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Université d’Evry Val d’Essonne Année 2020-2021

Licence Economie et Gestion 1er semestre


Organisation Industrielle, Information et
Incertitude (L3)

Cours de María Eugenia Sanin

Brochure de TDs d’Organisation Industrielle, Information et Incertitude (L3)


TD no 1 : Rappels
Description du document. Ce document propose un rappel des outils élémentaires
de la microéconomie : l’offre, la demande, l’équilibre partiel d’un marché et
l’équilibre de Nash d’un jeu.
Exercice 1 : Demande
1. Soit deux biens y et z dont les prix sont py et pz . Le consommateur dispose d’un budget
exogène m et ses préférences sont décrites par la fonction d’utilité u (y, z) qui vérifie les
hypothèses habituelles.

max u (y, z) s.l.c. m = py y + pz z


y,z

(a) Rappelez la condition d’optimalité des choix du consommateur.


(b) Déterminez la fonction de demande du bien y pour les fonctions d’utilité suivantes :

u (y, z) = bz + ay − y 2 /2
u (y, z) = z α y 1−α

Etudiez ensuite l’influence des paramètres et variables exogènes sur le comportement


de consommation.

2. En gardant les mêmes notations, on s’intéresse maintenant aux choix qualitatifs de consom-
mation.

(a) Donnez des exemples de bien où la consommation est qualitative et non quantitative
comme dans la question précédente. Indiquez aussi un exemple combinant ces deux
dimensions (qualitative et quantitative).
(b) En supposant que la quantité de bien consommée est fixe y = y (pour y = 1 on parle
de consommation unitaire ), sous quelle condition le bien y est-il consommé ? Pour
cette question et les suivantes, les préférences sont décrites par

u (y, z) = bz + ay

(c) On suppose qu’il existe deux types de consommateur se distinguant sur la valeur du
paramètre a, avec ni consommateurs de type ai pour i = 1, 2 et a1 > a2 . Donnez
l’expression de la fonction de demande du marché.
(d) On suppose maintenant que les consommateurs se répartissent sur un continuum
a ∈ [0, a]. La fonction de répartition est uniforme : F (a� ) = a� mesure la quantité
d’individus dont le paramètre a est compris entre 0 et a� et [a − F (a� )] la quantité
d’individus dont le paramètre a est supérieur à a� . Donnez l’expression de la fonction
de demande du marché

Exercice 2 : Offre et équilibre partiel


1. Déterminez la fonction d’offre collective Y s (p) sur un marché en concurrence parfaite avec
Y la quantité totale offerte du bien, p le prix unitaire du bien, ns le nombre d’entreprises
qui ont toutes la même fonction de coût total : CT (y) = ay 2 , avec a > 0 et y > 0 la
production d’une entreprise.
2. Etudiez l’influence de la variable exogène ns et du paramètre a sur la fonction d’offre
collective.

2
3. La fonction de demande collective sur ce marché est donnée par
m
Y d (p) = nd (1 − α)
p

avec 0 < α < 1, nd > 0 le nombre de consommateurs et m > 0 le budget de chaque


consommateur.

(a) Déterminez le prix d’équilibre de ce marché et la quantité échangée.


(b) Etudiez l’influence des variables exogènes et des paramètres sur l’équilibre.

Exercice 3 : Théories des jeux


Jeux sous forme normale.
1. Définir un jeu Γ sous forme normale. Donnez les définitions d’un équilibre de Nash et d’une
issue optimale au sens de Pareto.
2. Calculez les équilibres de Nash (lorsqu’ils existent) des jeux suivants :
J1/J2 G P H/F A S J1/J2 P F
G 1,1 3,0 A 1,2 0,0 P -1,1 1,-1
P 0,3 2,2 S 0,0 2,1 F 1,-1 -1,1
Dilemne du prisonnier Bataille des sexes Matching pennies
3. Déterminez les issues Pareto-optimales.
4. Existe t-il d’autres équilibres (si oui, ne pas les calculer) ?

Jeu d’entrée. Une firme M est en situation de monopole sur un marché. Une autre firme E
peut décider d’entrer (e) ou non (n) sur le marché. Si la firme E décide d’entrer, la firme M peut
alors soit combattre (c), soit laisser-faire (l). Les paiements pour M et pour E sont (0, 3) si E
n’entre pas, (-1,0) si E entre et M combat, et (1, 1) si E entre et M laisse faire. On représente
ce jeu par l’arbre suivant :
✛✘
E
✚✙
e n
✛✘
M (0, 3)
✚✙
l c

(1, 1) (−1, 0)

1. Déterminez l’équilibre par la méthode d’induction à rebours (ou backward induction).

3
2. Représentez alors ce jeu sous sa forme normale et trouvez tous les équilibres de Nash
en stratégies pures. Discutez ces équilibres (vous rappellerez les notions de sous-jeux et
d’équilibre en sous-jeux parfait).

4
TD no 2 : Les modèles de concurrence imparfaite en quantité
Description du document. Ce document porte sur les principaux modèles de
concurrence imparfaite en quantité.
Exercice :
Deux entreprises produisent le même bien de consommation Q. Leur fonction de coût sont
respectivement :
c1 (q1 ) = q1
c2 (q2 ) = 0.5q22
La demande concernant ce bien s’exprime par la relation suivante, où p représente le prix du
bien Q : Q = 6 − p.

Question préliminaire : Rappeler les hypothèses du comportement concurrentiel et calculer


l’équilibre associé dans cette situation.

Partie I Chaque entreprise est supposée connaître la demande globale concernant le bien Q,
et considère que la quantité proposée sur la marché par l’autre entreprise ne dépend pas de ses
propres décision de production.
1. Ecrire le profit de ces deux entreprises et déterminer la fonction de réaction qi = Ri (qj ) de
chaque entreprise i qui exprime sa décision de production qi en fonction de qj . Représenter
graphiquement dans le plan (q1 ; q2 ) ces deux fonctions de réaction, et déterminer l’équilibre.
2. Réécrire la condition du première ordre de l’entreprise i en faisant apparaître l’élasticité-
prix de la demande et la part de marché de l’entreprise i. En déduire une expression
du pouvoir de marché (aussi appelé taux de marge ou indice de Lerner) de l’entreprise
i : Quels sont les déterminants du pouvoir de marché d.une entreprise ? Intuitivement, à
quelle situation correspond la concurrence parfaite ?
3. Quelles critiques peut-on faire à la concurrence de Cournot dans cette version ?
4. Les deux entreprises s.entendent pour maximiser leur profit joint. Quelles quantités produisent-
elles ? Quels sont les profits correspondants ? Comment est partagé le gain par rapport à
l’équilibre de Cournot ? L’entente entre les deux entreprises est-elle stable ?

Partie II On suppose désormais que les deux entreprises n’ont plus des positions symétriques :
l’entreprise 1, dite ”leader“, est en mesure de décider de son offre de produit avant l’autre, plaçant
celle-ci devant le fait accompli et irrévocable.
1. Comment s’appelle cette forme de concurrence ? Quel en est alors l’équilibre ? Comparer
avec les résultats précédents.
2. Qu’on observe t-on si l’entreprise 2 devient ”leader“ ?
3. Quel avantage existe-t-il à être leader ?

2
Questions :
1. Calculez et comparez les indices de Lerner des différents secteurs pour les valeurs de n
reportées1 .

Energie Alimentation Restauration Habillement Livres, quotidien


ε -0,2 -0,29 -0,59 -1,41 -1,47
n
1
2
3
4
5
10
1000

2. Rappelez la définition de l’indice d’Herfindahl-Hirschman (IHH) et montrez que sur un


marché en concurrence oligopolistique il est directement relié à l’élasticité-prix de la consom-
mation et au taux de marge moyen.
3. Calculez et comparez les indices de concentration IHH et C4 sur les marchés suivants :

Marchés s1 s2 s3 s4 s5 s6 s7 s8 s9 s10 H C4
1 60 10 5 5 5 5 5 5 0 0
2 20 20 20 20 0 0 0 0 0 0
3 33,33 33,33 33,33 0 0 0 0 0 0 0
4 49 49 0.25 0,25 0,25 0,25 0,25 0,25 0,25 0,25

4. Dans la tradition SCP, de nombreuses études ont été menées pour estimer l’influence de
la concentration sur le taux de marge à partir d’équations économétriques de ce type :

p−c
= cst + β × (Indice de concentration) + autres variables + résidu
p
Ces études n’ont pas permis d’identifier un impact fort de l’indice sur le taux de marge.
Cela signifie-t-il que la théorie économique n’est pas vérifiée ? Quelle critique peut-on faire
à cette équation économétrique ?

1
Les élasticités prix de la consommation sont issues de P. Picard (1991, Montchrestien).

3
TD no 3 : La libéralisation des services publics : le cas de l’électricité.
Description du document. Ce document reprend un extrait d’une publication de
l’OCDE sur la libéralisation du secteur de l’électricité.
Questions
1. Quelle est la définition du pouvoir de marché retenue ? S’applique-t-elle au modèle de Cournot
(c’est à dire tel que présenté dans le chapitre 3) ?
2. Quelle est la mesure de la concentration d’un marché proposée ? Donnez son expression dans le
cas où les entreprises sont identiques.
3. La courbe d’offre de la figure 1 est-elle continue ? Quelles sont toutes les hypothèses né-
cessaires pour obtenir ce type de courbe d’offre ?
4. Quels sont les avantages et les inconvénients du modèle de Cournot ? (listez-les simplement)
5. Le modèle de Cournot permet-il de rendre compte des points (a), (b) et (c) de la page 91 ?
6. Listez les caractéristiques du marché de l’électricité qui font que l’offre et la demande y
sont ”peu réactives”.
7. Expliquez la notion de contrainte de capacités. Est-elle présente dans le modèle de Cour-
not ?
8. En quoi la prise en compte de cette notion modifie-t-elle la mesure de la concentration ?
9. Dans l’exemple proposé p. 93-94, calculez l’IHH en supposant que toutes les entreprises
produisent à pleine capacité ?
10. Expliquez la notion de demande résiduelle. Est-elle présente dans le modèle de Cournot ?
11. Expliquez comment apparaît un monopole (toujours dans l’exemple p. 93–94) et posez les
équations décrivant son programme et ses contraintes ?
12. Sur la base de la figure 3, que peut-on dire de l’indice IHH ? Listez les autres indices
auxquels il est fait référence dans le texte.
13. Donnez la définition de l’IHHadj Quelle est sa finalité ? Sur la base de la figure 4, que
peut-on dire de cet indice ?
14. Quelles conclusions sont tirées de ces résultats en matière de contrôle des fusions ?
15. En vous plaçant du côté des consommateurs, que pensez-vous de l’argument avancé p.111
sur l’impact limité du pouvoir de marché en raison de l’inélasticité de la demande ?
16. En regardant la structure de l’offre, quels sont les gains collectifs potentiels du pouvoir de
marché ?

2
Unclassified DAFFE/COMP(2003)14
Organisation de Coopération et de Développement Economiques
Organisation for Economic Co-operation and Development 28-Apr-2003
___________________________________________________________________________________________
English/French
DIRECTORATE FOR FINANCIAL, FISCAL AND ENTERPRISE AFFAIRS
COMPETITION COMMITTEE
Unclassified
DAFFE/COMP(2003)14

COMPETITION ISSUES IN THE ELECTRICITY SECTOR


English/French

JT00143391

Document complet disponible sur OLIS dans son format d'origine


Complete document available on OLIS in its original format
DAFFE/COMP(2003)14

FOREWORD

This document comprises proceedings in the original languages of a Roundtable on Competition


issues in the electricity sector which was held by the Working Party n°2 of the Competition Committee in
October 2002.

It is published under the responsibility of the Secretary General of the OECD to bring
information on this topic to the attention of a wider audience.

This compilation is one of a series of publications entitled "Competition Policy Roundtables".

PRÉFACE

Ce document rassemble la documentation dans la langue d'origine dans laquelle elle a été
soumise, relative à une table ronde sur la concurrence dans le secteur de l’électricité, qui s'est tenue en
octobre 2002 dans le cadre du Groupe de Travail n°2 du Comité de la concurrence.

Il est publié sous la responsabilité du Secrétaire général de l'OCDE, afin de porter à la


connaissance d'un large public les éléments d'information qui ont été réunis à cette occasion.

Cette compilation fait partie de la série intitulée "Les tables rondes sur la politique de la
concurrence".

Visit our Internet Site -- Consultez notre site Internet

http://www.oecd.org/competition

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DAFFE/COMP(2003)14

NOTE DE RÉFÉRENCE
Par le Secrétariat

Introduction

Ces dix dernières années, la plupart des pays de l’OCDE ont mis en train une vaste réforme du
secteur de la fourniture d’électricité. L’un des principaux objectifs des différentes réformes engagées était
d’introduire la concurrence – notamment entre les producteurs d’électricité. La concurrence devait,
espérait-on, permettre l’efficience et l’innovation dans ce secteur et favoriser une baisse des prix pour les
consommateurs.

Malgré les effets positifs non négligeables de la réforme du secteur électrique, on a constaté à
l’usage qu’un pouvoir de marché avait tendance à s’exercer sur les marchés de l’électricité libéralisés.
Dans les pays de l’OCDE, de nombreux producteurs détiennent un pouvoir de marché, du moins une partie
du temps, tandis que d’autres exercent un monopole effectif, du moins par moments.

En Californie, par exemple, le pouvoir de marché a progressé à tel point qu’on lui impute 60 pour
cent de la valeur des échanges effectués sur le marché de gros pendant l’été 2000. En conséquence, les
consommateurs californiens ont payé l’électricité environ 4.5 milliards de dollars en trop. Le pouvoir de
marché entraîne par ailleurs des inefficacités productives considérables, dans la mesure où une production
à faible coût est remplacée par une production à coût élevé et que des producteurs dont le fonctionnement
coûte cher sont encouragés à entrer sur le marché.

Dans le présent document, nous examinons les raisons qui font que les marchés de l’électricité
libéralisés sont enclins à exercer un pouvoir de marché et les mesures qui pourraient être prises à cet égard.
Les principaux points abordés sont les suivants :

• On fait souvent observer que les marchés de l’électricité présentent plusieurs caractéristiques
de base qui facilitent l’exercice d’un pouvoir de marché, notamment que l’électricité ne peut
être stockée (ce qui signifie que les marchés de l’électricité doivent être définis en fonction
du moment où intervient la livraison), que les producteurs font face à des contraintes de
capacité (de sorte que l’offre est inélastique en période de pointe), que la demande
d’électricité est très peu élastique (étant donné que la plupart des consommateurs finals paient
des prix correspondant à une moyenne dans le temps) et que le réseau de transport peut être
congestionné (ce qui a pour effet de séparer les marchés de l’électricité sur le plan
géographique).

• On a déjà pu se faire une idée du pouvoir de marché qui s’exerce sur les marchés de
l’électricité en utilisant des formalisations poussées, mais on peut également avoir recours à
un modèle de Cournot simple. Dans un modèle de Cournot simple, le pouvoir de marché est
fonction de la concentration du marché et de l’élasticité de la demande uniquement, et non du
niveau de la demande. Toutefois, lorsque les entreprises de production font face à des
contraintes de capacité liées à l’augmentation de la demande, certaines d’entre elles
deviennent soumises à des contraintes et ne peuvent par conséquent pas discipliner le pouvoir
de marché des entreprises sans contraintes. Pendant les périodes de pointe, les quelques

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entreprises sans contraintes qui restent sont susceptibles d’exercer un pouvoir de marché
significatif.

• La mesure conventionnelle de la concentration sur un marché économique est l’indice de


Herfindahl-Hirschman. Cette mesure n’est malheureusement pas précise sur les marchés où
existent des contraintes de capacité. Un marché en apparence très concurrentiel lorsqu’on se
fonde sur des mesures conventionnelles de la concentration peut, de fait, être exposé à un
pouvoir de marché significatif. Le présent document introduit une autre mesure de la
concentration appelée « indice de Herfindahl-Hirschman ajusté », qui reflète correctement le
degré de pouvoir de marché exercé sur un marché où certaines entreprises font face à des
contraintes de capacité.

• L’exercice d’un pouvoir de marché, sur les marchés de l’électricité, n’est pas nécessairement
limité aux périodes de pointe. De fait, il est possible que le pouvoir de marché se manifeste
seulement en période creuse. Par exemple, si un gros producteur à faible coût rivalise seul
avec un petit nombre de producteurs à coût élevé, le pouvoir de marché sera observé
seulement en période creuse. Le pouvoir de marché qui se manifeste seulement en période de
pointe n’est pas nécessairement affaibli par l’arrivée de nouveaux concurrents. Si l’électricité
produite par ces derniers coûte plus cher que l’électricité produite en base (par exemple, si les
possibilités de nouvelles centrales hydroélectriques ou nucléaires sont épuisées), le pouvoir
de marché qui est momentané (mais récurrent) n’est pas nécessairement entamé par un
nouvel entrant, si faibles que soient ses charges fixes.

• Le pouvoir de marché peut aussi découler de la congestion du réseau de transport. La


congestion tend à isoler les producteurs sur le plan géographique, ce qui accentue le pouvoir
de marché. Les contraintes de réseau de transport exercent sur les producteurs des effets
analogues à ceux des contraintes de capacité. En présence de contraintes de transport, l’indice
de Herfindahl-Hirschman classique ne fournit pas une mesure précise de la concentration et
doit être remplacé par l’indice de Herfindahl-Hirschman ajusté. Les « droits financiers de
transport » – le droit à une part des rentes de congestion engendrées par les contraintes de
transport – peuvent renforcer le pouvoir de marché des producteurs qui tirent profit de la
congestion.

• Comme par le passé, la congestion des réseaux de transport n’est pas nécessairement limitée
aux périodes de pointe. Elle peut également se produire en période creuse. Les transits
d’électricité sur les liaisons de transport sont fonction des écarts de prix entre des zones
géographiques. Si la demande varie davantage dans une zone que dans une autre, les transits
d’électricité sur une liaison de transport peuvent changer de direction entre les périodes de
pointe et les périodes creuses et n’être contraints que pendant les périodes creuses.

• Dans les réseaux électriques comportant plus d’un chemin entre le point de production et le
point de consommation, l’électricité circule sur toutes les liaisons possibles en quantité
inversement proportionnelle à la résistance de la liaison. L’augmentation de la production à
un point, même si elle s’accompagne d’une augmentation de la consommation à un autre
point, peut affecter les transits d’électricité (et le degré de congestion) sur toutes les autres
liaisons du réseau. On peut établir que même en l’absence de contraintes de capacité sur les
liaisons de transport entre les producteurs et les consommateurs, des contraintes de capacité
existant sur d’autres liaisons peuvent conférer à un producteur un fort pouvoir de marché.

• De nombreuses études ont été réalisées sur le pouvoir de marché et la concentration sur les
marchés de gros de l’électricité, en particulier au Royaume-Uni et en Californie. Il existe de

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bonnes raisons de croire que certains producteurs ont exercé un pouvoir de marché par le
passé. En Californie, même si les coûts ont considérablement augmenté pendant la période
comprise entre l’été 1998 et l’été 2000, le pouvoir de marché s’est accru plus rapidement
encore, le total des paiements versés aux producteurs étant passé de 1.7 milliard de dollars en
1998 à plus de 9 milliards en 2000.

• De nombreuses politiques différentes ont été proposées pour contrôler le pouvoir de marché
observé sur les marchés de la production d’électricité. Il s’agissant notamment de politiques
visant à élargir l’étendue géographique des marchés, de politiques structurelles, de politiques
de contrôle des prix et de politiques ayant pour but d’accroître l’élasticité de la demande.
L’étendue géographique des marchés peut être élargie par la construction de nouvelles
liaisons de transport, l’augmentation de la capacité des liaisons existantes ou l’amélioration
des modes de tarification de l’accès au réseau de transport. Il reste à traiter l’important
problème posé par la recherche de moyens adaptés pour stimuler la modernisation du réseau
de transport. Il n’est peut-être pas possible d’en laisser l’initiative aux forces du marché –
compte tenu du fait, par exemple, qu’une liaison de transport peut être économiquement
justifiée même s’il n’y circule jamais d’électricité.

• Les politiques structurelles peuvent atténuer le pouvoir de marché en réduisant la


concentration et la part de marché de producteurs sans contraintes. Il faudrait en particulier
examiner attentivement la déconcentration des centrales qui utilisent le même combustible,
étant donné qu’elles ont tendance à se regrouper dans le classement par ordre de coûts
croissants et, par conséquent, à se concurrencer de près. Il faudrait également se pencher sur
l’opportunité de séparer la production du transport, pour supprimer les mécanismes qui
favorisent la discrimination en matière d’accès au transport et réduire ceux qui encouragent
les producteurs à pratiquer le retrait de capacité dans le but d’accroître leur pouvoir de
marché.

• De nombreux observateurs ont souligné l’importance qu’il y a à accroître l’élasticité de la


demande. Dans les modèles simples de pouvoir de marché, le doublement de l’élasticité de la
demande équivaut au doublement du nombre de concurrents actifs sur un marché. L’élasticité
de la demande peut être accrue par une plus grande participation des consommateurs sur les
marchés de l’électricité et l’utilisation plus répandue des compteurs horo-saisonniers. Sur
certains marchés de l’électricité libéralisés, la participation des acheteurs n’était pas
envisageable – la demande était évaluée en tant que quantité fixe simple, insensible au prix.
Les acheteurs d’électricité devraient avoir la possibilité de faire des offres sur le pool de
l’électricité de façon à signaler leur intention de restreindre leur demande en période de
pointe.

• Enfin, lorsque le pouvoir de marché persiste sans qu’on ne parvienne à l’affaiblir par d’autres
politiques, il faut étudier la possibilité d’instituer des mesures de contrôle du prix ou de la
quantité. Comme les conditions de l’offre et de la demande fluctuent beaucoup à tout instant,
le contrôle du prix de la production d’électricité est ardu, bien qu’il ne soit pas
nécessairement irréalisable. Parmi les approches possibles, citons la mise en place d’une
tarification de type « price cap » applicable aux prix demandés pendant les périodes de
pointe, ou l’imposition de limites d’écart entre les prix demandés par les différents groupes.

Le présent document comporte trois parties. La première partie passe en revue certains des
principes de mesure du pouvoir de marché sur les marchés souffrant de contraintes de capacité et examine
les principales caractéristiques des marchés de l’électricité qui favorisent le pouvoir de marché. La
deuxième partie s’intéresse davantage à la façon dont le pouvoir de marché s’exerce sur le marché de

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l’électricité et formule plusieurs observations sur les conditions dans lesquelles il est susceptible de se
manifester, sur la façon dont il convient de le mesurer, de même que sur ses effets. La troisième partie
examine les avantages et les inconvénients des politiques visant à modérer le pouvoir de marché.1

Généralités : la théorie du pouvoir de marché et les caractéristiques des marchés de l’électricité

Avant de s’intéresser aux marchés de l’électricité, il convient de passer en revue certains


principes de base qui régissent l’évaluation et la mesure du pouvoir de marché, notamment sur les marchés
qui présentent des contraintes de capacité.

Examen de la théorie du pouvoir de marché

Une entreprise est réputée détenir un pouvoir de marché lorsqu’elle peut, en réduisant sa
production ou en augmentant le prix minimum auquel elle est disposée à la vendre, accroître ses bénéfices
en faisant monter le prix du marché. L’entreprise qui ne peut pas influencer le prix du marché est preneuse
de prix. Une entreprise preneuse de prix continue de produire et de vendre sa production tant que le prix du
marché dépasse le coût marginal de production de la dernière unité de production. Sur un marché où tous
les producteurs sont des preneurs de prix (autrement dit, où ne s’exerce aucun pouvoir de marché), le coût
marginal de toutes les entreprises présentes sur le marché est égal au prix du marché.2

C’est pourquoi l’ampleur de l’écart entre le prix du marché et le coût marginal assumé par une
entreprise peut constituer un indicateur permettant de détecter et de mesurer le pouvoir de marché.
L’« indice de Lerner » est une mesure courante de l’écart entre le prix et le coût marginal. Il exprime
simplement la marge en pourcentage comprise dans le prix final par rapport au coût marginal – autrement
dit, en supposant un prix final P et un coût marginal c, l’indice de Lerner s’établit comme suit :

P−c
P

On peut aisément montrer (voir annexe B) que sur un marché où les entreprises rivalisent en
quantité, la taille de la marge prix-coût (l’indice de Lerner) est obtenue par une mesure de la concentration
appelée indice de Herfindahl-Hirschman, divisée par l’élasticité de la demande. Autrement dit :

P − c IHH
= …(1)
P ε
où IHH est la somme des carrés des parts de marché des différentes entreprises qui rivalisent sur le marché
N

s
2
( IHH = i où s i est la part de marché de la ième entreprise), ε l’élasticité de la courbe de la
i =1
demande au prix et à la quantité d’équilibre et c une moyenne pondérée du coût marginal de chaque
producteur à la quantité d’équilibre.3

L’équation (1) met en évidence l’importance de l’élasticité de la courbe de la demande pour la


détermination de l’effet du pouvoir de marché sur le prix. Toutes choses égales par ailleurs, une réduction
de moitié de l’élasticité de la demande a le même effet que le doublement de la concentration sur le marché
(c’est-à-dire la réduction de moitié du nombre de concurrents). En supposant un degré constant de
concentration sur un marché, le pouvoir de marché est beaucoup plus grand sur les marchés où l’élasticité
de la demande est faible.

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DAFFE/COMP(2003)14

On verra plus loin qu’une des caractéristiques principales des marchés de production d’électricité
est que les différentes entreprises sont soumises à des contraintes de capacité. Par souci de simplicité,
supposons que chaque groupe assume un coût marginal constant pour tous les niveaux de production en
dessous de sa capacité. De fait, la courbe de coût marginal a la forme d’un « L » inversé.

La courbe de l’offre sur le marché peut être formée à partir des courbes de coût marginal des
différents groupes classés par ordre de coûts marginaux croissants et l’addition horizontale subséquente des
courbes de coût marginal. Ce calcul est illustré dans le diagramme ci-après.4

La figure 1 illustre une situation dans laquelle sont présents quatre groupes, le premier ayant un
coût marginal de 10 dollars le MW et une capacité de 100 MW, le deuxième et le troisième un coût
marginal de 15 dollars le MW et une capacité de 60 MW, et le quatrième un coût marginal de 30 dollars le
MW et une capacité de 80 MW. Cet « ordre de coûts marginaux croissants » détermine la courbe de l’offre
du secteur. Dans un marché parfaitement concurrentiel, le prix du marché se situerait à l’intersection de la
courbe de la demande et de la courbe de l’offre, comme l’illustre la figure 1.

Figure 1 : Demande et offre sur un marché ayant des contraintes de capacité

Prix, Courbe de la
coût demande
marginal

$30 Courbe de
l’offre
$25

$15

$10

MW
100 220 300

On peut avoir recours à l’indice de Lerner pour mesurer le pouvoir de marché sur les marchés
ayant des contraintes de capacité, à une importante réserve près. Sur un marché où les entreprises ont des
contraintes de capacité, le prix du marché peut dépasser le coût marginal de n’importe quelle entreprise
donnée sans que l’on observe pour autant un pouvoir de marché, lorsque toutes les entreprises présentes sur
le marché fonctionnent à pleine capacité et qu’aucune autre entreprise dont le coût marginal est inférieur au
prix du marché n’entend accéder au marché. Cette situation est illustrée à la figure 1. Dans cette figure,
l’intersection de la courbe de la demande et de la courbe de l’offre se situe à 25 dollars le MW, montant
supérieur au coût marginal assumé par toutes les entreprises actives sur le marché, sans que cela n’entraîne
de pouvoir de marché.5

Fait important, comme on le verra ci-après, la relation entre l’indice de Lerner, l’élasticité et
l’indice de Herfindahl-Hirschman ne s’applique plus sur des marchés présentant des contraintes de
capacité. Par conséquent, l’utilisation de l’indice de Herfindahl-Hirschman pour ces marchés peut donner
des résultats très trompeurs. La section suivante propose une autre façon de mesurer la concentration qui
reflète avec précision le pouvoir de marché qui s’exerce sur ce type de marchés.

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Nous utilisons dans le présent document le modèle de pouvoir de marché de Cournot (autrement
dit, nous supposons que les entreprises se concurrencent en quantité). Le modèle de Cournot nécessite un
calcul simple et donne des résultats justifiés intuitivement. Il convient cependant de ne pas perdre de vue
que le modèle de Cournot peut surévaluer ou sous-évaluer le degré réel de pouvoir de marché. La
surévaluation du pouvoir de marché s’explique par le fait que le modèle de Cournot ne tient pas compte
des possibilités d’entrée, et sa sous-évaluation, par celui qu’il fait abstraction d’un éventuel comportement
collusoire. En outre, sur la plupart des marchés de gros de l’électricité, les entreprises ne font pas des
enchères sur des quantités spécifiques mais sur une fonction d’offre complète – c’est-à-dire sur la quantité
qu’elles sont disposées à fournir pour chaque prix. Un équilibre des fonctions d’offre aboutit à une
évaluation du pouvoir de marché inférieure à celle d’un équilibre de Cournot. De fait, il semble qu’un
équilibre de la fonction d’offre aboutisse à une concurrence au sens de Bertrand lorsqu’il y a une
importante capacité excédentaire sur le marché, et à une concurrence à la Cournot lorsque la capacité
excédentaire est limitée. L’encadré qui suit examine les avantages et les inconvénients d’un équilibre à la
Cournot et d’un équilibre de la fonction d’offre.

Concurrence selon la fonction d’offre et concurrence à la Cournot


« La concurrence à la Cournot ne rend pas entièrement compte des options qui s’offrent aux entreprises sur un marché
de l’électricité. Les producteurs ne sont pas obligés de faire des enchères sur les quantités sur un marché spot mais
sont, en fait, libres de faire des enchères sur n’importe quelle courbe d’offre, les enchères sur les quantités
correspondant au cas particulier d’une courbe d’offre verticale. Cependant, l’évaluation de l’équilibre statique de
Cournot sur le marché de l’électricité ne donne qu’une indication approximative du comportement concurrentiel si les
entreprises font face à une faible incertitude de la demande. En l’absence d’incertitude, on observe que parmi les
nombreux équilibres de Nash possibles, celui produit par les enchères sur les quantités (stratégie de Cournot) est le
plus rentable. Par conséquent, en l’absence d’incertitude et si l’on dispose d’information sur les coûts, l’évaluation de
la marge prix-coût selon le modèle de Cournot pourrait remplacer un indice structurel comme celui de Herfindahl-
Hirschman.
Il en va autrement sur un marché où la demande est incertaine. Un producteur y est confronté à de nombreux niveaux
possibles de demande, même lorsqu’il connaît les niveaux de production de son concurrent. Les entreprises
s’engagent alors dans une concurrence axée sur la courbe de l’offre. Ce problème a été analysé par Klemperer et
Meyer (1989) dans un contexte général. Dans le cas d’une concurrence axée sur la courbe de l’offre, il est rentable
pour les entreprises de s’éloigner de l’équilibre de Cournot pour aller vers un équilibre de Nash, qui se définit en
terme de courbes d’offre ascendantes (mais non verticales). Les fournisseurs ne font pas des enchères sur des
quantités simples comme le spécifie le modèle de Cournot. On aboutit alors à des marges prix-coût inférieures à
celles que l’on obtient dans une concurrence à la Cournot. L’introduction de l’incertitude de la demande atténue par
conséquent les effets du pouvoir de marché.6

« Le modèle de la fonction d’offre (…) présente certaines faiblesses qui pourraient limiter son utilité lorsqu’il est
appliqué à certains marchés de l’électricité. Sur certains marchés, les échanges ne s’effectuent pas exclusivement ni
même principalement par le biais d’un processus d’enchères portant sur la fonction d’offre. L’échange bilatéral de
quantités spécifiées est répandu dans de nombreux marchés restructurés à l’échelle mondiale, comme les marchés à
terme et différentes formes de marchés spot. (…) L’approche selon la fonction d’offre ne convient pas non plus aux
marchés sur lesquels la capacité d’une frange concurrentielle peut être limitée par des contraintes de production ou de
transport. Globalement, l’approche selon la fonction d’offre réalise une meilleure approximation d’un aspect
important de nombreux marchés de l’électricité que l’approche de Cournot mais n’est pas aussi souple que cette
dernière pour ce qui est d’incorporer d’autres aspects institutionnels de ces marchés. L’approche selon la fonction
d’offre produit enfin des équilibres multiples dont la diversité augmente lorsque diminue l’incertitude de la demande.
L’équilibre de Cournot représente une borne supérieure des équilibres selon la fonction d’offre, est en général plus
facile à calculer, et constitue peut-être, à cet égard, le meilleur moyen de mesurer l’existence potentielle d’un pouvoir
de marché. »7

90
DAFFE/COMP(2003)14

Caractéristiques des marchés de l’électricité qui facilitent l’exercice d’un pouvoir de marché

On a vu qu’une entreprise est à même d’exercer un pouvoir de marché lorsqu’elle peut, en


augmentant son prix ou en diminuant la quantité de son produit, influencer le prix du marché. Sur la
plupart des marchés, la capacité qu’a une entreprise d’augmenter son prix ou de diminuer sa production
d’un service particulier à un lieu et à un moment donné est limitée par :

(a) la réaction des consommateurs, qui peuvent réduire leur consommation du service en
question ou modifier les moments et les lieux de consommation, ou consommer d’autres
services ;

(b) la réaction d’autres entreprises déjà présentes sur le marché, qui peuvent accroître leur
propre production à la suite de l’augmentation du prix ou de la réduction de la production
d’une autre entreprise ;

(c) la réaction d’autres entreprises qui ne produisent pas encore sur le marché et qui y entrent à
la suite d’une augmentation du prix ou d’une diminution de la production d’une entreprise
existante.

Chacune des contraintes énumérées ci-dessus a un effet limité sur le marché de l’électricité pour
les raisons suivantes :

• Premièrement, le stockage de l’électricité coûte cher. « Les techniques de stockage – par


exemple, par pompage d’eau en amont afin de constituer des réserves d’énergie
hydroélectrique ou sur des batteries – sont très peu efficaces »8. Etant donné que l’électricité
ne peut être stockée facilement, il existe un marché distinct pour chaque moment de livraison.
Le prix des marchandises qui peuvent être stockées a tendance à s’uniformiser avec le temps
étant donné que les entrepreneurs les achètent lorsque le prix est bas et les revendent lorsque
le prix est élevé. Comme l’électricité ne peut être stockée, les marchés de l’électricité ont
tendance à être plus instables que d’autres marchés de ressources énergétiques, par exemple
ceux de l’essence. Nous verrons que même s’il existe une vive concurrence entre les
producteurs à certains moments, la concurrence est parfois considérablement limitée
(notamment pendant les périodes de forte consommation).

• Deuxièmement, le transport de l’électricité coûte cher par moments – en particulier lorsque le


réseau de transport est congestionné. Dans ce cas, les marchés de la production sont séparés
géographiquement, ce qui réduit le nombre de concurrents potentiels et peut accroître le
pouvoir de marché. En outre, le degré de congestion est à la fois fonction du niveau de la
demande et des décisions stratégiques prises par les entreprises de production elles-mêmes.

• Troisièmement, l’élasticité de la demande d’électricité est très faible. Très peu de


consommateurs paient un prix correspondant aux variations du prix du marché du « pool » ou
de la « bourse » de l’électricité. Par conséquent, la chute de la demande qui résulte d’une
augmentation du prix du marché est négligeable. « La plupart des consommateurs finals
d’électricité ne disposent pour ainsi dire d’aucun moyen technique d’observer les prix en
temps réel et encore moins d’y réagir. La demande est pratiquement inélastique à court
terme ».9 On a vu que l’inélasticité de la demande facilite beaucoup l’exercice d’un pouvoir
de marché en limitant la réduction de la demande des consommateurs à la suite d’une hausse
de prix.

91
DAFFE/COMP(2003)14

• Quatrièmement, les producteurs font face à des contraintes de production évidentes. « Les
groupes ont de fortes contraintes de capacité qui font augmenter considérablement le coût
marginal au-delà d’un certain seuil de production ».10 Si les autres entreprises présentes sur
le marché souffrent de contraintes de capacité, elles sont incapables d’augmenter leur
production à la suite d’une hausse de prix – le pouvoir de marché des entreprises restantes qui
n’ont pas de contraintes peut donc être substantiel.

• Cinquièmement, l’électricité est un bien homogène vendu dans le cadre d’enchères répétées
sur des marchés comportant un nombre limité d’acteurs qui connaissent les coûts assumés par
leurs partenaires et peuvent apprendre rapidement à réagir au comportement des autres, ce qui
facilite les pratiques collusives.

En outre, il se peut que des caractéristiques particulières du mode d’organisation des marchés de
l’électricité contribuent à faciliter davantage le pouvoir de marché, comme c’est le cas, par exemple, des
marchés où se négocient des primes de capacité ou une capacité de production de réserve. Ces marchés
peuvent eux-mêmes se prêter aux manipulations stratégiques des entreprises qui y sont présentes.11

Borenstein et Bushnell résument comme suit les caractéristiques des marchés de l’électricité :

« Sur la plupart des marchés, il existe d’autres contraintes qui empêchent une entreprise donnée
représentant un assez faible pourcentage de la production de procéder à des hausses de prix
substantielles. Si le produit peut être stocké, les acheteurs, ou les intermédiaires qui le commercialisent,
peuvent le stocker pour être moins vulnérables aux hausses de prix. Si les consommateurs finals
reçoivent des informations sur les prix avant d’acheter, leur hésitation à payer des prix excessifs
dissuade le vendeur de pratiquer de tels prix. Si l’offre est élastique, l’entreprise qui demande un prix
élevé pour sa production provoque simplement un déplacement de part de marché vers un autre
fournisseur. Chacune de ces caractéristiques est beaucoup moins présente sur les marchés du secteur
électrique que sur ceux de la plupart des autres secteurs. Les entreprises qui détiennent des parts de
marché, si modestes soient-elles, sont par conséquent davantage en mesure d’exercer un pouvoir de
marché dans ce secteur que dans la plupart des autres secteurs ».12

Observations sur le pouvoir de marché sur les marchés de la production d’électricité

Examinons de façon plus détaillée comment le pouvoir de marché naît sur les marchés de
l’électricité, son impact ainsi que la façon dont il doit être mesuré. Pour simplifier, prenons le cas d’un
marché de l’électricité en faisant abstraction de la composante transport – et supposons que la totalité de la
production et de la consommation interviennent au même endroit. Nous pourrons de la sorte nous attacher
exclusivement aux effets des contraintes de capacité sur les producteurs. Nous réintroduirons ensuite la
composante transport afin d’étudier l’effet des contraintes de transport.

Nous avons vu que les prédictions des modèles économiques en ce qui a trait au degré de pouvoir
de marché qui se manifeste sur les marchés de gros de l’électricité sont liées à la nature de l’interaction
stratégique qui existe entre les entreprises productrices. On peut toutefois faire valoir que, du moins en
période de pointe, une certaine forme de pouvoir de marché doit exister, quel que soit le type de
concurrence que se livrent les producteurs.

Prenons l’exemple d’un marché sur lequel la production est soumise à des contraintes de
capacité, où la demande d’électricité n’est pas élastique, et où le niveau de la demande est suffisamment
élevé pour faire en sorte que si un producteur cesse de produire, les autres producteurs ne peuvent
compenser eux-mêmes la production manquante. Si l’inélasticité de la demande est suffisante, un
producteur, si petite que soit sa taille, pourrait hausser significativement le prix du marché en réduisant sa

92
DAFFE/COMP(2003)14

production. De fait, si la demande est parfaitement inélastique, cette entreprise pourrait facturer le prix de
son choix. Borenstein et Bushnell résument cet argument intuitif comme suit :

« Imaginez un pénible après-midi d’été où la température et l’humidité ont atteint des niveaux record et
où presque toutes les centrales du réseau doivent tourner afin de répondre à la demande extraordinaire
d’électricité nécessaire pour faire fonctionner les appareils de climatisation. Si le réseau n’a qu’un faible
pourcentage de marge de capacité de production de réserve et qu’un producteur fournit plus qu’un
faible pourcentage de la production totale, ce producteur joue un rôle essentiel dans la satisfaction de la
demande. Autrement dit, il peut demander un prix très élevé pour livrer l’électricité… et les
consommateurs paieront ce prix. » 13
Cela n’implique pas pour autant que le degré de pouvoir de marché augmente avec la demande.
L’augmentation du degré de pouvoir de marché, en période de pointe, dépend de la nature de la
concurrence entre les entreprises. Si elles se concurrencent en quantité (c’est-à-dire à la Cournot), quel que
soit le nombre de producteurs identiques, et en supposant une élasticité constante de la demande, le
pouvoir de marché est constant, peu importe le niveau de la demande, même lorsque la quasi-totalité de la
capacité du marché est épuisée.

C’est ce que démontre l’équation (1). Sur un marché comportant des producteurs de taille
identique, le niveau de production est le même pour tous les producteurs. Tous ces producteurs sont donc
soit soumis à des contraintes, soit exempts de contraintes. Tant que dure l’absence de contraintes, le degré
de pouvoir de marché est obtenu à l’aide de l’équation (1). Lorsque tous les producteurs atteignent le
même niveau de production, l’indice de Herfindahl-Hirschman (IHH) est la réciproque exacte du nombre
d’entreprises, de sorte que le pouvoir de marché est égal à IHH / ε = 1 / nε , peu importe le niveau de la
demande.

L’annexe B montre que ce résultat est vrai même lorsque les entreprises ne sont pas de taille
identique – tant que l’élasticité de la demande demeure constante et que les entreprises n’ont pas de
contrainte de capacité, l’augmentation de la demande est sans effet sur le prix.

Par ailleurs, si les producteurs ne sont pas de même taille (et se concurrencent à la Cournot), le
pouvoir de marché augmente avec la demande. Plus la demande augmente, plus le nombre de producteurs
qui fonctionnent à pleine capacité croît, et moins ceux-ci sont en mesure de discipliner les autres acteurs du
marché. Au point limite, il ne restera qu’un seul producteur (le plus gros). Ce dernier producteur sans
contrainte détient un monopole effectif sur la demande résiduelle sur le marché. Le FTC des Etats-Unis
résume ce cas de figure :

« Comment la participation de fournisseurs qui ne représentent qu’une petite fraction de la capacité


peut-elle affecter le prix du marché de l’électricité ? Cela tient à la manière dont s’effectue le
dispatching des centrales électriques. Les centrales électriques ont en général des fonctions de coûts très
uniformes jusqu’à ce qu’elles atteignent leur pleine capacité. Elles fonctionnent par conséquent au
maximum de leur capacité si elles sont économiquement en mesure de le faire au prix courant. Sinon,
elles tournent au ralenti. Par conséquent, la plupart des centrales électriques qui produisent de
l’électricité, pendant une période donnée, ne sont pour ainsi dire pas en mesure d’accroître leur
production et de contrebalancer un comportement anticoncurrentiel ».14
C’est ce qu’illustre le diagramme suivant : il s’agit d’un marché dont la courbe de la demande a
une élasticité constante égale à 0.2. On compte 51 producteurs ayant tous un coût marginal identique de 10
dollars le MW. Sur ce nombre, 50 sont de petits producteurs ayant une capacité totale de 20 MW. Le
cinquante et unième producteur est un gros producteur et a une capacité de production de 500 MW.
(Supposons que ce producteur est né de fusions antérieures effectuées par 25 petits producteurs). Ces

93
DAFFE/COMP(2003)14

producteurs sont réputés se concurrencer en quantité produite (autrement dit, on recherchera l’équilibre
classique de Cournot.)

La figure 2 illustre le profil d’évolution du prix du marché à mesure que la demande augmente.
Lorsque les niveaux de la demande sont bas, les petits producteurs n’ont pas de contraintes de capacité et le
prix reste voisin du prix du marché efficace, soit 10 dollars le MW. Lorsque la demande (en supposant que
le prix soit de 10 dollars le MW) dépasse les 1000 unités, les petits producteurs ont une contrainte de
capacité et le gros producteur détient un monopole effectif sur la demande résiduelle. Ce producteur
n’accroît pas sa production aussi rapidement que la demande augmente, ce qui conduit à une hausse du
prix du marché. Notons que sur un marché parfaitement concurrentiel, une demande supérieure à 1500
MW, lorsque le prix est de 10 dollars le MW, entraînerait des contraintes pour tous les producteurs. Par
conséquent, le prix efficace (le prix en vigueur sur un marché concurrentiel) dépasse le coût marginal de 10
dollars.

Figure 2 : Pouvoir de marché en période de pointe sur un marché comportant des


producteurs de tailles différentes

200

180

160
Le prix du marché
140
dépasse le niveau de
120 prix efficace.
Prix ($)

100
Quand la demande est
80
inférieure à 1000 unités, le
60 prix du marché est proche du
prix efficace.
40

20 Prix efficace
0
0 500 1000 1500 2000 2500

Indice de la demande

Lorsque, sur un marché, certaines entreprises fonctionnent à pleine capacité, elles ne peuvent plus
augmenter leur production lorsqu’une autre entreprise diminue la sienne. Dans une certaine mesure, ces
entreprises se retrouvent « hors marché ». Les autres entreprises présentes sur ce marché qui fonctionnent
sans contraintes sont, de fait, en concurrence sur un marché séparé, à cette différence que la demande, sur
ce marché « séparé », est réduite d’une quantité égale à la production de toutes les entreprises ayant des
contraintes de capacité (c’est ce que l’on appelle la demande « résiduelle. »)

Notons que cela signifie entre autres que lorsque certaines entreprises ont des contraintes de
capacité, le marché doit être défini non seulement en fonction du moment et du lieu où l’électricité est
vendue, mais aussi du niveau de la demande. Le marché peut être très concurrentiel à certains niveaux de
demande et très peu à d’autres.

94
DAFFE/COMP(2003)14

Cette réflexion peut se résumer ainsi :

Observation n° 1 : Lorsque des entreprises de production d’électricité n’ont pas la même capacité, un
accroissement de la demande peut entraîner une augmentation du nombre d’entreprises qui
fonctionnent à pleine capacité et intensifier le pouvoir de marché, même si toutes les entreprises
assument le même coût marginal et que l’élasticité de la demande demeure constante.

Mesures du pouvoir de marché et de la concentration

On a vu que sur un marché sans contraintes de capacité, le degré de pouvoir de marché peut être
relié à la concentration qui existe sur ce marché selon l’équation suivante.

P − c IHH
=
P ε
où IHH est la somme des carrés des parts de marché des différentes entreprises qui sont en concurrence sur
N

s
2
le marché ( IHH = i où s i la part de marché de la ième entreprise) et ε l’élasticité de la courbe de la
i =1
demande au prix et à la quantité d’équilibre.

Cependant, comme on l’a déjà noté, le recours à l’indice de Herfindahl-Hirschman pour évaluer
la concentration sur un marché ayant des contraintes de capacité peut aboutir à des résultats très trompeurs.

On peut aisément le constater en reprenant l’exemple du marché illustré à la figure 2 ci-dessus.


Dans cet exemple, il y a 50 petites entreprises et une grande. Comme le montre la figure 3, le marché n’est
pas très concentré – l’indice de Herfindahl-Hirschman ne dépasse jamais 500 – et se situe largement en
dessous du seuil (quelque peu arbitraire) de 1000 fixé par le Department of Justice des Etats-Unis pour
qu’un marché soit considéré comme concurrentiel. Cependant, comme le montre la figure 3, la marge prix-
coût approche les 90 pour cent du prix du marché, ce qui suppose des niveaux de concurrence relativement
bas.

95
DAFFE/COMP(2003)14

Figure 3 : Concentration et marge prix-coût

100 2000
90 1800
80 1600
Marge prix-coût (%)

70 Marge prix-coût 1400


60 (axe gauche) 1200

IHH
50 1000
40 800
IHH (axe droit)
30 600
20 400
10 200
0 0
400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000 2200
Indice de la demande

Les autres mesures de la concentration ne donnent pas de résultats beaucoup plus probants. Ainsi,
la part de marché de la plus grande entreprise ne dépasse jamais les 18 pour cent. Les 50 autres entreprises
ne détiennent que 1 à 2 pour cent du marché chacune. La part de marché attribuée aux quatre premières
entreprises ne dépasse jamais 25 pour cent.

Supposons que ce marché comportait à l’origine 75 petites entreprises identiques (20 MW). Sur
ce nombre, 25 envisagent fusionner. Etant donné que la concentration, après la fusion, serait inférieure à
500 sur l’échelle établie pour l’indice de Herfindahl-Hirschman, ou, en d’autres termes, que le ratio de
concentration des quatre plus grandes entreprises serait inférieur à 25 pour cent, l’autorité de la
concurrence concernée pourrait difficilement empêcher cette fusion. Mais, comme l’indique la figure 2,
l’entreprise née de la fusion peut détenir un pouvoir de marché significatif pendant les périodes de pointe.

Il est évident que l’indice de Herfindahl-Hirschman classique est un indicateur médiocre du


pouvoir de marché sur un marché présentant des contraintes de capacité. Existe-t-il une meilleure méthode
de mesure du pouvoir de marché sur ces marchés ?

L’annexe B montre que la relation entre l’indice de Lerner, l’indice de Herfindahl-Hirschman et


l’élasticité de la demande est toujours valable à la condition d’ajuster la formule de l’indice de Herfindahl-
Hirschman. Plus précisément, on constate que sur les marchés où certaines entreprises ont des contraintes
de capacité,

P − c IHH adj
=
P ε

n
s
IHH adj =  s i ( s i + ) …(2)
i =1 n

96
DAFFE/COMP(2003)14

et où n représente le nombre d’entreprises sans contraintes, s i la part de marché d’une entreprise sans
contraintes (i=1,..n) et s la part de marché combinée de toutes les entreprises soumises à des contraintes.

Pour donner un exemple du calcul de l’indice de Herfindahl-Hirschman ajusté, prenons le marché


déjà illustré aux figures 2 et 3. Lorsque la demande atteint un niveau égal à 1200 unités, les 50 petites
entreprises produisent au maximum de leur capacité de 20 unités de production. La plus grande entreprise
produit 85.6 unités de production. Elle détient par conséquent une part de marché d’environ 7.9 pour cent,
alors que les petites entreprises détiennent chacune une part de marché de 1.8 pour cent. L’indice de
Herfindahl-Hirschman classique aboutirait par conséquent à la concentration du marché suivante :
7.9 2 + 50 × 1.8 2 = 224 .

Par comparaison, étant donné que la part de marché combinée des petites entreprises ayant des
contraintes de capacité est de 92.2 pour cent, l’indice de Herfindahl-Hirschman ajusté se calcule comme
suit : 7.9 × (7.9 + 92.2) = 790 - soit une concentration environ 3.5 fois plus élevée que celle obtenue à
l’aide de l’indice de Herfindahl-Hirschman classique.15

Les différentes façons de calculer l’indice de Herfindahl-Hirschman apparaissent clairement à la


figure 4, qui reprend l’exemple de la figure 3 avec l’indice de Herfindahl-Hirschman ajusté plutôt qu’avec
l’indice de Herfindahl-Hirschman classique. Il ne fait pas de doute que l’indice de Herfindahl-Hirschman
ajusté reflète mieux le degré véritable du pouvoir de marché sur ce marché pour différents niveaux de
demande que ne le fait l’indice de Herfindahl-Hirschman classique. (Il convient de noter que dans ce
graphique, l’échelle de l’indice de Herfindahl-Hirschman a été légèrement décalée pour dissocier les deux
lignes qui autrement se seraient superposées).

Figure 4 : Marge prix-coût et mesure de la concentration selon l’indice ajusté

100 2100
90 1900
80 1700
Marge prix-coût (%)

70 Marge prix-coût 1500


60 (axe gauche) IHH ajusté 1300
(axe droit)
IHH

50 1100
40 IHH classique 900
(axe droit)
30 700
20 500
10 300
0 100
400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000 2200
Indice de la demande

Observation n°2 : Sur un marché où certaines entreprises ont des contraintes de capacité, la mesure de
la concentration au moyen de l’indice de Herfindahl-Hirschman classique donne des résultats imprécis
et il faudrait plutôt recourir à l’ « indice de Herfindahl-Hirschman ajusté » illustré dans l’équation (2).

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DAFFE/COMP(2003)14

Incidences sur les politiques structurelles

Il est intéressant d’examiner certaines des conséquences du recours au concept de l’« indice de
Herfindahl-Hirshman ajusté ». D’abord, il faut noter que chaque fois que la demande atteint un point où il
ne subsiste qu’une seule entreprise sans contraintes, l’indice de Herfindahl-Hirschman ajusté de la
concentration du marché est alors simplement égal à la part de marché de cette entreprise – les parts de
marché détenues par les autres entreprises ne sont pas pertinentes. C’est ce que l’on constate aisément en
examinant la formule de calcul de l’indice de Herfindahl-Hirschman ajusté. S’il n’y a qu’une seule
entreprise sans contraintes, (l’entreprise 1, par exemple) sa part de marché et celle des autres entreprises
totalisent évidemment 100 pour cent - soit s1 + s = 1 , de sorte que :

n
s
IHH adj =  s i ( s i + ) = s1 ( s1 + s ) = s1
i =1 n

Nous pouvons notamment en conclure que toute tentative de réduire le pouvoir de marché
lorsqu’il n’y a qu’une seule entreprise sans contraintes passe obligatoirement par la réduction de la part de
marché de cette entreprise – en recourant sans doute à la cession d’actifs. L’augmentation du nombre
d’entreprises sur le marché ne suffira pas nécessairement à contrer le pouvoir de marché.

Wolak et Patrick (1997) font ressortir le même argument : « L’entrée de nouvelles entreprises sur
le marché [de l’Angleterre et du Pays de Galles] n’aura sans doute à elle seule qu’une influence limitée...
De nombreux producteurs d’électricité indépendants desservent déjà le marché, de sorte qu’on ne saurait se
contenter d’augmenter le nombre de concurrents. Compte tenu du nombre actuel d’entreprises sur le
marché et des règles de marché, il importe, pour limiter le pouvoir de marché, de réduire la taille des plus
grandes entreprises comparativement à l’ensemble des autres entreprises. »16

L’annexe B montre que pour un nombre fixe d’entreprises sans contraintes, l’indice de
Herfindahl-Hirschman ajusté est réduit au minimum lorsque toutes les entreprises sans contraintes ont une
part de marché identique. Cette part de marché doit par conséquent être égale à la part totale des entreprises
1− s
sans contraintes divisée par le nombre d’entreprises sans contraintes . La valeur minimum de l’indice
n
de Herfindahl-Hirschman ajusté est par conséquent :

1− s
IHH adj ≥
n

Cette expression conduit à penser que pour réduire le pouvoir de marché, les responsables de
l’élaboration des politiques devraient porter leur attention sur (a) l’augmentation du nombre d’entreprises
sans contraintes et (b) la réduction de la part de marché des entreprises sans contraintes (ou, ce qui revient
au même, l’accroissement de la part de marché des entreprises ayant des contraintes).

Qu’implique cette analyse pour la politique en matière de fusions ? Soulignons notamment que le
contrôle des concentrations devrait être axé sur les fusions aboutissant à la création d’une entreprise sans
contraintes (la fusion de deux entreprises qui continueront d’avoir des contraintes à un niveau donné de
demande n’a pas d’impact sur le pouvoir de marché à ce niveau de demande, même si elle peut
évidemment accroître le pouvoir de marché à d’autres niveaux de demande.)

Notons également que le contrôle de la concentration devrait porter sur les fusions d’entreprises
sans contraintes réalisées par des producteurs marginaux qui sont relativement proches dans
l’ordonnancement selon l’ordre de coûts croissants. Le pouvoir de marché d’un producteur sans contraintes

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DAFFE/COMP(2003)14

est limité principalement par l’aptitude des autres producteurs sans contraintes à accroître leur production à
la suite d’une hausse de prix – notamment les producteurs qui assument un coût marginal voisin du prix du
marché mais qui n’ont pas encore été appelés.

De fait, comme l’illustre le diagramme ci-dessous, la fusion d’un producteur avec le producteur
qui le précède immédiatement dans le classement par ordre de coûts croissants peut avoir un impact
considérable sur le prix, même lorsque la part de marché du producteur dont le coût est le plus élevé est
très petite. Reprenons l’exemple du marché décrit à la figure 2, en supposant cette fois qu’un producteur
additionnel ayant une capacité de 200 MW et un coût marginal de 25 dollars le MW est actif sur le marché.
Lorsque le prix du marché dépasse 25 dollars, ce producteur commence à produire. La figure 5 présente le
niveau des prix pour différents niveaux de demande avant et après la fusion des deux plus grandes
entreprises considérées. L’impact de cette fusion sur le prix du marché peut être très considérable, même
lorsque l’entreprise dont le fonctionnement coûte le plus cher détient une petite part de marché. Par
exemple, lorsque le niveau de demande est égal à 1600, une fusion fait monter le prix, qui passe de 34.70 à
45 dollars le MW (soit une augmentation de 30 pour cent), même si les parts de marché détenues avant la
fusion par les deux producteurs sans contraintes ne sont que de 14.2 et 5.6 pour cent.

Figure 5 : Effet de la fusion de deux entreprises qui sont voisines dans le classement
selon l’ordre de coûts croissants

200

180

160 Prix du marché après


la fusion des deux
140
plus gros
120 producteurs
Prix ($)

100 Prix du marché lorsque


80 les deux plus gros
producteurs sont en
60
concurrence
40

20 Prix efficace
0
0 500 1000 1500 2000 2500

Indice de la demande

Observation n°3 : Le contrôle des fusions de producteurs devrait s’exercer sur les fusions qui
déboucbent sur la création d’entreprises sans contraintes et sur les fusions d’entreprises dont les
producteurs marginaux sont voisins dans le classement selon l’ordre de coûts croissants. La fusion de
deux entreprises sans contraintes qui sont proches dans le classement selon l’ordre de coûts croissants
peut avoir un effet significatif sur le prix même lorsque les deux entreprises en question ont une part de
marché relativement faible.

99
DAFFE/COMP(2003)14

Le pouvoir de marché dans la pratique

De nombreuses études ont été réalisées sur le pouvoir de marché sur les marchés de gros de
l’électricité. On trouvera à l’annexe A un excellent survol de ces études effectué par le Department of
Energy des Etats-Unis.

Les auteurs suivants ont réalisé des études intéressantes sur le pouvoir de marché en Angleterre et
au Pays de Galles : Green (2002), Wolfram (1999, 1998), Wolak et Patrick (1997), Newbery (1995a) et
Green et Newbery (1992).

Parmi les nombreuses études sur le pouvoir de marché observé sur le marché de gros de la
Californie, citons celles menées par Borenstein (2002), Borenstein, Bushnell et Wolak (2002), Borenstein,
Bushnell et Wolak (2001), Joskow et Kahn (2001), Hildebrandt (2001a, 2001b), Puller (2001), Sheffrin
(2001), Wolak, Nordhaus et Shapiro (2000), Bushnell et Wolak (1999), Borenstein et Bushnell (1998) et
Borenstein, Bushnell, Kahn et Stoft (1996).

Des études portant sur le pouvoir de marché sur le marché de l’électricité dans les pays
scandinaves (« NordPool »), ont été effectuées par Johnsen, Verma et Wolfram (1999), Andersson et
Bergman (1995), Halseth (1999) et Hjalmarsson (2000)23.

Les deux encadrés qui suivent résument certains des résultats d’études portant sur le pool de
l’électricité de l’Angleterre et du Pays de Galles et la bourse de l’électricité de la Californie.

Le pouvoir de marché sur les marchés de l’électricité est -il préjudiciable ?

Les problèmes liés au pouvoir de marché semblent répandus sur les marchés de gros de
l’électricité mais ce pouvoir de marché est-il vraiment nuisible ? Après tout, lorsque la demande est
inélastique, des prix plus élevés n’ont à peu près pas d’effet sur la demande – autrement dit, l’un des
aspects qui font du pouvoir de marché un problème important (l’inélasticité de la demande) assure
également que le pouvoir de marché qui s’ensuit a un impact limité sur le bien-être. Si la demande est
inélastique, la perte sèche imputable au pouvoir de marché est nulle. « En raison de l’extrême inélasticité à
court terme de la demande, le pouvoir de marché observé sur les marchés de l’électricité a très peu d’effet
sur la quantité consommée ou sur l’efficience allocative à court terme ».24

L’efficience allocative n’est cependant pas la seule composante du bien-être général affectée par
le pouvoir de marché. Le pouvoir de marché peut aussi mener à une inefficience productive s’il entraîne à
court terme le remplacement de centrales à faible coût par des centrales à coût élevé, ou, à moyen et à long
terme, l’entrée de centrales inefficientes. Borenstein, Bushnell et Wolak (2002) soulignent :

« [L]’exercice d’un pouvoir de marché par une entreprise peut donner lieu à une réaffectation
inefficiente de la production entre les entreprises productrices : une entreprise qui exerce un pouvoir de
marché limite sa production de manière à ce que son coût marginal soit en dessous du prix (et égal à son
revenu marginal), alors que les autres entreprises qui sont preneuses de prix produisent des unités pour
lesquelles elles assument un coût marginal presque égal au prix. Il y a par conséquent une production
inefficiente à l’échelle du marché, puisqu’une production qui coûte plus cher et qui est plus
concurrentielle remplace une production à moindre coût réalisée par des entreprises qui détiennent un
pouvoir de marché. Cela correspond à l’évolution du marché britannique telle que décrite par Wolak et
Patrick (1997) : des centrales appartenant à de nouveaux entrants, qui fonctionnaient avec des turbines à
gaz à cycles combinés, fournissaient à coût élevé de l’électricité en base qu’auraient pu produire à
moindre coût des centrales au charbon dont les deux plus grandes entreprises restreignaient la
production.

111
DAFFE/COMP(2003)14

Plusieurs analyses effectuées récemment ont également démontré que l’exercice d’un pouvoir de
marché sur un réseau d’électricité peut accroître considérablement le degré de congestion.25
L’accroissement de la congestion a un effet négatif sur l’efficacité et la fiablité du système. Le pouvoir
de marché peut aussi inciter les entreprises à utiliser leurs ressources hydroélectriques de manière à
diminuer l’efficience économique générale.26
Enfin, l’influence des prix de l’électricité sur la prise de décision à long terme peut avoir une incidence
considérable sur l’économie et l’efficicacité des investissements. Même si, comme on l’a fait
remarquer, des prix élevés sont susceptibles de stimuler les nouveaux investissements et l’accès à la
production d’électricité, les investissements en question ne seront pas efficaces s’ils sont motivés par
des prix élevés qui résultent de l’exercice d’un pouvoir de marché, et qui traduisent peut-être un besoin
non pas de capacité accrue mais d’utilisation efficiente de la capacité existante. Les prix artificiellement
élevés peuvent aussi conduire les entreprises à ne pas investir dans des activités productives qui
nécessitent une forte utilisation d’électricité, ou à avoir recours à des techniques de production à moins
forte intensité d’électricité mais inefficientes »27
Le pouvoir de marché sur le pool de l’électricité de l’Angleterre et du Pays de Galles28

Pendant la période comprise entre avril 1990 et mars 2001, la quasi-totalité de l’électricité consommée en Angleterre
et au Pays de Galles devait être vendue la veille pour le lendemain sur un marché spot aux prix d’équilibre du marché
établis pour chaque demi-heure. En 1990, l’ancienne société d’électricité d’Etat intégrée (le Central Electricity
Generating Board) a été séparée en trois grandes sociétés de production. Deux d’entre elles, National Power et
PowerGen, ont pris en charge toutes les centrales existantes de production d’électricité à partir de combustible fossile
et l’Etat a conservé la propriété des centrales nucléaires. Ces trois sociétés concurrencent avec des producteurs
d’électricité indépendants, des producteurs situés en Ecosse et Electricité de France, qui peut fournir de l’électricité au
Royaume-Uni par l’intermédiaire d’un interconnecteur avec la France. Cependant, le coût assumé par ces trois autres
opérateurs et l’existence de contraintes de transport font qu’ils sont très rarement en mesure d’influencer le prix du
marché de l’électricité au Royaume-Uni. En 1996, malgré les nombreuses entrées, le prix du marché était fixé par
National Power ou PowerGen et par les installations de stockage par pompage du réseau de transport dans 84 et 11
pour cent des cas respectivement.

Le prix payé aux producteurs en vertu des anciennes règles qui prévalaient sur le marché, c’est-à-dire le prix payé par
le pool (Pool Purchase Price ou PPP) était le prix proposé par le producteur marginal, ou prix marginal du système
(System Marginal Price ou SMP) auquel s’ajoutait une prime de capacité (Capacity Charge ou CC). (Autrement dit :
PPP=SMP+CC). La prime de capacité se calculait au moyen de la formule suivante : CC = LOLP×(VOLL-SMP). La
LOLP (Loss of Load Probability) représentait la probabilité de perte de charge et était une fonction décroissante du
montant prévu de capacité excédentaire disponible pour chaque tranche semi-horaire. Plus la capacité excédentaire
était élevée, plus la probabilité de perte de charge était faible. La valeur de la perte de charge (Value of Loss Load ou
VOLL) était une constante fixée à 2000 livres en 1990 et a suivi l’augmentation de l’IPC par la suite. Wolak et
Patrick (1997) soulignent que la prime de capacité encourageait fortement les producteurs à restreindre leur capacité
déclarée – ce qui, en plus d’augmenter le prix marginal du système, contribuait, en réduisant la capacité de réserve
disponible, à augmenter les primes de capacité. Les primes de capacité ont été supprimées en mars 2001, lorsque
l’Angleterre et le Pays de Galles ont adopté les nouvelles règles du marché de l’électricité.

La première tentative de modélisation du pouvoir de marché sur le pool de l’électricité de l’Angleterre et du Pays de
Galles a été faite par Green et Newbery (1992). D’après ce modèle, la concurrence entre PowerGen et National Power
est un jeu non coopératif dans lequel chaque producteur choisit non pas la quantité (comme dans une concurrence à la
Cournot) mais la totalité de sa fonction d’offre (c’est-à-dire la quantité qu’il produira selon chaque prix du marché
possible). Green et Newbery retiennent pour leur modèle des paramètres censés refléter la situation sur le marché de
l’Angleterre et le Pays de Galles. Ils concluent que comme par le passé, il existe un pouvoir monopolistique important
sur ce marché:

« A court terme, les stratégies mises en œuvre par National Power et PowerGen auront peu d’effet sur le niveau
des entrées, et elles détiennent un pouvoir de marché très significatif, qu’elles peuvent exercer sans collusion en
présentant un plan de fourniture situé nettement au-dessus des coûts marginaux d’exploitation. Elles ont recours à

112
DAFFE/COMP(2003)14

ANNEXE A:

On trouvera ci-après un tour d’horizon des études qui ont été faites sur le pouvoir de marché tiré d’un
document réalisé en mars 2001 par le Department of Energy des Etats-Unis :

Concentration sur les marchés de la production d’électricité :

« Schmalensee et Golub (1984) calculent les valeurs IHH de 170 marchés de production d’électricité
desservant près des trois quarts de la population des Etats-Unis, à l’aide de différentes hypothèses
d’étendue géographique des marchés de la production. Les auteurs font état d’un nombre significatif de
cas où la concentration mesurée au moyen d’un IHH atteint le seuil critique défini dans les principes
directeurs relatifs aux fusions horizontales. Par exemple, en supposant une faible capacité de transport,
entre 35 et 60 pour cent de l’ensemble des marchés de production ont des valeurs IHH supérieures à
1800 dans un éventail de cas de coût marginal et d’élasticité de la demande. La valeur IHH moyenne
pondérée s’établit entre 1590 et 2650, ce qui indique une concentration importante. Dans le cas plus
favorable où la capacité de transport est forte, la concentration est moins élevée, mais jusqu’à 33 pour
cent des marchés conservaient des valeurs IHH supérieures au seuil de 1800 établi dans les principes
directeurs relatifs aux fusions pour l’identification des marchés très concentrés. (…)
Dans une étude récente, Cardell, Hitt et Hogan (1997) avancent que les marchés de l’électricité restent
aujourd’hui encore fortement concentrés. A l’aide de données datant de 1994 et d’une définition plus
étroite de l’étendue géographique des marchés de l’électricité, ils calculent les valeurs IHH de 112 régions
en fonction des frontières des Etats et des sous-régions délimitées par le North American Electric
Reliability Council (NERC). Même si l’analyse ne reflète pas la poussée récente de fusions et de cessions,
environ 90 pour cent de ces régions affichent des valeurs IHH supérieures à 2500.

L’impact du pouvoir de marché sur les prix de l’électricité de gros au Royaume-Uni et en Californie

Des analystes ont été en mesure d’évaluer les incidences du pouvoir de marché en fonction de données
réelles provenant du Royaume-Uni et de la Californie. D’après leurs études, les producteurs, sur ces deux
marchés, ont pu percevoir des revenus excédentaires considérables grâce au pouvoir de marché.
L’expérience du Royaume-Uni a fait l’objet de nombreuses études, en partie parce que ce pays a été l’un
des premiers à introduire la concurrence sur les marchés de gros de l’électricité. Depuis la création du pool
de l’électricité du Royaume-Uni, en 1990, l’Office of Electricity Regulation (OFFER)65 a mené des
enquêtes sur les abus de pouvoir de marché à plusieurs occasions après avoir constaté que les prix du pool
étaient inhabituellement élevés. Lors de la conception du marché du Royaume-Uni, il a été prévu deux
types de rémunération pour les producteurs : les primes de capacité, qui sont fonction de la comparaison
pour le lendemain des besoins de capacité anticipés et de la capacité disponible, et les paiements liés à la
fourniture d’énergie, lesquels sont fondés sur les prix marginaux du système. Au début de 1992, les prix
marginaux du système et les primes de capacité ont considérablement augmenté. Après avoir mené une
enquête, l’OFFER a établi que National Power et PowerGen, les deux plus gros producteurs, qui
représentaient ensemble 70 pour cent de la capacité totale du pool, demandaient des prix qui excédaient
leurs coûts marginaux. En outre, PowerGen avait déclaré qu’un certain nombre de centrales étaient

128
DAFFE/COMP(2003)14

indisponibles afin de faire augmenter les primes de capacité. Une fois que la prime de capacité avait été
déterminée, PowerGen déclarait les centrales en question disponibles, ce qui les habillitait à recevoir les
primes de capacité les plus élevées. Même si l’OFFER a institué un certain nombre de réformes par la
suite, il semble avoir plus ou moins réussi a affaiblir le pouvoir de marché.66

Wolfram (1998 et 1999) a examiné le comportement stratégique de National Power et PowerGen dans le
cadre d’enchères. A l’aide de données sur les coûts du combustible et les coûts thermiques, elle a évalué le
coût marginal de l’électricité et l’a comparé ensuite avec le « prix marginal du système »67 afin de
déterminer la marge prix-coût (la différence entre le coût marginal d’un producteur et le prix qu’il
demande). Selon son évaluation, de 1992 à 1994, les prix marginaux ont dépassé 19 à 25 pour cent les
coûts marginaux estimés.

Wolak et Patrick (1997) examinent le problème du retrait de capacité sur le pool de l’électricité du
Royaume-Uni. La structure de ce pool permet aux entreprises de tirer grandement profit de cette pratique.
Les prix payés aux producteurs comprennent une prime de capacité déterminée toutes les demi-heures par
le gestionnaire du pool en fonction du niveau des réserves disponibles et de la « perte de charge »68.
Lorsque la capacité de production de réserve chute, les primes de capacité augmentent. Les entreprises qui
pratiquent le retrait de capacité perçoivent des primes de capacité et des prix marginaux du systèmes plus
élevés pour leur production, et cette stratégie est très rentable.

Après avoir analysé les prix et les quantités à l’équilibre de l’offre et de la demande aux demi-heures, et les
enchères et les déclarations de disponibilité aux demi-heures pendant la période comprise entre 1991 et
1995, les auteurs citent plusieurs éléments qui démontrent que National Power et PowerGen mènent une
stratégie de retrait de capacité. Premièrement, ils constatent que le pourcentage de capacité totale déclarée
indisponible par National Power et PowerGen pendant les mois creux de 1995 correspond à plus du double
de la quantité moyenne déclarée indisponible par tous les producteurs pendant les mois creux. En outre, ils
calculent les facteurs de disponibilité moyens par type de combustible pour National Power et PowerGen et
les comparent avec les critères établis pour le secteur d’après les données du NERC pour des groupes
comparables. Pour chaque type de combustible, les facteurs de disponibilité, aussi bien pour ce qui
concerne National Power que PowerGen, sont inférieurs au repère établi pour le secteur. Ainsi, les facteurs
de disponibilité moyens pour les turbines à gaz à cycles combinés sont respectivement de 53 et 64 pour
cent pour National Power et PowerGen, comparativement à un repère de 80 pour cent pour le secteur. A
l’inverse, les facteurs de disponibilité pour les producteurs d’électricité indépendants qui vendent au pool
du Royaume-Uni sont tous supérieurs au repère du secteur, puisqu’ils s’établissent entre 81 et 93 pour cent
pour les turbines à gaz à cycles combinés.

Le marché de gros de la Californie, beaucoup plus récent que celui du Royaume-Uni, est ouvert à la
concurrence depuis 1998. Ce marché a une structure institutionnelle différente de celle du Royaume-Uni
— par exemple, il n’y a pas de primes de capacité autres que celles qui sont directement liés à la prestation
de services auxiliaires. Même si les concepteurs du marché de la Californie auraient pu tirer les
enseignements de l’expérience britannique, les premières analyses font soupçonner qu’un pouvoir de
marché s’exerce sur ce marché. Borenstein, Bushnell et Wolak (1999) s’intéressent au marché de gros de
l’électricité pendant la période comprise entre juin et novembre 1998. Ils calculent la courbe de l’offre
marginale agrégée en se fondant sur les coûts du combustible, les coûts thermiques et les coûts variables de
fonctionnement et d’entretien, à l’aide de données fournies par la California Energy Commission et
d’autres sources. A l’aide des niveaux de production horaire communiqués par le gestionnaire du réseau de
transport, ils déterminent le prix concurrentiel horaire. Ce prix est ensuite comparé au prix horaire (plan
non contraint) pratiqué sur la bourse de l’électricité de la Californie pour évaluer la marge prix-coût. Pour
la totalité de la période de six mois, les paiements totaux aux producteurs ont dépassé de 29 pour cent, soit
94 million de dollars, et même, à certaines périodes, de 75 pour cent, les niveaux concurrentiels. Les
marges les plus élevées ont été enregistrées en juillet et août entre midi et 18 h, lorsque la demande est

129
DAFFE/COMP(2003)14

élevée. Wolak a récemment étendu l’analyse de manière à inclure l’été 1999, et révisé l’évaluation, de
sorte que les montants versés aux producteurs auraient dépassé de plus de 800 millions de dollars les
niveaux concurrentiels pendant les étés 1998 et 1999 combinés.

Les études mentionnées dans la présente section rendent compte du surprix en tant que pourcentage du prix
du marché de gros de l’électricité. Le prix de gros de l’électricité n’est qu’une des composantes du prix
global payé par les consommateurs de services d’électricité, qui comprend également les coûts de transport
et de distribution et d’autres frais. Les mêmes impacts sur les prix, mesurés en pourcentage du prix total à
la livraison de l’électricité aux utilisateurs finals, seraient beaucoup moindres, et se situeraient dans de
nombreux marchés entre la moitié et les deux tiers de l’impact en pourcentage en ce qui concerne la
production seulement.

Autres preuves du pouvoir de marché au Royaume-Uni et en Californie

Des études fondées sur des observations comme celles menées par Wolfram (1998, 1999) et par
Borenstein, Bushnell et Wolak (1999) mesurent l’ampleur du pouvoir de marché en évaluant d’abord le
coût marginal de production et en le comparant ensuite aux estimations obtenues avec les prix. La tentative
d’estimation des coûts de production pose toutefois un certain nombre de difficultés. Wolfram, par
exemple, n’inclut pas les coûts variables de fonctionnement et d’entretien dans ses estimations, et, de ce
fait sous-estime peut-être les coûts de production réels. En Californie, les producteurs n’incluent pas
explicitement les coûts de démarrage dans leurs offres (comme le font d’autres pools d’électricité) et
doivent plutôt les inclure dans leurs offres d’énergie (même si l’inclusion des coûts de démarrage ne
rendrait pas entièrement compte des paiements plus élevés déjà mentionnés versés aux producteurs de
Californie). A ce titre, l’offre faite par un producteur peut sembler supérieure aux coûts marginaux même
si le prix demandé reflète précisément le coût variable de production assumé par ce producteur.

D’autres éléments, cependant, font penser que les entreprises exercent un pouvoir de marché —le
comportement en matière d’enchères au Royaume-Uni, par exemple. Même si les entreprises ont intérêt à
faire des enchères plus élevées sur le pool afin d’augmenter leurs recettes, elles doivent faire en sorte que
la centrale soit appelée. Selon la théorie économique, si les producteurs se comportent en suivant une
stratégie, les marges prix-coûts sont plus élevées pour les centrales qui sont les plus susceptibles de fixer le
prix du pool et dont la capacité disponible est supérieure à la capacité inframarginale. Wolfram constate
que ces deux phénomènes ont pu être observés sur le pool du Royaume-Uni. Elle montre en outre que la
variation des prix des offres faites par un groupe donné est supérieure à la variation des offres faites par
l’ensemble des groupes.

D’autres analystes ont comparé les prix réels du pool de la bourse de l’électricité de la Californie avec ceux
établis dans une étude réalisée en 1997 par Borenstein et Bushnell sur l’existence possible d’un pouvoir de
marché sur le marché de gros de Californie. Pour deux des quatre mois étudiés, le modèle surestime les
prix faisant supposer l’existence d’une situation de concurrence ou de pouvoir de marché. Pour les deux
autres mois, cependant, le modèle prédit de manière exacte les prix concurrentiels pour environ 80 pour
cent des heures, en général lorsque les charges sont basses. Pour environ 10 pour cent des heures pendant
ces deux mois, les prix réels de la bourse de Californie se situent dans l’éventail des prix qui, selon les
prédictions, font soupçonner l’existence d’un pouvoir de marché.

L’arrivée de nouveaux concurrents sur le marché peut restreindre considérablement l’aptitude à maintenir
les prix au-dessus du niveau concurrentiel pendant une période significative, comportement qui correspond
à la définition de l’exercice d’un pouvoir de marché. La possibilité d’une entrée rapide de nouveaux
concurrents peut dissuader un opérateur historique qui domine le marché d’exercer un pouvoir de marché,

130
DAFFE/COMP(2003)14

étant donné que l’entrée motivée par la perspective de profits supérieurs à la normale et de prix élevés peut
mener à une surcapacité et diminuer les bénéfices après l’entrée.

Même si l’on a enregistré de nombreuses entrées sur le marché britannique depuis la privatisation, le
pouvoir de marché n’y a pas été entièrement éliminé. En 1993 et 1994, les prix du pool se sont situés en
moyenne immédiatement en dessous des coûts moyens à long terme d’un nouvel entrant potentiel. En
outre, National Power et PowerGen ont pratiqué des retraits significatifs de capacité lors de l’arrivée de
nouvelles entreprises au début des années 90, ce qui a limité l’augmentation nette de capacité au sein du
pool. Les montées des prix les plus récentes, survenues en 1999, donnent à penser que National Power et
PowerGen peuvent toujours exercer un pouvoir de marché malgré les nouvelles entrées et la baisse
subséquente de leur part de marché.69

Les problèmes liés au pouvoir de marché ont persisté au Royaume-Uni malgré les ajouts considérables de
capacité qui sont le fait de producteurs d’électricité indépendants (12 300 mégawatts) et l’ajout, entre 1991
et 1997, de capacité nucléaire, conformément à un engagement pris antérieurement (3 200 mégawatts).
Ensemble, ces ajouts ont représenté l’équivalent de 25 pour cent de la capacité totale du pool de
l’Angleterre et du Pays de Galles. Comme les conditions qui prévalaient sur le marché britannique étaient
probablement plus propices à l’ajout rapide d’une importante capacité fournie par des producteurs
d’électricité indépendants que sur de nombreux marchés régionaux de l’électricité aux Etats-Unis, l’entrée
de nouveaux concurrents ne devrait probablement pas être considérée comme la panacée au pouvoir de
marché à court et à moyen terme.

Etudes du pouvoir de marché dans d’autres régions

Borenstein, Bushnell et Knittel (1997) examinent la possibilité qu’un pouvoir de marché s’exerce dans le
New Jersey. En raison des contraintes de transport qui existent à destination et en provenance du pool de
l’électricité Pennsylvanie-New Jersey-Maryland (PJM), le New Jersey (« PJM-East ») peut parfois être un
marché restreint, distinct sur le plan géographique, qui se prête à l’exercice d’un pouvoir de marché.
L’analyse examine la possibilité qu’ont les cinq principales entreprises de service public du New Jersey
d’augmenter les prix en réduisant leur production, en supposant que les marchés voisins (New York et
« PJM-West ») sont parfaitement concurrentiels et vendront de l’électricité sur le marché du New Jersey
lorsque cela sera possible, compte tenu des prix et des contraintes de transport. Ils constatent que les prix
du marché commencent à dépasser les niveaux concurrentiels lorsque la demande excède 14 500
mégawatts au New Jersey (ils situent la demande de pointe à 16 500 mégawatts en 2000 pour les besoins
de cette analyse). Lorsque la demande atteint ce niveau, les augmentations potentielles de prix dues au
pouvoir de marché vont de quelques points à un facteur de 4.

On a également étudié la possibilité qu’un pouvoir de marché s’exerce dans le Colorado. Sweester (1998)
note que les contraintes de transport et la présence d’une entreprise dominante peuvent favoriser l’exercice
d’un pouvoir de marché dans l’est du Colorado. Il examine comment différentes possibilités d’action ou
d’évolutions du marché pourraient réduire ce pouvoir de marché. Par exemple, la présence de coopératives
d’électricité rurales et d’agences d’électricité municipales sur les marchés concurrentiels réduit les marges
prix-coûts prévues d’environ 10 pour cent. En supposant l’entrée sur le marché de 1 000 mégawatts de
production nouvelle et concurrentielle, les marges prix-coûts chutent de façon spectaculaire. La plus forte
diminution des marges prix-coût, dans une hypothèse de pouvoir de marché, est obtenue en exigeant de
l’entreprise dominante qu’elle cède 50 pour cent de ses actifs.

Plusieurs commissions de services publics des différents états ont également entrepris des études sur le
pouvoir de marché dans le cadre d’une restructuration. Dans le Michigan, par exemple, la commission des
services publics a calculé des valeurs d’IHH pour cet Etat et conclu que le marché du Michigan est

131
DAFFE/COMP(2003)14

« tellement concentré et que les avantages des services publics en place sont tellement généralisés que la
prise de mesures s’impose. » La commission des services publics de l’Utah a réalisé des études de
simulation similaires à celles qui ont été faites dans le New Jersey et le Colorado et constaté que
l’entreprise dominante serait en mesure d’exercer un pouvoir de marché de 45 à 60 pour cent du temps.

132
DAFFE/COMP(2003)14

ANNEXE B :

L’indice de Lerner et l’IHH sur un marché sans contraintes de capacité

Supposons un marché comportant n entreprises qui produisent un produit identique, assumant des coûts de
ci (q i ) pour i=1,.., n. La courbe de la demande sur le marché est P(Q), où Q = q1 + q 2 + ... + q n . Le
bénéfice de la i ième entreprise est donc :

π i (q i , q −i ) = P (Q)q i + ci (q i ) = P (q i +  q j )q i + ci (q i )
j ≠i

Supposons que ces entreprises se font une concurrence en quantité, l’équilibre de Cournot étant
(q1* , q 2* ,..., q n* ) . D’après les conditions de premier ordre, nous savons que :

∂π i
(q i , q −i ) = P ʹ′(Q)q i + P (Q ) − ciʹ′ (q i ) = 0 car i=1,.., n.
∂q i

Ce qui implique que :

P (Q ) − ciʹ′ (q i ) P ʹ′(Q ) s
=− q i = i car i=1,.., n.
P (Q ) P (Q ) ε

Où s i = q i / Q est la part de marché de la iième entreprise et ε est l’élasticité de la courbe de la demande


lorsque la production totale est Q. Si nous multiplions cette expression par s i et additionnons la production
de toutes les entreprises, nous constatons que :

P − c IHH
=
P ε

Où c =  s cʹ′ (q ) est la moyenne pondérée des coûts marginaux des entreprises au niveau d’équilibre de
i
i i i

la production (pondéré par les parts de marché de chaque entreprise) et HHI =  s est la somme des
2
i
i
carrés des parts de marchés des entreprises présentes sur le marché.

Supposons maintenant que les entreprises assument un coût marginal constant. L’expression ci-dessus
permet de déduire que :

P − c~ 1
=
P nε

133
DAFFE/COMP(2003)14

1
Où c~ =
n i

ci est la simple moyenne des coûts marginaux assumés par les entreprises. Ce résultat a pour

conséquence immédiate que si la courbe de la demande a une élasticité constante, la marge prix-coût
marginal est constante, quel que soit le niveau de la demande.

Contraintes de capacité et IHH ajusté

Supposons maintenant que la iième entreprise fait face à une contrainte de capacité de K i . Le problème de
l’entreprise est maintenant de maximiser π i (qi , q −i ) à la condition que q i ≤ K i . Soit m entreprises
exemptes de contraintes de capacité désignées 1,2,…,m. Pour ces entreprises, les conditions de premier
ordre ci-dessus sont maintenues. Supposons que la part de marché totale des entreprises contraintes soit s .
m
s
Supposons ensuite que
i =1

s i + s = 1 . Si nous multiplions les conditions de premier ordre par s i +
m
et

faisons le total, nous obtenons :

m
s P (Q) − ciʹ′ (qi ) P(Q) − cˆ IHH adj
 ( si +
i =1 m
)
P(Q)
=
P(Q)
=
ε
m m
s s
Où cˆ =  (s
i =1
i +
m
)ciʹ′ (q i ) et IHH adj =  s (s
i =1
i i +
m
).

Valeur minimum de l’IHH ajusté

Pour un nombre donné d’entreprises sans contraintes, nous pouvons trouver la valeur minimum de l’IHH
m
en choisissant s1 , s 2 ,..., s m pour réduire au minimum HHI adj , pour autant que s
i =1
i + s = 1 . On peut alors

1− s
aisément démontrer que s1 , s 2 ,..., s m doivent être identiques et, par conséquent, que s i = . En
m
intégrant ce résultat à l’expression IHH adj , nous obtenons

m
1− s  1− s s 1− s
IHH adj ≥   ( + )=
i =1  m  m m m

134
TD no 4 : Localisation et Différentiation Horizontale
Description du document. Ce document de travaux dirigés propose d’étudier
deux modèles de localisation qui ont et continuent de donner lieu à de nombreuses
recherches en économie industrielle.

Ces modèles sont détaillées dans le livre de (Tirole 1993, page 154 et 161), Théorie de
l’Organisation Industrielle.
Exercice 1 : Hotelling, localisation linéaire
Nous considérons deux firmes, 1 et 2, produisant un bien identique au même coût moyen
constant K. Ces firmes se font concurrence en prix ; on notera pi le prix pratiqué par la firme i.

Question préliminaire : Rappelez les hypothèses et les résultats du duopole de Bertrand.

L’hypothèse que les consommateurs achètent au plus bas prix est irréaliste s’ils ont à supporter
des coûts de transport. Dans ce cas, ils auront à arbitrer entre acheter près de chez eux et acheter
cher mais plus loin. Pour donner une représentation schématique de cette situation, on suppose
qu’il y a un continuum de consommateurs uniformément répartis le long d’une rue désignée par
[0, 1]. Chaque consommateur achète à coup sur une unité.
Les deux firmes ont chacune un magasin dans la rue, situé en l1 , 0 ≤ l1 ≤ 1, pour la firme 1
et en l2 , 0 ≤ l2 ≤ 1, pour la firme 2.
Le consommateur supporte un coût de transport qui varie de manière quadratique en fonction
de la distance qu’il parcourt : coût de transport = c × (distance)2 , c est une constante positive.
1. S’il habite en x, combien coûte au consommateur d’acheter à la firme i pour i = 1, 2 ?
2. Où sont situés les consommateurs qui achètent au magasin 1 ? On notera ¯l = l1 +l2 . En 2
déduire les fonctions de demande et de profit.
3. Les firmes choisissent leur prix. Quels sont les prix d’équilibre (p̄1 , p̄2 ) ? (Indication : cher-
cher l’équilibre de Nash et représenter les fonctions de réactions.) Pour quelles conditions
sur l1 et l2 sont-ils égaux ?
4. Exprimez les profits d’équilibre. Discutez l’influence du paramètre c. Que se passe t-il
lorsque c = 0 ?
5. Les firmes choisissent désormais leur localisation. En déduire la localisation d’équilibre des
firmes. Commentez.

Exercice 2 : Salop, localisation circulaire


On étudie dans cet exercice la localisation et le nombre optimal d’entreprises sur un marché
circulaire. Tirole, dans son manuel intitulé Théorie de l’organisation industrielle, suggère comme
exemple des supermarchés dans une banlieue circulaire ; on peut citer aussi ce modèle comme
un modèle de choix de produit (“localisation") : par exemple, une entreprise de transport aérien
peut choisir ses horaires d’avion (les produits) en fonction de la demande des voyageurs.

Le marché est représenté par un cercle de circonférence unité, sur lequel sont répartis uni-
formément les consommateurs : un arc de longueur d contient d% des consommateurs. Chaque
consommateur consomme 0 ou 1 unité de bien. S’il achète 0, son utilité est nulle ; s’il achète une
unité au prix p à une firme située à une distance d, son utilité est u − p − td, où t désigne le
coût unitaire de transport et u l’utilité que procure une unité de bien. Afin de ne pas compli-
quer la résolution du modèle, essentiellement illustratif, on ne s’intéressera qu’à des équilibres
symétriques, où les entreprises sont équidistantes et pratiquent le même prix. On note c le coût
marginal constant et f le coût fixe.

2
On suppose qu’il y a sur le marché n firmes équidistantes et que n − 1 pratiquent le prix p̄.
On cherche dans un premier temps, à quelles conditions la nème pratiquera aussi le prix p̄. Soit
p le prix pratiqué par cette firme.
1. On suppose que p̄ − nt < p < p̄ + nt . Où se situe le consommateur indifférent entre acheter
à la firme et à sa voisine ? Si ce consommateur consomme effectivement, quelle est la
demande adressée à la firme ?
2. Que se passe t-il si p > p̄ + t
n ?
3. Calculez le taux de marge. Discutez l’influence de t et n sur le taux de marge ?
4. Quel est le seul prix d’équilibre possible ? Calculez le nombre de firmes maximale N̄ sur le
marché. Commentez l’évolution de N̄ en fonction des paramètres de coût.
5. A quelle condition sur le coût fixe l’hypothèse que tous les consommateurs consomment
effectivement (marché dit “couvert") est-elle satisfaite ?

Question bonus : Montrez qu’un planificateur cherchant à maximiser l’utilité sociale (somme
des surplus des consommateurs et des profits des entreprises) choisirait N � de manière à minimi-
ser la somme des coûts de transport des consommateurs. Calculez N � . La concurrence imparfaite
engendre t-elle trop ou trop peu de firmes ? Commentez.

Exercice 3 : Dixit-Stiglitz, concurrence monopolistique


On considère un marché de concurrence monopolistique où s’échangent n variétés d’un même
bien, chacune produite par une firme mono-produit et une seule. Les variétés sont indicées
par i, i variant de 1 à n. On notera xi la quantité demandée de la variété i, et x le vecteur
x = (x1 , ..., xn ) ; Toutes les firmes sont identiques et sont caractérisées par la fonction de coût
total C(xi ) = cxi +f , avec c > 0, f > 0. La demande pour n variétés émane de N consommateurs
tous identiques dont les préférences sont définies sur des paniers (m, x) où m est la monnaie, qui
représente la dépense consacrée par les consommateurs à d’autres biens. Chaque consommateur
est caractérisé par la fonction d’utilité
� n
1
u(m, x) = m + x1−a
i
n(1 − a)
i=1

avec 0 < a < 1, lorsque n variétés sont présentes sur le marché. Les consommateurs ont tous le
même revenu r. On note pi le prix de la variété i. Le prix de la monnaie est égale à 1.

Les firmes jouent un jeu en deux étapes. Il y a un nombre potentiel arbitrairement grand de
firmes et de variétés. A la première étape chaque firme décide d’entrer ou non sur le marché. A
la seconde étape, les n firmes présentes se font concurrence en prix : chaque firme i choisit un
prix pi et sert la demande xi qui lui est adressée.

1. Comment résoudre un tel jeu ?


2. Calculez l’équilibre du jeu de concurrence monopolistique décrit ci-dessus :
a. Calculez d’abord l’équilibre de Nash symétrique du sous-jeu de concurrence en prix ;
b. Calculez ensuite le nombre de firmes présentes à l’équilibre d’entrée.
3. Commentez tous les résultats obtenus en proposant une interprétation économique.

3
4. Le modèle étudié décrit-il bien une situation de concurrence monopolistique ?
5. Examinez les propriétés asymptotiques de l’équilibre.

4
TD no 5 : Discrimination par les prix
Description du document. Ce document porte sur les différentes formes de
discrimination. Le troisième exercice introduit une dimension temporelle et illustre la
conjecture de Coase.
Exercice 1 : Une forme originale de discrimination par les prix
La firme Coca-Cola considère l’installation d’un nouveau type de distributeur de canettes,
capable de faire varier le prix selon la température extérieure. Pour simplifier, on considère une
clientèle pour laquelle Coca-Cola est en monopole local, et une machine capable de discriminer
entre seulement deux types de températures, “basse" et “haute". Lorsqu’elle est basse, la demande
quotidienne est donnée par : QB = 160 − 2p et lorsqu’elle est haute par QH = 280 − 2p, où Q
est le nombre de canettes vendues par jour au prix p, exprimé en centimes d’euros. On pose k,
le coût unitaire de production d’une canette de Coca-Cola, égal à 20 centimes.
1. Avant le changement d’appareil. On pose d = 34 la probabilité que la température prenne
la valeur “basse", et on suppose que Coca-Cola est neutre au risque. Calculer la quantité
et le prix d’équilibre, lorsque Coca-Cola est contraint de vendre au même prix chaque jour
de l’année.
2. Après le changement d’appareil. Calculer les quantités pour un jour de température “basse"
puis pour un jour de température “haute", (qB , qH ), et les prix d’équilibre (pB , pH ).
3. Valeur de la discrimination. Comparez les espérances de profits avant et après l’acquisition
de cette machine : quelle est la valeur maximale que Coca-Cola accepterait de payer pour
une telle innovation ? Rapprochez ce résultat de vos connaissances sur la discrimination.

Exercice 2 : Politique de prix


Soit une économie composée de deux types de consommateurs (i = 1, 2) et de deux types de
biens. Il y a N consommateurs et ceux de type i sont en proportion N/2. La fonction d’utilité
des agents de type i est donnée par

Ui (x, y; θi ) = x(1 − θi x) + y

avec x et y les quantités consommées des deux biens. Le bien y est le numéraire tandis que le
bien x est produit par un monopole : la fonction de coût de production est donnée par C(x) = cx,
avec c > 0. Tous les consommateurs ont un même revenu R tel que R > px où p est le prix du
bien x.

1. Les individus de type 2 ont une évaluation marginale du bien x plus élevée que les individus
de type 1. Qu’en déduisez-vous sur les paramètres θ1 , θ2 .
2. Déterminez les fonctions de demande des deux types de consommateurs. En déduire la
demande agrégée et représenter le tout graphiquement.
3. Determinez les prix, la quantité et le profit du monopole quand celui-ci ne pratique pas de
discrimination.
4. Déterminez uniquement les prix pθ1 et pθ2 si le monopole discrimine les deux consomma-
teurs.
5. Le monopole introduit une nouvelle politique de prix. Les individus doivent payer un abon-
nement A auquel s’ajoute un prix p par unité de consommée. Si le monopole décide de
discriminer, déterminez les abonnements A1 et A2 payés par chaque type de consomma-
teurs.
6. En supposant que le monopoleur sert les deux types de consommateurs, déterminez le
couple optimal (A� , p� ) sans discrimination.

2
7. Ne pouvant pas observer les deux types de consommateurs présents sur le marché, le mo-
nopoleur décide d’offrir deux menus différenciés (m1 , x1 ) et (m2 , x2 ). Ecrire les contraintes
de participation et d’incitation.
8. Quelles sont les contraintes a priori saturées ? (argumentez la réponse).
9. Ecrire alors le programme du monopoleur, sans le résoudre.
10. Quel type de consommateur consomme un montant efficace ?
11. Quelle est la conséquence d’une telle politique de prix ?

Exercice 3 : Le rôle discriminant des soldes versus la conjecture


de Coase
Beaucoup de magasins font des soldes pendant une période limitée de temps. Certains pensent
qu’une motivation de cette pratique est la possibilité de discrimination par les prix entre les
consommateurs patients et ceux qui ne le sont pas.

Chaque acheteur désire acheter une unité par période. Chaque période est divisée en deux
souspériodes. Il existe deux types de consommateurs : les consommateurs de type 1 et les consom-
mateurs de type 2. Chaque consommateur désire acheter à une période particulière : la moitié
des acheteurs préfère acheter durant la première sous période (les consommateurs de type 1), et
l’autre moitié à la seconde sous-période (les consommateurs de type 2). Un consommateur de
type i (i = 1, 2) est prêt à payer v̄i pour un achat durant sa sous-période préférée et v i à l’autre
sous-période.

Les acheteurs de type 1 qui représentent une fraction α de la population ont une disponibilité
à payer élevée (v̄1 très élevé) et sont impatients (v 1 très faible). A l’opposé, les consommateurs
de type 2 sont patients (v̄2 ≈ v 2 ). Nous supposons dans la suite de l’exercice que a est faible
dans la mesure où α < v 2 /v̄1 . En résumé, nous avons :

v̄1 > v̄2 ≈ v 2 > αv̄1 > v 1 ≈ 0

1. Montrer qu’avec une stratégie de prix constant au cours des deux périodes p, le vendeur
fixe un prix égal à v̄2 .
2. Déterminer le profit du vendeur lorsqu’il fixe p = v̄1 dans la première sous-période et
p = v 2 dans la seconde sous-période.
3. Montrer que les profit sont plus élevés avec la stratégie de soldes.
Certains magasins peuvent craindre qu’une politique trop systématique de soldes incite cer-
tains acheteurs, suffisamment patients, à différer leur achat pour attendre la baisse des prix, ce
qui empêche le vendeur de leur faire payer le prix fort. On considère maintenant qu’il existe un
troisième type de consommateurs, intermédiaire entre les consommateurs de type 1 et de type
2 précédents : des consommateurs de type 3, ayant une disponibilité à payer élevée (v̄3 ≈ v̄1 ) et
étant patients (v 3 > v̄2 ). On suppose que v 3 < 3v̄2 et v̄1 > 3v̄2 .
On suppose en outre que v̄1 = 4v 3 − 3v̄2 .
Les acheteurs de type 1 représentent maintenant une fraction α1 = 12 de la population, les ache-
teurs de type 2 une fraction α2 = 13 de la population, et les acheteurs de type 3 la fraction
restante α3 = 16 .

3
1. Montrer qu’avec une stratégie de prix constant au cours du temps, p, le vendeur décide de
fixer un prix égal à v̄3 si v̄1 > 32 v̄2 .
2. Déterminer le profit du vendeur lorsqu’il fixe p1 = v̄1 dans la première sous-période et
p2 = v̄2 dans la seconde sous-période. Montrer que les profit sont moins élevés avec cette
stratégie de soldes.
3. On veut vérifier que cette stratégie de soldes est la meilleure possible pour le vendeur.
Montrer que le vendeur fixera en deuxième période un prix p2 = v̄2 .
Montrer alors que les acheteurs de type 2 achètent en période 1 seulement si p1 ≤ v̄2 .
Montrer que la stratégie optimale de soldes pour le vendeur est p1 = v̄1 et p2 = v̄2 .

4
TD no 6 : La réglementation de la concurrence.
Description du document. Ce document présente la législation relative à la
réglementation de la concurrence en France, en Europe et aux Etats-Unis ainsi que
des exemples de son application par le conseil de la concurrence en France.

Références : Combe E., 2005. Economie et Politique de la concurrence. Dalloz.


Questions
1. Citez les principales institutions américaines, européennes et françaises en charge de l’ap-
plication des réglementations.
2. Mentionnez les principaux comportements anti-concurrentiels régis par la réglementation.
Reliez ces comportements aux législations reportées dans ce document.
3. Questions sur les études de cas du document de synthèse du conseil de la concurrence :

(a) Précisez dans chacun des cas présentés le ou les types d’infractions commises (s’il y
en a) et les textes réglementaires mobilisés ou mobilisables.
(b) Quels sont les modes de coordination effectifs ou potentiels entre les firmes mentionnés
dans les textes ?
(c) De quelle façon les montants des amendes sont-ils calculés ?

La législation française
CODE DE COMMERCE. Source : http ://www.minefi.gouv.fr/

Article L 420-1. t
Sont prohibées même par l’intermédiaire direct ou indirect d’une société du groupe implantée
hors de France, lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’empêcher, de restreindre
ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes
expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu’elles tendent à :
1o Limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d’autres entreprises ;
2o Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement
leur hausse ou leur baisse ;
3o Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès tech-
nique ;
4o Répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement.

Article L 420-2. t
Est prohibée, dans les conditions prévues à l’article L. 420-1, l’exploitation abusive par une
entreprise ou un groupe d’entreprises d’une position dominante sur le marché intérieur ou une
partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en
ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations
commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions
commerciales injustifiées.
Est en outre prohibée, dès lors qu’elle est susceptible d’affecter le fonctionnement ou la
structure de la concurrence, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises
de l’état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente
ou fournisseur. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées, en
pratiques discriminatoires visées au I de l’article L. 442-6 ou en accords de gamme.

2
Article L 420-4. t
I. - Ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 les pratiques :
1o Qui résultent de l’application d’un texte législatif ou d’un texte réglementaire pris pour son
application ;
2o Dont les auteurs peuvent justifier qu’elles ont pour effet d’assurer un progrès économique, y
compris par la création ou le maintien d’emplois, et qu’elles réservent aux utilisateurs une partie
équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises intéressées la possibilité d’éliminer
la concurrence pour une partie substantielle des produits en cause. Ces pratiques qui peuvent
consister à organiser, pour les produits agricoles ou d’origine agricole, sous une même marque ou
enseigne, les volumes et la qualité de production ainsi que la politique commerciale, y compris
en convenant d’un prix de cession commun ne doivent imposer des restrictions à la concurrence,
que dans la mesure où elles sont indispensables pour atteindre cet objectif de progrès.
II. - Certaines catégories d’accords ou certains accords, notamment lorsqu’ils ont pour objet
d’améliorer la gestion des entreprises moyennes ou petites, peuvent être reconnus comme satis-
faisant à ces conditions par décret pris après avis conforme du Conseil de la concurrence.

Article L 420-5. t
Sont prohibées les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement
bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, dès lors
que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’éliminer d’un marché
ou d’empêcher d’accéder à un marché une entreprise ou l’un de ses produits.
Les coûts de commercialisation comportent également et impérativement tous les frais résultant
des obligations légales et réglementaires liées à la sécurité des produits.
Ces dispositions ne sont pas applicables en cas de revente en l’état, à l’exception des enregistre-
ments sonores reproduits sur supports matériels et des vidéogrammes destinés à l’usage privé
du public.

La législation européenne
TRAITÉ INSTITUANT LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE. Troisième partie — Les poli-
tiques de la Communauté. Titre VI — Les règles communes sur la concurrence, la fiscalité et le
rapprochement des législations. Chapitre 1 — Les règles de concurrence. Section 1. Les règles
applicables aux entreprises.
Source : http ://europa.eu.int/

Article 81 (ex-article 85). t


1. Sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes
décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d’af-
fecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de
restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun, et notam-
ment ceux qui consistent à :
a) fixer de façon directe ou indirecte les prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de
transaction,
b) limiter ou contrôler la production, les débouchés, le développement technique ou les investis-
sements,
c) répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement,

3
d) appliquer, à l’égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales à des prestations
équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence,
e) subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation, par les partenaires, de prestations
supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec
l’objet de ces contrats.
2. Les accords ou décisions interdits en vertu du présent article sont nuls de plein droit.
3. Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables :
— à tout accord ou catégorie d’accords entre entreprises,
— à toute décision ou catégorie de décisions d’associations d’entreprises et
— à toute pratique concertée ou catégorie de pratiques concertées qui contribuent à améliorer la
production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique,
tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans :
a) imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour at-
teindre ces objectifs,
b) donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause,
d’éliminer la concurrence.

Article 82 (ex-article 86). t


Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États
membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de
façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle
de celui-ci.
Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à :
a) imposer de façon directe ou indirecte des prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de
transaction non équitables,
b) limiter la production, les débouchés ou le développement technique au préjudice des consom-
mateurs,
c) appliquer à l’égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations
équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence,
d) subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation, par les partenaires, de prestations
supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec
l’objet de ces contrats.

Article 83 (ex-article 87). t


1. Les règlements ou directives utiles en vue de l’application des principes figurant aux articles 81
et 82 sont établis par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission
et après consultation du Parlement européen.
2. Les dispositions visées au paragraphe 1 ont pour but notamment :
a) d’assurer le respect des interdictions visées à l’article 81, paragraphe 1, et à l’article 82, par
l’institution d’amendes et d’astreintes,
b) de déterminer les modalités d’application de l’article 81, paragraphe 3, en tenant compte de
la nécessité, d’une part, d’assurer une surveillance efficace et, d’autre part, de simplifier dans
toute la mesure du possible le contrôle administratif,
c) de préciser, le cas échéant, dans les diverses branches économiques, le champ d’application
des dispositions des articles 81 et 82,
d) de définir le rôle respectif de la Commission et de la Cour de justice dans l’application des
dispositions visées dans le présent paragraphe,

4
e) de définir les rapports entre les législations nationales, d’une part, et, d’autre part, les dispo-
sitions de la présente section ainsi que celles adoptées en application du présent article.

La législation américaine
The Sherman Antitrust Act (1890). t
Section 1. Trusts, etc., in restraint of trade illegal ; penalty. Every contract, combination in the
form of trust or otherwise, or conspiracy, in restraint of trade or commerce among the several
States, or with foreign nations, is declared to be illegal. Every person who shall make any contract
or engage in any combination or conspiracy hereby declared to be illegal shall be deemed guilty
of a felony, and, on conviction thereof, shall be punished by fine not exceeding $10,000,000 if a
corporation, or, if any other person, $350,000, or by imprisonment not exceeding three years, or
by both said punishments, in the discretion of the court.

Section 2. Monopolizing trade a felony ; penalty. Every person who shall monopolize, or attempt
to monopolize, or combine or conspire with any other person or persons, to monopolize any part
of the trade or commerce among the several States, or with foreign nations, shall be deemed
guilty of a felony, and, on conviction thereof, shall be punished by fine not exceeding $10,000,000
if a corporation, or, if any other person, $350,000, or by imprisonment not exceeding three years,
or by both said punishments, in the discretion of the court.

5
Fiche technique n° 1

Distribution de carburants sur les autoroutes :


les principaux groupes pétroliers sanctionnés

Par une décision du 31 mars 2003, le Conseil de la concurrence, saisi par le ministre de l'Économie, a
sanctionné la société Total Fina Elf France, la société des pétroles Shell et les sociétés Esso Saf et BP
France. Il leur a infligé des amendes pour un montant total de 27 millions d'euros 1.

Des échanges fréquents et répétés d'informations sur les prix entre les gérants des stations
autoroutières : une action collective anticoncurrentielle

Les déclarations des gérants de stations service ont fait apparaître, lors de l'enquête et de l'instruction,
que, à la demande ou avec l'assentiment de leur compagnie pétrolière respective, les stations service
échangeaient téléphoniquement, plusieurs fois par semaine avec leurs concurrents, des informations
sur les prix pratiqués pour les différents types de carburants.

Ces informations étaient ensuite systématiquement transmises dans la journée au siège social des
compagnies pétrolières, lesquelles, en retour, établissaient, en fonction des prix des concurrents, les
prix qu'elles demandaient à leurs gérants de pratiquer.

Le Conseil a estimé que ces pratiques avaient nécessairement favorisé une convergence rapide des
prix à un niveau plus élevé que celui qui aurait prévalu si les compagnies pétrolières avaient mené une
politique tarifaire autonome.

En effet, toute tentative d'une compagnie de baisser ses prix devenait vaine puisque ses concurrents en
étaient informés très rapidement par la station de la compagnie qui l'avait initiée, ce qui leur
permettait de réagir immédiatement et rendait ainsi l'opération sans intérêt pour la première
compagnie.

Le Conseil a noté à cet égard dans sa décision que, la Commission européenne a relevé, dans les
décisions Exxon/Mobil et TotalFina/Elf, "une différence de prix entre les stations autoroutières et les
stations hors autoroute de l'ordre de 25 à 30 % du prix HT" et a précisé "que cette différence de prix
était la plus importante de tous les pays de l'Union européenne et ne correspond pas aux coûts des
stations autoroutières qui sont les plus bas de toute l'Union européenne".

Gravité des pratiques et dommage à l'économie

Le Conseil de la concurrence a souligné que ces pratiques sont d'autant plus graves :
! qu'elles ont été mises en œœuvre sur un marché oligopolistique, sur lequel plus la transparence est
importante, moins forte est l'intensité de la concurrence ;
! que les consommateurs de carburants sur autoroutes sont "captifs" et que les sociétés mises en
cause ont mis à profit cet état de fait pour arrêter leur conduite ;

1
Un recours contre cette décision est pendant devant la cour d'appel de Paris.
! que ces pratiques ont eu un caractère généralisé et que, de l'aveu même des gérants des stations-
service interrogés, elles existent "depuis de nombreuses années".

Il a enfin souligné que près de 7 millions d'automobilistes empruntent chaque année le réseau
autoroutier.

Détail du dispositif de sanctions

! Société TotalFinaElf France : 12 millions d'euros ;


! Société Esso Saf : 5 millions d'euros ;
! Société des Pétroles Shell : 5 millions d'euros ;
! Société BP France : 5 millions d'euros.

Décision n° 03-D-17 du 31 mars 2003, relative à des pratiques sur le marché de la distribution des
carburants sur autoroutes
Fiche technique n° 2

Diffusion de la presse dans les aéroports :


le Conseil sanctionne les Nouvelles messageries de la presse
parisienne pour avoir favorisé sa filiale "Relais H"

Par une décision en date du 14 février 2003, le Conseil de la concurrence, saisi par la société Tuxedo,
a estimé que la société Les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) a abusé de la
position dominante qu'elle détient sur le marché de la diffusion de la presse.

Les NMPP, détenues à 49 % par le groupe Hachette, ont adopté un barème de rémunération des
diffuseurs concessionnaires à caractère discriminatoire ayant eu pour effet de favoriser Relais H,
filiale d'Hachette et d'évincer du marché ses concurrents.

Le Conseil a infligé à la société NMPP des sanctions pécuniaires d'un montant de 600 000 euros et lui
a enjoint de supprimer les éléments discriminatoires de son barème général de rémunération.

L'organisation de la distribution de la presse en France

La loi n° 47-535 du 2 avril 1947, relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des
journaux et publications périodiques, dite "loi Bichet", organise le cadre du groupage et de la
distribution de la presse autour du principe coopératif : soit l'éditeur assure directement le groupage et
la distribution de ses titres, soit il se regroupe avec d'autres éditeurs au sein d'une coopérative de
distribution, dite messagerie de presse.

Trois sociétés se partagent le marché national de la messagerie : la société Nouvelle messagerie


parisienne (NMPP), la société Transport presse (TP) et les Messageries lyonnaises de presse.

Le réseau de distribution est constitué, d'une part, des dépositaires centraux qui assurent la répartition
des journaux auprès des diffuseurs et, d'autre part, des diffuseurs de presse qui vendent la presse au
public et constituent l'ultime maillon de la chaîne de distribution. Certains diffuseurs de presse gèrent
des points de vente situés dans l'emprise de concessions du domaine public et de ses dépendances.
Ces concessionnaires exercent, notamment, dans les gares (SNCF et RATP), les hôpitaux, les aires de
repos des autoroutes et les enceintes aéroportuaires.

Les modalités de rémunération des agents de la vente de la presse sont prévues par le décret n° 88-136
du 9 février 1988 qui contient des dispositions spécifiques pour les agents de la vente ayant le statut
de concessionnaires. L'article 6 dispose que "les commissions, perçues par les entreprises
concessionnaires gérant l'ensemble des points de vente situés dans l'emprise de leur concession et
acquittant à ce titre une redevance au concédant chargé d'un service public, ne peuvent excéder 30 %
du montant des ventes exprimées au prix public".

Les NMPP en position dominante sur le marché de la diffusion de la presse

Dans sa décision 87-D-08, le Conseil de la concurrence avait déjà souligné que les NMPP détenaient
une position dominante sur le marché de la diffusion de la presse.
Dans la décision du 14 février 2003, il a estimé que les NMPP étaient en position dominante sur le
marché spécifique des concessions du domaine public pour la diffusion de la presse, marché connexe
de celui de la diffusion de la presse.

Il a par ailleurs rappelé la jurisprudence communautaire selon laquelle il incombe à une société en
position dominante, la responsabilité particulière de ne pas porter atteinte à la concurrence effective
par son comportement.

Le fonctionnement du marché des concessions aéroportuaires

Sur le marché des concessions aéroportuaires, le régime d'occupation du domaine public s'applique.
Depuis 1994, un appel d'offre est nécessaire pour attribuer ces marchés.

De 1994 à 1997, ADP (Aéroports de Paris) a renouvelé les concessions d'occupation du domaine
public relatives à la distribution de la presse dans les aérogares et en a attribué de nouvelles sur
d'autres terminaux.

Lors des trois consultations de 1997, ADP a imposé de nouvelles conditions financières aux
candidats, leur imposant un taux de redevance sur la presse fixe alors que celui-ci faisait auparavant
l'objet d'une proposition commerciale de la part des soumissionnaires.

Les pratiques mises en cause

La société Tuxedo se plaignait d'avoir été éliminée du marché de la distribution de la presse dans les
aérogares à l'occasion du renouvellement de ces concessions par Aéroports de Paris, au profit de la
société Relais H. Selon elle, cette élimination résultait à la fois des conditions financières imposées
par le concessionnaire du domaine public et des pratiques des NMPP concernant les modalités de
rémunération des diffuseurs de presse exerçant leurs activités sur des concessions du domaine public
et les conditions d'organisation du réseau de distribution de la presse sur ces concessions.

Un barème discriminatoire

Le Conseil de la concurrence a considéré que la société NMPP avait abusé, sur le marché connexe de
l'attribution des concessions de diffusion de presse, de la position dominante qu'elle détenait sur le
marché de la distribution de la presse, en élaborant un barème de rémunération des distributeurs de
presse ayant le statut de concessionnaire du domaine public, fondé sur des critères non justifiés qui
ont favorisé la société Relais H, filiale du groupe Hachette, au détriment de ses concurrents.

Ce barème fixait des taux de remise calculés en fonction de tranches du chiffre d'affaires. Ces remises
allaient de 15,5 % pour la plus basse à 30 % pour la plus haute. Or, selon ce barème, seul Relais H
pouvait avoir accès aux conditions de diffusion les plus favorables (à hauteur de 30 %), Tuxedo et ses
concurrents ne pouvant espérer qu'une rémunération inférieure de moitié environ.

Cette discrimination de traitement entre deux concessionnaires, fondée sur des critères non justifiés, a
conduit la société Tuxedo à ne pas présenter de dossier lors du renouvellement des concessions. La
société Tuxedo a en effet considéré que le montant de la rémunération qui lui était versée par les
NMPP était incompatible avec le niveau de redevances demandé par ADP et qu'elle n'était donc pas
en mesure de se maintenir sur le marché concerné dans des conditions d'exploitation normales car ces
conditions la conduisaient à réduire sa marge bénéficiaire à un niveau trop faible, 2 à 3 %,
incompatible avec la rentabilité de l'entreprise.
La mise en place d'un système particulier d'approvisionnement des Relais H

De plus, la société NMPP avait mis en place au sein du réseau de distribution spécifique aux Relais H
un dispositif particulier à l'approvisionnement des aéroports parisiens. Le surcoût de ces plate-formes
de distribution dites "PRH" est supporté par les NMPP, ce qui procurait un avantage concurrentiel à
Relais H dans le renouvellement des concessions d'aéroports.

Le Conseil de la concurrence, qui dans sa décision, a relevé l'existence de liens capitalistiques, d'une
part entre le groupe Hachette et les Relais H (filiale), et d'autre part entre les NMPP et ce même
groupe (actionnaire à hauteur de 49 %), a considéré que ces pratiques avaient eu pour objet et pour
effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché connexe de l'attribution des concessions de la
distribution de la presse pour la vente au numéro et constituaient une pratique prohibée par l'article
L. 420-2 du code de commerce.

Décision n° 03-D-09 du 14 février 2003, relative à la saisine de la société Tuxedo relative à des
pratiques constatées sur le marché de la diffusion de la presse sur le domaine public aéroportuaire
Fiche technique n° 3

Matchs de football de Ligue 1 :


le Conseil prononce des mesures conservatoires

Le 18 novembre 2002, la société TPS a saisi le Conseil de la concurrence d'une plainte pour abus de
position dominante et entente dirigée contre la Ligue de football professionnel (LFP) et les sociétés
Canal Plus et Kiosque (ci-après dénommées Canal Plus).

Par une décision du 23 janvier 2003, le Conseil de la concurrence a prononcé des mesures
conservatoires.

Recevabilité de la saisine : le Conseil de la concurrence a constaté la présence d'éléments justifiant la


poursuite de l'instruction

Lorsqu'une demande de mesures conservatoires est déposée auprès du Conseil de la concurrence, elle
s'accompagne toujours, parallèlement, d'une saisine au fond relative aux pratiques dénoncées. Le
Conseil se prononce d'abord sur la recevabilité de la saisine au fond, condition préalable à l'examen de
la demande de mesures conservatoires et à leur éventuelle adoption.

Le Conseil a tout d'abord relevé que les compétitions de football à caractère régulier se distinguent
par leur capacité à attirer et fidéliser les téléspectateurs de manière durable et que, dès lors, les droits
de diffusion les concernant peuvent être considérés comme un marché distinct. Compte tenu des
caractéristiques propres du championnat de France de Ligue 1, il n'a pas non plus exclu qu'il existe un
marché plus étroit, se limitant aux droits de diffusion des matchs de ce championnat.

Il a, ensuite, considéré qu'il n'était pas exclu que la LFP soit en position dominante sur ces marchés
des droits de retransmission du football, et que Canal Plus soit en position dominante sur celui de la
télévision à péage.

Dans ce cadre, le Conseil a relevé un certain nombre de pratiques dont la licéité concurrentielle mérite
un examen au fond. Il a notamment considéré qu'il ne pouvait être exclu, en l'état du dossier et à ce
stade de l'instruction :
! que les droits de diffusion des matchs du championnat de Ligue 1 constituent un produit essentiel
pour l'activité des télévisions à péage ou, à tout le moins, un élément crucial pour leur
développement et que leur attribution en exclusivité à Canal Plus, opérateur en position
dominante sur le marché de la télévision à péage, puisse avoir des effets restrictifs de
concurrence ;
! que les incertitudes du règlement de la consultation sur la définition et la recevabilité des offres
globales et sa mise en oeuvre aient pu avoir pour objet ou pour effet de créer une discrimination
entre Canal Plus et TPS ;
! que l'offre de Canal Plus, en position dominante sur le marché de la télévision à péage, combinant
des valorisations faibles lot par lot et un prime d'exclusivité très élevée, puisse être considérée
comme une offre d'éviction dirigée contre TPS ;
! qu'il ait pu exister une concertation entre Canal Plus et la LFP afin de favoriser les offres de Canal
Plus, compte tenu des liens contractuels entre Canal Plus et des clubs dont les présidents siègent
au conseil d'administration de la LFP.
L'ensemble de ces éléments a vocation à être examiné lors de l'instruction au fond 1.

Des mesures conservatoires justifiées par une atteinte grave et immédiate à l'entreprise plaignante,
au secteur concerné et à l'intérêt des consommateurs

! Le Conseil a relevé que les abonnés et prospects des chaînes de télévision à péage tiennent
compte des annonces de modification de contenu des programmes, pour déterminer leur choix en
matière d'abonnement.

Le flux des abonnements et désabonnements étant permanent, il a, par conséquent, estimé que
l'annonce de l'attribution de l'exclusivité des droits du championnat de Ligue 1 à Canal Plus, dès
lors qu'elle serait considérée comme définitive par le public, portait une atteinte immédiate aux
conditions de commercialisation des abonnements de TPS (acquisition de nouveaux abonnés et
renouvellement d'abonnements).

Le Conseil a souligné à cet égard que le dommage engendré serait d'autant plus grave que la
rigidité des mécanismes d'abonnement (durée annuelle, modalités de résiliation, contraintes
techniques liées à un changement d'opérateur) rendront très difficilement réversibles les pertes
d'abonnés enregistrées pendant cette période.
! Le Conseil de la concurrence a également relevé le risque pour les consommateurs d'un retour à
une situation d'exclusivité de Canal Plus pour la diffusion du Championnat de Ligue 1 : le
financement d'une telle exclusivité pourrait se traduire par une augmentation du prix des
abonnements, hypothèse que Canal Plus n'a pas écartée devant le Conseil.
! Enfin, se référant à l'avis du CSA, le Conseil a relevé que la disparition de l'un des deux
opérateurs de télévision par satellite aurait des conséquences importantes non seulement sur le
marché concerné mais également sur plusieurs marchés aval et sur l'ensemble des offreurs de
programmes, réduisant ainsi le choix des consommateurs.

Dispositif de mesures conservatoires

Le Conseil de la concurrence demandé à la LFP et à Canal Plus et Kiosque de suspendre les effets de
la décision d'attribution des droits de diffusion des matchs de football de Ligue 1, prise par le conseil
d'administration de la LFP le 14 décembre 2002, jusqu'à l'intervention de la décision du Conseil de la
concurrence sur le fond 1 et, en conséquence, de s'abstenir de toute communication tendant à présenter
la décision d'attribution de la LFP comme définitive et d'en faire toute utilisation publicitaire ou
commerciale dans leur démarche de prospection de nouveaux abonnés.

Décision n° 03-MC-01 du 23 janvier 2003, relative à la saisine et à la demande de mesures


conservatoires présentées par la société TPS

1
Un recours a été formé contre cette décision de mesures conservatoires auprès de la cour d'appel de Paris par
la Ligue de football professionnel et Canal Plus.
Sur la proposition de la cour, un processus de médiation a été ouvert, à l'issue duquel les parties sont
parvenues à un accord (homologué dans un arrêt du 29 avril 2003 de la cour d'appel) et se sont désistées de
leur saisine au fond auprès du Conseil de la concurrence (mai 2003).
Fiche technique n° 4

Gaz médicaux hospitaliers :


deux filiales du groupe L'Air liquide sanctionnées

Le Conseil de la concurrence, saisi par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a


sanctionné plusieurs filiales du groupe L'Air Liquide pour des pratiques anticoncurrentielles mises en
œœuvre dans le secteur des gaz médicaux hospitaliers. Le montant total des sanctions s'élève à
4,3 millions d'euros.

Le marché des gaz médicaux hospitaliers

Les gaz médicaux sont des gaz utilisés par les établissements de soin ou les particuliers, à des fins
thérapeutiques ou pour l'application de techniques médicales (oxygène, protoxyde d'azote, air médical
comprimé, gaz carbonique, azote et des mélanges gazeux……). Le 31 décembre 1992, la direction de la
pharmacie et du médicament (DPHM) a décidé que les gaz à usage médical étaient désormais des
médicaments. Ce nouveau statut a obligé le secteur à se réorganiser et a entraîné une augmentation
des coûts de production et de distribution.

Les hôpitaux publics et la plupart des établissements privés organisent des appels d'offres pour
sélectionner leurs fournisseurs.

Jusqu'en 1998, deux sociétés du groupe L'Air liquide intervenaient en France dans le secteur des gaz
médicaux et détenaient ensemble plus de 70 % du marché des gaz médicaux : d'une part, la société
CFPO (à laquelle a succédé la société Air liquide santé) et d'autre part, la société Carboxyque
française (à laquelle a succédé la société Carboxyque santé).

Répartition de marché et entente sur les prix

L'analyse du dossier a mis en évidence des pratiques d'entente de prix et de répartition de marché
entre les deux sociétés en 1994, 1995 et 1996.

Les sociétés CFPO et Carboxyque étaient la plupart du temps les deux seules sociétés à présenter des
offres lors des passations de marché. Elles se présentaient alors comme deux sociétés autonomes,
présentant des offres distinctes et concurrentes, alors qu'en réalité, elle se concertaient préalablement
sur les prix et se répartissaient les marchés.

Afin d'accroître les marges du groupe, les deux sociétés se sont entendues pour faire accepter aux
établissements hospitaliers, en cours de contrat et lors des appels d'offres, des augmentations de prix
importantes, qu'elles justifiaient de la même façon par l'apparition de nouvelles charges liées au
nouveau statut des gaz médicaux.

Elles déterminaient par ailleurs des zones géographiques de développement réciproque et se


répartissaient les clients entre elles.
Des pratiques d'entente particulièrement graves

Le Conseil de la concurrence a constaté que :


! la demande hospitalière se caractérise par une rigidité au changement de fournisseur, par crainte
de ruptures d'approvisionnement incompatibles avec la sécurité des patients ;
! l'élasticité au prix des gaz médicaux est très faible en raison de leur caractère indispensable et non
substituable ;
! les gaz médicaux constituent enfin des médicaments dont le coût est intégralement pris en charge
par les organismes de sécurité sociale, ce qui garantit au fournisseur une totale solvabilité de la
demande.

Dans un tel cadre, les prix sont potentiellement portés à la hausse et le Conseil a rappelé le rôle
déterminant d'une véritable mise en concurrence lors de la passation de ces marchés, celle-ci
constituant alors le seul frein efficace à une dérive des prix.

Il a par ailleurs rappelé qu'il est particulièrement grave de mettre en œœuvre une politique de tromperie
à l'égard des acheteurs publics et a tenu compte, pour la fixation du montant des sanctions, de
l'importance du marché en cause (supérieur à trois milliards de francs au total pour les trois années
concernées) et de la position dominante des deux entreprises en cause (70 % du marché considéré).

Dispositif de sanctions

Le Conseil de la concurrence a prononcé des sanctions pécuniaires à l'encontre des sociétés


impliquées à l'époque des faits ou bien venant aux droits et obligations de celles-ci, suite aux diverses
opérations de rachat et de fusion intervenues depuis lors :
! société Carboxyque française : 1 400 000 €€
! société Air liquide santé international : 285 000 €€
! société Air liquide santé France : 2 700 000 €€

Il a également enjoint aux trois sociétés citées de publier partiellement la décision, dans le quotidien
Les Échos et dans la revue Le Moniteur hospitalier.

Décision n° 03-D-01 du 14 janvier 2003, relative au comportement de sociétés du groupe L'Air


liquide dans le secteur des gaz médicaux
Fiche technique n° 5

Entente de prix dans le secteur des roulements à bille :


les principaux fabricants sanctionnés

Le Conseil de la concurrence, saisi par le ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie, a


sanctionné par une décision du 19 septembre 2002, une entente entre les principaux fabricants de
roulements à bille présents sur le marché français, pour un montant total de 19 014 000 euros
(124,7 millions de francs) 1.

Une entente sur les prix bruts et sur les taux de remise accordés

Le Conseil de la concurrence a établi qu'en 1993 et 1997, les sociétés SKF (suédoise), SNR
(française), FAG et INA (allemandes), ont eu des contacts répétés et se sont entendues sur le niveau
des hausses de prix bruts ainsi que sur les taux de remise applicables aux distributeurs. Par ailleurs, il
a également relevé, qu'en 1993, les sociétés japonaises Koyo et NSK s'étaient entendues avec
certaines des sociétés précitées, sur le niveau de hausse de prix à appliquer à plusieurs clients
industriels.

Le Conseil de la concurrence a souligné que de tels échanges d'informations sur les augmentations de
prix bruts et sur les évolutions des taux de remise, avant que celles-ci ne soient annoncées et ne
deviennent effectives, sont de nature à favoriser des hausses artificielles de prix. Les sociétés
concernées sont, en effet, d'autant plus incitées à procéder à de telles hausses, qu'elles sont assurées
que leurs concurrents augmenteront également leurs prix au même moment.

L'instruction a également montré que les fabricants retiraient leur assistance technique aux
distributeurs lorsque ceux-ci répondaient à des demandes de clients situés en dehors de la zone pour
laquelle ils avaient été agréés. Le Conseil de la concurrence a considéré qu'une telle pratique était de
nature à limiter la concurrence entre les distributeurs et venait en outre conforter les ententes de prix
passées au niveau des fabricants.

Des pratiques graves qui justifient des sanctions pécuniaires substantielles

Ces pratiques constituent la violation la plus flagrante du droit de la concurrence et sont


particulièrement répréhensibles dans la mesure où :

1. elles se sont répétées et ont perduré pendant plusieurs années,

2. elles concernent les roulements, matériel indispensable au fonctionnement de toute machine


mécanique et utilisé dans de très nombreuses branches de l'activité économique ; elles ont été
mises en œœuvre par des entreprises dont les ventes de roulements sur le marché français
représentaient près des 3/4 du total des ventes en 1998,

1
Un recours contre cette décision est pendant devant la cour d'appel de Paris.
3. elles ont abouti à une hausse artificielle des prix bruts du secteur : les hausses de prix bruts
annoncées par les fabricants participant à l'entente (soit 3 % fin 1993, 4,5 % mi-1994, 4,5 %
début 1995 et 3,5 % début 1998) ont conduit à une hausse cumulée de 16,4 % sur l'ensemble de
la période. Même si les prix bruts font traditionnellement l'objet de remises importantes, ces
concertations ont pu avoir un effet sur les prix nets pratiqués, d'autant plus que les remises ont
fait, elles aussi, l'objet d'entente.

Dispositif de sanctions

! 7 900 000 euros à la société SKF-France


! 32 000 euros à la société FAG France
! 6 600 000 euros à la société SNR Roulements
! 4 000 000 euros à la société INA Roulements
! 162 000 euros à la société Koyo-France
! 320 000 euros à la société NSK France (anciennement NSK-RHP-France)

Décision n° 02-D-57 du 19 septembre 2002, relative à des pratiques dans le secteur des roulements à
bille et assimilés
Fiche technique n° 6

Le Conseil de la concurrence lève la suspension


de la commercialisation des packs eXtense de Wanadoo
dans les agences France Télécom

Par la décision du 19 juillet 2002, le Conseil a levé la suspension de commercialisation des packs
eXtense de Wanadoo dans les agences France Télécom.

Cette décision fait suite à la mesure conservatoire prononcée par le Conseil le 27 février dernier, par
laquelle il avait enjoint à la société France Télécom :
! de mettre à la disposition des fournisseurs d'accès internet (FAI), autres que Wanadoo, un serveur
extranet ;
! et, en attendant, de suspendre la commercialisation des packs Wanadoo dans ses agences
commerciales tant que ce serveur ne serait pas opérationnel pour au moins deux FAI concurrents
de sa filiale Wanadoo.

Il était précisé que cette suspension pourrait être levée par le Conseil dès que deux contrats au moins
auraient été signés entre France Télécom et des FAI. Par ailleurs, il était prévu que les parties
rendraient compte, dans un délai de quatre mois au plus tard, des dispositions prises par France
Télécom pour se conformer à l'injonction prononcée.

Rappel des faits

La société T-Online, fournisseur d'accès à Internet sous la marque Club Internet, avait saisi le Conseil
en novembre 2001, se plaignant du fait que France Télécom avantageait sa filiale Wanadoo par
rapport aux autres FAI dans la fourniture de l'accès à Internet haut débit par l'ADSL.

La décision de mesures conservatoires 02-MC-03 du 27 février 2002, confirmée par la cour d'appel de
Paris, avait pour finalité de mettre sur un pied d'égalité les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) par la
mise en place d'un serveur Extranet et visait à faire respecter le principe de non discrimination lors de
la fourniture du service de vérification de l'éligibilité de la ligne et de passation de commandes.

La levée de l'interdiction de commercialisation des packs Wanadoo dans les agences France Télécom

Le délai de 4 mois ayant expiré, le Conseil a réexaminé la situation et après avoir entendu les parties,
a décidé de mettre fin à la suspension de la commercialisation des packs ADSL de la société
Wanadoo Interactive dans les agences commerciales France Télécom.

Il a pris en considération les efforts faits par la société France Télécom pour se conformer à
l'injonction prononcée à son encontre et a notamment retenu à cet égard, les améliorations apportées
relatives à l'information et à la prise de commande de connexion ADSL.

Il a également constaté que la condition posée dans la décision du 27 février 2002 est respectée,
puisque plus de deux sociétés (Magic Online, Nordnet, Câble & Wireless) ont contracté avec la
société France Télécom.

Décision n° 02-D-46 du 19 juillet 2002, relative à l'application de l'article 3 de la décision 02-MC-03


du 27 février 2002
Fiche technique n° 7

Marché de l'eau :
le Conseil demande au ministre de remettre en cause
les filiales communes de la CGE et de la SLDE

Par une décision du 11 juillet 2002, le Conseil de la concurrence, qui s'était saisi d'office, a établi que
les sociétés Compagnie générale des eaux (CGE) et la Lyonnaise des eaux (SLDE) détenaient une
position dominante collective sur les marchés de l'eau et de l'assainissement et qu'elles en avaient
abusé. Il a appliqué pour la première fois l'article L. 430-9 du code de commerce en demandant au
ministre de l'Économie le réexamen, pouvant aller jusqu'au démantèlement des filiales communes que
les entreprises en cause avaient créées conjointement.

Les marchés de la distribution et de l'assainissement d'eau sont dominés collectivement par deux
grands groupes : la CGE et la SLDE

Les marchés de l'assainissement et de la distribution d'eau sont des marchés très concentrés. La CGE
et la SLDE détiennent environ 85 % de ces marchés et ces deux groupes ont créé des entreprises
communes dans plusieurs régions.

Le Conseil a considéré que la CGE et la SLDE détenaient une position dominante collective sur les
marchés de la distribution et de l'assainissement de l'eau, prenant en considération les éléments
suivants :
! l'importance de leur part de marché respective ;
! l'existence de liens structurels entre elles ;
! la nature même du marché (faiblement contestable) et les caractéristiques du produit
(homogénéité et faible élasticité du prix par rapport à la demande), propres à favoriser des
comportements de collusion.

Le jeu de la concurrence faussé lors des appels d'offres publics

Lors de plusieurs appels d'offres publics lancés par des collectivités, à partir de juin 1997, les sociétés
mères s'étaient abstenues de présenter leur candidature. En renonçant à répondre à ces appels d'offres
et à se positionner en concurrence avec leurs filiales communes, les sociétés CGE et SLDE ont limité
l'intensité de la concurrence. Le Conseil a estimé qu'elles avaient ainsi abusé de leur position
dominante collective car une entreprise ou un groupe d'entreprises en position dominante a la
"responsabilité particulière de ne pas porter atteinte, par son comportement, à une concurrence
effective sur le marché".

La remise en cause des filiales communes

Invoquant pour la première fois l'article L. 430-9 du code de commerce, le Conseil a demandé au
ministre chargé de l'Économie d'enjoindre aux sociétés Compagnie générale des eaux et Lyonnaise
des eaux de "modifier, compléter ou résilier, dans un délai déterminé, tous accords et tous actes qui
ont conduit ces entreprises à associer leurs moyens dans le cadre des filiales communes qu'elles ont
créées conjointement dans les secteurs de l'eau potable et de l'assainissement". Il appartient donc au
ministre d'examiner, au cas par cas, s'il y a lieu de démanteler ces filiales communes.
Le Conseil a décidé qu'il n'y avait pas lieu de prononcer de sanctions pécuniaires à l'encontre des
sociétés CGE et SLDE, prenant en considération le fait que les autorités chargées du contrôle des
concentrations n'avaient pas remis en cause, en amont, la création des entreprises communes et que
celle-ci avait parfois résulté des exigences des collectivités plus que de la volonté des sociétés mères.

Par cette décision, le Conseil n'a pas souhaité exercer un rôle répressif mais s'est plutôt attaché, dans
le cadre de sa fonction régulatrice, à agir sur la structure du marché afin de corriger à leur source les
dysfonctionnements observés.

Décision n° 02-D-44 du 11 juillet 2002, relative à la situation de la concurrence dans les secteurs de
l'eau potable et de l'assainissement, notamment en ce qui concerne la mise en commun des moyens
pour répondre à des appels à la concurrence
Fiche technique n° 8

Appareils électroménagers et audiovisuels :


le Conseil sanctionne une entente
entre les principaux distributeurs et certains fabricants

Par une décision du 28 juin 2002, le Conseil de la concurrence a sanctionné le fabricant de produits
électroménagers Thomson, ainsi que les distributeurs Fnac, Darty, Euromarché, Connexion, Camif et
Conforama, pour un montant total de 34 160 000 euros (224 millions de francs) 1.

Bien que la société Akaï ait activement participé aux pratiques sanctionnées, le Conseil n'a pas
prononcé de condamnation pécuniaire à son encontre en raison de sa mise en liquidation judiciaire.

Les marques Akaï et Thomson comptent parmi les plus vendues en France en ce qui concerne les
magnétoscopes, caméscopes et téléviseurs.

Des produits Akaï au même prix dans la plupart des magasins……

Une enquête de grande envergure, dans le cadre de laquelle de très nombreux relevés de prix ont été
opérés, a permis de mettre en évidence que les distributeurs mis en cause pratiquaient des prix
identiques (ou très proches) pour chaque référence de la marque Akaï.

Le Conseil de la concurrence a constaté que cet alignement de prix procédait d'une série d'ententes
verticales sur le prix de vente au détail en magasin, entre Akaï et les cinq distributeurs Fnac, Darty,
Euromarché, Connexion et Conforama.

Cet alignement de prix, mis en place lors des négociations commerciales entre Akaï et ses
distributeurs, était ensuite consolidé par la politique commerciale et publicitaire mise en œœuvre par
ces derniers :
! l'uniformité des prix était contrôlée, à la fois par le fabricant, par le biais de ses forces
commerciales, et par les distributeurs eux-mêmes, au moyen de la clause de remboursement aux
consommateurs de la différence de prix, dans le cas où ceux-ci signaleraient qu'un même produit
était offert à un prix moins élevé par un distributeur voisin. Cette clause permettait, en fait, de
faire repérer par les consommateurs, les distributeurs qui ne respectaient pas le prix convenu ;
! la diffusion de catalogues et de publicités nationales ou locales permettait par ailleurs aux
distributeurs de s'assurer du respect généralisé à l'ensemble du territoire national des prix ainsi
convenus.

Thomson "négociait" le prix de vente de ses produits au catalogue de la Camif

L'enquête et l'instruction ont aussi mis en lumière que les prix de vente des produits du groupe
Thomson (marques Thomson, Brandt, Saba, Telefunken) vendus par la Camif à ses adhérents, avaient
été fixés d'un commun accord entre les deux parties lors de négociations commerciales, bien avant
l'impression et la diffusion du catalogue de vente par correspondance.

1
Un recours contre cette décision est pendant devant la cour d'appel de Paris.
Le consommateur final, victime de ces pratiques

Cette série d'ententes entre Akaï et ses distributeur a abouti à une uniformisation des prix de vente au
consommateur. Elles ont permis à Akaï et à ses distributeurs de garantir leurs marges de rémunération
et ont pénalisé le consommateur final en rendant impossible le libre jeu de la concurrence par les prix
entre distributeurs d'un même produit.

De même, la fixation en commun des prix de vente entre le fabricant Thomson et la Camif a
potentiellement privé le consommateur de la possibilité de bénéficier de prix qui auraient pu être
moins élevés.

Des pratiques graves, dont la portée justifie des sanctions pécuniaires

Les ententes de prix font partie des pratiques anticoncurrentielles les plus graves et sont
systématiquement relevées et sanctionnées par les autorités de concurrence. En l'espèce, ces pratiques
sont d'autant plus graves que les entreprises en cause sont des acteurs importants du marché :

La société Akaï (spécialiste des produits dits "bruns") est, avec la société Philips, en première
position des ventes de magnétoscopes.

Parmi les distributeurs, le groupe Pinault-Printemps-La Redoute (qui détient la Fnac, Conforama) est
leader sur le segment de la distribution "spécialisée", suivi par le groupe Darty.

La société Euromarché (groupe Carrefour) est, en ce qui la concerne, leader sur le segment de la
distribution assurée par le circuit des hypermarchés à dominante alimentaire.

La société Thomson est, pour sa part, avec la société Philips, en première position des ventes de
téléviseurs. Quant au groupe Camif, il est le troisième distributeur à distance.

Le Conseil a relevé que la mise en œœuvre d'ententes de ce type, par des distributeurs aussi importants,
peut donner à penser aux autres fournisseurs et distributeurs indépendants que ce comportement est
normal et les inciter à les adopter. Il a donc considéré que le dommage causé à l'économie dépassait le
simple enjeu des marques et distributeurs concernés : le dispositif de sanction tient compte de ces
éléments, mais aussi de la durée et de l'étendue des pratiques ainsi que des chiffres d'affaires des
sociétés en cause. Le Conseil a également pris en considération le fait qu'il s'agit d'une réitération de
pratiques pour les sociétés Thomson, Darty et Conforama, lesquelles avaient déjà été, dans le passé,
condamnées pour des pratiques analogues en 1980.

Décision n° 02-D-42 du 28 juin 2002 relative à des pratiques dans le secteur de la distribution des
appareils électroménagers et d'électronique grand public
Fiche technique n° 9

35 opticiens de la région lyonnaise condamnés


pour avoir tenté d'éliminer un concurrent moins cher

Le Conseil de la concurrence, saisi par le ministre de l'Économie, a sanctionné, par une décision du
14 juin 2002, une entente entre 35 opticiens de la ville de Lyon. Ces opticiens avaient organisé le
boycott des fournisseurs de l'un de leurs concurrents, qui pratiquait des rabais sur le prix des montures
de lunettes.

Le Conseil a prononcé des sanctions pécuniaires à l'encontre des opticiens et à l'encontre d'un
fournisseur qui s'était associé à leur action, pour un montant total de 2 046 894 euros 1.

C'est la première fois que le Conseil de la concurrence sanctionne sur la région lyonnaise une entente
de cette envergure, impliquant un nombre aussi important d'entreprises. Le Conseil souligne que la
concurrence permet aux consommateurs de bénéficier de prix bas et donc de protéger leur pouvoir
d'achat. Le boycott collectif mis en œœuvre par un grand nombre d'opticiens lyonnais est une pratique
particulièrement grave, dans la mesure où il empêche les consommateurs de bénéficier de rabais
important sur un produit essentiel de la vie quotidienne.

En 1996, l'ouverture d'Optical Center bouleverse le marché

Fin septembre 96, un magasin d'optique, "Optical Center", ouvre ses portes en plein coeur de Lyon. Il
mène une politique commerciale agressive basée sur des remises importantes - jusqu'à 40 % - sur les
montures de lunettes (y compris sur celles de marques prestigieuses), relayée par une campagne
marketing et publicitaire centrée sur les prix bas.

Les opticiens de Lyon se mobilisent contre la politique de "discount" d'Optical Center

En réaction à cette campagne et à l'initiative de quatre opticiens du centre de Lyon (les sociétés
Bourdeau, Nagabbo, Chavril et Europtic), une quarantaine d'opticiens de la région lyonnaise se sont
réunis afin de s'entendre sur les mesures de représailles à mettre en œœuvre à l'encontre des fabricants
des montures présentées dans le magasin Optical Center, l'objectif commun étant de les inciter à
renoncer à livrer ce point de vente et d'organiser leur boycott dans le cas où ils ne céderaient pas à
leurs sollicitations.

En pratique, ces représailles ont pris la forme de courriers, contacts téléphoniques et pressions
exercées auprès des représentants des fournisseurs concernés. Elles ont dans un certain nombre de cas
pris la forme de rétorsions commerciales (ralentissement, suspension ou annulation de commandes,
retrait des produits présentés en vitrine, cessation des relations commerciales) vis-à-vis des
fournisseurs d'Optical Center.

1
L'arrêt de la cour d'appel de Paris du 18 mars 2003 a confirmé cette décision sur le fond mais a réformé à la
baisse le montant des sanctions prononcées.
Le fabricant L'Amy rejoint le mouvement de boycott

Cédant à ces pressions, le fabricant L'Amy (qui commercialise notamment les marques Lacoste et
Nina Ricci) s'est joint au mouvement afin d'obtenir que le magasin Optical Center change de politique
commerciale et qu'il renonce à sa politique de prix bas. Après avoir pris diverses mesures de rétorsion
(certaines ayant été étendues à tous les points de vente Optical Center en France), il a finalement
rompu unilatéralement toute relation commerciale avec Optical Center Lyon.

Outre les sanctions pécuniaires prononcées, le Conseil a ordonné la publication d'une partie de la
décision dans le quotidien régional Le Progrès et dans le revue spécialisée Vente Optique.

Décision n° 02-D-36 du 14 juin 2002, relative à des pratiques relevées dans le secteur de la
distribution de lunettes d'optique sur le marché de l'agglomération lyonnaise

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