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D éterm ination d e la limite d e fatigu e

suivant la m éth od e L. Locati


utilisant une s e u le p iè c e
par C. DAUBERTÈS, M. RENOUT et R. CAZAUD (*)

IN T R O D U C T IO N P R IN C IP E D E L A M É T H O D E L O C A T I
E T E X E M P L E D ’A P P L I C A T I O N
Il est souvent difficile, parce que trop long et trop
coûteux, de pouvoir effectuer, sur des pièces ou des M . L ocati (1) a préconisé une m éthode d ’essai basée
ensembles mécaniques, des essais de fatigue suivant la sur l’hypothèse de M iner et perm ettant d ’évaluer la limite
méthode traditionnelle qui consiste à conduire les essais de fatigue en utilisant une seule pièce, soumise à des
à des niveaux de charges décroissantes, chaque essai s’ef­ paliers de charge de même durée et échelonnés en crois­
fectuant à une charge constante jusqu’à rupture ou non s a n t ; chaque palier de charge correspondant à un nombre
rupture pendant le nombre de cycles fixé. de cycles constant (égal à 10 0 0 0 0 p a r exemple) ; l’éche­
L e nombre de pièces, pour une même série d ’essais, est lonnement des charges étant lui-même constant (égal à
en général choisi entre 6 et 12, de façon à obtenir la 4 k g /m m 2, p a r exemple) ; le palier initial se situant sen­
non rupture pour deux ou trois pièces. siblement au-dessous de la limite de fatigue supposée.
Les résultats des essais traduits sur le diagram m e de
O n représente sur le diagram m e de W ö h le r les b ran­
W ö h ler montrent habituellem ent une certaine dispersion,
ches horizontales de trois courbes d ’endurance échelon­
plus grande sur des pièces ou sur ensembles que sur
nées de 4 en 4 k g /m m 2 ; le point de brisure des courbes
des éprouvettes, en raison des facteurs de fabrication plus
étant situé entre 1 et 2 millions de cycles, ainsi q u ’on
nombreux et moins faciles à contrôler. L a dispersion peut
peut l’adm ettre d ’après l’expérience, pour un grand nom­
être considérée « verticalement » sur la contrainte ou
bre d ’aciers.
« horizontalem ent » sur le nombre de cycles.
Cette observation a conduit à envisager des essais sta­ O n représente, en outre, les branches inclinées des trois
tistiques pour qualifier l’endurance en définissant la valeur courbes de W ö h ler avec une pente d ’au tant plus grande
moyenne et l’écart type. que les limites de fatigue sont plus élevées.
Les essais statistiques de fatigue nécessitent, par défi­ Ces conditions étant fixées, on considère les dommages
nition, un grand nombre d ’échantillons et, de ce fait, cumulés n / N pour les différents niveaux de charge et par
s’avèrent difficiles à appliquer pour le contrôle d ’une rapport à chacune des trois courbes hypothétiques, n étant
fabrication ou lorsqu’on ne dispose que de très peu de le nombre de cycles appliqué à chaque palier et N le
pièces ou d ’ensembles, p ar exemple pour l’essai de pro­ nombre de cycles correspondant à la rupture sous le
totypes. niveau de charge considéré.
(*) Com m unication présentée aux Journées m étallurgiques d ’A u ­
tomne d e la Société française de M étallurgie, P aris, le 11 octo­ (1) P . L o c a t i . — L e prove di fatica com e ausilio alla p ro ­
bre 1957. gettazione ed alla produzione. M etallurgia I taliana, n° 9 (1935).
T ableau I

D O M M A G E S

N om bre
Sollicitations C ourbe F = 12 C ourbe F = 16 C ourbe F = 20
d ’alternances
(k g /m m 2)
(n)
N n /N N n /N N n /N

8 100 000 0
12 100 000 10 6 0,10 0
16 100 000 4 ,5 .10 5 0,25 106 0,10 0
20 100000 2 ,5 .1 0 5 0,50 5.10 5 0,20 106 0,10
24 100 000 1,2.10 5 0,85 3.105 0,33 6.10 5 0,16
28 40 000 R 0 ,7 .10 5 0,57 1,8.10 5 0,22 3,2.10 5 0,12

D om m ages cumulés 2,27 0,85 0,38

D an s l’exemple donné p ar L . L ocati, les limites


de fatigue étaient successivement 12, 16 et 2 0 k g /m m 2
(fig. 1 ) . L e tab leau I donne les dommages cumulés cal­
culés pour ces différents niveaux de charge p ar rapport
aux trois courbes prédéterminées.

Fig. 2.
Fig. 1.

Fig. 3. — Profil de la trempe H.F. de l'arbre de roue essayé.


tive sur les machines représentées
sur la figure 4 et tournant à
1 2 0 0 tr /m n ; l’arbre est encastré
à son extrémité moyeu, la charge
étant appliquée à l’autre extrémité
p a r l ’interm édiaire d ’un roulement.
D an s une première série d ’essais,
on s’est proposé de déterm iner la
limite de fatigue et le dom aine de
dispersion des résultats avec vingt
pièces prélevées dans la fabrication
courante et réceptionnées norm a­
lement.
Ces résultats traduits sur la
figure 5 perm ettent de situer la
limite de fatigue à 4 0 ± 3 k g /
mm2, et de tracer trois courbes de
W ö h ler, les deux courbes extrêmes
représentent les limites du dom ai­
ne, et la courbe centrale la moyen­
ne des deux autres courbes.
D an s une deuxième série, on a
appliqué la m éthode L ocati et
étudié, sur six arbres, l’influence
des facteurs suivants :
— durée des paliers de charge :
Fig. 4. — Machine d'essai des arbres de roues en flexion rotative. Vitesse 1 2 0 0 tr/mn. 50 000 — 100 0 0 0 —
2 0 0 0 0 0 cy cles ;
Si, à présent, on porte (fig. 2) la somme des dom­ — échelonnement A σ des contraintes : 2 ,5 et 5 k g /m m 2
mages cumulés correspondant à chacune des courbes de le niveau de la contrainte σ0 étant, dans tous les
W ö h ler dont les limites sont respectivement 12, 16 et cas, de 3 2 ,5 k g /m m 2.
2 0 k g /m m 2, en fonction de ces mêmes limites, la con­
trainte pour laquelle la somme des dommages est égale Les résultats obtenus sont traduits p ar les figures 6 à
à 1 représente, d ’après l’auteur, la limite de fatigue de 11 et les tableaux II à V I I qui représentent l’échelon­
la pièce essayée. D ans l’exemple donné,
cette limite est de 15 k g /m m 2 (fig. 2 ) .
D es essais effectués p ar l’auteur ont
montré une concordance satisfaisante entre
la limite de fatigue trouvée par cette méthode
et celle déduite de la courbe de W öhler.

A PPLIC ATIO N DE LA M ÉTH ODE LO­


C ATI A L’ESSA I DE FA T IG U E D ’A R ­
BRES DE ROUES D ’A UTO M O BILES.

N ous avons cherché à vérifier la validité


de cette m éthode en l’appliquant au contrôle
rapide d ’une fabrication de série.
Les arbres étudiés étaient des arbres en
acier X C 3 8 forgés, grenaillés et traités par
trem pe superficielle p ar induction pour une
dureté correspondant à R = 140 à
160 k g /m m 2 (fig. 3) ; ce traitem ent créant
des contraintes de compression favorables a
pour effet d ’augm enter fortement la résis­
tance statique et l’endurance en flexion et
en torsion. Fig. 5. — Courbes de W öhler sur arbres de roues traités H .F . Acier X C 38. Dis­
L es arbres étaient essayés en flexion rota­ persion des résultats d'après les prélèvements sur 1 mois de fabrication.
T ableau II

D O M M A G E S
Nombre
Sollicitations Courbe F = 37 Courbe F = 40 Courbe F = 43
d’alternances
(kg/mm2)
(n)
N n /N N n /N N n /N

32,5 50 000 8 0
35 — 8 0
37,5 — 1,6 .106 0,0313 8 0
40 — 0,7 .106 0,0714 1 ,8 .1 0 6 0,0278 8 0
42,5 — 0,46.106 0,1085 0,90.106 0,0556 8 0
45 — 0 ,3 .1 0 6 0,1670 0,62.106 0,0807 1,3 .106 0,0385
47,5 — 0,195.106 0,2560 0,43.106 0,1165 0,95.106 0,0526
50 — 0,135.106 0,3700 0,28.106 0,1785 0,67.106 0,0746
52,5 — 0,08 .106 0,6250 0,19.106 0,2630 0,49.106 0,1020
55 34 000 0,053.106 0,6400 0,14.106 0,2425 0,36.106 0,0944

Dommages cumulés 2,2692 0,9646 0,3621

T ableau III

D O M M A G E S
Nombre
Sollicitations d’alternances Courbe F = 37 Courbe F = 40 Courbe F = 43
(kg/mm2)
(n)
N n /N N n /N N n /N

32,5 100 000 8 0


35 — 8 0 oc 0
37,5 — 1,6 .106 0,0625 8 0
40 0,7 .10« 0,1430 1 ,8 .1 0 6 0,0555 8 0
42,5 — 0,46 .10« 0,2175 0 ,9 .1 0 6 0,1110 X 0
45 — 0 ,3 .1 0 6 0,3333 0,62.106 0,1610 1,3 .106 0,0770
47,5 — 0,195.106 0,5130 0,43.106 0,2325 0,95.106 0,1050
50 — 0,135.106 0,7400 0,28.106 0,3570 0,67.106 0,1495
52,5 33 000 0 ,0 8 .1 0 6 0,4125 0,19.106 0,1740 0,49.106 0,0673

Dommages cumulés 2,4218 1,0910 0,3988

nem ent des contraintes, les valeurs des dom m ages cumulés O n observe que les six résultats obtenus s’inscrivent cor­
rectement dans la bande de dispersion des résultats donnés
et les courbes correspondantes Σ , en
n/N fonction de la
p ar les prélèvements du contrôle, sur un mois de fabri­
contrainte f. cation et qui se situent entre 3 7 et 4 3 k g /m m 2, soit un
O n trouve ainsi les limites de fatigue données au ta ­ écart de ± 3 k g /m m 2, soit ± 7,5 % .
b leau V I I I .
D an s les conditions des expériences, la durée des
L es limites de fatigue trouvées se situant entre 3 9 ,7
et 4 1 ,5 k g / m m 2, l’écart étant de ± 0 , 9 k g / m m 2, soit paliers et leur échelonnement n' ont pas d influence sur la
environ ± 2 ,3 % . limite de fatigue trouvée.
T ableau IV

D O M M A G E S

Nombre
Sollicitations d’alternances Courbe F = 37 Courbe F = 40 Courbe F = 43.
(kg/mm2) (n)
N n /N N n /N N n /N

32,5 200 000 8 0


35 — 8 0
37,5 — 1,6 .106 0,1250 8 0
40 — 0,7 .106 0,2855 1,8 .106 0,110 8 0
42,5 — 0,46 .106 0,4345 0,9 .106 0,2220 8 0
45 0 ,3 0 .1 0 6 0,6666 0,62.106 0,3225 1,3 .106 0,1540
47,5 — 0,195.106 1,0250 0,43.106 0,4650 0,95.106 0,2100
50 140 000 0,135.106 1,0350 0,28.106 0,5000 0,67.106 0,2090

Dommages cumulés 3,5716 1,6205 0,5730

T ableau V

D O M M A G E S
Nombre
Sollicitations d’alternances Courbe F = 37 Courbe F = 40 Courbe F = 43
(kg/mm2)
(n)
N n/N N n /N N n/N

32,5 50 000
37,5 — 1,6 .106 0,034 8 0
42,5 — 0,45 .106 0,110 0,90.106 0,055 8 0
47,5 — 0,195.106 0,255 0,43.106 0,115 0,92.106 0,054
52,5 — 0,080.106 0,625 0,19.106 0,260 0,49.106 0,102
57,5 — 0,035.106 1,430 0,09.106 0,550 0,26.106 0,192
62,5 1 500 0,005.106 0,300 0,04.106 0,037 0,14.106 0,011

Dommages cumulés 2,754 1,017 0,359

T ableau VI

D O M M A G E S
Nombre
Sollicitations d'alternances Courbe F = 37 Courbe F = 40 Courbe F = 43
(kg/mm2)
(n)
N n /N N n /N N n /N

32,5 100 000 8 0


37,5 — 1,6 .10” 0,0625 8 0
42,5 — 0,45 .10” 0,222 0,90.106 0,111 8 0
47,5 0,195.106 0,513 0,43.106 0,233 0,92.106 0,109
52,5 — 0,080.106 1,250 0,19.106 0,526 0,49.106 0,204
57,5 6 000 0,035.106 0,171 0,09.106 0,066 0,26.106 0,023

Dommages cumulés 2,181 0,936 0,336


Fig. 6. — η = 0,5.105
Δα = 2,5 kg/mm2.

Fig. 7. — η = 1.105 ;
Δα = 2,5 kg/mm2.

Fig. 8. — n = 2 .105;
Δα = 2,5 kg/mm2.

Fig. 9. — n = 0,5.105
Δα = 5 kg/mm2.
Fig. 10. — n = 105.
Δα = 5 kg/mm2.

Fig. 11. — η = 2 .105 ;


Δα = 5 kg/mm2.

Fig. 12. — Influence de la


pente des courbes suppo­
sées sur la limite de fati­
gue trouvées avec n =
0,5.105, Δα = 5 kg/mm2
et n = 2.105, Δα =
2,5 kg/mm2.

T ableau VII

D O M M A G E S

Nombre
Sollicitations d'alternances Courbe F = 37 Courbe F = 40 Courbe F = 43
(kg/mm2) (n)
N n /N N n /N N n /N

32,5 200 000 8 0


37,5 — 1,6 .106 0,125 8 0
42,5 — 0,45 .106 0,445 0,90.10« 0,222 8 0
47,5 — 0,195.106 1,025 0,43.106 0,465 0,92.106 0,217
52,5 137 000 0,080.106 1,710 0,19.106 0,720 0,49.106 0,280

Dommages cumulés 3,305 1,407 0,497


T ableau V III

L i m i te C o n d it io n s d 'e s s a is
d e f a t ig u e Ν°
tr o u v é e fig u re
Δσ
k g /m m 2 n c y c le s
k g /m m 2

3 9 ,7 0 ,5 .1 0 5 2 ,5 6
4 0 ,2 10 5 2 ,5 7
4 1 ,5 2 .1 0 5 2 ,5 8
4 0 ,1 0 ,5 1 0 5 5 9
3 9 ,7 105 5 10
41 2 .1 0 5 5 11

U n autre facteur qui a été examiné est la forme des


courbes hypothétiques de départ (fig . 5 ) .
D an s ce but, on a modifié la partie inclinée des trois
courbes ayant pour asym ptote f = 3 7 , 4 0 et 4 3 k g /m m 2
et on a calculé les dommages cumulés pour des conditions
d ’essais différentes :

n= 0 ,5 10 5 cycles; A e = 5 k g /m m 2
IX

n= 2 10 5 cycles; A e = 2 ,5 k g /m m 2
T ableau

qui ont été choisies à dessein parce que l ’une n = 0 ,5 10 5


cycles et A a = 5 k g /m m 2 intéresse le haut des courbes
de fatigue de sorte que la modification intervient à une
grande variation sur les nombres N de cycles; l’autre
condition intéresse la région du diagram m e avoisinant le
genou des courbes et de ce fait la modification agit peu
sur les nombre N de cycles (fig. 12 et tableau I X ) .
L e résultat de la modification de la pente des courbes
sur la limite de fatigue trouvée est représenté p ar le
tableau X .

D an s le cas le plus défavorable, la limite de fatigue


pour la courbe modifiée diffère seulement de 1,6 k g /m m 2.

T ableau X

Lim ite de fatigue


kg/m m 2

C onditions d'essais
avant après
m odifi­ modifi­
cation cation

n = 0,5 10 5 cy cles ; Δ σ =
5 kg/m m 2. 40,1 38,5
n = 2 105 cy cles ; Δ α —
2,5 kg /m m 2. 41,5 41
C O N C L U S IO N S

L ’auteur de la méthode, L. Locati, en avait souligné sont soumises pendant les essais p ar paliers de charges
l’intérêt pour le contrôle et pour l’essai de pièces ou échelonnés en croissant.
d ’ensembles de prototypes pour lesquels la précision obte­ N ous nous proposons de poursuivre nos essais sur des
nue devait être, dans tous les cas, supérieure à celle pièces diverses trempées superficiellement ou dans la
donnée p ar le calcul basé sur la limite de fatigue du masse, en recherchant si possible une signification statis­
m atériau, et les coefficients d ’influence des différents fac­ tique.
teurs : forme, dimension, état de surface, etc. C ette étude a été poursuivie au C entre T echnique de
Les résultats de nos essais montrent une concordance la Société Simca.
surprenante avec l’essai classique de longue durée. Il faut N ous remercions la D irection de la Société Sim ca et,
noter, toutefois, que ces essais se rapportent à des pièces en particulier, M . M ontabone, D irecteur T echnique et,
traitées p ar trempe superficielle com portant p ar consé­ M . C erruti, D irecteur des E ssais-E tudes, d ’avoir bien
quent des contraintes de compression en surface qui peu­ voulu nous perm ettre de présenter cette communication et
vent m asquer les effets d ’understressing auxquels les pièces d ’en publier les résultats.

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