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Chapitre 1 : Services publics en réseau : du monopole naturel à la déréglementation

4-1-3 Biens d’intérêt social :

Une grande partie des dépenses publiques est consacrée aux biens d’intérêt social, dont
l’offre est insuffisante dans l’économie de marché.
Les principaux biens de ce type sont l’enseignement et les soins de santé. « Le
marché ne tient compte que des coûts et profits individuels. Il ne peut absolument pas tenir
compte de l’utilité de certains biens et services qui ne sont utiles que si chacun les
consomme »1.
Les pouvoirs publics peuvent eux-mêmes proposer ces biens et services ou encourager
le secteur privé, par le biais de subventions, à en produire d’avantage.

4-1-4 Marchés incomplets2:

Il s’avère dans certains cas, que le marché n’est pas à même d’offrir des biens et
services demandés par les acteurs économiques et ce, même si les consommateurs se disent
prêts à payer un prix supérieur au coût de production. On parle en l’occurrence, de marchés
incomplets, cela signifie donc que le mécanisme de marché s’avère parfois défaillant et, afin
d’y remédier, les pouvoirs publics interviennent.
Un exemple type est l’intervention publique en cas de tremblement de terre ou d’autres
catastrophes naturelles.
Toutes ces considérations font que le nombre d’arguments qui plaident pour des
interventions publiques est beaucoup plus limité qu’auparavant.

4- 2- Les raisons pour lesquelles les pouvoirs publics régulent le marché :


La vision économique de la notion d’entreprise publique a évolué. Au lieu de produire
eux-mêmes, les pouvoirs publics peuvent recourir à la sous-traitance pour autant que le
contrôle et la régulation s’avèrent adéquats.3
Si les pouvoirs publics connaissent précisément les attentes vis-à-vis du producteur, ils
peuvent les fixer contractuellement4. Selon Mary M Shirley, « Il est essentiel pour améliorer
les résultats des entreprises publiques, de modifier la relation entre leurs dirigeants et l’Etat.
Les contrats d’entreprises peuvent être la solution, à certaines conditions »5
Ils peuvent, par exemple réguler la formation des prix et l’accès des tiers aux réseaux
dans le marché d’électricité. Ils peuvent imposer des investissements utiles à long terme
uniquement. Les principales raisons pour lesquelles les pouvoirs publics doivent jouer un rôle
régulateur sont d’ordres économiques et sociales.

1
François LEVEQUE (1998), Op.Cit. p,86.
2
Olivier Sautel : l’évolution de la théorie des contrats incomplets face à l’intégration verticale. Revue de
l’économie industrielle / N° 117 / 1er trimestre 2007.
3
Gilbert Abraham- Frois (1991), Op.Cit. p.363.
4
Gérard KOENIG : de nouvelles théories pour gérer l’entreprise du XXI e siècle ; éd. Economica, Paris 1999,
p. 363.
5
Mary M. SHIRLEY : les contrats d’entreprises sont-ils des instrumentes de réforme ; PP 6- 9. Revue Finance
et Développement, Septembre 1996.

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Chapitre 1 : Services publics en réseau : du monopole naturel à la déréglementation

4-2-1 Externalités :

L’intervention de l’Etat s’explique, également, par l’existence d’effets externes


d’externalités. Les externalités apparaissent à chaque fois que les décisions d’un agent
économique ont des effets non prévus ou non désirés sur d’autres agents.

4-2-1-1 Définition :
Il existe un effet externe quand la production ou la consommation d’un bien ou d’un
service par un acteur modifie la fonction de production ou d’utilité d’un ou de plusieurs autres
acteurs1.
En résumé, en science économique, le terme externalité désigne les conséquences des
activités économiques, qui ne se limitent pas à la personne décidant de l’activité mais qui
affectent également d’autres personnes sans que la personne responsable paie pour des
externalités négatives ou soit restituée pour des externalités positives.2
Il existe donc des externalités positives et négatives. Parmi les externalités positives,
on citera l’effet sur la demande d’électricité d’une unité de production d’électricité qui se
crée. Le coût de pollution de l’air et de l’eau, les nuisances sonores, les déchets nucléaires et
autres constituent les principales externalités négatives de nombre d’activités économiques.
Une réglementation environnementale et des écotaxes 3ont été approuvées en vue de
couvrir partiellement le coût de ces nuisances environnementales puisqu’ils n’en seront pas
tenus compte sur un marché concurrentiel.
A titre indicatif, en Algérie les lois de finances 2000 à 2005 ont introduit de différentes
dispositions fiscales en matière de réglementation environnementale, nous pouvons citer
notamment :
- La taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM);
- La taxe d'incitation au déstockage des déchets des activités de soins ;
- La taxe d'incitation au déstockage des déchets industriels spéciaux;
- La taxe sur les sacs en plastiques ;
- La taxe relative aux activités polluantes ou dangereuses pour l'environnement;
- La taxe sur la pollution atmosphérique d'origine industrielle; La taxe sur les
carburants;
- La taxe sur les eaux usées industrielles.

1
Frédéric Teulon (1995), Op.Cit. p.281.
2
François LEVEQUE (1998), Op.Cit. p.24.
3
L’écotaxe est une taxe pigouvienne, du nom de l’économiste libéral Arthur Cecil Pigou, qui proposa
d’internaliser les déséconomies externes, c’est-à-dire les dommages engendrés par l’activité d’un agent qui en
rejette le coût sur la société. L’écotaxe concerne spécifiquement les dommages environnementaux. Une taxe
pigouvienne (ou pigovienne) est une taxe qui vise à intégrer au marché les externalités négatives. Le principe
pollueur-payeur en découle.

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Chapitre 1 : Services publics en réseau : du monopole naturel à la déréglementation

4-2-1-2 L’internalisation d’un effet externe :


Internaliser un effet externe, c’est lui attribuer une contrepartie pécuniaire qui le
réintroduise dans le calcul économique des acteurs : qui les responsabilisent.
« L’internalisation ne peut pas se faire par le marché mais par les acteurs publics :
L’indemnisation en est l’un des types. Différents acteurs sont concernés : D’abord, celui qui
subit directement la nuisance, puis l’émetteur (qui peut ou non être le payeur). Puis les
pouvoirs publics, ne serait-ce que parce que c’est à ceux que vont s’adresser les mouvements
de mécontentement. Mais aussi parce que c’est à eux de définir et mettre en œuvre
l’indemnisation…..L’internalisation est un outil de certaines politiques publiques, en premier
lieu celle de l’environnement »1.
Les acteurs publics peuvent en effet, établir des normes qui organisent l’internalisation,
ou en prendre à leur charge tout ou partie.

4-2-2 Imperfections des marchés et information imparfaite :

Faute d’information fiable, il est impossible de distinguer des biens et des services de
qualité différente. Puisque des biens et des services de qualité différente sont vendus à un
même prix.
Le risque existe que seuls des biens et des services de qualité moindre soient
proposés2. Un marché concurrentiel ne fournit pas toujours toutes les informations sur les
biens et services proposés. L’information est partagée de manière asymétrique : il y a alors
inégal accès à l’information entre signataires d’un contrat ; à l’origine notamment de « l’anti
sélection » et « du risque moral ».
En économie, « il y a anti sélection à chaque fois que l’asymétrie de l’information ne
permet pas de passer des contrats en connaissance de cause, ce qui par définition est
défavorable à l’efficacité du marché3 » exemple : une entreprise d’électricité peut profiter du
fait que la structure du coût de revient ou le retour sur investissement sont difficiles à
déterminer par l’Etat régulateur ; celui-ci se méfie et n’a aucun moyen simple de savoir si
l’entreprise est honnête. C’est pourquoi l’Etat doit intervenir et mettre en place un système de
contrôle et d’évaluation crédible des prix et de l’investissement, au risque d’être considéré
atteint d’une « myopie ».4
De plus, en économie, « il y a risque moral lorsque le signataire d’un contrat peut
recouvrir à des actions cachées dont l’autre va pâtir, c’est un exemple de défaillance du
marché. L’existence de contrats ou de situations favorables ou risque moral attire les agents
« immoraux » : il y a anti sélection »5.

1
Philipe BRACHE (1995), Op. Cit. p, 253.
2
G. KOENIG (1999), Op. Cit. p. 80.
3
Jean Paul Piriou, lexique des sciences économiques et sociales, collection repères, éd.la découverte, 1997,
p.09.
4
Mohamed-Cherif BELMIHOUB, le management des politiques publiques : une approche institutionnelle : cas
de l’Algérie, les cahiers du CREAD, N° 45 (3ème trimestre 1998), PP 5-16.
5
Jean Paul Piriou (1997), Op.Cit. p.102.

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Chapitre 1 : Services publics en réseau : du monopole naturel à la déréglementation

Il faut ajouter à cela, que sur le plan théorique, on peut montrer que tant d’existence de
biens publics que celle de monopoles naturels engendre des externalités :
- Produire un bien public, c’est engendrer des externalités positives chez tous ceux
qui le consomment sans l’avoir payé (et on ne peut pas les empêcher par définition).
- Un monopole naturel non régulé fait payer trop cher les biens qu’il produit, exclut les
plus pauvres de la consommation et engendre ainsi des extrémités négatives : « les plus souvent,
les pauvres finissent par payer beaucoup plus cher que le reste de la population des services
d’infrastructures tels que l’eau et l’électricité parce qu’ils ne peuvent s’adresser qu’a des
prestataires privés. Le meilleur moyen de garantir aux plus démunis un accès minimum à ces
services sans mettre en péril la rentabilité commerciale des réseaux publics consiste à aider
directement les ménages considérés. C’est le cas du CHILI, par exemple, des subventions à
l’électrification des zones rurales sont intégrées aux contrats préalablement aux appels d’offres »1.
Les imperfections de marchés peuvent donc toujours s’analyser aux termes
d’externalités.
Or on montre, c’est le second théorème de Ronald COASE, que dans un monde :
- d’informations parfaites accessibles à tous et à coût nul, donc un monde sans coûts
de transactions,
- Où tous les droits de propretés sur tous les objets sont bien définis2,
Il ne peut y avoir d’externalités, donc d’imperfection de marchés.
Par conséquent, les imperfections de marché sont dus au fait que :
- l’information n’est pas parfaite et qu’elle est coûteuse à acquérir (information
asymétrique et coût de transactions).
- Certains droits de propriété ne sont pas définis.
L’Etat, et pour corriger ces imperfections, doit prendre comme cadre d’analyse un
monde d’information imparfaite et coûteuse. L’Etat en particulier n’est pas parfaitement
informé sur les acteurs dont il veut modifier les comportements3.

4-2-3 Objectifs sociaux :

Outre les sources de défaillance du marché, d’autres motifs justifient également les
interventions publiques4:
- Ajuster la redistribution des revenus et du patrimoine restant du processus
économique de marché : les revenus sont distribués via les impôts directs et les cotisations de
sécurité sociale.

1
Ashoka MODY et Michael WALTON : Consolider les infrastructures en Asie de L’Est. PP 18 – 21.
Revue Finance et Développement, Juin 1998, volume 35, N° 2 :
2
G. KOENIG (1999), Op. Cit. p. 41.
3
Revue française de Gestion.VOL 32 / 165 – 2006 : la place de la firme dans la coordination ; F.FACCHINI –
PP. 105- 124.
4
Mathias DEWATRIPAT et Peter PRACT : les logiques de l’intervention publique : pourquoi l’Etat intervient-il
dans l’économie ? Revue Problèmes Economiques / N° 2 .640, Novembre 1999.

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