Vous êtes sur la page 1sur 12

4 Magnétostatique

Si les charges électriques étaient immobiles, la physique en resterait là: le champ


électrique seul suffirait à la description des forces électriques. Cependant, des charges
en mouvement produisent des forces mutuelles supplémentaires. Cela se traduit par
l’apparition d’un champ magnétique.

Cette section a pour but d’établir les propriétés du champ magnétique produit par
des courants stationnaires.

4.1 Courant électrique


En chaque point d’une matière conductrice, on définit la densité de courant électrique
! r, t) par
J(!
J! = ρ!v
exprimée en Cm−2s−1. Cette densité de courant est comparable à celle déjà ren-
contrée pour le transport de matière par diffusion dans la loi de Fick. Comme les
charges électriques ne se créent pas et ne disparaissent pas spontanément, on peut
également écrire une équation de continuité

dρ ! !
+ ∇.J = 0
dt
! r, t) = J(!
Lorsque les courants sont stationnaires, on a ρ(!r, t) = ρ(!r) et J(! ! r), et donc

! J! = 0
∇.
En outre, il est utile de définir la quantité de charge I qui traverse une surface S
par unité de temps
!
I= ! n dS
J.!
S

exprimée en Cs−1 = A. Le courant est donc le flux de J! le long d’une surface.

Pour modéliser la densité de courant qui parcoure un fil conducteur placé selon l’axe
z, on prend

J! = Iδ(x)δ(y)!ez
On vérifie bien que toute surface qui coupe le fil est traversé par le courant
! +a ! +a
I= Iδ(x)δ(y)dxdy
−a −a

24
4.2 Loi de Biot et Savart
Suite à l’observation des influences mutuelles entre fils parcourus par des courants,
Biot et Savart en ont déduit qu’une charge q en mouvement produit un champ
magnétique

! r) = µ0 q!v × !r
B(!
4π r3
où la constante µ0 = 4π10−7N/A2. Dans ce champ, une autre charge q " en mouve-
ment subit une force magnétique

! " " ! µ0 q "!v " × (q!v × !r)


F = q !v × B =
4π r3

q
r

Suite à l’écriture de cette loi, quelques remarques s’imposent

• Encore une fois le facteur 4π a été introduit délibéremment dans la constante de


proportionalité pour simplifier les équations. Il disparaitra lors de l’application
d’opérateurs différentiels.
• Le champ B ! n’est pas radial comme l’était le champ E,
! mais il a des propriétés
axiales. C’est un champ tournant.
• Sur une direction fixe de !r, l’intensité du champ magnétique varie en 1/r 2,
comme le faisait celle du champ électrique créé par une particule immobile.
! dépend
• La vitesse !v de la particule chargée dépend du repère choisi et donc B
aussi de ce repère. Cela conduit parfois à des paradoxes qui ont été levés par
la théorie de la relativité.
! on peut généraliser la loi de Biot et Savart
Lorsque l’on a un courant électrique J,
par

! r") × (!r − !r " )


µ0 ! J(!
!
B(!r) = " 3
d3 r "
4π V |!r − !r |
où V est le volume contenant le courant.
25
Pour illustrer la loi de Biot et Savart, considérons le cas du courant filiforme. Lorsque
le courant est filiforme et orienté selon l’axe z, on peut écrire J! = Iδ(x)δ(y)!ez et
donc ! "
! r) = µ0 I +∞ !ez × (!r − !r ) dz "
B(!
4π −∞ |!r − !r" |3
Dans le schéma ci-dessous, le champ est toujours perpendiculaire au plan et ce calcul
revient à déterminer l’intensité B du champ à une distance a du fil
µ0 I ! +∞ cos θ
B= dz
4π −∞ r2
avec r cos θ = a et dz = a cos−2 θdθ. On obtient
µ0 I ! +∞ cos3 θ µ0 I ! +π
2 cos θ µ0 I
B= dz = dθ =
4π −∞ a2 4π − π2 a 2πa
L’intensité du champ produit par un tel courant décroı̂t en 1/a et non en 1/a 2 car
toutes les charges du courant contribuent au champ.

dz
r
q
a

26
4.3 Propriétés du champ magnétique
Comme pour le champ électrique, il est utile de calculer les opérateurs différentiels
du champ magnétique pour se débarrasser des équations intégrales.
!
Calculons tout d’abord la divergence de B.
 
! ! µ0 ! !  ! " (!r − !r " )  3 "
∇.B = ∇. J(!r ) × dr
4π V |!r − !r" |3
 
! "
! B
∇. ! = − µ0 J(! ! × (!r − !r )  d3r"
! r" ). ∇
4π V |!r − !r" |3
vu les propriétés d’anticommutation du produit mixte. Comme le rotationnel d’une
quantité vectorielle radiale est toujours nul, on a toujours

! B
∇. ! =0
Ainsi, sur toute surface fermée S, on doit avoir un flux
!
! n dS = 0
B.!
S
par Ostrogradski. Cette loi implique la conservation de flux magnétique le long
des lignes de champ. D’autre part, en calcul vectoriel, on montre que la condition
! B
nécessaire et suffisante pour que ∇. ! = 0 est que le champ B
! dérive d’un potentiel
vecteur soit

! =∇
B ! ×A
!
On peut vérifier que
! ! r")
A! = µ0 J(!
d3 r "
4π V "
|!r − !r |
convient comme potentiel vecteur. En effet,

µ0 ! J(!! r")
! ! ! !
B =∇×A=∇× "
d3 r "
4π V |!r − !r |

! µ0 ! 1 ! ! " 3 " µ0 ! ! 1 ! r " ) d3 r "


B= "
∇ × J(!
r ) d r + ∇ "
× J(!
4π V |!r − !r | 4π V |!r − !r |
Le premier terme est nul et le second donne bien

! r" ) × (!r − !r " )


µ0 ! J(!
!
B= d3 r "
4π V |!r − !r" |3

27
! a la propriété d’avoir une divergence nulle. En effet,
Le potentiel vecteur A
 
! ! "
! A
∇. ! = µ0 !  J(!r )  d3 r"
∇.
4π V |!r − !r" |
 
! ! µ0 ! 1 ! ! " 3 " µ0 ! ! " !  1  3 "
∇.A = ∇.J(!r ) d r + J(!r ).∇ dr
4π V |!r − !r" | 4π V |!r − !r" |
Le premier terme est nul et la divergence devient
 
! ! µ0 ! ! " ! "  −1  3 "
∇.A = J(!r ).∇ dr
4π V |!r − !r" |
 
! ! r")  µ0 ! ∇! " .J(!
! r")
! A
∇. ! = − µ0 ! "  J(!
∇. 3 "
 d r + d3 r "
4π V "
|!r − !r | 4π V "
|!r − !r |
La seconde intégrale est nulle pour des courants stationnaires et la première intégrale
devient par Ostrogradski une intégrale sur une surface S quelconque. Les surfaces
S doivent englober les courants et donc le produit !n. J! doit être nul le long de ces
surfaces. Finalement, on a

! A
∇. !=0

! On a
Considérons maintenant le rotationnel du champ magnétique B.
   
!
∇ ! = µ0 ∇
! ×B ! ×  J(! !  −1  d3 r" 
! r") × ∇
4π V |!r − !r" |
  
µ0 ! !  ! " !  1   d3 r "
=− ∇ × J(!r ) × ∇
4π V |!r − !r" |
Comme

! × (!a × !b) = !a(∇.


∇ ! !b) − !b(∇.!
! a) + (!b.∇)! ! !b
! a − (!a.∇)
On a
   
! !
! ×B
∇ ! = − µ0 J(!! r" )∇2  1  d3 r" + µ0 (J(! ! r" ).∇)
! ∇!  1  d3 r "
4π V |!r − !r" | 4π V |!r − !r" |
où le second terme est nul car après manipulations algébriques il fait intervenir la
divergence de J! qui est nul pour les courants stationnaires. Comme
 
2 1 
∇ "
= −4πδ(!r − !r " )
|!r − !r |
on a finalement
28
∇! ×B ! = µ0 J(!
! r)
! dérive d’un potentiel vecteur A,
et comme B ! on a

! × (∇
∇ ! × A)
! = ∇(
! ∇. ! − ∇2 A
! A) ! = µ0 J!
soit

∇2 A
! = −µ0 J!
qui est l’analogue de l’équation de Poisson.

29
4.4 Loi d’Ampère
! on a
Soit une surface S traversée par une densité de courant J,
! !
! × B).!
(∇ ! n dS = µ0 ! n dS
J.!
S S
En utilisant Stokes, on identifie le membre de gauche à une intégrale de chemin le
long du contour C de S.
,
! = µ0 I
! d&
B.
C
Cette dernière relation est la loi d’Ampère. Ce n’est rien d’autre que la forme
! ×B
intégrale de la propriété ∇ ! = µ0 J.
! L’équation intégrale permet de simplifier les
équations quand la symétrie le permet.

4.5 Analogie Electrostatique–Magnétostatique


On peut faire une analogie très forte entre les lois qui régissent l’électrostatique et
celles qui décrivent la magnétostatique.

Electrostatique Magnétostatique
1 ! ρ(!r" )(!r − !r " ) 3 " ! µ0 ! J(!! r" ) × (!r − !r " )
!
E= " 3
d !r B = " 3
d3 r "
4π'0 V |!r − !r | 4π V |!r − !r |
! E! = ρ ! B ! =0
∇. ∇.
'0
∇! ×E ! =0 ! ×B
∇ ! = µ0 J!
! = −∇V
E ! B! =∇ ! ×A !
∇2V = − "ρ0 ∇2 A ! = −µ0 J!
! Q !
!
E.!n dS = ! n dS = 0
B.!
S, '0 , S
! !
E.d& = 0 ! d&
B. ! = µ0 (I − I " )
C C

30
4.6 Dipôle magnétique
Considérons une boucle circulaire de rayon R et parcourue par un courant d’intensité
I. Calculons tout d’abord le potentiel vecteur A.!

r
R q

j y
j’
r’
t
x

µ0 ! J(!! r") µ0 , Id& !t(!r" )


! 3 "
A= dr =
4π V |!r − !r" | 4π |!r − !r" |

! µ0 IR ! 2π " !t(!r")
A= dϕ
4π 0 |!r − !r" |
où !t est le vecteur unitaire tangent à la boucle. En coordonnées sphériques, on a

!r = (r sin θ cos ϕ, r sin θ sin ϕ, r cos θ)


!r" = (R cos ϕ", R sin ϕ" , 0)
!t(!r" ) = (− sin ϕ", cos ϕ", 0)
et
- .1/2
|!r − !r" | = r2 + R2 − 2rR sin θ cos(ϕ − ϕ" )
Pour r $ R, on aura

1 1 R
"
= + 2 sin θ cos(ϕ − ϕ" ) + ...
|!r − !r | r r
En s’arrêtant au premier ordre et après intégration sur la variable ϕ " , on obtient les
trois composantes de A!
/
/
/ µ0 IπR2
/ Ax = − sin θ sin ϕ
/
/
/
4πr22
/
/
µ0 IπR
/ Ay = sin θ cos ϕ
/
/ 4πr2
/ Az = 0

31
! peut s’écrire comme un produit vectoriel
Le vecteur A

! × !r
! r) = µ0 µ
A(!
4π r3
avec le moment magnétique
1,
µ
!= !r × Id!& = πR2 I!ez
2
où l’on a fait apparaı̂tre l’aire πR2 de la boucle de courant. Le moment magnétique
! s’exprime donc en Am2. Enfin, le rotationnel de A
µ ! conduit au champ
 
! r) = µ0 1 3 (!µ.!r)!r − µ
B(! !
4π r3 r2
qui est une relation fort semblable à celle du champ électrique produit par un moment
dipolaire p!.

32
4.7 Bobines de Helmholtz
Pour générer un champ magnétique, on se sert souvent de spires et de bobines
parcourues par un courant I. Un système usuel est la bobine de Helmholtz qui est
constituée de 2 spires parallèles et de rayon R. Elles sont placées de part et d’autre
de l’origine des axes. La figure ci-dessous illustre ce système.

Le champ produit en !r est donné par

! ! ! µ0 IR ! 2π !t1 × (!r − !r1 ) µ0 IR ! 2π !t2 × (!r − !r2 )


B = B1 + B2 = dϕ + dϕ
4π 0 |!r − !r1 |3 4π 0 |!r − !r2 |3
avec

!r1 = (R cos ϕ, R sin ϕ, −a/2)

!r2 = (R cos ϕ, R sin ϕ, +a/2)

!t1 = !t2 = (− sin ϕ, cos ϕ, 0)


On recherche à déterminer la composante du champ magnétique entre les spires et
plus précisément le long de l’axe z. Le vecteur position sera !r = z!e z . On a alors
33
0
1 3 4
1 a 2
|!r − !r1 | = 2
R2
+ z−
2
Après avoir effectué les produits vectoriels, la composante verticale du champ magnétique
s’écrit
 
2 ! ! 2π
µ0 IR  2π

dϕ dϕ 

Bz =  5 63/2 + 5 63/2 
4π 0
R2 + (z − a/2)2 0
R2 + (z + a/2)2
Et si on développe ce résultat autour de z = 0, on obtient au second ordre

µ0 IR2 µ0 IR2 6(R2 − a2 ) z 2


Bz (z) = − + ...
(R2 + (a/2)2)3/2 2 (R2 + (a/2)2)7/2 2!
On note qu’un champ magnétique uniforme est obtenu le long de l’axe des z lorsque
R = a. En fait, les bobines de Helmholtz sont utilisées dans ce but précis.

34
4.8 Force de Lorentz
! et à un champ magnétique B,
Soumise à la fois à un champ électrique E ! une charge
électrique q va subir une force de Lorentz

F! = q E
! + q!v × B
!
On note que si la charge est au repos, elle ne subit que la contribution due au champ
! = 0, on a toujours
électrique. Lorsque E

F! .!v = 0
ce qui indique que la contribution magnétique à la force de Lorentz ne travaille ja-
mais. Cette composante change uniquement l’orientation de !v mais pas son intensité
(comme pour la force centripète d’un mouvement circulaire)!

Dans un champ B ! uniforme, une paticule chargée s’enroule autour de B.


! De par la
seconde loi de Newton, on a

mv 2
ma = qvB =
r
et

qB
ω=
m
qui est la fréquence cyclotronique de la particule chargée. Dans un champ non-
uniforme, une particule chargée peut être confinée dans une région de l’espace; c’est
le principe du mur magnétique et de la bouteille magnétique. Les 2 techniques sont
utilisées en physique des plasmas.

35

Vous aimerez peut-être aussi