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Articles scientifiques

Article 1 : Les discours de vulgarisation. De leur élaboration et leur circulation à leur place
dans la culture professionnelle des enseignants

Date de publication :2021

Lien : https://journals.openedition.org/reperes/4089

Auteurs : Sylvie Plane et Fanny Rinck

Les revues scientifiques ont pour but premier de diffuser la recherche scientifique et de
présenter l’état actuel de la recherche dans le domaine qu’elles couvrent. Cependant, le monde
de la recherche est un monde fermé de prime abord; le foisonnement des revues scientifiques et
le faible tirage des revues imprimées indiquent que chacune d’elles s’adresse à un lectorat très
spécialisé. Le secteur le plus touché est le secteur des sciences humaines et sociales.
Cependant, de nos jours et encore plus avec l’ère du web, la science ouverte (ou open science)
vise à rendre accessible la production scientifique. Il y a de nos jours une pluralité de contenus
disponibles sur internets dans tous les domaines de recherche. Cette accessibilité favorise une
« diffusion en chaîne » avec la création de contenu par toute personne intéressée par le domaine
qui peut puiser dans ce vaste contenu. Cette vulgarisation scientifique est devenue un excellent
moyen pour la recherche de s’évaluer sur son accessibilité, son impact mais aussi sur les dérives
de cette accessibilité. Depuis plusieurs années, la vulgarisation prend une place importante dans
la formation des enseignants en raison des choix politiques et économiques ont entraînés un
bouleversement de ces formation.

On définit la vulgarisation par : « un ensemble de pratiques sociales, empruntant des médias


différents (textes, livres, audiovisuels, informatique, expositions…) pour contribuer à
l’appropriation de la culture et technique par des non spécialistes en dehors de l’école ». La
vulgarisation n’est pas seulement l’accessibilité du savoir, elle tend aussi vers son appropriation
par le consommateur. Elle entretient donc une proximité avec l’enseignement mais ne se confond
pas avec lui car le consommateur sera seul, sans médiateur pour s’approprier ce savoir et il faut
donc une certaine didacticité. La majorité des études sur la vulgarisation portent sur les STM
(Sciences, Techniques, Médecine). Cela peut laisser penser que ce sont donc ces domaines qui
produisent le plus de contenu mais rien n’est certain. Cependant, si tel est le cas, cela pourrait
s’expliquer par la croyance populaire que les sciences dites « exactes » ont besoin d’une
vulgarisation pour être accessibles tandis que les sciences relevant des autres domaines font
partie de la culture patrimoniale. Cela a pour effet une crédibilité accrue envers les contenus qui
manifestent des signes renvoyant aux sciences exactes, tels que les schémas ou graphiques.
Cependant, les discours de vulgarisation ne sont pas soumis aux mêmes obligations que les
discours de recherche. Leurs auteurs ne sont donc pas tenus de préciser leurs sources, ni de
préciser le contexte ou la manière dont ces savoirs ont été établies. Ces discours ont un enjeu
politique, idéologique, voire économique. En effet, ils peuvent contribuer à construire un
consensus ou orienter des décisions. Il est également possible de dicter les conclusions vers
lesquelles ces discours doivent mener lorsqu’ils sont produits pour accompagner une décision
institutionnelle. De plus en plus de contenus de vulgarisation scientifique telle que l’opère des
journalistes spécialisés disparaissent au profit de contenus qui relèvent plus de la
communication. L’essor d’internet a accéléré la diffusion de ces contenus mais a également
encouragé l’émergence de réponses rapides à toute question, quelle que soit sa complexité,
encourageant la prolifération de discours affichant des certitudes et sans nuances. Cela peut
être un vecteur de l’émergence du complotisme et des pseudo-sciences qui apposent un jargon
scientifique sur des idées qui relèvent de l’opinion ou du bon sens.

La vulgarisation scientifique a connu un développement très fort, notamment grâce à son rôle
social et ses liens avec les mouvements socialistes, la spécialisation des sciences, les congrès
internationaux et la contestation de la science académique. Aujourd'hui, la vulgarisation est
influencée par des considérations de financement et d'évaluation de la recherche, ce qui soulève
des défis liés à l'ouverture et au maintien d'une distance entre les experts et le grand public. La
vulgarisation ne se limite pas à simplifier un langage spécialisé, mais elle implique la validation
des connaissances, le rapport au savoir et l'image de la science. Les scientifiques qui
communiquent au grand public peuvent être perçus de manière mitigée par leur communauté.
Pourtant, dans certaines disciplines, comme les mathématiques, la vulgarisation est valorisée, ce
qui confère un prestige à ses auteurs. La vulgarisation peut également donner une aura de
scientificité à des concepts, même s'ils ne proviennent pas directement de la recherche
scientifique. La relation entre le discours de vulgarisation et celui destiné à la communauté
scientifique est souvent comparée à la traduction. Cependant, la vulgarisation ne se limite pas à
une simple réécriture. Elle nécessite une mise en discours qui permet au lecteur de transformer
l'information en connaissances, avec un accent sur le pôle de la réception. Il persiste cependant
des problèmes liés à l'uniformisation de la vulgarisation, où les discours de vulgarisation sur un
même sujet peuvent éliminer les débats d'origine, conduisant à des interprétations diverses. Il
existe un fort impact des médias, des intérêts économiques et politiques sur les mouvements
d'opinions en vulgarisation, en particulier dans le domaine de l'éducation. La vulgarisation
scientifique est un contenu complexe, notamment en ce qui concerne la réception, la
transmission fidèle des connaissances, et son rôle dans la formation de l'opinion publique.

Une attente évidente et qui n’est pas remise en question est la nécessité pour les futurs
enseignants de devoir s'appuyer sur la recherche dans leur formation. Il existe cependant le
risque de la "posture prescriptive" qui se manifesterait par exemple dans le fait de « privilégier
ce qui est perçu comme innovant » et qui peut découler de cette attente, ainsi que le danger de
l'applicationnisme, qui se caractérise par le fait que des « données scientifiques [soient]
injectées dans le champ pratique, la plupart du temps sans réelle prise en compte des multiples
paramètres qui régissent ce dernier ». Cependant, les débats se cristallisent surtout autour de la
validation scientifique des approches didactiques. Il est illusoire de penser que des pratiques
efficaces dans la recherche se traduisent directement en pratiques efficaces dans
l'enseignement. La diffusion de discours de vulgarisation est examinée, avec l'idée que ces
discours peuvent influencer les pratiques et les croyances des enseignants. Il est également
important de questionner le rôle de la formation des enseignants dans la transmission des
connaissances théoriques et d’explorer comment ces connaissances se traduisent en pratiques.
La culture professionnelle des enseignants et les discours de vulgarisation qui la nourrissent,
sont parfois en contradiction avec la recherche académique.

Cet article est interessant car il donne un point de vue critique sur la vulgarisation scientifique et
sur les potentielles dérives qui peuvent en découler. On se souvient assez bien de la période de
Pandémie dû au SARS-Cov-2 et de cette multiplication de discours, parfois contradictoires qui
ont inondés les divers canaux de diffusion, les médecins de plateau qui, alors que les recherches
étaient en cours et que rien n’avait été officiellement publié à ce sujet, ont affirmé toutes sortes
de points de vues sur ce sujet, sous couvert de leur autorité de scientifique. C’était une époque
où personne ne savait de quoi il était question mais où tout le monde avait un avis sur le virus, les
masques, le confinement, les vaccins… . On se rend donc bien assez compte des dérives d’un
accès libre aux contenus scientifiques qui peuvent être compris à moitiés par des non
spécialistes intéressées par ce sujet. À mon sens, il est important que des contenus puissent
être accessibles pour des personnes non spécialistes de domaines mais il est important lorsque
l’on consomme ce genre de contenu de vérifier les sources, le parcours du créateur ou la
véracité de ces propos à travers une mise en parallèle de ce contenu avec d’autres. Pour
paraphraser ce que décrit assez bien Étienne Klein dans son livre « le goût du vrai », il est
difficile de discerner sur un même canal de diffusion, une vérité scientifique, d’un opinion, d’une
fake news, d’une croyance.

Article 2 : Vulgarisation scientifique et idéologie

Date de publication : 1969

Lien: https://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_1969_num_14_1_1203

Auteur : Baudouin Jurdant

L’accès à la science, au savoir et aux connaissances scientifiques est restreint à une certaine
population initiée au domaine. Certains non initiés, intéressés par le sujet je voient offrir la
possibilité de côtoyer ce monde par l’intermédiaire de revues spécialisées dans ce domaine. Ces
revues, promettent à leurs lecteurs un accès à la « science sans douleur ». Telles sont les
promesses de la vulgarisation scientifique. Avec comme justification que le public a le droit de
savoir mais un problème se pose, la question de la communication du savant au néophyte. Ce
Probleme ne peut être étudié que dans une seule direction : Du savant au néophyte par
l’intermédiaire du vulgarisateur.

En observant une fraction du monde sans s’y inclure, le scientifique au travers d’une méthode
qui lui est propre. Cette méthode qui se veut d’une neutralité parfaite est paradoxalement
influencée par le savant qui l’utilise tout au long de sa recherche. Cette recherche n’a lieu
d’exister uniquement tant que le sujet est inconnu. Dès que les connaissances sur ce sujet
adviennent, par l biais de la méthode ou du hasard, elles anéantissent du même coup le sens de
cette activité. Ainsi, la science ne peut trouver d’achèvement. Cependant, pour que l’idéologie
puisse exister, il faut que l’inconnu soit borné pour donner un cadre à cette idéologie. La science
existe uniquement grâce à la brèche qu’elle induit dans ces bornes.

La recherche ne peut exister sans une institution qui la guide et l’encadre. Comme la recherche a
un lien consubstantiel à l’ignorance, elle a une trajectoire incertaine à un rythme aléatoire.
L’institution sert de couverture à la recherche. Grâce à elle, le savoir peut exister. Grâce au
savoir, deux types d’ignorances se rencontrent : celle du savant et celle du néophyte. La science
décrit le vrai mais ce vrai n’est pas accessible au néophyte qui va donc devoir se contenter du
vrai simplifié qui, agrémenté de bon sens, donne le vraisemblable. Ce passage du vrai au
vraisemblable est effectué par la vulgarisation scientifique.

Il ne faut pas confondre vulgarisation et enseignement. De par son mode de communication qui
lui est propre, la vulgarisation prend la forme principalement de texte (sachant que l’image n’est
qu’une illustration d’un texte et que les images de vulgarisation dépendent du texte) tandis que
l’enseignement prend la forme de parole. Là où un cours se construit sur l’échange, les questions
et les réponses ainsi que sur la recherche ensemble du processus réflexif, la vulgarisation est
construite sur l’énoncé de faits, sans débat ni discussion.

Article 3 : De la vulgarisation à la communication

Date : 1997

Lien : https://www.cairn.info/load_pdf.php?ID_ARTICLE=HERM_021_0009&download=1&from-
feuilleteur=1

Auteur : Dominique Wolton

Il y a une certaine transformation des relations entre la science, la communication et la société


au fil du temps. Autrefois, la vulgarisation scientifique jouait un rôle essentiel en permettant le
passage de la science à l'espace public, contribuant ainsi à l'émancipation culturelle. Cependant,
de nos jours, ces relations sont devenues beaucoup plus complexes.
Les sciences se sont diversifiées en sciences de la matière, de la vie, de la nature et de la
société, remettant en question l'association traditionnelle entre la science et le progrès. De plus,
la science a perdu son autonomie en devenant fortement influencée par des considérations
politiques et économiques, ce qui a modifié son rôle et son statut.
Il y a Egalement de gros changements dans la communication, avec une médiatisation qui
préfère souvent les scandales scientifiques à l'explication patiente des découvertes. Les médias
cherchent à rendre l'information plus visuelle et spectaculaire, négligeant parfois les nuances
des controverses scientifiques.
Du côté du public, la confiance envers la science a été ébranlée par les problèmes liés au
progrès, et la demande de vulgarisation varie selon les domaines scientifiques. L'existence de
publics multiples rend la gestion de ces relations plus complexe.
Le passage de la vulgarisation à la communication des sciences a engendré de nouvelles
dynamiques impliquant quatre acteurs clés : la science, la politique, la communication et les
publics. Il est question dans cet article principalement de la communication. La communication
ne se limite plus à la simple transmission de connaissances, mais implique la gestion de logiques
contradictoires au sein d'une société ouverte où de nombreuses voix s'expriment.
De nombreuses questions sont également soulevées, en particulier sur la médiatisation des
sciences, les rôles des médiateurs, et la place de l'expertise. Le décalage entre la demande
croissante de connaissances et la réticence à accepter les mécanismes de production des
connaissances scientifiques, notamment les controverses, est mis en avant.
Enfin, un Probleme majeur est la question de l'existence et du rôle de la communauté scientifique
dans un contexte où les intérêts individuels, les rapports de force et les enjeux économiques
prennent le dessus. L'objectif est désormais de comprendre le rôle central de la communication
dans les relations entre la science, la culture et la société, en reconnaissant que la
communication consiste moins à transmettre des connaissances qu'à gérer la cohabitation de
logiques contradictoires.

Il est intéressant de se pencher sur l’intérêt des médias pour l’actualité scientifique. Comme
précisé dans cet article, les médias préfèrent largement couvrir une actualité qui fait sensation
plutôt que des faits scientifiques en raison de la possibilité de créer des titres plus accrocheurs
et d’attirer un plus large public. C’est un problème majeur de la majorité des revues de
vulgarisation scientifiques telles que « science et vie » et autres dérivés qui ont depuis quelques
temps changé de ligne éditoriale en quittant une actualité scientifique avec un état de la
recherche en temps presque réel, pour une actualité qui fait plus sensation.

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