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L'ECONOMIE DE LA NATURE (SCIENCES ECO.

)
Cours 4

1) Les théories des externalités


Qu'est-ce qu'une externalité ?
L'économie de l’environnement qui se développe a partir de la fin des années 1960 est inspiré par
la notion d’externalité ou de cout externe. Une externalité est un effet non désiré (positif ou
négatif) d’une activité de production qui entraine une modification des fonctions de couts d’un ou
plusieurs agents. Ce cout imposé n’est pas pris en compte par le marché, d’ou son caractere externe
(au marché, a la régulation économique). Dans l’analyse standard des problemes d’environnement,
ceux-ci sont interprétés comme des externalités, il faut les « internaliser ». Les dégradations causées
a l’environnement sont des couts non pris en compte; les acteurs qui dégradent l’environnement ne
paient pas pour cela. Deux auteurs ont livré des contributions clés a cet égard (qui ne traitent pas
spécifiquement de l’environnement), il s'agit de Pigou et Coase.

Idée principale : producteur de pommes attire et permet aux abeilles de prospérer, ce qui réjouit
l’apiculteur. Et l’apiculteur, en s’occupant des abeilles permet la prolifération des pommes.

Externalité en économie (concept économique avant tout) : effet non désiré qui affecte au moins un
et plusieurs agents économiques (si aucun, on ne peut parler d’externalité). C'est une forme de
macro économie qui s’est beaucoup développé depuis.

A.C Pigou (1877-1959)


Pigou, professeur a Cambridge est un auteur clé (notamment de l'économie
du bien-être) et s'est beaucoup intéressé aux travaux sur le marché du travail.
Par rapport aux externalités, Pigou prend dans l'un de ses ouvrages l'exemple
resté célebre de deux usines le long d'un cours d'eau : «L’usine A, située en
amont pollue, ce qui impose a l’usine B en aval des couts supplémentaires
liés a la dépollution qu’elle doit effectuer avant de pouvoir utiliser l’eau.
L’usine A ne tient pas compte de cette pollution dans sa fonction de cout et
elle produit plus que ce qui serait socialement optimal . L’usine B a des couts
artificiellement gonflés du fait de la pollution engendrée par A, elle produit
moins que si elle ne devait pas supporter ces couts ». Les niveaux de
production ne sont pas les mêmes que s’il n’y avait pas de pollution. Les
prix/couts du marché, qui n’integrent pas la pollution, donnent des signaux erronés aux agents
économiques, qui ne peuvent faire des choix socialement optimaux. Les externalités représentent
des couts sociaux (couts pour la société). Pour revenir a des niveaux de production qui constituent
un optimum social (optimiser le produit joint des deux usines), il faut internaliser ces externalités
et faire en sorte que les agents integrent le cout de la pollution. La solution préconisée par Pigou est
l’intervention de l’Etat sous la forme d’une taxe prélevée aupres de l’usine polluante, supposée
correspondre a peu pres au montant des couts engendrés par la pollution. Il doit etre de la
responsabilité du pollueur de prendre en charge les couts qu’il impose aux industries situées en aval.
De ce fait, Pigou préfigure le principe pollueur – payeur  idée de faire payer celui qui pollue.
Cette idée provient de résoudre les problemes économiques qui sont dans la redistribution des couts
et non pas dans l’impact environnemental. Et donc si l’état prélevait une taxe, le pollueur
diminuerait sa productivité et sa pollution (acceptable pour le pollueur et non d’un point de vue
environnemental). Il y a donc intervention de l’état car problématique d’intéret général.
A la suite de Pigou, la notion d'externalité a été affinée pour en distinguer plusieurs catégories
(externalités techniques, monétaires..). Les taxes ont longtemps été l’instrument privilégié des
politiques environnementales. Elles appellent une intervention de l’Etat, jugée inefficace dans une
perspective libérale, notamment parce qu’il n’est pas possible d’asseoir la taxe sur la pollution
observée dans chaque firme (le montant choisi correspond a une moyenne). Les montants de taxe ne
seraient donc pas optimaux et pourraient etre peu incitatifs.

A noter !
Une externalité ne peut etre qualifiée comme telle que si elle affecte la fonction de cout d’au moins
un agent économique. Ce n’est pas le cout pour l’environnement. Internaliser les externalités
environnementales ne suppose pas de restaurer l’environnement ou de compenser completement les
atteintes qui lui sont causées. La taxe n’est pas reversée a la victime et les revenus qui en sont tirés
ne sont pas affectés a la compensation des victimes (ou des dégats environnementaux). C'est une
approche économique, anthropocentrée (centrée sur l'homme).

Le Théorème de Coase
Ronald Coase (1910-2013), s’est intéressé a l’intersection entre l’économie et le droit (il
était d'ailleurs figure marquante de cette discipline). L'économie du droit traite des
rapports entre économie et droit, de l'impact du cadre institutionnel (normes, regles) sur
les décisions économiques, des fondements économiques des décisions de justice ou de
l'élaboration du droit. C'est un courant qui regroupe des économiste et des juristes. Il
s'intéresse aux externalités, et revient de façon critique dans un article sur la
représentation des externalités chez Pigou. La notion de cout social est remise en
question, il s’agit en fait d’une question de fonction de couts privés, qui implique des
acteurs identifiés. Pour Coase, rien ne justifie de stigmatiser le pollueur ni d’en appeler a
sa responsabilité. C’est un jugement moral, qui ne conduit pas forcément a la solution la
plus efficace d’un point de vue économique. Il n’y a de pollueur que parce qu’il y a un pollué. Si
une externalité entraine un cout pour un agent, son internalisation entraine également un cout pour
un autre agent « Prévenir les dommages causés a B, c’est entrainer des dommages pour A. La
question est en fait de savoir qui des deux agents concernés va être autorisé a causer des
dommages a l’autre. » Probleme de divergence en fonction des couts privés d’acteur identifiés. Le
probleme pourrait ainsi sans autre etre réglé entre les deux firmes (sans nécessiter une intervention
de l’état).Toujours vouloir punir celui qui est a l’origine du probleme n’est pas rationnel au niveau
économique. Selon Coase, si ça ne coute de rien de résoudre des problemes entre deux acteurs, il
est indifférent de leur accorder des droits. En revanche, si couts de transaction il y a, quelle serait la
solution ? Intervention correctrice de l’Etat au nom de l’intéret général difficilement justifiée, il n'y
a pas d’intéret général en jeu, uniquement conflit d’intérets privés. L’intervention de l’Etat est
généralement partisane, certaines nuisances peuvent etre autorisées et entérinées par la loi pour
favoriser l’industrie et le commerce. Rien ne justifie a priori, ni une intervention de l’Etat, ni
d’imputer la responsabilité des externalités au pollueur. Tout dépend des couts de transaction.

Les couts de transaction sont les couts de résolution des situations ou les parties ont des intérets
conflictuels (couts d’information, de définition d’une stratégie, de marchandage, de négociation, de
controle de poursuites judiciaires, couts d’établissement et de mise en œuvre d’un accord...). Selon
Coase, en l’absence de couts de transaction et d’effet revenu, il est indifférent que ce soit l’une ou
l’autre des parties qui paie pour les dommages causés. Il suffit que les droits de propriété des
parties soient bien définis. Les agents peuvent directement en décider entre eux, dans le cadre d’une
négociation bilatérale, sans l’intervention de tiers (Etat). Les solutions contractuelles sont alors les
plus efficaces. En réalité et selon Coase lui-meme, il y a toujours des couts de transaction (une
négociation entre des acteurs affectés par une externalité est toujours couteuse, et ce d’autant plus
qu’ils sont asymétriques en termes de nombre, de pouvoir... et que l’externalité en question est mal
connue). Si on ne peut pas estimer les dommages imputables a l’action d’un agent pour les autres
agents, les couts de transaction sont infinis.
--> Cette proposition est connue sous le nom de Théorème de Coase

Commentaires de la jurisprudence
- Dans le cas Cooke v Forbes, les fumées rejetées par une usine réagissent avec la teinture utilisée
par un fabricant de tapis, ce qui altere la couleur de ces derniers. Le juge a refusé de donner suite a
la demande d’indemnisation du plaignant (la nature de la teinture utilisée serait aussi en cause).
- Dans le cas Bryant v Lefever, la cheminée du plaignant enfume sa maison, a la suite de travaux
entrepris par son voisin (surélévation de la maison et stockage de bois sur le toit) qui empechent la
bonne circulation de l’air. Le juge a donné raison au voisin arguant du fait qu’il n’a fait qu’exercer
son droit.

Théoreme de Coase: si les couts de transaction sont nuls et si les droits de propriété sont bien
définis, il résultera une allocation efficace.

Les conditions de validité du théoreme


La résolution du probleme par négociation bilatérale suppose que les agents puissent répercuter ces
couts sur leurs prix de vente et que le paiement de ces couts n’affecte pas leur position
concurrentielle. Ce qui en pratique implique plutot des externalités entre producteurs (plutot
qu’entre consommateurs ou producteur/consommateur), sans trop d’asymétries de taille ou pouvoir.

Les différences entre Pigou et Coase


PIGOU COASE
Externalité = cout social Externalité = divergence de couts privés
Empeche d’atteindre un optimum social Caractere réciproque de l’externalité -->
(mauvaise allocation des ressources) internaliser une externalité c’est en créer une
nouvelle
Atteinte au bien-etre social
Nécessite une intervention Mieux vaut laisser les agents économiques
au nom de l’intéret général négocier directement entre eux
Taxe correctrice appliquée par l’Etat au Pas de justification d’une intervention de l’Etat
producteur de l’externalité
Principe pollueur-payeur

Différences principales entre Pigou et Coase

 De Pigou : régler les externalités par des taxes a l’auteur de celles-ci

 De Coase : critique du principe de Pigou, et place a des instruments très libéraux


Le Théorème de Coase, référence majeure des politiques de l'environnement
Les problemes environnementaux réels ne remplissent jamais les conditions de validité du
théoreme. Il y a cependant une application tres large de celui-ci dans les politiques
d’environnement: Il faut et il suffit de définir les droits de propriété sur les actifs environnementaux
(polluants, ressources) pour qu’ils soient gérés de façon efficace. L’intervention de l’Etat est limitée
a cette (re)définition initiale des droits. Les montants de compensation versés sont définis par les
agents et donc adaptés a chaque situation (1taxe).

Le Théorème de Coase et les politiques d'environnement


Un élément clé des politiques inspirées du théoreme de Coase est la (re)définition des droits de
propriété. Cette proposition fonde la plupart des politiques environnementales contemporaines
(définition de droits sur les actifs environnementaux + développement des échanges) :
– Marchés de quotas transférables (quotas de peche, de chasse, quotas d’émissions de
différents polluants, émissions de gaz a effet de serre)
– Accords de bioprospection préconisés dans le cadre de la Convention sur la diversité
biologique
– Paiements pour services environnementaux

Les instruments de politique environnementale


Jusqu’a la fin des années 1980, deux grandes familles d’instruments de politique environnementale
étaient distinguées:

1) Des instruments s’inscrivant dans la tradition pigouvienne et mis en place par l’Etat (taxes,
subventions, redevances...)
2) Les instruments dits de marché ou économiques, s’inscrivant dans une tradition Coasienne,
plus libérale (contrats, marchés de droits, etc.)

Les références a Pigou et Coase continuent a structurer le champ des politiques environnementales .
Le théoreme de Coase est la source majeur des politiques environnementales d’aujourd’hui !
Marché de quotas créer de la flexibilité (droit aux entreprises, sans le dépasser, de faire ce qui lui
plait de sa pollution a condition de payer ou de récupérer de l’argent sur un quota non atteint). Il
faut que les problématiques environnementales soient intégrés dans les principes fondamentaux de
l’économie, nécessite un calcul, une approche. A la longue, est-ce efficace ? (réguler la faune par
rapport a l’économie de l’ivoire pour l’éléphant.-> braconnage etc.). Et si autoriser la chasse sous
quotas ne serait pas plus efficace ? exemple pas interdit de tuer un éléphant mais de payer tres cher
(revenu régénérés, qui peuvent etre investis dans les parcs nationaux ).  percevoir les parcs
nationaux non plus comme un probleme mais comme une ressource économique, l’attitude est
modifiée et la conservation favorisée (paradoxal).

--> Quotas de chasse : un des outils des plus performants

Autre outil inspiré par Coase : développement de la propriété privée (ranchs, zoo, reproduction en
captivité), si derriere chaque élément menacé il existe un propriétaire, l’économie des marchés peut
s’y intéresser et prendre en charge la situation.

 Instruments Coasien
(on s’appuie sur le marché pour qu’il prenne en charge la politique environnementale.

 Instruments Pigou
(il faudrait que l’état intervienne sous forme de taxes/subventions/redevances)

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