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la Cour Constitutionnelle
à l’occasion de l’Audience
Solennelle et Publique
de la Rentrée Judiciaire
2023-2024
Dieudonné
KAMULETA BADIBANGA
Président
1
Le Président
Il est de coutume qu’à la rentrée judiciaire de hautes juridictions, se tienne une audience
solennelle au cours de laquelle le Président de la juridiction prononce un discours développant un
thème lié aux activités de sa juridiction.
S’agissant de la Cour constitutionnelle, l’article 100 alinéa 2 de son Règlement intérieur prévoit
ce qui suit : « La rentrée solennelle de la Cour constitutionnelle a lieu le premier samedi de la
deuxième quinzaine du mois d’octobre de chaque année ». Nous conformant à cette disposition,
nous nous sommes donné rendez-vous en ce jour, pour honorer cette tradition séculière à l’aune
de l’année judiciaire 2023-2024.
En effet, votre présence, une fois de plus, à la rentrée judiciaire de notre institution, témoigne à
suffisance de l’importance que vous attachez à l’enracinement et à l’émergence de la justice
constitutionnelle dans notre pays. Pour rappel, il y a à peine quelque semaine, vous aviez honoré
3
notre institution lors de la cérémonie de la pose de la première pierre pour la construction d’un
deuxième bâtiment de notre siège.
En effet, la Cour constitutionnelle vient d’examiner le contentieux des candidatures pour les
élections législatives et se prépare à aborder le contentieux des candidatures pour l’élection
présidentielle. Il s’agira ainsi de mettre en évidence les différentes innovations apportées par la
réforme électorale de 2022 et leurs incidences sur l’activité du juge électoral, particulièrement la
Cour constitutionnelle.
Excellence Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat, (Avec les hommages les
plus déférents) ;
INTRODUCTION
L’élection est pour ce faire, la voie indiquée d’accession au pouvoir et par lequel « un corps
électoral confère un mandat à une ou plusieurs personnes qu’il choisit par son vote »4. En tant
que tel, il existe les mécanismes, les procédures et les formalités de son organisation aussi bien
dans la Constitution que dans les lois5.
Le résultat souhaité de confier le mandat à la personne choisie par le corps électoral ne peut être
atteint que si au nombre des principes sur lesquels est fondée la source du pouvoir de l’Etat
figure le contrôle juridictionnel de la sincérité du scrutin. A ce propos, la quasi-totalité des Etats
à travers le monde6 attribue à leurs juridictions la compétence de statuer sur le contentieux des
élections.
Le contentieux électoral, au sens large, porte sur les litiges qui naissent à l’occasion de l’élection.
Ces litiges peuvent apparaître tout au long du processus électoral, donnant matière à plusieurs
branches du contentieux suivant l’objet et la finalité des recours7.
1
Lire BIAYA T.K., « Quelle démocratie pour l’Afrique ? Réflexion sur ses possibilités et ses caractéristiques »,
Symposium de Dakar sur la démocratie en Afrique, 1998, p.4.
2
Expression employée par Dominique Rousseau pour établir le lien entre la démocratie et le constitutionnalisme.
Lire KOSSI SOMALI, Le parlement dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique, Essai d’analyse comparée à
partir des exemples du Bénin, du Burkina Faso et du Togo, thèse de doctorat à la Faculté des sciences juridiques,
politiques et sociales, Université de Lille 2 - droit et santé, 2008, p.17.
3
Idem.
4
LE DIVELLEC A. et DE VILLIERS M., Dictionnaire du droit constitutionnel, 13e éd, Sirey, Paris, 2022, p. 156.
5
BIAYA T.K, « Quelle démocratie pour l’Afrique ? Réflexion sur ses possibilités et ses caractéristiques », Op.cit.,
p. 4.
6
Lire LE DIVELLEC A. et DE VILLIERS M., Op.cit., p.156.
7
Organisation internationale de la francophonie, Vade-mecum du contentieux des élections en RDC, juin 2006, p.4.
8
Lire dans ce sens MAMADOU SENE, La juridictionnalisation des élections nationales en Afrique noire
francophone : les exemples du Benin, de la Côte d’ivoire et du Sénégal. Analyse politico-juridique, Thèse de
doctorat, Université de Toulouse, 2017.
5
En effet, sous l’empire de la Constitution du 18 février 2006, le législateur n’a pas arrêté de
modifier successivement la loi électorale, dans le but de parfaire le processus, ce qui n’est pas
sans incidence sur le travail du juge électoral, obligé à s’adapter à l’évolution intervenue laquelle
peut, dans certaines mesures, l’amener à faire évoluer sa jurisprudence.
La loi électorale a subi plusieurs modifications9 dont la dernière en date intervenue par la Loi n°
22/029 du 29 juin 2022, pour permettre une élection calme et apaisée en intégrant les différentes
critiques qui ont été formulées par les parties prenantes, après les échéances électorales de 2018.
Intéressée par cette dernière réforme, la présente allocution tente de répondre à la question de
savoir de quelle manière les innovations qu’elle apporte exercent une influence sur le travail de
la Cour constitutionnelle, siégeant comme juge électoral, afin de rendre compte de l’évolution du
droit électoral congolais.
Ainsi, selon que les contestations et leur règlement se situent en amont ou en aval du vote
proprement dit10, la jurisprudence de la Cour sera examinée en rapport avec chaque étape du
processus électoral. Il s’agira en premier lieu de brosser les différentes innovations apportées par
la réforme du 29 juin 2022 (I) ; viendra ensuite la question relative à leur incidence sur le
traitement du contentieux des candidatures (II), il sera aussi question d’aborder quelques traits
marquants de la jurisprudence de la Cour en dehors des innovations de la loi électorale(III).
La dernière modification de la Loi n° 06/006 du 09 mars 2006 portant organisation des élections
présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales est intervenue à travers
la Loi n° 22/029 du 29 juin 2022. Avant de procéder à la présentation et à l’analyse des
innovations introduites par cette dernière (B), il semble opportun de présenter préalablement le
cadre normatif des élections politiques en droit congolais (A).
9
Il s’agit des lois n° 11/003 du 25 juin 2011, n° 156/001 du 12 février 2015 et n° 17/013 du 24 décembre 2017.
10
TSHIMANGA MUKEBA., « Du contentieux électoral en RDC » Mercuriale prononcée lors de la rentrée
judiciaire du 02 octobre 2004, in Bulletin des arrêts de la CSJ, années 2000 à 2003, Kinshasa, édition du Service de
documentation et d’étude du ministère de la justice, p.363.
6
A. Cadre normatif
Comme précisé dès l’entame de notre propos, la Constitution du 18 février 2006 et la Loi
n°06/006 du 09 mars 2006 constituent le principal support normatif des élections en droit positif
congolais. Aux côtés de deux textes juridiques précités, il y a aussi la Loi organique n°13/012 du
28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de la Commission électorale nationale
indépendante telle que modifiée et complétée à ce jour, la Loi organique n° 16/027 du 15 octobre
2016 portant organisation, compétence et fonctionnement des juridictions de l’ordre
administratif, la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et
fonctionnement de la Cour constitutionnelle, la loi sur la répartition des sièges par
circonscription électorale dont la dernière en date est celle du 15 juin 2023, ainsi que les
règlements et décisions d’application desdits textes11, précisément de la loi électorale12, qui en
assurent l’exécution.
En effet, ces textes constituent non seulement la source par excellence du droit électoral
congolais depuis 2006, mais aussi une étape décisive dans le processus conduisant à des
élections régulières, libres et transparentes. Ils encadrent l’opération électorale depuis la
constitution des listes électorales jusqu’au scrutin, en passant par l’enregistrement des
candidatures. Comme partout ailleurs, les conditions de la propagande et le déroulement de vote
y sont aussi décrits13.
Les textes précités sont communs à l’ensemble des élections en République Démocratique du
Congo. Cependant, les élections qui nous préoccupent sont celles dont le contentieux relève de la
compétence de la Cour constitutionnelle, à savoir les élections présidentielle et législatives
nationales.
Dans le but de prendre en compte les recommandations de différents acteurs afin de garantir des
élections libres, démocratiques, transparentes et sincères, le législateur modifie les règles du jeu,
en répondant aux différentes critiques portées contre la loi qui a précédé en vue d’améliorer le
cycle suivant.
11
Voir notamment le Règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 10 août 2018, in JORDC numéro spécial
du 16 novembre 2018.
12
Décision n°036/CENI/2022 du 25 août 2022 portant mesures d’application de la loi électorale de 2006 telle que
modifiée et complétée en 2011, en 2015, en 2017 et en 2022.
13
Lire M. DE VILLIERS et Cie., Code électoral, LexisNexis, 2020, Paris, p.3.
7
A cet effet, après le cycle électoral de 2006, la loi électorale a subi une modification juste à
l’aube des élections de 2011, par la Loi n°11/003 du 25 juin 2011. Après les échéances de 2011,
elle a été modifiée en 2015 par la Loi n°15/001 du 12 février 2015, en perspectives des élections
qui devaient normalement être organisées en 2016. Le troisième cycle électoral de 2018 sera
précédé par la modification législative du 24 décembre 2017.
Cinq ans après la modification de 2017, la loi électorale a fait l’objet de la réforme qui nous
intéresse au seuil du quatrième cycle électoral.
Ainsi, chaque modification de la loi électorale vient avec son lot d’innovations qui demande au
juge électoral, en l’occurrence la Cour constitutionnelle, une adaptation, ce qui n’est pas sans
conséquence ou sans incidence sur son activité juridictionnelle, voire sur sa jurisprudence.
A ce sujet, il ressort de l’exposé des motifs de la loi précitée les innovations ci-après :
Pour ce qui concerne la phase du contentieux des candidatures, plusieurs innovations législatives
ont été apportées. Il s’agit notamment des cas des inéligibilités définitives et temporaires, de la
prise en compte de la dimension genre dans la constitution des listes électorales, conformément à
l’article 14 de la Constitution, du seuil de recevabilité des listes au prorata de 60% de sièges en
compétition et de l’interdiction de cumuler l’exercice de fonctions d’agent de la Commission
électorale nationale indépendante avec une activité politique.
Cela étant précisé, abordons à présent chaque innovation retenue dans ce cadre singulièrement.
temporaires. Cette innovation apporte une distinction inhérente à la jouissance des droits
politiques14 dans la perspective de la moralisation des enjeux électoraux. Elle vient donc
renforcer une dimension essentielle liée à la moralité des élections.15
Appelée à appliquer cette disposition, dans la cause sous RCE 0252/DN initiée sur saisine du
Procureur général près la Cour constitutionnelle contre les candidatures heurtant la disposition
susvisée, par son arrêt rendu le 12 septembre 2023, la Cour a constaté l’inéligibilité à titre
définitif des candidats concernés et a ordonné à la CENI de les retirer respectivement des listes
du parti politique et du regroupement politique qui les avaient alignés. Ainsi, sur cet aspect, la
Cour a annulé la décision de la CENI qui avait déclaré recevables ces candidatures de nos
compatriotes qui avaient été condamnés par les juridictions internes et internationales pour
crimes contre l’humanité, crimes de guerre et enrôlement d’enfants de moins de 15 ans et du fait
de les avoir fait participer activement à des hostilités.
14
J-M. DUVAL, « Droit électoral. La sanction des comportements irréguliers relevés au cours des opérations
électorales », Revue française de droit constitutionnel, vol. 48, no. 4, 2001, p. 825.
15
Voy. R. YENGA, Nationalité congolaise, bonne moralité et élections en République démocratique du Congo,
Editions universitaires européennes, 2018.
16
Il s’agit du jugement qui n’est pas susceptible d’être frappé par des voies de recours, soit que ces recours aient été
exercés, soit que les délais pour les exercer soient expirés. Lire S. GUINCHARD et T. DEBARD, Lexique des
termes juridiques 2022 -2023, Dalloz, Paris, 2022, p.618. Suivant l’article 91 de la Loi organique n°13/011_B du 11
Avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire, la Cour
d’appel connaît en premier ressort les crimes de guerre, les crimes de génocide et crimes contre l’humanité.
17
J-L. ESAMBO KANGASHE, Le Droit électoral congolais, 2ème édition, Louvain-La-Neuve, Academia-
L’harmattan, 2020, p.72.
10
Il sied de noter que, bien que le Procureur général près la Cour constitutionnelle ne soit pas repris
parmi des requérants en contestation de la liste provisoire des candidats, c’est à bon droit que la
Cour a estimé que ce dernier pouvait intervenir en l’espèce dès lors que les dispositions légales
d’ordre public sont mises en péril18.
En effet, le principe est que « l’inéligibilité est une sanction civile ou pénale : seule une loi entrée
en vigueur au moment des faits peut l’établir »19. Cet enseignement dérive de la jurisprudence du
juge constitutionnel français qui considère que les faits pour lesquels l’impétrant peut être
condamné doivent avoir été commis après l’entrée en vigueur de la loi20. En d’autres termes, la
loi nouvelle ne rétroagit pas.
Dans le cas qui nous concerne, il faut remarquer que la réforme du 29 juin 2022 telle que
disposée à l’article 10 in fine, n’est nouvelle qu’en apparence puisque depuis le 25 juin 2011, le
législateur avait disposé que les personnes condamnées par un jugement irrévocable pour crimes
de guerre, crimes de génocide et crimes contre l’humanité étaient inéligibles21. Bref, les
personnes condamnées pour cette catégorie d’infractions étaient inéligibles à titre définitif.
18
Il y a lieu de noter que les dispositions légales ou réglementaires d’ordre public constituent l’ensemble des règles
obligatoires qui touchent à l’organisation de la nation, à la sécurité, à la paix publique et aux droits et libertés
fondamentaux des citoyens dont le parquet est chargé d’assurer le respect en disposant d’un pouvoir d’initiative et
d’intervention. Il sied d’observer que les dispositions de la loi électorale sur l’inéligibilité définitive aux élections en
République Démocratique du Congo, de toute personne condamnée par décision judiciaire irrévocable pour crime de
guerre, crime de génocide et crime contre l'humanité, sont d’ordre public en ce qu’elles interdisent à la Commission
électorale nationale indépendante de retenir pareille candidature et permettent même que le candidat proclamé soit
déchu de plein droit de la qualité d'élu, même après l'expiration du délai de contestation des candidatures, s’il se
retrouve dans ce cas d'inéligibilité.
C’est ainsi que la Cour a admis que le Procureur général peut bien contester la candidature d’une personne
condamnée par décision judiciaire irrévocable afin de préserver la sécurité, la tranquillité et la paix publiques lors
des scrutins, même à l’absence de la contestation de ladite candidature par un candidat ou par un parti ou
regroupement politique, ayant présenté la candidature dans la circonscription électorale concernée.
19
Jean- Pierre CAMBY, Le conseil constitutionnel juge électoral, Dalloz, Paris, 2022, p. 72.
20
Lire dans ce sens Conseil constitutionnel français, Décision n° 2000-2581 AN du 30 mars 2000, in www.conseil-
constitutionnel.fr
21
Article 10 de la Loi n°11/003 du 25 juin 2011 modifiant la loi n° 06/006 du 09 mars 2006 portant organisation des
élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales.
11
La loi électorale, prévoit d’autres cas d’inéligibilité qui ne sont pas définitives. Elles sont
temporaires et constituent un empêchement pour toute personne à se porter candidat à une
élection politique, et ce, pour plusieurs raisons.
Elles peuvent être consécutives à la fonction qu’exerce la personne concernée. Ainsi, dès lors
qu’elle n’assume plus les charges publiques qui l’empêchaient de se présenter au scrutin, elle
recouvre son droit de se faire élire. C’est le cas des membres de la Commission électorale
nationale indépendante et des mandataires actifs dans les établissement publics et sociétés du
portefeuille.
C’est dans ce sens que la CENI avait déclaré une candidature irrecevable au motif que le
candidat concerné était un agent de la CENI. Cependant, dans son arrêt sous RCE 022 du 26 août
2023, la Cour a précisé que « la disposition de l’article 10 point 9 de la loi électorale évoquée par
la CENI ne s’applique pas dans le cas d’espèce, d’autant plus que cette dernière est en défaut
d’apporter la preuve de l’acte d’engagement ou de la nomination de l’intéressé tel que prévu par
l’article 25 litera 10 de la Loi organique portant organisation et fonctionnement de la CENI ».
Dans l’entendement de cet arrêt, l’inéligibilité temporaire concernée par le cas d’espèce doit se
prouver par des actes.
Pour les deux premières, le législateur prévoit généralement comme peine supplémentaire aux
peines principales, l'interdiction pour cinq ans au moins et dix ans au plus, après l'exécution de la
peine, du droit de vote et du droit d'éligibilité 22.
C’est aussi les cas des personnes frappées d’incapacité mentale médicalement prouvée au cours
des cinq dernières années précédant les élections. Pour ces personnes, la décision judiciaire
établissant leur incapacité doit, s’il s’avère, sur base d’une expertise médicale, qu’elles sont
22
Articles 145 alinéa 2 et 149 bis du code pénal.
12
désormais lucides, être changée par une autre attestant leur nouvel état avant de jouir du droit à
l’éligibilité ; compétence qui revient au juge civil et non au juge électoral.
En somme, l’inéligibilité temporaire cesse lorsque sa cause n’existe plus. Ainsi, la personne
concernée a la possibilité de recouvrer son droit de vote et d’éligibilité.
Lors du traitement du contentieux des candidatures, le juge électoral vérifie les motifs justifiant
la recevabilité ou l’irrecevabilité de la candidature contestée.
Il y a lieu de relever que seul le candidat indépendant ou le parti ou regroupement politique ayant
présenté un candidat dans la circonscription électorale concernée peut contester une candidature
pour cause d’inéligibilité.
On peut légitimement se poser la question de savoir ce qu’il en serait lorsque la personne dont la
candidature est contestée devant le juge de l’élection se retrouve encore en pleine instance
judiciaire devant le juge pénal pour crimes de guerre ou crimes de génocide et contre l’humanité.
Le contentieux électoral étant par nature soumis au principe de célérité, il n’est donc pas
concevable que le juge électoral dépasse les délais légaux24pour statuer en contentieux des
candidatures au risque de perturber le calendrier électoral et de retarder l’installation des
nouveaux animateurs des institutions issus de l’élection.
Il est évident, dans pareil cas, que le juge pénal ne peut tenir le juge électoral en état. Ce dernier
devra simplement constater qu’un candidat, sur qui il ne pèse pas encore une décision judiciaire
irrévocable, bénéficie de la présomption d’innocence et valider sa candidature.
23
C.C. RCE 0242/DN : Requête du regroupement politique « RDT ».
24
Article 40 de la Décision n°036/CENI/2022 du 25 août 2022 portant mesures d’application de la loi électorale de
2006 telle que modifiée et complétée en 2011, en 2015, en 2017 et en 2022.
13
déchéance de plein droit de sa qualité d'élu, même après l'expiration du délai de contestation de
candidature25.
L’une des autres innovations de cette nouvelle loi électorale concerne la mesure incitative prise
dans la (loi électorale) en vue de l’effectivité de l’article 14 de la Constitution qui institue la
parité au regard homme-femme dans la participation à la gestion des affaires publiques à travers
l’éligibilité des femmes.
Dans l’esprit de l’article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, cette
innovation consacre une discrimination positive pour annihiler toute forme de discrimination à
l’égard de la femme26, dans le processus électoral.
Outre la Constitution, l’article 1er de la Loi n°15/013 du 1er août 2015 portant modalités
d’application des droits de la femme et de la parité, fait obligation aux pouvoirs publics de veiller
à l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard de la femme et d’assurer la protection
et la promotion de ses droits.
Dans ce cas, ils doivent prendre dans les domaines civil, politique, économique, social et
culturel, toutes les mesures appropriées pour assurer le total épanouissement et la pleine
participation de la femme au développement de la nation.
Le législateur a été amené à prendre les mesures appropriées pour assurer une pleine
participation de la femme au processus électoral. Avant la réforme de 2022, la loi électorale, en
son article 13 alinéa 2, prescrivait déjà que chaque liste de parti ou regroupement politique
devrait être établie en tenant compte de la représentation de la femme27 et de la personne vivant
avec handicap.
25
Articles 110 de la Constitution et 10 bis de la loi électorale.
26
F. GASPARD, « Égalité de droit, discrimination de fait : un combat qui ne s’arrête pas », Après-demain, vol. 3, no
3, 2007, p. 5. Voy. J. MOSSUZ-LAVAU, « La parité en politique, histoire et premier bilan », Travail, genre et
sociétés, vol. 7, no. 1, 2002, pp. 41-57.
27
Article 13 alinéa 2 de la loi électorale telle que modifiée et complétée avant la réforme de 2022.
14
L’objectif de l’article 14 de la Constitution n’ayant pas été atteint, l’actuelle réforme a modifié le
troisième alinéa de l’article 13 de la loi électorale dans le but d’encourager les partis et
regroupements politiques à aligner plus de femmes sur leurs listes et leur donner ainsi l’occasion
de pouvoir participer au développement de la Nation.
Face à cette exigence légale, que doit alors être la posture du juge électoral en cas de réclamation
ou de contestation d’une liste de candidature qui aligne au moins 50% des femmes dans une
circonscription ?
Comme il a été relevé plus haut, lorsqu’il y a contestation ou réclamation, le juge électoral
vérifie la régularité de la décision de la Commission électorale nationale indépendante au regard
des exigences légales de recevabilité d’une candidature. S’il constate que la liste présentée aligne
50% des femmes au minimum, il sera tenu de s’assurer que les frais de dépôt de candidatures
n’ont pas été exigés, au cas contraire, il se doit de corriger cette irrégularité en faisant prévaloir
l’autorité de la loi en validant ladite liste si toutes les conditions légales sont respectées et
ordonnera à la CENI de restituer les frais de cautionnement payés.
Mais il convient de signaler que le juge électoral ne peut, en aucun cas, exempter une liste des
frais du dépôt sous un quelconque motif et sans preuve dès lors que 50% de candidatures
féminines ne sont pas atteints. Ce seuil est le minimum légal, et donc d’interprétation stricte.
La question de l’interprétation stricte de la disposition s’est posée lors du contentieux des
candidatures devant la Cour où un regroupement politique avait contesté la décision de la CENI
portant publication des listes provisoires des candidatures.
En effet, sous RCE 0017 du 26 août 2023 le requérant reprochait à la CENI de n’avoir pas voulu
réceptionner 135 dossiers des candidatures reprenant 50% de femmes au motif qu’il n’avait pas
annexé au dossier des candidatures les preuves de paiement des frais y afférents.
Cependant, la Cour constitutionnelle a relevé que le requérant n’avait pas produit d’éléments
probants. Par cette réponse, la Cour a voulu rappeler qu’une telle procédure ne nécessite pas
15
seulement d’alléguer l’alignement de 50% de femmes, mais qu’il faudrait également prouver ses
allégations, car qui allègue un fait doit en apporter la preuve.
A ce sujet, l’article 22 in fine de la loi électorale dispose : « Sont également irrecevables les
listes du parti ou du regroupement politique qui n’auront pas atteint 60% des sièges en
compétition. Cette disposition s’applique aux élections législatives, provinciales, municipales et
locales directes».
En effet, il convient de rappeler que, à ce jour, la loi électorale comporte désormais deux seuils :
Celui de représentativité, issu de la réforme de 2017, qui se situe en aval du scrutin et celui de
recevabilité introduit en 2022 qui se situe en amont.
Il importe de retenir que le seuil de recevabilité des listes de candidatures est un pourcentage fixé
par la loi que les partis et regroupements politiques doivent atteindre pour que leurs listes de
candidatures soient recevables28. Il s’applique aux élections des députés nationaux et provinciaux
ainsi que celles des conseillers municipaux, communaux, locaux ou de secteur ou chefferie,29
c’est-à-dire des élections relatives aux assemblées délibérantes dans lesquelles les sièges sont en
compétition.
Concernant l’élection des députés nationaux, rappelons que le nombre des sièges à l’Assemblée
nationale est de 50030. Les députés nationaux ont un mandat national car, conformément à
l’article 101 de la Constitution alinéa 4, ils représentent la Nation. Au regard du principe posé
par l’article 22 in fine de la loi électorale telle que modifiée et complétée à ce jour, pour que la
liste d’un parti ou regroupement politique soit déclarée recevable, ce dernier doit présenter un
minimum de 300 candidats.
28
Article 41 de la Décision n°036/CENI/2022 du 25 août 2022 portant mesures d’application de la loi électorale de
2006 telle que modifiée et complétée en 2011, en 2015, en 2017 et en 2022.
29
Voir à cet effet les articles 118, 144, 191 et 209 de la loi électorale du 24 décembre 2017.
30
Article 115, deuxième alinéa, de la loi électorale du 09 mars 2006.
16
En apparence, cette nouvelle matière peut soulever des questions liées notamment à la nature du
contentieux du seuil de recevabilité, à la qualité des personnes pouvant venir en réclamation ou
contestation de la décision d’irrecevabilité des listes pour non atteinte du seuil ou à l’étendue de
la saisine du juge électoral.
Si le juge électoral reçoit une contestation d’une décision de la Commission électorale nationale
indépendante invalidant une liste des candidatures présentée par un parti ou regroupement
politique pour non atteinte du seuil de recevabilité, il appréciera, au regard des éléments et pièces
en présence, le fondement de la décision de la Commission électorale nationale indépendante.
Dans ce sens, la Cour a décidé sous RCE 0034/DN du 30 août 2023 que, dès lors que le
requérant a produit au dossier des récépissés de candidatures, des attestations de paiement du
cautionnement, des listes journalières (listes albums) et d’autres pièces pertinentes constituant
des preuves de dépôt de candidatures, mais aussi des lettres de dénonciation et des procès-
verbaux de constat du refus de la part des agents de certains BRTC de réceptionner les
candidatures, il y a lieu d’ordonner à la CENI de constater que le requérant a déposé des listes
de candidatures faisant un total, pour l’ensemble du territoire national, de 320 candidats,
atteignant, de ce fait, le seuil de recevabilité et de publier ces listes dans la liste définitive des
candidatures31.
Dans l’hypothèse où le juge constate que le seuil n’a pas été atteint, la liste des candidatures sera
invalidée. De même, lorsque, en invalidant certains candidats, une liste des candidatures qui
avaient atteint le seuil avant les invalidations se voit vidée de certains candidats ne permettant
plus d’atteindre le seuil, cette liste sera, par voie de conséquence, déclarée irrecevable.
31
C.C., RCE 0034/DN du 30 août 2023 : Requête du Regroupement politique Front Patriotique 2023 « FP 2023 ».
Cette même position est reprise dans l’arrêt sous RCE 0134/DN du 31 août 2023: Regroupement politique Action
des alliées Tous pour le Développement du Congo, « en sigle 2A/TDC » et l’arrêt sous RCE 0039/DN du 30 août
2023 : Requête du Regroupement politique Alliance des congolais pour la refondation de la nation, « ACRN ».
17
Dans la cause sous RCE 0210/DN du 31 août 2023, la Cour a relevé que, si le parti au profit
duquel le candidat avait déposé sa candidature, n’avait pas atteint le seuil exigé par l’article 22
alinéa 2 de la loi électorale, il n’y a pas lieu que la susdite candidature soit maintenue.32
Cependant, dans l’hypothèse où le parti ou le regroupement politique n’a pas atteint le seuil de
recevabilité du fait du refus de la CENI de réceptionner, sans motif valable, certaines de ses
listes, un tel préjudice mérite d’être réparé. C’est dans ce sens que, sous RCE 0136/DN du 31
août 2023, la Cour a ordonné à la CENI de recevoir les dossiers de candidatures d’un
regroupement politique dans des circonscriptions bien déterminées et de constater que ce
regroupement a atteint le seuil de recevabilité.
La Cour a motivé sa décision comme suit : « Le fait pour le requérant d’avoir satisfait aux
exigences légales et règlementaires pour les circonscriptions électorales où il a présenté des
candidatures et qu’il est prouvé à suffisance de droit que, dans certaines circonscriptions
électorales, le dépôt n’a pas été admis du fait de la mauvaise foi ou de la négligence de certains
agents de la CENI, il n’y a aucune raison que le requérant soit préjudicié et qu’il convient de
réparer ce dommage ».
L’article 79 bis de la loi électorale dispose que « l’exercice d’une fonction au sein de la
Commission électorale nationale indépendante, au niveau national, provincial et local est
incompatible avec l’exercice direct ou indirect d’une activité politique ».
En effet, la locution latine « aliquis non debet esse judex in propria causa, quia non potest esse
judex et pars » qui veut dire « personne ne doit être juge de sa propre cause, parce qu’on ne
peut être juge et partie », traduit clairement la volonté du législateur d’éviter que les agents de la
Commission électorale nationale indépendante, chargés d’assurer le déroulement harmonieux des
32
C.C., RCE 0210/DN : Requête de Monsieur OKUNDJI NJOVU Emery.
18
élections, se retrouvent eux aussi en compétition électorale et deviennent ainsi juge et partie, ce
qui serait de nature à mettre en danger l’indépendance et l’impartialité de la centrale électorale
en créant un conflit d’intérêt.
Que serait alors le sort de la liste électorale du regroupement ou parti politique ayant présenté un
candidat se trouvant dans un cas de cumul ? Nous estimons qu’il ne concernera que celui qui a
commis la faute qui demeure individuelle, s’il est attesté que le regroupement politique n’était
pas au courant de cette situation, en harmonie avec la jurisprudence de la Cour qui estime qu’il
n’est pas équitable que le parti ou le regroupement politique soit sanctionné pour un manquement
du candidat qui ne lui est pas imputable, le concerné devant seul subir la sanction34.
Au-delà de l’analyse des innovations introduites par la loi électorale, il s’avère d’une grande
utilité, par cette occasion solennelle, de revenir sur trois questions majeures sur lesquelles la
Cour a eu à déterminer sans atermoiements sa position.
33
L. TOUVET & Yves-Marie DOUBLET, Droit des élections, 2ème édition, Paris, Economica, 2014, p.123.
34
Voir à ces propos les arrêts C.C., RCE 0172/DN : Requête du regroupement politique Actions Audibles pour la
Bonne Gouvernance « AABG » ; RCE 0143/DN : Requête du Regroupement politique Forces Politiques alliées à
l’UDPS « FPAU/Tshisekedi » ; RCE 0194/DN : Requête du Regroupement politique Action des Alliés pour l’Essor
du Congo « AAec » ; RCE 0078/DN : Requête du parti politique Leadership et Gouvernance pour le
Développement, « LGD » ; RCE 0142/DN : Requête du Regroupement politique Forces Politique Alliées à l’UDPS/
TSHISEKEDI, « FPAU/TSHISEKEDI » ; RCE 0125/DN : Requête du Regroupement politique Dynamique
Progressiste Révolutionnaire, « DYPRO » ; RCE 0127/DN : Requête du Regroupement politique Dynamique
Progressiste Révolutionnaire, « DYPRO ».
19
En effet, en application de cette disposition, la CENI a eu à invalider des candidatures aux motifs
que les candidats invalidés apparaissaient sur une autre liste. Mais lorsque ces candidats viennent
en contestation de la décision de la CENI les invalidant, la Cour n’a pas manqué à plusieurs
occasions de vérifier si toutes les conditions étaient réunies pour pouvoir invalider la candidature
d’un citoyen et, par ricochet, la mise en suspension de son droit fondamental d’être élu pour
l’échéance concernée.
Vérifiant les pièces, la Cour constitutionnelle constata que le requérant ne savait pas qu’un autre
regroupement politique l’avait aligné ailleurs comme suppléant et cela sans son accord. Devant
pareille situation, la Cour estime que, pour candidater même comme suppléant, cela exige
l’intervention et l’engagement personnel du concerné. Ainsi, le fait pour un autre regroupement
politique que le sien de l’aligner dans ce sens est un acte de fraude, qui ne pourrait être imputé ni
au candidat qui est titulaire ni au regroupement politique qui a présenté la candidature, leur
bonne foi devant être protégée.
Dans un autre dossier, le RCE 0141/DN du 31 août 2023, la Cour a été saisie par une requête en
validation d’une candidature sur la liste d’un regroupement politique.
Dans les faits, son regroupement soutient le caractère arbitraire et non fondé de la décision de la
CENI invalidant le précité aux motifs que sa candidature était irrégulière alors que, au regard des
pièces du dossier, le candidat invalidé, non seulement détenait le récépissé lui remis par la CENI,
mais n’avait pas été alerté par cette dernière pour venir corriger cette irrégularité évoquée par
elle tel que le prévoit la loi électorale. C’est ainsi qu’elle avait saisi la Cour constitutionnelle
pour contester la décision l’invalidant.
35
A insérer dans ce lot également les arrêts RCE 0139/DN du 30 août 2023 et RCE 0141/DN du 31 août 2023.
20
Vérifiant les pièces même celles produites par la CENI, la Cour constata qu’il n’y en avait
aucune dans le dossier attestant que le candidat invalidé était invité pour régulariser son dossier.
Ce faisant, la Cour estima que les droits de la défense énoncés à l’article 61 point 5 de la
Constitution supposent qu’aucune sanction ne peut être portée contre une personne sans qu’il ne
lui soit accordé la possibilité de rencontrer les griefs portés à sa charge susceptibles d’entrainer
une condamnation contre lui, et ce, devant toute juridiction et à l’occasion de toute procédure,
notamment celle relative au droit électoral, suivant l’esprit et la lettre de l’alinéa deuxième de
l’article 21.
Il s’ensuit que la Cour constitutionnelle considère le respect des droits de la défense comme une
nécessité indérogeable dès lors qu’une personne est susceptible d’être sanctionnée dans une
quelconque procédure tant administrative que judiciaire. C’est pourquoi la Cour a, dans cette
affaire, ordonné à la CENI de déclarer recevable la candidature concernée.
De cette disposition, contrairement aux diverses interprétations que des particuliers peuvent
émettre, la Cour a considéré que le point de départ du délai de sa saisine courait à partir de
l’audience, dès l’instant où elle-même se déclare saisie.
Cette interprétation de la Cour en tant que juge électoral est de nature à préserver les intérêts des
particuliers qui la saisissent dans le cadre des recours en contentieux des résultats. Elle s’inscrit
ainsi dans une large perspective protectrice des droits fondamentaux d’être élu car elle permet
aux concernés, de conserver leurs droits aussi longtemps que l’audience n’est pas encore fixée.
C’est l’effet utile de cette approche de la Cour.
incidence sur le dispositif, sauf en cas d’inexactitude avérée des chiffres mentionnés dans les
décisions attaquées ou vices de transcription36.
Cette position légale est une réponse aux difficultés que cette Cour a connues lors des
contentieux électoraux qui ont résulté des élections du 30 décembre 2018, période durant
laquelle la Cour constitutionnelle a reçu un afflux des recours en rectification d’erreur matérielle.
Rappelons ici que l’erreur matérielle est « une inexactitude qui se glisse dans l’exécution d’une
opération, dans la rédaction d’un acte ou dans le contenu de celui-ci et, qui naturellement
appelle une correction. Cette maladresse peut résulter d’une fausseté dans le calcul ou la
transcription d’un montant ou une confusion dans l’enregistrement du nom ou d’un de ses
éléments. Il s’agit donc d’une inadvertance générale qui ne conduit pas nécessairement à la
nouvelle contestation, mais dont le juge apprécie souverainement, à partir des données plutôt
évidentes qui lui permettent, le cas échéant de la redresser37 ».
C’est dans ce sens que, dans l’arrêt de la Cour sous RCE 0258/DN du 25 septembre 2023, il a été
décidé : « Ne doivent pas être considérées comme réparables par voie de rectification d’erreur
matérielle notamment les erreurs d’ordre intellectuel, les appréciations inexactes d’un fait,
d’une responsabilité, d’une preuve ou de tout autre élément de la cause, les erreurs d’ordre
juridique (...) »
La réforme apporte deux principes majeurs sur le régime juridique d’erreur matérielle à savoir :
• L’erreur matérielle peut avoir une incidence sur le dispositif en cas d’inexactitude avérée
des chiffres mentionnés dans la décision attaquée ou de vices de transcription.
Cela étant, le juge électoral devra considérer que le recours en rectification d’erreur matérielle a
nettement des effets d’une voie de recours à part entière dès l’instant où le dispositif peut être
revu.
36
Article 74 quinquies de la loi électorale.
37
Jean-Louis ESAMBO KANGASHE, Droit électoral congolais, op.cit., p.188.
22
CONCLUSION
Je vous ai annoncé de parler des incidences de la réforme du 29 juin 2022 sur le travail de la
Cour constitutionnelle comme juge électorale. Il n’a échappé à personne que, de leur grand
nombre, seules quelques-unes ont prouvé leur incidence notamment la distinction entre les
inéligibilités temporaires et définitives, l’institution du seuil de recevabilité des listes, la prise en
compte de la dimension genre qui ont été illustrées par de nombreux exemples à travers le
contentieux des candidatures.
Si ces quelques innovations de moindre importance ont permis un si bon progrès, il y a des
raisons d’espérer que les innovations de plus grande importance notamment les obligations faites
à la CENI de publier les résultats bureau par bureau, d’assurer la transmission des plis vers les
juridictions compétentes et celle faite à ces dernières de se servir des plis contenant des procès-
verbaux lors du traitement du contentieux et de se prononcer dans le délai sous peine des
sanctions nous rapprocheront encore davantage de l’idéal légitime d’éviter les crises politiques
récurrentes dont l’une des causes fondamentales est, aux yeux du législateur, la contestation de
la légitimité des institutions et de leurs animateurs. Que vienne ce jour !
Après cette présentation des innovations issues de la réforme électorale de 2022, je tiens à
préciser que, durant le traitement du contentieux de candidature, la Cour constitutionnelle a
23
abattu un travail exceptionnel dans le traitement des dossiers et a rendu ses arrêts dans le délai lui
imposé par la loi électorale.
Je m’en vais vous donner les indications chiffrées des décisions rendues par la Cour en matière
de contestation des candidatures cette année 2023 :
Sur les 250 dossiers enrôlés au greffe électoral, 154 requêtes ont été déclarées fondées, 30 ont été
déclarées non fondées, d’un autre côté, 66 ont été déclarées irrecevables.
Il sied de relever aussi que, suite à ces arrêts, certains requérants sont revenus devant la Cour en
procédure de rectification d’erreurs matérielles. Au nombre total de 13 requêtes enrôlées, toutes
ont été déclarées irrecevables.
Je vous remercie.
Jean Paul
MUKOLO NKOKESHA
Procureur Général
MERCURIALE DU PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR
CONSTITUTIONNELLE
INTRODUCTION
voulue pacifique et aussi civilisée au pouvoir de l’Etat comme ce fut le cas lors
du scrutin de 2018 en République Démocratique du Congo.
Elle doit dès lors être entourée des garanties particulières qui
justifient l’existence d’un contentieux électoral qui aménage un cadre
procédural permettant légalement aux citoyens de faire entendre leur voix à
chaque étape du processus électoral afin de dénoncer les éventuelles fraudes,
les déviances et autres irrégularités observées.
§1. La recevabilité
1
M.ABDEL-KALEK Omar, la notion d’irrecevabilité en droit judiciaire privé, Thèse, Paris 1965, P.7
5
Et dans le cadre de notre étude, ces conditions sont posées par les
articles 27, 27 bis, 73, 74 et 74 ter de la loi n°06/006 du 09 mars 2006,
portant organisation des élections Présidentielle, Législatives, Provinciales,
Urbaines, Municipales et Locales telle que modifiée et complétée jusqu’à ce
jour successivement par la loi n°11/003 du 25 juin 2011, la loi n°15/001 du 12
février 2015, la loi n°17/013 du 24 décembre 2017 et la loi n°18/006 du 29
juin 2022.
2
6
3
Meledge DJ.Fr, « le contentieux électoral en Afrique » in Pouvoir, n°129,2/2009, pp.139-155
7
C’est ce que nous allons voir dans les paragraphes suivants pour
aider les requérants à éviter les erreurs de saisine.
§ 1. Le juge constitutionnel
§ 2. Le juge administratif
des arrêts rendus au premier degré par les Cours administratives d’Appel, en
matière de contentieux des résultats des élections provinciales.
c. Du candidat indépendant
d. De l’avocat ou du mandataire
C’est dans ce sens que les décisions suivantes ont été rendues :
B. Forme de la requête
C. Du délai
Tous les arrêts rendus hors délai par cette Cour n’ont pas été pris en
compte par la Commission Electorale Nationale Indépendante.
- Objet de la requête
- Défaut de qualité ;
- Non-respect de délai de recours ;
- Forme de la requête ;
- Non bis in idem ;
- Obscuri libelli.
§2. LES CAUSES D’IRRECEVABILITE
1. OBJET DE LA REQUETE
2. DEFAUT DE QUALITE
rectification des erreurs matérielles contenues dans un arrêt rendu sur appel
du demandeur, car les arrêts de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles
d’aucun recours et le réexamen de l’arrêt sollicité équivaut à demander deux
fois la même chose [CSJ 28 Septembre 2012] »
4. OBSCURI LIBELLI
Définition
Classification
Mais avant d’aller plus loin, il sied de rappeler qu’au fil de cycles
électoraux en République Démocratique du Congo, la jurisprudence électorale
au sujet de la recevabilité de la tierce opposition a connu une évolution en
dents de scie.
- Jurisprudence de 2006-2007
4
NSUMBU KABU Odon, op.cit, pp 915-916
19
5
NSUMBU KABU Odon, Cour Suprême de Justice, héritage de demi-siècle de jurisprudence, p.915
20
En République du Congo
- L’article 175 alinéa 3 de la Constitution de 2015 adoptée par voie
référendaire le 25 octobre 2015 dispose :
« La Cour Constitutionnelle est l’organe régulateur du
fonctionnement des institutions et des activités des pouvoirs
publics ».
En République de Guinée
- L’article 93 alinéas 4 de la Constitution du 7 mai 2010 dispose : « Elle
est l’organe régulateur du fonctionnement et des activités des
pouvoirs législatifs et exécutif et des autres organes de l’Etat ».
En République du Bénin
- L’article 114 de la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 dispose :
La Cour Constitutionnelle est l’organe régulateur du fonctionnement
des institutions et de l’activité des pouvoirs publics ».
En République du Cameroun
- L’article 46 de la loi n°96/06 du 18 janvier 1996, portant révision de
la Constitution du 02 juin 1972 telle que modifiée et complétée par la
loi n°2008/001 du 14 avril 2008 dispose : « Le Conseil constitutionnel
est l’organe régulateur du fonctionnement des institutions ».
En République de Côte d’Ivoire
- L’article 126 de la loi n°2016-886 portant Constitution de la troisième
République du 8 novembre 2016 dispose : « Le Conseil
Constitutionnel est une juridiction Constitutionnelle.
Il est indépendant et impartial.
CONCLUSION
6
Polydore MUKUBI KABALIK, la Constitution de la RDC : annotée, commentée et expliquée, Editions ITONGOA,
p.100
23
Je vous remercie.