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Prise en charge d'un nouveau-né en détresse en salle de naissance et son


transport

Article in Journal de Pédiatrie et de Puériculture · March 2004


DOI: 10.1016/j.jpp.2003.11.006

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Chabernaud jean-louis
Université Paris-Saclay
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Journal de pédiatrie et de puériculture 17 (2004) 101–111

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MISE AU POINT

Prise en charge d’un nouveau-né en détresse


en salle de naissance et son transport
J.-L. Chabernaud a,b
a
SMUR pédiatrique des Hauts-de-Seine (92), France
b
Service de pédiatrie et réanimation néonatales, hôpital Antoine-Béclère,
157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92141 Clamart cedex, France

MOTS CLÉS Résumé La prise en charge du nouveau-né en détresse en salle de naissance est de plus en
Salle de naissance ; plus prévisible grâce aux progrès de la surveillance obstétricale et aux changements
Ventilation non importants intervenus dans le domaine de l’organisation des soins périnatals. L’anoxie
invasive ; périnatale et la naissance prématurée, surtout avant un âge gestationnel de 32 semaines,
Oxymétrie pulsée ; sont les deux situations les plus fréquentes exposant le nouveau-né à des gestes de
Ventilation
réanimation dès la naissance. Les préalables indispensables à une prise en charge
mécanique ;
Surfactant exogène ;
cohérente et adaptée à chaque cas sont une bonne connaissance des données obstétrica-
Prévention de les et un matériel vérifié et en bon état de marche. La priorité de la réanimation
l’inhalation respiratoire fait aujourd’hui l’unanimité dans les premières minutes de vie. Le dévelop-
méconiale ; pement des méthodes de ventilation non invasive et l’utilisation précoce d’un surfactant
Prévention de exogène naturel sont les deux progrès les plus récents pour la prise en charge précoce du
l’hypothermie ; grand prématuré en salle de naissance. Le matériel de prise en charge respiratoire
Hypothermie (respirateur, monitorage de l’oxygénation par oxymétrie pulsée) permet une améliora-
cérébrale ; tion indiscutable de la qualité de la prise en charge. Le transfert maternel est toujours,
Éthique lorsqu’il est encore possible et non contre-indiqué, préféré au transport du nouveau-né
en cas de possibilité d’accouchement prématuré ou de toute autre pathologie maternelle
menaçant la sécurité de la mère et de l’enfant. Le transport du nouveau-né, quand il
n’est pas évitable, est organisé et réalisé par un personnel entraîné avec un matériel
adapté à la pathologie de l’enfant dans des conditions optimales de sécurité et de
confort.
© 2003 Publié par Elsevier SAS.

Introduction trême, un « état de mort apparente » dans les


premières minutes).
Dans tous les pays du monde, 5 à 10 % des nouveau- Les nombreux progrès réalisés au cours des
nés nécessitent des gestes de réanimation simples 30 dernières années, tant sur le plan de l’obstétri-
en salle de naissance (aspiration des voies aérien- que que de l’anesthésie obstétricale ou de la pédia-
nes supérieures avec ventilation et stimulations). trie néonatale, et surtout les changements impor-
L’anoxie périnatale (le plus souvent du nouveau-né tants intervenus dans le domaine de l’organisation
proche du terme ou à terme) et la grande prématu- des soins périnatals (réseaux périnatals et augmen-
rité (naissance avant 33 semaines d’âge gestation- tation des transferts maternels pour les grossesses
nel) sont les deux situations où une réanimation est à haut risque ou en cas de menace de naissance très
fréquemment nécessaire en raison de difficultés prématurée) ont beaucoup modifié les aspects pra-
d’adaptation à la vie extra-utérine (avec, à l’ex- tiques des soins du nouveau-né à la naissance.
Actuellement, les procédures de réanimation
Adresse e-mail : c.romain@elsevier.fr (J.-L. Chabernaud). néonatales recommandées par l’Académie améri-
© 2003 Publié par Elsevier SAS.
doi: 10.1016/S0987-7983(03)00106-3

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caine de pédiatrie en 1992 [1] et l’Académie amé- d’une cascade métabolique excitotoxique délé-
ricaine de cardiologie [2] en 1987 font figure de tère. Ainsi à la phase anoxique succède une phase
référence. La dernière mise à jour de ces recom- de dépression du métabolisme énergétique céré-
mandations par l’ILCOR (International Liaison Com- bral. Parallèlement les phénomènes d’ischémie–re-
mittee on Resuscitation) date de septembre 2000 perfusion génèrent un stress oxydatif avec libéra-
[8] . La priorité de la réanimation respiratoire fait tion de radicaux libres et synthèse de NO.
aujourd’hui l’unanimité. En revanche, le type et les La prévention de l’anoxie périnatale est difficile
caractéristiques de la ventilation en pression posi- car les anomalies du rythme cardiaque fœtal n’ont
tive (manuelle ou mécanique) ou non invasive, le pas une sensibilité et une spécificité satisfaisantes
choix de la concentration en oxygène utilisée, la et les formes anténatales sont généralement mé-
place du massage cardiaque externe, la posologie connues. Le processus délétère ne peut être dé-
des produits médicamenteux en particulier l’adré- tecté que s’il se produit en per-partum. Ainsi mal-
naline, l’attitude en cas de naissance dans un li- gré les progrès incontestables des prises en charge
quide méconial ou de naissance très prématurée et périnatales, le taux d’infirmité motrice et céré-
l’intérêt de l’alcalinisation ou du remplissage vas- brale n’a pas significativement baissé ces dix der-
culaire font encore l’objet de nombreuses discus- nières années [18].
sions.

Physiopathologie Principes fondamentaux de la prise en


charge
L’anoxie périnatale a des conséquences hémodyna-
miques, métaboliques et cérébrales : La prise en charge du nouveau-né en salle de nais-
• sur le plan hémodynamique : le débit cardia- sance repose d’une part sur l’évaluation de l’état
que reste d’abord normal tout en se redistri- de l’enfant et d’autre part sur l’enchaînement d’un
buant. Les débits locaux sont ainsi maintenus certain nombre de gestes et parfois l’administra-
ou augmentés au niveau cérébral et myocardi- tion de thérapeutiques médicamenteuses.
que, mais diminués au niveau rénal, mésenté- L’évaluation de l’état de l’enfant se fait sur trois
rique, hépatique, musculaire et cutané. Si principaux critères :
l’anoxie se prolonge, les réserves myocardi- • l’existence et l’efficacité des mouvements res-
ques s’épuisent et l’acidose lactique croissante piratoires ;
altère la fonction myocardique : fréquence • le niveau de la fréquence cardiaque, reflétant
cardiaque et débit cardiaque chutent. Ces mo- l’hémodynamique ;
difications sont enregistrées par la surveillance • la coloration de l’enfant avec l’existence ou
du rythme cardiaque fœtal. non d’une cyanose, témoignant d’une hypoxé-
Le canal artériel, ouvert pendant toute la pé- mie, laquelle peut être évaluée à partir de la
riode fœtale, risque alors de rester dans cet mesure de la saturation artérielle par oxymé-
état à la naissance avec un shunt gauche–droit trie pulsée (SpO2), considérée comme patholo-
par le foramen ovale et le canal artériel. Les gique quand elle est inférieure à 90 %.
résistances pulmonaires vont rester élevées, Le score d’Apgar, calculé à une, trois et cinq
empêchant l’ouverture, lors de la naissance, minutes de vie, reste un critère d’évaluation de
du réseau artériel pulmonaire. Tous les méca- l’efficacité de la réanimation quand celle-ci est
nismes d’adaptation circulatoires et respiratoi- nécessaire (Tableau 1).
res habituels propres à la naissance peuvent Un nouveau-né est considéré en « état de mort
ainsi être gravement perturbés et faire persis- apparente » lorsqu’il présente :
ter une hypertension artérielle pulmonaire • une absence de mouvements respiratoires effi-
postnatale ; caces ;
• sur le plan métabolique : l’hypoxie tissulaire • une fréquence cardiaque inférieure à 60/mi-
aboutit à la formation d’acide lactique et à une nute (ou pas d’activité cardiaque) ;
acidose métabolique ; • une cyanose généralisée avec une saturation
• sur le plan cérébral : chez le nouveau-né à imprenable ou extrêmement basse.
terme, les régions les plus sensibles à l’anoxie Son score d’Apgar est alors inférieur à 3.
sont le cortex, la substance blanche sous- Les objectifs principaux des gestes n’ont pas
corticale et les noyaux gris centraux. varié : assurer une ventilation alvéolaire efficace et
Les lésions cellulaires surviennent en deux pha- maintenir une hémodynamique correcte. La réani-
ses : d’abord une mort neuronale précoce puis une mation respiratoire a ainsi remplacé la correction
mort neuronale retardée, liée à la mise en route de l’acidose métabolique. La qualité de la ventila-

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Prise en charge d’un nouveau-né en détresse en salle de naissance et son transport 103

Tableau 1 Score d’Apgar. Moyen chiffré, rapide mais subjectif d’évaluer l’état des grandes fonctions vitales à une minute de vie
et d’en apprécier l’évolution à trois, cinq et dix minutes.
Critères ; Cotations
0 1 2
Fréquence cardiaque < 80/minute 80 à 100/minute > 100/minute
Respiration 0 cri faible cri vigoureux
Tonus 0 extrémités normal
Réactivité 0 grimaces vive
Coloration bleue ou blanche imparfaite rose

tion et de l’oxygénation alvéolaire dans les premiè- alvéolaire correcte, mais aussi pour instituer une
res minutes de vie a ainsi un effet net sur : ventilation spontanée autonome, en déclenchant le
• la résorption de liquide alvéolaire ; réflexe paradoxal d’inflation de Head. Cela permet
• la sécrétion des inclusions lamellaires (forme assez souvent d’éviter d’avoir à recourir à l’intuba-
de stockage intracellulaire du surfactant), tion endotrachéale.
l’élaboration du film tensioactif et l’établisse- La prise en charge ventilatoire du nouveau-né
ment d’une capacité résiduelle fonctionnelle prématuré doit être optimale. Depuis plusieurs an-
(CRF) ; nées, les stratégies ventilatoires se sont orientées
• l’effondrement des résistances vasculaires pul- dans le sens d’une moindre agressivité que ce soit
monaires et la rapide augmentation de la per- précocement ou un peu plus tard.
fusion capillaire pulmonaire ; La stratégie ventilatoire initiale doit tenir le plus
• l’adéquation de la ventilation alvéolaire et de possible compte du risque de barotraumatisme ou
la perfusion pulmonaire. de volotraumatisme, au niveau du poumon mais
Le matériel nécessaire et l’ensemble de l’asso- également de l’arbre aérien. Un mauvais recrute-
ciation et de la succession des gestes sont résumés ment alvéolaire initial et une application inhomo-
dans le Tableaux 2 et 3. gène du volume courant et des pressions d’insuffla-
tion sont le risque principal [5]. Mais il peut
également s’agir d’un risque de surdistension de
Qualité de la ventilation manuelle l’arbre respiratoire avec une agression portant pré-
ou mécanique en salle de naissance férentiellement sur la trachée et les différentes
branches de l’arbre pulmonaire.
Une large proportion des nouveau-nés ayant des
difficultés d’adaptation à la vie extra-utérine va Ventilation nasopharyngée manuelle au
requérir une assistance ventilatoire dès la salle de masque
naissance.
Elle est précédée, quel que soit l’âge gestation- Elle a pour but d’accompagner l’installation d’une
nel, par une désobstruction rhinopharyngée douce ventilation spontanée efficace et de récupérer une
(dépression < 100 mmHg) pratiquée avec une sonde fréquence cardiaque > 100/minute. Actuellement,
de calibre 8 pour l’oropharynx et de calibre 6 pour il existe un consensus sur la fréquence de cette
les narines. L’aspiration gastrique, si elle est déci- ventilation manuelle et la pression nécessaire : elle
dée, doit être différée pour être mieux tolérée. En doit être comprise entre 40 et 60/minute, sauf
effet, toutes ces manœuvres douloureuses peuvent quand lui est associé un massage cardiaque externe
déclencher un réflexe vagal et la bradycardie ainsi qui doit alors faire réduire la fréquence à
induite peut alors rendre nécessaire une réanima- 30/minute [16]. Il est communément admis que
tion respiratoire qui aurait pu être évitée. L’aspira- pour les premières insufflations chez le nouveau-né
tion gastrique secondairement pratiquée par la à terme, il peut être nécessaire d’employer des
bouche (longueur bouche–ombilic) permet de véri- pressions aussi importantes que 40 cmH2O. Cela
fier la perméabilité œsophagienne et de vider l’es- peut donc nécessiter parfois le blocage de la valve
tomac, pour éviter une inhalation secondaire de de surpression (tarée à 40 cm). Il a été montré par
liquide ou si une distension gazeuse existe après un travail lillois que la ventilation manuelle à
ventilation au masque. l’Ambu® n’est pas qu’une simple question de doigté
Lorsqu’il s’agit d’un nouveau-né à terme dans un et qu’il est parfois difficile de maîtriser les varia-
contexte d’asphyxie périnatale, de nombreux tra- tions de pression d’insufflation selon l’opérateur
vaux ont montré l’importance d’une pression posi- [12]. L’utilisation d’un temps d’insufflation long
tive d’ouverture des alvéoles forte (par- (2 à 3 secondes) à pression d’insufflation constante
fois > 30 cmH2O) pour obtenir une expansion (20 à 40 cmH2O selon le terme) est actuellement

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Tableau 2 Matériel de salle de naissance. Table de réanimation


• Amoxicilline (Clamoxyl®) et nétilmycine (Nétromycine®)
Table de réanimation
• Citrate de caféine (ampoule de 50 mg = 2 mL)
Radiante, avec chauffage efficace et matelas en gel, bien
• Albumine humaine à 20 % (ampoules de 10 mL) ou colloïde
éclairée, chronomètre
naturel ou sérum physiologique
Aspirations
Divers
• Source de vide
• Casaque stérile, calot, masque, gants stériles •
• Système d’aspiration d’intensité réglable, avec possibilité Stéthoscope
de clampage
• Tensiomètre pour nouveau-né (brassard : longueur 10 cm,
• Sondes d’aspirations nos 6, 8 et 10, stériles largeur 2,5 cm) ou mesure automatique par oscillométrie
• Flacon de rinçage stérile (sérum physiologique) (avec brassards de différentes tailles), intégré dans un
• Aspiration de mucosités appareil multiparamétrique (Fc, Fr, PANI et SpO2)
Oxygénation et ventilation • Sondes gastriques ch 6 et 8
• Source d’oxygène et d’air avec débitmètres • Duoderm®, sparadrap pour moustaches, teinture de
• Ventilateur manuel (Ambu® pédiatrique ou Laerdal® benjouin
enfant) avec masques nouveau-né (deux tailles) circulaires • Hémocue® (mesure instantanée de l’hémoglobine)
(contrôler la bonne position des valves et le bon • Appareil photo à développement instantané ou numérique
fonctionnement de la valve de sécurité) ou Néopuff® RD
PPC, pression positive continue ; VS-PEP, ventilation sponta-
(avec circuit à usage unique)
née avec pression expiratoire positive ; CPAP, Continuous
• Boîte d’intubation avec lames droites (Miller, Oxford ou
Positive Airway Pressure
Guedel) et petite lame, pince de Magill, jeu de piles et
d’ampoules de rechange
• Sondes d’intubation trachéales à usage unique, de recommandée pour les premières insufflations ma-
diamètre intérieur (mm) 2,5 (à canal latéral) 3 et 3,5 avec
repère glottique et échelle centimétrique, raccords
nuelles. Pour les suivantes, la pression et la fré-
(supprimer les sondes no 2) quence sont dépendantes de l’âge gestationnel et
• Raccord de Beaufils du type ou de la gravité de la pathologie respira-
• Sonde pour PPC nasale (VS-PEP, CPAP) en silicone (Vygon® toire.
2595-25) ou autre dispositif de ventilation non invasive Chez les grands prématurés, il est difficile d’ex-
(Babyflow® Dräger, Infant Flow System®, Medijet®) clure tout risque trachéobronchique et les expéri-
• Canules de Guedel
mentations animales ont mis en évidence que l’ap-
• Oxymètre de pouls (de préférence avec logiciel Masimo®
SET) avec capteurs pour nouveau-nés
plication de quelques insufflations manuelles à
• Respirateur néonatal avec circuit à usage unique et filtre volume important peuvent suffire à créer des lé-
bactérien (échangeur hygroscopique pour nouveau-né) sions pulmonaires très importantes [3]. Il a été
Perfusion également montré que la FiO2 obtenue avec un
• Cathéters courts de diamètre G24 (0,55 mm) ou G22 ventilateur manuel de type Ambu® était très dé-
(0,70 mm) pendante du débit et de la fréquence utilisée [10].
• Flacons de 250 mL de formule préparée de glucosé à 10 %
Cela amène à recommander l’adjonction au venti-
avec électrolytes
• Sparadrap autocollant transparent, compresses,
lateur manuel, d’un système permettant un
désinfectant type chlorhexidine contrôle visuel continu de la pression d’insufflation
• Seringues (2,5 et 10 mL), aiguilles, robinets à trois voies, lors de la ventilation manuelle en salle de nais-
sérum physiologique en ampoules sance. Il pourrait également être intéressant de
• Pousse-seringue électrique avec seringue de 50 mL et pouvoir mesurer le temps d’insufflation et le vo-
prolongateur lume courant insufflé.
• Flacon de Dextrostix® ou BM test glycémie 20-800 RF®,
Chez le grand prématuré, l’un des objectifs ma-
avec lancettes
• Plateau à cathétérisme ombilical, stérile comprenant :
jeurs est de permettre dès la naissance la création
champ stérile troué et autocollant, cathéter veineux d’une capacité résiduelle fonctionnelle suffisante.
ombilical 3,5 CH, robinet à trois voies, bistouri, seringues de Si le nouveau-né grand prématuré n’est pas dé-
5 à 10 mL, aiguilles pompeuses, compresses, une ampoule primé, la mise en place précoce d’une pression
de glucosé à 10 %, une ampoule de bicarbonate semi-molaire positive continue (PPC) [4], (ventilation spontanée
(42 ‰), pince à clamper protégée, pince courbe ou droite,
aiguille montée et porte-aiguille
avec pression expiratoire positive [VS-PEP] ou
Médicaments Continuous Positive Airway Pressure [CPAP]) de 4 à
• Glucosé à 5 et 10 % en ampoules de 10 mL
• Bicarbonate semi-molaire (42 ‰) en ampoules de 10 mL Tableau 3 Attitude pratique en salle de naissance
• Naloxone (Narcan®) (ampoules de 0,4 mg = mL)
• Adrénaline (ampoules 1 mL = 1 mg, à diluer dans 9 mL de
sérum physiologique)
• Glucagon (flacon de 1 mg)
• Flumazénil (Anexate®) (ampoule de 5 mL = 0,5 mg)

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Prise en charge d’un nouveau-né en détresse en salle de naissance et son transport 105

6 cmH2O, par voie nasale (canule uni- ou binari- Ventilation mécanique sur tube
naire) peut éviter d’avoir à recourir d’emblée à endotrachéal
l’intubation endotrachéale [20]. C’est ainsi que
25 % des très grands prématurés peuvent ne pas L’article 9 de l’arrêté du 25 avril 2000 (Journal
être intubés en salle de naissance, même si 35 à officiel) précise que toute salle de naissance doit
45 % d’entre eux nécessitent ultérieurement une pouvoir disposer d’un respirateur adapté au
intubation endotrachéale en réanimation néona- nouveau-né permettant le contrôle continu des
tale une fois confirmée leur maladie respiratoire de pressions d’insufflation et de la teneur en oxygène
type maladie des membranes hyalines [15]. Il est du mélange gazeux administré, muni d’alarme de
également intéressant de proposer, pour les pre- surpression–débranchement. La plupart des respi-
mières insufflations, des temps inspiratoires longs rateurs néonatals sont des découpeurs de flux (Ba-
et des pressions d’insufflation maximale de 25, bylog 2000® Dräger, Stephan® PDG system, Baby-
voire 20 cmH2O, réduites ensuite très rapidement Pac® Sims-Médipréma). Les ventilateurs récents
en dessous de 20 cmH2O. (Babylog 8000® Dräger et VIP® Bird) permettent une
ventilation mécanique plus élaborée et avec moins
Un appareil récent comme le Néopuff® RD900 de risque de baro- ou volotraumatisme grâce à leur
(Fisher Paykel) est intéressant car il est peu encom- monitorage complet (mesure du volume courant) et
brant et permet de ventiler le nouveau-né soit au l’utilisation d’une ventilation synchronisée avec
masque, soit sur tube endotrachéal à partir d’un trigger en volume, mais aussi l’utilisation d’une
débit continu. Il permet de régler par obturation au PPC par canule nasale double (Babyflow® de
doigt le rythme respiratoire et le temps inspira- Dräger). Ils sont préférables pour une ventilation de
toire. Un régulateur permet d’appliquer une PPC plus d’une heure. On attache particulièrement
variable. La pression maximale peut être régulée et d’importance au réglage du temps d’insufflation
limitée. Un manomètre permet également de sur- (TI < 0,35) et au monitorage de l’oxygénation
veiller la pression d’insufflation et la PPC. Il est (SpO2 < 95 % avant 32 semaines d’âge gestationnel).
ainsi probable qu’on puisse limiter les baro- et La disponibilité d’un respirateur permet plus de
volotraumatismes. rigueur pour le réglage des paramètres de la venti-
lation ou de la FiO2 et libère les mains des utilisa-
teurs.
Intubation endotrachéale

Concentration en oxygène du mélange


Il faut choisir le bon calibre de sonde d’intubation administré (FiO2)
(diamètre 2,5 en dessous de 2 kg) et être très
attentif à la position de la sonde d’intubation mise
Depuis plusieurs années [7], le bénéfice de l’utili-
en place par voie nasale (règle du 7 = 7 + le poids, sation de fortes concentrations d’oxygène pour la
pour les enfants de plus de 1000 g). Il est fondamen- réanimation est remis en question. L’oxygène pur
tal d’éviter tout risque d’intubation sélective favoriserait la production de radicaux libres lors de
droite risquant d’entraîner une ventilation, mais la phase de reperfusion tissulaire après la phase
aussi surtout une instillation ultérieure de surfac- hypoxique. Cela aggraverait les dommages cellulai-
tant exogène sélective quand celui-ci est indiqué. res induits par l’ischémie et l’hypoxie. Sans remet-
Parfois, l’intubation n’est réalisable que par voie tre en question le recours à de fortes concentra-
orale (choanes ou fosses nasales étroits chez les tions initiales en oxygène lors de la réanimation
nouveau-nés de très faible poids de naissance) la d’un nouveau-né asphyxique, cette crainte légi-
sonde doit alors être aux lèvres à 6 + 1 cm/kg de time confirme de disposer, dans toute salle de
poids. L’administration prophylactique précoce naissance, d’un oxymètre de pouls et d’installer
(avant M30) d’un surfactant exogène naturel (Curo- précocement le capteur au niveau du membre su-
surf® = 2,5 mL/kg) par une sonde d’intubation à périeur (droit si possible) de l’enfant pour éviter
canal latéral (Vygon®, Abbott®) chez le nouveau-né l’hyperoxie. Il est particulièrement important
prématuré d’âge gestationnel < 28 semaines peut d’éviter de dépasser une SpO2 de 95 % en dessous de
également permettre de diminuer la mortalité et 32 semaines d’âge gestationnel. Pour l’instant,
d’améliorer la qualité de la survie de ces enfants. aucune recommandation officielle n’est allée
L’intérêt du masque laryngé en cas d’échec d’intu- jusqu’à préconiser le recours exclusif à l’air pour la
bation a été décrit chez le nouveau-né à terme. réanimation en salle de naissance, même si plu-
Très peu d’équipes françaises en ont l’expérience. sieurs travaux ont montré ces dernières années que
la ventilation sous air est aussi efficace chez le

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106 J.-L. Chabernaud

nouveau-né asphyxique à terme [19]. Le fait de peuvent avoir une toxicité cérébrale chez le
disposer en salle de naissance d’un respirateur per- nouveau-né, en particulier très prématuré.
met d’ajuster rapidement la FiO2 aux paramètres En ce qui concerne la voie endotrachéale, les
de saturation pour éviter toute hyperoxie qui se- études sont contradictoires et n’incitent pas pour
rait, même pour une durée courte, délétère. l’instant à proposer des doses intrachéales supé-
Actuellement, de nombreux oxymètres de pouls rieures aux doses précédemment recommandées de
utilisent la méthode Masimo® qui a l’avantage, en 0,03 mg/kg (0,3 mL/kg d’une dilution d’une am-
cas d’hypothermie, de faible perfusion locale et de poule de 1 mg d’adrénaline dans 9 mL de sérum
mouvement de l’enfant d’être beaucoup plus fiable physiologique). L’administration de la solution di-
et de fournir quasi constamment une mesure oxy- luée est faite par une sonde descendue le plus bas
métrique d’excellente qualité. possible. Elle est rapidement suivie d’une ventila-
tion en pression positive, idéalement par un respi-
rateur néonatal.
Massage cardiaque externe

Le massage cardiaque externe (MCE) ne s’impose Alcalinisation par le bicarbonate


qu’en cas de grave échec de l’adaptation à la vie semi-molaire (42 ‰)
extra-utérine avec bradycardie profonde secon-
daire à une hypoxémie grave avec la séquence : Elle est devenue aujourd’hui exceptionnelle et in-
hypoxie tissulaire, acidose et diminution de la diquée seulement en cas d’arrêt cardiocirculatoire
contractilité myocardique. Il n’est réellement indi- de plus de cinq minutes (échec des mesures de
qué dans cette situation que lorsque la fréquence réanimation) et/ou d’acidose métabolique sévère
cardiaque reste inférieure à 60/minute après l’ins- (très fréquente par exemple après extraction ur-
tauration d’une ventilation correctement effec- gente pour hématome rétroplacentaire) parfois do-
tuée, en oxygène pur et pendant au moins 30 secon- cumentée (gaz du sang) [14]. Le bicarbonate semi-
des, avec une fréquence autour de 30 à 40/minute molaire (2 à 4 mL/kg) dilué (avec du sérum glucosé
[1]. La méthode la plus efficace est l’utilisation des à 5 %, à la même quantité), est préférentiellement
deux pouces au tiers inférieur du sternum, les deux administré par voie intraveineuse périphérique
paumes des mains et les doigts encerclant le thorax (lentement sur 2 minutes) et seulement après l’éta-
[1,5]. Les rythmes respectifs des compressions et blissement d’une ventilation alvéolaire efficace
de la ventilation sont de 90 compressions pour [8]. La pose d’un cathéter veineux ombilical pour
30 insufflations par minute (soit trois compressions administrer le bicarbonate ne s’impose que dans les
cardiaques pour une insufflation). L’association cas graves, surtout si un accès veineux périphérique
ventilation et MCE nécessite idéalement deux per- est difficile à obtenir rapidement.
sonnes pour une réalisation efficace, sauf si la
sonde d’intubation est déjà reliée au respirateur de
salle de naissance. Le temps de décompression doit Autres produits médicamenteux
être légèrement plus court que celui de la relaxa-
La naloxone (Narcan®), antagoniste des morphini-
tion. Le MCE est interrompu dès que le rythme
ques, est utilisée à la dose de 0,1 mg/kg si un
cardiaque spontané est supérieur à 60/minute.
morphinique, administré à la mère dans les quatre
heures précédant l’accouchement, est responsable
d’apnées et/ou de dépression respiratoire [5]. Ce
Administration d’adrénaline et choix produit est contre-indiqué en cas de toxicomanie
de sa dose maternelle aux opiacés.
L’utilisation du flumazénil (Anexate®), antago-
L’administration d’adrénaline est indiquée lorsque niste des benzodiazépines, à la dose de 0,01 mg/kg
le rythme cardiaque du nouveau-né reste inférieur peut être intéressante en cas de dépression neuro-
à 60/minute après au minimum 60 secondes d’uti- logique (et parfois respiratoire), liée à l’utilisation
lisation associée d’une ventilation efficace et d’un d’un de ces sédatifs chez la mère (automédication
massage cardiaque externe. Les doses utilisées ou protocole anesthésique spécifique).
chez le nouveau-né ont été extrapolées des travaux
réalisés chez l’animal adulte et de constatations
cliniques faites chez l’homme adulte. Actuelle- Choc hypovolémique
ment, il ne paraît pas souhaitable d’augmenter la
dose classique de 0,01 mg/kg par voie intravei- Si l’état de choc est lié à une anémie aiguë (trans-
neuse [5]. En effet, de fortes doses d’adrénaline IV fusion fœtomaternelle par exemple authentifiée

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Prise en charge d’un nouveau-né en détresse en salle de naissance et son transport 107

par la réalisation d’un test de Kleihauer sur le sang intérêt si elle est rapidement réalisable. Ensuite,
maternel), il est logique d’effectuer rapidement un l’enfant est confié à une équipe de réanimation, le
remplissage vasculaire (ou une exsanguino- plus souvent pour un bref séjour, afin de poursuivre
transfusion) avec du culot O Rhésus négatif, CMV la surveillance, les aspirations régulières et la kiné-
négatif sur la base de 10 mL/kg. Sinon, l’albumine sithérapie respiratoire.
humaine (à 20 %) diluée à 10 % (avec du glucosé à
5 %) est souvent préférée encore aujourd’hui en
France, surtout chez le prématuré [6]. Chez le Prévention de l’hypothermie
nouveau-né à terme, le sérum physiologique et réchauffement des grands
(10 mL/kg) est préconisé en première intention
prématurés
[17].
Il est rare d’avoir à utiliser également un ino-
Les tables de réanimation radiantes disposant d’un
trope. Si c’est le cas, on préfère commencer par la
matelas en gel de silicone préchauffé sont très
dopamine. Chez le grand prématuré, celle-ci est
performantes. L’essuyage avec des langes stériles
contre-indiquée en raison de la présence de sulfites
préalablement réchauffés, ainsi que l’installation
dans son solvant et de leur responsabilité dans la
de l’enfant dans un sac transparent en polyéthy-
leucomalacie périventriculaire. On privilégie
lène (par exemple des sacs à congélation) ne lais-
aujourd’hui, même si l’effet est assez lent, l’utili-
sant que le visage libre (ce qui permet tout geste de
sation précoce de l’hémisuccinate d’hydrocorti-
réanimation) sont extrêmement efficaces chez le
sone chez le grand prématuré (1 mg/kg intravei-
prématuré d’âge gestationnel < 28 semaines pour
neuse lente [IVL]) avec troubles hémodynamiques.
diminuer de façon significative les pertes thermi-
ques par évaporation et par convection, mais éga-
lement pour augmenter l’effet du réchauffement
Naissance dans un liquide méconial sur la table de réanimation radiante [21].
La mise en place précoce d’une perfusion péri-
La fréquence de la présence de méconium dans le phérique ou plus rarement d’un cathéter veineux
liquide amniotique à la naissance est estimée à ombilical, en permettant l’administration de subs-
13 %. Dans les années 1970, l’intubation systémati- trats énergétiques (glucosé à 10 %) évite tout risque
que pour aspiration trachéale de tous les enfants d’hypoglycémie et concourt à la réussite du ré-
nés dans un liquide méconial était préconisée. chauffement de l’enfant.
Depuis quelques années, une attitude plus sélec-
tive est proposée à la suite d’un certain nombre
d’études randomisées contrôlées ne montrant Encéphalopathie anoxique du
aucune différence significative entre les nouveau-
nés intubés de façon systématique ou élective pour
nouveau-né à terme et hypothermie
le devenir respiratoire immédiat, la mortalité ou la cérébrale
morbidité neurologique [13,22].
Aujourd’hui, l’aspiration oropharyngée au cours L’hypothermie contrôlée offre un réel espoir théra-
de l’accouchement lors du dégagement de la tête peutique chez le nouveau-né à terme souffrant
du nouveau-né est systématique. Si à la naissance d’encéphalopathie postanoxique [11]. Les résultats
le bébé a des difficultés d’adaptation à la vie encourageants des différentes études pilotes
extra-utérine ou une détresse respiratoire précoce, conduisent aujourd’hui à la réalisation d’essais thé-
une laryngoscopie directe est nécessaire pour aspi- rapeutiques randomisés dans plusieurs pays afin de
rer dans la trachée les sécrétions méconiales avec confirmer l’efficacité de cette technique tout en
une sonde plus grosse (CH 10). En cas de naissance en diminuant les dangers potentiels. Toute hyper-
en état de mort apparente, l’aspiration après intu- thermie iatrogène est ainsi à bannir dès la salle de
bation, et avant toute ventilation en pression posi- naissance.
tive (ventilation au masque contre-indiquée), reste
l’attitude recommandée. En revanche, lorsque le
nouveau-né à terme est en bon état et vigoureux, Éthique en salle de naissance
sans aucun signe respiratoire, il ne faut rien faire et
simplement le surveiller. Après l’intubation, si elle Aujourd’hui toutes les équipes, au niveau national
s’est avérée nécessaire, on s’abstient de tout « la- comme international, admettent que les enfants
vage alvéolaire » qui risquerait d’altérer ou même nés après une anoxie périnatale sévère doivent être
de détruire le surfactant pulmonaire. Une kinési- systématiquement pris en charge dès la naissance
thérapie respiratoire précoce trouve ici tout son quelle que soit l’origine supposée de leur mauvais

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108 J.-L. Chabernaud

état. C’est pour ceux d’entre eux qui vont rester Transport du nouveau-né
dans un état préoccupant que se pose la question
de la durée de la réanimation ou de son arrêt
éventuel. Ces questions se posent également pour Actuellement, lorsqu’il est possible et non
les enfants nés à la limite de la viabilité ou avec un contre-indiqué, le transfert maternel (transfert
très faible poids de naissance, et en cas de nais- in utero) vers un centre périnatal de type III ou
sance d’un nouveau-né malformé dont l’anomalie IIb selon les cas, est privilégié. En effet, de
n’avait pas été découverte en anténatal [9]. meilleurs résultats aussi bien en termes de mor-
talité que de morbidité et de séquelles à long
La salle de naissance n’est pas un lieu approprié terme sont rapportés après transfert du
pour résoudre les problèmes liés à ces dilemmes nouveau-né « in utero » par rapport au transfert
éthiques. C’est plutôt un lieu de vie que de fin de après la naissance, en cas de risque de nais-
vie. Par ailleurs, l’urgence ne permet pas de pren- sance très prématurée. Le transfert maternel
dre des décisions dans les meilleures conditions car évite également de séparer la mère de son
l’équipe médicale est souvent limitée et a peu de enfant qui vient de naître. Pour le nouveau-né à
moyens pour préciser rapidement un diagnostic in- terme ou proche du terme, le transfert postna-
certain ou porter un pronostic précis. De plus, les tal n’est pas toujours prévisible et évitable.
parents, ne sont pas préparés et n’ont le plus
souvent pas eu le temps de connaître leur bébé.
Organisation du transfert
La décision de fin de vie est envisageable dans
quelques cas précis : En cas de pathologie néonatale, le pédiatre de
• cessation de traitement en cas de naissance en maternité prend la décision soit de surveiller l’en-
état de mort apparente à terme sans récupéra- fant auprès de sa mère, si toutes les conditions de
tion stable au-delà de 20 minutes de gestes de sécurité sont réunies (personnel compétent et ma-
réanimation immédiatement mis en œuvre et tériel sur place) pour cela, soit au contraire de le
bien conduits ; transférer en milieu spécialisé. Le transfert d’un
• abstention de traitement quand un diagnostic nouveau-né est ainsi indiqué si son état réclame des
prénatal, déjà établi, s’avère tout aussi péjo- soins, une surveillance ou des investigations qui ne
ratif (voire plus péjoratif dans certains cas) peuvent être réalisés dans la maternité où il est né.
après la naissance ; Quelles que soient les circonstances, le transport
• limitation de traitement en cas de mauvaise du nouveau-né ne s’improvise pas. Dès l’appel for-
adaptation à la vie extra-utérine aux limites mulé par le pédiatre de la maternité à la régulation
extrêmes de la viabilité. du Samu départemental débute l’organisation de la
Le plus souvent, et surtout dans les situations les prise en charge de ce nouveau-né, de la maternité
plus incertaines, c’est le principe de la réanimation où il est né jusqu’à son arrivée dans le service
d’attente qui doit être respecté : l’enfant bénéficie spécialisé récepteur. Le service d’accueil est choisi
de traitements immédiats et appropriés puis est en fonction de la pathologie du nouveau-né, des
transféré sans aucune discontinuité de prise en places disponibles à proximité du domicile de ses
charge dans une unité de réanimation néonatale où parents, en évitant les transferts triangulaires. Le
une évaluation complète et documentée permet moyen de transfert est choisi en fonction de la
secondairement de prendre une décision collégiale, gravité de la pathologie motivant le transfert. Le
après entretien avec les parents. transfert est confié à une équipe de transport médi-
calisée (Smur pédiatrique) si l’état de l’enfant
reste grave ou instable au décours de la réanima-
tion initiale. Dans le cas contraire, l’enfant est
transféré par une ambulance paramédicalisée sous
Surveillance après la prise en charge
la surveillance d’une infirmière-puéricultrice ou
d’une infirmière formée à la néonatologie, avec un
Tout nouveau-né ayant nécessité des gestes de équipement adapté. Ce type de moyen de transport
réanimation doit être surveillé au moins 24 heures peut suffire pour les enfants atteints d’une patho-
dans un service de soins intensifs ou de réanimation logie stable ou pour un trajet de courte durée.
néonatale selon la gravité de la situation initiale et L’un des grands principes du transport néonatal
des gestes réalisés. Cela peut être dans le même reste la mise en condition préalable, la plus com-
site, ce qui évite la séparation mère–enfant, ou plète possible, du nouveau-né sur place, possible,
nécessiter un transfert médicalisé dans un centre en stabilisant les grandes fonctions vitales avant le
spécialisé. départ. L’utilisation d’un module pédiatrique com-

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Prise en charge d’un nouveau-né en détresse en salle de naissance et son transport 109

pact, rassemblant tous les appareils nécessaires, l’échangeur hygroscopique (« nez artificiel »). Il a
facilite la réalisation de cet objectif, ainsi qu’une l’avantage de simplifier grandement les circuits du
surveillance adaptée pendant toute la durée du respirateur. Tout épanchement gazeux liquidien
transport. est évacué avant la mise en route du transfert
(exsufflation pleurale ou drainage pleural, com-
Stabilisation des grandes fonctions vitales plété par l’installation d’une valve antiretour ou
avant le transport d’un dispositif de recueil à usage unique).

Réchauffement Apports hydriques et métaboliques


Il est réalisé au mieux par l’installation dans un La recherche et la correction de l’hypoglycémie
incubateur radiant avec servocontrôle de la tempé- complète les apports glycémiques et hydriques à
rature par sonde thermique. Chez le très grand débit constant et contrôlé (pousse-seringue électri-
prématuré, un bonnet en jersey et la mise précoce que autonome) sur une voie périphérique (cathéter
dans un sac en polyéthylène permettent de préve- G24 ou G22) ou exceptionnellement par un cathéter
nir l’hypothermie. La diminution des manipulations veineux ombilical (calibre 3,5). Il est exceptionnel
du nouveau-né dans l’incubateur, la limitation de d’avoir à réaliser la poursuite de l’alcalinisation par
l’examen clinique, l’utilisation d’un monitorage du bicarbonate semi-molaire dilué.
non invasif, une housse autour de l’incubateur et un
chauffage efficace de la cellule sanitaire de l’am- Hémodynamique centrale et périphérique
bulance de réanimation peuvent efficacement La surveillance de la fréquence cardiaque et de la
compléter ces mesures. pression non invasive sur le moniteur multiparamé-
trique, l’évaluation de l’hémodynamique périphé-
Oxygénation et ventilation rique (temps de recoloration cutanée) et le recueil
La détresse respiratoire est la principale cause de de la diurèse (sauf chez le très grand prématuré)
transfert. Ainsi environ 60 % des nouveau-nés sont complètent la surveillance.
en ventilation mécanique au cours du transport. La
ventilation non invasive est également de plus en Sédation–analgésie et confort
plus utilisée. Le nouveau-né transporté ne doit L’installation de l’enfant sur un matelas en gel,
présenter ni hypoxie (saturation < 85 %), ni hype- ainsi que l’utilisation autour de la tête de coussins
roxie (saturation > 95 % et TcPO2 > 75 mmHg), ni en gel permettent de réduire les contraintes de
recevoir des constantes de ventilation mécanique l’installation et de préserver au mieux le confort au
agressives (baro- ou volotraumatisme). Les appa- cours du transfert. Tous les gestes de mise en
reils de ventilation mécanique néonatals récents condition et en particulier l’intubation endotra-
permettent d’atteindre cet objectif. Pour certai- chéale et la ventilation mécanique s’accompagnent
nes pathologies sévères, il est préférable de dispo- de mesures de sédation–analgésie en recourant de
ser d’un ventilateur performant permettant une plus en plus aux dérivés morphiniques.
ventilation synchronisée et différents modes de
ventilation (ventilation assistée contrôlée [VAC], Asepsie des gestes et des procédures
ventilation assistée contrôlée intermittente Le lavage des mains et des avant-bras, une casaque
[VACI]). Les appareils de monitorage multiparamé- spécifique pour chaque nouveau-né et l’utilisation
triques permettent de bien surveiller la saturation d’un masque pour tous les gestes invasifs et rappro-
par oxymétrie pulsée ; il peut être intéressant de chés sont indispensables. Du matériel à usage uni-
surveiller aussi la PO2 et la PCO2 transcutanées et que est utilisé pour toute mise en condition respi-
parfois le CO2 expiré (système «mainstream » près ratoire (circuits de ventilation jetables) ou
du cobb de la sonde d’intubation). Il peut être vasculaire invasive.
nécessaire d’administrer du surfactant exogène
soit de façon préventive, avant 28 semaines d’âge Dossier de transfert
gestationnel, ou en curatif devant une FiO2 élevée
(> 40 %) dans le cadre d’une pathologie du surfac- Le pédiatre de maternité réunit les données obsté-
tant. L’administration de monoxyde d’azote inhalé tricales et constitue le dossier pédiatrique qu’il
avant et au cours du transfert en raison de l’exis- confie au médecin transporteur. Le dossier de
tence d’une hypertension artérielle pulmonaire transfert contient le maximum de renseignements
persistante doit pouvoir être réalisée à condition anamnestiques sur la grossesse, l’accouchement et
que la concentration puisse être mesurée en toute la naissance du nouveau-né transféré. Le médecin
sécurité. L’un des meilleurs moyens de réchauffer responsable du transfert rédige une observation
et d’humidifier les gaz inspirés est actuellement médicale (en trois exemplaires) rassemblant les

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110 J.-L. Chabernaud

renseignements administratifs, médicaux, la mise vant. Le père ressent une impression d’impuissance
en condition déjà effectuée, les compléments ef- et d’inutilité. Il est souvent désorienté, a du mal à
fectués, le déroulement du transport et l’orienta- se situer par rapport à sa femme, sa famille, son
tion diagnostique proposée. Un exemplaire de enfant malade, les médecins. Le rôle de l’équipe
celle-ci, ainsi que le sang de la mère (10 mL sur médicale de chaque maternité et du médecin trans-
tube sec et 5 mL sur tube avec anticoagulant), le porteur du Smur pédiatrique est de s’entretenir
placenta (surtout en cas de retard de croissance avec les parents, de les informer des raisons et du
intra-utérin, de souffrance fœtale inexpliquée ou lieu du transfert (dont on indique les coordonnées)
de contact infectieux) sont remis au service desti- en évitant toutes paroles blessantes ou traumati-
nataire. L’autorisation d’opérer, essentiellement santes (« souffrance fœtale », « état de mort
en cas de problème chirurgical est signée par les apparente »). À cette occasion, les parents vont
parents avant le transfert. parfois demander une estimation globale du pro-
nostic et des précisions sur les gestes thérapeuti-
Dernier contact avec le service d’accueil ques. Le rôle du pédiatre de maternité et du méde-
cin transporteur est alors de leur fournir des
Avant le départ, le médecin transporteur, au cours renseignements prudents, tout en trouvant des pa-
d’un échange téléphonique avec l’unité d’accueil roles apaisantes pour répondre aux questions
expose l’état de l’enfant et sa mise en condition, concernant le risque vital immédiat ou de séquelles
discute l’indication d’un certain nombre de théra- ultérieures. Il est fondamental de s’efforcer que la
peutiques (antibiotiques, remplissage vasculaire, mère voie et touche son bébé avant son départ. Une
éventuelle alcalinisation...) ou de la mise en jeu de photographie à développement instantané ou nu-
techniques exceptionnelles (ventilation à haute mérique est laissée aux parents. Tous ces moyens
fréquence ou par oscillation, monoxyde d’azote permettent de préserver au mieux la relation mè-
inhalé, assistance respiratoire extracorporelle...), re–enfant et d’atténuer les effets de la séparation
voire propose avant l’accueil dans l’unité de réani- liée au transfert. Ainsi peut s’instaurer le début
mation ou de spécialité la réalisation d’examens d’un dialogue qui se poursuit avec l’équipe du
complémentaires (échocardiographie, examen to- service de néonatologie qui prend en charge l’en-
modensitométrique...). fant après son transfert.

Au cours du transport Conclusion


L’équipe médicalisée assure le maintien de toutes La réanimation du nouveau-né en salle de naissance
les mesures thérapeutiques mises en route et la repose de plus en plus sur la réanimation respira-
surveillance de l’état de l’enfant. Le confort et la toire. De nombreux progrès ont déjà eu lieu pour
régularité priment sur la rapidité : le transport ne affiner la qualité de la ventilation manuelle. Il est
doit pas être une agression supplémentaire. L’héli- probable que dans les années à venir elle soit
coptère exigu et souvent générateur de vibrations progressivement remplacée par une utilisation plus
nocives n’est utilisé que pour certaines distances large de la ventilation non invasive ou mécanique
ou en raison de certaines conditions météorologi- avec des appareils de plus en plus précis dans le
ques particulières. L’absence d’hélistations dans domaine des pressions, de la fréquence, de la FiO2,
beaucoup de centres hospitaliers généraux ou uni- ainsi que des volumes courants. La place du mas-
versitaires n’en facilite pas l’utilisation. sage cardiaque externe et de l’utilisation de pro-
duits médicamenteux se restreint de plus en plus.
Information et accompagnement Il est aujourd’hui fondamental que tous les inter-
des parents venants de la salle de naissance aient reçu une
formation initiale de qualité, régulièrement réac-
Les parents dont l’enfant est en détresse vitale tualisée. En France, les actions nationales de for-
dans la période néonatale, vivent des moments de mation effectuées par la Fédération nationale des
très grande angoisse. La mère, souvent meurtrie pédiatres néonatologistes (FNPN) auprès des équi-
physiquement (césarienne, séjour en réanimation pes impliquées en salle de naissance ont été orga-
et traitements agressifs divers) éprouve un senti- nisées dans le cadre du plan gouvernemental de
ment d’échec personnel et de culpabilité. Elle res- périnatalité de 1994. Elles ont permis de favoriser
sent une certaine culpabilité à propos de son accou- la diffusion de bonnes pratiques en matière de
chement prématuré et/ou de la maladie de son réanimation à la naissance dans tout le pays.
bébé, dont elle est séparée dès la naissance et Celles-ci doivent être régulièrement mises à jour et
qu’elle ne peut pas investir en tant qu’enfant vi- disponibles sous forme de protocoles écrits dans

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Prise en charge d’un nouveau-né en détresse en salle de naissance et son transport 111

toutes les maternités. Ceux-ci doivent faire partie [11] Edwards AD, Wyatt JS, Thoresen M. Treatment of
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