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Caillet Robert. Le remède universel du docteur Ailhaud. In: Revue d'histoire de la pharmacie, 42ᵉ année, n°141, 1954. pp. 251-
266.
doi : 10.3406/pharm.1954.8538
http://www.persee.fr/doc/pharm_0035-2349_1954_num_42_141_8538
REVUE D'HISTOIRE
DE LA PHARMACIE
Juin 1954
LE REMÈDE
UNIVERSEL
du docteur jtiLuhaua
privés
Un des Mens
sages
secours
Si tibipréceptes
Maris,
deficiant
du corps
requies
demédical
medici,
l'Ecole
moderata,
medici
: de Salerne
fiant
dieta.s'adresse
haec triaaux
: malades
LA FAMILLE
NAISSANCE DE LA P OITJOKE,
SES CONTREFACTEURS, SON SECRET
S'il faut, faute de mieux, s'en remettre aux déclarations de Jean
Ailhaud, la découverte du Remède universel eut pour point de
départ l'état maladif de son inventeur. Il l'explique dans son Traité
de V origine des maladies et de Y usage de la Poudre purgative, p. 15
de l'édition de 1755.
Jeune médecin, « d'une santé délicate, héritier de la maladie
paternelle, et traînant une vie fort languissante », il cherchait « un
véritable remède à toutes ses infirmités ». U prit « la voie des
purgatifs », de préférence à celle des saignées préconisée par ses
maîtres ; et après avoir reconnu « que ce n'étoit pas du sang que
venoient les maladies, mais des humeurs qui le dérégloient », que
« toutes les maladies ne procèdent que d'une seule cause et qu'il ne
faut qu'un seul remède pour détruire cette cause générale des
maladies », il composa sa poudre, l'expérimenta et la porta à un si haut
point de perfection que, dit-il, « m'anéantissant en la présence de
Dieu, je crus certainement que c'étoit une grâce singulière dont il
voulut favoriser les hommes ».
Prenez ma poudre, concluait-il, usez-en sans crainte, et suivez mon exemple :
Quoique dès ma naissance faible et infirme, j'ai eu le bonheur d'arriver à l'âge
die 81 ans plein de santé, père d'une nombreuse et forte famille ; à présent
même, par la grâce de Dieu, pleine de vie et de santé ; et je ne leur ai jamais
donné autre remède, je n'en ai jamais pris d'autre moi-même pour quelque
maladie que c'ait été.
Italie fut traduit non seulement en italien, mais en latin, pour séduire
les médecins et les religieux de la péninsule. Beaucoup de ces
prospectus en langues étrangères sortirent des presses de l'imprimeur
carpentrassien D. G. Quenin.
Un sieur Astoud, fixé à Avignon, devint régisseur général, et Malet,
dit Malet de Ternante, rue Caisserie à Marseille, entrepositaire
général.
II ne paraît pas que la confection de la poudre ait donné de gros
soucis, ni qu'elle ait exigé l'intervention de spécialistes ; la main-
d'uvre familiale, ou celle des serviteurs, fut sans doute suffisante et
satisfaisante. La correspondance ne contient aucun détail sur ce point ;
nous y trouvons seulement une mention, en 1 780, portant que « le
baron de Castellet travaille aux poudres à Crillon ».
En peu de temps, les expéditions se multiplient. Les destinataires
sont presque toujours des religieux : à Venise, le R.P. Victor de
Sainte-Marie dirige un entrepôt qui approvisionne Trévise, Vicence,
Vérone et Padoue ; pour Venise même, la vente est confiée au R.P.
de Gonzague. Le P. Isidore, des Missions étrangères, emporte 1 .500
prises qu'il écoulera à Bassora ; le P. Marie, une pareille provision
à débiter à Ispahan. A Rome, le stock est déposé chez l'abbé de la
Recluse, qui touche 5 sols de commission par prise, 5 % pour ses
frais, 1 0 % en plus en cas de prompt paiement, tout comme les autres
vendeurs.
Mais quelle fâcheuse histoire I Rome est affligée d'une épidémie
des plus graves ; quarante mille malades ; l'abbé dépositaire n'échappe
pas à la contagion, ni ses nombreux clients. L'abbé perd toute
confiance, il crie à l'imposture, il accuse la poudre d'inefficacité et
verse son amertume dans une lettre désolée à Malet ; celui-ci tente
de le calmer en déclarant doctement que certains maux peuvent parfois
résister à tous les remèdes !
Après la mésaventure de Rome, un grave souci vient de l'entrepôt
de Cadix ; la poudre y est saisie, « d'ordre du gouverneur et de la
part des médecins, chirurgiens et apothicaires de la ville ». On fait
grief au dépositaire de mettre en vente un produit dont il ignore la
composition. Il faut lutter, présenter un mémoire, produire l'arrêt du
Conseil d'Etat de 1 769 et les lettres patentes de 1 772 ; enfin, le
LE REMÈDE UNIVERSEL DU D* AILHAUD 261
leurs huit' enfants, ils partageaient leur temps entre Aix, Vitrolles,
Avignon, Crillon, Marseille et Paris ; surtout Paris l'attirait et le
retenait ; il y demeurait chez son entrepositaire de Mestre de Rival,
place du Chevalier-au-guet, jusqu'en 1781.. Puis il voulut mieux
soutenir son rang et acheta un hôtel particulier. Il écrivait en janvier
1 782 : « J'ai un des plus beaux hôtels de Paris et une des plus
jolies maisons de plaisance à ses environs. Les fêtes de la Cour
m'occupent autant que les préparatifs de mon départ... » C'est
Marseille qui l'attend, où il a loué une grande maison « pour s'y loger
avec sa femme et vingt-cinq maîtres ou valets ». Il y emmènera ses
trois secrétaires et son maître des équipages. Malet, qui l'annonce,
ajoute : « Ce seigneur est puissamment riche I » Mais Malet n'est-il
pas contraint de le certifier ?
Le personnel affecté à la poudre se ressent des troubles de sa
trésorerie ; Tramier, homme d'affaires du baron à Crillon pour les
fabrications et les expéditions, Tramier, qui ajoute à son nom celui
de La Boissiere, est suspecté, puis suspendu ; il quitte son service en
1781. Astoud, mandataire général des d'Ailhaud à Avignon, a cessé
de plaire, et tous les dépositaires en sont informés. On le remplace par
un sieur Oddo, qui, ne voulant pas être en reste avec Malet (de
Ternante) , ni avec Tramier (de La Boissiere) enrichit son patronyme
du nom de sa terre de Fontlebre. Cet Oddo de Fontlebre, tout en
restant le directeur général du débit du Remède universel, s'est
associé avec Faure de Beaufort, ancien professeur de médecine, pour
la vente des « Eaux antiputrides minérales » que ce docteur a
composées.
Le baron a dépensé sans compter, tiré des traites sans couverture,
signé des engagements au-dessus de ses moyens. Il lui faut fuir Paris,
déléguer ses créances à ses banquiers et subir la honte d'une liquidation
judiciaire en 1 786.
Les dossiers d'Aix sont muets sur le Remède jusqu'en 1827 ; cette
année-là, M. d'Ailhaud de Montjustin écrivait de Vitrolles à Chau-
tard, président du Tribunal de commerce, et à son neveu négociant,
tous deux à Aix, au sujet de fournitures de poudres. Solde de
confections antérieures ou fabrications nouvelles ?
LB REMÈDE UNIVERSEL DU Dr AILHAUD 263
Robert Caillet,
Conservateur honoraire de la Bibliothèque
Inguimbertine de Carpentras.
BIBLIOGRAPHIE
MauriceLaBouvet,
liste desestpublications
abondante. On
concernant
peut g ajouter
la Poudre
les références
d'Ailhaud suivantes
relevée par: M.
ATTESTATIONS DE GUÉRISONS
publiées
connaissance
donner
Il faudrait
desicidepuis
maladies
quelques
pouvoir
1737,
etbrefs
des
jusqu'en
extraire
murs
extraits
des
1782,
ducaractéristiques
dizaines
temps.
de nombreux
Nous
de milliers
ne:passages
pouvons,
de lettres
utiles
faute àdelaplace,
guérisons
que
me saigner des deux bras ; ensuite de quoi, dans le courant d'un mois, ils me
firent saigner cinq fois des deux pieds, et me firent prendre les bouillons amers ;
après quoi, on me fit prendre les eaux de Balaruc. Je restai entre les mains de
ces habiles gens l'espace de six mois, sans qu'au bout de ce temps je fusse
soulagé.
...Manquant de confiance à tous ces Messieurs, je m'abandonnai entre les bras
de la Providence, et me résignai à sa Sainte volonté.
...L'on a recommencé de plus belle à me saigner et mûdicamenter sans que
j'aie éprouvé plus de soulagement que dans les premières opérations jusqu'au
10 septembre dernier, qu'il me tomba entre les mains un de vos livres
imprimés...
Les premières prises m'ont fait une évacuation considérable. J'ai été à la selle
avec beaucoup de facilité, 24, 27, 29, 31, et jusqu'à 36 fois par, jour, et à la
septième prise je ne fus à la selle que 4 a 5 fois, me sentant un mal d'estomac
insupportable, et un mal de cur affreux. L'après-midi de cette septième prise,
après avoir pris un bouillon sur les 4 heures, je rendis par le fondement un
paquet de glaires entrelacées les unes dans les autres comme de petites
couleuvres, la moitié d'un grand pot de chambre ; lequel paquet j'aurois porté au
bout d'un bâton à une lieue.
Je n'ai point discontinué, malgré cette évacuation, de prendre tous les jours
de cette Poudre. J'ai suivi de point en point la règle prescrite par votre livre.
Je n'ai point discontinué d'aller à la selle 30, 35 et même 40 fois par jour, sans
m'en trouver aucunement incommodé. Mes dernières selles sont des glaires
visqueuses, des biles jaunes, vertes, grises, noires, et puent comme une
charogne.
La dix-septième prise de votre poudre ne m'a pas fait une grande évacuation ;
mais l'après-diner, en revanche, je rendis par le fondement un abcès long et gros
comme un saucisson de Boulogne ; et cela m'arriva malgré moi, en descendant
un escalier, sans peine ni douleur. Il pesoit au moins une livre et cinq
quarterons, et étoit comme une espèce de poche que nous appelions ici crépinète. Les
bords étoient épaix comme deux écus de six francs ; le dessus, jaune comme de
l'ochre ; le dedans, gris et verd ; et dans le milieu de ce poison, il s'est trouvé
de petits vers tout blancs, longs comme des épingles et la quantité d'une tasse
à café.
J'ai toujours continué de prendre de cette poudre depuis que ce poison a été
hors de mon corps. Je vais à la selle tous les jours, 25, 30, 35 et jusqu'à 43 fois.
Je ne discontinue point de rendre des biles vertes, jaunes et noires comme à
l'ordinaire.
Je puis dire avec vérité que, grâces à Dieu et à vous, Monsieur, depuis douze
jours j'ai grand appétit. Je dors 8 à 10 heures de suite... ; les douleurs et pico-
temens que je sentois dans tous les membres sont totalement diminués... [etc.].
Signé : Fleury, ancien Valet de Chambre de Madame la Princesse de
Neufchâtel ; demeurant à Paris, rue des Fossoyeurs, proche le
petit Calvaire, chez M. Couque, Anglois.
...Enfin, Monsieur, pour mon bonheur et pour mon salut, M. de Ruffy mon
ancien ami vint en garnison à La Fère, et me trouva dans un état affreux. Il me
fit voir clairement que l'antipatie que j'avois contre vos poudres étoit une folie
de ma part... Je le crus
...Enfin, Monsieur, depuis trois ans, je n'ai pas eu le plus léger ressentiment
de goûte.
Ayant éprouvé par moi-même un effet si salutaire, je ne balançai pas à en
faire prendre à mes enfants ; en six ans j'en avois perdu six, et les quatre qui
me restoient annonçoient une fin prochaine et auroient péri très infailliblement
sans le secours de vos poudres divines.
Ma femme et moi leur en fîmes prendre à tous, ayant grande attention de faire
fermer les portes du château à tous médecins et apothicaires ; et depuis cet
heureux moment nos enfants se portent à merveille et jouissent de la meilleure
santé»...
Je ne m'en suis pas tenu là, après avoir éprouvé sur moi et sur mes enfants
la bonté de votre remède, je m'en suis servi et m'en sers très souvent pour mes
domestiques et les païsans de mes terres ; j'ai éprouvé les succès les plus
favorables. Je n'entreprens pas une seule cure que je ne réussisse et mes païsans
appelent aujourd'hui votre poudre, la Poudre du Miracle.
Signé : Le marquis de Flavigny, au château d'Elincourt,
près Saint-Valéry-sur-Somme.
VII. Dans le même recueil, pp. 210-211 :
Luçon, Bas-Poitou, 15 avril 176h.
Je suis établi à Moric avec une dame dont le mérite égale la vertu, et qui fait
toute ma consolation ; mais j'ai été l'espace de six mois dans des alarmes
continuelles à son occasion, lui étant survenu un mal d'estomac insupportable avec
des tiraillements dans la poitrine qui lui répondoient dans le dos, qui la fai-
soient pousser les hauts cris...
...Voyant cette tendre épouse à l'âge de 38 ans périr à vue d'il..., j'étois au
desespoir quand, par un coup du Ciel, un de vos livres, Monsieur, tomba entre
mes mains. Je le lus avec exactitude, et je reconnus son mal ; je ne balançai
point d'envoyer chercher trois paquets de vos poudres aux sables d'OUomnes...,
la quatrième prise l'a entièrement rétablie.
...Enfin, Monsieur, après Dieu, elle vous doit la vie, et moi, Monsieur, une
épouse tendrement aimée...
Signé : Froment de St-Pol, ancien officier d'infanterie.