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I. Introduction
Les décharges sont la plus ancienne manière de se débarrasser des déchets, et se
placent aujourd’hui en dernière position dans la hiérarchie européenne des
modes de traitement des déchets. C’est seulement depuis la fin des années 1990
que la réglementation est devenue plus contraignante en France pour les
constructeurs et exploitants de décharges, également appelées "centres de
stockage" ou "centre d’enfouissement technique". Cela a conduit à la fermeture
de nombreux sites. Persistent aujourd’hui environ 250 décharges d’ordures
ménagères ainsi qu’un nombre important de décharges sauvages. Malgré les
pansements technologiques imposés par la loi, la contamination de
l’environnement par les décharges persiste, de manière diffuse et durable, et
participe au réchauffement climatique.
II. Les différents types de décharges
En France, il existe trois types de décharges (également appelées CET : Centre
d’Enfouissement Technique).
Avant d’être enfouis, les déchets sont "stabilisés" par extraction, notamment, des liquides
dangereux pour limiter les réactions chimiques dans la fosse.
Il existe aujourd’hui 14 décharges de classe 1 en France :
Bellegarde (Languedoc-Roussillon)
Guitrancourt (Île-de-France)
Villeparisis (Île-de-France)
Jeandelaincourt (Lorraine)
Laimont (Lorraine)
Vaivre et Pusey (Franche-Comté)
Drambon (Bourgogne)
Changé (Pays de Loire)
Champteussé-sur-Baconne (Pays de Loire)
Saint-Cyr-des-Gâts (Pays de Loire)
Argences (Basse-Normandie)
Tourville-la-rivière (Haute-Normandie)
Saint-Marcel (Haute-Normandie)
Graulhet (Midi-Pyrénées)
La loi-cadre déchets de 1992 introduit une double définition du déchet qui n’existe qu’en
France. Si cette loi confirme la notion du déchet de la premier loi-cadre de 1975, elle lui
ajoute une définition relative au déchet "ultime". Ce dernier est défini comme "un déchet
résultant ou non du traitement d’un déchet, qui n’est plus susceptible d’être traité dans les
conditions techniques et économiques du moment, notamment par extraction de la part
valorisable ou par réduction de son caractère polluant ou dangereux". Or, chaque élu est en
effet confronté à des "conditions techniques et économiques du moment" différentes. Un
décret de 1996 et une circulaire ministérielle (dite circulaire Voynet) de 1998 était d’ailleurs
censés apporter davantage de précisions.
EN L’ABSENCE D’UNE GESTION EFFICACE EN AMONT, POINT DE
FREIN À L’ENFOUISSEMENT DES DÉCHETS NON ULTIMES
Une circulaire de 2002 souligne que "le caractère ultime d’un déchet s’apprécie au regard du
système global de collecte et de traitement, mais ne peut s’estimer à l’entrée d’une décharge".
La collecte et le traitement étant une compétence locale, il n’existe aujourd’hui pas de
compréhension homogène du déchet "ultime". La transposition de la directive cadre n’a
malheureusement pas clarifié et durci ce statut.
Les déchets sont en majorité acheminés par camion sur le site de la décharge (plus rarement
par bateau ou train). Le trafic routier autour du site est ainsi densifié, entrainant pour les
riverains des nuisances sonores et des pollutions. D’autant que la tendance est à l’expansion
des décharges existantes, pour plus de rentabilité. Les déchets sont ainsi acheminés depuis des
points de collecte de plus en plus éloignés, vers des méga-décharges, majoritairement
contrôlées par trois multinationales françaises qui se partagent les profits de la gestion des
déchets.
À son arrivée sur le site, le camion est pesé et dirigé vers l’un des trous, appelés « casiers »,
qui composent la décharge. Un même site comporte plusieurs casiers comblés et plusieurs
casiers en exploitation. Dans ces derniers, le camion déverse le contenu de sa benne, des
déchets de toutes sortes en mélange (déchets de cuisine, plastique, métal, bois, etc.).
Un ou plusieurs tractopelles compactent ensuite les déchets mélangés pour diminuer leur
volume et favoriser la fermentation des matières organiques qu’ils contiennent, en chassant
l’air. Le brassage de ces matériaux dégage une odeur désagréable - qui signale déjà
l’échappement de gaz nocifs - et peut même provoquer des départs de feu. Malgré le tassage,
certains déchets légers, comme les sacs plastiques, peuvent s’envoler dans la nature
environnante et au-delà s’ils ne sont pas stoppés par les filets « anti-envol ».
La décomposition par fermentation des déchets organiques (ou « biodéchets »), ajoutée aux
eaux pluviales, produit un jus, le lixiviat, dont une partie est captée par des drains enfouis à la
base des casiers. Ce jus chargé en différents polluants contenus dans les déchets mélangés est
très toxique : la loi oblige à l’acheminer vers une station de traitement sur site ou à l’extérieur,
où une partie seulement de la pollution est abattue (matière organique surtout). Le liquide
traité, contenant encore une quantité de métaux lourds et de substances nocives est rejeté dans
l’environnement, polluant les cours d’eau. Pour isoler les casiers du sol, leur fond est tapissé
par une membrane synthétique étanche, appelée « barrière active », complétée par une couche
de terre argileuse de 3 à 5 mètres, la « barrière passive ». Mais ces barrières n’ont qu’une
efficacité limitée dans le temps : dans un casier refermé, la membrane peut se fissurer et
laisser s’échapper du lixiviat. Franchissant la couche de terre, il finit alors par contaminer le
sol et les nappes phréatiques.
La décomposition par fermentation des déchets organiques produit également des gaz, connus
sous l’appellation « biogaz », constitués en majorité de méthane, un gaz avec un potentiel
d’effet de serre 25 fois plus élevé que le CO2. La loi oblige les exploitants de décharges à
installer, dans le casier, des systèmes de captage du biogaz, une fois celui-ci comblé
entièrement de déchets et recouvert éventuellement par re-végétalisation. Mais ces systèmes
ne permettent de capter que partiellement le biogaz produit, avant de l’envoyer vers un
alternateur où il servira à produire de l’électricité et, plus rarement, vers une chaudière pour
être transformé en chaleur . Le biogaz capté et non utilisé est brûlé dans des torchères, pour
lesquelles la réglementation est peu exigeante, entrainant le rejet dans l’air de fumées dans
lesquelles persistent des polluants nocifs, notamment des métaux lourds. Malgré le couvert
végétal de surface qui recouvre les casiers comblés, des fuites de gaz se produisent dans
l’atmosphère, participant ainsi au réchauffement climatique.
Les biodéchets stockés dans les casiers de la décharge libèrent plus ou moins rapidement l’eau
qu’ils contiennent. Ces jus, auxquels se mêlent les eaux de pluie qui percolent depuis la
surface des casiers sont appelés lixiviats. Ils concentrent les polluants et substances toxiques
contenus dans les déchets mélangés, notamment les métaux lourds. Les lixiviats sont une
menace pour les sols et la ressource en eau :
Les pollutions engendrées par les décharges, et leurs impacts sanitaires et environnementaux
sont difficiles à déterminer avec certitude car ils sont diffus dans le temps et dans l’espace.
Plusieurs polluants interagissent dans des milieux naturels différents (air, sol, eaux etc.) sur le
long terme. Les liens de causalité entre les pollutions liées aux décharges et des maladies ou
des modifications significatives de l’environnement sont donc particulièrement difficiles à
établir. La littérature scientifique sur le sujet est ainsi peu nombreuse.
Le tassement des déchets mis en décharge provoque la fermentation des biodéchets dans un
milieu sans oxygène, créant ainsi des conditions favorables à l’émission de méthane dans
l’atmosphère. Ce gaz a un pouvoir de réchauffement global 25 fois supérieur à celui du CO2.
D’après le CITEPA (Centre inter-professionnel technique d’études de la pollution
atmosphérique), environ 16 % des émissions de méthane en France proviennent des centres de
stockage de déchets ménagers. Or il est aujourd’hui urgent de réduire nos émissions de gaz à
effet de serre. Retirer les biodéchets des centres de stockage participera à limiter notre impact
sur le changement climatique.
Il existe des systèmes de captage pour récupérer en partie le méthane émis par les décharges
et éviter qu’il ne se disperse dans l’atmosphère. Certains en ont même fait un véritable
business en "inventant" les bioréacteurs, qui ne sont ni plus ni moins que des décharges dans
lesquelles la production de méthane est intensifiée. Si les quantités de méthane capté sont
suffisantes, il peut être valorisé en électricité. Cependant, il s’agit d’un moyen curatif qui ne
permettra pas de résoudre le problème. Il limite les impacts mais n’agit pas à la source. Il est
donc plus durable d’opter pour des moyens préventifs, c’est-à-dire pour des outils permettant
de ne plus enfouir de biodéchets. C’est d’ailleurs l’orientation qui est fixée par l’Union
européenne.