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Bas-Fonds Et Riziculture
Bas-Fonds Et Riziculture
et riziculture
Editeur scientifique
Michel Raunet
Structure et fonctionnement d'un bas-fond rizicultivé sur les hautes terres de Madagascar
M. RAUNET 99
Rôle des facteurs tectoniques et géomorphologiques dans l'organisation des systèmes
de bas-fonds rizicoles (exemple des hauts plateaux de Madagascar)
F. ARTHAUD, B. DUSSARRA T,).C GR/LLOT 727
Les unités de bas-fonds et d'interfluves sur socle altéré: un champ privilégié
d'étude des circulations d'eau
J.C. GR/LLOT............................................................................................................................................................... 737
Modélisation des écoulements souterrains entre interfluves et bas-fonds rizicoles:
cas d'un bassin versant élémentaire des hauts plateaux malgaches
A. DURBEC, C DUBAR, J.C. GR/LLOT, M. RAUNET 745
Fonctionnement hydrologique et aménagement des bas-fonds des formations
sédimentaires du continental terminal: exemple du bassin arachidier du Sénégal
j. ALBERGEL, P. PEREZ 755
Etude des bas-fonds rizicoles par l'imagerie Spot et Landsat
A.I. MOKADEM........................................................................................................................................................... 765
Mise en place d'une banque de données informatisée sur les marais et bas-fonds du Rwanda
j. DE LAAT 777
Les sols des rizières de vallée en Chine
GONG ZITONG, ZHANG XIAOPO.................................................. ••••••••••••••••.••..•.•••••••••••••••••••••••••• 793
Caractérisation physico-chimique des sols rizicultivés d'un bas-fond des hautes terres
de Madagascar: variabilité topologique des paramètres et influence sur la productivité
P.DEGIUDICI 257
Influence du régime hydrique sur la dynamique des éléments chimiques
et sur la croissance du riz cultivé dans un sol à toxicité ferreuse
A.L. RAZAFINjARA 26 7
Processus microbiens et physico-chimiques liés à la biodisponibilité des nutriments
dans la rhizosphère du riz: cas des rizières de bas-fond à Madagascar
j. BERTHELlN, P. DEGIUDICI. 273
Les risques de toxicités ferreuse et sulfureuse en rizières inondées:
symptômologie, écologie et prévention
V.A. JACQ, j.CG. OTTO\lY, K. PRADE 283
Caractériser la fertilité des sols de rizière par une mesure à l'interface des métabolismes
carboné et azoté de la plante: théorie, méthode et applications
R. GAUDIN 305
Facteurs limitant la nutrition minérale du riz de moyenne altitude pour différents sols
et sous différents régimes hydriques au Burundi
p. HENNEBERT 373
Les conditions physico-chimiques des sols de marais au Burundi:
risque de toxicité ferreuse pour le riz (Oryza sativa U.
j.G. GENON, N. DE HEPCEE, PA. HENNEBERT 321
Les biofertilisants fixateurs d'azote en riziculture: potentialités, facteurs Iimitants
et perspectives d'utilisation
P.A. ROGER 327
Synthèse des communications et débats 349
C'est à la fois un honneur et un réel plaisir pour le ministre chargé de la Recherche scientifique malgache que
de venir procéder aujourd'hui, dans ces lieux désormais historiques de l'hôtel Panorama, à l'ouverture
solennelle de ce séminaire international sur le thème « Bas-fonds et riziculture », placé sous son égide.
Comment en effet ne pas éprouver à ce niveau de responsabilité beaucoup de joie et de satisfaction doublée
d'une certaine fierté, quand on sait que l'idée de ce séminaire est l'aboutissement des recherches réalisées à
Madagascar sur le bas-fond d'Ambohitrakoho et son bassin versant, dans le cadre des actions thématiques
programmées (ATP) du Programme interdisciplinaire de recherche sur l'environnement (PIREN) du Centre
national français de la recherche scientifique.
Pendant trois ans, en effet, plusieurs institutions malgaches et françaises, dont:
-le Centre national malgache de la recherche agronomique appliquée au développement rural (FOFIFA),
-l'Institut français de recherche scientifique pour le développement en coopération (ORSTOM),
-le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (ClRAD),
-le Laboratoire des radio-isotopes de l'université d'Antananarivo (LRI),
- les universités de Montpellier et d'Avignon,
-le service de l'hydrologie du ministère malgache de l'Industrie, de l'Energie et des Mines,
- le Centre national français de la recherche scientifique (CNRS),
ont beaucoup travaillé dans la« transdisciplinarité Ti, et avec un esprit d'équipe basé sur le principe du partage
des tâches et des responsabilités, à l'étude de cet ensemble bas-fond-bassin versant, pour en établir le bilan
hydrologique et physico-chimique, aux fins d'en connaître le fonctionnement et d'en tirer les conséquences
agronomiques applicables aux systèmes de bas-fonds comparables des hautes terres du centre.
Mesdames et Messieurs,
La liste que je viens de donner des instituts et laboratoires qui ont pris part à cette étude du bas-fond
d'Ambohitrakoho en dit long sur la qualité des résultas qui en ont été tirés. Au cours de ce séminaire, nous
aurons au reste tout loisir de suivre de très intéressantes communications scientifiques et techniques sur cette
action-programme. Les implications de cette étude la hissent en tout cas aux tout premiers rangs des
investigations « utiles Ti pour ce pays où la riziculture est presque un culte, une civilisation.
Je voudrais maintenant m'adresser aux participants venus de si loin, pour contribuer à la réussite de ce forum.
Vous savez, Mesdames et Messieurs, un dicton bien populaire de chez nous dit en substance que « celui qui
aime rendre visite se fait toujours plus aimer Ti Ozai mahavangivangy tian-kavana) ; eh bien, vous êtes venus
plus qu'en visiteurs, vous êtes venus dans le cadre de ce séminaire pour partager avec nous vos expériences,
vos connaissances et les résultats de vos recherches sur les différents thèmes qui y seront débattus. Ce faisant
d'ailleurs, vous apportez un cinglant démenti aux propos un peu amers et quelque peu sarcastiques qu'on tient
à l'endroit des chercheurs en disant: « Des chercheurs qui cherchent, on en trouve, mais des chercheurs qui
trouvent on en cherche ».
Eh bien, vous avez cherché et vous avez trouvé; vous êtes venus ici pour en communiquer les résultats, pour
les partager avec les autres.
Soyez donc les bienvenus en cette terre malgache dont les attraits n'ont d'égal que l'hospitalité et la gentillesse
proverbiale de ses habitants.
Recevez en même temps la sincère expression de nos plus vifs remerciements. Les mêmes remerciements, je
les adresse, bien évidemment aussi, à tous les participants locaux, qu'ils soient malgaches ou expatriés, à tous
les organisateurs et à toutes les personnes qui, de près ou de loin, ont contribué à la tenue de ce séminaire.
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Enfin, le last but not least », je voudrais exprimer toute la reconnaissance du gouvernement malagasy aux
bailleurs de fonds, en particulier l'ACCT, le ClRAD et l'OR5TOM, qui ont bien voulu financer le séminaire
dont les résultats, j'en suis persuadé, permettront de mettre sur pied un nouveau projet tout aussi utile que
celui d'Ambohitrakoho, tant il est vrai qu'une recherche en amène toujours une autre.
Mesdames et Messieurs, je déclare maintenant officiellement ouvert le séminaire international d'Antananarivo
sur le thème le Bas-fonds et riziculture ».
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Allocution de François Rasolo,
directeur général du FOFIFA
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Secrétaire général,
Messieurs les directeurs généraux,
Messieurs les délégués et représentants,
Chers collègues,
Bien qu'il soit souvent embarrassant et quelquefois stressant d'ouvrir la série d'allocutions dans une telle
cérémonie d'ouverture - surtout dans un contexte comme le nOtre - c'est quand même avec un double
sentiment de joi~ et de satisfaction que nous le faisons aujourd'hui.
Cette joie et cette satisfaction s'avèrent en effet à la hauteur de la gageure que semblait constituer la décision
de tenir à Antananarivo le séminaire international «Bas-fonds et riziculture li. La genèse et l'historique du
séminaire l'expliquent aisément.
Déjà, en décembre 1988, quand Monsieur Bichat, alors directeur général du ClRAD, soumettait pour la
première fois aux autorités malgaches la proposition d'organiser ce séminaire à Madagascar, le pari n'était pas
facile. Mais le ministère de la Recherche scientifique et technologique et le FOFIFA avaient répondu
favorablement à cette requête, pour une organisation conjointe du séminaire par le FOFIFA, le CIRAD et
l'ORSTOM. C'est la première raison de notre joie, que nous exprimons a posteriori maintenant!
En juin 1991, quand les organisateurs se posaient la question sur l'opportunité de maintenir la date et le lieu
du séminaire, le pari devenait hasardeux. Mais, peut-être que, à ce moment-là, leur conviction se basait sur la
même philosophie d'action que celle de son Excellence Jawaharlal Nehru quand il disait: « Everything may
wait, but agriculture can't li.
Mesdames et Messieurs,
Sans vouloir faire un vulgaire plagiat d'une si noble citation ou un panégyrique déplacé de la recherche
agricole, nous disions aussi: « Tout peut attendre, mais un séminaire sur la recherche agricole ne le peut
pas! li. Et nous voilà réunis pour donner raison à tous ceux qui ont eu cette conviction. C'est la seconde raison
de notre satisfaction et nous sommes sûrs que vous la partagerez également.
Par ailleurs, permettez-nous de vous dire que c'est aussi un grand honneur et un privilège d'être avec vous
pour discuter d'un sujet dont l'importance ou l'enjeu n'est pas du tout négligeable dans le contexte actuel où
suffisance alimentaire, lutte contre la faim, pauvreté, développement agricole sont certains des mots-clés.
En effet, les contraintes qu'a connues dans un passé très récent le développement de l'agriculture en Afrique
et à Madagascar, et les innombrables problèmes qu'H nous faut résoudre pour pouvoir démentir les
inquiétantes et sombres prévisions sur les perspectives alimentaires et agricoles de! l'an 2000, toutes ces
questions, Mesdames et Messieurs, confèrent plus d'importance et plus de poids à ce séminaire sur les bas-
fonds et la riziculture.
Il nous faudrait justement rappeler brièvement qu'un des objectifs essentiels de ce séminaire est de faire
connaître les résultats de recherches menées dans le but de sous-tendr~ à terme l'exploitation et l'utilisation
rationnelle des bas-fonds pour l'agriculture. Et l'autre objectif consiste à comparer et à échanger les résultats
obtenus dans le cadre de l'ATP avec ceux obtenus par ailleurs.
Nous estimons que de telles initiatives constituent une contribution appréciable à la capitalisation des
connaissances nécessaires pour aborder le futur.
Pour le FOFIFA, qui, rappelons-le, est l'institution nationale malgache chargée de la recherche appliquée pour
le développement rural, ces aspects relatifs à la valorisation, à la diffusion des résultats de la recherche, aux
échanges d'expériences avec la communauté scientifique internationale sont au centre des préoccupations de
ses départements scientifiques, notamment de son département de recherche rizicole.
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Ces préoccupations du FOFIFA concrétisent d'ailleurs les idées directrices émises par Monsieur le ministre de
la Recherche en 1989, quand il disait (nous citons) : le Les échanges entre pays, l'existence d'une "république
de chercheurs", les contraintes logistiques et financières de tout travail de recherche font aussi que de nos
jours, plus que par le passé, la technologie se négocie entre peuples, se transfère sciemment d'une région à
l'autre. plus que par le passé, la maîtrise de nouvelles technologies requiert inventaire, classement et
sauvegarde afin d'enrichir les connaissances. Mais, surtout, elle suppose un choix, parmi les technologies déjà
éprouvées, de celles qui sont les mieux adaptées à un pays pour préparer leur vulgarisation. »
Eu égard à tout ceci, nous osons espérer que les fructueux débats et les échanges scientifiques qui auront lieu
durant ce séminaire sauront dépasser le cadre du le fondamentalisme» pour signifier davantage la participation
de la science et des scientifiques à l'enjeu du développement agricole. La valorisation des résultats de la
recherche n'aurél:it pas, en effet, sa dimension totale et complète sans avoir atteint l'aspect « opérationnel et
applicable ».
Nous vous souhaitons donc bon courage et bon travail pour en arriver là, à l'issue de cette semaine de
réflexion intensive.
Avant de terminer, Mesdames et Messieurs, au nom du FOFIFA et du comité local d'organisation, nous tenons
à remercier l'ensemble des institutions et des organismes donateurs, tant nationaux qu'extérieurs, pour leur
contribution efficace à la réalisation de ce séminaire. Sans vouloir faire une discrimination, nous nous sentons
quand même le devoir de citer particulièrement l'Agence de coopération culturelle et technique, pour son
soutien financier, le ministère de la Recherche scientifique et celui des Affaires étrangères, pour les facilités
qu'ils ont offertes pour l'entrée à Madagascar des participants étrangers.
Enfin, nous ne saurions terminer cette allocution sans vous faire part du traditionnel « tonga soa », le premier
mot à apprendre pour comprendre le vrai sens de l'hospitalité malagasy.
Nous vous souhaitons donc, à toutes et à tous, la bienvenue et un agréable séjour à Antananarivo. Puisse ce
séminaire constituer pour vous l'occasion de connaître davantage non seulement Madagascar et ses bas-fonds
mais aussi et surtout les Malagasy.
Allocution de Bernard Pouyaud,
directeur délégué de l'ORSTOM
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Secrétaire général,
Messieurs les diredeurs généraux,
Messieurs les délégués et représentants,
Chers collègues,
C'est toujours un plaisir de revenir à Madagascar, surtout avec un aussi bon prétexte que celui de participer à
ce séminaire« Bas-fonds et riziculture li, qui marque une étape importante des recherches multidisciplinaires
entreprises sur les bas-fonds rizicoles malgaches.
Je représente donc ici le directeur général de l'ORSTOM, qui m'a chargé de vous rappeler toute l'importance
que nore organisme attache à ces programmes de recherche proches du développement.
Il faut nous féliciter que ce colloque ait pu se tenir à Madagascar, à la date prévue, et réunisse autant de
participants, français et étrangers. Cette réussite doit beaucoup à l'action opiniâtre et résolue de Michel
Raunet, qui aura été l'adeur principal de l'organisation de ce séminaire, et je veux l'en remercier au nom de
l'OR5TOM et de ses chercheurs.
Sans la collaboration sans faille entre les différentes tutelles de ce séminaire, nous ne serions pas si nombreux
ici aujourd'hui. Cette réunion est l'œuvre commune du ministère malgache de la Recherche scientifique et
technologique pour le développement, de la CORAF, de l'ACCT et bien sûr du FOFIFA, du ClRAD et de
l'OR5TOM.
A Madagascar, c'est une évidence de considérer que le développement de l'aménagement rizicole des bas-
fonds constitue le principal vedeur d'intensification de l'agriculture vivrière. Madagascar est déjà bien
connue, comme l'Asie du Sud-Est et l'Indonésie, pour ses compétences en matière de riziculture. Cette
situation n'est pas aussi satisfaisante partout et de nombreux pays d'Afrique de l'Est, du Centre et de l'Ouest
ne maîtrisent pas actuellement la riziculture de bas-fond, en dehors de quelques zones particulières. Ce
colloque peut donc avoir des retombées positives loin de Madagascar.
Pour un hydrologue comme moi, le bas-fond est le lieu de tous les dangers, car c'est là qu'il faut savoir
maîtriser les conséquences néfastes des crues dévastatrices, aussi bien que gérer la pénurie éventuelle des
ressources en eau. Pourtant, c'est bien dans les bas-fonds que se retrouvent en principe rassemblées les deux
composantes incontournables de l'agronomie tropicale: des sols plutôt mei lieurs qu'ailleurs et des ressources
en eau. Encore faut-il savoir les gérer, ces « bons li sols pouvant se révéler difficiles à travailler, et nous venons
de dire que l'eau, d'abQOçlante comme il suffirait, peut devenir excessive et dévaster les terroirs péniblement
conquis.
Tout cela justifie pleinement l'attention particulière portée depuis quelques années à l'étude des bas-fonds. Ce
fut le cas de l'ATP PIREN, qui finança le début de l'étude des bassins versantsd'Ambohitrakoho à Madagascar,
comme ce fut aussi le cas du projet « Bas-fonds li avec le réseau R3S, et qui concerne l'Afrique de l'Ouest.
Cette étude des bas-fonds d'Ambohitrakoho nous apparaît donc exemplaire dans la façon dont elle a associé
les équipes du FOFIFA, du ClRAD et de l'ORSTOM, aux côtés d'universitaires, et c'est avec plaisir que nous
écouterons les nombreuses et brillantes contributions qui vont être présentées.
Je vous remercie.
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Allocution de Jean-Louis Reboul,
délégué du CIRAD à Madagascar
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Secrétaire général,
Messieurs les directeurs généraux,
Messieurs les délégués et représentants,
Chers collègues,
Il n'est pas facile de devoir parler à la suite d'aussi talentueux orateurs que ceux qui viennent de me précéder;
les collègues ont déjà presque tout dit, et je ne suis pas un spécialiste...
Je me dois donc tout d'abord de vous présenter les excuses du directeur général du ClRAD, M. Henri
Carsalade, qui n'a pu être des nôtres comme il l'aurait souhaité, retenu qu'II est à Paris par ses obligations de
directeur. J'ai donc le redoutable honneur de le représenter ce matin.
En son nom, et plus modestement en mon nom propre, pour ne pas faillir à la tradition, j'ai le plaisir de vous
souhaiter la bienvenue, à vous collègues qui venez d'ailleurs, d'Afrique, d'Asie, d'Europe, pour participer à
notre séminaire. Bienvenue à tous.
Je vous remercie ensuite, vous chercheurs, universitaires et agronomes résidant à Madagascar, d'être venus
aussi nombreux célébrer avec nous ce culte œcuménique à la gloire des bas-fonds rizicoles.
Je vous remercie enfin très chaleureusement vous tous, responsables des institutions nationales, des agences
de coopération, des organismes scientifiques et des organisations internationales..., d'avoir voulu honorer de
votre présence notre réunion: en répondant à notre invitation, vous nous manifestez tout le soutien qui nous
est indispensable.
Bienvenue à vous tous et un grand merci d'être avec nous aujourd'hui.
Je tiens maintenant, et je suis certain d'être parfaitement en phase avec mon directeur général sur ce point, à
rendre un hommage solennel et public à nos amis de la recherche agronomique malgache.
Oui, hommage à vous, docteur Charles Razafindrakoto, secrétaire général du MRSTD, professeur Sylvère
Rakotofiringa, son directeur de la planification et de la coordination, François Rasolo, directeur général du
FOFIFA, Yvonne Rabenantoandro, directrice scientifique, pour avoir obstinément bataillé envers et contre tout
et tous, depuis plusieurs mois, pour que ce séminaire se tienne bien aux date et lieu prévus et ce en dépit d'un
contexte Ô combien défavorable. Vous auriez pu faire comme tout le monde et renoncer.
Votre obstination, se situant à contre-courant du vent de pessimisme, de démission et de résignation
généralisés qui souffle sur Tananarive, est un bel acte de foi en l'avenir de votre pays. J'espère que les plus
jeunes d'entre nous retiendrons la leçon: tout est possible à l'homme qui sait rester debout... Et vous aviez
raison puisque aujourd'hui le pari est gagné.
Et nous, ORSTOM, ACCT et ClRAD, qui vous avons suivis, nous ne le regrettons pas, puisque nous sommes
tous là pour savourer cette victoire...
Je ne sais plus qui disait à qui lui reprochait de ne pas penser ni agir selon la mode du moment (peut-être le
général de Gaulle) : « Les dindons vont en troupeau, tandis que l'aigle vole solitaire... Il
Oui, hommage à vous amis du MRSTD et du FOFIFA d'avoir choisi de voler solitaires!
Je me dois maintenant de dire quelques mots sur notre séminaire lui-même, sur son contenu.
Cette manifestation est d'une part l'aboutissement de plusieurs années de travaux de recherche conduits sur
le thème des bas-fonds rizicoles à Madagascar et d'autre part l'occasion de faire le point sur le thème « bas-
fond Il en général.
Ayant suivi ces travaux de près, j'estime que la recherche entreprise sur les hauts plateaux malgaches peut être
qualifiée d'exemplaire à bien des égards, ne serait-ce qu'en raison de son caractère interinstitutionnel d'abord,
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de son caractère interdisciplinaire ensuite, de son caractère international enfin... Ils ont mis à contribution un
grand nombre de chercheurs dont la plupart sont réunis ici aujourd'hui. Ils ont généré des résultats très
conséquents sur le plan scientifique, et dont nous aurons l'occasion de faire le bilan et d'évaluer la portée tout
au long de cette semaine.
Ce séminaire sera donc une fête de la science, et l'occasion d'affirmer à nouveau, solennellement, le rôle
primordial de la recherche pour le développement.
La recherche, condition incontournable du progrès, est un secteur-clé d'une importance vitale pour un pays.
Et il ne peut y avoir de progrès sans recherche, de développement agricole sans recherche agronomique.
Les travaux de recherche conduits sur les bas-fonds rizicoles nous permettent de mieux comprendre les
mécanismes de leur fonctionnement. Bas-fonds dont l'importance socio-économique pour un pays comme
Madagascar va être soulignée tout au long de cette semaine.
Mais il ne suffit pas de mieux connaître un phénomène, de mieux le comprendre et mieux l'expliquer. La
recherche, la science, la réflexion ne doivent pas être une fin! On ne doit pas faire de la recherche pour la
recherche, de la science pour la science, de la réflexion pour la réflexion!
Excusez-moi si je joue ici un peu les professeurs, mais c'est un sujet très sérieux, et puis c'est le privilège de
l'ancien que de temps en temps pouvoir faire état de son expérience, et bien sûr je me tourne vers ceux d'entre
nous qui ont la chance d'avoir quelques années de moins...
La réflexion n'a de sens que si elle débouche sur l'action, la recherche que si elle impulse le développement.
A quoi bon, par exemple, savoir comment fonctionne un bas-fond si l'on se contente d'en rester là ?
Le chercheur a le devoir d'élargir sa vision du problème.
L'étude du bas-fond en est un bon exemple; n'oublions pas qu'autour du bas-fond d'un vert soutenu, centre de
production, oasis de vie, il y a des versants, des le tanety li rouges, souvent en fin de processus de dégradation,
secs, stériles, érodés... La recherche nous permet de comprendre combien les mécanismes de fonctionnement
du bas-fond sont conditionnés par ce qui se passe sur ces versants. Croyez-vous que les bas-fonds vont pouvoir
continuer à être des milieux de vie si les versants n'en finissent pas d'évoluer vers la mort ?
Et si vous me permettez de formuler un souhait: que soient engagés en urgence les travaux et actions propres
à stopper puis inverser ce processus mortel de dégradation des versants avant qu'il ne soit irréversible.
Nous tous, chercheurs, agronomes, avons les connaissances pour proposer les solutions techniques à
appliquer, vous bailleurs de fonds et vous décideurs pouvez mobiliser les moyens matériels et juridiques
susceptibles d'en permettre l'application. Ensemble agissons!
Certes la nature dans sa grande générosité est patiente et tolérante. Mais si l'on ne fait rien, viendra le jour où
elle en aura assez de l'ingratitude des hommes!
Après la réflexion, engageons donc l'action, pour que la Terre que nous allons laisser à nos enfants soit comme
l'Eden de nos lointains ancêtres, riante et fertile!
Il faut que, dans quelques années, lorsque notre ami Raunet alors grand-père viendra pour sa énième mission
à Madagascar, et à l'occasion de sa traditionnelle tournée de photos aériennes au-dessus de la campagne
malgache, il ne puisse distinguer les bas-fonds des versants, noyés et confondus qu'ils seront dans le même
vert de l'espoir...
Voilà, j'ai livré mon message.
Il me reste à remercier toutes celles et tous ceux qui ont assuré l'organisation matérielle de ce séminaire et je
pense à nos amis du FOFIFA et du Rn. Merci à tous et tout particulièrement à celui qui, non content d'avoir
été l'initiateur et l'animateur des travaux de recherche, prétexte à ce séminaire, a également été l'âme de
l'organisation de cette manifestation, aidé qu'il a été c'est vrai par l'efficacité souriante de sa collaboratrice
Nicole Fautrat, je veux parler de Michel Raunet !
Donc merci à tous et au travail!
Et pour finir, une citation de Confucius, je crois: le La vie est un chemin qui se trace en marchant... li
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Exposé introductif
Michel Raunet
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Cette lame d'eau ne dépasse pas 30 cm d'épaisseur. On ne peut y faire des aménagements importants de
stockage et de redistribution de l'eau, les bassins versants n'étant pas assez vastes. l'eau, gérée par la
communauté paysanne, circule dans de petits canaux qui alimentent les rizières et évacuent les excès.
Dans la terminologie de l'IRRI, les anglophones englobent cette riziculture dans le « rainfed lowland shallow
rice lf par opposition au « upland rice lf, à 1'« irrigated rice lf, au « deep water rice lf et au « tidal wetlands
rice lf. Une autre terminologie (MOORMANN et VAN BREEMEN) parle de « fluvial rice land lf •
• la riziculture « de nappe lf, dont l'alimentation en eau pluviale est assistée par les remontées capillaires ou
l'eau superficielle d'une nappe phréatique qui fluctue près de la surface. Ce type de riziculture est
intermédiaire entre le riz pluvial strict (<< upland rice lf) et le riz aquatique (<< rainfed lowland rice lf). En anglais,
on parle de « phreatic rice lf (MOORMANN et VAN BREEMEN). la riziculture de nappe ne nécessite pas toujours la
confection de casiers plans. Elle est réalisable sur les bordures et têtes plus ou moins larges, généralement
sableuses (<< sols gris lf) de certaines catégories de bas-fonds. On peut y pratiquer d'autres cultures (tubercules,
maïs, sorgho, canne.. J.
lorsqu'ils ne sont pas cultivés (surtout en Afrique), les bas-fonds sont occupés par une végétation hygrophile
ou une prairie, quelquefois une forêt galerie à raphias. Ils servent souvent de pâturage extensif en saison sèche.
lorsque les bas-fonds sont cultivés, c'est généralement la riziculture de saison des pluies qui en est l'utilisation
principale. Mais, dans beaucoup de régions d'Afrique, sans tradition rizicole, on y pratique, dans diverses
conditions, maïs, sorgho, tubercules (sur buttes), légumes de contre-saison, canne ou arboriculture sur les
bordures.
C'est en Asie qu'on trouve la plus grande superficie (25 000 km 2), bien qu'elle ne représente que 2% du total
rizicultivé. la superficie de riz de bas-fond en Afrique (sans Madagascar) est estimée à 4 250 km 2 , soit environ
11 % de la superficie totale rizicultivée (39 500 km 2 ) et moins de 0,5 % du potentiel (1,3 million de km 2 ). En
Amérique latine, le pourcentage est d'à peine 1% sur 80 000 km 2 au total.
le cas de Madagascar est très particulier. C'est le pays au monde où la proportion de riz de bas-fond est la plus
élevée avec 42 %, soit 5 000 km 2 sur un total de 12 000.
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Suivant les traditions socio-culturelles et alimentaires, le bas-fond peut occuper la place centrale dans le terroir
(hauts plateaux de Madagascar) ou au contraire une place marginale (beaucoup de régions d'Afrique).
En Afrique, il n'est souvent qu'un espace de pâturage de saison sèche, de petit jardinage maraîcher. C'est le lieu
des femmes et des enfants: proximité des puits, lessives, gardiennage des animaux autour des points d'eau. La
riziculture elle-même y est souvent réservée aux femmes, les hommes évitant les endroits « boueux •.
Le bas-fond joue un rôle important dans le partage de l'espace entre terroirs voisins, entre transhumants et
sédentaires. Dans les régions soudano-sahéliennes, le bas-fond est un couloir de passage pour les éleveurs
nomades ou semi-nomades (Peuls), qui doivent éviter les champs cultivés. Il peut être source de conflits pour
non-respect des droits d'usage.
Enfin, le bas-fond est parfois redouté et évité en tant que milieu insalubre (paludisme, onchocercose.. .>.
La perception du bas-fond par le paysan ou l'éleveur n'est donc pas la même que celle de l'agronome, du
pédologue ou de l'hydrologue.
Un état des lieux, un diagnostic, une expérimentation, destinés à proposer une mise en valeur, ne doivent
donc pas seulement avoir une logique « technique. mais aussi sociologique. Cela ne signifie pas qu'une
certaine dose de (bon) « dirigisme. ne soit pas nécessaire pour introduire des innovations et faire changer les
choses. Mais, pour être efficace et acceptable, il doit prendre en compte préalablement la dimension socio-
ethnologique.
Au fur et à mesure qu'un bas-fond est investi par la communauté, on passe d'une utilisation individuelle à une
utilisation collective, généralement rizicole, avec des règles nouvelles pour l'utilisation de l'eau dans un
microparcellaire contigu, cloisonné en casiers. Cette nouvelle auto-organisation sociale doit être prévue par
les « décideurs ., et éventuellement assistée.
Sols et eaux
Dans les milieux particuliers que sont les bas-fonds, la nature des sols, le régime des eaux et l'ambiance
physico-chimique sont, peut-être plus qu'ailleurs, en étroite interaction et se déterminent mutuellement.
Suivant le contexte c1imato-géologique, suivant la situation dans le réseau de vallées et dans le bas-fond
élémentaire lui-même, un ou plusieurs processus affectant les eaux et les matériaux peuvent être dominants.
On trouve ainsi des sites de confinage, de lavage, de transit, de départ et d'accumulation, qui impliquent
certaines pédogenèses et ambiances rhizosphériques.
« Le. sol de bas-fond n'existe donc pas. On peut trouver des sables lavés purs, des argiles gonflantes lourdes,
des argiles kaoliniques acides ou des sols organiques. Les matériaux peuvent être des alluvions, des
colluvions, des produits de fluage, des accumulations organiques ou des recouvrements anthropiques. Dans
un même bas-fond ou bassin, plusieurs catégories peuvent coexister tout en présentant une répartition logique
et répétitive. Le seul facteur commun des sols est leur engorgement une partie de l'année.
En bas-fond, les mouvements des eaux sont souvent complexes. Les arrivées d'eau ont des circuits divers:
pluie directe, ruissellement de surface, écoulements hypodermiques issus des versants proches, débordements
du talweg central, remontées de nappe phréatique au droit de la vallée ou latéralement en provenance des
interfluves.
Dans la gouttière, les écoulements de surface peuvent être étalés ou concentrés dans des canaux ou petits
cours d'eau. Les inféro-flux dans des couches drainantes (graviers sous berges, sables lavés.. '> sont courants.
Suivant la nature du bassin et le régime des pluies, les arrivées d'eau peuvent être brutales ou amorties. Le
premier cas caractérise plutôt les régions sèches mal couvertes à sols peu filtrants; le second cas, les régions
humides à bonne couverture végétale et épaisse éponge altéritique.
De ces fonctionnements physico-chimiques et hydriques découlent des contraintes pour la riziculture
aquatique.
• En région plutôt « sèche. (disons moins de 1 100 mm annuels), les « trop d'eau. instantanés alternant avec
les « assecs ., l'engorgement alternant avec le déficit hydrique de surface, stressent les systèmes racinaires, qui
ont du mal à s'adapter à un régime mixte pendant le cycle (<< pluvial-aquatique .). Le riz est souvent semé en
pluvial en situation de risque, puis il passe à l'aquatique mal contrôlé. Cela pose des problèmes d'adaptation
19
variétale parmi des cycles courts. Un tel régime est propice à la prolifération de toute sorte de mauvaises
herbes, qui devient un problème rapidement insoluble.
Les arrivées brutales d'eau (chasses d'eau) peuvent avoir des effets mécaniques importants: balayage des
semis, verse ou destruction des plants, ceux qui en réchappent pouvant être submergés et noyés s'ils ne sont
pas assez hauts.
Ces situations sont donc caractérisées par des risques hydriques et hydrologiques.
• En région plutôt humide (plus de 1 100 mm annuels), les problèmes purement hydriques d'insuffisance
d'eau se posent moins. Ce sont plutôt l'engorgement, le confinage et la faible circulation de l'eau qui
occasionnent des contraintes. Celles-ci sont alors de nature physico-chimique. La rhizosphère du riz
aquatique doit s'adapter à une ambiance physico-chimique fortement réductrice sous l'effet d'une microflore
anaérobie. Pour sa respiration, celle-ci utilise les transferts d'électrons par des processus d'oxydoréduction:
oxydation de la matière organique, réduction de substances minérales tels le fer ferrique ou le manganèse
manganique. li ya libération de substances réduites solubles pouvant être toxiques pour le riz (fer ferreux,
sulfures, acides organiques.. J. Les conditions de potentiel redox bas influencent l'assimilabilité des éléments
nutritifs, en particulier l'azote ammoniacal et le phosphore. On sait cependant que la rhizosphère d'un riz
aquatique sain et bien repiqué est capable de réguler dans certaines limites son environnement proche
racinaire, grâce à un transfert d'oxygène des parties aériennes vers les racines, des échanges de protons et des
exsudations spécifiques. La considération des processus physiologiques au sein de la plante peut être
nécessaire pour comprendre les mécanismes des déséquilibres nutritionnels.
• En région d'altitude ou à climat froid, la matière organique des bas-fonds a tendance à s'accumuler sous
forme peu évoluée (tourbeuse et acide) et la microflore à réduire son activité. Il s'ensuit des piégeages
minéraux (azote et phosphore en particulier) sous forme de composés organo-minéraux, très difficiles à
solubiliser et à mobiliser par les racines. La faible température de l'eau d'inondation aggrave la situation; un
réchauffement naturel préalable est alors bénéfique.
Sur matériau tourbeux, la nutrition minérale est rarement équilibrée: faible minéralisation de l'azote et du
phosphore, carences fréquentes en silice et en oligoéléments.
A ces contraintes peuvent s'ajouter les contraintes de drainage des supports tourbeux. L'éponge tourbeuse, à
géométrie variable, gonfle et se rétracte, ce qui est préjudiciable à un planage correct et à une mise en eau
régulière.
Ces trois situations extrêmes (milieux secs, milieux humides, milieux froids) sont des pôles de référence. Il est
évident que, la plupart du temps, on aura en bas-fond une prédominance de certaines de ces contraintes, mais
non exclusives des autres.
Une remarque importante, en bas-fond comme ailleurs, concerne l'espace, le temps et les niveaux de
perception (échelles) des phénomènes. J'aurais tendance à dire que tout suivi et toute observation localisés,
ayant trait à la nature des phénomènes et leurs changements d'état, n'ont réellement de valeur que s'ils sont
référés à leur domaine de validité dans l'espace, c'est-à-dire s'ils sont spatialisés à l'échelle qui leur
correspond. Même remarque concernant la chronicité des fonctionnements. Il y a toujours des régularités
spatiales et annuelles, spatio et chrono-séquences, qu'il faut identifier, même en termes statistiques. Cette
remarque est valable aussi bien pour le milieu humain que pour le milieu physique et l'agronomie. Cela est
souvent un des obstacles à maîtriser quand on travaille en équipe pluridisciplinaire, les échelles de
raisonnement ne coïncidant pas toujours.
Agronomie
Une fois les diagnostics opérés, le rôle de l'agronomie et de la vulgarisation sera, dans une optique
le recherche-développement », d'optimiser, pour une situation donnée: milieu humain, milieu physique,
productivité, reproductibilité, maintien de la fertilité. Ceci dans une approche le systèmes de production », non
indépendante des productions hors bas-fond.
L'élément de réflexion, de proposition et d'action de l'agronome en bas-fond, est le système de culture, avec
ses successions culturales et itinéraires techniques.
• Les successions ou associations culturales en bas-fond seront, la plupart du temps, centrées sur le riz. Celui-
ci peut être en monoculture (avec parfois deux, voire trois cultures annuelles en régions très humides). Mais il
peut inclure, en rotation ou association, des tubercules, des cultures maraîchères, d'autres céréales, des
engrais verts (azolla compris), des prairies, de la pisciculture... ou des canards. Beaucoup de bas-fonds, ou
certaines de leurs portions, se prêtent à une culture de contre-saison (saison sèche, plus fraîche), grâce à l'eau
résiduelle et à la remontée capillaire de la nappe phréatique proche. Par exemple, sur les hauts plateaux
malgaches, les cultures du blé, du triticale et de l'orge en contre-saison ont été lancées avec succès.
• Quelques thèmes techniques à étudier particulièrement dans les situations de bas-fond sont:
- les calendriers culturaux, particulièrement les dates optimales de semis et de repiquage en fonction des
ressources en eau et des successions;
-le travail du sol adapté aux microparcellaires;
- l'adaptation des outils de campagne (labour, hersage, planage, sarclage, récolte, battage, transport) ; degré
de mécanisation possible;
Dans les régions « sèches ", on recherchera plutôt des variétés mi-pluviales-mi-aquatiques, à enracinement
assez profond, susceptibles d'encaisser des changements hydriques rapides, de résister à des passages brutaux
de lames d'eau (hauteur et rigidité des tiges) et de préférence à cycles courts.
En région humide, on visera plutôt des variétés aptes à réguler l'ambiance physico-chimique de leur système
proche racinaire, de façon à freiner les déSéquilibres nutritionnels et empêcher la toxicité ferreuse. On
cherchera aussi des variétés résistantes aux maladies et aux insectes.
Aménagements
Pour améliorer les conditions naturelles du bas-fond, particulièrement le régime des eaux, et augmenter sa
productivité, des aménagements peuvent être nécessaires.
D'abord, la conception des ouvrages doit correspondre à l'échelle du milieu, c'est-à-dire être adaptée à la
nature des matériaux et des sols ainsi qu'à la dynamique des eaux et à la taille du bassin.
Ensuite, il faut que l'aménagement réalisé en bas-fond soit à la portée du paysannat (utilisation et entretien),
donc prenne en compte la réalité sociale.
Enfin, avant d'entreprendre un aménagement, il est souhaitable d'en prévoir les effets pervers possibles sur
l'environnement physique et le milieu humain (dégradation des sols en périphérie, changement du régime des
nappes, détournement d'utilisation...).
En Afrique, combien d'ouvrages coûteux n'ont servi à rien (quand ils n'ont pas été nuisibles) à cause d'un
mauvais «couplage" entre connaissance du milieu et aménagement.
Il est bien évident que les contextes asiatique et africain sonttrès différents: forte démographie, intensification,
longues traditions de riziculture aquatique pour l'Asie; moindre pression sur la terre, agriculture plus extensive
et moindre motivation pour la riziculture aquatique en l'Afrique.
22 '::::0:0::::::::::000000:0:00::::::::::::::0:::::::::::cec·
Bas-fonds
et milieu humain
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
c.P. RAVOHITRARIVO 1
:::::::::;:;:::::::::;:;::::;
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:::;::::::::::;:;::::::;;:;:;
- les parties aval (plus de 400 m de large) présentent Ce sont les meilleurs sols à blé de contre-saison
un vrai régime fluviatile avec une dynamique grâce à l'homogénéité granulométrique qui favorise
hydrologique et sédimentologique turbulente; la la remontée capillaire jusqu'au système racinaire.
topographie alluviale est alors assez marquée,
discontinue, changeante et hétérogène (présence
fréquente de lits sableux).
27
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
Agro-économique Sensibilité à la nécessité de fertiliser le sol Pratiques culturales traditionelles : variété locale,
(apport de fumier). labour à la bêche, piétinage aux bœufs, récolte
par la famille.
Sensibilité à la mécanisation (charrue, herse).
CoOt élevé des intrants.
Riziculteur à niveau de technicité assez avancé.
Faible rentabilité de la riziculture (rendement
Bas-fonds rizicultivés représentant inférieur à 2 t ha- 1).
les 3/4 de la riziculture des hauts plateaux.
Non-maîtrise de l'eau.
Possibilité de culture de contre-saison.
pédologie, sociologie rurale, agronomie, hydrologie, Moins spectaculaire que les grandes plaines, de par
hydrogéologie, physico-chimie, physiologie sa dispersion dans l'espace et sa configuration
végétale, microbiologie, géologie structurale. topographique, cette riziculture semble moins attirer
l'attention des décideurs et des bailleurs de fonds en
Les relations de travail interdisciplinaire se situent au
vue d'actions de production et de recherche. Ëlle est
niveau de chacun des cinq grands ensembles de
pourtant pratiquée par des riziculteurs de tradition
systèmes emboîtés, du plus général au plus fin,
maîtrisant les techniques de base et ouverts aux
définis par RAUNET (1989) :
innovations techniques.
-le réseau de vallées rizicultivées ;
- les bas-fonds élémentaires; Le milieu physique est cependant complexe tant par
sa nature que par son fonctionnement. Ceci se traduit
- les tronçons homogènes dans les bas-fonds;
entre autres par les différenciations spatiales des
-la rizière; rendements, malgré les efforts techniques déployés
-la rhizosphère. (pratiques culturales, fertilisation .. J.
28
CP. RA VOHITRARIVO
RAUNET M., 1989. Enseignements méthodologiques THEODORE A. et al., 1984. Etude du secteur agricole.
d'une opération de recherche interdisciplinaire à Rapport final. MPARA-AIRD.
29
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre' 1991
CIRAD,1993
if::;:;
1 CNRS, Paris. 1« Terre à riz recouverte d'eau pendant une bonne partie de fa
2 EN3, Université d'Antananarivo, Madagascar. période de culture, paddy field en anglais. (ABE, 1991).
31
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
mais aussi par leur utilisation: trois facettes selon une système hiérarchisé de thalweg. 1\ est en effet
position topographique amont-aval dans le sens intéressant de centrer l'analyse sur le bas-fond car,
longitudinal, trois autres n'occupant pas de position celui-ci étant encore « mis en rizière li sur les hautes
particulière mais étant caractérisées par leur état terres afin d'augmenter la production rizicole, on
hydrique et/ou rizicole. peut en reconstituer la construction et la gestion à des
pas de temps différents. Il est bien évident que le bas-
Cette approche globale considère le bas-fond comme
fond d'ordre 1 ne représente qu'une composante du
étant à l'interface du naturel et du social. Dans le
terroir villageois qui associe des bas-fonds de taille
cadre de cette étude, sera privilégié un niveau, celui
variée, domaine de la riziculture irriguée 1, et les
du lohasaha be et du lohasaha kely, l'amont du
collines, domaine des cultures pluviales et de
l'élevage. Du haut vers le bas, la tanety est découpée
en trois facettes en fonction des classes de pente:
tampon-tanety (partie sommitale), tehezan-tanety
(versant à pente accentuée), vodi-tanety (bas de
versant d'origine anthropique, creusé à l'angady).
32
C. BLANC-PAMARD, H. RAKOTO-RAMIARANTSOA
L'aménagement des bas-fonds a été un point mar- le réseau de contrôle des eaux, une somme de travail
quant de l'intervention de l'administration coloniale. considérable en plus du travail agricole de produc-
tion directe.
De 1960 à 1972, l'Etat malgache a souhaité diffuser
des techniques modernes de production. Dans les Sur les hautes terres, l'aménagement de nouvelles
bas-fonds, le ministère de l'Agriculture a favorisé la rizières dans les bas-fonds est toujours d'actualité. Il
promotion de la riziculture améliorée sur les hautes s'agit soit d'une extension latérale sur les bordures de
terres centrales dans le cadre du GOPR (Groupement ceux-ci, soit d'une mise en culture à l'intérieur même
opération productivité rizicole), appuyé par un des bas-fonds, quand il reste des zones rizicul-
encadrement très présent. La riziculture améliorée tivables.
devait permettre d'obtenir un rendement moyen de
3 tonnes à l'hectare (PELISSIER, 1976). Les plants
alignés dans les rizières datent de cette époque.
l'aménagement des éléments
A partir de 1972, la décentralisation des pouvoirs du milieu naturel
engendre des changements dans le monde rural. Les
Trois éléments sont c dressés,. à différentes échelles:
travaux collectifs de curage, entretien et réparation
l'eau, en quantité et en qualité, la pente dont la
des canaux, qui sont du ressort des communautés
planéité une fois acquise n'exige plus que des travaux
paysannes, sont moins bien réalisés.
d'entretien avant chaque repiquage, le sol dont il faut
Aujourd'hui, la majorité des rizières sont repiquées éliminer le caractère tourbeux en le faisant évoluer
en foule. La soudure rizicole est de plus en plus vers un sol hydromorphe minéral. Tout sol cultivable
longue mais le riz reste la pièce maîtresse du système est bon, meilleur encore s'il retient bien l'eau et est
de production en Imerina. Il s'agit d'une agriculture susceptible d'être irrigué (dans le sens où il peut
manuelle de petits exploitants: les parcelles rizicoles porter des rizières) ; telle est l'appréciation paysanne
sont petites et dispersées, de 7 ares en moyenne. La fondée sur les qualités physiques des sols.
taille des champs de cultures pluviales sur les collines
L'angady (bêche de jetl est l'outi 1 de façonnement des
dépend de l'effort apporté à la riziculture. La main
paysages des hautes terres. C'est l'outil à tout faire des
d'œuvre familiale et l'entraide 1 assurent l'essentiel
Merina, employé pour niveler, creuser les canaux,
des travaux. Presque tous les ménages ont besoin
pelleter de la terre ou du fumier, construire des
d'acheter du riz pendant une période d'un mois à
diguettes, labourer, régler dans le détail la conduite
plus de six mois. La polyculture sur les collines mais
de l'eau.. C'est à l'angady que bas-fonds et versants
aussi dans les bas-fonds est une façon de rechercher
des collines ont été aménagés. Avant l'introduction
la sécurité alimentaire. C'est ainsi que dans les bas-
de la culture attelée à Madagascar, la préparation du
fonds, espace jusque-là réservé au riz, se développent
sol de rizière se faisait en combinant le piétinage des
des cultures de contre-saison depuis une vingtaine
bœufs et le labour à l'angady, ou en ayant recours à
d'années 2.
l'une ou l'autre de ces techniques aratoires. L'angady
L'objectif d'autosuffisance en riz reste primordial est actuellement le principal instrument aratoire en
pour les paysans merina mais la polyactivité, qui raison de la régression des bovins.
assure la sécurité alimentaire par des revenus et des
La transformation du bas-fond en rizière est le résultat
cultures vivrières complémentaires (manioc, haricot,
d'un façonnement qui date de plusieurs centaines
maïs, patate douce, taro.. .> et entraîne la dispersion
d'années et qui se poursuit actuellement. On notera
du travai 1 des paysans, ne permet pas de rendements
que peu de travaux se sont intéressés au processus de
élevés (1,5 t à 2 t ha-1>. Outre les efforts nécessaires à
mise en rizière des bas-fonds 3. Cette construction se
l'aménagement du bas-fond, la parcelle de rizière
implique, pour l'entretien de ses diguettes et de tout
33
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
caractérise par la modification de la topographie mottes retournées, apportées des zones les plus
originelle du bas-fond à trous qui s'effectue par une hautes. l'opération consiste à écraser les mottes et à
double rectification du profil en long (pente combler les petits canaux de drainage qui quadrillent
d'environ 4 % ou 5 %) et du profil transversal pour la parcelle. C'est la mise en eau qui permet de
créer des parcelles horizontales, par la mise en place vérifier la bonne horizontalité de la parcelle car,
de réseaux de drainage et d'irrigation afin d'assurer comme l'expliquent les paysans, on égalise le niveau
la maîtrise de l'eau à la parcelle par une submersion en aplanissant les endroits qui émergent et en
régulière, par la protection contre les eaux de comblant les endroits submergés.
ruissellement dévalant la tanety à la saison des
la construction des diguettes se fait en même temps
pluies, par la création du sol adéquat selon les
que le planage de la parcelle, à partir des mottes de
techniques et le matériel pédologique, enfin par la
terre enlevées des secteurs les plus élevés.
construction de diguettes.
la fabrication des sols est une autre étape de la
le tc dressage li ou l' tc assouplissement li (rama-
construction du bas-fond. Elle se traduit dans le
lahana) du bas-fond, qui commence toujours par la
paysage par la couleur bigarrée de la parcelle en
bonification des terres tourbeuses au moyen de
cours d'aménagement. Sur une partie, le sol est
canaux centraux ou périphériques, se décompose en
rouge orangé, couleur des horizons C des collines,
une série de pratiques successives. les premiers
sur une autre, le sol est marron sombre, à caractère
aménagements durent parfois plusieurs années,
tourbeux. les sols récupérés à l'angady sur les
exigeant d'énormes efforts. l'assèchement est une
versants des collines ont pour but de tc mûrir les sols
condition nécessaire. C'est pourquoi l'aménagement
tourbeux li. les horizons d'altération (C) de couleur
commence par la création d'un drain en bordure du
jaune clair à jaune rougeâtre, de texture limoneuse,
bas-fond, au contact de la colline, pour, peu à peu,
constituent les meilleurs apports. les paysans créent
drainer et assécher les sols tourbeux. Ensuite, s'il ya
de petites niches, le plus souvent de l'ordre de 1 m 3 ,
un cours d'eau dans la partie centrale, on le canalise
sur le secteur le plus bas du versant où ils prélèvent
pour l'empêcher de divaguer, ce qui a aussi pour effet
la terre. Ils profitent aussi des talus ouverts par les
d'abaisser le niveau de la nappe et également un
routes et les pistes charretières. les femmes par-
assèchement progressif du bas-fond. les premières
ticipent en aidant au transport qui se fait en soubika
parcelles sont installées dans la partie la plus basse et
(panier) posé sur la tête 2. la culture du taro est
à proximité des drains. Un feu contrôlé est parfois
également un moment important de la création du
nécessaire dans chaque parcelle afin d'éliminer la
sol de rizière car cette plante mûrit la future rizière.
végétation naturelle et enrichir le sol en cendres. Puis
le taro tcsoutire l'eau li et contribue à assécher la par-
l'aménagement s'étend peu à peu dans tout le bas-
celle. De plus, les tubercules sont cultivés dans des
fond, de l'aval vers l'amont, pour créer les paysages
trous profonds et larges de 30 cm qui, au fur et à
rizicoles actuels tc Dominant le bas-fond, le versant
mesure de la croissance des plantes, sont remblayés
est le lieu névralgique du binôme colline-bas-fond :
par un apport de fumier qui complète l'amendement
on bonifie les zones tourbeuses du bas-fond avec les
du sol.
horizons minéraux des versants, on étend les rizières
de bas-fond latéralement aux dépens du versant. la la fabrication d'un sol hydromorphe dure 5 ou 6 ans
gestion du versant assure la complémentarité des en moyenne.
deux entités et la permanence de la toposéquence
agricole. li (RAKOTO-RAMIARANTSOA, 1991). En bordure l'aménagement diffère selon la taille des bas-fonds
du bas-fond, la propriété foncière suit ce modèle (ordre 1 ou 2). Dans le lohasaha be, large de 200 m
aval-amont. les propriétaires d'une parcelle de environ, où il ya un cours d'eau individualisé, il faut
rizière peuvent gagner, vers le bas du versant de procéder à la canalisation de cet axe hydrologique.
colline mitoyen de celle-ci, une nouvelle parcelle, de Un double objectif est assigné à ce canal mère, reni-
l'aval vers l'amont. tatatra, d'une part empêcher la divagation du cours
d'eau et drainer le bas-fond et, d'autre part, irriguer
la délimitation des parcelles se fait à l'œil en les parcelles voisines. Dans le lohasaha kely, large de
appréciant les topographies qui permettent d'avoir 50 m et sans cours d'eau individualisé, le drainage
des niveaux d'eau égaux. Dans le lohasaha kely, les qui a lieu dès mai-juin se fait à l'intérieur de chaque
parcelles sont perpendiculaires à la pente et d'autant
plus étroites que la pente est forte en amont. Dans le
l Les héritages successifs ont entraîné le morcellement des
lohasaha be, dans la partie la plus large, le parcel- parcelles, qui se fait d'abord dans le sens de la longueur puis
laire est allongé des bords jusqu'au centre où se ensuite dans le sens tranversal, ce qui donne parfois des micro-
trouve le canal principal 1. parcelles de quelques mètres carrés.
2 Les paniers de terre ont aussi, pourt une part, contribué à la
le nivellement de chacune des parcelles s'accomplit construction des terrasses dans les montagnes du sud de la
à partir des zones les plus basses où l'on dépose les France (AMBROISE et a/., 1990) •
34
C. BLANC-PAMARD, H. RAKOTO-RAMIARANTSOA
TANETY LOHASAHA
1 En Imerina, le riz semble prisonnier des seuls bas-fonds. En 1 - tampon-tanety 3 facettes 3 facettes
revanche, en pays betsileo, la configuration du relief (haute 2 - tehezan-tanety an-dohasaha sakamaina
surface d'aplanissement, reliefs résiduels) offre des impluvia 3 - vodi-tanety ati-tany andonaka
d'altitude. Les paysans, par de petits aménagements, créent des vodi-tany tanin-tsaha
réserves d'eau d'où partent des canaux longs de plusieurs
kilomètres qui irriguent les rizières en escaliers sur les versants. Figure 4. Le découpage en facettes.
35
Thème 1- Bas-fonds et milieu humain
d'une rizière une rizière lt. Le lohasaha qui est Le second facteur concerne l'aménagement. Il s'agit
désigné d'emblée, globalement, comme « un vallon de rizières qui, bien situées en tête de réseau et à
où il y a une source lt est caractérisé par la suite, plus proximité du canal d'irrigation, peuvent bénéficier
finement, au plan de l'utilisation. Le vary-aloha (riz de conditions hydriques adéquates mais dont le
de première saison) est repiqué en premier en caractère andonaka est lié à un curage insuffisant des
lohasaha, qui bénéficie de l'eau de source, puis en canaux. Dans ces rizières, autrefois bien asséchées
vodi-tany, point le plus bas qui reçoit les eaux de au mois de septembre, l'eau n'est plus aujourd'hui
source et de pluie; enfin, le vary-vakiambaty (riz de évacuée, par absence d'entretien du réseau de
deuxième saison) est repiqué en ati-tany. Un profil drainage.
longitudinal du bas-fond aménagé montre une
déclivité moins accentuée en lohasaha et en vodi- Ces rizières andonaka, naturelles ou liées à un
tanety, qui n'ont pas de contraintes d'eau. On les aménagement déficient, doivent bénéficier d'un
repique en riz de première saison. Par contre, l'ati- excellent drainage avant tout travail du sol. C'est la
tany, à pente légèrement plus accentuée, a besoin des principale contrainte des facettes andonaka, qui est
eaux de pluie pour être sous eau. bien connue des paysans.
Trois autres facettes latérales sont identifiées dans le En revanche, les sakamaina souffrent d'un déficit
lohasaha-kely; c'est l'aptitude des sols à retenir l'eau hydrique en raison des caractéristiques du sol liées
qui les différencie. En position de raccord colline- à la présence d'un horizon ressuyant en profondeur,
bas-fond, on distingue le tanin-tsaha,« champ de ce qui explique que « le sakamaina ne retient pas
vallon ou de bas-fond li ' . Il est, dans le vallon, situé l'eau li et « n'a de l'eau que sous la pluie lt. Ces fa-
entre les rizières et le vodi-tanety 2 aménagé en bas cettes n'ont pas de localisation particulière: elles sont
de la pente de la tanety. Le tanin-tsaha grignote le en contrebas du vodi-tanetyou à proximité d'une
vodi-tanetyet s'y incruste. Caractérisé par des sols rizière andonaka. Les rizières de sakamaina attendent
hydromorphes, il deviendra rizière quand les l'eau de pluie pour être repiquées mais il arrive
résurgences toujours présentes dans le tanin-tsaha qu'elles soient labourées et non plantées, faute d'eau.
seront mieux maîtrisées.
On a une chrono-catégorisation des facettes du bas-
Dans les bas-fonds, l'eau permet de distinguer les fond, le calendrier rizicole reposant sur les res-
unités rizicoles où le drainage est difficile de celles sources en eau. D'.~ne facette à l'autre, il ya une gra-
où le déficit hydrique est la contrainte majeure. Les dation ininterrompue du repiquage, d'octobre à
premières sont les andonaka (là où il y a de décembre: sous-facettes andonaka, facettes
l'humidité) ou tany-mandrevo (sol vaseux où l'on lohasaha et vodi-tany bénéficient des premiers
s'enfonce) ; les secondes sont les sakamaina (champ repiquages, facettes ati-tany et sous-facettes
sec). sakamaina sont repiquées après celles-ci. Cette
gradation permet d'étaler le calendrier de travail et
Les facettes andonaka sont liées à deux facteurs: un
facilite un système d'entraide « dans de bonnes con-
facteur physique et un facteur distance à l'eau qui
ditions d'eau ».
résulte de l'aménagement. Le facteur physique est
représenté par des résurgences phréatiques qui en- Le vocabulaire anthropocentrique appliqué au
tretiennent une alimentation permanente d'eau de lohasaha traduit l'intime relation des sociétés agri-
profondeur plus fraîche que celle en surface. Les coles merina avec les bas-fonds. De la tête aoha} au
eaux froides sont nettement localisées autour de derrière (vody), les mots du corps délimitent et
« l'œil de l'eau lt et les sols très tourbeux rendent le organisent le vallon et les facettes rizicoles qui le
travail difficile, avec des risques d'enlisement. composent en précisant leur hiérarchie par rapport
L'élimination des eaux froides est un aspect aux ressources en eau et au niveau de base (BLANC-
important de la bonification du bas-fond. Le travail PAMARD, 1990). Le terme loha (tête) identifie le vallon
de drainage sur plusieurs années permet peu à peu où les rizières bénéficient des eaux d'une source
de circonscrire la zone de l'œil de l'eau et de la (Joharano, tête d'eau) ; il définit et délimite également
réduire à une surface de 1m 2 ......le aéveloppement la partie amont du vallon la plus proche de la source,
végétal du riz hypertrophié; à longues tiges de la première repiquée en riz. La facette vodi-tanyest la
couleur vert vif, est un indicateur dans les vallons de plus basse topographiquement dans le vallon alors
ces parties andonaka. que la facette ati-tany (aty = foie, intérieur) est située
au centre de celui-ci. Ce système loha/vody opère à
différentes échelles: le vallon, les facettes et la ri-
1 RAUNET attribue au contact tanin-tsaha/vodi-tanety une évo-
lution par suffosion. zière. C'est ainsi que le loha limite la parcelle à
2 Le vody-tanetyest une unité morphopédologique construite
l'amont, le vody à l'aval, dans tout le terroir rizicole.
entre la colline et le bas-fond et dominant ce dernier; il est af- « Même si la pente de la parcelle est très faible, celle·
fecté aux cultures pluviales. ci a toujours un loha et un vody (figure 5) ».
36
C. BLANC-PAMARO, H. RAKOTO-RAMIARANTSOA
Lohasaha
f
:~~a:~~Ja
AII-tany
- ----- -
jOdy-Ianz
Lohasaha
@
rizière :: -:.: Loha
•••• Vody
Mais ce climat est soumis à des aléas bien connus
des paysans (retard ou avance des pluies, sécheresse
ou inondation, grêle, vent, cyclone...).
Les agriculteurs des hautes terres vivent dans l'espoir
de précipitations suffisantes à chaque saison de
Figure 5. Le couple loha-vody dans un vallon. culture du riz. Tout est fait pour profiter au maximum
de l'eau qui tombe (de pluie) et qui coule (de
surface), et pour pallier l'irrégularité décevante des
Les saisons agricoles
pluies dans un sens comme dans l'autre (sécheresse
La comparaison entre les données du climat et la ou inondation) (BLANC-PAMARD, 1989).
connaissance empirique des paysans dégage encore
L'eau étant le facteur limitatif central dans le bas-
plus la notion de partage dans le temps. La riziculture
fond, si les cycles du riz n'étaient pas décalés pour
domine le calendrier.
chacune des facettes, cela exigerait beaucoup trop
Le climat des hautes terres est de type tropical de ressources en eau en même temps au début de la
d'altitude à deux saisons bien tranchées. La saison culture, quand celle-ci nécessite le maximum d'eau
sèche dure de mai à septembre; les pluies se d'irrigation avant l'installation des pluies. Chaque
concentrent pendant la saison chaude de novembre facette, du sakamaina à l'andonaka, a un fonc-
à mars. La pluviométrie annuelle moyenne est de tionnement hydrodynamique que les riziculteurs
1 350 mm, la moyenne des températures est connaissent bien.
inférieure à 20 oc. Les riziculteurs composent avec ce climat à risque
Le découpage paysan de l'année se calque sur les (RAKOTO-RAMIARANTSOA, 1991), à la fois par des
activités agricoles et identifie trois saisons:« la tête pratiques culturales et des comportements culturels.
de l'année lI,« l'époque de la foudre lI,« l'hiver li, On donnera quelques exemples de gestion du risque
qui traduisent les termes de Johataona, fahavaratra et en riziculture.
ririnina. Le Johataona marque le début des activités
Le repiquage est préféré au semis parce qu'il permet
agricoles, concrétisé par la préparation des rizières.
d'amortir les « défauts d'eau li. Les riziculteurs
Le fahavaratra, qui dure de novembre à mars, est la
.. saison la plus longue et la plus importante car elle connaissent bien les avantages du repiquage " qui
atténue une mauvaise pluviométrie, mais ils les
correspond aux pluies. Le fararano (les dernières
eaux) clôture le fahavaratra. C'est le moment de la
récolte du riz, temps fort sans pour autant être
1 La pratique du repiquage se justifie par deux aspects essentiels.
individualisé comme saison par les paysans. Le D'une part, la pépinière est un bon moyen d'attendre le moment
ririnina succède au fahavaratra ; tout le riz a été favorable pour installer la rizière. D'autre part, le plant de riz est
récolté. Le froid et le crachin sont caractéristiques de d'emploi plus souple que le grain, la pépinière amortissant les
cette saison à partir du mois de mai. défauts de germination et d'homogénéité.
37
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
renforcent en jouant sur l'âge et la densité des plants. travaux rizicoles, ce qui permet aux autres cultures et
Les défauts des plants (âge et taille) et de la densité activités de bénéficier de ces jours interdits. C'est
(trop forte) se combinent pour donner aux plants une une des façons d'organiser à l'échelle du terroir et
meilleure résistance aux accidents climatiques, en dans l'année les nombreuses activités.
particulier aux risques de sécheresse, graves pour
une culture irriguée. Cette pratique antialéatoire
pallie par avance les caprices du climat et ne tient
pas compte des bienfaits connus d'une « riziculture La gestion du bas-fond
améliorée. qui vulgarise des plants jeunes et
vigoureux, repiqués en un nombre bien moins grand
dans le temps et dans l'espace
« à un âge donné (30 jours) et dans de bonnes
La gestion du bas-fond fonctionne à l'échelle du
conditions d'eau. (DOBELMANN, 1976). Le sarclage
terroir villageois et dans le cadre d'une polyactivité,
des rizières n'est effectué qu'une seule fois par la
mais on privilégiera ici la compréhension interne du
majorité des exploitants, les trois sarclages conseillés
étant sacrifiés au profit du repiquage. Ce choix se
lohasaha kely (drain d'ordre 1).
traduit par une concurrence plus forte des
adventices. Le palliatif adopté est le maintien d'un
plan d'eau élevé dans la parcelle car « l'eau Une gestion élargie à la colline
désherbe. (BLANC-PAMARD, 1985), mais cette La gestion du bas-fond ne se limite pas aux seules
pratique nuit au tallage et, par conséquent, limite les zones basses « mouillées. par la nappe affleurante
rendements. (RAUNET, 1987), car il faut tenir compte du binôme
Autre pratique antirisque : la fumure de fond. Dans tanety-bas-fond. En effet, les paysans accordent une
un vallon (drain d'ordre 1), les rizières ati-tany sont grande importance à certaines caractéristiques des
dans un secteur de pente plus accentué que celles versants de la colline: longueur et vigueur des
an-dohasaha ou celles de vodi-tany (figure 4). Ces pentes, convexité ou concavité, orientation.
rizières exposées à des écoulements pl us violents Les versants de tanety sont quadrilléS par un réseau
bénéficient toujours d'une fumure de fond car un antiérosif. La mise en culture de chaque parcelle
apport de couverture risque d'être entraîné plus bas s'accompagne de la construction d'une rigole
hors de la parcelle. défensive la ceinturant sur trois côtés à l'amont. Elle
Sur le plan culturel, les« charmes. (ody andro), qui s'inscrit dans l'ensemble comme une pièce de
expriment le souci des paysans de combattre les puzzle dont le but est de récupérer les eaux de
irrégularités du climat, concernent principalement la ruissellement, vecteurs d'atsanga (colluvions au sens
riziculture. Le respect des charmes dans un espace d'apports négatifs de matériaux grossiers) et de les
correspondant à deux ou trois réseaux hydrauliques conduire vers l'aval dans un collecteur périphérique
contigus souligne la dimension collective de la {aro-riaka}. Des pistes qui empruntent les flancs des
riziculture de bas-fond. Chaque exploitant s'y collines à mi-versant partent également des conduits
soumet pendant une période qui dure du repiquage à verticaux qui acheminent les eaux vers ce même
la récolte comprise. collecteur. Celui-ci doit être entretenu avant chaque
saison des pluies et recreusé pour assurer l'emport
Le dépositaire du charme, dont la fonction, héritée, des eaux chargées en matériaux. Sous la violence des
exige justice et honnêteté, joue un rôle important. \1 eaux de ruissellement descendues de la tanety, la
accomplit les rites nécessaires au début de chaque berge du collecteur périphérique peut céder, ce qui
saison rizicole. De plus, il sait chaque jour le temps provoque l'ensablement d'une ou plusieurs parcelles
qu'il fera et agit en conséquence. Lorsqu'un nuage et la perte de la récolte. Dans ce cas, la berge doit
paraît menaçant, il sort face au vent en se protégeant immédiatement être réparée. Les matériaux grossiers
de la pluie par un van ou par une natte enroulée et sont ramassés à l'angady et transportés dans des
commande au nuage de ne pas affecter les parcelles soubika posées sur la tête vers les bas des versants,
de rizières dont il a la charge. Si la pluie se fait où ils sont jetés. Cet agencement montre que les
attendre, il peut organiser une manifestation agriculteurs prennent en compte une dynamique
collective. 1\ a toute l'autorité pour faire respecter les d'ensemble de l'amont vers l'aval. Ils sont
règles liées à chaque charme, en particulier les particulièrement attentifs au contact entre le bas-
interdits, qui varient selon les régions. Par exemple: fond et la colline: les eaux de ruissellement achèvent
ne pas taper sur les rochers proches des vallons, ne en bas de pente leur course dans le canal péri-
pas vanner à la brise, ne pas ravaler les aires de phérique, « aussi précieux que les yeux pour voir la
battage... Les interdits de travail portent sur des actes nuit •. Le réseau antiérosif de tanety ne fonctionne
et sur un nombre variable de jours pendant la que pendant la saison des pluies cari 1 n'y a pas
semaine. Mais ces jours fady ne concernent que les d'atsanga sans pluie (atsanga tsyaman'orana).
C. BLANC-PAMARD, H. RAKOTO-RAMIARANTSOA
Les paysans se soucient non seulement de protéger le évacuer l'eau et en régler le niveau. Afin d'arriver à
bas-fond contre la violence des eaux de un partage équitable de l'eau, les règles d'utilisation
ruissellement descendues de la colline mais aussi de sont établies à l'échelle de.chacune des facettes et
gérer dans le bas-fond la qualité des eaux de la reposent sur des accords tacites.
nappe affleurante ou de flux résurgents.
Les diguettes permettent de circuler dans les bas-
fonds. Ce sont les chemins empruntés par l'ex-
ploitant pour surveiller l'eau de sa rizière. Légè-
U ne gestion en réseau rement courbé, les mains derrière le dos, il scrute la
On a vu comment la forme du parcellaire et la taille parcelle pour évaluer le niveau de l'eau, afin« d'en-
des parcelles caractérisent les différentes facettes. La lever de l'eau aux plants qui en ont trop et donner à
profondeur et la largeur des canaux traduisent boire à ceux qui ont soif ». De temps en temps, l'ex-
également les fonctions qui leur sont attribuées. Il en ploitant trempe son pied dans l'eau pour vérifier la
est de même des diguettes qui sont construites en température de celle-ci et régler en conséquence la
même temps que le bas-fond est aménagé en casiers hauteur de la lame d'eau, qui joue le rôle de régula-
rizicoles. Ce sont les diguettes qui concrétisent la teur thermique. Comme les rats creusent des trous
mise en rizière en faisant du bas-fond un espace dans les diguettes, il faut aussi surveiller leurs dégâts.
réticulaire. L'unité rizière (l'ensemble des parcelles L'exploitant se déplace lentement pour détecter
du lohasaha) ne peut se concevoir indépendamment d'éventuels trous, tout en tendant l'oreille pour
de ses éléments extérieurs, à savoir les diguettes et écouter si l'eau s'écoule à travers la diguette
les canaux, qui sont l'objet d'un entretien constant, affouillée par les rats.
individuel ou collectif.
L'entretien des diguettes vise aussi à rafraîchir leurs
La géométrie de la construction des diguettes dépend parois pour éviter qu'une végétation trop abondante
de l'emplacement des sources et des modes d'irri- n'attire les rats. Les agriculteurs s'appliquent éga-
gation. Les diguettes facilitent aussi le nivellement Iement à bien aplanir le replat de la diguette en
des parcelles; c'est ainsi que plus la pente est forte, apportant des mottes de la parcelle. Tout cet en-
plus les parcelles sont petites et le réseau de diguettes tretien se fait à l'angady.
dense. Les diguettes ceinturent les parcelles et ont
Dans les rizières andonaka, les diguettes sont peu
pour fonction principale d'assurer l'étanchéité.
stables quand les sols sont tourbeux et il n'est pas
la consolidation des diguettes, qui fait partie du recommandé de traverser un vallon où se trouvent
travail de préparation des rizières, et leur sur- des rizières de ce type« qui ne peuvent pas porter
veillance pour en contrôler l'imperméabilité sont un mouton ».
effectuées pour garantir des conditions hydriques
Enfin, à la moisson, les diguettes jouent un autre rôle
adéquates à la parcelle mais aussi et surtout pour
dans les rizières du bas de lohasaha où l'eau n'a pas
éviter que le « jus du fumier» ne se perde et n'aille
pu parfaitement être évacuée. Pendant deux ou trois
fertiliser la rizière voisine. On redouble d'attention
jours, les gerbes sont déposées à la queue leu leu sur
pour la surveillance des diguettes dans le sakamaina,
les diguettes, chaque groupe de panicules étant
où une éventuelle perte d'eau est grave car cette
recouvert par le pied de la gerbe suivante. Ceci
facette ne présente pas les facilités d'irrigation des
permet d'assécher les tiges, donc d'avoir des gerbes
rizières andonaka.
moins lourdes à transporter jusqu'à l'aire de battage,
Dans les lohasaha kelyoù l'alimentation en eau se mais aussi d'achever la maturité des grains et
fait à partir de la source, de parcelle à parcelle par d'augmenter la production. C'est aussi sur les
gravité, on ouvre une brèche sur la diguette (fam- diguettes que sont déposées les bottes de plants de
pidiran-drano: là où l'on fait rentrer l'eau). Dans les riz à repiquer ou les mauvaises herbes arrachées au
lohasaha be, l'irrigation se fait à partir du ruisseau cours du sarclage de la rizière..
canalisé, le reni-tatatra (canal mère), qui, tour à tour,
remplit les fonctions d'irrigation et de drainage. Il est Il est intéressant de noter que, dans les pépinières
comme dans les parcelles cultivées en contre-saison,
canal d'irrigation quand il est obstrué à l'aval: l'eau
monte et la diguette est cassée pour laisser entrer' les diguettes sont longées à l'intérieur de la parcelle
par un petit canal (figure 6). Dans les pépinières, ces
l'eau dans la parcelle. L'exploitant veille ensuite à
rigoles assurent une bonne humidité à la terre
bien colmater la brèche. Avant la moisson, on
évacue dans le canal l'eau de la rizière par une pendant les premiers jours, puis permettent de faire
entrer l'eau et de l'évacuer pour la renouveler aussi
brèche pratiquée dans la diguette et par des drains.
souvent qu'il est nécessaire, mais aussi d'assécher la
Les diguettes qui marquent les limites de propriété pépinière afin que les plants de riz supportent mieux
permettent à chaque exploitant d'avoir une certaine la transplantation. Dans les parcelles en contre-
autonomie, chaque riziculteur pouvant récupérer ou saison, ces rigoles recueillent les suintements venus
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
du canal qui sert à l'arrosage, car les tomates, Ainsi ne trouve-t-on des lam-Iam (Azolla pinnata)
comme les pommes de terre, sont particulièrement que dans les rizières où les sols sont « très mOrs »,
sensibles à une trop forte humidité. c'est-à-dire très bons et où la maîtrise de l'eau est
assurée (eau sans courant violent).
Les sols de rizière sont caractérisés par leur pouvoir
Plants de riz
Diguette
de rétention en eau car pour le riz joue la plus ou
moins grande hydromorphie du sol. Les sols sont
~'1~ finement répertoriés suivant que «l'eau reste ou s'en
va ». Les paysans n'ont de cesse d'améliorer la qualité
Pépinière en fahavaratra des sols de ce point de vue.
Les oppositions chaud-froid, cuit-cru qualifient la
texture et la structure des sols, que les paysans savent
Parcelle en contre-saison Parcelle en kolokolo
.---- I ~
40
C. BLANC-PAMARD, H. RAKOTO-RAMIARANTSOA
La matière organique est un élément essentiel de D'autres façons culturales exploitent les éléments
l'amendement des sols: elle est apportée avec les disponibles dans la parcelle sans apports d'intrants.
engrais chimiques, mélangée avec de la terre Dans l'est de l'imerina, on effectue le kobaka,
minérale, préparée dans des trous ou sur les lieux de prélabour qui vise, en retournant, avant le drainage
séjour des animaux domestiques. de la parcelle, les pieds des herbacées avec la partie
terreuse de leur rhizosphère, à ameublir le sol pour
Le fumier de parc combiné à d'autres apports cons- faciliter le labour de la rizière mais aussi en
titue la fertilisation de la rizière. Le bœuf fournit son améliorer la fertilité.
travail mais aussi du fumier, en quantité le plus
souvent insuffisante. La réduction des effectifs des
troupeaux limite l'intégration de l'agriculture à Le rôle des cultures de contre-saison
l'élevage. De plus, dans la conjoncture actuelle, le
En ririnina, les cultures de contre-saison (haricot,
recours à des engrais est difficilement rentable 1.
tomate, pomme de terre ou petit pois) occupent,
Pour fertiliser leurs rizières, les paysans excellent à
après la récolte du riz, les parcelles où il est possible
fabriquer fumier de parc, composts, mélanges de
d'arroser, en amont du lohasaha, à proximité de la
cendres et de déchets ménagers. Le fumier du parc à
source. Ce ne sont pas seulement des cultures
bœufs, zezi-pahitra, constitué d'un mélange de
rémunératrices, comme une analyse trop rapide
déjections des animaux et de graminées, est réservé
pourrait le laisser penser. C'est bien plus une façon
à la rizière. En saison des pluies, on alimente la litière
d'augmenter la production en riz par l'effet indirect
du parc, qui est à ciel ouvert, en graminées, restes de
de la fertilisation apportée au sol par le travail et les
paille de riz et feuilles de maïs. Urines et déjections
intrants. Si ces parcelles sont cultivées en faire-valoir
se déposent sur cette litière. Les bœufs piétinent
indirect, le propriétaire ne demande aucune contre-
l'ensemble. Plus les précipitations sont abondantes,
partie au locataire ou à l'emprunteur puisque l'amé-
plus il faut apporter de graminées pour offrir une
lioration de leur fertilité en constitue la rému-
couche sèche aux animaux: la production de fumier
nération.
n'en sera que plus importante. Humecté directement
par la pluie et piétiné par les animaux, le fumier est D'une part, les cultures de contre-saison intéressent
« mari ». Le fumier de parc est évacué une fois par les paysans soucieux d'une gestion de la fertilité de
an pour la fertilisation des rizières, il est déposé sur leurs rizières. D'autre part, elles économisent la
les parcelles en petits tas. L'analyse chimique préparation de la parcelle, qui n'a plus besoin d'être
confirme la richesse de ce fumier en éléments labourée en novembre après la récolte. Un bon
fertilisants 2 planage des parcelles récoltées est suffisant, la
récolte faisant office de labour avant le repiquage.
Les paysans qui n'ont pas assez de fumier de parc
associent celui-ci au fumier de porc et au fumier La culture d'une parcelle en contre-saison nécessite
« de coin», ramassé dans les coins du rez-de- une quantité importante de fumure; les paysans
chaussée de la maison où ont lieu diverses activités, reconnaissent qu'ils sont frappés par la te beauté»
et composé d'un mélange de déjections animales des plants de riz sur des rizières qui succèdent à des
(volailles et lapins) et de matière végétale (fongo, cultures de contre-saison. L'épandage n'est pas
débris végétaux, son de riz.. J. Le fongo est la litière systématique comme sur la rizière. On procéde par
faiblement décomposée des sous-bois d'eucalyptus petites doses apportées au pied ou au trou. Cette
(horizon AD). pratique économise à la fois du temps de travail et
des fertilisants trop rares; de plus, la charge de
Les paysans qui n'ont pas de bœufs ont recours à
transport en soubika est plus restreinte. Les paysans
d'autres modes de fertilisation. Ils font des mélanges
apportent des mélanges dont les dosages sont variés
de cendres de végétaux et son de riz, ou de cendres
et adaptés à la nature du sol et au type de culture. Par
de graminées et fongo. Ce mélange est apporté en
exemple, sur les sols tourbeux, un mélange de terre
couverture au moment de la levée des plantules dans
minérale et de fumier de parc a des effets bénéfiques
les pépinières: il fertilise, facilite l'enracinement en
pour une culture de pomme de terre mais est aussi un
pompant l'eau et assure une régulation thermique de
amendement très efficace pour la riziculture quand il
la surface de la parcelle.
est accompagné d'un bon drainage.
41
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
42 :o.::::::::e:::::::o:a::::: ......-.:«
:::::::::a:::::~"«*».
C. BLANC-PAMARD, H. RAKOTO-RAMIARANTSOA
Ces différents traitements des eaux froides (stagna- s'offrent à l'exploitant. Telle parcelle est labourée, les
tion, apport de matériaux, évacuation) montrent que chaumes retournés avec les mottes; sur une autre
les riziculteurs connaissent aussi bien les retouches barbotent des canards; ici les plants de riz rever-
ponctuelles que des pratiques qui concernent l'en- dissent; ailleurs les bœufs broutent les chaumes de
semble du bas-fond. riz; en tête de vallon, les planches de cultures
maraîchères sont l'objet de soins constants.
Comme les eaux froides, les eaux c sales 'fi, le taimbi-
hazona des riziculteurs, sont nuisibles car leurs effets Dans le /ohasaha, après la récolte du riz, des paysans
toxiques se répercutent sur le développement du riz. font à nouveau entrer de l'eau dans leu rs parcelles où
Ce sont des solutions colloïdales, probablement fer- restent les chaumes, pour obtenir une repousse
rugineuses, qui ont l'apparence de taches d'huile sur herbacée: le k%k%. Les bourgeons de la base des
un plan d'eau. Elles apparaissent en surface à la fa- tiges forment de nouvelles talles. Après le grain, c'est
veur des résurgences latérales et suintent sur les la production herbacée qui intéresse les agriculteurs
. parois des canaux périphériques. Autour de l'œil de pour complémenter l'alimentation des bœufs. Le
l'eau, le cfroid de l'eau 'fi peut aussi être entretenu, k%k%, coupé à la faucille, est apporté aux
voire accentué, par la faible pénétration du rayon- animaux au village. Des parcelles sont également
nement solaire empêché par la pellicule visqueuse utilisées comme barbotière et lieu de pâturage pour
de surface. Un réseau de double canalisation est mis les oies et les canards dont l'élevage est rému-
en place pour les éliminer. D'une part, un canal exté- nérateur. Dans d'autres parcelles, toujours à proxi-
rieur à la parcelle et très profond récupère et évacue mité des sources, tomates, haricots, petits pois ou
les eaux dans le canal principal; d'autre part, un pommes de terre succèdent au riz. La parcelle est
canal à l'intérieur de la parcelle double ce canal et asséchée. Des planches sont aménagées, entourées
renforce la protection contre les eaux nuisibles en de raies d'arrosage. Le mode de distribution de l'eau
collectant les suintements. du riz est différent de celui du riz: après l'irrigation
sur toute la parcelle, c'est l'arrosage de chaque plant
de légume à l'arrosoir ou à l'assiette. La plantation
L'après-riz commence en juin; la récolte a lieu à partir de la mi-
septembre et se poursuit jusqu'aux premières pluies.
Plusieurs utilisations du bas-fond sont possibles après
Il ya souvent un télescopage entre les parcelles déjà
la moisson du riz, comme le résume la figure 9. A la
repiquées et celles qui ont encore des légumes. Les
rizicu Iture qui occupe les bas-fonds de novembre à
travaux de préparation des rizières, qui commencent
avril succèdent d'autres activités agricoles et non
normalement début novembre, sont différés par les
agricoles qui requièrent une autre gestion du milieu.
exploitants; ceux-ci souhaitent récolter leurs lé-
Pendant le ririnina, les mois frais, on passe de la gumes dont la vente procure des revenus, avant les
riziculture à des utilisations individuelles, car plus dépenses qui vont être engagées pour le riz. Les
intégrées au circuit économique. Le contraste est fort paysans des hautes terres recherchent des cultures ou
dans le paysage: l'homogénéité des rizières cède la des activités qui rémunèrent mieux le travail et/ou le
place à une utilisation variée. Suivant la situation temps; ils saisissent les opportunités qui leur sont
topographique des parcelles, diverses possibilités offertes. C'est pourquoi la culture de contre-saison
s'est développée spontanément depuis une vingtaine
d'années en réponse aux sollicitations du marché, la
production étant écoulée vers les centres urbains de
l'imerina.
~'fJJ riz production herbacée
~=kold<olo repousse des tiges du
riz groin
~~ ~m
6lt fabricatian de briques
assèchement
Organisation sociale
Le domaine des rizières est celui de l'organisation
Figure 9. Les diverses utilisations d'une parcelle villageoise. La gestion du bas-fond repose sur une
de bas-fond. organisation sociale et passe par un travail collectif
43
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
ou au moins une entente étroite entre riziculteurs. fonctionnement du réseau des canaux à l'échelle
L'expression c sur le même terrain marécageux lt d'un bas-fond de deux hectares environ.
(iray petsapetsa) évoque la nécessaire solidarité entre
ceux qui veulent transformer tel terrain en rizière. En
effet, drainer un vallon, le protéger par un canal
circulaire en bordure, assurer l'irrigation des
parcelles, entretenir le réseau de canaux et diguettes
relèvent d'actions collectives.
44
C. BLANC-PAMARD, H. RAKOTO-RAMIARANTSOA
Par ailleurs, dans le cadre du système de production, chissent par des emprunts (DUPRE, 1990). C'est cette
des éléments tels que le mode de faire-valoir, la force trame que nous avons souhaité reconstituer afin
de travail disponible, le calendrier cultural ou d'éviter que des innovations techniques mal
l'émiettement des parcelles à la suite des héritages adaptées soient proposées ou que des pratiques
conditionnent la conduite de la rizière. Par exemple, paysannes soient mal comprises. La rizière est
la taille et la dispersion des parcelles influent sur le l'élément déterminant du système agraire, malgré la
système de culture. Dans le lohasaha kely, où les place des cultures pluviales, de l'élevage et le rôle
parcelles sont exigu~s (4 ou 5 ares), le repiquage est des activités extra-agricoles rémunératrices. La
en foule. Dans le lohasaha be, où les parcelles sont production personnelle de riz reste pour les ruraux la
plus grandes, on remarque que dans quelques garantie de leur autonomie.
parcelles le repiquage a été effectué en ligne. C'est le
Le lohasaha a une histoire et un langage. Et
cas d'un propriétaire qui, disposant d'un grand
comprendre le bas-fond, c'est se donner les moyens
nombre de repiqueuses, a pu les mobiliser pour le
d'une intervention mieux appropriée dans le cadre
travail d'une matinée pour repiquer toutes ses
des opérations de développement rural.
rizières. Ce que cherche le paysan, c'est que la
rizière soit repiquée d'un seul coup. Le riz est une Ceci pose la question des échelles de travail. C'est en
culture qui a besoin de solidarité (mila Firaisankina). fonction de l'échelle et des objectifs de l'étude qu'on
Chaque parcelle n'est qu'un élément du puzzle que identifie les unités. A l'échelle de Madagascar, les
constitue l'ensemble des rizières du bas-fond. Plus bas-fonds de niveau 1 et 2, de petite taille (quelques
les exploitants sont nombreux, avec une diversité des hectares), ne sont pas pris en compte, alors que ce
modes de faire-valoir (faire-valoir direct voisinant sont des espaces très présents dans la vie quotidienne
avec diverses formes de faire-valoir indirect), plus la des paysans des hautes terres. La carte à 1/1 000 000.
conduite de la riziculture est difficile. Un propriétaire « Potentiel des unités physiques », dont l'objectif était
qui cultive lui-même sa rizière le fait avec plus de d'élaborer un document unique exprimant globa-
soins qu'un métayer qui n'a qu'un tiers de la récolte lement les possibilités du milieu (BIED-CHARRETON
et n'est pas assuré de cultiver la même parcelle l'an- et al., 1981), en donne un exemple. En revanche, les
née suivante. Autre cas, celui des parcelles indivises bas-fonds de grande taille (plusieurs centaines d'hec-
qui sont mises en valeur une année sur deux par tares), vallées alluviales et plaines de niveau de base
chaque héritier. Le cas le plus préjudiciable est celui local, sont retenus car ils posent des problèmes
d'une parcelle que le propriétaire absent ne cultive d'aménagement d'ensemble.
pas. La non-mise en culture perturbe les parcelles
voisines. D'autre part, certains aménagements peuvent être
surdimensionnés par rapport aux sociétés rurales et à
Des faits de nature purement sociale contribuent leur façon de prendre en compte l'espace. C'est ainsi
donc à diversifier les paysages du bas-fond. qu'un canal aux dimensions très importantes
construit dans les années 50 pour drainer un bas-
fond a été abandonné par la suite, les paysans ne
pouvant entretenir à eux seuls un aménagement qui
« n'est pas à leur échelle li.
Conclusion Les décisions relatives à l'aménagement de l'espace
rural supposent que les espaces soient bien identifiés
Cette approche globale intègre la genèse et le
mais aussi que des formes de mise en valeur
devenir, dans les conditions d'utilisation actuelle,
adaptées soient proposées. Cette approche globale
des bas-fonds. Construire et gérer un bas-fond, cela
qui associe les paysans peut également les faire
exige des années de travail et beaucoup de savoirs et
participer aux projets de développement rural.
de savoir-faire. C'est dire à quel point il faut tenir
compte de tout le passé de ce paysage rizicole Le bas-fond rizicole est une construction paysanne,
minutieusement construit. Les paysans orientent les un ensemble organisé d'interactions qui relient les
différentes phases pour aboutir au produit final, la différentes facettes. Ces facettes écologiques
rizière (ranimbaryJ, qui s'inscrit dans le paysage des caractérisent le regard sur l'espace propre aux
campagnes malgaches. Les pratiques de gestion du populations locales; elles constituent des bases pour
bas-fond ne sont pas immuables, se reproduisant l'aménagement et un référentiel, à une certaine
à l'identique: elles se renouvellent. L'utilisation échelle, pour que scientifiques, utilisateurs et amé-
comme fumure du fongo, 1iée au développement des nageurs puissent ensemble envisager la gestion du
plantations d'eucalyptus introduits dans la première milieu en partant d'une même réalité. Une telle
moitié du xx e siècle ou les cultures de contre-saison, approche permet de mieux raisonner les choix en
qui remontent à une vingtaine d'années, sont deux matière d'actions sur le milieu et de proposer des
exemples qui montrent que les pratiques s'enri- réponses adaptées aux problèmes spécifiques qui se
45
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
posent aux paysans dans des situations écologiques, pour le semis en pépinière, avec trois ares de
sociales et économiques particulières. pépinière pour un hectare de rizière, soit 24 kg ha-l .
les paysans utilisent un plus grand nombre d'ares de
Dans le bas-fond, les agriculteurs et tous ceux qui ont
pépinière par hectare de rizière (six ares en
en charge son aménagement doivent considérer les
moyenne) et une densité de semis plus forte car ils
mêmes critères, l'eau, le sol et la pente, afin d'amé-
prennent en compte les pertes de plants par défaut
liorer la riziculture. le poids relatif de ces trois fac-
d'eau au repiquage; ce qui donne une quantité de
teurs est pris en compte par les paysans, qui s'en
semis de 160 à 180 kg à l'hectare.
accommodent, alors que les scientifiques se les
représentent en termes de contraintes en les isolant et la transformation d'un bas-fond en rizière, son
les amplifiant (érosion, sols pauvres, pentes fortes). entretien mais aussi son extension sont des stades
les riziculteurs savent qu'ils augmentent la pro- différents que l'on peut repérer sur les hautes terres.
duction s'ils appliquent les conseils des vulga- la dimension temporelle est un élément important de
risateurs mais, trop souvent, ils ne peuvent les suivre, cette transformation plus ou moins rapide. Chaque
ou plutÔt: mécanisme impliqué possède son propre pas de
- ils mobilisent des pratiques locales; temps. Des différences existent entre la durée de
construction du bas-fond (domestication des eaux à
- ils adaptent selon leurs te possibles,. les inno- l'échelle de l'ensemble bas-fond-tanety et amen-
vations techniques proposées: engrais chimique, dement des sols), la périodicité des cultures qui se
culture en ligne; succèdent sur la même parcelle et l'accélération des
- ils adoptent d'autres pratiques, par exemple pour changements entraînés par des mutations récentes.
gérer le risque de manque d'eau.
le bas-fond est une unité fonctionnelle à l'échelle du
Toutes ces pratiques tiennent compte des parti- terroir. Sa construction prend en compte le binÔme
cularités de chacune des facettes du bas-fond. tanety-bas-fond, qui constitue le pivot autour duquel
les paysages des hautes terres ont été et continuent
Dans le premier cas, on prendra l'exemple de l'eau
d'être façonnés. Sa gestion ne se comprend que dans
dont la qualité joue autant que la quantité. Alors que
le cadre d'un sytème de production qui donne la
l'hydrologue ne considère l'eau qu'en termes de
première place à la rizière. On pourrait penser que le
débit et éventuellement de richesse minérale, le
riz n'est plus aujourd'hUi aussi important. les amé-
riziculteur différencie des portions d'eau froides ou
nagements actuels le démentent, les bas-fonds
chaudes dans des positions topographiques parti-
continuant de s'élargir par recul des versants; et mal-
culières. la conduite de l'eau, calibrée à de multiples
gré le travail important de mise en valeur, le travail ~t
niveaux de façon très précise, est très efficace. les
le temps sont toujours rémunérés. Tout concourt à
pratiques paysannes permettent par une gestion à
montrer la prééminence du riz. l'association des
l'échelle du bas-fond de répartir les demandes d'eau
diverses pratiques qui relèvent de l'aménagement, du
- donc de jouer sur les quantités - et aussi de
système hydraulique et du fonctionnement du sys-
veiller à la qualité par des actions locales. Or l'aug-
tème agricole vise à assurer et à améliorer la produc-
mentation de la production rizicole passe par la maÎ-
tion rizicole. Ces pratiques sont impliquées à la fois
trise de ces caractères de l'eau.
dans la mise en rizière du bas-fond et dans le sys-
D'autres exemples illustrent le deuxième cas. On ne tème de culture. les cultures de contre-saison en sont
reviendra pas sur l'amélioration des terres de riz par un exemple très révélateur. Trop souvent, on a disso-
les cultures de contre-saison. Les paysans savent que cié les bas-fonds des collines, l'eau qui irrigue de
l'engrais chimique améliore la production de riz, les celle qui draine, la rizière des autres activités, le riz
doses recommandées étant de 300 kg de NPK à de l'après-riz, et établi des coupures qui sont à
l'hectare, mais ils savent aussi qu'une telle quantité l'origine des difficultés des opérations de dévelop-
est un gaspillage sur le sakamaina te qui n'a pas assez pement rural.
d'eau ,.. En ce qui concerne l'adoption de la culture
en ligne (PELISSIER, 1976), beaucoup d'éléments sont Références bibliographiques
pris en considération par les paysans: la taille de la ABE Y., 1984. le riz et la riziculture à Madagascar. Une
parcelle, comme nous l'avons vu, ou le fait que le
étude sur le complexe rizicole d'Imerina. Paris, CNRS,
repiquage nécessite impérativement un sarclage à la 232 p.
houe rotative. Mais un fady peut aussi l'interdire:
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47
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
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. . . . . . . . . . . ':::}dê~dMikforifiers}'la"reêh~rchê"dèconsensus"ei1tréUsigêHèt'.·.li:dô~tio~d'êêhéllé~'·'d':Hi6ii
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49
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
recherche de terres neuves, vierges de toute occu- bornes végétales 2 disséminées à travers les bas-
pation et de toute mise en valeur. fonds récemment acquis sont inhérentes à ce choix
Les exploitations pionnières, après un parcours stratégique.
hésitant et de multiples installations temporaires, Le fondateur ébauche les prémices d'un espace rural ;
parviennent sur les marges occidentales des bassins par ses allers et venues, il trace un réseau de pistes et
versants, avec de vastes plateaux sommitaux, de sentiers, dresse un premier parcellaire, décide de
festonnés par un réseau de bas-fonds plus ou moins la localisation du futur village, détermine l'em-
couverts de forêts, et voient dans ce paysage une placement de chaque case, incite, accepte ou refuse
faible emprise foncière, profitable à leur entreprise l'arrivée de nouveaux migrants et se constitue ainsi
de fixation. un environnement social dépendant, dont la fondion
Les critères de séledion des sites d'installation sont sécurisante est primordiale, surtout dans une région
étroitement associés à la ledure du paysage faite par où pillages et vols de bœufs sont courants.
le migrant et à son ordre d'arrivée dans la zone. Une Les avantages dont bénéficie un fondateur
distinction assez nette s'opère entre les stratégies apparaissent clairement; ses droits sur la terre lui
d'implantation des premiers arrivés -les fondateurs permettent d'exercer un contrôle social et
- et celles de la vague d'exploitants qui leur d'augmenter considérablement ses ressources par la
succède. vente progressive d'un patrimoine foncier acquis
sans dépenses.
lecture du paysage et stratégies . Cette rente de situation est flagrante chez les
des pionniers fondateurs migrants merina 3, qui invitent des membres de leur
Ces premiers pionniers s'assurent d'abord qu'ils famille des hautes terres à s'installer à proximité
s'installent dans un lieu encore inoccupé et vérifient d'eux. Cette mise à disposition de terres est rarement
dans le paysage l'absence d'éventuels témoins d'une gratuite et souvent payée en travail; d'autres
présence antérieure: plants de bananier, défriches fondateurs, moins scrupuleux, laissent à leurs
suivies de brûlis et d'une culture vivrière, dodoka 1 et proches des parcelles forestières en usufruit, puis les
eucalyptus étant autant d'indicateurs d'une récupèrent après défrichement et une année de mise
préappropriation. en culture.
s'installer définitivement, contribue à une sélection installés parviennent à une appropriation de fait, par
plus étudiée de la future parcelle. Les potentialités le biais d'une occupation extrêmement extensive de
rizicoles deviennent l'élément prépondérant du plusieurs bas-fonds. Les suivants doivent néces-
choix. sairement recourir à des modes d'acquisition plus
classiques: don, achat, héritage.
Le paysan observe en premier lieu la qualité du sol
de bas-fond: certains préfèrent les sols tourbeux A la grande différence de la plaine lacustre, les
assez évolués et profonds, d'autres recherchent les modes de faire-valoir indirect, à l'exception de
sols alluviaux qui faciliteront la maîtrise de l'eau. Son l'usufruit temporaire, sont pratiquement inexistants
intérêt se porte également sur les portions de bas- dans ces bas-fonds dont la mise en valeur est encore
fond élargies et relativement planes, où les eaux trop récente pour des systèmes de culture où le
s'écoulent plus régulièrement. Ces critères de sélec- propriétaire n'intervient pas.
tion anticipent sur les difficultés qui apparaîtront lors
de l'aménagement rizicole et visent à réduire l'im-
La loi du premier arrivé
portance des travaux.
La plupart des pionniers fondateurs, après avoir
Aux yeux du pionnier qui a encore l'avantage du
éventuellement négocié leur emplacement avec les
choix du terrain, certaines parties du bas-fond sont à
éviter: les débouchés de lavaka, aux sols très usagers habituels des transhumances ou d'autres
migrants plus éloignés, ont pris le soin de demander
instables et d'une fertilité variable, les zones trop
un permis de coupe auprès d'un service des Eaux et
marécageuses (surtout si elles sont liées au
Forêts, dont l'autorité ne s'était pas encore effritée.
verrouillage du bas-fond par un cÔne de déjection),
les bas-fonds trop étroits, les affleurements rocheux et Plus qu'une autorisation, ce document administratif
les épandages sableux, qui empêchent la riziculture. est compris et utilisé comme une reconnaissance par
La fertilité des bas de pente est également prise en l'Etat des droits fonciers du fondateur. Celui-ci ne
considération par le pionnier. La forêt galerie peut s'embarrassera pas avec les reconductions annuelles
indiquer la qualité des colluvions: le diamètre des (les renouvellements et les prolongations ne sont
troncs et certaines essences, comme le tavolo d'ailleurs pas autorisés) ; d'autre part, la portée de ce
(Ravensara sp.) sont des témoins de fertilité. Le savoir permis nominatif s'étendra illicitement à l'ensemble
de ces migrants concernant la forêt reste superficiel, des cultivateurs dépendants.
surtout en comparaison avec d'autres groupes Les cultivateurs pionniers emploient ce document
ethniques, tels les Zafimaniry (COULAUD, 1973). En administratif comme un titre foncier. Aux questions
fait, les défrichements s'étendent sur l'ensemble de la sur la propriété des bas-fonds, nombreux sont les
galerie forestière et la reconnaissance des parties les paysans qui répondent en montrant leur permis de
plus intéressantes est sans grande utilité. Au regard du coupe. Il n'existe pour les cultivateurs aucune
paysan, la forêt recouvre des sols immanquablement différence entre autorisation de mise en valeur et
fertiles. Les nuances lui importent peu. propriété - à moins qu'il ne s'agisse d'une
La topographie des bas de pente peut présenter confusion habilement entretenue. Ainsi entend-on:
te Cette terre est à moi. J'ai obtenu une autorisation
certains avantages supplémentaires: les replats sont
très appréciés car ils permettent l'extension des du garde-forêt il ya 15 ans. lt
cultures sur le versant et la plantation de petits Ce mode d'accès à la terre va précisément à
vergers, voire l'établissement d'un hameau. Il en est l'encontre des principes juridiques de la propriété
de même pour les formes en croissant sur les flancs foncière à Madagascar. Aucun titre ne peut être
du bas-fond, systématiquement aménagées en requis dans le cas où la parcelle est partiellement ou
vergers associés à diverses cultures sèches ou à des totalement couverte de forêt. Même si la délivrance
maraîchages. du titre ne se fait qu'à condition d'une mise en valeur
L'enracinement de ces pionniers reste inachevé. de la parcelle, on comprendra le souci du législateur
Face à un milieu relativement nouveau, leur voca- de ne pas cautionner l'abattage de la forêt domaniale
bulaire pour désigner les différentes caractéristiques par l'officialisation de droits fonciers au bénéfice des
pédologiques et topographiques ne paraît pas aussi défricheurs.
riche que dans leur région d'origine (BLANC-PAMARD,
1986). Substitution de l'achat au défrichement
Les modes d'acquisition des bas-fonds varient en
Modalités d'acquisition des bas-fonds fonction de l'avancement du front pionnier.
Les conditions d'accès à la propriété foncière Sur les bordures de l'espace colonisé, les appro-
diffèrent selon l'ordre d'arrivée. Les premiers priations par le défrichement et par divers marquages
51
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
52
A. TEYSSIER, O. TSIAL/VA, P. GARIN
Pour les bas-fonds situés à l'aval des bassins versants, Les arbres sont coupés à 1 m du sol. Une frange
le processus d'occupation du sol est différent. Les forestière est laissée temporairement en haut de la
riziculteurs du lac qui se sont accaparé ces bas-fonds concavité. Selon les agriculteurs, la terre est trop
proches de la plaine étaient motivés avant tout par le compacte pour y être cultivée. Il n'y a pas d'essou-
repiquage précoce, rendu possible par un équi- chage. Cette opération exige environ 25 jours de
pement plus important. travail par hectare; l'entraide est fréquente.
Après un mois de séchage, la parcelle défrichée,
Leurs cultures sèches étaient surtout localisées sur
parfois ceinturée par un pare-feu, est incendiée. Les
des glacis-terrasses cultivables en traction attelée.
L'émancipation ultérieure des aides familiaux a troncs pourriront sur place au bout de quelques
poussé au défrichement des versants. D'autres ont années; quelques-uns seront débités au fur et à
simplement voulu réduire l'ombrage des rizières mesure des besoins en bois de chauffe, mais il n'y a
pas de véritable exploitation du bois.
provoqué par la forêt et ont valorisé ces défri-
chements pour des cultures ou des petits vergers. Du riz est semé au bâton dans les cendres, de haut en
bas de la pente (figure 1, schéma 1), à faible densité
Cet intérêt tardif pour les versants explique la
persistance de quelques reliquats forestiers sur les
flancs de vallée proches de la plaine du lac et 1 Une abondante littérature décrit le tavy, notamment ALTHABE
l'accueil relativement favorable de certains aux (1982), RATOVOSON (1979), FANONY (1975).
53
Thème / - Bas·fonds et milieu humain
(40 à 50 cm en tous sens). l'enherbement est une à l'angady pour retourner le tapis herbacé. les
contrainte dès la première saison de culture, un cultivateurs ont recours à la variété rustique, aussi
sarclage est obligatoire même si la variété utilisée, le utilisée sur les versants, le botramaitso.
botramaitso, est réputée pour son tallage puissant et
Dans le cas plus fréquent où le bas-fond est tour-
sa haute taille.
beux, les cypéracées sont brO lées et la tourbe se
Ce riz de défriche se succède à lui-même pendant consume en surface. Cet aménagement s'apparente à
deux ou trois ans, puis, la fertilité se dégradant depuis celui réalisé en plus grand dans la plaine lacustre.
le sommet de la parcelle, du manioc en culture Nous n'avons pas retrouvé de cas d'apport de terre
continue occupera le haut de la concavité défrichée, de tanety, avec constitution d'un horizon
tandis que maïs et haricot seront semés dans la partie anthropique pour colmater la tourbe, comme cela a
basse (figure 1, schéma 2). Des bananiers, du café et été signalé pour les bas-fonds des hautes terres
divers fruitiers ligneux seront implantés sur la zone (RAUNET, 1989).
de raccordement relativement plane entre les
la tourbe est ici suffisamment évoluée pour être
colluvions de bas de pente et le fond de vallée, sur ce
cultivée, même si les rendements initiaux sont faibles
que les agriculteurs nomment baiboho, et que BLANC-
(1 à 1,5 t ha-1), du fait de déséquilibres minéraux et
PAMARD (1986) a décrit comme baiboho-colluvions).
de difficultés de gestion du niveau de l'eau durant les
Seules ces baiboho-colluvions seront exploitées en premières années.
continu. leur relative planéité et la proximité de la
Après piétinage par les bœufs, des populations de riz
nappe font que la dégradation de la fertilité y est
locaux sont semées à la volée à forte densité (riz
moins perceptible que sur le reste du bas de pente.
rouges, tsipala), sans planage de la rizière, ni
Pour la zone à forte pente, le système de culture diguettes.
dominant est une succession à terme jachère-manioc
les années suivantes, le tassement progressif de la
où celui-ci occupe la parcelle cinq à dix années
tourbe et le rabaissement de la nappe nécessitent un
consécutives. Si le sol n'est pas trop dégradé, du riz
approfondissement du réseau de canaux. Celui-ci se
de tanety, du maïs ou du haricot peuvent être semés
ramifie en tenant compte des irrégularités du relief,
la première année après la jachère. les restitutions
isole les zones de tourbe peu évoluées et infertiles. la
organiques sont rares, étant donné l'éloignement des
nappe est toujours sub-affleurante et ne descend pas
parcs à bœufs. les fumures minérales sont inexis-
en dessous d'un mètre en saison sèche. le captage
tantes.
des sources et les premières pluies sur les reliefs de
Après la première jachère, quelques aménagements l'amont permettent des mises en eau précoces.
sommaires sont souvent réalisés. Ils ont pour but de l'objectif est d'aboutir à une riziculture irriguée avec
protéger les colluvions cultivées de l'eau venant de repiquage, qui, selon ces cultivateurs, valorise un
l'amont et de canaliser le ruissellement de la parcelle accès à l'eau précoce. les labours aux bœufs avec
dans les ravines que celui-ci a déjà creusées lors de
hersage et planage deviennent de plus en plus
la première phase de mise en culture. Ces canaux
courants. le désherbage chimique au 2,4 D apparaît,
d'évacuation sont parfois complantés d'ananas pour de même que le recours à des variétés productives
les stabiliser (figure 1, schéma 3).
telles que 2798 ou MK 34, avec des rendements de
l'ordre de 4 à 6 t ha-1•
o Aménagements des bas-fonds rizicoles
Enfin, le développement des cultures de contre-
la première étape consiste à drainer le bas-fond, saison, surtout du haricot, confirme la stratégie
surtout s'il est tourbeux, car la nappe est affleurante intensive des pionniers fondateurs qui ont accès aux
et les inondations sont fréquentes en saison des équipements et aux intrants requis.
pluies. le bas-fond est soit ceinturé par un canal le
Pour la majorité des cultivateurs, encore en phase
long des colluvions de bas de pente, soit traversé par
un drain au centre ou sur un côté de la vallée. d'installation, le piétinage et le labour précoce à
l'angady sont autant de palliatifs du manque de ma-
Des drains secondaires sont creusés en épi à partir du tériel. Dans une certaine mesure, la disponibilité en
drain principal pour isoler les premières rizières. eau, en rallongeant notablement la période pendant
l'aménagement se fait de l'aval vers l'amont pour laquelle le travail est possible dans la rizière, atténue
mieux contrôler l'assèchement de la nappe, de le déficit d'équipement.
préférence dans les lobes élargis du bas-fond.
Ainsi, le repiquage s'étend dans les rizières de bas-
Si le bas-fond est recouvert d'épandages alluviaux fond. la longue suite d'aménagements consentie
provenant de lavaka (baiboho mena), du riz est semé pour le bas-fond rizicole vise à reproduire le système
immédiatement après la coupe des arbres, sur les relativement intensif observé à l'aval dans les
zones les mieux drainées, après un travail superficiel périmètres à bonne maîtrise de l'eau.
A. TEY55IER, O. T5IALlVA, P. GARIN
frange [oresUl:re
non brOllle
Borne végétale
(Haslna.)
Souches el troncs
Riz
" 'l'
21 Réseau hydrauligue el
constitution d'agro-vergers
Fougères
Manioc
Rigoles
EU'~I1/YP'US
Ensablemenl
Canaux
d'l:;vacU111ion
55
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
Cette forme d'intensification par le travail est en moins considérée comme un obstacle dont les
accord avec la stratégie antirisques adoptée par la exploitations pionnières doivent s'affranchir. Les
plupart des producteurs. Grâce aux mises en eau arguments des paysans visant à justifier l'éradication
précoces, les rizières mobilisent la main-d'œuvre des forêts galeries sont assez nombreux, et
jusqu'à l'installation de la saison des pluies (première difficilement contestables:
quinzaine de décembre), puis les travaux se - la forêt ne nourrit pas mais s'étend sur les sols
reportent sur les cultures pluviales. En année sèche, les plus intéressants pour une mise en valeur agri-
la rizière compensera la productivité médiocre des cole;
versants; en cas d'inondation du bas-fond, ce sera
l'inverse. - elle héberge une faune nuisible aux cultures:
sangliers, rats, pintades;
Hormis le recours aux bovins pour la riziculture,
- elle sert de refuge à des forces occultes jugées
l'élevage est très peu présent dans cet aménagement.
hostiles, les tsiny, dont la présence est parfois
Les troupeaux transhumants sont écartés d'une
incompatible avec l'élevage porcin;
aire de pâturage essentielle. Il reste à imaginer des
modes de gestion de ces espaces, où élevage et -le bois de forêt aurait une faible valeur; les paysans
agriculture soient complémentaires et non plus propriétaires de forêts galeries encouragent les
concurrents. prélèvements en bois par des tiers, de façon à réduire
leur travail de défrichement et à éviter ainsi les
charges de l'entraide ou du salariat '.
Néanmoins, la place de l'arbre dans le système
de production n'est pas remise en cause par les
paysans. Ils ressentent les rôles protecteur et
Vers une anthropisation régulateur joués par l'arbre: la rétention et le filtrage
achevée du paysage de matériaux issus de lavaka par les forêts galeries
:-. ~ ""'*' w."'*' -..:«-.",, --:.."<o. ""». -.: ,,"«V». "«<o."««-." "~",, --:-:.:.: ») sont bien observés; certains font même un
rapprochement entre la disparition des forêts et les
L'amont des bassins versants de l'ouest de l'Alaotra
retards de plus en plus fréquents et prolongés des
est le théâtre de modifications du paysage surpre-
premières pluies. D'autres regrettent la raréfaction du
nantes par leur ampleur et leur vitesse. Les bas-fonds miel et du gibier.
sont incontestablement les portions d'espace les plus
touchées par cette évol ution vers un paysage de
moins en moins « naturel lt.
La forêt est vécue comme une contrainte par le 1 Il faut cependant noter que les pionniers fondateurs, dont les
paysan. Si, au premier abord, elle permet de repérer réserves foncières sont importantes, gardent quelques bosquets
fertilité et disponibilité foncière, elle n'en est pas pour leur approvisionnement en madriers et en planches.
56
A. TEYSSIER, O. TSIALlVA, P. GARIN
Ce qui leur importe avant tout, c'est de pouvoir maî- la productivité du manioc qui y est planté. Ils
triser la forêt. la stratégie commune à ces cultiva- regrettent simplement de ne pouvoir y cultiver des
teurs est de la localiser sur des espaces impropres plantes plus intéressantes (riz, maïs, haricot), qui
aux cultures et d'introduire des essences plus utiles et restent cantonnées juste au-dessus des agro-vergers
plus rentables. l'intérêt pour le reboisement est quasi sur baiboho-colluvions.
unanime, même dans les zones pionnières où les
En outre, dans cette partie du bas-fond, les pratiques
défricheurs prévoient la disparition totale de la forêt
agricoles ont peu évolué depuis la défriche initiale et
et la croissance de leurs besoins en bois.
sont caractéristiques d'une agriculture très extensive
Des projets de reboisement sur le tiers supérieur des (débroussaillement, brûlis, semis, sarclage).
versants ou au sommet des collines en forme de Cette spécialisation par unités de paysage sur les
demi-orange sont envisagés par les paysans. colluvions de bas de pente, encore inachevée,
l'avantage des reboisements sur la forêt naturelle est
résulte cette fois d'une adaptation progressive des
une clarification de l'appartenance des arbres par le systèmes de culture à un appauvrissement du milieu
recours à des essences exotiques. l'abattage qui se poursuit, et qui contraste avec la relative
d'eucalyptus ou de pins par un tiers est considéré maîtrise du domaine rizicole. Encore que cette
comme un délit. dernière doive être nuancée par l'impuissance des
Dans le bas-fond, les essences forestières font agriculteurs à gérer l'ensablement croissant de leurs
progressivement place aux caféiers et à une grande canaux et de leurs rizières, principalement en aval
diversité d'essences fruitières: manguiers, avoca- des lavaka, mais aussi à cause des apports provenant
tiers, néfliers, orangers, rotra (Eugenia jambolana), des versants dégradés qui les surplombent. Dans
letchis... Ces arbres peuvent être regroupés en quelques bas-fonds de mise en valeur ancienne,
vergers de petite dimension, mais sont exploités le l'ensablement devient une préoccupation majeure
plus souvent en association avec des cultures qui motive les riziculteurs pour des interventions
vivrières. Certains vallons inaptes à la riziculture, spécifiques de protection des bassins versants.
plantés de caféiers et d'arbres fruitiers, retrouvent
parfois l'aspect initial des galeries forestières.
Le bas-fond, espace structurant
Affectation des systèmes de culture Face à des plateaux relativement homogènes, les
selon leur place dans la toposéquence bas-fonds présentent de très nettes différenciations,
dont la portée s'étend jusque dans les représentations
les différentes étapes de la mise en valeur agricole de l'espace propres à chaque exploitant. Dans
aboutissent progressivement à une utilisation l'ouest de l'Alaotra, ils constituent l'ossature de
spécifique des différentes unités de paysage, fondée l'espace rural.
sur une évolution différenciée de leur fertilité.
le pionnier renforce le potentiel de production Ebauche d'un.e typologie des bas-fonds
rizicole de son bas-fond. Cette fertilité construite est
principalement le fruit de son travail, de ses les cinq classes apparaissant sur la carte de la figure
aménagements, des modifications relativement 3 permettent d'identifier différents types de bas-fonds
maîtrisées du milieu qu'il s'est approprié, pour mieux dont les caractéristiques s'observent facilement dans
gérer l'eau, les cycles de production et les adven- le paysage.
tices. les pratiques agricoles deviennent plus com- • Forêt galerie: il s'agit essentiellement de reliquats
plexes (travail du sol, planage, pépinière, repiquage, forestiers peu dégradés, qui s'étendent sur les vallons
désherbage.. J. les temps de travail s'accroissent. perchés de l'escarpement de faille limitant l'ouest
A l'opposé, l'évolution de la fertilité sur les tanety des bassins versants de l'Alaotra.
paraît beaucoup plus subie que contrôlée. l'érosion • Bas-fond de première mise en valeur: ces bas-
des flancs de vallée est d'ailleurs acceptée comme fonds correspondent aux conquêtes les plus récentes
une fatalité et les agriculteurs sont encore nombreux des paysans sur la forêt; ils sont actuellement l'objet
à ne pas avoir réalisé le moindre fossé d'évacuation de cultures extensives dont le rôle de marquage
sur ces pentes. foncier est tout aussi important que la fonction
vivrière.
Au cours de nos discussions, les paysans ont reconnu
une dégradation générale de leurs bas de pente, alors • Bas-fond rizicole: les fonds de ces vallées sont
que le potentiel rizicole du bas-fond s'améliore. Ils exclusivement consacrés à la rizière irriguée tandis
acceptent d'autant mieux cette situation que cette que les pentes sont vouées aux cultures pluviales et
dégradation n'est sensible pour eux que sur le haut aux vergers; ils occupent le réseau hydrographique
de la concavité et qu'elle aurait peu d'incidence sur primaire, à savoir la vallée de l'imamba et ses
57
Thème 1- Bas-fonds et milieu humain
principaux affluents. Les bas-fonds les plus larges riziculture de bas-fond dans une région où les poten-
sont également concernés par ce type d'occupation. tialités rizicoles en plaine sont pourtant immenses.
Une véritable typologie des bas-fonds exigerait
• Bas-fond vivrier non rizicole: ces bas-fonds toutefois la prise en compte de données quantitatives
peuvent contenir quelques casiers rizicoles, mais les
obtenues.
cultures sèches et les vergers sont dominants; ce
type de bas-fond, généralement assez court,
correspond soit à de petites têtes de vallons en forme Bas-fond et représentation paysanne de l'espace
de spatule, soit à des vallons plus vastes, mais
Dans la partie aval des bassins versants où les
d'occupation encore récente, où les aménagements
modelés sont essentiellement constitués de collines
rizicoles n'ont pu être achevés.
en demi-orange, les bas-fonds sont les seuls éléments
• Bas-fond inculte: ces bas-fonds sont délaissés par du paysage susceptibles d'organiser l'espace.
les agriculteurs; des épandages sableux provenant
Les noms de lieux-dits sont associés à certaines
des bas-fonds, des marécages ou des lacs créés par
caractéristiques des bas-fonds et des galeries
des CÔnes de déjection et des sols lessivés expliquent
forestières (tableau 11).
cet abandon. Leur localisation correspond aux zones
où la densité de lavaka est la plus importante.
L'espace agricole est perçu comme une mosaïque
La carte citée confirme la progression du front d'unités de taille variable, décalquée sur le réseau
pionnier vers l'amont et montre l'importance de la hydrographique et fragmentée par les ruptures de
Â
N
~ Forêt galerie
~
-
1----"1 Bas-fond de première
mise en valeur
Bas-fond rizicole
2 km
1
Bas-fond vivrier à dominante
[ ==:J non rizicole
GJ Bas-fond inculte
_ , , _ Route
58
A. TEY55IER, O. T5IALlVA, P. GARIN
pente qui cernent les bas-fonds. Cette représentation nexion entre bas-fond et plateau, ce qui engendre
est accentuée par la configuration des reliefs où des conflits sur les droits d'usage entre éleveurs de
l'espace utile est confiné, entouré par des versants l'aval et cultivateurs de l'amont, ainsi qu'une
qui limitent la portée du regard. Ces petits espaces utilisation de l'espace différente et antinomique:
vécus correspondent aux étendues visibles depuis les reboisement et pâturage, défrichement des bas de
parties basses des vallons. pente par le feu et mise en valeur agricole des
plateaux.
Tableau Il. Noms vernaculaires et caractéristiques En aval du front pionnier, l'espace bas-fond et
des bas-fonds.
l'espace plateau constituent deux ensembles séparés,
Nom SignWication gérés par des producteurs différents et dont les
Zone. aval moyens incomparables (tracteur contre angady)
débouchent sur des stratégies divergentes.
Analalava Là où il y a une longue forêt
Ambavahadiala A la porte de la forêt
Analamongy Là où il y a une forêt de mongy·
Bas-fond et notion de terroir
Ampandroanandakana Là où i1faultirer les pirogues Une organisation de l'espace structurée par un
Andoharano Là où il y a une source réseau de bas-fonds coïncide difficilement avec le
concept de terroir propre aux africanistes.
Antetezambato Là où il y a un gué
Andranahoatra Là où l'eau a été déviée Le terroir, entendu comme un espace agricole centré
Zone. amont sur une agglomération, dont une communauté rurale
tire l'essentiel de sa subsistance, évoque une struc-
Analabe Là où il y a une grande forêt .
ture en auréoles et une corrélation entre distance et
Ankazovelona Là où il y a des aJbres vivants intensification de la mise en valeur. Un tel schéma
Andriakely Là où il y a une pet~e chute d'eau ne peut être replacé dans un contexte où l'espace
Andriamalama Là où (les pierres de) la cascade sont glissantes agricole vécu s'étire en lanières depuis les rizières de
Andranomiady Là où les eaux convergent
l'ankaiafo (le là où on met le feu li, marais de la plaine
lacustre) jusqu'aux aires de transhumance.
Mangarivotra "Air bleu" (air pur)
Maniotsioka "Fa~ du vent" (zone bien aérée) Les bas-fonds renforcent l'éclatement du terroir dans
Ambongabe Là où il y a une grande colline
la mesure où la plupart des exploitations possèdent
des parcelles à vocation complémentaire dans
Ambongamarina Là où il y a une colline "vraie" (stable) différents vallons très éloignés les uns des autres. Il
Amparihimaina Là où il y a une mare asséchée n'existe donc aucun rattachement entre unité
Bevilona Beaucoup de fourrages résidentielle et espace cultivé. La plupart des bas-
Antobivato Là où il y a un campement en pierre fonds sont mis en valeur par des paysans provenant
de villages différents. Les distances entre habitat et
Ankijandrasarnoel Là où se trouvent les pâturages de M. Samuel
bas-fonds peuvent dépasser une dizaine de
• Macanraga sp., une formation secondaire. kilomètres.
En effet, la forêt galerie constituait un filtre végétal à accroître les risques de feux de brousse, de divagation
l'amont des bassins versants, qui piégeait les du bétail et de destruction des reboisements.
colluvions arrachées aux reliefs ou déversées en
Cette intervention s'articule autour du bas-fond (ou
abondance par les lavaka. Celle-ci jouait également
d'un ensemble de bas-fonds contigusl pris comme
un rôle régulateur dans l'écoulement des eaux
base contractuelle. \1 s'agit, après avoir identifié les
récupérées pour l'irrigation des périmètres.
projets des usagers de la zone, de procéder à une
Toutefois, l'enjeu n'est pas de chercher à enrayer la clarification foncière par un relevé du parcellaire en
disparition de ces forêts galeries. Elles sont condam- concertation avec l'ensemble des usagers. Ce premier
nées par l'inéluctable avancée du front pionnier, croquis sert de point de départ à l'élaboration d'un
sous la pression de migrants en quête de terres libres. schéma d'aménagement conçu par les différents uti Ii-
sateurs de la zone et où figurent projets individuels et
Le défi à relever réside plutôt dans la recherche de
collectifs. L'occupation de l'espace et les litiges qui
solutions susceptibles de rendre l'exploitation de cet
en découlent sont ensuite régis par une charte, notion
espace viable à terme pour ses occupants actuels et à
connue à Madagascar sous le nom de dina (TEYSSIER
venir, et compatible avec les intérêts des usagers de
et al., 1991 l.
l'aval. Ceci oblige à créer des aménagements qui
reprennent les fonctions protectrices jadis assurées • A l'échelle de l'exploitation:
par la forêt galerie. - aider au transfert de l'arbre sur les unités de paysage
Les principes d'intervention qui peuvent guider les non cultivables, notamment sur les convexités de
promoteurs de tels aménagements sont justifiés par relief, et promouvoir des utilisations sylvo-pastorales ;
les conditions de mise en valeur des bas-fonds telles - développer sur les versants cultivés des systèmes de
qu'elles viennent d'être décrites. Ces orientations, culture tout aussi productifs mais réduisant le
réglées par différentes échelles d'intervention, ruissellement;
peuvent être schématisées de la manière suivante. - intensifier et sécuriser la productivité des bas-fonds
• A l'échelle des bassins versants et des baiboho-colluvions qui focalisent l'attention
Améliorer l'infrastructure rurale et en particulier le des paysans;
réseau de pistes: le désenclavement est une condi- - œuvrer au sein des exploitations pour faciliter
tion indispensable à une meilleure intégration des l'accès aux équipements et aux bœufs de trait par des
zones pionnières à l'économie marchande et à la formes adaptées d'épargne ou de crédit et en
fixation des populations. améliorant la gestion de l'élevage.
• A l'échelle des sous-bassins versants Pour le développement ou la recherche-déve-
Les limites étant déterminées par les usagers, loppement, ces quatre axes, suivis par les projets
rechercher un consensus entre éleveurs et cultiva- Imamba-Ivakaka et Vallées Sud-Est/PRO, se con-
teurs en essayant de préserver les droits et les aména- crétisent par les thèmes d'action résumés dans le
gements de chacun. Ecarter les éleveurs équivaut à tableau III.
Tableau III. Les axes d'intervention pour la recherche-développement suivis par le projet Imamba-Ivakaka.
Transfert de l'arbre Versants cultivés Bas-fondslbaiboho Elevage et matériel
Recherche-développement Recherche-développement Recherche-développement . Recherche-développement
Choix d'essences adaptéesl Mise au point de systèmes Diagnostic sur agro-vergers. Diagnostic économique de
toposéquence. Modes de de culture avec couverture Fertilisation sur tourbe. l'exploitation. Crédit
plantation: rideaux de du sol et nécessitant peu Systèmes de double culture expérimental pour soudure,
délimitation, reboisement en d'intrants. Fixation des et contre-saison. Mise au matériel, cheptel, campagne.
plein, protection, bois canaux d'évacuation. point du semis sur boue + Alimentation animale.
d'œuvre, haie, ombrage. Amélioration de la jachère équipement pour planage. Animaux de bât.
Acceptation par tous des (haies fourragères). Traitement de lavaka.
projets individuels et Introduction d'arbres
collectifs associés aux cultures.
61
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
D. ROLLIN 1
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-:-:':':':':';';';', : pIsciculture, Vaki ankaratra, Madagasc:ar. . . . ... {{{{{{{{:::~:r~~
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Introduction Altitude
Malgré la variété des situations, il est possible de Figure 1. Carte de situation du Vakinankaratra.
représenter schématiquement l'exploitation du
Vakinankaratra, ainsi que l'illustre la figure 2.
Le but de cette étude est de montrer comment le
système rizière a évolué en fonction du temps, quels
Une très grande majorité des exploitations du
Vakinankaratra réunit les quatre systèmes (figure 2) sont les facteurs qui ont accentué ou diminué son
élevage, tanety (colline), rizière, forêt; 4 % des importance.
exploitants agricoles ne possèdent pas de rizière, 2 %
pas de tanety, 1,3 % des exploitants sont de véri-
tables paysans sans terre (ANDRIANANDRAINA, 1990).
Selon les exploitations, l'importance relative de ces L'évolution du système rizière
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-.:-:-..-.:~ "'~« .." « -.: -.:«"-.:" -.:~ ..-..:o
quatre systèmes varie.
Le terme Vakinankaratra est d'origine relativement
récente (début du XIXe siècle) puisqu'il fut créé par
l'administration merina pour désigner la sixième
1 ClRAD, BP 853, Antananarivo, Madagascar. province de l'imerina (DEZ, 1967). Le père Dubois
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
dans sa monographie du Betsileo nous dit que long- Au XVIIIe siècle commence vraiment l'histoire du
temps les vallées de l'iandratsay, de la Manandona et Vakinankaratra, avec le souvenir conservé de la pre-
de la Mania restèrent presque inoccupées mais que mière migration au départ de l'imerina. Ces migrants
des Betsileo y sont montés et que des Merina y sont merina sont souvent partis parce qu'ils étaient
descendus (cité par MARCHAL, 1967) (figure 3). chassés ou éliminés au cours de luttes et de querelles
intestines (DEZ, 1967), ou bien parce te que la popu-
lation y est bien plus considérable qu'ailleurs»
(MAYEUR, 1785).
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1 ' - - - - - - - - 1
Ils pratiquaient une agriculture d'origine forestière La figure 4 retrace la chronologie des arrivées à
fondée sur le brûlis et la culture de plantes de régions Ambohibary.
bien arrosées (saonjo, banane) (RAISON, 1972). Ils ne
pratiquaient pas l'élevage.
Concentrés autour de Betafo, les Vazimb'a étaient
La colonisation et le début du XXe siècle
très peu nombreux. Vers l'ouest, c'était un pays de JI y eut une grande extension des rizières après la
bois et de marécages (DEZ, 1967). mise en œuvre de réseaux d'irrigation, le creusement
leurs ressources en les aidant à mettre en valeur les
1 • Fin XVIII' siècle
Imerina IAmbohimangal tanety ?
2 • Première moitié XIX' siècle
Betsiléo du nord et principautés
de l'iandratsay
La recherche, par l'intermédiaire de l'IRAM, avait
3 • Seconde moitié XIX' siècle précédé le mouvement, mettant en œuvre dès le
landratsay et lmerina Ambohimanarina
4 • Seconde moitié XIX' siècle début des années 1960 des séries importantes
rdgion est de Tananarive
Ankadinandriana
d'essais sur la fertilisation de redressement des sols
5 • Seconde moité XIX' siècle de tanety.
Province de l'imarna
6· Début XX' siècle
Fenomenana (Faratsiho) et Au début des années 70, l'agriculture, par l'uti-
Ambat%tsy (Tananarive)
lisation des intrants subventionnés, entre dans une
phase monétaire. Or le riz, aliment de base des
campagnes mais aussi des villes, ne peut, pour des
raisons politiques compréhensibles, être vendu cher
et n'est donc pas rémunérateur.
Merina et Betsileo sont d'autant moins enclins à une
intensification à tout prix de leur riziculture qu'ils
estiment que d'autres voies s'offrent à eux hanety et
élevage), Ils les ont spontanément inventoriées de
longue date et se tournent avec insistance vers
l'appareil de vulgarisation pour que celui-ci les aide
à les élargir et à les consolider (PELISSIER, 1976).
A la fin des années 70 et au début des années 80,
s'installe la réglementation du marché du riz, avec
l'absence de fluidité des échanges et les difficultés
d'approvisionnement en intrants. Dans la revue
Figure 4. Chronologie des arrivées à Ambohibary
« Marchés tropicaux et méditerranéens li (1990), on
(d'après RAZAFINDRABE. 1991).
trouve la description suivante: « Le désintérêt des
paysans à dégager un excédent commercialisable dO
de nouveaux lits de rivière (Ambohibary) et l'amé- à l'absence d'intrants, à une politique de crédit peu
nagement d'exutoires (Vinaninony), souvent par des satisfaisante, à la dégradation des infrastructures, à
travaux forcés. A Ambohibary Oa plus grande plaine une absence de dynamisme de la part des orga-
rizicole de la région), plus de 50 % des surfaces en nismes d'Etat chargés de la commercialisation (tant
riz ont été obtenues à cette époque. Certains pour aller collecter des denrées dans les rizières
ingénieurs sont restés célèbres (Nicolas). parfois difficilement accessibles que pour mener une
A partir de 1960, sont implantés des services de campagne promotionnelle active des produits
vulgarisation agricole, travaillant essentiellement sur malgaches), à l'insécurité, a entraîné la Grande Ile à
l'intensification rizicole. La volonté d'indépendance se rèplier sur elle-même et les paysans à ne tendre
et de limitation des importations, la vulgarisation des qu'à l'autosuffisance. li
résultats de la recherche entraînent la réussite d'opé- On assiste alors à une chute de l'adoption des
rations comme le GOPR (Groupement opération de thèmes de riziculture améliorée; 37 % des rizières
productivité rizicole). L'administration octroie du Vakinankaratra recevaient de l'engrais en 1970
gratuitement les terrains aux riziculteurs mettant en (PELISSIER, 1976), 9,6 % en 1983 (RAMAMONIISOA,
valeur de nouveaux marais. 1985). Le paysan produit d'abord le riz dont il a
Aves les années 70, la limitation de la surface rizi- besoin pour sa consommation ainsi que le
cultivable vient s'ajouter au froid (le riz est à sa limite complément de l'autoconsommation sur les tanety.
écologique dans une grande partie de la région) pour Depuis quelques années la situation s'inverse à
diminuer la productivité du travail en riziculture. nouveau, notamment grace à quelques projets
proposant des possibilités d'intensification. On
Celle-ci est très liée à l'utilisation d'engrais fortement
compte une trentaine d'organismes œuvrant pour le
subventionnés. PELISSIER (1976) rend compte d'un
développement rural dans le Vakinankaratra, réunis
dilemne chez les cadres du GOPR : après adoption
au sein du CCAD (Comité de coordination des
des thèmes de riziculture intensive (pépinière
actions de développement).
améliorée, repiquage en ligne, sarclage à la houe
rotative, utilisation d'intrants), faut-il accentuer Beaucoup cherchent à améliorer et à exploiter la
l'action d'intensification de la riziculture ou bien fertilité et la maîtrise de l'eau dans les rizières ainsi
pousser les exploitations à diversifier l'éventail de que la technicité des exploitants de la région.
65
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
C'est ainsi que les projets de réhabilitation des petits population. Si l'on compare la carte des densités en
périmètres irrigués (PPO et de microhydraulique et 1956, figure 7 (GOUROU), et en 1987, figure 8 (statis-
améliorent les infrastructures hydro-agricoles. tiques Firaisampokontany), on perçoit une augmen-
tation très sensible de la population le long des
KOBAMA, MALTO, et FIFAMANOR travaillent pour
routes nationales 7 (Tananarive-Fianarantsoa-Tu lear)
le développement des cultures de contre-saison: blé,
et 34 (Antsirabe-Morondava).
triticale, orge, pomme de terre, fourrage (figure 5).
Surfaces en hectares
2000
1800.
IlKlQ"
1400.
1200 .
1000 . '
800
lKlQ"
400 ..
~~._~.~
1988 1987 1968 1988 1990
Années
I,!Y:!:!I de 2 à 5% _>7%
Les facteurs déterminants
Figure 6. Carte des surfaces en rizière par rapport
de l'évolution à la surface totale.
66
.o. ROLUN
~~~~.t~~t~, . ~~f)~"""'~·~..~._~
cultures sur tanety par l'élevage, quitte à acheter du
riz.
67
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
celle de l'unité de surface est très faible et la concur- Surface en riz par personne
rence très difficile. La moyenne est de 10,2 ares par personne pour les
Selon que l'on apportait des subventions à l'engrais exploitations des PPI, de 9,9 pour les exploitations de
pour le riz (GOPR), aux amendements ou aux tra- l'ensemble de la zone. Un examen de la distribution
vaux de défriche pour les tanety (Opérations de des exploitations (figure 11) permet de voir qu'un
développement du moyen ouest, OOEMO), aux grand nombre d'exploitations (57 % pour les PPI,
vaccins pour l'élevage, on a permis le dévelop- 62,2 pour l'OOR) ont une surface inférieure à 9 ares,
pement de telle ou telle partie de l'exploitation. Cette seulement un petit nombre possédant des surfaces
pratique est d'ailleurs très employée dans les pays par personne importantes. A chaque génération, ces
développés pour promouvoir ou diminuer certaines surfaces en rizière par personne se réduisent.
activités.
~
3O..--------------~
La sécurité
RAISON (1972) remarque qu'avant le XIXe siècle le on
voyait alterner, selon que régnaient l'ordre ou
l'insécurité, des phases d'extension des rizières ou de
repli sur les collines habitées au profit des cultures
pluviales... It.
0-3 3-8 8-9 9-12 15-18 21-24 27-30 >30
Tant que la saturation de l'espace rizicultivable n'a 12-15 18-21 24-27
pas été atteinte, les périodes de sécurité ont permis am par p8r80M8
l'extension des surfaces en rizières. Oepuis la quasi- Figure 11. Distribution des exploitations
saturation pendant certaines périodes d'insécurité, selon la surface en riz par personne.
ce sont plutOt les cultures de tanety à récolte éche-
lonnées (manioc, fruits) qui en pâtissent alors que le
riz peut être gardé pendant la période approchant la Rapport surface en tanety-surface en rizière
maturité. Oans l'enquête de base de l'OOR, RAMAMONJISOA
Aux XVIIIe et XIXe siècles, l'insécurité touchait plus (1985) écrit que l'on assiste le à une conquête
les personnes qui n'osaient s'aventurer dans des effrénée des tanety autour des villages, d'abord sur
rizières éloignées de l'exploitation. Actuellement, des terres à soi, de plus en plus loin, ensuite aussi
cette insécurité concerne plutot les biens et en bien sur les terres domaniales que sur celles des pro-
l'occurrence les cultures ou le bétail. priétaires tolérants ou absentéistes It.
Le rapport le tanety cultivées sur rizières It, avec une
moyenne de 1,2, varie selon les exploitations mais
partout une partie importante du revenu et de
La situation actuelle l'alimentation est assurée par ces tanety (figure 12).
des exploitations
"'to."'"'Oo."'' '"'Oo.'' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' -':«<-. --:«.."«-:-:.-:-:-:.:-:.:-: -.:-:-.
~, '»».:-. ~ -..:.:.:.:.~
Type d'élevage
Quelques paramètres Les petits ruminants étant absents de la plupart des
de structure d'exploitation exploitations, et les volailles systématiquement
58
D. ROLLIN
69
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
ploitations, la pomme de terre se substitue au riz 6 hibary ce sera les carottes. D'une façon générale,
mois par an (Ambohibary, Vinaninony). volailles et légumes génèrent des revenus pour les
dépenses courantes.
La rizipisciculture permet elle aussi d'augmenter la
production de l'unité de surface en rizière. Sans di- Les cultures de contre-saison, la vente de porcins ou
minution de la production de riz (la diminution de la de bovins sont source de rentrées d'argent concen-
surface occasionnée par les aménagements est trées. Ce sont ces rentrées qui permettent l'amé-
compensée par une augmentation du rendement), il lioration de l'exploitation: achats de charrue,
est possible de produire en plus du poisson. charrette, vache laitière.
Sur une surface de 10 ares cultivée en rizipisci- Bien souvent blé, orge et porcins sont utilisés comme
culture, en plus des 250 kg de paddy (valorisé à 250 une marche permettant de passer à un étage supé-
FMG/kg = 62 500 FMG), la rizière peut apporter rieur de productivité.
20 kg de carpe royale (valorisée à 2 000 FMG/kg
= 40 000 FMG) qui contribuent de façon significative
au revenu et à l'autoconsommation de l'exploi-
tation. Conclusion
L'importance de la rizière dans les systèmes de
production des exploitations du Vakinankaratra a
donc évolué au cours du temps.
Le riz ne finance que très peu souvent le riz. Tel pay- GOUROU P., 1956. Madagascar, densité de population,
san d'Iandratsay va toutes les semaines au marché Bruxelles.
vendre des volailles et des oeufs pour avoir de quoi KOBAMA, 1991. Rapport d'activité de l'opération 1986-
vivre pendant la semaine. Pour tel paysan d'Ambo- 1990.
70
D. RDLLlN
MARCHAL J.Y., 1967. Contribution à l'étude historique du d'Acera sur la croissance démographique en Afrique et à
Vakinankaratra. Evolution du peuplement dans la cuveUe Madagascar.
d'Ambohimanambola (sous-préfecture de Betafo). Bulletin
de Madagascar, nO 250 RAISON J.P., 1972. Utilisation du sol et aménagement de
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71
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
;1';:';11fi~~~i~l1ï~1~~~:~~1~~~~i*~~~!{*~;§~~IÎIÎ1Ji
"i,!;~;il;!tz~{l~l:lr~l;~~~~~::r?.:;ti\ ii~~~~r;~.,'~':ir~$1tt;o;'c~~~~~':;l~~~!i;\~iW! i ii
73
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
recouvrait tout ou partie du Sénégal, de la Gambie, grandes villes de marché de l'époque. N'ont-elles
des deux Guinée, la Sierra Leone et le Mali ouest et pas déjà là suffisamment de siècles de pratiques pour
sud actuel. De Djenné partait un commerce de riz de apparaître au moins respectables?
petite et moyenne distances (de 100 à 1 000 km). A
En 1981, Pearson, Stryker et Humphreys firent avec
Tombouctou, le riz était deux fois moins cher que le
l'ADRAO (4) un bilan économique des types de rizi-
mil.
culture rencontrés dans cinq pays d'Afrique de
Plus à l'est, en pays songhaï, les écrits rapportent que l'Ouest: COte-d'Ivoire, Liberia, Mali, Sénégal et
les quantités et les prix du mil et du riz étaient assez Sierra Leone. Les tableaux 1 et Il sont issus de leurs
comparables. l'lus à l'est encore, autour de Kano, données, regroupant les chiffres en quatre grands
Barth, explorateur du XIX e siècle (3) confirme les types de riziculture: upland, rainfed, swamp et
rapports du XVIe siècle de Léon l'Africain, qui parlait f100ded, irrigated.
de la forte profusion du riz sur les marchés et dans les
A cette date, et encore actuellement, les formes
bas-fonds.
d'aménagement avec maîtrise totale de l'eau (riz
Enfin, si sa présence est encore attestée au XIve irrigué) accaparent plus des deux tiers des inves-
siècle (AI Omari voyage de 1342 à 1349) dans le tissements financiers sur un type de riziculture qui,
royaume de Kanem-Bornou, autour du lac Tchad pour les cinq pays cités, concerne 5 % de ses sur-
actuel, on relève un prix du riz supérieur à celui du faces et 11 % de ses productions.
mil.
Ce constat révèle que le choix des investissements
Les voyageurs arabes de cette époque notent que les publics reste fondé sur l'espoir salvateur des bien-
pratiques agricoles autour du riz sont différentes de faits de la technique la plus performante, du modèle
celles qu'ils connaissent le long du Nil et dans les le plus intensif.
oasis du Maghreb. Ces dernières, importées par eux
" Bas-fond,. et " site,. ne sont-ils pas deux des
du modèle asiatique, seraient fondées sur l'irrigation
termes totem qui, de manière quasi pavlovienne,
contrôlée. En Afrique de l'Ouest, nul témoignage ne
stimulent immédiatement les aménagistes afri-
se rapporte à cette pratique. On y parle plus de riz
canistes, permettant de montrer leur maîtrise d'une
flottant et de cultures de bas-fond.
science qui analyse la dynamique des eaux, et qui
Ce bilan fait naître l'idée de techniques rizicoles crée des procédés sans cesse plus sophistiqués pour
capables de dégager de larges surplus pour les les domestiquer.
Certains participants à ce colloque, tout en res- laisser les pieds des légumes hors de l'eau. Sur les
pectant le rôle nécessaire de ces bâtisseurs, ont l'am- grands réseaux marchands, ces producteurs
bition de les interroger sur l'opportunité de promou- acquirent également leur propre période dans le
voir d'autres modèles, d'apparence plus te grossière It calendrier cultural, fin de saison des pluies, début de
ou plus te fragile It, mais plus proches des usages et saison sèche (7), celle où on réalisait des marges
des contraintes des populations qui les utilisent. monétaires élevées. Ce sont actuellement les
principaux sites extra-urbains de la production
légumière congolaise à destination de Brazzaville.
75
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
Cette technique, où l'homme essaie de s'adapter aux Contrairement à toute attente, on n'observa pas de
variations saisonnières de la nappe d'eau, est rejet de ce système intensif tractorisé par les popu-
également observable dans le sud du Mali, en pays lations des villages environnants, plus concentrées
senoufo. La technique des hautes et larges planches sur les terres hautes, dans des systèmes de culture à
avec rigoles permet une production de patate et de base de maïs, arachide, igname. Lors de la priva-
pomme de terre, régulièrement écoulée vers Sikasso tisation des fermes d'Etat, les nouveaux postulants
ou au bord de la route fréquentée par les camions privés durent obtenir un « Land agreement» des
allant en Côte-d'Ivoire. services publics. Celui-ci ne fut concédé que pour
une durée de temps déterminée et après accord signé
Les Senoufo ont adapté leurs pratiques rizicoles non
des différents chefs des villages entourant le bas-
seulement à la décrue mais à la crue des eaux. A
fond. Mais la raison fondamentale de la réussite est
Loulouni (sud de Sikasso), les premières pluies
ailleurs: les systèmes de culture dagomba
déclenchent le labour des bas-fonds destinés à la
n'utilisaient les bas-fonds qu'en saison sèche et pour
riziculture. On commence par les parties basses pour
faire pâturer leurs bœufs. Les nouveaux arrivants ne
progressivement monter sur les rebords. Il se fait
les dérangèrent guère; même, ils purent en espérer
avec l'attelage des bœufs (parfois également à la
parfois un travail temporaire (désherbage du riz) et
main). Sans attendre la fin de ces travaux sur l'en-
un « service» fourni par la mécanisation (labour)
semble des surfaces, on effectue le semis du riz à la
pour leurs propres cultures. Le nouveau système riz
volée dans les parties les plus basses, où l'humidité
s'inséra donc remarquablement bien dans celui
du sol est meilleure. On recouvre les semences à la
existant jusqu'à présent, tant sur le plan des cultures
daba. Quand le riz est au stade de 30 cm, l'eau a
que sur celui des sites cultivés (non-concurrence
commencé à envahir la presque totalité du bas-fond.
foncière). De plus, si quelques désaccords appa-
On pratique alors un désherbage de la partie basse et
raissent (travail salarié non payé, service tracteur non
un « démariage », en réutilisant les pieds enlevés
rendu, volonté nouvelle des petits paysans de
pour le repiquage sur les parties plus hautes où l'eau,
pratiquer également la riziculture, riz tardif sur pied
affleurante ou déjà au-dessus du niveau du sol, a
au moment où les bœufs doivent venir pâturer), la
étouffé la majorité des herbes qui avaient repoussé
régulation est aisée: le riz brûle bien quand il est
après le labour. Ainsi la partie basse a servi à la fois
proche de la récolte!
de pépinière et de « parcelle semée» pour être
récoltée. La conquête des bas-fonds se fait donc Cette dynamique spontanée a été un tel succès que
progressivement de son centre vers les rebords et elle les petits paysans se sont mis à la riziculture, qu'une
suit le rythme de la montée des eaux. classe d'entrepreneurs de service-tracteur s'est
constituée, que la technique des labours mécanisés a
tendance à toucher le maïs et l'arachide (11).
Dans les années 60, le gouvernement ghanéen Toutefois, ces dernières avaient un rôle de « refuge»
souhaitait relancer l'agriculture dans sa région nord- alimentaire qui explique la très vieille habitude des
est, considérée jusqu'à cette date comme un réser- Senoufo d'y cultiver certaines parcelles de riz et
voir de main-d'œuvre pour les régions du sud où la d'autres cultures de décrue.
dynamique cacaoyère avait attiré la force de travail
(10). Il implanta d'abord un grand projet de fermes L'arrivée des structures d'encadrement technique de
d'Etat rizicoles, utilisant beaucoup de machines tels l'Etat, notamment la CMDT, a permis de conquérir et
les tracteurs et les moissonneuses-batteuses. Les de sécuriser les producteurs des cultures de terres
emplacements privilégiés furent les bas-fonds des hautes (coton, maïs). Dans les lieux où ces nou-
bassins versants de la Volta, autour de la capitale veaux systèmes de culture ont réussi, les bas-fonds
régionale de Tamale. Ce fut très rapidement un n'ont plus qu'un intérêt marginal ou sont repris par
échec. Ils revendirent alors leur matériel à des les quelques individus de la collectivité qui n'ont que
entrepreneurs ghanéens privés qui se lancèrent dans peu d'accès aux terres hautes. Dans les autres lieux,
cette grande agriculture capitaliste de bas-fond, dont notamment dans la partie la plus méridionale, le
certains dépassèrent 100 ha cultivés en riz. cercle de Kadiolo, les bas-fonds deviennent
76
A. LEPLAIDEUR
aujourd'hui la partie centrale des systèmes de cul- A l'autre extrême, un emplacement ayant un régime
ture, les terres de versant et les terres hautes devenant hydrique très aléatoire et des conditions difficiles de
les espaces complémentaires antirisque (manioc, commercialisation conduit les paysans à ne pas faire
taro, un peu de maïs). de riziculture, ou de manière marginale et anti
aléatoire, pour leur consommation, et à choisir des
Dans ce contexte agraire, on peut comprendre les itinéraires techniques moins sophistiqués, majo-
réactions plus que mitigées des populations vis-à-vis ritairement confiés aux femmes.
des lourds aménagements hydro-agricoles réalisés
dans certains bas-fonds de la région. D'abord leur site Ainsi les réseaux spatiaux du commerce influen-
fut choisi dans les régions où la dynamique coton- ceraient le choix des pratiques agricoles de manière
nière sur terres hautes était la plus efficace. L'intérêt quasiment identique à celle d'un réseau d'irrigation
économique des paysans, bien que réel, était moins amenant l'eau; les acteurs du commerce te baigne-
crucial. Cela permit aux cadres de la structure d'amé- raient li de manière différenciée les bas-fonds: les
nagement, qui contrôlaient l'établissement pério- condamnant ici à un te assèchement des échanges li
dique des listes d'attributaires, de s'en attribuer une ou au maintien d'une te mare li résiduelle (auto-
bonne part, pour l'alimentation de leur grande famille consommation) ; stimulant là leur productivité par
ou pour la vente du riz aux commerçants. Transmise d'incessantes sollicitations d'achat. On serait donc
de bouche à oreille, cette pratique d'attribution des conduit à préconiser, lors des aménagements des
terres par la structure aménagiste fit craindre aux bas-fonds, des mesures favorisant leur insertion dans
paysans pour lesquels les bas-fonds avaient une la géographie des échanges régionaux.
grande importance économique de voir arriver ces
projets, dont les fruits risquaient d'être accaparés par
des étrangers déjà monétairement mieux pourvus.
Certains villages, où les bas-fonds ont une im-
Vers un renforcement
portance affirmée, mais où les terres de versant sont de la pluridisciplinarité:
encore dominantes, refusent à présent l'aména- participation de la socio-économie
gement. D'autres, où les bas-fonds sont essentiels, O;O:-:-;'o."Oo..X';-."'iI'. --:-:-:-;.:-. :-. "";.;-. Xt."'iI'. :.-:-:.-:.-. "'iI'. :v. '«Y. '«Y."'iI'. "»:.o. :v :v '«'. 'O'. --x
reconnaissent l'attrait des techniques d'amé- Sans remettre en question le rôle prépondérant des
nagement mais demandent en contrepartie d'en spécialistes de l'hydraulique, ne faut-il pas leur éviter
contrôler eux-mêmes l'attribution voire l'amé- les errements qu'a subis une profession du même
nagement sous des formes moins coûteuses, à la type, les architectes, concevant des logements dans
portée de leurs compétences techniques et de leurs les cités modernes, qui dans leur conception,
capacités d'investissement. s'accommodent mal parfois des exigences de la vie
sociale.
Attendant également une intervention plus engagée
Des enjeux liés à l'emplacement des agronomes d'observation (14), je peux proposer
des bas-fonds dans les réseaux l'aide de la socio-économie sur les bases indiquées
par le schéma de la figure 1 (15)
d'échange
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77
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
© - Sols...
- CesUon fertilité
- Rèpartltlon des Intrants, etc.
(c)
de
gestion
(niveau village)
.--_l:"'-_IL,1~ @
(b)
Le thème d'observation est cel ui des pratiques La position de chacune des plantes produites,
agricoles. cueillies, de chacun des produits de la chasse, de la
pêche, de chacun des services accordés à l'extérieur
On analyse à ce stade, avec les agronomes, les cul-
dans le calendrier de trésorerie permet de hiérar-
tures pr?tiquées, les variétés utilisées, les itinéraires
chiser les éléments qui sont à la base de la dyna-
techniques suivis, les assolements et les rotations
mique monétaire, ceux qui articulent le village ou le
choisies, etc. En tant qu'économiste, on dresse des
ménage avec l'économie marchande. Un bref
bilans sur les calendriers agricoles, les surfaces, les
inventaire des principaux postes de dépenses et des
rendements obtenus, la productivité de la terre, des
périodes où elles sont le plus communément
hommes, des outils, parfois selon les types de sol ou
réalisées permet de dresser le bilan des finalités
d'aménagement. On analyse les pratiques sur bas-
sociales et économiques accordées à l'argent. La
fonds et leur complémentarité avec celles sur terres
comparaison entre les périodes de rentrée et de sortie
hautes.
d'argent révèle les moments d'abondance relative
Tous ces éléments recueillis, par l'observation et par mais également de manque sur lesquels les
l'interview, deviennent les faits à expliquer par les 1( prêteurs li calquent leurs stratégies de profit.
ensembles de type B et C.
Enfin, on recueille les informations sur l'histoire
La seconde entrée par la 1( porte B li permet de situer
récente de l'accumulation du village, du ménage.
chacune des productions et des pratiques agricoles
Les histoires de vie, orientées sur le thème des
dans sa finalité socio-économique immédiate, mais
valeurs de production acquises ou cédées et sur les
aussi à moyen et long terme.
circonstances qui en sont l'origine, permettent de
Ainsi analyse-t-on la place et l'enjeu de chacun des déceler les produits, les techniques, les événements
produits autoconsommés dans le calendrier ali- économiques et climatiques (prix, sécheresse,
mentaire des ménages; il ressort alors la durée des encadrement..J qui ont altéré ou stimulé l'ensemble
périodes de soudure, qui, si elle est allongée, in- de l'activité productive. Des classements en termes
fluence grandement les recherches d'innovations d'évolution tels que 1( en voie de paupérisation li,
paysannes pour améliorer les systèmes de culture « en reproduction simple li, « en voie d'accumu-
existants; les plantes 1( pivots li tels le manioc, le lation li, réalisés sur les villages ou ménages
taro, le maïs apparaissent clairement. échantillons, permettent de dresser un bilan général
78
A. LfPLAIDfUR
Dans le cas de l'application de notre schéma au Mais le milieu naturel n'est pas le seul détermant qui
problème spécifique des bas-fonds, tous les éléments explique les comportements agricoles. Celui du
recueillis par l'entrée de la te porte B li séparent marché, de sa strudure, des prix est au moins aussi
produits, pratiques et finalités des bas-fonds de ceux important. Il faut alors analyser les réseaux com-
des terres hautes. On comprend alors, en termes merciaux, les formes et les techniques d'échange (y
d'évolution, la complémentarité et la concurrence compris les conditionnements, les transports, etc,),
entre ces deux zones écologiques. les autres hommes qui mettent en relation l'espace
agricole avec l'ensemble des autres circuits éco-
Pour finir, la rentrée par la te porte C li permet de nomiques, ceux des produits fournis par les paysans,
comprendre les déterminismes écologiques et ceux des produits qu'ils acquièrent régulièrement ou
économiques auxquels l'homme a dû adapter ses qu'ils souhaitent acquérir (engrais, outils..,).
pratiques techniques, économiques et sociales. Ils
regroupent les cadres structurels sur lesquels ses Ces circuits peuvent se comparer à des réseaux
actes jouent, mais qu'il ne peut maîtriser à son d'irrigation dont les canaux primaires, secondaires et
niveau de décision (climat, marchés.. .). Pour des tertiaires irriguent de manière différente les zones
raisons de cohérence de l'analyse avec le champ enquêtées. Notre jargon parle alors de te rentes dif-
étudié, les pratiques agricoles et la temporalité dans férentielles li favorisant certains espaces et pas
laquelle elle s'inscrit (l'année en cours et les d'autres. Les géographes humains préfèrent le terme
quelques années antériures), on y inclut également d' te espace réticulé ou réticulaire li.
les forces produdives dont l'individu dispose pour Là encore l'application particulière de ce schéma
te artificialiser li le milieu: ses terres accessibles, sa
aux spécificités des bas-fonds permet d'inventorier
force de travail, ses outils. Ce sont en fait tous les de manière séparée les produits, techniques, milieux
éléments qui limitent ses ambitions immédiates. qui leur sont spécifiques, toujours en rapport avec les
D'abord se pose le problème du milieu écologique autres milieux qu'exploite également l'homme
dont l'homme essaie de maîtriser certains éléments. étudié.
Eau, sols, plantes et animaux en sont les principaux
supports. Il s'agit dans un premier temps d'en
analyser les grandes strudures, non pas tant avec les Différentes formes de synthèse
termes des spécialistes des autres sciences tech- et d'extrapolation
niques qu'avec ceux des hommes qui les utilisent à
Sont utilisées ici les techniques de notre discipline
cette place. Pour prendre leurs décisions et maîtriser
partiellement le milieu naturel où ils exercent leurs qui permettent le te changement d'échelle li et la
adivités, ils s'appuient moins sur les connaissances synthèse. Les traitements statistiques multivariés des
données sont alors d'une grande aide (AFC, ACP,
d'un savoir extérieur à leur société qu'aux catégories
classification ...). l:lles permettent de regrouper les
qu'ils ont eux-mêmes définies. Doit alors se faire un
unités observées par grands ensembles qui ont les
travail de conversion entre les éléments de leur
savoir et ceux des spécialistes, glossaire nécessaire mêmes caractéristiques de structure et d'évolution.
pour l'amorce d'une compréhension mutuelle. D'une série d'enquêtes de ménage, on peut alors
conclure sur la dynamique du village. A partir d'une
Vient alors le détail des techniques mises au point série d'enquêtes de village, on peut présenter les
pour agir sur le milieu naturel. Outre les éléments caradéristiques d'une région.
classiques de l'appareil de prodUdion et de ses per-
Quatre types d'éclairage peuvent faire ressortir les
formances économiques, si possible quantifiées, le
dynamiques productives des hommes dans leur
détail des outils, de leurs matériaux, des formes de
milieu.
leur utilisation est pris en compte. Chacun est relié
au type de milieu et d'action pour lequel il a été Le premier est de type socio-économique dominant.
conçu. Dans le cas des bas-fonds et de la gestion de Il consiste à privilégier lors du traitement les
l'eau, une attention particulière est portée aux variables décrivant les finalités de l'ade économique
techniques et performances de ces formes de (porte Bl. On aboutit ainsi aux classements faisant
maîtrise. Il en est de même pour les techniques de ressortir les entités qui s'accumulent et celles qui
lutte antiérosive et celles de maintien ou s'appauvrissent. Les variables sur les systèmes de
79
Thème / - Bas-fonds et milieu humain
80
A. LEPLAIDEUR
(5) Ces travaux ont porté sur l'analyse des filières maraÎ- (10) L'histoire de la cacaoculture ghanéenne est
chères (producteurs, commerçants, transporteurs, consom- remarquablement analysée par Polly Hill dans son livre
mateurs) qui approvisionnent Brazzaville. L'équipe franco- c Migrant cocoa farmers of southern Ghana ,., paru en
congolaise était multidisciplinaire (géographes, socio- 1970 à Cambridge University Press, 265 p. On y apprend
logue, économiste, juriste, agronome). Construite dans le ainsi que, loin d'être le résultat d'une dynamique coloniale
cadre d'un programme en trois phases (découverte, anglaise, la cacaoculture s'est développée de manière
compréhension des processus, quantification), l'équipe endogène, autour d'une classe d'entrepreneurs ghanéens,
vient de publier le bilan de sa première phase. Son titre est dont certains étaient issus du commerce précolonial. Ce fut
c Filières maraîchères à Brazzaville, premiers éléments ,., la rencontre de ces gens à capitaux et de migrants, venus
Montpellier, CIRAD-IRAT, 232 p. notamment du nord, à la conquête du c capital arbre
(cacaoyer) ,. et du capital terre accessible par le travail
(6) L'organisation de la production et des échanges chez manuel.
les Ba-Kongo est remarquablement analysée dans un
ouvrage, à présent de référence, de Georges Balandier, (11) Un travail récent mené par l'Oxford University et le
intitulé: c Sociologie actuelle de l'Afrique Noire. CIRAD-IRAT analyse la dynamique rizicole et la
Dynamique sociale en Afrique centrale ,., première édition mécanisation au Nord-Ghana. Constatant l'aspect positif
1955, quatrième édition 1982, Paris, PUF (coll. Quadrige), des effets induits par une mécanisation, il relativise les
530 p. Voir notamment p. 344-346, où Balandier écrit: constats qui a priori condamnent cette technique, en
c Peuple attaché à la vie de relations et aux activités insistant toutefois sur le délicat équilibre à conserver entre
d'échange et de traite, les Ba-Kongo ont donné à l'ins- c classe d'entrepreneurs, coOt du service, maintien du
titution des marchés une importance exceptionnelle qui a capital,. pour que ses effets perdurent. Voir le texte de
incité les ethnies voisines à l'utiliser comme modèle. Le Fiona Samuels, Alain Leplaideur, Barbara Harris intitulé
nom des différents marchés coïncidait avec celui des c Changing agrarian structure and petty commodity
quatre jours de la semaine Ba-Kongo et la périodicité - production in the Northern Region of Ghana ,., CI RAD-
tous les quatre ou huit jours - révèle l'activité des IRAT et QEH Oxford University, 1991, Montpellier, 41 p.
échanges, suggère l'intensité des rapports entre 12) On ne peut que recommander à ceux que le cas du sud
groupements. D. Naire et moi-même avons recueilli les du Mali intéresse la lecture de l'excellent travail d'Albert
témoignages d'un très vieil homme non lettré dans la Farats : c Place du riz dans les dynamiques de production
région du Pool qui nous a prouvé la véracité de ces écrits et de commercialisation agricoles des cercles de Sikasso et
et a pu préciser les produits que son père allait échanger, de Kadiolo ,.. Montpellier, CIRAD-IRAT, 1991,74 p.
dont certains légumes.
(13) Ousmane Sy : c Evolution du système agraire Senoufo
(7) Le lecteur intéressé pourra obtenir plus de rensei- et politique dans la zone Mali-Sud ,.. Mémoire DEA-IEDES,
gnements sur les nsaba dans un rapport pour le BIT en Paris, 76 p.
1979 : c Le système cultural paysan et la mise en place
d'un dispositif d'enquête- diagnostic agrotechnique des (14) c Place du riz dans les dynamiques de production et
conditions de production agricole. Paysans du Pool,.. de commercialisation des cercles de Sikasso et Kadiolo
A. Leplaideur, Montpellier, ClRAD. (Mali-Sud) ,.. Montpellier, CIRAD-IRAT.
81
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRA0, 1993
P. LEVANG 1
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83
Thème / - Bas bonds et milieu humain
Prenant la suite du colonisateur après les dures luttes culture vivrière pluviale. Ce sont en effet les projets
pour l'indépendance, les cadres de la jeune les moins coûteux par famille déplacée. L'ouverture
république d'Indonésie nient tout d'abord les leçons d'une piste d'accès et un défrichement sommaire
de l'Histoire, et renouvellent les mêmes erreurs. permettent d'attribuer à chaque famille un lot de
Ainsi, de nombreux projets, lancés sans les deux hectares dont un défriché, une maison,
infrastructures minimales, végètent ou disparaissent. quelques outils et semences, des engrais et pesticides
Avec l'avènement de 1'« Ordre nouveau li (à partir de à un coût très faible. L'alimentation des familles est
1965), les technocrates prennent le pouvoir. Le assurée par le ministère de la Transmigration
premier plan quinquennal est lancé en 1969 et le pendant 12 à 16 mois suivant le type de projet.
choc pétrolier de 1973 plonge le pays dans l'eu-
L'encadrement, dense sur le plan administratif, reste
phorie. Disposant enfin des moyens d'une politique
très léger sur le plan technique, les migrants étant
ambitieuse, les Travaux publics impriment leur
pratiquement livrés à eux-mêmes. Les sols, en
marque sur les grands choix nationaux (LEVANG et
général peu fertiles, remis aux transmigrants ne
5EvIN, 1989). C'est le règne de la « target li, objectif
correspondent que très peu à l'idée qu'ils se faisaient
incontournable du plan, qui privilégie le nombre de
de la terre promise, à savoir deux hectares de sawah
familles déplacées au détriment de la qualité des
(rizière irriguée). L'accès à la propriété d'une rizière
implantations. La technique résoudra tous les
étant la principale motivation poussant un Javanais à
problèmes éventuels. Sols insuffisamment fertiles?
rejoindre la transmigration, les autorités ne sont
On mettra plus d'engrais. Mauvaise accessibilité?
jamais avares de promesses. Le développement des
On construira des routes...
infrastructures ne pouvant pas suivre le rythme du
déplacement de population, une grande majorité de
transmigrants doit se contenter de promesses
Priorité aux projets vivriers d'irrigation...
84
P. LEVANG
guère à mettre rapidement en culture des surfaces matière organique. Ainsi, les rendements de la
importantes. Très souvent, seuls les 25 ares réservés première année se situent à un niveau très correct: 1
au pekarangan (jardin-verger entourant la maison) à 1,5 tonne de paddy, 0,5 à 0,8 tonne de maïs et au
sont cultivés pendant la première saison. moins 1,5 tonne de manioc (si celui-ci n'est planté
Progressivement, à raison de 20 à 30 ares par saison, qu'en bordure de parcelle). Malheureusement, les
la plupart des familles parviennent à cultiver surfaces cultivées restant en général inférieures à
l'hectare défriché qui leur a été remis. 50 ares la première année, les productions suffisent
tout juste, dans le meilleur des cas, à assurer l'ali-
Les colons doivent avant tout assurer l'alimentation mentation des familles. La fertilité du sol étant encore
de leur famille. Pour ce faire, ils recourent au jugée suffisante, de nombreuses familles revendent
tumpang sari, un système de culture traditionnel les engrais distribués gratuitement, à des fins de
ayant fait ses preuves de longue date à Java. Le consommation sociale. Pourtant, la situation se
tumpang sari associe riz pluvial, maïs et manioc sur dégrade rapidement: la conjugaison d'une capacité
la même parcelle. Le plus souvent, le maïs est semé d'échange faible, d'une minéralisation rapide de la
en poquets sur des lignes distantes de trois mètres matière organique, d'un lessivage important (la
environ, quinze jours avant le riz pluvial et un mois pluviométrie annuelle est en général supérieure à
avant le manioc. Traditionnellement, le manioc n'est 2 000 mm) et de la non-restitution des exportations
planté qu'en pourtour de parcelle ou en lignes très
d'éléments fertilisants handicape lourdement
espacées. Le manioc et le maïs n'ont qu'un rôle l'avenir.
d'appoint dans l'alimentation, le riz étant la culture
principale. Tumpang sari signifie d'ailleurs le profiter Dès la deuxième année des signes évidents de
de l'essentiel", maïs et manioc tirant parti de la carences se manifestent sur le riz et le maïs. A partir
culture du riz. Mais, lorsque les productions de de la troisième année, la croissance des cultures est
le l'essentiel" ne suffisent plus à l'alimentation de la compromise; seul le manioc résiste encore. Lorsque
famille, les cultures associées prennent plus le migrant se rend enfin compte de la nécessité de la
d'importance et une bouture de manioc est im- fertilisation, il ne dispose plus des moyens financiers
plantée sous chaque poquet de maïs. Progres- pour faire face à l'achat d'engrais, engrais et pesti-
sivement, riz et maïs sont abandonnés au profit de la cides n'étant distribués gratuitement que pendant
monoculture du manioc. A terme, le manioc est lui- deux à trois ans. D'année en année les rendements
même abandonné et les terrains se retrouvent décroissent rapidement pour se stabiliser en moyenne
infestés par l'alang-alang {/mperata cylindricaJ autour de 300 kg de paddy, 150 kg de maïs et 8 à 12
(LEVANG et MARTEN, 1984 a). tonnes de manioc (planté à raison de 10 000 pieds à
l'hectare), La fertilité du sol n'est cependant pas seule
Comment en est-on arrivé là ? La responsabilité en responsable de cette situation.
incombe essentiellement à trois facteurs: la
médiocre fertilité du sol, l'infestation par les pestes,
et surtout le niveau technique trop faible ou, plus
exactement, inadapté des transmigrants. Des infestations de pestes
Le niveau endémique des populations de pestes est
peu élevé lors de l'ouverture de ces zones de
Une médiocre fertilité du sol transmigration, jusqu'alors très rarement voire jamais
cultivées. L'arrivée de plusieurs centaines de familles
Sauf rares exceptions, les terres dévolues à la trans- (une unité de transmigration compte 500 familles en
migration présentent une fertilité plutôt médiocre et, moyenne) et la mise en culture de grands blocs de
dans la plupart des cas, nettement inférieure à celle parcelles vont favoriser le développement sans
des sols javanais. Il y a essentiellement deux raisons précédent de nombreuses pestes. Sur un même
à cela:
centre, l'arrivée successive des migrants sur une
- les sols plus anciens et très lessivés des îles période de un à deux ans va entraîner un important
extérieures ne bénéficient pas des apports récents du échelonnement des dates de semis et, par là, faciliter
volcanisme, très actif sur Java et Bali (MOHR, 1938) ; le développement des pestes à un niveau endémique
- les rares zones fertiles sont appropriées de longue élevé. En plus de cette infestation permanente,
date par les autochtones. d'insectes et de rongeurs essentiellement, les par-
celles des colons situées à proximité de la forêt se
Les problèmes liés à la médiocre fertilité du sol trouvent en butte aux incursions dévastatrices de
n'apparaissent pas immédiatement aux yeux des hordes de sangliers, de cerfs ou de singes (LEVANG et
migrants. La défriche récente et le brûlis de la forêt MARTEN, 1984 b). Il en va des pesticides comme des
primaire, ou de recrûs forestiers d'âges divers, engrais: jugés inutiles la première année, ils sont
enrichissent temporairement les sols en cendres et revendus à bas prix sur le marché local.
85
Thème 1- Bas bonds et milieu humain
Un niveau technique très faible les centres pendant des périodes relativement
longues, à la recherche d'emplois de journaliers. En
Un exploitant agricole javanais, s'il n'est pas l'absence de cette possibilité - certains villages
exproprié par des projets d'utilité publique, n'a isolés de Kalimantan, par exemple - les taux de
aucune raison de rejoindre la transmigration. Les désertion peuvent dépasser 35 % et mettre en danger
colons se recrutent bien évidemment parmi les la survie du centre (LEVANG et al., 1986). Absents des
paysans sans terre, c'est-à-dire les ouvriers agricoles. villages pendant des périodes de plus en plus
Ces derniers, tout en disposant d'une excellente longues, les chefs de famille réduisent tout
connaissance de l'ensemble des travaux agricoles, naturellement les surfaces cultivées et négligent leur
ignorent tout de la gestion d'une entreprise agricole. entretien. L'enherbement n'est plus contrôlé et les
Il leur manque surtout cet« esprit d'entreprise li, en plantes cultivées n'arrivent plus à se maintenir contre
totale contradiction avec la mentalité de l'ouvrier l'infestation d' Imperata. Tous les éléments se
agricole, qui goOte chaque soir le fruit de sa journée conjuguent pour réduire davantage des rendements
de travail. Fertilisation et traitements phytosanitaires déjà médiocres. Au bout de cinq ans environ, la
sont des thèmes techniques souvent mal maîtrisés. grande majorité des colons renonce à cultiver.
Ainsi, engrais et pesticides sont souvent appliqués L'alang-alang reste seul maître du terrain. Con-
trop tard, lorsque carences et dégâts ne sont plus trairement à une croyance très répandue, le paysan
rattrapables, et bien sOr à des doses homéopathiques, n'abandonne pas sa parcelle parce qu'elle est
en raison du coOt élevé des produits. Ultérieurement, envahie par Imperata. II serait plus juste de dire
la constatation de l'inefficacité des traitements qu'/mperata envahit les parcelles parce qu'elles sont
n'incitera pas les transmigrants à modifier leurs abandonnées.
habitudes.
Abandon de la culture ne signifie pas obliga-
toirement abandon du centre de transmigration. A
Kalimantan, de nombreux villages survivent grâce
Une situation bloquée aux revenus de journaliers trouvant à s'employer à
100 voire 200 km de chez eux. L'aspect psy-
La situation se retrouve rapidement bloquée malgré
chologique lié à la propriété foncière l'emporte très
tous les efforts des autorités. En raison des conditions
largement sur l'aspect strictement économique chez
de recrutement privilégiant les chefs de famille
tous ces anciens paysans sans terres. Lorsque les
jeunes, le colon ne dispose le plus souvent que d'une
possibilités d'emploi à l'extérieur ne permettent pas
force de travail réduite à l'unité, l'épouse devant
le plein emploi, en raison de la faiblesse de l'offre
s'occuper des enfants encore tous en bas âge Seule la
(comme à Kalimantan) ou d'une demande excessive
famille restreinte est prise en charge par le projet, la
(cas du Lampung), les colons font malgré tout appel
grand-mère étant considérée, à tort, comme une
à l'agriculture pour réduire leurs dépenses
bouche inutile, alors qu'elle libère l'épouse des
alimentaires. Même lorsque la part relative du
charges domestiques pour un coOt on ne peut plus
revenu agricole est faible, les migrants s'identifient
modique. Terre et capital sont mis à disposition par
comme étant des agriculteurs et non pas des
le ministère. Ce cadeau, indispensable pour attirer le
journaliers. Ils vont cependant concentrer leurs
candidat, mais aussi pour lui permettre de survivre
activités sur des parties bien précises du paysage.
pendant la première année, a des effets pernicieux.
En effet, une partie importante de ce capital de
départ est transformée en consommation sociale.
Une mentalité bien ancrée de journalier n'incite pas
particulièrement au travail, lorsque les besoins Le bas-fond, dernier recours
essentiels de la famille sont assurés par l'Etat.
Lorsque les aides cessent et que le migrant se
d'une agriculture en crise?
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retrouve dans l'obligation de nourrir sa famille, il ne
dispose plus des capitaux nécessaires à la mise en Réduite à son minimum, l'activité agricole se
culture d'un sol peu fertile dans un environnement concentre sur les pekarangan, jardins-vergers
pionnier. Cultivées pratiquement sans engrais ni entourant les habitations. Dévolus à la production de
pesticides, les parcelles ne fournissent que des fruits, légumes, épices, plantes médicinales et bois
rendements médiocres. Les productions s'avérant de feu, les pekarangan permettent aux Javanais
inférieures aux besoins, le colon est contraint à d'améliorer leur régime alimentaire, mais n'assurent
rechercher des sources de revenus extérieures. pas la fourniture de l'aliment de base, même si la
misère pousse de nombreuses familles à remplacer le
La faiblesse de l'offre d'emploi dans les zones riz par le manioc. L'abandon d'un grand nombre de
pionnières et l'absence de qualification profes- parcelles contraint les paysans irréductibles à se
sionnelle des migrants obligent ces derniers à quitter regrouper en bordure de village, les parcelles isolées
86
P. LEVANG
étant irrémédiablement la proie des prédateurs. Mis à principal poste de travail en riziculture pluviale.
part les pekarangan, les seules parcelles jamais Grâce à l'économie de travail ainsi réalisée, les
abandonnées se situent en position de bas-fond. temps de travaux totaux (sans compter l'éta-
blissement de la rizière) entre riziculture inondée et
Curieusement, lors de la planification des centres, les
riziculture pluviale s'équilibrent (tableau 11).
bas-fonds sont soigneusement éliminés du
cadastrage des lots remis aux transmigrants. En effet, Les rendements, quant à eux, sont largement
les nombreux méandres des ruisseaux gênent le supérieurs, puisque, sans faire appel à l'engrais, le
dessin de parcelles aux belles formes carrées, chères riziculteur obtient en moyenne plus de deux tonnes
aux ingénieurs des travaux publics. La topographie de paddy par hectare, et cela année après année,
accidentée des bas-fonds, quant à elle, empêche le sans baisse régulière comme c'est le cas en
défrichement mécanique des lots. Les transmigrants, riziculture pluviale. Le contrôle des pestes reste
en revanche, n'ignorent rien de l'intérêt des bas- cependant le problème crucial des bas-fonds. En
fonds. Très rapidement les plus entreprenants d'entre effet, l'abandon progressif des parcelles alentour
eux, avec l'aval du chef de centre, défrichent les provoque la concentration des pestes, essen-
vallons les plus proches, souvent bien avant d'avoir tiellement rongeurs et oiseaux, sur les bas-fonds,
défriché leur propre lot. La mise en valeur d'un bas- dernières parcelles encore cultivées. Toutefois, au
fond fait appel à des techniques bien maîtrisées par bout de quelques années, mais aussi au prix de
les colons, qu'ils soient javanais ou balinais. Surtout, quelques récoltes perdues, les populations endé-
elle ne fait appel qu'à du travail et ne nécessite pas miques retombent à un niveau acceptable.
l'achat d'intrants coOteux.
Les bas-fonds représentent ainsi l'unique chance des
L'investissement en travail, bien que relativement transmigrants d'assurer l'autosatisfaction de leurs
lourd (tableau 1), porte rapidement ses fruits. Après la besoins vivriers. Représentant en moyenne 10 à 20
défriche, l'établissement sommaire de diguettes et de % des superficies cultivables, il n'y a bien entendu
fossés de drainage permet de contrôler plus ou moins pas assez de bas-fonds pour toutes les familles de
le niveau de l'eau dans la rizière. Les nombreuses migrants. Parmi les exclus du partage, nous citerons
souches et troncs abattus, difficiles à brûler, pour- l'exemple de deux transmigrants de la région de
rissent lentement sur place et participent à l'enri- Sidomulyo (Lampung-Sud) qui ont décidé de faire
chissement du sol en matière organique. De par sa sortir les bas-fonds de leurs limites naturelles.
position topographique en contrebas, le bas-fond
profite d'importants apports de cendres ou d'autres
éléments fertilisants depuis les parcelles défrichées
aux alentours. De plus, en raison de leur caractère
hydromorphe, les sols de bas-fond ne subissent pas Sawah tadah hujan :
le lessivage intense auquel sont soumis les terrains des bas-fonds qui n'en sont plus
avoisinants. ~:~:~~~:~~~:~":;:;:::::::;::~::~::~~~~~::~$:::::::~::::::~::;:::::~::::;::::::::$::~:::::~::~:$~$:~~":;:;:;:::;:;:::;~:::::::::~:$::":;$$::~::;$::":;~~:;~~:;:~:$::::::~::~::::::~:::;:;~:;:;:,::
• L'Indonésie est très en retard dans la sélection variétale du riz Nos deux agri cu lteurs de Sidomu lyo vont essayer de
pluvial. La commercialisation de variétés sélectionnées de riz comprendre le pourquoi des différences de rende-
pluvial est quasi inexistante. ment importantes entre riziculture pluviale et rizi-
Thème / - Bas bonds et milieu humain
culture de bas-fond. Pour eux, la différence ne peut grande majorité des zones de transmigration. La
pas provenir de la fertilité du sol. Ils ont bien préparation du sol en conditions humides, par le
conscience que les sols de Sumatra sont moins passage répété de la charrue et de la herse en traction
fertiles que les sols de Java, mais il n'y a aucune attelée, permet la création de l'horizon imperméable
raison pour que les sols de bas-fond soient plus indispensable au maintien en eau de la rizière. La
fertiles que les sols des pentes voisines. La différence première année, la préparation du sol javanaise
ne provient pas non plus de la quantité d'eau classique, labour-hersage-Iabour-hersage, ne suffit
disponible; en saison des pluies, les déficits pas. En conditions bien humides, trois labours
hydriques graves sont rares (une année sur dix successifs sont indispensables pour créer un horizon
seulement). La seule raison évidente pouvant imperméable. Seuls les labours effectués immé-
expliquer ces différences de rendement provient de diatement après une pluie importante sont efficaces.
la quasi-permanence d'une lame d'eau en surface, Une fois créée, la discontinuité au sein du profil se
ce qui permet de faire appel aux variétés sélec- maintient facilement les années suivantes, par une
tionnées et de lutter efficacement contre les préparation du sol classique, toujours en conditions
adventices. humides.
88
P. LEVANG
décisif sur les adventices. Le surcroît de travail vend son riz sur le marché. Le mouvement est lancé.
occasionné par la préparation du sol et le repiquage, En quelques années le paysage de Sidomulyo
une fois le système installé, est compensé par le gain change. L'alang-alang recule devant les rizières. En
de travail au moment du sarclage (tableau III). Sans saison des pluies, le voyageur non averti croit se
apport complémentaire d'engrais ou de pesticides, déplacer au sein d'un vaste périmètre irrigué. Seul le
nos précurseurs obtiennent, dès la première année, spécialiste s'étonne de l'absence de canaux
des rendements supérieurs à deux tonnes de paddy d'irrigation sur des surfaces aussi importantes.
par hectare, soit trois à quatre fois plus que leurs
voisins en riziculture pluviale.
Mais quelle que soit l'explication du phénomène, les Avec une demi-tonne de paddy le colon n'arrive pas
résultats sont là, et bien visibles. Qui plus est, à nourrir sa famille; il est contraint de travailler à
l'innovation est endogène. Elle ne provient pas de l'extérieur et de réduire ses activités agricoles, voire
sociétés de développement aux motivations d'y renoncer. Qui plus est, les fluctuations inter-
ambiguês, ni d'une propagande gouvernementale annuelles importantes le laissent sans ressources
qui promet plus qu'elle ne tient, les transmigrants certaines années. Pourtant tout le monde s'est
sont bien placés pour le savoir. L'exemple vient du penché sur son cas. Ministères, sociétés de
voisin: celui qui faisait bien rire lorsqu'il construisait développement, ONG et instituts de recherche ont
ses diguettes, celui qui fait envie, maintenant qu'il tous tenté de rendre viables ces centres de
transmigration. Certains instituts comme l'IRRI ont
mis au point des systèmes de culture non dénués
d'intérêt et aux résultats tout à fait remarquables ONU
G. ISMAIL et al., 1978). Pourtant, aucune de ces
Tableau III. Temps de travaux en cu~ure attelée: merveilles agronomiques n'a été retenue par les
riziculture pluviale et sawah tadah hujan. colons. Pour améliorer l'agriculture pluviale, tous les
Opération Riziculture pluviale Sawah tadah hujan instituts proposent des combinaisons compliquées
Oours-homme/ha) Oours-homme/ha) d'espèces sélectionnées, avec toujours les mêmes
Pépinière 4 conséquences pour l'agriculteur: plus de travail,
Labours 10 + 8 6+5 plus d'intrants et surtout plus de risques! Au plan
technique qui est le leur, les transmigrants ne sont
Hersages 4+4
pas prêts à accepter ce genre de modèle.
Entretien cliguettes 7
Semis 14
Avec deux tonnes de paddy par hectare de sawah
tadah hujan, en revanche, le transmigrant est en
Arrachage plants 6
mesure non seulement de nourrir sa famille mais
Repiquage 22 aussi de dégager suffisamment de surplus pour
Sarclage 1 25 10 investir en facteurs de production. Ce rendement
Sarclage 2 20 10 minimal garanti, assurance de la survie du rizi-
culteur, va lever toutes les barrières empêchant
Fertilisation et traitements 4 4
l'intensification. L'engrais, d'abord épandu parci-
Récolte 3D 30 monieusement, est directement utilisé par le riz, sans
Total 111 112 pertes élevées dues au lessivage. La variété sélec-
Seule la préparation du sol est effectuée en traction attelée. tionnée répond bien à la fertilisation et les résultats
La joumée de traction attelée dure 4 à 5 heures, contre 7 à obtenus poussent l'agriculteur à augmenter les doses.
8 heures pour la journée-homme.
" s'ouvre progressivement à la vulgarisation et se met
Thème 1- Bas bonds et milieu humain
à l'affOt des dernières nouveautés permettant INU G. ISMAIL et al., 1978. Cropping systems research in
d'améliorer ses rendements... Transmigration areas. Southern Sumatra. Jakarta and
Bogor, Directorate General of Transmigration and Central
Dix ans plus tard, la révolution verte n'a plus de Research Institute for Agriculture.
secrets pour les riziculteurs de Sidomulyo. Leur
niveau technique s'est élevé de manière fulgurante. LEVANG P., MARTEN R., 1984 a. Sebamban 1. Case study
Engrais, pesticides et herbicides sont parfois même of a Transmigration project in South Kalimantan. Paris,
employés à des doses excessives. Le canton de ORSTOM, Jakarta, Departemen Transmigrasi.
Sidomulyo, déficitaire en riz jusqu'à la fin des années
70, compte maintenant parmi les principales régions LEVANG P., MARTEN R., 1984 b. Batumarta. Agro-
productrices de riz« irrigué,. du sud du Lampung, economie survey of a Transmigration center in South
avec des rendements moyens supérieurs à quatre Sumatra. Paris, ORSTOM, Jakarta, Departemen
Transmigrasi.
tonnes de paddy à l'hectare.
LEVANG P. et al., 1986. Usaha untuk memperbaiki taraf
hidup transmigran di Sintang. Survey agro-ekonomi di
daerah Transmigrasi Sintang, Kalbar. Paris, ORSTOM,
Jakarta, Departemen Transmigrasi.
Références bibliographiques
LEVANG P., SEVIN O., 1989. Quatre-vingts ans de
BENOIT D., LEVANG P., PAIN M. (éd.), SEVIN O., 1989. transmigration en Indonésie, 1905-1985, Ann. Géogr., 549
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Lampung, Sumatra, Indonésie. Paris, ORSTOM, Jakarta,
Departemen Transmigrasi. MOHR E.C.J., 1938. The relation between soil and
population density in the Netherlands East Indies. In :
HARDJONO J., 1977. Transmigration in Indonesia. Kuala
Comptes rendus du Congrès international de géographie,
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HEYTING H.G., 1932. De les van wortelvast
Gedongtatakan Javanen-kolonisatie. Amsterdam, De PELZER K.J., 1945. Pioneer settlement in the Asiatie
Indische Gids, vol. 60, p. 1106-1117. tropics. New York, American Geographical Society.
90
Synthèse des communications et débats
Thème 1- Bas-fonds et milieu humain
C. Blanc-Pamard, A. Leplaideur,
H. Rakoto-Ramiarantsoa, R. Rasolo
Madagascar se situe dans le groupe des pays dont l'enjeu rizicole des bas-fonds est primordial. Ceux-ci
représentent 47 % des surfaces rizicoles. Pour les hautes terres de Madagascar, on atteint 70 %
(CP. Ravohitrarivo).
Dans cinq pays de l'Afrique de l'Ouest (Côte-d'Ivoire, Mali, Liberia, Sénégal, Sierra Leone), les différentes
formes de riziculture représentent 1 314 000 hectares et 1 570 000 tonnes de riz. Promue depuis moins d'un
siècle, la riziculture irriguée ne touche que 5 % des surfaces et ne porte que sur 11 % de cette production.
Pourtant, ce type d'aménagement draine entre deux tiers et trois quarts des financements consacrés aux projets
rizicoles (A. Leplaideur).
L'enjeu posé à certaines recherches en sciences sociales est de démontrer l'intérêt de solutions alternatives
d'intervention, plus proches des usages, des contraintes et des attentes des populations.
La synthèse des débats de la première journée, consacrée aux sciences humaines, est présentée en trois
parties:
- Les dynamiques sociales et économiques paysannes qui accompagnent l'occupation et la mise en valeur des
bas-fonds rizicoles.
- Les questions de méthodes.
- Une pratique interdisciplinaire lors des interventions.
Les projets dirigistes d'aménagement ou de préservation de « l'environnement sans l'homme li sont le plus
souvent contournés par les fronts pionniers paysans (A. Teyssier, O. Tsialiva, P. Garin, P. Levang).
Aux projets normalisés qui oublient l'enjeu de la survie des gens qui y vivent, s'oppose de manière le plus
souvent insidieuse, et parfois conflictuelle, la force des mobiles individuels et collectifs. Moins tournés vers la
recherche du seul profit que vers la minimisation des risques, les sociétés paysannes et les unités qui les
constituent sont en dynamique permanente pour innover lorsque cela correspond aux enjeux économiques et
sociaux du moment (A. Leplaideur, D. Rollin, j.L. Sabatier).
91
n'est pas tourné vers l'intensification. L'utilisation des différentes facettes, la pluriactivité comme les risques
climatiques développent dans la société paysanne des pratiques qui ne recherchent pas un optimum de
production.
L'étude de A. Teyssier, O. Tsialiva et P. Garin sur la mise en valeur à l'ouest du lac Alaotra, région de faible
densité, souligne l'installation pionnière d'aménagement dans des thalwegs occupés par les forêts galeries. Le
défrichement puis la progression des aménagements montrent une évolution vers un système rizicole irrigué.
Progressivement aménagés, les bas-fonds sont analysés comme des espaces structurants autour desquels
s'articule la colonisation agricole et la hiérarchie sociale.
Une troisième analyse menée dans le Vakinankaratra par D. Rollin met l'accent sur la diversité des systèmes
de production et des stratégies paysannes pour assurer la sécurité alimentaire.
Deux types de situation caractérisent cette région, fruit de la rencontre entre les sociétés rizicoles merina et
betsileo. Dans le moyen-ouest, région de faible densité, la part des rizières dans les surfaces cultivées peut
atteindre 40 % ; les recettes proviennent, pour plus de la moitié, des rizières. Par contre, dans les zones
anciennes densément peuplées à l'est de la région, la plupart des exploitations agricoles possèdent moins de
10 ares par personnes et 7 % des revenus proviennent de la riziculture.
Cette évolution des paysages est de caractère endogène, mais il faut reconnaître, en Imerina, l'action de
vulgarisation depuis les années 60, qui s'est traduite par plusieurs innovations techniques: la culture en ligne
en est un des traits les plus marquants, la culture de contre-saison aussi, dont le succès tient pour beaucoup à
l'objectif de fertiliser au maximum, avec les moyens paysans, la parcelle rizicole. On constate l'impact de
projets agricoles qui répondent à des besoins paysans.
Une autre dimension, la transmigration indonésienne, étudiée par P. Levang dans la province de Lampung,
révèle la mise en valeur réussie des bas-fonds que les centres administratifs ont ignorés en les éliminant du
cadastre. C'est l'exemple d'un développement individuel et endogène. L'extension de l'effet bas-fond au-delà
de ses limites naturelles sur des terrains défrichés en sec est une évolution du paysage qui ne correspond pas
initialement aux objectifs du gouvernement indonésien. En maintenant une lame d'eau dans des rizières sans
canaux d'irrigation, le paysan obtient un rendement moyen de 2 tonnes par hectare; il joue sur une économie
en temps et en travail, tout en acquérant la possibilité de cultiver des variétés sélectionnées. Cela lui permet
de dégager du surplus nécessaire pour investir en facteurs de production.
Cet exemple, particulièrement intéressant en comparaison avec les situations malgaches, a révélé lors des
discussions le rôle des migrations temporaires, qui associent aux zones rurales des facteurs extérieurs tels que
la ville et l'industrialisation.
Les communications citées mettent en évidence trois dynamiques d'aménagement des bas-fonds:
- en lmerina, un espace façonné de longue date;
- dans la région de l'Alaotra, un espace de conquête;
- en Indonésie, un espace de survie devenu espace de surplus;
92
tumpang sari (profiter de l'essentiel) associe le riz pluvial, le maïs et le manioc. Là aussi, le riz et le maïs se
retirent les premiers quand la fertilité diminue.
Mais de pionnier minier l'agriculteur se fait progressivement aménagiste. A Madagascar, à la première phase,
où la forêt est vécue comme une contrainte dont il faut s'affranchir, succède le moment où il s'agit d'en
domestiquer les bienfaits. L'intérêt pour le reboisement sur le tiers supérieur et au sommet des collines est
quasiment unanime. Les arbres fruitiers (manguiers, avocatiers, néfliers, orangers...) sont souvent regroupés en
vergers.
A Sumatra, le pekarnagan (jardin-verger) entoure la maison sur 25 ares environ. Si P. Levang ne signale pas de
reforestation spontanée, il indique clairement les trois phases des systèmes rizicoles différenciés sur lesquels
les paysans s'appuient pour artificialiser à leur avantage l'espace, sans grand respect des lignes directrices
fixées par l'Etat. Quand le tumpang sari s'épuise, certains se replient sur les bas-fonds dont les techniques de
mise en valeur sont bien maîtrisées (diguettes, fossés de drainage...) et où les nouvelles variétés, utilisées avec
engrais, réussissent bien.
AprèS ce te repli lt du front pionnier, une nouvelle dispersion dans l'espace a lieu autour de parcelles sur
lesquelles ils étendent te l'effet bas-fond lt dans des lieux qui n'en sont pas, les sawah fadah hujan (rizières,
réservoir de pluie). L'équation de la réussite est liée à la maîtrise de trois facteurs. Pour pouvoir utiliser les
nouvelles variétés performantes et l'engrais, il faut garantir au riz une lame d'eau en permanence. Hors des
bas-fonds, celle-ci ne peut provenir que du ruissellement et de la pluie. Le ruissellement est facilement
contrôlé par l'édification de petites diguettes. L'infiltration est bloquée par la réalisation artificielle (argile) d'un
horizon imperméable à faible profondeur. Cette pratique de te pot de fleur lt, récemment mise au point par les
paysans, permet alors une reconquête des sols attribués par l'Etat aux pionniers volontaires.
En l'absence d'une pratique (variété et amendement) leur permettant de poursuivre la riziculture pluviale, ces
hommes ont su adapter l'espace à des variétés performantes existantes, base de la révolution verte en
Indonésie. A présent, quatre tonnes à l'hectare est le rendement moyen dans le canton de Sido Mulyo.
A Madagascar, il s'écoule moins de vingt ans entre l'instant où un pionnier fondateur s'installe au milieu de
cinq à six bas-fonds boisés et le moment où ces bas-fonds sont totalement défrichés selon les techniques
précisément décrites par C. Blanc-Pamard et H. Rakoto-Ramiarantsoa.
Par ses travaux sur le Vakinankaratra autour d'Antsirabe, Rollin apporte les éléments qui permettent
l'extrapolation spatiale des processus observés au nord du lac Alaotra. Dans la région pionnière du moyen-
ouest, les dynamiques de conquête continuent à privilégier l'occupation des bas-fonds et leur destination à la
riziculture: plus de 43 % des surfaces qui y sont cultivées sont en riziculture alors que, dans les vieux terroirs
d'Ambohibary, les autres activités agricoles qui se sont développées autour des rizières ne laissent plus à
celles-ci que moins de 20 % des surfaces.
D. Rollin confirme également la longue histoire des mouvements migratoires dans cette région (du XVIIIe au
xxe siècle). Ces mouvements de grande ampleur, par vagues successives sur de longues périodes, ne
pourraient-ils pas suggérer aux aménagistes des bas-fonds de porter davantage leurs efforts vers les zones
pionnières pour réserver aux zones d'occupation ancienne les conseils aux activités complémentaires du riz?
Mais la conquête des espaces peut également se faire dans une zone où l'homme est déjà installé, dans les
interstices qu'il laisse inoccupés. Egalement spontanée, elle peut prendre les formes inattendues d'un modèle
technique très moderniste, avec tracteur et moissonneuse-batteuse.
A. Leplaideur décrit la colonisation des bas-fonds du Nord-Ghana, où les hommes d'affaires ghanéens ont
réussi au cours des vingt dernières années à installer une riziculture motorisée dans les nombreux bas-fonds
restés sans emploi jusqu'à présent.
Leur modèle technique et leur présence ont été acceptés par les agriculteurs autochtones, car ils ne venaient
pas concurrencer les terres utilisées, et offraient une opportunité de travail à ceux qui le souhaitaient; ils
apportaient également en service la mécanisation pour leur propre agriculture (maïs, arachide...). En période
de déclin (récente) de cette riziculture capitalistique, ce sont à présent les petits paysans qui prennent le relais,
ayant compris l'attrait d'un espace bas-fond qu'ils avaient jusqu'à présent délaissé.
A. Teyssier, O. Tsialiva et P. Garin émettent l'hypothèse d'une liaison entre l'organisation hiérarchique dans
la société et les dates d'arrivée des migrants. Le le pionnier fondateur lt, venu surtout marquer le sol, prendrait
la tête d'une pyramide stratifiée selon l'ordre des arrivées. Les cérémonies qui accompagnent les opérations
93
de défrichement accomplies par les vagues successives consisteraient en l'établissement d'un contact avec les
ancêtres du défricheur.
L'enjeu de l'antériorité est confirmé par les pratiques d'installation au Nord-Ghana. Malgré leur volant
financier important et souvent l'influence qu'ils en tirent dans les échelons de l'administration régionale, les
hommes d'affaires ghanéens rendent de multiples services réguliers aux chefs de village qui jouxtent les terres
de bas-fond, où ils pratiquent leur grande riziculture. Contraints de jouer sur une dualité, ils montrent ainsi une
allégeance aux organisations sociales en place quand ils sont à leur ferme, la ville étant le seul lieu où ils
affirment leur pouvoir économique moderne fondé sur l'argent. Pour assurer la paix sociale, l'administration
régionale n'accepte d'ailleurs de délivrer des te Land agreements lt (occupation temporaire d'un sol) qu'à la
seule vue des accords des chefs des villages qui entourent la parcelle sollicitée.
Le cas du Mali démontre les effets pervers du non-respect de ces règles lors des aménagements dans les bas-
fonds. La distribution des terres est réalisée par la société de développement. Fondée sur des normes de respect
d'un itinéraire technique rigide, elle favorise l'arrivée des fonctionnaires techniciens au détriment des
autochtones qui s'estiment spoliés. A présent, les autres villages des alentours refusent l'aménagement.
Méthodes
Les différentes interventions ont permis d'engager une réflexion méthodologique, que les discussions ont
également nourrie et qui a porté sur les points suivants:
- la prise en compte des bas-fonds à différentes échelles de temps et d'espace;
-les regards normatifs et l'approche systémique.
94
Les échelles de travail
La diversité des situations montre qu'il n'y a pas une seule échelle car celle-ci est fonction de l'objectif de
l'étude. C. l3lanc-Pamard et H. Rakoto ont choisi le drain d'ordre 1, où l'on observe tout à la fois la
construction et la gestion des rizières.
L'étude de D. Rollin couvre 16 000 km 2 dans une approche régionale qui privilégie l'exploitation comme
niveau particulièrement significatif. La province de Lampung est le cadre de l'étude de P. Levang
(150 000 habitants en 1905, 6 millions habitants en 1980) ; la stratégie des familles de migrants vis-à-vis des
bas-fonds est un autre niveau d'analyse. A. Leplaideur, à l'échelle de différentes régions de l'Afrique de
l'Ouest, a choisi une analyse comparative; les comportements individuels et collectifs dans les villages situés
autour des bas-fonds ont fourni la matière de sa réflexion.
Les pas de temps considérés sont également très variés. Pour C. Blanc-Pamard et H. Rakoto, l'étude de la
construction du bas-fond doit inclure un temps long (trois cents ans de riziculture) et un temps court, celui de
la mise en rizière (3 à 5 ansl. D. Rollin et P. Levang montrent également que les phases de la colonisation
agricole sont inscrites dans la durée: dans le Vakinankaratra, la rencontre des migrants merina et betsileo
commence au XVIIIe siècle; les colons javanais ont commencé leur transmigration en 1905.
Ainsi la compréhension des processus rizicoles nécessite différentes échelles de temps: celle du cycle végétal,
celle du cycle de la vie de l'homme, celle de l'histoire récente (deux, trois siècles), celle des cycles
climatiques.
De la même manière, les calculs des économistes de projets n'introduisent-ils pas certains biais en cherchant
les formes de la maximisation des marges, alors que les paysans ont choisi de minimiser leurs risques et
d'économiser leur travail? Les rendements, la productivité, les temps de travaux ne sont pas des indicateurs
pour les paysans, alors qu'ils constituent des normes pour les techniciens. Et dans le calcul des temps de
travaux rizicoles, doit-on retenir la surveillance quotidienne de l'eau, phase clé de l'itinéraire technique,
pourtant non comptabilisée par le paysan malgache? Un rendement sûr de 2 tonnes à l'hectare,
technocratiquement considéré comme peu performant, permet au nouveau colon javanais, par une pratique
volontairement extensive, de libérer du temps de travail rentabilisé sur d'autres activités. Et si les calculs de
productivité tenaient compte tout d'un coup de la référence aux objectifs des paysans?
D. Rollin souligne que la prise en compte de l'après-riz dans le calendrier paysan apparaît essentielle pour
comprendre l'ensemble de leurs revenus et de leurs « stratégies de trésorerie li. Et si la briqueterie sur rizière
était beaucoup plus rémunératrice que la riziculture?
Ainsi les discussions ont-elles clairement fait ressortir que la rizière n'est qu'un élément du système bas-fond.
Elle doit se comprendre comme un sous-ensemble du système de production, plus vaste.
C. Blanc-Pamard et H. Rakoto-Ramiarantsoa, géographes, ont traité à leur manière des problèmes d'eau
perçus par les paysans.
A. Leplaideur, agro-économiste, a choisi une série d'illustrations qui questionnent les disciplines de la
sociologie, de l'agronomie, de la pédologie. Il termine sa communication sur un schéma proposant des
articulations entre ces disciplines.
A. Teyssier, O. Tsiilliva, P. Garin, géographes et agronome, ont travaillé ensemble pour observer les processus
d'aménagement par les paysans et pour se confronter aux spécificités foncières. O. Rollin et P. Levang,
agronomes, essaient de comprendre les régions sur lesquelles ils interviennent en faisant des emprunts à
l'économie et à l'histoire.
La définition des échelles d'étude doit inclure le point de vue paysan. En effet, les communications ont fait
ressortir des stratégies à la mesure de ceux qui les mettent en œuvre, c'est-à-dire les paysans des bas-fonds
rizicoles. Les problèmes posés révèlent la nécessité d'intervenants extérieurs qui apportent ce que ne peuvent
maîtriser les agriculteurs pluriactifs (éleveurs-pêcheurs-forgerons-briquetiers-artisans.. J.
Peut-on proposer un développement pour une te exploitation et utilisation rationnelle des bas-fonds pour la
riziculture li ? (F. Rasolo, séance d'ouverture). Voici les principales questions qui sont apparues:
- petits ou grands aménagements?
- amélioration de la maîtrise de l'eau, prévoyant les conflits fonciers à venir;
- quelles échelles quantitatives des facteurs limitatifs?
Ces questions évoquent des points de vue différents. Le moment n'est-il pas venu pour qu'utilisateurs,
scientifiques, aménageurs et bailleurs de fonds s'accordent autour d'une même réalité, afin d'identifier les
choix en matière d'actions sur le milieu? li est clair qu'il ne saurait y avoir d'interdisciplinarité efficace sans
un objectif clairement défini, sans une demande sociale des utilisateurs.
Cette première journée a ouvert la discussion sur le thème soulevé par M. Raunet dans son introduction, celui
d'une nécessaire synergie entre disciplines. Se poser les bonnes questions selon le point des paysans pour
répondre à leurs problèmes dans l'exploitation des bas-fonds, c'est l'objectif qui s'est dessiné en (in de
journée. Pour aller dans ce sens, écoutons ensemble ce proverbe malgache: te C'est en écartant les feuilles que
l'on trouve les racines li Osavasavana ny raviny, no ahitana ny fotony).
96
Bas-fonds
et milieu physique
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
M. RAUNET 1
99
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
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Les vallons amont du réseau, lorsqu'ils sont emboîtés dans les remblais. Avant de rejoindre l'ikopa, la
dans la surface fini-tertiaire, sont des bas-fonds mal plaine du Maniandro s'écoule plus difficilement
drainés, sans cours d'eau, à matériau organique plus (alluvionnement plus rapide de l'ikopa). La plaine
ou moins tourbeux, superficiel ou faiblement enterré. est alors mal drainée et montre des passées tour-
Ils se terminent en amphithéâtres. C'est le type beuses.
« Ambohitrakoho ,., objet de cette étude.
Les vallons situés en contrebas des rides résiduelles à Le bas-fond d'Ambohitrakoho, représentatif d'une
pentes très fortes sont des bas-fonds de transit qui variété importante de bas-fonds des hauts plateaux, a
canalisent des matériaux d'érosion riches en sables été étudié d'octobre 1986 à octobre 1989, dans le
et graviers quartzeux. Ils sont entaillés et se terminent cadre du PIREN (Programme interdisciplinaire de
en pointe en amont, où convergent les ravins. recherche sur l'environnement) du CNRS. Ont été
mis en œuvre (figure 2) des équipements et expé-
En aval, ces bas-fonds qui s'anastomosent passent à
rimentations pour les suivis hydrogéologique,
des vallées argileuses plus larges et mieux drainées,
hydrologique, physico-chimique et agronomique, de
où apparaît un cours d'eau qui, lorsqu'il n'y a pas
façon à comprendre les relations « eau-sol-riz ,.. Les
d'endiguement, peut déborder en hivernage, alimen-
études ont été menées dans une étroite synergie
tant la vallée en alluvions fines de décantation.
transdisciplinaire entre chercheurs du ClRAD, du
Au fur et à mesure que l'on descend vers l'aval du FOFIFA, du LRI, du MIEM, de l'ORSTOM, de l'USTL
bassin, des lentilles alluviales sableuses s'intercalent et de l'université d'Avignon.
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M. RAUNET
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o 2 3 m
Echelle
- - - ~ Limite de bassin
Rides granitiques
(reliefs résiduels)
Surface mi-tertiaire
_ Surface fini_tertiaire
-
Versants de raccordement
T errasse" rouge"
(quaternaire ancien)
T errasseJaune'"
(quaternaire récent)
Bas·fonds de transit
riches en sablas et graviers
-
Bas·fonds drainés
à cours d'eau
Affleurements granitiques
101
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
Plateau ondulé
(surface fini-tertiaire)
Terrasse ancienne
n
u Terrasse récente
Bas-fond actuel
fonctionnel rizicultivé
,
.,
.\,
\:
Alignements de boules
de granite (filons)
N
/ ".
"'F
(>
Forage
Pluviographe
0 Bac d'évaporation
0 Limnigraphe
lP Piézomètre
Os Sourcin aménagé
Essai agronomique
Ce travail a donné lieu à une quinzaine de publi- Dans les rizières, l'itinéraire technique moyen, en
cations (de 1987 à 1991) et à trois rapports d'avan- partant de la fin du battage de la campagne pré-
cement (1987, 1988, 1989), indiqués en biblio- cédente (avril), est le suivant.
graphie.
o Entretien des diguettes et des canaux
Le présent article synthétise une partie des résultats Il a lieu pendant la morte saison, de juin à août.
de cette recherche, obtenus par les personnes o Drainage
suivantes: B. BLAVOUX (université d'Avignon), P. DE Réalisé en août-septembre, il a pour but de faciliter le
GIUDICI (LRI), L. FERRY (ORSTOM), P. GARRETA labour. Drainage et labour précoces (après la récolte)
(ORSTOM), R. GAUDIN (LRI), J.c. GRILLor (USTL), ne sont pas en usage, afin, semble-t-il, d'empêcher la
R. RABESON (FOFIFA), J.H. RAKOTONDRAINIBE (MIEM), germination des graines de mauvaises herbes. Entre
J. RAKoroARlsoA (FOFIFA), N. RANDRIARANISOA avril et août, l'eau des rizières s'évapore, s'infiltre
(MIEM), M. RAuNEr (CI RAD), J.F. VIZIER (ORSTOM). peu à peu ou s'évacue lentement d'amont vers l'aval
par les brèches des rizières. Les résidus de récolte et
repousses sont laissés au bétail de trait. Les parcelles
en eau sont occupées par des canards. Seules les
Le contexte soda-rural du bas-fond quelques parcelles cultivées en contre-saison (une
dizaine sur le bas-fond) sont drainées et labourées tôt
Le bas-fond d'Ambohitrakoho, d'une superficie de en saison sèche.
14 hectares, rizicultivé en « vakiambiaty JO ou riz de
deuxième saison (cycle 150 à 180 jours), est investi
o Labour
II s'effectue entre juillet et novembre, surtout fin
par 26 exploitants des villages d'Ambohibary et
septembre. L'outil le plus courant (sur deux tiers
d'Angoc/onina dominant directement la vallée.
des parcelles) est la bêche à fer droit (angady)
Chaque exploitant cultive en moyenne une dizaine qui retourne bien le sol sur 15-20 cm. La charrue
de parcelles d'environ 5 ares chacune (fourchette de simple tirée par 1 ou 2 bœufs est utilisée par les plus
1 à 25 ares), éparpillées le long du bas-fond. Celui-ci « riches JO sur les plus grandes rizières. Les grosses
est ainsi cloisonné en 267 rizières. Le plus petit mottes sèchent à l'air pendant 15 jours à un mois et
exploitant ne possède que 12 ares, le plus gros (le demi.
président du fokontany) possède 245 ares. Les Le labour est précédé d'un apport de fumier
riziculteurs ont également des rizières dans d'autres (poudrette de parc, fumier de porc ou de volaille) en
bas-fonds voisins. quantité et fréquence très variables; 78 % des
parcelles en reçoivent selon une fréquence minimale
En plus des rizières, les paysans possèdent des
de 5 ans; 22 % n'en reçoivent plus jamais (du fait de
parcelles sur les collines (tanety) et terrasses, plus
la raréfaction du bétail ou du coût excessif du
grandes, où ils cultivent manioc, taro, patate douce,
. fumier). De temps en temps, sur les parcelles
haricot, pois de terre, maïs et quelques fruitiers.
tourbeuses de tête du bas-fond, l'exploitant « col-
Beaucoup sont en jachère ou en boisements d'euca-
mate» sa rizière par des apports de terre de tanety.
.Iyptus (environ 13 hectares sur le bassin).
Depuis au moins une dizaine d'années, les paysans
le statut foncier des rizières est variable: propriété ne peuvent plus se permettre des apports d'engrais
(achat ou héritage) pour 83 % de la superficie minéraux.
(15 exploitants) ou métayage-fermage pour 17 % o Semis des pépinières
(11 exploitants). Les parcelles de « cultures sèches JO Il se fait en septembre-octobre. La taille d'une
hors bas-fond sont en propriété. pépinière est de l'ordre de 1 à 5 ares, chaque paysan
en possédant entre 1 et 5 parcelles. Un are de pépi-
Pour moitié, les exploitants sont des double-actifs nière permet de repiquer 15 à 25 ares de rizières.
(artisans, fonctionnaires, libéral).
Dans le bas-fond, il yen a 73 parcelles. En général,
chacun produit lui-même ses semences (variétés
Les exploitants sont des ménages d'environ six
locales: Rojofotsy, 1632, Tsipala, Rojomena, etc.
personnes comprenant 1,5 à 2 UTH. L'entraide est
largement pratiquée (entre familles ou ménages des Les pépinières sont soignées, parfaitement planées et
villages), la main- d'œuvre salariée est quelquefois reçoivent systématiquement du fumier. Le semis se
utilisée. Les outils (charrues, herses, charrettes...) et fait en forte densité (30 à 50 kg à l'are), à la volée
la force de trait ne sont la propriété que de quelques- dans la boue, puis il est recouvert d'une faible
uns. Sinon ils sont loués, quand c'est possible. Mais hauteur d'eau. Les pépinières se situent en bordure et
beaucoup (plus de la moitié des exploitants) font tout tête de bas-fond, à proximité des sourcins
à la main, le seul outil omniprésent étant l'angady permanents. Les cc ketsy JO devraient être repiqués au
(bêche droite), . bout d'un mois. En réalité, il n'est pas rare qu'ils
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
restent 2 mois en pépinière (et jusqu'à 3 mois en Les raisons en sont nombreuses et interactives:
année peu pluvieuse). - circuits économiques et crédits déficients: pas
o Mise en boue, hersage et planage d'intrants (fumure, herbicides, semences... ) et
manque d'équipement (charrues, herses, houes.. ,) ;
Quinze jours à un mois et demi après la fin du
labour, on fait rentrer l'eau dans les rizières (suivant - élevage en disparition (de moins en moins de
la disponibilité en eau et les accords entre voisins). fumier, de traction animale) ;
L'imprégnation dure une semaine à 15 jours. Ensuite, - vols sur pied de plus en plus fréquents ;
on procède au délitage et à la mise en boue
- dégradation de la force de travail, due à un état
proprement dite, soit à l'angady, soit à la herse en
sanitaire déficient (malnutrition, paludisme, bilhar-
bois tirée par 1 ou 2 bœufs. Le planage final se fait à
ziose) et au coût élevé de la main-d'œuvre salariée;
l'angady ou à la herse retournée pointes en haut.
- développement de la pluriactivité aux dépens de
o Repiquage l'activité agricole proprement dite, qui favorise le
Suivant la pluviométrie (disponibilité en eau), le relâchement des liens familiaux et communautaires,
repiquage (réalisé par les femmes) s'étale entre avec des conséquences néfastes sur la pratique de
novembre et février. Le repiquage des ketsy, l'entraide, qui était généralisée autrefois;
regroupés en bottillons de 20 cm de haut, ne se fait - conséquence des facteurs précédents, abandon des
pas en ligne. Il est réalisé dans 7 à 10 cm d'eau. Une techniques de riziculture améliorée mises au point
semaine après, le niveau de l'eau est remonté à la avec succès par le GOPR : semis en ligne, sarclage à
moitié ou au tiers de la hauteur des plants, pour le la houe rotative, repiquage précoce, densité de
contrOle des mauvaises herbes. semis, lutte contre les parasites, soin des pépinières,
préparation des semences, fertilisation, etc.
o Sarclage
Les femmes procédent en général à un seul sarclage
manuel, le plus souvent en février. Auparavant, pour
faciliter l'opération, une vidange partielle de la Hydro-géomorphologie
rizière est souvent réalisée.
et genèse des bas-fonds
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o Récolte et séchage
~ ~
En bordure des bas-fonds c fonctionnels li (c mouil- plique par le fait que ceux-ci recoupent la napPe
lés li par la nappe affleurante), se trouvent deux phréatique et qu'ainsi les matériaux qui fluent laté-
terrasses étagées, l'une du quaternaire récent (dite ralement suivant une dynamique remontante d'aval
c terrasse jaune li), l'autre du quaternaire ancien vers l'amont ne peuvent s'évacuer qu'en nappe
(c terrasse rouge li). La première est perchée de 2 à boueuse sableuse, mobilisée par la compétence de la
3 m au-dessus des rizières et son tal us a été géné- tranche supérieure de cette nappe en mouvement
ralement accentué et rectifié par les riziculteurs. La latéral. Une accumulation organique tourbeuse puis
seconde, plus haute, est située entre la surface fini- des matériaux alluvio-colluviaux altéritiques arrachés
tertiaire et la terrasse jaune. Ces terrasses, parfois plus aux versants sont venus ensuite recouvrir la nappe
larges que le bas-fond fonctionnel qui s'y emboîte, sableuse. Ces processus hydro-Iogiques et morpho-
font aussi partie du réseau de vallées, au sens large, dynamiques se déroulent évidemment à l'échelle du
l'ensemble étant fortement enfoncé dans le paysage, quaternaire et ne sont donc pas directement percep-
à ruptures de pente prononcées avec les versants pen- tibles à l'échelle humaine.
tus convexes voisins.
Aux axes des vallées principales sont greffés de
multiples diverticules ou bas-fonds secondaires dont Les matériaux et les sols
les têtes sont terminées en larges amphithéâtres.
La pente générale longitudinale du vallon est sensible Le bas-fond proprement dit
et peut atteindre 4 % dans les tronçons situés les plus
Le sous-sol du bas-fond montre verticalement une
en amont. Elle a cependant été rectifiée par les pay-
structure fondamentale en quatre matériaux superpo-
sans, en casiers horizontaux étagés. Transversale-
sés assez bien typés dont seuls les deux supérieurs
ment, également, la topographie a été aménagée et
vont présenter des modalités différentes d'amont en
planée. La plupart du temps, les riziculteurs ont mor-
aval.
du sur la terrasse récente (recoupant la nappe
phréatique et élargissant ainsi la surface c utile li) en La nature, l'épaisseur, les relations mutuelles de ces
transférant les déblais en surface du bas-fond. matériaux et leur répartition spatiale ordonnée (figure
3) sont les résultats de la genèse hydro-géomor-
La transition entre bas-fond et terrasse jaune est
phologique du bas-fond. Ils induisent (en même
marquée par une frange concave de raccordement
temps qu'ils sont conditionnés par) des circulations
que l'on peut qualifier de petit c glacis de suffosion li
des eaux assez spécifiques, elles-mêmes en relation
à élargissement remontant. Les matériaux de la ter-
étroite avec les matériaux et nappes phréatiques du
rasse sont déstabilisés et mobilisés par des processus
bassin environnant.
de lavage et soutirage des argiles sous l'action de la
nappe phréatique peu profonde, dont les flux latéraux Ces matériaux jouent un rôle important dans les
sont activés par l'enfoncement progressif du niveau modes de gestion du bas-fond par les paysans.
de base général drainant le paysage. Le résidu sa- De la base vers le sommet de la séquence verticale,
bleux de lavage des altérites c flue li ensuite pro- on trouve (figure 4) les matériaux suivants.
gressivement vers l'aval, pour s'écouler lentement en
c nappe de fluage li sableuse dans toute la section du o L'arène argilo-micacée
bas-fond actuel, qui s'élargit ainsi aux dépens de la Ce matériau constitue le substrat profond général des
digestion régressive de la terrasse. vallées, où il apparaît vers 200-350 cm de profon-
deur. De teinte grise à verdâtre, il est argilo-sableux,
Les processus de formation de la surface fini-tertiaire, généralement riche en micas (c tany dilatra li), en
de la terrasse rouge et de la terrasse jaune étaient
feldspaths kaolinisés et autres minéraux éventuels
comparables à ceux des bas-fonds actuels (4e niveau
(ferro-magnésiens) en cours d'hydrolyse. Il contient
de base). C'est en effet la présence d'une « nappe
des argiles de néoformation de nature montmoril-
phréatique d'altérite li qui, lorsqu'elle est rabattue et lonitique. La structure originelle de la roche granito-
aspirée par l'enfoncement du réseau hydrographique
gneissique n'est pas modifiée. Le matériau n'a donc
aval dO à la montée isostasique des hauts plateaux,
pas été remanié mécaniquement. L'eau saturante, qui
provoque le fluage général remontant du manteau semble peu mobile, assure un bain basique proba-
d'altération et son évacuation en nappe étalée rendue
blement riche en éléments minéraux dissous et en
sableuse par lavage latéral. Cette dynamique s'effec-
silice colloïdale en cours de diffusion vers le haut.
tue selon des axes probablement privilégiés, guidés
Cette arène micacée peut avoir 50 à 150 cm d'épais-
par la fracturation du socle ou bien sa lithologie et
seur au-dessus de l'arène grenue grossière, libérée
son altération différentielles.
par la roche saine diaclasée et disloquée en boules.
L'absence d'axes d'écoulement concentré (cours Le socle sain est donc beaucoup plus proche de la
d'eau) et de véritables alluvions, au sens habituel du surface sous les bas-fonds (vers 2 à 4 m) que sous les
terme, dans les bas-fonds 'plats élémentaires s'ex- interfluves (où Il est à une vingtaine de mètres).
Thème 1/- Bas·fonds el milieu physique
'?.O...__l..1°O
01-_.... T"" m
SURFACE FINI·TERTIAIRE
Plateau à larges ondulations. Sols
ferral!itiQues rouges Iràs filtrants.
",--
/~
VERSANT PENTU CONVEXE
TERRASSE
1
/ \
QUA TERNAIRE ANCIENNE
Sols ferralllt.ques rougeâtres argileux è argile-
sableux, sou .... ent colluvionnés.
1
/ ) TERRASSE QUATERNAIRE RECENTE
!
1
D Paléosol hydfomolphe argila-sableux,
compact, ft "stone lins: gris-jaunAtt6.
sur arène argilo-micacée en place.
1
Il
\
J
1
FRANGE DE 'SUFFOSION-FLUAGE-
Aval de la ferrasse (aeente deprimèe
j
à sol hydromorphe sableux à argilo-
\1
./sableux, grisâtre. Nappe proche de la
surface (nom focel: "baiboho").
TETE DE BAS·FOND
1
./
Colluvions erg'lleuses grisâtres
sur tourbe êpeisse. souvent
sub-affleurante, Nappe à moins
1
(., de 50 cm en saison sèche,
Pente longitudinale = 1,2% à 3%.
\ entre 50 et 80 cm
N
/ ~
Filons granitiques
lallleurements en boulesl.
Telus anthropIques,
Cours d'eau.
~ Ri,ie,.s.
BaSSin,
o! 100
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/ -, ''-,
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,,
,,
,,,.
,
PLAINE AVAL CENTRE AMONT 1
MATERIAU MIGMATITIQUE
MATERIAU DE RECOUVREMENT NIVEAU ORGANIQUE ENTERRE MATERIAU DE FLUAGE LAVE
EN PLACE
D'amont vers l'aval, le niveau organique (te hona- o Le matériau colluvial fin de surface
hona li) passe progressivement de la tourbe instable Le niveau organique est enterré par une couche
au limon organique (e foumpotra li) sans débris argileuse d'origine colluviale qui augmente d'épais-
végétaux, stable et plus lourd, en même temps qu'il seur d'amont en aval. Epaisse de moins de 40 cm et
s'enterre plus profondément sous le recouvrement localement inexistante en tête, elle peut atteindre
colluvial argileux supérieur (moins de 40 cm de 1 m d'épaisseur au débouché dans la vallée
profondeur en amont, 60 à 100 cm à l'aval) et que alluviale. Ce remblai est verticalement homogène du
son épaisseur diminue (figure 4), point de vue texturaI. Il ne montre pas de grandes
variations granulométriques dans une section don-
Ce niveau organique argileux et non tourbeux a une née du bas-fond. En revanche, il montre un certain
perméabilité horizontale d'environ 3 . 10-6 m çl et gradient d'amont en aval (figure 9 b). Limono-argilo-
une perméabilité verticale de 4 . 10-4 m çl (i 1est sableux en tête (52 % d'argile + limon), il s'enrichit
anisotrope), Il est donc beaucoup plus perméable progressivement en limon et argile vers l'aval (66 %
que la vraie tourbe. d'argile + limon),
M.RAUNET
En surface (0-25 cm), le sol hydromorphe possède 7 hydrochimique qui détermine en particulier le pH et
à 8 % de matière organique en amont et 6 à 7 % en le potentiel d'oxydoréduction - donc l'abondance,
aval; cette matière organique est mal humifiée (C/N la forme, l'assimilabilité ou la toxicité des éléments
= 30 à 40). Entre 25 et 50 cm de profondeur, le taux minéraux qui entourent le système racinaire du riz-
de matière organique reste le même (6 à 7 %). est conditionnée par l'ensemble de l'environnement
et pas seulement par la nature du sol superficiel de la
Minéralogiquement, le remblai est essentiellement rizière.
kaolinique, avec quelques minéraux résiduels (fines
paillettes de mica) et du sable quartzeux.
L'hydromorphie confère une teinte grise en tête (pas
de réoxydation en saison sèche, nappe toujours
La plaine alluviale
proche) et une teinte brun-grisâtre en aval (meilleure Le « fiat» alluvial, large ici de 300 m, se distingue du
réoxydation, nappe descendant vers 80-1 00 cm de bas-fond qui, lui, n'est pas remblayé d'alluvions pro-
profondeur), où le sol se dessèche en surface. C'est prement dites. Ici les apports sont longitudinaux à la
ce que les paysans appellent le « tany manga » (terre vallée par débordements lents et peu turbulents du
« bleue »), qui constitue le sol de rizière proprement cours d'eau, et non plus latéraux. D'autre part, la
dit. plaine est drainée de façon naturelle par ce cours
Dans les parties du bas-fond à tourbe sub-super- d'eau (encaissé de 2 m), ce qui n'est pas le cas du
ficielle car faiblement remblayée de colluvions (di- bas-fond.
verticules de tête), les paysans sont obligés de En surface, la plaine présente une coloration bru-
recharger régu lièrement leurs parcelles en terre nâtre plus claire que celle du bas-fond (grisâtre). Elle
argileuse prélevée, sur les côtés du vallon afin de est remplie d'alluvions argilo-limoneuses homo-
créer un support stable et relativement imperméable gènes finement micacées qui bénéficient d'une assez
pour l'enracinement du riz et le contrÔle d'une lame bonne réoxydation durant la saison sèche (la nappe
d'eau dans les rizières. descendant jusque vers 120 cm). Ce remblai d'en-
Le rôle hydrologique du recouvrement colluvial est noyage alluvial (décantation fine) de 60 à 150 cm
très important. D'abord, comme indiqué ci-dessus, d'épaisseur repose sur un niveau enterré de limon
parce qu'il permet un contrôle relativement bon de organique de 20 à 50 cm, puis sur la semelle de sable
l'eau des rizières qui, ainsi, est peu soumise aux lavé non micacé épais également de 20 à 50 cm, lui-
fluctuations aléatoires de la nappe imprégnant les même reposant en discontinuité sur l'arène argilo-
matériaux du dessous. Ensuite, parce qu'il maintient micacée. Ces deux derniers matériaux sont exac-
en pression, par sub-artésianisme, cette nappe tement les mêmes que ceux décrits dans le bas-fond
phréatique du bas-fond qui circule en inféroflux de (voir ci-dessus), avec lesquels ils sont en continuité
façon relativement indépendante de la nappe latérale; ils sont noyés toute l'année par la nappe
d'inondation, celle-ci pouvant être « manœuvrée» phréatique.
en fonction des ouvertures et fermetu'res des
diguettes. Il y a cependant une continuité entre ces
deux flux, le matériau supérieur argileux étant
probablement saturé quand les rizières sont inondées
Les terrasses (figures 3 et 5)
ou engorgées. La terrasse récente (terrasse jaune)
La nappe phréatique en charge peut favoriser les La terrasse représente un ancien niveau de bas-fond
migrations de solutés profonds (azote, cations) vers le plus large que le bas-fond actuel qui s'y emboîte 1 à
haut et alimenter le sol de façon naturelle. Ceci reste 3 m plus bas. Les matériaux qu'on y trouve sont assez
une hypothèse de travail. " s'avérerait alors que si comparables à ceux du bas-fond, sauf pour le niveau
pour l'enracinement du riz la tourbe et l'arène organique supérieur qui a ici disparu par minéra-
profonde n'ont aucun rôle, du point de vue chimique lisation après la descente définitive de la nappe
- minéral et organique - elles en ont un non phréatique (actuellement en dessous de 1 m) qui était
négligeable, qui, d'ailleurs, pourrait être modulé initialement subaffleurante.
suivant la saison. Le « sol de rizière» ne serait donc
pas la zone racinaire seule mais bien l'ensemble des En surface, sur environ 1 m d'épaisseur, se trouve un
matériaux superposés que nous venons de décrire. niveau gris-beige massif (sans fentes), compact, lavé
L'agent de liaison, support des migrations, est en fer et en argile, Iimono-sableux à sables grossiers
représenté par la nappe phréatique et ses divers flux sans mica. C'est un ancien « gley », résultant du
(latéraux comme verticaux) variables pendant fluage, de l'étalement et du lavage d'altérites
l'année, en relation évidente avec la nappe générale antérieures (suivant les processus explicités plus
des altérites située sous les interfluves. L'ambiance haut).
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
+
+
+ + +
+ + +
+
+
+
.~
Sol ferrellitique
ergileux,
tràs filtrent
Argileux
à argilo·sableux
rouge
Arene orgilifiée
micacée
à mommorillonite
1:::::::·:ILimono.argilo-sebleux
:{:.;?:'.
.:.::.:f·;::·
â argilo-sebleux.
Massif.
1 Colluvions
argilo-Iimono-
. sablausas.
(1 à 3 m) (1 à 3 ml gris-verdâtre ...::....•:.: Gris·brun-jaunâtre Gris â gris-brunâtre
10 à 2 m.l (0,80 à l,50 m (0,40 à 0,75 m 1
Argileux marmorisé
ou décoloré
(blanchâtre)
(1 à 3 m)
Figure 5. Toposéquence de matériaux sous les unités morphopédologiques autour du bas-fond d'Ambohitrakoho.
'M.RAUNET
A la base du niveau précédent, existe souvent une réduite à de simples épaulements assez haut perchéS,
étroite « stone line » quartzeuse, provenant du surtout dans la partie amont du bassin. En aval, elle
fauchage des filons de quartz et de la descente, dans se déploie pl us largement.
le matériau fluant gorgé par la nappe, de leurs élé-
Les sols y sont très variables, en fonction du degré de
ments de démantèlement. Ceux-ci, par transit latéral
troncature dans l'altérite. Si la terrasse est peu
lent de cette « couche de fluage », ont été plaqués et
rabotée (en aval), les sols sont rouges ferrallitiques
concentrés contre le substrat plus compact d'arène
avec « stone line » possible, sans grandes différences
argilo-micacée qui, elle, n'a pas été déstabilisée par
morphologiques avec les sols de la surface fini-
les flux phréatiques latéraux.
tertiaire. Mais il ya alors souvent des recouvrements
En profondeur, se trouve enfin l'arène argilo-sableuse colluviaux. Dans ces cas favorables, la terrasse an-
micacée, déjà décrite, à structure lithologique con- cienne est recherchée pour les cultures sèches.
servée, à néoformation de montmorillonite.
Lorsque la terrasse est décapée, l'altérite argilo-
A l'heure actuelle, la nappe phréatique ne remonte sableuse compacte rosâtre ou blanchâtre à sables
pas au-dessus de la « stone line ». grossiers et cailloutis de quartz affleure (en amont).
Les sols, massifs et à faible réserve en eau, de la La terrasse présente alors une très faible valeur
terrasse jaune sont la pl upart du temps délaissés par agricole.
les paysans.
- en dessous, sur 3 à 5 m : couleur moins vive (ro- La perméabilité verticale de l'arène est de l'ordre de
sâtre), texture argilo-sableuse à sablo-argileuse 4. 10-6 m ç'.
Sa porosité utile est très faible (environ
(sables plus grossiers), structure devenant plus mas- 0,1 %).
sive;
Les versants de raccordement convexes et escarpés
- dans la moitié inférieure, sur 5 à 10 m : couleur qui relient la surface fini-tertiaire aux terrasses et val-
rosâtre à blanchâtre, texture sablo-argileuse à sables lées sont généralement le lieu d'une érosion impor-
grossiers et graviers quartzeux, structure massive. tante en glissements, arrachements, terrassettes
C'est dans cette partie que la c nappe phréatique (c pieds de vache lt). Ils sont donc décapés jusqu'à
d'altérites lt fluctue pendant l'année (fluctuation l'altérite argilo-sableuse compacte. Les sols y sont da-
d'environ 3 m), la base étant noyée en permanence. més et l'eau y ruisselle en abondance. La végétation
Cette nappe c libre lt est totalement déminéralisée graminéenne elle-même (Aristida, Hyparrhenia) a du
{conductivité inférieure à 40 J,LS cm-'). C'est cette mal à s'y maintenir.
nappe, alimentée directement par les pluies tombant
sur le bassin local, qui affleure en bordure du bas-
fond (ligne de sourcins).
NAPPES FLUX
NA = Nappe arène-socle P = Pluie
NM = Nappe d'altérites R = Ruissellement sur interfluves
NI = Nappe d'inondation des rizières 1 = Infiltration
NT Nappe de la tourbe S = Suintements de la ligne de sou reins
NS = Nappe des sables lavés Ld = Lame d'écoulement des drains
Lr = Lame d'écoulement des rizières
Ft = Inféro-flux total longitudinal
FI = Inféro-flux latéral
Da = Drainance ascendante
Dd = Drainance descendante
Ei = Evapotranspiration des interfluves
Eb = Evapotranspiration du bas-fond
X = Alimentation extérieure au bassin local
pression de cette nappe fluctue pendant l'année en observera un décalage comparable, bien que moins
fonction de son alimentation plus ou moins lointaine long, sous le bas-fond, alimenté par ces deux nappes.
et des temps de transit. Sa mise en charge est retardée Les essais de pompage et les mesures de conductivité
par rapport à la « montée li de la nappe libre (figure électrique dans la nappe libre ont montré qu'il y
7 aL Elle se prolonge 2 à 3 mois après la fin des avait des échanges par drainance verticale entre les
pluies jusqu'à début juin, alors que la décrue de la deux nappes, dont les sens dépendent des pressions
nappe supérieure s'effectue depuis mi-mars. On partielles au cours du cycle hydrologique.
Thème /1- Bas-Fonds et milieu physique
a Prolondeur
Pluie (mm) nappes (m)
7
300 - - Pluie
~r-, 8
100
i i
: ..............
---~-._
l .................
i2
13
'1
-._-- Nappe arène/socle semi-captive
14
o -I-+-...:-r-....:;~....,~~---t---,--,--i-~~~...,.::::::::;=-I-15
J FMAMJJ ASoNDJ FMAMJJ
:
50 60
40
Nappe sables lavés semi-captive -- __
200 -- .1 20
'i.
o
Nappe arène/socle semi-captive •• ---
100 -20
Debit de surlace aval - - -40
-60
JFMAMJJ
...
c
Niveaux Niveaux
piézométriques lcm) piézométriques (cm)
60 60
40 _ _ Nappe des sables lavés
40
20 20
a W:""-'--i-i--~\.~ T---..~i<-------'"'TF'~O ---Nappe d'arènes
-20 ·20
-40 ·40
-60 -60
J FMAMJJASON DJ FMAMJJ
"'s/cm)
300
25
Pluies 20
200
Température des sourcins 20
Température de l'air
100
Conductivité sourcins 15
'25
CD Mise en boue planage
a a CD Repiquage
J F MA M J J A S o N D J FM AM J J
Les nappes sous la surface du bas-fond Quant au début de la mise en charge, la nappe
d'arène commence à monter mi-novembre en aval et
Comme sous les interfluves, deux nappes principales début janvier en amont (un mois et demi de décalage
permanentes semblent exister: environ). La mise en charge de la nappe supérieure
- une nappe arène-socle logée dans la « roche pour- (alimentée par les pluies tombant directement sur le
rie lt, argilifiée en montmorillonite au sommet, qui bassin du bas-fond) est à peu près synchrone dans
constitue le « substrat lt du bas-fond; tout le bas-fond. Elle suittrès vite les pluies (quelques
- une nappe logée dans la série de matériaux jours). Rappelons que sous les interfluves la nappe
supérieurs, qui sont de bas en haut (figure 7 b) : les supérieure libre monte avec un décalage de 10 à 15
sables lavés, le niveau organique plus ou moins tour- jours par rapport aux pluies. C'est le temps néces-
beux, le recouvrement argileux colluvial. saire à l'infiltration sur environ 10 m. La réponse plus
rapide dans le bas-fond est due, en plus de la faible
Quand on enfonce des piézomètres en profondeur, profondeur de la nappe, à l'alimentation par un
crépi nés soit dans l'arène argilo-micacée, soit dans ruissellement important et très rapide sur les versants
les sables lavés ou le matériau organique, on cons- escarpés, damés et imperméables entourant le bas-
tate que, même lorsque la rizière est sèche, les ni- fond (figure 3).
veaux piézométriques montent la plupart du temps
au-dessus de la surface topographique. Ces nappes
sont donc en pression (semi-captives). Le niveau de la
nappe des arènes est généralement au-dessus de celui Les écoulements
de la nappe « sables lavés-matériau organique lt. La longitudinaux au bas-fond
pression de la première est donc le plus souvent
supérieure à celle de la seconde. Elle est également Les écoulements de surface
supérieure en amont du bas-fond par rapport à l'aval. Avant de s'étaler dans les rizières, les eaux de
Pendant l'année, les suivis piézométriques réguliers ruissellement et les eaux de la nappe phréatique
ont mont~é que, les pluies commençant vers début logée sous les versants sont captées par les drains
octobre, la mise en charge de la nappe supérieure dé- périphériques au bas-fond (figures 6 et 8). Ces
bute très peu de temps après (moins d'une journée canaux ont entre 50 à 150 cm de profondeur. Ils
souvent) ; son maximum est atteint fin mars (le maxi- collectent deux arrivées d'eau:
mum pluviométrique étant fin janvier). La décrue se - les ruissellements intenses qui dévalent les versants
poursuit ensuite jusqu'à fin septembre (étiage). escarpés (20 à 40 % de pente) dominant directement
Quant à la nappe profonde (vers 2 m), la mise en le bas-fond (figure 3) : ces versants sont damés et très
charge débute début novembre (décalée d'environ un peu perméables et on peut considérer que le
mois par rapport à la nappe supérieure), monte ruissellement y est de 50 à 100 % sur les versants des
d'abord assez rapidement jusque vers fin février, puis deux tiers amont du bassin et sur tous ceux de la rive
lentement jusqu'à début mai donc en pleine saison droite;
sèche. Le niveau piézométrique commence à redes-
- la nappe phréatique libre du manteau altéritique,
cendre début juillet pour atteindre l'étiage seulement
subsuperficielle en bas de versant ou de terrasse
fin octobre. Dans toute la moitié amont du bas-fond,
(figures 6 et 8) et court-circuitée par les talus « ex-
le niveau piézométrique de la nappe d'arène est situé
ternes lt des canaux. Les paysans creusent leurs
au-dessus de la surface du sol toute l'année, y com-
canaux dans l'argile kaolinique blanchie 'ou tache-
pris en fin de saison sèche. En tête de bas-fond, ce
tée, imprégnée en permanence ou temporairement
niveau est à + 20 cm en octobre et à + 30-40 cm de
par la nappe.
février à juin.
Les canaux communiquent dans un sens ou dans un
Dans l'espace, le long du bas-fond, les débuts de la
autre avec les casiers en fonction des besoins
décrue et de la mise en charge des deux nappes
(remplissage des rizières ou évacuation du trop
présentent des décalages (figure 7 d.
d'eau). Ces branchements sont échelonnés le long et
Concernant le début de la décrue, la nappe d'arène de part et d'autre du bas-fond. Ils sont ouverts ou
amorce sa descente vers le 15 juillet en aval et fermés par les riziculteurs, ainsi que les commu-
seulement un mois et demi après, début septembre, nications d'une rizière à l'autre, en fonction des
en amont. Pour la nappe supérieure, le décalage besoins individuels et communautaires, ainsi que de
entre l'amont et l'aval va en sens inverse et est plus la hiérarchie sociale. A l'exutoire du bas-fond, les
étroit; il est plus précoce en amont (mi-mars) qu'en débits moyens annuels (figure 7 b) sont maximaux en
aval (fin mars). Ce retard est dû au volume d'eau février (60 1 ç') et inférieurs à 2 1 ç' en septembre-
« égoutté lt et à la durée de cet égouttage, plus grand octobre-novembre (étiage). Le maximum journalier
en aval qu'en amont. peut atteindre 300 1 ç'. Lorsque toutes les rizières
Thème 1/ - Bas-fonds et milieu physique
sont déjà en eau (à partir de fin décembre), les pics possède la perméabilité latérale la plus élevée. Il a
instantanés sont étroitement liés aux pics des averses, justement acquis ces propriétés du fait des circu-
avec un retard de quelques heures. C'est essen- lations intenses d'eau et suivant une pente hydrau-
tiellement le ruissellement rapide sur les versants (via lique très sensible (0,2 % en aval, 3 à 4 % en amont>.
les canaux collecteurs) qui est en cause. Les rizières Il y a une discontinuité très marquée entre l'arène
pleines n'ont alors plus de rôle amortisseur. micacée argilifiée profonde en place et le sable lavé
qui a subi un fluage latéral. Cette limite est parfois
Pendant la mise en eau des rizières et le repiquage
soulignée par un placage de cailloutis de quartz
(novembre-décembre), les fortes averses ne se re-
filonien (<< stone line »).
trouvent pas rapidement aux jaugeages aval car les
casiers échelonnés retiennent les écoulements. L'eau qui circule dans les sables lavés provient en
Après la fin des pluies (avril), les écoulements sont le majeure partie de l'aquifère altéritique « libre» sous
fait des émergences de la nappe phréatique et de la les interfluves qui converge en étant canalisé sous le
vidange progressive et lente des rizières. En saison bas-fond.
des pluies, il n'est pas possible de dissocier les ap- Une fois dans les sables lavés, l'eau se trouve en
ports directs par ruissellement de ceux des nappes. pression sous les matériaux supérieurs peu per-
Leurs écoulements sont mélangés dans les canaux et méables du bas-fond (niveau organique et colluvions
les rizières. argi leusesL Le matériau tourbeux est noyé en per-
manence mais l'eau y circule peu latéralement, sa
Les écoulements d'inféroflux (figures 6 et 8) perméabilité étant extrêmement faible (moins de
C'est la couche de sables lavés qui, bien que peu 10-9 m ç'L De l'amont vers l'aval, la perméabilité
épaisse (moins de 50 cm), draine longitudinalement du niveau organique augmente, en même temps
le maximum d'eau d'inféroflux. Des quatre qu'il passe de la tourbe franche au limon organique
matériaux superposés du bas-fond, c'est celui qui (Kh = 10-6 à 10-5 m ç').
M. RAUNET
La circulation dans les sables lavés est également processus d'engorgement (nature et durée) et donc
alimentée en partie, à certaines périodes de l'année, que les « ambiances lt physico-chimique et
par la drainance ascendante de la nappe arène-socle microbiologique prévalant dans la rhizosphère du riz
à travers le chapeau montmorillonitique qui im- ne sont pas les mêmes d'amont en aval, et d'en
prègne le sommet de cette arène, et qui maintient la expliquer les raisol)S de façon satisfaisante.
nappe profonde, semi-captive. Enfin, le rôle de la
Pour compléter ce diagnostic, des mesures et suivis
drainance descendante de l'eau d'inondation des
réguliers in situ des variables d'état pertinentes,
rizières, à travers les matériaux supérieurs, n'est sans
d'ordre physico-chimique, ont été réalisés dans
doute pas négligeable.
différents tronçons du bas-fond de l'amont vers
Sous le bas-fond, les échanges entre l'eau des sables l'aval. Ces mesures, faites à 8 cm de profondeur dans
lavés et celle des matériaux inférieurs ou supérieurs, l'horizon de la rhizosphère du riz, ont porté sur le
par drainance ascendante ou descendante, sont très pH, le potentiel d'oxydoréduction, la teneur en fer
difficiles à déterminer. Ils sont conditionnés par les ferreux dans la solution du sol et la température.
pressions respectives (variables pendant l'année) des
Parallèlement, ont été mis en place des essais,
nappes en charge, par la pente hydraulique de ces
échelonnés dans le bas-fond, avec quelques
nappes (plus fortes en amont qu'en aval), par les
traitements simples (fumier, NPK, NPK + fumier).
débits dans les sables lavés.
De plus, 200 séries d'analyses de feuilles (prélevées
Des suivis de conductivité électrique et de tem-
au stade début floraison) ont été effectuées dans les
pérature de l'eau des sourcins où affleure la nappe
rizières cultivées de façon traditionnelle, toujours
altéritique libre qui recoupe les bas de versants ont échelonnées d'amont en aval.
montré (figure 7 d) des évolutions significatives
(GRILLOT, 1990). En saison sèche (et fraîche), ces deux La mise en relation de toutes ces données, leurs
variables décroissent régu-lièrement jusqu'à début variations dans le temps (l'année) et l'espace (le bas-
juin, où elles remontent légèrement, avant de fond) ont permis de confirmer que la réponse de la
redécroître au mois d'août. La nappe libre dont la plante était effectivement étroitement corrélée avec
température est liée à la température de l'air est donc l'évolution de l'ambiance physico-chimique du sol
« polluée li à cette époque (juin-août) par la nappe et que son « gradient de comportement li (spatio-
profonde semi-captive dont la température, plus séquence) était le même que les gradients pédo-
tamponnée pendant l'année, est alors plus élevée. hydrologiques et physico-chimiques. Les conditions
Cette drainance ascendante est confirmée pendant de mise en œuvre des protocoles des essais, suivis et
cette même période par une légère remontée de la analyses ont été mentionnées ailleurs (rapports
conductivité électrique, la nappe profonde étant d'avancement de l'ATP) et nous n'y reviendrons pas.
beaucoup plus minéralisée. Ils ont été réalisés par le FOFIFA, le LRI et le ClRAD
entre 1987 et 1989.
On peut donc supposer que cette drainance ascen-
dante de la nappe arène-socle minéralisée se produit Tous les résultats ont été repris. Nous mentionnerons
également sous le bas-fond en saison sèche, de juin ici non pas les « nuages de points li mais les
à août. C'est l'époque où la pression de cette nappe moyennes des résultats, que nous alignerons sur des
est encore élevée alors que celle de la nappe des courbes « lissées li, en fonction du temps, et/ou
sables lavés est en forte décroissance. Cet effet, peut- référerons à leur situation dans l'espace, ceci de
être bénéfique pour la rhizosphère du riz, est d'au- façon à représenter côte-à-côte, de façon claire, les
tant plus important que l'on se trouve en amont du sens de variation des phénomènes et leurs
bas-fond. interrel ations.
La figure 9 résume ces résultats.
Les paramètres physico-chimiques ont été men-
tionnés pour la période significative de changement
Spatio-séquences et diachro- pour la plante et le sol, qui s'étend depuis la fin de la
séquences dans le bas-fond: saison sèche (à réoxydation maximale), juste avant la
mise en eau (vers fin octobre), jusqu'à 50 jours après
sols, états physico-chimiques la submersion des rizières. On constate en effet que
et réponse du riz 20 à 40 jours est le temps moyen nécessaire et
..........." '»:'I. "'»». -..:-:-. "01. "Co. , '«'..-..: -..:.».-..:-:-:.:.:-:: X'-:.:-:..-..:-:-:.:-:-:-:-: -.:;.:.:«-:-:-:-.-..:-:.:-:.: -..:-:.:.:-:-:.:.:.:.:.:.:-:.:.:.:-:-:.:.:-:-:-:-:.:-:-:-:
suffisant à la stabilisation du pH, du potentiel redox
Nous avons vu comment se répartissent le long du et de la teneur en fer ferreux du sol. A partir de là, les
bas-fond, depuis sa tête jusqu'à la plaine alluviale, conditions d'engorgement et de réduction sont
les matériaux et les sols, comment l'eau y circule maximales jusqu'à la vidange des rizières précédant
pendant l'année. Cela permet d'affirmer que les d'une semaine à 15 jours la récolte (mars).
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
1 r- /J ,
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: ~\ laine
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22
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26
30
28
2'
30
18
0
/
-Sol réoxydé en saison sèche
6 •
SOMME
0,06
1,2
0.04
1,2
0,07
1,5
0,04
2,1
0,1
2,3
0,04
2,5
0,2
5,3
0,07
5,8
DES BASES
+.~:::~~~E~h_~~~~~~D§Eg~~
-100 P totallppml 600 500 700 500 700 700 700 700
P OIsen 30 60 30 50 60 60 60 60
5.5
-200 AB FER TOTAL 5,2 2,5 5,5 3,1 5,5 3,5 7,0 5,0
Sol non réoxydé en saison sèche IFe,OJ%1 IHel)
-300 5
0 10 20 30 40 50
Temps de submersion (jours) b : Caractères analytiques moyens des sols
des rizières dans le recouvrement
argilo-Iimoneux supérieur (0-50 cm),
pE + pH
AMONT CENTRE AVAL PLAINE
14 . . Rtzll::uhure tradldlonnelle 1,4 1,7 1,9 2,2
12 ~ pE + pH pas d'engr~15
1.51 de lurtlle,
101 \A tous les 2 ans
8000
f--A---------------1 AMONT CENTRE AVAL PlAINE
7000
6000
------------------ - Fe (l'l'ml 500 400 350 200
0.20
"B......... Pl%) 0.26 0.24 0,22
5000 ,
4000
3000
-,,,,,,--
..t:,.- _---
-------
-------~~~~~~~=::
__----------4
K 1%1
NI%)
Mg 1%\ 0,050
2.40
0,065
1,20
0,075
2.50
0,090
1--" ....-
2000 ....D- Fe++ Ca 1%1 0,33 0,35 1 0,36 0,40
E
1 000
V Dans le sol saturé
SI 1%)
Zn lppml
7 ~
19
10
o 10 20 30 40 50
Temps de submersion (jours) d : Teneurs minérales des feuilles paniculaires
de riz en culture avec variétés traditionnelles
a : Quelques indicateurs de l'ambiance physico-chimique, (sans engrais). Campagne 1987·88.
118
M. RAUNET
300 3000
Figure 10. Schéma du système proche racinaire
(riz aquatique).
2000
i'i"'ii~
ou le manganèse manganique (Mn++++L
Ce processus microbien libère dans le sol des o 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
substances réduites, en particulier du fer ferreux Temps de submersion (jours)
(Fe++) soluble. Ce transfert d'électrons est traduit par
une grandeur appelée potentiel d'oxydoréduction
Figure 11. Cinétique des teneurs en fer ferre.ux dans la
(Eh), mesurable avec un appareil à électrodes. Dans
solution du sol et dans le sol saturé à l'aval du bas-fond
les sols de rizière, il est commandé en grande partie d'Ambohitrakoho (d'après DE GUIDICI, 1989).
par le couple Fe+++/Fe++. D'autre part, en sols acides
à l'état réoxydé, le phénomène de réduction qui
accompagne l'engorgement progressif et l'inon- Donc, si globalement la teneur en fer ferreux du sol
dation des rizières s'accompagne de variations de saturé ne cesse de croître, celle de la solution passe
pH évoluant vers la neutralisation. Cette évolution par un pic. Une telle cinétique est la conséquence de
peut s'expliquer par l'accumulation de l'ammo- l'immobilisation progressive du fer ferreux par la
niaque (réduction des nitrates), la consommation phase solide du sol (adsorption, chélatation, pié-
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
geage.. J, le rendant progressivement moins soluble bas-fond et 5 à la jours seulement après le repiquage
après le pic (VIZIER, 1983). Pour un sol et un régime (période critique il est vrai) pour l'aval. En dessous de
hydrique donnés, la valeur et la date de ce pic par - 100 mV, il faut s'attendre à des déséquilibres
rapport au stade du riz sont donc importantes à con- nutritionnels importants, en relation avec la mise en
naître. Les auteurs ne s'accordent pas sur la concen- solution de fortes doses de fer ferreux, d'autant plus
tration en fer dans la solution au-delà de laquelle il y que ces conditions surviennent pendant la phase de
a apparition de symptômes de toxicité. TANAKA et repiquage et la phase végétative du riz (TANDANO,
YOSHIDA (1970) donnent une fourchette de 100 à 1974), c'est-à-dire les 40 premiers jours. Tout le bas-
500 ppm. fond, sauf l'extrême aval, est soumis à ces conditions
en permanence ou plus de la jours. Les analyses
foliaires (voir plus loin) confirment bien que le fer
Exposé des résultats (figure 9 a)
rentre en quantités toxiques dans la plante.
Au moment de la submersion (en fin de saison sèche),
les sols sont dans leur état maximal de réoxydation. Transversalement au bas-fond, la concentration en fer
Partout le potentiel redox Eh est à son niveau le plus ferreux dans le sol semble dépendre de la proximité
haut. Celui-ci est très faible en tête de bas-fond (Eh des drains latéraux. Dans une section du tronçon
=- 400 à - 200 mV), où il y a eu peu de réoxyation central avec drain sur le côté gauche, les teneurs en
en saison sèche, alors qu'il est élevé en aval et dans la fer ferreux, 40 jours après le repiquage, montrent un
plaine (Eh = + 200 à + 500 mV). Pour le pH, c'est gradient sensible (DE GIUDICI, 1989), avec 3 000 ppm
l'inverse; il est partout à son niveau le plus bas (6,7 à près du drain et 4 800 ppm au centre du vallon (figure
7,3 en amont, 5,2 à 5,5 en aval), A cette période, la 12). Sur ce transect, les effets d'apports de fumier
teneur en fer ferreux du sol (ramené à son poids sec) (lat ha- 1 ) et de terre rouge (100 t ha- 1 ) sont
est minimale (4 000 à 7 500 ppm en amont, 800 à également sensibles sur la teneur en fer ferreux. Il
2 000 ppm en aval). s'avère que le fumier favorise les processus
microbiens de réduction du fer et qu'au contraire la
A partir de la mise en eau, le pH et la teneur en fer terre de colline les inhibe. L'effet du fumier s'explique
ferreux augmentent alors que Eh diminue, à des par le fait que sa matière organique facilement
vitesses rapides pendant 20 à 30 jours, avant sta- oxydable apporte un supplément de source
bilisation. Seuls les sols d'extrême amont varient peu, énergétique à la flore anaérobie ferriréductrice,
ne s'étant de toute façon pas réoxydés auparavant. Ce augmentant ainsi la libération de fer ferreux. Ceci est
sont les sols qui avaient été les mieux réoxydés en connu depuis longtemps (RODRIGO et POLLARD, 1962 ;
saison sèche qui c bougent» avec les pentes les plus HOWELER, 1973). Ce résultat paraît contradictoire
fortes. Au bout de 20 à 3 a jours, les écarts se
réduisent, avec une tendance à la convergence des
valeurs:
Fe++
- en amont: Eh =- 200 à - 150 mV ; pH = 6,9 à dans le sol saturé
7,2 ; Fe++ = 7 000 à 7 500 ppm ; (ppm sol sec)
.--- -. Fumier (10 t/hal
- en aval: Eh =- 100 à - 50 mV; pH = 6,9 à 7,0; - - Terre rouge
Fe++ =3000 à 5 000 ppm. 5500
.-·Témoin
avec l'effet bénéfique du fumier sur les rendements, toxicité; on la dépasse largement dans tout le bas-
constaté par tous les paysans. On peut avancer fond. Il faut donc s'attendre à ce que le fer, de façon
comme hypothèse que le fer ferreux s'inso-Iubilise directe ou indirecte, soit un élément clé de la
par chélatation au sein des acides fulviques issus du nutrition minérale du riz.
fumier.
Les teneurs en phosphore ont également des
Quant à l'effet de la terre rouge ferrallitique, elle variations significatives le long de la séquence du
apporte du fer à l'état essentiellement cristallisé bas-fond. Sa variation dans les feuilles est la même
(hématite, gœthite), très peu solubilisable par la que celle du fer: 0,26 % en amont, en baisse
microflore. C'est surtout le fer amorphe [Fe (OH)3] régulière jusqu'à 0,20 % pour le riz de la plaine. Ce
qui est facilement réductible; or, dans les sols sont des valeurs relativement élevées, le niveau
ferrallitiques des bordures, il yen a très peu, moins critique de carence étant établi à 0,10 % à ce stade
de 4 % du fer total (tableau 10. Cet effet a été constaté (JONES et al., 1982). Ces résultats sont assez
par d'autres auteurs (y AMANE, 1978 ; Liu ZHI-GUANG, surprenants. En effet, ils paraissent en contradiction
1985). L'apport de terre rouge en mélange avec le sol avec le fait que le pouvoir fixateur du sol par le
de bas-fond est d'autant plus net que ce sol est plus phosphore et son énergie de fixation augmentent
fortement réduit (figure 11). avec la durée d'engorgement (SAH et MIKKELSEN,
1986), ceci ayant été confirmé par DE GIUDICI (1988)
pour les sols du bas-fond d'Ambohitrakoho.
Fer ferreux en solution et fer ferreux dans le sol L'absorption du phosphore semble corrélée avec la
rentrée du fer, peut-être sous la forme de phosphate
Un échantillon situé en aval du bas-fond (DE G1UDICI,
ferreux soluble. Cela va dans le sens constaté dans
1988) a été soumis en laboratoire à une saturation
les essais, à savoir que la réponse du riz au
progressive, avec recueil des percolats (assimilés à la
phosphore est plus nette dans les parties amont (qui
solution du sol), sur lesquels ont été dosées les
ne se réoxydent pas) que dans les parties aval.
teneurs en fer ferreux. La comparaison de cette
cinétique avec celle du fer ferreux dosé dans le sol Les teneurs en azote sont sensiblement partout les
saturé (DE G1UDICI, 1989) est illustrée par les courbes mêmes dans le bas-fond, environ 2,40 %. Dans la
de la figure 11). plaine, la teneur est légèrement supérieure (2,50 %).
Ces valeurs sont faibles (seuil critique: 2,50 %). Les
Dans les percolats, le maximum (200 ppm) est atteint
essais en rizières ont montré en effet que l'azote était
au bout de 35 jours après saturation, puis la teneur
mal utilisé dans les bas-fonds dont les sols se
redescend lentement jusque vers 100 ppm. Dans le
réoxydent mal.
sol saturé, l'augmentation est très forte et atteint un
maximum de 4 000 ppm (rapporté au sol sec) Le potassium, peu variable dans les feuilles
stabilisé au bout d'environ 30 jours. paniculaires (avec 1,20 %), est partout peu élevé
(le seuil de carence à ce stade est de 1,5 % ; JONES
et al., 1982). Les paysans ne restituent pas les pailles,
ce qui accentue la carence. Les essais paraissent
Analyses foliaires (figure 9 d)
mon-trer que la potasse apportée est mieux utilisée
L'élément des feuilles présentant la meilleure en aval qu'en amont. On sait par ailleurs
corrélation avec les conditions d'engorgement est le (TROLLDENIER, 1981) que la carence en potasse a un
fer. Très élevée dans la partie amont, avec 500 ppm, rôle synergique dans la rentrée de fer ferreux dans la
sa concentration diminue régulièrement jusqu'à plante. La déficience en potassium accroît
200 ppm dans la plaine alluviale. A titre de réfé- l'exsudation racinaire orga-nique, ce qui augmente
rence, on considère souvent (TANAKA et YOSHIDA, l'activité de la microflore réductrice du fer au contact
1970) que 300 ppm est une valeur seuil du risque de des racines.
Tableau Il. Les formes du fer dans les sols de rizière le long du bas-fond d'Ambohilrakoho (Sa jours après repiquage).
Amont Centre Aval Plaine Terre rouge
Fer total (%0) 34 36 36 46 20-80
Fer amorphe (%0) 21 22 22 29 1-3
Fe++ (%0) 7 5 4 3 0
Fe++ 1 Fer amorphe (%) 33 23 18 10 0
pH 7,2 7,1 7,1 7,1 5,0
Eh (mV) -200 -120 -100 -80
Concernant le magnésium, sa teneur dans les feuilles en aval. L'efficacité du fumier en rizière est reconnue
est liée significativement à la spatio-séquence : de depuis très longtemps par les paysans. Ils en appor-
0,050 % en tête, elle augmente régulièrement tent le plus souvent qu'ils peuvent (tous les ans à tous
jusqu'à 0,090 % dans la plaine. Ces valeurs sont les 5 ans en général). La composition du fumier
nettement en dessous du niveau critique admis (0,10 traditionnel (C/N = 20) est la suivante (ARRIVETS et
%). Il Y a donc partout une forte carence en RAZOFINDRAMONJY, 1980) : N = 6,4 kg t- 1 ; P2 0 S
magnésium. = 2,8 kg r' ; K~O = 9,6 kg r' ; CaO = 3,6 kg r' ;
MgO =2,4 kg r .
Le calcium suit la même variation (0,40 % en amont,
0,33 % en plaine). Les valeurs, bizarrement, sont Ces apports minéraux, à raison de une fois tous les
nettement supérieures au minimum requis (0,15 % 2 ans en moyenne, sont faibles. Le rôle bénéfique du
dans les pailles). fumier est donc d'un autre ordre que strictement
La teneur en silicium (7 à 10 % partout) ne signale fertilisant. II pourrait favoriser l'immobilisation du fer
pas de carence. ferreux par chélatation dans les acides fulviques.
Concernant le zinc, les essais ont montré que le riz L'apport par hectare de 60 unités de N + 90 unités de
répondait à l'apport de zinc en tête de bas-fond. P2 0 S + 45 unités de K2 0 + 5 tonnes de poudrette,
JONES et al. (1982) situent le seuil de carence dans les par rapport à cette même poudrette seule, augmente
feuilles entre 10 et 20 ppm. Ici on n'en est pas trop les rendements de 82 % en amont, de 67 % en aval
éloigné puisque les teneurs dans les feuilles sont et de 53 % dans la plaine.
partout voisines de 19 ppm.
Rendements du riz
Conclusion
La figure 9 c indique les moyennes des rendements
obtenus (toutes variétés confondues) sur l'ensemble
des parcelles d'expérimentation suivies par le Dans un bas-fond mal drainé de ce type, le riz
FOFIFA, le long du bas-fond, entre 1986 et 1989. pousse mal, pour des raisons d'absorption minérale
déséquilibrée, entraînant un dysfonctionnement
Les rendements actuels en riziculture traditionnelle physiologique.
ont été estimés assez empiriquement, d'après les
informations des exploitants et les multiples Tous les indicateurs (Eh, fer ferreux du sol, fer total
observations visuelles. Ces rendements paraissent des feuilles) signalent l'absorption précoce d'un
plafonner à 2 t ha-', avec un gradient sensible de excès de fer ferreux, celui-ci étant disponible en trop
l'amont (1,4 t ha-1) à l'aval (2 t ha-'). forte quantité dans la solution du sol. Mais le rôle du
fer est indissociable des interactions Fe-N-K-P-Mg.
Cette séquence de rendements intègre les conditions
La rentrée du fer dans la plante paraît être surtout
intrinsèques de milieu, mais aussi les pratiques
importante pendant les 40 premiers jours après le
culturales (travai 1du sol, dates de repiquage,
repiquage (phase de tallage) et plus spécialement
sarclage...) et la gestion de l'eau, deux aspects qui
sont également conditionnés par le milieu. durant les 20 premiers jours; c'est en effet la période
pendant laquelle les plants détériorés par l'arrachage
En essais te contrôlés », dans les conditions de hors des pépinières sont stressés et exposés plus
réalisation du FOFIFA, les rendements ne dépassent particulièrement à l'absorption du fer ferreux, dont la
pas 4 t ha-1 dans le bas-fond proprement dit (4 à 5 t teneur dans la solution du sol est, justement à cette
ha-1 dans la plaine). même époque, en pleine augmentation vers son
e e
le pic» (20 au 40 jour après la mise en eau).
En règle générale, quelles que soient la forme d'azote
et son époque d'apport, cet élément le marque» peu
L'importance de ces phénomènes dépend de la
sauf en plaine. Le phosphore a une efficacité signi-
durée et de l'efficacité de la réoxydation du sol
ficative jusque dans les zones les plus engorgées. La
pendant la saison sèche qui précède la mise en eau.
potasse est mieux utilisée en aval qu'en amont. Le
Ils sont de plus en plus contraignants de l'aval vers
zinc n'a marqué (légèrement) qu'en amont. La dolo-
l'amont du bas-fond. Nous avons vu pourquoi; avec
mie a généralement très peu d'effets..
la meilleure connaissance que nous avons
Enfin, il faut noter que dans tous les cas l'apport de maintenant du milieu - ses sols, son fonction-
fumier est efficace, d'autant plus que le sol est plus nement hydrologique, l'évolution annuelle de son
hydromorphe. Ainsi, 5 t ha-1 de poudrette de parc ambiance physico-chimique - il nous est possible
(fumier + terre) augmentent les rendements de près de tracer quelques axes de recherche appliquée
de 30 % en amont, de 20 % au centre et de 5 à 10% mieux le ciblés », entre autres :
M. RAUNET
- restitution des pailles de riz, pour diminuer la et du sarclage à la houe rotative, qui exigent des
carence potassique (toujours liée à l'entrée excessive temps de travaux et des équipements supplé-
de fer dans la plante) ; mentaires.
- vidange et labour précoces des rizières après la La restitution au champ des pailles de riz, recom-
récolte pour favoriser la réoxydation du sol ; mandable en soi pour la nutrition potassique, va
- essais d'implantation de légumineuses fourragères; rompre la filière te fumier li traditionnelle li ; or
- amélioration du réseau de drainage-irrigation pour l'apport de fumier, étant reconnu par les paysans
mieux faire circuler l'eau dans les rizières (oxy- eux-mêmes comme indispensable, va être ralenti,
génation et élimination des substances toxiques) ; puisque qu'ils n'ont pas les moyens d'en acheter.
Donc la proposition, apparemment simple, te resti-
- soin des pépinières afin d'obtenir des plants sains,
tution des pailles li peut être globalement néfaste
résistant mieux au stress du repiquage donc à l'entrée
pour les rendements, si l'ensemble du système n'est
du fer;
pas revu.
- utilisation de supergranules d'urée enfouis, pour
améliorer la nutrition azotée et limiter les pertes De la même façon, la te valorisation li de la contre-
d'azote; saison, le changement des dates de repiquage, des
circulations d'eau différentes dans les rizières ne
- essais d'immobilisation du fer ferreux par des ap-
peuvent être proposés aux riziculteurs sans qu'on
ports de soufre (précipitation) ou de substances
examine avec eux les te réaménagements li de leur
organiques komplexation) tels le fumier et les
système actuel dans son ensemble.
composts;
- repiquage précoce après la mise en eau (pour éviter
le pic de fer pendant au moins 20 jours).
Il faut cependant rappeler que les successions de
pratiques des riziculteurs des hauts plateaux, quand
elles sont réalisées dans de bonnes conditions, sont
déjà adaptées, autant que possible, à ces contraintes Références bibliographiques
de milieu. Les variétés locales de riz également. Ces
ARRIVETS j., RAZOFINDRAMONjY j.B., 1980. Expé-
riziculteurs ont 400 ans d'expérience dans les bas-
rimentation 1974-1979 sur la fumure du riz dans la
fonds. D'autre part, le bas-fond est un milieu province de Tananarive. Antananarivo, CENRADERU,
physique dont la mise en valeur implique, plus que 36 p.
celle des tanety, une gestion communautaire, avec
assez peu de marge de manœuvre individuelle. ARTHAUD F., GRILLOT j.C, RAU NET M.,1989 a.
L'ensemble de ces pratiques forme un système Contrôle néotectonique des directions de drainage sur les
cohérent, même lorsque certaines, prises sépa- hauts plateaux de Madagascar. CR. Acad. Sei., Paris, 308,
2: 527-530.
rément, aux yeux de l'agronome ou du scientifique,
peuvent sembler mauvaises ou améliorables. Avant ARTHAUD F., GRILLOT j.C, RAUNET M., 1989 b. Mise
de proposer des changements, il faudra toujours se en évidence d'une néotectonique en distension N-S à
demander si ces changements sont compatibles avec Madagascar (hauts plateaux). CR. Acad. Sei., Paris, 309,
le maintien du système, sans le remettre en cause 2: 125-128.
totalement, sous peine d'être inapplicables. Si une ARTHAUD F., GRILLOT j.C, RAUNET M' I 1990. La
proposition de changement ponctuel n'apporte pas tectonique cassante récente à Madagascar et son incidence
des avantages très sensibles, le système traditionnel sur les écoulements. Cano j. Earth ScL, 27 : 1394-1407.
opposera donc une résistance à cette intégration, et
DE DAnA S.K., 1981. Princip les and practices of rice
d'autant plus s'il implique des remises en cause en
production. New York, john Wiley and Sons, 618 p.
cascade. Enfin, un certain nombre de contraintes
socio-culturelles et de tabous (te fady lI), souvent DE GIUDICI P., 1988. Etude préliminaire de la
inconnues du chercheur, s'opposent aussi aux mobilisation du fer en sol de bas-fond et ses ineidences sur
changements. l'absorption du phosphore. In : Bilan hydrique et minéral
d'un bas-fond sur les hautes terres de Madagascar. Rapport
A titre d'exemple, la vidange des rizières et le labour d'avancement. Raunet M. (éd.). Montpellier, CIRAD,
précoce après la récolte, s'ils ont des effets sensibles p.55-76.
sur l'état d'oxydoréduction du sol au repiquage,
DE GIUDICI P.,1989. Caractérisation physico-chimique
entraîneront en revanche une prolifération des de l'état d'hydromorphie des sols du bas-fond
adventices qui peuvent neutraliser l'effet bénéfique d'Ambohitrakoho pendant le cycle du riz. ln: Bilan
du changement introduit. Celui-ci devra donc hydrique et minéral d'un bas-fond sur les hautes terres de
s'accompagner d'une modification de l'itinéraire Madagascar. Rapport d'avancement. Raunet M. (éd.).
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Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
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Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
127
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
partie de la surface, de sorte que seuls quelques actuel (sismicité), dont les effets sont importants sur
affleurements permettent d'analyser la structure du la géomorphologie et sur les écoulements (figure 1).
socle.
Figure 1. Eléments morphotectoniques dans la région de Tananarive. Sont représentés les escarpements
d'origine tectonique possible (lignes dentées), la zone alluviale liée au seuil de l'ikopa (pointillé),
le volcanisme quaternaire (V), les épicentres de séismes des périodes 1973-1976 et 1988 (cercles),
la direction d'extension néotectonique d'après les mesures microtectoniques (doubles flèches).
F. ARTHAUD, B. DUSSARRAT, J.e. CRILLOT
RATZIMBAZAFY, 1975), géomorphologiques et strati- - les failles majeures du secteur sont des failles
graphiques (BOURGEAT et PETIT, 1969). Dans les envi- orientées est-ouest à N11 OOE ; leur longeur moyenne
rons de Tananarive, cette surface est à une altitude est de l'ordre de 3 à 4 km, jusqu'à 10 km pour les
variable, de quelques mètres à plus de 200 m plus grandes; leur rejet vertical est de l'ordre de la
au-dessus de la surface récente. centaine de mètres;
Les versants de raccordement entre ces deux surfaces - il s'agit de failles normales, comme on peut le
sont de deux types: soit des versants à pentes faibles constater quand leur escarpement originel est encore
et à contours irréguliers qui correspondent au fluage conservé sous forme de facettes triangulaires;
des altérites vers le système de bas-fonds qui les
évacue; soit des versants plus ou moins rectilignes à - le jeu des failles majeures s'accompagne du
pentes raides qui correspondent à des fai Iles basculement de certains blocs, de la réactivation de
dénivelant la surface ancienne. fractures plus anciennes, en particulier nord-
est-sud-ouest, dont résulte en partie la géométrie du
La tectonique responsable de ces failles est réseau hydrographique actuel; en découle
postérieure à la surface d'aplanissement ancienne; également l'apparition de failles de deuxième ordre,
les escarpements originels parfois conservés et les de longueurs hectométriques à kilométriques et de
structures associées montrent que cette tectonique rejets métriques, orientées est-ouest à nord-
est contemporaine de la surface d'aplanissement ouest-sud-est;
actuelle. Comme la zone est sismique (RAKOTON-
DRAINIBE, 1977), on peut en conclure que la tecto- - la distribution spatiale des failles est-ouest est
nique a commencé dans le quaternaire puisqu'elle contrôlée par des failles antérieures nord-
affecte la surface haute, et qu'elle est encore actuelle est-sud-ouest marquées par des alignements
puisque la zone est sismique. morpho-logiques émoussés. Elles introduisent dans
la zone étudiée un compartimentage où la
La cartographie détaillée de ces failles a fait fracturation de chaque bloc est plus ou moins
apparaître les caractéristiques suivantes: indépendante de celle des blocs voisins (figure 2).
/2 -=.:-:- 4
Figure 2. Grands ensembles morphotectoniques du bassin de Mahitsy. 1: escarpement jeune supérieur à 20 m.
2: inférieur à 20 m. 3 : escarpement ancien. 4: sédiments liés au seuil de l'ikopa.
5 : site expérimental (Ambohitrakoho). 6 : seuil rocheux de l'ikopa.
Thème Il - Bas-fonds et milieu physique
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Il s'agit d'une roche homogène à quartz, orthose, réalisation, cette surface a été déformée suivant des
plagioclase, biotite et/ou amphibole, grenat, oxyde, modalités complexes décrites plus haut (te La
minerai (visibles à l'œil nu). Le granite possède le néotectonique en distension »).
plus souvent une foliation et une linéation
magmatiques marquées par les ferromagnésiens. Les
foliations et les linéations des gneiss et des granites Structure tectonique
sont en général subparallèles. Les granites sont du bassin de Mahitsy
probablement syncinématiques, subparallèles au
litage général et non intrusifs, comme on l'admet La structure du bassin de Mahitsy (figure 2) résulte de
souvent. Ils sont moins sensibles à l'altération que l'interférence et de la superposition de nombreux
leur encaissant gneissique (sans doute en raison de phénomènes:
l'absence de la blastomylonitisation). Ils jouent, de - structure et géométrie du socle: allure de la
ce fait, un rôle important dans la topographie (reliefs foliation, position et orientation des granites et des
te structuraux» ou reliefs résiduels) et dans le failles anciennes;
drainage (seuil rocheux, barrières imperméables,
- changement des niveaux de base hydrauliques
systèmes à boules).
régionaux et locaux en réponse aux mouvements
verticaux tectoniques ou eustatiques-climatiques;
Altérites et sédiments - jeux et rejeux des failles récentes qui modifient la
Les roches du socle sont altérées suivant les pro- topographie;
cessus définis par RAUNET (1985) pour la formation - reprise d'érosion (décapage) ou de sédimentation
des surfaces d'aplanissement et des bas-fonds. Dans (alluvionnement) en réponse aux phénomènes
la région de Mahitsy, le manteau altéritique est épais ci-dessus.
de 0 à plus 50 m. Divers profils (figure 5) montrent
que l'on peut distinguer sommairement:
Structure générale
- des altérites en place, caractérisées par la réma-
nence de structures te fantÔmes» (foliations, boules, La structure d'ensemble du bassin peut être décrite à
filons) ; partir de deux surfaces de référence: la surface
fini-tertiaire et la surface actuelle en cours de
- des altérites déplacées, caractérisées par l'absence
développement.
de structures fantômes et par des figures de fluage.
La surface actuelle correspond aux bas-fonds
Les deux types d'altérites sont séparés par des lignes
de blocs de quartz (paléosols probables) ou par des principaux et se développe à l'altitude d'environ
chena 1isations. 1 250 m en remontant vers l'amont à partir du seuil
de l'ikopa à Manaroandro. Ce niveau de bas-fonds
Les bas-fonds sont occupés par des sédiments dont la (BF 1 250) correspond à la nouvelle surface d'apla-
coupe a déjà été décrite (RAUNET, ce séminaire). Le nissement qui est en train de s'installer à l'altitude du
bas-fond fonctionnel actuel est flanqué localement seuil hydraulique régional, aux dépens des structures
par des lambeaux d'une terrasse alluviale située à antérieures, en particulier la surface fini-tertiaire.
environ 2 m au-dessus du bas-fond.
La surface fini-tertiaire (SFT), qui correspond à un
Les versants anciens, non repris par l'érosion paléoaplanissement, a été morcelée par .Ies failles
actuelle, sont parfois couverts par des formations de quaternaires et disséquée par la reprise d'érosion
pente composées essentiellement d'altérites fluées récente. Elle subsiste à l'état de lambeaux dont la
mélangées ~ du !'Datériel détritique hétérogène et des forme et la surface dépendent de l'amplitude des
boules descendues des parties hautes. mouvements verticaux par rapport au BF 1 250.
alignés est-ouest à des altitudes situées entre 1 300 et En résumé, la structure du bassin de Mahitsy peut
1 450 m. être décrite en fonction de deux paramètres majeurs.
Le premier est l'altitude relative de la SFT par rapport
Au nord de la vallée de la Tsoriaka, la SFT fortement
au niveau de base hydraulique régional de 1 250 m,
disséquée se présente sous forme de petits lambeaux qui est déterminé par le seuil de l'ikopa. En l'absence
entre 1 450 et 1 550 m d'altitude. Elle est très
de mouvement vertical important, la dénivellation
irrégulière et parsemée de reliefs dégagés par est de l'ordre de 20 m (partie ouest) à 50 m (partie
l'érosion (barres de gneiss granitisés, granitoïdes).
est). Ces valeurs correspondent à la valeur du
Au-delà du bassin de Mahitsy, la SFT se développe
recreusement non lié à la tectonique. Lorsque cette
largement vers le nord à une altitude proche de
dernière intervient sous forme de failles normales est-
1 500 m.
ouest, la dénivellation peut atteindre 150 à 200 m.
Discussion
Pendant longtemps, on a considéré que les formes du
relief qui, de façon générale, conditionnent le milieu
physique où se développent les bas-fonds ne
dépendaient fondamentalement que de deux
facteurs: d'une part, la lithologie des roches et leur
structure à proximité de la surface, d'autre part, la
Figure 4. Influence de la tectonique sur la forme climatologie, incluant la paléoclimatologie chaque
des reliefs et l'agencement des bas-fonds. fois qu'elle peut être reconstituée.
En haut. 1 : escarpement de faille. 2 : thalwegs en
formation (perchés). 3 : coulées boueuses, glissement La lithologie conditionne la résistance à l'érosion
en masse. 4 : lavaka. 5 : sources ou suintements. et/ou à l'altération en surface. Les différences de
6 : accumulation de boules. A, B, C : différents lithologie et éventuellement la structure ou la texture
types de bas-fond. En bas: typologie des bas-fonds des roches introduisent des nuances dans les pro-
selon leur profil transversal. cessus de destruction.
F. ARTHAUD, B. DU55ARRAT,).C. GRILLOT
La climatologie conditionne les modalités de la représentatif d'un seul type qui représente un
destruction des roches et les modelés de la surface, équilibre, peut-être transitoire, entre les interactions
qui, très schématiquement, sont liés au premier du climat et de la tectonique. Il reste donc à étudier
degré à la température et à la quantité d'eau les critères qui permettront de le comparer à des
disponible et au deuxième degré aux variations de bas-fonds d'un autre type ou à des bas-fonds de plus
ces facteurs dans l'espace et le temps. grandes dimensions. Dans ce sens, l'analyse d'un
bassin versant comme celui de Mahitsy peut se
Dans un tel cadre conceptuel, les modèles explicatifs
révéler particulierement féconde puisqu'on y trouve,
sont relativement simples: depuis un certain temps,
rassemblées sur une surface réduite, pratiquement
disons le tertiaire supérieur, les cycles climatiques
toutes les variétés de bas-fonds.
successifs ont modelé des paysages qui ne
dépendent que du climat dans leurs grandes lignes et
que de la lithologie dans le détail. Les effets de
chaque période climatique sont emboîtés les uns
dans les autres. Les plus profonds sont donc toujours Conclusion
liés au climat actuel, les plus hauts sont des reliques
fossiles pl us ou moins disséquées par les phéno- Le bas-fond, tel que le concept en a été défini
mènes plus récents. 1\ résulte de ce schéma simple (RAU NET, 1985), est un phénomène de convergence
que n'importe quel bas-fond peut en théorie être pris
entre certaines conditions assez précises de climat
comme exemple représentatif de tous les bas-fonds
(quantité d'eau et répartition des précipitations,
fonctionnels, puisque son fonctionnement ne
température), lithologiques, pédologiques (nature du
dépend que du climat actuel.
socle, chimisme, texture) et paléoclimatiques
Les travaux menés sur les environs de Tananarive (existence d'altéritesL En fonction de ces facteurs
montrent qu'il n'en est rien et que les modèles généraux, on peut définir de grandes catégories de
morphologiques purement climatiques utilisés bas-fonds dépendant pour l'essentiel du bilan
jusqu'à présent sont insuffisants. hydrique à grande échelle. Dans ce cadre général, à
l'échelle d'un bassin, de l'ordre de 100 à 1 000 km 2 ,
La typologie des bas-fonds doit prendre en compte
les relations entre les bas-fonds et les aquifères
deux autres facteurs totalement négligés jusqu'ici:
profonds et l'allure du réseau hydrographique seront
les mouvements verticaux à partir de seuils locaux et
contrôlées par des facteurs structuraux.
le jeu de failles très récentes qui compartimentent les
bassins versants (figure 5).
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Thème 1/ - Bas-fonds et milieu physique
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Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
ClRAD,1993
J.c. GRILLOT 1
Caractéristiques des exutoires étant contrôlées par les mises en charge du socle très
déphasées (3 mois) par rapport aux époques plu-
des a1latérites vieuses (observations piézo-métriques). 5ur les
sources 51 et 59, l'élévation thermique s'opère aussi
Les observations ont été bimensuelles dans l'en- (figure 3, graphe 4) environ 3 mois après la fin des
semble. Les débits ont été jaugés à la capacité. Les pluies régulières en mars (figure 3, graphe 1). On peut
conductivités et les températures ont été mesurées donc avancer que durant cette période de l'hiver
par sonde mixte d'un conductimètre de terrain austral (juin-juillet) des eaux plus profondes et plus
(précision de ± 0,5 J15 cm-let de ± 0,2 oC). Trois chaudes, en provenance du socle, migrent par
pluviographes répartis sur le bassin (figure 1) ont drainance dans les allotérites sus-jacentes. La
montré que les pluies avaient une distribution ho- conductivité y étant plus élevée (jusqu'à 100 J1S cm-1
mogène, avec une saison humide étalée en moyenne en moyenne), des mélanges d'eaux peuvent expli-
de novembre à avril, se corrélant bien avec les don- quer la stabilisation des conductivités concomitante
nées recueillies à la station météorologique située à la des remontées thermiques. 5elon ce fonctionnement
même altitude (1 300 m NGM), à 6 km de là. hydraulique, les pluies isolées de mai (figure 3,
Deux campagnes isotopiques (180 et 2H) ont aussi graphe 1) interrompent provisoirement la drainance,
été réalisées: l'une sur toutes les émergences (51 à comme le montrent la reprise de l'abaissement des
59, figure 1) au cours du cycle pluvieux; l'autre pour- conductivités (août-septembre) et celle de l'influence
suivie jusqu'à la fin de l'année hydrologique sur les des variations thermiques atmosphériques sur la
émergences 51, 54 et 57. Pour chacune de ces température des eaux souterraines. Les nettes
sources, 23 prélèvements ont ainsi été analysés sur remontées de conductivité et de température qui
l'ensemble du cycle climatique. s'amorcent bien avant l'arrivée des pluies du cycle
suivant (novembre) confortent ce mode de fonction-
Les deux sources ont des régimes différents (figure 3, nement de l'aquifère bicouche et en précisent les
graphe 2). La variabilité dans le temps est forte pour époques. Les flux profonds seraient toutefois faibles
51 (Q moyen = 655 1 h-1 , Q médian = 750 1 h-1 ), car le débit des sources varie peu au cours de l'hiver
faible pour 59 (Q moyen =630 1 h-1, Q médian =635 austral (pentes de décrue légèrement moins
1 h- 1). Les débits de 51 semblent dépendre des ap- prononcées). Il reste cependant que ces deux sources
ports pluviométriques (figure 3, graphe 1), avec un ont des débits et des régimes différents. Il y a tout lieu
déphasage de l'ordre du mois. Ceux de 59, au con- de penser que la variabilité de 51 est liée à la pré-
traire, semblent nettement plus tamponnés par le mi- sence d'une structure drainante locale, par exemple
lieu altéritique (crue lente et décharge très progres- de type filonien (BISCAlDI, 1968). 5ur le bassin,
sive). l'affleurement de filons granitoïdes reconnus à
Les conductivités électriques des eaux sont extrê- l'échelle régionale dans les directions est-ouest et
mement faibles (10 J15 cm- 1 en moyenne) et pré- nord-sud rend ce rôle probable.
sentent des variations identiques pour les deux 5ur le plan isotopique, les valeurs aux émergences
émergences (figure 3, graphe 3). Elles semblent restent remarquablement constantes durant l'année
d'ailleurs évoluer comme les débits de 59. Ces faibles hydrologique Œ180 =- 7,0 %0, 8 2H =- 44,7 %0) et
valeurs, observées aussi sur les autres sources, proches de celles des précipitations (PL, figure 3,
traduisent l'absence de toute interaction minérale au graphe 5l. Le signal pluie a donc des effets très
cours du trajet souterrain des eaux. atténués sur les eaux souterraines, ce qui montre que
l'alimentation des allotérites est fortement tamponnée
Les températures sont aussi très comparables pour les
par la zone non saturée. 5ur le diagramme 180_2H (fi-
eaux des deux émergences (figure 3, graphe 4).
gure 3, graphe 5), les eaux de 51, S4 et 57 sont bien
Durant la période chaude et humide (décembre à
groupées sur la droite météorique (TA). Ces eaux n'ont
mail, elles semblent évoluer en fonction des
donc subi aucune évaporation significative ni au
variations thermiques atmosphériques (TA, figure 3,
cours de l'infiltration, ni au cours de leur trajet souter-
graphe 4), ce que l'épaisseur des allotérites (20 m au
rain. Ceci est conforme à la bonne perméabilité
maximum) et l'amplitude des battements de nappe (4
m au plus) peuvent expliquer (zone d'hétérothermie
n
verticale des allotérites (4 . 10-4 m çl, tableau et à
la profondeur de la zone saturée (au moins 8 ml.
du sous-soD. Toutefois, ces températures remontent
en saison sèche, durant l'hiver austral (juin-juillet-
août). Parallèlement, les conductivités en décrois-
sance continue jusqu'alors marquent un palier de Phénomène5 de drainance
stabilisation. Or, l'analyse hydraulique du milieu intercouche dans le bas-fond
(pompages sur forages) a montré l'existence de
drainances verticales entre les allotérites et le socle La superposition des réponses piézométriques à deux
(GRlllOT et al., 1989), les drainances ascendantes niveaux extrêmes du bas-fond (B1 amont et B8 aval,
J.e. GRILLOT
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Figure 3. Caractéristiques des émergences des allotérites. 3.1 : pluviométrie. 3.2 : débit des sources captées 51
et 59 (figure 1). 3.3 : variations des conductivités électriques des eaux aux sources. 3.4 : évolution de la température
atmosphérique (TA) et des eaux souterraines. 3.5 : composition isotopique moyenne (18Q-2H) des sources 51,
54 et 57 (figure 1). D : droite météorique (station AlEA de Tananarive située à 6 km du bassin). PL : teneurs
des pluies sur le bassin au cours d'un cycle hydrologique complet (1987-1988).
figure 1) permet de discuter du phénomène de s'opérant jusqu'au début de la saison sèche (mai)
drainance verticale alternée (cycle 1988-89). pourraient de prime abord être soupçonnées. Mais la
tourbe franche imperméable rend ces échanges
improbables. En fait, les deux horizons interfèrent
Site 81 (figures 1 et 4.1) entre eux de manière complexe. Ils sont en effet
séparés par un niveau argileux, semi-perméable,
La charge hydraulique dans les sables est supérieure souligné par une « stone line li. Des drainances
à celle des arènes jusqu'à la fin du cycle pluvieux s'opèrent cependant entre ces deux niveaux,
(avril) ; elle est ensuite inférieure jusqu'au début des descendantes jusqu'en fin de saison des pluies' (avril),
apports pluviométriques suivants. Entre les sables et ascendantes ensuite par suite de la mise en charge
les arènes, des drainances verticales descendantes retardée de l'aquifère profond.
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
~!.~jl)~2;f~~0.::",êJ'"'
flux. Trois facteurs concourent à donner une
explication: les fluctuations piézométriques ont une
amplitude extrême de 3 m (figure 2), ce qui, compte
tenu de la porosité utile de 6 %, représente à + .
l'échelle de l'unité bas-fond-interfluves un volume lDmI + -1- ~,
annuel relativement faible (2 . 105 m3 ) ; la nappe est
au minimum (hautes eaux), à 8 m sous le sol, ce qui 1
limite les remontées capillaires à un niveau
insensible aux phénomènes d'évaporation; l'étiage
prolongé (6 mois) permet au milieu d'évacuer de
manière continue les stocks d'eau emmagasinés au
cours des phases de recharge.
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Bas-fonds et riziculture
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CIRA D, 1993
nelles de gestion. On analysera en particulier les morphiques. Les sommets de ces interfluves se
contraintes hydriques que subissent les sols de diffé- situent autour de 1 300 m d'altitude alors que le bas-
rente nature, pour adapter les pratiques culturales à fond rizicultivé s'étale entre 1 260 et 1 271 m.
un calendrier optimal de gestion de l'eau, laquelle
sera facilitée par la définition de petits aména-
gements. Schéma conceptuel
Les données exploitées sont extraites des rapports du fonctionnement hydrologique
édités à l'occasion des comptes rendus annuels Les échanges hydriques entre les différents compar-
PIREN (1987, 1988, 1989) ainsi que des différentes timents du domaine étudié sont naturellement
publications scientifiques produites par les équipes complexes et très fluctuants dans le temps. L'ori-
impliquées. Des données récentes concernant le ginalité de ce système réside dans trois éléments
bilan hydrologique du bassin d'Ambohitrakoho ne présentés sous la forme du schéma conceptuel de la
nous sont pas parvenues en raison de difficultés figure 3 (RAUNET, 1991, communication personnelle).
conjoncturelles apparues en 1991 à Madagascar;
elles seront donc examinées ultérieurement pour En premier lieu, le socle ou plutôt le complexe
te altérites + socle li. GRlllOT et al. (1989) constatent
conforter les hypothèses adoptées au stade de cette
synthèse préliminaire. que sa mise en charge est très déphasée par rapport
aux pluies. Pour le cycle 1987-1988, le déphasage
est de l'ordre de 90 jours. On peut avancer que la
crue des piézomètres des interfluves (F1 à F1 0)
correspond au début de la mise en charge du socle.
Le bassi n d'Amboh itrakoho Les zones d'alimentation directe du milieu fissuré
doivent être recherchées en dehors des limites du
site. La similitude des écarts piézométriques entre
Description générale ces forages (GRlllOT et al., 1990) va dans le sens
Le bassin étudié (138 ha) est le plus petit des quatre d'interactions hydrauliques qui tendent à équilibrer
bassins emboîtés, objets du programme général. les pressions entre les deux aquifères, au moins en
Situés aux alentours de Mahitsy, à 35 km de la capi- phase de recharge ascendante. Par ailleurs, l'hété-
tale, ces unités appartiennent au système du Manian- rogénéité des teneurs isotopiques dans le système
dro, affluent de rive droite de l'Ikopa. La te maille li bicouche altérites-socle est provoquée par le bed-
d'Ambohitrakoho couvre 138 ha et, comme le rock cristallin (GRlllOT, 1990). Ainsi, il est très pro-
montre la figure 1, elle est représentative de cette bable que le milieu aquifère que représente le socle
région de vallées et bas-fonds rizicultivés des hautes provoque des mélanges d'eau entre les deux réser-
terres malgaches. voirs superposés dans des proportions variables
d'une part spatialement, selon les pressions respec-
La structure géomorphologique de ce bassin est tives de chacun d'eux, d'autre part dans le temps, en
décrite par GRlllOT et RAUNET (1988), et son inci- fonction de leurs débits respectifs. Ceci laisse prévoir
dence sur les écoulements est abordée par ARTHAUD une alimentation non uniforme à l'échelle du bassin.
et al. (1989). Nous retiendrons les éléments fonda-
mentaux suivants dans le cadre de cette présentation En second lieu, l'existence dans le bas-fond d'un
volontairement succinte. horizon de sables lavés te pincé li entre le complexe
argile colluvio-anthropique-tourbes et les altérites
Le bas-fond proprement dit, aménagé en rizières permet d'augurer de relations complexes régies par
aquatiques, est le siège d'écoulements pérennes, à la des phénomènes de drainance tantôt ascendante,
surface, dus à la lente vidange de l'horizon aquifère tantôt descendante entre ces trois niveaux. L'alter-
altéritique libre des interfluves et au ruissellement sur nance de ce mode de fonctionnement est vérifiée par
ces mêmes interfluves pentus. Ces écoulements ont les suivis piézométriques réalisés sur certains dou-
lieu sur un niveau anthropique d'argiles limoneuses blets, comme l'illustre la figure 4 pour le cas du P4.
rapportées des terrasses quaternaires adjacentes. Ils
sont souterrains dans le complexe sables lavés-arènes Enfin, la ligne de sourcins qui longe le périmètre du
grenues-socle (figure 2) et drainent l'horizon aquifère bas-fond, dans son axe principal comme dans ses
profond semi-captif siégeant sous les inter-fluv~s. diverticules, représente la troisième originalité. Cette
ligne de sourcins apparaît au lieu où les dépressions
Les matériaux du plateau ondulé se distinguent du ramifiées du bas-fond entaillent les matériaux alté-
bas-fond qui s'y encastre de 20 à 30 m. Un épais ritiques. GRlllOT (1990) décrit l'intérêt de ces
manteau d'altérites (20 m sous les interfluves) est émergences pour la compréhension des écoulements
coiffé de sols ferrallitiques et couvre le socle dans les matériaux d'altération et de l'hydro-
précambrien composé de roches fortement méta- dynamique du socle fissuré.
A. DURBEC, C. DUBAR, J.c. GRILLDT, M. RAUNET
O Surface "fini-tertiaire"
(sur migmatites)
••
étagés des nappes -
Glacis du quaternaire ancien
phréatiques d'altérites
(sur migmatites)
Bas-fonds
et plaines alluviales actuels
+++ Reliefs résiduels
+++
+++ (granites et quartzites)
[ZJ
••
J:
Filons granitiques
\ "Bassin étudié
'.
Nord
o 500 1000 m
!
NAPPES FLUX
NA = Nappe arène-socle P = Pluie
NM = Nappe d'altérites R = Ruissellement sur interfluves
NI = Nappe d'inondation des rizières 1 = Infiltration
NT Nappe de la tourbe S = Suintements de la ligne de sou reins
NS = Nappe des sables lavés Ld = Lame d'écoulement des drains
Lr = Lame d'écoulement des rizières
Ft = Inféro-flux total longitudinal
FI = Inféro-flux latéral
Da = Drainance ascendante
Dd = Drainance descendante
Ei = Evapotranspiration des interfluves
Eb = Evapotranspiration du bas~fond
X = Alimentation extérieure au bassin local
o Les conductivités hydrauliques 1,5 et 2.10-5 m ç'. Nous retenons dans un premier
Le matériau altéritique est réputé sensiblement temps la valeur de 10-5 m ç' .
homogène. Les perméabilités horizontales mesurées
in situ sont faibles. Nous retenons une distribution o Les drainances
homogène à 7 . 10-7 m ç'. Entre les altérites et les sables, les drainances sont
La perméabilité des sables lavés a été mesurée initialisées à 2,5 . 10-8 m ç', sur l'ensemble d~ la
uniquement en laboratoire. Les résultats varient entre couche. Les différenciations et les transitions
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
~ ..
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Jours r
1/
Figure 4. Relation entre la nappe des altérites ~
l.-/1
et la nappe des sables au niveau du P4 d'août """" 1 •
AU "IOL' --f
Figure 6. Bas-fond d'Ambohitrakoho et maillage.
~·-Sii;;~irM'd~-tW:(~;d~..;~ ~~,;~;~~rult;d;~TO::;;{.:;··~~~~
Cette partition peut-elle être rapprochée de
... ~'.....';;...;-;TI'".....jV.~. ZOnes mailles b)'p 2 l'existence d'une faille en limite nord du bas-fond?
C'\lculs de m:lÎ 19&8 èbi:wiS9.... m3/s
St. S:lblcs Ali. sens -;~':'r.eni.~'7 A 30 ·6.7E·06 ARTHAUD et al. (1990) ont montré que la tectonique
'II-.JrVl'VI"'....;... O;' B 26 ·7.7E.06
Pl 1268,39 1267182 Sa·> Al '~1~:'~::;I~ C 29 ·6.9E·06
cassante récente à Madagascar a une incidence sur
P3 1262,87 1263,00 AI·> S, .,,".AJ"'."'·S,': DI 9 -1.7E-06 les écoulements.
P4 1261,63 1261,72 AI·> S, ~~~Eif:~~~~ 02 16 -3.0E-06
P5 1260,32 1260,42 AI -> S, ·~?AJ.,>S.!; E 13 -8.3E·06
P6 1260,27 1260,35 AI -> 5.'1Ar'>S.~ F 12 -3.3E-06 Pour parvenir à cette piézométrie « finale» restituant
P7 1259,30 1259,35 AI -> Sa .;·~Ai~;:SI;; 01 31 -4.0E·06
PR 1259.24 1259.22 S, -> AI if'SR'~i;ï\r: 02 16 ·2.7E-06 le régime de mai 1988, la recharge par le socle est
Il 17 -2.9F.·O~
ajustée en tenant compte d'un gradient négatif vers
l'aval et en respectant la dualité Nord-Sud liée à
Figure 7. Comparaison des deux hypothèses de calcul.
l'existence de la faille F (figure 8).
Quelle est la situation dans le bas-fond?
Une difficulté non négligeable résulte du fait que la
Rccharse par le socle:
69.00 10-5 mJJslba
piézométrie de 1988 n'est pas connue dans le bas-
fond. Nous avons néanmoins tenté une comparaison
avec les mesures effectuées en 1989 à la même
période. Pour obtenir des résultats acceptables, les
drainances entre sables lavés et altérites doivent à
leur tour être ajustées. Les valeurs initiales se révèlent
trop fortes. Lorsque le coefficient de drainance varie
entre 2,5 . 10-7 et 2,5 . 10-9 m s-1, la piézométrie est
localement influencée, mais les interfluves fluctuent
de quelques décimètres. Le maximum de cette
:\ -> H : zonage des sou reins fluctuation se rencontre dans la zone médiane. Le
meilleur calage est obtenu pour 2,5 . 10-9 m s-1 en
zone amont et 0,5 . 10-9m s-1 en zone aval (figure 7).
Figure 8. Partition du domaine étudié. La séparation se situe entre P4 et P5.
Sans aller jusqu'à la quantification des échanges,
corriger l'écart supérieur à 10 m obtenu en F4. La nous représentons en figure 11, sous forme de mail-
piézométrie dans le bas-fond est assez mal restituée, lages renseignés, le sens et l'intensité des échanges
mais dans tous les cas un ajustement des coefficients entre les trois couches. Ces indications constituent
de drainance ne permet évidemment pas non plus de les premiers éléments de description du « fonc-
corriger l'écart en F4. La piézométrie obtenue est tionnement » que nous évoquions dans l'intro-
présentée pour mémoire en figure 9 a. duction.
Il ~ 1
discrétisation spatiale adoptée. !'UII.
8.10-7 rn.s-!
1-1 : ±2: ; ,':':#! §
7.10- 7
5.10-7
La piézométrie calculée (figure 9 b) indique qu'un , ,
il"..
'
'l". "1' •
# 3.10-7
prisme vertical centré sur le bas-fond est bordé par o 2,5.10-7
1 i 1 .~
@ 1,5.10-7
1
deux plans de courant; des échanges latéraux ne . , . , 01.1 •
. • • OIDIO.:uor :
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, ! 1 ;-....; ,', ~§ 1 § ! § i
Conditions aux limites l , ~ . ....: .--':::: § i
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ne sont pas encore restituées de façon correcte.
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Cette prémodélisation est prometteuse, les flux
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J. ALBERGEL 1, P. PEREZ 2
·.<i»:ü~iII~"! .~~. froit~ saüva8~; (JePuis ledé~~tdes~i1née!i 80)so!teauXsécheressës qes aluiées70,1f!S bas.~ • • • • • • • •
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...<··}.·> .•· .• jardl~s;;;, 1>~~la···~égion.~.~ . I~rs~é~Kay~or, • .dE!~xbas~fon~s.?nt.ét~.ch~is.isp~ur despf"()jets.· pilott!s.d~ . • . i·••••
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155
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
o 1 2 3 4 S km
1 1 1 1 1 1
dite intermédiaire, s'est développée et étendue dans glacis étagés en trois niveaux se sont développés,
les séries tendres des pays de la moyenne et basse s'ordonnant en fonction du réseau hydrologique. Le
Gambie. Du tertiaire au quaternaire, l'événement niveau phréatique du continental terminal se met en
majeur dans la région est la surrection du Fouta place.
Djalon. Ce soulèvement a engendré la topographie Le réseau hydrographique est bien marqué, il se
et l'occupation des paysages par le réseau hydro- présente sous forme d'entailles convexes à forte
graphique actuel de tout le bassin de la Gambie. Au pente reliant le bas de glacis aux bas-fonds. Ces
cours du quaternaire ancien et moyen, de vastes derniers sont constitués de sols d'apports, peu évo-
j. ALBERGEL, P. PEREZ
lués et généralement sableux. Les bassins versants On peut subdiviser ce dernier en trois sous-unités:
ont des formes allongées, les rivières creusant leur lit
- 0,0-0,5 m : mare temporaire à submersion
dans la ligne des grandes failles. Le bas-fond com-
fréquente, superficie 0,5 ha ;
mence par une dépression parcourue par de nom-
breuses ravines d'érosion au changement de pente - 0,5-1,0 m : retenue hydraulique maximale définie
entre le plateau de sommet et les glacis-versants de par le seuil aval (cote 1,0) ; sa superficie avoisine
raccordement. Il se poursuit par un tronçon très long 2,5 ha pour un volume théorique de 7 700 m3 ;
allant en s'élargissant et recevant des affluents laté-
raux courts et actifs quant à l'érosion. - 1,0-1 ,5 m : zone de raccordement avec le bourrelet
de berge, de faible extension sauf au débouché de
Dans la région étudiée, on peut considérer comme l'adducteur principal où se forme un cône de
terre de bas-fond au sens large l'ensemble des zones déjection sableux; superficie 2 ha, en extension au
circonscrites par la courbe de niveau 20 m ( figure 1). détriment de la zone dépressionnaire.
Entre 20 et 40 m s'étagent, en pente douce, les sols
de glacis. A partir de 40 m, on trouve les plateaux
cuirassés, souvent bordés par des zones d'éboulis. Contexte pédologique
Sur le site de Keur Samba Diama, le tracé du bas-
Quatre transects pédologiques ont été réalisés (fi-
fond correspond à un méandre du talweg qui
gure 2). Compte tenu de la forme du bas-fond, la
délimite un isthme intérieur appartenant au bourrelet
notion de transect transversal est difficile à concré-
de berge. Un levé topographique du bas-fond a été
tiser; priorité a été donnée à la caractérisation des
réalisé à l'échelle 1/1 000. Il apparaît que certaines
zones cultivées. La profondeur maximale de prélè-
cotes caractéristiques permettent de différencier les
vement atteint 155 cm. La figure 3 présente les sols
unités du bas-fond (la cote 0 est celle du point le
plus bas du bas-fond et correspond environ à
du transect n.
l'altitude 12 m) (figure 2) : L'étude d'un profil pédologique te moyen» du
- cote> 1,5 m : bourrelet de berge, se raccordant pro- bourrelet de berge permet d'analyser, en partie, la
gressivement au glacis-versant, de forme convexe; morphodynamique du bas-fond :
- cote < 1,5 m : bas-fond proprement dit, à inon- - 0-1 00: horizon sableux (S, c1assif. GEPPA), couleur
dation plus ou moins prolongée et pentes trans- beige, 10 % d'argile + limon fin, aucun élément
versales faibles; limité au seuil aval de la mare, sa grossier, squelette granulométrique (1/4 LG + 1/2 SF
superficie avoisine 4,5 ha. + 1/4 SG) ;
~ Mare temporaire
• Site Muntz
____ Route
.,/ Transecl
/' pédologique
o 100 m
1 1
- 100-150 : horizon sablo-argilo-limoneux (SAL, strict dès la surface. Aucune tendance vertique n'a
c1assif. GEPPA), couleur beige clair, 20 % d'argile + été constatée.
limon fin, aucun élément grossier, squelette
Compte tenu de la nature des sols des zones d'ex-
granulométrique (2/5 LG + 2/5 SF + 1/5 SG) ;
portation, le colluvionnement dans le bas-fond s'ac-
- 150-200 : limono-sablo-argileux (LSA, c1assif. compagne d'un enrichissement en sable par rapport
GEPPA), couleur beige pâle, 30 % d'argile + limon au matériel en place. En fait, ces phénomènes sont
fin, taches rouges d'oxydation développées en discontinus dans le temps (régime des précipitations)
nodules à la base de l'horizon, squelette et dans l'espace (vitesse des matières transportées).
granulométrique (4/9 LG + 4/9 SF + 1/9 SG) ; La zone de déjection permet de définir un horizon
- 200-250 : limono-argilo-sableux (LAS,classif. allogène de 50 cm d'épaisseur, à texture sableuse
GEPPA), couleur blanchâtre, 35 % d'argile + limon particulaire, surmontant le sol en place enrichi en
fin, nombreuses taches brun-jaunâtre, squelette argile par les apports extérieurs.
granulométrique (10/18 LG + 7/18 SF + 1/18 SG).
Tous les profils dans le talweg (cote < 1,0 m)
possèdent un squelette granulométrique limoneux,
comparable à ceux des troisième et quatrième hori- Fonctionnement hydrique
zons décrits ci-dessus, mais enrichis en argile. En des sols de bas-fond
admettant la faible mobilité, in situ, des fractions LG,
SF et SG, nous pouvons émettre l'hypothèse d'une L'extension réduite des zones argileuses et la faible
entaille du massif sableux originel jusqu'aux hori- durée des période d'inondation du bas-fond nous ont
zons limono-argileux moins friables. conduit à étudier l'infiltrabilité de ces sols. Deux
Par la suite, les apports colluvionnaires entraînent un techniques complémentaires ont été utilisées:
enrichissement en argiles et limons fins qui migrent - l'infiltromètre double anneau (type Muntz), afin de
dans le profil à l'occasion des phases de submersion déterminer la vitesse d'infiltration stabilisée sous
temporaire. Toutefois, seul le sol de la mare tem- charge constante (h = 4 cm) de la zone cultivée
poraire (cote < 0,5 m) possède un caractère argileux inondable (Ml, M2, M3, M4) (figure 2) ;
Al A6 A9
Il enrichis!. A+LF
D squelette limoneux
squelette sableux
.... :·
t~:::
'
----. ~~~~:5 c:m 35-75 cm
L':':..
1 ! 75-115 cm
~
0_15 cm
15-35 cm
35-75 cm
75-115 cm
__ A+ LF
III lG D SG
-le minisimulateur de pluie (type OR5TOM), afin de réorganisation de surface (tassement, ségrégation,
compléter les connaissances sur l'aptitude des sols migration) apparaissent lors des cinq pluies suc-
locaux au ruissellement et d'étudier le compor- cessives et diminuent cette capacité: vitesse d'infil-
tement des sols du bas-fond sous intensité constante. tration stabilisée de 20 mm h-' lors du dernier évé-
Trois sites aux états de surface bien différenciés ont nement.
été choisis (figure 2) : 5ite 52 : le sol argilo-sableux se colmate rapidement
- parcelle 1 : zone d'épandage sableux, précédent et induit un ruissellement important dès la première
maïs (51) ; pluie, qui est alors essentiellement déterminé par la
lame précipitée, l'état hydrique initial et l'intensité
- parcelle 2 : zone argi lo-sableuse, précédent riz
de la pluie ne jouant qu'un faible rôle. Vitesse
(52) ;
d'infiltration stabilisée: de 3 à 5 mm h-'.
- parcelle 3 : bourrelet de berge, précédent mil (53).
5ite 53 : le sol sableux de bourrelet, protégé par des
graminées rampantes (25% de la surface) possède
Essais Muntz des coefficients de ruissellement plus faibles, de 35 à
45 %. Les capacités d'infiltration diminuent avec
Les sites M 1, M2 et M4 possèdent une vitesse l'état hydrique initial du sol : Vs =41 à 28 mm h-'.
stabilisée d'infiltration de 25 mm h-'. Cette valeur est
élevée pour un sol de bas-fond et confirme son faible Le tableau 1 résume les principales caractéristiques
caractère argileux en surface (20 à 26 % d'argile). hydrauliques pour chaque site à la première pluie
(état sec) et à la dernière (état humide, 378 mm de
Le site M3, malgré un apport d'eau conséquent précipitations en 5 jours).
(Lr = 200 mm) possède une vitesse stabilisée encore
plus importante, 100 mm h-'. Le profil sableux
limono-argileux (A : 14 % jusqu'à 75 cm) et une Résultats des essais
macroporosité biologique en profondeur peuvent Les résultats obtenus par les essais d'infiltration
expliquer de telles infiltrations dans la zone de Muntz et ceux par simulation de pluie se complètent.
raccordement. Ils démontrent la forte variabilité de l'infiltration du
bas-fond, dépendant de :
Essais simulation de pluie - l'hétérogénéité spatiale: si la mare temporaire
(cote < 0,5 m) peut être considérée comme
Le protocole de pluie simulée utilisé est celui, main- faiblement perméable, les autres zones dépres-
tenant classique au 5ahel, d'une succession de sionnaires possèdent des capacités d'infiltration non
cinq averses séparées par des temps de ressuyage négligeables (M1, M2) mais bien inférieures à la
variant de 12 à 72 heures. Les averses sont à intensité zone d'épandage ou aux zones de raccordement
variable et reproduisent un hyètogramme de récur- avec le bourrelet (M3) ;
rence annuelle ou décennale dans la zone consi-
dérée (ALBERGEL, 1987). -l'état initial du sol : le matraquage de la surface par
les gouttes de pluie et le taux de saturation du profil
5ite 51 : le sol sableux, à structure particulaire, transforment notablement les propriétés du sol en
possède une bonne capacité d'infiltration lors de la place (52) ; ainsi la vitesse de disparition de la nappe
première pluie, mais d'importants phénomènes de aérienne qui se forme dépend-elle des états de
surface rencontrés lors de la mise en charge de la crue, l'écoulement s'arrête, laissant des chapelets de
dépression. mares dans le bas-fond, à la faveur des seuils
naturels.
A ce titre, l'analyse de la vidange des crues du
20/07/90 et du 07/08/90, après arrêt de l'écou-
lement, permet d'obtenir une approximation de la Les plus fortes crues surviennent en début d'hiver-
vitesse d'infiltration globale du plan d'eau, après nage avant la mise en place de la végétation et au
mise en charge complète. Les cinq premiers jours, la moment où les orages à forte intensité sont les plus
vitesse atteint 4,6 mm h-1 puis décroît progres- probables. Une seule crue peut représenter plus de
sivement jusqu'à 2,0 mm h-1, vitesse de vidange de 50 % de l'écoulement annuel. Le tableau Il donne les
la mare temporaire.· caractéristiques des écoulements annuels dans le
bas-fond de Ndiba observés depuis 1983.
La pluviométrie de la zone sud du Siné-Saloum peut Ces crues violentes arrachent les cultures lorsqu'elles
être caractérisée à partir de trois postes de longue surviennent après la levée des graines ou le
durée, bien observés, dont les données ont été repiquage. Une étude des vitesses du courant a été
homogénéisées (LAMAGAT et al., 1989) : Nioro du Rip réalisée à Keur Samba Diama où toute la riziculture,
à 40 km à l'ouest de notre zone d'étude, Papem dans mise en place pendant l'hivernage 1988, a été
la zone et Georgetown en territoire gambien. La
emportée par la crue survenue le 4 août. les vitesses
pluie annuelle médiane est de 810 mm, la pluie mesurées sur les verticales de jaugeage montrent
annuelle de récurrence décennale sèche est de qu'elles diffèrent peu de la surface vers le fond. Sur
580 mm et la pluie annuelle de récurrence décen-
56 jaugeages réalisés, le rapport vitesse moyenne
nale humide est de 1 100 mm. la pluie journalière dans la section/vitesse de surface varie entre 0,9 et
de fréquence 0,5 a une hauteur estimée à 70 mm,
1,04. la figure 4 montre la variation de la vitesse
et celle de fréquence 0,1 a une hauteur estimée à
moyenne en fonction de la hauteur de l'eau dans une
110 mm.
section du bas-fond.
Tableau Il. Caractéristiques de l'écoulement annuel dans le bas-fond de Ndiba (bassin versant: 16 km 2).
Année Pm Ve Crue la plus forte
(mm) (103 m3 )
Date Ve
(103 m3 )
1983 394,0 157,6 13/07 141,5 89,8
1984 469,2 233,0 02106 157,7 68,5
1985 554,8 170,7 19/07 71,5 42,1
1986 682,7 299,5 02lOB 182,9 61,0
1987 795,3 49,3 17/06 20,9 42,4
1988 819,9 543,3 13/07 208,9 38,5
1989 704,3 385,5 17/06 370,0 96,0
1990 465,3 219,4 OBIOB 95,2 43,4
Pm : pluie moyenne sur le bassin.
Ve : volume écoulé.
Qmax : débit de pointe de la crue.
J. ALBERGEL, P. PEREZ
1.4
Vilesnmla cote 0, soit à environ 20 m au-dessous de la surface
du sol au bord des bas-fonds. L'étude des niveaux
1.2
statiques met en évidence une remontée importante
pour certains puits pouvant aller jusqu'à 80 cm
o.•
pendant l'hivernage, alors que la majorité n'accuse
0.6 .
~-..jr:::RiSQUtl-d""'.-"'d6,-.c""'1no-mc-;n,1
aucune variation. Ces remontées sont expliquées par
0.4 la présence de drains constitués par un niveau
0.2 cuirassé intermédiaire.
1 - - - 1 - - - - - - 1 - 1- - ----<
50 100 150 200 250
La qualité chimique de l'eau est excellente (pH de
t'-uteut de reau en cm l'ordre 6,5, conductivité mesurée in situ inférieure à
Figure 4. Crues dans le bas-fond 5 mS cm- 1 ), les formations étant constituées
de Keur Samba Diama : vitesse moyenne du courant. essentiellement de sable, grès et argile très pauvres
en matières solubles.
Une autre contrainte liée à ces fortes crues est cons- La contrainte d'exploitation de cette nappe est sa
tituée par les apports en matériaux d'érosion. Quatre profondeur. Le débit exploitable avec les moyens
ravines dont les bassins versants varient de 2,5 ha à d'exhaure traditionnels (puisage avec un cheval) est
90 ha ont été équipées d'un dispositif de mesure du estimé à 30 m 3 par jour. Il faudrait 50 m3 par jour
ruissellement et de l'érosion (fosse à sédiments et pour assurer un hectare de maraîchage en contre-
mesure des matières en suspension). Avant aména- saison.
gement antiérosif, les apports en matières solides ont
été évalués à 1,5 t ha-l, dont 12 % sont formés de Signalons l'existence de la nappe du maE!strichtien
sables grossiers se déposant sous forme de cÔne de dont le toit se situe à la cote - 300 dans la région.
déjection dans le bas-fond. Les concentrations Cette nappe est l'une des plus puissantes de l'Afrique
maximales annuelles mesurées varient entre 20 et de l'Ouest.
30 g 1-1 et surviennent un peu avant le maximum des
premières fortes crues. Ces concentrations diminuent
au fur et à mesure que la végétation s'installe durant
l'hivernage. La figure 5 montre l'évolution du débit
Ecologie et agronomie
solide durant une forte crue dans une ravine dont le
bassin a une superficie de 58 ha.
Ecologie
01 lia el 01 011 Avant de passer à un stade d'aménagement du bas-
1400
fond qui passe nécessairement par un déboisement,
1200
il est utile de faire un inventaire des espèces exis-
Dtbilliquida
1000 tantes et des possibilités naturelles de production du
Al \
800 Il' , bas-fond.
,: ~,
\
600
: L Un relevé floristique a permis de réaliser un tableau
1\\
1 1'\
400 ! phytoécologique des espèces présentes et de définir
\ Débit so d
200
'. des groupements caractéristiques par station. Les
'------------- .. _.
o.l-.......L-+-------<~:.:.::::.:::.:,~=~=---t zones anthropisées, à faible densité d'arbres, ne
7:12PM 8:24 PM 9:36 PM 10:48 PM 12:00 AM 1:12 AM
permettent pas la mise en évidence de groupes ho-
Cru a du 13107/88
mogènes ; cependant, en se référant aux travaux de
Figure 5. Transports liquides et solides: FONTANELLE (1986) et DIATTA (1988), on parvient à
crue du 13/07/88 à 52. définir le bas-fond de Keur Samba Diama comme
intermédiaire entre le type à fond creux (Mitragyna
inermis, Terminalia macroptera, Parkia biglobosa.. .J
Les eaux souterraines
du secteur amont du réseau hydrographique et celui
Le continental terminal représente l'aquifère exploité à fond plat (Dyospiros mespiliformis, Ficus
par les puits villageois dans la région. Il est constitué iteophylla.. .J plus en aval (tableau IV). Ceci confirme
d'un complexe de terrains variés d'origine conti- les études précédentes ayant décrit le bas-fond
nentale, qui se sont déposés de l'éocène à l'époque comme un type de transition.
actuelle. Les sables et les grès tendres ou argileux
Le bas-fond est une zone de parcours traditionnelle.
dominent et alternent avec des bancs d'argile.
La mare est utilisée pour l'abreuvement du bétail
L'épaisseur totale de la formation est de l'ordre de la
pendant l'hivernage et jusqu'à son tarissement (no-
centai ne de mètres.
vembre à décembre). La biomasse présente sert de
Trente et un puits villageois ont été suivis dans la fourrage aérien à la fin de la saison sèche et devient
zone d'étude. Le niveau phréatique est proche de la stratégique en période de soudure.
Thème 1/ - Bas-fonds et milieu physique
x-. ~ ~""»."'»."'Oo."'Oo. ~ ~ '«':-. ~ ~ w». ~~ "«-. w."«-. "'O'». "«-. "-:-. ~:-. "«<'. ~~:-. "-:-."-:-. "":-:-. ~~""». ~ 'I(
Dans le bas-fond de Keur Samba Diama, les carac- - maraîchage de fin d'hivernage, après la récolte du
téristiques hydropédologiques ont entraîné une riz, profitant de l'humidité résiduelle des sols argilo-
stratégie adéquate de mise en valeur par les agri- sableux.
culteurs: Depuis 1989, des tests variétaux tentent d'améliorer
- riziculture entre les cotes 0,5 met 1,0 m, la mare la productivité rizicole. Les forts contrastes pluvio-
temporaire étant réservée à l'abreuvement des métriques confirment la nécessité de cibl~r des va-
animaux; la variété locale utilisée est de type mixte riétés à cycle court, très plastiques (tableaux V et VI).
BOULANGER X., 1989. Aménagement d'un bas-fond et PEREZ V., SEGUIS L., 1991. Essai de caractérisation des
action anti-érasive dans le département de Niora. Dakar, bas-fonds par l'utilisation de la télédétection spatiale,
AFVP. Siné-Saloum, Sénegal. ISRA-ORSTOM.
RUELLE P., SENE M., JUNCKER E., DIAnA M., PEREZ P.,
BROUWERS M., 1987. Etude morphopédologique des 1990. Défense et restauration des sols. Fiches techniques.
bassins versants de Thyssé Kaymor. CIRAD-ENSAM. Dakar, ISRA, 50 p. (Coll. Fiches techniques, vol. l, n° 1).
DIAnA M., 1988. Caractérisation morphodynamique des SARR D.Y., 1989. Contribution à l'étude de la mise en
faciès forestiers de la communauté rurale de Kaymor. place du projet d'aménagement du bas-fond de Keur
Mémoire de confirmation, ISRA. Samba Diama. Kaolack, ISRA.
FONTANELLE P., 1986. Etat des végétations de parcours VALET S., 1985. Note explicative de la carte d'occupation
dans la communauté rural de Kaymor (Sud-Saloum, comparative des sols 1970-1983 de la région de Thyssé
Sénégal). Montpellier, CIRAD-IRAT. Kaymor (Siné-Saloum). Montpellier, CIRAD-IRAT.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
A.1. MOKADEM 1
';II!~II[illiiI.IJ}eJ.~tl~ii't~lill~lii
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ~~sllltéltS.dégagéSrévèlent.Jes··Possibilités.··offertës par.l'imagerié·.satellitairë··.pour··recoriilai@.. lesiririëS•• :........y . . \ . . .
... •.••.••••..•••.•••..•.•••.••.••..•••. ~uînideS/ën .·évàluer.la·.·répârtitiôr1·.spatialë·.dans.•. I~ ··pay~ge,· étüdier•. leursëoriditiriris.·de.·~~blllërsiôif~t) . •·.))n
.
I'imp~l1ânc::e.·.de I'il1t~ry~Î1tion·.hùmail1e.·sürces zo.ries:Unë··.ébauche.·de.·typolôgi~d~.lonêii\>.·i·.··
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lespersjÎéêtivesd'application
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Viol.hhol'\ t'ô. dcnU:.Ac:covv'tment ) JO';'
~tfft+t;~,
Nt~
de l'image tous les pixels dont les valeurs radio-
métriques sont incluses entre deux seuils maximal et 155
65
Ilt~!#
minimal. la détermination des seuils est fondée sur 95
~~t
miné.
Extraire par le même seuillage toutes les unités
présentes dans les zones humides est une opération
25
t
::tlt •
135
•
0 Savanes
Savanes
boisées
arborées
* Formations ripicoles - Savanes arbustives
inférieure: moyenne moins écart-type) de l'en- Zones anthropi~ues o Savanes herbeuses
humides présentent, dans les canaux TM6, TM5 et Figure 2. Signatures spectrales. Image Landsat TM
TM3, une ressemblance par le biais de valeurs du 5 novembre 1988. Plaines et bassins versants
de Kawara. Douna, Badini et Niofila.
radiométriques faibles, qui les démarquent en bloc
des autres unités du paysage.
Des traitements combinés comprenant une phase
analogique suivie d'une phase numérique ont aussi rayon. Des 200 parcelles visitées, 28 sont situées
été envisagés. le traitement analogique consiste à dans la zone humide, soit 14 % de la surface
extraire de l'image les zones humides avec les zones échantillonnée. l'ensemble des résultats a déja fait
basses des versants, en interprétant visuellement la l'objet d'une publication (MOKADEM et al., 1991).
restitution en composition colorée TM5-TM3-TMI. Nous présentons dans le tableau Il les traitements
les traitements numériques cités ci-dessus sont alors ayant donné la meilleure précision.
appliqués à ces surfaces pour en isoler les zones le traitement analogique de l'image et le traitement
humides uniquement. combiné avec seuillage sur les valeurs thermiques
Nous présentons dans le tableau Iles superficies des semblent les plus appropriés pour mettre en
zones humides dans les sept bassins versants étudiés. évidence l'ensemble des zones humides d'une
région et minimiser les taux d'erreur.
Un traitement en soi n'a de signification que s'il est
accompagné d'une estimation numérique de sa le seuillage sur le canal thermique TM6 permet, en
qualité. les résultats cartographiques des traitements extrayant les zones le froides ,., une discrimination
satellitaires et de la photo-interprétation ont été sensible des zones humides, l'utilisation du seuillage
confrontés à la réalité du terrain issue d'un sondage bispectral n'améliorant guère cette performance.
au sol. Ce sondage est constitué de 200 observations, Ceci confirme le potentiel de caractérisation du
prises aléatoirement dans les 18962 hectares canal TM6 dans les études agrohydrologiques
englobant les zones au sud-ouest du Burkina Faso, (MOKADEM et al., 1988). Quand on sait que la
pour lesquelles nous disposons d'une couverture résolution spatiale de TM6 est de 120 x 120 m, que
aérienne au 1/20000. Chaque observation porte sur certaines zones de bas-fond ont une largeur
l'état de surface d'une parcelle de 30 mètres de inférieure à 100 m, on ne peut qu'espérer l'arrivée
168 .oooO~CCCCCCCCOQC::C:cccc:::ooo::o:::cco:oo::c::::::::occ:'
A.I. MDKADEM
dans l'espace d'un satellite « thermique» ayant une d'images sans nuages à cette période permet d'en-
meilleure résolution spatiale. visager plus sûrement l'opérationnalité de la mé-
thode et des traitements proposés.
En plus du choix du traitement et du type d'image à
utiliser, il faut également insister sur le choix de la L'intervention humaine sur les bas-fonds (la récolte
date de prise de vue de cette image, pour permettre du riz s'étale dans la région de début novembre à
une éventuelle extrapolation des résultats obtenus à début janvier) et sur les versants (feux de brousse)
d'autres régions de l'Afrique de l'Ouest. rend très aléatoire l'application de notre méthode à
des images tardives dans la saison culturale. En re-
Une image avec peu de nuages est difficile à vanche, l'information supplémentaire apportée par
acquérir durant la saison des pluies. De plus, au celles-ci sera utilisée dans une analyse diachronique
cours de cette période, l'état d'engorgement et de pour cartographier les états de surface et l'occu-
submersion des zones humides sera fortement pation du sol dans les zones humides.
influencé par l'intensité et la durée des dernières
pluies tombées avant la date de l'image. En se situant
un mois après la fin des pluies, on minimise cette Etats de surface
influence. Le niveau des eaux de surface et de la dans les zones humides
nappe dans les sols commence à décroître et
l'humidité des zones à identifier sera alors davantage Après avoir exposé la démarche suivie pour la mise
liée à la capacité des écosystèmes à contenir et en évidence des zones humides, il s'agit maintenant
retenir l'eau. En outre, la possibi lité d'acquisition d'examiner dans quelle mesure l'imagerie satel-
Bassin versant Latitudes Superficie du Superficie des Rapport Taux d'utilisation Taux d'utilisation
bassin versant (B) zones humides (H) HIS x 100 des zones humides des versants
(ha) (ha) (%) (%) (%)
Farako 11 25 N-
0
122462 5821 4,8 19 11
(Mali) 11 0 00 N
Banankoni 11 0 25 N- 48733 3609 7,4 26 17
(Mali) 11 0 05 N
Lotioà 11°22N- 34893 2512 7,2 37 25
Samogossoni 11 0 05 N
(Mali)
Kambo 100 38 N- 1015 62 6,1 72 36
(Mali) 100 35 N
Kawara 100 39 N- 10293 934 9,1 74 44
(Burkina Faso) 100 33 N
Moadougou 100 35 N- 11 700 869 7,4 37 24
(Burkina Faso) 100 28 N
Damana 100 24 N- 10177 1 140 11,2 29 26
(Burkina Faso) 100 19 N
Tableau Il. Appréciation numérique des traitements de mise en évidence des zones humides
sur l'image Landsat TM du 5 novembre 1988 et sur les photographies aériennes du 10 novembre 1989.
Confrontation avec la réalité terrain issue d'un sondage aléatoire au sol.
litaire permet de discriminer les principales unités sols nus; d'autre part, l'assèchement de ces zones
d'état de surface et d'occupation des sols humides: permet d'effectuer une nouvelle évaluation des
mare, marigot, riz, formation ripicole, prairie, surfaces encore submergées en fin de saison
cultures maraîchères... culturale.
Le résultat cartographique issu du traitement En fonction de ces considérations, une méthode
analogique sert à masquer les pixels non classés en fondée sur des traitements séparés de l'image de fin
zones humides dans les trois images utilisées dans de saison des pluies et des deux images de fin de
notre étude. L'intérêt du masque réside ici dans saison culturale, suivis par une superposition
l'augmentation des contrastes que l'on peut obtenir à cartographique des produits dérivés de ces
l'intérieur des zones non masquées. Il permet aussi traitements, a été mise en œuvre (figure 3).
d'étudier séparément les zones humides et les zones
sèches. L'état de surface de ces zones est
sensiblement différent aux dates de prise de vue des
CIl
images. '"
Cl
.....
:>:
L'image Landsat TM du 5 novembre 1988 se situe un ê
<Il
mois après la fin de la saison des pluies. Les bas- '"oZ
fonds sont encore plus ou moins engorgés, le riz est N
CIl
sèches.
'"'"
.....
Les images Spot du 8 janvier 1990 et Landsat TM du Vu la submersion importante des zones humides à
7 décembre 1988 se situent à la fin de la saison l'époque de la prise de vue de l'image de fin de
culturale. La récolte du riz est pratiquement saison des pluies, celle-ci a été utilisée pour
terminée. Les bas-fonds sont asséchés ou en voie distinguer et séparer les zones inondées des zones
d'assèchement. Les prairies ne sont plus submergées engorgées présentant une couverture végétale
mais gardent néanmoins une certaine activité importante.
chlorophyllienne. Les plans d'eau et marigots se
réduisent sous l'action de la demande évaporatoire. La technique de séparation employée ici s'inspire
Les cultures céréalières sont entièrement récoltées. largement de la méthode du CEMAGREF-ENGREF
Les savanes subissent les premiers feux de brousse pour l'inventaire des plans d'eau (CUSSATLEGRAS et al.,
importants. 1986).
Le résultat du traitement aboutit à deux classes de
Les modifications et évolutions intervenues dans les
zones humides: zones inondées à la date du 5
zones humides pendant la fin de la saison culturale
novembre 1988 ; zones à couverture végétale
se reflètent dans l'imagerie satellitaire par une
importante à la date du 5 novembre 1988.
information spectrale intéressante sur deux points.
D'une part, le parcellaire rizicole se particularise par Les traitements de l'image Spot, dans le cas du sud-
des signatures radiométriques caractéristiques des ouest du Burkina Faso, et de l'image TM du 7
A./. MOKADEM
décembre 1988, pour les sites du Mali, sont effectués la superposition de cartes numériques issues
en deux étapes: extraction des zones inondées en fin d'images différentes est une opération délicate qui
de saison culturale; discrimination des parcelles de produit d'inévitables erreurs de bordure entre
riz, des cultures maraîchères et des formations classes. Un filtre de lissage est alors appliqué: il
ri pico/es et prairiales dans les zones non inondées. consiste à attribuer au pixel central d'une fenêtre de
30 mètres de rayon la classe majoritaire dans cette
la technique d'extraction des zones inondées sur fenêtre.
l'image Spot suit la méthodologie établie par MAU REL
(1988). Après la détermination des zones inondées, le résultat final des traitements est un rendu
un masque préalable est appliqué sur les pixels des cartographique restituant les différentes compo-
zones inondées avant d'entamer la seconde étape du santes des zones humides entourées des unités de
processus de traitement d'image. Celle-ci permet paysage des versants et des plateaux (figure 4).
d'établir l'occupation du sol des zones non inondées la mission d'octobre-novembre 1990 a permis de
grâce à l'élaboration d'une classification supervisée. valider en partie le résultat issu de l'analyse
le traitement sur les images aboutit à une carte de six diachronique des images Spot et landsat TM. A cette
classes de zones humides: zones inondées en fin de époque, l'inaccessibilité de certaines zones oblige à
saison culturale, formations ripicoles denses, opter pour un échantillonnage systématique des
formations ripicoles peu denses, prairies, bas-fonds points d'observation le long des voies d'accès. la
rizicoles, cultures maraîchères. mission a visité tous les transects matérialisés par le
tracé des pistes (carrossable, cyclable ou piétonne)
Une analyse diachronique est ensuite réalisée en au travers des bas-fonds et repérables sur les
superposant les cartes numériq ues issues des photographies aériennes. l'observation s'est
traitements singuliers de l'image de fin de saison des effectuée de part et d'autre de la piste sur une
pluies et celles de fin de saison culturale. distance de 100 mètres environ, et ce tous les 200
mètres le long du transect. Chaque observation porte
Cette procédure permet d'opérer les regroupements
sur l'état de surface d'une parcelle de 30 mètres de
affinés suivants: les zones submergées en fin de
rayon.
saison culturale ; les zones submergées en fin de
saison culturale et cachées par une végétation l'hétérogénéité (changements radicaux des états de
chlorophyllienne très couvrante en fin de saison des surface sur de faibles distances), l'étroitesse (largeur
pluies; les formations végétales submergées en fin de souvent inférieure à 100 mètres) et l'inaccessibilité
saison des pluies (essentiellement des prairies (zones submergées ou marécageuses) du milieu
aquatiques) ; les zones rizicoles submergées en fin de étudié n'ont permis de valider que les sept grandes
saison des pluies; les zones rizicoles cultivées non classes thématiques suivantes: les rizières; les
submergées en fin de saison des pluies; les forma- cultures maraîchères; les prairies hygrophiles; les
tions ripicoles denses; les formations ripicoles peu formations ripicoles denses (recouvrement> 50 %) ;
denses; les prairies hygrophiles; les cultures maraî- les formations ripicoles peu denses (recouvrement
chères. < 50 %) ; les marécages; les plans d'eau.
Tableau III. Matrice de confusion sur les principales unités des zones humides
issues de l'analyse diachronique des images Landsat TM et Spot XS.
Terrain
Précision
A B C D E F G H des inventaires
A. Rizières 68 0 1 0 0 0 70 0,93
B. Cultures maraîchères 5 1 3 0 0 0 10 1,25
C. Prairies hygrophiles 0 15 4 3 0 0 29 1,35
D. Formations ripicoles
peu denses 4 3 0 55 0 0 0 62 1,00
E. Formations ripicoles
denses 1 0 0 0 20 0 0 21 0,86
F. Marécages 0 0 0 0 0 2 1 3 1,5
G. Plans d'eau 0 0 0 0 0 0 2 2 1,00
H. Total 75 8 17 62 24 2 3 191 1,08
Précision cartographique 0,91 0,63 0,88 0,89 0,83 1,00 0,67 0,83 0,88
Thème Il - Bas-fonds et milieu physique
La matrice de confusion entre les thèmes observés métrique extraite pour chaque point de mesure
sur le terrain et ceux issus des traitements d'images correspond au compte moyen du pixel le repré-
satellitaires est présentée dans le tableau III. sentant et de ceux de son voisinage (connexité
d'ordre 4).
L'établissement de cette matrice aboutit à la
détermination de trois types de précision. La Pour déterminer s'il existe des relations entre degré
précision sur le plan cartographique est en moyenne d'engorgement et données satellitaires pour les bas-
égale à 83 %, la précision sur le plan des inventaires fonds rizicoles, nous avons créé des indices utilisant
est, dans notre cas, de 108 % et la précision globale les canaux TM4 et TMS pour étudier les pixels
du traitement est de 88 % « riziculture li, les canaux bruts de l'image et les
indices classiques de végétation et de sol n'ayant
donné aucun résultat significatif.
L'objectif de la partie présente de l'étude est de De plus, on constate que les corrélations entre les
développer une méthode permettant d'évaluer nouveaux indices d'une part et l'indice de végétation
l'engorgement et la submersion des bas-fonds d'autre part sont peu significatives dans le cas des
rizicoles à partir de données satellitaires. Cette bas-fonds rizicoles, alors que des valeurs élevées
évaluation sera de nature cartographique. pour les coefficients de corrélation sont calculés sur
l'ensemble de la zone d'étude. Cela permet de
L'image satellitaire traitée est celle de fin de saison supposer que, sur les versants, ces nouveaux indices
des pluies (Landsat TM du 5 novembre 1988). reflètent surtout l'incidence de la teneur en eau des
végétaux.
A cette date, nous disposons des données de terrain
reprenant les valeurs de profondeur de nappe et de On peut concevoir d'ores et déjà que la teneur en
hauteur d'eau sur 31 points de mesure dans les bas- eau des végétaux a une incidence marquée sur les
fonds rizicoles de Kawara et Moadougou, au Burkina indices d'humidité. La baisse de l'alimentation
Faso. Ces points sont répertoriés sur les plans hydrique ou des phénomènes de sénescence
d'aménagement, au 1/10000 et 1/2 000. Les plans précoce engendrent une diminution de la teneur en
ont été géoréférencés dans le même système de eau des végétaux, à laquelle la sensibilité du moyen
projection que l'image satellite. La valeur radio- infrarouge répond par des bandes d'absorption dans
Tableau IV. Relation entre indices dérivés de l'image TM Tableau V. Matrice de corrélation des indices
et degré d'engorgement au sol. sur les bas-fonds rizicoles.
Indice Coefficient NOVI 11 12 13 14 15
de détermination
R2 (N =31) NOVI 1
11 =TM4-TMS 0,76 11 0,373 1
12 = TM4/TM5 0,79 12 0,264 0,986 1
13 = (TM4 - TM5) 1 (TM4 + TM5) 0,79 13 0,071 0,977 0,991
14 = (TM3 - TM5 + 0,5) 1 (TM4 - TM3 + 0,5) 0,59 14 0,171 0,930 0,969 0,947 1
15 = (TM4 - TM5 + 0,5) 1 (TM4 - TM3 + 0,5) 0,61 15 0,156 0,928 0,968 0,947 0,999
r+ F+
. m
o
O
m -0
-0,2 chisée en termes de degré d'engorgement.
La partition permet de constater l'existence d'un
gradient d'engorgement des sols entre les berges et le
-0,3 lit central des bas-fonds. Cette tendance passe d'un
. m-O niveau phréatique bas (engorgement nul) sur les
Zones Végétations Zones berges à des hauteurs d'eau plus superficielles
anthropiques naturelles humides (engorgement total) dans l'axe central du bas-fond
... ... ... -0,4
(figure 4).
Unité du paysflge
Tableau VI. Matrice de corrélation des indices Que 1 peut être l'apport de 1a té lédétection à 1a
sur toute la zone d'étude.
régionalisation des caractères descriptifs du fonc-
NOVI Il 12 13 14 15 tionnement des bas-fonds en Afrique de l'Ouest? Le
NOVI 1
Il 0,797
Indice 13
12 0,793 0,981 1 (TM 4 - TM 5)I(TM 4 + TM 5)
13 0,811 0,978 0,992
14 0,834 0,913 0,926 0,899 1
0,2
15 0,832 0,914 0,927 0,900 0,997
.:
cette gamme, peu prononcée. Ce qui se traduit par
0,1
.. ....
."
••
des valeurs de réflectance plus élevées dans cette
longueur d'onde, qui expliquent par conséquent des
valeurs d'indices d'humidité plus faibles et donc
° ••.
-0,1
proches de celles du NDVI.
Nous avons également effectué in situ, en novembre -0,2
1990, des mesures de niveau d'eau sur 16 transects
coupant l'axe principal du bas-fond de Kawara et
répartis d'amont en aval. Les observations sur un -0,3
ensemble de 118 points systématiquement distribués Niveau de l'eau par rapport
-0,4 à la surface du sol
au pas de 30 mètres sur les transects ont été
-+------r----,.-----,----o--
comparées aux comptes radiométriques en ces -50 o 50 cm
points sur l'image.
Figure 6. Incidence de l'engorgement des rizières
L'analyse qualitative des courbes de variation de sur l'indice satellite 13 (Landsat TM du 5 novembre
l'indice d'humidité et du niveau de nappe en 1988). Bas-fond de Kawara.
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
J. DE LAAT 1
:~1\l !il ,.•:,:·.•ge~·.: t.1da~.irnai~.lsi.t:om~o{se'~d,O.u~:.ip:a·.m~yfs.I;~L'.te:~.·s;:.lr"e·~.mg :.al~m·. ~e r.I~:h"UY.~'d";.I:·r I~.·1g~'IO.:'q~du·.:·.~ei.~stde~cl.tel~.·s:~ o·.:md.t,p:-I;e·.~x .}'~so:r.en'·.;:t.·~}:Idr.'e~:. ct~ejmre:n. t'.~d:'.~ etd.~ .fr}tl:m.'• r. :.;p~.ar';Ies.~·; !.•.•,•. •.,•. ,.• ,.•·.•,•. •.
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29 0 30 0
o1 . SOkm
1 UGANDA
N
TANZANIE
~ Lac
• Chef-lieu de préfecture
Si de nombreuses activités dans les marais ont déjà L'objectif à moyen terme est de donner au
été financées par différents bailleurs de fonds dans la gouvernement rwandais, et à la Direction générale
plupart des préfectures, il faut constamment faire du génie rural et de la conservation des sols, un outil
face à un manque de coordination et à un manque qui puisse lui servir à :
de paquets technologiques adaptés aux différents - guider le choix d'investisseurs potentiels, intéressés
types de marais existants. par l'amélioration et le développement des seules
terres encore disponibles du pays;
- coordonner les aménagements, la distribution et
Inventaire des marais l'exploitation dans les marais et bas-fonds;
Malgré toutes les études et classifications faites - préparer un schéma directeur pour les aména-
préalablement, le gouvernement rwandais ne gements dans les marais et bas-fonds.
possède pas encore de document officiel enregistrant
de manière complète et sOre l'ensemble des terres de
marais et bas-fonds au Rwanda, alors que leur occu-
pation illégale se poursuit et préoccupe les autorités Méthodologie
nationales au point que certains qualifient la situa- ~..v.v."V!I'o'V'o..y"....,.,.....,.."................~V'otVVIh.....,..~........""".........."......................-.tI.""""""'v.N.~~~_
tion de dramatique.
Définitions
Le premier objectif immédiat du projet te Inventaire
Marais
des marais et bas-fonds du Rwanda» consiste à col-
lecter, centraliser, élaborer et analyser toutes les in- Une cause importante de malentendu entre les
formations existantes sur les marais et bas-fonds amé- intervenants dans les marais est la confusion qui
nagés ou non aménagés mais susceptibles de l'être. vient de la définition du terme te marais ».
Le second objectif immédiat consiste à mettre toutes Suivant le dictionnaire (Petit Larousse illustré, 1991),
ces données en mémoire dans une banque de don- un marais se définit comme une te région basse où
nées informatisée de type relationnel. sont accumulées, sur une faible épaisseur, des eaux
). DE LAAr
stagnantes, et qui est caractérisée par une végétation avec toutes les gradations possibles. Comme tous ces
particulière (aunes, roseaux, plantes aquatiques, sols sont différents et demandent des interventions
etc.), ou encore comme un ancien marécage assaini différentes, nous avons choisi de découper ces
consacré à la culture maraîchère lt. Quant au bas- réseaux en différents te tronçons lt.
fond, c'est un te terrain en contrebas des terrains
En bref, notre plus petite unité est une branche d'un
voisins lt.
réseau ramifié avec ses propres terres sur les deux
Un marais est donc un type particulier de bas-fond, rives et avec ses confluents et ses affluents.
qui est lui-même défini comme la partie basse d'une
vallée. Tout marais est donc un bas-fond, mais un
bas-fond n'est un marais, au sens strict du terme, que Découpages
lorsque la vallée est mal drainée et qu'une végétation
propre à ces zones marécageuses y prolifère. Pour parvenir à cette entité unitaire, nous avons
effectué des découpages à différents niveaux.
Dans le langage populaire du Rwanda, un te marais lt
est voisin d'une colline (la plus petite unité admi- Le premier niveau de découpage est la subdivision
nistrative), dont il porte généralement le nom. Ainsi, du pays en bassins versants primaires des grandes
souvent, les terres de marais d'un même émissaire rivières principales et des différents lacs (figure 2).
portent des noms différents sur les deux rives, Ces bassins versants sont appelés te bassins versants
puisque, sur chaque rive, la colline la plus proche supérieurs lt
porte un autre nom. Il était donc nécessaire de Ensuite, nous avons déterminé les cours d'eau secon-
te détacher lt les terres de marais des collines et de les
daires, qui déversent leurs eaux dans les rivières ou
rattacher aux émissaires. Ainsi fait, le découpage des lacs du réseau primaire. Les bassins versants -
marais ne se fait plus suivant la structure admi- chacun contenant des complexes de marais et bas-
nistrative (colline, cellule, commune, préfecture) fonds plus ou moins étendus et ramifiés -
mais suivant une structure hydrographique. correspondant à ces cours d'eau font l'objet d'une
En bref, dans notre inventaire, le mot te marais lt, ou première base de données.
plutÔt l'expression te tronçon de marais lt, représente La dernière étape était le découpage des complexes
aussi bien une partie d'un marais au sens strict du de marais et bas-fonds des différents bassins versants
mot qu'une partie d'un bas-fond, et même une partie en tronçons de marais. Ces tronçons font l'objet de la
d'une vallée sèche. deuxième base de données.
Les marais qui bordent les grandes rivières primaires
Approche « bassin versant lt
sont provisoirement exclus de notre inventaire car ils
En géographie physique, les marais du Rwanda ne se ont presque tous fait l'objet d'une grande étude. Ils
présentent pas comme des entités ponctuelles indi- seront probablement traités dans une troisième base
vidualisées mais plutôt comme des ensembles com- de données, qui tiendra compte des résultats des
plexes bordant le réseau hydrographique particu- deux autres bases.
1ièrement dense et anastomosé du pays.
Le régime hydrologique de ces complexes de marais Bases de données
et bas-fonds est directement déterminé par les condi-
tions de leur bassin versant, etil était donc indis- Base des bassins versants
pensable d'adopter une approche te bassin versant lt. Chaque bassin versant dit secondaire correspond à
une fiche technique informatisée dans la base des
bassins versants. Cet enregistrement contient des
Tronçon de marais
données générales sur l'ensemble du bassin versant,
La dernière définition est celle de notre te unité lt de à savoir:
travail, car ces réseaux hydrographiques à ramifi- - un code et un nom;
cations multiples ont des caractéristiques différentes,
aussi bien dans un même réseau qu'entre eux. - un code pour le bassin versant primaire (appelé
bassin versant supérieur) auquel il appartient;
En effet, les vallées des différents réseaux peuvent
- des données géographiques (latitudes, longitudes et
être très larges avec une pente quasi nulle comme
altitudes extrêmes, cartes topographiques) ;
elles peuvent être très étroites avec de fortes pentes.
Dans un même réseau, les terres des bas-fonds - des données administratives (communes, densités
varient de l'aval à Pamont, passant de sols gorgés de population) ;
d'eau (marécages au sens propre du mot) à des - des données climatiques et hydrologiques (plu-
vallées sèches de forte penté (plutôt des thalwegs), viométrie, débit spécifique, évaporation moyenne) ;
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
- des zones agroclimatiques, pédologiques, litho- - des données pédologiques (types d'association,
logiques; séries, inclusions) ; .
- des données spécifiques (superficie, longueur, - des données spécifiques: superficie et périmètre
pente moyenne, développement, indice de ma- du bassin de ruissellement direct, superficies de
rais.. J. marais (globales et exploitées) par commune, nom de
(Voir l'annexe 1: « Description des champs de la l'émissaire, noms des confluents et affluents, lon-
base BVERSANT.DBF,..) gueur, pente et largueur moyenne, développement,
indices de marais et de source.. .> i
Base des marais -l'existence d'une étude et/ou d'un aménagement.
Chaque « tronçon,. de marais est l'objet d'une fiche (Voir l'annexe Il : « Description des champs de la
technique informatisée dans la base des marais. Cet base MARAIS.DBF ,..>
enregistrement contient des données spécifiques au
tronçon, à savoir:
- un code; Données brutes
-le code et le nom du bassin versant auquel il appar- Pour pouvoir garnir les deux bases de données
tient; principales, le projet a conçu deux types de fiches de
saisie: une pour les bassins versants et une pour les
- des indications sur le genre du tronçon (de liaison, tronçons de marais. Les données entrant dans la
terminal, nombre de ramifications) ; composition des fiches sont extraites de différentes
- des données géographiques (altitudes extrêmes, sources de données brutes: disponibles, produites et
cartes topographiques) ; transformées.
- des données administratives (communes, densités
de population) ; Données brutes disponibles
- des données agronomiques (types de végétation et Dans un premier temps, les données suivantes ont
de cultures, autres activités) ; été recherchées et rassemblées:
29° ..
o1 SOkm
•
N
UGANDA
ZAIRE
TANZANIE
- cartes d'emplacement des sources d'eau sur fond A partir de ce premier jeu nous avons produit un
topographique au 1/50 000 avec une base de don- deuxième jeu - cartes des tronçons de marais
nées afférente (non encore éditées, Unicef, Kigali, codifiés - sur lequel nous avons ajouté les codes
1991 ). des tronçons de marais avec les limites de leurs
bassins de ruissellement direct (figure 5).
Le troisième jeu - planches-matrices des zones - a
Données brutes produites
été établi à partir des cartes des régions agdcoles, des
Dans le cadre du projet, les données brutes suivantes zones pédologiques, des zones lithologiques, de la
ont été produites: carte des isohyètes de la pluviométrie annuelle
moyenne et de la carte de répartition des débits
- fiches d'identification des marais et bas-fonds
spécifiques et de l'évaporation totale (figure 6).
obtenues par enquêtes de terrain effectuées par
l'intermédiaire des services agricoles communaux et Le quatrième jeu - cartes des bassins versants par
préfectoraux (annexe III) ; préfecture - a été établi à partir du premier jeu. Il ne
respecte plus le canevas des cartes au 1/50 000,
- cartes pédologiques des marais et bas-fonds au
superposable, mais reprend les données par
1/50 000 (sur la base des cartes pédologiques
préfecture.
générales au 1/50 000 du projet Carte pédologique
du Rwanda);
- carte de répartition des débits spécifiques et de Bases de données satellitaires
l'évaporation totale au Rwanda au 1/500 000 ; Pour faciliter la saisie et en limiter les erreurs, les
- planches de photorestitution stéréoscopique des données suivantes ont été remplacées par des codes
tronçons de marais et bas-fonds au 1/10 000 à partir et placées dans des bases de données satellitaires :
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
30 0
10
UGAN'irD;J;A~--T--I:A:;:::i::;;:::::!/-=r-:=:F''----1
ZAIRE
TANZANIE
- bassins versants primaires (ex. : Akanyaru = 02) ; second pour le situer dans ce bassin versant. Ce
- communes (ex. : Rutobwe = RTO) ; second code répond aux règles suivantes, établies
pour le projet:
- régions agroclimatiques (ex. : plateau de l'Est
= 10); - il contient jusqu'à six nombres de deux chiffres
- zones pédologiques (ex. : boutonnière granitique séparés par un point (ex. : Il 00.05.18.01. . ,.);
= 07a) ; - chaque nombre représente un ordre (ex. : 00 =
- zones lithologiques (ex. : roche volcanique = 4). ordre l, 05 =ordre 2, 18 = ordre 3...) ;
. . . {~ .....<.. ...•
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1
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Echene: 1/50 000
--
4toCOO
Limite de biluin vers ..nt
Llmile de prtfec1ure
Limite de commune
c-~
.....::: .....
'"001 ~
Mar.il
Rivière
Talwra
1 M\oIC •• 1
0----0 Tronçon
N· de riche d'idenliflc.ation
Figure 4. Extrait d'une carte des ensembles de marais et bas-fonds et de leurs bassins versants au 1/50000.
"
'.
....
\. ".
'. !:' 1
Echelle; 1150000
--
410'"
Lîmile de blllin verSill"lt
limite de prlofeclure ~
•..... ~gGENOE
Marais
Rivi.re
e
0------0
N· d~ code de troncon
Tl'a"çon
limile de commune .....::::::. Talv.eg
Figure 5. Extrait d'une carte des marais et bas-fonds découpés en tronçons codifiés au 1/50000.
\
""lOI
"I1CO sooa::o
EcheUe : 1/50 000
Cartes des ensembles des marais et bas-fonds Cartes pédologiques des marais et bas-fonds
Les ensembles des marais et bas-fonds ont été repris Le projet a produit, à partir des cartes pédologiques
sur les cartes provisoires des bassins versants, en se du Rwanda au 1/50 000, un jeu de cartes coloriées
référant aux : qui fait ressortir uniquement les marais et bas-fonds
(figure 9). Ces cartes respectent le canevas de toutes
- cartes topographiques au 1/50 000 ; les autres cartes au 1/50 000.
- cartes d'occupation des sols au 1/20 000 ;
Planches de photorestitution
- fiches d'identification;
On a fait produire, à partir des photos aériennes en
- planches de photorestitution au 1/10 000. infrarouge au 1/50 000 de 1989-1990, par procédé
photogrammétrique de photorestitution stéréosco-
Aux cartes provisoires ont été ajoutées les limites des
pique redressée, des cartes au 1/1 a 000 des zones de
marais ainsi que leurs « étiquettes li se référant aux
marais et bas-fonds de l'ensemble du pays (figure
fiches d'identification. Ces cartes sont également
des-si nées sur du calque et donc transparentes (fi-
gure 4).
51
.... Ut
.'" ." ... .,. ." .,. ." ." ."
EChene : \ 150 000
'''OH
'''000
+ +
715000
,noot
.....
Echelle: 1/10000
""100 "'7'00.
Limile de mir.1is
Talweg ...... Piste
Constructions
Figure 10. Extrait d'une planche de photorestitution sléréoscopique de tronçons de marais et bas-fonds au 1/10 000.
j.DELAAT
10). Ces cartes ont permis de délimiter exactement calculs sur des tronçons individuels (ex. : calcul de
les marais et bas-fonds, et d'en faire le tronçonnage la pente moyenne) sont intégrés dans le programme
précis. Elles ont également permis la mesure, par de saisie lui-même.
planimétrie, des superficies (totales et exploitées) des
Calculs sur des ensembles de tronçons
tronçons, ainsi que des longueurs et des altitudes
Une fois saisies toutes les fiches des marais d'un
minimales et maximales de leurs émissaires.
même bassin versant, deux programmes de calcul
Il y a lieu de mentionner qu'à l'origine il était prévu sont utilisés.
de faire des levés topographiques à grande échelle
Le premier programme effectue des calculs sur des
(1/2000) de tous les marais supérieurs à 15 ha pour
ensembles de tronçons d'un bassin versant (ex. : pour
connaître leur superficie. Malheureusement, la
un tronçon donné, calcul de la superficie du bassin
capacité de travail était fortement surestimée, et donc
versant en amont du tronçon, c'est-à-dire somme des
le délai d'exécution (24 mois contre plus de 6 ans)
bassins de ruissellement direct de tous les tronçons
ainsi que les frais nettement sous-estimés. Vu l'ur-
en amont dudit tronçon). Ce premier programme ne
gence des résultats du projet, il a été décidé de
travaille que sur la base des marais.
déterminer les superficies par photorestitution. Des
levés topographiques au sol de quelques marais ont Le second programme effectue des calculs sur
été faits pour vérification. l'ensemble des tronçons d'un bassin versant (ex. :
calcul de la superficie exploitée totale d'un bassin
Dans les zones de.faible densité de marais où la pho-
versant). Il cherche des données dans la base des
torestitution n'était pas rentable (temps et dépenses),
marais, fait les calculs et ajoute les résultats dans la
les superficies des marais ont été déter-minées soit
base des bassins versants.
par photo-interprétation non redressée à partir de
photos aériennes au 1/20 000 de 1980, soit à travers
des études existantes.
lBB
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1. Nom du marais:
2. Préfecture concernée :
3. Commune concernée:
5. Le marais continue-t-i1 sur d'autres communes avoisinantes? Et, dans ce cas, porte-t-il un (d') autre(s) nom(s) sur ces
communes? Indiquer.
6. A quelle distance approximative de la route ou piste carrossable la plus proche le marais se trouve-toi! ?
9. Dans la mesure du possible, indiquer les noms des collines qui entourent le marais et qui l'alimentent en eau de
ruissellement:
10. Superficie totale du marais. Indiquer comment cette superficie a été trouvée (estimation, recensement, plans
topographiques, étude ou rapport existant, ou toute autre source d'information).
Dans le cas où le marais s'étend sur plusieurs communes, indiqO.er, dans la mesure du possible, la superficie occupée
sur chacune des communes: 'fi
11. Le marais est-il exploité? Si oui, indiquer la superficie exploitée, ainsi que les types de cultures et rotations
habituellement pratiqués. Si non exploité, indiquer le type de végétation du marais.
12. Le marais a-t-il été aménagé ou a-t-il fait l'objet d'une intervention quelconque en matière d'aménagement? Si
oui, indiquer brièvement les interventions survenues (aménagement de drains, de canaux d'irrigation, de digues, d'un
barrage, etc.), leurs dates, et toute autre information concernant le suivi et l'évaluation de ces interventions. Dans le
cas d'une intervention due à un projet passé ou toujours présent, donner un bref historique de ce projet.
13. Dans le cas où le marais a seulement fait l'objet d'une étude mais pas d'un aménagement, indiquer qui a fait cette
étude et dans quel cadre. Indiquer la date de cette étude et où elle est éventuellement disponible.
14. Nombre d'exploitants du marais et indiquer comment ce chiffre a été trouvé (estimation, recensement, rapport
existant, ou toute autre source d'information). .
15. Les usagers du marais sont-ils organisés d'une quelconque manière (association, coopérative, regroupement, etc.) ?
Préciser.
Les usagers sont-ils encadrés? Si oui, comment?
16. Quels sont les problèmes majeures rencontrés par les usagers en général du marais?
17. Dans la mesure du possible, indiquer la nature du sol du marais: tourbeux, sableux, argileux... et son aptitude
agronomique.
18. Indiquer toute activité autre qu'agricole qui se fait dans le marais: briqueterie, extraction de sable, mines, etc.
Indiquer s'il s'agit d'une activité marginale ou importante.
20. Indiquer toute autre information jugée utile dans le cadre de la connaissance de ce marais en vue de son
aménagement.
' - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - .__. _ -
j, DEL.MT
Annexe IV. Méthodologie d'établissement de la banque centrale de données sur les marais et bas-fonds du Rwanda,
J
Données saisies Données brutes d'où Données saisies
dans cette base sont extraites les données dans cette base
saisies dans les bases
l
8. Superficies globale et exploitée 4. Planches de photorestitution au
par commune du tronçon 1/10000 des marais et bas-fonds
9. Elévation amont et aval de (produites en sous-traitance pour le
l'émissaire du tronçon projet RWAI89/00G par le Service
national de cartographie)
10, Longueur de l'émissaire du
tronçon
11. Type de tronçon: terminal, de
liaison ou normal 5. Fiches d'identification des
marais et bas-fonds obtenues par
~
enquêtes auprès des services
agricoles communaux (produites par
12. Types de végétation dans la le projet RWAl89/00G)
partie non exploitée du tronçon
13. Types de cultures pratiqués
dans la partie exploitée du tronçon G. Planches-matrices au 7. Plage de pluviométrie moyenne
14. Activités autres qu'agricoles 1/50 000 des zones pédologiques, ....... annuelle du bassin versant
pratiquées dans le tronçon lithologiques, agroclimatiques et des 8. Zones pédologiques concemées
isohyètes, débits spécifiques moyens 9. Zones lithologiques concemées
et évaporations moyennes
interannuels (produites par le projet 10. Zones agroclimatiques
15. Existence d'une étude eVou d'un RWAI89/00G) concemées
aménagement pour le tronçon 11. Débit spécifique moyen
considéré interannuel
7. Bibliothèque des documents 12. Evaporation moyenne
concernant les études eVou interannuelle
aménagements existants pour
certains marais et bas-fonds
(constituée par le projet
RWAI89/00G)
,!;;~i;!;~~tt:':'=~:;~~~~i;~~i:it';7.;;~~1\;=(:~:~~~:M':'i.f.::";:Ji~t:~~;;:::;,d:':~:'i·.'.i~lii
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2,6
1 •6+--r-r--r-,---.--r-.,...,r-r-.---.--.,...,.----r-,-~-r-r-r--!-
1950 1960 1970 1980 1990
___ \ •• 1 ~
- 1 _~..) ~
-=~\p..l 1 ._~-~
1 Institute of Soil Science, Academia Sinica, = = _ - ' _ C 31.~~r.:
PO Box 821, Nanjing, 210008, China. Figure 2. Répartition des sols de rizière en Chine.
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
a. Structure ramifiée
o .~.
La riziculture chinoise
-1
•
1 el
•
La riziculture chinoise à une histoire longue de plus
de 7 000 ans et a toujours été particulièrement prisée '~ ... ,.-,
, • .a
dans les vallées des rivières Huanghe et Changjiang.
Des siècles de pratiques agricoles - nivellement,
labour, irrigation et fertilisation des sols de rizières
. '7'~t"
. "
• f-'\.
Caractères topographiques
En vallée, il ya une large gamme de sols de rizières,
avec une grande diversité de conditions topo-
graphiques. Ainsi, dans les zones accidentées, on
trouve des rizières à des altitudes très variées, mais
elles sont petites et de formes diverses.
Elles sont variables en altitude. Les altitudes les
plus basses des rizières de vallée sont réparties entre
le niveau de la mer et quelques dizaines de mètres,
par exemple dans les collines cÔtières du Fujian,
du Zhejiang, du Guangdong et du Guangxi, ainsi
ue dans les vallées situées à proximité des lacs
et rivières; les altitudes des plus hautes atteignent
2 700 m, par exemple au Yunnan, au Guizhou et Figure 4. Caractéristiques des différentes régions
au Sichuan. Cependant, la plupart des rizières de rizicoles en Chine. a - Structure ramifiée. b - Structure
vallée sont situées entre quelques dizaines et tachetée réticulée. c - Structure en bande.
quelques centaines de mètres au-dessus du niveau
de la mer.
séparées de seulement quelques mètres peuvent être
Les rizières sont de petite taille. Le relief des flancs de étagées de deux à trois mètres ou même davantage.
vallée étant généralement accidenté, des parcelles Cependant, la riziculture nécessite un nivellement.
GONG ZITONG, ZHANG XIAOPO
Les rizières en terrasses sont donc petites (de l'ordre éléments minéraux assimilables, potasse en
de 0,01 ha), Cela représente un inconvénient particulier. Sur granite et gneiss, les altérations
considérable pour les pratiques culturales, ferrallitiques silico-alumineuses sont les principaux
spécialement les travaux mécanisés. matériaux originels des sols de rizière, avec comme
minéraux dominants les kaolinites et les illites,
Les formes diverses des rizières se conforment au mo-
possédant une bonne teneur en potasse (Nanjing
delé du terrain. Par exemple, les rizières « Kengtian ,.
Institute of Soil Science, 1990), Sur les argiles du
(figure 5 a), généralement de très petite taille, les
quaternaire, le matériau parental est une altérite
rizières « Tongtian ,. (figure 5 b), les rizières « Caotian
ferrallitique, avec une teneur modérée en potasse.
,. (figure 5.d et les rizières « Chongtian ,. (figure 5 d)
Sur les grès rouges du tertiaire, la roche mère des sols
sont respectivement formées dans des vallées étroites
de rizières est une altérite ferrallitique plutôt
et escarpées, dans des vallées relativement larges et
sableuse, à teneur relativement faible en potasse. Sur
ouvertes, dans des planchers karstiques et dans des
calcaire, l'altération, riche en illite, est relativement
vallées de relief collinaire.
riche en potasse. Sur les grès pourpres, l'altération
carbonatée à vermiculite a donné des sols de rizière
Caractéristiques minéralogiques riches en éléments minéraux, phosphore et potas-
sium en particulier.
La composition minéralogique des sols des rizières
de vallée dépend fortement du matériau originel, Cependant, les pratiques culturales et la fertilisation
source de la diversité des propriétés pédologiques durant une longue période ont fortement transformé
(tableaux 1et 11). les propriétés des sols, en comparaison avec leurs
états d'origine. Par exemple, des conditions quasi
Sur basalte, le matériau originel des rizières est permanentes d'engorgement et de réduction
ferrallitique, à kaolinite et gibbsite, très pauvre en provoquent la mise en solution du fer, sous forme
Tableau 1. Caractéristiques minéralogiques des sols de rizière, dérivés de différentes roches mères.
Roche mère Minéraux argileux Matériaux d'altération Teneur en K
Basalte Kaoline Ferrugineux- Basse
Gibbsite allitique
Granite, Kaolinite Silico-alumineux Elevée
gneiss lIIite allitique
Argile rouge Kaolinite Silico-ferrugineux Modérée
quaternaire 1iii te allitique
Vermiculite
Grès rouge Kaolinite Silico-allitique Assez basse
tertiaire Vermiculite
Calcaire IlIite Alumino-silico- Assez basse
allitique
Grès pourpre Vermiculite Carbonate pourpre Elevée
ionique dans le sol, accroissant fortement la fraction de surface, les régimes mixtes (de surface et
de fer ferreux et diminuant relativement la teneur en phréatique), les régimes à nappe phréatique.
fer total (GONG ZITONG et al., 1990). Dans la plupart
des sols de rizières de vallée, la teneur en phosphore
assimilable est beaucoup plus élevée que dans les Les sols à régime hydrologique de surface
sols d'origine, avec 5 à 20 ppm, allant même jusqu'à (ou sols oxydés)
30-50 ppm (pour moins de 5 ppm dans le sol Dans ce cas, les sols maintiennent généralement une
d'origine). Concernant les bases échangeables, on lame d'eau seulement en surface, par irrigation.
observe un accroissement important de calcium, L'eau d'irrigation s'écoule surtout vers.le bas ou
quelquefois de magnésium, et peu de changement et latéralement. En submersion, seul l'horizon labouré
même une baisse concernant le potassium et le est dans un état réduit alors que le sous-sol reste
sodium (figure 6). Cela provient du fait que les oxydé. En saison sèche, les deux niveaux sont dans
paysans ont l'habitude d'apporter des amendements un état oxydé. Les rizières non irriguées sont
calcaires dans leurs rizières, alors qu'ils appliquent appelées « rainfed fields lt (rizières alimentées par la
très peu d'engrais potassiques. De plus, le potassium, pluie). Le riz, qui pousse grâce aux pluies et à des
monovalent, est très sensible au lessivage (GONG écoulements de surface interceptés par les diguettes,
ZITONG et al., 1985).
a donc un rendement aléatoire. Dans les sols de ce
type, il n'y a pas de nappe phréatique à moins d'un
mètre de profondeur, de sorte que la migration et le
Caractères du régime hydrique lessivage des éléments minéraux tels que fer et
manganèse restent faibles. L'ensemble du profil,
Les rizières de vallée, situées sur des modelés assez excepté l'horizon supérieur, reste presque semblable
accidentés et à des altitudes très variées, possèdent à son état d'origine, du point de vue morphologique,
des régimes hydriques très divers, que l'on peut de la composition et des propriétés. L'aspect du
classer en trois types principaux: les régimes à eaux profil est généralement du type A-P-Bm-C.
GONG ZITONG, ZHANG XIAOPO
Dans les 5015 de ce type, outre la lame d'eau de Ce type de sol est caractérisé par une teneur impor-
surface, existe une nappe phréatique à moins d'un tante en éléments réducteurs comme le fer, un
mètre de profondeur. Sous le double effet de l'eau potentiel redox bas (tableau 111), une faible décom-
d'irrigation et de la nappe phréatique, l'horizon la- position et donc une accumulation de matière
bouré est à l'état réduit pendant la période d'irriga- organique, une faible aération et une accumulation
tion. L'horizon inférieur subit alternativement une d'éléments toxiques affectant la croissance du riz. II
oxydation et une réduction, consécutivement à la en résulte des rendements bas. La superficie de ces
Tableau III. Substances réductrices dans les sols de rizière, à divers degrés de gleyification.
Type de Horizon Profondeur Quantité totale Substance Fe++ Eh
gleyification (cm) de sustances réductrice (I)1V)
réductrices active
(mé 100 g- 1 de sol)
Giey total A9 0-13 5,75 4,37 292 345
G1 13-30 9,90 7,24 512 205
G2 30-60 9,30 6,20 482 145
G3 60-85 16,5 8,53 842 135
Semelle A 0-17 1,98 0,26 42 605
de labour
gleyifiée Pg 17-30 3,32 1,59 148 235
Bw 30-52 1,23 0,30 19 445
Be 52-90 1,20 0,23 4 480
Sol de rizière A 0-15 1,30 0,10 13 605
sans gley
P 15-24 0,94 0,20 0 590
Bm 24-52 0,67 0,09 0 595
Be 52-85 0,37 0,09 0 595
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
sols représente un tiers du total des rizières de vallée. phoriques, des engrais potassiques ou des cendres
Désormais, cette catégorie est l'objectif clé de devraient être amenés afin d'assurer un apport
l'amélioration des sols de vallée. suffisant et équilibré en N, P, K et oligo-éléments, et
d'ajuster le pH. D'autre part, de jeunes plants
robustes de bonnes variétés doivent être sélectionnés
et repiqués, avec de la terre sur leurs racines. Pour la
Amélioration de la riziculture
gestion de l'eau, l'irrigation avec une lame d'eau peu
épaisse et des drainages fréquents sont requis afin
Transformation d'un sol d'améliorer la perméabilité du sol et assurer des
de colline en sol de rizière plants robustes à feuilles saines.
Les terres exondées des vallées et flancs de vallées
ayant une très faible productivité, avec des rende-
ments de 1 à 2 t ha-1 et étant soumises à de sérieux Systèmes d'irrigation-drainage
problèmes d'érosion, les Chinois ont progres- et ouvrages de maintien de l'eau
sivement aménagé leurs terres en rizières étagées en Concernant les sols de rizière à régime hydrologique
terrasses, en conformité avec leur topographie; ceci
de surface, l'insuffisance des ressources en eau est un
c'est réalisé depuis la fondation de la nouvelle Chine
facteur limitant essentiel de l'augmentation des
et l'appel au développement de la production rendements. L'amélioration de la gestion de l'eau
agricole. Après ces aménagements, un régime hy-
commence donc par l'aménagement de systèmes
drique amélioré et une fertilisation intensifiée ont d'irrigation.
fortement augmenté les rendements, qui ont doublé
ou triplé. L'augmentation de la production rizicole Concernant les sols de rizière perméables (à régime
dans les régions collinaires et montagneuses de la mixte le surface-phréatique »), l'amélioration du
Chine du Sud est donc devenu un enjeu important. système de drainage est le meilleur moyen de gestion
de l'eau pour empêcher l'apparition d'une
En début d'évolution, certains nouveaux sols de gleyisation secondaire.
rizières donnent des jeunes plants de riz à feuilles
jaunies, à racines noircies, et une proportion élevée Quant aux sols à régime de nappe phréatique,
de grains vides à l'épiaison, entraînant des chutes de l'engorgement par l'eau peu mobile est la principale
rendement. Les expérimentations et recherches ont contrainte. La mesure la plus importante est alors de
montré que le phénomène des feuilles jaunies et créer un réseau de fossés de drainage. La pratique et
racines noircies apparaissait sur les remblais des l'expérimentation ont démontré que le creusement
parcelles nouvellement construites. Les causes en de fossés ouverts et la mise en place de drains
sont les suivantes: à ces endroits, le sol n'est pas enterrés sont l'un et l'autre efficaces pour améliorer
assez compacté, n'a pas une texture suffisamment les conditions de drainage externe et interne; le
lourde et argileuse pour le mettre en boue. Il se crée premier système évacue l'eau stagnante alors que le
alors un épais niveau boueux après irrigation et second rabat la nappe phréatique. Cela améliore la
submersion, entraînant un enfoncement trop perméabilité, diminue la teneur en éléments
important des jeunes plants et affectant la respiration réducteurs toxiques, augmente l'assimilabilité des
racinaire. Dans d'autres cas, l'enfouissement de éléments minéraux et améliore l'écologie du sol
compost frais insuffisamment décomposé, peut (tableau IV). La croissance du riz est alors fortement
entraîner la libération d'éléments toxiques, comme stimulée, avec une augmentation de rendement
des acides organiques formés en conditions généralement de l'ordre de 10 à 30 %.
réductrices, néfastes aux systèmes racinaires. En certaines régions, le système à double culture
Afin d'empêcher l'apparition de ces phénomènes, la remplace celui à culture unique, avec une aug-
première chose est d'améliorer la qualité de la mentation de production d'autant.
construction des parcelles afin d'éviter la perte d'eau
et d'éléments minéraux. Par exemple, le terrain doit
être plané le mieux possible en courbes de niveau, Systèmes de rotation
avec le moins de remblai possible, celui-ci devant pour améliorer la perméabilité du sol
être compacté couche par couche et les diguettes
Les études ont montré que, pour le drainage de l'eau
devant être tassées et imperméabilisées afin d'éviter
en excès dans les sols à gley, l'amélioration de la
les fuites latérales.
perméabilité et l'établissement d'un meilleur
En second lieu, compte tenu du fait que les nouvelles équilibre eau-air-chaleur-éléments nutritifs, les
parcelles sont la plupart du temps pauvres en techniques d'aménagement seules ne sont pas
éléments nutritifs, une fumure de fond suffisante doit suffisantes, et que le sol devait également subir un
être appliquée. En plus des engrais azotés et phos- bon dessèchement. Dans le cas des sols de rizière
GONG ZITONG, ZHANG XIAOPO
Tableau IV. Effets d'un drainage par fossés ouverts sur les propriétés physiques des sols de rizière à gley.
Avec fossés Labour 1,33 Trace 592 4,16 1,21 .10- 8 1 181
Giey 1,88 1,1 483 1,03
Sans fossés Labour 1,17 1,9 460 2,10 1,03.10- 9 632
Giey 3,93 45,6 188 0,40
Tableau V. Effets de divers systèmes de rotation sur les propriétés des sols de rizière à gley.
Système Substances Substances Fe++ Coefficient Perte
de rotation réductrices réductrices actives (mé 100 g-l de sol) de perméabilité d'eau
(mé 100 g-l de sol) (mé 100 g-l de sol) (cm S-l) (cm 1)r-
Colza-nz-haricot 179.10- 7 0,84
Colza-nz-riz 2,38 ',63 70,4 33,6. 10- 7 0,51
Engrais vert-nz-nz 7,34 6,54 173,8 9,7.10- 7 0,20
Thème 1/- Bas-fonds et milieu physique
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Tableau VI. Réponse du riz à l'apport de phosphore et de potasse dans les sols des rizières de vallée.
Tableau VII. Effet de l'application de phosphore et de potasse sur le pouvoir oxydant des racines
et la diminution des substances réductrices dans le sol.
une faible teneur en zinc assimilable; un faible de poissons et de canards dans les fossés augmente la
apport de zinc peut alors quelquefois augmenter le rentabilité économique.
rendement de 10 %. L'amendement calcaire peut
donc ne pas avoir d'effets favorables sur la
Dans d'autres régions, les paysans ne cultivent que
croissance du riz dans certains sols à gley.
des plantes aquatiques de rapport (lotus, Eleocharis
(water chesnut) au lieu du riz, ou bien transforment
les rizières engorgées en étangs à poissons ou à
Adaptation aux conditions locales canards, et plantent des mûriers pour élever des vers
En situation topographique trop déprimée, certaines à soie, ou cultivent des herbes afin de nourrir les
rizières peuvent difficilement évacuer l'eau poissons. C'est une tentative, à effets rapides, d'aug-
stagnante (même en creusant des fossés), ni assurer menter la productivité et d'accroître la prospérité des
une bonne production avec un système à une culture marchés urbains.
de riz. En conséquence, dans certaines régions,
divers systèmes d'utilisation ont été adoptés pour
améliorer la rentabilité. Par exemple, au Sichuan, au
Hunan et au Hubei, on pratique une culture « semi-
pluviale lt c'est-à-dire riz-lentille d'eau {duckweed}-
poisson, riz-lentille d'eau-asperge, riz-lentille d'eau-
poisson, canard, riz-Sagittaria. Les paysans creusent Références bibliographiques
alors des fossés et construisent des billons dans les
parcelles; ils cultivent le riz sur les billons et élèvent GONG ZITONG et al., 1983. The soils of Subtropical
simulta-nément poissons ou canards dans les fossés. Central China. Hunan Scientific and Technical Publishers.
(In Chinese).
De cette façon, la culture en billons améliore la
perméabilité du sol et ses conditions d'oxydo- GONG ZITONG et al., 1985. Advances and application
réduction; le rendement du riz augmente, l'élevage of soil geochemistry. Beijing, Science Press. (In Chinese).
GONG ZITONG, ZHANG XIAOPO
GONG ZITONG et al., 1989. The formation, charac- Hunan Province Cooperation Team on Ameliorating
terization and amelioration of gleyic paddy soils in China. Gleyic Paddy Soils, 1984. Collection of papers on
ln : Soils and their management, Asino-European formation of and ameliorating techniques for gleyic paddy
perspective. Amsterdam, Elsevier Applied Science, soils. (In Chinese).
p.321-338.
Nanjing Institute of Soi! Science, Chinese Academy of
GONG ZITONG, ZHANG XIAOPO, WEI QIFAN, 1990. Sciences, 1990. The soils of China. Beijing, Science Press.
Formation, characteristics and yield potential of the gleyic
paddy soils of China. (In Chinese).
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
.. :.;- .. ;. .•.. ;. ..
(:~::::\::~~~;;
.'::.: .... :::>:
Le but de cet exposé est de résumer le programme - mettre au point des technologies amél iorées
général de recherche du groupe, car il détermine réalistes, qui soient adaptées à ces systèmes.
l'orientation et la raison d'être de chacune de nos
Ces objectifs généraux recouvrent huit objectifs
activités de recherche, de présenter les résultats du
spécifiques, eux-mêmes sous-tendus par quinze
programme portant sur les adventices, en mettant
hypothèses de travail.
l'accent sur les méthodes employées plutôt que sur
les résultats obtenus, qui sont pour l'instant préli- Pour atteindre ces objectifs et tester ces hypothèses,
minaires. trois volets principaux de recherche ont été mis en
place (IZAC et al., 1991). Ils sont présentés en figure 1.
Les activités d'inventaire et de classification et celles
de quantification des contraintes ont démarré, alors
que celles de développement, évaluation et test de
technologies améliorées n'ont pas encore été
lancées. En effet, les objectifs des paysans dans les
différents types de bas-fond, ainsi que les para-
1 liTA, Ibadan, Nigeria. mètres déterminant la pérennité écologique et
Thème 1/ - Bas-fonds et milieu physique
1· mesure de la surface des bas-fonds • Identification des principales • Identification des améliorations
et bassins versants composantes et fonctions de potentielles contormes aux
• Identification des schémas ces agrosystèmes obJecllls des paysans et ~ la
de distribution des bas-tonds dans • quanlllicatlon des contraintes ~ pérennité écologique et économique
paysage, utilisation des sols l'accroissement durable de • évaluation ex-ante des améliorations
• classification des bas-fonds 1-+ la production f-+ • test des améliorations dans des
et Identification des sites • construction de modèles Intégrés slles représentallls
représentatifs de ces catégories économiques • écologiques des • validation des modèles développés
diverses calégorles de bas-fonds
• télédétection - SIG - vérité sol • recherche en milieu réel - • simulation- recherche en station
Interdisciplinaire systémique - et en milieu réel
• élaboration de modéles
~ /
Transfert des méthodes de recherche et des technologIes aux syslémes natIonaux
1 1
Parametres economlques
Paramètres sociaux Paramètres écologiques
• marchés agricoles
• Système politique • olfra et demande d'Intrants
• us et coutumes sociaux • existence de revenus non"
• droit foncier agricoles • climat
• blen·atre et niveau • Infrastructure (transports,
• sol s
de vie crédits, ....
)
•
•
hydrologie
ravageurs
• technologies disponibles
• adventices
l
Obj6ctlfs des agriculteurs 1 1
•
1
l 1
technologies utilisées
Paramètres écologiques
1 1
t
quantité et qualité de la production
r-----. effets environnementaux
utilisant les techniques paysannes: arrachage à la cultivent d'ailleurs les mêmes champs de bas-fond
main et sarclage à la houe. Les types de données depuis plusieurs décennies. Finalement, une
collectées lors de ces traitements, durant la saison majorité de paysans pensent qu'il n'y a pas
sèche 1991, sont présentés en annexe II. suffisamment de champs de bas-fond dans leur
région (65,6 % à Bida, 55 % à Makenj).
d'obtenir les semences dont ils ont besoin pour leurs satisfaisante durant la première saison d'essais; une
cultures de plateau (lors de la saison pluvieuse). méthode différente a été utilisée en 1991, mais les
résultats ne sont pas encore disponibles.
Aux yeux des agriculteurs de Sida, ces cultures de
saison sèche ont trois inconvénients. Le temps passé
à l'entretien des cultures ne leur permet de participer
Gestion de l'eau
pleinement ni aux cérémonies sociales et religieuses
qui ont généralement lieu à la même époque, ni aux La gestion de l'eau diffère dans les deux sites.
travaux d'entretien et de réparation des maisons. De Presque tous les paysans de Sida (98 %) essaient de
plus, ces cultures sont attaquées par les ravageurs. A construire des petits aménagements de régulation de
Makeni, les paysans considèrent que les principaux l'eau sur leurs parcelles, pour augmenter la durée de
inconvénients sont la présence de ravageurs et de la période de submersion et pour accroître la surface
voleurs, la main-d'œuvre requise par ces cultures et cultivée ainsi « irriguée ». A Makeni, une petite
les adventices. minorité (12 %) des paysans emploie des techniques
de régulation de l'eau dans le but de ralentir le
courant et d'étendre la surface cultivée ainsi
Engrais « irriguée ». Les paysans de Sida utilisent princi-
palement des diguettes de terre, qu'ils ouvrent ou
L'utilisation d'engrais chimiques (N, P, K, 15, 15,15) ferment selon les besoins en eau de leur riz. A
est beaucoup plus répandue à Sida (98 % des Makeni, les agriculteurs creusent des canaux et sur-
paysans) qu'à Makeni (40 %). Ces engrais sont en creusent les drains naturels de leurs parcelles.
général épandus en deux fois à Sida (juste après le
repiquage et après le premier désherbage) et une fois Dans les deux sites, l'avantage principal de ces petits
à Makeni (juste après le repiquage). aménagements, selon les paysans, est l'augmentation
des rendements de riz. De plus, à Sida, les paysans
Les engrais sont utilisés dans les deux sites en considèrent que ces aménagements aident à
premier lieu pour augmenter les rendements. A Sida, contrôler les adventices et à mieux distribuer et
les paysans considèrent aussi que les engrais conserver l'eau sur leurs parcelles (ce qui revient à
accroissent la fertilité de leurs champs, qui à leur avis augmenter les rendements). La grande majorité de
diminue suite à la disparition des jachères, facilitent ces paysans (77 %) considèrent que leurs amé-
le désherbage (en « assouplissant» le sol et les nagements ne comportent aucun inconvénient. A
adventices) et que leur résidu profite aux cultures de Makeni, ces aménagements ont aussi l'avantage, aux
saison sèche. A Makeni, les engrais sont utilisés pour yeux des paysans, de contrôler l'érosion causée par
« tuer les insectes ravageurs» du riz et aider celui-ci le courant, d'empêcher les plantules de riz d'être
à mieux entrer en compétition avec les adventices. emportées et de contrôler les adventices. Quant aux
Les paysans n'utilisant pas d'engrais à Makeni paysans de Makeni qui n'ont construit aucun
expliquent qu'ils n'ont pas l'argent nécessaire à leur aménagement (88 %), ils expliquent qu'ils ne savent
achat (89 % d'entre eux) et que les engrais sont pas comment s'y prendre, n'ont pas de main-
difficiles à obtenir sur les marchés. d'œuvre disponible, ou ne voient pas la nécessité de
tels aménagements.
Les inconvénients majeurs des engrais, pour les
paysans de Sida, tiennent à ce qu'ils encouragent la Une large majorité (83 %) des paysans de Sida
croissance végétative (plutôt que celle du grain), considèrent qu'il est nécessaire de mieux contrôler
qu'ils brOient le riz si la lame d'eau est insuffisante et l'eau, alors que cela est le cas pour seulement 43 %
qu'ils sont emportés par le courant. A Makeni, le seul des paysans de Makeni.
inconvénient majeur est qu'ils favorisent la
croissance des adventices. Finalement, dans les deux sites, une majorité des
paysans pensent que le niveau de l'eau sur leurs
En outre, à Sida, la plupart des paysans (51 %) parcelles a une influence directe sur les peuplements
utilisent les chaumes du riz, une fois brOlés ou d'adventices.
pourris, et les épandent sur leurs champs pour en
augmenter la fertilité. A Makeni, une minorité (26 %)
suit cette pratique, la majorité considérant que les Désherbage
chaumes « ne servent à rien ».
Quarante-deux espèces d'adventices ont été
Les analyses des échantillons de sol prélevés dans inventoriées dans les 120 parcelles de notre échan-
chaque parcelle n'ont fait apparaitre aucune tillon (Makeni et Sida). Les espèces dominantes sont
différence significative entre les différents niveaux de les mêmes dans les deux sites. Les adventices
fertilité de ces échantillons. Les quantités d'engrais dicotylédones les plus communes sont Ludwigia
épandues n'ont de plus pas été mesurées de façon decurrens, Floscopa aquatica et Aeschynomene
AM. IZAC, E. TUCKER
indica. Les adventices mono-cotylédones les plus Tableau 1. Résultats des essais en milieu réel
(saison pluvieuse 1990).
nombreuses sont Panicum laxum, Ischaemum
rugosum, Fuirena spp., Cyperus difformis et Traitement Rendements moyens (t ha- 1)
Rhynchospora corymbosa. Les taux d'infestation Bida Makeni
varient de 40 à 200 plantes par m 2, et sont un peu (N =57) (N =7)
plus bas à Bida qu'à Makeni. Désherbage total 3,1 • 2,7 +
La seule méthode directe de lutte contre les adven- Aucun désherbage 0,9 •• 1,2 ++
tices utilisée dans les deux sites est le désherbage. 2 désherbages 2,8 2,5 +
(Les méthodes indirectes étant le choix des variétés 1 désherbage 1,1 ++
de riz et la gestion de l'eau.) A Bida, tous les paysans
28 jours après
désherbent alors qu'à Makeni la majorité (57 %) ne repiquage (N =21) 1,8···
désherbe jamais. Dans les deux sites, un seul désher-
29-35 jours après
bage est la norme (pour 73 % des paysans de Bida et repiquage (N =14) 2,2···
42 % de ceux de Makeni). A Bida, l'arrachage à la
36-49 jours après
main et le sarclage à la houe sont les plus usités (les repiquage (N = 19) 2,6·
adventices sont en général incorporées au sol après
Plus de 50 jours après 1,5 ••
arrachage), alors qu'à Makeni l'arrachage à la main repiquage (N =3)
sans incorporation prédomine.
Coefficient de variation (%) 23 26
Les raisons données dans les deux sites pour justifier • et.+ : les moyen.nes ayant les mêmes symboles ne sont pas
les désherbages sont très similaires: augmentation statistiquement différentes (seuil de pertinence: 5 %).
des rendements de riz (96 % des paysans à Bida,
100 % à Makeni), diminution du nombre de rava-
geurs (6 % des paysans à Bida, 23 % à Makeni) et désherbage des plateaux, parce qu'ils estiment que
embellissement des parcelles (21 % à Bida, 15 % à les peuplements d'adventices y sont plus élevés. A
MakenD. Les paysans de Makeni qui ne désherbent Bida, une majorité relative (44 %) donne la priorité.
pas expliquent qu'ils sont trop occupés par leurs au désherbage des plateaux. Ils expliquent que les
champs de plateau (38 % des paysans), que leurs cultures de plateau (mil, sorgho, maïs) sont la base de
parcelles n'ont pas suffisamment d'adventices (32 % l'alimentation familiale.
des paysans) et qu'ils n'ont pas l'argent nécessaire
pour recruter de la main-d'œuvre (30 % des paysans). Préférences entre champs
Le moment du désherbage varie beaucoup d'un de bas-fond et de plateau
paysan à l'autre. Certains désherbent dès que les
La majorité des paysans de Bida (52 %) préfèrent les
adventices apparaissent, d'autres attendent qu'elles
champs de plateau à ceux de bas-fond, et 31 % des
soient bien établies pour n'avoir qu'un seul arrachage
paysans déclarent aimer autant les plateaux que les
à faire. Les résultats préliminaires des essais (tableau
bas-fonds. A Makeni, par contre, une majorité
1) font apparaître que, selon le moment du désher-
substantielle (92 %) préfère les champs de bas-fond,
bage choisi par les paysans de Bida, les pertes de
et personne n'est indifférent entre les deux. A Bida,
rendement (par rapport aux rendements obtenus avec
cette préférence vient du fait que les cultures de
deux désherbages effectués 2 et 6 semaines après le
plateau constituent la base de l'alimentation fami-
repiquage) s'échelonnent de 44 % (pour les 4 % qui
liale, alors que le riz de bas-fond est utilisé
ont désherbé plus de 50 jours après le repiquage) à
principalement lors de cérémonies sociales et reli-
a %. Les paysans n'ayant aucune perte (33 % d'entre gieuses. Les agriculteurs de Makeni justifient leur
eux) sont ceux qui ont désherbé de 36 à 49 jours
préférence pour les bas-fonds en soulignant que les
après le repiquage. A Makeni, les paysans ayant
travaux des champs y sont moins intensifs et moins
désherbé l'ont fait assez tard et ont eu une perte
pé~ibles. Ils estiment aussi que les bas-fonds sont plus
moyenne de rendement de 56 %, équivalente à celle
fertiles que les plateaux, et ils aiment les cultures de
des paysans n'ayant pas désherbé du tout.
bas-fond, le riz faisant partie de leur alimentation de
Les essais ont aussi fait voir qu'en l'absence totale de base.
désherbage les pertes de rendement sont plus élevées
à Bida (68 %) qu'à Makeni (56 %). Cela corrobore les
réponses des paysans à l'une de nos enquêtes.
Analyse des résultats et conclusion
.....................• ....,...v. ·.'oV.N'.v.-. v.:v.v. ....,., ~ ..,... ....,. .....,..
Enfin, les paysans des deux sites ont des priorités très
V.N\h. •
nettes à l'égard du désherbage de leurs champs de Lorsque nous aurons rassemblé les résultats de la
plateau et de bas-fond. La grande majorité des saison pluvieuse 1991, et ceux des quatre dernières
paysans de Makeni (80 %) donnent la priorité au enquêtes de Makeni, nous organiserons une réunion
Thème Il - Bas-fonds et milieu physique
avec les agriculteurs des deux sites pour débattre plateaux. En d'autres termes, il est impératif de
avec eux de notre interprétation des résultats. Il nous comprendre la façon dont les agriculteurs perçoivent
est cependant possible de tirer plusieurs conclusions et comparent les avantages et inconvénients
des résultats préliminaires présentés ci-dessus. respectifs de leurs parcelles de bas-fond et plateau.
o Les essais en eux-mêmes, ou les enquêtes seules, o Les résultats obtenus soulignent combien les
auraient donné une vue trop étroite des problèmes agriculteurs sont conscients des interactions qui
d'adventices dans les bas-fonds. L'utilisation régissent leurs différentes pratiques culturales. Nous
conjointe de ces deux outils d'analyse a permis une avons résumé les informations concernant ces
compréhension plus complète et plus nuancée de la interactions contenues dans chacun des question-
problématique des adventices. naires par un diagramme. Ces différents diagrammes
sont regroupés à la figure 4 qui schématise les per-
En effet, les résultats préliminaires nous donnent une ceptions que les paysans ont des interactions exi stant
ébauche de deux systèmes de bas-fonds entièrement entre leurs différentes pratiques culturales. Par
différents. Les paysans de Bida semblent appartenir à exemple, les agriculteurs sont très conscients du fait
une société relativement traditionnelle, dans la que l'épandage d'engrais sur leurs champs de bas-
mesure où les rapports sociaux et les valeurs hu- fond produira des rendements de riz différents selon
maines sont privilégiés par rapport aux valeurs l'état hydrique de leur parcelle, son taux d'infestation
commerciales et monétaires. Par opposition, ceux de par les adventices et les ravageurs, et sa fertilité. Sont
Makeni appartiennent à une culture qui est schématisés aussi certains des processus de décision
nettement plus orientée vers la notion de profit. Cette des agriculteurs. Par exemple, les paysans décident
différence se manifeste aussi probablement par un de mettre en œuvre dans leurs champs de bas-fond
moindre degré d'intégration des paysans de Bida différents niveaux de contrôle des adventices, selon
dans l'économie de marché (notre dernière enquête les caractéristiques physiques des champs de bas-
permettra de tester cette hypothèse), fond et de plateau, et selon leurs objectifs de pro-
duction. La conjonction de ces deux facteurs déter-
En outre, les denrées alimentaires de base sont mine les préférences et priorités de chaque paysan à
différentes dans les deux sites (riz de bas-fond et l'égard de ses champs de bas-fond et de plateau.
plateau à Makeni, cultures de plateau à Bida). Les L'allocation de la main-d'œuvre familiale, rému-
paysans de Bida consomment le riz presque nérée et communale aux champs de bas-fond et de
uniquement durant les cérémonies sociales et plateau est faite sur la base de ces préférences. Et
religieuses. Ces paysans considèrent donc leurs bas- c'est cette allocation qui détermine le nombre des
fonds comme un environnement d'appoint par désherbages et donc si le paysan aura ou non des
rapport à leurs champs de plateau. A Makeni, par pertes de rendement dues aux adventices. La figure 4
contre, les bas-fonds sont considérés comme un (qui est à rapprocher de la figure 3) met également en
environnement privilégié par rapport aux champs de lumière la complexité des agrosystèmes de bas-fond,
plateau. Les bas-fonds jouent donc un rôle entière- le fait que les paysans ont une connaissance certaine
ment différent dans les systèmes de production (et de cette complexité et que les interactions entre
par extension dans les systèmes régionaux) à Bida et champs de plateau et de bas-fond sont partie
Makeni. Il s'ensuit que des améliorations techniques intégrante de ces agrosystèmes. Lorsque tous les
entièrement différentes seront nécessaires dans ces résultats seront disponibles, nous tenterons de
deux sites, tant du point de vue de la gestion des quantifier les interactions les plus importantes entre
adventices que de celui des autres pratiques cultu- la gestion de la fertilité des sols, celle de l'eau et celle
rales. De même, les raisons du faible taux d'utili- des adventices (et ravageurs).
sation des bas-fonds pour la production agricole
seront sans doute totalement différentes dans les o Tout changement de technologie introduit dans les
deux sites. Les essais en milieu réel seuls n'auraient systèmes de bas-fond aura des répercussions directes
pas permis de saisir ces différences. et indirectes sur les systèmes de culture des plateaux,
à travers les interactions représentées en figure 4. Il
o Les informations obtenues dans les quatre pre- sera donc nécessaire d'identifier ces répercussions et
mières enquêtes ont montré qu'il est essentiel de d'évaluer leurs effets relatifs au bien-être des paysans
collecter des données sur les champs de plateau des et à la pérennité des systèmes avant de tester une
paysans dans tout travail sur les agrosystèmes de bas- amélioration technologique en milieu réel.
fond. Il est en effet impossible de comprendre les
motivations et objectifs des paysans à l'égard de leurs o La comparaison de deux sites (et a fortiori de plus
champs de bas-fond sans avoir aussi connaissance de deux sites) permet de tirer des conclusions plus
des systèmes de culture des plateaux et des priorités nuancées, et sans doute plus réalistes, que l'analyse
que ces paysans établissent entre bas-fonds et des résultats provenant d'un seul site. L'intérêt d'un
A.M. IZAC, E. TUCKER
travail de classification des systèmes de bas-fond est mais aussi d'affiner la compréhension des systèmes
donc non seulement de permettre l'extrapolation des de bas-fond par la comparaison de sites appartenant
résultats provenant d'un site à des régions entières, à des catégories différentes de bas-fonds.
technologie
... ....
disponible Objectifs de production
• autosuffisance alimentaire
• revenu minimum
• obligations sociales caractéristiques
gestion des plateaux et bas-
de l'eau fonds déterminant
/
les besoins en main-
....
,. d'oeuvre
état hydrique
') ') .. variétés de riz "
de la parcelle \ 'l~( V1 Jf,-_e_t_c_ul_tu_re_s_d_e,..--J
f- . saison sèche
préférences des
paysans entre
plateaux et bas-fonds
infest':tion ~ r ~
par adventices ,...-3----'---------,
et ravageurs ~ () épandage 'f
" 1
fertilité des sols
'r
désherbages ... \ (
rizières embellies
\ , "
rendements accrus (surface irriguée
accrue, contrôle des ravageurs, des
adventices)
Figure 4. Récapitulatif des perceptions et processus de prise de décision chez les paysans.
Thème 1/- Bas·fonds et milieu physique
o Matinée
Six communications orales, appuyées par des articles mis à la disposition des participants, ont été présentées
durant cette matinée :
- cinq ont porté sur le fonctionnement hydrologique des bas-fonds et sur une analyse typologique basée sur
des études morphopédologiques de terrain (Madagascar, Sénégal) ;
- une sur l'approche à petite échelle des états de surface de la zone soudano-guinéenne de l'Afrique de
l'Ouest par télédétection des zones humides (LandsatTM) : en fin de saison humide, en fin de saison culturale.
La cinquième communication a porté sur l'identification des bas-fonds et sur des propositions d'aménagement
en Afrique de l'Ouest (Siné-Saloum, Sénégal), à partir des résultats obtenus sur deux bassins expérimentaux
(réseau R3S) (J. AlbergeD.
Dans les deux zones géographiques présentées, les méthodes d'approche sont globalement identiques mais
présentent des particularités concernant le poids des disciplines sollicitées. " en résulte des résultats
complémentaires, donc d'intérêt indéniable car, en outre, les deux expérimentations ont été menées dans des
contextes naturels, différenciés surtout par l'environnement climatique (pluviométrique, altitude et latitude
différentes) et morphologique (modelés et pentes très contrastés à Madagascar par rapport au Sénégal).
Ces présentations ont suscité des questions de l'auditoire, auxquelles les conférenciers ont bien voulu apporter
des réponses. Dans cette synthèse, nous avons préféré les regrouper selon leur idée directrice plutôt que d'en
faire une énumération systématique.
Bassin expérimental de Madagascar
Questions
o Ces résultats sont-ils extrapolables, compte tenu des états différents d'anthropisation plus ou moins avancés,
à l'ensemble des hauts plateaux, y compris en milieu volcanique (A Rabeson, AM. Izac, A Leplaideur) ?
o Peut-on expliquer le contraste entre la richesse relative en phosphore observée et les valeurs beaucoup plus
faibles relevées en Asie (10 ppm) (P. Roger) ?
o Peut-on expliquer pourquoi à Madagascar la tourbe franche se rencontre seulement à l'extrême amont des
bas-fonds (P. Hennebert) ?
o y a-t-il un rôle de la néotectonique dans la morphologie des têtes de bas-fond (amphithéâtre) et l'édification
des lavakas (R. Rabeson) ? Est-ce un modèle local (ensemble de l'île) ou régional (ouest de l'océan Indien) qui
permet d'expliquer le déséquilibre isostasique de Madagascar et la présence de failles récentes, et est-ce que
cette tectonique récente est très active (G. Pédro) ? Quelle est la césure adoptée pour différencier cette
tectonique récente par rapport à celle du plio-quaternaire (M. Petit) ?Ces événements structuraux peuvent-ils,
à l'échelle humaine, altérer la productivité d'un bassin (A. Leplaideud ? Comment situer la surface
d'aplanissement fini-tertiaire (SFT) par rapport au niveau 3 décrit par Bourgeat et M. Petit?
o Peut-on limiter les débits d'inondation dans les rizières? En quelque sorte, peut-on les maîtriser à la
demande (M. Sonou) ?
o Peut-on introduire des paramètres tels que porosité, ruissellement... dans le modèle numérique des
écoulements et celui-ci peut-il intégrer des régimes transitoires? Y a-t-il des modifications des transferts de
solutés verticaux selon les périodes du cycle climatique?
o Peut-on identifier des marqueurs chimiques en solution dans les eaux, indicateurs des transferts de solutés
verticaux (M. Puard) ?
Réponses
l:lIes sont apportées de manière « collégiale,. par les quatre intervenants (M. Raunet, J.c. Grillot, F. Arthaud,
A Durbed.
o Extrapolation des résultats
Bien qu'une certaine logique de répartition des sols et de l'hydrodynamique à petite échelle puisse être
retenue, il serait hasardeux de faire cette extrapolation. Les études en cours sur bassins emboîtés devraient à
terme apporter une réponse. Quant au milieu volcanique, la pauvreté en matériaux riches en sable implique
a priori un autre type de fonctionnement hydraulique. Problème certainement à envisager aussi à court terme
dans les régions, à Madagascar et ailleurs, où des bas-fonds se développent sur des produits volcaniques.
o Problème du phosphore et de la position amont de la tourbe
A Madagascar, sur les hauts plateaux, les engorgements sont très importants, ce qui augmente sensiblement
les teneurs en phosphore. Quant au dépôt de tourbe, il dépend du drainage, qui est nettement plus fort à l'aval
qu'à l'amont.
o Rôle de la néotectonique
Elle n'est pas la seule bien sûr à intervenir sur les processus de reprise d'érosion. Par exemple, la déforestation
joue un rôle considérable. Ainsi, dans ces processus, c'est la conjonction hélas négative de plusieurs facteurs
qui accentue dans l'espace et dans le temps ces processus.
La néotectonique n'est pas très active au sens où elle n'introduit pas de rejet de faille important, bien que l'île
soit affectée d'une importante activité sismique mais de faible magnitude. Les vitesses d'érosion peuvent donc
« contrarier ,., voire dépasser dans le temps ces effets tectoniques. Le canal du Mozambique présente des états
de surface d'une grande activité tectonique, de telle sorte que le déséquilibre isostasique de l'tle
s'accompagne d'une remontée des hauts plateaux dans un état de contrainte à l'échelle de l'océan Indien. Les
failles récentes sont donc une conséquence de ces mouvements dans un champ d'extension orienté nord-sud.
Quant à « l'âge,. de cette néotectonique, on peut dire qu'elle va de la fin du tertiaire (elle affecte la SFT) à
l'actuel. Enfin, son rôle à l'échelle humaine dans la productivité des bas-fonds est probable: c'est elle qui
conditionne la circulation et la remontée des eaux minéralisées du socle (fractures) dont on aura besoin à
terme.
A propos des autres questions (maîtrise des débits d'inondation; introduction de paramètres multiples dans le
modèle des écoulements et régimes pris en compte; transfert de solutés), les réponses pourront peut-être être
apportées lorsque des informations, et leur analyse, seront fournies par les études en cours sur les bassins
emboîtés dans la région de Mahitsy (visitée lors de l'excursion du mercredi 11 décembre 1991).
Réponse
o Certes la signification est (imitée mais elle est pratique lorsque l'on ne dispose que d'observations
chroniques partielles, ce qui a été le cas pour diverses raisons matérielles et temporelles, et ce qui est
fréquemment le cas hormis les études très limitées sur bassins expérimentaux suffisamment bien équipés.
Questions
o Peut-on dire que la télédétection, menée par états comparatifs, est un outil qui permet vraiment de répondre
au problème de détection des zones humides propres à être aménagées (G. Pédro) ?
o Compte tenu de la limite de résolution des images par rapport à l'étroitesse de certains bas-fonds, comment
interpréter les images et comment se situer précisément sur le terrain? Peut-on évaluer le degré d'engorgement
des bas-fonds (Sonou) ?
o La télédétection, compte tenu de l'échelle de résolution, serait donc un indicateur des sous-éléments du
terroir paysan. Ceci est intéressant sur le plan socio-économique. Mais peut-on distinguer aussi les types de
culture (A. Leplaideur) ?
Réponses
o En tant qu'outil, la télédétection comparative permet une classification et une typologie des zones humides.
Si des comparaisons sont faites sur différentes zones, on pourra certainement mieux cerner l'utilité et l'emploi
systématique de cet outil. Peut-être, effectivement, demande-t-on trop tÔt des applications immédiates à une
méthode qui n'a pas encore livré tous ses « secrets li. C'est encore une potentialité de recherche; je la
considère, et je ne suis pas le seul, comme telle.
o Concernant les limites de résolution, le Il passage li intermédiaire classique, et souvent indispensable, est
celui de la photo-interprétation des clichés aériens, selon les disponibilités des échelles bien entendu.
o Quant au degré d'engorgement, c'est un problème difficile et il n'y a pas actuellement, à ma connaissance,
de réponse que l'on puisse apporter. Enfin, la distinction entre types de cultures est tout à fait possible, à
condition d'adapter les dates des clichés aux cultures et aux pratiques culturales.
Conclusion
Le nombre de questions suscitées par ce thème montre clairement que la définition du milieu physique, les
paramètres à prendre en compte et leur interprétation sont autant d'éléments indispensables à la
compréhension des unités de bas-fond. Ces communications marquent à notre sens une étape décisive sur
cette voie et ouvrent des perspectives pour progresser dans cette connaissance. On peut dire qu'aujourd'hui
le problème de la représentativité des sites expérimentaux reste essentiel et que des méthodes de résolution
sont relativement bien cernées.
o Après-midi
Première communication
Méthodologie de l'inventaire des marais et bas-fonds du Rwanda,
J. De Laat
La récupération des marais et bas-fonds devient une nécessité au Rwanda, pour faire face à une pression
démographique forte.
Un projet te Inventaire du marais Rwanda» est chargé de collecter, de classer et d'informatiser toutes les
données utiles pour répertorier l'ensemble des marais et bas-fonds.
L'auteur pense que cette méthodologie est transposable à d'autres régions ou pays possédant les données
brutes suivantes:
- cartes topographiques (au 1/50 000 ou moins);
- cartes pédologiques (au 1/50 000 ou moins) ;
- cartes administratives (au 1/250 000 ou plus);
- couverture photo aérienne récente.
Questions-réponses
Q : J.L. Sabatier. Votre zone d'analyse des banques de données se situe au niveau des bassins versants.
Pourquoi avez-vous choisi une telle approche car l'investigation des marais doit partir des marais?
R: L'aménagement va se faire dans une partie du marais sans entrer dans la totalité des bassins versants.
Q : A.1. Mokadem. Comment allez-vous déterminer la limite entre marais et ce qui ne l'est pas, à partir d'une
carte au 1/50 000 ? Est-ce à partir de critères altimétriques ?
R: Elle a été déterminée à partir des photos aériennes et des photorestitutions.
Q : A.M. Izac. Vous n'avez pas tenu compte des critères non physiques et non écologiques dans votre
inventaire. Quel est l'intérêt d'un inventaire fondé sur des paramètres physiques?
R : L'urgence du gouvernement est d'avoir la superficie des marais, l'objectif étant d'aider ce gouvernement à
diriger l'aménagement.
Deuxième communication
Le transfert de fertilité dans les écosystèmes des hautes terres de Madagascar
J.L. Rakotomanana
le maintien de la fertilité des rizières, dans le système traditionnel d'utilisation des ressources naturelles,
supposerait un transfert de fertilité des tanety aux rizières.
les bas-fonds sont des endroits de concentration naturelle de divers éléments mobiles de l'écosystème. le
processus de transfert liquide (eaux de surface ou eaux de ruissellement, qui non seulement inondent mais
irriguent et apportent des éléments dissous et/ou en suspension, eaux de nappe affleurante qui apportent leur
contribution aux caractéristiques des bas-fonds) est accentué par la dégradation des bassins versants.
le transfert de matière suit de près l'évolution de ce transfert de liquide. En effet, l'érosion des versants va de
pair avec un processus de dépôt dans les parties basses du relief. Il est à noter que l'érosion concerne en gros
deux unités relativement fertiles du profil pédologique : la couche humifère et le sous-sol en voie d'altération.
les formes de concentration anthropique (fumier dont les éléments ont été prélevés essentiellement sur les
tanety et concentrés sur les rizières) permettent à l'agriculteur de gérer la fertilité de ses rizières.
les cendres des feux de brousse constituent des sources d'éléments cationiques dont la fraction soluble dans
l'eau enrichit le bas-fond rizicole.
Questions-réponses
Q : c.P. Ravohitrarivo. Quel est l'intérêt de l'écoulement des eaux des tanety vers les rizières?
R: Il n'y a pas de données "collectées.
Q: B. Pouyaud. Quelle est la place de la riziculture dans le système de production? Est-ce qu'il existe une
structure de gestion des feux de brousse?
R : les feux de brousse ont des impacts négatifs mais il faut aussi préciser les effets positifs. la riziculture
occupe la première place dans le système de production. les projets de micro-réalisations ont pour objectif
d'améliorer la gestion de l'eau pour une meilleure utilisation agricole.
Troisième communication
La riziculture dans les collines et les vallées de Chine
Z.I. Gong, X.P. Zhang
les caractéristiques des sols de rizière des vallées encastrées dans les collines Onland valleys) sont les
suivantes.
°
Aspect topographique: altitude très variable allant de 1 m à plus de 2 700 m; rizières assez étroites limitant
l'utilisation de grand matériel agricole (0,002 à 0,01 ha); forme très variable.
la composition minérale est étroitement liée aux matériaux parentaux, créant ainsi une grande diversité dans
les propriétés du sol. Par exemple, les sols dérivés de matériau basaltique ont souvent une teneur faible en
potassium.
les régimes hydriques très variables impriment aux sols des morphologies caractéristiques et des types variés.
l'amélioration de la perméabilité du sol est atteinte par l'adoption de systèmes de rotation de cultures
raisonnés.
les sols des collines sont transformés en rizières. les rendements sont faibles (1-2 t ha-1 ) et il ya des problèmes
d'érosion. la riziculture en terrasses a permis d'améliorer le régime hydrique et la gestion de la fertilisation,
faisant ainsi doubler ou tripler les rendements.
Des systèmes de drainage et d'irrigation plus performants ont permis une meilleure gestion de l'eau et ont
procuré une augmentation de rendement de 10 à 30 %.
Une fertilisation rationnelle a amélioré l'état nutritif du sol. Par exemple, la fumure organique: celle-ci doit
être bien décomposée, en quantité suffisante et de bonne qualité. L'apport d'engrais azoté se fera très tôt.
Des phénomènes de toxicité ferreuse s'observent sur des sols de rizière de type gley, empêchant souvent
l'assimilation du potassium et gênant le développement normal du riz.
Questions-réponses
Q : J.CG. Ottow. L'augmentation de la production rizicole est-elle liée uniquement à l'utilisation d'engrais
potassique?
R : Non. D'autres zones rizicoles demandent soit uniquement une fertilisation azotée, soit une fertilisation
phosphatée. L'utilisation intensive d'engrais potassiques est très récente (vers 1980).
Q: A.M. Izac. Pourquoi les paysans n'adoptent-ils pas la recommandation de fertilisation s'ils sont conscients
du bénéfice réalisé ?
R : Ce cas n'est pas général. Le problème se situe dans le transfert des intrants dans la zone d'altitude élevée.
Q : F. Ntahomywkiye. Quel est le système de culture adopté par les paysans après la récolte du riz?
R : Dans les régions montagneuses, nous adoptions le système de rotation le rice-rice-rapeseed 71, ou
le rapeseed-corn (or soybean)-Iate rice 71.
Q: M. Sonou. Vous avez mentionné un rendement moyen de 5,4 t ha-1 en 1988. Comment situez-vous ce
rendement par rapport à ceux d'autres régions. Quel est le rôle de la mécanisation?
R : Dans les régions montagneuses, le rendement est beaucoup plus faible du fait que les paysans ne peuvent
pas utiliser d'engrais minéraux et que l'eau manque (déficit). La mécanisation se fait seulement dans des zones
privilégiées.
Q : A.L. Razafinjara. Est-ce que vous utilisez des techniques de préparation rationnelle du sol pour lutter
contre la toxicité ferreuse ?
R: La toxicité ferreuse existe mais n'est pas très importante, et ne nécessite pas l'emploi d'une telle technique.
Quatrième communication
Bas-fonds d'Afrique occidentale: le programme de recherche de l'liTA
Les objectifs de recherche comprennent:
- l'évaluation, du point de vue de leur pérennité écologique et économique et du bien-être des paysans, des
systèmes de gestion des ressources naturelles et des cultures dans les bas-fonds d'Afrique occidentale;
-la mise au point de technologies améliorées réalistes, adaptées à ces systèmes.
Les phases d'inventaire et de classification comportent trois niveaux:
- niveau 1 : grandes zones agro-écologiques et économiques pour toute la région mandatée;
- niveau 2 : localisation et distribution des réseaux de bas-fonds; utilisation des sols dans un échantillon
stratifié des zones de niveau 1 ;
- niveau 3 : caractérisation détaillée (quantification des contraintes) dans un échantillon stratifié des régions
du niveau 2.
Les objectifs des études menées au Nigeria et au Sierra Leone sont: la mesure des pertes de rendement dues
aux adventices; la compréhension des pratiques culturales concernant les adventices, des interactions
(gestion de l'eau, gestion de la fertilité des sols, gestion des adventices par les paysans), la compréhension des
mécanismes de prise de décision par les paysans relativement aux agro-écosystèmes de bas-fonds.
Les hypothèses de travail sont les suivantes:
- les rendements de riz sont influencés par la composition de la flore adventice, les taux d'enherbement et le
calendrier des désherbages;
- il Y a corrélation entre les pratiques culturales paysannes (gestion de l'eau, choix des variétés, modes de
semis ou repiquage, utilisation des bas-fonds en saison sèche) et les rendements associés à divers taux
d'enherbement.
Questions-réponses
Q : A. Leplaideur. Est-ce que votre objectif est de mettre au point un système à caractère universel?
R: La pertinence de nos interventions permet une extrapolabilité dans 26 pays concernés.
Q : M. Sonou. Je pose un problème d'échantillonnage: quel est le critère de sélection des sites additionnels?
Comment résoudre le conflit éventuel entre le riz de plateau et le riz de bas-fond, notamment au Sierra Leone
où la préférence pour la consommation de riz de plateau est manifeste?
R: A Makeni, on a travaillé sur quatre bas-fonds. A Bida, il existe des villages différents. On a travaillé sur trois
bas-fonds. Les sites appartiennent à un échantillon stratifié de niveau 2 : un site expérimental au Cameroun,
un au Bénin et un au Sierra Leone. Pour répondre à la seconde question, je vous demande de me dire quelle
est la représentativité des données que vous mentionnez? Je sais seulement que 60 paysans marquent leur
préférence du riz de plateau par rapport au riz de bas-fond. Le confl it existe plutôt dans l'uti lisation des
champs de plateau et des terres de bas-fond.
Commentaire: B. Pouyaud. Dans notre démarche, nous partons toujours d'un cas particulier pour aboutir au
cas général. Il doit y avoir un problème de financement si l'on veut partir du niveau 1 vers le niveau 2 puis le
niveau 3. Le choix de l'équipe est important.
Q : A. Leplaideur. La multidisciplinarité intervient dans le choix des démarches, c'est-à-dire des processus.
Comment les collègues des autres disciplines conçoivent la mise en cause de leur concept théorique?
Comment ils supportent son axe central économique?
R: Il n'y a pas de paramètre privilégié. Le paysan est le centre des choses. L'objectif est d'augmenter le bien-
être des paysans, c'est-à-dire introduire une technologie améliorée pour aboutir à une pérennité écologique et
économique du système.
Q : W. Van Oriel. Comment s'effectuent les enquêtes sur le terrain? Car des problèmes existent si le groupe
est grand.
R: Nous sommes un groupe de quinze personnes de l'liTA. Ce sont tous des chercheurs basés à Ibadan. Nous
travaillons en collaboration avec le système national. Nous visitons, soit ensemble, soit séparément, des sites.
Il faut que les quinze membres du groupe se mettent d'accord sur tous les détails.
Q : D. Rollin. Où est, dans votre schéma, l'intervention de l'élevage, car il faut considérer l'interaction
agriculture-élevage?
R: l'liTA s'occupe uniquement des cultures.
o Conclusion de la journée
En faisant le bilan de la journée, G. Pédro a fait remarquer qu'une certaine dérive s'observe dans la
présentation des données.
Le thème du séminaire est le bas-fonds et riziculture 'II, or on a parlé soit de bas-fonds sans mettre l'accent sur
la riziculture, soit de riziculture sans parler de bas-fonds.
Si on considère l'aspect géographique, on dispose de données physiques e~ce qui concerne Madagascar,
avec un problème de transfert d'échelle.
On a des données sur l'Afrique et l'Asie (Chine). En Afrique, il existe des bas-fonds humides mais aussi d'autres
types de bas-fonds.
En Asie, l'influence de l'intensification du milieu est très grande. Les rizières se développent sur des sols créés
par l'homme.
M. Raunet a ouvert le débat sur le problème de l'interdisciplinarité. Il a évoqué les conditions de réalisation
effective d'études transdisciplinaires en prenant l'exemple d'Ambohitrakoho. Chacun des intervenants a
reconnu les problèmes posés par l'étude interdisciplinaire, notamment la problématique d'unité de lieu,
d'unité d'espace et d'unité de temps.
B. Pouyaud a signalé que la logique scientifique doit se conjuguer avec la logique du développement.
En guise de conclusion, G. Pédro insiste sur la complexité du milieu bas-fond. L'essai de compréhension des
bas-fonds des zones humides est riche d'enseignements bien que beaucoup reste encore à faire.
Physico-chimie
. et microbiologie des sols
Rhizosphère
et physiologie du riz
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
C1RAD,1993
1
Conditions de culture à risques
t Aquatique stricte
Sol faiblement
humide
Mécanismes
...... Augmentation
des contraintes
~ physiologiques
de compensation
(figure 4). Cette observation est la conséquence, in cultivées en milieu hypoxique OUSTIN et ARMSTRONG,
situ, de l'adaptation physiologique du riz: le 1983; LESAI NT et al., 1983 ; PRIOUL et GUYOT, 1985 ;
transport d'oxygène et sa répercussion sur le JACKSON et al., 1985).
maintien du pouvoir oxydant de la rhizosphère. Ce
mécanisme, signalé chez plusieurs espèces, a une
incidence sur, ou est la conséquence de, la modi-
fication de l'anatomie racinaire (figure 5) des plantes Adaptation aux'contraintes du milieu
;-. "'it."ÎI'ow:-. "«'. :.-. ;.. "«*::.. 'Qo" ""h "'ÎI'o"Îl'o"'Îl'o"'it."" »». ""h --». "W9
Présence de sel
De nos études il ressort que les plantes adaptées à la
Evolution du potentiel
culture salée en mangrove sont moins productives
du sol en mV (non corrigé) que leurs cousines aquatiques cultivées en eau
douce. De même, nous avons pu observer que les
300 Mesure effectuée au moment-o pe+pH = 15.76 variétés européennes sélectionnées en Italie ou en
de la mise en eau le 3/07
250 Camargue et cultivées en milieu salé à des
concentrations croissantes avaient, en général, un
200
rapport photosynthèse/transpiration inférieur aux
150
plantes originaires d'Afrique. Cette différence
100 s'explique uniquement par un niveau de trans-
piration plus faible chez les variétés africaines. Nous
avons suivi l'évolution du poids de la matière
organique des racines et des parties aériennes en
-100
-150
0_,
" ' " pe+pH =
0-0-
7.3
fonction de la teneur en sel. On remarque la grande
sensibilité des variétés non adaptées au sel: on
obtient, en moyenne, une perte de 50 % de matière
-200 sèche si l'on cultive les plantules à une concentration
-250 de 1,5 g 1-1 de sel dans la solution nutritive.
-300 Partant des résultats obtenus au laboratoire, nous
-350+-~-.-,.......,--"---.-~-.--r--r-~"---',.....,.---r-.--.--r--r--1- avons mis au point un test de criblage variétal basé
o 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
sur la vigueur germinative et sur le degré de
Nombre de jours après semis
développement des plantules en milieu salé, par
Figure 3. Effet d'un « assec " sur le potentiel rapport à un témoin cultivé dans des conditions
oxydoréducteur. normales. li ressort que la vigueur germinative n'est
Evolution des concentrations en azote sous rizière, Evolution des concentrations en azote sous rizière,
avec peroxyde de calcium en absence de peroxyde de calcium
• • NH4+ • • NH4+
10
1,0 • ND3- • • ND3·
0.8 0.8
0.6 0,6
0,4 0,4
0.2 0,2
0,0 +-.,......+"---r-,--,.---.--I--.---,-...---.-~h---- __
0,0 .pT-.,....l=i:::::;::+--,-:.--.--.-,...-,----rl.-.--~
o 20 40 60 80 100 120 140 o 20 40 60 80 100 120 140
Figure 4. Evolution des concentrations en azote nitrique et ammoniacal, en présence ou non d'agents oxydants.
Thème'" - Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
pas proportionnelle à la masse de la graine mais tivité enzymatique de la semence (DUBEY, 1984). Le
semble dépendre davantage des réserves éner- test, mis au point et utilisé pour la contrainte liée à la
gétiques contenues dans l'endosperme et de l'ac- présence de sel, pourrait être expérimenté sur
d'autres contraintes comme l'acidité, ou la réponse à sont habituellement les accepteurs de l'ammoniac
une carence. terminal, ne pourront pas jouer leur rôle: c'est une
explication possible des grains laiteux obtenus
Des études plus fondamentales, réalisées aux Etats- certaines années particulièrement froides. Il pourrait
Unis et à l'IRRI, ont montré que la présence d'une
y avoir également une relation avec le dévelop-
protéine codée fixée sur le tonoplaste des cellules
pement actif de Fuscovaginae, la bactérie trouvant
était à l'origine de la résistance au sel. Lorsque cette
un terrain fragilisé qui lui est plus favorable.
protéine est présente à une grande concentration,
elle permet un ajustement osmotique entre la Par ailleurs, le froid, en agissant sur l'absorption
vacuole et le cytoplasme. Dans cette configuration, minérale, peut plus facilement encore entraîner une
on a pu faire vivre des plantes (AvicenniaJ dans de carence en oligoéléments; parmi ceux-ci, le
l'eau de mer. molybdène joue un rôle très actif puisqu'il est couplé
avec la nitrate réductase. En l'absence de molybdène
Cette même protéine, greffée sur des cellules de
et à un taux moindre de manganèse, la nitrate
tabac, a permis sa culture à des concentrations de sel
réductase est inhibée.
supérieures à 15 g 1-'. Cette manipulation laisse
entrevoir la possibilité, à long terme, de créer un Les conditions rencontrées sur le terrain à
matériel végétal nouveau Odéotype), qui pourrait Madagascar sont difficiles à recréer en France. Une
associer des caractères de résistance spécifiques aux première série d'expériences a été réalisée au
plantes aquatiques ou aux plantes de culture sèche. laboratoire. Les températures des racines et des
parties aériennes peuvent être régulées séparément.
Il est également possible d'analyser les échanges
Résistance au froid gazeux en fonction des conditions d'éclairage. Les
conditions de notre expérience sont les suivantes:
Les résultats obtenus sont encore très fragmentaires; température initiale des racines 22 oC, stress 8 oC ;
les variétés résistantes au froid sont celles sur température initiale des feuilles 25 oC, stress 15 oC ;
lesquelles on a enregistré la plus faible transpiration éclairement 11,5 heures à 500 micromoles ; air à
et un niveau d'activité photosynthétique peu 350 vpm de CO 2 et point de rosée de 17,5 oc.
performant. Ce mécanisme adaptatif a été décrit par L'expé-rience est réalisée en culture hydroponique,
de nombreux auteurs; parmi eux, NEILSON et al. la nutrition assurée par une solution de type
(1972), DE LUCIA (1987), LUNDMARK et al. (1988) Hoagland adaptée à la culture du riz.
considèrent le froid comme un inhibiteur du CO 2 . La
réduction de l'absorption du CO 2 serait la consé- Dans une première expérience, nous avons abaissé
quence d'une modification de la perméabilité la température racinaire à 8 oC, la température des
membranaire du cytoplasme (MURATA et al., 1982 ; feuilles restant à 25 oc. Dans ces conditions, nous ne
RAISON et WRIGHT, 1983) et de la composition constatons pas de différence importante dans le
lipidique et protéique (LEHNINGER, 1970), permettant fonctionnement de la plante. L'absorption des
au végétal de garder le maximum de fluidité éléments minéraux nécessaires à l'élaboration de la
membranaire (CORNILLON, 1980). matière végétale ne semble pas affectée; le froid
racinaire seul n'est donc pas une contrainte physio-
A Madagascar, le riz aquatique d'altitude est cultivé logique majeure.
entre 1 200 et 1 800 m. Les variétés vulgarisées ont
un comportement physiologique différent suivant la Dans les conditions initiales de l'expérience, nous
température rencontrée en cours de cycle. Certaines avons obtenu les chiffres apparaissant au tableau 1.
années, des pertes de rendement supérieures à 30 %
ont été relevées. Nous avons mis en comparaison
deux variétés malgaches d'altitude (Rojofotsy et Nutrition minérale et contraintes
Latsiday) avec une variété reconnue résistante au En conditions d'inondation, l'asphyxie racinaire est à
froid (lRCTN 141). l'origine de plusieurs contraintes observées chez les
Sur la tomate, CORNILLON (1977) note une diminution
de l'absorption de l'azote, et plus particulièrement
de l'azote nitrique à basse température. Dans le sol, Tableau 1. Fonctionnement physiologique
contrairement au milieu hydroponique, une basse de trois variétés pour une température racinaire de 8 oC.
température des racines a une forte incidence sur la
Variétés Photosynthèse Transpiration Efficience
nutrition minérale du riz. L'activité microbienne est (mg dm- 2 h-') (mg dm- 2 h-') photosynthétique
ralentie voire inhibée. La nitrate réductase dans les Rojofotsy 27,4 0,543 0,051
racines est stoppée, la plante va incorporer l'azote
Latisday 18,7 1,15 0,016
directement sous forme nitrique et non pas NH 3 • Or
les c~nzymes réduits et les produits carbonés, qui IRCTN 141 21,4 1,46 0,015
Thème /11- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
(I." ,"""", , w.: ~ ~ "" -..:' ..",~ ~.., ''',..~.,...." '\:'.: "..''-'=.:'''' -.,.:' " "',..,.,,, .:'.., ~ " w ~ , , ..".."'..,.,""".., ', ~ ..",..",..,.,,,..,.", 0,,:.
plantes (toxicité des substances et/ou des éléments L'hypoxie racinaire inhibe l'élongation des racines
réduits, diminution de la disponibilité de certains formées durant le traitement; de même, elle diminue
éléments minéraux, notamment de l'azote). Dans un l'absorption du phosphore et du calcium, mais son
travail précédent, nous avons montré que l'adap- effet n'est pas sensible sur l'absorption de l'azote,
tation du riz à une culture inondée est essen- quelle que soit sa forme (ZHANG et al., 1990).
tiellement due à sa capacité de transporter l'oxygène
Cette différence pourrait s'expliquer, entre autres,
depuis la partie aérienne, via l'aérenchyme, vers les
par une absorption plus importante du phosphore
racines et la rhizosphère. Ce mécanisme d'adap-
par les nouvelles racines émises, alors que
tation à l'inondation dépend en partie de l'origine,
l'absorption de l'azote proviendrait de l'ensemble
pluviale ou aquatique, du matériel végétal (PUARD
des racines. La corrélation entre l'absorption du
et al., 1989 b), mais il est également influencé par le
phosphore et la croissance racinaire va dans ce sens.
milieu de culture, en particulier par la nutrition
minérale ( ZHANG et al., 1991). La suppression de l'ammoniaque chez le riz
(impossible à réaliser en rizière) stimule légèrement
Des essais agronomiques menés à Madacascar
l'élongation racinaire. Ce mécanisme pourrait, à
(AHMADI et al., 1988) ont mis en évidence que
long terme, être une des explications du système
l'apport d'engrais augmentait les chances de survie
racinaire plus développé observé chez les variétés
du riz pluvial en cas de submersion. Nous avons
pluviales. En l'absence d'ammoniaque, l'absorption
étudié l'influence des contraintes, manque
d'oxygène, milieu acide et formes azotées (NO]" des autres ions est accélérée. Cet effet ne s'explique
pas comme précédemment par des différences
et NH! ou NO]" seul), sur l'absorption minérale
(figure 6). Notre étude a permis de mettre en d'absorption entre racines déjà présentes et racines
évidence, pour deux variétés de riz, l'une pluviale, nouvellement émises durant le traitement. Il s'ensuit
que NH!ralentit l'absorption des éléments minéraux
l'autre aquatique; la réponse des plantes vis-à-vis de
sans diminuer notablement les mécanismes de
trois conditions de stress environnementaux.
croissance.
L'acidité (pH 4,5) diminue sensiblement l'absorption
d'azote, tout particulièrement sous forme nitrique.
De même, elle diminue l'absorption du calcium.
IRAT 112 cultivé en' aquatique solution riche
L'aspect le plus notable de l'effet variétal (aquatique
Concentration (mg/l) •
ou pluvial) sur la réponse du riz aux trois stress
8
environnementaux étudiés porte sur le
comportement du riz vis-à-vis de l'ammoniaque et
7 •
de l'hypoxie. Moins adaptée à l'ammoniaque,
présente de façon dominante dans le sol en
6
conditions d'inondation, la variété pluviale répond
pl us fortement que la variété aquatique à la
5 • suppression de cette forme azotée.
Enfin, nous n'avons pas mis en évidence sur une
20 40 60 80 100 120 plante entière l'effet compensateur des nitrates vis-à-
Transfert d'oxygène (~g/h)
vis de l'hypoxie, mécanisme biologique ~ellulaire
IRAT 112 cultivé en aquatique solution pauvre souvent cité dans la littérature. Pour comprendre ce
Concentration (mg/l) mécanisme, il faudrait appliquer au riz un effet de
double contrainte, portant sur l'hypoxie en l'absence
8
d'ammoniaque (en vue d'augmenter l'absorption de
nitrates). Cette étude pourrait être entreprise dans le
cadre du projet « bas-fonds lt.
Conclusion
les expériences que nous avons réalisées au
a 20 40 60 80 100 120·
laboratoire et, lorsque cela était possible, sur le
Transfert d'oxygène (~g/h)
terrain ont montré que les plantes productives sont
Figure 6. Incidence de la nutrition sur le bilan également exigeantes. Une plante identifiée très
en oxygène dans le milieu racinaire. résistante à un stress est rarement résistante au cumul
M.PUARD
de plusieurs contraintes, même de faible intensité. GAUDIN R., DUPUY J., BOURNAT P., 1987. Suivi du
Par exemple, une plante résistante à 4 g 1-1 de sel ne contenu en azote de la solution du sol d'une rizière après
résistera pas forcément à 0,5 g 1-1 de sel si une placement d'urée. L'Agron. Trop., 42 (1) : 13-19.
carence en oligoéléments (Mn, Ca, Zn, etc,), le froid GLASZMAN N J.C, BENOIT H., ARNAU DM., 1984.
ou l'acidité s'ajoutaient à cette première contrainte; Classification des riz cultivés (Oryza sativa L.). Utilisation
d'où l'intérêt d'éliminer « la boîte noire,. que de la variabilité enzymatique. L'Agron. Trop., 39 (1) :
constitue le sol, en travaillant sur des dispositifs de 51-61.
laboratoire permettant d'intervenir avec précision sur
JACKSON M.B., FENNING T.M., JENKINS W., 1985.
un seul paramètre à la fois. A l'inverse, il ne servirait
Aerenchyma gas space formation in adventitious roots of
à rien de sélectionner un mécanisme de résistance, rice (Oryza sativa L.) is not controlled by ethylene or small
au stade végétatif, si son expression ne se traduisait partial pressures of oxygen. J. Exp. Bot. 36 (171) : 1566-
pas, en fin de culture, par le maintien d'une bonne 1572
production végétale ; d'où l'intérêt d'une
confrontation permanente des expérimentations de JACQUOT M., ARNAUD M., 1979. Classification
, laboratoire avec leur application sur le terrain. numérique des variétés de riz. L'Agron. Trop. 34 (2) :
155-171.
L'ensemble des expériences réalisées montre
JUSTIN S.H.F.W., ARMSTRONG W., 1983. Oxygen
l'importance primordiale que l'on doit accorder à la transport in the salt marsh genus Puccinellia maritima W.
nutrition minérale du riz cultivé en milieu aquatique. Particular reference to the diffusive resistance of the root-
Si la plupart des connaissances acquises en matière shoot junction and the use of parrafin oil as diffusive
de nutrition des plantes peuvent être transposées barrier in plant studies. J. Exp. Bot., 34 (145) : 980-986.
d'une culture à l'autre, par une simple adaptation des
LEHNINGER A.L., 1970. Biochemistry. New York, Worth
doses à utiliser, beaucoup de travail reste à faire pour
Publishers Inc., p. 189-214 et p. 513-537.
ce qui concerne la nutrition en milieu hypoxique
réducteur et la contribution des ions dans la LESAINT C, GRANDJEAN M., GAMBIER J., 1983.
résistance aux contraintes du milieu. Influence de l'aération du milieu nutritif sur l'absorption de
l'eau et des ions, la nuit et le jour. Comparaison du maïs et
de la tomate. CR. Acad. Agric. Fr., 69 (6) : 399-406.
contraintes du milieu. 1. Modifications anatomiques des VillER J.fI., PUARD M., 1989. Influence de la fertilisation
racines. L'Agron. Trop., 44 (3) : 165-171. sur le comportement du riz pluvial en milieu inondé.
L'Agron. Trop., 44 (4) : 313-319.
PUARD M., LASCEVE G., COUCHAT P., 1989 b. Etude
des mécanismes d'adaptation du riz (Oryza sativa L.) aux lHANG B.G., COU CHAT P., PUARD M., 1991. Effet de
contraintes du milieu. Il. Effets de la nutrition azotée sur la l'acidification et des types d'azote sur .la formation
consommation d'oxygène par les racines et l'évolution de d'aérenchymes chez le riz. L'Agron. Trop., 46 (1) : 23-28.
l'acidité. L'Agron. Trop., 44 (3) : 173-177.
lHANG B.G., COUCHAT P., PUARD M., 1990. Effect of
RAISON J.K., WRIGHT L.c., 1983. Thermal phase hypoxia, acidity and nitrate on inorganic nutrient in rice
transitions in the polar lipids of plant membranes: their plants. Plant Physiol. Biochem., 28 (5) : 655-661.
induction of disaturated phospholipids and their possible
relation to chilling injury. Biochem. Biophys. Acta, 731
69-78.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
C/RAD,1993
1
:li:~:ft:~~~~:~~::J~~~~~~o~:~t:~~~!~~?;;~~z~t~:;i~'~~:;;:i:~:~s~~~~J~1it~~~I~!:::lii:~::
:::) l'îlede Java, en Indonésie) ontm()ntré.que c~tte intoxication peut ê!re ~tténuée oUévit~pàr:des~PJl()rtS.;.u:
.... ···:·:··:::;··~·:t~~~~nJ~::·:i~.t~~;~;~:~.~~f~~t:~~~~tta~1t:=~~;~~~::~~t~~~e:~,~~;W::;.~,~~€VQ~?::;·II.i!!.!.:.I.:
·\llOnassimilatio~pàr:les racines~l~premier.su.rvientdans lesse~aines qui suivent le.repiquagti (toxi~it~»)
< . ) :::priniai~);les~c::ond$~situe~~trël'épiai~oi1et la ~oraison. (toxicité séc:()ndaire); Lors de. t~lJtëS ces:(>:.:
:}: . .• ~x~r:imentations;l~snivëalJx .en ~:et K da~le pl~ntmOdifient ser,siblêirient l'interisit~ des~ymptômi!S:>:
·.• ~.·• • • :.;i :. •~t J~ . c:oncen:~~~i()nst folia}ry-:~')~~.r:·.~a. toxidtépri~air~.s'~~liliq~~par . .~a.s~nsi bilité !()lJ~ë.f~rti5lJl~!!··:.i
231
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
~~"'''''>I».~~~~ ~ ~ ~~~~~~». ~ v..."«-,~,,'''t<..~"1..'».'''~''''''''ol»'''''''' ~ ~ ~.~~"«O
Ces expériences de terrain ont été conçues suivant Effets des engrais sur l'assimilation de fer
l'hypothèse que la toxicité ferreuse devrait être lors des expérimentations au champ
considérée bien plus comme un stress minéral
multiple - dans lequel interviendraient des carences Au Sénégal
en Pet K, le cas échéant associées à des disponibi lités Un site rizicole typiquement sensible à la toxicité
réduites en Ca, Mg et/ou Zn, théorie émise par ferreuse, établi sur un sol sulfaté acide (pH du sol
Onow et al. (1983) et par PRADE et al. (1990) - que sec, 3,8) à Loudia Ouoloff, en Basse Casamance, a
comme la conséquence du seul effet de fortes été choisi pour tester l'effet de la fertilisation sur
concentrations en formes solubles et mobilisables de l'assimilation du fer par le riz. Dans des carottages,
fer, ou encore de pH relativement acides. on a constaté la présence de concrétions de jarosite
J.c.G. OTTO~ K. PRADE, W. BERTENBREITER, VA JACQ
Tableau 1. Propriétés physico-chimiques des sols sensibles à la toxicité ferreuse, prélevés au Sri Lanka (Ceylan).
Tableau II. Analyses foliaires sur des prélèvements de variétés de riz sensibles au "bronzing"
dans différentes rizières à toxicité ferreuse du Sri Lanka.
Tableau III. Propriétés physico-chimiques de quelques sols sulfatés acides de Basse Casamance dans lesquels les
plants de riz (toutes variétés confondues) présentaient des symptômes foliaires nets et caractéristiques du "bronzing".
Java
Cihea 5,6 0,24 4,8 30,3 0,11 21,7 6,98 0,45 22 2415 520 1000 617 3 6
Cianjur 6,3 0,17 5,1 25,6 0,13 14,6 5,32 0,08 30 1325 480 953 194 5 5
Plered 5,3 0,15 5,3 9,8 0,08 3,9 1,27 0,16 24 750 120 1000 253 16 3
Sumatra
Penyasan 1 4,8 0,16 4,8 4,9 0,05 0,53 0,35 0,08 18 175 7 4 500 13 5
Penyasan2 4,7 0,22 5,9 8,7 0,09 1,21 0,67 0,09 30 195 60 4 215 11 4
Penyasan3 4,7 0,40 7,7 10,6 0,07 1,21 0,74 0,11 24 213 62 5 255 14 11
Rumbio 4,7 0,41 8,6 10,5 0,03 1,18 0,47 0,10 17 175 33 11 117 22 8
Oesa Baru'" 4,1 1,47 40,9 24,5 0,26 2,52 0,84 0,28 95 375 84 3 15 13 12
Taman Bogo 4,8 0,16 5,1 6,3 0,04 1,21 0,42 0,21 15 209 35 18 344 8 5
Metro 4,8 0,17 4,8 6,6 0,06 1,32 0,44 0,18 15 220 38 19 401 9 4
Niveaux critiques .... - 0,20 0,20 10 2-5 ? 10
• La texture des sols varie de sablo-limoneuse à argileuse.
.. Les cations ont été extraits par la méthode HCI5N + H 2 S0 4 0,025 N.
... Histosol.
.... Niveaux critiques selon TANAKA et YOSHIDA (1970).
Tableau V. Analyses foliaires sur des prélèvements de variétés de riz sensibles au "bronzing"
dans différentes rizières à toxicité ferreuse de Java.
Cette faible capacité d'échange a deux consé- une croissance et un développement satisfaisants.
quences : diminuer les possibilités de tamponner De toute évidence, les sols sensibles à la toxicité
chimiquement le pH et limiter la disponibilité ferreuse seraient donc caractérisés par un niveau
en éléments essentiels pour la plante. En particulier, de fertilité systématiquement bas, et, en con-
les teneurs en P, K, Ca, Mg et Zn restent basses, séquence, le riz pourrait souffrir davantage d'un
et doivent être considérées comme trop limitées, état de carences multiples que du seul bas pH des
ou même notoirement insuffisantes, pour assurer sols.
Thème 11/ - Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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~
Floraison
IR8
1
Second
repiquage l 100
r i •
~ i i
j
C
~c~c_ 7 28 51 86 118
•• C C/ \ Jours
C .... \ c_c'c/
Figure 2. Effets des applications in situ d'engrais
.".-.-.... .-.-.
. \ / c
i~c • c ....
(traitements NPK et NP, comparés aux traitements
.~" \ NP, NCa et N) sur le passage du fer jusqu'au feuillage
du riz IRS replanté dans un sol sulfaté acide de Loudia
7 2~ ~~ 65 92 110 Ouoloff (Basse Casamance, Sénégal). Les données
concernant les effets des engrais NPK et NP,
d'une part, celles concernant les effets des engrais NK,
pH
NCa et N, d'autre part, sont, à l'intérieur
de chaque groupe ainsi défini, suffisamment proches
pour permettre de ne constituer que deux lots
5,5
pour faciliter la lecture des courbes;
la même convention s'applique aux figures 3 et 4.
5,0
attribuée à des teneurs élevées en fer hautement indemnes de toute forme de Il bronzing '11, et cela
mobile, libérées par des processus réducteurs, très pendant tout le cycle végétatif. Ce résultat suggère
actifs et de nature microbienne. Cette TFP doit être que phosphore et potassium constituent des
différenciée (et on peut visuellement le faire) de la éléments essentiels à apporter pour empêcher les
Il toxicité ferreuse secondaire lt (en abrégé TFS, et en symptÔmes de Il bronzing lt dans les rizières
anglais, Il secondary iron toxicity lt, Sil). Celle-ci inondées.
survient généralement pendant les plus actives des
Dans le tableau VI, sont rapportées les teneurs en
phases de croissance du riz.
éléments minéraux mesurées sur les feuilles
prélevées au tallage maximal (cette étape de la vie du
Effets de la fertilisation riz est la plus active sur le plan de la physiologie). Si
dans un sol sensible non acide on considère les teneurs mesurées en N, P, K, Zn et
Ca, on ne peut affirmer qu'il ya carence en se refé-
A Cihea (ouest de Java), tout au long des cinq rant aux limites classiques indiquées dans le tableau
semaines qui ont suivi le repiquage, des symptômes III. En revanche, les teneurs en fer sont toutes, quel
nets de Il bronzing lt ont été observés sur les plants que soit le traitement, supérieures au seuil toxique
IR26, à la fois dans les parcelles de contrôle sans généralement admis, qui se situe au voisinage de 300
aucun apport et celles des essais N, Zn, NZn et ppm. A l'exception du traitement NZn, les teneurs les
NZnP. Un certain nombre de plants, dans ces plus basses en fer se constatent dans les essais
parcelles, se développaient très peu ou lentement, multiples, apportant au minimum trois éléments:
voire mouraient, à cause, selon toute vraisemblance, NZnK, NZnPK, engrais organique.
d'une toxicité ferreuse primaire. Après huit semaines
environ, l'état de santé des plants ayant survécu Il paraît particulièrement intéressant de signaler que
s'améliorait, et en particulier celui des poquets des la teneur en Fe (mais aussi celle en Mn) a dépassé le
parcelles de l'essai NZnP. seuil critique de toxicité de 300 ppm pour les plants
de deux essais, NZnPK et engrais organique, sans
A la floraison, on retrouvait des symptÔmes carac- pour autant que les symptÔmes de Il bronzing lt ne se
téristiques de Il mentek lt sur les plants des trai- soient manifestés. Il semble donc qu'un apport
tements précédemment favorables à la TIP : retard satisfaisant à la fois en P et en K (si le niveau en N est
constaté dans la formation. de la feuille-drapeau (la aussi convenable) est de nature à réduire
dernière), présence de nombreuses petites taches de l'assimilation du fer et à empêcher le Il bronzing lt.
Il bronzing lt. Ces deux constatations sont bien repré-
sentatives d'une toxicité ferreuse, et cette symptô- Dans le tableau VII sont présentés les résultats de
mologie typique est fort bien connue des agriculteurs productions en grain et en paille suivant les engrais.
locaux, qui ont pu l'observer sur un grand nombre de Les meilleures récoltes et les productions maximales
variétés de riz, dans tous les sols sensibles de Cihea. de paille sont obtenues dans les parcelles des essais
La formation tardive de la feuille-drapeau se constate NZnK, NZnP, NZnPK ou avec apport organique.
facilement pendant l'épiaison, et est plus fréquente Cela, une fois de plus, ne peut que confirmer que les
sur les plants des essais N, Zn, NZn et sur le témoin traitements pour lesquels les éléments P, K et Zn sont
absolu que dans les parcelles à NZnP. Les riz des en quantités insuffisantes ne sauraient être
parcelles NZnPK, comme ceux des lots NPK satisfaisants pour obtenir une croissance optimale du
organique (déjections aviaires), étaient totalement riz.
Tableau VI. Effets de différents mélanges d'engrais sur les teneurs en différents éléments minéraux,
mesurées lors des analyses sur des feuilles de variété de riz IR 26, prélevées au tallage
maximal dans une rizière à toxicité ferreuse de Cihea (à l'ouest de Java), en Indonésie.
Fertilisation N P K Fe Mn Zn Ca Mg
(mg kg- 1) (%) (mg kg- 1 )
Témoin 3,2 0,22 1,7 nl 1063 27 0,53 1036
N 3,5 0,26 1,7 817 822 27 0,47 1 118
Zn 3,1 0,23 1,6 740 936 33 0,48 973
NZn 3,7 0,25 1,7 430 898 31 0,44 1200
NKZn 3,4 0,23 1,9 660 847 28 0,41 980
NPZn 3,4 0,27 1,6 733 973 30 0,48 1220
NPKZn 3,6 0,25 1,9 545 815 34 0,41 960
Compost aviaire 3,5 0,25 2,0 680 804 33 0,46 950
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
Tableau VII. Effets de différents mélanges d'engrais sur les rendements en grain et paille de la variété IR 26,
lors d'un essai sur un sol à toxicité ferreuse de Cihea (ouest de Java), en Indonésie.
Fertilisation Grain Paille Biomasse totale
(t ha- 1) (t ha- 1) (t ha- 1)
Témoin 4,05 (100)· 3,87 (100)· 7,92 (100) •
N 4,08 (101) 3,52 (90) 7,60 (90)
Zn 4,18 (103) 3,33 (86) 7,51 (95)
NZn 4,31 (106) 3,92 (101) 8,23 (104)
NKZn 6,02 (105) 5,38 (140) 11,48 (145)
NPZn 5,33 (132) 4,93 (127) 10,26 (130)
NPKZn 6,62 (164) 6,21 (160) 12,83 (162)
Compost aviaire 6,22 (153) 5,00 (130) 11,22 (154)
• Les chiffres du témoin constituent la base 100 %.
,,, /\"0
Les données analytiques obtenues sur de nombreux , pflmalfe Il.
§: ° NK,NCa ,N
sols et par les analyses foliaires, tout comme les -..;::
500
Ci)
résultats des essais d'engrais chimiques ou eu
-t:::
organiques, réalisés sur différents sites sensIbles, vont
,,
l)
'CU /,00
dans le même sens. Ils confirment avec certitude Ci)
Ci)
\ F'ï:"ison
,,
l'hypothèse (BENCKISER et al., 1983, 1984 a) que
/\
~
.~\0,;0 /01'
l'entrée des ions ferreux dans le système racinaire du :os 300
riz inondé est due principalement à un déficit ~
multiple en macroéléments, et seulement de façon
Ci)
c:: 200 ,
accessoire aux pH acides et/ou à la disponibilité en
fer mobile après engorgement.
",/
\.
1
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CI)
1
1
Floraison
.... 2000
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Flétries 0:: •
r 1 1 i 1 .,
7 25 51 85 118
• •
Jours 500
•
\
.. •
Figure 4. Effets des applications d'engrais
(traitements NPK et NP, comparés aux traitements
NK, NCa et N) sur le passage du potassium jusqu'au ,
•
• •
"- .....
• e-_ -. -
,90 1
Q
••
t
feuillage d'un riz IRB replanté dans un sol sulfaté acide
500 1000 1500
de Loudai Ouoloff (Basse Casamance, Sénégal).
Expériences au champ. Fe (ppm)
Sur le plan de la prévention, les rizières sensibles à la et la floraison. La seule parade serait des apports de P
forme A doivent faire l'objet de deux séries de et de K, et, si utile, de Ca et de Mg. Cependant, avant
mesures: de l'affirmer, il est indispensable de faire des
- les jeunes plants issus des pépinières doivent être analyses de sols et de feuilles. En définitive, les
plongés, pendant toute une nuit, dans une solution à auteurs de la présente publication considèrent la
2 % de ZnO pour pallier la carence en Zn (BENCKISER toxicité ferreuse secondaire comme une maladie
le de carence lt, qui disparaîtra dès que le sol aura
et al., 1984 a) ;
reçu une fertilisation convenable. Cette forme de
- ils doivent ensuite être replantés 01 en est de même toxicité ferreuse est devenue très rare dans toutes les
pour les semences, en cas de semis direct), en zones de riziculture intensive, caractérisées par des
respectant un certain délai, qui va de 2 à 20 jours apports d'engrais massifs et fréquents, comme au
après le labour et l'inondation de la parcelle (PRADE Japon par exemple.
et al., 1988).
La durée de l'attente avant la transplantation ou le
semis est variable selon le sol et est très largement Remerciements. Cette recherche a été cofinancée par la
fonction de la cinétique globale (vitesse et durée!) de GTZ (Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit),
la réduction microbienne du fer ferrique. Cette Eschborn, Allemagne, et par une bourse de recherche (TSD
cinétique d'apparition du fer ferrique a également été 229) de la Commission des Communautés européennes,
étudiée par VIZIER (1978, 1987). Globalement, on Bruxelles, Belgique.
peut prédire, selon MUNCH et Dnow (1983), que des
quantités croissantes de matière organique
incorporées au sol augmenteront l'intensité et la
vitesse de réduction du fer ferrique et de mise en
solution des ions FeOO. Au champ, la fin des premiers
processus de réduction des formes de fer peut être
Références bibliographiques
visualisée par des irisations rouge-brun à la surface
du sol humide ou, en phase de submersion, à la BABA 1., 1958. Methods of diagnosing Akiochi, iron
surface de l'eau: cette irisation est due à la toxicity and hydrogen sulphide toxicity in the wet zone
reprécipitation de formes de fer précédemment rice fields ofCeylon. Trop. Agriculturist, 114: 231-236.
solubilisées. Dans la plupart des zones rizicoles,
caractérisées par un déficit en eau d'irrigation en BABA 1., INADA K., TAjlMA K., 1965. Mineral nutrition
and the occurrence of physiological diseases. In : The
début de cycle, une part importante des pertes doit
minerai nutrition of the rice plant, Symposium IRRI, 1964.
être attribuée à un tel repiquage le prématuré lt, c'est-
Baltimore, The Johns Hopkins Press, p. 173-195.
à-dire effectué avant la fin de la phase réductrice.
Cette période est également propice à toute sulfato- BENCKISER G., OTTOW J.CG., SANTIAGO S.,
réduction précoce (jACQ et al., 1991). WATANABE 1., 1982. Physico-chemical characterization
of iron toxic soils in some Asian countries. IRRI Res. Pap.
Alors que la toxicité ferreuse primaire s'explique par Ser., 88 : 1-11.
la haute sensibilisation des racines des jeunes plants
endommagés lors du repiquage, la toxicité ferreuse BENCKISER G., OTTOW J.CG., SANTIAGO S.,
secondaire doit s'expliquer comme un désordre WATANABE 1., 1983. Eisentoxizitat-Einfluss einer po, K-,
physiologique créé par un apport insuffisant en Ca- und Mg-Düngung auf Rhizoflora, Redoxpotential und
éléments fertilisants pendant les phases de Eisenaufnahme bei verschiedenen Reissorten (Oryza sativa
croissance ou d'intense activité végétative. La L.) Landwirtsch. Forsch., 36 : 285-299.
perméabilité des racines, dans les deux sens, et le
BENCKISER G., OTTOW J.CG., WATANABE 1.,
passage des métabolites, vers l'extérieur, sont le SANTIAGO S., 1984 b. The mechanism of excessive iron
résultat d'une insuffisance (et d'un déséquilibre, par uptake (iron toxicity) of wetland rice. J. Plant Nutr., 7 : 177-
rapport à la fertilisation azotée) des disponibilités en 185.
K et P, voire en Ca, Mg et Zn (ISMUNADJI, 1976 ;
TROlLDENIER, 1977 ; Onow et al., 1983 ; BENCKISER et BENCKISER G., SANTIAGO S., NEUE H.U., WATANABE
al., 1984 a et b ; PRADE et al., 1988). Ces composés 1., OTTOW J.CG., 1984 a. Effect of fertilization on
organiques exsudés, d'une part, activent très exudation, dehydrogenase activity, iron-reducing
fortement la microflore réductrice (BENCKISER et al., populations and Fe(ll)-formation in the rhizosphere of rice
(Oryza sativa L.) in relation to iron toxicity. Plant Soil, 79 :
1983 et 1984 b) et, d'autre part, empêchent le
305-316.
fonctionnement des processus qui oxydent les
composés ferreux à la surface racinaire, et tout FASSBENDER H.W., AHRENS E., 1977. Laborvorschriften
particulièrement lors de la phase la plus intense du und Praktikumsanleitung. Gtittinger Bodenkund. Ber., 47 :
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(.possi~i lités netteme ll t ac~.rues,mais. varï~ blessuivant. les sols,' désolu bi li5~ti()llet 'demobll is~ tionde.y
. ··...../C0'llp0Sésfli!rreù·~: la~éductièin dll.ferSei'épercutë donc plùs ouOloinssurlacompositiondelasolutipri>.< ....
.. ?d ll sol et .peùtaillsi~\ioirune influèncesur la hutrition minérale des plantes: Pétùde de Iii dyil~n1iqùë d u )
•...)fe~ est retelllJe c?inme base.d'uneméthodeperinett~nt de porter un diagnostiC.sur)'état. des lniliIilU:( ..
:~~9:i~~h~~;i~t~?~~~i~;~~~ii~1I~6~~tè:t;t~~?~~i~::txs~vr:~r:.;j~~}s~1;i:;;;:~!~li;~~;~:;)::i·<
<»d/appr~cierl'intensité des proçessus.d~oxYdo~é~uctioll i.su~lli!s modèles.expérimentalJx;enèpréd~e l e . . . :
....•.. ···..\~omportèment des sols subissant'un excèsd'eauet app~cie 1E!!i risquesde déséquilibreSriutriti()n~elslié~.).
' .. <.àlâprésencedefortesconcentratiolls de ferferreuxdanslasolutioridu sol: diagnosticPE!rniet~ile)< ... Ce
>meilleurli! gestion des terres de bas-fond-en vue d'une utilisation riziêole. .. . ..' ... ' .
:',~~t~:bl~s • ~~~f~l1d, an~êr~bi~~~/~~ç~~'~~u~tio~,fli!r,<~i~i~~1t~~k" .
Après la disparition de l'oxygène dans le sol saturé études, faites surtout en laboratoire, il n'est pas
d'eau, le développement des micro-organismes possible d'établir clairement le rôle exact de ces
anaérobies s'accompagne de la réduction de divers micro-organismes dans les processus de réduction.
composés minéraux, accepteurs d'électrons, dans Enfin, il n'est pas certain non plus que le dévelo-
des processus d'oxydoréduction impliquant succes- ppement des micro-organismes dépende toujours de
sivement les nitrates, les composés manganiques, ces processus (GHIORSE, 1988). Ces remarques
ferriques, les sulfates, le bioxyde de carbone (TAKAI et limitent un peu l'intérêt que peuvent présenter des
al., 1963 ; PONNAMPERUMA, 1972). Cette succession numérations de populations bactériennes, par
de réductions se traduit par des variations des valeurs exemple, pour évaluer l'influence des modifications
de certains paramètres physico-chimiques du milieu de l'activité biologique du sol sur la dynamique du
(Eh, pH). Les produits formés sont volatils (azote, fer.
méthane), insolubles (sulfures) ou au contraire plus
solubles que les formes oxydées (composés La seconde approche envisage la dynamique du fer
manganeux', ferreux). La mobilité relative des comme une conséq uence des processus d'oxy-
constituants du sol est de ce fait très différente de doréduction, dont le développement est lié aux
celle des milieux aérés. Il en résulte des redis- modifications de l'activité biologique du sol.
tributions particulières de certains constituants du L'évaluation du développement de ces processus et
sol, et notamment du fer. de leurs conséquences est réalisée par la déter-
mination de paramètres physico-chimiques mesurés
Le mode de redistribution du fer, caractéristique des in situ ou sur des modèles expérimentaux, en
conditions plus ou moins réductrices existant dans le laboratoire. C'est cette approche physico-chimique
milieu, confère à cet élément un rOle d'indicateur de qui a été retenue pour l'établissement d'un diag-
l'importance des processus de pédogenèse liés à la nostic de l'état des milieux saturés d'eau.
saturation du sol par l'eau, ou plus simplement un
rOle d'indicateur de l'hydromorphie (VillER, 1988 i
FAVROT et VillER, 1990). La redistribution du fer
correspond à une transformation de l'organisation Etude de la dynamique du fer
des constituants du sol qui peut se répercuter sur
certaines de ses propriétés, comme la conductivité
par une approche physico-chimique
:-. ».. :-."'«·:-. "'OI.""». w»:-. :-:-.~:-. "«<oo."'*" "'OI. :-."'OI."'OI. "«««". ».."»». '». "'01. "'»». "«'0'
~
représente une composante importante du fonc-
tionnement des sols saturés d'eau, tant par les
EVOLUTION EN ANAEROBIOSE DE LA FRACTION ORCANIQUE
conséquences que cette dynamique a sur l'évolution
des sols que par celles qu'elle peut avoir sur ET
conditions d'utilisation des sols en évaluant les considéré comme étant un paramètre mesurant
contraintes qui peuvent résulter de la plus ou moins l'intensité des processus d'oxydoréduction
. grande mobilité du fer ferreux: modifications des (PONNAMPERUMA, 1972). Ces mesures sont accom-
propriétés des sols (réorganisation de leurs pagnées de déterminations du pH, les réactions
constituants), risques de déséquilibres nutritionnels d'oxydoréduction associant souvent des échanges de
pour les plantes, de colmatage ferrique des drains protons à des échanges d'électrons. De telles
(concentrations de fer ferreux dans la solution du mesures sont couramment effectuées dans les
sol), Les applications de l'étude de la dynamique du milieux naturels et ne présentent pas de difficultés de
fer présentées ici se rapportent à l'utilisation des réalisation particulières.
milieux saturés d'eau pour la riziculture.
Le dosage de formes réduites complète l'appré-
ciation portée sur l'ambiance physico-chimique du
milieu. L'intérêt du fer comme élément indicateur de
Appréciation de l'ambiance l'intensité des processus étudiés réside dans le fait
physico-chimique d'un milieu que l'état d'oxydoréduction du sol paraît être
largement contrÔlé par le système fer ferreux/fer
Le développement des processus d'oxydoréduction
ferrique (PATRICK, 1981). Les valeurs de fer réduit
se répercute sur l'ambiance physico-chimique du
obtenues sont comparées à celles de différentes
milieu. Les modifications de cette ambiance peuvent
formes du fer dosées dans le sol aéré. Les formes
être appréciées par la mesure in situ du potentiel
réduites ou oxydées dont on compare les teneurs
d'oxydoréduction et la détermination, sur des
sont évidemment fonction des méthodes de dosages
prélèvements de sol saturé d'eau, des concentrations
retenues (fer ferreuxlfer total ou fer ferreuxlfer
de formes réduites de certains constituants des sols,
amorphe, par exemple).
comme celles de fer ferreux (voir annexe).
Les résu Itats obtenus peuvent être rapprochés des
Concernant le potentiel d'oxydoréduction (Eh), les
mesures de potentiel d'oxydoréduction et y être
valeurs obtenues sont fonction du rapport des
associés pour définir des « classes d'intensité de
activités des formes réduites et oxydées. La séquence
réduction» caractérisant bien l'ambiance physico-
de réduction précédemment évoquée étant
chimique d'un milieu (tableau O.
généralement suivie, les valeurs de Eh indiquent, en
principe, l'état d'oxydation ou de réduction dans Appliquée, par exemple, à la connaissance du
lequel se trouvent les constituants minéraux du sol fonctionnement d'un bas-fond rizicultivé des hautes
susceptibles d'être réduits. A ce titre, Eh peut être terres de Madagascar, l'appréciation in situ de
Tableau 1. Quelques exemples de "classes d'intensité de réduction" caractérisant l'ambiance physico-chimique du milieu.
Réduction très forte Réduction forle Réduction moyenne Réduction faible (3)
20 % < Fe (II) 1 Fe (III) < 1 %
Fortes diminutions Conditions pouvant,
du rendement des lors de certaines phases
cultures de riz du cycle du riz, être
défavorables au
rendement des cultures
(repiquage du riz)
(1) Valeurs corrigées à pH 7 (PATRICK, 1981).
(2) Yu TIEN REN (1985).
(3) Fe (II) dosé après extraction par une solution de AICI 3 à 0,2 % et Fe (III) dosé après attaque HCI à chaud, dans les sols d'un bas-
fond à Madagascar (VIZIER et al., 1990).
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
,1
supposer l'existence de déséquilibres nutritionnels, ,
voire de phénomènes de toxicité, dus à la présence 500 10
O~=---_------''-----------L o
Appréciation de la mobilité o 10 20 JO 40
temps de saturation (j)
du fer ferreux
Fe(II)601utlon/Fe(II}sol \
Une forte réduction du fer n'est pas toujours 2
synonyme d'une grande mobilité, donc d'une
importante redistribution dans le sol ou d'une forte
disponibilité de cet élément pour les plantes. Une
part seulement du fer réduit dans le sol saturé d'eau
se trouve dans la phase liquide. Seules des déter- o .L- _
végétative du cycle de la plante et n'induit pas de saturation du sol par l'eau (figure 2). Cette
risque de toxicité. immobilisation, plus ou moins importante suivant les
sols, est attribuée à la formation de composés ferreux
Pour le deuxième sol (courbe 2), également aménagé
moins solubles ou à l'adsorption du fer réduit sur les
sur un versant de bas-fond, mais mieux pourvu en
surfaces de la phase solide du sol (VIZIER, 1983). Le
matière organique (6,1 %), la concentration
développement de ces différents processus dans le
maximale en fer est très forte (395 ppm) et intervient
sol saturé d'eau témoigne de l'existence
après 10 jours de saturation. Il existe un risque
d'interactions à l'interface sol-solution, mettant en
certain de toxicité, mais la rapide évolution des
jeu des mécanismes de précipitation-dissolution et
concentrations permet de préconiser que l'on diffère
d'adsorption-désorption. Ces interactions sont très
d'un mois le repiquage, après la mise en eau de la
différentes suivant les sols et évoluent dans un même
rizière.
sol avec la durée de saturation, comme le montrent
Pour le troisième sol (courbe 3), aménagé dans la les variations du degré de mobilité du fer (valeurs du
partie basse d'un bas-fond riche en matière rapport Fe (II) solution/Fe (II) sol).
organique légèrement hydrophobe (21,3 %), le
maximum de concentration en fer ferreux intervient
après une longue période de saturation, mais il
correspond à un risque certain de toxicité étant Appréciation de la disponibilité
donné le niveau atteint (458 ppm). du fer ferreux .
Le second enseignement tiré de ces résultats obtenus Au-delà de la prévention des risques de toxicité
sur des modèles en laboratoire se rapporte à la nature ferreuse pour le riz, les connaissances acquises sur la
différente des processus qui se développent quand la dynamique du fer par le suivi des concentrations
durée de saturation augmente. dans la solution recueillie par percolation peuvent
être complétées, en ce qui concerne la disponibilité
Pendant une première période, allant du début de la de cet élément pour les plantes et les risques de
saturation du sol par l'eau jusqu'au temps pour déséquilibre nutritionnel, par une méthode visant à
lequel on obtient le maximum de concentration en « quantifier» l'intensité des interactions existant à
fer ferreux dans la solution recueillie par percolation, l'interface sol-solution.
la croissance des concentrations dans la solution
correspond à l'augmentation des quantités de fer L'appréciation de la disponibilité du fer ferreux dans
réduit dans le sol. La mobilisation du fer est donc les sols saturés d'eau est obtenue par une méthode
directement reliée à sa réduction. Au-delà de ce mesurant la susceptibilité des surfaces de la phase
temps de saturation, la diminution des concen- solide du sol à libérer plus ou moins facilement le fer
trations en fer ferreux dans la solution s'observe ferreux dans la solution du sol.
tandis que les quantités de fer réduit dans le sol se
stabilisent ou augmentent légèrement. Un processus La méthode choisie consiste à réaliser une cinétique
d'immobilisation progressive partielle du fer ferreux de séparation des formes de fer ferreux présentes
se développe donc après une certaine durée de dans une suspension de sol (rapport sol/solution
d'environ 1/10), grâce à un dispositif fonctionnant
suivant le principe de l'électrodialyse (voir annexe).
phase liquide, dépend de l'abondance de tous les FAVROT J.c., VIZIER J.F., 1990. Les sols à caractères
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metabolism in reduction process of paddy soils. Parts 2 and
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colonnes de sol saturé d'eau permet d'estimer la (4) : 32-38.
capacité d'un sol à réduire et mobiliser le fer. Cette VIZIER J.F., 1969. Choix et mise au point d'une méthode
appréciation de la mobilité du fer sur des modèles de dosage du fer ferreux applicable aux sols hydromorphes
expérimentaux en laboratoire constitue une bonne minéraux. Cah. ORSTOM, sér. Pédol., 7 (3) : 435-445.
approche prévisionnelle d~.fonctionnement des sols VIZIER J.F., 1978. Etude de la dynamique du fer dans des
saturés d'eau et de l'existence de risques de toxicité sols évoluant sous l'effet d'un excès d'eau. Etude
ferreuse pour le riz. expérimentale sur des sols de rizières de Madagascar.
Cah. ORSTOM, sér. Pédol., 16 (1) : 23-41.
La séparation par électrodialyse des formes de fer
présentes dans une suspension de sol permet enfin VIZIER J.F., 1983. Etude des phénomènes d'hydromorphie
de mieux apprécier la disponibilité du fer ferreux dans les sols des régions tropicales à saisons contrastées.
dans ces sols et les risques éventuels de déséquilibres Dynamique du fer et différenciation des profils. Paris,
nutritionnels pour les plantes, puisque cette ORSTOM, 294 p. (Coll. Travaux et documents, n° 165).
disponibilité paraît dépendante de l'abondance des VIZIER J.F., 1988. Le fer indicateur de l'hydromorphie.
autres éléments nutritifs présents dans le sol. Etude de sa dynamique dans les sols subissant un excès
d'eau. Bull. GFHN, 23 : 25-38.
VIZIER J.F., 1990. Etude du fonctionnement des milieux
saturés d'eau. Une démarche physico-chimique. Cah.
ORSTOM, sér. Pédol., 24 (3) : 431-442. .
Références bibliographiques VIZIER J.F., GIUDICI P. de, RAUNET M., 1990. Etude
BERTHELIN J., 1982. Processus microbiens intervenant physico-chimique des sols de rizières d'un bas-fond sur les
dans les sols hydromorphes en régions tempérées. hautes terres de Madagascar. Conséquences pour la
Incidence sur la pédogenèse. Pédologie, 32 (3) : 313-328. riziculture. L'Agron. Trop., 45 (3) : 171-177.
VIZIER J.F., DOULBEAU S., 1991. Premiers résultats sur la
BOHN H.L., 1968. Electromotive force of inert electrodes séparation par électrodialyse des formes de fer ferreux
in soil suspensions. Soil Sei. Soc. Am. Proc., 32 (2) : 211-
présentes dans un sol saturé d'eau. ln: Compte rendu de la
215.
Ive réunion du Groupe de réflexion sur l'étude de la
CHEIKHZADEH-MOSSADEGH D., 1981. Contribution solution du sol en relation avec l'alimentation des plantes,
expérimentale à l'étude de la géomicrobiologie du fer dans Montpellier, France, septembre 1991 .
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156 p. Beijing, Seience Press, Berlin, Springer Verlag, 217 p.
DUCHAUFOUR P., 1977. Dynamique de la matière ZOBELL C.E., 1946. Oxidation reduction potential of
organique. In : Pédologie. 1. Pédogenèse et classification. marine sediments. Bull. Am. Ass. Petrol. Geel., 30 : 477-
Paris, Masson, p. 28-70. 513.
J.F. VIZIER
ANNEXE
Caractérisation in situ de l'ambiance addition d'eau permutée ou distillée, dont on établit puis
physico-chimique d'un milieu maintient le niveau environ 5 cm au-dessus de celui du sol
dans la colonne. Un percolat de 70 à 80 ml est recueilli au
Détermination du potentiel d'oxydoréduction (Eh) bas des colonnes, suivant une périodicité qui dépend de la
Une électrode combinée (Pt, Ag/AgCI ou Pt, calomel dynamique de l'eau dans le sol étudié. Le fer est dosé dans
saturé) est enfoncée dans le sol, après avoir la solution recueillie par percolation, soit directement
éventuellement opéré une cavité cylindrique de la sous forme ferreuse si l'opération se déroule sous
dimension de l'électrode si le sol est trop compact. Le atmosphère d'azote, soit après réduction, si la percolation
milieu est peu perturbé par l'insertion de l'électrode dans est effectuée à l'air libre.
le sol. Les valeurs de Eh indiquées par le millivoltmètre
auquel est connectée l'électrode varient avec le temps;
elles tendent cependant à se stabiliser et la lecture est faite
lorsque la Variation est inférieure à 2 mV min- 1 , Détermination de la disponibilité du fer
généralement 10 à 20 min après la mise en place de ferreux et évaluation des risques
l'électrode dans le sol saturé d'eau (BOHN, 19G8). Entre de déséquilibres nutritionnels pour le riz
chaque détermination, l'électrode est nettoyée avec une La détermination est effectuée sur une suspension de sol
solution acide et abondamment rincée à l'eau distillée.
L'étalonnage de l'électrode est régulièrement réalisé à
°
(rapport sol/solution de 1/1 environ) réalisée à partir
d'une colonne de sol saturé d'eau. Toutes les opérations
l'aide d'une solution de chlorure de potassium à 0,1 M, sont effectuées en boîte à gants sous atmosphère d'azote
contenant 0,003 M de ferrocyanure de potassium et 0,003 pour éviter les risques de réoxydation. Un échantillon de
M de ferricyanure de potassium: le potentiel très stable de 12 à 15 g de sol (la masse exacte est déterminée en fin
cette solution est de 0,428 V à 25 oC (ZOBELL, 1946). La d'opération) est prélevé dans la colonne dès la fin de la
mesure de Eh est répétée plusieurs fois dans le milieu dont percolation de la totalité de la solution pouvant être
on veut caractériser l'ambiance physico-chimique. Le recueillie par gravité au bas de la colonne (environ
nombre de répétitions dépend de l'hétérogénéité du sol. 130 ml). Des dosages de fer ferreux sont effectués sur une
aliquote de la solution recueillie, et également sur d'autres
Détermination du pH du sol prélèvements de sol de la colonne (suivant la méthode
La mesure s'effectue à l'aide d'une électrode combinée déjà présentée, avec extraction par le chlorure d'alu-
(verre, calomel saturé) sur les mêmes emplacements et minium). Ces dosages permettent de connaître exac-
suivant un protocole analogue· à celui de la détermination tement le fer ferreux contenu dans la solution et le sol de
du Eh (stabilisation des valeurs du pH obtenue quelques la suspension sur laquelle va être effectuée la séparation
minutes après la mise en place de l'électrode, étalonnage, des formes du fer par un champ électrique (ddp constante
nettoyage de l'électrode par rinçage à l'eau distillée). de 80 V). Cette suspension est introduite dans le
compartiment central d'un dispositif qui en comporte cinq
Dosage du fer ferreux dans un sol saturé d'eau (cf. figure) et fonctionne suivant le principe de l'élec-
Un échantillon de 2 à 4 g de sol est mis, immédiatement trodialyse.
après son prélèvement, dans un erlenmeyer contenant 50
ml de chlorure d'aluminium à 0,2 %. Cet erlenmeyer est
conservé à l'abri de la lumière (pour éviter les risques de Les conditions de pH sont maintenues constantes dans le
photoréduction) et régulièrement agité. Après 24 h de compartiment central pendant toute la séparation, grâce à
contact, l'ensemble est centrifugé et le liquide surnageant l'utilisation de membranes cationiques, anioniques et de
filtré (toujours à l'abri de la lumière dans des fioles solution tampon, limitant le transfert des ions H+ et OH-
entourées de papier noir). Le fer ferreux est dosé dans la produits aux électrodes. L'intensité du courant, variable
solution filtrée, par spectrophotométrie à 520 nm, après au cours de la séparation, est régulièrement mesurée. Des
addition d'un réactif constitué de solution tampon à pH dosages de fer réalisés sur des prélèvements effectués en
4,6 contenant 0,2 % de 2-2' dipyridyl. Le poids de terre cours de séparation dans le compartiment central et les
recueilli après la centrifugation est déterminé après compartiments adjacents permettent de suivre la
séchage à l'étuve à 105 oC (VIZIER, 1969). La centri- répartition de cet élément dans les différents
fugation et la filtration peuvent être remplacées par une compartiments, en fonction du temps mais surtout en
filtration sur millipores à 0,2 . 10- 6 m après une fonction de la quantité de courant, exprimée en
vigoureuse agitation de la suspension de sol dans le coulombs. Des quantités de courant, variables suivant
chlorure d'aluminium. les sols, sont ainsi nécessaires pour extraire du com-
partiment central le fer de la solution et le fer du sol de la
suspension; elles sont indicatrices de la plus ou moins
Caractérisation du degré de mobilité grande susceptibilité d'un sol à libérer le fer ferreux dans
du fer ferreux et évaluation des risques sa solution. La détermination simultanée d'autres cations
de toxicité ferreuse pour le riz dans les prélèvements effectués en cours de séparation
permet de connaître la susceptibilité d'un sol à libérer
Un échantillon de 100 à 300 g de sol est mis dans une différents nutriments dans sa solution, et peut servir ainsi à
colonne et tassé de manière à reproduire une densité évaluer les risques de déséquilibres nutritionnels pour les
apparente voisine de celle du sol en place. Il est saturé par plantes (VIZIER et DOULBEAU, 1991).
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
Cl C2 C3 C4 cs
J
1
ow 1
1 Fe 2 +
r :~
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1 1 1
M 1/2A M 2/3C M3/4A M4/SC
L....------------I: r 1
80V
:1------------.. .
Annexe. Schéma du dispositif utilisé pour la séparation par électrodialyse des éléments
contenus dans une suspension de sol.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
ClRAD,1993
.•·c.\.•·•.•·••••··•·:.....y·.··.rizicllitivésa··été.
• •. •.···..C~ésJ~é .• · •·. •. • li ritétÜdlti~~t··à~~Aaé~is~F.ljévol
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to~iqlJès).l.êrendêrt1entfinal de la culture semble dépendantdescollditioMc:I'oxydorêc:lûctiondessols«<>
:!ili~~il!I!~ii~~~~!~~~;~WJl~J~!C~Ei~~;t:S;;t~~~;~~~g'~~~J~;7;~!~;!~~;f~1~~~'lti:i
Introduction 1955). Ces substances sont issues du métabolisme
anaérobie de nombreuses espèces bactériennes
Les bas-fonds représentent une part importante hétérotrophes (BERTHELlN, 1982) et leur accumulation
du terroir rizicole des hauts plateaux malgaches. se traduit par des valeurs très basses du potentiel
Comprendre leur fonctionnement agronomique est d'oxydoréduction (Eh) du milieu. Le fer, élément très
donc d'un grand intérêt pour la productivité agricole abondant et facilement réductible des sols acides
de ce pays. tropicaux, semble jouer un rôle prépondérant dans
ces phénomènes (jEFFERY, 1961).
Dans le cadre du projet d'ATP « Bïlan hydrique et
minéral d'un bas-fond des hautes terres de Mada- Au sein des bas-fonds typiques des hautes terres
gascar 'II, GAUDIN (1988) a montré que, dans certaines malgaches (bas-fond de suffosion), RAUNET (1980) a
parcelles subissant un engorgement prolongé, le riz décrit des variations dans la nature des sols et la
ne prélevait pas l'azote mis à sa disposition dans la dynamique des nappes selon un axe longitudinal de
solution du sol. l'amont vers l'aval. Ces disparités traduisent dans les
sols des conditions physico-chimiques différentes -
Le riz est une plante bien adaptée aux conditions anoxie, acidité, présence de substrats organiques
anoxiques : son aérenchyme permet le transport de facilement oxydables, etc. - plus ou moins propices
l'oxygène gazeux depuis les parties aériennes à la libération de substances toxiques.
jusqu'aux racines, où Il est excrété. Cependant, dans
un sol submergé, la présence de substances réduites Le but de cette étude a été de suivre, in situ, les
susceptibles de nuire à la croissance du végétal telles variations spatiales (à l'échelle d'un bas-fond) et
que ions ferreux, H 2 S, acides organiques, etc. a été temporelles (à l'échelle du cycle du riz) de certaines
mise en évidence depuis longtemps (PONNAMPERUMA, caractéristiques physico-chimiques des sols de
rizière. A partir de ces données, nous pourrons esti-
mer dans quelle mesure elles expliquent les pro-
1 Laboratoire de radioisotopes, Université d'Antananarivo, blèmes nutritionnels et les rendements médiocres du
BP 3383, Antananarivo 101, Madagascar. riz sur certaines parcelles.
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Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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Méthode
Dispositif expérimental en milieu naturel
Le bas-fond d'Ambohitrakoho, situé à 25 km au nord
de Tananarive, a servi de terrain d'expériences pour
toutes les études réalisées dans le cadre du projet
d'ATP. Il s'agit d'un bas-fond fortement encastré, si-
tué à environ 1 250 m d'altitude, inscrit dans le ré-
seau de drainage d'une surface d'aplanissement ra-
jeunie (d'âge fini-tertiairel du socle précambrien. Le
substrat géologique est constitué de roches pluto-
niques acides: migmatites et granito-gneiss (RAUNET,
1980l. Ce bas-fond ne comporte pas de cours d'eau
naturel mais aboutit dans une plaine alluviale par-
courue par une petite rivière (figure 1l. Les sols ont
été décrits par RAUNET (1980l : ils sont formés d'un
matériau moyennement organique argileux ou argilo-
limoneux (d'origine colluviale naturelle ou anthro-
piquel de 30 à 60 cm d'épaisseur reposant sur un ni-
veau organique enfoui (tourbe ou limon tourbeuxl.
Ces sols hydromorphes comptent 7 à 10% de matière
organique dans leurs trente premiers centimètres, leur
pH est toujours voisin de 5, la fertilité chimique est
faible, notamment en potassium et phosphore assimi- Figure 1. Dispositif de mesures in situ.
a. Le bas-fond d'Ambohitrakoho et les parcelles
lables. Ils sont aussi très riches en fer amorphe <ta-
expérimentales. b. Disposition des zones de mesures
bleau Il. dans une parcelle. c. Mesures électrométriques.
Six parcelles d'environ 20 m 2 ont été dél imitées
successivement en suivant' l'axe principal du bas-
fond, depuis l'extrême amont jusqu'à la plaine-
exutoire. Au sein de chaque parcelle, cinq zones de Tableau 1. Caractéristiques analytiques
mesures d'environ 100 cm 2 , disposées de manière du sol de la parcelle C.
périphérique et centrale, toujours entre quatre touffes Granulométrie Complexe adsorbant
de riz, ont été déterminées et matérialisées défini- (cobahihexamine)
tivement après le repiquage (figure 1l. Argile 47,6% Ca l,53 mé 100 g-'
Durant toute la campagne, les mesures et prélè- Limon lin 18,6% Mg 0,32 mé 100 g-'
vements ont été effectués dans ces mêmes zones, les Limon grossier 6,6% K 0,06 mé 100 g-'
résultats par parcelle étant égaux à la moyenne des Sable fin 10,2% Na 0,16 mé 100 g-'
résultats des cinq zones.
Sable grossier 17,2% AI O,68méloog-'
T 3,20 mé 100 g-'
Techniques de mesure in situ SIl 65%
Mesures électrométriques Matières organiques Phosphore
MO totale 8,10% Assimilable (Olsen) 10ppm
Les mesures physico-chimiques (température, Eh,
pHl ont été réalisées à l'aide d'un pH-mètre à Ctotal 4,71 % Total (HCIOa) 689ppm
microprocesseur (WTWl relié à : Ntotal 2,96%.
- une sonde thermométrique; CIN 16
- une électrode pH combinée Ag/AgCI, étalonnée Mélaux
avant chaque série de mesures; CBO Fe 26%.
- une électrode Ëh combinée platine-Ag/Ag Cl qui (Mehra AI 4%.
présente un potentiel propre (par rapport à l'élec- Jackson) Mn 0,05 %.
trode de référence à hydrogènel d'une valeur théo-
Acldité
rique de 198,7 mV à 25 oC ; cette valeur est ajustée
par une mesure dans une solution saline standard de pH eau (112,5) 5,10 Ox. Fe 22%.
Eh connu (solution de Zobell ou de Lightl. Après pHKCI 3,75 (Tamm) AI 3%.
P. DE GUIDICI
chaque mesure in situ, l'électrode est nettoyée par chaque parcelle aux moments importants de la
l'acide sulfurique concentré, puis abondamment croissance du riz, à savoir:
rincée à l'eau distillée. - au repiquage;
Pour éviter la submersion des électrodes, un tube de - 20 jours après repiquage (JAR), reprise active de la
PVC de faible épaisseur, de 8 cm de diamètre et de croissance après le « stress» de la transplantation et
hauteur appropriée est préalablement enfoncé dans restauration du sytème racinaire ;
le sol. Après évacuation de l'eau superficielle à l'aide - 40 jours après repiquage, tallage intense;
d'une pompe manuelle, les électrodes et la sonde - à la maturité des grains (soit environ 120 JAR).
sont introduites directement dans le sol saturé à
l'intérieur du tube. Une fois les mesures terminées, le
tube est retiré pour que l'eau recouvre à nouveau la
zone de mesure. Résultats et discussion
Toutes les mesures ont été effectuées dans le sol à
une profondeur de 7 cm.
Evolution des paramètres
physico-chimiques
Les résultats des mesures de ces paramètres appa-
Extraction du fer ferreux par Alel3 2 %0 raissent au tableau Il.
Une quantité de sol saturé équivalente à 2 à 4 g de
sol sec est prélevée à 7 cm de profondeur dans la Evo.lution des températures des sols
zone de mesure, à l'aide d'une petite tarière Les températures des sols, toujours mesurées entre 8
hélicoïdale. Ce prélèvement est introduit dans un h et 11 h du matin, varient de 18,5 à 26,5 oc.
Elles
flacon de 250 ml contenant 50 ml d'une solution évoluent parallèlement aux températures de l'air,
aqueuse d'AICI] à 2 g 1-1• Après une brève agitation avec des valeurs maximales en fin décembre-début
manuelle, le flacon est maintenu à l'abri de la janvier. Elles sont tout à fait favorables à la crois-
lumière. Après 24 heures de contact, la suspension sance du riz et à l'activité microbienne.
de sol est centrifugée et filtrée. Le fer ferreux est dosé
colorimétriquement par l'orthophénanthroline en Evolution des valeurs de pH
milieu sulfurique, et l'échantillon de sol pesé après Les pH des sols, mesurés in situ (figure 2), évoluent
séchage (VIZIER, 1969, 1978). différemment selon la localisation des parcelles:
- dans le cas de la parcelle A (extrême amontl, le pH
Protocole expérimental se maintient pendant toute la campagne dans une
zone de valeurs très proches de la neutralité
Les parcelles ont été cultivées en riz (variété 1632) (comprises entre 6,5 et 6,8) ;
suivant la pratique habituelle en expérimentation: - les parcelles du bas-fond proprement dit (B à E)
repiquage en ligne à 3 brins, écartement de 20 x 20 montrent au moment du repiquage un pH plus ou
cm, après trois semaines de pépinière, fertilisation
NPK (60-90-60> apportée à la mise en boue avant le
repiquage. En fonction de la disponibilité en eau F
o
gérée par les paysans locaux, les dates de repiquage
se sont étalées du 7 novembre 1988 (parcelle A en
tête de bas-fond) au 11 janvier 1989 (parcelle F dans
la plaine).
Durant la campagne, une série de mesures (tem- Figure 2. Variation du pH in situ dans les parcelles
pérature, Eh, pH) et prélèvements a été effectuée sur étudiées.
Thème 111- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
Tableau II. Résultats des mesures des paramètres physico-chimiques des sols des différentes parcelles étudiées.
réduit (Eh > 200 mV) pour les parcelles C et E, sol dans la solution du sol. En effet, la solution d'AICI) à
réduit (Eh < 100 mV) pour les parcelles B et D. Après 2 %0 extrait également la fraction du fer ferreux
le repiquage, le Eh chute vers des valeurs négatives adsorbée sur les surfaces électronégatives et, au
sans atteindre des conditions fortement réduites. moins partiellement, celle complexée par les
Ensuite, on observe une stabilité ou une légère molécules organiques, les complexes MO-AI+++
remontée du Eh à la maturité. étant plus stables que les complexes MO-Fe++
(VINCKLER et al., 1976) ; de plus, son acidité modérée
La parcelle de plaine (F) se montre modérément
lui permet de solubiliser les hydroxydes ferreux ou
réduite au moment du repiquage; ensuite, son Eh
ferroso-ferriques qui précipitent lorsque le milieu est
s'abaisse de manière beaucoup plus lente en restant
riche en fer ferreux et que son pH se rapproche de la
positif au stade de tallage intense. A maturité, on
neutralité (VAN BREEMEN et MOORMAN, 1978; VIZIER,
constate une réoxydation du sol avec un Eh
'978).
nettement supérieur à celui du sol après repiquage.
Contrairement aux valeurs de température et de pH,
les valeurs de Eh rencontrées ici peuvent parfois
s'avérer critiques pour la croissance du riz. En effet,
Utilisation du fer ferreux extrait
non seulement les valeurs de Eh optimales, par Alel 3 comme indicateur
comprises entre + 10 et + 120 mV (PONNAMPERUMA, du potentiel d'oxydoréduction du sol
1978), ne se rencontrent pas de manière durable Aux premiers stades de la culture, on observe une
(sauf peut-être dans la plaine), mais certaines valeurs corrélation négative significative (modèle linéaire)
inférieures à - 100 mV peuvent induire des entre les valeurs de Eh mesurées in situ et les
problèmes de toxicité pour la plante (Yu, 1985). logarithmes décimaux des teneurs en fer ferreux
extrait par AICI) (figure 5),
Evolution des teneurs en fer ferreux des sols
Dans le cas de la parcelle A (extrême amont), les • Repiquage
teneurs en fer ferreux sont très importantes (plus de
620 JAR
7 000 ppm) et relativement stables du stade 20 JAR à
la maturité (figure 4). . ... 40 JAR
• Maturité
ppm
A-A--- A
_.-. ----
7000 _.-8
6000 8---8-'
~
5000 ;' .... C------=--::=~_ --='"..::::::i2..- c LogIFeAICI 3 ]
0,..·--_0---- ppm
4000 1 C'"
• E
3000
8' / ~.~~~_ E
~-----
2000
1000 E/'" F--
F"'" ------_ F JAR
1 1 - .----
o W ~ 100 lW
(quasi neutres) indique qu'à ce stade le sol de la par- mique des sols de bas-fond sur les hautes terres
celle subit un engorgement prononcé depuis déjà malgaches, le fer, dont nous avons constaté précé-
une longue période (plusieurs semaines, voire demment l'importance de la solubilisation, joue
plusieurs mois) ; certainement le rôle le plus important. Le manganèse
- dans le bas-fond proprement dit, les valeurs ne sont est en effet peu abondant et les pH mesurés
pas stabilisées au moment du repiquage, ce qui permettent difficilement d'envisager une toxicité du
montre un engorgement plus récent, mais l'état de soufre ou des acides organiques, surtout nuisibles en
réduction plus avancé (pH> 6, l:h < 100 mV) des milieu très acide (TADANO et YOSHIDA, 1978). De
parcelles B et 0 semblerait indiquer un engorgement plus, la présence de fer réduit en grande quantité
antérieur ou plus prononcé que pour les parcelles C inhibe la solubilisation du manganèse et du soufre
et E (pH S; 5,7, Eh > 200 mV) qui étaient bien (précipitation de FeS) (PONNAMPERUMA, 1955 ;
réoxydées à la mise en eau; TADANO et YOSHIDA, 1978).
- dans la plaine (parcelle F), les premières valeurs La toxicité ferreuse - ou plutôt un ensemble de
indiquent un bon état d'oxydation du sol au moment troubles de croissance liés à la présence de cet
de la mise en eau. Les valeurs observées au stade élément - a été décrite dans de nombreux pays
maturité indiquent une forte réoxydation, qui s'ex- d'Afrique et d'Asie et donne parfois lieu à des
plique par la disparition de la lame d'eau, provoquée symptÔmes caractéristiques, l' le oranging lt et le
par arrêt des précipitations, drainage et assèchement le bronzing lt (HOWELER, 1973 ; TADANO et YOSHIDA,
MO"~'F :
a provoqué un assèchement du sol avec apparition
de fentes de retrait.
Influence de l'hydromorphie
sur la productivité des parcelles
Le nombre trop faible de données n'a pas permis une
étude statistique solide; néanmoins, il semble que le
rendement final des parcelles soit lié aux valeurs du
potentiel d'oxydoréduction des sols en début de
cycle, particulièrement au moment du repiquage Forte
(figure 7).
ABC D ·E
L'influence néfaste de conditions édaphiques Parcelles
fortement réductrices sur la croissance du riz est -0- Stade repiquage - . - Stade de 40 JAR - -0- - Stade maturité
connue depuis longtemps (PONNAMPERUMA, 1955) et
s'explique par l'accumulation dans le sol de subs- Figure 7. Variation comparée du Eh à différents stades
tances réduites toxiques telles que le fer (Fe++), le (courbes) et des rendements en paddy (histogramme)
manganèse (Mn++), le soufre (S-- ou H 2 S) et les dans les parcelles étudiées (d'après PATRICK
acides organiques. Dans l'environnement géochi- et MAHPATRA. 1968).
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
jeunes plantules, et semblant surtout concerner les successivement une phase d'inondation pendant
zones de croissance active situées à proximité de laquelle Ils sont rizicultivés et une phase de dessè-
l'extrémité des racines (TADANO et YOSHIDA, 1978). chement. Si, pendant la saison humide, les rizi-
culteurs s'efforcent de répartir l'inondation sur
Au moment de l'arrachage des plants, ces extrémités
l'ensemble des parcelles, après la récolte, en saison
fragiles sont les plus susceptibles d'être endom-
sèche, le ressuyage des parcelles s'effectue beau-
magées. Après la transplantation, le système raci-
coup plus naturellement et de manière hétérogène
naire, affaibli et blessé, est peu apte à empêcher la
selon leur localisation dans le bas-fond. Ainsi, en
pénétration du fer ferreux (ou d'autres substances
amont du bas-fond et de ses diverticules, la zone
toxiques) si cet élément est très abondant dans la
rizicultivée est étroite, encaissée, et présente une
solution du sol.
pente longitudinale relativement accusée. La nappe
Cette sensibilité particulière des jeunes plants phréatique affleure à la surface pendant toute
repiqués à la toxicité ferreuse a été décrite par PRADE l'année, le drainage est médiocre et l'engorgement
(1987) sur les sols sulfatés acides de Casamance et quasi permanent: les sols sont fortement réduits
baptisée « toxicité primaire» par ce même auteur. pendant tout le cycle du riz, particulièrement au
repiquage, et les rendements sont faIbles. Plus à
La croissance de la plante se poursuivant, l'oxy- l'aval, lorsque la pente longitudinale diminue et que
dation rhizosphérique sera plus efficace et aboutira, la zone rizicultivée s'élargit, les sols connaissent un
dans un milieu riche en fer ferreux, à la constitution meilleur drainage et la nappe descend à plus de
d'une gaine ferrugineuse à la surface des racines 60 cm de profondeur. Au moment du repiquage, la
(PONNAMPERUMA, 1955 ; HOWELER, 1973 ; TROLLDE- réduction du sol est modérée, puis elle s'accentue,
NIER, 1988). sans atteindre des valeurs critiques: les rendements
Cette gaine est constituée d'un dépÔt d'oxyhy- rizicoles sont satisfaisants. Des résultats inter-
droxydes de fer amorphes ou cristallisés (BACHA et médiaires sont obtenus sur des parcelles ressuyant
HOSSNER, 1977 ; CHEN et al., 1980) susceptibles de bien moins, qui subissent un engorgement précoce
fixer des éléments nutritifs importants tels que les en début de saison des pluies.
ions phosphates (BoRGGAARD, 1983). Bien que ne
recouvrant pas l'extrémité des racines (CHEN et al., Dans ces sols, issus d'un matériau d'altération
1980), la présence d'un tel manchon absorbant ferrallitique, le fer est de loin l'élément réductible le
pourrait être à l'origine de déséquilibre nutritionnel plus abondant et le couple Fe+++/Fe++ joue un rôle
(toxicité indirecte décrite par HOWELER, 1973). Or, prédominant dans l'état d'oxydoréduction du sol.
une mauvaise alimentation minérale est susceptible Des conditions très réduites se traduiront donc par
d'accentuer les nuisances dues à l'excès de fer une forte concentration d'ions ferreux Fe++ dans la
ferreux (TADANO et YOSHIDA, 1978 ; PRADE, 1987). solution du sol, qui peut aboutir à un ensemble de
troubles nutritionnels de la plante exprimés sous le
La sensibilité de la plante aux conditions d'oxydo- nom de « toxicité ferreuse », particulièrement néfaste
réduction du sol est donc très élevée au moment du au moment du repiquage.
repiquage mais continue de se manifester aux stades
ultérieurs de la croissance. La réduction du fer est un processus essentiellement
Ainsi, dans notre expérimentation, le plus bas microbiologique (MUNCH et ÜTTOW, 1980 ; BER-
rendement a été obtenu dans une parcelle subissant THELlN, 1982). Elle est l'œuvre de micro-organismes
des conditions réductrices en permanence. Dans les vivant en anaérobiose et nécessitant un substrat
autres parcelles, les conditions d'oxydoréuction sont carboné (bactéries hétérotrophes anaérobies strictes
peu différentes après le stade 20 JAR, et les diffé- ou facultatives). Compte tenu de ces conditions, un
rences de rendement s'expliquent essentiellement drainage précoce de la parcelle après la récolte du
par l'intensité de la réduction des sols au repiquage. riz, suivi d'un labour profond, peut s'avérer une
solution agronomique appropriée pour limiter cette
toxicité. La décomposition aérobie de la matière
organique résiduelle sera favorisée, ainsi que la
réoxydation du fer et son passage à une forme
Conclusion: cristallisée (goethite, lépidocrite.. J, plus difficilement
app 1ications agronom iques réductible par la suite (MUNCH et ünow, 1980). Un
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amendement organique (fumier ou compost) pourra
La région centrale des hauts plateaux malgaches être introduit à ce moment, plutôt qu'à la mise en
subit un climat tropical humide mésothermique à eau où il stimulerait la microflore ferriréductrice.
deux saisons: une saison des pluies alternant avec
une saison sèche plus ou moins marquée. Les bas- L'apport de chaux, ou de dolomie, en remontant le
fonds caractéristiques de cette région subissent donc pH du sol peut favoriser l'insolubilisation du fer
P. DE GUIDlCf
ferreux et donc diminuer sa concentration dans la PONNAMPERUMA F.N., 1955. The chemistry of
solution du sol (HOWELER, 1973). submerged soils in relation ta the growth and yield of rice.
PhD Thesis, Cornell University, 414 p.
La mise en place d'une culture de contre-saison
constituerait une excellente motivation de la part du PONNAMPERUMA F.N., 1978. Electrochemical changes
paysan riziculteur pour appliquer les techniques in submerged soils and the growth of rice. ln: Soils and
précédentes. rice. Los Banos, IRRI, p. 421-441.
En ce qui concerne la riziculture, la mise en eau PRADE K., 1987. EinfluB der Nahrstoffversogerung auf die
devra être retardée le plus possible et la fertilisation Eisentaxizitat bei NaBreis (Oryza sativa L.) in der Basse
renforcée, particulièrement en phosphore et surtout Casamance, Sénégal. Dissertation, Universitat Stuttgart-
potassium (TADANO et YOSHIDA, 1978; PRADE, 1987). Hohenheim, 216 p.
Cependant, dans certaines zones étroites et encais-
RAUNET M.,1980. Les bas-fonds et plaines alluviales des
sées ~ hydromorphie permanente, le drainage des
hautes terres de Madagascar. Reconnaissance morpho-
parcelles est quasi impossible ~ réaliser, ou peu ren- pédologique et hydrologique.165 p.
table étant donné les faibles surfaces cultivées. Dans
ce cas, certaines techniques paysannes telles que RODRIGO D.M., POL LARD A.G., 1962. Chemistry of
l'apport de terre de tanety - sol ferrallitique des waterlogged soils. 1. Changes in oxydation-reduction
collines avoisinantes, très riche en oxydes de fer potentials of two soils on submergence ; influence of pH
cristallisés - semblent efficaces et méritent d'être and organic matter. J. Sei. Food Agric., 13 (1) : 43-48.
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Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
A. L. RAZAFI NJARA 1
150
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IR 46
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Semaines après submersion
libération de substances réductrices qui accom- La décroissance de la conductivité électrique est plus
pagnent l'épuisement en oxygène avant que le rapide dans le cas du flux ascendant, pour lequel elle
manganèse (IV) et le fer (III) n'activent leur pouvoir descend jusqu'à 0,1 dS m-l après 6 SAR. Le déclin
tampon (PONNAMPERUMA, 1972). Les valeurs élevées est plus lent et plus modéré pour les deux autres
dans le cas de la nappe ascendante seraient proba- régimes hydriques. Pour ces derniers, la conductivité
blement occasionnées par l'élimination hors du électrique se stabilise vers 0,5 dS m-l , voire plus. La
système des substances solubles qui jouent le rôle décroissance de la conductance durant les deux
d'agents réducteurs durant la respiration anaé- premières semaines de submersion serait due à la
robique (PONNAMPERUMA, 1972). libération de Fe 2 + et Mn 2 + à partir d'hydroxydes
insolubles de Fe (III) et de Mn (IV), à l'accumulation
pH de NH;t, HCO] et RCOO-, et au déplacement des
Quel que soit le traitement qu'a reçu le sol, le pH de cations hors des colloides par Fe 2 + et Mn 2 +. Le
la solution de sol augmente durant les quatre déclin après 2 SAR pourrait être causé par la
premières semaines de submersion pour atteindre la précipitation de Fe 2+ en Fe304 - nH 2 0 et du Mn 2+
valeur 6,5 avant de décroître. Les faibles valeurs du en MnC03. Pour le cas du flux ascendant, le déclin
pH observées dans le cas du flux ascendant sont est aggravé par l'élimination rapide de Fe 2+ , Mn 2+
probablement liées au potentiel redox élevé qui et d'autres cations. Ceci peut d'ailleurs être illustré
résulte de l'élimination des substances réductrices par la similarité frappante qui existe entre les
hors du système (figure 2). cinétiques de Fe 2+, Mn 2+, Ca2 + et M g2+ avec celle
de la condu~tivité électrique.
Conductivité électrique
La conductivité électrique de la solution de sol Cinétique chimique
(figure 3) présente en général un pic à 1-2 SAR, puis Fer
décroît nettement par la suite. L'effet du régime La concentration en fer soluble de la solution du sol
hydrique commence à se dégager à partir de 4 5AR. est liée au potentiel redox et au pH du système
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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IR 46
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Semaines après submersion
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IR 46
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Semaines après submersion
tion de Fe (III) en Fe (1) provoquant la libération du P âgées. Le symptÔme commence par un brunissement
chimiquement lié. Les deux premières réactions suivi d'un jaunissement de l'extrémité de la feuille.
résultent de l'augmentation du pH, en relation avec la Quelquefois, une couleur orangée se propage sur les
réduction du sol (PONNAMPERUMA, 1972). bordures de la feuille. Comme le symptÔme s'inten-
sifie, la feuille tout entière se dessèche et prend une
Calcium et magnésium couleur jaune sale. Les plantes les plus touchées sont
celles cultivées dans le régime à flux ascendant; les
Les cinétiques de ces deux éléments présentent une
moins touchées sont celles du régime à nappe
similarité frappante avec celles de la conductivité
stagnante. L'apport de phosphore semble aggraver les
électrique, de Fe et de Mn. La concentration en Ca
symptÔmes.
de la solution du sol dans le régime à flux ascendant
décroîttrès vite et reste à un niveau sensiblement très
bas par rapport à celui des deux autres régimes
Rendements
hydriques. Cette faible teneur peut être attribuée au Les rendements en grain pour les différents trai-
lavage des sels de ces deux éléments à cause du tements sont présentés dans le tableau 1. Les rende-
régime hydrique (figures 7 et 8). ments obtenus ne diffèrent pas statistiquement. Les
différences observées aussi bien dans les cinétiques
Croissance du riz et rendement en grain de la solution de sol que dans la croissance du riz ne
semblent pas se refléter d'une manière évidente sur
Symptômes foliaires le rendement en grain.
Les plantules croissent normalement durant les
Analyses de plantes
premiers stades de végétation. Des symptÔmes de
désordre nutritionnel apparaissent seulement vers 4 à Les résultats des analyses faites sur de jeunes plants
5 SAR et persistent tout au long de la période de âgés de 6 semaines et sur la paille à la récolte sont
croissance. Les feuilles les plus affectées sont les plus consignés dans les tableaux Il à V.
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
IR 46
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Semaines après submersion
Tableau 1. Nombre de talles. nombre de panicules à la récolte. rendement. poids de 100 grains
et taux de stérilité des deux variétés IR26 et IR46.
Régime Phosphore Variété Nombre de Nombre de Rendement Poids de Taux de
hydrique talles (par pot) panicules (g/pot) (g/pot) 100 grains (g) stérilité (%)
Nappe Sans IR26 17,0 cde 17,0 cde 30,23 ab 1,70 b 10,3 bc
stagnante IR46 19,0 a-e 19,0 abc 33,07 ab 1,77 ab 18,2 ab
Avec IR26 17,3 b-e 17,0 b-e 30,57 ab 1,77 ab 10,8 bc
IR46 21,3 a 18,0 a-d 29,50 ab 1,87 a 12,5 abc
Ecoulement Sans IR26 15,7e 14,7e 28,63 b 1,77 ab 9,Oc
de surface IR46 19,7 a-d 19,7 ab 33,40 ab 1,80 ab 12,3 abc
Avec IR26 15,7 e 15,7e 30,80 ab 1,80 ab 12,7 abc
IR46 22,0 a 20,0 ab 31,80 ab 1,83 ab 17,7 ab
Flux Sans IR26 16,3 de 16,3 cde 32,5 ab 1,77 ab 12,1 abc
ascendant IR46 21,0 ab 21,Oa 35,80 a 1,80 ab 15,4 abc
Avec IR26 16,3 de 16,3 cde 33,50 ab 1,77 ab 16,0 abc
IR46 20,7 abc 20,7 a 32,97 ab 1,87b 19,8 a
Dans une colonne, les nombres suivis par une même lettre ne sont pas significativement différents au seuil de 5 % (DMRn.
Phosphore Calcium
Des différences significatives ont été observées seu- et magnésium
lement à la récolte. La teneur la plus élevée en phos- La teneur en calcium de la paille est la plus élevée
phore dans la paille a été observée pour le riz culti- pour le régime à nappe stagnante. Pour le magné-
vé dans un régime hydrique à nappe stagnante sium, c'est l'effet variétal qui prime: pour des plants
(0,084 %). Elle est minimale pour le régime à flux de 6 semaines, IR46 présente une plus forte teneur en
ascendant (0,055 %). Mg par rapport à IR26.
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Semaines après submersion
Tableau II. Teneurs en macroéléments de la partie aérienne de plants de riz, six semaines après repiquage (en %).
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0.35
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Semaines après submersion
Figure 6. Cinétique de la teneur en P soluble de la solution du sol.
Tableau IV. Teneurs en macroéléments de la paille de riz à la récolte pour les deux variétés IR26 et IR46 (en %).
Tableau V. Teneurs en microéléments de la paille de riz à la récolte pour les deux variétés IR26 et IR46 (en mg kg- 1).
pris comme référence. Il s'est avéré qu'au stade 6 - le régime hydrique à flux ascendant rehausse le
SAR le régime à flux ascendant qui présente les potentiel redox, abaisse le pH, la conductivité
symptÔmes les plus sérieux est associé aux rapports électrique, les teneurs en fer (11), phosphore soluble,
N/Zn et P/Zn les plus bas ainsi qu'au rapport Fe/Cu le calcium et magnésium de la solution de sol, par
plus élevé (tableaux VI et VII). Un faible rapport rapport aux régimes à nappe stagnante et à
N/Zn indiquerait un déséquilibre entre N et Zn, écoulement superficiel; .
tandis qu'un bas rapport P/Zn supposerait un - les symptÔmes de toxicité observés durant les pre-
antagonisme entre P et Zn. Un rapport Fe/Cu élevé miers stades de végétation sont plus prononcés pour
révélerait un antagonisme possible entre Fe et Cu, les plants cultivés dans le régime à flux ascendant que
qui résulterait en une aggravation de la toxicité, tout dans les deux autres régimes hydriques;
en accroissant le taux de stérilité. A la récolte, ces
deux rapports calculés pour la paille demeurent les - différents rapports calculés entre les éléments
plus faibles dans le cas du régime à flux ascendant. nutritifs dans les tissus ont montré que les symptômes
ne peuvent pas être attribués uniquement à une
assimilation excessive de fer, mais plutôt à un
déséquilibre nutritionnel. Les plantes les plus
affectées sont caractérisées par des faibles rapports
Conclusion
N/Zn et P/Zn, ainsi que par un rapport Fe/Cu élevé.
Des apports de manganèse et de cuivre pourraient
De cette étude des effets du régime hydrique sur la améliorer les effets de la toxicité ferreuse en
toxicité ferreuse, on peut tirer les conclusions contrebalançant les teneurs élevées en fer dans les
suivantes: tissus.
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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Semaines après submersion
Tableau VI. Rapport des teneurs en éléments minéraux Tableau VII. Rapport des teneurs en éléments minéraux
dans les parties aériennes du riz à 6 SAR (rapports dans la paille de riz à la récolte (rapports calculés
calculés à partir de teneurs exprimées en ppm). à partir de teneurs exprimées en ppm).
Régime hydrique Régime hydrique
Nappe Ecoulement Flux Nappe Ecoulement Flux
stagnante de surface ascendant stagnante de surface ascendant
N/P 9,9 9,1 10,2 N/P 11,5 14,2 16,2
KIN 1,1 1,3 1,2 KIN 1,4 3,0 3,1
Mg/P 1,3 1,2 1,3 Mg/P 2,1 2,5 3,2
Ca/Mg 1,5 1,4 1,5 Ca/Mg 2,9 2,8 2,6
KlCa 6,0 7,0 6,2 KlCa 2,7 6,1 5,8
KlMg 8,4 9,9 9,2 KlMg 7,8 17,1 15,2
KlFe 51 52 51 KlFe 35 78 77
Nlln 437 415 405 Nlln 152 139 134
Plln 44 46 40 Plln 14 10 8
Fe/Mn 1,1 1,3 1,2 Fe/Mn 0,9 0,7 0,7
KlMn 58 68 61 KlMn 32 54 52
Fe/Cu 46,9 46,9 57,2 Fe/Cu 92,3 80,4 79,7
Fe/(Cu + Zn) 7,9 8,4 8,2 Fe/(Cu + Zn) 5,7 5,1 5,1
A.L. RAZAFIN}ARA
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CIRAD,1993
Tableau 1. Processus de réduction bactérienne se produisant successivement dans des sols engorgés
(d'après YOSHIDA, 1975).
Transformations observées Eh initial du sol (V) Processus biochimiques
Consommation et disparition de 02 Respiration aérobie
Réduction dissimilative des nitrates + 0,6à+O,5 Respiration anaérobie
Réduction du manganèse + 0,6 à + 0,4 Respiration anaérobie·
Réduction du fer + 0,6 à+O,3 Respiration anaérobie·
Réduction dissimilative des sulfates
et formation de sulfures 0,Oà-O,2 Respiration anaérobie
Formation d'acides et d'alcools + 0,6 à+O,4 Fermentation
Formation de H2 - 0,1 à - 0,2 Fermentation
Formation de CH 4 - 0,1 à - 0,2 Fermentation
• Il n'est pas vraiment démontré que la réduction "dissimilative" du manganèse et du fer soit une véritable respiration anaérobie.
Par ailleurs, les couplages ou interactions entre cycles réactions métaboliques, ils forment des produits
biogéochimiques (par exemple carbone-fer- gazeux, liquides, solides. La figure 1 résume très
phosphore) doivent, dans l'environnement rhizo- schématiquement cette activité.
sphérique, retenir notre attention, tant d'un point de
vue chimique que biologique, et plus spécialement Dans les sols hydromorphes, on observe, après sub-
microbien. mersion, une diminution des populations bac-
tériennes aérobies et des populations fongiques et un
L'objectif de cet article concerne l'intervention de accroissement des populations bactériennes anaé-
processus microbiens, mais aussi physico-chimiques robies facultatives et anaérobies strictes (BERTHELlN,
1982) qui, si elles disposent de conditions nutri-
qui peuvent leur être associés, sur la biodisponibilité
d'éléments minéraux (en particulier fer, phosphore, tionnelles et énergétiques suffisantes (matières
éléments en traces) dans la rhizosphère du riz des organiques et accepteurs d'électrons), vont entraîner
rizières de bas-fond. des réactions de réduction successive de divers
éléments (tableau O.
Tableau Il. Classement des activités microbiennes en fonction du degré d'anaérobiose et du type de sol
(d'après BERTHELIN, 1982).
Sols à nappes d'eau Sols à nappes d'eau Sols à nappes d'eau
peu ou pas réductrices réductrices très réductrices
• Pas de décroissance sensible du Eh • Décroissance du Eh • Décroissance forte du Eh
• Forte production de CO2 • Production de CO2 • Mauvaise dégradation
+ acides + alcools production de CH 4 , H2 , H2 S
• Fixateurs d'azote libres aérobies • Fixateurs d'azote libres • Fixateurs anaérobies
(Beijerinckia, Azotobacter...) anaérobies (Clostridium)
• Fixation symbiotique si nodulation au-dessus de la nappe d'eau
• Minéralisation N-> NH4 •Minéralisation N -> NH 4
et surtout N03 surtout, mais aussi N03
• Dénitrification liée aux matières organiques, à N03 et aux phases de submersion et de ressuyage des sols
• Réduction Mn et Fe discrète • Réduction de Mn et Fe typique d'environnements réducteurs
• Minéralisation du soufre, • Production d'H 2S
surtoutS04 • Production de mercaptans
• Sols alluviaux • Gleys • Stagnogleys
• Sols hydromorphes apparentés • Pseudogleys • Tourbes
• Sols à nappe aérée el/ou • Rizières • Rizières dégradées
pauvres en matière organique
anaérobies strictes, qui vont modifier sensiblement parcelles du bas-fond d'Ambohitrakoho. Les teneurs
les voies de transformation des composés organiques en fer ferreux augmentent de manière continue au
et favoriser l'utilisation d'accepteurs d'électrons cours du cycle de la plante et les valeurs maximales
minéraux autres que l'oxygène (NO]", Mn 4 +, Fe 3+, mesurées au stade de maturité du riz augmentent de
SOl-) pour leur respiration anaérobie. Les réactions l'aval vers l'amont du bas-fond. Cette rédudion du
de dénitrification dissimilative, de réduction du fer, qui conduit à sa solubilisation, a été aussi étudiée
manganèse, du fer, des sulfates vont alors se dans des dispositifs d'incubation simplifiés constitués
manifester (TURNER et PATRICK, 1968; YOSHIDA, 1975). de pots contenant 2,5 kg de sol saturé par de l'eau
Certaines de ces bactéries vont aussi utiliser des déminéralisée. Les deux sols retenus dans cette
accepteurs d'éledrons organiques pour leur fermen- expérience étaient un sol de bas-fond (parcelle n° 11)
tation et produire divers métabolites (alcools, mé- et un sol alluvial de la c plaine» (parcelle n° 18), où
thane...), ainsi que des acides (acétique, butyrique, les rendements du riz sont plus élevés. Ces sols se
ladique.. J, qui interviendront dans l'altération des distinguent par leur texture, mais ont en commun cer-
minéraux et la dissolution des éléments minéraux tains caractères chimiques: pH acide, taux rela-
(BERTHELIN et KOGBLEVI, 1974; BERTHELIN et BOYMOND, tivement important de matières organiques, faible
1978 ; BERTHELlN, 1982) (tableau 11). teneur en P assimilable (DE GIUDICI, 1988). Le tableau
Après drainage et au cours du séchage, certains pro- III présente leurs propriétés essentielles.
duits comme le fer et le manganèse vont être oxydés
par voie chimique ou microbienne (BERTHELlN, 1982 ; Tableau III. Principales caractéristiques physico-
HOUOT et BERTHELlN, sous presse). II se produit ainsi chimiques d'un sol de bas-fond (parcelle n° 11)
des alternances de rédudions et d'oxydations, qui se et d'un sol de la "plaine" (parcelle n° 18).
manifestent dans différents sites des profils de sol.
Sol de bas-fond Sol de la "plaine"
Argiles (%) 25,8 57,6
Limons fins (%) 10,7 24,7
Dissolution du fer par réduction Limons grossiers (%) 3,5 3,9
bactérienne et incidence Sables fins (%) 12,5 4,9
sur la disponibilité du phosphore Sables grossiers (%) 47,1 10,3
). -.:-..-.:-.. w. -.:-.. -.:-..~ ~ w.». ». ,,-:-."'». '..;.:-.,~}., ~:-». -..;.:.~ --: ".: :-:-.~ --:-:-.~ --:-:-:-:-:-:-:-...:-...:-.--:-
pH (KCI) 4,36 4,15
Au cours de mesures in situ des quantités de fer
Matières organiques (%) 7,04 5,85
ferreux extractibles par AICI 3 , selon la méthode de
VIZIER (1988), DE GIUDICI (1989) a observé des Fe amorphe (%) (oxalate) 3,8 5,7
quantités importantes de Fe 2+ pour l'ensemble des Passimilable (ppm) (Olsen) 32,6 30,S
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des 5015. Rhizosphère et physiologie du riz
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Au cours de ces incubations sur 120 jours (figure 2), présentent l'action ferriréductrice de telles bactéries
on constate, pour le sol de bas-fond, une croissance pour une microflore mixte <Complexe) de sol qui
rapide de la teneur en Fe 2 + de la solution du sol, qui reçoit, comme source de carbone et d'énergie, une
atteint 190 ppm après 30 jours, puis décroît jusqu'à litière de graminée forestière (Festuca sylvatica), et
100 ppm au 90e jour, pour se stabiliser plus ou moins pour une souche pure de bactérie (Bacillus sp.), qui,
jusqu'au 120e jour. Pour le sol de la te plaine lt, la dans le cas présent, utilise le glucose. Dans les deux
réduction du fer est plus lente et atteint 120 ppm au cas, l'action bactérienne entraîne une dissolution très
60e jour, puis se stabilise jusqu'au 120e jour. significative du fer sous la forme Fe 2 +. L'activité
bactérienne, en consommant l'oxygène (figure 3),
produit un abaissement rapide du Eh, qui précède la
Fe' Ippml dissolution du fer. En début de percolation des
l dans la solution du sol
colonnes de sol (figure 3), la dissolution est très
voisine dans les dispositifs avec et sans activité
200 _ _ Sol de bas-fond
microbienne en raison de la lixiviation de produits
___ -- Sol de plaine
végétaux des litières fraîches dans les témoins stériles
(sans micro-organismes>' Puis l'activité bactérienne
;-;- ....... _--- anaérobie facultative et anaérobie stricte intervient
100 dans la dissolution du fer (figure 3).
-'
Fe (mg)
Eh (mV)
temps d'engorgement 500
pH 6 EhrnV
.h=lC+ l
P b bK
où 9 5
=
C concentration en phosphore de la solution à
8
l'équilibre,
P = phosphore fixé sur le sol (J,1g g-l de sol sed, 7 4
.----e-... ~-.-.-.
Tableau IV. Paramètres de l'équation de Langmuir d'adsorption du phosphore et quantités de fer amorphe (oxalate)
d'un sol de bas-fond (parcelle n° 11) à différents états d'engorgement et d'oxydation.
Sol initial Sol engorgé Sol réoxydé Sol séché
5 mois en atmosphère humide 3 semaines
b : capacité maximale 1260 1690 1660 1560
de P fixé (ppm)
K : coefficient relatif 0,498 0,936 0,526 0,323
à l'énergie de fixation
du phosphore
Feox (%) 3,8 4,8 3,8 3,9
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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Tableau VI. Dissolution d'un phosphate tricalcique par les acides aliphatiques pJoduits par des bactéries de la
rhizosphère du riz au cours de la biodégradation d'exsudats utilisés comme seule source de carbone et d'énergie
(après 250 heures d'incubation) (d'après BERTHELIN et al., 1991).
Azospirillum Klebsiella Pseudomonas Enrerobaerer
Iipoferum oxytoca c10acae
P solubilisé (119 par flacon 23±21 222± 55 197± 27 347±167
de culture)
0/0 d'exsudats minéralisés 21 59 61 26
Acides aliphatiques Aucun acide Citrique Gluconique Citrique
produits dans un milieu détecté Malique Malique
Fumarique Fumarique
Un acide Deux acides
non identifié non identifiés
1991), peuvent favoriser la nutrition minérale des amont qui, par rapport aux parcelles de la le plaine lt,
plantes. Mais ces acides organiques aliphatiques semblent présenter une potentialité plus importante
n'ont, vis-à-vis des oxyhydroxydes, qu'un pouvoir de pour la toxicité ferreuse.
dissolution relativement faible par rapport à la
réduction bactérienne du fer (MUNCH et OTTOW, La dissolution des oxyhydroxydes par réduction
1980 ; ROBERT et BERTHELlN, 1986 ; BERTHELlN, 1988) bactérienne qui accompagne l'engorgement
ou les sidérophores (WATTEAU et BERTHELlN, 1990). contribue à la formation d'oxyhydroxydes ferriques
Les gaines de fer sont alors des pièges efficaces, qui amorphes et également d'hydroxydes ferroso-
peuvent limiter significativement la disponibilité ferriques, qui présentent un grand pouvoir d'ad-
d'éléments comme le phosphore et le zinc. sorption du phosphore. Ainsi, le phosphore, qui peut
être libéré par la réduction bactérienne des oxyhy-
droxydes et/ou l'action des protons d'origine
bactérienne (fermentation) ou végétale, va se fixer
encore plus fortement sur ces précipités frais. C'est là
une première limitation à la biodisponibilité du
phosphore.
M Uo- 3
MA 1
0.5 0.5
MA
MHA
o +-~m,;";,,.,,-="'"'t-_~_-._-.-_-,
1 i 33 4 5 6 pH 7 2 3 4 5 6 pH 7
Oxalic Ac. Fe ' Oxalic Ac. Zn lo
M LlO- 3 M LlO- 3
1 1
0.5 0.5
O+--~-.---:r---r--~----r o o.J---r=~=;::::::~:::=::;;"----'
1 2 3 4 5 6 pH 7 123 4 5 6 pH 7 1 2 3 4 5 6 pH •7
Citric Ac. Fel. Ci tric Ac. Cu 2' Citric Ac. Zn 2•
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Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-74 décembre 7997
ClRAD,7993
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283
Thème /11- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
l'accumulation d'ions toxiques, un certain nombre 1975) et de l'ORSTOM (VIEILLEFON, 1971 ; MARIUS,
de cas ont été rencontrés, du plus simple (intoxi- 1985 ; LOYER, 1989 ; LE BRUSQ et al., 1987 ; BOIVIN et
cation liée à une seule cause) aux plus complexes LOYER, 1988) en font foi. On pourra en trouver une
(simultanéité et effets cumulatifs de nombreux analyse dans PRADE et al. (1990). Pour les pays
paramètres défavorables). En raison des consé- anglophones, on pourra consulter DAS GUPTA (1971),
quences directes sur la productivité (mortalité DENT (1986), SMALLING et al. (1985), et les
anormale, surtout chez de jeunes plants, ou ren- publications de VAN BREEMEN et de ses collaborateurs
dements dérisoires), on pourrait remettre en question néerlandais (dont VAN BREEMEN et MOORMANN, 1978),
la poursuite de l'exploitation de certaines parcelles, ou encore celles de l'IRRI sur des sols africains.
systématiquement touchées chaque année.
Etudier ces intoxications sous leur seul aspect micro-
Peu d'informations sont disponibles sur les consé- biologique paraît encore plus aléatoire: les études
quences effectives de tels processus dans les rizières précitées sont celles de pédologues, de chimistes du
de bas-fonds; mais il n'y a aucune raison de mettre sol ou d'agronomes. Ceux-ci, quand ils soupçon-
en doute la réalité d'un risque potentiel, dès lors que naient de tels processus, les citaient comme des fac-
les conditions qui, ailleurs, rendent le riz sensible teurs Iimitants le potentiels », sans chercher à pour-
sont réunies dans une parcelle continentale. Le but suivre plus loin leurs investigations. Le problème des
de cette revue n'est pas de décrire des cas observés toxicités bactériennes, suivi, mais presque exclu-
sur ces rizières (vallées et bas-fonds). Peu de données sivement au Sénégal, depuis 1971 par JACQ, depuis
analytiques sont disponibles, car la plupart des 1982 par Onow et PRADE, n'a jamais fait l'objet
observations ont été faites sur des rizières côtières et d'une étude synthétique qui soit spécifique aux sols
en général sur des sols de mangrove. Mais il reste africains, à une exception près, le travail publié en
utile d'attirer l'attention des riziculteurs: certaines commun (PRADE et al., 1990), sur une semi-province
observations (Burkina Faso, Madagascar, Tchad, du Sénégal, et après une difficile le relecture» de
Mali ou Côte- d'Ivoire) indiquent clairement que si, travaux de pédologie et de comptes rendus d'essais
dans ces zones, le risque semble moindre il n'est pas d'aménagement.
nul.
Le troisième congrès sur les sols sulfatés acides, à
Une des difficultés majeures reste de reconnaître la Dakar, en 1986, dont les principales communi-
nature bactérienne de certains dysfonctionnements. cations ont été publiées en 1988 par l'ILRI, à
L'un des risques accessoires est, quand une intoxi- Wageningen aux Pays-Bas (H. OOST, éditeur), a
cation de cette nature est suspectée, de confondre certes permis d'affirmer combien (et pourquoi !)
toxicité ferreuse et intoxication par les sulfures: les certaines données d'écologie microbienne du sol
symptômes apparents peuvent être confondus, les pouvaient expliquer des échecs d'aménagement.
causes écologiques sont relativement proches, mais Mais il pouvait également laisser croire qu'II n'y avait
les mesures à mettre en œuvre sont différentes. Sans guère que les sols de mangrove à être le siège
diagnostic certain, comme indiqué par Orrow et al. d'intenses processus réducteurs microbiens. Ce n'est
lors de ce séminaire, nul ne saurait prendre les certainement pas le cas! Il apparaît, à la suite
mesures qui s'imposent. Dans cette communication, d'expé-rimentations récentes effectuées en Asie, que
l'accent sera mis sur ce qui semble capital et le les rizières sur sols de mangrove constituent en fait
moins coûteux: diagnostic, prévention, utilisation un des rares sites au monde dans lesquels il est
optimale des engrais, choix de cultivars peu possible de rencontrer aussi presque tous les autres
sensibles, pratiques culturales adaptées et contrôle facteurs limitants (acidité, carences niinérales
de la submersion. simples ou multiples, salinité relative et toxicités
diverses) que de trop nombreux auteurs avaient
Parler de façon documentée des toxicités bacté-
associés aux intoxications de nature micro-
riennes dans les rizières de bas-fond d'Afrique est
biologique. Orrow et al., lors de ce congrès, les ont
apparu aux auteurs de cette revue comme une
passés en revue, pour la seule toxicité ferreuse, et
gageure. Autant les références sont nombreuses
PRADE et al. (1990) l'avaient fait pour toutes les
concernant des sols d'Asie de l'Est (japon et Corée),
maladies le physio-Iogiques » pour lesquelles avait
du Sud-Est et du Sud (Inde, Ceylan, Indonésie et
été signalée la présence de sulfures au niveau
Philippines), voire d'Amérique latine ou anglo- racinaire.
saxonne, autant elles restent rares pour l'Afrique
francophone. Pendant de longues années, l'étude a Il restait à vérifier que ce qui a été montré au Sénégal
semblé, à de rares exceptions près (VIZIER, 1974, est applicable aux rizières situées à l'intérieur des
1978, 1987, 1988) se limiter à certains sols de terres, tout comme, à l'inverse, certaines informa-
rizières le à problèmes », dont les sols de mangrove. tions obtenues dans d'autres zones rizicoles avaient
Ce fut le cas au Sénégal, et de nombreuses publi- permis de comprendre les conditions particulières
cations de l'IRAT (dont BEYE, 1973, ou BEYE et al., régissant cette riziculture spécifique des zones
V.A. JACQ, J.c.G. DrrOW, K. PRADE
deltaïques ou de mangrove, sur sols sulfatés acides limitants, dans lequel le rôle majeur serait tenu par
ou parasulfatés acides. Nous nous sommes même une ou plusieurs microflores?
posé la question de savoir si la « sulfato-réduction li,
- Est-elle particulière à la zone d'étude ou se
telle que décrite par JACQ (1973, 1977, 1989), n'était
rapproche-t-elle d'une forme que l'on rencontre dans
pas trop typique des rizières d'Afrique occidentale,
le monde entier?
ou si, en Asie (où elle semble moins répandue et plus
anodine), elle ne serait pas, sous sa forme rhizo- - A quel stade végétatif le riz est-il le plus systé-
sphérique, une simple conséquence de la toxicité matiquement atteint?
ferreuse. Cette hypothèse n'apparaissait pas dans la
revue de FRENEY et al. (1982). Elle n'a pas été faite - Quelles conditions particulières à la riziculture lo-
ailleurs, même pas en Louisiane où la simultanéité cale (sur le plan de l'écologie) peuvent expliquer une
des deux processus avait été signalée par HOLLIS baisse de rendement inhabituelle? Peut-on, suivant
(1975). Mais elle ne doit pas être exclue, tout au cette analyse, penser que certaines pratiques cul-
moins pour certains sols « à stress multiples li. Nous turales actuelles seraient inadaptées, ou encore que
avons décrit OACQ et al., 1991) des cas de sulfato- des interventions humaines seraient maladroites?
réduction « post mortem li sur des plants morts à la - A-t-on constaté la survie (et/ou la reprise de crois-
suite d'une première atteinte de toxicité ferreuse sance) de plantes atteintes?
secondaire, survenant en fin de cycle végétatif.
Le diagnostic de terrain ne pourra pas toujours être
JI semble que ceci se rencontre aussi au Burkina Faso confirmé par des analyses coûteuses. Il reste impor-
(DIANOU, 1989 ; OUATTARA, communication person- tant qu'il soit bien fait, sans affirmer comme certains
nelle, travaux en cours dans la vallée du Kou). Les que, puisqu'il peut s'agir d'une maladie micro-
prospections faites, à la fin des années 70 et au début bienne, il ya peu de chose à faire, sur un plan pra-
des années 80, au Mali, en Mauritanie ou en CÔte- tique, pour y remédier.
d'Ivoire confirment la présence de microflores
réductrices actives dans des rizières fluviales ou de
bassins (à Bouaké, une sulfato-réduction contrôlée a
été mise a profit pour éliminer les nématodes Matériel et méthode
phytoparasites du riz: JACQ et FORTUNER, 1979>' La
réalité des dégats provoqués par les ions ferreux dans Il est inhabituel, lors d'une revue, de citer les
d'autres zones intérieures, relatée par VIZIER (1974, méthodes utilisées. Il est cependant utile de bien les
1978, 1988), à Madagascar et au Tchad, indique définir, en faisant référence à des publications
clairement que si, dans ces rizières de bas-fond, le récentes, pour permettre au lecteur de les utiliser au
risque semble moindre, il faut en tenir compte pour mieux. L'interprétation des données analytiques peut
expliquer des baisses de rendement. Tout cela fait être une source d'erreur dans la comparaison de
que se posera, pour tous les cas de toxicité mal résultats obtenus suivant des techniques différentes.
définis, en Afrique comme ailleurs, la difficulté de Celles citées ici permettent aux microbiologistes
connaître la prééminence du processus mis en cause d'interpréter les résultats collectés par d'autres
sur tout autre facteur limitant et renforcera l'intérêt scientifiques, et de les comparer aux leurs.
d'un diagnostic juste. Cette interrogation n'est
nullement le seul point controversé. La complexité
de l'interprétation « microbiologique li rendra encore Prélèvements in situ et analyses de sols
nécessaire, pendant de nombreuses années,
d'étendre la prospection et de faire des essais au Afin de caractériser les sols testés, il faut prélever
champ. anaérobiquement des carottes de 50 cm de long au
minimum (horizons profonds) et un nombre plus im-
L'attention doit être attirée sur les questions qu'il faut portant d'échantillons de surface (horizon 0-20 cm),
se poser pour toute rizière sensible, et encore plus horizon Ap où s'implante le premier enracinement
quand la prospection en est à son début. Elles sont du riz. Nos prélèvements de sols ont été faits dans les
classées dans un ordre logique: portions de rizière dans lesquelles avaient été
signalés les symptômes les plus nets de toxicité
- La maladie observée est-elle une maladie phy- ferreuse (en Asie et en Afrique) ou a'intoxication par
siologique (essentiellement liée à la difficulté que les sulfures (au Sénégal). L'utilisation des symptômes
rencontre le plant de riz à adapter son métabolisme pour choisir les zones de prélèvement sera discutée.
au biotope et aux conditions particulières qu'on lui Les sols sont prélevés par fractions de 10 à 30 g, à
impose), une carence en un ou plusieurs éléments sec, en début de cycle, sous eau, à chaque stade de
majeurs ou en oligoéléments, une toxicité « chi- toxicité apparente. Les échantillons africains ont été
mique li ou un ensemble complexe de facteurs traités et analysés suivant les protocoles expé-
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
rimentaux et les méthodes indiqués dans PRADE et al. Concernant les formes de fer et d'aluminium, on peut
(1990) : techniques de SCHLICHTING et BLUME (1966) apporter des précisions. Le fer total {Fe t} peut être
ou celles utilisées par l'ORSTOM (PAYCHENG, 1980) ; dosé suivant la technique de PAYCHENG (1980) ; le fer
les sols prélevés en Asie ont été traités suivant les ferrique [FeOlO] et l'aluminium aluminique [AIOIO],
techniques standardisées par l'IRRI (VARLEY, 1966), qu'il n'est important de mesurer que dans les rizières
revues par BENCKI5ER et al. (1982) ou Onow et al. acides, sont à doser sous forme soluble et sont
(1983), et utilisées par BERTENBREITER (voir Onow et généralement exprimés en pour mille; le Feo est le
al., ce séminaire). Il est toujours utile, dans les sols fer sous forme d'oxyhydroxydes. Le rapport FeJFet
engorgés, et bien entendu aux stades critiques, de qui est le rapport fer (oxyhydroxydes)lfer total, peut
mesurer in situ le pH et le potentiel redox (Eh) parfois apporter une information complémentaire. La
suivant, par exemple, les techniques de GRONDIN teneur en fer ferreux [Fe(lO], sous forme soluble, est
(1982) et/ou celles de LOYER et al. (1982), qui exprimée en ppm. La description du protocole
permettent de ne pas oxyder l'échantillon pendant expérimental à utiliser in situ, pour le dosage à
son traitement. Ce type de prélèvement peut être l'orthophénantroline de SANDELl (1959), est donnée
également utilisé pour les mesures instantanées de dans PRADE et al. (1990).
concentrations en fer ferreux dans les solutions du
D'autres mesures seraient plus f( accessoires », et leur
sol, suivant la technique décrite en allemand par
utilité est plus limitée que celle des paramètres
PRADE (1987) ou en français par PRADE et al. (1990). Il
précédents :
est également adapté aux numérations des micro-
flores bactériennes anaérobies. Il est souvent néces- - le zinc assimilable (pour lequel il peut y avoir une
saire de suivre les parcelles pendant tout le cycle, carence surajoutée) peut être extrait à l'acide
certaines formes pouvant être tardives et se mani- chlorhydrique (D,OS N) suivant la technique de
fester jusqu'à la dernière exhaure d'eau avant matu- KATYAl et PONNAMPERUMA (1974), comme nous
ration. l'avons fait au Sri Lanka, ou extrait par une attaque
au mélange acide chlorhydrique (D,OS N) + acide
sulfurique (0,025 N), comme indiqué par PAGE et al.
Caractéristiques du sol (1982), technique utilisée pour nos échantillons du
Sénégal et d'Indonésie;
à suivre en priorité
- les mesures de pH et de conductivité électrique
Nous conseillons de mesurer par ordre d'impor- (CE, exprimée en mS cm-'), sur des extraits au 1/2,5
tance: ou au 1/5, ne sont utiles que sur des échantillons
prélevés en phase critique;
- la capacité d'échange des cations (CEC, en mé
100 g-', à pH 8,1), paramètre apte à définir s'il ya - les teneurs en carbone total (Ct %) et en azote total
une carence multiforme; (Nt %) sont utiles pour définir l'état général de la
rizière et sa matière organique; ce dernier paramètre
- l'analyse granulométrique : celle-ci doit définir le intervient sur la cinétique de réduction du sol ;
pourcentage et la nature des argiles;
-l'analyse du pH sur un sol séché n'apporte que peu
- les teneurs en sulfates (sols et eaux), mesurées par d'informations, car elle ne donne pas d'indication
gravimétrie; satisfaisante sur le pH réel, tel qu'il est mesurable
après réhumectation du sol, surtout pour les rizières
- les teneurs en cations échangeables, en particulier
apparemment très acides. Dans PRADE et al. (1990),
K, l'la, Ca et Mg (généralement exprimées en mé
100 g-') et potentiellement sous les formes dispo- est faite une critique concernant l'utilisation abusive
de ce critère pour définir le risque de toxicité
nibles, c'est-à-dire mesurées après une extraction
ferreuse.
acide (et exprimées cette fois en ppm) pour définir
s'il y a carence en un ou plusieurs éléments, et pour
savoir si les besoins nutritionnels majeurs du riz sont
satis-faits ; il est tout aussi utile de déterminer les Prélèvements de feuilles
teneurs en Fe et AI assimilables, suivant les tech- et analyses foliaires
niques citées dans la communication d'Ottow et al.
Les échantillons de feuilles, de 5 à 20 g (poids
(ce séminaire) ;
humide), ne sont à prélever que lorsque les
- le phosphore assimilable peut être extrait par symptômes sont apparents et si on soupçonne une
NaHC03 0,5 N (méthode d'OLsEN et al., 1954) ou toxicité ferreuse. Ils doivent être impérativement
par HCI 0,2 N (méthode de Bray). Dans les sols de prélevés sur les mêmes sites et au même moment que
rizières inondées et sur des échantillons prélevés en les prélèvements de sols correspondants. Ils sont
anaérobiose, ces deux méthodes sont valables et les lavés et rincés avant d'être séchés à 105 oc.
Il est
résultats sont comparables. indispensable de déterminer sur ces échantillons les
V.A. JACQ, J.CG. OTTOW, K. PRADE
teneurs en P, K, Ca, Mg et Na (généralement dénombrer in situ est celle de TRAORE et JACQ, 1991),
exprimées en %), mais aussi utile de mesurer celles mais aussi leurs antagonistes (thiobacilles), suivant la
en éléments théoriquement bien moins abondants technique de MOURARET et BALDENSPERGER (1979).
que sont Zn et Mn (généralement exprimées en
En conclusion, sur le plan analytique, il existe, vis-à-
ppm). Bien entendu, pour mettre en évidence toute
vis de la toxicité ferreuse surtout, plusieurs
toxicité, il faut impérativement connaître les teneurs
démarches scientifiques d'approche, toutes aptes à
en Fe et AI (aussi exprimées en ppm). La miné-
fournir des informations utilisables par les micro-
ralisation et les analyses effectuées sur les digestats
biologistes. La théorie « visualiste li est l'approche
peuvent être faites suivant les techniques décrites par
par les symptômes et la plus facilement utilisable par
FASSBENDER et AHRENS (1977), en utilisant un analy-
les riziculteurs eux-mêmes sur le terrain: elle permet
seur Perkin-Elmer ASS, pour les mesures de Mg, Ca,
de bien situer les parcelles ou les fractions de par-
Fe, Mn et Zn, ou un spectromètre Eppendorf à
celle les plus sensibles. L'approche physico-
émission de flamme, pour les déterminations de K
chimique et dynamique des ions toxiques libérés
et Na.
dans la solution de sol est celle de VIZIER (1988) ; elle
permet de confirmer que les symptômes apparaissent
dans les jours qui suivent la libération d'ions ferreux
Seuils de carence ou de toxicité ou l'accumulation de sulfures. Celles-ci, nous
Sur des échanti lions de sols, en se référant aux l'avons maintes fois vérifié lors d'expériences en
valeurs définies par l'IRRI (1969), les valeurs de P microparcelles et au champ, suivent de très près la
sont à comparer au seuil minimal de 10 ppm de P multiplication des bactéries. L'approche pédolo-
assimilable; celles des formes solubles de K+ et de gique est souhaitable pour mettre en évidence des
Mg++ sont à repérer par rapport au seuil minimal de caractéristiques défavorables du sol, ainsi que les
0,2 mé 100 g-1. Suivant les normes définies par JONES analyses foliaires pour repérer des carences
et al. (1982), il y aurait carence pour les valeurs, éventuelles. L'approche habituelle des micro-
mesurées sur des échantillons de feuilles, inférieures biologistes a tendance à favoriser l'analyse des
aux chiffres suivants: P et K : 1 à 2 %0 (suivant le processus par la situation de la microflore dans
stade végétatif) ; Mg : 1 à 2 %0 ; Zn : 10 à 20 ppm. Les l'environnement racinaire, par rapport aux substrats
toxicités peuvent être soupçonnées pour les valeurs carbonés et à l'oxygène. L'importance donnée aux
supérieures aux chiffres de 300 ppm en Fe, 300 ppm « exsudats li (substrats carbonés issus de la racine,
également en AI, 1 500 ppm en Na (TANAKA et composés organiques du métabolisme, exsudats
YOSHIDA, 1970). Dans deux de nos dernières gazeux) est à l'origine de nos études d'écologie
publications (PRADE et al., 1990 ; Orrow et al., ce microbienne. Enfin, il n'est pas exclu de pouvoir
séminaire), nous avons partiellement remis en cause étudier ces toxicités en faisant largement appel aux
le seuil de 300 ppm pour le fer ferreux dans les réactions du plant: cette approche « physiologiste li
feuilles. serait, à notre connaissance, la plus négligée actuel-
lement. Certains échecs d'interprétation peuvent être
Pour mieux connaître, dans les rizières inondées et attribués au cloisonnement artificiel entre sciences
sur les analyses foliaires de riz, les données ana- appliquées à la riziculture.
lytiques permettant de définir les seuils de toxicité ou
les niveaux significatifs de carence, on peut éga-
Iement consulter la publication de GOSWAMI et
BANERJEE (1978). Dans les rizières acides, une toxicité
aluminique du riz peut apparaître pour les valeurs
Résultats
supérieures à 1 ppm en AIOU) soluble par 100 g de
solution de sol ORRI, 1969). Nous ne ferons état que des résultats publiés. Ils
seront plus détai liés pour la sulfato-réduction (JACQ et
al., 1973 à 1991), car, en ce qui concerne la toxicité
ferreuse, de nombreuses références peuvent être
Techniques de numération bactérienne
trouvées dans l'article d'Orrow et al. (ce séminaire).
Les modes de prélèvement et les techniques de Pour la sulfato-réduction, nous invitons les lecteurs à
numérations simultanées des bactéries réductrices se reporter aussi aux publications suivantes: BABA
ont été récemment redécrites (PRADE et al., 1990). Les (1958), FUSURAKA (1968), FURUSAKA et al. (1991),
réducteurs de fer (Bacillus, Pseudomonas, c10stridies GARCIA et al. (1974), JOSHI et al. (1975), LOYER et al.
et entérobactéries) sont dénombrés sur des milieux (1982). Pour les formes de toxicité ferreuse, des
adaptés de ceux d'Orrow et GLATHE (1971) ou de précisions importantes sur les symptômes sont
HAMMANN et Orrow (1974). Pour le cycle du soufre, données par BABA (1958), OTA et YAMADA (1962),
il ne suffit pas de dénombrer les sulfato-réducteurs et INADA (1966), TANAKA et al. (1966, 1970, 1972) et
les sulfo-réducteurs (la technique permettant de les SAHU (1968). D'autres travaux précisent l'importance
Thème /11- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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des déficits en éléments minéraux: BABA et al. niveau des racines. QTTOW et al. proposent (ce sémi-
(1965), TROLLDENIER (1973, 1977), VIZIER (1974, 1978, naire) de nouveaux noms pour définir les manifes-
1987, 1988), ISMUNADH (1976), BENCKISER et al. (1 982, tations de toxicité ferreuse: primaire et secondaire.
1983, 1984), MUNCH et Orrow (1983), Orrow et al.
(1983), PRADE et al. (1988, 1990). Le symptôme le plus net de sulfato-réduction
spermosphérique est une grande irrégularité de
levée, voire l'absence totale de jeunes plantules. Ces
manques au semis sont difficiles à expliquer, sauf si
Cadre des études
on peut aisément visualiser la présence, autour des
Au Sénégal, la prospection des différentes formes de graines qui avaient commencé à germer, d'une gaine
sulfato-réduction a commencé en 1972 {JACQ, 1973). de sulfure ferreux bien noire et insoluble. Les pertes
Quelques « incursions li ont été faites au Mali, en peuvent atteindre 100 %.
Mauritanie et en Gambie (non publié). Dans cette
région, deux.zones sont les plus touchées: au nord- La sulfato-réduction rhizosphérique se traduit par le
ouest, les sols d'origine fluviatile du delta du fleuve fait que certaines feuilles, surtout les plus âgées, flé-
Sénégal, où se manifestent toutes les formes de trissent en quelques jours; la croissance ou la fructi-
sulfato-réduction, et, au sud, ceux des estuaires de la fication sont arrêtées. Un prélèvement dans le sys-
Gambie et de la Casamance où ne sévit que la tème racinaire permet de retrouver cette gaine de
sulfato-réduction rhizosphérique. La prospection sulfure ferreux. Les deux stades les plus sensibles
destinée à repérer les zones sensibles à la toxicité sont d'une part le tallage, d'autre part la période qui
ferreuse, plus tardive (à compter de 1982), a com- va de la montaison à la maturation. La mortalité à ces
mencé dans les mêmes provinces rizicoles du Séné- stades est assez rare, mais le nombre de talles est
gal, et s'est limitée assez vite à la basse Casamance diminué ou les rendements en grain sont fortement
(au sud-ouest, de Ziguinchor à la mer), zone parti- réduits.
culière dans laquelle se rencontrenttoutes les formes
Il existe, pour la sulfato-réduction, trois stades
de toxicité ferreuse, la sulfato-réduction rhizo-
dangereux. Nous l'attribuons, comme Orrow le fait
sphérique (le plus souvent sous une forme tardive),
pour l'activité réductrice de fer ferrique, à la
mais aussi bien d'autres facteurs limitants.
sensibilité particulière du riz à certains stades de vie
Cette sensibilité différente aux intoxications bacté- végétative intense, mais aussi à la grande dispo-
riennes, pour les deux plus grandes zones rizicoles nibi 1ité en substrats carbonés (les exsudats) à ces
du Sénégal, a été tardivement, et seulement en stades de sensibilité maximale. Jusque vers 1980, les
partie, expliquée par: Asiatiques soutenaient que la production de sulfures
- d'une part (PRADE et al., 1990), la nature des argiles ne se faisait qu'au contact des débris organiques en
dominantes et leur faible capacité d'échange des décomposition. Une autre théorie est apparue au
cations, provoquant une certaine indisponibilité en Japon (FURUSAKA et al., 1991). Elle privilégie, dans les
éléments fertilisants minéraux; sols étudiés, la destruction de microagrégats formés
en fin du cycle cultural précédent, à partir d'argiles et
- d'autre part {JACQ, 1989), le mode d'exploitation
de matière organique fraîche, par les deux micro-
différent: grands casiers et riziculture mécanisée au
flores réductrices étudiées. Les sulfato-réducteurs se
nord (semis direct, engrais minéraux), rizières arti-
libèrent aussi en trois « vagues li qui coïncident assez
sanales et pratiques culturales locales au sud.
bien avec les stades de danger maximal décrits au
En Afrique, l'étude de la sulfato-réduction, suivant Sénégal. Si les symptômes semblent dairement
nos techniques, se poursuit actuellement encore au définis pour la sulfato-réduction, grâce à la visua-
Burkina Faso. En Asie, les techniques mises au point lisation facile du FeS, la présence de ce sulfure
par PRADE (1987) ont été utilisées aux Philippines, à insoluble ne permet pas toujours d'affirmer que la
Java, en Inde, au Sri Lanka et en Indonésie. sulfato-réduction est la cause essentielle de la mala-
die. Il peut avoir été accumulé après une production
de fer ferreux {JACQ et al., 1991). Il reste significatif
Symptômes et stades critiques d'une intoxication par les sulfures si elle se situe
autour des graines: aucune toxicité ferreuse spermo-
Nous avions proposé, lors du symposium sur les sols sphérique n'a jamais été décrite.
sulfatés acides, d'utiliser en anglais le sigle « SID li
pour définir les « Sulphide Induced Diseases li. En Les formes de toxicité ferreuse présentent des
français, les termes de sulfato-réduction spermo- symptômes assez similaires en Asie et en Afrique
sphérique ou rhizosphérique ont l'avantage de (Sénégal). Il faut signaler le jaunissement, le brunis-
préciser que, dans le premier cas, c'est la graine en sement et le dessèchement progressif des feuilles.
germination qui souffre, et dans le second toute la Mais on peut aussi constater bien souvent la pré-
plante qui est touchée, à partir d'une attaque au sence de petites taches, ce qui laisserait croire à
V.A. JACQ, J.C.C. OrrO\iY, K. PRADE
ferreux. Des chiffres aussi spectaculaires que 4 700 - les populations minimales, généralement rencon-
ppm ont été mesurés dans certaines parcelles de trées en fin de saison sêche ou avant un nouveau
Casamance, ayant pour conséquence de tuer tous les cycle cultural, sont rarement inférieures à 102 ou 103
plants en 2 jours seulement (PRADE et al., 1990). Pour cellules par gramme de sol sec.
la toxicité ferreuse, il ya aussi des différences de
sensibilité variétale, et cela avait déjà été signalé aux
USA par ATKINS et al. (1956). Microlocalisation de l'activité
Dans tous les sols que nous avons analysés à la suite
bactérienne réductrice et colonisation
d'une intoxication bactérienne, les teneurs en de la spermosphère et de la rhizosphère
sulfates et/ou en fer total peuvent être très basses et, par les microflores anaérobies
de ce fait, il n'est pas possible de parler de seuils
Le voisinage immédiat des racines du riz inondé est
minimaux: les quantités de substrats Il minéraux»
caractérisé, en conditions normales de fonction-
utilisées par la microflore anaérobie sont minimes si
nement, par une relative aération due à la libération
on les compare aux quantités potentiellement dispo-
d'oxygène par l'aérenchyme (ARMSTRONG, 1969). La
nibles dans les rizières inondées, et remises sous
localisation préférentielle, à la rhizosphère et/ou au
forme soluble à la première submersion.
rhizoplan, de chacun de ces deux groupes bactériens,
et à la spermosphère pour les sulfato-réducteurs, est
régie à la fois par la nature et certaines propriétés du
Informations obtenues sol, en général celles qui favorisent l'installation
par les numérations rapide de conditions très anaérobies, le climat (par
bactériennes au champ les pluies) et toutes les pratiques culturales favorables
à la création de conditions réductrices, par des
Il aurait été logique de présenter ces résultats au carences en éléments fertilisants, les exsudats, mais
début de l'exposé, puisque c'est à partir de numé- aussi par des interactions (souvent cumulatives) entre
rations in situ que l'on a pu confirmer, d'une part, la les microflores réductrices elles-mêmes.
réalité Il microbiologique » des stades sensibles et,
Les modalités d'accès des bactéries réductrices à la
d'autre part, la localisation de l'activité bactérienne
spermosphère, à la rhizosphère et au rhizoplan, seuls
dans des Il microsites » précis. Mais ces résultats ont
microsites dans lesquels les ions toxiques produits
été assez longuement présentés dans nos publi-
passent facilement dans la plante, sont fondamen-
cations précédentes (de nombreux exemples sont
tales pour expliquer l'intensité des dégats. Elles sont
cités dans PRADE, 1987, et JACQ, 1989) pour que nous
résumées à la figure 1. La sulfato-réduction n'est
nous contentions de rappeler que:
pas dangereuse si l'activité des bactéries sulfato-
- les pics de populations bactériennes précèdent réductrices se situe loin des plantes (forme dite
toujours, mais de quelques jours seulement, Il diffuse »). Il n'y a pas de toxicité ferreuse si le fer
l'apparition des symptômes (1 à 2 jours pour les ferreux n'est pas produit assez près des racines pour
sulfato-réducteurs, un peu plus parfois pour les y pénétrer. Il faut donc se poser trois questions capi-
réducteurs de fer) ; les stades d'activité maximale de tales, auxquelles répond en partie le schéma de la
la microflore correspondent bien aux stades de figure 1.
sensibilité précédemment définis;
- les populations maximales, à ces stades, sont de
o Quand arrivent ces bactéries?
Suivant l'épuisement de l'oxygène, il existe des
l'ordre de 10 8 à 109 cellules par gramme de sol
séquences d'activité microbienne qui dépendent de
(spermosphérique et rhizosphérique) ou de racine
l'installation de conditions de plus en plus anaé-
(échantillons de rhizoplan) ;
robies (Orrow et FABIG, 1985). Dans la gradation des
- pour la sulfato-réduction, ce n'est pas le niveau potentiels redox (th, exprimé en mV), les bactéries
absolu de bactéries sulfato-réductrices qui définit le réductrices de fer ferrique interviennent de + 400 à
stade sensible, mais l'état d'équilibre entre une partie + 180 (rH de 26 à 18), les sulfato-réducteurs de
de celles-ci (les seuls Desulfovibrio qui oxydent le + 100 à - 200 (rH de 16 à 5), avant les méthanigènes
lactate: BSR) et une espèce de thiobacilles (T. (en dessous du Eh - 150 mV et du rH 7).
denitrificans: BSO). JACQ et ROGER (1978), ont défini L'épuisement de l'oxygène résiduel de la rhizosphère
un indice biologique, log BSR/BSO, en relation avec est le fait de microflores fermentaires, dont les
les teneurs en sulfures, mais aussi avec l'état de santé c1ostridies, qui dégradent les composés organiques à
de la plante; pour toute valeur positive de cet indice, poids moléculaire moyen en anaérobiose rela-
la plante souffre, sans périr; pour toute valeur supé- tivement modérée. Certaines sont réductrices de fer
rieure à 2, elle meurt (l'utilisation de cet indice reste ferreux (voir la récente revue de GHIORSE, 1988),
valable pour tous les sols et toutes les variétés) ; d'autres, comme C. aceticum, sont toujours
VA JACQ, J.CC. OTTO\!\!, K. PRADE
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - P - h a - s - e1 - - - - · · - · -. --- .-.__. - - - - -
(en quelques jours)
EAUX D'IRRIGATION
(quelques 85Rl
DEBRIS ORGANIQUES
MICRO-AGREGATS
ET
MICRO-AGREGATS
DEBRIS ORGANIQUES
Phase 2
(de 1 à 5-6 semaines)
BSR
JEUNE
RHIZOSPHERE
(lointaine, puis proche)
ET RHIZOPLAN
Phase 3
(en seconde partie du cycle végétatif)
"POST MORTEM"
Tout le système racinaire
Reconstitution des principales est couvert de la gaine de FeS.
particules de survie Après la mort du plant. toute la microflore
dans les micro-agrëgats réductrice a accès au rhizoplan et peut
rentrer dans le cortex racinaire
Figure 1. Conditions d'accès des bactéries sulfato-réductrices et réductrices de fer ferrique à la spermosphère,
la rhizosphère et le rhizoplan du riz inondé.
systématiquement associées aux Desulfovibrio (JACQ, dès l'arrivée de la première pluie ou de l'eau des
1989, OUATIARA et JACQ, 1992). Les biotopes de sur- canaux; leur accès à la rhizosphère est en partie
vie entre deux cycles culturaux sont des micro- fonction de l'activité des bactéries réductrices de fer
agrégats d'argiles, de matière organique et de ferrique, qui réduisent le biotope; l'accès des micro-
composés ferriques (FURUSAKA, 1990). flores anaérobies au rhizoplan semble difficilement
envisageable tant que le plant est en bonne santé.
o Où se situent-elles? Elle se ferait en deux étapes: d'abord les réductrices
On peut citer, par ordre chronologique: la sper- de fer, qui contribuent à affaiblir et tuer la plante,
mosphère, la rhizosphère lointaine, puis proche, et puis, « post mortem li, les sulfato-réducteurs.
enfin le rhizoplan. Les deux premiers microsites sont
plus favorables aux bactéries sulfato-réductrices, Les possibilités d'atteindre le rhizoplan sont donc
plus anaérobies que les réducteurs de fer, et donc différentes pour chaque groupe de bactéries, et
plus à même de se multiplier assez loin de la surface fonction à la fois de la diffusion des exsudats
racinaire où est libéré l'oxygène. Les deux suivants (substrats carbonés) et de l'oxygène, mais aussi de
sont plus favorables à la microflore réductrice de fer l'utilisation qu'en font les autres bactéries lors de
ferrique, qui intervient dès que ce mécanisme l'installation progressive de l'anaérobiose. Les effets
autoprotecteur commence à être défaillant. spermosphère et rhizosphère sont à relier à un
nombre très limité d'exsudats pour les Desulfovibrio
o Arrivent-elles ensemble? (OUATTARA et JACQ, 1992). Les sulfato-réducteurs
li existe trois cas (JACQ, 1989) : l'accès des bactéries sporulants seraient plus directement liés à la dégra-
sulfato-réductrices à la spermosphère est très rapide, dation de la matière organique, ce qui peut expliquer
à partir de fragments organiques en décomposition qu'ils interviennent beaucoup moins dans l'in-
Thème 11/ - Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
toxication du riz. la te course» vers le rhizoplan se l'étude physiologique des souches de bactéries
fait pour des raisons nutritionnelles, mais l'accès sulfato-réductrices de rizières (différentes de celles
reste limité tant que l'oxygène est présent. En con- trouvées dans d'autres biotopes) est en phase
clusion, toutes ces microflores anaérobies, les d'achèvement. En 1992, sera publiée la première
réducteurs de fer surtout, seraient des populations description des sept principales souches non
te opportunistes », comme le suggère la tendance sporulantes du Sénégal (OUATTARA et jACQ, article
qu'ils ont à attaquer plus fortement le plant à certains soumis). le fait que ces bactéries sulfato-réductices
stades de vie physiologique intense et de moindre utilisatrices de lactate soient les plus actives avait
résistance (semis et repiquage) ou quand il souffre également été indirectement démontré par PRADE
déjà (carences multiples en éléments majeurs). (1987) : sur des échantillons de rhizoplan de riz,
celles-ci sont environ 100 fois plus nombreuses que
celles qui utilisent l'acétate, et 1 000 fois plus
Exsudats nombreuses que celles qui utilisent le palmitate.
Nous les avons rencontrées en tant que groupe
les bactéries réductrices de fer ferrique appar- majoritaire dans 98 % des échantillons prélevés dans
tiennent à des groupes taxonomiques plus étendus, la spermosphère ou la rhizosphère des plants atteints
et ont des possibilités métaboliques plus diversifiées
que celles qui réduisent les sulfates. On pourrait
o ACQ, 1989).
donc supposer que les composés organiques à poids Il peut paraître paradoxal d'avoir mis tant de temps
moléculaire intermédiaire en provenance des pour pouvoir affirmer que ces bactéries sulfato-
processus de fermentation constituent pour cette réductrices isolées étaient, par leur physiologie et
microflore un réservoir de substrats carbonés à peu leur métabolisme, bien adaptées au biotope rizière!
près inépuisable, et largement réparti dans tous les l'isolement des souches et les études physiologiques
horizons du sol, mais encore plus dans la rhizo- ou métaboliques ont toujours été faits (PRADE, 1987 ;
sphère, où l'activité microbienne totale est bien plus jACQ, 1989) dans des laboratoires européens,
intense. plusieurs mois après la fin des études de terrain. Il
était donc d'une importance majeure de vérifier, a
les bactéries sulfato-réductrices les plus dange-
reuses, les Desulfovibrio, quand leur métabolisme posteriori, que les conditions écologiques (l'adap-
est celui qui leur convient le mieux dans la sper- tabilité aux sels et à des pH acides, les températures
optimales) apparues lors des études avaient une
mosphère et la rhizosphère (sulfato-réduction
dissimilatrice), n'utilisent paradoxalement (jACQ, quelconque importance sur le terrain! Elles expli-
1989 ; OUATTARA et jACQ, 1992) qu'un nombre limité quent, au Sénégal en particulier, pourquoi ces
de substrats carbonés comme donneurs d'électrons bactéries sulfato-réductrices ont pu s'adapter à la
modification des conditions climatiques des années
(dont le lactate, le pyruvate et HiC02)' soit appro-
ximativement, en poids, 15 % des exsudats carbonés 80 : la sécheresse, qui avait pour conséquence, bien
souvent, de saliniser les sols et de les acidifier, n'a en
totaux, et seulement 25 à 30 % de ceux qu'ils
pourraient théoriquement utiliser. rien modifié leur activité. Il est vraisemblable que
leur adaptabilité est à relier à leur biotope d'origine,
la mangrove, le haut lieu» de l'activité de toute la
microflore du cycle biologique du soufre (FELLER et
Micro·flores al., 1989), et où nous avions rencontré les
Nous avons résumé au tableau Il la liste des 60 es- populations sulfato- et su.lfo-réductrices les plus
pèces trouvées au Sénégal. actives (jACQ, 1973; TRAORE et jACQ, 1991).
(JACQ, 1989). Bien entendu, les conditions de mise en est illusoire de réaliser au champ une percolation
culture et l'hydromorphie doivent être favorables à efficace, sauf s'il existe un aménagement tertiaire.
l'installation d'une anaérobiose prononcée aux
En revanche, nous avions (jACQ et ROGER, 1978),
stades critiques.
toujours en microparcelles, étudié avec succès une
Egalement, une rizière de Casamance devient très technique préventive de lutte contre la sulfato-
sensible aux deux formes de toxicité ferreuse quand réduction spermosphérique, consistant à tremper,
le sol a tendance à s'acidifier; si les argiles domi- pendant toute la nuit qui précède le semis, les
nantes sont des kaolinites, la capacité d'échange est graines en prégermination dans une eau riche en
inférieure à 12 rné 100 g-', et une double carence en cyanobactéries, ce qui permet une réoxydation de la
phosphore et en potassium échangeable n'est pas spermosphère. Cette technique culturale a donné de
compensée par les apports d'engrais (PRADE et al., bons résultats lors des essais préliminaires au
1990). Elle est sensible à la sulfato-réduction Sénégal, mais son efficacité a été moindre lors des
rhizosphérique pour des teneurs en sulfates aussi essais au champ en Asie du Sud-Est (ROGER, com-
faibles que 50 ppm dans la solution de sol. munication personnelle).
suivantes, en Asie, dans un contexte climatique soufre), chimie des eaux d'irrigation (aux composés
différent, sur d'autres sols et sur d'autres variétés, ont précédents, il faut ajouter l'oxygène), climat (qui
confirmé qu'il existe des paramètres systéma- intervient par la pluviométrie: les quantités et la
tiquement défavorables. Ceux-ci sont donc essentiels répartition conditionnent l'engorgement). Elles sont à
si on les compare aux autres caractéristiques qui ne distinguer des conditions culturales, plus à même
peuvent, à elles seules, suffire à rendre le riz sensible d'être modifiées par l'homme: systèmes d'aména-
aux sulfures et au fer ferreux. On peut faire une gement et de contrôle hydrique, pratique du semis
prospective, destinée à définir un ordre de priorité direct ou du repiquage, choix des engrais (pour
des conditions défavorables au riz, à condition de pallier les déficiences simples ou multiples), apports
pouvoir la confirmer à partir d'exemples réussis. La d'amendements minéraux ou organiques, utilisation
hiérarchisation n'a d'autre but que de suggérer, pour éventuelle de pesticides, choix et sélection des
tous les sols si possible ou, à défaut, pour un certain cultivars, etc.
nombre de cas particuliers, un ensemble de mesures
D'autres conditions seront moins facilement
à prendre pour prévenir ou atténuer (notamment aux régulables : réactions de la plante (libération de O 2 ,
stades végétatifs critiques) les effets des intoxications
pouvoir autoprotecteur ou encore exsudation de
par sulfures ou ceux de la toxicité ferreuse. Avant de
. composés organiques) et dégradation de la matière
hiérarchiser les paramètres (cette hiérarchie sera
organique. Enfin, il est impossible de modifier la
différente suivant les zones rizicoles), il faut en
nutrition carbonée des bactéries.
terminer l'inventaire.
Pour chaque forme de toxicité, il est possible de
On peut les classer suivant les possibilités d'inter- suggérer une hiérarchie (tableau III). II faut préciser
vention humaine. Certaines conditions sont qu'elle diffère, y compris dans une même parcelle,
imposées par l'environnement: chimie des sols (dont pour un facteur qui intervient sur les deux formes de
les formes des composés contenant du fer ou du toxicité, et qu'elle est plus ou moins modifiable
Sulfato-réductlon spermosphérlque
• Engorgement excessif lors de la germination (fortes pluies ou première mise en eau trop copieuse)
• Semis direct (et/ou planage défectueux). La prégermination est utile mais parfois insuffisante
• Conditions de sol défavorables: origine (mangroves ou alluvions deltaïques f1uvio-marins) ; teneurs en sulfates et en argiles trop
élevées, acidité et/ou salinité excessives de l'horizon de surface
Sulfato-réductlon rhlzosphérlque primaire
• Engorgement excessif lors du tallage (fortes pluies ou planage défectueux)
• Conditions de sol défavorables (argiles, sulfates, sel)
• Paramètres secondaires: sensibilité variétale élevée (faible libération d'oxygène, exsudats trop favorables aux bactéries), attaque
préalable de toxicité ferreuse primaire, température trop élevée, dessalement insuffisant et présence de sulfates dans les eaux
Sulfato-réduction rhlzosphérlque secondaire
• Engorgement excessif de la floraison à l'épiaison (absence de drainage) et mise à sec trop tardive
• Paramètres secondaires: sensibilité variétale élevée, attaque préalable de toxicité ferreuse secondaire et carences multiples ou
autres toxicités (par exemple alumineuse)
Toxicité ferreuse primaire
• Stress multiples au repiquage (physiologiques et mécaniques)
• Première réduction de fer ferrique en cours (ou plutôt non achevée car elle commence dès la première mise en eau) et forte
disponibilité en fer ferreux produit hors rhizosphère
• Engorgement excessif lors du tallage
• Paramètres secondaires: planage défectueux, acidité (sols de mangrove), premier déficit en fertilisants minéraux et sensibilité
variétale élevée (enracinement faible ou lent, peu d'oxygène libéré)
Toxicité ferreuse secondaire
• Déficiences multiples en éléments fertilisants majeurs: P, K, Ca, Mg, parfois en liaison avec la nature des argiles à faible capacité
d'échange
• Anaérobiose prononcée entre la floraison et l'épiaison, ou altemance de phases d'assèchement et d'engorgement qui provoquent
une reprise de l'activité réductrice anaérobie
• Paramètres secondaires: carence en zinc, toxicité aluminique à bas pH, ou pH trop bas (inférieur à 4 sur le sol sec), et sensibilité
variétale élevée (cultivars importés ?)
V.A. jACQ, j.C.C. orrow, K. PRADE
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suivant les grandes zones rizicoles, surtout à partir du basse Casamance. Nous manquons donc d'infor-
troisième paramètre cité ou ceux considérés comme mations complémentaires pour mieux définir:
secondaires (classement par ordre décroissant). - l'antériorité des intoxications précédentes (quelle
est celle qui a provoqué la première atteinte du
plant ?) dans les sols « multisensibles li ;
Problèmes non résolus
- avec plus de précision, le risque d'intoxications
et résultats controversés simultanées;
La participation de la microflore dans les maladies - la part globale des processus bactériens dans les
décrites, trop souvent improprement dites « phy- maladies « multiformes l , quand des carences et
siologiques l , ne fait aucun doute. Mais il est difficile autres toxicités « chimiques li surajoutées expliquent
de faire la part des causes liées au sol ou à la nutri- déjà partiellement le mauvais état de santé du riz.
tion de la plante, et, surtout, de faire le point sur les
mécanismes physiologiques de défense. Aujourd'hui o Bactériologie
encore, il est malaisé de comprendre pour quelles
Un problème fondamental n'est pas résolu, celui de
raisons certaines plantes semblent bien résister à des
la survie des bactéries non sporulantes entre deux
teneurs en sulfures dans la rhizosphère, et/ou au
cycles culturaux. Il n'est pas le seul. Il serait com-
passage de quantités importantes de fer ferreux à
mode de pouvoir étudier les toxicités bactériennes
travers l'aérenchyme, suffisantes les unes et les autres
en faisant référence, comme en pathologie végétale,
pour tuer les plants d'une variété différente. Les
à un cycle annuel, pour lequel le sol serait considéré
informations sur l'origine et la nature du sol doivent
comme un réservoir de pathogènes, et le riz comme
encore être complétées: pour la toxicité ferreuse, on
l'hôte habituel. Il se pose en fait, à ce niveau, plu-
doit même avouer qu'à quelques exceptions près on
sieurs problèmes annexes.
connaît relativement peu de choses sur les condi-
tions physico-chimiques caractéristiques de tous les Les cellules bactériennes des deux microflores
types de sols sensibles. incriminées, même les plus mobiles et les plus
petites, comme certains Desulfovibrio, ne rentrent
Les principaux points qui donnent 1ieu à des
pas dans les tissus végétaux. Tout au plus, et en
controverses sont les suivants (liste non exhaustive et
fonction de l'épuisement relatif de l'oxygène, ont-
non hiérarchisable).
elles tendance à se rapprocher du rhizoplan, pour de
simples raisons de nutrition carbonée. Elles ne
o Physiologie végétale
pénétreront de façon significative dans les tissus
On citera:
racinaires qu'après la mort de la plante, et se
- la nature des mécanismes des intoxications au comporteront alors essentiellement en « minéra-
niveau des cellules de la surface des racines (celles lisateurs » de matière organique en décomposition
du rhizoplan et de l'aérenchyme) ; ceci pose en fait sur les tissus racinaires qu'elles ont tués. C'est donc
un problème de perméabilité cellulaire (accentuée, un seul produit de leur métabolisme habituel qui
dans le sens de la rentrée des ions ferreux venant de traverse l'aérenchyme. Ceci pose le problème, déjà
l'extérieur), quand il existe des carences; évoqué, de l'identification des causes de la
- la nature des mécanismes de défense du riz, ce modification de la perméabilité cellulaire. On peut
qu'on appel!e le « pouvoir autoprotecteur ; en dehors aussi se demander à quelle distance minimale du
de la libération d'oxygène, certaine et mesurable, il rhizoplan la production de l'ion toxique devient
est difficile de préciser plus avant ce qu'est ce dangereuse.
mécanisme (sans doute est-il lié à la perméabilité
précédemment évoquée) ; En conséquence, il est nécessaire de se poser deux
questions majeures sur la vie de cette microflore
- la sensibilité de certains cultivars importés, géné-
anaérobie stricte ou facultative, qui, pour vivre, doit
ralement à haut rendement potentiel, mais dont
être en mesure de se maintenir dans des microniches
l'usage, dans les sols sensibles, s'avère souvent
exemptes d'oxygène.
décevant, à cause de la toxicité ferreuse secondaire,
qui ne touchait pas aussi fortement les variétés Pemière question: la localisation des formes de
locales. Aucune réponse satisfaisante ne peut être résistance entre deux cycles végétatifs. 1/ n'y a
apportée, sauf peut-être par les généticiens. aucune difficulté majeure pour expliquer la survie
des réducteurs de fer: environ 50 % des souches,
o Symptômologie dont toutes les clostridies, possèdent des formes de
Les cas les plus spectaculaires de toxicités mult- résistance (revue de GHIORSE, 1988). Mais on ne peut
iformes, ferreuse et sulfureuse, carences (autres que expliquer le maintien, entre deux cycles, des sulfato-
celles en éléments majeurs) et toxicités diverses réducteurs non sporulés au niveau minimal de 100 à
(aluminique), n'ont été rencontrées par nous qu'en 1 000 cellules par gramme de sol. Ils représentent
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
98 % de la microflore sulfato-réductrice au Sénégal! façon quasi systématique, chaque année, quelle que
Fort peu de sulfato-réducteurs qui intoxiquent le riz soit la variété, et sous des formes similaires. C'est dire
sont sporulants : il a également été prouvé que les combien il est utile de rester prudent sur la définition
Desulfovibrio sont les plus nombreux et les plus d'un risque le absolu li, et combien il est souhaitable
actifs au Japon (FURUSAKA, communication person- de voir coopérer agronomes, pédologues, sélec-
nelle). Les formes de résistance entre deux cycles tionneurs et microbiologistes.
culturaux conditionnent leurs possibilités de survie
Ceci est encore plus vrai pour les rizières de bas-
en saison sèche et leur disponibilité au début du
fond, dont les caractéristiques physico-chimiques
cycle. La réponse est peut-être l'existence de micro-
sont, a priori, très variables, suivant la région ou le
agrégats mixtes (FURUSAKA et al., 1991). L'hypothèse
pays, voire d'une parcelle à l'autre. Mais, compte
que ces agrégats abritent des formes de bactéries
tenu des particularités constantes des rizières afri-
sulfato-réductrices non sporulantes reste encore à
caines de bas-fond, il nous a semblé logique de défi-
vérifier.
nir les risques le potentiels li comme suit:
Seconde question: que seraient les métabolismes - en l'absence de drainage, et/ou dans les sols à
le alternatifs li (et pas forcément anaérobies) permet-
teneurs en argiles élevées, l'anaérobiose et des
tant la survie à l'intérieur même de ces agrégats qui conditions fortement réductrices peuvent s'installer
sèchent en sol sec? Aucune preuve directe n'est rapidement et durablement: ceci est propice aux
donnée, mais des preuves indirectes pourraient être deux intoxications d'origine bactérienne;
obtenues par des études en cours sur un Desulfo-
vibrio sénégalais, qui, à la limite de l'anaérobiose - le confinement de la rizière peut faire que les ions
le précurseurs li ne seront pas éliminés entre les
stricte, utilise des sucres en présence d'extrait de
levure, ou encore continue à utiliser le lactate (sans cycles culturaux: à la première mise en eau, des
toutefois le le fermenter li) sur des milieux de plus en sulfates et certaines formes de fer seront solubilisés,
plus carencés en sulfates, sans se multiplier et sans et immédiatement disponibles pour intoxiquer les
produire de sulfures. plants en début de cycle;
- si les argiles sont des formes à faible capacité
d'échange (kaolinites, par exemple), le risque est
Risques particuliers .. élevé de rencontrer des carences en éléments
en rizières de bas-fond majeurs, et particulièrement en potassium, ce qui
favorise la toxicité ferreuse secondaire;
A un moment ou à un autre, dans la quasi-totalité des
- un risque supplémentaire peut être envisagé en
rizières tropicales inondées, les conditions favo-
Afrique continentale ou enclavée, du fait des faibles
rables à l'activité exacerbée d'une microflore
ressources monétaires, celui de voir un trop faible
anaérobie risquent de se réaliser. Le danger ne sera
apport d'engrais se traduire par une intense toxicité
immédiat que si ces conditions deviennent propices ferreuse secondaire;
lors d'un stade végétatif particulièrement sensible (et
en particulier en tout début de cycle). Mais il n'est - dans ces rizières, les difficultés liées à un excès de
pas obligatoire que cela se reproduise de façon sel seront peu à craindre, tout comme il est tout à fait
identique à chaque saison rizicole. En fait, même vraisemblable que la teneur globale en composés
avec les caractéristiques de sol a priori défavorables soufrés soit bien moindre que pour les rizières de
définies précédemment, il se peut qu'aucun mangrove ou sur sols deltaïques (mais il faut rappeler
symptôme ne soit observable une année donnée. qu'il suffit de peu de sulfates pour initier la sulfato-
L'intoxication disparaîtra, par exemple, à l'occasion réduction) ; ceci n'est pas exclu, par exemple sur les
d'un changement de cultivar (ou du retour à une bords du lac Tchad;
variété traditionnelle), d'une modification de la - enfin, il ne faut surtout pas se faire d'illusions sur
fertilisation ou du régime hydrique, ou encore dans une éventuelle absence de microflore dangereuse et
des conditions climatiques particulières (pluies bien adaptée. Comme dans tous les sols, surtout ceux qui
réparties, ne créant pas de trop forts engorgements). sont régulièrement engorgés, il y aura une microflore
Ceci explique pourquoi il devient de plus en plus fermentaire active, et donc toujours des réducteurs
difficile de parler de le sensibilité particulière li d'un de fer ferrique: si PRADE (1987) a pu en extraire 46
type de sol donné. souches différentes des échantillons de rhizoplan ou
de rhizosphère du Sénégal (tableau 11), il faut se
Il serait plus judicieux de parler de la le vulnérabilité li
persuader qu'un certain nombre de représentants de
d'un cultivar de riz, planté dans un sol donné et
cette microflore existent dans chaque sol de rizière
cultivé de telle manière, et de réserver le terme de sol
conti nentale.
sensible (comme, par exemple, en anglais on peut
parler de le iron toxic soil li) aux seuls sites sur Il y aurait plusieurs sulfato-réducteurs dans chaque
lesquels cette toxicité apparaît régulièrement, de sol: au Sénégal (JACQ, 1989), nous en trouvions au
VA JACQ, J.C.C. orrow, K. PRADE
minimum, par parcelle, deux à trois souches (diffé- peuvent intervenir sont: le contrôle de l'eau, les
renciables au microscope par leur morphologie). Sur pratiques culturales, les engrais, les amendements
l'ensemble du Sénégal, nous en avons isolé sept, minéraux, les apports organiques et le choix du
toutes nouvelles et douées de fortes facultés d'adap- cultivar. Il est difficile d'en préciser ici les coûts
tation aux conditions défavorables et fi uctuantes relatifs, sur des données économiques variables
avec le climat (salinité, pH et température). suivant les pays.
Les sulfato-réducteurs des rizières de mangrove Toute la prévention se basera sur une double stra-
semblent même pouvoir s'adapter à presque tout, y tégie, l'une de simple bon sens, qui consiste à placer
compris à des pH compris entre 4 et 5, et des le riz dans les conditions de culture qui lui soient
salinités de 15 g de NaCi par litre (cité dans PRADE et optimales, l'autre qui tend, à l'inverse, à placer les
al., 1990). Il Y en aura toujours une, au moins, qui bactéries dans de mauvaises conditions de
résistera à des conditions inhabituelles, même celles métabolisme. On peut tenter aussi de perturber leur
de n'importe quelle rizière continentale. Le con- métabolisme habituel, ou de changer les conditions
tinent africain, même dans sa partie centrale, est de milieu qui leur sont trop favorables. Tout cela
d'ailleurs depuis quelques années une source de revient à tenter de modifier l'environnement général
bactéries sulfato-réductrices particulières. Les de la rizière (et les conditions physico-chimiques de
descriptions de nouvelles souches, dont celles la solution du sol et/ou de la rhizosphère), les condi-
hébergées par les termites, sont données dans les tions de culture, ou enfin les réactions de la plante
récents articles de JOUBERT et BRITZ (1987), ESNAULT et elle-même.
al. (1988), TRAORE et al. (1990), BRAUMAN et al.
(1990), TRINKERL et al. (1990) et OLLIVIER et al. (1991). Modifier le fonctionnement de la racine consisterait
Au Burkina Faso, dans la vallée du Kou, OUATIARA à la rendre moins perméable aux ions ferreux ou aux
(résultats à publier) a découvert aussi une nouvelle sulfures. C'est difficile, sauf si le résultat peut être
espèce, et peut-être un nouveau genre de badéries atteint par les apports d'éléments minéraux choisis
sulfato-réductrices (Desulfovibrio senezii) et un pour rétablir un équilibre de la perméabilité
nouveau le producteur de sulfures lt, non sulfato- cellulaire. La priorité reste la sélection et le choix de
réducteur (Anaerovibrio burkinense), ainsi que de cu Itivars résistants.
nombreuses c1ostridies.
Modifier la disponibilité en fer ferreux ou en produits
soufrés dans la solution de sol apparaît irréaliste. Il
est impossible de modifier, tout au moins à court ou
moyen terme, les le réserves lt en sulfates et en
Prévention et lutte composés ferriques des horizons de surface. Il reste
hautement improbable de pouvoir prévoir le nombre
L'ensemble des données précédentes (résultats et minimal de lessivages successifs nécessaire pour
hypothèses de travail) permet de faire comprendre faire baisser ces stocks au-dessous d'un seuil limite
qu'il n'existe actuellement qu'un nombre limité en substrat minéral. On ne sait chiffrer ces seuils ni
d'informations le pratiques lt, c'est-à-dire diredement pour les sulfates, ni de façon certaine pour le fer. Ils
utilisables pour atténuer les conséquences de ces seraient de toute façon très bas. Le seuil de fer varie
deux intoxications. Mais les outils à notre disposition en fonction des solubilités définies par les chimistes
ne sont cependant pas négligeables. du sol, et, entre autres paramètres, avec le pH. Il
vaudrait mieux mettre à profit les connaissances
acquises lors des études de dynamique de libération
Principes de la prévention pour obtenir que les conditions optimales de la
et des techniques de lutte libération le physico-chimique lt, régies par l'hydro-
morphie (VIZIER, 1974, 1988), ne coïncident pas avec
Toute technique préventive utilisera en priorité les un stade végétatif pendant lequel la plante est très
données écologiques, pour placer les bactéries sensible physiologiquement et la microflore
réductrices dans de mauvaises conditions de milieu. anaérobie devient très active à cause de l'abondance
Simultanément, il faut renforcer la résistance du riz, et de la nature des exsudats disponibles.
et/ou rétablir une nutrition minérale appropriée.
L'intervention du riziculteur ne sera possible que si le En résumé, il faut favoriser l'aérobiose et renforcer
facteur défavorable ne dépend pas du climat ou de les capacités de résistance du riz. Ceci se fera en
certaines données pédologiques que l'on ne saurait lessivant les sulfates solubilisés, les excédents de
modifier à un prix raisonnable. Il est impératif formes de fer solubilisées ou de NaCl, en contrôlant
d'intervenir au moindre coût et au bon moment, sans les niveaux d'eau (différemment suivant que le risque
dépasser les possibilités monétaires des riziculteurs majeur est la sulfato-réduction ou la toxicité
locaux. Les principaux facteurs sur lesquels ceux-ci ferreuse), en modifiant les pratiques culturales (dates
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
Tableau IV. Maladies "physiologiques" du riz inondé dans lesquelles peuvent être impliquées les intoxications
par les sulfures et/ou par le fer ferreux. D'après JAca (1989) et PRADE et al. (1990).
prélèvements de sol et les analyser pour en connaître labour, tester des amendements favorisant la
les caractéristiques défavorables. percolation (gypse), et, de façon plus générale,
utiliser au mieux les techniques de drainage et
• Vérifier s'il existe des variétés moins sensibles, soit
d'exhaure. Modifier aussi les conditions de mise en
dans la même zone géographique, soit sur des sols
culture: choisir les dates de semis ou de repiquage
analogues.
en fonction de celle de mise en eau, éventuellement
• Identifier (en fonction des données analytiques de première mise en eau, des parcelles.
précédentes) les parcelles sur lesquelles une inter- • Diminuer la disponibilité en fer ferreux et/ou en
vention est justifiée, et économiquement suppor- produits soufrés de la solution du sol, et/ou la
table. dynamique de leur mise en solution: évacuer la
dernière eau d'irrigation avant l'assec, éviter les
o Phase d'intervention préventive engrais sulfatés (sulfate d'ammonium ou urée
• Effectuer les aménagements (si cela est techni- enrobée de soufre).
quement réalisable sur des parcelles existantes) qui
auraient pour effet de diminuer l'anaérobiose, c'est- • Utiliser une fertilisation optimale, minérale et/ou
à-dire de limiter un déficit ou des pertes en oxygène organique, qui évitera les carences et/ou régulera la
dans l'environnement général de la rizière: amé- perméabilité racinaire, et placera ainsi le plant dans
nagement tertiaire du drainage, planage, arrêt du des conditions favorables.
confinement. Il faut bien entendu calculer la renta- • Choisir (ou sélectionner) les variétés les moins
bilité à moyen terme de ces opérations. sensibles.
• Préconiser des pratiques culturales qui vont dans le Il est capital de signaler qu'il n'existe pas de phase
même sens (lutte contre l'installation de l'anaé- d'intervention curative: aucun traitement n'est
robiose) : contrôler la submersion (modifier les possible après l'apparition des symptômes. La mise à
niveaux d'eau), éviter la formation d'une semelle de sec de la parcelle est inefficace car trop tardive. Il
Thème /11- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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vaut donc mieux prévenir que guérir. Chaque rizière assez brefs. Les travaux effectués au Sénégal, fort
« à problème», ancienne ou récente, peut être le cas heureusement avec l'aide de pédologues, sur une
particulier d'un cas plus général, qu'il faudra iden- zone d'étude spécifique, mais double, dont une
tifier par des observations in situ, suivies, si néces- seule est sensible à la toxicité ferreuse (basse
saire, par des analyses de sols et de feuilles et des Casamance), ont permis de découvrir que les rizières
essais agronomiques. de mangrove constituent un biotope idéal pour
l'étude simultanée des différentes maladies, et, sur le
plan microbien, propice à des effets additifs possibles
mais pas obligatoires. Ce qui ya été découvert
Conclusion permet d'affirmer qu'il s'agit essentiellement
d'intoxications d'origine bactérienne et non de « ma-
Compte tenu des difficultés certaines à modifier ladies physiologiques », même si, nous l'avons vu,
l'environnefT1ent des bactéries, il vaut mieux changer l'explication des deux formes principales de toxicité
la plante par un choix de cultivars « résistants », ou ferreuse fait appel à des notions de « stress phy-
améliorer ses conditions de croissance. La variété siologique » ou de carences en éléments majeurs.
résistante doit être recherchée parmi les riz dont les La répartition mondiale des toxicités ferreuses est
exsudats carbonés seraient, qualitativement et confirmée par les analyses effectuées au Sri Lanka, à
quantitativement, peu favorables à ces microflores, Java ou aux Philippines, lors des travaux de
et pourvus d'un système racinaire vigoureux BERTENBREITER sur le cycle du fer, en voie d'achè-
(enracinement « géométriquement vaste ,., ce qui vement, et rapportés par Onow et al. (ce séminaire).
permet à une partie du système racinaire de survivre Les spécificités locales de l'Afrique occidentale ont
dans une zone de sol moins réduite), dont les racines été utiles pour affiner cette nouvelle analyse. Mais il
saines auraient un fort pouvoir oxydatif, ou encore reste actuellement difficile d'étendre les résultats
des propriétés autoprotectrices (à mieux définir) obtenus au Sénégal aux rizières des bas-fonds
contre le passage des ions ferreux. Modifier dans le continentaux, et a fortiori, à toutes les rizières
bon sens les conditions générales de la rizière, c'est sensibles de par le monde. A notre connaissance, il
choisir judicieusement les pratiques culturales, dont n'y a plus d'équipe de recherche sur l'intoxication
les dates de semis ou de repiquage, contrôler le par les sulfures, sauf au Japon.
régime hydrique aux stades·de sensibilité maximale,
utiliser les engrais adéquats. En particulier, pour la Les auteurs de cette revue espèrent cependant avoir
toxicité ferreuse, il faut apporter ceux qui été suffisamment clairs pour persuader le lecteur que
contrebalancent tout déficit amenant la plante aux toute nouvelle étude, dans des zones rizicoles non
limites de carence. S'il apparaissait que toutes les explorées, devra tenir compte des résultats présentés.
stratégies précédentes restent sans effet significatif, il Les plus importants, sur le plan pratique, sont les
ne faut pas hésiter à renoncer, pour des raisons de suivants: la symptomologie et les stades critiques
rentabilité économique, à aménager des rizières sur sont certains, tout comme les localisations de l'acti-
certains types de sols ou, au contraire, à investir pour vité microbienne (liées aux exsudats) et l'intervention
réaliser certains aménagements lourds. décisive des microflores réductrices (anaérobies
facultatives ou strictes) ; l'action des principaux fac-
Nous ne pensons pas que des faits nouveaux ou teurs du milieu, dont ceux liés au sol, commence à
importants seront mis en évidence, sur le plan micro- être bien connue, et la part prépondérante des
biologique tout au moins, par de nouvelles études de
déficiences en éléments minéraux pour la toxicité
cinétique de populations microbiennes, après les ferreuse secondaire est prouvée.
thèses complémentaires de PRADE (1987), en
allemand, sur le cycle biologique du fer et de JACQ Il existe, sur ce thème de recherche, bien d'autres
(1989), en français, sur le cycle du soufre, et les possibilités d'études in situ ou en laboratoire. Une
publications qui ont suivi. Il nous apparaît cependant bonne part pourrait tenir compte des hypothèses de
utile que paraisse, en anglais, une synthèse plus travail émises dans cette revue, et faire appel à des
globale. En cours de rédaction, elle nécessite la techniques « non microbiologiques ,.. Sur un certain
relecture soigneuse de près de 1 000 articles, et sera nombre de points, les connaissances, restent
soumise à l'IRRI à la fin de 1992. Des études incomplètes, mal élucidées, voire controversées.
ponctuelles sont actuellement en cours sur des Parmi elles, citons: l'étude fine, au niveau cellulaire,
rizières continentales au Burkina Faso: la thèse de des mécanismes des intoxications, la priorité à
OUAnARA, sur les bactéries productrices de sulfures, accorder à l'une des formes d'intoxication par
est prévue pour 1992. Un DEA, sur toutes les rapport à l'autre dans certains sols très sensibles,
bactéries réductrices de composés soufrés, a été l'importance économique et l'extension exacte des
soutenu par DIANOU à Ouagadougou, fin 1989 ; ce doubles intoxications, l'implication de l'un et l'autre
dernier devrait présenter sa thèse dans des délais de ces processus dans certaines maladies complexes,
'\. JACQ, J.c.G. orrow, K. PRADE
,-.:<:<:..-.:.:.. -.:.:..-.:..-.:.: .,;: 'O'}O: ~ ~ -.:..-.: ..:: :-: ""'=.~.:-:.: :....:..'-':o~.~.:.: ..~-:-:""'-.::.:.:.:.:oJo~-':-: ~ ..::o: :-:-:.::.:: :.:.:.:.:....::.:.::.:.::.:o'lo.'-':o:-:.:«-. :-:-:-:-:-:.:.: ..::.::.::.:.:.::.:.:.:.:.:.:.:.:-:.:-~ ·:·:.:·:.:·x·:.:·:.:·:.:: ....::.:.:.::....::.::.: x··
les possibilités multiples de défense du plant de riz et uptake iron toxicity of wetland rice. J. Plant Nutr., 7 : 177-
(sauf rares exceptions) la sensibilité variétale. On 185.
peut aussi envisager, pour mieux connaître la vie BEYE G., 1973. Acidification of mangrove soils after
bactérienne en rizière, un programme d'étude sur la empoldering in lower Casamance: effects of the type of
part de ces microflores dans la minéralisation du reclamation used. In : Proceedings of the international
carbone et la dégradation des débris racinaires. symposium on acid sulphate soils. Oost H. (ed.).
Aujourd'hui, dans le biotope rizière inondée, l'étude Wageningen, ILRI, p. 359-372 (ILRI Reports, nO 18).
de la réduction du fer ferrique et du sulfate sont des BEYE G., TaURE M., ARIAL G., 1975. Acid sulfate soils of
étapes obligées pour bien comprendre la partie West Africa : problems of their management for
anaérobie du cycle du carbone. agricultural use. International Rice Research Conference.
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Remerciements. Cette recherche a été cofinancée au BOIVIN P., LOYER J.Y., 1988. Mise en valeur des
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mission des Communautés européennes de Bruxelles, BRAUMAN A., KOENIG J.F. DUTREIX J., GARCIA J.L.,
Belgique. Les auteurs remercient le Dr P. ROGER pour ses 1990. Characterization of two sulfate-reducing bacteria
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Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
R. GAUDIN 1
données relatives au système et d'en proposer une devenir de la glutamine est son éventuel stockage va-
interprétation unitaire. Nous évoquerons ensuite les cuolaire.
appl ications potentielles.
le cycle GS-GOGAT constitue donc bien le carre-
four essentiel, l'interface, la plaque tournante des mé-
tabolismes carboné et azoté de la plante.
L'assimilation de l'ammoniaque
..«:~eeeeeeeeeeeeee~~~~~"«o.~""~"«o.""v...
........":"~:,'X""~""""""~:-""""«-,,,,,,,,,,,,,~,,&,,,,w
Le cycle GS-GOGAT
Ce cycle est la seule voie d'assimilation de l'azote
'a .
cycle de K,ebs
t
~OOH ÇOOH
ammoniacal chez les végétaux supérieurs. Il tire sOn ÇHNH 2 C=O
/ ~~~ \
nom des deux enzymes impliquées: la glutamine ÇH2
ÇH 2
synthétase (GS) et la glutamine-oxo-glutarate-amino- C=O r 1< Fd
"duite COOH
~H2 ~
ou 2.oxo.glutarate
transférase (GOGATI. C'est la découverte de cette M9~ glutamine [W@NAc#i
dernière par lEA et MIFLIN (1974) qui a conduit à
envisager le rôle primordial du couplage des
A T P - Y \ !=OOH
NH3
~HNH2A ~HNH2
CHl
,COOH
~H2
réactions catalysées par les deux enzymes. Dans le ÇH 2
COOH
ÇH2
CO OH ~
cycle réactionnel, deux acides aminés à cinq atomes glutamate gtutamate
d'offre en ammoniaque (15N) (JOY, 1988). Des Des études récentes montrent qu'un bon indicateur
expériences récentes permettent d'avancer que la de l'activité fixatrice de la PEPC est le rapport
principale fonction de la GDH est déaminatrice et glutamine/glutamate (SCHUllER et al., 1990 ;
qu'elle est régulée par un déficit en carbone VANlERBERGHE et al., 1990). Ainsi la production
(ROBINSON et al., 1991). différentielle de glutamine qui caractérise un cycle
GS-GOGAT, à un haut mais toutefois limité niveau
de fonctionnement, permet-elle de modifier ce
niveau en augmentant l'entrée du squelette carboné.
Localisation et capacité La fixation biologique du bicarbonate joue donc en
des enzymes GS et GOGAT quelque sorte à la façon d'un shunt réglable, afin
Le fonctionnement du cycle d'assimilation dépend d'orienter à la demande (ammoniaque externe) le
des capacités enzymatiques de GS et GOGAT, c'est- flux des photosynthétats de la fonction énergétique
à-dire de leurs activités maximales et de leur (respiration) vers la fonction aminosynthétique
localisation cellulaire. En ce qui concerne le premier (figure 2).
point, la capacité GS est beaucoup plus élevée que la
capacité GOGAT (SUZUKI et GADAl, 1984), ce qui
amène la plante, à jouer sur la glutamine pour faire
face à une offre importante en ammoniaque externe.
Cela va de pair avec la localisation des enzymes. La
GS cytoplasmique (HIREl et GADAl, 1980) est placée
dans une situation favorable à l'interception de toute
l'ammoniaque absorbée; son substrat étant
l'ammoniac NH 3 (GASS et MEISTER, 1970), l'hydro-
nium sera excrété pour préserver l'électroneutralité
de la cellule. La glutamine - produit de la réaction
- sera utilisée dans les synthèses, exportée de la
cellule, stockée dans la vacuole ou dirigée vers les
plastes. La GOGAT localisée dans ce dernier
compartiment permet d'assurer la deuxième partie
du cycle d'assimilation. Etant de capacité inférieure à
la GS, le glutamate produit qui sort des plastes est
tout de suite repris par la GS en cas d'offre
importante en ammoniaque. ,
,
\
,
oxo.glu~arcte 1
Le rôle de la PEPe
~
h\
G ,.,
L'activité de la GOGAT est dans la pratique limitée •
0; A
T
'%
par la disponibilité en oxo-glutarate ou en cofacteur \ . 0 1 GS \,
, ?
réduit (ferredoxine réduite). Un processus permet \ glu .'%
'~In ,
d'augmenter la disponibilité en oxo-glutarate et ainsi ,
de réguler le flux d'entrée du squelette carboné
dans le cycle GS-GOGAT. Ce processus est la
fixation de bicarbonate par la phospho-énol-
pyruvate carboxylase (PEPC). Cette enzyme est
particu-lièrement active dans les racines de plante Figure 2. Le cycle GS-GOGAT à l'interface
en alimentation ammoniacale (Popp et SUMMONS, des métabolismes carboné et azoté chez la racine
1983 ; ARNOZIS et al., 1988). Lorsque la fixation joue de riz en alimentation ammonicacale
à plein, elle permet théoriquement l'utilisation de (PEPe = phospho-énol-pyruvate-carboxylase).
tous les atomes de carbone du saccharose (produit
de la photosynthèse) pour la synthèse du glutamate
ou de la glutamine : c'est la voie anaplérotique du
cycle de Krebs qui a pour fonction de remplacer
Méthode
automatiquement l'oxo-glutarate ayant réagi. A des
niveaux intermédiaires de fixation, le saccharose ou
Principe
bien sert de substrat à oxyder (glycolyse puis cycle de Des particularités liées à la chimie du sol, à la phy-
Krebs), ou bien donne le squelette carboné (oxo- siologie du riz et à la forme sous laquelle l'azote est
glutarate) nécessaire au métabolisme azoté. apporté concourent à transformer cette propriété de
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
régulation en phénomène accessible de l'extérieur embout plat d'une épaisseur de 2 mm. Le super-
de la plante. granule est constitué d'urée compactée ; son dia-
mètre est de 14 mm.
En ce qui concerne le sol, le facteur le plus important
est l'anaérobiose qui règne en profondeur dans la Une dépression de 0,8 bar appliquée à la bougie
rizière: l'anoxie favorise l'ammonification et gêne la permet de prélever la solution du sol. Cette
nitrification. La plante est donc confrontée à une opération, effectuée grâce à une pompe à vide
alimentation ammoniacale quasi exclusive. manuelle, est répétée une dizaine de fois au long du
cycle. La solution est récupérée dans un flacon à
Le placement profond d'urée permet de conserver
pénicilline. Le volume recueilli, quelques millilitres,
cette caractéristique mais donne aussi naissance à
correspond aux besoins de dosage.
une hétérogénéité de substrat (ammoniaque) que la
plante va gérer au mieux. Ceci implique notament un La solution est analysée en ammoniaque par la
retard dans la prise d'ammoniaque si l'alcalinisation méthode du bleu d'indophénol (BURDIN et
du sol induite par l'hydrolyse de l'urée est trop im- EGOUMEDINES, 1973 ; SCHEINER, 1976 ; GAUDIN et al.,
portante. En effet, à des pH dépassant 8, la pro- 1985). Le nitrate et le pH sont éventuellement
portion de base faible NH] est telle que celle-ci mesurés.
passerait librement à l'intérieur de toute racine située
à proximité (JACOBS, 1940 ; WARREN, 1962) : si ce L'évolution de la concentration en ammoniaque est
mécanisme jouait pleinement, la plante ne pourrait comparée à une situation de référence définie par un
pl us réguler son pH ou ne parviendrait pas à se apport de supergranules en sol nu et décrite par un
débarrasser assez vite de l'ammoniaque accumulée modèle de la diffusion de l'ammoniaque à partir de
dans la racine plus acide (pH cytoplasmique = 7,25). l'engrais (GAUDIN, 1987). La concentration en
ammoniaque reste relativement uniforme (à 10 %
La prise de l'ammoniaque dérivant d'un placement près) dans le petit volume de sol touché par le
ponctuel d'urée intervient donc d'abord à la prélèvement.
périphérie de la zone de diffusion de l'azote; elle
intervient ensuite dans la zone centrale (SAVANT et
al., 1983 ; GAUDIN, 1987, 1988). C'est dans cette Le mécanisme du premier ordre
phase finale qu'est observé le mécanisme du premier
ordre (GAUDIN et al., i 987 ; GAUDIN, 1991) qui et les approches complémentaires
semble traduire directement l'adaptation à une offre de l'effet supergranule d'urée
variable en ammoniaque. Le mécanisme du premier ordre se présente sous la
En effet, ce mécanisme prend place dans un cadre forme d'une droite dans la représentation graphique
particulier où la plante est le facteur déterminant de du logarithme de la concentration en ammoniaque
l'évolution de l'offre. Ces conditions ne sont par en fonction du temps (figure 3).
exemple pas remplies au champ en présence de
L'analyse de ce mécanisme en termes de régulation
fumier, puisqu'alors l'ammonification de la matière
de l'assimilation de l'ammoniaque apparaît
organique empêche la maîtrise de l'offre; elles ne
diffici lement contournable lorsqu'on tient compte
sont pas remplies non plus dans des expériences
des résultats obtenus par d'autres approches de l'effet
classiques de physiologie végétale où la plante
supergranule d'urée, avec, dans le meilleur des cas,
pousse sur solution nutritive à concentration en
confrontation avec les données du dispositif de
ammoniaque bien définie. Le système, composé du
prélèvement.
plant de riz (ou d'un nombre limité de touffes de riz)
et de la source ponctuelle et instantanée d'urée La première approche est un suivi de l'assimilation
apportée profondément, constitue en fait un système de CO 2 chez des plants de riz fertilisés par
isolé du point de vue de l'économie de l'am- supergranules; il indique que la photosynthèse est
moniaque. maximale de 40 jours à 60 jours après repiquage et
qu'elle varie peu durant cette période (INGRAM et al.,
1991). Une photosynthèse variable ne peut donc
Description du dispositif expliquer le mécanisme du premier ordre car celui-ci
est généralement observé entre 40-45 jours et 55-65
Le dispositif consiste en une petite bougie en
jours; le partage des photosynthétats entre les
céramique poreuse placée au contact d'un
fonctions énergétique et aminosynthétique, en
supergranule d'urée de 2 g, le tout enfoui à 10 cm de
revanche, s'y accorde bien.
profondeur entre quatre touffes de riz repiquées
selon une géométrie 20 cm sur 20 cm. La bougie est La seconde approche concerne l'enracinement à
de forme cylindrique (longueur: 10 à 15 mm ; proximité du point d'apport du supergranule (SAVANT
diamètre: 13 mm) et présente au supergranule un et STANGEL, 1990) : si elle confirme que les racines
R. GAUDIN
évitent la zone centrale toxique (à cause de NH 3 ) neraient à la façon d'un réacteur biochimique trans-
jusqu'à quatre semaines (voire cinq) après repiquage, formant les photo-synthétats en glutamine (ou
elle ne montre pas ensuite de développement glutamate).
racinaire plus prononcé dans cette zone; seules
Cette idée séduisante s'accorde bien aux résultats de
quelques racines l'investissent et il semble que
Dupuy et al. (1990 c) relatifs à la cinétique de
celles-ci assurent exclusivement une fonction
marquage des parties aériennes de plants de riz
assimilatrice aux dépens de leur fonction
fertilisés par des supergranules enrichis en 15N. Cette
exploratrice naturelle. Ce résultat, qui s'oppose aux
expérience menée en plein champ démontre que la
observations de PASSIOURA et WETSELAAR (1972) en sol
migration de l'azote de l'engrais des racines vers les
sec, accrédite l'idée que la racine de riz profite du
tiges et les feuilles intervient principalement du 3S e
phénomène de diffusion qui lui amène l'am-
jour au 60 e jour après repiquage et apport du
moniaque ; en effet, cette diffusion intervient
supergranule. L'emploi de la sonde décrite ci-dessus
beaucoup plus vite dans un sol saturé d'eau. Dans le
a permis de dater le prélèvement de l'ammoniaque
cadre de cette interprétation qui a notre préférence,
par la plante: au point d'apport du supergranule, il a
en présence de grosses quantités d'ammoniaque
lieu entre le 40 e et le 55 e jour (figure 4).
comme celles dérivant d'un placement profond de
L'assimilation de l'ammoniaque est donc un
supergranules d'urée, quelques racines fonction-
phénomène de grande vitesse et le produit de
l'assimilation (de façon très vraisemblable,
essentiëllement de la glutamine ; LORENZ, 1975) est
rapidement transporté vers les feuilles. L'épuisement
précoce du sol au point d'apport du supergranule
Log de la concentration (60 j) semble de plus entraîner un redéploiement du
en ammoniaque système racinaire, nécessitant une remobilisation de
l'azote organique visible à travers la baisse du
coefficient réel d'utilisation en fin de cycle (Dupuy et
al., 1990 d.
-1
o 100
-2
\ (A) Courbe de diffusion observée en sol nu
\
\ -1 80
\
\ (B)
-3 \ ·2 60
\ (B)
Courbe en présence
\ de plante
\ -3 40
-4 \
\
\ -4 20
\ o'
-5 \
~ 0
o 10 20 30 40 50 60 70 80 90
o 10 20 30 40 50 60 70 80 90
Nombre de jours après repiquage
e! placemen! du supergranule de 2 g d'urée
-2 ~\'
\ ,
Conclusion: applications
\\ ,
\ \
\ \ ", Bas-fond stricto sensu
...• 'h • ••• • ..,."..v. • Yo·.·h· . ,." v.
Ces applications agronomiques ne doivent pas GASS j.D., MEISTER A., 1970. Computer analysis of the
cacher l'intérêt fondamental du mécanisme du active site of glutamine synthetase. Biochemistry, 9 (6) :
premier ordre, pour le physiologiste. Notamment, la 1380-1389.
notion de division du travail entre quelques racines GAUDIN R., DUPUY j., BOURNAT P., 1987. Suivi du
(dans un état stationnaire) assimilatrices et les autres contenu en azote de la solution du sol d'une rizière après
racines exploratrices constitue un thème de placement d'urée. L'Agron. Trop., 42 (1) : 13-19.
recherche qui pourrait conduire à terme à de
nouvelles stratégies de sélection variétale. Ce large GAUDIN R., DUPUY j., RANAIVO j., 1985. Les bougies
poreuses, un outil pour suivre NH1 et NO) en solution
champ d'investigation sera le nôtre dans les années à
dans les sols de rizières. Il. Etude expérimentale. L'Agron.
venir.
Trop., 40 (1) : 33-38.
SAVANT N.K., CRASWELL E.T., DIAMOND R.B., 1983. SUZUKI A., GADAL P., 1984. Glutamate synthetoase :
Use of urea supergranules for wetland rice : a review. physicochemical and functional properties of different
FerUI. News, 28 (8) : 27-35. forms in higher plants and in other organisms. Physiol.
Vég., 22 : 471-486.
SAVANT N.K., STANGEL P.J., 1990. Deep placement of
urea supergranules in transplanted rice : principles and VANLERBERGHE G.c., SCHULLER KA, SMITH R.G., FEIL
practiœs. Fertilizer Research, 25 : 1-83. R., PLAXTON W.c., TURPIN D.H., 1990. Relationship
between NHt assimilation rate and in vivo
SCHEINER D., 1976. Determination of ammonia and
phosphoenolpyruvate carboxylase activity. Regulation of
kjeldahl nitrogen by indophenol method. Water Research,
anaplerotic carbon flow in the green alga Selenastrum
10: 31-36.
minutum. Plant Physiol., 94 : 284-290.
SCHULLER KA, PLAXTON W.c., TURPIN D.H., 1990.
WARREN K.S., 1962. Ammonia toxicity and pH. Nature,
Regulation of phosphoenolpyruvate carboxylase from the
195 :47-49.
green alga Selenastrum minutum. Properties associated
with replenishment of tricarbocylic acid cycle YONEYAMA T., KUMAZAWA T., 1974. A kinetic study of
intermediates during ammonium assimilation. Plant the assimilation of the N-15 labelled ammonium in rice
Physiol., 93 : 1303-1311. seedlings roots. Plant Cel! Physiol., 15 : 655-661.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
ClRAD,1993
P. HENNEBERT 1
10
Sols
a
C CIN SBE CEC pH 7 Taux 8al pH 7
Les analyses des quatre sols (à l'état sec) sont reprises
au tableau Il et certaines caractéristiques sont _ Gi8uma _ Gileg. 0 Ak.goma _ Gikomero
illustrées à la figure'.
Figure 1. Quelques caractéristiques des sols
Le sol de Gitega est un colluvium minéral brun-rouge des essais soustractifs.
de 30 cm, superposé au sol originel hydromorphe
non organique. Ce colluvium provient de l'horizon B
ferrallitique d'une colline exploitée par des
est pédologiquement très hétérogène (ensemble
briquetiers. C'est un sol chimiquement pauvre. Le
organique ou tourbeux parsemé de lentilles d'argile
site est sommairement aménagé en casiers, inéga-
localisées, méandres recoupés, action anthropique),
lement irrigués.
mais le site est homogène. Ce site est bien drainé en
Le sol de Gikoméro est organique (9,4 % de C) sur saison sèche et peu engorgé suite au drainage
une épaisseur d'environ 40 cm, surmontant un anthropique en saison des pluies.
horizon B argileux gris clair gleyifjé. Ce sol est
Le sol de Gisuma est tourbeux (32,8 % de C) sur une
chimiquement riche (', cmol(+) de bases
épaisseur de plus d" m. Il est situé dans une vallée
échangeables par kg), car il a recu, d'après les dires
modérément encaissée de 50 m de large, servant
des paysans des environs, les déchets des cases
d'exutoire à une très vaste zone tourbeuse. Malgré
voisines depuis des années.
des aménagements, ce sol est très imparfaitement
Le sol de l'Akagoma est faiblement tou rbeux (' 4,8 % drainable pour des raisons topographiques et de
de C) sur une épaisseur de 50 à 70 cm, surmontant perméabilité excessive du matériau. Localement, la
un horizon B argileux gleyifjé. La vallée où il se situe tourbe flotte en matelas, sans contact avec le plan-
.>
3 14 ~."v>....,>~ "«.-... . .»:-.......................~:-:........»:-.""..:·:-......:....:·:-:<·:-:·:.."
...............
H. HENNEBERT
cher minéral de la vallée. La nappe affleure à la rendement (r = 0,94, n = 4, p> 0,97) (figure 3). Les
surface ou très légèrement en dessous de façon teneurs absolues en Ca, Mg, K et Na et la somme des
permanente. Le fer s'accumule à la surface de ce sol bases sont corrélées au rendement avec des
en précipités colloïdaux rouges, ou en pellicules probabilitéS proches de 0,90. A l'inverse, le taux de
irrisées d'apparence huileuse à la surface de l'eau. carbone n'est pas corrélé au rendement (figure 4).
Cependant, le niveau moyen de rendement est le
plus faible dans le sol tourbeux de Gisuma. La teneur
en fer extractible n'a pu être suivie dans l'essai. Une
Rendements étude antérieure a montré que ce sol présente à l'état
Les rendements sont présentés au tableau III et à la submergé un taux de saturation en fer ferreux au pH
figure 2. du sol de l'ordre de 66 % (HENNEBERT et OZA, 1990).
En sol sulfaté acide, la teneur critique en fer dans les
feuilles de 300 mg kg-' est atteinte lorsque le taux de
saturation en fer ferreux du complexe d'échange
Rendement (Mg hm-2)
5.-----.:........::.----.:...-----------------, atteint 68 % (MOORE et PATRICK, 1989). L'abondance
de Fe++ extractible, les faibles teneurs en K, Ca et Mg
relativement à la CEC du sol et une faible dispo-
nibilité de N et de P semblent les causes des faibles
rendements.
4
Gisuma Akagoma Gikomero
Le contrôle de l'eau est un facteur indispensable à o L------L:.-_ _----'- -'-- -----'- --.J
l'obtention de rendements élevés. o 0,1 0,2 0,3 0,4
sur échantillons secs), seul le taux de saturation du Figure 3. Relation entre le taux de saturation
complexe d'échange à pH 7 du sol est corrélé au en bases et le rendement.
cas, les éléments qui manquent le plus sont N, Pet K, Tableau VI. Rendements de l'essai fractionnement
de l'azote sans contrôle de l'eau.
alors que dans l'essai en champ, sur le même sol,
l'absence d'azote ne diminuait pas le rendement. Eau Non contrôlée (- 40-0 cm)
C(%) 14,80
Variété Y3
Rendement (g'pot) Traitements T 0,49 a
14 , - - - - - - = - - ' - - - - ' - - - - - - - - . - - - - - - - - - ,
et rendement
R-R 0,81 a
12 (t ha- 1)
R-30 0,33 a
R-60 O,na
30-30 0,44 a
30-60 0,53 a
30-90 0,54 a
30-90 0,69 a
FCl FC2 Moyenne 0,58
absolu de l'eau, depuis plusieurs années. Les l'ensemble des parcelles, le taux de saturation du
traitements « nappe à - 50 cm lt et « - 70 cm lt ont complexe d'échange à pH 7 est de 17 % .
été menés dans deux nouvelles parcelles constituées
en partie de terres rapportées, et ceinturées de drains
à niveau d'eau réglé par des planchettes. L'urée est Caractéristiques physico-chimiques
fractionnée: 50 N au repiquage, 50 N 34 jours après
repiquage. Le pH, le potentiel redox (exprimé sous la forme pe
= Eh/O,059), la teneur en azote ammoniacal et
nitrique et le fer ferreux échangeable ont été suivis à
Sols partir du travail du sol jusqu'à la maturation dans les
huit parcelles. Le sol était prélevé en échantillon
Les sols des huit parcelles (4 niveaux de nappe x 2 composite, et analysé à l'état frais. Les moyennes des
niveaux de N) diffèrent assez sensiblement (tableau mesures sont présentées au tableau VIII et aux figures
VII, analyses à l'état sec). Les parcelles forment deux 7 et 8.
groupes du point de vue teneur en C. Les casiers (par-
celles 1 à 4) montrent un taux de C et un rapport C/N Suite à la submersion, le pH augmente et le pe
plus faible que le matériau originel dont sont formés diminue. Les valeurs de pe + pH se stabilisent en
les parcelles drainées. La mise en valeur depuis des moyenne à 8,67 pour les sols des casiers irrigués à a
années aboutit donc à une évolution favorable pour et + 10 cm. Les sols des casiers drainés ont un pH
l'aptitude rizicole. A l'intérieur de ces deux groupes, plus acide et un potentiel redox plus élevé, avec un
la richesse en Ca et Mg varie fortement. Pour pe + pH de 15,22 en moyenne.
Tableau VII. Sols des huit parcelles de l'essai dynamique du fer et de l'azote.
Tableau VIII. Paramètres physico-chimiques des huit parcelles de l'essai dynamique du fer et de l'azote
en cours de culture (moyenne de toutes les mesures par parcelle).
31 8 :«-.~....-.c-o.."'' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' "'Co.'' ' ' ' ' ' ' ' «' ».'' ' ' '«o.%'' ' ' ' ':' ' '.-.':' ' ' ' ' ' .
H. HENNEBERT
12 12
_ Eau .10 -N I&.~ Eau -10 ·N CI Eau 0 -N _ Eau O.N _ Eau -10 -N ~ Eau -10 ·N D Eau 0 -N _ Eau O·N
o Eau ·150 -N CJ Eau -50 -N _ Eau -70 -N I!I!!I!J Eau -70 .N o Eau -50 -N 0 Eau -50 -N œ ElU -70·N Ul Eau -70 ·N
trouvent dans des conditions d'humidité différentes selon MIKKELSEN (1970), c'est à ce stade de déve-
et ont des passés différents, nous les avons portés à loppement que les teneurs minérales du riz sont le
un état de référence: ils ont été lavés avec une mieux corrélées aux rendements. Des plants de riz
solution de CaS0 4 et MgS0 4 de normalité totale semés dans des pots hors essai seront disséqués
1,5 mmolc 1-1 et de rapport Ca/Mg = 3/2 ; cette régulièrement afin de détecter la OP. A la DP, on
solution a été calculée sur la base de la composition prélève également un échantillon de sol ; les carac-
d'eaux d'irrigation de plusieurs marais. Nous avons téristiques des sols à la DP figurent au tableau II.
procédé à ce lavage en percolation libre jusqu'à
conductivité constante. Les caractéristiques des sols Les rendements en grain, le nombre de grains pleins
après lavage figurent au tableau 1. Les orifices de et le poids de 1 000 grains pleins sont donnés au
percolation ont ensuite été fermés avec des tableau III.
bouchons de caoutchouc.
Les feuilles de riz sont coupées en petits morceaux La figure 1 présente les relations entre cet indice de
« 5 mm) avec des ciseaux en acier inoxydable, toxicité et le rendement en grain (a), le poids
séchées à 105 oC dans des creusets en porcelaine et de 1 000 grains pleins (b) et le nombre de grains
pesées. Elles sont ensuite calcinées pendant 24 h à pleins (d.
400 oC dans un four à mouffle. Le résidu de 1 à 1,5 g
Le rendement (figure 1 a) est négativement corrélé
de matière sèche est attaqué par 8 ml de réactif
avec le Fe foliaire; la relation linéaire entre les deux
triacide (H 2 S04 , HN0 3 , HCI04 , 1/1/4 en volume)
variables n'explique cependant que 43 % de la
sur bain de sable jusqu'à évaporation. Le résidu est
variabilité du rendement.
repris à l'eau désionisée, filtré dans des ballons de
50 ml et porté à volume. Le poids de 1 000 grains (figure 1 b) ne présente pas
de corrélation significative avec le Fe foliaire. Les
Les cations Ca, Mg, Fe, Mn, Zn sont dosés par spec-
deux droites matérialisent la gamme des valeurs
trophotométrie d'absorption atomique sur un spectro-
citées par TILQUIN et DETRY (1991) pour la variété
photomètre Varian Techtron SpectrAA 10. Le potas-
Facagro 71 : 27,1 à 28,3 g pour 1000 grains. Quatre-
sium est dosé sur le même appareil par spectrométrie
vingt dix pour cent des points expérimentaux se
d'émission atomique. L'ammonium est distillé puis
trouvent en deçà de cette gamme, avec une
titré par H2 S04 . L'aluminium est dosé par colorimé-
moyenne de 25,2 ± 1,8 g.
trie à l'aluminon (Hsu, 1963), à 530 nm sur un spec-
trophotomètre Coleman Junior liA modèle 6/20A. La meilleure corrélation est observée entre le Fe
foliaire et le nombre de grains pleins (figure 1 d:
Les cations échangeables sont exprimés, confor-
mément aux nouvelles normes du système inter- NGP = 698 - 1,26 Fe plante; r2 = 0,54 ; n = 43
national d'unités, en centimoles de charge par La teneur en Fe foliaire à la DP explique 54 % de la
kilogramme de sol <emolc kg-1). variabilité du nombre de grains pleins.
On peut donc conclure à l'existence d'une toxicité
ferreuse dans les marais d'altitude. Un seuil de
toxicité ne peut toutefois pas être établi sur la base
Résu Itats et discussion
des relations linéaires ci-dessus.
Evaluation de la toxicité ferreuse
La teneur en Fe dans les plus jeunes feuilles au stade Relation avec le complexe d'échange
différenciation paniculaire (OP, 63 jours après le La figure 2 montre des diagrammes de Cate-Nelson
semis) permet de diagnostiquer une toxicité ferreuse. (CATE et NELSON, 1965) des couples Fe foliaire-
Thème 1/1- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
x-..,"<'('I.,.."C"....."C<'I......."":'I......»».~"''''..~...~. . .~. . . . ,. ~''»:o...,'''(>..,..x-:o....~~'''...~"«"--.;................:«<-.~~~~ ..., ...~"«-.--:-...." ««<-X«o....~......~...W »...."«<'.,"'«':-....-.;..~"'t"
Tableau III. Plantes: Fe foliaire (DP) et rendement. fraction équivalente de Fe échangeable (Fe extrait
Sol Rép Fe foliaire Rdt Nombre de Poids par KCI 1N rapporté à la somme des cations extraits
(f.Lg g-1 MS) (mgl2 pl.) grains pleins 1000 gr. par KCI 1 N et exprimés en cmolc kg-1). La méthode
(/2 pl.) (g) de Cate-Nelson indique un seuil de toxicité ferreuse
Kin1 A 70 19334 735 26,3 à 86 % de Fe échangeable. La teneur en Fe foliaire
B 166 17502 625 27,7 correspondante est de ± 250 Jlg g-1 MS.
C 113 18502 683 26,2 Le seuil toxique de Fe foliaire à la OP, 250 Jlg g-1 MS,
Mak A 105 18810 711 26,3 est proche du seuil de toxicité de 300 Jlg g-1
B 76 17700 628 27,0 mentionné par TANAKA et YOSHIDA (1970, cités par
MOORE et PATRICK, 1989). Cette valeur moyenne doit
C 106 17585 663 25,8
certainement être nuancée selon les variétés.
Aka A 111 17911 608 25,9
B 231 18080 422 27,5
C 146 16349 540 25,7
Kin2 A 283 16644 701 26,5
B 117 14818 535 26,9
Rendement en grains
20000 . .·
(mq/2 plants)
~ .
": 0 (a)
C 55 16n5 625 26,8 "
Nyam3 A
B
498
333
7076
4729
339
227
20,6
20,5
15000
·· .~ .
.... .t::':.
C 274 3603 178 20,2 10000 . ..........,
.......
·.. •
Nyam2 A 266 5702 265 21,5
B 294 5526 235 23,5 5000
Gah A
B
148
140
11843
10387
473
420
25,0
24,7
22
20
·. .
C 133 11870 467 25,4 18 1
Rug A 191 9702 411 23,6 o 100 200 300 400 500
Git
C
A
262
275
12477
12286
442
467
25,3
26,3
800
700
. 1
CO
(c)
600
~. I----..!...-
B 242 12159 463 26,2
C 302 10978 432 25,4 500
· ....... .-.··.·
~
Nkgz A 137 11747 448 26,2 400 . \
~ 1
B 124 12243 443 27,5 300
.• . ........
0
Gsm
C
A
170
243
13522
13902
512
545
26,0
24,3
200
100
NGrPl • 697,92 - 1,2643 Fe pl
-r2aOi54 n,43 1
·
B 190 18143 599 24,6 o
C 195 14523 560 25,0 o 100 200 300 400 500
Teneur en Fe des feuilles à la OP (~g/g MS)
Nkjm A 191 9190 374 24,6 (Rem. 1 les aymb61es ·0· lIont exclus du calcul das r'qres8ion8)
::::-jl-------+----1~
organique augmentent donc le risque de toxicité
ferreuse.
1
400
--=1 . i-~·:
1--
300 ----1
200 =-t-~-----~-J
______
·.~·~i--
1 :._._..+ .. L _
100 _.. .-
•
.1:~
•• -.
1
1
!
~---+------+---t'-.- -.--
,.
Figure 2. Relation entre la teneur des feuilles en Fe
20000 ,----,---,..-----,------r-------,
au stade de la différenciation paniculaire et la fraction
(a) ••• .:
équivalente de Fe échangeable. --- ~-_t_---~.--.:.....::;f__=1~-_I
.:
La figure 3 reprend le rendement (a), le poids de
1 000 grains (b) et le nombre de grains pleins (c) en
fonction de la fraction équivalente de Fe 10000 ,----+---t----+_--~
_______ . .~ -
. . ..e__: _
,.
15000 , - - - - 1 - - - - 1 - - - - 1 - - , .
.... •
•
,
1
1
1
échangeable. ,-
Au seuil de 86 % de Fe échangeable, le rendement et 5000 l----+----I---+-----+-+~·
~ ..
le nombre de grains pleins ont chuté à 50 % du
maximum observé, et le poids de 1 000 grains a a +-~-_+-~-f_~-+_-~_+--L~__1
perdu 15 %. 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
(b)
l
,----,----;-----.----~---;--__,
~ . .1.:
·1 ,.
• ."..
1:J
Nous n'avons pas trouvé de corrélation significative
entre le rendement et le seul carbone organique, ni ...
26 - l - - - _ r _ - - - f - - - - - + -..- o - , J . - - ' - -
• I.e'
o. 1
~.~
·:Ii
• 1 :
~-p- 1-1- -i
700
0,8 •
0,6
=1--
l
1
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600
~P~;'~
1-
400
--------I-------I-------J--------~~
0,4
,
300
0,2 j- 200
100
0,0 1
a
a la 20 30 40 50 60 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
Carbone organique (%) E' Fe
Figure 4. Relation entre la teneur en carbone du sol Figure 3. Relation entre le taux effectif de Fe
et le taux effectif de saturation en Fe. échangeable et le rendement du riz.
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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327
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
potentialités pour l'augmentation des rendements, le Des revues bibliographiques récentes font le point
statut de leur utilisation, leurs facteurs limitants et sur la fixation biologique de N z dans les rizières
leurs perspectives d'utilisation en fonction des (ROGER et WATANABE, 1986), la gestion micro-
résultats récents de la recherche. biologique des rizières (ROGER et al., 1992) et sur des
aspects plus spécifiques qui incluent: la quan-
tification de la fixation de Nz (ROGER et LADHA, 1992),
les fixateurs hétérotrophes (YosHIDA, et RINAUDO,
1982), la fixation de N z associée avec la décom-
Caractéristiques générales position des pailles (LADHA et BONKERD, 1988), les
de la fixation de Nz dans les rizières différences variétales du riz dans l'aptitude à stimuler
et utilisation agronomique la fixation de N z (LADHA et al., 1987), les cyano-
.." -Y ~ '"- ....,.. """'- "\l'Jo.....,.. ~ -.,.::., "Il).,. ....,......,.. """' ....,.. ...",. ....,.,"'<O,:O,:.~ .....". 'X« bactéries (ROGER et KULASOORIYA, 1980 ; ROGER
1991), Azolla (WATANABE, 1982) et les légumineuses
Les rizièrès traditionnelles inondées sont utilisées comme engrais vert (LADHA et al., 1988).
caractérisées par une productivité stable à long
terme. A l'opposé des autres céréales pour lesquelles
la monoculture continue en sol exondé aboutit Estimation du potentiel fixateur
rapidement à une diminution de la fertilité du sol et de N z des sols de rizière
des rendements, la monoculture du riz a pu être
pratiquée pendant des siècles, en obtenant des Les bilans d'azote classiques dans des expériences
rendements modestes (1 à 2 t ha-1 ) mais constants et de longue durée in situ ou dans des expériences sur
sans effets néfastes sur les sols. Cela s'explique par un ou plusieurs cycles culturaux en vases de
un effet positif de la submersion sur la conservation végétation permettent d'estimer le potentiel fixateur
de la fertilité azotée des sols (WATANABE et al., 1988). des sols de rizière. Toutefois, ces bilans ne prennent
En particulier, la submersion conduit à la formation pas en compte les pertes d'azote par volatilisation,
de macro- et micro-environnements qui diffèrent par dénitrification et lessivage, et fournissent des valeurs
leur potentiel redox, leurs propriétés physiques, leur par défaut.
éclairement et leurs propriétés trophiques (figure 1). Le tableau 1 résume les résultats d'une étude
Tous les groupes d'organismes fixateurs de N z bibliographique qui a analysé 211 bilans de l'azote
trouvent ainsi des niches favorables à leur déve- dans des sols de rizière (ROGER et LADHA, 1992). Les
loppement dans les rizières. Ces organismes valeurs s'échelonnent entre -1 02 et + 171 kg N ha-1
comprennent: les bactéries photosynthétiques et les par cycle cultural et ont une moyenne de 24 kg ha-1
cyanobactéries, organismes indigènes qui se (tableau 1 a). Quatre-vingt dix pour cent des valeurs
développent dans la zone photique de la rizière (eau sont comprises entre - 60 et + 90 kg ha-1 de N par
de submersion, interface sol-eau et parties submer- cycle (tableau 1 b). Le bilan est influencé par l'apport
gées du riz et des macrophytes aquatiques) ; les d'engrais, la présence de riz et l'exposition du sol à la
bactéries hétérotrophes indigènes dans le sol et la lumière (tableau 1 d.
rhizosphère du riz; Azolla et les légumineuses,
symbioses fixatrices de N z introduites et utilisées Un bilan positif moyen d'environ 30 kg N ha-1 par
comme engrais vert. cycle en l'absence d'engrais azoté indique que le
potentiel moyen de la fixation biologique de N z dans
les rizières traditionnelles est suffisant pour assurer à
long terme une production de l'ordre de 1,5 t ha-1
~,
(en admettant qu'à plus ou moins long terme la
totalité de l'azote fixé est absorbée par le riz et que
50 kg de grain sont produits par kg d'azote absorbé
~légumfneuse",
par la plante). Le bilan devient négligeable (4 kg N
ha-1 cycle) en présence d'engrais azoté (tableau 1 d,
Zone
phollQue ce qui traduit les deux phénomènes connus
oxydée d'inhibition de la fixation biologique de N z par
Zone l'azote minéral et de pertes d'engrais azoté par
8phollQue volatilisation (ROGER et al., 1987 aL On observe
rédufte
également une corrélation négative (p = 0,01 ) entre
la quantité d'azote minéral ou d'azote total
appliquée et le bilan de l'azote (tableau 1 d). Le
Figure 1. Schéma synthétique des principaux niveau de signification plus faible de la corrélation
macro-environnements d'une rizière submergée dans le cas de l'azote organique (p = 0,05) est en
et des principaux organismes fixateurs de N2" accord avec l'observation selon laquelle l'azote
P.A. ROGER
Nombre de valeurs
70
60
50
40
80
20
10
o
-120 -90 -60 -30 o 30 60 90 120 150 180
Bilan (kg N ha- 1 par cycle cultural)
organique est moins sensible aux pertes que l'azote par cycle cultural en sol non fertilisé. Avec des sols
minéral. La comparaison des valeurs moyennes du ayant reçu de l'engrais azoté, TROLLDENIER (1987) a
bilan dans des sols non fertilisés exposés ou non à la trouvé une corrélation négative entre la quantité
lumière (tableau 1c) indique que la fixation hétéro- d'engrais appliquée et la balance azotée, dont la
trophe contribue pour environ un tiers au bilan et la valeur moyenne était de 19 k N ha-l par cycle avec
y
fixation photo-dépendante pour environ deux tiers. l'application de 65 kg N ha- , - 0,3 avec 112 kg N
ha- l et - 14 avec 146 kg N ha- l . En utilisant la
méthode de dilution isotopique et l'azote assimilable
Rappel historique de l'utilisation d'un sol marqué avec l5N et stabilisé comme
de la fixation de N2 en riziculture contrôle, ZHU et al. (1984) ont estimé que la fixation
hétérotrophe produisait de 16 à 21 % de l'azote du
La technologie la plus ancienne faisant usage des riz, soit 11 à 16 kg N ha-l par cycle.
organismes fixateurs de N z en riziculture est celle
des engrais verts (légumineuses et Azolla). Les estimations de la fixation hétérotrophe associée
Azolla est une symbiose entre une fougère aquatique avec le riz à partir de mesures d'ARA correspondent
et une cyanobactérie fixatrice de N z dont l'utilisation à 1-5 kg N ha-l par cycle. Les extrapolations à partir
remonte au XIe siècle au Viêt-nam et au moins au d'expériences d'incorporation de l5N sont comprises
XIve siècle en Chine (LUMPKIN et PLucKNm, 1982). entre 1,3 et 7,2 kg ha- l par cycle (RoGER et
La nature symbiotique d'Azolla et l'identification du WATANABE, 1986).
symbiote fixateur de Nz remontent au Xlxe siècle, les
progrès concernant l'amélioration des souches et en Des mesures semi-quantitatives et des expériences
particulier l'hybridation sexuelle et la recombinaison de laboratoire suggèrent que l'incorporation de
étant récents (WEI et al., 1986 ; LIN et al., 1988). paille permet de fixer environ 2 à 4 kg N r l de paille
épandue ou incorporée (LADHA et BONKERD, 1988).
Le potentiel agronomique des cyanobactéries a
été mis en lumière en 1939 par DE, qui a attribué Ces données indiquent que, parmi les différents
la fertilité des sols de rizière à la fixation biologique systèmes fixateurs de N z présents ou introduits dans
de N z par ces organismes. Les recherches sur les rizières, les bactéries hétérotrophes ont le plus
l'inoculation algaire des rizières ont été initiées au faible potentiel (tableau Ill.
Japon en 1951 par WATANABE et ses collaborateurs.
SEN a suggéré la présence de bactéries fixatrices de
Nz dans la rhizosphère du riz en 1929. En 1971, des Potentiel estimé à partir
mesures de réduction d'acétylène (ARA) par RINAUDO des expériences d'inoculation
et DOMMERGUES et par YOSHIDA et ANCAJAS ont montré
une activité fixatrice de N z associée aux racines de Le tableau III présente une analyse de 210 essais
riz. Les premiers essais d'inoculation avec d'inoculation bactérienne du riz rapportés dans 23
Beijerinckia (DOBEREINER et RUSCHEL) et Azotobacter articles. La majorité des études se borne à comparer
(SUNDARA et al.) datent de 1962, mais la plupart des les rendements en riz, et l'absence de données sur
expériences ont été faites à partir de 1976. Les l'établissement des souches et la fixation de N z rend
recherches sur la fixation hétérotrophe ont l'interprétation des résultats hypothétique. Le
récemment montré l'existence de différences entre rendement en grain calculé sur l'ensemble des essais
variétés de riz en ce qui concerne la fixation est supérieur de 20 % dans les traitements inoculés.
rhizosphérique, et suggéré la possibilité de Les résultats sont extrêmement variables (- 33 % à
sélectionner des variétés ayant un potentiel fixateur + 125 %) et l'effet moyen de l'inoculation est
de N z accru. significativement plus élevé dans les expériences en
pot (+ 27 %) qu'in situ (+ 14 %).
Tableau II. Fourchette des estimations de l'azote fixé par différents organismes dans les rizières
(k~ N ha- 1 par cycle cultural) et maximum théorique (d'après ROGER et LAOHA, 1992).
pondant à la première classe positive et une forme - compétition des bactéries inoculées avec des
générale correspondant à la moitié droite d'une pathogènes dans la rhizosphère.
distribution gaussienne centrée sur le zéro!
Cela laisse penser que les essais infructueux L'importance relative de ces différents processus n'a
d'inoculation in situ n'ont généralement pas été pas encore été déterminée. En particulier, il n'existe
rapportés et invite à une certaine prudence quant à pas de résultats expérimentaux démontrant une
l'interprétation globale des expériences effectuées augmentation significative et durable de la fixation
jusqu'à présent. de N z dans des parcelles ou des pots inoculés et
permettant d'expliquer une augmentation
Les différences de rendement similaires pour le grain significative de rendement. Une différence moyenne
(14,3 %) et la paille (15,1 %) et les indices de récolte de rendement de 0,5 t ha-1 demanderait, dans les
(rendement en grain/rendement en paille) similaires conditions les plus favorables, l'absorption de la kg
dans les parcelles inoculées ou non suggèrent que d'azote par la culture de riz. Cela correspond à une
les effets de l'inoculation se produisent dès le augmentation moyenne de l'activité fixatrice de
début du cycle cultural. Les résultats obtenus avec N z de l'ordre de 30 kg ha-l, étant donné qu'en
Azotobacter (+ 16,6 %) et Azospirillum (+ 15,2 %) moyenne 36 % de l'azote fixé est absorbé par la,
ne sont pas significativement différents (tableau III). plante (tableau IV). Cette valeur est largement
L'augmentation de rendement plus forte observée supérieure aux estimations de la fixation
avec les autres micro-organismes est sans doute hétérotrophe.
imputable à l'expérimentation en pot.
Une autre hypothèse souvent avancée pour
Les effets bénéfiques de l'inoculation bactérienne expliquer des effets positifs de l'inoculation sur les
peuvent être attribués à quatre processus: rendements est la production de régulateurs de
- fixation de Nz accrue dans la rhizosphère; croissance par les bactéries inoculées, qui augmen-
terait l'absorption des éléments nutritifs par le riz.
- production de régulateurs de croissance qui
Cette hypothèse n'est pas en accord avec l'absence
améliorent la croissance du riz;
de différence d'efficacité de l'engrais azoté (kg de
- disponibilité accrue d'éléments nutritifs due à leur grain produit/kg de N épandu) entre les contrôles
solubilisation par les bactéries inoculées; (18,7 kg de grain/kg de N) et les parcelles inoculées
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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Histogramme des différences de rendement entre parcelles non inoculées et parcelles inoculées
10
o ...P==t----+=:::P::::=1----.f
-1,5 -1,0 -0,5 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5
tha-'
P.A. ROGER
(18,7 kg de grain/kg de N) et les parcelles inoculées Généralement, les souches inoculées disparaissent
(19,1 kg de grain/kg de N) (tableau III). rapidement et ne se multiplient pas. En conclusion,
l'intérêt agronomique de l'inoculation bactérienne
Il n'existe que peu d'informations sur le devenir des du riz reste encore à démontrer.
souches inoculées. Les variations des populations
bactériennes après inoculation n'ont généralement
pas été analysées par des méthodes statistiques, mais Utilisation actuelle:
elles sont fréquemment trop faibles pour être facteurs limitants et perspectives
significatives (ROGER et al., 1992). Une étude avec
une souche marquée a montré la persistance Si les cannai ssances actuelles ne permettent pas
d'Azospiril/um lipoferum dans le sol pendant d'envisager une utilisation de l'inoculation
quelques semaines, mais pas de multiplication bactérienne en riziculture, en revanche, la sélection
(NAYAK et al., 1986). Les populations d'Azospiril/um variétale est une approche récente qui mérite d'être
indigènes étaient environ 500 fois plus abondantes approfondie. L'existence de différences variétales
que celles de la souche inoculée. Toutefois, une pour la fixation de N 2 hétérotrophe a été montrée par
augmentation du poids sec des plantes inoculées a des bilans de l'azote (App et al., 1986) et des mesures
été observée. d'ARA (LADHA et al., 1987) et d'abondance isoto-
pique de l'azote (WATANABE et al., 1987). Les carac-
Les résultats des expériences d'inoculation sont téristiques de la plante associées avec la fixation
inconsistants. Les augmentations de rendement hétérotrophe sont le poids sec des racines et des
observées ne sont pas mises en relation avec une parties submergées de la plante à la montaison, le
augmentation de la fixation ou du bilan de l'azote. poids sec des parties aériennes à la montaison et
,."««.:.".:.:.:.:.:.:.:.:.:.:.:."<.:<.,,.:«~:.,,«<,,<,,<.,,«,':«,':.".:.:«,,«,,« 333
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
l'azote absorbé à maturité (LADHA et al., 1987). En cyanobactéries fournit une bonne approximation de
utilisant ces caractéristiques et des mesures d'ARA, l'azote fixé étant donné que l'azote éventuellement
Ladha et al. (1987) ont établi un classement de 21 excrété durant la phase de croissance est réabsorbé
variétés de riz qui s'est révélé relativement par la biomasse. L'étude de biomasses de
reproductible lors de deux cycles culturaux de saison cyanobactéries, récoltées in situ (figure 3) ou
sèche. Toutefois, les bases physiologiques des produites en microparcelles, et de croOtes algaires
différences variétales sont encore inconnues. La dans des rizières asséchées montre que, dans la
condition préalable à la sélection de variétés à majorité des cas, la biomasse des cyanobactéries,
potentiel fixateur élevé est la mise au point d'une correspond à moins de 10 kg N ha-1 • Une fleur d'ea'u
technique de criblage rapide (la collection mondiale très dense peut correspondre à 10-20 kg N ha-1 •
de riz contient plus de 80 000 accessions !). La
méthode de réduction de l'acétylène est lente et ne
permet pas de tester simultanément un grand nombre Nb de données
de variétés. La méthode de dilution isotopique 60,-----------------,
Nb de données 190
demande l'identification de variétés de référence 50 Minimum 2
ayant un potentiel nul ou très bas pour stimuler la 40 Moyenne 126
fixation de N z hétérotrophe. Meximum 479
30 Médiene 86
20 Ecerl-lype 1 19
10
Cyanobactéries o
..-..:.." "
.~-..: ~ -..: "ô."'' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' "ô.'' ' ' ' ' ' ' I,)"'' ' ' ' ' '">lIo,'I(I",'' -' »' 'I(I,,,'' v,.. ~ : "" "" :.~-..:.: ~-..:~~~ ~
o 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500
ARA moyenne( limai C2H2/m2 Der h) eu cours du cycle culturel
Potentiel pour augmenter les rendements
'0 1 ~ 1 1~ 1 1IS 1 2 0 1 2 S 1 3'0 i 3 5 1 4 0 i 4iS
1 i 1 1
i slo
Potentiel comme source d'azote Flxet10n de N estimée (kg N/he Der cycle cullurel)
Des valeurs supérieures (20-45 kg N ha- l ) ont été - l'augmentation de la teneur en matière organique
mesurées uniquement dans des parcelles utilisées du sol et de l'agrégation du sol ;
pour la production expérimentale d'inoculum qui - l'excrétion d'acides organiques qui solubilisent le
reçoivent des apports importants de phosphore et phosphore du sol et augmentent sa disponibilité pour
d'insecticides (ROGER et al., 1987 aL Etant donné le riz;
qu'au cours d'un cycle cultural on observe rarement - la diminution des effets de sulfato-réduction
le développement de plus de deux fleurs d'eau, 20 à néfastes pour le riz par oxygénation du milieu et
30 kg N ha-l par cycle cultural constituent une augmentation de la résistance de la plante;
estimation raisonnable du potentiel azoté des
- l'augmentation de la température de l'eau qui
cyanobactéries. Cette valeur est en accord avec les
favorise le tallage et la production de substances de
estimations obtenues par les mesures de fixation et
croissance.
indique un potentiel modéré comparé à celui
d'Azol/a ou des légumineuses (tableau 11). Ce dernier point demande à être démontré. ROGER et
KULASOORIVA (1980) citent 12 articles faisant
Les études avec du matériel marqué avec l5N
(tableau IV) ont montré que le pourcentage de l'azote référence à des effets auxiniques des cyanobactéries
sur les plantules de riz. Toutefois, l'étude des effets
des cyanobactéries retrouvé dans la plante variait
entre 13 et 50 % (moyenne 30 %). de 133 souches unialgales sur la germination du riz
(PEDURAND et REVNAUD, 1987) a montré un effet
négatif dans 70 % des cas et un effet de stimulation
dans seulement 21 % des cas. Comme l'ont fait
Tableau VI. Valeur moyenne de l'activité réductrice remarquer METTING et PVNE (1986), aucun des
d'acétylène au cours d'un cycle cultural en fonction
de la fertilisation azotée (d'après ROGER et al., 1988). nombreux articles faisant référence à des substances
de croissance produites par des algues ne présente
Trahement (60 répéthions) ARA moyenne Rendement de résultats faisant apparaître l'isolement et la
(llfTIol C2H2 m- 2 h- ') en grain
(t ha-') caractérisation d'une telle substance.
Contrôle sans azote 195±14 4,08±O,10
Potentiel estimé à partir
38 kg N ha- , épandus au repiquage des expériences d'inoculation
+ 17 kg N ha-' à l'inhiation paniculaire 80 ± 13 4,82±O,12
55 kg N ha-' enfouis (supergranules) Les résultats des expériences d'inoculation publiés
au repiquage 116± 16 4,78±O,09 avant 1980 et analysés par ROGER et KULASOORIVA
(1980) montrent une augmentation moyenne de
rendement en grain de 475 kg ha-1 sur 80 résultats,
tandis que la moyenne de 259 expériences publiées
entre 1980 et 1987 est siynificativement plus basse,
Nb de valeurs
de l'ordre de 280 kg ha- (tableau V) (ROGER et al.,
60 Nb de valeurs 400
Minimum 0,2
1992). L'analyse de 634 expériences in situ, publiées
50
Moyenne 4,6 dans des revues scientifiques et dans les rapports de
40
Médiane 4,0 différents organismes de recherche, montre une aug-
30 Maximum 16,8 mentation moyenne de rendement de 350 kg ha-l
20
dans les traitements ne différant des contrôles que par
10
l'apport d'inoculum (ROGER, 1991 L Toutefois, l'his-
o togramme des différences de rendement entre par-
3 5 7 9 11 13 15 17
kg N/ha celles inoculées et non inoculées montre une dissy-
métrie marquée qui provient en grande partie de
Figure 3. Histogramme de la distribution de 400 l'absence de données dans les classes négatives
estimations de la biomasse des cyanobactéries (figure 4). Cela indique que les expériences n'ayant
dans 65 parcelles expérimentales
pas montré d'effet positif n'ont généralement pas été
(ROGER, ARDALES et JIMENEZ, résultats non publiés).
publiées. La forme de l'histogramme suggère donc
que le mode (200 kg ha-l ) est une valeur plus réaliste
que la moyenne pour estimer le potentiel moyen de
Autres effets favorables l'inoculation avec des cyanobactéries. Les diffé-
rences observées ne sont significatives que dans
Les effets favorables, autres que l'apport d'azote,
17 % des cas. Ces résultats indiquent que l'inocula-
attribués aux cyanobactéries et relevés dans la
tion algaire peut augmenter les rendements. Toute-
bibliographie par ROGER (1991) comprennent:
fois les résultats sont très variables et l'augmentation
- un effet malherbicide dû à l'occupation de la sur- reste le plus souvent inférieure au seuil de détection
face de l'eau et la compétition; statistique.
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
Nb de données
profondeur de l'engrais diminue l'inhibition (figure 5
et tableau VI) ; le développement d'une activité
80"----
Nb d'expériences 634 fixatrice de N2 est parfois observé après application
Minimum -1260
Mexlmum 3700
d'engrais azoté (tableau VI) mais indique
60
Moyenne 337 généralement une mauvaise utilisation de cet engrais
Médiene 257
Ecerl-lype 396 par la plante (figure 6) ;
40
C.V. 116
- les propagules de souches indigènes fixatrices de
20,---- N 2 présentes dans les rizières sont généralement
nettement plus nombreuses que les propagules
contenues dans la quantité d'inoculum sec qu'il est
-1.0 -0.5. 0,0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5
Différence de rendemenl enlre percelles inoculées el non inoculées (l/he) recommandé d'appliquer (ROGER et al., 1987 b) ;
- les souches étrangères inoculées dans un sol ne s'y
Figure 4. Histogramme de 634 différences établissent généralement pas (REDDY et ROGER 1988 ;
de rendement (t ha-1) entre parcelles inoculées BISOYI et SINGH, 1988 ; REYNAUD et METTING, 1988).
et parcelles non inoculées (d'après ROGER, 1991).
de l'hypothèse que la majeure partie de l'azote -la diminution du pH de l'eau de submersion et, par
provenait de la fixation biologique. Des résultats suite, des pertes d'azote par volatilisation.
récents confirment cette hypothèse et montrent
qu'en moyenne 74 % de l'azote d'Azolla provient de
Effets sur les rendements
la fixation de N 2 . Cette valeur est identique en
présence ou en l'absence d'engrais azoté (tableau Des essais internationaux dans 37 sites de 10 pays
VII). Des résultats similaires (Ndfa de 59 à 99 % ) ont rizicoles (WATANABE, 1987) ont montré que, en
été obtenus avec la mesure de l'abondance moyenne, l'incorporation d'une culture d'Azolla
isotopique naturelle (YONEYAMA et al., 1987). avant ou après le repiquage du riz était équivalente à
l'épandage de 30 kg d'azote et augmentait les
Un essai international en vraie grandeur conduit rendements d'environ 0,6 t ha-l, et que l'incor-
pendant 4 ans dans 37 sites et 10 pays (WATANABE, poration de deux cultures d'Azolla avant et après le
1987) montre que la biomasse maximale d'Azolla repiquage était équivalente à l'épandage de 60 kg
cultivée avant et après repiquage du riz varie entre 5 d'azote et augmentait les rendements d'environ
et 25 t ha-l en poids frais (moyenne 15 t), soit 10-50 1 t ha-l (tableau VIII).
kg N ha-l (moyenne 30 kg).
En moyenne, 30 % de l'azote accumulé dans Azolla
est absorbé par les parties aériennes de la récolte du Utilisation actuelle:
riz cultivé durant le cycle cultural qui suit l'incor- facteurs limitants et perspectives
poration d'Azolla (tableau IV).
Après avoir été utilisée sur plusieurs millions
d'hectares de rizières en Chine et au Viêt-nam,
Autres effets favorables Azolla a vu son emploi constamment diminuer au
cours des dix dernières années et cette technique ne
Les effets favorables autres que l'apport d'azote
s'est pas répandue dans les pays qui ont testé son
attribués à Azolla et relevés dans la bibliographie par
utilisation. Le tableau IX résume cette évolution.
ROGER et al. (1993) comprennent:
- un effet malherbicide par compétition; Les facteurs qui ont empêché l'adoption par les pays
rizicoles des techniques utilisées en Chine et au
- l'amélioration de l'utilisation de P appliqué sous Viêt-nam sont à la fois technologiques et socio-
forme d'engrais minéral; économiques. Ces différents facteurs sont résumés
- la concentration de K présent dans l'eau de ci-après, ainsi que les méthodes possibles pour les
submersion à des teneurs (1-5 ppm) inférieures au surmonter.
seuil d'absorption par le riz (8 ppm) ; le seuil Azolla, ne résistant pas au dessèchement, demande
d'absorption est d'environ 0,85 ppm pour Azolla ; la présence d'eau pendant la totalité de son cycle
- la diminution des pertes d'eau par évapotrans- cultural. Elle est multipliée de façon végétative et
piration ; doit être conservée dans des pépinières. Son uti-
lisation requiert donc l'existence de réseaux d'irri- Le phosphore est un facteur clé de la croissance
gation et de réseaux de conservation et distribution d'Azolla et son addition est requise dans la majorité
de l'inoculum. Son adoption par les riziculteurs des sols. Le temps de doublement d'Azolla sur 972
dépend de décisions politiques pour l'établissement sols des Philippines était inférieur à 5 jours (sols
de tels réseaux (ROGER et WATANABE, 1986). La con- modérément favorables) dans 40 % des cas et
servation d'Azolla sous forme de sporocarpes utilisés inférieur à 3,5 jours (sols favorables) dans seulement
13 % des cas (CALLO et al., 1985). Pour être
ensuite pour inoculer les rizière n'a, pour le moment,
économiquement rentable, l'apport de phosphore
pas donné de résultats satisfaisants. Les conditions de
doit avoir une efficacité azotée (N fixé/P épandu)
la formation et de la germination des sporocarpes ne
supérieure à 3. Cette valeur n'est pas atteinte pour
sont que très imparfaitement comprises et la une application unique en début de culture. Le
croissance à partir des sporocarpes est trop lente fractionnement de la fertilisation permet d'obtenir
pour assurer l'établissement d'une biomasse suffi- une efficacité de 5 à 10 (WATANABE et al., 1980) mais
sante dans un laps de temps raisonnable. Une étude augmente le coût de l'application. Une forte
en Chine a montré que 160 kg ha-1 de sporocarpes fertilisation initiale de l'inoculum lui permet de se
produisaient de 16 à 21 t ha-1 d'Azolla en 52 jours multiplier 6 à 7 fois dans la rizière sans fertilisation
(Lu SHU- YING, 1987). supplémentaire et assure une efficacité azotée
élevée. Toutefois, cette méthode diminue la teneur
en azote du matériel produit et sa valeur comme
Tableau VIII. Résultats d'essais internationaux engrais vert. Des espèces présentant des besoins en P
(INSFFER, 1979-1980) de l'utilisation d'Azolla dans réduits ont été identifiées (WATANABE, commu-
37 sites de 10 pays rizicoles (d'après WATANABE, 1987). nication personnelle).
Traitement Rendement
Une trentaine d'insectes, deux arachnoïdes et neuf
t ha- 1 % du contrôle
mollusques (MOCHIDA, 1987) peuvent diminuer la
Contrôle sans azote 3,00 100 c produdivité d'Azolla de 10 à 60 % . Des maladies
30 kg N ha- 1 en 3applications 3,65 121 b fongiques qui se développent sur les blessures
60 kg N ha- 1 en 3applications 4,24 141a causées par les insectes augmentent l'effet de ces
derniers (GARCIA, 1986). Des méthodes de lutte ont
Azolla incorporée après repiquage 3,73 124b
été identifiées mais l'application de pesticides n'est
Azolla incorporée après repiquage 3,67 122b pas économiquement rentable dans les rizières. Elle
Azolla inoculée après repiquage doit être limitée aux parcelles de production
mais non incorporée 3,61 120b d'inoculum (MOCHIDA, 1987).
Combinaison des traitements 2 et 4 4,15 13Ba
La température optimale pour le développement de
Combinaison des traitements 2 et 5 4,07 135 b
la majorité des espèces (20-30 OC) est inférieure à la
Azolla incorporée avant et après repiquage 4,09 136 a température moyenne de la zone tropicale. Un
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Thème 1/1- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
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climat tempéré explique le succès d'Azolla en Chine des systèmes culturaux complexes. Liu CHUNG CHU
et au Viêt-nam. Il est possible de sélectionner des (FAO, 1988) a présenté un système combinant la
souches résistantes à des températures élevées culture du riz et d'Azofla avec la pisciculture. Dans
(LUMPKIN, 1987). Toutefois, les effets négatifs des ce système, le rendement en riz augmentait de 8 %
températures tropicales sur la productivité d'Azolla par rapport au système riz-Azofla, le développement
ne sont pas uniquement des effets physiologiques des adventices et des parasites du riz était
directs mais également des effets indirects; en significativement réduit, la surface du sol était
particulier, une température élevée en climat tropical enrichie en N et en P, et les pertes de l'azote d'Azofla
humide favorise le développement des parasites et étaient de 21 % contre 39 % dans le système riz-
pathogènes d'Azolla. Azofla.
Les principaux facteurs qui limitent l'utilisation Azolla est un engrais vert qui a un potentiel azoté du
d'Azolla sont socio-économiques. Les méthodes même ordre de grandeur que celui des légu-
traditionnelles utilisées au Viêt-nam et en Chine mineuses. Elle présente l'avantage de croître en sol
demandent énormément de travail. Les études de submergé en même temps que le riz et elle est plus
KIKUCHI et al. (1984) aux Philippines, dans une région facile à incorporer que les légumineuses. Depuis la
où la teneur exceptionnellement élevée des sols en P redécouverte d'Azolla par les agronomes des pays
assimilable permet le développement spontané rizicoles autres que la Chine et le Viêt-nam, aux
d'Azolla sans apport de P, ont montré un bénéfice de alentours de 1980, de nombreux travaux de
35 dollars par hectare. Ces auteurs ont cependant recherche ont été entrepris pour étendre cette
conclu que le seuil de rentabilité était dépassé technologie à d'autres pays rizicoles. Des progrès
lorsque le coût de la journée de travail était supérieur importants ont été faits dans l'identification de
à deux dollars ou lorsqu'il fallait appliquer des méthodes permettant de contourner les facteurs
insecticides pour contrôler les parasites d'Azolla. technologiques limitants et dans l'amélioration des
Une étude dans une région moins favorable souches. Dans le même temps, l'utilisation d'Azofla
(ROSEGRANT et al., 1985) a conclu que le coût de a pratiquement disparu des pays où elle était
l'utilisation d'Azolla était supérieur à celui de traditionnelle et ne s'est pas développée dans les
l'application d'urée et que son adoption était peu pays qui ont testé les technologies disponibles ou
probable lorsque de l'engrais azoté était disponible. tenté d'en développer d'autres. Les raisons sont
Ces études ne prennent pàs en compte les effets à principalement d'ordre socio-économique. Les
long terme d'Azolla sur la fertilité des sols. Au cours écosystèmes favorables qui permettent le dévelop-
des dernières années, les études de la recombinaison pement d'Azolla sans pratiques culturales addi-
de différents partenaires, fougère et cyano-bactérie tionnelles après l'inoculation représentent une
(LIN et al., 1988), et de l'hybridation interspécifique infime fraction des surfaces cultivées. Dans les autres
(WEI et al., 1986) ont montré qu'il est possible écosystèmes, l'utilisation d'Azofla est limitée par le
d'améliorer les propriétés des souches en combinant, coût de production. De plus, en conditions de semis
par exemple, le potentiel fixateur de N z élevé d'A. direct, Azofla devient une adventice préjudiciable
filieuloides avec la résistance à la chaleur d'A. par ses effets mécaniques sur les jeunes plantules de
mierophylla (tableau x). riz. L'évolution actuelle de la riziculture, du
repiquage vers le semis direct, est un facteur négatif
Le potentiel agronomique d'Azolla n'est pas limité à pour son adoption. A moins de changements écono-
l'utilisation comme engrais vert. Azolla peut être miques importants (taxation des engrais azotés et
également utilisée comme aliment du bétail pour les éventuellement subvention de la fertilisation
porcs et les poulets et en pisciculture, ainsi que dans organique), il est peu probable que l'utilisation
d'Azolla se développe sur un pourcentage significatif
des surfaces cultivées en riz. En revanche, l'identifi-
Tableau X. Biomasse, activité fixatrice de N2 et teneur cation d'Azolla comme un biofertilisant à usages
en azote de deux espèces d'Azolla et de leur hybride
cultivés pendant 28 jours à deux niveaux de température multiples (aliment du bétail, producteur primaire
(WATANABE et SANTIAGO-VENTURA, comm. pers. ). dans des systèmes culturaux complexes riz-Azolla-
poisson) est susceptible de relancer l'intérêt de son
Espèce Température Poids frais ARA" %N utilisation agronomique.
(g m-2)
A. microphylla 37-29 oC 1400 3,1 3,8
microphylla x
filiculoides 37-29 oC 1 100 3,4 5,0 Légumineuses
....:.:<O:.:.:-:.:.:-:-:.:O:~.:.~o':-:-:o':.:-~ ..:O,:.:.:-:O:':.:.:.,.:,'0':.:.:-:.:-:0:.:.:.:0:-:':.:-:.:.:.:-:.:-:-:.:-:-:.:.:-:-:.:.:-:.:.:.:.:-:-:'o:....:.:-:-:.:.:....:.:.:.x..-.:~-:-:.:-:.:.:..--=~~-:-:.:-: .......:.....~
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se développer dans les sols submergés (DREYFUS et maturité sont en moyenne de 114 kg N ha-l (tableau
DOMMERGUES, 1981 ; ALAZARD et DUHOUX, 1987)) et XI). Les valeurs publiées après 1985, exprimées en kg
présentant une activité fixatrice de N 2 élevée N ha-l, varient de 40 à 225 pour les légumineuses
(tableau XII) a ravivé l'intérêt des chercheurs pour aquatiques à nodules caulinaires, de 33 à 115 pour
l'utilisation des engrais verts en riziculture. Les 25 les légumineuses à graines traditionnelles, et de 24 à
espèces répertoriées appartiennent aux genres 39 pour les légumineuses arborescentes (LADHA et
Aeschynomene (21 espèces), Sesbania (3 espèces) et al., 1988).
Neptunia (une espèce: N. oleracera). Deux espèces,
S. rostrata et A. afraspera, présentent des carac- Toutefois, un engrais vert requiert généralement
téristiques permettant leur utilisation comme engrais d'être incorporé à 40-50 jours. Au-delà, le riziculteur
vert. aura intérêt à cultiver une culture vivrière ou une
culture de rapport et non un engrais vert. Les valeurs
de l'azote accumulé par 32 cultures de 11 espèces
Tableau XI. Légumineuses traditionnelles utilisées cultivées pendant 30 à 45 jours sont comprises entre
comme engrais vert en riziculture et quantités d'azote 7 et 143 kg N ha-l, et ont une moyenne de 63 kg N
accumulées (d'après ROGER et WATANABE, 1986). ha-l (tableau XIII).
Espèce kg ha- 1 % du poids frais
Autres effets favorables
Astraga/us sinicus 108-123 0,35-0,47
Les effets favorables des engrais vert autres que
Canavalia ensiformis 98 0,47
l'apport d'azote sont de trois types:
Cassia mimosoides 97 0,44
- amélioration des propriétés physico-chimiques du
Crota/aria anagyroides 98 0,33
sol (BECKER et al., 1988), en particulier: augmentation
Crota/aria juncea 105-129 0,30 des teneurs en matière organique et en azote total, de
Crota/aria quinquefolia 88 0,19 la teneur en Zn assimilable, de la capacité de
Do/ichos biflorus 89 0,58 rétention de l'eau et de l'agrégation du sol, une
propriété importante dans les sols de rizière utilisés
Gyaine koidzumii 71 0,42
en alternance pour une culture exondée;
Phaseo/us sp. 0,28
- contrôle de certaines mauvaises herbes, parasites et
Phaseo/us /athyroid 90 maladies; en particulier, des expériences récentes in
Phaseo/us ca/caratus 42 0,22 situ montrent un effet nématicide des légumineuses à
Sesbania acu/eata 96-122 0,32-0,36 nodules caulinaires (PRaT, communication per-
Sesbania rostrata 267
sonnelle) ;
Sesbania sesban 100-202 0,39 - piégeage de l'azote minéralisé dans les jachères de
saison sèche, qui permet la diminution des pertes
Sesbania microcarpa 87 0,50
d'azote par dénitrification lors de la resubmersion du
Sesbania sirececa 146 sol (BURESH et DE DATIA, 1991).
Moyenne 114 0,37
La majeure partie des valeurs concerne des cultures conduites Effets sur les rendements
jusqu'à maturité.
Les estimations d'augmentation de rendement après
l'incorporation d'un engrais vert sont comprises
entre 30 et 100 kg de grain par tonne (poids frais) de
Potentiel pour augmenter les rendements légumineuse incorporée (ROGER et WATANABE, 1986).
Potentiel comme source d'azote L'incorporation d'une légumineuse à nodu les
caulinaires de 40 à 60 jours permet des augmen-
Le potentiel azoté des légumineuses utilisées tations de rendement en riz de l'ordre de la tonne par
traditionnellement comme engrais vert en riziculture hectare (figure 7). L'efficacité de l'azote de l'engrais
a généralement été estimé à partir de mesures de vert (kg de grain produit /kg d'azote appliqué)
biomasse et de l'hypothèse que 50 à 80 % de l'azote diminue avec la quantité appliquée et est similaire à
accumulé provenait de la fixation de N 2 • Des celle de l'enyrais minéral pour des applications de
mesures récentes sur des espèces à nodules 50-60 kg ha- (figure 8).
caulinaires montrent des valeurs de Ndfa comprises
entre 38 et 94 % et une moyenne de 70 % (tableau
XII). Utilisation actuelle:
Les valeurs de l'azote accumulé par des cultures de facteurs limitants et perspectives
légumineuses traditionnelles utilisables comme Malgré un potentiel azoté élevé, une diminution
engrais vert en riziculture et cultivées jusqu'à continue de l'utilisation des engrais verts en
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
Tableau XII. Estimation de l'azote fixé par deux légumineuses à nodules caulinaires cultivées en sol submergé.
riziculture a été observée au cours des dernières ligneux dans le sol qui blessent les pieds des
décennies. Durant les années 80, la Chine a été le riziculteurs.
seul pays où les engrais verts étaient utilisés de façon
notable et leur usage n'a cessé de décroître (figure 9). Les facteurs limitants d'ordre sodo économique sont
Dans les autres pays, leur emploi semble être devenu les plus importants. Les engrais verts sont peu
pratiquement inexistant. attrayants pour les riziculteurs car ce ne sont ni des
cultures vivrières ni des cultures de rapport, et le
Les facteurs qui limitent l'utilisation des légumi- bilan économique de leur utilisation est rarement
neuses comme engrais vert sont à la fois techno- avantageux (GARRITY et FUNN, 1988).
logiques et sodo-économiques. Ces derniers sont
cependant les plus importants. Dans les régions où l'engrais azoté est disponible,
Des effets défavorables des engrais verts sur le riz ont
été observés dans les pays tempérés. La disparition
Tableau XIII. Quantités d'azote accumulées dans les
de leur utilisation au Japon a été attribuée à une légumineuses utilisées comme engrais vert en riziculture
diminution des rendements résultant d'un effet (calculées à partir des valeurs présentées
dépressif des produits de décomposition anaérobie par BURESH et DE DATIA, 1991).
de l'engrais vert sur la croissance du riz en début de
cycle et d'un décalage entre la minéralisation de Poids sec N accumulé
(t ha- l ) kg ha- l kg ha-l'Jour
l'azote de l'engrais vert et la demande par le riz, qui
conduisait à une croissance excessive en fin de cycle 110 cultures de 16 espèces
cultivées pendant 30 à 178 jours
(WATANABE, 1984).
(moyenne 52 jours)
Les aspects technologiques qui ont limité l'utilisation Moyenne 4,3 99 1,9
des légumineuses en engrais vert incluent le manque Maximum 13,3 267 5,1
de main-d'œuvre et de matériel pour l'incorporation Minimum 0,2 7 0,2
d'une biomasse volumineuse et l'impossibilité de
32 cultures de 11 espèces
prévoir la quantité d'azote apportée. La teneur en cultivées pendant 30 à 45 jours
azote des légumineuses est de 0,2 à 0,6 % du poids (moyenne 40 jours)
frais et l'apport de 50 kg N demande l'incorporation Moyenne 2,5 63 1,6
de 10 à 26 t d'engrais vert. D'autres facteurs limitants
Maximum 6,7 143 3,2
sont le broutage par le bétail en liberté, la destruction
par des ravageurs, et la persistance de fragments Minimum 0,2 7 0,2
PA ROGER
son prix par rapport à celui du riz est généralement - la main-d'œuvre et le matériel adéquat sont
favorable pour le paysan en raison des politiques disponibles pour l'incorporation; en particulier, il ne
gouvernementales de subvention de l'engrais et de doit pas y avoir de compétition avec la main d'œuvre
crédit. Par contre, le coût des semences de nécessaire pour le repiquage du riz.
légumineuses, de préparation du sol et d'incor-
poration, comparé à l'augmentation de rendement
obtenue, n'est pas favorable, en particulier avec des Kg grain Ikg N appliqué sous forme d'engrais vert
engrais verts traditionnels au potentiel azoté sa -rç-------------------,
imprévisible. le plus souvent, une culture vivrière
dérobée ou de rapport est plus avantageuse pour le 40
paysan qu'un engrais vert. Dans les régions où •
l'engrais azoté n'est pas disponible, la riziculture est 30
veleur moyenne pour 50- 60 kgN/he
de type autarcique, les exploitations sont de petite eppliqué .ou. forme d'urée
20
taille et le paysan ne peut utiliser sa terre pour
cultiver un engrais vert au détriment d'une culture 10
vivrière. Cette situation avait déjà été analysée par •
NORMAN (1982) qui écrivait: « Green manures have o+--.---......,..--.--.-~-__._-~__._-~-i
always loomed'larger in the agronomist's mind than o SO 100 1S0 200 2S0
N appliqué sous forme d'engrais vert (kg/ha)
in the farmer's except in parts of China. With
increasing pressure on the tropical world's cultivated Figure 8. Efficacité de l'azote de cultures de Sesbania
land for food production, 1 cannot see them et Aeschynomene, âgées de 42 à 59 jours,
becoming any more significant. lt sur le rendement en riz (à partir des valeurs publiées
par: VENTURA et al., 1987 ; DIEKMANN et al., 1991 ;
Une étude de GARRITY et FUNN (1988) indique que les BECKER, 1990 ; FUROC et MORRIS, 1989 ; BISWAS, 1988).
engrais verts ne peuvent être utilisés de façon
économiquement rentable que si les conditions
suivantes sont réunies:
-les graines sont disponibles; la découverte des légumineuses à nodules
caulinaires ouvre la voie à la sélection de plantes
- il n'existe pas d'alternative culturale plus rentable
particulièrement adaptées aux sols submergés et
sur les parcelles considérées;
ayant un potentiel azoté plus élevé que celui des
- l'établissement de la légumineuse se fait sans légumineuses traditionnelles. Un certain nombre des
travail du sol ou à un coût très bas; caractéristiques souhaitables pour un engrais vert
- la productivité de l'engrais vert est stable dans le adapté à la riziculture sont déjà présentes chez S.
temps; rostrata ou A. afraspera (tableau XIV). Toutefois, les
problèmes d'incorporation, de résistance aux
parasites et maladies et de production des graines ne
5 S. roslrala A. afraspera
Cycle court, croissance rapide + +
4
Taux d'accumulation d'azote élevé + +
Etablissement facile de la cuhure + ±
y = 0.71 373 + 1.2407x R2 = 0.870
2-t"--~----.-~-.--,--__r____.___._~ __..____,____._~-i Tolérance à la submersion + +
2 3 4 5 6 7 8 9 Initiation rapide de la fixation de N2 + +
Rendement (tlha) sans engrais vert
Absence de sensibilité à la phOlopériode +
Figure 7. Effet de l'incorporation de cultures de Facilité d'incorporation ± ±
Sesbania et Aeschynomene, âgées de 42 à 59 jours, Adaptabilité à des environnements variés + +
sur le rendement en grain (à partir des valeurs publiées
Résistance aux maladies ? ?
par: Ventura et al, 1987 ; DIEKMANN et al., 1991 ;
BECKER, 1990 ; FUROC et MORRIS, 1989 ; BlswAs, 1988), Production de graines élevée ? ?
Thème 11/- Physico-chimie et microbiologie des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
sont pas encore résolus. De plus, la majorité des rentables. Dans le cas d'Azolla et des légumineuses,
facteurs socio-économiques rencontrés avec les le potentiel azoté est suffisant mais son utilisation est
légumineuses traditionnelles s'appliquent également sévèrement limitée pa'r des facteurs socio-
aux légumineuses caulinaires. économiques.
Les zones de riziculture pluviale submergée cons- A l'origine, les recherches sur l'utilisation pratique de
tituent l'environnement le plus prometteur pour la fixation de Nz et les biofertilisants avaient pour but
l'utilisation des engrais verts. Ces zones, qui principal de trouver des sources d'azote bon marché
couvrent près de 20 millions d'hectares en Asie, sont pour remplacer les engrais de synthèse. A cet aspect
caractérisées par une seule culture de riz repiqué par est venu s'ajouter récemment la préoccupation de la
an et de mauvaises conditions de drainage qui se conservation à long terme de la fertilité des sols de
traduisent par de courtes périodes de submersion rizière. Aux niveaux de fertilisation pratiqués en
imprévisibles, lors de la transition entre saison sèche riziculture, la quantité d'azote absorbée par le riz qui
et saison des pluies. C'est dans ces zones que les provient du sol est supérieure à celle provenant de
conditions d'utilisation énumérées par GARRITY et l'engrais (figure 10). Il est donc possible que
fUNN (1988) sont le plus susceptibles d'être l'intensification culturale se traduise par une
rencontrées. diminution à long terme de la fertilité du sol. Une
étude en Louisiane à montré qu'après 40 ans de
riziculture un sol argilo-limoneux a vu sa teneur en
Millions d'hectares plantés en engrais vert azote passer de 0,20 % à 0,08 % et sa teneur en
12 - , - - - - - - - - - - - - - - - - , matière organique diminuer jusqu'à 40 % de la
valeur initiale. Les effets possibles de l'intensification
10 culturale et de l'utilisation de niveaux élevés
d'intrants agrochimiques sur l'évolution à long terme
8 des environnements rizicoles sont devenus une
préoccupation prioritaire de la recherche en rizi-
6 culture. Les connaissances sur ce sujet sont encore
très fragmentaires, mais le rôle clé de la biomasse
4
microbienne et de la biomasse photosynthétique
aquatique, et en particulier de leurs composants
2
fixateurs de N z' dans la conser-vation de la fertilité
O+--~-r_~-___,_-~-_r_-~__l azotée des sols submergés est reconnu (WATANABE
1950 1960 1970 1980 1990 et al., 1988).
Année
Notre analyse indique que les possibilités d'uti-
Figure 9. Evolution de l'utilisation des engrais verts lisation des biofertilisants fixateurs de N z n'ont
en Chine entre 1950 et 1988 (d'après STONE, 1990). actuellement qu'un potentiel très restreint en rizi-
culture. Il faut toutefois garder présent à l'esprit que
l'engrais azoté de synthèse provient de ressources
fixateurs libres (bactéries hétérotrophes et o 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220
Engrais azoté appliqué (kg/ha)
cyanobactéries), un potentiel azoté bas ou modéré
ainsi que des difficultés technologiques (en Figure 10. Origine de l'azote absorbé par le riz
particulier l'absence d'établissement des souches à différents niveaux de fertilisation (à partir des valeurs
inoculées) empêchent le développement de publiées par: BROADBENT et al., 1989 ; IAEA, 1970 ;
méthodes technologiquement et économiquement JOHN et al., 1989 ; BURESH, résultats non publiés.
PA ROGER
non renouvelables et qu'à long terme la mise au Les zones de riziculture pluviale submergée
point de technologies moins perturbantes pour les constituent l'environnement le plus prometteur. Une
écosystèmes cultivés et leur environnement peut première possibilité est de planter un engrais vert lors
devenir une nécessité. Ce qui justifie ample-ment la de la transition entre la saison sèche et la saison des
continuation de recherches sur les bio-fertilisants, en pluies, lorsque de courtes périodes de submersion
s'orientant vers les aspects les plus prometteurs. imprévisibles ne permettent pas d'autre culture.
L'autre possibilité est une culture de saison sèche
Les études sur la fixation de N 2 hétérotrophe
qui, en plus de la fixation de N 2 , piège l'azote
indiquent que l'approche la plus prometteuse est la
minéralisé en saison sèche et permet une diminution
sélection de variétés favorisant la fixation rhi-
des pertes d'azote par dénitrification lors de la
.zosphérique. Le potentiel de la fixation hétérotrophe
submersion du sol en saison des pluies.
comme source d'azote est très modeste; cependant,
s'il est inhérent à une variété ou introduit dans une L'évaluation de technologies d'utilisation des
variété, son utilisation aurait l'avantage de ne biofertilisants devrait prendre en compte, dans la
demander aucune intervention du riziculteur. mesure du possible, les effets à long terme sur la
fertilité des sols et sur l'environnement.
Les cyanobactéries ont un potentiel plus élevé, de
l'ordre de 20-30 kg N ha-1 par cycle cultural. Les
résultats récemment obtenus indiquent que le Remerciements. Ce travail résulte d'un accord de
principe de l'inoculation algaire doit être revu en collaboration scientifique entre l'IRRI et l'ORSTOM.
privilégiant la multiplication des souches indigènes L'auteur exprime ses remerciements à J.L GARCiA et D.
dans les agro-écosystèmes favorables au dévelop- ALAZARD (ORSTOM) pour leurs commentaires sur le
pement des cyanobactéries, en l'absence d'engrais manuscrit.
azoté. Toutefois, les superficies concernées ne
devraient représenter qu'un faible pourcentage des
sols plantés en riz.
Les progrès récents en génie génétique incitent à
spéculer sur les possibilités de sélectionner des
souches de bactéries ou de cyanobactéries pl us
efficaces pour l'inoculatlàn. Toutefois, les expé-
riences d'inoculation montrent que les souches
étrangères de bactéries et de cyanobactéries libres
inoculées dans un sol ne s'y établissent pas etque les
conditions qui leur permettraient de le faire sont Réferences bibliographiques
encore totalement inconnues.
ALAZARD D., DUHOUX E., 1987 Nitrogen-fixing stem
Azolla a'un potentiel azoté de 30 à 60 kg N ha-1 par nodules on Aeschynomene afraspera. Biol. Fert. Soils, 4 :
cycle cultural. Les facteurs édaphiques et nutri- 61-66.
tionnels qui limitent son utilisation en climat tropical ANTARIKANONDA P., LORENZEN H., 1982. N 2 -fixing
peuvent êtr.e partiellement contournés par la blue-green algae (cyanobacteria) of high efficiency from
sélection variétale, l'hybridation et la recombinaison paddy soils of Bangkok, Thailand : characterization of
de souches. Les facteurs limitants majeurs sont des speeies and N 2 -fixing capacity in the laboratory. Arch.
facteurs socio-économiques dont l'effet va proba- Hydrobiol. Suppl., 63 (1) : 53-70.
blement aller en s'accentuant, ainsi que le montrent APP A.A., WATANABE 1., SANTIAGO-VENTU RA T.,
la très forte récession de l'utilisation d'Azolla en BRAVO M., DAEZ-JUREY C, 1986. The effectof cultivated
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Synthèse des communications et débats
Thème III - Physico-chimie ét microbiologie
des sols. Rhizosphère et physiologie du riz
Présidents: J. Dupuy (matinée), J.F. Vizier (après-midi)
Rapporteurs: P. Hennebert (matinée), J. Berthelin (après-midi)
o Matinée
Physico-chimie
L'ensemble des travaux expérimentaux présentés confirme la diminution du potentiel d'oxydoréduction de la
solution du sol en cas de submersion: le flux d'oxygène devient négligeable, et les micro-organismes utilisent
d'autres accepteurs d'électrons, soit, dans l'ordre, le nitrate, le manganèse, le fer et éventuellement le sulfate.
Le pH remonte corrélativement à la baisse du Eh. L'amplitude de la variation est liée au rapport stœchio-
métrique /( électron-protonll pour chaque accepteur d'électrons. Tous ces processus s'inversent lorsque
l'oxygène redevient disponible.
La formation de composés amorphes (précipités d'oxyhydroxydes) lors de la réoxydation expliquerait le haut
pouvoir de fixation du phosphore dans les sols hydromorphes.
Le diagnostic de l'état physico-chimique peut se faire de différentes manières: valeur de Eh, taux de
conservation du fer total en fer ferreux; teneur en Fe++ en fonction du temps; estimation de la mobilité du fer
sous une différence de potentiel dans un champ électrique (électrodyalise).
Des corrélations avec des observations physiologiques sont souhaitées.
La variabilité spatiale de l'état de réduction des sols est notable à plusieurs échelles:
- le long d'un axe de drainage du paysage, entre parcelles (les parcelles hautes sont moins drainées et plus
réduites) ;
- dans les parcelles elles-mêmes, en particulier en cas de résurgence ou de proximité du versant ou de
canaux;
- selon la profondeur du sol (mince horizon oxydé de surface, horizon réduit sous-jacent) ;
- selon les axes x et y à l'intérieur de l'horizon exploré par les racines du riz, un gradient de réoxydation
s'établissant suite au transport passif d'oxygène par les racines.
A cette variabilité spatiale se combine une variabilité temporelle (pic de fer à 2-3 semaines, ou pic tardif) et la
possibilité de migration du fer selon les trois axes x, y et z et de la modification subséquente des propriétés
physiques du sol.
Le fer s'accumule dans les vallées et bas-fonds à mauvais drainage, dans les sols ferra Il itiques, les sols tourbeux
ou organiques, et les sols sulfatés acides (observations en Asie et en Afrique).
Microbiologie
Les micro-organismes sont responsables de la haute pression en électrons régnant dans un sol submergé. En
l'absence d'oxygène, ils vont aboutir à différents produits, suivant les accepteurs d'électrons disponibles.
La réduction est réalisée par la population des bactéries anaérobies facultatives ou anaérobies strictes
communes dans le sol.
La réduction du fer, processus biochimique, nécessite un contact direct entre oxyhydroxyde et bactérie.
l'oxydation serait un processus essentiellement chimique dans les rizières. la production de 5 ou de CH 4 est
le fait de groupes spécifiques de bactéries.
l'activité des micro-organismes est fonction de la quantité de matière organique facilement métabolisable et
de la température.
les bactéries forment des substances complexantes (polyacides organiques) qui pourraient jouer un rôle dans
la dynamique de P, Fe et des oligo-éléments (Zn).
Physiologie
le riz est une plante qui s'adapte aux conditions du milieu. Ainsi, l'espace lacuneux, le chevelu racinaire et le
transport d'oxygène varient suivant le régime hydrique.
l'adaptation au statut minéral du sol a cependant des limites. C'est l'ensemble du statut minéral qui doit être
considéré (en particulier Ca, K, P et Zn), plutôt que le pH, l'Eh ou le fer en eux-mêmes.
De plus, le revêtement ferrique des racines s'épaissit, freinant peut-être la diffusion des autres cations et de P.
Il a été montré qu'une bonne nutrition minérale des plantes diminue la teneur en fer ferreux de la solution du
sol!
Une relation négative est obtenue, dans des essais en Casamance sur sol sulfaté acide, entre prélèvement de
fer par la plante et rendement. la teneur en fer des plantes diminue, et le rendement augmente par des
traitements N, NP, NPK. le pH et le Eh ne seraient pas en eux-mêmes déterminants du rendement.
Dans un bas-fond de Madagascar, une relation a cependant été obtenue entre Eh et rendement dans un essai
en plusieurs sites, d'amont (colluvions anthrophiques ferrallitiques, mal drainé) en aval (sol argileux
hydromorphe humique).
Dans un essai en pot sur sol acide des Philippines, une culture sous flux d'eau ascendant a montré,
comparativement à un régime de nappe stagnante ou de nappe partiellement ruisselante et partiellement
descendante, des différences défavorables dans la composition de la solution du sol et des symptômes de
toxicité accrus, mais finalement pas de différence de rendement.
A partir de ces essais, les propositions et observations suivantes ont été formulées:
-la matière organique n'augmente pas la toxicité ferreuse, mais bien la solubilité du fer en solution;
-le repiquage 2 à 3 semaines après la mise en boue (après le pic initial de fer ferreux) permettrait de minimiser
la toxicité ferreuse primaire;
-la fertilisation Pet K (à un niveau dépendant de N) et Zn (par trempage) permet d'éliminer la toxicité ferreuse
secondaire.
Cette fertilisation doit éventuellement être répétée plusieurs années pour avoir des effets significatifs.
o Après-midi
Les communications de l'après-midi se sont encore rapportées à l'aspect physico-chimique, biochimique et
microbiologique des relations existant entre le sol, l'eau et la plante.
Les quatre communications évoquaient des travaux réalisés à Madagascar, en Afrique de l'Est (Burundi) et en
Asie du Sud-Est.
Dans une autre communication de P. Hennebert sur le Burundi, le rendement des cultures a été corrélé aux
paramètres pédologiques, au régime hydrique et à la fertilisation. Sur quatre types de sol, cette étude fait
apparaître un problème spécifique au Burundi, qui se rapporte à la maîtrise de la nappe: le paysan burundais,
qui n'est pas un riziculteur, ne souhaite pas être gêné pour la culture du haricot qu'il pratique en intersaison
en régime pluvial. Avec l'introduction de la riziculture dans les bas-fonds, on observe donc qu'aux relations
sol-eau-plante s'ajoute un problème socio-économique d'appropriation de techniques nouvelles.
L'exposé de R. Gaudin a mis l'accent sur la nutrition azotée de la plante. Cet élément est généralement mal
prélevé dans les rizières des bas-fonds de Madagascar. Par ailleurs, un effet particulier du supergranule d'urée
a été relevé. Cet effet se manifeste par un fort développement racinaire en direction du supergranule, suivi
d'un arrêt de croissance des racines dans la zone de toxicité ammoniacale, mais aussi par une reprise de
croissance et de prélèvement intense dans la zone « subtoxique li. D'importantes pertes par volatilisation ont
parfois été soulignées avec les méthodes d'apport « à la volée li, mais pas avec les techniques de placement
profond des granules, telles qu'elles sont pratiquées dans les sols étudiés. Cette communication mettait
l'accent sur un dispositif de prélèvement de la solution du sol utilisé pour suivre la cinétique de disparition de
l'azote au voisinage du supergranule. Dans cette étude, la disparition de l'azote avec des cinétiques d'ordre 1
est interprétée comme un indice d'assimilation de l'azote par la plante et proposée comme test possible de
fertilité: cette cinétique plus ou moins rapide correspondant à une utilisation plus ou moins bonne de l'azote.
La communication présentée par P. Roger souligne que l'apport biologique par fixation d'azote a une valeur
moyenne de 30 kg d'azote par hectare et par cycle cultural en riziculture traditionnelle. Quatre systèmes
fixateurs existent dans les rizières:
- les bactéries hétérotrophes du sol et de la rhizosphère, dont le potentiel modeste ne peut être actuellement
renforcé par des pratiques culturales;
- les cyanobactéries de la zone photique, avec un potentiel sensiblement plus important de 20 kg N ha-1
par cycle, se manifestent en l'absence d'engrais azotés; leur potentiel dans les rizières de bas-fond semble
cependant négligeable à Madagascar;
- les engrais verts, avec Azolla et les légumineuses: ces deux biofertilisants, dont le potentiel est important
(60 à 100 kg N ha-1 par cycle) ont été utilisés de façon traditionnelle en Chine et au Viêt-nam, mais ils ont
connu une régression très marquée dans la dernière décennie, du fait surtout de facteurs socio-économiques;
pour Azolla, les besoins permanents en eau, l'entretien des réseaux indispensables à la multiplication
végétative de cette fougère et les apports de phosphore nécessaires à sa croissance et, pour les légumineuses,
les problèmes d'incorporation aux sols des biomasses produites sont des freins à leur utilisation.
Il existe peut-être à Madagascar une possibilité d'utilisation des légumineuses avec les eaux résiduelles après
la culture du riz, en piégeant l'azote minéralisé pendant la saison sèche.
Dans la discussion générale qui a suivi cette série d'exposés, les intervenants ont souligné que l'apport de
fertilisants élimine les problèmes de toxicité, qui sont dus en fait à des déséquilibres nutritionnels. Dans les
régions où les riziculteurs n'ont pas la possibilité de se procurer des fertilisants, il est nécessaire de trouver des
tests physico-chimiques et/ou biologiques, comme ceux évoqués précédemment, pouvant prévoir des
déséquilibres nutritionnels et les risques de toxicité.
Agronomie,
amélioration variétale
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-74 décembre 7997
CIRAD, 7993
rizière, notamment en phosphore, avons-nous été Deux types d'essais y ont été mis en place depuis la
conduits à mener des expérimentations sur: saison culturale 1985-1986, suivant un dispositif
- l'optimalisation du rendement en paddy; organisé en blocs simples avec trois répétitions.
- la recherche de la technique d'apport d'engrais Le premier essai compare deux techniques d'apport
phosphaté la plus efficace ; d'une faible dose de P2 0 S (30 unités) : l'une par
- l'amélioration de l'efficience du phosphore par le trempage des racines de jeunes plants de riz dans
choix judicieux de sources d'engrais phosphatés. une pâte boueuse contenant du phosphore, l'autre
par épandage à la volée. L'essai comprend en outre
un traitement de 60 unités de P2 0 S épandues à la
volée. La pâte boueuse pour le trempage des racines
Matériel et méthode des jeunes plants de riz est un mélange d'engrais
phosphaté (l vol. ), d'eau (2 vol.) et de sol argileux
Les sites choisis pour les expérimentations sont des (1,5 vol.) de rizière. Le superphosphate triple (46 0/0)
rizières représentatives des hauts plateaux. Toutefois, et Chianan 8 (1632) étaient l'engrais phosphaté et la
dans le cadre de notre étude, le site de Manjakan- variété de riz testés.
driana a fait l'objet d'un choix particulier en raison Le second essai utilise la variété IRAM 10(2067)
de ses sols du type hydromorphe humique à gley, à comme plante test et quatre sources de phosphore
submersion quasi permanente et à déficience pour la technique de trempage: le superphosphate
marquée en phosphore. triple (46 %), le phosphate bicalcique (33 %), l'hyper-
Les caractéristiques physico-chimiques de ces sols réno (28 %) et un engrais ternai re 16-16-16 NPK.
sont données dans le tableau 1. A l'exception du témoin absolu, tous les traitements
des deux essais ont reçu une fertilisation uniforme de
Tableau 1. Caractéristiques physico-chimiques des sols 60 unités d'azote et 60 unités de potasse.
de rizière de Manjakandriana.
Profondeur (cm) 0-20 20-50
Granulométrie (%) Résultats et discussion
Argile 49 46 <-......."««o.-.:-.............................-..»....~o,,:......-..»."«-:-.-.:-.-.....:......-.:-.-..:-».......' »»....- ..».W».......' »............."*-"*-..."*--.....:-..~~~ ..." ».....o,,:.....- .:-."».."».."«
Limon 21 21
Sable 30 33 Effet de la technique d'apport
Matière organique (%) 5,7 5,65 de p20S sur le rendement en paddy
Azote (%) 0,4 0,40
Les rendements en paddy obtenus sur trois années
CIN 8,05 8,15 d'expérimentation sont présentés dans le tableau II.
Acidité (pH eau) 4,9 4,5
Il ressort que 30 unités de phosphore apportées avant
Cations écho (mé 100 g-1 sol)
Calcium 0,81 0,31 le repiquage par trempage des racines dans une pâte
Magnésium 0,20 0,07 boueuse de P2 0 S donnent un rendement supérieur à
Potassium 0,09 0,02 celui obtenu avec 60 unités épandues à la volée.
Sodium 0,03 0,02
CEC 10,2 11,8 Ces résultats montrent également que 30 unités et
60 unités de phosphore apportées par épandage à la
P20 S ass. Olsen (ppm) 5,3 7,0
volée donnent des rendements en paddy statis-
Tableau Il. Effet de la dose et du mode d'apport d'un engrais phosphaté sur le rendement (kg ha- 1) en paddy
de la variété Chianan 8 (1632) durant quatre années culturales. Sambaina, Manjakandriana (Madagascar).
1985-86 1986-87 1987-88 1988-89 M
Témoin absolu 2533 c 840 c 914 c 1 100 d 1 400
OP20 S 3700b 841c 1096c 16000 1800
30 P20 S par EV 3900 ab 1343 b 2303 b 2200 b 2400
30 P20 S par TR 4250 a 1992 a 3034 a 2600 a 3000
60 P20 S par EV 4430 a 1425 b 2376 b 2200 b 2600
Les moyennes suivies d'une même lettre ne sont pas significativement différentes au seuil de 5 % selon le test de Duncan.
EV : épandage à la volée.
TR : trempage des racines.
M: moyenne générale.
). RATSIMANDRESY,). RAKOTOARISOA, R. RABESON, A.L. RAZAFIN)ARA, P. RASOLOFO, ).R. HOOPPER
><~6
au cours du stade végétatif
La figure 1 montre la cinétique de l'absorption du 0,12
phosphore par les jeunes plants de riz d!J 20e au 40 e
jour après repiquage.
0.08 .----~~
Il apparaît que, pour les traitements où l'engrais
phosphaté a été épandu à la volée, l'assimilation du
...------- ~""
phosphore après le repiquage est très active puis 0,04
Tableau III. Effet de la dose et de la source de phosphore en fonction du mode d'apport sur le rendement (kg ha- l )
en paddy de la variété IRAM 10 (2067) durant trois années culturales. Sambaina, Manjakandriana (Madagascar).
Le superphosphate triple est la source la plus indi- VELLY J., ROCHE P., CELTON J., 1966. Les possibilités
quée pour cette technique, mais l'hyper-réno et le d'augmentation de la production rizicole après correction
phosphate bicalcique peuvent également être utilisés. des carences minérales sur sol à Madagascar. Lake
Charles, Commission Internationale du riz, FAO.
Références bibliographiques
ARRIVET5 J., RAZAFINDRAMONJY J.B., 1979. Expéri-
mentations sur la fumure du riz dans la province de
Tananarive, 1974-1979. Antananarivo, CENRADERU,·
36 p.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
C1RAD,1993
R. RABESON 1
Tableau 1. Teneur en matière organique et en soufre total de quelques sols de rizières malgaches (horizon 0-20 cm).
Périmètre de Types de sols (classification Matière organique (%) Soufre total (ppm) Nombre
prélèvement des sols française, CPCS, 1967) Moyenne Moyenne d'échantinons
Sahambavy Sols hydromorphes minéraux à gley 1,05-3,17 2,25 198-940 395 7
(Fianarantsoa) formés sur matériau alluvial
Mahajengy Sols hydromorphes minéraux à gley 1,15-1,58 1,25 175-435 310 5
(Fianarantsoa) formés sur matériau colluvio-alluvial
Ambohimahasoa Sols hydromorphes humiques à gley 4,35-5,08 4,80 742-1 235 895 5
Ambohimahasoa Sols peu évolués d'apport alluvial 1,15-1,60 1,41 134-329 225 5
hydromorphe
Ivato Sols hydromorphes minéraux à pseudo- 1,24-1,87 1,50 187-750 350 6
(Ambos~ra) gley formés sur matériau alluvial
Sandrandahy Sols hydromorphes minéraux à amphi- 2,25-3,15 2,45 257-810 425 5
(Fandriana) gley formés sur matériau alluvial
Sandrandahy Sols hydromorphes humiques à gley 5,05-5,42 5,20 820-1435 950 5
(Fandriana)
Manandona Sols hydromorphes minéraux à pseudo- 1,25-1,59 1,34 125-310 250 5-
(Antsirabe) gley formés sur matériau colluvio-alluvial
landratsay Sols hydromorphes minéraux à gley 2,35-2,90 2,70 590-1 325 1120 5
(Batafo) formés sur matériau d'origine volcanique
Ambohibary Sols hydromorphes minéraux à gley 1,20-3,58 2,75 124-783 380 5
(Sambaina) formés sur matériau alluvial
Ambatolampy Sols hydromorphes minéraux 1,35-1,90 1,80 117-295 218 5
à amphigley formés sur matériau alluvial
Ambatolampy Sols hydromorphes humiques à gley 4,24-4,80 2,50 658-1320 925 6
Ilernpona Sols peu évolués d'apport alluvial 0,92-1,97 1,37 107-420 205 5
(Ambohimandroso) hydromorphe
IIernpona Sols hydromorphes minéraux à pseudo- 1,07-2,75 1,95 195-345 275 5
(Ambohimandroso) gley formés sur matériau alluvial
Batsim~atatra Sols hydromorphes minéraux à gley 1,95-2,85 2,45 285-540 345 7
(Antananarivo) formés sur matériau alluvial
Betsim~atatra Sols hydromorphes humiques à gley 2,95-4,37 3,90 350-985 875 5
(Antananarivo)
Mahajija Sols hydromorphes minéraux à gley 2,05-2,90 2,50 158-480 310 5
(Mah~sy) formés sur matériau alluvial
Marovoay Sols hydromorphes minéraux à pseudo- 1,15-1,60 1,39 112-425 203 5
(Moramanga) gley formés sur alluvions anciennes
Le soufre total est mesuré avec l'appareil ·X-ray fluorescence spectrometry".
Tableau Il. Teneur en soufre assimilable (sous forme sulfatée 804) et soufre total de quelques types de sols
de rizières des hauts plateaux présentant des plants de riz portant des symptômes de déficience en 8.
inondée de bas-fond, il manque encore des infor- Les caractéristiques analytiques du sol sont données
mations consistantes sur la réponse des autres dans le tableau IV. Il est à noter qu'à Ambohidrano
cultures à l'apport de soufre. les sols sont dérivés de matériaux volcaniques. La
matière organique, à teneur très élevée, est
Cette communication ren~. compte des résultats des
étroitement associée avec Pallophane, qui limite la
essais agronomiques conduits sur des sols de rizière
minéralisation de cette matière organique, c'est-à-
apparemment déficients en soufre, pour évaluer la
dire que le taux de libération du soufre assimilable
réponse du rendement rizicole à quatre sources de
(sous forme de SOl-) est très faible. La teneur assez
soufre, sous différentes doses (20 et 40 kg ha-1) et à
élevée en S total s'expliquerait par l'existence de
une période d'application variable (au repiquage, 45
pyrite dans le matériau parental.
jours après repiquage et 30 jours après repiquage).
Les arrière-effets des quatre sources de soufre ont été
évalués durant la saison vakiambiaty 1990-1991.
Matériel et méthode
Evaluation des différentes Etude des périodes d'application
formes de soufre de trois formes de' soufre
L'essai a été conduit à Ambohidrano/Talata
L'essai a été conduit à Soanierana (Mahitsy) durant la
(Antsirabe) durant la saison vakiambiaty 1989-1990.
saison "vakiambiaty" 1989-1990, afin de comparer
les performances de quatre formes de soufre sur le On atesté trois sources de soufre (soufre élémentaire,
plan de la disponibilité de cet élément (S) pour le riz, fleur de soufre, sulfate de calcium), avec apport
à travers le rendement en paddy. séparé et à trois périodes d'application: au repi-
Les quatres formes de soufre (sulfate d'ammoniaque, quage ; 15 jours après repiquage; 30 jours après
repiquage.
soufre élémentaire, poudre de soufre, sulfate de
calcium), sous deux doses (20 et 40 kg ha-1), ont été Les traitements sont répartis dans un bloc simple à
épandues dans les sols en ~oue, avant le repiquage. quatre répétitions (tableau V), avec utilisation de la
variété de riz 2067.
Une dose uniforme de fertilisation NPK (90-60-30> a
été apportée dans tous les traitements sauf dans le Toutes les parcelles sauf le témoin absolu reçoivent
témoin absolu (tableau 110. une quantité égale de NPK à la dose de 60-60-45.
Les traitements sont répartis dans un bloc simple à Les caractéristiques analytiques du sol sont données
quatre répétitions. On a utilisé la variété de riz 2787. dans le tableau IV. -
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
Les arrière-effets du soufre ont été déterminés au différentes doses, ont donné des rendements
cours de la saison vakiambiaty 1990-1991. statistiquement équivalents à NPK sans soufre, in-
diquant que l'arrière-effet du soufre, issu des diffé-
Tableau III. Liste des traitements de l'essai rentes formes, a été épuisé en une année (figure 3).
d'évaluation des formes de soufre.
Un apport de soufre doit être fait chaque année sur le
Traitement Désignation type de sol de Soanierana,
1 Témoin absolu
2 NPK seul Les périodes d'application
3 NPK + sulfate d'ammoniaque (20 kg ha- 1)
Des symptÔmes typiques de déficience en soufre
4 NPK + sulfate d'ammoniaque (40 kg ha- 1) sont observés sur les plants de riz qui n'ont pas reçu
5 NPK + soufre élémentaire (20 kg ha- 1) de soufre.
6 NPK + soufre élémentaire (40 kg ha- 1)
7 NPK + poudre de soufre (20 kg ha- 1) Tableau V, Liste des traitements de l'essai sur les
a NPK + poudre de soufre (40 kg ha- 1) périodes d'application de trois formes de soufre,
9 . NPK + sulfate de calcium (20 kg ha- 1) Traitement Période d'application
1 Témoin absolu
2 NPK
Résultats et discussion 3 NPK + S élémentaire Au repiquage
4 NKP +fleur de soufre Au repiquage
Les différentes formes de soufre 5 NPK +sulfate de calcium Au repiquage
Des symptÔmes typiques de déficience en soufre 6 NPK + S élémentaire 15 jours après repiquage
sont observés sur les plants de riz qui n'ont pas reçu 7 NPK +fleur de soufre 15 jours après repiquage
de soufre,
a NPK + sulfate de calcium 15 jours après repiquage
Une comparaison des moyennes de rendement par 9 NPK + S élémentaire 30 jours après repiquage
le test de Duncan est donnée dans le tableau VI. NPK +fleur de soufre 30 jours après repiquage
10
On note une augmentation significative du ren- 11 NPK + sulfate de calcium 30 jours après repiquage
dement par rapport au témoin absolu et au traitement
NPK sans soufre, quelles que soient les formes et les
doses (figure 2).
Tableau VI. Comparaison des moyennes
La dose de 40 kg ha- 1 confère un rendement de rendement (kg ha- 1). Test de Duncan.
significativement supérieur à la dose de 20 kg ha-l
pour chaque forme appliquée. Traitement Rang Moyenne
Tl 10 2450d
Il n'y a pas de différence significative en ce qui
concerne la performance des quatre sources de T2 9 3145 d
soufre. Toutefois, le sulfate de calcium à la dose de T3 a 3400c
20 kg ha-1 donne un rendement statistiquement T4 4 4275ab
équivalent à celui obtenu avec le sulfate d'am- T5 6 3675 bc
moniaque à la dose de 40 kg ha-l,
T6 3 4450a
La dose préconisée est de 40 kg ha-l, T7 7 3650 bc
L'arrière-effet du soufre sur le rendement rizicole de Ta 1 4650a
la campagne suivante a été évalué. La comparaison T9 5 4125 ab
des moyennes de rendement par le test de Duncan est
Tl0 2 4600a
donnée dans le tableau VII. Toutes les formes, sous
2000 T4 5 4125 a
T5 2 4300a
1000 T6 3 4275a
T7 4 4175 a
o
Tl T2 T3 T4 T5 T6 Tl TB T9 no T8 1 4400 a
Traitement T9 8 3650a
Figure 2. Rendement moyen en paddy pour quatre T10 7 3900a
formes de soufre, sous deux doses d'apport. Moyenne 3900
Rendement (kg/ha)
5000
L'analyse de la variance (tableau X) a montré une Figure 4. Rendement moyen en paddy pour trois formes
différence significative parmi les traitements. de soufre, selon trois périodes d'application.
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
Tableau IX. Moyennes de rendement (kg ha- 1). 5000 Rendement (kg/ha)
Traitement Moyenne
4000
T1 2610
T2 3635 3000
T3 3800
3300 2000
T4
T5 4227
1000
T6 3782
T7 3662
T1 T2 T3 T4 T5 T6 T7 T8 T9 T10 T11
T8 3275 Traitement
Conclusion
S. TRAORE 1
chaque poquet. lis sont également enfouis à environ mesurent 5 x 2 m. Le repiquage se fait à une densité
20 cm de profondeur. La perlurée est apportée à la de 40 x 20 cm, à environ 3 brins par poquet.
volée. Sur le riz irrigué, quelle que soit la forme de
l'urée, on l'apporte dans la boue, après avoir enlevé
l'eau. On attend deux jours avant de la remettre.
Les deux apports de perlurée en riziculture irriguée Résultats et discussion
s'effectuent environ deux semaines après le
repiquage pour le premier et au début de la Les tableaux 1 à VIII ainsi que les figures 1 à 4
montaison pour le second. Sur le riz pluvial, le présentent les résultats des essais.
premier apport se fait au semis et le second 30 à 40
jours après semis. Les réponses à l'azote avec l'urée sont modestes sur
le riz pluvial (tableaux III et IV). Les rendements en
paddy sont plus faibles en 1987, certainement en
raison de la mauvaise pluviométrie.
Tra itements
Les gains de production par apport de l'azote sont
Dix traitements, dont un témoin sans azote, ont été plus importants sur le riz irrigué, avec une augmen-
adoptés pour les essais sur les cultures pluviales en tation plus susbstantielle sur les traitements où l'USG
même temps que sur les cultures irrigués: T1 : témoin a été appliquée.
sans azote; T2 : 30 N, perl urée, en deux apports;
Les faibles accroissements de rendement en rizi-
T3 : 60 N, perlurée, en deux apports; T4 : 90 N,
culture irriguée s'expliquent par une toxicité ferreuse
perlurée, en deux apports; T5 : 30 N, supergranules,
qui s'est manifestée au cours de la crois-sance du riz.
en une fois; T6 : 60N, supergranules, en une fois;
T7 : 90 N, supergranules, en une fois; T8 : 30 N, Au vu de l'ensemble des résultats, on constate un
perlurée, en un apport; T9 : 60 N, perlurée, en un comportement différent du riz vis-à-vis de l'urée
apport; T1 0 : 90 N, perlurée, en un apport. supergranule, donc de la localisation de l'azote,
En outre, tous les traitements reçoivent sur les deux selon qu'on est en riziculture irriguée ou pluviale.
types de riziculture un~ f~r:tilisation uniforme de 90 En riziculture irriguée, il n'y a pas de diffférence sta-
unités de P205 par hectare, sous forme de supertriple tistique entre l'apport unique et l'apport fractionné
phosphate, et 90 unités de K2 0, sous forme de de l'urée (tableaux 1 et Il ; figure 1).
chlorure de potassium.
La plus grande efficacité de l'urée supergranule face
à la perl urée n'est pas due à sa composition chi-
mique. Comme souligné ci-dessus, l'USG a la même
Dispositif teneur en N et la même solubilité que l'urée c1as-
~~ -..:~ :::: -»O«'~~ ~~~ -.o.. --».~
Riz pluvial
Chaque parcelle mesure 6 x 4 m. Sur chaque
parcelle, on retient dix lignes centrales de 5 m (en 5
éliminant 50 cm à chaque extrémité) représentant la
parcelle utile.
Un interligne de 20 cm sépare chaque ligne de la
suivante. La parcelle utile a donc une superficie de 4
(5 m x 0,2 m) x 10, soit 10 m 2 •
Tableau 1. Riz irrigué, rendement en paddy Tableau II. Riz irrigué, rendement en paddy
(t ha- 1), 1986. (t ha- 1), 1988.
,
Tableau III. Riz pluvial, rendement en grain Tableau IV. Riz pluvial, rendement en grain
(t ha- 1), 1986. (t ha- 1), 1987.
Tableau V. Riz irrigué, rendement en paille Tableau VI. Riz irrigué, rendement en paille
(t ha- 1), 1986. (t ha- 1 ), 1988.
Modalités Dose Modalités Dose
SON SON SON Moyenne 30N 60 N SON Moyenne
Perlurée 2 apports 3,79 4,29 3,86 3,98b Perlurée 2 apports 5,27 7,11 8,00 6,79
Perfurée 1 apport 4,99 4,91 S,OS 4,99 a Perlurée 1apport 5,15 7,92 10,03 7,70
USG 5,49 5,23 6,43 5,72 a USG 5,78 8,78 9,62 8,06
Moyenne 4,76 4,81 5,11 Moyenne 5,40 a 7,94b 9,22c
CV:21,1% CV : 24,20 %
LSD: 1,05 LSD: 1,47
sique. Son etticacité est essentiellement due à son Par ailleurs, du tait du placement en protondeur, les
mode d'application. L'USG est localisée tandis que éventuelles pertes par érosion sont réduites avec
la perlurée est appliquée à la volée. L'application à la l'Use.
volée est source de pertes supplémentaires, quoique
La baisse de la transformation de NH.t en NO]
moins pénible et exigeant moins de temps de travail.
diminue les risques de perte par lixiviation du fait du
La localisation de l'USG près de la rhizosphère milieu anaérobie.
améliore sa disponibilité vis-à-vis de la plante. Le sol, Il est mentionné aussi dans la littérature que l'USG
à la profondeur où l'USG est localisée, est dans un est moins immobilisée par les algues que ne l'est la
environnement anaérobie, avec un pH et un perlurée, du fait de son placement en profondeur.
potentiel redox stabilisés.
L'absorption de l'azote par les màuvaises herbes est
Dans ce milieu anaérobie, les phénomènes de réduite quand l'USG est placée en profondeur.
nitrification et dénitrification sont réduits autour de la
Les facteurs décrits ci-dessus favorisent et expl iquent
zone de placement. Les mouvements de NHt sont
plus orientés vers le bas que vers le haut, où il l'efficience de l'USG en riziculture irriguée.
pourrait se perdre par volatilisation (SAVANT et al., Quand la perl urée est épandue à la volée dans le
1983). milieu aquatique, l'azote est concentré à l'interface
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
~""C«-.."w),,"*,~"'''''''''''''''''''"<'I.'''ClI.''».~''''IQo.'».''''''».'''~"'OI."*,''«<'.'"««««*.'»»-"<'.''''"<'."*,''''~'''''~~~~''~~~~~;~=ilil=ilililil:ilil::ilililil::il::ilililil:~
/~/-.-&
du gain supplémentaire obtenu par unité d'éléments 8
nutritifs apportés à la plante. ...........
Dans notre cas, il s'agit de kilogrammes supplé- .. ,..,/~
6
mentaires de riz paddy par kilogramme d'azote ............~.
apporté (FAO, 1989).
Les résultats ont montré des coefficients de variation 4'---_---1.---...J...------J'---_ _....L._ _----J
élevés, rendant l'interprétation assez difficile. On
o 30 60 90
DOSES D'AZOTE ( N 1 ha 1
7,....-----------------, ...
Gl-_Gl P. U. on I.Apport (;).........(;) u. S. G.-
.f?J
.....'
Figure 4. Riz irrigué, rendement en paille, 1988.
61-
.'
5 . 7 . . :., :.
[?J...... ..' ••••• peut retenir que ces indices sont assez élevés pour
l'essai de 1986 (tableau VII). Ils sont le fait des
rendements anormalement faibles obtenus sur une
parcelle témoin sans azote.
Figure 3. Riz irrigué, rendement en paddy, 1988 Moyenne 13,26 11,83 11,73
S. TRAORE
J. RAHERIMANDIMBY 1, A. LOSSEAU 2 .
~tl!i~il·';til~i!~ii~ri~~~Ë~~~~"rÎ~lit&1~~riltt~~!#~~I~~~~4~]~ i "''<
:);::t;çQmprf{éntré3,4etS~3;ÇeSr~ndementsillontrènt
*• lê~tê"tiel
":':':'·:"·""'r.~@~m~9(môY~W~t • ~~tof.~r~~~ .• ~.99,kg f1~~}·P~~&?9îijm#n.dil~ioîWii~#PtMs~!@ • !~jtitl~4f: . ~~.:
de larizidJltureà Mildagascaf;dont lé ::.::i.:·::.:.'.:::',·'.:·,,·.••..:.:.••.:.:. 1
•.•.•.•...•.•••.•••••.••..•••••••,.••••.•••..:.; •••••.••.•••••.•.•••..•..•••..•...••. :;:;>:;:<;:;::.;:;:;:;:;::::.::;:::;:::::::;:::;:; :::.:·;::::·:.:-::;.;-::;:;:::;:X::;:;:;:;::::;::::: .'..... ;:;::::::: ......•...••••••••.•.••.•.•••,... ;:;:::::;:::::;::::::::::': f)}))Irrmrm
1 PEM, Nanisana, BP 1028, Antananarivo, Madagascar. L'analyse des résultats des essais qui sont présentés
2 FAO, PEM, BP 3971, Antananarivo, Madagascar. dans cet exposé montre que l'emploi optimal des en-
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
Dispositif expérimental
120 kg ha-1), avec une dose uniforme de 60 kg ha-1
En collaboration avec le FOFIFA et l'IRRI, le Pro-
de potassium; à ces 16 parcelles s'ajoutaient une
gramme engrais Malagasy a mis en place, en 1987-.
parcelle de II. contrôle» (0-0-0) et une parcelle
1988, un réseau d'essais de fertilisation de riz irrigué
d'essai sur l'effet du soufre (80-80-80 + 20 5), soit un
sur les hauts plateaux. Au total, 308 essais de 18
dispositif unitaire de 18 parcelles par site (figure 3).
parcelles (82 sites) ont été installés sur les champs des
Les pratiques culturales étaient celles recommandées
agriculteurs, dans sept vallées, dont cinq dans la
par la vulgarisation, avec l'utilisation de variétés
région d'Antananarivo et deux dans la région de
améliorées (1285 ou 1632).
Fianarantsoa. Les figures 1 et 2 présentent la loca-
lisation des vallées et un exemple d'emplacement des
sites dans une de ces vallées (vallée de Betsimizara). Ce dispositif a été conduit pendant trois saisons
successives (de 1987-1988 à 1989-1990) par les
Le dispositif factoriel complet N-P 4 x 4 comprenait
cadres de la DVA avec l'appui des cadres nationaux
quatre niveaux d'azote et de phosphore (0, 40, 80,
et internationaux du PEM. En 1990-1991, il a été
V.1 BETSIMIZARA
V.2 MAHITSY
V.3 AMaOlO
V,4 AMBOHIDAVA
V.5 T5ARAFAR4
V.6 AMaOH.aORY
v.7 MAHAZENCY
reconduit sur 62 des 82 sites, sans application de retenues pour le regroupement de sols des rizières:
phosphore ni de potassium, pour mesurer les arrière- argile + limons fins, matière organique, pH eau,
effets éventuels du phosphore. phosphore désorbé résine, taux de saturation en AI.
Les trois premières ont été privilégiées car elles
peuvent être appréciées sur le terrain. Quatre types
de sols ont été retenus. Leurs caractéristiques et les
Caractéristiques des sols principales corrélations observées sont présentées
...
C~~Q:QQI:C::QQQc::cC::C::C:::CICCCCC::cc:c:cc::::cc::c::«iCCC::C::CC:CCC:::~W.~"<-."«-........................-.O..."«-''''''''''''''''-'»'''«< dans les tableaux 1et II.
Sept vallées ont été choisies pour l'étude et le
classement pédologique des sols. Dans chaque
vallée, des échantillons de surface (0 à 20 cm) des 10
à 12 sites ont été prélevés pour l'analyse détaillée des Résultats
sols, soit au total 82 échantillons. En plus, deux ou
trois profils pédologiques complets ont été prélevés Méthodes d'analyse
et analysés pour chaque vallée. Après les trois
La plupart des analyses ont été réalisées à l'aide de
années d'essai, des analyses complémentaires ont
plus de 30 logiciels développés pour l'étude (COPE,
été effectuées sur des échantillons de sol prélevés
1989). Ces logiciels permettent d'effectuer les
dans les parcelles 0-0-0 et 120-1 20-60 de chaque
transformations nécessaires et de réaliser les analyses
site.
statistiques élémentaires, les analyses de variance et
Il est à noter que les sols tourbeux de la bordure est de régression et des analyses (iconomiques. Des
des hauts plateaux et les sols formés sur des analyses complémentaires, principalement pour les
matériaux d'origine volcanique (Miarinarivo et stratifications selon les classes de matière organique,
Antsirabe) ne sont pas représentés. Cependant, ont été réalisées à l'aide des logiciels Statitcf, Cstat,
l'échantillonnage effectué représente vraisem- Statgraphics et Quattropro.
blablement une bonne majorité des rizières des hauts
plateaux, spécialement du Faritany d'Antananarivo,
où les sols hydromorphes à gley et pseudo-gley Tendances générales
dominent très largement dans les vallées (ROCHE,
1988). Les résultats ont présenté une grande homogénéité
d'une année à l'autre. L'analyse statistique a montré
L'étude des sols des sept vallées (ROCHE, 1988) que l'effet année est globalement significatif, c'est-à-
montre que trois types de sols prédominent: les sols dire que les rendements diffèrent d'année en année,
hydromorphes minéraux à pseudo-gley (54 %), les mais sans interaction avec les réponses à N et à
sols hydromorphes minéraux à gley (17 %), et les sols P2 0 S' qui ne varient donc pas d'année en année.
semi-tourbeux et organiques (16 %). Les autres sols Aussi les tableaux et figures ne reprennent que les
sont du type hydromorphe à amphigley (6 %), moyennes des trois années d'essais. Les coefficients
hydromorphe sableux (6 %) et tourbeux (1 %). de variation par vallée, compris entre 10 et 18 %,
confirment la précision de l'essai.
L'hypothèse générale que les sols hydromorphes
tourbeux ou semi-tourbeux se trouvent en tête de La figure 4 présente les rendements et les pour-
vallée ou sur des zones non drainées et en bordure centages d'augmentation des différents traitements
de vallée n'a pu être confirmée par l'étude pédo- pour l'ensemble des sites.
logique, vu qu'il n'a pas été possible de mettre en
On peut observer que:
place les répétitions dans une même vallée selon
cette disposition (4 répétitions en tête de vallée, 4 au - le rendement du témoin absolu, de 2 862 kg, est
centre et 4 dans le bas). L'étude pédologique et supérieur de 30 % au rendement moyen national (2
l'analyse des sols ont montré cependant que la zone 200 kg ha-1) ;
la plus organique, semi-tourbeuse, se trouve en - les rendements sont faibles pour les traitements
général au centre de la vallée. La nappe phréatique sans azote ou sans phosphore, quel que soit le
est dans l'ensemble assez proche de la surface (40 à niveau de l'autre élément; ces rendements sont
50 cm). inférieurs à 4 000 kg ha-1 et l'augmentation de
Les données des analyses de sol ont été soumises aux rendement ne dépasse pas 27 %, soit environ 900 kg
analyses de corrélation entre les différents ha-1 ;
paramètres ainsi qu'à l'analyse factorielle en - avec un apport de 40 kg ha-1 de N et de P2 0 S' le
composantes principales. Parmi les différents rendement est plus élevé (4 650 kg ha- l ,50 %
éléments analysés, cinq caractéristiques (sur d'augmentation) ; ce rendement augmente ensuite
lesquelles s'appuie la variabilité de 82 sites) ont été avec chaque apport d'azote ou de phosphore;
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
- le rendement maximal (G 372 kg ha-l, 100 % Corrélations entre les paramètres de sol
d'augmentation) est obtenu avec la dose maximale et la réponse à l'azote et au phosphore
testée (120-120-GO). Plusieurs méthodes ont été utilisées pour estimer les
relations entre la réponse à l'azote et au phosphore et
La figure 5 montre les réponses moyennes à l'azote et
les 39 paramètres de sols analysés au laboratoire ou
au phosphore. sur le terrain. Les analyses des trois années d'essais
En général, la réponse à l'azote est très marquée ont montré que les meilleures corrélations sont
jusqu'au plus haut niveau testé, et la courbe reste obtenues en utilisant les coefficients des polynômes
pratiquement linéaire. La réponse au phosphore est orthogonaux des courbes de réponse. Les principales
elle aussi très élevée; la courbe est plus classi- corrélations sont présentées dans le tableau III.
quement curvilinéaire et le maximum de rendement On remarque de fortes corrélations entre la teneur en
est atteint aux environ de 90 kg ha-1 de P2 0 S' matière organique (MO) et la réponse à l'azote (N) (-)
Tableau II. Principales corrélations observées entre les paramètres du sol (d'après ROCHE, 1988).
et, dans une moindre mesure, la réponse au - pH eau est corrélé avec réponse à P2 0 S (-) et
phosphore (P 2 0 S) (+). On observe aussi de fortes fortement avec % MO (-) ;
corrélations entre le fer libre mesuré au laboratoire et - phosphore désorbé résine est fortement corrélé
la réponse à N (+), la teneur en MO (-), mais aucune avec réponse à N (-), réponse à P2 0 S (-) et % MO
corrélation entre ce fer libre et la réponse à P2 0 S • (+) ;
Ces deux critères peuvent être retenus comme
critères de base pour la discrimination des réponses - AI sato est fortement corrélé avec réponse à N (-) et
à N et P20S. % MO (+) et faiblement avec réponse à P2 0 S•
Les paramètres corrélés avec les réponses à l'azote
Parmi les critères dégagés par l'analyse pédologique ou au phosphore sont aussi corrélés avec la teneur en
pour grouper les sols, on constate que: matière organique.
- argile + lil)1on est faiblement corrélé avec réponse Cette dernière apparaît comme un critère valable de
à N (-) et fortement avec % MO (+); discrimination des réponses, à partir duquel des
7'000..,..,...---------------------------------.
100% e
93%
as
~ 5000-1-r---------------r-""n-I
57%
c
al
~
alC-
E
al
E
al
"0
C
al
oc
eooor----------------~ 6000
55OO+--------------~--Lt
i 5000+-----~~--~
t ~+__-~--------__1
5500
y
...---.- --
)~~--l /
1,/
3500+------------ -1 3500
3OOO~0-.---.---.---r40-.---r-~.......
80-..---r-~-12.JO 3000
o 40 80 120
N(kglhoj P205 (kg/hlj
Figure 5. Réponse moyenne à "azote et au phosphore (tous traitements azote et phosphore confondus).
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
groupes de réponses à l'azote et au phosphore au phosphore ont été analysées. Différentes échelles
relativement homogènes pourront être élaborés, de regroupement ont été testées: la formule qui rend
permettant donc une même gamme de recom- compte le plus synthétiquement des différentes
mandations. Ce choix est d'autant plus justifié que, gammes de réponses se compose de trois classes:
avec un peu d'expérience, la teneur en matière orga- teneur en matière organique faible k 4 %), moyenne
nique peut être assez aisément estimée sur le terrain. (4-8 %), élevée (> 8 %). On observe que les deux
premières classes ainsi déf.inies correspondent aux
deux premiers regroupements qui avaient été
Réponses selon la teneur proposés par ROCHE (1988) lors de l'interprétation
en matière organique des analyses de sol.
Réponse à l'azote et au phosphore La répartition des sites selon leur teneur en matière
C'est donc sur la base du critère le taux de matière organique est présentée dans le tableau IV.
organique» qu'ont été effectués des regroupements, Les courbes de réponse à l'azote et au phosphore
en fonction desquels les réponses du riz à l'azote et sont présentées en figure 6.
j. RAHERIMANDIMBY, A. LOSSEAU
Tableau IV. Classification des sites Les analyses statistiques basées sur les tests de
par classe de matière organique. séparation des moyennes de Newman et Keuls
Sile Classe 1 Classe 2 Classe 3 Total confirment ces observations:
MO<4% 4%<MO<8% MO>8%
- les trois niveaux d'azote (40, 80, 120 kg ha-1) se
Ambolo 2 9 1 12 traduisent par trois rendements différents dans les
Ambohidava 0 9 3 12 classes 0-4 % et 4-8 %, et par des rendements non
8etsimizara 0 2 10 12 différents dans les sols très organiques;
Mahitsy 6 4 10 - quant au phosphore, le premier niveau (40 kg ha-1)
12
se traduit par un rendement différent du témoin et
Tsarafara 11 1
également différent de celui des deux niveaux
Ambohibory 6 4 2 12
supérieurs, qui ont un rendement équivalent entre
Mahazengy 10 2 12 eux, et ce de façon identique pour les trois classes de
Total 35 31 16 82 sols, bien que les différences soient proportion-
nellement plus grandes dans la classe de matière
organique élevée.
La figure 6 montre que la réponse à l'azote varie Une analyse plus détaillée, en subdivisant les deux
d'une classe à l'autre: elle est continue et sensi- premières classes, confirme l'évolution graduelle de
blement linéaire pour les sols à faible teneur en MO cette réponse à l'azote en fonction de la teneur en
alors que, pour les sols à teneur élevée, la réponse est MO, en mettant en évidence le seuil de 6 % comme
très faible jusqu'à 40 unités d'azote et pratiquement limite à partir de laquelle cette réponse s'estompe.
nulle pour les doses supérieures. Les coefficients N Les sols à 4-8 % de MO se situent bien comme
des équations quadratiques diminuent de 30 pour les intermédiaires entre les sols « minéraux Il et les sols
sols à faible teneur en MO à 7,7 pour ceux à teneur « organiques Il pour la réponse à l'azote.
élevée.
Réponse aux interactions azote-phosphore
Les allures de la réponse au phosphore restent
Ces analyses révèlent aussi la présence d'interactions
sensiblement parallèles d'une classe à l'autre de
importantes entre N et P20 S pour toutes les classes,
matière organique (figure 6). Les coefficients P20S
c'est-à-dire que la réponse à une dose N - P2 0 S ne se
des équations quadratiques sont respectivement de
réduit pas à la simple juxtaposition de la réponse aux
35,31 et 35.
N et P2 0 S correspondant à cette dose. Ces struc-
turations sont par ailleurs différentes d'une classe à
On peut également remarquer que, si !e taux de
l'autre.
matière organique influe largement sur l'ampleur des
réponses à l'azote, il joue aussi beaucoup sur l'espé- Les courbes de réponse à l'azote (P2 0 S constant) et
rance moyenne de rendement: elles diminuent au phosphore (N constant) mettent en évidence
toutes deux avec l'augmentation de la teneur en ma- l'importance de ces interactions d'une classe de
tière organique. matière organique à l'autre (figures 7 et 8).
esoo.--------------~
8OOO+------------------l
M.0.<4%
3000+-----------------1
2500'~O---,-.---......---...,40-..-......---~-80.---......---~~-'.,....J2O
o 40 80 120
N (l<glha) P205 (l<glhaj
o Interaction azote-phosphore (figure 7) : - dans la classe 4-8 %, la réponse est du même type
que dans la classe précédente mais la pente (ré-
-l'azote a une réponse faible à nulle en l'absence de
ponse) diminue;
phosphore pour les trois classes de matière orga-
nique; - dans la classe> 8 %, il faut un minimum de 80 uni-
tés de P2 0 S pour qu'apparaisse une réponse signi-
ficative à l'azote, qui reste cependant faible.
MO<4%
7500.,........---------------, o Interaction phosphore-azote (figure 8) :
p. BO - la réponse au phosphore en l'absence d'azote est
65OO+------------::;>..c::..,7""'~.....=j p. <40 très faible dans la première classe et augmente avec
MO<4%
ëCl
E
7500r-------------------,
{; 45OOr---:7''7'L-------=:::;====1 P• 0 N·12O
.!
65OO~--____:7<::....---========::iN
• BO
-or
~
Cl
~
.
2500 ëCl N. <40
0 40 BO 120
E
N (KgIHaJ "0
c
M04-8% Il
7500 N-O
6500
P·12O
p. BO
-or p. <40
o 40 BO 120
~55OO +-------~$--='----=--===-j
ëCl M04-8%
E
Cl
7500',-------------------,
"0 4500
c
Cl
li:
~----------IP-O
3500 N·12O
'il" N. BO
~
Cl
~
0 ëCl Na <40
MO>8%
40
N (KgIHa)
BO 120
.
E
"0
c
7500 Il N-O
6500
---
40 BO 120
5500 1P2Q5 (KgIHa)
2500
- i~ 5500+------------------,1
o sa 120 ëCl
N (KgJHa) E
Cl
"0
Figure 7. Courbes de réponse à l'azote c
Cl
a:
pour chaque niveau de phosphore et par classe
de matière organique.
120
- dans la classe < 4 %, la réponse est pratiquement
linéaire et continue pour les autres niveaux de P20S Figure 8. Courbes de réponse au phosphore
(40, 80, 120) ; les courbes sont très rapprochées et pour chaque niveau d'azote et par classe
parallèles; de matière organique.
J. RAHERIMANDIMBY, A. LOSSEAU
le taux de matière organique dans les classes sui- à l'aide du logiciel FP1TF (COPE, 1990). Les résultats
vantes; sont présentés dans le tableau V.
- pour les autres niveaux d'azote, la réponse au phos- Pour les sols à teneur en MO faible « 4 %) et
phore augmente avec les niveaux d'azote mais l'am- moyenne (4-8 %), les calculs des doses d'azote ont
plitude des différentes réponses diminue quand aug- été extrapolés à partir de la partie linéaire de la
mente la teneur en matière organique dans le sol: courbe. Une estimation précise nécessiterait des
l'azote permet donc de mieux valoriser un apport de essais complémentaires (avec plus de 120 kg ha-1 de
phosphore, et ce d'autant plus que le taux de MO est N), ce qui dépasse le cadre de ces essais.
faible.
On observe que, avec l'augmentation de la teneur en
Les tests statistiques de séparation de moyennes matière organique du sol, la dose d'azote à appliquer
permettent de quantifier précisément les obser- diminue tandis que la dose de phosphore augmente
vations précédentes. On remarque entre autres que nettement pour la classe supérieure.
les quatre interactions les plus faibles en sol minéral
sont celles qui incluent le traitement N = 0, tandis Les résultats, résumés dans le tableau VI, pour les
qu'en sol organique ce sont celles qui incluent P2 0 S trois types de sols, montrent l'optimum économique
=0. en Net P2 0 S ' les rendements, l'indice de pro-
ductivité (lP) pour N + P2 0 S et les rapports valeur/
Les représentations graphiques des surfaces de coQt (RVC) calculés sur les prix de 1989.
réponse permettent d'illustrer ces différences de
réponse selon les classes de matière organique.Cette Les meilleurs résultats sont obtenus sur les sols à
analyse confirme: teneur en MO faible: l'augmentation de rendement
atteint 132 % pour un indice de productivité de 19 et
- le rôle prépondérant de l'azote en sol le minéral li, un RVC de 5,3. L'augmentation de rendement, l'IP et
mais la nécessité d'un apport minimal de phosphore le RVC diminuent avec l'augmentation de la teneur
pour le valoriser; en MO bien que restant à des niveaux élevés
- le rôle prépondérant du phosphore en sol orga- puisque, même sur les sols à teneur en MO élevée,
nique, mais la nécessité d'un apport minimal d'azote l'IP est encore de 12 et le RVC de 3,4
pour le valoriser à partir de 80 unités de P2 0 S'
Les essais ont été mis en place en milieu paysan en
conditions favorables (pratiques culturales, maîtrise
Optimums économiques de l'eau, utilisation éventuelle de produits phyto-
et recommandations sanitaires..,), qui sont encore peu fréquentes, et en
utilisant des variétés améliorées qui sont encore très
Les optimums économiques ont été calculés d'après peu diffusées. II est donc nécessaire d'adapter les
les courbes de réponse et les prix de 1989 (paddy: recommandations à des conditions générales moins
240 FMG/kg, N : 837 FMG/kg, P2 0 S : 870 FMG/kg) favorables en utilisant un facteur correctif estimé à
Tableau VII. Doses recommandées pour la fertilisation L'effet du soufre a pu être observé en comparant la
en fonction de la teneur en matière organique des sols. parcelle 80-80-GO à la parcelle 80-80-GO + 20 S.
Type de sol Après la saison 1987-1988, le nombre d'obser-
(%MO) vations a été réduit de moitié dans les cinq vallées
« Nord lt, les parcelles sans réponse ayant été subdi-
Sol minéral
(MO<4%) 86· 60 40·· visées pour observer l'arrière-effet du phosphore.
L'augmentation de rendement par le soufre a été de
Sol moyennement
organique 12 kg ha-1 en 1987, 15,7 kg ha-1 en 1988 et 122 kg
(MO =4-8 %) 72 55 40·· ha-1 en 1989. Ces réponses positives ne sont pas
Sol organique significatives mais suggèrent une réponse localisée à
(MO> 8 %) 33 66 40·· certains sites (ÇOPE, 1990).
• En conditions favorables, la dose d'azote pourrait être
augmentée jusqu'à 100-120 kg ha- 1 pourtenir compte
des interactions azote-phosphore.
•• Estimation à confirmer. Effets résiduels de P
Un effet résiduel du phosphore a été mis en évidence
sur les parcelles 80-80-GO + S divisées en 1988 ;
O,GG (COPE, 1990). La dose GO-GO-GO actuellement
recommandée 'pourrait ainsi être affinée par des aussi, G2 blocs ont été conservés en 1990-1991 sans
recommandations plus spécifiques liées à la teneur application de phosphore ni de potasse. Les parcelles
en matière organique du sol. 0-0-0, 120-80-GO et 0-80-GO n'ont pas reçu d'azote
pour détecter d'éventuels arrière-effets de l'azote;
Des recommandations mieux adaptées, en fonction les parcelles 80-0-GO, 80-40-GO, 80-80-GO et 80-120-
de la teneur en matière organique, ne pourront GO recevant 80 unités d'azote afin de détecter les
cependant être proposées qu'après concertation arrière-effets du phosphore.
avec le FOFIFA en adoptant, avec tous les inter-
Aucun effet résiduel de l'azote n'a été observé, ni par
venants, une stratégie qui permettra de confirmer
vallée, ni par classe de matière organique (Dupuy,
leur bien-fondé avant de les vulgariser.
1991).
Sur la base des résultats des parcelles divisées en
1988 et 1989, les effets résiduels de 80 unités de
Autres résu Itats P20S ont été estimés à environ 22 kg de P 20 S
l'année suivante (COPE, 1990).
Réponse à Ket S Les résultats des essais mis en place après les trois
L'effet du potassium a pu être observé en comparant années ont confirmé la présence d'effet résiduel, cet
la parcelle témoin O-O-GO à la parcelle témoin absolu effet s'accroissant avec la quantité de P2 0 S appli-
0-0-0. Cette réponse a été positive dans GO % des quée les saisons précédentes. La figure 9 montre les
sites seulement, pour une augmentation de 2GG kg ren~ements des parcelles ayant reçu le traitement
ha-1 en 1987,288 kg ha-1 en 1988 et 353 kg ha-1 en 80-0-0 en 1990 après les traitements 80-x-GO en
1989. Elle augmente avec l'élévation de la teneur en 1987, 1988 et 1989, x représentant 0,40,80 ou 120
matière organique du sol. kg ha-1 de P20 S'
Dix-huit sites où l'on avait constaté des réponses à L'analyse statistique a montré que l'augmentation de
K2 0 ont été sélectionnés en 1989 dans G vallées (à rendement est significative pour chaque traitement,
l'exception de Mahitsy) pour mettre en place pendant bien que les traitements 80 et 120 ne soient pas
deux ans un essai à doses croissantes de K2 0 (0-40- significativement différents entre eux. Les résultats
80-120-1GO), l'application de N et P20S étant ont aussi mis en évidence des différences de compor-
différenciée par vallée selon la dose « optimale lt. tement par site, qui ne peuvent être expliquées par la
seule matière organique, et qui montrent la com-
L'analyse statistique a montré une grande dispersion plexité des mécanismes en jeu dans la fixation/
des résultats et la localisation de la réponse, plus libération du phosphore (Dupuy, 1991).
marquée en première année, à certains sites (COPE,
1990; Dupuy, 1991),
Comparaison des analyses de sol
L'utilisation de doses supérieures à 40 unités ne Des analyses complémentaires ont été faites après les
semble pas nécessaire dans la plupart des cas. Des trois années d'essai en prélevant des échantillons
essais complémentaires sont indispensables pour dans les parcelles témoins absolus (0-0-0) et dans
mieux définir les sols qui ont réellement besoin de celles ayant reçu la fertilisation la plus importante
potassium (Dupuy, 1991). (120-120-GO),
). RAHERIMANDIMBY, A. LOSSEAU
Conclusion
o 40 80 120 (1997.1999)
P205 (kglhaj
L'ensemble des résultats des essais de fertilisation et
Figure 9. Effets résiduels du phosphore. des démonstrations conduits sur le riz irrigué par le
PEM dans les années passées permettent de
déterminer le rôle important joué par la matière
Les analyses effectuées sont les suivantes: matière organique en ce qui concerne la fertilisation des
organique (%), carbone organique (%), rapport C/N, rizières des hauts plateaux. Elle peut être considérée
azote total (%), phosphore résine (ppm), potassium comme un facteur prioritaire dans la détermination
échangeable (mé 100g-'), pH eau, fer libre (ppm). des types de sol, qui permet d'affiner les recom-
Les trois premières analyses n'ont été réalisées que mandations visant à améliorer la productivité de
pour un nombre limité de sites (10), tandis que les l'application des engrais.
autres l'ont été pour tous les sites.
L'analyse confirme que la réponse au phosphore est
Les analyses statistiques ont permis les conclusions élevée sur tous les types de sol. La réponse à l'azote,
qui suivent (Dupuy, 1991). par contre, qui est très forte sur les sols à faible teneur
en matière organique « 4 %), diminue avec
l'augmentation de cette teneur jusqu'à être faible sur
Matière organique, carbone organique, les sols à teneur élevée (> 8 %), L'étude des
rapport C/N interactions confirme le rôle prépondérant de l'azote
Le faible nombre des observations limite I~ portée de en sol minéral et du phosphore en sol organique,
l'essai. Il semble que les rapports C/N aient tendance mais aussi la nécessité d'un apport minimal de
à décroître au cours du temps. Aucune différence n'a l'autre élément pour être valorisé.
pu être détectée entre le témoin absolu et la parcelle
fortement fertilisée (120-120-60). Cela tendrait à La çomparaison entre le rendement moyen des
montrer que, dans les conditions de l'essai, les effets parcelles témoins (2 862 kg ha-') et le rendement
des engrais sur la matière organique, le carbone moyen national (2200 kg ha-') des rizières met en
organique et le rapport C/N restent limités. évidence que l'utilisation des variétés améliorées et
de meilleures techniques agricoles (date de semis,
pépinières améliorées, âge et densité des plants, date
Azote total, phosphore résine, potassium de repiquage, sarclage et maîtrise d'eau) pourrait
échangeable, pH eau, fer libre déjà assurer une augmentation considérable de la
Les différences de N total entre les parcelles production rizicole nationale sans utiliser la
fertilisées et non fertilisées ne sont pas significatives, fertilisation minérale.
alors qu'elles le sont parfois entre 1987 et 1990. Cela En revanche, quand les variétés améliorées et les
tendrait à montrer un effet peu prononcé de la techniques agricoles sont utilisées avec l'application
fertilisation sur la teneur en azote des sols des optimale des éléments nutritifs en fonction de la
rizières. teneur en matière organique des sols, les rendements
En revanche, les différences sont beaucoup plus des rizières des hauts plateaux peuvent augmenter
nettes pour le phosphore résine, des accroissements jusqu'à plus de 100 %.
entre parcelles fertilisées et non fertilisées étant
Les résultats des essais montrent aussi une réponse
observés dans toutes les vallées.
positive et localisée à la potasse et la présence
Le potassium échangeable, le pH, les teneurs en fer d'effets résiduels du phosphore, mais des essais
libre semblent être peu influencés par la fertilisation. supplémentaires sont indispensables pour mieux
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
définir soit les sols qui ont réellement besoin de Références bibliographiques
potassium, soit la complexité des mécanismes dans
la fixation/libération du phosphore. AIRD-MINAGRI, 1990. Etude du secteur rizicole. Rapport
final. Antananarivo, AIRD-MINAGRI.
Il est donc souhaitable que les informations et les
données produites par le PEM puissent être l'objet COPE F., 1989. Rice response ta fertilizers in Madagascar,
d'une réflexion conjointe entre le FOFIFA et la DVA 1987-1988 and 1988-1989 trails. Consultancy report.
pour effectuer leur évaluation et définir un plan FAO-AGLF.
commun de démonstrations sur les hauts plateaux,
avant que des recommandations plus affinées ne COPE F., 1990. Rice response ta fertilizers in Madagascar,
soient vulgarisées auprès des riziculteurs. 1989-1990 trails. Consultancy report. FAO-AGLF.
Bien que l'utilisation des engrais à Madagascar DE DAnA S.K., 1981. Princip les and practices of rice
remonte à 1951 et que l'on dispose de recom- production. New York, John Wiley and Sons.
mandations spécifiques pour le riz, il faut souligner
que les quantités d'engrais utilisées pour la culture DELANNOY M., 1987. Sols de rizières. Rapport de
du riz sont encore très limitées et, par conséquent, mission. Antananarivo, FAO, Programme engrais
n'ont pas eu l'impact souhaité sur les rendements. malagasy.
Actuellement, sur les hauts plateaux, dans les ClRVA
DUPUY J., 1991. Compléments aux résultats des essais de
d'Antsirabe, dl Ambositra et de Fianarantsoa,
fertilisation conduits sur riz irrigué à Madagascar.
seulement 8 % de la superficie des rizières sont Consultancy report. Antananarivo, FAO, Programme
fertilisés à la dose moyenne de 65 kg U.F. ha-1 alors engrais malagasy.
que la dose recommandée est de 150-175 kg U.F.
ha-1 (estimation RD/ODR). IRRI, 1979. Nitrogen and rice. Los Banos, IRRI.
Parmi les facteurs qui limitent le plus l'accroissement
IRRI, 1986. Progress in rainfed lowland rice. Los Banos,
des rendements des rizières, on peut souligner: IRRI.
- le rapport défavorable entre les prix des éléments
nutritifs (N et P2 0 S) et le prix du paddy (3,5 en 1989, IRRI, 1988. Green manure in rice farming. Los Banos, IRRI.
5,5 en 1991);
MINAGRI, 1989. Annuaire des statistiques agricoles 1987-
-l'utilisation de variétés locales à rendements faibles
1988. Antananarivo, MINAGRI (Série Statistiques
et, en même temps, la production nationale très courantes, nO 17-18).
limitée des semences améliorées, qui couvre moins
de 5 % de la superficie cultivée en riz; MINAGRI, 1990. Bilan du plan de développement agricole
- la disponibilité très limitée du crédit agricole pour 1986-1990. Antananarivo, MINAGRI.
l'achat des intrants ;
NABHAN H., RAKOTOMANANA H., 1990. Aspects de la
- le niveau très bas du pouvoir d'achat des agri- fertilisation dans les sols acides des rizières des hauts
culteurs; plateaux malgaches. ln: Organic-matter management and
- la connaissance inadéquate des pratiques de ferti- tillage in humid and subhumid Africa. Bangkok, IBSRAM
lisation équilibrée entre le riz et les cultures de (Proceedings nO 10).
contre-saison; ,
ODR-MINAGRI, 1990. Rapport de suivi-évaluation. Projet
- l'offre et la distribution insuffisantes en quantité et de développement agricole dans les hauts plateaux.
qualité des engrais. Antsirabe,ODR-MINAGRI.
Le défi auquel la riziculture malgache doit se
RAHERIMANDIMBY J., WILLEKENS A., LOSSEAU A.,
confronter est donc de définir une politique des prix
NABHAN H., 1991. Note sur la rentabilité des engrais sur
pour le riz et pour les intrants agricoles, et d'adopter
le riz irrigué. Antananarivo, FAO, Programme engrais
une stratégie de fertilisation qui puisse réduire les malagasy.
contraintes les plus importantes et, à court terme,
assurer la croissance de la production nationale, ROCHE P., 1988. Sols de rizières des hauts plateaux de
jusqulau niveau des rendements moyens mondiaux Madagascar. Consultancy report. Antananarivo, FAO,
(3,5 t ha-1). Programme engrais malagasy.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
que, à côté, les tanety exploitées par les mêmes Les formes
agriculteurs s'épuisent rapidement.
de concentration naturelle
Des études faites à Ambohimanambola indiquent
que des rizières exploitées depuis 1960 arrivent Les bas-fonds sont des lieux de concentration
encore à produire plus de 3 t ha- , sans aucun intrant naturelle de divers éléments mobiles de l'écosys-
chimique. tème : les eaux de surface ou eaux de ruissellement,
qui non seulement inondent mais irriguent et
Pour maintenir la fertilité des rizières, dans le apportent des éléments dissous et/ou en suspension;
système traditionnel d'utilisation des ressources les eaux de nappe qui y affleurent, et apportent leur
naturelles, nous émettons l'hypothèse d'un transfert contribution aux caractéristiques des bas-fonds. Ce
de fertilité des tanety, que nous allons maintement processus de transfert liquide est accentué par la
développer. dégradation des bassins versants.
A celui-ci s'ajoute un transfert de matières, qui est à
l'origine de la sédimentation, de l'envasement ou de
l'ensablement des infrastructures. Dans le cas du
Cadre de l'étude périmètre de la Taheza (hors des hautes terres), les
agronomes avaient constaté que l'eau d'irrigation
On admet que ce sont les agriculteurs eux-mêmes chargée pouvait colmater le sol sableux aménagé et
qui tiennent le rôle clé dans la transformation de leur le rendre plus apte à la riziculture (ROCHE et DUBOIS,
environnement. Sans leur adhésion à tout pro- 1959).
gramme d'aménagement, on ne peut parler d'action
Dans la gestion du transfert des éléments liquides, le
durable ou te sustainable », selon le terme anglais. Et
bassin versant est considéré comme un château
sans impact sur la productivité, toute action est
d'eau, et Pagriculteur le manipule en fonction des
vouée à l'échec.
besoins.
Le FOFIFA a décidé de mener des travaux de Dans l'étude des bassins versants de Périnet,
recherche dans le fokotany d'Avaratrambolo, un SARRAILH et RAKOTOMANANA ont pu mettre en évi-
village situé au nord-est d'Ambohimanga, à 30 km dence que l'étiage absolu se produisait en novembre,
de Tananarive. Ce village est constitué par une que ce soit sous forêt naturelle, sous eucalyptus ou
soixantaine de ménages et dispose de 800 hectares en terrain de savoka. Quelques chiffres carac-
de terres dont environ 20 hectares de rizières. Les téristiques ressortent de cette étude (tableau O.
observations faites dans cette communauté ont servi
de base à la présente note, mais des inf~rmations
plus pertinentes sont tirées d'autres régions des Tableau 1. Débits d'étiage mesurés
hautes terres lorsque cela est nécessaire. sur les bassins versants du Périnet.
Couvert Etiage absolu Etiage décennal
Pour obtenir ces informations, nous avons essen- (1 S-1 ha- 1) (1 S-1 ha- 1)
tiellement vécu avec la population, sur les lieux de
Forêt naturelle 0,07àO,15 0,07àO,11
ses activités, et nous l'avons surtout observée. Nous
Eucalyptus
avons en effet appris qu'il est inutile de demander de
décrire (verbalement) ou de justifier un acte, et qu'on Savoka
°
0,06àO,10
°
0,06
apprend davantage par une observation directe.
faiblesse de l'écoulement des rivières. RAKOTO- - pH compris entre 6,4 et 6,9, supérieur d'une unité
MANANA avait déjà signalé l'importance de ces crues au sol en place ;
précoces dans les pratiques culturales des hautes - teneur remarquable en P20S ;
terres.
- teneur en base échangeable supérieure au sol en
Cette concentration d'eau dans les bas-fonds se place.
poursuit tout au long de la saison des pluies. D'autres
infrastructures sont mises en place pour se protéger Par approximation, on peut estimer les quantités
des excès d'eau. d'éléments enlevées par l'érosion au sol en place
{tableau Ill.
Pour mieux comprendre ce comportement des ges-
tionnaires des bassins versants, on peut opposer deux En ce qui con.cerne la participation du sous-sol au
attitudes s'agissant du contrOle de l'eau sur le terrain. transfert de fertilité, on peut dire que ce sont les
La première attitude est celle de l'agriculteur. Il est lavaka qui en sont les points focaux. Diverses
intéressé principalement, et parfois exclusivement, analyses effectuées ont donné les résultats figurant au
par la quantité d'eau qui arrive sur ses terres tableau III.
agricoles, permettant d'obtenir de bonnes récoltes et L'arrivée de quelques tonnes de ces éléments sur les
de minimiser les dommages. Ruissellement alors rizières apporte donc des quantités minérales non
n'est pas synonyme de perte, comme on le signale négligeables et permet, après un délai de stéri-
dans la littérature. En conséquence, l'attitude de lisation, de redonner une certaine productivité aux
l'agriculteur est dictée par son désir de réunir les terrains.
facteurs nécessaires pour produire la quantité
maximale; et pour y parvenir il peut chercher à Pour compléter cette analyse, on peut signaler que
augmenter ou réduire le taux de ruissellement. La les eaux de drainage s'enrichissent en éléments
seconde attitude est celle du technicien ou du minéraux, surtout en potassium, lorsque le couvert
consommateur d'eau qui cherche plutôt la régularité est supprimé (tableau IV). Mais on ne sait si cet
du débit. Ces deux points de vue peuvent entrer en enrichissement profite à la rizière ou pas.
contradiction et nous pensons que c'est le cas sur les
hautes terres. Le problème se pose différemment là
Tableau II. Quantités d'éléments enlevées par l'érosion.
où un système d'aménagement hydraulique existe.
Eaux de ruissellement Dépôts lourds
Le transfert de matières suit de près l'évolution de ce (kg ha- 1) (kg ha- 1)
transfert liquide. En effet, l'érosion des versants va de P2 0 S 5,5 8,8
pair avec un processus de déposition dans les parties
Matière organique 210,0 820,0
basses du relief. L'érosion concerne en .gros deux
unités relativement fertiles du profil pédologique : la CaO 8,8 30,0
Tableau IV. Pluviométrie et drainage cumulés sur quatre années. Pertes minérales par lixiviation cumulée.
Quoi qu'il en soit, tout feu produit des cendres. Que De cette façon, le paysage se structure et on peut
deviennent-elles? déjà entrevoir des actions spécifiques pour chacune
des unités. Et, dans chaque cas, il convient de faire
Faute d'étude approfondie, on peut dire que leur sort exactement la part des formes de dégradation qui
est incertain. Après passage du feu, le vent les menacent le milieu:
emporte plus loin. Puis arrive la pluie, qui finit de
nettoyer le terrain. RAISON (1984) avance que, - dégradation physique: érosion;
lorsque la combustion du matériel végétal est - dégradation chimique: lixiviation, exportation
complète, pratiquement tous les éléments C, H, 0, minérale;
N, S et P partent dans l'air, alors que les éléments - dégradation biologique: disparition d'espèces
cationiques à l'exception du calcium deviennent végétales;
solubles. Il ajoute que les cendres des couvertures
-dégradation hydrologique: mauvais bilan de l'eau.
graminéennes peuvent être insuffisantes pour
provoquer une modification détectable des éléments Une stratégie pernettant d'assurer une conservation
assimilables du sol. des sols et des eaux efficace est soumise à plusieurs
impératifs.
• Accroître la production sur les terres les plus
favorables surtout les bas-fonds. Il s'agit d'intensifier
les travaux de drainage et d'irrigation, d'améliorer et
Discussion
d'entretenir la fertilité des sols, d'introduire des
variétés plus performantes. Dans ce sens, la
Un bilan succinct de ces divers phénomènes dans les
conservation des sols et des eaux sur certaines parties
écosystèmes de tanety et rizières peut être établi
hautes revêt un caractère primordial; mais en
(tableau VII).
portant attention aux relations plaine-tanety pour ne
Nous n'avons nullement l'intention de justifier à tout pas aboutir aux résultats inverses de ce qu'on
prix les pratiques paysannes; nous avons cherché cherche. Il serait également envisageable de mettre
surtout à établir des bases pour planifier et déve- au point d'autres systèmes de riziculture, pour
lopper une meilleure gestion des terres. réduire les exigences hydrauliques du repiquage (par
exemple les techniques « gogorancah li et « walik
Nous avons vu que les agriculteurs appliquent des jerami li mises au point par l'IRRI aux Philippines).
techniques de gestion de leur environnement qui
diffèrent de celles préconisées par les techniciens.
Ces derniers appliquent le principe de la gestion in
situ des facteurs (sol, eau, végétation), alors que les Tableau VII. Bilan et devenir des écosystèmes.
paysans recherchent pl utÔt la concentration des
Tanety Rizières
produits sur les terrains mis en valeur. La conclusion
Appauvrissement par: Appauvrissement par:
est vite tirée par le technicien que le paysan détruit
son environnement, mais il lui arrive rarement de - exportation des cultures -drainage
s'apercevoir qu'il détruit la base économique de -brûlis - exportation des cultures
l'agriculteur. En préconisant des dispositifs d'in- - ruissellement -pâturage
filtration, par exemple, on cherche à transformer un
- récolte de litière
écoulement rapide de surface en écoulement lent de (sorokahitralsoropako)
nappe. Le paysan recherche le contraire, en aug-
Enrichissement par: Enrichissement par:
mentant le ruissellement. Ceci implique qu'il faut
trouver des alternatives qui permettent de s'affranchir - remontée des réserves -érosion
des contraintes majeures de l'aménagement - apport de cendres
traditionnel. Dans cette optique, il y a lieu de valo- - pâturage
riser la vision que les agriculteurs ont de leur milieu.
- apport d'éléments fins
Concrètement, ils distinguent: -fumier
• Prendre en compte les atouts de la région, à savoir Les modifications dans la gestion du milieu qu'en-
les vastes étendues de terre, la pluviométrie suffi- traîne cette réorientation de l'agriculture peuvent
sante pour de bonnes productions et une population être énormes.
industrieuse. Ce potentiel pourrait trouver son
Tout d'abord, les cultures maraîchères font une
expression à travers les diverses cultures pérennes à
grosse consommation de fumier. Pour pouvoir
but industriel et/ou commercial.
satisfaire cette nouvelle demande, la population
• Renforcer les communautés et organisations donne une place plus importante à la biomasse
locales et régionales afin qu'elles soient capables de graminéenne des tanety. Il est plus facile de leur faire
prendre en main leur destinée et envisager leur admettre l'idée d'une mise en défens. Et ce point de
développement dans la bonne utilisation des vue est encore accentué lorsque des gens qui ne
ressources. Assurer aussi un appui institutionnel possèdent pas de bétail se mettent à fabriquer du
suffisant. En effet, pour conserver efficacement les compost.
sols, il faut plus que des techniques.
Il faut également noter la concurrence qui s'établit
Des exemples de réussite dans l'application d'une entre les rizières, lieu d'utilisation préférentielle du
telle stratégie peuvent être donnés. Certains villages fumier auparavant, et les terrasses maraîchères,
de Fianarantsoa, encadrés par le projet Lovasoa, ont nouveau pôle d'utilisation. On craint que l'attrait de
mis en place des associations très actives dans la spéculation commerciale ne nuise fortement à la
l'aménagement local des terres de collines et de production de la nourriture de base. La même
rizières. De même, l'IREDEC, une ONG d'Antsirabe, remarque peut être faite au sujet de l'utilisation de
a réussi à promouvoir le compostage de telle sorte l'eau.
que les gens ont admis d'eux-mêmes l'absurdité des
Le maraîchage demande de l'eau et les paysans ont
feux de brousse qui détruisent les ressources
étendu les aménagements dans l'espoir de planter
nécessaires pour le compost.
davantage d'oignons. Seulement, l'eau d'irrigation,
Pour le développement et la conservation des hautes résultat d'un mode de gestion des écosystèmes, est
terres, on peut prendre comme point de départ le insuffisante et les terrasses sont sous-utilisées. On
système de transfert de fertilité abordé précé- constate ainsi qu'à Avaratrambolo on a atteint la
demment, ainsi que les divers procédés de gestion de limite de l'utilisation de la ressource essentielle
l'eau. Le point le plus urgent à court terme est de qu'est l'eau. Si la population désire maintenir l'ex-
rendre les rizières plus productives, soit en assurant tension de la culture maraîchère, elle devra s'or-
l'irrigation, soit en relevant la fertilité, ou les deux. ganiser pour réaliser des travaux de conservation
Ceci ressort de la priorité tenue par la riziculture, qui dans les sites appropriés.
devient la clé d'une gestion de l'environnement dans
D'autres propositions pourraient être faites dans le
sa total ité. Dans son approche, le projet le Terre
contexte de cette nouvelle agriculture. Puisque les
tanety » lie intimement la mise en défens ou
gens désirent produire le plus de fumier possible, on
l'aménagement des tanety à la production de fumure
pourrait envisager avec eux des possibilités de
organique, elle-même liée à la productivité des
stabulation permanente, donc de production
rizières. De même, l'amélioration du bilan hydrique
fourragère aux fins d'affouragement. Et progres-
par des infrastructures physiques de collecte d'eau
sivement, s'orienter vers l'aménagement de tout
de ruissellement, sans risque d'érosion, est une étape
l'espace rural.
vers la satisfaction des besoins en irrigation. Ce n'est
qu'une fois ces étapes franchies qu'on pourra, à
moyen et long terme, vraiment remodeler le paysage
en vue d'une utilisation intensive. Conclusion
Pour mieux réussir dans les travaux d'aménagement
de l'espace rural, une bonne compréhension de la
L'évolution récente des écosystèmes gestion traditionnelle des ressources s'impose. Dans
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le cadre de nos travaux sur les hautes terres, nous
L'agriculture traditionnelle était presque totalement avons constaté que le transfert de fertilité dans les
orientée vers la subsistance. Dans certains endroits, écosystèmes est une réalité vécue, qui permet aux
les paysans s'engagent maintenant dans des riziculteurs de maintenir un certain niveau de
spéculations commerciales. On connaît les cultures production. Les observations effectuées ont permis
de pomme de terre d'Ambohimiadana, de carotte de faire ressortir l'importance du processus de
d'Ambohibary Sambaina. Avaratrambolo s'est concentration de fertilité sur les terrains les plus
spécialisée, il y a quelques années, dans la culture de propices. Mais on a vu aussi qu'il y a des limites à
l'ail et de l'oignon. l'application de cette gestion.
}.L. RAKOrOMANANA
Passer à l'étape suivante devient une nécessité. IRAM. Etude pédologique de la plaine de Tananarive.
Disposant des connaissances de base, il est possible Document nO 107.
d'établir des priorités dans les interventions, en
fonction des besoins des agriculteurs eux-mêmes. KHOUMA M., 1990. Matière organique et travail du sol.
Ces besoins engendrent des demandes, et les Action en cours et perspectives au Sénégal. In : Compte
demandes favorisent les innovations technologiques. rendu 3 e séminaire régional sur le développement des
terres et la gestion des sols acides en Afrique. ISBRAM.
FUJISAKA S., 1990. Rainfed lowland rice : burliding SARRAILH J.M., RAKOTOMANANA J.L. Bassins versants
research on farmer practice and technical knowledge. de Peri net. Résultats et interprétation de douze années
Agric., Ecosyst. Environ., 33. d'études. DFRP (Document nO 431).
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
C. POISSON 1, N. AHMADI2
d'Ivoire. Enfin, depuis 1983, outre la poursuite des Parmi les maladies, la pyriculariose reste la plus
travaux sur la riziculture pluviale, la création varié- grave de par les dégats qu'elle peut provoquer,
tale a surtout été orientée vers la riziculture irriguée notamment dans le cas d'une alimentation hydrique
d'altitude à Madagascar (base à Antsirabe- déficitaire, mais la panachure jaune du riz, dont des
Vinaninony), la riziculture inondée sans aména- foyers importants ont été identifiés récemment au
gements coûteux en Afrique de l'Ouest (Sikasso, Togo, au Mali, au Burkina Faso, en Côte-d'Ivoire, en
Mali) et la riziculture irriguée intensive en Guyane Guinée et à Madagascar, est la plus préoccupante
(Mana). pour toutes les formes de riziculture aquatique.
Objectifs et méthodes de travail ont été fixés en
fonction des contraintes identifiées dans les diffé- Riziculture ~rriguée
rentes formes de riziculture pratiquées.
C'est la forme la plus intensive de riziculture, où la
maîtrise de l'eau permet, avec l'utilisation de variétés
produdives et d'intrants en rapport, d'accéder à des
Contraintes niveaux élevés de rendement. Ce type de riziculture,
aujourd'hui très répandu de par le monde et en
Riziculture il"!0ndée et de nappe particulier en Asie, a connu en Afrique un dévelop-
L'aléa hydrologique, dû à la grande variabilité de pement important au cours des années 70. Mais les
l'inondation dans le temps et dans l'espace, constitue coûts des aménagements ont aujourd'hui atteint des
la contrainte la plus importante pour l'intensification niveaux tels qu'ils fragilisent la rentabilité des péri-
de la riziculture inondée. Les alternances de situa- mètres irrigués.
tions exondées et inondées entraînent souvent chez Hormis l'aléa hydrologique, on retrouve dans cette
le riz des désordres physiologiques et pathologiques forme de riziculture les mêmes contraintes physiques
préjudiciables à une bonne croissance de la plante. et biologiques qu'en riziculture inondée, avec
L'irrégularité du régime hydrologique des bas-fonds toutefois un accent particulier sur la pression souvent
ne permet pas toujours d'optimiser le calage des forte des insedes parasites du riz. Les foreurs de tiges
cycles végétatifs du riz, d'où un choix difficile des (Maliarpha separatella, Chi/o sp.> peuvent être
dates de semis et des variétés. responsables de pertes de rendement de 20 à 30 %,
En l'absence de dispositifs ou d'aménagements mais Orseolia oryzivora reste l'insede le plus dan-
permettant la régularisation des crues, la hauteur de gereux, ses attaques ayant anéanti des récoltes
la lame d'eau et la durée de son maintien sont d'au- entières, en particulier dans le sud du Burkina Faso et
tant plus contraignantes qu'elles sont importantes et du Mali.
que le riz est au stade jeune et peu développé. Dans les zones sahéliennes ou de latitude élevée, les
L'installation irrégulière du régime des pluies, froids nOdurnes durant la saison sèche représentent
particulièrement en début de cycle avant l'appui ou une contrainte importante pour la pratique de la
le relais, pour l'alimentation hydrique, d'une nappe double culture.
proche ou d'une lame d'eau permanente, pénalise Mais c'est surtout en zone tropicale d'altitude que le
également une bonne croissance du riz. froid est le plus contraignant pour la riziculture
La baisse de fertilité des sols, bien que moins impor- irriguée de saison, associé à une pression parti-
tante qu'en riziculture pluviale, se retrouve souvent culièrement forte, dans cette écologie, de maladies
en bordure des bas-fonds où l'on pratique une badériennes comme Pseudomonas fuscovaginae.
riziculture de nappe, ainsi que dans les sols de bas-
fond les plus perméables, où un lessivage excessif
diminue l'efficacité de l'azote.
Objectifs et méthodes
La toxicité du fer est également très fréquente dans
ces milieux hydromorphes où l'absence de maîtrise Pour identifier un matériel végétal à la fois adapté
de l'eau ne permet pas d'effectuer des drainages aux contraintes des divers types de riziculture
périodiques pour oxyder la forme ferreuse du fer plus inondée et conforme aux exigences des producteurs,
soluble et plus toxique pour la plante que la forme riziers et consommateurs, les sélectionneurs de
ferrique. Le milieu réducteur favorise également l'IRAT, en association avec leurs partenaires, ont
d'autres toxicités en fondion de la richesse du sol en élaboré des méthodes qui ont évolué dans le temps
certains composants soufrés notamment. pour aboutir à des stratégies visant une exploitation
raisonnée de la variabilité génétique du riz.
Parmi les contraintes biologiques, l'enherbement,
important dans ce milieu pseudo-aquatique, dissuade C'est ainsi que de nombreuses adions ont été entre-
souvent le paysan de mener une culture intensive. prises pour rassembler la variabilité génétique exis-
C. POISSON, N. AHMADI
tante, pour créer une variabilité nouvelle et pour pour élargir la variabilité génétique afin de l'exploiter
apprécier cette variabilité en vue de son utilisation. à bon escient.
C'est à Madagascar que le plus grand nombre de
croisements a été réalisé pour la riziculture
Rassemblement de la variabilité génétique aquatique (période 1960-1977) en travai Il ant
Ce rassemblement a été .réalisé par de nombreuses essentiellement au sein du groupe indica. La
introductions en provenance de différents continents recherche de variétés à paille courte, plus adaptées à
et tout particulièrement d'Asie et d'Afrique, et par une riziculture aquatique intensive, a constitué un
des séries de prospections organisées en Afrique de des objectifs de sélection du moment. L'utilisation du
l'Ouest. gène de demi-nanisme n'ayant abouti que rarement
à l'obtention de variétés performantes, la méthode
Au Sénégal, en Casamance, les premières pros- visant à rechercher des transgressions pour la taille
pections, qui remontent à 1959, ont permis d'en-
courte parmi les descendants des croisements ou
treprendre aussitOt un travail d'évaluation basé sur
parents génétiquement éloignés a souvent été
plus de 200 écotypes locaux.
préférée.
Des prospections plus systématiques ont été réalisées En COte-d'Ivoire, les croisements entre groupes
dans les années 70 sur l'ensemble de l'Afrique de
distants et plus particulièrement entre indica et
l'Ouest par l'ORSTOM, l'IRAT et les structures l'ensemble japonica ont d'abord été exploités pour la
nationales de recherche sous l'égide de l'IBPGR. riziculture pluviale mais les retombées d'un tel
A Madagascar, pour la seule zone d'altitude, plus de programme ont rapidement profité à la riziculture
550 écotypes ont été prélevés au cours des inondée, du fait de l'obtention de variétés de type
prospections réalisées conjointement par le FOFIFA, intermédiaire entre la riziculture pluviale et
l'IBPGR, l'IRAT et l'ORSTOM. Parmi ces pros- aquatique. Les travaux ont surtout été orientés vers la
pections, 90 sont encore en observation en recherche de solutions pour minimiser voire
collection testée à Vinaninony (1 800 m d'altitude), supprimer la stérilité initiale observée en F1. Il a été
et comparées au témoin local Latsidahy. ainsi mis en évidence l'intérêt pour les croisements
distants d'utiliser des géniteurs compatibles -
En zone de plateau, les écotypes collectés ont
croisements G3 x G5 ou AUS x G5, groupes
confirmé au fil des ans leur grande valeur puisque
morphophysiologiques définis par JACQUOT et
des variétés comme Makalioka 34 et Rojofotsy 1285
ARNAUD (1979) - ou de restaurer la fertilité après
sont aujourd'hui encore très largement cultivées sur
plusieurs cycles d'autofécondation.
l'île.
Au Mali, pour la riziculture en eau profonde pra- Mutagenèse
tiquée dans le delta du Niger, un accent particulier a
été donné à la collecte des espèces O. glaberrima La mutagenèse n'a été utilisée que très ponc-
cultivées dans ce biotope depuis plusieurs milliers tuellement, pour des actions précises, comme au
d'années. Environ 180 écotypes ont pu être ainsi Sén~al pour l'obtention de variétés à paille courte et
sauvegardés et étudiés sous différents régimes au cycle plus précoce. Dans ce cas, c'est princi-
hydrologiques. palement la voie physique qui a été utilisée (rayons
gamma du cobalt 60), avec la collaboration de
L'enrichissement des ressources génétiques s'est l'INRA (France). Cependant, à Madagascar, la voie
également fait par de nombreuses introductions de chimique, avec l'emploi de méthane sulfonate
variétés régulièrement effectuées d'un pays à un autre d'éthyle sous forme gazeuse, a été préférée pour son
ainsi que par l'intermédiaire des centres inter- efficacité, sa simplicité et pour l'absence d'effets
nationaux de recherche agronomique, et enfin grâce secondaires.
à la conduite de pépinières internationales. Plus de
9500 variétés ont ainsi été introduites en COte-
d'Ivoire, 2500 au Sénégal, 1 500 au Burkina Faso Sélection récurrente
depuis les années 60. Ces prospections et intro- Cette méthode a été introduite récemment en
ductions ont été évaluées et triées au sein de collec- Afrique de l'Ouest, au Mali pour la riziculture irri-
tions de travail. guée, et à Madagascar pour la riziculture d'altitude,
après sa mise au point au Brésil pour le riz (J. TAIL-
Création de variabilité génétique LEBOIS). Par alternance de phases de recombinaison
et de sélection au sein d'une population, ce type de
Croisements intra-sativa
sélection permet d'augmenter la fréquence des
Les croisements intra-sativa ont été le moyen le plus gènes favorables pour un ou des caractères poly-
largement utilisé par les sélectionneurs de l'IRAT géniques.
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
A Madagascar, la population a été constituée par 13 riziculture inondée, fait actuellement l'objet d'une
variétés locales de type japonica adaptées aux zones recherche particulière.
d'altitude, introduites au sein d'une population
D'autres actions sont actuellement en cours au
étrangère japonica du Brésil porteuse d'un gène de
centre de Montpellier, dont le transfert de gènes
stérilité mâle. L'objectif de ce type de sélection vise
agronomiquement intéressants.
l'obtention d'un matériel végétal performant stable et
plus tolérant à Pseudomonas fuscovaginae que les
populations Latsika locales. Les cycles d'inter-
croisement seront achevés en 1991 et la sélection
Analyse de la variabilité génétique
créatrice pourra débuter pour la zone d'altitude dès La connaissance du génome des variétés que l'on
1992. utilise, l'estimation de la variabilité exploitable, la
connaissance du déterminisme génétique des
Au Mali, c'est une population étrangère indica, créée
principaux caractères à sélectionner, l'appréciation
également al:J Brésil, qui a été utilisée comme source
de l'aptitude à la combinaison des géniteurs pour un
de stérilité mâle, et des variétés indica locales et
ou plusieurs caractères permettent une exploitation
introduites bien adaptées à la région sud, comme
raisonnée des ressources génétiques et favorisent
variétés fondatrices de la population. II s'agit
l'obtention au moindre coût de variétés ajustées aux
d'obtenir par cette voie des variétés performantes
idéotypes préalablement fixés.
avec une bonne résistance à la submersion au stade
jeune. Une telle démarche a été suivie par les équipes
IRAT de sélection.
Pour des conditions intermédiaires de riziculture,
entre les formes pluviale et aquatique, une autre
population a été créée, également au Mali, avec du Analyse morphophysiologique
matériel japonica et indica. Réalisée par JACQUOT et ARNAUD (1979) et pratiquée
sur des caractères très divers, cette analyse fournit
Hybrides Fl une classification utile pour le sélectionneur, en
particulier pour l'ensemble japonica. Quatre grands
La maîtrise complète de l'eau en riziculture de bas- groupes ont été définis parmi O. sativa dont trois
fond peut autoriser un haut niveau d'intensification pour l'ensemble japonica (G2, G3, G4), avec des
et justifier le recours à des variétés hybrides F1. Un sous-groupes et des groupes spéciaux. Une déter-
programme a été initié dans ce sens avec du matériel mination grossière mais calculée automa-tiquement
indica à partir de la base IRAT en Guyane. Le au moyen d'un logiciel de gestion des collections riz,
cytoplasme WA inducteur de stérilité mâle a été créé au ClRAD, est en cours de développement.
utilisé pour ce type de matériel. S'il a été aisé de
trouver des variétés restauratrices, il a été plus délicat
d'identifier le matériel mainteneur, toujours très rare Analyse isozymique
chez le riz de type indica. Néanmoins, les premiers Cette technique a permis de traduire un poly-
hybrides ont été obtenus et la production semencière morphisme génétique que l'on ne pouvait atteindre
en vraie grandeur est actuellement en test à Mana en par des méthodes biométriques et d'évaluer les
Guyane pour évaluer les coûts de production. distances génétiqu~s entre les groupes mis en
évidence (GLASZMANN 1982 ; SEGOND, 1982). Six
Biotechnologies groupes enzymatiques ont pu être ainsi déterminés
sur la base du polymorphisme génétique de 15 loci.
Le recours à l'androgenèse pour fixer plus rapi-
dement les lignées est aujourd'hui pratiqué de façon La connaissance de l'appartenance des géniteurs à
routinière par l'ensemble des équipes de sélection de l'un des groupes enzymatiques vient en complément
l'IRAT ainsi que par les équipes nationales d'Afrique de leur évaluation morphologique et agronomique.
de l'Ouest associées au sein du programme de Cet ensemble représente une base rationnelle pour le
sélection régionale CORAF, commun sur huit pays. choix des stratégies d'hybridation. La classification
enzymatique concordant avec divers autres schémas
Cette technique, qui a nécessité de nombreux permet de prévoir, dans une large mesure, le com-
travaux de mise au point sur la composition des portement des géniteurs dans un programme d'amé-
milieux de culture, et les facteurs physiques influant lioration variétale. C'est ainsi que la diversité des ori-
sur les différentes phases, présente aujourd'hui un gines des géniteurs contribue à augmenter la proba-
gain de temps de deux à trois années par rapport aux bilité d'apparition de recombinants originaux et inté-
méthodes classiques. L'amélioration de son ren- ressants. L'effectif des populations à cribler et l'inten-
dement, en particulier pour les croisements japonica sité de sélection à exercer sont variables en fonction
x indica très utilisés pour l'amélioration variétale en de l'éloignement génétique des géniteurs. Cet outil a
C. POISSON, N. AHMADI
été particulièrement utile pour l'élaboration et la d'inondations et d'exondations. Les chances pour
gestion des croisements indica x japonica. obtenir des variétés à large adaptabilité sont ainsi
accrues (coopération ClRAD-CORAF).
Environ 4 000 variétés et lignées ont déjà été clas-
sées, dont plus d'un millier à la demande des sélec- Quant à l'évaluation agronomique des variétés
tionneurs d'Afrique de l'Ouest. nouvelles créées, les dispositifs ont été variables d'un
pays à un autre. Un dispositif commun, conçu pour
mieux apprécier la nature et l'intensité des maladies
Analyses diallèles
et identifier avec plus de sûreté les variétés résis- .
Le choix des géniteurs peut être également orienté tantes, est en cours de développement en Afrique de
par la connaissance des modalités de transmission l'Ouest (coopération CIRAD-CORAF).
des caractères et des qualités individuelles. Des
travaux ont été réalisés dans ce domaine en Côte- Les pépinières internationales du type INGER-Africa
d'Ivoire, en particulier sur le déterminisme génétique complètent avantageusement ce dispositif en offrant
de la longueur du grain, de l'égrenage, de l'ouverture une grande diversité d'environnements aux lignées et
des glumelles, de la translucidité du gfain (CLEMENT et aux variétés à tester (essais ARLRESS, ARYMVESS,
POISSON, 1984, 1986). AIRPSS.. J
système intensif pratiqué dans ce type de riziculture; Parmi les variétés introduites, la variété Chianan 8,
c'est le cas notamment des variétés IRAT 312, IRAT connue à Madagascar par son numéro d'introduction
332, 1RAT 333, toutes issues du croisement 1RAT 177 (1632), a connu une large diffusion. Elle est au-
x Apura, qui possèdent, en outre, un format de grain jourd'hui cultivée sur plusieurs dizaines de milliers
très long et fi n. d'hectares. Plus récemment et toujours depuis la sta-
tion du lac Alaotra, deux variétés introduites, 2787
Citons également l'intérêt des variétés pl uviales (B54/BKN/112/2) et 2798 (Tché Kouaï), se sont révé-
améliorées à cycle court pour ce type de riziculture. lées plus intéressantes que la variété locale Maka-
Au Cameroun, dans la région du sud-est du Bénoué, Iioka 34 pour leur capacité de tallage, leur cycle plus
s'est développée depuis 1975 une riziculture inten- court et surtout leur tolérance à des repiquages
sive sur nappe, sur des sols hydromorphes de bas de tardifs, qui pe~mettent une plus grande souplesse du
pente, avec des variétés pluviales comme IRAT 133, calendrier cultural.
IRAT 110 et IRAT 112.
En conditions de haute altitude, les travaux de créa-
Autre résultat au crédit de la recherche: l'iden- tion variétale sont encore trop récents pour proposer
tification et la diffusion dans les années 60-70, au des variétés nouvelles pour ce biotope. II a été mis
Burkina Faso (Haute-Volta à l'époque), de la variété toutefois en évidence que, en année climatique
locale Fossa, remarquablement bien adaptée à la favorable, les types intermédiaires japonica/indica
riziculture de nappe dans un système faiblement avaient d'excellents rendements, supérieurs à ceux
intensif. des témoins locaux. Par contre, en année sélective,
seuls les types japonica maintiennent des rende-
ments comparables à ceux des' témoins, ce qui a
Riziculture inondée ou irriguée permis de mieux orienter les travaux de sélection.
Dans l'immédiat, compte tenu de leur stabilité de
Pour ce type de riziculture pratiqué le plus commu- rendement et de leur niveau de production, les
nément dans les bas-fonds, les premiers résultats ont variétés locales latsidahy et latsibavy ont été propo-
été obtenus en Casamance, au Sénégal, avec l'obten- sées à la diffusion.
tion des variétés 1RAT 6 et IRAT 7, plus connues sous
le nom de DJ 346D et DJ 684D. li s'agit de variétés à En Côte-d'Ivoire, les variétés créées dans le cadre de
cycle court (115 à 120 jours) et à paille courte, adap- la sélection régionale, IRAT 308 ((DSA 29), IRAT 309
tées à une riziculture intensive. Si les créations varié- ((DSA 30), IRAT 31 0 ((DSA 31), IRAT 311 ((DSA 32),
tales obtenues à Richard-TolI, dans la vallée du fleuve se sont révélées bien adaptées à une riziculture de
Sénégal, également au cours de la décennie 1960- bas-fond à régime hydrique fluctuant. le parent
1970 comme H 821-3, étaient surtout destinées à la japonica ((RAT 104) de ces variétés devrait leur
riziculture irriguée mécanisée, un certain nombre de apporter une meilleure tolérance aux maladies
variétés introduites connurent un grand succès en cryptogamiques et en particulier à la pyriculariose,
riziculture de bas-fond dans toute l'Afrique de notamment lorsque les conditions hydriques sont
l'Ouest. Il s'agit notamment de D 52/37 ou D 9/9, limitantes. le Togo et le Bénin ont, pour leur part,
originaires de Guyane britannique, variétés à paille nommé des variétés nouvelles parmi d'autres
longue et convenant pour un système de riziculture descendances de ces mêmes croisements exploités
faiblement intensif, ou même de SR 26B, originaire dans le cadre du programme commun coopération
d'Inde. D 52/37 connaît aujourd'hui un nouveau de sélection régionale CORAF-CIRAD.
développement en Afrique de l'Est.
L'aménagement permettant d'avoir le contrôle parfait ainsi que leur héritabilité, afin d'orienter en consé-
de l'eau est une des formes d'intensification de ce quence les stratégies de sélection.
type de riziculture. Lorsque le site autorise un
La qualité du riz, et tout particulièrement sa qualité
aménagement quaternaire à coat raisonnable ou que
culinaire, est un aspect qui devra être pris en compte
le paysan peut être associé à sa réalisation, c'est une
dans tout programme d'amélioration variétale, ce qui
voie recommandable pour accroître la production et
renforce l'idée de la nécessaire pluridisciplinarité
le revenu du producteur. Variétés hautement produc-
pour aborder une telle problématique.
tives, techniques culturales, fumures sont aujourd'hui
disponibles.
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De manière à comprendre les bases physiologiques requièrent moins de travail qu'avec les autres
des réponses de la plante à la sécheresse, et pour techniques. Deux inconvénients: la technique est
développer des variétés adaptées aux environ- coûteuse et la longueur des racines dans les sols peu
nements soumis à la sécheresse, nous définirons la profonds est sous-estimée. Quant à l'évaluation des
résistance à la sécheresse comme le potentiel d'une racines en matière de réponse à la sécheresse, le
culture à optimiser son rendement sous des second inconvénient est relativement minime
conditions d'alimentation hydrique limitées. En attendu que les racines profondes sont bien plus
outre, nous identifions cinq composantes de la importantes que les superficielles.
résistance de la sécheresse: la tolérance, ou capacité
de continuer à croître et à se développer sous des
conditions de déficit en eau des tissus; l'esquive, ou Croissance racinaire
capacité de compléter le cycle pendant des périodes et établissement de la culture
où l'apport en eau est satisfaisant; la préservation de
l'eau, ou capacité de survivre à une sécheresse en Une étude en riziculture de submersion a été
limitant la consommation en eau pour éviter un conduite à l'IRRI pendant la saison sèche de 1990,
déficit en eau des tissus; le captage de l'eau, ou dans le but d'évaluer la croissance racinaire de
capacité à maximiser l'usage de l'eau disponible quatre variétés de riz en semis direct sur sol humide
dans l'environnement; le recouvrement, ou capacité et en repiquage. Dans tous les cas, la longueur totale
à reprendre la croissance après la sécheresse. des racines a présenté la même tendance (observée à
une profondeur de 70 cm dans des minirhizotrons in
Des recherches récentes à l'IRRI portant sur la situ) : la longueur totale des racines (LTR) a augmenté
résistance à la sécheresse du riz de submersion ont jusqu'à environ 10 jours après l'initiation pani-
mis en évidence l'importance de deux caractères: la culaire, a ensuite diminué jusqu'à environ 10 jours
croissance et la distribution des racines; l'accu- après la floraison, a réaugmenté jusqu'à la récolte et
mulation et la redistribution des hydrates de carbone a enfin graduellement diminué au cours de la
non structuraux en relation avec la tolérance à la croissance des plantes après récolte.
sécheresse au cours de la montaison. Nous nous
proposons de décrire la façon dont ces deux carac- La LTR du riz repiqué a été significativement plus
tères contribuent à maximiser le rendement en importante que celle du semis direct en sol humide à
conditions de déficit hydrique du riz. 30 jours après semis ou repiquage, mais la LTR du
semis direct a ensuite rapidement surpassé celle du
repiquage et a atteint une fois et demi celle du riz
repiqué: à l'initiation paniculaire, à la floraison et à
Croissance la récolte (figure 1 a). La pl us grande LTR en semis
et développement racinaire direct, comparée à celle du riz repiqué, a été obser-
vée à tous les niveaux de profondeur du sol, mais a
été significativement supérieure seulement entre les
Méthodes d'observation des racines
profondeurs 10 et 20 cm (figure 2 a). Cette différence
Les racines ont été observées par échantillonnage de dans la croissance racinaire explique très proba-
sols ou de fractions de sols, par étude de profils de blement les rendements en semis direct en sol
sols, en culture aéroponique ou hydroponique, en humide plus élevés q~e ceux obtenus en repiquage
pots, ou encore par prélèvements racinaires. Cha- en conditions de déficit hydrique ORRI, 1988).
cune de ces méthodes présente certains désavan-
tages. Les observations au champ requièrent beau-
coup de travail, sont destructives et conduisent à des Croissance racinaire de diverses variétés
résultats très variables. Les cultures aéroponiques ou
Dans cette étude portant sur le développement
hydroponiques ou encore en pots sont conduites
racinaire en relation avec les techniques de culture,
dans des conditions tellement peu réalistes que les
plusieurs variétés ont été observées, celles-ci étant de
comportements des plantes dans ces conditions ne
même cycle. Toutes ces variétés ont eu des crois-
correspondent pas du tout à ceux qui existent au
sances racinaires semblables au cours de la saison
champ.
(figure 1 b) et à travers le profil de sol (figure 2 b)' Il
Une technique relativement récente est le minirhi- n'y a pas eu de différence significative dans les
zotron, tube de plastique transparent installé dans un interactions entre variétés et méthodes de culture
champ. Une micro-caméra vidéo est placée dans le pour les LTR et les rendements (tableau 1). Binato,
tube pour pouvoir observer les racines. Le minirhi- variété traditionnelle des Philippines, a présenté la
zotron n'est pas destructif, les observations peuvent plus grande LTR à toutes les dates et à toutes les
donc être répétées, les racines sont observées dans profondeurs de sol pour lesquelles les différences
des conditions naturelles et les échantillonnages entre variétés ont été significatives.
K.T.INGRAM, MA ARRAUDEAU, FA BUENO, E.B. YAMBAO, G.S. CHATURVEDI
40 ~---------------___,
o IR46 Tableau 1. Rendement (t ha-') en grain du riz en semis
b
• IR20 direct en sol humide et en repiquage. IRRI.
30 .f!, IR72 Saison sèche 1990.
o Sinato Cultivar Semis direct Repiquage Moyenne
20 IR46 4,9 4,5 4,7
IR20 4,5 3,7 4,1
10 IR72 5,6 4,0 4,8
r /'0
60 , . - - - - - - - - - - - - - - - ,
4
Durée du stress
2 50 • 5j
o 10j
o 0 ~ 15j
L.......<"""""'=...l_ _----'-_ _----'-_ _---'-_ _---'--' 40
10 30 50 70 90 110
Jours après semis
30
Figure 3. Transpiration cumulée (T) au cours d'un déficit
hydrique pour IR64, sous bonne alimentation en eau
(témoin) et des conditions de stress hydrique à divers 20
stades de croissance. IP =initiation paniculaire ; ~
F = floraison. y =47,40 -4.35X
10
r 2 =0.72** n:: 20
De manière surprenante, la régression pour la
0'-----'---'------'----'--------'--'--.1....----'-----'
relation entre le rendement en grain et la diminution o 23456789
de la transpiration cumulée causée par le stress ~ (Tc-Ts) (kg/plante)
hydrique ne change pas selon le stade de croissance
Figure 4. Relation entre la différence cumulée
pour IR64 (figure 4). Il en a été conclu que la
de la transpiration journalière pour le témoin
sensibilité au déficit hydrique ne change pas avec le
et les plantes stressées avec le rendement en grain
stade de croissance, même si le rendement est pour IR64 stressé pendant des durées diverses
largement réduit par un déficit hydrique aù cours de et à divers stades de croissance.
la floraison. 1\ s'agit plutôt d'une plus grande
demande en transpiration, parce que les plantes sont
plus développées au moment de la floraison qu'à Des études au champ ont montré des différences
tout autre stade du développement. Ainsi, une plus significatives entre divers génotypes de riz quant à
grande propension à une réduction du rendement leur aptitude à accumuler les NC dans les tissus
causée par un déficit hydrique à la floraison résulte végétatifs (et particulièrement dans les chaumes) et
d'un développement plus rapide et plus intense du ultérieurement à les remobiliser (CHATURVEDI et
stress, et non d'une plus grande sensibilité au stress. INGRAM, 1989>' Fait encore plus important, une
translocation apparente des NC des tissus végétatifs
vers les panicules en réponse à un stress hydrique au
Résistance à la sécheresse cours de l'émergence des panicules est fortement
à l'émergence de la panicule liée au nombre de grains pleins et au rendement pour
Bien que IR64 semble être sensible à un stress des génotypes pluviaux et de submersion (figure 5
hydrique, les pertes de rendement ne sont pas les et tableau 11).
mêmes selon le stade de croissance lors de l'ap-
parition du stress. Les résultats portant sur les diffé- Criblage des variétés
rences dans la résistance à un déficit hydrique au
pour la résistance à la sécheresse
cours de l'émergence de la panicule sont nombreux.
La résistance à un déficit hydrique au cours de la lors de l'émergence des panicules
montaison a été montrée comme étant liée à la Bien que l'on ait développé plusieurs méthodes et
déhiscence des anthères et à l'émission de pollen, techniques de criblage pour la résistance à la
ainsi qu'à l'élongation du chaume (EKANAYAKE, 1986), sécheresse au cours des stades végétatifs (par
parmi d'autres caractères. exemple, INGRAM et al., 1990), les succès ont été
K. T. INGRAM, MA ARRAUDEAU, FA BUENO, E.B. yAMBAO, G.S. CHATURVEDI
moindres pour un criblage lors de l'émergence des l'effet a été semblable à celui causé par un déficit
panicules. En raison du fait que les variétés fleu- hydrique quant au remplissage des grains et au
rissent à des époques différentes, il est difficile rendement (figure 6). Une défoliation induite par
d'imposer un stress identique lors de l'émergence application d'un dessiccant semble être une
des panicules. Même les essais de criblage à la méthode efficace de criblage pour l'aptitude à
sécheresse à ce stade en utilisant des dates de semis l'accumulation et à la translocation des Ne.
multiples n'ont conduit qu'à peu de résultats ORRI, L'application d'un dessiccant peut être faite variété
1987).
par variété et être une méthode pour l'étude de
l'accumulation et de la remobilisation des NC,
même en conditions de bonne irrigation. Malheu-
Rendement groin (g/p1ante) reusement, il-est parfois difficile d'obtenir une
20r------------------,
dessiccation uniforme au champ et le dessiccant
Riz de submersion: nlest pas toujours disponible dans certains pays. Une
Y=2.108 +0.31 X méthode manuelle de défoliation est en cours
15 r=0.894**
0
d'étude pour le criblage de l'aptitude à l'accu-
00 00
mulation et à la remobilisation des NC chez le riz
10 pluvial.
él:1l:1l:1
O'-----------'-------'----------J o 0
20 30 40 50 50
Translocation maxima apparente (%)
o
Figure 5. Relation entre la translocation apparente 40
maximale et le rendement pour des variétés pluviales
et aquatiques. Dans les groupes, les régressions sont
30
basées sur des résultats du traitement ayant la plus o
y =10.975 +0.772 X
grande translocation apparente parmi les variétés. r = 0.87**
20
Tableau Il. Coefficient de corrélation (r) entre le rendement et le pourcentage de grains pleins par pot
et les hydrates de carbone non structuraux (eN) de diverses parties des plantes.
Pluvial Submersion
Tallage Montaison Floraison Tallage Montaison Floraison
Rendement et CN
Limbe 0,02 ns 0,50·· o,ao·· 0,21 ns O,4r· 0,85··
Gaine 0,19 ns 0,51·· 0,82·· 0,20 ns 0,41·· 0,64··
Chaume 0,12 ns 0,45·· o,n·· 0,20 ns 0,26·· 0,52··
Grains pleins et CN
Limbe 0,06 ns 0,42·· 0,76·· 0,23 ns 0,42·· 0,78··
Gaine 0,20 ns 0,48·· 0,73·· 0,20 ns 0,49·· 0,51··
Chaume 0,31 ns 0,49·· 0,49·· 0,41 ns 0,19 ns 0,46··
•• Significatif à 0,01 %.
Thème IV - Agronomie, amélioration variétale
Méthode
Matériel et méthode Elle comprend trois volets complémentaires qui se
succèdent par étapes dans des écologies-cibles:
Matériel - criblage continuel du matériel existant;
Le matériel utilisé comprend aussi bien des lignées - sélection généalogique et massale des descen-
introduites et des lignées locales sélectionnées que dants de croisements ;
des descendants des croisements effectués dans le - évaluation de la productivité des lignées retenues
cadre du programme. lors du criblage.
X.R. RAKOTONjANAHARY, S. RAVAONORO, j. RAHARINIRINA, B.B. SHAHI, T. MASA}O
- une panicule longue (22 à 25 cm) ; Les sélections locales montrent en général une
meilleure tolérance à la déficience en phosphore du
- une bonne fertilité des épillets (85 à 90 %) ;
sol, particulièrement les lignées Rojomena. Elles sont
- une bonne compacité des grains; moins sensibles à une diminution de croissance et du
- un cycle moyen (170 à 180 jours) ; tallage et possèdent une plus grande capacité de
remplissage des grains. Les Ambalalava et les Tsipala
- un tallage fertile modéré (6 à 8 talles).
en général sont les moins affectées par la réduction
Les lignées retenues sont les suivantes: de hauteur de paille. En revanche, les sélections
locales sont plus tardives par rapport aux lignées
- parmi les introductions: Bin-Yang-Tsao, Chu-
introduites et sont plus sensibles à la verse.
Chen, Le-Go-Thou, Thou-Bir-San, B2982b-SR-62-3-
1-4, B3453F-SR-6-3, Yaejo 55638, Ginmasari 242, De l'analyse des caractères, il ressort que la pro-
Chusei Shinsembon, FR13A, Chianang 2, Chianang ductivité n'est pas corrélée à un tallage total élevé;
242, Kaohsiung 27, IR39534-1-2-2-1, IR15579-135- elle reste même habituellement faible pour les
3, IR15579-24-2, NRl 0073-167-3-1-1, Thou-Go- variétés à tallage fort, telles IR60, IR28150-84-3-3-2,
Shun ; ces quatre dernières se sont montrées les plus Tilokkachari 8321, à cause d'une stérilité pani-
productives; culaire très élevée, de l'ordre de 75 %. Une forte
- parmi les sélections locales: Fotsy Atoandro 44, compétition semble établie entre les différentes
Bozaka 140, Bodofotsy 118, Miandry Bararata 85-1, talles au détriment du remplissage des grains.
Ambalalava 60-2, Latsika 12-1, Rojomena 69-1, Les critères retenus pour la sélection des variétés
Mangakely 72 ; les trois dernières étant les plus sont les suivants (tableaux III et IV) :
productives dans l'évaluation du rendement.
- NRT compris entre 1 et 5 ;
- pourcentage de talles fertiles de l'ordre de 75 à
Sélection pour la tolérance 100 % par rapport au tallage total;
à la déficience en phosphore du sol - tallage total modéré (7 à 9) ;
- stérilité paniculaire faible (10 à 25 %) ;
Dans l'ensemble, les variétés introduites ont mani-
festé une faible tolérance vis-à-vis de la déficience en - hauteur de paille moyenne, de l'ordre de 70 à 100
phosphore du sol ; on note en effet, en l'absence de cm, relativement stable en présence ou en l'absence
phosphore: de ferti Iisation phosphorée;
- une forte réduction de la hauteur de paille; - cycle précoce à moyen : 150 à 180 j ;
- une forte stérilité des épillets; - panicule longue (22-25 cm) bien fournie en grains.
Les lignées retenues sont les suivantes: - MRl 0040: Botohavana 139/B2980B-SR-2-5-2-3-2 ;
- parmi les introductions: Chianang 2, Chianang - MRl 0057 : Molotry Ramadama/B2980B-SR-2-6-2-
242, NRl 0073-167-3-1-1, IRl 5579-135-3, IRl 5579- 3-2 ;
24-2, IR 5929-22-3, IR13540-56-3-2-1, IR20917-B-
- MRl 0073: Mainty Hoditra 241/Chu-Chen;
67, Kaoshiung 27 ;
- MRl 01 55 : Miandry Bararata 85-1/IR36B ;
- parmi les sélections locales: Tsipala 8, Tsima-
moroadala 30, Miandry Bararata 65, Mitrakaha raha - MRl 0176 : Vary Be Farantsa188B3381 F-SR-
hijery 130, Rojomena 48, Rojomena 137-2, Latsika 95-2 ;
112-1, Vary Omby 245. - MRl 0188 : Chianang 8/IR36 ;
- MRl 0208 : Chu-Chen/Bin Yang-Tsao.
Tableau IV. Matrice de corrélation entre cinq variables
dans l'essai préliminaire de la déficience en phosphore
du sol. Saison 1988-1989 à Mah~sy.
X1 X2 X3 X4 X5 Conclusion
X1 1,000 0,400** - 0,204 0,558** - 0,373**
Il est admis qu'il existe une forte hétérogénéité dans
X2 1,000 - 0,021 - 0,272** - 0,168
les parcelles de criblage et d'évaluation des variétés,
X3 1,000 0,165 0,279* tant du point de vue de la toxicité ferreuse et de la
X4 1,000 - 0,386** déficience en phosphore du sol que de celui des
X5 1,000 conditions environnementales (fluctuations du
régime hydrique, microclimats>' Par ailleurs, le
X1 : rendement.
X2 : hauteur. calendrier de mise en place varie d'une année à
X3 : tallage total. l'autre. Cependant, pour la grande majorité des bas-
X4 : tallage fertile. fonds des hautes terres centrales, ces deux con-
X5: cyde.
traintes nutritionnelles. ne sont pas toujours systé-
matiquement présentes à la fois; il existe même des
parcelles privilégiées à bonne maîtrise de l'eau, qui
Complémentarité de caractères conservent une bonne fertilité grâce à une gestion
rationnelle des pratiques culturales et offrent de
D'une manière générale, les lignées introduites meilleures conditions de culture.
retenues ont un cycle plus réduit, un tallage plus fort,
des qualités de grain supérieures (caryopse blanc, Ce programme de sélection variétale représente
grains fins et translucides) et une tolérance plus donc une approche plus approfondie en amé-
grande en face des contraintes rencontrées; cette lioration variétale dans les bas-fonds des hautes
dernière, cependant, n'est pas combinée à une pro- terres centrales et pourrait de ce fait apporter une
ductivité élevée, ni à une adaptation aux conditions modeste contribution à l'augmentation de la
de culture prédominantes. productivité.
La séance de l'après-midi du vendredi 13 décembre a été réservée au quatrième thème du séminaire portant
sur l'agronomie et la sélection variétale.
La première partie de la séance, avec quatre communications, a été consacrée à l'agronomie, notamment
l'apport des éléments fertilisants.
Trois communications sont relatives à des travaux de recherche réalisés à Madagascar et une à des études
effectuées en Côte-d'Ivoire.
Il est à signaler qu'une communication sur la culture de blé sur rizière en contre-saison n'a pas pu être
présentée, l'équipe Fifamanor étant retenue par des obligations professionnelles.
La majorité des travaux rapportés relève de la recherche appliquée, visant à apporter des solutions face à des
contraintes. Ce qui conduit à rappeler les contraintes majeures évoquées, qui peuvent être regroupées autour
de trois thèmes:
- pour la maîtrise de l'eau, deux points sont mentionnés: l'éventuelle alternance d'assecs et d'inondations,
puis la sécheresse ;
- sur la fertilité des bas-fonds, trois points sont évoqués: la carence en phosphate, la toxicité ferreuse, le rôle
de la matière organique, notamment quand sa teneur est élevée;
- les contraintes d'ordre biotique sont les maladies (notamment les bactérioses et la pyriculariose) et les
insectes, en particulier le poux.
D. Rollin et N. Ahmadi vont résumer successivement les points forts et les grandes idées qui ressortent des
communications et des discussions relatives aux sous-thèmes agronomie et amélioration variétale.
En effet, il semble bien que, si certaines contraintes de fertilité peuvent être examinées sous l'angle de la
sélection génétique (déficience en phosphore, toxicité ferreuse) (x. Rakotonjanahary), les solutions seront
beaucoup plus d'ordre agronomique. Trois aspects nous ont semblé importants.
Le temps des engrais à faible coût pour le paysan semble passé. La mise au point de techniques d'économie
d'intrants est prioritaire.
L'utilisation de supergranules d'urée devrait permettre des économies d'azote bien que les conditions
d'expérimentation décrites en COte-d'Ivoire (S. Traoré) ne permettent pas d'en tirer des résultats définitifs.
La technique de pralinage expérimentée par J. Ratsimandresy permet d'économiser 30 unités de P2 0 S : en
effet, l'apport de 30 unités de P2 0 S dans la boue dans laquelle on trempe les racines des plants de riz avant
repiquage donne un rendement correspondant (supérieur ou égal) à 60 unités de P2 0 S apportées à la volée.
Les engrais phosphatés simples, tels que le phosphate supertriple, sont à recommander en l'occurrence. En
effet, l'utilisation d'engrais ternaires contenant de l'azote sous forme nitrique (16-16-16) risque d'entraîner de
forts gaspillages d'azote (P. Hennebert).
L'interaction azote-phosphore semble très importante à considérer: quel que soit le niveau de la matière
organique, la réponse à l'apport d'azote sur les rizières des hautes terres malgaches est faible ou nulle en
l'absence de phosphore. L'azote permet également de mieux valoriser un apport de phosphore
O.L. Raherimandimby, A. Losseau).
Les notions de risque économique (A. Leplaideur), de possibilité de financement des engrais (P. Roger)
apportent un début de réponse à la question: « Si les engrais sont rentables (en termes de rapport valeur/coOU,
pourquoi ne sont-ils pas utilisés? » (AM. Izac).
Les arrière-effets de la fertilisation sur les cultures de contre-saison comme celui de la riziculture précédente
ont également été sou lignés.
Amélioration variétale
L'objectif est d'assurer la stabilité de la production à un niveau satisfaisant, par la création de variétés
tolérantes ou résistantes aux différentes agressions pédoclimatologiques et biotiques et répondant aux
exigences des producteurs et utilisateurs.
Les méthodes adoptées ont évolué dans le temps pour aboutir à une stratégie d'exploitation raisonnée de la
variabilité génétique. Il s'agit: de rassembler et étudier la variabilité génétique existante (définition de groupes
variétaux homogènes, évaluation de la variabilité génétique; les techniques utilisées vont des plus classiques,
évaluation au champ de l'effet d'une agression sur le rendement, aux plus modernes telles que les RFLP) ; de
créer une nouvelle variabilité lorsque celle existante est insuffisante ou inadaptée (dans ce domaine aussi, aux
méthodes classiques d'hybridation simple et de mutagenèse se sont ajoutées ces dernières années des
techniques plus sophistiquées telles que la sélection récurrente et les biotechnologies) ; d'utiliser la variabilité
génétique dans des dispositifs de sélection multilocale et pluriannuelle, de manière à assurer l'émergence de
variétés et lignées à performance stable.
La mise en œuvre d'une telle stratégie nécessite une approche pluridisciplinaire associant notamment
hydroliciens, agronomes, physiologistes, phytopathologistes et sélectionneurs.
Des résultats encourageants, dont certains sont déjà vulgarisés et adoptés, sont enregistrés par toutes les
équipes. La complexité des mécanismes de tolérance ou de résistance aux agressions ainsi que la nécessité de
traiter ces problèmes de manière pluridisciplinaire sont comprises de tous.
L'exploitation des complémentarités intersubspécifiques s'avère possible et intéressante. La variété IRAT 216,
qui s'accommode aussi bien du régime hydrique pluvial strict que d'un régime de nappe ou de faible
inondation, en est un exemple.
Discussion
Les discussions ont porté sur quatre grands thèmes.
C. alanc-Pamard et A. Leplaideur ont abordé la problématique d'intégration des critères de choix et du savoir-
faire des producteurs dans les programmes de sélection.
Cette intégration se fait lors de la définition des idéotypes pour différents systèmes de culture et lors de la phase
finale de la sélection qu'est l'évaluation en milieu réel.
Il faut aussi être conscient du fait que les critères de choix des producteurs évoluent dans le temps, en
particulier avec l'environnement économique (accès aux intrants, débouchés...).
1. Rabenasolo a soulevé, à travers son intérêt pour IRAT 216, la question de la diffusion rapide des acquis de
la recherche dans un pays donné et au plan international.
Cette diffusion passe par une collaboration étroite entre chercheurs d'une part (en particulier dans le cadre des
réseaux internationaux de recherche) et entre chercheurs et développeurs d'autre part. Les interactions
environnement-variété et système de culture-variété étant des facteurs déterminants de la production, toute
nouvelle introduction devra faire l'objet d'une évaluation avant sa diffusion.
A.M. Izac et R. Rabeson ont abordé les questions du choix entre la stabilité des rendements et la maximisation,
ainsi que les méthodes d'évaluation de ces paramètres.
En fait, pour la riziculture de bas-fond, les sélectionneurs visent l'optimisation de la production, et la
principale composante de cet optimum est la stabilité des rendements qui est évaluée en tests multilocaux et
pluriannuels.
G. Pédro a guidé les débats vers l'évaluation de la contribution de la génétique et de l'amélioration variétale
au développement rural et vers les perspectives d'avenir de cette discipline.
La contribution des sélectionneurs aux révolutions vertes, petites ou grandes, de régions et de pays en
développement est loin d'être négligeab1e.
Les biotechnologies et l'émergence de techniques très fines d'analyse et de manipulation du génome devraient
permettre de nouveaux gains de productivité imputables au matériel végétal.
Bas-fonds
. ~
et petits amenagements
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-74 décembre 7997
ClRAD,7993
N. ANDRIAMAMPIANINA 1
Une pluviométrie irrégulière mois (tableau 11). Notons qu'une décade est sèche si
~VV'o'th..v. "" ~ v.V'.YI/·.N·.h"V."""""""""'''''''''''''''''''v. v.v. 'tN'.v...'YIN'...'YIN'. , • -.N.l'o v la pluviométrie tombe au-dessous de 10 mm durant
la saison pluvieuse.
Sur les hautes terres malgaches, 80 % des activités
agricoles s'effectuent durant la saison pluvieuse, Ces sécheresses impliquent le décalage et le raccour-
qu'il s'agisse des cultures sur tanety ou des cultures cissement de la période végétative des cultures entre
de bas-fond. Le début des activités attend les pre- décembre et mai. En effet, pour la riziculture de bas-
mières pluies (labour sur les versants et repiquage fond, il faut un total cumulé de 200 mm de pluie
dans les bas-fonds). Un retard prononcé de celles-ci avant de pouvoir repiquer normalement. La pluvio-
porte atteinte au calendrier cultural et à la pro- métrie moyenne mensuelle (tableau 110 montre qu'on
duction agricole. Le tableau 1montre la variabilité ne peut repiquer généralement qu'au mois de dé-
des débuts de la saison des pluies sur les hautes cembre, ce qui est en contradiction avec les variétés
terres. de riz à cycle long utilisées par les paysans.
Statistiquement, les pluies commencent à tomber dès La variabilité mensuelle des pluies est aussi fréquente
le mois d'octobre. Cependant, le début des pluies sur les hautes terres durant la saison pluvieuse. Une
varie entre mi-octobre et mi-novembre, et on sécheresse de 10 à 20 jours peut diminuer la récolte
observe des sécheresses répétées durant ces deux de 10 à 20 % pour la riz,iculture de bas-fond.
Quelques exemples de creux pluviométrique
suffisent pour illustrer le problème: 2,2 mm pour la
deuxième décade de janvier 1961 et 3,3 mm pour la
première décade de février 1967 à Tananarive.
423
Thème V - Bas-fonds et peris aménagements
•
100 o-~ ETP
30 \
(d'après DONOUE, 1975). 20
Mois
Décade
Octobre
2 3
Novembre
2 3
10
0
F M A M J
,
J A S 0 N D
L
16 10 7 5 2 - _ _ OIdrùloQe Défldt en &aU
_ Conltftullon de Ja rMMYe en eau du ~ ~ UtilisaUon de ra réserve
Tableau III. Pluviométrie moyenne mensuelle à Nanisana (source: ISRIC-FOFIFA. Technical paper 21,1990).
Mois J A S 0 N D J F M A M J
P(mm) 7 7 13 45 153 271 282 239 238 41 12 7
Tableau VI. Erosion des sols et production rizicole. Situation à Antananarivo. Pluie annuelle: 1 300 mm
(source: FOFIFA).
Sol Ruissellement Infiltration Taux récupéré Paddy
(t ha-')
% mm % mm % mm
Normal 50 650 50 650 50 325 2,6
Erodé 70 910 30 390 50 185 1,5
100 mm d'eau produisenl8oo kg de paddy.
Selon cette organisation du terroir, la gestion de l'eau eaux d'écoulement superficiel. Des observateurs
est tournée vers les besoins des sakamaina et des avertis remarqueront l'existence des canaux col-
rizières. Toutefois, l'ensemble du terroir participe au lecteurs de ruissellement sur les flancs des collines.
fonctionnement de cette gestion de l'eau. Cette A la différence des canaux d'irrigation, ces canaux
constatation amène à intégrer l'analyse de la gestion collecteurs n'aboutissent pas à des sources pour les
de l'eau dans la relation bassin versant-bas-fond. capter. Les canaux d'irrigation et de protection
jouent aussi le rôle de colledeurs.
Les eaux de ruissellement colledées par le bassin
versant fonctionnel et les canaux collecteurs sont
réparties harmonieusement dans chaque sedeur du
Structuration des bassins versants bas-fond par l'Intermédiaire des canaux latéraux et
et gestion de l'eau médians. Ces canaux sont reliés aux rizières par des
.... ........% %...»>."*-»...;.:·:-."«-.»....-..:....., ...."«'I.,. . . .x«'
x::::::::;.::::~c..:.:::":::::::::::::::::::»,,"'~"""'~"')o.""""~~
~
pas suffisant pour apporter l'eau nécessaire au Sous bassin versant 0 secteur Intermédiaire
Erosion des versants Les zones de culture sèche sur les voditanety sont de
grandes exportatrices de sédiments et de ruissel-
et protection des bas-fonds lement. En se basant sur les résultats obtenus en
:~~~~QCCilC;CCilCCC:ilililCC::Q=QQQ=:Qm=;=:Qi:I:=il::C:=il :=Q:QQ:ilCQilQ:Cil:::...."<'».~...."(>,.~-.;..."(>,....." '»......."(>"..."«O"..."(>,.........."«<-:-..~
plaide en faveur de cette gestion. Elle ne justifie pas CTFT, 1976. Bassin versant, Madagascar. Bilan de l'eau
pour autant ces pratiques paysannes mais invite à sous prairies naturelles et artificielles. Tananarive, CTFT,
considérer les stratégies traditionnelles dans le cadre 35 p.
d'un projet d'aménagement rationnel pour la réussite DONGUE G., 1975. Contribution géographique à l'étude
des nouvelles technologies. du climat de Madagascar. Thèse de doctorat d'Etat,
université de Tananarive, 477 p.
Ces technologies doivent observer quelques prin-
cipes : IRAT, 1968. Colloque sur la fertilité des sols tropicaux,
Tananarive, Madagascar, 19-25 novembre 1967, Nogent-
- assurer l'alimentation en eau des bas-fonds, à la sur-Marne, IRAT, tome Il, p. 1332-1384.
fois par écoulement superficiel et par écoulement de
nappe ; MORGAN R.P.C., 1980. Soil conservation. Problems and
prospects. Silsor, Bedford, 578 p.
- régulariser l'écoulement superficiel sur les ver-
sants; OLDEMAN L.R., 1990. An agroclimatic characterization of
Madagascar. Wageningen, ISRIC (Technical paper 21 J.
- assurer la protection des sols des ver~ants, l'objectif
étant d'améliorer le bilan hydrique du bassin versant RAKOTOMANANA j.L., 1987. Climat, érosion et
techniques culturales sur les hauts plateaux de
afin de garantir la quantité d'eau nécessaire au
Madagascar. Notes d'études. DRFP, 16 p.
repiquage, au moment opportun.
RAKOTOMANANA j.L., 1991. Les hautes terres
malgaches. Notes d'études. Document Projet Terre-
Tanety.
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des hautes terres de Madagascar. Reconnaissances
BAILL y C, BENOIT DE CaiGNAC C, MALVOS C, morphologiques. Tananarive, MDRRA, IRAT, 116 p.
NIGREj.M., SARRAILH j.M., 1979. Etude de l'influence du
couvert naturel et de ses modifications à Madagascar. SACCARDY L., 1960. Protection de la plaine de
Expérimentation en bassins versants élémentaires. Bois Tananarive contre l'inondation. Travaux de défense et
For. Trop., Cahiers scientifiques n° 4. restauration des sols. RM, MTP, DTP, 33 p.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
..••..•.................:.:::;:;::::::::;:::::::::::::: ;.'.;.:.:-::.;:::.::::::::::::::::.;.:.:,"."
vente est quatre à cinq fois plus important que la d'autant qu'elles sont brOlées périodiquement avant
valeur du paddy récolté. Le choix de la culture les premières pluies (feux de brousse).
pratiquée n'est pas basé sur des critères
En fait, c'est la dégradation progressive des collines,
économiques: chacun essaie de produire au moins
dont les sols se sont appauvris rapidement, qui a
une partie du riz qu'il consomme, et l'essentiel de la
contraint les populations à mettre en valeur le fond
production est autoconsommé. De petites quantités
des vallées, et à donner au riz la prépondérance qu'il
de paddy sont vendues au moment de la récolte et,
a dans l'alimentation des Malgaches aujourd'hui.
quand il en reste, en cours d'année, afin d'assurer un
minimum de rentrées monétaires qui permettront L'aménagement des bas-fonds est en effet beaucoup
d'acheter quelques vêtements, du sel, du pétrole plus difficile, et a supposé un travail considérable et
pour la lampe. Les revenus monétaires sont faibles un saut technologique important: il a fallu planer et
(quelques dizaines à une ou deux centaines de endiguer les parcelles, aménager le cours d'eau,
milliers de FMG par exploitation et par an). Les créer, lorsque cela est possible, de petits canaux
dépenses sont réduites en conséquence; les frais de d'irrigation.
scolarité paraissent souvent rédhibitoires, et le taux
de scolarisation est en forte baisse dans les Il semble que, dans la première moitié du Xlxe siècle
campagnes. encore, un équilibre ait existé entre les rizières,
désormais pour l'essentiel établies dans les bas-
Les rizières occupent pendant la saison des pluies fonds, et les cultures pluviales de pente. Le
quasiment toutes les terres rizicultivables des hauts repiquage, associé à un travail remarquable du sol,
plateaux. apparaît au début du Xlxe siècle dans les environs de
Tananarive pour s'étendre pr"ogressivement à
On est donc en présence d'une civilisation du riz, l'ensemble des hauts plateaux.
qui est bien plus que la base de l'alimentation de
RAISON a d'ailleurs constaté, lors de l'étude des
cette région; les références fréquentes aux ancêtres,
peuplements anciens de ces régions, une absence à
lorsqu'il est question de riziculture, laissent à penser
peu près totale de coïncidence entre les forts
que cette situation est le fait de nombreuses
peuplements et les forts pourcentages de bas-fonds;
générations, et que les premières occupations de ces
l'exception réside dans la plaine d'Antananarivo,
hauts plateaux, qui ne remontent qu'à quelques
mais elle est due à l'existence d'un pouvoir central
siècles, se sont faites par implantation d'une
fort qui mit en œuvre, dès le début du XVIIIe siècle,
riziculture proche de celle que nous connaissons
de grands travaux collectifs. Il ya une bien meilleure
aujourd'hui.
corrélation entre l'importance et la valeur des pentes
Or des études récentes (en particulier RAIS<?N, 1984), utilisables et les zones de forts peuplements anciens;
ainsi que les quelques données archéologiques les cultures sur pente pourraient donc justifier
disponibles, montrent que, probablement, la situa- davantage l'ancienne répartition de la population.
tion actuelle est le résultat d'une évolution récente Cette évolution a culminé au cours de la seconde
qui a complètement modifié le paysage des hauts moitié du XIXe siècle, où l'essentiel des cultures est
plateaux, et qui a d'ailleurs contribué à la création ou concentré dans les bas-fonds; les quelques photos
à l'extension de ces bas-fonds. existantes et les témoignages des voyageurs décri-
vent des collines nues, qui n'avaient pas encore été
plantées des quelques bois de pins et d'eucalyptus
que nous y voyons aujourd'hui.
Premières occupations Une des conséquences essentielles de cette
et évolution des cultures évolution réside dans une forte augmentation de
l'érosion, qu'II s'agisse d'érosion progressive (ou « en
nappe li) sur les collines herbeuses, périodiquement
Plusieurs éléments suggèrent en effet que les hautes
parcourues par les feux de brousse, ou d'érosion
terres connurent d'abord un système de culture
concentrée et brutale (coulées provenant des lavaka).
forestier, largement fondé sur des tubercules
(igname, patate douce, taro), sur la canne à sucre Les produits de ces érosions se déposent dans la
et le bananier, auxquels devait être associé du riz vallée en contrebas: c'est sans doute l'origine essen-
pluvial. Mais ce système, que l'on rencontre encore tielle de ces bas-fonds, qui constituent aujourd'hui la
sur les franges orientales des hauts plateaux, est potentialité agricole principale de cette région.
basé sur une culture itinérante pratiquée sur brûlis RAISON parle même d'« érosion utile li, car elle a
(<< tavy li): La forêt disparaît rapidement pour faire permis de créer à partir de collines à faible potentiel
place à une savane, puis, progressivement, à des agricole des terroirs plus fertiles, qui couvrent de 5 à
étendues herbeuses très sensibles à l'érosion, 15 % des superficies concernées.
C.CHABAUD
La dégradation des bassins versants a également systématiquement refusée par les usagers. Si des
favorisé l'écoulement des ruisseaux au détriment de travaux sont demandés, l'amélioration possible du
l'infiltration et de l'évaporation. La conséquence de réseau de drainage se limitera au recalibrage de la
ce phénomène est très différente selon qu'il s'agit de rivière - ~ condition encore qu'il ne nécessite pas
tout petits bassins versants alimentant des bas-fonds un élargissement trop important au détriment des
ne disposant pas de cours d'eau permanent ou de rizières environnantes - et au déroctage des seuils
bassins plus importants. .rocheux éventuels. Quant aux pistes, elles sont
inexistantes ~ l'intérieur des périmètres, même dans
Dans le cas de tout petits bassins, les écoulements
les régions où les charrettes sont nombreuses. Les
temporaires qui se produisent dès les premières
besoins en transport sont limités (pas ou peu
pluies permettent dans les petits bas-fonds de
d'intrants) et l'évacuation de la récolte se fait par port
disposer d'un débit pour la mise en culture des
des gerbes sur la tête jusqu'au village.
rizières (mise en boue et remplissage des parcelles).
Le problème se pose d'ailleurs aujourd'hui - Ces bas-fonds ont été profondément remodelés par
lorsqu'il est question de reboiser les collines domi- leurs utilisateurs, pour aboutir aux paysages
nant ces petits bas-fonds - de ne pas trop réduire les constitués d'une succession de rizières en courbes de
écoulements qui permettent l'irrigation des quelques niveau que nous rencontrons aujourd'hui. Les
hectares situés ~ l'aval. terrassements effedués sont parfois impressionnants:
il n'est pas rare de trouver une famille qui s'attaque ~
Le phénomène inverse se produit dans des bassins
un surcreusement de plus d'un mètre de hauteur
plus importants, où les cours d'eau sont permanents
pour étendre sa rizière, avec pour seuls moyens des
et où le déboisement du bassin versant a eu
bêches et des paniers pour évacuer la terre. Les
pour effet de réduire les étiages utiles pendant
quantités de terre remuées sont considérables, et la
la période de préparation des sols et de repiquage,
topographie qui en résulte n'a souvent plus grand-
et d'augmenter la force des crues, souvent dévas-
chose ~ voir avec la topographie d'origine.
tatrices.
Les parcelles sont pl anées et endiguées, afi n de
La topographie de ces bas-fonds découle direc-
pouvoir retenir les eaux provenant soit de l'irrigation,
tement de ce processus de formation, et du
soit de la concentration des écoulements du petit
remodelage réalisé par ses utilisateurs pour y installer
bassin versant qui domine le bas-fond. Le riz y est
le plus de rizières possible, selon les pratiques
repiqué en général du 1 er novembre au 15
culturales actuelles.
décembre, pour pouvoir être récolté en mai ou juin
de l'année suivante.
Les façons culturales restent fréquemment manuelles:
Utilisation des bas-fonds - la préparation des sols se fait ~ l'angady (bêche
et contraintes de la riziculture droite), parfois ~ la charrue attelée ~ une paire de
bœufs;
Compte tenu de la pression démographique existante -la mise en boue de la parcelle permet d'en parfaire
dans ces régions, la superficie des exploitations est le planage soit ~ l'angady, soit ~ la herse; certains
très réduite: elle est en moyenne de 0,5 ha de ri- pratiquent encore le piétinage par les zébus;
zières, ce qui est insuffisant pourfournir le riz néces-
-le repiquage est réalisé par les femmes, des équipes
saire ~ la consommation de la famille. Les bas-fonds
de repiqueuses se louant sur les périmètres; il faut en
ont été aménagés et remodelés pour permettre
moyenne 30 jours de repiqueuse (ketsy vavy) pour
l'extension maximale des rizières et leur culture dans
repiquer un hectare; c'est d'ailleurs le principal
les meilleures conditions.
moyen d'estimation de la superficie des parcelles
Les emprises des ouvrages sont limitées au lors des discussions avec les paysans (le nombre de
maximum. Le canal principal est situé en pied de journées de femmes nécessaire pour repiquer une
colline, ce qui permet de le réaliser en déblais -la parcelle permet facilement d'en estimer la
réalisation et l'entretien de remblais étant beaucoup superficie...) ;
plus difficiles par les techniques traditionnelles. Il n'y - le désherbage est pratiq'ué deux ~ trois fois par
a généralement pas de canaux secondaires ou saison; lorsque le repiquage se fait en ligne, il est
tertiaires, l'eau s'écoulant en cascade d'une rizière ~ utilisé une petite houe rotative, sinon le désherbage
l'autre. est manuel;
Cette limitation des emprises, compte tenu de - enfin, la récolte se fait ~ la faucille, les gerbes étant
la rareté des terres rizicultivables, est encore évacuées ~ dos d'homme pour être battues au village
plus marquée en ce qui concerne le drainage ou les (battage ~ la main sur une pierre ou un morceau de
pistes: la création d'un réseau de drains est bois).
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
Il n'est pratiquement pas apporté d'engrais sur les exceptionnelle, et leur création est presque systé-
rizières. Le coût actuel des engrais (près de 650 FMG matiquement refusée par les paysans qui y voient
par kg) comparé au prix de vente du paddy (200 à une perte de superficie injustifiée.
250 FMG par kg) conduit à un différentiel trop faible
compte tenu des divers aléas (sécheresse,
inondations) qui peuvent compromettre la récolte.
Topographie des bas-fonds
Les principales contraintes pour cette riziculture sont
les suivantes. Plusieurs cas peuvent se présenter, selon l'im-
portance du bassin versant qui domine le bas-fond-
L'altitude, tout d'abord (de 1 200 à 1 800 m), et cor-
et donc du ruisseau permanent ou temporaire qui le
rélativement le froid dont le riz souffre à partir du
parcourt - et l'existence éventuelle de seuils dans la
mois de mai, qui limite au 15 décembre au plus tard
le repiquage; les rizières repiquées après cette date vallée concernée.
voient leurs rendements diminuer. Les bas-fonds dominés par de tout petits bassins
versants sont caractérisés par l'inexistence de cours
La sécheresse, fréquente au moment -du repiquage,
d'eau et de canaux d'irrigation: les eaux proviennent
alors que les façons culturales nécessitent près de
soit de sources situées en pied de colline, soit de la
2000 m3 ha-1 d'eau pour faire la mise en boue de la
concentration des eaux de pluie du petit bassin. Les
parcelle et la remplir. Les pluies ne commencent
eaux passent d'une rizière à l'autre, en suivant la
qu'au mois de novembre, et parfois, en année sèche,
pente naturelle du vallon.
au mois de janvier; l'étiage des rivières culmine en
octobre et novembre. En fait, les besoins en eau Lorsque le bassin versant est un peu plus important,
maximaux de la rizière se produisent au moment où il existe un ruisseau à écoulement temporaire; le lit
on en manque le plus. Ce phénomène ainsi que le de ce ruisseau est artificiellement repoussé sur l'un
planage approximatif des parcelles (à ± 10 cm) des bords de la vallée, pour laisser toute la place aux
expliquent le choix généralisé du repiquage; le rizières (figure 1). Le ruisseau est alors utilisé à la fois
semis direct supposerait en effet que l'on dispose comme évacuateur des eaux excédentaires et
d'eau sur la parcelle un à deux mois plus tôt, ce qui comme canal d'irrigation, sur lequel sont installées
est souvent irréalisable. des prises d'eau sommaires.
La dernière contrainte concerne, dans certains cas, la Enfin, lorsque la rivière est trop importante pour être
mauvaise évacuation des eaux en cas de crues ou de rejetée sur l'un des côtés, elle garde son lit initial.
_fortes pluies: les variétés de riz cultivées sur les hauts L'alimentation des rizières se fait alors par une
plateaux supportent une submersion de deux à trois succession de petites barrages traditionnels, qui
jours pendant les mois de janvier à mars sans dégâts dominent chacun quelques hectares à quelques
notables; au-delà, il est constaté des diminutions de dizaines d'hectares, et qui desservent un canal en
rendement pouvant aller jusqu'à la perte totale de la terre (figure 2).
récolte.
Dans le cas général, la pente de ces vallons varie de
Quelques cultures dites de contre-saison, dont quelques pour cent à quelques pour mille, ce qui
l'introduction est récente, sont pratiquées sur permet l'alimentation en cascade des rizières et
certaines rizières en saison sèche. Sur les terres les assure une évacuationlSuffisamment rapide en cas de
mieux drainées naturellement sont alors cultivés la crue. Parfois, cependant, le bas-fond est barré soit
pomme de terre, le blé et le triticale. par un seuil rocheux, soit par une coulée latérale,
soit enfin par le niveau de la vallée dans laquelle il
L'aménagement des parcelles, qui a abouti à la
débouche, qui a pu être remonté par un fort
recomposition des parties rizicultivables, apporte des
alluvionnement de la rivière qui y coule. La pente est
réponses à ces contraintes:
alors très faible, les inondations causent des dégâts
- il faut retenir l'eau qui peut arriver dans la parcelle, importants, et les sols souffrent d'un manque de
pour maintenir quelques centimètres d'eau pendant drainage.
presque toute la durée du cycle: les parcelles sont
planées et entourées de diguettes ;
- lorsque cela est possible,·il faut capter et conduire Conduite de l'irrigation
les eaux existant à proximité jusqu'à la rizière; c'est et structures sociales
l'objet des multiples petits barrages et canaux
d'irrigation traditionnels qui existent dans toute cette Quel que soit le type de bas-fond, avec ou sans
région; ruisseau, et qu'il existe ou non un canal d'irrigation,
- le bon drainage des parcelles est par contre très les parcelles rizicoles sont aménagées pour recevoir
rarement pris en compte; l'existence de drains est et conserver l'eau. C'est la date où cette eau est dis-
C.CHABAUD
ponible qui va conditionner la mise en place de la près d'un siècle, il est probable que ces groupes
culture et, si l'eau n'est disponible que tardivement, étaient au départ d'origine familiale, les ayants droit
son rendement. d'aujourd'hui étant les héritiers de cette famille de
base.
On constate en premier lieu l'extrême dépendance
des parcelles les unes par rapport aux autres: dans
Ces groupes ont souvent la même unité résiden-
les trois types de bas-fonds, il n'existe pour chaque
tielle; mais il peut exister plusieurs groupes habitant
parcelle ni alimentation ni exutoire indépendants.
le même village, et il n'est pas rare de trouver une
L'eau s'écoule en effet en cascade d'une parcelle à dizaine de petits canaux parallèles, issus d'une·
l'autre, en suivant la pente du vallon. Chaque même rivière, allant alimenter les rizières du terroir
riziculteur est dépendant de la parcelle située en d'un village donné: le nombre de canaux
amont; il existe donc de fait des groupes paysans correspond au nombre de groupes, qui constituent
utilisateurs en commun de la source, du ruisseau ou autant d'associations traditionnelles d'irrigants.
du petit barrage et du canal dérivés de la rivière.
L'étendue des rizières cultivées par.· un tel groupe
excède rarement 20 à 30 ha, ce qui, compte tenu
d'une superficie moyenne de 0,5 ha par exploitation,
correspond à une cinquantaine d'exploitants au
maximum. La plupart des sites étant exploités depuis
Prééminence sociale
et répartition des rizières
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La construction et l'entretien des petits ouvrages Pourtant, sur les collines avoisinantes, on trouve
utilisés sont restés très traditionnels; les techniques souvent des tombeaux qui appartiennent aux mêmes
n'ont quasiment pas évolué depuis près d'un siècle, familles et qui sont construits en dur; il est rare que
et les limites techniques de ces petits aménagements dans les villages n'existe pas au moins un maçon qui
sont rapidement atteintes. sache construire des ouvrages en maçonnerie de
moellons. En ce qui concerne les petits barrages et
Le barrage en rivière est constitué le plus souvent de canaux, le poids de la tradition demeure, et chacun
pierres disposées à la main, l'étanchéité de l'ouvrage s'attache à employer des techniques similaires à
étant assurée par des mottes de terre et d'herbe. celles mise en œuvre par les ancêtres qui ont créé
Parfois, lorsque les pierres sont rares, il est utilisé des ces aménagements.
pieux en bois enfoncés à la main dans le lit de la
rivière. Ces barrages sont éminemment fragiles, et Parallèlement, on a assisté depuis les années 50 à de
sont régulièrement emportés par les crues. Ils doivent multiples interventions de l'Etat pour améliorer ces
être reconstruits jusqu'à dix fois par an : les usagers petits aménagements, qui constituent l'essentiel
participent tous à ces reconstructions; c'est le de l'espace rizicultivé de la région: il y eut les
« vonjy rano vaky li, ou mobilisation générale en cas opérations « ras du sol li, « communes rurales li,
de casse du barrage ou du canal. On arrive dans « GOPR li, et plus récemment I!opération micro-
certains cas à ne pas pouvoir remettre en place le hydraulique qui a permis la réhabilitation ou la
barrage à cause de la force du courant; on peut alors construction de plus de 1 500 petits barrages et
aboutir au paradoxe de manquer d'eau dans les ouvrages divers sur ces hauts plateaux. Ces diverses
rizières au moment où le débit de la rivière est le plus interventions ont été appréciées par les usagers, et les
important. demandes ont été nombreuses; elles concernent
essentiellement la construction de barrages en dur,
Ce barrage dessert un canal principal qui ne mais aussi éventuellement des bâches et des
comporte pas d'ouvrage en dur. La construction de déroctages qui permettent aux canaux traditionnels
ce canal ne requiert que de la main-d'œuvre et les de desservir une plus grande superficie.
matériaux sont localement disponibles (bois, pierre).
En fait, le canal est creusé en déblai en pied de Ces interventions ont donné des résultats
colline, et domine de ce fait les rizières de la vallée. intéressants, tout au moins lorsqu'elles ont apporté
une solution technique (barrage en dur, construction
La présence d'un obstacle naturel (thalweg latéral,
d'une bâche pour traverser un ravin), sans toucher
passage rocheux) limite rapidement la portée de ces
à l'étendue ni à la structure sociale du groupe
canaux. Certains franchissements se font à l'aide de
concerné par l'aménagement traditionnel pré-
bâches en bois, creusées dans des troncs d'arbre,
existant.
mais dont la capacité est très limitée, et qui ne
peuvent desservir que cinq à six hectares à l'aval. Il Les principes d'action de l'opération mycro-
existe une technique traditionnelle de déroctage, qui hydraulique étaient les suivants: la demande
permet parfois d'attaquer de petits seuils rocheux: émanait d'un groupe d'usagers, et, lorsque le projet
un grand feu est allumé sur la pierre à casser et, s'avérait techniquement et économiquement
lorsque la pierre est brûlante, elle est arrosée d'eau réalisable, l'étude déterminait les quantités et la
froide, ce qui permet d'attaquer superficiellement le nature des matériaux nécessaires pour sa réalisation.
rocher. Les matériaux disponibles localement (sable, gravier,
moellons, bois) devaient être fournis par les usagers;
Les canaux secondaires sont rares; dans la plupart
le chantier ne commençait qu'après que ces divers
des cas, le canal principal est équipé de prises
matériaux aient été rassemblés sur le site. Le reste
rudimentaires (trous dans les berges ou petit ponceau
(ciment, fers à béton, produits divers non disponibles
en pierres sèches) qui desservent chacune une série
sur place) était fourni par l'opération et transporté par
de parcelles, l'eau passant en cascade de l'une à
ses soins aussi près que possible de l'ouvrage à
l'autre.
construire, le transport final se faisant à dos d'homme
Ces techniques sont caractérisées par le seul emplOi par les usagers jusqu'au site. Les travaux étaient
de main-d'œuvre et de matériaux disponibles réalisés par des tâcherons agréés, qui apportaient
gratuitement; il est extrêmement rare que soit leur technicité et quelques outils. La main-d'oeuvre
constitué une collecte en argent pour acheter des non spécialisée était fournie par les paysans. Le
matériaux et, a fortiori, pour faire venir un maçon ou creusement éventuel du canal (recalibrage et
C,CHABAUD
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extension éventuelle) était laissé également à la pol ice des eaux est inefficace ou inexistante, et
charge des usagers. malgré l'importance des travaux entrepris l'eau a
souvent du mal à arriver en bout de canal.
A quelques exceptions près, ces petits amé-
nagements ont donné de bons résultats. Il est arrivé
quelquefois qu'un nouveau canal ne puisse être tracé
faute de l'accord d'un propriétaire qui ne voulait pas
qu'il traverse ses terres, mais le cas s'est produit Conclusion
relativement rarement.
La structure sociale existante sur ces hauts plateaux
La réussite de ces petits projets n'a toutefois pu être est donc à la fois l'origine et la force de tous ces petits
assurée que lorsqu'ils ont respecté la structure aménagements traditionnels, qui représentent près
sociale préexistante, et qu'ils n'ont pas perturbé de 70 % de la superficie de rizières irriguées, et la
l'équilibre entre les différents groupes utilisateurs. principale contrainte pour la création ou la
réhabilitation d'aménagements plus importants, qui
En particulier, tout essai de regroupement entre deux concernent obligatoirement un certain nombre de
groupes traditionnels s'est soldé par un échec: il est groupes de base. Ces grands aménagements ont dans
en effet tentant pour un aménagiste à qui l'on le passé pu fonctionner dans de bonnes conditions,
demande de construire deux barrages sur la même mais avec une gestion et un entretien assurés par
rivière, parfois à quelques mètres d'intervalle, l'administration, et surtout une police des eaux sans
d'essayer de regrouper les deux ouvrages, quitte à faille. La rétrocession actuelle de ces aménagements
installer un partiteur sur un canal de tête pour aux associations d'usagers a mis en évidence les
desservir les deux petits périmètres voisins; chaque problèmes posés par cette structure sociale
essai de ce type, même lorsqu'on a réussi à parcellaire, qui a des difficultés à s'adapter à une
persuader les deux groupes de participer ensemble à dimension d'aménagement sans commune mesure
la construction, s'est soldé finalement par un échec. avec celle des aménagements traditionnels.
Le partage des eaux n'a pas pu se faire dans de
bonnes conditions, et, un an ou deux après les
travaux, le groupe en aval venait demander qu'on lui
construise un ouvrage dont il serait le seul utilisateur.
Il est arrivé aussi que la construction d'un barrage en Références bibliographiques
dur à peu près étanche en tête d'une petite vallée RAISON J.P., 1984. Les hautes terres de Madagascar et
utilisée par plusieurs groupes d'usagers modifie leurs confins occidentaux. Paris, Karthala, 2 tomes, 651 p.
brutalement l'équilibre entre ces groupes: les et 605 p.
barrages traditionnels préexistants étaient peu
LE BOURDIEC F., 1974. Hommes et paysages du riz à
étanches, et chaque groupe ne pouvait tech- Madagascar. Etude de géographie humaine. Tananarive,
niquement prélever qu'une partie du débit, le reste Imprimerie FTM, 648 p.
étant utilisé par les usagers en aval. Après la
construction du barrage en dur, les usagers en aval se
sont retrouvés sans eau, et ils sont allés « aménager 10
le nouvel ouvrage construit en amont, jusqu'à ce que
soit rétabli l'équiHbre initial.
Ces difficultés de partage des eaux entre groupes
voisins se retrouvent d'ailleurs sur les périmètres plus
étendus (petits périmètres irrigués, ou PPI, qui font
l'objet de projets de réhabilitation importants). Ces
périmètres couvrent souvent quelques centaines
d'hectares et réunissent un certain nombre de
groupes de base traditionnels. La gestion et
l'entretien de ces PPI, après réhabilitation, sont
laissés à la charge de l'association des usagers de
l'eau créée à cet effet. Or, sur les hauts plateaux, le
partage des eaux entre les groupes de base est
extrêmement difficile, et les tours d'eau ne sont pas
appliqués. Il arrive souvent que les groupes de base
situés à l'amont des canaux se servent au mieux de
leur intérêt, avec parfois des gaspillages manifestes,
sans se soucier des autres groupes situés à l'aval. La
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-74 décembre 7997
CIRAD,7993
Méthodes d'intervention
pour l'aménagement des bas-fonds en Guinée
C. CHERON 1, S. DRAME 1, O. SOW 1
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cultivés chaque année. Certaines conditions parti- Comment en est-on arrivé à privilégier les situations
culièrement favorables de climat et d'altitude de bas-fonds par rapport aux autres le potentialités
permettent des activités agricoles variées mais sur aménageables» ?
des sols généralement médiocres. En effet, une partie
importallte du pays est occupée par un substratum
rocheux inculte, et la pratique généralisée des feux Bref historique des expériences
de brousse a entraîné une dégradation accélérée des d'aménagement jusqu'en 1984
sols et des rotations plus rapides des jachères. Dans
ces conditions, la fertilité ne peut se reconstituer Dans les années 50, l'administration coloniale avait
naturellement dans de bonnes conditions. initié un important programme de mise en valeur des
grandes plain~s particulièrement attrayantes de la
C'est pourquoi l'intensification de l'agriculture dans Guinée maritime et de la haute Guinée.
les plaines et bas-fonds est considérée, à moyen
terme, comme un passage quasi obligé pour atteindre En Guinée maritime, il s'agissait de mettre en place
l'objectif que s'est fixé le gouvernement de nourrir sa des aménagements de type le polders ». Au moment
population à partir de productions nationales, tout en de l'indépendance, deux chantiers étaient en cours,
veillant à ne pas.'e faire à n'importe quel prix. Monchon (2 500 ha) et Kaback (1 500 ha) et
beaucoup d'autres projets étaient programmés
Les potentialités aménageables recouvrent une (Soumbouya-Mankoutan). L'aménagement de Koba
grande variété de situations qu'on peut classer autour (700 ha) appartenait aux services de la recherche
de trois grandes catégories: agronomique.
-les vastes plaines de mangrove en Guinée littorale, En haute Guinée, dans le cadre de l'Office du Niger,
à aptitude rizicole et dont le régime d'inondation est on tentait d'améliorer la riziculture dans les grandes
influencé par la mer: le potentiel aménageable se plaines (Niger et Banie) en utilisant les apports des af-
situe autour de 45 000 ha, mais ces plaines appar- fluents (exemple des travaux menés par M. DUFOUR à
tiennent à un écosystème complexe et fragile, et leur Siguiri dans la plaine du Niger) ou en contrôlant
aménagement doit se faire avec discernement dans le l'onde de crue (vallée de la Banie). Il s'agissait de sub-
souci d'en maintenir l'équilibre et la richesse natu- mersion semi-contrôlée qui, en pratique, n'engen-
relie; drait que de bien maigres améliorations de rende-
ment.
- les plaines alluviales, qu'on trouve principalement
Pendant toute la période qui a suivi, jusqu'en 1984,
en haute Guinée et distribuées sous forme de
on a poursuivi cette politique d'aménagement de
le chapelkets » de part et d'autre des grands fleuves (le
grands ensembles (Monchon, Kaback, Siguiril, où
Niger et ses affluents) : le potentiel aménageable a été
l'on faisait bien peu de cas des pratiques agricoles
estimé à 125 000 ha mais les potentialités réelles
traditionnelles et des mentalités paysannes puisqu'il
d'aménagement sont très réduites, les préalables
s'agissait de confier la mise en valeur à des unités
n'étant généralement pas satisfaits tant au plan
étatiques de production (BMP, BAP, FAPA. ..l*.
technique qu'au plan socio-économique;
Ces opérations ont soit échoué, soit atteint des
- les bas-fonds et petites plaines répartis sur tout le résu Itats très en deçà de ceux espérés.
pays, qui désignent les fonds de vallons, petites
vallées et gouttières d'écoulement, et correspondent Les causes principales de ces échecs peuvent être
aux parties basses du relief, plutôt situées vers l'amont résumées comme suit:
du réseau hydrographique, les plaines alluviales se - une trop grande emprise de l'administration dans la
situant elles plutôt en aval. préparation des projets, alors que les populations
concernées auraient dO être impliquées dès le stade
Pour cette dernière catégorie, du fait de la dispersion
de la conception;
des sites et de leur multiplicité, il n'a jamais été établi
d'estimations précises des potentialités en bas-fonds. - une mauvaise approche du monde paysan;
Le Centre d'investissement de la FAO a estimé le - l'absence d'études préalables sur les plans tech-
potentiel pour l'ensemble du pays à 47 000 ha. Ce nique, sociologique, et économique, et de données
chiffre est très certainement inférieur à la réalité. En de base fiables (hydrologie, pédologie, érosion.. .l ;
effet, le BDPA, dans une étude récente, a évalué à
40 000 ha le potentiel de bas-fonds de la Guinée
forestière. En résumé, on peut tabler sur un potentiel
de 70 à 80000 ha, dont la plus grande partie est * BMP : Brigade motorisée de production.
aménageable mais, comme dans le cas précédent, BAP : Brigade attelée de production.
avec des limites d'ordre socio-économique. FAPA : Ferme agro-pastorale d'arrondissement.
C. CHERON, s. DRAME, o. SOW
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-l'indisponibilité d'itinéraires techniques sars et bien (plus de 80 à 90 % des financements obtenus y sont
insérés dans les systèmes de productions existants consacrés) ;
(insuffisance de la recherche agronomique) ; - sur le plan hydro-agricole, considérant la situation
- l'absence d'une politique foncière s'appuyant sur générale de la Guinée (totalité du pays au-dessus de
les traditions et garantissant un niveau élevé de mise l'isohyète 1 200 mm) et les difficultés déjà exprimées
en valeur des surfaces aménagées; pour les grands aménagements, on devrait d'abord
- un contexte général déficient (accès insuffisant aux s'intéresser aux situations dites de bas-fonds, à
intrants et au crédit, pas de politique incitative de l'échelle individuelle ou de petits groupements de
prix ou de subvention, pas d'appui au stockage, à la paysans représentant des surfaces ne dépassant pas
transformation, à la commercialisation...). quelques dizaines d'hectares.
Une tendance générale s'est donc retrouvée autour
du thème des aménagements de bas-fonds, entrant
Les nouvelles orientations depuis 1984
comme composante dans de nombreux projets de
A l'instigation de la Banque mondiale, une étude des développement d'approche intégrée régionale ou
contraintes pesant sur le secteur rural et des mesures d'infrastructure rurale (figure 1).
à prendre pour,la mise en œuvre d'une nouvelle
politique de développement rural a été confiée à
SCETAGRI/BDPA (étude de schémas directeurs
régionaux de développement rural et de la Les bas-fonds
restructuration des services agricoles). En matière de dans le contexte guinéen
..v.....v..........v.v.v.v.......v.........v...................v.h...~....'tN'o.VY.-.Nvoh.v.v.~
. .'YIO~MNv>M~.w.
génie rural, les recommandations suivantes ont été ......v..v..v.NYlN\A
faites:
Caractéristiques des bas-fonds en Guinée
- plutôt que de privilégier les grands aménagements Par rapport aux pays voisins des zones plus septen-
hydro-agricoles, il ya lieu de reconsidérer les
trionales, on doit noter une série de particularités,
priorités, et de consacrer des efforts importants au
avec des conséquences pour les aménagements.
désenclavement des zones de production; on doit
indiquer que les bailleurs de fonds ont apporté un Sur le plan topographique, les reliefs guinéens
soutien sans réserve au génie rural dans ce domaine induisent des pentes longitudinales relativement
République
duSENEGAL
Itt!:tl
.:.:.:.:.:.:.: ZOnes à potentialités
de bas-fOnds
RépubRque
de GUINEE BISSEAU
Républque
du MAU
République
de SIERRA LEONE
République de GUINEE
Ministère de rAgrlculture et des Ressources Anlmales
Direction Nationale du GénIe Rural
fortes et des cours relativement encaissés, les bas- des autorités traditionnelles et administratives, la
fonds sont généralement étroits. En conséquence, les disponibilité foncière du bas-fond pour son amé-
ouvrages (canaux, drains) ont une « productivité» nagement et sa mise en valeur individuelle ou
moindre; en plus, on doit introduire des ouvrages de collective.
contrôle des vitesses érosives dans les canaux en
terre (coursiers, chutes, régulateurs). Sur le plan
pédologique, les bas-fonds ont des sols généralement Une conception de l'aménagement
filtrants (texture grossière), acides et fréquemment nécessairement spécifique
tourbeux. Les canaux présentent donc des pertes en
parcours et les pertes par percolation dans les casiers Toutes les particularités qui viennent d'être citées
sont importantes; vis-à-vis des problèmes d'acidité, doivent être prises en compte dans la conception des
on devra soit employer des variétés résistantes, soit projets de mise en valeur de bas-fonds.
renouveler le plus souvent possible les stocks d'eau La ressource en eau n'apparaît généralement pas
des bassins 'de submersion pour éviter les eaux comme la contrainte majeure. La « productivité de
stagnantes. l'eau» n'a pas la même signification en Guinée qu'au
Sur le plan hydroclimatique, on est souvent con- Mali ou au Burkina Faso. L'hydraulique agricole se
fronté à des problèmes d'engorgement et d'excès ramène, dans de nombreux cas, à des questions de
d'eau; en revanche, un facteur favorable réside dans drainage en saison des pluies et d'utilisation ration-
les apports de nappe phréatique en saison sèche, qui nelle de la nappe phréatique en saison sèche. On
offrent des possibilités de culture de nappe (les devra donc éviter d'appliquer systématiquement les
conséquences pour les aménagements sont abordées schémas classiques de type périmètres irrigués (avec
dans la partie suivante). ouvrages latéraux), pour adopter une conception vi-
sant à valoriser le plus simplement possible les res-
Sur le plan des systèmes de production, les bas-fonds sources en eau (souvent avec ouvrages centraux) :
sont utilisés pour toutes sortes de cultures, mais casiérage simple, drainage simple, cultures sur
surtout pour le riz, le maraîchage, le maïs, les tuber- nappe, gestion des écou lements différés et hypo-
cules, l'importance relative de chacune d'elles va- dermiques.
riant selon les régions; on les utilise aussi fréquem-
ment pour le pâturage en saison sèche. Le bas-fond Les typologies habituelles établies à partir de critères
entre comme composante du système de production. physiques et agronomiques devront être recon-
La mise en culture ne se fait pas de manière homo- sidérées selon une analyse prenant en compte
gène, mais selon les différents niveaux de la topo- l'environnement socio-économique.
séquence. Les schémas classiques d'aménagement
avec canaux latéraux pour des casiers de submersion
rizicoles entrent donc en opposition avec les sys-
tèmes traditionnels de production (figure 2).
Les expériences d'aménagement
de bas-fonds en Guinée
Sur le plan foncier, on a souvent des situations con-
f1ictuelles; l'idée est donc de se placer en dehors de
Une dizaine de projets de développement rural ap-
ces situations ou de prendre des garanties suffisantes.
portent leur contribution au programme national d'a-
On devra donc formaliser, par des engagements écrits
ménagement de bas-f~nds, qui concerne 12 000 ha
pour la période des cinq ans à venir, dont 7 000 ha
avec un financement acquis. La cr déontologie» de
chaque projet est fortement influencée par le bailleur
de fonds et les différences sont marquées en matière
d'organisation et de démarche, si bien que prati-
_ _-
autres:
- le Projet agricole de Gueckedou et le te complexe
- - - - - ._----------_._--------- .-- ....
..... bas-fonds» ;
en &lIborl Mche (1oneIltlllI)
- le Projet riz-palmier auquel on peut rattacher le
Figure 2. Coupe d'un bas-fond. projet SOGUIPAH, qui l'a d'ailleurs précédé dans le
Système de culture traditionnel. temps;
C. CHERON, S. DRAME, O. SOW
Le projet a développé un concept, « le complexe bas- Les types de bas-fonds rencontrés dans la région de
fonds lt, qui consiste à aménager le bas-fond en Gueckedou sont différents les uns des autres par
même temps que les versants pour protéger ceux-ci l'importance des pentes longitudinales et trans-
de l'érosion (plantations pérennes, surtout de caféier). versales et par d'autres caractéristiques telles que
On cherche ainsi à recentrer et intensifier les activités l'écoulement, la forme et la dimension des bassins
agricoles de l'exploitant autour du bas-fond. Tous les versants.
éléments « fixés lt du système agraire traditionnel (les On distingue quatre types d'aménagements réalisés à
jardins de case, les pla.nt!1~ions pérennes, les bas- Gueckedou:
fonds) sont privilégiés et individualisés au détriment
des éléments « itinérants lt et collectifs. On retrouve - type 1: planage simple;
donc autour du campement installé en bordure du - type Il : planage + endiguement + siphons en
. bas-fond une multiplicité d'activités et de cultures bambou (dans certains cas, un drain est nécessaire) ;
(maraîchage, manioc, maïs, café, cacao, agrumes, il est réalisé quand le cours d'eau est temporaire ou
avocat, palmier, bananier, petits élevages, etc.). Cette le bassin versant peu connu;
innovation, où le riz et le café sont associés (l'un dans
- type III : planage + endiguement + canaux
le bas-fond et l'autre sur les versants), marque
d'irrigation + drains + digues de dérivation au seuil;
sensiblement les paysages qu'on rencontre
maintenant dans la zone de Gueckedou. -type IV: type III + ouvrage de stockage.
Sur les 1 850 ha aménagés, 80 % des surfaces sont de
type III avec réseau d'Irrigation. Le degré de mise en
Description de la démarche
culture est resté élevé plusieurs années après la fin du
Le système de vulgarisation appliqué par le projet est projet. Mais on notera que seulement 5 % des
le « Training and visit lt. surfaces sont utilisés pour la pratique d'un deuxième
cycle de culture alors que, d'un point de vue stric-
Sur la base des informations transmises par les agents tement hydraulique, on pourrait irriguer au moins la
de terrain, une visite qui regroupe les techniciens moitié des surfaces aménagées.
(agronome, aménagiste et pédologue) est organisée
sur le site avec les paysans. La faisabilité de l'opé- Coûts
ration est appréciée de manière classique.
Seule une estimation des coûts directs a été établie
On considère qu'on peut aménager un hectare pour par la section d'aménagement du projet. Ceux-ci ne
cinq actifs. La participation des paysans aux travaux comprennent pas les charges de structure et ne
est bénévole; le projet prend en charge l'enca- s'appuient pas sur un suivi analytique rigoureux.
drement technique, les intrants nécessaires aux petits Leur montant, par hectare, est le suivant: type Il :
ouvrages (ciment, maçon, transport), et une assis- 1 800 FF ; type III : 2 500 FF avec matériaux locaux;
tance au paysan (techniques culturales, semences 3 750 FF avec maçonnerie (non armée) ; type IV :
sélectionnées, engrais, crédit..J. 6350 FF.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
Les rendements obtenus varient de deux à trois A ce stade, s'établit ou non la faisabilité de l'amé-
tonnes par hectare, mais sans recours systématique nagement.
aux intrants.
Une fois l'opération décidée, les travaux com-
mencent selon une séquence et un partage de res-
ponsabilité bien établi entre le projet et I.e grou-
Le Projet riz-palmier (PRP) pement. La période de travaux s'échelonne du 1er au
Présentation 15 juillet.
Le Projet riz-palmier, lancé dans la préfecture de
Forecariah (Guinée maritime) sur financement du Organisation
Fonds européen de développement, est un projet de
L'opération est confiée à un bureau d'études belge
développement de l'agriculture villageoise dans
(SOCFINCO), qui disposait pour la première tranche
lequel est également inclus un programme
de trois assistants techniques résidents et d'une
d'accompagnement d'infrastructures routières. La
équipe d'une cinquantaine d'agents techniques
priorité dans ce programme est donnée au riz. La
nationaux. La topographie est sous-traitée par un
réalisation de plantations villageoises de palmier
géomètre local et les travaux d'ouverture de pistes le
sélectionné est réservée prioritairement aux
sont par des entreprises de travaux publics locales.
membres des groupements de riziculteurs, les
La végétation arborée et arbustive est éliminée par
candidats à la culture du palmier sélectionné ne
tronçonnage et brûlée sur place. Les travaux manuels
manquant pas.
sont réalisés par les paysans bénéficiaires. Cette
Les objectifs du projet pour 1991 étaient les sui- participation aux travaux est une condition exigée
vants : 200 ha de bas-fonds aménagés, préparation pour l'attribution des parcelles.
de plants pour 100 ha de palmiers, 60 km de pistes
La surface attribuée est de 0,5 ha par chef de famille
d'accès, 20 km de routes en terre. De 1992 à 1994 :
en moyenne. Chaque journée de travail sur l'amé-
500 ha de bas-fonds aménagés, 600 ha de plan-
nagement fait l'objet d'une attribution d'une « in-
tations de palmiers sélectionnés, 150 km de pistes
demnité de subsistance li de 345 FG (120 FG = 1 FF).
d'accès, 140 km de routes en terre.
Le « paquet li proposé inclut:
Démarré en 1991, ce programme s'inscrit dans une
perspective d'aménagement de plusieurs milliers - l'aménagement permettant une maîtrise totale de
d'hectares en Guinée maritime. l'eau (voir description ci-après) pour la culture de
saison des pluies;
Description de la démarche - l'accès du bas-fond aux véhicules (piste d'accès et
périphérique) ;
Le projet a pour interlocuteur des groupements
- la formation des paysans aux techniques culturales
constitués à la faveur de cette opération.
(repiquage, désherbage, gestion de l'eau, entretien,
La question principale est relative aux aspects fon- récolte et battage) pendant deux campagnes;
ciers. Le projet se place délibérément à l'écart des - la fourniture des intrants (semences, engrais
situations foncières conflictuelles. Il est exigé un traitements phytosanitaires).
procès-verbal de réunion au cours de laquelle il est
affirmé, en présence du conseil des sages et du
Type d'aménagement
consei 1 de district, que chaque membre du
groupement a le droit d'aménager le bas-fond, de le Outre un aménagement simple en tête de bas-fond
cultiver et de le transmettre à ses successeurs, tout qui correspond sensiblement au type Il du PAG, le
ceci dans le respect des règles que se sera fixé le PRP développe essentiellement un aménagement du
groupement. Ce procès-verbal est contresigné par les type « au fil de l'eau li avec un ouvrage de prise sur
autorités sous-préfectorales et préfectorales. le cours d'eau, un drain central, des canaux d'ir-
rigation qui desservent les casiers à partir de
Le projet procède ensuite aux études suivantes:
l'ouvrage de prise et sont situés en périphérie du
- pédologie: sondage à la tarière avec élaboration périmètre (figure 3).
d'une carte d'aptitude des sols;
- topographie/hydrologie: vérification des con- Coûts et financement
ditions d'installation des ouvrages et estimation des
surfaces aménageables; Le montant global prévu pour la phase de 1992 et
1994 est d'environ six millions d'écus. Notons que
- tai Ile des famIlles avec actifs, occupations usuelles, les coûts correspondant à chaque composante ne
pratiques culturales; sont pas fournis. Cependant, les coûts directs d'amé-
- accessibilité du bas-fond. nagement à l'hectare (hors encadrement et frais
C. CHERON, S. DRAME, O. SOW
Canaux d'IrrIgaUon
1onguI~ lTIlIXI : environ 1000 m
Batardeau
~:4~12x'
FI ctNu mI'mun
+O,so/_1ll1oe
+ (),30 1foncl canal
COUPE
1
1
1
4.l!ll
0.80
" ..
0,20
PlAN PLAN
Fig"ure 3. Types d'aménagements et d'ouvrages développés par le projet SOGUIPAH et le Projet riz-palmier.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
généraux) ont été estimés à partir de l'expérience du Il s'agit d'une véritable monographie rurale dont la
projet SOGUIPAH en 1989 et 1990 : maîtrise qualité et l'importance sont évidemment en rapport
d'œuvre/topographie 500 FF, défrichement (abat- avec le temps qui a été consacré aux enquêtes (une
tage, tronçonnage, brûlage, essouchage) 1 750 FF, année).
creusement drains et canaux 670 Ff, terrassement
mécanisé pistes 1 460 FF, terrassement mécanisé L'AFVP a pour interlocuteurs privilégiés les paysans
digue 220 FF, ouvrages (béton, buses) 3 250 FF, exploitant le bas-fond, et dans un second temps les
notabilités villageoises. Les services spécialisés de
préparation des terres 750 FF, petit outillage 170 FF,
l'administration (agriculture et génie rural) sont
améliorations/finitions lors de la 2 e campagne
associés aux activités du projet (désignation d'ho-
830 FF, participation paysanne (estimation) 2 100 FF,
mologues).
soit un total de 11 700 FF
Les critères de choix (conditions physiques, acces-
La part paysanne dans ce coOt avoisine les 20 %, sibilité, motivation .. '> sont utilisés de manière
mais il est considéré que l'aménagement doit être classique pour la sélection et la programmation des
payé pour moitié par l'aide publique (subvention) et
interventions. La conception des aménagements se
l'autre moitié par les bénéficiaires. C'est pourquoi il
fait en concertation avec les populations concernées.
est prévu que, sur chaque récolte, soit prélevée une
Une convention faisant la part des obligations du
part qui corresponde au remboursement du « prêt li
projet et des obligations des bénéficiaires est signée
pendant une période qui dépend des rendements
par les représentants des exploitants du bas-fond et
obtenus. Par exemple, lors de la campagne 1991,
de l'AFVP. Elle est ensuite communiquée pour
800 kg de paddy seront prélevés par hectare pour les
information à la sous-préfecture.
dépenses d'intrants (engrais, pesticides) et 400 kg par
hectare pour le remboursement de l'investissement. Ensuite, l'organisation des travaux est discutée avec
les populations, qui doivent apporter une parti-
cipation bénévole aux travaux. Sous forme collective
pour les ouvrages collectifs, sous forme individuelle
L'Association française
pour les diguettes, le planage, les canaux et drains
des volontaires du progrès (AFVP) bordant chaque parcelle.
Les différentes méthodes - une action qui se veut «intensive. en termes d'aide
et de formation du paysannat (les paysans sont
d' intervention théoriquement « formés. en deux ans).
Le Projet agricole de Gueckedou (PAG) Les aspects les plus discutables et sur lesquels on
peut s'interroger concernent:
Ce projet a réussi en ce qui concerne l'introduction
- la capacité véritable des paysans en l'espace de
et la diffusion du « complexe bas-fonds. en Guinée
deux ans à assimiler l'ensemble des innovations et
forestière. L'effet en est bien visible dans les
des mécanismes d'une organisation complexe;
préfectures limitrophes et même au-delà.
- la vulnérabilité de l'édifice dans le contexte actuel
Le niveau d'intensification intermédiaire a permis de de la Guinée (l'option pour le libéralisme prise en
modérer le contrecoup de la réorientation du projet 1984 ne s'est pas concrétisée par une prise en charge
décidée en 1989 avec la reprise des activités sec- par le secteur privé de tous les besoins en transport,
torielles dans le cadre des projets nationaux (vul- approvisionnement et commercialisation du monde
garisation, semencier, recherche, .infrastructure rural) ;
rurale).
- les coOts relativement élevés des opérations et la
Les principes de réalisation (main-d'œuvre bénévole, difficulté pour l'administration d'accéder aux coOts
utilisation de matériaux locaux) permettent des coOts réels de chaque composante (on considère le paquet
extrêmement bas. En pratique, un aménagement dans son ensemble, qui comprend les hectares de
pouvait tout à fait être réalisé sans moyens financiers, riz, les hectares de palmier, les kilomètres de pistes et
rien que sur la base du conseil technique et du travail les appuis aux paysans) ;
paysan. Le résultat est remarquable. - l'appropriation foncière par le groupement au
Par contre, les points faibles de ce projet résident détriment des détenteurs traditionnels pourrait
dans son organisation, en raison d'effectifs plé- générer des tensions si on devait connaître quelques
thoriques, et dans l'absence de transparence dans la revers dans les résultats ;
gestion. - les activités agricoles des paysans sont déli-
bérément « orientées. vers la riziculture intensive,
En matière d'aménagement; il faut retenir que le PAG destinée à leur consommation propre certes, mais
avait atteint une cadence d'aménagement de 400 ha surtout à dégager des surplus dont a besoin
par an. Cette efficacité résidait dans le rOle de l'économie nationale, les appuis concernant la cul-
l'aménagiste, sorte de technicien n'appartenant pas à ture du palmier étant utilisés comme une incitation.
l'administration, présent sur le terrain et travaillant
directement avec le paysan dans les aménagements. Concrètement, le problème principal de cette
Cette efficacité et cette compétence sont reconnues opération pourrait se résumer par la question
non seulement par les cadres qui ont eu à les faire suivante: aura-t-on les moyens de maintenir la
travailler mais également par les paysans qui ont coûteuse structure de projet durant le temps,
continué à les mobiliser pour réaliser des amé- nécessairement long, indispensable à l'assimilation
nagements après démantèlement de la structure du paquet technologique par les paysans?
projet. Ce savoir-faire est intéressant dans le contexte
de privatisation actuel. Il pourrait préfigurer celui
d'entrepreneur de petits aménagements ou de L'AFVP
« tâcheron-aménagiste ., dont les prestations
seraient rémunérées à la tâche. Les avantages reconnus à \' AFVP dans sa méthode
d'i ntervention sont nombreux:
- on s'entoure de multiples précautions pour œuvrer
Le Projet riz-palmier (PRP)
dans un sens souhaité par les paysans et non «
Les points positifs de ce programme sont les sui- perturbant. pour les systèmes existants;
vants: - on travaille en étroite relation avec les populations
- une bonne capacité de réalisation des amé- bénéficiaires en les associant al.!,x prises de déci-
nagements (jI s'agit d'une' préoccupation affirmée sions;
dans la (Lettre de politique agricole) ; - on prend en compte les aspects relatifs à la gestion
- un paquet technologique élaboré qui doit équilibrée du terroir et du bassin versant;
permettre d'obtenir des rendements importants - on accorde une grande importance au suivi-
(supérieurs à 4 tonnes par hectare) de nature à évaluation, ce qui est du plus haut intérêt pour
donner une dynamique au programme; l'administration;
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
- la concertation et la collaboration sont déve- régie « autonome» avec rémunération sur objectifs
loppées avec les autres intervenants dans la zone (de type contrat d'entreprise) ;
pour donner le maximum de cohérence aux actions;
- faire participer les bénéficiaires au choix des
- le désengagement de la fonction d'opérateur est investissements et à leur entretien, et, lorsque la
une préoccupation matérialisée par les efforts de situation s'y prête, à leur réalisation;
formation et de structuration du milieu (souci de
pérenniser les actions). - réduire progressivement le nombre des projets
en cours en les incorporant ainsi dans un cadre na-
Les défauts principaux résident dans: tional;
- les importants moyens mobilisés pour les études - intégrer les financements extérieurs dans le cadre
préalables et le temps qui y est consacré; de programmés nationaux et de politiques homo-
- la faible capacité de réalisation, ce qui augmente gènes;
d'autant les coûts de structure. Cette faible capacité - minimiser les doubles emplois en n'excluant pas
peut provenir d'une disponibilité insuffisante de la le financement de projets sur des régions particu-
force de travail (ce qui n'est pas forcément à inter- lières (projets dits régionaux) par certains bailleurs de
préter comme u~e motivation insuffisante>' fonds;
- mettre l'accent sur la formation des cadres gui-
Comparaison des méthodes néens, afin de réduire progressivement les besoins en
Le tableau 1 fait ressortir les principales carac- experts étrangers.
téristiques relatives au PRP, à l'AFVP et au PNIR
(Projet national d'infrastructure rurale, voir ci-après).
Principes d'intervention du PNIR
En ce qui concerne les aspects économiques, il pour les aménagements de bas-fonds
apparait, au-delà de l'exactitude de certains chiffres,
qui n'est pas recherchée, que la stratégie développée Au titre des réalisations physiques du PNIR, il est
par le Projet riz-palmier se paie au prix fort (coût de prévu l'aménagement de 2 100 ha de bas-fonds. Ces
l'hectare aménagé le plus élevé et coût de la tonne aménagements seront répartis dans tout le pays, mais
de rendement supplémentaire également le plus une concentration des interventions est envisagée de
élevé>' L'AFVP est pénalisée par ses coûts de struc- part et d'autre d'un axe qui va de Mamou à
ture. N'Zerekore. Les principes de base qui doivent guider
les interventions sont les suivants.
Pour le PNIR, qui apparaît le plus performant, les·
chiffres annoncés sont basés sur les éléments de L'aménagement ne doit pas être imposé mais doit
l'évaluation. Un dispositif de suivi analytique des permettre une amé 1ioration des conditions de
coûts d'aménagement a été conçu justement pour production et s'intégrer au mieux au contexte social
vérifier ces hypothèses et améliorer éventuellement et agraire.
les stratégies.
Les paysans demandeurs doivent reconnaître dans
l'aménagement une amélioration foncière à
caractère productif, et participer à l'investissement
Le Projet national sous quelque forme que ce soit, le taux minimal de
participation exigé par le bailleur de fonds étant de
d'infrastructure rurale (PNIR) 20 %. Ce chiffre est indicatif et la priorité sera
donnée aux opérations pour lesquelles le niveau
Présentation d'engagement des populations est le plus élevé.
Rappel des principes généraux
Le niveau d'intensification visé tiendra compte de
Ce projet se place dans le cadre de la politique du l'environnement économique et des services. On
gouvernement guinéen dont les principes généraux évitera de placer le paysan dans un contexte de
peuvent se résumer comme suit: dépendance excessive par le fait d'options mal
- désengagement progressif de l'Etat des services que assurées ayant pour conséquence de laisser une part
le secteur privé peut fournir plus efficacement: ces de risque trop importante au seul paysan. La typo-
services comprennent en particulier la réalisation des logie des aménagements proposée (cf. « Typologie
infrastructures de développement rural et certaines des aménagements» ci-après) est évolutive et
études que l'administration ne serait pas à même de dépend tout à la fois des conditions physiques du site
mener à bien; les volumes des travaux en régie sont et des capacités d'appropriation des techniques par
appelés à diminuer et/ou évoluer vers un système de les paysans.
C. CHERON, S. DRAME, O. SOW
Tableau 1. Comparaison des méthodes d'intervention pour l'aménagement des bas-fonds en Guinée.
Projet riz-palmier AFVP PNIR
Cultures pratiquées Riz en saison des pluies Riz en saison des pluies Le choix des cultures est libre,
(un cycle) Vivrier/maraîchage en saison selon les régions: riz et
Palmier sèche maraîchage vivriers en saison
sèche
Type d'aménagement Maîtrise totale de l'eau Maîtrise élevée de l'eau Maîtrise progressive de l'eau
(deux types) Périmètres de 5 à 25 ha selon le type d'aménagement
Périmètres de 10 à 40 ha (de 1à IV) sur quelques hectares
(de < 1 à 15)
Nombre d'années 2 ans en Guinée forestière 2 ans (en haute Guinée) Expérience du projet agricole de
de référence et 1 an en Guinée maritime Gueckedou de 1980 à 1989
Vulgarisation/animation Deux campagnes 3 ou 4 ans avec actions Plusieurs années pris en charge
de structuration . par le service de vulgarisation
" Les coOts pondérés tiennent compte de la proportion que représente chaque type d'aménagement dans la programmation,
soit 25 % de type l, 20 % de type Il,45 % de type 111,10 % de type IV.
"" Estimation DNGR.
La réalisation des aménagements se fera avec l'appui doivent être conclus avec le démarrage des opé-
technique de l'administration tout en cherchant à rations.
s'appuyer sur des petits entrepreneurs et/ou des
tâcherons privés rémunérés sur la base de contrats,
pour tous les travaux qui ne sont pas directement
effectués par les paysans bénéficiaires. Description de la démarche
Le programme d'aménagement de bas-fonds fera
Les situations visées seront de faible superficie uni-
appel aux autres projets nationaux (vulgarisation,
taire, pouvant correspondre à des exploitations indi-
recherche, semencier, foncier rural). Le génie rural
viduelles ou à des groupes d'exploitations. On
sera prestataire de services en matière de conception
évitera, tant que les instruments administratifs et juri-
et de réalisation d'aménagements et s'intéressera
diques ne sont pas en place, des situations foncières
prioritairement aux bas-fonds actuellement en
conflictuelles ou non clarifiées.
exploitation, aménageables sans trop de difficultés et
L'entretien des aménagements sera à la seule charge dont les travaux pourraient être en partie réalisés par
des bénéficiaires. Des engagements préalables les paysans eux-mêmes.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
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Sur le terrain, la vulgarisation assurera le pilotage du IV, par exemple, selon la disponibilité de la res-
programme. Sur demande exprimée par les paysans source en eau, ou entre 1 et Il où on réalise un drain
intéressés, une équipe se déplacera sur le site en vue sans casiérage.
d'établir le diagnostic. Cette équipe sera composée
d'un chercheur, d'un vulgarisateur, d'un spécialiste
du génie rural et des paysans concernés. A ce stade,
Organisation
on devra décider si on engage ou non l'opération et Le dispositif institutionnel sur lequel reposera le
sous quelle forme. PNIR, et qui découle de la stratégie d'intervention,
Une fois la décision prise de passer à la réalisation, le est constitué, pour les aménagements de bas-fonds,
spécialiste de l'aménagement donnera son appui par la structure du génie rural, avec trois échelons:
technique aux paysans ou aux tâcherons pour exé- - l'échelon central avec la Direction nationale du
cuter les ouvrages. La mise en valeur et les mesures génie rural, qui dispose d'une division aménagement
d'accompagnement se feront avec l'appui du dis- hydro-agricole composée de quinze cadres pour la
positif de vulgarisation. conception, la méthodologie, les normes, la pro-
Sur le plan technique, il sera fait une iarge utilisation grammation et le suivi;
des photographies aériennes à différentes échelles: - l'échelon régional, avec le Bureau technique du
au 1/100 000 pour l'étude diagnostic et de la typo- génie rural (BTG), pour l'expertise technique, le
logie, au 1/20 000 pour la photo-interprétation des diagnostic, l'appui conseil à la structure préfectorale,
zones à aménager avec possibilité d'agrandissement, la maîtrise d'œuvre pour les aménagements com-
au 1/5 000 pour les projets d'aménagement. plexes ou de superficies importantes (notamment
ceux du type IV), la promotion du secteur privé
Dans le cadre du PNIR, il est prévu une couverture
(tâcherons, PME) dans les activités du secteur; la
photographique aérienne à l'échelle 1/20 000 sur
section aménagement hydro-agricole du BTGR
30 000 km environ, qui complétera la couverture
comprend six ingénieurs (génie rural, aménagiste et
JICA au 1/1 00 000 des an nées 80. agronome) ;
- l'échelon préfectoral, avec la section préfectorale
Typologie des aménagements du génie rural, qui comprend trois cadres chargés
La typologie proposée'pour les aménagements est des aménagements et dont la mission consistera
largement inspirée de l'expérience acquise dans le principalement en des identifications des sites, des
cadre du Projet agricole de Gueckedou. enquêtes et études préliminaires, de la conception et
de l'appui à la réalisation et à la gestion des amé-
Elle est définie comme suit:
nagements simples.
- type 1 : confection simple de casiers suivant les
courbes de niveau et planage; L'un des principes moteurs du PNIR réside dans sa
volonté d'évaluer les différents savoir-faire existants,
- type Il : type 1 + drains pour évacuer les excès
de les synthétiser, les adapter si nécessaire, et de les
d'eau;
utiliser pour l'exécution de son propre programme.
- type III : type Il avec réseau d'amenée et de dis- Une attention sera donc portée à toutes les expé-
tribution d'eau, y compris ouvrage de prise au fil de riences et il est prévu une action pilote confiée
l'eau; à l'AFVP pour tes~er les performances de la
- type IV : type III + petite retenue de stockage « démarche-système» dans la zone du projet
permettant une maîtrise totale de l'eau toute l'année. (cf. « Opération pilote avec l'AFVP » ci-après).
Cette typologie ne doit pas s'appliquer de manière Pour son démarrage, le PN IR bénéficiera du
rigide: redéploiement, dans les préfectures où sont prévus
- on recherchera, dans la majorité des cas, à atteindre des aménagements de bas-fonds, des agents du PAG
le type III, qui semble constituer le niveau optimal eu ayant acquis une compétence dans ce domaine.
égard à l'ensemble des facteurs à prendre en consi- En outre, une évaluation approfondie des résultats
dération ; c'est le niveau pour lequel on obtient des obtenus dans le domaine des aménagements de bas-
augmentations de rendement significatives sans avoir
fonds sera menée pour déterminer le degré de
à investir lourdement; « transposabilité » de la démarchè du PAG.
-la progressivité des aménagements ne s'impose pas
dans le temps et on pourra tout à fait entreprendre un
aménagement de type III ou IV sans être passé par Opération pilote avec l'AFVP
l'étape 1et Il ; Le PNIR mettra en place une opération pilote
- on conçoit assez facilement qu'il puisse exister des d'aménagement de bas-fonds, confiée l'AFVP et a
niveaux d'aménagement intermédiaires: entre III et dont les objectifs principaux sont la réalisation à titre
C. CHERON, S. DRAME, O. SOW
Tableau IV. Répartition des cultures dans le bas-fond réseaux sommaires d'irrigation devant permettre
de Peniasso (saison des pluies) l'épandage de la crue et assurer une submersion plus
(source: projet oc Eau-sol-plante ..).
uniforme des parcelles (figure 3). Dans la pratique,
Culture SUrface Pourcentage ces aménagements se sont révélés moins performants
Riz 70 45 que prévu.
Patate douce 37 25 Outre les difficultés d'ordre organisationnel (remem-
Cultures associées brement, insertion de la riziculture dans le système
(maïs, arachide, taro) 9 6
de production), leur mise en valeur s'est heurtée à
Manioc 8 5,5 des problèmes agronomiques et de gestion de l'eau
Arboriculture 6 4,5 non résolus par ce type d'aménagement. Les études
Jachère pour pomme de terre 4 2,5 menées par le projet Eau-sol-plante montrent que:
Zone non cultivée 4,5 3,5 -la maîtrise de la lame d'eau est illusoire sur les sols
Ut mineur du marigot 7,5 5 de bas-fond: pour maintenir une lame d'eau, il faut
Total 146 100 (suivant la place de la parcelle dans la toposéquence)
une qualité d'eau représentant trois à neuf fois les
seuls besoins de la culture (KRIER et SAMPARA, 1990 a,
Afin que le riz puisse supporter ou s'adapter à la b, c; LIDON et al., 1988, 1989) ; ces constatations
présence d'une lame d'eau, la riziculture est sont explicables par les très fortes perméabilités de
démarrée en pluvial et inondée lors de l'apparition ces sols (perméabilités horizontales de l'ordre de
des crues 30 à 45 jours après son semis suivant 10-3 m s-1, perméabilités verticales de l'ordre de
l'année pluviométrique, le type de bas fond et la 10-4 m ç1 ;
place de la parcelle dans ce bas-fond (KRIER et - maîtriser l'eau nécessite de concevoir des amé-
SIMPARA, 1990 a, b, c; LIDON, 1987 ; LIDON et nagements ou une gestion de l'eau permettant de
SIMPARA, 1988 ; LIDON et al., 1988, 1989 ; ALBERGEL, maÎriser la nappe (KRIER et SAMPARA, 1990 c; LIDON et
1989 ; lAMACHERE, 1984 ; LAMAGAT, 1979). al., 1989) ;
Ce système permet de satisfaire, grâce à l'épandage -la mauvaise maîtrise de l'eau sur les aménagements
des crues, les besoins en eau du riz en période cri- du type FED (battements de nappe, drainage intense)
tique et jusqu'en fin de cycle (figure 2). Une telle limite de façon importante les possibilités d'in-
technique induit des risques hydrauliques impor- tensification : les rendements moyens obtenus en
tants : pluies insuffisantes ou excessives pour
1988 sur 35 parcelles en milieu paysan, avec maî-
permettre la préparation du sol et/ou la levée des
trise de l'eau permise par l'aménagement et fumure
. semis; crue trop précoce ou trop importante noyant
vulgarisée (LIDON et al., 1989) n'ont été que de 2 100
le riz; crue trop tardive ne relayant pas les pluies kg ha-1 (écart-type: 851 kg ha-1).
assez tôt, entraînant un dessèchement de la culture;
décrue trop précoce ayant les mêmes résultats. Sur les sites non aménagés, où la nappe est régulée,
du fait de conditions naturelles favorables, comme la
Pour obtenir un minimum de maîtrise de l'eau, la
présence d'un verrou naturel en aval, les rendements
CMDT (Compagnie malienne des textiles) a réalisé, à
obtenus sont meilleurs et l'intensification devient
partir des années 70, un certain nombre d'amé-
intéressante (KRIER et SAMPARA, 1990 a, b; LIDON et
nagements de bas-fonds <tableau VO, essentiellement
sur des plaines de moyenne importance.
al., 1989). Les rend~ments obtenus en 1988 sur
6 parcelles paysannes dans ces conditions de milieu,
Le principal type d'aménagement (petits périmètres sans aménagement et avec une fumure vulgarisée
FED) est composé d'un barrage de dérivation et de l'illustrent: rendement moyen: 2 646 kg ha-1
Tableau V. Apparition des écoulements dans les bas-fonds en fonction de la pluviométrie (mm).
Bas-fond de Peniasso (bassin versant: 120 km 2), 1991 (source: projet oc Eau-sol-plante ..).
7.18 1 l
. , \ ,,' 1-
1
80
,,1\ 70
8,62
Il 1
60
,1
1
1
1"\
: 1 50
5,75
i\ A- -r -A~éqUatio~ entr)~~s: - 30
2,87
l
Démarrage de la mise /
-J.- "1
i ,"!
disponibles et,surface
i
irrig~ée_
1 1 1-
20
i""~L(
1.43
o
1/ Il ! 11- o 10
Figure 2. Comparaison mensuelle à Kléla des taux de satisfaction du riz en pluvial et des écoulements du Lotio
dépassés 8 années sur 10.
Tableau VI. Liste des aménagements de bas-fonds étudiés ou réalisés par la CMDT
dans la zone dépendant de la Direction régionale de Sikasso (source: CMD1).
-
p Prise d'alimentation
d'un canal d'irrigation
Prise d'alimentation
des parcelles
Prises d'alimentation
intercasier
Déversoir intercasier
-----
---------
-------- -.........
..... ,.
vf
--------_ 0 f
lA N HE",
RS 0 JR
Il t ~ • f ; III • Il
--------
..--------
SOU R C E FP/Pt1({/86
DEVERSOIR
70 à 100 cm
:c )t
Figure 4. Schéma d'un aménagement du type digue déversante avec tranchée d'étanché~é.
riennes. La pente dans la zone aval en amont du grossiers (KRIER et SIMPARA, 1990 aL Les pH sont
barrage est de moins de 1 % sur 1 km, de l'ordre de voisins de 5. L'indice de compacité est de 1,23.
2,5 entre 1 et] km, pour tèrminer à 4 %.
~-
CI ETP 2BB
-p
IBB
HOYENtE 1084.68
ECART TYPE: 276.
m POIUT5:32
Figure 6. Bilan climatique: cas de Kambo.
-3 -2 -1 01 1.'
CI.USS VARIATE lUI.
1 F 1
.0005 .005 .03 .10 .20 040 .60 .80.90 .~7 .995 999S
En 1990, 665 ha ont été cultivés, soit les deux tiers L'essentiel des revenus est réalisé à partir du coton,
du bassin versant (dont 20 ha dans le bas-fond>. la riziculture restant très marginale dans l'exploi-
tation.
Les cultures pratiquées sont résumées par le tableau
VIII.
L'un des objectifs de la CMDT est de diversifier les
Près de 22 % des UPA ne disposent d'aucune sources de revenu et, de ce fait, de promouvoir la
parcelle dans le bas-fond. La mise en valeur des bas- riziculture dans cette région où la demande des villes
fonds est essentiellement le fait des femmes (78 % n'est pas assurée par la production locale.
Paramètres morphologiques
Classe du relief (méthode Rodier Auvray) R2
Classe du relief (méthode OIivry) R2-o Altitude Superficie %
Classe de perméabilité P3-4 m km'
.?- ..'; --
/
Description
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e,1I ..... ...... j • .j; '.01
V'
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96
Site aménagé
95
Profil en long
94
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'l!lr'I"1'"---1!!-~':..!.....2j" .!:..."---"+'----"-~
•
- - Piste Kadiolo-Kambo
_'_0 Digue de pêche
Ancien/Nouveau
~ village de Kambo
".,. JardinNerger
Echelle
'----'
100m
Vue de dessus
-f
..
'.
.
1 Protection digue
2 Digue terre compactée Coupe type
3 Filtre anti-érosif de
4 Contrefort (pierres libres) l'ouvrage
-
N ord
5 Mur maçonné
6 Drains naturels (sable)
7 Barrière anti-drainage
Aval
1 Vanne
.-' ..'
2 Bajoyer
• _ •• ' 3 Mur maçonné
~îW
-' ~" 4 Digue de protection
~~ • .'. '.> . 5 Contrefort aval
Echelle 0\ '. ""'-
1 miL...,
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s
J
1
Profil transversal
du bas·fond
au niveau du site
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V /
a 0.1 0.2 0.5 0.4 0.5 0.8 0.7 0.8 0.9 a
0.'1. 0.5 0.2 0.1 -0.4--0.3-0.2-0.1 0 0.1 0.2 0.3 DA· 0.5 0.6 0.7 0.8 0.0
Hauteur ID Hauteur In
Figure 12. Courbe hauteur-volume caractéristique Figure 13. Courbe hauteur-surface inondée
de la retenue. caractéristique de la retenue.
Tableau XI. Nature, quantité et qualité • Le gradient hydraulique de la nappe aval i (en m
des observations hydrologiques.
m-1). Calculé entre le piézomètre 50 situé à 12,5 m
Rubrique 1988 1989 1990 en aval du barrage et le piézomètre 53 situé à 194 m
Pluviométrie en aval (paramètre d'évaluation du débit dans la
Pluviomètre 3 mesure où le niveau général de la nappe baisse).
Pluviographe 1 • La loi de Darcy pour évaluer les débits évacués en
Quantité jours de pluie 74 aval, qi = Ti x li, avec:
Qualité (année) Incomplète Complète Complète
Ti : transmissivité de la nappe en m2 S-l) ;
Umnigraphie
li : pente de la nappe (en m m-1) au jour i ;
Station 2 2
Quantité Continu Continu Continu qj : débit (en m3 par m de largeur du bas fond) au
Enregistrement jour i.
Qualité (année) Incomplète Complète Complète • La loi d'approximation des débits infiltrés sous une
Piézométrie parafouille (à laquelle est assimilée la tranchée
Piézomètre 15 36 36 d'étanchéité) : q = (K x H 3,14 ) x Log [a/c + «a/c)2
Puits villageois 19 19 _1]1/2 avec le a li puissance de la nappe (m), le c li
Piézographes 2 3 profondeur de la parafouille (m), K perméabilité (m
Quantité 1/5 jours 1/5 jours 1/5 jours çl), H différence de charge entre amont et aval (m).
Qualité (année) Incomplète Complète Complète Pour vérifier le domaine d'application de cette
Evaporation relation, on s'est assuré que la valeur du Log était in-
Bac flottant Année dépendante du niveau de la nappe en aval (coef-
complète
ficient de corrélation 0,15 pour 25 couples de
Jaugeages station amont: 10 jaugeages entre cote 0-78 cm,
courbe d'étalonnage bi-univoque.
mesures).
Jaugeages station aval: 132 jaugeages, 3 courbes
d'étalonnage suivant le nombre de batardeaux.
Malgré les incertitudes sur les propriétés hydro-
pédologiques du milieu, la modélisation montre
(tableau XII) l'importance de l'effet de la tranchée
d'étanchéité. Est mise en évidence la présence d'un
Efficacité de la tranchée d'étanchéité seuil naturel comme le laissait supposer la recon-
naissance des sols au niveau de la digue (figure 15).
Son évaluation a été faite en prenant en compte les
paramètres suivants. Pour évaluer l'effet pratique de la tranchée d'étan-
chéité, nous avons comparé la simulation de la
• Les volumes disparus dans le barrage. volume vidange de la retenue avec et sans tranchée d'étan-
disparu: Vu ; volume évaporé: Ve (évalué grâce au chéité.
bac flottant) ; volume infiltré: Vi ; volume d'apport :
Va. Vu = Ve + Vi - Va durant la période d'étude Sans tranchée d'étanchéité, le débit (en m 3 çl)
choisie (fin décembre Va = 0) ; par mètre linéaire d'ouvrage )a été évalué par l'équa-
tion:
• La relation existant entre la charge et le niveau de Q=KxHxb/(b+a)
la nappe en aval. La charge est théoriquement pro-
portionnelle aux infiltrations; le niveau de la nappe avec:
est une des principales caractéristiques des écou- b: puissance de la nappe sous l'ouvrage (m),
lements en aval: a : largeur de la l'ouvrage (m),
- Hi : différence de charge (en m) entre amont et aval K: perméabilité horizontale (m S-l),
du barrage; H : charge hydraulique (m).
- hso : niveau du toit de la nappe aval (12 m en aval), Le tableau XIII en donne les résultats et montre
au jour i (en m) (par rapport au zéro du nivellement l'intérêt de la tranchée d'étanchéité: durée de
des mesures) ; vidange allongée d'une vingtaine de jours.
- Hi = 0,186 h iSD + 0,619 (~= 0,73). Le tableau XIV illustre l'allongement de la durée de
présence de la lame d'eau due à la tranchée suivant
• La perméabilité horizontale estimée à partir les zones (hypothèse: puissance de la nappe 2,50 m,
des mesures in situ (Kh compris entre 2,7 et 5 . 10-3 s perméabilité horizontale 3,8. 10-3 m-1).
m-1).
On remarquera d'autre part que, pour assurer la
• L'incertitude sur la puissance de la nappe aval longévité de l'aménagement, une telle tranchée
(variant de 2 m à 2,50 m). d'étanchéité s'impose pour satisfaire aux critères de
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
Q
N
N
\l Pluviomètre
~ P1uviographe
~ Station
~ limnigraphique
Q Piézographe
.: Piézomètres Q Piézographe
• Bac d'évaporation
--- Piste
__ Digue
1 <oh.,,, .: Village
SOOm
-
9-6SO ro
irallsect
SOO m
Figure 14. Dispositif de mesure mis en place sur le bas-fond et le bassin versant de Kambo.
perte de charge sous l'ouvrage donnés par la règle de débits), rapport des crues 91,3 % (rapport estimation
Lane (pour un coefficient de Lane de 1,4 ~ classe de des fortes crues; moyennes sur 3 ans) i
sols filtrants - , la profondeur de la tranchée
-les pertes par évaporation (ETP Sikasso) i
d'étanchéité devrait être de 1,5 m compte tenu des
caractéristiques de l'ouvrage). - les pertes par infiltration estimées à une descente
du plan d'eau de 2 cm/jour (valeur moyenne
mesurée et correspondant aux résultats des
simulations) i
Sécurisation de la riziculture
-les apports pluviométriques i
Méthode utilisée
-les déversements au-dessus de la cote du déversoir
Cette estimation a été faite en couplant plusieurs central et évacuateur de crue
modélisations (PARIENTE, 1990) .
• Une modélisation du statut hydrique du sol, avec
• Une modélisation journalière du fonctionnement et sans aménagement:
du barrage, intégrant:
- avec aménagement, on a considéré que la réserve
- les apports d'une modélisation des écoulements en eau du sol utilisable par la plante (RU) était pleine
(modèle CEMAGREF-GR3 (EOIJATNO et MICHEL, 1989) lorsque le niveau de la nappe était à moins de 0,2 m
calée sur les mesures pluie-débit des trois années de de la surface du sol (0,2 m profondeur de l'enra-
suivi (ALBERGEL, 1989; ALBERGEL et al., 1991 ; GUIGEN, cinement du riz évalué in situ) i
1990 a, b,. GUIGEN et PARIENTE, 1990 ; PEPIN, 1989 a,
b ; PEPIN et PARIENTE, 1990) i son calage s'est avéré - sans aménagement, on a considéré que, lorsqu'il y
particulièrement satisfaisant (figure 16) : critère Nash avait écou lement,la nappe était affleurante et
54,4 % (seuil calage acceptable 50 %) erreur de descendait de 0,02 m/jour dès que les écoulements
bilan 5,2 % (erreur relative sur l'estimation des s'arrêtaient de façon significative.
B. LIDON, M. SIMPARA
Tableau XII. Evaluation par modélisation de l'effet Tableau XIII. Durée de vidange de la retenue en fonction
de la tranchée d'étanchéité. de la présence ou non d'une tranchée d'étanchéité.
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Distances cumulées
Figure 15. Profil transversal de répartition des différents types de sol au niveau de l'aménagement.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
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Figure 16. Modélisation des débits: comparaison des débits simulés et observés (modèle GR3).
L'analyse des fréquences au dépassement des Année Avec aménagement Sans aménagement
ETR/ETM simulés pour les différentes zones montre lH lM lB ZH lM lB
que leur loi de distribution est de type normal. Le 1963 88 88 88 83 86 88
tableau XVI en donne les paramètres pour les
1964 87 87 88 82 85 87
différentes situations.
1965 91 94 94 78 81 83
Cette constatation a per!'1li~.de caradériser les seuils
1966 87 87 87 76 79 81
ETR/ETM correspondant, sans aménagement, aux
bonnes années (33 probabilités de dépassement), 1967 92 92 92 76 79 81
mauvaises années (66 de probabilité de dépasse- 1968 88 89 89 79 82 84
ment de ETR/ETM cycle) et moyennes années 1969 93 93 93 82 85 87
(valeurs de ETR/ETM comprises entre ces seuils).
1970 87 91 93 72 75 n
Pour chacun de ces cas de figure et suivant les diffé- 1971 79 82 85 92 95 67
rentes zones, on a ainsi évalué le pourcentage 1972 86 91 94 72 75 n
moyen d'amélioration apporté par l'aménagement
1973 84 87 90 69 72 74
(tableau XVII).
1974 91 93 94 84 87 89
Il en ressort que l'efficacité hydraulique de ce type
1975 90 91 92 69 72 74
d'aménagement est optimale en années moyennes et
sur les zones moyennes et basses 1976 83 90 91 76 79 81
19n 80 84 89 66 68 70
1978 88 88 88 79 82 84
1979 62 66 66 57 59 61
Intérêt économique 1980 90 90 90 79 82 84
de l'aménagement 1981 72 78 84 60 62 64
,."...'"'>......................'"'>.......~~...~-.:...........~......" "....................~...~..."(O'..."'Qo....~..........................................'"'>......." 0................~"""*-"*-"(o............................' :................."'......:-....~
1982 38 38 38 35 36 38
Pour estimer l'intérêt économique de l'aména~
gement, on s'est servi d'une fonction de produdion 1983 30 30 30 27 28 30
mise au point en COte-d'lvqire sur riz pluvial (FOREST 1984 54 59 65 50 52 54
et REYNIERS, 1985), en l'absence de références agro- 1985 65 76 84 61 63 65
hydrauliques suffisantes dans la zone:
1986 80 84 86 69 72 74
R/Rmax. = 1,92 x ETR/ETM cycle - 0,92. 1987 84 87 89 67 69 71
Pour caler la valeur de Rmax., on s'est servi des lH zone haute.
résultats d'enquêtes agronomiques effectuées sur lM zone moyenne.
l'aménagement (KRIER et SIMPARA, 1990 den 1990 : lB zone basse.
Tableau XVI. Paramètres des lois normales Tableau XVIII. Variation des rendements moyens
de distribution des différents indices interannuels simulés avec et sans aménagement (t ha- 1).
de satisfaction suivant les zones.
Zone Zone Zone Ensemble
Zone Moyenna (%) Ecart-type haute moyenne basse aménagement
Avec aménagement ZH 78,76 16,69 Sans
aménagement 1,26 1,40 1,50 1,44
ZM 81,4 16,52
Avec
ZB 83,16 16,51 aménagement 1,84 1,99 2,09 2,03
Sans aménagement ZN 68,44 14,31 Gain dû
ZM 71 14,91 à l'aménagement +0,58 +0,59 +0,59 +0,59
ZH : zone haute.
ZM : zone moye.nne. Tableau XIX. Evaluation de la durée d'amortissement
ZB : zona basse.
de l'aménagement (en années).
Tableau XVII. Amélioration moyenne du taux % subvention Sans intensification Avec intensification
de satisfaction des besoins en eau des cultures (en %) 75 3 2
sous l'effet de l'aménagement.
50 6 4
Années Zone Zone Zone % moyen 25 10 6
haute moyenne basse
0 17 9
Mauvaises 10,5 14,07 14,84 13,13
Moyennes 15,78 19,81 23,0 19,53
Bonnes 11,99 9,3 7,1 9,46 - a induit un certain nombre d'activités annexes
% moyen 12,75 14,39 14,98 (pêche, petit maraîchage le long de la retenue),
- rendement moyen (résultat d'enquêtes) : 2 100 kg Pour estimer l'intérêt de l'intensification, on s'est
ha-1 ; rendement potentiel calculé: 3 000 kg ha-1 • référé aux résultats agronomiques obtenus par le
programme 1ER-CI RAD de riziculture inondée
Le tableau XVIII évalue sur les 25 ans de simulation
(rendement moyen interannuel : 3 t ha- 1 ). Les
les rendements moyens par zone et sur l'ensemble de
charges d'intensification afférentes sont estimées à
la zone aménagée avec ou sans digue et sans inten-
700 FF par hectare. Nous avons calculé la durée
sification.
d'amortissement de l'ouvrage avec pour hypothèses:
En fait, la digue a un effet régulateur en aval (de un taux d'actualisation de 4 % ; des frais d'entretien
l'ordre de 1 ha) et peut être assimilée à une zone à annuels de 1 % du prix de l'ouvrage; 8 années sur 10
maîtrise au moins égale à une zone haute. l'agriculteur a au moins le même bénéfice que sans
aménagement, tout en remboursant les frais
Dans ces conditions, le coût à l'hectare de l'amé- d'intrants liés à l'intem;ification et la redevance.
nagement serait (en faisant l'hypothèse que les frais
d'étude seront pris en charge par un financement Le tableau XIX résume ces résultats et montre d'une
extérieur) de 5 150 FF. part que, lorsque l'aménagement est subventionné à
plus de 50 %, l'intensification joue peu sur sa durée
En estimant à 1 % les frais d'entretien (a priori mi- d'amortissement, d'autre part que l'intensification
nimes, le seul risque étant lié à une crue excep- permet d'amortir l'aménagement sur une durée
tionnelle déplaçant les pierres libres en aval) et à 4 % raisonnable, même sans subvention.
le taux d'actualisation, en 9 ans, sans changer les
pratiques culturales, l'aménagement serait renta- Reste la question du réalisme de l'hypothèse sur
bilisé. l'accès des rizicultrices aux intrants.
L'aménagement réalisé par les Volontaires du
progrès n'a été facturé que 12 000 FF, soit 1 860 FF Si la subvention généralisée n'est pas non plus une
l'hectare. On comprend, dans ces conditions, le vif solution, la diminution du coût des aménagements
intérêt des paysans pour cet aménagement qui: reste la seule alternative envisageable. Une dimi-
nution du coût financier de 25 % devrait être
- sera rentabilisé en deux campagnes (prix du pad- possible en augmentant l'aire d'influence du barrage
dy : 1,40 F/kg) ; par des ouvrages en cascade.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
~'«-.~""""""""'\»..~~"«o».~"'~"'''o»>.-.o.. ...
-.o..'''''''''''''''''''''''''''''''"''»».''''''~'».''''Io»».~''''Iôo..~-.ooooo.
Les traditions socio-culturelles et l'absence d'une - des techniques de diagnostic rapide permettant
action de vulgarisation axée sur la riziculture d'évaluer la puissance de la nappe, la présence de
féminine font que l'accès des femmes aux intrants seuils, l'existence d'un débit de base significatif;
risque à court terme d'être difficile. - des études sur les normes de conception et de
dimensionnement des ouvrages, basées sur les
Ce type d'aménagement semble tout à fait adapté conclusions du diagnostic rapide.
pour s'intégrer dans une stratégie d'aménagement du
terroir prise en charge par les associations villa- Il fa.udrait pour cela poursuivre dans un cadre
geoises. pluridisciplinaire les recherches sur:
Sans subvention, cet objectif pourrait être atteint - l'hydrosystème bas-fond/baSSin versant, en
dans un contexte similaire: particulier la dynamique des nappes;
- en réduisant le coOt à l'hectare de l'ordre de 25 % -l'interaction entre description du paysage (morpho-
par une augmentation de l'aire d'influence du pédologie, couverture végétale et arborée) et
barrage (aménagements en série) ; fonctionnement hydrologique et hydrogéologique du
bas-fond;
- en évaluant plus précisément l'impact socio-
économique de l'aménagement sur l'activité - les critères de régionalisation de ces recherches;
villageoise ; - l'amélioration des techniques culturales en tenant
- en étudiant les possibilités d'amélioration de la compte de l'interaction entre dynamique de l'eau et
gestion de l'eau de la retenue et des pratiques comportement de la culture (limitée dans cette étude
culturales actuelles (en particulier, calage des cycles, à ETR/ETM) en conditions hydromorphes et avec
variétés plus adaptées, semis direct ou repiquage fluctuations de la nappe ;
suivant les zones) (SANOU, 1990). - l'impact sodo-économique de ces aménagements
La réussite de l'aménagement c Kambo » est liée à un et les critères décisionnels permettant d'évaluer la
contexte agro-écologique favorable; la fertilité des priorité à leur donner dans le cadre d'une politique
sols n'est pas un facteur limitant en culture tradi- de gestion des terroirs.
tionnelle, il existe un débit de base signific'atif à ce
niveau du bas-fond et un seuil naturel. Vulgariser sur
d'autres sites cette technique d'aménagement
suppose qu'on soit à même d'identifier ces condi-
tions favorables. Références bibliographiques
Dans d'autres situations telles que les c grandes AHMADI N., DAMAY G., DIABY M., HUSSON O.,
plaines », les travaux de recherche (AHMADI et al., TRAORE B., 1990. Projet riz inondé IER-IRAT. Rapport
d'activité. Hivernage 1989. Commission technique
1990 ; AHMADI et al., 1991 ; AHMADI et DIABY, 1991 ;
SRCVO, 1ER Mali, IRAT, 53 p..
SRCVO, 1990 ; HUSSON, 1990) tendent à montrer
qu'au contraire, sans aménagement, une inten- AHMADI N., DEMAY G., TRAORE B., HUSSON O.,
sification à raisonner en fonction des risques hy- 1991. Projet riz inondé IER-IRAT. Rapport analytique
driques est économiquement intéressante. Seul le Hivernage 1990. Deuxième partie. Agronomie. Système.
recours à des ouvrages lourds semble permettre une 1ER Mali, IRAT, 80 p. '
régularisation des flux hydriques. Cela suppose une AHMADI N., DIABY M., 1991. Projet riz inondé IER-
intensification importante de la culture pour renta- IRAT. Rapport analytique. Hivernage 1990. Deuxième
biliser de tels investissements. partie. Amélioration variétale du riz. 1ER Mali, IRAT, 28 p.
B. LIDON, M. SIMPARA
ALBERGEL j., 1989. Rapport de mission à Ouagadougou, LAMAGAT j.P., 1980. Région sud du Mali. Bilan des
Bamako et Sikasso, du 13 au 14 février 1989. Programme observations hydrologiques, débits spécifiques
CEE-CIRAD. décennaux. Bamako, ORSTOM.
KRIER D., SIMPARA M., 1990. Résumé des résultats ROUSSEAU V., 1991. Caractérisation d'un bas-fond de la
obtenus sur le fonctionnement hydrique des bas fonds au région de Sikasso, Mali. CIRAD-CNEARC, 15 p.SANOU
Mali. 1ER. j., 1990. Projet Kadiolo, rapport sur le suivi rizicole 1987-
1989. AFVP, 37 p.
LAMACHERE j.M., 1984. Etude hydrologique des plaines
de Niena Dionkele et Foulasso Lelasso. Ouagadougou,
ORSTOM, 387 p. SRCVO, 1990. Projet riz inondé IER-IRAT. Synthèse.
Rapport d'activité. Hivernage 1989. 1ER Mali, IRAT, 5 p.
LAMAGAT j.P., 1979. Région de Sikasso, le 'Kobafini à
Loudouni, débits journaliers, apports annuels, crue de VAKSMAN M., 1990. Modèle Bipode, notice d'utilisation.
projet. Bamako, ORSTOM. Montpellier, CIRAD-IRAT.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD,1993
469
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
sont des caractères qui les différencient des terrains inselbergs granitiques, schisteux, basaltiques). Les
cultivés de pente, dont le bilan hydrique s'est zones d'épandage des plaines sédimentaires
appauvri par le ruissellement et la baisse de l'offre endoréiques (plaine du Gondo et zones ensablées) et
pluviale. Ce contraste a conduit certains (BERTON, les thalwegs des collines birrimiennes (pente
1988 ; Réseau R3S, 1986) à créditer les bas-fonds supérieure à 1 %) ne sont pas des bas-fonds
d'un potentiel à mettre en valeur pour accroître les proprement dits.
productions vivrières de ces régions devenues très
déficitai res.
Les aménagements traditionnels (retenues pour Caractérisation des bas-fonds
l'irrigation) imposent souvent la création d'ouvrages de la zone granitique
massifs, dont le coût et le risque d'échec élevés La morphologie des bas-fonds de Bidi suit assez bien
s'accompagnent parfois de conditions sociales et la description faite par RAUNET (1985) pour les bas-
écologiques défavorables. Aussi les intervenants fonds soudano-sahéliens sur substratum granitique.
(ONG, fonds nationaux d'équipement) demandent- Ils constituent le réseau hydrographique principal,
ils des propositions d'alternatives aux chercheurs, dont la forme en le baïonnette» traduit les principales
compatibles avec les principes de participation et de fractures du socle, parfois des obstacles constitués
le gestion de terroir ». En revanche, une demande
par des dépôts sableux dunaires. Leur altitude s'étage
fréquemment exprimée par les populations pay- de 330 à 280 m. Ils s'impriment dans le paysage au
sannes porte sur la régénération des ressources en relief adouci de la pénéplaine, formé de glacis et
eau accessibles aux moyens traditionnels, lesquelles pseudo-glacis, renforcé sur certains interfluves par
sont fréquemment liées aux bas-fonds ou situées à des cuirasses plus ou moins démantelées, témoins
proximité (nappes d'alluvions, nappes d'altérites.. .l. d'anciennes surfaces d'aplanissement (altitude
Cette demande est aussi motivée par le dévelop- 330 m) ; à l'approche des inselbergs birrimiens, vers
pement du maraîchage, relancé par diverses la tête des bas-fonds, les témoins cuirassés s'élèvent
organisations. Des questions 1iées entre elles mais à 360 m ou à 390 m.
plus ou moins contradictoires se posent donc:
- Les petits-bas-fonds ont-ils un rôle à jouer dans une Latéralement (figure 2), les bas-fonds sont constitués
stratégie vivrière? Peut-on s'appuyer sur les pra- d'une zone centrale de largeur variable, qui
tiques et savoirs existants, faut-il innover radica- correspond à la zone inondable, et de deux bandes
lement et introduire l'irrigation, ou existe-t-i 1 d'autres latérales qui se raccordent aux bas de pente. Lorsque
solutions? le thalweg est encaissé, cette pente de raccord a une
morphologie convexe et est appelée « chanfrein»
- Peut-on envisager la restauration des réserves en (MARCHAL, 1983). Ce raccord est aujourd'hui géné-
eau souterraines avec des moyens peu onéreux et ralement érodé. Un processus d'érosion hydro-
sans perturber les milieux cultivés ou pâturés envi- éolienne, déclenché par la mise en culture et l'utili-
ronnants? sation en voie de communication, est à l'origine de
- Est-ce que la mise en œuvre de tels changements cette évolution (SERPANTIE et al., 1988l.
induira ou nécessitera une évolution sociale?
Quelles seront les conditions nécessaires à une Long de 30 km, le bas-fond de Bidi peut être
stabilité des résultats? décomposé en quatre parties:
- un segment amont, dont la pente ne dépasse pas
Nous tenterons de répondre à ces questions en
1 %; le profil transversal est concave et la largeur de
termes agronomiques, hydrologiques et anthro-
la zone centrale est inférieure à 50 m ( bassin versant
pologiques. Mais il faut d'abord connaître ces mi-
de moins de 10 km 2 ) ; les principaux affluents du
lieux et comprendre la place qu'ils tiennent dans les
bas-fond ont les mêmes caractères;
systèmes naturels et agraires. A partir de là, on peut
poser la problématique de l'aménagement, et - un segment médian (bassin versant de moins de
explorer diverses alternatives par le biais d'enquêtes 200 km 2 ), constitué d'un chapelet de petites
et de tests réalisés en partenariat. « plaines» plus ou moins encaissées; la pente varie
de 2 à 4 pour mille suivant que le fond est élargi (200
m) ou qu'il s'agit d'un segment de transition, souvent
rétréci au niveau d'affleurements de carapace; le
Un milieu hétérogène et évolutif profil transversal y prend alors la forme d'un V évasé
<..;·:..--:..» »...:-:-...:-....-..::~x·:v............:-.......:-.............-..:·:-....--:~--:-:·x·:<"':<·:-:->...:-.........:.........;-:.::..;.:;..;..;..;,·:·:·..·:·:..;·x-:-:-.-.:..•..·:-x-:·:·x·:-:·:·:·:-:·:·:·:·..·:·x·:·:-:·..·:-:·:-:v....x incisé d'un lit mineur étroit et peu profond;
Au Yatenga, région nous servant de modèle pour les - un segment aval (280 à 300 m d'altitude), où la
zones soudano-sahéliennes du Burkina Faso (fi- pente est inférieure à 2 %0 ; le fond se régularise en
gure 1), les bas-fonds étudiés ici ne s'observent que une plaine de 300 m de large jalonnée de mares
dans les régions à relief marqué (pénéplaines à temporaires;
J.M. LAMACHERE, P. MAIZI, G. 5ERPANTIE, P. ZOMBRE
2° 2°
NIGER
MALI
Ouagadougou
Koudougou •
•
Léo
. BENIN
GHANA
_ Frontières
~ Rivières
COTE-D'IVOIRE
o 50
,
100 150
, !
200 250 km
• Villes !
De même, la flore herbacée, dominée par les mètres et 3 pluvioSraphes, pour une superficie de
espèces annuelles de milieux secs dans le segment bassin de 47,5 km , soit une mesure pour 8 km 2 •
amont, s'enrichit vers l'aval en graminées de milieux Trois stations hydrométriques ont été installées sur
humides: Panicum laetum, Oryza barthii, Rottboelia une distance de 1,5 km, étalonnées pendant 6 années
exaltata, Andropogon gayanus. consécutives. Un réseau piézométrique a été installé
sur 5 lignes chevauchant l'axe du bas-fond. Chaque
ligne était composée de 5 à 7 piézomètres répartis sur
Régimes hydriques une distance de 200 m. La fréquence des relevés, ef-
fectués à la sonde lumineuse, a été fixée à un tous les
Le régime d'inondation des bas-fonds (durée, vitesse 15 jours en saison sèche, un tous les 3 jours en saison
et hauteur des lames d'eau) et le régime des eaux des pluies. Le choix des sections de mesures hydro-
souterraines dépendent principalement de l'inter- métriques et piézométriques a été réalisé de manière
action entre !e régime des pluies (averses violentes à pouvoir étudier l'influence locale d'ouvrages de
produisant du ruissellement et bilan hydrique retenue construits en 1986 et en 1987-1988.
excédentaire au mois d'août) et les constituants
physiques du paysage. . Le régime des pluies et l'évolution des états de
surface apparaissent comme les éléments les plus
Afin de hiérarchiser ces facteurs, un dispositif hydro- fi uctuants des facteurs expl icatifs. L'analyse du
métrique a été installé en 1985 et a fonctionné climat a été réalisée à partir de la série climatique du
jusqu'en 1991 sur le bassin versant qui alimente en poste météorologique de Ouahigouya, fonctionnant
eau le bas-fond de Bidi, bassin défini par la section de depuis 1920. Ce poste est situé à 35 km au sud de
Gourga (située sur la zone médiane du bas-fond). Bidi, aussi faudra-t-il systématiquement considérer
Une station météorologique complète a été installée les caractères climatiques (pluviosité, longueur de la
à quelques kilomètres en aval de cette section. Le saison) comme légèrement surévalués. La figure 4
réseau pluviométrique était composé de 5 pluvio- montre l'évolution de l'offre moyenne quotidienne
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1920 1940 19GO 1980 2000 l:: 1920 W40 19GO 19BO 2000
en eau pendant la saison des pluies, que l'on peut Tableau II. Ecoulement et pluviométrie
annuels médians et décennaux.
comparer au régime supposé peu variant de l'ETP.
On y voit une longue période excédentaire suivie Année Décennale Médiane Décennale
d'une période déficitaire. Le pic de 1950 s'est sèche humide
accompagné ainsi d'une période de reprise des Fréquence 0,1 0,5 0,9
sources. La végétation abondante et le bilan hy- Ecoulements (10 6 m3) 0,2 1,1 2
drique excédentaire donnaient temporairement aux
Pluie (mm) 300 450 604
bas-fonds un caractère marécageux que l'on ne
retrouve aujourd'hui que dans les plaines d'exutoire. Coefficient d'écoulement (%) 1,4 5,2 7
Si l'on s'intéresse à présent à la durée de la saison
pluvieuse où les inondations sont possibles (c'est-à-
bassin versant: Les écoulements annuels médian,
dire arbitrairement de la première décade où P
décennal sec et décennal humide sont évalués par
> ETP/2, sans sécheresse ultérieure de plus d'une
un ajustement statistique à la série des 7 années
décade, à la dernière, sans sécheresse antérieure), on
d'observation. Les écoulements sont alimentés
constate (figure 4) :
exclusivement par le ruissellement.
- que le début de la saison des pluies est très va-
riable ; de surcroît, sa date moyenne pendant la L'étude des crues met en évidence un comportement
période 1969-1985 a subi un retard d'une décade de bassin assez éloigné des normes fixées par les
par rapport à la période 1920-1968; mais cette abaques Rodier-Auvray en ce qui conceme le temps
analyse grossière cache le fait que certaines périodes de montée et le temps de base des crues. L'hydro-
sont plutôt précoces (1926-1934, 1953-59, 1978- gramme de la crue du 13 juillet 1986, correspondant
81), d'autres plutôt tardives (1920-25, 1946-53, à une pluie de forte intensité et de courte durée, est
1967 -77, 1982-90) ; représenté en figure 5. Les paramètres de cette crue
sont très proches de ceux de la crue de fréquence
- que la fin de la saison des pluies est un peu moins
décennale, qui sont les suivants:
variable, régulièrement centrée sur le 20 septembre;
il n'y a pas de relation entre les deux dates. - coefficient de ruissellement: 20 % ;
De ce fait, la durée de la saison est une donnée très - temps de montée: 2 h 30 ; temps de base 9 h ;
variable (figure 4), mais passant par des périodes de - débit moyen: 20 m3 s-1 ; débit maximal 40 m3 s-1.
hauts et de bas correspondant aux périodes d'avance
ou de retard de l'arrivée des pluies. Avant 1968, le Le débit maximal de valeur décennale a ainsi une
taux de saisons de moins de 90 jours est de 1 pour 7. valeur double de celle qui est obtenue à partir des
abaques Rodier-Auvray. L'écart est dO essentiel-
De 1969 à 1985, il est de 1 pour 3 et, de 1969 à
1991, il a augmenté à 1 pour 2. Entre 1981 et 1991, lement à une estimation erronée du temps de base.
.il y a eu 7 années à moins de 90 jours. Dans le même Cette spécificité du bassin versant a été prise en
temps, la variabilité interannuelle des durées de compte dans le calcul des ouvrages construits dans le
saison s'est accrue. Mais la relation entre date de cadre du programme d'aménagement du bas-fond.
début des pluies et durée de la saison n'a pas changé L'analyse des relations entre les pluies et les débits
entre la période « humide» 1920-1968 et la période sur le bassin versant a pour finalité l'établissement
sèche actuelle. Si les pluies arrivent en mai, on est d'une longue série d'écoulements afin de simuler le
certain que la saison pluvieuse durera au moins 110 fonctionnement de ces ouvrages. Le calage de
jours. Début juin, elle durera au moins 100 jours. Du modèles globaux, comme le modèle GR3 (BAIMEY,
10 au 30 juin, au moins 90 jours. Après le 10 juillet, 1991), au pas de temps journalier, n'a pas fourni de
la saison n'atteint jamais 90 jours. résultats satisfaisants. La mise en œuvre d'un modèle
à discrétisation spatiale est en cours. L'analyse des
Les résultats de l'étude des crues sont rapportés aux
averses ayant donné lieu à faible écoulement a
tableaux 1et II.
permis de définir la pluie limite de ruissellement pl
Il n'existe pas de relation entre les écoulements (variant entre 10 et 35 mm) sur le bassin versant en
annuels et la pluviométrie annuelle estimée sur le fonction de l'indice d'humectation des sols OK, type
Tableau 1. Ecoulements et pluviométrie annuels sur le bassin versant du barrage de Gourga-TilH (47,5 km2 ).
j 50 1
100
1 Place du bas-fond dans
35
1 1 1 1 les systèmes agropastoraux
~J3,5rn3JS ~"""Vh""""Vh • v.. v.. "~~"v.N'o v.. y,o,""""No'I/'o.v..~v..~v.. ..VV'o-.v.v..v..
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a 1/' ~-+-J 1
subsistance. Seule la place du bas-fond a évolué.
15 19 20 21 22 23 Oh 1 2 3 ,
13/07 1 1966 Trmps en h~lJrf'S " 1071 1986
d'une fragmentation de l'habitat et des terres densément peuplée, en dehors des lieux voisins des
cultivables. habitations, les bas-fonds étaient effectivement
réservés au libre parcours du bétail peul, les cultures
Il est probable que la modification des données étant marginales.
politiques après la conquête coloniale et la longue
sécheresse du début du siècle aient été les
déclencheurs de cette migration vers des terres
Le paysage en 1984
nouvelles, et en particulier à proximité de ce bas-
fond. Le parc arboré observé sur les photographies En 1984, la photo-interprétation donne du bas-fond
aériennes de 1952 suggère que le bas-fond a été un tout autre visage:
défriché dès les premières années de l'installation
- développement des bordures dégradées, en
pionnière. 5uh(ant l'habitude, les premiers arrivés
particulier à l'ouest sur près de 300 m de large, en
sont dépositaires de domaines fonciers en excès
partie aux dépens de la zone centrale du bas-fond;
qu'ils défrichent surtout pour en marquer les limites
et redistribuer ces c jachères» à leurs descendants ou - nombreux jardins de saison sèche sur les zones
aux immigrants installés auprès d'eux. Contrairement latérales;
à l'espace ouvert du terroir, dont les limites foncières
- des vergers de manguiers et goyaviers;
des différents segments lignagers ou groupes
d'affinité rayonnent vers des brousses éloignées, - culture de sorgho blanc (pour le grain et le
l'espace linéaire du bas-fond est actuellement fourrage) ;
découpé en tronçons dont aucun ne dépasse deux - cultures des zones latérales en mil, mais aussi
hectares: cette superficie correspond grossièrement nombreux champs individuels d'arachide, de gombo
à la limite de ce que peut cultiver en sorgho une et de dâh i
famille de 5 actifs, si elle ne veut pas nuire à l'en-
tretien du mil. Malgré la limite de cet accès au bas- - raréfaction des prairies, limitées à présent aux
fond qui dissuade de la monopolisation, les enjeux tronçons les plus resserrés et sur quelques interstices
vivriers actuels expliquent que les rares conflits (cuvettes, mares entourées de bosquets, ravines),
fonciers aient lieu précisément à propos des terres de Quelques animaux au piquet rappellent que ces
bas-fond. prairies ne font plus partie, en saison humide, des
libres parcours, et qu'elles sont quasiment appro-
priées pour l'élevage sédentaire.
Le paysage en 1952 Selon les anciens de Bidi, une telle mutation doit son
origine aux difficultés des cultures de coton pérenne,
Comme archives, nous ne disposons que d'une difficiles à protéger en saison sèche d'un troupeau
photographie aérienne de 1952 agrandie au divaguant en forte croissance. Cette croissance étant
1/10000, période pendant laquelle le bilan hydrique due à la capitalisation dans le bétail par de nom-
est excédentaire. La photo-interprétation de la zone breux paysans ayant réussi dans la vente de surplus
médiane (où le village de Bidi s'échelonne) suggère de mil. Mais cette disparition est aussi à rapprocher
que la moitié de la zone inondable est laissée en du besoin de terres de bas-fond pour d'autres pro-
prairie, et les champs de coton, sorgho et riz restent ductions et de la concurrence du coton égrené.
localisés à proximité des quartiers d'habitation, sur
les zones latérales. Il n'y a aucun jardin ni verger, et Les difficultés du commerce de saison sèche avec le
déjà la pente qui raccorde la plaine encaissée aux pays dogon, une fois la frontière du Mali mise en
bas de pente sableux (le chanfrein) apparaît place, sont sans doute à l'origine de la recherche
dénudée, donc érodée, sur une centaine de mètres d'activités de rente de saison sèche, en substitution.
de largeur. Les anciens disent que le coton, le riz et La culture du kumbâ (aubergine amère) dans de
le sorgho rouge n'entraient pas dans une logique petits champs enclos, empruntée aux Dogons du
d'acquisition vivrière. Le but de ces cu Itures plateau de Bandiagara, a ainsi été tentée par des
généralement individuelles était soit de fournir des commerçants de cola. Des vergers enclos d'arbres
denrées consommées aux fêtes, soit de produire une fruitiers ont été implantés après des expériences
matière première artisanale éventuellement vendue. concluantes menées à Ouahigouya, avec l'aide de
Le riz africain (Oryza glab.errima, c moui kienda »), l'administration. Ces innovations ont bénéficié de
était cultivé surtout à Debere, quartier islamisé; le l'islamisation concomitante qui a pu affaiblir
sorgho rouge était réservé à la bière de mil de la certaines traditions opposées au travail de la terre en
chefferie de Naïri, de religion animiste. Le coton saison sèche, à l'arrosage et à la plantation d'arbres.
pérenne était peu productif mais suffisait à l'artisanat Elles ont aussi été permises par la marginalité des
textile des Yarce du village. MARCHAL (1983) nous terres de bas-fond dans le système de production, en
rappelle qu'au Yatenga central, région plus période humide.
J.M. LAMACHERE, P. MAIZI, G. 5ERPANTIE, P. ZOMBRE
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Le bas-fond est par la suite devenu un élément de Le suivi d'une c bonne année,. pour le riz, 1986,
sécurité du système de production vivrier dès lors nous a permis de mieux cerner les résultats potentiels
que se manifestaient les premières sécheresses, à la de cette riziculture, à Bidi. La décision de planter du
fin des années 60. D'une part, le sorgho blanc y riz dépend de la précocité des pluies, qui donne une
devenait possible, grâce à la réduction du risque indication sur la durée minimale de la saison. Il faut
d'excès d'eau trop prolongé, d'autre part le champ attendre la fin des semis des champs vivriers
de bas-fond apparaissait comme une assurance collectifs et individuels si les pluies ont été précoces.
contre une mauvaise récolte sur les champs de mil, Le sol est déjà enherbé. Le travail du sol, alors
plus exposés aux sécheresses et aux sautériaux, les indispensable, est réalisé à la pioche mossi c sugo ,.
contraintes climatiques pour les champs pluviaux dès qu'une humidité suffisante le permet, les sols de
devenant des atouts pour les bas-fonds. bas-fond étant très durs. A l'inverse, les plaines
d'exutoire, qui ont des sols friables en sec, sont
travaillées avant même les semis de mil. Le semis en
La riziculture poquet est réalisé à la fin de ce travail, avec la variété
locale de moui kienda (Oryza glaberrimaJ. Le semis
Le riz est une culture très secondaire :.Ia moyenne de en poquet facilite l'entretien: désherbage ou sar-
la superficie cultivée dans une famille représentative clage. Généralement, le premier est préféré, compte
d'un quartier c rizicole,. comme Debere est de 5 tenu de la forte densité de Poquets (10 à 30 par m2).
ares par actif, sur un total de 120 ares de céréales et II n'y a généralement aucune fertilisation ni
légumineuses par actif (VISSERS, 1987). La riziculture protection chimique. La récolte est progressive, du
est le fait des femmes principalement. Elles disposent 1er au 15 octobre, afin de soustraire les panicules
de parcelles de quelques ares gérées indivi- mûrs aux ravageurs, à l'égrenage ou à la verse.
duellement (c beolse,.) dans les zones marécageuses
centrales des plaines les plus larges proches de leur Les rendements obtenus en 1986 sur les rizières de
quartier d'habitation, ou le long de champs de Debere sont assez élevés: 1,3 à 2,6 t ha-l de paddy
sorgho. Ces terrains leur sont prêtés par les tenants (mesures sur placettes de 3 m2), grâce à la régularité
fonciers. Mais lorsque le milieu le permet, certains de la saison pluvieuse et au site très favorable du bas-
paysans réalisent eux aussi des champs de plus fond de Debere, probablement enrichi par la
grande envergure, généralement sur des terrains présence de bétail en saison sèche. Ce bon
humides· éloignés dont ils sont propriétaires. De tels rendement est aussi à relier à la bonne faculté de
champs créent une gêne pour les opérations tallage de la variété moui kienda (200 à 300
d'abreuvement aux mares ou de franchissement des panicules par m 2 pour 10 à 30 poquets), et à sa
. bas-fonds par les troupeaux, source de tensions entre précocité. Les revenus atteignent 10000 FCFA pour
éleveurs et paysans. Des contrats implicites existent 4 ares de riz local. Dans les situations plus extensives
en effet entre les agriculteurs et les éleveurs peul, qui (cas des grands champs), l'enherbement est moins
sont les plus anciens utilisateurs de ce milieu. bien maîtrisé (adventice Oryza barthiiL Les
rendements se rapprochent de 0,5 t ha-l .
Le riz est absent du segment amont du bas-fond,
aujourd'hui raréfié dans sa partie médiane, mais, L'année 1986 exceptée, la sécheresse accusée de
dans la partie aval, sa place est plus importante. 1981 à 1990 a fortement réduit les résultats de cette
Certaines plaines d'exutoire sont exclusivement riziculture. Les femmes enquêtées n'espèrent
cultivées en riz (plaine de Sanga). souvent qu'une prodLction minimale pour renou-
La production de riz des femmes est destinée à la veler leur semence. La riziculture traditionnelle
vente. A Ouahigouya, en 1986, le prix du riz local semble ainsi en voie de régression. Néanmoins, les
étuvé, bien que plus apprécié que le riz importé, pratiques de mise en place et d'entretien, les
coOte comme lui de 120 à 175 FCFA le kilo au détail. rendements obtenus les bonnes années, les
Le riz importé, qui le concurrence directement, a semences disponibles montrent qu'un savoir
l'avantage d'être aussi vendu en sacs. Néanmoins, le important se maintient, en particulier chez les
riz local peut atteindre les jours de fête 240 FCFA le femmes.
kilo sur le marché de Bidi. Comme il revient aux
hommes de fournir le riz des jours de fêtes, leur
propre production n'est pas vendue mais permet de Une cc marge» du terroir
réaliser une économie équivalente. Le plat de riz
implique des dépenses supplémentaires en Cette c chronique,. d'un bas-fond soudano-sahélien
condiments (qui incombent aux femmes), ce qui suggère que le bas-fond de Bidi a joué des rôles très
limite la fréquence de sa consommation aux jours de divers pour des systèmes de production successifs:
fêtes. Les objectifs de production restent donc ceux des anciens forgerons dogon, l'élevage transhu-
faibles. mant des Peuls et de leurs captifs, les pionniers
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
sédentaires du début du siècle, les « producteurs de cialisation du milieu au sens d'améliorer l'exploi-
mil » des années 50, commerçants musulmans tation des ruissellements entrants et limiter les pertes
innovateurs, enfin la société agropastorale actuelle en en eau (LAMACHERE et SERPANTIE, 1991).
butte aux difficultés de la sécheresse. Si le bas-fond
est un milieu très sensible aux variations climatiques,
et voit donc changer ses aptitudes suivant son régime
d'inondation, il était aussi le lieu où la diversification Le sorgho de bas-fond
et les expériences étaient les plus profitables lorsque Dans les bas-fonds, l'apport des crues vient équi-
son accès était encore facile et les conditions ni trop librer le bilan hydrique P-ETP devenu déficitaire. Le
humides, ni trop sèches: cultures pérennes, cultures raisonnement sur les plantes photopériodiques
de cycle long, cultures arboricoles, cultures diver- s'applique aussi au sorgho. On ne le cultive pas sur
sifiées de femmes, jardins enclos étaient adaptés dans les zones trop resserrées (dégâts de crues), ni au
les années 60 à ce milieu argileux, humide et à nappe centre des plaines de la zone médiane et des plaines
d'eau facilement accessible en saison sèche. C'est sur d'exutoire (asphyxie). La précocité de l'humectation
un tel milieu que l'innovation pouvait être tentée et par les crues et l'existence d'un stock hydrique
prendre racine, malgré les fortes contraintes: important (sol argileux) permettent en effet la mise en
ressemis après les crues, travail d'entretien triplé, place de cultures à cycle plus long que le mil et à
clôtures et puisards à entretenir, excès d'eau. bon enracinement, mais résistantes aux inondations.
MARCHAL (1983) avait sans doute raison de présenter La vigueur de l'enherbement exige un semis précé-
le bas-fond comme une « marge» du terroir (au dant sa mise en place et un sarclage très rapproché
même titre que les brousses éloignées). On peut du semis. La violence des crues ne permet pas de
penser que l'innovation y était facilitée, en postulant travailler le sol préalablement au semis ni de ferti-
qu'une société paysanne à fond traditionnel liser. Les crues précoces sont donc nécessaires, pour
expérimente plus facilement en marge de son humecter suffisamment le milieu pour un semis sur
système de production. Le changement d'environ- sol propre. Le sarclage est un travail difficile en bas-
nement commercial et l'islamisation, puis les fond (terre lourde, enherbement dense, plantules de
premières sécheresses ont été les stimulants d'une sorgho fragilisées par les crues) mais très superficiel,
diversification des pratiques agricoles. En revanche, réalisé à plat, pour faciliter le drainage et limiter
la raréfaction des années favorables au riz n'a pas l'érosion. Une année sur deux, la mise en place du
entraîné la disparition de cette pratique et du savoir- sorgho est précoce (semis direct en poquets). Elle a
faire associé, seulement son repli. Cette production lieu après la première crue. Son sarclage suit
est donc à prendre en compte. immédiatement le semis du mil sur les champs
sableux. La lourdeur de ce travail fait qu'il est
Par la suite, la place du bas-fond est devenue
difficile de mettre en culture de grandes superficies,
centrale lorsque la période sèche s'est·installée,
sous peine de retarder le sarclage des champs de mil
focalisant un certain nombre d'enjeux: fonciers tout
dont les plus prometteurs ont aussi un enherbement
d'abord, mais aussi pour l'accès aux mares, aux
pâturages, à l'eau. La valeur symbolique du bas-fond rapide (champs fumés, creux topographiques.. '>.
Cette contrainte se renouvelle au deuxième sarclage.
ne s'est-elle pas aussi accrue à cette occasion?
Des charrues d'attelage, ramenées dans les années
50 par les paysans déplacés vers les zones de mise en
valeur de l'Office du Niger, n'ont pas eu de diffusion
immédiate. Promues dans les années 70 par les
Contraintes services agricoles avec des incitations diverses (accès
et atouts des bas-fonds au crédit d'équipement en particulier), elles se sont
mieux diffusées, trouvant un usage qui n'est pas sans
Le mil rapport avec la fréquence des années sèches et le
déploiement de la culture du sorgho en bas-fond. En
L'évolution climatique récente suggère que des effet, elles servent généralement à préparer des
systèmes de culture basés sur une faible exigence champs de mil qui risquent un enherbement précoce
moyenne en eau, une résistance à de longues (champs fumés, terrains humides hors bas-fond,
périodes sèches, un sol à réserve utile moyenne et à reprises de jachères) pour éliminer par avance le
faible évaporation (sableux en surface) et des variétés risque de retard du premier sarclage. En cas de semis
photopériodiques (dont le cycle s'achève à date fixe) retardé, le labour permettra de semer dans un sol
restent sinon productifs, du moins cohérents, à la propre, rugueux et aéré, même fin juillet (les variétés
condition de réduire les pertes en eau. C'est le cas de locales de mil à induction florale photopériodique le
la culture paysanne de mil sur pentes à faible densité permettant). Les exploitations sont donc moins
de plantation et faible fertilisation, et de l'artifi- limitées dans la surface mise en culture en bas-fond
J.M. LAMACHERE, P. MAtZt, G. 5ERPANTlE, P. ZOMBRE
bt«:ee~eeeee.r:e:eeeee~~~~'\NIOo.~'~eeeeeeeeeee:~"""""""'"«Io."""""''''-«o»..'''-':'''''-':'*-'"»»>.-..»»:-,,»:.:.~-.: .....-..e-.."'' ' ' ' ' '.........-.e«-...»»:-»:..........,...........-.:.).,......,.,,-.e..-.e..''««-...." ««
(mais aussi dans toutes les situations à enherbement n'est l'apport limité des sédiments de crues et des
rapide). De fait, on observe que les plus grandes racines. Selon les paysans, et ce phénomène est
superficies de bas-fond cultivées par actif appar- confirmé par BACYE (communication personnelle), les
tiennent à des paysans pratiquant le labour dans sols durcissent et leur humectation est très lente en
leurs champs sableux. Il s'agit de paysans ayant des début de cycle, ce qui s'ajoute au problème de
revenus commerciaux par ailleurs, l'attelage étant l'installation du sorgho. Des crues importantes sont
coOteux à entretenir. alors indispensables à cette humectation précoce. Le
blocage des premières crues par de gros ouvrages de
L'installation du sorgho subit fréquemment des retenue à l'amont des champs peut donc empêcher
préjudices dus à l'absence de crues précoces (1987, la mise en place précoce des peuplements de sorgho
1988) ou à des crues trop fortes pour les jeunes avant enherbement généralisé. Il faudrait donc que
plantules (1985, 1986, 1990) ; les ressemis étant ces retenues laissent passer les premières crues,
impossibles dans un enherbement trop abondant, les surtout si elles sont construites en amont de villages.
champs peuvent être alors abandonnés. La
croissance est contrariée par des sécheresses longues Le riz
(1984, 1987, 1988) ou des submersions trop La durée du cycle pluvieux nous intéresse parti-
durables (1988, 1989). Il ne faudrait donc pas voir le culièrement pour la culture de riz. En effet, le faible
bas-fond comme un milieu de tout repos. La sécurité enracinement du riz inondable (25 à 50 cm), la
qu'il offre ne repose que sur la possibilité de fournir vitesse importante de chute du niveau de la nappe du
un te haut rendement li (plus de 10 q ha-1) certaines sol (3 à 9 cm par jour) et l'absence de remontées
années te sèches li, c'est-à-dire plus d'une année sur capillaires dans les horizons superficiels des sols de
deux actuellement L'intensification de la culture du bas-fond font qu'il n'y a pas de possibilités de
sorgho dans ces conditions contraignantes, par prolonger la période de fructification de plus d'une
l'usage d'intrants classiques (cultivars, fertilisants, décade après les pluies, alors que !e sorgho de bas-
désherbants...) apparaît donc risquée bien que le sol, fond, mieux enraciné et planté dans des zones plus
paradoxalement, soit le plus riche en eau et saines, tolère un arrêt des pluies à l'épiaison. Les·
nutriments du territoire villageois. Les expériences variétés qui supportent des inondations importantes
menées à Bidi à ce sujet (test du sorgho court IRAT ont des cycles longs. La variété moui pelga, exploitée
204 par exemple) montrent que le gain de rendement en bordure de retenue dans la région, est une variété
est systématique dans des te situations idéales li (en de 90 jours, à cycle plus court que moui kienda (1 00
l'absence d'excès d'eau prolongée, et si l'installation jours). Une ou deux décades après le début des
est réussie). Cette variété n'a néanmoins aucune pluies sont nécessaires pour la mise en place (après
chance de diffuser en bas-fond, pour trois raisons: les semis de mil>' Si un système permet de compléter
risques importants de mauvaise inst~lIation et l'alimentation en eau pendant le cycle, la réussite
d'excès d'eau d'une part, trop faible production en demandera donc au moins 9 décades de saison
pailles eu égard au rôle fourrager assigné au sorgho pluvieuse. Cet événement a, sur la période sèche
de bas-fond, précocité incompatible avec les risques 1968-1991, une probabilité de 0,5, ce qui peut être
de ravages d'oiseaux. Les paysans qui testaient cette considéré comme limite mais suffisant pour une
variété l'ont finalement introduite dans leurs champs culture secondaire, compte tenu du fait que l'on peut
fumés, avec les autres céréales précoces surveillées prévoir la durée du cycle pluvieux à partir de la date
(maïs, mils et sorghos précoces>' Les engrais et le d'arrivée des pluies. Cultivé dans des cuvettes au
fumier ne sont jamais investis en bas-fond non plus, centre des plaines les plus larges, où la vitesse des
mais te saupoudrés li dans les champs de mil de crues est moindre et l'asphyxie plus fréquente, le riz
bordure. Le bas-fond est donc peut-être un lieu de bénéficie généralement d'un travail du sol préalable
diversification, mais pas d'intensification dans l'état car sa mise en place se fait après les semis de grandes
actuel des techniques, si l'on exclut le rôle indirect céréales.
joué par le labour des champs de mil.
dans les puisards et puits ont baissé à tel point que recharge de nappe sous de petits ouvrages de retenue
certains quartiers n'ont plus d'eau à proximité de ne sont pas encore suffisamment connues. Afin de
leurs maisons en saison sèche, ce qui gêne à la fois la limiter ces inconvénients et cette incertitude, il a été
vie domestique mais aussi les activités agraires, décidé avec nos partenaires (la population d'une
abreuvement et maraîchage, et potentiellement de partie de Bidi, l'administration et des organisations
nouvelles activités (pépinières d'arbres, travail de la non gouvernementales œuvrant dans la région) de
matière organique...). réaliser deux expériences:
- la mise en place d'une petite digue semi-filtrante,
De nombreuses enquêtes et réunions avec différentes
permettant de conserver de l'eau suffisamment
catégories sociales nous ont convaincus que, pour
longtemps pour qu'elle sature correctement le sol, et
elles, la sécurité vivrière peut être prise en charge par
remonte en saison des pluies le niveau de la nappe
d'autres voies que la seu le intensification de
pour sécuriser une culture (celle du riz étant alors la
J'agriculture de bas-fond (aménagement et
seule possible dans la partie centrale du bas-fond) ;
fertilisation 'des champs de mil, intensification sur
thalwegs secondaires, orpaillage, commerce, - une retenue plus conséquente de 25 000 m3, créée
élevage, migrations temporaires, aides d'urgence...). par un microbarrage à batardeaux. Cette vanne
Mais il leur semble que de l'eau (c'est-à-dire l'eau rustique permet de contrôler la montée du plan d'eau
disponible pour les besoins domestiques et et donc autorise la culture du riz dans la retenue elle-
d'abreuvement) dépendent la pérennité du village, la même, mais laisse passer les premières crues.
possibilité de faire des mariages, c'est-à-dire les
besoins minimaux. Cette priorité pour l'eau est telle A la différence des aménagements classiques de bas-
fond, qui fonctionnent par irrigation à l'aval (les
que toute autre proposition portant sur l'aména-
te bas-fonds améliorés li du FEER, étudiés par
gement d'un bas-fond à des fins agricoles se heurte à
une opposition, liée à la crainte de voir repoussé, MIETTON, 1986), les ouvrages expérimentés ont
une fois de plus, un projet hydraulique. Pour cela, l'avantage de ne pas requérir de chenaux d'éva-
seul un projet de barrage de retenue fait espérer aux cuation latéraux, et de préserver le stock d'eau en fin
paysans une amélioration durable du statut de leurs de cycle. Cela évite d'une part des tensions sur la
aquifères. Toutes les autres solutions, et il yen aurait gestion du stock d'eau entre irriguants (riziculteurs)
peut-être de moins coû,telJses (forages profonds dans et non-irriguants (éleveurs, jardiniers, etc.), et d'autre
les diaclases du granite, citernes, pompes solaires), part la mise en place d'une organisation de gestion
leur font regretter la sécurité et l'indépendance de l'eau, des canalisations et du parcellaire. Une
technologique qu'ils espèrent dans cette entreprise. telle organisation demanderait à la fois la garantie
Les médias ont suffisamment vanté les mérites des d'une autorité reconnue et la mise en place d'une te
retenues pour que les habitants de Bidi-Gourga démocratie de l'eau li, que nous postulons difficiles
désirent avoir la leur, dans un souci de rééquilibrer dans la mesure où ce système d'irrigation ne se
leur prestige par rapport à d'autres villages. Il est voudrait pas central dans Je système de production
aussi certain que le pouvoir symbolique et sécurisant mais seulement complémentaire, donc non prio-
d'une nappe d'eau superficielle est à prendre en ritaire par rapport à l'économie familiale. Rappelons
considération, en particulier en cette période de que les associations rurales habituelles
sécheresse persistante et inquiétante. L'analyse (groupements...) mettent leurs activités productives
montre que ce souhait traduit une volonté collective au second plan par rapport aux activités familiales de
et longuement débattue. Techniquement, il n'est pas leurs membres (les champs collectifs de mil et
illégitime de penser que la durée de persistance sorgho).
d'une nappe d'eau superficielle allonge d'autant la Ces expériences te en partenariat li ont pour but de
persistance du stock de l'aquifère sous-jacent. La valider avant tout des modèles techniques de
réalisation de retenues n'est pas une nouveauté dans recharge de nappe ayant des impacts réduits sur
la région. La remontée des aquifères est fréquente l'environnement et permettant éventuellement une
sous ces retenues et les habitants de Bidi l'ont cons- valorisation agricole. Ces, ouvrages sont installés sur
taté par eux-mêmes dans le village voisin d'Amene. des tronçons peu exploités pour des raisons
d'étroitesse du bas-fond. Ils ne provoquent donc a
Cependant, des inconvénients existent. Un réservoir priori pas de véritables nuisances.
modifie le régime des premières crues, utiles à un
semis précoce du sorgho en aval. Les grands réser- On comprendra que notre problématique est
voirs occupent de larges surfaces des meilleures éloignée de la conception classique de la te mise en
terres cultivables, en bas-fond et bas de pente. Ils valeur li. L'aménagement proposé vise à répondre à
perturbent d'autre part le fonctionnement des un besoin précis tout en préservant l'environnement
écosystèmes des deltas endoréiques et le remplissage d'effets non désirés. Il est intéressant d'y superposer
de leurs mares. D'autre part, les conditions de un objectif agricole, pour nous comme pour les par-
J.M. LAMACHERE, P. MAIZI, G. 5ERPANTIE, P. ZOMBRE
tenaires paysans, techniques et financiers: une phréatique supérieure entre l'année 1987, avant
riziculture améliorée, à défaut une extension des construction, et l'année 1990, deux ans après
milieux aptes à la riziculture traditionnelle, raréfiés construction. Ce rehaussement n'est observé sur
par la sécheresse. Pour trouver un système de culture aucune des autres lignes piézométriques.
recevable, il a fallu:
L'effet du microbarrage sur la recharge de la nappe
- tester des itinéraires techniques f( améliorés» cohé- aquifère supérieure est encore plus net si on
rents au regard des contraintes et objectifs paysans: considère son extension transversalement. à l'axe du
ne pas entrer en concurrence avec les travaux priori- bas-fond. En position de recharge maximale comme
taires (mil, sorgho), sécuriser les productions, dans en position d'étiage, le sommet de l'aquifère·
des conditions de faibles possibilités d'application présente des courbes isopièzes qui forment un dôme
d'intrants ; très élargi au niveau de la retenue du microbarrage.
- adapter le régime d'inondation en amont des En considérant une dénivelée piézométrique de 2 m
ouvrages aux conditions de culture d'une riziculture par rapport au sommet du dôme, les largeurs
paysanne f( amél iorée » (gestion du batardeau et de la atteintes latéralement par la nappe aquifère
perméabilité de la digue filtrante) ; superficielle sont celles indiquées dans le tableau III.
- vérifier que les savoirs paysans et la formation En amont du microbarrage de Gourga, l'extension
dispensée étaient compatibles avec cette riziculture latérale de la nappe aquifère supérieure dépasse le
expérimentale (dans les f( savoirs», nous devons double de la largeur inondée en surface par une crue
inclure l'outillage, les savoir-faire et les matériels moyenne.
végétaux locaux) ; Nous avons représenté en figure 6 les variations des
- vérifier que les implications économiques niveaux piézométriques de juin 1989 à avril 1990.
coïncidaient avec les objectifs et les contraintes des L'examen des fluctuations fait apparaître une assez
paysans: compatibilité des calendriers de travaux, forte hétérogénéité d'un endroit à l'autre du bas-
financement des intrants, revenus et coOts espérés, fond. En septembre 1989, la descente est rapide sur
risques pris; les lignes amont 1 et 2 (6 à 9 cm r'),
plus lente sur
- vérifier que l'organisation sociale (droit coutumier, les lignes aval 3, 4 (barrage) et 5 (3,5 à 4,5 cm). Au
aspects fonciers, systèmes de pouvoirs, rapports de mois d'octobre, elle se ralentit sur les lignes 1,4 et 5
production) n'était pas un obstacle à la mise en place (2,5 à 3 cm) mais se maintient entre 4 et 5 cm par
d'une rizière, ou pouvait s'adapter à travers un travail jour sur les lignes 2 et 3. Cette hétérogénéité du
d'accompagnement léger sous forme de contrat comportement de la nappe aquifère supérieure est
négocié et l'animation d'un groupement villageois de probablement liée à des hétérogénéités de la
riziculteurs; perméabilité verticale des terrains. Le barrage est
donc bien situé pour remplir sa fonction de recharge
- vérifier que les enjeux d'une telle entreprise, vus à
de la nappe supérieure, tout en permettant un bon
travers une théorie exogène du développement
maintien de la nappe phréatique supérieure en
économique, n'étaient pas en rupture avec les repré-
saison sèche
sentations des acteurs villageois et leurs stratégies
propres. La recharge de la nappe aquifère profonde, située
dans les altérites du granite, ne peut être étudiée que
par les fluctuations du niveau d'eau dans le puits
busé creusé en rive gauche du bas-fond, juste en aval
Résultats hydrauliques
»». -..:«o. ;:.. ». "»o, ":".•••~ "W. "'X«". -->. -w. -w...:1'...». ;:.. ':'..;:..'"
de la digue filtrante (à proximité de la ligne 2). Les
~ ...-.:-.~"""'C\. ~;:..
deux suivis sont présentés ensemble en figure 6. Le
Dans la zone centrale du bas-fond de Bidi-Gourga, comportement de la nappe inférieure s'explique si
juste en amont du barrage, on observe une remontée on le compare à celui de la nappe supérieure. Ce
de 1,3 m du niveau des basses eaux de la nappe· comportement traduit une vidange de l'une dans
Tableau III. Largeur atteinte (en m) par le dôme piézométrique de la nappe supérieure pour une dénivelée de 2 m.
~méro des lignes piézométriques 2 3 4" 5
Situation Amont Digue Début Barrage Aval
filtrante retenue
Recharge maximale 1989 60 120 150 300 100
Etiage 1990 100 100 100 200 150
Largeur bas-fond inondable 65 110 100 140 90
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
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1 Gabion inférieur (50 cm x 1 m x 2 ml
2 Gabion supérieur (50 cm x 1 m x 2 ml
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4 Filtre amont:
.......... PUITS GOURGA A - terre argileuse
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'0 JUIN NL~ AOU' SEPT, OCT, NOY. OEe. JAN FEV. • AIIS AVR • lU'
6 Culture de riz
ANHEE 1989 ANNEE 19iO 7 Perré aval
8 Niveau du sol
Figure 6. Variations piézométriques dans la partie 9 Déversement
centrale du bas-fond de Bidi-Gourga. 10 Gabion du bajoyer
Dans les situations sèches de bordure, les mauvais Ces interventions exigent une surveillance et un
peuplements en pieds « 30 par m 2 ) sont mal temps de travail sans doute excessifs au regard des
compensés par le tallage. Celui-ci a eu lieu pendant risques pris. Cette véritable « horticulture de saison
une période sèche, ce qui a accru l'impact d'une humide» reste étrangère à la logique générale du
absence ou d'un retard de désherbage. système de culture familial qui consiste à entretenir
et fertiliser en priorité les situations culturales les
En situation humide, le tallage est gêné par les excès moins risquées et les plus prometteuses, compte tenu
d'eau. Un peuplement en pieds correct (50 par m 2) d'un nombre de jours disponibles limité. Il entre
est dans ces conditions insuffisant. mieux dans une logique de champs individuels mais
dans ces conditions il ne peut être l'objet d'inves-
L'élaboration des panicules suit les mêmes règles: tissements en intrants.
les faibles peuplements en panicules liés à un
enherbement important n'ont pas une meilleure ferti-
lité. Il fallait au moins deux sarclages après le
premier désherbage pour éviter toute concurrence. Suite de l'expérimentation
L'engorgement a la même influence.
Les années 1987, 1988, 1989, 1990, défavorables
Une relation d~ compensation relative existe entre le pour des raisons diverses (retard du début des pluies
nombre de grains au m2 et le poids d'un grain. Les en 1987, 1988 et 1989, arrêt précoce des pluies en
situations les plus favorables (ni trop sèches, ni trop 1990, sauterelles en 1989), ont vu une désaffection
humides) optimisent le « rendement potentiel» progressive des expérimentateurs à l'égard de la
(poids moyen d'un grain plein multiplié par le rizière; ne se sont maintenus Jusqu'en 1989 que
.nombre de grains d'un panicule plein, multiplié par ceux qui disposaient de cette fameuse « situation
la densité de panicules par m 2 ). Mais le rendement intermédiaire », qui rentabilise le travail effectué et
potentiel apparaît avant tout lié au nombre de grains minimise les risques, mais sans application d'in-
par m2 • Il a été nivelé par la verse et l'égrenage qui .trants. Ce maintien était dû à la volonté de conserver
ont surtout marqué les situations à forte biomasse un droit d'usage. Cette sélection progressive de la
(peut-être à cause d'un rapport N/K déséquilibré en surface utilisée ôte tout son sens à un périmètre
situation de compétition pour la lumière>' d'intensification à caractère collectif.
Effectivement, un épandage de KCI (30 K) réalisé en
1987 sur 5 couples en fin de tallage a réduit la verse
de manière significative sur les parties traitées.
Le barrage à batardeaux
C'est donc à des conditions hydriques optimales
(zones intermédiaires entre zone centrale et bor- L'expérience renouvelée du barrage à batardeaux
dures) et à un entretien sans reproche que l'on doit, (figure 8) a des résultats similaires. Les situations de
en 1986, les meilleurs rendements potentiels (> 3,5 t bordure sont semées en riz de 90 jours (moui pelga),
ha-l ). Les meilleurs rendements mesurés sont de tandis que les situations fortement inondées sont
l'ordre de 2,5 t ha-l . Celui de la rizière n'est que de semées en ghana moui, variété inondable à paille
1,6 t ha-l (variabilité du milieu et de la maîtrise de longue de 120 jours utilisée en bordure de retenue à
l'enherbement:J. L'engrais investi est localement bien Ouahigouya. En 1988 et 1989, le début de saison a
valorisé. un mois de retard. La perméabilité de la cuvette mais
surtout de la retenue elle-même ont empêché le
D'autres variétés promues par les services agricoles maintien d'une nappe d'eau suffisante en fin de
(lRAT 144, IRAT 147 de 90 jours et 4418 de 115 saison des pluies, les dernières crues ayant eu lieu fin
jours) et d'autres modes de mise en place (repiquage) août. Le riz installé tardivement n'a donc pas terminé
ont été testés mais sans meilleurs résultats. Une son cycle et les parcelles les plus humides ont été
« pépinière de sécurité» a montré qu'elle pouvait noyées sous 50 cm d'eau pendant plus d'un mois. En
être utile en cas d'inondation trop précoce mais s'est 1990, la retenue s'est à peine remplie, faute de crues
avérée trop coûteuse en temps de travail (arrosage, en août. Seules les parcelles les plus humides ont
protection). réussi. Les villageois, frustrés à la fois de récoltes de
riz et de leur retenue d'eau, ont décidé en 1991 de
En conclusion, l'expérience de 1986 montre que le condamner le batardeau, malgré la nécessité de
système de culture testé est, même en bonne année, laisser passer les premières crues. Dans de telles
très « sensible» au statut hydrique de la parcelle, conditions, le semis de riz n'a été possible qu'en
déterminé par sa place dans le bief. II dépend bordure de la retenue et à son aval, souvent sur des
fortement de l'enherbement (que les inondations trop terrains impropres, trop sableux, limitant de fait toute
courtes ne réduisent pas) et du contrôle du la portée de l'aménagement en matière d'amé-
peuplement de pieds. lioration de la riziculture. Pourtant, une simulation
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
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hydrologique sur le bassin versant montre que, de très courtes des années 80 est en fait un événement
1985 à 1987 et en 1991, le système préconisé aurait réellement improbable, unique sur la série dispo-
bien fonctionné, assurant de bonnes conditions au nible. C'est un élément nouveau qui se surajoute au
riz jusqu'à la mi-octobre. déficit relatif de pluviosité. Ceci pose le problème de
la pertinence de tels aménagements s'ils étaient
Un petit essai d'arrosage de fin de cycle à partir d'un réalisés seulement au nom d'une intensification
puits latéral a été prometteur, bien que trop détaché rizicole viable, sous le c1imat« imprévisible» actuel,
des contraintes en matière d'effort de travail: la et dans les conditions limites de la zone soudano-
demande du riz à la fructification est de 4 à 5 mm 1 r sahélienne. Il existe bien sOr des possibilités
soit 1 m3 par parcelle de 2 ares en cas de période d'amélioration du système technique proposé, à
sèche. Une innovation plus sociale qu'agricole a été condition de disposer de variétés de cycle encore
la constitution d'un assez grand champ collectif plus court mais résistantes aux inondations, de
(10 areS) d'un groupement de femmes (MAlZI, 1991). moyens d'assurer une meilleure étanchéité des
Certes la variabilité du milieu se compense à ouvrages, et de rechercher un tronçon moins
l'échelle de cette superficie, mais la formule de perméable, avec un meilleur rendement topogra-
riziculture ne peut être qu'extensive, les groupe- phique. Mais ces dernières hypothèses sont en
ments de travail réalisant les travaux d'entretien avec contradiction avec la fonction de recharge de nappe
des retards importants et n'investissant pas d'intrants. prioritaire et l'intérêt que l'ouvrage soit situé près des
habitations (surveillance, puits) et n'occupe pas de
terres cultivées.
Sur le plan hydraulique, la remontée du niveau des
Discussion et conclusion nappes supérieures pendant la saison sèche n'a été
significative que sous la retenue du barrage à
batardeaux, ce qui i'\'plique à la fois un facteur de
Sur un plan agronomique, les expériences de
taille de l'ouvrage et la situation particulière de per-
riziculture ont subi une raréfaction des crues de
méabilité du site.
début et de fin de cycle qu'une étude fréquentielle de
la durée du cycle pluvial ne permettait pas de Sur le plan social, ces aménagements lourds et les
prévoir. Au 1ieu des deux années sur trois supérieures relations suivies avec des intervenants extérieurs
à 8 décades prévues {calcul sur 1968-1985, voir plus impliquent beaucoup plus les hommes que les
haut), il n'y a eu sur les 5 ans d'expérimentation femmes, même si ces dernières participent
(1986 à 1990) qu'une seule année favorable. Cette activement et en grand nombre aux constructions.
occurrence a été la même au poste météorologique Les tenants fonciers des milieux modifiés par les
de référence. Si on considérait comme indépen- aménagements acceptaient une distribution
dantes les saisons success.ives, une telle occurrence parcellisée des droits d'usage sous la condition
aurait une probabilité faible mais non nulle de se exclusive d'une culture de riz « expérimentale ».
produire (une chance sur 24). Le fait qu'il existe des Cette condition les protégait apparemment du risque
séries de saisons plus longues ou plus courtes (non- d'affaiblissement de leurs droits fonciers, à terme: on
stationnarité de la série) empêche en fait d'exploiter peut penser qu'ils savaient que l'expérience resterait
cette hypothèse et de faire réellement confiance à précaire et liée à l'intervention extérieure. Dans ces
une étude fréquentielle classique. La série de saisons conditions instables, la riziculture expérimentale
J.M. LAMACHERE, P. MAIZI, G. SERPANTIE, P. ZOMBRE
qu'ont tentée avec nous les paysans, sur de petites exclut toute riziculture intensifiée durable, surtout
parcelles (2 à 4 ares), restait sans doute une tentative quant elle est limitée à deux petites parcelles
promise à des difficultés. Il aurait fallu que le système attribuées au départ. Organisés en association, des
de culture proposé ait des résultats satisfaisants de paysans peuvent compenser le risque individuel
manière régulière pour que les expérimentateurs encouru sur une petite parcelle par la mise en culture
conservent leur droit d'usage. Dans le cas contraire, d'un grand champ, mais la priorité de l'économie
il était inéluctable que ce droit concédé au départ familiale sur l'économie individuelle et associative
reviendrait progressivement aux tenants fonciers, et les empêche de valoriser correctement ce terrain.
que le type de culture qu'ils choisiraient serait une Une telle riziculture collective ne fera que se
riziculture traditionnelle dans la zone devenue substituer à celle qu'aurait pratiqué (avec plus de
impropre au sorgho, les parties les moins inondées maîtrise probablement) le propriétaire foncier.
revenant au sorgho. Nous apprenons effectivement
Il est donc vraisemblablement erroné de présenter les
qu'en 1991 les propriétaires fonciers des terrains à
petits aménagements régulateurs de crues tels que
l'amont de l'a digue filtrante ont récupéré leurs droits
ceux que nous avons étudiés comme un soutien
d'usage et qu'ils ont mis en culture le bief de la
durable à l'agriculture vivrière des zones soudano-
manière prévue, ayant constaté l'e désistement
sahéliennes. Seuls pourraient en profiter, de façon
progressif des expérimentateurs après quatre années
très marginale, les propriétaires fonciers des terrains
défavorables.
inondables qui ne bénéficient d'ailleurs pas systé-
Sur le plan de l'aménagement, la différence fonda- matiquement de cet étalement des crues (à
mentale entre un aménagement hydro-agricole l'exception des petites digues filtrantes des zones
classique et les aménagements de Bidi tient dans collinaires, qui permettent la culture du sorgho grâce
leurs buts respectifs. à un meilleur drainage). le seul objectif sur lequel il
faut compter est l'impact local sur l'aquifère, encore
Dans le premier cas, les ressources à valoriser (eau faut-il améliorer le choix des sites et l'étanchéité des
d'irrigation et terres de lSas-fond) sont canalisées, ouvrages.
parcellisées par une autorité. Ces aménagements
permettent et nécessitent à la fois une « révolution Cette expérience rizicole aura-t-elle donc été vaine?
sociale» : les droits d'usage et pratiques antérieurs Pour MAIZI (1991), les actions de développement ne
sont totalement et définit~vement remis en cause. s'adressent pas à une collectivité fixée par la
l'aménagement ne peut être facilement détourné de tradition, mais à un ensemble complexe d'individus
ses buts. Et surtout, le fonctionnement est en grande qui se définissent par des contraintes ou des intérêts
partie prédictible, fiable (au moins jusqu'aux phases différents par rapport au projet. De fait, cette
ou la réhabilitation est nécessaire et s'il n'y a pas de confrontation de la société rurale avec elle-même et
vice du modèle technique). Clarté du changement avec des partenaires extérieurs, à travers l'expérience
social, sécurité et stabilité de l'aménagement sont menée, a à son tour imprimé une nouvelle trame de
peut-être à l'origine de la préférence des aména- relations et d'influences, généré de nouvelles
geurs, généralement étrangers à la société utili- contraintes et fait apparaître des axes de négociation
satrice, pour l'irrigation. et d'entente. l'ensemble de ces modifications du
tissu social peut être perçu comme une nouvelle
les installations de Bidi répondent, à l'opposé, à une étape dans l'adaptation de la société villageoise aux
demande clairement formulée par une société transformations de sdn environnement.
paysanne à des « partenaires contractuels» : sécu-
risation du niveau des nappes d'eau, ressources
collectives non appropriées traditionnellement. Il n'y
a aucune intention de changement social a priori. le Références bibliographiques
problème est que toute survalorisation de l'amé- AGNAME P., 1991. Diagnostic des barrages de Gourga et
nagement, recommandée par les partenaires Amene, proposition de travaux de restauration. Mémoire
extérieurs, nécessitera un tel changement. Même s'il de stage, EIER, Ouagadougou, 42 p.
est accompagné au départ par les partenaires sous
forme d'un I!. contrat », il faudrait pour stabiliser AUTISSIER V., MONIN L., 1987. Place et rôle du maraÎ-
chage dans le Yatenga. Rapport de stage, ORSTOM,
l'innovation sociale une pérennité des résultats
Ouagadougou, 250 p.
techniques en tout point.de la surface aménagée,
réussite légitimant une mutation durable des droits BAIMEY A., 1991. Application du modèle GR3 à
au profit des expérimentateurs. A défaut, ceux-ci l'évaluation des ressources en eau de quelques bassins
perdent progressivement de l'intérêt et surtout les versants du Burkina Faso. Mémoire de recherche, Ecole
droits qu'ils avaient tiré de l'intervention extérieure polytechnique de Lausanne, 62 p
et de leur participation au projet. Or, techniquement, BERTON S., 1988. Le point sur les aménagements de bas-
l'irrégularité fondamentale du régime d'inondation fonds. Paris, GRET.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
CASENAVE A., VALENTIN c., 1990. Les états de surface RAUNET M., 1985. Bas-fonds et riziculture en Afrique.
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486 :e~cc::ecc::c:::::cccc::mcc::mc:c:c::::::c::::::::::::·
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
CIRAD, 1993
Pour atteindre ses objectifs, le projet ORC a mis en L'aménagement de Kawara comprend des diguettes
place trois mesures d'intensification: la construction en terre, disposées selon les courbes de niveau. La
des aménagements hydro-agricoles, la mise au point hauteur des diguettes est de 0,30 m en moyenne en
d'une structure d'organisation des productrices et aval et de 0,20 m en moyenne en amont de cette
l'introduction de nouvelles techniques agricoles. diguette ; la largeur des crêtes est de 0,30 m et le
talus de pente 1/1. La figure 3 présente un croquis
schématique de l'aménagement de Kawara.
Maîtrise partielle de l'eau Les objectifs de l'aménagement à Kawara sont les
par des aménagements hydro-agricoles suivants: laminer les crues, stocker les eaux dans les
Le régime de l'eau étant lié aux caractéristiques du parcelles en fin de saison pluvieuse et pendant les
bassin versan~ et du bas-fond, le choix du type périodes sèches, et répartir l'eau d'une manière
d'aménagement diffère pour chaque plaine. Le uniforme sur la largeur du bas-fond.
problème principal de l'arrivée d'une grande Le tableau Il fournit quelques données générales sur
quantité d'eau dans la plaine s'explique par le fait les deux bas-fonds aménagés.
que la plus grande partie du bassin v.ersant se trouve
en tête du bas-fond (SAWADOGO, 1990). Une rapide Pour les deux bas-fonds, les parcelles aménagées ont
évacuation des eaux est nécessaire, bien qu'à été redistribuées aux exploitantes.
Kawara ce problème ne se pose pas vraiment (crues
Ecoulement latéral des versants
moins importantes).
La figure 2 présente une vue d'ensemble de 1 1 1
~~;~~::~~(h?(.~((~
l'aménagement de Moadougou.
B Collecteur central
avec un ouvrage à batardeaux
\
\ 1 /,v;;;.. \
1 1
.~
CI] Digue d'épandage ' / ",
Ecoulement •
W Bois sacré longitudinal
E3J Ma're . : .: \ .
·0": . - - - -. Limite de bas-fond +t-t-+++ Diguettes selon les courbes
de niveau
o
~
500 1000m Figure. 3. Schéma de l'aménagement de Kawara
(d'après FOKKER et WIlLE, 1988).
Figure 2. Vue d'ensemble de l'aménagement
de Moadougou (d'après SAWADOGO, 1990).
Tableau II. Données générales sur les bas-fonds
de Kawara et Moadougou.
Moadougou Kawara
Année de mise en place 1983-1984 1984-1985
\
Superficie aménagée (ha) 106 226
L'aménagement de Moadougou comprend :
Frais de l'aménagement (FCFAlha) 635700 202600
- un collecteur central pour accélérer l'évacuation
Nombre d'exploitantes 337 1 142
des crues dans le bas-fond, long d'environ 9 km et
muni d'ouvrages à batardeaux pour refouler l'eau du
collecteur; la fonction de ces ouvrages est d'apporter
un complément aux parcelles en fin de saison
pluvieuse et pendant les périodes sèches au cours de
la saison culturale;
- des ouvrages de prise/vidange des deux côtés du Mise au point d'une structure
collecteur pour drainer le.s parcelles au cours de la d'organisation des product~urs
saison pluvieuse et permettre une irrigation Une structure d'organisation visant la prise en charge
supplémentaire à la fin de la saison culturale; de la gestion des plaines par les exploitantes a été
- trois digues d'épandage (en tête de l'aménagement, mise au point. Ces dernières sont organisées en
en aval d'un bois sacré et en aval d'une mare) pour groupements rizicoles (GR), subdivisés en unités de
répartir uniformément l'eau sur la largeur de la groupements rizicoles (UGR) composées de 15 à 30
plaine. exploitantes. Il existe 1 GR à Moadougou, 2 à
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
superviser et coordonner les activités. Les tâches des Sur la base des chiffres du projet ORC, complétés par
groupements sont les suivantes: ceux des recherches effectuées sur le terrain par le
- l'organisation et l'exécution de l'entretien des C1EH et ses collaborateurs, il est possible de mesurer
aménagements et la manipulation des ouvrages; l'écart entre les objectifs visés par les mesures
d'intensification et le niveau effectif atteint.
-l'organisation de la distribution et de la collecte des
crédits de campagne pour l'achat des engrais, des
semences et des produits phytosanitaires;
Les rendements
-l'organisation de la commercialisation d'une partie
de la récolte; Le tableau III présente les rendements du riz, de 1983
à 1990, des bas-fonds aménagés. Les parcelles
- l'appui à l'encadrement pour la transmission des
estimées représentatives pour toute la plaine ont été
préoccupations et souhaits des exploitantes auprès
récoltées par des agents du projet ORC.
des encadreurs et animatrices.
Le tableau IV montre les rendements du riz pendant
les années 1989 et 1990 (RAN, 1990 ; VAN ETTEN,
Introduction de nouvelles 1991). Le même échantillonnage a été prélevé à la
techniques agricoles fin des deux campagnes sur 16 parcelles en moyenne
par plaine, choisies en tenant compte de leur
L'introduction de nouvelles techniques agricoles, position dans le bas-fond et de leur régime d'eau
vulgarisées dans les UGR par les encadreurs et les différent. Le bas-fond non aménagé de Damana est
animatrices du projet ORC, concerne: comparable à ceux de Kawara et de Moadougou
-le respect du calendrier cultural; avant leur aménagement: il se trouve dans la même
zone climatique, la taille des bassins versants et des
- l'utilisation de variétés améliorées à haut bas-fonds est à peu près identique.
rendement potentiel;
Une mission, réalisée en 1978 par une délégation de
- l'application d'intrants (engrais, herbicides et
la CEE, a visité cinq plaines non aménagées, parmi
pesticides) ;
lesquelles celles de Kawara et Moadougou. Leur
- le repiquage en ligne. estimation des récoltes concernant ces cinq bas-
fonds variait de 1 200 à 2 500 kg ha-l, avec une
Afin de stimuler l'usage des intrants et des variétés
moyenne de 2 000 kg ha-l (FED, 1978).
améliorées, le projet ORC vend sur place, à crédit,
les semences, le NPK, l'urée et les produits De l'analyse des tableaux et des observations ci-
phytosanitai res. dessus, il ressort que: .
Chaque UGR a un champ d'école pour mettre en - les rendements moyens n'ont pas encore atteint
pratique les connaissances acquises pendant les l'objectif de 3 000 kg ha- l . Pourtant, quelques
réunions de vulgarisation. parcelles ont donné plus de 3 000 kg ha-l, ce qui
Tableau III. Rendements (kg ha-l ) de riz dans les bas-fonds aménagés (selon le projet ORC).
1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990
Kawara 2408 1500 2660 2730 2500 3040 2387 1902
Moadougou 1664 2152 1326 1705 2500 2402 2355 1976
Tableau IV. Rendements (kg ha- l ) de riz selon le CIEH pour les années 1989 et 1990.
Plaine Moyenne Minimum Maximum
1989 1990 1989 1990 1989 1990
Kawara 1540 2100 1000 0 2530 4300
Moadougou 1 511 1880 500 600 2200 3700
Damana d.m. 2080 d.m. 1000 d.m. 3000
d.m. : donnée manquante.
\l\l.F. VAN ORIEL, A.M. RAN, P. FRAVAL
indique la bonne potentialité du riz sous certaines mergées qu'à partir du mois de juillet. Ce cas se
conditions; présente dès le mois de juin à Kawara. A Moa-
- vu le peu de données dont nous disposions, il est dougou, quelques parcelles se sont asséchées
impossible de démontrer une différence significative pendant plusieurs jours durant la saison pluvieuse et
entre plaines aménagées et non aménagées; au elles ont été mises à sec bien avant la récolte (jusqu'à
contraire, la différence entre le minimum et le un mois avant). Par ailleurs, à Kawara, toutes les
maximum de la production dans le bas-fond de parcelles étaient humides jusqu'à la récolte (RAN,
Damana est plus faible que celle relevée dans les 1990).
bas-fonds aménagés; en outre, les estimations de Le problème des fortes inondations pendant la saison
récoltes à 2 000 kg ha-1 pour plusieurs bas-fonds non pluvieuse n'est toujours pas résolu: 60 % des exploi-
aménagés en 1978 soutiennent la concurrence avec tantes à Kawara et 56% à Moadougou ont mentionné
les rendements des bas-fonds aménagés; que le nombre de fois où le riz est complètement
- il existe toujours une grande variation annuelle à noyé pendant plusieurs jours au cours d'une cam-
l'intérieur des bas-fonds, les différences entre les pagne est supérieur à trois (FOKKER et WILLE, 1988).
rendements minimaux et maximaux étant remar-
quables. La mobilisation des exploitantes pour effectuer
l'entretien est faible. Celui-ci est irrégulier, seules les
femmes directement concernées le prennent en
L'autogestion paysanne charge. Surtout au collecteur central à Moadougou,
l'absence d'arrachage des mauvaises herbes
Le projet ORC est conscient, après les premières empêche l'évacuation des eaux excédentaires.
années d'expérience, de la nécessité d'un comité
'pour l'autogestion de la plaine. Dans un cahier des Il reste encore des difficultés dans le domaine de la
charges, édité en 1988, les droits, devoirs et tâches conception des aménagements qui,compliquent une
des exploitantes et du projet ORC ont été définis. Le .bonne gestion de l'eau.
comité de gestion, constitué des responsables des
groupements rizicoles, est chargé de l'exécution des La capacité de plusieurs ouvrages de vidange à
Moadougou est trop faible, de sorte que les eaux
clauses du cahier. Pourtant, à l'heure actuelle, le
comité de gestion n'a toujours pas été mis en place latérales de ruissellement en provenance des ver-
dans les plaines de Moadougou et de Kawara. On sants ne peuvent pas être évacuées suffisamment
vite, cela entraînant des inondations prolongées dans
peut en conclure que, faute de ce comité de coor-
dination, l'entretien et la gestion des aménagements les rizières et des dégâts pour les ouvrages et les
diguettes.
sont toujours l'affaire d'individus ou de petits
groupes, mais surtout et malheureusement celle de Les diguettes selon les courbes de niveau ont partout
l'encadreur. les mêmes dimensions, indépendamment du
matériau de construction et de la perméabilité du sol
en 'place, d'où une grande variabilité de leur
résistance d'un endroit à l'autre. Celles construites
L'appl ication inadéquate dans les zones à teneur en sable relativement
des mesures d' intensification importante ne remplissent pas leur rôle et s'érodent
très rapidement. Vu l'hétérogénéité de la perméa-
Il vient d'être montré que les objectifs du projet ORC bilité du sol, la capacité de stockage d'eau des
n'ont pas été atteints. En examinant les niveaux parcelles devrait également être différente.
d'application, il est possible d'analyser les raisons de
La liaison entre les plaines et la Léraba orientale (le
ce constat.
cours d'eau à l'aval des bas-fonds) n'est pas réalisée.
Les eaux circulent difficilement, ce qui provoque des
inondations, surtout dans les parties en aval. II n'a
Les performances des aménagements pas été possible de cultiver les parties aval (environ
Bien que l'objectif n'ait jamais été une maîtrise totale 15 % du bas-fond amén.agé à Kawara, 12 % à
de l'eau, les aménagements ne répondent pas tout à Moadougou) de l'ensemble des deux plaines
fait aux attentes. pendant les années 1988-1 990.
Il y a toujours des problèmes de sécheresse au début, Le planage des parcelles n'a pas été exécuté de
pendant et à la fin de la saison pluvieuse. Un suivi de manière précise. Ceci ne pose pas uniquement le
17 parcelles à Kawara et de 19 à Moadougou en problème des différentes hauteurs d'eau dans une
1989, jugées représentatives pour les deux plaines, a même parcelle, mais rend également difficile la
montré qu'à Moadougou les parcelles ne sont sub- répartition des eaux entre les parcelles.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
«-. ~ o,o..~ -.e-.. ~ "' ~ "«-. ~ ""». ~''<<-. .........,.. ~ ~ ~ ~'''"(10)>,''*, ''<<<<>Oo.'
Les batardeaux des ouvrages dans le collecteur, très conséquent, le nombre d'exploitantes par UGR est
lourds et longs, sont difficiles à manier par les très élevé, jusqu'à 97 au lieu de 15 ou 30
exploitantes. D'un autre cÔté, plus ou moins laissés à (NUGTEREN, 1990). Dans de telles conditions, le
l'abandon, ils sont sujets à des vols. transfert des informations est plus qU'aléatoire.
Pourtant les exploitantes cherchent des solutions aux Les femmes connaissent traditionnellement
problèmes techniques, par exemple: différentes formes de coopération, ce qui offre un
- les van nettes absentes sont remplacées par une bon point de départ pour l'organisation des
construction faite de branches, de planches et exploitantes.
d'herbes;
- le cavalier cassé est réparé à l'aide de pierres, de
Les nouvelles techniques agricoles
branches et avec de la boue;
- si l'eau dl! collecteur entre involontairement dans Le tableau V fournit les données sur le pourcentage
la rizière, les ouvrages de vidange sont complè- des femmes qui appliquent effectivement les
tement bouchés avec des pierres et de la boue; nouvelles techniques agricoles, vulgarisées par les
encadreurs/animatrices du projet ORC pour les
- à l'initiative des exploitantes, un ouvrage à batar-
années 1988 (FOKKER et WILLE, 1988) et 1989
deaux a été réparé, en achetant du ciment et en
(OUEDRAOGO, 1990). Les chiffres de 1988 sont basés
engageant un maçon;
sur 55 enquêtes à Kawara et 20 à Moadougou, ceux
- afin de diriger l'eau plus uniformément dans une de 1989 sur 20 enquêtes dans chacune des plaines.
parcelle à forte dénivelée, des diguettes supplé- En examinant le tableau V, on remarque que:
mentaires ont été construites.
- la quantité de NPK et d'urée appliquée était
insuffisante dans tous les cas; la quantité d'engrais à
utiliser, vulgarisée par le projet ORC, est de 40 kg de
Le fonctionnement des groupements NPK et de 12 kg d'urée pour 0,2 ha ; lorsque les
Malgré l'espacement et la rareté des réunions de exploitantes les appliquent, il s'agit seulement de
sensibilisation/vulgarisation (tous les deux mois petites quantités de 1-10 kg pour 0,2 ha;
environ) et le fait que les exploitantes soient - les chiffres sur l'utilisation des variétés améliorées
prévenues au préalable, 'l'a participation moyenne concernent également les exploitantes ayant des
par UGR n'excède pas 30 à 40 % à Moadougou et parcelles avec une combinaison de variétés
10 % à Kawara (OUEDRAOGO, 1990). améliorées et locales. Si on considère les parcelles
La participation aux séances de formation sur le contenant uniquement les variétés améliorées, les
terrain dans les champs d'école est nettement plus chiffres réels sont encore plus bas que ceux du
élevée, mais dépend d'ailleurs fortement du type de tableau.
formation: les formations au sarclage ne sont que
faiblement fréquentées (jusqu'à environ 40 % des
membres); celles concernant le labour, le repiquage Tableau V. Application des intrants et des techniques
ou la récolte peuvent atteindre, dans quelques culturales vulgarisées par les femmes (en %) en 1988
(FOKKER et WILLE, 1988) et 1989 (OUEDRAOGO, 1990).
groupements, un taux de participation de 80 %. Cela
s'explique non pas par l'intérêt intrinsèque des Intrants Kawara Moadougou
exploitantes pour les nouvelles techniques mais 1988 1989 1988 1989
plutôt parce qu'elles se sentent moralement obligées
Variétés améliorées 23 35 58 35
de participer aux travaux communs de formation
pour pouvoir prétendre à leur part de la récolte des Utilisation NPK 29 30 32 15
champs d'école. Utilisation urée d.m. 10 d.m. 0
Théoriquement, l'ensemble des exploitantes est Repiquage en ligne d.m. 40 d.m. 20
nommément membre d'un UGR. Une enquête, Suivi calendrier cultural d.m. 35 d.m. 55
menée en 1989, a montré que seulement 88 % d.m. : donnée manquante.
d'entre elles étaient effectivement attachées à un
UGR (NUGTEREN, 1990). Lorsque, pour une raison ou
une autre, une femme cesse d'exploiter sa parcelle,
dont elle cède l'usage à une autre (parente ou amie),
l'encadrement n'en est jamais informé.
Un grand nombre d'exploitantes expérimentent aussi
Le nombre de groupements a été restreint par rapport bien avec des variétés locales qu'améliorées. Elles
à ce qui avait été prévu initialement à cause du sèment, même sur seulement quelques mètres carrés,
nombre insuffisant d'encadreurs et animatrices. Par des variétés inconnues afin de découvrir celles qui
\lY.F. VAN DRIEL, A.M. RAN, P. FRA VAL
répondent à leurs exigences. Cela souligne, malgré sion admissible pour le riz; il est à noter que les
tout, la volonté des exploitantes d'améliorer les variétés améliorées sont souvent beaucoup plus sen-
rendements. sibles aux inondations que les variétés locales;
- des écoulements importants (crues non ou
partiellement contrôlées) provoquent le transport des
semences, de l'engrais et parfois des plantules
Analyse des risques nouvellement repiquées;
et des contraintes de l'intensification - la vitesse importante de l'eau cause la verse du riz..
Il est évident que le peu d'application des mesures L'instabilité des niveaux d'eau d'une année sur
d'intensification. est la raison principale pour laquelle l'autre et le manque de maîtrise de l'eau créent une
les objectifs n'ont pas été atteints; cela tient aux grande incertitude en ce qui concerne la quantité
lacunes dans la performance des aménagements, à la d'eau à attendre dans les parcelles. En outre, dans la
faible utilisation des intrants et au faible niveau situation actuelle, cette incertitude est augmentée car
d'organisation des exploitantes. Cependant, ce les exploitantes ne possèdent plus qu'une seule
constat demande une analyse plus approfondie. parcelle au lieu de plusieurs comme avant la mise en
Apparemment, certains risques et contraintes place des aménagements. De ce fait, les exploitantes
empêchent les exploitantes d'investir dans la rizi- n'aspirent évidemment pas à obtenir la production
culture. Il est important de se rendre compte d'abord potentielle en investissant dans leur parcelle, mais
de la complexité des rapports entre ces risques et plutôt à minimiser les risques. Leur investissement
contraintes. Par exemple, les risques de nature dans les rizières, en main-d'œuvre et en financement
hydrologique ont une influence sur l'efficacité et, par pour l'achat des intrants et des semences des variétés
conséquent, sur l'application de l'engrais. L'uti- améliorées, n'est pas optimal pour atteindre les
lisation de l'engrais à son tour n'est pas seulement rendements potentiels. Ceux-ci doivent d'ailleurs
influencée par la situation hydrologique, mais éga- être évalués en fonction de la pluviométrie, du
Iement par la situation financière des exploitantes. drainage et du ruissellement.
Afin de préciser cette complexité, une matrice a été En raison des processus d'érosion qui ont cours dans
élaborée (tableau VO, qui montre l'influence des le bassin versant, le sable sédimente dans la plaine et
contraintes de nature différente sur les mesures le collecteur central. La conséquence en est
. d'intensification. l'explication du tableau est donnée l'envasement du collecteur et des dénivellations
ci-après. dans les parcelles. La gestion de l'eau à l'intérieur
des parcelles aux bordures de l'aménagement
Tableau VI. Relation entre l'application des mesures devient plus difficile.
d'intensification et les risques et contraintes.
récolte) et que le taux de commercialisation est très groupements, dans le cas de Kawara et de
faible, les exploitantes hésitent à prendre un crédit au Moadougou, le projet ORC n'a pas forcément pris en
début de la campagne pour acheter de l'engrais; compte les affinités existantes entre les exploitantes.
ceci de peur de ne pas pouvoir.le rembourser L'attribution plus ou moins arbitraire des parcelles
ensuite. après l'aménagement fait que les femmes d'une
même concession (alors apparentées) ne sont pas
De plus, vu que les ménages terminent le stock de riz
regroupées dans la même partie de la plaine. Il en
avant de commencer à consommer les céréales des
découle des problèmes de voisinage, comme le refus
terres hautes, l'augmentation des rendements de riz,
de collaborer avec les exploitantes voisines pour
qui nécessite des investissements, ne favorise
entretenir l'aménagement et gérer l'eau, qui ont
évidemment pas les femmes, mais davantage les
certainement une influence sur le niveau des
hommes, qui peuvent ainsi vendre une plus grande
rendements.
partie de leur stock de céréales (NUGTEREN, 1991 ;
VOLKERT et DE WIT, 1991).
Les rendements étant influencés par plusieurs La préférence pour certaines variétés
facteurs (par exemple de nature hydrologique) pas
Les paysannes ne portent pas seulement leur choix
toujours maîtri,sables, les exploitantes n'ont pas la
sur le rendement potentiel d'une variété donnée.
garantie que les investissements financiers puissent
Elles, utilisent également d'autres critères: le temps
leur rapporter.
de cuisson du riz, la possibilité de conserver les
grains, la durée du cycle de croissance, la résistance
L'emploi du temps chargé des femmes aux maladies et aux attaques des insectes, et le goOt.
Parce que les inondations dans les parcelles sont
Les femmes sont chargées de différentes tâches, dont
toujours fréquentes, la taille de la tige est un critère
l'une est la riziculture. Elles s'occupent aussi de
très important. De plus, les variétés améliorées
l'éducation des enfants, des tâches ménagères, du
n'atteignent leurs rendements potentiels que si
petit commerce, des jours de marché, des activités
certaines conditions sont remplies, comme par
sur les terres hautes (assistance obligatoire aux
exemple un niveau d'eau pas trop élevé dans les
hommes pendant les périodes de semis et de récolte).
parcelles (la taille de l'épi est généralement faible),
En considérant le fait que l'emploi du temps obéit à
l'application d'engrais, d'herbicides et de pesticides.
un régime de priorités, le manque de temps est une
Pour ces raisons, les variétés améliorées, avec de
des raisons pour lesquelles les femmes n'assistent pas
hauts rendements potentiels, ne sont pas
aux réunions de vulgarisation, n'entretiennent pas
automatiquement préférées.
l'aménagement, ne respectent pas le calendrier cul-
tural, et préfèrent utiliser des variétés avec différents
cycles pour pouvoir échelonner le moment de la
récolte.
Les relations entre exploitantes
et encadrement du projet
Les relations entre les exploitantes Souvent, il n'existe pas de relations de confiance
entre les exploitantes et l'encadreur/animatrice.
Les exploitantes apparentées sont moralement
Pourtant ceci est déterminant, puisque l'encadre-
obligées de s'aider dans la plaine, de partager l'eau,
ment a comme objectif de transmettre de nouvelles
de s'informer s'il y a des problèmes ou des réunions.
techniques aux exploitantes afin de parvenir à une
Pourtant, en attribuant les parcelles et en formant les
intensification. Il abuse parfois de son pouvoir pour
forcer les exploitantes à exécuter certaines tâches en
Tableau VII. Types de revenus et de dépenses les menaçant de leur retirer leurs parcelles. Il semble-
des femmes (VOlKERT et DE WIT. 1991). rait que, pour ces raisons, les paysannes n'assistent
plus aux réunions, n'informent pas l'encadrement en
Revenus Dépenses
cas de dégâts dans l'aménagement et règlent entre
Produits artisanaux Frais de scolarité elles les problèmes d'héritage des parcelles.
Produits de la cueillette Condiments pour la sauce
Produits agricoles transformés Céréales
Produits agricoles non transformés Vêtements L'absence d'une structure d'entretien
Petit bétail Médicaments Bien que l'autogestion des plaines soit assurée par les
Bois de chaulle Main-d'œuvre responsables des groupements rizicoles, l'entretien
ne peut pas être garanti sans la mise en place d'une
Main-d'œuvre Intrants riziculture
structure spéciale. Les connaissances techniques des
Dons du mari exploitantes et des encadreurs, la présence de ma-
W.F. VAN ORIEL, A.M. RAN, P. FRAVAL
tériels de construction, d'outils et de techniciens nique (gestion des aménagements par les exploi-
pour l'exécution sont indispensables. tantes, pratiques agronomiques, techniques cul-
turales) et une étude socio-économique (investis-
sements financiers pour la riziculture, concurrence
Le nombre d'encadreurs/animatrices d'autres activités économiques, commercialisation
par plaine insuffisant des productions, relations avec l'encadrement).
• Avant d'introduire une nouvelle technologie, par NUGTEREN H., 1990. La structure et le fonctionnement de
exemple mettre en valeur un bas-fond rizicole, il est l'encadrement mis en place par l'Opération riz Comoé
essentiel de réaliser des études de faisabilité tant (ORC) dans la plaine de Kawara. Document interne.
dans le domaine technique que sodo-économique, Ouagadougou, CIEH-UAW.
afin d'identifier et de minimiser les contraintes et les
risques potentiels. Pour cela, des approches NUGTEREN H., 1991. Les systèmes de production à
Konadougou et Damana, Burkina Faso: agriculture
interactives et sectorielles ont été proposées.
pluviale et riziculture de bas-fond. Wageningen, CIEH-
• Il est important d'étudier l'ensemble du système de UAW.
production (dont la riziculture fait partie), d'un
ménage ou d'une famille. Ceci permet de mieux ORC, 1990. Proposition de financement, 6 e FED.
connaître les. facteurs qui peuvent fortement Document interne. Ouagadougou, ORC-FED.
influencer les possibilités et motivations des femmes
pour investir dans la riziculture. OUEDRAOGO E., 1990. Etude socio-économique
concernant les exploitantes touchées par le projet
• Le système d'encadrement jouant un rôle crucial Opération riz Comoé. Banfora, ORC-SNV.
dans le transfert des techniques introduites, il est
indispensable d'évaluer constamment le fonc- RAN A.M., 1990. La gestion de l'eau pour la riziculture des
tionnement et l'efficacité de ce système. Au lieu bas-fonds dans la région de la Comoé. Ouagadougou,
d'imposer des techniques et pratiques aux exploi- CIEH-UAW.
tantes, les encadreurs devraient davantage tenir
compte des demandes et intérêts de celles-ci, en SAED, 1988. Etude sodo-économique pour l'exécution de
tentant d'y répondre de la manière la plus adéquate. la phase Il du projet Opération riz Comoé. Ouagadougou,
SAED.
Références bibliog~al?~iques VAN ETTEN J., 1991. Les rendements du riz des plaines de
Kawara, Moadougou et Damana de la campagne 1990
FED, 1988. Données brutes obtenues lors de la mission à
(province de la Comoé, Burkina Faso). Wageningen, CIEH-
Banfora du 14 au 17 novembre 1987. FED.
UAW.
FOKKER R., WILLE M., 1988. La gestion d'eau et
l'exploitation dans les plaines rizicoles de Kawara et VOLKERT P., DE WIT L., 1991. La commercialisation des
Moadougou. Banfora, C1EH-UAW. céréales à Konadougou. Ouagadougou, CIEH-UAW.
Bas-fonds et riziculture
Antananarivo, 9-14 décembre 1991
C1RAD,1993
M. SONOU 1
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Systèmes de contrôle
Dans les conditions traditionnelles, la maîtrise
partielle des eaux à petite échelle,peut apparaître
spontanément dans le cadre d'un processus d'in-
tensification de l'agriculture, quand la pression
démographique augmente. Mais il y a aussi des cas
oD le système de production a de longue date adopté
une méthode tirant profit de la montée des eaux ou
de leur retrait: soit la submersion naturelle, soit la
culture de décrue traditionnelle, qui n'exigent pas
d'aménagement spécifique.
Toutefois, des améliorations techniques simples
peuvent être apportées soit pour retarder la montée
G-- Motopompe
l'effet amplificateurdu contrôle de l'eau sur l'accrois- indicateur, parmi d'autres, des mérites du projet. Il
sement de rendement da aux engrais (figure 5). Pour ne porte que sur les effets du projet qui peuvent être
l'agriculteur, l'objectif final reste l'amélioration du mesurés en termes monétaires. JI est sans doute aisé
revenu dans des conditions de rémunération d'estimer les coOts et avantages directs - coOts des
satisfaisantes. ouvrages de génie civil, équipements, facteurs de
production et services, abandon de productions
Rendement du riz
antérieures et accroissement de certaines récoltes
(t ha-') sous l'effet du projet - qui constituent le noyau de
6 Mauvais contrOle de l'eau Bon contrOle de l'eau
l'analyse économique. Par contre, il est moins facile
d'évaluer les effets indirects ainsi que les effets
5
physiques et é.conomiques qui sont induits en dehors
4 -_ ... de la zone du projet.
3
.... --------- Au-delà; d'autres effets se feront également sentir,
qui ne peuvent être perçus que de manière très
2 ...----------_... vague, mais qui ont encore une grande importance et
1 1 1
qui influent directement sur la qualité de la vie des
15-15-15' 90-60-60 15-15-15 90-60-60 populations plutôt que sur leur revenu et sur leur
Engrais (kg ha-' NPKl bien~être matériel. On devrait donc compléter le
0 - - - 0 Améliorée "---e Traditionnelle calcul du taux de rentabilité économique de chaque
projet par une étude systématique de toutes les
Figure 5. Effet du contrôle de l'eau et de l'application répercussions importantes qu'il est possible de
d'engrais sur deux variétés traditionnelles
prévoir.
et deux variétés améliorées de riz
(d'après Rapport annueIIlTA-RCMP, 1986). En 1985, le rapport d'évaluation des projets d'irri-
gation financés par la CEE en Afrique recommandait
que la sélection des projets accorde plus de poids
aux critères tels que les te faibles coOts récurrents» et
Des études sont encore nécessaires pour clarifier une les te charges d'exploitation et de maintenance
situation où partisans et opposants aux travaux supportables par les agriculteurs» (IILRI, 1985).
d'amélioration du contrôle de l'eau dans les bas-
fonds semblent, les uns et les autres, disposer
d'arguments.
Certains soutiennent que l'amélioration des bas- Maîtrise de l'eau
fonds n'entraînerait qu'une augmentation de 20 à et environnement
50 % du rendement du système traditionnel. Aussi
l'analyse économique de la filière riz au Mali et en Les aménagements hydro-agricoles, notamment pour
Sierra Leone indiquait-elle qu'il aurait suffi d'une la riziculture, entraînent des variations du système
chute de 21 à 34 % des rendements ou d'une baisse hydrologique, variations qui provoquent à leur tour
de 15 à 23 % des prix mondiaux pour rendre les bas- des modifications de la communauté biotique. La
fonds améliorés non rentables (SPENCER, 1989). modification de la composition par espèces des
D'autres auteurs, dans une analyse récente effectuée populations de moustiques peut influer de façon
pour la zone de Bida, Nigeria (AsHRAF et WAKATSUKI, draconienne sur le tableau des maladies dues aux
1988) estimaient qu'un taux interne de rentabilité arbovirus et aux vecteurs du paludisme. Souvent, la
(TIR) de 55 % pouvait être obtenu avec des perturbation de l'environnement aquatique par
investissements dans l'amélioration de bas-fonds. Ils l'homme crée aussi des conditions favorables d'une
basaient leur analyse sur une durée de vie de dix ans part aux mollusques hôtes de la schistomiase et
pour les structures physiques mises en place, un taux d'autre part aux contacts entre l'homme et ces
d'actualisation de 20 % et un accroisement de vecteurs.
rendement de 1,5 t ha- l . Une réévaluation aux
La lutte antivectorielle par l'aménagement de l'en-
conditions de salaires et de prix du riz paddy de
vironnement est considérée comme le moins nocif
1984-85 ramène le TIR à 24 %, ce qui serait insuf-
des moyens de lutte. Elle devrait ici porter sur trois
fisant pour attirer des investissements (SPENCER,
1989). aspects principaux: la nappe d'eau, la végétation et
les établissements humains. Mais c'est plutôt la
Trop souvent, la controverse tourne autour du taux permanence de la nappe d'eau qui est généralement
économique interne de rentabilité des inves- un facteur important pour la colonisation par les
tissements. Pourtant, ce pourcentage n'est qu'un moustiques.
M.SONDU
A cet égard, la riziculture en submersion par inter- notamment en matière d'économie d'eau et de lutte
mittence offre une méthode de lutte que l'on peut antivectorielle ;
recommander. Elle permet aussi des économies - poursuivre l'inventaire des bas-fonds et améliorer
d'eau qui peuvent atteindre 50 %. leur caractérisation agrohydropédologique ; dans ce
Par ailleurs, l'alternance submersion/assec est cadre, des études spécifiques permettraient de
créditée d'une appréciable capacité de réduction des déterminer quelles proportions des bas-fonds
émissions de gaz méthane, dont 25 % proviendrait . pourraient être aménagées sans déséquilibre
de la riziculture inondée. le méthane contribue environnemental ;
fortement à l'effet de serre de l'atmosphère. En effet, - continuer le suivi hydrologique des bas-fonds
par kilogramme, son pouvoir de piégeage de la aménagés afin d'ajuster leur gestion et réhabilitation
chaleur de l'atmosphère terrestre est 20 à 60 fois plus éventuelle à des données de base fiables;
élevé que celui du dioxyde de carbone. la réduction - poursuivre l'analyse de la rentabilité socio-
de son émission pourrait donc contribuer à ralentir le économique des travaux de maîtrise partielle ou
réchauffement climatique global. Il faudrait toutefois totale de l'eau dans les bas-fonds, sans oublier les
veiller à ne pas provoquer des pertes inconsidérées autres avantages qui ne sont généralement pas pris en
de rendement et donc de production de riz dans des compte par le calcul du taux interne de rentabilité;
zones déjà affectées par le déficit en riz.
- poursuivre et intensifier, par réseaux de coopé-
Enfin, la réduction de la percolation non seulement ration technique interposés, l'échange d'information
économiserait l'eau et améliorerait le taux d'assi- sur les différents problèmes que posent l'amé-
milation des engrais par la plante, mais, au plan nagement et la mise en valeur d~s bas-fonds.
environnemental, elle réduirait les risques de pol-
lution de la nappe d'eau souterraine par les
fertilisants et les pesticides.
Conclusion
Références bibliographiqués
les bas-fonds constituent encore en grande partie
BRAATZ, B.V., HOGAN K.B., 1991. Sustainable rice
des réserves de terres arables caractérisées par des
productivity and methane reduction. Research Plan. US
conditions d'accès souvent difficiles et des fonctions Environmental Protection Agency.
agrohydropédologiques mal connues. Aussi vou-
drait-on, en guise de conclusion, faire les recom- FAO, 1986. Consultation sur l'irrigation en Afrique. Rome,
mandations suivantes: FAO.
- améliorer les méthodes de prédétermination des FAO, 1986. L'agriculture africaine: les 25 prochaines
crues et des apports des bassins où se situent les bas- ann,ées. Rome, FAO.
fonds, afin de rendre plus fiable la conception des GUNNEWEG HAM.I., EVERS A., HUIZING A., 1986. A
ouvrages de contrôle de l'eau; model to assess proposed procedures for water control:
- améliorer la gestion de l'eau sur parcelles amé- application and results for two small in land valleys. ln:
nagées en vue d'une meilleure valorisation des The wetlands and rice in Subsaharan Africa. International
conference on wetlands utilization for rice production in
investissements consacrés aux travaux de contrôle de
Subsaharan Africa, Ibadan, Nigeria, 4-8 November 1985.
l'eau;
A.S.R. juo, j.A. Lowe (eds). Ibadan, liTA, p. 87-94.
- rechercher et élaborer des méthodes d'amé-
ILRI, 1985. Evaluation of irrigation projects sponsored by
nagement si mples et peu coûteuses, conçues comme
the European Economic Community. Synthesis Report.
une amélioration des systèmes paysans traditionnels
Wageningen, ILRI.
et tenant compte du niveau de maîtrise tech-
nologique et de participation des bénéficiaires aux IWATA S., HASEGAWA S., ADACHI K., 1985. Water flow,
différentes étapes des projets; balance and control in rice cl,lltivation. In : The wetlands
and rice in Subsaharan Africa. International conference on
- intégrer la lutte antivectorielle dans la conception, wetlands utilization for rice production in Subsaharan
la construction et l'exploitation des aménagements; Africa, Ibadan, Nigeria, 4-8 November 1985. A.S.R. juo,
- identifier, concevoir, améliorer et promouvoir les j.A. Lowe (eds). Ibadan, liTA, p. 69-86.
méthodes potentielles de réduction des émissions de KANDIAH A., TON THAT T., CARPENTIER A. j., 1989.
gaz méthane par la riziculture inondée, sans effets Area change and system choice for rice irrigation in Asia
négatifs sur la productivité; à cet égard, l'irrigation 1990-2000. In : 17th Session of the International Rice
intermittente offre des avantages additionnels, Commission.
Thème V - Bas-fonds et petits aménagements
KILIAN J., TEISSIER J., 1973. Méthodes d'investigation pour SPENCER D.S.C., 1989. A farming system research strategy
l'analyse et le classement des bas-fonds dans quelques for the development of inland valleys for increased food
régions d'Afrique de l'Ouest. Proposition de classification production in West Africa. In : Second symposium of the
d'aptitudes des terres à la riziculture. L'Agron. Trop., 28 : West African Farming Systems Network, Accra, Ghana,
156-172. August 28-September 1, 1989.
Le cinquième thème du séminaire était celui des aménagements hydrauliques dans les bas-fonds. Qu'elle soit
séculaire ou récente, l'occupation des bas-fonds se heurte aux mêmes problèmes, la sécurité de la production
et l'intensification de l'agriculture, et a pour objectifs l'autosuffisance alimentaire, l'amélioration du revenu
agricole dans le cadre d'un développement durable au double plan économique et environnemental. Ce
développement nécessite la conception et l'élaboration d'aménagements hydrauliques pour se protéger des
crues, stocker et redistribuer l'eau, en bref diminuer ou supprimer la contrainte hydrique pour un meilleur
épanouissement agronomique.
Ces aménagements doivent être compatibles avec le niveau de maîtrise technologique des bénéficiaires et leur
capacité économique. Ils doivent reposer sur les structures sociales ou être basés sur des conditions réalistes
de leur modification.
Pour en traiter, sept communications ont été présentées, recouvrant essentiellement la problématique de
l'Afrique de l'Ouest et Madagascar: deux communications sur Madagascar, quatre communications sur
l'Afrique de l'Ouest et une communication de synthèse sur l'Afrique et sur les voies et moyens de rendre ces
aménagements plus viables.
On peut classer également ces contributions suivant les trois échelles appréhendées: le terroir, la zone
écologique, le pays et le continent.
Le terroir
La communication de J.M. Lamachère et G. Serpentié décrit des outils de diagnostic des différentes conditions
de développement d'un bas-fond. Les contraintes sont établies à partir de ces diagnostics qui ont pris en
compte à la fois le milieu naturel et humain. Les réponses à ces contraintes résident dans la conception
d'aménagements en vue de sécuriser la production agricole et la diversifier. Si cette étude s'applique à un
exemple particulier, un terroir sahélien, les méthodes développées sont plus générales.
Un diagnostic sur des aménagements réalisés dans le sud du Burkina Faso a été fait par W. Van Oriel et A.M.
Ran. Les objectifs des aménageurs sont mis en regard avec la situation d'apr~s-aménagement, pour montrer
comment un certain nombre de risques et contraintes peuvent compromettre les mesures d'intensification.
Dans ces aménagements, des risques liés tant au milieu physique (crues) qu'au milieu humain (stratégies
paysannes) ont été négligés.
Dans le même sens, la communication de B. Lidon et M. Simpara montre, dans une région écologique voisine,
que, si le même objectif d'intensification n'a pas été atteint pour les mêmes raisons, le développement
d'activités annexes, non prises en considération par les aménageurs, peut valoriser les investissements.
La zone écologique
1
La zone écologique présentée était les hauts plateaux malgaches. La communication de C. Chabaud montre
les performances des systèmes traditionnels d'aménagement, qui résistent aux changements liés aux impératifs
d'intensification. La modernisation des aménagements nécessite une solidarité de différents groupes sociaux
qu'il faut amener à travailler ensemble pour gérer l'eau et accepter une police des eaux.
La communication de N. Andriamampianina établit une typologie des aménagements et des systèmes de
gestion de l'eau en fonction de la surface des bassins. Elle montre l'importance d'une gestion intégrée des
ressources en eau à l'échelle des versants et à celle du bas-fond. Une complémentarité entre la ressource liée
au ruissellement et celle des apports souterrains est recherchée par les agriculteurs. Ces aménagements
doivent favoriser l'une ou l'autre de ces ressources en fonction de la taille du bassin.
Sur les petits bassins, une dégradation des versants au profit d'une augmentation du ruissellement est
nécessaire, mais doit être contrôlée pour ne pas avoir un contrecoup trop important avec l'érosion.
Pays et continent
c. Cheron et M.S. Drame ont présenté l'expérience de la Guinée en matière d'intensification de l'agriculture
dans les bas-fonds, thème majeur du programme hydro-agricole national. Cette expérience est intéressante à
un double titre: la Guinée est un pays à forte potientalité dans le doma-ine de l'aménagement des bas-fonds et
le programme d'aménagement lancé récemment a pu s'inspirer des expériences des pays voisins. Trois
méthodes d'intervention ont été analysées, comparées et les aspects positifs et négatifs de chacune ont été
soulignés. La première méthode, concernant la région de Geckedou, est celle d'un programme
d'aménagement intégré insufflé par le Projet national d'infrastructure rurale; elle privilégie l'intervention et
l'encadrement de l'Etat, et est réalisée en régie. La deuxième méthode est celle des ONG, avec une forte
participation paysanne. La troisième méthode est celle d'un aménagement confié à un bureau d'études, avec
cahier des charges émanant de l'administration. Cette communication propose une typologie des
aménagements et donne les coOts pour chaque type. Un calcul d'efficacité est réalisé pour les trois méthodes.
Le coOt d'investissement pour une intensification correspondant à l'augmentation du rendement d'une tonne
par hectare donne la faveur au projet réalisé en régie tandis que les résultats les plus probânts d'intensification
reviennent au projet confié au bureau d'études.
La communication de M. Sonou fait l'état des lieux sur la problématique de l'aménagement des bas-fonds en
Afrique. Elle dégage les éléments de réussite et d'échec de ces aménagements. Elle évoque les priorités
accordées par les bailleurs de fonds en matière d'aménagement, et leurs objectifs. Elle regroupe les
recommandations issues de très nombreuses expériences. Elle met l'accent sur les aspects socio-économiques
et environnementaux, conditions d'un développement durable.
De ces communications et des débats qui ont suivi, on peut tirer les enseignements suivants:
- un aménagement de bas-fond doit, sur le plan physique, considérer à la fois le bassin versant et l'unité
bas-fond; le problème de stérilisation des sols par les apports d'érosion est apparu dans des milieux très diver-
sifiés ;
-la caractérisation de la ressource hydrique doit précéder l'aménagement et être minutieuse;
- après aménagement, l'impact sur les ressources doit être suivi et le modèle de gestion réajusté en
conséquence;
-l'aménagement doit être facilement appropriable par la société paysanne;
-la participation des paysans doit être effective dans toutes les étapes du projet;
- si l'aménagement améliore la disponibilité en eau, il n'est pas suffisant pour intensifier l'agriculture; il doit
être accompagné de plusieurs mesures: fertilisation, variétés améliorées, pratiques culturales améliorées,
crédit agricole, introduction des productions dans le système de marché, prix incitatifs;
- il faut différencier les aménagements à vocation économique et ceux dont la vocation est d'améliorer
l'autosubsistance locale; la participation financière des agriculteurs doit être adaptée à leur capacité de
paiement et à la capacité de capitalisation induite par l'aménagement;
- suivant l'importance du bas-fond et la place traditionnelle des femmes dans le système de production, il y a
lieu de considérer des critères de rentabilité tenant compte des autres activités féminines.
Synthèse générale de Georges Pédro,
commission scientifique hydrologie-pédologie,
ORSTOM
Ce séminaire international « Bas-fonds et riziculture» a été en définitive un grand succès. Cela tient tout
d'abord à sa parfaite organisation, due à Michel Raunet, ensuite aux contributions des différents intervenants
dans les cinq thèmes retenus au départ, enfin aux discussions qui ont eu lieu au cours des diverses séances.
Il me reste à tirer maintenant les conclusions générales de ce séminaire, que je développerai autour des quatre
points suivants:
.- une connexion très forte entre recherche et développement;
- un rOle majeur joué par la riziculture en tant qu'agrosystème modèle pour les approches intégrées et les
études transversales;
- un intérêt pour une meilleure connaissance de la typologie des bas-fonds;
-la nécessité de la mise en place d'études approfondies à caractère multidisciplinaire en· site représentatif.
Les bas-fonds considérés ici sont en fait des zones basses du paysage, généralement bien délimitées, sans
dynamique fluviale, dans lesquelles la nappe phréatique est susceptible de jouer un rOle important, et qui
présentent une différenciation amont-aval nette.
Cela étant, les bas-fonds, par leur strudure et leur fonctionnement, sont différents suivant les conditions
pédobioclimatiques du milieu. Pour ce qui nous intéresse ici, en rapport avec la riziculture, il faut distinguer:
- les bas-fonds des zones tropicales humides (forestières) à modelé polyconvexe ; c'est le cas des bas-fonds
des hautes terres de Madagascar; ils sont très favorables à la production de riz aquatique;
-les bas-fonds des zones tropicales semi-humides (savanes) à modelé concave, avec développement de glacis
plus ou moins important; ils sont propices au riz pluvial et même quelquefois au riz aquatique.
Il y a ainsi bas-fond et ba~~fond à la surface de la planète, et il faut toujours bien préciser les situations avant
d'aborder les questions de mise en valeur et de développement.
Les résultats enregistrés au cours de ces recherches sont fort intéressants, dans la mesure où ils sont déjà
transposables à tous les petits bas-fonds du même type.
Naturellement, cette opéràtion est loin d'être terminée, et il paraît nécessaire de l'étendre et de l'approfondir,
notamment à deux niveaux, en envisageant les problèmes à une plus petite échelle (niveau bassin versant) et
en faisant intervenir les divers facteurs humains: géographiques, socio-économiques et culturels.
A l'issue de ce séminaire, la voie à suivre paraît toute tracée et il faut espérer qu'elle sera ainsi dans le futur,
plus encore qu'aujourd'hui, un gage de réussite pour la multidisciplinarité, un exemple de mise en valeur
intégrée, un modèle enfin pour les opérations de recherches en vue du développement.
Allocution de François Rasolo,
directeur général du FOFI FA
Mesdames et Messieurs,
Nous voici arrivés au terme de cette semaine si riche en événements de toute sorte, qui n'ont pas empêché
notre séminaire.de se tenir et les participants de travailler à dégager des réflexions scientifiques de haut niveau
et permettre des échanges d'expériences très enrichissants et très fructueux.
les divers comptes rendus et les conclusions que nous avons entendus confirment bien un tel constat, que
j'espère partagé par tout le monde et"qui peut se traduire par les mots suivants :«réussite totale du séminaire ».
Ce qui m'amène, Mesdames et Messieurs, à revenir sur deux mots clés utilisés par certains orateurs lors de la
séance d'ouverture de ce séminaire. En effet, à ce moment-là, nous avons tous entendu que ce séminaire est
un défi et qu'il repose également sur une conviction, car traitant d'un thème d'importance, pour ne pas dire
te clé ! ». Aujourd'hui, je pense sincèrement que nous pouvons être satisfaits car ce défi et cette conviction ont
été réellement à la hauteur des objectifs pour lesquels ils ont été lancés.
Cette satisfaction n'aurait cependant pu être entière sans la participation effective de tous, depuis les
organisateurs, étrangers et surtout locaux, jusqu'à vous tous participants, en passant par les spécialistes de la
logistique du RIT et de l'hôtel Panorama, et l'efficace secrétariat toujours disponible.
Aussi, au nom des institutions nationales impliquées dans l'organisation de ce séminaire et surtout du FOFIFA,
je tiens à remercier tout le monde. Ces remerciements s'adressent également et en particulier au généreux
donateur qu'est l'ACCT pour son concours inestimable dans la réalisation de ces assises scientifiques.
J'espère, - et je me fais ~à le porte-parole de nombreux participants - que l'expérience vécue lors de ce
séminaire sera un modèle positif qui sera repris par d'autres bailleurs de fonds, tant pour financer d'autres
séminaires non moins importants que pour soutenir des recherches nouvelles dont les premiers thèmes
peuvent être dégagés à partir des actes de ce séminaire. Pour ma part, et au nom du FOFIFA, je signale que
nous sommes partie prenante si le cas se présente. Avis donc aux amateurs ou plutôt aux professionnels de la
recherche.
Voilà peut-être, Mesdames et Messieurs, les quelques mots spontanés que j'ai à vous dire à l'occasion de cette
cérémonie de clôture. Comme vous pouvez le constater, ils ont été simples car non préparés. Mais, croyez-
moi, les mots simples n'en sont pas moins sincères et chaleureux.
Je vais donc m'arrêter, mais avant de donner la parole à Monsieur Didier Picard, directeur de l'IRAT, qui nous
a fait l'honneur de nous rejoindre depuis trois jours, permettez-moi de vous souhaiter à tous (surtout aux
participants qui vont nous quitter bientôt) bon retour dans vos pays respectifs ~t bon voyage.
Il faut toutefois vous avertir que, selon un dicton bien malgache maintes fois vérifié, « ceux qui ont bu l'eau
de Manangareza, reviendront sOrement »...
Nous espérons donc vous revoir prochainement pour un autre séminaire ou pour des recherches communes.
Je vous remercie de votre aimable attention.
Allocution de Didier Picard, directeur de l'IRAT
l'ambition de ce séminaire, comme l'a rappelé notamment Michel Raunet dans son introduction, était de faire
partager à une communauté de chercheurs de différentes disciplines les connaissances acquises par les uns et
les autres sur les bas-fonds, leur fonctionnement et leurs modes de mise en valeur.
Une partie des données a été recueillie au cours d'opérations de rech~rche concertées, en particulier dans le
cadre d'une action thématique programmée (ATP) financée par le ClRAD, le CNRS et le FAC et qui a regroupé
de nombreux partenaires, parmi lesquels des chercheurs des organismes qui l'ont financée et des organismes
du pays où se trouvait le site expérimental, Madagascar.
Il était intéressant de les confronter à d'autres données, obtenues dans d'autres conditions et d'autres données,
obtenues dans d'autres conditions et d'autres milieux.
Cette ambition apparaît légitime, s'agissant de restituer les résu Itats d'un programme nécessairement
multidisciplinaire pour l'étude d'un système complexe, requé'rant l'intervention des chercheurs de spécialités
très différentes, depuis les sciences d'étude du milieu (géologie, pédologie, hydrologie...) jusqu'aux sciences
humaines (économie, sociologie...), en passant par la géographie, l'agronomie et d'autres, encore.
'Mais cela représente une gageure, dans la mesure où chaque discipline a son vocabulaire, ses concepts, ses
méthodes et ses démarches propres, difficilement accessibles à des scientifiques de disciplines
thématiquement plus ou moins éloignées.
III est cependant indispensable que les chercheurs aient périodiquement l'occasion de restituer leurs travaux,
puisque qu'en fait il s'agit d'une obligation, un résultat n'étant acquis que lorsqu'il a été validé par la
communauté scientifique.
Par ailleurs, il n'y a pas de progression sans débat, sans remises en cause, même si cela est parfois douloureux
et demande un certain courage à exposer ses idées devant un public large et... critique, par profession. Et le
regard « extérieur,. de chercheurs d'autres disciplines scientifiques peut aider à mieux formuler certains
concepts, à expliciter davantage les résultats, à dégager plus clairement les interprétations. Ce débat est donc
tout à fait essentiel.
la qualité des échanges qui ont eu lieu cette semaine témoigne de l'intérêt que les participants ont trouvé au
séminaire et de la nécessité qu'il y a à tenir ces réunions.
les travaux du séminaire ont permis de faire le point des connaissances sur leurs modes de fonctionnement,
en relation avec les aménagements réalisés, et de mettre en lumière les sujets qui restent mal connus.
Par rapport à des objectifs de mise en valeur, particulièrement importants dans les pays à tradition rizicole, ils
ont contribué à éclairer un problème encore mal résolu: jusqu'où faut-il aller dans l'acquisition de
connaissances pour entreprendre leur mise en valeur sans provoquer de catastrophe, écologique ou
économique? le souci du chercheur est souvent d'accumuler le plus possible de connaissances. Celui de
l'aménageur peut être d'aller vite pour apporter une contribution à la solution du problème lancinant de
l'alimentation de populations en croissance rapide.
Certaines contributions ont notamment montré que des agriculteurs avaient été en mesure de mettre au point
des systèmes de production adaptés, souvent très ingénieux, confirmant ainsi que des innovations importantes
pouvaient être révélées par un examen attentif des systèmes de production existants. la rôle du chercheur est
alors d'en démonter les mécanismes pour pouvoir les reproduire dans d'autres conditions.
Cela justifie une démarche visant à sortir le chercheur de son laboratoire ou de sa station de recherche, pour
travailler à l'étude des systèmes de production en place, dans toutes leurs composantes, comme cela a été
pratiqué à Madagascar, notamment.
Globalement, ce séminaire a connu un grand succès, comme le reconnaissent unanimement les participants.
Il convient donc de remercier chaleureusement ceux qui ont permis sa tenue.
Si les armées, à ce que l'on dit, sont d'autant plus fortes qu'elles sont mal nourries, le chercheur a besoin de
confort pour travailler de façon féconde. L'agence RIT et l'hôtel Panorama ont fait que le séminaire s'est
déroulé dans d'excellentes conditions matérielles.
Le séminaire n'aurait sans doute pas eu lieu sans l'existence de l'ATP, qui a permis de développer des
collaborations ~ différents niveaux, chercheurs, organismes, pays, grâce aux financements du CIRAD, du
CNRS et du FAC.
Il n'aurait pâS eu lieu non plus sans l'intervention de bailleurs de fonds qui ont permis le rassemblement d'une
vaste communauté de chercheurs appartenant elle-même à de nombreux pays et à de multiples organisations
nationales ou internationales comme" la CORAF. L'ACCT, le CIRAD et l'ORSTOM ont contribué directement
au financement de cette manifestation.
L'ATP s'étant déroulée à Madagascar, il était normal que le séminaire ait lieu également dans ce pays, qui a
témoigné d'une hospitalité exceptionnelle, aussi bien pendant la phase des travaux que pendant le séminaire.
Merci particulièrement au FOFIFA et à ses ministères de tutelle qui ont permis les recherches et la réunion.
Enfin, l'équipe des organisateurs s'est dépensée sans compter pour le bon déroulement de cette semaine, aussi
bien lors des séances de travail que des visites sur le terrain ou des périodes de loisirs. Qu'Ils en soient tous
remerciés, au premier rang desquels Michel Raunet.
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Conclusion générale de Michel Raunet
particulièrement mis en évidence le décalage pouvant apparaître entre les deux logiques.
Le paysan, par ses connaissances, peut nous aider à l'aider.
Cela dit, le champ scientifique plus le fondamental» nous paraît également nécessaire. Le sol de rizière et la
rhizosphère du riz sont des milieux dynamiques complexes qui nécessitent une approche physico-chimique
et microbiologique interactive. Des progrès dans ces investigations, jusqu'à l'aspect physiologique et même
biochimique, nous paraissent important afin que l'on puisse mieux utiliser les bas-fonds et que cette plante au
pouvoir régulateur étonnant qu'est le riz aquatique y atteigne un niveau supérieur de productivité.
Comme nous l'avons enregistré, les progrès dans la génétique sont rapides. Mais le généticien n'est pas un
magicien. JI doit être alimenté par les enseignements des autres disciplines: agronomie, pédologie,
physiologie, hydrologie, etc.
En conclusion, je dirai que le bas-fond n'est pas un si mauvais lieu mais que l'on peut y être en excellente
compagnie. Ce séminaire l'a prouvé, me semble-t-il.
Souhaitons que cette rencontre favorise à l'avenir une meilleure synergie entre chercheurs, développeurs et
paysans, dans le but commun de mieux valoriser ces types de milieu.
Il me reste à remercier très chaleureusement tous les participants pour leur généreuse contribution, leur
assiduité et l'ambiance très sympathique qu'ils ont su créer tout au long de ce séminaire.
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Liste des participants
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