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Tle Cours sur l’État

TEXTES
Aussi longtemps que les hommes vivent sans un pouvoir commun qui les tienne tous en
respect, ils sont dans cette condition qui se nomme guerre, et cette guerre est guerre de chacun
contre chacun (…). Dans un tel état, il n’y a pas de place pour une activité industrieuse, parce
que le fruit n’en est pas assuré : et conséquemment il ne s’y trouve ni agriculture, ni
navigation, ni usage des richesses qui peuvent être importées par mer ; pas de constructions
commodes ; pas d’appareils capables de mouvoir et d’enlever les choses qui pour ce faire
exigent beaucoup de force ; pas de connaissances de la face de la terre ; pas de computation
du temps ; pas d’arts ; pas de lettres ; pas de société ; et ce qui est le pire de tout, la crainte et
le risque continuels d’une mort violente ; la vie de l’homme est alors solitaire, besogneuse,
pénible, quasi animale et brève. »

Hobbes , Leviat
han, XIII

La raison pour laquelle les hommes entrent en société, c’est qu’ils veulent sauvegarder leur
propriété ; la fin qu’ils se proposent lorsqu’ils choisissent et habilitent un pouvoir législatif,
c’est de faire adopter des lois et établir des règles, qui servent de protection et de clôture à la
propriété dans la société entière, de façon que chaque élément, ou chaque membre de celle-ci,
détienne seulement un pouvoir limité et une autorité tempérée. En aucun cas, on ne saurait
imaginer que la société veuille habiliter le pouvoir législatif à détruire l’objet même que
chacun se proposait de sauvegarder quand il s’est joint à elle et que le peuple avait en vue
quand il s’est donné des législateurs de son choix ; chaque fois que les législateurs tentent de
saisir et de détruire les biens du peuple, ou de le réduire à l’esclavage d’un pouvoir arbitraire,
ils entrent en guerre contre lui ; dès lors, il est dispensé d’obéir et il n’a plus qu’à se fier au
remède que Dieu a donné à tous les hommes contre la force et la violence. Aussi, dès que le
pouvoir législatif transgresse cette règle fondamentale de la société, dès que l’ambition, la
peur, la folie, ou la corruption, l’incitent à essayer, soit de saisir lui-même une puissance qui
le rende absolument maître de la vie des sujets, de leurs libertés et de leurs patrimoines, soit
de placer une telle puissance entre les mains d’un tiers, cet abus de confiance le fait déchoir
des fonctions d’autorité dont le peuple l’avait chargé à des fins absolument opposées ; le
pouvoir fait retour au peuple.
John Locke

Ce que l’homme perd par le contrat social, c’est sa liberté naturelle et un droit illimité à tout
ce qui le tente et qu’il peut atteindre ; ce qu’il gagne, c’est la liberté civile et la propriété de
tout ce qu’il possède. Pour ne pas se tromper dans ces compensations, il faut bien distinguer la
liberté naturelle qui n’a pour bornes que les forces de l’individu, de la liberté civile qui est
limitée par la volonté générale, et la possession qui n’est que l’effet de la force ou le droit du
premier occupant, de la propriété qui ne peut être fondée que sur un titre positif.
On pourrait sur ce qui précède ajouter à l’acquis de l’état civil la liberté morale, qui seule
rend l’homme vraiment maitre de lui ; car l’impulsion du seul appétit est esclavage, et
l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté.
Rousseau, Du contrat social, Livre
Ce pouvoir, issu de la société, mais qui veut se placer au-dessus d’elle et s’en dégage de plus
en plus, c’est l’État. […] L’État étant né du besoin de tenir en bride les antagonismes de
classe, mais étant né en même temps au milieu du conflit de ces classes, il est en général
l’État de la classe la plus puissante, de celle qui a la domination économique, laquelle, par son
moyen, devient aussi classe politiquement dominante et ainsi acquiert de nouveaux moyens
d’assujettir et d’exploiter la classe opprimée. C’est ainsi que l’État antique était avant tout
l’État des propriétaires d’esclaves pour tenir ceux-ci sous le joug, de même que l’État féodal
fut l’organe de la noblesse pour asservir les paysans serfs et vassaux, et que l’État
représentatif moderne sert d’instrument à l’exploitation du travail salarié par le capital. Par
exception cependant, il se produit des périodes où les classes en lutte sont si près de
s’équilibrer que le pouvoir de l’État acquiert, comme médiateur en apparence, une certaine
indépendance momentanée vis-à-vis de l’une et de l’autre ! […] L’État n’existe donc pas de
toute éternité. Il y a eu des sociétés qui se sont passées de lui, qui n’avaient aucune notion
d’État ni de pouvoirs de l’État. […] La société qui réorganisera la production sur les bases
d’une association libre et égalitaire des producteurs transportera toute la machine de l’État là
où sera dorénavant sa place : au musée des antiquités, à côté du rouet et de la hache de bronze.
Engels

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