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Vibrio H ervé L ehning

MEM Questions
de maths utiles
Soldes, sondages, loto, radars...

3€
Questions de maths utiles
Hervé Lehning

Questions
de maths utiles

Soldes, sondages, loto, radars...

Vibrio
Tout au long de cet ouvrage, nous vous proposons
des encadrés ludiques, signalés par une pastille.
Vous touverez en fin d'ouvrage les réponses aux questions.

Questions de maths sympas © Ixelles éditions, 2011.


© E. ]. L., 2015, pour la présente sélection et la présentation.
Dans la vie quotidienne

Après Taddition, les mathématiques les plus simples dont nous


ayons besoin dans la vie quotidienne tournent autour des ques­
tions de taux, que ce soit pour calculer une réduction ou connaître
les intérêts d'un emprunt. Comme toujours en mathématiques, il y
a matière à se tromper et il est facile de s'y perdre.

Les soldes
Les comptes de la vie ordinaire réservent des surprises, en par­
ticulier les jours de soldes. Nous passerons rapidement sur les faux
soldes. Éviter leurs pièges est plus question de bon sens que de
mathématiques.
En dehors de la pure escroquerie, la technique la plus simple
pour créer un faux solde est d'augmenter les prix au préalable pour
les réduire ensuite. Le prix est alors normal mais disparaît sous
l'expression magique « SOLDÉ à 50 % » écrite en rouge et en carac­
tères plus gros que le prix lui-même. Le danger est d'oublier que
seul le prix final compte, la réduction pouvant être factice. Une
autre technique est propre à certains magasins de luxe, qui font
fabriquer pour les soldes des articles spéciaux, de qualité très infé­
rieure à ce qu'ils vendent habituellement. Le client ne paye alors
qu'une étiquette. Dans tous les cas, plusieurs repérages avant la
période des soldes sont nécessaires pour faire des affaires. On ne
gagne rien sans dépenser un peu de son temps. Dans ce qui suit,
nous ne discuterons pas des soldes plus ou moins frauduleux mais
simplement de cas où l'acheteur pourrait se perdre dans les réduc­
tions proposées.
La règle est simple en théorie : on achète un article, pas une
réduction. Sa mise en pratique demande toutefois un effort de
lucidité et même parfois un peu de calcul mental. Prenons un
exemple. Vous trouvez un même article soldé à 20 % dans un
magasin et à 30% dans un autre. Les étiquettes m ettent en
valeur ce point et non le prix. Votre instinct peut vous faire voir
la deuxième offre comme la meilleure. Un examen plus appro­
fondi des étiquettes est nécessaire pour en être sûr. Selon le
règlement, vous devez y trouver les prix avant et après réduc­
tion. Le dernier est le seul qui importe vraiment, il est écrit en
caractères minuscules pour cette raison. Pourtant, une réduc­
tion de 20 % sur un prix initial de 200 € est préférable à 30 % sur
240 €. Un calcul mental rapide suffit pour s'en rendre compte !
Dans le premier cas, la réduction est de 40 € et, dans le second,
de 72 €. On pourrait penser que la seconde offre est plus inté­
ressante ; pourtant, dans la première, le prix final est de 160 €,
dans la seconde, de 168 €. Ces deux nombres doivent normale­
ment figurer sur les étiquettes. Il n'est donc pas nécessaire d'être
un as du calcul mental pour les connaître. Cependant, il ne faut
pas oublier de les regarder.

Deux et deux font-ils toujours quatre ?


La question se complique si deux réductions consécutives se
cumulent. Il est alors plus facile qu'on ne le pense de se faire pié­
ger ! Voici une petite histoire qui vous montrera où se situe le
problème. Depuis des mois, vous admirez la voiture de vos rêves,
malheureusement trop chère pour vos finances. Le garagiste en
demande 20 000 € ! Tout calcul fait, il vous faudrait une réduction
de 40 % pour vous l'offrir. Le jour des soldes arrive. Vous découvrez
que, suite à une mesure gouvernementale, les prix de toutes les
voitures de la concession sont réduits de 20 %. La moitié du chemin
est faite. Vous entrez, discutez le prix et obtenez une réduction
supplémentaire de 20 % à condition de prendre le modèle en expo­
sition. Vos 40 % sont atteints, cela semble aussi sûr que deux et
deux font quatre.
Vous achetez la voiture. Le vendeur vous demande un chèque
de 12 800 €. Content d'avoir obtenu la réduction espérée, vous
payez sans réfléchir. Une fois au calme, vous réalisez que vous
avez payé 800 € de plus que vous ne pensiez. En effet, sur 20 000 €,
une réduction de 40 % égale 8 000 €, ce qui donne un prix de
12 000 €. Quand vous retournez réclamer, le vendeur effectue un
calcul différent du vôtre : 20 % de réduction sur 20 000 € égale
4 000 €, d’où un prix de 16 000 €, 20 % de réduction sur ce prix
fait 3 200 €, d’où le prix annoncé de 12 800 €. La réduction totale
n’est donc que de 7 200 €, ce qui fait un taux de 7 200 divisé par
20 000, soit 36 %. Autrement dit, deux réductions consécutives de
20 % équivalent à une réduction totale de 36 % et non de 40 %.
D’où vient ce mystère ? Vingt et vingt ne feraient-ils plus qua­
rante, mais trente-six ?

0
LA VALSE DES ETIQUETTES
Un pantalon soldé à 40% est vendu 54 €. Le commerçant
décide de le solder à 50 % au lieu de 40.
Quel est le nouveau prix ?
Réponses : a) 42 € b) 45 € c) 48 €

Les taux ne s’additionnent pas


L’explication apparaît quand on suit les calculs méticuleuse­
ment. Une réduction de 20 % sur un prix revient à le multiplier par
0,8, puisque 0,8 est égal à 1 (le prix initial) moins 0,2 (la réduction).
Une réduction supplémentaire des mêmes 20 % aboutit à une nou­
velle application du même taux. Finalement, le prix initial est
multiplié par 0,8 fois 0,8, soit 0,64, ce qui correspond bien à un
taux de réduction de 0,36, soit 36 %. Où est l’erreur ? Tout simple­
ment dans l’idée que les taux s’ajoutent au sens de l’addition
usuelle des nombres. En réalité, les taux ne s’additionnent pas, ils
se multiplient ! Nous voyons à cette occasion qu’en mathématiques,
le langage courant peut être source de confusions. S’il est légitime
de dire que l’on ajoute un taux à un autre, cela ne signifie pas que
l’opération mathématique correspondante soit l’addition. Parfois,
ajouter peut signifier multiplier !
Le même phénomène se produit si on veut, après réduction,
retrouver le prix initial. L’histoire se passe maintenant lors d’une
exposition de peintures en atelier. N’ayant pas d’intermédiaire à
payer, l’artiste y consent une réduction d’un tiers sur les prix de
vente en galerie ; ainsi, une toile valant habituellement 1 200 € n’y
coûte que 800 €. Son argument de vente est : « Vous payeriez un
tiers plus cher en galerie »... Ce qui est faux. Pour monter de 800 à
D ans la vie quotidienne
1200, le taux est de 1 200 divisé par 800, soit 1,5. L’augmentation
serait donc de 50 %. L’explication est du même ordre que précé­
demment. Si nous appliquons une réduction d’un tiers, nous mul­
tiplions le prix initial par 2/3. Pour le retrouver, il faut multiplier
le final par l’inverse de 2/3, soit 3/2, d’où nos 50 % d’augmentation.
Les questions de pourcentages réservent ainsi bien des surprises.
Examinons pour conclure le résultat de deux réductions consécutives
de 2 %. Bien sûr, cela ne fait pas 4 %, ni 3,6 % comme les calculs
précédents pourraient le faire penser, mais 3,96 %. Pourquoi ? Le
calcul est toujours le même : on multiplie deux fois le prix par
0,98. Ce nombre multiplié par lui-même fait 0,9604, d’où le résultat
annoncé ; si bien que, dans ce cas, deux et deux ne font pas quatre
mais 3,96 !

Quel est le taux d’un emprunt ?


Ces questions de taux se retrouvent dans le calcul des emprunts.
Quel est le taux réel de celui que vous venez de souscrire ?
Reprenons l’achat de votre voiture à 20 000 € pour étudier la ques­
tion. Imaginons que vous ayez opté pour un paiement à crédit. Le
concessionnaire vous en propose un sur 24 mois au taux annuel de
6 %, de mensualités fixes, égales à 886,41 €. Il vous fournit de plus
un tableau d’amortissement correspondant à cet emprunt (voir la
figure Tableau d'amortissement).
L’examen des colonnes du tableau montre que la mensualité fixe
de 886,41 € se décompose en des intérêts et un remboursement
de capital. Ainsi, le premier mois, les intérêts sont de 100 € et le
capital de 786,41 €, ce qui fait bien un total de 886,41 €. L’intérêt
(100 €) est égal à 0,5 % du montant (20 000 €). Ce taux de 0,5 % se
retrouve chaque mois. Si vous êtes patient, vous pouvez le vérifier
ligne après ligne, aucune n’échappe à la règle. Ainsi, sur la der­
nière ligne, le montant est de 882 € et les intérêts de 4,41 €, soit
exactement 0,5 % de 882. On en déduit la méthode de calcul du
taux mensuel selon l’organisme de crédit : il s’agit du douzième du
taux annuel. Cela ne choquera personne, sauf celui qui sait que
les taux se multiplient et ne s’additionnent pas. Le taux de 6 % est
donc un taux fictif et non un taux réel, puisqu’il a été calculé addi-
tivement. Ce n’est pas très mathématique mais c’est légal. Voyons
le véritable taux annuel correspondant à notre taux mensuel de
0,5%. Puisque l’on compte les taux multiplicativement comme
8
nous l’avons vu avec les soldes, le taux annuel correspond à 1,005
multiplié 12 fois par lui-même, ce que l’on note 1,005’^ (1,005 à la
puissance 12) et donne 6,17 % annuel et non 6 %. La différence est
faible mais elle existe !

RESTANT INTÉRÊTS
PÉRIODE MONTANT INTÉRÊTS CAPITAL
DÛ CUMULÉS
1 20 000,00 100,00 786,41 19 213,59 100,00
2 19 213,59 96,07 790,34 18 423,24 196,07
3 18 423,24 92,12 794,30 17 628,95 288,18
4 17 628,95 88,14 798,27 16 830,68 376,33
5 16 830,68 84,15 802,26 16 028,42 460,48
6 16 028,42 80,14 806,27 15 222,15 540,62
7 15 222,15 76,11 810,30 14 411,85 616,74
8 14 411,85 72,06 814,35 13 597,50 688,79
9 13 597,50 67,99 818,42 12 779,07 756,78
10 12 779,07 63,90 822,52 11 956,56 820,68
11 11 956,56 59,78 826,63 11 129,93 880,46
12 11 129,93 55,65 830,76 10 299,16 936,11
13 10 299,16 51,50 834,92 9 464,25 987,61
14 9 464,25 47,32 839,09 8 625,16 1 034,93
15 8 625,16 43,13 843,29 7 781,87 1 078,05
16 7 781,87 38,91 847,50 6 934,37 1 116,96
17 6 934,37 34,67 851,74 6 082,63 1 151,63
18 6082,63 30,41 856,00 5 226,63 1 182,05
19 5 226,63 26,13 860,28 4 366,35 1 208,18
20 4 366,35 21,83 864,58 3 501,77 1 230,01
21 3 501,77 17,51 868,90 2 632,86 1 247,52
22 2 632,86 13,16 873,25 1 759,62 1 260,68
23 1 759,62 8,80 877,61 882,00 1 269,48
24 882,00 4,41 882,00 0,00 1 273,89

Tableau d’amortissement.
D ans la vie quotidienne
La vraie surprise se trouve si vous voulez assurer votre crédit
car le coût supplémentaire est de 21,67 € par mois. Le coût total de
Temprunt est ainsi augmenté de 520,08 €. Il s'élève donc mainte­
nant à 1 793,97 €. Calculer le taux réel de l'emprunt est compliqué
si on désire utiliser une formule le donnant en fonction du coût.
Le plus simple est de noter que la mensualité fixe est maintenant
de 912,08 €. 11 est facile de trouver sur Internet des sites simulant
des emprunts selon le taux annuel proposé. Nous n'en donnons
pas d'adresses car elles peuvent changer. Voici la recette pour la
trouver : utilisez un moteur de recherche comme Google sous le
critère « calcul intérêt emprunt », vous trouverez plusieurs sites
vous proposant ces calculs en fonction du montant à emprunter,
du nombre de mensualités et du taux d'intérêt annuel. Ils vous
donnent la mensualité fixe.

MONTANT NOMBRE
TAUXANNUEL MENSUALITÉ
DE L’EMPRUNT DEMENSUALÏTÉS
20 000 24 6% 886,41
20 000 24 7% 895,45
20 000 24 8% 904,55
20 000 24 9% 913,69
20 000 24 8,8 % 911,86
20 000 24 8,9 % 912,78
20 000 24 8,85 % 912,32
20 000 24 8,82 % 912,04
20 000 24 8,83 % 912,14
20 000 24 8,825 % 912,09
20 000 24 8,824 % 912,08

Dans ce tableau, l'utilisateur remplit les trois premières colonnes


et le logiciel, la quatrième.

Nous retrouvons ainsi la mensualité de 886,41 € correspondant


au taux de 6 %. La nouvelle mensualité de 912,08 € correspond à
un taux supérieur. L'essai de 7 % donne 895,45 €. Le taux correspon­
dant à 912,08 € est donc encore supérieur. Nous continuons ainsi
10
par essais et erreurs. Nous trouvons un taux annuel de 8,824 % très
précisément. En suivant la règle légale de calcul, nous trouvons un
taux mensuel égal au douzième, c'est-à-dire de 0,7353 %. Le taux
annuel véritable correspond au calcul de la puissance 1,007353^^ ce
qui donne 9,19 %. Ainsi, assurance comprise, le taux annuel véri­
table est 50 % plus élevé que le taux annoncé, ceci de façon parfai­
tement légale.
Comment comparer diverses propositions de crédit ? Sauf curio­
sité, il est inutile de reprendre les calculs ci-dessus. Comme dans le
cas des soldes, l'important est de ne pas comparer des taux annon­
cés, qui peuvent être loin de la réalité finale, mais de comparer
les coûts totaux sans oublier les frais d'assurance. La question est
d'autant plus importante que les comparateurs de crédits proposés
sur Internet ne tiennent pas compte de ces derniers.

LE TAUX DE VOTRE EMPRUNT


Vous empruntez 100 000 €, 20 000 à 2 annuels et le reste
à 5 %.
Quel est le taux effectif de votre emprunt ?
Réponses : a) 3,5 % b) 4 % c) 4,4 %

Tenir sa moyenne
Les questions de taux perm ettent également de répondre à des
questions comme : quel est le gain de temps que vous pouvez
réaliser en roulant à 140 kilomètres à l'heure au lieu des 130 auto­
risés tout au long du trajet de Paris à Marseille ? Pour répondre
à cette question, il est nécessaire de connaître la distance à par­
courir. Par l'autoroute, elle est d'un peu moins de 800 kilomètres.
À 130 kilomètres à l'heure, le temps nécessaire est donc de 800
divisé par 130, soit 6,15 heures, compté dans le système décimal.
À 140 kilomètres à l'heure, le temps nécessaire est de 800 divisé
par 140, soit 5,71 heures. Le gain est égal à la différence entre
6,15 et 5,71, soit 0,44 heure, ce qui se traduit en minutes en multi­
pliant ce nombre par 60. Le gain de temps est donc inférieur à 30
minutes, même si aucun obstacle n'oblige à ralentir. En revanche,
si vous ne ralentissez jamais, vous avez la quasi-certitude d'être
D ans la vie quotidienne 1.1
pris en excès de vitesse. Si vous voulez l’éviter, il vous faudra ralen­
tir, au moins au passage des radars. Le jeu en vaut-il la chandelle ?

Distance de freinage
Nous ne discuterons pas ici la forte probabilité que cet excès de
vitesse continuel soit verbalisé car il y a plus grave. Examinons plu­
tôt l’impact de la vitesse sur la distance nécessaire pour arrêter un
véhicule en cas d’urgence. Cette distance se décompose en deux.
Tout d’abord, celle parcourue avant que le chauffeur ne réagisse,
puis la distance de freinage proprement dite. Cette idée peut se
résumer en une formule mathématique : la distance d’arrêt est la
somme de la distance correspondant au temps de réaction et de
la distance de freinage proprement dite. Les deux sont de natures
différentes. L’une est proportionnelle à la vitesse et l’autre, au carré
de la vitesse.
Le temps de réaction du cerveau à un imprévu est normalement
d’une seconde. Avant que vous ne commenciez à freiner, votre voi­
ture parcourt une distance proportionnelle à sa vitesse. Effectuons
un premier calcul pour une vitesse de 60 kilomètres à l’heure
par souci de simplicité car, une heure comptant 60 minutes, cela
signifie que votre voiture parcourt un kilomètre en une minute.
En une seconde, elle parcourt donc 1 000 mètres divisés par 60,
soit 17 mètres avant que la décélération ne puisse commencer. À
30 kilomètres à l’heure, il faudra la moitié du temps puisque cette
distance est proportionnelle à la vitesse, soit 8 mètres (en arrondis­
sant). À 50 kilomètres à l’heure, vitesse autorisée en ville, le calcul
est un peu plus compliqué, on trouve 14 mètres (voir le tableau
Distance de réaction).
Line façon de réduire cette distance est d’anticiper : le temps de
réaction est alors divisé par deux. Une façon de l’allonger est de
manquer de vigilance. Téléphoner au volant va doubler ce temps.
Il vous faudra alors 28 mètres pour commencer à freiner en ville,
largement le temps d’écraser un piéton.

12
Distance de réaction en fonction de la vitesse du véhicule. Celle-ci
étant proportionnelle à la vitesse, le graphique est une ligne droite.
Cest pour cela que Гоп parle de dépendance linéaire entre ces deux
variables (vitesse et distance).

0
LA MOYENNE DU CYCLISTE
Un cycliste part d'Alphaville pour se rendre à Bêtaville, à la
vitesse de 20 kilomètres à Theure, puis, pressé, il retourne à
Alphaville, à la vitesse de 30 kilomètres à Theure.
Quelle est sa vitesse moyenne ?
Réponses : a) 24 km/h b) 25 km/h c) 26 km/h

Loi en carré
Malgré cette remarque, Tinfluence de la vitesse sur la distance
de réaction reste modeste : si vous allez 10 % plus vite, la distance
ne sera augmentée que de 10 %. Ce type de raisonnement nous
est naturel. Uinfluence de la vitesse sur la distance de freinage est
beaucoup plus importante et, de plus, absolument non intuitive.
Un passage par Tabstraction est nécessaire pour le comprendre ! La
mécanique nous apprend que Ténergie acquise par un corps du fait
de sa vitesse, que Гоп nomme énergie cinétique, est proportionnelle
à sa masse et au carré de sa vitesse (c’est-à-dire à la vitesse multipliée
par elle-même : 10 au carré vaut 10 fois 10, soit 100). Cette énergie
D ans la vie quotidienne 13
doit être absorbée au cours du freinage pour que le véhicule s’arrête.
Sans entrer dans les détails techniques, cela explique que la distance
de freinage soit proportionnelle au carré de la vitesse. La dépendance
n’est plus linéaire mais quadratique. Ainsi, si on double la vitesse, on
ne double pas la distance de freinage, on la quadruple ! Pourquoi ?
Tout simplement parce que deux fois deux font quatre. Par temps
sec, à 50 kilomètres à l’heure, la distance de freinage est de 16 mètres.
À 100 kilomètres à l’heure, elle sera donc de 4 fois 16 mètres, soit
64 mètres ! Tout ceci peut être résumé dans un tableau regroupant
les vitesses et les distances normales d’arrêt par temps sec (voir le
tableau Distances d'arrêt).

DISTANCE DISTANCE DISTANCE


VITESSE .
DE RÉACTION DEFREINAGE D’ARRÊT
30 8 6 14
50 14 16 30
90 25 52 77
110 31 78 109
130 36 109 145
150 42 144 186
Distances d’arrêt par temps sec pour un chauffeur et un véhicule tous
deux en excellentes conditions.

Par temps de pluie, il convient d’augmenter la distance de frei­


nage de 50 %, ce qui donne un nouveau tableau (voir le tableau
Effet de la pluie).

DISTANCE DISTANCE D IS T A N C E
VITESSE
DE RÉACTION DE FREINAGE D’ARRÊT
30 8 9 17
50 14 24 38
90 25 78 103
110 31 117 148
130 36 164 200
150 42 216 258
Effet de la pluie. Distances d’arrêt par temps de pluie
pour un chauffeur et un véhicule tous deux en excellentes conditions.
14
Ces tableaux montrent pourquoi la vitesse limite de 130 kilo­
mètres à rheure est réduite à 110 par temps de pluie. Les distances
d'arrêt sont alors à peu près les mêmes, et égales à 150 mètres. Ce
nombre est à comparer avec celui de près de 260 mètres à 150 kilo­
mètres à rheure par temps de pluie !

Distances de réaction et de freinage en fonction de la vitesse


du véhicule par temps sec. La première dépendance est linéaire,
la seconde, quadratique. On remarque sur ce graphique que la distance
de freinage est largement prépondérante aux vitesses de route.
En ville, c'est le contraire.

Les tableaux comme le graphique Distances de réaction montrent


qu'aux vitesses atteintes en ville, le temps de réaction est prépon­
dérant. La vigilance y est primordiale. Ils montrent- aussi l'évo­
lution vertigineuse de la distance de freinage en fonction de la
vitesse. La courbe reliant ces deux variables n'est pas une droite
mais une parabole, courbe qui a d'autres utilités, comme nous le
verrons plus loin. Dans le premier cas, la dépendance est linéaire,
dans le second, elle est quadratique.
Ces règles sont relativement difficiles à mémoriser. On peut en
présenter une version approximative, propice au calcul mental. Dans
tous les cas, on considère la vitesse privée du chiffre des unités, ce
D ans la vie quotidienne 15
qui revient à la diviser par 10. Ainsi, 30 devient 3, 50 devient 5, etc.
Pour la distance de réaction, on multiplie ce nombre par 3. Pour
une vitesse de 50 kilomètres à Theure, on multiplie donc 5 par 3, ce
qui donne 15. Pour une vitesse de 70 kilomètres à Theure, on multi­
plie donc 7 par 3, ce qui donne 21. Pour la distance de freinage, on
élève au carré le même nombre et on en enlève le tiers. Pour une
vitesse de 50 kilomètres à Theure, on élève donc 5 au carré, ce qui
donne 25 dont le tiers vaut 8 (environ) qu'on enlève de 25, on trouve
17. Pour une vitesse de 70 kilomètres à l'heure, on élève 7 au carré,
ce qui donne 49 dont le tiers vaut 16 (environ) qu'on enlève de 49,
on trouve 33. Ces calculs fournissent le tableau Calcul approximatif.

DISTANCE DISTANCE DISTANCE


VITESSE
DE RÉACTION DE FREINAGE D’ARRÊT
30 9 6 15
50 15 17 32
90 27 54 81
110 33 81 114
130 39 113 152
150 45 150 195
Calcul approximatif des distances d'arrêt par temps sec.

On notera la faible différence avec les calculs précédents.


Malheureusement, la gymnastique mentale est encore importante.
La mémorisation de chiffres comme ceux du tableau Distances d'ar­
rêt est sans doute plus simple :

DISTANCE D’ARRÊT DISTANCE D’ARRÊT


VITESSE
PARTEMPS SEC PARTEMPS HUMIDE
30 15 20
50 30 40
90 80 110
110 110 150
130 150 200
150 200 260
Distances d'arrêt par temps sec et par temps humide.
16
Notons une dernière fois que ces chiffres correspondent à des
conditions optimales, tant pour le chauffeur que pour le véhicule.
Le grand danger de la vitesse est que nous ne la ressentons pas
directement, le corps ne sentant que l’accélération.

0
ARRIVER À L’HEURE
Si un automobiliste roule à 120 kilomètres à l’heure, il sera
vingt minutes en avance à son rendez-vous. S’il roule à 80 kilo­
mètres à l’heure, il sera dix minutes en retard.
À quelle vitesse doit-il rouler pour arriver tout juste à l’heure ?
Réponses ; a) 90 kmAr b) 95 km/h c) 100 km/h

Que mesurent les radars ?


On ne peut évoquer la vitesse et ses excès sans parler de la
principale méthode pour la contrôler : les radars. Vous Tavez sans
doute remarqué : les radars fixes le long des routes ne sont pas
dans Taxe de la circulation mais légèrement de biais, qu'ils soient
placés pour flasher les véhicules de l'avant ou de l'arrière. Les
deux cas étant similaires, commençons par analyser le premier en
détail. Imaginons donc un radar comme ceux du bord des routes
françaises.

L'angle qu'il fait avec la route ne doit rien au hasard, il est égal
à 25 degrés. Pourquoi ? Pour le mettre dans l'axe de la route, il
aurait fallu le placer sur celle-ci, ce qui est impossible. On l'a donc
placé sur le bord mais de biais pour qu'il « voie » les véhicules pas­
ser. De façon assez logique, le radar ne mesure pas directement
la vitesse des véhicules mais celle à laquelle ils s'approchent de
lui (voir la figure Le radar ne mesure pas). Cette vitesse étant plus
faible que la vitesse réelle, une correction est nécessaire pour en
déduire cette dernière.
Dans le langage familier, la vitesse est un nombre. On roule
à 100 kilomètres à l'heure ou pas. Dans la réalité physique,
la vitesse est un vecteur car elle a aussi une direction. Cette
notion est analogue à celle de déplacement. Dire que l'on
bouge d'un kilomètre n'a pas de sens si on ne dit pas dans
quelle direction. De même, la vitesse a une intensité et une
D ans la vie quotidienne 17
direction. Elle peut se décomposer comme se décomposent les
déplacements.

Le radar ne mesure pas directement la vitesse du véhicule


mais celle à laquelle celui-ci s'approche de lui.
Elle lui est proportionnelle dans un rapport constant égal à 0,906.

B
La vitesse se décompose comme les déplacements.
Ici, V (qui fait aller de A à C résulte de la composition de
(de A à B) et (de BàC).

Chaque vecteur correspond à un déplacement de son origine à


son extrémité, en suivant la flèche. Sur la figure La vitesse se décom­
pose, V correspond à car on peut parcourir le trajet de A à C
en suivant V ou en effectuant le trajet (de A à B) suivi de V2 (de
B à C). De même, la vitesse (absolue) d'un véhicule peut se décom­
poser en sa vitesse vers le radar et une vitesse perpendiculaire. La
question relève ainsi de la géométrie du triangle rectangle.
Quand la vitesse absolue est l'hypoténuse (le grand côté du
triangle), la vitesse vers le radar est le côté de l'angle droit partant
du véhicule (voir la figure Lien entre.,.). Le rapport entre les deux
dépend de l'angle entre la route et le radar. C'est pourquoi cet angle
est constant. Dans la pratique, il vaut 25 degrés. On démontre que
ce rapport est égal au cosinus de 25 degrés, un nombre qu'il est
18
facile de calculer à Taide d’une calculatrice scientifique (voir l’enca­
dré Une question de cosinus). On trouve : cos 25° = 0,906, donc la
vitesse vers le radar est égale à la vitesse réelle du véhicule multi­
pliée par 0,906. Inutile d’en savoir davantage pour comprendre les
calculs qui suivent et leurs implications pratiques.

Lien entre la vitesse absolue d’un véhicule et la vitesse mesurée


par un radar. Une composante de la vitesse (celle qui fuit le radar)
reste ignorée.

Le cosinus d’un angle A est défini sur le dessin ci-dessous : si


on projette une longueur V sous un angle A, la longueur de la
projection est V cos A. C’est une grandeur que l’on peut donc
mesurer graphiquement. La démonstration évoquée dans le
texte se résume en fait à cette définition.

Une question de cosinus.

Pour obtenir la vitesse réelle du véhicule, la vitesse mesurée par le


radar doit donc être multipliée par l’inverse du cosinus de 25 degrés,
soit par 1 divisé par 0,906, c’est-à-dire par 1,104. La correction est
bonne si le radar et la voiture sont bien placés. Que se passe-t-il si ce
n’est pas le cas ? Imaginons que, par erreur, le radar fasse un angle
D ans la vie quotidienne 19
de 20 degrés avec la route et prenons l’exemple d’une vitesse de
130 kilomètres à l’heure. L’angle étant de 20 degrés, le radar mesure
une vitesse de 130 multiplié par le cosinus de 20 degrés (0,940), soit
122 kilomètres à l’heure. Il corrige alors cette vitesse en la multi­
pliant par 1,104. Il trouve 135 kilomètres à l’heure. Le même type
de différence peut venir de la conduite de l’automobiliste, s’il effec­
tue un dépassement, et change ainsi l’angle de son véhicule avec
l’axe de la route. Heureusement, la réglementation a prévu ce t } ^
d’erreur et l’automobiliste ne sera pas verbalisé car une tolérance
de 5 % est appliquée pour pallier de faibles écarts de disposition des
radars ou des changements de trajectoire des véhicules.
Plus l’angle est faible, plus l’automobiliste sera pénalisé. Nous
voyons qu’un angle de 20 degrés doit être le minimum si on veut
éviter que certains véhicules soient verbalisés à tort. En revanche,
un angle plus élevé augmente la tolérance à la vitesse. Pour utiliser
cette remarque, s’il voit le radar, un automobiliste peut augmenter
l’angle en corrigeant sa trajectoire. Imaginons par exemple qu’il
tourne de 10 degrés pour diminuer la vitesse à laquelle il s’ap­
proche du radar (voir la figure Un changement de direction).

Un changement de direction peut diminuer la vitesse perçue


par le radar.

S’il est en excès de vitesse et roule à 140 kilomètres à l’heure, le


radar va mesurer 140 multiplié par le cosinus de 35 degrés (0,819),
soit 115 kilomètres à l’heure. Ne tenant compte que d’un angle
de 25 degrés, il multiplie ce nombre par 1,104 et trouve donc une
vitesse de 127 kilomètres à l’heure. En fait, l’embardée de 10 degrés
donne une multiplication de la vitesse par 0,819 x 1,104, soit 0,904.
La valeur limite autorisée étant de 130 plus 5 %, soit 136, l’embar­
dée de 10 degrés la mène à 136 divisé par 0,904, soit 150 kilomètres
à l’heure. Cette faille du système ne doit pas encourager un tel com­
portement. Si vous apercevez un radar alors que vous êtes en excès
20
de vitesse, freinez, ce sera beaucoup moins dangereux qu’un chan­
gement de direction de 10 degrés à pleine vitesse.
Si le radar est placé pour contrôler les véhicules de l’arrière, il
mesure la vitesse à laquelle ils s’éloignent de lui. Les calculs sont
analogues. Dans ce cas, une manœuvre de changement de direc­
tion vers la droite augmentera la vitesse vue par le radar. Par
exemple, ce n’est pas le moment pour vous rabattre après un dépas­
sement, attendez un peu !
Le temps d’un trajet
Si la vitesse sert à économiser du temps, il importe plus de
connaître le temps d’un trajet que la vitesse à laquelle on l’effectue.
Cette notion paraît simple mais l’est-elle vraiment? Par exemple,
quelle est la distance entre Tours et Lyon ? La question semble avoir
une réponse unique. Pourtant, si on trouve 366 kilomètres à vol d’oi­
seau, les guides nous donnent 428 ou 496 kilomètres. Où est la vérité ?

Tours

Trajets de Tours à Lyon selon que l’on vole, suive les voies rapides
ou les routes les plus directes.

Tous ces résultats sont exacts, ils correspondent simplement à


trois notions de distances distinctes. La première est la distance à
vol d’oiseau, c’est-à-dire en ligne droite ou plutôt suivant un arc de
grand cercle terrestre. La seconde utilise le réseau routier ordinaire
alors que la troisième se limite aux voies express. Dans chaque cas, la
distance correspond à la longueur du plus court chemin entre Tours
et Lyon. Les règles de cheminement sont simplement différentes.
Dans la première, on garde le sens usuel, dans les autres cas, on
associe une contrainte supplémentaire : celle de rester sur un réseau
routier particulier.

D ans la vie quotidienne 21


Le plus court chemin entre deux points n'est donc la ligne droite
que pour les oiseaux, et encore, dans l'idéal des humains. Pour un
automobiliste allant de Tours à Lyon, le temps nécessaire est de
4 heures 50 minutes par le trajet suivant les voies rapides (496 kilo­
mètres) et de 6 heures 55 minutes en utilisant les routes secondaires
(428 kilomètres), plus courtes en kilomètres mais pas en temps. Une
personne utilisant le train passera par Paris.
De façon générale, que ce soit en voiture ou en train, on peut
redessiner la carte de France en utilisant cette notion de distance.
Vu de Paris, ce pays prend alors une forme étrange, ne ressemblant
en rien à l'hexagone qu'on nous a mis en tête. Cependant, une
telle carte n'a de sens que vue de Paris. Par exemple, sur celle que
nous proposons, Bordeaux et Marseille semblent proches. Il n'en
est rien, puisque, si les trajets de Paris à Marseille ou Bordeaux
prennent chacun environ 3 heures, celui de Bordeaux à Marseille
prend 5 heures et demie. Malgré son intérêt, la carte correspon­
dante doit être considérée comme une façon synthétique de voir
les distances à Paris (voir la figure Carte ferroviaire).

Carte ferroviaire de France vue de Paris. Les distances des principales


villes à la capitale sont mesurées en temps selon la SNCF. La frontière
de la France est modifiée et donne la ligne en pointillés.
22
0
LA DUREE DU VOL
Le 31 décembre à 15 heures, un avion quitte Alphaville pour
Bêtaville, qu’il atteint le 1^" janvier à 14 heures. Un avion
volant à la même vitesse part de Bêtaville le 31 décembre à
15 heures pour atterrir à Alphaville le 1^" janvier à 2 heures.
Quelle est la durée du vol ?
Réponses : a) 15 h b) 17 h c) 19 h

L’accordéon et les embouteillages


Le trafic routier est parfois surprenant. Imaginez : l’autoroute
est chargée, les voitures roulent au rythme de 15 à 50 par kilomètre.
Si elles roulent toutes exactement à la même vitesse, le trafic est
parfaitement fluide. Parfois, un accident survient, ce qui bloque
la circulation dans les deux sens. Les automobilistes roulant sur
l’autre voie de circulation ralentissent pour regarder, et, étrange­
ment, se retrouvent arrêtés. Pourquoi ?
Des chercheurs ont réalisé une expérience originale pour exami­
ner scientifiquement ce type de phénomène. Ils ont placé 22 véhi­
cules sur une route circulaire de 230 mètres de long en demandant
aux chauffeurs de rouler à 30 kilomètres à l’heure, pas plus, pas
moins. Au début, tout se passe selon la consigne et le trafic est
fluide. Cependant, de petites fluctuations apparaissent vite entre
les voitures. La fluidité du trafic est rompue. Un encombrement
se crée et certaines voitures doivent s’arrêter avant de repartir. Un
bouchon apparaît ! L’expériencè montre qu’il se propage comme
une onde à la vitesse d’environ 20 kilomètres à l’heure. Même si
nous avons simplifié les conditions réelles du trafic, il s’agit du
modèle de bien des embouteillages. D’un ralentissement naît un
bouchon. Un automobiliste freine fort. Celui qui le suit interprète
ce coup de frein brusque comme un danger potentiel et freine un
peu plus fort et ainsi de suite jusqu’à ce que l’un d’entre eux s’ar­
rête et tous les autres derrière lui.
Ce phénomène peut se modéliser mathématiquement, en définis­
sant des règles de conduite pour chaque conducteur : si un obstacle
survient devant lui à moins de 50 ou 100 mètres (selon la personne),
il freine plus que nécessaire. Le suivant fait de même en amplifiant
D ans la vie quotidienne 23
la réaction et ainsi de suite. Des essais sur ordinateur permettent
alors de voir ce qui se passe en cas d'événements imprévus, comme
un poids lourd qui déboîte subitement pour doubler. Au-dessus
d'une vitesse critique, lorsqu'un événement de ce type intervient,
un conducteur proche de l'événement réagit en freinant et force le
suivant à freiner un peu plus, et ainsi de suite ! Une vague se crée
dans le sens inverse de la circulation et s'amplifie si bien que, beau­
coup plus loin, les véhicules vont s'arrêter sans cause apparente. La
vitesse d'un automobiliste tue la vitesse du trafic !
Ce modèle montre que la seule surréaction d’un automobiliste,
qui freine pour éviter une voiture se rabattant trop près de lui,
suffit pour créer un bouchon plusieurs kilomètres derrière. Dans
ce genre de situation, l'essentiel est de maintenir la fluidité, d’évi­
ter des mouvements trop brusques, aussi bien en accélération qu'en
freinage. Ainsi, un conducteur «sportif» doublant en espérant
gagner quelques minutes peut créer des bouchons derrière lui. Il
sera lui-même victime de son alter ego devant lui. L'idéal est donc
de bannir ce type d'attitude.
La meilleure façon de créer un bouchon dans une circulation
dense est donc de freiner brutalement. Votre coup de frein se pro­
pagera comme une onde derrière vous, jusqu'au bouchon total. Une
autre façon est de provoquer cette réaction chez un autre automobi­
liste en conduisant de manière « sportive ». Si vous voulez l’éviter,
il faut au contraire conduire de manière fluide en anticipant au
maximum les ralentissements. L'ennui est que cette discipline doit
être respectée par tous pour être efficace. Pour l'instant, la meil­
leure façon d'éviter les bouchons est de réduire la vitesse maximale
autorisée. Ainsi, en cas de gros trafic sur autoroute, une limitation à
90 kilomètres à l'heure accélère la circulation. Paradoxal mais vrai !

La prévision des embouteillages


L'origine des embouteillages étant connue, on peut imaginer
les prévoir. L'expression est à la mode. Les transports sont devenus
intelligents. Ainsi, avant les départs en vacances. Bison Futé indique
les bouchons à venir. L'affaire n'est guère compliquée. Un petit son­
dage et on sait qui va où, quand et comment. Une comparaison
avec les situations du passé permet d'en déduire les difficultés à
venir. Bien sûr, il y a une faille. Elle est de taille : notre Bison ne
tient pas compte de l'influence de sa propre annonce. Ceux qui
24
récoutent peuvent bien être surpris de se retrouver tous ensemble
sur la même route. D'autre part, malgré tout son intérêt dissuasif,
il ne peut tenir compte des événements ponctuels imprévus tels que
les accidents. D'autres méthodes étudient le trafic en temps réel pour
aider l'automobiliste à se sortir des encombrements. Celle utilisée
pour le boulevard périphérique parisien relève de la mécanique
des fluides. Le principe en est simple. Des capteurs électromagné­
tiques à peine visibles sont placés tous les 500 mètres sur la chaus­
sée. Ils sont reliés par fibre optique aux ordinateurs du central de
Sirius. Que c'est beau, les sigles ! Celui-ci signifie : Service d'infor­
mation pour un réseau intelligible aux usagers. On connaît donc le
nombre de véhicules qui passent sur chaque capteur, et leur vitesse
moyenne. Le tout est traité comme un fluide. La circulation est
repérée par trois variables : densité, débit et vitesse en chaque point
et en chaque instant. La fluidité de l'écoulement implique que ces
variables vérifient un gros système d’équations, environ 2 000 équa­
tions à 2 000 variables, trois fois plus que de capteurs puisque cha­
cun en engendre trois (densité, débit et vitesse). Il reste à résoudre
un système de deux milliers d'équations à deux milliers d'inconnues,
en temps réel bien sûr. Si le résultat arrivait quelques heures plus
tard, il ne servirait pas à grand-chose ! Pour ce type de prouesse, la
puissance des techniques mathématiques est au moins aussi impor­
tante que celle des ordinateurs utilisés. L'usage de gros ordinateurs
permet de résoudre ce type de systèmes en quelques minutes au
maximum. C'est ainsi que les panneaux à message variable du péri­
phérique parisien informent les automobilistes sur l'état de la circu­
lation. Ils les préviennent également des bouchons et des accidents,
limitant ainsi le nombre des sur-accidents (en Île-de-France, 30 %
des accidents se produisent en queue d'embouteillage).

Les vols d'étourneaux


Le comportement des automobilistes en groupe fait penser à
celui des étourneaux, et d'autres oiseaux qui se comportent sou­
vent comme une unité filant parfois dans une direction précise
pour s'en détourner soudain. Les mouvements des bancs de poisson
sont similaires. D'où viennent ces comportements ?
La raison essentielle de ces regroupements est la défense contre
les prédateurs. Par exemple, quand les étourneaux sont effrayés,
ils s'élèvent, se rassemblent et volent en formant la masse la plus
D ans la vie quotidienne 25
compacte possible. Un rapace évite de fondre sur ce groupe de
crainte de se blesser. Il cherche plutôt à sélectionner des retarda­
taires ou des oiseaux affaiblis.
La nuée vire et tourne de telle sorte qu'il est difficile de pré­
voir ses mouvements, qui semblent aléatoires. De nos jours, les zoo­
logistes sont persuadés que ce ballet ne doit rien à la présence d'un
mystérieux chef d'orchestre ou à un esprit surnaturel du groupe.

1) Séparation pour éviter les collisions : si un oiseau est trop


proche de ses voisins, il s'en écarte.

2) Alignement dans la direction de vol des oiseaux qui l'en­


tourent,

3) Cohésion pour aller vers la position moyenne des oiseaux qui


l'entourent.

Les trois règles des vols d'étoumeaux.


26
Dans les années 1980, Wayne Potts, professeur à Tuniversité
d'Utah, a filmé des nuées de bécasseaux pour s'apercevoir que n'im­
porte quel individu pouvait initier un mouvement du groupe, qui
se propageait ensuite très rapidement par ondes rayonnant autour
de l'initiateur, et cela dans tous les sens. De plus, ces ondes se pro­
pagent bien plus rapidement que ne peut le laisser penser la vitesse
de réaction normale d'un individu isolé. En revanche, les mouve­
ments des oiseaux séparés du groupe ne l'influencent pas. Ils sont
les cibles privilégiées des prédateurs, donc ne sont pas suivis. Cette
règle a l'avantage d'accélérer la réponse du groupe à une attaque.
D'après l'étude de Wayne Potts, chaque oiseau réagit à ce qui
l'entoure, et uniquement à cela. Son comportement peut donc être
modélisé à travers des règles proches de celles des embouteillages :
chacun ne réagit qu'à ses voisins. En 1986, un informaticien, Craig
Reynolds, précisa des règles qui simulent le comportement des
nuées d'oiseaux comme celui des bancs de poissons. Il a nommé
« boids » ces oiseaux virtuels (un mot à faible distance linguistique
de « birds »). On peut trouver sur Internet des animations utilisant
son modèle (cherchez Boids avec votre moteur de recherche pré­
féré). Les trois règles sont toutes de nature locale, chaque oiseau
ne réagit qu'aux mouvements de ses voisins (voir l'encadré Les trois
règles des vols d'étourneaux).

Si vous voulez programmer une simulation de vol d'étourneaux,


il vous reste à définir plusieurs paramètres : rayon du cercle de
voisinage (en gris clair sur les figures), vitesses, accélération utilisée
pour rejoindre la position idéale définie par les trois règles. Ces
principes ont été utilisés pour la première fois dans Le Retour de
Batman en 1992, pour générer des vols de chauves-souris.

0
LES OISEAUX
Des oiseaux se posent sur deux fils électriques. Si l'un deux pas­
sait du premier fil au second, il y aurait autant d'oiseaux sur
chaque fil. Si, au contraire, un passait du second au premier, il
y aurait deux fois plus d'oiseaux sur ce fil que sur l'autre.
Combien y a-t-il d'oiseaux sur le premier fil ?
Réponses : a) 5 b) 6 c) 7

D ans la vie quotidienne 27


Le modèle peut être amélioré en limitant le voisinage à un sec­
teur de cercle, correspondant à la vision de Foiseau, à la considération
d'obstacles que Foiseau évitera et également aux prédateurs éventuels.

Les phénomènes de foule


Les phénomènes de foule comme les paniques, les ovations, les
applaudissements ou les olas ont des fonctionnements comparables.
Le mécanisme de la ola des stades est simple. Des spectateurs se
lèvent, agitent les bras en Fair en criant « ola ! » et se rassoient
lorsque leurs proches voisins les ont imités. S'ils le font, le mouve­
ment se propage comme une vague. La modélisation est ici élémen­
taire. L'intérêt de les étudier est cependant double. Premièrement,
comme dans le cas du vol en nuée, on remarque que le temps
de réaction de chacun est divisé par deux. Les gens anticipent.
Deuxièmement, il semble qu'il y ait un seuil critique pour initier
une ola. En dessous de 25 personnes, elle ne démarre pas. Au-dessus
de 35, elle semble assurée. Ce type de seuil a un intérêt aussi bien
dans les phénomènes de mode que dans ceux de panique. Savoir
modéliser la mode a un intérêt commercial. L'intérêt d'une modé­
lisation des phénomènes de paniques est plus grand. Cela pourrait
permettre de les éviter ou, au moins, de les contenir.

L’intelligence des fourmis


Un processus du même genre est à l'œuvre chez les insectes sociaux
comme les abeilles, les termites ou les fourmis. Prenons un exemple.
Pour chercher leur nourriture et la rapporter dans leur fourmilière, les
fourmis suivent le chemin le plus court. Quand on les voit se déplacer
l'une derrière l'autre en longues files indiennes, elles semblent obéir
aux ordres donnés par leur reine cachée au fond du nid. En fait, elles
procèdent par essais et erreurs au niveau collectif de la fourmilière.
La méthode pour ce faire est très simple. Une fourmi découvrant de
la nourriture retourne à la fourmilière en déposant sur le sol une
substance volatile appelée phéromone. Cette fourmi est rarement
seule à faire cette découverte. Celle qui a trouvé le chemin le plus
court rentrera plus vite et sera donc plus vite imitée. Le nombre de
traces dans sa direction sera bientôt prépondérant et des colonnes de
fourmis emprunteront sa trace tandis que les autres seront délaissées.
C'est de cette façon que les fourmis déterminent le plus court chemin
entre leur fourmilière et la nourriture. Elles se trompent rarement.
28
Des informaticiens ont tenté, avec succès, de simuler le com­
portement des fourmis. Ils essayent aujourd'hui de résoudre des
problèmes de plus courte distance au moyen de fourmis virtuelles.
Ainsi, après avoir essayé d'imiter le comportement humain, l'intel­
ligence artificielle suit aujourd'hui la voie des fourmis. On parle
d'intelligence distribuée ou d'intelligence en essaim.

Assurer son automobile


Après avoir comparé les automobilistes à des fourmis, reve­
nons aux questions de voitures pour découvrir les statistiques.
L'assurance automobile est une dépense importante et incontour­
nable : s'en passer serait folie, même si elle n'était pas obligatoire.
Aucun conducteur n'est à l'abri d’un accident. La prime d'assurance
correspond au coût global des accidents plus les frais de gestion de
la compagnie. Elle est donc d'autant plus chère que vous apparte­
nez à un groupe à risque. Ainsi, certains assureurs refusent tout
simplement d’assurer les titulaires du permis depuis moins de trois
ans, d'autres leur appliquent une surprime de 100 %, c'est-à-dire
doublent le tarif normal. Ceci s'explique par les statistiques. Pour
simplifier, considérons d'abord celles des morts sur la route :

CYCLOMOTEUR MOTO yO rrU R E


Total -> 299 888 2160
Âge i
inférieur à 14 2% 0% 3%
de 15 à 24 58% 24% 28%
de 25 à 34 14% 29% 17%
de 35 à 44 9% 24% 12%
de 45 à 54 8% 16% 11%
de 55 à 64 4% 5% 9%
de 65 à 74 3% 1% 7%
plus de 75 2% 0% 12%

Statistiques des tués sur la route (cyclomoteur, moto


et voiture). L'augmentation des morts après 75 ans ne tient pas
au nombre d'accidents mais au fait que les accidentés âgés survivent
moins souvent.
D ans la vie quotidienne 29
Les classes d’âge entre 15 et 35 ans sont nettement surrepré­
sentées. Cela explique la surprime qui leur est imposée. Le même
procédé est à l’œuvre quand des personnes âgées veulent s’assurer
sur la vie. Leur espérance de vie étant plus faible, elles doivent
payer plus. Les statistiques sont cependant plus terribles pour les
18-24 ans qui veulent assurer un véhicule à moteur. Alors qu’ils
forment 9 % de la population totale, ils représentent 21 % des
tués et 22 % des blessés sur la route. Autrement dit, leur risque
est double de celui des autres, ce qui légitime un doublement de
la prime. De plus, d’autres statistiques montrent que les décès de
jeunes sont souvent liés à une conduite à risque : vitesse, alcool,
fatigue, drogue, etc.
S’il est normal d’être surprimé si rien ne vous distingue du jeune
conducteur moyen, cela l’est moins si vous entrez par ailleurs dans
une autre catégorie. Tous les jeunes ne sont pas inconscients ! En
particulier, les statistiques précédentes ne distinguent pas les sexes.
En fait, 75 % des jeunes conducteurs tués ou blessés sur la route
sont des garçons. Une fille a donc un bon argument pour deman­
der une surprime moindre, 50 % au lieu de 100 % par exemple.
De même, si vous faites partie d’une catégorie réputée plus sage,
comme les enseignants ou les fonctionnaires en général, ou si
vous êtes présenté à leur compagnie d’assurances par vos parents,
conducteurs sans problème, vous pouvez bénéficier d’une surprime
allégée.

Le Rápido
Quittons les assurances pour aborder un domaine où le hasard
intervient de façon manifeste : celui des jeux de hasard. En guise
d’exemple, voyons comment évaluer la probabilité de gagner au
Rápido, un jeu de la Française des Jeux.
Le joueur doit cocher huit numéros dans une grille qui en com­
porte vingt (notée A) et un dans une grille de quatre (notée B).
Pour gagner, la règle est donnée dans le Tableau des gains, La
Française des Jeux affirme qu’un joueur a 1 chance sur 5,5 de
gagner. D’où vient cette prédiction? Comme toujours dans ce
type d’utilisation du hasard, son analyse est fondée sur deux pré­
supposés. Le premier est que, à chaque tirage, toutes les grilles
possibles ont la même probabilité de devenir la grille tirée. Le
second est que chaque grille a autant de chances que les autres
30
d'être choisie par les joueurs. Le premier est bien vérifié, la
Française des Jeux tire le résultat au hasard. Le second est vrai­
semblablement faux. Un humain va éviter certaines combinai­
sons, qui lui semblent improbables. S'il évite certaines régularités
comme 12345678 sur la grille A, ses chances de gain en seront
pourtant diminuées.

Grille A
CDCDCDCDCD
Œ)CDŒ) Œ)®
®®®®®

Grille B

® ® ® ®

Grille de Rapide.

G A IN P O U R
vous AVEZ T R O U V É :
U N E M IS E D E 1€
8 numéros dans la grille A et le numéro de la grille B 10 000 €
8 numéros dans la grille A 1000€
7 numéros dans la grille A et le numéro de la grille B 150 €
7 numéros dans la grille A 50 €
6 numéros dans la grille A et le numéro de la grille B 30 €
6 numéros dans la grille A 10 €
5 numéros dans la grille A et le numéro de la grille B 6€
5 numéros dans la grille A 2€
4 numéros dans la grille A et le numéro de la grille B 1€

Tableau des gains au Rapide.


D ans la vie quotidienne 31
Malgré cette remarque, nous adopterons cette hypothèse pour
effectuer nos calculs, tout en notant que les résultats obtenus
seront optimistes pour le joueur. Dans ce cadre, pour calculer le
nombre de chances de gagner, nous comptons le nombre de grilles
gagnantes distinctes et le rapportons au nombre total de grilles
possibles. Le calcul permet de vérifier que c’est bien le raisonne­
ment de la Française des Jeux.
Toutefois, nous n’irons pas au bout des calculs car ils sont
fastidieux. Voyons simplement comment procéder en remplis­
sant fictivement la grille A. Pour le premier numéro, nous avons
20 choix possibles. Une fois un numéro choisi parmi ces 20, pour
le deuxième, il ne nous reste plus que 19 possibilités. À chacun
des 20 choix du premier, nous avons ainsi 19 choix possibles du
second. Par conséquent, nous avons a priori 20 x 19 tirages pos­
sibles des deux premiers numéros. Ce raisonnement s’applique
pour le troisième, ce qui donne 20 x 19 x 18 possibilités et ainsi
de suite. Nous trouvons donc en tout 20 x 19 x 18 x 17 x 16
X 15 X 14 X 13, soit 5 079 110 400 façons différentes de remplir la
grille A.
Une fois la grille remplie, l’ordre dans lequel elle l’a été n’im­
porte plus. Pour trouver le nombre de grilles distinctes que nous
pouvons remplir, nous devons répondre à la question suivante :
combien de fois retrouvons-nous la même grille ? La question peut
être reformulée en : de combien de façons différentes pouvons-nous
classer huit numéros ? Par un raisonnement analogue au précé­
dent, nous trouvons 8 x 7 x 6 x 5 x 4 x 3 x 2 x l , soit 40 320 tirages
possibles des huit numéros. Les 5 079 110 400 façons de remplir
la grille A se groupent donc par lots de 40 320 identiques. Par
conséquent, il existe 5 079110 400 divisé par 40 320, soit 125 970
grilles distinctes possibles. Le fait que les grilles soient gagnantes
dépend essentiellement du remplissage de la grille A. Les raison­
nements pour en trouver le nombre sont du même type que pré­
cédemment, mais techniques et fastidieuses ; nous les laissons en
encadré et nous contentons ici des résultats.

32
Une seule grille remporte l’un des gros lots (8 numéros exacts).
Combien de grilles A ont-elles 7 numéros exacts sans en
avoir 8 ? Pour analyser cette question, prenons-la à l’envers.
Supposons la grille gagnante connue, combien existe-t-il de
tirages ayant exactement 7 numéros exacts ? Posé ainsi, le pro­
blème est similaire à la question précédente. Nous choisissons
un numéro parmi les 8 gagnants et le remplaçons par l’im des
12 perdants. Ce qui fait 12 x 8 = 96 possibilités et donc 96 grilles
à 7 numéros.
De même, pour obtenir une grille à 6 numéros, nous devons
d’abord tirer 2 numéros parmi les 8 gagnants, ce qui donne
(8 X7) / (2 X1) = 28 possibilités. Ensuite, nous tirons 2 numéros
perdants pour les remplacer, ce qui donne (12 x 11) / ( 2 x 1 )
= 66 possibilités. Nous obtenons ainsi 28 x 66 = 1 848 grilles
à 6 numéros. De même, pour 5 numéros, nous obtenons
((8 X 7 X 6) / (3 X 2 X 1)) X ((12 x 11 x 10) / (3 x 2 x 1)) = 12 320
grilles. Pour 4 numéros, nous trouvons, ((8 x 7 x 6 x 5) / (4 x 3
X2 X1)) X((12 x l l x l 0 x 9 ) / ( 4 x 3 x 2 x 1)), soit 34 650 grilles.

Recherche des grilles à 8,7, etc. numéros exacts.

Sur les 125 970 grilles possibles, une seule a 8 numéros exacts,
96 ont 7 numéros exacts, 1 848 ont 6 numéros exacts, 12 320 en ont
5 et 34 650,4. Une fois remplie la grille A, il reste à remplir la grille
B. Pour cela, il y a exactement 4 possibilités. Donc, nous trouvons en
tout 125 970 X 4 = 503 880 grilles distinctes. Parmi celles-ci, 1 gagne
10 000 fois la mise, 3 la gagnent 1000 fois, 96,150 fois, 288, 50 fois,
1 848, 30 fois, 5 544, 10 fois, 12 320, 6 fois, 39 960, 2 fois, 34 650,
1 fois. Les autres, soient 412170 personnes, perdent leurs mises.
En tout, nous trouvons donc 91 710 gagnants. Le nombre total
de grilles possibles divisé par le nombre de grilles gagnantes est
503 880 divisé par 91 710. Une petite division perm et de vérifier
que l’affirmation de la Française des Jeux est exacte : le joueur a
1 chance sur 5,5 de gagner. Notons qu’une grande part d’entre
eux ne gagnent que ce qu’ils ont misé ! En bon français, on dirait
plutôt qu’ils n’ont pas perdu. En fait, la chance de gagner vrai­
ment est de 503 880 divisé par 91 710 - 34 650, soit 1 chance sur
8,9 ; le risque de perdre est donc de près de 90 %.
D ans la vie quotidienne 33
0
LE TIERCE
Ce dimanche, la course du tiercé ne comporte que cinq che­
vaux. N’y connaissant rien, vous pariez au hasard.
Quelle est la probabilité que vous ayez joué la combinaison
gagnante dans le désordre ?
Réponses : a) 10 % b) 8,33 % c) 20 %

Les gains de la Française des Jeux


En moyenne, quel est le gain de l’organisateur du jeu ? Pom trai­
ter la question, nous gardons l’hypothèse que chaque grille possible
est également probable. Supposons que 503 880 € aient été misés,
un euro sur chaque grille possible. En suivant le tableau des gains,
la Française des Jeux rend 10 000 € pour la combinaison du gros
lot, 3 fois 1000 € pour les 3 combinaisons du lot suivant et ainsi
de suite, d’où une somme de : 10 000 plus 3 x 1 0 0 0 , plus 96 x 150,
plus 288 X 50, plus 1 848 x 30, plus 5 544 x 10, plus 12 330 x 6, plus
39 960 X 2 et enfin plus 34 650. Le tout fait 328 210 €, soit un gain
de 175 670 € duquel il faut retirer les frais, bien entendu. Le rende­
ment reste important. Pour la Française des Jeux, le Rápido n’est
pas un jeu de hasard !

Probabilités et loi des grands nombres


Les études des paris en ligne se font comme celle du Rápido,
que nous venons d’analyser. Le résultat obtenu repose toujours
sur la même hypothèse : chaque résultat a la même probabilité
et les grilles jouées également. Cette répartition est vraisemblable
si le nombre de joueurs est très élevé. En statistique, on parle de
loi des grands nombres pour caractériser ce phénomène. Cette loi
assure un bénéfice confortable aux organismes de jeu. Le hasard
intervient pour les joueurs, pas pour eux ! Les compagnies d’assu­
rances agissent de même. Si elles assurent cent mille voitures, elles
savent d’avance combien auront d’accidents et quel en sera le coût.
La prime d’assurance est calculée en fonction de ce risque qui n’en
est plus un dès que l’on applique la loi des grands nombres ! Si
5 % des automobilistes ont un accident chaque année, vous ne pou­
vez pas prévoir si vous en aurez un. En revanche, votre compagnie
34
d'assurances sait que, sur ses cent mille assurés, cinq mille environ
auront un accident.

Quelle est la taille de la Française moyenne ?


Il reste cependant une marge d'erreur sur ce chiffre car la notion
de moyenne réserve des surprises. Par exemple, vous pourrez lire
dans la presse que la Française moyenne mesure 1,63 mètre. Si
vous rencontrez une Française, quelle est la probabilité qu'elle ait
cette taille ?
En l'absence d'informations supplémentaires, impossible de
répondre à cette question. Pour cela, il faut connaître la réparti­
tion de la taille des Françaises. De plus, la question est mal for­
mulée : la Française moyenne est un m ythe... Il est préférable de
parler de la taille moyenne des Françaises. En fait, elles se répar­
tissent en 25 % de petites (1,54 m en moyenne), 50 % de moyennes
(1,63 m en moyenne) et 25 % de grandes (1,72 m en moyenne). La
répartition exacte suit une courbe en forme de cloche comme
c'est généralement le cas quand on étudie une population homo­
gène sous un certain critère (voir la figure Courbe de répartition).

1,54 m 1,63 m 1,72 m


Courbe de répartition de la taille des Françaises.
Peu ont la taille moyenne !

Cette courbe ne suffit pas non plus pour répondre à la ques­


tion, même si elle donne l'idée que la probabilité qu'une femme
D ans la vie quotidienne 35
donnée mesure 1,63 m se situe entre 10 et 20 %. Les données sta­
tistiques sont donc à analyser avec prudence. Une espérance de
vie moyenne de 80 ans ne signifie pas que chacun vivra exac­
tement 80 ans, ni même que ce sera le cas de la majorité. Un
tableau de répartition est nécessaire pour préciser cette idée. Il
s’agit des tables de mortalité, que les compagnies d’assurances
utilisent pour calculer leur taux de prime d’assurance-vie en
utilisant la loi des grands nombres. Nous examinerons la ques­
tion plus loin.

Le régime himalayen
De la taille moyenne de la Française, nous pouvons facilement
passer à son poids (63 kg) et au drame quotidien de la balance. Plus
efficace que le régime crétois, nous proposons le régime himalayen
que nous avons déjà testé plusieurs fois. Comme son nom le laisse
entendre, il s’agit de mincir en prenant de l’altitude. Ce régime,
fondé sur les mathématiques, est par ailleurs tout à fait fantaisiste.
Voyons de quoi il retourne. Tout d’abord, le corps consomme envi­
ron 1 000 calories supplémentaires par millier de mètres de dénivelé
gravis. Cela a une certaine efficacité pour maigrir mais il convient
de ne pas oublier que le corps fait son possible pour garder son
poids. En grimpant, votre appétit va se trouver décuplé. Sauf mal
des montagnes aigu, vous allez vous goinfrer ! C’est là qu’intervient
une autre caractéristique de la haute altitude : la difficulté à assi­
miler les graisses. Un séjour d’une semaine à une altitude d’environ
5 000 mètres suffît pour perdre deux kilos de ce fait, sans comp­
ter ceux que vous perdrez dans l’ascension. N’allez cependant pas
trop haut. La zone au-dessus de 8 000 mètres est nommée la « zone
de la mort » par les alpinistes, car le corps ne peut s’y adapter et
la mort survient de façon certaine. L’homme, comme la femme,
ne peut survivre plus de deux semaines à une altitude supérieure
à 5 500 mètres. Ce régime très efficace garde malheureusement le
défaut de tous les autres : revenu à des conditions normales, le corps
cherche à retrouver son poids initial.

La loi des petits nombres


Revenons à la loi des grands nombres. Les particuliers ne l’uti­
lisent pas. Si un événement malheureux mais peu probable se
produit deux fois de suite à une année d’intervalle, ils se diront
36
que « jamais deux sans trois » et prévoiront un troisième pour
Tannée suivante. À Tinverse, plusieurs années sans accident leur
feront croire que plus rien ne peut leur arriver. Autrement dit,
ils utilisent une loi des petits nombres et non celle des grands
nombres. Bien entendu, il ne s’agit pas de mathématiques mais de
psychologie ! Pour un mathématicien, cette loi des petits nombres
peut passer pour un canular. C’est pourtant de manière tout à
fait scientifique et en utilisant correctement la loi des grands
nombres que Daniel Kahneman (né en 1934) Ta mise en évidence.
Plus précisément, il a étudié expérimentalement le comportement
des individus devant l’assurance. Il apparaît que vivre plusieurs
années sans accident pousse l’Américain moyen à résilier ses
contrats d’assurances !

Le poker
Ces calculs de probabilités se retrouvent dans des jeux de hasard
comme le poker. Il est possible d’évaluer la valeur d’une main et de
tenir compte des réactions des autres joueurs dans cette évaluation,
qu’ils renchérissent ou qu’ils passent. Certains joueurs l’estiment
intuitivement, d’autres par le calcul. Dans tous les cas, pour ces
joueurs, le poker n’est pas un jeu de hasard mais un jeu où Ton uti­
lise le hasard et la loi des grands nombres. Nous vous déconseillons
de vous y frotter, surtout si vous avez tendance à utiliser la loi des
petits nombres.

LE CARRE AU POKER
0
On vous distribue cinq cartes au hasard à partir d’un jeu de
32 cartes.
Quelle est la probabilité que vous ayez un carré ?
Réponses : a) 1 % b) 2 % c) 0,1 %

L’art de tricher
Quatrième carré d’as consécutif pour votre adversaire. Il triche,
vous en êtes sûr ! Comment le coincer ? Cette situation se retrouve
dans la vie courante. Comment débusquer les tricheurs? Tout
d’abord, essayons de les comprendre en suivant la typologie de
Sacha Guitry :
D ans la vie quotidienne 37
S'il y a cent façons de tricher, il n'y a que trois sortes de tricheurs.
Tout d'abord, il y a Je joueur qui triche - qui ne triche que parce
qu'il Joue. Qui lefait sans méthode, sans préméditation, d'une manière
presque inconsciente, involontaire, et dont on sent très bien qu'il est
parfaitement honnête en dehors du Jeu. Il y a l'homme qui Joue incor­
rectement parce qu'il est incorrect d'un bout à l'autre de la vie - et qui
doit penser que ce n'est vraiment pas le moment de l'être. Enfin, il y a
le tricheur de profession, conscient et organisé.
Dans les deux premiers cas, un peu de psychologie suffit pour le
détecter. Le vrai professionnel est d’une autre nature. Les mathé­
matiques sont alors un outil essentiel. Nous le verrons à propos des
sondages au chapitre suivant.
Dans la politique et les médias

Les médias manipulent énormément de questions mathéma­


tiques, le plus souvent sans la moindre explication. La majorité,
qui commence à 50,01 %, y est tenue pour une quasi-unanimité et,
quand Topinion passe de 53 % à 47 %, on y voit un bouleversement.
Ce sont les règles de la démocratie, direz-vous. Oui, certes, mais
sont-elles si évidentes ?

Le paradoxe de la démocratie
Pour étudier la question, imaginons un vote entre trois candidats :
Alpha, Bêta et Gamma, pour ne pas les nommer. Nous nous propo­
sons d'étudier l'influence du système électoral sur le résultat.
En toute logique, il existe six façons de les classer : Alpha en pre­
mier puis Bêta et Gamma, Alpha en premier puis Gamma et Bêta
et de même en plaçant Bêta ou Gamma en premiers. Chaque élec­
teur a son propre classement entre ces trois candidats. Imaginons
que le nombre d'électeurs optant pour chacun des six choix possibles
soit donné dans le Tableau des préférences des électeurs.

Alpha, Bêta, Gamma 1000


Alpha, Gamma, Bêta 23 000
Bêta, Alpha, Gamma 500
Bêta, Gamma, Alpha 19 000
Gamma, Alpha, Bêta 2 000
Gamma, Bêta, Alpha 16 000

Tableau des préférences des électeurs.


Pour la suite, on suppose qu'aucun ne varie jamais de son opi­
nion initiale. Même si cette hypothèse est exagérée, son but est
seulement d'expliquer un phénomène étrange. Faisons jouer ces
préférences sur un scrutin à la mode britannique, c'est-à-dire uni­
nominal à un tour. Les scores de chacun sont faciles à calculer à
partir du tableau précédent (voir le tableau Vote uninominal).

Alpha Bêta Gamma


24 000 19 500 18 000
Vote uninominal à un tour : Alpha est élu.

Dans ce cas. Alpha est élu. Dans un système de type présiden­


tiel français à deux tours où le troisième du premier tour doit se
désister, le second tour oppose Alpha et Bêta. Chaque électeur se
détermine en fonction de son préféré parmi ces deux-là. Surprise !
Parmi les six groupes d'électeurs, ceux qui préfèrent Bêta à Alpha
sont majoritaires. Plus exactement, on les trouve dans les troisième,
quatrième et sixième lignes du premier tableau. Ils sont donc au
nombre de : 500 + 19 000 + 16 000. Avec cette forme de scrutin.
Bêta est élu (voir le tableau Second tour après désistement).

Alpha Bêta
26 000 35 500
Second tour après désistement : Bêta est élu.

Imaginons un système à trois tours, où le second oppose les deux


derniers du premier, pour déterminer celui qui affrontera le vain­
queur du premier tour. Gamma l'emporte alors sur Bêta au second
tour puis sur Alpha au troisième ! (Voir le tableau Un scrutin exotique).

Un scrutin exotique.
40
Les trois types de scrutin, tous démocratiques, donnent trois
résultats différents ! Nous pourrions en déduire que le système
électoral détermine le résultat, ce qui serait exagéré, mais il est
clair qu’il l’influence. Ce paradoxe est dû au marquis de Condorcet
qui l’énonça ainsi en 1785 : il est possible que dans un choix entre
trois solutions A, B et C, une majorité préfère A à B, B à C et
C à A... ce qui serait incohérent s’il s’agissait du choix d’un seul
individu. Si un être humain sain d’esprit préfère A à B et B à C, il
préfère A à C !

C’est une opinion généralement reçue, et contre laquelle je


ne sache pas qu’on ait jamais fait d’objection, que dans une
élection au scrutin, la pluralité des voix indique toujours le
vœu des électeurs, c’est-à-dire que le candidat qui obtient cette
pluralité est nécessairement celui que les électeurs préfèrent
des concurrents. Mais je vais faire voir que cette opinion, qui
est vraie dans le cas où l’élection se fait entre deux sujets seule­
ment, peut induire en erreur dans tous les autres cas.

Condorcet

L’idéal pour éviter ce paradoxe serait qu’un candidat l’emporte


sur chacun des autres par paire. Dans notre exemple, c’est le cas :
Gamma l’emporterait ! (Voir Les trois duels)

Alpha 26 000 Bêta 20 500 Gamma 37 000


Bêta 35 500 Gamma 41 000 Alpha 24 500
Les trois duels : Gamma remporte toujours.

Cette solution est celle adoptée par Condorcet. Cependant, il


existe des cas où aucun vainqueur ne se dégage par cette méthode.
On peut alors choisir celui qui a le moins perdu lors de son plus
mauvais duel... ou trouver d’autres règles.

L’important est de s’y tenir et de ne pas en changer en cours de vote.


Le tableau Un vainqueur sans duel montre un cas où Alpha remporte
les trois scrutins précédents mais personne ne remporte tous les duels :
D ans la politique et les médias 41
Alpha, Bêta, Gamma 19 000
Alpha, Gamma, Bêta 10 000
Bêta, Alpha, Gamma 5 000
Bêta, Gamma, Alpha 17 500
Gamma, Alpha, Bêta 10 000
Gamma, Bêta, Alpha 7 500

Un vainqueur sans duel. Avec ces préférences, Alpha remporte


tous les scrutins mais personne ne remporte tous les duels. Alpha
est cependant celui qui perd le moins lors de son plus mauvais duel.

Il ressort de cette étude qu'aucun système électoral n'est objec­


tivement meilleur que les autres. L'important est sans doute qu'un
consensus se dégage sur l'un d'entre eux et que le pays soit assez
raisonnable pour ne pas en changer trop souvent.

0
TRILEMME A ALPHAVILLE
Le conseil municipal d'Alphaville doit décider entre trois pro­
grammes d'aménagements A, B et C. Voulant avant tout satis­
faire la population, il organise un vote sur les préférences des
habitants. Les résultats sont :
60 % des habitants préfèrent la solution A à la solution B,
60 % des habitants préfèrent la solution B à la solution C,
60 % des habitants préfèrent la solution C à la solution A.
Ce résultat est-il crédible ?
Réponses : a) oui b) non

Le comptage des manifestants


Quand on parle de démocratie, après les élections, on pense
au droit de manifester. L'histoire est déjà ancienne : ils étaient
100 000 selon la police, 300 000, 500 000 voire plus d'un million
d'après les organisateurs. Mais comment font-ils pour trouver
tous ces chiffres ? Usage du pifomètre ou méthode plus scienti­
fique ? De son propre aveu, la préfecture de police utilise deux
méthodes, l'une pour les manifestations importantes, l'autre pour
42
les manifestations plus réduites. Si la manifestation est faible,
des fonctionnaires de police comptent le nombre de rangs de
la manifestation à partir d'un lieu élevé. On multiplie ensuite
ce nombre par le nombre moyen d'individus par rang. Cette
méthode est bien adaptée aux manifestations de gens disciplinés.
Ils forment des rangs réguliers et les approximations sont fiables.
Par exemple, il ne fait aucun doute que les manifestations du
14 juillet puissent ainsi être bien évaluées.
Pour les manifestations importantes, la préfecture préfère esti­
mer la superficie de la manifestation pour la multiplier par le
nombre de manifestants au mètre carré ; ce nombre varie entre 0,2
et 0,8 pour une manifestation donnée. Pour la calculer, on choisit
au hasard une zone de 100 mètres carrés et on y compte le nombre
total de manifestants. Cette évaluation de la densité permet de
fournir une évaluation du nombre de manifestants. Par exemple,
une manifestation occupant un boulevard de trente mètres de large
sur deux kilomètres de long s'étend sur 30 x 2 000 = 60 000 mètres
carrés. Pour un taux de 0,2 manifestants au mètre carré, cela
donne 60 000 x 0,2 = 12 000 manifestants. Pour un taux de 0,8,
quatre fois plus, soit 48 000 manifestants. La police et les organisa­
tions syndicales comptent de même mais les chiffres peuvent varier
suivant que l'on inclut ou non les trottoirs, que l'on sous-estime ou
surestime le nombre de manifestants au mètre carré ainsi que la
surface totale.
L'amplitude de la divergence entre les comptes des organisations
syndicales et ceux des autorités est malgré tout inexplicable par des
moyens scientifiques. La préfecture prétend toutefois qu'elle a l'ha­
bitude de majorer ses chiffres de 20 à 30 % au moins pour être plus
crédible. Les organisateurs ont une explication symétrique : ce serait
la préfecture qui réduirait par principe ses statistiques. L'homme
du XXI® siècle serait-il capable d'envoyer des sondes sur Mars mais
totalement incapable de compter ses semblables lorsqu'ils mani­
festent dans les rues ?

L’art des sondages


Après voter et manifester, une autre façon de faire entendre sa
voix de nos jours est de répondre à des sondages. Vous l'avez sou­
vent entendu : «les Français pensent que...» mais vous pensez
le contraire. C'est étonnant et cela demande d'y réfléchir. Vous le
D ans la politique et les médias 43
faites et découvrez que, selon un sondage réalisé sur un échantillon
représentatif de 1 000 personnes, 60 % des Français pensent que...
Les 40 % restants pensent sûrement le contraire mais disparaissent
soudain du rang des Français, pour cause de sondage. Perturbant,
mais simple abus de langage sans doute. Plus étonnant est l’usage
de cet échantillon dit représentatif. Comment peut-on déduire un
résultat concernant 60 millions de personnes de l’analyse des dires
de 1000 d’entre elles ?

Le sondage probabiliste
Les sondages sont fondés sur cette idée ! Une partie bien
choisie d’une population représente le tout. Dans cette phrase,
l’important est le « bien choisie ». Comment faire ce choix ? La
question étant complexe, commençons par un cas particulier.
Imaginons que, dans un pays ou une ville importante, 40 % des
électeurs aient décidé de voter pour Alpha et les autres pour Bêta.
Prenons une personne au hasard. Elle ne peut représenter correc­
tement les votes de la ville : soit elle vote Alpha (probabilité de
40%), soit elle vote Bêta (probabilité de 60%). Si nous prenons
deux personnes au hasard, il y a trois possibilités : soit les deux
votent Alpha, soit les deux votent Bêta, soit l’une vote Alpha et
l’autre. Bêta. Chacune de ces possibilités peut se produire, mais
chacune avec une certaine probabilité. Les sondages probabilistes
sont fondés sur ce calcul. Détaillons-le dans ce cas. Pour obtenir
deux fois Alpha, nous devons d’abord tirer un électeur d’Alpha, la
probabilité que cela arrive est de 40 %. Nous devons ensuite en
tirer un autre. Comme pour les soldes, les taux se multiplient, la
probabilité est maintenant de 0,4^, soit 0,16 ou 16 %. De même, le
tirage de deux électeurs de Bêta se produit avec une probabilité de
36 %. La probabilité d’avoir un électeur de chaque bord est donc
de 48 %. Deux électeurs tirés au hasard ne peuvent représenter la
ville entière, mais l’amélioration est nette par rapport au tirage
d’un seul électeur. Le même type de raisonnement peut se faire
avec 10 électeurs. La probabilité de tirer 10 électeurs d’Alpha est
maintenant infime puisque égale à 0,4 multiplié 10 fois par lui-
même, soit 0,4’“, ce qui vaut 0,01 %. Les calculs sont plus laborieux
mais du même type que les précédents. Finalement, nous obtenons
un tableau donnant les probabilités de tirer 0, 1, 2, etc. électeurs
d’Alpha parmi 10 pris au hasard.
44
Électeurs d'Alpha 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Probabilité en % 0,6 4 12 21 25 20 11 4 1 0,1 0,01

Tableau donnant les probabilités de nombres d'électeurs d'Alpha


parmi 10 tirés au hasard. L'échantillon représente parfaitement la ville
dans 25 % des cas (4 électeurs d'Alpha sur 10).

Nous sommes encore loin d'une représentativité correcte mais,


dans 25 % des cas, la ville est bien représentée par 10 électeurs
tirés au hasard ! Augmentons la taille de notre échantillon et
reprenons le même tableau pour le tirage de 100 électeurs au
hasard. Nous ne le donnons pas ici mais on peut y lire que la
probabilité totale que notre échantillon contienne moins de 32 ou
plus de 48 électeurs de Alpha est inférieure à 10 %. Autrement dit,
si nous prenons 100 personnes au hasard parmi les électeurs de la
ville et les faisons voter, le résultat pour Alpha sera compris entre
32 % et 48 % avec une probabilité de 90 %. Le même calcul peut
s'effectuer pour un choix aléatoire de 1 000 électeurs. Le résultat
sera situé entre 37 % et 43 % avec une probabilité de 95 %. Le
principe mathématique des sondages probabilistes se trouve là.
On prend un échantillon aléatoire d'un millier de personnes et
on les fait voter. La probabilité que le résultat soit conforme à un
vote véritable (à 2 % près) est supérieure à 95 %. Cette méthode
probabiliste est surtout utilisée par les instituts publics, pour
des sondages autres que politiques. En théorie, c'est la meilleure
méthode mais elle est difficile à mettre en place et coûte cher.

La méthode des quotas


Le danger du sondage probabiliste est de mal choisir l'échantillon
aléatoire, de le « biaiser », pour employer le langage des statisticiens.
Prenons un exemple. Imaginons qu'un institut de sondage décide,
pour alléger ses coûts, de faire ses sondages par Internet. Le biais
est évident : il ne sondera que des personnes connectées à Internet,
même s'il les choisit au hasard. Il en est de même de ceux qui uti­
lisent le téléphone ou tout autre moyen. Il existe des méthodes pour
choisir des numéros au hasard, comme nous le verrons plus loin,
mais certaines personnes sont difficiles à joindre ou refusent de
répondre. Il ne suffit pas alors de les remplacer par d'autres prises
D ans la politique et les médias 45
au hasard, car être toujours absent ou refuser de répondre n’est
pas le fait de tout le monde, cette attitude peut avoir une conno­
tation politique. Ainsi, certains instituts utilisent ces refus comme
des choix politiques probables et répartissent ces « abstentions » sur
les candidats. De même, des redressements sont opérés en compa­
rant les précédents sondages avec les élections qui les ont suivis. Par
exemple, si les sondages donnaient 10 % d’intentions de vote pour
Alpha alors que les élections consécutives lui ont donné 20 % des
voix, pour les sondages ultérieurs, les sondeurs multiplieront son
score par deux ! Avec ce genre de méthode, l’exercice devient péril­
leux. Dans tous les cas, il quitte le domaine des mathématiques.
La difficulté de la méthode probabiliste fait que, même si les
règles statistiques sont de choisir l’échantillon au hasard, l’usage des
instituts de sondage privés français est aujourd’hui de corriger le
hasard de façon à avoir une proportion donnée de chaque partie de la
population. Pourquoi ? La raison principale a déjà été donnée. Quelle
que soit la méthode de choix des sondés, l’échantillon en sera toujours
biaisé. Si vous utilisez Internet, vous excluez ceux qui ne l’ont pas, si
vous allez dans la rue, vous excluez ceux qui n’y sont pas, etc.
L’échantillon choisi aura donc les mêmes caractéristiques que
l’ensemble de la population visée, les électeurs par exemple. Ces
caractéristiques sont normalement le sexe, l’âge, la catégorie socio­
professionnelle, le type de commune et la région. Ainsi, l’échantillon
comprendra 46 % d’hommes et 54 % de femmes, comme la population
générale, etc. Les instituts de sondage affirment que les résultats valent
ceux obtenus par la méthode probabiliste, cependant seule la pratique
permet de le dire. La méthode des quotas est purement empirique.

L’art de tricher (suite)


Dans cette méthode, chaque enquêteur doit trouver un certain
nombre de représentants de plusieurs catégories. Imaginez que l’un
d’entre eux ait du mal à finir son travail. Il lui faut encore dix per­
sonnes dans le groupe des fameuses ménagères de moins de 50 ans,
si chères aux instituts de sondage. Pour gagner du temps et donc de
l’argent, la tentation est grande de remplir les questionnaires lui-même.
Que peut faire son employeur pour éviter cette tromperie ?
La première méthode est extra mathématique : lui faire peur !
Les sondeurs procèdent donc à des contrôles en demandant les
coordonnées des sondés. La mesure n’est guère efficace. Une bien
46
meilleure méthode est de tester les résultats des enquêteurs. S'ils
trichent beaucoup, cela se voit très vite : ils sont trop réguliers.
Trop de réponses se situent dans la moyenne.
Imaginez cet exemple : la taille moyenne des hommes adultes en
France est de 175,7 cm. Vous devez fournir des statistiques portant sur
100 hommes. Que fait le tricheur maladroit ? La réponse est simple, il
obtient exactement la moyenne de 175,7, ce qui est très peu probable.
S'il veut un résultat vraisemblable, il ne doit pas procéder ainsi. Tout
d'abord, la moyenne ne suffit pas, comme nous l'avons vu avec la
taille de la Française moyenne. La dispersion est essentielle. Quel est
le pourcentage de Français de chaque taille possible ? Ici encore, ne
collez pas trop à la moyenne, et n'en décollez pas de façon trop systé­
matique. Rien de plus difficile à simuler que le hasard ! Imaginez que
vous vouliez répartir 1000 sondés dans 6 groupes. Sur la population
totale, les pourcentages de chacun de ces groupes sont 5, 20, 25, 25,
20, 5 %. Si vous voulez passer pour un escroc doublé d'un imbécile,
proposez la distribution du tableau Une distribution peu crédible.

50 200 250 250 200 50

Une distribution peu crédible.

On y trouve les pourcentages exacts de la population entière.


C'est invraisemblable. Il est plus habile de les modifier un peu,
comme par exemple dans le tableau Une modification de faussaire.

49 198 254 246 205 48

Une modification de faussaire.

C'est mieux, bien sûr, mais loin de la perfection. N'essayez pas


davantage dans cette direction, vous n'y arriverez jamais !

Nombres pseudo-aléatoires
Alors comment faire pour tricher intelligemment ? Utilisez un
générateur de nombres pseudo-aléatoires entre 1 et 100 comme en
fournissent les principaux langages de programmation et même
les tableurs. Leur nom vient de l'anglais, essayez « random » ou
« rand ». Si vous tirez un nombre entre 1 et 5, vous le comptez
D ans la POLmquE et les médias 47
dans le premier groupe. Si vous tirez un nombre entre 6 et 25,
vous le comptez dans le second, et ainsi de suite. Vous obtiendrez
ainsi une distribution vraisemblable. Le tableau Tirages pseudo­
aléatoires montre ce que Гоп trouve en rappliquant dix fois.

41 209 240 263 199 48


38 220 253 224 220 45
51 176 243 274 205 51
53 192 270 240 201 44
53 185 240 259 208 55
59 189 238 255 203 56
49 195 249 241 216 50
46 189 252 260 191 62
54 209 263 222 213 39
54 192 242 285 184 43
Tirages pseudo-aléatoires.

Cest ainsi que Гоп peut créer un échantillon « aléatoire » d’élec­


teurs. Pourquoi faire confiance à ces suites de nombres pseudo­
aléatoires pour cela ? Il s’agit en fait de suites déterministes offrant
certaines caractéristiques du hasard. La pratique montre que les
résultats obtenus en les utilisant sont satisfaisants. Nous en don­
nons une dans l’encadré Une suite pseudo-aléatoire.

Prenez l’heure actuelle en secondes, c’est votre premier nombre.


S’il est 16 heures 35 minutes et 14 secondes, cela fait 59714
(16 X 3 600 + 35 X 60 + 14). Multipliez ce nombre par 16 807 puis
prenez le reste du résultat dans la division par 2147 483 647. Vous
trouvez ici 1003 613198. C’est votre second norhbre. Recommencez
en l’utilisant comme premier nombre. Vous trouvez mainte­
nant 1390 455 248. En itérant ce procédé, on obtient une suite de
nombres compris entre 0 et 2147 483 646. Elle passe tous les tests
statistiques usuels, utilisés pour contrôler le hasard. Pourtant, elle est
complètement déterminée par son premier élément !

Une suite pseudo-aléatoire.


48
0
PILE OU FACE
On lance quatre fois une pièce de monnaie.
Quelle est la probabilité d’obtenir en tout deux fois pile ?
Réponses : a) 50 % b) 62,5 % c) 37,5 %

Uespérance de vie
Continuons notre randonnée au pays du hasard et des proba­
bilités. Votre fille vient de naître. Les médias vous apprennent
qu'elle a une espérance de vie de 85 ans. D'où vient cette prédic­
tion ? Que signifie l'espérance de vie ? Pour le comprendre, dans
un premier temps, oubliez le sens commun du verbe « espérer »
car la définition n'est claire que pour les générations entièrement
décédées ! La voici. L'espérance de vie est la durée moyenne de
vie des personnes nées la même année. La définition est étrange
puisque, toutes ces personnes étant décédées, leur vie n'est plus
une espérance. N'était le côté macabre, peut-être vaudrait-il mieux
parler d'âge moyen à la mort ? La notion est identique, même si
l'espérance de vie devient équivalente à celle de mort. Toutefois,
le terme « espérance de vie » se comprend mieux pour les vivants.
Pour l'instant, restons malgré tout sur les générations passées
car ce sont les seules qui permettent des calculs certains. Pour
déterminer l'espérance de vie des gens nés en 1850 par exemple, il
suffit de connaître tous les actes de naissance de 1850 et tous les
actes de décès postérieurs. On en déduit les âges au décès et on en
fait la moyenne. Ce calcul s'effectue également à partir de la table
de mortalité de la génération née cette année-là (voir le tableau
Une génération du xix^ siècle).
Cette table de mortalité permet de calculer, parmi les personnes
nées en 1850, le nombre de morts dans leur première année. Il s'agit
du nombre de naissances (100 000) moins les survivants après un an
(84 905), soit 15 095. De même, 84 905 moins 79 355, soit 5 550 sont
morts dans leur seconde année. Le même calcul montre que 2 364
sont décédés dans leur troisième année, etc. L'âge exact au décès
étant inconnu, on peut estimer qu'il se situe au milieu de l'année
en cours.
D ans la POLmQUE et les médias 49
100 000 18 67 265 36 55 724 54 44 392 72 23 569 90 1181
84 905 19 66 749 37 55 155 55 43 607 73 22 039 91 805
79 355 20 66 102 38 54 600 56 42 766 74 20 433 92 542
76 991 21 64 905 39 54 058 57 41 868 75 18 818 93 368
75 304 22 63 645 40 53 497 58 40 964 76 17198 94 226
73 906 23 62 987 41 52 912 59 39 975 77 15 521 95 143
72 901 24 62 396 42 52 320 60 39 003 78 13 932 96 95
72132 25 61 855 43 51713 61 37 958 79 12 221 97 62
71 483 26 61 287 44 51 100 62 36 967 80 10 820 98 43
70 817 27 60 738 45 50 487 63 35 874 81 9 369 99 27
70 280 28 60197 46 49 873 64 34 722 82 8 072 100 17
69 877 29 59 655 47 49 276 65 33 453 83 6 842 101
69 508 30 59110 48 48 660 66 32179 84 5 741 102
69179 31 58 561 49 48 004 67 30 803 85 4 758 103
68 874 32 58 003 50 47 328 68 29 454 86 3 843 104
68 549 33 57 435 51 46 573 69 27 929 87 3 077 105
68141 34 56 863 52 45 881 70 26 570 88 2 390
67 728 35 56 294 53 45 136 71 25 149 89 1797

Une génération du xix®siècle : survivants à chaque âge


pour 100 000 naissances en 1850. On remarquera la surmortalité
aux âges de 20 et 21 ans, correspondant à la guerre de 1870.

Ainsi, les bébés morts dans leur première année sont comptés
pour morts à six mois, les morts dans leur seconde année, à un an et
demi, etc. Pour le calcul de Fâge moyen au décès, 15 095 comptent
pour 0,5 an, 5 550 pour 1,5, 2 364 pour 2,5, etc. Notre calcul com­
mence donc ainsi : 0,5 x 15 095 + 1,5 x 5 550 + 2,5 x 2 364 + etc. En
divisant le résultat final par 100 000, nous trouvons 41 ans et demi.
Le calcul est similaire si nous cherchons Fespérance de vie de
ceux qui ont survécu à leur première année. Nous trouvons main­
tenant 48 ans (ce qui fait 49 ans en tout). Si nous excluons les morts
de nourrissons, la véritable espérance de vie de la génération née
en 1850 est de près de 50 ans, morts à la guerre compris.
50
Tables actuelles de mortalité
La façon historique d'établir les tables de mortalité ne permet
pas le calcul de l'espérance de vie d'un bébé venant de naître, seu­
lement de ceux dont la génération entière est décédée. Vouloir esti­
mer celle des vivants relève du domaine de la prévision. Comment
savoir combien d'enfants venant de naître mourront à l'âge de dix
ans par exemple ? En fait, on l'estime à partir des taux de morta­
lité de l'année en cours. Plus précisément, on calcule le quotient
de mortalité des deux sexes à chaque âge grâce à des estimations
de population et de décès. En l'absence de toute migration, l'idée
est très simple. Le janvier 2009, on compte 440 428 hommes de
40 ans et 815 décès d'hommes de 40 ans pendant l'année 2009.
Le quotient de mortalité des hommes de 40 ans est donc estimé
à 815 divisé par 440 428, soit 1,850 %o (voir l'encadré Influence des
migrations pour la correction à apporter pour tenir compte des
flux migratoires). La méthode est fiable si on peut appliquer la loi
des grands nombres. Ses résultats sont fantaisistes quand ce n'est
pas le cas, particulièrement pour le grand âge.

Reprenons nos calculs du quotient de mortalité des hommes


de 40 ans pendant l'année 2009 en tenant compte des flux
migratoires. Le janvier 2010, on compte 440 112 hommes
de 41 ans. Le déficit par rapport à l'année précédente est de
316 hommes pour 815 décès. La différence correspond à un
solde migratoire positif de 499 individus. Ce chiffre fausse
légèrement nos résultats car ces hommes ne sont pas tous
apparus le dernier jour de l'année 2009. Les décès constatés
peuvent être dus à certains d'entre eux. Pour en tenir compte,
nous augmentons la population du 1®"janvier 2009 de la moitié
de ce flux. Le quotient à appliquer est alors modifié de 1,850 %o
à 1,849 %o.

Influence des migrations.

À partir de ces quotients de mortalité des personnes de chaque


âge, les statisticiens reconstruisent des tables de mortalité. On ne
considère donc plus une population réelle mais une génération fic­
tive de 100 000 individus qui connaîtrait toute sa vie les conditions
D ans la poLmguE et les médias 51
de mortalité par âge de Tannée considérée. La table que Ton peut
construire chaque année sur cette génération fictive est appelée
la table du moment. C’est à partir de cette table qu’on calcule
l’espérance de vie des enfants dès leur naissance. Cette méthode
est fondée sur l’hypothèse que la situation de la mortalité restera
identique à ce qu’elle est actuellement, et ceci alors même que
nous savons qu’il n’en est rien ! Malgré tout, ces résultats donnent
une idée plus vraisemblable de la réalité de l’avenir que l’utili­
sation de tables de mortalité de générations décédées. Mieux
vaut parfois une approximation raisonnable qu’une précision
illusoire.

0
ESPERANCE DE VIE
Pour 100 000 naissances d’une espèce animale, 10 000 indivi­
dus s’éteignent chaque année jusqu’à disparition complète de
la génération.
Quelle est l’espérance de vie à la naissance d’un individu de
cette espèce animale ?
Réponses : a) 10 b) 5 c) 6

Les femmes meurent deux fois moins que les hommes


Les tables de mortalité nous font découvrir que le rapport entre
les mortalités des hommes et des femmes est étonnant. Les pour­
centages sont deux fois moindres chez les femmes que chez les
hommes (voir le tableau Mortalité selon le sexe).

PROBABIUTÉ DE DÉCÉDERENTRE HOMMES FEMMES


0 et 20 ans 8 ,3 %o 5 ,7 %o

20 et 40 ans 2 0 ,2 %o 8 ,3 %o

40 et 60 ans 9 7 ,7 %o 4 5 ,8 %o

60 et 80 ans 3 3 9 ,5 %o 1 9 4 ,0 %o

Mortalité selon le sexe et Tâge.

Nous pourrions en déduire que les femmes meurent deux fois


moins que les hommes, ce qui est faux bien sûr. Tout le monde
52
mourra. Il manque juste une ligne à notre tableau ! La plupart des
femmes meurent après 80 ans, et cela explique quelques problèmes
démographiques, comme le fait qu’il existe autant de femmes de
60 ans que d’hommes de 45 et que, au-delà de 45 ans, plus de
femmes que d’hommes vivent seules. Avant, c’est le contraire.

Le surbooking
Quittons la mortalité pour gagner un terrain plus gai, mais
comparable au niveau des calculs : celui d’une pratique devenue
courante dans le domaine du transport aérien, le surbooking. Cette
pratique nous semble détestable quand nous en sommes victimes.
Certains tribunaux l’estiment même frauduleuse. Elle fait pour­
tant aujourd’hui partie des habitudes de gestion des compagnies
aériennes et s’étend progressivement à d’autres moyens de trans­
port, à des agences de voyage et même à certains hôtels. Restons
dans le domaine où elle est le plus répandue. Pour optimiser leurs
profits, les compagnies aériennes vendent plus de billets qu’il n’y a
de places disponibles dans les avions. Pourquoi ? Tout simplement
parce qu’un certain pourcentage des passagers ne se présentent pas
à rembarquement du vol sur lequel ils ont réservé. Bien sûr, ce sont
plutôt des passagers avec des billets remboursables, qu’ils ont payés
le prix fort. Inversement, ceux qui risquent d’être refusés à rembar­
quement sont ceux qui se présentent toujours, sauf cas de force
majeure, car leurs billets bon marché ne sont pas remboursables !
Malgré tout, nous négligerons cet aspect pour ne pas compliquer
notre étude et ferons comme si tous les passagers étaient égaux.
Le calcul des compagnies aériennes s’apparente à celui de la
Française des Jeux, ou du joueur de poker, vu précédemment.
Prenons un exemple. Une compagnie aérienne vend 106 places sur
un vol pouvant en contenir seulement 100. Par une méthode sta­
tistique ressemblant au calcul des taux de mortalité, elle estime
que chaque passager a une probabilité de 90% de se présenter
effectivement à rembarquement. Quel est le risque qu’un passager
ne puisse monter à bord ? Le calcul de probabilité est identique à
celui effectué pour un jeu comme le Rápido. Par exemple, la pro­
babilité que les 106 passagers se présentent tous est de 0,9’®^, soit
environ 1,5 pour 100 000. Qn évalue de même la probabilité que
105 passagers se présentent (106 x 0,9’®^ x 0,1 comme au Rápido ou
au poker !), etc. En ajoutant les probabilités de présence de 101 à
D ans la politique et les médias 53
106 personnes, on obtient un risque de 4 % de devoir refuser un
passager. Dans ce cas, la compagnie aérienne doit dédommager le
passager mais le jeu en vaut la chandelle ! Qui refuserait de jouer
quand la probabilité de gagner est de 96 % ?
À partir de ces données, on peut également évaluer la probabi­
lité que Tavion soit rempli à 100 %, 99 %, etc. À chaque remplissage
correspondent une probabilité et un coût. Il est donc possible d’éva­
luer une espérance de ce coût, comme on le fait pour l’espérance de
vie d’un nourrisson. Par exemple, si une perte de 5 000 € est asso­
ciée à une éventualité de 4 % et un gain de 1 000 € à une éventua­
lité de 96 %, l’espérance de gain est de 0,96 x 1 000 - 0,04 x 5 000,
soit 760 €. Le calcul des compagnies aériennes est plus compliqué
mais de ce type. En effet, chaque type de passagers a sa probabilité
propre de ne pas se présenter. Ceux pour qui le billet est rembour­
sable auront une probabilité de 80 % de se présenter sans doute,
tandis que celle des autres sera proche de 100 %. Dans tous les cas,
le calcul se justifie par la loi des grands nombres. Plus le nombre
de vols est important, plus on se rapproche de ces prévisions.
Le problème essentiel est donc d’évaluer correctement le nombre
de places à vendre sur chaque vol. Chaque place vide a un coût.
Chaque passager devant être refusé en a un autre, double du pre­
mier environ. Il est impossible de prévoir exactement le nombre de
passagers qui ne se présenteront pas mais, comme nous venons de
le voir, on peut estimer les probabilités qu’il en manque un, deux,
trois, etc. Selon le surbooking appliqué, on peut en déduire une
espérance du nombre de sièges vides et donc celle des personnes
non embarquées.
L’espérance du coût est proportionnelle à la somme de l’espé­
rance du nombre de sièges vides plus le double de l’espérance du
nombre de sièges indisponibles. On connaît le coût d’un siège vide.
On connaît donc les probabilités de coût selon le surbooking effec­
tué. On en déduit une espérance de coût dans chaque cas, ce qui
donne deux courbes. Dans tous les cas, il existe un remplissage opti­
mum des avions. Celui-ci n’est pas de 100 % mais plutôt de 115 %
environ (voir la figure Évolution de Fespérance), Les condamnations
par des tribunaux n’y feront rien car elles ne peuvent qu’être inté­
grées dans les coûts à prévoir en cas de passagers refusés à rembar­
quement. Le surbooking est une fatalité. Pour le passager, le mieux
est d’arriver en avance.
54
Évolution de Tespérance des coûts en fonction du surbooking:
en plein, espérance du nombre de passagers manquant à Tappel,
en petits pointillés, espérance du nombre de passagers ne pouvant
embarquer, en grands pointillés, espérance du coût. Cette courbe
présente un minimum.

0
TAUX DE REMPLISSAGE
La compagnie Alphajet gère une flotte d’avions en refusant le
surbooking. Elle vend toujours toutes ses places. En moyenne,
un passager sur dix ne se présente pas à rembarquement.
Quel est le taux de remplissage moyen de ses avions ?
Réponses : a) 95 % b) 90 % c) 80 %

Le jeu de la vie
Sortons de la question du surbooking pour en aborder une
autre où la notion de prévision est également centrale, par
exemple dans le cas des épidémies. Cent mille volailles sont
abattues à l’autre bout du monde, un oiseau migrateur m eurt
sur une île de la mer Égée, trois hommes décèdent. Pour cer­
tains, cela augure quelques dizaines de morts en Europe, pour
d’autres, des centaines de millions dans le monde. D’où viennent
ces chiffres ? Il existe plusieurs méthodes pour les obtenir. L’une
d’elles peut être décrite comme un jeu. Dans les années 1940,
John von Neumann (1903-1957) fut le premier à imaginer une
D ans la politique et les médias 55
machine présentant certains aspects de la vie. En 1970, John
Conway a popularisé ce type de machine sous le nom de « Jeu
de la vie ». En voici les règles. Pour jouer, vous avez besoin d’un
damier et de pions. Les cases du damier sont considérées comme
des cellules ; elles peuvent être mortes ou vivantes. Utilisez les
pions pour matérialiser les cases des cellules vivantes. Au début
du jeu, placez des pions sur les cases que vous désirez. Procédez
alors par étapes selon les règles suivantes :
- une cellule morte entourée de trois cellules vivantes ressuscite,
sinon elle reste morte,
- une cellule vivante reste en vie si elle a deux ou trois voisines
vivantes, sinon elle meurt.

Oscillation entre trois cellules vivantes en ligne


et trois cellules vivantes en colonne.

Bien entendu, révolution du jeu est complètement déterminée


par sa condition initiale. Cela n'empêche pas certaines surprises.
L'une des configurations les plus simples consiste à commen­
cer par trois cellules vivantes contiguës en ligne, elle se repro­
duit alors de deux en deux (voir la figure Oscillation). Ce jeu a
été abondamment étudié. Loin d'être un simple amusement, il
s'agit en fait d'un exemple de ce que l'on nomme un « automate
cellulaire ».

Un automate pour modéliser une épidémie


Les processus d'expansion des épidémies se prêtent bien à ce
type de schéma. Reprenons notre damier en l'étendant à l'infini.
Au départ, toutes les cellules sont saines. Plaçons une cellule infec­
tée puis « jouons » avec la règle probabiliste suivante :
56
- les cellules voisines sont infectées au coup suivant avec la pro­
babilité P,
- la cellule meurt ou est immunisée le coup suivant.
Pour quelles valeurs de p la maladie se propage-t-elle au monde
entier ?

Un exemple d’expansion de l’épidémie avec p = 25 %.


En noir, les cellules infectées, en gris clair les saines et
en gris moyen les mortes ou immunisées.

Comme le modèle est probabiliste, dans un cas particulier, tout


peut se produire. Si on veut avoir une idée rapide de l’évolution
moyenne du système, le mieux est d’en faire une simulation (voir
la figure Un exemple d'expansion). Pour cela, on joue selon les règles
énoncées ci-dessus en utilisant un générateur de nombres pseudo­
aléatoires et on comptabilise le nombre de cellules infectées. En
jouant cent fois et en faisant ensuite la moyenne, on obtient une
mesure de l’expansion moyenne de l’épidémie. De façon assez
logique, on constate qu’en dessous d’un certain taux de contami­
nation, l’épidémie ne s’étend pas. Au-dessus, elle envahit le monde
entier. Dans le cadre de notre modèle simplifié, le taux critique se
situe entre 30 et 40 %.
Ce modèle peut être amélioré de diverses façons. Tout d’abord,
on peut modifier le voisinage de chaque cellule. Ici, il est com­
posé de huit cellules. Les spécialistes parlent de voisinage de
Moore. On utilise souvent un voisinage plus simple, dit de von
Neumann. Il est constitué des quatre cellules partageant un
côté avec la cellule considérée. Avec ce nouveau modèle, le taux
critique se situe aux alentours de 60 %. On peut également amé­
liorer le modèle en tenant compte du temps pendant lequel une
cellule infectée est contagieuse puis du taux de mortalité et d’im­
munité ainsi que du temps d’immunité. On arrive ainsi à retrouver
D ans la politique et les médias 57
la façon dont se sont propagées des épidémies comme la peste
dans TEurope médiévale : une première vague tue le tiers de la
population en se propageant à partir d’un épicentre situé dans
un port. Elle est suivie de plusieurs répliques plus faibles, toutes
partant du même point. Ces répliques correspondent à la fin de
certaines immunités.

L’intérêt des vaccinations


En modifiant le modèle du jeu, on peut passer du cas où
chaque cellule représente un individu à celui où elle représente un
domaine où les individus sont en relation constante : un élevage
de volaille dans le cas de la grippe aviaire, une ville dans le cas
de la tuberculose, du sida ou de la grippe humaine. Ces domaines
sont reliés entre eux pour former un réseau. Dans chaque cellule,
la modélisation suit une autre logique, celle du modèle « SIR » dû
à William Kermack et Anderson Mac Kendrick en 1927. Ce modèle
compartimente la population en trois classes : S, la classe des indi­
vidus susceptibles d’attraper la maladie, I, celle de ceux qui sont
infectés (et contagieux) et R, ceux qui sont guéris (et immunisés)
ou décédés, donc plus contagieux.
On considère l’évolution de ces trois classes dans le temps en
fonction de deux taux mesurables expérimentalement. Le premier,
que nous notons C, est le taux de contagion de la maladie pour
un infecté, c’est-à-dire la probabilité pour qu’un individu suscep­
tible attrape la maladie après contact avec un individu infecté. Ce
taux est donc égal à C x I pour I infectés. Le second taux, que
nous notons G, mesure le passage de l’état d’infecté à celui d’im-
munisé (ou décédé). Il peut sembler étrange de réunir décès et
guérisons dans un même groupe. Bien entendu, il ne s’agit pas de
froideur vis-à-vis des malades. Cependant, en termes d’épidémie,
l’important est de connaître le nombre d’individus contagieux...
et les morts ne le sont plus. La compassion n’a rien à voir dans
l’affaire. Ces deux taux (C et G) correspondent à un laps de temps
qui dépend de la maladie, mais il importe peu que l’on compte en
heures, en jours ou en semaines pour comprendre le mécanisme.
Après ce laps de temps, on compte C x I x S infectés supplémen­
taires et G XI de moins. La variation du nombre d’infectés est donc
égale à C X S - G multiplié par I. La condition pour que la maladie
se propage, et donne lieu à une épidémie, est que le nombre de
58
malades infectés augmente, c'est-à-dire que le nombre C x S - G
soit positif. Le quotient G IC a. donc valeur de seuil. Si le nombre
S de sujets susceptibles est strictement inférieur à ce seuil, la mala­
die ne s'étend pas. Sinon, elle donne lieu à une épidémie (ou à une
épizootie).
D'une façon qui peut paraître paradoxale, l'apparition d'une
épidémie ne dépend donc pas du nombre de personnes infectées
mais du nombre de personnes susceptibles d'attraper la maladie !
Cette remarque justifie à elle seule les politiques de vaccination,
même avec un vaccin peu efficace.

Les prévisions de la vache folle


Heureusement, les prévisions des épidémies se révèlent souvent
excessivement pessimistes. L'exemple historique le plus criant est
sans doute celui de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, liée à celle de
la vache folle. En 2000, alors que le nombre total de cas depuis
le début de la maladie n'était que d'une dizaine, un rapport bri­
tannique prévoyait 136 000 victimes. Vu l'évolution de la mortalité
due à cette maladie, en 2011, plus personne n'y croit. Comment
a-t-on pu craindre une telle hécatombe ? La réponse se trouve
dans le modèle mathématique utilisé. Les prévisionnistes ont sup­
posé un temps d'incubation très long. Plus précisément, ils ont fait
l'hypothèse que les décès dus à la maladie de Creutzfeldt-Jakob se
répartissaient sur trente ans, avec un pic la quinzième année (voir
la figure Distribution de 1 000 décès).

Distribution de 1 000 décès en fonction du temps


après la contamination selon les hypothèses alarmistes.
D ans la politique et les médias 59
Avec cette hypothèse, en faisant correspondre les décès des pre­
mières années avec ceux représentés sur cette courbe, on arrive
effectivement aux prévisions de Tan 2000. La suite des événements
a prouvé que le modèle utilisé était insensé. En matière d'épidé­
mies, il suffit souvent de modifier un paramètre pour changer une
maladie sans gravité en grande ravageuse. S'agit-il d'une manipu­
lation ? Il est difficile de le dire : pour un responsable, la prudence
peut être de prévoir le pire... mais est-ce toujours raisonnable ?

L'art de présenter les statistiques


L'utilisation d'un modèle inapproprié peut être une manipulation
mais la première façon de manipuler les statistiques est sans doute
de rendre compte d'une réalité complexe à travers un seul nombre,
même calculé correctement. Prenons l'exemple de l'indice des prix.

POSTES DE CONSOMMATION POURCENTAGE


Transport 16%
Produits alimentaires et boissons non alcoolisées 15%
Logement, eau, gaz, électricité, etc. 14%
Autres biens et services 12 %
Santé 10%
Loisirs et culture 9%
Hôtellerie, bar, restauration 7%
Ameublement, équipement ménager,
6%
entretien de la maison
Habillement 5%
Boissons alcoolisées et tabac 3%
Communications 3%

Répartition moyenne des dépenses des ménages par poste.


Chacun de ces postes se répartit également de même.
Par exemple, les transports se décomposent en transports collectifs
et transports individuels.

De façon implicite, on en fait un indicateur de l'évolution du


pouvoir d'achat, même s'il s'agit d'un instrument de mesure de
60
rinflation. Comme tel, il est calculé de façon correcte. On déter­
mine chaque mois le pourcentage de chaque produit acheté par
les Français et son prix. C’est ce que Гоп appelle de façon imagée
le « panier de la ménagère ». Ainsi, il ne comprend pas seule­
ment les produits qu’une ménagère achète au supermarché. Ce
panier inclut des prix d’achat d’automobiles, d’ordinateurs et des
coûts d’entretien de ces biens. Ces produits se répartissent en plu­
sieurs familles, chacune représente un certain pourcentage des
dépenses des ménages (voir le tableau Répartition moyenne des
dépenses).
Ces taux sont modifiés annuellement pour tenir compte de
révolution du comportement d’achat des consommateurs mais ils
restent constants entre deux changements. Ils sont alors chaînés
pour conserver un indice cohérent. Autrement dit, on évite les
sauts qui ne viendraient que du changement de contenu du panier.
Le prix global est calculé grâce au coût de chaque produit et de
ces taux. Le rapport avec le prix global de l’année de référence
donne l’indice des prix à la consommation. L’année de référence
actuelle est 1998 où l’indice est donc 100, par convention. En 2010,
les indices de prix ont varié de 119,69 à 122,08 selon le tableau
Évolution de Vindice.

Mois 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

CJN vo vO ON oo ГМ m ON m oo
VO m ON r r^ O m O
Indice oC
T— 1
O
ГМ
O
(N (N
1— t
ГМ
1— t
(N
1— 1
(N
1— 1
<N
1— t
rsl (N
T— 1
rvl
<N
(N
1 T— 1 T— t 1—< rH 1—< T—• 1— 1 rH

Évolution de l’indice des prix (sans tabac) en 2010.

Cet indice des prix est un instrument valable pour mesurer l’in­
flation. En 2010, elle aura donc été égale au rapport entre l’indice
de décembre 2010 divisé par celui de décembre 2009, soit 122,08
divisé par 119,96, c’est-à-dire 1,77 %. Il mesure également le pou­
voir d’achat d’un Français idéalement « moyen », qui achèterait
un peu de tout. Cependant, la répartition proposée dépend, en
particulier, du niveau de revenus de chacun. Une augmentation
de prix des produits alimentaires peut être dissimulée par une
diminution des prix de produits comme les ordinateurs. Pour sim­
plifier, imaginons que les dépenses des ménages se répartissent
D ans la politique et les médias 61
en quatre postes. Chacun a son indice de prix et sa répartition
dans le budget moyen, comme indiqué dans le tableau Indices et
répartitions.

P R O D U IT
PO STES lO G E M E ÏS rr A L IM E N T A T IO N TRA N SPO RT
CULTUREL

Indice 110 130 105 80


Répartition
30 20 30 20
moyenne

Indices et répartitions sur quatre postes.

Selon cette répartition moyenne, pour calculer Tindice global,


on multiplie d’abord les indices par la répartition correspon­
dante et on ajoute les résultats obtenus, soit 30 fois 110 (3 300)
plus 20 fois 130 (2 600), etc., ce qui donne 10 650. Ceci doit être
divisé par le même nombre calculé avec les indices 100, soit
10 000. L’indice global est donc égal à 106,5. L’augmentation glo­
bale des prix est donc de 6,5 %. Prenons m aintenant deux classes
différentes de ménages, disons les hauts et les bas revenus, dont
les dépenses se répartissent suivant le tableau Répartitions sur
quatre postes.

PRODUIT
POSTES LOGEMENT ALIMENTATION TRANSPORT
CULTUREL
Hauts reve­
30 10 30 30
nus
Bas revenus 40 30 30 0

Répartitions sur quatre postes selon les revenus.

Un calcul identique au précédent montre que l’augmentation


globale des prix pour les hauts revenus est de 1,5 % alors qu’elle est
de 14,5 % pour les bas revenus. Bien sûr, notre exemple est poussé
à l’extrême mais il montre que juger une situation complexe sur un
seul nombre est une erreur.

62
QUESTION DEMOGRAPHIQUE
0
L'année de référence, 50 % des habitants d'Alphaville étaient
pauvres. Aujourd'hui, la ville a perdu le sixième de sa popula­
tion et le pourcentage de pauvres a augmenté de 10 %.
Quel est le taux de croissance du nombre de pauvres à
Alphaville ?
Réponses : a) 10 % b) 5 % c) 0 %

L’évolution du climat
On retrouve le même problème dans la présentation usuelle de
la question climatique dans les médias. Nous ne voulons pas ici
entrer dans le cœur de ce débat, qui n'est pas d'ordre mathéma­
tique d'ailleurs, mais simplement parler de sa présentation média­
tique, qui n'est pas scientifique. En effet, pour simplifier et être
mieux compris sans doute, on ramène la question à un seul chiffre :
la moyenne des températures sur notre planète. On nous explique
qu'une augmentation de la température moyenne de 4 degrés
Celsius (ou 5 voire 10, peu importe) provoquera la fonte des glaciers.
L'argument n'a pas de sens en lui-même car la fonte des glaciers ne
dépend pas directement de la seule température moyenne mais de
la température des lieux où se trouvent les glaciers. On pourrait
très bien imaginer une augmentation de la température moyenne
qui résulterait d'une augmentation importante dans les régions
proches de l'équateur et d'une baisse dans les régions polaires.
Visiblement, ce n'est pas le cas, peut-être même le contraire, mais
il serait bon qu'une explication éclairée soit donnée. Une moyenne
ne rend pas complètement compte de la globalité.
Autrement dit, la question est extrêmement mal présentée.
Dans une moyenne, l'arbre peut cacher la forêt. Qtiel glacier fon­
dra du fait d'une augmentation de 10 degrés Celsius en moyenne
à Singapour si elle s'accompagne d'un maintien de la température
à Vancouver ? Si fonte il doit y avoir, la raison est plus subtile
que cela. Il serait intéressant qu'elle soit divulguée et commentée
correctement.

D ans la politique et les médias 63


Dénombrer l’invisible
Il est vrai que les médias expliquent rarement d’où viennent
leurs informations. Le téléspectateur, l’auditeur ou le lecteur est
invité à croire sans preuve réelle. Même si le message est juste,
cette attitude peut entraîner le doute. En voici un autre exemple.
Comme il est purement mathématique, nous pouvons décrypter la
méthode qui se cache derrière. Ce matin, vous apprenez que, selon
le ministère de l’Intérieur, il y aurait entre 200 000 et 400 000 clan­
destins présents sur le territoire. D’où viennent ces chiffres ? Le
propre des clandestins... est de l’être, et donc d’échapper à tout
recensement. La démographie permet cependant d’évaluer leur
nombre. Pour commencer, on connaît les taux de mortalité par
âge et par origine. On peut estimer que les taux sont environ les
mêmes pour les clandestins. Du nombre de décédés sans papiers,
on peut donc déduire une approximation du nombre de vivants
sans papiers. La même opération est possible grâce aux naissances.
Les recensements permettent aussi de se douter de la présence de
clandestins, quand les nombres recensés ne correspondent pas aux
nombres prévus.
De même, vous apprenez que 150 000 personnes sont porteuses
du virus du sida (c’est-à-dire séropositives) sur un territoire donné,
dont 40 000 l’ignorent. Comment peut-on faire une telle estima­
tion ? Ici encore, l’idée est de faire des recoupements. Sans entrer
dans toute la subtilité des détails, voyons le principe du calcul.
Imaginons que nous connaissions le nombre de cas de sida dia­
gnostiqués une certaine année, 500 par exemple. Parmi ceux-ci,
370 correspondent à des personnes dont la séropositivité était
connue. Ainsi, 130 étaient des séropositifs inconnus les années pré­
cédentes. Il est donc légitime d’estimer que, pour 370 séropositifs
connus, il en existe 130 inconnus. Nous multiplions le nombre de
séropositifs connus (110 000 par exemple) par le rapport 130 / 370
pour en déduire le nombre de séropositifs inconnus, ce qui donne
un peu moins de 40 000. Bien sûr, le modèle est un peu plus raf­
finé que cela car certains milieux sont plus conscients que d’autres
du danger de cette maladie et pratiquent plus volontiers les tests.
Les taux entre connus et inconnus diffèrent alors selon le milieu.
Dans tous les cas, à défaut d’un vaccin, l’idéal pour enrayer l’épidé­
mie et mieux soigner les malades serait un test annuel pour tous.
Ce serait malgré tout coûteux et difficile à mettre en place.
64
Espérance de vie d’un piéton sur l’autoroute
Vous l’avez sans doute lu : l’espérance de vie d’un piéton marchant
sur la bande d’arrêt d’urgence de l’autoroute est de 20 minutes. Si
vous comparez avec les 30 minutes accordées par l’armée pour
un soldat au combat (donc attaqué avec fusils, mitrailleuses, blin­
dés, canons, avions, etc.), l’autoroute semble digne d’un champ de
bataille. Cet avertissement est-il simplement là pour nous inciter à
la prudence ou correspond-il à une réalité ?
Tout d’abord, que veut-il dire? Comme pour l’espérance de
vie de l’enfant qui vient de naître, il s’agit d’une durée de vie
moyenne... quand la mort survient. Si l’automobiliste survit, quelle
est son espérance ? On ne voit pas bien comment comptabiliser les
gens qui s’arrêtent et repartent sans rien dire à personne. Cette
statistique est biaisée et n’a donc qu’un intérêt limité. Il serait plus
intéressant de connaître la probabilité d’être accidenté en s’arrê­
tant sur la bande d’arrêt d’urgence sans se réfugier derrière les
barrières de sécurité. Ce chiffre n’est pas donné mais on connaît
le nombre de piétons accidentés par an sur l’autoroute. Il est de 50
environ, dont 20 tués. Si les personnes sur la bande d’arrêt d’ur­
gence mouraient en 20 minutes en moyenne, l’hécatombe serait
tout autre. De même pour le soldat mort au combat, la statistique
doit être comprise dans le sens : le soldat mort au combat est resté
en moyenne 30 minutes exposé au feu de l’ennemi. Est-il besoin de
présenter des statistiques biaisées pour servir une cause juste ? On
peut en douter. Il suffirait de dire que rester sur la bande d’arrêt
d’urgence est dangereux et citer le nombre de morts, sans inventer
des statistiques étranges qui ne peuvent que faire douter du sérieux
de cette science.

Cryptographie
Un autre domaine souvent rencontré dans les médias est celui
du secret, où il est naturellement difficile d’avoir des informations
précises. Autrefois réservée aux usages diplomatiques et mili­
taires, la cryptographie (l’art de cacher) est aujourd’hui garante
de la sécurité des échanges sur Internet et sert à crypter certaines
chaînes de télévision. Vu l’enjeu, les sociétés utilisant ces codes les
garantissent inviolables. Comment peuvent-elles l’assurer ? Aucun
code n’est fiable pour l’éternité. Si une intelligence peut créer
un code, une autre peut le percer. Croire le contraire vaut garantie
D ans la politique et les médias 65
d'échec, comme Га montré Thistoire de la Seconde Guerre mon­
diale. Une erreur de procédure minime peut réduire à néant
une méthode que Гоп croit fiable. À cette époque, l'armée alle­
mande utilisait des machines nommées Enigma pour coder ses
messages. La clef de chiffrement dépendait d'un certain nombre
de rotors : trois, quatre ou cinq. Pour déchiffrer la machine, il fal­
lait connaître les rotors utilisés, qui appartenaient à un jeu connu
de tous. Ces rotors étaient changés chaque jour. La météo n'étant
pas vraiment un secret militaire, la marine allemande envoyait
à son quartier général les messages météo cryptés mais avec une
machine Enigma à trois rotors. Chaque jour, cette Enigma était
réglée comme celle à quatre rotors, mais avec le dernier rotor
en moins ! Les Britanniques savaient déchiffrer ces messages.
Ils avaient donc la position des trois premiers rotors, il restait
à essayer tous les rotors possibles pour le quatrième (26 possi­
bilités) ! Les Allemands ne s'aperçurent jamais de cette erreur
de procédure monumentale ! Pourtant, ils se doutaient que les
Britanniques savaient déchiffrer l'Enigma à trois rotors puisqu'ils
étaient passés à quatre. Au contraire, ceux-ci ne se vantèrent
jamais d'avoir su décoder Enigma. Ils firent croire que la machine
était indéchiffrable. Ils purent ainsi revendre les machines prises
aux Allemands à la fin de la guerre à des entreprises et gouverne­
ments étrangers.
Rien ne doit jamais être considéré comme acquis dans le
domaine du secret. Ainsi, la recherche n'est pas près de s'y essouf­
fler, pas plus que dans tout ce qui concerne les mathématiques
liées à l'informatique. Les méthodes cryptographiques sont au
centre des échanges sur Internet et des cartes bancaires. Voyons
d'abord une question plus médiatique.

0
LE CODE DE BETA
Alpha intercepte le message suivant ; FH PHWDJH HVW
IDFLOH D GHFRGHU en provenance de Bêta.
Saurez-vous le décoder ?
Réponses : a) oui b) non

66
Le téléphone rouge
Gilbert Vemam (1890-1960) a inventé un code utilisé de nos jours
dans les milieux diplomatiques et, en particulier, pour le «télé­
phone rouge » (qui n’est ni rouge ni un téléphone mais une ligne de
communication d’urgence) reliant Washington et Moscou. Il s’agit
du seul code dont l’invulnérabilité soit prouvée. Ses faiblesses sont
la taille et le nombre de clefs nécessaires ainsi que le besoin absolu
de secret dans leur transmission. Pour cette raison, son emploi est
limité aux milieux de la diplomatie et de l’armée. De nos jours, tout
message à transmettre est une suite de 0 et de 1 (on dit de « bits »).
La méthode de Vernam consiste à choisir au préalable une suite de
bits de même longueur, que l’on appelle clef de chiffrement, et de
transmettre le texte obtenu en ajoutant le message et la clef bit à
bit. Par exemple, supposons que le message soit la suite de 64 bits
suivante :
011000010101010001010100010000010101000101010101010001010
1011010,
et la clef, celle-ci :
1010110101111001010100011110000111010101101011100000011110
001110.
On chiffre le message en l’ajoutant bit à bit au message. Le tableau
Codage d’un message montre ce que cela donne pour les premiers.

Message 0 1 1 0 0
Clef 1 0 1 0 1
Message codé 1 1 0 0 1
Codage d’un message.

À chaque étape, nous avons effectué l’addition de deux bits, ceux


qui se correspondent dans le message et la clef. La seule surprise vient
quand on ajoute 1 et 1, car cela donne 0. Autrement dit, la table d’ad­
dition n’est pas la table usuelle (voir la Table d’addition).

+ 0 1
0 0 1
1 1 0

Table d’addition sur {0,1}.


D ans la politique et les médias 67
Pour décoder, il suffit d'ajouter la clef au message codé pour
obtenir le message en clair ! Pourquoi ? Tout simplement parce
que chacun des deux bits vérifie la même relation : 0 + 0 = 0 et
1 + 1 = 0. Le tableau Décodage montre ce que cela donne pour les
premiers bits de notre exemple.

Message 0
Clef
Message codé
Clef
Message décodé 0

Décodage d'un message en réutilisant la clef.

Nous obtenons ainsi le message codé :


011000010101010001010100010000010101000101010101010001010
1011010
1010110101111001010100011110000111010101101011100000011110
001110

110011000010110100000101101000001000010011111011010000101
1010100

Le décodage s'opère de même :


110011000010110100000101101000001000010011111011010000101
1010100
1010110101111001010100011110000111010101101011100000011110
001110

011000010101010001010100010000010101000101010101010001010
1011010

En modélisant la notion d'information, Claude Shannon (1916-


2001) a montré que le chiffre de Vernam est inviolable. Sans entrer
dans les détails, il est facile de comprendre que, si la clef est aléa­
toire, le message obtenu en l'appliquant l'est également.
L’algorithme des mariages stables
Après ce détour vers le secret des relations internationales,
voyons un domaine où l’opacité est garantie sans code. Les
médias évoquent parfois la sélection dans les Grandes Écoles ou
autres comme une question relevant du délit d’initiés, voire pire,
sans vraiment décrire le mécanisme d’affectation utilisé. La rai­
son est sans doute qu’il relève des mathématiques, même si son
nom fait plutôt penser à une agence matrimoniale futuriste.
En 1962, David Gale et Lloyd Shapley ont baptisé « algorithme
des mariages stables» une méthode pour affecter les internes
en médecine dans les hôpitaux des États-Unis. Il est aujourd’hui
utilisé pour affecter les candidats en classe préparatoire. Dans
cette procédure, chaque candidat remplit un dossier dans lequel
il classe douze prépas. Une fois effectués ces choix des candidats,
les lycées classent leurs prétendants par filières sans aucun ex-
aequo. Ce problème d’affectation équivaut donc à un problème de
mariage polygame, chaque prépa acceptant plusieurs prétendants.
Pour simplifier et respecter la tradition, nous utilisons le langage
imagé des mariages pour décrire l’algorithme utilisé mais ne
cherchez surtout pas ce que l’amour peut bien avoir à faire dans
cette question. « Appariement » serait un terme sans doute plus
adéquat mais « mariage » est plus parlant. L’algorithme de Gale
et Shapley procède par étapes. Chacune d’entre elles se scinde en
deux parties. Dans la première, les hommes font des propositions
de mariage comme ils inviteraient à danser dans un bal d’autre­
fois. Les femmes les rejettent ou les acceptent. Notez tout de suite
que le résultat final dépend fortement de cet ordre. Si les femmes
proposaient et les hommes consentaient, les mariages à venir en
seraient transformés pour les uns comme pour les autres. À la
première étape, chaque homme propose donc le mariage à la
femme qu’il préfère, sans tenir compte d’éventuels concurrents.
À ce moment, chaque femme accepte la proposition qu’elle pré­
fère parmi celles qu’elle a reçues. Elle se fiance alors à ce préten­
dant en rompant éventuellement ses fiançailles précédentes. Les
femmes ne recevant aucune proposition de mariage attendent.
Aux étapes suivantes, les hommes déjà fiancés ne font rien, les
autres font une nouvelle proposition aux femmes qui ne les ont
pas déjà refusés. Tant que les hommes ne sont pas tous fiancés,
on continue. Quels résultats espérer de cet algorithme ? En fait.
D ans la politique et les médias 69
on montre qu’il produit effectivement les mariages attendus et
ces unions sont stables en ce sens que, dans deux couples ainsi
produits, la femme du premier ne préfère pas celui du second et
vice versa. On démontre aussi que les hommes ne peuvent être
mieux lotis et les femmes, pas plus mal !
Qui sont les hommes et qui sont les femmes dans la procédure
d’affectation en prépas ? Si vous ne l’avez pas deviné, relisez ce qui
précède ! Ce n’est pas une question de grammaire qui voudrait que
prépa soit féminin et candidat, masculin. Les candidats ici sont
tous des candidates. Ce sont les lycées qui tiennent le rôle mascu­
lin et les candidats, le féminin. De plus, les lycées peuvent épouser
autant de femmes qu’ils le désirent. L’organisme central limite les
vœux des plus courtisés pour accorder un minimum d’épouses aux
plus rejetés.
Un présupposé de l’algorithme de Gale-Shapley est que chacun
donne ses vraies préférences. Une femme ou un homme ont-ils
intérêt à tromper sur leur vrai intérêt afin d’obtenir un meilleur
mariage ? On démontre que, dans ce cadre, le mensonge masculin
est impuissant mais ce n’est pas le cas du mensonge féminin. Plus
précisément, si un homme ment sur ses préférences, il n’obtiendra
pas une femme préférable à celle qu’il aurait obtenue en agissant
selon ses vraies préférences. En revanche, une femme peut obtenir
un meilleur partenaire par la manipulation. D’un côté, on trouve
ceux qui prétendent décider et, de l’autre, celles qui peuvent mani­
puler. Les candidats ont-ils de même intérêt à manipuler le système
d’affectation en prépas et comment ? Leur nombre rend une telle
tactique improbable. En revanche, elle est possible dans tout sys­
tème de ce type avec un nombre plus modeste de concurrents,
comme celui de la nomination des professeurs en universités. En
effet, celles-ci publient leurs préférences avant que les candidats
ne donnent les leurs. Des ententes entre certains candidats et
des manipulations sont ainsi possibles. Pour éviter cet aspect, il
suffirait d’inverser l’algorithme en commençant par les choix des
« femmes ».

70
0
LE DINER DE FAMILLE
Alpha invite le beau-frère de son père, le beau-père de son
frère, le frère de son beau-père et le père de son beau-frère.
Combien y a-t-il de convives au minimum sachant que, dans ce
pays, les mariages entre cousins sont autorisés ?
Réponses : a) 5 b) 3 c) 2
Les, réponses aux jeux sont données après leurs titres.

La valse des étiquettes, énoncé page 7 :


Réponse b, 45 €.
Le prix soldé à 40 % correspond au prix initial multiplié par
0,6. Pour retrouver ce prix, il convient donc de diviser le prix
soldé (54 €) par 0,6. On obtient 90 €. En le soldant à 50%, on
trouve 45 €.

Le taux de votre emprunt, énoncé page 11 :


Réponse c, 4,4 %.
Les intérêts après un an font 2 % de 20 000 € plus 5 % de 80 000,
soit 4 400 €, c’est-à-dire 4,4 % de 100 000.

La moyenne du cycliste, énoncé page 13 ;


Réponse a, 24 km/h.
Imaginons que la distance entre Alphaville et Bêtaville soit
égale à 60 km. L’aller à 20 km/h se fera donc en 3 heures, et le
retour en 2. Au total, le cycliste aura parcouru 120 km en 5 heures.
Sa vitesse moyenne aura donc été de 24 km/h.

Arriver à l’heure, énoncé page 17 :


Réponse a, 90 km/h.
En roulant à 80 km/h, le temps du trajet est égal à la distance
divisée par 80. En roulant à 120 km/h, il est égal à cette même dis­
tance divisée par 120. Le gain de temps est donc égal à la distance
multipliée par 1/80 moins 1/120. Un petit calcul montre que cette
fraction vaut 1/240. Le gain de temps étant d’une demi-heure, la
distance est donc égale à 120 km. Pour faire ce trajet en 80 minutes,
sa vitesse doit être de 90 km/h.

La durée du vol, énoncé page 23 :


Réponse b, 17 h.
En Tabsence de décalage horaire, le vol d’Alphaville à Bêtaville
dure 23 heures et le voyage inverse, 11 heures. Uun des temps est
augmenté du décalage horaire et Tautre, diminué du même déca­
lage. Le temps du trajet est donc la moyenne entre 11 et 23, soit
17 heures.

Les oiseaux, énoncé page 27 :


Réponse c, 7.
D'après la première phrase, le premier fil contient la moitié
des oiseaux plus 1 et le second, la moitié moins 1. La seconde
phrase permet de dire que la moitié plus 2 vaut deux fois la moitié
moins 2. La moitié est donc égale à 6. Ainsi, le premier fil contient
7 oiseaux et le second, 5.

Le tiercé, énoncé page 34 :


Réponse b, 8,33 %.
Quand vous jouez, vous avez 5 choix possibles pour le premier
cheval et, pour chacun de ces choix, 4 choix du second puis 3 du
dernier, soit 5 x 4 x 3 bulletins possibles. Parmi ceux-ci, 1 gagne
dans Tordre et 5 dans le désordre. Vous avez donc 1 chance sur 12
de gagner le tiercé dans le désordre, soit une probabilité de 8,33 %.

Le carré au poker, énoncé page 37 :


Réponse c, 0,1 %.
Comptons le nombre de mains de 5 cartes possibles en imagi­
nant la distribution. Pour la première carte, il y a 32 choix pos­
sibles, pour la seconde 31, etc. Pour le tout, cela donne le produit
32 X 31 X 30 X 29 X 28, soit 24 165 120 possibilités. Plusieurs de ces
mains sont identiques car les mêmes cartes ont été distribuées
dans un ordre différent. Nous les comptons de la même manière.
Pour la première, 5 choix possibles, pour la seconde, 4, etc. Donc,
un groupe de 5 cartes peut être ordonné de 5 x 4 x 3 x 2, soit
120 façons différentes. Le nombre de jeux de 5 cartes distincts est
le quotient de 24 165 120 par 120, soit 201 376.
74
Pour obtenir une main contenant un carré d'as, nous n'avons
le choix que d'une carte parmi 32 moins 4, c'est-à-dire 28. Il existe
donc 28 mains contenant un carré d'as. Il en est de même des
autres carrés. Il existe donc 8 fois 28, soit 224 mains contenant un
carré.
La probabilité que la main que l'on vous a distribuée contienne
un carré est donc égale à 224 divisé par 201 376, soit 1/899, c^est-à-
dire un peu plus de 0,1 %.

Trilemme à Alphaville, énoncé page 42 :


Réponse a, oui.
On peut imaginer la répartition des préférences suivantes :

A>B>C A>C>B B>A>C B>C>A C>A>B C> B>A


25 < 10^ 25 ‘ 30^

Elle aboutit à : 60 % préfèrent A à B, B à C et C à A. Bien sûr, ce


ne sont pas les mêmes 60 % à chaque fois !

Pile ou face, énoncé page 49 :


Réponse c, 37,5 %.
Si vous jouez à pile ou face quatre fois, 16 tirages sont pos­
sibles et également probables, de PPPP (pile quatre fois) à FFFF
(face quatre fois). Les tirages correspondants à deux piles sont au
nombre de six : PPFF, PFPF, FPPF, PFFP, FPFP et FFPP. La probabi­
lité cherchée est donc de 6 divisé par 16, soit 37,5 %.

Espérance de vie, énoncé page 52 :


Réponse b, 5.
Chaque année, 10 % de la population meurt. La moyenne d'âge
au décès est donc égale à la somme de 0,5,1,5,..., 9,5 divisé par 10,
ce qui donne 5.

Taux de remplissage, énoncé page 55 :


Réponse b, 90 %.
Bien entendu !

Question démographique, énoncé page 63 :


Réponse c, 0 %.
L a page jeu 75
Si Alphaville comprenait 600 habitants, dont 300 pauvres. Une
baisse de la population du sixième donne 500 habitants. Si les
pauvres sont maintenant 60 %, ils sont 300, comme précédemment.

Le code de Bêta, énoncé page 66 :


Réponse : cela dépend de vous mais ce message est facile à
décoder car il a été codé en décalant chaque lettre de trois rangs
dans l’alphabet. Ainsi A devient D, B devient E, etc. Ce code est
attribué à Jules César.

Le dîner de famille, énoncé page 71 :


Réponse c, 2.
Alpha a une sœur. La mère d’Alpha a deux frères, appelons les
oncle 1 et oncle 2. Oncle 1 a un fils, cousin. Oncle 2 a une fille,
cousine. La sœur d’Alpha a épousé le cousin et Alpha a épousé la
cousine. Alpha a invité oncle 1, beau-frère de son père, frère de son
beau-père, père de son beau-frère.
Table des m atières

Dans la vie quotidienne.................................................................. 5


Les so ld es..................................................................................... 5
Deux et deux font-ils toujours quatre ? ............................ 6
Les taux ne s ’additionnent p a s ............................................... 7
Quel est le taux d’un emprunt ? ............................................... 8
Tenir sa moyenne....................................................................... 11
Distance de freinage................................................................. 12
Loi en carré................................................................................... 13
Que mesurent les radars ? ....................................................... 17
Le temps d’un trajet................................................................... 21
L’accordéon et les embouteillages........................................ 23
La prévision des embouteillages......................................... 24
Les vols d’étourneaux................................................................ 25
Les phénomènes de foule........................................................ 28
L’intelligence des fourmis........................................................ 28
Assurer son automobile........................................................... 29
Le Rápido.............................................................
Les gains de la Française des J e u x ................................... 34
Probabilités et loi des grands nom bres............................ 34
Quelle est la taille de la Française moyenne ? ................ 35
Le régime himalayen............................................................. 36
La loi des petits nom bres........................................................ 36
Le poker........................................................................................ 37
L’art de tricher............................................................................. 37
Dans la politique et les médias.............................................. 39
Le paradoxe de la démocratie............................................. 39
Le comptage des m anifestants.......................................... 42
L’art des sondages................................................................. 43
Le sondage probabiliste....................................................... 44
La méthode des quotas...................................................... 45
L’art de tricher (suite)........................................................... 46
Nombres pseudo-aléatoires................................................ 47
L’espérance de vie ................................................................ 49
Tables actuelles de m ortalité............................................. 51
Les femmes meurent deux fois moins que les hommes 52
Le surbooking.......................................................................... 53
Le jeu de la v ie ....................................................................... 55
Un automate pour modéliser une épidémie.................... 56
L’intérêt des vaccinations.................................................... 58
Les prévisions de la vache folle.......................................... 59
L’art de présenter les statistiques.................................... 60
L’évolution du clim at............................................................. 63
Dénombrer l’invisible............................................................. 64
Espérance de vie d’un piéton sur l’autoroute................. 65
Cryptographie........................................................................ 65
Le téléphone rouge................................................................ 67
L’algorithme des mariages stables.................................... 69

La page je u .................................................................................. 73
La valse des étiquettes........................................................ 73
Le taux de votre emprunt..................................................... 73
La moyenne du cycliste........................................................ 73
Arriver à l’heure..................................................................... 73
La durée du vo l....................................................................... 74
Les oiseaux.............................................................................. 74
Le tiercé.................................................................................... 74
Le carré au poker.................................................................. 74
Trilemme à Alphaville........................................................... 75
Pile ou face.............................................................................. 75
Espérance de vie.................................................................... 75
Taux de rem plissage............................................................. 75
Question démographique...................................................... 75
Le code de B ê ta ...................................................................... 76
Le dîner de famille................................................................. 76
Achevé d’imprimer en Italie par"3^ Grafica Veneta
en mars 2013
Dépôt légal mars 2013
EAN 9782290054062
OTP L21ELLN000449N001

Ce texte est composé en Lemonde journal et en Akkurat

Conception des principes de mise en page :


mécano, Laurent Batard

Composition ; NORD COMPO

ÉDITIONS J ’AI LU
87, quai Panhard-et-Levassor, 75013 Paris
Diffusion France et étranger : Flammarion

5Ôbrio
1064
Questions
de maths utiles
Au Loio^ la fRjunçuiêe Des Jeux
egi ôuR.e De gagr\t(L. ”

Fait-on réellement une affaire lorsqu’on achète un vêtement


soldé ? Comment se forme un embouteillage ? Que mesurent
les radars? Pour répondre à toutes ces questions,
les mathématiques nous sont d’une aide précieuse !

Loin des formules interminables et des théorèmes énigmatiques,


cet ouvrage astucieux s’adresse à tous ceux qui, curieux de nature,
désirent apprendre tout en s’amusant : des explications simples
et des jeux permettent au lecteur de mettre directement
en pratique leurs connaissances.

HERVELEHNING
Mathématicien de formation, Hervé Lehning est
aujourd’hui rédacteur en chef chez Pôle Éditions.
Spécialiste du jeu et de la culture mathématiques,
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CD IjP il a beaucoup œuvré pour la vulgarisation des sciences.
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