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SECTION SCIENCES
04/12/2008

Analyse temps-fréquence. Ondelettes


Applications
par José MARTINEZ
Docteur en sciences
Ingénieur de recherche, Transiciel
Pierre GAJAN
Docteur en sciences
Ingénieur de recherche, Office national d’études et de recherches aérospatiales (ONERA)
et Alain STRZELECKI
Docteur en sciences
Ingénieur de recherche, ONERA

1. Domaines d’application ......................................................................... AF 4 511 – 2


1.1 Exemples pédagogiques............................................................................. — 2
1.1.1 Représentations et paramètres de l’analyse .................................... — 2
1.1.2 Premier exemple................................................................................. — 2
1.1.3 Deuxième exemple............................................................................. — 3
1.1.4 Un peu de musique ............................................................................ — 4
1.2 Bilan .............................................................................................................. — 5
1.2.1 TO et FFG............................................................................................. — 5
1.2.2 Arête et squelette................................................................................ — 5
1.2.3 Matching pursuit................................................................................. — 5
1.3 Conclusion.................................................................................................... — 6
2. Exemples d’applications ........................................................................ — 6
2.1 Détection d’intermittence............................................................................ — 6
2.1.1 Analyse de la transition laminaire/turbulente
sur un disque tournant....................................................................... — 6
2.1.2 Analyse du signal à l’aval d’un barreau prismatique ...................... — 7
2.1.3 Conclusion .......................................................................................... — 9
2.2 Analyse de l’évolution de structures tourbillonnaires
à l’aval d’obstacles ...................................................................................... — 10
2.2.1 Analyse de l’écoulement à l’aval d’une marche descendante....... — 10
2.2.2 Analyse des structures tourbillonnaires à l’aval d’un jet ................ — 10
2.2.3 Analyse de l’écoulement dans un débitmètre à diaphragme ......... — 10
Références bibliographiques ......................................................................... — 11

’analyse de signaux non stationnaires nécessite une extension des méthodes


L stationnaires – et notamment de la transformée de Fourier (TF) –, uniquement
fréquentielles, en y introduisant un aspect temporel. La théorie de ces méthodes
– analyse de Fourier à fenêtre glissante (FFG) et transformée en ondelettes (TO)
– est exposée dans une première partie [AF 4 510]. Les applications expérimen-
tales présentées ici sont issues de la mécanique des fluides. Elles mettent
concrètement en évidence les potentialités de ces outils d’analyse.

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ANALYSE TEMPS-FRÉQUENCE. ONDELETTES ________________________________________________________________________________________________

Par rapport à la formulation de Morlet, cette ondelette est centrée


Notations et symboles sur 1 Hz ( ω 0 = 2π ) et le paramètre k 0 permet de fixer la largeur de
Symbole Unité Définition bande du filtre dans l’espace fréquentiel.
a s échelle
1.1.2 Premier exemple
As ( t ) amplitude instantanée
b s position Le premier exemple choisi est volontairement didactique et sim-
ple, et sert à définir le type de représentation et les différences entre
C s ( b, ν ) coefficient d’ondelette à l’instant b et la les décompositions évoquées :
fréquence ν
3
g(t) s ( t ) = A 0 ( t ) sin [ 2π ν 0 t ] Π t ( t ) + A 1 ( t ) sin [ 2π ν 1 t + φ 1 ( t ) ]
enveloppe 0 , T0 (2)
+ A2 δ ( t – t2 )
h m hauteur
I coefficient d’intermittence Les valeurs numériques sont extraites de [1] :
k0 paramètre de l’enveloppe gaussienne A 0 ( t ) = 1, 0 + 0,25 sin [ 2π ν 2 t ] t0 = 3 s
L norme A 1 ( t ) = 1, 0 t1 = 8 s
Q qualité du signal A 2 ( t ) = 2, 0 t 2 = 12 s
Re nombre de Reynolds
ν 0 = 18 Hz T0 = 4 s
s(t) signal
ν 1 = 0, 05 Hz T 1 = 16 s
Sr nombre de Strouhal
ν 2 = 0, 60 Hz T éch = 16 s
t s temps
N = 2 048
U0 m/s vitesse d’écoulement  0 si t < t 1
φ1 ( b ) =  ν éch = 128 Hz
ν, ξ Hz fréquence  π si t  t 1 N = 2 048
νd Hz fréquence de détachement Ce signal est constitué de plusieurs composantes :
Πt porte de durée T, centrée sur t 0 — une composante sinusoïdale, de fréquence ν 0 fixe, mais
0, T
σ écart-type d’amplitude variable A 0 ( t ) existant sur un support fini matérialisé
par la porte Π t0, T0 ( t ) ;
Ω intensité de rotation
— une composante d’amplitude A 1 fixe, mais de fréquence ν ( t )
ψ (t) ondelette évoluant de manière parabolique. Elle existe durant tout le signal et
se trouve perturbée par un saut de phase, à l’abscisse t 1 ;
— une impulsion de Dirac, centrée à l’instant t 2 , d’amplitude A 2 .
Il est représenté figure 1 avec les lois de modulations de chaque
1. Domaines d’application composante.
Les représentations temps-fréquence sont présentées figure 2.
Elles amènent quelques remarques.
Les méthodes évoquées dans [AF 4 510], bien que toutes issues ● Quel que soit le type d’analyse mis en œuvre, l’information est
d’une décomposition en atomes temps-fréquence du signal, n’ont toujours la même, seule la manière de la voir change. La lisibilité
pas les mêmes domaines d’application. Pour illustrer cela, nous dépend de la décomposition, qui se concentre plus ou moins sur les
allons donner trois applications de ces méthodes d’analyse à partir composantes du signal.
d’exemples pédagogiques constitués de signaux synthétiques.
● L’analyse par ondelettes se fait à ∆ ν ⁄ ν constant. La largeur des
Ensuite, nous ferons un bilan des observations réalisées.
composantes mises en relief augmente donc avec la fréquence. La
loi de modulation ν ( t ) est représentée par une surface de plus en
plus large quand la fréquence augmente.
1.1 Exemples pédagogiques ● La normalisation L 2 (figure 2c) pour les ondelettes privilégie
les bases fréquences, pour lesquelles le facteur a amplifie le
niveau à l’échelle a. L’énergie mise en avant est la même (l’intégra-
1.1.1 Représentations et paramètres de l’analyse tion de cette densité d’énergie redonne bien celle de la structure)
mais son support fréquentiel est réduit en largeur. Au contraire, si
les fréquences augmentent, le maximum du filtre ψ̂a( ν ) diminue
La transformation continue fait passer d’un signal monodimen-
(l’énergie de l’ondelette reste constante), ce qui tend à minimiser les
sionnel à une image décrivant le coefficient C s ( b, ν ) en fonction du
temps et de la fréquence. Afin de visualiser le résultat de l’analyse, niveaux d’énergie. Cette remarque est directement liée au fait que
les représentations bidimensionnelles obtenues portent le temps en ∆ ν ⁄ ν est constant et que le gain des filtres représentant les atomes
abscisse et la fréquence en ordonnée. Les basses fréquences sont suit une loi en 1 ⁄ ν (voir figure 3 de [AF 4 510]).
dans la partie inférieure des figures, les hautes fréquences dans la ● Le rôle du facteur k 0 (paramètre de l’enveloppe gaussienne)
partie supérieure. Les niveaux d’énergie (ou d’amplitude) sont est clairement montré sur les comparaisons (figures 2a et 2b). Il
représentés en couleurs. permet d’affiner la précision en temps ou en fréquence, et donne
des graphes où les lois de modulation sont plus ou moins étalées.
Pour cette analyse, nous considérons des atomes de décomposi-
● Le matching pursuit (figure 2d) (linéaire par extension de TO et
tion comparables à ceux utilisés par Gabor ou Morlet faisant inter-
venir une enveloppe gaussienne définie par : FFG ou dyadique) « suit » les lois de modulation de fréquence de
manière discrète. Il ne parvient pas en revanche à retrouver la
π
2
2
modulation d’amplitude de la première composante, pour laquelle il
– ------ ⋅ t retourne une valeur d’énergie correspondant à l’amplitude
k0 2iπt
ψ(t ) = e e (1) moyenne de la composante.

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s (t ) 2,5
ν (Hz)
1,5

0,5

– 0,5

– 1,5

– 2,5
0 2 4 6 8 10 12 14 16 t (s )
a signal s (t )
0,0625
0 16 t (s )
1,50 50,0 a TO, norme L1, k0 = 10

1,25 40,0
ν (Hz)
32
1,00 30,0
ν (Hz)
A

0,75 20,0

0,50 10,0

0,25 0
0 2 4 6 8 10 12 14 16 0 2 4 6 8 10 12 14 16
t (s ) t (s )
première composante
deuxième composante 0,0625
b modulation c modulation 0 16 t (s )
b d'amplitude c de fréquence b TO, norme L1, k0 = 50

Figure 1 – Premier exemple


ν (Hz)
32

1.1.3 Deuxième exemple

Le deuxième exemple comporte deux lois de modulations, à la


fois en amplitude et en fréquence :
s ( t ) = A 1 ( t ) sin [ φ 1 ( t ) ] + A 2 ( t ) sin [ φ 2 ( t ) ] (3)
Nota : la fréquence instantanée est déduite de la fonction φ ( t ) par la relation :

1 ∂φ
ν ( t ) = ------- -------
2π ∂t
0,0625
La première composante se caractérise par : 0 16 t (s )
2 c TO, norme L2, k0 = 50
A 1 ( t ) = 1 + 0, 33 sin 0, 78πt (4)

φ 1 ( t ) = 2πt ( 29,0 – 1, 31t ) (5) ν (Hz)


32
ν 1 ( t ) = 29, 0 – 2, 62t (6)
La deuxième composante se caractérise par :
A 2 ( t ) = 0, 92 + 0, 27 sin [ 0, 42πt + 0, 965 ] (7)

3
φ 2 ( t ) = 2π ( 0, 06t + 0, 168 t sin ( 1, 5πt ) ) (8)

2 0, 084 sin ( 1, 5πt )


ν 2 ( t ) = 0, 18t + --------------------------------------------- + 0, 252π t cos ( 1, 5πt ) (9)
t
0
Le signal et les différentes lois sont représentés figure 3. La trans- 0 16 t (s )
formée en ondelettes du signal est représentée figure 4a.
d Matching pursuit issu de FFG et TO, 120 itérations
L’utilisation d’une norme L 1 est impérative pour retrouver direc-
tement les lois d’amplitude. La figure 3 permet de visualiser les lois
de modulation à la fois en amplitude et en fréquence. Elle fait de
plus apparaître certains phénomènes d’interférences : Figure 2 – Représentations temps-fréquence du premier exemple

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s (t ) 2,5 ν (Hz)
32
1,5

0,5

– 0,5

– 1,5

– 2,5
0 2 4 6 8 10 12 14 16 t (s )
0,0625
a signal s (t ) 0 16 t (s )
a TO, norme L1, k0 = 25
1,5 50

1,2 40 ν (Hz)
32
1,0 30

ν (Hz)
A
0,8 20

0,5 10

0,2 0
0 2 4 6 8 10 12 14 16 0 2 4 6 8 10 12 14 16
t (s ) t (s )
première composante 0,0625
deuxième composante
0 16 t (s )
b modulation c modulation b Matching pursuit issu de FFG et TO, 182 itérations
b d'amplitude c de fréquence

Figure 3 – Deuxième exemple Figure 4 – Représentations temps-fréquence du deuxième exemple

de nouvelles pseudo-lois, mieux marquées au voisinage du lieu de


— d’une part, entre les modulations d’amplitude et de fréquence croisement que ν 2 ( t ) , et sur lesquelles l’algorithme préfère s’accro-
de la première composante, représentées par les deux lignes partant cher ;
en haut à gauche et encadrant la modulation de fréquence ν 1 ( t ) ; — les modulations d’amplitude sont mal restituées, surtout
— d’autre part, le « rebond » des modulations (et des interféren- A 1 ( t ) , ce que l’on pouvait prévoir puisque le signal n’est pas
ces) de la première composante sur l’axe des abscisses, correspond asymptotique par rapport à l’outil de mesure. L’amplitude varie trop
à l’émergence de la partie symétrique (fréquences négatives), mas- vite pour que l’algorithme puisse correctement l’estimer.
quée jusque-là par l’aspect progressif des atomes ; L’analyse par ondelettes est désavantagée aux basses fréquences,
— au croisement entre les composantes, le module et les repré- où la précision en temps et la phase sont mal estimées.
sentations des lois de la transformée sont perturbés.
Une décomposition à l’aide du matching pursuit (figure 4b) est
donnée afin d’illustrer et comparer son comportement vis-à-vis des
1.1.4 Un peu de musique
lois de modulation et de ces interférences.
Finalement, un exemple musical permet de conclure. Le signal,
Les lois de modulation obtenues à partir de l’algorithme d’extrac- simulé et créé numériquement, est une approximation d’une vérita-
tion de l’arête du signal sont regroupées figure 5. Seules les compo- ble partition. L’attaque, le timbre, les harmoniques ne sont pas
santes attendues sont représentées. Les lois « parasites », que l’on reproduits, ce qui limite la validation des résultats, mais l’aspect
retrouve aussi, sont volontairement omises. pédagogique désiré est conservé. La partition jouée est donnée
Les lois trouvées ne sont pas aussi nettes que celles, qualitatives, figure 6.
issues des représentations du module. Ces différences sont liées La transformée en ondelettes est donnée figure 7. Cette représen-
aux perturbations volontairement introduites : tation permet d’identifier les notes (hauteur et durée) (une décom-
— le croisement des lois « perturbe » l’algorithme de recherche position logarithmique en fréquence permet de retrouver
qui ne sait quelle arête suivre. De plus, à proximité du lieu de croise- directement la partition).
ment, l’estimation de l’amplitude est biaisée. La représentation en Le matching pursuit et sa représentation associée permettent
module-phase suppose que l’on effectue une mesure quadratique d’obtenir la densité d’énergie du plan temps-fréquence, ainsi que
de la somme des composantes, différente de la somme des carrés. l’énergie et les caractéristiques de chaque structure composant le
Cela fait perdre la linéarité de la transformée et introduit des interfé- signal. Il est intéressant de noter que cette énergie est reliée, par le
rences correspondant aux termes croisés ; biais de a et donc de g γ m ( t ) de l’étape n, à l’amplitude de manière
— les interférences entre la modulation d’amplitude et de fré- univoque. Sa représentation dans ce plan permet de retrouver la
quence de la première composante (lignes supplémentaires volon- notion de signature temps-fréquence. Celle-ci, continue pour la
tairement non représentées dans la figure 5) gênent en introduisant décomposition, se représente par des structures discrètes, puisque

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l’algorithme isole des composantes localisées, de taille limitée. Il ne


donne pas comme pour le cas précédent, des lois de modulation
continues, mais un ensemble de petits segments sur lesquels la fré-
quence ξ est fixe. Une analyse plus complète, à l’aide des harmoni-
ques et de l’introduction de fonctions particulières g ( t ) , correspon-
dant aux diverses attaques possibles de notes peut s’imaginer.
Celle-ci autoriserait la caractérisation complète des instruments
joués, puis de l’orchestre.

1,50 1,50

1,25 1,25
t (s) en abscisse (0 à 4 s)
1,00 1,00 ν(Hz) en ordonnée, échelle logarithmique (0,0625 à 1 050 Hz)

0,75 0,75
A

Figure 7 – Transformée en ondelettes du morceau de musique


(norme L 1, k 0 = 250 )
0,50 0,50

0,25 0,25 1.2 Bilan


0 0
0 2 4 6 8 10 12 14 16 0 2 4 6 8 10 12 14 16 1.2.1 TO et FFG
t (s ) t (s )
a TO, lois d'amplitude
La première qualité que l’on doit attribuer à la transformée en
b FFG, lois d'amplitude
ondelettes (TO) et à l’analyse de Fourier à fenêtre glissante (FFG) est
première composante la description qualitative qu’elles donnent du signal, même si elle
deuxième composante semble parfois peu lisible. Celle-ci permet de déduire le contenu ou
les événements traduits par ce signal.
50 50
Cet aspect pédagogique est non négligeable. Il constitue une
40 40 base dans la sélection des moyens ultérieurs à mettre en œuvre
pour caractériser complètement le signal.
30 30
Si le signal est suffisamment « propre », les composantes bien
ν (Hz)

ν (Hz)

marquées et isolées permettent de déterminer directement et quan-


20 20 titativement les fréquences présentes, les amplitudes associées et
leurs évolutions (voir l’exemple du débitmètre à vortex, § 2.1.2).
10 10
1.2.2 Arête et squelette
0 0 Sous réserve des hypothèses énoncées plus haut, les transfor-
0 2 4 6 8 10 12 14 16 0 2 4 6 8 10 12 14 16 mées en ondelettes et gaborettes permettent d’accéder aux lois de
t (s ) t (s ) modulation d’un signal, d’isoler séparément chacune des diverses
c TO, lois de fréquence d FFG, lois de fréquence lois et de suivre leur évolution. La notion de signature temps-fré-
quence [AF 4 510] autorise à utiliser cette approche et à distinguer
ces lois, même si elles se croisent. Elle isole de plus la partie la plus
Figure 5 – Lois de modulation du deuxième exemple significative du signal.

Cette approche est très intéressante pour décrire un signal


comme une somme de fonctions continues du temps, elles-
mêmes composées de deux lois de modulation : la fréquence
ξ ( t ) et l’amplitude A ( t ) :

s(t ) = ∑ An ( t ) sin [ 2π ξn ( t ) ] , An ∈  (10)


n

1.2.3 Matching pursuit

Les décompositions et représentations obtenues fournissent une


liste non exhaustive et quantitative du signal. Si ces composantes
Figure 6 – Partition sont discrètes, il est représenté par une somme de structures locali-

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sées. Il est possible d’affiner la sélection de la forme des composan- que nomme plus poétiquement Barbara Burke Hubbard [9] « couper
tes par le biais de l’enveloppe. Cette décomposition permet de les mauvaises herbes en épargnant les marguerites ». En traitement
réaliser des mesures statistiques sur le signal, comme des histo- d’image, cette opération a pour effet de rendre plus nette une
grammes, et de trouver des lois entre les paramètres. Elle offre de image. Au-delà de ce travail de nettoyage, la transformée en onde-
plus la possibilité de filtrer proprement et de manière sélective, non lettes doit être vue comme un outil d’analyse performant d’aide à la
plus par rapport à une gamme de fréquences ou à un seuil arbi- compréhension des phénomènes physiques. Parmi les nombreuses
traire, mais par rapport à l’énergie de chaque structure. applications, on peut citer des travaux allant de l’étude de l’effet du
Cette méthode atteint vite ses limites pour retrouver des lois de courant marin El Niño sur la vitesse de rotation de la Terre en géo-
modulation, on sort alors de la définition initiale de somme de struc- physique, la détection et la reconnaissance de la signature d’un héli-
tures localisées discrètes. coptère en traitement de signaux radar, la reconnaissance vocale en
automatique, l’analyse de signaux turbulents en mécanique des flui-
des ou encore l’identification de sous-amas en astrophysique [10].
Cette approche est très intéressante pour décrire un signal Une autre application de la transformée en ondelettes à la fron-
s ( t ) comme une somme de composantes discrètes, pouvant tière entre la compression et l’analyse concerne l’utilisation de ces
être très différentes, dépendant de quatre paramètres fixes : le techniques pour améliorer les simulations. Un exemple de cette
temps b, la fréquence ξ , l’échelle a et l’enveloppe g ( t ) : approche peut être les travaux de Marie Farge sur la turbulence
[11][12]. Dans cette application, Farge utilise la transformée en
1  t – bj 
∑ Aj --------
2iπ i j t ondelettes, d’une part comme outil d’analyse afin de détecter des
s(t ) = - g j  -------------  e , Aj ∈  (11)
j a  aj 
j
structures cohérentes, d’identifier les chemins de transfert d’énergie
entre les échelles, et d’autre part pour déterminer les zones où il est
nécessaire d’investir sur le plan des calculs et les zones où il est pos-
sible de faire des économies.
1.3 Conclusion Pour illustrer ces différentes applications, nous nous focalisons
volontairement sur des applications orientées vers l’analyse de
La classification des méthodes n’a pas de frontière rigide. Il est signaux turbulents en mécanique des fluides puisque c’est là que se
clair qu’un phénomène physique peut être composé de structures situe notre compétence. Néanmoins, nous essayons, à partir des
continues et discrètes, et qu’une loi discrète peut se voir comme une exemples choisis, de fournir au lecteur des informations sur le type
loi continue particulière (et vice versa). Néanmoins, elle fixe un d’informations pouvant être obtenu à partir de la transformée en
cadre général, qui aide dans le choix des outils à appliquer. ondelettes. Ces informations peuvent être extrapolées à d’autres
domaines de la physique.
Quelle que soit la transformation effectuée, elle ne peut remplacer
l’information perdue lors de l’acquisition du signal, ni valider la
méthode de mesure. Bien que les figures puissent être distinctes,
l’information mise en avant est toujours la même, mais visualisée 2.1 Détection d’intermittence
d’une manière différente.
Les diverses méthodes décrites peuvent maintenant être appli-
quées à des cas concrets. Il est important de penser à interpréter les 2.1.1 Analyse de la transition
résultats comme de la physique, sous-jacente derrière le signal, laminaire/turbulente sur un disque tournant
et non comme des formules mathématiques. De même, il faut
essayer de bien extraire l’information pertinente, sans se laisser Une première application de la transformée en ondelettes
« influencer » par l’outil. concerne la détection de transition correspondant à l’apparition
d’intermittence dans le signal. Un premier exemple est donné par
Liandrat [13] qui utilise cet outil pour détecter la transition laminaire/
turbulent à proximité de la paroi d’un disque en rotation. Les diffé-
2. Exemples d’applications rentes études menées sur ce projet montrent que le point de transi-
tion dépend d’un nombre adimensionnel appelé nombre de
Reynolds défini d’une façon générale par :
Depuis les années 1980, il est possible de trouver dans la littéra-
UL
ture un grand nombre d’exemples d’utilisations pratiques de la Re = -------- (12)
transformée en ondelettes. Il est possible de diviser ces applications ν
en deux catégories différentes suivant que l’outil « ondelettes » sert avec U une vitesse,
à compresser l’information contenue dans le signal ou à l’analyser.
L une longeur,
L’action de compresser consiste à traduire dans un langage donné
le signal initial avec un nombre de mots réduit. On peut discerner ν une viscosité.
dans ce cas deux types de compression, celle qui consiste à conser- L’expérience réalisée consiste à analyser des signaux de vitesse
ver toute l’information initiale et celle qui ne retient que la partie la obtenus au voisinage de la paroi du disque à différentes positions
plus énergétique. Dans cet objectif, l’utilisation de la transformée en radiales. Au fur et à mesure que l’on s’éloigne de l’axe, la vitesse
ondelettes permet dans de nombreux cas, de déceler dans le signal ainsi que le nombre de Reynolds augmentent. Sur les signaux de
initial les événements utiles pour sa compréhension (continuité, vitesse, on voit tout d’abord apparaître une oscillation harmonique
gradient) et de ne conserver in fine que les coefficients associés. correspondant à une instabilité hydrodynamique puis, pour de plus
Parmi les applications, il est possible de citer les travaux de Tzannes grandes valeurs, des spots turbulents tout d’abord de façon spora-
[2] sur la transmission à haut débit d’information dans des fils dique puis quasi continue.
de cuivre, de Mallat [3][4], Rioul [5], Wisnoe [6] sur le traitement L’analyse développée par Liandrat consiste à définir à partir d’une
d’images, de Coifman et Wickerhauser [7][8] sur la compression transformée en ondelettes, une fonction d’intermittence caractéri-
d’empreintes digitales pour le FBI. sant la présence des spots turbulents. Cette fonction F ( t ) , basée sur
L’autre catégorie de travaux utilisant la transformée en ondelettes une mesure d’écart-type de la fluctuation de la fréquence instanta-
consiste à déployer le signal afin d’accroître sa lisibilité. Une pre- née, vaut 1 lorsque le signal est turbulent, 0 sinon. À partir de cette
mière opération peut consister à nettoyer ce dernier en éliminant sa fonction, Liandrat calcule pour chaque signal un facteur d’intermit-
composante bruit afin de mettre en évidence le signal utile. C’est ce tence qui consiste à comparer le temps global pour lequel la fonction

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F ( t ) est égale à 1 par rapport au temps total du signal. Ce facteur Γ gie dans une bande encadrant la fréquence de détachement rame-
est compris entre 0 (aucun spot) et 1 (écoulement totalement turbu- née à l’énergie totale du spectre. Afin de comparer les valeurs
lent). La valeur du rayon, et donc du nombre de Reynolds, pour obtenues pour différentes intensités de rotation, les résultats sont
lequel Γ est égal à 0,5 correspond au point de transition. ensuite normalisés par le cas sans perturbation (giration nulle)
Q(0).
On utilise le nombre adimensionnel Ω rattaché à l’expérimenta-
2.1.2 Analyse du signal à l’aval d’un barreau tion. Ω est le rapport du débit tangentiel sur le débit total dans la
prismatique conduite. Il varie de 0 (pas de rotation) à 1 (rotation maximale).
L’évolution de Q en fonction de Ω présente trois parties distinctes
(figure 8) :
Une approche similaire a été suivie par Martinez pour l’analyse de
signaux de vitesse à l’aval d’un obstacle [1]. Si l’étude de l’écoule- — pour les faibles intensités de rotation ( Ω variant de 0 à 0,2), Q
ment derrière un obstacle est courante dans de nombreux domai- est proche de Q ( 0 ) : il semble que la giration n’ait aucune influence
nes (profil d’aile, voitures de course, débitmétrie…), le cas sur le phénomène de détachement tourbillonnaire ;
expérimental choisi est un débitmètre à tourbillons, dont on essaie — pour les valeurs proches de 0,25, le rapport devient supérieur
d’améliorer la précision face à des perturbations amont. à 1. Il y a augmentation du niveau d’énergie du signal pour la fré-
Le principe du débitmètre à tourbillons (ou vortex) [R 2 285] con- quence de Strouhal. Il semble que le phénomène de détachement
siste à placer dans la conduite, normalement à l’écoulement, un soit amélioré ;
obstacle de forme géométrique donnée. Il provoque l’apparition — pour les intensités supérieures à 0,3, la courbe décroît puis
d’une double rangée de tourbillons alternés en aval. tend vers 0. La fréquence de détachement tourbillonnaire disparaît.
L’échappement périodique est détruit, le signal n’a plus de compo-
Pour une gamme étendue du nombre de Reynolds Re , on sante caractéristique.
observe que la fréquence adimensionnelle Sr (encore appelée
nombre de Strouhal) reste constante : Les représentations temps-fréquence (densités d’énergie) obte-
nues à partir des transformées en ondelettes (figure 9) permettent
h d’appréhender de manière visuelle les phénomènes existants. Pour
Sr = ------- ν d (13) Ω = 0, 13 (figure 9a), la fréquence de détachement est stable, légè-
U0
rement fluctuante, sans intermittence. Pour Ω = 0, 25 (figure 9b),
avec h (m) la hauteur du barreau, la fréquence de détachement est stable, pratiquement fixe et sans
U 0 (m/s) la vitesse amont, intermittence. Pour Ω = 0, 42 (figure 9c), la fréquence de détache-
ment est moins nette et surtout disparaît régulièrement.
ν d (Hz) la fréquence de détachement.
Les conclusions suivantes peuvent être déduites :
Cette relation permet de déterminer la vitesse de l’écoulement et
— l’intermittence est plus marquée pour les fortes valeurs de
donc le débit à partir d’une mesure de fréquence.
l’intensité de rotation ;
Nota : dans ce cas, Re est calculé à partir d’une vitesse de référence, telle que la vitesse
amont U0 , et de la hauteur du barreau h.
— la fréquence de détachement a tendance à fluctuer dans une
bande de plus en plus large, pour finalement disparaître à mesure
Dans des configurations industrielles, ce débitmètre peut être que la giration augmente.
situé à l’aval de divers éléments de conduite (coude, vanne, té…) qui
viennent modifier la nature de l’écoulement à l’amont du barreau et À partir des outils d’analyse détaillés dans [AF 4 510] (§ 2), Marti-
perturber le détachement tourbillonnaire à l’aval du barreau. Dans nez détermine pour les différents signaux, l’évolution des lois de
ce cadre, Martinez a utilisé la transformée en ondelettes pour analy- modulation en fréquence (figure 10) et en amplitude à partir des
ser la répercussion d’une rotation d’ensemble du fluide à l’amont du méthodes suivantes :
barreau sur la qualité du signal mesuré à l’aval. — squelette ;
— signature ;
— enveloppe du signal (amplitude instantanée du signal analyti-
2.1.2.1 Résultats
que associé). Elle s’obtient par reconstruction à partir des coeffi-
Le travail réalisé consiste à déterminer l’influence de l’intensité de cients les plus importants autour de la fréquence de détachement de
la rotation caractérisée par un index Ω variant de 0 à 1, sur la fré- la transformée en ondelettes ;
quence de détachement et sur le rapport signal/bruit. L’analyse est — évolution des maxima de la transformée (en supposant que le
réalisée sur des signaux de vitesse obtenus à l’aval du barreau. bruit extérieur ne perturbe pas la représentation).
Les premiers résultats, issus de transformées de Fourier [14],
montrent qualitativement que l’augmentation de l’intensité de rota-
tion génère une diminution du niveau du pic autour de la fréquence
de détachement ν d ainsi qu’un élargissement de celui-ci. Ces deux 1,25
modifications peuvent provenir :
— d’une disparition temporaire du phénomène (intermittence), et 1,00
donc d’un temps d’existence réduit ;
Q (Ω )/Q (O)

— d’un « affaiblissement » du phénomène (énergie plus faible à 0,75


la fréquence caractéristique) ;
— d’une fluctuation de la fréquence de détachement, introduisant 0,50
une bande de fréquences de détachement.
Les précédentes conclusions amènent à introduire la qualité du 0,25
signal Q [14] comme grandeur physique caractérisant l’évolution du
détachement tourbillonnaire lors de l’apparition de la rotation. La 0
0 0,10 0,20 0,30 0,40 0,50 0,60 0,70
qualité Q correspond à la variance du signal, calculée dans une
bande de fréquence ∆ ν centrée sur la fréquence de détachement Ω
ν d , à laquelle on enlève le bruit contenu dans cette plage de fré-
quences, en le supposant identique à l’extérieur. Enfin, pour adi- Figure 8 – Évolution de la qualité du signal Q adimensionnalisé
mensionnaliser le résultat, on le divise par la variance globale du par sa valeur dans le cas non perturbé, en fonction de l’intensité
signal. Cette grandeur peut être vue comme un pourcentage d’éner- de rotation Ω

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ν (Hr)

r (σ )
a Ω = 0,13

b Ω = 0,25 c Ω = 0,42

Figure 9 – Signatures temps-fréquence suivant le swirl (giration)

La corrélation entre les résultats est bonne aux instants d’exis- Nota : ces calculs ne prennent pas en compte l’intermittence existant dans le signal.
L’écart-type est mal estimé, car la disparition de l’événement donne des fréquences très dif-
tence du phénomène. Lorsque celui-ci disparaît (intermittence), on férentes de la valeur moyenne, ce qui augmente sa valeur.
observe, pour les diverses méthodes, des hausses ou chutes bruta-
les de la fréquence instantanée, vers des valeurs quelconques liées Afin de caractériser l’amplitude du phénomène et par là même
au bruit. son existence, un coefficient d’intermittence a été introduit. L’inter-
mittence est caractéristique de la disparition du phénomène dans le
Pour mieux représenter les mesures de modulation de fréquence, signal, soit ici du détachement tourbillonnaire. Le coefficient d’inter-
l’écart-type σ ( Ω ) , associé à la fluctuation de fréquence autour de la mittence I, permettant de quantifier cette influence, est défini
fréquence moyenne pour une densité de rotation Ω est calculé. Sa comme le rapport :
valeur est renormalisée par le cas sans perturbation (intensité de
rotation nulle) σ ( 0 ) . Cela amène à tracer l’évolution du rapport temps de non existence du phénomène
I = ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (14)
σ(Ω = 0) ⁄ σ(Ω) . temps total du signal
Nota : l’évolution du rapport σ ( Ω ) ⁄ σ ( 0 ) diverge pour les fortes valeurs de Ω et donne
les graphes moins lisibles que pour la normalisation choisie ici. C’est un nombre sans dimension, compris entre 0 et 1 : nul pour un
Il présente une allure semblable à celle de la qualité Q du signal détachement tourbillonnaire présent de manière continue (pas d’inter-
(figure 11). En particulier, pour des intensités de rotation proches de mittence) et égal à 1 lorsque ce phénomène disparaît complètement.
0,15 à 0,25, la fluctuation de la fréquence de détachement s’atténue Pour calculer le coefficient d’intermittence I, le signal original est
et donne un phénomène plus stable du point de vue de la périodicité transformé en une fonction tout ou rien caractérisant l’existence du
d’émission. détachement tourbillonnaire à un instant donné à l’aide d’un seuillage

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ν (Hz) 17 0,60

16 Préseuillage
15
0,50
14

13

12 0,40

11 I
10
0,30
9 Enveloppe

8
maxima (TO, k0 = 5) 0,20
7 Maxima
arête (TO, k0 = 5)
6
Squelette
5 0,10
8 9 10 11 12 13 14 15
0 0,10 0,20 0,30 0,40 0,50 0,60 Ω
t (s)

Figure 10 – Modulation de fréquence Figure 12 – Coefficient d’intermittence

intensités de rotation supérieure à 0,3, l’intermittence augmente, le


arête signal est détruit ;
1,2 maxima — l’utilisation d’un seuillage global [1] donne des résultats en
général plus intermittents que ceux obtenus ici.
Une fois l’intermittence des signaux quantifiée, il est possible de
1,0 séparer l’influence de cette disparition sur la fluctuation de fré-
quence. Pour cela, le signal de modulation de fréquence est multi-
plié par les fonctions tout ou rien représentant l’existence du
0,8 phénomène de détachement. L’écart-type est ensuite calculé hors
des plages nulles, là où le phénomène existe. Les résultats obtenus
σ (0)/σ (Ω)

montrent un comportement semblable au cas précédent (sans l’arti-


0,6 fice de calcul consistant à utiliser les fonctions tout ou rien), avec
toujours une amélioration de la stabilité de la fréquence de détache-
ment pour des valeurs de Ω proches de 0,25, puis une dégradation
0,4 pour les intensités de rotation importantes.

0,2 2.1.3 Conclusion

L’analyse menée permet, de manière simple et facilement exploi-


0 table, d’expliquer les premiers résultats obtenus (TF – transformée
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 Ω de Fourier – et qualité Q du signal), ainsi que l’évolution temporelle
de la fréquence de détachement tourbillonnaire et la modulation
Figure 11 – Modulation d’amplitude d’amplitude associée. Elle permet de conclure pour chaque type de
perturbation identifié.
des courbes. Il en est de même pour l’instant de disparition. Si les Pour les intensités de rotation inférieures à 0,2, le taux d’intermit-
variations du signal sont suffisamment lentes (asymptotisme), il est tence est constant et faible, proche de 10 %. La fluctuation de fré-
possible de le discrétiser comme une suite de fonctions portes Π ( t ) , quence est constante elle aussi. Ces valeurs sont liées à la turbulence
donnant une loi de modulation d’amplitude en escalier, qui permet en amont. L’écoulement est identique au cas sans giration. La giration
d’accéder aux instants d’apparition et de disparition des phénomènes. ne produit aucune perturbation dans l’écoulement tourbillonnaire.
La figure 12 montre l’évolution du coefficient d’intermittence Pour les intensités de rotation proches de 0,25, l’intermittence
obtenu à partir soit de l’enveloppe, soit des maxima des coeffi- diminue, ce qui traduit une amélioration du détachement : il dispa-
cients, ou encore du squelette de la TO, en utilisant un seuillage raît moins souvent. La fréquence de détachement est plus marquée,
local. On peut conclure et remarquer que : pratiquement constante comme le suppose la théorie. La giration a
— les résultats issus de l’enveloppe et du squelette sont pratique- un effet bénéfique sur l’écoulement en terme de stabilité et de régu-
ment identiques : le bruit extérieur reste faible et la fluctuation de larité de l’émission des structures.
fréquence est toujours « énergétique », même si la fréquence est Pour des valeurs plus importantes, la fluctuation de fréquence aug-
loin de celle attendue, ce qui assure une bonne extraction des lois ; mente. La fréquence de détachement prend des valeurs de plus en
— comme pour la fluctuation de fréquence, les valeurs Ω voisi- plus éloignées de celle attendue. L’intermittence augmente. La mise
nes de 0,15 à 0,25 paraissent plus stables, du point de vue de l’inter- en rotation détruit le détachement tourbillonnaire en le rendant de
mittence et de la stabilité du détachement tourbillonnaire. Pour les plus en plus aléatoire, pour finalement faire disparaître le phénomène.

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2.2 Analyse de l’évolution de structures plan de sortie, les fluctuations de vitesse sont en phase sur les deux
signaux et ceci, quelles que soient les fréquences détectées (mouve-
tourbillonnaires à l’aval d’obstacles ment symétrique du jet). Par contre, pour des distances plus éloi-
gnées, l’interTO met en évidence pour une fréquence, des
Une autre application de la transformée en ondelettes consiste à fluctuations en opposition de phase caractéristiques d’un mouve-
détecter dans un signal de vitesse ou de pression, la présence de ment dissymétrique du jet. Ce mouvement correspond à un batte-
structures tourbillonnaires et de suivre à l’aide de l’analyse de plu- ment du jet déjà observé par d’autres auteurs.
sieurs signaux enregistrés simultanément, l’évolution de ces struc-
tures dans le temps, l’espace et les échelles. Plusieurs applications Comme pour l’exemple précédent, l’utilisation de l’interTO per-
de ce type d’approche peuvent être trouvées dans la littérature mais met ici de différencier différents comportements instationnaires de
pour illustrer notre propos, nous présentons trois travaux utilisant l’écoulement étudié. Ceux-ci n’auraient pu être mis en évidence par
différentes techniques détaillées dans [AF 4 510]. des analyses classiques dans l’espace physique ou dans l’espace de
Fourier (intercorrélations, interspectres).
2.2.1 Analyse de l’écoulement
à l’aval d’une marche descendante
2.2.3 Analyse de l’écoulement dans un débitmètre
Le premier travail concerne l’analyse de l’écoulement à l’aval d’une à diaphragme
marche descendante caractérisée par un décollement du fluide sur
une arête vive à 90°, par la formation d’une zone de cisaillement à
Un autre exemple peut être trouvé dans la thèse de Martinez [1].
l’aval du point de ce dernier et par la présence d’une zone de recircu-
Dans ce cas, les méthodes de traitement temps-fréquence sont
lation localisée entre cette zone cisaillée et la paroi. Cette configura-
appliquées à l’analyse de signaux de pression pariétale mesurés à
tion d’écoulement, représentative de nombreuses géométries
l’aval d’un débitmètre à diaphragme. Ce dispositif utilisé pour
industrielles (déversoir, chambre de combustion, élargissement brus-
que…), provoque la formation de nombreuses structures tourbillon- mesurer le débit d’un fluide dans une canalisation comprend un ori-
naires, de battement pouvant jouer un rôle important dans les fice circulaire centré sur l’axe de la conduite. Au passage de cet obs-
phénomènes de mélange, de vibration ou de combustion. tacle, le fluide est accéléré, ce qui provoque une chute de pression
entre l’amont et l’aval du diaphragme. L’amplitude de la pression
Dans leur étude, Lee et Sung [15] appliquent les méthodes d’ana- différentielle est alors proportionnelle au carré du débit. L’écoule-
lyse par ondelettes pour détecter et analyser l’origine des fluctua- ment en aval se caractérise par un jet central, entouré d’une zone de
tions de pression mesurées à l’aide de trente-deux microphones recirculation. Entre ces deux zones prend naissance une zone
placés en paroi à l’aval de la marche. Pour cela, ils réalisent une cisaillée formée de structures tourbillonnaires. Martinez a étudié la
décomposition continue des signaux à l’aide de l’ondelette signature de ces structures sur les signaux de pression pariétale afin
« chapeau mexicain ». Une comparaison entre ces différentes trans- de suivre leur évolution dans le temps et l’espace.
formées en ondelettes permet à ces auteurs de différencier les fluc-
tuations de pression liées à la convection de grosses structures
(caractérisées par un décalage temporel entre différentes abscisses)
de celles ayant pour origine un battement d’ensemble de la zone 1,37D 3,22D
cisaillée (mouvement d’ensemble). Ce dernier correspond à une res- paroi
piration de la zone recirculée. L’analyse simultanée des évolutions
temporelles des deux phénomènes apparaissant à deux fréquences
distinctes, permet de définir la relation de phase existant entre eux. axe
À partir de ces résultats, Lee et Sung établissent un scénario sur les
interactions entre les différentes zones de l’écoulement présentes à
l’aval de la marche. L’obtention de ces informations, nécessaire à la
compréhension des processus instationnaires de mélange, est ici
fortement facilitée par l’utilisation d’une méthode de décomposition
temps-fréquence.

2.2.2 Analyse des structures tourbillonnaires


à l’aval d’un jet
Une application de la méthode InterTO peut être trouvée dans le
travail de Li [16]. Cet auteur s’intéresse à la caractérisation des struc-
tures tourbillonnaires à l’aval d’un jet libre rectangulaire. Pour son
analyse, Li utilise l’ondelette de Morlet centrée sur 1 Hz. Les traite-
ments présentés sont réalisés à partir de signaux de vitesse obtenus
simultanément en différents points du jet. L’analyse réalisée à partir
de la transformée en ondelettes de l’autocorrélation d’un signal
mesuré en dehors de l’axe du jet, met en évidence la présence de
plusieurs fréquences caractéristiques.
Nota : on pourrait dénommer le résultat de ce traitement « autoTO » par analogie avec
les définitions données au paragraphe 3 de [AF 4 510].

À partir de l’interTO de deux signaux obtenus à une même dis-


tance de l’axe du jet mais à deux positions longitudinales différen-
tes, Li met en évidence un décalage temporel lié à un phénomène
convectif. À noter que l’auteur affirme, à partir de ses résultats, que
la vitesse de convection dépend de la fréquence du phénomène.
À partir d’une analyse équivalente faite sur deux signaux mesurés
à une même distance du plan de sortie du jet mais en deux posi-
tions symétriques vis-à-vis de l’axe, l’auteur montre que, proche du Figure 13 – Structures à l’aval d’un diaphragme (LES)

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Dans un premier temps, des tests ont été réalisés à partir de


500 signaux issus de simulations numériques obtenues à l’aide d’une
450 méthode instationnaire (large-eddy simulation : LES). Elle consiste à
400 résoudre les équations de conservation de masse, de quantité de
350 mouvement et d’énergie pour les grandes échelles de turbulence,
300 tout en appliquant des modèles pour les petites échelles (figure 13).
ξ (Hz)

250 L’application de la méthode d’interTO permet de calculer la


200 vitesse de convection des structures tourbillonnaires en fonction
150 des échelles. Dans le cas présent, cette vitesse semble constante.
100 point plus en amont (1,2 D ) Un autre point important concerne le résultat d’un traitement de
point plus en aval (1,7 D ) type matching pursuit. En comparant le résultat de ce traitement
50
pour deux signaux de pression enregistrés simultanément en deux
0 positions distantes d’un demi-diamètre de conduite, cette méthode
– 0,005 0,000 0,005 0,010 0,015 0,020 0,025 0,030 permet de suivre l’évolution de ces structures dans l’espace. En par-
t (s) ticulier, elle permet de détecter la fusion de deux structures consé-
Les cercles positionnent le centre théorique (abscisse) en fonction de cutives, phénomène connu sous le nom de pairing (figure 14).
leur fréquence caractéristique (ordonnée). Les tourbillons peuvent ainsi
être regroupés facilement. L’extension de ces résultats sur des mesures permet d’étudier
l’influence de l’acoustique de la veine sur la signature des signaux.
Figure 14 – Représentation temps fréquence des signatures Néanmoins, le suivi des structures dans l’espace devient moins aisé
des tourbillons pour 1,2 D et 1,7 D et nécessiterait un complément d’étude.

Références bibliographiques
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