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Revue Marocaine d’évaluation et de la recherche éducative RMERE.

Numéro spécial. Actes du colloque international :


INNOVATION PÉDAGOGIQUE & EMPLOYABILITÉ :
QUELLES PRATIQUES FORMATIVES A L’UNIVERSITÉ ?

La pédagogie de la complexité : une voie optimale pour


acquérir les compétences du troisième millénaire
The pedagogy of complexity: an optimal way to acquire
the skills of the thirdmillennium
Ouassou Ali
Equipe de recherche “Sociolinguistique de la complexité”, Laboratoire Langue,
communication, pédagogie- Développement (LCP- D), FLSH- Marrakech
a.ouassou@uca.ac.ma

Résumé
Aujourd’hui, une poignée de pays a assuré son passage d’une société industrielle de
production à celle de l’information et du savoir alors que la majorité de l’humanité, dont le
continent africain, essaie tant bien que mal d’entrer dans l’ère de l’industrialisation. Si le
capital a pris la place des ressources naturelles, il y a deux siècles, la prédilection, mais aussi
la nécessité de la société du troisième millénaire est l’informationdevenue, à la fois, source et
instrument des pouvoirs politique, économique, social, culturel et scientifique.
Il est donc urgent de procéder à des transformations foncières prenant en considération
l’impact des technologies de l’information sur le développement et se traduisant en
« politiques opérationnelles tenant compte », Selon Mahdi El Mandjra, de certains éléments
dont ce rôle capital que peuvent jouer les ressources humaines ; « le rôle fondamental de la
Recherche et du Développement » ; « la dimension essentielle des valeurs socioculturelles »
et surtout « la transformation des structures mentales par l’éducation ».
Aussi, les brassages de populations de par le monde sont de plus en plus favorisés et
complexes et l’étude des situations, caractérisées par la diversité linguistique et culturelle, qui
en découlent n’est plus possible sans une refonte des théories, approches et méthodes
d’analyse « traditionnelles » d’autant plus que, d’après plusieurs spécialistes, nos
établissements de formation continuent à dispenser des enseignements et à préparer nos
apprenants/étudiants à des métiers qui seront obsolètes dans un futur proche.
Désormais, les nouvelles compétences du monde « post-moderne » versent dans la
transdisciplinarité, le plurilinguisme, le pluriculturalisme et la polyvalence. Ainsi, dans un
effort épistémologique, nous nous inscrivons dans un nouveau champ « disciplinaire », « la
pédagogie de la complexité » laquelle nous servira de cadre théorique pour étudier les
situations complexes de manière systémique, dynamique et innovante.
Mots-clés : Compétences du troisième millénaire, contextualisation, information, « Pédagogie de la
complexité », savoir.
Abstract:
Today, a handful of countries have ensured their transition from an industrial society of
production to that of information and knowledge whereas most of the humanity, including the
African continent, is doing its best to access the era of industrialization. Though capital took
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over natural resources two centuries ago, the predilection, but also the necessity of the third
millennium is information that has become both the source and instrumentof political,
economic, cultural and scientific powers.
It is therefore urgent to carry out innate transformations that consider the impact of
information technologies on development and become " accountable operational policies ",
according to Mahdi El Mandjra, certain elements including this crucial role that human
resources can play; "the fundamental role of Research and Development"; "the essential
dimension of socio-cultural values" and above all "the transformation of mental structures
through education".
Moreover, the mixing of populations around the world is increasingly favored and complex
and the study of situations, characterized by linguistic and cultural diversity that derive, is no
longer possible without a redesign of the "traditional" theories, approaches and methods of
analysis. Especially that according to several specialists, our training institutions continue to
provide teaching and prepare our learners/students for occupations that are obsolete in the
near future.
From now on, the new skills of the "post-modern" world are pouring into transdisciplinarity,
plurilingualism, pluriculturalismand versatility. Thus, in an epistemological effort, we are
entering a new "disciplinary" field, "the complexity pedagogy" which will serve as a
theoretical framework for us to study complex situations in a systemic, dynamic and
innovative way.
Keywords: Complexity Pedagogy, contextualization, third millennium skills, information, knowledge.
I. INTRODUCTION
Depuis 1990, une poignée de pays avait déjà assuré son passage d’une société industrielle de
production à celle de l’information et du savoir alors que la majorité de l’humanité, dont le
continent africain, essaie tant bien que mal d’entrer dans l’ère de l’industrialisation. Si le
capital a pris la place des ressources naturelles, il y a deux siècles, la prédilection, mais aussi
la nécessité de « la Société du troisième millénaire » est l’information devenue, à la fois,
source et instrument des pouvoirs politique, économique, social, culturel et scientifique.
Il est donc urgent que des pays comme le Maroc procèdent à des transformations foncières
prenant en considération l’impact des technologies de l’information sur le développement et
se traduisant en « politiques opérationnelles tenant compte », Selon Mahdi Elmandjra1, de
certains éléments dont ce rôle capital que peuvent jouer les ressources humaines ; « le rôle
fondamental de la Recherche et du Développement » ; « la dimension essentielle des valeurs
socioculturelles » et surtout « la transformation des structures mentales par l’éducation ».
Aussi, les brassages de populations de par le monde, sont de plus en plus favorisés et
complexes et l’étude des situations, caractérisées par la diversité linguistique et culturelle, qui
en découlent n’est plus possible sans une refonte des théories, approches et méthodes
d’analyse « traditionnelles » d’autant plus que, d’après plusieurs spécialistes, nos
établissements de formation- ô combien concernés par la diversité précitée- continuent à
dispenser des enseignements et à préparer nos apprenants/étudiants à des métiers dont une
grande partie sera obsolète dans un futur proche.
1
Elmandjra, M. (1996), La Décolonisation culturelle. Défi Majeur du 21ème siècle. Editions Walili, Marrakech
Futuribles, Paris, P. 24.

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Dans ce nouveau contexte, quand bien même notre système éducatif national essaierait plus
que jamais de rester au diapason de ceux (systèmes éducatifs) des sociétés dites « post-
modernes », il n’arrive pas encore à être en phase avec lui-même et à répondre d’abord aux
énormes besoins intra-muros.
La problématique étant précisée, nous essaierons à travers cette recherche de mettre en relief
les diverses lacunes et problèmes dont souffre le système éducatif marocain ; il s’agira ici des
institutions publiques et l’accent sera mis sur les problèmes langagiers et ceux d’ordre
pédagogique. Nous procéderons aussi à une critique constructive de quelques remédiations
proposées par les protagonistes du domaine. Enfin, nous tenterons de tracer, ne serait-ce qu’à
traits grossiers, les contours et caractéristiques d’un modèle pédagogique, prélude de
l’avènement de « l’Université du troisième millénaire », lequel nous soumettrons à
l’appréciation de nos pairs.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous tenons à préciser que la présente recherche se veut
transdisciplinaire, puisqu’elle fait appel à la sociolinguistique variationniste, interactionnelle,
etc.- Labov W. (1975), Messaoudi L. (2003et 2016), Gumperz J. J. (1989) et à la pédagogie
de la complexité- A. Amime (2016, 2019).
II. PROBLEMES DU SYSTEME EDUCATIF MAROCAIN
D’après les derniers rapports du Programme des Nations Unies pour le Développement
(PNUD), le Maroc continue à faire partie des pays à faible indice de développement (IDH) 2,
relativement à certains indicateurs dont le niveau d’instruction, le revenu, la santé, la
pauvreté, l’état d’avancement des traités sur les droits de l’homme, la sécurité humaine et
l’éducation à titre d’exemples. La situation est d’autant plus critique que les tensions sociales
ne cessent de s’accentuer, le fossé entre les différentes couches de la société s’approfondit de
plus en plus et la réticence et le manque de confiance se font de plus en plus sentir concernant
la relation entre les citoyens et les institutions (politiques, juridiques, économiques,
éducatives, etc.).
A. Troisième millénaire et l’épineuse question linguistique
La société du troisième millénaire, celle de l’information et du savoir, ne cesse de s’adapter
aux vents nouveaux qui n’arrêtent pas de secouer les fondements des sociétés dites
traditionnelles et/ou tiers-mondistes en touchant au passage tous les domaines de la vie
sociétale, à commencer par celui de l’éducation, notre terrain de prédilection. Chacun cherche
alors à protéger son identité, ses richesses naturelles et son patrimoine culturel et immatériel
tout en s’ouvrant inéluctablement sur l’Autre où qu’il soit, sans distinction de race, de religion
ou de langue.
Au centre de ce patrimoine mondial, la langue fait figure de grande star. Ainsi, quel que soit
le qualificatif que nous pouvons lui associer (première/(maternelle), seconde, nationale,
étrangère, internationale, minorée, dominante, etc.), la langue- dans le sens de « tout système
de phonèmes, en nombre fini, régi par des règles et permettant la communication au sein
d’une communauté humaine donnée relativement à une dimension spatio-temporelle bien
précise »- a droit de cité et de maintien au nom de/du : droit à l’éducation, droit à une identité
nationale, à l’égalité des chances, à la sauvegarde du patrimoine linguistique mondial, à la
diversité culturelle et linguistique, la cohésion internationale, etc. Il n’est pas inutile d’ajouter
2
Ibid. P. 23.

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que cette responsabilité, dépassant le cadre de la tribu, la commune, la région, l’Etat ou même
les groupements d’Etats, incombe à la Communauté internationale tout entière.
a. Quid du Maroc ?
Si la question de l’enseignement des langues et des langues de l’enseignement est centrale
dans tout système éducatif, elle se pose avec beaucoup plus d’acuité, voire de manière
pernicieuse, dans le cas d’un pays plurilingue et pluriculturel comme le Maroc.
Pour s’en rendre compte, il suffit de souligner que les systèmes linguistiques de
l’enseignement/apprentissage sont différents des langues premières des élèves/étudiants ;
chose qui complexifie les modalités d’acculturation à l’écriture scolaire/universitaire, surtout
dans le domaine des sciences exactes, et compromet sérieusement les chances de réussite de
nos élèves/étudiants dans leur parcours scolaire/universitaire.
L’enseignement des langues et les langues de l’enseignement sont au cœur des principaux
problèmes entravant le bon fonctionnement du système éducatif marocain, surtout au niveau
universitaire. Les « politiques linguistiques », proposées pour redresser la situation, ne cessent
de se succéder et s’alterner sans jamais apporter de réponse positive et/ou de remédiation
viable aux « méta-fractures sociolinguistiques » qui hypothèquent l’avenir des étudiants.
La situation est d’autant plus délicate que le Maroc doit rester au diapason de la société du
troisième millénaire, celle de l’information et du savoir, dont les mots d’ordre sont
plurilinguisme, pluriculturalisme et transdisciplinarité ; pour ne citer que les éléments
intéressant directement l’intelligence de la présente recherche. En d’autres termes, comment
prôner le plurilinguisme et le pluriculturalisme au niveau de la macro échelle universelle- ceci
étant la condition sine qua non à l’inscription de la société marocaine dans l’ère post
industrielle- alors que les problèmes relatifs à la gestion de la diversité linguistique et
culturelle à l’échelle locale nationale demeurent toujours d’actualité ?
b. Analyse de quelques propositions
b.1. Concept de« Fracture linguistique »
Devant la pléthore de termes dénotant la cacophonie dans laquelle sont plongées les personnes
en charge de la question linguistique marocaine et des problèmes qu’elle pose, il a fallu
clarifier cette ambigüité qui plane autour d’expressions vagues comme
« Enseignement/apprentissage des langues » / « Langues de l’enseignement/apprentissage ».
En effet, l’expression « Enseignement des langues » pose un grand problème quand il s’agit
des filières scientifiques et techniques. Ici, il est incommode de parler de « Enseignement des
langues » car l’objet premier des études relevant des sciences dites dures ou exactes renvoie
aux concepts scientifiques et techniques et non linguistiques.
Dès lors, nous sommes dans l’obligation de lever l’équivoque et trouver d’autres appellations
plus claires et l’expression « Fracture linguistique », notamment, est née dans l’espoir de
régler quelques problèmes d’ordre langagier, surtout en matière d’enseignement scientifique
et technique.

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Ici, la « Fracture linguistique »3 concernerait la discontinuité dans la langue d’enseignement


assuré en arabe standard (AS)- durant tous les cycles préuniversitaires- qui passe le relais au
français (Fr) de manière brusque et exclusive au niveau des études supérieures ; chose qui
provoque une sorte de hiatus/fracture apparemment linguistique
Cette expression semble circonscrire les choses certes mais, le concept demeure flou et
déroutant pour les raisons que nous expliquerons ultérieurement quand nous aurons abordé le
volet pédagogique.
b.2. L’alternative linguistique, version « Bachelor »
Depuis l’indépendance du Maroc, la question linguistique s’est imposée comme l’éternel sujet
qui alimente débats et polémiques qu’on ravive au gré des aléas politiques, économiques,
idéologiques, etc. et l’« Arabisation » en est l’épicentre.
L’alternance des avis, positions et discours a donné lieu à un output affiché depuis fort
longtemps par les protagonistes de l’aménagement linguistique, à savoir les bienfaits de
l’ouverture sur les langues étrangères. Quand bien même cette prise de conscience serait
salvatrice, elle a fini par accentuer l’hégémonie des langues étrangères et marginaliser à
jamais les langues nationales, l’AS, en premier lieu et l’amazigh (AM) par la suite- en somme
les langues « officielles » du Maroc.
Aujourd’hui encore, la stigmatisation des langues nationales est à l’ordre du jour, ceci au nom
d’une alternative présentée comme une sorte de bouée de sauvetage dont se serviraient nos
apprenants pour se prémunir d’une noyade annoncée. Il s’agit bien du Bachelor, nouveau
Diplôme et fruit de ce système en vogue dans les pays anglo-saxons.
Les langues ont une place particulière dans ce nouveau système et sont mises au même pied
d’égalité que les matières fondamentales ; chose qui ne manque pas de poser certains
problèmes.
Quels sont les premiers éléments relatifs au volet linguistique des langues- version Bachelor ?
La première année est une sorte de transition. Elle vise à faciliter l’intégration de l’étudiant
dans le cursus universitaire (organisé en unités de valeurs (UV), 240 au total, soit 60 UV par
année).
Elle sera axée essentiellement sur les langues étrangères qui sont au nombre de trois (le
français, l’anglais et l’espagnol), les soft skills, …, en plus des matières fondamentales qui
seront enseignées.
Des tests de langues seront dispensés à l’entrée universitaire pour fixer le niveau des étudiants
et l’obtention du niveau B2 (ou équivalent) dans les différentes langues devient une condition
sine qua none pour l’obtention du Bachelor.
Ceci dit, l’alternative « Bachelor » relativement au volet linguistique, du moins, pose
d’énormes problèmes que nous ne manquerons pas de soulever une fois avoir abordé le volet
purement pédagogique.

3
Messaoudi, L. (2016), « La fracture linguistique dans l’enseignement scientifique au Maroc : quelles
remédiations ? », Revue Langues, cultures et sociétés, Volume 2, n°1, pp. 69-85, IMIST, Rabat.

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III. DIFFICULTES EN MATIERE DE PEDAGOGIE ET DE


DIDACTIQUE
A la suite d’Amsidder4, nous tenons à mettre en relief ce fossé, pour ne pas dire ce gouffre,
énorme entre la recherche théorique sur les langues nationales et le domaine de
l’enseignement/apprentissage des langues. Disons le franchement et sans ambiguïté, la
didactique au Maroc, quand elle a droit de cité, ne fait qu’importer des modèles théoriques,
conçus pour d’autres langues et d’autres contextes, qu’elle essaie d’appliquer machinalement
à ses langues nationales lesquelles se retrouvent réduites à de simples terrains
d’expérimentations infirmant ou confirmant ce qui a été importé. Amsidder ne manque pas de
dénoncer cette sorte « d’orientalisme didactique » dont se servent certains pseudo-intellectuels
pour tester la validité de telle ou telle théorie ou hypothèse venue d’ailleurs au lieu de se
consacrer à l’étude de nos langues nationales en elles-mêmes et pour elles-mêmes.
Nous nous demandons aussi pourquoi la majorité de nos chercheurs, parmi les didacticiens,
les linguistes et autres socio-didacticiens des langues, se contentent de faire de la théorie et
des « recherches de cabinet » alors que d’un point de vue épistémologique toutes ces
disciplines, dont ils sont spécialistes ou supposés l’être, prônent et défendent
l’interdépendance entre théorie et pratique.
Il est obligatoire de réduire ce gouffre, existant entre la Recherche théorique sur le répertoire
langagier national et l’enseignement/apprentissage des langues de telle sorte que la socio-
didactique au Maroc puisse concevoir ses propres modèles au lieu de tout importer. Précisons
à ce sujet que s’il est vrai que les échanges et les partenariats dans le cadre d’une coopération
bi-ou multilatérale est une nécessité, dans la société des humains, il faudrait tout de même
veiller à ce que les transferts de théories, de méthodologies et de tout autre modèle ne se fasse
plus à sens unique sans aucune prise en considération des contextes dans lesquels ils sont
appelés à évoluer. Il ne nous est plus possible non plus de continuer, par mimétisme ou sous
n’importe quel autre prétexte, à expérimenter une multitude de méthodologies, devenues la
plupart du temps obsolètes sous d’autres cieux, dans des intervalles de temps très rapprochés ;
chose qui ne colle pas d’ailleurs avec le domaine de l’enseignement et de l’éducation dont les
politiques s’inscrivent forcément dans la durée pour pouvoir donner des résultats
satisfaisants, fiables et évaluables.
Le Maroc fait partie de ces pays où l’on enregistre malheureusement « une succession de
méthodologies en l’espace de quelques années : une nouvelle approche est parfois introduite
sur le terrain avant même que les acteurs sociaux de l’éducation aient pu prendre la mesure de
celle qui la précédait. »5
Pour s’en rendre compte, il suffirait de rappeler que les autorités en charge du domaine de
l’éducation et de la formation ont mis en place, en 2003, le « Système LMD ». Ce dernier a
été adopté de manière hâtive, comme à l’accoutumée, sans aucune prise en considération des
conditions nécessaires à son opérationnalisation. Aujourd’hui, encore une fois, les
responsables de ce grand secteur vital de la vie sociétale, qu’est l’éducation et la formation,

4
Amsidder, A. (2000), « La problématique des langues maternelles au Maroc. », dans Langues maternelles et
enseignement apprentissage des langues étrangères au Maroc (Coordination AMSIDDER A.), Université Ibn
Zohr, Faculté des lettres et des sciences humaines, Agadir.
5
http://www.univ-paris3.fr/contexte-global-contextes-locaux-tensions-convergences-et-enjeux-en-didactique-
des-langues-246973.kjsp

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proposent un autre système, le « Bachelor » sans même avoir pris la peine d’évaluer « le
système LMD ».
S’il est vrai que l’Etat essaie tant bien que mal, depuis des décennies, de dépasser cet état de
léthargie en proposant, prônant et soutenant de grands chantiers structurants, les résultats
demeurent insignifiants ; chose qui appelle de notre part la contribution à des propositions de
solutions innovantes car devant s’inscrire à la fois dans les cours, moyen et long termes et
mobiliser par là même toutes les forces vives de la nation afin de gagner en efficacité et en
efficience et remédier aux clivages socioculturels, de manière systémique.
Il ne suffit pas alors de démocratiser l’Information, laquelle est devenue la matière
première de la Société du Troisième Millénaire, mais, de faire en sorte qu’elle se transforme
en Savoir accessible à toutes et à tous.
A partir de là, il serait légitime de souligner, à la suite du philosophe Michel Serres,
que toute la société devient pédagogique, parce que tout est message et qu’« On n’a jamais eu
autant besoin des enseignants ! »
En tant qu’enseignant chercheur en sociolinguistique, communication et pédagogie,
nous sommes appelé à mieux nous servir des avancées affichées par nos semblables et des
possibilités offertes par les «Techniques d’information et de communication », TIC, pour
appliquer une pédagogie active, individualisée, profitable et utile à tous les citoyens. Tel est
l’un des principaux objectifs de nos recherches scientifiques.
Enfin, pour mieux faire écho à la grande complexité de la situation sociolinguistique
marocaine, nous puiserons l’essentiel de notre arsenal théorique dans un nouveau champ
disciplinaire qu’est la « Pédagogie de la complexité ».
A- La pédagogie de la complexité (PC)
L’adhésion et l’inscription de notre pays dans la société du troisième millénaire nous impose
de relever un double défi :
- relativement à la micro-échelle (à l’intérieur de la société marocaine) : il faudrait maintenir
la relation ombilicale et réciproque entre l’(les) individu(s) et la société ;
- au niveau de la macro-échelle (entre le Maroc et le reste du Monde) : le local (spécifique au
Maroc) devra se nourrir de l’universel et inversement.
Pour ce faire, nous soulignons que ce nouveau champ transdisciplinaire (PC)) revisite, de
manière on ne peut plus innovante, le concept de « Pédagogie » en le présentant sous une
forme nouvelle (plus riche et réaliste) faisant écho avec la notion de « Complexité » et des
paradigmes y afférents.
Désormais, la PC instaure une vision complexe et systémique ; en somme, une « Approche
scientifique » et logique des phénomènes sociétaux dont les principales caractéristiques sont :
diversité et complexité.
Au risque d’être redondant, nous nous contenterons de dire que la PC concilie ouverture sur
l’autre (selon un continuum allant du local à l’universel, en intégrant tous les ingrédients de la
diversité, ne serait-ce que parce que son point de départ est anthropologique) et spécificité
marocaine (qui ne veut dire aucunement fermeture et repli sur soi).

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Sur le plan méthodologique, il ne s’agira aucunement de prôner une méthodologie particulière


ou de se figer dans telle orientation ou telle ou direction. Ladite nouvelle Pédagogie jouit
d’une grande souplesse et d’une fluidité lui permettant d’approcher intelligemment et de
manière transversale tous les contextes sociétaux possibles, aussi complexes et différents
soient-ils sur les plans culturel, cultuel, politique- linguistique, économique, géographique,
historique, philosophique, etc. Réussir à mettre en relief les systèmes sous-jacents présidant
au fonctionnement complexe de la société, tel est l’objectif ultime de la PC et « la Pédagogie
des contextes complexes marocains », expressions que le pédagogue Abdeljalil Amime6 et
nous même avons « créées » et sommes les premiers à en faire usage, du moins au Maroc.
La PC tire sa plus grande originalité du fait qu’elle s’adresse aussi bien aux individus qu’aux
institutions, abstraction faite de tous les traits les distinguant et des environnements dans
lesquels ils évoluent. Il s’ensuit que, de nos jours, les Facultés et autres institutions prenant en
charge les « sciences de l’éducation » ou qualifiées de pédagogiques se multiplient dans le
souci de mettre sous le microscope des chercheurs tout ce qui est susceptible de permettre le
développement tous azimuts de l’Homme.
Décidément, la PC est un hymne à cette nouvelle anthropologie du troisième millénaire visant
le « Développement de l’Homme » ; elle en est l’un des principaux catalyseurs.
Quant à la didactique7, l’une des principales embouchures de la pédagogie, vue sous l’angle ô
combien ouvert de la complexité, elle est traversée de fond en large par la pédagogie tant cette
dernière lui transmet tous ses caractères génétiques quel qu’en soit l’ordre (épistémologique,
théorique, méthodologique, etc.) et la visée (éducative, incitative, influente, « remédiatrice »,
développante, etc.).
Il va sans dire que cette relation ombilicale entre Pédagogie et Didactique est une sorte de
décentralisation et de déconcentration du fait pédagogique à chaque fois que celui-ci est
appelé à se manifester à travers un acte didactique dont la « contextualisation » est tributaire
d’un faisceau de facteurs complexe, organisé de manière systémique et difficilement
saisissable car vivant et mouvant. Dorénavant, tout acte didactique est forcément pédagogique
mais, la réciproque n’est pas vraie tant la didactique (générale et/ou particulière) demeure
l’apanage, la chasse gardée de l’enseignement et constitue de ce fait l’une des innombrables
ramifications de la Pédagogie.
En d’autres termes, la didactique seconde la pédagogie en ce sens qu’elle s’occupe de la
théorisation et de la mise en pratique de l’enseignement/apprentissage des contenus, ceci à
travers les réponses possibles à des questions légitimes (en rapport avec les contenus)
embrassant les dimensions d’ordre conceptuel et méthodologique, à savoir : Quoi enseigner ?
Comment (l’) enseigner ?
B. De quelques apports de la pédagogie de la complexité
a. Qu’en est-il de « la fracture linguistique » (FL), vue sous le prisme de la PC ?

6
Amime, A. (2016), Madkhal ilâ lbîdâghûjyâ wa ʕulûm attarbiyya ruʾya tarbawiyya mughâyira, fī ttaʾsîs
libîdâghûjyâ ssiyâqâti lmaghribiyyati lmurakkaba, Première partie. Publications du Laboratoire LCP, Marrakech.
7
Amime, A. (2019), Madkhal ilâ lbîdâghûjyâ wa ʕulûm attarbiyya ruʾya tarbawiyya mughâyira, fī ttaʾsîs
lidîdâktīki ssiyâqāâi lmaghribiyyati lmurakkaba, Deuxième partie. Publication Laboratoiore LCP, Marrakech.

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Rappelant que la PC est transdisciplinaire, nous soulignerons que ce nouveau champ


scientifique repose sur certains principes (P) que nous effleurerons en partie pour traiter de la
FL en commençant par mettre en relief ses limites :
- en vertu du P1, celui de la « Globalisation », le problème touche le système éducatif
marocain dans sa globalité mais, la FL renvoie à une approche sectorielle (voir schéma ci-
dessous) ;
- cette approche sectorielle a donné lieu à une réduction au niveau de la portée du problème
puisqu’elle insiste seulement sur le passage des cycles pré-universitaires à celui universitaire
alors que ce genre de problème concerne le système éducatif dans sa globalité, à savoir le
« Préscolaire » (PS quand il existe !), le « Primaire » (PR), le « Collège » (Coll.), le « Lycée »
(Lyc.) et enfin, l’« Université » (Univ.) ;

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- il y a une réduction au niveau de l’objet puisque ladite FL s’intéresse seulement à l’AS et au


Fr., en fait la première langue officielle et la première langue étrangère ;
- ici, en vertu du P3, « Mise en relief des antagonismes », on a mis l’accent sur des situations
diglossiques enchâssées et réduites à l’AS/Fr. en omettant involontairement ou à dessein que
les inputs et les outputs marocains concernent d’abord les langues premières (maternelles) des
citoyens : l’Amazigh (AM) et/ou la Darija (Arabe dialectal- AD) et leurs variétés.
Si nous acceptions que la fracture soit qualifiée de linguistique, cela reviendrait à dire que
tous les problèmes y afférents sont inhérents aux langues en question et cela a un sens :
- pour mener bien et à terme des études supérieures, surtout scientifiques (sciences dures), il
faudrait le faire en Fr. car cela serait impossible en AS !
Cela est absolument faux. Pour nous autres sociolinguistes, toutes les langues du monde
peuvent véhiculer les sciences (Chacun des pays du G 20, par exemple, fait d’abord appel à
sa/ses langue(s) nationale(s)).
S’il est vrai que l’AS souffre, aujourd’hui, d’un déficit terminologique, cela ne justifie
aucunement la marginalisation de cette grande langue ; en témoigne son histoire récente :
l’AS était le principal- pour ne pas dire le seul- véhiculaire des sciences et des recherches à un
certain moment où les langues qui prédominent aujourd’hui, dont le Fr., n’étaient même pas
codifiées et fonctionnaient comme de simples parlers locaux ou patois. Aujourd’hui même les
études médicinales et pharmaceutiques les plus prestigieuses sont l’apanage des universités
espagnoles, dépositaires du plus grand héritage terminologique et scientifique au monde,
notamment celui de l’Empire Arabo-Musulman.
Il faudrait aussi souligner que toutes les langues du monde souffrent d’une manière ou d’une
autre d’un certain déficit terminologique puisqu’aucun système linguistique n’a l’apanage de
la Terminologie Scientifique (touchant tous les domaines des activités humaines).
L’expression FL est truffée de sous-entendus aux conséquences lourdes et fâcheuses aussi
bien sur les plans politique, éthique, économique, historique, sociétal, etc.
Pour nous, les problèmes ne sauraient être inhérents aux langues mais devraient être plutôt
imputés aux usagers (en soulignant qu’ils ne sont pas seuls responsables mais, bien d’autres
facteurs peuvent intervenir). Prétendre le contraire en le maintenant sans aucune
argumentation scientifique, c’est toucher à la Souveraineté Nationale et porter atteinte à
l’Humanité.
Nous supposons que cette approche, du seul point de vue linguistique, fonctionne comme la
partie apparente d’un iceberg dont nous avons exploré la partie émergée (voir schéma ci-
dessus).
Conséquences et perspectives ouvertes grâce à la pédagogie de la complexité :
La «Fracture linguistique » et son corollaire l’«insécurité linguistique » sont des Concepts
flous, réducteurs et non productifs.
Nous leur substituons « la Fracture sociolinguistique » et son corollaire « l’insécurité
sociolinguistique » qui sont des concepts plus productifs et dynamiques dans le sens où ils
nous aident à explorer des sentiers permettant de découvrir les mécanismes sous-jacents à la
complexité sociale laquelle fonctionne de manière systémique. En fait, en optant pour l’entrée
« sociolinguistique », cela nous permet de mettre en relief les conséquences de ladite fracture
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sur toutes les facettes de la vie sociétale et les champs disciplinaires auxquels il faudrait faire
appel pour y remédier, de manière systémique.
b. Qu’en est-il des problèmes que soulève le volet linguistique- version Bachelor, vu sous le
prisme de la PC ?
Pour ce qui est des curricula, la nécessité de l’enseignement- par le biais des langues
premières (dites maternelles) en fait les langues de socialisation- malgré son importance est
remise aux calendes grecques. Même l’arabe standard, langue nationale et première langue
officielle n’a plus droit de cité alors que sous d’autres cieux, on s’efforce à en faire usage.
En matière d’approche et de méthodologie, beaucoup de problèmes surgissent dès lors que
notre démarche est sectorielle puisque l’Enseignement Supérieur traite les choses en aval.
Mais, qu’en est-il de l’amont ?
La fracture sociolinguistique est non seulement persistante au niveau des apprenants mais,
après des années d’efforts louables et acharnés des milliers d’enseignants formés dans le cadre
de la politique « d’arabisation » seront aussi concernés par ladite fracture puisqu’ils devront
se recycler pour enseigner en français (exclusivement) après le retour en force de ce système
linguistique (comme seul idiome pour enseigner ce que nous appelons les matières « non
métalinguistiques » (« DNL ») ou scientifiques et techniques.
Il s’ensuit une « insécurité sociolinguistique » dont souffriront les apprenants et leurs
professeurs.Trois langues étrangères seront enseignées : le français, l’anglais et l’espagnol.
Ici, l’on est en droit de nous demander pourquoi faudrait-il s’ouvrir exclusivement sur deux
langues romanes et une germanique ? Il y a bien d’autres langues qui véhiculent des
connaissances et cultures savantes.
Rappelons qu’aucune langue au monde n’a l’apanage de toute la terminologie savante de tous
les domaines de la vie sociétale et que les problèmes d’interférences et d’emprunts sont une
constante universelle.
Des tests de langues seront dispensés à l’entrée universitaire pour fixer le niveau des
étudiants.
Là aussi, les choses sont diluées puisque rien n’est dit à propos de :
- la nature du test…... S’agira-t-il des seuls critères linguistiques ? Quelle place réserver au
discours ?
- Allons-nous privilégier la composante linguistique sur celle conceptuelle ? Qui prendra en
charge la conception du test ?
- L’obtention du niveau B2 (ou équivalent) dans les différentes langues devient une condition
sine qua none pour l’obtention du Bachelor.
Il est évident que le niveau B2 (ou équivalent)- copié du Cadre européen commun de
référence pour les langues, Apprendre, Enseigner, Évaluer (CECRL ou CECR)- pourrait être
intéressant. On pourrait s’en inspirer mais, il est surtout conçu et destiné à des contextes
autres que marocains. Son adaptation aux contextes marocains est donc incontournable.
- On oublie souvent que les inputs et les outputs sont d’abord MAROCAINS
=====amazighophones et arabophones ?

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Pour ce qui est des problèmes d’ordres pédagogique, scientifique, juridique et financier, les
langues auraient une place particulière dans le nouveau système et sont mises au même pied
d’égalité que les matières fondamentales
Cette question se pose avec plus d’acuité dans les disciplines « non métalinguistiques »
puisque les langues d’enseignement et les soft Skills ne devraient pas prendre le dessus sur les
modules majeurs/les hard Skills véhiculant les concepts qui constituent l’essence même
desdites disciplines scientifiques et techniques.
Le fait de trop s’investir dans les langues étrangères aura un impact négatif sur les efforts de
créativité et d’innovation lesquels seraient affaiblis par un zèle non justifié au niveau
linguistique.
Toujours relativement au volet scientifique, nous sommes en droit de nous poser la question
suivante :
Qui va prendre en charge ces modules de langue ? S’il s’agit de personnes autres que les
enseignants chercheurs, cela dévaloriserait nos diplômes au lieu de les valoriser et posera un
problème d’ordre juridique et éthique, etc.
Un enseignement linguistique adéquat et répondant aux normes internationales exige une
prise en charge de petits groupes d’étudiants ; chose qui pose d’énormes problèmes
supplémentaires puisqu’il nous faudrait recruter des milliers d’enseignants chercheurs.
A ce niveau de l’analyse, il devient aisé de mettre en relief les questions de financement de ce
grand chantier sociétal lesquelles paraissent faramineuses.
IV. CONCLUSION
Comme nous l’avons énoncé plus haut pour que le Maroc puisse rester au diapason de la
société « Post-moderne », il doit procéder aux transformations des structures mentales par
l’éducation et l’université paraît comme la véritable locomotive du développement se
traduisant par la capacité à produire, traiter, stocker, transmettre et utiliser de manière
rationnelle l’information en vue de créer du savoir.
Abdelkader Berrada, en préfaçant l’ouvrage de Mohamed Harakat 8 souligne que le peuple
marocain a tout intérêt à préparer incessamment l’université à relever les défis du nouveau
millénaire, à développer les capacités créatrices et innovantes de notre jeunesse.
Selon Mohamed Harakat, « L’Université du XXIème siècle devrait concilier trois logiques
intimement liées : la logique cognitive (l’économie du savoir), la logique pédagogique (la
formation de qualité) et la logique démocratique fondée sur le mérite, la compétence, la
performance et la transparence »9.
Nous sommes donc appelés à développer nos universités en nous inspirant, certes, de nos
semblables conformément à nos aspirations et valeurs propres sans tomber dans l’imitation
car celle-ci, comme le dit si bien Mahdi El Mandjra, « ne pourra jamais remplacer
l’imagination, l’innovation et l’auto-dépendance »10.

8
Harakat, M. (2011), Quelle université́ pour le XXIe siècle ? La gouvernance cognitive et démocratique, une
chance pour le Maroc. Al Maarif el jadida, Rabat, P. 17.
9
Harakat, M. Op cit. P. 214.
10
Elmandjra M., Op cit. P. 16.

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En vue de contribuer tant soit peu à cet élan national visant à réinventer notre université et par
là même notre système éducatif, nous avons soumis à l’appréciation des pairs « la Pédagogie
de la complexité ».
Nous prétendons que ce champ scientifique est novateur et apte à nous faciliter la création de
formations dignes de la « Société du troisième millénaire » dont les mots d’ordre sont :
transdisciplinarité (interaction entre les sciences humaines, sociales, juridiques, économiques
et exactes) ; plurilinguisme (faisant appel à l’anglais, le français et de biens d’autres idiomes
selon nos besoins qui seront, bien entendu, ajoutées à nos langues africaines dont l’arabe
standard et l’amazigh font figure de proue) ; pluriculturalisme (étudiants, enseignants,
professionnels et programmes versant dans diverses obédiences culturelles, cultuelles, etc.) ;
polyvalence (pour rappel, une bonne part des métiers auxquels nous continuons à former nos
lauréats seront obsolètes dans peu d’années ; moralité, la polyvalence est de mise).
REFERENCES
[1] Amime, A. (2016), Madkhalilâlbîdâghûjyâwaʕulûmattarbiyyaruʾyatarbawiyyamughâyira,
fīttaʾsîslibîdâghûjyâssiyâqâtilmaghribiyyatilmurakkaba, Première partie. Publications du
Laboratoire LCP, Marrakech.
[2] Amime, A. (2019), Madkhalilâlbîdâghûjyâwaʕulûmattarbiyyaruʾyatarbawiyyamughâyira,
fīttaʾsîslidîdâktīkissiyâqāâilmaghribiyyatilmurakkaba, Deuxième partie. Publication
Laboratoiore LCP, Marrakech.
[3] Amsidder, A. (2000), « La problématique des langues maternelles au Maroc. », dans
Langues maternelles et enseignement apprentissage des langues étrangères au Maroc
(Coordination AMSIDDER A.), Université Ibn Zohr, Faculté des lettres et des sciences
humaines, Agadir.
[4] Elmandjra, M. (1996), La Décolonisation culturelle. Défi Majeur du 21ème siècle. Editions
Walili, Marrakech Futuribles, Paris.
[5] Gumperz, J. J. (1989), Engager la conversation. Introduction à la sociolinguistique
interactionnelle. (Traduit del’anglais par Michel Dartovelle, Martine Gibert et Isaac Joseph),
Les Editions De Minuit, Paris.
[6] Harakat, M. (2011), Quelle université́ pour le XXIe siècle ? La gouvernance cognitive et
démocratique, une chance pour le Maroc. Al Maarif el jadida, Rabat.
[7] LABOV, W. (1975), Sociolinguistique, Les Éditions de Minuit, Paris.
[8] Messaoudi, L. (2003), Etudes sociolinguistiques, Editions OKAD, Rabat.
[9] Messaoudi, L. (2016), « La fracture linguistique dans l’enseignement scientifique au
Maroc : quelles remédiations ? », Revue Langues, cultures et sociétés, Volume 2, n°1, pp. 69-
85, IMIST, Rabat.
[10] Ouassou, A. (2018), La « fracture linguistique », un continuum allant des
langues « autochtones » à celles étrangères : approche sociolinguistique complexe », Dans
Revue des Etudes Amazighes, 2, pp.77-94, IMIST, Rabat.

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