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Classes de Terminales

Littéraires
Enseignement Secondaire Général

PHILOSOPHIE
SINE QUA NON
Tome 1

OLOMO PETIT STANISLAS


Enseignant, Etudiant à l’Unité de Recherche et de Formation Doctorale de
l’Université de Yaoundé I
EUREKA
SEPTEMBRE 2016

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 1


A FRANCINE
« Ce n’est qu’à la tombée du jour que l’oiseau de Minerve prend
son envol. » Georg Wilhelm Friedrich Hegel

CONTACTS:
Tel: (237) 666 425 077 (SMS uniquement)
E-Mail: olomostanislas@gmail.com
Avertissement : Toute reproduction totale ou même partielle est
interdite

© Eureka Septembre 2016


DOUG éd. 2016

2
Remerciements

Nous adressons nos remerciements à l’endroit :

Du Pr. Lucien AYISSI, pours ses textes et encouragements

Du Dr. Alice Salomé NGAH ATEBA, pour ses textes

De l’I.P.N. Paul Bienvenu ONANA pour ses conseils.

De l’I.P. Charlotte AMBOMO pour ses conseils

De Mme Geneviève KAMDOM, pour ses conseils

De mes collègues, enseignants pour les échanges instructifs


que nous avons eus.

« La vie est trop longue pour être ignorée, trop courte pour
être gaspillée. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 3


PREAMBULE
Cette édition de PHILOSOPHE SINE QUAN NON a pour objectif d’apporter
une aide sur le double plan didactique et méthodologique à l’enseignement de la
philosophie dans les classes terminales. Elle apporte une réponse pratique et concrète
aux nombreuses difficultés que rencontrent les élèves. La philosophie est une
discipline éminemment pratique, on ne peut y réussir qu’au terme d’une pratique
assidue des exercices qui lui sont propres. Nous nous sommes intéressés plus
spécifiquement dans ce volume à la dissertation au commentaire de texte. Dans cette
perspective, nous proposons d’une part :

 Une méthodologie de la dissertation et du commentaire qui répondent aux


canons de l’enseignement de la philosophie.
 Un ensemble d’exercices pratiques qui stimule les candidats à développer
leurs aptitudes aux questions philosophiques.
 Une explication concise des différentes œuvres aux programmes des classes de
terminales littéraires de l’enseignement secondaire général.
 Un recueil de textes et de citations idoines à améliorer les compétences
des élèves, à les préparer à affronter avec succès l’épreuve de philosophie au
Baccalauréat.
La majeure partie des manuels de philosophie présente davantage des sujets
corrigés que les élèves s’appliquent simplement à répéter en développant comme seule
compétence leur capacité mnémonique. Certes, ces manuels contiennent presque tous
de bonnes explications mais ils ne permettent pas aux utilisateurs (élèves) de se faire
leurs propres idées sur les sujets proposés. Notre expérience d’enseignement nous
a confirmé que ces manuels pouvaient être, au mieux, de bons outils de travail à la
maison mais qu’ils ne remplissaient aucunement la fonction d’un véritable manuel
scolaire, à savoir la possibilité d’être un recours pour le lycéen ayant mal compris un
cours ou, pour un enseignant de travailler avec ses élèves.
L’originalité de cette édition se trouve dans son approche qui permet à
ses différents utilisateurs de développer leurs compétences propres. C’est en quelque
sorte un galop d’essai vis-à-vis de la nouvelle approche par compétence (APC) en
vigueur dans l’enseignement de la philosophie. Les différents textes sont précédés d’un
thème et d’une brève explication qui ne sont en fait que des balises, chacun ayant le
devoir de « se mettre en route » comme le dirait Karl Jaspers.

L’auteur
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PREMIERE
PARTIE
LA DISSERTATION

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A- METHODOLOGIE DE LA DISSERTATION

I. DEFINITION DE LA DISSERTATION
Disserter, c’est discuter, donc formuler des thèses, des
jugements, qu’on explique et argumente pour les justifier auprès de notre
lecteur et formuler des objections qu’on explique et argumente encore. La
discussion se poursuit jusqu’à épuisement des objections. Elle est une sorte
dialectique, une démarche maïeutique.
En cela, la dissertation se distingue de la simple conversation, succession
de propos peu rigoureux qui s’enchaînent souvent par associations d’idées sans
véritable ordre rationnel. La dissertation ne fait pas prévaloir l’arbitraire d’un
point de vue particulier mais exige notre habileté singulière pour formuler
les raisons admissibles par tout homme. La dissertation n’est pas non plus un
exposé : il ne s’agit pas de réciter un cours.
Elle n’est pas un essai : il ne s’agit pas de soutenir un point de vue unilatéral
pour soutenir une unique thèse. Il s’agit au contraire de confronter des thèses
adverses. Elle ne se contente pas enfin d’être un débat, c’est-à-dire l’opposition
stérile de thèses adverses.
Il s’agit de résoudre un problème à partir d’une question. Il faut donc
problématiser cette question, c’est-à-dire transformer une simple question
en problème. Le plus facile, dans un premier temps, consiste à construire
un paradoxe, c’est-à-dire l’opposition de deux idées contradictoires
également admissibles à propos de la question.

II. LES ETAPES D’UNE DISSERTATION

II.1. COMPRENDRE LE SUJET

A) LE SUJET LUI-MÊME
Au cours de l’examen, il s’agit de bien choisir son sujet.
Il faut se méfier des sujets apparemment faciles, qui paraissent renvoyer à
du « bien connu ». Il faut pour chaque sujet voir ce qui ne va pas de soi, ce qui
fait que la réponse n’est pas si évidente et nécessitera une exploration en
profondeur, bref, il faut savoir déloger la difficulté problématique relative au sujet
tel qu’il vous est proposé.
D’autre part, il est peut être intéressant de choisir un sujet qui vous
semble difficile car, il peut stimuler votre réflexion, ce qui vous conduit souvent

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à être plus rigoureux et fidèle à la question (et ne pas vous éloigner du sujet, soit
en récitant, soit en traitant un sujet proche, qui vous intéresserait, mais qui n’est
pas exactement celui qui vous est donné).
La précision dans la compréhension de la question est primordiale, et vous
devez tenir compte du fait que vous comprenez bien le sujet, qu’il vous intéresse
ou au moins vous interpelle, que vous avez travaillé sur les notions et les thèmes
concernés.
Une fois le sujet choisi, surtout pas de retour en arrière (« et si j’avais pris
l’autre sujet »… « Allez, je ne vais pas y arriver, je tente de faire l’explication de
texte ») : il faut s’y engager pleinement, et de manière patiente.
En effet, l’analyse du sujet est primordiale. Il faut s’exercer en prenant
des sujets très divers et se familiariser avec les différents types de formulation.
Rien ne vaut l’entraînement !
Un sujet de dissertation est / ou contient toujours une question dont la forme
et le contenu doivent être bien mis en évidence.

B) LES DIFFÉRENTES FORMES DE SUJETS


Nous avons deux principaux types de sujets à l’examen : les Sujets
questions et les sujets citations. Ces deux types de sujets peuvent avoir des formes
variables. Nous avons ainsi :
* LES SUJETS QUESTIONS
1) Recherche d’une définition
a) Forme typique : « qu’est-ce que X ? »
Exemple : Qu’est-ce que… la justice ? Qu’est-ce que philosopher ?
C’est la question philosophique par excellence. Des étapes sont
nécessaires, comme autant d’approches successives, par approfondissement
progressif pour arriver à la définition recherchée. Ces approches sont les
parties de la dissertation, ses moments.
b) Autres formes de recherche de définition :
Elles sont fréquentes, mais ramènent à la recherche d’une définition.
C’est pourquoi il faut vous exercer à chercher le type de question. Cependant,
vous devez tenir compte de la forme, car elle vous aide à mieux vous engager dans
la question.

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Exemple : À quoi reconnaît-on un acte juste ? Ceci revient à : Qu’est-ce qu’un
acte juste ? Dans les deux cas, la définition de l’acte juste est en question, mais
différemment.
2) Rapport entre des idées, des attitudes, des points de vue :
Ce type de sujet est très fréquemment rencontré. Il est important que vous
le maîtrisiez. Ici aussi, il peut prendre des aspects divers. Le rapport peut être
implicite.
Forme typique : Quel est le rapport entre A et B ?
Il faut comprendre le « et ». L’intérêt du sujet tient du caractère problématique du
rapport. Il ne s’agit donc pas de traiter l’un puis l’autre de ces termes.
Exemples : La religion s’oppose-t-elle à la philosophie ? La philosophie est-
elle une évasion du monde ? La liberté est-elle synonyme d’absence de lois ?
Le rapport peut être d’exclusion (A exclu B et/ou B exclut A), d’inclusion
(A inclut B ou vice-versa), de contradiction (A est le contraire de B et vice-versa),
d’interdépendance (A est dépendant de B, mais B est aussi dépendant de A, par
exemple), d’indépendance, etc. Il faut envisager toutes les possibilités.
3) Autres formes interrogatives
a) « Peut-on… » ?, « Faut-il… » ?, « Doit-on… » ? :
Vous devez toujours chercher à tirer profit de la formulation, car elle peut
conditionner la façon de trouver la difficulté contenue dans le sujet.
Le meilleur moyen, pour ne pas oublier un aspect de la question, est
d’envisager tous les sens et d’éliminer ceux qui n’ont pas de rapport avec le
sujet. En effet, en explorant systématiquement les différents sens, vous pouvez
découvrir une facette de la question qui vous avait échappée.
Exemples : Peut-on dire que la morale c’est l’action qui réussit ? Ou Peut-on
accéder au pouvoir par la violence ? Faut-il vivre sans passion ?
 verbe « pouvoir » : S’agit-il d’une possibilité logique, d’une puissance
physique, d’une capacité légale, morale ?
 verbes « falloir », « devoir » : Est-ce une contrainte, une obligation ?
De quel ordre est cet impératif ? Politique ? Moral ? Théorique ? Logique
? Etc.

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Quand il s’agit de pouvoir, falloir ou devoir, il faut toujours se demander :
au nom de quoi, de qui, de quelle valeur, à quel titre (autorité), en fonction de quel
critère ou principe, sur quel fondement on « peut », « il faut » ou « on doit » ?
En quoi est-il légitime de pouvoir ou devoir… ? Il faut enquêter dans ce
sens, examiner le sujet, chercher jusqu’à ce que vous trouviez des éléments qui
vous permettent de dire : voilà, c’est pour ceci et/ou cela que l’« on peut »…, qu’«
il faut »…, que l’« on doit »… faire / penser / croire / … ceci et/ou cela.
b) « Pourquoi… » ? :
Deux directions sont à envisager dans la réflexion sur la cause : l’origine et
la fin (c’est-à-dire le début et le but). Exemple : « Pourquoi philosopher ? » Vous
avez à comprendre les causes et raisons qui poussent à philosopher et le but que
l’on veut atteindre en philosophant.
c) « Suffit-il de… (Ou suffit-il que…) pour que… » ? ; Ou « Est-il
nécessaire de… (Est-il nécessaire que…) pour que… » ? :
Cela revient à la recherche d’une évaluation : comment et jusqu’où une
chose en permet une autre. Ayez à l’esprit les expressions : « nécessaire et
suffisant », ou « nécessaire mais pas suffisant ».
Exemple : Pour philosopher, suffit-il de connaître les philosophes ? (Exemple de
réponse : c’est nécessaire, mais pas suffisant).
d) En quel sens… » ? :
Il vous faut évaluer le sens de ce qui est proposé, ce qui peut mener à des
voies divergentes, opposées, voire contradictoires, ou des étapes successives
d’approfondissement progressif, une étape en présupposant la suivante, etc.
jusqu’à l’aboutissement de l’enquête sur le sens.
Exemple: En quel sens la connaissance scientifique donne-t-elle accès au réel ?

*LES SUJETS CITATION


On vous donne une citation qui appelle réflexion, discussion,
positionnement, accord ou non, etc. Une analyse très précise de la citation
est nécessaire, bien entendu, et, une fois analysée, vous avez à exprimer ce en
quoi elle vous semble pertinente, mais aussi limitée, pour, petit à petit, exprimer
votre pensée sur le sujet de la citation. Exemple : Que vous suggèrent ces

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propos d’Antoine Guillaume Amo : « Le but de la philosophie se trouve dans la
perfection morale » ?
Le traitement de tels sujets est similaire à celui d’un commentaire. Dans ce
sens, on devra :
 Expliquer la thèse de l’auteur dans son contexte (Thèse 1)
 Discuter cette thèse, c’est-à-dire apporter des réserves ou faire sortir les
limites (Thèse 2)
 Revaloriser cette thèse en montrant son mérite au-delà de la critique qui lui
a été faite (Thèse 3)

C) LE CONTENU DU SUJET
Le contenu du sujet est la plupart du temps en rapport avec une ou
plusieurs notions générales du programme, même si une ou deux d’entre
elles sont plus particulièrement concernées. Le grand piège est d’identifier
une notion du programme et de réciter tout ce que vous savez sur ce
thème, sans prendre en compte la spécificité du sujet.
Exemple : Qu’est-ce que comprendre autrui ? N’est pas « Qu’est-ce qu’autrui
? », de la même manière que « Qu’est-ce qu’acheter une voiture ? » n’est pas
identique à « Qu’est-ce qu’une voiture ? »…
En effet, même si définir « autrui » sera nécessaire, c’est l’ensemble
de l’expression qui doit être définie, à savoir « comprendre autrui ». La ou
les notions sont utilisées pour être éclairées sous un certain angle, donc chaque
mot doit compter pour comprendre la manière dont vous devez envisager la
notion.

II.2. POSITION D’UN PROBLÈME


Nous l’avons dit, le sujet contient une question. Devant cette question (et
pas une autre…), vous devez vous demander : où est le problème ?
En grec ancien, problèma veut dire : « obstacle » et « sujet de controverse
». Une controverse est une discussion argumentée, un débat, voire une polémique.

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Donc, il y a débat parce que la question contient un obstacle qui empêche
une réponse simple et un accord indiscutable. Le débat vise à examiner,
clarifier, cheminer, et ce de manière argumentée et progressive.
L’analyse de la forme du sujet vous permet en général de mieux déterminer
ce problème, c’est-à-dire ce qui fait que la réponse à la question que contient le
sujet n’est pas évidente, et mérite d’être discutée.
Discuter de façon organisée et progressive de ce problème, voilà le but
de l’exercice de la dissertation.
Dans ce sens il faut :
1) Analyser rigoureusement le sujet :
Il s’agit en premier lieu d’en identifier la forme, et d’examiner soigneusement le
contenu :
 Il faut déterminer de quel type est l’énoncé : cela vous met sur la voie du type
de réponse que vous devez élaborer.
 Concernant le contenu, tous les termes doivent donner lieu à une recherche
systématique (au brouillon, mettez par écrit les termes en lien avec les termes
du sujet, qu’ils soient proches, opposés, en relation d’implication réciproque,
etc., pour tenter de commencer une ébauche de définition de chaque mot du
sujet. Ainsi un sujet portant sur « la » science devra s’interroger sur ce
qui fait l’unité des sciences (puisque nous avons différentes sciences) :
même – et parfois surtout ! – les articles (au singulier, au pluriel) doivent
être interrogés pour être sûr de ne rater aucune dimension du sujet.
 Chaque terme peut apporter une nuance : par exemple : Pour philosopher,
faut-il douter ? N’est pas du tout équivalent, et n’admettra donc pas le même
type de réponse, que : Pour philosopher, faut-il douter de tout ?, puisque, dans
le deuxième cas, on vous demande si un doute total et permanent est nécessaire
à l’activité philosophique. Le premier sujet ne précise ni l’extension du
doute, ni sa permanence.
 Partez du sens commun des mots pour voir quel sens est pertinent pour
donner le plus de significations possibles aux différents termes de votre
sujet.
 N’hésitez pas à faire référence à l’étymologie d’un ou plusieurs mots du sujet
pour en éclairer le sens, si vous la connaissez.
 Mettez en rapport les termes du sujet et les notions et thèmes concernés. Cela
permet de bien mettre en lumière certaines oppositions ou certaines relations

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qui ne seraient pas apparues sinon. « Être libre rend-il heureux ? », par
exemple, fait apparaître une relation entre la liberté et le bonheur, qui va
moins de soi que le fait d’affirmer que l’on est heureux d’être libre,
affirmation qui ne paraît pas problématique au premier abord.
2) Mettre en rapport ce que vous avez découvert, vos connaissances et le sujet
:
Ce n’est qu’à ce moment-là qu’interviennent les connaissances proprement
dites. L’analyse, à la fois de la forme et du contenu du sujet, doit se faire
indépendamment de toute référence aux auteurs. Ne pensez jamais en terme de
références, elles risquent de vous masquer le sujet, puisque vous aurez du coup
envie de montrer ce que vous savez de tel ou tel auteur au lieu de répondre au
problème posé. Forcez-vous à ne pas aborder vos références aux auteurs avant
cette étape.
Une fois mise au jour la structure du sujet, et après avoir donné les
différentes définitions primaires de tous les mots que comporte la question, vous
pouvez penser, en fonction des différents sens que vous avez trouvés, « convoquer
» les auteurs, les citations, les références, pour les mettre en relation avec ces
différentes. Les définitions, citations, arguments, raisonnements d’auteurs doivent
être mis en rapport avec le déroulement de la réflexion et non « plaqués ». Ainsi,
vous réunissez des données grâce auxquelles votre argumentation va pouvoir
s’ordonner. De plus, au fur et à mesure que vous affinez votre compréhension du
sujet, des aspects problématiques surgissent.
3) Révéler les ambivalences :
Il faut en premier lieu envisager de façon systématique des positions
opposées. Laissez se développer des points de vue différents et divergents, des
ambiguïtés, des nuances. Vous devez vous y arrêter pour les approfondir, les
renforcer, les enrichir à l’aide des données de l’analyse.
Si un point de vue apparaît d’emblée comme seul possible, il faut
prendre le contre-pied, comme si un contradicteur s’exprimait pour vous
embarrasser… N’oubliez pas que vous avez à convaincre votre correcteur :
il faut faire toute la place à des positions autres que celles que vous allez défendre,
pour d’une part, montrer que vous y avez pensé (et ainsi montrer que vous-mêmes
êtes convaincus de votre thèse, et non pas seulement persuadés/charmés par elle),
mais surtout pour, d’autre part, réfuter d’éventuelles objections par rapport à ce
que vous voulez montrer.

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On ne pose bien sa thèse qu’en l’opposant à d’autres thèses. Aussi, il
vous faudra vous prêter au jeu consistant à défendre une position qui n’est pas
la vôtre, pour mieux en montrer, juste après, les limites, les contradictions,
le fait que cette thèse adverse doit être dépassée… Il ne faut jamais faire
de copie « à sens unique ».
Mais attention : Pas de plan du type THESE/ANTITHESE/VAGUE
SYNTHESE. Il ne s’agit pas de dire en première partie quelque chose, et en
deuxième partie son exact opposé. Vous vous montreriez ainsi bien peu cohérent
dans votre progression argumentative. Si vous pouvez défendre tout et son
contraire, c’est qu’en réalité vous ne défendez rien du tout et ne progressez pas.
Il vous faut examiner une thèse, voir sa force, mais aussi ses limites, ce qui la rend
insuffisante pour répondre au problème. Mais le fait que cette première thèse soit
insuffisante ne signifie pas que tout ce que vous avez dit en première partie est à
oublier : c’est seulement à relativiser, compte-tenu des limites que vous aurez
démontrées. Il faut chercher le rapport, le lien entre les différents aspects pour
révéler un problème. Sans cela, il n’y a pas de problème. Il ne suffit en effet pas
de dire qu’il y a « d’un côté » ceci et « d’un autre côté » cela, ou bien que «
certaines personnes » ont telle opinion et « d’autres personnes » telle autre
contraire. Vous devez montrer qu’il est nécessaire de penser ceci et cela, bien que
penser ces deux choses en même temps semble impossible, impensable,
paradoxal. Autrement dit, il s’agit de montrer que deux thèses opposées
peuvent être pensées, l’une dans une certaine limite, l’autre dépassant cette
limite.
4) Formuler un problème :
Un problème peut prendre des formes différentes, en rapport avec la
forme du sujet, son contenu et votre façon de l’envisager.
Il faut chercher la racine du problème : radicalisez l’écart entre les points
de vue, pour en exprimer la raison philosophique précise : n’hésitez pas, en début
de devoir, et notamment en introduction, à montrer comment deux positions
contradictoires peuvent être défendues apparemment avec la même force
concernant ce problème, et en quoi ces positions semblent totalement
inconciliables (même si, en en relativisant une pour laisser la place à l’autre, vous
les concilierez dans votre développement).
Vous pouvez formuler votre problème de plusieurs façons. À vous de
trouver celle qui convient le mieux.

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Remarque : Comment découvrir un problème philosophique ?
1-On transforme le sujet en une affirmation,
2- On recherche la thèse contraire ou opposé (qui n’est nullement la négation de
la thèse). On aura un débat ou une discussion.
3-On se pose la question de savoir quel est le thème de la discussion ainsi
engendrée. La réponse juste à cette question est le problème philosophique.
4- Ne jamais poser le problème sous une forme interrogative. Le problème
philosophique est toujours affirmatif.

Exemple 1 : Peut-on connaître autrui ?


Affirmation : On peut connaître autrui.
Thèse opposée : La connaissance d’autrui a des limites.
Thème du débat : La connaissance d’autrui. Le problème de ce sujet c’est donc
la connaissance d’autrui
Exemple 2 : La science peut-elle apporter le salut à l’humanité ?
Affirmation : La science est capable de résoudre les problèmes de l’humanité ?
Thèse opposée : La science n’est pas capable d’apporter une solution aux
problèmes de l’homme.
Thème du débat : L’évaluation des capacités réelles de la science. Le problème
portera sur les capacités réelles ou l’aptitude de la science à résoudre les
problèmes des hommes.
NB : Il faut bien noter qu’un sujet de dissertation ne soulève qu’un et un seul
problème.

II.3. LE PLAN
Il s’agit maintenant d’organiser la réflexion. Il faut toujours, au brouillon,
faire un plan détaillé avant d’écrire la dissertation. Il n’y a pas de plan type. Le
contenu et l’ordre des parties dépendent du sujet et de votre problématique. Une
dissertation de philosophie, c'est une discussion argumentée. Il faut donc
l’organiser au moyen d’un plan pour éviter qu’elle ne parte dans tous les sens :

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 Quand vous établissez votre plan, ne perdez jamais de vue la question
posée. Chaque partie doit s'y rapporter d'une manière ou d'une autre.
 Un plan dialectique procède par thèse, antithèse et synthèse.
Vous exposez une affirmation qui constitue la réponse la plus spontanée à
la question posée (c'est la thèse), puis vous montrez en quoi cette réponse
peut être critiquée (c'est l'antithèse), enfin vous tirez des conclusions
personnelles des deux premières parties (c'est la synthèse).
 Attention, une synthèse n'est pas un compromis entre deux thèses ; elle
représente une nouvelle étape de la réflexion.
 Si, pour un sujet, vous ne pouvez opposer une thèse à une antithèse, alors
choisissez le plan progressif : partez du point de vue du sens commun et
affinez progressivement la réponse à la question posée.
 Une fois que vous avez fixé les différentes parties et sous-parties de votre
dissertation, pensez à insérer, dans votre plan, exemples et références
philosophiques.

A) L’INTRODUCTION :
La première impression est souvent tenace et l’impression que vous laissée
en débutant n’en est pas moins importantes dans la vie. Il en va de même dans la
dissertation. L’introduction et la conclusion doivent être spécialement soignées,
car il s’agit de moments forts qui vont mettre le correcteur dans de bonnes
dispositions pour lire votre dissertation puis lui mettre une note. L’introduction
doit :
a) Situer la question posée dans le cadre d’une réflexion plus générale. On ne
doit pas partir de la question mais l’amener à partir d’une question plus globale
dont l’importance et la légitimité sont aisément perceptibles. Eviter les platitudes
générales du style : « de tout temps les hommes.. », « depuis toujours…» ou des
affirmations gratuites du genre « tout le monde sait bien aujourd’hui.. », ne pas
également répéter purement et simplement le sujet comme si la question tombait
du ciel sans justification.
b) Nouer une problématique. D’abord en déterminant le sens des termes du
libellé. On peut s’appuyer sur l’étymologie ou sur l’usage de la langue, les
proverbes etc. s’agissant des termes utilisés dans le libellé, il est indispensable de
s’en donner dans l’introduction un pré-concept ou une définition provisoire
suffisante pour identifier le problème sous-jacent à la question et destinée à être
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 15
enrichie ou corrigé au fil du développement. Exemple, si le sujet est : Peut-on
parler du travail comme un droit ? On peut d’emblée souligner ce que le travail
a de contraignant, en tant qu’il exprime l’assujettissement de l’homme à des
nécessités vitales ; tandis que l’exercice de « droits » semble supposer la liberté.
c) Souligner l’enjeu de la question, tel qu’il peut apparaître, non pas d’emblée,
mais une fois le travail de problématisation effectué.
Une fois l’énoncé reformuler ou annoncé, viens la problématique qui est
le point crucial du travail ! Une bonne dissertation est avant tout une bonne
réflexion sur la problématique et ses enjeux.
La problématique est un ensemble de question dont on ne peut pas
répondre directement, mais qui se prête à un débat contradictoire et appelle une
réponse argumentée en montrant le paradoxe ou le problème qui se pose entre
diverses notions qui apparaissent dans l’énoncé. Une problématique repose
nécessairement sur un paradoxe.
REMARQUE : Tous les sujets ne se problématisent pas de la même façon,
chacun exigeant un traitement particulier. Quatre cas sont envisageables dans la
recherche de la problématique d’un sujet de dissertation philosophique1 :
- Si le sujet est la citation d’un auteur, cette citation, dont la thèse implicite
doit être prise par l’élève pour la thèse 1 de son développement, est certainement
un point de vue sur un débat entretenu par des philosophes qui n’arrivent pas à
s’entendre. L’élève doit se situer au cœur de ce débat. Il remontera alors à sa
genèse en se posant une question simple : quelle est la question qui a été posée et
dont l’une des réponses possibles est la citation présente ? Cet effort, qui consiste
à aller au-delà du sujet, le conduira à la problématique. Cela signifie que l’énoncé
du sujet est une apparence à dépasser et la problématique, une évidence qui se
cache derrière l’apparence. Prenons par exemple le sujet suivant : « Si j’avais une
province française à punir, je la ferais gouverner par un philosophe » Que
pensez-vous de cette affirmation de Clemenceau ? Il faut d’abord reformuler ce
sujet ; on aura donc ceci : Le philosophe ne peut apporter que des souffrances aux
gouvernés, Autrement dit il est un mauvais dirigeant. La question dont cette thèse
est une réponse c’est : Doit-on confier au philosophe la direction d’un Etat ? Cette
question est donc la problématique. La représentation schématique de ce procédé
est la suivante :

1
Cf FOUMANE DELAMOUR,

16
Problématique

Doit-on confier au philosophe


la direction d’un Etat ?

Sujet Reformulation du sujet


Si j’avais une province française à punir Le philosophe fera souffrir les
gouvernés s’il est chef d’Etat
Je la ferais gouverner par un philosophe

- Si le sujet est sous forme de question posée aux élèves, ceux-ci doivent d’abord
transformer l’interrogation en affirmation. Ils auront alors un point de vue qu’ils
prendront dans leur développement pour la thèse. Ils doivent remonter ensuite à
la question dont ce point de vue est la réponse. Par exemple : Peut-on reprocher
à la philosophie d’être inutile ? On aura cette affirmation : On peut reprocher à la
philosophie d’être inutile. La question dont cette affirmation est une réponse est :
quel est le rôle de la philosophie ?
- Un autre procédé pour trouver la problématique consiste d’abord à
relever la limite de la thèse soutenue dans l’énoncé du sujet ou bien à donner une
raison qui empêche de la valider, on aura alors une thèse contraire. Pour avoir la
problématique, l’élève doit transformer cette thèse contraire en une interrogation
qu’il adresse à la thèse du sujet. C’est cette interrogation qu’on appelle la
problématique. Voici par exemple un sujet : L’homme d’Etat doit-il gouverner
avec la masse ou avec l’élite ? La raison qui remet en cause ce que la thèse avance
est que si l’homme d’Etat dirige avec l’élite, il y’aura la dictature de la minorité
sur la majorité. C’est pourquoi la problématique proposée dans le Cahier du
département de philosophie N°4 de Juillet 1999 est : « La confiscation du pouvoir
par une élite ne comporte-t-elle pas le risque d’une dérive vers la dictature d’une
classe sur les autres classes de la société ? »2
- Une dernière façon de trouver la problématique est celle qui consiste à
formuler une interrogation sur le point de vue opposé à celui du sujet. C’est le cas
dans le sujet ci-après : Faire le bien est-ce nécessairement se faire du bien ? On
déterminera d’abord, pour problématiser, la thèse implicite de ce sujet. Cette thèse
2
Cahiers du Département de philosophie, N° 4, Presses Universitaires de Yaoundé, Juillet, 1999, P. 39

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 17


est : la morale se réduit à la recherche de l’intérêt. La thèse contraire est : il y a
des morales gratuites. La problématique est donc : une morale gratuite n’est-elle
donc pas possible ? De préférence, cette question formulée sur la thèse opposée
doit venir après une première qui porte sur la thèse implicite du sujet. La logique
sera donc la suivante : toute morale se réduit-elle à la recherche de l’intérêt ? Les
morales gratuites n’existent-elles donc pas ? La représentation schématique de
cette recherche de la problématique est la suivante :

Sujet : Faire le bien est-ce Reformulation du sujet : Thèse opposée au


nécessairement se faire La morale se réduit-elle sujet : Il y a des
du bien ? à la recherche de morales gratuites
l’intérêt

Problématique : L’expérience d’une


morale gratuite est-elle
donc impossible?

Tous les sujets ne se problématisent donc pas de la même manière. La


logique montrera à l’élève quelle est la meilleure façon de problématiser le sujet
qu’il a devant lui.
- NB : Les sujets se réduisant à une notion ou à un rapport entre deux ou
trois notions sont déconseillés aux examens officiels pour leur complexité et leur
ressemblance aux cours dispensés en classe. C’est pourquoi nous ne nous
intéressons pas à la façon de les problématiser.
Résumé :
Dans une introduction, trois éléments sont indispensables : Amener le sujet ;
poser le problème ; formuler la problématique.
Le Problème : Le problème est posé de manière déclarative. C’est le thème autour
duquel se construit le travail. Pour l’avoir il faut se poser la question de savoir,
de quoi il est question dans ce sujet.
La problématique : C’est un questionnement qui s’articule autour du
problème philosophique posé. Il s’agit d’un ensemble de questions dont
chacune trouvera des réponses dans une des parties du développement.

18
B°) LE DÉVELOPPEMENT
1) LA THESE
La thèse est l'énoncé qui exprime le point de vue que l'on entend défendre,
une première position en lien avec la problématique que vous devez argumenter
et prouver. Vous affirmez alors en quoi vous êtes « d’accord » ou non avec
l’énoncé avant d’expliquer pourquoi vous l’êtes au moyen de plusieurs ou d’un
enchaînement de preuves. Le choix de la thèse à défendre est le résultat d'une
réflexion sur l'énoncé qui s’est faite après avoir identifié les concepts sur lesquels
s'appuie notre discours. Elle se fait de la manière suivante :
a) Le point de départ : On commence par le sens commun, par l’usage
d’une expression courante, par exemple, d’un élément qui semble évident et
simple, pour analyser et approfondir, afin d’accéder à une dimension plus
philosophique de la réflexion. C’est à partir de là que vous pourrez commencer à
argumenter.
b) L’argumentation est la série logique de vos idées. Elle vise à prouver,
démontrer, illustrer, expliquer, convaincre ou réfuter : allez dans vos arguments
du plus simple au plus complexe, du superficiel au profond, pour atteindre le
niveau qui pourra répondre le plus finement possible à la question. Distinguez
bien les étapes de votre démarche en composant et en ordonnant vos paragraphes.
Chaque paragraphe doit correspondre à un argument. Sur votre brouillon, vous
devez ordonner les idées et bien réfléchir à la progression des arguments.
N’hésitez pas à changer cet ordre s’il ne vous paraît pas clair ou pertinent.
c) Un schéma logique utile : définition, présupposés, conséquences.
Par exemple : Soit A un concept étudié (ou une idée particulière, ou un exemple
qui l’illustre). Il faut tout d’abord le définir précisément, du moins dans les limites
de ce que vous permet la thèse que vous défendez
(dans « Qu’est-ce que comprendre autrui ? », vous n’allez pas dès le départ
définir une fois pour toutes « comprendre autrui », mais, petit à petit, donner
des définitions de plus en plus subtiles, par exemple).
d) Les exemples illustrent les idées, mais ne doivent jamais se substituer à elles.
Une argumentation n’est pas un catalogue d’exemples, aussi pertinents
soient-ils. Mais les exemples sont importants, car ils nourrissent et enrichissent
vos arguments. Plusieurs types d’arguments existent :

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 19


– Exemples philosophiques : citation et/ou argument d’auteur. Attention
cependant à ne pas réciter pour « épater » votre correcteur sur vos
connaissances, cela n’est pas ce qui est attendu. Une citation n’a de valeur que si
elle est adaptée au sujet et à votre raisonnement. Il faut l’expliquer, seul
moyen de légitimer son exploitation. Inexpliquée, elle vous dessert, puisque
vous ne montrez pas que vous l’avez comprise et que vous ne maîtrisez pas
son utilisation.
Un argument d’auteur est aussi valable qu’une citation. Si vous ne
vous souvenez pas exactement d’une phrase, utilisez l’argument en nommant
l’auteur.
– Exemples non philosophiques : ils peuvent venir de tous les champs de la culture
(anthropologie, histoire, sciences, littérature, art, religions, etc.). Il faut là-
aussi montrer clairement le lien entre l’exemple et l’idée qu’il illustre. Il ne
suffit pas de « raconter » un exemple pour que l’idée soit bien illustrée (attention
au style « narratif »). L’exemple ne doit pas prendre plus de place que le
raisonnement conceptuel, c’est-à-dire par arguments (mais celui-ci se nourrit
d’exemples, sous peine de passer pour trop « abstrait »).
Au total, vous devez enchaîner logiquement des arguments, de façon progressive,
jusqu’à ce que vous ayez exploité le mieux possible le point de vue à défendre.
REMARQUE : La transition
C’est une étape capitale. Vous devez absolument comprendre son rôle.
Le passage d’une partie à la suivante doit être expliqué, justifié,
convaincant. Vous montrez alors que ce n’est pas par un pur artifice que vous
dépassez le point de vue défendu dans la partie précédente, mais à cause
d’arguments de réfutation solides.
Comment élaborer votre transition ? Schématiquement, en trois étapes :
a) Faire le bilan de la partie précédente : dire en une phrase l’idée essentielle à
laquelle vous êtes parvenus.
b) Objection, réfutation : à partir d’un ou plusieurs éléments précédents, montrez
qu’un aspect (présupposé ou conséquence) est intenable, indéfendable. Vous
faites apparaître une limite de la thèse précédente.
c) Nécessité d’envisager un autre point de vue. Vous relancez la discussion en
amenant la deuxième partie.

20
2) LA THESE 2 OU ANTITHESE
L’antithèse est l’affirmation opposée de la thèse qui doit également être
argumentée et prouvée. (Mêmes principes, même règles que pour la première
partie) Rien de ce que vous dites dans le développement ne peut qu’une simple
affirmation, mais demande d’être prouvé.
Ceci dit, il peut paraître factice d’apporter des preuves pour l’antithèse alors
que l’on vient d’argumenter en faveur de la thèse. Mais la dissertation est
dialectique au sens platonicien du terme, c'est-à-dire qu'elle tient du dialogue.
Dans une discussion, il est possible de s'entendre sur certains points, mais le
dialogue réside surtout dans la confrontation entre les arguments.
Dans un texte, évidemment votre interlocuteur est absent. Ainsi, pour faire
avancer la réflexion, vous devez donc vous mettre à la place de votre interlocuteur
et prévoir les objections qu'il pourrait apporter à votre thèse. C'est en cela que
réside l'antithèse.
Il est évident que les objections doivent satisfaire aux mêmes critères de
rationalité, de pertinence et de cohérence que les arguments.
On peut critiquer une thèse en mettant en lumière les conséquences
négatives de son acceptation, forçant ainsi l'interlocuteur à nuancer voir à rejeter
sa thèse. Il est plus difficile dans une dissertation de critiquer la pertinence ou la
cohérence d'un argument, car on vous accusera alors d'avoir mal défendu ou mal
présenter vos arguments. Par contre, on peut critiquer la suffisance de l'argument,
de par sa superficialité ou par l'occultation d'aspects importants du sujet.
Enfin, vous pouvez reprendre votre argumentation par une réfutation des
objections. A cette fin, la réfutation réhabilite la validité de la thèse si elle a été
attaquée, elle rejette les thèses différentes ou contraires si elles ont été proposées,
elle confirme et rétablit la cohérence des arguments.

3) LA THESE 3 OU SYNTHESE
La synthèse est le lieu où vous terminez votre argumentation en donnant
une conclusion au développement de votre argumentation.
Littéralement, elle est le lieu où vous reliez ensemble (syn) la thèse et
l’antithèse. Elle est ainsi souvent définie comme un dépassement du conflit entre

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 21


thèse et antithèse. Plus concrètement, il s'agit de montrer à quelle position vous
êtes amené au final, en donnant ainsi une réponse à votre problématique.
Pour faire une bonne synthèse, on doit se dire que le sujet est proposé en
vue de trouver une solution à un problème. Il y a donc c toujours une finalité à
atteindre dans les sujets philosophiques. Cette finalité peut être trouvée si on se
pose les questions suivantes : Quelle est l’objectif recherché dans le sujet ? Quelle
est la solution au problème posé ?

C) LA CONCLUSION
La conclusion doit fournir une réponse précise à la question qui constitue
le sujet. Il faut donc dresser un bilan final. Les idées finales ne doivent pas entrer
en contradiction avec celles qui se trouvent dans la dernière partie du
développement. Enfin, il est utile (mais pas nécessaire) que la dernière partie de
la conclusion ouvre de nouvelles perspectives en relançant la question pour un
débat ultérieur.
La conclusion comporte trois parties :
1. Le rappel du problème (Celui posé à l’introduction !)
2. Le bilan succinct des étapes du raisonnement
3. La solution finale (Elle s’inspire de la synthèse)

Remarque :
1. Rien ne doit être ajouté à la conclusion qui n’ait été dit dans le
développement. Tout ajout inutile est mauvais.
2. Faites attention à ne pas proposer une ouverture qui traite d'une question
que vous avez abordé dans votre développement, mais d'une thématique
nouvelle, car sinon on se dira que vous n'avez au final pas argumenter
puisque la question se repose à nouveau.
Enfin, ne jamais rendre une dissertation sans avoir vérifié chacun des points
suivants.
L'introduction
 On donne un exemple concret
 La signification de l'exemple est dégagée Préambule

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 Un paradoxe est indiqué
 Un problème conceptuel est indiqué à partir du paradoxe Problème
 Le chemin à prendre pour le résoudre est indiqué Problématique
 Tous les termes de l'énoncé sont pris en compte
 Le problème indiqué est bien celui dont traite l'ensemble du devoir

Le développement
 Le plan procède de la logique du problème dégagé dans l'introduction
 La nécessité de chaque partie est clairement expliquée dans la précédente
 Aucune référence n'est arbitraire, aucune n’est laissée sans développement
 Chaque partie apporte un élément décisif au traitement du problème
 Chaque affirmation est justifiée (pas par un nom d'auteur ou une citation !)
 On a fait un effort pour diminuer les ambiguïtés dans l'usage des notions
vastes, ainsi que les allusions de toutes sortes (notamment au cours, que
le correcteur est supposé ignorer : ce sont les arguments qu'il faut
reprendre ou éventuellement réfuter)
 On a supprimé toutes les opinions " personnelles " et toutes les généralités

III. RÉDACTION ET GESTION DU TEMPS DE L’ÉPREUVE


L’épreuve dure 4 heures : gérez bien ce temps. Deux grandes étapes sont à
prévoir, avec, au départ, le choix du sujet (10 minutes grand maximum), et, à la
fin, la relecture de la copie (15 minutes) :
III.1. LE TRAVAIL PRÉPARATOIRE : chercher (trouver…) et organiser
(1h15 environ)
– Le brouillon n’est destiné qu’au travail préparatoire : analyse du sujet,
position du problème, matériaux divers (références philosophiques, exemples,
…), plan détaillé, etc. Il ne faut pas y rédiger des paragraphes entiers en écrivant
des explications complètes. Pour cela, schématisez les arguments, analyses, etc.
– Lorsque vous avez un plan précis (parties, ordre des arguments, références,
schémas conceptuels), vous pouvez écrire une première forme d’introduction
au brouillon, ainsi que le tout début de votre première partie, pour vous «
lancer ». À partir de là, vous savez où vous allez. Rédigez sur la copie.
III.2. LA COPIE : (2h15 environ)

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 23


L’attention à l’écriture proprement dite de la dissertation est facilitée
puisque vous n’avez plus le souci du plan. Il vous faut soigner la forme de votre
expression : présentation, écriture, mise en page. Allez à la ligne quand c’est
nécessaire (à chaque nouvel argument). De même, sautez deux lignes entre
l’introduction et le développement et entre le développement et la conclusion. Au
sein du développement, sautez une ligne entre chaque grande partie. Vous
aiderez ainsi à la lecture et montrerez que votre réflexion est ordonnée.
Soyez attentif à l’orthographe, au choix des termes, au niveau de langue, etc.
 Soignez le contenu : ne pas répéter la même chose sous des formes
différentes ; ne pas s’embarrassez de formules « compliquées » si l’idée est
simple (ou même complexe : complexité n’est pas complication) ; faire des
phrases plutôt courtes, plus faciles à maîtriser.
 Pour éviter le hors-sujet, il faut relire régulièrement le sujet pour être sûr de
ne pas se laisser emporter par une explication hors-cadre ou qui ne tient pas
compte d’un aspect du problème que vous devez explorer.
 La qualité d’une bonne copie ne tient pas au nombre de pages.
Toutefois, trop courte, elle risque d’être elliptique (de passer sous silence
des aspects importants) ou réductrice (ne pas exploiter « à fond » vos idées,
en les caricaturant). Trop longue, elle peut noyer le sujet et le perdre.
 L’ensemble doit être équilibré, en longueur et en densité. Chaque partie doit
mobiliser votre réflexion de la même manière ; introduction, transitions
critiques et conclusion doivent être solides.
Quoi qu’il en soit, vous devez apprendre à vous connaître dans l’épreuve, en vous
exerçant régulièrement à faire l’analyse d’un sujet, un plan, à rédiger une
introduction, etc.

IV. LA CORRECTION
A- BAREME DE L’EVALUATION DE LA DISSERTATION
La dissertation est évaluée selon les critères suivants (Cf. la circulaire
n°06/C/20/C/MINEDUC/IGP/ESG/ESTP/OBC/D du 20 avril 1998)
Critères Signes Séries A&B Série C, D, E, F, G
Présentation P 2 pts 2 pts
Introduction I 4 pts 4 pts

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Examen du problème EP 5 pts 6 pts
Rédaction R 2 pts 3 pts
Utilisation des auteurs A 4 pts 3 pts
Conclusion C 3 pts 2 pts

B-LES QUALITES D’UNE BONNE COPIE


La dissertation philosophique est un exercice qui est évalué sur un certain
nombre de critère (Cf. le barème de notation). On attend un certaines qualités sur
le plan de la forme et du fond dans une copie de dissertation.
1) Les qualités formelles (la présentation)
 l’exposé doit être clair et écrit dans une langue correcte qui respecte la
syntaxe. A ce propos vous rencontrerez une difficulté qui ne vous était pas
familière : l’usage des mots abstrait si fréquents en philosophie (ex.
transcendantal, phénoménologique, immanent, intrinsèque, nouménal). Un
effort d’attention dans le choix de ces mots s’imposera, et le recours à un
bon dictionnaire ou à un lexique de philosophie vous facilitera la tâche.

 Le style philosophique est assez différent du style littéraire auquel vous


étiez habitué. D’une manière générale, il exige d’avantage de sobriété
puisqu’il exprime l’activité de l’intelligence et non la sensibilité. D’où la
proscription des fioritures et la méfiance vis-à-vis des superlatifs et des
adjectifs affectifs. (ex. un grand philosophe…)

 Il n’est pas besoin d’insister ici sur la nécessite d’éviter les fautes
d’orthographes et d’écrire lisiblement. Rappelons qu’il convient de faire
des paragraphes sans pour autant morceler votre exposé au risque de donner
une impression de décousu et d’essoufflement. Enfin, éviter les expressions
familières voire argotiques.

2) Les qualités intellectuelles


Peu importe le contenu doctrinal de votre développement. Il n’y a pas
d’auteurs tabous et toutes les idées sont accueillies pourvues qu’elles soient
exprimées de manière cohérente. On exige avant tout un esprit logique et du bon
sens.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 25


 Avoir de la suite dans les idées. Ainsi, ne pas annoncer par exemple trois
facteurs à propos d’un phénomène et n’exposer que deux.
 Expliquer le sens d’un mot ou d’une expression avant de commenter c'est-
à-dire avant d’apporter une réflexion personnelle. Par exemple, si on
demande d’examiner la question: « la liberté s’oppose-t-elle à la loi ? »
vous ne pouvez pas commencer par manifester votre accord ou votre
désaccord, mais essayer de comprendre cette question en expliquant ses
différents termes. Exposer ses différentes implications, leurs critiques
éventuelles, vos points de vue personnelle viennent ensuite.
 Maintenir votre effort de réflexion. Ce qui signifie que votre attention ne
doit pas se relâcher avant la fin de la conclusion. Trop souvent, en effet, les
dissertations dont le développement commence par être trop bien conduit,
manifestent de graves faiblesses dans les dernières parties et notamment
dans les conclusions. En conséquence il n’est ni souhaitable ni prudent de
faire un exposé trop long, qui risquerait d’être un obstacle à la maîtrise du
sujet et à son traitement correct.

3) L’argumentation doit s’appuyer sur des connaissances et sur des exemples


Pour que la démonstration ne tombe pas sur le verbalisme, il faut qu’elle
s’incorpore aux faits. Montrer et démontrer sont également indispensable. Par
exemple, il ne suffit pas d’affirmer que certains préjugés peuvent être utiles à
l’action, il faut le prouver. En conséquence vous devez faire appel à des
connaissances et des exemples.
 On n’exige pas de l’élève la connaissance de philosophes déterminés
auxquels il faudrait se référer pour traiter tel sujet. Néanmoins, la référence
à un auteur suppose une interprétation exacte de sa doctrine.
 L’utilisation d’un savoir extra-philosophique est non seulement légitime
mais souhaitable, car la philosophie est une réflexion sur des connaissances
de tous ordres (scientifique, technique, juridique, artistique…) la synthèse
que l’élève réussit à faire entre sa formation générale et la philosophie est
donc accueillie très favorablement à condition de ne pas sortir du sujet.
 Les exemples littéraires ne sont pas interdits. Mais ils peuvent difficilement
constituer une preuve car, il faut bien distinguer un fait réel d’un fait
imaginaire. En outre, la mention d’un auteur littéraire doit s’accompagner
d’une analyse conceptuelle.

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4) La réflexion personnelle
Il n’y a pas de dissertation sans réflexion personnelle, ce qui suppose que
la pensée se déploie progressivement. Il faut donc un certain nombre de mise en
garde.
 Eviter le piétinement d’un argument qui ne présente pas d’idées nouvelles
d’un paragraphe à un autre.
 Eviter les digressions. Notamment, traiter le sujet dès le départ au lieu
d’aller de se lancer dans des envolées littéraires qui n’ont rien avec le sujet.
 Ne pas aligner des doctrines en laissant parler les auteurs. Il est ainsi très
maladroit de commencer un paragraphe en écrivant : « Descartes a dit
ceci… » ou « Kant a soutenu cela… »
 Ne pas réciter le cours, car, en principe il n’est pas adapté tel quel au
problème que vous devez résoudre.
 Eviter les développements descriptifs, anecdotiques ou historiques qui ne
peuvent pas tenir lieu de dissertation.
 Ne pas se réfugier derrière l’autorité d’un auteur.
 Ne pas traiter cavalièrement les auteurs. Il serait par exemple présomptueux
de s’opposer à Descartes ou à Kant sans un examen attentif de leur doctrine
respective.

Ainsi, il faut donc faire un développement personnel dans lequel viennent


s’intégrer les références philosophiques et les diverses informations dont on peut
disposer. En outre, l’argumentation doit être explicite, ce qui exclut le recours à
l’allusion. Vous ne devez pas simplement évoquez « le mythe de la caverne » ou
« le cogito » sans expliquer de quoi il s’agit.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 27


B- EXERCICES PRATIQUES

Les Sujets qui suivent comporte des corrigés qui sont à titre
indicatif, notre objectif de développer chez l’élève sa propre réflexion,
de développer ses aptitudes face à des questions philosophique. Les corrigés ne
sont qu’à titre indicatif, il ne s’agit pas d’une « camisole de force » à laquelle
l’élève doit se conformer à tout prix ! D’autres propositions de problèmes sont
possibles, de même que d’autres formulations de problématique.

I. LES SUJETS QUESTIONS

Sujet 1 : Pouvons-nous penser que l’Afrique noire a une


philosophie ?
A- Explication des mots difficiles :
 Pouvons-nous : Est-il possible, il s’agit d’une éventualité.
 L’Afrique noire : Le continent africain et plus particulièrement les
hommes négroïdes (les africains à peau noire)
 Philosophie : Pensée rationnelle ; l’élève peut (et doit) se servir de
l’étymologie. Cependant, il ne doit pas donner une définition vague de la
philosophie comme « amour de la sagesse » ; il faut interpréter cette
définition étymologique.
B- Reformulation : L’existence d’une philosophie propre aux africains est-elle
possible ?
Ce sujet nous amène à statuer d’une part sur l’existence ou non d’une
philosophie africaine ; une question qui est elle-même liée à l’aptitude des
africains à philosopher et d’autre part sur la nature de la philosophie.
C- Problème : L’existence d’une philosophie africaine.
D- Problématique : Dans quelle mesure existe-t-il une pensée propre aux
africains ? Sont-ils étrangers à la pensée philosophique ? Que signifient
véritablement philosopher ?
Ou Les africains sont-ils aptes ou inaptes à développer une pensée critique et
rationnelle ? Quelles sont les critères de la pensée philosophique ?

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THESE 1: Les africains sont aptes à philosopher (Il s’agit de montrer que les
africains sont capables de développer une pensée philosophique)
Argument 1 : L’Egypte Antique a connu un essor intellectuel qui a précédé et
servi de base à la pensée hellénique. La plupart des philosophes grecs de la période
antique ont séjourné en Egypte (Pythagore, Socrate). Dans ce sens, la pensée
philosophique égyptienne (et donc africaine) a précédé et servi de fondement à
la pensée philosophique hellénique.
Argument 2 : Les africains produisent des œuvres philosophiques ; en effet la
production philosophique africaine moderne vient éclairer définitivement la
question de l’aptitude des africains à philosopher. Il existe ainsi de nombreux
penseurs africains (Marcien Towa, Ebénézer Njoh Mouelle, Hubert Mono Djana,
Pius Ondoua, Lucien Ayissi, Chindji Kouleu, etc.)
Argument 3 : La philosophie est synonyme de vision du monde propre à un
peuple ; elle est la réponse rationnelle que chaque homme apporte aux problèmes
de son existence et de son environnement. Dans ce sens, la culture des peuples
africains pourrait en quelque sorte être le reflet de leurs différentes visions du
monde (c’est-à-dire de leur philosophie). C’est en quelque sorte l’argument que
formule l’ethnophilosophie.
Citation :
Basile Juléat Fouda : « La philosophie nègre doit se transmettre à travers
les âges comme un héritage à recevoir à défendre et à incarner pour atteindre
l'existence authentique.»

Transition : De ce qui précède, il apparait clairement que l’africain est producteur


de pensée philosophique. Cependant, doit-on inclure tous ses modes de pensée ?
N’existe-t-il pas des raisons pour lesquelles sa pensée n’obéit pas toujours aux
canons de la pensée philosophique ?

THESE 2 : Il n’existe pas une philosophie proprement africaine.


Il s’agit de montrer que la philosophie en tant que discipline ne saurait se
régionaliser, qu’elle échappe au réductionnisme racial ou régional selon lequel
chaque région à sa propre philosophie
Argument 1 : La philosophie n’est pas réductible à la culture comme l’on pensée
les ethnophilosophes. La culture ne saurait s’identifier à la philosophie. En effet,
la culture est un domaine différent et beaucoup plus large dans son extension que
la philosophie. La culture échappe à la critique.
Argument 2 : On ne peut nier que la philosophie dans le sens rigoureux que nous
lui donnons s’est véritablement développée en Grèce. Dans ce sens l’Occident
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 29
jouit d’une brillante tradition philosophique et d’une abondance production
d’œuvres philosophiques. L’Afrique ne semble pas encore s’être véritablement
accommodée aux exigences de la philosophie au regard du comportement de
certains africains dans leurs immense majorité.
Argument 3 : La philosophie est la matrice de la science et l’Occident a pu se
développer par elle, par contre il n’existe véritablement pas de développement en
Afrique. La pensée philosophique en Occident se matérialise dans le
développement technoscientifique ; ceci n’est pas encore le cas en Afrique où la
pensée reste réactionnaire dans certains domaines et est en proie à la superstition
et au dogmatisme etc.
Citations :
1. Laburthe Tolra : « En Afrique, la philosophie reste à faire »
2. Marcien Towa : « Déterrer une philosophie ce n’est pas encore
philosopher »
3. Heidegger : « La philosophie est grecque dans son être même »
Transition : Il vient d’être établi que les africains n’ont pas joué un rôle
fondamental dans l’éclosion et le développement de la philosophie. Cependant,
doit-on les exclure, que serait véritablement philosopher ? (ou quelle est la nature
de la pensée philosophique ?)
SYNTHESE : La philosophie est universelle
La philosophie est une activité rationnelle, c’est une pensée critique d’elle-
même et de tout. La philosophie ne saurait appartenir à une race ou à un
continent ; c’est une discipline universelle qui obéit aux mêmes critères partout.
Il s’agit donc pour les africains de s’y conformer car ils ont au même titre que
tous les autres hommes, les mêmes aptitudes.

Sujet 2 : La science peut-elle apporter le salut à l’humanité ?


A- Explication des mots difficiles
 La science : discipline qui tire des connaissances objectives de la réalité
par une méthode objective. Ce mot désigne en même temps la théorie
scientifique et la technique.
 Salut : La rédemption. Dans ce contexte il prend le sens de solution.
 Humanité : L’espèce humaine, l’ensemble des hommes.

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B-Reformulation : La science est-elle capable de résoudre tous les problèmes des
hommes ?
C-Problème : Il s’agit de réfléchir sur les capacités réelles ou sur l’aptitude de la
science à résoudre les problèmes des hommes.
D-Problématique : Dans quelle mesure la science apporte-t-elle une solution aux
problèmes que pose l’existence humaine ? Ne connais-t-elle pas des limites ? Quel
regard avoir de la science ?
THESE : La science apporte des solutions à nos problèmes.
Il s’agit de montrer que la science résout la plupart des problèmes de l’homme.
Arguments 1 : L’homme grâce au savoir scientifique sort de l’ignorance en
expliquant rationnellement les faits humains tout comme les phénomènes
naturels. La science contribue ainsi à la démystification de la réalité.
Arguments 2 : La science apporte une solution aux nombreux problèmes
matériels de l’existence. Elle améliore les conditions de vie par la médecine et
la technique ; elle assure un bien-être matériel.
Arguments 3 : La science est le paradigme du savoir de l’homme. Elle est aussi
bien théorique que pratique et brille par ses nombreuses applications. Aujourd’hui
la quasi-totalité des domaines de l’existence humaine est sous l’influence
bénéfique de la science.
Citations :
1. Marcellin Berthelot : « La science st la bienfaitrice de l’humanité »
2. Pierre Thuillier : « Il est de notoriété publique que la science a rendu et
rend encore des services »
3. René Descartes : Garce à la science, l’homme se fait comme maître et
possesseur de la nature
Transition : La science a certes participé à l’amélioration des conditions de vie
de l’homme. Cependant, celle-ci ne peut-elle pas être dangereuse dans une
certaine mesure?
THESE 2: La science connaît des limites.
Montrer que la science est inapte face à certains problèmes et est potentiellement
dangereuse

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 31


Arguments 1 : Les problèmes d’ordre métaphysique (la mort, Dieu). En effet,
certaines questions de l’existence échappent au domaine de compétence de la
science. La science par nature est matérialiste, elle tend ainsi à réduire la réalité
au visible. La réalité va au-delà du visible et du physique. La réalité n’est pas
objectivable dans sa totalité.
Arguments 2 : Le comportement imprévisible de l’homme. La science ne peut
pas s’appliquer totalement dans le comportement humain. Le domaine affectif (les
sentiments) échappe à la science. Nous avons également le caractère encore
incompréhensible de certains phénomènes naturels.
Arguments 3 : La Science est potentiellement dangereuse et aboutie parfois à
l’éradication de la vie ou à la dégradation de l’environnement et des conditions de
vie de l’homme. Les recherches scientifiques peuvent aboutir à des catastrophes
et à la chosification de l’homme.
Citations :
1. Jean Rostand : « La science a fait de nous des dieux avant que nous ne
méritions d’être des hommes »
2. Rabelais : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».
3. Henri Bergson : « L’humanité gémit, à demi écrasée sous le poids des
progrès (scientifiques) qu’elle a faits »
Transition : De ce qui précède, la science apparait comme potentiellement
dangereuse. Mais loin de la décrédibiliser ne pouvons-nous pas rechercher les
conditions de son perfectionnement.
SYNTHESE : Montrer que la science est perfectible et évolue avec le temps
La science est heuristique et a un caractère dynamique ; elle repousse sans cesse
ses propres limites. Une science qui n’est pas au service de la vie est dangereuse
d’où les nombreux défis éthiques que la science doit relever.

Citations
1. Gaston Bachelard : « Seule une philosophie en alerte peut suivre les
profondes modifications de la connaissance scientifique. »
2. Maurice Blondel : « Le défi lancé aux scientifiques, aux gouvernants et
aux peuples de demain peut se résumer à avoir la sagesse. »

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Sujet 3 : Le travail humanise-t-il l’homme ?
A- Explication des mots difficiles
 Travail : Activité conscience de transformation de la nature et de l’homme.
Ou dépense conscience d’énergie physique ou intellectuelle orienté vers
une fin.
 Humaniser : Rendre homme dans ce sens il s’agit de rendre l’homme
meilleur.
 Homme : Animal raisonnable.
B-Reformulation : Le travail rend-t-il l’homme bon ?
Ce sujet nous amène à statuer sur la valeur du travail, son impact positif ou négatif
sur l’homme. Il conviendra ainsi d’interroger l’aptitude du travail à rendre
l’homme heureux ou malheureux.
C-Problème : La valeur du travail
D-Problématique : Le travail est-il une source d’épanouissement ou
d’aliénation ? Quelle est la valeur du travail ?
THESE 1 : Le travail épanouit l’homme
Il s’agit de montrer les aspects positifs du travail dans l’existence de l’homme.
Argument 1: Par le travail, l’homme transforme la nature et améliore ainsi ses
conditions d’existence. L’homme adapte la nature à ses besoins et n’est plus
soumis à l’arbitraire ou aux aléas de la nature.
Argument 2 : Le travail contribue au développement des potentialités de
l’homme. En effet, le travail transforme positivement le travailleur. L’homme par
son activité se perfectionne aussi physiquement que moralement.
Argument 3 : Le travail est un cadre de réalisation de l’homme. Celui-ci peut
s’accomplir et se réaliser par et dans son travail. Aujourd’hui l’homme se défini
et se distingue des autres animaux et même de ses semblable par son travail.
Citations :
1. Voltaire : « Le travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui le vice
et le besoin » (Candide)
2. Emmanuel Mounier : « Tout travail travaille à faire un homme en même
temps qu’une chose »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 33


3. Friedrich Hegel : « L’humanité ne peut se réaliser dans l’histoire que par
le travail »
4. Georges Bataille : « Le travail est la voie de la conscience par laquelle
l’homme est sortie de l’animalité »
Transition : Le travail ne peut-il pas rendre l’homme malheureux ?
THESE 2 : Le travail ne contribue pas toujours au bonheur de l’homme.
Montrer les aspects négatifs du travail
Argument 1: Le travail apparait comme une malédiction divine, elle est la
conséquence du péché d’Adam et Eve (Conception Judéo-chrétienne).
Argument 2 : Le Travail est une contrainte. En effet, l’homme se soumet à la
nécessité et ce n’est pas toujours par plaisir qu’il travaille. Le travail est une
punition, il aliène l’homme ; c’est le cas de l’esclavage et du travail forcé.
Citations :
1. Karl Marx : « La nature aliénée du travail apparait nettement dans le fait
que, dès qu’il n'existe pas de contrainte physique ou autre, on fuit le travail
comme la peste. » et « Le domaine de la liberté commence seulement là où
cesse le travail. »
2. Bible : « Tu mangeras à la sueur de ton front » (Le travail est une punition
divine)
Transition : Le travail n’est pas toujours péjoratif, il convient de rechercher les
conditions de son amélioration.
SYNTHESE : Le travail est une nécessité de l’existence humaine et qu’il
convient d’améliorer les conditions dans lequel l’homme travaille. Dans cette
perspective le travailleur doit être valorisé et bénéficier du fruit de son travail.
Citations :
1. Jean Lacroix : « En même temps que signe d’aliénation, le travail est le
remède de cette aliénation »
2. Alain : « Le travail est la meilleure et la pire des choses. La ma meilleure
quand il est libre et la pire quand il est aliéné »

34
Sujet 4 : Faire du bien, est-ce se faire du bien ?
A-Définition des concepts
 Faire le bien : Accomplir une bonne action.
 Se faire du bien : Se faire plaisir, avoir un intérêt.
B- Reformulation : La bonne action est-elle ce qui nous rapporte ? Le bien se
fonde-t-il exclusivement sur l’intérêt (plaisir) ?
C-Problème : La nature ou le fondement de l’action morale.
D-Problématique : Le bien est-il toujours intéressé ? Ne peut-il pas être gratuit ?
Quels sont les véritables critères de l’action morale ?
Ou Dans quelles mesures peut-on affirmer que toute bonne action est d’abord
égoïste ? L’homme n’agirais-t-il pas également de manière désintéressée ?
THESE 1 : L’action morale (le Bien) est toujours intéressée.
Il s’agit de montrer que l’action morale obéit toujours à un intérêt.
Argument 1 : La morale de l’intérêt. L’homme pose plus facilement des actes qui
lui rapportent un intérêt, un bénéfice.
Argument 2 : La morale du plaisir. L’homme agit plus facilement pour se faire
plaisir, c’est action sont motivé par son autosatisfaction
Argument 3 : Dans l’utilitarisme (Stuart Mill et Bentham) ; La moralité consiste
ici à la recherche de ce qui est utile sur le plan matériel. La vertu vise donc une
satisfaction matérielle basée sur le calcul. La bonne action serait celle qui rapporte
et qui conduit au bonheur matériel.
Citations :
1. Maxime des utilitaristes : « Pas d’intérêt, pas d’action. »
2. La Rochefoucauld : « Les vertus se perdent dans l’intérêt comme les
fleuves dans la mer. »
3. Jeremy Bentham : « Les plus vicieux des hommes tout comme les plus
vertueux ont des motifs absolument semblables ; tous se proposent
d’accroitre leur plaisir. »
Transition 1 : Le critère du bien semble être le plaisir et l’intérêt mais peut-on
réduire l’action morale à ceux-ci n’existe-t-il pas d’autres critères du bien (ou
l’homme ne peut-il pas agir de manière désintéressé)

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 35


THESE 2 : Le bien est désintéressé (l’action morale n’est pas toujours
motivée par l’intérêt)
Il faut déplorer l’égoïsme développé dans ces morales qui visent le bien individuel
en se reposant sur des valeurs éphémères. Elles sous-estiment l’aspect collectif et
l’altérité pour la satisfaction individuelle. Elles mettent en péril l’intérêt général
et les valeurs de l’esprit.
Argument 1 : L’homme pose des actes désintéressés. Nous avons l’altruisme et
l’héroïsme.
Argument 2 : L’homme possède également une conscience du devoir qui
caractérise le bien. C’est le cas du rigorisme kantien.
Citations :
1. Bible : « Aimes ton prochain comme toi-même »
2. Emmanuel Kant : « Agis toujours de telle sorte que tu traites l’humanité
aussi bien dans ta personne que dans celle d’autrui, toujours et en même
temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen »
Transition 2 : L’action morale est désintéressée et l’homme ne pose pas toujours
des actes par intérêt, cependant quels sont les véritables fondements de l’action
morale ?
SYNTHESE : Le critère du bien est fixé par l’homme et tient compte de la valeur
intrinsèque de l’homme. Le plaisir et l’intérêt peuvent constituer une motivation
supplémentaire pour pousser au bien mais celui-ci ne saurait se réduire à ceux-ci
car, le plaisir et l’intérêt sont relatifs et éphémères.
Citation :
Emile Durkheim : « Chaque peuple à sa morale qui est déterminée par les
conditions lesquelles il vit »

36
Sujet 5 : Le Travail est-il pour l’homme un droit ou une
fatalité ?
A- Définition des concepts :
 Travail : Production consciente d’énergie physique ou mentale en vue
d’une fin. Activité de transformation de la nature par l’homme.
 Droit : Ce qui est permis par conformité à une règle morale, ce qui est
légitime par extension. Droit à une connotation positive.
 Fatalité : Force surnaturelle par laquelle tout ce qui arrive (surtout ce qui
est désagréable) est déterminé d'avance d'une manière inévitable. Par
extension la fatalité apparait comme une malédiction, une adversité.

B- Reformulation
Le travail serait-il une activité bénéfique ou nuisible pour l’homme ?

C- Problème : La valeur du travail dans l’existence de l’homme.


D- Problématique : Dans quelles mesures le travail peut-il être une condition
d’épanouissement de l’homme ? Ne peut-il pas avoir un impact négatif ? Quelle
serait la valeur du travail ?

THESE 1: Le travail comme activité positive


Montrer que le travail a un impact positif chez l’homme.
Argument 1 : Le travail apparait aujourd’hui comme un droit fondamental de
l’homme. L’homme s’identifie par son travail.
Argument 2 : Le travail est une activité de transformation de la nature et de
l’homme. L’homme y développe ses talents latents et soumet la nature.
Argument 3 : Le travail permet à l’homme de subvenir à ses besoins
fondamentaux. Il s’affranchit ainsi de la nécessité.
Citations :
1. Voltaire « le travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui, le vice
et le besoin »
2. Adam Smith : « Le travail est la richesse d'une nation, autant que l'or et
l'argent. »
Transition : Au –delà de cet aspect positif du travail, ne peut-il pas avoir des
aspects négatifs dans la vie de l’homme ?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 37


THESE 2 : Les aspects négatifs du travail.
Montrer que le travail peut être une source d’aliénation de l’homme.
Argument 1 : Le travail apparaît comme une malédiction dans la tradition judéo-
chrétienne.
Argument 2 : Le travail dans certaines conditions peut avilir l’homme
(esclavage). En effet, l’homme est déshumanisé dans certaines conditions de
travail comme l’esclavage.
Argument 3 : Le travail ne se fait pas toujours librement et l’homme peut être
chosifié dans certaines tâches où il y perd sa dignité.
Citations :
1. Freud : « la grande majorité des hommes ne travaille que sous la
contrainte de la nécessité »
2. André Breton : « rien ne sert d’être vivant tant qu’on travaille »

Transition : Certes le travail a des aspects négatifs. Nous nous interrogeons


cependant s’il serait envisageable pour l’homme de se détourner de cette activité ?
N’apparait-t-elle pas comme une nécessité ?

SYNTHESE : Le travail comme une nécessité existentielle.


Le travail est nécessaire au processus d’humanisation de l’homme, il convient
juste d’améliorer les conditions dans lesquelles il est effectué.

Conclusion : Rappel du problème, des grandes étapes de notre réflexion (bilan),


réponse à la question qui s’inspire de la synthèse.

Sujet 6 : Est-il absurde de dire : « je te comprends » ?


A- Définition des concepts
 Absurde : Irrationnel, insensé
 Comprendre : Pouvoir expliquer, prévoir ton comportement
B- Reformulation : La compréhension de l’autre est-elle irrationnelle ? (La
connaissance d’autrui est-elle insensée)
C- Problème : la connaissance d’autrui.

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D- Problématique : Autrui ne demeure-t-il pas un mystère, dans quelles
mesures peut-on le connaitre ?
THESE 1: On ne peut connaître autrui.
Montrer que la connaissance de l’autre est difficile, qu’il demeure un mystère
qui échappe à notre compréhension.
Argument 1 : Autrui est imprévisible, il nous surprend toujours par son
comportement, ses actions et sa réflexion.
Argument 2 : Autrui est une liberté, une conscience qui demeure presque
toujours une arcanne malgré nos efforts de compréhension.
Citations :
1. Montaigne : « l’homme est divers et ondoyant ».
2. Arthur Schopenhauer : « Autrui est un blockhaus impénétrable. »
3. Blaise Pascal : « L’homme n’est donc que déguisement, mensonge et
hypocrisie. »
4. Gottfried Wilhelm Leibniz : « Autrui est une monade » c'est -à- dire
une substance sans porte ni fenêtre. »
5. Jean-Paul Sartre : « L’homme est un être en situation, il change d'une
situation à l'autre. » ou « L’homme est un être en qui il y a du jeu. »
Transition : Bien qu’autrui soit changeant, ne peut-on pas le connaitre dans
une certaine mesure ?
THESE 2 : La connaissance de l’autre est possible.
Montrer qu’il existe des moyens par lesquels nous pouvons essayer de
comprendre l’autre.
Argument 1 : On peut essayer de connaitre l’autre par l’analogie. En effet, à
partir de notre propre comportement, de nos réactions, on peut comprendre les
réactions d’autrui.
Argument 2 : On peut connaitre l’autre par le dialogue, l’amitié. Par le dialogue
sincère, autrui exprime ses pensées et nous dévoile son être.
Citations :
1. Victor Hugo : « Quand je parle de moi, je parle de vous, insensé qui
crois que je ne suis pas toi. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 39


2. Nicolas Malebranche : « Les âmes des autres hommes sont de même
espèce que la nôtre. »
3. Graham Green : « Aucun être humain ne peut en connaître un autre »
Transition : La connaissance de l’autre n’est-elle pas approximative ?
SYNTHESE : On ne peut connaitre l’autre de façon définitive et notre
connaissance de lui est extrêmement volage. Toute connaissance de l’autre ne
peut être que conjecturale.

Sujet 7 : L’antagonisme est-il au cœur des rapports


interindividuels ?
A- Définition des concepts
 Antagonisme : l’opposition, le conflit, la rivalité
 Au cœur : à la base ; le fondement
 Rapports interindividuels : relations humaines

B- Reformulation : Nos relations sont essentiellement conflictuelles

C- Problème : les rapports avec autrui


D- Problématique : quelles est la nature de nos rapports avec autrui, autrui est-
il essentiellement un ennemi ? Ne peut-il pas être un ami ?

THESE 1: Les relations avec autrui sont essentiellement conflictuelles.


Montrer ici que nos échanges avec l’autre sont sous le signe de l’opposition
permanente, de la rivalité.
Argument 1 : Autrui est un danger pour moi, il s’oppose à moi par sa liberté. Il
installe la concurrence, la haine, la jalousie et l’exploitation (Le capitalisme).
L’ampleur des activités criminelles reflète bien la nature des rapports entre les
hommes.
Argument 2 : Autrui est différent de moi et ne partage pas les mêmes positions
que moi. Cette différence entraine souvent le rejet mutuel. Les réalités telles que
la xénophobie, le tribalisme, le racisme sont les conséquences du rejet de l’autre.

Citations
1. Jean-Paul Sartre : « l’essence des relations entre les hommes ce
n’est pas la communication, mais le conflit ».

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2. Jean-Paul Sartre Huis Clos : « l’enfer c’est les autres »
3. Jean-Paul Sartre : « Ma chute originelle, c’est l’existence de l’autre.
»
4. Thomas Hobbes dans Le Léviathan : « l’homme est un loup pour
l’homme ».

Transition : De ce qui précède, il apparait que nos rapports avec autrui sont
conflictuels. Cependant, ne peut-il pas exister d’autres types de rapports ?

THESE 2 : Les autres types de rapports avec autrui

Argument 1 : Autrui et nous pouvons avoir des rapports de fraternité, d’amitié


et d’amour (frères, sœur, mari & femme)
Argument 2 : Autrui et moi pouvons entretenir des rapports professionnels
dans le respect mutuel.

Citations :
1. Georges Gusdorf : « Celui qui se refuse aux autres s’appauvrit »
2. Gabriel Marcel : « Le ciel c’est les autres ».

Transition : Autrui apparait à la fois comme un ennemi et un ami, sa présence


n’est-elle pas indispensable au-delà des rapports que nous entretenons avec lui ?

SYNTHESE : Autrui est mon alter-ego et nous partageons notre existence avec
lui, nos rapports doivent être régis par des lois morales et rationnelles pour éviter
dans la mesure du possible les conflits.

Sujet 8 : Peut-on remédier à l’injustice par la violence ?


A-Définition des concepts
 Peut : Est-il possible
 Remédier : Trouver une solution
 L’injustice : Ce qui est contraire à l a justice, à la morale en général ; le
mal
 Violence : Ici, il s’agit de l’usage de la force (morale ou physique)

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 41


B- Reformulation : La violence peut-elle mettre fin à l’injustice ? La violence
est-elle une solution aux maux de la société ?
C- Problème : La valeur ou le rôle de la violence.
D- Problématique : Dans quelle mesure l’usage de la violence pourrait-il
constituer une solution face à l’injustice ? Devrait-il être proscrit ? Quelles sont
les solutions idoines pour faire régner la justice ?
THESE : La violence comme solution à l’injustice
Montrer le rôle positif de l’usage de la violence, établir que l’usage de la violence
peut être positif
Argument 1 : Le droit naturelle permet l’usage de la force c’est-à-dire de la
violence pour imposer la légitimité.
Argument 2 : L’obéissance à la force est un acte de nécessité car, la force est
contraignante. Les hommes obéissent plus facilement lorsqu’ils sont contraints.
Ainsi la violence permet de faire respecter la norme.
Argument 3 : La justice a parfois recours à la force pour se faire appliquer : c’est
dans ce sens que l’Etat use des moyens de coercitions tels que la police, la
gendarmerie.
Citations :
1. Proudhon : « La violence est le phénomène le plus profond et le plus
sublime de notre vie morale »
2. Héraclite : « Le combat est le père et le roi de tout »
3. Thomas Hobbes : « Les pactes sans les glaives ne sont que des maux »
4. Albert Camus : « la société brandit la tête coupé pour que les candidats
au meurtre y lisent leur avenir et reculent »
Transition : Certes la violence peut aboutir à l’instauration de la justice mais est-
elle le moyen idoine pour restaurer la justice ?
THESE 2 : La violence ne constitue pas une solution à l’injustice.
Montrer que l’usage de la violence ne résout pas le problème de l’injustice. La
violence peut constituer elle-même une forme d’injustice
Argument 1 : La violence est parfois immorale et consacre l’inégalité entre les
faibles et les forts.

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Argument 2 : La violence n’instaure pas toujours l’état de droit mais beaucoup
plus l’état de nature où règne la force et l’arbitraire.
Argument 3 : Il existe d’autres voies pour instaurer la justice telle que le dialogue,
la négociation et le compromis.
Citations :
1. Gandhi : « la violence est la loi de la brute »
2. Paul Ricœur : « Personne ne plaider pour la violence sans se contredire »
3. Martin Luther King : « La guerre naît dans l’esprit des hommes, et c’est
dans l’esprit des hommes qu’il faut combattre la guerre »
Transition : Bien que la violence soit négative dans quelle mesure peut-on
l’utiliser ?
SYNTHESE : Seule la violence légale peut constituer une solution à l’injustice
et pour cela elle doit tenir compte du droit et de la dignité de la personne humaine.
La violence doit être orientée et guidée par la morale ou avoir pour fin le respect
du droit.

Sujet 9 : La réflexion philosophique s’oppose-t-elle à la


tradition ?
A- Définition des concepts
 Réflexion philosophique : Pensée Personnelle et critique.
 S’oppose : Contraire, incompatible, hostile.
 Tradition : Ensemble des vérités et des valeurs acquises et défendues par
un peuple pour être transmises de génération en génération.

B- Reformulation : Une pensée personnelle et critique est-elle incompatible avec


les vérités établies ?
C-Problème : Les rapports de la philosophie avec la tradition, ou la nature de la
philosophie face à la tradition.
D-Problématique : La nature de la philosophie l’oppose-elle à la tradition ? Dans
quelles mesures la philosophie et la tradition peuvent-elles être compatible ?

THESE 1 : La réflexion philosophique est incompatible avec la tradition

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 43


Montrer que la nature même de la philosophie l’oppose au dogmatisme de la
tradition.
Argument 1 : La réflexion philosophique est une critique des modes de
Comportement des hommes dans une société. Le philosophe dit toujours non aux
mauvaises habitudes enracinées dans les consciences. Il ne peut donc pas
conserver un héritage qui n’obéit pas aux principes de raison (objectivités,
universalité)
Argument 2 : Entre les philosophes eux-mêmes, l’accord n’est pas possible. Les
uns critiquent les autres démontrant ainsi que la vérité ne peut être enfermée dans
un dogmatiste ou dans un magister dixit telle que la tradition.
Citation :
E. Njoh-Mouelle : « Le philosophe qui fait office de conservateur de musée est
un pseudo philosophe, inutile à la société » ; « Il n’y a pas de philosophie dans
les proverbes »
Transition : la réflexion philosophique serait donc le rejet systématique des
vérités établies. Mais, cela a-t-il lieu tout le temps ? N’est-il pas aussi possible que
la tradition survive en philosophie ?
THESE 2 : La réflexion philosophique ne s’oppose pas toujours à la tradition
Montrer qu’il existe de points de convergence entre la philosophie et la tradition
Argument 1 : Les ethnophilosophies ont fondent la philosophie dans les mythes,
les contes et les proverbes. Pour eux, la réflexion philosophique conserve un
héritage.
Argument 2 : Au lieu de tout rejeter en bloc, les philosophes reprennent souvent
à cœur les citations de leurs prédécesseurs ; il y a même parmi eux ceux qui
partagent l’essentiel des points de vue d’un autre auteur qu’ils jugent pertinent.
Citation :
Basile Juléat Fouda : « La philosophie nègre doit se transmettre à travers les
âges comme un héritage à recevoir à défendre et à incarner pour atteindre à
l’existence authentique »
Transition : On pourrait donc établir que la réflexion philosophique conserve la
tradition. Dira-t-on alors que la philosophie s’assimile au dogmatisme ?

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SYNTHESE : La réflexion philosophique est un regard critique sur la
tradition
La réflexion philosophique exerce sur la tradition « une critique sans
complaisance » (Marcien Towa). Cette critique n’est pas synonyme de rejet total.
Ce qui s’impose dans la tradition par sa pertinence, le philosophe ne saurait le
remettre en cause. Mais comme la tradition a souvent des limites, la réflexion
philosophique vient à elle pour combattre ses dogmes, ses tabous, qui n’ont
souvent aucune valeur de vérité, ainsi que ses « obstacles épistémologiques ».

Sujet 10 : La science a-t-elle des préoccupations éthiques ?


A- Définition des concepts :

 La science : Connaissance rationnelles et objectives sur un domaine


donné.
 Préoccupations éthiques : Des questions d’ordre moral, des valeurs

B- Reformulation du sujet : La science s’intéresse-t-elle aux questions morales ?


C-Problème : La préoccupation de la science
D-Problématique : Dans quelles mesures la science intègre –t-elle la morale dans
son activité ? Est-elle étrangère à toutes questions d’ordre moral ?

THESE 1 : La science s’intéresse à la morale.


Montrer que l’activité scientifique tient compte des questions d’ordre moral. Que
la science n’est pas étrangère aux valeurs.
Argument 1 : La science améliore la vie par la médecine et la technique ; elle
veut offrir à l’homme des conditions de vie meilleures « La science ne fabrique
pas une morale, elle est elle-même fabriquée par la morale », dit Albert Bayet
Argument 2 : La science développe les qualités morales des hommes en leur
proposant de mener une vie sobre, équilibrée et rationnelle. Elle s’oppose à la
sorcellerie, rend claire et vulgarise le mystère. Elle enseigne la tolérance,
l’honnêteté (confère esprit scientifique) « La science n’est pas seulement une
connaissance, elle est une éducation »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 45


Transition : La science s’occuperait donc de la morale. Mais ne s’implique-t-elle
pas aussi dans des pratiques malsaines qui compromettent la vie ?
THESE 2 : L’activité scientifique ne tient pas toujours compte de la morale
Argument 1 : Les découvertes scientifiques ont des impacts graves sur la vie. La
science est responsable des dommages causés par les bombes par exemple. Cela
est dû au fait que le savant croit savoir tout alors qu’il ignore bien des choses.
Jean Rostand peut donc dire : « La science a fait de nous des dieux avant que
nous ne méritions d’être des hommes »
Argument 2 : La science banalise la vie par les manipulations des laboratoires. Il
n’y a plus d’éthique dans sa façon de faire, elle traite l’homme comme un cobaye.
Argument 3 : Par des compromissions politiques, la science se met au service de
l’hégémonie des grandes puissances et leur donne les moyens d’écraser les autres ;
elle protège les intérêts des individus au lieu de se mettre au service de tous : « Je
croyais qu’un savant était toujours un homme qui cherche une vérité, alors que
c’est souvent un homme qui vise une place », dit Jean Rostand.
Transition : Faut-il donc tourner le dos à la science ? Ne faut-il pas plutôt la
perfectionner ?
SYNTHESE : La nécessité de perfectionner la science
Une science qui nuit à la vie est dangereuse. C’est d’elle que Rabelais parle quand
il dit : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Souvent les drames
qu’on impute à la science sont l’œuvre des hommes politiques quand elles ne sont
pas de simples accidents. Pour retrouver ses lettres de noblesse, la science ferait
mieux de se méfier des recherches qui nuisent à la vie. Elle se consacrera
uniquement à celles qui sauvent. Elle sera donc une science pleine de conscience.
La science actuelle n’a pas encore réalisé ce défi, elle a encore des efforts éthiques
à fournir. D’où l’urgence de la bioéthique par exemple.

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Sujet 11 : L’Etat peut-il permettre l’épanouissement de
l’homme ?
A- Explication des concepts
 Etat : Forme d’organisation sociale, un ensemble d’individus vivant sur
le même territoire et soumis aux même lois et à la même autorité
politique.
 Permettre : Accorder, laisser
 L’épanouissement de l’homme : le bonheur des citoyens.
B- Reformulation : L’Etat est-il un cadre favorable au bonheur des citoyens ?
C- Problème : Le rôle ou la finalité de l’Etat
D-Problématique : L’Etat constitue-il un cadre d’épanouissement de l’homme ?
Ne serait-il pas une réalité aliénante ?
THESE 1 : L’Etat comme cadre de réalisation de l’homme
Montrer le rôle positif (les bienfaits) que l’Etat joue dans le bonheur de l’homme.
Arguments 1 : L’Etat assure la protection des hommes et des biens. Dans la
mesure où il vient mettre un terme à l’arbitraire de l’Etat de nature grâce aux lois.
Argument 2 : L’Etat assure l’égalité entre les citoyens et limites ainsi les abus. Il
assure et garanti la liberté des citoyens. En effet, l’Etat a des devoirs vis-à-vis de
ses citoyens.
Citations :
1. Hobbes : « Le but de l’Etat c’est la paix sociale »
2. Friedrich Hegel : « Loin de l’Etat nous périssons »
3. John Locke : « L’Etat assure la sécurité et le bien-être du peuple »
Transition : Il apparait que l’Etat est un cadre d’épanouissement de citoyens.
Cependant, celui-ci ne limite-t-il pas dangereusement leurs libertés ?
THESE 2 : L’Etat n’est pas toujours un cadre favorable pour l’homme.
Montrer les limites et les aspects négatifs de l’Etat dans le bonheur des citoyens.
Arguments 1 : L’Etat est un frein pour les libertés individuelles. C’est lois
viennent parfois restreindre la liberté. L’Etat assujettit l’homme.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 47


Arguments 2 : L’Etat est un cadre qui consacre les injustices et les inégalités
sociales. Les lois sont parfois l’expression de la domination des riches (forts) sur
les pauvres (faibles).
Citations :
1. Friedrich Nietzsche : « L’Etat est le plus froid de tous les monstres froid »
ou « L’Etat est l’immoralité organisée »
2. Bakounine : « L’Etat est un vaste cimetière où vienne s’enterrer toutes les
manifestations de la vie individuelle »
3. Karl Marx : « L’Etat est le pouvoir organisé d’une classe pour
l’oppression d’une autre »
Transition : L’Etat n’est pas toujours propice à l’épanouissement de l’homme.
Que faire pour l’améliorer.
SYNTHESE : L’Etat a besoin d’être améliorer
Montrer que l’homme est perfectible
L’homme ne peut se passer de l’Etat qui demeure la meilleure forme
d’organisation sociale. Il convient simplement d’améliorer le fonctionnement de
l’Etat.

Sujet 12 : La nature est-elle une œuvre d’art ?


A- Définition des concepts :

 Nature : Ensemble de tous ce qui existe indépendamment de l’action


humaine (ce qui n’a subie aucune action de l’homme).
 Art : Représentation désintéressée et idéale du beau ; ensemble des
activités humaines créatrices qui traduisent cette expression (production de
la beauté par un être conscient).
B- Reformulation : La nature est-elle belle, est-elle la représentation idéale du
Beau.

C- Problème : La définition de l’art. La nature de l’art.

D- Problématique : Qu’est-ce que l’art ? L’art est-il la représentation de la


nature ? N’est –il pas le produit de l’imagination humaine ?

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THESE 1 : L’art est la représentation de la nature (la nature est une œuvre
d’art)
Argument 1 : Il y a de la beauté dans la nature. L’artiste s’inspire de la nature
pour créer, il fait une copie de la beauté naturelle qui est de loin supérieure à la
beauté de l’œuvre de l’artiste. Exemple : La beauté des paysages, du ciel, des
plages, d’un coucher de soleil etc.
Argument 2 : La nature est l’œuvre d’un créateur (la thèse créationniste), c’est-
à-dire d’un esprit conscient. La religion fait de la nature l’œuvre d’un Dieu
créateur.
Citations :
1. Bible : Dieu crée le ciel et la terre

Transition : La nature apparait à bien égard comme une œuvre d’art, mais n’est-
elle toujours belle ? Ne peut-elle pas susciter autre chose que l’émerveillement ?
THESE 2 : L’art est le produit de l’imagination humaine (la nature n’est pas
une œuvre d’art)
Argument 1 : il y a de la laideur dans la nature. La nature ne suscite pas toujours
un sentiment esthétique car il existe des monstres dans la nature, de l’horreur.
Nous avons également le mal. Ainsi l’art ne consiste pas simplement à la copie de
la nature mais la belle copie de celle-ci. La beauté artistique est supérieure à la
beauté naturelle car elle est le produit de l’imagination de l’artiste.
Argument 2 : La nature est issue du hasard : la thèse scientifique du Big Bang.
La nature n’est pas l’œuvre d’un créateur.
Citations :
1. Hegel : Le beau est la manifestation sensible et empirique de l’idée
2. André Malraux : L’œuvre d’art témoigne du génie de l’homme
3. Kant : L’art ne veut pas la représentation d’une chose belle, mais la belle
représentation d’une chose

Transition : L’art est une œuvre exclusivement humaine et la nature est dans ce
sens exclut de son domaine mais peut-on réellement parler de l’art sans la nature ?
SYNTHESE : L’art est une création de l’esprit mais qui s’inspire de la nature. La
nature est la source d’inspiration de l’artiste et celle-ci contient à la fois du Beau

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 49


et du Laid, elle suscite à la fois un sentiment esthétique d’émerveillement et de la
répugnance (dégout, aversion)
Citation :
Maurice Nédoncelle : L’artiste est un créateur mais il ne crée pas ex-nihilo,
il s’inspire de la réalité du monde qu’il parachève.

SUJET 13 : La passion est-elle un mal ?


A- Définition des concepts :
 Passion : C’est une tendance exclusive et prédominante qui s’est faite le
centre de la personnalité et de l’activité du sujet. C’est une inclinaison
durable suffisamment forte pour dominer la vie psychique.
 Mal : ce qui fait souffrir, qui cause de la peine.
B-Reformulation : La tendance exclusive vers un objet ou une chose est-elle
synonyme de souffrance ?
C-Problème : La valeur de la passion, son rôle
D-Problématique : Dans quelles mesures les passions sont-elles pernicieuses ?
Toutes passions sont-elles mauvaises (la passion n’est-elle pas à l’origine des
grandes œuvres ?)
THESE 1 : La passion est une souffrance. (La passion est un mal, elle est
source d’aliénation.)
Argument 1: La passion est immorale, elle fausse le jugement, l’objectivité. Elle
cultive le fanatisme, le dogmatisme et peut même pousser au terrorisme. Elle
détruit la personnalité.
Illustration : Le passionné n’est pas conscient de sa passion, de son inclination.
Elle est source d’erreur. La passion vient obnubiler notre raisonnement. Pour
Kant la passion est le verni de la raison.
Argument 2 : La passion influence notre comportement et est un obstacle à notre
liberté.
Illustration : On ne contrôle plus nos agissements, c’est la passion qui nous guide,
elle nous domine et nous réduit à l’esclavage.

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Citations :
1. Alain : « nos passions sont nos erreurs » (Le désir d’éternité)
2. Kant : « les passions portent le plus grand préjudice à la liberté, elles sont
des maladies de l’âme » (Anthropologie)
3. Ferdinand Alquié : « La passion est inconscience, méconnaissance de son
objet, aversion pour la valeur, obstacle enfin au véritable amour » (Le désir
d’éternité)
4. Corneille : « l’amour est tyran qui n’épargne personne » (Le Cid)

Transition: La passion apparaît comme une source d’aliénation et de souffrance


pour l’homme. Cependant, elle peut également être une source de bien et
d’épanouissement.
THESE 2 : La passion peut être bénéfique pour l’individu.
La passion est le moteur de la vie, de l’action, elle est source de progrès (la passion
est une source de bien, de bonheur.) Pour Hegel « la passion n’est pas toujours
opposée à l’ordre moral »
Argument 1 : La passion nous stimule, elle nous émule. La passion nous permet
de surmonter les difficultés que nous rencontrons dans la vie
Illustration : Quand on veut on peut ! On consacre son énergie, ses potentialités.
La passion peut servir un intérêt moral. C’est le cas de la vocation à la médecine
ou à certains métiers qui peut d’abord obéir à des motivations égoïstes mais servir
plus tard les intérêts de la communauté.
Argument 2 : La passion permet l’épanouissement de l’individu, elle éloigne de
l’ennui. En effet, l’homme passionné se réalise à travers sa passion.
Citations :
1. Hegel : « Rien de grand ne s’est accompli dans ce monde sans passion »
(La raison dans l’histoire)
2. Descartes : « Les passions sont toutes bonnes de leurs natures, nous
n’avons rien à éviter que les mauvais usages et leurs excès » (Les passions
de l’âme)

Transition : Les passions nous permet dans une certaine mesure de nous
épanouir, elles ne sont donc pas dans ce sens une source d’aliénation. L’homme
malgré les risques que peut présenter les passions peut-il se passer d’elle ?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 51


SYNTHESE : Les passions sont inhérentes à la nature humaine.
Elles sont potentiellement bonnes ou mauvaises. Loin de vouloir les supprimer il
convient plutôt de les maîtriser. De les orienter vers des fins qui sont en accords
avec nos valeurs, vers des fins en conscientes et morales. Elles ne représentent
donc pas le signe de notre impuissance.

II. LES SUJETS CITATIONS


SUJET 1: Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Karl
Popper : « Il n’y a de liberté qu’assurée par l’Etat » ?
A- Compréhension du sujet :
Cette affirmation de Popper nous montre que l’Etat est un cadre favorable à la
liberté de l’homme. Popper a une conception positive du rôle que l’Etat joue dans
l’épanouissement de l’homme.
B- Reformulation : L’Etat est le garant des libertés.
C- Problème : Le rôle de l’Etat.
D- Problématique : L’Etat assure-t-il l’épanouissement des individus ? (ou la
liberté véritable est-elle octroyée par l’Etat ?), l’Etat ne peut-il pas être
liberticide ? (ou l’Etat ne peut-il pas aliéner les citoyens ?)
THESE 1 : Explication et justification de la pensée de l’auteur.
Selon Popper, l’Etat apparaît comme garant des libertés individuelles. Il s’agit de
montrer le rôle positif de l’Etat.
Argument 1 : L’Etat avec ses lois est l’expression de la volonté générale. Il assure
la protection des citoyens et garanti leur sécurité. L’homme abandonne certes les
avantages de l’état de nature mais aussi l’arbitraire de celui-ci.
Argument 2 : Dans les Etats démocratiques, l’Etat assure un certain nombre de
libertés aux citoyens : liberté d’expression, de religion, etc. On peut dans ce sens
évoquer les appareils idéologiques de l’Etat (les écoles, les hôpitaux, les mairies).
Citations :
1. Friedrich Hegel : « Loin de l’Etat nous périssons »
2. John Locke : « L’Etat assure la sécurité et le bien-être du peuple »

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Transition : Certes l’Etat apparait comme le garant des libertés de l’homme.
Cependant, ne peut-il pas être liberticide ?
THESE 2 : La liberté n’est pas toujours garantie par l’Etat
Montrer les aspects négatifs de l’Etat.
Argument 1 : Les lois de l’Etat sont parfois liberticides. Cette réalité est beaucoup
plus affirmée dans les Etats totalitaires.
Argument 2 : L’Etat consacre également de nombreuses inégalités et injustices.
Il est un cadre de dépravation de l’homme dans une certaine mesure.
Citations :
1. Friedrich Nietzsche : « L’Etat est le plus froid de tous les monstres froid »
ou « L’Etat est l’immoralité organisée »
2. Bakounine : « L’Etat est un vaste cimetière où vienne s’enterrer toutes les
manifestations de la vie individuelle »
3. Karl Marx : « L’Etat est le pouvoir organisé d’une classe pour
l’oppression d’une autre »
SYNTHESE : L’Etat est perfectible et constitue de nos jours la meilleure forme
d’organisation sociale. Il convient juste de l’améliorer.

Sujet 2 : Que vous suggère cette pensée d’Alain : « l’inconscient


est une méprise sur le moi, c’est une idolâtrie du corps » ?
A- Compréhension du sujet :
Alain nie par cette affirmation l’existence de l’inconscient. Selon lui,
l’inconscient est tout simplement une excuse, une chimère. Il remet clairement en
question la thèse freudienne.
B- Reformulation : l’inconscient n’existe pas, c’est une survalorisation du
pouvoir du corps.
C- Problème : L’existence et la nature de l’inconscient.
D-Problématique : L’inconscient est-il une chimère ? N’existe-t-il pas
réellement ? Qu’est ce qui détermine notre comportement ?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 53


THESE 1 : L’inconscient est une illusion
Il s’agit d’évoquer les arguments qui explicitent la thèse de l’auteur.
Argument 1 : L’homme est doté de raison, il a une conscience de lui-même et
des actes qu’il pose.
Argument 2 : L’homme a une certaine maîtrise de ses pulsions et instincts. Il a
un contrôle de son corps et des actions.
Argument 3 : l’homme est caractérisé par sa liberté qui se manifeste par sa
volonté et son libre arbitre.
Citations :
1. Alain : « Savoir c’est savoir qu’on sait »
2. Sartre : « L’inconscient psychique n’existe pas »
3. Jean-Paul Sartre : « Tout homme qui se réfugie derrière l’inconscient,
tout homme qui se réfugie derrière l’excuse de ses passions, tout
homme qui invente un déterminisme est un homme de mauvaise foi. »
Transition : De ce qui précède, l’homme est véritablement mû par sa conscience
mais doit-on exclure toute possibilité d’un inconscient ?
THESE 2 : L’inconscient existe
Il s’agit de montrer que l’inconscient est une réalité prouvée scientifiquement.
Argument 1 : L’homme n’a pas la totale maîtrise de son corps, de ses pulsions et
instincts ; il existe un inconscient physiologique, psychologique et même social.
Physiologique dans la mesure où certains mécanisme biologique échappent à
notre conscience (la digestion, le vieillissement, etc.)
Argument 2 : L’inconscient se manifeste de plusieurs manières : rêve, actes
manqués, lapsi. Il s’agit ici des manifestations de l’inconscient psychologique.
Argument 3 : La psychanalyse a mis en évidence l’existence des pathologies
d’origines inconscientes. (Cleptomanie, mythomanie, schizophrénie etc.)
Citations :
1. Freud : L’hypothèse de l’inconscient est nécessaire et légitime
2. Freud : L’inconscient est la réalité essentielle de l’appareil psychique
3. Freud : Le moi n’est pas maitre dans sa propre maison

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Transition : Il apparaît que l’inconscient est une réalité irrécusable mais celui-ci
a-t-il autant de pouvoir que lui prête la psychanalyse ?
SYNTHESE : L’homme est mû à la fois par la conscience et l’inconscient.
L’homme ne saurait se réduire à l’inconscient qui bien qu’existant réellement ne
caractérise pas véritablement l’homme. L’homme se singularise des autres êtres
vivants dans la mesure où il est conscient et donc libre et responsable de ses actes.

Sujet 3 : Que vous suggèrent ces propos Galilée : « l’univers est


écrit en langage mathématique » ?
A- Compréhension du sujet
Selon Galilée, les mathématiques qui sont ici le modèle des sciences sont aptes à
expliquer la réalité dans sa totalité. La réalité peut donc se traduire en termes de
scientifiques.
B- Définition des concepts :

 L’univers : Ensemble de ce qui existe.


 Langage : système de signe permettant l’expression et la communication
de la pensée
 Mathématique : Science des grandeurs mesurable (science des nombres)
C- Reformulation : Tout ce qui existe est-il quantifiable et mesurable ? Peut-on
comprendre tout ce qui existe ?

D-Problème : La capacité réelle des mathématiques ou de la science à expliquer


le monde (en d’autres termes la valeur réelle des mathématiques qui sont le
modèle des sciences).

E- Problématique : Peut-on tout expliquer par les chiffres ? N’existe-t-il pas des
réalités qui échappent à la mesure et la quantité ?

Ou La sciences est-elle apte à apporter une explication à la totalité du réel ? Dans


quelles mesures certaines réalités lui échappent-elles ? Quelle serait la valeur de
la science ?

THESE 1 : Les mathématiques (les sciences) expliquent la nature (l’univers


est explicable scientifiquement)

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 55


Argument 1 : La nature entière est régie par les lois qui sont susceptibles d’être
formaliser par les mathématiques. On peut expliquer les phénomènes par des
formules mathématiques. La loi de la causalité
Argument 2 : L’univers est une réalité matérielle qui est entièrement quantifiable.
La science obéit au principe du matérialisme qui voudrait que seule la matière
existe. Toute matière étant quantifiable est par conséquent mathématisable.
1. Hegel : « Tout ce qui est réel est rationnel et tout ce qui est rationnel est
réel »
2. Pythagore : « Tout est nombre »
3. Léon Brunschvicg : « Connaître, c’est mesurer »

Transition : On peut traduire par des formules mathématiques les phénomènes


naturelles mais les mathématiques suffissent-elles à expliquer toute la nature ?
THESE 2 : On ne peut pas expliquer tout par les mathématiques (l’univers
ne s’écrit pas totalement en langage mathématique).
Argument 1 : Il existe des phénomènes naturelles qui ne sont pas mesurable : les
sentiments, les passions et les émotions, la durée, le plaisir. Ainsi on ne peut pas
expliquer ces phénomènes par des formules mathématiques.
Arguments 2 : La réalité n’est pas seulement matérielle et est également
immatérielle, elle est également invisible. La science ne s’applique pas à la totalité
de la réalité et elle n’arrive pas encore à expliquer le monde dans sa totalité. On
ne prévoit pas tout, le devenir nous échappe encore tout comme l’origine du
vivant.
1. Henri Bergson : « Les mathématiques ne s’appliquent qu’à un aspect du
réel. »
2. Renan : « Les mathématiques, sciences de l’éternel et de l’immuable, sont
la science de l’irréel. »
3. Albert Einstein : « Les mathématiques ne réfèrent au réel, elles
n’apportent pas de certitudes, et quand elles apportent des certitudes, elles
ne se réfèrent pas au réel. »

Transition : Certains phénomènes de la nature échappent à la dictature de la


mesure et de la quantité mais ceci suffit-il à décrédibiliser les mathématiques ?
SYNTHESE : Les mathématiques (la science) participent à la compréhension du
monde. Elles ne sont pas la seule forme de compréhension du monde qui est une

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réalité complexe et multidimensionnelle. De plus, la science est évolutive et
heuristique, la recherche est donc dynamique et ne connais pas de limites dans la
continuité.

Sujet 4 : Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Jean-


Paul Sartre : Il n’y a pas de nature humaine puisqu’il n’y a pas de
Dieu pour la concevoir » ?
A- Compréhension du sujet
Cette affirmation de Sartre fait l’économie de sa thèse qui est un existentialisme
athée. En effet, Sartre professe la liberté de l’homme par la négation de l’existence
de Dieu. L’existence de Dieu serait inévitablement un frein à la liberté de l’homme
car, elle véhicule et suppose un déterminisme.
B- Reformation : L’homme est libre car dieu n’existe pas.
C-Problème : La nature et la liberté humaine.
D-Problématique : Dans quelle mesure l’homme est-il libre, Ne subit-il aucun
déterminisme ? L’existence de Dieu serait-elle par nature incompatible avec toute
idée de liberté de l’homme ?

THESE : Il n’y a pas de nature humaine (affirmation de la liberté de


l’homme)
Il s’agit ici d’expliquer et de justifier la thèse de l’auteur.
Argument 1 : L’homme est libre et se façonne lui-même par ses choix. C’est la
conscience et la volonté humaine qui sont à l’origine de ses actions.
Argument 2 : Dieu n’existe pas et l’homme est le produit de l’évolution
(Darwin). Les hommes sont tous différents et ne sont pas déterminés d’avance par
des lois.
Citations :
1. Sartre : « L’existence précède l’essence » ou « l’homme n’est rien d’autre
que ce qu’il se fait »
2. Georges Bataille : « L’homme est l’animal qui n’accepte pas simplement
le donné naturel, qui le nie »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 57


Transition : L’homme est certes libre mais ne connais-t-il pas des contraintes ?
THESE : Il existe une nature humaine
Montrer que l’homme possède une nature, qu’il n’est pas totalement libre.
Argument 1 : L’homme connaît certains déterminismes qui le conditionnent : il
a un inconscient. Il est influencé par la société, la religion.
Argument 2 : L’homme fait partie de la nature et est soumis à ses lois. L’homme
est un être limité dans le temps et l’espace, il y a des réalités qui échappent à sa
volonté, à son entendement.
Citations :
1- Spinoza : « L’homme n’est pas un empire dans un empire »
2- Freud : « Le moi n’est pas maître dans sa propre maison »

Transition : La liberté humaine est-elle une utopie ?


SYNTHESE : L’homme est un être limité mais qui est capable de dépasser les
déterminismes. L’idée de Dieu n’est pas antinomique avec celle de liberté, il
existe d’ailleurs un existentialisme chrétien. (Mounier, Teilhard de Chardin)
1. Montaigne : « L’homme est divers et ondoyant »
2. Georges Bataille : « L'homme est l'animal qui n'accepte pas simplement le
donné naturel, qui nie. »
3. Merleau-Ponty : « Il est impossible de superposer chez l'homme une
première couche de comportements que l'on appellerait naturel et un
monde culturel ou spirituel fabriqué. Tout est fabriqué et tout est naturel
chez l'homme. »

Sujet 5 : Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Karl


Marx : « Chaque individu est le produit des circonstances
existentielles ; mieux des conditions sociales dans lesquelles il se
trouve » ?
A- Compréhension du sujet
Marx a une conception matérialiste de l’homme. Pour lui, notre personnalité est
totalement conditionnée par notre environnement. L’homme est le produit de son
milieu.

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B- Reformulation : L’homme est le produit des facteurs sociaux dans lesquelles
il se trouve. (C’est nos conditions de vie qui déterminent notre personnalité)
C-Problème : La formation de la personnalité.
D-Problématique : L’homme est-il le produit de sa condition sociale ? N’est-il
déterminé par d’autres facteurs ? Qu’est ce qui fonde véritablement sa
personnalité ?
THESE 2 : L’homme déterminé pas ses conditions sociales.
Argument 1 : L’homme est influencé par sa société à travers : l’éducation, la
tradition, la religion etc.
Argument 2 : Les conditions d’existence et la classe sociale d’un homme
détermine sa personnalité.
Citation :
Georges Gusdorf : « Le paysage fait partie de notre être »
Transition : Certes l’homme est influencé par la société mais peut-on réduire son
comportement à l’influence de celle-ci ? Ne peut-il pas être influencé par autre
chose ?
THESE 2 : L’homme est déterminé par d’autres facteurs.
Argument 1 : Les facteurs physiologiques et psychologiques : le caractère, le
tempérament et l’émotivité. L’hérédité
Argument 2 : L’homme est un être libre qui a une volonté, il peut donc s’opposer
au déterminisme social.
Citation :
Spinoza : « l’homme n’est pas un empire dans un empire »
Transition : L’homme est façonné par de nombreux déterminisme au fil de son
existence. Cependant qu’est-ce qui caractérise essentiellement sa personnalité ?
SYNTHESE : L’homme subit de nombreuses influences qui façonnent sa
personnalité cependant, il est caractérisé par sa liberté, il est capable de se
transcender et de se libérer continuellement de ses déterminismes.
Citation :
Jean-Paul Sartre : « L'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 59


Sujet 6 : Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Lucien
Malson Dans Les enfants sauvages : « L’homme n’a pas de nature,
il a ou il est une histoire » ?
A- Compréhension du sujet
Lucien Malson reformule en quelque sorte la thèse sartrienne, l’homme est maître
de sa destinée (ici de son histoire). Il a une histoire c’est-à dire qu’il est le produit
ou la somme de ses différentes expériences. Il est le produit de ses propres choix
(il est son histoire)

B- Définition des concepts :


 L’homme : Animal raisonnable.
 Nature : Ensemble des caractères invariants, ce par quoi une chose se
défini. Dans ce conteste la nature prend l’extension de destinée.
 Histoire : Ensemble d’évènements qui s’enchainent dans le temps. Par
extension liberté

C- Reformulation : L’homme n’a pas de destin, il, est libre. Malson reformule et
soutient en quelque sorte la thèse existentialiste selon laquelle l’homme est ce
qu’il se fait.
D-Problème : La nature humaine (La question de la liberté).
E-Problématique : L’homme est-il responsable de ce qu’il est ? N’est-il pas
déterminé ? En quoi consiste véritablement la liberté de l’homme ?

THESE 1: L’homme est totalement libre.


Montrer que l’homme est effectivement maître de son histoire, qu’il est le produit
et l’acteur de cette histoire. Il s’agit de reprendre en quelque sorte les arguments
de l’existentialisme.

Argument 1 : L’homme possède un libre arbitre par lequel il fait des choix
volontaires et conscients.
Argument 2 : L’homme est une liberté qui est capable de changement, l’homme
est imprévisible.
Argument 3 : L’homme change par le temps, c’est-à-dire il est le produit de ces
différentes expériences existentielles.
Citations :
1. Jean-Paul Sartre : « l’homme est ce qu’il se fait » ou « il n’y a pas de
nature humaine »
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2. Georges Bataille : « L’homme est l’animal qui n’accepte pas simplement
le donné naturel, qui le nie »
Transition : Bien que l’homme soit un être libre, n’est-il soumis à aucune
influence ?

THESE 2 : L’homme n’est pas totalement maître de son existence.


Montrer que l’homme subit de nombreuses influences. Il s’agit en quelque sorte
de reprendre l’argumentaire de l’essentialisme.

Argument 1 : L’homme connaît un déterminisme psychologique avec


l’inconscient.
Argument 2 : L’homme connaît un déterminisme physiologique : les lois de
l’hérédité et de la génétique.
Argument 3 : L’homme apparait comme le produit de sa destinée dans la
religion : il a un Karma ou un destin. Nous pouvons évoquer le stoïcisme.

Citations :
1. Freud : « Le moi n’est pas maître dans sa propre maison. »
2. Spinoza : « L’homme n’est pas un empire dans un empire. »

Transition : Bien que l’existence humaine soit influencée par de nombreux


déterminisme, l’homme peut-il affirmer sa liberté ?

SYNTHESE : La liberté de l’homme est un dépassement constant des


déterminismes.
Montrer que l’homme affirme sans cesse sa liberté face aux différentes influences.

Sujet 7 : Que vous suggèrent ces propos de Thomas Hobbes dans


Léviathan : « La justice se ramène au droit qui est l’expression de la
force » ?
A- Compréhension du sujet
Thomas Hobbes traduit ici le fait que le droit se fonde sur la force. La justice n’est
ni plus, ni moins que le droit du plus fort.
 Justice : Ce qui est conforme au droit, vertu par laquelle on rend à chacun
ce qui lui est dû
 Droit : Ensemble des règles qui indiquent ce qui est permis et interdit
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 61
 Force : Puissance de domination, de contraindre
B-Reformulation : La justice se ramène au droit de la force (au droit naturel)
C-Problème : Le fondement (ou nature) du droit et de la justice
D-Problématique : Le droit se fonde-t-il exclusivement sur la force ? Ne peut-il
pas avoir d’autres fondements ?
THESE 1 : La force comme fondement du droit
Argument 1 : La force est une puissance coercitive : on se soumet à la force par
contrainte.
Argument 2 : Le droit de la force est un droit naturel et qui régit les rapports entre
individus en l’absence de toute réglementation.
Argument 3 : Les rapports entre Etats aujourd’hui sont des rapports de forces
(communauté internationale, Conseil de sécurité, nucléaire, G8)
Citations :
1. Spinoza : « Les gros poissons ont tendance à avaler les plus petits.
Chaque individu possède autant de droit qu’il a de puissance. »
2. Calliclès, Gorgias : « je crois que ce qui est juste est que les forts
commandent les plus faibles. »
3. Dicton : Le droit du plus fort est toujours le meilleur

Transition : Au regard de ce qui précède la force est l’un des fondements du


droit, mais le droit ne peut-il pas avoir d’autres fondements, d’autres sources ?

THESE 2 : Les limites du droit de la force L’existence d’autres sources du


droit et de la justice
Argument 1 : Le droit de la force est éphémère, il ne peut durer et change
constamment en fonction de la force. C’est le cas dans les pays à régime totalitaire
où la justice est soumise à l’arbitraire des dirigeants.
Argument 2 : Le droit de la force est immoral, il va parfois à l’encontre de l’idéal
de justice.
Argument 3 : Il existe d’autres fondements du droit tels que : la tradition, la
religion.

Transition : Le droit de la force n’obéit pas toujours à l’idéal de justice, mais le


droit peut-il se passer de la force ?
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SYNTHESE : La force est parfois nécessaire pour faire appliquer le droit. Le
droit s’impose plus facilement lorsqu’il est accompagné de force. Cependant,
l’usage de la force doit être orienté dans le service de la justice c’est-à-dire il doit
être encadré par les valeurs morales.
Citation :
Blaise Pascal : « La justice sans la force est impuissante, la force sans la
justice est tyrannie »

Sujet 8 : Que vous suggèrent ces propos de Karl Marx dans


Thèses sur Feuerbach : « Les philosophes n'ont fait qu'interpréter
diversement le monde. Ce qui importe, c'est de le transformer. » ?
A- Compréhension du sujet
Selon Karl Marx, Les philosophes sont des rêveurs, ils n’apportent aucune
solution aux problèmes de l’homme. Leurs discours sont essentiellement
théoriques et spéculatifs pourtant le plus important serait d’apporter des solutions
concrètes et pratiques aux problèmes que rencontre l’homme.
 Les philosophes : Les amoureux de la sagesse.
 Interpréter le monde : Spéculations vaines ; discours inutiles.
 Ce qui importe : Ce qui est important, qui est nécessaire.
 Transformer : Le développer, le dominer.
B- Reformulation : les philosophes ne font que spéculer sur le monde au lieu de
le développer ou Les philosophes ne font que des discours sans impacts sur la
vie.
C- Problème : Le rôle ou la valeur de la philosophie.
D- Problématique : La philosophie est-elle un discours suranné et futile ? Dans
quelle mesure ce discours est-il important dans l’existence de l’homme ?

THESE 1: La philosophie est inutile.


Il s’agit ici de montrer les aspects négatifs de la réflexion philosophique.
Argument 1 : Il existe de nombreuses contradictions entre les philosophes. C’est
une réflexion qui est sans cesse remise en questions par les philosophes eux-
mêmes.
Argument 2 : Les philosophes apparaissent comme des subversifs, des rêveurs
qui sont totalement détacher des préoccupations concrètes de l’existence

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 63


quotidienne. La science par contre apporte des solutions concrètes aux solutions
de l’homme (Médecine, transport, alimentation etc.)
Argument 3 : La réflexion philosophique est abstraite et spéculative. C’est le cas
en métaphysique. Les limites de la philosophie semble découler de sa nature
même puisqu’elle est une réflexion critique vis-à-vis d’elle-même et de tout.

Citations :
1. Clément Rosset : « Il ne faut compter sur la philosophie pour trouver des
raisons de vivre »
2. Maurice Duverger : « La philosophie doit céder la place aux nouvelles
humanités que sont la science et les techniques »
3. Goblot : « Toute connaissance qui n’est pas scientifique n’est pas
connaissance, mais ignorance »
4. Clémenceau : « Si j’avais une province française à punir, je la ferai
gouverner par un philosophe »

Transition : La philosophie apparaît comme obsolète et futile face aux difficultés


que rencontre l’homme. Néanmoins, la philosophie ne conserve –t-elle pas sa
valeur au-delà de ces critiques ?

THESE 2 : L’importance de la philosophie.


Montrer les aspects positif de la philosophie, il s’agit de réhabiliter celle-ci au-
delà des critiques qu’on vient d’établir.
Argument 1 : La philosophie éclaire l’action humaine. La connaissance
philosophique guide l’homme dans la quasi-totalité des domaines de l’existence :
Politique, Morale, Religion, Science, etc.
Argument 2 : La philosophie est à la base des savoirs et des sciences. En effet,
c’est un discours rationnel qui a permis de démythiser et de démystifier le monde.
Les sciences et les techniques ne se distinguent de la philosophie que par
spécialisation et singularisation. (Cf. La métaphore cartésienne de l’arbre)
Argument 3 : L’existence humaine ne rencontre pas seulement des problèmes
matériels, l’homme se pose également des questions métaphysiques auxquels la
science ne saurait apporter des réponses. C’est le cas en religion avec la question
de Dieu, de l’âme, de la vérité. La philosophie éclaire également l’homme dans le
domaine axiologique.

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Citations :
1. René Descartes : « C’est proprement avoir les yeux fermé sans jamais
tacher de les ouvrir que de vivre sans philosopher. » Ou « le plus grand
bien qui puisse être dans un Etat est d’avoir de vrais philosophes. »
2. Karl Jaspers : « Ne pas philosopher c’est être réduit à l’animalité »
3. E. Njoh Mouelle : La philosophie n’est pas et ne saurait être cette
spéculation brumeuse détachée de la réalité et des problèmes concrets des
hommes » ou « l’initiative philosophique est indétachable des
préoccupations pratiques »

Transition : Le discours philosophique garde toute sa valeur et reste d’actualité,


ne convient-il pas de l’orienter vers des questions plus pratiques que
spéculatives ?
SYNTHESE : La nécessité d’orienter la philosophie
Il s’agit de montrer que l’homme ne peut se passer de la philosophie mais qu’il
convient de l’orienter également vers des questions d’ordre pratique. La
philosophie est fille de son temps, il convient donc d’actualiser son discours.
Citation :
Karl Marx : « La philosophie n’est pas extérieure au monde » ou « Les
philosophes ne sortent pas de terre comme des champignons, ils sont le produit
de leurs époque »

Sujet 9 : Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Nietzsche


dans Ainsi Parlait Zarathoustra : « Là où cesse l’Etat, c’est là où
commence l’homme. » ?
A-Compréhension du sujet
Nietzsche est un anarchiste qui a une conception péjorative de toutes les formes
d’organisations qui empêcherait l’homme d’être libre. Selon lui, l’Etat serait un
cadre d’aliénation de l’homme.
B- Reformulation : L’Etat est un obstacle à l’épanouissement de l’homme ou
l’homme n’est homme qu’hors de l’Etat.
C-Problème : Le rôle de l’Etat.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 65


D-Problématique : L’Etat constitue-t-il un obstacle à l’humanisation de
l’homme ? Dans quelles conditions l’homme peut-il s’épanouir au sein de l’Etat ?
L’Etat n’est-il pas la meilleure forme d’organisation humaine ?

THESE 1 : L’Etat comme cadre d’aliénation de l’homme.


Il s’agit ici d’expliquer et de justifier la pensée de l’auteur en montrant les aspects
négatifs de l’Etat.
Argument 1 : L’Etat vient consacrer les inégalités sociales et les injustices.
Argument 2 : L’Etat ne permet pas l’expression de la liberté de l’homme ; il
encadre celle-ci par des lois quelques fois liberticides.
Argument 3 : L’Etat possède plus de droit que l’individu et à les moyens de
répression. C’est le cas des Etat totalitaires.
Citations :
1. Friedrich Nietzsche : « L’Etat est le plus froid de tous les monstres froid »
ou « L’Etat est l’immoralité organisée »
2. Bakounine : « L’Etat est un vaste cimetière où vienne s’enterrer toutes les
manifestations de la vie individuelle »
3. Karl Marx : « L’Etat est le pouvoir organisé d’une classe pour
l’oppression d’une autre »
Transition : L’Etat semble être hominicide c’est-à-dire qu’il est un obstacle à
l’épanouissement de l’homme. Cependant ne peut-il pas être une source de bien
être pour l’homme ?
THESE 2 : L’Etat comme cadre d’épanouissement de l’homme.
Argument 1 : L’Etat consacre l’égalité de citoyen grâce à la loi. Il crée un état de
droit qui protège les hommes et les biens.
Argument 2 : L’Etat offre à l’homme un cadre d’humanisation à travers : les
écoles, les hôpitaux, les routes.
Argument 3 : L’Etat permet les conditions d’épanouissement de l’homme et
garantie sa liberté dans le cadre de la légalité
Citations :
1. Hobbes : « Le but de l’Etat c’est la paix sociale »

66
2. Friedrich Hegel : « Loin de l’Etat nous périssons »
3. John Locke : « L’Etat assure la sécurité et le bien-être du peuple »
Transition : Au-delà des différentes formes que prendre un Etat avec les abus et
avantages qui peuvent en découler. Quelle serait la forme idoine d’un Etat pour
l’épanouissement de l’homme ?
SYNTHESE : L’Etat doit être conçu par la volonté générale des populations qui
le forme. Il doit donc être au service des hommes qui choisissent eux-mêmes leurs
institutions et les hommes qui les gouvernent. Dans ce sens l’Etat démocratique
semble plus indiqué pour garantir les libertés individuelles.

Sujet 10 : Peut-on dire avec Sartre que « Toute conscience poursuit


la mort de l’autre » ?
A-Compréhension du sujet
Sartre souligne l’aspect conflictuel des relations intersubjectives. Nos rapports
avec autrui sont sous le signe de la rivalité et de l’opposition. Poursuivre la mort
de l’autre c’est l’annihiler c’est la manifestation par excellence même du conflit.
B- Reformulation : Toute personne s’oppose à une autre ou nos relations sont
toujours conflictuelles.
C-Problème : Les rapports avec autrui.
Problématique : Les rapports avec l’autre sont-elles exclusivement
conflictuelles ? N’existent-ils pas d’autres types de rapports ? Comment envisager
nos relations ?
THESE 1 : Les rapports avec autrui sont conflictuels.
Il s’agit de montrer que c’est l’opposition qui caractérise les relations humaines.
Argument 1 : L’homme possède des germes criminogènes et belligènes. C’est
cet ensemble que Freud désigne comme étant des pulsions de mort ou thanatos.
Ainsi, l’homme s’oppose naturellement aux autres, cette opposition est inhérente
de sa nature. En effet la conscience est par nature égoïste et c’est dans
l’affrontement qu’elle s’affirme.
Argument 2 : Pour Sartre, Autrui est un obstacle à notre épanouissement, il nous
néantise et nous chosifie par son regard.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 67


Argument 3 : La société humaine apparait comme un cadre d’affrontement entre
individus. Elle est un cadre criminogène. L’actualité mondiale est
quotidiennement jalonnée par des crimes.
Citations :
1- J. P. Sartre : « L’enfer c’est les autres » ou « Ma chute originelle, c’est
l’existence de l’autre. »
2- Fichte : « Le moi se pose en s’opposant. »
3- Thomas Hobbes : « L’homme est un loup pour l’homme. »
4- Friedrich Hegel : « Les consciences sont en perpétuel conflit à mort. »
Transition : Certes nos rapports avec autrui sont de nature difficile et
conflictuelle. Mais n’existent-ils pas d’autres formes de rapports moins difficiles ?
THESE 2 : Les rapports avec autrui ne sont pas toujours conflictuels
Montrer qu’il existe d’autres formes de rapports avec l’autre que ceux-ci ne sont
pas que négatifs.
Argument 1 : Les rapports avec autrui peuvent être amicaux ou amoureux. Autrui
apparaît dans ce cadre comme une source d’épanouissement pour nous.
Argument 2 : Nous avons également des rapports professionnels et fraternels
dans le respect mutuel.
Argument 3 : L’homme est un animal social et a besoin de l’autre dans son
existence.
Citations :
1- Gabriel Marcel : « Le ciel c’est les autres. »
2- Seydou Badian : « L’homme n’est rien sans ses semblables. Il vient par
leurs mains et s’en va dans leurs mains. »
3- Aristote : « L’homme est un animal qui périt loin des siens. »
Transition : Certes nos rapports avec autrui apparaissent comme positifs mais ne
convient-il pas de règlementer ces rapports ?
SYNTHESE : Le nécessite de régir nos rapports avec autrui.
Montrer ici qu’autrui est une nécessité. On en e peut se passer de lui et loin de
laisser nos rapports sous l’arbitraire des humeurs et des affections, il convient de
les encadrer par des valeurs de respect et d’acceptation mutuel. Au besoin, les lois
sociales sont un guide pour réglementer nos relations.

68
Sujet 11 : Partagez-vous cette affirmation de Voltaire : « Si Dieu
n’existe pas, il faudrait l’inventer » ?
A- Compréhension du sujet
Voltaire affirme ici son théisme et la nécessité de l’existence de Dieu dans
l’existence de l’homme. L’idée de Dieu est une nécessité car, sa négation a des
conséquences négatives dans l’existence. L’existence de Dieu garantit la morale.
B- Reformulation : Il est nécessaire de croire à l’existence de Dieu.
C-Problème : La valeur de l’existence de Dieu.
D-Problématique : L’idée de l’existence de Dieu est-il une nécessité pour
l’existence humaine ? L’homme ne peut-il pas se passer de Dieu ?
THESE 1 : L’utilité de l’existence de Dieu ou la valeur positive de l’existence
de Dieu.
Il s’agit de montrer ici que l’homme a besoin de croire à l’existence de Dieu.
Argument 1 : Dieu est le garant des valeurs morales. En effet, l’homme croit à
certaines valeurs qui sont directement rattachées à l’existence de Dieu. Dieu est
garant de la vérité, la justice etc.
Argument 2 : L’existence de Dieu vient donner un sens à notre existence et à
celle du monde. Un monde sans Dieu apparaîtra comme chaotique.
Argument 3 : Dieu est la garantie de l’immortalité de l’âme. Si Dieu existe
l’homme peut orienter son existence dans la poursuite du bien et espérer
l’immortalité. C’est la doctrine de la rétribution.
Citations :
1. Dostoïevski : « Si Dieu n’existe pas tout serai permis »
2. Blaise pascal : Le pari pascalien (l’homme a tout à gagner si Dieu existe et
n’a rien à perdre au cas où il n’existe pas)
Transition : De ce qui précède l’existence de Dieu est positive dans l’existence
de l’homme. Cependant, la croyance en cette existence n’a-t-elle pas des
conséquences néfastes ?
THESE 2 : L’homme peut se passer de l’existence de Dieu ou la valeur
négative de l’existence de Dieu.
Il s’agit de montrer que l’idée de l’existence de Dieu a également des
conséquences négatives. Que celle-ci n’est pas nécessaire pour l’homme.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 69


Argument 1 : L’idée de l’existence de Dieu apparaît comme antinomique avec
celle de la liberté de l’homme. C’est la thèse de l’existentialisme athée de J. P.
Sartre.
Argument 2 : L’existence de Dieu est une question de foi et non de raison. Elle
peut donc être remise en question rationnellement.
Argument 3 : La science semble apporter des solutions concrètes aux problèmes
matériels de l’homme. Et elle donne une explication rationnelle à l’existence et
au monde. Ce qui décrédibilise de plus en plus la religion avec l’existence de
Dieu.
Citations :
1- Alphonse de Lamartine : « Dieu n’est qu’un mot rêvé pour expliquer
le monde ».
2- Nietzche : « Dieu est mort, que vive le surhomme »
3- Jean-Paul Sartre : « Même si Dieu existe, il faudrait le nier »
4- Karl Marx : « le christianisme accomplit théoriquement en sa qualité
de religion achevée l’auto-aliénation de l’homme par rapport à soi et à
la nature.»
Transition : Certes l’idée de Dieu a été remise en question et même décrédibilisée
par la science, ne convient-il pas de reconsidérer celle-ci ?
SYNTHESE : L’idée de Dieu est une nécessité dans l’existence de l’homme.
Montrer que la question de l’existence de Dieu fait partie des questions
fondamentales de l’homme. L’homme est un être religieux par nature. Cependant,
il faut séparer les questions de foi des questions de science. De plus, La question
de Dieu ne doit pas donner lieu aux différentes formes de fanatismes et de
radicalismes (jihad, terrorisme, sectes, croisade).

Sujet 12 : Que vous suggère ces propos de Thomas Hobbes :


« L’homme naît mauvais, c’est la société qui le rend bon » ?
A- Compréhension du sujet
Pour Thomas Hobbes, la société a un rôle positif dans l’hominisation de l’homme.
C’est dans la société que l’homme accède aux valeurs morales qu’il n’avait pas à
l’état de nature. Il présente par cette affirmation sa conception optimiste de la
société.
B- Reformulation : C’est la société qui améliore la nature humaine.

70
C- Problème : Le rôle de la société.
D- Problématique : La société est-elle un cadre d’humanisation de l’homme ?
N’a-t-elle pas un rôle actif dans la dépravation des mœurs ? Quelle est la valeur
de la société dans le processus d’humanisation de l’homme ?
THESE 1 : La société a un rôle positif dans l’humanisation de l’homme.
Il s’agit ici d’expliquer et de justifier la pensée de Hobbes et montrant les aspects
positifs de la société.
Argument 1 : Dans la société l’homme accède aux valeurs morales telles que le
respect d’autrui.
Argument 2 : Dans la société l’homme quitte l’état de nature qui est considéré
selon Hobbes comme un état de violence. C’est la dictature de l’instinct avec
comme corollaire l’immoralité.
Argument 3 : Dans la société l’homme développe ses talents, ses potentialités. Il
accède aux valeurs humaines grâce à l’éducation. Son comportement et ses
actions sont éclairées par les lumières de la raison.
Citations :
1. Aristote : « L’homme est un animal politique »
2. Jean-Jacques Rousseau : « c’est la société qui d’un animal stupide et
borné fit un être intelligent et un homme »
3. David Hume : « L’union des forces accroit notre pouvoir, la division des
taches accroit notre capacité, c’est ce supplément de force, de capacité et
de sécurité qui fait l’avantage de la société.
4. Hegel : « L’Etat de nature est l’état de rudesse, de violence et d’injustice.
Il faut que les hommes sortent de cet état pour constituer une société »
Transition : La société participe sans doute à l’épanouissement de l’homme mais
n’a-t-elle pas également un impact négatif ?

THESE 2 : La société comme cadre de dépravation de l’homme


Il s’agit de montrer les aspects négatifs de la société. Celle-ci participe à
l’acquisition des comportements déviants.
Argument 1 : La société est un cadre de dépravation des mœurs dans la mesure
où l’homme peut acquérir des pseudo-valeurs comme l’individualisme, le
matérialisme etc.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 71


Argument 2 : La société ne présente pas toujours des modèles de comportement
positifs. En effet, nous avons aujourd’hui une dépravation des généralisés des
mœurs. Des domaines comme l’éducation, la religion et même la justice sont
corrompus.
Argument 3 : La société est le siège des inégalités, elle est un cadre de rivalité
entre les hommes. L’homme
Citations :
1. Rousseau : « L’homme naît bon, c’est la société qui le corrompt » ou « tout
est bien sortant des mains de l’auteur des choses, tout dégénère entre les
mains de l’homme ».
2. Jean Daniélou : « partout où il y a des hommes, il y a de l’hominerie »
Transition : La société participe d’une certaine manière à la dépravation de
l’homme, ne convient-il pas de l’améliorer ?

SYNTHESE : La nécessité d’une société au service de valeurs morales.


Il s’agit de montrer que puisque l’homme vit nécessairement au sein d’une société,
il convient d’améliorer celle-ci pour qu’elle soit véritablement un cadre
d’humanisation de l’homme. La société dépend des individus qui la constituent.
Ainsi, l’homme serait tel que la société l’a voulu mais la société serait également
telle que l’homme l’a pensé. Ces deux réalités s’influencent.

Sujet 13 : Que vous suggère ces propos de Laroche Foucault : « Les


vertus se perdent dans l’intérêt comme les fleuves dans la mer » ?
A- Compréhension du sujet
L’auteur montre ici la relativité de la morale. Les bonnes actions que l’on pose
dépendent des intérêts. Il s’agit également de montrer que la morale disparait
devant les intérêts, autrement dit l’homme n’obéit aux valeurs morale qu’en
fonction de son intérêt et peut aller jusqu’à perdre toute notion de morale dans
certaines circonstances.
B- reformulation : La morale varie en fonction de l’intérêt
C- Problème : La nature ou le fondement de la morale
D-Problématique : La morale ne se fonde –t-elle que sur l’intérêt ? N’existe-t-il
pas des actions morales totalement désintéressées ?

72
THESE 1 : L’intérêt est au fondement de l’action morale
Il s’agit de montrer que l’action morale n’est guidée et motivée que par l’intérêt.
Argument 1 : La morale de l’intérêt. L’homme pose plus facilement des actes qui
lui rapportent un intérêt, un bénéfice.
Argument 2 : La morale du plaisir. L’homme agit plus facilement pour se faire
plaisir, ses actions sont motivées par son autosatisfaction.
Argument 3 : Dans l’utilitarisme (Stuart Mill et Bentham) ; La moralité consiste
à la recherche de ce qui est utile sur le plan matériel. La vertu vise donc une
satisfaction matérielle basée sur le calcul. La bonne action c’est celle qui rapporte
et qui conduit au bonheur matériel.
Citations :
1. Maxime des utilitaristes : « Pas d’intérêt, pas d’action »
2. La Rochefoucauld : « Les vertus se perdent dans l’intérêt comme les
fleuves dans la mer »
3. Jeremy Bentham : « Les plus vicieux des hommes tout comme les plus
vertueux ont des motifs absolument semblables ; tous se proposent
d’accroitre leur plaisir »
Transition 1 : Le critère du bien semble être le plaisir et l’intérêt mais peut-on
réduire l’action morale à ceux-ci. N’existe-t-il pas d’autres critères du bien
(l’homme ne peut-il pas agir de manière désintéressé)
THESE 2 : Le bien est désintéressé (l’action morale n’est pas toujours
motivée par l’intérêt)
Il faut déplorer l’égoïsme développé dans ces morales qui visent le bien individuel
en se reposant sur des valeurs éphémères. Elles négligent l’aspect collectif et
l’altérité pour la satisfaction individuelle. Elles mettent en péril l’intérêt général
et les valeurs de l’esprit.
Argument 1 : L’homme pose des actes désintéressés. Nous avons l’altruisme et
l’héroïsme.
Argument 2 : L’homme possède également une conscience du devoir qui
caractérise le bien. C’est le cas du rigorisme kantien.
Citations :
1. Bible : « Aimes ton prochain comme toi-même »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 73


2. Emmanuel Kant : « Agis toujours de telle sorte que tu traites l’humanité
aussi bien dans ta personne que dans celle d’autrui, toujours et en même
temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen »
Transition 2 : L’action morale est désintéressée et l’homme ne pose pas toujours
des actes par intérêt, cependant quels sont les véritables fondements de l’action
morale ?
SYNTHESE : Le critère du bien est fixé par l’homme et tient compte de la valeur
intrinsèque de celui-ci. Le plaisir et l’intérêt peuvent constituer une motivation
supplémentaire pour pousser au bien mais celui-ci ne saurait se réduire à ceux-ci
car, le plaisir et l’intérêt sont relatifs et éphémères.
Citation :
Emile Durkheim : « Chaque peuple à sa morale qui est déterminée par les
conditions lesquelles il vit »

Sujet 14 : Appréciez ces propos de Lafontaine : « La justice des


hommes est purement aléatoire. Tant que vous serez puissant ou
misérable, les jugements des cours vous rendront blancs ou noirs » ?
A- Compréhension du sujet
Lafontaine relève ici la relativité de la justice qui change en fonction de la valeur
sociale des individus. C’est une autre formulation de la loi du plus fort.
B- Reformulation : Le plus fort a toujours raison ou la justice dépend de la force
de l’individu.
C- Problème : La nature ou la valeur relative de la justice.
D-Problématique : La justice est-elle tributaire du statut social ? N’est-elle pas
égalitaire ?
THESE 1 : La relativité de la justice.
Montrer avec Lafontaine que la justice dépend du statut de l’individu
Argument 1 : La justice est fonction de la classe sociale des mis en cause. En
effet, les personnes puissantes bénéficient des privilèges que les autres citoyens
n’ont pas. La justice reflète dans ce sens les inégalités sociales.
Argument 2 : Les lois et les constitutions sont souvent taillés à la mesure de la
classe dirigeante. C’est le cas dans de nombreux Etats où les lois sont dictées par
les classes dirigeantes. De même dans certaines traditions, les coutumes accordent
74
un certain nombre de privilèges en justice aux chefs et notables que les autres
n’ont pas.
Argument 3 : La justice dépend des affinités et des relations entre justiciables et
jurés ou juges. Nous avons dans nos sociétés des relations condamnables entre les
juges et des accusées.
Citations :
1. Dicton : « Quelqu’un est quelqu’un derrière quelqu’un »
2. Otto Von Bismarck : « La force crée le droit »
3. Lafontaine : « La raison du plus fort est toujours la meilleure »
4. Karl Marx : « Le droit exprime la force en ce sens qu’il n’est que
l’expression de la classe dominante dont il traduit la volonté »
Transition : De ce qui précède, la justice semble être fonction des individus ce
qui lui enlève toute objectivité. Cependant, la justice n’est-elle pas par nature
égalitaire ?
THESE 2 : L’objectivité de la justice.
Montrer ici que la justice est égalitaire et universelle.
Argument 1 : Les hommes sont tous égaux devant la loi qui doit par ailleurs être
unique pour tous.
Argument 2 : La justice est une valeur morale, elle est un bien et par conséquence
elle ne saurait cautionner des inégalités. Une justice relative au statut des individus
serait par nature immorale car injuste.
Argument 3 : Tout favoritisme est par nature contraire et impropre à la nature
même de la justice dont le symbole reste la balance qui signifie impartialité et
égalité.
Citations :
1. Proudhon : « La justice c’est le respect de la dignité humaine en toutes les
personnes »
2. Montesquieu : « la loi est la raison humaine en tant qu’elle gouverne tous
les pays de la terre »
3. Rousseau : « Le plus fort n’est jamais assez fort pour toujours le
demeurer »
Transition : La justice est par nature égalitaire mais que faut-il faire pour
atteindre cet idéal ?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 75


SYNTHESE : Les moyens pour une justice idéale
Montrer ici que l’idéal de justice qui est l’impartialité et l’égalité nécessite un
certain nombre de moyens pour être véritablement appliquée. Il s’agit dans ce
sens : d’éliminer le favoritisme, l’affectivité (les sentiments), etc.

C- QUELQUES SUJETS
1) L’antagonisme est-il au cœur des rapports interindividuels ?
2) Peut-on rejeter la philosophie sans philosopher ?
3) Que vous suggèrent ces propos de Karl Marx dans Thèses sur Feuerbach :
« Les philosophes n'ont fait qu'interpréter diversement le monde. Ce qui
importe, c'est de le transformer. » ?
4) Est-il absurde de dire : « je te comprends » ?
5) Que vous suggèrent ces propos de Thomas Hobbes dans Le Léviathan :
« La justice se ramène au droit qui est l’expression de la force » ?
6) Une vérité scientifique peut-elle être dangereuse ?
7) La philosophie peut-elle dépasser son temps ?
8) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Nietzsche dans Ainsi
Parlait Zarathoustra : « Là où cesse l’Etat, c’est là où commence l’homme.
»?
9) Faut-il oublier le passé pour se donner un avenir ?
10) L'art peut-il se passer de règles ?
11) Une connaissance scientifique du vivant est-elle possible ?
12) N'avons-nous de devoirs qu'envers autrui ?
13) Le juste et l'injuste ne sont-ils que des conventions ?
14) Peut-on dire qu'il y a un progrès en philosophie ?
15) Toutes les personnes méritent-elle un égal respect ?
16) Toute vérité est-elle démontrable ?
17) La notion d'inconscient psychique est-elle contradictoire
18) La vérité dépend-elle de nous ?
19) Les notions de bien et de mal nous viennent-elles de la société ?
20) Que peut la raison pour exclure la violence ?
21) Notre liberté de pensée a-t-elle des limites ?
22) Peut-on concilier le pouvoir de l'État et la liberté individuelle ?
76
23) Que pensez-vous de cette affirmation d’Emmanuel Mounier : « La
nature de l’homme c’est l’artifice » ?
24) Que pensez-vous de cette affirmation : « l’animal s’adapte à la nature,
l’homme adapte la nature » ?
25) Le droit n’est-il que l’expression d’un rapport de force ?
26) Peut-on remédier à la justice par la violence ?
27) La liberté est-elle le pouvoir d’agir sans motif ?
28) Que pensez-vous de cette affirmation de Jean-Paul Sartre : « L’homme
est l’avenir de l’homme » ?
29) Que pensez-vous de cette affirmation : « Plus on connaît, plus on est
libre » ?
30) Que vous suggère ces propos de Blaise pascal : « je ne puis concevoir
l’homme sans pensée : Ce serait une pierre ou une brute »
31) Que pensez-vous de ces propos de Karl Marx : « Ce n’est pas la
conscience des hommes qui détermine leur être ; c’est inversement leur être
social qui détermine leur conscience » ?
32) La diversité des philosophies ruine-t-elle toute prétention de la
philosophie au vrai ?
33) La réflexion philosophique nous détache-t-elle du monde ?
34) La religion est-elle une consolation pour les faibles?
35) Que pensez-vous de ces propos de Thibaudet : « La philosophie peut se
définir non comme la science de tout, mais la science du tout » ?
36) Commentez cette remarque de Lagneau : « L’espace est la forme de ma
puissance, le temps de mon impuissance ».
37) Commentez cette maxime de Spinoza : « La philosophie est une
méditation non de la mort, mais de la vie ».
38) La mortalité est-elle d’une certaine façon un privilège ?
39) Que vous suggèrent ces propos de Marc Aurèle : « Ne maudis pas la
mort, fais lui bon accueil » ?
40) Que pensez-vous de ces propos de Pierre Theillard de Chardin : « La
mort définitive serait un vice de construction dans le plan de l’évolution » ?
41) Que pensez-vous de cette affirmation de Georges Bataille : « La mort
m’apparait comme ce qu’il y a de plus risible du monde » ?
42) Que pensez-vous de ces propos de Karl Marx et Engels : « Les
philosophes ne sortent pas de terre comme des champignons. Ils sont le fruit
de leur époque. La philosophie n’est pas extérieure au monde » ?
43) Y a –t-il des belles morts ?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 77


44) La philosophie a-t-elle encore sa place dans le monde ?
45) Toutes les cultures se valent-elles ?
46) L'inconscient est-il un animal redoutable ?
47) Ce qui est vraiment normal, est-ce ce qui est naturel ?
48) La mort ôte-t-elle tout sens à l'existence humaine ?
49) L’homme peut- il se passer de Dieu ?
50) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Bakounine : « l'Etat est
un immense cimetière ou viennent s'enterrer toutes les manifestations de la
vie individuelle » ?
51) Les lois suffisent-elle pour rendre les hommes vertueux ?
52) Que pensez-vous de cette affirmation de Jean-Paul Sartre : « L’homme
n’est rien d’autre que ce qu’il se fait » ?
53) Que pensez-vous de ces Propos de Voltaire : « Si Dieu n’existait pas, il
faudrait l’inventer »
54) Que vous suggèrent ces propos d’Antoine Guillaume Amo : « Le but de
la philosophie se trouve dans la perfection morale » ?
55) Le droit est-il l’expression de la puissance ?
56) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos Calliclès: « Je crois que ce
qui est juste est que les forts commandent les plus faibles » ?
57) La croyance religieuse est-elle en conflit avec la raison ?
58) Les sciences peuvent-elles accorder une place aux idées de destin et de
hasard ?
59) Quelles réflexions vous suggèrent cette affirmation de Jean Paul Sartre
: « Ma chute originelle, c’est l’existence de l’autre » ?
60) L’inconscient psychique n’est-il qu’un prétexte visant à légitimer la
mauvaise foi ?
61) Quelle réflexions vous suggèrent ces propos d’Alain : «
L’inconscient est une méprise sur le Moi, c’est une idolâtre du corps » ?
62) Peut-on parler de philosophie africaine ?
63) La science rend-elle la philosophie inutile ?
64) La science rend-t-elle obsolète le discours philosophique ?
65) Que pensez-vous de ces propos de Voltaire : « Le travail éloigne de nous
trois grands maux : le vice, l’ennui et le besoin » ?
66) Que pensez-vous de cette affirmation : « Le destin du monde se trouve
dans la science ; la philosophie n’est qu’un simple bavardage »
67) Peut-on accéder au pouvoir par la force ?
68) Le progrès scientifique peut-t-il faire disparaître les religions ?

78
69) L’Etat constitue-il le cadre idéal de réalisation de l’homme ?
70) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Jean-Paul Sartre : « Il
n’y a pas de nature humaine puisqu’il n’y a pas de dieu pour la
concevoir » ?
71) Que vous suggèrent ces propos de Lénine : « Tant que l’Etat existe pas
de liberté, quand règnera la liberté, il n’y aura plus d’Etat » ?
72) Le bien est-il issu d’une disposition naturelle de l’homme ?
73) La science est-elle le modèle de toute connaissance ?
74) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Sigmund Freud : « Le
moi n’est pas maître dans sa propre maison » ?
75) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Clément Rosset : « Il ne
faut pas compter sur la philosophie pour trouver des raisons de vivre » ?
76) Peut-on dire que tous les hommes philosophent ?
77) Le travail est-il pour l’homme un droit ou une fatalité ?
78) Faire du bien, est-ce se faire du bien ?
79) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Karl Marx : « Chaque
individu est le produit des circonstances existentielles, mieux des conditions
sociales dans lesquelles il se trouve » ?
80) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Lucien Malson :
« L’homme n’a pas de nature, il a ou est une histoire » ?
81) L’homme est-il totalement responsable de ses actes ?
82) La violence peut-elle avoir raison ?
83) La religion est-elle la négation de l'homme ?
84) Quelles réflexions vous suggère cette assertion de Karl Marx :
« L’abolition de la religion en tant que bonheur illusoire du peuple, c’est
l’exigence de son bonheur véritable » ?
85) Le savant est-il un homme libre ?
86) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Galilée : « Le monde est
un grand livre écrit en langage mathématique » ?
87) Que pensez-vous de ces propos d’Emmanuel Kant : « Il n’y a pas de
philosophie que l’on puisse apprendre […] l’on ne peut apprendre qu’à
philosopher ».
88) Que vous suggèrent ces propos d’Emile Durkheim : « Quand notre
conscience parle, c’est la société qui parle en nous. » ?
89) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos d’Ebénézer Njoh Mouelle :
« l’initiative philosophique est indétachable des préoccupations pratiques
»?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 79


90) Autrui demeure-t-il un mystère ?
91) Que pensez-vous de ces propos de Simone De Beauvoir : « On ne naît
pas femme, on le devient » ?
92) La nature est-elle une œuvre d’art ?
93) Que vous suggèrent ces propos d’Emile Durkheim : « Quand notre
conscience parle, c’est la société qui parle en nous »
94) L’œuvre d’art doit-elle tout simplement imiter le réel ou alors le recréer ?
95) Les progrès des sciences expérimentales vont-ils à l'encontre de la foi
religieuse ?
96) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Spinoza : « Le
philosophe ne pense à aucune chose moins qu'à la mort et sa philosophie est
une méditation de la vie, non de la mort » ?
97) Peut-on triompher de la mort ?
98) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos de Schopenhauer :
« L’absence de tout motif égoïste, voilà le criterium de l’acte qui a valeur
morale » ?
99) Que pensez-vous de cette affirmation de Cheikh Anta Diop : « Il faut
faire basculer définitivement l’Afrique noire sur la pente de son destin
fédéral » ?
100) Que vous suggèrent ces propos d’E. Njoh Mouelle : « Le spectacle le
plus affligeant en situation de sous-développement c’est celui de
l’irrationalité dans le comportement de l’homme » ?
101) Êtes-vous d'accord avec cette formule de Dostoïevski : «Si Dieu est mort,
tout est permis» ?
102) Quelles réflexions vous suggèrent ces propos d’Epictète : « Notre opinion
sur la mort, qui nous la fait regarder comme terrible, voilà ce qui est
terrible » ?
103) Que pensez-vous de ces propos de Montesquieu : « La liberté est le droit
de faire tout ce que les lois permettent » ?
104) L’homme est-il une donnée naturelle ou culturelle ?
105) La religion est-elle fondée sur la peur de la mort ?
106) Que pensez-vous de ces propos d’Hegel : « Rien de grand ne s’est fait
dans le monde sans passion » ?
107) L’inconscient justifie-t-il l’irresponsabilité de l’homme ?
108) La religion est-elle fondée sur la peur de la mort ?
109) Que pensez-vous de ces propos de Spinoza : « L’homme n’est pas un
empire dans un empire » ?

80
110) La science peut-elle répondre à toutes les aspirations de l’homme ?
111) Quelles réflexions vous suggère cette affirmation d’E. Njoh Mouelle :
« L’initiative philosophique est indétachable des préoccupations pratiques » ?
112) La philosophie est-elle une évasion hors du monde ?
113) Vivre en société, est-ce renoncer à sa personnalité ?
114) Le travail permet-il à l'homme de s'accomplir ?
115) L'esprit religieux n'habite-t-il que les religions ?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 81


DEUXIEME
PARTIE
COMMENTAIRE DE
TEXTE

82
A- METHODOLOGIE DU COMMENTAIRE DE TEXTE

Le commentaire philosophique à ses spécificités qui le singularise et le


différencie du commentaire littéraire. Il n’est certes pas un exercice nouveau car,
dans les autres disciplines, il arrive la plupart du temps qu’un texte puisse être
soumis en vue d’un commentaire. Le commentaire philosophique a pour objectif
d’amener l’élève à développer un jugement personnel sur la thèse de l’auteur. Il
ne s’agit pas de la thèse de l’auteur dans l’ensemble de son œuvre mais dans le
cas précis de l’extrait du texte qui est proposé.
Le commentaire philosophique comporte trois parties : une introduction, un
développement et une conclusion. Chacune de ces parties comportent des
particularités qu’il convient de maîtriser.
I. L’INTRODUCTION
Elle comporte un certain nombre de parties qui sont :
- La situation du texte.
- La formulation du thème et du problème philosophique du texte.
- La formulation de la thèse de l’auteur.
- La problématisation de la thèse de l’auteur.

Il s’agit de rappeler le titre de l’œuvre et le nom de l’auteur dans la situation


du texte. On peut également faire figurer les circonstances où le contexte de
rédaction de l’œuvre. La formulation du thème consiste à faire inscrire le texte
dans une notion relative la plupart du temps au programme. Après la formulation
du thème, le problème philosophique doit pouvoir s’inscrire au sein même du
temps, d’où l’importance du thème. Le problème philosophique se présente sous
la forme d’une question. A cette question, l’auteur apporte une réponse qui
constitue sa thèse, il parait donc logique que la thèse de l’auteur soit en adéquation
avec le problème posé. Enfin, l’introduction s’achève par une problématisation
de la thèse de l’auteur. Il s’agit de questionner la thèse en vue de déceler des
limites à celle-ci, la problématique est donc un ensemble de questions (deux, trois
au plus), cet ensemble annonce déjà la réfutation que l’on pourrait développer vis-
à-vis de la thèse de l’auteur.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 83


Avertissement : L’introduction n’est pas le lieu indiqué pour présenter
l’œuvre ou la position de l’auteur dans son ensemble. Dans cette perspective,
l’introduction doit être brève et susciter la curiosité du correcteur.

II. LE DEVELOPPEMENT
Le développement commence par un préambule de deux phrases au
plus, qui annoncent les articulations logiques du texte. Il faut dire ici ce qu’on
doit développer dans l’explication analytique. Le développement comporte trois
parties : l’explication analytique, la réfutation et la réinterprétation.

a) L’explication analytique
Il s’agit de déterminer les idées principales et les idées secondaires du texte.
Chaque articulation du texte développe une idée avec des arguments
pour la défendre. La plupart du temps, un texte comporte deux à trois
articulations. L’explication analytique consiste à repérer les concepts qui
permettront de présenter les grandes idées de l’auteur dans le texte. Il s’agit de
présenter comment l’auteur procède pour résoudre le problème du texte.
b) La réfutation
Il est question ici de ressortir les perspectives ignorées par l’analyse de
l’auteur. Il ne s’agit pas de démontrer que l’auteur a tort, mais de présenter les
autres orientations, les réflexions et les analyses concernant le thème et le
problème développé dont l’auteur a volontairement ou involontairement omis de
ressortir dans le texte. Il y a une double réfutation :
- La réfutation interne. Elle se fait quand l’élève traque les incohérences
internes du texte, les contradictions ou les arguments spécieux de l’auteur.
- La réfutation externe qui a lieu quand l’élève montre les limites du texte
en se servant des idées d’autres auteurs.

c) Réinterprétation
C’est la partie essentielle du commentaire philosophique de texte. Tout le
travail de la partie analytique a pour objectif de donner l’intérêt philosophique
ou les enseignements et renseignements ou l’importance de la réflexion de
l’auteur dans le texte.

84
Avertissement : Pour expliquer un texte philosophique, l’élève doit éviter
:
- la récitation de tout ce qu’il sait sur l’auteur. Une telle récitation,
lorsqu’elle est faite, oblige le candidat à sortir du texte pour aller discourir
inutilement sur d’autres idées.
- la paraphrase qui consiste à dire en des termes maladroits ce que l’auteur
a bien dit dans son texte. Expliquer, ce n’est pas reprendre en d’autres
termes ce qui a été bien dit, c’est rendre compréhensible le message de
l’auteur, c’est dévoiler le sens profond de ses propos.

Conseil : Pour réussir l’explication analytique du texte, l’élève doit


concevoir au brouillon le plan de son explication. Il lui est recommandé
de se mettre dans la peau de l’auteur. Son souci doit être de ressortir le
contenu objectif du texte. C’est le texte à étudier qui lui donne ce contenu
ainsi que le plan de l’explication. Muni de son stylo, il écrira sur son
brouillon : le thème du texte, le problème philosophique et la thèse de l’auteur.
Cette thèse de l’auteur se développe à travers des idées secondaires. Ces idées
secondaires sont les éléments du plan de l’explication analytique. Si donc un texte
a trois idées secondaires, le plan de l’explication aura aussi trois parties

III. LA CONCLUSION
La conclusion d’un commentaire philosophique fait le bilan du travail. Il
consiste en :
 Un rappel du problème auquel le texte a tenté de répondre.
 Un rappel de la réponse et de l’objection faite à cette réponse.
 L’indication des raisons pour lesquelles le texte conserve un intérêt
philosophique par-delà les objections formulées dans la partie critique.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 85


B- EXERCICES PRATIQUES
TEXTE 1 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de
son étude ordonnée

C’est dans cette situation que se trouve aujourd’hui la culture de nos sociétés
africaines. Le code a été brisé lors de l’impact avec la civilisation occidentale,
brutalement brisé par la colonisation. Et la gravité de la crise vécue aujourd’hui
par l’homme africain est proportionnelle à la brutalité de cette rupture de la
matrice première des significations. La crise se manifeste d’abord comme un
manque, une absence. Notre homme égaré en pleine forêt culturelle cherche une
issue. Sa crise est vécue comme une désorientation inopinée. Et la prise de
conscience de cette désorientation peut l’exposer à l’inquiétude et à l’angoisse.
Que la crise soit vécue comme conscience d’un manque dans la réalité n’est pas
douteux ; mais l’occasion est encore bonne de souligner ici que dans notre
situation de sous-développement, ce manque a souvent été vu sous l’aspect de
biens de consommation. Nous sommes justement en train de montrer que l’aspect
véritablement culturel est d’autant sinon plus important que l’autre. Par aspect
culturel nous entendons l’activité par laquelle l’homme se sépare de la nature-
instrument pour lui donner un sens en même temps qu’il donne sens à ses propres
entreprises et par là acquiert une personnalité et une dignité propres. Il y a un
manque aujourd’hui dans la culture africaine. On ne sait plus toujours avec
certitude ce qu’il faut croire, ce qu’il ne faut pas croire.

Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.26.

A-INTRODUCTION
THEME : La culture
PROBLEME : L’importance de la culture dans le processus de développement
THESE : La culture a un rôle majeur dans le processus de développement. La
dévalorisation, la destruction des cultures africaines lors de la colonisation a
entrainé une crise profonde de l’identité africaine.
PROBLEMATIQUE : La crise culturelle explique-t-elle à elle seule le sous-
développement de l’Afrique ?
B- EXPLICATION ANALYTIQUE
a- La colonisation comme cause de la crise culturelle africaine : « Le code a été
brisé lors de l’impact avec la civilisation occidentale, brutalement brisé par la
colonisation. »

86
b- les manifestations de la crise culturelle africaine : « La crise se manifeste
d’abord comme un manque, une absence » il s’agit d’une absence de signification,
de sens, d’une désorientation c’est une « une désorientation inopinée ». La prise
de conscience de la crise suscite elle-même de l’angoisse.
c- L’acculturation comme cause principale du sous-développement : « l’aspect
véritablement culturel est d’autant sinon plus important que l’autre. » c’est-à-dire
la crise culturelle des valeurs, de la qualité est plus importante que la crise
matérielle, de la quantité. La crise culturelle est la crise identitaire, de l’être tandis
que la crise matérielle est la crise de l’avoir, de la quantité.
Transition : Peut-on justifier le sous-développement de l’Afrique exclusivement
par la crise culturelle ?
C- REFUTATION
Le sous-développement de l’Afrique a plusieurs causes et l’africain ne peut se
dédouaner de toute responsabilité. De plus, la culture africaine couve en elle-
même des germes du sous-développement (tradition, superstition).
Le contact avec la culture occidentale n’a pas toujours été négatif et il y a des
aspects positifs dans cette culture.
Transition : Une société sans culture propre est-elle nécessairement sous-
développée ?
D-REINTERPRETATION
Le texte d’Ebénézer Njoh Mouelle nous éclaire sur les causes réelles et la nature
de notre sous-développement. On ne saurait réduire le sous-développement au cri
du ventre c’est-à-dire à l’aspect matériel. La culture a un rôle majeur dans le
processus de développement car, elle est la matrice qui donne sens et qui oriente
l’existence d’une société (la matrice première des significations). Le texte a donc
un intérêt épistémologique car il nous éclaire sur la véritable nature de notre sous-
développement

Texte 2 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de son


étude ordonnée
A vrai dire c’est là un régime de la facilité ou de l’anti-effort. Ici, l’homme
ne réussit pas parce qu’il est intrinsèquement fort ou qu’il construit de lui-
même son succès mais parce qu’un secret de la nature lui a été révélé. La
révélation dudit secret, cela va de soi, fait l’économie de tout discours. Il n’y a pas
compréhension du monde, mais participation magique au rythme du monde. C’est

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 87


le régime de la facilité parce que partout l’homme a démissionné devant la nature
qu’il ne cherche pas à dominer mais dont il accepte d’être dominé. Suivre la nature
c’est la pente naturelle, facile à dévaler ; et ce n’est pas à là la voie de l’auto-
affirmation de l’homme. C’est plutôt la voie de l’esclavage. Par contre, chercher
à remonter la pente de la nature, la pente des penchants et instincts qui nous
attachent à la nature, telle devrait être l’option de l’homme soucieux de se
récupérer sur une nature aliénatrice. Cette conquête et cette récupération de soi ne
peuvent être assumées que par la raison. Or l’homme sous-développé vit dans le
régime de l’anti-raison. Il meurt de faim à côté des vaches prétendues sacrées,
préfère subir les inondations que troubler le soi-disant repos des ancêtres morts-
vivants de la rivière, se laisse escroquer par un diabolique charlatan qui répète le
même diagnostic à mille patients plutôt que de se confier aux soins d’un médecin
des hôpitaux modernes. C’est cela sa misère et son sous-développement. Misère
qui, pour être inconsciente, n’est pas moins objective.

Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.22.

A- INTRODUCTION
Thème : Le sous-développement de l’africain.
Problème : Quelles sont les manifestations du sous-développement de l’africain.
Thèse : le sous-développement de l’africain se manifeste par l’absence de
rationalité qui est la misère objective. L’homme est un agent passif des forces
mystérieuses de la nature qui le détermine à agir. Il ne peut quitter cet état que par
la raison.
Problématique : La rationalité du comportement est-elle la solution exclusive
pour sortir du sous-développement ?
B- EXPLICATION ANALYTIQUE
Le texte comporte deux articulations :
a- L’hétéronomie de l’homme vis à vis de la nature comme manifestation du sous-
développement. L’homme n’a aucune responsabilité vis-à-vis de ce qui lui arrive,
il subit les lois de la nature.
1. Le sous-développement est « un régime de la facilité ou de l’anti-effort »
2. « Il n’y a pas compréhension du monde, mais participation magique au
rythme du monde. »

88
3. « C’est le régime de la facilité parce que partout l’homme a démissionné
devant la nature qu’il ne cherche pas à dominer mais dont il accepte d’être
dominé. »

b- L’affirmation de soi par la rationalité du comportement comme solution au


sous-développement
4. « Cette conquête et cette récupération de soi ne peuvent être assumées
que par la raison »
5. « l’homme sous-développé vit dans le régime de l’anti-raison »

Transition : L’homme des pays sous-développés est-il nécessairement


irrationnel ?
C-REFUTATION
Le sous-développement de l’Afrique n’est pas forcément synonyme d’anti-raison
ou d’irrationalité car, on retrouve également beaucoup d’irrationalité dans les pays
les comportements des hommes des pays dits développés (Homosexualité,
horoscopes etc.)
Transition : Quelles peuvent être les conditions du développement de l’Afrique ?
D- REINTERPRETATION
Le sous-développement véritable de l’Afrique est la misère objective et non
subjective c’est-à-dire l’homme manque d’être et non nécessairement manque
d’avoir. L’africain est donc un pauvre homme car son comportement est
irrationnel. Le texte a un intérêt didactique car il nous oriente sur la voie à suivre
pour sortir du sous-développement. Cette voie est celle de la rationalité et la
rationalisation de nos comportement qui conduisent l’africain à dominer la nature
et à être maître de sa destinée.

Texte 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de


son étude ordonnée
La philosophie est peut-être la seule discipline qui a le seul courage et la
force de soumettre ouvertement l’Absolu à la discussion, de le prendre comme
objets de débats publics, débats qui ne sont pas seulement formels puisqu’ils
aboutissent souvent à la détrôner. Le philosophe n’est ni neutre, ni désintéressé,
c’est peu de dire qu’il a opté pour un Absolu : il est militant de son Absolu. Et en
cela il diffère du simple savant qui affecte devant son objet d’étude une attitude
neutre. Mais l’Absolu du philosophe n’est pas un mystère dont il détiendrait seule
la révélation : il sait son Absolu et entend le démontrer par des arguments. Il fait
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 89
appel à la raison, à la pensée critique et non à la peur ou à la confiance. L’ethno-
philosophie au contraire, a pour effet, sinon pour but, d’éluder le débat sur
l’Absolu. Elle se caractérise en effet par le fait qu’elle glisse subrepticement (avec
cependant beaucoup moins de retenue que l’ethnologie pure) dans des exposés
théoriquement descriptifs et objectifs, des opinions métaphysiques non critiquées,
et les soustrait par-là à la critique philosophique. Pour cette raison l’ethno-
philosophie apparait à la philosophie comme une théologie qui ne veut pas dire
son nom.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, CLE,
1971, pp.31-32.

A-INTRODUCTION
Thème : La philosophie et l’ethnophilosophie.
Problème : La différence entre la philosophie et l’ethnophilosophie.
Thèse de l’auteur : La philosophie est une discipline essentiellement critique qui
milite pour un absolu qu’elle impose par des arguments rationnels tandis que
l’ethnophilosophie se dérobe à toutes critiques.
Problématique : La philosophie serait-elle essentielle critique, et iconoclaste et
militante ?
A- EXPLICATION ANALYTIQUE
Le texte comporte deux articulations :
1- La nature de la philosophie.
 La philosophie comme discipline essentiellement critique et iconoclaste :
« La philosophie est peut-être la seule discipline qui a le courage et la force
de soumettre ouvertement l’Absolu à la discussion. »
 La philosophie comme débat orienté (intéressé) vers une fin : « Le
philosophe n’est ni neutre, ni désintéressé, c’est peu de dire qu’il a opté
pour un Absolu : il est militant de son Absolu. »
 La méthode philosophique : une démonstration, une argumentation
rationnelle : « Il fait appel à la raison à la pensée critique et non à la
peur ou à la confiance. »

2- La nature de l’ethnophilosophie
 L’absence de débat sur l’Absolu : « L’ethnophilosophie au contraire, a
pour effet, sinon pour but, d’éluder le débat sur l’Absolu. »

90
 La méthode de l’ethnophilosophie : « elle glisse subrepticement(…) dans
des exposés théoriquement descriptifs et objectifs, des opinions
métaphysiques non critiquées, et les soustrait par-là à la critique
philosophique »
 L’identification de celle-ci à la théologie : « l’ethnophilosophie apparait à
la philosophie comme une théologie qui ne veut pas dire son nom »

Transition : On ne saurait identifier l’ethnophilosophie à la philosophie car, elles


sont différentes par leur nature et leur méthode. Cependant, la philosophie serait
telle essentiellement critique et iconoclaste ?
B- REFUTATION DU TEXTE
Interne : La philosophie est une discipline iconoclaste selon Marcien Towa,
cependant elle milite également pour un Absolue qu’elle impose certes par la
raison, mais la raison elle-même s’en trouve déifiée (adorée) il y a une
absolutisation de la raison.
Externe : Il existe plusieurs conceptions de la philosophie qui font d’elle une
discipline spéculative qui n’adhère pas à une cause. La philosophie dans ce sens
serait absolument neutre.
C- LA REITERPRETATION DU TEXTE
Marcien Towa nous éclaire sur la véritable nature de la philosophie d’où l’intérêt
épistémologique de sa thèse. De plus, il exclut de son champ l’ethnophilosophie
qui exalte une sorte de dogmatisme et la reproche de la théologie. Le texte nous
montre également le caractère pratique de la philosophie car, selon Towa le
philosophe doit s’engager pour une cause qu’il défend par des arguments
rationnels. En cela nous voyons le véritable rôle du philosophe dans le contexte
africain.

Texte 4 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir


de son étude ordonnée
Toutes questions d’image mises à part, messieurs, cela ne me
parait pas conforme à la justice de prier le juge et d’obtenir son
acquittement par des prières ; ce qui est conforme à la justice, c’est de s’expliquer
et de persuader. En effet le juge ne siège pas pour cela – pour accorder des faveurs
en guise de justice – mais pour décider de ce qui est juste. Il a prêté serment non
pas de se montrer complaisant envers qui bon lui semble, mais de juger selon les
lois. C’est pourquoi nous ne devons pas vous habituer à violer votre serment et
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 91
vous, vous ne devez pas prendre cette habitude : nous serions les uns et les autres
fautifs envers les dieux. N’exigez donc pas de moi, Athéniens, que je me force à
user à votre égard de procédés que je ne juge ni beaux ni justes ni pieux, surtout
évidemment quand, par ZEUS, c’est d’impiété que je suis accusé par lui,
MELETOS. Il va de soi en effet que, si j’arrivais à vous persuader et, par mes
prières, à vous détourner de votre serment, je vous enseignerais à ne pas croire à
l’existence des dieux. Un tel mode de défense reviendrait sans conteste à
m’accuser moi-même de ne pas reconnaître les dieux. Or il s’en faut de beaucoup
qu’il en soit ainsi : j’y crois en effet, comme n’y croit aucun de mes accusateurs,
et je m’en remets à vous et à la divinité du soin de décider à mon sujet de ce qui
vaudra le mieux et pour moi et pour vous.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.72.
A-INTRODUCTION
Thème : Le philosophe et la justice.
Problème : Le rapport entre le philosophe et les pratiques judiciaires courantes.
Thèse de l’auteur : Le philosophe ne doit pas se conformer aux pratiques
judiciaires courantes.
Problématique : La philosophie ne sera-t-elle donc pas subversive ?

A- EXPLICATION ANALYTIQUE
Le texte comporte trois articulations :
1- Dénonciation des pratiques judiciaires de la société.
 Condamnation des accusés qui viennent pleurnicher devant les juges :
« Cela ne me parait pas conforme à la justice de prier le juge »
 Condamnation des juges complaisants : « Le juge ne plaide pas pour cela-
pour accorder des faveurs en guise de justice »
 Invitation faite aux accusés et aux juges à respecter la loi et la divinité.
2- Les raisons du rejet des conventions judiciaires par le philosophe.
 Les prières que les accusés adressent aux juges sont immorales : « Procédés
que je ne juge ni beaux ni justes ni pieux »
 L’accusé qui pleurniche devant les juges rend ceux-ci impies : Si j’arrivais
à vous persuader et, par mes prières, à vous détourner de votre serment, je
vous enseignerais à ne pas croire à l’existence des dieux »
3- L’affirmation de la foi religieuse du philosophe pour rejeter la justice sociale.

92
 Le philosophe ne veut pas pratiquer l’injustice et déplaire aux dieux: «J’y
crois en effet »
 Le philosophe dénonce ses accusateurs de ne pas croire véritablement
Transition : Ne s’expose-t-on pas à la condamnation quand on refuse de se
conformer aux pratiques judiciaires de son pays?

B- REFUTATION DU TEXTE
 Socrate dit qu’il respecte les lois de son pays. Et pourtant, c’est encore lui
qui refuse de faire ce que la loi autorise, à savoir prier les juges. Il est donc
en contradiction avec lui-même. Il confond la loi avec l’idée du bien.
 La sincérité de Socrate devant les juges est inefficace. Malgré sa pertinence,
il sera condamné à boire la ciguë : « Ce n’est pas la ciguë c’est le syllogisme
qui tue Socrate ». Paul Valery le dit pour montrer l’échec de la logique
devant les réalités judiciaires d’un pays.
 On peut parfois réussir devant le juge par le mensonge. « Tous les moyens
sont bons », dit Jean-Paul Sartre dans Les mains sales. Socrate n’a donc pas
été réaliste mais plutôt idéaliste.
Transition : Une justice corrompue ne compromet-elle pas la paix sociale ?

C- LA REINTERPRETATION DU TEXTE
 Le texte de Platon nous renseigne sur les pratiques judiciaires en cours dans
la société et nous prévient contre leur arbitraire. La prière des accusés
devant les juges et la complaisance des juges eux-mêmes compromettent le
droit, elles faussent la sentence, elles permettent à coup sûr de relaxer le
coupable, d’encourager la malhonnêteté et la parodie de justice.
 Platon voudrait réconcilier les lois de la justice avec les exigences morales
en montrant que la loi c’est le bien. Il annonce de loin Rousseau qui
insistera sur l’identité de la loi avec la morale.
 Le texte montre aussi le courage du philosophe qui s’inscrit en faux contre
une pratique judiciaire malveillante.

Texte 5 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir


de son étude ordonnée
Nul en effet ne sait ce qu’est la mort, ni si par hasard elle n’est
pas pour l’homme le plus grand des biens ; mais on la redoute comme
si on sait pertinemment qu’elle est le plus grand des maux. Comment ne pas voir
là cette ignorance qu’il faut stigmatiser, celle qui consiste à croire qu’on sait ce
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 93
qu’on ne sait pas ? En ce qui me concerne, Messieurs, voici ce en quoi je me
distingue sur ce point de la plupart des autres hommes : si je devais me prétendre
plus savant qu’un autre en quelque chose, ce serait en ceci que, n’en sachant pas
assez sur ce qui advient dans l’Hadès, j’ai bien conscience aussi de ne pas le
savoir. Mais commettre une injustice et désobéir à un meilleur que soi, dieu ou
homme, cela je sais que c’est mauvais et honteux. Jamais donc je ne redouterai ni
ne fuirai ce qui, sait-on jamais, est peut-être un bien, avant un mal dont je sais
qu’il est un mal.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.64.
A-INTRODUCTION
Thème : La mort
Problème : L’attitude du philosophe face à la mort
Thèse de l’auteur : La crainte de la mort n’a pas de fondement rationnel.
Problématique : Peut-on humainement être indifférents vis-à-vis de la mort ? Ne
constitue-t-elle pas un mal

A- EXPLICATION ANALYTIQUE
Le texte comporte trois articulations.
1- La dénonciation de l’attitude commune au sujet de la mort.
 La mort est un mystère : « Nul en effet ne sait ce qu’est la mort »
 la crainte de la mort se fonde sur un faux savoir : « Mais on la redoute
comme si on savait pertinemment qu’elle était le plus grand des maux»
 Socrate blâme ce faux savoir sur la mort

2- La spécificité du savoir philosophique au sujet de la mort


 Rupture avec le savoir populaire : « Voici en quoi je me distingue… de la
plupart des autres hommes »
 L’humilité de Socrate qui avoue son ignorance au sujet de la mort : « N’en
sachant pas assez sur ce qui advient dans l’Hadès, j’ai bien conscience
aussi de ne pas le savoir »
3- La préférence de la morale à la crainte de la mort
 La prise de conscience des valeurs morales
 Acceptation courageuse de la mort

Transition : La mort n’est-elle donc pas un danger pour les hommes ? N’y a-t-il
pas des raisons de la craindre ?

B- REFUTATION DU TEXTE
1- La thèse de la mort comme mystère ne saurait permettre de songer à l’hypothèse
de la mort comme bien. A ce niveau, il y’a une contradiction interne.

94
2- La crainte de la mort que Socrate veut rendre incompréhensible se comprend
bel et bien. En effet, les hommes fondent leur crainte de la mort sur la crainte de
l’inconnu.
3- Le courage de Socrate face à la mort est contredit par l’expérience. Dans la vie
pratique, la mort inflige des douleurs et de la désolation à ceux qui restent en vie
en même temps qu’elle arrache brutalement aux délices terrestres celui qui
décède.

C- LA REITERPRETATION DU TEXTE
1- Socrate montre que le vrai savoir repose sur l’humilité qui consiste à se remettre
soi-même en cause.
2- La crainte de la mort ne peut rien changer à ce qui arrive. La mort est une
échéance inévitable. La seule attitude qui soit logique c’est de l’accepter
courageusement comme les stoïciens. Ainsi Epictète disait « Supporte et abstiens-
toi ». Cette sagesse est recommandée au sujet de la mort.
3- Socrate montre qu’il faut rejeter les fausses valeurs sociales : l’injustice, la
désobéissance à la transcendance, pour se contenter des valeurs morales comme
la justice.
Texte 6: Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de
son étude ordonnée
L’Europe s’offre à nous sous des visages différents et même
opposés : de tous ses visages, chrétien, industriel capitaliste, industriel
socialiste, lequel est le plus authentique, le plus important pour nous ? Le premier
pas vers une réponse à cette question consiste à préciser qu’en disant « pour
nous », nous ne visons pas notre essence, ce que nous sommes en propre, mais ce
que nous avons à être. C’est notre devoir-être, et non notre être distinctif, qui doit
orienter notre questionnement. Si donc nous convenons que ce qui constitue notre
dessein essentiel, c’est la liberté, c’est-à-dire, une Afrique auto-centrée et
puissante, ayant en elle-même le centre de conception et de décision pour toutes
les sphères de son existence : politique, économique, spirituelle, une Afrique
appliquant le même principe de liberté dans toutes les formes de relations inter-
humaines, une Afrique enfin œuvrant pour le triomphe du même idéal dans le
monde, si nous convenons d’un tel dessein, c’est lui aussi qui doit être notre fil
d’Ariane dans notre quête du secret de l’Europe. Le second pas vers une réponse
à notre interrogation consiste à observer que, aussi sûrement que la raison de notre
défaite par l’Europe réside dans ce qui nous en différencie, le secret de l’Europe
réside dans ce qui la différencie de nous et de toutes les civilisations auxquelles
elle a infligé le même sort.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 56.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 95


A- INTRODUCTION
Thème : La libération de l’Afrique.
Problème : Quelle sont les moyens de la libération de l’Afrique.
Thèse : La compréhension de la véritable nature de l’Occident est une condition
indispensable pour notre libération et notre développement.
Problématique : Comprendre et connaitre l’Occident suffit-il au développement
de l’Afrique ?
B- EXPLICATION ANALYTIQUE :

La compréhension de la nature de l’Occident vue de notre libération comprend


deux étapes :
a- L’assimilation de la nature de l’occident comme model pour l’Afrique
- C’est le devoir être de l’Afrique c’est-à-dire son développement qui doit
guider son assimilation de l’Occident.
- L’Afrique doit appréhender la nature de l’Occident qui parait la plus
authentique et importante pour elle dans sa quête de libération.
- La liberté ou l’autonomie comme finalité de la quête de l’Afrique.
- L’appréhension de l’Occident doit être orientée vers notre autonomie sur
les plans politique, économique et culturelle.
b- La rupture avec notre passé et le culte de la différence qui pérennisent notre
assujettissement par l’Occident.
- C’est tout ce qui nous différence de l’Occident qui porte les causes de notre
défaite.

Transition : La compréhension et la connaissance de l’Occident sont certes une


condition de notre libération mais sont-elles suffisantes.
C- REFUTATION :
- Avec la position de Towa nous avons le risque d’une perte d’identité africaine
par l’occidentalisation de l’Afrique.
- Contrairement à Towa, l’Occident ne saurait constituer le seul modèle de
développement pour l’Afrique qui peut également tracer sa voie et son modèle de
développement.
D- REINTERPRETATION :
Marcien Towa nous éclaire sur les conditions de notre libération et les causes de
notre défaite vis-à-vis de l’Occident d’où l’intérêt didactique de ce texte.
96
L’Afrique ne doit pas demeurer dans une auto apologie d’elle-même, mais doit
se nier afin d’appréhender la véritable nature de l’Occident.

Texte 7 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de


son étude ordonnée
Notre souci a été bien plutôt de démasquer la négritude
senghorienne et l’ethno-philosophie qui voudrait la prolonger, et de
rendre manifeste pour tous que leur culte de la différence, de l’originalité conduit
en fait à Canossa, consciemment ou non. Ceci explique la faveur que ce courant
idéologique trouve auprès du néo-colonialisme, au point qu’il prend aujourd’hui
figure d’idéologie officielle du néo-colonialisme. Ce n’est pas en nous accrochant
à notre essence et à notre passé que nous pourrons jamais recouvrer l’autonomie
culturelle. Ce serait plutôt maintenir le statu quo ou plus exactement confirmer et
accélérer l’évolution actuelle vers la dépendance et l’impuissance. Le chemin de
l’autonomie culturelle passe obligatoirement par une révolution, et donc par une
auto-révolution. Aucune autonomie n’est possible dans le domaine de la culture
sans base matérielle, politique et économique. Et dans notre monde de
superpuissances impérialistes, comment prétendre à une autonomie tant soit peu
réelle, dans quelque domaine que ce soit, sans acquérir soi-même une puissance
suffisante pour résister à toute tentative de subjugation ouverte ou camouflée ?
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 67-68.
A- INTRODUCTION
Thème : Le développement de l’Afrique.
Problème : Quelles sont les conditions de l’autonomie culturelle de l’Afrique ?
Thèse : Contrairement à la négritude suivie de l’ethnophilosophie qui pérennise
notre assujettissement culturel, la révolution ou l’auto-révolution sont les seuls
moyens de la libération de l’Afrique.
Problématique : La révolution est-elle l’unique condition de notre libération ?
L’affirmation de l’identité africaine ne peut-elle pas se faire autrement ?
B-EXPLICATION ANALYTIQUE
a- La dénonciation de la négritude comme cause de notre hétéronomie culturelle.
b- L’édification d’une puissance matérielle égale à celle de l’Occident comme
condition de notre autonomie.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 97


C- REFUTATION
La négritude a constitué une étape dans la valorisation de l’identité culturelle
africaine, elle a contribué à la libération culturelle de l’Afrique.
D- REINTERPRETATION
Le texte de Towa a le mérite de nous éclairer sur les moyens adéquat pour un
véritable développement de l’Afrique. Il attire également notre attention sur les
conséquences négative qu’entraine une pérennisation de l’ethnophilosophie.

TEXTE 8 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir


de son étude ordonnée
La volonté d’être nous-mêmes, d’assumer notre destin, nous accule
finalement à la nécessité de nous transformer en profondeur, de nier
notre être intime pour devenir l’autre. Et cette nécessité nous ramène au point de
départ de notre affrontement avec l’Occident, époque où nous cherchions avec
tant d’ardeur à rétablir l’équilibre des forces en nous emparant du secret de la
victoire de l’Occident. Le moment de la négritude que l’ethno-philosophie
voudrait prolonger artificiellement, nous a détourné de cette quête. Or, l’erreur de
cette première démarche ne résidait pas dans la volonté de s’emparer du secret de
l’Occident, mais dans la croyance fort répandue que ce secret consistait en
quelque sorte en une recette communicable par révélation ou par initiation ; elle
résidait surtout dans la confiance accordée à la « mission civilisatrice », aux
promesses et à la bonne foi du colonisateur, elle résidait dans le fait d’embrasser
sans discrimination la civilisation occidentale, de la prendre en bloc comme
supérieure à la nôtre. Ce que cette première démarche avait de juste, en revanche,
c’est l’idée que la civilisation occidentale recèle une arme secrète dont il importe
absolument de s’emparer pour sortir de la raque de l’histoire.
M. Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle,
CLE, 1971, pp. 39-40
A-INTRODUCTION
Thème : La philosophie.
Problème: La tâche de la philosophie aujourd’hui en Afrique.
Thèse : La philosophie doit faciliter notre maîtrise de la science occidentale.
Problématique : Cette thèse ne nous conduit-elle pas au déracinement culturel des
Africains ?

98
B- EXPLICATION ANALYTIQUE
Le texte comporte trois articulations.
1- La véritable tâche de la philosophie
 La critique philosophique doit nous permettre de rejeter les faiblesses de
notre culture.
 La philosophie doit nous apporter le savoir et la science.
 Elle nous permet de « devenir l’autre »
 La philosophie doit nous rendre aussi puissant que l’Occidental.
2- L’erreur pratique de l’ethno-philosophie.
 L’évolution de l’ethno-philosophie dans le sillage de la négritude : « Le
moment de la négritude, que l’ethno-philosophie veut prolonger
artificiellement, nous a détourné de cette tâche »
 La croyance qu’on acquière la science par la révélation et l’initiation.
 L’acceptation de la domination occidentale : « Confiance accordée à la
mission civilisatrice »
 L’adoption aveugle de la culture occidentale : « La prendre en bloc comme
supérieure à la nôtre »
3- Les points positifs de la négritude.
- La prise de conscience de la supériorité de la culture occidentale.
- La nécessité de Maîtriser cette culture pour se fortifier.

Transition : La philosophie doit-elle donc se confondre avec l’idéologie ?

B- REFUTATION DU TEXTE
- Towa fait une confusion entre la philosophie et l’idéologie. Pour lui, il y
a une tâche précise de la philosophie pour tous les Africains, à savoir faciliter la
maîtrise de la culture et de la puissance occidentale. La philosophie devient pour
lui l’arme de la puissance d’un continent. Elle cesse d’être la libre réflexion sur
les idées abstraites.
- Le texte de Towa trahit son admiration de la culture occidentale. Et
pourtant cette culture a bien des faiblesses morales qui justifient le dégoût qu’on
pourrait avoir à son égard. Par contre, Njoh-Mouelle montre les faiblesses morales
de cette culture dans De la médiocrité à l’excellence
- Ce qui est plus décisif chez Towa, c’est sa volonté effrénée de détruire
l’identité culturelle du Nègre. Il y a plutôt une fierté à conserver cette identité. La
course aveugle vers la puissance ne pourrait que nous rendre aussi belliqueux que
l’Occidental. Or le monde a besoin des hommes vertueux et non des conquérants.
La philosophie, au lieu d’avoir pour tâche de faciliter l’acquisition de la puissance,
doit plutôt moraliser les hommes. C’est ainsi que Kant la conçoit.

Transition : Faut-il donc tourner le dos à la science ?

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 99


C- LA REINTERPRETATION DU TEXTE
- Le mérite de Towa c’est d’avoir permis de constater que la situation de
l’Africain est déplorable. Quelque chose doit être faite pour affranchir l’Afrique
de la domination occidentale.
-En donnant pour tâche à la philosophie de faciliter la maîtrise de la
puissance occidentale, Towa la rend plus utile. Une philosophie qui s’occupe des
idées abstraites ne sert à rien. Le rôle pratique de la philosophie est souligné par
Karl Marx et Kwamé Nkrumah.
- Towa se préoccupe aussi du destin de l’Afrique.

TEXTE 9 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir


de son étude ordonnée
Si c’est par instinct de conservation que le milieu exerce sa loi sur
l’homme, c’est aussi au nom du même instinct de conservation c’est-à-
dire du même désir de sécurité que l’homme se soumet à la loi dictée par le milieu
et accepte d’entrer dans le troupeau. Pour survivre, l’homme renonce à son
originalité et à sa liberté. Il se fait esclave à la fois de la vie et du milieu. C’est un
dramatique paradoxe existentiel que celui qui veut que l’homme doive se renoncer
pour être, entendons par là se renoncer solitaire, conscience de soi pour être masse,
autre que soi. Ici aussi, l’instinct de conservation est en même temps instinct de
mort. On se sauve en mourant à soi, on sauve sa vie en se faisant homme du milieu
plutôt qu’en s’opposant au milieu au risque de se laisser détruire par lui pour cause
de rébellion et de subversion. Mais, d’un autre côté, il y’a donc oubli de soi dans
l’anonymat de la masse, annihilation de toute velléité créationnelle, existence
monotone et routinière. C’est cela que nous appelons mort.
E. Njoh-Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Clé, P. 50.

A-INTRODUCTION
THEME : Le conformisme social.
PROBLEME : L’évaluation du conformisme social.
THESE DE L’AUTEUR : Le conformisme social est un danger pour l’homme.
PROBLEMATIQUE : Faut-il donc révolutionner la société au risque de
s’exposer à la mort ?

B- EXPLICATION ANALYTIQUE
Le texte comporte trois articulations.
1- Les causes du conformisme social.
 La volonté sociale de préserver l’ordre établi : « Instinct de conservation
du milieu »
 La crainte individuelle de la mort : « Désir de sécurité »

100
2- Les conséquences dramatiques du conformisme social.
 La perte de l’originalité et de la liberté.
 Un double asservissement de l’homme « se fait esclave à la fois de la vie
et du milieu »
 Acceptation du statu quo synonyme de mort : « C’est cela que nous
appelons mort »

3- Souhait de la lutte contre le conformisme social


 Nécessité de retrouver l’originalité et la liberté des individus.
 Nécessité de révolutionner la société.
 Fuite de la mort ou du dépérissement.

Transition : Ne court-on pas un grand danger de déstabilité en révolutionnant la


société ?

B- REFUTATION DU TEXTE
- La société se montre souvent impardonnable à l’égard de ceux qui tentent
de briser ses lois. Nul ne veut mourir. Le conformisme social a donc un fondement
solide. Car, il vaut mieux vivre dans la soumission que de courir les dangers qui
guettent ceux qui vivent dans la rébellion et la subversion. Socrate a voulu
s’attaquer à l’ordre social. N’ayant pas réussi sa mission, il a été tué. Il aurait dû
renoncer à ses idées révolutionnaires pour être en vie. C’est en vivant qu’il se
serait montré plus utile aux hommes.
- Une révolution à tout prix de la société devient la folie. S’il n’y a rien à
révolutionner, on doit s’accorder avec l’ordre établi. Parfois cet ordre nous
arrange. Nous pouvons l’accepter librement comme les stoïciens sans devenir
automatiquement malheureux.
- Njoh-Mouelle donne un sens idéaliste de la mort. Pour lui, mourir c’est se
soumettre. Cette conception de la mort est éloignée de la réalité. Celui qui se
soumet ne se croit pas mort. C’est plutôt la mort qu’il fuit par le fait d’obéir.

Transition : Le conformisme social ne freine-t-il pas le développement.

C- REINTERPRETATION DU TEXTE
- Le texte nous permet de comprendre que nos sociétés ne sont pas encore
un idéal et que, pour cette raison, il faut les révolutionner. Bien des pratiques
malsaines y sont visibles. Les lois qui les régissent aussi sont l’expression de la
dictature. L’homme ne peut s’accomplir que s’il s’engage à les parfaire ou bien à
les développer.
- Njoh-Mouelle se soucie du bonheur de l’homme. Il veut lui donner sa
liberté qu’il perd quand il se soumet à un ordre social qui l’étouffe. Il y’a donc de
la part de l’auteur un souci moral.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 101


- Le texte nous permet aussi de comprendre que nous devons être courageux
dans la vie, être comme Socrate qui préfère mourir plutôt que de se soumettre à
un ordre social imparfait. En dehors de cette leçon de courage, le texte nous
permet aussi de comprendre que nous ne devons pas croiser les bras devant les
défis qui nous interpellent dans la société. L’homme normal est donc celui qui se
met à l’œuvre tout le temps pour améliorer son cadre de vie.

Texte 10: Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de


son étude ordonnée
Athéniens, ce n’est pas ma cause, loin de là, que je plaide à présent,
comme on pourrait le croire, c’est la vôtre, car je crains qu’en prononçant ma
condamnation vous ne méprisiez le cadeau que vous a fait le dieu. Si vous me
faites mourir en effet, vous n’en trouverez pas facilement un autre comme moi :
un homme littéralement (mes propos dussent-ils prêter à rire) attaché par le dieu
à la cité, comme si elle était un cheval de belle taille et de bonne race, mais alourdi
par sa grandeur et qui aurait besoin d’un taon pour l’aiguillonner. C’est ainsi,
comme une sorte de taon, que, me semble-t-il, le dieu m’a attaché à la cité, moi
qui me pose partout et, toute la journée, ne cesse de vous aiguillonner, de vous
exhorter, de vous invectiver chacun individuellement. Non, messieurs, vous aurez
du mal à trouver mon pareil et, si vous m’en croyez, vous me traiterez avec
ménagement. Mais peut-être bien céderez-vous à l’agacement, comme les gens
qu’on réveille en plein sommeil, et, dociles aux arguments d’Anytos,
m’expédieriez-vous d’une tape à la mort. En suite de quoi, vous continuerez à
dormir le restant de votre vie, à moins que, dans sa sollicitude, le dieu ne vous
envoie quelqu’un d’autre pour me remplacer.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, pp.66-67.
A-INTRODUCTION
Thème : Le philosophe.
Problème : La valeur du philosophe.
Thèse : Le philosophe est irremplaçable, il est unique et a une valeur inestimable
dans la cité.
Problématique : Le philosophe est-il réellement irremplaçable ? La société ne
peut-elle pas se passer de philosophie ?

B- EXPLICATION ANALYTIQUE
Le texte comporte trois articulations.
1. Les raisons de ne pas tuer le philosophe.

102
- Le philosophe est un cadeau du ciel fait aux hommes pour se soucier d’eux : «
Le cadeau que vous a fait le dieu »
- Il est un être rare et difficilement remplaçable : « Si vous me faites mourir en
effet, vous n’en trouverez pas facilement un autre comme moi »

2. La mission divine du philosophe.


- Faire marcher sans cesse les hommes vers le progrès : « C’est ainsi, comme une
sorte de taon, que…le dieu m’a attaché à la cité »
- Critiquer les hommes un par un pour qu’ils puissent changer.
3- La conséquence sociale de la mort du philosophe.
- La perte d’un homme rare.
- La perte du principe actif de la société et l’arrêt du progrès des hommes.

Transition : Le philosophe est-il vraiment indispensable ?

B- REFUTATION DU TEXTE

- Le philosophe est généralement vu par les hommes comme un être ennuyeux.


Plusieurs raisons conseillent qu’il faut le condamner : il corrompt la jeunesse, il
sape les règles qui régissent la société, il enseigne aux autres l’esprit subversif.
- Le discours du philosophe est souvent contre Dieu. Nietzsche avait dit : « Dieu
est mort ». Il serait douteux qu’un homme qui proclame ainsi la mort de Dieu
puisse encore être en bons termes avec lui.
- Il y’a dans le texte cette prétention que sans le philosophe, la société ne peut pas
se parfaire. C’est plutôt avec le philosophe que la société se détruit : dès que le
philosophe fait surface dans le monde, il détruit par sa critique habituelle tout ce
qui a été fait en son absence. On pourrait donc avancer que sa perte est salutaire
pour les hommes. Quand le philosophe meurt, les hommes se délivrent d’un être
qui les dérangeait.

Transition : Les critiques du philosophe sont-elles donc mauvaises ?

C- REINTERPRETATION DU TEXTE

- Le texte de Platon nous fait voir que, contrairement à ce que les hommes pensent,
le philosophe est un homme indispensable dans la société. Sa seule présence parmi
les hommes permet le progrès.
- Le texte nous fait prendre position contre les meurtres. Tuer un homme, cette
lâcheté ne nous apporte que des ennuis. L’assassinat d’un homme, fut-il mauvais,
est une initiative immorale.
- Il vaut donc mieux garder dans la société un homme qui nous critique. Il nous
est utile parce que ses critiques nous permettent de nous améliorer.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 103


Texte 11 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de
son étude ordonnée
S’il est vrai que la thèse de l’occidentalité exclusive de la
philosophie aboutit à la légitimation de l’impérialisme occidental, n’est-
il pas normal que la négation de l’impérialisme entraîne aussi la négation de cette
thèse ? La première expérience du nègre colonisé après l’effondrement de son
univers, fut l’éblouissement par le monde occidental aperçu dans l’éclat aveuglant
de sa victoire. Fasciné, il n’eut bientôt qu’une aspiration : s’échapper de son
monde vaincu et dévalué, et se jeter les yeux fermés dans le nouvel univers ; celui-
ci lui apparaissait, dans une totale indifférenciation, comme une nébuleuse sans
contours et sans formes, mais étincelante. Ce fut le temps de l’assimilation, de
l’illusion que l’occidentalité, même subie, suffirait à lui restituer son humanité
perdue. Mais quand son regard se fut suffisamment exercé à mieux scruter
l’Occident, il ne tarda pas à discerner à côté des zones de lumière, beaucoup de
zones d’ombre. Et surtout il sut que de toute manière l’Occident l’excluait
absolument. Il ne lui restait plus qu’à constituer ou à reconstituer son propre
monde fondé sur ses propres valeurs. Ce fut le temps du retour aux sources, de
l’exaltation de l’originalité et de la différence : ce fut le temps de la négritude.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp.23-24.
A-INTRODUCTION
Thème : La négritude
Problème : Les causes de la négritude
Thèse : La négritude est un repli identitaire en réaction contre l’impérialisme
occidental
Problématique : La négritude est-elle contreproductive ? Est-elle essentiellement
négative ?

A- EXPLICATION ANALYTIQUE

Le texte comporte trois articulations

1. L’exclusivité philosophique de l’occident comme légitimation de


l’impérialisme
- Seule les peuples aptes à philosopher ont le droit de domination sur les autres et
les apologistes de l’impérialisme fonde leurs thèse sur la non humanité des
africains qui a pour corollaire leur inaptitude à philosopher.

104
- La négation de cette thèse par les africains est la première étape de l’affirmation
de leur indépendance

2. L’illusion de l’Occident comme paradigme :


- Les africains sont émerveillés devant les prouesses technoscientifiques de
l’occident
- L’effondrement de l’univers culturel de l’africain face à l’Occident
- Le constat des pseudos valeurs de l’Occident
-L’échec d’une occidentalisation de l’africain et désillusion des africains vis-à-vis
de l’Occident

3- L’affirmation de l’identité africaine comme moyen de libération


- L’exaltation de l’originalité africaine
- L’apologie de la culture africaine

Transition : La négritude comme discours apologétique de l’identité africaine


est-elle contreproductive ?

B- REFUTATION DU TEXTE

Critique externe : Le retour sur soi n’est pas essentiellement négatif car, il
permet de mieux se connaitre afin de mieux s’ouvrir aux autres. La négritude a le
mérite de valoriser l’humanité bafouée des africains.

Transition : Les critiques du philosophe sont-elles donc mauvaises ?

C- REINTERPRETATION DU TEXTE

- Le texte de Towa nous fait voir que, la négritude est essentiellement un


mouvement de réaction contre l’impérialisme. Ce mouvement est contreproductif
dans la mesure où c’est encore l’occident qui est maître et l’africain cherche
auprès de l’occidental son certificat d’humanité.
- Le texte nous éclaire également sur la méthode à adopter pour la libération de
l’Afrique : il s’agit d’adopter une critique sans complaisance vis-à-vis de nos
cultures.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 105


Texte 12 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de
son étude ordonnée
Mais le problème est de savoir où se situe véritablement la liberté :
dans l’action de supprimer l’entrave ou plutôt dans la jouissance de la
facilité qui naît postérieurement à l’action de réduire l’entrave, en d’autres termes,
suis-je libre quand je m’engage dans la réduction d’un ordre contraignant donné
ou plutôt dans le moment de repos qui succède à l’effort victorieux de réduction
des contraintes ? Toute liberté dont on veut jouir dans l’absence de contrainte et
par conséquent de l’effort n’est pas qualitativement différentes de celle qu’aurait
métaphoriquement un corps quelconque tombant en chute dite justement libre
dans un vide d’obstacles et de résistance ! C’est une liberté négative qui veut être,
définitivement être soi au lieu que la vraie liberté est toujours en devenir. C’est
une liberté qui aspire à se loger, à se cloisonner, pour ainsi dire, dans le vide d’une
résistance antérieurement supprimée ou simplement inexistante. Or, la vraie
liberté ne se laisse point figer ni séquestrer. La liberté conçue comme absence
d’entraves est ce que nous appellerions une liberté-chose par opposition à la
liberté-action, une liberté-consommation par opposition à la liberté-production.
L’action de supprimer l’obstacle lui devient une condition de possibilité et non
une caractéristique essentielle. C’est la pseudo-liberté qu’on octroie et vous ne
gagnez pas.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.87-88.

A-INTRODUCTION
Thème : La liberté
Problème : Qu’est-ce que la liberté ? (la nature de la liberté)
Thèse : Contrairement à une pseudo-conception de la liberté qui est la marque de
la médiocrité, La véritable liberté est une conquête permanente sur les obstacles,
elle est dynamique et non statique, active et non passive.
Problématique : La liberté perçue comme absence de contrainte est-elle
forcément péjorative ? La conception de la liberté par l’auteur n’est-elle pas
remise en question par la nature de l’homme ? Quel véritable acception donné à
la liberté ?
B- EXPLICATION ANALYTIQUE :
Dans la première articulation, l’auteur soulève l’ambiguïté que pose la question
de la liberté. Il s’agit d’une alternative : soit la liberté est une jouissance sans
contrainte, soit la liberté est une lutte pour supprimer les contraintes.
106
Dans la seconde articulation l’auteur montre la nature dynamique de liberté. En
effet, la liberté prise comme absence de contrainte est un libertinage. C’est une
liberté négative qui veux se cloisonner c’est-à-dire se figé et enfermé l’Etre dans
un état de jouissance sans effort. Il s’agir d’un avatar de la médiocrité.
Dans la troisième articulation : l’auteur donne les différentes manifestations et
forme que prend la véritable liberté en les opposant à la pseudo-liberté. Il pose la
suppression de contrainte comme condition de liberté et non comme finalité de la
liberté. La véritable liberté se gagne au prix d’une lutte incessante et perpétuelle.
Elle est acquise au prix d’une lutte.
C-REFUTATION :
Naturellement l’homme conçoit la liberté comme une absence d’obstacle cette
conception semble plus en adéquation avec la réalité et on peut objectivement
interpréter la thèse de l’auteur d’être un idéalisme qui ne tient pas compte de la
réalité. De plus comment l’absence de contrainte n’est pas forcément négative et
les contraintes sont même dangereuses dans certaines conditions. La contrainte à
défaut de limiter la liberté peut même totalement supprimer celle-ci.
D- REINTERPRETATION : L’auteur a le mérite de nous éclairer sur les
dangers d’une conception erronée de la liberté. En effet la liberté conçue comme
absence de contrainte, comme jouissance et repos nous entraine au libertinage.
Une telle liberté est une soumission à l’instinct ; c’est donc une manifestation de
la médiocrité dans la mesure où celle-ci est un anti effort. La liberté à laquelle
nous devons aspirer est celle qui nous hisse au-dessus de la nature ; c’est une telle
liberté qui est en adéquation avec le concept de développement. L’auteur reste
donc cohérent avec lui-même en nous montrant que la liberté de l’homme n’est
pas figée mais dynamique. La pseudo-liberté nous maintient dans le sous-
développement tandis que la liberté véritable est un facteur de développement.
L’homme ne cherche pas seulement à consommer ou à jouir ce qui serait une
soumission à l’avoir ; mais il cherche à produire, à agir ; ce qui élève son être.
Dans la perspective du développement de l’Afrique, ce texte nous donne une
pédagogie à suivre e nous éclairant sur la conception véritable de la liberté.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 107


TROISIEME
PARTIE
ETUDE DES ŒUVRES
A-PLATON,
APOLOGIE DE SOCRATE,
HATIER, 1993.

I- QUELQUES ÉLEMENTS BIO-


BIBLIOGRAPHIQUES DE PLATON.
De son vrai nom Aristoclès, Platon auteur de cet ouvrage est né en 428
avant J.C. à Athènes. Sa famille fait partie de la haute aristocratie athénienne.
Son père Ariston était un ami du roi Périclès ; sa mère Péritonê était la sœur
du magistrat Critias et descendait de Solon. Il avait une éducation princière, celle
qui le disposait à participer à la gestion des affaires publiques.
Les sophistes furent ses premiers maitres. De ces derniers, il a appris la
rhétorique (l’art de bien parler ; l’éloquence, la manipulation des du
verbe/mot).Il s’initie à la poésie et à la peinture. Lorsqu’il fait ses premiers pas à
la dialectique et à la philosophie, ce sera grâce à la rencontre de Socrate
dont l’enseignement est au cœur de ses ouvrages en général et en particulier dans
ce dialogue qui retrace son procès et sa condamnation.
Platon adhère entièrement aux idées de Socrate sur une politique fondée
sur la justice, la vérité et la vertu. La vérité, la justice et la vertu qui représentent
les valeurs qu’enseigne la philosophie dont Socrate est le symbole ne sont pas

108
partagées dans la cité d’Athènes. C’est en cela que le procès de Socrate est aussi
le procès de la philosophie.

II- L’APOLOGIE OU LE PROCES DE LA PHILOSOPHIE.


Socrate est un père de famille, désœuvré à qui l’Oracle Delphes annonce
qu’il est l’homme le plus sage d’Athènes. N’étant pas convaincu des
allégations de l’oracle, il s’impose de vérifier cela auprès de ceux qui sont
considérés comme les plus sage de la cité, à savoir : les hommes politiques, les
poètes, les artisans, les magistrats, les médecins, les orateurs de toutes sorte et
même les esclaves. Le procès de Socrate est un simulacre de procès pour
neutraliser celui qui ose remettre en cause les croyances, les habitudes et le mode
de gestion de la chose publique. C’est donc l’attitude ou l’esprit philosophique
qui doit être réprimandé à travers ce procès.
1- Les chefs d’accusations contre Socrate.
« Socrate est coupable de corrompre les jeunes gens et de ne pas
reconnaitre les dieux que reconnait la cité mais de croire à d’autres
manifestations surnaturelles nouvelles.» 24b-c. Pour résumer, Socrate est accusé
de perversion de la jeunesse, d’impiété vis-à-vis des dieux de la cité et de
croyance à des choses extraordinaires. De plus il méprise des biens matériels
prisés et honorés par tous les athéniens. À cela s’ajoute le fait d’introduire le
doute et la subversion (un subversif c’est celui qui bouleverse l’ordre établi)
dans le cœur de ceux qui sont sages et les membres de la cité. Les accusateurs de
Socrate sont : Anytos qui voulait se venger de Socrate pour l’avoir accusé de
retirer son fils de la philosophie pour le forcer de reprendre la tannerie familiale.
Mélétos le jeune poète terne (peu d’éclat) qui porte plainte et Lycon un orateur.
Tous sont de sophistes.
2- Le déroulement du procès
Socrate est jugé au tribunal d’Héliée à l’agora où tous les curieux peuvent
assister au procès. Le jury est tiré des 42000 citoyens que compte Athènes, soit
6000 citoyens qui représentent le quorum représentatif du peuple. Mais seuls 501
membres de plus de 30ans et ne devant rien à l’Etat seront présents dans le jury.
Tout commence par une prière et la lecture de l’accusation par le greffier, il n’y
a ni procureur, ni avocat. Le plaignant et l’accusé prennent la parole librement
pour se défendre. Le procès ne peut être ajourné sauf par signe de Zeus
(tremblement de terre, orage).la journée est divisée en trois, une partie pour le

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 109


plaignant, une pour l’accusé et une pour les juges (magistrat jury). On peut
tout dire pour remporter.
3- Défense (plaidoirie) et condamnation de Socrate.
Socrate est un juste devant la justice, un légaliste qui respecte les
institutions et demande d’être jugé selon la loi. Socrate dénonce la démarche
injuste de ses accusateurs car il est un homme droit. Au sujet de la corruption de
la jeunesse, Socrate répond que ses accusateurs n’ont aucune preuve contre lui.
La vérité qu’ils n’osent avouer « c’est qu’ils ont été percés à jour sous leur faux
airs de savants, alors qu’ils ne savaient rien. » (23d-c). Il pense ensuite qu’un
seul homme ne peut pervertir la jeunesse si tous les autres leurs font du bien.
25b-c ; et que lui-même Socrate serait en danger si ces jeune sont détournés du
bien.
En ce qui concerne l’accusation portant sur l’impiété de Socrate, il pense
que Mélétos se contredit lorsqu’il affirme ensuite qu’il enseigne l’existence des
dieux différents de ceux de la cité. Par conséquent il croit aux dieux (27a).
Aussi, Socrate déclare tout le temps être en contact avec un démon. « Tu dis que
je ne crois pas aux dieux, puis qu’à l’inverse je crois aux dieux puisque je crois
aux démons. » (27d). Socrate pense qu’il mène une activité citoyenne en
améliorant la conduite des hommes de la cité. En enseignant la justice, la vertu,
il perfectionne les âmes et participe au bien être de la communauté (30b). Ainsi,
au lieu d’être accusé, il doit être décoré et nourrit au prytanée (36d-e). Il pense
enfin que sa condamnation à mort ferait plus de mal aux athéniens dans de telles
conditions qu’à lui (30d-e).
Socrate est condamné à mort en buvant de la cigüe. Or la conception
socratique de la mort est toute aussi particulière. Pour lui, « pour un homme de
bien, il ne peut y avoir aucun mal, ni pendant sa vie, ni après sa mort » (41d).
C’est la conception vulgaire de la mort qui la rend terrifiante, pourtant nul n’a fait
l’expérience de celle-ci. Il y a de fortes chances que la mort soit un bien (40c). Le
juste ne craint pas la mort car les dieux ne seront pas indifférents à sa justice et
à ses vertus.

110
B- MARCIEN TOWA,
ESSAI SUR LA PROBLEMATIQUE
PHILOSOPHIQUE DANS
L’AFRIQUE ACTUELLE, CLE, 1971, 77
pages

L’Essai est l’ouvrage qui introduit M. Towa dans le débat sur la


problématique philosophique en Afrique. Bien que, la genèse de ce débat est
exogène au continent, dans le sens où, c’est le belge Placide Tempels à travers
son ouvrage : Philosophie bantoue qui l’initie. Tempels s’oppose aux thèses
soutenues par Hegel, Lévy-Bruhl ou Heidegger qui nient l’aptitude
philosophique des africains, pour affirmer l’existence d’une philosophie africaine
authentique. Ce débat se déportera en Afrique par les partisans de Tempels tels
que Kagamé, Basile Juléat Fouda et John Mbiti…qui affirment une philosophie
africaine perceptible dans les us et coutumes traditionnelles. A ces derniers
s’opposent ceux qui rejettent l’ethnophilosophie à cause de ses rapports
incestueux avec les principes de la philosophie universelle. C’est dans cette
perspective de clarification de la nature des principes et de la valeur de la
philosophie que Marcien Towa rédige l’Essai. La réflexion de notre auteur dans
cet ouvrage vise à apporter des réponses aux questions suivantes : Existe-t-il une
philosophie africaine ? Quel rapport l’ethnophilosophie entretient-elle avec la
négritude et la culture africaine en générale ? Au regard des multiples tendances
qui émergent de ce débat, quelle orientation faut-il donner à la philosophie en
Afrique ?

I- L’INTENTION DE MARCIEN TOWA DANS L’ESSAI

La pensée philosophique occidentale a réussie à construire le préjugé


suivant lequel les africains sont absent dans la production de pensée et la science.
Cette absence se justifie par le fait que les africains sont des êtres dominés par la
brutalité, la sauvagerie et le manque d’organisation et de réflexion. La philosophie
et la science sont d’essence occidentale.
Si Tempels réagit à cette accusation des africains, c’est pour les soumettre
à leur maitres qui ne sont rien d’autre que les occidentaux en démontrant que seuls
les blancs peuvent présenter cette philosophie africaine. Ceux qui partagent cet

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 111


avis de Tempels en Afrique sont tombés dans le piège de l’occident pour des
raisons suivantes.
- En reprochant l’occident de s’être approprié de la philosophie, eux-mêmes
s’en sont procuré une. Or la philosophie ne saurait se régionaliser ou se
réduire à une culture, car c’est une science universelle.
- En affirmant que la philosophie africaine existe à travers les proverbes, les
croyances religieuses, les contes et les mythes, ils ont lié la philosophie à l
tradition. Or la tradition est l’œuvre de nos ancêtres, s’ils ont philosophé,
cela ne nous dispense pas de philosopher à notre tour. La philosophie n’est
pas un savoir par procuration, c’est l’usage libre et personnel de la raison.
Plus grave encore, ils présentent la philosophie africaine comme un contenu
de formules laissées par nos ancêtres qui ne nécessite aucune critique. Towa
démontre que c’est une attitude qui déshonore la philosophie.

II- Evolution et résumé de la pensée de Towa dans l’essai


1- PREMIERE PARTIE : « Existe-t-il une philosophie africaine »

Dès les 1eres lignes M. Towa identifie les principaux piliers et le secret
de la puissance occidentale. Il s’agit de la science la philosophie et la technologie.
La raison qui permet ces sciences ne se manifeste qu’en occident.
Pour Lévy-Bruhl, les africains font partie intégrante des sociétés
inférieures : « rentre dans la catégorie des sociétés inférieures, tous les primitifs
africains et australiens en général. Mais aussi l’Egypte ancienne et le Mexique
précolombienne. » (p.7) Il estime que ces sociétés sont caractérisées par une
mentalité prélogique faite de mysticisme, de l’ancestralisme et du traditionalisme.
Il considère la Grèce comme le model par excellence d’une société évoluée et la
terre natale de la raison donc, de la philosophie et la science.
Emile Bréhier dans son projet d’élaboration d’une histoire systématique
de la philosophie, il commence par Thales. Il s’en prend aussi à Masson-Oursel
qui osait parler de « pseudo miracle grec ». Masson-Oursel niait la paternité
philosophique et scientifique de la Grèce antique. Towa montre que Bréhier
manque de pertinence pour critiquer scientifiquement Masson-Oursel. Towa
établit la primauté de la philosophie égyptienne à celle de l’occident en rejetant le
fameux miracle grec. Towa évoque brièvement Tempels en insistant sur l’écho
favorable de son ouvrage chez certains scientifiques tels que G. Bachelard,
Lavelle et Gabriel Marcel qui ont l’apprécier positivement.

112
Gusdorf soucieux de mettre un terme à la querelle élabore une échelle
de l’évolution des sociétés humaines pour trancher en faveur de l’occident. « C’est
en Grèce avec Socrate que Gusdorf situe le berceau de la philosophie. En dehors
de la pensée philosophique occidentale inaugurée par Socrate, il n’y a que mythe
et primitivisme ».Le reste de l’humanité dans laquelle se situe l’Afrique beigne
dans le mythe et l’instinct, l’occident seul a atteint le stade suprême de la pensée
libre.
Heidegger a une position euro-centriste par rapport à la philosophie. Il
affirme sans équivoque que « la philosophie est grecque dans son essence ».Il
ajoute : « l’occident et l’Europe et eux seuls sont dans le cas le plus intérieurement
philosophique. » (p.13)
Hegel c’est un auteur qui a beaucoup influencé Marcien Towa. Towa
le présente à la fois comme le négateur de la philosophie en Afrique et comme le
philosophe model. Pour cette auteur, la philosophie est une pensée : libre,
universelle, générale, absolu. Elle est liberté et raison. C’est parce que Hegel
définit la philosophie comme « la pensée qui se pense elle-même, le général ayant
pour contenu le général ».La philosophie est la contrainte de la raison et la liberté
pour penser le tout. Pour lui la mentalité africaine est incapable de s’élever.
« Hegel fait de la pensée et la philosophie le monopole de l’occident ». Il estime
que l’attachement des africains à la nature les condamnent à l’enfance de la
raison. « Je ne suis pas libre si je dépends d’un instinct… » (pp.15-16) Towa
accepte la définition que Hegel donne à la philosophie mais rejette son opinion
sur l’homme noir. Il conclut : « Hegel est qualifié pour définir la nature et
exigences de sa discipline .En revanche, l’insuffisance manifeste de son
information sur les cultures non-européenne et son attitude impérialiste à leur
égard rendent suspect son refus de toute philosophie aux peuples colonisés »
(p22). Voir pp. 12-13 ; 15 ; 19 ; 20.
2- DEUXIEME PARTIE : « La philosophie africaine dans le sillage de la
négritude »
Marcien Towa remarque que l’ethnophilosophie s’inscrit dans la
continuité de la négritude. L’attitude ethnophilosophique correspond à la
négritude qui est un mouvement littéraire qui vante le passé culturel et traditionnel
de l’homme Noir en réagissant contre les préjugés racistes de l’occident. En
s’attaquant à la négritude, Towa indique clairement dans cet ouvrage son objectif ;
celui de montrer aux jeunes lecteurs que l’ethnophilosophie est une tricherie qui
trahit la philosophie en imitant la démarche de la négritude. En découvrant les
coins d’ombre de la culture occidentale, les africains désirent retrouver leur
humanité arrachée en rentrant dans leurs valeurs, dans leurs racines. Ce retour
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 113
marque la preuve de leur différence à l’homme Blanc, cette différence est une
acceptation de leur humanité secondaire. Par conséquent ils n’ont pas la même
rationalité que l’occident. « Ce fut le temps du retour aux sources, de l’exaltation,
de l’originalité et de la différence : ce fut le temps de la négritude. » (p.24) Le
rêve de liberté a ruiné le bon sens des africains à reconnaitre une humanité
commune en tous les hommes. « Si les Nègres ont une philosophie propre, ils sont
donc pleinement hommes et doivent jouir de tous les droits d’homme, notamment
du droit d’autonomie aussi bien culturelle que politique. » (p.25)
La quête de l’autonomie nous a conduits dans le piège de l’occident
de nous placer à la périphérie de l’histoire de la rationalité en nous produisant une
philosophie à notre mesure. Cette philosophie est dans la culture, les légendes, les
proverbes et la religion. L’ethnophilosophie sera dons un culte célébré pour nos
ancêtres qui ont dû se montrer philosophes. Mais nous ne pouvons évoluer et
participer à la construction de l’histoire universelle. C’est pour cette raison que
Towa caractérise l’ethnophilosophie comme suit :
 Elle est une voie de facilité.
 Elle n’admet pas l’esprit critique (p.29-30).
 Elle trahit la philosophie (p.31).
 Elle est un discours militant et théologique.
 Elle est fondée sur la démarche de la retro-jection (essentiellement tournée
vers le passé en cherchant le présent et le futur dans le passé).
 Elle est exhumation du passé.
 Elle est une philosophie de la récurrence et du dogmatisme. (p.32)
 Elle est enfin un certificat d’humanité pour les africains.

3- TROISIEME PARTIE : « Pour une nouvelle orientation philosophique


en Afrique »

L’auteur commence à dévoiler véritablement son projet philosophique


pour l’Afrique. La première étape consiste pour Towa au dépassement de
l’ethnophilosophie. « Pour ouvrir la voie à un développement philosophique en
Afrique, il faut que, résolument, nous nous détournions de l’ethno-philosophie ».
(p.35) Simplement, pour Towa, la problématique de l’ethno-philosophie est
devenue désuète et sa scientificité douteuse car sa méthode trahit la philosophie
et son objet est traditionaliste. L’ère des revendications identitaires est révolue.
Pour Marcien Towa, la philosophie en Afrique doit commencer par la
reconnaissance de notre identité comme partie intégrante du monde. « La simple
idée que nous sommes indispensables à la communauté humaine pourrait

114
contribuer substantiellement impulser dynamisme et enthousiasme à la lutte de
libération et gagner des sympathies dans les métropoles ». (p.38) Il faut donc
rejeter notre nature et identité actuelle qui nous a conduit à la soumission. Pour
survivre dans le monde actuel nous devons prendre ce qu’il y a de meilleur chez
notre bourreau. « La volonté d’être nous-mêmes, d’assumer notre destin, nous
accule finalement à la nécessité de nous transformer en profondeur, de nier notre
être intime pour devenir l’autre. » C’est une révolution qui imposer une négation
de soi, une rupture avec la culture de l’humiliation par une appropriation de ce
qui constitue le secret de la puissance de l’occident. (pp. 40-41) Les peuples qui
se sont transformer et battus l’occident sur son propre terrain reçoivent de celui-
ci du respect et de l’admiration.
La science et la philosophie sont identifiées comme les armes de la
puissance occidentale dont il faut nécessairement s’emparer. « La destruction des
idoles traditionnelles qui seule permettra d’accueillir et assimiler l’esprit de
l’Europe, secret de sa puissance et de sa victoire sur nous. Et c’est seulement en
édifiant une puissance comparable aux grandes puissances de notre temps et donc
capable de résister à leur agression éventuelle et à leur impérialisme ». (p.52) Il
est alors indispensable de s’identifier à certains principes de l’occident,
développer l’univers scientifique, technique et philosophique pour affronter
l’occident. « Notre attention sera en revanche retenue par ce que l’Europe elle-
même affirme être sa marque distinctive : la philosophie et la science. » (pp.56-
57) « Nous sommes en quête de quelque chose qui nous manque, et non de ce que
nous aurions déjà » (p.59)
La démarche de Towa est donc tripartite : le dépassement de l’ethno-
philosophie « le changement de perspective entraine l’abandon de la méthode
ethno-philosophique» (p.53) ; la rupture avec l’héritage culturel et
traditionnel (p.52) : enfin l’identification et l’appropriation du secret de la
puissance occidentale pour résister à l’Europe.

4- QUATRIEME PARTIE : « Le concept européen de la philosophie et


nous »

L’auteur examine dans cette partie le rapport entre la philosophie et la


conscience africaine. Pour Towa, la rigueur méthodologique et scientifique de
Hegel fait de lui le philosophe modèle. Il permet aussi de reconstituer les principes
et les critères d’une bonne philosophie. «La philosophie pour Hegel, nous l’avons
vu, c’est la pensée reposant sur elle-même … la philosophie ne présuppose rien,
n’admet rien comme vrai qui n’ait été reconnu par la pensée» (p.61) Pour

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 115


parvenir à la vérité la philosophie et la science n’admettent que la pensée libre
individuelle et évaluée. C’est ce qui établît la différence entre la philosophie et la
religion. La religion suppose que l’homme ne peut parvenir à la Vérité, il faut
donc lui proposer des vérités toutes faites. Tandis que la philosophie et la science
pensent que l’homme est capable de lever le mystère et accéder à la vérité. « Ainsi
dans la religion le contenu est donné, il est considéré comme au-dessus ou au-
delà de la raison…Mais l’idée d’une vérité au-delà de la raison, inaccessible
naturellement à l’esprit humain, est absolument inconcevable par la
philosophie.» (p.62) Les vérités religieuses sont dogmatiques et spéculatives ; la
philosophie se fonde sur l’examen libre de l’esprit « qui doit apprécier et juger. »
(p.63)
L’auteur distingue aussi la philosophie de la philosophie populaire. La
philosophie populaire ne s’encombre pas de la rigueur méthodologique elle
recherche l’expression des convictions, des sensations et de l’instinct moral et le
cœur. « La philosophie populaire recherche moins la pénétration intellectuelle
que l’édification par l’enthousiasme enflammé pour le beau, le sacré ». (p.65) La
philosophie et la science représentent une opportunité pour l’homme. Un moyen
pour retrouver la liberté et satisfaire ses besoins. « L’homme par la science et la
philosophie, non seulement connaisse mieux le monde, mais aussi développe sa
puissance sur lui pour l’aménager à son profit, et se libérer ainsi de la nécessité
du besoin. » (p.67) c’est en cela que cette philosophie et la science sont utile au
continent africain, construire une communauté affranchie des croyances et de la
domination occidentale en nous aidant à édifier une superpuissance. « Elle nous
aidera à opérer la révolution des mentalités qui conditionne l’édification de notre
propre puissance… elle rencontre directement le sens même de notre projet : une
Afrique libre dans un monde libéré. » (p.68)Tous les chercheurs africains ont la
charge de reconstruire une histoire digne du continent au-delà de ses humiliations.

CONCLUSION
Le continent africain pratique de la philosophie et a plus que jamais
besoin de l’intégrer dans son histoire. La philosophie dont l’Afrique a besoin n’est
pas dans son passé, elle n’est pas à exhumer comme le préconise l’ethno-
philosophie et la négritude. L’Afrique doit rompre avec sa culture qui l’a conduit
dans la faiblesse et la soumission. Elle doit s’approprier de la science et la
philosophie qui ont développé et rendu puisant leurs maitres. L’Afrique doit se
servir de ces mêmes armes pour se développer, résister l’occident et créer
l’équilibre mondial en devenant puissant à notre tour.

116
C- EBENEZER NJOH MOUELLE,
DE LA MEDIOCRITE A
L’EXCELLENCE,
ED. EMC, 1988, 154 pages

La problématique majeure qui guide la réflexion d’Ebénézer NJOH-


MOUELLE dans son œuvre est celle du développement en Afrique. Pour ce faire,
l’auteur commence par souligner la nécessité de la philosophie dans le contexte
socio-historique des pays africains. Puis, il se penche sur les tâches qui incombent
actuellement au philosophe africain qui ne doit pas être un conservateur de musée,
mais un élément actif dans le processus du développement intégral dont l’Afrique
a besoin. Ce qui l’amène à reprendre la question du développement pour en
dégager la signification philosophique.
La question du développement est pluridimensionnelle et interpelle aussi
bien le philosophe que l’homme ordinaire. L’homme disait Protagoras est la
mesure de toute chose, c’est cet homme que NJOH MOUELLE place au centre
de la question du développement. Un développement qui ne prendrait pas comme
référence l’homme est voué à l’échec. L’état sinistré et de paupérisation
accentuée dans laquelle se trouve l’Afrique montre que la question du
développement est plus que jamais urgente. Mais de quel développement s’agit-
il, quelle est la finalité de celui-ci et quels sont les moyens que nous devons mettre
pour y arriver. Ces questions vont guider la réflexion de NJOH MOUELLE dans
son œuvre qui comporte neuf chapitres.

Chapitre 1 : Le faux problème de la pauvreté


Faut-il voir le développement sous le seul angle technologique et
scientifique et de ce fait l’évaluer par l’aspect quantitatif des réalisations
matérielles effectuées dans une société ? Pour l’auteur, l’aisance matérielle ne
saurait faire l’économie du développement. Dans ce chapitre, NJOH MOUELLE
dénonce la conception commune de la pauvreté qui se résume au manque de biens
matériels. La véritable pauvreté est celle qui affecte l’être, et dans cette
perspective l’accumulation de l’avoir peut s’avérer néfaste pour l’individu : « tout
enrichissement pris comme une fin en soi est au bout du compte, un
appauvrissement ». En définitive, l’auteur montre que la pauvreté de l’Afrique

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 117


n’est pas simplement absence d’objet réponses aux problèmes quotidiens que pose
l’existence.

Chapitre 2 : La misère de l’homme


La misère est l’un des avatars de la pauvreté. Elle se décline sous deux
formes selon NJOH MOUELLE. Nous avons la misère subjective qui est
essentiellement matérielle c’est-à-dire absence de biens, d’argent, etc. c’est une
pauvreté générique qui n’est pas le propre de l’Afrique. Nous avons également la
misère objective qui est plus spécifiquement africaine, elle est le premier facteur
de sous-développement du continent : « La marque particulière du sous-
développement c’est la misère objective, celle qui n’a pas besoin d’être
consciemment vécue pour être. Elle s’appelle ignorance, superstition,
analphabétisme. C’est la véritable misère, celle qui maintient ou ravale l’homme
à l’état de sous-humanité par l’aliénation et le défaut de liberté qu’elle entraine. »
C’est la misère objective qui maintient l’homme à l’état constant de sous-
humanité qui a justifié d’une certaine manière l’impérialisme occidental. Nous
avons par cette forme de misère la dictature de l’instinct, de l’irrationalité sur la
raison.

Chapitre 3 : La mentalité de l’africain


L’occidentalisation tout azimut de l’Afrique apparaît comme une
pérennisation de l’assujettissement de l’Afrique. L’auteur invalide la conception
du développement prise comme occidentalisation. En effet, l’Occident est certes
développé sur le plan matériel mais on ne saurait prendre sa culture en bloc
comme paradigme de développement. L’Africain se trouve dans un état de crise,
une crise dû à a dépersonnalisation culturelle. La dépravation des mœurs est l’une
des conséquences de l’adoption sans critique de tout ce qui est occidental. Les
élites africaines érige en modèle les contre-valeurs comme l’homosexualité,
pratique étrangère à l’être au monde des africains. Par ailleurs, L’élite africaine
s’accommode de l’état actuel des choses, pire elle tire profit de cette situation tout
en ayant pleine conscience de la situation. Il s’agit d’un manque de courage, d’un
aveu d’impuissance. Plutôt que changer les choses, elle se complaît à s’adapter à
elles. C’est ni plus ni moins qu’une stratégie désespérée de survie. L’état de crise
de l’homme africain se caractérise par l’ubiquité de son comportement, de sa

118
personnalité. Résoudre le problème du développement revient à résoudre le
problème de personnalité des africains qui sont inauthentiques.

Chapitre 4 : La médiocrité
La médiocrité est le caractère le plus récurrent de l’homme de l’Afrique
sous-développée. L’homme médiocre est l’homme mitoyen. Il se fond
complètement dans la société et, c’est celle-ci qui lui dicte son comportement. Le
médiocre est incapable de prendre du recul face à son milieu, au contraire il a une
relation fusionnelle avec celui-ci. C’est un homme passif pour qui la société est
sécurisante pour sa survie : « En effet, si l’homme médiocre est celui qui met sa
raison et son jugement personnel en congé pour s’abandonner au ballotement que
lui impose l’opinion et le jugement anonyme des autres, il peut être et il est même
aussi l’homme qui, dans un second mouvement d’auto-abandonnement, se laisse
balloter par les diverses tendances aussi tyranniques les unes que les autres. » La
médiocrité est une démission vis-à-vis des exigences de l’excellence. Et
l’exigence majeure de l’excellence est la rationalité du comportement. L’homme
médiocre subsume la fin au moyen : « C’est l’homme qui ne résoud aucun
problème mais qui transforme tous ses problèmes en solutions. » La répétitivité,
la routine et le conformisme caractérisent le comportement de l’homme médiocre.
Le comportement de l’homme médiocre relève de l’instinctivité, de l’affectivité
(le corps). Il relève aussi de la société (du dehors) et annihile tout esprit
d’initiative. Le médiocre sombre dans la grégarité. Plutôt spectateur qu’acteur, le
médiocre emprunte une attitude de passivité face aux problèmes existentielles. La
médiocrité est une attitude de démission qui pérennise le sous-développement.

Chapitre 5 : La modernité
NJOH MOUELLE démontre que la modernité en saurait à elle seule se
subsumer au développement. En effet, la modernité ne signifie pas
rigoureusement progrès ou amélioration. L’actualité d’une chose n’est pas
synonyme de progrès, elle peut même signifier régression sur le plan
axiologique : « La modernisation doit donc être, non pas une simple question
d’adaptation formelle au présent, mais un souci d’amélioration réelle de la
condition humaine. » De plus, la temporalité ne suffit pas à établir la modernité
d’une chose. Celle-ci devrait plutôt se fonder sur le perfectionnement et
l’amélioration des conditions de vie de l’homme. L’homme doit demeurer la
valeur absolue autour de laquelle gravite la modernité et toutes autres choses. Par
ailleurs, l’auteur montre que le développement en Afrique exige le dépassement

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 119


de la mentalité tribale ou clanique pour la nation. La nation est un ferment au
double plan de l’émergence et de l’unité qui elle-même constitue une
propédeutique au développement. Le destin fédéral de l’Afrique apparaît donc
comme une condition sine qua non de son développement entendu comme
autonomie politique, économique et culturelle : « L’économie moderne,
inconciliable avec toutes formes d’autarcie, exige un espace bien plus vaste que
celui de la tribu. […] l’unité africaine n’est pas une fin en soi ; elle doit être
recherchée en tant qu’instrument et comme moyen en vue du développement
rapide et efficace de toutes les régions d’Afrique. On voit par là combien
dérisoire est l’organisation clanique ou tribale et la conscience qui les
accompagne. »

Chapitre 6 : Bien-être et Bonheur


Il existe une différence fondamentale entre le bien-être et le bonheur. Le
bonheur apparait comme une chimère, il doit être substitué au bien-être. La
conception du bonheur comme un paradis de jouissance est chimérique, c’est un
pseudo-bonheur qui relève du fantasme. Le bonheur implique la conscience du
bonheur, c’est une conquête permanente de l’homme sur les obstacles de son
existence. L’auteur clarifie également les différentes formes d’avoir. L’avoir bien
vient modifier l’être par l’illusion de satisfaction qu’il procure, il s’agit d’un avoir
quantitatif qui est un pseudo-avoir. Le véritable avoir dont l’Afrique a besoin pour
son émergence est l’avoir qualitatif ou le bien avoir. La fin dernière de l’existence
est l’auto-accomplissement par la création d’’œuvres qui sont autant de preuves
de liberté. L’existence jouissive d’objets-réponses n’est qu’une existence
médiocre. Le mal être de l’homme y en découle. L’homme ne trouve son plein
épanouissement qu’à travers l’actualisation de son existence, son bien-se faire.
Enfin, Le développement conçu comme accumulation de l’avoir a pour
conséquence une diminution de l’être c’est-à-dire une déshumanisation de
l’homme. La subordination de la qualité à la quantité ne peut être que dévastatrice
pour l’homme.
Chapitre 7 : Liberté et libération
La liberté ne signifie pas l’absence d’obstacles. La liberté ainsi conçue est
une liberté négative, c’est une liberté-chose, une liberté consommation. A cette
conception médiocre de la liberté qui est propre au sous-développement s’oppose
une conception excellente de la liberté propre au développement : la liberté, la
véritable, est une quête permanente, elle n’est jamais acquise définitivement.
C’est une liberté- action, une liberté production. De plus, la liberté se conquiert
dans l’action libératrice permanente. Elle n’est pas la fin mais un incessant
120
recommencement. La liberté devrait donc signifier plus rigoureusement
libération. De plus, si donc le développement économique et social doit viser non
pas tant la production massive des biens divers de consommation, mais avant tout
l’amélioration de l’homme en tant que tel, le philosophe a son rôle à jouer : il est
l’oracle dont la voix doit constamment percer le silence mortel des nuits de
servitudes et de l’aliénation sous toutes les formes. Par son sens de la réflexion
et de l’humain, son rôle est de « veiller constamment pour pouvoir révéler aux
autres le sens du présent et la direction de l’avenir » afin de les amener à se
détacher d’un ordre qui tend à les étouffer pour devenir en permanence les
créateurs de leur propre histoire. Le philosophe fait des lectures objectives de la
réalité dans le sens d’améliorer la vie. Aussi tire-t-il la société vers l’idéal vu par
lui. Il est donc ce moraliste qui montre toujours ce qui doit être contre ce qui est.
Chapitre 8 : Culture et développement
C’est la culture qui oriente nos comportements et permet de comprendre le
monde qui nous entoure. C’est le réfèrent qui contient les réponses que pose
l’existence. La culture a un rôle majeur dans le processus de développement. La
dévalorisation, la destruction des cultures africaines lors de la colonisation a
entrainé une crise profonde sur l’identité africaine. Ainsi, La culture occidentale
comme paradigme de développement par les élites du tiers monde en général et
de l’Afrique en particulier frise le ridicule. Il y a une sorte dévalorisation
systématique de soi-même et de ceux qui est local au bénéfice du label occidental.
Cet état de chose consacre et même pérennise le sous-développement. Par ailleurs,
Il ne peut y avoir une hiérarchisation des cultures car il n’y a pas de cultures
supérieures. Cependant l’aptitude ou l’inaptitude d’une culture à apporter des
réponses aux problèmes de l’individu, à la science peut favoriser le
développement ou le sous-développement. Promouvoir l’épanouissement intégral
de l’homme doit être le souci majeur du développement. Enfin, le développement
doit favoriser l’émergence des artistes. En effet, la modernité mal assimilée
aboutit à l’extrême rationalisation du temps : personne n’est libre vis-à-vis du
temps, on est soumis à de nombreuses contraintes. Seul l’artiste prend encore le
temps, il dispose de son temps. L’africain a des prédispositions culturelles à vivre
en artiste, préserver ces dispositions doit être garantie par le développement.
Chapitre 9 : L’excellence
Pour NJOH MOUELLE, l’homme excellent est un homme d’action, il
brille par son pragmatisme en joignant la parole aux actes. Son action est orientée
vers la promotion du groupe car il est conscient de la communauté de destin qu’il
a vis-à-vis du groupe. L’excellence n’est pas élitiste, tout homme y peut accéder.
Le moyen le plus idoine pour accéder à l’excellence est l’éducation. Une

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 121


éducation orientée vers la promotion de la liberté à travers la science, l’art et la
philosophie. L’homme excellent est l’homme que doit produire le processus de
développement. Ce nouvel homme est un homme-totalité, l’homme libre d’une
liberté vécue comme libération perpétuelle, l’homme toujours éveillé et engagé
dans l’histoire à travers l’action libératrice. Il est ce courageux prisonnier
platonicien qui brise les chaines de la caverne, accepte la difficulteuse ascension
dans le monde de la connaissance vraie, puis revient auprès de ses anciens
compagnons les aider à se libérer et à transformer leur monde.

122
QUATRIEME
PARTIE
RECUEIL DE TEXTES
Nota bene : Vous pouvez avoir accès à certains corrigés des textes proposés à
l’adresse suivante : www.olomostanislas.over-blog.com

A- PLATON,
APOLOGIE DE SOCRATE, HATIER,
1993.

I. LE PROCES
Texte 1 : L’accusation du philosophe
C’est « la science qui convient aux hommes » autrement dit la philosophie que pratique
Socrate qui lui vaut les calomnies. Devant ses accusateurs, Socrate soutient que leurs
accusations découlent du fait qu’il vit de manière atypique.
Peut-être alors l’un d’entre vous voudrait-il me rétorquer : « Mais alors,
Socrate, toi, quelle est donc ton occupation ? D’où te viennent ces calomnies ?
Car enfin, si tu ne t’occupais à rien de plus extraordinaire que les autres, il n’y

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 123


aurait pas sur ton compte une telle réputation et tant de racontars ; il faut bien que,
d’une manière ou d’une autre, tu aies fait quelque chose de peu commun. Dis-
nous donc ce qu’il en est. Que nous n’allions pas nous faire notre propre idée à
ton sujet. » Une telle requête me semble bien légitime, et je vais essayer de vous
expliquer le fond de l’affaire et ce qui m’a valu le qualificatif de savant et cette
calomnie. Peut-être certains d’entre vous vont-ils penser que je plaisante ; non,
sachez-le bien, je ne vous dirai que la pure vérité. Il est donc vrai, Athéniens, que
c’est en raison d’une certaine science, et pour nulle autre raison, que j’ai reçu ce
qualificatif. Quelle sorte de science ? Celle précisément qui a les chances d’être
la science qui convient aux hommes.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, pp.53-54.

Texte 2 : La calomnie du philosophe


Socrate explique l’origine des calomnies contre lui. L’oracle ayant déclaré qu’il
est le plus sage des hommes. Il s’attire des inimitiés des prétendument savants
à qui il se confronte dans le but d’affirmer ou d’infirmer la prophétie de
l’Oracle.
Considérez maintenant pour quelle raison je vous en parle. C’est que je dois
vous expliquer d’où vient la calomnie dont je suis victime. Quand j’appris cet
oracle, je me dis en moi-même : « Que peut bien vouloir dire le dieu et que laisse-
t-il entendre ? Car je sais bien, au fond de moi, que je ne suis savant ni peu ni
beaucoup. Que veut-il donc signifier en prétendant que je suis le plus savant ?
Car enfin il ne peut assurément pas mentir : ce serait contraire à l’ordre des
choses. » Longtemps je demeurais perplexe devant cette énigme ; et puis, non sans
peine, j’entrepris de tirer la chose au clair de la façon suivante. J’allais trouver un
des hommes qui passaient pour savants, convaincu que là mieux qu’ailleurs je
pourrais prendre en faute la prophétie et déclarer tout net à l’oracle : « Cet homme
est plus savant que moi, et toi tu as prétendu que c’était moi. » J’examinai donc
mon homme à fond (je n’ai pas besoin de donner son nom ; c’est un de nos
hommes politiques) et voici, Athéniens, l’impression que j’ai eue en l’observant
et en discutant avec lui. Il me sembla que cet homme paraissait savant aux autres,
fort nombreux, et surtout à lui-même, mais qu’il ne l’était pas. Et alors j’essayai
de lui montrer qu’il se croyait savant, mais qu’il ne l’était pas. /Résultat : je
m’attirais sa haine et celle de beaucoup de personnes présentes.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, pp. 54-55.

124
Texte 3 : La mort
Pour le philosophe, la crainte de la mort est injustifiée. Socrate présente son
agnosticisme vis-à-vis de la mort. On ne peut déclarer de façon péremptoire
qu’elle est un bien ou un mal.
Nul en effet ne sait ce qu’est la mort, ni si par hasard elle n’est pas pour
l’homme le plus grand des biens ; mais on la redoute comme si on sait
pertinemment qu’elle est le plus grand des maux. Comment ne pas voir là cette
ignorance qu’il faut stigmatiser, celle qui consiste à croire qu’on sait ce qu’on ne
sait pas ? En ce qui me concerne, Messieurs, voici ce en quoi je me distingue sur
ce point de la plupart des autres hommes : si je devais me prétendre plus savant
qu’un autre en quelque chose, ce serait en ceci que, n’en sachant pas assez sur ce
qui advient dans l’Hadès, j’ai bien conscience aussi de ne pas le savoir. Mais
commettre une injustice et désobéir à un meilleur que soi, dieu ou homme, cela je
sais que c’est mauvais et honteux. Jamais donc je ne redouterai ni ne fuirai ce qui,
sait-on jamais, est peut-être un bien, avant un mal dont je sais qu’il est un mal.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.64.

Texte 4 : L’engagement du philosophe


Le philosophe ne fait pas de compromission avec son engagement. Socrate précise
que le philosophe doit rester ferme dans sa décision, la crainte de la mort ne doit
pas le détourner de sa mission.
Supposons qu’à l’heure qu’il est vous m’acquittiez, n’ayant pas été
convaincus par Anytos qui alléguait qu’il ne fallait pas au départ me faire
comparaître ici, ou bien que, l’ayant fait, il n’était plus possible de m’épargner la
vie ; car, vous a-t-il exposé, si j’en réchappais, vos fils, qui mettent en pratique
l’enseignement de Socrate, seraient tous intégralement corrompus. Supposons
donc qu’en dépit de tels propos vous me disiez : « Socrate, nous ne suivrons pas
pour cette fois Anytos ; nous t’acquittons, à la condition toutefois que tu ne passes
plus ton temps à ce genre d’enquête et que tu cesses de philosopher. Mais si on te
reprend à de tels agissements, tu mourras ». Oui, je le répète, si vous deviez
m’acquitter à de telles conditions, je vous répondrais : « Athéniens, je vous suis
reconnaissant et je vous aime, mais j’obéirais aux dieux plutôt qu’à vous et tant
qu’il me restera un souffle de vie, tant que j’en serai capable, je ne cesserai, soyez-
en sûrs, de philosopher, de vous exhorter et de m’expliquer avec tel ou tel d’entre
vous au gré des rencontres. (…) Je n’ai d’autre occupation en effet que de circuler
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 125
dans les rues en vous persuadant, jeunes et vieux, de ne pas vous soucier de votre
corps et de l’argent en priorité et de ne pas y tenir aussi fort qu’à votre âme et aux
moyens de la perfectionner. Je dis que l’argent ne fait pas le mérite, mais que c’est
le mérite qui entraîne la réussite et tous les autres avantages humains, dans les
affaires privées comme dans les affaires publiques. Si vraiment je corromps les
jeunes par de telles déclarations, c’est donc qu’elles seraient nocives ; mais, si on
prétend que je tiens d’autres discours, on dit n’importe quoi. Et j’ajouterais : « Là-
dessus, Athéniens, croyez-en Anytos, acquittez-moi ou ne m’acquittez pas,
toujours est-il que je ne changerai pas de conduite, même si je devais souffrir
mille morts ».
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, pp.65-66.
Texte 5 : La valeur du philosophe
Socrate démontre que le philosophe transcende les difficultés qu’il rencontre. Il est,
et a une valeur intrinsèque qui devrait servir de paradigme les citoyens de la cité.
Sachez…que, si vous me condamnez à mort, moi tel que je me
présente, ce n’est pas à moi, mais à vous-mêmes, que vous ferez le plus de tort.
Pour moi, en effet, ni Mélétos ni Anytos ne sauraient me causer le moindre tort.
Ils en sont bien incapables car, à ce que je sache, il est hors de question qu’un
homme de qualité soit lésé par quelqu’un qui ne le vaut pas. Oh certes, mon
adversaire peut vraisemblablement me mettre à mort, ou exiler, ou priver de mes
droits civiques. Et il pensera sans doute, lui ou un autre, que ce sont là de grands
malheurs. Ce n’est pas mon avis, et je tiens pour beaucoup grave ce qu’il fait en
ce moment, en s’employant à faire mourir un homme injustement. Ainsi donc
Athéniens, ce n’est pas ma cause, loin de là, que je plaide à présent, comme on
pourrait le croire ; c’est la vôtre, car je crains qu’en prononçant ma condamnation
vous ne méprisiez le cadeau que vous a fait le dieu. Si vous me faites mourir en
effet, vous n’en trouverez pas facilement un autre comme moi.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.66.

Texte 6 : La valeur du philosophe


Socrate interpelle ces concitoyens sur les conséquences de sa mort. Le philosophe
est unique dans la société. Il est un cadeau de la divinité.
Athéniens, ce n’est pas ma cause, loin de là, que je plaide à présent, comme
on pourrait le croire, c’est la vôtre, car je crains qu’en prononçant ma
126
condamnation vous ne méprisiez le cadeau que vous a fait le dieu. Si vous me
faites mourir en effet, vous n’en trouverez pas facilement un autre comme moi :
un homme littéralement (mes propos dussent-ils prêter à rire) attaché par le dieu
à la cité, comme si elle était un cheval de belle taille et de bonne race, mais alourdi
par sa grandeur et qui aurait besoin d’un taon pour l’aiguillonner. C’est ainsi,
comme une sorte de taon, que, me semble-t-il, le dieu m’a attaché à la cité, moi
qui me pose partout et, toute la journée, ne cesse de vous aiguillonner, de vous
exhorter, de vous invectiver chacun individuellement. Non, messieurs, vous aurez
du mal à trouver mon pareil et, si vous m’en croyez, vous me traiterez avec
ménagement. Mais peut-être bien céderez-vous à l’agacement, comme les gens
qu’on réveille en plein sommeil, et, dociles aux arguments d’Anytos,
m’expédieriez-vous d’une tape à la mort. En suite de quoi, vous continuerez à
dormir le restant de votre vie, à moins que, dans sa sollicitude, le dieu ne vous
envoie quelqu’un d’autre pour me remplacer.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, pp.66-67.
Texte 7 : le philosophe et la politique
Devant les juges qui le soupçonnent de détruire les ressorts politiques de la
société, Socrate va présenter ses rapports avec la politique. Pour lui, le
philosophe ne doit pas s’occuper de politique, parce qu’elle est une activité
dangereuse.
Mais il pourrait paraître étrange que moi qui, en privé, mets mon nez partout
et dispense mes conseils à la ronde, je ne me risque pas à agir en public, à prendre
la parole devant le peuple et à conseiller la cité sur l’intérêt général. La cause en
est, comme vous me l’avez entendu dire en maintes occasions et situations cette
manifestation en moi d’un dieu ou démon dont Meletos a fait état par dérision
dans sa plainte. C’est quelque chose qui remonte à mon enfance, l’intervention
d’une sorte de voix qui, lorsqu’elle se manifeste, me détourne toujours de ce que
j’allais faire et jamais ne me pousse à agir. C’est cela qui m’a empêché de
m’occuper de politique. Et, à mon avis, cet empêchement est parfaitement bien
venu car, sachez-le Athéniens, si j’avais entrepris de m’occuper de politique, il
y’a belle lurette que je serais mort sans avoir été de la moindre utilité ni pour vous
ni pour moi. Non ! Ne m’en veuillez pas de dire des vérités. Il n’y a pas homme
au monde qui puisse sauver sa peau s’il s’oppose vaillamment à vous ou à
n’importe quelle foule assemblée et s’il veut empêcher que bien des injustices et
des inégalités ne se produisent dans la cité. Au contraire, il est impératif que celui

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 127


qui veut combattre réellement pour la justice et rester en vie quelque temps encore,
demeure simple particulier au lieu d’agir sur la scène publique.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.67.
Texte 8 : Le philosophe devant la justice
Face à ses accusateurs, Socrate démontre son innocence et sa droiture.
Contrairement aux sophistes, il n’a jamais monnayé ses enseignements.
Et maintenant, pouvez-vous croire que j’aurai vécu tant d’années
si je m’étais occupé de politique et si, m’en occupant en honnête homme, j’avais
pris la défense de la justice et, comme il se doit, placé cette cause au-dessus de
tout ? Tant s’en faut, Athéniens, et personne au monde n’y serait parvenu. Mais,
tout au long de ma vie, dans les fonctions publiques que j’ai pu exercer, voici
l’image que l’on trouvera, et celle aussi qui se dégage de ma vie privée : un
homme qui n’a jamais fait la moindre concession contraire à la justice, que ce soit
à l’un de ceux que mes calomniateurs présentent comme mes disciples ou à
quelqu’un d’autre. En fait, je n’ai jamais été le maître de personne. Si quelqu’un,
jeune ou vieux, désire m’entendre quand je remplis ma mission, je n’ai jamais
refusé ce droit à personne. Je ne poursuis pas mes entretiens moyennant finance
et je ne les interromps pas s’il n’y a rien à gagner. Au contraire je me prête aux
questions du riche et du pauvre ; à moins qu’on ne préfère répondre à mes
questions et entendre ce que j’ai à dire. Si donc, parmi ces auditeurs, il s’en trouve
un qui tourne bien ou mal, on ne saurait légitimement m’en attribuer la
responsabilité, dans la mesure où je n’ai jamais promis ni dispensé aucun
enseignement à personne.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.69.
Texte 9 : Le philosophe et la justice
Socrate dénonce les pratiques qui ont cours dans la justice. Il est conscient de
s’attirer l’animosité des juges en adoptant une attitude anticonformiste et
quasi subversive.
Mais il se pourrait que tel d’entre vous s’indigne au souvenir de son propre
cas, si, ayant eu à soutenir un procès moins grave que le mien, il a prié et supplié
les juges avec force larmes et même, pour les apitoyer au maximum, amené à la
barre ses jeunes enfants, d’autres membres de sa famille et de nombreux amis ;
tandis que moi, je ne vais rien faire de tout cela, quoiqu’il dût m’en coûter, c’est-
à-dire selon toute apparence, le danger suprême. Peut-être donc à cette évocation

128
redoublerait-il d’animosité contre moi et, exaspéré de ma conduite il déposerait
son caillou sous l’effet de la colère. Si l’un de vous était dans ce cas (ce que pour
ma part je me refuse à croire), mais enfin si cela était, il me semble que ce serait
lui répondre comme il convient que de lui dire : « Moi aussi, excellent homme,
j’ai très certainement des proches. En effet, pour reprendre la formule d’Homère,
je ne suis pas né d’un chêne ni d’un rocher, mais d’êtres humains et, par
conséquent, j’ai une famille et des fils, Athéniens, trois fils dont l’un est déjà un
adolescent, et les deux autres tout jeunes. » Mais je ne ferai pourtant venir ici
aucun d’eux pour vous supplier de m’acquitter.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, pp.70-71.
Texte 10 : La justice
La justice doit demeurer impartiale. Selon Socrate, il est impropre de supplier le juge
pour avoir gain de cause car, seule le souci de vérité doit guider le juge dans son
jugement. Socrate dénonce ici, les imperfections de la justice humaine.
Toutes questions d’image mises à part, messieurs, cela ne me parait pas
conforme à la justice de prier le juge et d’obtenir son acquittement par des prières ;
ce qui est conforme à la justice, c’est de s’expliquer et de persuader. En effet le
juge ne siège pas pour cela – pour accorder des faveurs en guise de justice – mais
pour décider de ce qui est juste. Il a prêté serment non pas de se montrer
complaisant envers qui bon lui semble, mais de juger selon les lois. C’est pourquoi
nous ne devons pas vous habituer à violer votre serment et vous, vous ne devez
pas prendre cette habitude : nous serions les uns et les autres fautifs envers les
dieux. N’exigez donc pas de moi, Athéniens, que je me force à user à votre égard
de procédés que je ne juge ni beaux ni justes ni pieux, surtout évidemment quand,
par ZEUS, c’est d’impiété que je suis accusé par lui, MELETOS. Il va de soi en
effet que, si j’arrivais à vous persuader et, par mes prières, à vous détourner de
votre serment, je vous enseignerais à ne pas croire à l’existence des dieux. Un tel
mode de défense reviendrait sans conteste à m’accuser moi-même de ne pas
reconnaître les dieux. Or il s’en faut de beaucoup qu’il en soit ainsi : j’y crois en
effet, comme n’y croit aucun de mes accusateurs, et je m’en remets à vous et à la
divinité du soin de décider à mon sujet de ce qui vaudra le mieux et pour moi et
pour vous.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.72.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 129


II. LA FIXATION DE LA PEINE
Texte 11 : La sanction du philosophe
La seule sanction que mérite le philosophe est une récompense car c’est un homme
juste. Il mérite d’être honoré par ses concitoyens.
Toujours est-il que maintenant cet homme demande la mort comme
montant de ma peine. Soit. Mais moi, quelle contre-proposition vais-je faire
Athéniens ? La peine évidemment que je mérite ? Mais quelle est-elle donc ? Quel
châtiment ou quelle amande est-ce que je mérite pour n’être pas resté à vivre
tranquillement et pour avoir négligé ce dont se soucient la plupart des gens :
gagner de l’argent, administrer ma maison, obtenir des commandements militaires
et succès oratoires devant le peuple, courir après les autres charges, engagements
sociaux et positions sociales que propose la cité ?(…) Pour avoir refusé de
m’engager dans une voie où je n’aurais été d’aucune utilité ni pour vous ni pour
moi, et pour avoir choisi celle où je pouvais rendre à chacun en particulier ce qui
est à mes yeux le plus grand service : à savoir m’employer à convaincre chacun
d’entre vous qu’il ne devrait pas faire passer le soin du moindre de ces biens avant
celui de sa propre personne, de manière à devenir le meilleur et le plus sage
possible(…)Rien n’est plus approprié, Athéniens, que de nourrir un tel homme au
Prytanée, beaucoup plus en tout cas que pour tel d’entre vous qui aurez remporté
la victoire à Olympie avec un cheval ou un attelage de deux ou quatre chevaux.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.73.

III. LA CONDAMNATION A MORT

Texte 12 : La mort du philosophe


En mettant à mort le philosophe, la société croit se dispenser des dénonciations de
celui-ci. La mort de Socrate loin d’installer la paix sociale inaugure a contrario
déclenche la colère des dieux. Le philosophe apparaît donc comme un bouc
émissaire.
Je vous déclare donc, vous, messieurs qui m’avez fait mourir, que vous
aurez à subir, aussitôt après ma mort, un châtiment bien plus pénible, par Zeus,

130
que la peine capitale que vous m’avez infligée. En effet, si vous venez d’agir ainsi,
c’est en pensant que vous pourriez vous soustraire à l’obligation de justifier votre
manière de vivre. Or c’est tout le contraire qui vous arrivera, je vous le garantis.
Ils seront plus nombreux à vous demander des comptes, ceux que je retenais
jusqu’ici sans que vous vous en aperceviez ; et ils seront d’autant plus intraitables
qu’ils sont plus jeunes, et vous n’en serez que plus irrités. Si vous vous figurez
qu’en tuant les gens vous empêcherez qu’on vous reproche de ne pas vivre
correctement, vous ne faites pas un bon calcul. Car cette échappatoire n’est ni très
efficace ni honorable. En voici une au contraire qui est on ne peut plus honorable
et facile : au lieu de s’en prendre aux autres, c’est de s’employer à être le meilleur
possible.
Platon, Apologie de Socrate, Hatier, 1993, p.76-77.

Texte 13 : Le philosophe devant la mort


Le philosophe accepte la mort avec résignation, elle est un évènement inéluctable
et il convient de l’accepter comme faisant partie de l’existence humaine.
J’aime beaucoup mieux mourir après m’être défendu comme je l’ai fait que
de vivre grâce à ces bassesses. Car ni dans les tribunaux, ni à la guerre, personne,
ni moi, ni un autre, n’a le droit de chercher à se dérober à la mort par
tous les moyens. Souvent, dans les combats, on voit bien qu’on pourrait échapper
à la mort en jetant ses armes et en demandant quartier à ceux qui vous
poursuivent. De même, dans toute espèce de dangers, on trouve mille
autres expédients pour échapper à la mort, si l’on est décidé à tout faire et à tout
dire. Seulement ce n’est peut-être pas cela qui est difficile, Athéniens, d’éviter la
mort : il l’est beaucoup plus d’éviter le mal ; car il court plus vite que la mort.
Dans le cas présent, c’est moi, qui suis lent et vieux, qui ai été atteint par le plus
lent des deux, tandis que mes accusateurs, qui sont forts et agiles, l’ont été
par le plus rapide, le mal. Et maintenant moi, je vais sortir d’ici condamné
à mort par vous, et eux condamnés par la vérité comme méchants et criminels, et
moi, je m’en tiens à ma peine, et eux à la leur. Peut-être fallait-il qu’il en fût ainsi
et je crois que les choses sont ce qu’elles doivent être.
Platon, Apologie de Socrate, Chambry, p.77

Texte 14 : La conception philosophique de la mort


Socrate adopte une conception positive de la mort. Contrairement au vulgaire qui
voit dans la mort un évènement malheureux, la mort pour le philosophe peut être
positive, une délivrance de l’âme.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 131


Voici d’autres raisons d’espérer fermement que la mort est un bien. De
deux choses, l’une : ou bien celui qui est mort est réduit au néant et n’a plus
aucune conscience de rien, ou bien, conformément à ce qui se dit, la mort
est un changement, une transmigration de l’âme du lieu où nous sommes
dans un autre lieu. Si la mort est l’extinction de tout sentiment et ressemble
à un de ces sommeils où l’on ne voit rien, même en songe, c’est un merveilleux
gain que de mourir. Si en effet l’on devait choisir une de ces nuits où l’on a
dormi sans même avoir un songe, pour la comparer aux autres nuits et aux autres
jours de sa vie, et s’il fallait après examen dire combien l’on a vécu de
jours et de nuits meilleurs et plus agréables que cette nuit-là, j’imagine que
non seulement les simples particuliers, mais le grand Roi lui-même trouverait
qu’ils sont faciles à compter en comparaison des autres jours et des autres nuits.
Si donc la mort est quelque chose de semblable, je soutiens, moi, que c’est
un gain, puisque alors toute la suite des temps ne paraît plus ainsi qu’une seule
nuit. D’un autre côté, si la mort est comme un passage d’ici-bas dans un
autre lieu, et s’il est vrai, comme on le dit, que tous les morts y sont réunis,
peut-on, juges, imaginer un plus grand bien ? Car enfin, si en arrivant chez Hadès,
débarrassé de ces soi-disant juges, on doit y trouver les juges véritables, ceux qui,
dit-on, rendent là-bas la justice.
Platon, Apologie de Socrate, Chambry, pp.80-81
Texte 15 : La philosophe devant la mort
Le philosophe ne craint pas la mort dans la mesure où il est un homme de bien,
celle-ci lui délivre des maux de l’existence.
Vous aussi, juges, vous devez avoir bon espoir en face de la mort et vous
mettre dans l’esprit qu’il y a une chose certaine, c’est qu’il n’y a pas de mal
possible pour l’homme de bien, ni pendant sa vie, ni après sa mort, et que
les dieux ne sont pas indifférents à son sort. Le mien non plus n’est pas le fait du
hasard, et je vois clairement qu’il valait mieux pour moi mourir à présent et être
délivré de toute peine. De là vient que le signe ne m’a retenu à aucun moment
et que je n’en veux pas beaucoup à ceux qui m’ont condamné ni à mes
accusateurs. Il est vrai qu’en me condamnant et en m’accusant, ils n’avaient pas
la même pensée que moi ; ils croyaient bien me nuire et en cela ils méritent d’être
blâmés. (…) Mais voici l’heure de nous en aller, moi pour mourir, vous pour
vivre. Qui de nous a le meilleur partage, nul ne le sait, excepté le dieu.
Platon, Apologie de Socrate, Chambry, pp.82-83

132
B- MARCIEN TOWA, ESSAI SUR LA
PROBLEMATIQUE PHILOSOPHIQUE
DANS L’AFRIQUE ACTUELLE

1- EXISTE-T-IL UNE PHILOSOPHIE AFRICAINE ?


Texte 1 : Philosophie et science
La science et la technologie sont une exclusivité occidentale selon les
européocentristes. Tous les autres peuples sont exclus de ces domaines. Cette
affirmation non seulement justifie l’impérialisme, mais hiérarchise les hommes en
races inférieures et supérieures.
Avec la science et la technologie, nous accédons à la spécificité
européenne, à ce que le penseur européen considère à la fois comme le privilège
et le fardeau de l’Europe, le secret de sa puissance et de sa domination.
Historiquement, la philosophie fut la matrice de l’univers scientifico-technique.
Plus d’une fois elle s’est dressée contre cet univers, tout compte fait, elle s’est
dressé contre cet univers, mais tout compte fait, elle en demeure l’âme. Très
significative à cet égard est la manière dont les philosophes viennent d’imposer la
linguistique et le structuralisme en France. En science aussi bien qu’en
philosophie, c’est la même faculté qui est à l’œuvre : la raison. La raison ainsi
que la science et la philosophie en lesquelles elle se déploie seront donc ce que
les idéologues de l’impérialisme européen accepteront le plus difficilement de
partager avec les autres civilisations.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p.7.
Texte 2 : L’origine de la philosophie
Towa expose ici la thèse des euro-centristes. La Philosophie est d’essence occidentale.
L’histoire de la philosophie est homogène à celle de l’Occident. Heidegger soutient ainsi
l’exclusivité philosophique de l’Occident. Le miracle Grec n’a pas d’équivalent dans
l’histoire de l’humanité.
D’emblée Heidegger pose en axiome que la philosophie est grecque et
occidentale tout comme l’Occident est en soi philosophique. « La philosophie est
grecque dans son être même » et cette affirmation, « la philosophie est grecque

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 133


dans son être propre ne dit rien d’autre que : l’Occident et l’Europe sont, et eux
seuls sont, dans ce qu’a de plus intérieur leur marche historique, originellement
philosophique ». Marche historique de l’Occident européen et cheminement
philosophique signifient donc rigoureusement la même chose, au point que la
locution « philosophie occidentale-européenne » devient pure tautologie. De tant
d’affirmations intrépides, Heidegger ne daigne fournir la moindre justification.
Philosophie et monde grec semblent présenter une identité d’essence. Plus
exactement, la philosophie réclamait le monde grec et en a pris possession. « La
philosophie est dans son être originel, de telle nature que c’est d’abord le monde
grec et seulement lui qu’elle a saisi en le réclamant pour se déployer-elle ».
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp.13-14.

Texte 3 : La pensée philosophique


La réflexion philosophique est autonome et ne souffre d’aucune autorité au-
dessus d’elle. Elle n’est inféodée à aucune autre instance qu’elle-même.
Mais poser la pensée comme l’absolu, l’infini, c’est du même
coup la poser comme libre ; ce qui est infini et absolu ne peut rien souffrir au-
dessus de soi, aucune autorité qui lui soi étrangère, en fait ne se rapporte qu’à soi-
même. C’est là le lien profond qui unit la pensée à la liberté. Tout comme la
pensée, la liberté exige que l’homme ait dans sa particularité l’intuition de lui-
même comme universel, qu’il prenne conscience que son être consiste à être
universel dans l’universel. Je ne suis pas libre si je dépends d’un instinct, d’une
inclination, d’un intérêt égoïste, car alors je suis quelque chose de particulier, je
place mon être dans une particularité et je me trouve lié par elle.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp.15-16.
Texte 4 : L’enjeu de la délimitation de la philosophie
Le problème de la délimitation de la philosophie est idéologique. Il a pour enjeu, ni
plus ni moins qu’une hiérarchisation des races humaines. Il ne s’agit donc plus
d’une simple querelle d’intellectuels, mais d’une lutte qui engage l’avenir de
l’humanité.
Le problème de la délimitation du domaine de la philosophie peut sembler
d’abord purement académique et comme tel ne présentant d’intérêt que pour le
134
cercle étroit des philosophes. En réalité, ce qui est en jeu, c’est la hiérarchisation
des civilisations et des sociétés, ni plus ni moins. Selon Hegel en effet, le
mouvement qui anime l’histoire multimillénaire de l’humanité n’a qu’un but : le
triomphe final de la raison, et de la liberté. Par conséquent, la présence ou
l’absence de la liberté et de la pensée, c’est-à-dire de la philosophie, signifie
l’appartenance ou la non appartenance à l’histoire universelle. Le fait que la
philosophie, i.e., la pure pensée et la liberté, ne se rencontre qu’en Occident veut
donc dire en même temps que seul l’Occident est véritablement historique
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p.19.

2- LA PHILOSOPHIE AFRICAINE DANS LE SILLAGE DE LA


NEGRITUDE
Texte 5 : Les causes de la négritude
L’apologie de l’identité africaine comme réaction contre l’humiliation subie
par l’impérialisme occidental explique en quelque sorte l’origine de la
négritude. Il s’agit d’une réaction identitaire contreproductive car, c’est
encore l’occidental qui est interpellé à délivrer le certificat d’humanité à l’africain.
S’il est vrai que la thèse de l’occidentalité exclusive de la philosophie
aboutit à la légitimation de l’impérialisme occidental, n’est-il pas normal que la
négation de l’impérialisme entraîne aussi la négation de cette thèse ? La première
expérience du nègre colonisé après l’effondrement de son univers, fut
l’éblouissement par le monde occidental aperçu dans l’éclat aveuglant de sa
victoire. Fasciné, il n’eut bientôt qu’une aspiration : s’échapper de son monde
vaincu et dévalué, et se jeter les yeux fermés dans le nouvel univers ; celui-ci lui
apparaissait, dans une totale indifférenciation, comme une nébuleuse sans
contours et sans formes, mais étincelante. Ce fut le temps de l’assimilation, de
l’illusion que l’occidentalité, même subie, suffirait à lui restituer son humanité
perdue. Mais quand son regard se fut suffisamment exercé à mieux scruter
l’Occident, il ne tarda pas à discerner à côté des zones de lumière, beaucoup de
zones d’ombre. Et surtout il sut que de toute manière l’Occident l’excluait
absolument. Il ne lui restait plus qu’à constituer ou à reconstituer son propre
monde fondé sur ses propres valeurs. Ce fut le temps du retour aux sources, de
l’exaltation de l’originalité et de la différence : ce fut le temps de la négritude.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp.23-24.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 135


Texte 6 : La philosophie africaine
La non existence d’une philosophie africaine vient justifier l’impérialisme occidental.
Il s’agit d’une thèse européocentriste qui ne se fonde sur aucun argument objectif mais
qui vient simplement défendre et rationaliser une idéologie.
Le problème est l’existence ou la non existence d’une philosophie africaine,
savoir, celui-là même qui est soulevé par les philosophes occidentaux. Ceux-ci,
nous l’avons vu, donnaient une réponse négative à la question ainsi posée. Et dans
la mesure où la philosophie était considérée comme l’attribut essentiel et
indispensable d’une humanité véritable, une telle réponse avait pour effet de
justifier l’impérialisme politique et culturel. En reprenant la question, l’intention
des penseurs dont nous parlons était au contraire d’y répondre positivement afin
de ruiner par là un argument essentiel de l’idéologie impérialiste. Si les nègres ont
une philosophie propre, ils sont donc pleinement hommes et doivent jouir de tous
les droits d’homme, notamment du droit à l’autonomie aussi bien culturel que
politique.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p.25.

Texte 7 : La philosophie africaine et ses implications


L’existence d’une philosophie africaine implique que les africains doivent disposer
d’eux-mêmes. Ils sont pleinement hommes et doivent exercer leur humanité dans tous
ses aspects.
Si les Nègres ont une philosophie propre, ils sont donc pleinement homme
et doivent jouir de tous les droits d’homme, notamment du droit à l’autonomie
aussi bien culturelle que politique. Alassane N’daw écrit : « une première
déclaration d’indépendance intellectuelle se fait jour par l’intention de fonder
une philosophie de l’homme africain qui montre que cet homme ne peut être conçu
comme un accident d’une substance qui serait l’Européen. La revendication
d’une dignité anthropologique propre constitue l’un des pôles de cette pensée
militante qui a pris conscience qu’elle n’aura de chance de dévoiler l’essence de
l’homme noir qu’autant qu’elle pourra le considérer comme producteur d’œuvres
culturelles, de philosophie et d’esthétiques. »
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp.25-26.

136
Texte 8 : L’ethnophilosophie et sa méthode
L’objectif de l’ethnophilosophie est certes noble mais ses moyens sont mauvais et
impropres à la philosophie. L’ethnophilosophie dilue le concept de philosophie dans
celui de culture. Elle devient ainsi une vision du monde propre à chaque peuple. Pour
Towa, la philosophie est universelle et non particulière.
Mais comment établir l’existence d’une philosophie africaine originale ?
La méthode de nos auteurs consiste à partir d’une révision de la notion même de
philosophie, révision qui revient toujours à son élargissement, de manière à
pouvoir y comprendre aussi les modes de pensée propres à l’africain. Le concept
en est dilaté jusqu’à prendre la même extension que celui de culture, au sens
sociologique de ce terme. Mr N’daw entend, dépassant « une certaine idée de la
philosophie considérée comme une vision du monde systématiquement
développée ou une tentative de fondation intégrale du discours », se livrer à une
interprétation de toutes les œuvres culturelles africaines, d’en dégager les
caractéristiques générales qui seraient présentées comme la philosophie africaine.
C’est B. Fouda qui exprime cette méthode avec le plus de relief. Pour lui,
philosopher, c’est interroger le monde pour le comprendre et l’expliquer,
l’organiser et le totaliser. Le concept de philosophie ainsi élargie est coextensif à
celui de culture. Il est obtenu par opposition au comportement animal. Il se
différencie donc d’un tel comportement mais demeure indiscernable de n’importe
quelle forme culturelle : mythe, religion, poésie, art, science, etc…
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p.26.

Texte 9 : La philosophie
La philosophie est une réflexion personnelle essentielle critique vis-à-vis de tout et
même d’elle-même. Elle est une remise en cause permanente des acquis et est
iconoclaste.
Amener au jour une authentique philosophie négro-africaine établirait à
coup sûr que nos ancêtres ont philosophé, sans pour autant nous dispenser, nous,
de philosopher à notre tour. Déterrer une philosophie, ce n’est pas encore
philosopher. L’Occident peut se vanter d’une brillante tradition philosophique.
Mais l’occidental qui a reconnu l’existence de cette tradition et qui en a même

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 137


saisi le contenu, n’a pas encore commencé à philosopher. La philosophie ne
commence qu’avec la décision de soumettre l’héritage philosophique et culturel
à une critique sans complaisance. Pour le philosophe aucune donné, aucune idée
si vénérable soit-elle, n’est recevable avant d’être passé au crible de la pensée
critique. En fait la philosophie est essentiellement sacrilège en ceci qu’elle se veut
l’instance normative suprême ayant seule le droit de fixer ce qui doit ou non être
tenu pour sacré, et de ce fait abolit le sacré pour autant qu’il veut s’imposer à
l’homme du dehors. C’est pourquoi tous les grands philosophes commencent par
invalider ce qui était considéré jusqu’à eux comme absolu. On prétendra peut-être
que cela ne vaut que pour la philosophie européenne et non pour la philosophie
négro-africaine. Mais si on pousse à ce point le culte de la différence, on ne voit
plus la raison de faire passer nos modes de pensée pour de la philosophie.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 29-30.
Texte 10 : Philosophie et ethnophilosophie
La philosophie et l’ethnophilosophie sont diamétralement opposées par leur
méthode respective. La première se veut rationnelle et critique tandis que la
seconde exclu tout débat et sombre dans des thèses apologétiques.
Leur façon de procéder n’est ni purement philosophique, ni purement
ethnologique, mais ethno-philosophique. L’ethno-philosophie expose
objectivement les croyances, les mythes, les rituels, puis brusquement, cet exposé
objectif se mue en profession de foi métaphysique, sans se soucier ni de réfuter
la philosophie occidentale, ni de fonder en raison son adhésion à la pensée
africaine. De la sorte l’ethno-philosophie trahit à la fois l’ethnologie et la
philosophie. L’ethnologie décrit, expose, explique, mais ne s’engage pas (du
moins pas ouvertement) quant au bien-fondé de ce qui est décrit, expliqué. Elle
trahit aussi la philosophie parce que la pierre de touche qui lui permet d’opérer un
choix entre les diverses opinions est avant tout l’appartenance ou la non
appartenance à la tradition africaine, alors qu’un exposé philosophique est presque
toujours une argumentation, une démonstration ou une réfutation. Ce qu’un
philosophe retient et propose est toujours, du moins en droit, la conclusion d’un
débat contradictoire, c’est-à-dire d’un examen critique et absolument libre.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p.31.

138
Texte 11 : Philosophie et ethnophilosophie
L’ethnophilosophie est une discipline hybride impropre de par sa nature à la
philosophie. Le philosophe selon Marcien Towa ne se dérobe pas à la critique, il
est engagé et milite pour un Absolu qu’il impose par des arguments.
La philosophie est peut-être la seule discipline qui a le seul courage et la
force de soumettre ouvertement l’Absolu à la discussion, de le prendre comme
objets de débats publics, débats qui ne sont pas seulement formels puisqu’ils
aboutissent souvent à la détrôner. Le philosophe n’est ni neutre, ni désintéressé,
c’est peu de dire qu’il a opté pour un Absolu : il est militant de son Absolu. Et en
cela il diffère du simple savant qui affecte devant son objet d’étude une attitude
neutre. Mais l’Absolu du philosophe n’est pas un mystère dont il détiendrait seule
la révélation : il sait son Absolu et entend le démontrer par des arguments. Il fait
appel à la raison, à la pensée critique et non à la peur ou à la confiance. L’ethno-
philosophie au contraire, a pour effet, sinon pour but, d’éluder le débat sur
l’Absolu. Elle se caractérise en effet par le fait qu’elle glisse subrepticement (avec
cependant beaucoup moins de retenue que l’ethnologie pure) dans des exposés
théoriquement descriptifs et objectifs, des opinions métaphysiques non critiquées,
et les soustrait par-là à la critique philosophique. Pour cette raison l’ethno-
philosophie apparait à la philosophie comme une théologie qui ne veut pas dire
son nom.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp.31-32.

Texte 12: L’ethnophilosophie


L’ethno-philosophique est une trahison à la fois de l’ethnologie et de la philosophie.
Elle est une « voie de facilité » qui n’hésite pas à faire valoir l’argument d’autorité
qui est autre chose qu’un sophisme.
L’ethno-philosophie telle qu’elle est pratiquée jusqu’ici n’a trop souvent
été qu’une voie de facilité, faisant l’économie à la fois des techniques et des
méthodes d’enquête ethnologiques et de la discussion philosophique des idées et
des valeurs mises en avant, et tout ceci, au nom de l’africanité. En plus des
multiples impasses théoriques auxquelles elle aboutit, l’ethno-philosophie s’est
avérée d’une grande stérilité. En se soustrayant aux exigences scientifiques
d’enquête, elle se met hors d’état d’enrichir notre connaissance de nous-même par
l’apport de documents neufs solidement établis ; et en esquivant le débat
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 139
philosophique sur les idées et les valeurs, il ne lui reste pour les imposer que la
voie d’un dogmatisme desséchant dans lequel la négritude entendue comme retour
à nos sources culturelles dans la fierté retrouvée, est pervertie au point de n’être
plus qu’un avatar du « magister dixit ». En raison d’un tel dogmatisme, les idées
avancées par l’ethno-philosophie sont figées dès leur mise au jour et ne sont
susceptibles d’aucun développement.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp.32-33
3- POUR UNE NOUVELLE ORIENTATION PHILOSOPHIQUE EN
AFRIQUE

Texte 13 : La philosophie en Afrique


L’une des conditions sine qua non du développement de la philosophie en Afrique
est d’annihiler. La philosophie en Afrique doit consister pour l’africain à penser
son « actuel rapport au monde ». L’Afrique doit rompre avec l’apologie d’un passé
qui n’est plus adapté à son existence actuelle.
Pour ouvrir la voie à un développement philosophique en Afrique, il faut
que, résolument, nous nous détournions de l’ethno-philosophie, aussi bien de sa
problématique que de ses méthodes. Plutôt que l’exhumation d’une philosophie
africaine originale selon des voies qui ne soumettent ni aux exigences de la
science, ni à celles de la philosophie, notre dessein principal devrait être de
parvenir à une saisie et à une expression philosophique de notre être dans le monde
actuel et à une détermination de la manière de le prendre en charge et de l’infléchir
dans une direction définie. Une philosophie africaine originale arrachée à la nuit
du passé n’a pu être, si elle a existé, que l’expression d’une situation elle-même
passée. C’est dire que la redécouverte d’une telle philosophie ne saurait résoudre
notre problème philosophique actuel, savoir, l’effort d’élucidation de notre actuel
rapport au monde. Notre monde n’étant plus celui de nos ancêtres (il s’en faut de
beaucoup) leur conception du monde ne saurait non plus être la nôtre.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 35.

140
Texte 14 : L’ethnophilosophie
L’ethnophilosophie est un avatar de la négritude senghorienne. Son objectif est la
restauration de la « dignité anthropologique » de l’Africain.
L’ethno-philosophie, disions-nous est un aspect (tardif) du mouvement de
la négritude. Notre opinion est qu’elle doit être dépassée tout comme le
mouvement qui la porte. L’ethnophilosophie s’inscrit avec la négritude, dans une
perspective revendicative : « la revendication d’une dignité anthropologique
propre », pour reprendre la formule de N’daw. Il s’agit de déterrer une
philosophie africaine propre, pour la brandir devant les négateurs de notre
« dignité anthropologique » comme un irrécusable certificat d’humanité. Ainsi
l’ethno-philosophie en reste à la finalité de la négritude et des mouvements de
libération coloniaux, dont la négritude révolutionnaire (celle de Césaire, de
Damas ou de David Diop) ne fut que la dimension idéologique et spirituelle. En
somme, les mouvements coloniaux de libération sont d’essence revendicative,
leur lutte même a pour fin d’appuyer des revendications. Et celles-ci se ramènent
à la réclamation d’un droit fondamental : « le droit à l’initiative historique »,
selon l’expression de Césaire, et spécialement le droit à l’indépendance politique.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 35-36.

Texte 15 : La philosophie
La reconnaissance de la dignité anthropologique de l’africain n’était qu’une étape
dans la libération de l’Afrique. Le temps est venu pour l’africain de passer aux actes.
La réflexion doit déboucher sur la praxis.
Dès lors l’enjeu ne peut plus être pour nous la reconnaissance d’un droit,
mais l’exercice de ce droit. Pour la majorité des peuples noirs l’ère des chicanes
sur les textes juridiques est close, close aussi celle des revendications pour la
reconnaissance de « notre dignité anthropologique ». Il faut maintenant passer
aux actes, et imposer par des réalisations de tous ordres cette dignité
anthropologique. Tant que notre droit à l’initiative n’était pas reconnu, cela avait
un sens de brandir notre originalité culturelle, philosophique, etc… comme
certificat d’humanité et comme justification de notre revendication d’un destin
séparé, autonome, car ce quelque chose d’essentiel et d’irremplaçable dont nous
nous disions détenteurs, nous ne pouvions l’apporter au monde qu’en étant nous-
mêmes, en assumant la responsabilité de notre destin. La simple idée que nous
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 141
sommes indispensables à la communauté humaine pouvait contribuer
substantiellement à impulser dynamisme et enthousiasme à la lutte de libération
et gagner des sympathies dans les métropoles. Mais tout cela pouvait rester
formel.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 38.
Texte 16 : La philosophie
La philosophie a un rôle éminemment pragmatique, elle devrait nous aider à
assimiler le secret de la puissance de l’Occident. Seules la négation de nous-même
et l’assimilation de l’être au monde de l’occidental constituent les voies de
l’émergence du continent africain.
La volonté d’être nous-mêmes, d’assumer notre destin, nous accule
finalement à la nécessité de nous transformer en profondeur, de nier notre être
intime pour devenir l’autre. Et cette nécessité nous ramène au point de départ de
notre affrontement avec l’Occident, époque où nous cherchions avec tant d’ardeur
à rétablir l’équilibre des forces en nous emparant du secret de la victoire de
l’Occident. Le moment de la négritude que l’ethno-philosophie voudrait
prolonger artificiellement, nous a détournées de cette quête. Or l’erreur de cette
première démarche ne résidait pas dans la volonté de s’emparer du secret de
l’Occident, mais dans la croyance fort répandue que ce secret consistait en
quelque sorte en une recette communicable par révélation ou par initiation ; elle
résidait surtout dans la confiance accordée à la « mission civilisatrice », aux
promesses et à la bonne foi du colonisateur, elle résidait dans le fait d’embrasser
sans discrimination la civilisation occidentale, de la prendre en bloc comme
supérieure à la nôtre. Ce que cette première démarche avait de juste, en revanche,
c’est l’idée que la civilisation occidentale recèle une arme secrète dont il importe
absolument de s’emparer pour sortir de la raque de l’histoire.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 39-40.
Texte 17 : La libération de l’Afrique
L’africain doit développer une attitude critique vis-à-vis de la tradition (le passé),
entendue qu’elle est en même temps le fondement de son identité et la cause
principale de son assujettissement à l’Occidental. Il s’agit donc de rompre avec la
tradition, véritable cause d’échec. Il ne faut donc pas suivre l’ethnophilosophie qui stagne
dans la valorisation du passé.
142
Si la libération est notre but, alors la chose la moins avisée que nous
puissions entreprendre est certainement la restauration du monde ancien, la
conservation de notre spécificité, le culte de la différence et l’originalité, puisque
la cause de notre défaite et de notre condition actuelle de dépendance effective est
à chercher dans notre spécificité, dans ce qui nous différencie de l’Europe, et nulle
part ailleurs. Car si notre monde ancien n’a pas pu supporter le choc du monde
européen ce fut assurément en raison de quelque chose qui le différenciait de
l’Europe. Or tenter de reconstituer le monde ancien, c’est entreprendre de
maintenir aussi cette faille ; essayer de sauver l’une ou l’autre épave
institutionnelle, idéologique ou spirituelle de ce monde uniquement parce qu’elle
fut nôtre, c’est courir le risque de sauver précisément cela qui causa notre défaite
et qui par conséquent confirmait cette défaite et nous conduirait à la perte.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 40-41.

Texte 18 : La philosophie africaine


La tradition et le passé africain consacrent l’hétéronomie et la domination de
l’Afrique. Seule la rupture radicale avec le passé peut assurer une véritable autonomie
à l’Afrique. La philosophie apparaît comme le moyen indiqué pour prendre du recul
vis-à-vis de la tradition et du passé.
Notre tâche se précise donc ainsi, nous avons à nous affirmer dans le monde
actuel ; nous, séculairement assis dans la nuit de l’inanité, nous avons à nous
redresser de toute notre stature d’hommes ; nous, depuis si longtemps affairés au
service de l’autre, nous avons à nous affairer à notre propre service ; nous dont
l’autre a si longuement disposé, nous devons rentrer dans la disposition de nous-
même s. et naturellement la décision de nous assumer , de nous affirmer, d’être
fiers (nous jusqu’ici si humiliés et si humbles) est en même temps décision
d’assumer notre passé, de le valoriser et d’en être fiers. Seulement, une telle
décision, pour autant qu’elle veut introduire une révolution radicale dans notre
condition actuelle, exige pour aboutir une rupture elle aussi radicale avec notre
passé, puisque cette condition provient rigoureusement et contestablement de ce
passé. La volonté d’être soi conduit immédiatement à la fière reprise en charge du
passé, parce que l’essence du soi n’est que le résultat du passé du soi ; mais le
passé lucidement et froidement interrogé et scruté atteste que l’assujettissement

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 143


présent trouve son explication dans la provenance de l’essence du soi, c’est-à-
dire, dans le passé du soi, et nulle part ailleurs.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 41.
Texte 19 : La confrontation à l’Occident
La confrontation à l’Occident est inéluctable. Pour sortir vainqueur de cette lutte,
il convient à l’africain de « rompre avec son essence et son passé ».

S’affirmer, se revaloriser, retrouver la fierté, qu’est-ce à dire sinon entrer


en conflit avec les forces qui nous écrasent ? Et comment imaginer que nous
sortions victorieux d’un tel affrontement avant d’avoir assimilé le secret en vertu
duquel nous sommes encore dominés en dépit de notre souveraineté formelle ?
autrement dit, pour s’affirmer, pour s’assumer, le soi doit se nier, nier son essence
et donc aussi son passé. En Rompant ainsi avec son essence et son passé, le soi
doit viser expressément à devenir comme l’autre, semblable à l’autre, et par là
incolonisable par l’autre. C’est la nécessaire médiation conduisant à une réelle
affirmation de nous-même dans le monde actuel.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 41-42.

Texte 20 : La finalité de la négritude


La négritude sert les intérêts de l’Occident et non de l’Afrique. Elle pérennise la
domination de l’Occident travers la culture.
En ce qui concerne les peuples africains, un coup d’œil sur les horaires
d’enseignement suffit à faire voir que la proportion élevée de nos maigres
ressources consacrée à l’éducation sert essentiellement à l’extension des langues
européennes. Dans les anciennes colonies françaises notamment, nous en sommes
au point où de nombreux enfants de la bourgeoisie ignorent tout de la culture
africaine, ne connaissent pas un traitre mot d’aucune langue africaine, ne
comprenant et ne parlant que le français. Et dans le même temps, L.S. Senghor
au nom de la négritude, nous propose la francophonie, c’est-à-dire,
l’affermissement et le développement du domaine du français, comme idéal et
fondement de notre politique et de notre culture. La négritude senghorienne

144
manifeste ainsi au grand jour sa vraie nature : c’est l’idéologie quasiment
officielle du néo-colonialisme, le ciment de la prison ou le néo-colonialisme
entend nous enfermer, et que nous avons donc à briser. En Afrique, aussi c’est le
radicalisme iconoclaste, et non le culte superstitieux et mystificateur de la
différence et de l’essence de soi, qui, paradoxalement permet de se retrouver, et
d’être soi. C’est au Ghana de Nkrumah, en Tanzanie et en Guinée que les pas les
plus sérieux vers une renaissance culturelle africaine ont été faits.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 47.

Texte 21 : La finalité de la confrontation à l’Occident


Accéder à l’autonomie constitue la fin de notre lutte contre l’Occident et son système
de domination. Cette autonomie se manifestera chez l’africain par la capacité de
création, d’innovation.
Ce qui est réellement décisif et fondamental, c’est notre libre appréciation,
notre libre jugement d’œuvres quelconques, passées, présentes ou simplement
possibles, c’est notre capacité d’innover, de créer, c’est en d’autres mot, notre
liberté, notre humanité. Et c’est seulement à ce niveau de profondeur que la
perspective révolutionnaire nous ramène aux ancêtres, pour autant qu’eux aussi
furent créateurs. Pour nous approprier le secret de l’Europe, savoir un esprit
nouveau et étranger, nous devons révolutionner le nôtre de fond en comble, ce
faisant nous devenons assurément semblables à l’européen. Mais en un sens plus
fondamental, nous devenons semblables à nos ancêtres en redevenant comme ils
durent l’être aux plus hautes époques de leur histoire, créateur et libres.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 48.

Texte 22 : Les conditions du développement de l’Afrique


L’acquisition des moyens de production apparaît comme la condition du développement
de l’Afrique. Elle assure à la fois l’autonomie politique, économique et surtout culturelle.
La domination culturelle est une conséquence de la domination matérielle.
La négritude senghorienne et l’ethno-philosophie qui cherche à la
prolonger, entretiennent l’illusion que l’Afrique pourrait apporter à l’Europe un

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 145


« supplément d’âme » avant la complète liquidation de l’impérialisme européen
en Afrique. En réalité aucun développement d’envergure ne sera possible en
Afrique avant qu’elle n’édifie une puissance matérielle capable de garantir sa
souveraineté et son pouvoir de décision non seulement dans le domaine politique
et économique, mais aussi dans le domaine culturel. Notre infériorité matérielle
met notre culture à la merci des puissances de notre temps. Ce que Marx dit à ce
propos des classes sociales s’applique entièrement aux rapports entre les peuples.
«…La classe qui est la puissance dominante de la société est aussi la puissance
dominante spirituelle. La classe qui dispose des moyens de production matérielle
dispose, du même coup, les moyens de production intellectuelle, si bien que l’un
dans l’autre, les pensées de ceux à qui sont refusés les moyens de production
intellectuelle sont soumises du même coup à cette classe dominante. Les pensées
dominantes ne sont pas autre chose que l’expression idéale des rapports
matériels dominants. »
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 51-52.
Texte 23 : Les conditions du développement de l’Afrique
Accéder au développement nécessite la rupture avec les traditions. La philosophie
africaine doit s’orienter vers l’acquisition des moyens de nous « affirmer comme
auto-centré politiquement, économiquement et spirituellement ».
Notre analyse a voulu établir que l’iconoclasme révolutionnaire constitue
la voie unique conduisant à l’émergence d’une humanité africaine rajeunie et
robuste et à l’authenticité ; c’est la destruction des idoles traditionnelles qui seule
permettra d’accueillir et d’assimiler l’esprit de l’Europe, secret de sa puissance et
de sa victoire sur nous. Et c’est seulement en édifiant une puissance comparable
aux plus grandes puissances de notre temps, et donc capable de résister à leur
agression éventuelle et à leur impérialisme que nous aurons le pouvoir et les
moyens de nous affirmer comme auto-centré politiquement, économiquement et
spirituellement. A notre sens c’est ce dessein qui devrait orienter notre effort
intellectuel. Donc, à la quête de l’originalité et de la différence comme certificat
d’humanité, nous proposons de substituer la quête des voies et moyens de la
puissance comme inéluctable condition de l’affirmation de notre humanité et de
notre liberté. La puissance peut sembler prosaïque à certains. Mais sans puissance,
la négritude est condamnée à n’être qu’un rêve innocent.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 52-53.

146
Texte 24 : La réflexion philosophique en Afrique et ses conséquences
L’exercice de la réflexion philosophique aboutit à une critique sans complaisance
de la culture et du passé. La philosophie se différencie ainsi de l’ethnophilosophie
dans la mesure où, cette dernière prône un culte de la différence stérile alors que
la philosophie n’hésite pas à remettre en cause même l’acquis.
La détermination préalable de ce que nous avons à être, de la possibilité
fondamentale de nous-même à promouvoir, a pour conséquence méthodologique
importante de normaliser notre approche du passé et de notre culture en la rendant
critique, alors qu’elle est essentiellement narcissique dans l’ethno-philosophie.
L’effort de thématisation de notre être distinctif ne se propose plus de dresser une
idole pour le culte de la différence, culte qui entraîne, méthodologiquement, les
gauchissements et les équivoques de la rétro-jection, mais de soumettre notre
héritage à une critique sans complaisance, afin de découvrir la racine de nos
difficultés présentes. Une autre conséquence de grande portée, d’ordre pratique
cette fois, c’est d’enlever toute base théorique au régime « original » auquel le
fascisme néo-colonialiste soumet l’Afrique. C’est au nom de notre être distinctif,
de la négritude senghorienne que sont organisés un peu partout des régimes
« démocratiques » où un seul est libre et décide de tout selon son bon plaisir, des
régimes où règne la « liberté », mais sans possibilité de contestation, etc…La
dénonciation de la confusion de l’essence et de la valeur, de l’être et du devoir-
être, disqualifie l’usage normatif du passé et de l’être différent dans la praxis
politique et sociale.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 55.
Texte 25 : L’appréhension de l’Occident
Déterminer la véritable nature de l’Occident est un préalable à notre
développement. D’une part nous pourrons orienter notre devoir être qui est ici la
Liberté ou l’autonomie ; d’autre part nous pourrons trouver les causes de notre
assujettissement qui est une étape vers la libération.
L’Europe s’offre à nous sous des visages différents et même opposés : de
tous ses visages, chrétien, industriel capitaliste, industriel socialiste, lequel est le
plus authentique, le plus important pour nous ? Le premier pas vers une réponse
à cette question consiste à préciser qu’en disant « pour nous », nous ne visons pas
notre essence, ce que nous sommes en propre, mais ce que nous avons à être. C’est
notre devoir-être, et non notre être distinctif, qui doit orienter notre
questionnement. Si donc nous convenons que ce qui constitue notre dessein
essentiel, c’est la liberté, c’est-à-dire, une Afrique auto-centrée et puissante, ayant

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 147


en elle-même le centre de conception et de décision pour toutes les sphères de son
existence : politique, économique, spirituelle, une Afrique appliquant le même
principe de liberté dans toutes les formes de relations inter-humaines, une Afrique
enfin œuvrant pour le triomphe du même idéal dans le monde, si nous convenons
d’un tel dessein, c’est lui aussi qui doit être notre fil d’Ariane dans notre quête du
secret de l’Europe. Le second pas vers une réponse à notre interrogation consiste
à observer que, aussi sûrement que la raison de notre défaite par l’Europe réside
dans ce qui nous en différencie, le secret de l’Europe réside dans ce qui la
différencie de nous et de toutes les civilisations auxquelles elle a infligé le même
sort.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 56.
Texte 26 : Le développement en Afrique
Ce qui manque à l’Afrique c’est la science. La science et la liberté sont les
caractéristiques de la philosophie occidentale qu’il convient d’adopter dans notre
quête de développement.
Science comme principe de la puissance, nécessité de la liberté de pensée
et de la liberté tout court pour le développement de la science, et donc aussi
indirectement de la puissance : ces deux thèmes caractéristiques de la philosophie
de l’Europe au moment de son passage à la modernité ont un rapport évident avec
notre dessein profond : avènement d’une Afrique puissante, auto-centrée et libre
dans un monde réellement libéré. Dans notre quête du secret de la puissance
européenne, il semble donc bien que c’est la philosophie de l’Europe qu’il
convient d’interroger. Mais en interrogeant la philosophie européenne, nous ne
cherchons pas comme l’ethno-philosophie à en élargir le concept pour pouvoir
revendiquer aussi une philosophie. Nous sommes en quête de quelque chose qui
nous manque, et non de ce que nous aurions déjà. Nous laisserons à la philosophie
sa signification la plus rigoureuse.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 59.

148
4-LE CONCEPT EUROPEEN DE PHILOSOPHIE ET
NOUS
Texte 27 : La philosophie et la Science
La science et la philosophie sont les manifestations d’un même principe : la Raison.
La philosophie est la matrice qui a engendré les différentes sciences ; celles-ci ne sont
qu’une spécialisation de la philosophie ; des « branches » de la philosophie d’après Descartes.
La science aussi repose sur le même principe. Science et philosophie ont
par suite la même exigence, le même critère de vérité, la même forme. De fait, les
diverses sciences sont nées historiquement de la philosophie par spécialisation et
particularisation. Et c’est par cette particularité seulement qu’elles diffèrent de la
philosophie. Mais les sciences reposent sur un principe, qui leur est commun avec
la philosophie qui consiste à voir, sentir, penser par soi-même, à être soi-même.
C’est le grand principe qui s’oppose à toute autorité dans quelque domaine que ce
soit…tout ce qui doit avoir pour l’homme quelque valeur doit se trouver dans sa
pensée propre…chaque homme doit penser pour lui-même, aucun ne peut penser
pour un autre pas plus que manger et boire pour un autre.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 61-62.

Texte 28 : La philosophie et la Religion


La philosophie et la religion sont opposées. La première consacre la capacité humaine
à atteindre la vérité grâce à la raison tandis que la seconde établit l’inaptitude de
l’homme à la découvrir d’où la foi.
Par-là la philosophie entre en conflit avec la religion, du fait que celle-ci se
veut l’autorité absolue tant dans le domaine de la vérité que dans celui de la
pratique. Mais la vérité de la religion se présente comme un donné extérieur en
présence duquel on s’est trouvé. Cela est particulièrement net dans les religions
dites révélées, celles dont la vérité a été annoncée par quelque prophète, quelque
envoyé de Dieu. Ainsi dans la religion « le contenu est donné, il est considéré
comme au-dessus ou au-delà de la raison ». La religion conçoit l’esprit humain
comme borné, limité et ayant donc besoin que les vérités essentielles pour
l’homme, que sa raison infirme serait incapable de découvrir par elle-même, lui
soient révélées d’une façon surnaturelle et mystérieuse. Mais l’idée d’une vérité
au-delà de la raison, inaccessible naturellement à l’esprit humain, est absolument
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 149
inconcevable par la philosophie qui repose sur le principe diamétralement opposé
selon lequel la pensée ne doit rien présumer en dehors d’elle-même, c’est-à-dire,
que la philosophie ne doit rien admettre comme vrai qui n’ait été saisi comme tel
par la pensée. L’homme est certes un être borné, fini (sauf du côté de l’esprit).
« Le fini concerne les autres modes de son existence… ; mais, quand, comme
esprit, il est esprit alors il ne connaît pas de limites. Les bornes de la raison ne
sont que les bornes de la raison de ce sujet-là, mais s’il se comporte
raisonnablement l’homme est sans bornes, infini. »
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 62.
Texte 29 : La philosophie et la Religion
La religion exige une adhésion sans critique à ses dogmes tandis que la philosophie
admet la critique. La philosophie de même que la religion sont en quête de vérité
et se veulent Absolues. Elles s’opposent par leur nature même et par leur méthode.
Dire que la philosophie est la pensée humaine libre, infinie, d’admettant
comme point de départ et comme principe qu’elle-même, c’est la poser comme
absolue et rivale de la religion qui occupait la même position. Pour éviter la
collision, on a proposé que la philosophie ait sa vérité particulière et la religion la
sienne. Mais l’Eglise a condamné la doctrine de la double vérité, et la philosophie
non plus ne peut admettre à côté d’elle la « satisfaction religieuse ». Les pensées
ayant leur origine et leur fondement dans la religion et l’Eglise chrétienne
s’excluent du domaine de la philosophie, parce que leur pensée « se tient à
l’intérieur d’un dogme déjà fixé, donné, qui en forme la base ». Les Pères de
l’Eglise et les scolastiques développent de grandes idées spéculatives. Mais ces
spéculations n’ont d’intérêt que pour l’Histoire de la dogmatique, et ne rentrent
pas dans celle de la philosophie, parce que leur contenu « n’est pas justifié par la
pensée même, mais l’ultime justification de ce contenu est la doctrine déjà établie
et présumée de l’Eglise. »
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p. 63.
Texte 30 : La suprématie de la philosophie
La philosophie se pose en s’opposant à la religion. La pensée philosophique garde la
primauté sur toutes autres formes de pensée dans la capacité à découvrir la vérité. Elle ne
saurait donc s’inféoder à la religion mais au contraire, c’est elle qui doit régenter celle-ci.

150
Hegel conçoit l’histoire de la philosophie comme l’étude de l’évolution de
la pensée libre dans son opposition à l’autorité de la religion. « L’histoire de la
philosophie décrit la lutte de cette pensée libre contre cette autorité ». Il n’exclut
cependant pas toute réconciliation. Seulement c’est de la philosophie pleinement
développée, de la pensée libre ayant déjà triomphé, que doit venir l’initiative de
la réconciliation. Autrement dit, c’est à la philosophie qu’il revient d’interpréter
les représentations religieuses et mythologiques, de déterminer ce qu’elles
peuvent comporter de vrai. C’est la philosophie, la pensée libre qui doit apprécier
et juger les représentations religieuses et mythologiques et non l’inverse. « La
philosophie peut bien, en effet, reconnaître ses propres formes dans les catégories
de la représentation religieuse, et son propre contenu dans le contenu religieux
et rendre justice à ce contenu, mais inversement il n’en est pas ainsi, parce que
la conception religieuse ne s’applique pas à la critique de la pensée et ne
comprend pas elle-même et quelle est par suite exclusive dans son immédiateté. »
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 63-64.
Texte 31 : Le développement en Afrique
L’ethnophilosophie qui est un avatar de la négritude pérennise l’assujetissement de
l’Afrique à l’Occident. Par son culte de la différence, elle consacre l’ordre ancien qui
a été défait par l’Occident. Le développement et la libération exige une révolution.
Notre souci a été bien plutôt de démasquer la négritude senghorienne et
l’ethno-philosophie qui voudrait la prolonger, et de rendre manifeste pour tous
que leur culte de la différence, de l’originalité conduit en fait à Canossa,
consciemment ou non. Ceci explique la faveur que ce courant idéologique trouve
auprès du néo-colonialisme, au point qu’il prend aujourd’hui figure d’idéologie
officielle du néo-colonialisme. Ce n’est pas en nous accrochant à notre essence et
à notre passé que nous pourrons jamais recouvrer l’autonomie culturelle. Ce serait
plutôt maintenir le statu quo ou plus exactement confirmer et accélérer l’évolution
actuelle vers la dépendance et l’impuissance. Le chemin de l’autonomie culturelle
passe obligatoirement par une révolution, et donc par une auto-révolution. Aucune
autonomie n’est possible dans le domaine de la culture sans base matérielle,
politique et économique. Et dans notre monde de superpuissances impérialistes,
comment prétendre à une autonomie tant soit peu réelle, dans quelque domaine
que ce soit, sans acquérir soi-même une puissance suffisante pour résister à toute
tentative de subjugation ouverte ou camouflée ?
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, pp. 67-68.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 151


Texte 32 : Le rôle de la philosophie
La philosophie est idoine pour acquérir le secret de la puissance occidentale.
Elle peut également servir à la construction de l’unité africaine.
C’est dans la perspective de cette possibilité de nous-mêmes, de cette
anticipation de nous-mêmes que se situe l’intérêt que la philosophie européenne
offre pour nous et c’est relativement à la même finalité que doivent être jugées et
appréciées toutes les cultures y compris les nôtres propres. Parce que la
philosophie européenne, en raison de sa parenté étroite avec la science et la
technologie, semble être à l’origine de la puissance européenne, elle nous aidera
à opérer la révolution des mentalités qui conditionne l’édification de notre propre
puissance ; en révélant le savoir philosophique conceptuel comme seul fondement
de l’universalité et du dialogue sur l’Absolu, elle nous fournit des indications
précieuses pouvant orienter nos efforts pour surmonter les divisions africaines
fondées sur la diversité des confessions religieuses fanatiques et mettre sur pied
un unité politique aux dimensions de notre temps.
Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique
actuelle, CLE, 1971, p.68.

C- EBENEZER NJOH MOUELLE,


DE LA MEDIOCRITE A
L’EXCELLENCE,

PREFACE

Texte 1 : La révolution en Afrique


La Révolution et le révolutionnaire doivent remplir un certain nombre de critères.
Manifestement l’intelligentsia n’est pas apte à mener la révolution en Afrique.
Quelle révolution conduire aujourd’hui en Afrique, après le renversement
du pouvoir colonial ? Et qui peut la conduire ? Ce n’est pas une vaine question,
contrairement à ce que l’on pourrait croire au premier abord. Car nous entendons
souvent des gens interpeller l’intelligentsia, considérée comme tête de pont
152
naturelle de la révolution. Mais le simple fait d’avoir fait des études supérieures,
d’avoir lu toutes sortes d’ouvrages, y compris, bien entendu, ceux relatant les
grandes révolutions de l’Histoire, ne crée pas nécessairement le révolutionnaire.
Le premier moment d’une aventure révolutionnaire suppose qu’on ait clairement
et distinctement identifié les intérêts en présence. Dans tout pays d’Afrique
aujourd’hui en voie de développement, quels sont les intérêts en présence et qui
les défend, qui est prêt à lutter pour faire triompher, aujourd’hui et demain ? Il y
a les intérêts du grand capital international, qui a tendance à prolonger sous une
forme insidieuse l’Etat colonial. Il y a les intérêts de ceux qui, nationaux opérant
à l’intérieur de leur pays, sous les relais indispensables du grand capital
international. Parmi eux, on trouve un peu tout le monde, de l’intellectuel de
renom au petit fonctionnaire d’une administration qui ne songe qu’à tirer son
épingle du jeu quand il ne se laisse pas corrompre.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, Préface.

Texte 2 : L’Etat en Afrique (ou la révolution)


Le développement en Afrique nécessite que l’Etat soit fort. Il est le garant d’une
véritable révolution et non des intérêts d’une classe particulière.
Le choc des intérêts égoïstes dans nos sociétés est tel qu’il rend le rôle de
l’Etat bien plus important que partout ailleurs. L’Etat en Afrique, se doit d’être
fort, non pas pour assurer la survie des dirigeants et de leur régime, mais pour
imposer ses arbitrages et sauvegarder l’ordre public sans lequel le processus du
développement se verrait chaque fois perturbé. On sait quel retard la guerre civile
a causé au développement du Tchad ; mais, si, aujourd’hui, l’unité du pays est
heureusement sauvegardée, sait-on si le Tchad est prêt à engager une nouvelle
guerre révolutionnaire pour l’instauration d’un type déterminé de société ? Car la
vraie révolution se fait au nom d’une vision politique, sociale, économique et
culturelle déterminée, et non pour satisfaire une soif particulière de pouvoir.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, Préface.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 153


1-LE FAUX PROBLEME DE LA PAUVRETE QUI
S’IGNORE

Texte 3 : Les critères du développement


L’aisance matérielle ne fait pas l’économie du développement. C’est plutôt
l’aptitude à la liberté qui devrait être le critère du développement.
Si l’adaptabilité de l’homme à toutes sortes
d’environnement lui fait trouver une raison de vivre en toutes circonstances, cela
ne peut nullement vouloir dire que toute circonstance à laquelle l’homme
s’adapte, par nécessité souvent, favorise son épanouissement, c’est-à-dire lui
permet d’être plus homme. On devrait suivant ce raisonnement fallacieux,
conclure en second lieu qu’il n’y a aucun sens à proclamer que tel ou tel pays est
sous-développé, ou sur-développé, faute d’une commune mesure du
développement. Or nous disons qu’il faut distinguer entre bonheur et
développement. Il n’y a pas de commune mesure du bonheur ainsi que nous
l’avons dit en avant-propos (…) mais il y a une commune mesure du
développement. Ce ne sont pas les richesses dénombrables et accumulables, c’est
l’aspect par où notre activité de transformation du monde qui aboutit à cette
accumulation nous permet de nous réaliser pleinement, d’être des agents
créateurs c’est-à-dire libres.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.10.

Texte 4 : La primauté de l’être sur l’avoir


L’avoir ne saurait être une fin mais un moyen, il est subordonné à l’être. Trop plein
d’avoir peut entrainer l’appauvrissement voire même l’annihilation de l’être.
Ce sur quoi nous voulons insister c’est l’idée selon laquelle la pauvreté qui
s’ignore n’est pas plus avantageuse pour l’homme que la recherche de la richesse
matérielle comme fin en soi. Ce qui importe dans tout processus d’enrichissement
comme dans tout processus de transformation du monde, c’est la réalisation de
soi, l’auto-accomplissement de l’homme qui n’est pas une donnée de la nature,
mais une auto-production historique. C’est pourquoi on peut être pauvre, diminué
dans son être au milieu de nombreux biens matériels. Tout enrichissement pris
comme fin en soi est au bout du compte un appauvrissement de l’être au profit de

154
l’avoir, dilution de l’être dans l’avoir. Etre tout entier ce qu’on a, c’est le risque
que court tout homme oublieux de fait que l’avoir doit être subordonné à l’être et
non le contraire.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.11.

Texte 5 : L’influence de l’avoir sur l’être


Le caractère fugace et éphémère de l’avoir démontre qu’il ne devrait pas être pris
comme fin. L’avoir a des méfaits sur l’être au point que celui-ci s’identifie à lui ;
être et avoir deviennent ainsi homogènes.
Mais l’état social, l’apparition de la propriété individuelle a inauguré la
dialectique de l’être et de l’avoir. Ce que j’ai, ce qui m’appartient sous forme de
richesses dénombrables finit par faire partie de mon être. Mes plantations, mes
immeubles, mes cars de transport, si je suis homme d’affaires, c’est, ni plus ni
moins, moi-même. Qu’une partie de cet avoir en vienne à me manquer et me voilà
affecté dans mon être entier et cela peut aller jusqu’au suicide (suppression de
l’être) en cas de faillite (perte de l’avoir). Or cela arrive ; avoir quelque chose en
sa possession, s’attacher par conséquent à ce quelque chose, c’est s’exposer à le
perdre un jour et à être malheureux. Celui qui n’a rien ne perd rien ; par contre
celui qui a quelque chose vit dans la crainte permanente de perdre ce qu’il
possède. Nous ajouterions même que celui qui accède à une propriété quelconque
a déjà perdu quelque chose par ce fait même ! Il a en effet perdu la tranquillité. Il
est devenu un être inquiet. Dans ce sens, l’avoir vient modifier l’être
négativement. L’être se laisse absorber par l’avoir. Je suis ce que j’ai.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.12.

Texte 6 : L’avoir comme moyen et non comme fin


Bien compris, l’avoir est un moyen d’enrichissement de l’être, mal compris il
entraine un appauvrissement de celui-ci. L’enrichissement n’est donc pas bien
ou mal en soi pour l’humanisation de l’homme, c’est l’usage qu’on en fait qui
détermine son caractère bon ou mauvais.
Etre ce que nous avons est cependant un échec dans la mesure où
l’appropriation ne s’accompagne d’aucun détachement de notre part vis-à-vis de

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 155


la propriété. Dans ces conditions, l’accession à la propriété entraine une
diminution de notre être sous la forme de la perte d’une sérénité et d’une
tranquillité première. C’est en ce sens que nous disons que l’enrichissement est
en même temps un appauvrissement. Il ne s’agit pourtant pas de condamner tout
enrichissement ni d’encourager au dénuement de l’homme naturel de Rousseau.
Nous voulons simplement dire que le travail qui mène à l’enrichissement
comporte un aspect formateur pour l’homme et qu’on ne saurait refuser même au
pauvre qui s’ignore et qui n’est riche que d’une naïve tranquillité. L’accumulation
des biens matériels n’est pas une fin mais un moyen pour l’humanisation de
l’homme.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.12.

Texte 7 : Les bénéfices de l’état civil


Le passage de l’état de nature à l’état civil fonde l’humanisation de l’homme. Les
bénéfices qu’il en tire sont plus grands que les inconvénients qui en découlent.
L’homme se libère de la dictature de l’instinct ; il passe de l’animalité à l’humanité.
Le passage de l’Etat de nature à l’état civil produit dans l’homme un
changement très remarquable, en substituant dans sa conduite la justice à l’instinct
et donnant à ses actions la moralité qui leur manquait auparavant. C’est alors
seulement que la voix du devoir succédant à l’impulsion physique et le droit à
l’appétit, l’homme qui jusque-là n’avait regardé que lui-même, se voit forcé d’agir
sur d’autres principes et de consulter sa raison avant d’écouter ses penchants.
Quoiqu’il se prive dans cet état de plusieurs avantages qu’il tient de la nature, il
en regagne de si grands, ses facultés s’exercent et se développement, ses idées
s’étendent, ses sentiments s’ennoblissent, son âme toute entière s’élève à tel point
que, si les abus de cette nouvelle condition ne le dégradaient souvent au-dessous
de celle dont il est sorti, il devrait bénir sans cesse l’instant heureux qui l’arracha
pour jamais et qui, d’un animal stupide et borné, fit un être intelligent et homme.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.13.

Texte 8 : La finalité du développement


C’est l’homme qui doit motiver toutes actions de développement. Il est la finalité du
développement tandis que le bien-être et l’enrichissement ne sont des notions
équivoques. Ils ne peuvent donc pas servir de finalité au développement.
La pauvreté qu’elle s’ignore ou qu’elle soit consciente d’elle-même, est un
obstacle à la liberté. Et, plus profondément encore c’est l’ignorance elle-même

156
qui est l’obstacle majeur à la liberté. L’homme de l’Afrique sous-développé n’est
peut-être plus cet homme qui ne se sait pas pauvre. Mais dans une grande échelle,
il reste un homme ignorant. Le bien-être et l’enrichissement qu’il recherche, à
l’exemple de l’homme des pays développés, ne sont pas toujours des notions
claires à son propre entendement. C’est un homme qui risque de travailler contre
lui-même à la longue. Les dirigeants politiques qui étudient souvent les problèmes
à l’échelle de pays entiers, oublient que c’est lui, l’homme individuel, qui doit être
la finalité de tous leurs plans de développement. Il se voit réduit en chiffre ou en
simple référence numérique dans leurs calculs statistiques.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.14.

2-LA MISERE DE L’HOMME

Texte 9 : La nature de la misère de l’africain


La misère de l’homme n’est pas que matérielle, elle est également spirituelle. La
résolution de la misère matérielle par la production d’objects-réponses n’est pas
suffisante. Elle ne constitue qu’une étape, un moyen.
Mais la misère du sous-développé ne saurait se résumer par le cri du ventre.
Et il faut s’entendre sur la place de la faim dans la situation de l’homme sous-
développé. Vue sous l’angle de l’homme, le seul qui nous intéresse en écrivant
ces lignes, la recherche du pain quotidien n’est pas une fin en elle-même ni
l’abondance du pain critère d’un développement certain : c’est parce que la sous-
alimentation a pour effet non seulement d’entretenir une débilité physique
favorisant la contamination mais encore de diminuer les capacités intellectuelles
et d’annihiler l’effort qu’elle est un état à enrayer. Autrement dit, le bonheur, ce
n’est pas tellement parce qu’on mange à sa faim tous les jours, mais peut-être
parce que, mangeant, on supprime un certain nombre de handicaps à
l’épanouissement total de soi. Tout cela va certainement de soi, et tellement que
le moyen est transformé en fin et la fin en moyen. La misère de l’homme n’est
pas supprimée par le simple fait qu’il mange à sa faim. Le problème de la misère
ou du bonheur lui-même ne se pose que postérieurement à la satisfaction du besoin
vital de manger. Il faut d’abord vivre ou survivre avant de se préoccuper du
bonheur en cette vie. En d’autres termes, il faut d’abord être, avant de nous
préoccuper de notre manière d’être. La considération de sa misère ou de son

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 157


bonheur ne vient à l’être qu’après qu’il a résolu le problème de l’existence. Et la
satisfaction du besoin de manger est la condition de ma permanence dans
l’existence et ne saurait constituer mon vivre-heureux ou mon vivre-homme. Par
le fait de me nourrir quotidiennement je ne réussis qu’à assurer une reconduction
brute de mon être d’un jour à l’autre, sans rien de plus.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.17.

Texte 10 : Les formes de misère


La misère de l’africain se présente sous deux formes : objective et subjective. La première
n’est pas spécifique à l’africain car elle existe également ailleurs. C’est la misère objective
qui est la véritable misère spécifiquement africaine, elle est mentale et se manifeste par
l’ignorance, la superstition, l’analphabétisme.
Une première forme de misère apparaît ici et que nous appellerions la
misère subjective, prise de conscience douloureuse par l’homme de la faille qui
sépare son être actuel de qu’il veut être. Le chômeur qui cherche du travail en ville
connait le même déchirement. Il n’a pas ce qu’il veut. Il veut du travail c’est-à-
dire une garantie du pain quotidien, une sécurité. Sa misère réside dans la
conscience de la différence et de la distance. Différence d’avec ceux qui possèdent
ce qu’il n’a pas, distance par rapport à ce qu’il n’a pas et qu’il voudrait avoir. Et
cette misère n’est pas la misère spécifique de l’homme du pays sous-développé.
Des hommes, en pays développé vivent le même type de déchirement qui fixe, au
point de l’y aliéner, notre existence à un objet, à une situation qui sont un objet,
une situation de l’autre côté d’une barrière qui nous hypnotise par la force de la
valeur de vie plus que nous y avons projetée. Ce qui rend la misère subjective plus
aiguë c’est la servitude dans laquelle elle nous place à l’égard de l’aspiration.
Cette misère est subjective parce que justement, sa cause peut être jugée non
nécessaire par d’autres même quand elle s’appelle vouloir-vivre. Si c’est parce
que nous nous cramponnons à la vie que nous sommes esclaves, alors on peut
toujours nous faire observer qu’il ne tient qu’à nous de renoncer à la vie pour
supprimer le déchirement et, par là-même, la conscience malheureuse et,
finalement la conscience tout cour. Ce n’est pas à la misère subjective qu’on peut
voir la marque particulière du sous-développement. Nous venons de le dire, cette
forme de misère se rencontre partout, même en pays développés, et entendons par
là pour le moment les pays d’abondance relative. La marque particulière du sous-
développement c’est la misère objective, celle qui n’a pas besoin d’être
consciemment vécue pour être. Elle s’appelle ignorance, superstition,
158
analphabétisme. C’est la véritable misère, celle qui maintient ou ravale l’homme
à l’état de sous-humanité par l’aliénation et le défaut de liberté qu’elle entraine.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.18-19.

Texte 11 : La manifestation de la misère


Dans l’état de misère ; l’homme n’a aucune emprise sur son succès ou son échec. Il est
un agent passif des forces mystérieuses qui le déterminent à agir. C’est donc un état qui
dédouane l’homme de toute initiative et responsabilité vis-à-vis de ce qui lui arrive et de ce
qu’il fait.
A vrai dire c’est là un régime de la facilité ou de l’anti-effort. Ici, l’homme
ne réussit pas parce qu’il est intrinsèquement fort ou qu’il construit de lui-même
son succès mais parce qu’un secret de la nature lui a été révélé. La révélation dudit
secret, cela va de soi, fait l’économie de tout discours. Il n’y a pas compréhension
du monde, mais participation magique au rythme du monde. C’est le régime de la
facilité parce que partout l’homme a démissionné devant la nature qu’il ne cherche
pas à dominer mais dont il accepte d’être dominé. Suivre la nature c’est la pente
naturelle, facile à dévaler ; et ce n’est pas à là la voie de l’auto-affirmation de
l’homme. C’est plutôt la voie de l’esclavage. Par contre, chercher à remonter la
pente de la nature, la pente des penchants et instincts qui nous attachent à la nature,
telle devrait être l’option de l’homme soucieux de se récupérer sur une nature
aliénatrice. Cette conquête et cette récupération de soi ne peuvent être assumées
que par la raison. Or l’homme sous-développé vit dans le régime de l’anti-raison.
Il meurt de faim à côté des vaches prétendues sacrées, préfère subir les inondations
que troubler le soi-disant repos des ancêtres morts-vivants de la rivière, se laisse
escroquer par un diabolique charlatan qui répète le même diagnostic à mille
patients plutôt que de se confier aux soins d’un médecin des hôpitaux modernes.
C’est cela sa misère et son sous-développement. Misère qui, pour être
inconsciente, n’est pas moins objective.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.22.

Texte 12: La misère objective


La misère objective se caractérise par le manque de rationalité et de liberté. Elle est
pauvreté spirituelle et non mentale. Certes les deux formes de misère frappe l’africain,
mais la misère objective est la cause majeure du sous-développement de l’Afrique.
La misère de l’homme des pays sous-développé est donc double : elle est
misère subjective et misère objective tout à la fois. C’est un homme pauvre ; il
lui manque parfois le strict nécessaire pour la survie ; et il le sait. Pour lui, toute
sa misère se résume dans ce manque. Mais comme nous l’avons déjà dit, ce n’est
pas là sa vraie misère. Sa vraie misère est celle par laquelle il reste un sous-
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 159
homme, inconsciemment sous-homme. Si nous avons appelé cette seconde forme
de misère, misère objective c’est parce que nous tenons le critère universel par
lequel il faut ici juger. Ce critère est l’humanité de l’homme ; et, dans cette
humanité, la rationalité et la liberté comme valeur déterminantes. Est misérable et
sous-homme, celui qui, dans son comportement, ne manifeste pas ces
caractéristiques de liberté et de rationalité. Il est pauvre homme et non
nécessairement homme pauvre ; c’est-à-dire qu’il est pauvre en esprit. Nous avons
vu que c’est pour la même raison que l’homme naturel de Rousseau est un sous-
homme. Il n’a pas suffisamment exercé sa raison, faculté spécifique de l’espèce
et ne connaît que le pouvoir de ses instincts et tendances qui le maintiennent
étroitement dépendant de la nature. La misère subjective et la misère objective
représentent des limitations absolues à la libre expression de l’homme sous-
développé. Car s’il est vrai qu’un homme affamé et démuni de tout est un homme
enchaîné, il en est de même d’un homme ignorant, superstitieux et crédule. Le
mythe de la Caverne est éternellement vrai. L’enchainement des esclaves dans la
caverne ombreuse et mensongère figure bel et bien l’aliénation qu’entraîne le
défaut de science.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.22-23.

3-L’HOMME CRITIQUE

Texte 13 : La crise culturelle


La fascination que l’occident exerce sur l’africain produit une dépersonnalisation de
celui-ci. C’est un homme en crise qui n’a plus de référentiel pour guider son agir. La
destruction des traditions africaines entraine un vide spirituel. Sortir de cet état de chose
nécessite du recul vis-à-vis de l’Occident, un examen critique de notre être-au-monde actuel.
Celui qui, égaré en pleine forêt, au lieu de marquer un temps d’arrêt pour
essayer de se réorienter se met à courir à gauche, à droite, devant, derrière,
compromet ses chances de retrouver le chemin. Non seulement il peut être
définitivement perdu, mais son comportement désordonné aura d’abord fait de lui
un homme malade. L’homme de l’Afrique sous-développée est aujourd’hui un
homme malade, le citadin bien plus atteint que le paysan, l’alphabétisé que
l’analphabète. Et nous ne parlons pas de maladie physique, nous voulons plutôt
évoquer cette désorientation culturelle et mentale qui entraîne ce qu’il est convenu

160
d’appeler dépersonnalisation. L’on a beaucoup écrit sur le heurt des cultures et
ses séquelles en pays anciennement colonisés ; et nous voudrions simplement
souligner ce qui, à nos yeux, doit être considéré comme le mal fondamental que
le développement devrait réparer : une certaine dégénérescence de l’homme pris
dans un vertigineux tourbillon des valeurs. Egaré donc en épaisse forêt de valeurs,
cet homme vit une crise plus ou moins consciente, reflet intériorisé d’une plus
vaste crise, celle qui ébranle la culture traditionnelle toute entière.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.24.

Texte 14 : Le rôle de la culture


C’est la culture qui oriente nos comportements et permet de comprendre le monde qui
nous entoure. C’est le réfèrent qui contient les réponses que nous pose l’existence.
Si toute culture est un système fermé d’habitudes, elle l’est, son
rôle est de coder en quelque sorte l’environnant, c’est-à-dire de donner une
signification aux objets qui entourent les hommes. Aussi longtemps que le
déchiffrement des significations ainsi distribuées s’effectue aisément et de
manière quasi automatique, on n’a besoin d’aucune nouveauté, tout se passe
comme si l’inventaire des besoins de la société a été fait et que des solutions ont
été proposées une fois pour toutes pour satisfaire ces besoins chaque fois qu’ils se
renouvellent. La sécurité règne. Chaque individu s’oriente facilement dans son
univers. Il sait à chaque moment qui il est et à quel milieu il appartient. Et le milieu
lui-même, par instinct d’auto-conservation, le rappelle à l’ordre chaque fois qu’il
tente de s’en éloigner. Le devoir apparaît ici comme un devoir de conformité. Il
faut toujours agir conformément aux habitudes du groupe. Et l’accomplissement
du devoir est la condition de l’intégrité de l’individu. Vue sous cet angle (et qui
le principal), la culture se présente comme un inventaire prétendument complet
des problèmes posés une fois pour toutes et définitivement résolus.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.25.

Texte 15 : L’importance de la culture dans le processus de développement


La culture a un rôle majeur dans le processus de développement. La dévalorisation, la
destruction des cultures africaines lors de la colonisation a entrainé une crise profonde
sur l’identité africaine.
C’est dans cette situation que se trouve aujourd’hui la culture de nos
sociétés africaines. Le code a été brisé lors de l’impact avec la civilisation

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 161


occidentale, brutalement brisé par la colonisation. Et la gravité de la crise vécue
aujourd’hui par l’homme africain est proportionnelle à la brutalité de cette rupture
de la matrice première des significations. La crise se manifeste d’abord comme
un manque, une absence. Notre homme égaré en pleine forêt culturelle cherche
une issue. Sa crise est vécue comme une désorientation inopinée. Et la prise de
conscience de cette désorientation peut l’exposer à l’inquiétude et à l’angoisse.
Que la crise soit vécue comme conscience d’un manque dans la réalité n’est pas
douteux ; mais l’occasion est encore bonne de souligner ici que dans notre
situation de sous-développement, ce manque a souvent été vu sous l’aspect de
biens de consommation. Nous sommes justement en train de montrer que l’aspect
véritablement culturel est d’autant sinon plus important que l’autre. Par aspect
culturel nous entendons l’activité par laquelle l’homme se sépare de la nature-
instrument pour lui donner un sens en même temps qu’il donne sens à ses propres
entreprises et par là acquiert une personnalité et une dignité propres. Il y a un
manque aujourd’hui dans la culture africaine. On ne sait plus toujours avec
certitude ce qu’il faut croire, ce qu’il ne faut pas croire.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.26.

Texte 16 : L’occidentalisation comme modèle de développement


La culture occidentale comme paradigme de développement par les élites du tiers
monde en général et de l’Afrique en particulier frise le ridicule. Il y a une sorte
dévalorisation systématique de soi-même et de ceux qui est local au bénéfice du
label occidental. Cet état de chose consacre et même pérennise le sous-développement.
Le fait que l’homme de l’Afrique sous-développée n’a d’yeux que pour
l’Occident exportateur de décadence aussi bien que de progrès. Cette fascination
pour l’Occident s’exerce sur tous les plans : économique, vestimentaire, loisir,
etc. (…) C’est une vérité de tout le Tiers-Monde. Les goûts de l’Occident ne sont
pas seulement acquis par ceux qui sont allés en Occident ; l’occidentalisation de
ceux qui n’ont jamais pris l’avion ni le bateau, de ceux qui ne sont jamais sortis
de leur terroir, s’est effectuée et s’effectue encore sur place par l’intermédiaire
justement des élites fanfaronnes. Si à Yaoundé ou à Douala, le commerçant se
sent obligé pour vendre ses œufs camerounais ou ses poulets camerounais d’y
coller des étiquettes indiquant : « œufs de France », « poulets de Normandie ».
C’est précisément parce que son compatriote de retour de France lui a inoculé la
honte, voire même le dégoût de ce qui est local au profit des « merveilles »
d’Europe. Un tel, retour d’un séjour de trois mois à Paris dédaigne son manioc,
ses ignames coutumier. A sa table désormais, il fait venir artichauts, choucroutes
ou endives. Il se croit devenu tout autre être. Son voyage en France doit l’avoir
162
transformé, estime-t-il. Mais, très bientôt, il découvre qu’il ne peut soutenir
l’effort financier que son nouveau régime impose. Un ou deux mois après, le voilà
revenu aux plats qu’il jugeait bon d’abandonner à sa femme analphabète et aux
enfants. Quelle misère !
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.32-33.

Texte 17 : La dépravation des mœurs


La dépravation des mœurs est l’une des conséquences de l’adoption sans critique
de tout ce qui est occidental. Les élites africaines érige en modèle les contre-valeurs
comme l’homosexualité, pratique étrangère à l’être au monde des africains.
La fascination de l’Occident n’a pas épargné les élites elles-mêmes, et
jusqu’à la bêtise. C’est ainsi que vous entendrez dire un beau jour que
l’homosexualité et le strip-tease par exemple, sont des signes d’un développement
élevé d’une culture. Et vous vous poserez alors la question de savoir ce que
signifie l’expression « développement élevé ». On ne se contente pas du reste de
le proclamer, on passe aux actes. A Douala, Abidjan ou Dakar, il n’est pas rare de
rencontrer des homosexuels parmi l’élite africaine. Il s’agit parfois d’une
homosexualité de pur snobisme : c’est étrange, direz-vous, mais c’est vrai. Qu’une
perversion sexuelle puisse être recherchée comme marque d’une distinction de
niveau de culture passe simplement tout entendement. En tout cas, le moins qu’on
puisse dire est que c’est précisément là le signe de cette dégénérescence dont nous
parlions au début. Ici et là, on voudra ouvrir une « boîte à strip-tease », un
divertissement pour intellectuels ! Et c’est tout ce qu’on aura retenu de la
« civilisation des loisirs ». Jusque dans la manière d’organiser ses loisirs,
l’intellectuel de l’Afrique sous-développée veut singer l’Europe et la singe de la
pire des façons.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.33.

Texte 18 : La compromission de l’élite


L’élite africaine s’accommode de l’état actuel des choses, pire elle tire profit de cette
situation tout en ayant pleine conscience de la situation. Il s’agit d’un manque de
courage, d’un aveu d’impuissance. Plutôt que changer les choses, elle se complaît à
s’adapter à elles. C’est ni plus ni moins qu’une stratégie désespérée de survie.
Un aspect fondamental de la crise des mœurs est exploité et entretenu par
lui. Et là, son comportement rejoint celui du charlatan cynique dont nous parlions
plus haut : nous voulons parler de la débauche générale. En discussions de salons,
tout le monde s’accorde à dire que les jeunes filles sont dévergondées. On se
lamente sur cette situation qu’on dénonce vigoureusement au nom de
l’intemporel « bon vieux temps », au nom aussi de la morale, non seulement de

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 163


nos pères et mères, mais de la morale universelle tout court. Mais sortis des salons,
on se retrouve dans les mêmes ruelles sombres, dans les mêmes rendez-vous de
consommation d’alcool en compagnie de ces femmes qui vous tapotent sur
l’épaule et sur la cuisse, insolentes et vulgaires. La complicité de l’intellectuel
avec la crise est évidente. La pérennité de celle-ci lui garantit une bonne pêche en
eaux troubles. Tout comme le charlatan cynique, il juge qu’il est plus facile
d’entrer dans le système que d’entreprendre, de l’extérieur, de secouer le système.
Sa révolte reste théorique. Elle n’a pas pour fonction de lui procurer une bonne
conscience. Elle est pur masque. L’intellectuel joue la comédie verbale du
révolutionnaire tandis qu’il se comporte en réactionnaire toujours attaché à l’ordre
ancien tandis qu’à y bien voir, il se comporte en révolutionnaire insidieux et
subtil : en effet, chacune de ses supercheries démasquées devrait plaider contre
l’ordre ancien qu’il exploite en feignant d’y croire toujours. Si un charlatanisme
peut être préférable à un autre, celui de l’intellectuel serait loin d’avoir notre
préférence. Si un cynisme peut être plus condamnable qu’un autre, celui de
l’intellectuel ne bénéficierait d’aucune circonstance atténuante, même pas cet exil
involontaire qui a voulu qu’il aille faire ses études en Occident.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.34.

Texte 19 : La nature de la crise


L’état de crise de l’homme africain se caractérise par l’ubiquité de son
comportement, de sa personnalité. Résoudre le problème du développement revient
à résoudre le problème de personnalité des africains qui sont inauthentiques.
Le dédoublement, voilà le mot par lequel nous pourrions résumer l’état de
crise de l’homme critique. Et qui dit dédoublement dit fausseté et inauthenticité.
L’Afrique sous-développée est certes pleine d’hommes sous-alimentés et
affamés, mais elle est surtout plein d’hommes masqués, certains se sachant
maqués, et d’autres pas, les premiers se confondent parfois avec les seconds sans
qu’on puisse voir qui enlèvera le masque de l’autre après s’être démasqué lui-
même, ou après l’avoir été par l’autre. Le problème du développement n’est donc
pas de donner à manger à cet homme mais plutôt de le transformer, de supprimer
sa duplicité, de substituer de la consistance à de l’inconsistance.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.35-36.

164
4- LA MEDIOCRITE

Texte 20 : L’homme médiocre


L’homme médiocre est l’homme mitoyen. Il se fond complètement dans la société et,
c’est celle-ci qui lui dicte son comportement. Le médiocre est incapable de prendre du
recul face à son milieu. C’est un homme passif pour qui la société est sécurisante pour
sa survie.
Etymologiquement, l’homme médiocre est l’homme du milieu, c’est-à-dire
l’homme du centre sans que par centre il faille entendre le noyau, le cœur dans
l’ordre de l’excellence ou de l’essence. Il est du centre mais sans être central. Au
centre de quoi se trouverait-il donc exactement ? Ce n’est certainement pas au
centre des hommes, mais plus exactement au centre de l’homme ne ce sens qu’il
reste à mi-chemin de l’humanité authentique et de la sous-humanité parfaite.
Notions qui restent elles-mêmes à définir en toute rigueur. La mitoyenneté est par
conséquent ici d’ordre idéel et non physique. Bien évidemment, l’homme
médiocre est l’homme du milieu aussi bien que l’homme d’un milieu. Si la
médiocrité se dit d’abord en rapport avec des considérations d’ordre qualitatif et
spatial. Il est en effet l’homme d’un milieu en ce sens qu’il est signe d’un milieu
et appartient au grand nombre, à la majorité, à la masse. Et c’est sans doute parce
qu’il est d’abord d’un milieu qu’il est en second lieu du milieu. L’appartenance à
un milieu ne conduit pas nécessairement à la médiocrité. C’est l’inaptitude à
prendre du recul par rapport au milieu, l’adhérence totale à lui qui mène sûrement
à la médiocrité. Celle-ci se présente donc d’abord comme grégarité, esprit
moutonnier et conformisme irréfléchi. Etre du milieu c’est penser, s’habiller,
parler comme on fait dans le milieu. C’est adopter le comportement du grand
nombre car le milieu ou la loi du milieu ne se reconnaît qu’à ceci qu’elle est la loi
acceptée par le grand nombre, la majorité. L’homme d’un milieu, c’est-à-dire
celui qui suit en toute circonstance consciemment ou inconsciemment, la ligne de
conduite de la majorité est un homme dont la personnalité se dissout dans
l’anonymat d’une masse incolore et inodore. Il devient lui-même, par le fait de
cette immersion dans la masse, incolore et inodore. Et le défaut de personnalité,
le manque d’originalité sont les premiers traits par lesquels se révèle l’homme
médiocre. Ce qui rend médiocre ou pousse à la médiocrité c’est l’instinct de
conservation ou le besoin de sécurité.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.37-38.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 165


Texte 21 : les causes de la médiocrité
L’instinct de conservation et le besoin de sécurité sont les causes de la médiocrité. La
grégarité qui caractérise la médiocrité obéit simplement à un instinct de survie. L’homme
médiocre se fond dans son milieu et est incapable d’initiative.
Si c’est par instinct de conservation que le milieu exerce sa loi sur l’homme,
c’est encore au nom du même instinct de conservation c’est-à-dire du même désir
de sécurité que l’homme se soumet à la loi dictée par le milieu et accepte d’entrer
dans le troupeau. Pour survivre, l’homme renonce à son originalité et à sa liberté.
Il se fait esclave à la fois de la vie et du milieu. C’est un dramatique paradoxe
existentiel que celui qui veut l’homme doivent se renoncer pour être, entendons
par là se renoncer solitaire, conscience de soi pour être masse, autre que soi. Ici
aussi, l’instinct de conservation est en même temps instinct de mort. On se sauve
en mourant à soi, on sauve sa vie en se faisant homme du milieu plutôt qu’en
s’opposant au milieu au risque de se laisser détruire par lui pour cause de rébellion
ou de subversion. Mais d’un autre côté, il y a donc oubli de soi dans l’anonymat
de la masse, annihilation de toute velléité créationnelle, existence monotone et
routinière. C’est cela que nous appelons mort. C’est plus exactement le
dépérissement par manque de renouvellement ou par défaut d’activité créatrice
autonome chez l’individu, dépérissement qu’occasionne non seulement l’auto-
répétition quotidienne de soi mais encore l’imitation systématique du
comportement du grand nombre.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.39.

Texte 22 : Le critère de la normalité


C’est la raison et non la majorité qui détermine ce qui est normal. La normalité de la
médiocrité se fonde sur la majorité, le populisme c’est un critère empirique qui est
nécessairement relatif et particulier à chaque société. La normalité de l’excellence se
fonde sur la raison, elle est ainsi universelle.
Nous avons dit que l’homme médiocre est un homme du centre sans être
véritablement central. Mais, par un curieux renversement des valeurs, il arrive
qu’on le prenne pour norme. Seulement, il est norme non pas en tant que
individualité mais en tant que masse, en tant que majorité. Dans tel ou tel milieu,
l’homme normal sera celui qui se situera dans le camp de la majorité ; peu importe
si cette majorité est faite d’hommes veules ou nobles, stupides ou intelligents. Ici,
le critère de la normalité est donc empirique, statistique. L’homme normal est
l’homme qui se comporte comme font la plupart des hommes. Il va de soi que

166
c’est nécessairement une pseudo-normalité. Ce qui est pris ici comme normalité
c’est encore de la médiocrité. La loi du grand nombre n’est pas nécessairement
une loi dictée par la raison. Or c’est celle-ci, qui doit être, en toute circonstance,
critère de la normalité. Est normal, non pas ce qu’on voit faire par tout le monde,
mais ce qui, même suivi par une infime minorité seulement, obéirait à la raison
universelle. Des contradictions peuvent surgir entre la majorité de tel milieu et
celle de cet autre milieu, ce qui prouve que ce n’est pas le nombre ni la quantité
qui fonde la normalité. Mais, devant la juridiction de la raison, aucune autre
contradiction ne saurait demeurer irréductible.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.40-41

Texte 23 : L’homme médiocre


La médiocrité est une issue de substitution face aux exigences de l’excellence. C’est un
état de facilité devant les pesanteurs de la responsabilité. L’homme médiocre entretient
une relation fusionnelle avec son milieu dans lequel la dictature de la masse lui garantit
une forme de sécurité.
Que le plein épanouissement de l’humanité en chaque homme soit une
entreprise difficultueuse et essoufflante ne devrait pas entraîner comme
conséquence la redéfinition d’un idéal bâtard et plus facile à atteindre parce que
fait de conciliation et de compromissions. L’acceptation d’idéaux bâtards est le
fait de la médiocrité et l’on voit en quel sens l’homme médiocre est un sous-
homme. L’on peut également voir par-là que la position moyenne n’est pas
nécessairement la bonne position. Etre homme au maximum ne signifie pas
développer également toutes les tendances de l’espèce. Ici aussi, il convient de se
méfier de la loi du grand nombre. En effet, si l’homme médiocre est celui qui met
sa raison et son jugement personnel en congé pour s’abandonner au ballotement
que lui impose l’opinion et le jugement anonyme des autres, il peut être et il est
même aussi l’homme qui, dans un second mouvement d’auto-abandonnement, se
laisse balloter par les diverses tendances aussi tyranniques les unes que les autres.
Entre l’inférieur et le supérieur, le corps et l’esprit, la bête et l’ange, il balance
sans cesse et, en désespoir de cause, finit par ériger son balancement en raison de
vivre. Rien de surprenant à cela en effet ; car l’homme médiocre pourrait être
fondamentalement défini comme l’homme qui abdique sa responsabilité et son
autonomie pour se soumettre à la plus complète hétéronomie. Il ne se fait pas,

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 167


comme dirait Bergson, mais il est fait, il n’agit pas mais il est agi par les
évènements, les hommes, l’entourage, ou le milieu.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.42-43.

Texte 24 : Les caractères de la médiocrité


La répétitivité, la routine et le conformisme caractérisent le comportement de
l’homme médiocre. Le comportement de l’homme médiocre relève de l’instinctivité,
de l’affectivité (le corps). Il relève aussi de la société (du dehors) et annihile tout
esprit d’initiative. Le médiocre sombre dans la grégarité.
Nous avons vu que la médiocrité s’appelle routine, conformisme, snobisme,
répétitivité. Et dans la répétitivité nous avons vu le signe d’un dépérissement
indiscutable. L’acte répétitif est son essence et rien d’autre ; c’est l’acte fermé sur
lui-même, débordé par aucune marge, par aucune ouverture. Inconscient de soi il
est vie emprisonnée en elle-même et la tragédie vient de là ; car là où le choix
n’existe plus, la conscience s’annule et l’avenir fermé. Vivre par le corps et par le
dehors comme moyen, ne tarde pas à se transformer en vivre pour le corps et pour
le dehors comme fins. L’extériorité représente alors une menace permanente de
subversion qui pèse sur la conscience et l’intériorité. Les structures de l’extériorité
apparaissent bel et bien comme vice et la négation de l’intériorité et de la liberté.
L’homme médiocre, homme du milieu parce que homme d’un milieu, sous
l’aspect de l’homme superficiel est un être qui se réfugie derrière la facilité du
suivisme et de l’auto-répétition habituelle, un être par conséquent qui tourne le
dos à la liberté difficultueuse et au génie créateur de l’homme, c’est-à-dire à
l’effort par lequel on devrait se hausser perpétuellement au-dessous de soi-même.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.44-45.

Texte 25 : l’hétéronomie de la médiocrité


Plutôt spectateur qu’acteur, le médiocre emprunte une attitude de passivité face aux
problèmes existentielles. La médiocrité est une attitude de démission qui pérennise le
sous-développement.
La médiocrité montre ici un autre de ses aspects : l’accommodation facile
avec n’importe quelle situation. Elle s’était révélée à nous comme démission de
notre responsabilité, abandonnement à l’hétéro-détermination ; à présent, elle se
révèle amour du balancement et de l’embarras. Amour n’est peut-être pas le mot
juste ici. A vrai dire, l’homme médiocre n’aime pas particulièrement le
balancement ni l’embarras ; seulement, par faiblesse et par paresse, il ne cherche
pas à mettre fin au mouvement de balançoire auquel il est assujetti ni à résoudre

168
son embarras. C’est l’homme des fausses solutions qui transforme le carrefour en
point d’arrivée ; ne réussissant pas à sortir de la croisée des chemins, il dépose ses
bagages et décrète qu’il a atteint sa destination. C’est finalement l’homme qui ne
sait pas où il va ou plutôt l’homme qui oubli sa première destination lorsqu’il
rencontre une difficulté sur son itinéraire. C’est l’homme qui ne résoud aucun
problème mais qui transforme tous ses problèmes en solutions. Seul le présent
l’intéresse et, à la rigueur, le passé. C’est l’homme fermé à la dimension de
l’avenir, incapable de créer quoi que ce soit. L’on voit aisément de quel côté se
trouve la misère de cet homme. Il lui manque parfois le pain quotidien mais quand
bien même il est assuré de manger à sa faim tous les jours il ne risque pas moins
de demeurer médiocre et sous homme.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.45.

5-LA MODERNITE
Texte 26: Définition de la modernité
La modernité ne signifie pas rigoureusement progrès ou amélioration. L’actualité d’une
chose n’est pas synonyme de progrès, elle peut même signifier régression sur le plan
axiologique.
Rigoureusement, moderne se dit de ce qui appartient au temps présent ou
à une époque relativement récente. C’est ce qui est actuel et contemporain par
opposition à ce qui est ancien et peut-être dépassée ou démodé. Nous entendons
bien établir une distinction utile entre ce qui est dépassé et ce qui simplement
démodé. Dans le dépassement en effet, on doit pouvoir noter un progrès de
l’ultérieur sur l’antérieur. Une technique est dépassée lorsqu’elle cède la place à
une seconde qui se révèle plus efficace et plus perfectionnée qu’elle. La vieille
faucille est dépassée par la moderne faucheuse mécanique. Par contre, un style
vestimentaire, une manière d’utiliser le temps de loisir peuvent être démodés sans
être véritablement dépassés, c’est-à-dire sans être améliorés. Mieux, un style
vestimentaire ancien peut être remis à la mode sans que personne songe à parler
de régression ; sa modernité demeure par conséquent d’ordre strictement temporel
et n’entraine aucune considération d’ordre axiologique. Ainsi, tout ce qui est
moderne ne représente pas nécessairement un progrès par rapport à l’ancien et au
traditionnel. Le modernisme peut être un progrès sur un point, une régression sur
un autre point.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, P.46.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 169


Texte 27 : Les critères de la modernité
La temporalité ne suffit pas à établir la modernité d’une chose. Celle-ci devrait
plutôt se fonder sur le perfectionnement et l’amélioration des conditions de vie de
l’homme. L’homme doit demeurer la valeur absolue autour de laquelle gravite la
modernité et toutes autres choses.
La considération strictement temporelle ne suffit pas quand on veut
conférer une valeur à un phénomène. Car alors, les débats du genre « tradition et
modernisme en Afrique noire » seraient de faux débats en ce sens qu’on saurait a
priori, avant même que le débat ne soit ouvert, le sens dans lequel on le trancherait.
Il faut un autre critère autre que celui de l’actualité pour décider de la véritable
modernité comme de la véritable régression. Pour que le préjugé favorable dont
jouit la modernité soit fondé, il faut un critère extra-temporel, il faut que le
moderne ne soit pas seulement l’actuel mais aussi le meilleur par rapport à ce qui
précède et par rapport aux aspirations fondamentales de l’homme. Il faut un critère
extra-temporel, disions-nous, car d’une certaine façon et précisément en Afrique
sous-développée, la houe et le tracteur appartiennent au présent, de même
l’éclairage à l’huile et l’éclairage électrique. Bien évidemment, leur
contemporanéité n’est pas d’origine ; la houe pré-existe au tracteur et l’éclairage
à l’huile pré-existe à l’éclairage électrique. Mais d’un autre côté, ces deux
systèmes n’appartiennent pas moins au présent. Et pourtant, nul ne songera à dire
que la houe est un outil moderne, ni que l’éclairage à l’huile est un éclairage
moderne. Par contre la modernité du tracteur et celle de l’éclairage électrique
emporte la conviction de tous. Le critère qui devrait nous fonder à assimiler
modernité et progrès doit donc être cherché dans une double direction : le
perfectionnement des méthodes et des instruments de l’épanouissement de
l’homme qui devrait en découler. La modernisation doit donc être, non pas une
simple question d’adaptation formelle au présent, mais un souci d’amélioration
réelle de la condition humaine.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, P.48.

Texte 28 : Le panafricanisme comme fondement du développement


Le développement en Afrique exige le dépassement de la mentalité tribale ou clanique
pour la nation. La nation est un ferment au double plan de l’émergence et de l’unité
qui elle-même constitue une propédeutique au développement.
Nous parlerons de solidarité africaine en nous souvenant qu’elle est une
valeur relative. Dans quelle mesure cette valeur traditionnelle peut-elle favoriser

170
la modernisation de l’Afrique ? Un des aspects du modernisme que nous
évoquerions tout de suite s’appelle constitution des nations, résorption des hordes,
clans et tribus. Le phénomène-nation est en effet un phénomène moderne dans le
double sens de l’actualité et de l’amélioration. Une nation, tout comme un clan ou
une tribu, ne manque pas d’avoir ses égoïsmes de groupe. Solidarité nationale et
conscience nationale en sont par conséquent rien d’autre que des manifestations
de positions particularistes et égoïstes. Egoïsmes légitimes, hâtons-nous de le dire.
Mais quel sens la solidarité nationale est-elle un progrès sur la solidarité clanique
ou tribale ? Pourquoi aujourd’hui lutter contre l’esprit clanique et le tribalisme ?
Il ne suffirait pas de dire, en guise de réponse, que c’est pour favoriser la naissance
de véritables nations. Il faut établir de façon indiscutable que la constitution des
nations représente un gain, un progrès par rapport à une tradition clanique et
tribale. En effet, l’objectif-nation ne saurait être une fin en soi, une valeur absolue,
mais un instrument tout relatif au service d’une cause humaine : l’organisation de
la vie des hommes dans un cadre qui permette l’épanouissement et le mieux-être
de tous. Le clan et la tribu pouvaient aussi se vouloir de tels cadres. Mais, en vue
de l’organisation au mieux du bien-être de l’homme, le cadre du clan et de la tribu
est un instrument aujourd’hui dépassé. L’économie moderne, inconciliable avec
toutes formes d’autarcie, exige un espace bien plus vaste que celui de la tribu. La
modernité ici est celle des grands ensembles économiques. C’est pourquoi les
nations africaines elles-mêmes se révèlent des cadres fort insuffisants en regard
des nécessités du développement et que l’unité africaine apparaît alors comme un
impératif majeur du développement. En effet, l’unité africaine n’est pas une fin
en soi ; elle doit être recherchée en tant qu’instrument et comme moyen en vue du
développement rapide et efficace de toutes les régions d’Afrique. On voit par là
combien dérisoire est l’organisation clanique ou tribale et la conscience qui les
accompagne.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.52-53

Texte 29: La nation comme cadre de développement


La nation instaure un cadre relationnelle beaucoup plus grand que la tribu ou le
clan. Elle et le cadre idoine pour le développement de l’individu par la sollicitation
plus grande de ses facultés mentales, sollicitation due à la complexification des
rapports interhumains.
Nous pensons que la vie simple c’est-à-dire, la vie à faible densité de
relations inter-personnelles, la vie se déployant dans un univers fermé sur lui-
même, culturellement et économiquement parlant, n’est pas une vie qui puisse
favoriser le plein épanouissement de l’homme. L’univers fermé des structures
sociales traditionnelles, leur exiguïté, la multiplication des égoïsmes qui leur sont
inhérentes suffisent à établir, si besoin en était, que la nation figure un indéniable
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 171
progrès sur la tribu et le clan et favorise un épanouissement supérieur de l’homme.
Dans le cadre de la nation en effet, la densité de la vie se voit augmentée ; à une
simplicité de nature succède, pour l’homme, une complexité de culture et la
complexité de culture n’est pas une entrave mais un enrichissement. La
complexité des problèmes quotidiens amène l’individu à mettre à contribution
toutes ses facultés aussi bien intellectuelles que physiques ; dans le cadre national,
il renonce à certains de ses égoïsmes primaires (ethniques, claniques, tribaux),
encore que d’autres puissent se substituer à eux : égoïsmes de classe par exemple.
Au-dessus de ceux-ci, on trouve encore des égoïsmes nationaux et toutes les
formes de nationalismes. Mais il ne demeure pas moins vrai que l’intégration des
structures sociales, politiques et économiques, traditionnelles dans des structures
plus vastes, parce qu’elle tend à la simplification des égoïsmes de base est un
facteur de modernisation.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.53.

Texte 30 : L’homme référentiel au développement


C’est l’homme et l’homme seul qui doit guider ou motiver toute action de
développement. Tout développement qui ne prend pas en compte l’homme l’homme
est un pseudo-développement voué à l’échec. La modernité est un processus indéfini
et relatif à la temporalité.
Que devons-nous donc entendre par l’expression « l’homme moderne » ?
Nous entendrons certainement par-là l’homme du temps présent par opposition à
l’homme des siècles passés. Mais cette distinction serait sans grande utilité si nous
ne devions lui associer l’idée d’une amélioration, ou plus exactement, d’un mieux-
être de l’homme concerné. L’homme moderne n’est donc pas une fin, un terminus,
mais un passage vers une nouvelle modernité, sans d’ailleurs que l’ordre
chronologique coïncide nécessairement avec un ordre de valeur. La modernité
d’hier devenu tradition aujourd’hui peut être plus proche de l’humain que la
modernité d’aujourd’hui. C’est dire une fois de plus que ce n’est pas la modernité
mais l’humain comme valeur qui devrait servir de référence dans la bataille du
développement.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.55.

172
6-BIEN-ETRE ET BONHEUR

Texte 31 : Le véritable vivre homme


L’existence humaine ne devrait pas se réduire à la satisfaction des besoins primaires
(biologiques) mais à l’auto-accomplissement de soi. L’existence médiocre ne saurait
satisfaire l’homme car elle ne permet pas l’éclosion de la liberté, elle consiste
simplement en à la sécurité-conservation ; c’est la sécurité-accomplissement qui est la voie de
l’excellence et de la pleine humanité.
La recherche du bien-être ne répond donc pas directement au besoin
fondamental de sécurité mais à un autre besoin qui prend appui sur celui de la
sécurité pour se satisfaire : l’accomplissement total de soi. Il y a en effet une
différence entre exister banalement, en dessous de ses potentialités et exister
pleinement d’avantage, en se réalisant, en « se faisant » chaque jour d’avantage
que le jour précédent. Dans l’existence banale et médiocre on se contente du seul
fait de vivre biologiquement parlant, tandis qu’avec la considération du bien-être
apparaît quelque chose comme une insuffisance du seul fait de vivre. Vivre, tout
court, ne satisfait pas l’homme. Et cette insatisfaction est créatrice car c’est grâce
à elle que sa liberté trouve l’occasion de se manifester non seulement en imaginant
une seconde manière de vivre non biologique, mais encore et surtout en
entreprenant de réaliser effectivement cette seconde manière. Si donc nous
distinguons entre le vivre biologique et le vivre humain, nous sommes amenés à
distinguer également entre deux formes de sécurité : la sécurité-conservation de
la vie et la sécurité-accomplissement et conservation de l’humain. Dans la
première forme, il s’agit exclusivement de conserver et sauvegarder un acquis : la
vie, « le souffle », si on veut ; tandis que dans la seconde forme, il s’agit de
conquérir d’abord l’humanité, le vivre-homme, pour ne s’inquiéter de sa
conservation que par la suite.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.68.

Texte 32 : Le véritable avoir


L’avoir bien vient modifier l’être par l’illusion de satisfaction qu’il procure, il s’agit d’un
avoir quantitatif qui est un pseudo-avoir. Le véritable avoir dont l’Afrique a besoin pour
son émergence est l’avoir qualitatif ou le bien avoir.
L’on n’est bien que lorsqu’on a bien et qu’on se fait tel qu’on ait
suffisamment. Avoir suffisamment ou avoir bien n’est pas bien avoir. Avoir bien

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 173


c’est avoir beaucoup, en quantité plus que suffisante. Bien avoir comme bien être
ne désignent qu’une manière et non une quantité d’être ou d’avoir. Cependant
l’avoir détermine l’être, la quantité modifie la qualité. Et rien d’étonnant à ce que
le bien-être soit d’abord conçu comme essentiellement matériel. Est bien celui qui
a réponse facile aux problèmes quotidiens de l’existence. Nous disons bien qu’il
a réponse facile à tout ; il ne s’agit pas de réponses verbales mais plus exactement
d’objets, de choses, de « biens » ayant pour fonction de combler les manques,
d’assouvir les besoins divers, de supprimer, momentanément, le désir. On ne
peut avoir ces objets-réponses que si on les acquiert, si on les conquiert, bref, si
on les fait ou les fabrique. Dans la bataille du développement à laquelle l’Afrique
Noire est attelée, l’objectif le plus apparent est l’amélioration du sort matériel des
hommes. Il est question pour ceux-ci d’avoir des habitations saines, des
baignoires, des téléphones, des automobiles etc… la liste des objets-réponses à
acquérir est longue. La recherche du bien se présente donc comme une recherche
d’une aisance qui seule permettrait à l’homme d’oublier le harcèlement des
impératifs de la sécurité élémentaire pour se consacrer à lui-même.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.69.

Texte 33 : La finalité de l’existence humaine


La fin dernière de l’existence est l’auto-accomplissement par la création d’’œuvres qui
sont autant de preuves de liberté. L’existence jouissive d’objets-réponses n’est qu’une
existence médiocre. Le mal être de l’homme y en découle. L’homme ne trouve son plein
épanouissement qu’à travers l’actualisation de son existence, son bien-se faire.
La fin dernière de l’homme n’est pas de se conserver en vie jour après jour
même si cela devrait se faire dans la médiocrité. Une existence médiocre n’est pas
une existence qui vaille la peine d’être vécue. La fin dernière de l’homme est
d’actualiser son humanité, de s’accomplir totalement en créant des œuvres qui se
proposent en additions au monde. C’est pourquoi la sécurité-conservation de vie
n’est qu’un tremplin pour la sécurité accomplissement de soi. La véritable
inquiétude de l’homme, celle qui se cache derrière l’inquiétude du pain quotidien,
c’est la compréhension du sens de l’histoire. Si donc, en définitive, le bien-être
n’est que tel parce qu’il prend appui sur une sécurité-accomplissement-de-soi-
humain. C’est ce que nous voulions laisser entendre plus haut lorsque nous
disions que le bien-être ne s’identifie pas avec la jouissance pure et simple des
objets-réponses que fournit la technique à nos besoins et désirs. Le bien-être-
jouissance a vite fait de transformer l’homme en esclave de l’objet. En vérité le
174
véritable bien-être humain devrait être un bien-se faire. Dans le bien-être, il y a
un statisme sclérosant de l’homme enfermé dans le cadre de la répétition jouissive.
Or l’objet de jouissance peut être lui-même tarissable. Par contre, dans le bien-se
faire il y a un dynamisme créateur qui pousse l’homme à se hisser
perpétuellement au-dessus de ses jouissances successives et à s’approfondir sans
discontinuer.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.71-72.

Texte 34 : Les méfaits du pseudo-développement


Le développement conçu comme accumulation de l’avoir a pour conséquence une
diminution de l’être c’est-à-dire une déshumanisation de l’homme. La subordination
de la qualité à la quantité ne peut être que dévastatrice pour l’homme.
Il faut être attentif à ceci que le développement conçu comme une
accumulation pure et simple de l’avoir est un mauvais développement. La
production devenant l’objectif principal, tout lui est subordonné, y compris
l’homme lui-même. Les auto-critiques que l’Occident développé a faites à cet
égard soulignent un fait qui mérite l’attention des pays en voie de développement :
le règne de la technique est le règne de la déshumanisation de l’homme et de son
aliénation sous toutes les formes. L’époque industrielle et capitaliste entraîne des
conséquences psychologiques et morales inéluctables, écrit Nicolas Berdiaeff.
Non seulement elle crée le prolétariat et l’a placé dans une situation pénible et
humiliante, mais elle a aussi porté un coup à l’homme en général. La mécanisation
et la rationalisation abaissent la qualité. La technique aboutit au règne de la
quantité. On constate l’aliénation de la nature humaine, ce que Marx appelait
« Verdinglichung » : l’homme est considéré comme une chose.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.73-74.

Texte 35 : L’art comme liberté


La religion de par sa nature peut donner que des solutions illusoires aux problèmes
humains, elle est l’expression de l’assujettissement de l’homme à une
transcendance. L’art par contre apporte un contrepoids à la dictature de la
technique. Il est de fait plus apte à libérer l’homme de l’écrasement de la routine technicienne
Certains croient que le salut vient de la religion parce que la religion
orienterait vers une certaine spiritualité et vers une certaine profondeur. A notre
avis (…) la spiritualité religieuse est imparfaite parce que passive. Si la vie
moderne a tendance à faire de nous des êtres superficiels, tournés vers
l’extériorité, il ne faut pas non plus que l’intériorité et la spiritualité qui devraient
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 175
nous rétablir à l’endroit consistent en une paisible contemplation de soi. Il n’y a
de spiritualité et de profondeur véritables que créatrices et actives. C’est pourquoi
nous voyons principalement dans l’art le contrepoids à la technique. Un ouvrier
musicien, un ingénieur sculpteur ou un peintre vivant dans une civilisation
technicienne ne seraient pas des hommes totalement aliénés. Ils conservent la
possibilité de s’accomplir humainement en réalisant des œuvres de leur liberté.
Sauver l’homme de l’écrasement de la puissance technique c’est
fondamentalement sauver sa liberté. Et il faut comprendre celle-ci de façon
dynamique et non de façon statique. C’est pourquoi nous croyons fermement que
le développement de la sensibilité-esthétique ferait davantage de bien que toutes
les pratiques religieuses.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.76.

Texte 36 : Le pseudo-bonheur et ses méfaits


La conception du bonheur comme un paradis de jouissance est chimérique, c’est un
pseudo-bonheur qui relève du fantasme. Le bonheur implique la conscience du
bonheur, c’est une conquête permanente de l’homme sur les obstacles de son
existence.
Mais à vrai dire, quel bonheur serait celui qui installerait l’homme dans une
monotone éternité de jouissance ? Peu nous importe, pour le moment de savoir
quel type de jouissance vient avec le bonheur. L’idée sur laquelle nous voulons
insister est celle de permanence et de stabilité. Il nous vient à l’esprit un
rapprochement fort éclairant : il en irait de l’idée de bonheur comme celle de
paradis. Dans l’imagerie chrétienne, le paradis figure dans un état d’éternelle
félicité. Et ce qui nous paraît dénoncer le bonheur ainsi conçu et le paradis ainsi
conçu comme pseudo-bonheur et pseudo-paradis c’est l’élément important
d’inconscience que tous deux comportent. Tous les automobilistes savent
d’expérience que rouler sur une belle route longue et rectiligne finit par endormir
le conducteur. Ce qui endort c’est la monotonie du parcours, c’est la route sans
virage, c’est la stabilité et le confort. Une route sinueuse par contre ne laisse pas
au conducteur le loisir de somnoler ; il est constamment tenu en éveil par les
difficultés du parcours. Il n’y a effectivement de conscience que dans et par le
changement, la transition, l’obstacle. Or un bonheur stable, permanent serait tel
qu’on n’en aurait plus conscience à la longue, le souvenir l’état antérieur lui-
même devenant de plus en plus flou. La monotonie est mortelle pour l’homme
même lorsqu’elle est monotonie d’une vie paradisiaque.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.79.

176
Texte 37 : Le véritable bonheur
L’humanité d’Adam et Eve est problématique dans la mesure où ils étaient
dépourvus de conscience. Par ce fait, ils n’ont pu être heureux car le bonheur
implique la conscience de l’état. Ainsi, le jardin d’Eden chrétien, le Nirvana
hindous et toutes les idées de paradis conçues comme éternité de jouissance ne
sont que des chimères qui plongent l’individu dans l’illusion.
Le mythe biblique du paradis d’Eden permet de mieux comprendre ce qui
précède. Adam et Eve sont présentés, avant la chute comme des êtres heureux ou
« bon heureux » vivant en paradis ; mais qu’en savaient-ils eux-mêmes ?
Absolument rien, puisqu’il a fallu qu’ils transgressent le commandement divin,
en mangeant du fruit de la science pour prendre conscience d’eux-mêmes ; en
d’autres termes, l’homme n’a accédé à la conscience et à la science qu’en rompant
avec la monotonie d’une pseudo-félicité inhumaine. On nous aurait dit pourtant
qu’ils étaient heureux dans la situation précédant le péché. Etrange bonheur que
celui qui s’ignore ! Adam et Eve n’ont pu connaître aucun bonheur. On peut même
se demander s’ils étaient des humains comme nous. Si oui, ils furent des êtres
forts misérables avant la chute car, pour l’homme véritable, il n’y a pas de misère
plus grande que l’inconscience et l’ignorance absolue. Il y aurait une curieuse
ironie de la part de l’homme d’après la chute à vouloir retourner dans cette espèce
de Nirvâna qu’on vécut ses ancêtres bibliques. Le bonheur paradisiaque, s’il
existait ne serait en effet pas différent du Nirvâna des hindous. L’illusion des
chrétiens consiste à présenter le paradis comme différent du néant. Le bonheur
humain est inséparable de la conscience explicite du bonheur ; comment un
bonheur inconnu, un bonheur vécu, mais ignoré pourrait-il encore être un bonheur
? Le bonheur est la conscience vécue et effective, mais il est aussi conscience
pour soi que l’on prend de l’accord de soi-même avec l’ordre du monde.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.79-80.

Texte 38 : La finalité du développement


L’homme doit évacuer l’idée de bonheur de ses préoccupations car elle est
thanatogène. On devrait lui substituer l’idée de bien-être. La bataille du
développement est en fait une bataille pour le bien-être, c’est une bataille qui
intègre à la fois les intérêts individuels et collectifs au contraire de la bataille
pour le bonheur qui est essentiellement égocentrique.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 177


Nous disons que si on pouvait réellement accéder à un tel état on mourrait
simplement ; le seul sentiment de l’existence sans aucune préoccupation du passé,
du présent ni de l’avenir, la suppression de toute succession et de tout mouvement
sont les signes auxquels on reconnaît la cessation de la vie. Le bonheur est une
aspiration paradoxale de l’homme. Nous pensons qu’il ne sert plus à rien de s’en
préoccuper. L’homme d’action n’a plus que faire du bonheur. La bataille du
développement n’est ni ne saurait être une bataille pour le bonheur de l’homme
car ce serait alors une bataille pour la mort. Ce qui est recherché par les
populations sous-développées c’est le bien être au sens où nous l’avons présenté
dans ce chapitre, c’est-à-dire un accomplissement de soi humain simplement
adossé sur la libération de l’homme vis-à-vis d’un certain nombre de contraintes
matérielle et vitales qui pèsent sur lui. C’est pourquoi le bien-être seul peut être
une affaire collective et individuelle à la fois tandis que le bonheur se voit évacué
du champ des préoccupations de l’homme qui place le sens de sa vie dans la liberté
perpétuellement agissante.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.85.

7-LIBERTE ET LIBERATION
Texte 39 : la pseudo-liberté
La liberté ne signifie pas l’absence d’obstacles. La liberté ainsi conçue est une liberté
négative, c’est une liberté-chose, une liberté consommation. A cette conception
médiocre de la liberté qui est propre au sous-développement s’oppose une conception
excellente de la liberté propre au développement : La liberté, la véritable, est une quête
permanente, elle n’est jamais acquise définitivement. C’est une liberté- action, une
liberté production.
Mais le problème est de savoir où se situe véritablement la liberté : dans
l’action de supprimer l’entrave ou plutôt dans la jouissance de la facilité qui naît
postérieurement à l’action de réduire l’entrave, en d’autres termes, suis-je libre
quand je m’engage dans la réduction d’un ordre contraignant donné ou plutôt dans
le moment de repos qui succède à l’effort victorieux de réduction des contraintes ?
Toute liberté dont on veut jouir dans l’absence de contrainte et par conséquent de
l’effort n’est pas qualitativement différentes de celle qu’aurait métaphoriquement
un corps quelconque tombant en chute dite justement libre dans un vide
d’obstacles et de résistance ! C’est une liberté négative qui veut être,
définitivement être soi au lieu que la vraie liberté est toujours en devenir. C’est
une liberté qui aspire à se loger, à se cloisonner, pour ainsi dire, dans le vide d’une
résistance antérieurement supprimée ou simplement inexistante. Or la vraie liberté
178
ne se laisse point figer ni séquestrer. La liberté conçue comme absence d’entraves
est ce que nous appellerions une liberté-chose par opposition à la liberté-action,
une liberté-consommation par opposition à la liberté-production. L’action de
supprimer l’obstacle lui devient une condition de possibilité et non une
caractéristique essentielle. C’est la pseudo-liberté qu’on octroie et vous ne gagnez
pas.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.87-88.

Texte 40 : La liberté
La liberté se conquiert dans l’action libératrice permanente. Elle n’est pas la fin
mais un incessant recommencement.
La liberté, en effet ne saurait être un luxe, un couronnement pour
l’action de l’homme ; elle est tout entière dans l’action qu’elle aspire, engagée
dans une histoire à rebondissements multiples. La vouloir rassemblée à un
moment quelconque, c’est vouloir identiquement la fin de l’histoire mais la fin de
cette même liberté. Il n’y a pas de liberté qu’on puisse gagner définitivement, et
la vraie liberté, selon nous n’est pas à escompter à un terminus quelconque, la
vraie liberté s’éprouve et se prouve dans l’action libératrice concrète. Et l’on passe
d’une action libératrice à une autre action libératrice, indéfinitivement, sans qu’on
puisse prétendre, à aucun moment, avoir résolu toutes les aliénations ni satisfait à
toutes les aspirations qui sont toujours des incitations à créer, toutes les
insatisfactions provenant des besoins et idéaux non comblés.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.94.

Texte 41 : le rôle du philosophe


Le philosophe a pour rôle de donner la direction à suivre, c’est un homme qui fait
des lectures objectives sur l’avenir et c’est par ces lectures qu’il sauve la société des
mauvaises surprises. Son rôle est purement rationnel et personnel. Il fait des lectures
objectives de la réalité dans le sens d’améliorer la vie. Aussi tire-t-il la société vers
l’idéal vu par lui. Le philosophe est donc ce moraliste qui montre toujours ce qui doit être
contre ce qui est.
C’est en effet le rôle de la philosophie et des philosophes de veiller
constamment pour pouvoir révéler aux autres le sens du présent et la direction de
l’avenir. Le philosophe est celui qui ne dort jamais. Sa voix, constamment doit
trouer, percer le silence mortel des nuits de la servitude et de l’aliénation sous
toutes les formes. Il ne nous vient pas à l’esprit de meilleur exemple que celui de
Karl Marx, interprète des structures de la société capitaliste. Karl Marx est
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 179
l’homme qui, dans un contexte donné, s’est risqué de dire : voilà ce qui se passe,
voilà où cela peut nous mener, voilà les illusions et les mirages, et voilà la voie
de la certitude et du renouveau. Le philosophe est comme l’oracle d’une société.
Seulement ses interprétations du monde ne sont ni des visions, ni des révélations,
au sens biblique du terme. Aucun esprit mystérieux ne lui souffle ce qu’il doit
dire. Il réfléchit, c’est-à-dire analyse, compare, confronte le réel avec l’idéal qu’il
porte en lui, confronte la laideur existante avec le beau devant être, l’injustice
existante avec la justice devant être, bref, le désordre existant avec l’ordre devant
être. I a le sens de l’humain et c’est cela au fond, appuyé sur la raison universelle
qui sert de critère à toutes ses entreprises.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.99.
Texte 42 : Les étapes de la liberté
La liberté d’indifférence ne saurait faire l’économie de la liberté, de même la
négation gratuite ou l’abstention ne sont pas des preuves de liberté. La liberté exige
la connaissance qui doit déterminer et précéder l’action c’est-à-dire le choix.
On ne saurait donc refuser d’admettre que la liberté commence avec le
pouvoir de dire non, la résistance, l’opposition, la contestation. Et qu’on n’aille
pas confondre cette liberté de négation avec la pseudo liberté d’indifférence donc
est mort le célèbre âne de Buridan. Descartes a fort bien montré que la liberté
d’indifférence est « le plus bas degré de la liberté ». La négation gratuite,
l’abstention gratuite ne manifeste pas la liberté. On doit résister, s’opposer, se
détacher de la chaîne pour des raisons biens établies. Or l’indifférence suppose
l’absence de raisons de quelque nature ce soit. L’indifférence signifie ici
l’ignorance. Comment un être ignorant peut-il se dire libre précisément en raison
de son ignorance ? Le premier moment de la liberté que nous avons décrit comme
étant le moment d’une halte imposée à une marche uniformément variée n’est
donc pas un moment d’hésitation ou d’indétermination. Il est au contraire le
moment d’une détermination à voir plus clair, le moment où on décide d’une
réorientation positive. Mais ce n’est qu’un moment qui ne constitue pas à lui tout
seul la liberté. Le second est autant sinon plus important. Il est le moment de la
construction devant nécessairement faire suite à l’opposition.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.101.

Texte 43 : La nature de la liberté


La liberté est plus précisément une libération perpétuelle vis-à-vis des
déterminismes naturels en soi et en dehors de soi. Elle n’est pas une fin en soi
mais une condition de réalisation et d’auto-accomplissement.

180
La liberté n’est donc pas un programme qu’on puisse envisager de réaliser ;
mais elle permet de réaliser des programmes. Nous voulons dire que la liberté
n’est ni derrière nous, ni devant nous au titre d’une chose que nous devons
posséder, car alors elle serait une nature, ce qui est contradictoire. La liberté c’est
plus exactement la libération. Nous sommes attelés à une tâche de libération
perpétuelle. La liberté c’est l’effort permanent par lequel l’homme se hisse
perpétuellement au-dessus de la nature et de lui-même, pour, inlassablement,
témoigner en faveur de la vie au détriment des forces destructives de la mort. Ce
qui existe, c’est la vie et l’anti-vie. La liberté est au service de la vie mais elle ne
se donne pas à récupérer à une fin quelconque de l’histoire de l’histoire de cette
vie. Nous pourrions même ajouter que si par victoire définitive sur l’anti-vie,
c’est-à-dire sur la mort, elle ne deviendrait pas moins une forme de mort de
l’homme. C’est pourquoi nous pourquoi nous disons que la liberté de l’homme
est plus exactement dans les meilleurs cas, une libération perpétuelle ; on doit
renouveler sa liberté tous les jours comme on ferait pour une foi quelconque.
Seules nos œuvres quotidiennes de libération parleront de notre liberté. Ici aussi,
et comme pour la foi, nombreux sont ceux qui s’imaginent libres et qui sont en
réalité des esclaves qui s’ignorent. Un tel sort de prison et se dit libre enfin ! Mais
il n’a plus d’emploi, donc de ressources pour sa subsistance quotidienne. Il n’est
pas libre ; car cette situation de pauvreté et de dénuement réduit ses capacités
d’épanouissement, il sera l’esclave du pain quotidien aussi longtemps que son
ventre affamé ne lui laissera pas le loisir de s’occuper d’autre chose.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.107-108.

8- CULTURE ET DEVELOPPEMENT

Texte 44 : La vie moderne


La vie moderne est une annihilation constante de la vie spirituelle ou intérieure ; elle
entièrement au service de la production de l’avoir. L’extrême rationalisation des
comportements est contreproductive de liberté. Il est plus qu’urgent aujourd’hui de
préserver la vie intérieure contre la toute-puissance du matérialisme.
Trop peu d’avoir ne supprime pas la préoccupation de l’avoir, avons-nous
vu. De même l’avoir excessif ne nous laisse qu’un seul loisir : veiller sur lui
jalousement. Le style de vie moderne, tout entier au service de la production de
cet avoir créé des conditions d’existence d’où disparaît la véritable détente qui
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 181
participe de la créativité ou, si on veut, de la récréativité. Si la rationalisation des
comportements ne signifie pas seulement l’introduction du sens en eux ainsi que
la possibilité de les justifier à tout moment mais encore leur transformation en
évènements réglés de façon rigide et par là-même prévisibles, elle demanderait à
être mitigée d’une certaine manière. Nicolas Berdiaeff dans l’article déjà citée
écrit : « nous vivons à l’époque de la barbarie civilisée. La vie intérieure, la
contemplation, deviennent de plus en plus difficiles. L’homme est déchiré par le
monde. On est forcé de mener une lutte héroïque pour le droit à la vie intérieure
dont l’existence même est niée… Mais le caractère matérialiste de la civilisation,
la puissance de plus en plus menaçante de la technique exigent précisément une
spiritualité plus intense que ne l’exigeaient les siècles passés ».
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.111-112.

Texte 45 : La morale chrétienne et des religions africaines


La morale chrétienne est motivée par la perspective de la félicitée heureuse. Elle
valorise l’au-delà au détriment de l’ici-bas. Contrairement au christianisme, la
préoccupation des religions africaines est d’améliorer non seulement la réalité
quotidienne de l’homme d’une part, de lui assurer un au-delà favorable d’autre part.
L’impératif moral chrétien n’est pas un impératif catégorique mais un
impératif hypothétique : si tu veux gagner le ciel, si tu veux sauver ton âme, si tu
veux passer à travers le trou d’une aiguille, entrer au royaume de Dieu, alors aime
ton prochain, ne t’encombres pas de biens superflus, distribue-les aux pauvres,
etc…la considération du salut personnel est ce qui fonde l’action morale du
chrétien. Comment ce salut est-il envisagé dans le cadre des religions africaines ?
La préoccupation de ce salut existe ; mais pour l’Africain traditionnel, il s’agit de
se sauver d’abord ici-bas. C’est pourquoi on fait tout pour se concilier les divinités
secondaires. Il existe une considération de l’au-delà dans les religions africaines ;
c’est l’au-delà non d’un paradis mais d’une simple éternité de vie pour les
ancêtres. La préoccupation de l’ici-bas est néanmoins plus prépondérante dans les
religions africaines qu’elle ne l’est dans le christianisme, si du moins nous nous
en tenons au contenu des prières dites ici et là.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.119-120.

182
Texte 46 : La religion comme obstacle à la liberté
La religion est inapte à la libération de l’homme, elle consacre plutôt
l’assujettissement de celui-ci à un ordre irrationnel. La religion aliène l’homme
bien plus qu’elle ne le libère.
Telle est la spiritualité de la religion, la vie intérieure et la contemplation
accompagnées de l’arrière-pensée d’une vie extérieure et de l’action. Sans
contredit, en se livrant à une telle pseudo-vie intérieure, l’homme s’aliène bien
plus qu’il ne se libère. Il s’aliène d’abord en ceci qui a été déjà dit par d’autres :
il se dépossède de son pouvoir et surtout de sa responsabilité au profit d’êtres
imaginaires. A quoi sert-il de danser Dieu, de chanter, de louer, de célébrer Dieu,
comportements considérés comme hautement spirituels, si cela ne doit aboutir
qu’à nous pousser dans l’abandon de nous-même à l’irrationnel au moment précis
où il faut résoudre les problèmes de la vie quotidienne ? Car finalement, il nous
est clairement apparu que la spiritualité religieuse, bien loin de se désintéresser de
la matérialité, manifeste au contraire un attachement à peine voilé à la vie et au
monde ; la béatitude paradisiaque n’étant que la projection dans l’au-delà de
l’image améliorée de la vie terrestre. Les pratiques religieuses elles-mêmes, celles
du catholicisme tout comme celles des religions africaines, dans la mesure où elles
entraînent l’homme dans une indéfinie auto-répétition finissent par mécaniser la
spiritualité et à vider bien des gestes de leur signification. (…) Ce n’est pas avec
la religion, strictement parlant que nous pouvons espérer limiter les effets
aliénateurs de la modernisation car l’esprit de religion étouffe en l’homme les
meilleures dispositions à la créativité à cause justement de la soumission qui la
caractérise. L’esprit de religion est en effet un esprit de soumission à l’irrationnel
et à l’ordre qu’on croit émaner d’un être qui nous surpasse en toutes choses et qui
cumule toutes les perfections dont nous rêvons. Or il faut à l’homme un peu plus
d’initiative créatrice pour pouvoir envisager avec optimisme de faire échec aux
diverses formes d’aliénation que lui présente en perspective la société devant
sortir de la bataille du développement. La religion ne nous donnera pas ce
supplément nécessaire d’initiative créatrice, c’est-à-dire, au fond, de liberté.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.122-123.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 183


Texte 47 : L’art
L’art relève de l’esthétique plutôt que de l’utile. Il est le moyen le plus idoine à la
libération de l’homme car il prend en compte les réalités existentielles de celui-ci.
L’artiste est un travailleur de l’esprit tout autant que de la matière ; bien
évidemment son rapport à la matière n’est pas ordonné sur un besoin de
consommation ; l’art n’est ni ne saurait se vouloir une technique de transformation
utilitaire du monde. Est-ce à dire qu’il est cette activité gratuite et désintéressée
qu’on a parfois vantée précisément à cause de cette gratuité et de ce
désintéressement ? Nous ne le pensons pas. L’art ne se désintéresse pas du monde,
de la vie. Et ce qui en lui retient notre attention c’est le fait que tout en restant
préoccupé du monde, il n’est pas pour nous une source supplémentaire
d’aliénation ; bien au contraire, il se présente comme un moyen de libération.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.123-124.

Texte 48 : L’artiste
L’artiste produit des œuvres uniques plutôt que génériques, sa production découle de
son imagination. Avec l’art, la qualité domine sur la qualité, l’être sur l’avoir.
L’artiste est en symbiose avec sa création qui est l’expression de sa liberté.
Considérons, non pas l’art en général, mais l’artiste. C’est un producteur, si
on veut au même titre que l’ouvrier des usines, l’ingénieur ou le cultivateur. Il
produit des œuvres palpables. Mais il existe une grosse différence entre le
producteur du circuit économique et lui-même. Tandis que le premier produit
selon des canons plus ou moins déterminés, lui produit des œuvres originales.
Tandis que la production du premier se donne à répéter, sa production n’offre
aucune prise à la répétition. L’artiste cumule la conception et l’exécution séparées
ailleurs. Il y a un aspect aliénateur de l’activité économique déjà souligné par
nous et qu’on ne retrouve pas dans l’activité l’artistique. ; C’est non seulement
l’aspect par où le producteur est séparé de son produit et ne participe qu’à la phase
d’exécution de la production, mais encore l’aspect par où il se laisse fasciner par
la quantitativité de son produit qui s’érige ainsi en finalité dernière de la
production. Le produit, séparé de l’idée qui lui a donné le jour se transforme lui-
même en fin de soi. La confusion qui se produit alors est celle qui transforme des
objets-réponses aux besoins des hommes en des sortes d’idées concrètes et
contradictoires les unes des autres devenues elles-mêmes de nouveaux points de
départ, de nouvelles origines pour des besoins nouveaux et paradoxaux. Cela se

184
passe dans le domaine d’une finalité : satisfaire le besoin fondamental de sécurité
afin que sur cette sécurité garantie puisse se construire une existence réellement
libre de l’homme.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.124.

Texte 49 : La promotion de l’artiste


Le développement doit favoriser l’émergence des artistes. En effet, la modernité mal
assimilée aboutit à l’extrême rationalisation du temps : personne n’est libre vis-à-vis
du temps, on est soumis à de nombreuses contraintes. Seul l’artiste prend encore le
temps, il dispose de son temps. L’africain a des prédispositions culturelles à vivre en artiste,
préserver ces dispositions doit être garantie par le développement.
Et puis il n’est pas nécessaire d’aller aux concerts ou de parcourir les
musées pour vivre réellement une existence d’artiste. L’artiste se découvre jusque
dans sa manière de porter une coupe aux lèvres. La manière d’artiste engage tout
l’homme, toute notre personnalité et fait échec à l’atomisation aliénatrice. On est
tout entier dans chaque geste qu’on exécute. Ici, pas de stéréotypie verbale des
« comment ça va ? » « bien » « merci », ni de poignées de mains données à la
sauvette tandis qu’on a l’esprit ailleurs. Entrez dans un restaurant de pays
développé : vous serez frappé par la frénésie du mouvement. Dès que son plat est
posé devant lui, le consommateur n’a qu’un souci : engloutir le plus rapidement
possible son contenu. Il mange vite, il se brûle la langue et le palais jusqu’à ce
qu’une insensibilisation s’ensuive. D’autres consommateurs se pressent à la
porte ; il faut leur céder la place. Le temps presse, on n’a pas assez de temps ! On
ne sait plus prendre son temps. Il arrive cependant qu’on rencontre ce type
d’homme que nous cherchons : l’artiste ; le seul être qui sache encore se donner
du temps, déguster un plat, siroter vraiment une boisson ou marcher sans courir.
Il faut donc que la bataille du développement puisse garantir la pérennité de ce
type d’homme en Afrique, l’artiste et le créateur. Il s’agit bel et bien de garantir
sa pérennité car l’africain, tout le monde l’a dit, est l’être qui a constamment
associé l’art à ses activités diverses de production. Pagayer en chantant, piler le
mil en dansant et chantant sont des exemples souvent cités. La véritable
spiritualité est là, nous semble-t-il, la spiritualité telle que l’homme doit la vivre
et non telle que Dieu ou les anges sont supposés la vivre. La modernisation doit-
elle sonner le glas de cette Afrique en perpétuelle frénésie rythmique ?
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.126-127.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 185


Texte 50 : Le développement au service de l’individu
Il ne peut y avoir une hiérarchisation des cultures car il n’y a pas de cultures
supérieures. Cependant l’aptitude ou l’inaptitude d’une culture à apporter des
réponses aux problèmes de l’individu, à la science peut favoriser le développement
ou le sous-développement. Promouvoir l’épanouissement intégral de l’homme doit être le souci
majeur du développement.
Quand nous parlons de sous-développement culturel nous ne pensons pas à
la négritude comme manière particulière pour les Négro-Africains d’être-au-
monde : car ce serait vouloir dire qu’une manière d’être-au-monde peut être sous-
développée par rapport à une autre ! Ce serait un non-sens. La culture dont nous
parlons n’a rien de particulariste, elle est plutôt l’expression de l’aspect
scientifique de toute culture particulière. Et en tant que telle elle est d’abord
culture des individus pris isolément et non culture d’une société globale. C’est
l’homme individuel qui nous intéresse ici, avec son niveau de connaissances, son
pouvoir réel sur le monde, et non la société prise globalement et comme super-
individualité. C’est au service de cet homme individuel que doit se mettre le
développement. C’est à lui qu’il faut donner le maximum de savoir nécessaire
pour qu’il puisse connaître un réel épanouissement. Sa formation, son éducation
devront associer très étroitement l’étude et la connaissance des causes réelles des
choses et une sensibilisation convenable à la beauté. A la formation scientifique
de l’homme de l’Afrique moderne, il faudra par conséquent associer une solide
éducation artistique si on tient à éviter la fabrication de marionnette et de robots
humains.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.133.

9- L’EXCELLENCE
Texte 51: L’homme excellent
L’homme excellent est un homme d’action, il brille par son pragmatisme en joignant
la parole aux actes. Son action est orientée vers la promotion du groupe car il est
conscient de la communauté de destin qu’il a vis-à-vis du groupe.
L’homme véritable, l’excellence, c’est celui qui ne balance pas entre être
spectateur et être créateur, il choisit d’être acteur ; c’est celui qui ne se contente
pas de vaines paroles mais qui agit immédiatement sa parole à la fois intime et
publique, laissant le soin à d’autres d’expliquer cette parole déjà inscrite par lui

186
dans des œuvres. Voilà le type d’homme que le développement devrait
promouvoir. C’est l’homme qui comprend que le salut des autres dépend de son
propre salut et réciproquement. La compréhension de cette solidarité sur le plan
de l’humain lui prescrit une attitude et lui dicte un devoir : l’attitude qui lui est
prescrite est celle de l’homme de l’action ; qu’il agisse bien plus qu’il n’accepte
de subir ; qu’il aille au-devant des évènements, les prévienne et les prenne en
charge à défaut de les occasionner librement bien plus qu’il ne se laisse balloter
de surprise en surprise par les évènements. Le devoir qui lui est dicté est celui
d’aider à l’épanouissement de l’excellence en tout homme ; c’est le devoir de
responsabilité dont nous avons déjà parlé.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.143-144.

Texte 52 : La promotion de l’excellence


L’excellence n’est pas élitiste, tout homme y peut accéder. Le moyen le plus
idoine pour accéder à l’excellence est l’éducation. Une éducation orientée vers la
promotion de la liberté à travers la science, l’art et la philosophie.
Maintenant comment faire pour généraliser l’excellence, la rendre moins
aristocratique ? Etant donné ce que nous avons déjà indiqué comme
caractéristiques de l’homme excellent, il s’agirait pour les éducateurs de
concevoir l’éducation de la jeunesse africaine d’aujourd’hui dans le sens indiqué ;
c’est-à-dire s’attacher à développer chez les jeunes le sens critique, le sens des
responsabilités, le goût de la création esthétique et l’amour de la liberté. Ce n’est
pas le lieu ici d’indiquer un programme de formation du futur citoyen mais, pour
donner une idée de ce que nous pensons dans ce domaine, nous dirions que les
programmes d’enseignement et les programmes d’activités dans les divers
mouvements de la jeunesse devraient accorder une place de choix aux sciences, à
la philosophie comme pratique de la réflexion, à l’esthétique non pas du point de
vue de la théorie de l’art mais au point de vue de la création proprement dite ; les
activités de création artistique, nous l’avons déjà dit dans le précédent chapitre,
disposeraient les jeunes à aimer la liberté positives et à résister de toute leur
culture aux forces matérielles et mécaniques de déshumanisation. C’est dire
l’important du rôle qui incombe à l’éducation dans cette entreprise de
l’excellence.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, pp.145-146.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 187


CONCLUSION

Texte 53 : Le sous-développement
Le véritable sous-développement est celui de l’être. L’ignorance, la superstition sont
ses différentes expressions. L’être sous-développé est un être passif, il est assujetti et
subit son histoire plutôt qu’il ne l’a fait. Son référent est l’accumulation des biens
matériels. L’avoir pour lui est plus essentiel que l’être d’où sa médiocrité.
Le point de vue matériel a détourné l’attention des hommes jusqu’au point
de leur faire voir dans le sous-développement une situation qui se définirait
exclusivement par privations. Dans cette optique, tout se passait comme si le sous-
développement n’était que sous-développement de l’avoir et jamais de l’être. Ce
qui est évidemment une erreur, disons une grave illusion d’optique. Si le
développement doit être au service de l’homme c’est en tant que celui-ci est
d’abord un être distinct de son avoir. Le sous-développement de l’avoir n’est pas
essentiel ; le véritable sous-développement est celui de l’être en tant que tel. Un
être sous-développé n’est pas un être qui n’a pas ceci, qui n’a pas cela, qui manque
de ceci, qui est privé de cela…, un être sous-développé est d’abord un être en
quelque sorte atrophié. Vivre dans l’ignorance, la superstition sous toutes ses
formes, la crainte d’un univers déifié et investi de puissances terrifiantes, vivre
dans la résignation, élément passif d’une histoire qui vous fait bien plus que vous
ne la faites, qu’est-ce d’autre sinon se montré atrophié dans son être ? il ne s’agit
pas pour nous de contester l’importance de l’avoir dans l’entreprise
d’épanouissement personnel de tout être, mais simplement d’inviter à effectuer
un déplacement d’accent, un renversement des positions : ce n’est pas l’être qui
doit être subordonné à l’avoir mais exactement le contraire.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.150.

Texte 54 : La médiocrité
La médiocrité n’est pas le propre des pays dit sous-développés mais également il
existe aussi dans les pays développés. Elle célèbre l’avoir, le bonheur et la facilité
qui, loin d’épanouir l’homme l’entraine vers sa fin.
C’est ainsi qu’il existe de nombreux médiocres qui s’ignorent non
seulement dans nos pays officiellement sous-développés mais aussi et en
proportions importantes dans les pays officiellement développés. Les pseudo-
valeurs de la médiocrité sont l’avoir, le bonheur, la facilité. Nous avons tenté de

188
montrer en quel sens il était anti-humain ou non-humain de rechercher à travers
le développement et précisément au terme du développement, l’accès dans une
espèce de régime de la facilité et d’un bonheur définitif qui soit félicité ou
béatitude. Le bonheur imaginé comme la situation dans laquelle l’homme serait
définitivement dispensé de tout effort, où tout tournerait en rond dans la lassitude
et la monotonie finalement inconscientes de la consommation coupée de la
nécessité de produire est simplement l’image d’une mort certaine de l’homme. Le
bonheur ainsi conçu figurerait la fin de l’homme.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.151.

Texte 55 : La liberté
La liberté est ambivalente dans la mesure où elle peut être une pseudo valeur de la
médiocrité ou une valeur de l’excellence. Dans son aspect médiocre, elle est une fin, un
état statique qu’on accède au terme d’un cheminement. Dans son aspect excellent, elle
est une libération permanente.
La liberté ! Une autre valeur que nous avons longuement examinée tout au
long de cet essai. Elle nous est également apparue tantôt comme une pseudo-
valeur du médiocre, tantôt comme une véritable valeur de l’homme excellent.
Valeur du médiocre la liberté l’est en effet quand on l’envisage comme pouvant
être acquise une fois pour toutes à un point de convergence où toutes les pseudo-
valeurs se donneraient rendez-vous : (bonheur, béatitude, justice, jouissance
perpétuelle, etc…). Mais lorsqu’elle est plutôt envisagée comme une libération
perpétuelle, la liberté redevient une vraie valeur de l’excellence ; elle est alors tout
à la fois moyen et fin de la réalisation de l’homme. L’homme est apte à la liberté,
il n’est jamais définitivement libre, il se libère indéfinitivement. On ne peut donc
pas attendre du développement qu’il organise pour l’homme le règne de la liberté,
car finalement le développement dans son ensemble se ramène au processus
indéfini de libération lui-même.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988, p.152.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 189


CINQUIEME
PARTIE
ANCIENS SUJETS
D’EXAMENS CORRIGES

190
SESSION 2009
SUJET I : Peut-on accéder au pouvoir par la violence ?

Reformulation du sujet
Entendu que la violence est par essence immorale, faut-il encore s’en servir pour
accéder au pouvoir ?
Problème : La légitimité du pouvoir acquis par la violence ou le meilleur moyen
d’accéder au pouvoir.
Problématique : Quelle est la meilleure manière d’accéder au pouvoir? Un
pouvoir acquis par la violence n’est-il pas illégitime et essentiellement instable?

Thèse 1 : L’efficacité de la violence dans l’accession au pouvoir.


- Le besoin de renverser un régime qui veut s’éterniser au pouvoir par tous
les moyens. (Le cas de certains Etats africains)
- Le besoin de se venger d’une dictature qui s’est installée au pouvoir par
la violence.
- La volonté d’exprimer sa force en s’imposant à un peuple indiscipliné
pour le réduire à l’obéissance. Machiavel « Il est beaucoup plus sûr de se
faire craindre que d’être aimé »
Thèse 2 : Le danger d’accéder au pouvoir par la violence.

- Pertes humaines et matérielles qui appauvrissent les Etats.


- L’instabilité d’un pouvoir acquis par la violence. Rousseau « Le plus fort
n’est jamais assez fort pour être toujours le maître.. »
- La condamnation morale d’un pouvoir acquis par la violence. Luther King
« la violence est aussi inefficace qu’immorale ».

Thèse 3 : Des meilleurs moyens d’accéder au pouvoir


- Tout pouvoir qui se veut légitime et durable doit reposer sur la volonté
populaire. Contrat social, J.J Rousseau
- Même si on a des raisons valables pour accéder au pouvoir par la violence,
la morale interdit toutefois d’y recourir. Il faut toujours respecter la loi en
vigueur.
- La démocratie et les élections comme meilleures formes d’accès au
pouvoir.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 191


SUJET II : « La sauvagerie est l’indépendance à l’égard de toutes les
lois ». Que pensez-vous de cette affirmation d’Emmanuel Kant ?

Reformulation : La barbarie est la non-conformité aux normes.


Problème : L’inadéquation de la violence (sauvagerie) par rapport aux normes
(lois)
Problématique : La violence s’oppose-t-elle à toujours aux lois ? Peut-il avoir
une adéquation entre la violence et les lois ? Dans quelle mesure la violence
peut-elle être utilisée ?

Thèse 1 : La violence comme l’indépendance à l’égard des lois


- L’irrationalité de la violence (il n’y a aucune réflexion dans la sauvagerie)
- L’immoralité de la sauvagerie qui ne tient pas compte des lois morales
que nous impose la conscience
- L’illégalité de la violence dans la mesure où elle est parfois injuste et ne
se situe pas dans un cadre légal
Transition : Certes la sauvagerie apparait comme une forme d’affirmation de la
liberté de l’homme à l’égard des normes mais ne peut-on pas exister des
conditions d’une violence légales ?

Thèse 2 : L’adéquation d’une violence (sauvagerie) avec les normes.


- L’existence d’une violence légale (cas des appareils répressifs de l’Etat)
- L’existence d’une violence légitime. La conscience morale peut valider
dans certains cas la violence (cas de la légitime défense)
Transition : la violence ne s’oppose pas toujours à l’ordre établie. Ne convient-
il pas cependant d’examiner dans quelles conditions il faut l’utiliser ?

Thèse 3 : La violence au service de la raison


Montrer que la violence peut-être salutaire dans le cadre de l’éducation et du
processus de socialisation de l’homme.

Conclusion : Rappel du problème, bilan de la réflexion, réponse à la question


(en s’inspirant de la synthèse)

Sujet III : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de son


étude ordonnée

Pour celui qui ne se préoccupe pas de l’éternité et s’en tient au devenir historique
comme unique théâtre de l’action humaine, la liberté ne saurait résider dans
l’enchainement à quelque Dieu, Etre ou grand Tout. La liberté réside d’abord dans
la possibilité de se détacher en tant que chaînon, de la chaîne totale pour, en
second lieu, revenir, après avoir contemplé la chaîne totale (au sens platonicien
192
du terme, c’est-à-dire après avoir accédé au vrai) effectuer un nouvel
arrangement de la chaîne conforme au sens qu’on veut lui donner. La liberté
comporte deux aspects fondamentaux devant nécessairement être associés dans
l’histoire de la pensée ; ce sont, premièrement cette possibilité de détachement, la
suspension du jugement comme dorait Descartes, la négation comme dirait Hegel
ou Sartre ; deuxièmement, l’activité de transformation du réel, l’information du
réel c’est-à-dire l’insertion de la forme ou de l’idée dans le réel et qui est
proprement créatrice.

E. NJOH MOUELLE, De la médiocrité à l’excellence, clé, p.112

A- Introduction
Thème : La liberté.
Problème : Nature et caractéristique de la liberté.
Thèse : La liberté consiste à l’affirmation de son indépendance vis-à-vis de
l’Absolu ou du tout mais encore elle est action c’est-à-dire la transformation du
réel.
Problématique : N’existe-t-il pas d’autres conception de la liberté,
l’indépendance vis-à-vis du tout ne comporte-t-elle pas des risques ? Cette
conception de liberté n’est-elle pas purement matérialiste ?

B-Développement
Explication Analytique
Le texte comporte deux articulations
1- La négation de l’idée de liberté comme dépendance à Dieu ou au groupe
- L’enchainement à Dieu par la religion s’oppose à la liberté
- La liberté comme possibilité de choisir et comme affranchissement
2- Les caractéristiques fondamentales de la liberté
-La liberté comme doute et remise en question (Hegel, Descartes)
- la liberté comme activité créatrice

Réfutation
La thèse d’Ebenezer est reflète en quelque sorte son matérialisme en effet, une
telle conception de la liberté exige au préalable qu’on ne se préoccupe pas de
l’Eternité hors l’homme croit à une existence après la mort.
De plus la croyance à Dieu n’est pas toujours contre la liberté. Rousseau nous
montre en effet que l’homme peut délibérément s’octroyer lui-même des lois et
y obéir.

Réinterprétation :
Les dangers de la religiosité et l’activité créatrice comme affirmation de la
liberté.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 193


SESSION 2010

Sujet I : La violence peut-elle avoir raison ?


I- ANALYSE ET COMPREHENSION DU SUJET

La violence est l’usage de la force en vue d’amener autrui à agir contre son gré.
Elle est une contrainte exercée sur la volonté d’un individu ou d’un groupe. Ainsi
définie, elle apparaît comme la négation de tout ce qui est humain : la liberté, la
moralité, la rationalité et le respect dû à l’autre. A priori, la violence est donc
inhumaine, immorale et irrationnelle.

Or dans l’histoire, des peuples ont dû recourir à la violence pour conquérir leur
liberté, leur indépendance. Et, certains philosophes ont légitimé son usage en lui
conférant un rôle déterminant dans la marche de l’humanité.

II- PROBLEME PHILOSOPHIQUE

Dans ce contexte on est amené à s’interroger sur la légitimité de la violence.

III- PROBLEMATIQUE

Il se pose dès lors la question de savoir quel crédit faut-il accorder à ces thèses
qui font l’apologie de la violence ? Autrement dit, y a-t- il des violences
légitimes ?

IV- PLAN POSSIBLE

THESE 1 : La légitimation de la violence

1- L’omniprésence naturelle de la violence

Elle est inhérente à la nature, à la vie. L’être vivant pour survivre et s’affirmer
dans un contexte essentiellement violent est obligé d’en faire usage.

Cf. : -Héraclite : « le combat est père de tout, roi de tout » in Fragments.

-Nietzsche, la violence s’exprime par la volonté de puissance. Dans, Par-delà le


bien et le mal.

2- Le rôle de la violence dans l’histoire

194
D’après Karl Marx, la violence a un rôle déterminant dans l’histoire, elle en est
le moteur. L’histoire est essentiellement lutte des classes : chaque époque est
dominée par une classe qui maintient les autres sous son joug et qui ne peut être
renversée que par une lutte violente.

Cf. : - Karl Marx, Manifeste du parti communiste.

Illustrations : les peuples sous dominations coloniales n’ont pu reconquérir leur


liberté qu’en engageant une lutte violente contre le colonisateur. (La lutte anti
apartheid, la révolution française de 1789, la lutte pour les indépendances des
peuples en Afrique).

3- Machiavel et la légitimation de la violence politique

Compte tenu de la méchanceté naturelle des hommes, le prince doit recourir à la


violence pour gouverner efficacement et pour préserver l’ordre où la stabilité
sociale.

Machiavel : « en politique seul compte l’efficacité. La violence y est un mal


nécessaire, en raison de la méchanceté des hommes. Elle contribue à l’ordre,
la justice et la paix ». Le prince.

THESE 2 : Critique de la violence

1- La civilisation (l’humanité) comme dépassement de l’instinct ou du


naturel.

Les sociétés humaines ne peuvent se contenter de reproduire l’ordre naturel des


choses. Il faut donc éviter de légitimer la violence du seul fait qu’elle est inhérente
à la vie : ce serait aplatir le culturel sur le naturel, l’humain sur l’instinctuel. Les
thèses d’Héraclite, de Freud et de Nietzsche nous ramènent à une forme
d’animalité en nous condamnant dans l’état de nature. La vocation de l’homme
est de transcender la nature, de faire éclore l’humanité qui sommeille en lui. Cf. :
Alain et la critique des déterminismes naturels.

2- La stérilité de la violence

Les effets de la violence sont en réalité ponctuels et éphémères et ne sauraient


constituer les solutions efficaces et durables.

En usant de la violence politique, le prince n’est pas sûr de consolider son pouvoir
car à tout moment, le rapport de force peut basculer en faveur du camp adverse.
Cf. : Rousseau « le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le
maître… »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 195


3- La bonté naturelle de l’homme

Les thèses qui affirment la méchanceté naturelle de l’homme pour légitimer


l’usage de la violence sont unilatérales et discutables. L’homme naît dans un état
de virginité et de pureté (Rousseau) et il se corrompt par la suite. Rousseau
fondera par conséquent l’Etat non sur la violence mais sur « la volonté générale »
(expression de la raison).

SYNTHESE

1- La raison comme moyen et fin dernière de l’activité humaine

Les sociétés humaines doivent être gouvernées selon les principes et les exigences
de la raison (le dialogue, le débat, la communication…). Cicéron « la raison et
la parole unissent les hommes entre eux ».

2- La violence ne doit intervenir dès lors que lorsque les moyens humains et
légaux ont été épuisés.

3- La société doit donc promouvoir comme le dit Pascal la raison et la justice et


faire en sorte que « ce qui est juste soit fort et ce qui est fort soit juste ».

Sujet II : Que vous suggère ces propos de E. Njoh Mouelle : « le


spectacle le plus affligeant en situation de sous-développement c’est
celui de l’irrationalité dans le comportement de l’homme » ?

I- ANALYSE ET COMPREHENSION DU SUJET

Dans la perspective de Njoh Mouelle, le comportement irrationnel est la


manifestation la plus grave du sous-développement. Il a pour caractéristiques
l’ignorance, la superstition, l’analphabétisme. Ici, l’homme sous-développé ne
fait pas appel à sa raison / intelligence dans ses rapports avec la nature et ses
semblables.

Le sous-développement pour Njoh Mouelle est avant tout un phénomène


mental ou spirituel. Cette thèse accorde le primat à l’aspect spirituel.

Or, le spirituel ou le mental repose nécessairement sur un support matériel


qui est le corps.

196
II- PROBLEME PHILOSOPHIQUE

Le problème qui se pose est celui de la discussion du privilège que Njoh


Mouelle accorde à la dimension mentale dans l’analyse du sous-développement.

III- PROBLEMATIQUE :

Quelle est la place de la dimension matérielle dans la définition du sous-


développement ? Peut-on développer ses facultés mentales et intellectuelles dans
un contexte d’extrême pauvreté ou de dénuement matériel ?

IV- PLAN POSSIBLE

THESE 1 : Le sous-développement est d’abord mental

1- Caractéristique du sous-développement mental

Le sous-développement mental est défini par Njoh Mouelle comme défaut de


rationalité dans le comportement. Ce déficit se reconnaît à certains éléments : la
superstition, l’ignorance, l’analphabétisme, la mentalité magico-religieuse, le
charlatanisme.

2- Exemples de comportements irrationnels

- Sur la maladie : au lieu d’en rechercher les causes scientifiques, on se réfugie


dans les explications irrationnelles ou mystiques en l’imputant au mauvais sort ou
aux intentions maléfiques du voisin.

- L’élève qui prépare un examen ne va pas s’attacher à réviser ses leçons, mais va
plutôt consulter un charlatan pour obtenir le stylo miraculeux.

- Les villageois qui s’opposent à la construction d’une route sous prétexte de


protéger le baobab sacré qui se trouve sur l’itinéraire.

3- Le primat de l’esprit sur le matériel

Le développement de l’homme est d’abord spirituel compte tenu du privilège que


revêt l’esprit par rapport au corps. Le point de vue de Njoh Mouelle rejoint celui
du courant spiritualiste / idéaliste que développent les auteurs tels que Socrate,
Platon, Descartes qui considèrent que le corps est la remorque de l’esprit.
Cf Socrate : « il ne faut pas donner le pas au corps et aux richesses matérielles
et s’en occuper avec tant d’ardeur que le perfectionnement de l’âme ».

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 197


THESE 2: Importance de la matière dans la définition du sous-
développement

1- L’esprit est nécessairement logé dans un corps et son épanouissement dépend


de celui-ci : « primum vivere, deinde philosophare » (vivre d’abord, philosopher
après) nous enseigne les latins ; « Ventre affamé n’a point d’oreilles » dit la
sagesse populaire.

2- Le privilège que Njoh Mouelle accorde au sous-développement mental ne se


justifie pas. Sa vision est unilatérale et réductrice.

3-Les philosophes matérialistes estiment d’ailleurs au contraire que le corps est


l’élément déterminant du bien-être de l’homme. Mon état spirituel dépend de mon
état physique et matériel. Cf. Karl Marx.

SYNTHESE :

1- Le mérite de Njoh Mouelle est d’insister sur la dimension morale et spirituelle


du sous-développement qui est généralement occultée par les économistes ou les
matérialistes.

2- Toutefois, l’aspect matériel n’est pas moins important en tant que l’homme est
corps et esprit.

3- Finalement, le sous-développement est un phénomène global qui touche aussi


bien l’âme que le corps. La hiérarchisation ne se justifie donc pas. Le sous-
développement du corps est tout aussi affligeant que celui de l’esprit.

Sujet III : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir


de son étude ordonnée
L’ethnophilosophie telle qu’elle s’est pratiquée jusqu’ici n’a trop souvent
été qu’une voie de facilité, faisant l’économie à la fois des techniques et des
méthodes d’enquête ethnologiques et de la discussion philosophique des idées et
des valeurs mises en avant et tout ceci, au nom de l’africanité. En plus des
multiples impasses théoriques auxquelles elle aboutit, l’ethnophilosophie s’est
avérée d’une grande stérilité. En se soustrayant aux exigences scientifiques
d’enquête, elle se met hors d’état d’enrichir notre connaissance de nous-mêmes
par l’apport de documents neufs solidement établi ; et en esquivant le débat
philosophique sur les idées et les valeurs, il ne lui reste pour les imposer que la
voie d’un dogmatisme desséchant dans lequel la négritude entendue comme retour
à nos sources culturelles dans la fierté retrouvée, est pervertie au point de n’être
198
plus qu’un avatar du ‘magister dixit’. En raison d’un tel dogmatisme, les idées
avancées par l’ethnophilosophie sont figées dès leur mise à jour et ne sont
susceptibles d’aucun développement.

M. Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle,


Clé, pp. 32-33.

I- COMPREHENSION DU TEXTE

Situation : Ce texte de Towa est un extrait de son œuvre Essai sur la


problématique philosophique dans l’Afrique actuelle. Dans cet extrait, le
projet de Towa s'inscrit dans le cadre général de l’œuvre qui est celui d'un
réexamen de la problématique philosophique en Afrique. Dans cette perspective,
le texte expose sa critique de la méthode ethnophilosophique qui, selon l’auteur a
des travers dans ses procédés qui méritent d’être dénoncés.

Thème : L’ethnophilosophie.

Problème : La valeur de la méthode ethnophilosophique.

Thèse : La méthode ethnophilosophique est une voie de facilité qui ignore les
exigences scientifiques de l’ethnologie et de la philosophie.

Problématique: La méthode ethnophilosophique est-elle essentiellement


vicieuse ? N’a-t-elle eu que des conséquences néfastes dans l’effort de définition
d’une philosophie africaine ? Marcien Towa n’est-il pas excessif dans sa
caractérisation de l’ethnophilosophie ?

II- EXPLICATION ANALYTIQUE

Le texte se divise en trois mouvements :

1- Ignorance des techniques et des méthodes de l’ethnologie par


l’ethnophilosophie

- Technique d’enquête
- Interview et études statistiques
- Collecte des données
- Inconsistance des documents établis

2- Ignorance de la méthode philosophique :

- Absence de discussion et de débat contradictoire


PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 199
- Narcissisme conduisant à l’adoption des idées et des valeurs au nom de
l’africanité
- Dogmatisme desséchant dans la méthode

3- Les conséquences du vice méthodologique de l’ethnophilosophie

- Les impasses théoriques


- Stérilité
- Dogmatisme des idées qui sont figées dès leur mise à jour.

III- REFUTATION DU TEXTE

1- Le projet ethnophilosophique est louable en dépit de quelques vices


méthodologiques parce qu’il permet la disqualification de l’ethnocentrisme
occidental qui a fait de la philosophie le monopole de l’occident.

2- Chaque peuple peut exploiter le patrimoine culturel (mythes, contes, proverbes)


dont il dispose pour penser son existence à l’exemple des présocratiques qui ont
été reconnus comme des philosophes. Et pourquoi pas l’ethnophilosophie
s’interroge Tshiamalenga Ntumba : « Si l’histoire de la philosophie appelle
philosophie les fragments des présocratiques, les pensées d’un Marc Aurèle ou
les maximes de La Rochefoucauld et autres textes semblables, alors bien des
textes de tradition orale africaine peuvent être philosophiques ». in Qu’est-ce que
la philosophie africaine ? Faculté de théologie de Kinshasa, 1977, p. 36.

3- L’ethnophilosophie est un moment de l’histoire de la philosophie africaine


qu’on ne peut évacuer parce qu’elle a contribué à la décolonisation mentale et
intellectuelle de la l’Afrique et à la promotion de sa culture.

IV- REINTERPRETATION

L’intérêt philosophique du texte repose sur trois idées fondamentales au moins :

1- Le souci de clarté scientifique et méthodologique (invitation à la rigueur dans


l’analyse et le cheminement)

2- Le souci d’éviter la confusion des genres en distinguant le non philosophique


du philosophique. Ceci permet d’éviter la dilatation abusive du concept de
philosophie.

3- Une critique pertinente de l’ethnophilosophie dont le principal défaut est


d’avoir évacué le débat philosophique dans le traitement du patrimoine culturel
africain. Marcien Towa ne nie pas la valeur des contes et des proverbes comme
matériaux philosophiques, mais reproche à l’ethnophilosophie de les avoir érigés en
dogmes.
200
SESSION 2011

Sujet I : L’union de la force et du droit peut-elle constituer un


danger pour la démocratie ?
I- ANALYSE ET COMPREHENSION DU SUJET

1- Analyse : La démocratie, en tant qu’expression de la volonté générale repose


sur le droit et exclut en principe l’usage de la force comme moyen de gestion de
la cité. Dès lors, l’union de la force et du droit peut apparaître comme un danger
pour la démocratie. Mais comme il se trouve dans toute société des groupes
partisans animés de tendances anarchistes, l’Etat peut se sentir obligé de recourir
à la force pour faire respecter ou appliquer la loi.

2- Problème philosophique : Le sujet pose ainsi le problème de la légitimité, de


l’influence ou de l’impact de la force dans un contexte démocratique qui consacre
plutôt l’Etat de droit. Le problème est alors de savoir si l’usage de la force ne peut
pas provoquer le glissement de l’Etat démocratique vers la dictature.

3- Problématique : L’usage de la force n’est-il pas une menace pour la


démocratie qui a pour fondement le droit, expression de la volonté générale ?
Sinon, quelles sont les conditions d’un usage légitime de la force dans l’exercice
du pouvoir en démocratie ?

II- ESQUISSE DE PLAN DETAILLE

THESE 1 : Le droit comme fondement de la démocratie : la primauté de la


loi sur force

a) La démocratie repose sur l’idée de souveraineté du peuple qui s’exprime par la


« volonté générale » et non par la force. L’idée de contrat social et de pacte
républicain. Cf. J.-J. Rousseau.

b) La démocratie comme régime des libertés et des droits des citoyens : d’opinion,
d’expression, de conscience, d’association, droit de vote, etc. cf. Alexis de
Tocqueville, De la démocratie en Amérique.

c) la volonté générale comme émanation de la raison et non des passions violentes.


L’idée d’intérêt général chez Rousseau repose sur la raison. « Délibérer dans le
silence des passions ».

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 201


Conclusion partielle : La démocratie privilégie le droit sur la force : elle a pour
finalité l’instauration de l’Etat de droit et des libertés. Cf. Spinoza.

THESE 2 : Les limites du droit sans la force en démocratie

a) Les tendances agressives et anarchistes de la nature humaine. Cf. Machiavel,


Le Prince, Thomas Hobbes, Le Léviathan.

b) Le conflit des intérêts de classes peut fragiliser l’Etat de droit et justifier le


recours à la force. Cf. Karl Marx, Le manifeste du parti communiste.

c) l’impuissance du droit face à la violence internationale. La logique impérialiste


peut légitimer le recours à la force. Kwame Nkrumah, Samir Amin.

Conclusion partielle : La justice sans la force peut donc se révéler impuissante.


Cf. Blaise Pascal. Le droit peut donc recourir à la force pour se faire respecter.

SYNTHESE : Conditions d’un usage légitime de la force en démocratie

a) Le droit comme fondement et finalité de la démocratie : l’idée de l’Etat de droit.

b) Néanmoins, la force joue le rôle d’accompagnement du droit : elle est un moyen


ou un recours dont l’Etat peut se servir pour faire respecter le droit.

c) Donc, l’union de la force et du droit peut rendre des services à la démocratie,


mais la primauté restant au droit. Le droit est le fondement d’un Etat
démocratique, la force ne pouvant intervenir que pour obliger les récalcitrants au
respect de la loi.

Sujet II : Que pensez-vous de cette affirmation de Poincaré : « La


science est déterministe ; elle l’est a priori, elle postule le
déterminisme parce que sans lui elle ne pourrait être » ?
ANALYSE ET COMPREHENSION

- Analyse : Le déterminisme pose que tout ce qui se produit dans la nature est
déterminé par des causes que la science a pour tâche de découvrir et d’expliquer
par les lois. Autrement dit, tout effet a une cause, de sorte que, connaissant la
cause on peut prévoir l’effet. Le déterminisme est la condition sine qua non de la
science car il exclut l’idée du hasard ou d’arbitraire.

202
Or, dans la nature, il existe des phénomènes que la science ne parvient
pas à expliquer, et à prévoir. De même, un bon nombre de phénomènes sociaux
échappent au déterminisme scientifique.

- Problème philosophique : Dès lors le problème est celui de la validité, du rôle


du déterminisme scientifique. Le candidat est convié ici à examiner la pertinence
et les limites du déterminisme scientifique.

- Problématique : N’y a-t-il pas dans la nature et dans la vie des hommes des
phénomènes qui échappent au déterminisme, c’est-à-dire à l’explication et à la
prévisibilité ?

PLAN POSSIBLE

THESE I : Le déterminisme comme fondement de science

1- Principe de causalité comme base de l’activité scientifique. Tout phénomène


naturel a une cause. Connaître c’est déterminer les lois (causes) qui gouvernent
les phénomènes naturels ; aller au-delà des apparences, découvrir la cause cachée
de ce qui apparaît.

2- L’idée d’un ordre dans la nature qui garantit la régulation des phénomènes.
L’univers est gouverné par les lois mathématiques. Galilée : « l’univers est écrit
en langage mathématique ».

3- Cela garantit la précision et l’anticipation : les mêmes causes dans les mêmes
conditions produisent les mêmes effets. Auguste Comte : « Science d’où action,
action d’où prévoyance ».

4- La recherche des causes et des liens entre les phénomènes est le principe
directeur de la connaissance, de l’activité scientifique. Claude Bernard : « Le
déterminisme est le principe absolu de la science ».

THESE II : Les limites du déterminisme scientifique

1- La complexité de la nature et l’enchevêtrement des phénomènes sont tels qu’il


est impossible de tout expliquer et tout prévoir.

2- La nature comporte une part d’énigme, de mystère et de surprises qui échappent


à toute prévision déterministe.

3- La crise du déterminisme dans la physique quantique avec les relations


d’incertitude de Heisenberg. L’impossibilité de tout prévoir au départ rend
nécessaire le calcul probabiliste qui propose un certain nombre d’hypothèses.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 203


4- La liberté de l’homme disqualifie le caractère absolu du déterminisme dans les
sciences humaines (déterminisme relatif dans les sciences humaines). Cf. J.P.
Sartre : l’homme comme sujet, c’est-à-dire liberté et indétermination. L’homme
est ondoyant et divers.

SYNTHESE : Légitimité du déterminisme scientifique

1- La science comme refus du hasard, de l’arbitraire et de la superstition dans la


connaissance du monde : le déterminisme procède du souci de fonder en raison la
connaissance du réel.

2- Même si ce souci rencontre des obstacles du fait de la complexité de la nature


et de la persistance des mystères et des zones d’ombres, le déterminisme garde
toute sa pertinence.

Sujet III :
Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de son étude
ordonnée

C’est en effet le rôle la philosophie et des philosophes de veiller


constamment pour pouvoir révéler aux autres le sens du présent et la direction de
l’avenir. Le philosophe est celui qui ne dort jamais. Sa voix, constamment, doit
trouer, percer le silence mortel des nuits de la servitude et de l’aliénation sous
toutes ses formes. Il ne nous vient pas l’esprit de meilleur exemple que celui de
Karl Marx, interprète des structures de la société capitaliste. Karl Marx est
l’homme qui, dans un contexte donné, s’est risqué à dire : voilà ce qui se passe,
voilà où cela peut mener, voilà les illusions et les mirages, et voilà la voix de la
certitude et du renouveau. Le philosophe est comme l’oracle d’une société.
Seulement, ses interprétations du monde ne sont ni des visions, ni des révélations
au sens biblique du terme. Aucun être mystérieux ne lui souffle ce qu’il doit dire.
Il réfléchit, c’est-à-dire analyse, compare, confronte le réel avec l’idéal qu’il porte
en lui, confronte la laideur existante avec le beau devant être, l’injustice existante
avec la justice devant être, bref, le désordre existant avec l’ordre devant être. Il a
le sens de l’humain et c’est cela au fond, appuyé sur la raison universelle, qui sert
de critère à toutes ses entreprises.

Njoh-Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Clé, 1998, p. 115.

I- COMPREHENSION DU TEXTE

Situation : Tiré de son ouvrage intitulé De la médiocrité à l’excellence, ce texte


de Njoh-Mouelle expose sa définition du rôle de la philosophie.

204
Thème : La philosophie.

Problème : A quoi sert la philosophie (le rôle de la philosophie).

Thèse : Elle a pour rôle de révéler le sens du présent et d’indiquer la direction de


l’avenir ; c’est-à-dire qu’elle dénonce les maux qui minent la société et propose
des solutions en vue du mieux être de l’homme.

Problématique : La conception d’Ebénezer NJoh-Mouelle ne réduit-elle pas la


philosophie à sa seule mission socio-politique en occultant ses autres dimensions
que sont l’esthétique, la métaphysique, et l’épistémologie ? La finalité première
et essentielle de la philosophie selon Aristote n’est-elle pas « le savoir pour le
savoir » et non pour une fin étrangère ? N’y a-t-il pas un risque de glissement de
la philosophie vers l’idéologie lorsqu’elle sert des fins socio-politiques ?

II- EXPLICATION ANALYTIQUE

Le texte se divise en trois mouvements :

1er mouvement : L’objet de la philosophie

- Dévoiler le sens du présent


- Dénoncer les maux qui minent la société
- Indiquer la direction de l’avenir (les solutions)

2e mouvement : Illustration par Karl Marx

- Analyse des structures capitalistes


- Dénonciation des illusions et des mirages
- Proposition des solutions

3e mouvement : La méthode de la philosophie

- La voie réflexive c’est-à-dire analytique, critique


- Rejet de la révélation et de la superstition
- Confrontation de l’idéal et du réel dans le souci d’humaniser l’existence

III- REFUTATION DU TEXTE

1- Le caractère réductionniste de la conception d’Ebénezer NJoh-Mouelle qui


confine la philosophie à sa seule mission socio-politique (au détriment de
l’esthétique, la métaphysique, l’épistémologie...).

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 205


2- La finalité première et essentielle de la philosophie selon Aristote est « le
savoir pour le savoir » et non pour une fin étrangère (cf. Aristote, La
métaphysique).

3- Risque de glissement de la philosophie vers l’idéologie (cf. Hountondji, la


critique de la tendance politique de la philosophie).

IV- REINTERPRETATION

1- Nécessité d’allier le savoir à la pratique en vue du bien commun : le savoir doit


s’incarner dans la réalité pour la transformer.

2- Conception pragmatique de la philosophie dans l’optique de Nkrumah. La


rupture avec la spéculation brumeuse et l’idéalisme creux : « Théorie sans
pratique est vide, pratique sans théorie est aveugle ».

3- Le philosophe comme pédagogue de la cité. Il doit éduquer et éclairer les


consciences (cf. Platon, La République).

SESSION 2011 (Bac Blanc)

SUJET I : L’inconscient justifie-t-il l’irresponsabilité de l’homme ?

Reformulation : L’inconscient rend-t-il l’homme irresponsable /l’existence d’un


inconscient rend l’homme irresponsable
Présupposé : L’homme n’est pas responsable de ses actes (il n’est pas libre) à
cause de l’inconscient

Problème : Le rapport de l’inconscient a la liberté.


Problématique : Dans quelles mesures l’homme l’inconscient rend-t-il l’homme
irresponsable, l’homme ne peut-il pas assumer ses actions malgré l’inconscient ?
En quoi consiste la responsabilité de l’homme ?

THESE 1 : L’incompatibilité de la conscience avec la responsabilité


L’inconscient détournerait les hommes de leurs responsabilités, les empêchant
ainsi de se conduire suivant l’éclairage de la raison ; il serait une occasion offerte
aux hommes de donner de mauvaises raisons pour justifier les abominations qu’ils
auraient dû éviter.

206
 Les actes inconscients sont contre la volonté de l’homme
 La responsabilité est une conséquence de la liberté, l’inconscient est
incompatible à la liberté
Citations :
Freud : « le moi n’est pas maître dans sa propre maison » ; « la conscience règne
mais ne gouverne pas »
Roger Ebacher : « L’inconscient agit en nous sans nous et malgré nous »
Transition : Bien que l’homme soit également un être mû par l’inconscient, ne
peut-il pas être libre ?

THESE 2 : L’homme est responsable malgré l’inconscient


L’homme pose des actes conscients la plupart du temps, il est un être doté d’une
volonté et d’une raison par lesquels il fait des choix.
 L’homme n’est pas toujours dirigé par l’inconscient mais aussi par la
conscience
 L’homme a la capacité de choisir, il a un libre arbitre
Citations :
Alain : « l’inconscient est de la mauvaise foi »
Transition : l’homme apparaît comme effectivement un être responsable malgré
l’inconscient, en quoi consiste véritablement la responsabilité de l’homme

SYNTHESE 3 : L’homme est responsable dans la mesure où il connaît et


assume ses actes
Montrer qu’il est impossible de lutter contre l’inconscient qui fait partie de la
nature humaine. L’inconscient existe mais de saurait réduire à néant la
responsabilité de l’homme. L’homme en effet peut nier le donné naturel.

SUJET II : Quelles réflexions vous suggère cette assertion de Nietzsche : « Les


véritables philosophes ont pour mission de commander et de légiférer »

Reformulation : Le philosophe a pour rôle de diriger et d’orienter les hommes


Présupposé : Nietzsche soutient que le philosophe est la personne indiquée pour
gouverner, il reprend en quelque sorte la thèse platonicienne du philosophe roi.
Problème : Le rôle de la philosophie
Problématique : le philosophe a-t-il pour rôle de gouverner ? N’est-il pas inapte
à la politique ? Quel est le rôle véritable de la philosophie ?

THESE 1 : Le philosophe a pour rôle de diriger


Il s’agit de montrer ici que le philosophe a des qualités qui lui permettent de
gouverner mieux que les autres hommes
 La philosophie est une réflexion sur les problèmes actuels des hommes

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 207


 La philosophie est à l’origine de la science politique c’est-à-dire l’art de
gouverner
Citations :
Platon : « l’idéal serait que les philosophes soient rois ou que les rois soient
philosophes »
Descartes : « c’est proprement avoir les yeux fermés sans jamais tacher de les
ouvrir que de vivre sans philosopher »
Transition : Le philosophe apparait certes comme la personne indiquée pour
gouverner, cependant n’existe-t-il pas des limites à la gouvernance d’un
philosophe ?

THESE 2 : le philosophe n’est pas apte à gouverner.


Il s’agit de montrer ici que la philosophie ne prédispose pas forcément à la
politique ou que la philosophie à d’autres missions.
 Le philosophe est un idéaliste et n’est pas pragmatique
 Le réalisme politique est souvent incompatible avec la philosophie

Citation :
Clemenceau : « Si j’avais une province française à punir, je la ferais gouverner
par un philosophe »
Transition : Le philosophe n’est pas toujours apte à diriger, mais que serait
véritablement son rôle dans la société ?

SYNTHESE : La philosophie comme penser sur la totalité du réel


Montrer que la réflexion philosophique a plusieurs missions qui vont au-delà de
la politique. Ainsi la politique ou l’art de gouverner fait partie du rôle du
philosophe car cela fait partie des problèmes du monde.

SUJET III : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de son


étude ordonnée.

Que devons-nous donc entendre par l’expression « l’homme moderne » ?


Nous entendrons certainement par-là l’homme du temps présent par opposition à
l’homme des siècles passés. Mais cette distinction serait sans grande utilité si nous
ne devions lui associer l’idée d’une amélioration, ou plus exactement, d’un mieux-
être de l’homme concerné. L’homme moderne n’est donc pas une fin, un terminus,
mais un passage vers une nouvelle modernité, sans d’ailleurs que l’ordre
chronologique coïncide nécessairement avec un ordre de valeur. La modernité
d’hier devenu tradition aujourd’hui peut être plus proche de l’humain que la
modernité d’aujourd’hui. C’est dire une fois de plus que ce n’est pas la modernité

208
mais l’humain comme valeur qui devrait servir de référence dans la bataille du
développement.
E. NJOH MOUELLE, De la médiocrité à l’excellence, clé, p.78

A- Introduction
Thème : Le développement
Problème : Le critère du développement
Thèse : C’est l’homme et non la modernité qui est la référence de tout
développement. La véritable modernité doit tenir compte du bien-être de
l’homme.
Problématique : la modernité est-elle toujours négative ?

B- Développement
Explication analytique
Le texte est divisé en deux articulations
a- La véritable modernité
- La véritable modernité n’est pas d’ordre chronologique mais qualitatif c’est-à-
dire l’idée de modernité doit signifier amélioration
- La modernité n’est pas une fin en soi mais un moyen de développement. La
modernité est un passage d’une étape à une autre.
b- L’homme comme valeur de tout développement
- La modernité d’aujourd’hui s’éloigne de l’homme
- L’homme comme référentiel à tout développement
Transition : Certes la modernité ne correspond pas toujours
Réfutation
L’auteur semble avoir une conception de la modernité dans la mesure où il la
présente dans son unique aspect négatif. Il existe des aspects positifs de la
modernité en termes d’amélioration qualitative de la vie des hommes. De plus il
n’est pas exclu que la modernité apporte un confort matériel non négligeable à
l’homme.

Réinterprétation
L’auteur nous éclaire sur une conception de la modernité en nous rappelant que la
modernité n’est pas synonyme d’amélioration. Ce qui est ancien peut être meilleur
que ce qui est nouveau ou actuel. L’homme doit être le référentiel de tout
développement et non simplement l’aspect matériel.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 209


La valeur de ce texte est épistémologique dans la mesure où il nous éclaire sur le
véritable développement dans une Afrique en proie au sous-développement.

SESSION 2012

Sujet I : L’obligation morale peut-elle se réduire l’obligation


sociale ?
I- COMPREHENSION DU SUJET :

Le sujet porte sur le fondement de la morale ou précisément sur l’origine


du devoir. Il invite les candidats à réfléchir sur ce qui doit déterminer et orienter
la pratique morale. L’enjeu du sujet est donc d’amener les candidats à se
prononcer sur le conflit ou le débat entre la morale objective relevant du droit
positif et la morale subjective liée à l’intériorité de l’individu. Ainsi analysé, le
sujet peut être problématisé ainsi qu’il suit :

Problématique : La pratique de la morale doit-elle se limiter à la seule


observance des lois, us et coutumes établis comme normes de comportement par
la société ? Cette problématique générale peut donner lieu à diverses formulations
au regard desquelles les pistes suivantes sont suggérées :

a- suffit-il d’obéir aux lois pour être vertueux, juste ou bon ?

b- Est-il légitime de penser qu’en dehors de l’obligation sociale, il n’y a point de


salut moral pour l’individu ?

c- Le bien, le juste, le bon, peuvent-ils se résumer ou se ramener aux seules


obligations que la société nous impose ?

d- Aussi vrai qu’il existe des lois injustes, n’y a-t-il pas lieu de penser que la vraie
morale est conditionnée par le dépassement des intérêts sociaux ?

II- PLAN POSSIBLE

THESE 1 : A priori et par convention, la légitimité est fondée par la société et en


conséquence, l’obligation morale se limiterait à la seule obligation sociale.

210
Argument 1 : Nombre de théoriciens soutiennent le primat de la moralité
objective ou sociale sur la conscience morale individuelle, l’individu étant le
relatif par rapport auquel la société est l’absolu.

Auteur : Auguste Compte : l’individu n’a pas de droits, il n’a que de devoirs.
Cf. Cours de philosophie positive.

Argument 2 : L’homme par nature est un être immoral et ne doit sa moralité qu’à
la société.

Auteurs : Thomas Hobbes dans Le Léviathan. Il montre la méchanceté


naturelle de l’homme toujours enclin à l’égoïsme et à la violence. Il ne devient
moral que par l’action de la société. Emile Durkheim dans Sociologie et
philosophie soutient que les comportements individuels s’expliquent à partir de
la société qui est un tout. C’est la conscience collective ou sociale qui façonne les
consciences individuelles : « Quand la conscience parle, c’est la société qui
parle en nous ». Cf. Freud avec le Surmoi qui n’est que le reflet ou
l’intériorisation des interdits sociaux et culturels.

Argument 3 : Il est bien difficile de juger à partir de la conscience morale qui est
subjective voire relative : d’où l’imposition des normes sociales. On ne discute
pas les lois sociales. Cf. la sagesse latine : « Dura lex, sed lex » (la loi est dure
mais c’est la loi).

Spinoza pense que les lois sont bonnes pas parce que nous les trouvons bonnes,
mais parce que la société les juge bonnes. D’où la nécessité de les respecter.

THESE 2 : Les lois sociales à elles seules ne sauraient exprimer l’idéal moral :
elles n’en représentent qu’un aspect.

Argument 1 : La conscience morale serait antérieure et supérieure aux normes


sociales.

Auteurs : Jean-Jacques Rousseau qui assimile la conscience morale à un


« instinct divin, juge infaillible du bien et du mal ». Emmanuel Kant soutient
l’autonomie de la volonté et le fondement rationnel du devoir. La moralité ne
relève donc pas de l’hétéronomie sociale : « nous trouvons dans la raison l’idée
du devoir ».

Argument 2 : Les lois sociales sont parfois injustes et immorales, elles incitent à
la révolte au nom d’une moralité supérieure ou transcendante.

Illustration : le cas d’Antigone dans la mythologie grecque ; le procès injuste de


Socrate…

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 211


Auteurs : Cicéron : « la plus grande sentence rendue peut être en même
temps la plus grande offense ». Rousseau : « toute justice vient de Dieu (…)
mais si nous savions la recevoir de si haut, nous n’aurions besoin ni de
tribunaux, ni de lois… ». Karl Marx, les lois sociales sont des simulacres de
normes visant à pérenniser la domination des bourgeois sur les prolétaires : « tout
droit est un droit bourgeois ». D’où l’exigence de révolution sociale.

SYNTHESE

L’homme est doublement déterminé au plan moral. Il est d’une part soumis aux
obligations sociales, d’autre part, il est capable de s’auto déterminé en vertu de la
conscience morale ou de la raison.

Auteur : Bergson. Il évoque cette double détermination morale de l’homme dans


Les deux sources de la morale et de la religion.

CONCLUSION

- Rappel du problème

- Solution : L’obligation sociale est une contrainte morale collective qui participe
à l’essor du vivre ensemble et à la promotion des valeurs. Néanmoins, elle ne
subsume pas toute la moralité et mérite d’être fécondée par la conscience morale.

Sujet II : Quelles réflexions vous suggère cette assertion de Karl


Marx : « L’abolition de la religion en tant que bonheur illusoire du
peuple, c’est l’exigence de son bonheur véritable. » ?
I- COMPREHENSION DU SUJET :

1- Explication de la thèse

Cette affirmation de Karl Marx est une critique de la religion, notamment de


l’illusion religieuse qui promet aux hommes un pseudo bonheur dans l’au-delà,
les détournant ainsi de leurs responsabilités terrestres. En ce sens, la religion
apparaît à Marx comme une forme d’inertie sociale qui paralyse l’action humaine.
La véritable félicité du peuple passe donc par la négation du bonheur illusoire que
promet la religion.

212
2- Problème du sujet

Le sujet pose le problème de la valeur sociale de la religion. Ce problème peut


donner lieu à diverses formulations. Par exemple :

 Rapport entre religion et bonheur


 L’impact de la religion dans la promotion / progrès / développement de
l’homme.

3- Problématique

 Est-il légitime de penser avec Karl Marx que le véritable bonheur du peuple
passe nécessairement par l’exclusion / le rejet de la religion comme
promesse d’une félicité fictive et mensongère ?
 Les hommes ne peuvent-ils mener une vie heureuse que s’ils se détournent
de la religion ?
 Faut-il conclure que la religion ne revêt aucune importance pour l’homme ?
Pourrait-on imaginer une société paisible sans cette adhésion de l’homme
à la divinité ?

II- PLAN POSSIBLE

THESE 1 : La religion comme promesse d’un bonheur illusoire.

Argument 1 : Explication de la thèse de Karl Marx. L’auteur prend appui sur


l’idée selon laquelle tous les peuples sont soumis à une exploitation de la part de
l’élite sociale ou bourgeoise à laquelle font partie les représentants de la religion.
Dès lors, la religion, en prônant la soumission à l’ordre établi, au nom d’un
bonheur attendu dans l’au-delà, est une source d’endormissement des consciences
et une force d’inertie qui paralyse l’action et empêche la libération du peuple. Par
conséquent, le bonheur des hommes passe par l’abolition de cet idéal illusoire et
mensonger de la religion présentée par Marx comme « l’opium du peuple », dans
La philosophie du droit de Hegel.

Argument 2 : Les partenaires topiques de Karl Marx :

- Nietzsche. Les valeurs religieuses sont une dépréciation de la vie et le signe


d’une volonté décadente ou « malade ». Elles poussent les hommes à haïr la vie
et à renoncer au bonheur terrestre au nom d’une vie meilleure hypothétique dans
l’au-delà. Or « ce qui importe, écrit Nietzsche, ce n’est pas la vie éternelle,
c’est l’éternelle vitalité ». Cf. Crépuscule des idoles.

- Freud. Pour lui, les idées religieuses maintiennent l’homme dans un état
infantile et entravent son développement comme être rationnel. Elles sont des

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 213


illusions nées de notre propre esprit. Car l’idée de Dieu est le prolongement du
père protecteur et autoritaire. Ainsi, le développement de l’homme passe
nécessairement par la dénonciation de ces illusions religieuses.

- Ebénézer Njoh-Mouelle. Pour lui, la religion est un obstacle au développement


à travers ce qu’il appelle « son esprit de soumission et l’abandonnement à
l’irrationnel ». Et il ajoute : « l’esprit de religion étouffe en l’homme les
meilleures dispositions à la créativité à cause de la soumission qui le
caractérise ».

THESE 2 : La légitimité de la religion et sa valeur humaine.

Argument 1 : Distinguer superstition et religion.

L’une est relationnelle et engendre des peurs puériles et des pratiques aliénantes,
alors que l’autre peut être fondée en raison, d’après Descartes et Spinoza. Et pour
Kant, « la religion sans conscience morale est un culte superstitieux ».

Argument 2 : La religion répond aux questions relatives au besoin d’intellection


et de compréhension de l’homme et de l’univers. Elle résout plus d’un problème
humain :

- Elle est un antidote à l’angoisse existentielle en tant qu’elle fait de la mort un


phénomène naturel, un passage dans l’au-delà (Platon ; Socrate).

- C’est par elle que se réalise ce que Ferdinand Alquier a appelé « le désir de
l’éternité ».

Argument 3 : La fonction morale et sociale de la religion.

Epurée de ses dérives, la religion contribue comme la raison à l’amélioration


qualitative de l’homme. Elle est donc à bien des égards vecteur d’humanisme.

Auteurs : Henri Bergson : la religion a une fonction de conservation du lien


social, garant de l’ordre et de la stabilité. Max Weber. L’éthique protestante et
l’esprit du capitalisme.

SYNTHESE

Même si la foi religieuse n’est pas en soi nécessairement négative, il y a


lieu de dénoncer une certaine forme de croyance et même de pratique religieuse.
D’où le nécessaire couplage de la foi et de la raison. Auteurs : Augustin in
Confessions, Rousseau in La religion civile.

CONCLUSION :
214
 Rappel du problème
 Solution : La religion peut être aliénante lorsque la foi qu’elle génère est
aveugle et non réfléchie.

Sujet III : Dégagez l’intérêt philosophique de ce texte a partir de


son étude ordonnée :
Notre tâche se précise donc ainsi : nous avons à affirmer dans le monde
actuel ; nous, séculairement assis dans la nuit de l’inanité, nous avons à nous
redresser de toute notre stature d’hommes ; nous, depuis si longtemps affairés au
service de l’autre, nous avons à nous affairés à notre propre service ; nous dont
l’autre a si longtemps disposé, nous devons rentrer dans la disposition de nous-
mêmes. Et naturellement la décision de nous assumer, de nous affirmer, d’être
fiers (nous jusqu’ici si humiliés et si humbles) est en même temps décision
d’assumer notre passé, de le valoriser et d’en être fiers.] Seulement, une telle
décision, pour autant qu’elle veut introduire une révolution radicale dans notre
condition actuelle, exige pour aboutir une rupture, elle aussi radicale avec notre
passé, puisque cette condition provient rigoureusement et incontestablement de
ce passé. La volonté d’être soi conduit immédiatement à la fière reprise en charge
du passé, parce que l’essence du soi n’est que le résultat du passé du soi; mais le
passé lucidement et froidement interrogé et scruté atteste que l’assujettissement
présent trouve son explication dans la provenance de l’essence du soi, c’est-à-
dire, dans le passé du soi, et nulle part ailleurs. Révolutionner la condition
présente du soi signifie donc en même temps révolutionner l’essence en soi, ce
que le soi a en propre, ce qu’il a d’original et d’unique, entrer dans un rapport
négatif avec le soi.

Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique


actuelle, Cle, 1981, p. 41.

I- COMPREHENSION DU TEXTE

1- Situation : Ce texte de Towa est un extrait de son œuvre Essai sur la


problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, qui expose sa
compréhension du chemin que doit emprunter l’Afrique pour son affirmation,
pour son émergence dans le concert des Nations. Il s’agit selon l’auteur d’une
tâche qui interpelle les africains de manière urgente et pressante en tant que
continent assujetti et aliéné.

2- Thème : La tâche, le rôle que l’Afrique doit assumer ou jouer pour son
émergence.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 215


3- Problème : Ce texte pose le problème des voies et moyens indispensables à
l’affirmation et au développement de l’Afrique.

4- Thèse : Pour Towa, la libération et l’affirmation de l’Afrique passent


nécessairement par une rupture radicale avec son passé.

5- Problématique : Faut-il penser que l’Afrique ne peut se développer qu’en se


démarquant de son passé ? Est-il du reste possible de se défaire de son essence /
identité ?

II- EXPLICATION ANALYTIQUE

Le texte se divise en deux mouvements :

1er mouvement : La situation de dépendance de l’Afrique et la nécessité de sa


libération / son affirmation.

- Paragraphe 1 : L’auteur rappelle la condition de dépendance et d’aliénation de


l’Afrique qui subsiste depuis des siècles sous diverses formes (servitude et
humiliation).

- Paragraphe 2 : D’où la nécessité de rompre avec cette servitude pour s’auto-


affirmer.

Transition : Comment y parvenir ?

2e mouvement : Le recours du passé pour le nier en tant qu’il est la cause de notre
assujettissement actuel.

- Paragraphe 1 : Le recours au passé est une attitude naturelle en situation de


crise (négritude et ethnophilosophie par exemple).

- Paragraphe 2 : Solution d’échec, car il s’agit de nier ce passé et non de le


valoriser en tant qu’il est responsable de notre servitude.

III- REFUTATION

a- Le rejet systématique du passé peut conduire à l’amalgame culturel, car l’auteur


ne distingue pas les éléments positifs des éléments négatifs de notre passé culturel.

b- Nier son identité, n’est-ce pas un génocide culturel ? N’est-ce pas substituer
une aliénation à une autre pouvant aboutir à la dépersonnalisation ou à la perte
d’identité dénoncée par Njoh-Mouelle dans De la médiocrité à l’excellence.

216
c- En invitant l’Africain à se nier pour devenir l’autre, l’auteur ne développe-t-il
pas un complexe d’occidentalisation sous fond d’afropessimisme ?

IV- REINTERPRETATION

a- Marcien Towa se démarque dans le texte du narcissisme culturel ambiant et


pose les jalons d’une auto critique culturelle et intellectuelle, base irréfutable de
tout devenir et de tout progrès du peuple africain.

b- L’intérêt du texte se dégage aussi à travers la volonté de l’auteur de sortir


l’Afrique de l’ornière de la singularité / originalité (culte de spécificité) pour
l’engager dans la voie de l’universalité, devenue aujourd’hui par ses présupposés
que sont la mondialisation et la globalisation, le passage obligatoire de tout
développement : « l’ère des destinées singulières est révolue » C. H. Kane.

c- La position de l’auteur tranche avec les approches passéistes et muséales


développées par la négritude et l’ethnophilosophie.

Au regard de ce qui précède, l’auteur aura convenablement rempli la mission


assignée aux philosophes dans la cité : disséquer le présent en vue de poser les
jalons de l’avenir.

SESSION 2013 (Bac Blanc)

SUJET I : Le doute philosophique remet-il en cause la valeur de


l’activité philosophique elle-même ?

Reformulation : La remise en question permanente décrédibilise-t-elle la


philosophie ?
Problème : La valeur de la philosophie face au doute.
Problématique : La philosophie est une réflexion vaine de par sa nature ? Ne
demeure –t-elle pas essentielle à l’existence humaine ? Quelle serait le rôle du
doute méthodique ?

THESE 1: La philosophie est une activité vaine (inutile)


Montrer que le doute permanent de la philosophie décrédibilise celle-ci

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 217


- La philosophie n’établit pas des certitudes mais beaucoup plus des
incertitudes
- Il existe de nombreuses contradictions entre les philosophes (doctrines et
écoles philosophiques)
Citations :
1. Karl Marx: « Jusqu’ici, les philosophes n'ont fait qu’interpréter le monde
de diverses manières, or il s’agit de transformer. »
2. Maurice Duverger : « La philosophie doit céder la place aux nouvelles
humanités que sont la science et les techniques. »
3. Clément Rosset : « Il ne faut pas compter sur la philosophie pour trouver
des raisons de vivre »
4. Georges Clémenceau : « Si j'avais une province française à punir, je la
ferai gouverner par un philosophe. »

Transition : La philosophie semble être une activité futile et pleine de


contradiction cependant ne garde-t-elle pas une valeur ?

THESE 2 : La philosophie garde sa valeur


Montrer que l’activité philosophique est positive et bénéfique
- Le doute méthodique manifeste l’anti dogmatisme de la philosophie et
favorise son caractère euristique.
- La philosophie éclaire l’homme dans son action et son comportement, elle
rationalise ses réponses sur les questions essentielles de son existence.

Citations :
1. Karl Jaspers : « L'on ne peut pas se passer de la philosophie. La seule
question qui se pose est celle de savoir si elle est consciente ou non. »
2. Karl Jaspers : « Ne pas philosopher c’est être réduit à l'animalité. »
3. Karl Marx : « La philosophie n'est pas extérieure au monde. »
4. Karl Jaspers : « Faire la philosophie c’est être en route » ;

Transition : La philosophie est une activité essentielle pour l’homme malgré les
incertitudes auxquelles elle aboutit, il convient d’évaluer la fonction véritable du
doute en philosophie.

SYNTHESE : Le doute méthodique comme fondement même de la philosophie


La philosophie commence avec l’étonnement c’est-à-dire la remise en question
des vérités établies. C’est le doute qui favorise la découverte de la vérité
Citation :
Héraclite : « La vérité naît de de la contradiction »

218
SUJET II : Que pensez-vous de cette affirmation de Jean-Paul
Sartre : « Il n’y a pas de nature humaine puisqu’il n’y a pas de dieu
pour la concevoir » ?

Reformulation : L’homme n’a pas de nature car il n’y a pas de dieu. En d’autres
termes Sartre soutient un existentialisme athée.
Problème : L’existence d’une nature humaine
Problématique : L’homme est-il un être en devenir ou déterminé ? Qu’est-ce que
l’homme ?

THESE 1 : L’homme est un être en devenir


Montrer que l’homme est libre et se façonne lui-même (existentialisme)
- L’homme est un être inachevé. Nous avons l’antériorité de l’existence sur
l’essence. L’homme s’autodétermine par ses choix.
- L’homme se façonne par ses expériences, c’est un être changeant
Citations :
1. Montaigne : « l’homme est divers et ondoyant »
2. Sartre : « l’homme est ce qu’il se fait »
Transition : L’homme s’affirme comme un être libre mais n’est –il pas également
déterminé ?

THESE 2 : L’homme est un être achevé (fini ou déterminé)


Montrer que l’homme est soumis à de nombreuses déterminations
(essentialisme) : montrer l’antériorité de l’essence sur l’existence.
- L’homme connaît un déterminisme biologique avec les lois de l’hérédité et
l’existence d’un code génétique.
- L’homme connaît un déterminisme psychologique avec l’existence d’un
inconscient et plus précisément le ça.

Citations :
1. Monod dans Hasard et nécessité affirme l’existence du code génétique
2. Freud : « le moi n’est pas maître dans sa propre maison »

Transition : De nombreux déterminisme montre que l’homme est une réalité


achevé mais qu’est qui caractérise en dernier ressort l’homme ?

SYNTHESE : L’homme est un être qui se fait malgré les déterminismes.


Montrer que l’homme est libre mais qu’il a un ensemble de détermination qu’il
dépasse perpétuellement. Sartre est avant tout un athée et l’existence de Dieu est
pour lui un obstacle à la liberté humaine.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 219


SESSION 2016 (Bac Blanc)

SUJET I : Le doute philosophique remet-il en cause la valeur de l’activité


philosophique elle-même ?

Reformulation : La remise en question permanente décrédibilise-t-elle la


philosophie ?
Problème : La valeur de la philosophie face au doute
Problématique : La philosophie est une réflexion vaine de par sa nature ? Ne
demeure –t-elle pas essentielle à l’existence humaine ? Quelle serait le rôle du
doute méthodique ?

THESE 1: La philosophie est une activité vaine (inutile)


Montrer que le doute permanent de la philosophie décrédibilise celle-ci
- La philosophie n’établit pas des certitudes mais beaucoup plus des
incertitudes
- Il existe de nombreuses de nombreuses contradictions entre les philosophes
(doctrines et écoles philosophiques)

Citations :
1. Clément Rosset : « il ne faut pas compter sur la philosophie pour trouver
des raisons de vivre »
2. Clémenceau : « si j’avais une province française à punir, je la ferai
gouverner par un philosophe »

Transition : La philosophie semble être une activité futile et pleine de


contradiction cependant ne garde-t-elle pas une valeur ?

THESE 2 : La philosophie garde sa valeur


Montrer que l’activité philosophique est positive et bénéfique
- Le doute méthodique manifeste l’anti dogmatisme de la philosophie et
favorise son caractère euristique.
- La philosophie éclaire l’homme dans son action et son comportement, elle
rationalise ses réponses sur les questions essentielles de son existence.
Citation :
Karl Jaspers : « Faire la philosophie c’est être en route » ; « en philosophie les
questions sont plus importantes que les réponses »

220
Transition : La philosophie a une grande est une activité essentielle pour
l’homme malgré les incertitudes auxquelles elle aboutit, il convient d’évaluer la
fonction véritable du doute en philosophie.

SYNTHESE : Le doute méthodique comme fondement même de la philosophie


La philosophie commence avec l’étonnement c’est-à-dire la remise en question
des vérités établies. C’est le doute qui favorise la découverte de la vérité
Citation :
Héraclite : « La vérité naît de de la contradiction »

SUJET II : Quelles réflexion vous suggère cette affirmation de :


« Fortifier le droit, cela n’est-il pas justifier la force » ?

Reformulation : Le droit est l’expression de la force


Présupposé : Le droit se fonde sur la force, il n’est que le reflet de celle-ci.
Problème : Le fondement du droit
Problématique : Peut-on fonder le droit sur la force ? N’existe-il pas des limites
à un tel droit ?

THESE 1: Le droit se fonde sur la force


Montrer que la force peut fonder le droit
La force est contraignante et coercitive
La force est un droit naturel

Citations :
1. Otto Von Bismarck : « La force créer le droit »
2. Lafontaine : « La raison du plus fort est toujours la meilleure »
3. Karl Marx : « Le droit exprime la force en ce sens qu’il n’est que
l’expression de la classe dominante dont il traduit la volonté »
Transition : La force semble garantir n certains droit, cependant n’est-il pas
dangereux de fonder le droit sur la force ?

THESE 2 : Les limites du droit fondé sur la force


Montrer qu’il existe des dérives et des dangers de fonder le droit sur la force
Le droit de la force est éphémère et manque de stabilité
Le droit de la force est immoral et n’obéit pas à l’idéal de justice

Citations :
Rousseau : « Le plus fort n’est jamais assez fort pour le demeurer » ou « Force
ne fait pas droit (…) On est obligé de n’obéir qu’aux puissances légitimes »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 221


Transition : Bien qu’il existe des limites d’un droit fonder sur la force, peut-on
se passer de celle-ci ?

SYNTHESE : La nécessité de mettre ensemble le droit et la force


Montrer que le droit a parfois besoin d’être accompagné de force pour être
respecté
Blaise Pascal : « La justice sans la force est faible, la force sans la justice est
tyrannie »

SUJET III : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de son


étude ordonnée.
Le culte de la différence s’arrête au passé et manque d’humanité (..) La révolution
n’abolit pas et en peut abolir le passé, mais seulement la dictature du passé. Par
elle le passé est mis à notre disposition au lieu que nous soyons à la disposition
du passé. L’optique révolutionnaire nous libère de la dictature du passé en le
relativisant, en présentant tous les éléments constitutifs de notre passé comme des
produit, des résultats, des œuvres d’une praxis créatrice passée. Le fait que de tels
résultats furent obtenus dans le passé ne leur confère ni autorité ni supériorité
automatique sur ceux que nous obtenons maintenant ou pourrions obtenir dans
l’avenir par une praxis également libre, créatrice. Ce qui est réellement décisif et
fondamental, c’est notre libre appréciation, notre libre jugement d’œuvres
quelconques, passées, présentes ou simplement possibles, c’est notre capacité
d’innover, de créer, c’est en d’autres mot, notre liberté, notre humanité. Et c’est
seulement à ce niveau de profondeur que la perspective révolutionnaire nous
ramène aux ancêtres, pour autant qu’eux aussi furent créateurs.

Marcien Towa, Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique


actuelle, Clé, P.48

INTRODUCTION
Thème : La révolution
Problème : La finalité de la révolution
Thèse : La révolution a pour finalité la promotion de l’autonomie et de l’humanité
c’est-à-dire la liberté et les valeurs morales, la rupture avec le passé ne constitue
qu’une étape.
Problématique : Toute révolution ne peut-elle que se faire qu’en rupture avec le
passé ? Le passé est-il toujours un obstacle à la révolution ?

222
DEVELOPPEMENT
Explication Analytique : Le texte comporte deux articulations
a- La révolution comme libération du passé
- La dénonciation du culte de la différence qui veut pérenniser le passé
(ethnophilosophie et négritude)
-La révolution comme dépassement et non abolition du passé
b- La révolution comme promotion de la liberté et de l’humanité
- La révolution comme évaluation critique du passé
- La révolution comme promotion de la liberté à travers la création et l’innovation
Transition : Le passé est-il toujours un obstacle à la révolution ?

Réfutation :
Le passé dans l’élaboration de l’être au monde des africains selon Ebénezer Njoh
Mouelle
Le passé à travers la tradition orale (mythe, proverbe) peut servir de base à la
philosophie)
Transition : Au-delà des limites soulignées ci-dessus, le texte ne garde-t-il pas sa
valeur.

Réinterprétation :

Le texte a un intérêt didactique dans la mesure où il statut sur la valeur véritable


du passé dans la perspective révolutionnaire. De plus l’auteur nous éclaire sur la
finalité de la révolution dans une Afrique où l’usage de ce concept à trop souvent
été utilisé dans l’équivocité. La révolution doit aboutir à la libération des africains
aussi bien de leurs propres passé que de l’impérialisme occidental, cette
révolution ne doit en aucun cas occulter les valeurs humaine c’est-à-dire la
morale.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 223


SESSION 2016
SUJET I : Le progrès des connaissances est-il allé de pair avec le progrès de la
morale ?

A-Définition des concepts

Le progrès des connaissances : L’évolution des savoirs (scientifiques)


Allé de pair : Ensemble
Progrès de la morale : L’évolution des valeurs éthique
B- Reformulation : Le savoir entraine-t-il un meilleur comportement ? Ou
l’évolution des savoir implique-t-il l’évolution des valeurs morales ?
Problème : Le rapport entre les connaissances et la morale ou le progrès des
savoir de l’homme et sa moralité
Problématique : L’évolution de la connaissance humaine détermine-t-elle
l’amélioration de la conduite morale des hommes ? N’est-elle pas un obstacle à
celui-ci ?

THESE 1 : Le progrès des connaissances entraine un meilleur comportement


moral de l’homme.
Montrer que plus on sait ou connait mieux on agit et se comporte bien

Argument 1 : Le savoir améliore l’agir de l’homme, car la connaissance et


l’action sont solidaire. La pensée éclaire nos actions. Auguste Comte soutient
dans ce sens : « Science d’où prévoyance, prévoyance d’où action ». De même
Jean Perrin insiste sur la nécessaire articulation entre la science et l’action. Dans
le même sens Socrate avait déclaré plutôt que « Nul n’est méchant
volontairement »
Argument 2 : La parité entre la science et la conscience posée par Rabelais
comme socle de l’humanisme : « science sans conscience n’est que ruine de
l’âme ». Ce qui tient au fait que la croissance de la connaissance doit être en
proportion égale avec le progrès de la morale. Le savoir doit permettre de prévenir
les passions et de toujours maintenir l’homme en équilibre.

224
Argument 3 : Il y a un éveil d’une conscience positiviste et optimiste de la
science. Chez Ernest Renan, « la science seule fournit le fond de réalité
nécessaire à la vie ».

Transition : Toutefois, bien que les connaissances permettent à l’homme de bien


agir, ne peuvent-elle pas également être un obstacle à la morale ?

THESE 2 : La connaissance n’entraine pas toujours un meilleur


comportement moral
Montrez que la connaissance peut avoir un effet négatif dans le comportement
moral de l’homme.

Argument 1 : La connaissance n’est pas seulement savoir, mais aussi pouvoir ;


et comme tout pouvoir, elle peut plus nuire qu’épanouir.
Argument 2 : Il n’est pas toujours vrai que c’est en connaissant qu’on agit mieux.
Et le savoir lui-même par rapport à l’éthique peut devenir un obstacle : l’action
n’a pas toujours besoin de la médiation de la raison. Pour Hegel, « Rien de grand
ne s’est accompli dans le monde sans passion ». De même, pour Pascal, « La
vraie morale se moque de la morale » et Rousseau : « La froide raison n’a jamais
rien fait d’illustre »
Argument 3 : La science dans son degré d’élaboration le plus élevé donne parfois
l’impression d’être une atteinte à la morale. Jacques Monod assimile la science
à un « attentat aux valeurs ». Il y a une opposition entre la science et la morale,
c’est ce qui fait dire à Henri Poincaré : « Il me semble que la vérité scientifique
qui se démontre ne peut en aucun titre se rapprocher de la vérité morale qui se
sent ». De même, la science érode conscience la morale, pour Jean Rostand :
« La science a fait de nous des dieux avant que nous ne méritions d’être des
hommes ».
Transition : De ce qui précède, l’évolution des savoir n’est pas toujours un gage
d’un meilleur comportement moral, n’est-il pas souhaitable d’arrimer la
connaissance aux valeurs morale ?

SYNTHESE : La nécessité que le progrès des connaissances s’accompagne


du progrès moral.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 225


Argument 1 : Le rôle de l’éducation dans l’essor moral des sociétés. Pour
Descartes : « Les nations sont d’autant plus civilisées et polies que les hommes y
philosophent mieux »
Argument 2 : Au regard des dérives dans lesquelles excelle la technoscience
contemporaine, il serait nécessaire d’humaniser et de normer la science pour
qu’elle ne se démarque pas de sa finalité d’épanouir l’homme. Selon Louis de
Broglie : « La science étant l’accroissement de la puissance, elle est pour le bien
comme pour le mal ».

Sujet II: « La mort est un vide qui se creuse brusquement en pleine


continuation d’être ». Que pensez-vous de ces propos de Vladimir
Jankélévitch ?

A-Compréhension du sujet

L’auteur pense que la mort est essentiellement imprévisible, perturbatrice de


l’équilibre social et des rapports psycho-affectif. La mort crée une psychose
permanente dans l’existence de l’homme.

B-Reformulation : La mort est une fatalité.


C-Problème : L’impact de la mort sur l’existence de l’homme.
D- Problématique : La mort marque-t-elle toujours négative l’existence
humaine ? N’a-t-elle pas un aspect positif ?

THESE 1 : La mort a un impact négatif dans l’existence


Montrer avec Jankélévitch les aspects négatifs de la mort

Argument 1 : La mort crée un vide dans la société, elle nous sépare brusquement
des êtres qui nous sont chers.
Argument 2 : La mort est inscrite génétiquement chez l’être vivant dans la
mesure où tout organisme vivant grandit, vieillit et meurt. La mort est donc une
certitude qui intervient à tout moment de l’existence d’où son caractère à la fois
tragique et inéluctable
Argument 3 : La mort met un terme à toutes perspectives, elle est une
néantisation de l’être.
Citations :
1. Louis Vincent Thomas : « Rien n'est immortel. Tous les êtres vivants, mais
aussi les objets, les sociétés, les systèmes culturels sont promis à une
disparition inéluctable. »

226
2. Paul Valéry : « La mort est une surprise que fait l'inconcevable au
concevable. »
3. Duc De La Rochefoucauld : « Rien ne prouve davantage combien la mort
est redoutable que la peine que les philosophes se donnent pour persuadés
qu'on la doit mépriser. »
Transition : La mort est certes un évènement tragique mais n’a-t-elle pas un
impact positif dans l’existence ?

THESE 2 : La valeur positive de la mort


Il s’agit ici de soulever les limites de la pensée de Jankélévitch
Argument 1 : La mort est peut être une réalité qui donne une motivation
supplémentaire à la réalisation de soi Le risque de perdre la vie lui donne une plus
grande valeur.
Argument 2 : La mort peut apparaître comme une délivrance. Elle nous délivre
des souffrances de l’existence (maladie)
Argument 3 : la mort régule l’équilibre social. Elle équilibre le taux
d’accroissement des populations.
Citations :
1. Birago Diop : « Les morts ne sont pas morts. »
2. Charles de Secondat de Montesquieu : « Il faut pleurer les hommes à leur
naissance et non à leur mort. »
3. Epicure : « La mort n'est rien pour nous, car tout bien et tout mal réside
dans la sensation; or, la mort est la privation complète de cette dernière. »
4. Ibrahim Sow : « On n'est pas vraiment mort lorsqu'on a laissé une
descendance. »
5. Maximilien : « La mort est le commencement de l'immortalité. »

Transition : La mort a certes des aspects positifs mais ne convient-il pas de


réaffirmer la primauté de la vie face à celle-ci ?

SYNTHESE : La transcendance de la vie sur la mort


La mort est un évènement inhérent à l’existence, il faut l’accepter non comme une
condamnation mais comme une invitation à mener une existence conforme aux
valeurs morales. L’affirmation de la transcendance de la vie sur la mort exige une
rationalisation du comportement.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 227


SUJET III : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de son
étude ordonnée.

Nous avons vu que la médiocrité s’appelle routine, conformisme, snobisme,


répétitivité. Et dans la répétitivité nous avons vu le signe d’un dépérissement
indiscutable. L’acte répétitif est son essence et rien d’autre ; c’est l’acte fermé sur
lui-même, débordé par aucune marge, par aucune ouverture. Inconscient de soi il
est vie emprisonnée en elle-même et la tragédie vient de là ; car là où le choix
n’existe plus, la conscience s’annule et l’avenir fermé. Vivre par le corps et par le
dehors comme moyen, ne tarde pas à se transformer en vivre pour le corps et pour
le dehors comme fins. L’extériorité représente alors une menace permanente de
subversion qui pèse sur la conscience et l’intériorité. Les structures de l’extériorité
apparaissent bel et bien comme vice et la négation de l’intériorité et de la liberté.
L’homme médiocre, homme du milieu parce que homme d’un milieu, sous
l’aspect de l’homme superficiel est un être qui se réfugie derrière la facilité du
suivisme et de l’auto-répétition habituelle, un être par conséquent qui tourne le
dos à la liberté difficultueuse et au génie créateur de l’homme, c’est-à-dire à
l’effort par lequel on devrait se hausser perpétuellement au-dessous de soi-même.
Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence, Ed. EMC, 1988,
pp.44-45.
INTRODUCTION :
Thème : La médiocrité
Problème : Les caractéristiques (ou la nature) de la médiocrité
Thèse : La répétitivité, la routine et le conformisme caractérisent le
comportement de l’homme médiocre. Le comportement de l’homme médiocre
relève de l’instinctivité, de l’affectivité (le corps). Il relève aussi de la société (du
dehors) et annihile tout esprit d’initiative. Le médiocre sombre dans la grégarité.
Problématique : Tout conformisme est-il négatif ? La répétition ne peut-elle pas
être source d’amélioration ?
DEVELOPPEMENT
A- EXPLICATION ANALYTIQUE : Le texte comporte trois articulations
Première articulation : Njoh Mouelle démontre que la répétitivité est l’essence
même de l’existence médiocre
Deuxième articulation : il montre que l’existence médiocre est unilatéralement
orientée dans la satisfaction des besoins du corps. Elle est un hédonisme stérile

228
Troisième articulation : L’auteur établit enfin que l’homme médiocre est un
homme superficiel, adepte de la liberté facile et ennemie de ce qu’il appelle « la
liberté difficultueuse ». Il manque de génie créateur.
Transition : L’auteur ne prône-t-il pas un idéalisme radical qui ne tient pas des
réalités existentielles ?

B- REFUTATION :
Le conformisme et la répétition ne sont pas toujours négatifs. L’homme peut
volontairement adopter cette attitude dans le cadre de l’éducation, de la formation.
De plus, chaque milieu possède un ensemble de règles qu’il faut respecter.
Vivre en tenant compte des plaisirs du corps n’est pas un délit, l’auteur semble
pathologiser le corps. Les progrès de l’humanité sont certes spirituels mais
beaucoup plus matériels.
Transition : En dépit des remarques soulignées ci-dessus, le texte ne garde-t-il
pas toute sa pertinence ?

C- REINTERPRETATION :

Le mérite de l’auteur n’est pas de nous prescrire l’excellence, mais surtout de nous
mettre en garde contre les dérives et les pesanteurs d’une existence grégaire
orienté vers des besoins exclusivement charnels. Il nous montre la futilité d’une
existence soumise aux dictats de l’avoir. Le texte reste d’actualité au regard de la
dépravation des mœurs que connais notre société, il nous interpelle à prôner les
valeurs spirituelle. Enfin, l’auteur nous invite à une auto-amélioration.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 229


SIXIEME
PARTIE
RECUEIL DE CITATIONS

LA PHILOSOPHIE
La méthode en philosophie

1. Charles Péguy : « Une grande philosophie pas celle qui


installe une vérité définitive, mais celle qui introduit une
incertitude. »
2. Emmanuel Kant : « « Il n’y a pas de philosophie que l’on puisse
apprendre […] l’on ne peut apprendre qu’à philosopher. »
3. Emmanuel Kant : « Pense par toi-même »
4. Emmanuel Kant : « Que puis-je connaître? – Que dois-je faire? – Que
suis-je permis d’espérer? »
5. Karl Jaspers : « Philosopher c’est être en route »
6. Ludwig Feuerbach : « Philosopher c’est décider de poser un autre regard
sur les choses et la vie, c’est tenter de connaître à travers les apparences,
ce qui est au-delà des apparences : c’est exercer sa conscience à prendre
conscience d’elle-même. »
7. Marcien Towa : « La philosophie ne commence qu’avec la décision de
soumettre l’héritage philosophique et culturel à une critique sans

230
complaisance. Pour le philosophe, aucune donnée, aucune idée si
vénérable soit-elle, n’est recevable avant d’être passée au crible de la
pensée critique. »
8. Socrate : « Connais-toi toi-même » ; « Ce que je sais, c’est que je ne sais
rien »

Inutilité de la philosophie

5. Aristote : « Connaitre pour savoir et savoir pour connaitre. »


6. Clément Rosset : « Il ne faut pas compter sur la philosophie pour trouver
des raisons de vivre »
7. Georges Clémenceau : « Si j'avais une province française à punir, je la
ferai gouverner par un philosophe. »
8. Goblot : « Toute connaissance qui n'est pas scientifique n'est pas
connaissance, mais ignorance. »
9. Karl Marx: « Jusqu’ici, les philosophes n'ont fait qu’interpréter le monde
de diverses manières, or il s’agit de transformer. »
10.Maurice Duverger : « La philosophie doit céder la place aux nouvelles
humanités que sont la science et les techniques. »

Nécessité de la philosophie

1. Bertrand Russel: « Celui n'a aucune teinture de philosophie traverse


l'existence embrigadé dans les préjugés qui viennent du sens commun. »
2. Emmanuel Kant: « Il suffit de bien penser pour bien agir »
3. Epicure: « De même que les médecins ont reçu pour mission de guérir le
corps, le rôle de la philosophie est de guérir les âmes. »
4. Friedrich Hegel: « Penser la vie, voilà la tâche. »
5. Karl Jaspers : « L'on ne peut pas se passer de la philosophie. La seule
question qui se pose est celle de savoir si elle est consciente ou non. »
6. Karl Jaspers : « Ne pas philosopher c’est être réduit à l'animalité. »
7. Karl Marx : « La philosophie n'est pas extérieure au monde. »
8. Njoh-Mouelle : « La philosophie n'est pas et ne saurait être cette
spéculation brumeuse détachée de la réalité et des problèmes concrets des
hommes.... l'initiative philosophique est indétachable des préoccupations
pratiques. »
9. Platon : « Le monde marchera mieux le jour les philosophes seront rois se
mettrons en philosophie. »
10.Platon : « Les maux ne cesseront pas pour les humains avant que la race
des purs et authentiques philosophes n’arrivent au pouvoir. Ou que les
chefs des cités, par une grâce divine, ne se mettent à philosopher
véritablement. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 231


11.Spinoza : « Il pense en homme d'agir et agir en homme de penser »
12.René Descartes : « C’est proprement avoir les yeux fermés sans tâcher
jamais de les ouvrir que de vivre sans philosopher. »
13.René Descartes : « Toute la philosophie est comme un arbre dont les
racines sont la métaphysique, le tronc la physique et les branches qui
sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences dont les principales sont :
la médecine, la mécanique et la morale »
14.René Descartes : « Chaque nation est d’autant plus civilisée et polie que
les hommes y philosophent mieux.»

LA PHILOSOPHIE EN AFRIQUE
L’inexistence de la philosophie en Afrique

1. Bernard Stevens : « La philosophie est née en Grèce antique et elle a


gardé de cette naissance grecque une configuration propre. »
2. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « L’homme en Afrique, c'est l'homme
dans son immédiateté... le nègre représente l'homme naturel dans toute sa
barbarie et son absence de discipline. »
3. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « la philosophie est grecque dans
son être propre ne dit rien d’autre que : l’Occident et l’Europe sont, et eux
seuls sont, dans ce qu’a de plus intérieur leur marche historique,
originellement philosophique. »
4. Lévy Brühl : « Les sociétés inférieures comme l'Afrique sont régies par
une mentalité prélogique et mystique qualitativement différente de la
logique propre à l'homme civilisé d'Europe. »
5. Louis De Raeymaeker : « Le peuple grec fut le peuple élu de la raison »
6. Martin Heidegger : « La philosophie c'est grecque dans son essence
même. »
7. Jacques Maritain : « La Grèce est le seul point du monde antique où la
sagesse de l’homme ait trouvé sa voie, et où, par effet d’un heureux
équilibre des forces de l’âme, et d’un long travail pour acquérir la mesure
et la discipline de l’esprit, la raison humaine soit parvenue à l’âge de sa
force et de sa maturité. Aussi bien le petit peuple grec apparait-il (…)
comme un homme au milieu des géants enfants. C’est en Grèce seulement
que la philosophie acquit une existence autonome en se distinguant
explicitement de la religion. »

232
Critique de l’eurocentrisme

1. Roger Caratini : « La philosophie n’est pas sortie, toute armée, du cerveau


de Thalès ou de Pythagore. »

Contre l’ethnophilosophie

1. Ebénézer Njoh-Mouelle : « Il n'y a pas de philosophie dans les


proverbes. »
2. Laburthe Tolra : « En Afrique, la philosophie reste à faire. »
3. Marcien Towa « Déterrer une philosophie ce n’est pas encore
philosopher.»
4. Martien Towa : « L'ethnophilosophie apparait à la philosophie comme
une théologie qui ne veut pas dire son nom. »
5. Martien Towa : « L'ethnophilosophie trahit à la fois l'ethnologie et la
philosophie. »
6. Paulin Hountondji : «La philosophie africaine n'a été jusqu'ici qu'une
ethnophilosophie: recherche imaginaire d'une philosophie collective,
immuable, commune à tous les Africains, quoi que sous une forme
inconscience. »
7. Paulin Hountondji : « J’appelle philosophie africaine un ensemble de
textes : l’ensemble précisément des textes écrits par des africains et
qualifiés par leurs auteurs eux-mêmes de philosophiques »

Pour l’ethnophilosophie

1. Basile Juléat Fouda : « La philosophie nègre doit se transmettre à travers les


âges comme un héritage à recevoir à défendre et à incarner pour atteindre
l'existence authentique. »

LA CONSCIENCE ET
L’INCONSCIENT
Origine et nature de la conscience

1. Henri Bergson : « toute conscience est choix. »


2. Edmund Husserl : « la conscience n’est jamais état de conscience mais
toujours conscience de l’état. »
3. Emile Durkheim : « Quand notre conscience parle, c’est la société qui
parle en nous. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 233


Contre l’existence de l’inconscient

1. Alain (Emile Chartier) : «L’inconscient est un fantôme démobilisateur


comme l’hérédité. »
2. Alain (Emile Chartier) : « La conscience est toujours implicitement
morale et l’immoralité consiste toujours à ne pas vouloir penser qu’on
pense et à ajourner le jugement intérieur. »
3. Alain (Emile Chartier) : « l’inconscient est une méprise sur le moi, c’est
une idolâtrie du corps.»
4. Alain (Emile Chartier) : « Savoir, c'est savoir qu'on sait. »
5. Alain (Emile Chartier) « La conscience est toujours implicitement morale
et l’immoralité consiste toujours à ne pas vouloir penser qu’on pense et à
ajourner le jugement intérieur. »
6. Edmund Husserl : « Toute conscience est consciente de quelque chose. »
7. Jean-Jacques Rousseau : « La conscience est l'instinct divin, la céleste
voix en l'homme. »
8. Jean-Paul Sartre : « Il y a pour une conscience une seule façon d'exister:
c'est d'avoir consciente qu'elle existe. »
9. Jean-Paul Sartre : « L'inconscient n'existe pas, car le fait psychique est
coextensif à la conscience. »
10.Jean-Paul Sartre : « Tout homme qui se réfugie derrière l’inconscient,
tout homme qui se réfugie derrière l’excuse de ses passions, tout homme
qui invente un déterminisme est un homme de mauvaise foi. »
11.René Descartes : « Je pense donc je suis. »
12.René Descartes: « Il ne peut avoir en nous aucune pensée de laquelle, dans
le moment où elle est en nous, nous n'ayons aucune claire conscience. »

Pour l’existence de l’inconscient

1. Alain (Emile Chartier): « L’inconscient est un mythe dangereux. »


2. Baruch Spinoza : « Le corps, par les seules lois de la nature peut beaucoup
de choses dont l’esprit reste étonné. »
3. Jean Dalbiez : « La psychanalyse ne présente de l’honneur que ce qu'il a
de moins humain. »
4. Paul Valery : « La conscience règne mais ne gouverne pas. »
5. Roger Ebacher : « L’inconscient agit en nous sans nous et malgré nous. »
6. Sigmund Freud : « Le moi n'est pas maitre dans sa propre maison. »
7. Sigmund Freud : «Le moi n’est pas maitre dans sa propre maison. »
8. Sigmund Freud : « L'interprétation des rêves est, en réalité, la voie royale
de la connaissance de l'inconscient. »

234
DESIRS ET PASSIONS
Valeur négative des passions

1. Blaise Pascal : « La passion conduit à l’erreur et contraint aux malheur


2. Emmanuel Kant : « La passion agit comme un torrent qui creuse son lit
de plus en plus profondément. »
3. Emmanuel Kant : « Les passions sont sans mauvaises. »
4. Emmanuel Kant : « Les passions sont une gangrène pour la raison
(…) la passion est un ensorcèlement qui exclut toute amélioration. »
5. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « Les passions demeurent l’élément
actif du monde. »
6. Jean-Paul Sartre: « Tout homme qui se réfugie derrière l'excuse de ses
passions, tout homme qui invite un déterminisme est un homme de mauvaise
foi. »
7. Jouffroy : « Il est absurde de raisonner avec passions parce que si
elles entendaient raison elles ne seraient plus des passions. »
8. Lamartine : « Un seul être vous manque et tout vous semble dépeuplé. »
9. Platon : « A cause du désir, nos recherches sont à nouveau basculées en
tout sens par cet intrus qui nous assourdit, nous trouble et nous
détourne au point de nous rendre incapables de distinguer le vrai ».
10.Stendhal : « La passion est l'effort qu'un homme qui a mis son bonheur
dans telle chose est capable de faire pour y parvenir. »

Valeur positive des passions

1. Baruch Spinoza : « Le désir est l’essence même de l’homme. »


2. Blaise Pascal : « Le cœur a ses raisons que la raison ignore »
3. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « Les passions constituent l’élément
actif du monde. »
4. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « Rien de grand ne s’est accompli dans
le monde sans passion ».
5. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « Elles ne sont pas toujours opposées
à l'ordre éthique. »
6. Jean-Jacques Rousseau : « L'entendement humain doit beaucoup aux
passions... c'est par leur activité que notre raison se perfectionne. »
7. Jean-Paul Sartre: « L’homme est responsable de ses passions. »
8. Louis Lavelle : « Non seulement le propre du désir, c'est de s'élancer
vers l'avenir, mais encore on peut dire que c'est lui qui crée l'avenir:
il n'y a d'avenir que pour celui qui désire. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 235


9. René Descartes : « Les hommes qu'elles les passions peuvent le plus
émouvoir sont capables de gouter le plus de douceur en cette vie ... ils
peuvent aussi y trouver le plus d'amertume lorsqu'ils ne savent pas bien les
employer. »
10.Soeren Kierkegaard : « Exister si l’on n’entend pas par ce mot un
simulacre d’existence, ne peut se faire sans passions. »
11.Vauvenargues : « Un homme sans passion est comme un roi sans
sujet. »

PERSONNE ET PERSONNALITE
Valeur de la personne

Emmanuel Kant : « Agis de telle sorte que tu traites


l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre
toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un
moyen.»

La personnalité est innée

1. Arthur Schopenhauer : « Notre destinée est déterminée par notre


caractère immuable. »
2. La Bible : « L’homme est à l’image de Dieu. »

La personnalité est construite

1. François Jacob : « Les 46 chromosomes de l'être humain lui confèrent une


série d'attitudes physiques ou mentales qu'il peut exploiter ou développer
de manière très variable selon le milieu dans lequel il vit. »
2. Georges Gusdorf : « Le paysage fait partie de notre être. »
3. Jean-Paul Sartre : « L’essentiel n’est pas de savoir ce que les
situations ont faits de nous, mais de savoir ce que nous avons fait de
ce que les situations ont fait de nous. »
4. Jules Michelet : « Sans une base géographique, le peuple, l’acteur
historique semble marcher en l'air,...il ne l'est que par sa communauté avec
autrui. »
5. Karl Marx: « L'homme n'est homme que dans la société avec d'autres
hommes... ce que chacun est comme homme, il ne l'est que par sa
communauté avec autrui. »

236
AUTRUI
La reconnaissance d’autrui est possible

1. Edmund Husserl : « Ma conscience reconnait l'existence d'autres


consciences dans un sentiment originaire de coexistence. »
2. Jean-Paul Sartre: « Autrui est là, avant toute réflexion sur lui ... l'existence
d'autrui ne doit pas être une possibilité. »
3. Martin Heidegger : « Le monde auquel j’appartiens est toujours un monde
que je partage avec d'autres. »
4. Thomas Merton : « Nul n'est une ile. »
5. Sully Prudhomme : « Nul ne peut se vanter de se passer des hommes.
»

L’impossibilité de la reconnaissance d’autrui

1. Arthur Schopenhauer : « Autrui est un blockhaus impénétrable. »


2. Blaise Pascal : « La vie humaine n’est qu’une illusion perpétuelle, on ne
fait que s’entre-tromper et s’entre-flatter. Personne ne parle de nous en
notre présence comme il en parle à notre absence. L’Union qui est entre
les hommes n’est fondé que sur cette mutuelle tromperie ; et peut d’amitié
subsisteraient si chacun savait ce que son ami dit de lui à son absence. »
3. Blaise Pascal : « L’homme n’est donc que déguisement, mensonge et
hypocrisie. »
4. Gottfried Wilhelm Leibniz : « Autrui est une monade » c'est -à- dire une
substance sans porte ni fenêtre. »
5. Jean-Paul Sartre : « L’homme est un être en situation, il change d'une
situation à l'autre. »
6. Jean-Paul Sartre : « L’homme est un être en qui il y a du jeu. »
7. Michel Eyquem de Montaigne : « Il se trouve autant de différences à
nous- mêmes que de nous à autrui. »
8. Michel Eyquem de Montaigne : « L’homme est ondoyant et divers. »

L’affirmation de la connaissance d’autrui

1. André Gide : « Je connais autrui par analogie à moi- même. »


2. Nicolas Malebranche : « Ce que nous sentons en nous-mêmes, nous
prétendons qu'ils le sentent. »
3. René Descartes : « Je juge, à partir des chapeaux et des manteaux, que
des gens semblables à moi m'environnent. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 237


4. Victor Hugo « Quand je parle de moi, je parle de vous, insensé qui crois
que je ne suis pas toi. »

Les rapports conflictuels

1. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « Les consciences sont en perpétuel


conflit à mort. »
2. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « Toute conscience poursuit la mort de
l'autre. »
3. Jean-Paul Sartre : « L’enfer c'est les autres ».
4. Jean-Paul Sartre : « La rencontre avec autrui est heurt des libertés. »
5. Jean-Paul Sartre : « L'essence des rapports entre les hommes ce n'est pas
la communication, c’est le conflit ».
6. Jean-Paul Sartre : « Ma chute originelle c'est l'existence de l'autre. »
7. Jean-Paul Sartre : « Etre vu, c'être dépossédé de soi-même. »
8. Johann Gottlieb Fichte : « Le moi se pose en s'opposant au non moi ».
9. Paul Valéry : « Si le regard pouvait tuer, si le regard pouvait féconder, la
rue serait pleine de cadavres et de femmes enceintes.»

Les rapports d’amitié

1. Antoine De Saint-Exupéry : « Aimer ce n'est pas se regarder l'un l'autre,


c'est regarder ensemble dans la même direction. »
2. Aristote : « L'homme est un animal qui périt loin des siens. »
3. Emmanuel Mounier : « Etre c'est aimer. »
4. Emmanuel Mounier : « Je n'existe que dans la mesure où j'existe pour
autrui. »
5. Gabriel Marcel : « Le ciel c'est les autres. »
6. Jean-Paul Sartre : « Autrui est le médiateur indispensable entre moi et
moi-même.»
7. Saint Augustin : «On ne peut connaître personne sinon par l’amitié.»
8. Seydou Badian : « L’homme n'est rien sans ses semblables. Il vient dans
leurs mains et s'en va dans leurs mains. »

LA SOCIETE
La société est naturelle

1. Aristote : « L’homme est par nature un animal


politique ; si bien que celui qui vit hors cité…est soit un être dégradé, soit
un être sur-humain : sans lignage, sans loi, sans foyer. »

238
2. Aristote : « La société est une réalité naturelle et l’homme est par nature
un être fait pour vivre en société […] l’homme incapable d’être membre
d’une communauté, est soit une brute soit un Dieu. »
3. Avicenne : « L’être de l’homme tel qu’il a été créé ne peut se maintenir en
vie sans une société. »
4. Auguste Comte : « Une société n'est pas plus décomposable en individus
qu'une droite en points. »
5. Cicéron : « C'est la nature qui nous a liés et associés en vue d'une
commune politique. »
6. Denis Diderot : « L'homme est né pour la société »
7. Henri Bergson : « En vain on essaye de se représenter l'individu dégagé
de toute vie sociale. »
8. Karl Marx : « L'homme est un animal qui ne peut s'isoler qu'en société. »

La société est construite par l’homme

1. Thomas Hobbes : « L'homme est matière et artisan du corps politique. »

L’individu et la société

1. Jean-Jacques Rousseau : « L'homme nait bon c'est la société qui le


corrompt. »
2. Sigmund Freud : « Chaque individu est virtuellement un danger pour la
société. »

LA MORALE

La morale est relative

1. Blaise Pascal : « La vraie morale se moque de la morale. »


2. Blaise Pascal : « On ne voit rien de juste ou d'injuste qui ne change de
qualité en changeant de climat...vérités en-deçà des Pyrénées, erreur au-
delà. »
3. François La Rochefoucauld : « Les vertus se perdent dans l'intérêt comme
les fleuves dans la mer. »
4. François La Rochefoucauld : « L'intérêt parle toute sorte de langue et
joue toute sorte de personnage, même celui de désintéressé. »
5. Jeremy Bentham : « Les plus vicieux des hommes tout comme les plus
vertueux ont des motifs absolument semblables; tous se propose d'accroitre
leur plaisir. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 239


6. La morale de l’intérêt
7. Maxime : « Pas d’intérêt, pas d'action. »

L’origine de la morale

1. Emile Durkheim : « Chaque peuple a sa morale, qui est détermine par les
conditions dans lesquelles il vit. »
2. Emile Durkheim : « Quand notre conscience parle c'est la société qui
parle en nous. »
3. Jean-Jacques Rousseau : « La conscience morale est l'instinct divin,
l'immortelle et céleste voix »

La morale du sentiment

1. Arthur Schopenhauer : « La pitié est un grand remède à la misère de


l'homme car elle est capable de convertir l'égoïsme en amour. »

La morale du devoir

1. Emile Durkheim : « L'homme est un prisonnier dans la société. »


2. Emmanuel Kant : « Agis d'après des maximes qui puissent se considérer
elles-mêmes comme les lois universelles de la nature. »
3. Emmanuel Kant : « Agis toujours afin que la maxime ton action puisse
être érigée en règle universelle. »
4. Emmanuel Kant : « De tout ce qu’il est possible de concevoir en ce monde
ou même hors de ce monde, il n'y a rien qui puisse sans restriction être
regardé comme absolument bon, excepté la bonne volonté. »

DROIT ET JUSTICE
La relativité de la justice

1. Jean de La Fontaine : « <Selon que vous soyez riche ou pauvre, les


jugements de la cour vous rendrons blanc ou noir. »

Le droit de la force

1. Baruch Spinoza : « Le droit de chacun s'étend jusqu'où s'étend la


puissance. »
2. Baruch Spinoza : « Tous les poissons ont le droit de manger, et les gros
poissons ont le droit de manger les petits d'après le droit naturel. »

240
3. Baruch Spinoza : « Tout ce qui est possible est permis. »
4. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « La puissance réelle est la seule
mesure du droit. »
5. Jean de La Fontaine : « La raison du plus fort est toujours la meilleur. »
6. Karl Marx : « Le droit exprime la force en ce sens qu'il n'est que
l'expression de la classe dominante dont il traduit la volonté. »
7. Max Stirner : « Le tigre qui m'attaque a le droit, moi aussi qui l'abats j'ai
le droit. »
8. Otto Von Bismarck : « La force crée le droit. »
Critique du droit de la force

1. Blaise pascal : « La justice sans la force est faible, la force sans la justice
est tyrannie ».
2. Jean-Jacques Rousseau : « Force ne fait pas droit... on est obligé de
n'obéir qu'aux puissances légitimes. »
3. Jean-Jacques Rousseau : « Sitôt que c'est la force qui fait le droit, toute
force qui surmonte la première succède à son droit. Qu'est-ce qu'un droit
qui périt quand la force cesse. »

Le droit positif fondé dur la raison

1. Charles de Secondat de Montesquieu : « La loi est la raison humaine en


tant qu'elle gouverne tous les pays de la terre. »
2. Cicéron : « Le droit est cette loi naturelle qui n'est pas faite par le
législateur, mais que l'on puisse au fond de soi dans la sagesse intérieure.
3. Hugo Grotius : « Le droit naturelle est suggéré par la raison, selon
laquelle nous jugeons qu'une action est morale ou injuste. »
4. Maxime : « Ni Dieu, ni maitre. »
5. Pierre Joseph Proudhon : « La justice c'est le respect de la dignité
humaine en toutes les personnes. »

L’ETAT ET LE POUVOIR

Les détracteurs de l’Etat

1. Friedrich Nietzsche : « L'Etat est le plus froid de toutes


les montres froids. Il ment froidement et voici le mensonge qui s'échappe
de sa bouche; moi l'Etat je suis le peuple. »
2. Friedrich Nietzsche : « L'Etat est l'immortalité organisée. »
3. Karl Marx : « Le pouvoir est le pouvoir organisé d'une classe pour
l'oppression d'une autre ».

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 241


4. Karl Marx : « L'Etat est un conseil d'administration des affaires
bourgeoises. »
5. Max Stirner : « L'Etat est un vaste cimetière où viennent s'enterrer toutes
les manifestations de la vie individuelle. »
6. Mikhaïl Aleksandrovitch Bakounine : « L'Etat est une universalité
dévorante vivant de sacrifices humains. »

Les partisans de l’Etat

1. Baruch Spinoza : « La fin de l'Etat c'est la liberté ».


2. Georg Wilhelm Friedrich Hegel: « C'est seulement dans l'Etat que
l'homme a une raison conforme à la raison. »
3. Georg Wilhelm Friedrich Hegel: « L’individu lui-même n'a d'objectivité,
de vie et de moralité que s'il est membre de l'Etat. »
4. Georg Wilhelm Friedrich Hegel: « L'Etat est la réalisation en acte de
l’idée morale objective. »
5. Georg Wilhelm Friedrich Hegel: « L'Etat est le rationnel en soi et pour
soi. »
6. Georg Wilhelm Friedrich Hegel: « L'Etat, c’est l'incarnation de la raison,
c'est la fin de l'histoire, de l'universel. L'homme ne peut avoir une existence
digne de sa nature raisonnable que dans l'Etat. »
7. John Locke : « L'Etat assure la sécurité et le bien-être du peuple. »
8. Karl Popper : « Il n'y a de liberté qu'assurée par l'Etat. »
9. Thomas Hobbes : « Le but de l'Etat est la paix sociale. »

LA VIOLENCE

Les partisans de la violence

1. Albert Camus : « La société brandit la tête coupée pour que les candidats
au meurtre y lisent leur avenir et reculent. »
2. Héraclite : « Le combat est père et roi de tout. »
3. Joseph Ngoué : « Face à la violence il faut opposer la force de la raison. »
4. Karl Marx : « La violence est l'accouchement de toute veille société qui
en porte une nouvelle dans son flanc. »
5. Paul Ricœur : « Personne ne peut plaider pour la violence sans se
contredire. »
6. Pierre Joseph Proudhon : « La violence est le phénomène le plus profond,
le plus sublime de notre vie morale. »

242
7. Thomas Hobbes : « La violence est dans la main du souverain qui doit
continuer à s'en servir pour maintenir la paix et la cohésion sociale ».
8. Thomas Hobbes : « Les pactes sans les glaives sont que des mots »

Les détracteurs de la violence

1. Mohandas Gandhi : « La religion de la non-violence n'est seulement pour


les saints, elle est pour le commun des hommes. C'est la loi de notre espèce.
La violence est la loi de la brute. »
2. Martin Luther King : « La guerre nait dans l'esprit des hommes, et c'est
dans l'esprit des hommes qu'il faut combattre la guerre. »

Pour un bon usage de la violence

1. Max Weber : « L'Etat a le monopole de la violence légitime. »


2. Mohandas Gandhi: « S'il n'y avait le choix qu'entre la violence et la
lâcheté, je conseillerai la violence. »
3. Nicolas Machiavel : « Ce n'est pas la violence qui restaure mais la violence
qui ruine qu'il faut condamner. »
4. Raymond Aaron : « La violence est un moyen parfois nécessaire, d'une
politique rationnelle. »

LIBERTE ET RESPONSABILITE
La thèse déterministe de la liberté

1. Baruch Spinoza : « Les hommes se trompent en ce qu'ils se


croient libres. Cette opinion consiste en cela qu'ils ont conscience
de leurs actions et qu’ils sont ignorants des causes par lesquelles
ils sont déterminées. »
2. Baruch Spinoza: « L’homme n’est pas un empire dans un empire »
3. Charles de Secondat de Montesquieu : « La liberté est le droit de faire
tout ce que les lois permettent »
4. Emile Durkheim : « L'homme est un ennemi de la société. »
5. Epictète : « N’attends pas que les événements arrivent comme tu le
souhaites ; décide de vouloir ce qui arrive et tu seras heureux. »
6. Les stoïciens : « Il y a des choses qui dépendent de nous et des choses qui
ne dépendent pas de nous. »
7. Maxime : « L'essence précède l'existence. »
8. Maxime : « Souffres et abstiens-toi. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 243


La liberté absolue

1. Jean-Paul Sartre : « L'existence précède l'essence. »


2. Jean-Paul Sartre : « L'homme est une liberté qu'il se choisit. »
3. Jean-Paul Sartre : « L'homme n'est rien d'autre que se qu'il se fait. »
4. Jean-Paul Sartre : « Une fois jeté dans le monde, l'homme est libre et
responsable de tout ce qu'il fait. »
5. René Descartes : « L'homme est libre, et sa liberté consiste en ce que pour
faire une chose il ne faut pas le faire. »

La liberté comme effort permanent

1. Ebénézer Njoh-Mouelle : « Il n'y a pas de libération que l'on puisse


gagner définitivement. »
2. Ebénézer Njoh-Mouelle : « La liberté est plus exactement dans le meilleur
cas une libération perpétuelle. »
3. Jean-Paul Sartre : « L’important n'est pas ce que la vie fait de nous, mais
ce que nous faisons de ce que la vie a fait de nous ».

TRIBU ET CLASSE SOCIALE

La valeur négative des tribus et classes

1. Ebénézer Njoh-Mouelle : « En vue de l'organisation au mieux du bien-


être de l'homme, le cadre du clan et de la tribu est un instrument
aujourd'hui dépassé. »
2. Guy Landry Hazoume : « L'ethnocentrisme qui rien d'autre que le
triomphe de la médiocratie. »
3. Karl Marx : « L'histoire des sociétés n'est que l'histoire de la lutte des
classes. »
4. Victor Kamga : « A tous les niveaux de la vie sociale, chacun croit que la
solution à ses problèmes ne peut venir que d'un ressortissant de sa tribu. »

La valeur positive des tribus

1. Friedrich Engels : « La société les classes sociales avaient été créées à


l'origine par simple division du travail. »

244
LE PANAFRICANISME
L’importance du panafricanisme

1. Cheikh Anta Diop : « Il faut cesser de tromper les


masses mineures et accomplir l'acte qui consomme la rupture avec les faux
assembles sans lendemain historique.il faut faire basculer l’Afrique noire
sur la pente de son destin fédéral. »
2. Cheikh Hamidou Kane : « Nous n’avons pas eu le même passé vous et
nous; mais nous auront le même avenir, rigoureusement. L’ère des destinés
singulières est révolue. »
3. Ebénézer Njoh-Mouelle : « L'unité africaine apparait comme un impératif
majeur du développement. L’unité africaine...doit être rechargée en
tant...que moyen en vue du développement rapide et efficace de toutes les
régions d’Afrique. »
4. Mongo Béti : « Le panafricanisme exprime l'aspiration des Africains à se
rassembler en une nation unique sous la bannière d'un seul Etat, pour
restaurer leur dignité outragée par des siècles de traite, d'esclavage, de
colonisation et de prendre en mot leur revanche sur l'histoire. »

NATURE ET CULTURE
L’existence d’une nature humaine

1. Arthur Schopenhauer : « L'homme est un désir


d'éternité. »
2. Gottfried Wilhelm Leibniz : « Tout est certain et
déterminé par avance dans l'homme et partout ailleurs; l'âme
humain est une espèce d'automate spirituelle. »
3. Henri Bergson : « On a tort de dire chassez la nature il revient au galop
car le naturel ne se laisse pas chasser, il est toujours là. »
4. René Descartes : « L'homme est essentiellement un être de pensée. »

La nature culturelle de l’homme

1. Edouard Herriot : « La culture c'est ce qui nous reste quand on a tout


oublié. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 245


2. Georges Bataille : « L'homme est l'animal qui n'accepte pas simplement le
donné naturel, qui nie. »
3. Jean-Paul Sartre : « L'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait. »
4. Jean-Paul Sartre : « Il n'y a pas de nature humaine, puisqu'il n'y a pas de
DIEU pour la concevoir. »
5. Jean-Paul Sartre : « L'existence précède l'essence. »
6. Karl Marx : « L'essence de l'homme n’est pas une abstraction inhérente
isolée dans sa réalité, elle est l'ensemble des rapports sociaux. »
7. Lucien Malson : « Avant la rencontre d'autrui et du groupe, l'homme n'est
rien que des virtualités aussi légères qu'un transparente vapeur. »

L’homme comme nature et culture à la fois

1. Merleau-Ponty : « Il est impossible de superposer chez l'homme une


première couche de comportements que l'on appellerait naturel et un monde
culturel ou spirituel fabriqué. Tout est fabriqué et tout est naturel chez l'homme. »

L’ART
L’art comme copie de la nature

1. Boileau : « Il n’y a point de serpents ni de monstres


odieux qui par l’art imité ne puissent plaire aux yeux ».
2. Henri Bergson : « L'art n'est surement qu'une vision plus directe de la
réalité il nous met face avec la réalité. »
3. Platon : « L'art d'imité est donc bien éloigné du vrai. Et s'il peut tout
exécuter, c'est semble-t-il, qu'il ne touche qu'un petite partie de chaque
chose et cette partie n'est qu'un fantôme. »
4. Roden : « Il n'y a point de recette pour embellir la nature. Il ne s'agit que
de voir. »

L’art comme dépassement de la réalité

1. Aristote : « L'art n'est pas la représentation d'une chose, mais une belle
représentation de la chose. »
2. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « il est permis de soutenir dès
maintenant que le beau artistique est plus élevé que le beau dans la nature
»

246
3. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « Le beau se manifeste comme une
manifestation sensible de l'idée. »
4. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « L'œuvre d'art ne peut pas se contenter
de n'être qu'une imitation. Ce n'est pas en cela que consiste sa mission. »
5. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « l’œuvre d’art vient de l’esprit et
existe pour l’esprit ».
6. Michel-Ange : « Le beau est la purgation de toute superfluité. »

La valeur de l’art

1. André Malraux : « L'art est un antidestin. »


2. Georg Wilhelm Friedrich Hegel: « Les peuples ont déposés leurs
conceptions les plus haute dans les productions de l'art, les ont exprimées
et en ont pris conscience par le moyen de l'art. »
3. Victor Hugo : « L'art pour l'art est beau, pour le progrès est plus beau
encore. »

L’art et la société

Matta Echaurren : « l’artiste doit se mêler au peuple, sa peinture est heureuse


ou dramatique selon que ce dernier est l’un ou l’autre ».

LE TRAVAIL ET LES MODES DE


PRODUCTION
La conception négative du travail

1. André Breton : « Rien ne sert d’être vivant tant qu’on travaille »


2. Cheikh Hamidou Kane : « L’on travaille par avidité, on croit qu’en
multipliant les richesses on multiplie la vie ».
3. Karl Marx : « La nature aliénée du travail apparait nettement dans le fait
que, dès qu’il n'existe pas de contrainte physique ou autre, on fuit le travail
comme la peste. »
4. Karl Marx : « Le domaine de la liberté commence seulement là où cesse
le travail. »
5. Karl Marx : « Le travail aliéné, le travail dans lequel l'homme se
dépossède est sacrifice de soi, mortification. »
6. Kwamé Nkrumah : « l’homme est comme chez lui quand il ne travaille
pas et, quand il travaille il ne se sent pas chez lui. »
7. La Bible : « Tu mangeras à la sueur de ton front. »
PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 247
La conception positive du travail

1. Adam Smith : « Le travail est la richesse d'une nation, autant que l'or et
l'argent. »
2. Cheikh Hamidou Kane : « Travaillez par nécessité pour faire cesser la
grande douleur du besoin, pour sauvegarder notre dignité et ne pas passer
le temps à quémander. »
3. Emmanuel Mounier : « Tout travail travaille à faire un homme en même
temps qu'une chose. »
4. Friedrich Engels : « Le travail est le chemin de l'autonomie. »
5. Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « L'humanité ne peut se réaliser dans
l'histoire que par le travail. »
6. Georges Bataille : « Le travail est la voie de la conscience par laquelle
l'homme est sorti de l'animalité. »
7. Jean Lacroix : « Par le travail, l’homme va rendre familier ce qui était
étranger, donne forme humain à ce qui était uniforme. »
8. Jean Vialatoux : « Le travail a la vertu de libérer l’homme ».
9. Voltaire: « Le travail éloigne de nous trois grands maux : le vice, l'ennui
et le besoin. »

Le travail comme aliénation et libération

1. Alain (Emile Chartier) : « Le travail est le meilleur et la pire des choses.


Le meilleur quand il est libre et la pire quand il est aliéné. »
2. Jean Lacroix : « En même temps que signe d'aliénation, le travail est le
remède de cette aliénation. »
3. Jean Lacroix : « Le travail n’est pas un accident pour l’homme, mais son
essence même. »

LE DEVELOPPEMENT EN
AFRIQUE
Le sous-développement de l’Afrique

1. Ebénézer Njoh-Mouelle : « Le sous-développement de l'avoir n'est pas


essentiel. Le véritable sous-développement est celui de l'être en tant que
tel. »
2. Maurice Kamto : « Je vois en effet dans l'embastillement de la pensée, la
raison première de l'enlisement de nos sociétés dans l'ornière du non-
développement.»
248
3. René Dumont : « l’Afrique noire est mal partie »

Les solutions pour sortir du sous-développement

1. Aimé Césaire : « L’Afrique n’a pas besoin des programmes


d’ajustement structurels(PAS), mais plutôt des programmes d’ajustement
culturel (PAC) »
2. Ebénézer Njoh-Mouelle : « Il faut que le développement œuvre à
substituer à la médiocrité l'excellence »
3. Ebénézer Njoh-Mouelle : « Le développement est un processus complet,
total qui dérobe largement le cadre économique pour couvrir
l'éducationnel et le culturel. »
4. Etounga Manguelé : « L’Afrique n’a pas besoin d’un programme
d’ajustement structurel, mais d’un programme d’ajustement culturel »
5. Martien Towa : « S'emparer du secret de l'occident doit dès lors consister
à connaitre à fond la civilisation occidentale, à identifier la raison de sa
puissance et à l'introduction dans notre propre culture. »
6. Maurice Kamto : « Plus qu'une urgence d'aide financière il y a pour ce
continent sinistré, urgence de pensée. »
7. Rostow : « Dans le cas le plus général, l'économie n'a démarré que
lorsqu’un capital s'est constitué et que le progrès technique s'est introduit
dans l'industrie et l'agriculture. »

L’ESPACE ET LE TEMPS
1. Alain (Emile Chartier) : «La méditation sur
le temps est la véritable épreuve du philosophe.»
2. Lagneau : « L’espace est la forme de ma puissance ; le temps, la forme de
mon impuissance »
3. Henri Bergson : « Le temps de la conscience, c’est la durée vécue, il n’est
pas le temps abstrait et homogène de l’horloge. »
4. Martin Heidegger : « Dès qu’un homme est né, il est assez vieux pour
mourir ».
5. Miguel Unamuno : « Le temps et l’espace sont nos plus cruels tyrans »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 249


LA SCIENCE
1. Gaston Bachelard : « accéder à la science c’est
spirituellement rajeunir »

La valeur positive de la science

1. Francis Bacon : « Savoir c'est pouvoir. »


2. Jean Rostand : « La science a fait de nous des dieux avant que nous
méritions être des hommes. »
3. Marcellin Berthelot : « La science est la bienfaitrice de l’humanité. »
4. Pierre Thuillier : « Il est de notoriété publique que la science a rendu et
rend être des hommes. »
5. René Descartes : « Grâce à la science, l'homme se fait maitre et possesseur
de la nature. »

Valeur négative de la science

1. Edgar Morin : « cette science libératrice apporte en même temps des


possibilités terrifiantes d’asservissement »
2. François Rabelais : « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. »
3. Henri Bergson : « L'humanité gémit, à demi-écrasée sous le poids des
progrès qu'elle a faits. »
4. Herbert Marcuse : « Toute la société technologique est un système de
domination qui fonctionne au niveau même des conceptions et des
constructions techniques. »
5. Pierre Thuillier : « Elle a conduit à des productions redoutables telles que
la bombe atomique. »
6. Robert Blanché : « Il n'y a pas, sinon à titre d'idéal à viser, de science où
tous les savants compétents seraient parvenus à une parfaite humanité. »

La science au service de la vie

1. Gaston Bachelard : « Seule une philosophie en alerte peut suivre les


profondes modifications de la connaissance scientifique. »
2. Maurice Blondel : « Le défi lancé aux scientifiques, aux gouvernants et
aux peuples de demain peut se résumer à avoir la sagesse. »

250
LES MATHEMATIQUES
1. Académie : « Nul n’entre ici s’il n’est géomètre. »
2. Bertrand Russell : « Les mathématiques sont la seule
science où l’on ne sait pas de quoi on parle, ni si ce qu’on
dit est vrai. »
3. Ernest Renan : « Les mathématiques, sciences de l’immuable, sont la
science de l’irréel.»
4. Galilée : « La nature est écrite en langage mathématique. »
5. Pythagore : « Tout est nombre. »

LA MORT
Conception pessimiste de la mort

4. Duc De La Rochefoucauld : « Rien ne prouve


davantage combien la mort est redoutable que la peine que les philosophes
se donnent pour persuadés qu'on la doit mépriser. »
5. Duc De La Rochefoucauld : « Rien ne prouve tant que les philosophes ne
sont pas si persuadés qu'ils disent que la mort n'est pas un mal, que le
tourment qu'ils se donnent, pour établir l'immortalité de leur nom par la
perte de la vie. »
6. Louis Vincent Thomas : « Rien n'est immortel. Tous les êtres vivants, mais
aussi les objets, les sociétés, les systèmes culturels sont promis à une
disparition inéluctable. »
7. Paul Valéry : « La mort est une surprise que fait l'inconcevable au
concevable. »
8. Vladimir Jankélévitch : « La pensée ne tue pas la mort, mais c'est la mort
qui tue la pensée. »

Conception optimiste de la mort

6. Birago Diop : « Les morts ne sont pas morts. »


7. Charles de Secondat de Montesquieu : « Il faut pleurer les hommes à leur
naissance et non à leur mort. »
8. Epicure : « La mort n'est rien pour nous, car tout bien et tout mal réside
dans la sensation; or, la mort est la privation complète de cette dernière. »
9. Ibrahim Sow : « On n'est pas vraiment mort lorsqu'on a laissé une
descendance. »
10.Maximilien : « La mort est le commencement de l'immortalité. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 251


11.Nicolas Malebranche : « L'honneur de la mort n'est qu'un sentiment confus
qui n'ébranle l'âme que pour la conservation d'un corps tellement opposé
à notre bonheur. »
12.Platon : « La mort est une aubaine. »
13.Platon : « Pour un homme de bien, il ne peut y avoir aucun mal, ni pendant
sa vie ni après sa mort. »
14.Platon : « Qu'est-ce que craindre la mort sinon s'attribuer un savoir qu'on
n'a point. »

La vie au-delà de la mort

1. Antoine Saint Exupéry : « Ce qui donne un sens à la vie donne un sens à


la mort. »
2. Baruch Spinoza : « L'homme libre ne pense à rien moins qu'a la mort et
sa sagesse est une méditation, non de la mort, mais de la vie. »
3. Confucius : « Celui qui ne sait pas ce que la vie, comment saura-t-il ce que
c'est que la mort. »
4. Maurice Blanchot : « La mort dans l'horizon humain, n'est pas ce qui est
donné, elle est ce qui est à faire. »
5. Michel Eyquem de Montaigne : « Je veux que la mort me trouve plantant
mes choux, mais nonchalant d'elle et encore plus de mon jardin imparfait. »
6. Soeren Kierkegaard : « Il s'agit de trouver une vérité qui soit vérité pour
moi, de trouver l'idée pour laquelle je veux vivre et mourir. »

DIEU ET LA RELIGION

La nécessité de l’existence de Dieu

1. Voltaire : « Si Dieu n’existait pas, il faudrait


l’inventer »

La négation de l’existence de Dieu

1. Alphonse de Lamartine : « Dieu n’est qu’un mot rêvé pour expliquer le


monde »
2. Friedrich Nietzsche : « Dieu est mort, que vive le surhomme ».
3. Jean-Paul Sartre : « Même si Dieu existe, il faudrait le nier »
4. Ludwig Feuerbach : « L’être divin n’est rien d’autre que l’être de
l’homme »

252
Contre la religion

1. Karl Marx : « le christianisme accomplit théoriquement en sa qualité de


religion achevée l’auto-aliénation de l’homme par rapport à soi et à la
nature.»
2. Karl Marx : « C'est l'homme qui fait la religion, ce n'est pas la religion qui
fait l'homme. »
3. Ludwig Feuerbach : « les dieux sont les vœux de l’homme réalisés »
4. Sigmund Freud : « Se projeter en Dieu, projeter un Dieu pour pouvoir se
l’approprier, pour pouvoir se faire soi-même Dieu et jouir de sa puissance
de consolation, voilà l’illusion religieuse. »

Pour la religion

1. Dostoïevski : « Si Dieu n’existe pas, tout serait permis. »

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 253


VOCABULAIRE
ELEMENTAIRE DE
PHILOSOPHIE
Absolu : [opp. Relatif] : Qui ne comporte ni exception ni restriction. Ex. nécessité
absolue, pouvoir absolu. Ou ce qui est en soi et par soi, indépendamment de toute
autre chose.
Absurde : Dénué de sens et/ou illogique, contradictoire.

Accident/Accidentel : Ce qui existe non en soi-même mais en une autre chose;


ex. la forme ou la couleur appartiennent à une chose qui subsiste en elle-même;
par suite, ce qui peut être modifié ou supprimé sans que la chose elle-même
change de nature ou disparaisse. Désigne une propriété non essentielle d'une
chose. [voir Essence/Essentiel]

Acte (en -) : En philosophie, depuis Aristote, on oppose ce qui existe en acte à


ce qui existe en puissance. Ce qui existe en acte est pleinement réalisé, alors que
ce qui existe en puissance existe seulement potentiellement, virtuellement. Ex.:
la plante existe dans la graine en puissance.

Actes manqués : Chez Freud : Les actes manqués désignent dans le cadre de la
théorie psychanalytique les lapsus, oublis, pertes d'objets etc. que l'on interprète
naturellement comme des accidents, de simples 'ratés' insignifiants, mais que
Freud voit comme des manifestations d'intentions, de désirs inconscients refoulés
par la conscience.

Agnosticisme : Attitude consistant à ne pas se prononcer sur le problème


de Dieu ou de l’au-delà et à n’exclure aucune hypothèse.
Agréable : Ce qui est relatif aux plaisirs sensibles selon Kant.
A priori : En parlant des connaissances humaines, ce qui existe avant même toute
expérience.
Abstraction : Opération de la pensée consistant à séparer mentalement ce
qui est uni dans la réalité.
Aliénation : Etat dans lequel se trouve un homme ou un groupe d'hommes qui
sont privés de liberté, qui ne s'appartiennent pas (être aliéné = être étranger à soi)
du fait d'un contexte politique, social ou économique (par exemple chez Marx,
dans le système capitaliste).
Peut désigner aussi, de manière purement descriptive et non plus critique, le
processus par lequel les hommes cèdent une part de leur pouvoir sur eux-mêmes
254
à l'Etat dans les théories politiques contractualistes (voir Hobbes, Locke ou
Rousseau par exemple).
Apodictique : Caractère nécessaire et universel de la vérité d'une proposition,
d'un jugement.
Se distingue chez Kant de : assertorique (qui est vrai, mais de manière
contingente) et de problématique (qui est seulement possible).

Aporie, aporétique : Un raisonnement est dit aporétique quand il débouche sur


une impossibilité de conclure, de donner une réponse au problème examiné.
L'impasse à laquelle on arrive alors s'appelle une aporie. De nombreux dialogues
de Platon, sont ainsi dits aporétiques en ce que Socrate amène ses interlocuteurs
à remettre en cause leurs opinions premières sur telle ou telle notion, jusqu'à ce
qu'ils prennent conscience de leur ignorance, des contradictions dont ils sont
victimes, du fait de mauvaises définitions de départ. Si une telle découverte ne
produit pas nécessairement un nouveau savoir, au moins a-t-elle la vertu de nous
dévoiler notre ignorance, d'écarter de fausses solutions et de nous engager à
rechercher la vérité.

Arbitraire : Décision prise en contradiction avec les règles ou les lois


existantes
Aristocratie : Terme qui désigne une forme de gouvernement, celui des
"meilleurs" (aristoï en grec ancien signifie effectivement "les meilleurs").
L'aristocratie est une forme d'oligarchie. [diff. Monarchie, Démocratie]

Art : Activité humaine visant à matérialiser par une œuvre souvent sensible
un univers intérieur et à traduire une manière de percevoir, de ressentir,
d’interpréter le monde et ce de manière gratuite.
Ataraxie : Terme d'origine grecque qui désigne "l'absence de trouble" de l'âme
que des écoles philosophiques antiques (stoïcisme, épicurisme, cynisme
notamment) définissent comme étant l'idéal à atteindre dans l'existence. Cette
"tranquillité de l'âme" est atteinte par le sage qui grâce à l'usage de sa raison, à la
philosophie, est parvenu à vaincre les causes des malheurs et des souffrances qui
assaillent les autres hommes (ces derniers sont souvent qualifiés d'insensés parce
qu'ils vivent leur vie sans y penser, sans la penser, sans souci éthique).
On peut cependant relever que le bonheur atteint dans l'ataraxie est un bonheur
essentiellement négatif, en ce qu'il consiste en l'absence des causes de souffrance
et non en l'expérience positive d'un plaisir ou d'une satisfaction.

Athéisme : Croyance niant l’existence d’un ou plusieurs dieux.


Autonomie : Etymologiquement, autonome signifie "qui se donne à soi-même sa
loi". L'autonomie définit une certaine forme de liberté que l'on rencontre souvent
en philosophie. Elle implique qu'être libre ce n'est pas seulement suivre
l'impulsion du moment, "être spontané" comme on dit beaucoup aujourd'hui, mais

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 255


que cela signifie suivre les principes ou règles dont notre raison nous aura montré
la valeur; règles que nous nous sommes données à nous-même. Ainsi la notion
d'autonomie nous permet de voir qu'être libre ce n'est pas agir en l'absence de
toute règle.
Chez Kant par exemple, c'est en obéissant à la loi morale, découverte grâce à
notre raison, que l'homme fait l'expérience la plus sûre de sa liberté.
Chez Rousseau, une formule, utilisée cette fois dans le contexte de la réflexion
politique, exprime de manière nette cette idée de la liberté comme autonomie :
"l'impulsion du seul appétit est esclavage, et l'obéissance à la loi qu'on s'est
prescrite est liberté" (Du Contrat Social, Livre I, chap. VIII)

Autrui : Etre conscient distinct du sujet que j’incarne.


Axiome / Postulat : A l'origine (chez Euclide) : Un axiome est une proposition
non démontrée qui sert de base dans un système déductif et qui est considérée
comme évidente par elle-même. Se distingue dans ce sens-là du postulat qui est
posé à titre d'hypothèse, de manière conventionnelle, sans que l'on se prononce
sur sa vérité ou sa fausseté, et dont la fonction est purement opératoire.
A l'époque moderne, la distinction entre axiomes et postulats tend à disparaître à
mesure que l'approche formaliste l'emporte dans les mathématiques, c'est-à-dire
la tendance à concevoir un système mathématique comme un pur système
hypothético-déductif : La question de sa vérité au sens de son adéquation au réel
n'étant plus posée, le seul critère de la validité dudit système étant alors celui de
sa cohérence interne.

Beauté : Qualité d’une apparence dont la forme suscite une satisfaction intérieure
gratuite qui, en dépit de son caractère indémontrable, s’impose à tous les esprits
avertis.
Besoin : Manque précis qui peut être ponctuellement satisfait.
Bonheur : Dans l’idéal, satisfaction qui accompagne un état de vie conciliant
notre désir, notre bien, nos exigences morales et qui est appelé à durer.
Ça : Dans la théorie de l’inconscient, ensemble des pulsions.
Certitude : Connaissance qui ne peut faire l’objet d’aucun doute possible.
Classe sociale : Groupe humain ayant le même statut par rapport à la propriété
des moyens de production, à savoir les terres et les usines (bourgeoisie ou
prolétariat).
Concret : Réalité relative aux organes des sens.
Condition humaine : Les vécus nécessaires et communs à tous les hommes
(naître sans l’avoir demandé, vivre avec autrui, mourir) mais pouvant être
assumés de manière très diverse.
Conscience : 1) Sens général : Connaissance plus ou moins claire que possède
le sujet du monde qui l'entoure ainsi que de lui-même (du fait qu'il existe, de ce
qui se passe en lui). On parle alors de conscience psychologique. Celle-ci peut-
être immédiate, spontanée ou réfléchie quand le sujet fait retour sur lui-même

256
pour prendre conscience de ses états d'âmes ou d'une situation dans laquelle il est
pris. Le fait que l'homme possède la conscience implique un "recul néantisant"
par rapport au monde, comme dit Sartre, une mise à distance de celui-ci qui
explique que notre présence au monde n'est pas celle des choses : l'homme n'est
pas seulement dans le monde comme n'importe quel objet, mais il se le représente,
il le pense; son rapport à lui est donc toujours, nécessairement, médiat. [Cf. Hegel,
Sartre entre autres.] 2) Sens moral : Faculté qui permet à l'homme de juger du
bien et du mal.

Contingent/Possible/Nécessaire : Ces trois termes désignent trois manières


d'être d'une réalité : Est contingent, ce qui est (ou existe) mais aurait tout aussi
bien pu ne pas être ou être autrement. Est possible ce qui n'existe pas mais pourrait
exister parce que non logiquement contradictoire et/ou compatible avec les lois
de la nature. Nécessaire : ce qui est et ne peut pas ne pas être, ou être autrement.

Contrainte/Obligation : Une contrainte est une force extérieure qui s'exerce sur
un individu et le détermine en proportion de sa puissance. Elle constitue un
obstacle à la liberté ou à la volonté humaine : nous subissons une contrainte. Une
obligation est la conscience d'un devoir, elle est d'ordre moral et implique ma
volonté, ma liberté : quand j'accomplis mon devoir, non par crainte d'une sanction
extérieure seulement, mais parce que je reconnais la légitimité de la règle qu'il
m'impose, je n'agis plus simplement par contrainte, mais je m'oblige. L'obligation
ne s'oppose donc pas comme la contrainte à la liberté : Je choisis dans ce cas
d'obéir.

Convention : Accord implicite ou explicite sur des règles d’action à observer.


Conviction/certitude : Ces deux termes que l'on peut facilement confondre entre
eux, et pire, confondre avec une vérité, sont à distinguer. Une conviction est une
affirmation, une idée à laquelle le sujet qui la possède accorde un fort crédit. Il est
convaincu de sa vérité, a priori parce qu'il y a réfléchi. Cependant, en tant que
telle, une conviction reste subjective et la réflexion qui y a mené peut avoir abouti
à une erreur. Une conviction ne diffère donc d'une simple opinion que par
l'intensité avec laquelle j'y adhère; elle n'est pas plus fondée ou infaillible. Le mot
certitude peut lui, être entendu en deux sens, un sens faible et un sens fort.
- Dans le premier sens, "certitude" est synonyme de conviction : on parlera alors
de certitude subjective. Ainsi je peux dire indifféremment que je suis convaincu
ou que je suis certain que telle personne est sincère, alors qu'il se peut que je me
trompe...
- Dans le sens fort, et plus juste du mot, une certitude désigne une affirmation dont
je sais qu'elle est vraie, parce qu'elle a été démontrée ou prouvée. On pourra parler
de certitude objective ou absolue. Ainsi Descartes peut-il parler de la certitude
absolue du cogito.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 257


Croyance : Acte intellectuel consistant à donner son adhésion à des affirmations
dont on ne peut établir avec certitude la validité.
Culture : Ensemble des réalités matérielles et spirituelles créées par l’homme.
Déduction : Opération logique qui permet de faire découler nécessairement une
proposition de propositions antérieures.
Déisme : Doctrine qui admet l'existence d'un Dieu ou d'un être suprême, mais
sans que cette affirmation soit liée à l'adhésion à des dogmes ou à une révélation,
à la prescription de pratiques ou de rites particuliers. Autrement dit, un déiste
n'adhère à aucune religion.
A distinguer du Théisme.

Démocratie : Régime politique dans lequel la souveraineté appartient au peuple,


ou plus exactement aux membres de la société qui sont définis comme citoyens.
On peut distinguer la Démocratie directe dans laquelle les citoyens exercent
réellement le pouvoir en siégeant dans les assemblées qui détiennent les pouvoirs
exécutif, législatif et judiciaire; et la Démocratie représentative ou parlementaire
dans laquelle les citoyens désignent des délégués, des représentants pour siéger
dans ces assemblées. [dist. Monarchie, Oligarchie]

Déontologique / Conséquentialiste : Ces deux termes appartiennent au


vocabulaire de la philosophie morale. Une morale est déontologique quand elle
évalue les actions en fonction de leur conformité avec des principes, c'est-à-dire
avec des règles posées antérieurement à l'action et que celle-ci doit seulement
appliquer. Une morale est conséquentialiste quand la valeur morale de l'action
est jugée en fonction de ses résultats, ses effets ou conséquences. Ainsi, la morale
kantienne est déontologique en ce que pour elle l'agent doit seulement se soucier
de la conformité de son action avec la loi morale ("Ce qui fait que la bonne volonté
est telle, ce ne sont pas ses œuvres ou ses succès"), sans prendre en compte les
circonstances particulières de l'action; alors que la morale utilitariste est
conséquentialiste, puisqu'il faut se demander avant d'agir si notre action va
contribuer à augmenter ou diminuer le bonheur du plus grand nombre.

Désir : Manque fondamental lié à la condition consciente de l’homme et


qui laisse ce dernier en permanence insatisfait.
Déterminisme : Le principe déterministe affirme que tous les phénomènes sont
liés par des relations de causalité; que tout phénomène peut être considéré comme
l'effet d'une ou plusieurs causes externes. Cette conception rejette l'idée de hasard
("Tout phénomène a une cause"), et est donc au fondement de toute démarche
scientifique. Si ce principe a d'abord été utilisé dans les sciences de la nature, il a
ensuite été étendu à d'autres réalités : la sociologie l'a appliqué aux faits sociaux
(cf les travaux fondateurs de Durkheim sur le suicide); la psychologie aux
phénomènes mentaux (cf en particulier Freud et l'énoncé du principe du

258
déterminisme psychique) En philosophie, l'affirmation du déterminisme pose le
problème de la réalité ou du caractère illusoire de la liberté humaine : l'homme
est-il totalement soumis aux déterminismes ou bien y échappe-t-il d'une manière
ou d'une autre ?

Devoir : Ordre intérieur, provenant de la tradition ou de la raison, que le


sujet se donne (= obligation) et où il s’oppose à ses désirs sensibles afin de tenir
compte de certaines valeurs (celle de la personne humaine chez Kant).
Discursif, discursive : Une pensée ou une connaissance est dite discursive quand
elle a été obtenue ou construite par étapes, en élaborant un raisonnement. Cela
s'oppose à l'idée d'une connaissance qui serait intuitive, l'objet d'une intuition.
[opp. Intuitif]

Dogmatique/Dogmatisme : 1) Sens courant : être dogmatique c'est affirmer


quelque chose de manière catégorique, péremptoire, sans recul critique. Faire
preuve de dogmatisme (sens péjoratif) : manquer d'ouverture d'esprit, de sens des
nuances, être fermé au dialogue et à la critique. 2) Histoire de la philosophie :
terme utilisé par les penseurs sceptiques pour désigner leurs adversaires qui
prétendent pourvoir atteindre la réalité en soi grâce à la raison (alors que les
sceptiques s'en tiennent à la réalité pour nous, aux phénomènes).

Doute : Attitude intellectuelle consistant à ne pas admettre la vérité de certaines


affirmations, soit par méthode (doute méthodique), soit par principe (doute
sceptique).
Droit : Renvoie à l’idée de lois régissant une société, inventées par les
hommes et fixant des limites conventionnelles à notre action.
Droit naturel : Droit non écrit, découlant d’une intuition morale saisissant ce qui,
dans le droit positif, est digne de l’homme.
Droit positif : Ensemble des lois régissant une société.
Economie : Science de la production des biens et des services et de leurs
échanges.
Egalitarisme : Principe de l’égalité totale des conditions matérielles des
hommes, quelles que soient les fonctions sociales occupées.
Empirisme : Doctrine philosophique qui affirme que toutes nos connaissances
viennent de l'expérience, de l'observation, c'est-à-dire ont pour source nos sens.
Les empiristes (Locke, Hume par exemple) nient l'existence d'idées innées en
notre esprit (cf. Descartes au contraire) ou de toute connaissance a priori. L'idée
de causalité par exemple n'est qu'un produit de notre expérience, de l'habitude que
nous avons de voir une chose en suivre toujours une autre. Nous appelons alors la
première l'effet et la seconde la cause.

Epistémologie : Philosophie des sciences ou réflexion critique sur les procédés,


les possibilités et les limites des différentes sciences.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 259


Essence : Ensemble des caractéristiques qui définissent une réalité quelconque.
Esthétique : Philosophie de l’art ; ou ce qui concerne la qualité d’une forme.
Etat de nature : Etat fictif où l’homme vivait hors de toute société humaine
depuis la naissance.
Eternel retour : Conception selon laquelle l’univers actuel est amené à se répéter
indéfiniment et à l’identique. Chez Nietzsche, idée symbolique destinée à
donner au temps présent une valeur absolue.
Exégèse : Science de l’interprétation des textes.
Extrinsèque : Qualité ou caractéristique d'un objet qui lui appartient par accident,
ou plutôt, qui lui est attribuée de l'extérieur par exemple de manière
conventionnelle ou arbitraire.

Fatalité : Idée selon laquelle des forces surnaturelles nous dirigent sans que nous
ayons le choix d’accepter ou de refuser.
Hédonisme : Doctrine faisant du plaisir la fin de toute action humaine.
Heuristique : A la lettre, signifie « qui permet de découvrir » ; une
théorie scientifique permet de découvrir de nouveaux faits.
Idéalisme : 1) Théorie de la connaissance : Courant philosophique qui accorde
aux idées un rôle prééminent dans le réel. Les idées peuvent être soit conçues
comme la véritable réalité par opposition aux apparences sensibles (cf. Platon),
soit comme ce qui ordonne et oriente le monde (cf. Hegel et sa Phénoménologie
de l'esprit ou sa philosophie de l'histoire).
2) Sens moral ou politique : Attitude qui consiste à adopter un point de vue général
et abstrait sur une situation, un phénomène; fait de ne pas assez prendre en compte
la réalité.
Idéologie : Ensemble d’idées de toutes sortes (religieuses, philosophiques,
politiques, morales…) formant une conception du monde. Pour Marx, ces
idées ont pour origine nos conditions matérielles d’existence.
Illusion : Erreur d’appréciation engendrée par le désir que ce soit vrai.
Immanence : Qui est à l’intérieur d’une réalité, qui résulte de sa nature.
Inconscient psychique : Ensemble des désirs interdits, censurés à son insu par
la conscience afin de conserver l’équilibre psychique et qui continuent à colorer
notre vécu.
Induction : Attitude intellectuelle consistant à généraliser à tous les cas ce qui a
été vérifié sans exception dans un certain nombre de cas
Intrinsèque : Qui appartient de manière indissociable à la chose considérée; qui
est inclus dans sa définition ou dans sa nature. [opp. extrinsèque]

Intuition : Du latin intuitus, "regard". Mode d'accès immédiat à la vérité, sans la


médiation d'un raisonnement, la mise en oeuvre d'étapes ou de procédures
intellectuelles pour parvenir au vrai. Saisie du vrai par une sorte de "vision" de
l'esprit.

260
Irrationnel : Soit ce qui est contraire à la réflexion rationnelle (conduite
incohérente) soit ce qui est étranger aux capacités d’explication de la raison
(expliquer une couleur à un aveugle-né).
Justice : Fondée sur l’idée d’égalité naturelle, elle-même fondée sur la
définition de l’homme comme être conscient. A ne pas confondre avec
l’institution judiciaire.
Langage : Système de signes articulés, traduisant la pensée et que l’on peut
combiner en vue de produire des signes en nombre potentiellement infini.
Légalité : Ce qui est conforme à la loi.
Légitimité : Ce qui est conforme aux idées que les hommes se font de la justice.
Libido : Chez Freud, ensemble des phénomènes sensuels ou sexuels.
Libre-arbitre : Capacité de choix d’un sujet conscient
Logique : Science des lois de la pensée et donc du raisonnement correct.
Matérialisme : Doctrine philosophique selon laquelle il n’y a qu’une seule
substance, la matière, substance dépourvue d’intelligence et d’intentions.
Mauvaise foi : Attitude consistant à mentir à autrui sur ses véritables pensées ou
bien à se mentir à soi-même.
Métaphysique : Questionnement philosophique abordant et tentant de
répondre aux questions soulevées par les religions mais à l’aide de la seule raison.
Morale : Ensemble de devoirs et d’interdits réglant les actions humaines dans une
société donnée et ce, en fonction d’un certain nombre de valeurs.
Mythe : Langage symbolique, religieux ou profane, évoquant par des histoires
extraordinaires inventées par les hommes, l’intuition d’un sens transcendant mais
échappant aux capacités de la raison et du langage ordinaire.
Nature : Ensemble des réalités non créées par l’homme.
Nature humaine : Ensemble des comportements normatifs supposés devant être
communs à tous les hommes et qui conduisent à les qualifier d’ « humains » ou
d’« inhumains ».
Nécessité : Caractère de ce qui ne peut être autrement.
Névrose : Trouble mental, au cours duquel le sujet connaît son mal, en souffre
psychiquement, mais ne peut le surmonter.
Nihilisme : Attitude intellectuelle consistant à nier toutes les valeurs.
Chez Nietzsche, attitude consistant à nier la réalité au nom de valeurs morales
imaginaires.
Normal : Etat de ce qui est conforme à des normes (ce qui doit être) soit
sur le plan moral (conforme à des valeurs), soit sur le plan sociologique
(conforme à des comportements dominants) soit sur un plan biologique
(conforme aux caractéristiques génétiques de l’espèce).
Objectivité : Relatif à des jugements qui ne dépendent pas du sentiment de
chacun mais qui s’imposent à tous les esprits car vérifiés par des procédures
incontestées.
Panthéisme : Affirmation selon laquelle tout est Dieu.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 261


Personne : Etre conscient, pourvu d’une responsabilité morale et incarnant
la valeur la plus élevée.
Postulat : Premiers principes indémontrables mais qui paraissaient naturels ou
évidents.
Psychologie : Science des comportements individuels.
Psychanalyse : Thérapeutique visant à briser progressivement les résistances de
la conscience et à faire remonter les désirs interdits et inconscients à la surface de
cette dernière.
Psychisme : Ensemble des phénomènes intérieurs, conscients ou inconscients.
Psychose : Nouveau nom de la folie. Trouble mental où le sujet ne prend pas
conscience de son mal et tend à confondre son imaginaire et la réalité.
Raison : Faculté humaine permettant de penser de manière rigoureuse et
ordonnée en suivant des règles logiques.
Rationalisme : 1) (sens le plus large) Doctrine qui attribue à la raison humaine la
capacité de connaître et d'établir la vérité. 2) Doctrine selon laquelle la
connaissance procède de principes a priori, indépendamment de l'expérience.
(opp. à l'empirisme)

Religion : Activité humaine développant des croyances sur le divin, l’au-


delà, et comportant édifices, rites, organisation sociale avec le plus souvent des
intermédiaires entre les hommes et les dieux, appelés prêtres.
Réincarnation : Croyance des hindouistes et des bouddhistes selon laquelle les
individus n’étant pas encore parvenus à un état de perfection leur permettant
d’échapper à la roue des existences, connaissent des vies successives au sein de
corps différents.
Sacré : Ce qui est relatif au divin et qui qualifie les domaines qui symbolisent sa
présence ou son action.
Scepticisme :1) Dans l'antiquité grecque (IVème siècle av. J.-C.), doctrine selon
laquelle la raison humaine est incapable de parvenir à aucune connaissance ou
vérité. Les sceptiques en concluent que nous ne pouvons rien affirmer au sujet de
rien et qu'il ne nous reste qu'à suspendre notre jugement, c'est-à-dire à pratiquer
l'epochè. (=Pyrrhonisme, du nom du principal représentant de cette école). 2)
Dans un sens plus large et modéré, le scepticisme s'oppose au dogmatisme en
s'opposant à sa prétention à connaître la réalité en-soi des phénomènes, qui plus
est par le seul recours à la raison spéculative.

Science : Depuis le XVII° siècle, activité humaine qui se donne pour


mission d’expliquer les phénomènes de la nature à l’aide d’une méthodologie
expérimentale où la raison et les mathématiques jouent un rôle essentiel.
Solipsisme : Conséquence extrême d'une attitude idéaliste, le solipsisme consiste
à affirmer que la seule réalité est le moi pensant lui-même et que l'existence du
monde extérieur (incluant les autres sujets) n'est qu'une illusion ou représentation
du moi. Aucun philosophe n'a réellement et durablement défendu cette position,

262
mais elle a pu être envisagée comme moment dans une réflexion (cf. en particulier
Descartes, deuxième Méditations métaphysiques).

Sublimation : Processus psychique par lequel le sujet trouve des


satisfactions socialement reconnues, transformant ainsi l’énergie des désirs
interdits en réalisations culturelles.
Subjectivité : Ce qui est relatif au vécu individuel ou à la pensée d’un sujet, mais
dont aucune procédure ne permet d’attester la validité.
Surhomme : Selon Nietzsche, l’homme pour qui l’absence de vérité est un « gai
savoir ».
Sur-moi : Ensemble des interdits inconscients.
Technique : Ensemble de procédés matériels ou intellectuels permettant
d’aboutir à des objectifs précis.
Téléologique : Qui concerne ou suppose un rapport de finalité.

Théologie : Science religieuse qui, en se fondant sur les données de la foi,


systématise ces dernières à l’aide de la raison.
Théodicée : (de théos, Dieu et dikè, la justice) Tentative pour rendre compte,
grâce à la raison, du paradoxe de l'existence du mal et de l'existence d'un Dieu à
la fois pensé comme Bon, Tout-puissant et Omniscient. La théodicée la plus
célèbre est l'œuvre de Leibniz qui dans l'ouvrage du même nom tente de concilier
ce qui parait irréconciliable. Ce qui lui vaudra d'être plus tard raillé et caricaturé
par Voltaire dans Candide. On peut considérer d'autre part, que les philosophies
de l'histoire (notamment celles de Kant ou Hegel) ont été aussi des formes de
théodicées, mais pensées cette fois dans le temps

Totalitarisme : Système politique et social où une idéologie officielle, par la


médiation d’un parti unique contrôle l’ensemble des activités sociales et les
contraint à se conformer aux normes de cette idéologie.
Transcendance : Ce qui est relatif au divin, à l’absolu et qui renvoie à des vérités
objectives.
Transcendantal : Concerne les structures a priori de la connaissance chez
l’homme.
Travail : Activité propre à l’homme et ayant pour objectif de s’adapter à
la nature et d’adapter la nature à ses besoins.
Utilitarisme : Doctrine morale selon laquelle l’intérêt collectif est le lien social à
privilégier et le fondement des relations morales.
Utopie : Idéal formé à une époque donnée, irréalisable immédiatement et
destiné à ne l’être jamais à cause des changements d’idéaux à travers le temps.
Vérité : Jugement portant sur l’existence d’un fait (jugement de fait) ou sur
l’appréciation portée sur un fait (jugement de valeur) et dont on affirme qu’il est
effectivement conforme à la réalité évoquée.

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 263


Vérité formelle : Concerne la rectitude du raisonnement indépendamment
de la vérité de son contenu.
Vérité logique : Enoncé qu’on peut justifier par des raisons précises et dont
on comprend la nécessité.
Volonté : Faculté humaine hypothétique permettant à un sujet d’effectuer des
choix.
Volonté générale : Volonté qui devrait être unanime dans l’idéal car exprimant
les conclusions de la raison lorsqu’elle se met au point de vue de l’intérêt général.
Volonté de puissance : Chez Nietzsche, énergie qui habite toute vie et qui
pousse les êtres à vivre, voire chez les meilleurs à accroître leurs capacités de
vie.

264
CONNECTEURS LOGIQUES

Le discours philosophique demande une rigueur et une cohérence, qui suppose de


bien maîtriser les connecteurs logiques. On appelle connecteurs logiques les mots
et expressions qui servent à enchaîner les idées, à construire l’argumentation, le
discours. En voici quelques-uns, qui à coup sûr, vous aideront à bien rédiger vos
sujets de philosophie.

Addition: Et / De plus / Puis / En outre / Non seulement... mais encore


Alternative : Ou / Soit… soit / Soit… ou / Tantôt… tantôt / Ou… ou /Ou bien /
Seulement… mais encore / L’un… l’autre / D’un côté… de l’autre
But : Afin que / Pour que / De peur que / En vue de / De façon à ce que
Cause : Car / En effet / Effectivement / Comme / Par / Parce que Puisque /
Attendu que / Vu que / Etant donné que / Grâce à / Par suite de / Eu égard à / En
raison de / Du fait que / Dans la mesure où / Sous prétexte que
Comparaison : Comme / De même que / Ainsi que / Autant que / Aussi… que
Si… que / De la même façon que / Semblablement / Pareillement / Plus que /
Moins que / Non moins que / Selon que / Suivant que / Comme si
Concession : Malgré / En dépit de / Quoique / Bien que / Alors que / Quelque
soit/ Même si / Ce n’est pas que / Certes / Bien sûr / Évidemment / Il est vrai que
/ Toutefois
Conclusion : En conclusion / Pour conclure / En guise de conclusion / En somme
/ Bref / Ainsi / Donc / En résumé / En un mot / Par conséquent / Finalement /
Enfin / En définitive.
Condition, supposition : Si / Au cas où / A condition que / Pourvu que / A moins
que / En admettant que / Pour peu que / A supposer que / En supposant que / Dans
l’hypothèse où / Dans le cas où / Probablement / Sans doute / Apparemment.
Conséquence : Donc / Aussi / Partant / Alors / Ainsi / Par conséquent / si bien
que /
D’où / En conséquence / Conséquemment / Par suite /C’est pourquoi / De sorte
que / En sorte que /De façon que/ De manière que / Si bien que / Tant et

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 265


Classification, énumération : D’abord / Tout d’abord / En premier lieu /
Premièrement / En deuxième lieu / Deuxièmement / Après / Ensuite / De plus /
Quant à / En troisième lieu / Puis/En dernier lieu / Pour conclure / Enfin.
Explication : Savoir / A savoir / C’est-à-dire / Soit.
Illustration : Par exemple / Comme / Ainsi / C’est ainsi que / C’est le cas de /
Notamment / Entre autre / En particulier.
Justification : Car / C’est-à-dire / En effet / Parce que / Puisque /En sorte que/
Ainsi / C’est ainsi que / Non seulement… mais encore / Du fait de
Liaison : Alors / Ainsi / Aussi / D’ailleurs /En fait /En effet /De surcroît /De même
/ Également / Puis / Ensuite.
Opposition : Mais / Cependant /Or / En revanche /Alors que / Pourtant / Par
contre / Tandis que / Néanmoins / Au contraire / Pour sa part / D’un autre côté /
En dépit de / Malgré / Au lieu de.
Restriction : Cependant / Toutefois / Néanmoins / Pourtant / Mis à part / Ne…
que / En dehors de / Hormis / A défaut de / Excepté / Sauf / Uniquement /
Simplement.
Temps : Quand /Lorsque / Comme / Avant que / Après que / Alors que / Dès lors
que / Tandis que Depuis que / En même temps que / Pendant que / Au moment
où.

266
BIBLIOGRAPHIE
 ALBERT MENDIRI, Cours de philosophie, Editions Scripta, 2010.
 AZOMBO-MENDA, Les philosophes africains par les textes, Nathan,
1978.
 EBENEZER NJOH MOUELLE, De la médiocrité a l’excellence,
Les éditions du Mont-Cameroun, 1988.
 HILARION NGOA MEBADA, La philosophie en Afrique, Les
classiques camerounais, 2008.
 MARCIEN TOWA, Essai sur la Problématique philosophique dans
l’Afrique actuelle, clé, 1971.
 PLATON, Apologie de Socrate, Hatier, 1993.
 CAHIER DU DEPARTEMENT DE PHILOSOPHIE N°4 & N°5
 P. Serange et J.-J. Marimbert, Méthode de la dissertation en
philosophie Terminales l/es/s, 2009

PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016 267


TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS………………………….…….…….………………………………...03
PREAMBULE………………………………….….……………………………..…….……04

PREMIERE PARTIE : LA DISSERTATION….…………………………………………05


A- Méthodologie de la dissertation …………………………………………………….…..06
B- Exercices pratiques …………………………………………………………………..…28
C-Quelques sujets……………………………………………………………..……………..76

DEUXIEME PARTIE : LE COMMENTAIRE DE TEXTE……………..………………82


A- Méthodologie du commentaire de texte………………………………………………...83
B- Exercices Pratiques……………………….......…………….…………………….…...…86

TROISIEME PARTIE : ETUDE DES ŒUVRES……………..…………………...……108


A- Platon, Apologie de Socrate…………………………..……..………………..…..…….108
B- Marcien Towa, L’essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle..111
C- Ebénézer Njoh Mouelle, De la Médiocrité à l’excellence…………………...……...…117

QUATRIEME PARTIE : RECUEIL DE TEXTES………………………...……………123


A- Platon, L’apologie de Socrate……………...…...…………………...…………………123
B- Marcien Towa, L’essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle...133
C- Ebénézer Njoh Mouelle, De la médiocrité à l’excellence……………..…………….…152
CINQUIEME PARTIE : ANCIENS SUJETS D’EXAMENS CORRIGES………....…190

SIXIEME PARTIE : RECUEIL DE CITATIONS ……………………………..……….230


VOCABULAIRE ELEMENTAIRE………….………………………………………...…254
CONNECTEURS LOGIQUES…………………………………………………………....265
BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………....………………267

268
Cet opuscule n’a nullement pour prétention de dispenser les élèves
(futurs candidats au Baccalauréat) de lire intégralement les différentes
œuvres au programme. Au contraire, il est une invitation à les lire
scrupuleusement. Il s’agit ici ni plus, ni moins que d’un outil de travail
utile pour tous ceux qui se sont préalablement familiarisés aux œuvres
au programme.
Comme tout exercice, la dissertation et le commentaire de texte
philosophique ont leurs exigences méthodologiques, la connaissance et
la maîtrise de celles-ci par le candidat est une nécessité en vue du succès
à l’examen. Par cet opuscule, nous lui permettons tout simplement
de prendre connaissance des règles à appliquer vis-à-vis de ces
exercices. Nous mettons ici de nombreux sujets et textes à la disposition
du futur candidat. Notre objectif, n’est pas de proposer des sujets
et des textes corrigés aux candidats, mais de les aider à développer
des compétences propres. Ils pourront dans cette perspective
solliciter l’accompagnement de leurs enseignants respectifs, qui ne
manqueront certainement pas d’éclaircir ici et là, les points d’ombres
qui demeurent presque toujours dans l’apprentissage de toute discipline
nouvelle.
Nous restons ouverts aux suggestions et aux sollicitations que
pourront-nous adresser les différents utilisateurs de cet opuscule.

Enseignant, diplômé de l’Ecole


Normale Supérieure de Yaoundé et
titulaire d’un Master en philosophie
des sciences et logique. OLOMO P.
Stanislas poursuit actuellement ses
recherches doctorales à l’Université
de Yaoundé I

PRIX UNIQUE 3500 FCFA


PHILOSOPHIE SINE QUA NON 2016
DOUG EDITION 269

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