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Étudier le rîb de Mi 6,1-8, pour répondre à la question : quelle est la fonction (ou les fonctions)
du rappel du passé dans les versets 3-4 ?
Introduction :
L’épisode des versets 1 à 8 du livre du prophète Michée se présente comme une controverse
prophétique, similaire à d’autres controverses des livres prophétiques. Toutefois, après
l’introduction des versets 1 et 2, il n’y a pas d’accusation du peuple par le Seigneur, mais plutôt
un rappel du passé (Mi 6,3-5). Comment expliquer cette absence d’accusation ?
Nous répondrons à cette question avec trois hypothèses ordonnées par ordre de vraisemblance
croissante : d’abord, ce rappel du passé peut être vu en réaction à une accusation préalable
sous-entendue, comme une contre-accusation du Seigneur (1). Mais nous verrons que la
proximité de notre passage avec l’alliance à Sichem (Jos 24) suggère non une accusation, mais
plutôt le but d’une rénovation d’une alliance rituelle (2). Enfin, ce rappel des bienfaits passés et
inconditionnels du Seigneur, serait plutôt le signe d’une stratégie d’une conversion et d’une
réconciliation (3) profonde avec le Seigneur.
Conclusion :
Notre rappel du passé (Mi 6,3-4) pourrait d’abord être compris comme une accusation
accablante du Seigneur envers son peuple. Toutefois, le cadre inconditionnel de l’alliance
rituelle à Sichem auquel ce rappel du passé est fait probablement référence, invite davantage à
une rénovation d’une alliance rituelle. En réalité, l’absence d’accusation dans le rappel du passé
est cohérente avec l’insistance sur la gratuité des bienfaits du Seigneur, comme un exemple
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Nous reprenons la conclusion d’Harvey : « Le réquisitoire prophétique exprimé au moyen du rîb est donc la
transposition théologique d’une formule traditionnelle du droit sacral » (HARVEY, plaidoyer prophétique, 165.)
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Cette « argumentation » reste ambivalente, soit de l’ordre de l’accusation juridique, soit d’une conversation
informelle, comme le traduit le verbe διελέγχω dans la version des Septante, qui signifie à la fois reprocher et argumenter. Il
traduit le verbe יכחau hitpaël, cas unique dans la bible, qui signifierait « argumenter avec » (KÖHLER ET AL., HALOT, 410.)
avec la même ambivalence.
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Nous notons la retenue de tons à la différence d’autres rîb : accusation véhémente en Is 1,4-7 : « malheur… »,
argumentation moins accusatrice mais très développée en Jr 2,5-3,5 et relancée par plusieurs aggravations (Jr 2,9.20.22.34).
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Un sens de désavantage, sous-entendu « que t’ai-je fait de mal » (cf. Jr 2,5 « en quoi vos pères m’ont-ils trouvé
injuste ? ») est sans doute permis par l’ambiguïté de cette question elliptique, en plus d’un autre sens d’avantage (cf. note
suivante).
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Selon la première manière (« faire quelque chose à quelqu’un »), le syntagme ְלָ֖ךse comprend comme un datif de
désavantage et selon la seconde manière (faire quelque chose pour quelqu’un), il s’agit d’un datif d’avantage. L’un et l’autre
cas sont possibles avec la préposition לcf. §133d P. JOÜON, Grammaire de l’hébreu biblique (Roma 1923) 405.
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Le verbe ( לאהMi 6,3) au hifil « fatiguer quelqu’un, rendre fatigué quelqu’un » a un sens similaire à יגעau qal, verbe
qui apparait dans un contexte liturgique en Is 43,22-23. Il peut donc signifier ici un sens cultuel ou rituel.
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À cet effet, comme indiqué oralement lors de la correction de ce devoir, la mention de Shittim (Mi 6,5) peut renvoyer
à l’épisode d’infidélité rituelle avec Baal-Péor, dieu de Moab, en Nb 25,1s, qui suit l’épisode de Balaq et Balaam (Nb 22-24), et
préalable à la traversée du Jourdain (Jos 3-4).
pour le peuple, afin qu’à son tour, il s’implique de manière gratuite dans l’alliance avec le
Seigneur, et convertisse en profondeur son attitude.