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Economies, sociétés,
civilisations
Crouzet Michel. Aspects nouveaux de l'analyse du romantisme. In: Annales. Economies, sociétés, civilisations. 20ᵉ année, N.
3, 1965. pp. 476-489;
doi : https://doi.org/10.3406/ahess.1965.421290
https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1965_num_20_3_421290
DE L'ANALYSE DU ROMANTISME
LAl'École
critique
d'Antioche,
littéraire de
livrée
nos àjours
l'étude
semble
grammatico-historique
reproduire l'opposition
du texte
entre
sacré, et l'École d'Alexandrie qui, selon la méthode allégorique, distingue
dans l'Écriture le contenu charnel, le contenu moral, le contenu spirituel.
D'une part la critique dite « universitaire », de l'autre la critique dite
« structurale », ou « idéologique », c'est-à-dire « rattachée plus ou moins,
mais en tout cas d'une façon consciente, à l'une des grandes idéologies
du moment x ». Ou encore : d'un côté les positivistes, qui croient au
déterminisme du texte, et de l'autre ceux qui pratiquent une analyse
immanente de l'ouvrage, de ses thèmes et de ses fonctions. Toujours se
distinguent ceux qui évoluent plus ou moins à l'extérieur, et ceux qui
s'installent à l'intérieur de l'œuvre, et de son sens.
A quelle école appartient l'ouvrage de В.. Girard 2 dont nous rendons
compte ici ? Comme tous les livres courageux et neufs, il bouleverse
sans doute les classifications et les modes ; cette tentative d'une
phénoménologie du roman, fondée sur la saisie d'une « structure dynamique
se déployant d'un bout à l'autre de la littérature romanesque » ne tient
aucun compte des frontières de l'histoire littéraire, et de son « postulat
d'analogie ». Mais cette étude d'une structure est une étude du signifié,
du message spirituel du roman pour nous, dans la mesure où il nous parle
de notre vie, de notre mort, de nos valeurs. Le roman semble à Girard
directement en prise sur des problèmes de valeurs, il est à, la fois le récit
et la récompense d'une métamorphose spirituelle, chute et conversion
au vrai. « La création littéraire, dit Girard, est un rapport humain » ». Et
encore : « l'esthétique dans le roman génial ne constitue plus un royaume
distinct ; elle rejoint l'éthique et la métaphysique... le souci fondamental
du romancier n'est pas la création de personnages, c'est la révélation du
désir métaphysique... ». Le roman découvre et communique (n'est-il pas
la seule vraie communication intersubjective ?) des vérités sur l'existence.
1. Roland Bakthes, Essais Critiques, p. 245.
2. Mensonge romantique et vérité romanesque, Paris, Grasset, 1961.
3. In Critique, n° 205, « Racine, poète de la gloire ».
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vanité par son intensité ; romancier il saisit mieux que la passion connaît
son objet, et que la vanité est la plus intense des passions ; la pensée
originale de Stendhal « est roman et n'est que roman ». De même Proust
est un symboliste et un snob guéri. En devenant romancier, l'écrivain
met en question son romantisme, et se convertit : « le salut de l'homme
et du romancier ne se distinguent pas » (p. 268). Le romancier ne se
confond jamais avec ses personnages : il traque en eux, et en lui, grâce à
eux, le médiateur caché, et la vérité de son désir. De là de très belles
notations sur la passion stendhalienne, et sur le rôle du « Temps Retrouvé »
qui enfin dénonce l'imbrication infernale « du rêve et de la rivalité ».
L'émotion qui naît de l'afflux du temps échappe au médiateur ; le moi
ressuscite tel qu'il fut avant de s'être choisi semblable à l'Autre ; la vérité
naît de l'oubli de l'emprunt, et de l'investiture de l'Autre. Le romancier
de même ne saurait s'engager, sans retomber dans le manichéisme
romantique ; il refuse la scission avec l'Autre, il sait que les « rivalités
idéologiques ne doivent leur pouvoir qu'à l'appui secret que se fournissent
les contraires » (p. 142).
1. Nous ne pouvons insister sur de très belles notations de Girard concernant par
exemple la métaphore proustienne (pp. 82-84), sur « l'exception et la règle » dans le
roman stendhalien ; sur le rôle du narrateur omniscient chez Proust et chez Dostoievski,
et ses différents substituts.
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1. Sur Hegel, voir encore pp. 115, 137, 165, 286 ; but le marxisme, p. 225.
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Michel Grouzet.
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