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KHALFA MAMERI

ALGÉRIE
2000 ANS D’HISTOIRE
L'ORIGINE DU PEUPLE ALGERIEN
D’AUJOURD’HUI

CHRONOLOGIE DE-264 à 1962

2éme édition augmentée


L’édition numérique de ce livre a été réalisée
par mon fils Farid MAMERI et mon petit-fils Mehdi.

Juin 2022

Tous droits réservés à l’auteur


Je dédie ce livre à la mémoire de
ma chère mère SAÂDIA,
partie trop tôt et trop jeune (35 ans) au paradis.
K.M.
« Tous les siècles d’une nation sont les feuillets d’un même livre. »
« Les vrais hommes de progrès sont ceux qui ont pour point de départ un
respect profond du passé. »
Ernest RENAN, La réforme intellectuelle et morale

« C’est dans la lutte et la résistance qu’un peuple se donne une âme. »


Max GALLO, L’âme de la France

« L’homme n’est esclave ni de sa race (qui n’existe pas) ni de sa langue, ni de


sa religion… Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de
cœur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation. »
Ernest RENAN, Qu’Est-ce qu’une Nation ?
SOMMAIRE
PREFACE A LA DEUXIEME EDITION AUGMENTEE DU CHAPITRE I
INTRODUCTION
I - L’ORIGINE DU PEUPLE ALGERIEN D’AUJOURD’HUI
II - L’ABSENCE DES DONNEES HISTORIQUES ET LA QUESTION DES SOURCES
III - LA NUMIDIE : ÉTAIT-CE L’ÂGE D’OR DE L’ALGÉRIE ?
IV - LA COLONISATION ROMAINE DE - 108 À + 429
V - L’INTERMÈDE VANDALE ET BYZANTIN 435 - 565
VI - LA COLONISATION ARABE DE L’ALGÉRIE 700 - 750
VII - LES ROYAUMES BERBÈRES 761 - 1516
VIII - PROTECTORAT OU COLONISATION TURCS ? 1516 - 1830
IX - LA COLONISATION FRANCAISE 1830-1962
X - LA GUERRE D’INDEPENDANCE 1954 - 1962
XI – CONCLUSION : CONSOLIDER L’ÉTAT : L’IMPÉRATIF HISTORIQUE
ANNEXES
LE PEUPLEMENT DE LA TERRE
L’AFRIQUE PUNIQUE
LA NUMIDIE SOUS L’EMPIRE ROMAIN
L’AFRIQUE ROMAINE
ÉTAPES DE LA CONQUÊTE DU MAGHREB VII-VIII SIÈCLES
LE MAGHREB AU DÉBUT DU IXÈME SIÈCLE

LA BERBÈRE DU MILIEU DU XIÈME SIÈCLE


LES ÉTAPES DE LA CONQUÊTE ALMOWAHADE
LE MAGHREB À LA FIN DU XIII SIÈCLE
L’ALGÉRIE AU DÉBUT DU XVIE SIÈCLE
L’ALGÉRIE ET LA TUNISIE SOUS LES TURCS DU XVIE AU XIXE SIÈCLES
L’ALGÉRIE INDÉPENDANTE 1962
PREFACE A LA DEUXIEME EDITION
AUGMENTEE DU CHAPITRE I

Cette deuxième édition enrichie du chapitre I sur « l’Origine du peuple


algérien d’aujourd’hui » n’avait aucune chance d’être publiée dans sa terre
d’origine. Tout simplement parce que parler de « l’origine amazigh » du
peuple algérien et de la « conquête ou colonisation arabes de l’Algérie »,
n’étaient ni tolérables ni acceptables. Une lourde et impitoyable censure s’est
de nouveau abattue sur le pays où le simple fait d’avoir parlé d’un Emir
Abdelkader « collaborateur » ou « ami » de l’ex-puissance coloniale, a
conduit son auteur, pourtant, fils du redoutable Colonel Amirouche l’un des
héros indiscutables de la guerre d’indépendance à faire plusieurs mois de
prison.
Ses procureurs politiques n’ont eu à aucun moment la crainte ni même le
remords de conscience de s’attaquer à l’un des symboles de l’Algérie puisque
Amirouche, l’un ou le plus grand des chefs de guerre, est tombé au champ
d’honneur, après avoir tenu tête les armes à la main aux troupes d’élite
françaises dans la région de Bou-Saâda le 28 mars 1959.
J’ai dit ici même, en couverture de ce livre, que je n’étais pas un « Kamikaze
de la pensée ». J’ai donc choisi pour la présente édition, l’exil culturel vers
des cieux plus cléments et plus généreux ; ceux qui restent éclairés par le «
siècle des lumières » et nourris par les droits humains ; notamment ce bel
article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26
Août 1789 qui s’énonce comme suit :
« La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les
plus précieux de l’homme ; Tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer
librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés
par la loi »
Si j’ai cherché à remonter à l’origine du peuple algérien d’aujourd’hui après
de nombreuses et savantes lectures, c’est pour essayer de mettre un terme ou
tout au moins éclairer par des références scientifiques bien établies, cette
interminable querelle, parfois violente, sur la question de savoir d’où vient le
peuple algérien. Que de fois je n’ai pas entendu qu’il venait du Yémen, de
l’Arabie Saoudite actuelle, de l’Egypte et même du Sahara occidental ! Il ne
suffit pas d’imputer à l’ignorance, somme toute pardonnable, de telles
croyances qui revêtent souvent la forme de dogmes intouchables lorsqu’elles
sont associées à la religion musulmane ou à une « race arabe » prétendue.
Je considère pour ma part que ces « croyances » sont nourries et entretenues
par des enseignements ou des propagandes aussi erronés qu’abêtissants.
Je ne suis ni meilleur ni plus autorisé que d’autres de croire que le problème
fondamental, quasiment existentiel de l’Algérie, est de savoir qui est son
peuple, d’où vient-il et comment le qualifier ? Est-il besoin de se référer à
Mohamed Boudiaf l’un des six chefs historiques de la guerre d’indépendance
mais aussi le sauveur du chaos islamiste lorsque, revenant d’un cruel exil de
28 ans, il déclarait ceci en janvier 1992 :
« Balloté depuis trente ans entre le socialisme et le capitalisme, entre
l’Occident et l’Orient, entre l’Est et l’Ouest, entre la langue française et la
langue arabe, entre l’arabe et le berbère, entre la tradition et la modernité,
entre le retour aux sources et les valeurs universelles, notre peuple ne sait
plus à quel saint se vouer »
Insurpassable résumé, condensé du mal actuel de l’Algérie ! On ne peut ni
mieux dire ni mieux écrire. Le drame, vécu au quotidien, c’est que aucun
dirigeant du pays n’a eu le courage, en soixante années d’indépendance, de
l’assumer et si possible de le surmonter avec sagesse et patience. D’aucuns,
tels les premiers présidents du pays, l’ont aggravé en jetant de l’huile sur le
feu, par des déclarations ou des politiques humiliantes et dégradantes. On ne
déclare pas trois fois de suite que « l’Algérie est arabe » avant même
l’indépendance du pays. On ne décrète pas l’arabisation importée et imposée
de l’Algérie. Le mal causé au pays semble à beaucoup, sinon à la plupart,
inguérissable. Loin de moi l’idée ou la volonté de noircir le tableau. Il suffit
de regarder l’Algérie dans les yeux pour se rendre compte combien son
visage humain s’est orientalisé durant les dernières décennies par l’habit et le
comportement notamment.
Est-il trop tard pour recentrer l’Algérie sur elle-même, pourtant fille
authentique voire l’ainée de la méditerranée occidentale ? Je refuse de le
croire. Depuis mon éveil à la politique, il y’a plus de soixante années, je n’ai
jamais cessé de croire à une Algérie algérienne ; C’est-à-dire une Algérie qui
renoue avec ses origines lointaines, au temps du grand MASSINISSA (-238
-148 ? avant JC) qui a sédentarisé et urbanisé les populations algériennes
d’alors en les fixant dans une agriculture riche et abondante sans pour autant
qu’il faille rejeter les apports étrangers jugés utiles et enrichissants.
Le livre présent, si modeste soit-il, a justement pour seul but, dates à l’appui,
de montrer que ce qui est appelé l’Algérie depuis 1831 a préexisté
pratiquement autant de siècles que depuis sa conquête arabe par le feu et le
sang à la fin du huitième siècle de notre ère.
Beaucoup parmi ses plus grands libérateurs de 1954 à 1962 ont cru, voulu
que l’Algérie redevienne elle-même. Car il y va, toujours, des nations comme
des humains : rien n’est meilleur que d’être soi-même.
Que l’Algérie profonde, réelle, et authentique le veuille dans sa libre volonté,
alors l’infini et vaste horizon du progrès humain lui sera ouvert au bénéfice
de tous ses enfants ; sans distinction de langue, de religion ou de région.
Plaise au ciel qu’il en soit ainsi.

ALGER MARS 2022

K. M.
INTRODUCTION

Qui peut dire, parmi les 40 millions d’Algériennes et d’Algériens


d’aujourd’hui (2018) qu’il possède chez lui, ou même avoir lu, un ou des
livres sur Massinissa, Syphax, Jugurtha, Takfarinas, Kosaïla, Kahina pour ne
citer que les plus célèbres et les plus lointains de nos ancêtres connus ? J’ose
affirmer qu’ils sont assez peu ; voire aucun.
Cette remarque préalable n’est ni une provocation ni même un reproche ou
une critique malveillante. Tout simplement pour souligner d’emblée qu’il est
extrêmement difficile de connaître et, encore plus de comprendre, certaines
périodes du parcours historique de l’Algérie ; sans parler d’écrire un livre
ayant une certaine autorité scientifique.
S’il est admis, le constat peut conduire à un certain nombre de déductions
accablantes et gravement préoccupantes même de nos jours.
En revanche, il n’est même pas nécessaire, tellement cela est évident et banal,
de démontrer que pour les mêmes périodes où ont vécu nos illustres ancêtres
cités plus haut, il existe de très nombreux livres sur leurs contemporains ;
c’est à dire sur les souverains (Rois, Empereurs, Consuls…) ou chefs de
guerre de l’époque dans les différents pays qui peuvent nous intéresser ;
Grèce et Rome notamment.
Pour être encore plus clair, je possède dans ma très modeste bibliothèque
personnelle bon nombre d’ouvrages sur les Empereurs romains dont la
célèbre biographie consacrée par Suétone historien latin vers + 69 à vers +
126 aux Vies des douze Césars, Empereurs romains. Livres accessibles aux
plus modestes bourses, ils sont pour la plupart, d’une valeur intemporelle et
impérissable pour nous renseigner sur l’exercice du pouvoir et, d’une façon
encore plus générale, sur la vie des peuples observés.
Qui ne sait que de nos jours encore, des livres qui atteignent des records de
vente sont publiés sur de nombreux souverains même très lointains.
Comment expliquer l’absence totale pour certaines périodes et la faiblesse,
aujourd’hui, d’une production culturelle sur nous-mêmes et par nous-mêmes
surtout.
Certes, il existe, par moments très éloignés ; des décennies sinon plus,
quelques initiatives ou efforts qui mériteraient d’être signalés. Ils restent à la
fois numériquement très faibles et scientifiquement sans portée réelle quand
ils ne sont pas, souvent, empruntés ou appuyés sur des travaux, occidentaux
pour la plupart. Là aussi, mon observation n’a d’autre motivation que celle
d’un constat car je sais que tous les travaux scientifiques, dans quelque
domaine que ce soit, sont toujours bâtis sur ceux des prédécesseurs sans, bien
entendu, les copier ou les plagier ; ce qui serait extrêmement grave, au moins
moralement ; mais les expliquer, les vulgariser, les compléter et même,
pourquoi pas, les critiquer.
Tout compte fait et sur ce point seulement de l’histoire lointaine de notre
pays, les auteurs algériens, je ne dis pas arabes, sont peu nombreux, voire
inexistants sur certaines périodes ou, encore plus, sur nos plus illustres
ancêtres.
J’ai par exemple l’opuscule de 107 petites pages consacré par Mohamed-
Chérif SAHLI au Message de Jugurtha en 1947. Il présente sûrement de
l’intérêt surtout par disette culturelle, tel un arbre qui n’apparaîtrait pas
comme un mirage en plein Sahara. Mais parler de « frères Marocains, de
frères Tunisiens ou de guerre sainte » 7 ou 8 siècles avant l’Islam, c’est tout
simplement utiliser des mots ou des concepts, même discutables,
d’aujourd’hui pour des faits, des événements ou des hommes d’il y a plus de
2000 ans ! Par définition, l’histoire est elle-même une suite de changements,
d’événements, souvent sinon toujours de natures et de réalités différentes.
Si dépourvus que nous soyons en matière de documentation ou de matériaux
culturels sur des périodes aussi lointaines, nous résigner à ne rien faire c’est
accepter l’état de pauvreté auquel on se heurte à chaque entreprise du genre,
mais c’est surtout perpétuer une conduite, un comportement qui auront et qui
ont déjà d’énormes et graves conséquences sur nos vies et plus encore sur
celles des générations à venir.
Pour fuir toute abstraction, il suffit de s’interroger sur le nombre de travaux
ou de livres qui ont été faits sur les dirigeants de l’Algérie et de leur
gouvernance depuis l’indépendance du pays. Ce qui est vrai de nos illustres
ancêtres, cités plus haut, donc absence totale de livres, critiques ou non, sur
eux et leur gestion, se répète et se poursuit sur les dirigeants récents du pays.
Dans quelques décennies, voire déjà aujourd’hui, notre passé récent, depuis
1962 va nous échapper ou, nous échappe déjà. Il est inconnu à la plupart des
Algériens sinon à tous en dehors des approximations toujours hasardeuses.
Or et comme n’a cessé de l’écrire un grand historien disparu il y a à peine
trois décennies Fernand Braudel (1902- 1985), le futur est toujours une large
part du passé ou pour reprendre ses mots qui sont plus éclairants et plus
autorisés : « L’histoire est l’ingrédient sans quoi aucune conscience
nationale n’est viable. Et sans cette conscience, il ne peut y avoir de culture
originale, de vraie civilisation. »
Plus loin, Braudel est encore plus explicite dans sa Grammaire des
Civilisations à la page 56 quand il écrit : « Une civilisation est toujours un
passé, un certain passé vivant. »
Or l’Algérie ne connaît pas son passé. Oserai-je dire qu’elle ne veut même
pas le connaître quand elle ne l’interdit pas sous peine de graves sanctions, à
ses propres auteurs, si peu nombreux de le faire connaître.
Allez comprendre pourquoi, depuis l’indépendance du pays, tous les
dirigeants successifs ont cherché à faire commencer l’histoire de l’Algérie à
partir de la conquête arabe située au début du 8é siècle, entre 698-700. Même
le terme de conquête est banni, interdit. On lui préfère « l’arrivée des arabes »
comme s’il s’est agi d’une réponse à une invitation ou d’une simple mission
scientifique ou religieuse. Il s’est même trouvé, un Président de la
République pour nier l’existence des Berbères ou du rôle historique qu’ils ont
joué plusieurs siècles avant l’invasion des troupes arabes dirigées, entre
autres, par Okba et Hassan Ibn Noâman.
Les pouvoirs officiels de l’Algérie indépendante ne sont pas seuls à faire
preuve d’un esprit sectaire ou arbitraire. Même s’il est peu recommandé de
parler de soi-même, je peux affirmer avec tout le respect que je dois au
lecteur, que mes livres sur Houari Boumediene m’ont valu rejet et invectives
auprès de la plupart des Kabyles, éditeurs compris, comme mes ouvrages
consacrés à Abane Ramdane depuis 1988, ont déchainé l’hostilité auprès de
certains lecteurs qui se disent ou se croient arabes. Un ancien ministre, parmi
les plus importants, quasi inamovible, Kabyle d’origine au surplus, mais qui
s’en cache, m’a tout simplement reproché, sous forme de mise en garde, de
commencer par Abane au moment où il avait appris mes travaux.
Je ne cherche pas à tourmenter le lecteur sur le poids psychologique, voire
même matériel et professionnel, qui s’ajoute aux difficultés académiques
liées à toute recherche scientifique. Il faut cependant l’associer ou au moins
le sensibiliser et le rendre témoin de certaines causes qui expliquent les
défaillances lointaines et présentes d’une prise en charge de notre patrimoine
culturel.

Parler d’un devoir à la charge des intellectuels serait peut-être excessif ou


jugé trop présomptueux. Il reste que nous ne pouvons pas, nous ne devons
pas laisser notre passé et notre présent en friche. Le modeste travail ci-devant
dont je me garderai bien de dire ou d’écrire qu’il est exempt de lacunes, me
parait être une nécessité, même si d’autres n’y ont pas pensé. En vérité, j’étais
de ceux-là tout en sachant que de grandes et lointaines périodes de notre
histoire m’étaient assez peu familières et même obscures. Jusqu’au jour, donc
récemment, où j’ai eu besoin de réfléchir sur l’identité historique de
l’Algérie.
Justement ce thème me parait être l’un des plus importants ; peut-être même
l’un des plus urgents, pour dégager l’horizon algérien d’un obscurcissement
depuis au moins 1949 et singulièrement depuis l’indépendance du pays en
1962. L’évolution de l’Algérie se heurte continuellement à de gros obstacles
comme un automobiliste à des barrages routiers qui freinent sa progression
ou qui l’obligent à s’arrêter plusieurs fois pour des contrôles tatillons et
fastidieux ou, plus encore, pour écarter les objets qui l’empêchent d’avancer
ou même de poursuivre sa route.
Il n’y a rien de mieux que des dates, des chiffres, des faits et des acteurs
incontestables ; donc une chronologie dépouillée de tout développement
interprétatif pour dire avec assurance et sans esprit polémique deux choses
primordiales :
1 - Qui est le peuple algérien ?
2 - D’où vient-il ?
Questions assez explosives, il faut bien l’admettre. C’est pourquoi je me
contenterai pour le travail présent d’aligner les événements, les dates et si
possible les acteurs, pas toujours faciles pour ces derniers à situer dans une
généalogie certaine et indiscutable ; laissant à d’autres temps et à d’autres
forces le soin d’apporter les réponses aux questions déterminantes posées
plus haut.
Pour le moment, il me faut juste expliquer pourquoi ma chronologie s’arrête
en 1962, donc au jour de l’indépendance de l’Algérie (3 juillet 1962) ;
laissant au chapitre juste après le soin de présenter la méthode et les sources
utilisées par honnêteté et devoir vis-à-vis du lecteur.
Donc, pourquoi mon travail ne va pas au-delà de 1962 ? Tout simplement et
d’abord parce que ma liberté critique, ou de jugement n’est pas suffisante,
parce que bridée, pour m’interroger sur des dirigeants encore vivants ou qui
sont protégés par des interdits infranchissables. Qu’on se rappelle juste ce
que j’ai dit plus haut sur les inimitiés, les sarcasmes et l’ostracisme que m’a
valu mon travail universitaire sur Boumediène. Personne ne peut vivre
stoïquement en faisant fi de son entourage. Je n’ai pas l’âme d’un kamikaze.
Plus encore, des obstacles insurmontables nous empêchent de voir plus clair
dans les épisodes les plus douloureux de notre pays et même de rassembler
toutes les données statistiques voire judiciaires sur les différentes périodes.
Enfin, autre mais non dernière explication, elle tient à l’intérêt et à l’objectif
que se fixe un auteur. Je fais de la recherche qui exige du temps et des efforts
parce que telle question plutôt qu’une autre me taraude et m’invite ou
m’oblige à y réfléchir et à m’y investir.
De toute mon âme et mon parcours professionnel, diplomatique et
universitaire, je considère que la question la plus importante pour mon pays
comme pour mes compatriotes, telle que je la vois, est celle de notre
appartenance identitaire commune. Que l’Algérie cesse d’être ballotée par
des courants politiques, idéologiques, religieux qui ont brisé son élan
libérateur de la Révolution de 1954. Je dirai dans la conclusion combien un
regard froid et lucide sur une chronologie qui se veut neutre, dépouillée de
tout à priori, de tout esprit partisan devrait conduire l’Algérie à tirer des
leçons de son long et tumultueux passé pour n’appartenir qu’à elle-même et à
son peuple martyre.
Initialement et pour mes autres travaux, la présente chronologie devait
s’arrêter non pas à 1962 mais juste après la conquête arabe, au début du 8ème
siècle. Parce que, me suis-je convaincu, le problème identitaire de l’Algérie
ne se pose ni avec Carthage, ni avec Rome, ni avec Constantinople, ni bien
sûr avec la France mais seulement et toujours avec le « monde arabe » ou la «
nation arabe » concepts fabriqués ; le premier par les « Orientalistes »
occidentaux, le second par les « Baâthistes » et les « Nasséristes » en mal
d’hégémonie.
Le risque d’être accusé d’épargner le colonialisme français était si grand et si
inacceptable que j’ai fini par inclure dans la chronologie présente la période
coloniale française «1830-1962 » alors que cette séquence de notre histoire
est la plus connue en raison des nombreuses études de qualité qui lui sont
consacrées mais aussi parce que douloureusement ou atrocement vécue par
de nombreux Algériens encore vivants ou qui ont laissé des souvenirs encore
fumants à leurs proches descendants.
Au total, cette chronologie n’a d’autre but que de donner une photographie
aussi précise que possible du long parcours historique si accidenté de
l’Algérie actuelle.
Bien sûr, à la différence de son peuple qui est d’un seul bloc, si je puis
l’écrire, en ce sens qu’il a peu changé ethniquement depuis les origines des
temps, malgré des apports extérieurs si faibles qu’ils restent statistiquement
insignifiants, la formation du territoire actuel de l’Algérie « 2018 » ne s’est
pas faite uniquement d’un seul tenant, en une seule fois mais par des
variations fréquentes ; allant du morcellement extrême à des tentatives
d’expansion et d’unification, vite éclatées en entités disparates. C’est
pourquoi j’ai jugé utile de reproduire en annexes un certain nombre de cartes,
dressées par d’autres que moi et auxquels je rends hommage sans oublier de
donner leurs références, de telle sorte que le lecteur puisse mieux comprendre
comment le territoire algérien s’est appelé ou constitué au cours des
séquences des 2000 ans d’histoire qu’il m’a été possible de dater et de
comprendre.
Instrument sûrement incomplet ou insuffisant, peut-être même erroné par
endroits, la présente chronologie vise surtout à combler un vide
incompréhensible alors que la plupart des peuples connaissent avec précision
et en totalité les différentes phases de leur histoire. Toujours dans ma
modeste bibliothèque, j’ai des chronologies et des histoires du monde qui
retracent, en format de poche, 5000 ans d’événements. Comment ne pas
déplorer l’absence qui persiste en Algérie !
Si donc le lecteur peut y trouver un éclairage à ses attentes et plus encore s’il
peut en tirer des leçons pour le « Vivre ensemble » des Algériens
d’aujourd’hui alors ce livre, si modeste soit-il, trouvera toute sa justification,
ce qui serait plus que le salaire de ma peine mais la joie de mon
esprit. Alger, mai 2018
Khalfa MAMERI
I- L’ORIGINE DU PEUPLE ALGERIEN
D’AUJOURD’HUI

Certains diront qu’il faut probablement beaucoup d’impertinence et même


d’insolence pour traiter d’un tel sujet.
Je rassure : je n’ai ni l’une ni l’autre. De même qu’il faut avertir que je ne
suis ni archéologue, ni anthropologue, ni ethnologue ; encore moins
préhistorien. Je veux tout simplement reprendre ici, en citant mes références
et mes sources, ce qui est généralement connu et admis sur l’Origine de
l’espèce humaine ; du lieu de sa naissance et de son expansion très lente et
très progressive à la terre tout entière, territoire algérien actuel compris.
Ces différentes sciences ont fait d’énormes progrès et permettent de retracer
avec assurance l’origine de tous les peuples d’aujourd’hui. Le lecteur aura
déjà compris que je cherche à dire clairement d'où vient le peuple algérien en
m'appuyant sur les données les mieux établies. Non pas pour finir une fois
pour toutes avec les affirmations péremptoires, toujours teintées d’idéologie
et de fanatisme bien que toutes fausses, mais pour m’adresser aux gens
raisonnables et de bonne foi qui ne demandent qu’à connaitre leur origine
authentique et historique.
En plus clair encore, je tenterai de dissiper toute confusion entretenue
volontairement sur l’origine et la qualification du peuple algérien quand il ne
s’agit pas purement et simplement d’une falsification de l’histoire pour
tromper tout un peuple. Bien entendu, à force de slogans, de mensonges, de
propagande on finit par faire croire n’importe quoi à n’importe quel peuple ;
comme l’avait si justement noté le philosophe anglais Bertrand Russel dans
les années 1960.
Pour ne pas tomber dans la même erreur que je cherche à combattre et à
dissiper, je donnerai les preuves de ce que j’affirmerai en reprenant les
citations des auteurs ou des savants mondialement reconnus et respectés
comme tels.
Autre avertissement encore plus nécessaire : je ne confonds pas la science
avec la religion ; encore moins considérer que la première est supérieure à la
seconde.
La religion est éminemment respectable. Elle est du domaine de la foi et de la
croyance. Elle ne cherche pas à démontrer, à prouver mais à faire croire. Par
contre, la science s’appuie sur les faits, les observations, qu’elle doit
démontrer, vérifier et prouver ; tout en étant jamais sûre que ses découvertes,
ses résultats ne seront pas corrigés, améliorés ou tout simplement démentis
ou abandonnés un jour ou l’autre par d’autres scientifiques. Les exemples
sont nombreux des erreurs commises par de grands penseurs ou scientifiques
comme sur la fixité et l’éternité de l’univers acceptées comme des vérités
depuis près de 2000 ans mais qui ont été totalement remises en cause par les
physiciens de l’ère moderne (EINSTEIN principalement, mort aux Etats Unis
d’Amérique en 1945) qui ont établi que l’univers est en quelque sorte
élastique ; qu’il s’étend donc infiniment et que dans plusieurs milliards
d’années certains astres devraient disparaitre comme par exemple le soleil qui
aurait déjà brûlé la moitié de son énergie et devrait s’éteindre dans 5 milliards
d’années ; entrainant du même coup la disparition de notre propre galaxie
appelée la "Voie lactée".
Les écritures saintes ; principalement la Bible qui est apparue la première au
8éme siècle avant JC puis le Coran à partir de 610 du temps présent (Présent
Time) transcris officiellement par l’imam OTHMAN vers 650 ne nous
renseignent pas sur le temps et le lieu de la création de l’homme, tout juste
comment il a été créé ; avec une certaine concordance entre les trois religions
monothéistes : juive, chrétienne, et musulmane.
Faut-il rappeler les textes ? Le risque est réel d’être trop long sans être
exhaustif. Qu’on me pardonne de ne donner que les deux principales
références :
- Pour la Bible : « Dieu créa l’homme à son image, il créa l’homme
et la femme… Ce fut le sixième jour ».
- Pour le Coran : Sourate 96 Ikra (Lis en arabe) : « Au nom de Dieu
le Très Miséricordieux, le Tout Miséricordieux, Lis, par le nom de
ton seigneur qui a créé, qui a créé l’homme d’un caillot de sang. »
[1]

C’est la traduction du verset suivant : « AKRA BISSMI RABIKA ALADHI


KHALAKA, KHALAKA AL INSANE MINE ÂLAKINE »
Je n’ai pas la compétence pour dire ce que signifie exactement le mot «
ÂLAKINE » traduit ailleurs, non pas par « caillot de sang », mais par «
goutte. ». Je laisse donc ouverte cette question de l’exégèse infinie du Coran.
Je reviens à l’apparition de l’homme, telle qu’elle est retracée de façon quasi
unanime par tous les savants d’aujourd’hui. Il serait hors de proportion,
d’atteinte ou de propos de remonter jusqu’au « Big Bang » qui semble le
point de départ de la formation de l’Univers il y’a 10 ou 15 milliards
d’années mais seulement à l’apparition de l’Homo sapiens ou « l’Homme qui
sait ».
Même ici il faut se garder de toute assurance prétentieuse et rappeler
continuellement que ce que nous cherchons c’est d’offrir autant qu’il est
possible des points de repères pour que le lecteur puisse suivre et comprendre
une évolution de l’espèce humaine sur une période de plusieurs milliards
d’années ce qui interdit toute datation ou chronologie précise.
Surtout s’il n’oublie pas que l’Histoire fondée sur des documents ne remonte
tout au plus qu’à cinq ou six mille ans ; ce qui est insignifiant par rapport aux
âges de l’univers et de la terre qui se comptent en plusieurs milliards
d’années.
Si par conséquent nous prenons pour point de départ non pas la période à
laquelle est apparue la vie sous forme d’organes ni même celle du passage de
l’animal à l’humain mais celle de l’Homo Sapiens qui eut plusieurs
prédécesseurs (Homo Habilis, Homo Erectus, etc…) c’est exclusivement
parce que les historiens ont moins d’incertitudes sur les premiers
peuplements connus de l’Afrique du Nord et de notre pays en particulier.
Voici ce qui est affirmé par Charles André Julien[2], sur l’origine de ce que
nous appelons l’homme algérien et qui est largement partagé par tous les
autres historiens :
« Les hommes de cette dernière période (Paléolithique ou âge de pierre :
entre -18 millions d’années et -18000 ans avant JC) sont désignés
généralement sous le nom d’hommes de MECHTA-EL-ARBI du nom de
l’escargotière de Châteaudun -du-Rhumel (Chelghoum El Aîd) (Constantine)
découverte par G Mercier en 1907[…] Les fouilles faites entre 1927 et 1930
ont révélé un véritable ossuaire (prés de Bougie) et permis l’étude conjointe
d’une trentaine de spécimens, retrouvés dans des conditions qui excluent
toute incertitude stratigraphique[…]Contrairement à l’opinion d’abord
soutenue elle (cette race d’hommes) ne se rattache point à celle du
Neandertal, mais à celle de l’Homo Sapiens »
Y’a-t-il citation plus précise ? Nous tenons là une quasi-certitude sur le
premier peuplement de l’Afrique du Nord composé de la dernière espèce des
Homo, celle des Sapiens qui va peupler la terre tout entière, de laquelle
dépendent tous les humains d’aujourd’hui selon toutes les découvertes faites
à ce jour.
Autre citation qui renforce la précédente et qui s’étend à toute notre planète ;
c’est celle de Yuval Noah HARARI qui dans son « Best-Seller » mondial
appelé SAPIENS de 2015, écrit ceci à la page 6 : « Humans first evolved in
East Africa about 2,5 millions years ago from an earlier genus of apes called
AUSTRALOPITHECUS, which means « Southern Ape ». About 2 millions
years ago, some of these archaîc men and women left their homeland to
journey through and settle vast areas of North Africa, Europe, and Asia »
En traduction personnelle, cette citation donne ceci en français :
« Les humains sont d’abord apparus en Afrique de l’Est, il y’a 2,5 millions
d’années à partir d’une espèce de singes antérieure appelés
AUSTRALOPITHEQUES, qui signifie « singe du sud ou austral, comme
Afrique australe » ; certains de ces hommes et femmes archaïques ont quitté
leur foyer il y’a 2 millions d’années environ pour aller s’établir dans de
vastes régions d'Afrique du Nord, d’Europe et d’Asie »
La carte reproduite en annexe permet de mieux comprendre comment s’est
effectué le peuplement de la terre. Elle montre à l’évidence que l’une des
quatre flèches qui donnent les itinéraires suivis aboutit en Afrique du Nord
alors qu’une autre s’oriente vers ce que nous appelons aujourd’hui le Moyen-
Orient pour continuer vers l’Europe, l’Asie et les Amériques. Les périodes
auxquelles ces peuplements ont eu lieu sont les suivantes :
- Afrique entre – 45 000 et -35 000 ans
- Amériques moins 18 000 ans
- Asie – 67 000 ans
- Australie vers – 50 000 ans
- Europe occidentale vers – 40 000 ans
Pour éviter toute confusion il convient de souligner que les périodes données
ci-dessus sont celle de la deuxième recolonisation, celle des Homo Sapiens,
ancêtres lointains de tous les humains actuels de la terre. La première
colonisation encore plus lointaine que la deuxième est celle des Homo
Erectus dont on ne connait pas les raisons de son extinction ; de façon
naturelle selon certaines connaissances ; violente selon d’autres.
Encore quelques indications capitales pour notre sujet. Pour dire simplement
et brièvement que :
1) Le feu aurait été inventé par l’Homo Erectus vers moins 500 000
ans du temps présent.
2) La population des Homo Sapiens ne dépassait pas au départ 30 000
personnes ; comprenant parents et enfants.
3) Tous les grands groupes régionaux, de préférence au mot races qui
n’existent pas pour les scientifiques remontent à plus de 10 000 ans
en arrière.
4) Les langues actuelles parlées dans le monde proviennent toutes
d’une seule langue originelle.
Il est clair que toutes ces indications puisées aux sources scientifiques les
mieux établies et quasiment admises par tous les spécialistes de niveau
mondial ruinent totalement bon nombre de croyances et de certitudes sur
l’origine et la qualification du peuple algérien d’aujourd’hui.
Il nous faut continuer à remonter le temps ; du plus lointain au plus récent ;
en nous appuyant exclusivement sur les travaux des historiens les plus
réputés et les plus respectés. Je n’ai d’autre choix que d’offrir des citations
parfois un peu longues pour lever toute confusion et être le plus clair possible
sur l’origine du peuple algérien d’aujourd’hui. Cette fois je fais appel à
l’historien anglais John M. Robert dont le livre sur Histoire du monde- Les
âges anciens est sans équivalent, unanimement salué par la critique et
plébiscité par le grand public est-il écrit sur la couverture.
Voici ce qu’il écrit sur le Sahara algérien et nos ancêtres :
« Encore récemment disons vers 3000 avant JC, le Sahara était habité par
des animaux comme l’éléphant et l’hippopotame ; qui ont depuis longtemps
disparu ; plus étonnant encore, il abritait des populations de pasteurs qui
élevaient du bétail, des moutons et des chèvres. Aujourd’hui de tous les
déserts, le Sahara est celui qui se développe le plus rapidement. Mais ce qui
n’est plus à présent qu’une étendue aride, sillonnée de canyons desséchés
était jadis une savane fertile arrosée par des rivières coulant vers le Niger et
par un système fluvial de 1200 Kilomètres de long qui se jetait dans le lac
Tchad. Les peuples qui vivaient sur les collines traversées par ces cours
d’eau nous ont laissé des renseignements sur leur vie, par le moyen de
peintures et de gravures rupestres bien différentes de l’art des cavernes
apparu plus tôt en Europe et qui traitait essentiellement de la vie animale,
avec parfois quelques allusions à l’homme. Ces documents paraissent
indiquer également que le Sahara était alors un lieu de rencontre entre
peuples africains et peuples méditerranéens, ceux qui figurent parmi les
ancêtres des futurs Berbères et Touaregs ».[3]
Citation trop longue, sûrement ! Mais combien utile pour connaître comment
vivaient nos ancêtres lointains donc plus de 5000 ans et où apparait pour la
première fois la référence aux Berbères.
Comment ne pas accepter et, pire encore, rejeter des citations des plus grands
savants du monde ?
Les refuser c’est accroitre l’ignorance sur nous-mêmes ou, pire encore, croire
des idéologies mortifères.
Pour nous résumer sur une période aussi longue de plusieurs millions
d’années et si difficile à comprendre on dirait tout simplement que jusqu’ici
c’est-à-dire 3000 ans avant JC, la population qui vivait sur le territoire
algérien actuel était, comme toutes celles qui ont peuplé la terre, d’origine
Est-Africaine issue de l’espèce Homosapiens et qu’aucune autre population
venue du Nord (Europe) ou de l’Est dit Proche et Moyen Orient n’est venue
s’intégrer à elle.
Est-elle restée dans cette pureté primitive tout au long des cinq derniers
millénaires ?
C’est ce qu’il nous faut démontrer à présent, toujours en nous appuyant sur
les travaux scientifiques les plus rigoureux et les plus respectés.
La meilleure façon d’y parvenir, c’est de rappeler qu’aucun envahisseur
connu de l’Algérie actuelle n’est parvenu à y rester définitivement ; si longue
qu’ait été l’occupation. Plus encore, aucun des envahisseurs n’a fait de
l’Algérie des différentes époques, quels que furent ses limites géographiques
et ses noms, une colonie de peuplement hormis l’occupation française, la
toute dernière et la plus récente, donc la mieux connue de nombres
d’Algériens encore vivants au moment où j’écris, qui a réussi, à la suite de
plusieurs générations, à compter 984 000 Européens contre 8 360 000
algériens d’origine en 1954. Or tous ces Européens d’origine diverse, connus
plus tard sous le nom de « Pieds Noirs » ont presque tous quitté ou fuit
l’Algérie dans un désordre indescriptible, souvent poussés par la folie
meurtrière de l’OAS (Organisation de l’Armée Secrète créée et dirigée par
des extrémistes civils et militaires qui voulaient l’Algérie Française) peu de
mois avant son indépendance le 3 Juillet 1962.
Aucune autre occupation antérieure, y compris celle de l’Empire romain qui a
duré près de six siècles de -108 à +429 en s’appuyant sur les royaumes
vassaux dont il se disait protecteur ; (Massinissa était officiellement « ami des
Romains »[4]) n’a voulu y implanter en nombre ses populations.
Le décompte donné par Charles André Julien est édifiant à plus d’un titre. Il
mérite d’être rappelé et connu :
- « Les vandales qui ont succédé aux Romains étaient 80 000. »
- « L’immigration arabe n’a pas été non plus considérable. Les
contingents envoyés d’Orient en Afrique aux VIIème et VIIIème
siècles ont atteint un total approximatif de 150 000 hommes ». En
tenant compte des pertes subies tout au long d’une longue et dure
conquête et même en y ajoutant femmes et enfants, l’historien
français pense « que cela fait 200 ou 300 000 nouveaux venus tout
au plus » et de conclure sur ce point « rien ne permet de croire
qu’elles (immigrations) aient été massives, et, tout compte fait, on
ne voit pas qu’aucune d’elles ait été susceptible d’action profonde
en ce qui concerne la situation ethnique du pays ; surtout si l’on
tient compte du fait que les immigrants s’échelonnaient dans le
temps ( 2 siècles au moins) et se dispersaient dans l’espace ». « Ces
remarques nous amènent à penser que les populations qui occupent
aujourd’hui la Berbèrie sont, compte tenu de quelques métissages,
les mêmes qui l’occupaient au début des temps historiques"[5]
- La longue occupation turque de 1516 à 1830 n’a pas davantage été
une colonisation de peuplement. Pire encore, le nouvel occupant
français a, dès 1830, renvoyé en Turquie aussi bien le dernier Dey
Hussein d’Alger que les quelques 3000 Janissaires (soldats turcs),
avec leur famille, pour éviter toute insurrection.
Est-il encore possible, raisonnable, lucide, responsable de qualifier l’Algérie
d’aujourd’hui autrement que totalement algérienne puisque au moins
ethniquement aucun des envahisseurs n’y a fait souche. Qui peut prétendre et
soutenir que Romains, Vandales, Byzantins, Arabes et Turcs et même
Français sont venus en grand nombre et surtout qu’ils ne soient pas repartis ?
Faut-il ajouter, même si la question est sensible, que les mariages mixtes
étaient de tout temps si rares et si contraires au poids des traditions
ancestrales que la population algérienne était ethniquement restée sans
mélange extérieur depuis la nuit des temps ? Aujourd’hui encore, dans
certaines régions de notre pays, pourquoi ne pas dire ou reconnaitre sans
chercher à blesser aucun amour propre qu’il est assez mal vu qu’une jeune
fille se marie avec un étranger fut-il tout simplement arabe ou supposé tel.
Tel est notre pays ! La question n’est pas pour autant tranchée, car, il reste
encore à se demander et si possible à répondre pourquoi l’Algérie et les
Algériens sont qualifiés d’arabes.
Essayons dans un souci majeur, plus qu’académique mais aussi existentiel de
nous frotter à la question et d’offrir quelques explications. J’en donnerai trois
pour ne pas être trop long.
La première me parait être cette méconnaissance totale de l’Algérie, qui
n’avait même pas de nom précis au départ, qui a conduit l’occupant français à
considérer tous les habitants du pays comme étant des arabes ; se fiant surtout
aux vêtements, burnous et gandouras principalement alors que ces deux
habits remontent aux temps numides au point que dans les années 1960 un
homme aussi perspicace et cultivé que le Président Bourguiba de Tunisie
aimait à répéter que l’Afrique du Nord (ou Maghreb) s’arrêtait là où
s’arrêtent le burnous et le couscous ; c’est à dire au Maroc, à l’Algérie et à la
Tunisie excluant du même coup Libye d’un côté et Mauritanie de l’autre pour
la construction éventuelle d’une Union ou Fédération des trois pays.
Il fallut beaucoup de temps aux « Orientalistes français » pour découvrir que
les populations d’Algérie étaient quasiment toutes d’origine berbère comme
l’expliqueront à force de recherches, de fouilles archéologiques et de travaux
scientifiques les universitaires de la Faculté des lettres d’Alger. Mais rien
n’est plus difficile à redresser qu’une erreur historique ou sociologique
comme il est impossible de redresser un tronc d’arbre de quelques décennies
ou plus ;
Inversement les populations autochtones, toutes régions du pays confondues,
ont fini par croire qu’elles-mêmes étaient d’origine arabe. Cette croyance,
totalement erronée, s’explique à mes yeux par deux facteurs assez persistants
dans la société algérienne.
Le premier tient encore à la confusion qui est faite encore de nos jours entre
la religion musulmane, la langue arabe voire même la race arabe inexistante
selon tous les scientifiques de renom.
Allez faire comprendre aujourd’hui à la plupart des Algériens, hommes et
femmes, que sur plus d’un milliard et demi de musulmans dans le monde à
peine le cinquième ou 300 millions se disent ou se croient arabes. À elle seule
l’Indonésie est peuplée par une population de musulmans quasiment égale à
celles de tous les « pays arabes » réunis.
Que dire encore si on y ajoute des pays aussi densément peuplés de
musulmans comme le Pakistan, le Bangladesh, l’Iran, la Turquie, le Nigéria
… que personne ne commettrait l’erreur de confondre avec les pays arabes.
Le deuxième facteur explicatif de l’erreur qui est faite en Algérie sur la
croyance d’une appartenance « arabe » est à rechercher dans l’esprit de
résistance du peuple algérien à la colonisation française.
Les différents chapitres de ce livre finiront par convaincre le lecteur que faute
de cohésion et de conscience nationales affirmées, qui se construisent et se
fortifient sur de longs siècles, les populations algériennes n’avaient d’autres
branches auxquelles s’accrocher face au nouvel occupant français que de se
dire arabe et musulmane autant par commodité, urgence et détresse, en
situation de danger mortel.
Enfin troisième et dernière explication, c’est celle qui tient à la gouvernance
de l’Algérie depuis son indépendance. Quatre de ses Présidents de la
République sur cinq à ce jour (Ben Bella, Boumediene, Chadli Bendjedid,
Bouteflika) obsédés voire possédés par l’Orient Baâthiste et Nassériste n’ont
rien réussi d’autre qu’à implanter durablement l’arabisme et l’islamisme
politique. Le premier sera pris d’hystérie dès sa sortie de prison en Mars 1962
pour effacer des milliers d’années d’histoire berbère, en criant à Tunis, 3 fois
: « Nous sommes arabes », le dernier en pactisant avec le FIS dont la folie
meurtrière a fait 100 ou 200 000 morts lors de la décennie noire de 1990.
Ingérer sur plus d’un siècle par une population privée de culture et
d’ouverture sur le monde, cette croyance a fini par forger, façonner
l’imaginaire de tout un peuple.
Il faut beaucoup de temps pour qu’un peuple apprenne calmement,
paisiblement, fraternellement d’où il vient et qui il est ; Questions qui restent
lancinantes en Algérie.
A regarder froidement le monde actuel et si cruel soit-il par endroits et par
moments, l’optimisme actif et constructif devient un devoir.
Que reste-t-il de l’Irak qui a vu naître la première civilisation au monde ?
Celle de Sumer ancien nom de la Mésopotamie il y’a quelque 5000 ans avant
notre ère. Rien ou presque. C’est de là aussi à OUR(UR) exactement qu’est
parti ABRAHAM fondateur des religions monothéistes. Devenue par la suite
le phare du monde grâce à la dynastie Abbasside.
Même question pour la Syrie voisine d’aujourd’hui ravagée, ruinée (au sens
de ruines) par la folie d’un Bachar El Assad qui s’accroche au pouvoir en
tuant son peuple ? Encore rien.
Autre désastre, autre ruine. C’est le Yémen qui est en guerre religieuse avec
l’Arabie Saoudite où se trouvent les lieux saints de l’Islam et qui menace de
s’effondrer à tout moment.
Plus près de nous, la Libye est éclatée dans tous les sens dans une mosaïque
de tribus, impossible à souder ou à unifier ; même sous l’occupation déguisée
de la Turquie et de la Russie.
La liste est loin d’être close. Je m’arrête ici pour ne pas être accusé de
froideur et de cynisme face à tant de malheurs qui lancent des millions de
femmes, d’enfants et de vieillards vers une Europe barbelée car saturée de
réfugiés inconscients et impuissants devant les dangers et les naufrages en
méditerranée qui ont ébranlés la conscience universelle.
Si insupportables que soient ces désastres que je déplore sincèrement et
profondément, je veux tout simplement dire que le mythe d’un « monde arabe
» finira par s’effondrer quels que soient les efforts désespérés d’une Algérie
qui vit continuellement dans le déni de réalité.
Alors, mais alors seulement, ce beau pays d’hommes et de femmes libres
(IMAZIGHENE) qui est le mien pour m’y être modestement mais réellement
impliqué pour sa libération et sa construction finira bien dans un élan
fraternel par ouvrir ses yeux ; se réconcilier avec son origine fondatrice et
prendre part à la civilisation universelle.
Le seul problème, pour lequel j’éprouve quelques difficultés à proposer une
solution est, non pas l’origine ethnique bien établie, ni la religion musulmane
que je respecte infiniment et que je défendrai au besoin, mais celui de la
langue ou des langues officielles de l’Algérie de mes rêves et de mon idéal.
Faut-il faire cohabiter deux langues : arabe et amazigh ou faut-il que cette
dernière retrouve pleinement son berceau d’origine ? Par esprit centralisateur
et « fortificateur », je suis porté sur une seule langue, celle qui est chez elle.
Bien entendu, la tâche est immense voire titanesque. Mais elle n’est pas
impossible si chaque algérien, chaque algérienne y croit et s’implique
pleinement.
Mais la cohabitation de deux langues nationales, égales dans leur traitement
et promotion, ne m’effarouche pas. De nombreux pays, parfaitement
respectables, utilisent deux ou plusieurs langues sans que cela leur pose de
sérieux problèmes. Citons à titre simplement indicatif la Suisse, la Belgique,
le Canada, l’Inde, l’Espagne et bien d’autres.
Quelques conditions préalables devraient être clairement et paisiblement
établies pour l’Algérie ; à savoir ne plus faire de lien entre l’usage d’une
langue et l’appartenance à une aire quelconque géo-civilisationnelle. De
même qu’il faudrait éviter toute prédominance d’une langue sur l’autre.
Ai-je besoin pour illustrer la force de mon propos de reprendre les exemples
des pays cités plus haut ou d’autres encore qui parlent la même langue mais
qui ne forment pas pour autant la même nation. Allez dire à un Wallon belge
dont la langue officielle est le français qu’il est Français. Pire encore, le dire à
un Suisse risque de déchaîner sa colère et peut répondre avec mépris qu’il
n’est pas Français. Même chose encore du Monégasque ou du Québécois,
fiers d’appartenir à leurs seuls Etats. Tout aussi forts sont les sentiments
nationaux des Latino-américains qui parlent tous Espagnol ou Portugais sans
pour autant se revendiquer en quoi que ce soit Espagnols ou Portugais.
N'hésitons pas à citer des exemples extrêmes. On risque de se couvrir de
ridicule de dire à tout africain qu’il est Français, Anglais, Portugais, Espagnol
ou autre si on s’avise à traiter comme tel un Sénégalais, un Malien, un
Ghanéen, un Nigérian, un Sud- Africain, un Mozambicain ou un Angolais
dont les Etats ont choisi la langue de l’ancien colonisateur comme langue
officielle.
Peut-être une autre citation pour en finir avec les langues. C’est celle d’Ernest
Renan dont la conférence à la Sorbonne le 11 mars 1882 est devenue
anthologique sinon un passage obligé. S’agissant des langues, il affirmait ceci
:
« Les langues sont des formations historiques, qui indiquent peu de choses
sur le sang de ceux qui les parlent, et qui, en tout cas, ne sauraient enchainer
la liberté humaine quand il s’agit de déterminer la famille avec laquelle on
s’unit pour la vie et pour la mort. »[6]
Si claire et si juste que soit la citation empruntée à ERNEST RENAN, elle
reste insuffisante et peu parlante pour l’Algérie où les anathèmes, les
susceptibilités voire les peurs et les haines nourries par les idéologies
baâthiste et nassériste sont à fleur de peau. Explosives, les questions
d’identités, de langues et de religions doivent être abordées et traitées avec
infiniment de prudence et de discernement. Mais le pire serait de ne pas en
parler ; de les laisser couver comme un feu de paille qui peut s’embraser à
tout moment. C’est pourquoi j’ai tenté de le faire du mieux que j’ai pu.
Il me reste à implorer l’indulgence, et la clémence du lecteur qui peut être
choqué, blessé, ou se sentir directement visé par mes écrits. Dieu m’est
témoin que mon seul but était et reste de renforcer cette belle nation qui nous
a été redonnée après tant d’éclipses par la génération de novembre 1954. A la
seule condition toutefois de rester fidèles aux messages des chefs historiques
de notre guerre de Libération Nationale et des six membres du Congrès de la
Soummam qui ont jeté les fondements impérissables de l’Algérie. Il nous faut
retrouver cet esprit de fraternité, de tolérance et de justice sociale surgis de
ses montagnes sans lesquels il serait vain de protéger l’Algérie des graves
défis qui la menacent de toute part.
II - L’ABSENCE DES DONNEES
HISTORIQUES ET LA QUESTION DES
SOURCES

1) L’ABSENCE DES DONNÉES HISTORIQUES :

Faute d’efforts et de recherches, nos ancêtres et nous- mêmes avons laissé


s’engloutir des pans entiers de notre histoire. Nous sommes, pour certaines
périodes, pas forcément lointaines, dans la même situation de manque voire
d’angoisse que des enfants qui ne connaitraient pas leurs parents ou qui les
chercheraient désespérément.
Voici brièvement ce qu’écrivent certains historiens français supposés être très
favorables à l’indépendance de l’Algérie et dont la compétence scientifique
est au-dessus de tout soupçon.
Charles André Julien à la page 63 de son livre sur l’Histoire de l’Afrique du
Nord est péremptoire :
« La colonisation phénicienne avec laquelle la Berbèrie entre dans l’histoire
ne nous est connu dans ses débuts que par des traditions peu sûres ».
Yves Lacoste, André Nouschi et André Prenant : Algérie passé et présent
page 73 sont encore plus catégoriques :
« Faute de sources historiques, il n’est pas possible de connaître les
processus qui aboutirent, à partir d’organisations tribales, à la formation de
deux grands royaumes berbères…A l’Ouest, le royaume des Massaesyles (de
la rivière Moulouya au Maroc actuel, jusqu’au Rummel de Constantine, dont
l’Aguellid aurait été Syphax) …A l’Est, le royaume des Massyles (de Cirta
jusqu’aux possessions mouvantes de Carthage dont Massinissa est cité
comme son Aguellid ou Roi) ».
Mahieddine Djender, historien algérien écrivait dans un livre récent
(Introduction à l’Histoire de l’Algérie –SNED - Alger 1968 page 33) que :
« Rien ne nous est parvenu de ce qui a pu être écrit en langue punique ou en
grec durant la période des royaumes Berbères (Numides) ».
Plus loin à la page 35 de son livre, Djender ajoutait ceci :
« Il est absolument certain que les écrits latins constituent la seule source
écrite que nous possédons sur l’antiquité Nord-Africaine ».

Or ces sources latines dont j’ai eu accès pour certaines d’entre elles, en
traduction française, ne contiennent pas grand- chose sur l’Algérie de
l’époque ; qu’elle s’appelât « Numidie » ou « Maurétanie césarienne ». Tout
juste si les auteurs, Suétone par exemple, citent les adversaires ou les
ennemis des Empereurs qui, seuls, les intéressaient réellement puisque
c’étaient l’objet de leurs livres.
Je n’ai trouvé qu’une seule phrase ou une ligne à peine exploitable dans le
livre de Suétone. La voici. Parlant de Jules César le premier des douze
Empereurs, il écrit : « il défit en Afrique Scipion et Juba qui rassemblaient les
débris de leurs partisans… ». On avouera que c’est bien peu pour connaître
les royaumes numides, ancêtres de l’Algérie actuelle.
La moisson de connaissances n’est pas plus riche ni meilleure lorsqu’on
consulte un livre récent (1993) consacré à l’Empire romain par Pierre
Grimal ; dans la collection « le livre de poche ».
Il est clair par conséquent que, faute de recherches hautement spécialisées en
archéologie, en numismatique et en bien d’autres disciplines en cours
d’élaboration ou à venir, il est peu probable que nous puissions lever le voile
sur une période de trois siècles environ avant l’ère chrétienne qui est si
importante à connaître pour l’Algérie, alors que les autres pays
méditerranéens, surtout ceux du pourtour nord ont exploré tous les reliefs de
leur passé, au moins la séquence des trois siècles cités.

2) LA QUESTION DES SOURCES :


Par question des sources j’entends à la fois toutes celles qui existent dans
quelque langue que ce soit pour tout le passé algérien mais aussi celles qui
m’ont servi à établir la présente chronologie. Parler des deux, même
brièvement, me paraît être un devoir moral élémentaire.
S’agissant des quelques sources qui existent sur le passé de l’Algérie
arrachées à l’enterrement et à l’oubli, il faut prévenir qu’il faut garder toute sa
lucidité et son sang-froid car certains jugements qui sont portés sur certaines,
au nom de la liberté critique, qui semble être l’apanage du seul Occident pour
avoir fait son avancée scientifique depuis plusieurs siècles, peuvent être
extrêmement dérangeants voire choquants. Je les reprends à dessein pour
réveiller les consciences et dire combien notre responsabilité est primordiale
vis-à-vis de notre Histoire, objet de ma réflexion, comme vis-à-vis des autres
domaines de notre destin.
Les jugements portés par Charles André Julien sur les auteurs latins et arabes
sont féroces dans certains cas. En voici un bref échantillon :
« La pénétration des Perses, des Mèdes et des Arméniens en Afrique après la
mort d’Hercule n’est qu’une légende sans fondement rapporté par Salluste »
C’est précisément à Salluste qui présente un intérêt particulier puisqu’il fût
gouverneur romain de Numidie en 46 avant l’ère chrétienne, qu’on doit un
livre Guerre de Jugurtha et Histoires.
Sur un autre historien qui intéresse de près l’Algérie, le Byzantin Procope qui
fut le secrétaire du Général Bélisaire envoyé en Afrique romaine (Tunisie,
Algérie actuelles) pour reprendre aux vandales les possessions romaines de
juin à décembre 533 de l’ère chrétienne, Charles André Julien n’est pas plus
tendre ni indulgent quand il écrit :
« Quant à la tradition rapportée par Procope de l’invasion de la Libye par
les Hébreux, tradition dont l’écho se retrouve chez les auteurs arabes, elle …
est sans valeur historique ».
Sur les sources arabes, les historiens occidentaux sont très réservés en raison
d’une méthode ou d’une tradition littéraire qui favorisent le lyrisme et le
romantisme plutôt que la rigueur scientifique qui exigent des références pour
traiter de l’Histoire.
Voici le jugement de Charles André Julien : Ibn El- Hakam, Historien
Egyptien mort au Caire en 871 a écrit vers le milieu du IX é siècle :
« Les analystes postérieurs…du XIe au XVe siècles…donnent l’impression
d’avoir brodé sur un maigre canevas et doivent être utilisés avec autant de
prudence au moins qu’Ibn Abdel- Hakem ».
Le seul qui semble plus ou moins épargné par une critique féroce n’est autre
qu’Ibn Khaldoun, quand l’historien français écrit ceci sur lui :
« Ibn Khaldoun manifeste non seulement une grande liberté de jugement et
de l’esprit critique, mais encore le besoin de comprendre et d’expliquer.
Malheureusement son récit de la conquête (arabe de l’Afrique du Nord) est
postérieur de sept siècles aux événements et il est impossible de restituer ses
sources » pages 12. T II.
Quant aux historiens algériens de notre époque contemporaine, je me
contenterai pour informer plus complètement le lecteur de reprendre le
jugement si courtois et patriotique de Mahieddine Djender qui écrit ceci dans
son livre déjà cité sur les trois auteurs les plus connus : El Mili, El Madani et
El Djilali :
« Ont-ils…réussi ? » se demande-t-il.
« On peut déjà, dans le domaine technique, scientifique (précision, critique
des sources, références etc…) déceler des insuffisances. Elles se traduisent
par la tendance à la compilation chez El Djilali (Abderahmane), par l’abus
des citations poétiques et du détail inutile chez El Mili (cheikh El Mubarek),
par la précipitation et la généralité trop vague des conclusions chez El
Madani (Ahmed Taoufik). »
On a beau vouloir ménager ses confrères ou compatriotes ; ce qui est loin
d’être une règle ou une obligation scientifiques, il n’en reste pas moins que
les mots de Djender trahissent, peut-être, une critique ou une sévérité
méritées.
Pour ce qui est des sources que j’ai décidé d’utiliser pour la confection de la
présente chronologie, la morale comme le devoir envers le lecteur exigent
d’être clair et sincère : je n’ai pas trouvé de meilleurs livres que ceux de
Charles André JULIEN et du collectif d’auteurs : Yves Lacoste, André
Nouschi et André Prenant.
Il me faut me justifier brièvement. D’une façon générale je considère qu’un
livre fait par un universitaire est incomparablement meilleur, plus rigoureux,
plus honnête que tout autre livre rédigé par des non universitaires, qu’ils
soient des hommes ou des femmes politiques, des journalistes ou même des
écrivains. La raison en est simple. Un universitaire est par principe
déontologique, tenu d’être neutre et objectif. Il est exposé, naturellement et
forcément, à la critique scientifique et académique de ses pairs. De plus, il va
de soi que sans ses références bibliographiques sur les sources, un livre ne
peut servir d’instrument pédagogique ; alors que pour un journaliste ses
sources doivent, au contraire, rester secrètes et ne peuvent pas être révélées,
même à la justice.
De plus, il y a chez le professeur d’université une sorte de mission
sacerdotale qui le pousse à transmettre un savoir qui est au cœur du progrès
de l’humanité, comparable à celle des hommes de cultes qui se vouent, pour
la vie, à partager la parole divine. Certaines universités (La Sorbonne et le
Collège de France à Paris, Oxford et Cambridge en Angleterre, Heidelberg,
Berlin ou Iéna en Allemagne, Harvard, Yale, Princeton ou Columbia aux
États Unis) ont élevé si haut le niveau du savoir humain, depuis de nombreux
siècles, que les professeurs qui y enseignent sont entourés d’un tel culte,
digne des grands maîtres, que les dirigeants de leurs pays s’inclinent par
respect devant eux.
J’ai donc une totale confiance de probité dans les auteurs choisis. La question
de leur nationalité française n’a pour moi aucune influence négative sur leurs
travaux scientifiques. Je sais qu’il est courant et de mode, même hypocrite, de
critiquer ces grands savants pour la seule raison qu’ils sont français donc
forcément peu ou prou colonialistes alors que tous les contempteurs
ingurgitent sans l’avouer leur apport académique.
Pour tout dire, je partage totalement le jugement de Mahieddine Djender,
Historien algérien qui, j’espère n’est pas le seul, lorsqu’il écrit à la page 111
de son livre déjà cité :
« On ne peut se passer, on ne peut pas se passer, des matériaux de tous
ordres (textes, documents épigraphiques, numismatiques, monuments)
rassemblés, déchiffrés, interprétés, classés et mis en ordre par les chercheurs
français et européens, ni des exposés clairs et détaillés sur les faits que nous
leur devons et des vérifications délicates et patientes qu’ils ont été souvent
les premiers à faire. »
Djender pousse plus loin la dette de reconnaissance quand il ajoute à la même
page :
« Il faut le reconnaître ; à nous-mêmes, notre passé national paraîtrait
encore bien obscur si nous n’avions pas à notre disposition l’abondante
littérature historique, de ceux-là même qui nous ont dominé ».
Dieu, que l’honnêteté est salvatrice ! Il est bien triste cependant qu’elle ne
soit pas largement partagée chez nous.
Il me reste à ajouter que j’ai tiré un énorme profit, pour le présent travail, de
la Muqadima d’Ibn Khaldoun publiée, comme chef d’œuvre universel, par
l’UNESCO Paris en 1967. Je n’ignore pas que mes jugements sur les arabes
dérangent, irritent voire révoltent prodigieusement bon nombre d’Algériens,
mais on ne peut pas répudier tous les auteurs y compris l’œuvre qui a été
écrite à Biskra, ce dont tous les Algériens devraient être fiers, sans quoi il
faudrait purement et simplement renoncer pour toujours à savoir qui nous
sommes et d’où nous venons.

.
III - LA NUMIDIE : ÉTAIT-CE L’ÂGE D’OR
DE L’ALGÉRIE ?

Il serait malvenu que des auteurs ou des chercheurs Nord- Africains


reprochent aux historiens gréco-latins d’avoir plus étudié les conquêtes de
leurs généraux que celles de leurs adversaires ou ennemis numides. Encore
plus d’avoir été si peu intéressés par la vie des populations numides.
Par contre, il n’est que juste de déplorer l’absence de vocations de chercheurs
locaux pour leur propre Histoire. Combien d’études pénétrantes ont été faites
par les Nord- Africains sur leur propre passé depuis leur indépendance, certes
récentes ; 1956 pour le Maroc et la Tunisie et 1962 pour l’Algérie mais
suffisantes pour aller fouiller les sites archéologiques et dépoussiérer les
pierres pour les interroger sur un passé peu connu.
Ceci explique largement pourquoi nous possédons assez peu de
connaissances sur la Numidie. Il reste que tous les auteurs sont unanimes sur
au moins les trois fils les plus célèbres de la terre qui a vu naître au fil des
siècles et des épreuves l’Algérie actuelle. Il s’agit dans l’ordre des naissances
des Rois (Aguellids) Massinissa et Jugurtha et du génial penseur Saint
Augustin.
Tout jugement de ma part en peu de mots sur ces géants de notre Histoire
serait indécent, en tout cas bien en deçà de leur immense grandeur. Aussi je
me contenterai de reprendre quelques citations qui ont traversé intactes les
siècles et l’histoire sur chacun des trois grands.
Sur Massinissa (vers - 238 / vers - 148 avant l’ère chrétienne) la citation de
Polybe (vers 200 et 125 ou 120 avant l’ère chrétienne), l’historien grec
présent à Carthage en - 146 avec Scipion Emilien Consul romain qui
s’empara de la ville, est celle qui est la plus fréquemment reprise ; par Ch. A.
Julien qui lui-même l’a emprunté à Stéphane Gsell :
« Voici dit Polybe (parlant de Massinissa) ce qu’il fit de plus grand et de plus
merveilleux. Avant lui, toute la Numidie était inutile et considérée comme
incapable par sa nature de donner des produits cultivés. C’est lui le premier,
lui seul, qui montra qu’elle peut les donner tous, autant que n’importe qu’elle
autre contrée, car il mit en pleine valeur de très grands espaces. »

Bâtisseur aussi, Massinissa a eu l’idée, la volonté et la politique géniales de


fixer les nomades d’alors dans des bourgades ou villages agricoles ce qui
transforma totalement le paysage de la Numidie. On lui doit aussi, d’après
Tite-live (- 57 + 17 de l’ère chrétienne) Historien romain, la très célèbre
doctrine ou devise : « l’Afrique aux Africains » qu’il faut replacer dans le
contexte d’alors pour rejeter tout impérialisme romain ou à venir. Elle
signifiait surtout pour Massinissa : « La Numidie aux Numidiens ».
S’agissant de Jugurtha (vers - 160 ; vers - 104 avant l’ère chrétienne) petit fils
de Massinissa on lui doit surtout deux choses immenses qui restent les
fondements d’une nation :
1- Résister à tout envahisseur
2- Réaliser et sauvegarder l’unité de la nation.
Curieusement, à sa mort (vers - 148), Massinissa a laissé à la puissance
romaine, surtout à Scipion Emilien, de partager son royaume entre ses 3 fils
légitimes : Micipsa, Gulussa, Mastanabal. Le premier des 3 fils finit par
hériter de toute la Numidie sur laquelle il régna de - 148 à - 118. A sa mort le
même problème de succession se repose avec cette fois la présence de
Jugurtha fils de Mastanabal et donc cousin des 2 fils de Micipsa : A et
Hiempsal 1er.
Voici le jugement de Charles André Julien :
« Jugurtha était beau, intelligent, ardent habile à utiliser la faiblesse de ses
adversaires, mais sujet à des alternatives d’activités fébriles et
d’abattement... »
« Jugurtha, n’était pas homme à se contenter d’un partage. Il fit tuer
Hiempsal, vainquit en bataille rangée, Adherbal, qui se refugia à Rome, et
s’assura la possession de toute la Numidie » en 116 avant l’ère chrétienne.
Enfin Saint Augustin (354 - 430 de l’ère chrétienne)
Quelques dates d’abord pour éviter tout malentendu et toute confusion.
1- Saint Augustin est né en 354 soit 346 ans avant la conquête Arabe
de l’Algérie !
2- Saint Augustin ne pouvait être musulman AVANT la révélation de
l’Islam qui se fera en 613 ; soit 183 ans après sa mort.
3- Les religions qui pouvaient avoir été pratiquées en Algérie du
temps où vivait Saint Augustin ne pouvaient être que : païenne,
juive ou chrétienne.
4- Saint Augustin était donc Numide donc Algérien mais chrétien.
FLORILÈGE SUR SAINT AUGUSTIN
1- « De ce coin de terre (Hippone/Annaba), il (Saint Augustin) remua
le monde » ...Peu d’hommes dans l’Histoire ont eu une telle
influence » pages 120 et 131 Histoires de la civilisation, l’âge de
foi de Will Durant- Traduit de l’Anglais.1963.
2- « Le plus grand des Pères de l’église » car la tête d’Augustin a été
le lieu, non pas unique, mais privilégié, d’une des opérations
majeures de l’esprit humain. C’est à lui, plus qu’aucun autre qu’il
fut donné de réaliser la synthèse de la pensée antique et de la
pensée chrétienne, dont a vécu, de longs siècles, la civilisation
occidentale »
3- « Qu’est-ce que cela signifiait pour eux (évêques africains) qu’il y
avait un génie (Saint Augustin) parmi eux ? » Peter Brown
(Augustin d’Hippone Londres 1967- page 652 de la traduction.
4- « The continuity of western thought from pagan antiquity to
medieval christianity can clearly be seen in the thought of St
Augustine…the first of the great church fathers, and to this day
(1957) one of the two dominant figures in the whole history of the
Christian church (the other being ST Thomas Aquinas) »- William
Ebeenstein –Political thought in perspective. Mc Graw-Hill Book
Compagny – New- York, 1957, page 2.
Quel autre pays que la Numidie ou l’Algérie actuelle a eu un si grand homme
? Comment l’Algérie peut-elle ne pas l’honorer chaque année quand elle ne
l’a pas ignoré ? Parce que chrétien plus de 3 siècles avant l’Islam ! Je n’ose le
croire.

De -814 à -813 :
Fondation de Carthage par les phéniciens. Seule date pour faire entrer la
Berbérie dans l’Histoire. Carthage a en effet « joué dans l’Histoire de
l’Afrique du Nord un rôle immense » ; selon Charles André Julien ;
probablement le meilleur historien de l’Afrique du Nord.
IIIe siècle A.J.C :
Fondation de deux royaumes berbères dans le territoire de l’Algérie actuelle :
À l’Ouest, celui des Massaesyles qui allait de la Moulaya (rivière du Maroc
actuel) jusqu’au Rummel dit Ampsaga à l’époque qui symbolise les
précipices rocheux de Constantine connue alors sous le nom de Cirta. Syphax
était son Roi (Aguellid) le plus connu.
À l’Est celui des Massyles limité par les occupations mouvantes des
carthaginois. Son Roi le plus prestigieux était Massinissa.

De -264 à -241 :
Première guerre punique entre Rome et Carthage pour le contrôle de la
méditerranée occidentale. Alliance du Roi Syphax avec les Carthaginois,
affaiblis vers la fin de cette première guerre ; ce qui permet au premier
d’occuper Cirta et de fonder un vaste Etat appelé Numidie.

De - 218 à -202 :
Deuxième guerre punique : Massinissa accepte une alliance avec les Romains
pour combattre les Carthaginois et leur allié Syphax.

-203 :
Massinissa sort vainqueur de son combat contre Syphax et les Carthaginois.
Il s’installe à Cirta et en fait sa capitale.

-202 :
Scipion l’Africain général romain, dont le vrai nom était Cornelius Scipion
aidé par Massinissa l’emporte à la bataille de ZAMA (Tunisie) en octobre -
202 sur le redoutable et légendaire Hannibal, général Carthaginois rappelé
d’Italie pour sauver Carthage qui s’était pourtant assurée de son côté de
l’alliance avec Vermina, fils et successeur de Syphax.

-201 :
Maître du pays Numide, Massinissa attendait des romains que son alliance
avec eux se traduise par l’annexion de Carthage. C’est mal connaître la vision
impérialiste de Rome qui ne voulait à aucun prix retrouver un autre Hannibal.
Il fallait raser Carthage, plutôt que de la voir tomber entre les mains d’un
Numide ; fût-il, comme Massinissa, un ancien allié.

-150 :
Guerre ouverte et directe entre Carthage qui rassembla une armée de 50.000
hommes et Massinissa qui, malgré un âge avancé de 88 ans finit par arracher
la victoire.

-148 :
Mort de Massinissa qui laisse 3 fils légitimes. Ils se partagent la Numidie :
1- Micipsa
2- Gulussa
3- Mastanabal
-116 :
Jugurtha fils de Mastanabal, donc neveu de Micipsa qui succéda à Massinissa
après la mort de ses deux autres frères réunifie toute la Numidie en un seul
royaume
IV - LA COLONISATION ROMAINE DE - 108 À
+ 429

-108 :
Les légions romaines occupent Cirta, capitale du Royaume Numide après que
Rome eut échoué à renverser JUGURTHA en suscitant différents complots
contre lui.

-105 :
Affaibli, Jugurtha cherche refuge et aide auprès de son beau-père Bocchus,
roi de Maurétanie occidentale (Ouest de l’Algérie actuelle) qui n’hésite pas,
soudoyé par des agents romains, à le livrer à Sylla négociateur de Rome.

-104 :
Mort de faim de Jugurtha enfermé dans une grotte de Rome ; grotte ouverte à
ce jour (2018) aux touristes.

6 avril -46 :
Jules César poursuivant Pompée et ses légions en Egypte d’abord, puis après
un bref séjour à Rome, débarque à Hadrumète dans ce qui était la province
africaine (Tunisie actuelle) de l’empire, finit par vaincre Juba fils de
Hiempsal II, lui-même fils de Gauda qui hérita du royaume Numide de l’Est
après la mort de Jugurtha et qui mourut en - 88.

-33 :
Octave, successeur de Jules César qui prendra le nom d’Auguste, fonde six
colonies dans ce qui est devenue la grande Maurétanie qui englobait le
territoire actuel du Maroc et qui s’étendait jusqu’au Rummel à Cirta
(Constantine). Ces six colonies étaient :
1- Igilgili (Djidjelli)
2- Saldae (Bougie)
3- Rusazus (Azzeffoun)
4- Rusguniae (Cap Matifou)
5- Gunugu (Sidi Brahim près de Cherchell)
6- Cartennae (Ténès)

-25 :
Auguste, nouvel Empereur à Rome fait de la Maurétanie agrandie, un
royaume qu’il confie à JUBA II, fils de Juba 1er défait par Jules César en
avril 46 avant l’ère chrétienne.

23 ou 24 de l’ère chrétienne :
Mort de Juba II dont le fils Ptolémée assure la succession. Malgré sa fidélité à
l’empire Romain, il sera assassiné sur ordre de Caligula à Lyon, capitale des
Gaules.

42 :
CLAUDE, nouvel Empereur forme à son tour deux provinces romaines :
1- La Maurétanie Tingitane (partie du Maroc actuel)
2- La Maurétanie Césarienne (partie de l’Algérie actuelle)
De 42 à 429 :
La Numidie, appelée Berbérie désormais, devient colonie romaine. Pour
autant la colonisation n’a jamais été acceptée par les populations qui se
révoltent à plusieurs reprises.
Faute de pouvoir redérouler près de cinq siècles d’occupation d’autant qu’il y
a assez peu d’écrits et de précisions, citons quelques chefs illustres qui ont
défié et combattu la puissance romaine :
1- Tacfarinas : grande révolte de 17 à 24.
2- Feraxen : soulèvement en Grande et Petite- Kabylie en 253.
3- Firmus : princeKabyle qui s’empara de Cherchell et d’Alger en
373-375.
4- Gildon : révolte en 395 pour affamer Rome par l’arrêt des envois de
blé.
13 novembre 354 :
Naissance de Saint Augustin à Thagaste (Souk-Ahras). Il y fera ses études
primaires, secondaires à Madaure aussi puis ira à Carthage terminer sa
formation supérieure. C’est peu de dire qu’il fût un génie. Il est qualifié dans
de nombreux ouvrages savants de « plus grand père de l’église chrétienne ».
De Hippone (Bône ou Annaba) dont il deviendra l’évêque de 395 à sa mort le
28 août 430, il éclairera ou illuminera le monde de sa pensée universelle
impérissable. Ses deux plus grandes œuvres : Les Confessions et La cité de
Dieu sont à ce jour (2018) insurpassées. Comment l’Algérie peut-elle ignorer
ou rejeter le plus illustre des Algériens ? Parce que non- Musulman ? Il est
mort DEUX SIÈCLES AVANT LA RÉVELATION DU CORAN ET
PRATIQUEMENT TROIS SIÈCLES AVANT SON IMPLANTATION
DANS L’ALGÉRIE DU 8é SIÈCLE. Ah ! Berbère romanisé ? Pas plus que
Kateb Yacine, Mouloud Mammeri, Mouloud Feraoun qui ont écrit en
Français !
V - L’INTERMÈDE VANDALE ET BYZANTIN
435 - 565

11 février 435 :
Convention d’Hippone (Bône et Annaba après 1962) entre Vandales venus
d’Espagne et commandés par Genséric et Romains dont le général Boniface
avait été vaincu à Hippone assiégée. La convention avait pour objet central le
ravitaillement de Rome en blé de Numidie.

2 juin 455 :
Genséric occupe Rome.

24 juin 477 :
Mort de Genséric, ce qui provoque l’affaiblissement de la présence Vandale
en Berbèrie.

508 :
Développement en Numidie comme en Maurétanie d’Etats indépendants où
cohabitent aussi bien Romains que Berbères sous des chefs locaux comme
Mastiès dans les Aurès vers 476-477. Les Vandales seront vaincus sous la
conduite d’un chef berbère nommé Antalas.

27 juin 533 :
Justinien, Empereur byzantin de Constantinople, décide de reconquérir
l’Afrique romaine en y chassant les Vandales. Le général Belisaire est à la
tête du corps expéditionnaire :16 000 hommes de troupes 500 vaisseaux de
transport et 92 croiseurs de protection.

Vers décembre 533 :


BELISAIRE qui avait débarqué, non à Carthage, mais, plus au sud, non loin
de Sousse, a déjoué tous les plans de Gélimer, chef des Vandales qui seront
obligés de fuir vers la Numidie. Gélimer n’a d’autre issue que de se rendre, ce
qui met fin à la guerre contre les Vandales.

539 :
L’Empereur Justinien de Byzance redonne le commandement de l’Afrique au
général Solomon qui va « pacifier » les Aurès en poursuivant le chef local
connu sous le nom de Iabdas. Pour peu d’années : 4 ans seulement. D’autres
soulèvements finiront par vaincre le général Byzantin qui sera tué. Au fil des
soulèvements et des pacifications temporaires, il devenait évident que faute
de les diviser, il était impossible de venir à bout des Berbères.

565 :
Mort de l’Empereur Justinien. La présence de l’Empire romain est plus
menacée que jamais en Afrique.
VI - LA COLONISATION ARABE DE
L’ALGÉRIE 700 - 750

« Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde » selon le


verdict de Camus. Pourquoi donc ajouter de la confusion et ne pas appeler
colonisation la conquête arabe ? Une colonisation se définit très simplement :
« Une armée étrangère envahit un territoire ou un pays étranger quel
que soit le motif ou l’objet ». C’est donc le cas de l’Algérie d’alors envahie
par 6000 cavaliers venus d’Egypte.
Qui ne connait la formule : « Le poids des mots et le choc des photos » ? J’ai
même entendu dire que les mots sont comme des balles : une fois prononcés,
on ne peut plus les rattraper. Ils peuvent même tuer. Tel n’est pas mon esprit.
Mais la question est si importante qu’aucun mot si doux soit-il ne peut cacher
la vérité. La vérité est plus forte que les mots. Alors je choisis la vérité.
L’Islam n’a pas été révélé en Algérie. Il est venu de l’extérieur. Il ne pouvait,
tel un nuage traverser les frontières et déverser ses bienfaits sur la terre si
fertile d’Algérie. Croire aussi que la nouvelle religion s’est implantée
rapidement et qu’elle a été acceptée facilement par les populations d’alors est
contraire à la vérité. Car ces populations avaient déjà, depuis de longs siècles,
leurs propres croyances qui pouvaient être païenne, juive ou chrétienne sans
qu’on sache avec assurance et précision l’importance de chacune d’elles. Par
contre, ce que l’on sait, c’est que les communautés autochtones ; qu’elles
soient juives ou chrétiennes, ont continué à pratiquer leurs propres religions.
Il n’est pas nécessaire de fournir de longues et savantes explications. Il suffit
tout simplement de citer le verset 256/257 de la Sourate numéro deux du
Coran intitulée « la Génisse » pour s’en convaincre. Y lire : « Nulle
contrainte en la religion » donne en une phrase toute la mesure de la
tolérance de l’Islam ; indépendamment de la simplicité des rites qu’apporte la
nouvelle religion. Il a fallu probablement un long et large travail
d’explications et d’exégèses pour que les populations adhérent et pratiquent
la religion musulmane. Sans pour autant effacer ou faire disparaître
totalement les deux religions monothéistes qui l’ont précédée. C’est le cas
bien sûr des juifs qui ont gardé leur religion alors que la pratique du
christianisme s’est prolongée pendant 4 siècles jusqu’au douzième siècle
environ.
Il faut bien admettre comme l’ont fait tous les historiens de renom, y compris
arabes, que l’Algérie appelée alors Berbèrie ou Numidie et qui deviendra
sous les arabes le Maghreb central ou El Maghreb Elwasta fut de loin, le pays
le plus difficile à conquérir et à soumettre. Qu’il ait fallu selon tous les
auteurs quelque six mille (6000) cavaliers venus d’Egypte ; ce qui est énorme
pour une population estimée entre 4 et 5 millions d’habitants et près de 40
années pour venir à bout de la résistance des Berbères (Algériens), prouvent
bien l’âpreté et même la férocité des batailles. S’il est vrai, comme l’ont écrit
les historiens consultés, y compris Ibn Khaldoun que la tête de la « reine des
Aurès », la Kahina fût décapitée pour être montrée en trophée au calife Abdel
Malek qui trônait à Damas, alors il faut admettre une fois pour toutes que
cette conquête fut impitoyable des deux côtés. Ne parlons même pas des
douze apostasiès (changements de religion) répertoriées par Ibn Khaldoun à
la page 322 de sa Muqadima publiée par l’UNESCO en 1967. Alors
comment ne pas s’interroger ? Surtout qu’à ce jour (2018), l’irréductible
question de la succession entre chiites et sunnites qui se double d’une
ambition géopolitique explosive pour le leadership des musulmans, plus forte
population de croyants au monde, plus de 1.6 milliards d’adeptes n’est
toujours pas réglée. L’Algérie est doublement concernée. Je n’ai d’autres
ressources que d’offrir ci-après quelques dates, quelques faits solidement
établis, pour que le lecteur algérien puisse, en son âme et conscience se faire
une opinion.

570 ou 571 :
Naissance du prophète MOHAMMED.

Vers 610 :
Premières révélations du Coran.

612 – 613 :
Premières prédications du prophète.

Septembre 622 :
Emigration, Hégire du prophète Mohammed à Yathrib (Médine).
8 JUIN 632 :
Mort du prophète Mohammed.

632 – 634 :
Califat de Abou-Bakr ; 1er Calife.

Novembre 644 :
Assassinat de Omar (2è Calife 634-644).

17 juin 656 :
Assassinat de Othman (3è Calife 644-656).

3 janvier 659 :
Arbitrage d’EDHROH (Jordanie) entre ALI 4è Calife et MOUÂWIYA
gouverneur de SYRIE qui s’est révolté contre ALI. Certains proches de Ali
refusent l’arbitrage d’où le nom des KHAREDJITES (les sortants) ou
KHAREDJISME qui sera à l’origine du Royaume des JEDAR et plus encore
de TAHRET ou TIARET en Algérie actuelle.

24 janvier 661 :
Assassinat de Ali (4è Calife 656-661).

661- 680 :
Mouâwiya proclamé Calife.

661- 750 :
Califat Omeyades.

666 :
Okba Ibn Nafiâ dirige une première expédition contre l’Afrique du Nord.

670 :
Fondation de Kairouane comme base d’expédition contre le reste de l’Afrique
du Nord.

681 :
Okba reçoit de nouveau le commandement en Afrique (Tunisie). De là, il
aurait poussé des raids, non garantis, contre le reste du Maghreb (nouveau
nom-occident-donné à l’Afrique du Nord ou aux provinces Romaines
occupées par Byzance). Ces raids, invérifiables, l’auraient conduit jusqu’au
bord de l’océan Atlantique ; dans le Maroc actuel.

683 :
De retour de ses raids, Okba aurait capturé (selon Ibn Khaldoun) Kosaïla, un
chef de la résistance berbère qui lui aurait échappé ensuite et, plus encore, lui
tend une embuscade dans la région de Biskra, en coalition avec des éléments
byzantins. Okba est tué avec 300 de ses cavaliers à Tahoudha située à la fin
de l’Oued-El- Abiod dans les Aurès. Le mausolée de Sidi Okba s’y trouve,
non pas pour symboliser la victoire de Kosaïla, chef berbère, mais la défaite
d’un chef arabe ! Cet échec d’une armée arabe sera durement ressenti par le
Calife Abdel Malik 3ème successeur (685-705) de Mouâwiya dans la
dynastie des Omeyades qui siégeait à Damas.

686 :
Bien que préoccupé par des dissensions internes toujours liées aux
successions difficiles voire violentes, le Calife Abdelmalek ne voulait pas
rester sur l’échec incompréhensible de Okba qui passait pour l’un de ses
meilleurs généraux. Il charge Zouhair Ibn Qaïs de reprendre les combats
contre les chefs berbères et de lui ramener en trophée la tête de cette reine
berbère (Kahina) qui aurait fait alliance avec Kosaïla pour résister aux
envahisseurs. Celui-ci sera tué près de Kairouan.
La Kahina va poursuivre, seule, le combat pendant près de cinq années. Elle
réussit à vaincre les troupes arabes ! Elle les poursuivra jusqu’en Libye
actuelle.
698 :
La 6ème expédition arabe viendra à bout de la résistance des Berbères :
Carthage est prise par un nouveau général arabe nommé Hassan Ibn Noâman
Al-Ghassani.
La Kahina va se heurter à la versalité des Kairouanais. Ils préfèrent se joindre
au général arabe vainqueur, plutôt qu’à une reine, fût-elle berbère comme
eux.

700 :
La Kahina s’éloigne de Kairouan hostile, pour se diriger, non pas vers les
Aurès, qui sont ses montagnes, mais vers l’Est à Thysdrus ou El Djem pour
tromper les troupes de Hassan.
Réunions sur réunions avec ses lieutenants pour savoir quelle stratégie
adopter vis-à-vis des poursuivants arabes, supérieurs en nombre, Khaled
neveu de Hassan, prisonnier depuis longtemps, renseigne le général arabe.
Assiégée à Thysdrus (Eldjem), la Kahina suivie de ses fils Ifran et Yazdigan
réussit à sortir de l’encerclement en suivant un tunnel creusé à cet effet par
ses hommes.
Enfin libre avec une faible escorte : direction les montagnes des Aurès. C’est
là à Thumar lieu de naissance en 656 de la Kahina qui voulait se recueillir sur
les tombes de ses ancêtres, qu’elle aura la tête décapitée par le général arabe
(en 700 ou 702) ; cruauté bien inutile pour assouvir la soif de sang et
d’orgueil du Calife Abdelmalek qui n’aura, d’autre réaction à la vue d’une
tête déposée à ses pieds dans son palais de Damas que de soupirer et dire : «
après tout, ce n’était qu’une femme ». Plus réaliste ou plus inspiré, son
général Hassan prophétisera que « conquérir l’Afrique est une chose
impossible ».
La KAHINA sera surtout vaincue par sa politique de la terre brûlée que ne lui
pardonnent pas les Berbères si attachés à leurs arbres et leurs cultures.

De 744 à 750 :
Période d’anarchie : la dynastie Omeyade renouera avec les révoltes internes
qui ont commencé dès l’arbitrage d’EDHROH le 6 janvier 659 qui
provoquera le schisme des Kharidjites. Reflux arabe de l’Afrique du Nord.
25 juin 750 :
Massacre des Omeyades. Seul Abderrahmane Ibn Mouâwiya a réussi à fuir
en Espagne conquise par Tarik en 711 avec ses troupes Berbères et seulement
27 arabes.

5 août 750 :
Assassinat de Marwan II ce qui met fin à la dynastie des Omeyades de
Damas.

750 :
Début de la dynastie des Abbassides à Baghdâd sous le Calife Abou
L’Abbas.

Juin 758 :
Abderrahmane Ibn Rostem, perse d’origine et Kharidjites devient gouverneur
de Kairouan.
VII - LES ROYAUMES BERBÈRES 761 - 1516

Nous n’avons pas la prétention de mieux éclairer une période (surtout celle
qui va du 8è au 11è siècle) pour laquelle E.F Gautier, historien français,
consacre un livre appelé Les siècles obscurs du Maghreb publié en 1927 et
que Charles André Julien, également historien français, juge comme étant «
une période confuse de l’Histoire du Maghreb ». Tout juste si, au prix de
longues et fastidieuses lectures, nous pouvons formuler quelques remarques
pour essayer de comprendre cette période charnière de notre histoire qui
commence à partir du reflux arabe vers 750 et qui se termine avec l’appel aux
« Protecteurs turcs » en 1516 soit quelque 8 siècles ; ce qui n’est pas mince !
La première remarque tient au fait que tous ces royaumes berbères : Tahert
(Tiaret) Ziride de Achir (Boghari) puis d’Alger, ensuite de la Kalaâ des Beni
Hammad et de Bougie et enfin celui de Tlemcen semblent tous avoir été
dirigés, par des chefs étrangers ; c’est à dire non issus d'’une lignée
autochtone. C’est ce que suggère clairement Charles André Julien quand il
écrit à la page 41 de son livre (IIe Tome) sur l’Histoire de l’Afrique du
Nord :
« Les berbères secouent les liens qui les ont attachés longtemps à l’Orient…
ils accueillent volontiers les exilés orientaux et les prennent pour chefs... »
Ainsi Abderrahmane Ibn Rostem qui a fondé l’Etat Kharedjite de Tahert en
761 est tout simplement d’origine perse, élevé puis chassé de Kairouan.
Par contre il n’a pas été possible d’établir avec assurance l’origine de Ziri
sinon qu’il avait été chef de tribus Kabyles auxquelles il était étranger mais
d’une fidélité à toutes épreuves pour promouvoir la cause des Fatimides,
épopée prodigieuse, la seule probablement, qui a débordé les limites de
l’Afrique du Nord pour aller occuper l’Egypte et fonder le Caire, sa capitale
en 969. Tué au combat en 971, Ziri laisse à son fils Bologhin la charge de
gouverner toutes les possessions fatimides en Afrique du Nord. Pour peu de
temps car à son tour, le fils de Bologhin, donc petit fils de Ziri qui s’appelle
Hammad transforme à son tour son gouvernorat en royaume indépendant
avec pour capitale d’abord la Kalaâ des Beni Hammad, non loin de M’sila,
fondée en 1007 puis à Bejaia (Bougie) érigée au statut de siège de la dynastie
en 1067.
Quant au royaume de Tlemcen, sa naissance revient, semble-t-il, au souverain
marocain Abdelmoumen, fondateur de l’empire des Almouhades qui
regroupe pour la première fois par une série de conquêtes tous les États Nord-
Africains. Quelle que fut la volonté de Yaghmorasan d’affirmer
l’indépendance ou la souveraineté du royaume de Tlemcen, il ne semble pas
que les sultans de Marrakech ne lui en aient jamais laissé la possibilité.
Dirigés par des étrangers ou vassaux des États étrangers, les royaumes
berbères du Maghreb central ne semblent pas avoir eu la latitude de devenir
des États totalement indépendants.
La deuxième remarque générale sur cette période porte sur l’étendue et le
périmètre de ces royaumes berbères. Les cartes regroupées en annexes
montrent plus facilement et à l’évidence deux choses :
1- L’extrême morcèlement du Maghreb central.
2- La faible superficie des royaumes qui y ont été édifiés.
Ce double constat impose de tirer plusieurs leçons de cette partie centrale de
l’Afrique du Nord :
1- L’inexistence d’une unité nationale sur une grande période et sur
une grande étendue.
2- L’absence d’un centre ou d’une autorité forte.
3- L’absence d’un rayonnement durable au-delà des limites
géographiques étroites des royaumes.
4- Des empiétements ou incursions répétées et prolongées des deux
royaumes du Maroc et de la Tunisie actuels sur l’Algérie de
l’époque.
Les facteurs d’explications tiennent probablement aux rivalités permanentes
au sein des tribus algériennes mais aussi au caractère « rebelle » et réfractaire
des habitants du pays continuellement opposés aux pouvoirs et à l’autorité.
Les quelques explications que je donne, particulièrement préoccupantes si
elles s’avèrent exactes, méritent d’être examinées par d’autres spécialistes. Je
crois avoir fait ici et autant qu’il était possible ma part d’analyse.
A présent, place aux faits et aux dates.
Août 761 :
Ibn Rostem, perse d’origine, est chassé de Kairouan par le nouveau
gouverneur d’Egypte nommé Ibn El Achath auquel est rattaché le Maghreb
pour le compte des Abbassides de Baghdad. C’est alors qu’Ibn Rostem
s’installe à Tagdemt pour y fonder un royaume kharedjite qui deviendra
quelques années plus tard le royaume Ibadite de Tahert ou de Tiaret.

893 :
Abou Abdallah, chiite, mais surtout missionnaire du Mahdi (imam caché)
Obaïd Allah, installé à Damas, aurait été ramené de la Mecque par deux
pèlerins de la Petite Kabylie. Ils l’auraient caché et protégé à Ikjan, forteresse
Kabyle qui se situerait au nord d’Akbou non loin de Bougie. Grâce à ses
prêches, Abou Abdallah a réussi à faire de la tribu des Kotama une armée
redoutable qui va fonder la dynastie des Fatimides du nom de Fatima, fille du
prophète Mohammed mariée à Ali.
On sait que la guerre de succession au prophète de l’Islam se poursuit à ce
jour (2018) entre Chiites et Sunnites. Pour les Chiites, seul Ali, gendre et
cousin du fondateur de l’Islam, devait lui succéder à sa mort en juin 632 et
que les trois Califes (Abou Bakr, Omar et Othman) qui ont précédé ALI,
4ème Calife, étaient illégitimes, ce qui entraine des conséquences
incroyablement graves et explosives.
Pour Charles André Julien la tribu des Kotama « clôture définitivement la
conquête arabe ».

922 :
Obaïd Allah renonce à ses conquêtes orientales pour gagner et occuper tout le
Maghreb, Maroc actuellement compris. Après avoir détruit le royaume
Ibadite de Tahert ou de Tiaret le 26 août 909, les Kotama sous la direction
d’El Manҫour (946-953) vont se heurter aux Espagnols, effrayés par
l’expansion des Fatimides vers le Maroc actuel.

953 – 975 :
C’est le Calife El-Mouizz qui met fin à la domination des Fatimides sur le
Maghreb.
969 :
Par contre le même El-Mouizz reprend le rêve des Fatimides d’occuper
l’Egypte. Il charge Jawhar l’un de ses généraux d’aller avec 100 000 hommes
occuper le vieux Caire où il fonde la nouvelle ville. L’Egypte sera Fatimide
pendant deux siècles.

971 :
ZIRI, chef des contingents Kabyles qui était gouverneur d’une partie du
Maghreb central (Tiaret- M’sila) pour le compte des Fatimides de Mahdia en
(Tunisie) sera tué dans un combat contre un gouverneur révolté.
Il faut souligner que même après le transfert de la capitale des Fatimides de
Mahdia au Caire, les souverains Zirides (étaient-ils d’origine tunisienne ou
orientale ? ZIRI était-il l’un d’eux ?) (Ziri, puis son fils Bologhin fondateur
d’Alger, de Médéa, de Miliana, puis son petit-fils El Manҫour 984-996, puis
enfin Badis (996-1016) dépendaient du Calife Fatimide du Caire à qui ils
payaient tribut.
Il n’a pas été possible de déterminer l’origine de ZIRI. Était-il étranger
comme Ibn Rostem ? Son père se serait établi au Soudan d’alors qui allait du
Sénégal actuel jusqu’en Ethiopie. Où était-il né ? Quel était l’origine de son
père ?

1004 – 1005 :
Hammad, l’un des fils de Bologhin, donc oncle de Badis, reçut le
commandement du Maghreb central pour combattre les Maghraoua qui
régnaient en Tunisie d’alors et les Zénètes tribus berbères couvrant une partie
du Maroc actuel. Il s’est révolté contre les souverains Zirides pour fonder son
propre royaume d’abord à la Kalaâ des Beni Hammad, non loin de M’sila,
puis à Bougie capitale du royaume fondée en 1067 qui deviendra la ville la
plus importante de l’Afrique du Nord avec un rayonnement culturel et
religieux qui rappelait Carthage.

1048 :
El-Moizz fils et successeur de Badis, donc souverain Ziride, rompt avec le
Caire pour se placer sous la souveraineté Abbasside de Baghdad.
1057 :
L’INVASION DES BANOU-HILLAL
Pour se « venger » de la rupture des Zirides avec les Fatimides du Caire au
profit des Abbassides de Baghdad, le Calife de la capitale Egyptienne va
lancer sur tout le Maghreb les « Banou Hillal » nomades internés en haute
Egypte pour leurs méfaits. Voici pour éviter toute accusation de parti pris ce
qu’ont écrit les plus grands historiens de l’Afrique du Nord :
1) IBN KHALDOUN[7] (AL MUQADDIMA – UNESCO 1967) :
« On remarquera que la civilisation s’est toujours effondrée avec la poussée
de la conquête arabe…Quand les Hilâliens et les Banu Laym ont poussé
jusqu’à la Tunisie et au Maroc (donc Algérie aussi même si le mot n’existait
pas encore), au début du XIè siècle, et qu’ils s’y sont débattus pendant 350
ans, ils ont fini par s’y fixer et les plaines ont été dévastées » pages 297- 298.

Ajoutons ceci, toujours du même Ibn Khaldoun :


« En raison de leur nature sauvage, les arabes sont des pillards et des
destructeurs. Ils pillent tout ce qu’ils trouvent sans combattre et sans
s’exposer. Puis ils se replient sur leurs pâturages au désert. Ils n’attaquent
ou ne combattent que pour se défendre. Ils préfèrent éviter les forteresses ou
les positions difficiles : ils ne les attaquent pas. Les tribus que protègent
d’inaccessibles montagnes sont à l’abri de la malfaisance et des
déprédations des arabes » pages 293.
2) CHARLES ANDRÉ JULIEN (Histoire de l’Afrique du Nord,
Payot, Paris 1969)
« L’invasion hilalienne est à coup sûr l’événement le plus important de tout
le moyen âge maghrébin. (Soit de 476 qui correspond à la chute de l’empire
romain à 1453 prise de Constantinople par les Turcs ou 1492, découverte de
l’Amérique). C’est elle, bien plus que la conquête musulmane, qui a
transformé le Maghreb pour des siècles. Avant les Hilaliens, ce pays, l’Islam
mis à part, était profondément berbère de Langue et de coutumes ; il l’était
redevenu sur le plan politique, à mesure qu’il avait secoué l’autorité de
l’Orient » page 74 T II.
« L’Islam a donc triomphé en Afrique du Nord…il a imprimé un style de vie
orientale à un pays qui, pendant toute la période romaine, avait vécu à
l’occidentale et s’en était bien trouvé, selon toute apparence… » p 305,
Tome II.
3) Yves LACOSTE, André NOUSCHI, André PRENANT : l’Algérie
: passé et présent. Éditions sociales – Paris 1960.
« La quasi-totalité des historiens modernes considère que la cause essentielle
de la désorganisation du royaume Hammadite, comme celle, plus précoce de
l’Etat des Zirides, procède de « l’invasion » des nomades arabes, qui avaient
fait leur apparition en Ifriqiya au milieu du XIe siècle. Ce serait là le fait
décisif, « une immense catastrophe », « la grande décomposition sans
remèdes » et en particulier « la mort du Maghreb intermédiaire frappé de
paralysie », p 121.

1082 :
Les Almoravides, dynastie installée à Marrakech occupe la partie occidentale
de l’Algérie et parvient à prendre Alger.

1136 :
Les Gênois attaquent Bougie.

1143 :
Les Normands de Sicile qui contrôlaient les ports de l’Ifriqya (Tunisie)
s’emparent de Djidjelli et poussent leur avantage jusqu’à Cherchell et Ténès.

1147 :
Les Almouwahades (Unicité de DIEU), nouvelle dynastie du Maroc actuel
dont le fondateur était Ibn-Toumert auquel succèdera Abdelmoumen chassent
les Almoravides et s’étendent à toute l’Afrique du Nord.

1152 :
Le royaume Hammadite de Bougie est défait par les Almouwahades. Bougie,
capitale du royaume est occupée.

1159 :
La conquête de L’Ifriqia (Tunisie actuelle) par les Almowahades achève
l’unification des trois pays de l’Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie)
sous la dynastie conduite d’abord par Ibn Toumert puis par Abd- El-
Moumen qui meurt peu de temps après en 1163.

1184 :
Ibn Ghaniya, gouverneur des îles Baléares, encore sous allégeance de la
dynastie Almoravides, antérieure à la dynastie des Almowahades, déloge
ceux-ci de la ville de Bougie. Il pousse son emprise sur la Tunisie actuelle.
Malgré les révoltes des populations soumises à l’impôt illégal contre les
musulmans (Kharadj) les Almowahades finissent par reprendre le dessus sur
les hordes de Ibn Ghaniya. Pour peu de temps car l’empire Almowahades
finit par se disloquer à la fois pour des causes successorales mais aussi sous
la pression et la lutte de l’Espagne musulmane (Omeyade) qui craint de
tomber sous la férule des Almowahades qui se rangent du côté des
Abbassides de Baghdad.

1235 :
Yaghmorasan Ibn Ziyan (étranger ?) chef d’une tribu berbère Zénète, celle de
Beni – Abdel - Ouâd dite Ziyanide aussi fait reconnaître le royaume de
Tlemcen qu’il dirige de 1235 à 1283 par les Almowahades affaiblis de
Marrakech. Ce royaume de Tlemcen s’étend de la rivière Moulaya au Maroc
actuel jusqu’en Grande Kabylie comprise. Le royaume doit sa naissance à
Abdel Moumen du Maroc en contrepartie du ralliement et de la soumission
de la tribu des Zenata.
Mérinides au Maroc, successeurs des Almowahades et Hafçides régnant en
Tunisie actuelle jusqu’à Bougie comprise ; donc toute la partie EST de
l’Algérie actuelle, ont tout fait pour éviter l’extension du royaume de
Tlemcen dont le chef voulait réaliser l’unité du Maghreb Central.

1283 – 1304 :
Abou–Saâd–Othman, successeur de Yaghmorasan, tout en résistant tout au
long de son règne contre les Mérinides qui ont assiégé huit ans durant la
vieille ville de Tlemcen a voulu surtout diriger ses forces contre les Hafçides
de Tunisie pour réoccuper tout le Constantinois. Résister aux assauts et aux
ambitions territoriales des Mérinides pourtant cousins des Ziyanides était
impossible.

De 1304 à 1308 :
Abou – Ziyan, fils et successeur de Abou-Saâd Othman s’est attaché pendant
la brève période de son règne à reconstituer l’armature administrative du
royaume de Tlemcen, profitant surtout de la paix signée avec les Mérinides
qui avaient fort à faire dans la Cour de FÈS après l’assassinat du roi Abou
Yaaqoub en 1307.

De 1308 à 1318 :
Abou Hammou Moussa frère et successeur de Abou Ziyan reprend la
politique d’expansion vers le Constantinois, Bougie surtout, tout en
maintenant la paix avec les Merinides de FÈS. Il sera assassiné en 1318 sur
ordre de son fils.

De 1318 à 1337 :
Abou - Tachfin connut à son tour une fin tragique. S’étant lancé à la conquête
du Constantinois contre les Hafçides de Tunisie, Abou Bakr Sultan ou roi du
pays réussit à obtenir le soutien des Merinides de FÈS. Pris en étau par les
forces des deux pays voisins, le royaume de Tlemcen capitule. Abou-Tachfin,
trois de ses fils et son général en chef sont tués dans l’enceinte même de
Tlemcen assiégée et affamée par les troupes du Sultan de FÈS dit Abou El
Hassan en 1337.

De 1337 à 1359 :
Le royaume de Tlemcen, défait par les Mérinides, est gouverné directement
par cette dynastie marocaine.

De 1359 à 1389 :
Abou - Hammou Moussa II. Restauration des Ziyanides à Tlemcen. Voulant
à la fois prévenir les attaques du Sultan de Fès et de soumettre Bougie à son
autorité, il va subir une grave défaite face à la capitale des Hammadites en
1366 ; ce qui lui coûtera probablement son trône. Son propre fils Abou
Tachfin se coalise avec les Merinides de Fès pour le chasser du pouvoir.
Poursuivi jusque dans les montagnes, où il s’est réfugié, Abou Hammou
Moussa II sera tué les armes à la main en 1389.
C’est la fin du Royaume de Tlemcen.

1453 :
Chute de Constantinople, ancienne capitale de l’empire chrétien d’orient ou
Byzantin, occupée par les Turcs et qui deviendra Istanbul. Le pape avait
proclamé une croisade contre les Turcs. Portugais et Espagnols, surtout ces
derniers, qui ont entamé la reconquête de leur pays, depuis son occupation
par les troupes Berbères et Musulmanes de Tariq en 711, vont se lancer
contre les ports nord-africains qu’ils occuperont tour à tour.

1465 :
Fin des Mérinides.

1492 :
Fin de la Reconquista par l’occupation de Grenade par les Espagnols.
Fin du XVème siècle début du XVIème siècle
Situation du Maghreb Central ou de l’Algérie actuelle : sources Charles
André Julien[8] et Mahieddine Djender[9].
- Oasis de Figuig : État indépendant.
- Ouarsenis : Tribus indépendantes.
- Ténès : Ville indépendante.
- Médéa : Ville indépendante.
- Alger : Ville indépendante.
- Kabylie : Royaume de KOUKOU.
- Djurdjura : Tribus indépendantes.
- Ghardaïa et Ouargla : Oasis Ibadites.
- Touggourt : Principauté.
- Aurès : Tribus indépendantes.
- Constantine : Dépendances du Cheikh Hafçide.

23 octobre1505 :
En réaction, semble-t-il, à une attaque de corsaires de Mers El- Kébir près
d’Oran au printemps 1505, une armada Espagnole occupe le port algérien.
1509 :
Oran est attaquée à son tour par la flotte espagnole : 4000 personnes y sont
massacrées, 8000 autres prises comme prisonniers et enfin le port occupé.

Janvier 1510 :
Bougie est occupée par la marine de guerre Espagnole.

Mai 1511 :
Pour ne pas subir le sort désastreux des ports de Mers El- Kébir, Oran et
Bougie, la plupart des autres ports algériens comme Ténès, Dellys, Cherchell,
Mostaganem ont accepté de payer un tribut aux Espagnols.
De son côté, la ville indépendante d’Alger s’est vue contrainte, pour prévenir
toute occupation, de céder l’un des îlots qui protègent son port. Les
Espagnols y installent des batteries de canons qui menacent Alger, située à
moins de 300 mètres.
VIII - PROTECTORAT OU COLONISATION
TURCS ? 1516 - 1830

Comment caractériser l’occupation turque de l’Algérie pendant plus de trois


siècles (1516-1830) ? Est-ce une colonisation militaire ? Non. Est-ce une
colonisation de peuplement ? Non. Est-ce un protectorat ? Pas davantage.
L’Algérie ou plutôt la cité-État indépendante d’Alger, menacée par
l’Espagne, est contrainte d’appeler à l’aide les frères Barberousse (pirates ou
corsaires) lesquels se tournent vers la Turquie en 1518.
Faire en peu de mots, le bilan de cette occupation c’est constater que tout
compte fait et à tous égards cette période de 3 siècles s’est traduite par :
- Une privatisation ou féodalisation de l’Algérie.
- Une « dépatriotisation » ou une déresponsabilisation de son peuple.
Si la privatisation de l’Algérie au profit surtout d’une aristocratie militaire
(Odjaq) est relativement explicitée plus bas par des citations empruntées aux
meilleures sources, par contre il faut dire au lecteur, en peu de phrases
compte tenu de la nature du livre ce que j’entends par déresponsabilisation ou
d’un néologisme encore plus clair « dépatriotisation » du peuple algérien.
Qui ne sait que la colonisation romaine a produit (sans le vouloir bien sûr)
des héros comme Massinissa, Jugurtha, Takfarinas et bien d’autres; que la
conquête arabe a produit, elle aussi, mais toujours sans le vouloir, des
résistants comme Kosaïla et la Kahina qui ont réussi des exploits historiques
et qu’enfin la colonisation française s’est heurtée tout au long de ses terribles
132 années d’occupation à la résistance farouche et héroïque des Abdelkader
et Fatma ISSOUMAR pour ne citer qu’eux alors que pour les 3 siècles
d’occupation et d’exploitation de l’Algérie au profit des «Janissaires» qui ne
sont pas toujours turcs, notre histoire n’a retenu aucun nom, aucun héros,
aucun résistant.
C’est ce que j’ose appeler un « vide patriotique » ou une déresponsabilisation
du peuple algérien aux conséquences désastreuses. Mais d’abord aucune
résistance notoire. Ce n’est sûrement pas faute d’oppressions, d’exactions et
d’exploitations.
L’explication la plus insipide, suggérée parfois, mais non étudiée ou
analysée, c’est que les occupants turcs, protecteurs ou colonisateurs, étaient
eux aussi des Musulmans, comme les Algériens. De surcroit les Turcs étaient
depuis (1517) les Gardiens des Lieux Saints de l’Islam en assumant le Califat
jusqu’en 1924. Incroyable paresse ou faillite de l’esprit. Est-ce qu’une
oppression ou même une spoliation venant des siens n’est pas plus
insupportable, plus cruelle que celles qui viendraient d’un ennemi étranger ?
À force d’accepter l’inacceptable d’où qu’il vienne on finit par perdre toute
volonté de surmonter et de vaincre ses épreuves. On devient aboulique.
Ne jamais résister, pendant trois siècles (!), surtout pour un peuple contre la
confiscation d’un pouvoir donné en totalité à des Turcs, fussent-ils
musulmans, finit par faire perdre tout esprit de résistance et de lutte. En fait,
c’est ce qui semble arrivé en juillet 1830 lorsque le corps expéditionnaire
français fort seulement de 37 000 hommes débarque le 14 Juin 1830 à Sidi
Ferruch met moins de 20 jours pour atteindre et occuper Alger distante de 30
Kilomètres pour y contraindre le Dey Hussein d’abdiquer et de partir en exil
en Egypte. Les Janissaires, soldats ou miliciens Turcs, avaient tout
simplement fui les combats car aucune fibre sentimentale ou patriotique ne
les rattachait à la terre algérienne qui n’était pas leur mère-patrie.
Quant aux Algériens, dépossédés de leurs terres et même du devoir et de
l’honneur d’assurer leur propre sécurité, conditionnés par trois siècles de
désarmement moral, ils mettront du temps, un temps très précieux, pour se
rassembler par moments et par endroits autour de l’Emir Abdelkader qui, à
24 ans, s’est improvisé comme chef de la résistance. Reprenons l’égrenage
des événements et des dates.

1516 :
ALGER paralysée par le blocus et les canons Espagnols fait appel aux frères
Barberousse : Aroudj, Kheireddine, Elias et Ishaq ; l’un d’eux corsaire bien
connu était installé et maître de Djidjelli depuis 1514.
Demander protection à des corsaires est une bien curieuse transaction ;
impossible à qualifier juridiquement. Ils ne sont même pas d’origine Turque
car nés dans l’île grecque de Mytilène.
S’agit-il d’un traité ? Non. D’un contrat de droit privé entre une ville fut-elle
indépendante et des personnes privées ? Si oui, quelles juridictions ou
autorités pourraient le faire respecter ?
Il aurait été plus facilement explicable et acceptable de demander protection à
la Sublime porte (Turquie) puisque c’est elle qui exerçait le Califat
musulman. Donc inextricable confusion politico-juridique.

1518 :
Aroudj qui avait réussi à étendre son autorité sur d’autres cités ou
principautés (Ténès, Kabylie de Koukou), va occuper Tlemcen pourtant
protégée par l’Espagne. Venu d’Oran, Charles–Quint le puissant empereur
chrétien qui se voulait le rassembleur de toute la chrétienté : Espagne, Pays
Bas, Autriche souvent contre la France de François 1er allié aux Turcs
Ottomans a livré bataille autour de Tlemcen où Aroudj sera tué.
Kheireddine, son frère et successeur est considéré comme l’unificateur de
l’Algérie féodale de l’époque.

1525 :
C’est ce même Kheireddine qui a réussi, malgré de nombreuses révoltes en
Kabylie pour maintenir le Roi Koukou ou à Tlemcen où les partisans de la
dynastie des Abdelwadides étaient mécontents de la déchéance de leur
Sultan, à détruire la forteresse Espagnole qui tenait Alger au bout de ses
canons.
Il est vrai que seul, il ne pouvait rien faire contre tant de révoltes,
d’oppositions et d’hostilités. Son trait de génie était d’offrir à la Turquie, sa
mère-patrie, les vastes territoires et richesses potentielles d’un pays comme
l’Algérie, contre bien entendu une protection et une aide militaires
immédiates.
En récompense d’un tel « cadeau » Kheireddine a reçu de Constantinople
(ISTANBUL) près de 6000 hommes dotés d’une artillerie. Mais surtout il est
nommé chef des Emirs ou BEYLERBEY.
Comment qualifier la nouvelle situation de l’Algérie des frères Barberousse
en 1525 ? Protectorat ou colonie ? Voici ce qu’écrivent les 3 auteurs de
l’Algérie , Passé et Présent qu’on ne peut suspecter de partialité encore
moins de malveillance à l’égard des Algériens puisque leur livre était offert
comme manuel d’HISTOIRE aux jeunes diplomates.
« L’Odjaq imprima au gouvernement de l’Algérie une orientation qui fit de
ce pays le bien de la caste dirigeante qu’elle devint peu à peu » (page 142).
L’Odjaq était composée par les « JANISSAIRES » recrutés dans « la
pouillerie anatolienne », selon Charles André Julien page 259 de son Tome
II.
L’Odjaq écriront les 3 auteurs du livre l’Algérie, Passé et Présent à la page
144, avait pour « principe constant de placer au sommet de la hiérarchie la
minorité d’originaires de l’empire Turc et de chrétiens convertis dont il était
lui- même composé ».
Cette organisation à base militaire est restée sans changement significatif
jusqu’à la conquête française.
« Le régime de l’ODJAQ ne pouvait apparaître que comme un frein à la
formation d’une véritable nation (Algérienne) » page 183 du livre l’Algérie,
Passé et Présent.

De 1521 à 1525 :
Expulsion des Hafçides Tunisiens de tout le Constantinois y compris la
Kabylie.

1541 :
Défaite de Charles-Quint Empereur d’Espagne devant Alger.

1543 :
Fin du règne des Abdelwadides à Tlemcen.

De 1536 à 1543 :
Kheireddine qui doit se rendre à Constantinople confie la régence à Hassan
Agha

De 1544 à 1552 :
Hassan Pacha, fils de Kheireddine remplace Hassan Agha, accusé de
faiblesse lors du siège d’Alger par les Espagnols de Charles-Quint (1541)

1546 :
Mort de Kheireddine.

De 1552 à 1556 :
Salah Raïs et Takerli succèdent à Hassan Pacha congédié par les Janissaires
de l’ODJAQ et renvoyé à Constantinople.

Juin 1557 :
Face aux désordres d’Alger, HASSAN, fils de Kheireddine est réinvesti
comme Beylerbey par Constantinople.

Juin 1561 :
Enchaîné, Hassan Pacha est de nouveau renvoyé à Constantinople, accusé par
l’ODJAQ de vouloir l’indépendance de l’Algérie.

Début 1567 :
Hassan Pacha rappelé par Constantinople pour commander la flotte Ottomane
laisse la régence à Mohamed Pacha Ibn Salah Raïs.

1568 – 1587 :
Un Calabrais (Italie) converti à l’Islam, du nom de Euldj- Ali devient
Beylerbey.

1569 :
Le nouveau Beylerbey d’Alger marche sur Tunis ; en chasse le Beylerbey
Hamida qui se réfugie chez les Espagnols rivaux des Turcs et le fait
remplacer par Ramdan puis regagne Alger.

9 octobre 1571 :
La coalition catholique : Espagne de Philippe II, Papauté avec PIE V et
Venise inflige une grande défaite à la Turquie lors de la bataille navale de
Lépante en Grèce ou Euldj Ali Co-commandant de la flotte turque s’est
brillamment distingué.

1574 :
Sinan Pacha et Euldj Ali reprennent la ville de Tunis occupée par surprise en
1573 par le frère de Philippe II, Don JUAN d’Autriche.

De 1574 à 1577 :
Devenu commandant de la flotte Turque au lendemain de la bataille de
Lépante, Eulj Ali confie la régence à Arab- Ahmed puis au Caïd Ramdan.

De 1577 à 1580 :
Hassan Veneziano un renégat de Venise se voit confier le Beylerbey d’Alger.
Cruel et brutal, il sera remplacé par Ramdan pendant deux années (1580-
1582) lors de la visite d’Euldj Ali à Alger.

De 1582 à 1588 :
Hassan Veneziano reprend le Beylerbey d’Alger.

1587 :
Mort de Euldj Ali. L’Algérie cesse d’être un Beylerbey, elle devient un
Pachalik, une province Turque au même titre que les autres.

De 1659 à 1671 :
État des Aghas élus tous les deux mois par la milice des Janissaires ; ce qui
accroît l’instabilité et l’anarchie.
« Les quatre Aghas qui reçurent le caftan d’honneur, de 1659 à 1671, furent
massacrés par l’ODJAQ », TII de Charles André Julien page 275.

1664 :
Le Duc de Beaufort, débarque à Djidjelli sous prétexte de défendre des
négociants marseillais.

De 1622 à 1655 et 1672 :


Les navires de guerre Anglais ont usé des bombardements pour imposer leurs
intérêts souvent concurrents des autres puissances Européennes ; Espagne,
France, Pays-Bas, Cité Italiennes etc…

1689 :
Ce sont les officiers de la milice des Janissaires qui désignent le Dey.

De 1671 à 1818 :
Trente Dey seront ainsi désignés, 14 seront imposés par des émeutes après
l’assassinat de leur prédécesseur. Il y avait en tout 4 provinces.
Alger où siégeait le Dey, appelée Dar Es Soltan.
Beylik de l’ouest. Capitales successives : Mazouna, Mascara, Oran.
Beylik du Centre. Ou Titteri : Capitale Médéa. Beylik de l’est. Capitale
Constantine.

1661 – 1665 – 1683 :


Bombardements d’Alger par des escadres de guerre françaises commandées
par DUQUESNE, TOURVILLE et D’ETREES pour des motifs souvent liés
aux atteintes contre la liberté de navigation en Méditerranée ou tout
simplement pour arracher des avantages dans des traites inégaux avec la
régence d’Alger.

De 1681 à 1705 :
Guerres avec les États voisins du MAROC et de TUNISIE : 1701 l’armée
Marocaine est arrivée jusque à Chélif où elle sera battue. Même résultat pour
des contingents Tunisiens battus à SETIF.

1815 :
Les États Unis ont usé à leur tour de la diplomate du canon contre Alger pour
prévenir ou écarter toute atteinte à leurs intérêts.
De 1806 à 1816 :
L’Angleterre exerce un monopole commercial sur l’Algérie des Deys. Trois
causes principales peuvent être retenues :
1- Rupture des relations entre l’Algérie et la France suite à
l’expédition de Napoléon Bonaparte sur l’Egypte.
2- Blocus Continental contre l’Angleterre ; ce qui ruine les échanges
extérieurs de l’Algérie.
3- Contre blocus Anglais contre la France qui était le premier
débouché commercial de l’Algérie. Les blés Ukrainiens, européens
et moins chers remplacent ceux d’Algérie.
1819 :
Pressions militaires combinées franco-anglaises exercées par les amiraux
Freeman et Julien contre l’Algérie.

1826 :
William Shaler, Consul américain à Alger préconisait la colonisation de
l’Algérie par l’Angleterre dans un ouvrage intitulé Esquisse de l’État
d’Alger.

1827 :
La flotte de guerre algérienne avait été anéantie à Navarin, port de Grèce où
elle avait été engagée avec les flottes Turque et Egyptienne contre les marines
d’Angleterre, de France et de Russie unifiées aux côtés de la Grèce pour son
indépendance de la Turquie.
Même reconstruite en 1830, la marine algérienne avait perdu sa puissance
antérieure et ne pouvait par conséquent s’aligner face aux marines,
combinées ou non, des puissances européennes, France et Angleterre surtout,
considérée maîtresse des mers.

30 avril 1827 :
Coup d’éventail. Excédé par le non-paiement des dettes de la France pour des
livraisons de blé faites au Directoire ; exécutif qui gouverna la France de
1795 à 1799, le dernier Dey d’Alger Hussein, né à Smyrne en Turquie vers
1765 et qui sera enterré à Alexandrie en Egypte en 1838, donne un coup
d’éventail au Consul français Deval reçu en audience. C’est le prétexte que
choisira la France du roi Charles X, en plein désarroi politique à la fois pour
des raisons de politique intérieure mais aussi du rabaissement de la France,
suite au congrès de Vienne (1er novembre 1814 - 9 janvier 1815) qui avait
réglé les guerres napoléoniennes pour déclencher la conquête de colonisation
de l’Algérie. Deux négociants israélites (Bacri et Busnach) étaient mêlés à
cette affaire de dettes qui provoqua le coup d’éventail ou de chasse mouches.
L’affaire est si obscure qu’on se contentera ici de dire que les deux
négociants travaillaient à la fois pour Hussein Dey d’Alger que pour des
intérêts de comptoirs marseillais auxquels était lié le Consul Deval ; plus
grave encore le si redoutable comte de Talleyrand, plusieurs fois ministre, qui
fit et défit Rois et Empereurs de France dont Napoléon.
L’Algérie était à l’époque dans une faiblesse pour ne pas dire anarchie
extrême.
Pour un auteur qu’on est obligé de citer car il faut bien recourir aux seules
sources existantes qu’on ne peut écarter car elles seraient toutes, à tort, «
partisanes, sectaires et malhonnêtes ».
« L’autorité effective des Deys ne s’étendit d’après Louis RINN (acteur du
livre le Royaume d’Alger sous le dernier Dey, Alger 1900) qu’au sixième
de l’Algérie actuelle » cité par Charles André Julien (Page 295 Tome II) qui
ajoute :
« Les républiques de Kabylie, les tribus nomades des plateaux et du Sud et
les principautés guerrières ou maraboutiques, comme celles de Touggourt et
Ain Mahdi vécurent entièrement indépendantes… »
« Quelle que fût son habilité (celle du Dey), il ne réussit jamais à tenir le
pays en mains. Les Kabyles ne cessèrent de s’insurger. » page 296.
IX - LA COLONISATION FRANCAISE 1830-
1962

14 juin 1830 :
Les 35 000 hommes du corps expéditionnaire français, commandés par le
général De Bourmont, royaliste qui avait trahi Napoléon à la veille de la
bataille décisive de Waterloo (18 Juin 1815) en se ralliant aux Anglais,
débarquent à Sidi-Ferruch à moins de 30 Kilomètres d’Alger où il n’y avait ni
port, ni installations ni encore moins des fortifications car toutes les
expéditions européennes et même américaines rapportées plus haut ont pris
pour cible la ville et le port d’Alger bombardés à plusieurs reprises.
Rappelons que c’était une course de vitesse entre Espagnols, Anglais invités
par le Consul américain à coloniser l’Algérie et bien sûr Français pour
occuper les côtes algériennes sous prétexte de neutraliser la course, terme
assez neutre pour caractériser la piraterie à laquelle beaucoup de pays, y
compris la France, recouraient sous différentes formes.
Voici ce qui est écrit dans un livre consacré à Colbert ministre de LOUIS
XIV :
« Ainsi, alors que la France est en guerre avec l’Espagne, les navires de
Fouquet (surintendant du Roi Louis XIV ou ministre des finances) Pillent les
navires des alliés de la France sous prétexte que les Hollandais sont
calvinistes ». Page 155 du livre Colbert : La politique du bon sens. Payot.
Paris 2005.
N’oublions pas non plus que dès 1808, bien avant ce coup d’éventail
provoqué par l’insolence et l’arrogance du Consul français, affairiste plus que
diplomate, Napoléon avait envoyé à Alger un certain Boutin, espion au
service de l’empereur pour lui établir des relevés topographiques et des
endroits où il pourrait réaliser ses plans de débarquement et d’occupation de
l’Algérie.
Cette affaire d’éventail réelle, mais stupide ; ce qui renseigne aussi sur les
médiocres capacités du Dey Hussein, n’était que l’occasion rêvée mais
préparée pour envahir l’Algérie.

5 juillet 1830 :
Le Dey d’Alger capitule. La convention qu’il signe remet « Alger, ses forts et
sa Casbah » au général de Bourmont sans « transfert de souveraineté ».
Quelle niaiserie ! Comme si un vaincu pouvait dicter ses conditions au
vainqueur. Cela révèle tout simplement la méconnaissance totale de l’ennemi,
de la société française, du pouvoir royal, de ses intentions réelles et les enjeux
européens ; surtout les rivalités entre la France et l’Angleterre.

06 juillet 1830 :
Avant même d’avoir vu ou combattu l’armée d’invasion ; le Bey du Titteri
capitule à son tour et reconnait le pouvoir français. Il est maintenu dans ses
fonctions en attendant que les troupes françaises occupent la région.
Par ailleurs, au cours du même mois de juillet 1830, le général De Bourmont
expulse vers la Turquie près de 3000 Janissaires, accompagnés pour la
plupart de leurs familles algériennes pour éviter toute tentation de résistance
ou d’insurrection.

27 - 28 - 29 juillet 1830 :
La Révolution des « trois glorieuses ». Ouvriers et étudiants dressent des
barricades à Paris mécontents de la suppression de la liberté de la presse mais
surtout de l’abaissement de la France depuis le congrès de Vienne
(1/11/1814-9/06/1815). Le Roi Charles X abdique. Le Duc d’Orléans est
choisi par le Parlement. Il devient le Roi Louis Philippe.

Septembre 1830 à février 1831 :


Le général Bertrand Clauzel remplace le général De Bourmont et devient
gouverneur de l’Algérie en 1835.

4 janvier 1831:
Occupation d’Oran à la suite de curieuses tractations entre le général Clauzel
et le Bey de Tunis pour substituer des princes Tunisiens aux Beys Turcs
d’Oran et de Constantine ; en contrepartie de l’extension de la souveraineté
française sur les deux Beyliks de l’est et de l’ouest algériens.
Clauzel est relevé de son commandement pour avoir conduit des tractations
diplomatiques qui n’étaient pas de sa compétence avec un souverain étranger.

De février à décembre 1831 :


Le général Berthezène remplace le général Clauzel.

1er et 6 décembre 1831 :


Le nom Algérie apparaît pour la première fois. Casimir Périer, premier
ministre du Roi l’utilise dans les correspondances signées par le souverain
pour désigner les « possessions françaises en Afrique ».

27 mars 1831 :
Bône est occupée à son tour. Elle servira de base d’attaque contre
Constantine siège du Beylik de l’est.

22 novembre 1832 :
Les tribus hostiles à la conquête française se réunissent près de Mascara sous
l’égide de Sidi Laâredj l’un des notables de la confrérie des Quadiria ainsi
que El Hadj Mahieddine père du jeune Abdelkader, âgé seulement de 24 ans,
pour désigner celui-ci qui leur était apparu dans leurs songes en qualité de
Sultan. Des acclamations fusèrent dans l’assemblée des notables. Tout en
acceptant la désignation de ses aînés, Abdelkader choisit d’être appelé
seulement Imam ; le titre de Sultan étant réservé à celui de FÈS Moulay
Abderrahmane au nom de qui il fera réciter la prière dans les mosquées de
Mascara !

Mars 1833 :
Le général Desmichels est nommé commandant de l’ouest algérien. On le
disait sensible, intelligent même s’il ne connaissait rien de l’Algérie encore
moins d’une société musulmane. La France hésite encore sur la voie à suivre
: colonisation totale ou partielle ; partir ou rester ; car la guerre coûtait cher
en hommes comme en argent.

17 avril 1833 :
Le général Berthezène qui avait été commandant en chef de l’Algérie pendant
peu de mois ; de février à décembre 1831 était pour l’évacuation. Il l’avait dit
à la chambre des députés à Paris. Rester, c’est pour lui, encourir de graves
catastrophes. Une commission d’enquête parlementaire est envoyée en
Algérie. Elle semble avoir été impressionnée par l’audace et le courage de
l’émir Abdelkader qui avait attaqué à Misserghine tout près d’Oran, les
escortes de protection des députés. L’idée d’une négociation semble avoir été
retenue.

27 décembre 1833 :
Une lettre du général Desmichels est remise à deux émissaires secrets
(Miloud Ben Harrach et Ould Mahmoud accompagnés de Abdellah
d’ASBONNE et Brahamcha Thomas, interprètes), destinée à l’Emir
Abdelkader. Il est rapporté que deux Israélites étaient derrière ces tractations :
Amar Mardoukaï et le bien connu négociant Busnach qui se trouvait être la
cause indirecte du « coup d’éventail » de 1827.

26 février 1834 :
Deux traités sont signés par le général Desmichels et l’Emir Abdelkader. Ils
donnent lieu à des interprétations différentes et à de graves confusions. La
reconnaissance de la souveraineté française était pour le gouvernement de
Paris la traduction des territoires occupés ; Abdelkader n’était qu’un vassal
même si on lui avait accordé le titre de « commandeur des croyants » ce qui
avait conduit l’Emir à se croire et à se comporter comme le chef des
musulmans. Or il n’avait pu, à aucun moment faire reconnaître son autorité ni
à Oran, ni à Mostaganem, ni même à Tlemcen.
Dans cette dernière ville, le Turc Mustapha BEN Ismaël qui exerçait toute
son autorité n’a pu être réduit par les fidèles de Abdelkader. Il a fallu que le
général Desmichels qui ne comprenait rien aux rivalités et aux guerres entre
croyants musulmans « ravitaille l’Emir et ses partisans en armes et en
munitions » comme cela a été rapporté par plusieurs auteurs.

22 juillet 1834 :
Une ordonnance du gouvernement démissionnaire du Maréchal Soult
renforce l’occupation de la France en confiant la gestion des territoires
conquis à un « gouverneur général dont dépendront un commandant en chef
des troupes, un intendant civil, un commandant en chef des forces navales, un
intendant militaire, un procureur général et un directeur des finances ».

23 septembre 1835 :
L’Emir cherche une aide extérieure. Il écrit au Consul anglais à Tanger,
Drummond Hay. Il se dit prêt à prendre tous les engagements envers
l’Angleterre. Il reçoit argent, armes et munitions.

7 décembre 1835 :
Le Duc d’Orléans fils du Roi Philippe et le Maréchal Clauzel entrent avec
une cinquantaine de cavaliers à Mascara, la capitale de l’Emir qui venait
d’être dévastée, brûlée et pillée par des tribus hostiles à l’Emir. Les Français
n’y restent pas.

Juin 1836 :
Le Maréchal Thomas Bugeaud est nommé commandant de la province
d’Oran plus pour négocier avec l’Emir que pour étendre la guerre ; ce que le
gouvernement de Paris, variable dans ses positions selon les chefs qui se
succèdent, ne voulait pas.

30 mai 1837 :
Traité de la Tafna entre Bugeaud et l’Emir. Les deux textes du traité écrits en
arabe d’un côté et en Français de l’autre donnent lieu à des interprétations
différentes voire totalement opposées par endroits.
Curieux marchandage : la France cède à l’Emir la province de l’Ouest
algérien sauf Oran, Arzew et Mostaganem. Au centre elle contrôle Alger, le
Sahel, Blida et la Mitidja. Le marchandage, source de casus belli se trouve
dans les mots « et au-delà » de l’oued Keddara vers Boudouaou.
Rappelons que Constantine et ses environs était toujours, à cette date, sous
l’autorité du Bey Turc Ahmed ménagé par la France mais honni par l’Emir
qui voit en lui un adversaire ou un collaborateur de la France.

13 octobre 1837 :
Prise de Constantine après de violents combats..., le général Damrémont
nommé gouverneur général le 12 février 1837 est tué.
Octobre 1837 :
Décembre 1840 le Maréchal Valée est le nouveau gouverneur général. Le
gouvernement hésite toujours entre la conquête totale qui signifie la guerre
totale ou la conquête partielle qui accepte la fiction provisoire de l’autorité de
l’Emir. Le nouveau gouverneur général est l’homme de la manière forte. Il
veut établir une liaison directe entre Alger et la nouvelle conquête de
Constantine.

28 octobre 1839 :
Pour tester la réaction de l’Emir qui revendique des territoires qu’il croit être
les siens, en vertu du traité de la Tafna, le Maréchal Valée en personne et le
Duc d’Orléans fils du Roi Philippe commandent un convoi militaire qui
prend le départ à Constantine, traverse Sétif, pénètre dans les Bibans ou
Portes de fer territoire contesté ; pour arriver dans Alger le 2 novembre 1839.

18 novembre 1839 :
Curieusement, l’Emir avertit le gouverneur général Valée que la guerre sainte
est déclarée suite à la violation par la France du traité de la Tafna. De défaite
en défaite (Oued El Alliague 31 décembre 1839, Cherchell 15 mars 1840,
Médéa 17 mai 1740, Miliana 18 juin 1840) Abdelkader est refoulé vers
l’Oranie.

18 décembre 1840 :
Valée est remplacé par le Maréchal Thomas Bugeaud en tant que gouverneur
général : changement total dans l’action, voire même dans les intentions et la
politique du nouveau gouverneur. Plus question d’occupation restreinte mais
offensive générale et mobilité des troupes pour détruire les forces de l’Emir.
Les généraux et maréchaux français ; Cavaignac, Pélissier, Saint Arnaud vont
commettre des crimes qui annoncent et dépassent les méthodes nazies :
exterminations par tous les moyens (enfumades, abattages des arbres fruitiers,
incendies des récoltes) des populations qui refusent de se soumettre.
Incroyable ? Voici rapporté par Luc Ferry dans son livre « la plus belle
histoire de la philosophie » publié chez Robert Laffont à Paris en 2014 à la
page 227 ce qu’écrivait à l’époque Alexis de Tocqueville probablement l’un
des philosophes français les plus lus dans le monde à cause de sa Démocratie
en Amérique diffusée en Janvier 1835 :
« On doit viser avant tout à ce que les arabes indépendants s’habituent à
nous voir nous mêler de leurs affaires intérieures. La colonisation sans la
domination sera toujours, selon moi, une œuvre incomplète et précaire ».
« Détruire les villages, couper les arbres fruitiers, brûler ou arracher les
récoltes, vider les silos, fouiller les ravins, les roches et les grottes pour y
saisir les femmes, les enfants, les vieillards, les troupeaux et le mobilier et ce
n’est qu’ainsi que l’on peut faire capituler ces fiers montagnards ».
Les nazis n’auront jamais atteint un tel degré de sauvagerie contre la France
occupée de 1940 à 1945. Car il faut bien admettre que ces sauvageries
prônées par Tocqueville ont été commises sur une grande échelle sur
plusieurs années (au moins entre 1840 et 1847) et en de nombreux endroits
du territoire algérien.

16 mai 1843 :
À quelque 60 Kilomètres au Sud-Est de Boghar, très au Sud de Médéa, la
Smalah de l’Emir Abdelkader, une ville ambulante de près de 70 000
personnes y compris Lalla Zohra et Lalla Kheira respectivement mère et
femme de l’Emir, absent du lieu, est prise par le Duc D’Aumale ;
préalablement renseigné.
Exfiltrées du carnage par des gardes d’une incroyable bravoure, la mère et
l’épouse de l’Emir ont pu être sauvées à la nuit tombée.

19 mai 1843 :
L’Emir Abdelkader, occupé à porter secours à ses lieutenants dans
l’Ouarsenis, apprend à Oued Rihou où se trouve son campement la terrible
nouvelle de la prise de sa Smalah. Fou de rage et de douleur qu’il domine, il
s’entoure de 200 cavaliers et part récupérer sa famille pour aller l’abriter près
de la frontière marocaine, probablement non loin de Tlemcen.
À elle seule, « cette capitale mobile » de l’Emir de plusieurs milliers de
personnes peut être ou sûrement âgées, fatiguées, femmes et enfants, révèle
combien sa stratégie de guerre est si peu adaptée contre une armée française
qui, moins de 30 années avant, avait, sous Napoléon 1er, conquis quasiment
toute l’Europe.
Deux exemples pour mieux comprendre : l’Espagne conquise un temps par
Napoléon qui y plaça son frère Joseph Napoléon sur le trône du pays a fini
par chasser les troupes napoléoniennes grâce à une guerre de partisans et
reprendre son indépendance en 1814.
Plus près de nous, la lutte de libération nationale déclenchée en 1954 en
Algérie, n’était pas et n’a jamais été une guerre frontale de l’ALN contre
l’armée française ; mais une guerre de guérilla qui signifiait tout simplement :
attaquer par surprise et décrocher pour aller se cacher et se réfugier dans les
massifs rocheux et montagneux du pays. Une guerre de harcèlements finit par
démoraliser les troupes françaises. Elle permettait aux Moudjahidines
organisés en groupes restreints de quelques combattants d’être insaisissables.
De plus, peut-on imaginer des Abane, des Krim, des Ben M’Hidi, des Ben
Boulaid, des Didouche, des Zirout, des Amirouche et bien d’autres qui
avaient tous, bien entendu, leurs familles vivre avec elles dans les djebels ?
Avec femmes et enfants comme l’avait fait l’Emir. Il y a quelque chose
d’incompréhensible et d’inexplicable dans sa stratégie. On ne peut pas ne pas
le noter car il nous faut, à nous Algériens, tirer les leçons des échecs de nos
ancêtres.

18 mars 1844 :
Abdelkader cherche à sortir du désastre. Il compte sur Moulay
Abderrahmane, Sultan du Maroc qui, seul peut le sauver. Il y a à ses côtés les
réseaux britanniques qui, à partir de leur consulat à Tanger cherchent à «
monter » le souverain Chérifien contre les intérêts français.

22 mai 1844 :
Abdelkader peut se réjouir : le Sultan du Maroc décide d’expulser les troupes
françaises qui occupent Lalla Maghnia. Bugeaud menace même d’occuper
Oujda, qu’il occupe mais n’y reste pas.

14 août 1844 :
Après plusieurs démonstrations de force contre le Maroc dont quelques
salves de canon marins sur Tanger, Bugeaud défait les troupes royales près de
Oujda sur les berges de l’oued Isly. Le Sultan se presse de demander la paix.
Une convention est signée à Tanger le 11 septembre 1844. Son article 4
dispose :
« El Hadj Abdelkader est mis hors la loi dans toute l’étendue de l’empire du
Maroc aussi bien qu’en Algérie. Il sera en conséquence poursuivi à main
armée par les Français sur le territoire de l’Algérie et par les Marocains sur
leur territoire jusqu’à ce qu’il soit expulsé ou qu’il soit tombé au pouvoir de
l’une ou l’autre nation. »

23 et 27 septembre 1845 :
De retour dans ses terres et auprès des siens, l’Emir gagne deux batailles dans
la région de Tlemcen à Sidi Brahim et Sidi Moussa. Les pertes françaises se
comptent par centaines. La presse et l’opinion française s’en émeuvent.

Octobre 1847 :
Tout au long des mois précédents, Abdelkader a cherché l’aide des capitales
occidentales ; Londres et Madrid surtout sans résultat autre que la fourniture
d’armes et de munitions. Il se tourne de nouveau vers les tribus marocaines
qu’il croit soulever contre leur Sultan et les incroyants. L’armée du Sultan,
commandée par son fils Si-Mohammed se lance contre les contingents de
l’Emir. Le choc est terrible au point que les hommes de l’Emir ont sacrifié
femmes et enfants pour les soustraire à la captivité et à la honte.

5 octobre 1847 :
Le Duc d’Aumale a remplacé le Maréchal Bugeaud à la tête de l’Algérie. On
le croit libéral. Il cherche à établir la paix.

21 décembre 1847 :
L’Emir cherche à gagner le Sud algérien vers le col de Guerbous. Il réunit les
Khalifas qui lui restent : Mustapha BEN-TAMI, Kaddour Benallah,
Abdelkader Bouklika. Face à l’étau qui se resserre contre lui où les forces
marocaines et françaises l’ont pris en tenaille, l’Emir décrit une situation sans
issue et dit à ses lieutenants d’une voix brisée : « il faut accepter les arrêts de
Dieu ».

23 décembre 1847 :
L’Emir Abdelkader qui avait demandé « L’Aman » ou le pardon deux jours
auparavant, se rend aux généraux Lamoricière et Cavaignac à qui il remet son
sabre au lieu-dit marabout Sidi Brahim où ses hommes avaient gagné une
bataille contre les troupes françaises le 23 Septembre 1845.
Dès le lendemain, la reddition se fait devant le Duc d’Aumale, fils du Roi
Louis Philippe à qui il offre son propre cheval. Le prince, gouverneur général
le reçoit avec ces mots :
« Je l’accepte comme un hommage rendu à la France dont la protection vous
couvrira désormais, et comme un signe d’oubli du passé ».

Février 1848 :
Journées de révolte qui verront la fondation de la deuxième république après
l’abdication du Roi Louis Philippe qui fuit en Angleterre.

Novembre 1848 :
La nouvelle constitution déclare l’Algérie territoire français.

10 décembre 1848 :
Louis-Napoléon BONAPARTE est élu président de la IIème République par
une population française (plus de 5 millions de voix) lasse des émeutes et des
promesses non tenues.

1850 :
Insurrections dans les Aurès. La tribu des ZAATCHA qui occupe toute la
région de Biskra à Ouargla est décimée par les troupes françaises.

1851 :
La Kabylie est à son tour insurgée. Bou Baghla (l’homme à l’ânesse) en est le
chef. La répression française est féroce.

2 décembre 1851 :
Coup d’Etat de Louis Napoléon Bonaparte en réaction à l’assemblée
législative qui refuse de réviser la constitution pour lui permettre de briguer
un autre mandat.

1857 :
Expédition en Kabylie conduite par le Maréchal Jacques- César Randon,
gouverneur général (1851-1858). Pour la France. Cette expédition met un
terme à la conquête du pays.

17-19 septembre 1860 :


Napoléon III (proclamé empereur après son coup d’état) se rend à Alger et va
y retourner en 1865.

22 avril 1863 :
Sénatus-consulte (acte voté par le Sénat ayant valeur de loi) qui rend les
tribus propriétaires de leurs terres. Napoléon se voulait « l’empereur des
Français et des Arabes » car c’est une race intelligente, fière, guerrière et
agricole.

14 juillet 1865 :
Un Sénatus-Consulte (acte voté par le Sénat ayant valeur de loi) donne la
qualité de Français aux indigènes algériens ; à condition qu’ils abandonnent
leur statut personnel ! Échec. Peu d’indigènes acceptent de perdre leur
identité.

Novembre 1867- Juin 1868 :


La famine fait plus de 500 000 morts sur une population de l’ordre de trois
millions.

19 juillet 1870 :
La France déclare la guerre à la Prusse de Bismark à cause de la succession
inattendue sur le trône d’Espagne où la France craignait qu’un prince
Allemand puisse reconstituer l’empire de Charles Quint.

2 septembre 1870 :
Mal préparée, en mauvais terme aussi bien avec l’Angleterre, à cause des
prétentions de la France sur la Belgique, qu’avec la Russie, Napoléon III va
de défaite en défaite. Il est prisonnier avec 80 000 de ses soldats. L’Alsace-
Lorraine devient allemande.

6 septembre 1870 :
Un comité de défense se forme à Alger sous la présidence de l’avocat
Vuillermoz. D’autres comités se constituent ailleurs ; mécontents de la
capitulation de la France face à la Prusse et condamnent sévèrement les «
généraux capitulards ». Le comité d’Alger demande le rattachement de
l’Algérie à l’Angleterre pour échapper à l’occupation Allemande.
La commune éphémère d’Alger qui a voulu imiter celle de Paris pour résister
aux Allemands se termine à l’arrivée d’un nouveau gouverneur général De
Gueydon le 8 avril 1871.

24 octobre 1870 :
Décrets à l’initiative du ministre de la Justice d’origine juive Alphonse
Crémieux dans le gouvernement de la défense nationale qui accordent la
nationalité française à tous les juifs d’Algérie.

14 mars 1871 :
Insurrection du Bachagha El Mokrani mécontent surtout de son déclassement
par rapport à son père qui était Khalifat, mort en 1852.

6 avril 1871 :
Cheikh EL Aziz Ben El Haddad 80 ans, porté par ses 2 fils : M’Hamed et
Aziz se joint à El Mokrani pour « jeter la France à la mer comme je jette ma
canne à terre », dira- t-il au souk de M’cisna à Seddouk OUFELLA
(Kabylie).
L’insurrection va durer sept mois. El Mokrani sera tué le 5 mai 1871 près de
Aïn Bessam. Cheikh El Haddad se rendra avec sa famille au général
Lallemand, près de Aïn El Hammam, le 30 avril 1871 ; alors que ses 2 fils
Aziz et M’Hamed et bien d’autres (104) seront déportés à Noumea en
Nouvelle Calédonie bout du monde dans l’océan Pacifique ; au-delà de la
Nouvelle Zélande et de l’Australie pour qu’ils ne puissent jamais en revenir.
Et pourtant, exploit rare, Aziz s’évade du bagne, rejoint l’Australie et, de
Sydney, il embarque pour l’Egypte puis va à la Mecque et enfin, autorisé à
regagner l’Algérie, il meurt de maladie en France le 22 août 1895 à 55 ans.
L’insurrection se solde aussi par 100 000 morts du côté algérien, 20 000 du
côté français et plus de 500 000 hectares confisqués aux paysans Kabyles
selon un livre consacré à la « vie de Cheikh EL Haddad » page 166.

De 1864 à1881 :
Insurrection des Ouled Sid Cheikh dans le sud oranais pour les mêmes
raisons qui ont conduit El Mokrani à soulever les populations de Kabylie.
Mécontent de n’être que Bachagha à la mort de son père cheikh Hamza
(1864) qui était Khalifat, son fils Slimane se révolte. L’insurrection va durer
une vingtaine d’années ; ce qui rendaient dangereuses ou impossibles la
pénétration et l’occupation du sud algérien ou Sahara.

1881 :
Le « code de l’indigénat » est instauré. En fait, il avait commencé avec les
décrets du 29 Août et du 11 Septembre 1874.
Il comprend 41 infractions en 1881 auxquelles s’ajoutèrent 21 en 1890. Il
s’applique aux seuls indigènes algériens. Voici quelques-unes des infractions
punissables :
1- Propos contre la France.
2- Retard dans le paiement des impôts.
3- Habitation isolée en dehors du douar, sans permission.
4- Départ de la commune sans autorisation.
5- Faire viser un permis de séjour au-delà de 24 heures.
6- Réunion sans autorisation de plus de 20 personnes.
7- Ouverture sans autorisation d’une école ou d’un lieu de prière.
8- Exercice non autorisé d’une fonction d’enseignant.

1881 :
La mission Flatters qui cherche à explorer le Sahara pour la construction
d’une ligne de chemin de fer est massacrée.

1878 et 1884 :
Les deux congrès de Berlin ouvrent la voie aux décisions des États
impérialistes européens (Angleterre, France, Allemagne, Italie, Belgique,
Espagne, Portugal…) non pas à se partager l’Afrique, mais aussi à se lancer
dans une course pour l’occupation violente des territoires du continent.
Voici ce qu’écrivait en 1893, Jules Cambon, ambassadeur de France à Berlin
:
« Le Sahara est dévolu à notre domination. Nous ne saurions y reconnaître,
même en fait, aucune souveraineté que la nôtre aussi bien au Touat et à In
Salah que partout ailleurs. Il importe que les indigènes soient convaincus que
l’occupation effective de ces régions n’est pour nous qu’une question de
temps…cette occupation se fera, sans que nous ayons à tenir compte des
protestations auxquelles elle viendrait à donner lieu ».

5 août 1890 :
Une convention franco-britannique ouvre le droit à la France de faire la
jonction entre l’Algérie et l’Afrique occidentale française ou AOF.

20 - 25 janvier 1898 :
Émeutes Anti-juives à Alger pour l’abrogation du décret Crémieux accordant
la nationalité française à tous les juifs d’Algérie. Les colons français n’y sont
pas étrangers même si le sentiment anti-juif est répandu chez les indigènes.

23 août 1898 :
Une assemblée élue, appelée les « délégations financières » est créée. Elle
remplace la politique dite de « rattachements » (aux ministères parisiens)
supprimée le 31 décembre 1896. Cette assemblée était composée de 48
délégués représentant la population française, 17 délégués pour représenter
les populations arabes et 17 pour les Kabyles. Même si elle était interdite de
politique, cette assemblée avait une fonction essentielle voire exclusive :
voter un budget spécial pour l’Algérie. Mais qu’y a-t-il de plus politique
qu’un budget qui détermine à la fois l’action économique et sociale.

17 décembre 1899 :
Occupation de Ain-Salah puis des oasis du Touat et du Gourara.
Avril 1900 :
Occupation d’IGLI.

1901 :
Fixation des limites entre Sahara Algérien et Sahara Tunisien.

1902 :
Occupation de TAGHIT.

11 novembre 1903 :
Occupation de Béchar.

1909 :
Regroupement des écoles de médecine, de droit, de sciences et lettres en
université d’Alger.
31 janvier - 3 février 1911 :
Décret rendant obligatoire le service militaire pour les indigènes algériens.

1916 :
Révolte dans les Aurès conte le service militaire obligatoire.

1914 – 1918 :
Première guerre mondiale : mobilisation de 173 000 jeunes algériens dont 25
000 seront tués sur les champs de bataille entre la France et l’Allemagne.

1919 :
Accord franco-italien pour la délimitation de la frontière Algéro-Libyenne.

4 février 1919 :
Clemenceau, Président du conseil français et vainqueur de la première guerre
mondiale accorde plus d’accès à la citoyenneté française aux indigènes
algériens sous certaines conditions : savoir lire et écrire le français, avoir fait
son service militaire, être monogame, être propriétaire d’un bien, payer les
impôts etc…

1920 :
Elections municipales à Alger. L’émir Khaled, petit-fils de l’émir Abdelkader
et capitaine de l’armée française qui conduit l’une des deux listes d’indigènes
l’emporte largement mais se voit déclaré inéligible par l’administration.

1921-1936 :
La population musulmane passe de 4 923 106 à 6 201 144 soit un
accroissement annuel de 15.3 pour 1000 alors que pour la même période la
population européenne augmente de 11.8 pour 1000 passant de 791 000, à
946 000 habitants.

Mars 1926 :
Création de l’étoile Nord-Africaine au sein de l’émigration algérienne en
France. Messali, né à Tlemcen en 1898 et ouvrier en région parisienne, en est
le Président même si le fondateur en est Hadj-Ali né en Kabylie. Elle se
donne l’émir Khaled comme Président d’honneur. Programme :
indépendance de l’Algérie.

Septembre 1927 :
Congrès constitutif de la fédération des élus indigènes d’Algérie tenu à Alger.
Le docteur Bendjelloul de Constantine en est Président. Programme :
assimilation et citoyenneté française.

5 mai 1931 :
Fondation à Alger du congrès des Oulemas. Abdelhamid Ben Badis, d’une
famille constantinoise dont le père était un notable du Consul Général du
département, est porté à la présidence. Programme : défense de la langue
arabe et de l’Islam.

1932 :
Dissoute en 1929 pour atteinte à la souveraineté française (l’ENA) se
reconstitue sous le nom de « Glorieuse Etoile Nord-Africaine », et publie un
journal « El Oumma » ou NATION dont le rédacteur en chef en est Immache
Amar.

5 août 1934 :
Graves affrontements entre les communautés Juive et Musulmane de
Constantine.

1934 :
Tindouf est la dernière occupation française de OUEST algérien.

7 juin 1936 :
Un congrès musulman algérien est constitué par les Oulémas (Ben Badis - El
Okbi) les réformistes et modérés de Bendjelloul, Ferhat Abbas, Bentami et
Saâdane mais aussi les communistes, (Ali Boukort) qui sont encore sous la
houlette du Parti Communiste Français (PCF). Une charte de revendications
est votée. On y trouve notamment :
- Suppression des lois d’exception.
- Rattachement direct à la France avec suppression du gouverneur
général.
- Maintien du statut personnel.
- Instruction obligatoire pour filles et garçons.
23 juillet 1936 :
Léon Blum, Président du gouvernement du Front Populaire, assisté de
Violette ancien gouverneur général en Algérie et Jules Moch, ministre de
l’Intérieur reçoit à Paris une délégation du congrès musulman algérien
conduite par le docteur Bendjelloul. Satisfaction partagée que « des Français
reçoivent des Français, des démocrates d’autres démocrates » selon un
communiqué de la Présidence du Conseil !
Messali et l’ena qui n’ont pas assisté au CMA se démarquent de la démarche.

Novembre 1936 :
Le projet Blum-Violette propose d’étendre la citoyenneté à 21 000 indigènes.
26 janvier 1937 :
Dissolution de L’ENA par le Gouvernement du Front Populaire en raison de
ses « positions extrémistes ». Bagarres et agitations à Oran comme à Sidi-
Bel-Abbès n’ont cessé depuis l’élection du Front Populaire aux élections
législatives en mai 1936 d’opposer gens de droite et gens de gauche ; les
premiers étant déterminés à s’opposer à toute politique libérale en Algérie.
Toute la colonisation mais surtout les 300 maires français d’Algérie sont
violemment contre le Projet BLUM- Violette qui sera abandonné en mars
1938.

11 mars 1937 :
Création du PPA par les anciens dirigeants de l’ENA interdite en janvier
1937.

14 juin 1940 :
L’armée de l’Allemagne nazie occupe Paris. La France s’est effondrée en
moins d’un mois. Fuite et affolement général. Le gouvernement lui-même,
dirigé par Paul Reynaud, a quitté la belle capitale française déjà revêtue, tour
Eiffel surtout, par les oriflammes rougeoyants nazis, pour s’installer
provisoirement à Bordeaux.

17 juin 1940 :
Albert Le Brun Président de la République accepte la démission du
gouvernement de Paul Reynaud. Le Maréchal Pétain, 80 ans, ancien
vainqueur de la bataille décisive de Verdun (Février 1916) accepte de former
un nouveau gouvernement. Le jour même, à midi trente, le nouveau chef du
gouvernement, d’une voix cassée, s’adresse au peuple de France à travers la
radio (TSF) puisque la télévision n’existait pas encore, pour lui dire :
« C’est le cœur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat.
Je me suis adressé cette nuit à l’adversaire pour lui demander s’il est prêt à
rechercher, entre soldats, après la lutte dans l’honneur, les moyens de mettre
un terme aux hostilités ».

18 juin 1940 :
De Gaulle, général deux étoiles obtenues il y a peu, mais visionnaire depuis
plus de dix ans du passage de l’armée française à l’arme blindée et aux chars,
seuls à même de faire la victoire dans les batailles futures ; écouté et suivi
plus par les stratèges allemands que ceux de son pays, n’occupe plus aucune
fonction au sein du gouvernement du Maréchal Pétain. Il a été peu de jours à
partir du 5 juin 1940 Secrétaire d’État à la défense nationale et à la guerre
dans le Gouvernement précédent de Paul Reynaud. Il réussira cependant
grâce à Winston Churchill qui lui a prêté un avion pour quitter à la hâte
Bordeaux à aller à Londres. Difficilement, il obtient la possibilité de
s’adresser le soir même à la BBC au peuple français qui ne le connaissait
même pas pour lui dire ceci :
« Cette guerre n’est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est
une guerre mondiale… Il y a dans l’univers tous les moyens pour écraser un
jour nos ennemis… ».
« Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas
s’éteindre et ne s’éteindra pas ».

8 novembre 1942 :
Débarquement des troupes anglo-américaines à Alger. Le général américain
Dwight Eisenhower commandant en chef des forces des alliées contre
l’Allemagne nazie d’Adolf Hitler, s’installe à l’hôtel Saint Georges d’Alger
qui deviendra longtemps après l’indépendance l’hôtel El Djazaïr.

10 février 1943 :
La présence des troupes américaines à Alger change totalement les données
politiques du problème algérien. Les différentes autorités françaises
(Gaullistes, Vichystes ou Pétainistes, l’Amiral Darlan, le général Giraud…)
se disputent le pouvoir à Alger au grand étonnement, voire désarroi, des
dirigeants des partis algériens comme des européens ultras ; alors que la
réalité du pouvoir appartient désormais aux anglo-américains qui ménagent
tout le monde.
C’est dans ce contexte que nait le « Manifeste du peuple algérien » texte
élaboré par Ferhat ABBAS et ses proches, qui dit avoir eu l’accord des
Oulémas, des marabouts, des communistes et du PPA.
Document important qui amorce un tournant des « réformistes » et des
Oulémas sans pour autant demander l’indépendance de l’Algérie,
revendication permanente de l’ENA et du PPA.

11 juin 1943 :
Un additif au manifeste qui demande « l’autonomie politique de l’Algérie »
est remis au général Catroux nouveau gouverneur général en Algérie depuis
peu, nommé par le Comité Français de libération Nationale (CFLN) donc
avec l’appui du général De Gaulle.
Il est plus que probable que le manifeste du Peuple algérien, comme son
additif, ont été remis aussi à Robert Murphy qui est le représentant civil des
autorités américaines, très averti du problème algérien.

12 décembre 1943 :
Installé depuis peu de mois à Alger, le général De Gaulle prononce un
important discours à Constantine où il annonce des réformes.

2 avril 1945 :
Ferhat Abbas transforme le manifeste du peuple algérien en rassemblement
politique sous le nom des « Amis du Manifeste et de la Liberté ».

14 avril 1945 :
Messali Hadj, leader charismatique du PPA, interdit depuis le 26 septembre
1945 comme toutes les formations démocratiques en Algérie est envoyé en
exil dans la lointaine Brazzaville, alors capitale du Congo français.

8 mai 1945 :
Au moment où les peuples du monde, surtout européens, célébraient la fin de
la seconde guerre mondiale par la signature de l’armistice à Berlin, les
Algériens manifestaient dans l’Est du pays à Sétif surtout pour protester
contre l’exil de Messali et demander l’indépendance de l’Algérie. Sous
prétexte d’un drapeau algérien brandi par un seul manifestant à Sétif, les
forces de l’ordre colonial réagissent avec une violence extrême. Embrasement
général dans tout le Constantinois. Il y aurait eu 103 morts du côté européen
et de 1500 à 45 000 morts du côté algérien selon les sources.

8 mai 1945 :
Ferhat Abbas, leader du mouvement des AML, ancien élu, est arrêté le jour
même des émeutes au gouvernement général d’Alger (G.G) où il attendait
d’être reçu par le plus haut représentant français. Il ne sera libéré de la prison
militaire de Constantine que le 16 mars 1946, une fois que l’assemblée
française aura voté, le jour même, à Paris, une loi d’amnistie en faveur des
détenus algériens.

14 mai 1945 :
Dissolution de l’association des AML, à la suite des émeutes de Sétif.

Mai 1946 :
 peine sorti de prison, Ferhat Abbas crée un nouveau parti appelé : Union
Démocratique du Manifeste Algérien (UDMA).

2 juin 1946 :
Élection à l’assemblée constituante française. L’UDMA de Ferhat Abbes
remporte la quasi-totalité des sièges (11 sur 13) réservés au 2ème collège
formé par les électeurs indigènes.

20 octobre 1946 :
 peine libéré de prison Messali crée, à son tour, un nouveau parti politique
appelé : Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques (MTLD).

10 novembre 1946 :
Élections législatives françaises. Le MTLD obtient 5 sièges de députés qui
vont représenter le courant radical indépendantiste au Palais Bourbon
(Assemblée Nationale) à Paris.

15 février 1947 :
Le MTLD formalise sa création en tenant son premier congrès où une «
Organisation Spéciale » (OS) est constituée. Même si elle est tenue secrète
car elle a pour mission d’organiser la lutte armée pour libérer l’Algérie.

27 août 1947 :
L’Assemblée nationale française vote le statut de l’Algérie à une écrasante
majorité : 320 voix pour, 88 voix contre. En quoi consiste-t-il ? En deux
mots :
1- Une assemblée Algérienne est créée. Elle siège au Palais occupé
actuellement (2018) par le conseil de la Nation ; Boulevard Front de
mer à Alger.
2- L’assemblée est composée de 120 membres : 60représentants pour
les 8 000 000 de musulmans dits « Deuxième Collège » et autant,
donc 60, pour les 900 000 Européens appelés « Premier Collège ».
Il n y’a pas 1 homme (ou une femme) une voix ; principe
démocratique universel mais stricte égalité entre les deux
communautés, garantie d’une impossible Libération juridique de
l’Algérie.
3- L’Assemblée algérienne a surtout pour compétence les affaires
sociales, économiques et budgétaires. Ses décisions ne sont pas
souveraines. Elles sont soumises à la double approbation du
gouverneur général siégeant à Alger et du Gouvernement français
siégeant à Paris.
Décembre 1948 - octobre 1949 :
« Crise berbériste » à la suite d’une motion votée par le Comité fédéral de
Paris par 28 voix sur 32 à l’initiative d’un étudiant en droit Kabyle du nom de
Ali Yahia dit Rachid qui préconisait une « Algérie Algérienne » mais non une
« Algérie arabo-musulmane » qui était le dogme du MTLD sous la direction
autocratique de Messali. Conséquence : déchaînement d’une purge ; véritable
épuration ethnique contre les hauts cadres Kabyles du parti ; notamment Aït
Ahmed Hocine qui avait été exclu de ses fonctions de membre du Bureau
politique et surtout de chef de « l’Organisation Spéciale » secrète, confiée à
Ben Bella originaire de Tlemcen comme Messali.

18 mars 1950 :
Démantèlement de l’OS (organisation spéciale) « bras armé » du PPA-MTLD
par la police française à la suite d’une « bavure » d’un commando qui voulait
châtier dans la région de Guelma un membre de l’organisation. Près de 500
de ses cadres seront arrêtés et condamnés à de lourdes peines
d’emprisonnement. Ben Bella chef de l’organisation est jugé responsable des
méthodes musclées introduites sous sa direction.

5 août 1951 :
Création d’un « Front Algérien pour la Défense et le Respect de la Liberté »
composé du MTLD, de l’UDMA, du PCA et des OULÉMAS. Les
divergences de fond (indépendance ou assimilation, formes d’action ; légalité
ou voie des armes…) restent insolubles.

4 - 6 avril 1953 :
Deuxième congrès du MTLD tenu à Alger sans la présence de Messali,
toujours en résidence surveillée à Niort en France. La Direction du parti
(BEN KHEDDA, Lahouel, Kiouane, Ferroukhi et Abdelhamid Ali) comme
les trente membres du comité central sont choisis ou validés par Messali en
personne.

Septembre 1953 :
Une réunion du comité central est organisée à Alger. Coup de tonnerre :
Moulay MERBAH porte-parole de MESSALI affirme à l’assistance sidérée
que le Président du parti :
1- Retire sa confiance au secrétaire général donc à Benyoucef Ben
Khedda qu’il avait lui-même choisi moins de six mois auparavant.
2- Demande les pleins pouvoirs pour « redresser le parti ».
La demande des pleins pouvoirs est rejetée par la quasi- totalité des membres
du comité centrale (27 sur 30).
Décembre 1953 :
La crise est ouverte au sein du MTLD. D’un côté les 27 membres du comité
central dits désormais les « centralistes », de l’autre Messali et ses trois plus
proches compagnons appelés les « Messalistes ». Ils vont se livrer à une lutte
violente pour contrôler les militants, les fonds et les locaux du parti.

Mars 1954 :
 l’initiative probable mais pas sûre de Mohamed Boudiaf et de Didouche
Mourad, anciens dirigeants de l’Organisation Spéciale (O.S) du
Constantinois, mais jamais membres du comité central, il est créé un «
Comité Révolutionnaire pour l’Unité et l’Action » ou CRUA. Son objectif ou
sa mission était d’éviter l’éclatement du MTLD et de réconcilier les deux
tendances : Messalistes et centralistes.

Juin 1954 :
Le groupe des « 22 » qui ne sont en fait que « 21 », tous membres du CRUA
se réunissent au Clos Salembier, ou plutôt à « la Redoute » devenue El
Mouradia, fief de Didouche Mourad pour décider s’il faut oui ou non
déclencher « immédiatement » la guerre de libération nationale. Certains
hésitent et vont même faire défection connus sous le nom de « groupe de
Constantine ».
Ils élisent à bulletin secret, Mohamed Boudiaf, pour choisir les membres
d’une direction qui déclencheraient, à la date de leur choix, la lutte armée.
BOUDIAF aurait coopté le jour même où le lendemain de son élection les 4
autres membres qui doivent partager sa responsabilité. Ce sont avec lui :
- Mohamed Boudiaf
- Didouche Mourad
- Larbi Ben M’hidi
- Mostéfa Ben Boulaid
- Rabah Bitat
Juillet – Août 1954 :
Longues et difficiles tractations avec KRIM Belkacem et Ouamrane pour
associer l’incontournable Kabylie au combat libérateur. Le problème crucial
qui a conduit à des tensions et à des ruptures était de savoir si la Kabylie
devait être érigée en zone autonome de combat comme les quatre autres
régions (Aurès, Nord Constantinois, Centre, Oranie) ou intégrée, partie Ouest
à l’Algérois, et partie Est au Constantinois.
Krim et Ouamrane obtiennent gain de cause : la Kabylie est érigée en zone de
combat autonome.

Juillet 1954 :
Les « Messalistes » tiennent un congrès extraordinaire à Hornu en Belgique.
Ils décident l’exclusion des « Centralistes » et élisent Messali Président du
parti à vie.

Août 1954 :
Les « Centralistes » tiennent un contre congrès à Alger où ils excluent du
parti Messali et ses partisans.
La crise est consommée.

Octobre 1954 :
(Vers le 10 ou le 15) les Six chefs historiques les cinq cités plus haut plus
Krim tiennent une réunion soit à Bouzaréah soit à Pointe Pescade (Rais
Hamidou). Décision : la guerre de Libération Nationale de l’Algérie est fixée
pour la nuit du 31 Octobre au 1er novembre 1954 à zéro heure donc juste
après minuit.
X - LA GUERRE D’INDEPENDANCE 1954 -
1962

1er novembre 1954 :


Une trentaine d’opérations sont engagées sur tout le territoire algérien. Elles
ont visé des casernes de gendarmes et de militaires français pour récupérer
surtout des armes. Des dépôts de carburants, des fermes, des unités
économiques ont été attaqués ou incendiés pour y faire le plus de dégâts
possible. Huit personnes, civiles pour la plupart, ont été tuées. Surprise
générale ; en France comme en Algérie : la guerre d’indépendance de
l’Algérie a éclaté.

20 août 1955 :
Horrible carnage dans le Nord Constantinois ; tout près de Philippeville,
devenue Skikda : massacre de 17 Européens hommes, femmes et enfants
auquel répondent des représailles, des troupes françaises où se mêlent des
civils européens. Bilan : 1273 morts du côté des indigènes musulmans.
L’explication donnée plus tard par Zirout Youcef, chef de la zone II (Wilaya
II) et ses adjoints consiste à dire qu’il fallait à tout prix sortir les populations
musulmanes de leur attentisme envers les moudjahidines ; qui n’est en fait
qu’une peur de représailles de l’armée coloniale. La deuxième explication,
peu crédible pour moi, est qu’il fallait exprimer une forme de solidarité avec
la lutte du peuple marocain dont le Sultan est exilé à Madagascar depuis deux
années jour pour jour. Il faut toujours rappeler que ni les Marocains ni les
Tunisiens ne vont continuer le combat pour libérer les trois pays de l’Afrique
du Nord quand la France qui ne pouvait mener trois guerres en même temps
offrira aux deux pays (Maroc et Tunisie) un semblant d’indépendance ou
d’autonomie interne, une année plus tard en 1956.

22 janvier 1956 :
Albert Camus, écrivain déjà célèbre, né en Algérie et qui obtiendra le si
prestigieux prix Nobel de littérature, une année plus tard en 1957, lance à
Alger un appel pour une « trêve civile ». Horrifié par la torture et la violence,
il dira dans son appel :
« J’ai aimé avec passion cette terre où je suis né, j’y ai puisé tout ce que je
suis, et je n’ai jamais séparé dans mon amitié aucun des hommes qui y
vivent, de quelque race qu’ils soient. Bien que j’aie conçu et partagé, les
misères qui ne lui manquent pas, elle est restée pour moi la terre du bonheur,
de l’énergie et de la création ».

18 février 1956 :
Création de l’Union Générale des Travailleurs Algériens ou UGTA par
Abane Ramdane au domicile de Boualem Bourouiba à Saint Eugène
(Bologhine) devenu mon ami de 40 ans. Les cinq dirigeants du secrétariat
National sont désignés sur le champ, ce sont :
- AISSAT Idir
- BOUROUIBA Boualem
- DJERMANE
- BEN AÏSSA
- ALI YAHIA Madjid

24 février 1956 :
Les statuts de l’UGTA sont déposés à la préfecture d’Alger ; ce qui vaut
agrément.

20 août - 10 septembre 1956 :


Congrès de la Soummam (Kabylie) : sommet de la Révolution ou Projet de
Civilisation ?
Face au double risque réel et immédiat d’étouffement et d’effondrement de la
révolution déclenchée depuis près de 22 mois, Abane Ramdane est le premier
et le seul à avoir lancé l’idée d’une réunion ou d’un congrès des plus hauts
dirigeants de la guerre pour essentiellement régler la double question vitale et
lancinante des approvisionnement des maquis en armes de guerre et du
commandement de celle-ci. Y ont été présents selon le procès-verbal dressé
(seule preuve acceptable) à l’issue du congrès les zones de combats et les
dirigeants suivants :
- Oranie : Larbi Ben M’hidi
- Algérois : Amar Ouamrane
- Kabylie : Belkacem Krim
- Nord Constantinois : Youcef Zirout et Lakhdar Bentobbal
- Alger ou Secrétariat du FLN : Ramdane Abane.
La double absence des Aurès et de la délégation extérieure au Caire,
officiellement invités par des lettres de Abane Ramdane s’explique par :
1- La mort inexpliquée à ce jour de Mostéfa Ben Boulaid, chef
historique des Aurès le 27 mars 1956, donc 5 mois avant le congrès
et qu’aucun de ses 3 adjoints ne lui a succédé à cause des rivalités et
des tensions entre eux.
2- La crainte ou le refus de Ahmed Ben Bella nommément désigné
deux fois pour représenter la délégation extérieure, probablement
pour éviter d’y être jugé, car tenu pour responsable de n’avoir pu
envoyer des armes aux maquis.
La réussite du congrès, sans précédent dans l’histoire de l’Algérie tient
essentiellement à sa bonne organisation politique (textes de la plateforme dus
à Abane) et sécuritaire due à Krim mais surtout au nombre volontairement et
préalablement réduit de congressistes (2 à 3 dizaines avec les escortes) pour
ne pas éveiller l’attention des troupes française qui étaient partout ; y compris
à Ifri Ouzallaghene près de Bejaia donc à quelques centaines de mètres des
lieux de la réunion.
La plateforme de la Soummam, adoptée à l’unanimité et sans aucune
divergence de fond peut être considérée, en toute objectivité, comme un
projet de civilisation.
Deux institutions de guerre y ont été créées pour combler le vide
incompréhensible et quasi mortel laissé par les six chefs historiques de la
guerre d’Algérie. Soit :
1- Le CCE (Comité de Coordination et d’Exécution) une sorte de
gouvernement de guerre de 5 membres.
2- Le CNRA (Conseil National de la Révolution Algérienne), une
sorte d’assemblée nationale de 34 membres, formés de 17 titulaires
et de 17 suppléants).
22 octobre 1956 :
Coup de maître des services spéciaux français. Un avion français dont tout
l’équipage est également français mais affrété par le Maroc, indépendant
depuis peu (2 mars 1956) allant de Rabat à Tunis est arraisonné ou piraté en
plein ciel par l’armée française en Algérie. Il est détourné sur Alger. Quatre
dirigeants du FLN y sont capturés. Il s’agit de Mohamed BOUDIAF, Hocine
AÏT AHMED, Mohamed KHIDER et Ahmed BEN BELLA présenté à tort
par la propagande française comme le chef de la Révolution algérienne.
Jubilation du côté français et abattement chez les Algériens.
Comment une telle imprudence a-t-elle été commise par des dirigeants qui
font une guerre secrète et impitoyable à la France et qui empruntent en
groupe un de ses avions ? Ne pouvaient-ils pas voyager individuellement,
utiliser des compagnies aériennes des Etats européens (Espagne, Italie, par
exemple) dont les avions ne sont pas, en principe, irraisonnables, et enfin
choisir un itinéraire qui ne survolerait pas l’espace aérien algérien,
étroitement contrôlé par l’armée de l’air française ?
Ils ont tous les quatre, surtout Ben Bella, commencé la guerre d’Algérie à
l’étranger. Ils y resteront dans les prisons françaises jusqu’au 18 mars 1962
(!) jour de la signature des accords d’Évian par Krim Belkacem qui mettaient
fin à la guerre d’Algérie.

28 janvier 1957 :
Début de la grève de huit jours décidée par les cinq membres du CCE issu du
congrès de la Soummam.
Voulue surtout par Ben M’hidi comme une grève insurrectionnelle générale
elle avait pour objectifs essentiels :
1- Désorganiser l’économie coloniale et ses rouages.
2- Desserrer la pression sur les maquis en obligeant l’armée française
à investir les villes.
3- Alerter l’opinion mondiale sur la guerre d’Algérie.
4- Affirmer le soutien du peuple algérien tout entier à la lutte armée
surtout à la veille du débat à l’ONU (New York) sur la « Question
Algérienne ».
5- Provoquer une rupture totale et définitive entre les deux
communautés algérienne et européenne qui continuaient bon gré
mal gré à cohabiter.
Brisée par les troupes d’élites du général Jacques Massu qui a reçu les «
pleins pouvoirs », la grève laisse des traces et des souvenirs terrifiants surtout
à Alger au point que l’histoire retient l’expression de « Bataille d’Alger ».
Tortures et disparitions ont fait des milliers de morts. L’admirable Paul
Teitgen, ancien résistant français et secrétaire général de la préfecture de
police d’Alger a dénombré 3000 disparus. Il démissionne de ses fonctions
pour protester contre les excès et les exactions des troupes françaises.

4 mars 1957 :
Conséquence directe de la grève des huit jours par les arrestations massives
voulues et opérées par MASSU et ses soldats affranchis de toute retenue
même de morale chrétienne, Larbi Ben M’hidi, l’un des cinq membres du
CCE, donc du commandement suprême de la révolution est exécuté par
pendaison par le capitaine Aussaresses qui s’en vantera 40 années plus tard
dans un livre indécent publié à Paris en 2001. Eichmann et Barbie, criminels
nazis n’ont pas autant de cruauté, puisque d’une part Jean Moulin chef et
héros de la résistance française ne semble pas avoir été assassiné sous la
torture mais mort à la suite d’une chute accidentelle et que d’autre part ils ont
plaidé non coupables pour n’avoir obéi qu’aux ordres supérieurs.
Aussaresses, non ; puisqu’il se vantera de son crime monstrueux ; ne
craignant, peut-être, aucun jugement, aucune peine pas même un kidnapping
comme les Israéliens et les Français l’ont fait en Amérique Latine pour les
deux criminels nazis cités ci-haut.

Début mars 1957 :


Aussitôt connu l’assassinat de Ben M’hidi, les 4 rescapés du CCE quittent
Alger en catastrophe. Se donnant rendez- vous dans un cimetière sur les
hauteurs de Blida, ils décident sur l’insistance de ABANE Ramdane, de
quitter le territoire algérien et de se retrouver à Tunis vers juin 1957 ; deux
(Abane et Dahleb) partant par l’Ouest via le Maroc ; les deux autres (Krim et
Benkhedda) empruntent la voie inverse, donc par le Constantinois pour
arriver en Tunisie.

1er août 1957 :


André Morice ministre français de la défense déclare après une inspection en
Algérie que des lignes électrifiées dites plus tard « lignes Morices » ou «
barrages électrifiés » sont construits ou en voie d’être achevés pour isoler les
frontières algériennes de la Tunisie et du Maroc pour réduire à hauteur de
80% l’entrée ou la sortie des armes et des combattants de l’ALN.

20 août 1957 :
Réunion au Caire du CNRA. Sur 34 de ses membres 22 (10 militaires et 12
civils) y sont présents. La réunion est présentée comme un contre congrès de
la Soummam mais sans charte, sans plateforme. Il s’est agi de se « venger »
de Abane, surtout de l’affaiblir. Le CCE passe de 5 à 9 membres. Benkhedda
et Dahleb, supposés être les « amis » ou les « protégés » de Abane, sont
éliminés. Le redoutable Boussouf, sorte de chef de la police politique y fait
son entrée avec Lakhdar Bentobbal son ami villageois mais surtout complice
pour affaiblir Abane et Krim redoutés, même s’ils sont rivaux, mais Kabyles
surtout et, forcément, « berbéristes » un jour ou l’autre ; en souvenir de la «
crise berbériste » de 1949.

26 - 27 décembre 1957 :
Abane Ramdane est assassiné au Maroc, à Nador probablement. La note du
colonel Ouamrane l’un des membres du CCE issu du Caire signée à Tunis le
15 août 1958 dit clairement que celui que j’appelle le « père de
l’indépendance de l’Algérie » pour avoir conçu et tenu le congrès de la
Soummam est étouffé par Boussouf et deux de ses gardes corps. Aucun
procès ne lui a été fait ; encore moins condamné à quelque peine que ce soit,
comme je l’ai démontré dans un livre, preuves à l’appui. Certes, accompagné
au Maroc par Krim Belkacem et Mohamed Cherif, tous deux colonels et
membres du CCE, mais je ne crois pas qu’ils aient été impliqués dans
l’assassinat.

1er juin 1958 :


Le général De Gaulle, « sauveur » de la France lors de la deuxième guerre
mondiale (1939-1945), est investi comme Président du conseil (équivalent de
Premier ministre sous la IVème République) par 329 voix contre 224 par les
députés de l’assemblée nationale française.
Il faut bien admettre que c’est un coup d’Etat institutionnel imposé par
l’armée française en Algérie. Trois événements majeurs, décisifs ont conduit
au retour au pouvoir du général De Gaulle. Les rappeler en peu de mots
aiderait à comprendre ce qui conduira la France à changer de régime, de
constitution et de République en moins de 6 mois.
1- Le 8 février 1958 une escadrille française bombarde Sakiet Sidi
Youcef bourgade tunisienne, juste en face de Souk-Ahras du côté
algérien ; en représailles d’un mitraillage d’un avion français peu de
jours auparavant par l’ALN installée en Tunisie. Immense émotion
et colère en Tunisie qui déplore 8 morts et plusieurs blessés.
2- Les Anglo-américains proposent leurs « bons offices » le 17 février
pour calmer les tensions et les accusations entre la France et la
Tunisie. L’acceptation de ces bons offices par le gouvernement
français de Félix Gaillard déchaîne les passions des partis de droite
et des Européens d’Algérie contre l’immixtion des anglo-américains
; ce qui conduit à une crise ministérielle en France.
3- Le 9 mai, le FLN annonce, qu’en représailles aux exécutions par
guillotine de patriotes algériens dans les prisons françaises
d’Algérie, il a décidé de fusiller trois prisonniers de guerre français.
La crise est à son paroxysme. Pour protester contre ces exécutions et le «
défaitisme » supposé de Pierre Pflimlin, nouveau chef de gouvernement à
Paris, les anciens combattants français en Algérie organisent une
manifestation monstre à Alger le 13 mai 1958. Le gouvernement général,
énorme bâtiment qui surplombe le forum d’Alger est pris d’assaut par la
foule, saccageant tout sur son passage.
Le jour même, à 21 heures 10, un comité de salut public présidé par le
général Massu est constitué. L’armée prend le pouvoir en Algérie. Elle
menace d’occuper la Corse. Elle dicte au Président de la République, Mr
René Coty, de faire appel au général De Gaulle seul capable de garder
l’Algérie française.

19 septembre 1958 :
Création d’un « Gouvernement Provisoire de la République Algérienne » ou
GPRA. Il est présidé par Ferhat Abbas, ancien leader des AML puis de
l’UDMA ou « Union Démocratique pour le Manifeste Algérien ». Honni par
les éléments radicaux du PPA puis du MTLD, dont Ben Bella notamment, le
leader modéré, longtemps partisan d’une « assimilation » des indigènes
algériens comme citoyens français à part entière, est apparu, tout compte fait,
comme la seule personnalité algérienne qui avait une certaine notoriété pour
être opposée à celle du général De Gaulle, géant de la seconde guerre
mondiale qui va dominer la scène des relations internationales. Avec lui, il
était à peu près certain que les données générales de la « Question algérienne
» allaient changer du tout au tout.

8 janvier 1959 :
Le général De Gaulle est élu Président de la République au suffrage indirect
pour un mandat de 7 ans. Il remplace le Président René Coty qui est arrivé au
terme constitutionnel de son mandat.

16 septembre 1959 :
Le général De Gaulle, Président de la République française propose le
recours à l’autodétermination pour résoudre le « problème difficile et
sanglant de l’Algérie ». Le choix doit se faire par référendum aussi bien en
France qu’en Algérie entre les trois options suivantes :
1- Sécession ou indépendance.
2- Francisation complète.
3- Gouvernement des Algériens par les Algériens dans le cadre d’une
coopération avec la France.
28 septembre 1959 :
Le GPRA s’est dit prêt à « entrer en pourparlers avec le gouvernement
français afin de discuter des conditions politiques et militaires du cessez-le-
feu, des conditions et des garanties de l’application de l’autodétermination ».
En clair : après de longues et laborieuses délibérations et tractations entre les
différentes factions du CNRA, le GPRA accepte l’autodétermination, même
si le Président français, fin stratège, ne s’est pas adressé directement aux
dirigeants de la Révolution mais aux Algériens dont il dit clairement : « je
m’engage à demander…aux Algériens… ce qu’ils veulent être en
définitive… ».

25 janvier 1960 :
La semaine des barricades commence à Alger. Sous prétexte de protester
contre le rappel en France du Général Massu «demi-dieu» pour les Européens
d’Algérie, relevé de ses fonctions pour avoir donné une interview à un
journal allemand, mais en fait violemment hostile à l’autodétermination
proposée par le général De Gaulle pour régler le problème Algérien, toutes
les organisations activistes de « l’Algérie française » appellent à une grève
générale et à des manifestations qui se transforment en barricades dressées
l’une à l’intérieur de l’université d’Alger, la seule du pays, par le député
Pierre Lagaillarde, ancien étudiant en droit et, l’autre barricade, au niveau de
la banque «compagnie algérienne» qui fait face à la belle et imposante «
grande poste » d’Alger dont l’animateur est Joseph Ortiz, entouré de ses
milices habillées de chemises Kaki, de bérets noirs et de fanions avec la croix
celtique.

29 janvier 1960 :
Revêtu de son uniforme de général deux étoiles pour envoyer surtout un
message de fermeté à une armée réticente voire complaisante à l’égard des
insurgés, le général De Gaulle s’adresse à toute la France dans les journaux
télévisés de 20 heures pour dire notamment :
« Et tandis que les coupables qui rêvent d’être des usurpateurs, se donnent
pour prétexte la décision que j’ai arrêté au sujet de l’Algérie, qu’on sache
partout, qu’on sache bien, que je n’y reviendrai pas. Céder sur ce point et
dans ces conditions, ce serait brûler en Algérie les atouts que nous avons
encore, mais ce serait aussi abaisser l’État devant l’outrage qui lui est fait et
la menace qui le vise. Du coup, la France ne serait plus qu’un pauvre jouet
disloqué sur l’océan des aventures. »

1er février 1960 :


L’ordre public est rétabli : c’est la fin des barricades. Joseph Ortiz a pu
s’évader de nuit de son P.C grâce à la complicité des militaires alors que
Pierre Lagaillarde, en tenue de parachutiste, est conduit dans un camp de
l’armée non loin d’Alger.

25 juin 1960 :
Premiers contacts officiels entre le gouvernement français et le GPRA. Du
côté Algérien Maître Ahmed Boumendjel ancien avocat au barreau de Paris
mais surtout « bras droit » de Ferhat Abbas Président du GPRA, accompagné
de Mohamed Seddik Ben Yahia, ancien Président de la section UGEMA
d’Alger, lui aussi très proche de l’ancien leader du l’UDMA se rendent à
MELUN, non loin de Paris, pour y rencontrer Mr Roger Moris, secrétaire
général des « affaires algériennes » auprès du général De Gaulle et le général
Hubert de Gastines.
Les entretiens se terminent le 29 juin 1960 sans résultats décisifs ou
significatifs. Il reste que ces premiers contacts ont permis de rompre la
méfiance et de lancer le processus des rencontres.

Septembre 1960 :
Un manifeste dit des « 121 » est publié à Paris. Il est contre la guerre qui se
poursuit en Algérie. Il est signé par 121 personnalités parmi les plus célèbres
de France. Elles viennent de tous les horizons. L’impact est tel dans un pays
où « les intellectuels » depuis Voltaire, Hugo, Zola…ont un statut à part qu’il
serait indécent et ingrat de ne pas citer quelques noms de ces 121 signataires.
Les voici :
- Pierre Boulez, compositeur et chef d’orchestre.
- André BRETON, écrivain et animateur du courant surréaliste.
- Marguerite DURAS, écrivain et membre de l’Académie
française.
- Théodore MONOD, chercheur et futur Prix Nobel de Médecine.
- Jean François REVEL, Philosophe.
- Jérôme LINDON, acteur de cinéma.
- Gérard LEGRAND, Musicien.
- Claude ROY, écrivain.
- Pierre VIDAL-NAQUET, historien.
- André MANDOUZE, Professeur.
- Jean PAUL SARTRE, Philosophe, futur prix Nobel de littérature
refusé.
- Simone De BEAUVOIR, écrivain et philosophe.
- Claude LANZMAN, réalisateur de cinéma.
11 décembre 1960 :
Des milliers, voire des dizaines de milliers de manifestants algériens
descendent dans les rues, surtout à Belcourt (Belouizdad) à l’occasion de la
visite du général De Gaulle en Algérie (du 19 au 12 décembre) mais aussi
pour s’opposer aux ultras de « l’Algérie française » qui ont déclenché des
grèves de protestation. Les manifestants algériens, drapeaux nationalistes
confectionnés de façon artisanale, défilent en criant « vive le FLN » « vive le
GPRA », « vive De Gaulle », « Abbas au pouvoir », « Lagaillarde au
poteau ».

22 avril 1961 :
Coup de force à Alger. Quatre généraux français dont deux anciens
commandants en chef des forces françaises en Algérie prennent le pouvoir à
Alger. Il s’agit des généraux Challe, Salan, Jouhaud (pied noir) et Zeller.
Opposés à la politique d’autodétermination du général De Gaulle, s’appuyant
sur une population européenne de plus d’un million de personnes, fanatisés
par le mythe de « L’Algérie française », assurés de l’adhésion de la plupart
des cadres de l’armée, sinon au moins de la passivité de tous, ces généraux ne
visaient rien d’autre que le renversement et le départ du général De Gaulle
puis de l’abandon de sa politique. Ils étaient prêts à lancer les parachutistes,
eux-mêmes fanatisés et blessés surtout par les sanctions qui ont frappé le
général Massu et nombre d’officiers rebelles ou récalcitrants, sur Paris et
toute la France pour changer de régime. Au besoin et face à l’impossible,
faire de l’Algérie une Afrique du Sud, gouvernée par les blancs, en la
détachant, si nécessaire de la France.
La réaction inquiète et immédiate du général De Gaulle qui apprend le coup
de force à 1 heure 45 du matin du 23 avril 1961 est à la mesure du « désastre
» qui pèse sur la France. Il le dit en ces termes dans le journal télévisé de 20
heures du même jour :
« Un pouvoir insurrectionnel s’est établi en Algérie par un Pronunciamiento
militaire ».
« Les coupables de l’usurpation ont exploité la passion des cadres de
certaines unités spécialisées, l’adhésion enflammée d’une partie de la
population de souche européenne qu’égare les craintes et les mythes,
l’impuissance des responsables submergés par la conjuration militaire.
Ce pouvoir a une apparence : un quarteron de généraux en retraite. Il a une
réalité : un groupe d’officiers partisans, ambitieux et fanatiques. Ce groupe
et ce quarteron possèdent un savoir-faire expéditif et limité. Mais ils ne
voient, et ne comprennent la nation et le monde que déformés à travers leur
frénésie. Leur entreprise conduit tout droit à un désastre national…
Au nom de la France, j’ordonne que tous les moyens, je dis tous les moyens,
soient employés pour barrer partout la route à ces hommes-là, en attendant
de les réduire ».
Jamais probablement discours n’a produit un tel souffle dévastateur. Des
mesures exceptionnelles sont prises : des réservistes sont rappelés, des
volontaires sont postés aux édifices publics en France, des arrestations
préventives sont opérées, des avions de combat fuient l’Algérie pour la
France, les comptes bancaires sont gelés, l’embargo est décrété sur toutes les
fournitures à l’Algérie comme les carburants, les troupes du contingent,
hostiles aux cadres putschistes, sabotent discrètement les équipements
militaires en Algérie.

Nuit du mardi 25 au mercredi 26 avril 1961 :


Le coup de force est défait. Les généraux se débandent : Zeller se fond dans
la foule appelée au secours à 1’heure du matin et disparait. Le général Challe
se rend aux forces de l’ordre loyalistes, Salan et Jouhaud (natif d’Algérie)
entrent dans la clandestinité.

3 mai 1961 :
Un tract annonce qu’une « organisation armée secrète » ou « OAS » est
créée. Elle regroupe toutes les organisations d’activistes européens favorables
à « l’Algérie française ». Elle va mener une politique de terreur, une «
politique de terre brûlée ». Les généraux putschistes Salan, Jouhaud et Zeller
qui ne se sont pas rendus aux autorités françaises et qui n’ont pas été arrêtés
en font partie.

20 mai 1961 :
Les négociations qui devaient avoir lieu entre le gouvernement français et le
GPRA le 7 avril 1961, sont enfin ouvertes à Evian, station balnéaire du côté
français du lac de Genève.
La délégation ministérielle française est conduite par Louis Joxe, ministre
d’État chargé des affaires algériennes alors que la délégation du GPRA est
conduite par Krim Belkacem qui en est le vice-président.

13 juin 1961 :
Ajournement des négociations d’Evian qui ont buté sur la question du Sahara
notamment, que la France cherche à détacher du reste de l’Algérie pour en
faire une entité indépendante.

9 - 28 août 1961 :
Réunion du CNRA à Tripoli en Libye. De fortes dissensions opposent les
différents clans de la Révolution non point sur les questions de fond, pas
même sur les négociations avec la France mais sur les personnes qui, toutes,
cherchent à se positionner pour accéder au pouvoir d’une Algérie dont
l’indépendance est désormais en vue. Ferhat Abbas est limogé, surtout par les
plus radicaux (militaires) des membres du CNRA. Il est remplacé par
Benyoucef Benkhedda grâce à des manœuvres diaboliques de Saâd Dahleb
menées depuis longtemps pour écarter Krim Belkacem, seul chef historique
encore libre, parce qu’accusé à tort, d’avoir éliminé les deux anciens
condisciples de Abane Remdane au lycée de Blida que sont Dahleb et
Benkhedda, mais surtout parce que Kabyle, donc forcément « berbériste » un
jour ou l’autre en souvenir du spectre de la « crise berbériste » de 1949.

15 mars 1962 :
Assassinat par l’OAS de six fonctionnaires du centre social de Ben Aknoun
(Alger). L’écrivain Mouloud Feraoun est l’une des six victimes.

18 mars 1962 :
Signature des « accords d’Evian » par KRIM Belkacem chef de la délégation
du GPRA et par trois ministres français : Louis Joxe, Louis De Broglie et
Robert Buron. Le même jour les dirigeants FLN détenus au château d’Aulnoy
qui sont : Aït Ahmed Hocine, Boudiaf Mohamed, Ben Bella Ahmed, Bitat
Rabah, Khider Mohamed sont remis à monsieur Laghzaoui représentant
personnel du Roi Hassan II du Maroc.
19 mars 1962 :
Le cessez-le-feu est observé sur l’étendue du territoire algérien à 12 heures.

29 mars 1962 :
Le chef de l’Exécutif Provisoire, Mr Abderrahmane Fares s’installe à «
Rocher Noir » à Boumerdes. Il préside l’instance prévue par les accords
d’Evian composée de 12 membres nommés par la France et 12 autres
nommés par le GPRA.

8 avril 1962 :
Referendum en France pour approuver ou rejeter les « accords d’Evian ».
Résultats :
- Inscrits : 26.983.275 électeurs ;
- Suffrages exprimés : 19.300.026;
- OUI :17.505.473 soit 90,70% des suffrages exprimés ;
- NON : 1.794.533 soit 9,30% des suffrages exprimés.
2 mai 1962 :
Sauvage attentat de l’OAS contre les dockers d’Alger : 60 morts et 1230
blessés.

7 juin 1962 :
La bibliothèque de l’université d’Alger est brûlée par l’OAS. 600.000
ouvrages sont détruits. Certains sont des exemplaires uniques (thèses de
doctorat, comme celle de Camus que j’ai feuilletée) perdus à jamais. L’OAS
dit vouloir conduire une « politique de terre brûlée » même contre la culture
et les établissements d’enseignement.

17 juin 1962 :
Les électeurs des deux communautés (musulmane et européenne) en Algérie
seulement sont appelés à se prononcer par Oui ou par Non (Referendum
d’autodétermination) sur la question suivante :
« Voulez-vous que l’Algérie devienne un État indépendant coopérant
avec la France dans les conditions définies par les déclarations du 19
Mars 1962 »
3 juillet 1962 :
Les résultats du Référendum sont proclamés à Alger à 10 heures 15 :
- Total des électeurs inscrits dans les 15 départements algériens 6
549 736.
- Nombre de votants 6 017 680.
- Bulletins blancs ou nuls : 25 565.
- Suffrages exprimés 5 992 115.
- Bulletins OUI 5 975 581.
- Bulletins NON 16 534.
3 juillet 1962, Paris 10h30 :
Le général De Gaulle, Président de la République française proclame
l’indépendance de l’Algérie et envoie la lettre suivante à monsieur
Abderrahmane Farès, chef de l’Exécutif provisoire de l’État algérien :
Monsieur le Président
« La France a pris acte des résultats du scrutin d’autodétermination du 1er
juillet 1962 et de la mise en vigueur des déclarations du 19 mars 1962. Elle
a reconnu l’indépendance de l’Algérie.
En conséquence et, conformément au chapitre 5 de la déclaration générale
du 19 mars 1962, les compétences afférentes à la souveraineté sur le
territoire des anciens départements français d’Algérie sont, à compter de ce
jour, transférées à l’Exécutif provisoire de l’État algérien.
En cette solennelle circonstance, je tiens à vous exprimer, monsieur le
Président, les vœux profondément sincères, qu’avec la France tout entière,
je forme pour l’avenir de l’Algérie.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président à ma haute considération »
Ch. De GAULLE.

3 juillet 1962, Rocher Noire (Algérie) :


En réponse à la lettre du Président de la République française, le Président de
l’État Algérien, Président de l’Exécutif provisoire lui adresse la lettre
suivante :
Rocher Noir, le 3 juillet 1962
« Monsieur le président,
« J’ai l’honneur, au nom de l’Exécutif Provisoire Algérien de vous accuser
réception de votre message et de prendre acte de la reconnaissance
officielle, par la République française, de l’indépendance de l’Algérie.
Conformément au chapitre 5 des déclarations d’Evian du 19 mars 1962,
l’Exécutif provisoire a ainsi reçu ce jour transfert des compétences
afférentes à la souveraineté sur le territoire algérien.
Je vous remercie des vœux sincères que vous formulez à l’adresse de
l’Algérie et j’exprime à mon tour, au nom de l’Exécutif provisoire, en cette
journée historique, des vœux sincères pour la France, et pour une
coopération féconde et prospère entre nos deux pays.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’expression de ma haute
considération »
A. FARÈS

Ainsi se termine une colonisation française qui aura duré 132 années.
Tout ce qui arrive après le 3 juillet 1962 à 10 heures 30 est de la seule
responsabilité des Algériens et des Algériennes, enfin dotés d’une nationalité
propre, pour le pire comme pour le meilleur.

.
XI – CONCLUSION : CONSOLIDER L’ÉTAT :
L’IMPÉRATIF HISTORIQUE

Inertie, anarchie, incapacités, féodalités, divisions, trahisons, sont des mots


qui reviennent trop souvent dans l’histoire de l’Algérie. Si blessants soient-
ils, il faut les assumer. Car les nier, c’est se condamner à poursuivre ou à
répéter les mêmes faiblesses, les mêmes défaillances, les mêmes échecs
sanglants, meurtriers et prolongés. L’étranger, l’autre, si cruels soient-ils, ne
sont pas seuls en cause dans nos malheurs.
Qui n’entend autour de soi aujourd’hui (2018), au travail ou dans son propre
quartier, que les chaos de Syrie, d’Irak, de Yémen, de Libye qui s’étalent
sous nos yeux sur tous les écrans du monde sont dûs, non pas à leurs
dirigeants, mais à l’Occident quand ils ne citent pas nommément l’Amérique
et Israël surtout, mais aussi la France, l’Angleterre et bien d’autres. Tous
savent pourtant que ce sont les arabes qui tuent des arabes, des musulmans
qui assassinent des musulmans souvent à l’intérieur des mosquées supposées
être des lieux de prière à Dieu. Aucun, ou si peu, ne cherche les causes
réelles, profondes, lointaines et présentes qui sont à l’origine de ces chaos
alors qu’elles sont largement établies et même admises par moments et par
certains ce qui est contradictoire avec leurs accusations. Il s’agit toujours et
partout de la double confiscation du pouvoir et des richesses.
Culpabiliser un ennemi imaginaire est toujours plus commode que de
reconnaître et admettre ses propres faiblesses ou défaillances.
Pendant de nombreuses années, les Français, surpris, ahuris par
l’effondrement de leur armée face à l’armée allemande en juin 1940 ont
cherché les coupables ou les responsables ; se réfugiant pour la plupart dans
la fausse supériorité matérielle des troupes nazies. Jusqu’au jour où un
brillant professeur d’histoire, Marc Bloch, qui s’est fait mobiliser de force
parce qu’ayant dépassé l’âge limite a mis le doigt sur les causes du désastre;
notant au jour le jour sur le front où il était, dans un livre palpitant (l’Etrange
Défaite) resté longtemps inconnu, les défaillances présentes ou récentes des
uns et des autres : dirigeants politiques d’abord, puis les hauts gradés de
l’armée et du commandement, les élites industrielles, intellectuelles,
syndicales et même les travailleurs. Marc Bloch sera fusillé par les
Allemands avec un enfant de 17 ans le 16 juin 1944.
L’Algérie n’est pas la France ; pas plus que je ne suis Marc Bloch. Mais
j’aimerais tellement que ma modeste chronologie puisse ouvrir les yeux de la
conscience sur les graves et irréparables défaillances de la plupart de nos
ancêtres à l’exclusion bien entendu de la génération de novembre 1954 et du
congrès de la Soummam, qui sont quasiment les mêmes, puisqu’ils sont
contemporains de beaucoup d’Algériens encore vivants.
Nous Algériens, avons longtemps refusé de prendre en charge notre passé
niant parfois cette longue succession quasi ininterrompue d’invasions, de
dominations et de colonisations depuis au moins l’époque romaine. C’est-à-
dire en gros vers le III siècle avant l’ère chrétienne.
On peut comprendre que face à un colonialisme dont la nature même est de
dominer, d’exploiter et de nier le pauvre colonisé, celui-ci cherche, par
dignité, à sauver le peu qui lui reste ; c’est-à-dire son identité. Mais que
l’intellectuel fausse délibérément et en toute connaissance de cause l’histoire
réelle de son pays pour se donner peut-être courage et bonne conscience cela
ne me paraît pas être la bonne défense car nier la vérité se paye tôt ou tard. Si
pénible soit-elle, si dégradante qu’elle peut être parfois, la vérité est toujours
bonne à connaitre et à dire. Elle peut être fortifiante et donner des raisons et
des forces pour réparer ce que certaines consciences, peu armées, refusent
d’admettre.
L’objet d’une chronologie n’est que de donner les dates ou les périodes des
événements bien établis ; non de chercher les causes de ceux-ci ou de les
interpréter. Mais pour étancher la soif du lecteur et me soulager d’un devoir
de conscience je dirai simplement que pour moi les trois causes essentielles
qui ont rendu possibles les colonisations de l’Algérie chassée de l’histoire en
tant que Nation ou État fort, se ramènent toujours, tel que le suggère ou le
montre la chronologie, d’abord aux divisions au sein des populations du pays,
ensuite à une absence ou faible conscience nationale de ses élites du moment,
et, enfin, aux trahisons au sein des dirigeants qui sont pour la plupart des
étrangers au sol et à la terre qui façonnent les âmes.
Il n’appartient pas à une chronologie de développer ces trois facteurs qui ont
rendu impossible la formation d’une identité ou d’une nation algérienne
présente et forte tout au long de ces deux mille ans d’histoire. Il reste qu’un
travail si modeste soit-il n’est jamais sans mérite. C’est pourquoi je cherche à
m’appuyer sur ce qu’il m’apprend pour suggérer la seule solution qui peut
épargner à l’Algérie une nouvelle éclipse qui peut prendre d’autres formes
que les précédentes. Cette solution, la seule, réside dans la consolidation de
l’État algérien. Acceptons pour asseoir la base de notre réflexion commune
de considérer que c’est la première fois en deux mille ans d’histoire connue
que ce qui est appelé l’Algérie depuis 1831 est assise à la fois sur un territoire
délimité, unifié, aux frontières admises et une population de 40 millions
d’habitants qui se disent Algériens. Je veux insister pour dire que cet acquis,
ce capital est considérable ; sans précédent. Nous le devons tous et toutes aux
pères de notre indépendance ; dirigeants, combattants et populations de
l’époque mêlés dans la même reconnaissance éternelle.
Alors, qu’allons-nous faire de cet héritage indivis qu’aucune génération
précédente à celle de la lutte de libération nationale lancée en 1954 n’a, selon
moi, possédé ?
Il n’y a pas d’autre priorité permanente, ardente pour tout le monde ;
populations et dirigeants confondus que de consolider l’État algérien. Simple
à l’énoncé mais si compliqué à réaliser. Je tente l’exercice sur peu de pages
en fuyant le plus possible l’abstraction. Pour moi la consolidation de l’État,
ce sont trois acceptations ou trois réalisations permanentes :
1- L’État de droit.
2- La justice sociale
3- La démocratie

1) L’ÉTAT DE DROIT :
Si je le place à la tête des priorités c’est parce que je pense qu’au départ de
toute chose il y a la distinction entre le bien et le mal que toute personne
raisonnable peut opérer et comprendre sans même qu’il soit nécessaire
d’avoir été formé dans quelque école que ce soit en dehors de celle de la vie.
Chaque être est doué de raison. C’est un don de la vie. C’est ce que suggère
Cicéron (- 106 - 43 AV.J.C) homme politique et juriste romain, dans cette
citation de la Republica :
« Il existe une loi vraie, c’est la droite raison, conforme à la nature,
répandue dans tous les êtres, toujours d’accord avec elle-même, non sujette à
périr, qui nous rappelle impérieusement à remplir notre fonction, nous
interdit la fraude et nous en détourne. L’honnête homme n’est jamais sourd à
ses commandements et à ses défenses ».
Prise à la lettre, la citation de Cicéron conduit à penser qu’avant même toute
légifération, c’est à dire la confection des lois, la personne humaine a déjà en
elle-même, grâce à sa raison, le jugement qui lui permet de distinguer ce
qu’elle peut faire de ce qu’elle ne doit pas faire. Nous ne sommes pas par
conséquent au stade de la loi qui est la base de l’État de droit. Mais alors
qu’est-ce qu’une loi ? l’explication habituelle, banale, celle d’aujourd’hui est
que la loi est un texte voté par un parlement composé d’une ou deux
assemblées une fois que le texte est préparé par le gouvernement (projet) ou
par un certain nombre de députés (proposition). La loi qui n’exclut en
principe de sa compétence aucun sujet de la vie est supposée être l’expression
de la volonté générale donc du peuple selon Jean Jacques Rousseau qui le dit
admirablement dans le Contrat Social et qui ajoute que l’objet de la loi doit
lui aussi être général. Ecoutons-le sans trop multiplier les citations car
souvent difficiles à comprendre :
« Quand je dis (c’est Rousseau qui parle) que l’objet des lois est toujours
général, j’entends que la loi considère les sujets en corps et les actions
comme abstraites, jamais un homme comme individu ni une action
particulière »
Mais là où le problème de la loi se complique c’est au double stade de sa
confection initiale ou rédaction et à celui de son vote, en commission d’abord
puis au niveau de l’Assemblée plénière. Mais qui sont les votants ? L’idéal
serait que tout peuple ait la capacité de voter. Mais on voit mal comment
rassembler sur une place publique des millions de personnes, encore que le
système informatique pourrait le permettre aujourd’hui. Cependant l’aptitude
d’un électeur, quel que soit le pays, à comprendre un texte de loi est quasi
impossible. D’où le recours à des élus appelés représentants de la nation qui
sont supposés à la fois exprimer le mandat de leurs électeurs et bien formés
pour évaluer les textes de lois qui sont soumis à leurs votes ; au double plan
de l’équité et de l’intérêt général. Et c’est ici que commence le débat
inépuisable sur ce qu’est l’intérêt général et surtout sur l’objectivité,
l’honnêteté et l’indépendance morale et politique de l’élu.
Une fois que la loi est votée, le concept « État de droit » prend toute son
ampleur et sa signification. Qui peut mieux que l’un des plus grands
philosophes de tous les temps nous dire en quoi il consiste ? Aristote,
philosophe grec (384-322 avant l’ère chrétienne) répond magistralement et
pour toujours à la question dans son livre Politique.
«le règne de la loi est préférable à celui d’un seul des citoyens pris
individuellement et, en application de cette même idée, même s’il est meilleur
que certains individus aient en main l’autorité, on doit seulement les établir
comme gardiens des lois et ministres des lois…Vouloir le règne de la loi,
c’est semble-t-il vouloir le règne exclusif de Dieu et de la raison; vouloir, au
contraire, le règne d’un homme, c’est vouloir en même temps celui d’une
bête sauvage, car l’appétit irrationnel a bien ce caractère bestial, et la
passion fausse le caractère des dirigeants, fussent-ils les plus vertueux des
hommes»
Ainsi donc et pour résumer le sens et la portée de l’État de droit ce n’est rien
d’autre que le respect de la loi aussi bien par les particuliers ou citoyens d’un
État que par ses dirigeants. Quand on entend l’expression courante que «
NUL N’EST AU DESSUS DES LOIS » cela veut dire tout simplement tout
le monde, y compris les dirigeants, fussent-ils chefs d’État, Monarques,
Présidents, Ministres ou autres. Or il est plus facile aux gouvernants de ne pas
les respecter, de les violer car ils n’encourent que rarement ou jamais des
sanctions alors que les gouvernés, « Monsieur ou Madame tout le monde »
est passible de nombreuses et graves sanctions ; y compris pénales. Cela est
surtout vrai et actuel dans les pays appelés du « Tiers Monde » qui ne
couvrent guère plus pratiquement que les Etats dits arabes et africains. A titre
de simple exemple il faut se rappeler, qu’au moment de la mort de Haffez El
Assad, père de l’actuel Président de Syrie, Bachar El Assad, la constitution
du pays avait été amendée en 48 heures, par des députés du régime pour
permettre au fils de prendre la succession du père, rendant la Syrie une
République héréditaire. C’était manifestement une violation flagrante de la
constitution. Tout le monde connait la suite. Une guerre civile atroce s’y
poursuit au moment où j’écris (Avril 2018) avec déjà 300 à 400 000 morts
dont certains ont été bombardés aux gaz de chlore ou Sarin à seule fin de
garder le pouvoir qui n’a été à aucun moment gagné à travers des élections
libres, plurielles et transparentes.

2) JUSTICE SOCIALE :
Un État ne peut être fort et défendu que si tous les citoyens du pays y
trouvent leur compte. On ne peut pas demander à ces citoyens de prendre leur
part dans un effort national et surtout protéger leur pays et le défendre en cas
de nécessité, toujours présente et pressante dans la cas de l’Algérie, si ses
citoyens se sentent délaissés, oubliés ou abandonnés la plupart du temps par
leurs gouvernants.
Il n’y a pas de liberté ni de citoyenneté dans la pauvreté. John Rawls,
philosophe américain, encore vivant est comparé à Platon et à Rousseau pour
sa « théorie de la justice ». Certes la liberté est pour lui supérieure à toutes les
autres valeurs qu’elles soient morales ou politiques, mais il soutient avec
autant de force que la liberté doit se traduire par la réduction des inégalités.
Car que peut signifier la liberté pour une personne qui est dans le besoin ; qui
ne mange pas à sa faim, qui ne peut ni s’éduquer ni se soigner en cas de
faiblesse ou de maladie. Sur le plan politique, il est encore plus difficile voire
impossible de mobiliser l’intérêt, encore moins la volonté de quelqu’un qui
manque de l’essentiel.
Il y a bien sûr mille façons pour un État d’assurer la justice sociale qui
contribue à donner tout son sens au pacte du « vivre ensemble » qui est l’un
des deux éléments constitutifs d’une nation avec le « culte des ancêtres » telle
qu’elle est définie par Ernest Renan.
La première condition de réalisation d’une justice sociale entre les citoyens
d’un même État c’est de veiller à l’équité entre eux. Il n’y a pas de justice
sociale sans équité. On ne peut pas assister sans risque, dans un pays, à
l’étalement des richesses d’un côté et à la pauvreté de l’autre. L’État doit
veiller à une bonne répartition des richesses. Cela peut se faire à travers une
politique des salaires équitable où un dirigeant ne peut pas accaparer une trop
grande part de la richesse produite par les employés auxquels on donne un
salaire d’airain ; ce que les Marxistes expliquaient autrefois comme étant un «
salaire à peine suffisant pour la reproduction des forces du travailleur ».
Le choix du modèle social d’un pays peut aussi contribuer à réduire les
inégalités en faisant en sorte qu’il n’y ait pas une politique du logement, de la
santé ou de l’ éducation à deux vitesses : une pour les riches, une autre pour
les pauvres. Je revois encore ce congressiste du FLN qui, en 1979, reprochait
au pouvoir politique de fermer les yeux sur les Algériens enrichis, souvent à
travers la corruption ; qui se construisent des châteaux (Koussor) alors que
les plus démunis n’arrivent pas à construire des tombes (Kobbor) !
C’est la manière à peine excessive ou forcée pour ce congressiste de
souligner, d’alerter et même de dénoncer les graves inégalités sociales qui se
creusaient dans le pays sans que le gouvernement ne s’en inquiète, encore
moins n’y apporte l’urgente solution.
Toutes les luttes sociales auxquelles on assiste ces derniers temps en Algérie
n’ont d’autre but que de réduire les inégalités de tous ordres qui minent la
société algérienne. Il n’est nul besoin de fournir ici tout un appareillage
statistique. Il suffit que le sentiment d’inégalité et d’injustice soit répandu
dans un pays et qu’il persiste en s’aggravant pour que le « contrat social » qui
lie tous les citoyens d’un pays soit gravement compromis ou rompu. C’est
l’une des causes principales qui peuvent conduire à un désastre historique.

3) LA DÉMOCRATIE :
Le lecteur non averti, ne doit pas croire qu’un auteur ou tout autre acteur de la
vie publique cède à un caprice ou à la fascination de l’Occident lorsqu’il se
bat pour que son propre pays soit enfin gouverné par un système
démocratique. C’est grâce à la démocratie que l’Occident (Europe et
Amérique du Nord notamment) brille de mille feux et que tous les exilés et
les émigrés d’aujourd’hui (2018) ne rêvent que de se réfugier et de s’établir,
seuls ou en famille, dans les terres si hospitalières (malgré tout) de ces pays.
Où vont les Syriens, les Afghans, les Soudanais, les Egyptiens et d’autres
africains du Sahel qui fuient, au risque de leurs vies, les atrocités des guerres
ou des famines dans leurs pays sinon d’abord en Grèce, en Italie, en Espagne
puis cherchent à gagner d’autres pays d’accueil comme la France,
l’Allemagne, l’Angleterre et la Scandinavie. Qu’on cesse là aussi d’accabler
l’Occident pour les malheurs actuels des pays arabes et africains notamment.
Il faut donc admettre que la Démocratie inventée par la Grèce, donc l’un des
membres de la famille occidentale, est le meilleur, voire le seul, système
politique au monde qui assure la liberté, la dignité, le bien être, la stabilité, la
tranquillité et le développement durable dans tous ces pays.
Alors qu’est-ce que la démocratie ? Sa définition depuis La République de
PLATON (vers 428 et 347 ou 348 avant l’ère chrétienne) recueille jusqu’à
nos jours (2018) la quasi-unanimité des penseurs sur ses fondements et
mécanismes.
La démocratie consiste dans le libre choix des électeurs d’un pays de leurs
dirigeants élus à tous les échelons (maires, conseillers départementaux,
députés et surtout Président de la République parce que premier magistrat
d’un pays) à l’occasion d’élections périodiques, régulières où le traitement
égalitaire des candidats (temps d’antennes médiatiques, journaux,
protections, dépenses de la campagne électorale…) est garanti par la loi.
Bien entendu, liberté de choix, pluralité et égalité des candidats, neutralité du
scrutin ne suffisent pas, car même si une élection est entourée du plus grand
nombre de garanties le jour du scrutin; elle peut se jouer et se joue en fait
plusieurs mois ou plusieurs années à l’avance avec le conditionnement des
esprits par les médias de l’État ou contrôlés secrètement par lui sans parler
des « achats » à coup de subventions de faveurs ou de passe-droits accordés
au plus grand nombre d’associations, y compris sportives notamment, qui
peuvent avoir une grande influence sur le vote de leurs adhérents ou
sympathisants.
Ce qui fait problème en démocratie comme dans toute entreprise humaine ce
n’est pas tant de fixer des règles faciles à formuler et à adopter mais c’est
surtout et quasi exclusivement le respect de ces règles à la fois par tous les
candidats concurrents mais aussi par leurs soutiens qui peuvent être dans les
institutions qui sont chargées de les organiser, de les conduire et de les
contrôler. Il y a mille manières de frauder et de fausser une élection à quelque
niveau que ce soit.
Il faut admettre, au risque de paraître pro-occidental que seuls les pays qui en
sont membres tiennent des élections à peu près convenables, respectueuses
des règles établies; tout simplement parce qu’une lente évolution de la culture
dans ces pays a permis aux populations d’accepter le verdict des urnes, car
étroitement contrôlées par des institutions (administrations centrales et
territoriales, tribunaux, cours suprêmes ou conseils constitutionnels) d’une
indiscutable et incontestable probité.
J’ose dire que ce n’est le cas nulle part ailleurs.
Si éloignés que sont, peut-être, les 3 thèmes abordés ici pour une chronologie
historique inépuisable source de leçons, ils montrent à l’évidence que sans
leur strict adoption et consécration permanente et vigilante dans la société
algérienne, il serait illusoire de vouloir ou de croire qu’un État fort et stable
peut exister en Algérie. C’est parce que j’ai considéré tout au long de mes
recherches et de la réalisation de la présente chronologie, miroir gigantesque
d’une Algérie de 2000 ans que le facteur le plus grave qui manquait à la
construction d’une nation algérienne était précisément l’absence d’un État
fort.
Il va de soi que par État fort je n’entends nullement un État dictatorial,
comme pourrait le penser un lecteur peu attentif à mes développements
précédents. Un État fort c’est celui qui respecte toutes les libertés
fondamentales individuelles et collectives longuement préparées par le siècle
des lumières (18è siècle) et largement adoptées par les Révolutions
hollandaise, anglaise, américaine et française puis progressivement par toute
l’Europe occidentale.
Il n’est pas de meilleure illustration à fournir que de dire qu’en plus de deux
siècles les États-Unis d’Amérique, première puissance du monde aujourd’hui
(2018) et depuis pratiquement la fin de la première guerre mondiale en 1918
n’ont connu aucun régime dictatorial. Ce qui fait la force d’un État c’est le
double respect des libertés et du peuple.
A contrario les régimes dictatoriaux ne respectent ni les libertés individuelles
ni bien sûr leurs propres peuples et finissent toujours et partout par des
désastres spectaculaires : massacre des populations et sous-développement
général.
Pour éviter toute confusion sur ces notions d’État, il reste à mettre en garde
contre une opinion répandue chez nous qui est à la fois fausse et dangereuse.
Il s’agit des attaques répétées contre l’État « Jacobin » que serait l’État
algérien depuis l’indépendance du pays en 1962. Rien n’est plus faux, même
si en Algérie critiquer une organisation empruntée à la France est toujours
bonifiant auprès des populations dont la bonne foi est abusée. Mauvaise foi
mise à part, il n’est personne au monde qui puisse considérer que la France
est mal administrée. Je ne dis pas gouvernée.
L’administration française est considérée comme l’une des meilleures au
monde.
D’où vient alors ce rejet du « Jacobinisme » ? Tout simplement de la
croyance qui était vraie depuis de nombreux siècles y compris du temps des
Rois, donc pas seulement depuis la Révolution française de 1789 conduite
essentiellement par le « club des Jacobins » (monastère Parisien où se
réunissaient les amis de Robespierre) et qui le restera jusqu’aux années 1970
que la France était administrativement trop centralisée.
Comme il serait facile de montrer, chronologie présente à l’appui, qu’une
bonne centralisation, oui même forte, eût évité à notre pays des éclatements et
des morcèlements fréquents qui ont toujours empêché l’existence d’un centre
ou d’une autorité forte dans l’Algérie des différentes époques. Savons-nous
que même les Deys, d’origine Turque, il est vrai, n’ont jamais réussi à
collecter l’impôt. Ils étaient obligés de faire appel aux Janissaires pour aller
pressurer les populations. Encore qu’à aucun moment, faute justement d’État
centralisé, ils n’ont pu avoir autorité sur toute l’Algérie. Ils ne contrôlaient
qu’une faible partie du territoire ; évaluée à 1/6ème de sa superficie.
Faut-il encore ajouter que le « Jacobinisme » français avait une autre vertu,
un autre objectif celui de « casser » les provinces françaises antérieures à la
Révolution de 1789 précisément pour détruire les féodalités locales et éviter
le morcellement du pays, danger toujours possible en Algérie. Il n’y a pas que
les Rois qui ont fait la France. L’esprit Jacobin, avec la centralisation l’a
rendue plus forte, plus rayonnante, hélas plus conquérante aussi.
Donc à l’évidence, c’est moins le « Jacobinisme » que le « Césarisme » qui
fait grave problème en Algérie et qui empêche territoires et populations de
respirer et de se développer dans tous les domaines.
Le Césarisme est exactement à l’opposé du Jacobinisme. Il faut le présenter à
son tour en peu de mots. Il tire son essence des Empereurs romains surtout du
premier d’entre eux (Jules César -101 -44 avant l’ère chrétienne) qui a
concentré ente ses mains tous les pouvoirs ; devenant au fil de ses victoires
despote et dictateur et même par moments, le Dieu Jupitérien, si cher à
l’imperium romanum; au point de finir poignardé par Brutus et Cassius à son
arrivée au sénat de Rome.
Tout le mal de l’Algérie vient de cette incroyable concentration ou
confiscation du pouvoir malgré les limites voire les interdits imposés par les
constitutions successives mais jamais respectées et sans cesse violées.
Evitons toute confusion entre les systèmes politiques ou références
historiques. Rien ne ferait plus de mal à l’Algérie qu’une absence d’un centre
ou d’une autorité centrale forte ; ce qui ne veut pas dire, non plus,
autoritarisme.
Le Jacobinisme est compatible avec une décentralisation continuellement
ajustée à l’évolution de la société algérienne. Par contre, pour l’heure et pour
longtemps, toute régionalisation conduirait forcément au régionalisme
ravageur, négation de l’esprit de novembre et de la Soummam et au bout de
compte au risque mortel d’une explosion de l’Algérie alors qu’elle est enfin
rassemblée pour la première fois depuis 2000 ans !

ALGER, mai 2018


Khalfa MAMERI
[1]
Traduction tirée du Saint Coran de Muhammad HAMIDULLAH, professeur à l’université
d’Istanbul ; préface par Louis MASSIGNON, professeur au Collège de France. Le titre donné à la
sourate est différent selon les auteurs. Ici le titre qui lui est donné est le « Le caillot de sang ». Elle est
la première sourate révélée au prophète Mohamed par l’ange Gabriel.
[2]
Charles André Julien, Histoire de l’Afrique du Nord,, éditions Payot, 1968, page 36.
[3]
John. M. Roberts, Histoire du monde, tome I, les âges anciens, éditions Perrin, Paris 2018, page
273.
[4]
Pierre Grimal, « L’empire Romain, éditions LGF, Paris, page 22.
[5]
Charles André Julien, Histoire de l’Afrique du Nord, éditions Payot, Paris 1968, pages 50-51.
[6]
Ernest Renan, Qu’est-ce qu’une nation ?, éditions Bordas, page 39.
[7]
Ibn-Khaldoun est né à Tunis le 27/05/1332 et mort au Caire en 1406. Nommé en 1350 « Garde du
sceau du Sultan » de Bougie. Y retourne en 1365. Se retire à Biskra de 1374 à 1378 où il rédige en cinq
mois la Muquadima. Il avait 45 ans.
[8]
Charles André JULIEN –Histoire de l’Afrique du Nord ; Tome II page 251. Edition PAYOT-Paris
1969
[9] Mahieddine DJENDER – Introduction à l’histoire de l’Algérie. Editions SNED page 141
ANNEXES

Cartes des états ou territoires dans l’Algérie des différentes époques

NB : Toutes les cartes reproduites sont tirées des deux tomes du livre de
Charles André Julien : Histoire de l’Afrique du Nord Payot Paris 1968
Sauf celles de :
1- La Numidie sous l’empire romain tirée du livre de P. GRIMAL «
L’EMPIRE ROMAIN ».
2- L’Algérie au début du XVIème siècle tirée du livre de M.
DJENDER/ Introduction à l’histoire de l’Algérie –SNED Alger
1968.
3- L’Algérie indépendante ONS Alger 1974.
LE PEUPLEMENT DE LA TERRE

Carte tirée du livre Sapiens : une brève histoire de l’humanité de Yuval


Noah Harari.
L’AFRIQUE PUNIQUE
LA NUMIDIE SOUS L’EMPIRE ROMAIN
L’AFRIQUE ROMAINE
ÉTAPES DE LA CONQUÊTE DU MAGHREB
VII-VIII SIÈCLES
LE MAGHREB AU DÉBUT DU IXÈME SIÈCLE
LA BERBÈRIE DU MILIEU DU XIÈME
SIÈCLE
LES ÉTAPES DE LA CONQUÊTE
ALMOWAHADE
LE MAGHREB À LA FIN DU XIII SIÈCLE
L’ALGÉRIE AU DÉBUT DU XVIE SIÈCLE
L’ALGÉRIE ET LA TUNISIE SOUS LES
TURCS DU XVIE AU XIXE SIÈCLES
L’ALGÉRIE INDÉPENDANTE 1962
OUVRAGES DE KHALFA MAMERI

1- Les Nations Unies face à la question algérienne. SNED Alger 1968


(2 éditions).
2- Orientations politiques de l’Algérie. SNED- Alger 1973- (2
éditions).
3- Citations du Président Boumediene –SNED- Alger 1975- (5
éditions).
4- Réflexions sur la constitution algérienne –OPU-ENAL- Alger
1978-( 2 éditions).
5- Le premier ministère en Algérie-ENAL-Alger 1984.
6- Abane Ramdane- héros de la guerre d’Algérie-Paris 1988. (8
éditions).
7- Ben M’Hidi Larbi- héros de la guerre d’Algérie- Alger- 1994. (5
éditions).
8- Journal d’un ambassadeur d’Algérie en Chine-Alger-1998
9- Abane Ramdane - le faux procès- Tizi-Ouzou 2007- (3 éditions).
10- Les constitutions algériennes- Alger 2008
11- Histoire de la guerre d’Algérie- jour après jour- Alger- 2012- (2
éditions).
12- Abane Ramdane « Documents et vérité » -Tizi-Ouzou- 2012
13- Krim Belkacem - éditions EL AMEL- Tizi-Ouzou-2016- (2
éditions).
14- Abane-Krim - De la Double méprise au double assassinat- Editions
EL AMEL-Tizi-Ouzou-2016
15- Premier novembre 1954 : les six chefs historiques de la guerre
d’Algérie, Editions EL AMEL- Tizi-Ouzou-2017
16- Algérie 2000 ans d’histoire chronologie de-264 à 1962, Editions el
Amel- Tizi-Ouzou-2018
LIVRES POUR ENFANTS D’ALGERIE DE KHALFA MAMERI

1- Colonel Lotfi -Editions EL AMEL-Tizi-Ouzou 2015- (4 éditions).


2- Larbi Ben M’Hidi - Editions EL AMEL Tizi-Ouzou 2016- (2
éditions).
3- Abane Ramdane -Editions EL AMEL- Tizi-Ouzou -2015 - (9
éditions).
4- Houari Boumediene (3 éditions).
5- Mohamed Boudiaf -le rêve assassiné- Editions EL AMEL- Tizi-
Ouzou 2016- (3 éditions).
6- Ferhat Abbas - Editions EL AMEL- Tizi-Ouzou -2015- (3
éditions).
7- Djamila Boupacha - Editions EL AMEL- Tizi-Ouzou - 2016- (3
éditions).
8- Krim Belkacem -Editions EL AMEL- Tizi-Ouzou -2016.
LIVRES NUMERIQUES DISPONIBLES SUR AMAZON

1- Abane Ramdane : Le père de l’indépendance algérienne.


2- Krim Belkacem : L’un des six chefs historiques de la guerre
d’Algérie.
3- Djamila Boupacha : L’inoubliable héroïne de la guerre d’Algérie

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