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Les Objectifs du Développement Durable (ODD) dans l’agenda post 2015: Enjeux et
perspectives Philippe Hugon, professeur émérite Paris Ouest-Nanterre, La Défense, IRIS,
philippehugon@neuf.fr
Dans leur déclaration du Millénaire (2000), les Nations unies avaient défini des
objectifs du développement auxquels se sont engagés 189 pays en 2002 1. Les OMD,
résultant d’un relatif consensus de la communauté internationale, étaient pensés en termes
de réduction des écarts du Sud par rapport au Nord à l’horizon 2015. Par contre, ils ne
remettaient pas en cause les préférences collectives du Nord et traitaient de manière
identique les pays émergents et les pays en développement. Ces OMD se sont concentrés
sur des objectifs quantifiés identiques, simples en termes de % à atteindre et non des
dynamiques de caractère chronique ou transitoire propres aux différentes trajectoires. Les
« planistes » internationaux se sont placés d’un point de vue volontariste et normatif au
niveau des fonds à mobiliser et des objectifs à atteindre et non des facteurs explicatifs sur le
plan national ou mondial des situations ou des dynamiques observables. En revanche, ils se
sont limités aux seuls pays en développement et n’ont pas intégré les priorités sécuritaires
ou environnementales ou la question de la vulnérabilité des populations.
Le monde a changé depuis le début du XXIème siècle. Dans un contexte de grandes
disparités socio-politiques et démographiques, le capitalisme mondialisé notamment
financier et les politiques publiques ont globalement favorisé la baisse de la pauvreté en
valeur relative, mais en même temps accru les inégalités intra-nationales et entre les pays
émergents et les pays pris dans les trappes à pauvreté. Aux relations cardinales Nord/Sud
tend à se substituer un monde multipolaire ou tripolaire avec déplacement du centre de
gravité des pays industriels en crise, vers les pays émergents et avec relative marginalisation
des pays pauvres et des Etats faillis. Le modèle de référence de sociétés énergivores et
carbonées, aux produits obsolètes, accumulant des déchets et générant de la pollution tend
à s’étendre tout en étant de moins en moins supportable par la planète malgré les
innovations technologiques. Le passage des OMD aux ODD se situe dans ce contexte où les
questions planétaires, notamment climatiques, dominent les débats.
La pauvreté multidimensionnelle reste évidemment un enjeu majeur. Les OMD et les
ODD seront intégrés dans un agenda commun post-2015 en ajoutant les objectifs
sécuritaires, les transitions énergétiques, l’environnement tant pour les pays du Nord que du
Sud. Les arbitrages politiques à différentes échelles entre le « trilemne », équité sociale (les
objectifs des OMD), efficacité économique et soutenabilité écologique auxquels on peut
ajouter la sécurité conduisent à accroître les divergences entre les préférences collectives
exprimées par les Etats et les acteurs privés. Les ODD posent ainsi avec une acuité nouvelle
le problème des conflits de valeurs, des limites de la quantification et des écarts entre la
complexité des situations socio-économiques à diverses échelles et le caractère simple et
réducteur des indicateurs sensés les mesurer. Les objectifs chiffrés doivent être concrets,
concis, faciles à comprendre, en nombre limités, comparables, universels et chiffrables tout
en étant ambitieux, d’envergure et en intégrant les spécificités des sociétés. Il est nécessaire
d’avoir des indicateurs mesurables, universels pour agir internationalement et permettre de
1La Commission européenne a ainsi mis en place en 2008 les contrats OMD qui constituent une forme d’appui
budgétaire général s’inscrivant dans le long terme (8 pays ont été concernés pour 1,8 milliards euros).
confronter pour les bailleurs ou les organisations internationales les objectifs et les résultats
selon un échéancier programmé. Or, la traduction des objectifs à atteindre en ressources à
mobiliser et en résultats observables est particulièrement délicate pour un développement à
la fois durable et inclusif.
Ce texte après avoir présenté le bilan contrasté des OMD dans des relations
Nord/Sud, traite des principaux enjeux et difficultés de mise en œuvre des ODD dans un
monde multi ou tripolaire.
Les OMD ont été une avancée et un plus petit commun dénominateur conduisant aux
engagements de la communauté internationale. Ils ont été évidemment critiqués, de
manière externe, comme rhétorique, consensus mou, objectifs généreux et généraux qui
cachent la réalité des asymétries internationales de richesse et de pouvoir, du capitalisme
financier mondialisé ou sont un simple cache misère. Ils ont également été critiqués, de
manière interne, du fait de la pauvreté des indicateurs, des limites de la métrique et de
l’empirisme, face à la complexité des situations différemment contextualisés. Il y a, par
définition, écart entre les décideurs publics se situant dans une optique praxéologique, à
partir de compromis politiques, et la communauté scientifique adoptant des positions
critiques et controversées et se voulant moins opérationnelles et moins normatives.
Les liens entre l’aide, les objectifs et les résultats dans les pays en développement
Les objectifs, cibles quantifiables par des indicateurs internationaux, s’appliquent aux
différents Etats membres des Nations unies. Ils sont mis en œuvre dans le cadre de
politiques nationales, évalués quant à leurs résultats et conduisent à une comparaison entre
objectifs initiaux et résultats ou entre situation de départ, situation actuelle. Ils font l’objet
de rapports indiquant les échecs ou réussites et cherchant à les expliquer par des facteurs
lourds exogènes (démographiques, catastrophes, chocs ) ou endogènes (mauvaise
gouvernance). Les OMD sont définis dans une conception top down. Ils expriment « des
rapports de pouvoir qui, selon M Foucauld (2001), cherchent à réduire la complexité et la
diversité du social (en l’occurrence mondial) en un ordre unifié et manipulable ». Ils
traduisent, comme tous les indicateurs, des relations de pouvoirs de la part des
organisations internationales avec transfert de la production du chiffre, normalisation des
standards liés à des compromis dans les négociations internationales. Les indicateurs
internationaux tendent à supplanter les services nationaux de statistiques. Les Etats, les
ONG ne viennent qu’en second.
L’engagement sur les OMD a eu des effets sur la légitimité de l’aide (Gastineau,
Gubert, Robillard, Roubaud 2010). Les OMD ont accru la connaissance, stimulé la recherche,
sensibilisé les opinions publiques. Ils ont constitué un agenda et un cadre d’action aidant les
pays à cibler leurs politiques de solidarité internationale et ont renforcé la société civile
(Sachs 2013). Ils ont permis une mobilisation des différents acteurs publics et privés
nationaux et internationaux sur des objectifs quantifiés. Ils ont conduit à accroître l’aide
budgétaire et les financements des budgets nationaux moyennant contrôle des résultats. Ils
ont, en même temps, eu des effets parfois pervers sur la production de données en
concentrant les enquêtes sur des informations liées aux seuls OMD aux dépens des
spécificités nationales.
La question centrale est évidemment celle de savoir comment les différents pays
cherchent à atteindre ces objectifs dans un cadre global (ex du cadre stratégique de lutte
contre la pauvreté), sectoriel (ex des programmes éducatifs ou de santé, des plans d’action
national pour l’environnement). La mise en œuvre par les autorités se fait à diverses échelles
du national au local ; elle mobilise des moyens financiers et concerne une pluralité d’acteurs
du secteur public et privé, de la société civile ; elle suppose un cadre institutionnel adapté.
Les cibles quantifiables et mesurées selon 48 indicateurs impliquent un appareil statistique
fiable.
La baisse du taux de pauvreté a été notable dans les pays en développement avec un
taux de pauvreté passant de 43,1% à 22,3% mais avec de grandes différences selon les
régions (Chen, Ravaillon 2012). Les réussites les plus notables des pays en développement
concernent la généralisation du traitement contre le sida, les gains de productivité agricole,
la hausse du taux net de scolarisation, l’amélioration de l’accès aux services d’eau. L’objectif
de réduction de moitié de la pauvreté extrême (moins de 1, 25 $ jour) a été atteint
Plusieurs objectifs ont été atteints dans les PMA notamment en Afrique sub-
saharienne, même si l’ASS est à la traîne du fait de la croissance démographique, des conflits
voire de la baisse de l’APD. Ils ont été globalement atteints pour OMD1 en termes de baisse
de la pauvreté absolue, OMD2 de scolarisation primaire, OMD3 d’équité par genre de la
scolarisation, OMD6 de lutte contre le sida, la tuberculose, le paludisme, et de partenariat
pour le développement OMD 8. Ils ont été dépassés pour l’accès à l’eau potable (baisse de
50% du non accès), de la population exclue des quartiers insalubres (200 millions contre 100
millions comme objectifs). Mais ils ont été inférieurs en termes de baisse de la mortalité
maternelle OMD5 (la moitié contre ¾ pour les objectifs) et de mortalité infantile OMD4
(baisse d’1/3 contre ¾ au niveau des objectifs), et de viabilité de l’environnement (OMD7).
Ces moyennes résultent d’évolutions très divergentes entre les pays émergents et ceux pris
dans des trappes à pauvreté, à conflits et à forte croissance démographique.
En revanche, ces indicateurs quantitatifs n’intègrent pas certains défis actuels et
futurs en termes de qualité de l’éducation, d’accès des femmes à des activités économiques
ou de baisse des mariages précoces, de réduction des indices de pauvreté dans les zones
rurales, d’emplois décents notamment pour les jeunes arrivant sur le marché du travail, de
résilience face aux changements climatiques. Les questions de qualité de l’enseignement
sont aussi importantes que celle de quantités. L’école demeure caractérisée par des taux
élevés de déperdition.
Tableau I- Résultats des OMD en Afrique sub saharienne entre 1990 et 2013
Le processus de légitimation publique des OMD passe repose sur une validité
scientifique. Des économistes comme Jeffrey Sachs en termes de trappes à pauvreté ou
Amartya Sen en termes de capabilité sous forme de being et de doing, d’accomplissement et
de libertés d’actions ont joué un rôle essentiel 2. Les référents philosophiques diffèrent
toutefois chez les deux auteurs.
Alors que l’utilitarisme assimile biens et bien être, les capabilités de Sen mettent
l’accent sur les libertés et les accomplissements individuels. La pauvreté multidimensionnelle
est alors une privation de capacités base dans le domaine de la vie, de la santé, de
l’éducation, du logement, de l’habillement, du déplacement, de la vie sans honte, (mortalité
prématurée élevée, malnutrition, morbidité persistante, illettrisme). Selon le PNUD, elle est
la « privation des possibilités de choix et d’opportunités qui permettent aux individus de
mener une vie décente ». La philosophie libérale anglo-saxonne (Sen, Rawls) considère que
les libertés sont premières et qu’elles impliquent une responsabilité Les capabilités posent
toutefois, non seulement le problème de catégories universelles mobilisées à des fins
praxéologiques, mais également les nombreux problèmes du passage de l’individu au
collectif, de l’intergénérationnel ou des limites des libertés de l’individu par rapport à celles
2 L’approche en termes de capabilités de Sen vise à compléter les approches de la pauvreté monétaire en
conditions de vie ; elle met l’accent sur l’étendue de la liberté dont les individus jouissent. Les capabilités sont
un ensemble de choix à la portée des individus qui leur permettent de mener la vie qu’ils ont raison de
souhaiter.
des autres. Pour la phénoménologie et des courants moins individualistes, la pauvreté ne
peut être dissociée de l’inégalité ; la personne socialisée et responsable peut de ce fait être
libre. Les OMD privilégient les basiques matériels (nutritionnels, sanitaires, éducatifs, de
logement, de déplacement) par rapport aux critères non matériels et moins quantifiables
(vivre sans honte, participer aux activités de la communauté, avoir le respect de soi).
Les conceptions issues de Sen ou de Sachs s’opposent évidemment aux auteurs qui,
tels les classiques, Marx, les structuraliste, raisonnent en termes de classes sociales, de
rapports d’inégalités ou d’exploitation. Elle s’oppose également aux fondateurs de l’école
néo-classique se référant, tel Walras, aux inégalités de positions et de conditions ou au
courant utilitariste assimilant le bien être aux seuls indicateurs monétisés. Elle ne prend pas
en compte la pauvreté subjective telle qu’elle est vécue et énoncée par les agents avec prise
en compte des interdépendances entre les préférences des agents, des effets de
démonstration ou de mimétisme et de la manière dont les agents définissent et se
représentent la pauvreté en relation avec les autres avec des effets de frustrations, de désirs
mimétiques. Au-delà d’un seuil minimal, le plus matériel peut être source de mal être et la
satisfaction des désirs être liée au plus par rapport aux autres et par rapport aux stocks de
biens possédés.
Le rôle des politiques publiques et de la mobilisation internationale par rapport aux OMD
Une des questions centrales que posent les OMD est évidemment celle de
l’évaluation des politiques publiques internationales et nationales. Les résultats observés
peuvent être liés à l’évolution de l’économie mondiale, au déplacement de la richesse et de
la puissance mondiale vers les « émergents », aux politiques mises en œuvre par des
pouvoirs nationaux sans référence à une mobilisation de la communauté internationale. Les
indicateurs peuvent être comparés en référence avec un point de départ (d’où l’on vient) ou
par l’écart entre les objectifs initiaux et les résultats observés. Les indicateurs des OMD
n’intègrent pas la dimension temporelle et intergénérationnelle de la pauvreté. Ils ne
peuvent aborder les questions dynamiques de pièges à pauvreté, de vulnérabilité face aux
chocs notamment pour les individus ou les groupes proches de la ligne de pauvreté ou de
l’indigence. Ils ne différencient pas la pauvreté chronique liée au déficit d’actifs et de
ressources de la pauvreté transitoire liées aux chocs et aux proximités des lignes de pauvreté
(Helme, Sheperd 2003).
3 L’agenda du développement post-2015 a mobilisé depuis 2012 des Think Tanks, des chercheurs, des ONG, la
haute administration, des entreprises. Des ODD ont été proposés en juillet 2014 par le groupe de travail de
l’assemblée générale des Nations unies (OWG 2014).
en même temps, les priorités ne sont pas les mêmes selon les grandes catégories de sociétés
et les actions doivent être hiérarchisées selon des objectifs différenciés.
Les ODD peuvent s’appuyer sur des textes, tels la Déclaration universelle des droits
de l’homme ou les différentes Conventions internationales notamment sur le climat ou la
diversité. Ils peuvent renvoyer à une conception philosophique proclamant l’égale dignité
des hommes. Ils peuvent être fondés analytiquement sur la théorie des biens publics,
collectifs ou communs mondiaux, voire des argumentaires utilitaristes en termes de
nécessité de prévention des catastrophes face à leurs coûts, de réduction des disparités et
des exclusions sources de violences et de risques pour les opérateurs économiques. Ils
s’opposent, par contre, aux conceptions « réalistes » stato- centrées qui mettent en avant
les différences de préférences collectives des « pays », aux courants culturalistes voire
anthropologique privilégiant le relativisme et les systèmes de valeurs irréductibles, ou aux
analystes les assimilant à une rhétorique utopique des organisations internationales ou à des
rapports de pouvoirs de puissance imposant leurs modèles.
La conférence de Rio +20 a fixé les objectifs du développement durable qui changent
de paradigme. Il s’agit à la fois d’agir sur ceux qui sur consomment des biens générant des
externalités négatives et sur ceux qui doivent améliorer leur bien être sans pour autant
générer ces externalités négatives. Le défi ne peut être relevé qu’avec de fortes innovations
technologiques et une transition notamment énergétique.
Le développement durable, plus de 20 ans après le sommet de Rio qui l’a consacré
comme compromis politique, reste toutefois un concept flou avec jusqu’à présent faible
mode opératoire. Les trois piliers efficacité économique, équité sociale et soutenabilité
écologique n’intègrent pas les questions de sécurité des personnes et des sociétés. Ils
supposent compatibles des objectifs en partie contradictoires et font ainsi abstraction de la
question des arbitrages politiques intra et inter générationnels, internes aux nations et
internationaux, entre le Nord et le Sud, les économies matures, émergentes et en
développement. Les ODD visent des objectifs multiples beaucoup plus larges et moins
consensuels : sécuritaire, environnement. Certains voudraient introduire les droits de
l’homme et les libertés publiques. Or, il y a conflits de valeurs et des préférences collectives
différentes sur ces questions. Le « trilemne » efficacité économique, équité sociale et
soutenabilité écologique, au cœur des tensions socio politiques, suppose un arbitrage
politique. Les ODD ne pourront être mis en œuvre que si les financements sont mobilisés, si
les grandes puissances signent des accords plus ou moins contraignants, si le calcul des
risques d’inactions apparait suffisamment fort et si le principe de responsabilité commune
et différenciée de Kyoto permet des arbitrages acceptés par les puissances industrielles et
émergentes.
Les nouveaux défis des pays les moins avancés notamment africains
Les pays pauvres notamment africains ont à faire face à trois principaux défis durant
la période 2015-2030
-L’explosion et le dividende démographique en Afrique. En un siècle (1950-2050), le nombre
de jeunes aura plus que décuplé en Afrique et le nombre de jeunes urbains aura été
multiplié par plus de 20 défi historique qu’aucune société n’a eu à relever. 20 millions de
jeunes arrivent annuellement sur le marché du travail dont plus des ¾ sont sans emplois
durables ou décents. On estime que la population rurale croit de 10 millions par an en
Afrique et que la population urbaine qui croit de 20 millions par an en 2014 croitra de 35
millions par an en 2050. L’opportunité est liée au dividende démographique augmentant la
part des actifs par rapport aux non actifs (jeunes et vieux). La croissance économique
africaine, observée depuis le début du XXIème siècle, non inclusive est peu génératrice
d’emplois avec peu de redistribution internes des progrès de productivité élargissant les
marchés. Les grandes entreprises sont peu créatrices d’emplois (labor saving capitalistiques).
L’emploi salarié représente entre 10 et 15% de l’emploi total. Les activités des jeunes sont
caractérisées par une grande vulnérabilité, une absence ou une faiblesse de la protection
sociale. De nombreux jeunes sont au seuil de la ligne de pauvreté et peuvent tomber en
dessous ou bifurquer vers des activités illicites plus valorisantes pour eux.
-Les défis environnementaux liés au stress hydrique, à la pollution urbaine, à la baisse de la
biodiversité, à la déforestation ou aux changements climatiques sont considérables. Bien
qu’émetteurs pour 4% de GES de la planète, les pays africains sont les premières victimes du
réchauffement climatique. Les objectifs des ODD sont évidemment à mettre en relation avec
les diverses conventions notamment de Paris sur le climat (CP 21). Les 3 grands émetteurs
de C02 ont pris des engagements en annonçant des cibles à atteindre pour l’après 2020.
L’UE a défini des objectifs clés de son paquet énergétiques pour l’après 2030. Le fonds verts
climat est doté de 9,7 milliards $. Les pays doivent au-delà de leurs objectifs de réduction
des GES préciser les moyens d’y arriver (ressources renouvelables, efficacité énergétique..) .
-Les enjeux sécuritaires seront croissants notamment dans l’arc sahélo saharien et en
Afrique centrale. L’indice Bo Ibrahim s’est amélioré en Afrique dans tous les domaines de la
depuis 2000 en Afrique sauf dans le domaine de la sécurité. 1,5 milliard de personnes vivent
dans des Etats « fragiles » ou en conflits. 70% des Etats dits « fragiles » ont été affectés par
un conflit depuis 1989. 30% de l’APD est affectée dans des contextes de fragilité,
vulnérabilité et de conflits là où les objectifs des OMD sont les plus éloignés à atteindre.
Faut-il avoir une approche top down à partir des conférences internationales et des
conventions (ex climat, biodiversité, désertification) ? Ou faut-il, au contraire recenser et
mieux coordonner les engagements volontaires, les initiatives et les expérimentations des
divers acteurs privés et publics à diverses échelles ? Il existe un no bridge entre ces deux
approches. Les conventions top down doivent-elles être mises en œuvre au niveau
international, régional, des clubs des pays riches, des BRICS ou des PMA ? Les acteurs
concernés sont-ils les politiques, et les administrations, les grands oligopoles privés, les ONG,
les faiseurs d’opinions ? La mobilisation doit- elle se faire sur le référent des biens publics
mondiaux supposant un intérêt commun, défini par persuasion, hégémonie, compensation
des perdants par les gagnants dans le cas d’un jeu à somme positive. La coopération peut-
elle être fondée sur la prise en compte d’un risque insupportable pour certains ? (Voituriez
2013) ? Faut-il au contraire avoir une approche bottom up qui à partir de la multitude
d’initiatives locales conduit à une agrégation. Les acteurs concernés diffèrent. Ce ne sont
plus prioritairement les Etats mais les collectivités décentralisés, les entreprises,
L’objectif de sécurité et la lutte contre la vulnérabilité : moyens de concilier les OMD et les
ODD ?
Les Etats et les régions fragiles et les vulnérabilités extrêmes : une catégorie oubliée par les
ODD
4 Elles peuvent être appréhendées par les théories des catastrophes et du chaos, de
systèmes dynamiques déterministes mais instables avec une sensibilité aux conditions
initiales et une forte récurrence rendant non prévisible le futur (vol de l’aile du papillon). Il
importe de prendre en compte la nature des nouveaux conflits qui ne sont plus
interétatiques opposant des armées mais renvoient à une pluralité d’acteurs privés et
publics avec enchevêtrement de facteurs et emboîtements d’échelle, avec effets de
contagion régionale et réseaux transfrontaliers de réfugiés, déplacés, milices, trafics.
5 Les catégories d’Etat faillis et de sociétés fragiles renvoient à des situations de
vulnérabilité extrêmes. La fragilité des Etats se différencie de la vulnérabilité économique
mais il existe des liens entre elles (Guillaumont 2012). Plusieurs critères permettent de
définir les Etats fragiles : l’absence d’Etat de droit, le non-respect des règles, l’impuissance
Dans le cas de risques naturels, l’index mondial du risque (World Risk, Index) 6 résulte
de l’exposition et de la vulnérabilité des populations et de la société. La vulnérabilité est
définie comme la somme de la prédisposition (fonction des infrastructures et du contexte),
des difficultés à faire face (fonction de la gouvernance et de l’aide) et à s’adapter (fonction
de l’anticipation des aléas futurs) (cf. l’indice de vulnérabilité physique au changement
climatique de la Ferdi, Guillaumont et Simonet 2011).
Malgré les limites de la catégorisation, il y a au sein des ODD des zones qui devraient
rester prioritaires. Les ODD ne peuvent se limiter à une check list d’objectifs juxtaposés. Ils
supposent d’agir, en même temps, sur le volet de la légitimité politique, de la sécurité des
biens et des personnes, de la justice d’un Etat de droit, du contrôle des activités illicites, de
la mise en place d’activités rémunératrices et générant un travail. (cf International Dialogue
on Peace Building and State Building 2013)
En conclusion, les OMD comme les ODD se heurtent à une contradiction identique.
Comment disposer d’indicateurs simples, universels et opérationnels dans un monde
incertain, complexe voyant se renforcer des marqueurs identitaires Les trappes à pauvreté, à
violence et à vulnérabilité résultent d’un enchaînement entre insécurité et sous-
développement 7 Il ne peut avoir de réelle avancée sur les ODD sans mises en place de
régulation du capitalisme financier ne serait-ce que pour disposer des ressources financières
permettant de les financer. Bien entendu, ce rappel peut être considéré comme relevant de
la pure utopie. Mais les avancées de la Société des Nations de Wilson, des Nations unies
d’après la seconde guerre mondiale ont été également considérés à leur époque comme des
utopies. Au lieu de viser prioritairement l’amélioration du bien-être des populations
mondiales, la communauté internationale pourrait se mettre d’accord sur les grandes
catastrophes à éviter et sur les modes de résilience des populations à renforcer. Les ODD
auront une pertinence accrue lorsque seront abordés les questions qui fâchent celles de la
régulation du capitalisme mondial et celles des modèles alternatifs ou complémentaires tels
l’économie verte, l’économie circulaire, l’économie sociale et solidaire, la croissance
inclusive qui sont autant de référents permettant de rendre compte de la soutenabilité ou
de la durabilité du développement.
Sources
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7 La montée de la pauvreté et du chômage, des inégalités et des perceptions de corruption sont parmi les
premiers facteurs de la violence armée et criminelle. Sathanhar et al (2004) ont testé pour 41 pays africains
qu’entre 1991 1999 un ralentissement de 5% de croissance économique augmente de 50% le risque qu’un
conflit éclate l’année suivante.
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