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Psychologie du développement, par R. Miljkovitch, F. Morange-Majoux


et E. Sander, 2017, 528 pages.
Le développement du bébé de la vie fœtale à la marche, par E. Devouche
et J. Provasi, 2019, 328 pages.
Médecine et santé de l’adolescent, par P. Gerardin, B. Boudailliez et P. Duverger,
2019, 504 pages.
Le développement psychique précoce. De la conception au langage, par B. Golse,
collection « Médecine et psychothérapie », 2014, 360 pages.
Le Développement affectif et cognitif de l’enfant, 5e édition, par B. Golse,
collection « Médecine et psychothérapie », 2015, 368 pages.
Enfance et psychopathologie, 11e édition, par D. Marcelli et D. Cohen,
collection « Les âges de la vie », 856 pages.
Adolescence et psychopathologie, 9e édition, par D. Marcelli, A. Braconnier
et L. Tandonnet, collection « Les âges de la vie », 2018, 944 pages.
Petite enfance et psychopathologie, par A. Guédeney, collection « Les âges
de la vie », 2014, 312 pages.
L’attachement : approche théorique et évaluation, 5e édition, par N. Guédeney,
A. Guédeney et S. Tereno, collection « Les âges de la vie », 2021, 371 pages.
L’attachement : approche clinique et thérapeutique, 5e édition, par N. Guédeney,
A. Guédeney et S. Tereno, collection « Les âges de la vie », 2021, 432 pages.
Psychopathologie transculturelle, 2e édition, par T. Baubet et M. R. Moro,
collection « Les âges de la vie », 2013, 304 pages.
Échelles et questionnaire d’évaluation chez l’enfant et l’adolescent, par M. Bouvard,
collection « Psychologie », volume 1 : 2008, 192 pages, volume 2 : 2008,
200 pages.

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Collection Médecine et psychothérapie

Guide pratique de sémiologie


en pédopsychiatrie
Mugisho Nfizi Koya
Pédopsychiatre,
médecin assistant et responsable thérapeutique à l’Office médico-pédagogique,
département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse de Genève

Préface du Professeur Bernard Golse

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Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie, 1re édition, de Mugisho Nfizi Koya.


© 2022 Elsevier Masson SAS
ISBN : 978-2-294-77794-3
e-ISBN : 978-2-294-77817-9
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Préface
Je suis très touché que Mugisho Nfizi Koya m’ait invité à écrire la préface de
son Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie, non seulement parce qu’il
s’agit d’un ouvrage extrêmement intelligent sur le plan clinique, théorique
et thérapeutique, mais aussi parce que cet écrit vient à point nommé à un
moment où la pédopsychiatrie vit l’une des crises les plus profondes de son
histoire.
Formé en France, Mugisho Nfizi Koya a la chance de travailler depuis 2017 à
l’Office médico-pédagogique (OMP) du département d’instruction publique
de la formation de la jeunesse à Genève et il a été profondément marqué
par les positions théorico-cliniques de l’École genevoise, singulièrement par
celles de mon collègue et ami, le Pr Francisco Palacio-Espasa.
C’est évidemment une grande chance qu’il a eue et cette influence se
reflète à l’évidence dans ce travail qui promet d’être utile à tous, et tout
particulièrement à nos plus jeunes collègues en formation.
Mugisho Nfizi Koya nous montre en effet à quel point la démarche diag-
nostique ne saurait être réduite à un simple temps d’évaluation descriptive
comme voudrait nous le faire croire le contexte ambiant.
L’étape diagnostique – en pédopsychiatrie comme en psychiatrie générale
– vaut déjà par elle-même comme un temps de la rencontre entre le patient
et le clinicien et nous devons résister à tout clivage entre une clinique de
l’instant (celle de l’évaluation) et une clinique de l’histoire (celle du soin
psychique).
Les centres hospitalo-universitaires comme celui où je travaille surinves-
tissent clairement l’évaluation au détriment du soin, et nous ne pouvons
évidemment que le regretter amèrement.
En préface de cet ouvrage, je souhaiterais donc attirer l’attention du
lecteur sur la crise actuelle de la pédopsychiatrie française, sur les risques
qui pèsent lourdement sur le concept même de psychopathologie, et sur
les conséquences néfastes de la coupure qui s’aggrave aujourd’hui entre la
pédopsychiatrie et ses racines psychanalytiques.

La crise actuelle de la pédopsychiatrie française


À l’occasion du 50e anniversaire du centre Alfred Binet, un hommage a été
rendu en décembre 2018 à quatre fondateurs de la psychiatrie de l’enfant
qui ont initié et/ou accompagné l’aventure du 13e « Enfants », à savoir :
Serge Lebovici, René Diatkine, Colette Chiland et Myriam David.
J’ai eu l’honneur d’introduire la matinée de ce colloque émouvant et donc
de dire quelques mots d’ouverture qui m’ont permis de rappeler ma double

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XII

dette professionnelle personnelle vis-à-vis de Michel Soulé tout d’abord, et


vis-à-vis de Serge Lebovici ensuite.
Quoi qu’il en soit de ce privilège incontestable que j’ai eu de m’inscrire,
professionnellement parlant, dans cette double filiation prestigieuse, ce col-
loque a donné aux uns et aux autres l’opportunité de réfléchir à la crise que
traverse actuellement la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, crise dont
les racines sont certainement multiples et dont les effets n’ont pas certes pas
fini, hélas, de se faire sentir.
Cette crise est suffisamment sensible pour avoir fait l’objet, assez récem-
ment, d’un rapport d’information1 effectué – au nom de la mission d’infor-
mation du Sénat sur la situation de la psychiatrie de mineurs en France –
par Alain Million et Michel Amiel (rapport n° 494 enregistré à la présidence
du Sénat le 4 avril 2017), document pour la rédaction duquel nombre
de professionnels ont été auditionnés, parmi lesquels Marie Rose Moro et
moi-même.
La pédopsychiatrie est actuellement sinistrée, ce que les pouvoirs publics
ont enfin reconnu et ce que même les psychiatres d’adultes admettent
désormais comme dommageable.
Avec Marie Rose Moro, ma collègue et amie, nous avons publié en 20182
une tribune dans le journal Libération pour alerter l’opinion publique, tri-
bune intitulée « La pédopsychiatrie ne veut pas mourir ».
En France, il ne s’agit pas seulement d’une question de moyens (même si
ce point est essentiel) mais aussi d’une déroute quant à l’organisation des
dispositifs (obsédés par la problématique des troubles neurodéveloppemen-
taux) et plus encore d’une crise des vocations et des différentes étapes de la
formation au métier de pédopsychiatre qui est pourtant l’un des plus beaux
métiers du monde…

La psychopathologie ou les psychopathologies


Depuis 2014, j’assure la présidence de l’Association européenne de psycho-
pathologie de l’enfant et de l’adolescent (AEPEA), tâche à laquelle j’accorde
la plus grande importance et à laquelle je consacre donc beaucoup de temps
et d’énergie.
C’est en effet une manière pour moi de me battre pour tenter de faire
prévaloir dans le champ des troubles mentaux un modèle polyfactoriel
qui tienne compte à la fois des déterminants internes (endogènes) et des
déterminants externes (exogènes) du développement psychique et de ses
troubles.

1. https://www.senat.fr/rap/r16-494/r16-4941.pdf
2. Golse, B. et Moro, M. R. (2018). La pédopsychiatrie ne veut pas mourir ! Libéra-
tion, n˚ 11459, 30 mars 2018, p. 22.

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XIII

La vision des troubles mentaux en général – mais en particulier ceux de


l’enfant et de l’adolescent – se trouve en effet écartelée aujourd’hui entre
deux pôles diamétralement opposés.
En effet, ces troubles sont considérés soit comme de nature purement
endogène et quasi neurologique, soit comme de nature purement exogène,
d’origine traumatique ou réactionnelle, et de ce fait la pédopsychiatrie se
voit aujourd’hui menacée d’un éclatement entre une composante biolo-
gique (ou neurobiologique) et une composante sociale (éventuellement
médico-sociale).
Le défi de la psychopathologie (dans toutes ses composantes) est, à
l’inverse, de tenter de nouer, d’intriquer, de tresser ensemble les détermi-
nants internes et les déterminants externes de ces différents troubles afin de
travailler à leur interface et de pouvoir ainsi pouvoir aboutir à un diagnostic
structural et à une stratégie thérapeutique spécifiques de chaque patient.
Un médecin peut, hélas, aujourd’hui terminer ses études de médecine
sans avoir même entendu le terme de « psychopathologie » sauf s’il se des-
tine à la psychiatrie ou à la pédopsychiatrie… et encore, je n’en suis pas
absolument certain !
La psychopathologie continue certes à être enseignée dans les facultés de
psychologie, mais il importe tout de même de souligner que ce concept de
psychopathologie est aujourd’hui en grand danger, comme s’il était défini-
tivement obsolète et à ranger, sans hésitation aucune, au rayon des acces-
soires démodés.
Ceci est plus que regrettable car, à bien y réfléchir, le concept de psycho-
pathologie demeure d’une modernité épistémologique impressionnante.
La psychopathologie n’est pas seulement psychanalytique même si c’est
celle-ci qui est la plus ancienne et la plus approfondie à l’heure actuelle.
Il existe également, on le sait désormais, une psychopathologie atta-
chementiste, une psychopathologie cognitive, une psychopathologie sys-
témique, une psychopathologie développementale et même une psycho-
pathologie transculturelle (M. R. Moro), d’où la nécessité d’un véritable
plaidoyer pour parler des psychopathologies au pluriel et non pas de la
psychopathologie au singulier.
Se référant par essence à un modèle polyfactoriel (inférentiel et fondé sur
une temporalité circulaire qui inclut les effets de l’après-coup), la psychopa-
thologie ménage par ailleurs tout naturellement en son sein une place pour
une causalité épigénétique dont l’avènement est d’ores et déjà prévisible
dans des délais relativement proches.
Il est donc indispensable que nos collègues les plus jeunes et ceux qui
sont encore en cours de formation puissent avoir accès à une démarche
diagnostique dynamique et structurale seule à même de leur éviter une pra-
tique opératoire, monotone, purement descriptive, linéaire et finalement
assez peu créative.

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XIV

D’où l’importance à mes yeux de l’Association européenne de psycho-


pathologie de l’enfant et de l’adolescent (AEPEA) qui est une association
scientifique dont l’objectif est de valoriser l’axe psychopathologique de la
pratique et de la réflexion théorique en matière de psychologie et de psy-
chiatrie du bébé, de l’enfant et de l’adolescent.
Fondée en 1996 par Michel Soulé et Pierre Ferrari ainsi que par Graziella
Fava-Vizziello, elle vise à faire connaître bien sûr les travaux les plus récents
et les avancées scientifiques dans le domaine de la psychopathologie du
bébé, de l’enfant et de l’adolescent, à promouvoir la recherche pluridis-
ciplinaire, internationale en matière en matière de psychopathologie, mais
aussi à faciliter des collaborations dans ce domaine.
Elle rassemble une dizaine de sections nationales et son activité va crois-
sant comme le lecteur pourra aisément s’en rendre compte en consultant le
site internet www.aepea.org.
En 2014, Stanghellini et Broome, éditorialistes du British Journal of Psy-
chiatry3 – ce qui n’est pas rien ! – prenaient clairement position en affirmant
que la psychopathologie devrait constituer « le cœur de la psychiatrie » et
que son enseignement devrait être un passage obligé de la formation des
professionnels de la santé mentale ainsi qu’un « élément clé » partagé par
les cliniciens et les chercheurs dans ce domaine.
Pour ces auteurs, ce primat de la psychopathologie s’impose pour « au
moins six raisons » :
• la psychiatrie représente une discipline « hétérogène » et puisque
l’approche des professionnels est d’origine multiple (psychanalyse, compor-
tementalisme, neurosciences, sociologie, etc.), il est donc indispensable de
pouvoir disposer d’un « terrain d’entente et d’un langage comparable ».
Pour des cliniciens aux conceptions théoriques variées, la psychopatholo-
gie est susceptible d’offrir un tel dénominateur commun permettant une
compréhension mutuelle de troubles mentaux ;
• le recours à la psychopathologie demeure « largement utile » en présence
de définitions des maladies mentales reposant sur des symptômes et des
« éprouvés singuliers subjectifs » et non sur des bases précises garanties par
les neurosciences ;
• la psychopathologie peut être conçue comme un « pont » entre les
sciences humaines et la clinique, comme la « boîte à outils » de base don-
nant « un sens à la souffrance psychique » ;
• la psychiatrie abordant la « subjectivité humaine anormale », la psycho-
pathologie tente de définir ce qui est anormal et de saisir les éléments de la
vie psychique normaux dans un contexte de maladie mentale ;

3. Stanghellini, G., et Broome, M. R. (2014). Psychopathology as the basic science


of psychiatry. British Journal of Psychiatry, 205 (3), 169-170.

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XV

• la psychiatrie doit prendre soin d’un sujet en difficulté, « et non le juger,


le marginaliser, le punir ou le stigmatiser ». Dans cette perspective, la psy-
chopathologie fait précisément le lien entre la compréhension et la prise en
charge thérapeutique, en s’efforçant d’établir à cette fin une trame « à la fois
éthique et méthodologique » ;
• la psychiatrie enfin cherche un moyen de rapprocher l’expérience
subjective individuelle du fonctionnement cérébral et la psychopathologie
ouvre un passage entre la compréhension et l’étiologie, pour la recherche et
pour la clinique.
Une part au moins des difficultés existant actuellement pour établir une
psychiatrie étayée sur les neurosciences semble provenir d’une « connais-
sance insuffisante de la psychopathologie » et, de ce fait, un savoir fon-
damental dans ce domaine constitue une « condition préalable » à une
démarche explicative à même de donner « une nouvelle impulsion à
une psychiatrie biologique ».
Ces auteurs jugent donc nécessaire d’accorder une place centrale à la
psychopathologie afin de pouvoir « réaliser l’ambition » des psychiatres
d’apporter un éclaircissement sur les maladies mentales.
Même si l’on peut discuter tel ou tel terme de cette déclaration utilement
tonitruante, il faut saluer leur courage conceptuel en opposition avec la
pensée unique du moment et, personnellement, je m’associe bien évidem-
ment sans réserve aucune à cette position qui me paraît aujourd’hui de plus
en plus vitale pour l’avenir de la psychiatrie et de la pédopsychiatrie.
Sans psychopathologie, point de salut !
Et je le répète, la psychopathologie ne se résume pas, tant s’en faut, à la
psychopathologie psychanalytique.

La coupure d’avec la psychanalyse


La crise de la pédopsychiatrie est de toute évidence pluri-déterminée, mais
la crise de la psychanalyse y ajoute une dimension de gravité inédite en
constituant un germe de dangers plus que préoccupants.
On peut même se demander si la crise de la pédopsychiatrie et la crise de
la psychanalyse ne représentent pas au fond les deux aspects d’une seule et
même crise4.
Chacun sait bien aujourd’hui la virulence des attaques envers la psycha-
nalyse dans le champ de l’autisme.
Mais ces attaques vont en réalité bien au-delà, dans la mesure où elles visent
en fait, plus profondément, le soin psychique en général, voire les sciences
humaines dans leur ensemble, sciences humaines dont la psychanalyse fait

4. Golse, B. (2017). Pédopsychiatrie et psychanalyse – Une seule et même crise.


Perspectives Psy, 56, 4, 299-302.

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XVI

évidemment partie, ce qui est lourd de danger pour la liberté de penser tout
simplement…
Quels sont alors les liens entre la crise de la pédopsychiatrie et celle de la
psychanalyse ?
En repensant au colloque du 50e anniversaire du centre Alfred Binet
évoqué ci-dessus, l’idée me vient en effet que la pédopsychiatrie souffre
aujourd’hui de l’abandon progressif de ses fondements psychanalytiques.
• La première génération de pédopsychiatres français a jeté les bases de
cette discipline (la génération des fondateurs célébrés dans ce colloque).
• La deuxième génération a transmis ce socle initial de connaissances aux
médecins, aux psychologues et autres professionnels impliqués dans le
champ de l’enfance.
• La troisième génération enfin, celle d’aujourd’hui, se trouve désormais
en mal d’identité car notre modèle pédopsychiatrique a la tentation de se
calquer sur un modèle purement médical (monofactoriel, déductif et référé
à une temporalité linéaire) en abandonnant le modèle psychopathologique
(polyfactoriel, inférentiel et référé à la temporalité circulaire de l’après-coup).
Pourtant, dans le champ de la psychiatrie et de la pédopsychiatrie, si nous
renonçons à comprendre, c’est-à-dire à donner du sens, alors nous ouvrons
un boulevard aux traitements psychotropes linéaires et monotones, nous
nous privons de toute analyse psychopathologique complexe mais fas-
cinante, et nous laissons libre champ à notre masochisme fondamental.
Ce n’est pas seulement l’existence d’une psychiatrie et d’une pédo-
psychiatrie authentiques qui se trouve, ici, mise en cause.
Il en va tout simplement du respect et de la dignité des sujets et des
patients dont nous avons la responsabilité en tant que professionnels et
soignants de la psyché.

Pour toutes ces raisons,


ce livre s’avère donc essentiel
Très loin d’une sémiologie à visée purement descriptive telle que nous la
proposent, voire nous l’imposent, les grandes classifications internationales
telles que le DSM-55 et la CIM-106, ce travail insiste à nouveau sur l’intérêt
d’un diagnostic structural qui, à partir d’un symptôme, pose véritablement la
question du fonctionnement psychique sous-jacent et de son organisation.
Il ne peut donc s’agir ici que d’une pédopsychiatrie transférentielle et
contre-transférentielle pour reprendre ici les termes de Delion.
Mugisho Nfizi Koya aborde ainsi successivement les outils du clinicien,
l’importance de l’anamnèse (alors même qu’elle est aujourd’hui vivement

5. 5e édition du Diagnostic and Statistical Manual of mental disorders.


6. 10e édition de la Classification Internationale des maladies.

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XVII

décriée), et enfin les liens qui se doivent d’être faits entre l’observation cli-
nique et l’élaboration d’hypothèses psychopathologiques utiles à la défini-
tion de stratégies thérapeutiques spécifiques de chaque patient.
Tout ceci suppose une formation approfondie des (futurs) cliniciens,
seule à même de leur éviter de se cantonner dans des choix thérapeutiques
opératoires, uniquement liés à la description des symptômes et finalement
assez monotones.
Les enfants malades ont déjà rencontré des adultes opératoires ou dépri-
més et s’ils rencontrent des soignants qui ont renoncé à toute inventivité
clinique ou à toute créativité, cela ne peut en rien leur être profitable.
Merci à Mugisho Nfizi Koya de nous le rappeler si efficacement et si utile-
ment en des temps difficiles pour l’intelligence du soin psychique.
J’espère – mais j’en suis sûr – que cet ouvrage rencontrera un grand succès,
un succès qu’il mérite indéniablement.
Bernard Golse
Pédopsychiatre-psychanalyste (membre de l’Association psychanalytique de
France), ancien chef du service de pédopsychiatrie de l’hôpital Necker – Enfants
malades (Paris), professeur émérite de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à
l’Université René Descartes (Paris 5), membre titulaire du laboratoire « Psychologie
clinique, psychopathologie, psychanalyse » (PCPP) de l’Université de Paris, ancien
membre du Conseil supérieur de l’adoption (CSA), ancien président du Conseil
national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP), président de l’association
Pikler Loczy-France, président de l’Association pour la formation à la psychothéra-
pie psychanalytique de l’enfant et de l’adolescent (AFPPEA), président de l’associa-
tion CEREP-Phymentin, président de l’Association européenne de psychopathologie
de l’enfant et de l’adolescent (AEPEA), président de la CIPPA (Coordination inter-
nationale entre psychothérapeutes psychanalystes s’occupant de personnes avec
autisme et membres associés)

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Avant-propos
La pédopsychiatrie est une discipline médicale qui reste inconnue dans cer-
taines régions du monde. Certaines universités offrent la possibilité d’appren-
dre la médecine et ses diverses disciplines dont la pédopsychiatrie, mais
chaque pays a son modèle de formation. Les médecins et les psychologues
cliniciens qui se spécialisent dans cette discipline empruntent des cursus de
formation presque différents mais, dans l’ensemble, ils ont un seul point de
convergence qui est la santé mentale du bébé, de l’enfant et de l’adolescent.
Pour notre part, la sémiologie pédopsychiatrique est toujours apparue comme
étant au centre de la démarche clinique et/ou thérapeutique. Elle est l’une des
clés incontournables pour tout pédopsychiatre et pédopsychologue clinicien,
peu importe qu’il soit débutant, avancé ou expert. Au fil de ma pratique quo-
tidienne, je me suis rendu compte du manque d’un manuel fédérateur qui
aide les collègues en formation à apprendre la sémiologie pédopsychiatrique.
Les difficultés sémiologiques auxquelles sont confrontés les différents
collègues en formation post-grade (internat de médecine ou formation de
psychothérapeute) ont motivé la conception de ce projet. Les cliniciens doi-
vent surmonter ces difficultés étant donné que l’évaluation pédopsychia-
trique est une activité principale des médecins et des psychologues dans
un service de pédopsychiatrie hospitalier ou ambulatoire. La sémiologie
pédopsychiatrique se réfère à des connaissances en biologie médicale, en
neurosciences, en psychopathologie (systémique, psychologie développe-
mentale, psychodynamique, thérapie cognitive et comportementale, etc.),
en génétique médicale, etc. La sémiologie apporte une logique très spéci-
fique. Elle intègre le tout dans l’objectif de proposer au clinicien un éventail
riche et diversifié en connaissances médico-thérapeutiques.
Depuis quelques années, nous avons à cœur de travailler et de développer
la question de la sémiologie pédopsychiatrique afin de rassembler en un
seul ouvrage les différents textes ou monographies que les collègues méde-
cins assistants, stagiaires psychologues, psychologues, chefs de clinique et
différents thérapeutes genevois (ceux qui travaillent dans l’Office médico-
pédagogique [OMP1], ceux qui sont installés en cabinets privés et les collègues

1. L’OMP est un service de l’État genevois. Cet office dispense des soins pédopsy-
chiatriques, de la pédagogie et un enseignement spécialisé à tous les enfants du
canton de Genève en Suisse et de la France voisine. Depuis plus d’un siècle, cet
office est arrivé à se faire une place de choix et précieuse dans cet accompagne-
ment des enfants, des jeunes et des familles. Soulignons que l’OMP a accueilli au
cours de son histoire diverses personnalités (médecins et psychologues, logopé-
distes ou orthophonistes, psychomotriciens, éducateurs, enseignants, etc.). Ces
derniers ont créé et renforcé l’identité de notre office durant toutes ces années.

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XX

du service de psychiatrie pour l’enfant et l’adolescent [SPEA] des hôpitaux


universitaires de Genève [HUG]) nous proposaient. L’idée de départ était
de clarifier les concepts sémiologiques, psychodynamiques, thérapeutiques
d’une part et de comprendre le principe de déroulement d’un entretien
clinique d’autre part. Ce guide a pour but de devenir un véritable outil
pour tous les cliniciens – quelle que soit leur formation de base – qui tra-
vaillent en pédopsychiatrie et/ou ceux qui désirent s’informer, se former à
ce métier ou qui sont confrontés à des jeunes en difficulté ou en souffrance
psychique. Il leur permettra de comprendre et de déchiffrer les concepts de
base qu’ils pourront approfondir plus tard.
Dans notre expérience personnelle, en arrivant à Genève, j’avais remar-
qué que la sémiologie apprise au cours de la formation post-grade à l’OMP
de Genève est préférentiellement centrée sur la théorie psychodynamique,
mais en réservant toutefois une place importante aux autres sources théo-
riques telles que les neurosciences, la systémique, la génétique et la biologie.
Depuis quelques décennies, à l’initiative du professeur Francisco Palacio-
Espasa et de ses collaborateurs, l’OMP a adopté et progressivement intégré
dans la formation post-grade l’évaluation et la prise en charge thérapeu-
tique de ses patients, une autre manière de travailler. Il s’agit de la grille
d’évaluation introduite depuis trois décennies déjà. La grille pédopsychia-
trique fut mise en place sous la forme d’un canevas psychodynamique pour
les thérapeutes en formation ou ceux ayant déjà terminé leur formation, et
dans la recherche clinique.
En fait, les travaux de Francisco Palacio-Espasa ont apporté une nou-
velle tonalité à la prise en charge des patients. Il s’agit bien évidemment
de l’introduction du diagnostic structurel selon la grille d’évaluation.
Ce diagnostic structurel aborde des entités qui requièrent des éclairages
théorico-cliniques et pratico-techniques aussi bien sur le plan sémiologique
que thérapeutique. Il incombe au thérapeute de renforcer ses compétences
professionnelles à l’aide des lectures répétées, des supervisions et des « inter-
visions » cliniques hebdomadaires.
L’OMP a instauré cet exercice de la grille tous les jeudis matin. Les objectifs
étaient, entre autres, de proposer un cadre rassemblant tous les thérapeutes,
afin de discuter et d’échanger des informations cliniques des patients.
La « grille du jeudi » offre la possibilité aux patients et aux familles d’être
examinés par un nouveau thérapeute. L’exercice dit de la « grille du jeudi »
se veut un point de ralliement institutionnel à l’OMP. Certains peuvent se
demander s’il s’agit de griller ou de faire de la grillade ou quel autre jeu de
mots, mais il est vrai que ce moment permet aux thérapeutes (plus avancés
et débutants) et aux participants (assistants sociaux, étudiants en méde-
cine, étudiants en psychologie, différents stagiaires, etc.) non seulement
de se rencontrer physiquement, mais aussi de partager leurs expériences et
impressions théorico-cliniques. Cette rencontre ponctuelle vise à donner

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XXI

un second avis sur le fonctionnement clinique, à formuler de nouvelles


hypothèses de travail, dans l’objectif de proposer d’autres pistes de prise
en charge. Ainsi, les discussions cliniques (thérapeutiques, psychopatho-
logiques, sémiologiques, etc.) commencées le jeudi matin se prolongent le
plus souvent dans les consultations de secteur.
C’est dans ce sens que les cliniciens mettent à profit leurs compétences
et observations cliniques à chaque rencontre hebdomadaire. Cette activité
débute par un visionnage de l’entretien enregistré puis le chef de clinique,
ou le responsable, ou le meneur de la grille, tend le microphone aux partici-
pants, afin de rassembler les idées et impressions cliniques. Cet exercice de
brainstorming est très bénéfique et utile pour tous les thérapeutes avancés ou
en début de formation post-grade.
Depuis la mise en place de la « grille du jeudi », les pères fondateurs
disent : « À l’occasion d’un examen “à l’aveugle” de l’enfant (sans que l’exa-
minateur qui voit l’enfant pour la première fois ne connaisse quoi que soit
du motif actuel de consultation et des antécédents anamnestiques), les cli-
niciens présents remplissent une grille avec des items clinico-dynamiques
pour déterminer le diagnostic structurel de l’enfant. »2 Le visionnage de
l’entretien clinique permet aux thérapeutes de proposer une réflexion
psychopathologique, sémiologique et thérapeutique selon un canevas.
Il découle de ce moment des pistes de réflexion sur les différents types de prise
en charge des patients, les diagnostics différentiels catégoriels et structurels,
les bilans (psychométriques, génétiques, biologiques, neurologiques, etc.).
La « grille du jeudi » fédère tous les cliniciens présents dans la salle.
Elle permet d’éclairer, d’élucider, de clarifier les idées, d’élargir les hypothèses
de travail et de renforcer les théories ou les compétences théorico-pratiques
des praticiens.
Dès notre arrivée en 2017 à l’OMP, l’exercice de la grille nous a rappelé
les réunions et les rencontres cliniques auxquelles nous participions tout
au long de notre cursus de formation universitaire (en République démo-
cratique du Congo, au Sénégal et en France). Il s’agissait également des exer-
cices hebdomadaires tels que ceux tenus à l’OMP. À Genève, presque tous
les collègues en formation ont un point commun : le stress d’être interrogé
pendant « la grille ».
En plus d’être angoissante, la « grille du jeudi » est source de confusion
pour les jeunes thérapeutes qui sont au début de leur formation. Tous ne
se sont pas encore familiarisés aux concepts psychodynamiques, psycha-
nalytiques, médico-psychiatriques. Cet exercice, dont le but premier est la
formation, se transforme en véritable cauchemar pour les collègues débu-
tants. Inutile de rappeler que les médecins n’ont pas vraiment de cours de
psychopathologie clinique à la faculté de médecine.

2. Palacio-Espasa, F. et Dufour, R. (1994). Diagnostic structurel chez l’enfant. Masson.

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XXII

Ces jeunes collègues ne sont pas encore « outillés » sur le plan conceptuel.
Pour pallier cette insuffisance, l’OMP offre un cadre de formation théorique.
Les cliniciens sont initiés aux diverses théories psychanalytiques, psychopa-
thologie psychodynamique, sémiologie pédopsychiatrique, psychopatho-
logie psychiatrique, etc. Ainsi, dès l’arrivée dans le service, le thérapeute
est immédiatement plongé dans le quotidien théorico-clinique. Après une
durée minimum de 4 ans, on espère qu’il aura acquis des compétences
essentielles pour assumer son rôle de thérapeute.
Les collègues utilisent certains documents qui font autorité dans la caté-
gorisation ou la pose des diagnostics des troubles mentaux. Il s’agit de la
Classification internationale de troubles mentaux dans la 10e version (CIM-10,
en attendant la sortie officielle de la 11e édition), la Classification française
de troubles mentaux pour les enfants et les adolescents (CFTMEA) et le Manuel
diagnostique et statistique des troubles mentaux, dans sa 5e version (DSM-5).
Ces outils diagnostiques aident le clinicien dans sa rédaction des rapports
d’évaluation ou tout autre type de rapport. Ils permettent également de
proposer un projet de prise en charge adéquat et adapté à la demande et aux
besoins thérapeutiques du patient et/ou de sa famille.
Malheureusement, ces outils diagnostiques ne sont pas destinés à pro-
poser des modèles sémiologiques aux thérapeutes. Le manque d’outils ou
d’ouvrages proposant des modèles de techniques d’entretien (la démarche
sémiologique) ou d’évaluation pédopsychiatrique est flagrant dans notre
service tout comme dans la littérature nationale et internationale. Comment
les jeunes collègues peuvent-ils comprendre et déchiffrer les concepts cli-
niques ? Il leur est très difficile (mais non impossible) de décoder la perti-
nence de ces concepts cliniques. La peur d’apprendre les règles du jeu, la
logique ou les enjeux de la grille et de l’évaluation clinique des enfants et
des adolescents est continuelle. Pour pallier ce manque et réduire lesdites
difficultés, cet ouvrage répertorie, collectionne et rédige, pour expliquer,
décrire et éclaircir un tant soit peu les concepts usités en clinique pédopsy-
chiatrique.
Ce guide est le fruit, comme souligné plus haut, d’un travail de longue
haleine. Le contenu a été modifié, amélioré et adapté grâce aux différentes
questions qui ont été soulevées par les collègues lors des diverses réunions
formelles et informelles (réunions, rencontres, discussions, débats, confé-
rences, colloques, échanges, etc.) entre les différents cliniciens de l’OMP ou
d’autres services publics et privés.
Souvent, les formateurs conseillent de théoriser ou de faire évoluer les
théories psychodynamiques. À notre avis, la sémiologie pédopsychia-
trique ouvre un chemin vers cet exercice de théorisation ou d’invention
de nouveaux concepts pratiques. La pratique clinique précède l’activité de
théorisation. Ce guide propose aux thérapeutes un moyen d’acquérir des

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XXIII

astuces, des techniques ou des stratégies afin qu’ils puissent relier leurs pra-
tiques cliniques aux diverses théories acquises. Ensuite seulement, ils pour-
ront concevoir de nouvelles théories reposant sur leur propre expérience.
Il incombe au clinicien d’être un praticien assidu. Cette position lui permet-
tra de rester prêt à remanier ou réadapter sa clinique. Il pourra réinventer
sa clinique progressivement, au fil du temps, grâce à la formation indirecte
que lui offrent ses patients.
Comme cela sera répété régulièrement au fil de l’ouvrage, chaque patient
est singulier et différent d’un autre. Les époques aussi diffèrent et évoluent,
les techniques sémiologiques doivent s’adapter à la réalité et au contexte
socio-environnemental et culturel du patient. Toute rencontre clinique est
thérapeutique en soi. Voilà pourquoi ce guide est proposé aux nouveaux
collègues, à tous ceux qui démarrent leur carrière en pédopsychiatrie ou à
toute personne qui cherche à enrichir ses compétences théorico-pratiques.
C’est au thérapeute de rapprocher sa clinique de la théorie, dans un
souci de créer ou d’avoir une même chorégraphie musicale avec le patient.
Les questions justes, adaptées et adéquates du thérapeute feront le lien
entre ses diverses théories thérapeutiques et la symptomatologie du patient
et de sa famille. L’acquisition de cette finesse clinique n’est possible que par
la sémiologie. Le thérapeute évite de faire de l’intrusion ou d’être maladroit
envers les patients. Il progresse dans sa démarche clinique tout en construi-
sant un lien thérapeutique, comme expliqué dans le chapitre 4. Grâce à la
sémiologie, des véritables ponts de travail ou des ponts thérapeutiques se
construisent entre le patient et le thérapeute.
L’un des objectifs de ce guide est de rendre intelligibles, limpides et
maniables les concepts qui peuvent être considérés comme « flous » ou
« tordus » de la théorie psychodynamique ou pédopsychiatrique. Il vise
également à dégager la différence entre la psychopathologie, la sémiologie
et la thérapeutique pédopsychiatrique.
À travers les quelques conseils et techniques d’entretien proposés dans
cet ouvrage, les collègues trouveront certaines astuces qui leur permettront
de construire leur propre façon de travailler. Celle-ci laissera briller leur
singularité en tant que thérapeute des bébés, des enfants et des adolescents.
L’autre objectif de cet ouvrage est de clarifier la double identité du thé-
rapeute ou du clinicien pédopsychiatre ou pédopsychologue. Le professeur
Stephan Eliez a l’habitude de rappeler que le clinicien (psychologue ou
médecin) porte automatiquement la double casquette du pédopsychiatre
et du psychothérapeute. Même si seul le médecin a le titre de pédopsy-
chiatre, le psychologue est lui aussi détenteur du titre de psychothérapeute
d’enfants et d’adolescents. Ce clinicien devra être capable de poser un diag-
nostic catégoriel et structurel chez le même patient et de proposer une prise
en charge adéquate, efficace et peu onéreuse.

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XXIV

Ainsi :
• le diagnostic catégoriel détaillé par les manuels (la CIM-10 et le DSM-5)
consiste en une photographie du fonctionnement du patient au temps t de
l’évaluation ou de la rencontre clinique. Cette image peut être la même ou
pas, si elle est prise à un autre moment de la vie du patient. Le fonctionne-
ment catégoriel vient révéler ou appuyer ce qui se joue au niveau structurel.
Ce diagnostic permet d’orienter, de poser le diagnostic et de proposer un
type de prise en charge, de faciliter le dialogue entre les professionnels ou
différentes institutions sanitaires et d’établir un rapport officiel sur le fonc-
tionnement du patient évalué ;
• le diagnostic structurel, pour sa part, éclaire l’organisation de la structure
psychopathologique ou psychodynamique du patient. Il permet au théra-
peute d’avoir une vision assez large de la structure et du fonctionnement
du patient. N’oublions pas les éventuels changements et modifications
structurels sur le plan développemental en réponse à l’environnement
biopsychosocial de l’individu. Le diagnostic structurel amène le thérapeute
à choisir le type de psychothérapie, la fréquence et le setting thérapeutique
qui conviennent au patient et à sa famille. Le thérapeute arrive à mieux
comprendre les aménagements internes du patient et l’expression de pos-
sibles symptômes catégoriels ou psychodynamiques qu’il lui laisse voir à un
moment ou à un autre de sa vie.
En d’autres termes, la différence ou les rapprochements entre le diagnos-
tic catégoriel et le diagnostic structurel sont comparables à la métaphore du
volcan. On a, sous la croûte terrestre, le magma. L’observateur extérieur a
l’impression que tout est calme jusqu’au moment où apparaît la fragilité des
parois terrestres. Et là, on assiste à l’éruption volcanique. Ce déversement de
la lave est le diagnostic catégoriel et le magma en soi et les parois de la terre
constituent le diagnostic structurel.
Contrairement à toute attente, de ce texte a émergé l’idée de proposer,
à Genève, un séminaire annuel en formation continue bimensuelle à tous
les collègues du service et aux externes. Ce cadre facilite les discussions et
les échanges cliniques en plus de la « grille du jeudi ». Les participants sont
moins stressés et moins angoissés à l’idée de donner leur avis, de proposer
un autre regard clinique, de remettre en question les idées des uns et des
autres. Ils approfondissent leurs connaissances théoriques et pratiques à tra-
vers des enregistrements vidéo ou tout autre matériel clinique (par exemple
les dessins, des vignettes cliniques, etc.) qu’apportent les patients pendant
les entretiens cliniques.
Ce Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie traite les diverses questions
sémiologiques pédopsychiatriques et psychodynamiques, allant du premier
appel téléphonique du patient ou de ses parents pour prendre un rendez-vous
jusqu’à la restitution ou l’élaboration du rapport d’évaluation. Il ne s’agit pas
d’un traité de psychopathologie psychodynamique en pédopsychiatrie.

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XXV

Les concepts sémiologiques sont explicités dans la mesure du possible


avant de proposer une technique de leur évaluation. Ce guide propose ou
fait des rapprochements ou des correspondances, entre les concepts caté-
goriels (proposés dans les manuels tels CIM-103 et DSM-54) et structurels
(proposés dans la CFTMEA)5.
En outre, il semble important de signaler tout au début de ce guide que
la démarche diagnostique en pédopsychiatrie fait souvent appel à l’usage
de tests ou d’évaluations utilisant différents questionnaires ou échelles psy-
chométriques standardisés. Il existe des échelles qui évaluent les troubles
de l’humeur, les troubles anxieux, l’hyperactivité et le déficit d’attention, le
dépistage précoce d’un trouble psychotique ou d’autres symptômes psychia-
triques, le quotient intellectuel, la mémoire, des échelles plus projectives,
etc. Citons à titre d’exemple : le Mini Mental State Examination (MMSE),
l’échelle d’évaluation globale du fonctionnement (EGF), la Psychotic Symp-
tom Rating Scales (PSYRATS), la MADRS (Montgomery and Asberg Depression
Rating Scale), l’échelle de manie de Young, le Mood Disorder Questionnaire, la
Yale-Brown Obsessive Compulsive Scale (Y-BOCS), l’échelle d’intelligence de
Wechsler pour la période préscolaire et primaire (WPPSI-R), l’échelle d’intel-
ligence de Wechsler (WAIS), la Wechsler intelligent scale for children (Wisc),
le Rorschach, le Thematic Apperception Test (TAT), etc. Sur ce point, les thé-
rapeutes sont invités à se familiariser et à perfectionner leurs compétences
sémiologiques avant d’entreprendre des passations de ces échelles. Celles-ci
exigent une formation spécialisée ou ciblée. La sémiologie pédopsychia-
trique rend le thérapeute apte à mener des enquêtes cliniques sans ou avec
ces échelles. Ces dernières sont spécifiques et très variées. Elles sont une
source d’informations cliniques très riche. Elles apportent un éclairage ou
une touche particulière permettant des changements des paradigmes dans
la prise en charge des patients. Ce guide ne décrit pas ces échelles car elles
sont développées dans plusieurs ouvrages, notamment les textbooks.
Les collègues psychologues étudient certaines échelles au cours de leur cur-
sus de formation universitaire. Les autres échelles font l’objet des diverses
formations spécifiques.

3. Pull, C. B. (2000). CIM-10/ICD-10 : Descriptions cliniques et directives pour le


diagnostic. Organisation mondiale de la santé (OMS), Masson.
4. American Psychiatric Association. (2015). DSM-5 : manuel diagnostique et sta-
tistique des troubles mentaux (traduit par J.-D. Guelfi et M.-A. Crocq ; 5e éd.).
Elsevier Masson.
5. Misès, R., Bursztejn, C., Botbol, M., Coincon, Y., Durand, B., Garrabe, J., Garret-
Gloanesc, N., Golse, B., Portelli, C., Raynaud, J.-P., Schmit, G. et Thevenot, J.-P.
(2012). Une nouvelle version de la classification française des troubles mentaux
de l’enfant et de l’adolescent : la CFTMEA R 2012, correspondances et trans-
codages avec l’ICD 10. Neuropsychiatrie de l’enfant et de l’adolescence, 60 (6),
414-418.

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XXVI

Ce guide est organisé en quatre parties, qui suivent la chronologie de la


démarche sémiologique : les outils du clinicien, l’anamnèse du patient et de
sa famille, le status clinique pédopsychiatrique, et la clôture de l’évaluation
clinique.
Excellente lecture à tous !

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Remerciements
Que tout le monde se sente remercié à travers ces lignes. Nos pensées vont
plus particulièrement :
• à mon épouse, Bahati et à notre fils, Agisha, qui m’ont laissé travailler des
journées entières, sans jamais m’en tenir rigueur ;
• à ceux qui ont pris leur temps pour relire ce guide : M. Trésor Zagabe
N’Nama, Dr Gaëlle Devillard, M. Juan Sepulveda, Mme Amanda Di Giovanni
Bonard, Mme Olga Muller-Cid, à nos collègues de formation post-grade
2017-2021 et au Dr Claus Pawlak ;
• à Francisco Palacio-Espasa, pour avoir mis en œuvre indirectement ce tra-
vail par son manuel sur le diagnostic structurel et surtout pour avoir mis en
place avec ses collègues l’activité de la grille d’évaluation psychodynamique
à l’OMP comme un outil formateur des thérapeutes ;
• au professeur Bernard Golse pour avoir accepté de préfacer cet ouvrage ;
• au professeur Stephan Eliez pour sa sympathie, son accueil et son encadre-
ment théorico-pratique.
• à la Dre Jacqueline Megevand et à Mme Maja Perret-Catipovic, nos deux
directrices médico-psychologiques, pour leur écoute bienveillante ;
• à la Dre Murielle Chtourou et à Mme Giovanna Grandjean, qui se sont
vite mobilisées et ont soutenu avec ardeur ce projet de séminaire intitulé :
« Concepts de la “grille” illustrés, expliqués et approfondis ». Ce fut un
moment important qui nous a permis de bien approfondir le présent travail ;
• à tous les anciens, actuels et futurs collègues. Nous pensons aux collègues
de l’enseignement spécialisé de l’OMP et du service de psychiatrie pour
enfants et adolescents des hôpitaux universitaires de Genève (SPEA) ;
• à tous nos patients et leurs familles qui nous ont largement appris à per-
fectionner notre métier de pédopsychiatre, psychothérapeute d’enfants et
d’adolescents.
Nous remercions très particulièrement les éditions Elsevier Masson
d’avoir accepté de publier ce guide.

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Liste des abréviations
BMT Mentalisation Based Therapy
CFTMEA Classification française des troubles mentaux de l’enfant et l’adolescent
CIM-10 Classification internationale des maladies
Covid Coronavirus Disease
DSM-5 Diagnostic and Statistical Manual
EMDR Eye Movement Desensitization and Reprocessing
FA Figure d’attachement
HUG Hôpitaux universitaires de Genève
OMP Office médico-pédagogique
RUD Risque, urgence et dangerosité
SPMi Service de protection des mineurs
TCC Thérapie cognitivo-comportementale
TS Tentative de suicide

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1 Introduction
Le psychothérapeute d’orientation psychodynamique s’efforce de compren-
dre et d’améliorer le fonctionnement structurel du patient. Au cours de
cette démarche, il prend en compte les rapports du patient avec lui-même
et avec son entourage. Pour y arriver, le thérapeute a besoin d’avoir à portée
de main une « boîte à outils ». Le contenu de la boîte doit être diversifié.
Ce présent guide s’en veut un exemple. Le thérapeute ne doit pas oublier
qu’il est avant tout un médecin ou un psychologue clinicien.
Le thérapeute se doit en premier lieu :
• d’écarter les affections somatiques ou médicales. De nombreuses patho-
logies somatiques (d’origine infectieuse, tumorale, génétique, congéni-
tale, etc.) ont des manifestations psychiatriques. Il est important pour le
thérapeute de se le rappeler et d’être en mesure d’en référer aux collègues
(dermatologues, neurologues, pédiatres, oncologues, généticiens, etc.) afin
d’apporter au patient et à la famille l’aide nécessaire dans la prise en charge
des troubles que présente le patient. Tout simplement, le fait d’écarter une
pathologie ou une affection médicale permet de rassurer le patient et la
famille ;
• de tenir compte des découvertes en neurosciences et de mettre à jour ses
théories psychopathologiques sur le développement du bébé, de l’enfant et
de l’adolescent. La proposition de la prise en charge que le thérapeute offre
à ses patients doit tenir compte des lignes directrices et des traitements
médicamenteux ou des psychothérapies recommandées selon les affections,
les souffrances ou les troubles du patient.
Il est préférable que le thérapeute s’informe continuellement des mises à
jour des données de l’evidence-based medicine. Il doit aussi s’informer sur
les nouvelles pratiques de ses pairs afin d’offrir à ses patients une prise en
charge adéquate, nécessaire, globale et efficace ;
• de poser un diagnostic catégoriel dans les termes actuels (CIM-10 [Clas-
sification internationale des maladies, 10e édition], DSM-5 [Diagnostic and
Statistical Manual, 5e ed.]), compréhensibles par les autres professionnels
(pédiatres, infirmiers, médecins de famille, enseignants, éducateurs, assu-
reurs, juristes, etc.). Ce diagnostic catégoriel est capital dans la prise en
charge des patients. La question du diagnostic catégoriel est traitée plus en
profondeur dans la dernière partie de ce guide ;
• d’expliquer son approche clinique et thérapeutique en termes clairs,
concis et simples. Le thérapeute laisse le choix au patient et à ses parents de
se tourner vers d’autres types de traitements ou de prises en charge non psy-
chodynamiques ou psychanalytiques. Une explication claire est nécessaire
afin que le patient et sa famille puissent se positionner vis-à-vis de la prise

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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2 Introduction

en charge et deviennent ainsi actifs dans son déroulement. Le thérapeute


ne détient pas de clé magique, il n’a ni la suprématie ni l’exclusivité des
soins. Son humilité est le secret de sa réussite quotidienne.
Par ailleurs, les techniques et les compétences théorico-pratiques apprises
dans d’autres registres thérapeutiques (cognitivo-comportementales, sys-
témiques, biologiques, etc.) sont là pour compléter notre cadre, non pas
comme des éléments accessoires, mais plutôt comme d’autres références.
Elles nous permettent de situer nos limites et nos compétences. Étant donné
que « l’enfant est un sujet en évolution relativement rapide : il grandit et
se développe suivant un programme ou un agenda inné, reposant sur des
bases en génétique biologiques, au sein et en relation avec un entourage et
un environnement plus ou moins stables, quoiqu’également évolutifs. Être
complexe et changeant, l’enfant s’organise, se structure, se différencie et
s’individualise à partir de son équipement somatique et grâce aux échanges
qu’il noue avec les différentes personnes qui l’entourent. » (Bochereau
et al., 2011) Le clinicien garde ces informations à l’esprit pour éventuelle-
ment savoir confier ses patients à des collègues plus compétents ou plus
spécialisés dans un autre domaine, et selon les disponibilités psychiques et
les possibilités financières des patients.
Quel que soit son lieu d’exercice du thérapeute, il existe souvent une
diversité de lieux ou de services qui offrent des prises en charge différentes
selon les besoins des patients. Qu’il soit thérapeute en privé ou en institu-
tion, il se doit de considérer ces alternatives thérapeutiques, en fonction de
son évaluation clinique :
Le traitement psychodynamique (consultation thérapeutique, psycho-
thérapie jusqu’à plusieurs fois par semaine au besoin, analyse de l’enfant,
traitement de la famille, groupes thérapeutiques, guidance parentale, thé-
rapie basée sur la mentalisation, thérapie avec les animaux, psychodrames
psychanalytiques en individuel ou en groupe, etc.).
• le traitement systémique du couple ou de la famille ;
• le traitement cognitivo-comportemental (TCC) ;
• l’Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR) ;
• les traitements médicamenteux ;
• l’aide éducative par le service de protection des mineurs (SPMi) en Suisse
ou les services de protection de l’enfance en France, par exemple ;
• les adaptations scolaires et parascolaires ;
• la pédagogie spécialisée ;
• les foyers thérapeutiques, les foyers de placement, les foyers pour les soins
études, etc. ;
• etc.
En effet, les connaissances en neurosciences, les théories cognitivistes,
systémiques et psychodynamiques constituent une base inépuisable
pour le thérapeute. Disons plus encore qu’« une formation personnelle

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Introduction 3

psychothérapeutique aide enfin le clinicien à être plus à l’aise pour


observer les mouvements psychologiques en situation, mieux appréhen­
der le fonctionnement de chacun et atténuer les éventuelles résistances au
processus de l’examen clinique, et de l’enfant et des parents. » (Bochereau
et al., 2011) Toutes ces compétences ou ces connaissances théorico-prati­
ques constituent un socle pour le thérapeute.
Elles font partie des trois piliers (ou les trois classes) de connaissances et
des compétences du thérapeute et qui lui permettent d’être plus l’aise dans
son travail. Il s’agit de connaissances en :
• sémiologie pédopsychiatrique. Ces connaissances permettent l’inves-
tigation des divers symptômes et syndromes cliniques à partir des informa-
tions que le patient et son entourage fournissent au thérapeute. La sémiologie
pédopsychiatrique est un langage codé. Les symptômes du patient sont
ainsi considérés comme les maillons d’une longue chaîne qui peut être lue
en langage catégoriel (CIM-10 et DSM-5) ou en langage structurel (CFTMEA
[Classification française des troubles mentaux de l’enfant et l’adolescent] ou
psychodynamique) ;
• psychopathologie clinique. Grâce à ces connaissances, le thérapeute
comprend et explique la genèse, l’évolution et le pronostic des troubles
psychiatriques à partir des symptômes du patient. La psychopathologie
explique comment les symptômes relevés ou objectivés par la sémiologie
ont pris place, comment ils interagissent et évoluent. À travers la psychopa-
thologie, le thérapeute se fraye un chemin ou décide d’une conduite à tenir
dans l’objectif de proposer une prise en charge adéquate et adaptée aux
besoins du patient ;
• thérapeutique pédopsychiatrique. Elle impose une maîtrise de la psy-
chopharmacologie, des psychothérapies et d’autres formes ou possibilités
de prise en charge du patient seul ou avec sa famille. On peut citer : la socio-
thérapie, l’équithérapie, les thérapies en psychomotricité, en ergothérapie,
l’hypnose, etc.
Le thérapeute améliore ses compétences professionnelles à l’aide de ses
efforts quotidiens, même si, et nous le répétons, les références en géné-
tique, en biologie, en pharmacologie sont pour lui un appui considérable et
incontournable. Les références étio-psychopathogéniques constituent une
toile de fond du cadre interne du thérapeute. « Le travail du clinicien res-
semble à celui de l’historien d’art, à la différence que notre art est vivant.
Nous pouvons étudier cet art vivant après avoir assimilé un langage qui
nous permet de conceptualiser nos styles d’entretien. Alors, les principes
qui semblent fournir un “plan de la pièce” au clinicien expérimenté se
dégagent naturellement. » (Shea, 2005) Avec ces trois piliers, le thérapeute
exécute son art de guérir sans faille et avec aisance.
Enfin, nous abordons dans les lignes qui suivent quelques particularités
ou points essentiels à prendre en compte lors d’une évaluation clinique.

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4 Introduction

Ces particularités font partie du socle d’une bonne évaluation clinique.


Mais avant cela, voici quelques avertissements pour lire ce présent guide.

Quelques avertissements aux lecteurs


Les cinq remarques suivantes nécessitent d’être prises en compte pour la lecture
de ce guide. Elles aident les lecteurs à éviter toute confusion et permettent,
nous l’espérons, de lever tout malentendu que cet ouvrage pourrait provoquer.

Ouvrage d’évaluation sémiologique


Ce guide se veut être un condensé de deux démarches : l’une pédopsy­
chiatrique pure, et l’autre psychodynamique. Le lecteur doit faire attention
à ne pas « se mélanger les pinceaux ». Le mot « pédopsychiatrique » renvoie
au diagnostic catégoriel que l’on retrouve dans le DSM-5 et la CIM-10. En
revanche, la démarche psychodynamique fait allusion au diagnostic struc-
turel. L’essentiel de ce travail consiste à dégager des équivalences, des cor-
respondances ou des liens entre les deux démarches susmentionnées. Cela
dit, chaque item, concept ou symptôme développé dans ce guide s’inscrit
dans le modèle de la grille psychodynamique utilisée dans le service de
l’OMP (Office médico-pédagogique). Plus précisément, cet outil développe
certains éléments comme :
• la définition de quelques concepts de base, dans le but de familiariser les
lecteurs au vocabulaire, au langage et aux expressions psychodynamiques
et pédopsychiatriques qui sont très usités par des thérapeutes ;
• l’apport de quelques notions ou d’informations théoriques pour clarifier
ou rafraîchir la mémoire des lecteurs ;
• des stratégies d’investigation : comment le thérapeute recherche-t-il les
signes et les symptômes cliniques de troubles psychiques auprès de ses
patients ? Quelles sont les diverses manières ou techniques qu’il peut utili-
ser pour recueillir un maximum d’informations ou des données cliniques ?
Comment arrive-t-il à en déduire des hypothèses de travail afin de proposer
la meilleure prise en charge adaptée aux besoins des patients ?
• des exemples pour élucider ou faciliter la compréhension des concepts. Il
y a plusieurs questions que le thérapeute peut poser à ses patients ou alors
se poser lui-même dans le but d’affiner ses hypothèses de travail.
Il est important de ne pas confondre un guide pratique de sémiologie en
pédopsychiatrie comme celui-ci avec les autres manuels traitant de psycho-
pathologie psychodynamique ou de thérapie cognitivo-comportementale,
ou thérapie systémique. Ils sont eux-mêmes différents des manuels de la
classification des troubles mentaux en pédopsychiatrie et en psychiatrie (la
CIM-10, le DSM-5, la CFTMEA, etc.).

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Introduction 5

En outre, une évaluation pédopsychiatrique est en elle-même une théra-


pie (cf. infra). Nous précisons que ce guide ne donne pas de « recette » de
psychothérapie. Il existe des manuels spécialisés traitant uniquement des
techniques et des spécificités de chaque orientation psychothérapeutique
en pédopsychiatrie.

Items d’une évaluation pédopsychiatrique


Le présent ouvrage regroupe les différents items que le thérapeute recherche
pendant une évaluation pédopsychiatrique. Il s’agit de tenir compte des
différentes étapes de développement du patient : des interactions avant,
pendant et après sa naissance. Le thérapeute évalue les interactions psy-
chosociales de l’entourage familial avec le patient, la période préhistorique,
historique et actuelle du patient. Dans la plupart des services de pédopsy-
chiatrie, les patients sont reçus dès leur naissance et ce, jusqu’à leur majo-
rité (18 ans et même au-delà).
Considérant que les différents services de pédopsychiatrie reçoivent les
patients âgés de 0 à 18 ans révolus, le thérapeute doit prendre soin d’adap-
ter ses questions à l’âge, au contexte socioculturel, aux compétences intel-
lectuelles, etc., du patient et de son entourage.
Certains items de la grille d’évaluation développés dans cet ouvrage sont
abordés différemment avec chaque patient en raison des paramètres indivi-
duels énumérés ci-dessus. Compte tenu de la diversité des symptômes, de la
disponibilité du patient et du thérapeute, du cadre de l’entretien, des para-
mètres socioculturels et contextuels, de l’urgence de la gravité du trouble,
de la qualité de la collaboration, de l’âge du patient et de ses compétences,
etc., certains items peuvent être analysés de manière aléatoire durant
l’entretien. Et par « aléatoire », nous pensons à la souplesse que doit avoir le
thérapeute durant son entretien. Il n’est pas recommandé de s’enfermer sur
le canevas ; bien au contraire, nous conseillons au thérapeute de se laisser
la latitude et la liberté de mener son entretien selon les ouvertures que lui
laisse le patient. Le thérapeute peut y revenir ou reprendre certains points
clés pour clarifier ses hypothèses diagnostiques.

Concepts objet, patient et thérapeute


Les trois termes : objet, patient et thérapeute sont centraux dans ce travail.
Il est judicieux de les clarifier et de les expliciter :
• le terme ou concept d’« objet » renvoie au thérapeute, aux parents, aux
pairs et à tous les adultes en contact avec le patient. Le terme « objet » est tout
ce qui n’est pas patient ou sujet. L’« objet », selon Freud et Mélanie Klein,
correspond au « grand autre » de la théorie de Lacan. L’objet peut encore

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6 Introduction

signifier le doudou, l’animal de compagnie, les amis de classe du patient ou


bien ses jouets, et bien d’autres choses encore ;
• le terme « patient » désigne le bébé, l’enfant ou l’adolescent dans ce texte.
Ainsi, le pronom « tu » est utilisé pour signifier à la fois le « tu » et le « vous »
qu’emploie le thérapeute pour s’adresser à ses patients. Il faut bien garder
à l’esprit que l’évaluation doit mettre le patient au centre de la rencontre.
Tout autour du patient, on retrouve sa fratrie, ses parents, ses amis, ses voi-
sins, ses professeurs, ses éducateurs, son pédiatre, son médecin de famille,
le thérapeute qui fait partie de cet environnement tout en étant lui-même
l’observateur observé. Nous revenons sur cette notion plus loin dans ce
guide ;
• le terme « thérapeute » est utilisé pour signifier le clinicien, le psycho-
logue, le pédopsychiatre, le professionnel de santé mentale, etc. Il est appelé
« thérapeute » parce qu’une évaluation clinique est thérapeutique en soi.
Ajoutons qu’un entretien clinique « constitue une expérience très nouvelle
pour un jeune, expérience qui, si elle est réussie, est enrichissante et par
elle-même thérapeutique. » (Marcelli, 1999)
Didier Houzel attire notre attention et nous invite à la prudence maxi-
male disant que « parfois l’entretien avec l’enfant apporte un matériel suf-
fisamment clair pour qu’il soit possible de risquer une interprétation, dont
l’effet mutant se manifeste dans les suites immédiates de la consultation.
Il faut, cependant, être très prudent dans ce domaine. » (Houzel, 2018)
Ce terme de « thérapeute » ne devrait pas prêter à confusion, car il renvoie
évidemment au clinicien ou à ce pédopsychiatre, ou à ce psychologue qui
porte la double casquette de « pédopsychiatre » et de « psychothérapeute ».
Plus encore, le pédopsychiatre incarne, endosse et représente ces deux
identités professionnelles1. Ainsi, lorsqu’un clinicien propose un entretien
d’évaluation, il propose par la même occasion une forme de psychothéra-
pie, pour laquelle il reste à expliciter les tenants et les aboutissants. Nous ne
le dirons jamais assez, une rencontre clinique est thérapeutique.

Remarque
Somme toute, deux expressions sont utilisées tout au long de ce travail :
► « au sens catégoriel » fait allusion ou référence au DSM-5 et à la CIM-10 ;
► « au sens structurel » fait référence à la théorie psychodynamique ou psy-
chanalytique.

1. En particulier en Suisse, le titre de spécialiste qu’il reçoit à la fin de sa formation


postdoctorale est de « pédopsychiatre et psychothérapeute des enfants et des
adolescents ». Les collègues psychologues, eux, obtiennent le titre de « psycho-
logue et psychothérapeute des enfants et des adolescents ».

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Introduction 7

Particularité d’un entretien pédopsychiatrique


Rappelons que l’entretien clinique en pédopsychiatrie est une démarche
hypothético-déductive. Le long de ce guide, nous revenons sur la particu­
larité du travail de thérapeute. Plus particulièrement, le travail avec les ado-
lescents invite le thérapeute à « lutter contre la pensée clivée, toute-puissante
et paralysante » (Robin, 2019). L’entretien clinique pédopsychiatrique n’est
pas un interrogatoire policier. Le thérapeute doit « analyser, nuancer, hié-
rarchiser, graduer, différencier » (Robin, 2019) les différentes informations
reçues pour faire la part de choses et trouver des pistes de solutions, surtout
quand les enfants/adolescents se trouvent dans l’impasse ou dans l’arrêt de
développement. Il incombe au clinicien d’ajuster, d’adapter ou d’orienter
son entretien selon les informations que lui rapportent les patients. Il peut
aussi s’appuyer sur la demande d’aide formulée au départ, sans pour autant
s’empêcher d’élargir son champ de recherche diagnostique.
Contrairement à ce que certains pourraient penser, un entretien clinique
reste le même dans la forme. Qu’il s’agisse du premier, du deuxième ou du
troisième entretien, le déroulement d’un entretien clinique reste le même.
Les entretiens diffèrent quant au contenu :
• le premier entretien donne la coloration du contact avec le patient. Il
fournit des observations cliniques standardisées du patient. À partir cette
première rencontre, le thérapeute se fait une vision globale ou une impres-
sion générale du patient et/ou de sa famille ;
• le deuxième et le troisième entretien viennent éclairer les zones de forces
ou de faiblesses du patient. Ces rencontres informent sur l’évolution pro-
bable de la symptomatologie du patient et orientent le clinicien dans ses
indications thérapeutiques.
La demande d’une évaluation pédopsychiatrique peut venir du patient,
de ses proches, des instances judiciaires ou d’un autre professionnel (pédo­
psychiatre, pédiatre, éducateur, psychologue, psychomotricien, logopédiste,
ergothérapeute, enseignant, etc.). Parfois, il peut s’agir d’un entretien pour
donner un deuxième ou un troisième avis, d’un entretien pour faire une
expertise ou une contre-expertise. Dans cette situation, le thérapeute doit
être sûr du type d’évaluation que le demandeur attend de lui. Ainsi, un
entretien clinique est une « rencontre originale, unique ou plus souvent
répétée au fil du temps, qui fait appel à la disponibilité, à la sensibilité et à la
réceptivité du clinicien. » (Bochereau et al., 2011) L’essentiel est de savoir à
quelles questions nous devons répondre à la fin de la séance. Le thérapeute
doit garder à l’esprit de rendre plus humain, plus spécial, plus informatif,
plus saisissant son entretien.
Ces différents entretiens peuvent laisser croire qu’il s’agit d’utiliser des
techniques différentes mais, finalement, ce qui change en général, ce sont
les points focaux sur lesquels insiste le thérapeute lors de ses évaluations
cliniques. En fait, le rang de l’entretien ne compte pas. Avoir rencontré par

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8 Introduction

le passé le patient peut ou non jouer en faveur du prochain entretien. Ren-


contrer une deuxième ou une troisième fois le patient peut être considéré
comme une autre chance de rectifier le tir et de clarifier ses impressions
diagnostiques.
Cet ouvrage propose les bases nécessaires et essentielles pour que le thé-
rapeute se sente plus disponible et plus libre de mener son évaluation. Pour
le reste, le principe d’évaluation pédopsychiatrique est identique et la tech-
nicité du clinicien devrait être au rendez-vous.

Style choisi pour la rédaction


Nous avons choisi d’utiliser le genre masculin pour nous faciliter la rédac-
tion. Nous avons préférentiellement adopté le tutoiement quand nous nous
adressons aux patients et le vouvoiement quand il s’agit du thérapeute.
Nous conseillons vivement au thérapeute de vouvoyer les patients adoles-
cents et insistons sur l’importance absolue et capitale de le faire. Nous lais-
sons le lecteur découvrir plus loin les multiples raisons, explications et
arguments cliniques et thérapeutiques de ce choix.
En conclusion, l’objectif de cet ouvrage étant plus pratique que théorique,
nous invitons le lecteur à approfondir ses connaissances à l’aide d’autres
ouvrages notamment référencés dans la bibliographie finale. Il peut perfec-
tionner ses compétences à travers les discussions et les échanges au cours
des « intervisions » entre collègues, supervisions avec les formateurs spécia-
lisés, etc. Le thérapeute médecin a une double tâche : il est observateur et
prescripteur. Cette responsabilité demande finesse et délicatesse au cours
de l’exercice clinique. L’évaluation sémiologique doit être répétée plusieurs
fois pour acquérir de l’aisance dans les entretiens.

Bibliographie
Bochereau, D., Guédeney, N., & et Corcos, M. (2011). Examen clinique de l’enfant en
pédopsychiatrie. Psychiatrie, 8(2), 1-9.
Houzel, D. (2018). Une application de la méthode d’observation des nourrissons : les
traitements à domicile. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M. Soulé (dir.), Nouveau
Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1, p. 519-530). Presses
universitaires de France.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie
Médico-Chirurgicale. Psychiatrie. article 37-213-A-10.
Robin, M. (2019). L’adolescent en crise dans un environnement en crise. Adolescence,
t. 37, 2(2), 233-245.
Shea, S. C. (2005). La Conduite de l’entretien psychiatrique : l’art de la compréhension.
Elsevier Masson.

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2 Généralités
Francisco Palacio Espasa disait qu’un diagnostic structurel est nécessaire
lorsqu’il s’agit d’évoquer avec les parents (les autres adultes ou les profes-
sionnels) les possibilités d’évolution de l’enfant, afin d’instituer la psycho-
thérapie la plus adéquate, compte tenu de l’organisation de la personnalité
du patient. Avant tout, il faut clarifier avec le patient et ses parents ce que
nous faisons comme travail, quel est notre métier et en quoi cela consiste,
ce qui permet de connaître ou d’appréhender les représentations qu’ils se
font de notre métier.
Les outils du clinicien l’aident à mener à bien une anamnèse et une obser-
vation clinique. Ces deux éléments doivent permettre au thérapeute de for-
muler une première hypothèse psychodynamique sur la nature des conflits
actuels, le type et le degré de stabilité ou d’effondrement de l’organisation
défensive.
Le thérapeute doit être attentif, pendant son évaluation, dans sa recherche
des réponses et dans sa façon de poser les questions au patient ou à son
entourage. Il n’est pas intrusif, agaçant ou maladroit, il ne juge pas. Il ne
cherche pas à apposer un diagnostic au patient. Le thérapeute se montre
attentif et empathique vis-à-vis du patient. Il évite de finir précipitamment
un entretien clinique. Selon Lantéri-Laura, « la sémiologie psychiatrique
est pratiquement le seul savoir de notre discipline qui peut prétendre au
qualificatif d’“objectif” » (Kapsembelis, 2015).
Cramer nous dit qu’il faudrait chercher la nature du contrat inconscient
entre les parents et le patient à travers le symptôme ou le motif de la consul-
tation. Le thérapeute facilite et écoute la narration du symptôme du patient
amené par les parents. Le premier contact avec le patient permet d’établir
une alliance thérapeutique, reposant sur la sympathie, l’identification
au patient, l’empathie, la bienveillance, la présence active du thérapeute
durant l’entretien. Roussillon parle de « l’espace de sécurité » qu’offre le
thérapeute au patient.
Le thérapeute crée un foyer en écoutant les symptômes du patient. Quel
est le souci ou quelle explication du symptôme le patient lui donne-t-il
(c’est-à-dire que le thérapeute essaie de comprendre les fantasmes conscients
et inconscients du patient et de son entourage) ? Il prend en compte le côté
interpersonnel ou interrelationnel (c’est-à-dire la proximité ou encore la
distance entre parents et patient) et la contingence ou la correspondance
des informations que lui apporte le patient. Le thérapeute a une écoute res-
pectueuse, concernée et bienveillante. Bion parle de la fonction alpha d’un
parent suffisamment bon. Grâce à cette fonction, le parent aide son enfant
à métaboliser ses affects, ses pensées, son ressenti, ses représentations, ses

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12 Outils du clinicien

images, etc. Le thérapeute suffisamment bon utilise sa fonction alpha pour


être un auxiliaire secondaire au moi du patient. Suivant les conseils et les
enseignements de Bion, le thérapeute prête son appareil à penser ou son
appareil affectif au patient, l’objectif étant de l’aider ou de l’amener à bien
métaboliser les différents bombardements affectivo-émotionnels et autres
qui lui viennent de l’intérieur ou de l’extérieur de son appareil psychique.
Techniquement, le thérapeute se rallie avec la partie saine du patient pour
aller soigner sa partie malade. On cherche à soutenir les parties du moi du
patient qui ont un fonctionnement adéquat ou adapté à la réalité. Il s’agit
de créer un lien relationnel avec le patient durant l’entretien clinique. Juan
Manzano entendait par le terme « relationnel », « un point de vue ou un
modèle psychopathologique qui prend en compte le développement intégral
de l’enfant ». Le patient, peu importe son âge, grandit dans un environne­
ment biopsychosocial. Cette personne constitue un ensemble d’éléments en
interaction stable. Il est donc important de prendre en compte les diverses
interactions qu’il peut avoir dans son milieu de vie.
Cet ouvrage aborde essentiellement la question de technique (ou tac-
tique) à mener lors d’un entretien clinique. Selon Houzel (2018), la tactique
est « la façon de procéder aux entretiens successifs avec l’enfant et avec ses
parents ». Cela dit, le thérapeute doit trouver sa propre manière, son propre
chemin, pour créer un lien avec le patient et la famille. Il doit trouver son
propre levier, sa « clé en or », pour se sentir à l’aise quand il reçoit les
patients. Les éléments sémiologiques détaillés dans ce guide lui permettent
de proposer un cadre adéquat qui propose de bonnes conditions pour per-
mettre à ses interlocuteurs de participer à leur propre évaluation. Nous espé-
rons, sauf surprise ou réactions inattendues de la part des protagonistes,
qu’une bonne mise en relation avec le patient a une meilleure influence sur
l’entretien clinique du début jusqu’à la fin.

Bibliographie
Houzel, D. (2018). Une application de la méthode d’observation des nourrissons : les
traitements à domicile. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M. Soulé (dir.), Nouveau
Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1, p. 519-530). Presses
universitaires de France.
Kapsambelis, V. (2015). Qu’est-ce qu’une institution psychiatrique ? Filigrane, 24(1), 13-
25.

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3 Théorie
psychopathologique
de Sigmund Freud
Certains peuvent se demander pourquoi nous avons pris le temps de parler
de Freud (1856-1939) et de sa théorie sur l’appareil psychique (« les topiques
freudiennes 1900-1920 ») dans un guide de sémiologie. Si nous avons
choisi d’évoquer cette théorie freudienne, c’est parce que nous savons tous
qu’il existe plusieurs modèles théoriques expliquant le fonctionnement de
l’être humain. Toutes les sciences sociales, la littérature, la philosophie, l’art,
ainsi que la médecine, ont proposé de multiples théories sur l’homme (son
fonctionnement, son développement et ses interactions sociales). N’est-il
pas vrai que l’être humain est un être en développement et en perpétuelle
évolution ?
Une autre raison de parler des théories freudiennes est que ce guide a
pour base la théorie psychodynamique. Et c’est le génie de Freud qui nous
a mis sur cette voie. Inutile de répéter qu’en pédopsychiatrie, les autres
modèles de réflexion ont une place de choix. L’exercice d’évaluation psy-
chodynamique d’un patient demande alors au thérapeute de faire le tour
des différents concepts développés par le père fondateur de la psychanalyse,
par ses disciples et ceux des générations futures des xxe et xxie siècles. Les
notions développées par Freud et ses successeurs ont profondément contri-
bué à l’amélioration de la prise en charge des patients. Pour commencer,
Freud propose dans son œuvre deux théories non exclusives, mais complé-
mentaires, appelées « des topiques ».
Ce chapitre se focalise sur les concepts centraux qui bouleversent, depuis
plus d’un siècle, les thérapeutes dans leurs manières de penser et de pro-
céder. Dès sa genèse, la psychanalyse a connu de profonds remaniements.
Les plus importants à notre avis sont la première et la deuxième topique
de Freud. Ainsi, il nous semble pertinent d’en parler avant d’entrer dans
le vif du sujet et de « décortiquer » les différentes stratégies sémiologiques.
Ce chapitre propose donc un condensé de ces deux travaux de Freud.

Première topique de Freud


Le contexte socioculturel dans lequel a émergé cette théorisation mérite
d’être souligné avant d’aborder cette première topique. Souvenons-nous que
Freud est « l’héritier » de deux époques : la révolution industrielle (xixe siècle)
et la guerre mondiale. Cette époque était marquée essentiellement par

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14 Outils du clinicien

l’éclosion de plusieurs courants de pensée politique (fascisme, communisme,


etc.). Freud était influencé par diverses disciplines de son époque comme la
physique, la thermodynamique, la neurologie, l’art, la politique ou encore
l’économie. À cette époque, les moyens et les possibilités d’exploration
paraclinique et clinique en médecine n’étaient pas aussi avancés, comme
c’est le cas au xxie siècle. Grâce à son sens de l’invention, de créativité, de
remise en question et à son talent de fin clinicien et observateur, Freud a pu
théoriser des concepts, tout en prenant un risque vis-à-vis de sa carrière de
médecin neurologue, étant donné que ses idées sont venues bouleverser les
habitudes, les conceptions et les croyances populaires de son temps.
À son époque, les scientifiques utilisaient déjà le terme de « subcons-
cient ». Avant de développer cette topique, Freud avait l’habitude, lui aussi,
d’utiliser ce terme pour désigner tout ce qui était en deçà de la conscience.
Ce subconscient était, pour Freud, le précurseur de la première topique.
Mais plus rapidement et grâce à son expérience clinique, Freud met de côté
cette idée. La raison plausible de cet abandon est que cette notion laissait
entendre qu’il existerait des personnalités distinctes chez un même indi-
vidu. En 1900, Freud abandonne donc ce concept de subconscient pour
théoriser sa topique faite de l’inconscient, du préconscient et du conscient.
Les deux derniers concepts forment le psychisme, et Freud attribue à ces
entités certaines caractéristiques propres qui sont :
• une fonction ;
• un type de processus ;
• une énergie d’investissement ;
• des contours représentatifs.
En comparaison, en se référant au système optique, la grande question
pour le père de la psychanalyse fut celle de la localisation anatomique de cet
appareil psychique. Freud souligne que le fonctionnement psychique est
compliqué et qu’il ne peut se comprendre qu’en assignant chaque fonction
particulière aux diverses parties de l’appareil psychique. Dans sa première
topique, il montre que ces entités, appelées encore des « systèmes », exercent
des censures et contrôlent le passage d’un système (ou « compartiment ») à
l’autre. Le terme « système » ou « compartiment » équivaut à une instance
psychique.
La première topique « regroupe le système conscient, préconscient et
inconscient avec le refoulement qui fait office de barrière plus ou moins
étanche entre le système inconscient et le système conscient-précons-
cient. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012)
En fait, dans l’objectif de clarifier le fonctionnement de la première
topique, on doit noter que : « le passage à la conscience n’implique pas
à lui seul une véritable intégration du refoulé au système préconscient ; il
doit être complété par tout un travail capable de lever les résistances qui
entravent la communication entre les systèmes inconscient et préconscient

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Théorie psychopathologique de Sigmund Freud 15

et capable d’établir une liaison de plus en plus étroite entre les traces mné-
siques inconscientes et leur verbalisation. » (Laplanche & Pontalis, 2007)
Ce passage est toujours le même et respecte un ordre clair. Pour y arriver,
Freud confirme que ce mécanisme de passage consomme de l’énergie.
Comment cela est-il possible ? Pour Freud, l’énergie psychique se transmet
d’un lieu à un autre, selon des lois ou des règles bien définies. La théorie
développe deux façons (ou deux directions) que peut prendre ce passage :
1. direction normale, dite « progrédiante ». La direction « progrédiante »
permet à la communication de partir de l’inconscient, de passer par le
préconscient, pour atteindre le conscient. Cette théorie soutient la trans-
mission linéaire et contrôlée d’un compartiment à un autre. On peut alors
imaginer combien il serait facile de freiner ou de laisser traverser les infor-
mations d’une instance psychique à une autre instance psychique ;
2. direction dite « régressive ». Les informations à communiquer partent du
conscient, passent par le préconscient pour atteindre l’inconscient. Freud la
qualifie de « régression topique », illustrée par le phénomène du rêve. Les
représentations ou les pensées peuvent prendre un caractère visuel. Elles
régressent ainsi aux types d’images les plus proches de la perception. Ces
images peuvent aller jusqu’à l’hallucination située à l’origine du parcours
de l’excitation.
Après avoir compris comment fonctionnent ces deux modes de commu-
nication ou le mode de passage d’un système à un autre, voyons par la suite
ce qui se passe dans ces systèmes ou ces instances psychiques décrites par
Freud.

Conscient
La première topique de Freud nous informe que le conscient est l’un des
concepts pivots. La notion du conscient peut être analysée selon deux
points de vue : économique et dynamique. Le conscient est défini comme
une « enveloppe de surface située à la périphérie de l’appareil psychique
qui reçoit les informations provenant de l’extérieur et de l’intérieur. »
(Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012) Si nous regardons de près cette défi-
nition, nous apercevons déjà les bornes pour délimiter ce qui appartient
au-dedans ou au-dehors. Cette instance psychique fait une séparation entre
l’environnement externe du patient (le dehors) et interne du patient (le
dedans). On peut déjà sous-tendre les deux principes de plaisir et de réalité.
L’appareil psychique de Freud commence à prendre une certaine forme qui
sera remodelée et revisitée dans la seconde topique.
Certains auteurs ont attribué au conscient de Freud un rôle principal. Ils
disent que « le rôle principal qui lui est attribué est celui de la perception. »
(Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012) La perception dont il est question
ici, et que nous reprenons plus loin dans la troisième partie de ce guide,

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16 Outils du clinicien

consiste à recevoir des informations ou des stimuli qui viennent du dedans


et du dehors. En plus, ce conscient est présent à la conscience du patient
et lui permet de communiquer avec le monde extérieur. C’est à travers ce
conscient qu’il développe ses différentes relations à l’objet (nous revenons
sur cette notion dans la troisième partie).
Freud appelle « censure » la barrière qui existe entre le conscient et le pré-
conscient. Celle-ci est un mécanisme de sélection. Elle est régie par l’incons-
cient. C’est-à-dire que c’est à l’inconscient de faire le tri et de censurer les
informations qui peuvent ou pas arriver ou atteindre la conscience.

Préconscient
Le préconscient est l’autre instance décrite dans la première topique de
Freud. Il chevauche entre la conscience et l’inconscient. On le définit
comme étant une « instance charnière entre l’inconscient et le conscient.
Son contenu n’est pas accessible directement à la conscience, mais peut
resurgir au niveau conscient sans être déformé lorsqu’il est réactualisé.
Par exemple : un souvenir d’enfance qui remonte subitement à la surface
lorsqu’une situation rappelle brusquement celle que l’on a déjà vécue il y a
de longues années et que l’on croyait avoir oubliée. » (Askenazy-Gittard &
Darcourt, 2012)
En fait, de manière raccourcie, ce préconscient se situerait, à ce moment
pour Freud, entre l’inconscient et le conscient. Ce préconscient fait un pont
entre les deux parties de l’appareil psychique.
À l’aide de sa topique, Freud dit qu’une représentation ne peut donc
jamais passer directement du conscient à l’inconscient ni, inversement, de
l’inconscient au conscient. L’information passe toujours par la voie tracée
dans cet appareil psychique. Les informations ou les représentations psy-
chiques provenant de l’inconscient passent par le préconscient avant d’arri-
ver au conscient. Ainsi, le préconscient permet au conscient de travailler
sans se laisser parasiter par des pulsions, des désirs ou des sentiments qui
proviennent de l’inconscient. Les processus secondaires sont régis par le
principe de réalité. Les faits psychiques sont latents et il n’existe pas d’alté-
ration de contenus. Le préconscient joue le rôle de censure et fait barrière
entre le conscient et l’inconscient.
Parler de la prise de conscience équivaut à la réintégration du souvenir
inconscient dans le conscient. Ce processus implique que les représenta-
tions, images, souvenirs, etc. défilent et franchissent les censures entre le
préconscient et la conscience. Un second mécanisme, appelé le « refoule-
ment », s’opère entre le préconscient et l’inconscient. Ce dernier contrôle
le passage des faits psychiques qui ont été refoulés devant la présence de
quelque chose d’insupportable ou d’inadmissible.
Chaque instance est formée en couches. Freud dit que les souvenirs sont
rangés autour du noyau pathogène, tout en respectant un ordre logique

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Théorie psychopathologique de Sigmund Freud 17

et chronologique. Pour lui, ce qu’il nomme comme « noyau pathogène »


existe dès l’origine de l’homme et est transmis par la voie phylogénétique.
L’échec ou le résultat du refoulement peut être ou non la source de la patho-
logie. Par exemple, le préconscient fragile des adolescents peut être débordé
par les pulsions libidinales ou agressives, provenant de leur dedans ou de
leur dehors. Il est alors plus fréquent que la pathologie apparaisse quand le
préconscient ne joue pas son rôle de « pare-excitation ».
Le préconscient permet d’évaluer le fonctionnement de l’adolescent sur le
plan de la qualité de ses représentations. Lors de l’évaluation, le thérapeute
se demande quelle est l’épaisseur du préconscient du patient. S’agit-il d’un
préconscient perméable qui assure la continuité des informations entre le
dedans et le dehors et la communication entre le conscient et l’incons-
cient ? Est-ce que le thérapeute se trouve devant un patient qui a une bonne
intégration du moi et du surmoi ? Est-ce que le préconscient de l’adolescent
est suffisamment étoffé pour permettre à ses fantasmes et ses rêveries de se
déployer ?
Précisons encore que plus les assises narcissiques du patient sont bonnes
et fiables, plus le travail du préconscient est solide. De toute façon, l’objectif
d’évaluer le préconscient de l’adolescent, c’est aussi de voir comment ce
préconscient joue son rôle de « pare-excitation ». Le thérapeute, qui se veut
substitut du parent, joue ce rôle de « pare-excitant » dans les entretiens
d’évaluation ou dans les séances de psychothérapie.
Nous développons plus loin comment le préconscient apporte des élé-
ments nécessaires dans l’évaluation des patients adolescents. L’évaluation
de l’adolescence revient à identifier la qualité, l’épaisseur, les fonctions, etc.
de ce préconscient.

Inconscient
Si la conscience est perçue de manière consciente, qu’en est-il de l’incons-
cient ? Disons que « l’inconscient freudien est d’abord indissolublement
une notion topique et dynamique qui s’est dégagée de l’expérience de la
cure. Celle-ci a montré que le psychisme n’est pas réductible au conscient
et que certains “contenus” ne deviennent accessibles à la conscience qu’une
fois des résistances surmontées. » (Laplanche & Pontalis, 2007) La défini-
tion de l’inconscient va de pair avec les rôles ou les fonctions qu’il remplit
dans l’appareil psychique selon Freud.
On peut se demander à quoi sert cet inconscient et comment il fonc-
tionne. Dans les lignes qui suivent, nous essayons de présenter de façon
plus synthétique quelques rôles (ou fonctions) de cette instance psychique.
• Dans un premier temps, citons avec Freud que l’inconscient est « rem-
pli de contenus fortement chargés d’énergies affectives dont la censure
ou le refoulement refuse l’accès de la conscience. » (Askenazy-Gittard &
Darcourt, 2012) L’inconscient est le siège des éléments refoulés qui sont

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18 Outils du clinicien

appelés « des processus primaires ». Ils sont faits des désirs, des émotions,
des fantasmes, des sentiments et des pulsions.
• Dans un deuxième temps, on sait que l’inconscient « n’obéit pas aux
mêmes lois de fonctionnement que le conscient. Ces lois sont appelées
processus primaires. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012) Ces processus
primaires ne sont pas liés dans l’inconscient. Ils sont régis par le principe de
plaisir. Ils sont libres de mouvement, contrairement aux processus secon-
daires. Ils s’expriment sous forme d’actes manqués, de lapsus, lors des cures
analytiques ou des rêves.
• Dans un troisième temps, cet inconscient « exerce une poussée perma-
nente sur le système préconscient-conscient pour chercher à refaire sur-
face et se heurte au refoulement. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012)
Les contenus de cet inconscient sont soumis continuellement à une pous-
sée pour qu’ils partent de l’inconscient. Tout est en mouvement et tout
doit se mouvoir ou quitter cet endroit, pour aller vers un autre endroit (par
exemple vers le préconscient ou la conscience). Il s’agit d’un mouvement
de va-et-vient en pêle-mêle. Nous devons souligner ici la notion de liberté
de mouvement des éléments ou des occupants de l’inconscient.
• Dans un quatrième temps, on observe que : « dans certaines maladies
mentales graves, la censure ne fonctionne pas correctement, fait défaut, et
l’inconscient peut surgir directement à la surface sans avoir subi de défor-
mations. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012) Ce défaut de contrôle ou
cette survenue brutale peut être observé chez les patients présentant un
trouble psychotique ou maniaco-dépressif. L’absence de compromis fait
que les contenus de l’inconscient surgissent dans le conscient. Lacan dirait
que le patient a un défaut de la forclusion du nom du père. Quand ces
éléments traversent plus ou moins en éclair les trois instances sans contrôle
ni maîtrise, le thérapeute doit évaluer le préconscient du patient.
Enfin, avant de clore cette première topique de Freud et de passer à la
deuxième, voyons en quoi consistent les principes de plaisir et de déplaisir.

Principe de plaisir et principe de déplaisir


En 1920, Freud publie un ouvrage intitulé Au-delà du principe de plaisir. Il
met en évidence certaines compulsions, des répétitions de certains faits ou
actions, activités ou jeux, etc. Les deux principes cités plus haut regorgent
des notions de topique, de dynamique et d’économie. On peut dire que
pour Freud, dans sa théorie, le concept de plaisir était la baisse de la tension
psychique. L’augmentation de cette tension en revanche est considérée
comme un déplaisir. On sait que le psychisme et le corporel sont liés, alors
tout ce qui peut entraver le calme est considéré comme du déplaisir.
En outre, nous dirions que le plaisir, c’est le retour au calme, à l’homéos-
tasie. Ce principe de plaisir est ralenti par le principe de réalité, qui laisse
au patient un sentiment de peine ou de déplaisir, de façon momentanée.

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Théorie psychopathologique de Sigmund Freud 19

Nous apprenons avec Freud qu’au départ, les éléments psychiques sont
libres et non liés. Progressivement, ils se lient entre eux pour s’achever sur
des processus secondaires. Il s’agit donc d’un départ du principe de proces-
sus primaires vers des processus secondaires.
Pour plus d’éclaircissement, le déplaisir et l’angoisse sont liés dans la pre-
mière théorie de l’angoisse de Freud. Ainsi, le patient met les choses ailleurs
pour éviter de s’y confronter. Mais par la force de la nature, les éléments mis
de côté finissent par s’échapper et par sortir, pour s’exprimer autrement.
Et c’est à ce moment précis que nous pouvons observer des actes manqués,
des lapsus, des rêves, etc.
En conclusion, ces quelques éléments théoriques ne sont que la synthèse
d’une grande et riche théorie métapsychologique de Freud. Nous invitons
les thérapeutes à les compléter et les approfondir. Certaines notions et fonc-
tions que Freud attribue ou conçoit dans sa première topique sont reprises,
reformulées et incluses dans la seconde topique.

Deuxième topique de Freud


C’est dans son œuvre Le Moi et le Ça, de 1923, que Freud propose cette
nouvelle division du psychisme. Il la formule dans l’objectif de compléter
et d’élargir la première topique. Cette « deuxième topique est incluse dans
la première. Elle regroupe le système : moi, ça, surmoi. Elle a été développée
par Freud, principalement pour rendre compte de ce qui lui échappait dans
la compréhension de la clinique à partir de sa première théorie : incons-
cient, conscient, préconscient. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012)
Cette théorie (ou topique) est élaborée à partir de 1920. Freud n’a plus
proposé d’autre théorie de l’appareil psychique, mais il n’a cessé de la
compléter et de la complexifier. Il a proposé intelligemment des concepts
métapsychologiques dans l’objectif, nous supposons, de clarifier, compléter
ou de rendre plus intelligible et compréhensible le fonctionnement psy-
chique de l’homme.
Cette seconde topique fait intervenir la notion des conflits entre les ins-
tances psychiques, mais aussi à l’intérieur de chaque instance. La communi-
cation n’est plus unidirectionnelle comme dans la première topique :
• la notion d’ambivalence apparaît dans l’exemple de la dualité pulsion-
nelle chez un même individu. On retrouve un conflit entre les différentes
instances psychiques de l’individu. Ce conflit est généré par le ça (origine
pulsionnelle) et siège dans le moi, qui se réfère au surmoi avant d’exécuter
ou de laisser passer une émotion ou un désir, etc. ;
• au moment de l’apparition du complexe d’Œdipe chez le jeune enfant,
en revanche, on retrouve un conflit dans ces instances entre le ça et le
surmoi. Dans sa nouvelle théorisation, Freud conçoit et met l’accent sur la
dépendance et la communication entre les instances psychiques.

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20 Outils du clinicien

Cette deuxième topique nous permet de comprendre que les mécanismes


de défense (cf. partie III) sont déclenchés par le moi, quand le principe
de réalité (représenté par les règles édictées par le surmoi) ne permet pas
d’obtenir la satisfaction des revendications pulsionnelles du ça. La deuxième
topique révèle mieux la façon dont le patient se construit, se protège, se
défend, se perçoit et s’intègre dans son environnement social.
La suite apporte quelques éléments qui constituent le second l’appareil
psychique de Freud. L’auteur garde les trois instances psychiques, comme
c’était déjà le cas dans la première topique.

Moi
Freud a attribué au moi l’intérêt de la totalité de la personne. Le moi est le
siège de la raison, du narcissisme, etc. Dès le début de son œuvre, la notion
de moi est présente chez Freud, mais il l’utilise pour désigner la personne
consciente. À partir de 1923, il présente le moi comme une « instance de
régulation » de phénomènes psychiques, qui doit sans cesse trouver un équi-
libre entre les exigences du ça – le « réservoir des pulsions » – et du surmoi –
auparavant nommé « instance critique » ou « critique de la conscience »
(Quinodoz, 2004). Par toutes ses fonctions ou toutes ses attributions psycho-
dynamiques, le moi se réfère au surmoi pour trouver un compromis avec le ça.
Freud attribue ainsi au moi un rôle régulateur entre les pulsions venant
du ça et les règles régies par le surmoi. Le moi est le pôle de liaison entre
les exigences de la réalité extérieure, le ça et le surmoi. En fait, le moi est
un médiateur entre le ça et le surmoi. Il est le siège du raisonnement, de
la perception et met l’appareil psychique de l’individu en contact ou en
relation avec l’extérieur. Le moi met en place les mécanismes de défense
dans l’objectif de se préserver du conflit entre les pulsions ou les désirs du ça
et les interdits du surmoi. Les faits psychiques ne sont pas libres, mais sont
régis par le principe de réalité. Ils sont soumis ou contrôlés par l’individu.

Ça
Le ça est cette instance psychique théorisée par Freud. Il dit qu’il représente
le pôle pulsionnel de l’individu. C’est le réservoir pulsionnel et le siège de
l’autoconservation. Les pulsions sexuelles réagissent de façon souveraine.
Le terme « ça » a été inventé par Georg Groddeck en 1923. Freud l’a donc
repris et conceptualisé dans le courant de la même année. Disons alors que :
« Contrairement à Groddeck, Freud considère que le moi ne subit pas pas-
sivement les assauts du ça, mais qu’il tente de les dompter, comme le ferait
un cavalier qui doit refréner sa monture. » (Quinodoz, 2004) Comprenons
plus encore que le ça est le siège des principes primaires chez l’individu.
Freud écrit en 1958 dans un abrégé de psychanalyse qu’« en dépit de
toutes ces incertitudes, la science analytique a établi un fait nouveau. Elle a

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Théorie psychopathologique de Sigmund Freud 21

montré que les processus, qui se jouent dans l’inconscient ou le ça, obéis-
sent à d’autres lois que celles qui se déroulent dans le moi préconscient.
Nous appelons l’ensemble de ces lois “processus primaires”, par opposition
au processus secondaire qui régit les phénomènes du préconscient, du moi.
Ainsi l’étude des qualités psychiques n’aura finalement pas été tout à fait
infructueuse. » (Freud, 1958)
Le ça est le siège des contenus psychiques (c’est-à-dire les fantasmes, les
sensations, les perceptions, les émotions, les affects, les concepts, les pen-
sées, les représentations mentales, etc.). Ces derniers sont libres et sont régis,
comme à l’image de l’inconscient de la première topique, par le principe de
plaisir. Ces contenus dits de « processus primaires » sont libres et échappent
au contrôle conscient de l’individu. Les représentations sont régies par le
principe de plaisir et s’expriment par des actes manqués, des lapsus, des
rêves ou objectivés dans les cures analytiques.
Le ça est le siège des éléments interdits et refoulés. Le ça peut entrer
en conflit avec le moi ou le surmoi du patient. Lorsque le conflit est là,
le moi perçoit l’angoisse et pour lutter contre cette sensation de déplaisir,
le moi recourt à différents mécanismes de défense. Et si ces derniers ne sont
pas suffisamment solides ou s’ils sont défaillants ou moins efficaces, il y a
formation de compromis et donc apparition des symptômes. Mais de leur
côté, les contenus psychiques du ça sont tellement libres, têtus, malins et
capricieux qu’ils arrivent d’une façon ou d’une autre à apparaître à la sur-
face ou à s’extérioriser par des actes manqués, des lapsus, des rêves, etc.

Surmoi
Cette instance est qualifiée d’agent critique. Le surmoi fait l’autocensure
et l’auto-observation : c’est le juge intérieur. Il correspond au préconscient
de la première topique. Ce surmoi est acquis grâce à l’intériorisation des
interdits, des exigences, des règles de la réalité extérieure ou de la société. Il
est aussi fait par identification parentale tout au long de la vie du patient.
Ce surmoi est le résultat ou la conséquence du complexe d’Œdipe. Pour
clarifier encore cette instance psychique, Freud dit que « le surmoi n’est pas
uniquement une instance qui sadise le moi, comme dans la pathologie, car
chez l’individu normal le rôle dévolu au surmoi post-œdipien est d’exercer
une fonction de protection et de sauvegarde, pas une identification au père
et à la mère. » (Quinodoz, 2004)
En fait, le surmoi joue le rôle de censeur du moi. Il empiète sur l’incons-
cient, sur le préconscient et le conscient de la première topique. Le travail
du surmoi est de jauger, d’évaluer, de juger les écarts entre le moi idéal de
départ et l’idéal du moi. Si l’écart est énorme, la culpabilité s’installe.
Nous montrons dans le chapitre consacré aux affects (chapitre 17),
comment la honte et la culpabilité s’articulent autour du surmoi et de
l’idéal du moi.

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22 Outils du clinicien

Nous le détaillons à plusieurs reprises dans ces instances psychiques. En


plus de ces trois notions centrales théorisées dans la deuxième topique et
dans l’objectif de clarifier davantage l’ensemble des phénomènes ou des
processus mentaux, Freud rajoute les concepts d’idéal du moi, très investi
narcissiquement et du moi idéal plus tard. Le concept d’« imago » et « soi »
a été introduit par Carl Gustav Jung. Plus tard, Winnicott introduit les
concepts du « self » et « faux self » ainsi que d’autres concepts.
Il est temps que l’on s’attarde sur ce qu’est un moi idéal ou un idéal du
moi. Les notions du narcissisme primaire et secondaire de Freud ne sont pas
traitées dans les points suivants. Nous exhortons les thérapeutes à se référer à
d’autres manuels pour comprendre les narcissismes qui, à notre avis, se posi-
tionnent comme des notions précurseurs du moi idéal et de l’idéal du moi.

Moi idéal et idéal du moi


Ces deux concepts sont très parlants dans notre clinique psychodynamique
(cf. chapitre 19).

Idéal du moi
L’idéal du moi est du côté des identifications de l’individu. Il s’installe plus
tardivement au cours du développement de l’individu. Il est constitué des
éléments œdipiens et post-œdipiens. Il est le résultat de la transformation
du moi idéal. Cet idéal du moi renvoie au verbe « suivre ». Le patient se pose
alors la question, à savoir : « Qui devrais-je suivre comme modèle de ma vie
actuelle et future ? » Pendant la constitution ou la formation de cet idéal du
moi, le patient prend pour modèles ses parents, un artiste, un peintre, des
hommes politiques, scientifiques, etc. Le patient se demande : « À qui dois-
je ressembler ? Vers quel parent devrais-je orienter ma rivalité ? » Cet idéal
du moi se place vraiment du côté de l’avoir. Continuellement, le patient se
demande quelles qualités il devrait ou pas avoir.
L’idéal du moi est compris comme étant le désir, les envies, les projets, le
niveau supérieur, tout ce que la personne espère avoir dans le futur. L’indi-
vidu cherche constamment à atteindre son idéal du moi. L’idéal du moi est
l’ultime désir que peut avoir une personne, mais qu’elle ne pourra jamais
atteindre.

Moi idéal
Le moi idéal renvoie plus au narcissisme – « Qui suis-je ? » – ou aux identi-
fications primaires de l’individu. Le moi idéal est l’ensemble des choses ou
des caractéristiques que la personne souhaite ou aime avoir dans l’immé-
diat. C’est le résultat du moi grandiose du début de la vie. Le moi idéal est
un mécanisme qui se rapproche de la paranoïa.
Chez le bébé, la constitution de ce moi idéal est faite des bouleverse-
ments quand il rencontre un nouvel événement ou une nouvelle personne.

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Théorie psychopathologique de Sigmund Freud 23

Ce bébé se demande ainsi, tout d’abord, si la nouvelle personne est bonne


(plaisir) ou mauvaise (déplaisir). Que devrait-il garder en lui ou rejeter ? Est-
ce que cette personne lui apporte des éléments qui sont tout mauvais ou
tout bons ? Lesquels de ces éléments devrait-il garder en lui ?
Grâce à ces premières questions, le bébé peut se demander si l’objet (c’est-
à-dire l’événement ou la personne rencontrés) est réel ou non.
Pour finir, voici cet exemple : un patient adolescent explique à son théra-
peute que pour pouvoir atteindre son moi idéal, il faudrait que ses parents,
ou tous les adultes autour de lui, lui laissent la paix. Le même patient peut
dire, à propos de son idéal du moi, qu’il a envie de devenir un artiste pein-
tre, un designer-graphiste, un chirurgien esthétique, un inventeur ou un
sapeur-pompier. Les deux notions du moi idéal et de l’idéal du moi sont
gérées en quelque sorte par le surmoi qui essaie de tempérer la situation en
tenant compte de la réalité interne et externe du patient.
D’autres théoriciens tels que Mélanie Klein, Winnicott, Françoise Dolto
et Lacan ont repris ces notions de moi idéal, d’idéal du moi, du narcissisme,
du self et des identifications. Ces différents concepts sont repris le long de
ce guide.
Par exemple, Lacan propose un autre regard sur la théorie freudienne en
se fondant sur l’optique. De 1936, où il part du stade de miroir (préhistoire
du schéma optique) à 1962 où il donne son séminaire sur l’angoisse, il tente
d’expliquer comment est-ce que les concepts de moi idéal, d’idéal du moi et
la pulsion s’intriguent grâce à son schéma optique. Celui-ci est fait de trois
registres : le réel (R), l’imaginaire (I) et le symbolique (S). Pour Lacan, le réel
correspond à la perception des sensations réelles. Le R renvoie aux objets
de la pulsion orale, anale, phallique, etc. L’imaginaire renvoie vers l’image
du corps reflétée sur le support du moi et le symbolique est équivalent au
nom du sujet.

Bibliographie
Askenazy-Gittard, F., & Darcourt, G. (2012). Initiation à la psychanalyse freudienne.
Ellipses.
Freud, S. (1958). Abrégé de psychanalyse. Coll. « Bibliothèque de psychanalyse ». Presses
universitaires de France.
Laplanche, J., & Pontalis, J. -B. (2007). Vocabulaire de la psychanalyse. Presses uni­
versitaires de France.
Quinodoz, J. -M. (2004). Lire Freud (1re éd.). Presses universitaires de France.

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4 Recueil des données
cliniques
La sémiologie pédopsychiatrique est un art. Il s’agit d’un ensemble de
techniques par lesquelles le thérapeute collige, cerne, organise ou classe les
symptômes du patient objectivés pendant son entretien clinique. « Le but
de l’entretien clinique est double, concomitance d’objectifs que l’on doit
toujours garder à l’esprit. C’est d’abord un objectif d’évaluation dans les
divers domaines de la clinique psychiatrique de l’adolescent (sémiologique,
nosographique, psychopathologique, psychodynamique, individuel, inter-
individuel, familial…). C’est aussi un objectif thérapeutique : du fait du
dévoilement, de l’énonciation, des tentatives de clarification des diverses
difficultés et symptômes, les entretiens peuvent avoir un effet thérapeutique
certain. » (Marcelli, 1999) Il découle de ce qui précède que le thérapeute est
un technicien ou un artiste. Il recueille et trie les informations cliniques
obtenues auprès du patient et de son entourage. La technique sémiologique
s’affine avec l’expérience, c’est-à-dire avec le temps et le nombre de patients
rencontrés.
Chaque examen clinique est une occasion pour le thérapeute et le patient
de se rencontrer. De manière singulière, l’entretien clinique permet au thé-
rapeute de questionner le patient et son entourage sociofamilier, et de se
questionner lui-même constamment. L’objectif de cette rencontre est d’évi-
ter de les frustrer, de ne pas les mettre mal à l’aise et de ne pas projeter sur
eux la charge émotionnelle du thérapeute.
L’investigation pédopsychiatrique n’est pas un interrogatoire policier, un
procès de jugement, ni une recherche d’aveux. Le thérapeute n’est pas là
pour juger, prendre position entre le patient et ses parents. Il est là pour
aider le patient à aller mieux. Très exactement : « L’approche sémiologique
aura d’abord pour but l’établissement d’un pronostic. À l’intérieur d’une
classification “classique” des troubles mentaux en névroses, psychoses, états
limites, le clinicien pourra affiner un diagnostic précis de trouble mental,
pour construire une première représentation globale de l’univers mental du
sujet observé et du type de problèmes auxquels il est confronté (nature des
angoisses, types de conflits, types de mécanismes de défense, modalités de
relation d’objet). » (Ciccone, 2018) La technicité du thérapeute lui permet
de recueillir des informations capitales pour poser le diagnostic et proposer
une prise en charge adaptée aux besoins du patient.
La suite de ce chapitre apporte quelques éléments, considérations ou
astuces techniques en ce qui concerne la manière de mener un entretien
clinique.

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


Il a été
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26 Outils du clinicien

De la théorie à la pratique
« De la théorie à la pratique », voilà un titre qui pourrait sembler préten-
tieux. Pour développer ce chapitre, nous nous sommes posé certaines ques-
tions comme : « Quelles compétences ou stratégies le thérapeute devrait-il
avoir lors de son entretien ? », « Comment arriverait-il à contourner les
difficultés liées à l’entretien clinique ? », « Est-ce que tous les entretiens cli-
niques devraient être menés de la même façon ? », « Comment rencontrer le
patient ? » ou « Qu’est-ce que le thérapeute doit mettre en place pour rendre
plus facile une rencontre clinique ? », « Du patient ou du thérapeute, qui
devrait faire le premier pas vers l’autre ? », « Comment se montrer le garant
du cadre et tenir jusqu’au bout ? », « Qu’est-ce qu’un entretien clinique va
nous apprendre ? », etc.
Voici quelques éléments de réponses à ces questions.

Début d’une évaluation pédopsychiatrique


Patient et sa famille collaborant avec le thérapeute
L’évaluation pédopsychiatrique commence quand le patient ou sa famille
font le premier appel. « C’est certes un entretien informatif, mais c’est
aussi un moment où la pathologie conflictuelle, la dimension pulsionnelle
sont volontiers dévoilées, d’autant qu’il s’agit de la première rencontre
avec un psychiatre. Ce premier entretien est souvent pris dans l’urgence
des symptômes et la pression d’une demande instante à les faire cesser. »
(Ciccone, 2018) Le premier contact avec le patient est capital pour la suite
de la prise en charge. Cet appel est souvent fait dans l’urgence, le stress,
l’angoisse ou l’appréhension de rencontrer le pédopsychiatre. Il est alors
important de prendre le temps d’écouter, de recevoir et de comprendre la
demande du patient. Bien que nous revenions sur cette question du premier
appel dans la deuxième partie de ce guide consacrée à l’anamnèse clinique,
nous tenons à souligner les différents dispositifs ou aménagements à faire
lors de la rencontre avec le patient.
Plus exactement, l’évaluation des adolescents doit être différente de ce
que l’on peut faire avec les enfants. Par exemple, les adolescents n’ont pas
toujours besoin de la présence de la famille ou d’autres adultes (comme les
éducateurs, les assistants sociaux, etc.) lors de l’entretien, ce qui n’est pas le
cas pour les enfants et les bébés. Il est fortement conseillé d’adapter le cadre
d’accueil à la catégorie chronologique du patient.
Lors de la prise de ce premier rendez-vous, le thérapeute doit s’assurer que
le patient a eu toutes les informations concernant ce rendez-vous : l’adresse
physique du lieu de consultation, les formalités administratives à remplir (si
possible le coût de la consultation), les différentes modalités de traitement
ou de prise en charge qu’offre le service, la spécialité du thérapeute. Il faut
surtout éclaircir la demande de bilan pédopsychiatrique.

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Recueil des données cliniques 27

Le premier rendez-vous est capital pour le thérapeute. C’est au cours de


celui-ci que le thérapeute arrive à mettre en place les premiers jalons d’une
alliance de travail et, par la suite, l’alliance thérapeutique. Le thérapeute
doit se dire qu’il n’a que cette unique chance pour arriver à communiquer
ou à susciter chez le patient et sa famille le besoin ou le désir de revenir au
prochain rendez-vous. Ceci est d’autant plus pertinent quand il s’agit de
patients adolescents qui demandent une grande mobilisation de la part du
réseau ou des adultes afin de les faire venir à une première séance.
En bref, le thérapeute doit être proactif quand il évalue la demande du
bilan pédopsychiatrique. Le temps qu’il offre à ses patients est capital. Il a
tout intérêt à faire fructifier ce moment, puisqu’il est hautement probable
qu’il ne revoie plus le patient.

Refus des soins par le patient ou ses parents


Il arrive que le patient ou ses parents refusent de venir aux rendez-vous
proposés. « Quelle qu’en soit la cause, le refus d’un parent complique la
tâche du consultant dans la mesure où, d’une part l’adolescent peut utiliser
ce refus comme paravent pour ne pas s’impliquer lui-même, d’autre part
la situation risque d’aboutir à une coalition parent présent – adolescent –
consultant contre celui qui s’est exclu. » (Marcelli, 1999) Le refus de soin
nous invite à bien analyser la situation familiale, la provenance, le type ou la
qualité de la demande. Comme nul n’est censé ignorer la loi, le thérapeute
est tenu de protéger le patient. Le refus des soins est évalué minutieusement
et, le cas échéant, le thérapeute doit signaler le refus à l’ensemble du réseau
ou à la personne qui a conseillé la demande de bilan pédopsychiatrique. Il
arrive que le thérapeute signale le refus de soin aux autorités compétentes,
afin de prendre des mesures adéquates.
Si la vie du patient est en danger, le thérapeute ou les autres instances
judiciaires peuvent contraindre le patient ou sa famille à accepter les soins
(en ambulatoire ou en hospitalier). « Quand le refus de l’adolescent semble
massif et persistant, c’est le travail du consultant, en fonction des infor-
mations données par les parents et de l’évaluation présumée de la qualité
des interactions familiales compte tenu du récit parental, de proposer
d’éventuelles mesures plus ou moins contraignantes : appel au juge des
mineurs ; hospitalisation sous contrainte ; mesures éducatives diverses. »
(Marcelli, 1999) En effet, la justice peut être un moyen de recours pour
amener le patient adolescent à consulter. Il est toutefois recommandé au
thérapeute d’user de ses ressources et de ses compétences techniques pour
convaincre ou faire changer d’avis l’adolescent qui refuse de se soigner.
Il serait également pertinent de s’appuyer sur les différents acteurs de la
vie socioculturelle (coaches sportifs, éducateurs, enseignants, amis, voisins,
etc.) pour que l’adolescent accepte de se faire aider. Il faut absolument évi-
ter de faire croire à l’adolescent ou au patient que nous sommes les seuls

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28 Outils du clinicien

capables de lui apporter de l’aide, ou que notre proposition est bien meil-
leure que toutes celles que les autres acteurs de sa vie peuvent lui proposer.
En fait, le refus de soin peut avoir d’autres significations au sein de
la famille et il incombe au thérapeute de chercher son sens implicite.
« La velléité de refus d’un des parents (dans l’expérience clinique, il s’agit
presque toujours du père) peut témoigner de son besoin d’affirmer un
“pouvoir”, une “autorité” qu’il craint de voir lui échapper ou de sa crainte de
confrontation avec un médecin psychiatre, surtout s’il a déjà consulté pour
lui-même (dépression, alcoolisme, maladie mentale ou autre). » (Marcelli,
1999) Peu importe qu’il s’agisse d’envie d’affirmer son pouvoir ou son
autorité, le refus de soin peut être lié à une situation ou à un conflit intrafa-
milial. On ne refuse pas une aide sans raison. Explicite ou non, cette cause
doit être recherchée. Souvent, les familles peuvent se braquer par crainte ou
manque d’informations. Les parents peuvent se demander à quoi servira
cette consultation. La consultation en soi peut réactiver les angoisses, les
stress, les traumatismes, les conflits, bref les émotions que les membres de
la famille n’aiment pas revivre. Ce refus de soin peut alors être compris
comme étant un manque d’informations de qualité, soit parce que les
parents ont eux-mêmes des difficultés psychiques, soit parce qu’ils rencon-
trent des difficultés à voir celles de leurs enfants, etc.
Enfin, le refus de soin est à prendre avec sérieux. Le thérapeute examine
dans quels cas ou dans quelles conditions il peut accompagner ou amener
le patient et sa famille à venir sur le long cours ou une seule fois.
Il peut paraître étrange qu’un thérapeute appelle un adolescent ou un
enfant, qu’il n’a jamais rencontré physiquement, « le patient ». Oui, il est
« le patient » à la seconde où il est informé.
De même, il devient un patient quand un dossier à son nom est ouvert,
quand le thérapeute s’entretient avec lui ou son représentant légal, ou
encore quand il est informé d’un rendez-vous au cabinet. Rappelons que
plusieurs raisons citées plus haut peuvent être la cause de son refus de venir
rencontrer le thérapeute.

Observation participante
La pédopsychiatrie est une discipline médicale. Elle est de ce fait une science
et un art. On peut faire un lien entre la broderie artisanale et la technique
d’évaluation sémiologique. Peu importe le type de questions que l’on a
envie de poser ou qui semblent importantes à poser, le thérapeute doit se
laisser guider par le patient ou ses parents. Lors de l’entretien, le thérapeute
est comparable à ce fil que les grands-mères utilisent et qui se laisse guider
par l’aiguille lors du tricotage d’un bonnet ou d’une paire de gants.
Le thérapeute rebondit, reprend, ramène, propose, bref, il visite et revisite
toute la symptomatologie du patient sans précipitation, mais en faisant ce

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Recueil des données cliniques 29

double travail de réflexion sur ce dont l’informe le patient et sur ses propres
pensées et ressentis. Cette observation repose « sur l’implication de l’obser-
vateur dans la situation observée » (Ciccone, 2018). Conduire un entretien
clinique revient pour le thérapeute à accepter d’être observé pendant que
lui-même observe l’autre. Jongler avec ces différentes possibilités d’observa-
tions lors d’un entretien n’est pas facile.
Habituellement, on peut constater trois situations d’observations cli-
niques pendant un entretien pédopsychiatrique :
• le thérapeute qui observe le patient ou son entourage ;
• le thérapeute observé en train d’évaluer le patient ou de mener l’entretien
clinique ;
• le duo patient-thérapeute qui interagit (dans une optique de porter un
regard méta sur ce qui se passe ou se noue et se dénoue entre eux).
Ces trois observations cliniques qui viennent d’être énumérées ne font
pas l’objet d’un développement dans ce guide parce qu’elles sont plus utiles
quand on parle de psychothérapie que de sémiologie pédopsychiatrique.
Par ailleurs, la démarche sémiologique va au-delà de ces observations. Ce
qui importe, c’est la manière de réaliser cet exercice clinique. Que l’on soit
du côté de l’observateur ou de celui de l’observé, le thérapeute applique
cette gymnastique mentale afin de passer entre ses diverses positions.
Pour réussir cette gymnastique, le thérapeute adapte ses questions
ouvertes, semi-ouvertes et semi-directes à l’âge et à la problématique du
patient. Il doit éviter de suggérer des réponses au patient. Il faut également
éviter des termes vagues et flous tels que : « Ton père est maniaque ? »,
« Ta sœur est dépressive ? » ou « Ta mère est bipolaire ? », « Es-tu souvent
angoissé ? », C’est toi qui as déchiré le carnet de Jules ? », « Parle-moi de tes
affects ou de tes pulsions », etc.
Les termes et les expressions techniques des professionnels ont souvent
une autre signification ou connotation dans le langage courant. Il faudrait
éviter d’utiliser le jargon « psy » et adapter au mieux le discours au niveau
de compréhension du patient ou de ses accompagnants. Si le patient et
son entourage utilisent les terminologies pédopsychiatriques ou psycha-
nalytiques, le thérapeute doit essayer de comprendre par le biais d’exem-
ples ce qu’ils veulent lui communiquer. Le thérapeute se doit de déplier
les informations qu’il reçoit. Il doit expliciter et clarifier les propos de ses
interlocuteurs.

Technique d’évaluation par des questions ouvertes


Le thérapeute pose des questions qui permettent au patient de formuler
des phrases ou de s’exprimer largement. Les questions ouvertes donnent
la liberté au patient de donner un sens, voire plusieurs, à ses symptômes.
« Ce foisonnement du sens rend certaines séances plus riches et plus
instructives que les résultats des meilleures procédures d’observation,

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30 Outils du clinicien

même pour décrire et préciser la nature et la fonction des symptômes. »


(Brusset, 1999) Par exemple, il peut lui demander : « Parle-moi de toi, de
tes amis », « Que fais-tu quand tu as peur ? », « Veux-tu bien m’éclaircir
sur ce sujet ? », « Je n’arrive pas bien à te suivre, tu veux bien m’en dire
davantage ? », « Comment cela t’est-il arrivé ? »

Exemples des phrases à éviter ou questions que le thérapeute doit


bannir de ses expressions
« Je te comprends… », « Je sais ce que tu ressens… », « Je vois ce que tu
veux me dire à ce sujet », etc. Nous déconseillons vivement au thérapeute de
donner l’impression de savoir par avance ce que le patient tient à lui dire ou à
exprimer. Les phrases suivantes sont à proscrire : « J’ai validé l’investissement
physique de mon patient », « Je lui ai dit que son maquillage était bon » » « J’ai
fait remarquer à mon patient qu’il était temps de montrer à son entourage son
investissement physique par son accoutrement vestimentaire… », etc.
Modèles de phrases à dire aux patients
« Permets-moi de bien comprendre, s’il te plaît », « Peux-tu répéter pour que
je puisse bien l’entendre ? », « J’essaie de m’imaginer cette colère, ta souf-
france, mais peux-tu m’aider à y arriver, etc. ? », « Je n’arrive pas m’imaginer
ce que cette situation a suscité en toi » ; « Veux-tu bien me parler des émo-
tions que tu as ressenties à ce moment-là ? » ; etc.

Il ne faut pas s’aviser de donner des leçons de psychologie aux patients


ou à leurs parents. Ce n’est pas en fournissant trop d’explications au patient
que le thérapeute établit un bon lien avec lui ni une meilleure alliance de
travail ou thérapeutique. Il est préférable de rester attentif au matériel qu’il
apporte.
Pour mener à bien un entretien, certains auteurs suggèrent que : « la
première partie devrait être non directive. Cela vous aidera à établir une
relation et à apprendre quels types de problèmes et de sentiments dominent
dans les pensées de votre patient. » (Morrison, 2018) La suite de l’entretien
peut devenir plus directive selon que le patient apporte du matériel ou selon
le besoin du thérapeute à vouloir éclaircir certaines notions ou hypothèses
qu’il a eues en tête.

Technique d’évaluation semi-directe ou semi-ouverte


Le thérapeute pose des questions tout en laissant du temps au patient pour
qu’il lui apporte des matériels cliniques. Les questions orientées accordent
du temps nécessaire au patient pour qu’il puisse réfléchir ou réagir aux
sollicitations du thérapeute. Voici quelques exemples des questions semi-
directes ou orientées : « Penses-tu qu’il avait écouté ta proposition ou ta
demande ? », « Pourquoi à toi seulement ? », « Existe-t-il d’autres personnes
concernées ? », « Veux-tu jouer, dessiner, me raconter une histoire ? »,

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Recueil des données cliniques 31

« Avec qui es-tu venu ? », « Qui est la personne qui t’accompagne ? », « À qui
parles-tu de tes souffrances ? », « Quel est ton rôle dans ce groupe d’amis ? »,
« Que ressens-tu à ce sujet ? » ; etc.
Technique d’évaluation directe ou fermée
Elle consiste à poser des questions claires, courtes, nettes et brèves au
patient, des réponses courtes et précises étant attendues en retour. Le thé-
rapeute peut demander par exemple : « L’as-tu vu, oui ou non ? », « Es-tu
sûr de ce que tu me racontes ? », « Est-ce que tu étais présent à l’école hier
ou cette semaine ? », « Penses-tu être prêt ou pas encore ? », « Es-tu triste,
en colère, fatigué, énervé ? », « Demandes-tu de l’aide quand tu n’y arrives
pas ? », « De qui penses-tu être le plus proche dans ta famille ? », « Entre ton
père et ta mère, avec qui penses-tu être le plus complice ? », etc.
Autres techniques d’entretien
Il existe une multitude de techniques pour mener un entretien clinique.
Cela dépend du cursus académique du thérapeute, de ses compétences et
de ses expériences théoriques et pratiques, de sa souplesse dans les « inter-
visions » et supervisions avec les pairs ou les formateurs, de sa créativité,
de son implication, etc. Bref, il n’y a pas une meilleure manière de mener
un entretien clinique. Un bon entretien clinique est un entretien qui
permet au thérapeute et au patient d’atteindre un objectif déterminé, ou
lorsque le thérapeute apporte de l’aide au patient par sa fonction alpha.
À la fin de chaque entretien, le patient est censé sentir ses symptômes
apaisés. Le thérapeute apprend également et se perfectionne auprès de
ses patients.
La liste des techniques étant exhaustive, voici quelques techniques
d’entretien détaillées.
Épisode narratif
Dans l’objectif d’obtenir assez d’éléments cliniques, le thérapeute aide le
patient à déplier ses épisodes narratifs. Les faits, les interventions, les ressen-
tis des uns et des autres sont examinés avec finesse. Le thérapeute cherche
l’affect dans la narration. Il peut demander au patient : « Comment ta mère
s’est-elle sentie quand tu lui racontais cette scène ? » Le thérapeute invite le
patient à dépister, à expliciter ses propos, ses ressentis, ses affects, etc.
Focalisation des affects
La focalisation des affects demande de la part du thérapeute d’orienter son
entretien sur les affects présents durant la séance. Cette technique dite de
focalisation des affects est plus usitée en thérapie fondée sur la mentalisa-
tion (Mentalisation Based Therapy – BMT). Le thérapeute essaie de se cen-
trer sur ce qui est en train de se passer dans la séance. Il reste focalisé sur
le moment présent de la séance. À plusieurs reprises, il doit infirmer ou
confirmer ses hypothèses en obtenant une validation de la part du patient.

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32 Outils du clinicien

« Est-ce exact si je dis que tu t’es senti trahi à ce moment-là ? », « Quand tu


me parles de ces événements, j’ai l’impression que tu étais très en colère.
Est-ce que c’est vrai ? », « Qu’est-ce que ça t’a fait ressentir ? », « As-tu envie
à ce moment-là de pleurer ? », « Ressens-tu de l’amertume ? », etc.
Mentalisation de soi et de l’objet
Il est important d’aider le patient à se mentaliser lui-même ainsi que l’autre.
Des phrases telles que : « Si j’étais à ta place, je me sentirais très frustré
devant les réponses de ta mère ! », « Si je peux me permettre de penser
à voix haute, ton histoire est de celles qui donnent la chair de poule »,
« Comment arrives-tu à savoir ce que dira ton père (ou ta maîtresse) ? »,
« Te demandes-tu ce qu’ont pensé tes amis de te voir agir comme ça ? » ou
« À ta place, j’aurais besoin de me blottir dans les bras de papa ou de maman
pour ne plus avoir peur, pas toi ? », « C’est très perturbant de se retrouver
dans cette situation », « Qu’as-tu compris des reproches de tes camarades
de jeu ? », « Mais dis-moi, pourquoi t’ont-ils laissé seul ? », « Pourquoi ta
copine t’a-t-elle quitté ? », « Qu’est-ce qui fait que tu sois toujours parmi les
élèves que la maîtresse punit ? », « Je n’arrive pas à me mettre à la place de
ta mère ou ton père », « Si je peux me permettre d’imaginer ce que pense
ton grand frère de ton geste, je ressens de la peur et de la nervosité » ou
« À quoi penses-tu quand tu deviens irritable ? », « Peux-tu t’arrêter juste
une minute avant que ta colère éclate ? », etc.
Validation empathique
La technique a pour objectif d’aider le thérapeute à confirmer ou non ses
hypothèses, tout en offrant au patient le libre choix de valider les affects,
émotions, sentiments, pensées, idées, voire les propositions échangées
durant l’entretien. Le thérapeute se met dans une observation ostentatoire.
Par exemple, il demande au patient : « Si j’ai bien compris, tu as la rage ou
tu ressens de la haine, de la tristesse, de la colère, quand les autres refusent
de jouer avec toi à la récréation ? », « Ai-je bien saisi que c’est toi qui l’avais
provoqué en premier ? », « Serais-tu d’accord avec moi si je te dis que la
réponse de ton ami était déplacée ? », « Tu te sens triste, c’est juste de dire
ça ? », « Est-ce que ma formulation de tout à l’heure te convient ? », « Es-tu
d’accord avec moi pour changer de sujet et travailler sur d’autres choses, par
exemple sur la question de ton manque de sommeil ? », « Qu’est-ce que tu
dirais si on se fixait un autre rendez-vous dans la semaine ? », etc.
« Tierciser » le patient
Cette technique consiste à parler du patient en utilisant la troisième per-
sonne du singulier. Par exemple, le thérapeute lui dit : « Qu’est-ce que cela
veut dire à Alex ? », « Qu’est-ce que ferait Léo quand il est en colère ? »,
« Qu’est-ce que dirait Yannis devant cette situation ? », « Peut-on s’imaginer
que Gustave ait eu peur ? Ou qu’il soit en colère ? Ou qu’il ait envie de sortir
jouer avec ses copains ? », « Peut-il avoir besoin d’être câliné par sa mère ? »,

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Recueil des données cliniques 33

« Se pourrait-il que Noé se sente triste, nul, déçu, incapable, malheureux,


etc. ? », « Qu’est-ce que cette envie de mourir signifie pour Jonathan ? »,
« Suis-je devant un garçon qui a du mal à parler avec ses copains de
classe ? », etc.
Partage des affects
Le thérapeute essaie d’expliciter ses propres ressentis affectivo-émotionnels.
Techniquement, il prête son appareil à penser et son appareil affectif au
patient dans le but de l’aider à entrer en contact avec lui-même. Le clini-
cien doit se garder de rester authentique et plus à l’écoute de ses propres
émotions et affects.
Il peut demander au patient : « Est-ce qu’il y a une façon de t’aider ? »,
« Ce que tu me dis me touche, j’ai les larmes aux yeux comme tu peux le
voir. » Il est très important de rester authentique et de ne pas enjoliver ses
ressentis ou ses émotions. Le thérapeute explicite ses émotions pour éviter
de tomber dans le trop-plein face à un récit rempli d’émotions. Nous lui
conseillons d’expliciter les affects, les émotions, les réactions et les ressentis.
On explicite tout ce qui se joue dans la séance du côté du thérapeute, du
patient ou de ses accompagnants. Le thérapeute revient sur le déroulement
de la séance afin d’évaluer ce que lui et le patient en ont retenu. Qu’est-il
est important de garder ou de retenir ? C’est comme si le thérapeute faisait
une synthèse de la séance et cela permet de créer une alliance de travail et
une alliance thérapeutique avec le patient.

Subtilités et différences à considérer


au cours d’un entretien clinique
Après avoir abordé la manière de poser des questions aux patients ou à leurs
proches, voici quelques spécificités de l’approche clinique quand il s’agit
d’un patient plus jeune (un bébé) ou un adolescent.

Spécificité de l’évaluation des bébés ou des patients


du premier âge
La sémiologie clinique des bébés est très particulière. Elle a des propriétés
qui lui sont propres. Ces dernières font qu’elle se démarque de la sémiolo-
gie de l’enfant, du grand enfant et de l’adolescent. Tout s’enracine dans le
développement du bébé. Comment le nouveau-né va-t-il s’inscrire dans la
communauté des humains à l’aide de ses parents et surtout de son care­
giver ? Quand le thérapeute reçoit un patient de cette tranche d’âge, il doit
se rappeler les quatre propriétés suivantes.
Évaluation interactive
Tout au long de ce guide, nous essayons de montrer combien il est néces-
saire que le couple patient-thérapeute soit actif, et que chacun interagisse.
Le thérapeute ne doit pas se limiter à recueillir des informations cliniques

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34 Outils du clinicien

par l’observation du patient. Il doit également inclure les parents ou les


accompagnants du patient. Certains auteurs ont trouvé que « l’étude des
interactions ne peut pas se limiter à celles que les cliniciens observent,
mais doit s’élargir à celles qu’ils engagent avec le bébé et les parents. Si
le clinicien demeure un observateur immobile, immuable aux tentatives
de questionnement et d’établissement de contact, il risque de devenir un
personnage inquiétant pour l’enfant. » (Disnan & alvarez, 2010) Le parent
est un appui et un personnage important qui facilite la familiarisation du
thérapeute avec le patient.
En fait, nous verrons plus loin les autres stratégies pour mener un entre-
tien clinique. Laissez-moi souligner que tout devrait se passer comme un
jeu entre le thérapeute, le patient et sa famille. Car « l’engagement dans
un jeu avec l’enfant et ses parents peut contribuer à la mise en scène et à
l’élaboration de leur vie fantasmatique, permettant ainsi la coconstruction
d’un cadre de consultation où l’intime pourrait se partager et où le lien
thérapeutique pourrait se tisser. » (Disnan & alvarez, 2010) Cela dit, nous
montrons plus loin, dans le paragraphe sur les préalables d’un entretien
clinique, combien il est conseillé de voir le patient jeune avec ses parents.

Évaluation tenant compte du contre-transfert


Le transfert et le contre-transfert font partie des éléments essentiels et cen-
traux de la rencontre avec le patient. Peu importe son âge chronologique,
le patient transfère une partie de ses affects, impressions, attitudes, sentiments,
croyances, etc. sur son thérapeute. En réponse au transfert, le thérapeute fait
du contre-transfert sur le patient. Le principe transfert et contre-transfert
est comparable à celui retrouvé dans les équations symétriques des mathé­
matiques : à chaque flèche « aller » correspond une flèche « retour ». Ces
deux concepts sont bien développés par différents théoriciens et auteurs
comme Freud, Lacan, Hélène Brunschwig (2001), Jacquelyne Brun (2001),
Collette Jacob (2001), etc.
Pour ce qui concerne l’évaluation clinique des enfants d’un âge plus
jeune, le contre-transfert doit être pris dans un sens plus élargi. Il ne s’agit
pas seulement de se limiter à la relation thérapeute-patient, mais plutôt
l’étendre à tous ceux qui sont dans l’environnement du bébé. Ainsi,
« le contre-transfert, dans ses registres de contre-attitudes, de partage d’émo-
tions, voire d’empathie, apporte une foule d’informations sur ce que peut
être le ressenti du bébé, éprouvé, qu’il ne peut pas encore mettre en mots »
(Disnan & alvarez, 2010) et se révèle très bénéfique dans cette évaluation.
À partir de ce contre-transfert, le patient reçoit les échos de son transfert.
Il s’ajuste et communique davantage à son thérapeute et ainsi de suite.

Évaluation situationnelle
Les informations cliniques à rechercher dans l’anamnèse repositionnent ou
situent le cadre de la rencontre clinique. L’anamnèse du patient et de sa

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Recueil des données cliniques 35

famille (cf. partie II), apporte des éléments clés au bénéfice de la rencontre
clinique. Il s’agit alors de décrire « tous les aspects de la situation originaire
faisant appel à la richesse et à la complexité de l’avènement d’un enfant.
Ainsi, le clinicien accueille tant l’intégralité de la réalité actuelle, y compris
biologique et sociale, de l’enfant, de sa fratrie, de ses parents et de sa famille,
que l’intégralité des événements, si minimes qu’ils soient, qui auraient pu
jouer un rôle dans l’apparition, l’évolution, l’aggravation ou la disparition
des signes et symptômes du tableau clinique allégué. » (Disnan & Alvarez,
2010) Le thérapeute devrait prendre et accorder le temps suffisant à ses
patients afin de bien tracer les contours de son évaluation. Cette notion
situationnelle rappelle combien la recherche anamnestique ne devrait pas
être réalisée à la hâte. Le clinicien devrait se donner le temps nécessaire
pour aborder tous les aspects de la vie du patient.
Évaluation historicisante
L’anamnèse plante toujours les premiers jalons de la rencontre clinique.
En pédopsychiatrie, il est important de se souvenir que « le bébé advient,
ontologiquement, anthropologiquement, à l’intérieur d’un tissu d’huma-
nité qui, ayant précédé sa conception, fournira le substrat relationnel à la
construction de son être somato-psychique. De cette manière, nous devons
nous soucier de la rencontre de l’histoire de l’enfant, si courte qu’elle puisse
être, avec l’histoire de ses parents, dans un travail de mise en récit d’une his-
toire neuve, qui intègre, élabore, différencie et donne du sens aux scénarios
du passé et aux événements du présent. » (Disnan & Alvarez, 2010) En fait,
tout ce travail ne peut être possible que si on se laisse réellement le temps
de rencontrer les patients et leurs parents, leur donnant l’opportunité de
raconter leur propre histoire.

Spécificité de l’évaluation des adolescents


L’évaluation des adolescents a une particularité qui la distingue du reste
de celle des enfants et des bébés en pédopsychiatrie. Le thérapeute doit
chercher à surprendre l’adolescent lors de l’évaluation. Par exemple, il lui
demande : « Parlez-moi de vous ». Cette question permet au thérapeute
de poser les premiers jalons sur la structure psychodynamique du patient
adolescent.
Quand on lui pose cette question : « Parlez-moi de vous », le thérapeute
peut entendre trois types de réponses selon la psychopathologie du patient :
• le patient qui a un fonctionnement structurel psychodynamique du type
névrotique peut commencer par parler de lui-même, de ses passe-temps, de
sa scolarité, de ses activités scolaires et parascolaires, ses amis, sa famille, de
son réseau social, de ses conquêtes, etc. ;
• le patient qui a un fonctionnement structurel psychodynamique du type
psychotique montre une désorganisation, est plus perturbé ou décompensé
dans le sens où il perd le contrôle et donne des réponses étranges et bizarres.

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36 Outils du clinicien

Il est plus dans la projection, la persécution, les acquisitions ou, tout simple­
ment, il a de la peine à répondre ;
• le patient qui a un fonctionnement structurel psychodynamique du type
borderline donne des explications qui vont dans tous les sens. Il se disperse
et ses réponses sont difficiles à cerner. Pour autant que le psychotique est
insaisissable, le borderline est plus vague et dispersé.

Remarque
Lors de l’entretien, le thérapeute devrait être plus créatif, malléable, très à
l’écoute ou attentif à ce qui vient de lui-même et du patient. La psychanalyse
nous apprend beaucoup de choses. N’est-ce pas que l’analyste s’écoute soi-
même en écoutant le patient ? Plus encore, à l’image de Lacan, l’analyste
écoute le sujet parlant ou le sujet de l’inconscient du patient, de son propre
inconscient et de l’inconscient partagé entre deux. Cela dit, le thérapeute
peut utiliser des exemples, des anecdotes, des histoires ou contes, des adages
ou proverbes et maximes, des connaissances culturelles, religieuses, scienti-
fiques, etc. pour arriver à s’accorder avec le patient. Ces différents moyens ou
médiations ont pour but de permettre au patient d’expliciter, de verbaliser, de
laisser entendre, d’exprimer les affects, émotions, pulsions, angoisses, désirs,
fantasmes, etc., la finalité étant de l’amener à élaborer les éléments de son
monde interne à l’aide de son histoire, ses symptômes, ses angoisses, etc.

Parfois, nous comparons l’entretien clinique à l’activité des pêcheurs de


poissons. On jette le filet et on reste patient. Le pécheur attend le bon moment
pour tirer son filet tout en évitant qu’un poisson ne s’en échappe. Au théra-
peute de jouer le jeu : patienter, observer attentivement et tirer le filet.

La sémiologie pédopsychiatrique :
une sémiologie médicale
Une chose reste vraie : nous n’allons pas répéter que la pédopsychiatrie est
une discipline scientifique et donc une branche de la médecine. La sémiologie
pédopsychiatrique répond aux critères généraux de la sémiologie médicale,
la discipline mère. L’objectif de cette sémiologie est de classer les maladies
ou les troubles en syndromes à partir des signes ou symptômes des patients.
Nous pouvons dire que « la perception visuelle est le fondement de la
clinique, comme mode de constitution des objets de connaissance et d’ins-
tauration d’une pragmatique de la communication qui évite le langage. »
(Brusset, 1999) À la lumière de quatre temps d’examen sémiologique (ins-
pection, palpation, percussion et auscultation), le thérapeute porte une
écoute affective, émotionnelle, verbale, comportementale, etc., au patient.
Le thérapeute doit se mettre à la hauteur du patient. C’est ce que nous
avions annoncé plus haut, le thérapeute devrait être en accord ou accordé

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Recueil des données cliniques 37

au patient. Ceci veut dire qu’il doit être en résonance affective émotion-
nelle, gestuelle et posturale avec le patient. La distance physique ou char-
nelle entre le thérapeute et le patient est contrebalancée par l’empathie du
thérapeute. Il doit aussi adapter son langage à celui du patient selon son
âge, sa langue parlée, le débit de ses phrases, son gestuel, etc. Le thérapeute
doit faire attention de ne pas entrer dans la séduction. C’est un véritable
exercice de communication polysensorielle comme l’a conseillé Meltzer
dans ses travaux des années quatre-vingt.
Par exemple, la prise de notes durant l’entretien ou en leur présence risque
de mettre le patient mal à l’aise. Il est important d’essayer de mémoriser au
maximum les informations lors des entretiens et les transcrire en deuxième
temps. D’autres patients, en revanche, seraient plus rassurés en voyant le
thérapeute prendre des notes au cours de l’entretien. Il est important de
s’accorder et de s’ajuster aux besoins de ses patients.
Un autre exemple est celui du froncement de la face, des mimiques ou
des expressions d’intonation : la position ou changement de position sur
son fauteuil, le regard, bref, toute la chorégraphie mimo-gesto-posturale et
verbale doit être accordée entre le thérapeute et le patient.

Le relationnel : base essentielle de la pédopsychiatrie


L’exercice d’évaluer nos patients diffère des autres activités scientifiques où
« l’observateur, derrière une caméra vidéo ou un miroir sans tain, observe
le comportement et la vie sociale d’un groupe d’enfants. » (Ciccone, 2018)
Faire l’exercice d’évaluation d’un status clinique ou l’examen pédopsy-
chiatrique est un chemin qui n’est pas toujours longiligne. Il arrive que ce
chemin soit sinueux, un chemin sans issue, un chemin pernicieux, etc. En
parcourant ce chemin avec le patient, le thérapeute devrait user de tact et
se montrer professionnel.
Pour que le patient se sente à l’aise et libre de penser ou de nous commu-
niquer ce qu’il a à cœur, nous proposons la règle de l’association libre. Étant
donné que « le dire sera central dans la méthode psychanalytique, l’associa-
tion libre des idées du côté du malade, l’attention flottante et l’interpréta-
tion du côté du médecin. » (Brusset, 1999) Ainsi, le thérapeute doit suivre le
patient sans rester rigide et sans le contraindre à répondre à ses questions.
Il s’agit d’appliquer la méthode hypothético-déductive. Le thérapeute garde
à l’esprit qu’il doit valider ses hypothèses au fur et à mesure de l’entre-
tien. Albert Ciccone (2019) parle de trois manières de rendre un entretien
thérapeutique : la décharge, le dévoilement et la contenance. En plus de
la validation ou de la vérification de ses hypothèses, le thérapeute devrait
se préparer à revenir sur son diagnostic. Associer librement ne concerne
pas seulement le patient, mais aussi le thérapeute. Cet exercice permet la
création ou l’obtention ou la mise en place d’une relation de confiance dite
la « relation thérapeutique ».

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38 Outils du clinicien

Cette relation thérapeutique nous rappelle combien l’évaluation ou


l’entretien pédopsychiatrie doivent reposer sur le relationnel. Il existe un
ensemble de concepts que nous appelons des facilitateurs de la relation
thérapeutique. Nous pouvons citer entre autres : la neutralité bienveillante,
l’attention flottante, l’alliance thérapeutique, l’alliance de travail, la capacité
négative, l’empathie, etc. La compréhension de ces concepts et leur mise en
pratique favorisent l’existence du lien relationnel entre le thérapeute et le
patient. Nous développons dans la suite les quatre premiers concepts et lais-
sons le soin aux lecteurs de lire les deux restants dans d’autres références.

Neutralité bienveillante
Le thérapeute doit avoir une attitude bienveillante et neutre. Cette capa-
cité rappelle ce que Bion conseille d’être sans mémoire, sans désir et sans
connaissance. « La neutralité bienveillante désigne une attitude où le psy-
chanalyste doit s’abstenir de tout jugement moral, ou de valeur, ne donne
jamais de conseils. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012) L’évaluation
clinique n’est, en aucun cas, un moment de porter un jugement de valeur,
un cadre pour faire valoir ses connaissances sur la vie et ses exploits de tout
genre, ou un temps pour imposer au patient une philosophie quelconque
ou lui faire accepter notre manière de voir ou d’appréhender le monde.
Le thérapeute n’est ni un éducateur, ni un travailleur social, ni un péda-
gogue, etc. Il a comme devoir d’évaluer les difficultés ou troubles psychiques
probables que présente le patient. De ce fait, il est invité à poser un diagnos-
tic et à proposer une prise en charge adéquate. La neutralité bienveillante
lui permet de garder sa casquette thérapeutique tout en se montrant empa-
thique et touché par le patient. Il se garde de s’écarter de son chemin, mais
doit faire preuve de la souplesse psychique dans ses associations, ses ques-
tions, ses interrogations pour comprendre au mieux les difficultés ou pro-
blèmes de ses patients.
La neutralité bienveillante consiste à savoir où est la frontière entre ce
qui appartient au thérapeute, ce qui est réveillé par ce que lui raconte le
patient, ce qui appartient au patient, ce qui appartient à un membre de la
famille, ou un ami, ou un proche du patient dans l’objectif de tout inté-
grer et lui fournir une explication cohérente conduisant vers une prise en
charge adéquate. La démarche psychodynamique est faite d’activités de tri,
de séparation, de clarification, d’intégration, de réunification, de rappro-
chement, de limitation, etc. Bref, ce travail requiert de l’énergie psychique
et de l’adaptation constante au patient.
La neutralité bienveillante n’est pas synonyme d’être silencieux du début
à la fin de l’entretien. Le silence du thérapeute est requis de temps en temps,
mais pas le long de la rencontre clinique. Un dicton africain dit qu’un sage
est celui qui ne dit pas un mot de trop quand on lui donne la parole. Le
thérapeute devrait être plus proactif, à l’écoute de tout ce qui se joue dans
la séance, et moins intrusif envers le patient.

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Recueil des données cliniques 39

Pour conclure ce point, nous dirons qu’« il est classique de dire que la
position clinique psychanalytique exige une “neutralité bienveillante”.
Mais dans l’expression “neutralité bienveillante”, c’est le terme “bienveil-
lante” qui est important. Il ne s’agit pas d’être neutre au sens d’“indifférent”
et “impartial”. La “neutralité” concerne simplement la nécessité de neu-
traliser les éléments contre-transférentiels qui font obstacle à la rencontre.
Mais la présence et la position d’écoute se doivent d’être actives et bienveil-
lantes. » (Ciccone, 2018)

Attention flottante
L’attention flottante est une notion essentielle qui mérite d’être prise en
compte dans notre travail clinique. Elle « décrit l’état du psychanalyste en
séance. Obtenir cet état demande une très grande pratique de la part de
l’analyste. Cela signifie qu’il doit laisser son esprit aussi ouvert autant que
possible à ce que suscitent en lui les paroles de son patient ». (Askenazy-
Gittard & Darcourt, 2012)
Si nous reprenons l’exemple du pêcheur, celui-ci ne jette pas son filet
n’importe où dans une rivière ou dans la mer. Du haut de sa pirogue, il
inspecte la rivière, observe le courant d’eau et le mouvement, reste attentif
et jette son filet. Après l’avoir fait, il ne le quitte pas des yeux. Le calme,
le silence, la sérénité, la patience, la rapidité et bien d’autres qualités lui
sont bénéfiques pour qu’il ne perturbe pas la vague des poissons qui se
dirigent vers son filet et puisse les attraper. De cette même façon, l’attention
flottante aide le thérapeute à garder le cap et rester réactif et proactif lors de
son entretien. La notion d’attention flottante complète celle de la neutralité
bienveillante du thérapeute.
Comme dit plus haut, la neutralité bienveillante et l’attention flottante
ne sont pas corollaires au silence tout le long de l’entretien. Le thérapeute
est observateur et observé à la fois. Au cours de l’entretien, nous devrions
montrer ou témoigner notre intérêt, notre empathie, notre capacité
réflexive sans être intrusifs ni brutaux, mais respectueux. Rappelons que
certains patients peuvent avoir autour d’eux des gens (amis, voisins, col-
lègues, etc.) qui peuvent leur témoigner une affection particulière ou non
en écoutant leurs souffrances. Cette attention cherchée ou obtenue auprès
des tiers est très différente de celle que le thérapeute leur accorde dans un
setting clinique.
En outre, nous savons que les proches du patient ne prennent pas la pos-
ture thérapeutique. La différence entre notre attitude professionnelle et
celle des voisins, familiers, amis, copains, amoureux, etc. des patients est
que notre posture de thérapeute nous permet de leur porter et de leur prê-
ter toute notre attention. Nous leur montrons que nous sommes affectés,
touchés, préoccupés, intéressés et surtout disponibles pour cheminer avec
eux dans la compréhension de ce qui se passe en eux. Pendant que leurs
proches profitent de moment où les patients racontent leurs difficultés à

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40 Outils du clinicien

parler d’eux-mêmes, ils ne peuvent pas leur témoigner leur empathie. Ils
peuvent se mettre à faire de la comparaison soit avec leur propre vie, soit
avec l’expérience des autres membres de la famille, amis ou voisins, etc.
Certains les jugent, les critiquent, ou dissipent leur ennui, car c’est peut-être
la énième fois que le patient leur raconte son histoire, etc.
Au cours de l’entretien clinique « il ne s’agit pas seulement, en effet, de
jeter des ponts entre notre pratique clinique et les modèles théoriques qui
ont pu être forgés par d’autres, ni même entre notre pratique clinique et
les repères théoriques personnels que nous pouvons nous donner ou nous
inventer à partir des modèles existants. Il s’agit, nous semble-t-il, comme le
fait le bébé, de faire converger sur un seul et même objet une pratique de la
relation à cet objet et une théorie de la connaissance de cet objet. Les choses
sont donc très ciblées, très focalisées. » (Golse, 2000) Ainsi, le travail d’éva-
luation ou d’entretien pédopsychiatrique est un tout. Il réveille en nous des
sensibilités selon la problématique de nos patients.

Recherche d’une alliance thérapeutique


avec le patient et ses proches
Le concept d’alliance thérapeutique vient compléter les deux concepts pré-
cédents : la neutralité bienveillante et l’attention flottante. Il est conseillé
au thérapeute d’éviter d’entrer en collision frontale avec le patient et ses
parents. Le rapport de force ne sert qu’à détruire l’alliance thérapeutique.
Celle-ci « représente un élément essentiel de l’examen clinique, car de sa
qualité dépend grandement la possibilité d’établir et de réaliser le projet
thérapeutique. » (Brunschwig, 2001) Il faut aider le patient et ses parents à
se faire une vraie perception de notre métier.
Par ailleurs, le parent a besoin d’être restauré et accompagné dans sa
parentalité. Le thérapeute doit se montrer empathique avec le patient par
identification sans se laisser submerger par les affects. Il faut garder à l’esprit
de diminuer à chaque occasion la tonalité émotionnelle à son plancher si
l’on se trouve devant les parents borderline. Pour aucune raison, le théra-
peute ne doit s’aviser de répondre aux attaques ressenties dans le trans-
fert ni du patient ni des parents. Il devrait rester dans les constantes des
faits et ne pas se précipiter pour verbaliser, donner des interprétations ou
« psychologiser » le parent, ni à tenir des propos à connotation jugeante.
Répétons une fois encore que le thérapeute n’est ni un juge, ni l’agent de
police, ni un éducateur, ni un enseignant, etc. Il doit se dire ou se présenter
comme un objet malléable et auxiliaire psychique tel que l’ont développé
Bion, Roussillon, etc.
En général, le thérapeute se comporte comme un catalyseur d’une réac-
tion biochimique ou chimique. De toutes les façons, si les parents sont sur
un versant narcissique, alors l’alliance entre le thérapeute et le patient est
mise en souffrance, d’où la créativité du thérapeute qui est nécessaire dans

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Recueil des données cliniques 41

le but de créer une belle alliance thérapeutique, qui est la base d’une prise
en charge conséquente et fructueuse.
Une des techniques qui facilitent la création de cette alliance thérapeu-
tique est la validation des stratégies mises en place par le patient pour
apaiser ses souffrances. Par exemple, pour un patient qui est envahi par
des idées suicidaires, le thérapeute peut valider dans un premier temps
la proposition du patient de passer plusieurs heures devant les écrans en
jouant aux jeux vidéo afin d’éviter des passages à l’acte autodommageable.
La question de dépendance ou non aux jeux est abordée ou analysée dans
un second temps.
Le thérapeute examine la présence ou non des croyances négatives sur
soi. Il s’agit d’une vraie analyse fonctionnelle dans le but de vérifier avant
de valider les différentes hypothèses fonctionnelles du patient. Continuelle-
ment, le thérapeute demande au patient, par exemple : « Qu’est-ce que tu as
compris de ce que nous venons de discuter ? » ou « À quoi cela t’a-t-il fait
penser ? ». Le thérapeute gagne énormément en adoptant une position de
non-savoir pour permettre à son interlocuteur de laisser émerger quelque
matériel clinique pouvant orienter la prise en charge.

Alliance de travail
L’alliance de travail est un point très central dans la prise en charge de nos
patients. Cette alliance est à ne pas confondre avec l’alliance thérapeutique,
le transfert, ou le contre-transfert. Il est à noter que cette alliance permet
au thérapeute de travailler avec ses patients, car leur fragilité narcissique
ne leur permet pas de demander de l’aide. L’alliance de travail se cocons-
truit durant l’évaluation. Le thérapeute identifie la partie saine et la partie
malade du patient (c’est-à-dire la partie non hypomaniaque, maniaque,
dépressive, psychotique, etc.). Il s’allie à la partie saine pour aller rencon-
trer ou soigner la partie malade. Il s’agit de transformer le patient en un
véritable allié.
Cette alliance n’est pas spécifique à une psychothérapie ni à un type
d’évaluation, son avantage est qu’elle permet d’avoir de bons résultats.
Elle contrebalance le transfert ou contre-transfert positif ou négatif en per-
mettant aux protagonistes des soins de se supporter mutuellement dans
l’objectif de travailler ensemble. N’est-ce pas le principe de : « un pour tous
et tous pour un » ?

Qualités d’une sémiologie pédopsychiatrique


On garde à l’esprit que la communication non verbale ou verbale, le lan-
gage émotionnel et comportemental du patient, etc., sont tous recher-
chés avec une finesse clinique. Le silence n’est jamais vide, le thérapeute
doit apprendre à tolérer l’absence de mots. Le silence vaut mieux qu’un
interrogatoire stérile et répétitif. « Les débutants ont souvent du mal à

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42 Outils du clinicien

supporter le silence. Ils estiment que chaque trou dans la conversation


doit être comblé avec des mots. Il est vrai que des pauses de plus de 10 ou
15 secondes peuvent donner l’impression que le clinicien est froid et cela
décourage certains patients. Cependant, les pauses plus brèves signifient
souvent que votre patient essaie d’organiser ses pensées pour la suite de la
discussion. » (Morrison, 2018)
Le thérapeute doit reformuler ses questions, les poser autrement et avoir
un enchaînement logique avec les informations que lui donne le patient.
Il rebondit sur les phrases, les mots, les gestes, les mimiques des personnes
présentes dans l’entretien, lui y compris, et surtout sur son propre ressenti
interne.
Ce rebondissement du thérapeute se réalise à l’aide de différents outils ou
références théoriques cliniques qu’il a dans sa boîte à outils. « Le tempo des
entretiens est au début particulièrement délicat à régler. Il s’agit de trouver
une sorte d’accord harmonique entre consultant et adolescent, qui évite le
double écueil d’un silence trop prolongé et d’un excessif bombardement de
questions. » (Marcelli, 1999)
Souvenons-nous de Bion qui nous invite à prendre le rôle d’auxiliaire du
moi en remplissant notre fonction alpha. Le thérapeute doit se questionner
continuellement, cherchant à savoir comment aider le patient à métaboliser
les matériels bruts qui émergent durant l’entretien. Nous devons rappeler
ici les diverses techniques de recueil des données que nous avons dévelop-
pées plus haut dans ce chapitre. Ces techniques constituent un socle pour
permettre au thérapeute de déplier avec le patient, de métaboliser ou de
transmettre quelques informations au patient.
Comment pouvons-nous aider le patient à métaboliser ce qu’il commu-
nique maintenant ou en rapport avec la séance précédente ? Cette question
fait appel aux deux notions développées dans ce guide qui sont : la libre
association et l’attention flottante, règles d’or dans une évaluation clinique.

Particularités de la clinique pédopsychiatrique


Nous abordons dans ce point diverses questions : la façon dont le théra-
peute devrait s’adresser au patient, le secret professionnel, la pertinence de
l’enregistrement vidéo et de la formation des thérapeutes ou des « inter-
visions » entre cliniciens, etc.

Comment s’adresser au patient ?


Certains collègues tutoient les adolescents, d’autres, en revanche, soutien-
nent qu’il est préférable de les vouvoyer. Certains thérapeutes continuent de
tutoyer leurs patients jusqu’à ce qu’ils ne soient plus au collège. Malgré ces
divergences, ce qui importe c’est que le patient se sente compris et écouté.
Il est judicieux et nécessaire que le patient réalise que ses ressentis, ses pro-
pos, ses souffrances sont considérés avec du sérieux par son interlocuteur.

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Recueil des données cliniques 43

« La psychanalyse a joué un rôle essentiel pour passer de l’interrogatoire à


l’entretien. Le diagnostic psychiatrique en deviendra d’autant plus difficile
à porter. Il ne s’agit plus seulement du repérage des signes caractéristiques,
mais aussi de l’observation des processus mentaux qui se manifestent dans la
parole et le langage d’un sujet et dans la communication avec lui. » (Brusset,
1999) Bien que les autres thérapeutes utilisent le « tu » en s’adressant aux
jeunes patients et adolescents, nous recommandons vivement d’utiliser le
« vous » quand on travaille avec les adolescents. Vouvoyer un adolescent
amène une autre considération dans le lien thérapeutique et relationnel.
Cette manière de recevoir les adolescents marque la différence entre la per-
sonne qu’il était hier et celle d’aujourd’hui.
Secret professionnel
Le thérapeute rappelle au patient qu’il est tenu au secret professionnel à
chaque occasion. Ce qui est très intéressant et nécessaire, c’est de commu-
niquer des informations justes, claires et nettes en des termes facilement
compréhensibles par le patient et sa famille. Comme nous l’avons dit plus
haut, le langage du thérapeute doit être adapté au niveau intellectuel, à
l’âge et contexte socioculturel et environnemental du patient.
Étant donné que le thérapeute doit rédiger un compte rendu, il est pré-
férable de le faire par écrit qu’à l’oral. Certains cliniciens conseillent de
leur transmettre un rapport en deux temps. Pratiquement, « un premier
contact, immédiat, qui informe que l’on a vu la famille, remercie le profes-
sionnel et donne quelques informations souvent inachevées, une première
consultation clinique devant plus souvent être considérée comme une
sorte de “flash” clinique ; un courrier plus détaillé peut être ensuite envoyé
lorsque le processus d’évaluation est achevé. » (Brunschwig, 2001) De toute
façon, l’accord du patient et de ses responsables légaux doit être obtenu par
avance. Il faut que la partie demandeuse de soin soit tenue informée des
avancées, des difficultés rencontrées dans l’évaluation, du reste d’examen
ou bilan complémentaire à faire, etc.
Enregistrements vidéo des entretiens cliniques
En fait, avant tout enregistrement audio ou vidéo, il est très recommandé
d’avertir et d’avoir l’accord du patient et de ses parents ou responsables
légaux. De préférence, un accord signé par le patient ou ses responsables
légaux devrait être requis. Le thérapeute doit prendre soin de bien noter
que les parties ont été informées et ont validé les éventuels usages dans le
futur pour des raisons de recherche clinique ou d’enseignement des jeunes
collègues.
Le setting systémique, lors des thérapies de couple ou des familles, fait
usage des enregistrements vidéo. Cette configuration thérapeutique permet
aussi aux thérapeutes formés ou en cours de formation d’observer, derrière
une glace sans tain, ce qui se joue dans la séance.

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44 Outils du clinicien

En fait, avant tout entretien de ce type, observé par des tierces personnes
ou vidéo enregistrée, il est vivement recommandé d’informer les patients
et ses parents. Les thérapeutes doivent recueillir l’accord des patients après
leur avoir fourni des explications en des termes clairs et adaptés.
La crise sanitaire de 2020 liée à la pandémie de coronavirus (Covid-19)
a introduit une autre disposition dans la prise en charge des patients. Les
entretiens en distanciel ont été menés dans la plupart des cas sous forme
de télétraitement à l’aide des applications webinaires (Zoom, Webex, Skype,
etc.) ou par téléphone. Ce nouveau dispositif est une raison de plus pour
que les patients et leurs parents soient informés de toute modification ou
tout remaniement afin qu’ils ne se sentent pas menacés, imposés ou sou-
mis à la volonté des thérapeutes. Lorsque les thérapeutes leur donnent des
explications à propos du cadre et du déroulement de la séance, ils doivent
par la même occasion demander si le patient et ses parents sont d’accord pour
que les enregistrements servent également à un usage formatif (enseigne­
ment universitaire, discussion sur les techniques d’entretien, etc.). « Cela,
en général, n’entraîne pas beaucoup de difficultés dans la mesure où les
gens ne se sentent pas soumis à des pressions, mais ont le sentiment de
collaborer à une œuvre utile. » (Houzel, 2018)
De son côté, Winnicott souligne le fait qu’il est difficile de rapporter avec
fidélité les informations recueillies. « Ce que je demande à l’étudiant avant
toute chose, c’est un compte rendu précis et fidèle ; or, c’est là, on le sait
bien, un travail très difficile. Ni la bande magnétique ni la vidéocassette
ne constituent une solution satisfaisante. » (Winnicott, 1971) Un enregistre­
ment vidéo aide à revoir les moments forts et faibles de l’entretien et
pointer les difficultés ou les stratégies pour améliorer les compétences tech-
niques et thérapeutiques. Le thérapeute peut visionner l’enregistrement
avec le patient. Plusieurs thérapeutes (thérapie fondée sur la mentalisation,
thérapie systémique, etc.) et les chercheurs enregistrent très régulièrement
les séances. Ces images permettent de corriger, de comprendre, d’amélio-
rer les compétences du thérapeute. Elles permettent également d’aider le
patient avec ses parents à visualiser avec le thérapeute les différents points
à améliorer dans la dynamique parents-enfants ou dans le système familial.

Préalables d’un entretien clinique


En pédopsychiatrie, nous pouvons classer trois préalables ou outils à avoir
dans les préparatifs d’un entretien clinique. « L’art du thérapeute, supposé
s’affiner avec l’expérience, consiste à aménager et adapter le cadre de la
consultation à son petit patient afin que s’établisse une relation, puis se
développe une communication aussi riche, authentique et constructive que
possible. » (Brunschwig, 2001) Il s’agit du cadre interne théorique, du cadre
externe matériel et du cadre spatiotemporel. Ces éléments sont nécessaires
à définir et à remplir pour le thérapeute avant qu’il rencontre le patient.

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Recueil des données cliniques 45

Cadre interne théorique


Chaque thérapeute doit s’identifier comme appartenant à une référence
théorique donnée. Il devrait être au clair avec le corpus théorique qu’il
utilise pour ses entretiens. À la même occasion, il doit « préciser le cadre
dans lequel il se déroule, donc les modes théoriques de compréhension de
l’adolescence en tant que processus et des événements psychiques que le
clinicien observe. » (Marcelli, 1999) Les trois grands courants théoriques qui
traitent la psychopathologie du développement sont la psychanalyse, les
neurosciences et les théories systémiques. Il n’est pas dit que les unes sont
supérieures ou que les autres sont moins importantes.
L’entretien clinique est une observation qui joint la théorie à la clinique.
Cette observation permet au thérapeute de théoriser de nouveaux concepts,
ou de confirmer ou infirmer les connaissances acquises au cours de sa for-
mation. En fait, le thérapeute doit garder à l’esprit que « le risque est en
effet, toujours, de se laisser aller à théoriser sans observer, de théoriser à
vide en quelque sorte, sans se laisser d’abord le temps d’éprouver, le temps
de ressentir, et ceci grâce à cette fameuse “capacité négative” si bien mise en
exergue par W.R. Bion. » (Golse, 2000)
Le temps de guerre ou de conflits entre théoriciens ou cliniciens doit
être considéré comme révolu. Toutes les théories du développement ont
la même importance étant donné qu’elles sont complémentaires et visent
la compréhension de l’être humain. Ce dernier reste par ailleurs complexe
avec ses multiples facettes développementales, son évolution incessante et
son unité irrévocable.
Nous conseillons au thérapeute d’éviter de considérer le patient sous un
seul et unique aspect de son développement. Il faut plutôt le prendre en
sa totalité (développement psychique, cognitif, affectif, social, biologique,
etc.). Lors de la prise en charge, le thérapeute gagne du temps en mettant
de côté les incompréhensions générées par différents lobbyings pharmaceu-
tiques et les assureurs, peu importe leur centre d’intérêt. Il doit se dire qu’il
est là pour la cause du patient. Souvenons-nous que la santé du patient est
le premier souci du thérapeute comme on le lit dans le serment d’Hippo-
crate. Quoi qu’il en soit, le thérapeute ne se perd pas dans les multiples
types de prise en charge, le mieux c’est d’être au clair avec l’orientation
thérapeutique qu’il propose au patient et à sa famille.

Cadre externe matériel


L’équipement ou le matériel d’évaluation doit être choisi à l’avance par le
thérapeute. Il met à disposition du patient les outils nécessaires pour son
évaluation. « Les dimensions et l’aménagement de l’espace de consulta-
tion sont adaptés autant que faire se peut à l’accueil de l’enfant et de ses
parents. Dans l’idéal, le bureau de consultation se veut protecteur et diffé-
renciateur, et doit garder une certaine constance. Rien ou presque ne sort

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46 Outils du clinicien

véritablement de l’ordinaire, rien ou presque ne suscite l’envie, rien n’est


dangereux ni menaçant, mais l’ambiance qui s’en dégage figure la différen-
ciation entre le monde des adultes et celui de l’enfant. » (Brunschwig, 2001)
Nous recommandons aux thérapeutes de recevoir les patients dans un cadre
digne et adapté.
En plus de l’espace ou bureau du thérapeute, nous avons « la boîte à
jouets ». Cette boîte est très spécifique et extrêmement utile et nécessaire en
pédopsychiatrie. Elle contient des feuilles de papier blanc, un crayon gris
et des crayons de couleur, une poupée asexuée, une famille complète de
Playmobil® ou de personnages, une famille d’animaux sauvages et domes-
tiques, de la pâte à modeler, un rouleau de ficelle, une colle à papier, un
rouleau de ruban adhésif, une paire de ciseaux, des voitures banalisées, une
maison à poupées, des barrières en bois ou en plastiques, etc. L’intérêt de
limiter le contenu de cette boîte à jouets est de permettre au préconscient
du patient de se déployer et se montrer plus créatif, si non expressif.
Il arrive que certains thérapeutes mettent expressément certains jouets
(des poupées sexuées, des voitures de police, des engins agricoles, des taxis,
des superhéros, un ballon en mousse, une lampe torche, des Lego®, des
Kapla®, des jeux de cartes ou des jeux de mémoire, etc.) reconnaissables
pour les patients afin d’évaluer leurs capacités à reconnaître et à manier ou
jouer avec les objets du quotidien. Étant donné que le thérapeute doit écou-
ter le langage du patient, il est alors conseillé de se montrer assez malléable
et souple à s’adapter au langage mimo-gesto-posturo-verbal de l’enfant. La
redéfinition de la boîte à jouets vise à favoriser la situation de rencontre
entre le thérapeute et le patient.
Nous conseillons d’utiliser des jouets plus neutres. Il est préférable que le
thérapeute se déplace dans la salle en suivant le patient lors des entretiens.
Nous trouvons moins intéressant que le thérapeute reste « scotché » sur sa
chaise, à l’image du divan du psychanalyste et laisse le patient seul jouer. Il
peut arriver que celui-ci souhaite se mettre sur une table basse pour dessiner
ou préfère le faire à même le sol. L’adulte devrait s’adapter ou s’ajuster aux
besoins du patient. La flexibilité du thérapeute lors d’un entretien facilite
pour le au patient le fait d’exprimer ou d’extérioriser son monde interne.
En ce qui concerne la salle d’attente, nous trouvons inutile de la remplir
avec des jouets qui coûtent très cher, ou qui sont très extravagants (des
superhéros, des voitures et avions sophistiqués, des personnages des dessins
animés ou films d’enfants, des jouets très convoités par les enfants, etc.).
Nous considérons que la simplicité reste la règle du thérapeute.
Pour finir ce point, rappelons que « l’ensemble est mis à la disposition
de l’enfant, mais est supposé rester sur place et appartenir dès lors à l’ins-
titution ou au consultant : celui-ci autorise ou non l’enfant à emporter des
traces concrètes, tangibles, physiques, de son passage, par exemple un des-
sin. » (Brunschwig, 2001) Exiger du patient de laisser sur place les matériels

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Recueil des données cliniques 47

(jouets) ou lui permettre d’emporter ses productions faites dans la séance


(dessin, bricolage, etc.) est aussi une des façons de travailler la séparation.
Cette décision – de laisser ou d’emporter sa production – risque d’inciter ou
non le patient à revenir. Dans tous les cas, la créativité du thérapeute doit
être au rendez-vous lors d’un entretien.

Cadre spatiotemporel
On parle de la disposition du bureau, du setting thérapeutique ou de la posi-
tion patient-thérapeute (en face-à-face, en diagonale, assis sur le tapis, etc.).
Nous laissons au thérapeute décider comment disposer les chaises de son
bureau. Il doit privilégier son propre confort et celui du patient. Le confort
peut s’évaluer sur le plan externe ou interne. Le patient doit pouvoir trou-
ver un moyen ou une possibilité de sortir du bureau quand ses pulsions ou
émotions émergent. Nous conseillons de disposer les chaises perpendicu-
lairement et moins en face-à-face comme c’est le cas chez certains « psys ».
En ce qui concerne le temps d’une séance, les thérapeutes sont assez
d’accord sur une durée moyenne de ¾ d’heure. « La durée d’une première
consultation clinique en pédopsychiatrie est loin d’être consensuelle, sauf sur
la durée minimale qui ne peut être inférieure à 45 minutes. » (Brunschwig,
2001) Quoi qu’il en soit, le thérapeute doit être suffisamment bon pour per-
mettre au patient de lui apporter les matériels suffisants pour conclure une
évaluation pédopsychiatrique.
La pédopsychiatrie genevoise offre un modèle assez parlant de l’adapta-
tion ou la malléabilité que doit avoir un thérapeute vis-à-vis du patient et
du cadre spatiotemporel. À Genève, plusieurs dispositifs permettent d’offrir
les soins psychiques. Ces services offrent un espace orientant par la suite
le patient et sa famille vers les structures plus habituelles ou plus formelles
dites « les lieux de soins psychiques » ; citons les hôpitaux universitaires de
Genève (HUG), avec leurs multiples services qui font d’eux une unité de tra-
vail et de soin pour les enfants, les adolescents et leurs familles. On retrouve
également au sein du système de soins genevois des équipes mobiles, des
équipes de liaison, etc.
Toujours à Genève, des dispositifs ou services représentent la porte d’entrée
directe ou indirecte pour les consultations ambulatoires ou consultations
de secteur et l’unité d’urgence de l’OMP (Office médico-pédagogique), les
structures spécialisées de l’OMP (les équipes pluridisciplinaires, les psycho-
logues au sein du cycle ou des écoles de culture générale, les écoles de péda-
gogie spécialisée anciennement appelées de centres médico-pédagogiques,
les dispositifs d’inclusion, les classes spécialisées intégrées au sein de l’ensei-
gnement dit ordinaire, des foyers thérapeutiques, des centres de jours, etc.).
Chacune de ces diverses structures bénéficie de la présence d’un thérapeute
qui ne joue pas un rôle de psychothérapeute pour les patients, mais a un
regard pédopsychiatrique et donc thérapeutique. Il est là pour évaluer la

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48 Outils du clinicien

pertinence de la demande de professionnels qui ne sont pas des thérapeutes


(éducateurs, assistants sociaux, enseignants, etc.), ou des patients et leurs
familles, dans le but d’orienter l’enfant et sa famille vers les autres collègues
pour des prises en charge plus appropriées (cabinets de pédopsychiatrie et
de psychothérapie infantojuvénile privés, etc.).
Le thérapeute est amené à réadapter le cadre de son travail afin d’être à
la hauteur des attentes des patients et de ses collègues. Il n’est possible de
se permettre de modifier ce cadre externe que si le cadre interne est solide.

Voir le patient seul ou en présence de ses parents


En ce qui concerne la réalisation des visites, disons que de manière générale,
« le choix dépend de l’âge de l’enfant, du nombre de consultations d’éva-
luation habituellement prévu, de la durée de la consultation et, finalement,
de la pratique de chacun, en l’absence d’études montrant l’intérêt de telle
ou telle pratique. Tous les montages sont donc possibles : voir l’enfant seul
puis avec ses parents ; voir tout le monde ensemble, puis l’enfant seul, puis
tout le monde ensemble, en une ou plusieurs fois. » (Brunschwig, 2001)
C’est au thérapeute d’être moins rigide dans la mise en place de son cadre
ou dans sa réadaptation.
Pour les patients plus jeunes, soit les bébés de moins de 3 ans, il est
préférable de les recevoir d’emblée avec leurs parents. Dans certains cas,
après leur avoir expliqué clairement ses intentions, on peut demander aux
parents de sortir un moment de l’entretien afin d’évaluer la qualité d’atta-
chement, de séparation-retrouvailles parent-patient, etc.
En ce qui concerne l’entretien avec toute la famille, nous pouvons soit
recevoir en premier lieu le patient seul, soit ses parents en premier et vice
versa. Si l’on peut se référer au modèle des thérapies systémiques qui fonc-
tionne également, on voit que les thérapeutes de famille travaillent sou-
vent en binôme, voire plus. Ils reçoivent d’emblée toute la famille. Nous
nous disons que le thérapeute avise selon le contexte et la pertinence de la
demande de soins.
Certains collègues thérapeutes proposent de recevoir l’adolescent le pre-
mier et de lui offrir un espace singulier avant de le recevoir avec ses parents
ou les adultes qui l’accompagnent. D’autres, en revanche, reçoivent au
même moment l’adolescent et ses parents et disent arriver à créer un lien
thérapeutique avec le patient et sa famille. Une autre possibilité est que le
thérapeute reçoive ensemble l’adolescent et ses parents pour rester seul avec
le patient avant la fin de la séance.
En bref, il est conseillé au thérapeute d’essayer de sortir du cadre sans trop
s’en éloigner, que sa créativité lui rende service pour le bien-être du patient.
Le cadre d’évaluation définit clairement : le nombre et l’objectif des séances
proposées pour une évaluation, le coût financier, les horaires, la fréquence,
le lieu où doivent se passer ces séances, les adaptations possibles du cadre,

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Recueil des données cliniques 49

les situations médicolégales qui nous obligeraient de sortir du secret profes-


sionnel (par exemple si le patient nous parle de ses envies de meurtre, de
suicide, d’acte d’auto ou d’hétéroagression, etc.). Insistons sur le fait qu’il
faut au préalable discuter, travailler, analyser les contours des informations
que nous voulons transmettre au tiers avec le patient et obtenir son libre
consentement – s’il a la capacité de discernement – avant d’avertir ses res-
ponsables légaux ou les autorités compétentes.
En conclusion, le thérapeute devrait évoquer la possibilité d’absences :
• le patient peut s’absenter pour de multiples raisons : un sentiment
d’ennui, de désespoir, des affects dépressifs, de colère ou de la haine contre
lui, etc. Que faire en cas d’absence du patient ? Qui va honorer la facture ?
Comment reprendre un autre rendez-vous ?
• le thérapeute peut s’absenter pour diverses raisons aussi. Comment aver-
tir et travailler ces absences programmées ou imprévues (vacances, voyage
scientifique, maladie, changement de service, départ du service, etc.) ? Le
patient doit avoir la sécurité dans son suivi.
Enfin, il faut également parler de la fin et de la séance de restitution
(quelles personnes, professionnelles ou non, doivent être informées des
conclusions de l’évaluation), etc.

Particularité des patients adolescents


Une particularité doit être soulignée en ce qui concerne les patients adoles-
cents. Leur accueil doit se faire dans un cadre bien aménagé et complète-
ment différent de celui des consultations pour enfants. Il n’est pas question
de disposer une boîte à jouets dans la salle d’attente ou dans les bureaux de
consultation.
Les adolescents, eux, préfèrent la communication verbale. Autre chose à
savoir, la boîte à jouets n’est plus d’actualité quand on évalue l’adolescent.
Dans l’objectif de rester créatif comme le conseille Roussillon, le thérapeute
peut soit utiliser le flip-chart, les papiers avec stylo, les marqueurs, les che-
valets de conférence, l’actualité du moment (culturelle, musicale, sportive,
etc.), bref, tout matériel que ramène le patient en séance doit être utilisé
lors de l’exploration de ses symptômes. Il faudrait trouver d’autres types de
canaux ou des médiations pour communiquer avec l’adolescent, rester créa-
tif et personnaliser ses entretiens en leur donnant une touche de couleur
singulière qui l’incitera à revenir au prochain rendez-vous.
Ainsi, dans l’objectif d’établir un lien et d’avoir une véritable commu-
nication avec un patient adolescent, il est recommandé de marquer une
différence entre l’enfant d’hier et l’adulte de demain. Le thérapeute doit
éviter d’employer le mot « papa » ou « maman ». Les appellations telles que
« père », « mère » ou « vous » aident le thérapeute à marquer ce fait.
Par ailleurs, dans le souci de créer un lien relationnel, de manière plus parti-
culière, il faut collectiviser la chose quand on évalue un patient adolescent.

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50 Outils du clinicien

Grâce à sa subtilité, le thérapeute évite de généraliser la situation du patient.


Il peut néanmoins comparer ses progressions, difficultés, peines, etc. avec
le groupe des pairs. Le thérapeute ne peut pas se permettre de commenter
tous les signes qui sont ostentatoires chez le patient. La raison est d’éviter
de tomber dans le piège identitaire (cf. chapitre 14).
Le thérapeute devrait éviter d’utiliser certaines expressions telles que :
« ces ados », « cet ado ». Il s’agit d’une terminologie très péjorative.
N’oublions pas que les adolescents sont continuellement dans la projection
et l’identification. Nous conseillons de s’abstenir de les appeler ainsi.

Investigation de la symptomatologie actuelle


James Morrison rappelle que : « la plupart des patients viennent demander
de l’aide et espèrent l’obtenir d’un clinicien. Vous pouvez vous appuyer
sur cette attente avec vos paroles et votre langage corporel, qui doivent
exprimer un véritable intérêt pour le patient. Bien sûr, n’importe qui peut,
par inadvertance, dire une chose contrariante, mais vous ne pouvez pas dire
grand-chose qui ne puisse être rattrapé si vous restez attentif et sensible à
ce que votre patient éprouve. » (Morrison, 2018) L’évaluation pédopsychia-
trique est un processus thérapeutique dont les effets peuvent être observés
dans l’immédiat ou plus tard.
Le thérapeute doit avoir à l’esprit les questions auxquelles on est censé
répondre à la fin de l’évaluation : quel est le fonctionnement psychique
du patient ? Quelles sont les hypothèses diagnostiques retenues ? Quelles
prises en charge seraient adéquates pour lui ? Quelle serait l’évolution de
son trouble s’il en existe un ? Quel est le pronostic en l’état actuel ? Etc.

Vision large et regard d’aigle


Le large éventail des outils d’investigation du thérapeute lui permet d’abor-
der ou d’évaluer en totalité ou en intégralité la problématique du patient.
Le thérapeute met ses compétences professionnelles, ses ressources person-
nelles au service de sa pratique clinique. Nous avons rappelé plus haut que
le travail du clinicien est avant tout un travail relationnel. Le thérapeute
doit éviter de se laisser influencer par ses connaissances théoriques.
Le patient étant un tout, on devrait orienter notre évaluation ou entre-
tien clinique à 180°, ce qui veut dire que le thérapeute devrait prendre en
considération les autres connaissances cliniques, psychopathologiques et
thérapeutiques. Qu’il se range du côté de ceux qui prônent la théorie psy-
chodynamique (voire la psychanalyse), des neurosciences ou des systémi-
ciens ou organicistes (généticiens ou biologistes), le seul intérêt du patient
reste suprême. Le patient et sa famille passent en premier et ils sont la rai-
son pour laquelle nous travaillons.

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Recueil des données cliniques 51

Cela dit, « le détour par le passé apparaît ainsi comme opportunité et tac-
tique de l’entretien, visant à favoriser l’expression de la dimension incons-
ciente des interactions parents-enfants. Toutefois, si l’évocation du passé
ouvre à une pluralité de significations du présent par la décentration qu’elle
permet et les digressions qu’elle induit, elle peut apporter des éléments
précieux qui viendront confirmer ou invalider les hypothèses explicatives
ou interprétatives qui peuvent être esquissées à partir des diverses sources
d’information qu’utilise la démarche diagnostique. » (Brusset, 2018)

Clinique d’auto-observation et interobservation


Le thérapeute doit faire une analyse méta sur ses propres pensées et celles
du patient. Il se demande continuellement durant son évaluation : où est
mon patient par rapport à son développement psychique ? Est-ce que ce
processus est en cours ou menacé d’être arrêté ? Le patient se trouve-t-il
dans un « cul-de-sac » ou les choses sont-elles interrompues (c’est-à-dire
que le processus de développement psychique s’est arrêté) ? C’est ainsi que
le patient et sa famille connaîtront le diagnostic structurel, fonctionnel et
catégoriel retenu par le thérapeute. Par cette même occasion, ils sont infor-
més de toutes les différentes modalités ou des avancées pédopsychiatriques
de la prise en charge. Il est clairement important d’éviter de renfermer nos
patients dans notre seule vision de sa problématique. « Bien évidemment,
la découverte de cet “accord harmonique” qui établit un tempo satisfaisant
pour l’adolescent et le consultant est une création commune qui peut être
l’objet d’une clarification lors des premiers entretiens. » (Marcelli, 1999)
Il faut penser aux autres théories psychopathologiques ou autres prises en
charge selon les lignes directrices validées par les pairs ou les recommanda-
tions nationales ou internationales selon le type de pathologie ou trouble
mental que présente le patient.
Nous revenons plus explicitement sur cette notion d’évaluation des
patients en référence à la ligne développementale à la section plus loin qui
traite de l’évaluation de l’adolescence.

Processus ou procédure d’évaluation diagnostique


Cet entretien permet de dégager un diagnostic fonctionnel (pas au sens
de la CIM-10 ou du DSM-5) et aussi un pronostic, puisqu’on répond par
rapport à un processus de développement. L’évaluation va au-delà du diag-
nostic catégoriel. Elle inclut la structure, le fonctionnement, l’évolution, les
interactions et échanges possibles entre le patient et son environnement. Le
thérapeute cherche à aller au-delà des symptômes. Tout ce qui est « appel à
l’aide » (tentative de suicide, colère, crises d’angoisse, troubles du comporte­
ment, etc.) doit amener le thérapeute à chercher le sens manifeste (expli-
cite) et latent (implicite).

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52 Outils du clinicien

Par exemple quand le patient dit : « Je ne veux pas aller à l’école » (phrase
explicite), le thérapeute entend que ce patient a peut-être peur de laisser
ses parents, a peut-être des angoisses de perte ou d’abandon… (phrase
implicite). Albert Ciccone souligne la différence entre le thérapeute et les
autres professionnels en disant que « si le clinicien évalue implicitement
ces niveaux d’interaction, le chercheur les évaluera de façon systématique,
explicite, expérimentale. Le clinicien, par ailleurs, s’il n’est pas interaction-
niste, peut néanmoins s’inspirer de ces modalités d’observation et recher-
cher toujours la précision dans le relevé des attitudes, des comportements,
des échanges, des interactions verbales et non verbales observées. Cela
donne une voie d’accès aux niveaux intersubjectifs de la relation obser-
vée. » (Ciccone, 2018) Expliciter les contenus latents correspond au travail
de métabolisation des éléments bêta en éléments alpha tel que conseille
Bion dans sa théorie sur la fonction alpha.

Écart thérapeutique entre deux pôles :


mobilité et stagnation
Le thérapeute devrait se souvenir qu’il n’y a pas d’évaluation psychologique
ou pédopsychiatrique qui ne prenne pas en compte l’accessibilité thérapeu-
tique, en plus du diagnostic et du pronostic à la fin. « Autant que faire se
peut, il est souhaitable que la tonalité générale de l’entretien prenne l’allure
d’une “conversation” au cours de laquelle le consultant montre clairement
son intérêt pour le monde intrapsychique de l’adolescent. » (Marcelli, 1999)
Cette technique de conversation avec le patient facilite la tâche de dénouer
les nœuds et d’établir une relation de confiance avec lui, d’autant plus qu’à
l’adolescence, les pathologies chroniques posent des problèmes de conti-
nuité. La relation de confiance est également appelée alliance de travail
(cf. supra).

Spécificité d’une évaluation clinique


Il nous semble important de rappeler que « le premier pas de l’investigation
psychologique est doublé d’un second, métapsychologique, qui précise la
valeur relative, les proportions (point de vue économique), le polymor-
phisme ou la stéréotypie de la conflictualité intrapsychique (point de vue
dynamique), l’homogénéité ou l’hétérogénéité (point de vue topique), les
degrés de contrainte, les modalités de la subjectivation et la position du
sujet. » (Brusset, 1999) Ceux qui travaillent avec les adolescents peuvent
se souvenir que certaines caractéristiques de développement observées à
cet âge sont considérées comme normales : l’instabilité relationnelle, la
régulation émotionnelle et la durée de ses investissements narcissiques et
objectaux à évaluer selon leur durée, leur répétition et leur intensité.
Le thérapeute permet au patient de décrire son symptôme. Il cherche à
comprendre le vécu et les explications que celui-ci donne à son trouble.

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Recueil des données cliniques 53

Est-ce que le patient a une conscience morbide de son trouble ? Qu’est-ce


qu’il attend de la consultation ? Quelle est la demande de ses parents ou
d’autres professionnels ou ceux qui l’accompagnent ou qui l’ont encou-
ragé à venir consulter ? Cherchent-ils des bénéfices secondaires à cette
consultation ?
Le thérapeute offre un espace de sécurité au patient afin de lui permettre
de comprendre qu’ils sont sur une même longueur d’onde. Cette sécurité
favorise l’alliance thérapeutique, et l’accueil des symptômes et de la souf-
france du patient. « La conduite de ces thérapies suppose de pouvoir soutenir
des mouvements antagonistes entre nos repères internes et les innova-
tions issues de chaque rencontre, d’être assurés intérieurement de certains
repères établis pour laisser émerger une liberté au sein de la rencontre. »
(Ciccone, 2001) Plus le thérapeute est confiant et capable d’entendre les
symptômes (les risques suicidaires, les symptômes psychotiques, la sexua-
lité, la maltraitance, etc.), plus le patient peut se livrer librement.
L’observation doit répondre à la question de la capacité psychique à faire
face aux exigences développementales, voire d’une fin anticipée du déve-
loppement. Le thérapeute doit se poser la question de savoir quand deman-
der une réévaluation clinique du patient. Pour toute thérapie longue ou
reprise, ou pour une suite d’un suivi d’une psychothérapie de longue date,
il est important de réévaluer le patient, de réadapter les aménagements du
cadre (les jours des rendez-vous, les heures, etc.), de proposer une fenêtre
thérapeutique et de voir les réaménagements possibles en accord avec le
patient et sa famille (que faire avec la boîte de thérapie à sa fin ? Quel
vecteur de communication privilégier : dessin, jeux, crayons, parole, etc. ?).
L’évaluation ne se termine qu’après avoir fait une restitution sur le fonc-
tionnement du patient. Il est conseillé de mentionner dans le dossier et non
dans le rapport d’évaluation des phrases, des expressions, des attitudes ou
des contre-attitudes, de noter les différentes impressions que le thérapeute
a faites ou observées dans la communication verbale et non verbale. Ces
informations observées constituent des données cliniques discutables lors
de probables supervisions, « intervisions », échanges avec les collègues ou
lors de restitutions auprès des parents ou du patient.
Une attention particulière est requise lors de la rédaction des rapports
d’évaluation. Selon les services, des modèles de rédaction sont à disposi-
tion des thérapeutes quand il s’agit de répondre aux autres professionnels
(juges, assurances, services tiers, administrations publiques, etc.) afin d’évi-
ter tout préjudice probable à l’auteur du tel document. N’oublions pas que
le contenu d’un rapport peut frustrer le patient ou lui porter préjudice s’il
contient des informations qu’il ne souhaitait pas donner à tout le monde.
Ceci peut influer sur l’alliance thérapeutique. Certains services ont déjà
informatisé leur dossier médical, ce qui veut dire que le patient ou toute
autre personne autorisée peut y avoir accès.

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54 Outils du clinicien

Évaluation de l’adolescence
Évaluer un adolescent demande au thérapeute d’être plus attentif à certains
éléments psychodynamiques comme la projection, le clivage, etc. qui sont
considérés comme physiologiques à cet âge. Disons tout d’abord que les
adolescents recourent à la régression et à la projection au cours de leur
développement. La projection à l’adolescence protège le moi contre l’effon-
drement et maintient le test de réalité du patient. La régression et la pro-
jection lui permettent de se défendre de la double menace qui leur vient
de l’intérieur et de l’extérieur de son corps. Certains jeunes adolescents, au
lieu de régresser, se comportent comme des agresseurs ou des caïds vis-à-vis
des autres quand leur entourage social n’est pas bienveillant envers eux. Les
projections et la régression sont très bénéfiques à cet âge et empêchent que
le patient ne tombe dans l’arrêt ou l’impasse du développement.
En fait, le thérapeute doit donner aux adolescents la liberté de vivre
leur choix et leur contradiction. L’entretien avec l’adolescent doit rendre
l’ambivalence tolérable et gérable. Il ne faut pas le forcer à se déterminer
ou à prendre une position ou une décision face aux demandes des tierces
personnes à l’avance. On devrait éviter de donner des injonctions ou des
ordres exécutables sans laisser la possibilité de choisir aux adolescents.
Comme nous l’avons dit plus haut, le thérapeute crée un territoire auprès
de l’adolescent. Cet espace lui offre un point d’appui ou une occasion de se
positionner à côté du patient, l’objectif étant d’inviter le patient à regarder
avec lui dans une même direction.
Mme et M. Laufer, dans leurs travaux, rappellent que l’évaluation de
l’adolescence est un exercice particulier et différent de l’évaluation du fonc-
tionnement psychique des adultes et des enfants. Comme dit plus haut, le
thérapeute doit arriver à dire à la fin de son évaluation quel est son diagnos-
tic et quelle prise en charge est proposée au patient. Il lui est demandé
de répondre aux trois autres questions liées à l’aspect du développement
psychique de ces adolescents. Ces dernières questions complètent les trois
questions précédentes qui sont : d’où vient-il ? Où est-il ? Où va-t-il ?
Est-ce que l’adolescent se trouve dans l’impasse développementale ?
Un adolescent est dans l’impasse développementale quand il perd ses capa-
cités à faire du step back pour se donner le temps de réfléchir et de trouver
d’autres solutions à ses problèmes quotidiens. L’impasse est donc cette inca-
pacité de pouvoir reculer. La personne n’a plus de possibilité de poursuivre
sa trajectoire étant donné qu’elle bute contre un mur. L’adolescent qui est
dans l’impasse est comme un homme qui se trouve sur un chemin qui n’a
pas d’issue.
Est-ce que le patient est dans l’arrêt ou la rupture développemental(e) ?
On parle de l’arrêt du développement chez un adolescent quand il n’éprouve
plus d’angoisse. En d’autres termes, l’angoisse chez ces adolescents en

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Recueil des données cliniques 55

rupture de développement a débordé les capacités du moi à y faire face. Ces


adolescents remplacent le plus souvent les questions auxquelles ils n’ont pas
de réponse par des questions qu’ils peuvent contrôler eux-mêmes. L’exemple
type est l’anorexie mentale. L’adolescent s’inscrit durablement dans quelque
chose qui ne peut pas l’amener à la conflictualité. Il se pose ainsi certaines
questions telles que : « Est-ce que je peux ou je ne peux pas… ? », « Est-ce
bien de faire ceci ou cela… ? », « Qu’est-ce qui est bon ou mauvais dans
cette situation ? », « Qu’est-ce qui m’appartient ou qui vient de moi, de
mon intérieur ou de l’extérieur… ? » L’adolescent devient incapable de se
poser ce genre de questions de peur d’entraîner toute source de conflit ou
de malentendu.
Un deuxième exemple d’arrêt de développement est la dépendance aux
jeux, aux drogues, etc. Le thérapeute note un seul objet qui occupe toute
l’attention de l’adolescent. Ceci est différent de ce qui se passe chez le
patient souffrant de troubles obsessionnels compulsifs, car ces derniers ont
accès à la conflictualité sociale. Ils essaient de trouver des objets ou des rites
contre leur phobie. Chez les patients souffrant de difficultés de dépendance,
en revanche, on ne retrouve pas de conflictualité. La conflictualité est ran-
gée et remplacée par l’objet qu’ils contrôlent, par exemple le jeu vidéo, le
nombre de calories, la quantité et la qualité des repas, le sport extrême, le
ski hors-piste, les dépendances aux produits psychostimulants ou létaux,
etc. Bref, le patient ne vit que pour faire quelque chose. Il est alors dans
l’illusion de pouvoir contrôler l’objet.

Est-ce que l’adolescent est dans le développement normal ?


Le thérapeute peut conclure que le patient est dans un développement
normal quand il arrive à évaluer s’il a un bon développement. Il s’agit
d’un patient qui a un système de défense qui fonctionne. Ce patient a une
bonne progression sociale, relationnelle, familiale, amicale, etc. Il affronte
sans peine ses angoisses et ses difficultés quotidiennes et parvient à aller de
l’avant. Ces adolescents ne sont pas que dans le perfectionnisme ou dans la
culture de l’excellence, ils sont confrontés tant bien que mal à la vie de tous
les jours. Ils gardent leurs pieds dans la réalité.
Après cette brève introduction sur l’investigation de la symptomatologie,
nous traitons dans le paragraphe suivant les techniques de prise de contact
ou d’entrée en relation avec les patients ou leur famille.

Particularité des tentatives de suicide à l’adolescence


La tentative de suicide est plus fréquente chez les adolescents que chez les
enfants. Il faut rappeler qu’une tentative de suicide a une signification dif-
férente selon la souffrance psychique ou le trouble psychique que présente
la personne. Les tentatives de suicide méritent une attention particulière
du thérapeute.

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56 Outils du clinicien

Tout d’abord, la signification ou la compréhension qu’ont les adolescents


de la tentative de suicide est souvent différente de celle retrouvée dans la
population générale. Les adolescents ont besoin d’attaquer leur corps et
prendre sa possession. Les actes d’automutilation peuvent avoir une signi-
fication d’autocalmant tout comme ils peuvent signifier une réelle envie de
mourir. Certains adolescents justifient leurs actes par l’envie de ne plus res-
sentir la souffrance charnelle. La toute-puissance à l’adolescence fait que les
attaques au corps laissent des marques, d’où la nécessité de prendre le temps
de bien examiner une tentative de suicide et de ne pas se précipiter à des
conclusions hâtives de peur de casser l’alliance de travail et l’alliance théra-
peutique plus tard. Cette notion est largement discutée dans le chapitre 18.

Prise de contact avec le patient


Le thérapeute se demande quels défis il doit relever dans cette rencontre.
Il faudrait valider de temps en temps ces affirmations ou impressions par
le patient, ne pas conclure ni prêter ses propres émotions ou impressions
au patient. C’est à Didier Houzel de souligner que : « La tâche de psycho-
thérapeute d’enfants est une tâche lourde qui exige une formation psy-
chanalytique approfondie, une grande expérience des enfants et surtout la
possibilité de supporter pendant longtemps les émergences pulsionnelles
non médiatisées de l’enfant, en particulier sous forme de passage à l’acte. »
(Houzel, 2018)
Le risque est que le patient se sente manipulé ou « chosifié » par le thé-
rapeute. L’évaluation pédopsychiatrique doit faire l’objet d’un début de
traitement. Il essaie de toutes les manières d’aider le patient et ses parents
à digérer le matériel brut à la lumière de la fonction alpha de Bion. Dans
la rencontre avec le patient, le thérapeute cherche à avoir une alliance de
travail et une alliance thérapeutique avec lui, destinées à faciliter la ren-
contre et le travail thérapeutique. C’est à travers cette alliance que le thé-
rapeute peut communiquer avec toute sa délicatesse et finesse clinique, ses
impressions, ses ressentis, ses affects, ses difficultés, ses ressources, etc. que
le patient lui laisse observer.
En fait, certaines questions peuvent être posées dès le début de l’entretien :
• Est-ce que tu étais d’accord pour venir ici ? As-tu demandé à venir me
voir ? Pourquoi l’es-tu ou ne l’es-tu pas ? Sais-tu pourquoi tu es là ? Qu’est-ce
que papa, maman, éducateur, infirmière scolaire, enseignant t’ont expliqué
avant de venir ici ? Sais-tu qui je suis ? Tu veux bien me dire ce que je fais
comme travail ?
• Peux-tu m’expliquer quel est ton problème ? Qu’est-ce que cela te fait, à toi ?
• Penses-tu avoir besoin d’aide ? Si non, pourquoi, et si oui, as-tu une idée
de ce qui pourrait t’aider, de ce qu’il faudrait que je fasse pour t’aider ?

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Recueil des données cliniques 57

Nous ne le dirons pas assez : un entretien pédopsychiatrique doit être


centré sur une évaluation selon les besoins du patient et de sa famille. Le
thérapeute conduit son évaluation de manière systématique de la péri-
phérie au centre. Utilisons ici la métaphore de la gousse d’ail. Pour bien
peler un ail, le cuisinier enlève les gousses d’ail l’une après l’autre. Après
avoir fini d’en peler une, il passe à la suivante. Qu’il s’agisse d’un entretien
où sont présents les parents, la famille, les autres adultes et le patient ou
non, le thérapeute ne doit pas se presser pour confronter les parents ou la
famille à leur dynamique interpersonnelle. Il faut attendre le bon angle,
le bon moment, le moment implicite pour exprimer ses impressions, sa
compréhension du fonctionnement de la dynamique familiale ou la nature
des relations interpersonnelles au sein de l’unité familiale. À partir d’un
point d’appui que le patient nous offre, nous pouvons soulever les couches
entassées et laisser émerger quelque chose dans l’objectif de travailler les
symptômes du patient. Le thérapeute gagne en déconstruisant la maladie,
en dédramatisant le diagnostic et réduisant une influence du trouble sur le
quotidien du patient ou de la dynamique familiale.
Quoi qu’il en soit, nous recommandons au thérapeute d’être large dans
son évaluation. Il devrait inviter le patient et lui-même à répondre aux
questions suivantes pour chaque symptôme rapporté ou observé.

Quand ?
Certains symptômes peuvent être identifiés dès leur début et d’autres, au
contraire, restent difficiles à relever. L’important, c’est d’essayer de dater ou
de trouver la durée approximative, si non exacte, d’installation des troubles,
avec l’aide du patient ou de ses accompagnants.
Le thérapeute devrait dater le début d’apparition des troubles ou des
symptômes avec l’aide du patient ou de son entourage. Il peut être difficile
de déterminer exactement quand sont apparus les premiers symptômes,
mais avoir une idée probable de la durée s’avère nécessaire pour poser le
diagnostic catégoriel par exemple.
Les questions suivantes peuvent être posées dans ce but : « Quand cela a-t-il
commencé ? », « Quand aviez-vous constaté ce changement ? », « Quand
aviez-vous remarqué des améliorations ? », « Depuis à peu près combien de
temps n’arrives-tu pas à dormir suffisamment ? », « Depuis quand se plaint-
il de perte d’enthousiasme ? »
La durée est un des critères majeurs pour poser tel ou tel diagnostic
catégoriel. Par exemple pour le trouble psychotique, il faut au minimum
un mois d’installation des troubles. Avant d’évoquer un diagnostic de la
schizophrénie, la durée conseillée est de plus d’un mois et de moins d’un
an. Le diagnostic de trouble de l’humeur (la dépression, le trouble bipolaire,
etc.) est posé avec une durée minimum de 2 semaines sans interruption.

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58 Outils du clinicien

La durée qui sépare l’événement causal et l’apparition des premiers symp-


tômes doit être variable, entre quelques semaines et quelques mois, pour
poser le diagnostic d’état de stress post-traumatique, etc.
Cette notion de durée permet aussi de se faire une idée sur les capacités
des uns et des autres, au sein de la famille ou de l’entourage du patient, à
pouvoir supporter ou accepter ses perturbations psychologiques. Elle per-
met de chercher quels étaient les aménagements mis en place par le patient
ou ses proches pour garder un certain niveau de fonctionnement social.

Comment ?
Cette question renvoie à la manière dont le patient explique son symp-
tôme. Quel est le chemin pris par le symptôme pour s’extérioriser ? Quels
sont les facteurs aggravants, protecteurs, précipitant ou déclencheurs du
trouble ? Il s’agit de répondre ou d’établir les modalités d’installation des
symptômes. Quelles étaient les probables ou réelles réactions du patient ou
de son entourage devant l’apparition des symptômes ? Est-ce que le patient
a cherché à se protéger, se soigner, les cacher, les nier, etc. ? Comment
explique-t-il les hypothèses de la genèse de ses troubles ? Comment est-ce
arrivé ? « Comment aviez-vous réagi en l’apprenant ? », « Comment tes
parents te considèrent-ils ? », « Comment t’en es-tu sorti ? », etc. Cette
question pose les premiers jalons d’un début de narration de son histoire,
de sa vie, de soi, etc.

Pourquoi ?
Le thérapeute doit essayer de confronter le patient à ses croyances, à ses consi-
dérations, à ses symptômes et à la réalité. Il est important de contextualiser
et de remettre les informations reçues dans le cadre socioculturel. On devrait
éviter de prendre des décisions ou de conclure de manière hâtive. Cette ques-
tion du pourquoi fait appel aux fonctions du moi qui sont développées dans
la partie III. Le thérapeute se demande : quelles sont les hypothèses que se
fait le patient ou son entourage vis-à-vis de la symptomatologie passée et
actuelle ? « Pourquoi n’en parles-tu que maintenant ? », « Pourquoi ne l’as-tu
pas pris ? », « Pourquoi te faire vomir ? », « Pourquoi es-tu le seul à entendre
ces voix ou à avoir ces visions ? », « Dis-moi exactement pourquoi, selon
toi, les autres élèves t’embêtent à l’école », « Puis-je savoir quelles étaient tes
motivations à ce moment-là ? », « Est-ce que tes parents savent pourquoi il
t’est difficile de rester sur place ou pourquoi tu prends des drogues ? »

Où ?
Cette question cherche à identifier le lieu, l’endroit, l’origine des troubles
ou des symptômes rapportés. Étant donné qu’il s’agit d’une évaluation
pédopsychiatrique, le lieu ou la zone, ou la région ou le siège de la maladie

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Recueil des données cliniques 59

ou de la souffrance est dans la plus grande partie soit à l’intérieur du patient


(ce qui veut dire non palpable ni visualisable par les yeux anatomiques),
soit à l’extérieur du patient.
Les collègues médecins ou soignants, qui travaillent en médecine soma-
tique, parlent de l’organe touché ou concerné par la maladie. En santé men-
tale, en revanche, la localisation de trouble ou de la souffrance donne une
idée sur le diagnostic structurel ou fonctionnel. En d’autres mots, le patient
localise sa souffrance là où le thérapeute pourrait s’y attendre le moins. Par
exemple, pour les hallucinations auditives, le patient dit que les voix ou les
bruits sont à extérieur de lui. Pour un patient hypocondriaque, les troubles
sont à l’intérieur de lui.
Le plus important n’est pas de faire situer les souffrances ou les maux du
patient, plutôt de chercher le sens ou la signification de cette localisation.
L’endroit physique aide à matérialiser ce qui est abstrait et non palpable
comme en médecine générale ou en chirurgie, etc.
Enfin, ces différentes questions sont reprises à chaque fois sont abordées
ou proposées les techniques d’exploration des divers symptômes le long de
ce guide.

Bibliographie
Askenazy-Gittard, F., & Darcourt, G. (2012). Initiation à la psychanalyse freudienne.
Ellipses.
Brun, J. (2001). Le transfert dans les cures d’enfants. Imaginaire & Inconscient, 2(2),
79-89.
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis-
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Brusset, B. (1999). Diagnostic psychiatrique et différence du normal et du patholo-
gique. Encyclopédie Médico-Chirurgicale, Psychiatrie. article 37-102-E-20.
Brusset, B. (2018). Enquête familiale et anamnèse. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M.
Soulé (dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1,
p. 509-517). Presses universitaires de France.
Ciccone, A. (2001). Enveloppe psychique et fonction contenante : modèles et pra-
tiques. Cahiers de psychologie clinique, 17(2), 81-102.
Ciccone, A. (2018). Aux frontières de la psychanalyse. Soin psychique et transdis-
ciplinarité. Dunod.
Ciccone, A. (2019). L’Observation clinique. Dunod.
Disnan, G., & Alvarez, L. (2010). Adaptation du cadre des psychothérapies parents-
bébé aux nouvelles connaissances en psychopathologie périnatale. La Psychiatrie
de l’enfant, 53(1), 115-166.
Golse, B. (2000). Du corporel au psychique. Dans C. Geissmann et D. Houzel (dir.),
L’Enfant, ses parents et le psychanalyste (473-483). Bayard Compact.
Houzel, D. (2018). Une application de la méthode d’observation des nourrissons : les
traitements à domicile. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M. Soulé (dir.), Nouveau
Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1, p. 519-530). Presses
universitaires de France.

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60 Outils du clinicien

Jacob, C. (2001). Les transferts archaïques. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 47-69.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie
Médico-Chirurgicale. Psychiatrie. article 37-213-A-10.
Morrison, J. (2018). L’Entretien clinique : outils et techniques de diagnostic en santé
mentale. Mardaga.
Winnicott, D. W. (1971). La Consultation thérapeutique et l’enfant. Gallimard.

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Anamnèse du patient
II
et de sa famille
L’anamnèse personnelle et familiale doit être scrutée avec un intérêt maxi­
mum. Rappelons qu’« en médecine, ses modalités sont fonction de ses buts,
à savoir le recueil des informations sur le passé individuel et familial et, plus
précisément, la recherche des facteurs étiologiques, des épisodes patho­
logiques antérieurs, des caractéristiques du “terrain” individuel et familial, et
des données héréditaires et mésologiques susceptibles de jouer comme fac­
teur favorisant d’une maladie. Dans cette optique, il est important d’obtenir
des notions précises et vérifiables et surtout de ne pas omettre des faits
importants. » (Brusset, 2018)
L’anamnèse personnelle et familiale du patient nous permet de recueil­
lir toutes les informations cliniques sur le plan personnel et familial. Ce
temps d’anamnèse permet aux parents de raconter l’histoire personnelle de
leur enfant, et au patient d’entendre son histoire racontée autrement pour
la première ou la énième fois. Le thérapeute aide la famille à se raconter,
s’écrire ou se répéter, entre elle et devant la personne neutre du thérapeute,
pour une énième fois leur propre histoire qui fait sens.
Cette histoire peut mobiliser quelque chose en eux, pas redynamiser les
liens fantasmatiques ou imaginaires intrafamiliaux dans le but de compren­
dre les symptômes qui les amènent à consulter. Les termes ou expressions
qu’emploient ou qu’utilisent le patient et son entourage (sa famille ou ses
parents) lors du recueil d’éléments anamnestiques, voire lors de l’entretien
tout entier, ne sont pas innocents ou vides de sens. Il s’agit de réels vecteurs
de messages qui méritent toute l’attention du thérapeute. Nous devrions
arriver à prendre du temps pour essayer d’expliciter leurs expressions dans
le but d’élucider le sens caché ou la signification implicite sur le plan émo­
tionnel et affectif. Cette anamnèse comprend les éléments développés dans
la suite.
En bref, et de façon plus générale, l’anamnèse clinique va au-delà de l’âge
du patient. Le thérapeute ne reste pas focalisé ou ne centre pas sa recherche

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clinique sur l’ici et maintenant. On devrait évaluer ou s’interroger sur le
passé, le présent et le futur du patient. Le fil rouge est celui de se souvenir
qu’il s’agit d’un développement intégral. Les informations peuvent s’étof­
fer, se rajouter, se compléter, entrer en fusion ou en conflit, se différencier,
etc. Pour éviter de nous répéter dans ce guide, nous développons cer­
tains points dans une tranche d’âge tout en espérant que le thérapeute les
explore dans une autre tranche d’âge dès qu’il estime nécessaire de le faire.
Il s’agit des conduites alimentaires, du sommeil, des compétences sensori­
motrices, des compétences cognitives, des interactions avec son entourage
et les compétences sociales, etc.
Avant de développer ces différents points, voyons dans la suite en quoi
consiste la demande ou le motif de la demande.

Bibliographie
Brusset, B. (2018). Enquête familiale et anamnèse. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M.
Soulé (dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1,
p. 509-517). Presses universitaires de France.

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5 Motif de consultation
Tout entretien clinique, entretien d’évaluation ou entretien de demande d’un
second avis ou d’une expertise commence soit par un appel téléphonique,
soit par le déplacement du patient ou de l’un de ses proches aux cabinets
ou services pour formuler la demande d’évaluation auprès du secrétariat.
Qui appelle et pourquoi ? « La majorité des parents ne sollicitent pas directe­
ment de leur propre et unique initiative : quand ils le font, ceci n’augure
pas nécessairement d’une situation plus facile à traiter. » (Brunschwig, 2001)
La demande est-elle implicite ou explicite ? Est-ce que cette demande
est faite sur conseil ou obligation de la crèche, de l’école, du pédiatre, du
juge, de l’avocat d’un parent, du service social, du « psy » des parents, d’un
membre de la famille, d’un ami, etc. ? Cette demande est-elle claire ? S’agit-
il de la même demande ou du même besoin quand on parle de l’adulte et du
patient ? Que désire ou que cherche le demandeur ou celui qui a conseillé
ou ordonné l’évaluation ? Et le patient dans tout ça, où est sa place, ou
quelle est sa demande implicite ou explicite ?
Le motif de la consultation informe sur l’élément déclencheur ou l’ori­
gine de la demande. La plainte principale est recherchée dans le motif
de consultation. « La plainte principale établit la raison pour laquelle le
patient est en demande de soins, tandis que la liberté de parole qui s’ensuit
immédiatement l’encourage à parler de toutes les raisons pour lesquelles il
consulte. » (Morrison, 2018)
Le thérapeute cherche la personne qui est à l’origine de cette demande de
consultation ou d’évaluation. Qui a obligé le patient à contacter le théra­
peute ? S’agit-il de sa famille, de son école, de son employeur, des instances
sociales (à préciser) ? Depuis combien de temps lui conseille-t-on de venir
consulter ? Devant la résistance ou le refus des parents ou du patient de
consulter et dans le but de les motiver, certains professionnels (pédiatres et
enseignants) contournent le problème ou maquillent la situation en évo­
quant des difficultés ou des symptômes qu’ils peuvent facilement entendre.
« Je vous envoie demander cette consultation car votre enfant a des difficul­
tés de sommeil, d’écriture, etc. », « Votre fils a besoin de la psychomotricité
ou il peine à entrer dans son métier d’élève », « Madame, Alain a besoin
d’un soutien en logopédie. Je le trouve assez maladroit lors des activités de
créativité, etc. »
Le thérapeute demande aux parents : quelle signification donnent-ils aux
actes ou à une réaction de leur enfant ? Pourquoi pensent-ils qu’il réagit de
la sorte, qu’est-ce que cela leur évoque ? Quelles sont les raisons manifestes
(exprimées par le patient lui-même ou par son entourage) et les raisons
latentes (à titre d’hypothèses) ? Il est important que le thérapeute connaisse

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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64 Anamnèse du patient et de sa famille

la motivation et le niveau de connaissance des troubles du patient afin


d’en faire un levier important pour travailler l’alliance thérapeutique. Il est
plus souple pour les parents et le patient de venir consulter quand ils sont
convaincus et reconnaissent clairement ou peu leurs difficultés. « Si le cli­
nicien a l’intention de rencontrer le patient plusieurs fois, les informations
à retirer du premier entretien auront des chances d’être relativement suc­
cinctes, car d’autres séances seront là pour les compléter avant l’établisse­
ment d’un plan de traitement. En conséquence, il s’autorisera un rythme
plus modéré et s’attachera à une approche moins structurée, similaire à
maints égards aux processus adoptés lors d’une thérapie d’inspiration psy­
chodynamique. » (Shea, 2005)
Consulter un pédopsychiatre n’est en rien un luxe. Le patient et ses
parents acceptent qu’un inconnu dévoile le mystère de leur vie quoti­
dienne. Ainsi, dans l’investigation de la symptomatologie, le thérapeute
cherche à identifier le motif de consultation. Lors de l’analyse de la plainte
des patients et/ou de leurs familles, le thérapeute devrait donner la colora­
tion psychique à la plainte somatique. L’évaluation de la plainte pendant
l’anamnèse éclaircit les différents symptômes du patient. Pourquoi est-ce
seulement aujourd’hui qu’ils viennent consulter ? Existe-t-il un élément
déclencheur ou motivateur à la consultation ? Est-ce que le patient aborde
les raisons manifestes de son trouble (le patient situe sa problématique en
lui-même ou dans son environnement) ? Est-ce que ces raisons sont plutôt
latentes (sont souvent liées à la problématique développementale, l’entrée
dans la vie d’adolescent et des interrogations sur la sexualité, etc.) ? Est-ce
qu’ils ont demandé la consultation pour éviter ou valider que le patient soit
placé au foyer ou dans une famille d’accueil ? Est-ce que le patient vient
consulter parce qu’il craint d’être privé de ses droits ou il risque d’être exclu
de l’école ou de refaire la classe s’il ne consulte pas ?
Est-ce que le patient avait déjà présenté les mêmes symptômes ou les
mêmes signes par le passé ? Avait-il eu recours à des moyens ou à des tech­
niques de soin pour pallier ses difficultés ? Le cas échéant, lesquels ? Le
patient et son entourage avaient-ils noté une amélioration ou un échec de
traitement ? Quelle est la cause de cet échec ? Est-ce qu’il s’agit d’un suivi
pré-hospitalisation, post-hospitalisation ou contre une hospitalisation ? Y
a-t-il des expériences positives et négatives (pour le patient et sa famille)
d’une ou des évaluations pédopsychiatriques vécues par le passé ?
En s’interrogeant sur le motif de consultation, le thérapeute « apprend
à rencontrer et à contenir les sentiments négatifs aussi bien que positifs
dans la relation parents-bébé (angoisses, colères, douleurs), ainsi que dans
la relation fraternelle (jalousie, haine). Il apprend à observer les capacités
de symbolisation du bébé devant les expériences toujours traumatiques de
rencontre avec la réalité… Il apprend à apprécier la singularité d’une his­
toire particulière. » (Ciccone, 2018)

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Motif de consultation 65

Le symptôme est toujours potentiellement biface. Quand on explore le


symptôme du patient, il peut être question de se dire : comment organiser
une crise sans aller à la rupture du lien thérapeutique ? L’évaluation cli­
nique permet au thérapeute d’avoir des leviers pour être capable d’organiser
cette crise thérapeutique.
Quelquefois, le thérapeute se doit de rechercher la culpabilité incons­
ciente des parents vis-à-vis des symptômes de leur enfant, et surtout les
amener à verbaliser – autant que possible – sur comment est-ce qu’ils expli­
quent les difficultés de leur enfant. D’une manière ou d’une autre, le théra­
peute explore les éléments négatifs de la symptomatologie.

Particularité du symptôme chez l’adolescent


Lors de cet exercice thérapeutique, le clinicien doit « remonter le fil du symp-
tôme de l’adolescent pour comprendre son organisation psychique individuelle,
mais aussi la place que vient prendre ce symptôme dans son monde familial, est
le cœur de notre pratique de pédopsychiatrie. L’analyse tant psychanalytique
que transgénérationnelle et systémique, nous permet de distinguer la charge
qui appartient à l’adolescent et celle qu’il porte pour sa fratrie et ses parents
(et les ancêtres avant eux) […] » (Robin, 2019)
Nous recommandons au thérapeute de prendre en compte les informations
cliniques que rapporte l’entourage de l’adolescent ou du patient lui-même en
vue d’ouvrir un large éventail dans l’exploration symptomatique. Le thérapeute
doit plutôt s’inscrire dans l’action et non dans le passage à l’acte. De cette
façon, il peut aider le patient « à identifier des sources de difficultés et de
conflits avec les autres, et les leviers d’action qui sont en soi » (Robin, 2019)
et, par la suite, proposer des solutions pour un compromis ou avoir un contrat
thérapeutique avec l’adolescent.
L’adolescence apporte divers changements ou chamboulements dans la vie du
jeune et dans ses relations avec ses proches. Le thérapeute ne doit pas se limiter
à accueillir la plainte du patient, il doit travailler, clarifier, déplier les symptômes
avec l’adolescent et ses proches. Ainsi, « cette analyse se fait logiquement dès
lors que l’on observe le processus de création de toutes les petites solutions
intermédiaires ; dès lors que l’on décortique les étapes nécessaires pour traiter
les symptômes psychiatriques et redonner à ces sujets de quoi regagner une
force de vie qui leur permette de poursuivre leur route, non sans difficulté
(ce serait une illusion), mais avec des outils pour les aborder. » (Robin, 2019)
Grâce à différentes questions que nous soulevons dans ce guide, nous souhai-
tons que le thérapeute puisse trouver comment aider le patient à répondre à
ses attentes personnelles et à celles de son entourage (parents, pédiatre, édu-
cateurs du foyer, enseignants, etc.).

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66 Anamnèse du patient et de sa famille

Enfin, avant de conclure, répétons que le motif de demande de consul­


tation formulé soit par le patient soit par un tiers nous donne une idée
sur le fonctionnement psychodynamique et les hypothèses diagnostiques
catégorielles du patient. Les raisons de consultation ouvrent les pistes de
réflexion ou de recherche pour ce qui est des hypothèses de travail ou la
technique d’évaluation à proposer à nos interlocuteurs.

Bibliographie
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis­
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Ciccone, A. (2018). Aux frontières de la psychanalyse. Soin psychique et transdis­
ciplinarité. Dunod.
Morrison, J. (2018). L’Entretien clinique : outils et techniques de diagnostic en santé
mentale. Mardaga.
Robin, M. (2019). L’adolescent en crise dans un environnement en crise. Adolescence,
t. 37, 2(2), 233-245.
Shea, S. C. (2005). La Conduite de l’entretien psychiatrique : l’art de la compréhension.
Elsevier Masson.

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6 Période prénatale,
périnatale et postnatale
du bébé

Quelques généralités sur la clinique du bébé


Pour ce qui est de l’anamnèse personnelle du patient, disons que « la
conduite de l’évaluation, qui garde l’enfant au cœur de l’intérêt du consul-
tant, est souvent déjà une première expérience thérapeutique pour l’enfant,
qui n’est plus ni jugé ni coupable, mais considéré comme souffrant, voire
victime, de ses troubles. » (Brunschwig, 2001) Plus exactement, le théra-
peute doit savoir que « la psychanalyse a en effet profondément remanié le
sens même de l’investigation anamnestique, par la place faite aux conflits
et aux fantasmes inconscients dans les interactions parents-enfants en tant
que facteurs de développement, par la place donnée à la sexualité infantile,
au conflit œdipien et par les nouvelles perspectives sur le développement
ouvert par les modèles génétiques qu’elle se donne. » (Brusset, 2018)
Étant donné que le thérapeute se donne le temps de mener sa démarche
diagnostique ou son évaluation clinique, il est préférable d’avertir les parents
des nombreuses questions que l’on va leur poser durant ces entretiens
d’évaluation. Ils sauront par avance qu’il est naturel qu’ils aient l’impres-
sion que nous sommes très curieux ou alors à partir de nos questions, ils
peuvent avoir un sentiment d’intrusion de la part du clinicien. Tout cela est
expliqué par « la logique même de la méthode anamnestique ainsi conçue
qui tend à valoriser une remémoration aussi exhaustive que possible, de
façon à reconstituer les stades du développement, mais seulement sur les
différents plans où celui-ci peut être objectivé ». (Brusset, 2018)
Nous décrivons point après point les différents éléments à scruter lors de
cette anamnèse de la période précoce du bébé.

Déroulement de la grossesse
Le thérapeute essaie de tracer les événements cliniques saillants qui ont
précédé la conception de la grossesse ou qui se sont déroulés pendant la
grossesse, les antécédents psychiatriques et somatiques des parents avant et
pendant la conception.
Quels ont été les effets et les réactions des parents face aux difficultés, à
l’incapacité de concevoir ? Quelle a été la répercussion sur le fonctionne­
ment de la dynamique familiale, dynamique du couple, chez l’un des
parents ou l’entourage familial ?

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68 Anamnèse du patient et de sa famille

Est-ce qu’il y a une notion de stérilité primaire ou secondaire ? Est-ce


que madame a eu des fausses couches, des avortements ou des interrup-
tions volontaires de la grossesse ? Quel a été l’espacement des grossesses ?
Comment les parents parlent-ils ou rapportent-ils ces informations ? Le
thérapeute doit prendre le temps d’expliciter les informations qui lui sont
communiquées. Il faut rester authentique et direct, sans détour, mais bien
explorer les affects et sensations que les parents ont perçus ou perçoivent
encore durant l’entretien.
Comment le conjoint a-t-il réagi à l’annonce de la grossesse ? Était-il pré-
sent pendant la grossesse ? Est-ce que le couple se soutenait mutuellement
durant la grossesse ? Est-ce que monsieur a présenté des difficultés psycho-
logiques ? Quelle était son implication pour cette grossesse ? Y avait-il des
interactions affectives et émotionnelles entre les futurs parents ? Comment
étaient les ressources financières de la famille ? Quelle a été l’évolution ou
quel a été le déroulement de la grossesse ? Est-ce que madame a gardé son
travail ? Pourquoi a-t-elle arrêté de travailler ? Pourquoi les parents ont-ils
préféré continuer à travailler ?
La mère a-t-elle souffert durant la grossesse ? Avait-elle des problèmes
somatiques ou psychiques ? Quel a été le vécu émotionnel et affectif des
parents pendant la grossesse ? Quels diagnostics avaient retenu les méde-
cins à l’époque ?
Comment les parents ont-ils réagi devant les examens d’échographie du
1er, du 2e et du 3e trimestre ? Les parents ont-ils accepté sans difficulté les
investigations des possibles pathologies ou malformations génétiques ou
embryonnaires durant la grossesse ? Y avait-il une notion de violences ver-
bales, physiques, d’un climat conjugal conflictuel, d’un stress intense, d’un
probable traumatisme, etc. ?
Comment les parents décrivent-ils le vécu du bébé pendant la grossesse ?
Chez certains patients hyperactifs, on retrouve que, déjà pendant la grossesse,
les parents ont pu noter une certaine agitation intra-utérine. « Aviez-vous
l’impression que votre enfant était très actif ou non durant votre grossesse ? »
On essaie de chercher la qualité du lien entre les futurs parents. Le thérapeute
essaie de dégager le rêve des parents avant la naissance du patient (enfant
fantasmé et enfant imaginaire), etc.
Quelles étaient les émotions et éventuelles maladies des autres membres
de la famille (les aînés et les personnes vivant sous le toit familial) sur-
venues pendant la période de la grossesse de madame ? Le thérapeute doit
rassembler les informations ayant trait au vécu émotionnel de l’entourage
de la famille (surtout quand il s’agit de familles nombreuses et selon les
clans et coutumes qui sont différentes d’une région à une autre du monde).
Comment ont-ils reçu la nouvelle de l’annonce de la grossesse ? Quelle
a été la réaction de l’entourage familial (selon les cultures d’appartenance

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 69

des parents) ? Est-ce que les proches parents ont montré de l’empressement
ou ont-ils moins soutenants envers le couple parental ? Quelle était la place
de cette grossesse dans la lignée intergénérationnelle ? Quelle signification
symbolique a porté cette grossesse au sein de la famille élargie ?

Période périaccouchement
Les événements cliniques que le thérapeute recherche sont ceux qui infor-
ment sur l’ensemble d’événements ou le moment qui entoure l’accouche-
ment. Il s’agit de déceler des éléments psychopathologiques qui peuvent
orienter la démarche clinique vers de probables pathologies du lien parent-
enfant. Plus le patient est âgé, plus les informations sont difficiles à collec-
ter, ceci à la suite d’une amnésie probable de cette période. L’essentiel est de
rester le plus possible en connexion avec les affects des parents.
Par ailleurs, cette investigation n’est pas sans conséquence, car elle
réveille les souvenirs enfouis que peut-être le parent ou le patient ne voulait
plus se rappeler. Il est important de répéter que l’évaluation clinique est un
moment très délicat et important. Par ses compétences théorico-pratiques,
le clinicien trace avec plus de fidélité la chronologie du développement
psychomoteur du patient.
Le terme et ses circonstances devraient être analysés : est-ce que le patient
est né à terme, prématuré ou après terme ? L’accouchement s’est-il déroulé
dans les conditions physiologiques ou non (on recherche la notion d’un tra-
vail déclenché artificiellement ou naturellement : qu’est-ce que les parents
ont compris du pourquoi de ce déclenchement du travail ?) ? Quelle a été
la durée du travail d’accouchement ? S’agit-il d’un accouchement par voie
basse ou par césarienne, et pourquoi (indications de la césarienne si pos-
sible) ? Quels sont les souvenirs et les impressions affectivo-émotionnelles
de cet accouchement ?
Certaines questions viennent compléter l’analyse de cette période périna-
tale. Le thérapeute demande par exemple : est-ce que la mère et le patient
ont eu des problèmes dans la période périnatale ? Quel était le poids, la
taille du bébé ? Le patient a-t-il été réanimé à sa naissance ? On recherche la
notion de séjour du bébé en couveuse ou une autre forme de réanimation.
Est-ce que le cri du bébé était faible, fort, peu audible, absent à sa naissance ?
Les parents peuvent-ils raconter les débuts des tétées à la naissance ?
Lequel des deux parents se montrait le plus disponible pour le bébé ? Ont-ils
reçu de l’aide de la part de leur entourage familial, des amis ou des voisins ?
Peuvent-ils aborder la question des premiers soins (nettoyage, bain, change
des couches, etc.) ?
Est-ce que le patient a présenté une pathologie congénitale (ictère néo-
natal, cardiopathie congénitale, malformation congénitale, etc.), acquise

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70 Anamnèse du patient et de sa famille

ou un autre signe inquiétant à la naissance ? Les parents ont-ils accepté


de faire un prélèvement des cellules souches de leur enfant, et pourquoi ?
Tous les gestes effectués et les conseils reçus de la part des soignants ou de
l’entourage peuvent éclairer la démarche clinique.
En ce qui concerne le bébé, plusieurs questions aident à clarifier de quel
bébé il s’agissait. Le thérapeute recherche les correspondances entre le bébé
imaginaire, le bébé réel et le bébé fantasmatique chez les parents. Le théra-
peute examine le vécu émotionnel et la manière dont les parents racontent
ou rapportent les événements liés à la naissance de l’enfant. Quelles étaient
les émotions ressenties par les parents à l’accouchement ? Quels types de
souvenirs ou d’images garde chacun des parents de cet événement ? Est-ce
que les parents peuvent donner une narration de cet événement de la nais-
sance de leur bébé ?

Réactions et attitudes intrafamiliales à la naissance


du bébé
L’accouchement d’un enfant n’est pas une chose anodine. Nous invitons
chaque thérapeute à se demander si chaque naissance est un heureux événe­
ment. L’arrivée de l’enfant perturbe l’équilibre familial (du couple conjugal
ou de la petite famille nucléaire). Cette naissance peut devenir un début
des cauchemars pour certains membres de famille. L’anamnèse de cette
période nous apporte des informations très utiles sur les premières réac-
tions ou interactions entre le nouveau-né, ses parents et tout l’entourage.
En fait, le thérapeute conduit son examen de manière à recueillir plus
d’informations concernant l’accueil, les échanges, les disponibilités des
uns et des autres, les réactions socioculturelles à la naissance du patient.
Les questions suivantes peuvent orienter cette recherche : qu’est-ce qui a
précédé les jours avant la naissance du patient ? La mère était-elle prête à
accoucher ? Quels étaient l’atmosphère ou le climat conjugal et celui de
l’entourage ?
Est-ce que les enfants aînés de la famille se sont mobilisés pour accueillir
le bébé ? Quelle a été la réaction de la fratrie ou des proches parents lors de
la première rencontre avec le bébé ? Quelles étaient les réactions de l’entou-
rage familial vis-à-vis du sexe, du visage, du patient ou de sa physionomie,
etc. ?
Comment l’entourage du patient a-t-il qualifié la relation entre le patient
et ses parents à sa naissance ? Qui a donné le prénom au patient et que cela
signifie-t-il en particulier ? Qu’est-ce qui a motivé le choix de ce prénom ?
Y aurait-il d’autres informations particulières ayant trait à ce prénom, à
savoir : est-ce qu’il s’agit d’un prénom originaire, d’un nom de remplace-
ment ou d’un prénom d’emprunt ? Existe-t-il une cérémonie coutumière,
religieuse, culturelle lors de l’attribution du nom à l’enfant ? Qu’est-ce que
les parents attendaient du bébé en lui donnant ce prénom ? Etc.

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 71

Bébé et clinique de l’attachement


Généralité sur l’attachement
Nous abordons ici quelques éléments essentiels sur le développement du
processus d’attachement. Ce travail se focalise sur les éléments de sémio­
logie de l’attachement. Il nous semble néanmoins nécessaire de revenir sur le
concept d’attachement chez les petits enfants ou chez les bébés. La sémio-
logie de l’attachement est complétée par d’autres informations recueillies
dans les autres items du status clinique. La théorie de l’attachement n’est
pas développée dans ce guide.
L’attachement est un concept très large et développé par de nombreux
auteurs, dont l’initiateur fut John Bowlby. Il a revisité sa théorie en 1969 :
« la similitude des concepts ou l’accent porté sur les mêmes dimensions est
évident pour qui est familiarisé avec ces deux œuvres majeures : présence du
bébé réel, importance des interactions comportementales et émotionnelles
comme indicateurs des processus psychologiques sous-jacents, rôle de la
sensibilité parentale aux signaux de l’enfant, poids des événements réels,
poids du transgénérationnel interpersonnel, empathie du thérapeute. »
(Guédeney et al., 2007)
Le concept d’attachement est intimement lié à celui de parentalité
(inventé par Benedek). « Le concept de parentalité s’impose comme porteur
d’une idée-force : être parent n’est ni une donnée biologique ni une donnée
sociale, mais le fruit d’un processus complexe de maturation psycho­
logique. » (Sellenet, 2012) D’autres termes tels que la coparentalité, l’homopa­
rentalité, la monoparentalité, la pluriparentalité, la grand-parentalité, etc.
sont souvent utilisés pour qualifier les capacités d’un individu d’être parent.
Sellenet continue à écrire que « soucieux de présenter le devenir-parent
comme une étape de maturation de l’adulte, Benedek invente le terme de
parenthood pour désigner le processus de développement psychoaffectif
commun aux deux géniteurs du fait de la conception d’un enfant. » (2012)
L’être ou le devenir parent sont-ils des capacités innées ou les fruits d’un
long processus d’acquisition d’un futur parent ? Que peut-on comprendre
de l’attachement ?
L’attachement est défini comme un lien qui s’établit entre deux per-
sonnes : l’une est plus immature, vulnérable et totalement dépendante, et
l’autre est mature et apte à apporter de la sécurité au plus petit. En fait,
« il s’agit de ce lien qui nous fait rechercher et trouver auprès de certaines
figures spécifiques un sentiment de réconfort et de sécurité quand nous
sommes nous-mêmes en détresse ou en situation d’alarme ou d’impuis-
sance. Son importance est toute particulière dans les premières années de la
vie. » (Guédeney et al., 2008)
L’anamnèse permet au thérapeute de s’attarder sur les éventuels éléments
qui sont en rapport avec la qualité du lien d’attachement du bébé à son

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72 Anamnèse du patient et de sa famille

caregiver (mère, père, oncles et tantes, grands-parents, etc.). Ainsi, le thé-


rapeute cherche à savoir si le patient a ou avait acquis la capacité d’être
seul en présence ou en absence de l’autre. Ces informations envoient vers
les notions de la sécurité interne du patient et à celle de ses caregivers.
En d’autres termes, quelle est la qualité de l’attachement d’un côté et de
l’autre : celle du bonding ou du caregiving ? Le thérapeute recherche sys-
tématiquement les signes pouvant orienter vers un trouble du premier lien
mère-bébé. Il analyse ou examine la qualité du lien entre le bébé et sa mère
ou ses parents. Ce lien se met en place durant les premières années de vie.
Il incombe au thérapeute de s’attarder sur les questions ayant trait aux
liens précoces dans l’anamnèse personnelle et familiale du patient. La
première enfance nous apporte des éléments précieux pour comprendre le
fonctionnement structurel du patient et dynamique de sa famille. Ces don-
nées cliniques nous renseignent sur la manière dont le patient a construit
l’échafaudage de sa vie psychique et sociodéveloppementale.
Le thérapeute analyse systématiquement les informations sur les pro-
bables ruptures ou séparations, les pertes, les retrouvailles, les acquisitions
sur le plan neurodéveloppemental et cognitivo-affectivo-social qui ont eu
lieu dans cette prime enfance. Toutes ces diverses informations cliniques
doivent être recherchées du côté du bébé et des parents.

Mise en place de la relation précoce


La première expérience relationnelle permet au patient d’inscrire ou de gar-
der les messages qu’il reçoit de son environnement immédiat. La répétition
de ces informations produit des traces considérées elles-mêmes comme des
empreintes précoces. Celles-ci représentent les modèles relationnels entre
les parents et leur enfant. Le thérapeute doit rechercher systématiquement
les éléments ou les signes d’un probable trouble de la relation précoce.
L’attachement naît d’un comportement naturel ou inné de l’être vivant.
Est-ce qu’il s’agit d’une suite des événements, comme prescrits dans un
canevas édicté par l’évolution humaine ? On retrouve une adaptabilité et
un ajustement du patient à leur enfant ou du bébé à l’adulte dans le proces-
sus d’attachement. Nous laissons aux théoriciens le soin de répondre à cette
question : comment l’attachement se met-il en place ?
De façon globale, il est important de chercher comment le bébé a établi la
proximité physique, le comportement exploratoire et la capacité d’identifier
un indice menaçant chez lui. La théorie de l’attachement met en relation
les différentes catégories d’attachement avec les facteurs dits protecteurs ou
favorisant l’un ou l’autre type d’attachement.
Parmi les facteurs favorisant une excellente qualité d’attachement, on a
le lien relationnel entre le patient et l’adulte caregiver. Bien que le niveau
socio-économique soit classé parmi les facteurs péjoratifs, nous restons
convaincus qu’un attachement sûr exige à avoir de bonnes interactions

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 73

relationnelles entre le bébé et son caregiver. Le faible niveau socio-écono-


mique a un effet négatif sur l’interrelationnel. Il induit ainsi la précarité
sociale en affaiblissant le lien relationnel. Celle-ci diminue la capacité et la
disponibilité des adultes dans leurs interactions avec le bébé. Nous insistons
sur le fait que ce niveau socio-économique doit être contextualisé. Nous
sommes sûrs que les avoirs ou la pauvreté devraient être entendus non pas
dans le cadre financier, mais plus dans le rapport à l’autre.
Pour le dire autrement, la pauvreté relationnelle dont il est question
ici n’est donc pas économique ni financière, elle est plutôt relationnelle.
Il n’est pas rare de retrouver des patients qui sont nés dans des familles
pauvres, économiquement parlant, mais qui ont une excellente qualité
d’attachement. Dans l’investigation de lien d’attachement, il s’agit de
trouver comment ça marche ou comment se met en place le lien inter-
relationnel le long de la vie. Le contexte sociofamilial doit être central. Le
contexte social doit répondre au besoin social primaire qui est considéré
comme inné au patient.

Figure d’attachement ou caregiver


Le terme caregiver, ou figure d’attachement (FA), renvoie au parent, nounou,
grands-parents, oncles, tantes, ami(e), voisin(e), parrain, marraine, assis-
tant(e) maternel(le), etc. Il s’agit de toute personne qui s’occupe de l’enfant
ou toute personne qui est le plus en interaction relationnelle avec lui. Cet
adulte écoute les besoins de l’enfant et les assouvit. Le caregiver est l’adulte
qui prend soin physiquement et émotionnellement du plus petit. On étend
ce concept à celui qui protège, sécurise, permet la survie, permet de grandir
en confiance. Le caregiver offre une relation d’affection à l’enfant. Celle-ci
permet à l’enfant de s’attacher à l’adulte qui lui donne le soin et la sécurité.
L’adulte devrait investir émotionnellement l’enfant. La nature des choses
veut que le parent (la mère ou le père) soit le premier caregiver de son enfant.
Le parent exécute sa fonction de FA en s’occupant de son enfant qui est
dans le besoin.
L’adulte a une capacité de percevoir les besoins des petits. Il peut s’agir
des moyens comme : caregiver, intersubjectivité, empathie, soucis de l’autre,
etc. L’un des canaux ou schémas de communication entre le bébé et l’adulte
caregiver peut être : les odeurs, les bruits, les mots, les sons, les positions, la
température du milieu ou corporelle, etc. La répétition de ces différentes
informations sensori-motrices laisse une trace dans le répertoire psychique
du bébé. Ces expériences relationnelles précoces laissent des traces dans le
développement du bébé.
L’attachement est une histoire de rencontre entre deux individus : le bébé
et l’adulte. À côté des préoccupations physiologiques ou des sollicitations
quotidiennes qui peuvent interférer dans la mise en place des liens rela-
tionnels entre le bébé et son caregiver, on retrouve les troubles psychiques.

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74 Anamnèse du patient et de sa famille

Le thérapeute recherche si les parents n’ont pas eux-mêmes vécu des


carences. Est-ce qu’ils ont souffert d’un trouble psychique particulier ?
Quels étaient les états mentaux et psychiques des uns et des autres dans
leur famille ? L’absence ou l’indisponibilité psychique du caregiver pour
des questions de deuil ou d’autre trouble psychopathologique, de conflit
conjugal, etc., empiète sur la qualité relationnelle avec le bébé. Cela risque
d’entraîner une diminution ou une absence d’attention pour le patient, et
causer la perturbation ou fausser les empreintes précoces à la suite de cette
absence psychique de l’adulte.
En outre, d’autres causes ont été soulignées par Kobak et Mandelbaum. Il
est question de toutes les sources ou causes qui peuvent influencer ou inter-
férer avec la mise en place des liens d’attachement ou du caregiver. Il s’agit
de « la multiplicité des stress environnementaux éventuels auxquels la mère
est soumise (événements négatifs de la vie de type chômage, maladie, statut
socio-économique précaire), les stress interpersonnels (conflits conjugaux,
absence d’alliance parentale avec le père, autres personnes à protéger, enfants
jeunes, fratries en souffrance, ascendants à protéger), qui peuvent miner les
ressources de la mère pour exprimer son caregiving. » (Guédeney et al., 2008)
Rappelons que le comportement d’attachement l’emporte sur celui de
caregiver. En activant ce comportement d’attachement, l’adulte désactive
son comportement de caregiver. Est-ce que la mère ou le père eux-mêmes
avaient ou ont un attachement solide ? Il est préférable que le parent soit
sûr afin de permettre à son enfant de bien s’attacher. On recherche si le
parent n’était pas distant ou rejetant vis-à-vis du patient. Par ailleurs, les
nouvelles naissances ont une influence sur la qualité ou sur la disposition
psychologique des parents envers la fratrie. Le thérapeute recherche dans
ce cas les différentes représentations que peuvent avoir les parents de leurs
enfants.
Guédeney et al. (2008) affirment que « dès les premiers mois, le parent
montre son acceptation des besoins d’attachement, sa tolérance aux
expressions de détresse et son envie de répondre à cette détresse en étant
persuadé qu’il est indispensable à la régulation émotionnelle de son bébé
à ce moment-là. À partir du 1er trimestre, le parent soutient de manière
sensible l’exploration de son petit : le parent peut promouvoir la coopéra-
tion, développer la résolution de problèmes de manière indépendante par
le petit, poser les défis appropriés, aider à la régulation émotionnelle et tout
ceci sans intrusion et avec le respect du rythme de l’enfant auquel il laisse
le leadership. » Le rôle de caregiver n’est pas l’apanage de la mère seule.
Nous pensons que tout adulte vivant avec le nouveau-né lui apporte d’une
manière ou d’une autre une part de sécurité interne. Mais, sans nous voiler
la face, et pour nous répéter, la mère et le père sont les deux personnes de
référence qui apportent le plus de matériel dans cette construction. Il est
important alors de chercher si le conjoint était ou non d’une aide pour sa

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 75

conjointe et vice versa. Comment réagissait l’entourage face ou difficultés


de la mère ou du père ?
En plus de tout ce qui précède, le thérapeute devrait rechercher les signes
de la dépression maternelle ou d’une autre maladie (psychose, phobie
d’impulsion, angoisses, détachement émotionnel, etc.) du post-partum et
toutes les autres causes qui concernent l’adulte, telles que le deuil, la sépara-
tion, le divorce, le conflit conjugal, la précarité socio-économique, etc., qui
peuvent perturber la mise en place des liens d’attachement pour l’enfant.
Enfin, il faut savoir que si les mères peuvent de leur côté souffrir d’une
dépression du post-partum, les pères peuvent également souffrir comme
elles, voire aussi présenter une psychopathologie perturbatrice de mise en
place du processus d’attachement chez leurs nouveau-nés.

Exploration de l’attachement
Il est établi que « dès la naissance, le bébé va expérimenter, chaque jour et
de nombreuses fois par jour, que la même personne s’approche, et par une
série d’interventions, lui apporte le réconfort, apaise sa détresse et lui per-
met de retrouver un état d’équilibre, de détente et de reprendre le contrôle.
Cette personne lui parle, agit, lui fait ressentir qu’elle partage son vécu émo-
tionnel, soulage sa détresse et lui fait vivre l’expérience répétée que le chaos
est suivi de solutions positives. » (Guédeney et al. 2008) Le thérapeute
cherche comment le bébé a fait ses multiples rencontres et la qualité de
ses empreintes précoces. Rappelons que le patient perçoit les modifications
posturales et relationnelles du handling et holding de l’adulte. Il est de ce fait
sensible à la disponibilité psychique de son caregiver.
Le thérapeute devrait accorder plus de temps à son exploration de la
période de la première enfance. Il se demande comment le patient a pu
développer sa capacité d’imitation, d’identification, comment étaient ses
jeux symboliques, acceptait-il les limites que posaient les parents ou la fer-
meté des parents ? Faisait-il appel aux adultes ?
Le thérapeute recherche les canaux de communication entre le patient et
son caregiver. Il recherche systématiquement les éléments sensorimoteurs
(les bruits forts, la perte de soutien, les mouvements de ses membres, etc.)
et la manière dont le patient exprime ses peurs, ses joies, sa curiosité, etc.
Comment les parents arrivent-ils à décoder les différents messages que leur
envoie leur bébé ? À quoi les parents sont-ils plus attentifs dans leurs inter-
actions avec leur bébé ?
Il est important de signaler que certaines activités du bébé favorisent son
attachement.
• De la naissance à 3 mois, il peut s’agir de succion, comportement aver-
sif (cris et pleurs), signalisation (babillage et sourire), comportement actif
comme s’orienter vers l’autre, s’agripper, attraper et s’accrocher à l’autre,
suivre le regard, etc.

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76 Anamnèse du patient et de sa famille

• Vers l’âge de 3-4 ans : est-ce que le patient a acquis la capacité d’être seul
en présence ou en absence de l’adulte ? Quelle distance physique et rela-
tionnelle peut-il tolérer sans qu’il déclenche l’alarme d’alerte émotionnelle
(le cri, les pleurs, les rires, les différentes vocalisations, se tortiller le corps,
montrer un mal-être, etc.) ?
Les enfants non attachés risquent de développer des troubles instru-
mentaux (trouble de langage, dyslexie), des troubles du comportement,
de l’hyperactivité, des retards sur le plan cognitif et psychomoteur, etc.
Ces patients sont le plus souvent hospitalisés ou placés en institutions
médico-sociales (foyer d’urgence, foyer d’accueil ou thérapeutique, famille
d’accueil, centre de jour, etc.). Ils sont le plus souvent confrontés aux change­
ments continuels des adultes qui prennent soin d’eux. Ils ont besoin de la
prise en charge en logopédie, en psychomotricité, en ergothérapie, par des
éducateurs spécialisés, etc.
Une des particularités de ces patients est de tester le lien relationnel. Dès
que l’enfant placé a répertorié la personne importante pour lui, il fait tout
pour tester le cadre et ses limites. Il est important de travailler en supervision
avec la personne référente car l’adulte risque de lâcher prise et de se sentir
submergé ou incapable d’être utile pour le patient. Ce dernier peut se dire que
les adultes lui ont proposé quelque chose d’intéressant, mais qui ne tient pas.
En outre, dans l’anamnèse, le thérapeute explore les réactions du patient
sur le plan comportemental. Il s’interroge sur ses retours de week-ends (si
le patient a des parents séparés et qui se partagent la garde ou le retour
du foyer). Il cherche les manifestations de régression : énurésie, trouble du
comportement, crises clastiques, tolérance à la frustration, crises d’angoisse
ou moments d’anxiété, hypervigilance, etc.
Ces modifications ou ces changements du comportement du patient
peuvent être dus à une réactivation des liens d’attachement par la visite
ou le séjour chez l’un des parents ou dans les foyers. Le patient peut avoir
des lectures distordues du monde interne de ses parents ou de l’adulte qui
s’occupe de lui. Il se met ainsi à crier, à pleurer, etc. Il manifeste ces types de
comportements quand l’adulte est absent émotionnellement pendant qu’il
a besoin de lui. Le thérapeute essaie de voir si les parents ont l’impression
que leur enfant venait les chercher quand ses capacités psychiques étaient
dépassées.
De façon générale, le thérapeute demande : comment les parents interprè-
tent-ils le sourire, le regard, les mouvements, les sons, les agitations, enfin
les différents moyens de communication de leur bébé ? Comment était le
patient dans sa petite enfance sur le plan allaitement, sommeil et interac-
tions avec l’autre ? Quels sont les qualificatifs que les parents peuvent don-
ner à ce bébé réel ? Quelles étaient les réactions ou les interpellations qu’ils
s’échangeaient en famille ? Comment étaient les rapports parents-patient
dès le bas âge du patient ? Quels étaient les éventuels placements durant la

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 77

petite enfance (garde pour enfants, crèche, nounou, grands-parents, foyer,


adoption, etc.) ? Qu’est-ce qui a motivé ces placements, ou pourquoi n’avoir
pas pris une nounou ou le placer à la crèche ? Comment le patient réagis-
sait-il lors de ce placement ? Qu’était le retour des adultes qui s’occupaient
de l’enfant ? Comment le patient se comportait-il envers les adultes et ses
pairs dans ces divers milieux de placement ?
Le thérapeute demande si l’enfant était apathique, hypotonique ou s’il
avait des regards vides. On peut noter que certains nourrissons sont déjà
très actifs dès la naissance. Ils ont du mal à rester calmes. Est-ce que les
parents rapportent que le bébé criait, pleurait, ou qu’il était difficilement
consolable ou non, etc. ? Est-ce qu’ils arrivaient à comprendre la raison de
changement de comportement de leur bébé ?
Le thérapeute cherche les signaux d’alerte observables chez le patient :
hypervigilance, peur excessive, agitation désorganisée, défiance, manque
d’activité exploratoire, recherche d’affection indiscriminée, etc. Selon le type
d’attachement confiant, inquiet, évitant ou ambivalent, les patients réagis-
sent différemment à la séparation et aux retrouvailles avec le parent ou la FA.
L’attachement rapproche le patient à ses caregivers. Pour ce qui concerne
le comportement d’attachement, il est important d’observer comment le
patient :
• fait attention à l’absence de sa FA. Quelles sont ses réactions face à la
séparation et aux retrouvailles avec ses parents ou la FA ?
• utilise son parent comme une base de sécurité dont il peut s’éloigner puis
se rapprocher lorsqu’il a besoin d’être rassuré ;
• accepte d’être consolé et aidé par sa FA.
Quelles étaient les réactions du patient à la séparation d’avec ses parents
et surtout son caregiver ? Les parents avaient-ils noté des signes d’angoisse
de l’étranger (signes particuliers face aux inconnus) ? Pouvait-il présenter
ou non des signes ou des manifestations de plaisir aux retrouvailles avec sa
figure d’attachement ou son caregiver ? Avait-il un regard évitant ? Est-ce qu’il
réagissait aux bruits ou à des modifications de sons ? À quel âge les parents
ont-ils observé le premier le sourire ? Est-ce que le patient pleurait souvent
ou non ? Quels sont les souvenirs qu’ils ont de cette période ? Nous insis-
tons sur le fait que le thérapeute doit inviter les parents à parler du patient
quand il était bébé. Historiciser le passé du patient permet aux parents de
faire un lien entre leur propre passé et celui de leur enfant. Quelles sont les
ressemblances ou les dissemblances à relever ? Quels qualificatifs les parents
donnaient-ils à leur bébé ?
Au même moment que le thérapeute évalue la qualité ou le type d’attache-
ment que développe le patient avec sa FA, il évalue les compétences paren-
tales de ses parents. Parce que « dans le cadre de la clinique, les interactions
doivent être également étudiées à la lumière du dialogue qui s’institue entre
ses partenaires et l’observateur : on a vu toute la richesse de ce dialogue

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78 Anamnèse du patient et de sa famille

qui implique aussi l’enfant imaginé et les attitudes actives de ce dernier. »


(Lebovici, 2018)
L’évaluation de la qualité ou le type d’attachement du patient est un
exercice qui fait un point entre le recueil des éléments anamnestiques et
l’examen clinique.

Quatre chantiers de la naissance


À l’aube de sa vie, le bébé est confronté aux quatre chantiers à construire.
Dès qu’il naît, l’enfant est appelé à construire les quatre chantiers de la vie.
L’attachement est l’un des quatre chantiers qu’on retrouve à la naissance
du bébé. Voici les trois autres chantiers auxquels le bébé est confronté à sa
naissance :

Premier chantier : opter pour la vie


« Le bébé doit opter pour la vie » est une expression de Michel Soulé. Depuis
1980, les spécialistes de la psychopathologie savaient déjà que le bébé devait
opter pour la vie au risque de mourir. Et depuis lors, celui-ci est devenu l’un
des chantiers. On peut dire que « le chantier de l’autoconservation est celui
qui permet que s’enclenchent les grandes fonctions vitales de l’organisme
sans lesquelles le nouveau-né ne pourrait pas physiquement survivre. »
(Golse, 2019) Cela étant, vivre n’est plus un jeu du hasard, ni quelque chose
à prendre à la légère, vivre pour l’enfant est l’un des plus grands enjeux de
sa vie. Il doit mettre en place tous ses moyens pour vivre.
Sans vouloir ignorer les avancées de la médecine fœtale et pédiatrique, il
est important de souligner les statistiques de la mortalité infantile surtout
dans les pays qui ont des difficultés économiques. La vie pour certains ne
devrait pas être considérée comme une suite logique après la naissance, elle
est un véritable fruit d’énormes sacrifices pour le bébé et les adultes autour
de lui dès sa naissance.
En d’autres termes, il faut que la pulsion de vie l’emporte sur la pulsion
de mort dès la naissance du bébé.

Deuxième chantier à la naissance : l’attachement


Nous revenons beaucoup sur cette notion d’attachement. La raison est que
l’attachement joue un rôle considérable dans le développement du bébé.
« Le chantier de l’attachement est celui qui permet à l’enfant de réguler au
mieux la juste distance spatiale, physique avec autrui, afin de construire son
espace de sécurité, ce qui renvoie à tout ce que John Bowlby (1978, 1984)
a développé dans le cadre de la théorie de l’attachement. » (Golse, 2019) Il
ne s’agit pas de n’importe quel type d’attachement. Le bébé doit avoir un
attachement sécurisé, qui lui permettra de passer aux deux autres chantiers
de la vie. Le bébé devrait se sentir très en sécurité pour qu’il ose explorer les
objets de son entourage sans peur de se voir relâché par l’adulte.

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 79

Troisième chantier : l’intersubjectivité


À la suite de l’attachement, le bébé doit construire ses capacités d’inter-
subjectivité. Plusieurs auteurs et théoriciens ont bien développé ce concept
d’intersubjectivité qui est lié à celui de subjectivité. Disons plus simplement
que « le chantier de l’intersubjectivité est celui qui lui permet de réguler au
mieux sa juste distance psychique, cette fois avec autrui, afin de se sentir
exister comme une personne à part entière. » (Golse, 2019) Cette intersub-
jectivité l’aide à faire des va-et-vient tout en restant connecté au caregiver.
L’adulte est là pour lui faciliter cette tâche délicate, essentielle et continuelle
durant toute sa vie.

Quatrième chantier : le principe de plaisir et de déplaisir


Freud est le premier à avoir conçu et développé les concepts de principe
de plaisir et de déplaisir. Le patient ressent le déplaisir devant la montée
d’angoisse, d’inconfort psychosomatique, les émotions indigestes, etc. à un
niveau plus haut. En revanche, la baisse de ce niveau au sein de l’appareil
psychique lui procure du plaisir. Il cherche ainsi à satisfaire ses besoins psy-
chiques ou à baisser le niveau des pulsions pour obtenir du plaisir. Ces deux
principes accompagnent l’individu durant toute sa vie.

Enfin, ces quatre chantiers de la vie sont interdépendants. Le bébé va de l’un


à l’autre dès la naissance jusqu’à sa mort. Golse (2019) explique que les quatre
chantiers, bien que distincts, restent interdépendants et l’un facilite l’accès à
l’autre. Après avoir acquis la capacité d’autoconservation, le bébé travaille ses
liens d’attachement « puisqu’un attachement sécurisant favorise l’intersubjecti-
vité, et puisque celle-ci est nécessaire à la prise en compte par le bébé du plaisir
ou du déplaisir d’autrui. » Voilà de manière rassemblée comment ces quatre
chantiers se mettent en place.

Développement psychomoteur du bébé


Le thérapeute recense, avec finesse et dans la mesure du possible, les détails
sur le développement psychomoteur du patient. Il faut relever au maximum
les informations sur ce développement psychomoteur. Comment étaient
le développement précoce et son évolution ? Le patient aurait-il présenté
un retard dans ses acquisitions psychomotrices ou du développement ?
Est-ce que les parents rapportent des signes de précocité, de traumatismes
physiques ou de maladie grave durant la petite enfance ? L’exploration des
compétences du bébé requiert d’examiner les diverses compétences de la
relation parent-bébé.
Parfois, il faut aider ou pister les parents dans cette recherche clinique. Il
arrive qu’ils aient peu de souvenirs du passé de leur enfant. Pour y parvenir,
voici certaines informations à chercher.

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80 Anamnèse du patient et de sa famille

Prémices du langage verbal


L’apparition du langage chez le bébé n’est pas un fruit du hasard. Certains
parents sont attentifs aux faits et gestes de leur enfant, d’autres, en revanche,
le sont moins. L’exploration peut d’une façon ou d’une autre orienter pour
recueillir plus d’informations. Par exemple, on leur demande : à quel âge
le patient a commencé à faire des babillages ou ses premiers cris ou ses
premiers mots et phrases ? Est-ce que le parent était attentif aux divers cris
de son bébé ? À quel moment avait-il commencé à babiller ? Montrait-il les
compétences à imiter l’adulte ? Est-ce que les parents ont perçu le moment
où leur bébé a fait sa première mue vocale ? Comment étaient ses cris (des
cris de joie, des cris agaçants, des cris de communication) ?

Communication visuelle
La communication n’est pas seulement verbale, il existe d’autres modes
de communication telle que la communication visuelle. Le thérapeute
demande aux parents comment était le regard de leur bébé ? S’agit-il d’un
regard communicateur ou non ? Quel message lisaient-ils du regard de leur
enfant ? Comment décrivent-ils ce regard ? Quels en sont les souvenirs ?
Est-ce que les parents étaient les seuls à remarquer le regard de leur bébé, ou
l’entourage ou le voisinage pouvait-il aussi faire des remarques ? Comment
les parents recevaient-ils les remarques des passants ou de l’entourage fami-
lial (gratifiant, décourageant, persécuteur, accusateur, etc.) ?

De la subjectivité vers l’intersubjectivité


Ces deux notions, la subjectivité et l’intersubjectivité, sont très importantes
dans la sémiologie du bébé. Même si ce guide ne traite pas de la théorie,
l’exploration de la subjectivité et de l’intersubjectivité apporte des informa-
tions complémentaires à la connaissance du développement psychomoteur
du bébé. Comment réagissait le bébé quand le parent lui présentait un dou-
dou ou un autre objet ? Quelles étaient ses préférences dans les jeux ? On
devrait demander au parent s’il avait imposé un jouet quelconque à leur
enfant ou si c’était le bébé lui-même qui avait décidé de jouer avec un objet
particulier. Il est capital de savoir pourquoi l’enfant préférait un jouet à un
autre. Est-ce que ce jouet permet d’entrer en relation avec lui ? Comment
arrivaient-ils à entrer en relation avec leur bébé ?

Réponse du bébé aux attentes de l’adulte


Il s’agit d’explorer les compétences du bébé à communiquer des informa-
tions au quotidien. Le thérapeute demande aux parents si le bébé leur faisait
des signes d’appel ou comment il faisait pour leur signifier qu’il avait besoin
d’eux. Comment arrivait-il à exprimer ses besoins :

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 81

• est-ce que l’enfant leur montrait qu’il a envie d’être porté ? Ou quand il
avait un besoin que l’on change ses couches ?
• est-ce qu’il appelait l’adulte quand il était fatigué, ou qu’il avait faim ou soif ?
• est-ce que le bébé montrait qu’il avait envie de dormir ou de changer de
position, etc. ?
• est-ce qu’il bébé avait besoin d’avoir toute l’attention en continu des
parents ou pouvait-il accepter de s’occuper seul en leur présence ?
Comment les parents arrivaient-ils à capter les messages ou signaux de
leur bébé ? Comment réagissaient-ils à tous ses moindres signaux ? Quels
types de souvenirs gardent-ils de ce moment ? Qu’est-ce qu’ils attendaient
de leur bébé ?
Est-ce que les parents se rappellent son premier sourire ? Comment réagis-
sait-il devant un inconnu ou bien encore éprouvait-il de l’angoisse devant
un étranger ?

Rencontres et séparations entre le bébé et ses parents


Dès sa naissance, le bébé fait plusieurs expériences, dont les diverses rencon-
tres et séparations avec différents objets. Il est important d’explorer comment
celles-ci se sont faites. Le thérapeute demande comment les parents rappor-
tent ou racontent leurs premiers moments de séparation avec le bébé. Est-ce
qu’il était difficile de se séparer de leur bébé pour une raison ou une autre de
leur vie professionnelle ou sociofamiliale ? Peuvent-ils nous parler des ren-
contres ou de retrouvailles qu’ils avaient avec ce bébé à la fin de la journée (au
retour du travail, ou après un long ou un court moment d’absence) ? Est-ce
que le bébé supportait l’absence de l’adulte ? Est-ce qu’il s’agissait d’un bébé
calme ou apaisé ? Quelles sont les émotions qui émergent durant la séance ?

Motricité globale et fine


Les parents sont questionnés sur le tout début du développement psycho-
moteur. Le bébé ne se met pas à marcher ou en position assise sans passer
par d’autres étapes précurseurs de ce développement précoce. À quel âge, et
comment, le bébé a-t-il amorcé la position assise ?
Plus spécifiquement, le thérapeute étudie la période ou l’âge auquel le
bébé a pu acquérir : la capacité de soulever sa tête en position couchée sur le
ventre, se tourner ou se retourner en position ventrale ou dorsale ? Faisait-
il appel à l’adulte ? À quel âge a-t-il tenu sa tête ou a-t-il acquis la position
assise, a-t-il marché à quatre pattes et marché debout ?
Comment les parents ont-ils réagi en le voyant marcher à quatre pattes ?
L’avait-il fait spontanément ou plus tard et difficilement ?
En ce qui concerne sa motricité fine, le thérapeute étudie comment s’est
faite l’acquisition de la préhension (à quelle période le bébé s’est-il rendu
compte qu’il pouvait ramasser ou tenir les objets en utilisant juste son pouce

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82 Anamnèse du patient et de sa famille

et son index ?). Il peut s’agir de gestes de manier ses doigts, les contempler,
toucher les objets autour de lui, toucher les doigts de l’adulte, ramener tout
vers sa bouche, se mouvoir en position ventrale ou dorsale, etc.
Cette exploration permet au thérapeute de relever les notions d’hypoto-
nie axiale ou globale, ou une hypertonie. Le patient peut avoir présenté une
maladresse ou une mauvaise coordination ou une inhibition psychomo-
trice. On peut noter des maniérismes, une agitation, une hyperactivité ou
une baisse ou une absence d’activité.
En définitive, tous les éléments du développement précoce du patient doi-
vent être scrutés avec finesse et empathie. Le thérapeute gagne beaucoup en
restant empathique et à écouter les parents, non pas dans la précipitation,
mais avec plus d’attention. Ces informations recueillies pendant l’anam-
nèse lui permettent de créer – sinon de renforcer – l’alliance de travail ou
l’alliance thérapeutique qui sont les éléments clés de la réussite d’un entre-
tien ou d’une observation clinique. La narration de cette période infantile
permet au couple patient-thérapeute d’historiciser la vie du patient.

Conduites alimentaires du bébé


Les moments de repas sont très précieux car ils nous informent sur la qua-
lité relationnelle entre les parents et le bébé. Le thérapeute recherche l’évo-
lution de l’alimentation durant la petite enfance. Le patient était-il nourri
au sein ou au biberon ou s’agissait-il d’une alimentation mixte ? Avait-il
présenté des allergies alimentaires lors du passage des liquides vers l’ali-
mentation solide ? Est-ce que les parents avaient de la facilité à passer des
liquides aux solides ? Est-il sélectif sur le plan alimentaire ? Comment était
son appétit ? Comment s’est passé le sevrage ? Il faut donner une opportu-
nité unique aux parents de raconter ce climat général lors des repas : ce que
faisait leur enfant durant le repas, les facilités et les difficultés rencontrées.
Comment ont-ils fait pour surmonter les difficultés à nourrir leur enfant ?
On demande aux parents de raconter la qualité des différents passages du
liquide au semi-solide et solide. Est-ce que leur enfant avait de la difficulté
à boire le biberon ? Qui s’occupait le plus de lui donner la nourriture ? etc.

Sommeil du bébé
Le moment de coucher n’a jamais été identique chez tous les bébés. Les
parents sont confrontés différemment à ses difficultés d’endormissement.
Comment s’y sont-ils pris ? Quel était le rituel de sommeil mis en place
(heure de coucher, atmosphère et lumière dans la chambre des parents ou
du bébé, comptines avant de coucher leur bébé, etc.) ?
On peut classer en deux grands groupes les causes d’insomnie chez les
bébés : il s’agit des origines somatique et psychique.

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Période prénatale, périnatale et postnatale du bébé 83

Origine somatique
Les difficultés d’endormissement ou les réveils fréquents du bébé peuvent
avoir plusieurs causes. Les collègues pédiatres sont plus consultés pour ces
raisons. Dans la mesure où ils le jugent nécessaire et important, ils deman-
dent aux parents de venir nous consulter. Comme exemple, citons les
coliques du nourrisson, qui perturbent grandement le sommeil du bébé.
Elles apparaissent le soir et poussent le bébé au hurlement, au cri, à un
inconfort qui ne laissent pas les parents indifférents.

Origine psychique
Les causes d’insomnie ou de difficultés pour dormir du bébé peuvent apparte-
nir aux parents. On peut aussi retrouver des angoisses de mort, des angoisses
de séparation, etc. chez les deux parents ou chez l’un d’entre eux qui se
transmettent chez leur bébé. Certains parents reviennent vérifier plusieurs
fois dans la nuit, même dans la journée, que leur bébé est encore en vie.
Rappelons que le thérapeute devrait très bien investiguer cette symptoma-
tologie de trouble du sommeil en périnatalité. Nous avons montré combien
l’aide des parents est capitale dans cette recherche clinique. Ces derniers
font obligatoirement partie du dispositif dès le diagnostic jusqu’à la prise
en charge du trouble du sommeil de leur bébé. Mais avant de proposer toute
sorte de traitement, l’évaluation en périnatalité ne limite pas aux premiers
éléments apportés par les parents. Il incombe au thérapeute de creuser et
faire émerger ce qui semble inexistant ou ce qui n’a pas été rapporté ou
n’est pas apparu au premier abord. Comme pour tout symptôme psychique
ou somatique en pédopsychiatrie, le trouble du sommeil est une des portes
d’entrée de la rencontre clinique pour le thérapeute.

Bibliographie
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis-
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Brusset, B. (2018). Enquête familiale et anamnèse. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M.
Soulé (dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1,
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Golse, B. (2019). De Lóczy à l’université ouverte du bébé Dans B. Golse (dir.), Les
Destins du développement chez l’enfant – Avenirs d’enfance (p. 43-50). Érès.
Guédeney, N., Morales-Huet, N., Rabouam, C., & Jeammet, P. (2007). Apports de
la théorie de l’attachement aux traitements conjoints parents-bébés. À propos
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Pierrehumbert (dir. ), L’Attachement, de la théorie à la clinique, 61-72. Érès.
Guédeney, N., Lamas, C., Bekhechi, V., Mintz, A. -S., & Guédeney, A. (2008). Déve-
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84 Anamnèse du patient et de sa famille

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vici, R. Diatkine, M. Soulé (dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de
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Sellenet, C. (2012). Parentalité. Dans M. Formarier, L. Jovic (dir.), Les Concepts
en sciences infirmières (2e éd., p. 231-233). Association de recherche en soins
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7 Période
de la prime enfance
Cette période est comprise entre l’âge de 3 et 5 ou 6 ans. Systématiquement,
le thérapeute analyse la qualité de l’alimentation, le sommeil, l’acquisition
de la propreté, les rapports sociaux du patient et bien d’autres informations
cliniques.

Alimentation
Il est important de noter les différents troubles alimentaires que pourrait
présenter le patient durant sa petite enfance. L’essentiel de l’exploration
des conduites alimentaires du patient ne se limite pas à la seule la petite
enfance, le thérapeute fait un lien avec les données récentes ou actuelles des
conduites alimentaires du patient.
Le thérapeute peut ainsi rechercher le comportement actuel du patient
face aux aliments (légumes, fruits, protéines animales et végétales, sucre-
ries, pâtisseries, etc.). Avait-il développé un refus alimentaire, une anorexie
ou une boulimie ? Le patient fait-il des caprices devant le repas ? A-t-il une
tendance à la potomanie ? Fait-il des régurgitations, des vomissements ?
Présente-t-il des troubles alimentaires de type pica, mérycisme, etc. ?
Comment l’entourage familial ou les parents réagissent-ils face aux difficul-
tés de leur enfant ? La notion de conflit entre parents et patient pendant ou
devant le refus du nourrissage (alimentation) est à examiner.
On constate des troubles alimentaires assez fréquemment chez les patients
ayant un trouble hyperactif avec déficit de l’attention. On recherche de
probables antécédents familiaux de troubles alimentaires.

Sommeil
L’anamnèse devrait nous fournir des informations nécessaires sur la qua-
lité, la quantité et les modalités de sommeil du patient. A-t-il fait ses nuits
tardivement ou non ? Quelles étaient les réactions des parents vis-à-vis du
trouble du sommeil de leur enfant ? Quelles explications donnent-ils à ce
trouble ? Est-ce que le patient continue ou non à dormir dans la chambre
ou dans le lit de ses parents ? Quelles sont les raisons qui ont amené les
parents à garder près d’eux leur enfant toutes les nuits ? À quel âge le patient
a-t-il intégré sa chambre ? Arrive-t-il à dormir seul ou non ? Demande-t-il à
dormir dans la chambre des parents ou avec ses frères ou ses sœurs ? Est-ce
que le patient présente des peurs avant de dormir ?

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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86 Anamnèse du patient et de sa famille

Le rituel du coucher doit être évalué minutieusement. Le thérapeute


recherche tous les rituels d’endormissement ou les autres rituels mis en
place par le patient ou ses parents pour s’apaiser ou éviter d’être envahis par
diverses angoisses et peurs.
Ces questions se complètent par celles qui sont orientées pour examiner
les rapports des parents entre eux. Certains couples invitent, proposent ou
laissent la place ou le choix à leur enfant de dormir dans leur lit conjugal
dans l’objectif de cacher ou d’éviter d’aborder le conflit latent entre eux.
Le thérapeute recherche si le patient présente des insomnies ou non.
Fait-il des cauchemars, des terreurs nocturnes, du somnambulisme ou des
hypersomnies ? Comme pour le trouble alimentaire, le thérapeute étudie le
trouble de la naissance à l’âge actuel du patient.

Acquisition de la propreté
Patient propre : contrôle des sphincters
L’acquisition de la propreté chez le patient est un élément important pour
sa socialisation. L’enfant qui n’est pas propre risque d’être sujet de rejet de
la part des certains adultes ou de ses pairs. Tous les enfants ne contrôlent
pas le sphincter urétral et anal au même âge. Certains, sinon tous, passent
par un apprentissage. Il est important de chercher comment le patient a
acquis la propreté et le contrôle de ses sphincters. À quel âge est-il devenu
propre le jour et la nuit ? Comment était l’acquisition de cette propreté le
jour et la nuit ? Les parents étaient-ils très exigeants ou sévères vis-à-vis de
la propreté ? Le patient a-t-il présenté des résistances aux apprentissages de
la propreté ? Était-il timide ou réservé à cette période-là ? A-t-il présenté des
périodes où il n’était plus propre ?
Les différents troubles psychopathologiques peuvent être relevés. Le
patient peut avoir une énurésie primaire ou secondaire, organique ou non,
il peut présenter des constipations ou une rétention urinaire et fécale. Le
thérapeute recherche le rituel, l’étalage des selles, la polyurie, les douleurs et
infections des voies urinaires et abdominales, etc. Le patient a-t-il présenté
une incontinence urinaire après l’âge de 5 ans ou une incontinence fécale
après l’âge de 4 ans ? Avait-il déjà acquis la propreté avant de redevenir
sale ? Le cas échéant, quelles étaient les causes de cette rechute (maladie
somatique, opération chirurgicale, traumatisme psychologique facile à
objectiver pour l’entourage, etc.) ?
Le plus important dans l’investigation des acquisitions de la propreté
est le fait d’analyser l’attitude ou le comportement de l’entourage familial
ou scolaire face aux difficultés de l’enfant. Quel sens ou quelle importance
accordent le patient ou ses proches à l’acquisition ou non de la propreté ?
Est-ce que le patient cache ses culottes quand elles sont sales ? Essaie-t-il
de les nettoyer seul ? Quel sentiment éprouve-t-il le matin à son réveil ?
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Période de la prime enfance 87

Comment réagissait l’entourage vis-à-vis de sa propreté ? Est-il harcelé ou se


moque-t-il de lui ? Reçoit-il du soutien de la part de sa famille ? Est-ce que
ces difficultés l’empêchent de garder ses relations amicales (par exemple :
le patient ne peut pas aller dormir chez ses amis, les parents lui refusent de
passer des soirées « pyjama » avec les autres, le patient a peur de mouiller le
lit d’un ami, etc.) ?

Patient constipé à répétition


Qu’en est-il de la constipation des enfants ? Certains patients contrôlent
consciemment ou non leurs sphincters jusqu’au point de développer des
constipations. Le thérapeute ne doit pas confondre ou mettre toutes les
causes des constipations sur le compte d’un contrôle. La constipation peut
être due à une mauvaise alimentation, à l’introduction d’un nouvel ali-
ment, à une cause psychologique, à une cause médicamenteuse, etc.
Nous invitons le thérapeute à s’y atteler, une fois que le patient se plaint
des constipations idiopathiques ou même celles qui ont une cause donnée.
Quelles sont les réactions des uns et des autres au sein de la famille envers
les constipations ? Quelles sont les habitudes alimentaires du patient ?

Période préscolaire et scolaire


En général, le moment d’aller à l’école ou à la crèche demande aux parents
et au patient d’adopter certains aménagements sur le plan relationnel. Le
thérapeute essaie de retracer le parcours du patient dès l’entrée à la crèche,
la fréquentation scolaire dès l’entrée à l’école maternelle jusqu’au jour de
l’entretien. La grande question est de savoir comme s’est passé son parcours
scolaire sur le plan qualitatif et quantitatif, comment se sont déroulés les
années d’école primaire, le collège et la suite (lycée, filières de formation
professionnelle).

Séparation des parents


Les séparations n’ont jamais été faciles pour certaines personnes. Il est inté-
ressant de voir comment les parents et l’enfant s’y sont pris quand est arrivé
le jour d’aller à l’école, à la crèche, etc. Comment le patient a-t-il vécu les
premières séparations avec ses parents en allant à l’école, à la crèche, etc. ?
Le thérapeute demande à l’entourage de décrire les différentes réactions du
patient et de ses parents face à la séparation.

Exploration de la période préscolaire


Le thérapeute demande si le patient a été confié à une nounou, à une crèche,
à une maman de jour, aux oncles ou tantes, aux voisins, aux grands-parents,
etc. Comment étaient l’entrée et le début de son placement à la crèche ?

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88 Anamnèse du patient et de sa famille

Comment ses parents ont-ils vécu cette séparation ? La question de la sépa-


ration est très centrale car elle donne la tonalité de la qualité d’attachement
du patient. Comment les parents ont-ils aidé leur enfant à se séparer d’eux ?
Il ne faudrait surtout s’arrêter sur la séparation, mais impérieusement cher-
cher la qualité de la retrouvaille en fin de journée ou fin de semaine, au
retour de vacances, etc. Le thérapeute aide les parents à déployer toute
information ou tout souvenir de cette période qui leur revient à l’esprit.
Tout comme les patients, ils doivent être invités à donner de la narration de
cette époque. Tous les souvenirs sont accompagnés par les affects et émo-
tions ressenties à cette époque. Dans l’ici et maintenant il est intéressant
d’entendre ou de demander la position ou les commentaires des parents et
du patient sur tel ou tel autre comportement passé.

Rapports sociaux
Il est important que le thérapeute se renseigne sur les relations ou les
rapports sociaux du patient. C’est l’âge aussi d’aller à l’école (école mater-
nelle et école primaire). À cet âge, les enfants commencent à avoir de plus
en plus des amitiés avec leurs pairs. C’est le temps de rechercher les éven-
tuels conflits entre le patient et ses pairs. Comment s’organisent ses jeux,
éprouve-t-il du plaisir ? Est-il victime de mauvais traitement ou du rejet de
la part des pairs ?

Sur le plan scolaire et parascolaire


Comment le patient se comporte-t-il en présence d’autres enfants de son
âge ? Préfère-t-il jouer avec les enfants de son âge ou avec des plus grands
que lui ? Accepte-t-il de partager ses jouets ? Est-il victime de harcèlement
de la part des plus grand ou de plus petit que lui ? En parle-t-il aux adultes
de l’école ? Recherche-t-il de l’aide auprès d’un tiers ? Comment se posi-
tionnent ses parents ou l’école vis-à-vis de ses abuseurs ou ceux qui le mal-
traitent ? Etc.

Sur le plan extrascolaire et extrafamilial


Est-il invité à des anniversaires ou des cérémonies de baptême de ses amis ?
Parle-t-il de ses fréquentations à ses parents ? Se plaint-il d’être victime des
maltraitances de la part des plus grands ? Qu’est-ce que les autres adultes ou
enfants rapportent à ses parents à son sujet ? Le thérapeute doit chercher
la notion d’hyperactivité, de timidité, d’isolement ou retrait social, etc. Le
patient peut se décrire comme étant le caïd de son groupe alors que c’est
contraire. Ne se laisse-t-il pas embrigader facilement dans les bêtises par ses
pairs ? Etc.

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8 Période
de la seconde enfance
Cette période s’étend de 5 ou 6 ans jusqu’à 10 ou 11 ans. La seconde enfance
vient avant l’entrée dans la puberté. Il est intéressant de rechercher des
informations sur le développement psychosexuel du patient, sa communi-
cation orale et écrite, ses interactions en milieu familial et extrafamilial, etc.
Avant de développer ces différents points dans ce chapitre, nous trouvons
important de noter le lieu de vie du patient. Est-ce qu’il habite avec ses
parents ? Vit-il avec sa famille biologique ou est-il placé dans une famille
d’accueil ou dans un foyer ? Provient-il du lieu de rétention ou de rééduca-
tion, d’une prison pour mineurs ou non ? Est-il un sans domicile fixe ? Ces
questions sont à préciser dans l’anamnèse du patient pour en savoir un peu
plus sur le pourquoi, le comment et la durée de son placement en dehors
de la cellule familiale. La détermination du lieu de vie du patient met le
thérapeute sur des pistes intéressantes durant son entretien.

Développement psychosexuel
Le développement psychosexuel du patient est tout aussi important à explo-
rer que les autres items du développement intégral de l’individu. Le théra-
peute cherche si le patient a la curiosité sexuelle. Comment s’est manifestée
sa sexualité infantile ? Donne-t-il trop d’explications sur sa sexualité ou à celle
des autres ? Montre-t-il un intérêt particulier sur la sexualité ? Comment le
patient se comporte-t-il envers ses pairs du sexe opposé ? Comment s’adapte-
t-il aux adultes du sexe opposé ?
Le thérapeute examine les probables troubles liés à cet âge. Le patient
entretient-il une activité masturbatoire occasionnelle ou excessive ? Souf-
fre-t-il d’un trouble de l’identité sexuelle ? Se considère-t-il comme appar-
tenant au sexe féminin, masculin ou neutre ? A-t-il demandé à changer son
sexe ? S’habille-t-il comme ses pairs du même sexe ou ceux du sexe opposé ?
Montre-t-il des tendances exhibitionnistes ou voyeuristes ou fétichistes ?
Souffre-t-il d’un traumatisme ou d’un abus sexuel récent ou passé ?

Développement de la communication orale


(cf. aussi chapitre 15)
Le thérapeute essaie de voir comment le patient s’adapte dans son
environne­ment linguistique. Avait-on constaté des changements éventuels
dans l’environnement linguistique du patient ? Les enfants des migrants,

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90 Anamnèse du patient et de sa famille

des familles qui viennent d’ailleurs peuvent présenter des difficultés dans
leur langage oral, car il leur faut assez de temps pour apprendre la langue
de leur nouvelle ville, de leur nouvelle cité ou de leur nouveau pays. Il est
conseillé d’attendre 2 ans après leur arrivée pour poser les diagnostics de
troubles ou de retard de langage.
Systématiquement, lors de l’exploration du langage oral et de la communi-
cation, le thérapeute devrait rechercher l’âge auquel le patient a prononcé les
premiers mots et ses premières phrases. Le contexte socio-environnemental
est important à signaler. Ces informations permettent de faire un lien avec
les difficultés actuelles du patient. Ce dernier peut avoir des troubles de l’arti-
culation, des retards de parole ou des troubles de phonation. Il peut avoir des
bégaiements, des zézaiements, etc. On peut noter des troubles de la phona-
tion, des troubles de la compréhension du langage ou un retard de langage.
Certains patients utilisent de manière inappropriée des mots, des échola-
lies, des néologismes ou d’autres troubles de la pensée. Il arrive que le thé-
rapeute observe un mutisme électif ou total. Est-ce que le patient s’exprime
de manière correcte et adaptée en sa langue maternelle ou non ? Combien
de langues est-il en mesure de parler ou de comprendre ? Le thérapeute
se fonde sur ses connaissances sur le développement normal de l’individu
pour comparer les symptômes du patient et le situer sur le continuum de
développement.

Développement de la communication écrite


Comme dit plus haut, la communication n’est pas seulement orale ou
visuelle, elle est aussi écrite. Le thérapeute cherche les probables investisse-
ments de la lecture et de l’écriture du patient. On peut noter des troubles de
la lecture et du graphisme (dysorthographie, dyscalculie, etc.). Ces troubles
sont à rechercher selon l’âge du patient. Est-il capable de compter, de lire et
d’écrire son prénom ou de reconnaître les chiffres et les lettres ? Comment
écrit-il son prénom ou son nom ? Le thérapeute s’appuie sur les remarques
pertinentes des enseignants et maîtres d’école pour se faire une idée des
difficultés du patient.

Patient dans l’environnement familial


Le milieu familial est l’endroit où la majorité des gens passent la plus
grande partie de leur vie. Ne dit-on pas que l’homme est un animal social ?
Globalement, on recherche les interactions entre le patient et le reste de la
fratrie ou son entourage. Quels souvenirs apporte le patient ou le parent de
cette prime enfance ? Répétons-le, cette investigation ne se limite pas à la
seule prime enfance. L’exploration clinique s’étend de la naissance jusqu’au
moment où nous avons rencontré le patient.

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Période de la seconde enfance 91

On devrait saisir ce moment pour s’informer sur la disponibilité des


parents. Est-ce qu’ils travaillent tous les deux ? Qui garde l’enfant en leur
absence ? Comment se font la séparation et les retrouvailles ? Pourquoi les
parents ont-ils préféré reprendre le travail ? Dans quel domaine et à quel
rythme travaillent-ils ?
Il est important d’étudier l’environnement familial afin de dresser un
tableau temporel du milieu dans lequel vit le patient. La qualité des rela-
tions ou rapports interpersonnels en famille et la disponibilité des frères
et sœurs et des parents. Le thérapeute cherche à savoir si les membres de
famille sont mobilisables ou pas. Les prochains rendez-vous ou différents
types de consultations et les thérapies risquent d’être mis en échec si les
parents ou l’entourage restent peu ou difficilement mobilisables.
Le thérapeute demande à l’entourage si le patient est adapté, autonome
ou trop dépendant dans ses rapports avec les membres de sa famille. Il peut
être soumis, opposant, agressif, destructeur, ou être un enfant calme et sage.
Certains patients font des crises de colère à la moindre frustration ou se
montrent très jaloux envers leur fratrie ou leurs parents. Le patient est-il dans
le retrait, la régression ou l’inhibition ? Qu’est-ce que la famille dirait sur le
comportement de leur enfant vis-à-vis de leurs animaux de compagnie ? Se
montre-t-il plus câlin ou maltraitant ? S’occupe-t-il de son animal de compa-
gnie ? Est-ce qu’il est soucieux du bien-être de son animal de compagnie ?
Quel que soit l’âge du patient, nous pouvons inviter l’entourage à utiliser
les images ou les animaux pour essayer de décrire le patient. Comment
l’entourage le décrit-il ? Toute personne qui est proche du patient peut
apporter des informations intéressantes pouvant compléter notre évalua-
tion. Ces informations peuvent être une source importante pour compléter
les traits de caractère de la personnalité du patient.

Patient dans l’environnement extrafamilial


En complément du point précédent, l’enfant ne passe pas sa vie seulement
dans son environnement familial. Il existe des moments où il est appelé
à sortir et à aller rencontrer d’autres personnes. Le thérapeute cherche à
savoir la nature de socialisation du patient. Quelles sont les relations qu’il
développe avec les enfants de son âge ? Est-il invité aux anniversaires de ses
amis ou non ? Est-ce que lui-même invite ses copains à ses anniversaires ou
d’autres cérémonies familiales (fêtes religieuses ou culturelles, etc.) ? Cette
exploration va au-delà des soirées ou fêtes d’anniversaire, il faut examiner
la qualité de jeux qu’a le patient avec ses pairs. Est-ce qu’il en parle à ses
parents ou à ses proches ?
Le patient est-il victime de mauvais traitements de ses pairs ? Est-il un
enfant solitaire, pourquoi et depuis quand ? Peut-on dire qu’il est asocial,
très social ou familier, et pourquoi ? Quel est son comportement envers

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92 Anamnèse du patient et de sa famille

les personnes vulnérables ? Est-il empathique ou antipathique envers ses


proches ? Quelle est la nature de sa relation avec les adultes de son quartier,
de son village, etc. ?
L’étude de la vie extrafamiliale s’étend également sur la manière dont
le patient se comporte avec les animaux des amis, des voisins ou les siens.

Expression des pulsions libidinales et agressives


Les pulsions sont un concept sur lequel nous revenons au chapitre 18. En
avant-goût, nous devons inviter le thérapeute à bien étudier ou à recher-
cher l’expression des pulsions (agressives ou libidinales) du patient, c’est
très important dans une évaluation clinique. Le thérapeute reste attentif à
la manière dont les parents décrivent les activités qui procurent du plaisir
à leur enfant. Il est également important d’être attentif à la manière dont
le patient nous raconte ses activités. Qu’affectionne-t-il ? Quels sont ses
centres d’intérêt ? Montre-t-il qu’il éprouve du plaisir à être en compagnie
de ses pairs ?
Le patient participe-t-il aux jeux de société ? À des activités sportives avec
ses pairs (football, volleyball, handball, tennis, etc.) ? Fait-il de la musique,
du dessin, etc. ? Aime-t-il la lecture, les voyages, lit-il des livres ou passe-
t-il son temps en jouant aux jeux vidéo (lesquels en particulier) ? Joue-t-il
seul ou en ligne avec des amis ? Connaît-il les amis avec qui il discute sur
internet ? Combien de temps passe-t-il devant les écrans ? Peut-il arrêter et
passer à d’autres activités sans difficulté ? Etc.
L’essentiel de cette exploration est de décrire le début et la fin d’une
activité. Le thérapeute doit faire attention à ne pas oublier d’interroger le
patient sur les causes ou la manière dont commence ou arrête une activité
quelconque. Est-il impulsif ? Il ne supporte pas l’échec ? Accepte-t-il que
l’autre propose d’arrêter un jeu ? Comment réagit-il par rapport aux règles
du jeu (cherche-t-il à les modifier par exemple) ?
Quelles sont les difficultés ou les facilités que le patient a rencontrées
dans ses activités ludiques ? Quelle est la fréquence ou quel est le temps
qu’il consacre sur telle ou telle autre activité ? Comment justifie-t-il ses
préférences de jeux ? Quelle est son implication dans le jeu ? Quel béné-
fice tire-t-il de son activité ? Fait-il cette activité ludique seul ou en groupe
d’amis de l’école, du quartier, dans un club sportif, sur internet avec des
amis virtuels ou non, etc. ?
On recherche également les façons dont le patient exprime ses pulsions
agressives. Quelle est sa réaction devant la frustration ? Est-il dans la provo­
cation ou non ? Est-il menaçant ou non envers ses pairs ? Comment
s’adapte-t-il aux changements de règles ? Comment exprime-t-il son dés-
agrément ou son mécontentement ? A-t-il des réactions disproportionnées
sans raison évidente ? Quel est son comportement pendant ses jeux et
diverses activités en étant seul ou en compagnie des autres ?

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Période de la seconde enfance 93

Qualité de la conscience sociale


Le point concernant la conscience sociale du patient est repris en détail
dans le chapitre 19. Il est nécessaire que le thérapeute s’enquière des impres-
sions des tiers par rapport au comportement, à la réaction ou à l’adaptation
du patient face aux règles de la société. Comment réagit-il par rapport aux
règles de société pendant les jeux ?
L’entourage le trouve-t-il autonome, responsable ou consciencieux ?
Le patient fait-il des petits mensonges ou des vols ? Commet-il des actes
délictueux intentionnellement ou sous l’influence des pairs ? Se remet-il en
question devant une remarque ?
Chez les patients préadolescents et adolescents, il est important de s’inter-
roger sur leurs rapports à la police ou à toute personne, symbole ou institu-
tion qui représentent l’autorité sociale ou la loi (le drapeau, les bâtiments
et les biens publics, etc.). Est-ce que le patient respecte la chose publique ?
Tenant compte de son âge, le thérapeute essaie d’en savoir plus sur la place,
l’estime, ou l’importance que le patient accorde à la société et ses règles.

Parcours scolaire
Le thérapeute étudie minutieusement le parcours scolaire du patient.
Comment était l’entrée à l’école maternelle, en primaire ? Comment le
patient s’est-il adapté à ses pairs et aux adultes de l’école ? Est-il un élève à
problème ?
Le thérapeute scripte les adaptations et relations du patient envers ses
pairs et ses enseignants, ses implications dans les apprentissages, ses résul-
tats scolaires, etc. à l’école maternelle et à l’école primaire. Quels étaient les
retours des enseignants sur ses compétences, en ce qui concerne ses appren-
tissages, la relation avec l’adulte et ses pairs ? Les adultes étaient-ils inquiets
sur les compétences du patient ?
Dans sa relation avec les autres à l’école, on demande si le patient est vic-
time de mauvais traitements ou de harcèlement de la part de ses pairs. Est-il
le meneur ou l’agresseur des autres ? Montre-t-il de l’empathie envers ses
pairs ? Respecte-t-il les règles de la communauté ? Fait-il l’objet d’un rejet de
la part de ses pairs ? Comment s’est-il adapté au parascolaire ? Déjeunait-il à
l’école ou chez lui ? Que disent les adultes éducateurs de la cantine scolaire
ou du parascolaire ? Le patient participe-t-il aux camps scolaires (ski, nata-
tion, découverte de la nature, etc.) ?
En fait, vis-à-vis des matières apprises en classe, le thérapeute pose les
questions suivantes :
• Le patient a-t-il rencontré des difficultés particulières dans les apprentis-
sages ? Retient-il les matières ou les leçons vues en classe ? Dans quelles
matières se montre-t-il très compétent ? Obtient-il de mauvaises notes en
classe ? Est-ce qu’il suit des cours de rattrapage des leçons ? A-t-il besoin

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94 Anamnèse du patient et de sa famille

d’une aide pédagogique complémentaire ? Redouble-t-il ou est-il promu à


la fin de l’année scolaire sans difficulté ou condition particulière ?
• Le patient est-il dans l’échec scolaire ou l’absentéisme scolaire ? Fait-il ses
devoirs correctement en classe ou à domicile ? Quelle est la qualité de son
travail à l’école ou de ses devoirs à domicile ? Est-il souvent absent, distrait
ou ailleurs, dans sa bulle ou décontenancé ? Arrive-t-il à rester concentré
durant une longue période ? Est-il dans le métier d’élève ? Reste-t-il tran-
quillement assis pendant les cours ? Présente-t-il ses travaux ou son carnet
de communication à ses parents ? Etc.
• Comment ses maîtresses le trouvent-elles en classe ou en dehors de la
classe ? Quel intérêt porte-t-il sur les apprentissages ? Oublie-t-il fréquem-
ment des consignes ? Est-il souvent interpellé par les enseignants ? L’école
évoque-t-elle des troubles de l’attention du patient, des difficultés à travail-
ler seul ou en groupe de pairs ?
L’autre élément est l’investigation du comportement relationnel du
patient à l’école ou au parascolaire. Quel type de relation développe-t-il avec
ses pairs et ses enseignants ? Les autres adultes, à part les parents, peuvent-ils
nous informer sur ses réactions à sa réussite ou à l’échec ? Il faut en outre
s’informer sur le comportement du patient en classe, à l’école et au paras-
colaire. Présente-t-il un retrait social ? Est-il plus dans l’agressivité ou l’hyper-
activité, ou montre-t-il des réactions excessives à la frustration ? Supporte-t-il
une frustration ou est-il indiscipliné ? Ces éléments permettent de recueillir
des informations essentielles sur le parcours scolaire du patient.
Il est préférable, dans certaines situations, de revenir auprès de l’école
pour obtenir des informations concernant les apprentissages scolaires du
patient. « C’est donc en analysant les rapports réels qui s’instaurent entre
les partenaires de la relation éducative au sein de l’école que l’on pourra
mieux saisir la part des déterminismes socioculturels, institutionnels ou
individuels, et la marge de liberté effective de chacun. » (Perron et al., 1994)
Le thérapeute cherche à savoir si le patient a des facilités ou des difficultés
partielles ou globales dans les apprentissages.
En conclusion, le thérapeute peut encore clarifier avec les parents ou les
autres adultes la question de changement fréquent d’école ou de classe.
Pourquoi ces changements de classe ou d’école, et comment le patient et
ses parents justifient-ils ces changements ou ces déménagements ? Quels
sont ses résultats et ses projets à venir sur le plan scolaire et professionnel ?

Bibliographie
Perron, R. (dir.). (1994). Les Représentations de soi. Privat.

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9 Période de la puberté
et de l’adolescence

Généralités
Rapport au corps biologique : la puberté
Il nous semble important de retracer les modifications physiques externes
qui apparaissent à l’aube de la puberté. Sous l’impulsion de la biologie, c’est-
à-dire l’apparition des nouvelles hormones (LH-RH [Luteinizing Hormone
– Releasing Hormone], FSH [Follicle Stimulating Hormone], hormone lutéini-
sante « LH » [Luteinizing Hormone], pour ne citer que ces trois-là), l’enfant
d’hier poursuit son chemin pour devenir un adulte de demain. Les signes
qui indiquent ce changement sont externes (perceptibles par l’entourage
à travers les changements corporels, les habitudes comportementales, les
activités sociales et sportives, etc.) et internes (perceptibles par l’individu).
Ces différents changements ou modifications physiques et psychiques du
corps du jeune enfant sont source de la double bascule que l’on observe
à l’adolescence. Simultanément, l’adolescent perd la toute-puissance de la
pensée jusque-là très présente au profit de la toute-puissance de son corps
physique qui devient mature, c’est-à-dire qu’il n’a plus le corps imberbe
d’enfant d’hier, mais plutôt un corps d’adulte. C’est le début de remise en
cause de toutes les croyances infantiles, de toutes les règles jusque-là res-
pectées ou observées à l’aveugle, de l’image idéalisée qu’il se faisait de ses
parents, etc. Le jeune adolescent s’improvise en philosophe, artiste, star,
bref en penseur. Il découvre la « possibilité de s’interroger sur ce qu’on a
été en fonction de ce qu’on souhaite devenir tout en se sentant vulnérable
puisque la part inévitable d’inconnu rend précaire toute remise en cause. »
(Letendre & Marchand, 2010) Il devient un opposant potentiel aux adultes
(cf. infra « Attachement à l’adolescence »).
Pour rappel, sous l’impulsion hormonale, on observe dans les deux sexes
une poussée de croissance, la maturation des gonades, l’apparition des
caractères sexuels secondaires comme :
• du côté des garçons : l’apparition des poils axillaires, pubiens, de la barbe,
l’élargissement des épaules et du thorax, la modification vocale, etc. Le théra-
peute peut explorer les différents rapports du jeune avec ses soins corporels,
vestimentaires (le choix et les styles d’habits), ses idéaux, ses projets, etc. ;
• du côté des filles : l’élargissement du bassin, l’arrondissement de la silhouette
corporelle, le développement mammaire, la modification du timbre vocal,

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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96 Anamnèse du patient et de sa famille

la survenue des règles, etc. Le thérapeute peut explorer la question du maquil­


lage et d’hygiène corporelle (des ongles et des cheveux, etc.) et vestimentaire,
la question des rapports au sexuel, etc.
Par ailleurs, la puberté soulève la question des rapports sexuels, de la mas-
turbation, de la découverte soit de son propre sexe, soit de l’autre sexe,
etc. Il est important de rester stratégique et respectueux quand on explore
l’intimité de l’adolescent. Il est essentiel que le thérapeute fasse attention à
ne pas faire de l’intrusion dans l’intimité de l’adolescent. Il n’est pas néces-
saire d’insister pour que l’adolescent nous réponde dans l’immédiat. On lui
laisse le choix d’aborder son intimité après l’avoir évoquée. Il est important
qu’il se sente plus à l’aise et prêt à parler spontanément de son intimité. Si
cette exploration met le patient en difficulté, le thérapeute devrait arrêter.
Le risque est de violer son intimité si l’on persévère dans l’exploration de sa
sexualité. Savoir attendre fait partie des qualités d’un thérapeute. Comme
nous l’avons dit plus haut, la rencontre clinique est thérapeutique en elle-
même. Il faut être suffisamment apte à rencontrer le patient pour déclen-
cher en lui quelque chose de thérapeutique.
La puberté induit les modifications physiques et biologiques qui, à leur
tour, entraînent des changements sur le plan psychique. Quand l’adoles-
cence est déclenchée, « il y a en effet comme une fragilité du sujet autant
par rapport à sa peau, à son côté fréquemment dysharmonique sur le plan
corporel, que par rapport à ses contradictions de désirs. La nostalgie de
grandir plus vite se mêle à l’amertume de perdre ses avantages d’enfant. »
(Letendre & Marchand, 2010) L’adolescent n’est plus dans la ressemblance
avec l’adulte, mais il rentre plus dans l’identique avec lui. Ainsi, l’adoles-
cent commence le travail de construction de sa propre identité. Poursuivant
sa quête identitaire, il va « remettre en cause les réponses identitaires anté-
rieures qui étaient inévitablement inscrites sous le registre d’identifications
fortement plaquées aux personnes reliées à l’univers familial et scolaire. »
(Letendre & Marchand, 2010) et si les choses se font autrement, il déve-
loppe des comportements ou attitudes inadéquats dans la société et pas
forcément des troubles psychiques.
La puberté fait que l’infantile disparaît avec la toute-puissance de la pen-
sée, laissant la place à la toute-puissance du corps. Ce qui n’était jusque-là
pas possible à réaliser avec le corps devient alors possible, c’est la magie
de la puberté. Tout petit, il pouvait verbaliser son envie de devenir le
conjoint ou le partenaire sexuel de sa mère ou de son père, maintenant il se
rend compte qu’il y a réellement un risque de procréer avec sa mère, d’où
l’urgence de se mettre à l’écart. Les écarts physiques se manifestent et l’ado-
lescent n’accepte plus de câlins, plus de bisous ou plus d’accolades avec ses
parents. Comme ça bouillonne très fortement en lui, la seule solution est de
fuir et aller très loin de l’autre, car la menace est grande. « Je ne reconnais
plus mon fils depuis quelque temps maintenant », s’étonnent ses parents.

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Période de la puberté et de l’adolescence 97

L’arrivée de l’adolescence est corollaire des changements psychiques,


sociaux, familiaux, affectifs, sexuels, etc. L’adolescence résout des énigmes,
mais en crée d’autres. Le jeune est obligé de redistribuer ses cartes comme
il l’a fait à sa naissance. Ainsi, tout n’est pas perdu et tout n’est pas acquis
non plus. Un nouveau parcours de vie est à faire. Il est maintenant ques-
tion de s’individualiser et se séparer de ses parents pour s’autonomiser.
Mais comment y arriver étant donné qu’il a encore besoin de l’adulte pour
résoudre d’autres difficultés qui sont en lui ? Il s’agit par exemple de son
indépendance financière, son manque d’expérience de la vie d’adulte,
toutes les incertitudes du lendemain, etc. En fait, malgré toutes les « mer-
veilleuses choses » que l’adolescent s’imagine obtenir de la puberté, il reste
néanmoins à dire que « la puberté menace de plonger l’adolescent dans
cette situation de lien paradoxal avec ceux dont il a le plus besoin, en fai-
sant de ce besoin une menace pour son autonomie et même son identité. »
(Jeammet, 2009)
L’adolescence est le début d’une quête identitaire. Celle-ci peut se décli-
ner sur le plan psychique et physique. La question à lui poser serait : « Qui
êtes-vous ? » Lesdits changements induisent des transformations à tous les
niveaux : comportemental, social, vestimentaire, ses fréquentations, ses
rêves, son attitude face à l’adulte, ses résultats scolaires, sa dextérité dans les
différentes activités, etc. Progressivement, l’adolescent se crée une identité
provisoire car « il n’y a pas de trajectoire aboutissant à un point oméga.
Il n’y a qu’une succession d’états uniques de vie avec leurs forces, leurs
difficultés et leurs richesses propres. Les nouvelles réponses identitaires que
déclenchent nécessairement les changements biologiques, sociaux, fami-
liaux, culturels, cognitifs à une époque donnée forment la trame d’une exis-
tence en perpétuelle mutation. » (Letendre & Marchand, 2010) Dans cette
optique, il essaye de trouver un apaisement provisoire à travers des groupes
des pairs par le biais de la musique, des activités sportives, de l’idéologie,
etc. Cet adolescent « se marque, s’affilie à un nouveau groupe de références
dans un triple mouvement : séparation de l’enfance, tentative d’intégra-
tion à une nouvelle communauté porteuse de symboles et distanciation du
monde adulte. » (Letendre & Marchand, 2010)
Rappelons que l’adolescence est un « temps de fragilisation et de mise à
l’épreuve des ressources de l’adolescent qui fait de cet âge un puissant révé-
lateur de ce qui constitue ces ressources, mais aussi de ce qui les fragilise et
de ce qui est susceptible de menacer l’équilibre de l’adolescent et de le met-
tre en danger. » (Jeammet, 2009) En fait, les transformations ainsi induites
suscitent différents besoins, dont celui de se créer une identité. Le patient
cherche à s’individualiser, se séparer et devenir autonome de l’autre. Les
choses ne lui sont pas facilitées par son environnement ni par son propre
corps, il doit surmonter différentes épreuves de sa vie. Le thérapeute explore
alors les fragilités et compétences du patient.

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98 Anamnèse du patient et de sa famille

En outre, comparativement à l’enfance, l’adolescence est un deuxième


moment où l’individu doit se subjectiver et rester en lien avec l’autre, il s’agit
donc d’intersubjectivité. Le prix à payer est moindre quand il a un attache-
ment confiant avec l’adulte.

Attachement
À l’adolescence, l’attachement naît de la confiance qui, elle-même, induit la
qualité de savoir attendre. L’adolescence est une période où tous les enjeux
relationnels sont revisités. L’individu doit s’adapter à son environnement
familial et extrafamilial. Comment cet environnement arrive-t-il à satisfaire
le désir ou le besoin de l’adolescent ? Une réponse serait qu’il ait de bonnes
assises narcissiques. Celles-ci découlent d’une estime de soi solide. Ce n’est
qu’à partir de cette estime de soi que l’adolescent développe une relation
d’objet lui permettant d’avoir un attachement sûr.
De plus, grâce à l’anamnèse, le thérapeute s’informe sur les premières
relations précoces du patient quand il était bébé. L’exploration du proces-
sus adolescence consiste entre autres à rechercher le « premier paradoxe du
développement : le sujet n’est jamais autant lui-même que lorsqu’il s’est
abondamment nourri des autres sans qu’il ait à prendre conscience des
parts respectives de ce qui lui revient et de ce qui appartient à autrui. »
(Jeammet, 2009)
Est-ce que l’environnement familial permet à l’adolescent d’exprimer
ses écarts manifestes ? « Cette démarche prend très tôt son origine dans la
relation entre parents et enfants. Si le milieu familial a su lui proposer, dès
l’enfance, un cadre assez précis pour ne pas se perdre et une ouverture assez
large pour se différencier, l’adolescent sera en mesure de trouver ses propres
limites et de prendre ses distances avec son entourage, sans conflits exces-
sifs. » (Jeammet, 2002) Quand les écarts sont bien acceptés par les deux
parties (adolescent et parents), alors il est plus facile aux protagonistes de
tolérer les différences.
Comment l’adolescent parvient-il à gérer la proximité et les écarts avec
l’autre ? Est-ce qu’il pose les limites ou accepte et respecte les limites ins-
taurées par l’adulte ? Les limites permettent-elles d’éviter la confusion
avec l’autre ? Permettent-elles d’éviter les actes inadéquats ou d’adopter
un comportement négatif ? Comment est-ce qu’il dit « stop » quand c’est
trop pour lui ? L’adolescent s’oppose-t-il à ses parents sans craindre de les
énerver ou de les décevoir ? Comment exprime-t-il son désir ? Est-ce que le
parent l’aide à renforcer son identité ?
L’attachement est différent de la fusion ou du collage avec l’autre. On
n’est pas pareil ni égal à l’autre, mais on est différent et séparé. L’adulte
devient une base sur qui l’adolescent s’appuie pour faire de nouvelles ren-
contres, découvertes, prendre de nouveaux risques, etc.

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Période de la puberté et de l’adolescence 99

En fait, l’adolescent s’inscrit dans l’opposition quand il est insatisfait.


Souvenons-nous que « par l’insatisfaction, le sujet oblige l’entourage à
s’occuper de lui, et en même temps, il lui échappe et sauvegarde son auto-
nomie puisqu’il le met en échec en un cycle sans fin. Il évite l’angoisse
d’abandon et l’angoisse de la fusion ou de l’intrusion. » (Jeammet, 2009)
Il pose ainsi des actes négatifs tels que :
• le silence, où il se met en retrait affectif ou émotionnel vis-à-vis de son
environnement. En réalité « ce silence est bourré de musique, de films, de
jeux d’ordinateur, mais il demeure un silence puisqu’il est un état de non-
parole à autrui. La solitude est remplie pourtant de présences évoquées,
de moi idéaux recherchés, de colères et de joies ressenties, mais elle est un
effort singulier pour se libérer des influences passées et actuelles afin de se
construire un devenir. » (Letendre & Marchand, 2010) ;
• la résignation où il montre un désintérêt à tout ce qu’on peut lui proposer ;
• les absences à l’école ou aux différentes activités sociales ou sportives
proposées par ses parents ;
• le refus qui est le corollaire du « non » de la crise de 2 ans des bébés ;
• le retard par rapport aux horaires fixés pour rentrer à la maison ;
• la fugue ;
• des scarifications et des tentatives de suicide à répétition ;
• la mise en danger, la prise de risque divers ou l’échec scolaire ;
• la consommation d’alcool, de drogues, de toxiques, etc.
• etc.

Subjectivation
Le processus de subjectivation implique que l’individu devienne un sujet
à part entière. L’être soi ou le devenir soi chez l’adolescent impose que le
patient et l’adulte travaillent de concert pour y arriver. L’adolescent a besoin
de sentir les limites de son corps. Ceci est d’autant vrai dans le cas où il n’a
pas de contrôle sur ce corps. Il a ainsi recours à de nombreuses médiations
pour essayer de garder un contrôle (se regarde dans le miroir, se coiffe plu-
sieurs fois dans la journée, change de vêtements, viole les interdits et les
règles posés par l’adulte, ne respecte pas le contrat établi par le passé avec
ses parents). Il a en fait un besoin de contenance à l’image du bébé qui
le manifeste par des pleurs et des cris dans l’objectif d’être porté par son
parent.
La subjectivation de l’adolescent renvoie vers un besoin d’attachement,
d’autonomie, du regard de l’autre et du regard du soi sur soi-même. Le
besoin d’autonomie renvoie vers l’estime de soi et le narcissisme de l’ado-
lescent. En fait, l’estime de soi a une importance élevée à l’adolescence.
Elle est considérée comme une trame fondamentale. Cette dernière « sert
d’appui au narcissisme, qui lui confère sa qualité émotionnelle de confiance

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100 Anamnèse du patient et de sa famille

ou de méfiance, de tranquillité ou de vigilance anxieuse, de quiétude ou


d’avidité, et ce caractère basique de fondation de la coloration affective et
de la tonalité émotionnelle du regard que le sujet portera sur lui et sur le
monde. » (Jeammet, 2009) Ainsi l’adolescent se demande si le regard de
l’autre est porteur d’une critique, d’un jugement, d’un désaccord, etc. Le
processus de subjectivation à l’adolescence entraîne l’individu à prendre
le comportement de risque. Il a tellement besoin de s’identifier.
Comment l’adolescent fait-il pour assurer la continuité entre lui et
l’autre ? Rappelons qu’il ne peut avoir ce sentiment de continuité que s’il
a de bonnes basses narcissiques. Celles-ci lui procurent de la sécurité, de la
quiétude, de la cohérence, du calme et plus encore un attachement solide.
La conséquence de tout cela est une meilleure subjectivation de l’adolescent
et sa capacité de nouer le lien avec l’autre : l’intersubjectivité.

Intersubjectivité
L’adolescence interroge sur la qualité des rapports à l’autre. L’intersubjecti-
vité naît de la communication avec l’autre, de l’obtention de la confiance de
l’autre, de la relation avec le parent ou tout autre adulte et de la déception
que l’adolescence suscite chez le parent (celle-ci paraît de la différence entre
le rêve et la réalité : l’adolescent rêvé par les parents et l’adolescent réel).
L’intersubjectivité à l’adolescence s’interroge sur l’idée de la séparation sans
vraiment chercher à se retrouver tout seul. Il est primordial pour l’adoles-
cent de garder le lien avec l’adulte.
L’adolescent se sent-il écouté par les adultes ? Pense-t-il être bien accom-
pagné ou mis à l’écart ou de côté par les autres ? Comment arrive-t-il à
exprimer ses vœux, désirs et souhaits ? Normalement, l’adolescent a besoin
d’être pris au sérieux et n’aime pas être banalisé par l’adulte.
Comment se perçoit-il dans le regard de ses parents ? S’agit-il d’un regard
tranquille, apaisé, dépassé, de déception, de confusion ? Est-ce que son
parent lui renvoie un regard ou un message exagéré, le perçoit-il comme
quelqu’un de sévère, de rassurant, ou d’absent ?
L’adolescent doit accepter la différence pour mieux se séparer de l’autre.
Cela n’est possible que lorsqu’il est en confiance envers lui-même et l’autre.
« La confiance se construit en permanence en fonction des rencontres où
le dedans, son monde interne, fait de ses désirs, de ses croyances, de ses
attentes, de ses expériences passées et présentes, et le dehors, celui des
courants, des modèles qui animent et parcourent le monde environnant et
les personnes qui l’habitent, rencontres heureuses ou décevantes ou même
absence de rencontres se complètent ou s’opposent, mais sont en échange
permanent en une continuelle coconstruction. » (Jeammet, 2009) Il y a une
espèce d’allers-retours entre soi et l’autre dans la mise en place de l’inter-
subjectivité.

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Période de la puberté et de l’adolescence 101

Espace personnel : zone à accès limité


L’adolescent a besoin d’avoir un espace personnel qui n’est pas envahi par
l’adulte. Cet espace devrait lui apporter de la sécurité interne et de la tran-
quillité. Son entourage parvient-il à respecter les limites de cet espace et à
rester à distance, sans être ni trop près ni trop loin ? Remarquons que « très
souvent le groupe de pairs prend une énorme importance tout en permet-
tant de s’éloigner du milieu familial d’une façon acceptable pour tous. »
(Letendre & Marchand, 2010) La présence du parent est très importante
afin que l’adolescent ait des occasions de vérifier le respect ou le non-respect
de son espace personnel. Si, en revanche, le parent est absent, l’adolescent
ressent une déception. Celle-ci peut résulter d’une longue attente inter-
minable de l’autre, car l’adolescent a besoin d’être couvert, protégé, que
l’adulte lui pose des limites (les règles, les interdits, etc.). L’absence peut être
réelle (parent physiquement absent : en voyage, parents séparés, divorcés,
décédés, inconnus de l’adolescent, etc.) ou fantasmée (parent qui ne joue
pas son rôle, qui n’est jamais là quand l’adolescent a besoin de lui, qui ne
pose pas de règles et de limites, trop permissif, parent qui n’arrive pas à
assumer son rôle à cause de sa propre maladie mentale, etc.).
Chez l’adolescent, on retrouve une incompréhension de l’image de son
corps. Il est plus dans la recherche identitaire. Il faut lui éviter des intrusions
dans son espace personnel. Le parent arrive-t-il à garder une distance avec
son adolescent ?
Nous savons que « le jeune a besoin pour devenir adulte d’un espace per-
sonnel et d’une certaine quiétude. Il existe, donc à respecter, plus ou moins
facile à trouver selon les manières d’être. » (Jeammet, 2002) Sa chambre, par
exemple, est considérée comme son espace personnel. Il est plus en sécurité.
En fait, cet espace personnel est une zone interdite pour les adultes. Elle
est privée pour l’adolescent. C’est son jardin secret. Cet espace a l’avantage
de lui permettre de se construire.
L’envahissement de l’espace personnel de l’adolescent risque d’entraîner
des violences de tout genre, contre soi ou contre les autres avec un senti-
ment d’étouffement des désirs qui devient un frein au développement de
la personnalité.

Apparition des conduites à risque


sur le plan individuel et social
Comme dit plus haut, l’enfant devenu adolescent peut adopter un nouveau
comportement. Il peut devenir plus pudique, dans l’opposition, prendre
des risques, être téméraire, ou avoir plus de peur, de la dextérité dans cer-
taines activités, des attitudes de provocation (verbale, comportementale,
réponse à tout instant, refus sans explication, etc.).

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102 Anamnèse du patient et de sa famille

Par ailleurs, les transgressions du cadre sont assez fréquentes à l’adoles-


cence. L’adolescent repousse les limites du cadre instauré par ses parents ou
les autres adultes (écoles, foyer, clubs sportifs, etc.). Il est constamment en
négociation des horaires, des heures de sorties ou de retour le soir. Certains
sont plus dans la désobéissance ou cherchent à déclencher une escalade
avec l’adulte.

Confrontations
L’adolescence soulève la question des confrontations. Celles-ci peuvent
concerner l’adolescent lui-même ou lui et l’adulte. Nous savons que les
rapports aux règles renvoient à la confrontation entre l’adolescent et l’adulte.
Il s’agit comme dit plus haut de tester les limites imposées par l’adulte. Il
exprime sa colère à travers ses différents passages à l’acte. Comment l’ado-
lescent arrive-t-il à outrepasser les interdictions des parents ? L’opposition à
l’adolescence devrait être considérée comme un moyen d’entrer en relation
avec l’autre. Il teste le cadre pour être sûr de se séparer de l’adulte bienveil-
lant. Il faudrait que l’adulte ajuste sa distance avec l’adolescent : être ni trop
près ni trop loin de lui.

Conduites à risque
Le thérapeute devrait explorer les différentes conduites dites à risque à l’ado-
lescence. Nous savons que « la moyenne des ados passe ce cap sans grands
conflits, un petit groupe qui n’a pas forcément une vie familiale antérieure et
actuelle perturbée a besoin d’opérer sa distanciation de façon beaucoup plus
insolite. Il le fait par des prises momentanées mais inquiétantes de drogues,
par des comportements à risque fort dangereux pour lui-même, par un temps
d’éloignement qui se caractérise par l’adoption d’une vie marginale le coupant
totalement de ses racines antérieures. » (Letendre & Marchand, 2010) Parmi
les divers comportements à risque, nous retrouvons ceux qui sont commis en
groupe d’amis, de camarades de classe ou seul. Citons essentiellement :
• la consommation de substances, c’est-à-dire le tabac, l’alcool, les diffé-
rents produits illicites (cannabis, cocaïne, héroïne, LSD, champignons hal-
lucinogènes), etc. ;
• les conduites violentes : l’adolescent se retrouve impliqué dans les bagarres
et rixes, des violences verbales et physiques, des actes de délinquance, il
devient le « meneur » ou le « suiveur » des autres adolescents, etc. ;
• la déscolarisation, les investissements scolaires, les retards et absences, les
redoublements de classe, les exclusions de l’école, les échecs scolaires,
les dérangements et perturbations du déroulement des cours, etc. ;
• les conduites délictueuses comme des vols publics, des vols privés, des
rackets, du trafic de drogue, etc. Au cours de l’exploration clinique, le théra-
peute peut lui demander à quelle fréquence il le fait ? Comment est-il arrivé
à commettre tel ou tel autre acte ? Est-ce qu’il était seul ou en groupe de
pairs ? Etc.

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Période de la puberté et de l’adolescence 103

Recherche identitaire
Elle se manifeste à travers différents comportements, styles vestimentaires
ou attitudes (rapport aux autres), etc. L’adolescent adopte un nouveau style
vestimentaire, une nouvelle coiffure toutes les heures, il imite tel artiste ou
tel personnage et cela de manière très changeante. Il a une identité fluc-
tuante et éphémère. Il colle des posters, des affiches des images, ou fait de la
peinture sur les murs de sa chambre. Tous ces symboles ont pour but de lui
offrir de la contenance psychique.
L’adolescence est la période où l’individu a un rapport particulier avec
l’hygiène vestimentaire et corporelle. Il peut devenir très méticuleux dans
le choix de ses habits, de son style vestimentaire. Il peut être dans l’excès
ou dans la négligence de soins corporels. Certains sont très sales ou moins
attentifs aux besoins personnels d’hygiène. L’identification passe par la
découverte de soi et de l’autre sexe. Dans cette optique, l’adolescent cherche
à maîtriser la relation à l’autre (cf. chapitre 13).
Enfin, il arrive que pendant une évaluation pédopsychiatrique, « le patient
annoncé par tous comme auteur des violences, apparaît alors comme victime
de sa propre vie, celle qui lui est infligée depuis une quinzaine d’années. La
grande majorité de nos patients a vécu des évènements relationnels violents,
que ce soit par l’excès ou par le défaut, par l’abus ou la carence. Ils ont souvent
expérimenté des ruptures de liens précoces, des relations instables, incohé-
rentes et imprévisibles, porteuses de traumas via des parents eux-mêmes rési-
lients, comme ils le peuvent, à partir de leurs propres traumas. » (Robin, 2019)
Cet âge requiert une particularité et une finesse dans l’écoute clinique. Nous
soulignons plus haut que le thérapeute doit être empathique avec le patient.
L’adolescent qui est dans la recherche identitaire s’inscrit dans un mouve-
ment de réparation d’une cassure dont il n’est généralement pas l’auteur. Est-
il vrai que l’adolescence lui confère des nouveaux atouts, ceux que relancer
l’autre ? Il doit se délier des uns pour se lier avec d’autres (cf. chapitre 14).

Travail scolaire et professionnel


On constate une ambiguïté entre le travail scolaire et le refus. Sur le plan
social, l’adolescent a besoin de s’identifier, de s’intégrer dans la société des
adultes.
Il existe un décalage entre le rêve d’un parent sur son adolescent et l’ado-
lescent réel devant lui. « Certains parents vont retrouver les mêmes difficul-
tés à accepter de reconnaître leur adolescent tel qu’il est et non pas tel qu’ils
l’ont rêvé. Ou encore ils préfèrent continuer à le rêver sans tenir compte de
ce qu’il est. » (Jeammet, 2002) Comment le parent arrive-t-il à accorder ses
rêves et désirs et la réalité de son fils ?
Sur le plan du comportement social, l’adolescent a besoin de s’isoler et
de se mettre en retrait. Il est dans l’évitement de soi-même. Il refuse de

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104 Anamnèse du patient et de sa famille

parler en groupe. Le jeune peut devenir très exigeant ou non envers lui-
même. Au-delà du milieu familial, il laisse ses empreintes à l’école, dans son
environnement professionnel, etc. Nous revenons sur cette problématique
du travail scolaire et professionnel plus bas dans ce chapitre.

Évaluation de l’adolescence
L’adolescence est la dernière étape avant que l’enfant d’hier ne devienne
l’adulte de demain. L’exploration de la période d’adolescence devrait aussi
inclure la période de la prépuberté. Ainsi, chaque étape devrait être évaluée
dans le but de recueillir plus d’informations. Plusieurs items sont à explorer
pour chacune de ces tranches de vie. Citons entre autres : s’entretenir avec
un adolescent, les rapports au corps à l’adolescence, les pulsions libidinales
et agressives à l’adolescence, la vie scolaire et professionnelle de l’adolescent,
les toxiques et drogues à l’adolescence, l’évaluation de l’adolescence, etc.
Avant de développer ces différents points, nous devons avertir le clini-
cien que les informations recueillies auprès de l’adolescent en l’absence des
parents ou des tiers ne doivent être rapportées aux parents qu’avec l’accord
de l’adolescent. Ce principe s’applique bien évidemment à tous les patients.
Même si la situation est gravissime ou si l’adolescent souffre d’un retard
mental ou nous ne savons quel trouble cognitif ou psychique, le thérapeute
doit l’informer et, le cas échéant, obtenir son accord avant toute démarche.
L’alliance de travail est très particulière à obtenir à cet âge. Il faut du tact
et de la technique pour entrer en discussion-échange avec les adolescents. La
confrontation directe peut donner ses fruits mais, quelquefois, il vaut mieux
trouver d’autres passerelles ou voies d’approche pour obtenir une alliance de
travail avec l’adolescent. Le thérapeute accepte que le patient se dérobe ou se
montre réservé, distant, projectif, accusateur, indifférent, méfiant, etc. Après
tout, le thérapeute est un adulte et donc il est pour lui comme ses parents
ou ses éducateurs, ses professeurs, ses moniteurs, etc. Le thérapeute devrait
prouver à l’adolescent son intérêt par les différentes questions afin d’obtenir
une bonne alliance thérapeutique et une alliance de travail.
Enfin, en ce qui concerne les adolescents, « l’énonciation par les parents
eux-mêmes des difficultés de l’adolescent telles qu’ils les perçoivent, l’écart
ou la similitude existant entre le récit de l’adolescent et le récit des parents
sont déjà un bon indice du mode de fonctionnement familial. » (Marcelli,
1999) Ceci est tout d’autant plus vrai ou faisable pour les patients plus
jeunes que les adolescents.
L’activité principale de tout thérapeute qui travaille avec cette population
est d’évaluer son fonctionnement psychodynamique avant de poser des
diagnostics catégoriels ou de proposer des prises en charge. L’évaluation
de l’adolescence, bien développée dans la partie III, revient à faire le status
clinique du patient adolescent.

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Période de la puberté et de l’adolescence 105

Les données anamnestiques complètent le status clinique que fait le cli-


nicien. L’anamnèse est un deuxième pilier de l’évaluation. Elle permet au
thérapeute de poser un diagnostic fonctionnel et structurel du patient dans
l’objectif de construire avec lui et son entourage un projet thérapeutique
adapté à ses besoins. Pour ne pas nous répéter, l’anamnèse a une place cen-
trale et nous permet d’avoir déjà une idée globale sur le type de patient
(son fonctionnement psychique, ses fréquentations sociales, ses compé-
tences intellectuelles, sociales, culturelles, sportives, ses types d’angoisses,
ses projets de vie, ses difficultés ou ses ressources personnelles et amicales,
familiales, etc.). L’anamnèse bien faite oriente et clarifie, dans un second
temps, nos impressions lors de l’examen clinique.

Nouvelles règles d’entretien


Le patient pubère ou adolescent nous convie à de nouveaux défis. C’est
un réel défi d’évaluer un adolescent. Nous avons abordé, dans la partie I,
quelques techniques pour aborder les patients. De façon plus spécifique,
insistons sur le fait qu’un adolescent doit être considéré comme une per-
sonne à part entière et ne pas être pris pour un mini-adulte. Le thérapeute
doit soigner son adresse et rester authentique devant le patient. L’adoles-
cent n’est plus un enfant qu’il invitait jadis à jouer ou à dessiner pendant
l’entretien. La parole est à privilégier à l’adolescence. Celle-ci permet
notamment de montrer à l’adolescent qu’il est considéré au même titre
que tout le monde. Le thérapeute lui renvoie un message lui signifiant
qu’il le considère comme étant plus âgé. Par la discussion avec l’adoles-
cent, le thérapeute évalue ses compétences cognitives, intellectuelles,
langagières, etc.
Les données d’anamnèse concernant l’adolescent qui sont recueillies
auprès des parents ou des tiers devraient être confrontées à l’avis du patient.
Il est invité à compléter, infirmer, confirmer, rajouter ou supprimer cer-
taines informations cliniques. L’adolescent est le maître de son histoire.
Ainsi, l’anamnèse de cette période est très essentielle à examiner. Les
questions doivent porter sur la réaction du patient et de son entourage à
l’apparition des premiers signes de changements physiologiques, morpho-
logiques, comportementaux, etc. Le thérapeute recherche le vécu affectivo-
émotionnel du patient et de son entourage. Il ne met pas à l’écart ou alors
n’oublie pas toutes les modifications morphologiques et psychosociales
inhérentes à cette tranche d’âge.

Pensée et rapports au corps


L’adolescence est une autre étape du parcours de combattants. Nous utili-
sons intentionnellement le terme « combattant » pour montrer comment

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106 Anamnèse du patient et de sa famille

le patient change sa manière d’être, de paraître, de faire, etc. En fait, la


question des rapports au corps est très centrale chez certains théoriciens de
l’adolescence.
Au cours de l’exploration clinique, le thérapeute devrait poser ouverte-
ment les questions qui ont trait au corps de l’adolescent. Avec empathie, le
thérapeute examine : son style vestimentaire, son rythme et la qualité du
sommeil, sa sexualité (le premier rapport sexuel : quand, avec qui, avec ou
sans protection, planning familial, expériences sexuelles multiples, etc.), sa
propreté et l’hygiène corporelle, son alimentation, etc. Et même dans les
hobbies, on retrouve bien les traces du corps. Si un patient aime les jeux
vidéo, il ne choisit pas par hasard ses avatars, par exemple. C’est peut-être
une occasion d’explorer les pulsions libidinales et agressives, l’idéal du moi,
le moi idéal, le surmoi, etc. à travers le jeu. Tout est bien calibré psychique­
ment. L’essentiel dans tout cela c’est de porter attention aux moindres éléments
ou faits, quelle que soit leur nature.

Pulsions libidinales et agressives


Les pulsions ont une place de choix dans l’évaluation clinique (cf. chapitre
18). Avant tout, rappelons que le patient exprime ses pulsions libidinales et
agressives à travers les activités récréatives, sportives, culturelles, sociales,
familiales, etc. Le thérapeute recherche le type d’activité que préfère le patient.
L’exploration devrait noter la fréquence, le rythme, les objectifs, les
motivations conscientes et inconscientes de préférer un jeu ou un autre. Le
patient est-il solitaire dans ses jeux ou est-il accompagné par des amis de la
vraie vie ou des amis virtuels rencontrés sur internet ? Arrive-t-il à mettre fin
à la partie ou les adultes peinent-ils à lui poser un cadre ?
Le patient aborde-t-il spontanément les questions de jeux au cours de
l’entretien ? A-t-on l’impression qu’il éprouve du plaisir à jouer ? Se sent-il
obligé de passer des moments de jeu ou d’autres activités avec ses pairs ou
les adultes ? Comment se comporte-t-il quand il est contrarié ? Se mon-
tre-t-il agressif ? Est-il timide face à certaines personnes ou dans certaines
situations sociales ? Que peut signifier sa timidité (ne s’agit-il pas d’une
pulsion agressive inhibée) ? N’oublions pas que certaines pulsions peuvent
être réprimées, contrôlées, incontrôlées malgré le bon-vouloir du patient.
Comment explique-t-il son comportement jugé étrange par sa famille ?
Comment supporte-t-il la frustration ? Il est important de demander à
l’entourage du patient de nous parler de lui. Cette anamnèse nous permet
également de recueillir des informations sur les traits de personnalité du
patient. Comment l’entourage amical parle-t-il de lui ? Comment le décrit-
il ? Quels sont ses rapports avec ses parents et sa fratrie ? Comment se
comporte-t-il vis-à-vis de ses proches ? Se montre-t-il protecteur, violent,
docile, doux, intransigeant, calme, etc. ? Est-ce que le temps qu’il passe
dans le jeu a une proportion très importante sur le reste de la vie sociale ?

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Période de la puberté et de l’adolescence 107

Devenir de la vie sociale


Aborder la vie sociale de l’adolescent revient à revisiter ses multiples liaisons
qui se font et se défont régulièrement. L’adolescent est dans la recherche
d’appartenance à un groupe de pairs. C’est l’occasion pour lui de faire de
nouvelles découvertes, de faire la mise à jour de ses connaissances et d’expé-
rimenter la limite de ses compétences à tout niveau, y compris les relations
et rapports sexuels. Les amitiés ou les groupes de pairs constituent pour lui
un « territoire d’intérêts, de partages, d’échanges, et deviennent capitaux au
point que ce groupe de pairs et ces ébauches de couple jouent alors pour la
construction de la personnalité des fonctions beaucoup plus essentielles. »
(Letendre & Marchand, 2010) Très spécifiquement, le thérapeute interroge
sur les fréquentations du patient, ses probables conflits et alliances avec
ses pairs et les adultes, etc. On étudie également ses amitiés (meilleur ami,
vie amoureuse, camarades, etc.). Qu’est-ce qui l’a motivé ou qu’est-ce qu’il
pense trouver auprès de tel ou tel autre ami ? Quels qualificatifs donne-
t-il à ses diverses relations amicales ? Est-ce qu’il est membre d’un gang
du quartier ou de l’école ? Comment organise-t-il son temps ou de quelle
manière gère-t-il ses réseaux sociaux ? Arrive-t-il à faire un lien entre la vie
virtuelle et sa vie en dehors des réseaux sociaux et d’internet ? Éprouve-t-il
un besoin d’être protégé par un plus fort ? Nous conseillons au thérapeute
de ne pas se limiter à la constellation familiale, plutôt d’explorer davantage
l’univers des pairs.

Vie scolaire et professionnelle


L’investigation de la vie scolaire et professionnelle actuelle ou des projec-
tions dans l’avenir fait appel à l’idéal du moi et au moi idéal. L’important
est de voir comment le patient se positionne vis-à-vis de sa scolarité et de sa
future vie professionnelle. Certains patients arrivent déjà à avoir une idée
de ce qu’ils souhaiteraient faire ou être plus tard, d’autres pas du tout. Ce
n’est pas au thérapeute de porter un jugement sur un tel ou tel choix, il doit
plutôt essayer de comprendre ce qui le motive. On explore les envies, les
désirs, les projections et les modèles identificatoires du patient.
Ainsi, le thérapeute devrait s’intéresser à la vie socioscolaire du patient.
Il recherche la qualité de son travail ou de ses résultats scolaires. Le patient
a-t-il redoublé ? Le cas échéant, pourquoi ? Quelles sont les matières qui
lui semblent être faciles ou difficiles ? Quelles sont ses stratégies mises en
place pour réussir à l’école ? Quel retour font ses professeurs, ses maîtres de
stage, ses encadrants, ou ses formateurs sur son rapport au travail ou à son
entourage ?
Le patient se projette-t-il dans l’avenir professionnel ? Quel métier sou-
haite-t-il faire plus tard ? « Dites-moi, pourquoi avez-vous choisi ou pour-
quoi aimerez-vous devenir footballeur professionnel, menuisier, médecin,

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108 Anamnèse du patient et de sa famille

enseignant, éducateur, assistant social, etc. ? », « Pourquoi n’arrivez-vous


pas à vous déterminer au sujet de votre futur métier ? », « Ressentez-vous de
la peur en pensant à votre avenir professionnel ? », « Qu’est-ce qui vous
empêche de faire cette formation ou avez-vous bien compris en quoi consis-
tait ce genre de métier ? »
Cette anamnèse nous donne des informations sur son idéal, sur ses pro-
jections, sur sa vision du monde adulte ou du monde professionnel. Elle
permet également de voir si le jeune est dans la réalité quand il se réfère à
ses compétences intellectuelles en se projetant dans un métier quelconque.
Le patient peut nous laisser entendre la qualité ou le type de son surmoi et
la conception de son self. Nous conseillons au thérapeute d’être attentif et
d’avoir de la patience pour certains patients qui peuvent demander plus de
temps pour pouvoir livrer leurs idées, leurs pensées, etc.

Consommation de toxiques et de drogues


Le clinicien doit toujours se souvenir que l’adolescence est une période
complexe de la vie. Tous les faits et gestes de l’adolescent ont une raison
implicite ou explicite d’exister. Le thérapeute ne devrait pas limiter son
champ d’investigation ; au contraire, cette tranche d’âge donne accès
autant que possible aux divers tiroirs de la vie d’un humain. Il faut oser
ouvrir tous les tiroirs.
En plus de ce qui précède, le thérapeute doit évaluer la consommation de
toxiques. Les possibles prises de toxiques, drogues et médicaments doivent
être investiguées délicatement. Le but est d’éviter que notre interlocuteur se
braque ou se retrouve coincé. Il doit se sentir à l’aise pour pouvoir aborder
la question de prise de toxiques. L’évaluation ne se limite pas à citer les
noms des drogues ou des toxiques connus ou consommés. Qu’est-ce qu’il
consomme au juste (un ou plusieurs produits à la fois) ? Il est nécessaire
de savoir pourquoi le patient les consomme. Où et comment les trouve-
t-il ? Depuis quand et avec qui (parents, amis, groupe du quartier, seul, etc.)
consomme-t-il ? Quels sont la fréquence et le rythme de sa consommation ?
Quels sont les effets attendus ou souhaités en consommant ces produits ?
Qui lui procure le produit ? Comment se l’administre-t-il ?
Existe-t-il d’éventuelles répercussions de ces toxiques sur son fonctionne-
ment cognitif et sociopsychique ? Souhaite-t-il arrêter sa consommation ?
Existe-t-il d’éventuels échecs d’arrêt par le passé ?
À cette liste de questions s’ajoutent toutes celles qui aident à identifier les
différentes notions d’anxiété, de trouble psychotique au sens catégoriel, des
traumatismes et des violences subis qui sont à rechercher chez tout patient
qui consomme des toxiques ou qui s’automédique. La suite apporte plus
d’informations au sujet de la consommation des drogues, des toxiques et
des médicaments (cf. chapitre 10).

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Période de la puberté et de l’adolescence 109

Bibliographie
Letendre, R., & Marchand, D. (2010). Adolescence et affiliation, les risques de devenir soi.
Presses de l’Université du Québec.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie
Médico-Chirurgicale. Psychiatrie. article 37-213-A-10.
Robin, M. (2019). L’adolescent en crise dans un environnement en crise. Adolescence,
t. 37, 2(2), 233-245.

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10 Antécédents personnels

Antécédents pédopsychiatriques
Au cours de l’investigation des antécédents personnels du patient, il est
important de s’arrêter et de relever les différentes pathologies qu’il a eues
par le passé. Le thérapeute élucide la symptomatologie à l’aide des termes ou
mots ou expressions clairs, simples, adéquats et adaptés au contexte sociocul-
turel et à l’âge du patient et de ses parents. Il faut scruter toutes les maladies,
troubles psychiatriques et tout signe ou symptôme que les patients ont pré-
sentés par le passé.
Le patient a-t-il déjà consulté un « psy » par le passé ? Pourquoi avait-
il consulté un psy ? Qui a conseillé aux parents ou au patient de demander
la consultation ? Quelles étaient les attentes de cette consultation ? Quels
étaient les diagnostics retenus, les différentes prises en charge, leurs résultats
cliniques, les probables échecs et les causes de ces échecs, les différents théra-
peutes consultés le cas échéant, etc. ? Qu’est-ce que les parents et le patient ont
compris de ces prises en charge ? Pourquoi a-t-il arrêté son suivi ? Existe-t-il
de probables abandons ou refus de soins ou d’hospitalisation ? Quels étaient
l’intérêt, les avantages ou les conséquences tirés de ces prises en charge ? Est-
ce que le patient et sa famille sont d’accord pour reprendre ou retourner vers
l’ancien collègue ? Pourquoi préfèrent-ils démarrer un suivi avec un nouveau
praticien ?
Le patient est-il sous traitement antipsychotique, antidépresseur, anxio-
lytique, etc. ? Depuis quand, combien de molécules prend-il ou avait-il pris
par le passé ? Quels ont été les éventuels effets secondaires des médicaments,
la durée globale du traitement, l’évolution clinique de la prise en charge
proposée ?
Le patient a-t-il eu recours à la médecine alternative ou à la médecine douce
(hypnose, chamanisme, prière chez le pasteur, prêtre ou imam, tradipraticien,
etc.) ? Le cas échéant, pourquoi et depuis quand ? Quels sont les résultats
de cette médecine alternative ? Le patient croit-il à la médecine alternative ?
Quelles sont ses croyances ? Comment explique-t-il l’origine de ses troubles ?
La question des antécédents personnels pédopsychiatriques est complétée
par celle qui recherche les antécédents psychiatriques au sein de la famille.
Pour rappel, certains diagnostics, prises en charge, évolutions ou pronos-
tics des troubles pédopsychiatriques (par exemple, les troubles anxieux,
les troubles bipolaires, les troubles schizophréniques, etc.) dépendent de la
présence ou de l’existence du même trouble ou de la même pathologie, ou
encore d’autre pathologie comorbide au sein de la fratrie ou de la famille.
Il est donc très important de ratisser tout le terrain.

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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112 Anamnèse du patient et de sa famille

Antécédents somatiques
On recherche les différentes maladies, les différentes raisons des séjours
précédents à l’hôpital, les divers accidents ou opérations chirurgicales que
le patient a eus par le passé. « Plus particulièrement, le récit des épisodes
de la pathologie somatique de l’enfant est d’autant plus révélateur que les
parents ne se sentent pas responsables de leur survenue. » (Brusset, 2018)
Le recueil des informations sur les antécédents personnels du patient est
une base de données qui « doit être aussi proche que possible des faits de
l’histoire de votre patient. Vous pouvez prendre plusieurs mesures pour
augmenter la validité des informations que vous rassemblez consignées au
sein de l’histoire de la maladie actuelle. » (Morrison, 2018) Le patient a-t-il
présenté des crises convulsives ? A-t-il eu des pertes de connaissance ?
Quel médicament prend-il ou a-t-il pris par le passé ? Les pédiatres ou les
médecins de famille pour les grands adolescents peuvent nous fournir des
informations essentielles concernant le passé médical du patient.
On recherche les éventuelles allergies aux médicaments, les pathologies
cardiaques, thyroïdiennes, hépatiques, rénales, etc. Ces informations per-
mettent au thérapeute de réajuster sa prise en charge, voire de réorienter
le patient vers ses collègues spécialisés pour une meilleure prise en charge.

Toxiques, drogues ou éventuels traitements


Comme souligné dans le chapitre 9, il est important de savoir pour le thé-
rapeute si le patient consomme ou non de la drogue. Le cas échéant, depuis
quand et pour quels motifs ou quelles raisons ? Il est important de deman-
der tout simplement au patient pourquoi il consomme des drogues.
Combien de sortes de drogues a-t-il consommées ? Il peut s’agir de :
l’alcool, du tabac, des cigarettes, des médicaments, des produits cosmétiques,
etc. Quel type de drogue consomme-t-il le plus souvent ? Depuis combien
de temps en consomme-t-il ? Quand a-t-il commencé sa consommation ?
Quelles étaient les raisons de cette consommation ? Le fait-il seul ou en
compagnie d’amis ou de personnes inconnues ou récemment rencontrées ?
Quels sont les effets qu’il ressent avant et après la consommation des
drogues ? Ses parents ou d’autres adultes sont-ils au courant de cette consom-
mation ? Pourquoi le fait-il en cachette ? Comment s’en procure-t-il ?

Bibliographie
Brusset, B. (2018). Enquête familiale et anamnèse. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M.
Soulé (dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1,
p. 509-517). Presses universitaires de France.
Jeammet, P. (dir.). (2002). Adolescences. La Découverte & Syros.
Jeammet, P. (2009). Paradoxes et dépendance à l’adolescence. Fabert.
Morrison, J. (2018). L’Entretien clinique : outils et techniques de diagnostic en santé
mentale. Mardaga.
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11 Anamnèse familiale
Souvenons-nous que « l’évaluation dynamique du groupe familial s’atta-
chera particulièrement à identifier la nature des relations transgénération-
nelles, intergénérationelles et la qualité des discriminations et délimitations
interindividuelles au sein du groupe. Ces deux plans correspondent à la
nécessité pour l’adolescent, d’une part de s’inscrire dans la différence des
générations en y trouvant une identification dont l’étayage peut résider
dans une histoire ou un mythe familial, et d’autre part d’accéder à sa propre
individuation. » (Marcelli, 1999)
En effet, systématiquement dans l’anamnèse familiale, le clinicien cherche
à savoir la position ou le rang du patient dans sa fratrie, la composition de
la famille, les relations interpersonnelles, la qualité du lien et le type de la
relation que le patient entretient avec chaque membre de sa famille, sans
oublier que les activités professionnelles ou scolaires de chaque membre de
la famille seront analysées également.
En outre, le clinicien peut s’appuyer sur le génogramme familial qui est
un outil « souvent préalable à la thérapie familiale pour y être utilisé comme
un instrument dynamique » (Brusset, 2018). Ce génogramme permet de
souligner les éventuelles migrations : le pays, la ville ou la région d’origine,
les causes plausibles de ce déplacement, la qualité d’adaptation dans la ou
les villes actuelles ou antérieures, etc. Souvenons-nous que les familles ne
changent pas de ville, de région, de quartier, etc. sans une raison valable.
De manière plus détaillée, cette anamnèse familiale doit nous apporter
des informations sur le mode de relation entre le patient et les autres mem-
bres de sa famille restreinte ou élargie. On doit signaler le lieu de vie du
patient.
Si le patient ne vit pas dans sa cellule familiale biologique, il est très
important de chercher à savoir les motifs qui ont conduit aux éventuels pla-
cements. Il peut s’agir de : deuil d’un ou de deux parents, placement dès la
naissance, adoption, maltraitance intrafamiliale, victimes d’abus, difficulté
relationnelle avec sa fratrie ou ses parents, mineur non accompagné, etc.
Il faudrait se demander comment le patient ou sa fratrie se sont adaptés
ou non à ces différentes décisions administratives, judiciaires ou sociales.
Quel a été le vécu du patient face à ce déménagement ? S’en souvient-il ou
non ? Comment raconte-t-il ces différents voyages ou déménagements ?
Le thérapeute doit noter les relations que développe le patient dans son
nouvel environnement social (foyer d’accueil d’urgence ou pour un court
ou un long terme, famille d’accueil, maison de rééducation, prison pour
mineur, etc.). Est-ce que le fait d’être placé a eu un effet positif ou négatif
sur les liens interfamiliaux ? Le patient s’est-il coupé du reste de sa fratrie ?

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114 Anamnèse du patient et de sa famille

Comment se comporte-t-il dans son nouveau milieu de vie avec ses pairs,
les adultes ? Respecte-t-il les règles de vie ? Quelle explication donne-t-il à
sa situation familiale ?
Pour conclure sur l’anamnèse familiale, insistons sur le fait qu’elle
apporte des informations très utiles pour la suite de notre prise en charge.
Soulignons qu’une bonne anamnèse oriente déjà le thérapeute vers où se
tourner pour recueillir les informations afin de confirmer ou infirmer ses
hypothèses diagnostiques. Cette anamnèse permet de cerner la probléma-
tique du patient.
Grâce à l’anamnèse, le thérapeute peut décider si la demande faite est du
ressort de l’éducatif, du social ou du thérapeutique. « En d’autres termes, du
fait que l’entretien n’est pas centré sur le sujet qui parle, mais sur l’enfant
qui est amené en consultation, l’évocation du passé laisse parfois plus aisé-
ment filtrer les implications inconscientes, comme si les mécanismes de
refoulement se trouvaient plus facilement pris en défaut. » (Brusset, 2018)
L’anamnèse du patient invite pour sa part les parents à revisiter les diffé-
rentes fonctions comme : la « fonction de réceptacle de la souffrance paren-
tale, fonction de “requalification” des parents, la fonction de tri des confu-
sions de générations et la fonction de support identificatoire des parents »
(Houzel, 2018) telles que développé par Ester Bick dans sa méthode d’obser-
vation des bébés.
Il est important de chercher les réactions entre l’enfant que les parents
ont été, c’est-à-dire l’infantile des parents, et leur enfant réel qui a besoin
d’une consultation. Il s’agit de laisser les parents raconter leur fantasme
sur l’enfant imaginaire qu’eux-mêmes ont ou n’ont pas été, ou ce mauvais
enfant qu’ils craignent avoir été. Le thérapeute reste attentif aux mouve-
ments identificatoires et projectifs qui se déroulent entre le parent et son
enfant pendant le recueil des informations anamnestiques.
Ce recueil des données anamnestiques ne consiste pas seulement à retra-
cer la chronologie des événements de la croissance ou du développement
psychomoteur du patient. C’est un moment où la question de chercher
comment les parents et l’entourage ont vécu le développement du patient.
Quelles émotions et quels affects émergent quand on aborde les souve-
nirs de l’enfance du patient ? Le thérapeute doit revenir sur les souvenirs
agréables ou désagréables des interactions entre le patient et son entourage
durant tout son développement.
Il est important de relever les éventuels antécédents médicaux et psy-
chiatriques au sein de la famille. Les antécédents familiaux concernant les
parents, la fratrie, les proches parents ne doivent pas être oubliés ni écartés.
Le thérapeute doit prendre le temps de se poser et d’examiner ces antécé-
dents qui peuvent être d’une aide importante dans la pose des diagnostics
différentiels et dans l’orientation de sa prise en charge (médicamenteuse,
psychothérapeutique ou socio-éducative).

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Anamnèse familiale 115

Note sur la filiation et l’adoption


La question de filiation peut être posée sur le plan juridique, sociologique,
culturel, psychologique, etc. La filiation fait appel à la notion d’adoption.
Ces deux notions sont complexes et vastes. Malheureusement, nous ne les déve-
loppons pas dans ce guide. Ce travail vise à fournir un guide de réflexion pour
bien mener son entretien clinique.
Arrêtons-nous sur le comment étudier la filiation et l’adoption. Nous invitons
le lecteur à s’informer sur les connaissances théoriques dans d’autres ouvrages.
Enjeux de l’adoption
Cliniquement le thérapeute doit chercher s’il s’agit d’une filiation biologique
ou si l’enfant a été adopté naturellement ou administrativement. Nous compre-
nons par adoption naturelle le fait qu’un parent biologique donne son bébé à
un autre adulte afin qu’il devienne parent adoptif ou serve d’intermédiaire au-
près d’un parent adoptif. L’adoption administrative est celle qui fait intervenir
les services socio-étatiques.
• Quelles étaient les motivations implicites et explicites de cette adoption ? D’où
est venue l’idée d’adopter un enfant ? Pourquoi ces adultes ont-ils pris cette
décision d’adopter cet enfant ? Existait-il des critères avant l’adoption (le choix
du sexe, de l’ethnie, de l’âge et d’autres caractéristiques de l’enfant à adopter) ?
• Quelles étaient les circonstances qui ont précédé ou qui ont suivi l’adoption ?
Comment s’est passée cette adoption (on invite les parents à faire la narration
des circonstances qui ont eu lieu avant, pendant et après l’adoption) ? Est-ce
que les parents adoptants ont changé le prénom de cet enfant ? Qu’est-ce qui
a motivé le choix de ce prénom ?
• Quels étaient les fantasmes, les représentations imaginaires des parents
adoptifs avant l’adoption ? Quels bons ou mauvais souvenirs les parents
gardent-ils de cette adoption ? Est-ce qu’ils ont l’impression d’avoir adopté un
bébé comme ils le souhaitaient ?
• Est-ce que l’enfant sait qu’il a été adopté ? Comment a-t-il réagi en appre-
nant cette nouvelle ? Connaît-il ses parents biologiques ? Pourquoi les parents
adoptifs ont-ils gardé un si long silence avant de lui en parler ?
Enjeux de la filiation
Nous entendons par filiation, dans ce guide, tous les dispositifs qui font une
continuité généalogique. Le thérapeute essaie de comprendre comment ou
jusqu’à quel degré les parents actuels sont prêts à inscrire leur enfant dans la
lignée généalogique. Quelle est la position de l’enfant dans sa famille (premier
enfant, second, puîné, etc.) ?
• Qu’est-ce qui a précédé sa conception ? S’agit-il d’une conception naturelle,
après plusieurs échecs ou fausses couches, ou avortements, etc. ? S’agit-il d’une
grossesse programmée, ou les parents (un ou les deux) ont été surpris d’appren-
dre la nouvelle ? Quelles étaient les réactions des uns et des autres à l’annonce
de la grossesse ?

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116 Anamnèse du patient et de sa famille


• Est-ce que le patient a été conçu grâce à la procréation médicalement
assistée ? Le patient a-t-il été recueilli, ou conçu par insémination in vitro ? Est-ce
que les parents ont fait appel aux services d’une mère porteuse ? Continuent-ils
à garder un lien avec la mère porteuse ?
• Est-ce que les parents ont eu recours aux donneurs de sperme ou d’ovocytes ?
Quelles étaient les conditions vis-à-vis du donneur ? Ont-ils gardé un lien avec
le donneur ?
En conclusion, l’investigation de ces notions adoption et de filiation a des
résonances avec les identifications parentales et la dynamique familiale ou
dynamique de couple. Le thérapeute devrait approfondir son investigation
clinique et éviter de rester à un niveau superficiel ou en façade. Les étiologies
de différents troubles psychiques peuvent être élucidées à partir de ces types
de questions. Par exemple, les troubles d’attachement, les troubles de relations
précoces, les troubles du comportement et autres troubles émotionnels appa-
raissent habituellement durant l’enfance ou à l’adolescence, classés F90-F98
dans la CIM-10. Mais ce ne sont pas les seuls, car toute information qui concerne
le patient peut enrichir la compréhension de sa psychopathologie.

Bibliographie
Brusset, B. (2018). Enquête familiale et anamnèse. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M.
Soulé (dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1,
p. 509-517). Presses universitaires de France.
Houzel, D. (2018). Une application de la méthode d’observation des nourrissons : les
traitements à domicile. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M. Soulé (dir.), Nouveau
Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1, p. 519-530). Presses
universitaires de France.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie
Médico-Chirurgicale. Psychiatrie. article 37-213-A-10.

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Status clinique
III
pédopsychiatrique
L’anamnèse doit obligatoirement être complétée par l’examen clinique.
Qui dit examen dit évaluation pédopsychiatrique du patient. Ceci équi-
vaut à parler de la formation théorique et pratique du thérapeute. Celle-ci
« requiert du clinicien une connaissance parfaite du calendrier développe-
mental normal de l’enfant dans tous les domaines de fonctionnement (psy-
chomoteur, langagier, cognitif et psychodynamique). » (Brunschwig, 2001)
Tout au long de l’entretien, le thérapeute essaie de recueillir différentes
informations sémiologiques qu’il juge ou trouve nécessaires compte tenu
de la demande ou des symptômes du patient.
Le clinicien vérifie continuellement si « les éléments jugés significatifs sont
immobilisés et coupés de toute signification pour être traités comme s’ils
étaient les indices naturels d’une maladie mentale considérée comme une
réalité organique, ou comme une essence caractérisée par sa nature propre,
pour faire l’objet de calculs et d’opérations quantitatives abstraites, ou bien
sont-ils ramenés à quelques grandes dimensions, supposées significatives
des rapports du sujet avec son monde, son histoire, son expérience subjec-
tive ? » (Brusset, 1999) Le status pédopsychiatrique correspond à un travail
d’architecture. La construction se déroule étape par étape dans une logique
de cohérence et de concision.

Bibliographie
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis-
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Brusset, B. (1999). Diagnostic psychiatrique et différence du normal et du patholo-
gique. Encyclopédie Médico-Chirurgicale, Psychiatrie,. article 37-102-E-20.

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12 Impression générale
C’est souvent dans un second temps, ou après l’évaluation, que l’examina-
teur écrit l’impression générale. Le thérapeute décrit ses ressentis affectivo-
émotionnels, les difficultés et facilités, l’apparence du patient, bref tout ce
qui s’est passé dans le transfert et le contre-transfert. La description faite
ici découle exclusivement de l’analyse durant l’entretien : les interactions
patient-parent, patient-thérapeute et patient-environnement. Il est ques-
tion de décrire ou d’aborder les différentes émotions que le patient et ses
parents nous font ressentir lors de cette rencontre.
En effet, dans l’impression générale, « le clinicien observera ainsi les effets
de la situation d’observation clinique, les effets du dispositif. Il se posera
toujours la question de savoir si le sujet observé agit, s’exprime, déploie
sa subjectivité, ou bien s’il ne fait que réagir à l’observateur, à ce que
l’observateur-clinicien transmet, au dispositif clinique. » (Ciccone, 2018)
Pour compléter ce chapitre sur l’impression générale, nous conseillons
fortement d’utiliser la sémiologie traditionnelle en notant aussi l’absence
éventuelle des signes ou symptômes cliniques pertinents.
Très spécialement, ce chapitre est consacré à la description ou au développe­
ment des sept points essentiels à observer dans une impression générale.
Nous pouvons dire en d’autres termes qu’« en quelques minutes, le tonus,
l’humeur, la vitalité de l’enfant, sont plus ou moins faciles à évaluer : ils
sont surtout à apprécier au fil du temps, notamment des heures et jours de
la semaine et des rythmes scolaires. La place que choisit l’enfant, ou que
lui désignent les adultes, est bien sûr intéressante à observer, sa proximité
puis son maniement de la distance physique vis-à-vis de chaque parent.
(Est-il au milieu, à côté ? Tient-il la main, se love-t-il ? À qui s’adresse-t-il,
qui regarde-t-il, au fur et à mesure que le temps s’écoule ?) Son envie ou sa
capacité à rester immobile, assis, loin de ses parents, à jouer, dessiner ou
écrire, donnent un premier aperçu, partiel, fragmentaire, de son aptitude à
assumer son rôle d’élève, tandis que la suite de la consultation informe sur
son besoin de se mouvoir, de se dresser, son usage plus ou moins adroit de
la gestuelle. Surtout, l’on découvre peu à peu la voie d’expression, verbale,
figurée ou agit, qu’il va ensuite privilégier. » (Brunschwig, 2001)
En fait, l’impression générale rassemble des informations subjectives et
objectives que le thérapeute tire du patient durant l’entretien. Les impres-
sions cliniques reposent sur les bases des aspects ou informations externes
ou extérieures, fonctionnelles, relationnelles personnelles ou collectives des
observateurs en résonance avec leurs propres disponibilités internes ou psy-
chiques. Ainsi, les moindres informations pouvant orienter, guider la prise
en charge du thérapeute sont rapportées avec toute la fidélité dans les sept
catégories suivantes.
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120 Status clinique pédopsychiatrique

Aspects ou apparences physiques


Le thérapeute décrit l’apparence et la corpulence physique du patient (en
fonction de l’âge, de la taille, du poids). En fait, il devrait relever d’emblée
les signes extérieurs qui lui laisseraient penser à l’une ou l’autre hypothèse
diagnostique (pathologie mentale, trouble psychique, etc.). Il doit décrire si
le patient est costaud, mince, maigre et pâle ou présente un embonpoint.
Présente-t-il des signes d’une carence nutritionnelle ou d’un mauvais traite-
ment (châtiment corporel, abus, négligence, etc.). A-t-il un faciès alcoolique
ou typique d’une personne qui présente une dépendance aux toxiques ?
Le thérapeute relève les informations caractéristiques sur la physionomie
du patient. Est-il plus petit ou plus grand en taille que les autres enfants de
son âge ? Présente-t-il un aspect enfantin ou adultomorphe ? Fait-il penser
à un trouble alimentaire : anorexie ou boulimie ou à une mauvaise hygiène
alimentaire ?
Le patient nous donne-t-il l’impression d’avoir une maladie somatique ?
Le thérapeute relève tout signe externe ou toute information sur la phy-
sionomie qui fait la différence entre le patient et tout autre individu du
même âge.

Présentation et soins corporo-vestimentaires


Il s’agit de décrire les caractéristiques de la peau du patient, de sa propreté
du point de vue hygiénique et vestimentaire, etc. Le thérapeute relève tous
les éléments qui peuvent le mettre sur une piste clinique :
• il est important de décrire en plus de la couleur des cheveux, les soins
que le patient accorde à son look. Est-ce que le patient porte une marque
particulière sur son corps ou sa peau ? Quelle est la signification qu’il donne
à cette marque (piercing, tatouages, décorations fantaisistes avec ornement
de bijoux, port d’objets religieux comme des croix, bagues, chapelets, etc.).
A-t-il sur lui des objets insolites (amulettes, blindage ou médailles, parfois
vêtements ridicules et baroques) ?
• l’accoutrement du patient est-il adapté à la saison et à son âge ? Ses
vêtements sont-ils sales ? Est-ce que ses habits ont des débris alimentaires
révélant une incurie générale ou une absence de soins corporels (obser-
vation retrouvée dans les états confusionnels, syndrome dissociatif, syn-
drome maniaque) ? Il arrive que le patient s’habille à l’envers (syndrome
maniaque, syndrome dissociatif ou consommations de toxiques). Dans son
style vestimentaire, le patient peut être très dénudé, trop couvert, moins
couvert selon la saison, etc. C’est l’occasion de noter les probables signes de
négligence ou de la mauvaise qualité des soins corporels dont il bénéficie de
la part de ses parents ou des adultes qui s’occupent de lui ;
• le patient peut présenter une excentricité vestimentaire : couleur vive des
vêtements, maquillage exagéré, inadaptation à l’âge ou au sexe (travestisme),

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Impression générale 121

etc. L’extravagance vestimentaire est retrouvée dans le syndrome maniaque.


Le style vestimentaire peut mettre le thérapeute sur une piste de dysphorie
de genre, d’appartenance à une idéologie spirituelle, mystique ou fantaisiste,
etc. Il peut s’agir d’un accoutrement hors norme qui peut signifier l’apparte-
nance du patient à un groupe spécifique (rockstar, hip-hop, hippie, moine,
etc.).
Enfin, il ne s’agit pas de décrire ou de seulement relever les différents
signes sur l’apparence externe du patient, ces éléments sont de véritables
clés des portes qui conduisent vers des discussions plus personnelles et sur
son entourage. Quelle importance accorde-t-il à son apparence vestimen-
taire, en quoi cela consiste, pour quoi tel look et pas un autre, depuis quand
a-t-il opté pour ce look, quelles sont les réactions de gens de son entourage,
etc. ? Le thérapeute doit faire une véritable fouille des informations. Il peut
déboucher sur les identifications, les projections, l’idéal du moi, son rapport
aux règles sociales, etc.

Qualité du lien patient-examinateur


Il est demandé au thérapeute de décrire l’attitude, le contact et le lien du
patient envers lui. Il note la qualité de la relation que le patient établit du
début à la fin de l’entretien. Le patient peut développer une relation du type
dominant, contrôlant, inhibé, soumis, etc. Sur le plan relationnel, qu’est-ce
qui différencie le patient d’un autre enfant de son âge, de son rang social,
de son origine culturelle, etc. ? Est-ce qu’il garde un contact visuel avec son
thérapeute ? Quel comportement adopte-t-il durant l’entretien ? Est-ce que
le thérapeute a noté d’éventuelles discordances dans son expression cor-
poro-posturo-verbale ou gestuelle ? Comment expose-t-il ses difficultés ou
ses problèmes, ou encore, comment s’explique-t-il le ou les motifs qui l’ont
amené à consulter ? Quelle est sa capacité d’auto-observation ? Change-t-il
sa manière de s’exprimer au cours de l’entretien ?
Il est important de relever si la qualité du contact du patient est :
• syntone, c’est-à-dire s’il participe spontanément à l’ambiance, avec
fusion affective. Dès la première rencontre, le patient établit aisément le
contact avec l’autre. Le comportement du patient pendant l’entretien est
adapté à la situation. Il n’y a ni réticence ni familiarité excessive. Le contact
syntone est un contact en accord avec l’ambiance, harmonieux et réci-
proque. Le patient se montre courtois, chaleureux, respectueux et participe
naturellement à l’échange avec le thérapeute ;
• hypersyntone, c’est-à-dire s’il montre une familiarité excessive dans
le contact. Il s’agit des patients qui, dès le premier contact, se mettent à
parler comme si le thérapeute le connaissait depuis des lustres. Le patient
réagit de façon excessive à l’ambiance. Cette hypersyntonie peut entraîner
un ludisme. Le patient s’exprime avec prolixité, multipliant les taquineries.

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122 Status clinique pédopsychiatrique

Certains patients se permettent de toucher le thérapeute aux épaules,


d’autres le prennent pour un ami, d’autres encore le tutoient. Attention, il
est normal qu’un enfant tutoie son thérapeute. On peut dire que le patient
le considère au même niveau que ses parents, ses nounous, ses enseignants,
ses éducateurs, son pédiatre, etc. ;
• indifférente. L’indifférence est la perte de la tendance à s’intéresser à
l’entourage et à soi-même. Le patient, quasi mutique, ne répond à aucune
sollicitation verbale, donnant une impression de froideur. Le contact est
très difficile à établir. Parfois, il paraît absent, ne prêtant aucune attention
à ce qui se passe autour de lui, semble être ailleurs. La conversation est
difficile et pauvre, limitée à quelques paroles banales. Le patient éprouve-
t-il des difficultés à avoir des conversations avec les autres ? L’indifférence du
patient peut cacher aussi la méfiance, un trouble délirant, un émoussement
affectif, un trouble dissociatif ou psychotique ;
• réticente, c’est-à-dire que le patient montre une attitude de méfiance
excessive se traduisant par un refus systématique et volontaire d’exprimer
sa pensée, ses idées, d’expliquer les raisons de ses propres difficultés. La
réticence peut être due à l’angoisse, au stress de rencontrer une nouvelle
personne, au syndrome délirant ou à des hallucinations (le patient peut
recevoir un ordre de ne rien communiquer ou de refuser de répondre à
aux questions ou de se méfier du thérapeute, etc.), à la crainte de s’imagi-
ner qu’il sera puni par ses parents ou le médecin, ou plus encore de croire
qu’après le rendez-vous, il ne sera plus aimé par ses parents à cause de ce
qu’il a dit au thérapeute, etc. Enfin, le thérapeute doit revenir et rechercher
la cause probable de la réticence dans un deuxième ou un troisième temps
de l’évaluation pour confirmer ou infirmer ses hypothèses.

Traits distinctifs ou autres signes


pathognomoniques
Au cours de cette impression générale, le thérapeute essaie de rechercher ou
de ressortir les signes particuliers observés pouvant être associés ou non à
une pathologie organique.
En fait, à chaque entretien clinique, il faudrait rechercher les probables
stigmates d’une affection organique, génétique, héréditaire, neurologique,
psychiatrique, etc. Le thérapeute cherche ce à quoi lui fait penser le faciès,
la démarche, les mimiques, la physionomie du patient. Est-il habile, mala-
droit, équilibré, etc. ? Est-ce qu’il a une affection organique ou génétique
phénotypiquement visible ?
Le patient présente-t-il des tics et maniérismes moteurs répétitifs (claque­
ment des mains, clignement des yeux, haussement des épaules ou des
bras, tournoiement sur lui-même), un handicap ou des dysmorphies, etc. ?

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Impression générale 123

Sa démarche est-elle normale ou lente, hésitante, bizarre, assurée, titubante,


claudicante, etc. ? Porte-t-il des lunettes ou un implant auditif ou autre
appareil et pourquoi ? Pourquoi porte-t-il des écouteurs, est-ce un moyen
d’éviter d’entendre les voix, de se protéger des insultes ou paroles ou cri-
tiques des passants, de son entourage ? Présente-t-il des problèmes dans la
communication avec autrui ?

Topographie cognitive et fonctionnelle


Le thérapeute fait un survol de la topographie cognitive et fonctionnelle du
patient. Il s’agit de décrire les éléments patents qui attirent l’attention du
thérapeute durant cet entretien.
On peut constater chez certains patients des signes particuliers pouvant
être associés ou pas aux troubles de fonctions supérieures : le langage, la
pensée, la mémoire, le jugement, la perception, etc.
Étant donné que l’impression générale donne une description globale du
fonctionnement structural et fonctionnel du patient, il convient de sou-
ligner toutes les informations cognitivo-fonctionnelles que l’on a notées
durant l’entretien.
Les propos, les attitudes, les comportements du patient intéressent le
thérapeute au long de l’entretien. Il prend soin de les livrer sur ce point
consacré à l’impression générale. Le patient parle-t-il de manière étrange
ou bizarre ? Il peut avoir des idées fixes ou des intérêts restreints, des obses-
sions, des explosions ou labilités émotionnelles, etc. Donne-t-il l’impres-
sion d’être limité sur le plan cognitif ou mental ? Quelle est la qualité de ses
expressions verbales ? Avec quelle pertinence s’exprime-t-il ? Parvient-on à
lui faire changer d’avis facilement ?
En guise d’exemple, on peut noter sur le plan moteur une :
• une amimie : c’est l’absence des mimiques ou des gestuelles, corres-
pondant à une suppression de l’expression physionomique. Ce signe est
retrouvé dans les affections neurologiques ou dans les dépressions sévères ;
• une hypermimie : il s’agit de l’exagération de l’expression mimique tra-
duite par une mobilité excessive des traits du visage, etc. Ce symptôme est
retrouvé la plupart du temps dans l’hypomanie, la manie, l’hyperactivité,
etc. On note un excès dans la gestualité du patient ;
• une hypomimie : c’est la diminution de l’expression mimique. Les mouve­
ments des traits du visage sont plus faibles, plus lents et moins durables.
Cette symptomatologie peut se retrouver chez les patients qui présentent
une forte inhibition ou une dépression moyenne et sévère ;
• une paramimie : il s’agit de la dissociation entre l’état psychique et la
mimique. L’expression physionomique du patient est paradoxale. Il montre
des grimaces bizarres relevant du syndrome dissociatif. Il peut avoir un air
joyeux retrouvé chez les personnes mélancoliques, etc.

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124 Status clinique pédopsychiatrique

Déroulement et évolution de l’entretien


Début de l’entretien
Le thérapeute décrit les facilités ou les difficultés qu’il a rencontrées dans la
manière de mener ou de conduire l’entretien seul avec le patient ou en la
présence ou l’absence de ses parents. A-t-on eu de la peine à discuter avec
le patient ? Le patient accepte-t-il de rester seul avec le thérapeute ? A-t-il
demandé à plusieurs reprises d’arrêter la séance ? A-t-il donné l’impression
d’avoir peur ou d’être dans les difficultés de rester seul en entretien ? Est-
il venu sans hésiter dans le bureau ? Certains patients demandent à être
apprivoisés délicatement avant d’accepter de rester seuls avec le thérapeute
et en l’absence des parents.

Déroulement de l’entretien
Le recueil des données cliniques était-il laborieux ? Le patient était-il dans la
séduction ? A-t-on senti une facilité dans les échanges ? Pouvait-il s’arrêter
ou avoir des interruptions durant l’entretien ? Comment accepte-t-il de
parler ? Prend-il en considération les sollicitations du thérapeute ? A-t-on
eu la facilité de relancer l’échange ? Qui a commencé la conversation ou
l’échange (jeu, discussion, dessin, etc.) ? Se préoccupe-t-il de ses parents, de
sa fratrie, de son animal de compagnie au lieu de participer à la discussion ?
Le thérapeute relève les éléments qui l’ont interpellé durant l’entretien.
Il note la communication non verbale, la tonalité verbale et affectivo-
émotionnelle du patient. Est-ce qu’il y a un effondrement émotionnel durant
l’entretien ? Le patient est-il devenu agressif, plus ou moins collaborant ?
A-t-il exprimé une explosion de colère, un mutisme ? S’est-il montré oppo-
sant, distant, etc. durant l’entretien ? A-t-on noté de la régression au cours
de cet entretien ? Est-ce qu’il y a des changements du comportement durant
l’entretien : instabilité psychomotrice dans les activités, persévérations dans
le jeu, etc. ? A-t-on noté des changements gestuels ou des mimiques ou de
la tonalité émotionnelle durant l’entretien ? Le patient reste-t-il dans le jeu
répétitif, a-t-on eu du mal à le cadrer, à l’arrêter, etc. ? Cet entretien a-t-il
demandé de fournir de gros efforts pour le mobiliser ou garder son attention ?

Clôture de l’entretien
Comment le thérapeute se sent-il à la fin de l’entretien ? Il lui est conseillé
de décrire les réactions que le patient a suscitées chez lui. Il s’interroge sur
ce qui appartient au patient ou à lui-même. Quels affects ou ressentis a-t-on
éprouvés à la fin de l’entretien ? Quelles émotions ou quels affects marquent
cette rencontre ? Comment le thérapeute peut qualifier cet entretien ? Et si
on demande de coter cet entretien sur une échelle de 0 à 10, comment le
noter en sachant que la note de 10 signifie un entretien excellent ?

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Impression générale 125

Le thérapeute donne le fil rouge de la séance. Toutes les interventions


du monde externe et interne sont rapportées délicatement. Il s’agit d’un
moment crucial où le thérapeute parle ou rapporte ses ressentis vis-à-vis de
la rencontre qui s’est faite avec le patient.

Séparation à la fin de l’entretien


Le thérapeute note les éléments relationnels entre le patient et lui. Il décrit
la qualité de la rencontre et de la séparation avec le patient. Il se demande
à la fin de l’entretien si leur séparation peut être qualifiée de sécurisante ou
d’anxieuse.
Comment le patient réagit-il à l’annonce de la fin ? Est-il « collant »,
« s’accroche-t-il » au thérapeute ? Continue-t-il de jouer ou demande-t-il de
prolonger la séance ? Pleure-t-il, refuse-t-il de partir ou alors part-il à toute
vitesse sans dire au revoir, etc. ?
Le patient peut essayer d’emporter un objet ou tout autre élément de la
séance ou de la boîte à jouets du cabinet. Accepte-t-il la proposition d’un
prochain rendez-vous ou refuse-t-il de revenir ? etc.

Conclusion
L’impression générale doit rassembler de manière cohérente les informa-
tions observées lors de l’évaluation. Il faut une cohérence dans les diffé-
rentes observations cliniques. Le thérapeute se demande comment le
patient exprime ses pulsions (libidinales et agressives). Quelles angoisses
présente-t-il ? À quels types de mécanismes de défense a-t-il recours ? Quelle
est la qualité de relation d’objet dès la rencontre au cours et à la fin de
l’entretien ? Quels sont les possibles stigmates physiques externes ou les
signes révélateurs d’une pathologie organique, génétique ou neurologique ?
L’impression générale offre au thérapeute la possibilité de constater ou
de découvrir les points saillants qui permettent d’orienter son investigation
clinique. Ces éléments sont comparés au développement normal des autres
jeunes de son âge et de son contexte socioculturel.
Le chapitre 22 décrit comment le thérapeute fait la restitution de tout
son entretien clinique. Il est préférable qu’il aborde l’impression qu’il a eue
durant les entretiens en notant ce qu’il a pu constater ou comprendre des
différents symptômes du patient. L’impression générale du thérapeute lui
permet d’avancer les hypothèses diagnostiques fonctionnelles et structurelles
tout en relevant leur conséquence sur l’intégration dans la personnalité.

Bibliographie
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis-
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Ciccone, A. (2018). Aux frontières de la psychanalyse. Soin psychique et transdis-
ciplinarité. Dunod.
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13 Relation d’objet
La notion d’objet ou de relation d’objet occupe une place importante dans
la théorie psychodynamique. Dans ses travaux sur le deuil et la mélanco-
lie, Freud fait un lien entre le patient et l’objet. Il écrit alors que « l’ombre
de l’objet tomba ainsi sur le moi qui put alors être jugé par une instance
particulière comme un objet, comme l’objet abandonné ». Toujours pour
reprendre ses propos, c’est comme si l’on disait qu’entre moi et moi, il y a
une ombre de l’objet. La relation d’objet désigne le rapport qu’a un indi-
vidu avec son entourage ou avec les objets qui constituent le monde dans
lequel il vit. Ce monde est par essence tout aussi interne qu’externe (objets
internes/objets externes).
Soulignons que dans la relation d’objet, le patient essaie d’établir une
sorte de compromis entre son monde intérieur et la réalité extérieure
intériorisée de manière à satisfaire le plus possible les pulsions, en évitant
les angoisses qui résulteraient d’un conflit entre ces pulsions et les forces
inhibitrices du surmoi. Ce conflit est géré par son moi (cf. chapitres 15, 18
et 19). Le patient peut avoir différents modes relationnels propres à chacun
des stades de son développement psychosexuel.

Les principaux types de relation d’objet


Relation d’objet de type oral
Celle-ci est retrouvée dans les premières semaines ou mois de vie. Il s’agit
des expériences d’une première relation à un objet extérieur à soi : le sein
maternel ou ce qui le représente. Le patient « incorpore » l’objet et le consi-
dère ou le fait sien. À cet âge, le patient n’a plus une relation ou une vision
unifiée entre l’objet et lui. On remarque en revanche que toute la relation se
passe par cette sphère orale. Les parents du bébé indiquent que leur enfant
met à la bouche tout ce qu’il attrape avec ses mains, par exemple dou-
dou, jouet, ficèles, livre, etc. Il est important d’analyser les compétences du
patient, la qualité du lien qu’il développe avec les objets de son entourage.

Les trois organisateurs de Spitz


Le thérapeute cherche les trois organisateurs décrits par Spitz :
• à 3 mois, est-ce que le bébé faisait des sourires à l’approche d’un visage
familier ou un visage humain ? La réponse avec le sourire est le début de la
perception externe.

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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128 Status clinique pédopsychiatrique


• à 8 mois, est-ce que le bébé présentait de l’angoisse de l’étranger ? Il s’agit ici
du début de la reconnaissance du soi et de l’autre.
• à 2 ans, est-ce que le bébé dit « non » en associant le mot et le geste ?
La réponse de « non » signe le début d’une communication sémantique. Il y a une
véritable relation d’objet.
C’est bien après cet âge qu’apparaissent les deux autres types de relation
d’objet ci-après.

Relation d’objet de type sadique-anal


Celle-ci est mise en place entre la 1re et la 3e année de la vie. Le patient
éprouve ou exprime soit du plaisir, soit de l’agressivité dans sa relation avec
l’autre. Il attaque, retient, détruit ou contient son objet. L’objet de cette
relation est appelé l’objet excrémentiel car certains se mettent à jouer avec
leurs excréments. La particularité de cette relation est que l’objet excré-
mentiel est à la fois une partie de soi-même (relation narcissique) et objet
extérieur à lui (relation objectale). Il s’agit de la construction d’une relation
d’objet sur le mode du contrôle. Cette relation d’objet permet au patient
d’essayer de maîtriser, retenir ou expulser l’objet.
La part du contrôle que l’on retrouve dans la relation d’objet sadique-anal
fait lien avec le comportement sadique que développent plus tard certains
patients, le sadisme étant caractérisé par la volonté de « détruire l’objet et
de le maintenir en le maîtrisant. » (Laufer & Laufer, 1989)

Relation d’objet de type génital


Le patient en grandissant ne se limite pas à la relation sadique-anale, il
développe le troisième type de relation d’objet. En plus des deux précé-
dentes relations d’objet, il se procure du plaisir avec d’autres parties de son
corps ou de ses organes.
La relation d’objet de type génital est retrouvée dès l’âge de 3 ans. On
constate que le patient a une acquisition progressive de la différence des
sexes. Ce type de relation lui permet de reconnaître l’autre comme autre
sujet qui a aussi des désirs. Dans la relation d’objet de type génital, il ne
s’agit plus de parler de la loi du tout ou rien, mais plutôt celle de la prise en
considération de l’objet.

Lien entre les différents types de relation


De manière générale, signalons que ces types de relation d’objet, bien que
différents, ne se succèdent pas mais se chevauchent sans jamais disparaître,
et se perpétuent tout au long de la vie. La relation d’objet permet la mise en
place de la négociation entre le principe de plaisir et le principe de réalité,

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Relation d’objet 129

c’est-à-dire la satisfaction du désir dans la réalité. Lors de cette négociation


entre le patient et son objet, le fonctionnement mis en place pendant les
différentes phases de développement pour satisfaire la pulsion commence
à prévaloir et devient un véritable prototype : toutes les activités du sujet
peuvent être imprégnées de significations orales, anales et génitales.

Théories
Freud a signalé combien l’objet est lié à la pulsion. Selon lui, le but de la
pulsion est la satisfaction, et l’objet est ce en quoi et par quoi la pulsion
peut atteindre son but (« choix de l’objet »). L’objet est pour Freud ce qu’il y
a de plus variable dans la pulsion, il ne lui est pas originellement connecté,
au contraire il ne lui est adjoint qu’en raison de son aptitude à rendre pos-
sible la satisfaction. Plus tard, Freud théorise aussi que l’objet est à détruire
à peine se distingue-t-il du moi en voie de différenciation.
Ainsi, on parle de « choix de l’objet » pour signifier que c’est le sujet ou
le patient et son histoire qui, dans un moment de développement, s’adres-
sent à un type particulier d’objet parmi d’autres (le thérapeute, les parents,
la fratrie, les pairs, etc.). La force qui fait le lien entre le patient et les diffé-
rents objets ou plus encore ce qui entretient la relation entre les objets et
le patient est appelée la pulsion. Celle-ci peut être libidinale, agressive ou
autre. Peu importe sa nature, la pulsion permet le déplacement d’un objet
à un autre ou la fixation sur un seul objet ou sur une période de développe-
ment que Freud avait appelée « de stade de développement ». Quand une
pulsion déterminée est restée nouée à un objet dont elle ne peut se dessaisir,
on parle de la fixation.
Fairbairn a abordé différemment la théorie des relations d’objet. Vuaillat
montre que contrairement à Freud, Fairbairn essaie de remplacer la théorie
des pulsions par celle de la relation d’objet. Il insiste sur le fait que la pul-
sion est à la recherche de l’objet et non du plaisir. Dans sa métaphore de
l’oiseau qui construit son nid [« un nid n’est pas moins un objet pour un
oiseau que ne l’est une maison pour un homme, parce que c’est un objet
qui doit être construit. C’est un objet qui est recherché, même si, pour être
trouvé, il doit d’abord être fabriqué »], Vuaillat (2003) s’explique en disant :
« Le nourrisson est d’emblée à la recherche d’un objet même si cet objet
doit se construire… Ainsi, d’emblée, la pulsion est à la recherche de l’objet,
même si l’objet n’est pas encore très clairement distingué de l’enfant qui
l’investit : Fairbairn propose une histoire du développement des relations
d’objet, développement qui permet peu à peu que l’objet soit différencié
du sujet qui investit. Le premier stade est le stade de dépendance infantile,
caractérisé par l’attitude de prendre, mais l’objet n’est pas encore différencié
du sujet investisseur. Vient ensuite le stade transitionnel, où l’enfant se dis-
tingue de l’objet en l’expulsant également, et enfin le stade de dépendance

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130 Status clinique pédopsychiatrique

mature, caractérisé surtout par la capacité pour un individu différencié


d’avoir des relations avec des objets différenciés. »
D’autres théoriciens tels que Mélanie Klein, Lacan, Bion, Meltzer, Winnicott,
Roussillon, etc. ont bien abordé la question de la relation d’objet. Il est difficile
de ne pas citer les travaux de Lebovici et ceux de Tustin et Haag pour leur
contribution à une intelligibilité des fonctionnements des enfants autistiques
et plus particulièrement la théorie sur la position schizoparanoïde et la position
dépressive de Mélanie Klein, les objets transitionnels ou aire transitionnelle de
Winnicott, etc. Michael Balint a consacré ses travaux sur les différentes formes
de la relation d’objet. Il a introduit la notion de l’amour génital. En revenant
sur les stades libidinaux, Maurice Bouvet en fait un concept central de
ses travaux en 1967.
Parler de la relation d’objet revient à parler du transfert et du contre-
transfert. Les réactions du patient dépendent quelquefois des questions que
pose le thérapeute ou de la situation de l’examen ou de l’entretien. Certains
patients réagissent aux sollicitations du thérapeute et d’autres moins. Il
s’agit de noter la qualité des interactions affectives entre le patient et son
thérapeute.

Place dans l’évaluation


Sans trop s’étaler sur la théorie de la relation d’objet, sa pertinence et sa
place incontournable dans la psychopathologie psychodynamique et
surtout dans l’évaluation pédopsychiatrique, il est important de savoir
comment rechercher quels types de relation d’objet développe le patient
avec son entourage et avec le thérapeute.
Pendant l’évaluation, le thérapeute porte une attention particulière aux
types des relations interpersonnelles que peut entretenir le patient avec les
différents interlocuteurs qu’il côtoie tous les jours. Il peut arriver que le
thérapeute note une relation d’objet inexistante ou alors une relation qui
est en deçà de la relation d’objet partielle. Ce type de patient est plutôt dans
le refus de lien avec son thérapeute. Ceci soulève l’importance d’utiliser un
médiateur ou objet intermédiaire pendant l’observation clinique.
Le clinicien décrit le type de relation que le patient établit avec lui et les
autres personnes de son environnement :
• comment investit-il ses rapports à ses parents, sa fratrie, ses amis de jeu
(pairs à l’école, parascolaire, etc.) et sa relation avec les animaux ?
• quel est son vécu face à la séparation (il s’agit de la séparation dans la salle
d’attente ou quand le thérapeute demande aux parents de le laisser seul
avec le patient) ? Est-ce que, lorsque l’adulte n’est plus là, le patient s’effon-
dre en larmes, crise, pleure, etc. ? Insiste-t-il pour que ses parents soient
présents ou pas dans l’entretien ? Est-ce qu’il se montre plutôt indifférent à
la présence ou à l’absence de ses parents dans la salle d’entretien ?

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Relation d’objet 131

• A-t-il une tendance au repli sur soi ? Chez les patients névrosés, les vécus
de perte d’objet prennent alors des formes d’intensité modérées. Les fan-
tasmes qui traduisent des angoisses dépressives peuvent s’exprimer par le
sentiment d’être incompris ou délaissé, mis à l’écart, rejeté, voire exclu par
les objets parentaux.
Il est important de se souvenir que la relation d’objet a un lien avec le type
ou la qualité des investissements objectaux ou narcissiques du patient. On
parle des investissements quand une certaine quantité d’énergie psychique
du patient est liée à une représentation mentale ou à un objet extérieur réel.
Durant l’entretien, le thérapeute se demande de quel type d’investissement
il est question. Le thérapeute explore et décrit si le patient a un attachement
tranquille, peu sûr, évitant, désorganisé (cf. chapitre 2).
Somme toute, on cherche la notion de jalousie, d’entente, d’amitié, de
loyauté, d’agressivité, de complicité, etc. du patient envers sa fratrie, ses
parents, ses pairs, le thérapeute et toutes les personnes ou les objets de son
environnement socioscolaire et familial. Comment décrit-il ses rapports
aux différents objets ? Est-ce qu’il est satisfait de ses relations ? Quel senti-
ment lui renvoie son entourage familial, social et scolaire ?

Relation au corps sexué


Investissement narcissique
L’investissement narcissique est une relation d’objet dans laquelle l’inves-
tissement pulsionnel est tourné vers soi, ou vers une représentation de soi
ou à un semblable. La relation d’objet donne une idée sur la constitution du
self. Avant d’avancer sur cette notion d’investissement narcissique, gardons
à l’esprit que « le retrait de la libido d’objet sur le moi constitue le narcis-
sisme secondaire tel qu’on peut l’observer notamment dans les états psy-
chotiques (hypocondrie, délire des grandeurs). » (Laufer & Laufer, 1989)
Le thérapeute cherche à savoir comment le patient gère sa libido vis-à-vis de
son investissement narcissique.
Cet investissement narcissique présente certaines caractéristiques :
1. le patient chez lequel on relève l’investissement narcissique ne prend pas
en compte les autres ou des objets. Il change constamment de thérapeute.
Ce patient ne respecte pas la régulation affective émotionnelle avec l’objet.
C’est comme s’il fonctionnait dans un système de vases clos ;
2. l’investissement narcissique du corps peut être en positif ou en négatif. Il
s’agit du fait qu’un investissement narcissique d’un corps sexuellement dif-
férencié implique une intégration de la réalité de la castration et l’abandon
des positions omnipotentes. Quand le patient a un investissement narcis-
siquement positif de son corps, sa vision du monde n’est pas la même que si
la qualité narcissique investie est négative. Le corps est un filtre. Le patient

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132 Status clinique pédopsychiatrique

a besoin de l’objet pour être informé de la réalité extérieure. Et tout ceci se


répercute sur l’épreuve ou test de réalité du patient.
– Si le corps est investi en négatif, le patient perçoit le monde comme
un persécuteur. Ils sont tous contre lui. Personne ne l’écoute et tout le
monde lui en veut, etc.
– Si le corps est investi en positif, le patient perçoit le monde comme une
référence, une source de réflexion et de remise en cause de ses décisions,
pensées, imaginations, perceptions, etc. Ce n’est pas la réalité extérieure
qui change, mais ses aspects internes qui se modifient ;
3. quand le rapprochement avec l’objet est vécu comme une menace contre
soi, ceci peut provoquer de l’agressivité, la peur d’un débordement pulsion-
nel ou émotionnel chez le patient. Le thérapeute cherche l’existence de ce
débordement en lui disant : « J’ai l’impression que ça te fait peur ce que je
te dis », « As-tu peur d’être jugé par ton entourage ? », « As-tu peur que je
te juge ? », « As-tu peur que nous ne puissions plus nous revoir ? », « As-tu
peur de retrouver ta mère folle de rage, après ce que tu lui as dit ? » ;
4. l’investissement narcissique d’un corps sexuellement indifférencié met un
décalage entre la réalité interne et la réalité biologique. S’agit-il d’une fixation
ou non ? S’agit-il d’un mode prévalent de gratification sexuelle ? Etc.

Investissement objectal
Contrairement à l’investissement narcissique, on trouve que dans l’investisse­
ment objectal, une certaine quantité d’énergie psychique est liée à une repré-
sentation mentale ou à un objet extérieur réel. L’investissement objectal est
une seconde forme ou un second type de relation d’objet à l’adolescence.
Dans ce type de relation d’objet, on retrouve plus d’investissement de
l’objet que narcissique. Le patient a tendance à fonctionner en mode d’adhé-
sivité à l’objet. S’il a des fragilités sur le plan narcissique, l’investisse­ment
objectal fait qu’il ressent comme envahissant l’objet qu’il essaie d’investir,
avec pour conséquence un investissement plus des autres que de lui-même.
Il s’agit des patients qui enregistrent et copient les propos, la manière de
faire, de se présenter, de parler, etc. de leurs pairs, des thérapeutes ou d’autres
personnalités idéalisées, etc. Certains patients disent même, par exemple,
qu’ils sont comme leurs amis. Ils disent ne pas avoir besoin de parler pour se
comprendre.
Normalement, la richesse des investissements objectaux renforce les
investissements narcissiques et, réciproquement, un investissement narcis-
sique solide permet d’aller à la recherche de l’objet sans se sentir menacé
d’être englouti par ce dernier. Il est intéressant de voir comment le patient
supporte le fait que l’objet se signale comme propre et, qu’à son tour, se
sente menacé dans son existence.
Un autre élément à retenir est que le type d’investissement se répercute
sur la parentalité, et ainsi sur l’attachement de l’enfant. Une thérapie peut

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Relation d’objet 133

viser à trouver un équilibre entre investissement narcissique et objectal.


Par exemple, une mère qui a un investissement narcissique adéquat laisse
son bébé pleurer pendant qu’elle termine sa lessive ou étale son linge, ou
téléphone à son amie avant de s’occuper du bébé sans sentir qu’elle est
agacée par ses pleurs.

Relation envers l’examinateur


Le thérapeute évalue le mode de relation interpersonnelle que le patient a avec
lui. Il analyse de quelle manière le patient entre en relation avec lui. Comment le
patient maintient-il cette relation ? Quel vécu affectivo-émotionnel éprouve
le thérapeute au regard de cette relation ? Qu’est-ce que le patient suscite en
lui ? Comment qualifie-t-il l’évolution du lien au cours de l’entretien ?
Le thérapeute devrait se prononcer sur la réceptivité ou la collaboration
du patient. Celui-ci accepte-t-il ses sollicitations ou bien montre-t-il un
besoin de contrôler ou de conduire l’entretien ? Son contact est-il syntone
ou non ? Quel type d’investissement développe-t-il vis-à-vis du thérapeute ?
L’examinateur est-il investi comme un objet total, un objet partiel ou un
objet non investi ? Certains patients rendent l’entretien très laborieux. Ils
obligent leur thérapeute à aller les chercher ou les réanimer sur le plan psy-
chique, littéralement parlant, afin de garder un lien thérapeutique.
Lors de certains entretiens, le thérapeute a l’impression que le patient
reste avec lui juste par obligation et rien de plus. Dans ce type de relation,
on a du mal à voir même des bribes de regard, d’interaction, difficultés de
jouer, d’échanger, etc.
Les trois niveaux d’interaction patient-thérapeute suivants méritent
d’être décrits à la fin de l’évaluation.
Premier niveau : recherche de l’angoisse du patient
Le thérapeute observe et consigne si le patient est angoissé, distant, froid,
chaleureux, réservé, silencieux, peu communicatif, craintif, se replie sur lui
ou non. Est-ce qu’il observe une distance adéquate à l’égard du thérapeute ?
Est-il en confiance, entre-t-il facilement en relation ?
Est-ce que le patient est dans : la familiarité, le jeu théâtral, la quête
affective, l’immédiateté, dans un traitement d’égal à égal, un contrôle, une
forme de soumission, de rivalité, de méfiance (c’est-à-dire qu’il prend une
attitude soupçonneuse, anxieuse, hostile, son entourage est perçu comme
chargé d’intentions malhonnêtes ou malveillantes. Il a du mal à se confier
au thérapeute. Il peut soit le verbaliser, soit le laisser voir par son comporte­
ment et affect.), de persécution, de séduction, d’excitation, de soutien,
d’opposition (opposition partielle ou totale) ou dans le refus ?
Comment y fait-il référence dans ses dessins, ses jeux, cherche-t-il à lui
faire plaisir, ou reste-t-il indifférent ? Montre-t-il un besoin d’être soutenu
et rassuré par le thérapeute ? Est-ce qu’il présente un besoin d’être stimulé
ou faut-il utiliser une médiation ?

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134 Status clinique pédopsychiatrique

Deuxième niveau : recherche de la qualité et la quantité


de la tonalité affective
Le thérapeute décrit ce que lui fait ressentir le patient. Est-ce que le patient
supporte ou accepte la présence d’un tiers ? Sa charge affective lui permet-
elle d’entrer en échange avec le thérapeute ? « Le thérapeute peut alors ten-
ter de se représenter et se figurer, d’abord pour lui-même seul, comment se
crée, se noue et se déploie la relation avec cet enfant-là. Il n’est pas recom-
mandé de verbaliser cette figuration à l’enfant dans ce premier temps, car
celui-ci risque de ne pas savoir comment s’en saisir, ni à quoi le relier en
lui, et cela peut lui faire vivre l’expérience persécutrice du corps étranger
enfoncé de force dans son psychisme. » (Ciccone, 2001)

Troisième niveau : recherche de l’attention visuospatiale


On observe si le patient porte un regard conjoint, une attention partagée,
s’il prend en compte des sollicitations de l’autre, etc. On décrit son regard,
s’il est fuyant, fixe comme chez les psychotiques. L’inhibition massive du
patient peut l’empêcher d’entrer en relation avec le thérapeute.
À un autre niveau, « l’intérêt se situe donc essentiellement du côté de
l’objet-thérapeute, car il peut non seulement ajuster ses attitudes et ses
comportements personnels, mais accueillir en lui, sur sa propre scène interne,
les éléments vécus et ressentis dans la relation comme porteurs d’un sens qui
pourra aussi émerger à un certain moment chez le sujet. » (Ciccone, 2001)
En fait, c’est dans cette prédisposition interne que le thérapeute se demande
si le patient prend en compte sa présence et l’étayage qu’il lui propose durant
l’entretien. Comment fait-il référence au thérapeute dans ses jeux, ses des-
sins, etc. ?
Le patient peut ne pas investir son thérapeute ou alors montrer qu’il a
de la peine à sortir de son ornière dans son discours. Il peut avoir le même
discours qui se répète encore et encore. Le patient peut essayer de rassurer
le thérapeute. Cette relation d’objet est retrouvée chez les individus qui
s’identifient à l’agresseur ou qui sont parentifiés par l’entourage.
Bion nous dit que quand le patient peut attaquer le lien, il faut se
demander s’il n’est pas en train de montrer les mécanismes de défense afin
d’empêcher le thérapeute de faire le lien entre les différentes informations
qu’il lui livre.

Relation envers les différentes personnes investies


Le thérapeute évalue la qualité des rapports interpersonnels du patient.
Comment ce dernier aborde-t-il la question de ses liens ou rapports qu’il a
au sein de sa famille et à l’extérieur ? En parle-t-il spontanément ou évite-
t-il d’en parler ? Quelle place se donne-t-il au sein de cette chaîne relation-
nelle ? Quelle appréciation fait-il de ses différentes relations ? Comment
se comporte-t-il avec elles ? Comment en parle-t-il ou comment gère-t-il

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Relation d’objet 135

la séparation avec elles ? Quelle est sa réaction à la séparation dans la salle


d’attente (anaclitique, idéalisation, facile, difficile, laborieuse, etc.) ?
Le thérapeute décrit la fréquence, la qualité, le rythme et les rôles des
relations interpersonnelles que développe le patient ou non. Si l’environne-
ment familial est très chaotique (trouble d’attachement, décès de membres
de la famille, parents souffrant de dépendance à des substances, de troubles
du comportement, de maladies psychiatriques graves, langage cru entre
adultes, maltraitance psychologique, physique, sexuelle, etc.), le patient
présente des risques de développer un trouble de personnalité, parfois grave
mais pas toujours car rentre en compte sa capacité interne et personnelle à
faire face aux événements confus qu’il rencontre dans sa vie. Par exemple,
certains patients qui arrivent toujours à s’en sortir bien qu’ils soient nés et
aient grandi dans des familles avec de nombreux problèmes éducationnels,
sociaux, affectifs, des traumatismes, etc. Ces patients ont une grande capa-
cité de résilience qui les aide à rebondir encore et encore.
Avec les parents
L’autre composante de la relation d’objet est l’ensemble ou la nature (qua-
lité et quantité) des rapports qui lient le patient à ses parents. Les infor-
mations recueillies à ce niveau peuvent s’avérer fort distinctes, en raison
des mécanismes de défense potentiellement à l’œuvre. Il est important de
rappeler que « l’évaluation des schémas de fonctionnement familiaux ne
peut se faire qu’après quelques précautions. Il importe toujours de veiller à
ne pas se montrer trop intrusif vis-à-vis d’un ensemble familial initialement
mal connu. » (Brunschwig, 2001)
On décrit le niveau d’accordage émotionnel, affectif et comportemen-
tal entre le patient et ses parents. Il faut laisser au patient la possibilité de
parler du lien ou de la relation qu’il a avec ses parents. Ce lien est-il fait
d’insultes ? Est-ce que les parents le mettent le plus souvent à la porte ? Est-
ce qu’ils ont une dépendance aux produits toxiques, à l’alcool, etc. ? Est-ce
que le patient trouve ou juge ses parents irresponsables, absents, présents,
aimant le contrôler, etc. ?
Durant les entretiens parent-patient, les questions suivantes sont sou-
levées : est-ce que le thérapeute peut dire que le contact visuel, vocal et
relationnel est établi ou maintenu entre eux ? S’agit-il d’un évitement actif
ou passif ? Observe-t-on un niveau de confort quand le patient est porté par
son parent ? Le patient arrive-t-il à s’agripper dans les bras de ses parents ?
Le thérapeute a-t-il l’impression ou la certitude qu’ils échangent du plaisir,
un sourire, un geste d’affection ou de rapprochement affectivo-émotionnel,
une communication vocale adéquate, etc. ?
Le patient est-il différent en présence de chaque parent ? Accepte-t-il de
jouer, de dessiner, de parler sans hésitation, sans difficulté ? Cherche-t-il
à s’appuyer ou à utiliser l’adulte ? Le thérapeute recherche les différences

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136 Status clinique pédopsychiatrique

possibles retrouvées dans la communication verbale et non verbale. Com­


ment le patient se comporte-t-il avec ses parents ? Comment en parle-t-il ?
Ces différences peuvent être soulevées en présence et en absence des parents.
Le patient a-t-il recours à un objet transitionnel (doudou, livre, jouet,
etc.) ? Est-ce qu’il supporte la séparation avec l’adulte ? Lui est-il facile de se
séparer de son objet transitionnel ou le garde-t-il durant l’entretien ?
Est-ce que le patient se considère comme un objet décevant ou de dés-
espoir pour ses parents, un objet destructeur ou détruit par ses parents ?
Ses parents sont-ils fiables ou non ? Le repérage du type et de la qualité
des rapports du patient avec ses parents permet de savoir si le parent est
fiable. Comment le parent se comporte-t-il lors de la séparation ou des
retrouvailles avec son enfant ? Remarque-t-on des tendances à rester dans
la fusion avec l’autre ? S’agit-il d’une sexualisation des rapports, un rejet, un
manque ou désir d’attention, un défaut de contenant ?
Il faudrait noter que les pathologies psychiatriques telles que la dépres-
sion, le trouble bipolaire, le trouble des conduites addictives (alcool, tabac,
cannabis, drogues, etc.) d’un ou des deux parents favorisent le développe­
ment d’une structure borderline chez les enfants. Ce parent est happé
plusieurs fois dans la journée, par ses propres besoins et l’accordage affectif
n’est pas de bonne qualité. Si la fonction de filtrage ou de « pare-excitation »
parentale devient défaillante, le patient se voit victime des diverses agres-
sions tant physiques (le froid, la chaleur, la douleur ou la faim), qu’émotion-
nelles (l’excès de joie, de colère, etc.) et risque de développer une attitude
adultomorphe.
Il arrive que le thérapeute note une ambivalence chez le patient adoles-
cent mais qui est totalement réprimée et refoulée. Cette ambivalence peut
se manifester par une soumission totale du patient envers ses parents contre
un refus ou un défi lancé à l’autorité sociale (municipale, juge, police, etc.).
L’adolescent peut se mettre à casser, à briser les objets, se bagarrer, se dis-
puter ou commettre des actes hétéroagressifs ou délictueux en dehors de
sa famille (par exemple à l’école, dans la rue, etc., cf. chapitre 18) et rester
soumis ou très docile en milieu familial.
Quelles que soient les difficultés de chaque parent, le thérapeute tente
de créer une bonne alliance avec eux, ce qui permet au patient d’inves-
tir sa thérapie et son thérapeute du mieux possible. Nous avons abordé ce
point plus haut (chapitre 4) quand nous avons parlé de l’alliance de travail
et de l’alliance thérapeutique. En fait, techniquement il est conseillé au
thérapeute de s’allier avec la partie saine des parents et du patient pour aller
chercher et soigner la partie malade du patient.
Avec les frères et sœurs
Le thérapeute se fait une idée sur la qualité des rapports du patient avec sa
fratrie, ses cousins et cousines, à travers le jeu symbolique ou le dessin d’une
famille par exemple. Tout simplement, le patient peut parler de cette relation.

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Relation d’objet 137

Parfois, un entretien de famille avec la fratrie peut être utile afin de bien éva-
luer la qualité des relations fraternelles : les jalousies, les bagarres, les disputes,
les inimitiés, les amitiés, les complicités, les rapprochements, etc. Bref, tous
les mouvements qui peuvent survenir dans les rapports dans la fratrie doivent
être étudiés et évalués. Le thérapeute analyse la manière dont le patient parle
ou décrit ses frères et sœurs et, inversement, comment la fratrie parle de lui.
Il en est de même de la relation entre le patient avec ses demi-sœurs et demi-
frères le cas échéant.
Une particularité est à signaler chez les patients souffrant d’une hyperacti-
vité. Ils sont tellement agissants qu’ils poussent fréquemment leurs familles ou
leurs fratries au bord de la rupture. Certains disent que leur frère ou leur sœur
fonctionne à un haut régime. Il lui est souvent reproché de ne pas écouter les
autres membres de la famille. Les autres vivent un calvaire en permanence
du matin au soir. Enfin, cette investigation invite le thérapeute à écouter les
protagonistes de la relation dans la fratrie avant de faire la part de choses.

Avec les pairs et amis


En plus de la relation avec sa fratrie ou dans sa famille élargie, il est essentiel
d’examiner le type de relation ou des rapports que le patient entretient avec
ses amis, ses amoureux, ses camarades de jeu, ses voisins, etc.
Le thérapeute se demande s’il note une absence totale de relations. Le
patient préfère-t-il des relations duelles ? Veut-il rester seul avec ses amis
intimes de manière exclusive ? Comment se comporte-t-il ou ménage-t-il
ses relations en groupe ? Cherche-t-il à être émancipé ou s’agit-il d’une rela-
tion de pseudo-émancipation ? Pourquoi a-t-il choisi tel ou tel autre ami ?
Qu’est-ce qui a motivé son appartenance à un tel groupe de camarades de
l’école ? Quelle place croit-il occuper au sein du groupe d’amis ? Peut-il
affirmer avoir de la facilité ou de la difficulté à faire des nouvelles rencon-
tres ? Quel est le vécu de ses rapports au quotidien ?
On cherche un défaut majeur de la relation interpersonnelle. Le parte-
naire de jeu est-il un objet partiel ou total ? Est-ce que l’ami a la fonction de
réceptacle où le patient y décharge sa pulsion ? S’agit-il de la mégalomanie
dans sa relation aux autres ? Est-ce qu’il écrase ses pairs ? Devant les instabi-
lités de la relation interpersonnelle, le thérapeute cherche les instabilités du
self, de même que les mécanismes de projection et les capacités d’empathie
de l’enfant.
Le patient ayant une hyperactivité est souvent victime de harcèlement et
mis à côté par les pairs. Il est vite exclu du groupe et se retrouve seul. Cette
situation peut induire un blocage affectivo-relationnel.

Avec les autres adultes


Comme on peut le constater, « l’enfant n’est pas seul. Il est indissolublement
lié à son entourage du fait de sa dépendance qui est encore grande. L’entou-
rage familial est donc toujours associé à la consultation pédopsychiatrique.

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138 Status clinique pédopsychiatrique

Un enfant a en général deux parents, qui ont chacun une place unique
et non interchangeable. » (Brunschwig, 2001) Le thérapeute « décortique »
la relation qu’entretient le patient avec ses oncles, tantes, grands-parents,
éducateurs, enseignants, etc. Cette relation donne des indices sur le type et
la qualité de son investissement objectal.
En définitive, l’investigation de la relation d’objet s’appuie également sur
les informations recueillies pendant l’anamnèse. L’entourage nous fournit
des informations ou données importantes dans la compréhension du type
de relation d’objet que le patient entretient avec les différentes personnes
dans son quotidien. Il est donc plus important de mentionner avant tout
si l’objet existe ou non, si cet objet est différencié ou non et s’il est partiel
ou total.

Exemples objectivés pendant l’entretien


La description du type et de la qualité de la relation d’objet est impérative
lors d’une évaluation psychodynamique.
Le thérapeute essaie de valider si l’entrée dans les liens affectifs a amené
ou provoqué une répercussion narcissique. Le cas échéant, le thérapeute
cherche les types d’investissements d’objet et narcissiques qu’a le patient.
Un investissement objectal de plus en plus important et différentié alimente
la boucle et offre une possibilité pour le patient de s’investir lui-même.
Le patient peut être en retrait relationnel, réservé, peu communicatif,
craintif, méfiant, négligé, séducteur, précieux, volubile, passif, retenu, il
veut faire plaisir à l’autre, il a un contact syntone ou trop familier, agressif,
hypoactif ou hyperactif, tonique, agité, vif, rival, contrôlant, calme, à l’aise,
authentique, présent, absent, contenu, inhibé, lent, figé, éteint, amorphe,
vide, ennuyeux, débordé, étrange, insaisissable, confiant, collaborant, pho-
bique, etc.
La relation d’objet a des caractéristiques différentes selon la structure psy-
chodynamique du patient. Avant d’aborder la question du diagnostic struc-
turel développée dans la partie IV, voyons en survol ce qui fait la différence
entre les structures névrotique, psychotique et dite borderline :
• le patient qui a la forme ou la structure névrotique est en général confiant,
collaborant, conciliant, séducteur, démonstratif, excité, rival, craintif, pho-
bique, etc. Il arrive à fonctionner seul ou à trouver des solutions sans tout
le temps avoir besoin de l’aide de l’autre. La plupart du temps, il développe
une relation d’objet du type total ;
• le patient ayant une structure borderline (ou état limite) peut être dans
la recherche de l’étayage ou capable de s’appuyer sur les interventions
du thérapeute pour restructurer sa pensée. Il peut chercher à faire plaisir
à l’autre. Il est dépendant, soumis, contraint, oppositionnel, provocateur,
critique et contrôlant (il cherche à inverser les rôles entre le thérapeute et

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Relation d’objet 139

lui). Il pousse l’autre à le contenir, à le remplir ou à le stimuler. On remarque


qu’il développe une relation partielle ;
• le patient ayant une structure psychotique est soit dans la toute-puissance,
soit se laisse déstabiliser par les interventions du thérapeute. Il est distant,
froid, méfiant, ou au contraire familier avec le thérapeute. Il peut dire qu’il
se sent être persécuté par des objets identifiés ou non de son entourage. On
le voit dans la mimétique avec l’objet. Il peut chercher de la fusion avec
l’objet ou il se colle physiquement à l’autre. Dans ce moment de collage, il
traite l’autre comme une chose ou comme le prolongement de soi.
En fait, lors de l’investigation de la relation d’objet, le thérapeute doit
être attentif aux éventuels changements émotionnels, comportementaux,
relationnels et communicationnels qui peuvent survenir en cours d’entre-
tien. Il note des éventuels changements en fonction des thèmes abordés.
L’outil de transfert et de contre-transfert ou l’outil de résonance utilisé par
les systémiciens a tout son intérêt dans les échanges patient-thérapeute et
vice versa. « Ainsi a-t-on été conduit à élargir la sémiologie aux attitudes et
traits de caractère, mais aussi aux modes de relation avec autrui et avec le
clinicien. » (Brusset, 1999) Le thérapeute se demande le long de son évalua-
tion : quelle est la représentation d’objet du patient ? S’agit-il d’une relation
d’objet complet, clivé, etc. ?
Répétons que le thérapeute décrit ou qualifie sémiologiquement ce que
lui fait ressentir le patient lors des entretiens.

Objet anaclitique
La relation d’objet du type anaclitique amène le patient à ne rien faire sans
l’appui ou le soutien d’un ami, de ses parents ou du thérapeute. Il est très
dépendant de l’objet ou de l’autre (parents, adultes, pairs, amoureux, etc.).
Dans la relation d’objet anaclitique, on retrouve les patients qui sont très
accrochés à l’objet. Ils font tout pour détruire cette relation dès qu’ils se
sentent très proches de l’objet afin de se positionner en victimes. Cette
situation les pousse à rechercher un lien avec un nouvel objet.
Le fait d’avoir des parents atteints de troubles psychiques (bipolaires,
alcooliques, pervers, dépendants aux drogues ou à d’autres toxiques, etc.)
expose au risque de parentification. Ces enfants courent le risque de se met-
tre en relation essentiellement avec des gens qui vont mal psychiquement
(les personnes sans-abri, sans domicile fixe, les personnes dépendantes aux
substances, les pervers narcissiques, etc.) afin de se rendre utiles. Ils ont
besoin de rester en lien avec les gens pour qu’ils soient indispensables et
utiles afin de garder la relation.
Dans la relation d’objet anaclitique, à défaut de pouvoir intéresser l’autre
par des aspects positifs (bons résultats scolaires, performances sportives,
musicales, artistiques, partage de sentiment, de plaisir, etc.), le patient
développe le narcissisme négatif. Ces individus s’orientent souvent dans

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140 Status clinique pédopsychiatrique

des métiers d’aide à l’autre. Par exemple, ils sont intéressés pour travailler
au sein des établissements médicosociaux. D’autres choisissent le métier
d’éducateur ou de travailler en crèche ou dans d’autres établissements de la
petite enfance. D’autres encore deviennent maîtres d’école, psychologues,
infirmiers ou médecins, voire travailleurs sociaux, etc.

Remarque
La relation d’objets idéalisée, anaclitique, indifférenciée et narcissique est clas-
sée dans les pathologies narcissiques-identitaires qu’a développées Roussillon.

Objet calmant
L’objet calmant est celui qui procure de la quiétude ou de l’apaisement au
patient. Il peut également lui procurer de la sécurité. Il faut retrouver ou
aider le patient à introjecter ou « garder dans soi » une pensée calmante
à laquelle il peut avoir recours sans aller vers les objets externes, l’aider
à développer ses propres ressources internes pour ne plus dépendre d’un
objet externe face à ses difficultés internes. Cette notion d’objet calmant
se rapproche de l’objet transitionnel de Winnicott. Selon Blondel, cet objet
transitionnel est un préalable à l’internalisation de l’objet, la mère.
Par exemple, un patient dit qu’il peut rester des heures et des heures
devant la fenêtre à contempler la pluie ou la neige qui tombe car il se sent à
ce moment-là apaisé. Un autre recourt à un objet contre le stress.

Objet clivé
Dans la relation d’objet de type clivé, le patient a du mal à voir les deux
faces du même objet. Soit il voit le mauvais côté, soit le bon. Il s’agit d’une
relation d’objet partiel. Le patient n’a pas accès à la totalité de l’objet. Chez
le bébé, il perçoit le sein tour à tour comme bon ou mauvais selon qu’il
satisfait ou frustre son désir. L’objet est clivé, par l’activité fantasmatique du
sujet en un bon objet et un mauvais objet.
Cliniquement, le patient scinde sans se rendre compte les gens en deux
catégories : les méchants et les gentils.
• Les équipes d’adultes ou de pairs ont deux types de rapports opposés à
l’égard du patient. Certains le trouvent très sympathique, cohérent, gentil,
doux, etc., alors que les autres vivent un calvaire avec lui.
• L’objet clivé peut être constaté en différentes circonstances, par exemple
lorsque le patient est hospitalisé, scolarisé ou dans un groupe, qu’il soit
thérapeutique, familial, dans un camp de vacances, etc. Ce mouvement de
clivage peut être vécu de la même façon par le patient vis-à-vis de l’équipe,
du groupe ou de son entourage social.

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Relation d’objet 141

Objet différencié
Le patient conçoit l’autre comme différent de lui-même. Dans le trouble
du spectre de l’autisme par exemple, le patient considère l’autre comme le
prolongement de lui-même, se trouve dans l’indifférenciation du soi et de
l’objet. L’objet différencié entraîne l’individu à avoir une bonne conscience
de soi et de l’autre. Il a les bonnes capacités d’introspection. Il parle spon-
tanément et clairement des relations qu’il a avec ses parents, ses amis, etc.

Objet fétichisé
Ce mode de relation d’objet est plus retrouvé chez les patients adultes.
L’objet fétichisé se repère chez les adolescents qui ont la dépendance aux
jeux vidéo, à d’autres jeux ou à l’ordinateur et qui les fétichisent. Cet objet
fétichisé ou fétiche est « un objet permettant de maintenir le déni du
manque, ici, de la mère » (Blondel, 2004) Il est important de garder à l’esprit
qu’un objet fétiche ne favorise pas une internalisation de l’objet, il l’entrave
plutôt et se substitue à lui.

Objet idéalisé
Le patient trouve que l’autre ou l’objet idéalisé est le meilleur de tous. Dans
la relation d’objet idéalisé, le patient peut dire qu’il est impressionné par
son thérapeute. Le thérapeute devient le plus beau, le plus intelligent ou
l’idéal non rencontré auparavant. Quand le thérapeute est l’objet idéalisé,
il y a un risque d’une dévalorisation entraînant par la suite une coupure du
lien thérapeutique. Le clinicien doit faire attention à ne pas se laisser piéger
par sa propre tendance à la mégalomanie à cause de l’hypervalorisation de
ses patients.

Objet indifférencié
Contrairement à la relation d’objet différencié, la relation d’objet indif-
férencié amène le patient à considérer ou à entretenir le même type de
rapport avec toutes les personnes de son entourage, qu’il s’agisse des amis,
des camarades de classe, des adultes, de l’enseignant, de l’éducateur, du
thérapeute ou du M. X du coin de la rue. Dans cette relation d’objet, tous les
objets de l’entourage du patient sont pris au même niveau et avec le même
type de rapports. Ces objets indifférenciés ont un même degré d’impor-
tance pour le patient.
La relation d’objet indifférencié est un véritable magma d’amis non diffé-
renciés. À l’opposé, le patient dit que seule sa mère le comprend, les autres
n’y arrivent pas. Aussi, les adolescents qui présentent le double narcis-
sique se disent être exactement pareils. C’est un signe d’indifférenciation.
Le patient dit exister à travers son thérapeute.

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142 Status clinique pédopsychiatrique

Enfin, dans ce type de relation, l’autre forme un corps unifié avec le


patient. Ces individus sont ceux qui disent qu’ils se comprennent sans dire
un mot. L’autre peut être pris comme son double. Le patient est constam-
ment en connexion avec l’objet. Il nous paraît important de bien examiner
les fonctions du moi, de vérifier si le patient n’est pas délirant et qu’il ne
s’agit tout simplement d’une relation d’objet indifférencié.

Objet narcissique
Il s’agit d’une relation où le patient vit une relation d’objet plus ou moins
indifférenciée. Il y a une proximité théorique entre l’objet narcissique et
l’objet indifférencié. On observe dans la relation d’objet narcissique des
patients vantards, qui aiment rationaliser ou « embobiner » l’autre. Ils
racontent des balivernes au thérapeute pour éviter qu’il pose des questions
centrées sur leur noyau de souffrance.
Dans ses travaux sur le trouble narcissique identitaire, Roussillon (2011)
écrit que « dans les états de souffrances narcissiques-identitaires, le sujet
reste pris dans l’illusion première. Il cherche à se penser en fonction de
lui-même, uniquement. C’est là son impasse : il “oublie” qu’il ne s’est pas
autoengendré, pas plus dans son être de chair que dans sa psyché […] dans
l’objet narcissique, le patient investit l’objet comme “double homosexuel”
de soi, l’objet présent dans cette fonction de reflet de soi, est investi et
“aimé”. L’objet absent, c’est-à-dire l’objet s’absentant de cette fonction,
l’objet devenant autre, non présent comme “double” de soi, l’objet non
“narcissique”, sera haï pour son absence, pour le manque qu’il creuse. Le
manque prend la place de l’illusion négative, le conflit d’ambivalence peut
commencer à s’organiser. L’objet est aimé pour sa présence, haï pour son
absence, c’est-à-dire sa “présence” ailleurs, son ouverture au tiers. »

Objet partiel
La relation d’objet partiel est l’opposé de celle dite d’objet total. Typique-
ment, le patient n’a pas de confident malgré un nombre élevé d’amis. Il
reste indifférent vis-à-vis de l’autre quel qu’il soit. Il ne voit qu’une partie
du fonctionnement de l’objet.
Les personnes qui souffrent de troubles psychotiques perdent la capacité
de percevoir l’autre en sa totalité. Par exemple, le patient dit que l’autre est
un « gros bras », il est donc capable de faire tout ce qu’il peut lui deman-
der. La relation d’objet partiel est rencontrée dans le trouble du spectre de
l’autisme où des patients prennent la main de l’adulte ou ont besoin de
l’adulte pour exécuter une tâche à leur place.
Sur le plan psychodynamique et dans leur rapport à l’autre, ces patients
ne peuvent que voir les aspects bons, méchants, les perfections, les insuf-
fisances, l’amour, la haine, le conflit, etc. Pour le formuler autrement, le

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Relation d’objet 143

patient peut dire ou considérer l’autre ou la personne en face comme étant


la gentillesse et rien d’autre, contrairement à ce qui se passe dans la relation
d’objet narcissique, où le patient dit, par exemple, que c’est lui le gentil et
non l’autre.
L’objet partiel n’est présent que pour satisfaire les pulsions et les besoins
du patient. Celui-ci pense que le thérapeute est là pour son plaisir à lui. Le
patient développe une relation avec l’autre mais sans réciprocité. En évitant
de répondre aux sollicitations de l’autre, il peut dire au thérapeute : « Est-
ce qu’on peut jouer ? » Ce type de relation renvoie à la phase ou position
schizoparanoïde décrite par Mélanie Klein en 1946. Il s’agit de patients qui
ne voient qu’une partie de l’objet. Les partages ou échanges se font dans un
seul sens. L’objet doit être au service du patient et non le contraire.

Objet sadisé
Cette relation d’objet sadisé est retrouvée chez le patient qui trouve des
manigances pour contrôler son thérapeute ou son objet. Il tient son thé-
rapeute sous son emprise. Le thérapeute se sent ou se retrouve dans une
relation contrôlée par le patient. Par exemple, certains patients veulent à
tout prix décider quand c’est le début ou la fin d’une séance. D’autres se
réjouissent en mettant leur thérapeute dans des situations pénibles. On a
l’impression que ces patients sont dans une toute-puissance et que le théra-
peute ou l’objet devrait se soumettre à leurs désirs.

Objet soumis
La relation d’objet soumis est constatée chez le patient qui se soumet litté-
ralement au désir ou au bon vouloir de l’objet. Dans la rencontre clinique,
le patient attend que le thérapeute lui pose des questions. Il reste attentif et
garde le lien avec son thérapeute. Le patient répond de manière adéquate
aux questions. On essaie de voir s’il se soumet de manière adéquate ou non.
On peut voir si le patient respecte la différence de génération ou pas. Ces
patients sont très polis, très soumis et ne s’opposent à rien. Ils sont prêts à
accomplir le désir de l’autre. Il est intéressant de faire un lien avec le type
de leur surmoi.

Objet total
Dans la relation d’objet total, le patient investit l’autre dans tous ses divers
aspects et caractéristiques. Il accepte le « bon » et le « mauvais » côté de
l’objet. Il s’inscrit dans des échanges réciproques avec l’objet. Après être
contenu, rassuré et satisfait dans ses besoins, le patient peut sourire et
partager les affects de plaisir après les moments d’angoisse. Il a accédé à la
phase ou à la position dépressive décrite par Mélanie Klein en 1940. Ainsi,
le patient peut devenir une référence à un tiers dans son jeu ou l’histoire

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144 Status clinique pédopsychiatrique

qu’il raconte. On le voit jouer au papa, à la maman et aux enfants, etc.


Les patients qui développent une relation d’objet total sont plus spontanés
dans leur jeu symbolique. Ils n’ont pas de peine à se diversifier ou s’enrichir.
Cette relation d’objet total est conçue comme ayant diverses caractéris-
tiques : bonne, mauvaise, méchante, gentille, disponible, occupée, présente
ou absente, etc. Le patient peut s’identifier à la fonction réflexive du théra-
peute (il se met à réfléchir ou à critiquer ses gestes, actes, pensées et affects
en présence ou en l’absence du thérapeute). Dans ce type de relation, le
patient prend en compte des qualités de l’objet, et accepte par exemple de
partager les joies, les douleurs avec l’autre.

Exploration de la relation d’objet


Elle est capitale, essentielle et nécessaire à faire dans un entretien clinique. Il
est important de noter si le patient évoque, aborde ou parle spontanément
de ses différentes relations dans son cercle social, scolaire, professionnel
ou familial. Certains patients ont du mal ou n’arrivent pas à parler d’une
personne de leur entourage, peut-être parce qu’ils sont timides, inhibés, ont
des mauvais souvenirs avec cette personne qu’ils souhaitent oublier…
À l’aide des différentes questions, le thérapeute essaie de comprendre
le type de relation d’objet que le patient développe dans son entourage y
compris avec lui.
• « Comment sont tes parents ? », « Peux-tu me décrire ton papa ou ta
maman ? » ou « Quel genre de maman as-tu ? », « Qu’aimes-tu faire avec ton
papa, ta maman, tes cousins, tes oncles et tantes, en famille ? », « Qu’est-ce
que tu apprécies beaucoup chez ta mère ou chez ton meilleur ami ? », etc.
• « As-tu des frères et des sœurs, ils sont combien ? », « Sont-ils plus âgés ou
plus jeunes que toi ? », « Comment t’entends-tu avec eux ? », « Qu’aimes-
tu faire avec eux ? », « Vous arrive-t-il parfois de vous bagarrer, à propos de
quoi ? », « Es-tu satisfait de la place que tu occupes dans ta famille ou dans
ta fratrie ? », « Pourquoi es-tu satisfait ? Si non, quelle place aimerais-tu
occuper et pourquoi ? », etc.
• « Quand tu seras grand, où imagines-tu vivre ? », « Imagines-tu vivre
loin ou près d’ici ? », « Si loin, est-ce que tu vas garder un lien avec tes
parents ? », « Comment penses-tu faire pour voir ta famille ? », etc.
• « As-tu des amis ? », « Comment s’appellent-ils ? », « Sont-ils des amis qui
sont dans ta classe à l’école, au parascolaire, ou dans ton quartier ? », « Es-tu
plutôt du genre à avoir beaucoup d’amis et être copain avec tout le monde
ou plutôt du genre à avoir quelques très bons amis ? », « Trouves-tu que tu
as assez d’amis ? », « Peux-tu me parler de tes amis ? », « Que pensent-ils de
toi ? », « C’est qui le meneur parmi tes amis ? »
• « As-tu un meilleur ami ou un petit ami et que pense-t-il de toi ? », « As-tu
un vrai ami ? », « Cette amitié est-elle réciproque ? », « Qu’est-ce que vous

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Relation d’objet 145

aimez faire ensemble, à quoi vous jouez, de quoi vous parlez ? », « Cela fait
combien de temps que vous êtes amis ? », « Es-tu satisfait de cette amitié ? »,
« As-tu déjà éprouvé des sentiments d’amour envers quelqu’un ? », « As-tu
déjà été amoureux ? », « C’étaient plutôt des filles ou des garçons ? », « Si tu
t’imagines quand tu seras amoureux, tu penses que tu le seras avec une fille,
un garçon ou les deux ? »
• « Aimes-tu les animaux, les oiseaux, etc. ? », « Comment s’appelle ton ani-
mal de compagnie ? », « Qui a pris la décision de l’acheter ? », « Qui a donné
le nom à ton animal de compagnie ? », « Est-ce que tes frères ou tes parents
s’occupent de ton animal de compagnie, si non pourquoi ? », « Peux-tu me
dire pourquoi tu as demandé à avoir cet animal de compagnie ? », « Est-ce
que tu as déjà eu un autre animal de compagnie, pourquoi ? »

Remarque
Il est important que le thérapeute fasse la différence entre l’objet interne et
externe. Cette distinction est d’autant plus intéressante dans le choix du type
de psychothérapie à proposer ou du type de suivi thérapeutique à indiquer
après une évaluation. Par exemple, dans la psychothérapie individuelle, le
thérapeute travaille sur l’objet interne (c’est-à-dire la manière dont le patient
se représente ou a internalisé l’objet réel externe). Lors des thérapies sous
forme de guidances thérapeutiques, le thérapeute focalise ses interventions
sur le narcissisme des parents. Les consultations thérapeutiques permettent
au thérapeute de revenir sur les relations entre parents et enfants. Il travaille
les représentations des objets internes et externes réels ou fantasmés pour
essayer expliquer au patient et à ses parents le fonctionnement psychody-
namique de tous en lien avec la problématique personnelle du patient et la
dynamique familiale.

Bibliographie
Blondel, M.-P. (2004). Objet transitionnel et autres objets d’addiction. Revue française
de psychanalyse, 68(2), 459-467.
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis-
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Brusset, B. (1999). Diagnostic psychiatrique et différence du normal et du patholo-
gique. Encyclopédie Médico-Chirurgicale, Psychiatrie,. article 37-102-E-20.
Ciccone, A. (2001). Enveloppe psychique et fonction contenante : modèles et pra-
tiques. Cahiers de psychologie clinique, 17(2), 81-102.
Laufer, M., & Laufer, M.E. (1989). Adolescence et rupture du développement. Presses
universitaires de France.
Roussillon, R. (2011). Déconstruction du narcissisme primaire. L’Année psychanaly-
tique internationale, 9, 177-193.
Vuaillat, S. (2003). Les relations précoces entre la mère et l’enfant : la théorie de la
relation d’objet selon Fairbairn. Devenir, 15(3), 289-299.

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14 Conception du self,
identifications et soi
Ce chapitre traite les notions de base sur le self, l’identification et le soi du
patient. Après avoir étudié ces éléments, le thérapeute doit être en mesure
de relever les différentes qualités du self du patient. Il peut également déga-
ger les différentes identifications et les rapports à soi que se fait le patient
de sa propre image. Plusieurs auteurs se sont penchés sur la question de la
conception du self et de l’identification.

Self ou conception du self


Généralités
Le self, une notion très importante dans la métapsychologie et dans le
développement de l’individu, a été abordé par plusieurs théoriciens dont
Freud et Mélanie Klein. Par souci de synthèse, nous renvoyons le lecteur
vers cette richesse théorique retrouvée dans plusieurs manuels théoriques
et cliniques.
Dans une tentative de définition, disons que le « self au sens anglais du
terme est une représentation, un concept qui n’existe pas en tant que tel dès
le début de la vie, car l’enfant est encore en état de fusion avec sa mère. »
(Golse, 2015) Que devons-nous savoir de ce concept dit « le self » ? Avant
tout, il est important de rappeler que le « self peut faire partie intégrante
d’une expérience linguistique, sociale, privée, de chaque jour ; il nous ren-
drait perceptible, mieux qu’une définition conceptuelle, l’écart entre le
registre du self et celui de notre soi. » (Angelergues, 1975)
Le self est défini comme étant un sentiment d’existence que le sujet a de
lui-même. Lors de l’exploration clinique du self, le thérapeute explore chez
le patient comment, lui se voit en tant que personne physique et en tant
qu’être psychique englobant les objets internes et les objets externes.
Avant d’aborder la technique d’exploration ou de qualification du self,
rappelons que « le self trouve ses origines dans les expériences de continuité
psychique, de mise en place des capacités de fantasmatisation : la question
est alors celle du repérage des éléments constitutifs, des éléments organisa-
teurs du premier moi dans la dialectique du self et de l’objet. Or, beaucoup
de descriptions du self reprennent sur le plan narcissique ce qu’il en est de
la description de l’objet dans la dimension du “monde objectal”. Les repré-
sentations du self sont comparables dans leur destin intrapsychique aux
représentations d’objet sur les plans inconscient, préconscient, conscient,

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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148 Status clinique pédopsychiatrique

corporel ou mental. Mais le soi existe avant la création du monde objectal. »


(Brusset, 2007)
Ferenczi et Winnicott ont travaillé cette question du self à la lumière de
la clinique du traumatisme. « Winnicott remarque que l’individu se trouve
paradoxalement en situation de dépendance réelle vis-à-vis de l’environne-
ment défaillant. En effet, malgré l’hypermaturation intellectuelle qui sup-
plée aux carences, il a besoin de la répétition des empiétements pour se
sentir tant soit peu exister. C’est ce que notait déjà Ferenczi : la volonté
étrangère étant devenue le squelette de la personnalité de l’enfant, celui-ci
vit le retrait de l’agresseur comme un séisme qui ébranle son être. L’enfant
n’a donc pas accès à la capacité d’être seul, ni en présence de l’autre, ni sans
l’autre puisqu’il ne peut atteindre l’état de détente ou de non-intégration
nécessaire à cette aptitude. » (De Parseval, 2007)
Le self est très investi sur le plan libidinal et donc indissociable du narcis-
sisme. Le thérapeute essaie de trouver quelle est la représentation du soi du
patient. Cette image de soi peut donc être plus ou moins positive, négative,
cohérente, intégrée, dissociée, dévalorisée, grandiose, toute-puissante, fluc-
tuante, discontinue, clivée, etc. En fait, « le self est donc le moi maturé,
mature ; il se constitue au-delà des cinq premiers mois. » (Golse, 2015)
La notion du self est intimement liée à celle de la relation d’objet et de
l’idéal du moi ou du moi idéal. Certains patients s’hyperadaptent à l’envi-
ronnement avec comme conséquence la construction d’un faux self. Ainsi,
le faux self est le résultat ou la conséquence des empiétements… de l’envi-
ronnement qui pousse le patient à le construire afin de s’adapter et vivre
mieux. En d’autres termes, « le “faux self” provient du fait que la mère
au stade primitif de non-intégration primaire n’est pas capable de rendre
effective l’omnipotence du nourrisson et qu’elle lui fait tout le temps défaut
au lieu de répondre à son geste. » (Golse, 2015)
Par exemple, un bébé qui sent la faim se tord le ventre, pleure, le dit à
sa mère avec ses manières à lui, mais si la mère ne lui apporte pas la nour-
riture, ici le sein, ce type d’expérience répétée risque d’amener le patient
à se construire ou à développer un faux self. Cet enfant cherche alors à
s’adapter au besoin de son environnement qui peut consister en une attente
longue, une absence de réponse ou une réponse décalée et inadaptée à la
demande. Contrairement à cette expérience, si le sein est présent quand
le bébé a faim, celui-ci développe un vrai self. C’est ce que certains ont
nommé l’expérience du « trouvé-créé ». Cette expérience correspond à la
rencontre entre le désir et la réponse de l’environnement.
Nous avons tous une part du vrai et du faux self intégré dans notre fonc-
tionnement psychique. La question est de savoir si l’une ne prend pas trop
de place ou n’est pas très écrasante au risque de perturber le fonctionnement
du patient. Quand le thérapeute constate que le faux self est très prononcé,
il doit se donner la peine de rechercher où est le vrai self du patient.

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Conception du self, identifications et soi 149

Il arrive souvent que ce vrai self se retrouve à travers les fissures structu-
relles du patient. À partir des jeux symboliques, par des épisodes narratifs, à
l’aide des explications que le patient donne à sa propre histoire de vie, celui-
ci peut laisser la porte ouverte afin que l’autre identifie le vrai et le faux self.
Comme avant-goût de l’exploration du self, le thérapeute se demande
à quel degré le patient fait la différence entre la représentation de soi et
la représentation de l’objet. Est-ce qu’il se différencie du reste du monde ?
Comment parle-t-il des autres ? Le patient reste-t-il collé ou fusionné à
l’objet ?
Nous pouvons noter comme réponses :
• une confusion ou indistinction de la représentation soi-objet ;
• un patient a des difficultés dans le processus de séparation-individuation ;
• un self bien intégré et différencié de l’objet ;
• un patient qui présente ou non un manque de sentiment de continuité
du self.
Un psychanalyste américain d’origine allemande du nom d’Erik Erikson
(1902-1994) a développé une classification des stades de développement
d’individu. Nous trouvons intéressant de la parcourir dans la suite. Erikson
dit qu’après 6 ans, on peut déjà commencer à observer un self en consti-
tution. Cette classification revisitée par Muray & Michel (1994) dans leurs
travaux propose les cinq catégories suivantes.

Première crise : confiance versus méfiance fondamentale


(0-18 mois)
Pour Erikson, la bouche est le moyen par lequel le patient établit un contact
avec le monde. La confiance est une condition ultime lui permettant de
s’ouvrir au monde et de recevoir ce qu’on lui donne par la bouche. Le
L’implication et la disponibilité de l’adulte qui s’occupe du bébé est ultra-
nécessaire pour que ce dernier acquière une confiance de base. Il en découle
que le patient qui a suffisamment confiance en sa figure d’attachement peut
sans faille se permettre d’explorer le monde avec confiance. Autrement dit,
un degré de méfiance est requis chez le bébé afin que l’adulte lui assure la
protection. Ce stade correspond au stade oral de Freud.

Deuxième crise : autonomie versus honte et doute


(18 mois – 3 ans)
À ce stade, l’enjeu du développement est de savoir si l’enfant va pouvoir
devenir une personne autonome ou non. Erikson dit que cette première
volonté d’être soi-même devient un prérequis du sentiment de libre arbitre.
Cette période est en adéquation avec le moment où l’enfant expérimente et
joue avec son autonomie. Il se rend compte qu’il est susceptible de provo-
quer la désapprobation du contexte social, donc celle de ses parents, dans
un premier temps. Cependant si l’équilibre est trop du côté du doute ou de

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150 Status clinique pédopsychiatrique

la honte, le patient hérite d’un sentiment de ne pas être assez bon. Comme
pour les autres stades de développement, l’équilibre est ici aussi souhai-
table. Ce stade coïncide avec le stade anal chez Freud.

Troisième crise : initiative versus culpabilité (3-6 ans)


À ce stade, le patient cherche à définir ses ambitions et les rôles qu’il sou-
haite assumer dans la société. L’enjeu de ce stade serait de pouvoir pour-
suivre des objectifs valables sans se laisser inhiber par la culpabilité et la
crainte paralysante de la punition. L’enfant doit avoir la capacité d’oser
entreprendre ou d’avoir des initiatives, qui constitue la base de la curiosité
et de l’ambition. S’il éprouve de la peur de la punition, il souffrira du sen-
timent de culpabilité, d’où l’importance d’avoir une stabilité. Cette phase
coïncide avec le stade phallique de Freud.

Quatrième crise : travail versus infériorité (6-12 ans)


Cet âge coïncide au stade de latence de Freud. Le patient a la volonté
d’atteindre un but « socioprofessionnel ». Tout se focalise sur les résultats
scolaires. Le patient n’est plus dans le jeu, mais plus dans le travail d’école.
Il cherche à occuper la place d’individu que lui confère son entourage. Les
compétences cognitives et intellectuelles continuent à s’acquérir et à se
développer. La période de latence ne signifie pas que tout est au ralenti ou
que le développement de l’individu s’arrête. Bien au contraire, la personne
continue de croître et s’approche doucement mais sûrement de l’étape sui-
vante. Cette période lui permet d’intégrer les valeurs morales, culturelles, et
exécute s’il le faut des tâches complexes et multiples. Pour certains patients,
c’est le début des changements identitaires et morphologiques. C’est une
période très importante pour solidifier sa personnalité.

Cinquième crise : identité versus confusion ou diffusion


des rôles (12-20 ans)
Ce stade correspond à la fourchette dite d’adolescent. Le patient se préoc-
cupe de son image dans le groupe de pairs. Il doit s’autonomiser de ses
parents tout en ayant encore besoin d’eux, son narcissisme est donc blessé.
Il doit négocier la séparation-individualisation avec ses parents tout en cher-
chant à être accepté ou admis par ses pairs. Tout n’est pas encore fin prêt
pour qu’il décolle dans sa vie (nous pouvons citer la dépendance financière,
l’inexpérience de la vie, la formation scolaire ou professionnelle à terminer,
etc.) malgré ses changements physiques très patents. Le patient a un ego
surdimensionné qui accroît la confiance en soi et en un avenir prometteur.
Le sens de l’identité sexuelle se développe également vers la fin de l’adoles-
cence. Cette phase correspond au stade de l’adolescence de Freud.
Plus exactement, la construction de l’identité du patient se fait au fil des
années. L’expérience clinique souligne que « certaines interactions fami-
liales peuvent engendrer de grandes difficultés de construction psychique

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Conception du self, identifications et soi 151

pour un jeune en développement, sans pour autant être considérées comme


de la maltraitance, et donc sans être proscrites. Par exemple, la commu-
nication paradoxale qui consiste à donner des messages contradictoires
à son enfant peut, selon son intensité, être source d’une désorganisation
comportementale. C’est également le cas des exigences parentales déme-
surées par rapport aux capacités de l’enfant, ou encore des menaces sui-
cidaires faites par les parents. » (Robin, 2019) Cela dit, le thérapeute doit
garder en arrière-plan certaines questions du style : comment est-ce que les
parents, les autres adultes ou intervenants accompagnent le patient dans
sa construction identitaire ? Comment le patient arrive-t-il à faire le tri de
toutes les informations qu’il reçoit de la part de l’autre ? Le thérapeute se
retrouve-t-il devant un patient qui présente un faux self ou un vrai self ?
Pour le dire autrement, « le travail de compréhension inclut les relations
immédiates de l’adolescent : le lien aux parents, à la fratrie, à la famille
élargie, aux professeurs, aux amis, aux petits amis, aux éducateurs, etc. »
(Robin, 2019) À l’adolescence, tout s’imbrique et tout est en connexion.
L’adolescent n’est pas un individu isolé. Pour reprendre Winnicott, un
enfant seul n’existe pas.

Différentes sortes ou qualités du self


Le self peut avoir plusieurs qualités différentes selon la qualité des réponses
que reçoit le patient de son environnement sociofamilial à ses demandes. La
qualité dépend également des capacités propres du sujet à pouvoir s’adapter
à cet environnement qui peut lui paraître hostile ou bienveillant.

Self grandiose
Celui-ci est retrouvé chez un patient qui a le sentiment d’avoir des pou-
voirs et la supériorité sur le reste de son entourage. Il est tout-puissant et
mégalomaniaque. Il se voit capable de démonter, de détruire ou de mettre
en échec tout le monde sans que personne ne l’arrête. Il a un self tout-puis-
sant et est prêt à démolir, à corriger tout le monde. Il se passe des règles
établies dans la société. Il peut s’agir d’un « enfant roi ». Certains patients
essaient d’écraser l’objet à travers leurs actions, dans leurs propos, à chaque
occasion. Il est nécessaire de chercher le surmoi du patient et voir comment
il se comporte devant l’émergence de l’angoisse ou d’autres difficultés de
sa vie courante.

Self dévalorisé
Ce type de self donne un sentiment d’infériorité et d’insécurité. Le patient a
le sentiment d’incomplétude. Il juge que les autres sont meilleurs que lui. Il
se trouve nul et incapable. Sa place est derrière les autres. Le patient qui a un
self dévalorisé n’ose pas entreprendre un projet ou n’arrive pas à proposer
une activité à ses pairs. Il craint peut-être le rejet des autres ou d’être le sujet

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152 Status clinique pédopsychiatrique

de moqueries des autres. Ces patients qui ont un self dévalorisé sont encore
plus fragilisés dès qu’ils souffriront de dépression, etc.
Self vulnérable
On parle du self vulnérable quand le patient ressent continuellement
un besoin de protection. Il a constamment un sentiment d’insécurité. Il
manque d’estime de lui-même. Il n’arrive pas à se faire confiance ou à trou-
ver des solutions dans des situations conflictuelles.
Faux self
Le patient essaie de se conformer à son environnement social. Il montre
le contraire de son monde interne. Il fait semblant d’être celui que l’autre
aimerait voir ou rencontrer. Le faux self amène le patient à se tourner vers
les besoins de l’autre et s’oublie soi-même. Dans un but de plaire, de séduire
ou se dérober face à l’objet, il pose des actes, donne des réponses, s’active,
etc. Ce type de patient est hyperadapté aux exigences de l’environnement.
Il peut devenir très gentil, très serviable, très poli ou alors l’inverse.
Self mal défini
Il s’agit d’un self qui est sans cesse fluctuant. Le thérapeute peut noter dif-
férentes qualités de ce self : abandonnique, peu incarné, constitué ou non,
tout-puissant et instable chez le patient borderline, bipolaire, hyperactif
(trouble de déficit d’attention et hyperactivité), etc.
Le thérapeute a du mal à cerner le patient. Il a l’impression que celui-ci
passe entre les mailles du filet. Le patient se dérobe continuellement bien
que le thérapeute essaie de cerner sa personnalité.
La conception du self met plus en lien le moi, le test de la réalité, le
surmoi, l’idéal du moi et les représentations parentales de la personne. Par
exemple, pour un patient qui est dans une école spécialisée (c’est-à-dire
un cursus scolaire adapté aux difficultés cognitivo-comportementales et
intellectuelles des élèves) et qui se dit vouloir devenir chirurgien plus tard,
le thérapeute cherche la qualité de son test de la réalité, le pourquoi et
comment est l’image de soi.
Les représentations parentales doivent être recherchées au cours de l’exa-
men du self. Le patient brillant à l’école peut avoir une image faible de soi,
une basse estime de soi avec un surmoi très critique s’il a un parent qui
n’arrête pas de le rabaisser ou de lui renvoyer une image négative, de décep-
tion, d’échec, etc. Il en est de même s’il a un parent toujours insatisfait, qui
demande toujours mieux et plus, ou un parent idéalisé, indépassable, etc.

Exploration du self
L’écoute fine du thérapeute lui permet de relever certaines couleurs du self
du patient. Pour compléter ses impressions cliniques, il peut poser diverses
questions telles que : « Si je ne te connaissais pas et si tu devais me parler de

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Conception du self, identifications et soi 153

toi, comment te décrirais-tu ? », « Comment te vois-tu ? », « Qu’est-ce que


tu apprécies chez toi ? », « À quoi te compares-tu ? », « As-tu des amis ? »,
« Pourquoi as-tu autant, peu ou pas d’amis ? », « Qu’est-ce qui fait que tout
le monde est ami avec toi ? »
Le thérapeute cherche à savoir comment le patient peut parler des autres,
ou comment ces derniers parlent de lui, comment il se décrit lui-même,
comment ses parents, éducateurs ou ses pairs le décrivent. Le thérapeute
demande à l’entourage de le décrire. Rappelons que l’anamnèse person-
nelle rapporte des informations très constructives sur la nature et la qualité
du self.
Le self peut s’observer à travers le dessin. Le thérapeute constate comment
le patient se dessine ou dessine ses représentations d’objets. Le thérapeute
décrit quelle attitude prend le patient : enfantine ou adulte, masculine ou
féminine ? Comment se représente-t-il ou comment se considère-t-il ? Se
dessine-t-il comme quelqu’un de fort, faible, bon, mauvais, grand, petit,
beau ou laid ?
Le self s’observe également dans le jeu symbolique. Comment le patient
amorce-t-il son jeu ? Quel rôle s’attribue-t-il dans le jeu ? Comment réa-
git-il aux différentes règles, au changement de règles qu’impose l’autre ?
S’autorise-t-il à jouer ? S’autorise-t-il à s’amuser avec ses pairs à l’école ou à
la maison ?
Quelles sont ses conduites et la qualité de ses contacts, son réseau social
primaire et secondaire ? Participe-t-il aux diverses activités sociales et
communautaires ? Est-il désorganisé, apathique, agressif, responsable, etc. ?
Le patient consomme-t-il des substances (le cas échéant, pourquoi ou
dans quel but ou quel effet cherche-t-il ?). A-t-il des antécédents de ten-
tative de suicide, scarification, gestes hétéroagressifs, etc. ? Quels sont les
effets de l’adolescence sur la constitution et le développement de son self ?

Identifications
Généralités
L’identification a un lien étroit avec le type et la qualité de relation d’objet,
l’idéal du moi, le moi idéal et le surmoi du patient. Tous les items d’éva-
luation pédopsychiatrique sont imbriqués. L’entretien a pour objectif de
mettre en lien toutes ces données ou toutes les informations recueillies. Il
est important de souligner ou de faire la différence entre ce qui vient du
patient, de l’extérieur ou de l’autre, et ce qui appartient au thérapeute.
Par exemple, est-ce que le patient accepte que ce qui vient de l’autre ren-
tre en lui comme les odeurs, le reniflement, le gargouillement de l’estomac
des parents ou des pairs, etc. ? Ces informations permettent de distinguer
les éléments qui appartiennent à l’identification et la différenciation.

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154 Status clinique pédopsychiatrique

Le concept d’identification renvoie à la notion de la bisexualité psychique


de tout individu. Cette bisexualité psychique du patient aide à savoir s’il
est capable de laisser montrer la partie féminine ou masculine enfouie
en lui. Que nous soyons tous au clair avec cette notion de la bisexualité
psychique : celle-ci est une notion ou un concept totalement différent de
la bisexualité génitale des adultes. Il n’est pas question de confondre ce
concept de l’orientation sexuelle que nous retrouvons dans l’activité géni-
tale sexuelle des adultes.
Les identifications se font avec la relation d’objet et se constatent dans
le transfert. Tout au long de l’évaluation, le thérapeute se demande quels
sont les identifications et les investissements des objets que présente le
patient. L’identification porte sur l’apparence tandis que les imagos paren-
tales portent sur l’intérieur ou sur les représentations des parents que se
fait le patient. On recherche ses imagos parentales par diverses questions
proposées chapitre 19.
L’exploration des identifications du patient consiste aussi à chercher les
attentes du patient face à l’avenir. Quelle est sa capacité d’avoir un projet
qui correspondrait à une intériorisation des attentes ? On peut noter des
discordances entre attentes personnelles et les attentes des parents (le cas
échéant, on cherche la signification de ces discordances). L’important est
de mettre en lien ses projets avec le degré d’adéquation à la réalité. Mais il
s’agit surtout de comprendre à quel modèle parental il s’identifie (son père,
sa mère, son oncle, sa tante, un autre adulte, etc.) mais aussi à quel rôle
(victime, malade, sauveur, etc.).
C’est aussi à partir de l’habillement du patient que l’on objective ses iden-
tifications. Est-il habillé comme les jeunes de son âge, de sa génération, le
style en vogue dans la ville ? Les tatouages peuvent donner une apparence
des personnes se traitant à la dure extérieurement, mais qu’en est-il à l’inté-
rieur ? Par exemple, si l’on voit deux personnes (mère et fille), on essaie de
savoir qui se réfère à l’autre dans l’apparence, l’attitude et l’habillement. Le
patient se présente-t-il en affichant de manière flagrante son homosexualité
ou son hétérosexualité (s’agit-il d’un flou entre les deux ?). Il faut se méfier
du cliché qu’un accoutrement ou une apparence du patient peut induire
chez le thérapeute et éviter tout jugement de valeur.
Ces identifications peuvent être préférentiellement masculines ou fémi-
nines. Le thérapeute observe le choix des jeux, les couleurs, il décrit l’appa-
rence physique du patient et son métier à venir, à la vie d’adulte qu’il pense,
etc. Le patient peut avoir des identifications à l’agresseur, à la victime, à la
toute-puissance, etc. Il peut aussi avoir une identification aux objets mélan-
coliques ou à un objet détruit.
L’accoutrement vestimentaire ou l’apparence du patient peuvent mettre
le thérapeute sur une piste particulière. Il est très nécessaire de se souve-
nir que la mode et la culture ou le contexte socioculturel influencent
considérablement les habitudes vestimentaires, les apparences et les
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Conception du self, identifications et soi 155

identifications des individus. Ainsi, le thérapeute devrait faire la part des


choses entre ce qui apparaît comme une volonté de faire partie d’un groupe
spécifique et ce qui affirme une appartenance sociale. L’identification va
plus loin que l’habillement extérieur.
En revenant sur la technique d’investigation, le thérapeute se demande :
• « Est-ce que mon patient est parentifié ou non ? », « Est-ce qu’il a intégré
la différence des générations ? »
• « Est-ce que mon patient cherche à ressembler à ses parents ou aux
groupes des pairs (par son style vestimentaire, le tatouage, la manière de
parler et le vocabulaire, etc.) ? »
• « Est-ce que mon patient investit son habillement, son sexe, son âge et
son propre corps ? »
• « Est-ce que mon patient utilise le “je” en parlant de lui-même ? »
(Le « je », souligne la différence entre l’autre et moi. Il donne un aperçu sur
la qualité du self de l’individu.)
Rappelons que le complexe d’Œdipe se rejoue à l’adolescence. Qu’il
s’agisse du pôle positif ou négatif du complexe d’Œdipe qu’avait le patient
à l’âge de 4 ou 6 ans, il sera revisité ou rejoué à l’adolescence. Cette redis-
tribution des cartes ramène la question des pôles de l’œdipe à cet âge. Alors
« qu’il s’agisse donc du corps, de l’espace, du temps, de la causalité, de la
gestion de l’anxiété, de la construction d’un langage et de formes variées
d’expression symbolique, l’adolescent tente de s’éloigner du monde de ses
origines pour accéder à un nouvel état à la fois marqué par la douleur de
devoir perdre un certain nombre d’acquis antérieurs et la joie de s’ouvrir
vers de nouvelles potentialités. » (Letendre & Marchand, 2010) Parmi les
conséquences de cette redistribution, on trouve chez certains adolescents
une dissolution de leur moi au profit de l’étayage des pairs. Leur surmoi se
dissout lorsque le groupe se dissout.

Exemples
• Un patient qui n’arrive pas à trouver une image surmoïque en famille et se
met à se conformer aux idéaux du groupe des pairs afin de se faire accepter ou
être admis dans leur cercle. Ce patient va poser une série d’actes délictueux.
Les pairs vont l’abandonner et il sera pris en flagrant délit par la police. Souvent,
le patient se rend lui-même au poste de police ou aux forces de l’ordre pendant
ses actions délictueuses sans s’en rendre compte.
• Un patient qui, après avoir volé un scooter, ne respecte pas la signalisation
routière et se retrouve coincé dans un rassemblement encadré par la police.

Cela peut aussi aller dans un sens positif si le patient s’inscrit dans un
groupe de pairs bienveillants. L’identification au groupe de pairs n’est pas
toujours négative. Elle peut apporter une sécurité au patient en lui donnant
un sentiment d’appartenance.

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156 Status clinique pédopsychiatrique

Exploration des identifications


Elle consiste, de manière imagée, à regarder avec le patient dans la même
direction. Techniquement, peu importe le setting que l’on adopte dans nos
entretiens (s’asseoir face à face, en oblique, en perpendiculaire, en demi-
cercle, etc.), nous invitons le thérapeute à regarder dans la même direction
que le patient. Il peut décrire avec lui les différentes attributions identitaires
extérieures qu’il faut progressivement s’approprier. L’identification permet
de faire connaissance avec le patient. Le thérapeute décrit les impressions
que lui a données le patient.
Il lui demande : « As-tu des copains à l’école ? », « Tu t’entends avec les
garçons ou avec les filles ? », « À quel jeu tu aimes jouer à l’école ou à la
récréation ? », « Lequel des jeux préfères-tu ? » ou « Quel est le rôle que
tu aimes jouer dans ce jeu ? », « Pourquoi préfères-tu jouer seulement à ce
jeu ? », « N’existe-t-il pas un autre jeu qui t’intéresse ou auquel les autres
amis jouent ? », « Proposes-tu aux amis de changer de jeu ou de règles
de jeu ? », « Quelle est ta place au sein de ce groupe d’amis de jeu ? »,
« Est-ce que c’est toi le meneur ou tu ne fais que suivre les propositions
des autres ? »
« Combien as-tu d’amis ? », « C’est quoi ton rôle dans ce groupe de
copains ? », « Et tes amis, ça fait combien de temps que vous vous voyez ? »,
« As-tu souvent ou toujours l’impression de vouloir voir tes amis chaque
jour ? », « Éprouves-tu du plaisir à être en leur compagnie ? », « Selon toi,
pourquoi ces amis sont avec toi ? », « Qu’est-ce qu’ils disent ou pensent de
toi ? », « Sont-ils fiers d’être tes amis ? »
« Depuis quand es-tu avec ce meilleur ami ? », « Pourquoi tu n’as pas de
meilleur ami ? », « Qu’est-ce cet ami t’apporte de plus que tes parents ou tes
frères ? », « Pourquoi tu es ami avec lui ? », « Peux-tu me parler de ta petite
amie ou ton amoureuse ? »
« En plus du jeu, quelles sont les choses qui t’intéressent à l’école ? »,
« Pourquoi tu n’aimes pas cette matière ? », « Et les maths, les trouves-tu
importantes pour ton futur ? »
À qui le patient se compare-t-il ? Comment peut-il parler des autres ?
Comment arrive-t-il à décrire sa personnalité ? Comment pense-t-il que les
autres le décrivent ou pour quelles raisons croit-il qu’il arrive ou pas à se
faire des amis ?
Au cours de cette investigation, le clinicien recherche les aspects mater-
nels ou paternels assimilés. Il peut demander : « Duquel de tes deux parents
es-tu proche ou à qui ressembles-tu ? », « Penses-tu que tu vas ressembler
à ton papa ou à ta maman ou que tu seras différent d’eux ? », « Souhaites-
tu être comme ton père ou ta mère une fois devenu adulte ? », « À qui
te compares-tu le plus souvent (identification au père ou à la mère) ? »,
« Qu’as-tu en commun avec ton père et avec ta mère, ou tes amis ? »

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Conception du self, identifications et soi 157

Plus encore, on peut lui demander : « Imagines-tu que tu seras un papa


ou une maman quand tu seras grand ? », « Est-ce que tu veux te marier
plus tard ? », « Le feras-tu avec un homme ou une femme ? », « Peux-tu
me décrire ton partenaire idéal et comment imagines-tu la profession de
ton partenaire ? », « Comment vois-tu ta progéniture : désires-tu avoir des
enfants ? », « De quel sexe sera l’aîné, le cadet ? », « Combien d’enfants
comptes-tu avoir ? », « Quel sera l’écart d’âge entre tes futurs enfants ? »,
« Pourquoi désires-tu avoir des enfants ? »
On essaie de rechercher ses projections futures : « Quelle profession exer-
ceras-tu une fois devenu adulte ? », « À part cela, est-ce qu’il y a un autre
métier qui t’intéresse ? », « Comment es-tu dans ton équipe ? », « Tu joues
à quel poste ? », « Y a-t-il une autre discipline sportive qui t’intéresse ? »,
« Pourquoi veux-tu devenir mécanicien ou menuisier, etc. ? », « Qu’est-ce
que tu as compris de ce métier ? »
En outre, dans l’exploration de l’identification, attirons l’attention du thé-
rapeute afin d’éviter certains commentaires ou propos portant sur l’aspect
physique, l’habillement, le maquillage, les tatouages, les piercings, etc. du
patient, surtout d’un adolescent. En fait, il faut éviter de tomber dans la
séduction ou la sexualisation du lien thérapeute-patient. Les commentaires
d’une apparence ou des efforts du patient qui vont dans le bon sens n’ont
pas lieu d’être mentionnés non plus. On ne sait jamais ce qui est derrière le
changement d’habits ou un maquillage très prononcé. S’agit-il d’un piège
pour le thérapeute ou d’un masque ? Est-ce que le patient l’a fait par plai-
sir, pour répondre à la demande des pairs ou pour faire semblant que tout
va bien ?
Voici les phrases à bannir lors des entretiens : « Tu vois que tu es capable
de prendre soin de toi ! », « Je vois qu’aujourd’hui tu as bien coiffé tes
cheveux ! », « As qui appartient ou à qui as-tu pris ce style vestimentaire ? »
Le thérapeute évalue également la présence ou non des signes suivants.

Confusion des sexes


Le thérapeute essaie de chercher si le patient confond les sexes ou non, s’il
est capable de différencier les rôles des uns et des autres dans son environne­
ment social. Comment se comporte-t-il vis-à-vis à l’autre sexe ? Existe-t-il
une différence des sexes pour lui ? Le cas échéant, comment accueille-t-il la
différence des sexes ?

Identifications autonomes
Ces identifications sont liées à la mère ou au père. Le patient arrive-t-il à
s’autonomiser de ses parents ? Reste-t-il dépendant d’eux ? Peut-il se per-
mettre d’aller plus loin dans ses activités, jeux, formations, voyages, loisirs
sans qu’il en soit empêché par la montée d’angoisse ? Est-ce que les dif-
ficultés de s’autonomiser viennent des parents ou du patient lui-même ?

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158 Status clinique pédopsychiatrique

Pense-t-il que ses parents sont d’accord ou seront satisfaits de le voir s’auto-
nomiser ? Quelles sont les émotions ou les affects qui ressortent dans son
jeu de la famille ?

Identifications idéalisées
Ces identifications sont liées à l’image maternelle ou paternelle. Comment
le patient se comporte vis-à-vis de ses imagos paternelles ou maternelles ?
Est-ce qu’il se sent persécuté, rassuré, incompris, délaissé, contrôlé, déstabi-
lisé, etc. par les imagos parentales internalisées en lui ?

Identifications mélancoliques
Le patient qui a des identifications mélancoliques a des affects de tristesse.
Il est submergé par la mélancolie dans ses identifications. Il a du mal à
se réanimer car il dégage de la mélancolie sans qu’il soit déprimé selon le
DSM-5 ou la CIM-10. Le thérapeute note ces identifications mélancoliques
dans les propos, le jeu, voire les différents échanges affectivo-émotionnels
du patient.

Identifications adhésives
Le patient chez qui l’on observe les identifications adhésives ne supporte pas
d’être séparé de l’objet. L’objet et lui font un. Le patient imite le comporte­
ment, l’accoutrement, le style de vie, le style de paroles, l’apparence, etc.
Il est plus dans la dépendance à l’objet que dans les états mentaux. Certains
patients réagissent en miroir au comportement du thérapeute (ils repren-
nent ses intonations, sa posture, ou peuvent essayer d’avoir l’approbation
du thérapeute à chaque mot, fait et geste, etc.). Ce type de patient a ten-
dance à se coller ou à être adhésif vis-à-vis de l’objet. Il s’agit de ce que l’on
appelle un patient qui est dans le double narcissique. L’autre ou l’objet est
comme lui. Il s’identifie exactement, totalement et complètement à l’objet.
Il dit : « Mon meilleur ami est exactement comme moi, on aime les mêmes
choses, nous avons les mêmes délires, nous nous comprenons sans même
dire les choses… ».

Identifications défensives
Le patient peut s’identifier à l’agresseur ou à la victime pour exprimer ses
défenses. Qu’il s’agisse du jeu ou dans sa communication gesto-posturo-
verbale, il montre qu’il est plutôt en mode défensif. Il peut s’agir d’une
forte inhibition dans le but de se défendre contre ses pulsions libidinales ou
agressives (cf. chapitre 18).

Identifications structurantes
Le patient essaie de se structurer à travers les identifications qu’il s’est faites.
Le modèle de structure auquel il s’identifie l’aide énormément à garder une
certaine vision de sa vie et de son environnement.

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Conception du self, identifications et soi 159

Conclusion
Lors de l’exploration des identifications des patients, il est question de
comprendre le message qu’ils communiquent à partir de leur langage du
corps. Le thérapeute doit garder à l’esprit que le corps du patient est un
corps de messages ou un corps messager. Comme dit plus haut, la posture,
l’habillement, le style, etc. doivent mettre la puce à l’oreille. Culturellement
parlant, le corps parle et témoigne de notre appartenance sociale.
En définitive, lors de l’évaluation, le thérapeute peut noter ou découvrir les
identifications en s’interrogeant sur les projets, les pensées, les projections
futures du patient. Il s’agit d’être attentif à toutes ces phrases du patient qui
commencent par : « Je suis méchant… », « Je dois faire… », « Je serai… ».

Grossesse à l’adolescence
Il peut sembler étrange d’aborder la question des adolescents qui sont des fu-
turs pères ou mères. Il nous arrive en effet de plus en plus de recevoir des ado-
lescentes enceintes ou des futurs pères. Il est alors essentiellement important
d’évaluer leurs identifications vis-à-vis des futurs changements et de savoir à
quel niveau ils sont en parlant de la parentalité et tout ce qui va de pair avec.
Pour y arriver, voici certaines questions qui peuvent guider ou orienter la dis-
cussion avec l’adolescent :
• « Comment tu t’imagines dans quelques mois ? », « Comment tu vis cet état
de grossesse ? » ou « Te vois-tu après l’accouchement ? »
• « Quelle est la position ou la réaction de tes parents ou tes responsables
légaux vis-à-vis de cette grossesse ? », « Comment ont-ils reçu la nouvelle ? »,
« Se sont-ils positionnés ? », « Quelle est leur décision vis-à-vis de la grossesse ? »,
« Pourquoi avoir gardé cette grossesse ? »
• « C’est comment pour toi physiquement ou mentalement cet état de gros-
sesse ? », « Parle-moi de ton ressenti vis-à-vis de cette grossesse », « Penses-tu
être à la hauteur et prêt à devenir parent ? »
• « Arrives-tu à te comprendre ces derniers temps ? », « Comprends-tu tes sen-
timents actuels liés à ton état de grossesse ? », « Comment expliques-tu le fait
que dès l’accouchement, vous serez trois personnes (le père, le bébé et toi) ? »,
« Est-ce que tu vas t’en sortir ? »
• « Quelle était la réaction de ton entourage amical, scolaire ou professionnel ? »
Le clinicien doit aller loin dans son investigation et rechercher les fantasmes,
les émotions, les affects, la notion de culpabilité ou non, les inquiétudes, etc.
Bref, il faut être le plus possible très systématique, clair, large et non vague dans
cette exploration.

Impasses identificatoires
Il est clair déjà que les différents mouvements identificatoires permettent
la continuité du self. L’impasse identificatoire est l’arrêt de cette continuité.

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160 Status clinique pédopsychiatrique

Ceci interfère sur la constitution du self. Bien que l’enfant puisse tirer du
bon de ces adultes de référence et de substitution, le manque d’un ou des
deux parents se répercute sur la continuité de son self. L’absence psychique
temporaire ou continue d’un parent (due par exemple à un trouble dépres-
sif, un trouble de la personnalité, un trouble psychotique, une consomma-
tion de substances) se répercute sur la relation et le self de son enfant. Dans
l’enfant adultomorphe, on cherche quel est le parent malade ou quel parent
défaillant il faut réanimer ou soigner.
Il arrive que si un patient ne parvient pas à trouver une identification
masculine ou féminine dans sa famille, il aille chercher cette identification
(père ou mère manquant) dans un autre endroit tel qu’à l’école auprès des
éducateurs, de l’assistante sociale, etc.

Traits de personnalité
Les traits de personnalité doivent être décrits dans l’évaluation du patient.
L’anamnèse fournit des informations nécessaires qui sont complétées avec
le status clinique. En ce qui concerne la recherche des traits de personnalité
du patient, Ivanov Mazzucconi conseille au thérapeute d’explorer l’histoire
du patient dans l’objectif de relever ses différentes difficultés qu’il rencontre
dans sa vie amoureuse et professionnelle. Ces informations sont nécessaires
à la pose du diagnostic.
Le patient et son entourage sont les mieux placés pour fournir des don-
nées sur les traits de personnalité. Il arrive que le patient se décrive tel qu’il
se voit ou comment les autres parlent de lui. Le thérapeute lui demande ce
qui motive ses pairs à être amis ou copains avec lui. Quels sont les critères
de choix de son amoureux ? Comment ses parents ou ses frères et sœurs le
décrivent-ils ? Il est important de noter que « les troubles de la personnalité
apparaissent habituellement dans l’enfance ou l’adolescence et persistent à
l’âge adulte. Par conséquent, un diagnostic de trouble de la personnalité est
rarement approprié avant 16 ou 17 ans. » (Pull, 2000)
Avant cet âge, il est nécessaire de relever les caractères ou signes pouvant
évoluer vers un type de personnalité ou un autre.
L’investigation clinique permet au thérapeute de constituer par assem-
blage des éléments qui lui donnent une idée sur le trait de personnalité du
patient. Pour y arriver, il peut aborder la question des relations interperson-
nelles, professionnelles, de ses thèmes de conversation ou de réflexion, etc.

Relations interpersonnelles
Il est intéressant de noter la qualité des échanges ou relations personnelles
du patient dans son milieu familial ou amical, dans ses réseaux sociaux,
etc. En interrogeant l’entourage ou le patient lui-même, le thérapeute note
si celui-ci est réservé, combatif, sélectif, évitant, utilitaire, indifférent aux

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Conception du self, identifications et soi 161

sentiments de ses proches, instable, paranoïaque, soupçonneux, sujet à des


angoisses diverses, etc.
Le patient peut être en retrait vis-à-vis des membres de sa famille ou ses
amis. Il peut être serviable, égoïste, méfiant, un bon ami, il inspire confiance
à l’autre, etc. Est-ce que le patient est susceptible ou réagit-il à la moindre
frustration ? « Est-ce qu’il t’arrive de perdre le contrôle de tes humeurs ? »,
« Penses-tu être colérique ou rancunier ? », « Pardonnes-tu facilement
aux autres ? », « Arrives-tu à participer aisément à la discussion avec tes
amis ? », « Comment tes copains critiquent tes idées ? », « Comment les
autres reçoivent ou entendent tes différents arguments lors de vos échanges
ou discussions ? »

Relations scolaires/professionnelles
En plus des relations familiales ou amicales, il est important de s’interroger
sur les relations colaires/professionnelles du patient. Que disent ses collègues,
ses enseignants, ses maîtres de stage à propos de ses activités profession­
nelles ? Fait-il preuve de sens de dévotion, de responsabilité, d’engagement,
d’irresponsabilité, d’incapacité, d’indécision, de perfectionnisme, d’impré­
visibilité ? Est-il est négligent, convaincant, etc. ? A-t-il peu d’estime de soi ?
Cherche-t-il à copier les autres ?

Thèmes de conversations ou de réflexions


Les thèmes ou sujets de discussion qu’aborde le patient avec les personnes
de son entourage peuvent être très vagues et difficilement compréhensibles,
ésotériques ou métapsychologiques, fantastiques, flous, clairs, adéquats à la
réalité socioprofessionnelle et culturelle, etc.
En fait, plusieurs pistes devraient être explorées. Par exemple, le théra-
peute essaie de savoir pourquoi le patient s’isole ou se sent isolé par son
entourage. Ses proches peuvent nous rapporter qu’ils ont du mal à le suivre
dans ses pensées ou qu’il les perd à chaque prise de parole.
Pour conclure sur les traits de personnalité, rappelons que « le trouble de
la personnalité spécifié par des traits est défini par une altération impor-
tante du fonctionnement de la personnalité, mesuré par l’échelle du niveau
de fonctionnement de la personnalité et par un ou plusieurs domaines de
traits de personnalité ou facettes de traits de personnalité pathologiques…
C’est une tendance à se comporter, ressentir, percevoir et penser de manière
relativement constante au cours du temps et à travers les situations où le
trait peut être manifeste. » (American Psychiatric Association, 2015) Cela
étant, rien ne doit être oublié lors de l’exploration clinique, c’est-à-dire que
tous les domaines de la vie du patient doivent être revisités et explorés pour
en savoir un peu plus sur son fonctionnement et comment lui-même et ses
proches le perçoivent.

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162 Status clinique pédopsychiatrique

Soi
Introduction du concept de soi
En guise de définition, « le soi est conçu par Spitz comme une élaboration
idéationnelle de l’expérience émotionnelle et somatique dépendant de la
réalisation d’être séparé, d’être un individu. » (Golse, 2015)
En fait, le soi est un concept important dans la métapsychologie psy-
chodynamique. Il se met en place au cours des 6 premiers mois de la vie. Il
est important que l’individu fasse une différence entre soi et l’autre, entre
ce qui lui appartient et ce qui appartient à son entourage. Il s’agit de l’effort
que le patient fait pour donner à lui-même et à autrui une image de lui-
même. Ce concept de soi renvoie vers une compréhension ou une compo-
sante cognitive, tandis que l’estime de soi est la manière dont la personne
s’évalue sur le plan affectif. De ce fait, l’estime de soi a une composante
affective.
Le soi est une structure intrapsychique. Il prendrait naissance dans un
moi en cours de formation. La constitution du soi précède la formation
du moi et ce soi y est nettement enchâssé. « Le soi manœuvre par touches
successives, par mouvements d’essais et de retraits, pour faire face aux
menaces créées à l’extérieur comme à l’intérieur tant par la réalité que par
les pulsions. » (Bergeret, 2013) Le soi provient de l’exercice de la fonction
symbolique. C’est une sous-structure du moi qui détermine, par la voie des
relations d’objets qui le constituent, la structure du moi, du surmoi et donc
du caractère du patient. Plus exactement, « la distinction entre le soi et le
monde qui l’entoure est pour l’enfant la première étape vers la formation
du moi. » (Golse, 2015)
On cherche avec le patient quels sont son auto-investissement, l’image de
soi et l’estime de soi. Comment exprime-t-il ses émotions et son identité ?
A-t-il recours aux mensonges ? Y a-t-il de l’assurance dans ses propos, etc. ?
À l’aide des dessins de bonshommes, d’une famille ou de la fratrie, on peut
constater comment le patient se conçoit lui-même. Le thérapeute observe
s’il arrive à se représenter intégralement ou s’il manque certaines parties du
corps dans ses productions ou ses dessins. Ceci est flagrant chez les patients
souffrant des troubles psychomoteurs et surtout ceux qui connaissent des
difficultés dans la représentation de leur schéma corporel.
L’image de soi fait lien entre l’estime de soi et le self. En fait, « trois compo-
santes de l’estime de soi entretiennent généralement des liens d’interdépen-
dance : l’amour de soi (se respecter quoi qu’il advienne, écouter ses besoins
et ses aspirations) facilite incontestablement une vision positive de soi
(croire en ses capacités, se projeter dans l’avenir) qui, à son tour, influence
favorablement la confiance en soi (agir sans crainte excessive de l’échec
et du jugement d’autrui). » (André & Lelord, 1999) Les patients souffrant

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Conception du self, identifications et soi 163

d’hyperactivité ont souvent une faible estime d’eux-mêmes. Ils sont peu
sûrs d’eux-mêmes car les autres les rejettent assez souvent. Ces exclusions
fréquentes se retrouvent dans la sorte et la qualité de relation d’objet qu’ils
développent.
La question de l’image de soi est liée à l’idéal du moi. Plus jeune, le
patient n’a pas honte de ses parents car il puise dans l’image de son parent
un besoin narcissique de protection et d’un idéal du moi. À l’adolescence,
il éprouve une honte à l’égard du même parent qui jadis faisait sa fierté.
En fait « pour avoir une bonne estime de soi, il faut pouvoir compter sur
soi-même et en particulier sur sa capacité de penser clairement et d’agir en
accord avec son propre jugement. » (De Saint-Paul, 2004)
La honte chez l’adolescent est liée au fait de devoir se détacher et se
différencier de ses parents. La honte est l’héritière de l’idéal du moi non
protecteur de l’individu. C’est le sentiment de honte qui mesure tout l’idéal
du moi (le patient se calque au mode de vie de ses idoles, artistes préférés,
mannequins, qui sont actuellement appelés des influenceurs). L’idéal du
moi n’est plus calqué sur les parents, plutôt sur d’autres objets qu’il juge
utiles à ses yeux (cf. chapitre 17).

Exploration de l’image ou du concept de soi


Lors de l’exploration clinique, le thérapeute peut remarquer différentes qua-
lités de l’image de soi. Par exemple, l’image de soi du patient peut être mal
définie, peu incarnée, discontinue, fluctuante, toute-puissante, grandiose,
dévalorisée, clivée, dissociée, indifférenciée, intégrée, cohérente, négative,
plus ou moins négative.
Les perturbations mentales ou les difficultés psychologiques ont un effet
négatif sur la qualité de l’image de soi. Il est alors important de chercher la
provenance ou l’origine de la baisse d’estime de soi et de la distorsion de
l’image de soi. Plus encore, le thérapeute recherche si la source de cette dis-
torsion ou baisse vient du dedans ou du dehors du patient.
Techniquement, le thérapeute peut lui demander : « Que penses-tu de
l’image de ton corps ? », « Penses-tu avoir un regard bienveillant ou jugeant
envers toi-même ou non ? », « Quelle est cette image que tu te fais de toi-
même ? », « Es-tu fier ou apprécies-tu ton image dans la glace ? », « As-tu
confiance en toi ? », « Qu’est-ce que les autres pensent de toi ? », « Si tu étais
un oiseau ou un animal, lequel serais-tu ? »

Traits de caractère structurels


Jean Bergeret considère le caractère « comme l’émanation même de la struc-
ture profonde dans la vie relationnelle (indépendamment de tout facteur
morbide éventuel) ; le caractère constitue donc le témoignage visible de la

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164 Status clinique pédopsychiatrique

structure de base de la personnalité, le véritable “signe extérieur de richesse


ou de pauvreté structurelle”. » (Bergeret, 2013) Cet auteur a développé
quelques traits de caractère structurels. Ces derniers complètent ou renfor-
cent le socle de la structure du patient (cf. chapitre 20).

Traits de caractère hystérique


Les traits des caractères d’une structure psychodynamique type hystérie de
conversion peuvent être constitués de différents éléments. Le plus souvent,
on objective que le patient est dans l’« érotisation évidente ; théâtralisme ;
mythomanie ; affectivité factice, déplacée et capricieuse ; régression de
l’action à la pensée érotisée. » (Bergeret, 2013) En plus de la quête affec-
tive, on voit le patient qui cherche du bénéfice secondaire dans ses diverses
actions. Il arrive qu’il s’inscrive dans la séduction du lien thérapeutique.
C’est au thérapeute d’être attentif à tous ces mouvements psychodyna-
miques et ne pas céder dans la séduction ou tout autre piège afin de ne pas
compromettre le travail clinique.

Traits de caractère hystérophobique


Les patients qui présentent une structure hystérophobique sont plus dans
la « suggestibilité ; variabilité de la distance relationnelle ; évitement et
déplacement dans le comportement extérieur ; érotisation masquée, etc. »
(Bergeret, 2013) Ces traits de caractère impliquent que le thérapeute a du
mal à cerner le patient. Celui-ci lui donne du fil à retordre à chaque tenta-
tive d’investigation de ses symptômes.

Traits de caractère obsessionnel


Cette structure psychodynamique est caractérisée la plupart de temps par la
« rigidité du mode de pensée ; fixité de l’ordre éthique et esthétique ; per-
manence des protections physiques et morales ; besoin d’ordre, de propreté,
de symétrie, d’exactitude dans l’espace comme dans le temps ; puissance
magique de la pensée alternant avec les doutes : impression d’incomplétude
dans le geste, l’action, le temps, etc. » (Bergeret, 2013) Il est plus ou moins
facile pour le patient et son entourage de relever ces différents symptômes
au quotidien.

Traits de caractère schizophrénique


Chez ce type des patients, nous retrouvons volontiers le « retrait affectif ;
impression de maladresse et d’étrangeté corporelle ; angoisse de grande
vulnérabilité ; comportement froid et cassant ; solitude sentimentale et
difficulté de la communication ; stéréotypies de comportement ; tendances
aux ruminations, etc. » (Bergeret, 2013) Nous pouvons ajouter à ces traits la
bizarrerie dans les propos ou le comportement du patient.

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Conception du self, identifications et soi 165

Traits de caractère paranoïaque


Les traits que présentent les patients de cette catégorie ont essentiellement
la « raideur de comportement ; reproches persécuteurs ; idées grandilo-
quentes ; déformations de la réalité affective ; revendications agressives ;
exubérance de l’humeur ; allergie aux frustrations ; intuitions interpréta-
tives, etc. » (Bergeret, 2013) Ces patients peuvent avoir de la peine à entrer
en relation avec l’objet. Ils donnent l’impression de rester sur leurs gardes,
d’être distants et de ne pas arriver à entrer ou à rester en lien ou en relation
avec l’objet.

Traits de caractère narcissique


La personnalité ou les traits de caractère narcissique peuvent être couplés
à d’autres traits de caractère comme la phobie. Pour ce type des patients,
« le caractère narcissique-phobique est marqué à la fois par la fragilité du
moi, qui bien qu’unifié (il ne s’agit jamais d’un moi psychotique) n’est
jamais assez complet narcissiquement et, à la fois aussi, par une hyperémoti-
vité à fleur de peau pouvant déclencher à tout moment des orages affectifs. »
(Bergeret, 2013)
En plus des traits narcissiques-phobiques, les patients peuvent présenter
des « traits dépressifs, phobiques (de nature narcissique), abandonniques,
maniaques, hypocondriaques, phalliques, psychasthéniques, psychopa-
thiques, comportements d’échec, ou de destinée, etc. » (Bergeret, 2013)
Il existe d’autres traits de caractère structuraux qu’ont abordé et déve­
loppé un bon nombre d’auteurs dans les divers manuels de psychopatho­
logie psychodynamique.

Conclusion
Les items consacrés au self, les identifications, le soi et les traits de caractère
sont en étroite connexion avec des autres instances de l’appareil psychique.
Dans l’évaluation psychodynamique du patient, il revient au thérapeute de
dégager son unité fonctionnelle ou sa structure fonctionnelle. Nous reve-
nons sur ces notions dans le chapitre 20 avant d’aborder le sujet thème de
la restitution de l’évaluation.

Bibliographie
American Psychiatric Association. (2015). DSM-5 : manuel diagnostique et statistique
des troubles mentaux (traduit par J.-D. Guelfi et M.-A. Crocq ; 5e éd.). Elsevier
Masson.
André, C., & Lelord, F. (1999). L’Estime de soi. S’aimer pour mieux vivre avec les autres.
Odile Jacob.

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166 Status clinique pédopsychiatrique

Angelergues, R., Anzieu, D., Boesch, E. E., Brès, Y., Pontalis, J. -B., & Zazzo, R. (1975).
Psychologie de la connaissance de soi. Presses universitaires de France.
Bergeret, J. (2013). La Personnalité normale et pathologique (3e éd.). Dunod.
Brusset, B. (2007). Le self et l’objet. Dans B. Brusset (dir.), Psychanalyse du lien (cha-
pitre 7, p. 189-219). Presses universitaires de France.
De Parseval, C. (2007). De Ferenczi à Winnicott : le « nourrisson savant » et le faux
self. Le Coq-Héron, 189(2), 122-141.
De Saint-Paul, J. (2004). Estime de soi, confiance en soi. S’aimer, s’apprécier et croire en
soi (2e éd.). Dunod.
Golse, B. (2015). Le Développement affectif et cognitif de l’enfant (5e éd.). Elsevier Mas-
son.
Letendre, R., & Marchand, D. (2010). Adolescence et affiliation, les risques de devenir soi.
Presses de l’Université du Québec.
Murray, T. R., & Michel, C. (1994). Le modèle d’Erikson. Dans Théories du développement
de l’enfant. Études comparatives. De Boeck Supérieur. (p. 241-262).
Pull, C. B. (2000). CIM-10/ICD-10 : Descriptions cliniques et directives pour le diagnostic.
Organisation mondiale de la santé (OMS). Masson.
Robin, M. (2019). L’adolescent en crise dans un environnement en crise. Adoles-
cence, t. 37, 2 (2), 233-245.

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15 Fonctions du moi
Le moi est l’une de trois instances de l’appareil psychique qu’a développées
Freud dans sa seconde topique en 1923. « Freud propose d’appeler “moi”
une instance qui fonctionne simultanément à deux niveaux : d’une part,
ce moi fonctionne au niveau physiologique sous la forme d’un groupe de
neurones investis de façon permanente qui maintiennent l’“énergie liée”,
et d’autre part, ce moi fonctionne au niveau psychologique comme une ins­
tance chargée d’établir une prépondérance des processus secondaires sur les
processus primaires. » (Quinodoz, 2004) Le moi exerce une interface entre
le dedans et le dehors. Il adapte les pulsions du ça à la réalité de l’environne­
ment social en se référant aux exigences du surmoi.
Par ailleurs, « une autre fonction essentielle du moi consiste dans
“l’épreuve de réalité” qui permet à l’individu de différencier une perception
provenant de l’extérieur d’une hallucination ou d’un souvenir provenant
de l’intérieur. » (Quinodoz, 2004) Ce moi dont parle Freud a été remanié
et étoffé grâce aux diverses contributions de tous ceux qui lui ont succédé.
Actuellement, nous avons un peu plus d’éléments qui le composent ou le
constituent, ses propriétés psychiques et physiques, ses fonctions et ses
interactions avec les autres instances de l’appareil psychique.
Plusieurs auteurs ont bien développé cette notion du moi, y compris
des fonctions. « Les fonctions de ce moi autonome sont celles que nous
avons évoquées sous le terme d’“autonomie primaire du moi”, c’est-à-dire
la perception (qui contrôle l’action), la mémoire (qui anticipe la réalité), la
motricité, tous les aspects cognitifs… Toutes ces fonctions constituent le
secteur aconflictuel du moi. » (Golse, 2015)
Vers 1974, Didier Anzieu développe sa théorie sur le moi-peau. Il l’affine
en 1985 et la complète en 1995. Le moi-peau est défini comme « une
figuration dont le moi de l’enfant se sert au cours des phases précoces de
son développement pour se représenter lui-même comme renfermant des
contenus psychiques, à partir de son expérience de la surface du corps. Cela
correspond au moment où le moi corporel sur le plan opératoire et reste
confondu avec lui sur le plan figuratif. » (Anzieu, 2002)

Fonctions biologiques et psychodynamiques


Le moi a pour rôle initial d’établir un système défensif entre la réalité
interne et externe, et les exigences pulsionnelles. Le moi est représenté phy­
siquement ou extérieurement par la peau ou le corps du patient. On parle
de la peau ou du cerveau sur le plan neurobiologique et du moi-peau sur le
plan psychodynamique.

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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168 Status clinique pédopsychiatrique

Les points qui suivent consistent à dégager les liens ou les rapports
entre les fonctions neurobiologiques et psychodynamiques du moi. On lui
accorde huit fonctions (Anzieu, 1995). L’intérêt de rappeler ces fonctions
est de montrer comment le thérapeute devrait se ménager au cours de
ses entretiens. Il remplit d’un instant à l’autre ces différentes fonctions.
Ces huit caractéristiques lui permettent de concrétiser la fonction alpha
de Bion. Qu’il s’agisse des entretiens d’évaluation ou de psychothérapie, le
thérapeute métabolise, décode et transcrit des informations méta en infor­
mations simples, explicites, digestibles pour le patient.

Maintenance du psychisme
La peau remplit une fonction de soutènement du squelette et des muscles.
Le moi, donc le moi-peau, remplit une fonction de maintenance du psy­
chisme du patient. Le rapport entre la fonction biologique et la fonction
psychique est que la maintenance du psychisme est assurée par l’intériori­
sation du holding maternel.
La défaillance ou l’excès de cette fonction entraîne une sensation de vide
intérieur. Le thérapeute a l’impression d’être devant un patient qui porte
des vêtements qui ne font qu’assurer une unité superficielle mais dépourvue
de cette arête dorsale qui tient le corps et la pensée. Le manque de solidité
ou de dureté de cette charpente psychique est flagrant dans les entretiens.

Contenant
La peau recouvre la surface entière du corps dans laquelle sont insérés tous
les organes des sens.
Le rapport entre la fonction biologique et la fonction psychique est que le
contenant est assuré par l’intériorisation du handling maternel. Le moi-peau
est le siège des organes de sens de l’individu.
Quand il y a une défaillance ou un excès de cette fonction du moi-peau,
on retrouve deux types d’angoisse :
• l’angoisse d’une excitation pulsionnelle diffuse, permanente, éparse, non
localisable, non identifiable, moins apaisée, c’est-à-dire une angoisse sans
noyau écorce ;
• l’angoisse d’avoir un intérieur qui se vide, l’enveloppe existe mais sa
continuité est interrompue par des trous, il s’agit d’un moi-peau passoire
dans la structure psychotique. Le patient se plaint de ses angoisses de
vidange. On peut noter également des angoisses d’intrusion. Le patient res­
sent un manque de limite entre son dedans et son dehors.

« Pare-excitation »
La peau est une couche superficielle de l’épiderme. Elle protège la couche
sensible de celui-ci et l’organisme en général contre les agressions physiques.

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Fonctions du moi 169

Le moi-peau exerce une fonction de « pare-excitation ». On sait que « la psy­


ché ne peut pas travailler si l’excitation et les impressions issues du champ
sensorimoteur et du champ pulsionnel menacent d’être débordantes et sont
potentiellement désorganisatrices, c’est-à-dire si elles ne peuvent être liées
de manière efficace. » (Roussillon, 2012)
Le rapport entre la fonction biologique et la fonction psychique est que
la peau ou le moi-peau sert de « pare-excitation ». Cette fonction est totale­
ment assumée par le caregiver du patient dès sa naissance. Cet adulte, en
l’occurrence la mère ou le père, est un auxiliaire de la vie psychique pour
le patient. L’adulte prête son appareil à penser à l’activité psychique du
bébé. Comme la psyché de l’enfant ou du bébé n’a pas encore acquis sa
totale perfection, il est nécessaire que l’adulte fasse en premier le travail de
« pare-excitation », car « le travail d’enregistrement, de mise en message, en
signe et en sens ne peut s’effectuer que si on peut dégager un “message” ou
un signe, ce qui implique que l’excitation et les impressions reçues soient
maintenues à un niveau modéré. » (Roussillon, 2012) C’est dans cette
optique que l’on remarque qu’un moi en croissance du patient trouve sur
sa propre peau un étayage suffisant pour assumer cette future fonction de
« pare-excitation » à son tour.
Il est évidemment clair de rappeler que le moi-peau qui assume cette
fonction n’est pas en permanence en mesure de l’assurer, tout comme le
moi-peau peut exercer cette fonction par défaillance. On peut retrouver que
le moi-peau exerce cette fonction par excès. Prenant en compte ce qui est
dit, nous pouvons avoir trois fonctions de moi-peau « pare-excitant » :
• moi-poulpe. On parle de moi-poulpe lorsqu’aucune fonction du moi-
peau n’est acquise. Il s’agit d’un manque total de contrôle dans les gestes,
mots, phrases, paroles, etc. qui sont dits par le patient. Celui-ci est fragilisé
par ce qui vient de l’extérieur mais aussi par ce qui sort de son intérieur ;
• moi-crustacé. Le thérapeute note la présence d’une carapace rigide qui
empêche la mise en place ou le fonctionnement de toutes les autres fonc­
tions de son moi-peau. Ceci nous donne l’impression que le mécanisme
d’engrenage est complètement rouillé. Le patient est incapable de se proté­
ger des attaques externes ou internes de soi ;
• moi-peau avec un excès de « pare-excitation ». Quand le moi-peau
travaille en excès, le patient peut ne pas avoir connu la possibilité ni la
nécessité d’en venir à un auto-étayage. Toute la question reste de rabaisser
le niveau d’excitation afin que le patient arrive à prendre en compte les
sollicitations et l’étayage de son thérapeute.

Individuation du soi
La peau humaine présente des différences individuelles considérables par
son grain, sa couleur, sa texture, son odeur, etc. Le moi-peau assure à son
tour une fonction d’individuation du soi.

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170 Status clinique pédopsychiatrique

Le rapport entre la fonction biologique et la fonction psychique est


d’assurer au soi un sentiment d’être un être unique.
La défaillance ou l’excès de cette fonction laisse percevoir de l’angoisse,
de l’« inquiétante étrangeté », liée à une menace visant l’individualité du soi
par affaiblissement du sentiment des frontières de celui-ci. En référence au
soi, le moi-peau lui permet de s’enraciner et de se développer dans un but
de rendre effective la séparation du soi et de l’objet. En d’autres termes, ce
moi-peau permet au patient de sentir la continuité de son self.

Intersensorialité
La peau est une surface porteuse de poches, de cavités où sont logés les
organes des sens autres que ceux du toucher. Le moi-peau remplit sa fonc­
tion d’intersensorialité dont la référence de base se fait toujours au toucher.
Le rapport entre la fonction biologique et la fonction psychique est que
le moi-peau est une surface psychique qui relie entre elles les sensations de
diverses natures.
Les défaillances ou les excès de cette fonction font que l’on retrouve une
angoisse de morcellement du corps ou précisément une angoisse de déman­
tèlement décrite par Meltzer en 1975, c’est-à-dire d’un fonctionnement
indépendant, anarchique des divers organes des sens.

Surface de soutien de l’excitation sexuelle


Freud fut le premier à parler des rôles des orifices érogènes dans sa théorie
métapsychologique de la sexualité infantile. Ces orifices sont nulle part ail­
leurs que dans le moi-peau. La peau assure l’ingestion de la nourriture et les
soins s’accompagnent des contacts peau à peau, qui préparent l’auto-érotisme
et situent les plaisirs de peau comme toile de fond habituelle des plaisirs
sexuels. Le moi-peau remplit une fonction de surface de soutien de l’excita­
tion sexuelle.
Le rapport entre la fonction biologique et la fonction psychique est que
le moi-peau capte sur toute sa surface l’investissement libidinal et devient
une enveloppe d’excitation sexuelle globale.
La défaillance ou l’excès de cette fonction de soutenir de l’excitation
sexuelle peut se manifester différemment :
• si l’investissement de la peau est plus narcissique que libidinal, alors
l’enveloppe rend son possesseur invulnérable, immortel et héroïque, par
exemple chez le patient maniaque ;
• si l’on note une absence de cette excitation sexuelle, alors une fois adulte,
l’individu ne se sent pas en sécurité pour s’engager dans une relation
sexuelle aboutissant à une satisfaction génitale mutuelle ;
• si les zones sexuelles sont le lieu d’expériences douloureuses plutôt qu’éro­
gènes, alors un moi-peau troué se trouve renforcé, l’angoisse est majorée,
la prédisposition aux perversions sexuelles vise à inverser la douleur en
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Fonctions du moi 171

plaisir (exemple : pratiques sadomasochistes, patient ayant des troubles de


conduite sociale, etc.).

Recharge libidinale
La peau est une surface de stimulation permanente du tonus sensorimoteur
par les excitations externes. Le moi-peau assure la recharge libidinale.
Le rapport entre la fonction biologique et la fonction psychique est que
cette dernière permet une recharge libidinale et maintient de la tension
énergétique tout en répartissant les inégalités libidino-énergétiques entre
les sous-systèmes psychiques.
La défaillance ou l’excès de cette fonction permet d’objectiver deux types
d’angoisses antagonistes :
• l’angoisse de l’explosion de l’appareil psychique sous l’effet de la sur­
charge d’excitation ;
• l’angoisse de nirvana qui est aussi l’angoisse de l’accomplissement du
désir d’une réduction et de baisse de tension au niveau zéro.
Ces différentes angoisses sont observables dans divers troubles psy­
chiques. La question est de savoir comment les atténuer ou baisser la surex­
citation ou l’inconfort qu’elles génèrent. Quel est le fonctionnement qui se
met en place chez le patient angoissé et submergé ou en défaillance vis-à-vis
du principe de plaisir et de réalité ? Quels sont les mécanismes de défense
auxquels a recours le moi du patient pour se défendre de ses angoisses ? Etc.

Inscription des traces sensorielles tactiles


La peau, avec les organes des sens tactiles qu’elle contient, fournit des infor­
mations directes de l’extérieur à l’intérieur et vice versa. Le moi-peau rem­
plit une fonction d’inscription des traces sensorielles tactiles.
Le rapport entre la fonction biologique et la fonction psychique est que
l’inscription des traces sensorielles tactiles est renforcée par l’environne­
ment maternel dans la mesure où il remplit son rôle « présentation de
l’objet » auprès du patient. C’est l’objet presenting de Winnicott que l’on
retrouve chez le tout-petit bébé. Grâce à la communication polysensorielle,
le bébé enregistre les contours et les caractéristiques de l’objet (ses couleurs,
odeurs, chaleurs, textures, consistance, résistance, etc.). Cette mémorisa­
tion l’aide à reconnaître l’objet dans ses futures interactions (par exemple
en présence de l’objet, le bébé peut se demander si c’est toujours le même
objet, est-ce que le bébé est devant un objet différent du précédent ? Est-ce
que cet objet est jugé fiable par le bébé ? Etc.).
La défaillance ou l’excès de cette fonction est la base de trois types
d’angoisses :
• l’angoisse d’être marqué par des inscriptions infamantes et indélébiles pro­
venant du surmoi. Cette angoisse laisse des traces physiques sur le corps du
patient. Par exemple, le patient se plaint de rougeurs, d’eczéma, d’acné, etc. ;
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172 Status clinique pédopsychiatrique

• l’angoisse du danger d’effacement des inscriptions sous l’effet de leur sur­


charge ou surexcitation psychique ;
• l’angoisse de la perte de la capacité de fixer des traces. Ce type d’angoisse
est rencontré dans les troubles du sommeil par exemple.

La suite de ce chapitre apporte certaines réponses aux diverses questions que le


thérapeute peut se poser lors de son évaluation clinique. Il est connu en effet
que le moi ne se limite pas aux fonctions décrites par Didier Anzieu, on retrouve
d’autres fonctions dites autonomes et non autonomes du moi. Le moi-peau et
ses diverses fonctions sont en étroite collaboration ou en rapport avec le surmoi
et le ça. Le moi assume ainsi l’équilibre entre ces deux instances psychiques.
L’objectif est d’obtenir un compromis entre les pulsions, les mécanismes de
défense, l’angoisse, etc.

Fonctions autonomes du moi


Elles sont nommées ainsi car même si elles interagissent entre elles, elles
n’ont pas un lien direct avec les affects. On peut dire qu’il y a une espèce
d’indépendance entre les fonctions autonomes du moi et les affects du
patient. Il s’agit de : l’intelligence, de l’attention, de la vigilance, de la
mémoire, du jugement ou test de réalité et du raisonnement.

Intelligence, vigilance et attention


Définitions
Intelligence
La définition de l’intelligence est loin d’être simple. La notion de l’intelli­
gence fait appel au symbolique, à l’abstrait, au concret, à la capacité analy­
tique et synthétique et à la capacité intuitive ou discursive.
Henri Ey et ses collaborateurs ont défini l’intelligence dans leur Manuel
de psychiatrie de 1989 comme étant une capacité opératoire de travailler à
l’aide de schémas de plus en plus compliqués et mobiles conformément à
un plan logique à la solution d’un problème.
L’intelligence est une fonction qui dépend des autres fonctions supé­
rieures du moi. Elle est en étroite collaboration avec le raisonnement, le
jugement, la mémoire, la perception, etc.
Comme avant-goût de l’exploration de l’intelligence, le thérapeute
cherche à savoir si le patient a une capacité de s’adapter ou d’inventer, ou
tout simplement de comprendre les informations qu’il reçoit de l’intérieur
et de l’extérieur.
En guise de rappel, plusieurs travaux développent cette notion d’intelli­
gence. Ceci n’est malheureusement pas le cas pour ce présent guide.

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Fonctions du moi 173

Pour revenir sur l’objectif de ce travail, le thérapeute devrait se demander


si le patient est oui ou non dans la norme selon son âge. Il cherche à savoir
si le patient peut s’interroger sur les faits présents ou passés. Est-ce que le
patient incarne sa pensée ? Est-ce qu’il tient plutôt des propos d’adultes ?
Certains patients sont très pertinents et percutants sur le plan de l’intelli­
gence. Ils peuvent faire preuve de connaissances ou avoir des compétences
largement étoffées par rapport à ce que l’on attendrait d’enfants de leur âge.
Aux patients plus jeunes, on peut demander s’ils connaissent leur nom,
leur prénom, leur âge, leur adresse, la profession de leurs parents, etc. Est-ce
que le patient connaît la saison ? Reconnaît-il les différents jouets contenus
dans la boîte à jouets ? Peut-il imaginer l’usage d’un jouet inconnu, etc. ?
Il est aussi question de voir si le patient est dans le symbolique ou s’il
est dans la manipulation d’objets sans avoir une narration quelconque. Le
thérapeute cherche à savoir s’il a une pensée gelée ou pauvre en lui deman­
dant : « Veux-tu bien me raconter une histoire ? », « Qu’est-ce qui s’est passé
dans cette histoire ? », « Peut-on s’imaginer ce qu’ils sont en train de se
dire ? Est-ce qu’ils veulent devenir des amis ou… ? », « Que fait le papa du
coup ? », « Mais pourquoi la maman poule est méchante ? », etc.
L’exploration de l’intelligence sur le plan cognitif essaie de dégager la pré­
sence ou non de la synchronie et de la diachronie. Qu’est-ce que le patient
peut dire sur la fonction ou l’identité de l’examinateur ? Qu’est-ce qu’il en
avait imaginé avant de venir à la consultation ? Prend-il en compte les sol­
licitations de son thérapeute ? Cherche-t-il la fusion ou le collage à l’autre ?
Est-ce qu’il fait des écholalies durant l’entretien ? Est-ce qu’il donne tout
simplement l’air d’être intelligent ? Pourquoi ne s’intéresse-t-il pas du tout
à ce que le thérapeute lui dit ?
Attention
L’attention est une fonction autonome du moi. Elle a pour rôle principal de
« fixer l’esprit sur des objets déterminés et de lutter contre l’émergence et
l’envahissement de pensées involontaires qui se manifestent dès que faiblit
l’attention. » (Tribolet & Sahidi, 2005) Une personne attentive à son envi­
ronnement arrive à capter et à emmagasiner plus d’informations. L’atten­
tion permet de bien mémoriser des informations.
La notion d’attention est liée à celle de l’orientation. Cliniquement, le
patient peut être orienté sur les quatre modes suivants.
Orientation dans le temps
Pour savoir si le patient est orienté ou non dans le temps, les éléments horo­
dateurs sont à rechercher : le jour, la date, le mois, l’année, voire la saison
de l’année. Une légère désorientation est notée quand « la date précise n’est
pas connue (à 2 ou 3 jours près), même après l’avoir demandée plusieurs
fois, mais le patient connaît le mois, l’année, le jour et la saison. » (Preising
& Serre, 2000)

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174 Status clinique pédopsychiatrique

Pour les plus petits, la notion de temps n’est pas encore acquise. Certains
se réfèrent à la notion de nuit, c’est-à-dire le « dodo », pour compter les
jours.
Orientation dans l’espace
L’élément espace est à examiner également. Il s’agit de voir si le patient
arrive à connaître le nom du lieu dans lequel il séjourne. Le nom de
son quartier, de sa ville ou les distances entre deux ou plusieurs villes,
communes, quartiers peuvent lui être demandés. Comment arrive-t-il à
s’orienter dans son espace quotidien ? « Où es-tu maintenant ? », « D’où
viens-tu ? », « Comment fais-tu pour rentrer chez toi ? », « Quelle est la dis­
tance entre chez toi et ton école ? », « Où habite ton grand-père ? »
Orientation quant à la situation
Pour explorer cette fonction, certains auteurs disent qu’« il ne s’agit pas
seulement ici de se reconnaître comme un patient en situation d’examen,
mais de connaître les raisons qui ont conduit à cette situation. » (Preising
& Serre, 2000) Le thérapeute demande au patient : « Qu’est-ce que tu fais
ici ? », « Pourquoi es-tu venu me voir ? », « En quoi consiste notre rendez-
vous d’aujourd’hui ? », « Qu’est-ce qui s’est passé pour que tu viennes me
voir ? », etc.
Orientation quant à la personne
Il s’agit de vérifier si le patient se souvient ou connaît les détails sur sa vie
ou sa biographie. « La connaissance de la situation personnelle comprend
l’anniversaire, le lieu de naissance, les origines, le nom, la profession ainsi
que le rôle dans le contexte social. » (Preising & Serre, 2000) Le thérapeute
essaie de décrypter les connaissances du patient sur sa propre personne, sa
vie, sa famille, etc.
Vigilance
La vigilance est évaluée autant et au même moment que les autres fonc­
tions du moi. C’est la capacité d’adaptation ou d’orientation dans le temps,
l’espace, quant à la situation et quant à sa personne. Cette vigilance peut
être comprise comme un « état du système nerveux permettant à l’orga­
nisme de s’adapter et d’échanger avec le milieu. » (Tribolet & Sahidi, 2005)
L’état de vigilance est opposé à l’état du sommeil. L’état d’hypovigilance
peut être noté dans certains troubles dépressifs ou les états traumatiques ou
anxieux. Le thérapeute se retrouve en train de fournir l’effort pour redyna­
miser le patient pendant l’entretien.
Certains patients ont un niveau de vigilance accru. Ils n’arrivent pas à
rester calmes et donnent l’impression d’être soit en insécurité, soit d’avoir
une anxiété ou une peur.
Dans le trouble maniaque, le patient est très attentif au moindre bruit
et son de son environnement. Son hypervigilance lui permet d’entendre

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Fonctions du moi 175

ce qui se passe dans la salle à côté ou à l’extérieur. L’état d’hypervigilance


demande au thérapeute de ramener systématiquement le patient dans la
séance. Cet état est très coûteux du point de vue énergétique pour diriger
un seul entretien.

Exploration
Exploration de l’attention
Est-ce que le patient est orienté dans le temps, dans l’espace ? (On lui
demande le jour de la semaine, le mois, la saison, etc.) Quand il n’arrive pas
à bien se situer dans le temps, on peut penser à l’anxiété durant l’entretien,
au trouble du cours de la pensée, etc. Le patient devrait, selon son âge, se
repérer dans le temps et être en mesure de faire la différence entre les sexes,
les générations et entre soi et l’autre.
L’exploration de l’attention demande au thérapeute d’observer si le
patient est attentif au déroulement de l’entretien. Prête-t-il attention à
ce qu’on lui dit ? Est-ce qu’il participe à l’entretien ? Donne-t-il l’impres­
sion d’écouter attentivement ou semble-t-il être ailleurs ? Est-il happé par
d’autres idées, d’autres pensées ou son imagination ? Est-ce qu’il commet
des erreurs d’inattention ? Le cas échéant, à quelle fréquence ? Quelle est la
durée pendant laquelle il peut rester attentif à l’autre ?
Est-il attentif aux détails dans sa vie scolaire, professionnelle et familiale ?
Est-ce que son trouble d’attention se manifeste seulement pendant l’entre­
tien ou cela arrive même quand il est à l’école, à la maison, dans le jeu
avec ses pairs, etc. ? Aime-t-il les activités en classe qui requièrent beaucoup
d’effort de concentration ou qui durent longtemps, ou le contraire ?
Le thérapeute peut lui demander, par exemple : « Est-ce que la maîtresse
te reproche d’être dans ta bulle ou dans ton monde souvent ? », « Penses-tu
qu’il t’est facile de te laisser distraire ? », « Arrives-tu à suivre la conversa­
tion avec tes amis ? », « Est-ce que tu peux suivre les instructions ou les
consignes (simples ou complexes) de ta maîtresse ou de tes parents sans
que tu te trompes ? », « Arrives-tu à terminer tes tâches ou tes devoirs sans
difficulté et au même moment que tes camarades en classe ? »
Le patient peut être attentif tout en restant silencieux pendant que ses
parents racontent l’histoire de sa vie. D’autres n’aiment pas qu’une tierce
personne parle d’eux en leur présence. Ils préfèrent rapporter eux-mêmes
les faits essentiels de leur vie. Si le thérapeute a l’impression que le patient
est moins attentif, il se doit de rechercher la cause. Il peut arriver qu’il soit
sous l’effet de drogues, de toxiques ou de médicaments. Dans ce cas, il est
important de confirmer avec le patient ou son entourage ce qu’il aurait
consommé, pourquoi, quand et avec qui.
Exploration de l’intelligence
Est-ce que le patient exprime sa curiosité ou non ? Peut-il relater les événe­
ments selon une certaine chronologie ? Quelles sont ses initiatives ? Est-ce

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176 Status clinique pédopsychiatrique

qu’il arrive à prendre seul des initiatives ? Le thérapeute a-t-il l’impression


que le patient a une connaissance riche ou pauvre ? Porte-t-il un intérêt
particulier à des choses, des activités, des objets ? Porte-t-il de l’intérêt au
monde extérieur ? Connaît-il son nom, son adresse, le nom de son profes­
seur, le jour, le mois et la saison, etc. ? Est-ce qu’il peut reconnaître les
différents jouets de la boîte à jeux et leur usage ? Est-il capable de compter,
faire des calculs ou des opérations simples ou complexes d’arithmétique ?
Comment le patient explique-t-il les choses ? Les questions qu’il pose
ou qu’il se pose sont-elles pertinentes ? Montre-t-il de la finesse dans sa
manière de réfléchir selon son âge ? Peut-il rebondir sur les propos ou les
choses que l’on vient d’aborder un instant avant ? Est-il ouvert au monde
autour de lui ? Est-ce qu’il arrive à raconter l’organisation de son temps et
ses activités quotidiennes ? Comment gère-t-il ses rendez-vous ? Est-ce qu’il
égare souvent ses cahiers, ses devoirs ou ses jouets ?
Exploration de la vigilance
Le thérapeute peut noter une baisse de la vigilance. Il peut observer dif­
férentes situations telles que l’obnubilation, la somnolence, la torpeur, le
coma, etc. Il peut, sur le plan neurologique, noter :
• un rétrécissement de la conscience : le patient a une pensée focalisée,
éprouvée et une volonté sur un nombre réduit de thèmes. Il y a une dimi­
nution de réponses aux stimuli externes ;
• des troubles de la conscience : on peut avoir la dissolution de la conscience.
C’est l’atteinte qualitative de la clarté de la conscience du patient, la perte
de la capacité de comprendre différents aspects de soi-même et du monde
extérieur, et de relier de façon sensée.

Conscience ou préconscient
Définition
L’évaluation de la conscience ou du préconscient diffère selon que l’on
porte une casquette de pédopsychiatre ou de neuropédiatre. Ce que le
neurologue appelle conscience, le pédopsychiatre d’orientation psychody­
namique l’appelle préconscient. Il n’est pas question de coter le score de
Glasgow comme pratiqué en neurologie chez certains patients ayant un état
de conscience déficitaire.
Le thérapeute doit faire attention à ne pas mélanger les concepts neu­
rologiques et psychodynamiques. La conscience peut être examinée selon
un regard neurologique ou un regard psychodynamique. Il est clair que ces
deux concepts se chevauchent ou sont, à un moment donné, presque les
mêmes. L’importance est de savoir de quel côté on se penche pour examiner
ou évaluer l’un ou autre sans oublier leur coexistence.
L’exploration du préconscient du patient ne consiste pas à faire un exa­
men neurologique, quoique chez certains, selon que l’état de conscience

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Fonctions du moi 177

est atteint, le thérapeute doive demander à un collègue neurologue de pra­


tiquer cet examen ou le référer dans un service spécialisé. Bien contraire à
tout cela, l’évaluation de la conscience en psychodynamique a un lien avec
le préconscient. Nous abordons ici l’exploration de la conscience sur le plan
psychodynamique.

Exploration du préconscient
Le patient dont le préconscient est atteint a du mal à jouer à faire sem­
blant. Comme nous l’avons mentionné dans la partie I, le préconscient joue
un rôle de taille dans l’évaluation de nos patients, surtout quand ils sont
adolescents. Le thérapeute évalue la capacité de rêverie du patient. Qu’il
s’agisse d’un rêve diurne ou nocturne, il est important d’évaluer l’épaisseur,
la qualité, la constitution du préconscient.
Lors d’une évaluation pédopsychiatrique du préconscient, il est ques­
tion de voir comment le patient aborde ou distingue ses difficultés ou le
problème qui l’amènent à consulter. Comment raconte-t-il son histoire ?
Quelle est la qualité de sa narration ? Est-ce qu’il se permet de rêver ? Est-il
capable de parler ou penser au second degré ? Comment son préconscient
fait-il l’arbitrage entre son surmoi et son moi ou entre son inconscient et
sa conscience ? Exprime-t-il des contenus latents ou manifestes dans ses
récits ? Est-ce que son préconscient est un filet composé de nombreux trous
qui ne favorise pas la rétention des informations refoulées ? Ce précons­
cient joue-t-il son rôle de pare-excitant ? Comment est faite cette double
limite entre le dedans et le dehors chez le patient ?

Mémoire
Généralités
La mémoire est la capacité de se rappeler ce que l’on a appris dans un passé
proche ou lointain. À travers cette fonction, le patient fait un lien entre ses
capacités mnésiques, ses productions symboliques, sa concentration, etc.,
et les tâches ou activités qu’il est amené à exécuter. La mémoire est considé­
rée comme une fonction qui aide la personne à faire le pont ou le lien entre
son passé, son présent et anticipe le futur.
Les différentes étapes de la mémorisation
Le travail de mémoire passe par trois étapes : l’encodage, la fixation et le
rappel.
Encodage du souvenir ou de l’information
Il consiste à enregistrer des informations nouvelles via nos sens avant de
passer à l’étape de la consolidation et de récupération. Cette étape fait appel
à l’attention ainsi qu’aux prédispositions émotionnelles du patient. Ces
deux éléments contribuent à opérer une sélection des informations selon
ses motivations.

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178 Status clinique pédopsychiatrique

Consolidation, fixation ou stockage de l’information ou du souvenir


Cette étape est la deuxième du processus de mémorisation. Elle consiste
en un acheminement des informations de la mémoire de courte durée
vers celle à long terme. Cette étape permet de ranger, de conserver plus ou
moins durablement une information en vue de la réactiver en cas de besoin.
Récupération du souvenir ou de l’information stockée
Elle équivaut à effectuer un exercice mental afin de permettre au patient de
ramener un souvenir à la conscience. Chez certaines personnes, cet exercice
peut être bloqué temporairement. C’est ce qui est appelé usuellement un
« trou de mémoire ». Le patient dit tout simplement qu’il a « le mot sur le
bout de la langue ». Quelques stratégies permettent une excellente récupé­
ration, par exemple un rappel, une ressemblance, un indice, une reconnais­
sance, ou autre chose qui permet au patient de faire une sorte d’association
des souvenirs. Pour rappel, ces différentes techniques sont plus utilisées lors
de passations des tests ou des échelles d’évaluation psychométriques.
Les différents types de mémoire
Il existe plusieurs sortes de mémoires que nous rangeons dans deux grandes
catégories. Il s’agit notamment de la mémoire de travail ou mémoire à
court terme, et de la mémoire à long terme (mémoire implicite ou mémoire
consciente et mémoire explicite ou mémoire inconsciente).
Mémoire à court terme ou mémoire de travail
Cette mémoire est encore dite mémoire du présent. Le patient retient dans
l’immédiat les informations. Il s’agit d’une mémoire de travail qui lui per­
met de retenir une information très vite avant de l’utiliser (par exemple on
lui demande de regarder cinq objets selon leur ordre de rangement ou de
présentation, et de le répéter quelques minutes plus tard, etc.). L’amnésie
antérograde consiste en la perturbation de cette mémoire. Pour que les infor­
mations soient stockées dans la mémoire à long terme, la personne doit
répéter plusieurs fois.
Mémoire à long terme
Cette mémoire dure longtemps, on dirait toute la vie si rien ne vient pertur­
ber le stockage ou l’évocation. L’amnésie rétrograde consiste en la perturba­
tion de cette mémoire à long terme.
Il existe deux sous-types : la mémoire implicite ou mémoire inconsciente,
et la mémoire explicite ou mémoire consciente.
Mémoire implicite ou inconsciente
Ce type de mémoire est encore appelé mémoire de travail par l’amorçage. Il
s’agit de la mémoire procédurale dont il existe trois sous-catégories.
Mémoire procédurale ou motrice
Cette mémoire est implicite. Elle n’est pas déclarative. Elle résiste dans le
temps. La mémoire procédurale est une partie de la mémoire à long terme.
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Fonctions du moi 179

La personne n’utilise pas de grandes énergies pour exécuter l’action ou faire


l’activité. Le patient fait appel aux habilités acquises par le passé. Il ne fait
pas usage de son savoir-faire en général. Cette mémoire fait que la motricité
est à l’œuvre continuellement. Il s’agit des gestes automatiques que nous
faisons au quotidien sans nous en rendre compte, comme se brosser les
dents, marcher, balancer ses bras, courir, tenir une cuillère pour manger,
nager, faire de la trottinette ou du vélo, etc.
Mémoire eidétique ou photographique
Cette mémoire est non déclarative. Elle est encore appelée mémoire abso­
lue. Il s’agit de stocker des informations visuelles, sonores, des objets avec
des détails bien fournis en un laps de temps. Cette mémoire est souvent
utilisée lors de nos passations de bilans psychométriques (bilan cognitif,
attentionnel, affectif, etc.). Techniquement, le thérapeute peut demander
au patient de regarder et mémoriser cinq objets différents à un moment de
l’entretien, puis vient un temps où il lui pose la question de savoir s’il se
rappelle les objets qu’il lui avait demandé de mémoriser plus tôt.
Mémoire sensorielle ou perceptive
La mémoire perceptive est non déclarative. C’est une mémoire qui fait
appel au vecteur ou à la voie par laquelle le patient reçoit les informations.
Comme son nom l’indique, la mémoire sensorielle utilise nos cinq organes
de sens : l’olfaction, le toucher ou mémoire kinesthésique, la mémoire audi­
tive (surtout pour les stimuli sonores, la création musicale, etc.), la mémoire
gustative et la mémoire visuelle.
Il s’agit d’un stockage automatique. Sans s’en rendre compte, le patient
stocke des informations visuelles, sonores, des images, des bruits (voix et
sons), etc. Cette mémoire peut être très sollicitée chez les patients qui pré­
sentent le trouble du spectre de l’autisme. Leur mémoire sensorielle peut
ne concerner qu’un seul organe de sens. D’autres patients présentant un
trouble du spectre de l’autisme peuvent avoir du mal à mémoriser des infor­
mations car ils réagissent mal aux moindres stimuli sensoriels.
Mémoire explicite ou consciente
Cette catégorie de mémoire œuvre dans la déclaration des souvenirs à tra­
vers un récit, par exemple quand on demande au patient d’évoquer son
vécu personnel d’une scène ou d’une situation dont il a été témoin.
Mémoire épisodique
Cette mémoire est déclarative. Elle consiste à rappeler les événements
vécus qui peuvent être personnels ou spécifiques selon leur contexte. La
mémoire épisodique englobe le souvenir des événements (factuels) et de
leur contexte. Grâce à elle, le patient peut voyager dans le temps et l’espace.
On peut citer la mémorisation des lieux, des dates, des noms de parti­
cipants à une soirée pyjama, etc. Il existe deux sous-types : la mémoire
factuelle et la mémoire contextuelle. Les deux sont intimement liées. Si des
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180 Status clinique pédopsychiatrique

difficultés d’encodage ou de récupération se manifestent chez la mémoire


factuelle, cela entraîne inéluctablement le déclin de la mémoire contex­
tuelle, ce qui peut en définitive avoir pour effet la disparition du souvenir
épisodique dans son ensemble.
Mémoire sémantique
La mémoire sémantique consiste à stocker et à fournir des connaissances
générales sur le monde. Cette mémoire sémantique est déclarative. Le
patient ne mémorise que les faits généraux tels que l’apprentissage d’une
langue, de la géographie, ou des connaissances de culture générale, etc.
Cette mémoire nous permet de garder les caractéristiques d’un objet, d’un
lieu, d’un instrument (sa fonction, son usage, sa spécificité), etc. Il s’agit de
mémoriser les faits et les concepts historiques.

Différents troubles de la mémoire


Plusieurs causes peuvent altérer la qualité ou la quantité de la mémoire. Il
peut s’agir des : accidents, traumatismes, maladies et angoisses ou stress lors
de l’apprentissage. On peut y citer également la baisse de l’attention, voire
tout trouble qui peut toucher le circuit neurobiologique de la mémorisation.
Trouble de la concentration
C’est la diminution de l’attention soutenue sur un thème ou sur une acti­
vité. Par exemple, quand on demande au patient de faire des calculs d’addi­
tion, de soustraction ou toute autre activité intellectuelle qui requiert une
concentration mentale, le thérapeute remarque que le patient n’est pas en
mesure de finir la tâche. Il arrive aussi qu’il dise pendant l’entretien qu’il
a du mal à se concentrer en classe ou ailleurs. L’évocation des souvenirs,
le rappel des événements passés, suivre une discussion entre pairs, suivre
la conversation avec l’autre, rester actif lors de l’entretien, etc. deviennent
pour lui une tâche très coûteuse.
Trouble de la fixation
Le trouble de la fixation des souvenirs est compris comme une perte de la
capacité de fixer de nouvelles informations durant 10 minutes. On parle
d’amnésie de fixation. Le patient est incapable de retenir quoi que ce soit.
Malgré ses efforts de répéter l’acquisition des nouvelles informations, il ne
les enregistre ou ne les encode pas. Ce trouble se manifeste volontiers lors
des troubles thymiques et émotionnels. La diminution de son attention ne
fait qu’aggraver son trouble mnésique.
Trouble de l’évocation
La difficulté d’évocation des souvenirs est l’incapacité d’enregistrer et
conserver les informations à long terme. Le patient a du mal à se remémorer
ou se rappeler les renseignements, les informations, les faits, les données ou
les expériences qui datent de plus de 10 minutes. Certains ne peuvent pas
évoquer ce qu’ils ont appris ou viennent d’apprendre.

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Fonctions du moi 181

Aperception
C’est la perte de la capacité de comprendre les informations par rapport à
leur sens et de faire des liens entre les perceptions. Ce type de patients a du
mal à raconter une fable, une histoire en images, de donner une explication
ou faire usage d’un proverbe, etc.
Par exemple, un enfant raconte à son thérapeute que sa mère le punit
tout le temps, alors que sa mère ne punit que le chat. « L’un des défis impor­
tants auquel fait face toute personne qui interroge un enfant est d’évaluer
son niveau de développement et de s’y adapter. » (Cyr, 2014) Si nous ne
faisons pas attention, le patient peut nous livrer ses propres fantasmes ou
imaginations qui ne collent pas avec la réalité.
Confabulations
Elles apparaissent quand le patient remplace ses lacunes mnésiques par des
intuitions du moment qu’il tient pour des souvenirs propres. Les confabula­
tions sont observables chez le patient qui essaie de répondre aux questions
répétitives par des faits imaginés ou inventés sur le moment. Le thérapeute
note alors qu’à chaque fois qu’il pose une question, le patient lui donne une
nouvelle réponse.
Mensonge
La question de mensonge ou vérité est difficilement applicable aux patients
âgés de 2 à 10 ans. À cet âge, plusieurs raisons peuvent pousser l’enfant
à nous raconter des faits ou des choses que nous serions tentés d’appeler
mensonges. Il peut :
• essayer de combler le vide de sa mémoire par ce qu’il aurait entendu
avant ou après un événement donné ;
• compléter son histoire par d’autres événements (en les mélangeant) ;
• répondre de manière inadéquate par peur de décevoir l’adulte ;
• répéter le dernier mot qu’il vient d’entendre et resté accrocher à ça ;
• etc.
En fait, il s’avère important de rappeler que les enfants sont convaincus,
la plupart du temps sinon toujours, que l’adulte sait tout. Pour eux, l’adulte
peut tout deviner, tout savoir par avance. Il comprend ce qu’il pense et il lui
est très difficile ou incapable de le tromper. Ceci reste vrai jusqu’à ce qu’il
découvre les autres rôles de mensonges et leurs conséquences sur le plan
relationnel.
Suggestibilité
Le concept de suggestibilité est particulier en pédopsychiatrie. Il est préfé­
rable de l’éviter au maximum pendant les entretiens cliniques. « La sugges­
tibilité des enfants est une question importante puisqu’elle est au centre
même de la véracité du témoignage de l’enfant quant au mauvais traite­
ment qu’il a pu subir ou quant à l’événement dont il a été témoin. Des
procès retentissants, aux États-Unis à la fin des années 1980 ont démontré

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182 Status clinique pédopsychiatrique

clairement que les enfants, sous certaines conditions, peuvent produire


des récits qui sont faux. La suggestibilité réfère généralement aux erreurs
qui surviennent lorsque le témoin est exposé à des informations qui sont
fausses ou à une pression sociale qui encourage certains types de réponses
en particulier. Les enfants comme les adultes diffèrent dans leur degré de
suggestibilité, c’est-à-dire que la facilité avec laquelle ils acceptent les sug­
gestions et les propositions provenant d’autres personnes varie beaucoup. »
(Cyr, 2014)
En fait, la suggestibilité est fréquente dans les familles déchirées par les
conflits parentaux et les séparations ou les divorces où la question de garde
se pose. Dans ces situations, il est facile de rencontrer un des parents qui
communique de fausses informations à son enfant juste pour augmenter
ses chances d’obtenir sa garde devant la justice, en faisant passer l’autre
parent pour un monstre. Il peut trop enjoliver les propos de l’enfant ou
bien au contraire transformer ou détourner les actes, les gestes, les propos
de l’autre parent…
Autres distorsions de la mémoire
En plus de ce qui est énuméré ou cité comme trouble de la mémoire, le
thérapeute peut constater d’autres formes de troubles classés dans les dis­
torsions de la mémoire. Il peut s’agir de :
• paramnésies ;
• amnésies parcellaires : le patient oublie des détails essentiels et successifs
de son récit ;
• amnésies électives : le patient oublie quelques éléments cibles de ce qu’il
cherche à nous raconter ;
• etc.

Quid de la maltraitance, d’abus ou de harcèlement


du mineur ?
Les victimes d’abus ou de maltraitance font partie de notre patientèle. Dans
notre métier de thérapeute, nous sommes plusieurs fois confrontés à ces
types de situations. Les patients ou leurs proches peuvent nous rapporter
des informations très préoccupantes et inquiétantes. Recueillir la parole du
patient dans ce cas-là n’est pas une chose facile, ou du moins, elle exige
une certaine technicité, prudence et expérience. Car « au-delà de la for­
mation, la capacité d’adaptation des professionnels à la personnalité de
chaque enfant est tout aussi importante que leur positionnement. Ils doi­
vent adopter une attitude empathique et respectueuse de leurs sentiments
et allier le recueil de leur parole à leur bien-être en respectant leur niveau de
développement et en s’appuyant sur chacune des étapes présentes dans le
protocole : la prise de contact et la mise en confiance de l’enfant, le rappel
libre des faits, le questionnement spécifique, la clôture de l’entretien. »
(Savard, 2019) Tout ceci n’est possible que dans un cadre affecté à un tel

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Fonctions du moi 183

exercice. En revanche, notre cadre thérapeutique ne permet pas d’explorer


les abus, dont nous rappelons que les informations doivent être envoyées
aux services compétents.
Quoi qu’il en soit, notre travail se limite à un certain point. Nous sommes
invités à adresser le patient vers d’autres collègues plus compétents ou plus
impliqués dans la recherche de solution pour rendre justice et protéger le
patient. La raison qui nous amène à référer les suspicions d’abus au service
judiciaire est que leur exploration risque de convier plusieurs professionnels.
Et « face à la multiplicité des acteurs qui vont intervenir pour le question­
ner (enquêteurs, experts médicolégaux, juge d’instruction, avocat, parfois
chercheurs) et lui apporter du soutien (psychologue, éducateur, travailleurs
sociaux, assistants familiaux), l’enfant est régulièrement amené à revenir
sur son histoire, son parcours, devant des adultes qu’il ne connaît pas et
qu’il devra rencontrer parfois de manière ponctuelle, parfois de manière
plus régulière. » (Savard, 2019)
Il suffit que le patient se sente plus en sécurité ou, par le fait de lever des
défenses du moi, il se met à nous confier ce qu’il n’a pas osé dire à d’autres
personnes, y compris ses parents ou les thérapeutes précédents. Il faut être
prudent alors pour nous empêcher de le questionner plus sur ses propos
car « le rappel successif des faits, devant ces multiples interlocuteurs, n’est
pas sans conséquences pour lui et influence plus ou moins directement sa
mémoire, son discours, sa manière de penser. Au-delà de cet aspect, la fragi­
lité des liens qui caractérise bien souvent les enfants maltraités les amène à
utiliser différentes stratégies défensives à l’égard de l’adulte quel qu’il soit. »
(Savard, 2019)
Sachant que la situation d’abus doit être explorée par un expert dans un
dispositif spécifique, cette clinique doit tenir compte de l’âge, du niveau
ou de la qualité du développement psychocognitif et de la pathologie du
patient. Il ne faut pas oublier de prendre en compte le contexte, l’environne­
ment et les circonstances qui favorisent ou protègent le patient contre ses
agresseurs potentiels. Pour tout dire, « un jeune enfant ne possède pas
les mêmes capacités cognitives (mémoire, langage), intellectuelles (traite­
ment de l’information), sexuelles, affectives et sociales qu’un adolescent
par exemple. » (Savard, 2019)
Il incombe à l’expert ou à la personne mandatée de se souvenir qu’un
« jeune mineur aura aussi une capacité d’attention plus limitée mais ren­
contrera également plus de difficultés à se situer dans le temps et dans
l’espace, à se remémorer certains faits, en parler et à entrer en relation avec
l’enquêteur, d’autant plus que le traumatisme vécu pourra aussi influencer
l’ensemble de ses capacités. » (Savard, 2019) C’est pourquoi il est conseillé
d’être moins dans les suggestions ou la confrontation dès qu’un patient
nous rapporte des informations de ce genre. Il est important de savoir
jusqu’où nous pouvons aller dans cet entretien et surtout le tenir informé

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184 Status clinique pédopsychiatrique

du caractère urgent ou non, contraignant et obligatoire à devoir signaler la


situation aux autorités avec l’information claire que nous n’allons pas res­
pecter le secret professionnel ou le secret médical.
En ce qui concerne les suggestions, « les recherches ont mis en évidence le
fait que les enfants de moins de 6 ans sont les plus vulnérables aux sugges­
tions. Elles faussent souvent les informations qu’ils donnent et présentent
le risque de s’inscrire dans sa mémoire et ses souvenirs si elles sont répé­
tées, risquant ainsi d’erroner son discours. » (Savard, 2019) Une prudence
extrême est indispensable face à ce type de cas.
Bien que « les recherches scientifiques tendent à démontrer que la
répétition des faits traumatiques lors du long parcours judiciaire qui leur
est imposé appauvrit la qualité du discours » (Savard, 2019) du patient,
n’oublions pas que celui-ci peut se mettre à raconter ce qu’il aurait entendu
ou cru comprendre des histoires racontées par un autre enfant ou un adulte
proche. Notre tâche comme thérapeute est de travailler la culpabilité, le
paradoxe qu’implique la loyauté envers un potentiel abuseur ou agresseur.
Il revient à l’expert de juger de la véracité des faits. Nous devons nous limi­
ter sur ce qui est thérapeutique et les effets des événements probablement
vécus par le patient sur son développement intégral.
Techniquement, « au-delà du recueil des propos verbaux de l’enfant, il
apparaît également important d’analyser tout ce qui a trait au non verbal
comme ses comportements, ses silences, son regard, la spontanéité de ses
réponses qui caractérisent aussi le traumatisme. » (Savard, 2019) Ainsi, il est
préférable de seulement recueillir la parole du patient sans aller plus loin
dans la fouille aux détails. Le thérapeute doit consigner et rapporter mot à
mot les propos du patient. Il rapporte toutes ses observations en écrivant les
paroles du patient entre guillemets et les transmet aux professionnels atti­
trés sous forme d’informations préoccupantes ou du signalement selon la
législation en vigueur dans son pays. Il doit expliquer avec soin au patient
qu’il va devoir signaler ces informations aux autorités compétentes et à
ses responsables légaux, s’ils ne sont pas des auteurs d’agression, ou pour
autant qu’ils ne sont pas complices ou impliqués dans les abus ou mal­
traitance ou sévices que rapporte le patient. Comme dans tout entretien
clinique, l’empathie du thérapeute est très importante. Les abus laissent un
sentiment de culpabilité chez la victime. Le fait de briser le silence est un
geste audacieux.
L’expert a plusieurs manières d’explorer et de confirmer ou infirmer les
propos rapportés. Nous ne pouvons que suggérer au thérapeute de « lais­
ser l’enfant s’exprimer librement à son rythme et avec ses propres mots,
même si celui-ci ne détaille pas suffisamment les faits ou ne les aborde pas
de manière chronologique. » (Savard, 2019) Cette liberté nous permet de
gagner de la confiance du patient et de nous positionner comme un adulte
différent des autres ou de son abuseur.

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Fonctions du moi 185

Les patients qui seraient abusés ou qui seraient victimes de viol, de mal­
traitance ou de négligence peuvent rencontrer des difficultés à se remémo­
rer la scène ou les scènes qu’ils ont vécues. L’une des multiples raisons est
que ces scènes sont traumatiques en elles-mêmes. Les actes d’abus sont for­
tement chargés sur le plan émotionnel. Raconter ou dévoiler son intimité
a un effet émotionnel très fort. Le patient submergé par l’émotion pourrait
avoir du mal à aborder son mal-être et demander qu’un proche le fasse à sa
place. Rappelons encore que « l’état de stress post-traumatique et l’état de
sidération dans lequel il peut se trouver au moment de la première audition
peuvent appauvrir la qualité de son discours, altérer sa mémoire et néces­
siter une nouvelle rencontre » (Savard, 2019) entre le patient et l’expert ou
la personne autorisée à mener des auditions. Quelle que soit la personne
qui nous donne les informations, nous devons nous souvenir que nous ne
sommes pas mandatés pour mener des entretiens de type audition dans nos
consultations.
En ce qui concerne les rapports à la réalité et le lien entre abusés et agres­
seurs ou auteurs d’abus, « l’enquêteur doit avoir conscience du fait que les
enfants victimes de maltraitances commises par leurs parents peuvent être
en difficulté pour placer un événement dans l’une des catégories, normale
ou anormale, car les modèles parentaux les amènent à intégrer un schéma
violent et maltraitant comme étant conforme à la réalité. » (Savard, 2019)
Cela dit, il revient au thérapeute de faire la part des choses entre les fan­
tasmes et la réalité des propos du patient. Après tout, devant un doute, il
vaut mieux signaler la situation et travailler après avec le patient ce qui est
ou n’est pas acceptable dans la société et les différents rôles (protection,
éducation, instruction, accompagnement, etc.) des uns et des autres au
regard des mineurs.
À Genève, c’est à la police de brigade des mineurs spécialisée qui mène
ces types d’entretiens pour chercher la véracité des faits rapportés. Après
avoir relayé la situation d’abus ou de maltraitance aux autres collègues spé­
cialisés dans ce domaine, le clinicien doit se souvenir qu’il continue à être
le thérapeute référent pour le patient. Son objectif n’est pas de rechercher
la véracité des faits que le patient rapporte ou raconte. Il ne peut nulle­
ment se lancer dans des confrontations ou d’autres moyens d’investigation.
L’alliance thérapeutique et l’alliance de travail doivent être préservées à
tout prix.

Exploration de la mémoire
L’exploration de la mémoire tient compte de l’âge du patient. Le thérapeute
doit éviter les questions directes ou les questions à caractère suggestible. Il se
doit de laisser au patient la possibilité de faire appel à ses souvenirs ou à ses
capacités de rappel. En revanche, il peut guider le patient à l’aide des indices
ou d’autres médiations ou outils qui favorisent le rappel de souvenirs.

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186 Status clinique pédopsychiatrique

Techniquement, l’exploration de cette fonction supérieure peut être faite


de plusieurs manières. Il existe des tests ou des questionnaires à faire pas­
ser au patient. Nous proposons plutôt d’utiliser des questions ouvertes et
moins directives telles que :
• « Peux-tu me raconter les activités que tu fais avec après l’école ? »,
« Qu’est-ce que tu faisais avec tes copains après l’école ? », « Parle-moi de ta
journée d’hier » ou « Peux-tu me parler de ce qu’il s’est passé pendant que
tu étais au parascolaire ? »
• « Tu me dis que tu as joué au football, alors parle-moi de ce que tu as
fait », « Avec qui tu préfères jouer au football ? », « Tu me parles de dispute,
veux-tu bien m’en dire davantage ? »
• « Où as-tu passé les vacances l’été dernier ? », « Qu’est-ce que tu faisais
entre le matin et le moment où tu partais au lit pendant ton séjour au camp
ou pendant ces vacances ? », « C’était comment la sortie du week-end ? »,
« Qu’est-ce que tu as apprécié pendant tes vacances ? », « Est-ce que tu étais
ami ou proche avec tout le monde ? », « Explique-moi comment tu avais eu
peur cette nuit-là ? », etc.
• « Tu sais que je ne sais pas avec qui tu vis chez toi, veux-tu bien me parler
de ta famille ? », « Combien êtes-vous dans votre famille ? », « Comment
s’est passée la fête d’anniversaire de ta sœur ? », « Qui a commencé à se
bagarrer lors de la soirée d’anniversaire ? »
• « Comment s’appelait ton meilleur ami de la crèche ? », « Comment
s’appelait ta maîtresse de l’école enfantine ? », « Parle-moi de ce jeu que tu
préfères à la récréation », « Avec qui joues-tu le plus souvent ? », « Est-ce que
tu te rappelles ce qui s’est passé ce matin dans le vestiaire ? »
• « Je te montre ces cartes de jeu, tu pourras les retrouver selon cet ordre,
tout à l’heure ? », « Peux-tu te rappeler comment étaient rangés ces cinq
jouets tout à l’heure ? » ; etc.
Une autre stratégie serait de partir des éléments récents vers les plus
anciens. Il est conseillé de partir également des éléments qui sont moins
chargés sur le plan émotionnel vers les éléments plus chargés émotionnelle­
ment. Enfin, l’exploration de la mémoire devrait partir de l’extérieur vers
l’intérieur. Plus le patient est en confiance, plus il livre des informations
sans les surcharger ou essayer de les transformer pour dire ce qu’il croit que
nous avons besoin d’entendre.

Raisonnement
Définition
L’activité de raisonner précède le jugement ou l’épreuve de réalité. Le rai­
sonnement correspond à la capacité d’aller chercher les images, les souve­
nirs dans le passé ou le futur. Le patient utilise ses diverses connaissances
acquises dans le processus de raisonnement. Il se réfère aux expériences
personnelles et à celles des autres pour comprendre, juger, décider, etc.

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Fonctions du moi 187

Raisonner équivaut à penser. C’est aussi fournir des arguments pour appuyer
ou soutenir ses réflexions ou ses hypothèses.
Il convient de dire que le raisonnement équivaut dans certaines circons­
tances à avoir une capacité de rêverie. Cette capacité de rêverie évite les pas­
sages à l’acte. Le patient peut réfléchir avant de passer à l’acte, s’appuyant
sur son surmoi. Cette activité de penser permet à l’individu de fournir des
thèses et d’antithèses avant d’arriver à une conclusion lors d’une discussion.

Capacité d’insight ou capacité autoréflexive


La capacité d’insight ou la capacité autoréflexive est la capacité de regarder à
l’intérieur de soi-même. Le thérapeute vérifie si le patient peut arriver à pen­
ser sur sa propre pensée. Dominique souligne : « La psychanalyse nomme
insight le processus par lequel un sujet se saisit d’un aspect de sa propre
dynamique psychique jusque-là méconnu de lui. Il s’agit d’un moment
très particulier de la cure analytique, où l’analysant prend conscience
d’un aspect de sa propre conflictualité, d’un mouvement pulsionnel, d’un
aspect de ses défenses jusqu’alors refoulé ou dénié… » (Dominique, 2012)
Dans l’évaluation pédopsychiatrique, la capacité d’insight est la faculté de
faire une introspection et à comprendre ses actes.

Capacité de se mettre à la place de l’autre


La théorie de l’esprit nous explique comment le patient peut arriver à se
mettre à la place de l’autre. Dans la théorie de l’esprit, « le principe de base
étant celui de l’attribution ou de l’inférence, les états affectifs ou cognitifs
d’autres personnes sont déduits sur la base de leurs expressions émotion­
nelles, de leurs attitudes ou de leur connaissance supposée de la réalité. »
(Duval et al., 2011)
Le thérapeute demande au patient d’essayer d’imaginer ce que peuvent
penser les autres devant telle ou telle autre circonstance. On essaie de l’ame­
ner à se demander ce que son entourage pense de ses actions, de ses actes,
de ses attitudes, de ses gestes, etc. Quelles sont les pensées ou les émotions
qu’il fait vivre aux autres à partir de ses propos, de ses actions, de ses actes,
de son comportement et de ses attitudes ?
Il s’agit de chercher la capacité d’empathie du patient devant les passages
à l’acte, l’hétéroagressivité, le trouble de conduite, les attitudes inadéquates
diverses du patient, etc. Le thérapeute essaie de savoir ce que s’imagine ou
ce que pense le patient de ce que les autres pensent de ses faits et gestes.
Enfin, les patients à fonctionnement borderline sont plus disposés à béné­
ficier de la thérapie fondée sur la mentalisation. Ce type d’approche théra­
peutique leur permet d’anticiper la survenue d’un déséquilibre émotionnel
ou d’éviter des explosions émotionnelles spontanées. Grâce à une prise en
charge conséquente, le patient peut avoir la possibilité ou la capacité de
mentaliser ses états mentaux pour bien gérer le flux de ses affects, et éviter
ainsi les multiples passages à l’acte.

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188 Status clinique pédopsychiatrique

Exploration du raisonnement
Explorer la qualité du raisonnement du patient revient à analyser sa manière
de mener une réflexion ou de faire des déductions ou des inductions dans
une discussion ou échange avec l’autre. Le thérapeute objective si le patient
reste cohérent, logique et concis dans sa manière de réfléchir. Comment
organise-t-il son raisonnement ou planifie-t-il ses activités ? Son jugement
est-il cohérent à la réalité externe ? Le patient est-il adéquat dans son rai­
sonnement selon son âge ? Reste-t-il dans un raisonnement généralisé ou
peut-il pousser très loin sa réflexion et aborder ou apporter plus de détails
dans la discussion ?
Le thérapeute essaie de confronter le patient en soulevant ou en souli­
gnant des contradictions dans ses propos pour voir comment il réagit ou
comment il supporte cette remise en question de ses postulats. Il ne s’agit
pas de se montrer jugeant à l’égard du patient, mais d’évaluer sa souplesse
mentale, son sens critique, ses capacités d’ajustements, l’authenticité de
son raisonnement. Cette confrontation doit se faire dans l’empathie et la
neutralité.

Distorsion du raisonnement
Confusions
La confusion que nous abordons ici est différente de celle que l’on peut
observer chez le patient qui est dans un état crépusculaire ou l’emprise des
toxiques. On parle d’un raisonnement confus quand le patient confond
les détails ou mélange les informations qu’il nous raconte. Son discours
devient difficile à suivre et à comprendre. Il se perd ainsi dans les détails,
il remplace ses oublis par d’autres informations qui n’ont pas lieu d’être
données ni abordées dans le thème de discussion.
Contradictions
Le patient qui se contredit est incapable de s’en rendre compte. Il peut
persévérer dans ses assertions bien que le thérapeute vienne de lui faire
remarquer son erreur. Il peut, dans ce cas, avancer dans une même démons­
tration deux postulats diamétralement opposés. Il a du mal à cerner la
contradiction de ses propos. Sur le plan psychodynamique, les contradic­
tions sont relevées chez le patient qui présente un clivage du moi comme
mécanisme de défense.
Incompréhensions
Il arrive que le patient livre un discours complètement opaque ou qui
entraîne des céphalées si l’on cherche à le comprendre. Ce genre de rai­
sonnement est retrouvé chez les patients psychotiques, ceux qui sont sous
l’emprise de toxiques, etc. Bien que le thérapeute demande au patient de
répéter encore et encore son histoire ou son discours, il persiste à ne rien
comprendre.

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Fonctions du moi 189

Troubles de la logique et de la causalité


Il s’agit des réflexions qui n’ont pas de logique en soi. Les faits sont rappor­
tés comme si le patient les collait les uns à côté des autres. Ce genre de dis­
cours use la patience du thérapeute et fatigue sa capacité d’écoute. Le lien
de cause à effet est absurde. Tout est mélangé et le thérapeute a l’impression
que les faits sont parachutés sans aucune logique, harmonie, directive, etc.
Pseudo-cohérences
Ce genre de raisonnement demande au thérapeute d’avoir une oreille fine
et une écoute attentive. Le patient arrive à glisser certaines informations qui
n’avaient pas lieu d’être dans la conversation. Ses propos donnent l’impres­
sion de suivre une suite logique, mais au fond, on découvre que tout est
incohérent et illogique.
Pseudo-logiques
Les pseudo-logiques sont proches du raisonnement en pseudo-cohérence.
Si le thérapeute reste attentif et confronte le patient à ses assertions, il
découvre le manque de logique dans ce que le patient vient de lui raconter.

Test ou épreuve de réalité ou jugement


Généralités
La plupart des auteurs reconnaîtraient dans l’épreuve de réalité « un proces­
sus, postulé par Freud, permettant au sujet de distinguer les stimuli prove­
nant du monde extérieur des stimuli internes, et de prévenir la confusion
possible entre ce que le sujet perçoit et ce qu’il ne fait que se représenter,
confusion qui serait en principe de l’hallucination. » (Laufer & Laufer, 1989)
Pour pousser plus loin la réflexion, « sous le terme d’épreuve de réalité,
il semble que soient encore confondues deux fonctions assez différentes :
l’une fondamentale qui consisterait à différencier ce qui est simplement
représenté de ce qui est perçu et instituerait de ce fait la différenciation du
monde intérieur et du monde extérieur, l’autre qui consisterait à compa­
rer l’objectivement perçu au représenté de façon à rectifier les éventuelles
déformations de celui-ci. » (Laufer & Laufer, 1989)
L’exploration de l’épreuve de réalité consiste à chercher si le patient peut
différencier l’imaginaire du fantasme et de la réalité. Le test de réalité peut se
chercher en dehors des troubles perceptifs (hallucinations). Le patient ado­
lescent « peut alors avoir recours à une rupture d’avec la réalité comme seul
moyen pour lui de préserver la déformation originaire du passé. Certaines
constructions délirantes, les projections paranoïdes, les agressions violentes
contre son propre corps telles qu’on peut les voir dans les tentatives de sui­
cide et l’automutilation, les hallucinations de l’adolescent peuvent toutes
être comprises comme le résultat de cette rupture du développement. »
(Laufer & Laufer, 1989)

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190 Status clinique pédopsychiatrique

Le thérapeute se demande le long de l’entretien si le patient est adéquat


ou non. Existe-t-il une distorsion du jugement ou une pensée abstraite,
etc. ? Observe-t-il des tâtonnements, des précipitations, des blocages dans
son récit ? Dans la clinique de l’enfant, il est important de se référer au
niveau de développement. Le test de réalité s’acquiert normalement entre
6 et 8 ans.
Facilité à distinguer les stimuli ou la réalité interne et externe
Bonne différenciation entre mondes interne et externe
Le patient qui a une bonne différenciation entre le monde interne et externe
a une conscience de son état interne. Il est également capable d’exprimer
ses problèmes, ses peurs, ou ce qui le perturbe émotionnellement, etc. Sur
le plan de la perception externe, le patient a une bonne imagination. Il
est conscient et arrive à différencier ce qui appartient à la réalité de ce qui
appartient plutôt à l’imaginaire et au fantasme.
Intrusion répétée des pensées ou fantasmes bizarres
Cette situation peut être objectivée lors des moments de stress qui sont
réversibles avec du soutien de l’entourage ou non. Ici, le test de réalité est
globalement conservé mais peut être altéré lors de moments d’angoisse ou
d’anxiété. Cet état est mis à jour par le jeu. Ce moyen de médiation permet
au patient de manifester son état anxieux à travers une agitation psycho­
motrice.
Il arrive que l’on observe des dérapages, des délires, une confusion entre
la réalité et la fantaisie, une interprétation des événements extérieurs, un
équilibre entre le faire-semblant et le réel.
Justesse de la perception
Il s’agit d’analyser comment le patient interprète les événements extérieurs,
comment il rapporte les événements selon l’ordre de leur survenue dans le
temps et dans l’espace.
Conscience de la réalité et états internes morbides
Par conscience de la réalité et états morbides internes, on comprend que
le patient a une capacité d’exprimer ses problèmes, ses peurs, etc. Le thé­
rapeute analyse comment il arrive à différencier ce qui est de l’ordre de
l’imaginaire, du fantasme ou de la réalité.
Distorsions du test de la réalité ou jugement
Déréalisation
Ce symptôme se manifeste chez un patient qui a l’impression que les per­
sonnes, les objets de son environnement paraissent comme étant irréels,
étrangers, déformés. Le monde extérieur lui semble non familier, bizarre,
fantomatique.

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Fonctions du moi 191

Dépersonnalisation
Elle fait partie des troubles de l’éprouvée corporelle. Le patient a l’impres­
sion d’être déshabité dans son propre corps. La dépersonnalisation est un
« sentiment d’irréalité portant sur la perception de soi (en totalité ou en
partie) ou du monde environnant, qui survient dans les situations extrêmes
de stress ou de fatigue. » (Kaplan & Sadock, 2005) Dans la dépersonnalisa­
tion, le patient perd son identité au cours de sa vie (cf. supra « Justesse de
la perception »).
Pensées imposées
Les pensées du patient sont perçues comme influencées, fabriquées, diri­
gées de l’extérieur. Il s’agit d’une « idée délirante selon laquelle le patient a
l’impression qu’une force extérieure ou d’autres personnes lui ont implanté
des pensées dans son propre esprit » (Kaplan & Sadock, 2005).
Le patient qui a des pensées imposées dit qu’il se sent incapable de contrô­
ler ses idées ou ses pensées. Il peut pointer ou identifier la personne auteur
de son calvaire ou non. Il dit être persécuté par l’imposition de ses pensées
et idées. Il est incapable de s’en débarrasser. Il ne s’agit pas de ruminations
anxieuses qui font qu’il cogite sans en finir sur une thématique unique ou
multiple et n’arrive pas à couper le cercle vicieux. Dans les pensées impo­
sées en revanche, le patient sait qu’il ne s’agit pas de ses propres pensées
ou idées. Il reconnaît qu’elles lui sont dictées ou communiquées par force
de l’extérieur.
Devinement de la pensée ou pensées dévoilées ou devinées
par un tiers
Le patient croit que les autres peuvent lire ses propres pensées ou que lui-
même est en mesure de lire dans les pensées des autres. Il peut dire avec
conviction, par exemple : « Les gens dans la rue, dans le centre commercial,
à l’école, à la télé, etc. savent mes pensées même si je ne dis rien. »
Le patient est persécuté et angoissé à l’idée de sortir de chez lui car tout
le monde sait ses idées, ses pensées, etc. Certains recourent à des stratégies
de lutte (se couvrir les yeux, porter un habit spécial, ne sortir qu’à certaines
heures de la journée, etc.).
Vol de la pensée
Le patient peut dire que ses pensées lui sont enlevées par quelqu’un d’autre.
Il a l’impression que les gens lui volent ses idées ou ses pensées. Le vol de
la pensée est différent des idées de concernement où le patient se croit être
victime d’un complot. Ce vol de la pensée est encore différent des idées de
référence où le patient croit que tout le monde parle de lui, il est le seul qui
intéresse les autres, etc. Inversement, dans le vol de la pensée, le patient
croit être le centre d’intérêt lors des discussions ou échanges avec les autres.

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192 Status clinique pédopsychiatrique

Il affirme avec certitude que les gens lui ont volé ses idées, son projet, ses
stratégies et ceci avant que lui-même ne les communique.
Idées de référence ou de concernement
Elles sont retrouvées chez le patient qui souffre d’un trouble délirant. Il est
fermement convaincu de la véracité de leur perception ou croyance.
• Le patient, dans sa grande conviction, dit que des personnes étrangères
à son entourage lui envoient des signes ou parlent de lui derrière son dos.
Il peut avoir cette conviction quand il se trouve dans la rue, dans les trans­
ports en commun, au marché, dans les manifestations publiques et privées,
dans des rassemblements ou lieux de rencontres, etc.
• Il soutient que les différentes émissions de radio et de télévision ou les
réseaux sociaux sur internet parlent de lui ou s’adressent directement à lui.
• Le patient peut être convaincu que la presse locale, les journaux locaux,
nationaux ou internationaux ne parlent que de lui. Les médias écrits ont
tous orienté leurs projecteurs vers lui. Il n’y a plus d’autres thèmes dans les
journaux que ceux qui le concernent ou d’articles qui lui sont destinés.
• Le patient dit que tous ou presque tous les objets qui permettent une
communication (par exemple les panneaux d’affichage, les panneaux
publicitaires, les pancartes, les calicots ou les banderoles, les différentes
banderoles posées sur la route, etc.) ou toutes les situations ont été conçus
délibérément pour lui envoyer un message. Il peut ou non dire comment il
sait ou reçoit lesdits messages, l’essentiel est qu’il y croit fortement.
• Un autre patient dit que les différents événements (les catastrophes ou
accidents locaux, nationaux, internationaux, du monde entier, etc.) lui
transmettent une information ou ont un caractère particulier pour lui. Soit
il peut arriver à le démontrer, soit il affirme qu’il le sait par son instinct ou
son sixième sens.
Pensée magique
Le patient se dit être capable de changer les choses en une claque. La
pensée magique est normale chez les plus jeunes qui sont dans la rêverie
et la toute-puissance infantile. La pensée magique est considérée comme
physiologique avant l’âge de 7 ans. La pensée magique est « une forme de
pensée déréistique […] les pensées, les mots ou les actes ont un pouvoir
(par exemple, peuvent provoquer ou empêcher un événement). » (Kaplan
& Sadock, 2005)
Rationalisme morbide
Le patient qui fait des rationalismes morbides conserve son jugement dans
ses aspects dynamiques et ses possibilités discriminatives, mais il reste flou
et abstrait. Il s’observe dans la pensée dissociée caractéristique du syn­
drome dissociatif et se traduit par une rationalisation systématique, froide
et pseudo-logique associée au désintérêt et à l’inaffectivité.

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Fonctions du moi 193

Fausseté du jugement
Le patient a tendance à tout interpréter dans le même sens, en rapport avec
une conviction prévalant et caractéristique de la pensée paralogique. Ce
trouble du jugement infléchit le raisonnement et s’exprime par un discours
démonstratif, ordonné, cohérent et rigoureux, mais fondé sur des postulats
inexacts.

Épreuve de réalité dans la psychopathologie


Le test de réalité renvoie vers l’investigation de type d’angoisses primitives
qui, à leur tour, conduisent à la recherche des mécanismes de défense aux­
quels a recours le patient pour se protéger contre les menaces pulsionnelles
et les attaques du corps. Le plus souvent, les éléments psychotiques (délire,
hallucination, symptômes négatifs, etc.) altèrent le test de réalité du patient.
L’épreuve de réalité du patient est liée à sa capacité de discernement.
Celle-ci dépend de son âge, de sa pathologie et du contexte environnemen­
tal dans lequel il a grandi. Le test de réalité est intimement lié aux autres
instances psychiques et fonctions supérieures autonomes du moi.
Sur le plan psychodynamique, le thérapeute doit porter un grand intérêt
à cette fonction du moi qui lui permet d’analyser comment est fait l’agence­
ment des différentes fonctions du moi. Il doit faire une différenciation entre
le monde interne et externe. Pendant l’exploration de l’épreuve de réalité,
il examine les capacités du patient à avoir recours ou usage du perceptif. Il
décrit la capacité du patient à utiliser les fonctions autonomes du moi par
exemple le langage, la motricité, l’intelligence, la mémoire, etc.
À la fin de l’évaluation, le thérapeute devrait également transcrire dans
son rapport si son examen clinique a révélé la présence de capacités subli­
matoires chez le patient. Plus encore, il vérifie s’il existe ou s’il reste certains
secteurs de fonctionnement mental ou psychodynamique préservés ou
fortement atteints.

Exemples de test de réalité


Cliniquement, le thérapeute peut noter différentes qualités du test de réa­
lité chez ses patients selon leur psychopathologie :
• le plus souvent, les patients qui ont une structure psychodynamique
névrotique ont un test de réalité assez fonctionnel. Le thérapeute note que
l’épreuve de réalité du patient est ou n’est pas globalement préservée. Par
exemple, l’hystérique fabule mais reste dans la réalité quand on essaie de
confronter ses dires et les éléments de la réalité. Le patient doit être sensible
à la contradiction pour pouvoir garder l’épreuve de réalité ;
• quand l’anxiété envahit certains patients, on remarque que leur test de
réalité peut être remis en cause ou parfois altéré. Les défenses du patient
peuvent s’effondrer devant une grande charge émotionnelle. Le test
de réalité vacille, fragile ou dérape chez des personnes ayant des fortes

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194 Status clinique pédopsychiatrique

angoisses ou de sentiment de persécution. Le patient peut avoir du mal à


séparer ce qui revient au jeu ou à la réalité dans ces moments de grande
confusion ;
• les patients qui ont un test de réalité qui tient peuvent évoquer qu’ils
ressentent des envies ou des imaginations riches et qu’ils arrivent à différen­
cier le réel de l’imaginaire. Ces patients ont une capacité de nommer leurs
peurs ou d’exprimer leurs problèmes ;
• on peut noter des dérapages, des ruptures, des délires ou une confusion
entre la réalité ou la fantaisie ;
• le thérapeute note des moments de rupture quand l’émotionnel devient
très important. Il y a une rupture de la mentalisation. L’épreuve de réalité
peut être défaillante.
Enfin, l’exploration de l’épreuve de réalité aide le thérapeute à constituer
un tout pour se faire une idée sur le fonctionnement du patient. Il semble
inutile qu’il cherche à tout prix à confronter le patient à la réalité après
avoir vu que son test de réalité est défaillant. Tout simplement, il doit cher­
cher à s’allier à une des parties du patient qui lui semble plus ou moins
fonctionnelle afin de soigner ses autres parties malades.

Exploration du test de réalité


Lors de l’exploration du test de réalité ou de l’épreuve de réalité, le théra­
peute doit se référer au développement normal du patient selon le groupe
de pairs. Le test de réalité peut être évalué lors du jeu ou la manière dont le
patient exprime ou justifie ses actes ou ses réactions, ses actions, ses faits et
gestes, ses pensées, ses idées, ses croyances, ses angoisses, ses émotions, etc.
Quelle critique ou quel commentaire apporte-t-il durant l’entretien ?
En bref, il faut évaluer la qualité de la cognition, de la mémoire, de
l’attention, du jugement, du raisonnement – qui peut être bonne ou altérée –,
rechercher d’éventuels retards du développement cognitif, affectif, biolo­
gique et social du patient. Est-ce que ce développement se fait normalement
avec ou sans difficultés d’accomplissement ? Il faut toujours se demander
quel est le niveau, cliniquement parlant, de l’intelligence du patient.
Est-ce que l’on note des retards ou des inadéquations par rapport à son
âge ? Est-ce que le patient est dans la norme moyenne, supérieure, sur­
douance ou inférieure à la norme ? Quelles sont ses capacités sublimatoires
(productions symboliques, jeu, dessin, etc.) ? Son potentiel cognitif est-il
bon ou préservé, mais affecté ou entravé par autre chose ?

Fonctions non autonomes du moi


Celles-ci dépendent directement ou sont très en lien et influençables par les
affects. Il s’agit du langage ou du discours du patient, de la motricité, de la
pensée et de la perception.

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Fonctions du moi 195

Les différentes ou diverses fonctions du moi sont en interdépendance.


Dire qu’une fonction dépend ou non des affects n’empêche pas celle-ci
d’être influencée par la quantité et la qualité des affects. Comment le moi
intègre-t-il et gère-t-il toute cette panoplie d’informations ?

Pensée
En psychanalyse moderne, la pensée équivaut au préconscient. Le patient
peut être inhibé sans avoir un préconscient défaillant. Ainsi en clinique, on
peut rencontrer des difficultés à faire la part des choses entre les inhibitions
du trop-plein ou du tout vide. Le non-verbal aide à évaluer le trop-plein et
le trop vide. Par exemple, dans le trop vide, le patient répond par : « Je ne
sais rien… ».
En plus de la pensée, le préconscient du patient devrait être analysé sur
plusieurs items : conscience, mémoire, raisonnement et intelligence. Tous
ces concepts sont étroitement connectés. Il convient d’étudier concept
après concept. Pour l’instant, voyons dans la suite en quoi consistent les
troubles du cours et du contenu de la pensée.

Cours de la pensée
Le thérapeute cherche à savoir si la pensée du patient est continue ou discon­
tinue dans son cours. Est-ce que cette pensée présente des glissements ? Le
patient passe-t-il d’un rythme à un autre ? Ce rythme devient-il subitement
lent ou rapide, voire accéléré ? Est-ce que le patient énonce des coq-à-l’âne,
des réponses à côté, etc. ? Le patient peut avoir un discours plaqué ou très
médical qui reste moins informatif. Il est important de vérifier avec lui s’il
comprend toutes les expressions ou mots techniques qu’il raconte en séance.
Distorsions de la pensée sur le plan quantitatif
Continuité ou discontinuité
La continuité peut se comprendre comme étant le contraire ou l’inverse de la
discontinuité. Lorsque la pensée du patient est continue, on remarque qu’il
a des idées claires et continues. Son récit est facile à suivre par n’importe
quel auditeur. Le thérapeute note de la cohérence dans ses propos.
La recherche de la continuité de la pensée consiste à voir si le patient
garde ou non le fil rouge dans ses pensées ou dans son discours. On se
demande s’il lui arrive de se perdre en cours de chemin de réflexion. Arrive-
t-il à conclure ses idées ou à faire entendre son message ?
Fuite des idées
Le thérapeute éprouve des difficultés à suivre la pensée du patient qui
manque de cohérence dans ses idées. Celui-ci aborde mille et un sujets à la
fois. On ne retrouve pas un fil rouge dans ses propos. Les jeunes patients ont
souvent du mal à rester sur les mêmes types de jeu. Ils explorent plusieurs
jouets à la fois. Ils papillonnent dans le bureau. Le thérapeute a du mal à

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196 Status clinique pédopsychiatrique

contenir le patient. Il arrive que l’entourage du patient rapporte une dif­


ficulté à suivre son discours et à comprendre tout ce qu’il aborde lors des
discussions, ses jeux, etc.
Pensée irréaliste ou floue
Le patient peut perdre son interlocuteur par ses pensées floues qui s’écartent
de la réalité ou du réel. Le thérapeute a du mal à comprendre ou à suivre
son discours. Ce discours a peut-être beaucoup ou moins de détails qui nous
empêchent de mieux le suivre. Finalement, le thérapeute a l’impression
d’être « largué » et perdu sur le chemin. Les propos sont flous et moins en
rapport avec la réalité. Il est important d’examiner et de faire un lien entre
les pensées floues et le syndrome délirant, le trouble de mémoire, etc.
Labilité des pensées
Les pensées du patient changent de versant affectif d’un moment à l’autre.
Pendant qu’il parle de sa tristesse, il change automatiquement et parle de la
joie, crie, chante, pleure à la fois, etc. Cette labilité des pensées s’extériorise
par la nature des affects et la qualité de l’humeur de celui qui parle. On peut
juger si les pensées sont congruentes ou non à l’humeur et aux affects du
patient (cf. la labilité affective chapitre 17).
Pensée logique ou illogique
Les pensées logiques sont conformes à la réalité de tout le monde. En cas de
pensées illogiques, le patient perd de la cohésion, de l’ordre, de la logique et
donne des explications erronées des faits. Durant l’évaluation, le thérapeute
note si les pensées du patient ont une logique en soi ou non. Il s’agit de
rechercher également s’il existe de la cohérence dans ses propos ou son
récit. La logique à chercher se situe d’abord entre les pensées du patient,
puis entre ce qu’il raconte et la réalité de son contexte socioculturel.
Logorrhée
La logorrhée est un des signes de la tachypsychie. Le patient qui a la logor­
rhée peut dire qu’il a l’impression que ses pensées ou ses idées « vont à
cent à l’heure ». La logorrhée est un flux continuel de mots avec rapidité et
prolixité. La précipitation du débit verbal associé parfois à une graphorrhée
fait que le discours devient souvent incompréhensible en raison de la trop
grande rapidité dans la succession des idées.
Pensée interrompue, ou ruptures du cours de la pensée
Le thérapeute souligne plusieurs arrêts ou coupures dans la continuité du dis­
cours. Le patient donne l’impression soit d’être très loin de ses idées ou de ses
pensées, soit qu’il recherche ses mots ou ses expressions. Son discours n’est
pas fluide. Cette situation peut évoluer vers le fading, la bradypsychie, la pau­
vreté de la pensée, etc. Ce signe peut être observé dans les inhibitions graves,
la dépression, les troubles psychiques ou les déficiences intellectuelles.

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Fonctions du moi 197

Ralentissement de la pensée
La pensée ralentie caractérise la bradypsychie. Le patient parle avec un
rythme très lent. Ce ralentissement peut être dû au trouble de concen­
tration traumatisme ou la catastrophe, voire à une autre cause : prise de
toxiques, cause neurologique (syndrome frontal, etc.), etc.
Le thérapeute doit faire la part de choses entre la dispersion des pen­
sées et les difficultés de concentration. Le patient a du mal à parler comme
habituellement. On lui demande s’il arrive à remarquer sa lenteur aussi.
Pourquoi parle-t-il ou réfléchit-il avec autant de lenteur ?
Le ralentissement de la pensée est différent de l’aboulie intellectuelle.
Dans celle-ci, le patient éprouve de la peine à réfléchir ou ressent une fatigue
intellectuelle. Le ralentissement de la pensée peut ou non correspondre au
ralentissement psychomoteur. Il n’est pas rare que l’on observe une agi­
tation motrice chez les patients qui ont un ralentissement de la pensée.
Dans un niveau sévère du ralentissement de la pensée, on peut noter que le
« cours de la pensée perturbe considérablement le discours qui est hésitant
et marqué par de longues pauses » (Preising & Serre, 2000).
Rythme de la pensée rapide ou accéléré
Le patient parle vite, le thérapeute a du mal à le suivre malgré ses efforts.
La pensée est souvent accélérée dans la manie, l’alcoolisme, la prise de
toxiques, etc. Le thérapeute peut demander ou faire remarquer au patient
qu’il a une pensée accélérée et voir comment il réagit (se justifie-t-il ? Le
confirme-t-il ? Est-ce qu’il sait pourquoi ses pensées sont accélérées ainsi ?
Etc.) « Comment trouves-tu ta façon de penser ? » Quel est le sentiment qui
accompagne une pensée accélérée ?
Tachypsychie
La tachypsychie peut se manifester par une fuite d’idées, une logorrhée,
des coq-à-l’âne, le relâchement d’association d’idées, etc. Le patient a une
accélération de sa pensée, une instabilité psychomotrice, etc. La tachypsy­
chie est un véritable signe d’une désorganisation psychique. Le thérapeute
peut avoir du mal à suivre le patient. Il aborde tous les sujets et « va à cent
à l’heure ». Le patient peut confirmer avoir un flux d’idées. Il se sent sub­
mergé par ses idées et pensées. Certains disent n’être pas en mesure de les
contrôler ni de les ordonner. D’autres, en revanche, ont de la peine à s’aper­
cevoir qu’ils sont abondés par l’afflux massif des idées et pensées. D’autres
encore disent qu’ils ont du mal à finir une tâche commencée.
Distorsions de la pensée sur le plan qualitatif
La distorsion de la pensée se manifester par une pensée cohérente, incohé­
rente ou fluide. Le thérapeute peut noter des glissements de la pensée ou le
manque de bonnes capacités d’associations. Il peut y avoir des irruptions des
processus primaires. Le thérapeute observe que le patient a des associations

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198 Status clinique pédopsychiatrique

relâchées, des liens absurdes. Il arrive que les associations d’idées du patient
soient difficiles à suivre.
Idées de grandeur
Les idées de grandeur sont très caractéristiques de l’expansion de l’humeur.
Elles sont très fréquentes dans le trouble bipolaire ou la manie (cf. infra).
Ces idées peuvent encore être retrouvées chez les personnes qui présentent
une inflation du narcissisme. Le patient tient des propos grandioses. Il a
des idées ou des projets qui vont au-delà de ses capacités mentales, intellec­
tuelles, financières, économiques, etc.
Discours confus
Le discours du patient est confus et déborde de contradictions. Ce discours
confus est retrouvé chez le patient dément ou qui présente un syndrome
neurologique. Il peut s’agir également d’une personne qui a consommé des
toxiques, des médicaments, etc. Il est important d’écarter le risque vital et
d’évaluer le risque suicidaire quand le thérapeute note une confusion dans
le discours du patient après avoir consommé des drogues. Cet état peut
être accompagné de léthargie. Devant un patient confus, un moindre doute
peut justifier son hospitalisation pour compléter son investigation clinique.
Sauts de coq-à-l’âne, jeux de mots, salades de mots
• Le patient passe d’un sujet à un autre avec ou sans lien entre les sujets.
On ne trouve pas de transition ni de lien entre les thèmes abordés durant
l’entretien.
• Dans les jeux de mots, le patient essaie de développer ou de transformer
ou de rapprocher des mots qui ont une même consonance, son ou même
racine sans que cela soit important dans la communication. Il le fait sur le
mode de la plaisanterie et du plaisir niais. On retrouve ce type de jeux de
mots chez les patients bipolaires sur un versant d’hypomanie ou maniaque.
• La salade de mots consiste à dire différents concepts ou mots qui man­
quent de cohérence ou de logique grammaticale ou lexicale.
Débordement par l’affect
Le patient qui est débordé par l’affect n’arrive pas à exprimer ses idées à
cause du débordement émotionnel. Il est bloqué par l’excès de tristesse,
de joie, etc. Le thérapeute a du mal à mener son entretien étant donné
que le patient est submergé par ses émotions. Il peut s’agir des affects qui
congruent ou non à l’humeur. Le thérapeute valide l’affect dans l’objectif de
rabaisser le niveau émotionnel haut du patient. Cette technique de menta­
lisation permet lui de poursuivre son entretien.
Idées confabulatrices
Elles sont retrouvées chez le mythomane. L’humeur de base est en adé­
quation avec les histoires qu’il invente. Elle est souvent élevée, joyeuse
lorsqu’il parle de ses confabulations. Cela va curieusement de pair avec une

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Fonctions du moi 199

grande indifférence. Si le thérapeute le contredit ou s’il prétend ne pas le


croire, le patient se contente parfois de changer d’histoire. L’expression des
affects est souvent émoussée.
Techniquement, le thérapeute doit penser aux idées confabulatrices
devant l’attitude du patient vis-à-vis de ce qu’il lui raconte. On se demande
s’il est dans la confabulation, dans la mythomanie, est-ce qu’il est hallu­
ciné ou son discours est plutôt délirant ? Présente-t-il des attitudes d’écoute
pendant l’entretien ? Est-il touché ou impacté émotionnellement pendant
qu’il raconte son histoire, etc. ? Le thérapeute ne cherche pas le vrai du
faux dans les propos du patient, plutôt la signification du message qu’il lui
transmet. Disons plus simplement qu’« en réponse aux questions répéti­
tives, le patient livre chaque fois une nouvelle version. Lors d’un entretien,
il faut poser plusieurs fois la même question au patient, si on a l’impression
qu’il confabule. » (Preising & Serre, 2000) L’exploration clinique des idées
confabulatrices demande au thérapeute de prendre le temps de question­
ner encore et encore le patient sur le même thème et de voir ce qu’il peut
apporter comme réponse.

Pensées magiques
Il s’agit de la toute-puissance du désir. Les pensées du patient sont sans
références logiques. Il s’agit aussi de la pensée magique des enfants, qui est
normale chez les plus jeunes patients. À l’âge de la puberté ou de l’adoles­
cence, cette pensée magique ne doit plus être d’actualité. Si tel est le cas,
on recherche quel mécanisme de défense ou mécanisme délirant est en jeu.
Il n’est pas rare que la régression soit à la première loge chez les patients
présentant les pensées magiques.
Pensées perplexes
La perplexité est retrouvée chez les patients anxieux qui sont tourmentés,
indécis, soucieux de leur état. Le patient a l’air d’être perdu ou complète­
ment de l’autre bout de la planète. Ces pensées sont retrouvées dans les
psychoses et états dissociatifs sévères ou lors des états de stress post-trauma­
tique au sens catégoriel du DSM-5 et de la CIM-10.

Pensées dévitalisées
Ces pensées sont retrouvées dans les psychoses ou états psychotiques sens
catégoriel. Le patient psychotique peut avoir des pensées qui sont sans
« sens ». Le thérapeute a du mal à comprendre ou à déchiffrer ce qu’il lui dit.
C’est comme s’il s’agissait de salades des mots, un conglomérat de mots sans
sens. On a du mal à trouver la valeur communicative des propos du patient.

Répétitions thématiques
Le patient revient encore et encore sur les mêmes idées et thèmes déjà abor­
dés. Bien que le thérapeute essaie d’éloigner la discussion du thème actuel,
le patient tient ou revient sur les mêmes sujets abordés. Le thérapeute a

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200 Status clinique pédopsychiatrique

l’impression que le patient n’arrête pas d’aborder les mêmes pensées ou


thématiques. Il peine à changer de thème de discussion, il redit les mêmes
idées, histoires, etc.

Réponses à côté
Le thérapeute note que le patient n’arrive pas à répondre à une question
claire et précise. Il donne une réponse inattendue et complètement à côté
par rapport à la question posée ou au thème de la discussion.
Lors de réponses à côté, le thérapeute a l’impression que le patient ne
l’écoute pas et ne suit pas leurs échanges. Celui-ci peut être complètement
« à l’ouest » ou « à côté de la plaque ». Le thérapeute doit différencier les
réponses à côté au sens catégoriel de l’évitement qui est un des mécanismes
de défense psychodynamique (cf. chapitre 16).

Sidération
Elle est retrouvée le plus souvent chez les patients victimes d’un trauma­
tisme psychique, dans la schizophrénie, les troubles démentiels, etc. C’est
une sorte d’arrêt ou une incapacité de penser. Le patient sidéré perd tous
ses moyens de défense. Il reste bloqué, figé ou immobile tant sur le plan
physique que psychique. Il s’agit d’une conséquence de choc traumatique
qui induit une dévitalisation émotionnelle et affective à l’instant donné.
L’appareil psychique du patient à ce moment-là est crispé, dévitalisé
ou déconnecté de la réalité environnementale. Cet instant est proche du
moment de mort psychique où le patient, non seulement perd ses compé­
tences à se défendre ou à réagir face à ce qu’il traverse, mais est comme
inexistant. C’est comme si le temps s’était arrêté ou figé devant lui.

Vide de la pensée
Le vide de la pensée consiste à avoir des propos ou des pensées qui n’ont
aucune signification entre eux. Les pensées du patient n’ont pas une valeur
communicative. Elles ne contiennent aucun message ou information. Ce
type de pensée est retrouvé chez la personne souffrant de schizophrénie ou
sous l’emprise de toxiques.
Pensée abstraite
Ce type de pensée est retrouvé chez le patient qui recourt à des concepts
vagues et abstraits. Il est alors très difficile de deviner ou de comprendre ce
qu’il essaie de communiquer. Ces pensées sont plus courantes dans certains
thèmes de délire (confabulation, mystique, religieux, extraterrestre, etc.).
Attaques du lien
Elles sont présentes quand le patient éprouve de la difficulté à raconter son
histoire au thérapeute. Il s’agit du patient qui met les idées ou les bribes
d’un récit les unes à côté des autres. Cet assemblage ne donne pas l’impres­
sion qu’il y a une continuité dans le récit. Ce trouble se répercute dans les

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Fonctions du moi 201

apprentissages scolaires, dans la relation thérapeutique, dans les rapports


sociofamiliaux, etc.
Contenu de pensée
Le patient exprime le contenu de sa pensée de manière verbale ou non
verbale. Le thérapeute cherche les éléments suivants.
Idées de persécution
Le patient qui présente les idées de persécution a l’impression que quelqu’un
lui veut du mal. Il interprète le regard, les propos mal entendus, les faits
et gestes de son entourage. Le voisin, le policier, les affiches publicitaires,
les médias audiovisuels, etc., bref tout peut être source de persécution. Le
patient peut se sentir persécuté chez lui ou à l’extérieur. Certains patients
arrivent à sortir de la maison pour aller à l’école et d’autres n’y arrivent pas.
Quand le patient désigne son ou ses persécuteurs, le thérapeute doit le
prendre très au sérieux et élargir son investigation clinique. Il est important
d’identifier le persécuteur désigné et les éventuels auteurs présumés de cette
persécution. Ces derniers risquent de subir des actes de violence ou hété­
roagressifs de la part du patient. Le plus souvent, ces idées de persécution
peuvent être causées par une anxiété, des idées délirantes, des traits de per­
sonnalité paranoïaque (méfiance, interprétation, etc.).
Idées de grandeur
Elles sont le plus souvent rencontrées chez des patients qui présentent un
syndrome manique ou une hypomanie. Dans une compréhension psy­
chodynamique, ces idées de grandeur signent un mode défensif contre la
dépression sous forme de la toute-puissance maniaque. Dans les idées de
grandeur, le patient recourt à la toute-puissance. Ces idées expriment un
besoin pour le patient de garder une image de lui qui est sans faille. Il dit
qu’il est le plus beau, le plus fort, capable de tout faire, que son père est
untel, etc. Ces idées de grandeur peuvent se retrouver également chez les
patients narcissiques, paranoïaques, psychopathiques ou antisociaux, etc.
Ils disent et croient fermement être « au-dessus de la mêlée ».
Idées délirantes
Cf. infra « Syndrome délirant ».
Obsessions
Il arrive que le thérapeute observe ou constate des obsessions idéatives ou
des obsessions compulsives avec ou sans rituel. Les obsessions du patient
peuvent se manifester à travers les actes, gestes, comportements, paroles,
mots, phrases, etc. Ces symptômes peuvent être observés dans d’autres
maladies comme les tics, le syndrome frontal, le syndrome de Gilles de La
Tourette, etc. C’est au thérapeute de faire la différence. Nous revenons sur
le concept des obsessions plus loin dans ce chapitre.

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202 Status clinique pédopsychiatrique

Idées exprimant une souffrance


Le patient peut avoir des idées rappelant l’amertume ou exprimant des
souvenirs qui sont mauvais, atroces, traumatiques, etc. On peut noter des
idées de mort ou de ruines ou des pensées dévitalisées, de damnation, etc.
Celles-ci sont retrouvables dans les états dépressifs sévères. Le patient peut
avoir des perturbations perceptives : dépersonnalisation, déréalisation,
hallucination, illusions, distorsions de la pensée, image du corps fragilisée,
possédée ou détruite, etc.
En définitive, il convient d’aller en profondeur et explorer sans relâche
les différentes informations que nous offre le patient ou son entourage. À
l’image d’un laboureur, le thérapeute devrait creuser, fouiner, sarcler, etc. Il
se doit d’essayer de comprendre avec le patient ce qui lui fait dire telle ou
telle autre idée, phrase, etc.
Le thérapeute ne devrait en aucun cas minimiser son impression diag­
nostique. Le partage des affects implique que le thérapeute fasse part de
son inquiétude et de l’intérêt qu’il porte à comprendre le patient ou à lui
proposer de l’aide.

Exemples de troubles formels de la pensée


Hypocondrie
C’est un surinvestissement anxieux des fonctions et des sensations cor­
porelles superficielles ou profondes. Le patient est fermement convaincu
d’être malade, d’avoir un organe qui dysfonctionne ou de manquer d’un
organe interne ou externe. Il se plaint de manière récurrente de douleurs, de
diverses maladies, etc. Il se plaint continuellement ou fréquemment d’un
problème de santé ou d’un autre. Il exprime en continu ou très souvent sa
crainte de tomber malade ou d’avoir contracté une maladie très grave. Il est
très convaincu d’avoir contracté une maladie incurable. Certains patients
multiplient des consultations spécialisées, ils demandent sans arrêt à passer
différents examens paracliniques qui s’avèrent tout sans anomalie, etc.
Feeding
Le feeding consiste en la suspension progressive de la pensée. Dans le cas
des barrages ou de feeding, le patient peut continuer sur la même idée ou
repartir sur un autre thème ancien ou nouveau. Le feeding est très caractéris­
tique de la schizophrénie tout comme les barrages de la pensée.
Fuite des idées
C’est un défaut d’enchaînement des idées avec une hyperactivité de l’asso­
ciation des représentations mentales. C’est un tourbillon sans fin, sans
ordre et sans but. Il s’agit d’un « afflux d’idées qui ne sont plus strictement
dirigées par un projet » (Preising & Serre, 2000). Dans la fuite des idées, le
thérapeute note que les pensées du patient changent en permanence de
buts et de directions. Il y a une impression de sensations intercurrentes.
La fuite des idées est l’un des signes de la tachypsychie.

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Fonctions du moi 203

Pensée inhibée
La pensée est freinée ou bloquée, comme si elle se heurtait à une résis­
tance. Le patient laisse ressentir de l’hésitation dans son discours. Il peut
s’agir d’une forte défense, ou alors d’une inhibition pulsionnelle. Quand le
patient a une pensée inhibée, il est important d’évaluer son self ou l’estime
de soi qui peut être fortement touché.
Le patient inhibé est différent de l’amnésique, car ce dernier cherche ses
mots oubliés.
Pensée rétrécie ou appauvrie
La pensée appauvrie ou rétrécie fait que le champ de la pensée est limité,
focalisé ou fixé sur un seul petit nombre de thèmes. La pensée du patient
est appauvrie par son incapacité de diversifier ses thèmes. Il est incapable
d’aborder d’autres domaines de sa vie personnelle, sociale et professionnelle.
Techniquement, le thérapeute note que « durant l’entretien, le patient a de
la difficulté à passer d’un thème à l’autre, même si on l’y incite, ou il revient
sans cesse au même thème. Il faut que l’examinateur ait proposé un nombre
de thèmes suffisants. » (Preising & Serre, 2000)
Pensée circonstanciée
Le patient ne distingue pas l’essentiel de l’accessoire dans son récit. La cohé­
rence de sa pensée est conservée, mais il se perd dans les détails inutiles tout
en gardant complètement le fil de ses idées. Le patient qui a des pensées cir­
constanciées peine à aller droit au but. « La pensée circonstanciée peut résul­
ter par exemple d’un manque de la capacité d’abstraction ; elle peut aussi
provenir de l’incapacité du sujet à négliger le détail, bien que ce dernier soit
reconnu comme tel. » (Preising & Serre, 2000) Il est important de rechercher
le type d’angoisse sous-jacent qui déstabilise le discours du patient.
Pensée digressive
Le patient s’éloigne du fil de ses idées pour y revenir plus tard. Le thérapeute
se demande où il veut en venir. Il n’est pas très certain qu’il arrive à saisir le
message du patient. Cette pensée est riche de détails importants, mais mal­
heureusement ces derniers ne permettent pas au thérapeute de comprendre
ou de saisir le fil rouge de la pensée du patient.
Pensée tangentielle
Les réponses du patient ne sont reliées que de manière indirecte aux ques­
tions. Par exemple quand le thérapeute lui demande : « Combien pèses-
tu ? », le patient répond : « J’ai beaucoup mangé ces derniers jours ». Dans la
pensée tangentielle, le patient essaie de répondre aux questions posées par
des explications au lieu de donner une réponse directe et simple.
Pensée incohérente
Le thérapeute relève une perturbation de la construction logique. Le patient
perd facilement le fil rouge et la cohérence logique de son discours. Il peut

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204 Status clinique pédopsychiatrique

utiliser des associations illogiques dans ses propos. La salade des mots peut
être un exemple d’un cas extrême des pensées incohérentes.

Pensée barrée
Lors des barrages de la pensée, le patient donne l’impression qu’il a une
suspension brusque de sa pensée qui était fluide jusque-là. Il s’agit d’un
ressenti du patient d’un barrage idéique observé par le thérapeute. Alors
que le patient donnait une explication ou faisait sa narration, le thérapeute
note qu’il s’arrête brusquement pour soit reprendre sur le même thème, soit
reprendre sur un thème nouveau ou anciennement abordé. Le patient est
dans l’impossibilité d’être conscient de cet arrêt brusque ou de ce change­
ment de thème.

Pensée opératoire
Le patient qui a ces pensées opératoires répond aux questions qu’on lui
pose à la manière de questions-réponses. C’est comme s’il jouait au ping-
pong avec son thérapeute. La particularité de la pensée opératoire est que
les réponses du patient peuvent ou non être adéquates aux questions, lui-
même n’arrive pas à se rendre compte de l’incohérence de ses réponses par
rapport aux questions posées.

Pensée xénopathique
Il s’agit d’activités psychiques ressenties comme étrangères, faisant une
irruption mystérieuse et hostile au niveau de la conscience. Le sujet hallu­
ciné s’exprime souvent en termes de « pensées exogènes », « pensées exté­
rieures » ou « pensées dictées ». Le patient peut attribuer ces phénomènes à
un pouvoir extérieur auquel il ne peut s’opposer, aboutissant au syndrome
d’influence. Ces pensées font partie des hallucinations intrapsychiques (cf.
infra les hallucinations dans « Perceptions »).

Persévération verbale
On observe dans la persévération verbale une « répétition de mots ou de
phrases précédemment employées qui n’ont plus de sens dans le contexte
actuel de l’entretien » (Preising & Serre, 2000). Le patient revient encore et
encore sur ce qu’il vient de dire. La persévération est différente des rumi­
nations de la pensée par le fait que le patient ne se rend pas compte qu’il
se répète sans arrêt. Tandis que dans la rumination, il est au courant et
incapable d’arrêter d’avoir les mêmes pensées, actes ou idées. Devant la
persévération, le thérapeute est lassé par les propos en boucle du patient, à
la limite incompréhensibles et interminables.

Ruminations de la pensée
Les préoccupations incessantes gravitant autour des mêmes thèmes. Les
pensées du patient sont égosyntones et ininterrompues. Il a beaucoup de
difficulté de passer à d’autres thèmes.

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Fonctions du moi 205

Lors de l’entretien, on note que « les pensées du patient gravitent sans


arrêt autour des mêmes thèmes, mais ne sont pas ressenties comme étran­
gères au patient. Elles ne sont interrompues qu’avec difficulté ou pour une
courte durée. » (Preising & Serre, 2000) Cette incapacité de mettre de la
distance dans ces pensées ou cet afflux de pensées en boucle fait toute la
différence avec des idées ou pensées normales.
Ces ruminations sont causées par l’état anxieux qui entretient à son tour
ces ruminations. La conséquence est que le patient a du mal à dormir s’il
a tendance à ruminer ses pensées le soir ou la nuit. En présence de rumi­
nations de la pensée, le trouble du sommeil doit être analysé minutieuse­
ment. Le thérapeute doit évaluer les idées dépressives ou les symptômes
psychotiques. Les ruminations des pensées sont à différencier des pensées
obsédantes que nous abordons plus loin. Chez certains patients, devant les
ruminations de la pensée, il est conseillé de rechercher les idées ou projets
suicidaires.
Verbigération de la pensée
Le patient dit des choses incompréhensibles de manière incantatoire ou par
des murmures ou à voix audible mais indéchiffrable. Ce type de pensée peut
être retrouvé chez les patients maniaques (sous forme de jeu de mots ou
d’expansion euphorisante) ou chez les patients schizophrènes. Ces patients
se mettent à marmonner des choses que le thérapeute ou l’entourage
n’arrive pas à déchiffrer. Les propos d’un patient qui fait de la verbigération
de sa pensée sont totalement incompréhensibles, insaisissables et opaques.
On a l’impression qu’il se parle à lui-même.
Exploration du trouble de la pensée
Pendant l’exploration de la pensée, il est important d’être très systématique
et minutieux. Il ne faut jamais minimiser les informations cliniques que le
patient apporte. Le thérapeute pose des questions directes, semi-directes,
ouvertes ou bien d’autres techniques développées dans la partie I pour
mener son entretien clinique.
L’exploration de la pensée s’étend du début à la fin de l’entretien. Elle
débute dès la rencontre avec le patient jusqu’à la fin de l’entretien. On reste
attentif sur sa manière de dire les choses, d’amener les éléments cliniques,
de les expliciter, de faire le lien entre les éléments, etc. Le thérapeute peut
confronter le patient à ses propres pensées et voir comment il réagit. Toute
en gardant le même fil rouge, il essaie de voir jusqu’où il est en mesure de
rester cohérent, clair, succinct et adéquat à sa réalité ou à la réalité de son
environnement.

Exploration des symptômes psychotiques


L’exploration des symptômes psychotiques vise à différencier l’angoisse psy­
chotique de l’angoisse névrotique. Quelle explication le patient donne-t-il

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206 Status clinique pédopsychiatrique

de ses symptômes ? Comment interprète-t-il ou quelle hypothèse fournit-il


sur ses angoisses ou son sentiment de persécution ? Qu’en est-il des autres
symptômes ? Le thérapeute doit prendre le temps de mener son investiga­
tion sans chercher à braquer le patient en lui demandant par exemple :
• « T’est-il déjà arrivé de te dire que les gens te regardent, t’épient ou
parlent de toi dans la rue ? », « Es-tu sûr de cette impression ? », « Depuis
quand as-tu cette impression ? » et « Qu’est-ce que cela te fait ? », « Penses-
tu que le regard des passants ou des gens que tu croises est bienveillant,
menaçant, malveillant, jugeant ou admiratif ? », « Comment tu différencies
ce regard ? », « Ce regard est-il persécuteur ou non ? »
• « C’est quoi pour toi être persécuté ? », « N’as-tu pas l’impression que c’est
ton imagination qui te joue des tours ? »
• « Qu’est-ce que les gens pensent tout bas de toi ? », « Comment sais-tu
qu’ils parlent de toi ? », « Qu’est-ce que tu imagines que les autres élèves
pensent de toi ? ».
• « Pourquoi tu portes ce casque partout ? », « Comment sais-tu qu’il s’agit
de toi et pas d’une autre personne ? », « Pourquoi cela te concerne ? »
• « Reconnais-tu la voix en question ? », « Réponds-tu à cette voix ? »,
« Que lui dis-tu ? », « Est-ce que tu exécutes les ordres que cette voix te
donne ? », « Est-ce que ton entourage est au courant de ce que tu viens de
me dire ? », « Pourquoi ne les as-tu pas informés ? », « De quoi as-tu peur si
tu les informais ? », « Peux-tu arrêter d’entendre cette voix ? »

Les fugues à l’adolescence


La signification des fugues dans l’enfance est différente de celles dans l’ado-
lescence. Les fugues des enfants sont de fortes indicatrices des tentatives de
suicide à l’adolescence. La fugue peut devenir une porte de sortie pour tenter
de fuir la tension interne que ressentent les adolescents. Il est essentiel que le
thérapeute explore le sens, l’objectif, la cause et comment il a réalisé sa fugue.
Chez certains patients, la fugue peut être d’origine psychotique, anxieuse,
épileptique ou tout simplement la conséquence d’une amnésie dissociative.
La notion d’impulsivité doit être recherchée.
« Veux-tu me parler de ta fugue ? », « Avais-tu une idée dans la tête avant
ta fugue ? », « Où vas-tu lors de tes fugues ? », « Connais-tu le lieu exact de ta
fugue ? », « Combien de temps te prend cette fugue ? », « D’où t’est venue
cette idée de fuguer ? », « Est-ce qu’il arrive de planifier ta fugue à l’avance ou
cela arrive-t-il spontanément ? », « Qu’est-ce que ta fugue t’apporte alors ? »,
« À quoi te sert de fuguer ? », « Qu’est-ce qui motive tes fugues ? », « Peux-tu
me parler de ce que tu ressens maintenant vis-à-vis de ce geste de fuguer ? »
ou « De qui avais-tu peur ou évitais-tu de rencontrer avant de fuguer ? »
N’existe-t-il pas une autre cause qui puisse être à l’origine de la fugue
du patient ?

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Fonctions du moi 207

Syndrome délirant
Définition
Le syndrome délirant est l’ensemble des idées manifestement en désaccord
avec des faits observés et les croyances habituellement partagées dans un
contexte culturel donné. Plus spécifiquement, la personne qui délire a une
conviction très inébranlable de ce qu’elle dit ou croit savoir ou de ce qu’elle
avance. Cette personne n’est pas accessible à toute tentative de raisonne­
ment et n’admet aucune démonstration si l’on cherche à lui faire savoir
qu’elle tient des propos erronés ou faux.
Le délire consiste en une « attribution d’une signification anormale à une
saisie perceptive normale (le plus souvent dans le sens d’une référence à
soi) » (Preising & Serre, 2000). Le patient a une conviction inébranlable sur
la véracité des éléments qu’il perçoit. Il est hermétique au raisonnement et
à la démonstration de l’erreur.
La dissociation précède le délire et progressivement, les pensées du
patient se mélangent. Il finit par tenir des propos incohérents et insaisis­
sables par son entourage. Sur le plan psychodynamique, « le délire qui se
forme à partir des mécanismes hallucinatoires est une construction qui
tente désespérément d’endiguer l’angoisse et la catastrophe psychotique. »
(Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012)
Le discours du patient délirant est « sans lien affectif, sans signification,
sans vrai mécanisme de symbolisation ou d’intériorisation. Ainsi, le patient
construit un nouvel univers sans refoulement, sans limites, sans règle où
tout devient possible, communiquer avec Dieu ou le reste de l’univers, où le
temps ne s’écoule plus, reste figé ou au contraire aboli, on parle et on commu­
nique avec des ancêtres, des personnes disparues. » (Askenazy-Gittard &
Darcourt, 2012)

Caractéristiques
Il existe sept caractéristiques du syndrome délirant. Le patient peut avoir
ou ne pas avoir toutes les caractéristiques. L’investigation du syndrome
délirant exige une bonne technique, c’est-à-dire que l’on ne devrait pas se
précipiter pour donner ou pour proposer des réponses au patient. Quand les
critères ne sont pas bien réunis ou quand le thérapeute n’arrive pas à cerner
le patient, il peut noter que celui-ci présente des éléments délirants ou des
éléments de la lignée psychotique.
Mode de survenue ou début du délire
Lors de l’évaluation du syndrome délirant, le thérapeute repère le mode
d’entrée ou de survenue des idées délirantes et leur ancienneté, la notion
de récidive, les facteurs déclenchants (deuil, retour d’un voyage à l’étranger,
rupture sentimentale, maladie d’un proche, catastrophe naturelle, etc.),
organicité, toxicité ou iatrogénie.

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208 Status clinique pédopsychiatrique

Dater le mode d’entrée ou le début des troubles délirants aide dans la


psychoéducation ou tout autre type de psychothérapie. Le thérapeute
demande au patient ou à son entourage si les idées délirantes sont apparues
de manière insidieuse ou subitement. Certaines idées délirantes explosent
comme la foudre dans un ciel bleu (on parle alors de bouffée délirante) et
d’autres prennent plusieurs jours, semaines ou mois d’installation. L’entou­
rage du patient confirme le caractère brutal ou insidieux d’apparition
du délire.
Thèmes délirants
Le thème du délire est le contenu de son message. Le thérapeute cherche
le ou les thèmes du délire. S’agit-il d’un thème unique ou multiple, précis
ou flou ? On peut avoir un ou plusieurs thèmes dans un même délire. On
écoute le discours du patient, ce qu’il communique à travers son délire.
Techniquement, il faut permettre au patient de parler ou raconter ses
idées, ses croyances, ce qu’il pense connaître, entendre, voir, ou ce qu’il
cherche à communiquer. Le thérapeute écoute l’histoire du patient. Il n’est
pas conseillé de le contraindre à admettre notre réalité ou à lui couper la
parole lui disant que l’on sait déjà ce qu’il veut nous dire pour une énième
fois encore (il arrive que le thérapeute soit étonné d’entendre un tout autre
discours, un nouveau thème, une nouvelle idée délirante qui émerge). Le
thérapeute doit se montrer plutôt intéressé et désireux de dialoguer avec le
patient.
L’apparition des idées délirantes n’est pas un luxe pour le patient. On
doit partir du principe selon lequel, ne délire pas qui veut. La présence des
idées délirante est corolaire à la perturbation de la pensée. Il s’agit d’un
trouble à prendre très au sérieux par le thérapeute. Le patient délirant a du
mal à se faire entendre, la plupart de temps, de ses interlocuteurs. L’attitude
bienveillante et empathique du thérapeute offre un espace privilégié pour le
patient où il se peut se sentir plus en confiance et en sécurité pour aborder
ce qui l’a amené.
Les thèmes de délire sont divers et variés. Parfois, on retrouve une mixité
des idées délirantes.
Délire de type cosmique ou féerique
Le patient peut se mettre à parler des astres, des étoiles, des planètes, etc.
Les explications métaphysiques qu’il donne ont un sens pour lui, mais pas
pour le thérapeute. Il ne s’agit pas de fantasme, plutôt une réelle conviction
d’avoir compris le fonctionnement des astres célestes ou alors d’être peut-
être lui-même en contact ou de communiquer avec le cosmos. Le patient
peut dire qu’il est en étroite collaboration ou en communication continue
avec les planètes, les astres, les étoiles, l’univers, le cosmos, les extraterres­
tres, etc.

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Fonctions du moi 209

Délire de type fantastique


Le thérapeute note des idées sous forme de rêveries. On observe plutôt que
le patient exprime ses pensées, ses croyances, ses idées sous forme d’une
rêverie. Le thérapeute a l’impression que le patient fait un rêve éveillé.
Celui-ci tient des propos fantaisistes et loin de la réalité socioculturelle.
Délire de type surnaturel
Le patient peut aborder des thèmes très surnaturels, métaphysiques, mys­
tiques dans son délire. Il peut se mettre à parler de la communication
qu’il a avec les anges, esprits, forces de l’univers et spirituelles. Il est le seul
capable à comprendre la pertinence et l’agencement de ses idées ou ses
propos. Certains disent être en contact étroit avec ces forces ou ces entités
surhumaines. D’autres disent avoir un don surnaturel ou être investi d’une
mission de la part des forces cosmiques ou extraterrestres, etc.
Délire de type possession
Le thérapeute retient ce thème quand le patient dit être possédé d’un esprit
maléfique, protecteur, bienveillant, de ses ancêtres, des djinns, des anges,
des démons, etc. Il peut dire que ce n’est pas lui qui parle, mais plutôt
l’esprit qui peut le saisir et lui faire dire de bonnes ou de mauvaises choses,
etc. Il faut différencier le trouble de personnalité multiple de ce délire de
possession.
Délire de type érotomaniaque
Le thème érotomaniaque est retenu quand le patient dit être amoureux
d’une personne avec qui il n’a pas de liens réels. La personne supposée
aimée peut ou non être au courant des propos ou des démarches entrete­
nues par le patient. Elle peut nier toute suspicion d’existence de relation
entre eux.
Il arrive que soit la personne n’est pas au courant, soit elle ne connaît
pas le patient, soit il s’agit d’une personne imaginaire ou fantasmée par le
patient. Le patient se vante d’avoir eu des rapports sexuels ou intimes avec
untel. Il peut dire qu’un autre jeune n’arrête pas de lui faire des avances
amoureuses. Il peut dire qu’il a reçu des avances de la part d’une star natio­
nale ou internationale, etc.
Certains patients harcèlent leur supposée amoureuse ou supposés futurs
partenaires par téléphone, messages, visites à l’improviste, demandes exces­
sives de rencontres, courriers postaux, messages sur les réseaux sociaux, etc.
Le risque est que le patient tombe dans la persécution à la suite des échecs
dus au refus ou à son incapacité d’avoir ce qu’il cherche auprès de l’objet.
Délire de type filiation ou appartenance
Le patient peut dire avec fermeté qu’il appartient à une famille royale, à une
famille riche connue ou non par son entourage, à un groupe d’intellectuels,

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210 Status clinique pédopsychiatrique

à un guide spirituel ou une communauté d’artistes, etc. Certains disent


qu’ils sont les descendants d’un personnage localement, nationalement ou
internationalement connu. Le patient peut même demander de changer
son prénom ou son nom de famille dans l’objectif de prendre le nom de
sa nouvelle famille. Certains, dans un jeu de mots, font un rapprochement
entre leur origine et celle d’une star ou d’un homme connu.

Délire de type messianique


Le patient dit avoir une mission à accomplir. Il croit avoir été désigné ou
choisi soit par les forces surnaturelles, soit par Dieu ou mandaté par les
anges, soit par le diable ou les démons, soit par les ancêtres, soit par sa
communauté, etc.
Certains patients peuvent se considérer comme de nouveaux guides spi­
rituels. D’autres ont au contraire une mission pour sauver la jeunesse, les
enfants abusés ou maltraités, etc. Le patient peut s’imaginer investi de cer­
tains pouvoirs ou d’une certaine autorité pour accomplir une tâche donnée
ou anéantir ou sauver un groupe de sa communauté. Certains se comparent
aux grandes personnalités historiques, religieuses et culturelles dans l’objec­
tif de faire comme eux, voire plus.

Délire de type mégalomaniaque ou thème de grandeur


Le patient mégalomaniaque se considère comme supérieur aux autres. Il est
le plus beau, le plus fort de tous. Il se vante d’être capable de faire tout ce
qu’il souhaite ou tout ce que l’on peut lui demander de faire. Il peut vaincre
ou contourner tous les pièges. Il échoue difficilement. Tout le monde doit
se soumettre à ses exigences. Il croit avec fermeté que, sans lui, les autres,
ses amis, ses copains, ses collègues, sa fratrie ou les membres de sa famille
seraient sans protection ou sans valeur.

Délire de type ruine


Ce thème est retenu quand le patient évoque, tient des propos ou dit claire­
ment qu’il a l’impression ou qu’il est fortement convaincu d’être au fond
du gouffre. Il ne peut plus s’en sortir. C’est la catastrophe la plus extraordi­
naire qui lui tombe dessus. Personne ne peut plus le sauver, etc. Les idées de
ruine sont à différencier des idées noires. Dans les idées de ruine, le patient
n’exprime pas une envie de mourir ou de disparaître du globe terrestre. Il
dit, en revanche, qu’il a une impression d’être dans un chaos total. Le thé­
rapeute a l’image d’être en train d’écouter un récit de ruines archéologiques
ou historiques. Certains patients peuvent avoir des idées de ruine accompa­
gnées d’une forte culpabilité et de la mégalomanie. Par exemple, ils disent
que c’est à cause d’eux que les autres enfants de la planète n’arrivent plus à
avoir suffisamment d’oxygène, ils les empêchent de respirer un air pur, ils
sont la cause de la pollution de l’air, etc.

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Fonctions du moi 211

Délire de type damnation


Le patient trouve qu’il est maudit. Il ne peut plus s’en sortir. Sa maladie est
une conspiration mystique ou spirituelle. Il est le siège des forces externes
qu’il ne contrôle pas et dit que, peut-être, personne ne peut l’aider, etc. Il
peut être convaincu que son esprit a été sacrifié par les sorciers, les forces
occultes, les esprits mauvais, etc.
Sinistrose délirante
Le patient dit être victime d’une catastrophe naturelle ou d’une conspi­
ration. Ce qui lui arrive est le résultat d’une théorie de complot fait par
les hommes ou les personnes qui lui sont proches. Les auteurs des actes,
actions, gestes ou causes de malédiction du patient peuvent ou non être
identifiés par le patient. Dans ce cas, il risque de poser des actes hétéroagres­
sifs. Il peut devenir un persécuté qui persécute les autres à son tour.
Le thérapeute doit faire la différence entre la sinistrose délirante et la
damnation. Dans cette dernière, les auteurs ne sont pas des humains mais
plutôt des puissances mystiques ou surnaturelles.
Délire de type culpabilité
Le patient se dit être coupable ou responsable du mal qui lui arrive ou qui
arrive à son prochain. Il s’attribue des responsabilités d’un dégât matériel,
physique, spirituel, etc. Il peut dire : « C’est à cause de moi que cela lui
est arrivé. » « Si j’étais là, ou si je savais, cela ne pourrait pas arriver… » Le
patient est fortement convaincu d’être l’auteur ou à l’origine de ce qui se
passe autour de lui ou chez lui. Certaines personnes cherchent à réparer
leurs supposées fautes ou erreurs par des actes auto et hétéroagressifs, ou
tout simplement commettent des actes dits « réparateurs ».
Délire de type hypocondriaque
Le patient se plaint de plusieurs maux ou régulièrement d’une maladie qui
ne peuvent être objectivés par le clinicien ou les moyens paracliniques. Il
peut dire qu’il ne sent plus ses intestins, qu’il souffre d’une maladie grave. Il
faut rechercher le syndrome de Münchhausen. Ce qui caractérise ce type de
délire est le fait de se rendre compte que, malgré les multiples investigations
médicales, le patient reste convaincu de sa maladie à soigner. Souvent, ces
patients consultent le psychiatre en dernier lieu.
Délire de type référence
Le patient dit que tout le monde parle de lui. Il affirme avec conviction que
tout ce que les autres font, c’est justement à cause de lui.
À la télévision, à la radio, sur internet et les réseaux sociaux, tous ne
parlent que de lui. Il se place au centre du monde. Certains patients croient
être incontournables dans leur société. Les idées de référence peuvent être
accompagnées de mégalomanie ou d’idées de persécution.

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212 Status clinique pédopsychiatrique

Délire de type préjudice


Le patient dit subir un préjudice soit par un particulier ou une société, soit
par un voisin ou un copain qu’il a identifié comme auteur. Le patient risque
de se transformer en persécuteur persécuté, d’où la nécessité de bien l’éva­
luer et de lui éviter de poser des actes médicolégaux ou tout acte préjudi­
ciable à l’autre. La cause du préjudice permet de comprendre la suite de la
prise en charge thérapeutique.
Délire de type persécution
Le patient dit être en insécurité devant quelqu’un ou une situation quel­
conque. Il se sent attaqué, harcelé, trompé, persécuté ou victime d’une
conspiration. La présence, le regard, les paroles ou les gestes d’une per­
sonne quelconque de son entourage le mettent en insécurité. Le thérapeute
demande s’il peut pointer ou nommer son ou ses persécuteurs. Le persé­
cuteur désigné est-il proche et bien identifié ? Le risque de passage à l’acte
hétéroagressif est élevé. Sur le plan psychodynamique, on recherche les
mécanismes de défense liés à ces idées de persécution : il peut s’agir de la
projection, de l’identification projective, du déni, du clivage, etc.
Délire de type jalousie ou haine
Le patient peut soit poser des actes, soit tenir des propos, soit faire des
démarches dans l’objectif de gagner ou retrouver la personne aimée. Il
peut accuser son petit ami d’infidélité, de tromperie, etc. Il dit être troublé
ou dérangé par l’infidélité de la personne dont il est amoureux, mais peut-
être que cette dernière n’est même pas informée de la soi-disant liaison
entre eux. Finalement, le thérapeute se rend compte qu’il ne s’agit que
de l’imagination du patient et que tout ce qu’il lui raconte est irréel et
inexistant.
On peut noter des propos haineux envers une personne déterminée ou
généralisée sans aucune preuve ni fondements qui expliqueraient la haine
en soi. Les patients qui ont des idées délirantes de jalousie ou de haine ris­
quent de devenir des persécuteurs à leur tour. Ils risquent de poser des actes
médicolégaux auto ou hétéroagressifs.
Délire de type revendication
Le patient revendique être l’auteur d’une idée, d’un ouvrage, d’une œuvre
d’art ou d’une découverte, etc. Il peut entreprendre de longs procès en jus­
tice qui seront sans fin, car il reste convaincu qu’il cherche à être rétabli
dans ses droits. Certains patients fournissent des preuves juridiques mais,
en les examinant de près, on s’aperçoit vite de leur fausseté. Ce délire inclut
également des personnes dites des « inventeurs ignorés ».
Délire de type vol ou divulgation de la pensée ou pensée devinée
Ce thème est retenu chez le patient qui nous explique que ses pensées sont
diffusées par une force externe. Il ne peut pas contrôler ni empêcher que ses

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Fonctions du moi 213

idées ou ses pensées lui soient volées, dévoilées ou devinées par un tiers. Il
a l’impression que les gens devinent sa pensée avant même qu’il ne parle.
D’autres patients ont l’impression que leurs pensées sont transparentes et
tout le monde peut les lire.
Le patient est convaincu que ses pensées, ses projets, ses idées, ses émo­
tions ou ses envies sont affichées sur la place publique. Il n’a plus de secret
ni d’intimité. Tout le monde peut connaître ce qu’il pense silencieusement
dans sa tête. Certains se voient concernés par les affiches publicitaires sur
la voie publique, les spots publicitaires animés, la télévision, la radio, sur
internet, etc. Il faut rechercher les idées de persécution et des éventuels
actes médicolégaux.
Délire de type influence
Le patient qui présente ce délire d’influence laisse entendre à son thérapeute
qu’il n’a plus de contrôle sur la vie. Tout échappe à son contrôle. Il se dit
être soumis, contre son gré, à des forces extérieures. Il a l’impression que les
sensations, les impulsions, ses pensées ou ses actes ne viennent plus de lui.
Ses actes, ses pensées, ses mouvements, voire ses faits et gestes lui seraient
imposés par force ou lui sont communiqués de l’extérieur. Il est convaincu
d’être sous l’emprise d’une force supérieure externe.
Délire de type mixte ou parfois flou
Lors de l’entretien clinique, il peut arriver que le thérapeute objective plu­
sieurs thèmes délirants. Dans cette situation, le délire aborde plusieurs idées
à la fois. Il est essentiel de chercher le thème qui prédomine dans le discours
délirant. Comme son nom l’indique, le délire mixte est le mélange ou le
« fourre-tout » de toutes les idées délirantes.
Ces différents thèmes rendent les pensées floues, confuses, etc. Le patient
perd son interlocuteur dans ses explications ou justifications floues et inco­
hérentes.

Remarque
Chez certains enfants et au début de l’adolescence, la thématique délirante
peut être faite par des personnages de dessins animés, des films pour enfants,
des superhéros, etc.

Mécanismes délirants
Le mécanisme du délire est comparé à l’échafaudage. Le mécanisme donne la
structure du délire. Il nous informe sur la façon dont le patient a construit son
délire. Sur quoi son délire s’appuie ? Le thérapeute se demande sur quoi les idées
délirantes du patient sont fondées. Comment le patient a-t-il reçu le message
ou l’information qu’il nous donne ? Par quel canal fournit-il ses informations ?

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214 Status clinique pédopsychiatrique

Comment arrive-t-il à justifier ce qu’il avance ? Le syndrome délirant peut avoir


un ou plusieurs mécanismes, il peut s’agir :
• d’hallucination sensorielle, intrapsychique ou pseudo-hallucination et
cénesthésique (cf. infra « Hallucinations ») ;
• d’interprétation délirante.
Il s’agit d’une saisie perceptive normale au départ, mais dont l’attribution
a une signification anormale dans la conclusion. Le patient justifie ses idées
en donnant une succession de faits réels mais mal interprétés. Par exem­
ple, il dit : « Je suis sûr qu’elle me faisait des avances sexuelles, car depuis
quelques semaines on se croise à l’arrêt de bus, et elle n’arrête pas de sourire
après m’avoir regardé et touché ses bracelets… » L’interprétation délirante
part d’un fait réel mais qui est mal interprété par le patient dans le but ou
l’objectif de donner une justification à ses croyances délirantes.
Intuition délirante
Il s’agit de l’apparition soudaine d’une conviction délirante immédiate sans
support perceptif. Le patient s’explique en disant : « Je le sais », « Je suis
sûr que c’est ça », « Je sais par intuition… », « C’est mon don de connaître
les choses en un clin d’œil », etc. Il ne peut jamais donner une explication
persuasive. C’est comme s’il connaissait les choses par son sixième sens.
Il ne peut pas expliquer le comment ou le pourquoi de ses assertions ou
affirmations délirantes.
Imagination délirante
Ce mécanisme est retrouvé plus fréquemment dans les paraphrénies ou le
délire fantastique. Le patient a une imagination débordante. Il peut dire
qu’il communique avec les étoiles, les astres ou les espaces cosmiques. Il
semble être en train de rêver en parlant de son délire. Il donne l’impression
à son thérapeute d’avoir de l’imagination débordante.
Organisation délirante
En ce qui concerne l’organisation du syndrome délirant, on peut retrouver
des délires très systématisés, moyennement systématisés et les délires non
systématisés. Une construction délirante fortement systématisée risque
d’induire l’interlocuteur en erreur. Les délires paranoïaques ont cette carac­
téristique d’être fortement systématisés avec pour conséquence de tromper
les interlocuteurs du patient.
Délire systématisé
Le délire du patient a une structure très rigide. On y retrouve une forte
cohérence et une systématisation des idées. En analysant ses pensées ou
idées délirantes, le patient a de fortes réactions affectives et comportemen­
tales directement en rapport avec le thème du délire retrouvé chez les para­
noïaques. Ce type de délire demande au thérapeute d’être attentif car, s’il

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Fonctions du moi 215

ne l’est pas, il y a un fort risque qu’il tombe dans le piège du patient. On


retrouve très peu de thèmes et de mécanismes qui soutiennent ces idées
délirantes systématisées.
Délire moyennement ou peu systématisé
Le syndrome délirant est constitué de peu de thèmes et mécanismes. C’est
un délire situé entre les plus systématisés et les non systématisés. Le théra­
peute a peu de difficultés de découvrir que le patient est en train de tenir
des propos délirants.
Délires non systématisé ou faiblement systématisé
Le délire est peu cohérent et facilement mis en doute par l’entourage du
patient. Ce délire est le plus souvent retrouvé chez le paranoïde. Il est mal
organisé, flou, etc. Sa construction est faite de plus d’un mécanisme. On y
rencontre également des thèmes multiples.

Remarque
Tous les syndromes délirants ont une étendue ou un champ d’action :
► on parle d’un délire étendu en réseau quand il touche généralement tous
les secteurs de la vie socioprofessionnelle du patient ;
► il peut arriver que le délire soit étendu en secteur, c’est-à-dire qu’il est soit
partiel, soit limité à certains domaines de vie du patient, soit circoncis à un
domaine particulier de sa vie.

Le thérapeute se demande si le patient lui donne l’impression que son


délire concerne son environnement professionnel, scolaire ou familial,
son réseau social ou si ses idées se limitent juste à un cercle bien défini.
Son délire est-il sectorisé ou limité à certains domaines ? Est-ce qu’il touche
tous les secteurs de la vie du patient ?
Réaction au délire
Le vécu délirant est pénible, douloureux, difficile pour le patient et son
entourage également. La réaction du patient vis-à-vis de son délire est à
rechercher et à décrire. Comment réagit-il au délire ? Se soumet-il à ses idées
ou cherche-t-il à les appliquer ? Fait-il un passage à l’acte pour accomplir les
ordres ou s’en défendre ?
Certains patients se bouchent les oreilles avec des cotons ou des écouteurs
(volume à fond) pour ne plus entendre les voix. D’autres commencent à
discuter à voix haute avec leur interlocuteur. Certains deviennent violents
quand ils sont persécutés et passent aux actes auto ou hétéroagressifs, etc.
Le thérapeute doit être attentif quand le patient persécuté désigne son
potentiel persécuteur. Ceci peut conduire à des actes médicolégaux.

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216 Status clinique pédopsychiatrique

Critique ou adhésion
Lors de l’investigation du syndrome délirant, le thérapeute doit chercher à
savoir si le patient est capable de critiquer ou non ses idées délirantes. La cri­
tique du délire renvoie à l’épreuve de réalité. Il s’agit de vérifier si le patient
critique ses idées délirantes de manière franche ou non. En d’autres termes,
le thérapeute se demande si le patient est raisonnable ou non. Comment se
positionne-t-il vis-à-vis de l’irrationalité de ses propos ?
Il arrive que son délire ait une forte adhésion (c’est-à-dire que le patient
est incapable de critiquer ses propos). Certains patients peuvent avoir une
critique partielle de leurs idées. Dans ce cas, ils peuvent critiquer leur propre
délire ou reconnaître que ce qu’ils perçoivent n’est pas réel.
Évolution du délire
Le thérapeute doit noter la durée d’installation des idées délirantes du
patient. Il peut s’informer auprès de son entourage sur cette évolution. On
s’informe sur le début et les circonstances d’apparition : depuis quel jour,
combien de semaines, de mois, etc. ?
Combien de temps le patient a-t-il pris avant de convaincre son entou­
rage de ses idées ou de ses impressions étranges ? S’agit-il d’une installation
sur un court, moyen ou long terme ?
Il est important de chercher l’expansion, l’étendue, la croissance des idées
délirantes. On se demande si au fil du temps les idées délirantes ont tou­
ché d’autres secteurs ou d’autres domaines de vie. Est-ce que le syndrome
délirant s’est complexifié en d’autres thématiques ? Le patient a-t-il eu un
moment de doute ou de confirmation de ses idées… ?
Exploration du syndrome délirant
Nous trouvons intéressant de rappeler la métaphore de l’ail ou de la gousse
d’ail en ce qui concerne l’exploration du syndrome délirant. Le thérapeute
pose des questions allant des généralités vers les plus spécifiques. Ou, plus
encore, l’exploration part de la périphérie vers le centre. La meilleure stra­
tégie est de montrer son intérêt aux propos du patient. Notons que certains
patients méfiants peuvent vite se fermer et éviter d’aborder leurs idées avec
tout le monde. D’autres craignent peut-être d’être critiqués négativement
ou rejetés par leurs proches. D’autres évitent que leur « secret » ou « révéla­
tion » puisse être trahi par eux-mêmes ou l’entourage, etc. Cela dit, le théra­
peute doit user du tact et de la patience au cours de cette exploration. Il doit
éviter de presser le patient à lui répondre ou de lui suggérer des réponses.
Il est nécessaire de noter les réactions du patient face aux idées délirantes,
etc. L’important est de se souvenir de poser ces questions : Quand, où,
comment, pourquoi, avec qui, dans quel but ou objectif ? Est-ce que l’on
arrive à identifier d’autres personnes qui seraient concernées ? Pourquoi est-
ce maintenant qu’il en parle ? L’investigation du thème, des mécanismes et

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Fonctions du moi 217

toutes les autres caractéristiques du syndrome délirant permettent au théra­


peute non seulement de confirmer le délire, mais aussi d’avoir une stratégie
d’aide à proposer au patient comme projet thérapeutique. Ces informations
sont également d’une importance capitale dans les psychothérapies et la
psychoéducation du patient et de sa famille.
Le thérapeute peut poser différentes questions dans son investigation
clinique :
• « Comment expliques-tu le début et le développement de ces idées ? »,
« D’où ou de qui penses-tu que te viennent ces idées ? », « Existe-t-il d’autres
personnes qui sont au courant de tes idées ? »
• « Veux-tu bien me dire qui te veut du mal, pourquoi ? », « Comment le
sais-tu ? », « S’agit-il d’une impression ou es-tu sérieusement convaincu de
ce que tu me racontes ? », « Où se trouvent ceux qui te veulent du mal ? »,
« As-tu l’impression que même sur le chemin de l’école, les gens peuvent
te faire du mal ? », « Arrives-tu à sortir de chez toi ? », « Pourquoi cette
personne voudrait-elle contrôler tes pensées ? »
• « Est-ce que tu as peur de sortir de chez toi ? », « À quel moment de la
journée ressens-tu cette peur ? », « As-tu une boule au ventre à l’idée même
de te dire que tu vas sortir de chez toi ? »
• « Est-ce que les gens parlent de toi à la télé ou dans les journaux ou sur les
affiches, dans le bus, le tram, le train, l’avion, etc. ? », « Peux-tu me parler
de ces idées que tu entends ? », « T’arrive-t-il de les entendre le matin, le soir
seul ou en compagnie des amis ou en famille ? », « Depuis quand reçois-tu
ces critiques ? », « Es-tu le seul à entendre ces voix ou bien d’autres per­
sonnes peuvent les entendre ? », « Pourquoi es-tu le seul à avoir ces idées, à
écouter cette voix, à voir ces images, etc. ? », « Écoutes-tu ces voix partout (à
l’école, à la maison, dans ta chambre, aux toilettes, dans la douche, pendant
le jeu, etc.) ? », « Serais-tu le seul capable de parler avec ces voix ? », « Est-ce
que d’autres enfants ont vu ton ami imaginaire ? »
• « Peux-tu contrôler ce que pensent ou disent les gens de ton entourage ? »,
« Peux-tu deviner les pensées des autres ? », « Est-ce qu’eux peuvent deviner
tes pensées ? », « Est-ce qu’il y a d’autres choses à savoir ? »
• « Ne penses-tu pas que c’est ton imagination qui te joue un tour ? »,
« Peux-tu arrêter ou contrôler ces sensations, ces pensées, ces idées, ces
images, ces visions, etc. ? »
• « Comment réagis-tu aux idées délirantes ? », « Exécutes-tu leurs ordres ? »,
« Aimes-tu ces idées ? », « Réponds-tu à ces voix ? », « Comment te sens-tu
en écoutant ces voix ? », « Ressens-tu de la peur, de la colère, de l’énerve­
ment, etc. à l’égard de ces voix ? », « As-tu honte d’entendre des voix ? »,
« Et si les gens te disaient qu’ils ne croient pas à ce que tu racontes, quelle
serait ta réaction ? », « Arrivera-t-il un jour où ces voix vont disparaître
selon toi ? »

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218 Status clinique pédopsychiatrique

Conclusion
Certains thérapeutes préfèrent recourir aux questions semi-directes ou
aux questionnaires répertoriés dans différentes échelles d’évaluation, de
diagnostic, de sévérité ou de pronostic, etc. Pour notre part, nous trouvons
intéressant que le thérapeute se familiarise avec l’exploration des symp­
tômes psychotiques et les diverses techniques d’investigation clinique en
général. Cet exercice lui permet d’enrichir ses techniques sémiologiques, sa
capacité d’entrer en relation avec le patient, ses compétences de clinicien-
observateur. Par la suite, les échelles nous sont d’une aide capitale quand il
est question d’apporter ou de rechercher des éléments plus spécifiques de
la symptomatologie.

Perception
Définition
La perception est en général définie comme « la synthèse des informations
qui permet une prise de conscience d’un objet. Il peut s’agir d’informations
à partir des cinq sens, l’objet perçu est alors présent dans l’espace réel, il est
objectivé. Mais il peut s’agir aussi d’une représentation mentale, l’objet est
imaginé, il est “perçu” dans un espace imaginaire. La perception peut être
augmentée, diminuée, abolie, faussée ou peut concerner une réalité propre
au sujet. » (Tribolet & Sahidi, 2005)
À chaque évaluation pédopsychiatrique, le thérapeute est invité à explo­
rer la perception du patient. Il est extrêmement important d’user de pru­
dence et d’y aller sans hésiter lors de l’exploration des troubles perceptifs.

Distorsions de la perception
Perception accrue
Hypersyntonie
Le patient chez qui l’on observe l’hypersyntonie est « accroché » à
l’ambiance. Le thérapeute note qu’il participe spontanément à l’ambiance
avec perception immédiate des détails qui échappent à tous. Il incorpore
dans la conversation un mot entendu d’une conversation extérieure (dans
la pièce à côté, ce que disent les passants dans la rue, etc.), ou évoque le
sifflement d’oiseaux, le bruit des freins des voitures ou le grincement des
trains, les sons et les klaxons des voitures de la police ou des ambulances
entendus au-dehors. Rien ne lui échappe de l’ambiance environnante.
Cette hyperperception est souvent retrouvée dans le syndrome maniaque,
le trouble bipolaire, etc. Le thérapeute peut avoir du mal à focaliser ou à
garder l’attention du patient durant l’entretien car il est dispersé.
Hyperesthésie perceptive
Elle est liée à la tachypsychie. La personne peut être très dispersée ou elle
se distrait facilement par n’importe quelle sollicitation. Il s’agit des patients

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Fonctions du moi 219

qui déclarent entendre ce qui se passe à l’extérieur du bureau, les bruits


des oiseaux, des passants, etc. L’hyperesthésie perceptive diffère de l’hyper­
syntonie par le fait que le patient hypersyntone a un contact très exagéré.
L’hypersyntonie fait appel à la relation à l’autre. Le patient peine à s’accli­
mater à l’étranger, tandis que l’hyperesthésie perceptive renvoie plus à
l’environnement.
Acuité de perception
Cette acuité se retrouve chez le patient qui montre un plaisir inhabituel
à entendre ou à percevoir les stimuli sensoriels. Ceux-ci l’excitent et ne le
laissent pas différent. Il peut dire qu’il ressent les odeurs ou les parfums plus
que son entourage.
Réactivité accrue aux stimuli extérieurs
Il s’agit d’un état retrouvé dans :
• l’hypervigilance des états anxieux ;
• la résonance intense d’un son banal (syndrome confusionnel ou usage
accru de toxiques ou drogues) ;
• la perception vive, voire aveuglante de la couleur d’un objet (syndrome
confusionnel) ;
• l’atonie des perceptions dans le syndrome dépressif.
Perception ralentie
Il s’agit de la diminution globale des perceptions dans le syndrome mélan­
colique ou dans le syndrome dépressif qui s’accompagne de la bradypsy­
chie. Cette baisse de perception peut être observée dans le champ affectif :
anesthésie affective, indifférence émotionnelle ou ambivalence affective (le
patient éprouve de la haine et de l’amour au même moment envers un
membre de sa famille, un ami, etc.). La baisse de perception peut également
être observée dans la proximité du syndrome de dépersonnalisation et de la
thématique délirante (voire le syndrome de Cotard).

Illusions
L’illusion est définie comme une fausse perception d’un objet réel. Elle
consiste en une déformation ou une perception déformée ou erronée d’un
objet réel. Elle part d’un stimulus réel, contrairement à l’hallucination, qui
s’en différencie dans laquelle l’objet perçu est inexistant.
L’illusion est différente de la perception délirante. « Dans l’illusion, il
existe un stimulus réel, mais la capacité de vérifier l’objectivité du stimulus
est temporairement défaillante ou bien réduite. Cette épreuve permet une
correction après-coup. » (Preising & Serre, 2000)
Le patient qui fait l’illusion se rend compte qu’il s’agissait d’une fausse
impression. Il critique ce qu’il croit percevoir et cherche à le vérifier.
On distingue parmi les illusions une autre catégorie dite les illusions de
sosies, il s’agit d’un syndrome de Capgras, dans lequel « elles signent un

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220 Status clinique pédopsychiatrique

trouble de l’identification des personnes familières, se manifestant par une


négation de leur identité et la conviction délirante qu’elles ont été rem­
placées par un double. » (Tribolet & Sahidi, 2005) Dans ce syndrome, le
patient peut être convaincu, par exemple, que sa mère n’est pas la véritable
mère qu’il connaît, mais qu’il s’agit d’une autre personne qui la remplace.

Hallucinations
Définition
Les hallucinations sont rangées parmi les troubles de la perception. « L’hal­
lucination se définit comment étant une perception sans objet à percevoir. »
(Tribolet & Sahidi, 2005) Le patient halluciné dit avoir une forte impression
de voir, d’entendre, de sentir, d’avoir des goûts, etc. mais que les autres
personnes de son entourage ne perçoivent pas. Un ou plusieurs organes de
sens peuvent être concernés par les troubles perceptifs.
On définit les hallucinations « comme des expériences de type perceptif
qui surviennent sans stimulus externe. Elles sont saisissantes et claires, avec
la force et les effets des perceptions normales, et elles ne sont pas sous le
contrôle de la volonté. » (American Psychiatric Association, 2015)

Caractéristiques
Hallucinations psychosensorielles ou sensorielles
Elles sont :
• objectivées par un ou plusieurs organes de sens ;
• caractérisées par leur spatialité ;
• associées à la conviction de leur réalité subjective.

Hallucinations psychiques, intrapsychiques ou pseudo-hallucinations


Elles sont caractérisées par :
• une absence de sensorialité ;
• une absence de spatialité ;
• une représentation mentale exclusive.
Les différentes sortes d’hallucinations
Le patient est fortement convaincu du caractère réel de ce qu’il perçoit. Il
n’y a pas de critique possible. Le faire raisonner serait une perte de temps
tellement il est convaincu de ce qu’il perçoit.
Hallucinations psychosensorielles
Ce type d’hallucinations concerne les cinq organes de sens. On peut avoir
des hallucinations dites :
• auditives (acoustiques ou verbales) : il peut s’agir d’un bruit bien audible,
différencié ou non, de voix d’humains, de voix d’animaux, d’un son aigu,
grave, de bruits de machines, etc. Le patient peut ou pas supporter ces hal­
lucinations ;

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Fonctions du moi 221

• olfactives : le patient dit sentir de manière particulière les odeurs habi­


tuelles ou non. Il peut s’agir de quelque chose qui brûle, de la pourriture, de
la putréfaction ou de la fermentation, il peut percevoir les odeurs de parfum
des personnes connues partout où il va, etc. ;
• gustatives : le patient perçoit un goût anormal des aliments ou des sensa­
tions bizarres et étranges. Il peut dire que les aliments ont changé de goût,
ou que tout ce qu’il met dans la bouche a un le même goût, soit amer, soit
aigre, etc. Il indique qu’il a de la peine à manger telle ou telle autre nourri­
ture par peur d’être empoisonné, ou parce qu’il est convaincu que son repas
n’est pas bon pour sa santé, etc. ;
• visuelles : le patient dit percevoir des images familières partout où il se
déplace. Certains indiquent être suivis par une ombre, voire tel animal,
voire le même personnage partout, etc. D’autres voient des choses, des
personnes, des images, etc. que leur entourage n’arrive pas à voir ou à per­
cevoir. Le patient arrive à plus ou moins bien différencier ses propres hal­
lucinations des perceptions des gens de son entourage. Ces hallucinations
visuelles requièrent la réalisation d’un examen ophtalmique et neuro­
logique pour écarter une étiologie somatique ;
• tactiles ou haptiques : le patient a la sensation que quelque chose parcourt
sa peau (par exemple, il peut être convaincu d’avoir des vers qui parcourent
sa peau, ou sentir que sa peau est en train de desquamer, etc.), son corps
tout entier ou ses organes externes, etc.
L’essentiel dans les hallucinations est de bien les analyser. Le thérapeute
recherche les types, les caractéristiques, les moindres indices de la présence
de trouble perceptif. Nous devons éviter de coller au patient ou de lui sug­
gérer des réponses. De manière libre et avec empathie, le thérapeute doit
mener sa démarche clinique pour sarcler tout le terrain.
Hallucinations intrapsychiques
Il s’agit des perceptions internes que le patient ressent en dehors des organes
de sens. Il dit que tout se passe dans sa tête. Il est en mesure de différencier
la voix de son thérapeute ou de son entourage de celle qu’il entend. Cette
voix peut être localisée soit dans son cerveau, soit dans une partie quel­
conque de son corps.
Hallucinations cénesthésiques ou corporelles
Le patient ressent des manifestations à travers ses organes ou viscères
internes (estomac, poumons, intestins, vaisseaux, etc.). Il dit sentir des
choses étranges dans son corps, dans sa peau, ses os, ses organes internes,
etc. Il peut dire qu’il sait que ses intestins sont bouchés, que son estomac est
transformé en une pierre, qu’il n’a plus de foie, qu’il ressent que quelqu’un
lui fait des rapports sexuels à distance, il se sent être pénétré, caressé,
étouffé, reçoit des coups, etc.

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222 Status clinique pédopsychiatrique

Hallucinations kinesthésiques ou motrices


Le patient qui a des hallucinations kinesthésiques ou motrices dit avoir
des mouvements forcés. Il subit et exécute certains gestes et actes par force.
Ces hallucinations le mettent sous pression ou dans des mouvements de
traction. Il peut nous dire par exemple : « Ces hallucinations peuvent me
faire tomber. » En levant son bras, il a l’impression ou la sensation qu’une
force le lui lève. Ainsi, il reste convaincu que marcher, courir, se déplacer
ou l’exécution de tout autre mouvement n’est pas le fruit de sa volonté,
mais plutôt celle de ces forces qui ont pris la commande de son corps
entier.
Pseudo-hallucinations
Le patient est conscient de l’irréalité de ce qu’il perçoit comme halluci­
nation. Par exemple, il peut nous rapporter qu’il a eu ses hallucinations
après la prise de LSD, de psilocybine, de mescaline, d’iboga, de cannabis,
d’héroïne, d’alcool, de médicaments, etc. Ces hallucinations disparaissent
dès que s’estompe l’effet de la drogue ingérée ou consommée.
Réactions du patient halluciné
Dans le cadre des hallucinations, il faut chercher à savoir si le patient dis­
tingue avec clarté la voix, l’image, la personne, l’objet qui est source de son
hallucination. Il est question de vérifier s’il nous parle de manière claire de
ses hallucinations ou si tout est brouillé dans ses perceptions.
En plus, on recherche le type de réaction contre ses hallucinations. On
analyse la manière dont le patient y répond. Est-ce qu’il adopte tel ou tel
autre comportement ?
Le patient peut quelquefois :
• montrer réticence, méfiance et dissimulation, etc. vis-à-vis de ses halluci­
nations ;
• adopter une attitude d’écoute qui est parfois révélatrice de l’activité hal­
lucinatoire ;
• trouver des stratagèmes de défense : obturation des oreilles, couverture
par un son plus intense (radio, casque, écouteurs sur les oreilles, lunettes
fumées, etc.) ;
• obéir aux ordres dictés (syndrome d’influence, grand et petit automa­
tismes de de Clérambault, etc.). Le cas échéant, il est nécessaire de chercher
les idées suicidaires et les éventuels passages à l’acte auto ou hétéroagressif ;
• dialoguer avec les voix : il parle à voix haute ou leur répond en murmu­
rant.
Les sons, bruts, tonalités, odeurs, images, sensations, etc. peuvent ou non
être fortement ressentis par le patient. Leur fréquence peut être variable
(certains disent que leur trouble de perception est constamment présent
toute la journée, d’autres le perçoivent uniquement le matin ou seulement
quand ils se retrouvent dans les transports en commun, à l’école, etc.).

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Fonctions du moi 223

Généralement, il faut bien rechercher leur mode d’apparition, leur inten­


sité, les facteurs aggravants, les réactions du patient et de l’entourage, etc.
Il arrive que le patient peine à parler ou à évoquer ses hallucinations par
crainte que personne ne le croie ou ne prête attention à ce qu’il est en train
de vivre ou de raconter. Ainsi, il évite d’en parler pour ne pas être pris pour
un malade ou un fou.
Exploration des hallucinations
Tout le long de ce guide, nous répétons expressément combien il est
important de faire preuve de tact et d’empathie quand on explore un symp­
tôme ou lors de l’entretien clinique. À plus forte raison, l’exploration des
hallucinations requiert d’avoir plus de stratégie. Il faut prendre le temps de
mener son entretien. L’investigation des troubles perceptifs nécessite d’être
méticuleux et d’user de technicité. Pourquoi ne pas le faire en deux ou trois
temps ? Le thérapeute peut avertir le patient en ces termes : « Je vais te poser
des questions un peu plus particulières et très personnelles. »
En fait, voici quelques questions à poser : « Est-ce que ça t’arrive de voir
des images ou entendre des sons ou bruits mais que ton entourage (les amis,
ta fratrie ou tes parents) n’entend pas ? », « As-tu l’impression que souvent
ton imagination, tes pensées ou tes idées te jouent un mauvais tour ? »,
« Depuis quand et comment arrives-tu à avoir ces sensations, à entendre ces
voix ou à voir ces images ? »
Hallucinations auditives
Lors de l’exploration des hallucinations auditives, le thérapeute peut
demander : « Est-ce qu’il t’arrive d’entendre des choses tout seul mais que les
autres n’entendent pas ? », « Explique-moi comment cela t’arrive », « Cette
voix, est-ce qu’elle vient de l’extérieur ou tu l’entends par tes oreilles ? »,
« Penses-tu savoir à qui appartient cette voix ? », « Pourquoi, selon toi, c’est
ton père qui te parle ? », « Peux-tu bien différencier les voix qui parlent ? »
« Peux-tu me parler de cette voix qui te parle juste à toi seul ? », « Penses-
tu que les autres peuvent l’entendre ? », « Qu’est-ce que cela te fait d’enten­
dre cette voix ? », « Est-ce que cette voix te fait peur ? », etc.
« Obéis-tu à la voix ? », « Est-ce que cette voix peut t’empêcher de faire ce
que tu veux ou elle te communique ses ordres ? Si oui, lesquels ? », « As-tu
l’impression que cette voix devient de plus en plus forte, si oui depuis
quand ? »
« À quelle fréquence tu perçois ces voix ? », « Est-ce que tu entends cette
voix ou ces voix tout le temps et partout, ou bien il t’arrive de ne pas
l’entendre ? », « Que fais-tu pour ne pas entendre cette voix ? », « As-tu
cherché à t’en débarrasser ? Si non, pourquoi, et si oui, comment ? », « C’est
quand la dernière fois que tu as entendu la voix en question ? »
« Que te dit-elle au juste ? », « Penses-tu que cette voix à un objectif
précis ? », « Veux-tu me dire au juste ce qu’elle dit maintenant ? », etc.

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224 Status clinique pédopsychiatrique

Hallucinations visuelles
« Il t’est arrivé une fois ou plus de percevoir des choses étranges ? », « Veux-tu
bien me parler de ces images ou visions ? », « Ou alors, pouvons-nous pren­
dre un moment pour aborder tes pressentiments ? », « Existe-t-il d’autres
personnes de ton entourage qui peuvent voir tes amis imaginaires ? », « Qui
d’autre est en mesure de voir ce que tu vois ? », « Est-ce que ces images sont
présentes même quand tu fermes tes yeux ou quand tu dors ? », etc.
« Comment sais-tu que tu es le seul à voir ces choses-là ? », « Où as-tu
vu pour la première fois ces visions ou ces images ? », « Que vois-tu au
juste ? », « Tu voyais quelqu’un comme tu me vois, moi ? », « Est-ce que
l’image était claire ou floue ? », « C’était quand et où ces apparitions ? », « Il
t’arrive aussi de voir cette personne à l’école et à la maison ? », « As-tu parlé
avec quelqu’un de ce que tu vois ? », « Qu’est-ce que cela te fait de voir ces
images ? », « As-tu peur en voyant ces images ? »
Hallucinations cénesthésiques
« Veux-tu bien me parler de ce que tu ressens sur ou sous ta peau ? », « Est-ce
que ces sensations sont dans ta peau ou sur la surface de ton corps ? », « Que
fais-tu quand tu ressens ces sensations ? », « As-tu l’impression qu’il s’agit
de ton estomac ou de tes intestins ? », « Peux-tu contrôler leur apparition
ou leur mouvement ? », « Qu’est-ce qui te dit qu’il s’agit bel et bien de ton
estomac et non d’un autre organe ? »
Autres caractéristiques
L’exploration des hallucinations ne s’arrête pas à décrire le type. Il faut exa­
miner les autres critères telles que la fréquence, la durée, la survenue, les
facteurs aggravants, la réaction de l’entourage, etc.
En bref, il faut que le thérapeute précise et clarifie ses questions : « Veux-
tu me dire quand cela a commencé ? », « En as-tu parlé avec quelqu’un ? »,
« Pourquoi gardes-tu ce qui t’arrive pour toi seul ? », « Qui d’autre de ton
entourage est au courant de ce que tu me racontes ? », « Es-tu sûr qu’il s’agit
d’un ami imaginaire ? », « Est-il présent maintenant ton ami imaginaire ? »,
« À quel moment de la journée apparaît-il ? », « Es-tu sûr qu’il s’agit de
la voix de ta mère qui t’insulte ? », « Comment le sais-tu ? », « Pourquoi
penses-tu que c’est vrai ? », « Ne trouves-tu pas que ce que tu me racontes
n’a rien de réel ou de normal ? », etc.
L’important dans l’exploration des hallucinations est d’éviter que le
patient se braque. Il doit se sentir très en confiance pour nous livrer les
informations qu’il préférerait garder pour lui seul. Il faut s’abstenir de toute
précipitation ou conclusion hâtive. Le thérapeute devrait valider ses impres­
sions auprès du patient pour qu’il soit le plus près possible de sa réalité.

Troubles de la personnalité
Les troubles de la personnalité ne sont pas à confondre avec les traits de la
personnalité décrits dans le chapitre 14 ; ils sont abordés dans la perception

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Fonctions du moi 225

car le patient qui présente un trouble de personnalité a une perception erro­


née de lui-même ou de son environnement.
Les différentes sortes de troubles de la personnalité
Les troubles de la personnalité sont classés en trois entités. Ces dernières
sont à différencier selon les informations cliniques récoltées. Elles aident à
poser des hypothèses diagnostiques structurelles des troubles de la person­
nalité abordées dans la partie IV.
Déréalisation
Le patient semble se retrouver dans un monde ou un environnement irréel.
Il a la perte de sentiment de réalité et de familiarité dans l’environnement
habituel. Il peut dire qu’il a le sentiment de séparation, d’éloignement,
d’étrangeté de la réalité. Il a l’impression que les choses dans son environne­
ment lui paraissent artificielles et factices. Il perçoit les personnes comme
bizarres, déformées, étranges par leur taille ou tout autre caractère physique
ou externe.
Désanimation
C’est un sentiment d’étrangeté de soi. Le patient a le sentiment de ne plus
être soi-même, de perdre sa personnalité, son identité, de se transformer
en un autre que soi. Il peut aussi avoir le sentiment de transformation de
soi ou de vide intérieur, d’automatisme, de perte de la volonté, de perte de
sa propre liberté, de gêne, d’indécision dans l’action ou d’irréalité de ses
souvenirs et ses idées. Il a l’impression ou le sentiment de transformation
de l’affectivité et de dévalorisation.
Le patient peut nous dire qu’il a un sentiment de dédoublement : il a
l’impression d’être spectateur de lui-même. On peut avoir une proximité
sémiologique avec l’héautoscopie (hallucination du double) et l’automa­
tisme mental. Certains patients ont un sentiment du néant ou d’anéantis­
sement psychique : il s’agit d’avoir une impression d’être à la fois mort et
vivant, ressentir un vide, d’une baisse de l’intensité de la vie, d’une perte
de l’énergie vitale.
Désincarnation ou décorporéisation
Le patient a un sentiment d’être atteint dans son intégrité corporelle. Il
peut, dans ce cas, verbaliser ses impressions en ce sens qu’il a :
• une sensation d’une pesanteur majorée de son corps propre ou au
contraire d’être immatériel et sans poids ;
• une sensation de modifications de densité, de volume (corps dilaté ou
rétréci) ou de forme de son corps ;
• une sensation de séparation entre sa personne et son enveloppe corpo­
relle. Par exemple, le patient dit avoir l’impression de flotter dans son corps.
Localisation prédominante de l’éprouvé corporel
La localisation de l’éprouvé corporel peut concerner plusieurs organes.

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226 Status clinique pédopsychiatrique

Cœur
Il arrive que le cœur soit concerné par l’éprouvé corporel du patient. Celui-
ci dit dans ce cas qu’il a l’impression que son cœur ne bat plus. D’autres
disent avoir l’impression que leur cœur s’est rétréci ou arrêté. Lorsque c’est
le cœur qui est le siège de l’éprouvé corporel, le patient perçoit des sensa­
tions étranges de son cœur. Ces informations obligent à analyser et recher­
cher un éventuel syndrome délirant.
Cerveau
Le cerveau peut, comme les autres organes internes, être touché ou concerné
par les distorsions de perceptives. Dans cette situation, le patient vient
consulter avec une conviction que soit son cerveau a été changé, soit il est
vide, soit il a l’impression qu’il va éclater, etc. Les hallucinations intrapsy­
chiques sont également examinées systématiquement.
Intestins
Certains patients disent avoir des sensations étranges au niveau de leurs
intestins. Ils ont l’impression que leurs intestins sont noués, bouchés, rétré­
cis, etc. Il est important de rechercher les hallucinations sensorielles qui
peuvent accompagner cette sensation étrange.
Visage et regard
À part les viscères internes, le visage peut être ou devenir un autre siège
d’éprouvé corporel. Le patient peut alors se dire qu’il ne se reconnaît plus
dans le miroir. Le thérapeute note des sensations de vertige, de fatigue et
d’épuisement.

Trouble de la personnalisation des hypocondries


Il est à différencier :
• de la cénesthopathie : où le patient a des doutes de l’existence de son corps,
de ses limites, de son appartenance ;
• du délire de négation ou du syndrome de Cotard où le patient vit sans
angoisse dans un état de mort éprouvé et de l’asomatognosie. Il s’agit de l’inca-
pacité de reconnaître ses troubles ou sa pathologie suite à un trouble du schéma
corporel entraînant notamment une absence de reconnaissance d’une portion
de son propre corps, suivant un traumatisme ou une lésion au cortex.

Remarque
Il reste important pour le thérapeute d’accueillir avec insistance, empathie et
respect les idées délirantes, les hallucinations ou le trouble de la personnalité
sans oublier de le confronter à la réalité, non pas celle du patient, mais celle
du sens commun. L’objectif est d’analyser son niveau de jugement ou son test
de réalité. L’entourage du patient reste une ressource importante dans cette
démarche surtout quand il est question de départager ce qui est délirant et ce
qui est culturellement admis comme normal.

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Fonctions du moi 227

Langage ou discours
En ce qui concerne le langage, « à partir de la première approche, on peut
circonscrire la suite de l’examen. Certains troubles sont en effet très symp­
tomatiques et repérables dès cette première approche. » (Mosset, 2018)
Les repères du développement normal guident l’entretien clinique. Le théra­
peute sait à la fin de son évaluation quels bilans orthophoniques ou logo­
pédiques demander pour affiner ses hypothèses diagnostiques et la prise en
charge adaptée aux besoins du patient.
Remarquons que les troubles du langage peuvent faire partie des troubles
dits « dys ». Ces derniers sont très handicapants. Le patient qui a des pro­
blèmes, quels qu’ils soient, en ce qui concerne le langage oral ou écrit,
risque d’être à la merci de ses pairs et, plus grave encore, se retrouver en
échec scolaire. Nous invitons le thérapeute à être plus attentif et ne pas
passer outre cette exploration, quel que soit l’âge du patient.
Si pour les jeunes enfants, le langage permet d’entrer dans la socialisa­
tion à la crèche, à l’école maternelle, les enfants plus âgés entrent dans les
apprentissages scolaires par le biais du langage. Chez les adolescents, en
revanche, le langage est vecteur de leur identité. C’est un excellent moyen
de communication et d’ailleurs, le langage est un canal préférentiel utilisé
lors de l’évaluation clinique.

Généralités
En guise de définition, le langage est un système de communication symbo­
lique qui se manifeste, chez les humains, à travers les langues, les symboles,
les codes et les signes. Son importance est capitale du fait qu’il permet
la communication entre les individus. Le langage fait partie intégrante de la
construction psychique du patient. C’est une fonction non autonome du moi.
Le langage, ou la parole ou le discours, est un outil important d’explo­
ration clinique à partir de 7 ans. Il est intéressant de rappeler que : « si
l’observation clinique, qui inclut évidemment l’“écoute” clinique, vise la
subjectivité et est animée par une quête de sens, il est clair que le langage
est un objet privilégié d’observation, car il véhicule du sens. Le langage
communique du sens conscient, il transmet aussi, et c’est là que s’orientera
plus spécifiquement l’observation clinique, du sens latent, inconscient. »
(Ciccone, 2018)
Un autre fait important à souligner est que le langage est intimement lié
à la pensée, aux émotions, aux affects et aux sentiments. Cela dit, il faut
rechercher d’autres troubles probablement associés quand on suspecte un
trouble de langage.
Le langage oral et écrit se vérifie par le son, l’articulation, le vocabulaire,
les défauts ou fautes sur les plans syntaxique, orthographique et rythmique.
Le langage permet la libre association autour des préoccupations du patient
et de ses principaux intérêts, ses fantasmes, ses désirs, sa pulsionnalité, ses
rêves, etc.
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228 Status clinique pédopsychiatrique

Langage oral
Il existe deux types de compétences ou habilités du langage oral : les compé­
tences ou habilités réceptives et expressives.
• Les compétences réceptives désignent l’action de recevoir, de comprendre
ou de traiter les informations. En fait, dans les habiletés réceptives ou le lan­
gage oral réceptif, le thérapeute se demande si le patient comprend, décode
ou capte la logique du message ou des phrases qu’il entend ou écoute.
• En revanche, lors d’investigation du langage oral expressif, le thérapeute
essaie de savoir si le patient respecte les règles de phonétique, grammati­
cales, lexicales ou d’orthographe quand il s’exprime. Comment sont son
articulation, sa fluence verbale, ses intonations et sa gestion de la syntaxe et
de la grammaire ?
Nous devons signaler que « l’apprentissage et l’utilisation du langage
dépendent à la fois de compétences réceptives et expressives. La compétence
expressive fait référence à la production de signaux vocaux, gestuels ou ver­
baux, tandis que la compétence réceptive désigne le processus de réception et
de compréhension des messages linguistiques. » (American Psychiatric Asso­
ciation, 2015) Il est important de faire la différence entre produire, donner
et communiquer des informations, quelle que soit la source, soi ou l’autre.
Langage écrit
En fait, le langage écrit s’étend de l’écriture à la maîtrise de l’orthographe et
des règles de grammaire. Le langage écrit comprend également la maîtrise
de la syntaxe, de la ponctuation, de l’organisation du texte et de l’utilisa­
tion d’un vocabulaire adéquat.
En plus de l’écriture, le langage écrit consiste en la lecture. Le thérapeute
cherche à savoir si le patient est capable de décrire distinctement les diffé­
rents mots qui composent une phrase.

Exploration du langage
Le thérapeute complète l’exploration du langage avec le bilan effectué par
d’autres spécialistes tels que des logopédistes, des spécialistes de l’audition,
des psychomotriciens, des neuropsychologues, des enseignants, etc.
Le spécialiste est libre de faire passer des tests ou diverses échelles lors de
l’évaluation. Le thérapeute doit penser de prime abord à la surdité devant
un retard de langage. Son investigation doit aller plus loin. Elle consiste à
analyser le langage oral et écrit dans l’objectif de déterminer les compé­
tences réceptives et expressives du patient.
L’exploration du langage se fait sur deux critères : le contenu et le rythme,
qui renvoie à la prosodie et la musicalité.
Rythme du discours
Le thérapeute doit chercher la qualité affective du langage. On recherche
le degré d’appétence à la communication, son intérêt pour le langage. Le
thérapeute doit décrire la qualité du discours, de l’expression de la pensée,

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Fonctions du moi 229

du vocabulaire (exactitude et richesse), de l’articulation, selon l’âge et le


niveau de scolarité du patient.
Il arrive que le moment d’émergence d’anxiété s’observe avec un discours
qui change dans son rythme ou son cours. C’est-à-dire que les émotions
ou les modifications affectives ont de l’influence sur la forme du langage.
Au cours de l’exploration du discours, tous les éléments intrinsèques ou
extrinsèques du discours doivent être évalués et comparés selon le contexte
socioscolaire et l’âge du patient.
Est-ce que le patient est spontané, organisé, ralenti ou accéléré dans son
discours et le rythme verbal (débit) ? Est-il mutique (absence totale ou
partielle de mots ou de phrase) seulement pendant votre entretien ou il
l’est aussi en milieu scolaire et familial ? Présente-t-il une pauvreté du dis­
cours ? Quel est le ton de son discours : s’agit-il d’un langage monotone,
monocorde, d’une voix rauque ou fine, d’un ton discontinu ? On décrit
aussi la fluidité et la cohérence du discours. Le thérapeute note si le discours
du patient est par-dessus tout communicatif ou non.
Un langage laconique est caractérisé par une parcimonie verbale, des longs
silences, il est bref et économe et dépend de sollicitation du thérapeute.
C’est un langage pauvre qui n’est pas riche en informations sémiologiques.
Le patient peut avoir parfois tendance à la logorrhée avec une augmen­
tation du flux verbal (discours accéléré et prolixe) (cf. supra la définition de
la logorrhée dans « Pensées »). Contrairement à un flux rapide et accéléré,
le patient peut avoir un langage lent ou ralenti qui peut s’observer chez des
personnes inhibées. Il peut s’agir d’une bradypsychie qui est un symptôme
rencontré dans plusieurs troubles (dépressif, anxieux, neurologique, etc.).
La bradypsychie peut être observée chez les patients souffrant d’un état de
stress post-traumatique, chez des patients inhibés, ceux qui souffrent d’une
déficience intellectuelle.
Le langage du patient peut régresser (par exemple un patient de 15 ans se
met à parler comme un patient de 7 ou 9 ans). Le discours peut contenir des
lapsus. Il est important de clarifier s’il existe des défauts ou des erreurs sur le
plan syntaxique, orthographique et rythmique.
Certains patients peuvent se mettre à faire des jeux des mots, parler à
l’envers ou, plus encore, inventer de nouveaux termes et concepts connus
uniquement d’eux-mêmes.
Trouble de contenu du discours (contenu de la pensée)
En plus de la forme ou du rythme du discours, nous devons explorer le
contenu du discours. Le contenu du discours peut être clair, cohérent, struc­
turé, compréhensible, réaliste, irréaliste, illogique, flou, confus, pauvre, il
peut demander à être reformulé, etc.
Pour explorer le contenu du discours, le thérapeute analyse l’expression
de la pensée, la richesse du vocabulaire selon l’âge et le niveau de scola­
rité du patient. On se demande finalement ce qu’il veut communiquer ou

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230 Status clinique pédopsychiatrique

transmettre. Quelle est la qualité de sa valeur communicative : bonne ou


mauvaise ?
Le thérapeute devrait se demander s’il existe dans le discours du patient
une adéquation des processus qui guident de manière adaptative le discours
et soutiennent la pensée : attention, concentration, anticipation, formation
des concepts, lecture, etc.
Certains symptômes particuliers peuvent être observés : coq-à-l’âne, inco­
hérences, relâchements des associations, illogismes, etc.
Les questions à se poser sont, par exemple :
• Est-ce que nous notons des variations du discours de mon patient au
cours de l’entretien ou d’un entretien à un autre ?
• Est-ce que nous arrivons à observer des améliorations ou des détériora­
tions, voire des régressions, dans le discours du patient pendant l’entretien
quand le thème abordé concerne sa situation sociale, environnementale et
professionnelle (par exemple la présence d’un nouveau conflit) ?
Particularités de l’exploration du langage
Langage dans sa globalité
Le langage a certaines particularités ou spécificités qui lui permettent de
remplir certaines fonctions dans la communication avec l’autre. On peut
citer onze différents rôles ou missions du langage. Il incombe au thérapeute
de vérifier auprès de l’entourage du patient ou de lui-même quelles sont les
fonctions ou critères remplis par le langage.
Ces particularités sont rapportées dans la suite sous forme de questions
ouvertes, à savoir : qu’est-ce que le patient communique par sa vocalisation
et babillages ? Est-ce qu’il est dans l’imitation motrice et verbale ? Qu’est-ce
qu’il transmet comme message ou quel est le niveau de sa compréhension
non verbale ? Montre-t-il son intention de communiquer ? Peut-il observer
ou respecter le tour de rôle au cours d’un échange ou une discussion avec
l’autre ?
Quelle est la qualité de l’attention conjointe du patient ? Arrive-t-il à
se servir de son langage pour partager les émotions, le plaisir, les affects
avec l’autre ? Son langage lui permet-il de faire des rapprochements ou des
similitudes (premières catégorisations) ?
Comment exprime-t-il sa capacité d’attention ? Existe-t-il une perma­
nence de l’objet chez le patient ? Est-ce que son langage est un canal per­
mettant la tenue d’un jeu symbolique ? Comment est son contact visuel
lorsqu’il communique avec l’autre ?
En plus, lors de l’exploration clinique, le thérapeute fait un double travail :
pendant qu’il analyse le langage (son cours et son contenu), il recherche en
même temps quelle fonction remplit le langage ou quelles sont ses particu­
larités. Étant donné que le langage évolue en fonction du développement
de l’individu, en pédopsychiatrie, l’examen ou l’exploration du langage
tient compte des éléments suivants : l’expression écrite, la formation des

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Fonctions du moi 231

phrases, la lecture et la reconnaissance des mots, la vitesse des réactions, la


qualité visio-attentionnelle, la précision phonologique, etc.
Toutefois, le thérapeute se pose de manière continuelle les questions sui­
vantes lors de son évaluation :
• Quelle est la qualité du langage par rapport à l’âge du patient ?
• Le langage est-il spontané, organisé, ralenti dans son discours ?
• Quel est le débit ou la tonalité du discours ?
• Quel est le contenu, la qualité, le degré d’appétence à la communication,
son intérêt pour le langage ?
• Utilise-t-il jeux de mots, écholalie, palilalie, tachyphémie (accélération
du rythme verbal prenant la forme d’une récitation plus ou moins bre­
douillante de la parole de l’articulation), bradyphémie (lenteur du rythme
verbal ; s’observe dans les processus ralentissant l’activité psychique), etc. ?
• Parvient-il à communiquer quelques informations claires et cohérentes ?

Remarque
Nous tenons à souligner que la langue des signes est une forme de langage.
Que le patient soit sourd, sourd-muet ou muet, l’important c’est de trouver le
moyen de travailler avec lui et nous analysons son langage au même titre que
celui des patients parlants. Nous n’allons pas plus loin car cette thématique
est vaste et requiert des compétences plus spécialisées.

Exploration du langage oral


Elle peut se faire à plusieurs niveaux. L’analyse doit être systématisée et
concerne la qualité de la communication, la parole, le rythme de la parole,
l’articulation, la voix, les autres manifestations liées au langage oral.

Exploration de la communication
Le clinicien observe si le patient parle de manière fluide ou non. Est-ce qu’il
parle ou pas ? A-t-il des difficultés à prendre la parole (dans les situations de
groupe ou non : à échanger avec ses camarades ou ses amis, à respecter les
tours de parole, à proposer une idée ou faire une suggestion, etc.) ? Est-ce
qu’il arrive à s’exprimer clairement ? Éprouve-t-il de la peine à mettre en
mots ses idées, à construire ses phrases ou à structurer son récit ? A-t-on
l’impression qu’il a des difficultés à comprendre ce qu’on lui dit ? Est-ce que
son langage correspond à celui des enfants de son âge ou de son contexte
socioculturel ?

Exploration de la parole
Il est important d’analyser si le patient prononce les mots, les sons, les
expressions verbales, etc. Est-ce que son langage est difficilement intelli­
gible ou compréhensible ? Semble-t-il comprendre ou entendre ce qu’il dit ?

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232 Status clinique pédopsychiatrique

Exploration de la qualité d’articulation


Le thérapeute vérifie la qualité d’articulation des mots, des expressions, etc.
Est-ce que le patient a de la peine à prononcer certains mots ou syllabes ?
Déforme-t-il un ou plusieurs sons ? Parle-t-il de manière audible et compré­
hensible ? Est-ce que son entourage éprouve de la peine à le comprendre ?
Parvient-on à noter des accents liés à sa province ou sa ville de provenance ?
Exploration de la voix
Durant l’entretien, le thérapeute essaie d’apprécier le timbre vocal du
patient par rapport à son âge. Est-ce qu’il a une voix rauque, cassée, mono­
tone, etc. ? Est-ce qu’il crie au lieu de parler, pleure-t-il, etc. ?
Exploration du rythme de la parole
Le rythme du langage nous informe sur le flot de la parole du patient.
S’agit-il d’un rythme saccadé ou non ? Normalement, le thérapeute note ou
observe si le patient respecte ou non certains éléments de la communica­
tion non verbale. On vérifie ses mimiques, sa gestualité, sa tonalité vocale.
Respecte-t-il le tour de rôle ?
Est-ce que l’on objective des phénomènes particuliers dans son discours :
fuite des idées, stéréotypies verbales, écholalies, interruptions du discours
(barrages ou feeding, relâchement des associations, etc.), persévérations,
néologismes, etc. ? (Cf. supra dans « Pensée »).
Le thérapeute peut noter une régression dans le langage du patient. Il
peut aussi constater que le discours contient des lapsus ou alors qu’il est
parasité ; le cas échéant, il faut bien examiner la pensée dans son cours et
son contenu.
Certains patients ont une dyslexie faite de :
• zézaiement : portant sur les consonnes, anomalies de position de la
langue ;
• chuintement : difficultés de concentration des joues portant sur les
consonnes ;
• blésité : les mots ne peuvent être reproduits correctement par nasalisation ;
• bégaiement : clonique (on note une répétition involontaire d’une même
syllabe) et tonique (c’est le blocage temporaire de l’expression d’une syllabe
avec contraction du système phonateur).
Par ailleurs, l’écholalie est un syndrome qui accompagne souvent la dys­
phasie. C’est une forme de communication verbale souvent constatée chez
les enfants autistes.
Exploration des autres manifestations
En plus du rythme, du timbre de sa voix, etc., l’exploration du langage
analyse également la qualité du tonus des muscles de la sphère bucco-orale.
Le thérapeute examine si la déglutition du patient est adaptée ou non. Le
plus souvent, cette exploration est faite par d’autres collègues car, en entre­
tien clinique, on n’a pas à notre disposition tous les moyens d’examiner

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Fonctions du moi 233

physiquement nos patients. Cela dit, au moindre doute, le thérapeute doit


demander un avis du collègue le plus spécialisé.
Exploration du langage écrit
Seule, l’exploration du langage oral ne suffit pas. Le thérapeute doit analy­
ser le langage écrit. Certaines personnes peuvent oralement être indemnes
de difficultés pendant qu’elles ont des problèmes dans leur écrit. Le langage
écrit a deux parties : la production écrite et la lecture.
En fait, les enseignants sont à la première loge quant à la question
d’explorer les difficultés du patient à entrer dans les apprentissages. Les
activités scolaires sont plus concentrées autour de la lecture et de l’écriture.
Certains élèves ou patients peuvent présenter des troubles globaux des
apprentissages, d’autres souffrent de troubles plus spécifiques des apprentis­
sages. Pour ces derniers, les « difficultés à apprendre à élaborer des lettres
avec les sons de sa propre élocution – lire des mots écrits (souvent appelé
dyslexie) – sont une des manifestations les plus fréquentes du trouble spéci­
fique des apprentissages. Les difficultés d’apprentissage s’expriment par une
série de comportements ou de symptômes observables et descriptifs […] Ces
symptômes cliniques peuvent être observés, recherchés à travers l’entretien
clinique, ou établis grâce aux relevés scolaires, aux échelles d’évaluation
ou aux descriptions dans les évaluations éducatives ou psychologiques. »
(American Psychiatric Association, 2015)
Ceci montre combien il est nécessaire et important que le thérapeute
fasse une évaluation complète du patient.
Exploration de la lecture
Cet examen analyse si le patient déchiffre aisément les lettres ou peine à
le faire. Il revient au thérapeute de se demander si le patient confond des
sons ou des lettres. A-t-il de la peine à assembler les sons pour lire les mots
ou les phrases par syllabes ? Certains peuvent avoir du mal à déchiffrer les
syllabes. Arrive-t-il à deviner les mots sans chercher à les vérifier ou sans
l’approbation de l’autre ? Le thérapeute peut être étonné de savoir qu’il
peine à comprendre ce qu’il lit. Il est important de chercher la présence ou
non de l’intérêt à entrer dans la lecture chez le patient. Quel est le rythme
de sa lecture ? Est-il un bon lecteur ? Il faut rechercher systématiquement
les différentes difficultés qui l’empêchent d’entrer dans sa lecture. Quelle
image se fait-il de lui-même devant ses peines à lire ? Est-ce qu’il existe des
moyens mis en place pour l’aider dans sa lecture ? Le cas échéant, quelle est
son attitude vis-à-vis de cette aide ?
Exploration de l’écriture
Un autre élément important à évaluer est l’écriture. Généralement,
l’apprentissage scolaire commence entre 3 et 6 ans. L’écriture ne doit pas
être confondue avec le dessin. L’écriture n’est pas à confondre avec le des­
sin. Lors de cette exploration, le thérapeute vérifie si le patient n’a pas de

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234 Status clinique pédopsychiatrique

la peine à écrire des syllabes. Est-ce qu’il mémorise l’orthographe du mot ?


Comprend-il le code grammatical, lexical, l’orthographe ? Comment arrive-
t-il à structurer ses phrases, à créer des textes cohérents, à paraphraser les
autres, etc. ?
Rappelons que l’exploration de l’écriture se recoupe avec celle de la gra­
phomotricité. Le patient qui rencontre des difficultés sur le plan de la motri­
cité fine a de la peine dans son écriture. En revanche, nous ne conseillons
pas que le thérapeute fasse des conclusions hâtives entre les difficultés psy­
chomotrices du patient et l’écriture. Tout est à explorer avec rigueur.
Exploration des compétences en calcul
Les apprentissages en logico-mathématiques peuvent s’avérer difficiles pour
certains enfants. Deux grandes difficultés semblent être les plus fréquentes :
la représentation des nombres et la logique dans les opérations.
Exploration de la représentation du nombre
La famille du patient ou l’école peuvent soulever les difficultés qu’a le
patient à compter les chiffres. Lors du comptage, il peut peiner à lire ou à
mémoriser une suite de nombres entiers ou décimaux, à faire le dénombre­
ment des chiffres (il peut s’agir de comprendre le nombre comme une
quantité), à énumérer ou à classer le nombre en unités, dizaines, centaines,
etc. Il est difficile pour certains patients de faire le comptage à rebours. Les
difficultés de représentation du nombre s’étendent aussi sur les capacités
à faire des calculs (opérations de base : additions, soustractions, divisions,
multiplications, etc.).
Selon l’âge du patient, le thérapeute peut se permettre d’aller plus loin
dans cette exploration. Les patients ayant un trouble du spectre de l’autisme
peuvent montrer un intérêt plus particulier aux chiffres, aux nombres,
aux calculs, etc. L’important est d’éviter de confondre une acquisition ou
compétence et une obsession quelconque.
Exploration du raisonnement logique
Elle fait suite à l’exploration du raisonnement, l’une des fonctions du moi.
Pour ce qui est de cette rubrique, il s’agit d’analyser ou d’évaluer toutes les
informations que le patient fournit afin de « décortiquer » s’il garde un sens
des opérations dans la résolution de ses problèmes. Est-ce qu’il comprend
le texte qu’il a lu ? Respecte-t-il les différentes étapes successives logiques à
réaliser par des opérations ? Comment se débrouille-t-il dans les choix des
opérations arithmétiques, les fractions ?

Remarque
Dans l’objectif d’insister encore, devant toute suspicion, inquiétude ou doute
lors d’évaluation du langage, nous conseillons au thérapeute de demander
l’avis d’un collègue logopédiste ou tout autre spécialiste comme dit plus haut.

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Fonctions du moi 235

Motricité
Généralités
Les capacités motrices du patient dépendent de l’intégrité des voies motrices
et nerveuses, de la mise en place d’un schéma corporel convenable et du
mode de relation avec son environnement. L’examen pédopsychiatrique
vise notamment à appréhender d’une façon générale le développement psy­
chomoteur et le vécu corporel du patient. Une évaluation plus approfondie
devrait être faite par un spécialiste (neurologue, psychomotricien, etc.).
L’exploration des capacités motrices (motricité fine et globale) peut être
faite par le thérapeute. Si celui-ci observe ou suspecte une difficulté en
particulier, il doit référer ou s’adresser à un collègue plus spécialisé pour
continuer le bilan psychomoteur.
En fait, dans nos cabinets, nous pouvons examiner la dextérité manuelle, la
maîtrise de balle, l’équilibre statique et dynamique (la marche à quatre pattes
ou deux pattes, la course), la coordination de différents mouvements, etc.
Le thérapeute peut demander au patient d’exécuter des mouvements
répétitifs des doigts, des mains et des pieds ou alors de faire des mouve­
ments alternatifs des mains ou des pieds en position assise et debout (dia­
dococinésies). Plus spécifiquement, on peut lui demander d’exécuter des
mouvements séquentiels des doigts ou des marches contraintes (sur les
orteils, sur les talons, sur la face externe ou interne).
Plus particulièrement, dans la tranche d’âge de 4 à 6 ans, on peut cher­
cher différentes compétences selon la vitesse, la précision du geste, la coor­
dination des deux mains, la coordination de mouvements lents, rapides
et explosifs, le contrôle graphique, la réception des balles ou autres objets,
l’équilibre statique et dynamique, etc.
L’élément à évaluer lors de l’entretien est la coordination entre membres
supérieurs et membres inférieurs, les parties droite et gauche de son corps.
Le thérapeute peut demander au patient d’exécuter deux actions telles que
« saut avec demi-tour » et « tournoiement ».
En fait, l’aspect quantitatif du mouvement ou du geste est déterminé par
la réussite et le niveau de précision de la performance. Il prend en considéra­
tion le nombre d’essais nécessaires et le temps. Mis à part le côté quantitatif,
il faut également rechercher les critères qualitatifs concernent l’harmonie
du mouvement ou du geste, sa continuité, la capacité d’anticipation (est-ce
que le patient arrive à coordonner ses pauses, les interruptions ou la reprise
du mouvement ?), la précision avec laquelle le mouvement est réalisé et la
souplesse, la fluidité ou la rigidité des gestes du patient, etc.

Quelques exemples sur le dynamisme


Dynamisme bas
C’est un manque d’énergie, d’initiative, d’intérêt du patient pour les activi­
tés qui l’intéressaient par le passé. Il dit qu’il n’a plus envie de sortir, d’aller
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236 Status clinique pédopsychiatrique

voir ses copains, et s’il le fait c’est parce que l’entourage le force. Dans le
dynamisme bas, « le patient ressent le trouble ou l’examinateur le reconnaît
à la pauvreté de la motricité spontanée ou au manque d’initiative dans le
discours » (Preising & Serre, 2000). Cet état peut se retrouver dans les états
dépressifs.
Inhibition du dynamisme
Il s’agit d’une absence d’énergie, d’initiative et d’intérêt. Le patient ressent
comme s’il était freiné ou bloqué sans réellement savoir la cause de son
manque d’énergie. Il est incapable d’exécuter un geste, aussi minime soit-il.
Dynamisme haut
Le patient sent une augmentation d’énergie. Il constate que son initiative
et son intérêt pour les activités sont accrus. Il a plusieurs idées à la fois. Il
a des projets qui lui viennent à flots. Il est très expansif et enthousiasmé le
long de la journée. Cet état peut être retrouvé dans les états maniaques ou
hypomaniaques.
Agitation motrice
Le patient montre plus d’activité motrice, ses mouvements moteurs se font
de manière désordonnée. Il est instable, bouge sans arrêt. Il a de la peine à
rester en place. Cette agitation est différente de l’akathisie objectivée chez
les patients schizophrènes.
Pour les patients jeunes, les enseignants ou les parents disent « qu’ils ont
la bougeotte ». Ils papillonnent dans la cour, la classe ou à la maison. Le
patient a un besoin constant de bouger sur son siège ou il est agité. Il peine
à rester silencieux ou est très bruyant. Il est toujours en action. Dans le
bureau, ces patients n’arrêtent pas de toucher à ceci ou à cela.
Sur le plan verbal, on trouve d’autres symptômes. Le thérapeute note que
le patient parle impulsivement ou qu’il a tendance à trop parler. Il coupe la
parole aux autres. Il s’agit de patients qui ont du mal à attendre leur tour
dans le jeu, dans la prise de parole ou dans une file d’attente. Le patient a
tendance à interrompre l’adulte quand il s’adresse à d’autres personnes ou
quand il est au téléphone. Le parent dit qu’il attire l’attention sur lui. Il se
met au centre de l’attention.
Stéréotypies
Stéréotypies verbales
Parmi les stéréotypies verbales, on retrouve les verbigérations, les tics
vocaux, la palilalie et l’écholalie. Les tics vocaux sont rencontrés dans le
syndrome de Gilles de La Tourette. Le patient atteint de cette maladie dit
des mots obscènes, des insultes, un langage extravagant, saugrenu, artifi­
ciel, affecté, etc.
L’écholalie est une tendance à répéter de façon spontanée, involontaire et
systématique les derniers mots prononcés par un interlocuteur.

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Fonctions du moi 237

Stéréotypies motrices
Les tics simples ou complexes. Le thérapeute peut objectiver chez certains
patients des tics gestuels qui peuvent se manifester sous forme d’un cer­
tain maniérisme dans la gestuelle et les mimiques. Le patient peut avoir
un comportement ou des mouvements anormaux qui contrastent avec son
appartenance groupale, culturelle, etc.
Stéréotypies posturales
Le thérapeute peut par exemple noter la catalepsie qui est une paralysie
observée dans les états hypnotiques et dans la schizophrénie. Cette para­
lysie est caractérisée par l’annihilation de tous les réflexes de locomotion
et de changement de position, la réduction de la sensibilité, la contraction
tonique des muscles.
Actes automatiques
Le patient ne ressent pas les actions ou ses actes comme venant de lui-
même, mais comme des réponses automatiques à des ordres. Il dit être
télécommandé par une force extérieure à lui-même. Il peut dire qu’il ne
contrôle pas le mouvement de ses pieds, de ses mains, de sa tête, etc. Les
actes automatiques sont retrouvés chez les patients délirants qui commet­
tent des actes sans avoir un réel contrôle. Il peut s’agir d’actes qui n’ont
aucune conséquence sur le plan social ou médicolégal ou alors d’actes à
caractère hétéro ou autoagressif.
Il est évidemment utile de rechercher les éléments psychotiques, le syn­
drome d’influence ou du petit ou grand automatisme (cf. supra « Syndrome
délirant »).
Akathisie
Il s’agit d’une incapacité pour le patient de rester assis sans bouger. L’aka­
thisie est différente de la « bougeotte » que peut avoir un jeune patient.
C’est une « sensation subjective de tension musculaire qui se traduit par
un besoin irrésistible d’être constamment en mouvement ; effet secon­
daire extrapyramidal des antipsychotiques. » (Kaplan & Sadock, 2005)
Le patient peut être sous traitement (antipsychotique le plus souvent) ou pas.
Il n’arrive pas à rester sur sa chaise. L’akathisie est différente du syndrome
des jambes sans repos. Le plus souvent, on rencontre ces deux symptômes
chez les patients qui sont sous traitement antipsychotique.
Soulignons que l’akathisie est un réel besoin de bouger. Le patient peine
à garder ses jambes en place. Le fait qu’il bouge ou qu’il est en mouvement
le soulage momentanément.
Négativisme
L’attitude dite de négativisme peut être rapprochée de l’opposition, et
peut être active ou passive. Le négativisme se retrouve chez la plupart des
patients qui s’opposent aux adultes. La conduite de l’entretien est moins

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238 Status clinique pédopsychiatrique

fluide et peu contributive. Le thérapeute peut se retrouver face à un patient


dont le négativisme s’exprime avec les gestes ou les actes. Certains patients
le verbalisent et d’autres non.
Il arrive que le négativisme soit sélectif, c’est-à-dire que le patient peut
collaborer, échanger, discuter ou parler avec certaines personnes soit de son
entourage familier, soit seulement extérieur à la maison. L’école ou la famille
rapportent qu’il n’arrive pas à s’exprimer quand il est dans tel ou tel autre
milieu social. Il arrive qu’il adresse volontiers la parole à son thérapeute ou
alors qu’il n’adresse la parole qu’à ses parents et refuse catégoriquement de
parler au thérapeute, à l’enseignant, etc.
Plus généralement, on retrouve deux groupes de négativisme : passif et
actif.
• Dans le négativisme passif, le patient a du mal à exécuter précisément ce
que l’on attend de lui. Il peut alors faire à moitié la tâche confiée. Il peut
venir aux rendez-vous et rester silencieux sans répondre ni dire un mot, etc.
• Dans le négativisme actif, il fait le contraire de ce qu’on lui demande.
Certains patients peuvent verbaliser le fait qu’ils ne sont pas d’accord avec
l’ordre, l’idée, la tâche donnée.
Parakinésies
Les parakinésies sont des anomalies qualitatives, le plus souvent faites de
mouvements complexes. Il est important d’écarter les parakinésies qui sont
les effets secondaires des médicaments (parakinésies iatrogènes), des para­
kinésies comme symptômes des maladies génétiques, neurologiques ou de
manifestation d’une instabilité affection-émotionnelle du patient.
Le thérapeute demande au patient s’il peut rester un moment sans bouger
ni changer de position, ou alors s’il lui est extrêmement difficile de rester
sans bouger. Ce n’est pas que le patient fait exprès de bouger. Ce trouble
peut être préjudiciable pour un travail en groupe (tel qu’en classe) et lui
poser des difficultés pour suivre les cours ou être tout simplement attentif
aux consignes données par l’enseignant.

Exploration de la motricité
Elle part du tonus, des émotions, du sensoriel, de la représentation pour
arriver sur le cognitif. Pour compléter son investigation, nous conseillons
au thérapeute de rechercher la qualité des interactions premières du bébé
ou du patient dans l’anamnèse personnelle et familiale.
En règle générale, l’investigation de trouble ou de la perturbation de la
motricité invite le thérapeute à chercher la présence d’angoisse et ses carac­
téristiques (la nature, la qualité et la quantité, la réaction, de quelle façon le
moi gère ou contrôle l’angoisse, etc.).
Les questions ci-après donnent un avant-goût des différentes manières
d’explorer la motricité. Le thérapeute demande si le patient arrive tout seul
ou avec l’aide de l’adulte à mettre des jetons dans une tirelire. Est-ce qu’il

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Fonctions du moi 239

peut empiler des cubes ? Comment conduit-il ou quel est son trajet quand il
est sur une bicyclette ? Est-ce qu’il arrive à attraper le sac lesté ? Peut-il faire
rouler une balle à travers un but (le panneau, le jet d’objets, etc.) ?
Arrive-t-il à garder l’équilibre sur un pied (le thérapeute demande au
patient de faire des sauts successifs sur un pied et contrôle la qualité de son
équilibre dynamique) ? Peut-il sauter au-dessus d’une corde ou escalader un
niveau ? Quels sont ses principaux mouvements « explosifs » ? Est-ce qu’il
marche sur la pointe de ses pieds (cet examen évalue l’équilibre statique du
patient) ? Le cas échéant, à quel moment et pour quoi ?
La position des membres est explorée pour vérifier s’ils sont rassemblés
ou non. Est-ce que le patient est calme, bouge sans arrêt, est-ce qu’il arrive
à coordonner ses membres par rapport à l’équilibre ? Sait-il coordonner
sa latéralisation ? Comment est son polygone de sustentation en position
debout ? Remarque-t-on un certain maniérisme ? Est-ce qu’il arrive à res­
sembler et à se coordonner au flux sensoriel ?
Le thérapeute se doit de chercher l’existence ou non d’un problème
d’axialité. Est-il organisé dans l’axe, dans l’espace, ou non ? Est-ce qu’il est
centré sur l’axe ? Arrive-t-il à croiser son axe ? Est-ce que la jonction droite-
gauche est intégrée ? Est-ce qu’il est en mesure de faire des rotations ou des
croisements ?
On vérifie si le patient a des mouvements involontaires qu’il n’arrive pas
à contrôler. Est-ce qu’il présente des mouvements parasites ? Cherche-t-il
des appuis avant de jouer ou de faire une action ? Comment arrive-t-il à
jeter ou à recevoir un ballon ou un autre objet ? Est-ce qu’il est en double
tâche et rien n’est automatisé chez lui ?
Est-ce que le patient fait usage d’utilisation bimanuelle de ses deux
mains ? Nous montre-t-il certains gestes avec ses doigts qui laissent penser
à une anxiété (tortiller les doigts, bouger sans arrêter ses doigts, se mordre
les doigts, etc.) ?
Le thérapeute observe le tonus de fond, le tonus postural et le tonus
d’action du patient. Il peut arriver qu’il soit tout mou, très mobile, très
rigide, etc. Le dialogue tonique est très important dans le toucher, le contact,
le regard. Ces éléments de contact ont un lien avec la communication non
verbale.
Est-ce que l’on sent le patient plus rigide ou non ? Dans quelle partie de
son corps a-t-on noté cette rigidité ? Est-ce que ses membres sont crispés ?
Existe-t-il d’autres parties du corps qui sont crispées ? Comment est sa res­
piration (ample, bloquée, saccadée, relâchée, avec des apnées) ? Comment
est la position de ses épaules vis-à-vis du reste de son corps ou de son axe
vertical ? Comment est son tonus pneumatique ? Est-ce que l’on note un
effondrement de la partie supérieure du corps et un relâchement en bas ?
En ce qui concerne l’exploration de la motricité fine, le thérapeute peut
demander au patient de mettre le fil dans le chas de l’aiguille et l’observer faire.

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240 Status clinique pédopsychiatrique

Cette motricité peut aussi s’explorer par la manière dont il tient le crayon pour
écrire ou dessiner. On recherche s’il est ou non agile dans ses activités. Arrive-t-il
à jouer avec les Lego®, les Kapla®, peut-il empiler les cubes, enfiler les perles,
etc. ?
Au cours de l’exploration de la motricité, le thérapeute devrait rechercher
ou analyser les notions suivantes.
Équilibre
Le thérapeute demande au patient de rester debout immobile. Il peut lui
demander de rester en équilibre sur la pointe des pieds ou sur un pied, c’est-
à-dire rechercher l’équilibre statique. Le thérapeute peut encore observer
la façon dont il marche ou court, recherchant alors l’équilibre dynamique.
Le thérapeute explore aussi le rythme de déplacement du patient. Est-ce
qu’il a un tempo spontané ? Adapte-t-il son rythme de marche aux stimuli
auditivo-visuo-kinesthésiques ? Peut-il exécuter des gestes ou mouvements
tels que frapper et marcher tout en s’adaptant aux rythmes auditivo-visuo-
moteurs ?
Enfin, la notion d’équilibre donne une idée sur la motricité générale gros­
sière par la démarche, quand il lance un ballon, etc.
Latéralisation
Elle est acquise entre 4 et 7 ans. Le patient utilise préférentiellement un
côté de son corps à partir d’un an. Il est question de chercher quel pied, œil,
ouïe, visée est utilisé préférentiellement. On cherche à connaître la latéra­
lité d’utilisation en recherchant quelle est la main dominante (en le faisant
écrire), le pied dominant (« Avec quel pied tapes-tu le ballon ? ») et l’œil
dominant (« Si tu étais un pirate, de quel côté mettrais-tu la longue-vue ? »),
et on observe la latéralité gestuelle dans les gestes spontanés. Une latéralité
non homogène est souvent associée à des troubles de l’organisation spatiale
et du schéma corporel.
Finalement, on recherche si la latéralité est spontanée, usuelle, « psycho­
sociale » ou lors de pantomimes.
Orientation spatiale et temporelle
L’orientation spatiale consiste à discriminer la droite et la gauche, sur soi,
sur autrui et par rapport à des objets, ou si le patient peut s’orienter par
rapport à un plan, etc. Le thérapeute fait appel aux notions de haut et
bas, devant et derrière, dessus et dessous, dedans et dehors, en avant et en
arrière, gauche et droite, etc. Ces diverses notions sont acquises progres­
sivement jusque vers 4 ans. L’enfant situe la droite et la gauche un peu plus
tard vers 6 ans sur son propre corps, et vers 7 ans sur celui d’autrui. Cette
notion d’orientation spatiale implique aussi l’intégration de la latéralité.
On peut ainsi laisser, lors de l’exploration, le patient aller retrouver seul le
bureau en lui donnant des indications comme : « Va tout droit, puis tourne
à gauche, après, avant, à côté de, etc. »

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Fonctions du moi 241

L’orientation dans le temps est une donnée plus abstraite et donc d’appa­
rition plus tardive, vers 6 ou 7 ans. Son exploration se fait en posant des
questions au patient autour de la durée de ces activités, du récit, etc. Le
thérapeute évalue sa capacité d’exécuter les tâches sur une courte ou une
longue durée.

Image du corps
L’image du corps est liée au sujet, à sa propre histoire et à son développement,
tandis que le schéma corporel est le même pour tous les individus. C’est
la synthèse des expériences émotionnelles qui fait toute la différence entre
deux individus. L’image du corps est toujours inconsciente et constituée de
l’articulation dynamique d’une image de base, d’une image fonctionnelle et
d’une image des zones érogènes où s’exprime la tension des pulsions.

Nature des mimiques


Les mimiques font partie des éléments essentiels à rechercher lors de cet
examen. Leur nature donne une idée sur sa motricité fine. Le patient peut
avoir des mimiques pauvres ou fluides, etc. Le thérapeute essaie de décrire
la qualité des gestes qui peuvent être souples, précis, rigides, pauvres, mala­
droits (par exemple dans ses dessins, son écriture, etc.), habiles, minutieux
(dans le graphisme : capacités et aisance graphique, tenue de crayon [acqui­
sition de la préhension], etc.).

Praxies
L’exploration des praxies comprend l’évaluation des mouvements de pro­
nosupination bimanuelle symétrique et asymétrique.
Le thérapeute demande aux parents si le patient a acquis la préhension (le
pouce qui touche l’index pour attraper quelque chose). Peut-il mettre son
pouce en opposition de ses doigts ? Quelles sont ses capacités de gnosies
tactiles digitales ? A-t-il des habilités oculomanuelles (on recherche s’il peut
mettre des jetons dans une boîte) ?
Dans l’exploration des praxies, on recherche la présence ou non de syn­
cinésies car elles donnent des indices sur la maturation motrice de l’enfant.
Les syncinésies d’imitation (le patient peut reproduire involontairement le
même mouvement avec le pied quand on lui demande de faire fléchir sa
main. Par exemple quand le thérapeute lui demande de faire la marion­
nette avec une main, il observe ce qu’il fait avec son autre main ou un de
ses pieds.) Ces syncinésies disparaissent normalement vers 7 ou 8 ans. Le
thérapeute observe comment le patient manipule les jouets, comment il s’y
prend lors des activités, etc.
Réflexes archaïques
Les réflexes dits archaïques sont les plus anciens qu’a un individu dès sa
naissance. Ils sont recherchés systématiquement par nos collègues pédiatres,
neuropédiatres, bref chez tous les nouveau-nés et jeunes enfants.

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242 Status clinique pédopsychiatrique

En fait, dans la clinique des bébés, il ne s’agit pas d’énumérer ou de


décrire les différents réflexes, plutôt les rechercher afin d’avoir une idée sur
le développement psychomoteur du patient. Leur liste étant exhaustive,
voici certains réflexes à examiner : réflexe de succion-déglutition, réflexe
des points cardinaux ou de fouissement, réflexe d’agrippement ou grasping,
réflexe de la marche automatique, réflexe de Moro, réflexe de maintien de la
tête, réflexe d’allongement croisé, réflexe de Babinski, etc. Répétons qu’en
cas de doute, il faut référer le patient vers un autre collègue.
Schéma corporel
Le schéma corporel correspond à l’acquisition de la connaissance des diffé­
rentes parties de son propre corps, aussi bien en termes de ressenti que de
représentation de soi. Cette notion de schéma corporel s’établit à partir de
l’intégration des sensations kinesthésiques et sensorielles (visuelles, tactiles,
cénesthésiques, olfactives, gustatives et auditives). Il est également en partie
lié à l’affectivité et à la qualité du dialogue tonique. La représentation du
schéma corporel a un lien étroit avec l’image de soi, l’estime de soi, la consti­
tution du soi et le self du patient. Toutes les informations concernant ces élé­
ments doivent être recueillies et analysées subtilement lors de l’évaluation.
Tonus de base
Avant de parler du tonus de base, disons que le tonus apparaît comme le
fond ou la base sur lequel vient émerger et s’inscrire le mouvement. Plus
exactement, le tonus comme les autres critères moteurs à évaluer s’obser­
vent directement dès que le patient entre dans le bureau. On reste attentif
à sa démarche, sa posture, ses différents mouvements, son expression ges­
tuelle, ses mimiques, etc.
En général, on peut rechercher ces différents types de tonus :
• le tonus de fond : le thérapeute examine la qualité d’extensibilité mus­
culaire et articulaire, la mobilisation passive des membres, la palpation et
il fait l’étudie du ballant (cette étude du baillant se fait aux articulations
distales comme la cheville et le poignet. Le thérapeute agrippe le segment
proximal et demande au patient d’exécuter des mouvements alternatifs.) ;
• le tonus d’action : le thérapeute examine les syncinésies d’imitation, les
syncinésies axiales, l’appréciation du tonus axial ;
• le tonus de soutien : on examine comment le patient se met en position
assise ;
• le tonus d’attitude : en rapport avec l’angoisse, l’anxiété, les affects ou
l’humeur du patient, on observe quelle attitude lui convient le mieux,
comment il exprime son mal-être à travers son tonus ;
• les réflexes rotuliens : à rechercher comme les autres réflexes archaïques
décrits supra.
Au cours de l’entretien, il est important d’observer le tonus de base du
patient. On peut constater qu’il a une souplesse générale, une rigidité des

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Fonctions du moi 243

membres, une capacité de se relaxer, etc. Ces trois éléments sont plutôt
observés tout le long de l’entretien et ne font pas l’objet d’une recherche
spécifique. On évalue les éventuels troubles de la coordination, hyperacti­
vité, lenteur, décharge motrice, grimaces, stéréotypies, rigidité, hypotonie
ou hypertonie, retenue, minutie, degré d’intégration du corps dans un
sentiment d’identité (schéma corporel). On peut le voir dans le dessin du
bonhomme, dans le jeu (comment il prend ou lance le ballon, etc.) et par
la marche.
En bref, il existe deux niveaux de vérification de la motricité :
• le niveau quantitatif : est-ce que le patient a une activité agitée, ralentie,
inhibée et retenue ? A-t-il un bon tonus (hypotonie ou hypertonie axiale) ?
Est-il stable, instable, hyperactif ou hypoactif ? Le thérapeute demande
si le patient gigote sans cesse. Comment le patient dépense son énergie
motrice ? Est-ce qu’il est fatigué rapidement ou demande-t-il d’arrêter ou
abandonne-t-il une activité avant l’heure de fin ?
• le niveau qualitatif : on essaie de savoir si le patient est adroit, agile ou
non. Aborde-t-il les choses de façon appropriée ou non ? Est-ce qu’il pré­
sente des mouvements fluides, saccadés ou maladroits ? Est-il mal ou bien
orienté dans l’espace ?
On évalue donc la qualité de ses gestes et de son activité, tant sur le plan
de la motricité globale que fine. L’impulsivité chez certains patients vient
compléter le tableau clinique d’un trouble d’hyperactivité avec ou sans défi­
cit de l’attention. Ces patients sont auteurs d’une multitude d’accidents,
fautes d’attention et d’impulsivité. Ils commettent des actes inadéquats en
répétition.

Obsessions
Généralités
Il s’agit des idées, pensées, impulsions ou représentations qui s’imposent
de manière répétée et vécues comme absurdes. Le sujet ne peut les faire
céder que difficilement. Il reconnaît qu’il s’agit bien d’une idée extérieure
distincte des siennes et à laquelle il ne peut rien faire d’autre que de se
soumettre. Il faut rechercher la notion d’impulsivité, de passage à l’acte ou
des actes de passage et de la satisfaction secondaire (c’est-à-dire chercher
à savoir si le patient ressent de l’apaisement psychique après avoir posé le
geste ou l’acte).
Ces éléments peuvent aider dans la pose du diagnostic différentiel.
L’obsession est un état pathologique émotif dont le caractère assiégeant
constitue une véritable effraction de la volonté. De ce point de vue, l’obses­
sion est à la fois un trouble de l’émotivité, ou trouble affectif, et un trouble
de la volonté.

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244 Status clinique pédopsychiatrique

En fait, lors de l’exploration clinique des obsessions, le thérapeute devrait


clarifier s’il s’agit seulement d’une obsession idéative ou qu’en plus le
patient fait des actes obsessionnels compulsifs (de rituels, de compulsion, la
nature d’angoisse et son apaisement, etc.).
Il arrive que les actes, gestes, mots, etc. épuisent le patient ou son entou­
rage. Il est obligé de refaire plusieurs fois le même geste, acte, ou tout autre
symptôme avant de passer à une autre activité. Certains justifient leurs
obsessions par la volonté de chasser un mauvais sort ou d’éviter la survenue
d’un malheur.
Enfin, le moindre geste et fait que rapporte le patient a une signification
psychodynamique. De sa part, le rituel d’obsession ou l’obsession en soi se
présente comme un moyen d’apaiser son angoisse. Par exemple, un patient
qui évite de se souiller ou de se salir, se lave à plusieurs reprises les mains ou
nettoie sans arrêt les objets, les surfaces, etc. D’autres, en revanche, vérifient
l’état des portes, de la gazinière, de la cuisine, etc. Certains encore font
usage des « mots magiques » ; la récitation de ces « formules magiques » vise
à les protéger du danger ou de mauvais œil, de la damnation, etc.

Caractéristiques communes des obsessions


Avant de développer la question des caractéristiques des obsessions, souli­
gnons que la compulsion de répétition est rencontrée dans toutes les sortes
d’obsession. Le patient essaie de contrôler ses obsessions à l’aide de la
compulsion. Il incombe au thérapeute de la rechercher dans son évaluation.
Les caractéristiques générales des obsessions sont les suivantes :
• elles s’imposent au patient en « assiégeant » son esprit, faisant intrusion
dans sa conscience ;
• elles apparaissent au patient comme un phénomène morbide. Il les res­
sent comme absurdes. En fait, malgré ce caractère absurde, il ne peut pas
s’en passer ;
• elles sont reconnues par le patient comme émanant de sa propre activité
psychique et n’étant pas imposées de l’extérieur. Il peine à les différencier
des activités hallucinatoires par exemple ;
• malgré les efforts pour les réprimer, les chasser ou les neutraliser par
d’autres pensées, le patient ne parvient pas à s’en débarrasser. Il reconnaît
sa volonté de s’en débarrasser mais échoue ;
• classiquement, elles n’entraînent pas de passage à l’acte. La quasi-rareté des
passages à l’acte auto ou hétéroagressif est une caractéristique des obsessions.

Différentes formes d’obsessions


Obsessions idéatives
Elles consistent en une idée fixe qui ne se conforme pas à la réalité. Il
peut s’agir de représentations ou de phrases le plus souvent grossières ou

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Fonctions du moi 245

obscènes, sacrilèges comme des injures adressées à Dieu, ou toute autre idée
neutre comme des chiffres, des mots ruminés. Les mots grossiers ou obs­
cènes devraient être différenciés des insultes ou autres mots obscènes que
l’on rencontre dans le syndrome de Gilles de La Tourette ou les autres syn­
dromes neurologiques. Alors que le patient lutte contre les idées obsédantes
ou résiste à poser des actes ou des gestes compulsifs, celui qui a le syndrome
neurologique le fait de manière spontanée et sans aucun contrôle.

Obsessions phobiques
Il s’agit de crainte obsédante d’objets ou des situations reconnues comme
absurdes mais ne pouvant être chassées de l’esprit. Ce type d’obsession se
distingue des phobies étant donné que dans ces dernières, la crainte existe
en dehors de la situation ou de la présence de l’objet. Le patient obsédé
éprouve une peur de certaines situations ou objets précis (par exemple, peur
des couteaux par crainte de blesser ; peur des maladies, de la contamina­
tion, des microbes : folie de toucher).
On doit rechercher les conduites d’évitement et les objets ou comporte­
ments auxquels le patient a recours pour lutter contre ses troubles phobiques.
Cette catégorie regroupe entre autres : la phobie sociale, l’agoraphobie, la
phobie des insectes, des animaux, etc.
Le clinicien devrait tenir compte et rechercher la phobie de rencontre
ou de contact qui ne favorise pas la socialisation. Dans les obsessions pho­
biques, le patient décrit en détail la pensée où les idées qui l’angoissent, les
qualifiant souvent lui-même d’idées parasites, d’idées étranges qu’il juge
bizarres et absurdes. Il ne parvient pas à s’en débarrasser. Les phobies han­
dicapent sa vie, il le reconnaît mais ne peut rien faire pour les éradiquer
tout seul.

Obsessions impulsives ou phobies d’impulsion


C’est l’ensemble des conduites accomplies sous la forme d’une contrainte
intérieure obsédante. Dans une tentative de définition des obsessions
impulsives, disons que les « pressions intérieures qui s’imposent au sujet
de manière répétée, contre sa volonté, et le pousseraient à accomplir des
actes bien définis. Même si le sujet récuse l’idée, il ne peut que difficilement
se dégager de cette pression. » (Preising & Serre, 2000) Leurs caractéris­
tiques communes sont les suivantes : la conscience lucide, la lutte contre
l’angoisse, l’irrésistibilité, l’émotivité, le soulagement consécutif à l’accom­
plissement d’un acte qui n’est pas celui redouté mais qui consiste le plus
souvent en un rituel.
Le patient passe à toute une succession d’actes afin de réduire sa tension
psychique. On peut relever :
• des obsessions suicidaires ou d’homicides (crime d’intention, infanti­
cides, etc.) ;

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246 Status clinique pédopsychiatrique

• des obsessions verbales : elles consistent en la peur de prononcer des pro­


pos grossiers (coprolalie), des sacrilèges, des insultes, des propos déplacés,
etc. ;
• des actes asociaux ou antisociaux comme l’exhibition de sa nudité, le
voyeurisme, la pyromanie, la kleptomanie (il s’agit d’une envie impérieuse
et irrésistible de voler. Souvent le patient vole des objets de peu de valeur ou
des futilités, les garde ou les cache à un endroit plus ou moins secret. Bien
qu’il se fasse surprendre en train de voler, il recommence à une prochaine
occasion…).
De manière générale, le syndrome délirant, les idées de persécution et
les troubles psychotiques devraient être recherchés devant toute suspicion
d’une obsession.

Compulsion obsédante
Elle peut être définie comme étant une « conduite que le sujet accomplit
toujours sous la force d’une contrainte intérieure obsédante. Les compul­
sions et les rituels non compulsifs (basés sur des obsessions et des obses­
sions-impulsions) sont toujours accomplis contre la résistance interne du
sujet. » (Preising & Serre, 2000) Le patient a du mal à éviter ou n’arrive pas
à s’empêcher de poser cet acte compulsif.

Conclusion
Il est important de rechercher dans les obsessions et les compulsions la
capacité d’insight ou la bonne prise de conscience. Le patient peut alors
dire que ses actes, ses pensées, ses gestes ou ses idées ne correspondent
pas à la réalité ou qu’elles sont fausses ou vraies. Les idées délirantes, des
pensées suicidaires, des tics, des rituels, des compulsions et bien d’autres
perturbations de la pensée doivent systématiquement être recherchés. On
trouve généralement des craintes excessives d’avoir une maladie, etc.
On doit rechercher le retentissement et l’influence du trouble sur le fonctionne­
ment psychique, intellectuel, social et sur le quotidien du patient.

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16 Mécanismes de défense
Anna Freud s’est penchée sur le problème de mécanisme de défense employé
par le moi pour réduire les tensions pulsionnelles et l’angoisse résultant des
conflits avec les fantasmes inconscients. Les mécanismes de défense ont
pour rôle de contenir et de métaboliser les angoisses. Continuellement, tout
le monde recourt aux mécanismes de défense. Ceci se passe à chaque fois
que l’on entre ou non en relation avec l’objet (objet interne ou externe). Le
moi du patient recourt à ses défenses pour pallier toute suspicion d’émer-
gence d’angoisse et trouver un compromis.
À quoi servent les mécanismes de défense ? La réponse à cette question
est simple et complexe à la fois. Quand émergent les pulsions libidinales
ou agressives, les fantasmes, ou d’autres types d’affects ? Le moi se réfère
aux règles qui lui sont dictées par le surmoi. Le patient doit faire un choix
entre satisfaire ses désirs conscients ou inconscients selon le principe
de plaisir, ou se conformer au principe de réalité. Face aux difficultés de
répondre aux tensions psychiques, le moi du patient met en place des
mécanismes de défense pour lutter contre cette angoisse. Disons simple-
ment que le système de défense désigne l’ensemble des mouvements de
protection utilisés par le moi dans un but de surmonter l’angoisse générée
soit par :
• les pulsions sexuelles libidinales ou agressives qui viennent des exigences
internes, ou intrapsychiques et externes de l’individu ;
• le contexte environnemental qui peut réactiver un conflit latent ou
refoulé ou forclos ;
• les affects pénibles (culpabilité, honte, dépression, sentiment d’infério-
rité, etc.) ou les autres affects de joies démesurés ou non.
Les mécanismes de défense jouent un rôle prédominant dans l’équilibre
psychique. Au cours de l’entretien, il incombe au thérapeute d’évaluer le
type des mécanismes de défense prévalant et de déterminer si ces derniers
sont souples, rigides, inefficaces ou pas assez variés, trop fréquemment uti-
lisés ou mal adaptés à la réalité interne et externe, etc.
Pour ne pas nous répéter, insistons sur le fait qu’une particularité est à
souligner à l’adolescence : l’idéalisation, la rationalisation et la projection
sont considérées comme des mécanismes de défense dits physiologiques à
cet âge.
Plus simplement, quand l’angoisse émerge, on observe que le moi du
patient met en place certains traits de caractère, adopte certaines conduites
et certains comportements pour s’en défendre. Le patient serait malade

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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250 Status clinique pédopsychiatrique

dans le cas où ses mécanismes de défense sont trop rigides, inefficaces ou


exclusivement d’un même type enlevant alors la souplesse et l’harmonie du
fonctionnement mental.
Le thérapeute cherche la nature et le niveau d’anxiété ou d’angoisse pré-
dominant. Quelles sont les défenses mises en place contre ces angoisses ?
Comment le moi se défend-il pour éviter de sentir envahi, englouti,
menacé… par l’objet interne ou externe ? Il s’agit de décrire la stratégie mise
en place par le moi du patient pour apaiser son angoisse ou son anxiété.
Le thérapeute devrait déterminer la hiérarchie des mécanismes de défense
utilisés et leur variété, en tenant compte de la phase développementale du
patient. Ces mécanismes sont-ils dirigés contre des pulsions spécifiques ou
l’activité de pulsion en général ? Sont-ils dirigés contre des demandes du
surmoi (de quel surmoi est-il question ici ? cf. chapitre 19), des demandes
des pairs, des liens objectaux infantiles, de la masturbation, des contenus
fantasmatiques ou encore d’un type de relation d’objet particulier ? Qu’en
est-il d’une éventuelle dimension traumatique actuelle ou de sa réactivation
dans l’après-coup ?

Contribution des mécanismes de défense


Les mécanismes de défense sont recherchés sur le plan verbal, infraverbal
et comportemental. Le thérapeute essaie de les identifier à travers le jeu
symbolique, les histoires que raconte le patient, les réponses qu’il donne,
la manière dont le patient justifie ses actes, ses propos, l’origine de ses
difficultés, ses douleurs physiques et morales. Le patient peut-il se rendre
compte de ses contradictions ? Remet-il en question ses faits, ses gestes et
ses actes ? Est-ce qu’il s’attribue la faute ou est-ce les autres qui sont des
fautifs ?
On peut retrouver plusieurs classifications de mécanismes de défense.
Certains auteurs les distinguent en matures et immatures, en niveaux
d’adaptation, etc. Il ne s’agit pas de savoir citer ou classer les mécanismes
de défense, l’essentiel dans une évaluation clinique est d’être en mesure de
les relever ou de les pointer et de les intégrer dans le fonctionnement inté-
gral du patient. Les mécanismes de défense sont un levier important dans
les psychothérapies. L’abord thérapeutique d’un patient qui a une structure
névrotique est différent de celui qui a une structure psychotique ou bor-
derline, car leurs mécanismes de défense constituent une des différences
importantes de leurs structures psychodynamiques. Par exemple, pour les
patients (les psychotiques en l’occurrence), il est évidemment conseillé
de ne pas essayer de lever ses mécanismes de peur qu’ils flambent, pour
d’autres (les névrotiques) en revanche, le thérapeute peut se permettre de
les lever à l’aide des interprétations justes et correctes.

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Mécanismes de défense 251

Afin d’être plus systématiques, Chabrol (2005) propose sept niveaux de


classification : « le niveau adaptatif élevé représentant les défenses matures,
le niveau des inhibitions mentales représentant les défenses intermédiaires
névrotiques et les niveaux immatures avec les niveaux de distorsion
mineure et majeure de l’image de soi et des autres, le niveau du désaveu, le
niveau de l’agir et le niveau de la dysrégulation défensive. »
La suite de ce chapitre développe les différentes classifications des méca-
nismes de défense selon leurs différents niveaux d’action.

Mécanismes de défense les plus accordés


On retrouve dans cette classe des mécanismes de défense qui s’adaptent le
plus. Il s’agit de : la répression, l’anticipation, l’auto-observation, l’affiliation,
l’affirmation de soi, l’altruisme, l’humour et la sublimation. Charbol dit que
ce niveau inclut les processus de coping. Il s’agit d’une adaptation très opti-
male aux facteurs de stress. Le patient qui recourt à ces défenses devrait avoir
une perception consciente des sentiments, des idées et de leurs conséquences.
Enfin, ces mécanismes « permettent une adaptation optimale aux facteurs
de stress, accroissent la gratification, autorisent la perception consciente des
sentiments, des idées et de leurs conséquences assurent le meilleur équilibre
possible entre les différentes motivations conflictuelles » (Inonescu et al.,
2016). Le patient qui utilise ces défenses développe une relation d’objet
plus particulière. Il s’adapte à sa manière à son environnement.

Inhibition mentale ou formation de compromis


L’inhibition mentale ou la formation de compromis regroupe certains
mécanismes de défense tels que : le déplacement, l’intellectualisation, la
dissociation, l’isolation de l’affect, le refoulement, la formation réaction-
nelle et l’annulation. Ces mécanismes ont pour fonction de maintenir hors
de la portée de la conscience du patient ses différents souvenirs, désirs,
peurs, idées, craintes probables et sentiments.

Distorsion mineure de l’image de soi, du corps


ou des autres
Cette catégorie est constituée par trois mécanismes de défense qui sont : la
dépréciation, l’omnipotence et l’idéalisation. Ces défenses narcissiques ont
pour but de « réguler l’estime de soi, des distorsions mineures de l’image
de soi, du corps ou des autres » (Inonescu et al., 2016). Ainsi, grâce à ces
mécanismes de défense, le thérapeute peut immédiatement avoir une idée
sur la qualité de la constitution du self du patient, y compris son estime et
son image de soi. Ces mécanismes donnent un coup de projecteur sur la
qualité de la relation d’objet du patient.

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252 Status clinique pédopsychiatrique

Distorsion majeure de l’image de soi et des autres


Contrairement aux mécanismes de défense qui ont pour conséquence la
distorsion mineure, cette classe comprend des défenses qui ont un effet
conséquent sur l’image de soi et de l’objet. Il s’agit notamment du clivage,
de la rêverie autistique et de l’identification projective.
Ces mécanismes sont à la base d’une confusion de l’image de soi et des
autres ou d’une distorsion majeure de l’image de soi. Cette distorsion peut
être retrouvée dans le type de relation d’objet, dans la constitution du self
et les identifications du patient. Comme pour toutes les autres défenses,
le thérapeute devrait prendre du temps pour bien les explorer durant
l’entretien.

Mécanismes de défense du désaveu


Cette classe comprend en principe trois mécanismes de défense. Il s’agit
du déni, de la rationalisation et de la projection. Elle est constituée des
défenses maintenant hors de la conscience des facteurs de stress, les affects,
les idées, les sentiments ou les diverses impulsions en les attribuant ou non
à une cause extérieure.

Défenses de la classe de l’agir


Cette catégorie regroupe quelques mécanismes de défense qui sont : l’agres-
sion passive, le retrait apathique, la demande d’aide et son rejet et le pas-
sage à l’acte. Le patient peut formuler une demande d’aide et son rejet à la
fois. Ces mécanismes de défense font que le thérapeute ou l’entourage du
patient constate qu’il est soit dans l’action, soit dans le retrait. Ces quatre
mécanismes de défense « engendrent un fonctionnement défensif qui se
caractérise par l’utilisation, en présence de facteurs de stress internes ou
externes, de l’action ou du retrait » (Inonescu et al., 2016). On peut dire que
dans la relation d’objet, le patient qui utilise ces mécanismes de défense
mobilise assez considérablement l’autre.

Mécanismes de la dysrégulation défensive


On peut dire qu’il s’agit là des mécanismes archaïques ou immatures. Les
principaux mécanismes sont le déni psychotique, la projection délirante
et la distorsion psychotique. Ces défenses sont la preuve « d’un échec de
la régulation défensive des réactions du sujet aux facteurs de stress, ce qui
entraîne une rupture marquée par rapport à la réalité objective » (Inonescu
et al., 2016). Le test de réalité des patients qui recourent à ces défenses est
complètement défaillant. Les fonctions du moi devraient être minutieuse-
ment examinées durant l’entretien. Nous conseillons au thérapeute d’aller
doucement, avec finesse, dans la prise en charge psychothérapeutique de

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Mécanismes de défense 253

ce type de patient et d’éviter de focaliser très rapidement l’entretien sur les


mécanismes de défense de peur de lever ce bouclier et de voir le patient
flamber. Il est nécessaire d’étoffer suffisamment l’épaisseur du préconscient
avant de travailler sur les mécanismes de défense.

Mécanismes de défense et psychothérapie


On sait déjà que la mise en place des mécanismes de défense a pour objec-
tif de lutter contre l’angoisse générée par le conflit intrapsychique ou la
tension pulsionnelle. La qualité d’angoisse nous renseigne sur la structure
psychopathologique du patient (s’agit-il des angoisses de castration, de
séparation, d’abandon, de vidange, de persécution, de mort, etc.) ?
Le thérapeute s’appuie sur les mécanismes objectivés chez le patient dans
le but de l’aider à trouver une voie de sortie quand émerge l’anxiété. Ceci per-
met d’analyser avec lui ce qui est à renforcer, à soulager, à conserver comme
type de défense. Ainsi, on retrouve des mécanismes de défense dits de dégage­
ment. Ces derniers ont pour but de faciliter un aménagement des conflits
internes du sujet pour s’adapter à une situation externe difficile, par exemple
lors de travail de deuil, la familiarisation avec les situations difficiles de la vie,
les hospitalisations, l’annonce d’une maladie grave et chronique, etc.
Lors de l’évaluation clinique, le thérapeute se pose trois questions essen-
tielles :
• Quel type d’angoisse envahit le moi du patient ?
• Où se localise le conflit intrapsychique ?
• Quels sont les mécanismes de défense mis en marche par le patient pour
lutter contre l’angoisse ?
Le thérapeute vérifie s’il y a une cohérence entre ces trois questions. En
d’autres termes, il établit une correspondance entre la qualité de l’angoisse
que nous comparons à la pointe de l’iceberg, le conflit intrapsychique qui
est tout l’iceberg enfoui dans l’eau et les mécanismes de défense qui sont
pour moi la force qui pousse ou qui maintient en surface l’iceberg. Ceci
équivaut à essayer de dégager le lien entre le surmoi, la relation d’objet, les
pulsions et les affects.
Techniquement, l’évaluation des mécanismes de défense se fait dans le
contre-transfert. Celui-ci est un moyen qui permet au thérapeute d’appré-
cier la qualité de l’angoisse du patient. Le thérapeute cherche à savoir si
le patient a une structure ou un fonctionnement de type névrotique, psy-
chotique ou limite.
Pour le dire de différentes manières, l’évaluation des mécanismes de défense
consiste à se demander ou à chercher le type de mécanisme de défense selon
trois axes :
• la prédominance du mécanisme de défense : celle-ci est recherchée
lorsque le mécanisme est utilisé de façon excessive, stéréotypée, etc. ;

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254 Status clinique pédopsychiatrique

• la rigidité du mécanisme de défense, qui risque d’entraver la souplesse et


l’harmonie du fonctionnement mental du patient ;
• l’efficacité du mécanisme de défense : le thérapeute vérifie si celui-ci
n’entraîne pas un comportement stérile et inadapté dans sa vie quotidienne
ou dans ses rapports à l’objet.
Nous développons ci-après le lien entre le type de conflit, le conflit et le
type de fonctionnement structurel du patient.

Lien entre le conflit et l’angoisse


L’autre tâche du thérapeute est de vérifier si les défenses mises en place par
le moi réussissent à soulager l’angoisse et à faciliter le fonctionnement du
patient. On peut se demander à quel niveau se joue l’angoisse, ou encore
quel type d’angoisse correspond à quel type de mécanisme de défense.
L’objectif est de chercher à savoir pourquoi le moi recourt à ce mécanisme
de défense et non à tel autre.
Les lignes suivantes apportent des éléments de clarté de ces trois noyaux
psychodynamiques de fonctionnement structurel. Soulignons les points de
différence entre ces trois modes de fonctionnement.

Organisation immature ou structure psychotique


La structure psychotique est caractérisée par le fait que le conflit se joue
entre le moi et la réalité externe ou interne du patient. L’angoisse dont il est
question ici est celle du morcellement, c’est-à-dire que le thérapeute note
chez le patient une absence de différenciation de la réalité interne (le monde
pulsionnel) et externe (le monde réel, social, le surmoi, etc.). Contre cette
angoisse, les mécanismes de défense névrotiques s’avèrent le plus souvent
insuffisants ou inefficaces. Le moi du patient recourt à des mécanismes de
défense propres au système psychotique (autisme, déni de la réalité, délire,
etc.) dans l’optique de trouver un compromis.

Organisation mature ou structure névrotique


La particularité de la structure névrotique est que ses mécanismes de
défense s’adressent préférentiellement au conflit qui se trouve entre les pul-
sions sexuelles (c’est le ça) et à leurs interdictions (c’est-à-dire le surmoi).
L’angoisse est celle de la castration et les mécanismes de défense tendent à
diminuer cette angoisse par stratégies comme : la régression de la libido, des
auto ou hétéroagressions, etc.
Freud a décrit les mécanismes de défense qui prévalent dans les structures
névrotiques qui sont :
• la névrose hystérique et la névrose phobique : le refoulement et le déplace­
ment. Ces deux mécanismes de défense sont ceux qui prédominent dans
ces fonctionnements psychodynamiques ;

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Mécanismes de défense 255

• la névrose obsessionnelle, parallèlement à la régression anale, qui apparaît


à côté du refoulement de la formation réactionnelle, l’isolation de l’affect,
l’annulation rétroactive, etc.

Organisation limite ou structure borderline


ou état limite
Cette structure a pour spécificité de placer le conflit entre les pulsions
agressives ou les pulsions libidinales contre l’objet frustrant et l’immense
désir que ce dernier répare la blessure narcissique. L’angoisse est celle de
perte d’objet, c’est-à-dire de dépression. Le conflit varie selon le cadre dont
bénéficie le patient de la part de son environnement ou de sa figure d’atta-
chement. Cela se répercute sur la façon dont il gère ses émotions ou les diffi-
cultés qu’il a pour anticiper les réactions de l’objet afin de mieux s’y adapter
ou de mieux répondre aux attentes de l’objet. Le manque de congruence et
la discontinuité émotionnelle se répercutent sur les affects et le mode de
relation que le patient entretient avec l’objet.

Mécanismes de défense matures


(fonctionnement névrotique)
Les mécanismes de défense dits matures sont retrouvés ou objectivés chez
les patients ayant une structure de fonctionnement psychique type névro-
tique. Il n’est pas rare de rencontrer un ou plusieurs de ces mécanismes dans
la structure borderline. Chaque structure psychique a une préférence et
développe ses propres mécanismes de défense. Le thérapeute ne doit pas se
tromper ou ne devrait pas mélanger les mécanismes matures et immatures.

Affiliation
Définition
Il s’agit de la capacité que peut avoir un patient de se retourner vers les
gens de son entourage pour leur demander de l’aide, rechercher la solution
avec eux ou toute autre forme de soutien de leur part afin de réduire les
stress internes ou externes e/ou les conflits émotionnels. « En s’affiliant
aux autres, le sujet peut exprimer et confier ses conflits, ses émotions et ses
problèmes en se sentant moins seul. » (Perry et al., 2009)
En fait, le patient essaye de trouver la solution à ses propres problèmes
en évitant de demander aux autres de le faire à sa place. Ce mécanisme
de défense lui permet soit de se rapprocher de ses propres besoins d’atta-
chement affectif et émotionnel, soit de partager ou d’extérioriser ses pro-
blèmes. Il montre son souhait de faire efficacement face aux problèmes, ce
qui permet de diminuer la tension psychique subjective et, le cas échéant,

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256 Status clinique pédopsychiatrique

d’augmenter les compétences à y faire face grâce à l’aide apportée par l’objet.
Le patient trouve des stratégies pour aller mieux quand il se sent envahi par
des fortes émotions. Certains rejoignent un groupe d’amis ou voient un
meilleur ami pour échanger, discuter sur leur situation ou d’autres théma-
tiques afin de baisser leurs tensions internes.

Mécanismes de défense différentiels


Altruisme
L’affiliation fait une différence également avec l’altruisme. « L’affiliation se
focalise sur l’aide obtenue pour soi-même, mais peut aussi inclure le partage
d’émotions et de problèmes qui apportent aux partenaires des bénéfices
mutuels. » (Perry et al., 2009), tandis que l’altruisme part du principe selon
lequel la personne doit faire du bien ou une bonne action pour son pro-
chain. Dans l’altruisme, le patient pose des gestes ou des actions ou peut
devenir actif vis-à-vis de l’objet pour bénéficier en retour une gratification
de la part de l’objet.
L’affiliation fait que le patient est plus ou moins actif. Il s’exprime plus
verbalement dans l’idée de se décharger sur le plan émotionnel. La gratifi-
cation vient de ce sentiment qu’il éprouve après avoir partagé, discuté ou
échangé autour de ses souffrances ou ses difficultés avec l’autre.

Hypocondrie
L’affiliation comme mécanisme de défense diffère de l’hypocondrie par le
fait que le patient hypocondriaque verbalise son ressentiment et son impuis-
sance à résoudre son problème de santé. Malgré ses multiples demandes
d’aide, il est incapable de les accepter. Mais celui qui met en place l’affilia-
tion comme défense ne pose pas des actions inamicales, et ne manipule pas
ses proches. Seulement, il éprouve un réel besoin d’attachement. Ce patient
s’inscrit plutôt dans une logique de recherche de l’aide de la part de l’autre.
C’est cela qui fait la différence avec l’hypocondrie par laquelle la personne
se plaint mais n’attend pas de l’aide ni ne prend en compte la solution que
l’autre lui propose.

Exploration de l’affiliation
L’exploration de mécanisme de défense exige du thérapeute d’avoir une
attention particulière. Il doit se demander si le patient fait souvent des
demandes d’aide ou de soutien à ses proches quand il se trouve dans des
situations conflictuelles ou émotionnelles stressantes.
Est-ce que le patient a tendance à nouer des relations de confiance avec ses
pairs dans le but de recevoir d’eux une aide quelconque ? Se confie-t-il à ses
proches devant ses difficultés ? Apprécie-t-il l’aide que ses proches lui pro-
posent ou ce qu’ils auraient témoigné pendant ses moments d’angoisses ou
de stress ? Accepte-t-il l’aide ou l’assistance que lui proposent ses proches ?
A-t-il de la peine à laisser son entourage l’aider ?

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Mécanismes de défense 257

Affirmation de soi ou self-assertion


Définition
L’affirmation de soi est une défense par laquelle le patient exprime ses
propres pensées et émotions en vue de gérer son stress ou ses conflits
internes. On ne retrouve pas de manipulation ni de contraintes dans l’affir-
mation de soi. L’entourage du patient comprend facilement le but ou la
raison de tel ou tel autre geste. Ce mécanisme de défense ne permet pas
l’obtention de la satisfaction dans la réalité.
Pour ne pas nous répéter, disons que dans l’objectif de réduire l’anxiété ou
l’inconfort psychique associés aux facteurs conflictuels internes ou externes
et de faire face au conflit émotionnel ou au stress interne et/ou externe,
le patient exprime directement ses émotions, ses désirs, sa pensée et ses
sentiments pour atteindre les objectifs qui semblent être clairs pour lui.
Une autre façon de définir ou d’expliciter ce qu’est une affirmation de soi
est de souligner la manière dont le patient l’utilise pour traiter ses conflits
par l’expression directe de ses propres sentiments, envies ou souhaits.
Cette extériorisation soulage les tensions psychiques alors que des forces
contraires empêchent leur expression. De quoi se rapproche ou se différen-
cie l’affirmation de soi ?

Mécanismes de défense différentiels


Lors de son exploration clinique, le thérapeute ne devrait pas confondre
l’affirmation de soi avec les mécanismes de défense suivants.
Agressivité passive
Dans l’agressivité passive, le thérapeute observe que l’hostilité ou le res-
sentiment du patient est directement ou indirectement dissimulé, tandis
que dans l’affirmation de soi, tout se rapporte in fine vers le patient. En
d’autres termes, le patient met ses propres intérêts au premier plan dans
l’affirmation de soi, ce qui n’est pas le cas dans l’agressivité passive où le
projet est bâti pour s’adresser à l’objet.
Déplacement
Le fait que dans l’affirmation de soi, le patient est amené à échanger ou
partager ses émotions, ses affects, ses envies, ses souhaits, etc. avec l’objet
pose une question de comparaison ou de rapprochement avec le déplace-
ment. Ce qui peut différencier l’affirmation de soi et le déplacement est que
dans ce dernier, le patient déplace ses affects d’un objet à un autre. On ne
note pas de modification de tension, ou alors la charge émotionnelle reste
identique même quand le patient s’adresse à un nouvel objet. Le déplace-
ment ne permet pas d’obtenir un agrément psychique comme c’est le cas
pour l’affirmation de soi. On voit là que le patient déplace ses affects ou ses
conflits sur l’objet tandis que dans l’affirmation de soi, il les exprime pour
obtenir une satisfaction.

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258 Status clinique pédopsychiatrique

Passage à l’acte
Le passage à l’acte est différent de l’affirmation de soi dans le sens où le patient
s’exprime de manière agressive, violente et directe avec comme conséquence
de blesser l’autre, tandis que dans l’affirmation de soi, il est dans la recherche
du lien avec l’autre non pas pour le nuire, mais pour se satisfaire lui-même.
Disons plus encore que les conséquences du passage à l’acte sont très
fâcheuses et risquent de détruire les relations avec l’autre. En revanche, le
patient qui recourt à l’affirmation de soi s’inscrit plutôt dans la collabora-
tion avec l’autre. Dans l’affirmation de soi, le thérapeute ne retrouve pas la
dimension agressive contre l’objet comme c’est le cas dans l’agressivité pas-
sive. On voit que ce point creuse un écart entre ces deux défenses.

Exploration de l’affirmation de soi


L’écoute attentive du patient permet au thérapeute de noter ses différents
mécanismes de défense dans ce qu’il nous rapporte ou dans les différentes
informations sur sa vie quotidienne. Le thérapeute doit penser à une affir-
mation de soi quand, par exemple, le patient dit : « Pendant mon entretien
d’embauche, le recruteur a voulu me déstabiliser en me disant que je m’étais
trompé. Du coup, je lui ai sorti tous mes diplômes et je lui ai dit qu’il n’en
avait pas autant. » Certains patients disent qu’ils font face à des conflits
internes ou des stress externes en affirmant leur personnalité.
Le thérapeute recherche le sentiment de honte ou de culpabilité chez le
patient. « Ressens-tu de la honte lors de tes différentes activités ou actions ? ».
Est-ce qu’en voulant s’affirmer face à une situation, le patient pose des
actions qui émotionnellement le culpabilisent ? Comment se comporte-t-il
devant une situation qui semble le couvrir de honte ? Est-ce qu’il éprouve de
la culpabilité ou essaie-t-il de justifier ses différents actes ou attitudes ? Etc.

Agrippement ou cramponnement
L’agrippement ou le cramponnement du moi se fait d’une manière particu-
lière. Certains cliniciens comme Roussillon disent que dans cette modalité
défensive, le patient s’agrippe de façon convulsive, effrénée, à un objet
(chose ou personne), dont la perte fait courir un risque vital. Cette stratégie
fait un lien avec la pulsion d’emprise. Ici, le patient ne lutte pas contre une
quelconque séparation, plutôt contre une impression qu’il risque de se réin-
tégrer. Il doit s’agripper pour surmonter cette angoisse qui est très forte et
très menaçante pour sa survie psychique.

Altruisme
Définition
L’altruisme est un mécanisme de défense qui « renvoie » au principe de
donner pour recevoir. Le patient s’attache à répondre aux besoins des
autres comme moyen de satisfaire ses propres besoins. L’altruisme est défini

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Mécanismes de défense 259

comme une défense par laquelle le patient gère « ses conflits émotion-
nels, ses stress internes ou externes, en se dévouant pour les autres tout
en réalisant partiellement ses propres besoins. En utilisant l’altruisme, le
sujet reçoit des gratifications partielles ou indirectes de la part des autres. »
(Perry et al., 2009) Le patient répond à ses conflits et à ses stress internes et
externes par le dévouement aux besoins de ses proches.
Soulignons encore le fait que l’altruisme est un mécanisme par lequel
le patient satisfait ses besoins internes en prétendant poser des gestes ou
actions pour le bien-être de l’objet. Il faut savoir que le patient peut être
motivé par l’obtention de récompenses ou de gains personnels. Ilt reçoit
en retour une gratification partielle, soit sous forme de bénéfice secondaire,
soit par l’aide directe apportée à l’autre. Il est conscient de ses motivations
à aider l’autre. La relation à l’autre est directe et fonctionnelle. Par exemple,
le patient qui dit à son thérapeute : « Cela m’a fait du bien de l’avoir aidé,
car je m’étais trouvé un jour dans la même situation que lui quelques mois
avant. C’était une situation assez complexe et difficile pour lui tout seul… »
C’est comme si le patient, en se mettant à la place de l’autre, revivait son
passé avec toutes les difficultés qu’il n’avait pas pu résoudre en ce temps-là.
Ainsi, dans le but de réparer ce qu’il n’a pas pu faire, accomplir ou finir, il se
met lui-même à apporter de l’aide à ceux qui se retrouvent dans la situation
identique, selon lui, jadis à la sienne.

Mécanismes de défense différentiels


Comme pour les autres mécanismes de défense, l’altruisme peut prêter à
confusion avec d’autres mécanismes. Il incombe au thérapeute de veiller à
différencier les actes, les attitudes, les expressions ou les faits qui peuvent
être considérés ou mis sous le joug de l’altruisme ou non.
Affiliation
L’altruisme doit être différencié de l’affiliation. Celle-ci n’implique pas que
le patient accomplisse une activité ou une action envers son prochain pour
gérer les conflits de son monde interne. En revanche dans l’altruisme, il est
essentiel de poser un geste, une action de bienveillance à l’égard des autres.
Le patient qui recourt à l’affiliation serait plutôt moins actif que lorsqu’il
utilise l’altruisme. L’affiliation se manifeste dans les propos ou la verbalisa-
tion du patient, contrairement à l’altruisme où l’individu est amené à poser
des actes envers l’autre.
Formation réactionnelle
Il peut arriver au thérapeute de faire un rapprochement entre l’altruisme et la
formation réactionnelle. La différence entre ces deux mécanismes de défense
réside dans le fait que le patient reçoit de la gratification en posant un geste
ou un acte altruiste. C’est le contraire dans la formation réactionnelle où il
sacrifie en général la gratification. Ici, la question de gratification a du sens
et souligne la différence entre les deux mécanismes de défense psychiques.

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260 Status clinique pédopsychiatrique

Projection et passage à l’acte


Pour reprendre les mots de Mélanie Klein, le patient projette le mauvais sein
à l’extérieur de lui ou sur l’objet. Il fait des passages à l’acte auto ou hétéro­
agressifs vis-à-vis de l’objet. Tout ceci fait la différence avec l’altruisme
comme mécanisme de défense. En procurant de l’aide réelle aux autres,
l’altruisme se différencie de la projection et du passage à l’acte. Le patient
qui recourt à l’altruisme est beaucoup plus proactif envers les autres. Il est
intéressé pour leur apporter de l’aide ou son assistance, quelle qu’en soit la
nature.

Sublimation
L’autre mécanisme de défense qui n’est pas à confondre avec l’altruisme
est la sublimation (détaillée infra). L’altruisme implique que le patient pose
un acte ou une action directe à l’égard de l’autre, alors que la sublimation
s’accompagne d’exploits, n’a pas d’impact direct sur l’individu. L’altruiste
cherche plutôt sa propre satisfaction directe à partir des actes qu’il pose
envers l’autre. Dans la sublimation, le patient n’apporte pas de l’aide à
l’autre, il fait des gestes ou des actions ou change d’activités dans le but
de faire plaisir dans un premier temps à l’autre pour recevoir en retour une
satisfaction par la reconnaissance de ce qu’il a fait.

Exploration de l’altruisme
L’exploration de l’altruisme comme mécanisme de défense est importante
du fait que l’altruisme peut être rapproché des différents autres mécanismes
de défense. Le long de l’entretien, le thérapeute devrait inviter le patient à
expliciter ou expliquer pourquoi il a posé un tel acte, un tel geste, ou son
attitude envers l’objet.
A-t-on l’impression que le patient est animé par un désir d’aider les
autres ? Cette aide qu’il fournit à son prochain lui procure-t-elle une satis-
faction ? Est-il capable de se projeter dans une profession à caractère d’aide
aux autres ou au prochain ? Manifeste-t-il une satisfaction dans ce qu’il
aurait fait à l’égard des autres, qu’importent les finalités ? Certains patients
disent qu’ils se sentent plus intéressés par la profession d’aide à l’autre. Il
est intéressant d’analyser avec eux pourquoi ils veulent devenir des tra-
vailleurs sociaux, des éducateurs spécialisés, des moniteurs de camps de
jeunes, etc.

Annulation rétroactive
Définition
L’annulation rétroactive est définie par le fait que le patient gère ses stress
ou ses conflits émotionnels grâce aux comportements, pensées ou affects
qui ont une portée opposée à des pensées, affects ou comportements
passés. La particularité de l’annulation rétroactive est la coexistence de deux

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Mécanismes de défense 261

affects contraires dans la même expérience. Le patient pose des actes ou des
actions dans le but de réparer ou d’apaiser le problème. Cet acte réparateur
l’exempte de la souffrance liée au problème.
L’acte que pose le patient dans l’annulation rétroactive correspond à une
correction symbolique. Il fait la négation des pensées, des sentiments ou
des actions antérieures. Ce mécanisme est rencontré le plus souvent chez les
patients obsessionnels (avec le trouble obsessionnel compulsif).
En fait, par ce mécanisme de défense, le patient répète les gestes, les
paroles, les actes dans l’idée d’annuler ou de conjurer un mauvais sort. Par
exemple, il se dit que pour éviter une malédiction, il doit compter de 1 à 6
quand il rentre chez lui.
L’annulation rétroactive est loin d’être une superstition. Il ne s’agit pas
d’une action qui est validée par l’ensemble des membres de sa communauté,
de son village, de son quartier ou de son appartenance tribale ou sociale. Le
patient est le seul qui fait ses gestes et l’explique à sa manière. L’annulation
rétroactive est un mécanisme inconscient et révèle un caractère exigeant,
spontané et automatique. L’individu ne peut pas se dérober, ni s’empêcher
de poser un acte devant un fait donné.
Enfin, dans l’annulation rétroactive, le patient se sent obligé d’annuler ou
d’effacer ses intentions, propos ou attitudes originelles. Il lutte contre une
pulsion destructrice inconsciente. Les gestes, actions, mots, propos, etc. qui
composent ce mécanisme de défense ne sont pas à interpréter de manière
hâtive. Par exemple, le patient qui dit : « Ma meilleure amie est vraiment
épouvantable, et en même temps, elle est pleine de bonnes intentions. » se
corrige ou essaie de dire une chose qui vient corriger ce qu’il vient de décrire
sur son amie. Il ne s’en rend pas compte mais le thérapeute si.
En bref, une annulation rétroactive d’une attitude ou d’une représenta-
tion correspond à l’annulation de l’attitude ou de la représentation concer-
née par la mise en œuvre d’une seconde attitude ou représentation opposée
à la première.

Mécanismes de défense différentiels


L’annulation rétroactive se retrouve dans plusieurs pathologies ou types de
fonctionnement psychique. Il est important de la différencier particulière-
ment des deux mécanismes de défense suivants.
Clivage de l’objet
Le clivage de l’objet se rapproche de l’annulation rétroactive dans le sens où
il fait appel à la contradiction que nous pouvons rencontrer dans l’annula-
tion rétroactive. L’existence de composantes contradictoires rapproche ces
deux mécanismes de défense. Soulignons que ces deux modes de défense
s’opposent par leurs relations d’objets, des représentations et des affects.
C’est ce côté contradictoire qui intéresse ces deux mécanismes. Le clivage
de l’objet fait que le patient est incapable de faire des rapprochements entre

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262 Status clinique pédopsychiatrique

deux situations. L’objet est clivé, ce qui n’est pas le cas de l’annulation
rétroactive où le patient arrive à se rendre compte de la contradiction ou
des deux facettes de l’objet.
Dans l’annulation rétroactive, le patient fait des reproches à l’objet, for-
mule très vite des commentaires positifs afin d’éviter d’éventuelles critiques
ou conséquences défavorables de ses précédentes affirmations. Enfin, les
parties qui sont non conciliables dans le clivage de l’objet le sont heureuse-
ment dans l’annulation rétroactive.
Formation réactionnelle
Comme mentionné supra, dans l’annulation rétroactive, on retrouve une
coexistence des affects ou pulsions opposées, ce qui n’est pas le cas dans la
formation réactionnelle.

Exploration de l’annulation rétroactive


L’écoute fine du clinicien l’amène à pointer deux éléments qui le mettent
sur la voie pour explorer une annulation rétroactive comme mécanisme de
défense :
• quand le patient a l’habitude de contredire ses affirmations ou ses
commentaires sur les autres ;
• quand le patient fait des connotations ou commentaires opposés juste
après avoir évoqué son intention malveillante à l’égard d’un proche.
L’exploration amène le thérapeute à se demander si le patient arrive à
contredire ses pensées, ses pulsions, ses affects, ses émotions ou ses senti-
ments. Donne-t-il l’impression de désavouer par avance ce qu’il veut dire à
propos des sentiments ou attitudes qu’il a envers ses pairs ? A-t-on l’impres-
sion qu’il répond de manière vague, évasive et moins claire ? Raconte-t-il
spontanément des propos réparateurs du type à justifier ses comportements
ou attitudes personnelles ? Cherche-t-il à chaque occasion à justifier ses
gestes et ses actes ? Cherche-t-il à montrer une attitude contraire aux actes
qu’il vient de poser ou contre les propos qu’il vient d’évoquer ?

Anticipation ou affective rehearsal


Définition
L’anticipation peut être définie comme un mécanisme par lequel le patient
réduit ses conflits internes. Il anticipe les conséquences émotionnelles du
problème à venir, en envisageant les alternatives réalistes, mais en vivant
réellement cette détresse par un processus de représentation des idées stres-
santes et des affects.
Cette défense implique que le patient soit capable de supporter le stress et
l’anxiété causés par la représentation des situations futures et de leurs pro-
bables conséquences sur son fonctionnement quotidien. Par l’anticipation,
il atténue ses futurs stress ou conflits émotionnels. Pour arriver à anticiper

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Mécanismes de défense 263

psychiquement les réactions et les conséquences émotionnelles futures, il


noue, réunit ou lie ses représentations avec ses affects.

Mécanismes de défense différentiels


Il est intéressant d’aller plus loin dans une investigation de ce mécanisme
de défense. Pour ce faire, voyons deux mécanismes de défense dont l’anti-
cipation se rapproche ou s’écarte.

Annulation rétroactive
L’anticipation est différente de l’annulation rétroactive. Retenons que
l’absence de pensées compulsionnelles et la richesse du contenu affectif
dans le processus fantasmatique de l’annulation rétroactive font la diffé-
rence avec l’anticipation. Le patient qui utilise l’anticipation est plus dans
les pensées que dans les actes et les gestes.

Fantasmatisation autistique
La fantasmatisation autistique diffère de l’anticipation par le fait que le
patient n’a pas de réelles intentions réellement par rapport aux effets des
actions ou des situations supposées fantasmées. En revanche, l’anticipa-
tion s’accompagne d’actions fantasmatiques qui tiennent compte des
situations ou des difficultés réelles et prévisibles du patient. L’individu
qui utilise l’anticipation est beaucoup plus inscrit dans la réalité de son
environnement.

Exploration de l’anticipation
Lors de l’exploration de l’anticipation comme un mécanisme de défense,
les éléments ci-après peuvent orienter le thérapeute. Le plus souvent, ce
mécanisme fait que les patients rapportent s’être imaginé la scène, le scé-
nario ou les réactions des gens de leur entourage (leurs parents, leurs amis,
leurs professeurs ou éducateurs, etc.) avant de passer à l’acte. Par exemple,
un patient qui nous dit : « Je savais qu’annoncer à mes parents le fait que
je vais faire un apprentissage au lieu de continuer avec le collège serait très
difficile. Avant cette confrontation, je me suis entraîné en essayant d’ima-
giner différents scenarii pour mieux surmonter ». Un autre dit : « Avant de
dévoiler mon attirance sexuelle aux personnes du même sexe que moi, j’ai
pris le temps de me faire le film de toutes les réactions de mes amis et de
ma famille ».
Ce mécanisme amène le patient à s’imaginer ou passer en revue les
différents scenarii ou probabilités de réactions des autres. Il se prépare au
pire ou non. Pour confirmer qu’il est face à une anticipation, le thérapeute
se demande si le patient lui décrit des situations qu’il a essayé d’anticiper
dans sa vie. Présente-t-il des attitudes anticipatives dans ses activités quoti-
diennes ? Qu’est-ce qui a précédé ou qu’est-ce qu’il s’est imaginé avant de
poser un acte ou un geste ?

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264 Status clinique pédopsychiatrique

Blocage
Il s’agit d’un mécanisme de défense dans lequel prédomine l’inhibition
des affects, de la pensée ou des pulsions. En d’autres termes, le « blocage
constitue un processus défensif proche, en tant qu’effet, du refoulement.
Il est, cependant, plus bref et implique une sensation naissante de tension
que produit le fait de contenir l’affect, la pensée ou la pulsion, ce qui les
empêche de se manifester. » (Inonescu et al., 2016)
Le patient bloqué est dans l’impossibilité de verbaliser ses émotions et
ses affects.

Contrôle ou maîtrise de l’environnement


Définition
C’est un mécanisme qui n’existe pas dans les manuels de vocabulaire psy-
chanalytique de Laplanche et Pontalis. L’objectif est de minimiser l’anxiété
et de résoudre les conflits internes, le contrôle devient une défense par
laquelle le patient essaie de manière exagérée de réglementer ou de conduire
les événements et les objets de son environnement. Il s’agit d’un individu
qui ne laisse pas la place à son thérapeute et qui essaie de tout contrôler.
Le contrôle comme mécanisme de défense peut se constater dans un
jeu. Le patient dicte au thérapeute la marche à suivre ou alors il change
constamment les règles du jeu afin de rester le seul gagnant ou meneur. On
trouve chez le patient qui recourt au contrôle l’utilisation de « différentes
stratégies comme l’intervention avec des suggestions, le sabotage, la séduc-
tion, la complaisance excessive, etc. » (Inonescu et al., 2016)
De manière ouverte, par opposition ou non, il peut demander au thé-
rapeute de changer le thème de discussion, de passer à un autre jeu, de
ne plus faire ceci ou cela. Tout cela a pour but d’éviter de se confronter à
l’émergence émotionnelle ou affective.

Exploration du contrôle
Quand le thérapeute explore ce mécanisme de défense, il a une impression
que le patient essaie de lui dicter les règles du jeu. Sciemment ou directe-
ment, le patient échappe ou évite tout simplement de suivre le thérapeute
dans le sentier qu’il trace au cours de l’entretien. Il trouve un autre moyen
de contourner la situation et reprendre les rênes. Il peut dire au thérapeute
avant ou pendant le jeu : « Toi, tu prends les animaux méchants ou gentils,
et moi je prends les bonshommes… » Le patient qui est dans le contrôle
exprime verbalement le fait qu’il veut que ce soit le thérapeute qui exécute
ce qu’il veut. Il a du mal à suivre toute idée venant de l’autre.
Retenons qu’il est possible, chez certains patients, d’objectiver ce méca-
nisme de défense à travers leur attitude corporelle, la manière de répondre
aux sollicitations du thérapeute, etc. Le thérapeute cherche à démasquer si

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Mécanismes de défense 265

l’attitude, le comportement, ou les propos du patient appartiennent bien au


contrôle ou à l’évitement.

Dénégation
Définition
La dénégation peut être définie comme un mécanisme de défense par lequel
la pulsion gênante n’est pas refoulée d’emblée. Cette pulsion apparaît dans
la conscience, mais le patient s’en défend en la niant. Il essaie de mettre à
l’écart ses émotions, ses affects, voire ses pulsions, tout en refusant d’admet-
tre que ces derniers le concernent personnellement.

Exploration de la dénégation
La dénégation est plus objectivée dans la narration de l’individu. Par exem-
ple, un patient raconte son rêve et dit : « J’ai rêvé d’une jolie demoiselle qui
me faisait des avances amoureuses. Au fait, cette fille qui apparaît dans mon
rêve n’est pas ma cousine Alicia. » Un autre patient s’étonne en ces termes :
« Je n’ai pas pensé du tout à cela avant que tu le dises ! »
Lors d’une recherche de validation émotionnelle, le thérapeute peut dire
au patient : « Je me demande si tu n’étais pas triste de le voir partir sans te
dire au revoir ? » Le patient qui rétorque : « Moi, suis-je triste ? Pas du tout !
Qu’est-ce qui vous fait croire cela ? » Ces types des négations valent souvent
plus qu’une confirmation.

Déni névrotique ou déni mineur


Définition
Le déni névrotique est un mécanisme de défense par lequel le patient peine
à reconnaître différents aspects de la réalité interne ou externe qui sont fla-
grants pour le thérapeute. De cette façon, il arrive à faire face à ses conflits
émotionnels, à des stress internes ou externes. Par ce mécanisme, il gère une
situation désagréable ou pénible émotionnellement en refusant de recon-
naître certains aspects de la réalité de son expérience, pourtant évidents
pour le thérapeute.
Le patient qui est dans le déni névrotique ne se rend pas compte de la
véracité des faits qu’il rapporte. Bien que le thérapeute lui notifie la vraisem-
blance d’un fait, le patient réfute la présence ou l’absence d’un sentiment,
d’un ressenti émotionnel, d’un comportement ou d’une intention (passée
ou présente). Tout est hors de champ de sa conscience et, de manière pré-
pondérante, il répond par « non ». Souvent par crainte d’être sujet de honte
ou d’éprouver du chagrin, il nie ses pensées, désirs, émotions, etc. Le déni
névrotique empêche le patient de reconnaître ses sentiments, ses souhaits,
ses intentions ou les actions dont il pourrait être tenu pour responsable ou
dont il pense qu’ils pourraient lui valoir des suites désagréables.

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266 Status clinique pédopsychiatrique

Mécanismes de défense différentiels


Le déni névrotique est constaté chez les patients qui ont une structure plu-
tôt névrotique.
Déni psychotique
Comme son nom l’indique, le déni psychotique est un mécanisme du fonc-
tionnement psychotique et non névrotique. Disons tout simplement que
dans le déni névrotique, le patient refuse de reconnaître un objet physique
ou un événement réel dans son vécu présent.
Dissociation
La notion de conscience est un élément essentiel de différence entre le déni
névrotique et la dissociation qui est essentielle. Alors que la dissociation
fait appel à l’altération globale de la conscience, le déni névrotique garde
la conscience normale du patient. Ainsi, les contenus idéationnels et émo-
tionnels inconscients sont préservés de manière particulière lors du déni
névrotique.
La dissociation est un mécanisme de défense que l’on rencontre chez
les patients traumatisés ou qui ont été en contact avec des événements
traumatisants ou potentiellement traumatiques. Le patient qui recourt à ce
mécanisme n’est pas en contact avec une partie de lui qui a été en lien avec
l’événement traumatique en question.
Formation réactionnelle
La formation réactionnelle diffère du déni névrotique par le fait que, grâce
à elle, le patient transforme un affect ou une pensée en son contraire (par
exemple, saleté en propreté, haine en amour, colère en bienveillance), ce
qui n’est évidemment pas possible avec le déni névrotique. Plus exacte-
ment, dans le déni, rien n’est transformé, plutôt tout est nié en bloc.
Répression
C’est un autre mécanisme de défense retrouvé dans une structure névrotique
mais qui se différencie du déni névrotique. Dans la répression, le patient a
conscience de sa réalité psychique. Il donne à son thérapeute l’impression
qu’il a conscience de ce qu’il est en train d’éviter ou de nier. Autrement
dit, la part de la conscience que l’on peut trouver dans la répression est
totalement absente dans le déni névrotique.

Exploration du déni névrotique


Au cours de l’entretien, cette exploration du déni névrotique peut s’objec-
tiver dans la narration, les arguments ou les propos du patient vis-à-vis des
nouveaux ou des anciens thèmes de discussion. Le patient revient sur les
éléments de discussion ou sur le déroulement des séances précédentes. Le
thérapeute se demande si le patient formule des excuses par rapport à un
thème de discussion abordé dans les séances passées ou pas du tout.

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Mécanismes de défense 267

A-t-on l’impression que le patient nie constamment les faits, même si


l’on essaie de lui exposer leur existence ? Est-ce qu’il nie certains senti­
ments (la colère, la tristesse, la joie, la peur) ou certaines intentions ?
Est-ce qu’il nie ou évite d’aborder les pensées ayant un contenu affectif ?
Écarte-t-il sciemment les questions qui concernent ses émotions et ses
sentiments ? Quelle est sa réaction à la demande de renseignements sur
son état sentimental ou émotionnel quand il parle d’une situation qu’il a
vécue ? Parvient-il à donner des réponses détaillées sur ses sentiments, ses
émotions, ses affects, etc. ?

Déplacement
Définition
Le déplacement est défini comme « une opération de substitution par
laquelle l’intérêt est déplacé des pensées importantes vers des éléments
indifférents. La possibilité d’un tel mécanisme repose sur le fait que l’éner-
gie psychique inconsciente n’est pas retenue par les contraintes et les sépa-
rations logiques, ainsi elle glisse librement des représentations importantes
aux représentations insignifiantes. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012)
Le déplacement est caractérisé par le fait que le patient « gère ses conflits
émotionnels, ses stress internes ou externes, en déplaçant une représenta-
tion, ou un affect lié à un objet sur un autre objet (généralement moins
angoissant). Le sujet est conscient, ou n’est pas conscient, du déplacement
de la représentation, de la pulsion ou de l’affect lié à un objet sur un autre
objet. » (Perry et al., 2009) Le patient généralise ou déplace un problème
vers un autre objet habituellement moins menaçant. L’affect ou le senti-
ment sont reconnus, exprimés, mais redirigés vers une cible moins conflic-
tuelle bien que de même nature.
Le déplacement permet de transférer l’affect lié à une représentation
interdite vers un autre affect moins gênant, mais lié à la première représen-
tation par un élément symboliquement significatif. Par exemple, la peur de
la sexualité peut se déplacer sur la rue (peur de sortir dans la rue). Le lien
entre les deux est que la rue représente le lieu des rencontres, qui peuvent
aboutir à des relations sexuelles. Il y a juste la modification de l’objet mais
l’affect reste intact.
Le déplacement est un mécanisme de défense qui prévaut dans les
névroses phobiques. Le patient peut déplacer sa crainte ou son angoisse sur
les lieux, les animaux, les objets, les insectes, etc.

Mécanismes de défense différentiels


Le déplacement présente un certain nombre d’avantages au patient car, si
on le compare aux autres mécanismes de défense comme la dissociation, le
refoulement ou la formation réactionnelle, il permet une expression plus
marquée du contenu psychique déplacé. Il s’agit d’avoir une seule cible

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268 Status clinique pédopsychiatrique

dans le déplacement. Nous pouvons dire ainsi que dans le déplacement, la


satisfaction réside dans cette impression qu’a le patient d’avoir un contrôle
sur son angoisse ou sa crainte. Il a réussi à mettre à l’écart ce qui le perturbe
émotionnellement parlant.
Agressivité passive
Le patient qui recourt au déplacement ne cache pas son agressivité, contraire­
ment à ce qui se passe dans l’agressivité-passivité où il dissimule son
agressivité envers un ou des objets qui l’ont frustré ou déçu.
Dissociation
De manière particulière, nous retrouvons la notion de perte ou d’altération
de la conscience du patient dissocié sans que la cible change. En revanche,
dans le déplacement, il garde son bon fonctionnement ou un bon état de
conscience mais sa représentation, sa pulsion ou ses affects sont déplacés
vers une nouvelle cible ou sur un autre objet. Les éléments clés qui font la
différence entre ces deux mécanismes de défense sont : la conscience du
patient et l’objet vers qui se dirige sa pulsion ou ses affects (cf. infra « Dis-
sociation »).
Projection
La grande différence entre ces deux mécanismes se résume par la notion
d’externaliser ou non les affects. Le patient qui est dans la projection peut
être dans les plaintes, les revendications, les réclamations, les accusations,
le dénigrement vis-à-vis de l’objet ou dans la multiplication des démarches
pour se faire restaurer ou retrouver ce qu’il pense avoir perdu à cause de
l’autre. Tout ceci n’est pas le cas dans le déplacement.

Exploration du déplacement
Plusieurs éléments peuvent aider le thérapeute à objectiver ce mécanisme
de défense. Pour commencer, on peut se demander si le patient exprime
ses sentiments de colère, de haine, de joie, etc., tout en y apportant un
quelconque jugement ou peu d’intérêt et dans les minutes qui suivent.
Est-ce qu’au cours du même entretien, le patient exprime des sentiments
à la suite desquels il se retrouve dans un malaise ou dans un inconfort ?
Investit-il des situations, des personnes ou des objets qui semblent avoir
peu d’importance, mais dans l’instant après ces situations ont des simili-
tudes avec d’autres auxquelles il attache une grande importance ? Est-ce
que les disputes ou mésententes qu’il a eues à l’école avec ses pairs ou sa
maîtresse, il les reproduit à la maison avec sa fratrie ou ses parents ?
Est-ce qu’il réagit sans grande émotion devant un refus d’aide ou service
de la part d’une personne proche ? Donne-t-il l’impression qu’il évite déli-
catement ou non toutes les questions qui risquent de réveiller de fortes
émotions ou des sentiments désagréables ou chercher plutôt à aborder
d’autres thèmes ?

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Mécanismes de défense 269

Dépréciation
Définition
La dépréciation est un mécanisme de défense qui stimule l’amour-propre
du patient. Ce mécanisme repose sur la conscience des désirs ou la décep-
tion liée à la non-satisfaction de ses souhaits ou de ses besoins. Grâce à la
dépréciation, le patient arrive à occulter un sentiment de vulnérabilité, de
honte, de non-valeur. Il gère ses problèmes en attribuant à l’autre ou à lui-
même des défauts exagérés. Il utilise pour ce faire des expressions grossières,
sarcastiques ou négatives sur les autres ou sur lui-même. Il essaie de mettre
l’objet à distance sans le nier.

Exploration de la dépréciation
Le thérapeute a tout intérêt à bien écouter le discours du patient, qui donne
l’impression de chercher à montrer qu’il est humble ou alors qu’il apprécie
peu ce qu’il est ou ce qu’il possède. Par exemple, il dit : « Je ne suis pas un
véritable écrivain, je suis tout juste un humble journaliste. »

Dissociation
Définition
La dissociation est un mécanisme de défense par lequel le patient altère la
fonction intégrative de sa conscience ou de son identité afin de gérer les
stress ou les conflits émotionnels. « Lors de la dissociation, un affect ou une
pulsion déterminée agit dans la vie psychique du sujet sans que le sujet en
soit conscient. » (Perry et al., 2009) Dans la dissociation, le patient maintient
le problème hors de sa conscience, et l’affect qui l’accompagne s’exprime par
une altération de la conscience ou par un comportement inhabituel.
Le patient exprime son affect en minimisant consciemment les aspects
menaçants du problème. Par exemple il dit : « J’ai donné une baffe à mon
meilleur ami. Je ne comprends pas pourquoi. Ce n’était pas moi, ça. Qu’est-
ce qui m’a poussé à faire ça ? »
Étant donné que le contenu dissocié est considéré comme trop menaçant,
trop conflictuel ou trop angoissant pour le patient, la principale fonction de
la dissociation est de mettre hors champ de la conscience le matériel ou les
affects pénibles pour lui.
La dissociation est un mécanisme de défense souvent retrouvé chez les
patients qui ont vécu un traumatisme simple ou répété. Cette dissociation
peut s’accompagner de l’hyperadaptation de la personne à son environne-
ment et complète ainsi le tableau du faux self.
Mécanismes de défense différentiels
La dissociation peut être différenciée de plusieurs autres mécanismes de
défense. Il est important que le thérapeute s’intéresse aux détails pour la

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270 Status clinique pédopsychiatrique

distinguer du clivage, du déplacement, de l’isolation, du mensonge, de la


formation réactionnelle et du refoulement.

Clivage
Le patient qui est dans le clivage a une connaissance des affects associés, mais
pas pour ceux qui lui semblent dissemblables. Étant donné que le clivage et la
dissociation sont très souvent associés, il est alors possible que le patient uti-
lise les deux mécanismes de défense en même temps. L’important est de savoir
les distinguer afin de bien aider le patient dans la suite de sa prise en charge.

Déplacement
La dissociation diffère du déplacement sur le fait que dans la dissociation,
le patient n’est pas conscient au moment du fait, tandis que dans le déplace­
ment, il oriente ou dirige ses affects ou sa pulsion sur d’autres thèmes de
discussion ou d’autres objets.

Formation réactionnelle
Dans la formation réactionnelle, les affects ou le désir sont transformés en
leur contraire, tandis que dans la dissociation, le patient ne se rend pas
compte de la présence de l’objet. Son affect ou son désir n’est pas trans-
formé mais plutôt mis à l’écart du champ de sa conscience.

Isolation
Contrairement à la dissociation, l’isolation consiste à garder une conscience
réduite de l’affect. Le patient peut parler de la situation ou de l’événement
sans que ses affects soient exprimés (cf. infra « Isolation »).
Mensonge
Pour faire une différence entre la dissociation et le mensonge, le thérapeute
doit chercher la notion de conscience du patient lors des actes ou actions
qu’il rapporte. La qualité de la conscience est un élément clé et apporte une
nette différence entre ce qui appartient au mensonge et à la dissociation.

Refoulement
Le fait que le contenu idéationnel soit maintenu inconscient mais que
l’affect ou la pulsion conservent leur conscience dans le refoulement fait la
différence avec la dissociation.

Exploration de la dissociation
Il est important de souligner que la tâche du clinicien est lourde quand il
s’agit d’explorer ce mécanisme de défense. Pour ce qui est de la dissociation,
le thérapeute peut avancer cette hypothèse quand le patient semble ou se
montre fasciné par des pairs qui ont des conduites impulsives, désinhibées
ou des personnes jugées asociales ou en dehors de la légalité dans la société.
Les questions ci-après peuvent aider à élucider ce mécanisme s’il existe
chez le patient. Est-ce qu’il arrive à poser des actes sans en connaître la

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Mécanismes de défense 271

raison exacte ? Par exemple, le thérapeute lui demande : « Fais-tu des gestes
de manière inadéquate et impulsive sans t’en rendre compte ? »
Par ailleurs, est-ce que le patient se plaint de douleurs abdominales ou
de céphalées intenses quand il ressent de l’angoisse, de la tristesse, de la
colère, ou de la joie ? Certains peuvent souffrir d’une amnésie ou de crises
émotionnelles ou peuvent évoquer des états de transe, des fugues amné-
siques qui sont une expression d’une pulsionnalité ou des affects causes
d’un conflit inconscient.

Évitement
Définition
L’évitement est un mécanisme de défense inconscient. Le patient n’a pas
la conscience du conflit, mais il refuse automatiquement de se confronter.
Lors de l’évitement, sans s’en rendre compte, il refuse d’aborder le problème
ou la thématique que lui propose l’autre. Par exemple, dans son récit, il
évite d’aborder un thème ou de raconter une histoire qui a trop d’affect.
Il préfère changer de thématique. Sur le plan psychiatrique, on parle de
l’opposition passive ou active du patient.
Mécanismes de défense différentiels
Les mécanismes de défense qui sont à distinguer de l’évitement sont le
déplacement, le refoulement, etc. (cf. les paragraphes consacrés à ces méca-
nismes).

Exploration de l’évitement
Le thérapeute note que le patient change de sujet ou lui demande de chan-
ger de sujet si celui-ci génère du stress ou des affects pénibles. Au lieu de
répondre aux questions posées ou de continuer à discuter avec son théra-
peute, le patient peut lui demander directement : « Est-ce qu’on va jouer ? »
Il peut aborder ou amener le thérapeute à aborder d’autres sujets ou d’autres
thématiques ou tout simplement lui demander d’arrêter la séance. Et si, par
exemple, son thérapeute lui demande d’expliquer ce qu’il fait en classe ou
avec ses copains, le patient lui dit : « Je peux aller aux toilettes ou je peux
dessiner ? » au lieu de répondre ou de continuer à raconter son histoire, etc.

Formation réactionnelle
Définition
La formation réactionnelle est un mécanisme de défense retrouvé essen-
tiellement dans la structure névrotique (hystérique, obsessionnelle et pho-
bique). La formation réactionnelle est définie comme un moyen par lequel
le patient essaie de gérer ses stress, ses conflits émotionnels en donnant
un sens opposé à des affects ou pensées qui sont inacceptables pour lui.
Il s’agit de la transformation d’une pulsion inacceptable en son contraire.

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272 Status clinique pédopsychiatrique

Soulignons que la formation réactionnelle peut être l’équivalent du retourne­


ment en son contraire.
On constate au cours de la formation réactionnelle que le patient adopte,
fait ou pose des actes et des gestes différents acceptables dans la société qui
sont l’opposé de ce que l’on ressent pour l’objet.

Mécanisme de défense différentiel


La formation réactionnelle doit être différenciée de l’annulation rétro-
active. La présence simultanée et conflictuelle des affects ou des pulsions
opposées dans l’annulation rétroactive fait un point de différence avec la
formation réactionnelle.

Exploration de la formation réactionnelle


Les comportements et les attitudes très exagérés du patient sont des indi-
cateurs de ce mécanisme de défense. Par exemple, le thérapeute note un
comportement très pudique chez un patient qui a une pulsion d’exhibi-
tionnisme. À noter cependant que la pudicité n’est pas toujours corollaire
de l’exhibitionnisme.
À l’aide de la formation réactionnelle, la pulsion est transformée sans que
le patient s’en rendre compte consciemment. Il manifeste ou adopte alors
un comportement diamétralement opposé à ses tendances instinctuelles ou
pulsionnelles.
En fait, au cours de la névrose obsessionnelle par exemple, les patients
peuvent avoir une propreté excessive. Celle-ci peut être un mécanisme de
défense contre un désir inconscient de saleté ou de manipuler des saletés.
Un autre exemple est l’ascétisme des adolescents comme formation réac-
tionnelle contre la poussée pulsionnelle sexuelle de la puberté.
Voici quelques questions à poser au patient ou à soi-même lors de cette
exploration : le patient décrit-il une situation personnelle pendant laquelle
il a eu une réaction opposée à ce que l’on pouvait attendre ? A-t-il ten-
dance à minimiser ses sentiments quand on est en désaccord sur un sujet
ou sa manière d’interpréter ou d’expliquer les événements ? Est-ce qu’il
exagère en décrivant avec enthousiasme des événements ou des activités
qui lui procurent de la peur ? Devient-il aimable, collaborant, gentil ou
doux quand on aborde avec lui des sujets qui normalement génèrent de la
peur, de l’angoisse ou un malaise ? Accepte-t-il les remarques même celles
pour lesquelles il devait montrer son désaccord ? Évite-t-il d’exprimer des
pensées négatives envers ses pairs, bien qu’ils ne soient pas gentils avec lui ?
A-t-on l’impression qu’il nie ou désire ce qu’il évite ?

Humour
Définition
L’humour est l’utilisation des aspects amusants ou ironiques d’un problème
pour minimiser les tensions psychiques qu’il provoque chez le patient.
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Mécanismes de défense 273

Ce mécanisme de défense est défini comme un moyen par lequel il arrive


à gérer ses conflits émotionnels, ses stress internes ou externes. Il utilise
l’ironie pour exprimer le conflit.
Il est important de souligner que l’humour est totalement différent des
blagues car on ne retrouve pas la finalité de gérer un conflit quelconque
dans les blagues.
L’humour permet l’expression symbolique d’une partie des affects liés à
un problème quelconque. Lorsque le patient se retrouve bloqué dans une
situation de stress ou de difficultés, il a recours à l’humour pour trouver un
compromis ou obtenir un soulagement de la tension interne.

Mécanismes de défense différentiels


Agressivité passive
L’humour diffère de l’agressivité passive par le fait que le patient use de l’iro-
nie pour détourner soi-même ou son entourage des problèmes à résoudre.
L’agressivité-passivité regorge en elle d’une dose assez forte d’agressivité,
ce qui n’est pas du tout le cas dans l’humour. L’agressivité s’accompagne
souvent de roueries ou de plaisanteries par lesquelles le patient se rabaisse
constamment. Il entrave ses capacités à faire face à ses propres conflits ou
au stress.
Dans certains cas, l’agressivité-passivité peut être rapprochée de l’humour
noir. Il devient très subtil de saisir le sens ou le message caché ou transmis
par les propos humoristiques du patient. Mais, quand on essaie de bien
analyser, on se rend compte qu’il s’agit d’une forme d’agressivité-passivité.
Dévalorisation
Le thérapeute doit garder à l’esprit que le patient qui est dans la dévalo-
risation qui est dans la dévalorisation peine à apprécier ses qualités, ses
exploits, etc. Il a recours à des commentaires défavorables sous forme de
sarcasme, de dénigrement, de rabaissement ou d’ironie mordante. Tandis
que dans l’humour, il plaisante ou tient des propos hilarants pour apaiser
ses tensions internes.
En fait, la dévalorisation amène le patient à aller au-delà de la limite du
comique ou de l’ironie, alors que le patient qui fait de l’humour garde une
estime de soi et certains peuvent même se vanter d’avoir un bon sens du
second degré.
Exploration de l’humour
Certaines personnes reconnaissent ou revendiquent eux-mêmes avoir le
sens de l’humour. Par exemple, un patient qui a de l’acné et qui suscite
de l’angoisse en société ou qui a de l’effet sur l’image de soi dit : « Regarde
ma tête, avec tous ces boutons, je ressemble à une machine à écrire. »
Le patient cherche à amuser, à faire rigoler les autres pour essayer d’apaiser
ou de réduire le seuil d’excitation ou de tensions internes en lui ou dans sa
relation avec l’objet.
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274 Status clinique pédopsychiatrique

Les patients qui recourent à l’humour noir deviennent vite agaçants dans
le groupe des pairs. Leurs propos sont difficiles à déchiffrer et suscitent de
l’agressivité chez l’autre. Il arrive qu’ils se rendent compte de leur mauvais
sens de l’humour ou de leur second degré.
Le patient utilise-t-il l’humour, l’ironie, essaie-t-il de détourner les propos
de ses interlocuteurs en y ajoutant de la plaisanterie ? Fait-il des remarques
drôles ? Malgré sa manière de recours à l’ironie ou à la plaisanterie, l’entre-
tien n’est-il pas perturbé ? Fait-il des commentaires humoristiques durant
l’entretien ? Aborde-t-il ses conflits émotionnels avec ironie ou de manière
drôle ?

Hypocondrie
Définition
L’hypocondrie est définie comme étant un mécanisme de défense qui
« entraîne l’usage répété d’une plainte ou d’une série de plaintes par laquelle
ou lesquelles le sujet appelle ostensiblement à l’aide. Cependant, les sen-
timents cachés d’agressivité ou de ressentiment à l’égard des autres sont
exprimés simultanément par le sujet sous la forme de refus de suggestions,
de conseils, ou de n’importe quelle autre proposition. » (Perry et al., 2009)
Par ailleurs, on remarque que le patient qui utilise l’hypocondrie rapporte
plusieurs plaintes à son thérapeute, mais ne laisse pas entrevoir une envie
de recevoir de l’aide de la part de ses proches. Il évite ou refuse toute propo-
sition d’aide de la part de ses proches.
La principale fonction de l’hypocondrie est d’aider l’individu à lutter
contre la colère qu’il ressent par rapport à ses besoins de dépendance de ses
proches. À cause de sa colère ou de son agressivité, les différentes tentatives
d’aide que lui proposent ses proches sont refusées insidieusement ou indi-
rectement par le patient. Son attitude de refus ne l’empêche pas de persister
dans sa demande d’aide.

Mécanismes de défense différentiels


Plusieurs mécanismes de défense se rapprochent de l’hypocondrie, mais le
thérapeute doit faire attention à ne pas les confondre. Il est évidemment
intéressant d’y porter toute l’attention et de souligner les points de diffé-
rence.
Agressivité passive
L’agressivité passive diffère de l’hypocondrie par le fait que le patient ne
verbalise ni ne formule directement ses besoins et ses désirs. Mais l’absence
de la réalisation de certaines tâches suscite indirectement de l’agressivité
dans son entourage. Dans l’hypocondrie, en revanche, le patient manifeste
sa demande d’aide à ses proches pour la refuser afin d’éviter d’être dépen-
dant d’eux.

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Mécanismes de défense 275

Il est capital que le thérapeute reste fin dans son investigation afin de ne
pas confondre ces deux mécanismes. On observe souvent de l’agressivité
passive dans des contextes relationnels et professionnels hiérarchiques.
Annulation rétroactive
Au cours de l’entretien, il peut arriver de noter des contradictions dans les
propos du patient d’un instant à un autre. Cette situation devra nous amener
à penser à l’annulation rétroactive, qu’il faut distinguer de l’hypocondrie.
Lors de l’exploration de l’annulation rétroactive et dans le but de la diffé-
rencier de l’hypocondrie, il est important de poser des questions pour met-
tre en lumière les différents mouvements de va-et-vient au cours de la dis-
cussion. Le thérapeute finit par soulever les incohérences dans les assertions
ou informations que le patient lui apporte. Il ne s’agit pas d’un trouble de la
pensée ni de discours, plutôt de contradictions verbalisées soit ouvertement
ou subtilement à travers les pensées, les idées et les propos du patient.
Dévalorisation
La dévalorisation se rapproche également de l’hypocondrie. Il arrive que ces
deux mécanismes soient observés conjointement. Le patient qui utilise la
dévalorisation peut faire des critiques négatives, des reproches dénigrants
d’une personne proche. Il ne cherche pas non plus à garder un lien avec la
personne qu’il vient de dénigrer sous prétexte d’obtenir des aides plus tard.
Enfin, le manque d’envie de demander de l’aide est l’élément essentiel qui
permet d’emblée de distinguer ces deux mécanismes.
Dissociation
Il peut arriver que l’on se demande si le patient est en train de recourir à la
dissociation ou à l’hypocondrie. Quelques éléments essentiels permettent
de tirer au clair cette différence :
• d’une part, dans la dissociation, les plaintes ou difficultés sont exprimées
à bas bruit mais s’il s’agit de l’hypocondrie, les plaintes ont une intensité
croissante au risque de devenir insupportables. Le patient cherche de l’aide
et verbalise sa souffrance à ses proches ou au thérapeute ;
• d’autre part, le patient dissocié peut ressentir une douleur ou un besoin
d’aide mais ne pas formuler sa demande contrairement au sujet hypocon-
driaque qui, non seulement a mal, mais demande aussi de l’aide.
Exploration de l’hypocondrie
L’exploration de l’hypocondrie requiert d’être franc et direct dans les ques-
tions que l’on pose au patient. Le thérapeute peut demander par exemple :
« Est-ce qu’il t’arrive de demander de l’aide ou d’aborder tes difficultés
de manière répétée avec les mêmes personnes afin qu’elles te prodiguent
des conseils ? », « Lorsque tu t’adresses à ton entourage, penses-tu que les
autres ont raison quand ils essaient de t’apporter leur assistance ou non ? »,
« Essaies-tu parfois ou souvent de remettre en question les arguments de tes

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276 Status clinique pédopsychiatrique

copains ? », « Penses-tu que ton problème a une solution ? », « Tes douleurs


seront-elles guéries un jour ? », « Penses-tu que ton souci d’inattention
finira un jour ? », « Pourquoi as-tu abandonné ou renoncé à tes demandes
ou aux propositions que t’ont proposées tes enseignants ou éducateurs ? »,
« Souffres-tu de manière récurrente de maladies somatiques que les méde-
cins ou psys n’arrivent pas à soigner ? », « T’arrive-t-il de penser que les
autres refusent volontairement de t’apporter de l’aide ? », « T’arrive-t-il de
rejeter les suggestions des copains, de ta famille ou de tes proches quand
tu as des soucis ? », « Que fais-tu quand rien ne semble aller bien au niveau
de ta formation ou en classe ? », « Peux-tu me parler de tes souffrances
infernales et persistantes que les psys ou les médecins n’arrivent pas à soi-
gner ? », « Pourquoi penses-tu qu’il est impossible que l’école apporte des
solutions à tes soucis ? »

Inflation narcissique
L’inflation narcissique fait référence à la mégalomanie, la toute-puissance,
etc. Elle peut déboucher sur une croyance délirante quand le patient sures-
time ses compétences, ses capacités, ses connaissances, ses moyens, etc. Ce
mécanisme est plus souvent rencontré dans le fonctionnement maniaque.
Lors des entretiens, on peut entendre un patient prétendre que le canna-
bis ne fait du bien qu’à lui seul, contrairement aux autres. D’autres patients
peuvent dire qu’ils estiment être tellement supérieurs ou qu’ils consom-
ment une telle quantité d’air au point qu’ils peuvent empêcher les autres
enfants de la planète de bien vivre.

Intellectualisation
Définition
Au cours des entretiens, le patient recourt à l’intellectualisation pour éviter
de se confronter à ses affects chargés d’angoisse, dans une tentative de maî-
triser ses émotions et ses sentiments. L’intellectualisation est définie comme
un mécanisme de défense qui permet au patient de gérer ses stress ou ses
conflits émotionnels à l’aide des pensées excessives et abstraites.
Le patient reste conscient de ses affects qui le dérangent. Ainsi, il les
exprime soit par une généralisation, soit par une distanciation, soit par
l’emploi de termes impersonnels. Il parle de lui-même comme s’il s’agissait
d’une autre personne. Souvent, ces personnes utilisent la deuxième ou la
troisième personne pour justifier ou décrier ce qu’elles ressentent.
L’intellectualisation fait que le patient minimise l’importance du ressenti.
Il utilise des théories scientifiques pour justifier ses actes et sa position. C’est
souvent le comble des professionnels de santé mentale qui n’arrêtent pas
d’intellectualiser ou de théoriser devant chaque situation. Ceci permet de
diminuer la capacité du thérapeute à s’identifier au vécu du patient, en lui

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Mécanismes de défense 277

disant par exemple : « La plupart des gens sont stressés par nature, c’est
logique que cela m’arrive à moi aussi de temps en temps », etc. Ce méca-
nisme de défense n’est pas seulement l’apanage des professionnels ou des
thérapeutes, tout le monde peut avoir recours à l’intellectualisation.

Mécanismes de défense différentiels


Isolation
L’isolation diffère de l’intellectualisation car elle consiste à détacher,
compartimenter les affects tout en diminuant leur tonalité, ce qui permet
au patient de décrire les détails factuels de son expérience. En revanche,
l’intellectualisation transforme les expériences de l’individu en des généra-
lités. Il emploie par exemple des informations ou affirmations abstraites, se
situe dans la généralisation ou utilise la troisième personne pour son récit.
Projection
L’intellectualisation diffère de la projection par le fait que le patient
conserve indemnes les faits qui se déroulent dans son psychisme. Il attribue
la source ou l’origine de son anxiété ou de son stress à autrui. Le thérapeute a
l’impression que le thème ou la motion pulsionnelle du patient est mobile.
Rationalisation
La rationalisation se rapproche également de l’intellectualisation. La ratio-
nalisation permet au patient d’utiliser des pensées ou explications plau-
sibles pour masquer ses véritables motifs et conflits. À l’inverse, le patient
qui généralise essaie de se dérober du sujet en se référant aux différentes
explications, plausibles ou non.
Le thérapeute sent sa capacité d’empathie diminuée devant un patient
qui est dans l’intellectualisation. En revanche, son attention est détournée
des expériences réelles quand il utilise la rationalisation.

Exploration de l’intellectualisation
On peut se demander si le patient recourt souvent à des explications géné-
rales et moins personnelles lorsqu’il répond aux questions qui portent sur
ses affects, ses sentiments ou ses émotions. Ses réponses sont-elles du style
à éviter les composantes émotionnelles ou sentimentales ?
Est-ce que le patient a tendance à détourner les questions et demande
des explications sur le fonctionnement de ceci ou cela ? Généralise-t-il ses
réponses quand les questions portent essentiellement sur ses états affectifs,
émotionnels ou sentimentaux ? Fait-il un détour sur des considérations
scientifiques pour répondre aux questions ? Utilise-t-il la troisième ou la
deuxième personne ou un temps impersonnel pour justifier ou expliquer les
sentiments devant certains événements de la vie personnelle ou familiale ?
A-t-il des réponses très abstraites ou fait-il des généralisations à la plupart
des questions ?

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278 Status clinique pédopsychiatrique

Introjection
Définition
Certains auteurs définissent l’interjection comme « un processus psychique
fondamental dans le développement psychique de l’enfant, en relation
avec les fantasmes d’incorporation » (Sabourin, 2002). Par cette idée, ce
mécanisme de défense « suppose d’abord un processus possible et suffisant
d’identification projective » (Ciccone, 2019). Le patient s’identifie à l’objet
avant de l’incorporer ou le mettre en lui.
Autrement dit « le terme d’introjection est plus large : ce n’est plus seule­
ment l’intérieur du corps qui est en cause, mais l’intérieur de l’appareil
psychique, d’une insistance, etc. C’est ainsi qu’on parle d’introjection dans
le moi, l’idéal du moi, etc. » (Laufer & Laufer, 1989) Il est intéressant de cher-
cher à comprendre comment s’est faite cette introjection. Qu’est-ce que le
patient a introjecté en lui ? Est-ce que l’introjection a inclus toutes les parties
de l’objet ou il s’agit seulement de certains aspects ou parties de l’objet ?
Le mécanisme d’introjection est intimement proche de celui de la pro-
jection. Freud et plusieurs autres auteurs ont fait ce lien entre l’introjection
et la projection. Il s’agit de deux mécanismes de défense qui sont liés. Plus
encore, « C’est la raison pour laquelle, dans le travail progressif d’internali-
sation propre à la psyché, l’introjection est le temps premier d’un processus
plus complexe menant à l’identification. » (Inonescu et al., 2016).

Exploration de l’introjection
Il est important de se rappeler combien ce mécanisme d’introjection n’est
pas simple ni facile à réaliser pour le patient. L’introjection est différente
de la projection, de l’identification, etc. Dans l’introjection, le patient met
en lui ce qui vient de l’extérieur ou de l’objet. On se demande s’il s’agit
d’introjection de l’objet avec ou sans pores. Ces questions sont très capitales
à rechercher lors de l’exploration. Le thérapeute se demande si le patient a
introjecté des objets apaisants, menaçants, persécuteurs, perturbateurs, dés-
agréables et toxiques, ou la confusion, etc.
L’exploration essaie de vérifier si les éléments introjectés ne contiennent
pas de pores, des fragments, des bribes, les parties fragiles de l’objet, les
insuffisances pour ne pas dire le mauvais objet introjecté.

Isolation des affects


Définition
L’isolation est un mécanisme de défense par lequel le patient sépare l’affect
de sa représentation. Il s’agit de refoulement des affects. L’isolation permet
de garder l’affect éloigné de la conscience du patient car il a l’incapacité de
prendre conscience simultanément des composantes cognitives et affectives
d’une expérience. En faisant cela, il arrive à gérer ses conflits émotionnels.

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Mécanismes de défense 279

Techniquement, on peut dire que lors de l’isolation de l’affect, le théra-


peute entend le patient dire ou évoquer certains affects (la tristesse, la joie,
la colère, la haine, etc.) sans savoir pourquoi il les ressent à cet instant.
Autrement dit, l’isolation de l’affect comme mécanisme de défense permet
la mise à distance des affects menaçants qui sont associés à l’expérience
(angoisse, honte, culpabilité).

Mécanisme de défense différentiel


La différence que l’on trouve entre l’intellectualisation et l’isolation des
affects est que, par l’intellectualisation, le patient recourt de façon excessive
à des généralisations dans une tentative de mettre à distance ses sentiments
ou ses affects. Dans l’isolation, en revanche, l’affect n’est pas directement
associé à une expérience émotionnelle ou à une représentation. Il y a une
notion de mise à distance ou d’un écart non communicant entre les affects
et les représentations ou émotions dans l’isolation.
En revanche, la similitude entre ces deux mécanismes est due au fait que
le patient a conscience de la représentation pendant qu’il a une expérience
réduite de l’affect.

Exploration de l’isolation
En explorant l’isolation, le thérapeute doit se demander si le patient donne
l’impression que ses émotions sont détachées de ses expériences ou de ses
propos. Est-ce qu’en parlant des événements tels que la séparation, l’aban-
don, le décès d’un proche ou d’un animal de compagnie, ses échecs sco-
laires ou son redoublement, ses déceptions, ses ruptures amoureuses, etc., il
ne laisse pas voir, ne montre pas ou ne ressent pas ses émotions ?
A-t-on l’impression que dans son récit ou lors de discussion sur un événe­
ment traumatique ou douloureux, le patient fournit plus de détails, mais
garde ses émotions à distance ? A-t-on l’impression que dans la description
d’une scène lors d’un jeu symbolique, il n’est pas en contact avec ses émo-
tions ou les ignore royalement ?

Rationalisation
Définition
La rationalisation est définie comme un mécanisme de défense par lequel
le patient élabore des explications rassurantes sur son attitude ou comporte­
ment, pour faire face à ses conflits émotionnels, à des stress internes ou
externes. Il essaie d’expliquer d manière rationnelle les actes qu’il pose pour
éviter l’angoisse.

Mécanismes de défense différentiels


Certains mécanismes de défense doivent être différenciés de la rationali-
sation. Il s’agit de l’intellectualisation, du mensonge, de la projection, etc.

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280 Status clinique pédopsychiatrique

Intellectualisation
La rationalisation a pour conséquence de détourner le thérapeute des vécus
réels du patient alors que l’intellectualisation réduit ses capacités d’empa-
thie à son égard.
Mensonge
La notion de conscience ou de l’intentionnalité du patient fait toute la diffé-
rence entre ce concept et celui de rationalisation. Rappelons que le mensonge
est un acte conscient, ce qui n’est pas le cas de la rationalisation. Dans celle-
ci, le patient n’a pas la capacité d’être conscient du motif. Mais le mensonge
est utilisé pour empêcher les autres d’en prendre conscience. Schématique-
ment, on peut dire qu’un menteur sait ce qu’il est en train de raconter aux
gens alors que le patient qui rationalise ne s’en rend même pas compte.
Projection
Dans la projection, le patient n’est pas conscient de ses actions ou des
motifs de ses actes. Dans la rationalisation, bien qu’il utilise des raisons
vraisemblables mais inexactes pour des faits qui le concernent directement,
il ne déplace pas de faits sur les autres. À l’inverse, la projection amène le
patient à attribuer de manière inadaptée le motif de son action à l’autre.

Exploration de la rationalisation
L’exploration de ce mécanisme de défense requiert de rechercher, pendant
que le patient justifie et raconte son histoire, des preuves ou signes d’exis-
tence ou non des motifs conscients ou non dans ses propos. A-t-on l’impres-
sion que les explications des faits qu’avance le patient sont excessives ? Est-ce
qu’il esquive les questions qui portent sur sa responsabilité ou ses défauts,
ses éventuelles erreurs, ses mauvaises actions ou décisions par des explica-
tions concrètes, externes et plausibles ? Donne-t-il l’impression de s’éloigner
dans ses justifications ou explications du pourquoi ceci ou cela ? Perd-il le
thérapeute dans des théories ou explications portant sur les concepts philoso-
phiques (l’amour, la pureté, le climat, idéal, la perfection, etc.) ? Le thérapeute
a-t-il l’impression que le patient le trompe ou le manipule ? Comment jus-
tifie-t-il ses actes ou actions agressives, antisociales ou son irresponsabilité ?
L’exemple le plus fréquent de la rationalisation se situe dans le trouble
obsessionnel compulsif. Le patient qui présente ce trouble donne ou explique
de manière logique et cohérente pourquoi il fait tel ou tel autre geste.

Refoulement
Définition
Freud a décrit le premier ce mécanisme de défense et son rôle dans le déve-
loppement de l’appareil psychique. En fait, lors du refoulement, le patient
disjoint le lien représentation et quantum d’affect et rend la représentation
inconsciente. Le refoulement est un mécanisme central dans la structure
névrotique, caractérisé par le fait que le patient est incapable de se souvenir
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Mécanismes de défense 281

de conflits émotionnels tel que les désirs, sentiments, pensées ou diverses


expériences individuelles ou collectives. Par exemple, lors d’un entretien
le thérapeute note qu’en suivant le récit du patient, ce dernier se perd et
n’arrive plus à se rappeler la suite de son histoire. Cet oubli subit marque la
présence d’un affect refoulé dans l’inconscience.
Un autre patient raconte qu’en écoutant de la musique, tout allait jusqu’à
ce que soudain il se mette à pleurer. Ce récit nous amène à comprendre que
la représentation s’est séparée de l’affect. À l’aide du retour du refoulé, le
patient s’est aperçu émerger ou pris par cet affect. Le fait de pleurer témoigne
du fait qu’il a pris conscience ou a été en contact avec, à ce moment-là, cet
affect de parvenir à sa conscience.
Le retour du refoulé est le moment où remontent à la conscience des
éléments qui étaient inconscients. Ils peuvent être positifs ou négatifs. Le
retour du refoulé est favorisé dans le travail de l’analyse. C’est ce qui se
repère dans un premier temps pour permettre au thérapeute avec le patient
de rechercher l’élément refoulé.
On parle du retour du refoulé « lorsque certaines représentations parvien-
nent à la conscience au cours de la cure analytique et sous l’effet du processus
et des interprétations, elles sont souvent vécues de façon très douloureuse
par le patient, c’est ce que nous appelons alors le retour du refoulé. »
(Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012) Cette notion est capitale et essentielle
à comprendre afin de permettre de faire la part de choses lors des entretiens.

Mécanismes de défense différentiels


Déni
Le refoulement est différent du déni car ce dernier retient à la fois le contenu
affectif et émotionnel en dehors de la conscience. Mais on retrouve un cer-
tain degré de conscience du contenu émotionnel dans le refoulement. Il est
important de distinguer le déni névrotique, psychotique et le refoulement.
Dissociation
Le refoulement peut aussi être différencié de la dissociation étant donné
qu’il est difficile pour le patient de prendre conscience des contenus idéa-
tionnels et émotionnels car son degré de conscience est altéré. En revanche,
le refoulement le maintient hors du champ de l’expérience consciente pour
lui sans l’écarter focalement de la connaissance d’une thématique conflic-
tuelle donnée. Enfin, le patient perd le contact avec la réalité dans la dis-
sociation, ce qui n’est pas le cas lors du refoulement.

Exploration du refoulement
Le patient qui recourt au refoulement donne l’impression qu’il se perd dans
un brouillard. En l’écoutant parler, on a l’impression de déjà-vu. Il nous
laisse soupçonner quelque chose que lui-même est incapable de verbaliser
car sa conscience ou le moi refuse l’accès à l’affect pénible. Il oublie une
période pénible de sa vie, qui est refoulée dans l’inconscient.
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282 Status clinique pédopsychiatrique

Le refoulement se remarque quand le patient commet des lapsus et des


actes manqués. Il peut directement ou non corriger son lapsus. Certains
n’arrivent pas à décrire une réaction émotionnelle, peuvent également se
tromper du sujet de discussion, etc.
Techniquement, le thérapeute se demande si le patient lui répond par
« je ne sais pas » lors d’investigation de ses réactions émotionnelles. Donne-
t-il l’impression de conserver des vagues souvenirs des événements trauma-
tiques ou désagréables ? Peut-il se rappeler les détails ou peut-il garder le fil
rouge d’une discussion chargée émotionnellement ? Arrive-t-il à justifier
ses sentiments, ses émotions ou ses pulsions (haine, colère, tristesse, joie,
peur, désir sexuel, etc.) ? Arrive-t-il au thérapeute d’observer le patient qui
se met à pleurer, à rire, à se vexer ou s’énerver sans raison apparente ? Le
patient peut verbaliser ses incompréhensions vis-à-vis de ses réactions émo-
tionnelles en disant par exemple : « Je ne sais pas pourquoi je m’agace », ou
« Je ne vois aucune raison de pleurer », etc.

Retrait apathique ou refroidi des affects


Définition
Le retrait apathique ou le refroidi des affects est le repli sur soi, la res-
triction des activités extérieures, l’indifférence affective. Selon le DSM-IV
cité par Chabrol, le retrait apathique est considéré comme « une réponse
aux conflits et aux stress par un repli sur soi, une restriction des activités
extérieures et un état d’indifférence affective. On le rencontre aussi chez
les personnalités limites ou psychopathiques ou à l’adolescence où il peut
s’observer par un stress ou un conflit modéré. » (Chabrol, 2005) Le « retrait
apathique est un mécanisme de défense mis en jeu, dans des situations de
grande détresse, par des personnes qui n’ont pas, au départ, de pathologie
mentale (déportées, personnes confrontées à leur mort prochaine ou à celle
d’un proche), on le retrouve aussi comme symptôme de la schizophrénie,
de la dépression, etc. » (Inonescu et al., 2016)

Exploration du retrait apathique


Le thérapeute remarque que le patient refuse de continuer à lutter ou de
se défendre. Certains individus se soumettent aux désirs ou à la volonté
des autres. C’est comme s’ils se laissaient au bon vouloir de la nature. Le
thérapeute essaie de vérifier avec le patient comment il se défend ou défend
sa cause devant ses pairs ou les adultes.

Répression ou suppression
Définition
Ce mécanisme est moins élaboré que le refoulement. Dans la répression, le
patient supprime l’affect de la conscience sans le mettre dans l’inconscience.
Elle est définie comme une défense qui lui permet de gérer les stress et les
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Mécanismes de défense 283

conflits émotionnels en évitant volontairement de penser à des difficultés,


des désirs ou des affects qui le gênent temporairement.
La répression aide le patient à éviter délibérément et temporairement de
penser aux problèmes, souhaits, sentiments ou expériences gênants. Le pro-
blème réprimé n’est pas oublié, il peut être rappelé à tout moment et en
toute conscience. « La répression correspond à une mise à l’écart momenta-
née des problèmes, des désirs ou des affects, et non pas un trait de caractère
comme la tendance à “remettre les choses au lendemain” ou à les “faire
traîner”. » (Perry et al., 2009)
Étant donné que le préconscient permet l’élaboration des rêves chez le
névrotique, il est moins développé et moins efficace chez le psychotique.
Ce mécanisme a une spécificité par le fait qu’il garde délibérément et
momentanément hors de la conscience la représentation et l’affect qui sont
associés à des stress ou des conflits émotionnels.
Mécanisme de défense différentiel
La suppression diffère du refoulement par le caractère conscient du matériel
mis à part comme les désirs, sentiments, pensées ou expériences. Le patient
est conscient qu’il a mis à côté, dans un coin de son appareil psychique,
l’affect qu’il ne veut pas extérioriser. En revanche, le caractère conscient
n’est pas retrouvé dans le refoulement. Dans cette défense, les affects ou
matériel refoulé reviennent sous forme de lapsus, acte manqué, etc.
Exploration de la répression ou de la suppression
L’exploration de la répression permet au thérapeute de quantifier l’angoisse
liée au matériel écarté par le patient. Par exemple, il se met à faire de la
mindfulness pour éviter d’être en contact avec son angoisse.
Certains patients disent par exemple : « Bien sûr que j’étais bouleversé,
mais je savais qu’en attendant, ça s’arrangerait », ou « Quand le prof de
maths a critiqué mon travail devant toute la classe, j’ai pris sur moi, mais
dès demain, je vais m’en expliquer avec lui. »
Par exemple, le patient joue à la dînette entre deux personnes (papa et
maman, enfants ou amis), à un moment, les fourchettes des deux person-
nages se touchent et le patient rougit ou montre une réaction étrange.
Quand le thérapeute s’exclame : « Oh, je vois bien que ces deux-là sont
amoureux ou bien ils vont le devenir ! Regarde comment leurs fourchettes
se touchent à table ! », le patient peut présenter différentes réactions
(tableau 16.1) :
• quand il y a refoulement, il ne reste pas indifférent à la remarque mais
n’arrive pas à en dire plus ;
• quand il y a retour du refoulé, il appuie la remarque associée ;
• quand il y a dénégation, il répond vite par des explications en disant :
« Non, non, au fait ce n’est pas le cas… », « Ce n’était pas ma mère » ; etc. ;
• quand il y a déni, il ne se rend compte ni de la représentation ni de
l’affect qui va avec la scène.
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284 Status clinique pédopsychiatrique

Tableau 16.1. Comparaison des mécanismes de défense, représentations


et affects.
Mécanisme de défense Représentation Affects
Refoulement Absente Présents
Dénégation Présente Absents
Déni Absente Absents
Répression Présente Réprimés

Remarque
La répression est un mécanisme conscient de mise à l’écart de l’affect avec
l’idée de s’en servir sous un autre discours. Le patient met volontairement de
côté ses affects. Il ne refoule pas.

Rêverie autistique ou fantasmatisation autistique


(autistic fantasy)
Définition
La fantasmatisation autistique se rencontre chez le patient qui se réfugie dans
des rêveries éveillées excessives afin de gérer ses conflits émotionnels ou ses
stress. Il peut être conscient de la nature substitutive de la rêverie, mais c’est la
seule façon dont il dispose pour exprimer son besoin de relation gratifiante.
Plus encore, dans la fantasmatisation autistique, un excès de fantasme se
substitue aux relations humaines, à des actes plus efficaces ou à des solu-
tions aux problèmes. Ainsi, « bien que le sujet puisse être conscient du
caractère illusoire du fantasme, le sujet privilégie la rêverie éveillée comme
moyen d’expression de ses désirs et de ses besoins de relations interperson-
nelles » (Perry et al., 2009).
Étant donné que l’une des fonctions capitales de la fantasmatisation autis-
tique est de permettre au patient de gagner des satisfactions substitutives et
momentanées sans être confronté au principe de réalité. Cette solution est
irréaliste car elle ne tient pas compte des contraintes de la réalité dans l’envi-
ronnement externe qui peuvent cependant être perçues par le patient ou son
entourage.

Mécanismes de défense différentiels


Anticipation
L’anticipation est également un mécanisme de défense qui peut prêter à
confusion ou se rapprocher de la fantasmatisation autistique. Mais géné-
ralement, le patient qui anticipe semble mieux s’organiser en se mettant

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Mécanismes de défense 285

à la place de l’objet ou en s’imaginant ses réactions, ses émotions, etc.


en réponse de ses propres agissements (parole, émotions, propos, propo-
sitions, etc.).
Omnipotence
La fantasmatisation autistique s’écarte de l’omnipotence par le fait que
dans ce dernier mécanisme, le pulsionnel pousse à réagir à l’égard de l’objet,
ce qui n’est pas le cas dans la fantasmatisation autistique où le patient à
tendance à se satisfaire lui-même.
Passage à l’acte
Le passage à l’acte est un mécanisme de défense qui se rapproche de la fan-
tasmatisation autistique. Dans le passage à l’acte, le patient pose ou commet
de manière franche des actes ou gestes qui affectent ou qui déstabilisent
verbalement, émotionnellement ou physiquement l’objet. En revanche,
dans la fantasmatisation autistique, on retrouve l’absence de réalisation
concrète des actes du patient.

Exploration de la fantasmatisation autistique


La fantasmatisation autistique est un mécanisme de défense qui aide le
patient à éviter le sentiment d’impuissance. Par exemple, il dit : « Les filles
de mon collège sont vraiment toutes des nulles, je préfère lire une belle his-
toire d’amour que de perdre mon temps avec elles. »
Ainsi, durant l’entretien, quelques éléments peuvent nous orienter.
On se demande si le patient nous donne l’impression d’avoir une tête
vide. Est-il incapable de décrire ce qu’il fait durant ses journées ? Donne-
t-il l’impression d’amplifier la nature des événements, aussi petits soient-
ils, qui surviennent dans ses relations interpersonnelles ? Donne-t-il
l’impression d’être dans la rêverie ? Arrive-t-il à parler ou à décrire ses
activités, ses passe-temps ou ses hobbies, sans se laisser emporter par ses
rêveries ?
Cherche-t-il des supports fantasmatiques dans la lecture, les séries télé-
visées, afin de se satisfaire passivement ? A-t-on l’impression qu’il n’est
pas dans le monde réel ou qu’il entretient une relation amicale avec des
personnes irréelles ou fantasmées ? Est-ce qu’il aborde des obstacles ou des
difficultés dans ses récits ou ses histoires ?

Self-observation ou introspection ou observation de soi


Définition
La self-observation est définie comme une défense qui permet au patient
de faire de l’introspection. Il s’interroge sur ses propres pensées, ses senti-
ments, ses motivations ou ses comportements. Il se voit lui-même comme
il est vu par le thérapeute, et comprend mieux de ce fait les réactions de
l’autre à son égard.

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286 Status clinique pédopsychiatrique

L’observation de soi permet au patient de s’adapter à une situation future.


Il fait des adaptations face aux exigences de la réalité extérieure. On peut
dire alors que grâce à cette défense, il « a une meilleure compréhension de
ses propres affects, de ses désirs, de ses pulsions et de ses comportements,
ce qui lui permet de mieux s’adapter aux exigences de la réalité externe. Ce
mécanisme de défense permet au sujet d’être plus mûr et de mieux gérer les
conflits et les stress. » (Perry et al., 2009)

Mécanismes de défense différentiels


Dévalorisation
La dévalorisation de soi s’accompagne de médisances ou de rabaissement
de l’estime ou de l’image de soi, alors que l’introspection permet au patient
d’avoir une assez bonne compréhension de ce qui se passe en lui sans y
apporter un jugement négatif.
Fantasmatisation autistique
L’introspection diffère de la fantasmatisation autistique par le fait que
le patient réalise ses désirs et ses affects avec les contraintes de la réalité
externe, ce qui n’est pas le cas pour la fantasmatisation autistique. Dans
celle-ci, le patient est plutôt dans l’irréel.
Intellectualisation
Il n’est pas rare d’avoir les deux défenses de manière concomitante. Dans
l’intellectualisation, le patient donne une image floue de lui-même par sa
description erronée faite de termes abstraits, de généralités ou de pseudo-
logiques. Disons en fait que dans l’observation de soi, le patient arrive à
s’autocerner de façon plus claire et nette.
Omnipotence et déni/hypomanie
Dans l’introspection, le thérapeute constate que le patient cherche une vraie
compréhension de lui-même, ce qui n’est pas le cas pour l’omnipotence
et le déni où l’on rencontre une pseudo-connaissance ou compréhension
de soi.

Exploration de l’observation de soi


Le thérapeute doit porter son attention de manière particulière sur les
différentes réactions du patient lors de l’exploration de l’introspection ou
l’observation. Par exemple, le patient dit après l’interprétation du théra-
peute : « Tu as raison, j’y suis allé un peu fort avec lui. »
Techniquement, on y pense quand le patient fait de la réflexion sur lui-
même de manière spontanée. Il peut rebondir sur les commentaires ou
interprétations de son thérapeute. Comment réagit le patient quand on
aborde ses différents conflits émotionnels ? Arrive-t-il à décrire spontané-
ment les aspects clés de sa personnalité ?

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Mécanismes de défense 287

Sublimation
Définition
La sublimation peut se comprendre comme un mécanisme de défense qui
consiste à transformer la pulsion sexuelle interdite en une activité sym-
bolique utile et acceptable socialement. On peut évoquer quelques exem-
ples : l’art, le dessin, la musique, la peinture, le sport, les études, etc. Cette
pulsion peut être encore transformée en une activité ayant une connotation
altruiste ou spirituelle. De cette façon, le patient gère son stress, ses conflits
émotionnels en orientant ses pulsions ou émotions vers des nouveaux
objets admis et valorisés dans l’environnement social.
C’est la symbolisation qui permet au patient d’utiliser l’énergie pulsion-
nelle et de la métaphoriser pour faire autre chose ou une autre activité
admissible par l’autre ou par la société. La sublimation prend des aspects
variables selon les individus, par exemple les adolescents symbolisent en se
mettant à l’écriture de romans, de poèmes, ils cherchent les idéaux et sont
plus actifs dans le militantisme, etc.

Mécanismes de défense différentiels


Altruisme
Il est important de différencier l’altruisme de la sublimation par le fait que
ces deux mécanismes se recoupent dans la manière dont le patient canalise
ses désirs, pulsions et affects dans des activités socialement acceptables.
Dans le but de clarifier encore la différence entre ces deux mécanismes de
défense, le patient fait des activités ou pose des actes qui sont socialement
acceptables : le sujet altruiste fait des activités qui sont plus en faveur de
l’autre tandis que la sublimation ne procure pas dans l’immédiat de l’aide
à personne. La notion de l’immédiateté du plaisir fait la différence entre les
deux mécanismes de défense.
Déplacement
La sublimation diffère du déplacement comme mécanisme de défense par le
fait que le patient déplace des désirs, affects ou pensées sur un autre objet.
Celui-ci a la particularité d’être généralement moins angoissant et moins
conflictuel pour le patient. Dans la sublimation, en revanche, le patient
essaie de faire des activités, des formations ou des productions artistiques
plus acceptables socialement.

Exploration de la sublimation
La sublimation se met en place à l’aube du complexe d’Œdipe. Le travail
scolaire ou parascolaire ou toute autre activité que fait le patient peut
orienter le thérapeute. Par exemple, un adolescent dont les parents sont
séparés et qui vit avec sa mère (italienne, le père étant égyptien), dans le

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288 Status clinique pédopsychiatrique

but de rechercher ce père manquant en famille, oriente son exposé sur


l’islam en Égypte. L’exploration de la sublimation se fait dans l’écoute des
explications que donne le patient sur ses activités. A-t-on l’impression que
ses activités ont une fonction exécutoire et transformatrice de la pulsion
ou de l’affect ?

Mécanismes de défense immatures


(fonctionnement psychotique)
Les mécanismes de défense dits immatures sont l’apanage du fonctionne-
ment psychotique. Certains sont dits physiologiques selon l’âge du patient.
D’autres peuvent être objectivés dans les structures limites ou borderline.
Le thérapeute doit faire extrêmement attention aux différents mécanismes
mis en jeu dans la prise en charge du patient. Voici une liste non exhaustive
de ces mécanismes.

Agressivité passive ou retournement de l’agressivité


contre soi
Définition
Le patient qui utilise l’agressivité passive présente une façade de collabora-
tion et de disposition. Cette situation cache une certaine résistance envers
les autres. L’agressivité passive l’aide à face à ses conflits émotionnels, ses
stress mais en exprimant d’une manière indirecte et dissimulée de l’agres-
sivité envers les autres. Pour le dire autrement, « l’agressivité passive sur-
vient souvent lorsque les désirs et les attentes du sujet, ou ses besoins
de bien-être et de sécurité, ne sont pas réalisés en raison de l’attitude
de l’autre ou des autres. Ceci sans tenir compte du fait que le sujet ait
exprimé ou non ses désirs. Ce terme inclut le concept de “retournement
de l’agressivité contre soi”. » (Perry et al., 2009) À travers ce mécanisme,
le patient exprime indirectement et sans conviction une agressivité envers
les autres. D’une manière indirecte, voilée et sans assurance, il décharge
ses sentiments hostiles ou vindicatifs. En exprimant ses besoins ou senti-
ments directement envers quelqu’un en position de pouvoir ou d’autorité,
il s’attend à être puni ou frustré. Il obtient de manière retardée une satis-
faction à ses besoins.
Le patient exprime son ressentiment d’une manière passive et ses
attentes sont plus prononcées dans les relations de pouvoir hiérarchique. Il
s’exprime par une prise de position passive, une revendication non verba-
lisée ouvertement ou de la procrastination. Par exemple, il dit : « Eh bien,
j’ai oublié de faire mon devoir de français dans les délais, mais en même
temps, on était plus nombreux à le remettre en retard. J’étais occupé à finir
d’autres tâches. »

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Mécanismes de défense 289

Mécanismes de défense différentiels


Déplacement
Ce mécanisme de déplacement diffère de l’agressivité passive par le fait que
le patient exprime et déplace son agressivité vers un autre objet ou contre
une fausse incitation. En revanche, dans l’agressivité passive, le patient ne
change pas d’objet. Ce sont toujours les mêmes objets qui sont concernés
par son agressivité, même si elle est exprimée passivement.
Hypocondrie
Entre l’agressivité passive et l’hypocondrie, la différence se remarque par
la manière dont le patient exprime ou fait savoir son malaise, fait ressortir
sa tension interne ou son malentendu. Dans l’agressivité, il manifeste indi-
rectement ses demandes d’aide et d’attention, comme les désirs et les sen-
timents, par des comportements indifférents ou acharnés, inintelligents ou
de procrastination. À l’inverse, dans l’hypocondrie, il verbalise sa demande
d’aide ouvertement sous forme de plaintes ambivalentes et de rejet de l’aide
proposée.

Exploration de l’agressivité passive


Au cours de l’exploration de l’agressivité passive, le thérapeute demande
au patient : « As-tu l’impression de négliger de faire certaines tâches ? »,
« Travailles-tu d’arrache-pied ou de manière acharnée sans aucune raison
valable ? », « Est-ce que ton entourage te reproche d’être quelqu’un qui
procrastine souvent ? »
« Collabores-tu avec tes professeurs ou ta maîtresse tout en sachant que tu
camoufles ta colère envers eux ou elle ? », « As-tu l’impression de faire sem-
blant pour t’éviter des punitions ou des malentendus en classe ? », « As-tu
souvent l’impression d’être agaçant dans ton travail ou quand tu exécutes
les ordres des adultes ? », « Est-ce qu’il t’arrive d’être une ou plusieurs fois
en retard ou de dépasser une heure fixée par l’éducateur, la maîtresse, le
pédiatre, etc. ? »
« Demandes-tu de l’aide aux autres dans les temps ou avec un retard ? »,
« As-tu constaté qu’il t’arrive de te torturer sans une raison valable ? »,
« Ressens-tu de la colère contre toi-même et même si tu n’es pas à son origine ? »,
« T’est-il arrivé de te mettre en échec pour faire savoir aux autres que tu
n’étais pas d’accord avec eux ? », « As-tu l’impression de poser des actes ou
d’avoir des comportements qui te rabaissent toi-même face à la sollicitation
de tes amis, tes copains, tes frères, ta sœur, tes parents ou collègues ? »

Démantèlement
Le démantèlement comme mécanisme de défense est retrouvé ou très utilisé
par les personnes souffrant d’autisme. Cette défense consiste dans la désorga-
nisation des modalités sensorielles. Afin de lutter contre son anéantissement,

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290 Status clinique pédopsychiatrique

le patient monte une forteresse très redoutable. Les perceptions passent par
les canaux sensoriels (visuel, auditif, cénesthésique, kinesthésique, etc.). Dans
l’objectif d’éviter d’être envahi par les angoisses, le moi du patient démantèle
les flux sensoriels. Les canaux sont sélectionnés préférentiellement pour éviter
le trop-plein d’informations qui risque de dépasser les capacités de contention
du moi.

Clivage de l’objet ou splitting


Définition
Le clivage de l’objet est évoqué quand le patient classe les objets en bons
et en mauvais. Il idéalise l’objet ou le déprécie alternativement. C’est le
dédoublement des imagos. Il y a là contradiction entre les points de vue,
les attentes, les sentiments envers l’autre, ce qui perturbe la construction
réaliste et cohérente de l’image de l’autre, d’où des avis extrêmes. Le patient
agit de façon tout aussi imprévisible envers l’autre car il pense ou croit avoir
été classé ou catégorisé par lui comme positif ou négatif, bon ou mauvais,
méchant ou gentil, sage ou turbulent, etc.
On observe chez le patient qui est dans le clivage de l’objet le développe-
ment de relations constituées sur la base des fausses appréciations. « L’objet,
et au-delà le monde, est scindé en deux parties disjointes. L’une est porteuse
des bons aspects de l’objet, sur lesquels le sujet peut s’appuyer, et l’autre
renferme les mauvais aspects. » (Roussillon, 2018)
Plus encore, lors du clivage de l’objet, le patient n’a pas encore élaboré la
position dépressive de Mélanie Klein. Dans le jeu symbolique, le patient dis-
tingue deux groupes : les bons policiers et le méchant voleur, ou les animaux
méchants qui dévorent les faibles, les petits ou les gentils. « Il est incapable
de concilier ces différences pour les intégrer dans des représentations cohé-
rentes et réalistes des autres. Comme les images des autres se divisent en des
représentations opposées et tranchées, le sujet ne peut prendre en considé-
ration qu’un des deux aspects contradictoires de l’objet. » (Perry et al., 2009)
Enfin, le clivage de l’objet correspond au dédoublement des imagos
parentales du patient. Son moi n’est pas coupé mais déformé, alors que
l’objet est scindé en deux : une partie bonne, porteuse des bons aspects
de l’objet sur lesquels le sujet peut s’appuyer, et l’autre qui renferme les
mauvais aspects. Il s’agit, comme dit plus haut, de la non-élaboration de la
position dépressive de Mélanie Klein.

Mécanismes de défense différentiels


Il est essentiel de faire attention de ne pas confondre le clivage de l’objet
et les autres mécanismes de défense qui lui ressemblent. Qu’il s’agisse du
clivage du moi, de l’annulation rétroactive, de la dévalorisation ou de l’iden-
tification projective, le thérapeute doit essayer de poser des questions ou
alors bien observer le patient pour juger le mécanisme auquel il est question.

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Mécanismes de défense 291

Annulation rétroactive
Le mécanisme d’annulation rétroactive fait que le patient prend en considé-
ration les représentations et les aspects contradictoires de l’objet, alors que
dans le clivage, il est incapable de les concilier et de les incorporer.
Clivage du moi
On note ce mécanisme chez le patient qui n’arrive pas à pointer la propre
contradiction de sa pensée malgré l’étayage du thérapeute. Le patient
répond au problème en considérant soi ou autrui comme tout bon ou tout
mauvais. Il a du mal ou ne parvient pas à intégrer ses propres qualités et
défauts, ni ceux des autres (voir point suivant).
Roussillon dit en effet que le clivage du moi est un mécanisme par lequel
le patient met à distance ou hors de lui les événements ou les histoires qui
n’ont pas été subjectivés ou symbolisés. Ces informations sont en état brut.
« Dans cette forme de clivage, le patient se désengage, se retire de l’expé-
rience qu’il laisse en jachère jusqu’à l’éventualité d’une rencontre avec un
objet et un dispositif qui lui permettront de retracer le tissu de sa vie psy-
chique. » (Roussillon, 2018)
Dévalorisation ou mépris de l’objet
Dans le clivage de l’objet, le patient scinde ou classe les autres en bons
et mauvais objets, alors que dans la dévalorisation il énonce des critiques
ou des commentaires négatifs afin de dénigrer, dévaloriser les qualités de
l’objet.
Identification projective
Contrairement au clivage de l’objet et du moi, lors de l’identification pro-
jective, le patient impute les altérations des sentiments, des affects ou des
désirs aux autres.

Exploration du clivage de l’objet


Le clivage de l’objet s’observe également dans le jeu symbolique du patient.
En fait, certains patients mettent spontanément d’un côté les animaux ou
personnages qu’ils nomment comme étant des méchants, et de l’autre côté,
les gentils. Le patient qui clive ses objets a du mal à apercevoir les deux faces
de l’objet. Donne-t-il l’impression de dire une chose et son contraire d’un
instant à un autre ? Donne-t-il l’impression de se contredire sans arrêt ou
qu’il croit en une chose et son opposé ? Se décrit-il devant les autres comme
quelqu’un de « tout bon » ou « tout mauvais », « tout gentil » ou « tout
méchant », etc. ? « Comment peux-tu me décrire ton ami, tes parents, ta
maîtresse ? », « Peux-tu faire un lien ou établir une relation entre les deux
images ou descriptions de ton père ? »
Le thérapeute essaie de voir comment réagit le patient devant une
confrontation. Est-ce qu’il résiste quand on essaie de le confronter à ses
contradictions ? Arrive-t-il à tirer des conclusions claires sur ses pairs à partir

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292 Status clinique pédopsychiatrique

de leurs comportements ? Peut-il admettre l’importance ou la signification


de ses actions ou de ses propos par rapport à ses propres contradictions dans
la description des autres ?

Clivage du moi
Le clivage est un mécanisme assez puissant qui opère soit du côté de l’objet,
soit du côté du moi. Il est très difficile pour le patient d’admettre ces deux
réalités et l’unique moyen de les faire coexister est de cliver.
Ce mécanisme présente des bénéfices, contrairement à ce que l’on peut
toujours s’imaginer. Nous dirions que « grâce à la capacité de discrimination
et d’attention qu’il établit, le clivage permet l’organisation des émotions,
des sensations et des pensées ou encore des objets, condition préalable à
tout processus d’intégration et de socialisation » (Inonescu et al., 2016).
Le clivage du moi peut être défini comme une opération qui sépare ou
qui divise le moi sous l’influence angoissante d’une menace, afin de faire
cohabiter les deux parties. Le patient qui a un clivage du moi commet des
contradictions dans ses propos sans s’en rendre compte. Le clivage du moi
requiert une écoute particulière, comme tous les mécanismes de défense.
Le thérapeute devrait en tenir compte.
En effet, le clivage du moi est un mécanisme de défense par lequel le moi
du patient se divise en deux parties. L’une reste en contact avec la réalité
que le patient partage avec l’objet, et l’autre est plus concernée par le délire,
qui est une construction, une autre réalité propre au patient. « Cette opé-
ration défensive protège le moi contre l’angoisse de morcellement : le moi
se casse pour tenter d’éviter sa propre disparition » (Roussillon, 2018). On
retrouve une néoréalité que se crée le patient. Le moi du patient est clivé,
il peut se contredire dans une phrase sans s’en rendre compte et malgré
l’insistance du thérapeute.

Remarque
Le clivage au moi est un autre mécanisme de défense qui est différent du
clivage du moi. Grâce à ce mécanisme, le moi du patient met à distance les
aspects de son histoire qui n’ont pas été subjectivés. « Cette partie clivée est
en attente de symbolisation pour être intégrée au moi » (Roussillon, 2018).

Déni psychotique des affects


C’est le refus de reconnaître un fait réel existant. Le patient nie la réalité
même de la perception. Il réalise une négation de la réalité des perceptions
sensorielles objectives. Ce déni intéresse habituellement des faits doulou-
reux de la réalité. Ce mécanisme de défense est retrouvé dans les structures
borderline, perverses et psychotiques.

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Mécanismes de défense 293

Autrement dit, le déni est un mécanisme de défense que le moi du patient


peut utiliser pour lutter contre les angoisses de perte ou d’abandon. La
partie, la réalité, l’objet ou l’élément qui est concerné par le déni est totale­
ment hors champ de perception du patient. Cet élément ou objet dénié
n’existe plus pour lui.
Quand le thérapeute dit au patient : « Je pense que ça doit être difficile
pour toi d’avoir un nouveau thérapeute et te retrouver dans un bureau
changé ! », celui-ci répond : « Non, ce n’est pas ça, ça va ! »

Dévalorisation ou mépris de l’objet


Définition
La dévalorisation est un mécanisme de défense défini par le fait que le
patient attaque l’objet directement en attribuant des « qualités » exagéré-
ment négatives soit à lui-même, soit aux autres.
Le thérapeute note que le patient tient, dans le but d’améliorer l’estime
de soi, des propos ou des affirmations dévalorisantes, sarcastiques sur lui-
même ou sur les autres. Par exemple, en cherchant à savoir pourquoi il
a arrêté de voir un précédent thérapeute, le patient répond que de toute
façon, personne ne peut aller voir ce thérapeute-là, car il est nul. « Vous
savez, je me demande pourquoi il s’appelle psychothérapeute. Il n’a pas
d’empathie envers ses patients. », « Il est vraiment nul, ce prof de gym, il
nous fait courir ou sauter au lieu de nous donner de vrais exercices. »

Mécanismes de défense différentiels


Clivage
Dans le clivage, le patient aborde ou évoque ses vulnérabilités ou les aspects
négatifs de ses images de soi, tandis qu’il a tendance à présenter une image
invincible de soi dans la dévalorisation de l’objet.
Omnipotence
La dévalorisation est l’inverse de la toute-puissance ou de l’omnipotence dans
lesquelles l’objet n’est pas pris en compte directement. Dans la dévalorisation
ou le mépris de l’objet, le patient dénigre, méprise ou attaque directement
l’objet. Alors que lors de l’omnipotence, le sujet met en exergue ses qualités,
ses prétendues forces ou points forts dans le but de rester supérieur à l’autre.
Projection
La projection ne doit pas être confondue avec le mépris de l’objet. Dans la
projection, on observe la forte relation ou un lien entre le patient et l’objet
de projection, ce qui n’est pas du tout le cas dans la dévalorisation.

Exploration de la dévalorisation
Certains patients ont tendance à dévaluer ou rabaisser les pairs ou les
adultes qui les encadrent dans leurs diverses activités. Le thérapeute se

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294 Status clinique pédopsychiatrique

demande si le patient se dévalorise ou dévalorise souvent les autres. Uti-


lise-t-il son humour de manière caustique ou sarcastique ? Dénigre-t-il
ses pairs ? Utilise-t-il des termes obscènes ou se permet-il de laisser des
commentaires dénigrants ou des jugements négatifs contre les autres ?
Ses propos contiennent-ils des obscénités flagrantes ? A-t-on l’impression
qu’il a tendance, plusieurs fois au cours des entretiens, à se dévaluer ou
se traiter de stupide, de nulle, de bon à rien, d’incompétent, etc. ? Se
compare-t-il aux autres très souvent ou se remet-il en question par rapport
aux compétences de ses pairs ? Est-il en mesure de dire des choses ou
des compliments agréables aux autres ? Est-ce que ses propos sont peu
favorables ?

Idéalisation de l’objet
Définition
L’idéalisation de l’objet peut être définie par le fait que le patient peut évo-
quer des relations réelles ou prétendues avec d’autres personnes ou objets
quand ils sont puissants ou importants pour lui. Il arrive qu’il soit conscient
des défauts ou imperfections de l’objet, mais il les ignore et reste dans l’idéa-
lisation complète.
L’idéalisation est la source de gratification et de protection contre les
sentiments d’insignifiance, d’impuissance, de nullité, etc. Le fait marquant
dans l’idéalisation de l’objet est que le patient s’attribue ou attribue à
l’autre des qualités exagérées. Il met l’objet à un niveau plus élevé que tout
le reste.
La principale fonction de l’idéalisation de l’objet serait de permettre
au patient de « décrire des relations réelles ou imaginaires avec les autres
(y compris des institutions, des systèmes de croyance, etc.) qui sont impor-
tantes, puissantes, vénérées, etc. » (Perry et al., 2009) Par exemple, un
patient dit que le meilleur ami de son frère est le plus intelligent de tous les
élèves du collège, un autre que son médecin cardiologue est le plus expert
de tous les médecins de sa ville.

Mécanisme de défense différentiel


Dans le clivage, le patient n’arrive pas à intégrer les différents aspects
contradictoires des images de soi ou de l’objet dans des représentations
matures et cohérentes, ce qui n’est pas le cas dans l’idéalisation. Il semble
plus facile pour le patient qui est dans l’idéalisation de l’objet de tenir des
propos très qualifiants vis-à-vis de l’objet tout en sachant combien cet objet
n’est pas parfait. Celui qui est dans le clivage a du mal à rassembler les deux
parties ou les deux facettes de l’objet.
En fait, dans l’idéalisation de l’objet, on souligne le fait que le patient
est incapable de prendre conscience des défauts ou des erreurs de l’objet.
Il considère et se représente cet objet comme bon et sans défaut, contraire-
ment au clivage où il considère l’objet selon le côté pile ou face.
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Mécanismes de défense 295

Exploration de l’idéalisation
Techniquement, l’exploration de l’idéalisation de l’objet prend en compte
les propos du patient. Celui-ci peut laisser entrevoir une idéalisation dans
l’exagération des aptitudes ou qualités de l’objet. Le thérapeute vérifie s’il
parle d’une personne tierce de manière exaltante ou exagérée.
A-t-on l’impression que le patient loue les exploits d’une personne en parti-
culier ? Comment critique-t-il ou parle-t-il des réalisations, des qualités, des
compétences, etc. de l’autre ? Est-ce qu’il parle d’un proche ami de manière
extraordinaire ? Utilise-t-il des superlatifs quand il parle d’une personne en
particulier ? A-t-on l’impression qu’il parle d’une relation très intime ou
proche avec une personnalité sans que cette dernière soit réellement au cou-
rant de ce lien ? Pense-t-il que la personne spéciale, importante ou puissante
de la ville (maire, préfet, directeur de l’école, doyen de l’école, député, entraî-
neur ou sportif de haut niveau, etc.) lui fera des cadeaux ou des faveurs ?

Identification
C’est le fait d’adopter un aspect ou une attitude d’une autre personne. Ce
mécanisme de défense joue un rôle fondamental dans la construction de
la personnalité et en particulier du surmoi de l’enfant qui se met en place
par identification aux parents. L’identification est un mécanisme par lequel
le patient « s’approprie les qualités d’autrui et vise un enrichissement du
moi » (Inonescu et al., 2016).
L’identification peut donner une idée sur l’idéal du moi ou le moi idéal du
patient. Comment fait-il des rapprochements entre l’image de la personne
idéalisée et lui-même ? Certains, par exemple, s’identifient à leur idole :
professeur, star de la musique, gameur, youtubeur, influenceur sur internet,
etc. Il s’agit d’une identification avec l’objet idéalisé sur le plan narcissique.
L’identification à l’agresseur est une variante du mécanisme principal
d’identification. Lors des entretiens, le thérapeute peut se rendre compte
que le patient s’identifie à l’agresseur. Dans ce cas, il commet des actes
d’agression verbale ou des actes agressifs ou délictueux envers l’objet. Il
arrive que les patients s’identifient aux victimes. L’identification fait appel
à la qualité de la conception du self et au soi du sujet.
Ce mécanisme, comme dit ci-dessus, peut être retrouvé chez un patient
abusé dans son jeune âge qui devient abuseur de ses pairs à l’école primaire,
au collège ou au lycée. Le patient qui était harcelé à l’école peut devenir un
harceleur ou rester dans la position de victime bien qu’il change d’école ou
qu’il soit devenu plus grand.

Identification projective
Définition
L’identification projective consiste en la communication, en direction
d’autrui, des états affectifs et émotionnels du patient qui se débarrasse du
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296 Status clinique pédopsychiatrique

contenu mental intolérable en le projetant dans un objet. Par ce mécanisme


de prise de possession d’un objet extérieur, le moi transforme l’objet en
extension de lui-même. Le patient « peut être pénétré par l’objet de la
même façon qu’il fantasme de le pénétrer et de le contrôler de l’intérieur.
En ce sens, les angoisses d’intrusion forment le résultat d’un renversement
actif-passif. » (Roussillon, 2018)
Ce mécanisme s’explique par le fait que le patient a l’impression que la
représentation qu’il a de l’affect ou de la pulsion lui vient de l’autre, alors
qu’il en est lui-même à l’origine. Ainsi, le patient a une autre compréhen-
sion de la succession des événements qu’il est en train de vivre ou de traver-
ser. En d’autres mots, l’identification projective est un moment de détresse
psychique où il « s’appréhende comme étant la victime légitime plutôt que
comme la victime “innocente” » (Perry et al., 2009).
Le patient éprouve un sentiment ou un affect qu’il juge inacceptable et
qu’il attribue à quelqu’un d’autre, comme si cette personne en était réel-
lement à l’origine ou la cause. Il ne désavoue pas le vécu dont il reste
conscient. « L’identification projective consiste à investir et explorer un
espace mental, à transmettre et déposer les émotions incontenables, à explo-
rer la vie émotionnelle dans l’espace mental d’un autre. » (Ciccone, 2019)
Le mécanisme d’identification projective est retrouvé le plus souvent chez
les patients traumatisés. Lors de la réactivation du traumatisme par une
situation menaçante, le sujet vit un sentiment d’impuissance et y répond
par l’attaque et en justifiant ses actes.

Mécanismes de défense différentiels


Passage à l’acte
On peut dire globalement que le passage à l’acte vient de l’identification
projective. Mais plus spécifiquement, on retrouve la colère et la peur de
représailles comme affects originels. Elles peuvent être induites par les
comportements perturbés du patient.
Projection
Il semble très essentiel de souligner la différence entre l’identification pro-
jective et la projection. En fait, bien que l’on ait de la projection dans l’iden-
tification projective, toute la différence réside sur le caractère conscient ou
non de la présence d’affect, d’émotion ou de pulsion que le patient attribue
à l’objet pour justifier ses actes, ses actions, ses propos, etc.
Autrement dit, nous comprenons que « lors de projection, les processus
sont moins confusionnels, car le sujet possède une image stable des repré-
sentations qui sont niées et projetées sur le monde externe. En cas d’identi-
fication projective, les représentations subissent des modifications globales
qui deviennent les supports des processus projectifs et de leurs sentiments
de culpabilité subséquents. » (Perry et al., 2009)

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Mécanismes de défense 297

Exploration de l’identification projective


Le thérapeute peut observer les réactions ou les justifications que lui donne
le patient en voulant justifier ses actes ou ses actions. On recherche volon-
tiers la présence de cette conscience chez lui.
Pour élucider comment fonctionne ce mécanisme de défense, voici cet
exemple : un patient qui a fait une bêtise (écrire sur le canapé ou laisser ses
jouets partout au salon), dit à sa mère, en la voyant préoccupée et fatiguée
de sa longue journée pénible de travail : « Je suis sûr que tu es en colère
contre moi après le mal que je t’ai fait (je ne t’écoute pas), mais tu m’avais
vraiment agacé (quand je me suis retrouvé à la maison tout seul après
l’école), ainsi je me suis mis à écrire ou gribouiller sur le canapé. »
Techniquement, le thérapeute peut poser les questions suivantes :
Le patient donne-t-il l’impression de craindre les réactions du thérapeute
ou de ses pairs s’ils arrivaient à connaître ses pensées ? Semble-t-il mal à
l’aise ou énervé en abordant certains thèmes qui peuvent potentiellement,
selon lui, faire fâcher le thérapeute ? Se montre-t-il indisposé s’il exprime un
sentiment qu’il essaie de se mettre à l’écart ? Pense-t-on que sans avoir envie
de rationaliser ses propos et ses comportements, il vous montre des diffi-
cultés à distinguer ses propres sentiments de ceux des autres ? Est-ce qu’il
se fâche en abordant ou en se plaignant des attitudes ou comportements
négatifs faits à son égard ? Se montre-t-il en colère en parlant de ses pairs ?

Omnipotence
Définition
L’omnipotence est définie comme un mécanisme de défense par lequel le
patient développe une image de soi toute-puissante supérieure aux autres par
sa capacité d’auto-attribution pour gérer conflits émotionnels ou ses stress.
Plus simplement, ce mécanisme de défense permet au patient de gérer ses
problèmes en se comportant de manière supérieure aux autres, ou comme
s’il possédait des capacités ou des pouvoirs supérieurs à ceux des autres.
L’omnipotence protège contre la perte de l’estime de soi. Ce mécanisme
peut s’exprimer lorsque le problème provoque des sentiments de déception,
de dévalorisation, d’impuissance, de nullité, etc. Cette stratégie minimise
subjectivement ces affects au prix d’une déformation positivante mais exagé-
rée, limite puérile, des représentations de soi. Le patient répond par exemple :
« Je suis capable de résoudre n’importe quel problème », « Je peux tout faire. »

Mécanismes de défense différentiels


Clivage
Il convient très particulièrement de noter que le clivage peut apparaître
avec l’omnipotence dans un entretien. Le patient qui est dans le clivage
n’arrive pas à concilier les deux parties de l’objet alors que lorsqu’il est dans

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298 Status clinique pédopsychiatrique

l’omnipotence, la conciliation de deux facettes ou de ces deux blocs de


qualités de l’objet lui permet d’asseoir ou de laisser entendre sa puissance
ou sa supériorité face à l’objet.
Formation réactionnelle
Le thérapeute doit être très attentif quand il observe la présence d’omnipo-
tence et de formation réactionnelle. Dans l’omnipotence, le patient met au-
devant de la scène son image de soi très valorisée et amplifiée. En d’autres
termes, la différence majeure à poser entre ces deux mécanismes de défense
est que « l’omnipotence se rapporte plus à l’estime de soi et la formation
réactionnelle aux relations envers les autres » (Perry et al., 2009).

Exploration de l’omnipotence
Techniquement, le thérapeute arrive à distinguer l’omnipotence d’autres
mécanismes à l’aide de différentes questions qu’il se pose ou pose au patient.
Est-ce que le patient donne l’impression qu’il exagère plus ses capacités, ou
donne-t-il de l’importance démesurée sur son influence personnelle sur le
cours des événements ordinaires, alors que le thérapeute n’y croit pas ? Uti-
lise-t-il le plus souvent une expression telle que : « Je suis capable de réaliser
tel projet. Laisse-moi seul m’occuper de ce travail, car je peux tout faire » ?
Donne-t-il l’impression de se vanter ou de vanter ses mérites ? A-t-il
tendance à surenchérir ou surajouter des faits dans ce qu’il raconte (par
exemple : « J’ai beaucoup de copines, je peux avoir des rapports sexuels
sans me fatiguer » ou « Nous, les Brésiliennes, sommes très sollicitées car
nous savons danser, et moi je danse mieux que tout le monde à l’école.
D’ailleurs, pendant les rapports sexuels, je ne m’épuise pas aussi vite que les
autres filles non brésiliennes »). Certains patients racontent par exemple :
« Je peux consommer une bouteille de vodka et de la cocaïne et tenir debout. »
Les propos du patient paraissent-ils délirants quand il dit par exemple :
« J’ai des superpouvoirs, je suis le plus intelligent de ma classe, etc. » ?

Passage à l’acte ou acting-out


(troubles du comportement)
Définition
À travers le passage à l’acte, le patient commet des actes ou a un comporte­
ment inadéquat vis-à-vis des mœurs de son entourage. Ce mécanisme de
défense se laisse voir chez le patient qui a des difficultés à gérer ses pro-
blèmes. D’autres patients, en revanche, sous l’effet de stress, d’émotions
pénibles, posent des actes sans réfléchir et sans considérer leurs consé-
quences négatives. L’individu a un comportement inadapté par le fait qu’il
n’arrive pas à réduire son conflit interne.
En guise d’exemples, le patient peut raconter : « Mes parents m’ont telle-
ment énervé, j’étais en colère, que j’ai pris le premier bus et je me suis

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Mécanismes de défense 299

retrouvé au terminus », « Ma petite copine m’a dit des choses odieuses, je


me suis fâché avec elle et j’ai cassé ma tablette », « Je me suis conduit de la
sorte car c’était sa faute, il ne devait pas me tenir des tels propos, il n’arrêtait
pas de me provoquer… ».
Ce mécanisme de défense permet d’exprimer ou d’évacuer des sentiments
ou des pulsions au lieu de les supporter et de devoir réfléchir aux événe-
ments pénibles qui les stimulent.
Mécanismes de défense différentiels
Dissociation
Ce mécanisme diffère du passage à l’acte par le fait que le patient n’a pas
conscience de ses affects ou impulsions. On rapporte peu d’actes criminels
ou dangereux chez les patients dissociés. La différence entre le pendant et
l’après-dissociation est flagrante, le patient n’arrive pas à croire à ce que lui
dit son entourage à propos des actes qu’il aurait commis. Il n’est pas en train
de nier les actes, il semble plutôt étonné. A contrario, dans le passage à l’acte,
le patient peut dire avoir été hors de lui lors de ses actes ou impulsions.
Identification projective
L’identification projective est différente du passage à l’acte. Dans le pas-
sage à l’acte hétéroagressif, le patient peut par exemple projeter dans l’objet
l’affect ou l’émotion à laquelle il s’est identifié.

Exploration du passage à l’acte


Le thérapeute qui explore le passage à l’acte recherche techniquement
comment le patient réagit devant une frustration, une tension interne ou
un stress externe. Comment gère-t-il ses impulsions auto et hétéroagres-
sives ? Arrive-t-il à se contrôler devant une déception interpersonnelle ?
Exprime-t-il son désaccord à travers des comportements impulsifs ? Fait-il
souvent des surdoses, des scarifications, des conduites dangereuses, de mul-
tiples hospitalisations, des changements de classe, de lieux de formation
professionnelle ? A-t-il d’énormes difficultés relationnelles ?
On peut demander au patient par exemple : « Pourquoi as-tu fait cet acte-
là ? », « Pourquoi as-tu dit cela ? », « Qu’est-ce qui t’a poussé à répondre à la
maîtresse ou aux adultes de l’école ? », « Comment réagis-tu quand les gens
te stressent ? », « Pourquoi as-tu changé d’école ou de classe chaque fois ? »,
« Peux-tu te contrôler quand tu es stressé ou quand les autres te menacent ? »,
« Qu’est-ce que tu n’aimes pas dans ta vie et quelle en est la raison ? »

Projection
Définition
La projection est définie comme le fait d’imputer à une autre personne des
sentiments ou des pulsions inacceptables. Dans sa lutte contre l’angoisse,
le patient décharge ou évacue sa tension intérieure en l’attribuant à l’objet.

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300 Status clinique pédopsychiatrique

C’est dans cet objectif qu’il peut dire, par exemple, qu’il déteste quelqu’un
car il se sent persécuté par lui.
En fait, lors d’une projection, la représentation est d’abord déliée de ses
quantums d’affect. Cette représentation est ensuite transformée par retour-
nement, elle est enfin projetée au-dehors et fait un retour vers le patient. La
projection signe un échec plus ou moins profond du refoulement en trans-
formant un danger intérieur en danger extérieur.
Ce mécanisme fausse les rapports avec autrui. Il peut entraîner des diffi-
cultés relationnelles.
De façon non pathologique, on recourt à la projection dans la supers-
tition, la mythologie, l’animisme, etc. Le patient paranoïaque l’utilise de
manière excessive. On constate que ses pulsions de haine sont projetées sur
les autres qui deviennent des persécuteurs.
Enfin, insistons sur le fait que la projection est un mécanisme roi à l’ado-
lescence. Il est considéré comme physiologique à cet âge. Ainsi, elle ne
permet pas de trancher entre le normal et le pathologique. « La projection
non hallucinatoire permet su sujet d’éviter de se confronter directement
avec des émotions et des mobiles qui le rendent trop vulnérable (surtout la
honte ou l’humiliation) au cas où il admettrait leur présence en lui-même »
(Perry et al., 2009).

Mécanismes de défense différentiels


Dévalorisation
La distance émotionnelle ou affective établit une différence entre les deux
mécanismes sans oublier la notion clé d’investissement de l’objet par le
patient dans la projection. A contrario, dans la dévalorisation, le patient
déprécie constamment l’objet et ne cherche pas à garder un lien avec lui.
Identification projective
La projection diffère de l’identification projective par l’existence de pro-
cessus d’interaction entre le patient et l’objet. Dans la projection, il dés-
approuve le contenu projectif et dans l’identification projective, son affect
originel est projeté sur un objet en lui attribuant à tort son origine.
Rationalisation
Le patient qui utilise la rationalisation ne dément pas son rôle dans les
événements même s’il a tendance à le présenter sous un jour favorable,
tandis qu’en cas de projection, il réfute son propre rôle et évite d’en prendre
conscience comme de s’y confronter.

Exploration de la projection
Lors de l’exploration de la projection, le thérapeute se demande s’il a
l’impression que le patient est continuellement concerné par les intentions
ou les sentiments de ses pairs ou d’autres personnes autour de lui.

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Mécanismes de défense 301

Le thérapeute se demande si le patient porte des commentaires sarcas-


tiques sur les autres. Se montre-t-il agressif ou en colère, impuissant ou
manipulateur à l’égard de son entourage ? Quelle critique fait-il souvent à
l’égard des autres ? Considère-t-il que ses pairs ne sont là que pour lui faire
mal ou pour le nuire ? Le patient peut dire par exemple : « À l’école, toutes
les filles sont contre lui, sauf les garçons. »
Fait-il confiance aux autres ? Aborde-t-il son vécu avec de l’amertume,
de la tristesse, un sentiment d’injustice ou un ressentiment ? Pense-t-il que
son malheur, son échec, sa déception, sa ruine sont causés par les autres ?
Pose-t-il des questions qui laissent penser qu’il est plutôt méfiant, réticent,
ou évite de s’exposer à l’autre ? Le patient peut dire : « Ce n’est pas moi qui
n’ai pas fait le devoir, c’est que le prof de maths n’a pas bien dit qu’il fallait
le faire ce week-end. » Certains patients expliquent la cause de leur absence
aux rendez-vous en disant que la faute revient à leurs parents qui ne leur
ont pas rappelé à temps.

Régression
Définition
Le patient cherche à résoudre ses conflits par le retour à des conduites, à
des pensées ou à un style relationnel, d’un stade dépassé et antérieur du
développement de la personnalité. La régression permet d’éviter la tension
et le conflit évoqués au niveau actuel du développement. Son utilisation
excessive signe une immaturité de la personnalité.

Exploration de la régression
Avant de parler de l’exploration de la régression comme mécanisme de
défense, rappelons que « la régression est une notion d’un emploi très
fréquent en psychanalyse et dans la psychologie contemporaine ; elle
est conçue le plus souvent comme un retour à des formes antérieures du
développement de la pensée, des relations d’objet et de la structuration du
comportement. » (Laufer & Laufer, 1989)
Le thérapeute essaie de voir si le patient fait des mouvements de retour en
arrière. L’exemple le plus parlant est que tout le monde régresse pendant au
cours d’une maladie (fièvre, grippe, toux, fracture, entorse du genou, etc.).
On a l’impression que l’individu redevient un enfant. Le patient donne
l’impression qu’il cherche à être couvé, entouré, lové par le thérapeute.
Dans le jeu, l’adolescent qui régresse se met à jouer le jeu du tout-petit.
Certains patients se mettent à parler comme des bébés, d’autres se mettent
à marcher à quatre pattes, d’autres, en revanche, montrent une agitation
ou une désorganisation psychomotrice. Ils cherchent à ce moment-là à
grimper, à toucher à tout, à pleurnicher, à babiller, etc.

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302 Status clinique pédopsychiatrique

Bibliographie
Askenazy-Gittard, F., & Darcourt, G. (2012). Initiation à la psychanalyse freudienne.
Ellipses.
Chabrol, H. (2005). Les mécanismes de défense. Recherche en soins infirmiers, 82(3),
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Ciccone, A. (2019). L’Observation clinique. Dunod.
Ionescu, S., Jacquet, M. -M., & Lhote, C. (2016). Les Mécanismes de défense. Armand
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Laufer, M., & Laufer, M. E. (1989). Adolescence et rupture du développement. Presses
universitaires de France.
Perry, J. C., Guelfi, J. D., Despland, J. -N., Hanin, B., Lamas, C., de Roten, Y., & Aubresin, G.
(2009). Mécanismes de défense : principes et échelles d’évaluation (2e éd.). Masson.
Roussillon, R. (2018). Manuel de psychologie et de psychopathologie clinique générale
(3e éd.). Elsevier Masson.
Sabourin, P. (2002). L’introjection. Dans A. de Mijolla (dir.), Dictionnaire internatio-
nal de la psychanalyse (p. 885, 886). Calmann-Lévy.

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17 Affects

Quelques définitions
Avant de développer ce chapitre, nous devons attirer l’attention sur l’extrême
importance de ne pas confondre les émotions ou affects appartenant au
patient et ceux qui viennent du thérapeute au moment de l’entretien.

Affects
Les affects sont considérés comme des indices. Ils renvoient aux théories des
pulsions dans la vision freudienne. Les émotions sont du côté des signes de
communication, contrairement aux affects qui sont du côté des signes.
Il n’y a pas d’intentions de communication consciente dans les affects.
L’affect est quelque chose d’assez statique. Il s’agit de plaisir (détente) et de
déplaisir (tension psychique). Stern parle des affects dynamiques du bébé.
Plus encore, l’affect est un ensemble des processus psychiques qui a pour
but de nous apporter ou de nous communiquer un message. Il s’agit d’une
expression de l’énergie pulsionnelle et de ses variations. L’affect est l’ensem-
ble des signes ou des manifestations observés pendant l’entretien.
Pour paraphraser Roussillon, le terme d’affect désigne le représentant-affect
de la pulsion, et qu’il englobe donc les différentes formes sous lesquelles
celui-ci se présente : émotion, passion, sentiment, sensation, humeur, etc.
L’affect est donc le terme générique pour désigner d’une manière générale
ce qui affecte la psyché, il n’y a pas de forme « affect » spécifique comme
certains l’avancent, il n’y a que des formes de l’affect, que des variations
de formes de celui-ci. Les affects sont déduits de signes externes et se dif-
férencient de ce que le patient fait ressentir à son thérapeute (c’est-à-dire
les émotions). Quelles sont les émotions ressenties et liées à des représen-
tations ou affects ? Par exemple, les affects d’angoisse sont explorés par les
peurs concrètes et les peurs diffuses qu’ils génèrent ou suscitent devant une
situation donnée.

Émotions
Pour essayer de faire un lien entre les affects et les émotions, nous disons
que l’affect renvoie à la métapsychologie freudienne de la théorie des pul-
sions. Une représentation des affects passe par l’organisation interne du
patient. La représentation des images ou des affects est personnelle, tandis
que les émotions renvoient à l’autre, donc à la théorie de relation d’objet. Il
s’agit d’un partage avec l’autre. L’émotion est un signe de communication

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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304 Status clinique pédopsychiatrique

avec autrui. Ce signe est pris comme message. L’émotion aide à faire un
lien avec l’autre. Elle a pour but de créer des liens entre les objets internes,
externes et le patient.
Les émotions sont du côté des signes et de langage. Elles ont une inten-
tion communicative consciente. Par exemple, les lapsus sont des indices ou
des signes qui ont une intention communicative.
Entre les indices et signes, se situent les symptômes. Les symptômes de
la maladie physique sont du côté des indices et les symptômes de la mala-
die psychique sont plutôt du côté des affects ou des lapsus. On place la
maladie psychosomatique entre les deux types des symptômes physiques
et psychiques.

Différents types d’affects


Sur le plan quantitatif
Le thérapeute cherche à savoir si les affects sont présents, exprimés, variés,
adéquats, modulés ou invariables, monotones, contrôlés, inhibés, etc. Il
vérifie auprès du patient s’il a un aplatissement, une mise à distance ou une
isolation de ses affects.
Les affects du patient sont-ils différenciés, bien régulés par rapport à
l’humeur ? Sont-ils adaptés à la situation ou sont-ils en décalage ? Le patient
peut être débordé ou envahi par l’anxiété ou d’autres émotions qui vien-
nent influer sur ses affects ou états émotionnels. Le thérapeute recherche
l’expression réprimée pendant l’entretien.

Sur le plan qualitatif


Seule, la description de la quantité de l’affect est insuffisante, il faut recher-
cher la qualité ou la tonalité affective du patient. Le thérapeute cherche à
savoir si les affects varient en cours d’entretien ou d’un entretien à l’autre.
Sont-ils en adéquation avec les thèmes abordés (congruents ou non à
l’humeur) ? Le patient les exprime-t-il ou les négocie-t-il facilement ? Le
thérapeute peut noter ou objectiver plusieurs sortes d’affects au cours d’un
même entretien.
Il peut s’agir de : plaisir, excitation, irritabilité, euphorie, jubilation, toute-
puissance, peur, honte, timidité, solitude, abandon, etc. Nous développons
dans la suite ces différents symptômes.

Aboulie
C’est l’effondrement de la volonté, la perte de l’élan vital ou de l’initiative
motrice, la lenteur et la rareté des gestes. L’aboulie est définie dans le DSM-
5 comme se manifestant par une diminution de la motivation pour des
activités auto-initiées et dirigées vers un but. Le patient ne sait plus ce qu’il

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Affects 305

doit faire, il est incapable de pouvoir vouloir. Il n’aime plus ou éprouve des
difficultés à participer aux activités sociales ou professionnelles, bien que
ces dernières lui procuraient du plaisir jadis.

Agitation intérieure
Le patient décrit une espèce de fébrilité ou tension intérieure, nervosité,
etc. Certaines personnes disent sentir un état de stress interne. Le clinicien
devrait aider le patient à clarifier ses ressentis et l’amener à décrire le plus
possible cette tension qui l’agite de l’intérieur. Celui-ci peut décrire un état
d’anxiété ou d’angoisse.

Ambivalence affective
Il s’agit d’une consistance de sentiments contradictoires vécus comme simul-
tanés. Le patient ressent de l’amour et de la haine, de la joie et de la colère, de
la considération et du mépris envers l’objet. Par exemple, il dit, à propos de
sa mère, de son père, de son frère ou d’un proche, qu’il l’apprécie et le hait un
instant d’après. Il peut exprimer ou éprouver de la colère, de l’énervement ou
rester indifférent affectivement à l’égard d’un proche. La grande caractéris-
tique de l’ambivalence est ce retournement spontané ou d’un instant après
l’autre dans l’expression des affects ou des émotions ressentis envers l’objet.
L’ambivalence affective doit être notée lors d’un même entretien. Ne doi-
vent pas être considérés comme ambivalents les affects contradictoires qui
sont notés dans deux entretiens différents ou espacés ou plus. Si tel est le
cas, il incombe au thérapeute de clarifier les propos du patient et de cher-
cher à savoir quel est son retournement affectif.

Anesthésie affective
Le patient évoque un manque d’éprouvé ou du vécu affectif. Cette anes-
thésie fait qui a une diminution considérable de la capacité à ressentir des
émotions. Il verbalise une espèce de froideur dans les émotions ou les sen-
timents qu’il exprime. C’est l’incapacité de ressentir des émotions à l’égard
de ses proches ou à l’égard de l’objet. Le patient se plaint de ne plus pouvoir
aimer ses proches, de ne pouvoir sentir ni s’émouvoir. Il est incapable de
dire s’il hait ou apprécie l’objet. Cette anesthésie affective est différente de
la neutralité ou de l’indifférence affective.

Anhédonie
C’est la perte d’intérêt pour les activités qui auparavant donnaient ou pro-
curaient du plaisir au patient. « L’anhédonie est une diminution des capaci-
tés à éprouver du plaisir à partir de stimuli positifs ou à se rappeler les plai-
sirs antérieurement éprouvés. » (American Psychiatric Association, 2015)
Le patient peut dire qu’il arrive à sortir avec ses copains sans avoir la même
envie ou le même ressenti qu’avant. Il est avec eux sans éprouver du plaisir
ou de la joie d’être en leur compagnie.

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306 Status clinique pédopsychiatrique

Par exemple, dans la dépression, le patient peut dire qu’il lui arrive de
sortir et de passer un moment en compagnie des pairs mais que, malgré
tout, il n’apprécie plus ces moments qui jadis étaient une source de plaisir.
Il peut nous dire qu’il participe moins à la discussion, à l’échange ou la
conversation avec ses pairs. Depuis un certain temps, il trouve que leur
conversation n’est plus comme avant. Il n’éprouve aucun plaisir ni entrain
à être en compagnie de l’objet.
L’anhédonie est une « absence d’intérêt ou de plaisir ou d’abandon des
activités habituellement génératrices de plaisir ; souvent associée à la dépres-
sion » (Kaplan & Sadock, 2005). Le patient ne tire plus de plaisir des choses
de la vie quotidienne. Certains individus disent que même leurs activités
passe-temps sont loin de les intéresser ou de leur procurer du plaisir.
Disons en effet que dans l’anhédonie, le « patient n’a plus de plaisir, à un
degré de sévérité variable, dans ses activités sociales, familiales et profes-
sionnelles, et dans ses relations » (Preising & Serre, 2000).
Le thérapeute a peu ou pas d’information sur ce qui intéresse le patient.
Il est incapable d’éprouver du plaisir et ceci n’est pas la faute de manque
d’activité, plutôt dû à son état affectivo-émotionnel.

Anxiété généralisée
Comme son nom l’indique, l’anxiété généralisée devrait être différenciée
des autres formes d’anxiété dites spécifiques. En fait, l’anxiété généralisée
consiste en un ressenti d’un fond anxieux permanent, associé ou non à des
paroxysmes anxieux : colère, irritabilité, fatigabilité, difficultés de concen-
tration, troubles du sommeil.
Cette anxiété peut s’accompagner de symptômes ou manifestations
physiques ou neurologiques (transpiration, sentiment d’évanouissement,
vertiges, difficulté respiratoire, tremblement des extrémités, palpitations,
douleurs abdominales, etc.) qu’il faut rechercher.
Lorsque le patient évoque ses inquiétudes ou ce qui l’angoisse, on n’est
plus dans le registre d’anxiété généralisée. Il est important de lui demander :
« C’est quoi pour toi, être anxieux ? » Cette question est essentielle afin de
clarifier ses états mentaux. La population utilise des expressions emprun-
tées au vocabulaire « psy », ceci ne signifie pas que ces expressions ou mots
signifient la même chose pour le clinicien et pour un citoyen lambda.
Apathie
L’apathie est une « tonalité émotionnelle émoussée, accompagnée de déta-
chement et d’indifférence ; elle s’observe dans certaines formes de la schizo-
phrénie et dans la dépression » (Kaplan & Sadock, 2005). Il s’agit d’une
fatigue que ressent le patient au niveau psychique. Il dit lui-même qu’il est
fatigué au niveau intellectuel. Le thérapeute doit faire une nette différence
entre la fatigue psychique et la fatigue intellectuelle ressentie dans les diffi-
cultés de concentration retrouvées chez le patient hyperactif.

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Affects 307

Asociabilité
L’asociabilité est décrite dans le DSM-5 comme faisant référence au manque
d’intérêt pour les interactions sociales et peut être associée à l’aboulie,
mais peut aussi être une manifestation d’une diminution des opportunités
d’interactions sociales. Le patient qui présente cette asociabilité s’isole du
reste du groupe des pairs. Il est de moins en moins en lien avec les autres.
Il peut dire pour justifier son changement de comportement vis-à-vis des
autres qu’il n’éprouve plus de plaisir ou ne voit plus un sens de participer à
des activités sociales, culturelles, sportives, etc., car tout n’est plus comme
avant et rien ne semble l’intéresser. Ce syndrome est le plus souvent ren-
contré chez le patient dépressif, de trouble phobique ou de phobie sociale.

Asthénie
C’est une sensation de fatigue, d’épuisement physique. Cet état est indé-
pendant de la fatigue psychique. C’est un manque de force physique. Le
patient a envie de faire des activités mais il n’y arrive pas par manque
d’énergie. Certaines personnes se disent être des fainéantes ou se jugent être
des incapables à faire n’importe quelle tâche de la vie quotidienne. Dans les
formes plus avancées de trouble dépressif, les patients sont incapables de se
lever de leur lit, de faire leur toilette, de prendre leur bain, de bouger, etc.

Athymhormie
C’est la perte de l’élan vital ou l’atteinte des sources de la vitalité. Elle est
associée à une athymie, à une inertie qui est un manque de vigueur dans les
activités. Il s’agit d’un défaut d’initiative motrice, de spontanéité de l’effort
et de prolongation de celui-ci. Les patients qui présentent une athymhor-
mie ont une froideur affective envers l’objet.

Autosatisfaction haute
Il s’agit d’un sentiment éprouvé par le patient sur ses propres valeurs, sa
force ou sa performance au niveau artistique, intellectuel, etc. Cette autosa-
tisfaction fait un lien avec la mégalomanie. Ce syndrome est retrouvé dans
les fonctionnements maniaques. Il est important de rechercher le méca-
nisme de défense qui accompagne cette haute autosatisfaction. Il arrive de
l’observer dans certains délires à thématiques mystique, érotomaniaque,
messianique, de filiation, etc.

Colère
C’est un sentiment modulable qui caractérise une partie de l’objet total. Le
patient peut arriver à expliquer la source de sa colère. Parfois, cette colère est
dirigée vers l’extérieur de lui ou, au contraire, la colère contre lui. La colère
peut être telle qu’il ne peut s’autoapprécier ni entreprendre des activités
qu’il considérait par le passé comme positives. On recherche des périodes
distinctes des attaques de colère ou d’hostilité contre soi ou contre l’objet.

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308 Status clinique pédopsychiatrique

Techniquement, la colère peut être explorée de différentes façons. Le


thérapeute peut demander par exemple au patient : « C’est quoi être en
colère pour toi ? », « Penses-tu être colérique de nature ou très souvent ? »,
« Quelles sont les circonstances qui activent ta colère ? », « Pour quelles
raisons exploses-tu en colère ? », « Comment gères-tu ta colère ? », « Et si
j’étais cette colère en toi, qu’est-ce que tu pourrais me dire maintenant ? »,
« Peux-tu me décrire ta colère ? », « Qu’est-ce qui te fait dire que tu es
colérique ? », « Que ressens-tu quand tu es en colère ? », etc.

Culpabilité
La culpabilité s’inscrit dans la lignée œdipienne et génitale. Elle renvoie au
surmoi. Elle est liée au regard du père ou à son substitut dans l’omnipotence
infantile. Il s’agit de la forme la plus élaborée de la honte. La culpabilité
doit être différenciée de la honte, de la colère et de la haine. Le patient
se reproche d’être responsable d’actes, de pensées ou de désirs condam-
nables. Il est important de faire un lien entre la culpabilité, le surmoi et la
constitution du self du patient. Ce symptôme ou signe est retrouvé forte-
ment dans les états dépressifs sévères sous forme d’idées de culpabilité ou
d’autoaccusation.

Douleur morale
Cliniquement, la douleur morale se traduit par la tristesse profonde, une
tonalité désagréable de l’humeur, un sentiment de dépersonnalisation, un
affaiblissement de la volonté, un ralentissement psychique intense avec son
expression dans le langage (discours lent, monotone, voire mutisme), un
sentiment d’humilité, d’infériorité et un dégoût de soi-même et de la vie,
une grande solitude. La douleur morale est un signe clé de l’épisode dépres-
sif majeur selon les classifications internationales des troubles mentaux. Il
est important que le thérapeute s’arrête sur ce symptôme pour rechercher
son intensité, sa durée, etc.

Dysphorie
La dysphorie s’observe chez le patient qui est de mauvaise humeur ou
acariâtre, grincheux, morose, bougon, mécontent, agacé, etc. On décrit la
dysphorie comme « un sentiment de malaise ; le mécontentement et la
nervosité qualifient l’humeur » (Kaplan & Sadock, 2005).

Émoussement ou indifférence des affects


L’émoussement ou l’indifférence des affects implique que le patient reste
distant de l’autre à l’égard des affects. Sa capacité à ressentir ses affects est
atténuée. Il peut montrer une froideur ou un détachement affectif au regard
de l’objet. Ses affects peuvent être adaptés à la situation, en décalage ou le
patient peut être indifférent. Ce signe peut être retrouvé dans les états psy-
chotiques ou dépressifs.

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Affects 309

Euphorie
C’est l’expansion de l’humeur tournée vers la joie démesurée. Il s’agit d’un
bien-être excessif procurant plaisir, gaîté, assurance, sensation de force et de
vitalité. Le patient dit qu’il n’a jamais senti le bien-être avant aujourd’hui.
Il peut poser des actes ou gestes dommageables ou qu’il peut regretter après
cet état. Il peut s’agir de dépenses inconsidérées, d’achats démesurés, de
donations injustifiées, d’actes d’hypersexualité, etc.

Élation des affects


C’est l’optimisme pathologique. Le sentiment d’élation s’observe dans
certains états d’exaltation de l’humeur. Le patient qui a une élation des
affects a une « humeur caractérisée par un sentiment de joie, d’euphorie, de
triomphe, de satisfaction de soi ou d’optimisme » (Kaplan & Sadock, 2005).
Par exemple, dans la manie, on note que le patient a des projets grandioses
ne tenant pas compte des objections et ne percevant ni limite ni contrainte.
Il est important de faire la part des choses entre l’idéal du moi, le moi idéal
et l’élation des affects. Les deux premiers concepts s’arrêtent au niveau de la
pensée tandis que dans le dernier, le patient devient agissant dans son excès
d’affect. Le thérapeute peut se demander s’il est ou non capable de mesurer
ou d’accepter ses limites (intellectuelles, physiques, cognitives, sociales,
financières, etc.).

Haine
La haine est un « sentiment qui vise à détruire, elle semble donc s’opposer
radicalement à l’amour » (Jeanmet, 2005). Il s’agit d’une menace existen-
tielle que ressent le patient. Par la haine, il considère que sans l’objet, il ne
peut rien. L’objet est tout pour lui. La haine fait allusion à la relation d’objet
partielle. Le patient considère l’objet comme un tout mauvais objet.

Honte
La honte renvoie au moi idéal, idéal du moi qui est le moi de l’enfance. La
honte renvoie à nos idéaux, à ce que l’on aimerait être comme enfant, à ce
que l’on a l’impression d’avoir été comme enfant ou bébé, etc.
La honte s’inscrit dans la lignée narcissique. En d’autres termes, elle est
pour Freud liée « à l’action des forces refoulantes (ce qui a été initialement
objet de plaisir devient objet de pudeur, de dégoût et de honte) » (Tisseron,
2005). La honte est liée au regard de la mère dans l’omnipotence infan-
tile. On retrouve le fantasme de la mégalomanie ou de la toute-puissance
infantile.
La honte a également un lien à l’immaturité. Il est nécessaire qu’une
comparaison entre la honte et la culpabilité soit faite lors de l’entretien.
La honte est liée au moi idéal contrairement à la culpabilité qui est liée au
surmoi. Ainsi, il est facile de ne pas confondre ces deux affects.

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310 Status clinique pédopsychiatrique

Humeur
L’humeur est globalement définie comme « une disposition affective fon-
damentale qui donne une tonalité particulière au monde subjectif et qui, à
l’extrême, peut modifier certains aspects du comportement d’une personne
et sa perception du monde environnant » (Kaplan & Sadock, 2005).
Le patient peut avoir différentes sortes d’humeur. Celle-ci va de la neutralité la
tristesse ou la dysphorie, à l’euphorie ou l’élation, ou à l’humeur normale,
et peut prendre une tonalité négative ou positive. Dans certains troubles
psychiques tels que la manie ou le syndrome bipolaire, on retrouve une
humeur qui va au-delà de la tonalité positive.
Tonalité négative
Ici, il est question de voir le patient ressent à ce moment-là de la tristesse,
un mal-être, un abattement, du chagrin ou de la détresse, de la colère, etc.
Il peut donner l’impression ou confirmer qu’il est avachi, adynamique,
n’a plus d’entrain, est prostré, etc. Certains patients disent avoir moins de
force, moins d’énergie ou qu’ils se sentent plus en isolation ou en retrait
affectif vis-à-vis des proches.
Tonalité positive
Lors de l’exploration de cette tonalité, il est important de chercher la joie,
la gaîté, la vivacité, l’envie de faire de choses ou différentes activités, etc.
Humeur expansive ou exaltée
Cette humeur procure au patient une joie, de la gaîté, une tonalité positive
très excessive, plus que normale. Ce symptôme est retrouvé dans les états
maniaques, les hypomanies et les troubles bipolaires.

En bref
L’exploration de l’humeur va de pair avec celle des affects et émotions. Il est
capital de savoir si les affects ou émotions du patient sont congruents ou non à
son humeur. Le manque de congruence peut singer un état de dissociation ou de
discordance affective émotionnelle retrouvée dans les états schizophréniques.

Incontinence affective
Elle s’observe chez une personne qui réagit autrement à la suite d’un stimu-
lus. Il s’agit d’une émergence soudaine de réactions affectives incontrôlables
par le patient. Cette hémorragie émotionnelle peut prendre une intensité
disproportionnée. Pour donner un exemple, le patient peut dire qu’il a des
peurs incoercibles ou des colères non contenues. La psychothérapie fondée
sur la mentalisation peut être d’une aide cruciale dans ce type de cas. On
retrouve ce smptôme chez les patients qui ont une structure borderline.

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Affects 311

Irritabilité
L’irritabilité est une « excitabilité anormale et excessive, qui déclenche
facilement la colère, l’ennui ou l’impatience » (Kaplan & Sadock, 2005).
Le patient est hostile ou présente une excitabilité ou réagit vite et de
manière démesurée à une moindre frustration. Cette irritabilité peut aller
de pair avec l’impulsivité. Elle prédispose le sujet à des réactions affectives
explosives diverses (par exemple des acouphobies ou des photophobies).
Techniquement, lors de la recherche de ce symptôme, le thérapeute peut
se permettre de pousser le patient hors de sa zone de confort pour voir sa
réaction ou sa capacité de supporter la frustration. Cette irritabilité peut être
due à quelque chose qui le touche, le fâche ou le frustre. Le patient peut
arriver à identifier ou non la cause de son irritation interne. L’irritabilité est
différente de la nervosité.
L’exploration de l’irritabilité peut se faire à l’aide des questions suivantes :
« Est-ce que tu es irritable également ? », « Qu’est-ce qui peut justifier cet
état selon toi ? », « Est-ce que tu t’énerves rapidement ? », « Pour quelle
raison as-tu du mal à accepter les contradictions ou les frustrations ? »,
« Supportes-tu que l’autre te dise non ? », « Comment réagis-tu devant une
réponse négative ? », etc.

Labilité affective ou versatilité de l’humeur


La labilité affective ou la versatilité de l’humeur consiste en des change-
ments émotionnels rapides que l’on peut observer au cours de l’entretien
ou que l’entourage peut rapporter au thérapeute. Le patient passe du rire
aux pleurs ou de la tristesse à la joie, de la colère ou de la rage à la gaîté, de
l’agressivité à la générosité, du découragement à l’insouciance en un court
laps de temps. Ce symptôme est retrouvé dans l’hystérie, les états de schizo-
phrénie et maniaques ou le trouble bipolaire.

Monotonie affective
La monotonie affective est la perte de la capacité de modulation affective.
Quand ce symptôme est présent, le thérapeute n’observe pas de modifica-
tion dans l’amplitude ou la tonalité des affects. Il note que depuis le début
de l’entretien, le patient parle comme un robot, les intonations sont plates,
etc. On peut avoir l’impression d’être en train d’écouter quelqu’un nous lire
ses émotions écrites par un autre.
Nervosité
Cliniquement, la nervosité consiste en un état de tension interne causée
par quelque chose que le sujet n’arrive pas à savoir mais qui le met dans un
état d’angoisse ou de stress. Cet état de nervosité est différent de l’irritabilité
que peut ressentir le patient ou son entourage. Le patient qui a de la nervo-
sité peut dire qu’il n’arrive pas à se calmer. Il est incapable de canaliser ses
affects ou de rester focalisé sur une activité donnée.

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312 Status clinique pédopsychiatrique

Parathymie
La parathymie est une discordance affective. Il s’agit d’une expression des
sentiments qui ne correspond pas au vécu relaté par le patient. En fait, lors
de l’investigation de ce symptôme, celui-ci peut rire pendant qu’il nous
raconte une histoire triste de décès de son animal de compagnie, de son
grand-père, de sa mère, etc. Il est important de vérifier avec lui ce qui le fait
rire pendant qu’il nous raconte des choses tristes ou horribles. Est-ce qu’il
arrive à faire cette différence entre raconter les événements heureux avec la
joie qui s’ensuit et les événements malheureux qui entraînent des pleurs ou
de la tristesse ?
Il peut aussi s’agir tout simplement de l’excès d’émotions. Nous conseillons
au thérapeute de faire une nuance sur ce que dit et exprime le patient durant
l’entretien. La validation émotionnelle ou empathique avec le patient nous
semble être mieux indiquée quand on suspecte une parathymie.

Phobie
La phobie est le sentiment d’anxiété qui apparaît en présence d’un objet ou
devant une situation qui n’a pas en elle-même de caractère dangereux. Elle
disparaît quand l’objet phobogène disparaît. C’est une peur irrationnelle,
jugée comme absurde par le patient. « La personne phobique peut être
consciente du caractère irrationnel de sa peur et néanmoins être incapable
de s’en défaire. » (Kaplan & Sadock, 2005)
En fait, comme conseillé pour l’anxiété généralisée, il est important
d’analyser ou de rechercher les circonstances pendant lesquelles le patient
ressent de la phobie. Il peut s’agir de la crainte de se retrouver dans des
lieux publics, dans les transports en commun, dans les endroits claustrés
(ascenseurs, caves, chambres souterraines, chambres moins éclairées, etc.).

Perplexité
Le patient perplexe donne l’impression de ne plus pouvoir se situer sur le
plan affectif. Autrement dit, il est perdu, désorienté. La perplexité concerne
des patients qui sont débordés par leurs affects et qui n’arrivent pas à les
contrôler ou les gérer.

Rage
La rage, du moins la rage narcissique, est définie comme « une réaction
issue de la blessure narcissique dans le contexte des pathologies narcis-
siques ; elle est au narcissique ce que l’agressivité est au souhait œdipien. »
(Oppenheimer, 2005)
Dans tous les cas, il faudrait faire une différence entre la rage qui porte
au self-object et l’agressivité à l’objet. Dans l’agressivité, la pulsion de mort
ou pulsion de destruction est portée vers l’autre ou vers l’objet. Cette der-
nière disparaît en l’absence de l’objet, ce qui n’est pas le cas pour la rage
qui perdure même en l’absence de l’objet. Il est moins facile d’apaiser une

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Affects 313

rage narcissique. La rage fait appel au passage à l’acte, voire à l’auto ou à


l’hétéroagressivité.

Sentiment d’insuffisance
Il s’agit d’un manque de confiance en ses propres capacités, en sa valeur
propre. Il est très important de faire un lien avec l’estime de soi, le self et les
identifications du patient. Le thérapeute se demande pourquoi le patient
pense qu’il a de l’insuffisance ? Qu’est-ce qui lui laisse croire ou ressentir
ce sentiment d’insuffisance ? Que désire-t-il avoir de plus pour pallier son
sentiment (on recherche la présence d’une pensée magique, son lien à la
réalité, ses capacités de jugement, etc.) ?

Sentiment de perte d’espoir ou de désespoir


Le sentiment de perte d’espoir ou de désespoir est lié à la tonalité affective
que ressent le patient vis-à-vis de sa situation, des difficultés et souffrances
qu’il endure. Il peut dire se sentir sans espoir quand il évoque ses études,
son apprentissage, etc. Le patient qui a un sentiment de perte d’espoir ou de
désespoir donne l’impression d’avoir perdu sa valeur de vivre.
Le patient qui a perdu l’espoir présente une humeur plutôt négative et
se montre pessimiste dans ses rapports avec soi-même ou dans sa relation
d’objet. Il est incapable de se projeter dans l’avenir. Ce symptôme peut
s’exprimer par les phrases suivantes : « … Je sais que maintenant ma vie
est foutue », « Je ne pourrai plus m’en sortir, c’est fini pour moi », « Tout
le monde sait que je suis maudit », « … Tout est noir… », « Je suis sur un
chemin sans issue », etc.

Sentiment de solitude ou d’ennui


Le sentiment de solitude ou d’ennui est lié à la tonalité affective que perçoit
le patient de la part de son environnement. Il a l’impression d’être inutile
dans ce moment. Il peut se sentir seul, solitaire et moins utile pour l’autre.

Sidération émotive
La sidération émotive entraîne l’état de stupeur chez le patient. On observe
de la sidération émotive chez les personnes victimes de traumatismes.
Certaines rapportent au cours de leurs narrations verbales une situation
pendant laquelle elles se sont senties scotchées : « Je suis resté sans mots ! »,
« J’étais complètement bouleversé ! », « J’étais hors de moi… ! », etc.

Sentiment de persécution
Le patient dit qu’il est menacé, directement ou indirectement, par le regard
ou les propos des gens autour de lui. Il a l’impression que les autres le jugent
trop. Il est important de distinguer s’il est seulement persécuté dans des
milieux familiers ou non familiers. Qu’est-ce qui lui fait croire ou lui laisse
cette impression d’être persécuté ? Entreprend-il des actes ou des projets

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314 Status clinique pédopsychiatrique

pour s’en défendre ? À quel moment ou à quelle occasion perçoit-il ce sen-


timent d’être persécuté ? Peut-il tolérer d’être face à ses potentiels ou hypo-
thétiques persécuteurs ? De manière générale, dès que l’on a l’impression
que le patient se sent persécuté, il faut rechercher des éléments de la lignée
psychotique (syndrome délirant, troubles perceptifs, etc.). La persécution
peut se retrouver chez les patients anxieux. Il vaut la peine de s’arrêter un
moment et d’essayer de comprendre avec le patient ce qu’il met derrière
son sentiment de persécution. Arrive-t-il à se rendre à l’école, à prendre les
transports en commun, à se passer du probable regard menaçant des pas-
sants, etc. ?

Sentiment de vide
Le sentiment de vide donne l’impression de ne rien ressentir en soi. Cette
sensation de vide peut s’exprimer sous forme d’un manque de pensée,
d’idée, d’émotion, d’affect, etc. Certains patients disent se sentir perdus. Ce
syndrome peut être retrouvé dans les formes dépressives, dans la perplexité
anxieuse, après un traumatisme, etc.

Timidité
Les affects de timidité sont rapportés par le patient ou ses proches. Il peut
s’agir d’une inhibition névrotique ou psychotique. On retrouve la timi-
dité chez certains patients qui présentent une défense contre leur pulsion
libidinale ou agressive. Ainsi, nous conseillons au thérapeute d’étudier la
manière dont le patient dit timide exprime ses pulsions (libidinales et agres-
sives) et le type de rapport qu’il entretient avec son surmoi et son self.

Tristesse
Les affects de tristesse doivent être examinés avec finesse. On essaie de voir
si la tristesse va de pair avec les idées suicidaires ou d’autres types d’angoisse.
Les questions suivantes peuvent orienter le thérapeute : « C’est qui pour
toi, quelqu’un qui est triste ? », « Tu penses à quoi en étant triste ? », « Il
t’arrive d’être très triste et d’en pleurer ? », « À quel moment as-tu cette
envie de pleurer ? », « Qu’est-ce qui te rend si triste ? », « Quand tu es triste,
arrives-tu à garder un lien avec tes copains, tes amis ou ta famille ? », « À
quel moment apparaît cette tristesse ? », « Est-ce que c’est le matin ou le
soir que tu te sens avoir moins d’énergie ou plus de tristesse ? », « Qu’est-ce
qui cause ta tristesse selon toi ? », « Comment ressens-tu ta tristesse ? », etc.

Trouble d’éprouvé corporel ou d’élan vital


Lors de trouble d’éprouvé corporel ou d’élan vital, le patient a un dys-
fonctionnement sur ses capacités à discerner son sentiment de force ou de
vitalité. Il est dans l’impossibilité de mesurer les limites de ses compétences
physiques et psychiques. Il est incapable d’entreprendre une activité phy-
sique, intellectuelle, etc.

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Affects 315

Exploration de l’humeur en général


Lors de l’exploration clinique de trouble de l’humeur, le thérapeute doit
essayer de catégoriser ou d’organiser son entretien selon les symptômes
explicites et implicites que présente le patient. Par exemple, il dit : « On va
essayer de discuter d’une chose après l’autre. »

Exploration des symptômes bipolaires


L’exploration de la bipolarité est essentielle à faire quand le patient laisse
apercevoir certains signes. Nous proposons dans un premier temps l’investi-
gation de ce syndrome de manière globale, puis l’exploration du syndrome
maniaque et du syndrome dépressif.
L’exploration des affects demande au clinicien de rester dans l’empathie
avec le patient. Il doit lâcher prise et se montrer très concerné par les ressen-
tis, les émotions ou les affects du patient. En fait, la question à se poser est
la suivante : « Si j’étais à la place de mon patient, qu’est-ce que je sentirais
ou qu’est-ce que cela réveillerait en moi ? »
Techniquement, ces questions peuvent être posées : « Si j’étais ton ani-
mal de compagnie, comment je saurais que tu te sens heureux chez toi ? »,
« Comment je saurais que tout se passe bien dans ta famille, ou au foyer ? »,
« Est-ce que je pourrais me sentir en sécurité ou peureux ou triste dans cette
situation ? »
On peut encore lui demander : « Qu’est-ce que cela te fait d’avoir tes amis,
tes parents, tes frères qui hurlent tout le temps ? », « Qu’est-ce cela te fait
d’avoir un papa qui n’est pas là tout le temps ? », « À ta place, je ressentirais
de la colère, de la satisfaction ou de la haine, et toi ? »
« Est-ce qu’il t’arrive d’être en colère, ou d’avoir de la tristesse, de la haine,
de la joie ou d’autres sentiments ? », « Penses-tu être malheureux ou heu-
reux à l’école ? », « Te sens-tu perdu ou seul lors de la récréation ? », « Peux-
tu me dire, sur une échelle de 0 à 10, combien tu donnerais à ta colère ou
ta tristesse ? », « Arrives-tu à différencier le moment où tu es triste et les
autres où tu es en colère ? », « Est-ce à ce moment-là que tu as juste envie
de reste seul ou bien que quelqu’un de rassurant soit près de toi pour que
tu ne fasses pas de bêtise ? », « C’est quoi pour toi, avoir envie de faire une
bêtise ? », « Qu’est-ce qui t’apaise ou t’apporte le calme ou le réconfort en
pareil moment ? », « Qu’est-ce qui te permet de te rassurer dans de tels
moments de peur intense ? »
On essaie de voir si les affects sont présents, exprimés, variés, adéquats,
modulés, monotones, contrôlés ou inhibés. Le patient arrive-t-il à contrôler ses
affects ? Comment arrive-t-il à s’en sortir ? Reste-t-il touché ou préoccupé par
ses affects pendant plusieurs jours ? Le thérapeute doit permettre au patient
de revivre, revisiter ou aborder ses émotions, son expérience, etc. dans un
climat de sécurité et voir si ses affects sont ou non congruents à son humeur.

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316 Status clinique pédopsychiatrique

Le clinicien observe la fréquence et la durée de leur apparition ainsi que


le contexte, mais aussi leurs répercussions sur le fonctionnement du patient
et sur son entourage. Il cherche la présence d’idées noires ou suicidaires,
la présence d’éléments psychotiques, etc. Le patient garde-t-il un lien à la
réalité pendant la montée de l’angoisse ?

Exploration de la phase maniaque


Le thérapeute peut demander au patient : « Dis-moi, dans cette phase où
tu te sens très bien, que ressens-tu ? », « Peux-tu me décrire cette phase ? »,
« As-tu l’impression de bien parler pendant cette phase haute ? », « As-tu
l’impression que tes idées vont très vite ? », « Qu’est-ce que ton entourage
(tes parents, tes frères ou tes amis) dit de toi ? », « Est-ce qu’ils compren-
nent tes actes ? », « Ton entourage arrive-t-il à te suivre ou suivre tes
idées ? », « Y a-t-il un lien entre vos pensées ? », « Es-tu très speed ? »,
« Les autres arrivent-ils à te suivre ? », « As-tu l’impression que dans ta
tête, les choses partent dans tous les sens ? », « Peux-tu me donner un
exemple ? », « As-tu l’impression que tu prends la décision très vite ou très
facilement ? », « As-tu des rires nerveux ou très en colère ? », « Est-ce qu’il
t’arrive de pleurer et de rire d’un instant à l’autre ? », « Sais-tu pourquoi
tout à l’heure, tu avais une haine, la colère ou les pleurs et la joie ou les
rires spontanément ? », etc.
En fait, le thérapeute peut encore lui demander : « C’est quoi ces envies
ou ces trucs moins cohérents pour toi ? », « Comment parviens-tu à orga-
niser tes idées ou tes pensées ? », « Penses-tu aux conséquences avant ou
après les actes ? », « Pendant que tes pensées vont à cent à l’heure, dans
quelle mesure penses-tu que ton sens de perception est égal ou différent
de celui de ton entourage ? », « As-tu posé des actes dangereux pendant
cette phase ? », « Pourquoi tu penses que tu n’es pas en danger ? », « As-tu
d’autres choses en tête en ce moment d’hyperexcitation ? », « Est-ce que
pendant cette phase, ton sommeil change ? »
Par ailleurs, on peut lui demander à propos de l’école : « Arrives-tu à
aller à l’école ? », « Combien de temps dure cette période ? », « Comment
c’est pour toi de suivre les leçons ? », « Qu’est-ce que te dit ta maîtresse ? »,
« Comment sont tes résultats scolaires ? », « Arrives-tu à faire tes devoirs ? »,
« Penses-tu être capable de faire plusieurs activités scolaires et parasco-
laires ? »
En plus, on peut lui demander : « Y a-t-il des jours ou des moments où tu
crois avoir de superpouvoirs ? », « As-tu l’impression d’être un surdoué ou
d’avoir des compétences supérieures aux autres ? », « Es-tu capable de faire
plus que les autres ? », « Comment sens-tu la différence entre les moments
ou les phases où ton humeur est plus basse et quand elle est plus haute ? »,
« As-tu besoin d’aide pendant ce moment-là ? », « As-tu le sentiment d’être
abandonné ? » et « Qui t’aurait abandonné ? »

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Affects 317

Exploration de la phase dépressive


Le syndrome bipolaire peut être fait de phases maniaques et dépressives.
Comme décrit plus haut, la phase dépressive doit être explorée au cours de
l’entretien. Le thérapeute demande au patient : « Peux-tu me dire, sur le
plan émotionnel, comment ça va ? », « Quand cela ne va pas bien, que res-
sens-tu ? », « Peut-on dire que c’est plus de la tristesse que tu ressens qu’une
autre émotion, par exemple de la colère, de la peur, etc. ? », « Comment sont
tes idées dans ces moments de forte tristesse ? », « As-tu l’impression que ça
remue trop dans la tête ? », « Perds-tu le contact avec les autres quand tu es
dans cette phase de moins bien ? Combien de temps dure cette phase ? »,
« Peux-tu me parler ou me décrire cette phase ? », « As-tu de la motivation
dans les phases basses ? », « As-tu l’impression de réfléchir dans le vide ? »,
« Qu’est-ce que ton cerveau remue à ce moment-là ? », « Concerne-t-il des
choses tristes ou pénibles ? », « As-tu l’impression d’être content, heureux,
en colère, de ressentir de la haine, de la culpabilité, etc. ? », « Comment
expliques-tu cette culpabilité ? », « Pourquoi penses-tu que c’était à toi de
lui éviter le pire ? »
Le thérapeute examine la qualité, le rythme, la fréquence des diverses
habitudes sociales et culturelles du patient. D’un côté, il peut lui deman-
der : « Sors-tu de chez toi pour aller voir tes amis ? », « Que fais-tu de tes
journées ? », « Peut-on dire que tu ne fais rien en période de ni trop bien
ni trop mal ? », « Penses-tu que tes idées vont très lentement ? » De l’autre
côté, le thérapeute demande : « Arrives-tu à aller à l’école ou non ? », « Pour-
quoi n’arrives-tu pas à aller à l’école ? Comment se justifie cette incapacité
d’aller à l’école ? », « Veux-tu bien m’expliquer davantage ? », « Arrives-tu à
faire d’autres activités avec ta famille ou tes amis ? », « Pourquoi as-tu arrêté
de voir tes amis ? », « Qu’est-ce que les autres amis te disent, ou comment
te trouvent-ils ? »
Il est important d’étudier les symptômes physiques (le sommeil, l’appétit,
le poids, etc.) : « Que peut-on dire par rapport à ton appétit ? », « Comment
est ton sommeil ces jours-ci ? », « Es-tu plus ou moins fatigué ou très en
forme ? », etc. (Cf. à la fin du chapitre l’exploration de ces symptômes.)

Différents sentiments à investiguer


En plus des affects décrits ci-dessus, le patient peut ressentir d’autres affects.
Certains termes méritent d’être définis avant leur développement. Il s’agit de
la peur, de la terreur, de l’horreur, de l’effroi, de la panique, de l’anxiété, etc.

Crainte
La crainte est définie comme une petite peur. On peut demander au patient
de situer le niveau de sa peur sur une échelle de 0 à 10, comment il ressent

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318 Status clinique pédopsychiatrique

sa peur. Il peut donner une impression d’avoir la crainte d’aborder certains


thèmes, de se rendre à certains endroits, d’aller se confronter à certaines
personnes, etc.

Terreur
C’est la peur paralysante et qui tend à déformer la perception. Il y a intro-
duction d’une fausse appréhension dans l’imaginaire du patient. Il peut
néanmoins garder sa capacité d’analyser la situation.

Horreur
C’est la peur qui s’accompagne de dégoût. Ce sentiment laisse des traces
dans l’appareil psychique du patient. La personne peut exprimer son hor-
reur verbalement ou à travers son corps.

Effroi
Le patient qui a l’effroi éprouve une grande peur devant un danger objectif.
Il dit être paralysé et incapable ou impuissant de se défendre. Contraire-
ment à la réaction que peut avoir une personne devant la peur, ici le patient
perd ses moyens de fuir, de se battre ou de faire face à la menace. « Il est réel-
lement en danger d’être détruit par ce qui le menace et ne dispose d’aucun
moyen de combat ou de fuite » (Roussillon, 2014).
En fait, l’effroi est lié au facteur surprise et au fait de n’être pas préparé à
ce qui arrive.
Le patient peut avoir une angoisse devant :
• les personnes inconnues ou non familières. Cette peur correspond à celle
que, plus petit, l’enfant ressentait vis-à-vis de la personne ou de son premier
objet d’amour ;
• les situations nouvelles ou qui semblent menaçantes pour le patient,
c’est-à-dire que cette peur peut se transformer en effroi ;
• les choses ou différents éléments anxiogènes.
Le thérapeute peut aider le patient à décrire les éléments qui sont poten-
tiellement anxiogènes ou qui peuvent provoquer la sensation de peur.

Panique
C’est la peur où l’imaginaire tient une place importante et empêche l’ana-
lyse de la situation, entraînant des ripostes exagérées.

Anxiété
C’est le sentiment proche de l’angoisse, mais relatif à une difficulté réelle,
bien qu’intense. Étant plus mentalisé, ce sentiment est maîtrisable.

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Affects 319

Peur
La peur est une sensation immédiate et spontanée. Elle est liée à l’instinct
de conservation. Elle est conséquente à la perception d’un danger extérieur.
La peur est un « état émotionnel désagréable, correspondant à des modifi-
cations psycho-physiologiques en réponse à une menace ou un danger réel
et objectif » (Kaplan & Sadock, 2005). La peur est le choc dû au stress face à
ce danger réel ou objectif.
Autrement dit, la peur est un processus qui exige une évolution plus
grande dans la pensée. Elle implique une reconnaissance de ce qui vient
de l’extérieur. Elle peut amener le patient soit à fuir, soit à se battre, soit à
résister et à faire face à la situation.
On peut déceler des peurs concrètes et celles focalisées ou diffuses. Ces
différentes peurs sont parfois nocturnes ou diurnes en rapport avec : la
chambre de l’enfant, la maison et ses lieux de jeu, les rues, l’école, les maga-
sins et autres endroits publics, les animaux, la nuit, la solitude, la mort, les
maladies, les monstres, etc.

Angoisse
En 1926, Freud propose sa théorie d’angoisse dans son ouvrage intitulé
« Inhibition, symptôme et angoisse ». Le concept d’angoisse a été étoffé,
clarifié, développé par plusieurs psychanalystes qui lui ont succédé. Freud
distingue l’angoisse qui est une préparation à l’inconnu « attente imprécise
d’un danger ». L’angoisse est un signal d’une détresse psychique. En ce qui
concerne sa qualité, celle qui est à la base de tout conflit névrotique est une
angoisse de perte (castration).
De son côté, Bowlby cité par Golse (2015) donne une définition « selon
laquelle l’angoisse serait une réaction primaire, irréductible à d’autres termes
et due simplement, par le fait de la séparation, à la rupture des liens d’attache­
ment entre l’enfant et sa mère. » L’absence du lien mère-fils peut générer
une sensation étrange venant de l’intérieur de l’enfant. Dans cette situation,
« l’angoisse est éprouvée face à un danger interne » (Roussillon, 2014).
Le symptôme phobique est décrit par Freud comme une formation subs-
titutive, par déplacement de l’angoisse sur l’objet phobogène, où une situa-
tion extérieure devient porteuse de la conflictualité propre à l’objet fantas-
matique initial. La naissance d’une phobie nécessite donc la réactivation de
l’angoisse de castration et de la culpabilité par une exacerbation de la pro-
blématique œdipienne avec des désirs érotiques face à l’objet incestueux,
et de l’hostilité face au parent rival. Lorsque ces angoisses ne peuvent pas
être atténuées par des mécanismes de déplacement réussis (activités symbo-
liques et activité onirique), des mécanismes de déplacement de type pho-
bique apparaissent.

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320 Status clinique pédopsychiatrique

L’angoisse s’exprime par le jeu, la parole, le passage à l’acte ou toute autre


expression mimo-gesto-posturale. L’exploration de l’angoisse est faite de
manière systématique pour différencier les différents symptômes qu’elle
génère. Le thérapeute doit fournir l’effort d’expliciter ses questions, « par
exemple, devant une conduite de retrait ou d’isolement dans sa chambre,
conduite que l’adolescent ne semble pas pouvoir de prime abord expliciter,
on peut formuler la question de la façon suivante : “Si vous restez ainsi isolé
dans votre chambre, c’est peut-être parce que vous êtes en conflit avec l’un
ou l’autre de vos copains, ou que vous avez peur que l’on se moque de vous,
ou que vous êtes angoissé quand vous êtes à l’extérieur ou encore que vous
avez perdu l’intérêt pour ce que vous faisiez auparavant et peut-être y a-t-il
encore d’autres raisons, qu’en pensez-vous ?” La question ainsi formulée,
l’attention se déplace vers les pensées et les affects sous-tendant la conduite
incriminée. » (Marcelli, 1999)

Différents types d’angoisse


Kapsambelis fait un lien entre les différents types d’angoisse selon la psy-
chopathologie structurelle des patients. Pour lui, « l’angoisse névrotique
serait une angoisse de l’avoir : angoisse de l’accès à l’objet du désir, de la
culpabilité qui s’y associe, et donc aussi de la perte d’avoir (angoisse de
castration). L’angoisse psychotique serait une angoisse de l’être : angoisse
existentielle au sens littéral, angoisse de la survie du psychisme, de la
menace qui pèse sur sa constitution autonome en tant qu’unité, angoisse
donc aussi de la perte de l’être. L’angoisse des pathologies dépressives et
états limites serait une angoisse de la perte d’objet : perte de l’objet du
désir, qui peut s’intriquer à des degrés variables à un sentiment de perte de
soi. » (Kapsambelis, 2007)
La suite de ce travail aborde les différentes angoisses en trois niveaux
avec les modalités défensives qui les accompagnent dont parle Roussillon
(2014) : angoisses primitives, angoisses liées au processus de différenciation
et de séparation et angoisses liées à la différence des sexes.
Angoisses primitives
Il existe trois types d’angoisses primitives dont les angoisses d’anéantisse-
ment, de morcellement et de vidange. Ces angoisses font que le moi recourt
à des mécanismes de défense particuliers selon le type d’angoisse objectivé.
Angoisses d’anéantissement
Mélanie Klein a souligné dans ses travaux que l’angoisse primaire est en
lien avec le travail interne de la pulsion de mort. Plus encore, lors de ses
angoisses d’anéantissement, « le patient a des sentiments de désintégration,
des angoisses inimaginables, menaces d’annihilation » (Winnicott, 1971).
En fait, ces angoisses sont très paralysantes et envahissantes et à la base des
crises de panique retrouvées chez le patient. Les principaux mécanismes de
défense en jeu sont l’agrippement ou cramponnement et le démantèlement.

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Affects 321

Étant donné que devant toute angoisse, le moi met en place des méca-
nismes de défense, pour ce qui est des angoisses d’anéantissement, Rous-
sillon (2014) souligne le fait que « ces éprouvés précoces appartiennent à
l’univers du bébé et impliquent chez lui des formes défensives normales et
nécessaires au développement psychique : le rapprochement avec l’objet,
le collage et l’agrippement […] Les modalités défensives mobilisées passent
par le même éventail, du plus normal au plus pathologique : du démantèle-
ment à l’agrippement, en passant par le déni et le clivage. »
Angoisses de morcellement
Le patient ressent une désorganisation, une perte de cohérence de quelque
chose qui avait été construit auparavant. « Le sujet (patient) est envahi par
la sensation de partir en morceaux, de se démembrer, de se déconstruire en
tant que sujet, de se fragmenter. » (Roussillon, 2014) Une angoisse typique-
ment psychotique comprend les ébauches d’angoisses de séparation ou de
différenciation.
Ces angoisses impliquent l’expérience de la contenance et de rassemble-
ment du moi grâce à cet objet. Les mécanismes de défense mis en jeu sont
l’agrippement et le clivage du moi.
Angoisses de vidange
Le patient a des angoisses de perdre sa substance ou son contenu. Ces
angoisses impliquent l’existence d’un contenant relativement étanche et
au moins partiellement une forme d’analité. Elles sont plus élaborées que
celles d’anéantissement. Le patient a la « sensation ou la crainte de perdre
son intérieur, de se vider comme si on souffrait d’une hémorragie incontrô-
lable, suppose l’expérience de contenir quelque chose » (Roussillon, 2014).
Les mécanismes de défense mis en jeu sont orientés vers un objet chargé
de faire un bouchon ou un objet d’emprise ou de séduction. Ces types de
patients s’agrippent à leurs objets.
Angoisses liées aux processus de différenciation et de séparation
En fait, parmi les angoisses liées à ces processus de séparation ou de différen-
ciation, on retrouve les angoisses d’intrusion, les angoisses de persécution
et les angoisses de perte ou d’abandon. Ces angoisses peuvent entraîner
la mise en jeu de plusieurs mécanismes de défense dont la projection, le
clivage au moi, le clivage de l’objet, le déni et l’annulation rétroactive.
Angoisses d’intrusion
On retrouve différentes formes d’angoisse intrusive en fonction du degré
d’intégration atteint ou de la nature de l’intrusion. Elles sont liées aux
angoisses de vidange et de pénétration (cette dernière catégorie est liée à
la différence de sexes) chez le patient schizophrène, psychotique (idées
délirantes, troubles perceptifs, bizarreries, etc.) et dans les états limites.
« Ces angoisses peuvent augmenter les angoisses de castration et de péné-
tration. » (Roussillon, 2014)
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322 Status clinique pédopsychiatrique

L’identification projective est préférentiellement le mécanisme de défense


en jeu lors de l’émergence de ces angoisses.

Angoisse de persécution
Le patient dit avoir peur que quelqu’un lui fasse du mal. Il n’arrive plus à
sortir de chez lui ou à sortir sans être accompagné. Le persécuteur peut être
désigné ou peut être une personne inconnue. Il peut s’agir de la police, des
pompiers, d’autres enfants qu’il croise pendant la récréation ou le temps
parascolaire, etc. Certains patients persécutés prennent des précautions
avant de sortir de chez eux.

Angoisses de perte ou angoisse d’abandon


Le patient a peur de perdre ce qu’il possède. L’angoisse s’articule autour de
la perte de l’amour de l’objet. On retrouve deux formes de perte :
• la perte rattachée aux angoisses primitives d’anéantissement. Cette
angoisse vise la perte du support, de l’appui, de ce à quoi le patient
s’agrippe et se cramponne. « Cette forme de perte se rattache à l’angoisse
de chute sans fin et, en dernière instance, à l’angoisse d’anéantissement. »
(Roussillon, 2014) ;
• la perte qui est orientée en direction de la position dépressive et des
angoisses liées à la différence des sexes.
Angoisses liées à la différence des sexes
Il existe deux types ou formes d’angoisses liées à la différence des sexes :
l’angoisse de castration et celle de pénétration. L’angoisse de castration
concerne plutôt les hommes et l’angoisse de pénétration les femmes. En ce
qui concerne la bisexualité psychique, les deux sexes peuvent être concer-
nés par l’une ou l’autre forme d’angoisse.
Angoisse de castration
Selon certains auteurs, « les angoisses de castration se définissent comme
des angoisses de castration phallique, mais elles sont proches des angoisses
de perte. La perte de la toute-puissance phallique est une angoisse de ne pas
être le tout de l’autre, de perdre la relation exclusive à l’objet du fait de la
rivalité, de la jalousie, du partage. » (Chagnon et al. 2011)
Il s’agit des angoisses de « perdre le pénis », la force de travail, la créa-
tivité, son pouvoir de séduction, etc. L’objet qui menace de castration est
présent. L’angoisse est générée dans le but de punition : retirer au patient
sa force de créer, de travailler, de penser, de séduire, etc. Elle contrebalance
la position active au sentiment de culpabilité et l’envie de transgresser
du patient. « L’angoisse de perdre le pénis constitue un pont entre les
investissements narcissiques relatifs à la possession de quelque chose de
beau qui symbolise la force (le phallus), et un instrument de plaisir sexuel.
Derrière la possession d’un organe relatif à la puissance, c’est toute l’inté-
grité corporelle qui se profile. Derrière l’angoisse de castration, on aperçoit

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Affects 323

les angoisses primitives relatives au morcellement et à l’anéantissement. »


(Roussillon, 2014) Le refoulement est le mécanisme de défense le plus mis
en jeu.
Angoisses de pénétration
Dans les angoisses de pénétration, le patient a le fantasme d’activité
sexuelle à but passif. Ces angoisses sont tout le contraire de la forme mas-
culine, l’angoisse de castration. Ici, le patient ressent la peur du désir de se
laisser pénétrer par l’objet. « Elle exprime une forme de désir et de punition
relative à ce désir. » (Roussillon, 2014) Le fantasme de se faire pénétrer ou de
pénétrer l’autre peut être analysé dans les rêves ou d’autres matériaux que
rapportent les patients.

Exploration de l’angoisse et de la peur


Les termes « angoisse » et « peur » prêtent à confusion dans le langage popu-
laire. Il est très important de clarifier avec le patient si ce qu’il dit ressentir
est bel et bien de l’angoisse ou de la peur. Le thérapeute recherche l’origine,
la cause, la fréquence, la durée, le type, les réactions face à l’angoisse ou
à la peur, les stratégies d’évitement ou de compensation, les mécanismes
de défense, le contact ou la perte de contact avec la réalité au moment de
l’angoisse, ou de la peur, etc.
Voici à titre d’exemples certaines questions à poser : « C’est quoi avoir
peur pour toi ? », « Qu’est-ce qui te fait peur ? », « Peux-tu m’en parler
davantage ? », « Peux-tu m’expliquer en quoi consiste cette peur ? », « Veux-
tu bien m’expliquer, m’en parler ou me décrire cette peur ? », « À quel
moment de la journée as-tu ces manifestations ? », etc.
« De quoi as-tu peur ? », « As-tu peur des gens ou de certaines choses en
particulier ? », « As-tu peur de te faire agresser, si oui par qui ? », « Peut-on
dire que tu as une peur de te retrouver seul ? », « Est-ce qu’il y a des choses
qui te font peur dans ta vie ? », « Qu’est-ce qui te met mal à l’aise ? »,
« Qu’est-ce qui te fait peur maintenant ? », « As-tu peur d’entrer dans mon
cabinet ? », « Pourquoi n’arrives-tu pas à venir à tes rendez-vous ? »
« Penses-tu être quelqu’un de nerveux ? », « Peut-on dire que tu es
quelqu’un d’anxieux la plupart de temps ? », « Ressens-tu la peur à l’idée
juste de sortir chez toi le matin pour aller à l’école ou dans les magasins ? »,
« As-tu la peur des situations sociales ou de parler en public ? », « Peux-tu
prendre les transports en commun sans crainte ? », « Éprouves-tu de la peur
devant une foule ou quand tu te retrouves sur des hauteurs ? », « As-tu peur
des insectes ou d’autres bêtes (les araignées, les abeilles, le chien, le chat, les
souris, le ver de terre, etc.) ? », « As-tu parfois peur sans savoir vraiment de
quoi ? », « Est-ce que tu constates des choses particulières qui te font peur,
par exemple dans ta chambre, ta maison, à l’école, dans la rue ou dehors ? »,
« As-tu peur des animaux ? », « À quel moment de la journée apparaît ta
peur (au réveil, la nuit, avant de dormir, avant d’aller au centre commercial,

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324 Status clinique pédopsychiatrique

etc.) ? », « Peux-tu aller à l’école malgré la peur ? » et « N’arrives-tu pas à


sortir de chez toi ? »
D’autres questions plus spécifiques doivent être posées : « Quelle serait la
fréquence de survenue de cette peur dans la journée ? », « Sur une échelle
de 0 à 10 (0 pour aucune peur et 10 pour la peur la plus insupportable de ta
vie), combien donnes-tu à ta peur maintenant ? », « Penses-tu être le seul à
avoir ce type de peur, pourquoi le crois-tu ? », « Pourquoi as-tu peur ? », etc.
Le thérapeute cherche comment le patient gère sa peur ou son angoisse :
« Et que fais-tu lorsque tu as peur ? », « Comment t’y prends-tu pour te ras-
surer ? », « Ta peur, penses-tu que tu peux la supporter ? », « Est-elle vraiment
intense, cette peur ? », « Cette intensité reste-t-elle tout le temps ou baisse-t-
elle souvent, si oui quand exactement ? », « Est-ce qu’il y a des moments où
tu arrives à sortir de chez toi ? Si oui, quand et pourquoi ? », « Peux-tu faire
d’autres activités malgré ta peur ? », « Te ronges-tu les ongles ou te tires-tu
les cheveux ou te grattes-tu la peau quand tu te sens stressé ? », « Quand
survient l’angoisse ou la peur ? », « As-tu peur la nuit ? », « Utilises-tu la
petite lumière pour dormir ? », « Arrives-tu à sortir de chez toi et aller sans
difficultés dans les magasins, à la plage, ou chez tes amis sans crainte ? »
On essaie de retrouver les manifestations somatiques de l’angoisse :
« Comment se manifeste ta peur ou ton stress ? », « Veux-tu bien me décrire
comment tu deviens quand tu as vraiment peur ? », « Éprouves-tu des
attaques de panique ? », « Selon toi, qu’est-ce qui pourrait déclencher cette
peur ? », « Peux-tu te souvenir des événements précis qui seraient à l’origine
de cette peur ? », « Ressens-tu la boule à la gorge ou au ventre quand ta peur
apparaît ? », « Est-ce que d’autres personnes de ton entourage souffrent de
la peur ? », « Est-ce que tu te plains de douleurs physiques fréquemment ou
de douleurs chroniques ? », « As-tu d’autres ressentis particuliers durant ta
peur ? », « Est-ce qu’il t’arrive d’avoir l’impression de t’évanouir, d’avoir de
la difficulté à respirer ou d’avoir du mal pendant ta peur ? », « Te faut-il de
l’aide à ce moment-là ? », « Combien de temps dure cette peur ? », « Qu’est-
ce qui te rassure contre ta peur ? Comment réagis-tu face à ta peur ? »,
« Comment ressens-tu ta peur ? », « Comment se manifeste cette peur ? »,
« Ressens-tu des manifestations quelconques en particulier ? », « Dans
quelle partie de ton corps se manifeste cette peur ? »
Il est important de rechercher des ruminations anxieuses. Il s’agit des
pensées, des idées ou des préoccupations que le patient ressent comme en
boucle dans sa tête. On lui demande s’il a des idées auxquelles il pense et
qui lui restent dans la tête. Voici quelques questions à titre d’exemples :
« As-tu des idées qui tournent dans ta tête ? », « Arrives-tu à te passer
de penser à ses idées ? », « Cherches-tu à les chasser de ton esprit ou de
ta tête ? », « Peux-tu bien me parler de ces idées ? », « À quel moment
de la journée ces idées sont-elles présentes ? », « As-tu l’impression que
c’est quand tu es seul que tu y penses beaucoup ou même en présence

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Affects 325

d’autres personnes ? », « Est-ce que ces idées t’empêchent d’interagir avec


tes amis ? », « Arrives-tu à suivre la maîtresse ou tu ne fais que penser à tes
idées ? », « As-tu l’impression d’être seul en train de parler ou de discuter
avec toi-même ou tu crois qu’il y aurait d’autres personnes dans ta tête ? »,
« Et depuis quand as-tu ces idées ? »

Idées noires et suicidaires


Idées noires
Les idées noires consistent en des ruminations ou questionnements que le
patient peut avoir sur sa vie, la mort, le futur sans lui, la vie après la mort.
Il peut avoir envie que les choses s’arrêtent. Le patient demande ce qui va
arriver s’il n’est plus de ce monde. Il peut s’imaginer à son enterrement en
se demandant qui serait triste. S’il pense, par exemple, que ses parents, ses
proches amis ou sa petite amie seraient très attristés par sa mort, cela est de
bon aloi. Inversement, s’il répond qu’il ne sait pas, ou bien qu’il n’arrive pas
à s’imaginer ou à se représenter les conséquences de sa mort sur ses proches,
cela est très dangereux, et c’est au thérapeute de faire la part des choses
entre le véritable risque suicidaire avec un projet suicidaire clair et ces idées
noires. Le thérapeute recherche le niveau de dangerosité, de l’urgence et du
risque de passage à l’acte chez le patient qui présente ces idées suicidaires.
On peut retrouver des réelles pensées sur la mort, mais orientées vers soi.
Ici, le thérapeute n’objective pas de passage à l’acte autoagressif, ni de projet
de suicide. Tout est dans le verbal et non dans les actes. L’activité de pensée
du patient est très fortement tournée vers ces idées de mort, la mort, les
choses sombres, les catastrophes, l’après-lui sur terre, l’au-delà, etc.

Idées suicidaires
L’examen des idées suicidaires objective souvent des scarifications, des idées
de mort, de projet suicidaire, etc. Ainsi, le patient dit clairement avoir envie
de se donner la mort. Il peut avoir un projet de suicide clair ou flou. Il peut
avoir déjà décidé du jour ou de l’heure de sa mort. Techniquement, on
décrit le mode de survenue de ses idées ou envies de mourir, l’intensité, la
fréquence ou les facteurs aggravants (le patient n’arrive pas à se représen-
ter les effets de son suicide ou les conséquences de sa mort en disant que
personne ne s’inquiéterait pour lui) et protecteurs (patient est conscient
ou verbalise le fait que les gens de son entourage seront tristes s’il venait à
mourir) de ces idées suicidaires.
Le thérapeute recherche le mode de passage à l’acte, la répercussion sur
la vie du patient, son projet suicidaire (chercher si ce projet est clair, flou, le
moyen de passage à l’acte, etc.). L’échelle du risque, urgence et dangerosité
(RUD) permet d’adapter la prise en charge.

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326 Status clinique pédopsychiatrique

Exploration des idées noires


et des équivalents suicidaires
Exploration générale des équivalents suicidaires
La mort ou l’envie de mourir peut avoir une signification différente selon
qu’il s’agit d’un jeune patient ou d’un adolescent. Il est important de souli-
gner la présence d’une dissociation lors d’émergence des actes ou idées sui-
cidaires. Ce moment est accompagné d’angoisse et de tension interne très
agressive retournée sur soi. Après un passage à l’acte autoagressif (par exem-
ple lors des scarifications), la partie saine du patient peut devenir mater-
nante et essayer de le protéger contre ses passages à l’acte. Le cas échéant,
on voit le patient qui demande à panser ses plaies, il peut les dissimuler ou
adopter une attitude de « bienveillance » envers soi.
Dans l’exploration des tentatives de suicide, des projets ou idées suicidaires,
l’essentiel est d’être clair et ouvert. Le thérapeute cherche à préciser ce qu’attend
le patient en posant des actes suicidaires à l’aide de diverses questions. Le thé-
rapeute doit se montrer empathique et préoccupé par l’état du patient. Il est
important de le rassurer et de l’inviter à aborder ses ressentis ou ses souffrances
internes sans avoir peur d’être jugé, rejeté ou méprisé par l’entourage.
Le thérapeute demande au patient de lui raconter les événements qui ont
précédé ou qui l’ont mis dans un état jusqu’à penser au suicide ou aux idées
noires. On examine les événements qui ont précédé ou qui semblent pour
le patient être à la base des idées noires ou suicidaires. Le thérapeute amène
le patient à raconter avec ses mots la chronologie des événements pré- et
post-suicidaires. Quelles sont les angoisses, les craintes, les peurs, les moti-
vations, etc. ? Quelle est cette goutte de trop qui a fait déborder la vase ?
Le thérapeute demande sans hésiter au patient s’il a envie de mourir. Les
questions de quand, où, comment, avec qui et quoi, pourquoi, etc. aident à
bien analyser les idées suicidaires sans se montrer intrusif.

Exploration des idées noires


Certaines questions peuvent aider le thérapeute dans l’exploration des idées
noires, à savoir : « Penses-tu souvent à la mort ? », « C’est quoi pour toi, mou-
rir ou la mort ? », « Devrais-je comprendre que pour toi, faire une bêtise égale
se couper sur le corps ? », « Qu’as-tu compris de la mort ? », « Selon toi, où
vont les morts ? », « Comment te sens-tu quand les idées ou l’envie de mort
occupent ton esprit ou tes pensées ? », « Arrives-tu à faire d’autres activités ou
penser à autre chose qu’à la mort ? », « Est-ce que tu parles à quelqu’un de ces
idées ? », « Avec qui, dans ta famille, à l’école ou au foyer, penses-tu être en
mesure d’en parler ? », « Est-ce que tu penses qu’ils te croient, tes parents ? »,
« Que fais-tu quand émergent ces idées dans ta tête ? », « N’existe-t-il pas une
autre solution que la mort ? », « Dis-moi, s’agit-il de tes propres idées ou bien
tu as l’impression qu’elles te sont communiquées par quelqu’un d’autre ? »

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Affects 327

Exploration des scarifications


Le thérapeute doit analyser la présence ou non du bénéfice secondaire
que peuvent lui offrir ses actes de scarification. « Est-ce que tu te scarifies
souvent, fréquemment ou rarement ? », « Si oui comment ? », « Quand
penses-tu le faire, à quelle fréquence ? », « Est-ce que tu te scarifies seul ou
en compagnie ? », « Comment tu te sens après tes gestes de scarification ? »
Les questions suivantes sont proposées en guise d’exemples : « Est-ce que
tu montres tes marques de coupures aux gens ? », « Te caches-tu avant, pen-
dant ou après le geste de scarification ? », « Est-ce que tu te scarifies seul ou
en groupe de pairs ? », « Que ressens-tu après l’acte ou le geste ? », « Qu’est-
ce qui t’a motivé à te scarifier ? », « Et après tes scarifications, qu’est-ce qui a
suivi ? », « As-tu ressenti de la douleur pendant ou après les scarifications ? »,
« Que penseraient les autres (ton père ou ta mère) de tes actes ? », « Crois-tu
que ce fut difficile ou facile pour ton père ou ta mère en apprenant que tu te
scarifies ? », « C’est quand la dernière fois que tu t’es scarifié ou mutilé ? »,
« As-tu ou non encore l’envie de te scarifier ? », « Pourquoi d’un coup, tu
me dis que tu n’as plus besoin ni envie de te scarifier ? », « Peut-on dire que
les scarifications ne soulagent plus tes douleurs ? », « Demandes-tu de l’aide
après tes scarifications ? », « Dis-moi, est-ce que c’est encore cette voix qui
t’a intimé l’ordre de te scarifier ? », « Et maintenant, quelle serait la réaction
de tes parents s’ils apprenaient que tu te scarifies ? », « Pourquoi ne veux-tu
pas en parler à tes parents ? »
On recherche en outre s’il y a d’autres moyens ou stratégies à mettre
en place pour lui éviter de passer à l’acte ou d’avoir en boucle des idées
noires. Y a-t-il d’autres gestes ou actions que fait le patient dans l’objectif
de s’apaiser (par exemple se donner des coups, se punir, etc.) ? Quoi qu’il
en soit, il ne faut jamais le responsabiliser d’être le seul garant de sa santé.
Il faudrait plutôt lui montrer qu’il n’est plus seul, qu’il a le droit d’en parler
sans avoir peur d’être jugé.

Exploration des idées suicidaires


L’exploration des idées suicidaires exige que le thérapeute soit plus direct.
On doit éviter de poser des questions sous forme de paraboles, en demi-
mots ou à l’aide de figures de style.
Par exemple, on peut demander au patient : « As-tu perdu goût à la
vie jusqu’à désirer la mort ? », « Veux-tu te donner la mort ? », « Depuis
quand penses-tu à la mort ? », « Pourquoi as-tu fait une tentative de sui-
cide (TS) ? », « As-tu envie de te faire du mal ? », « Penses-tu te donner la
mort ? », « Qu’est-ce que tu as fait comme TS ? », « Peux-tu me décrire les
idées qui sont derrière cette TS ? », « Existe-t-il d’autres TS que tu aies faites
par le passé ? », « Est-ce qu’il t’arrive de poser des gestes agressifs contre toi-
même ? », « À quoi penses-tu quand tu parles de bêtise ? »

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328 Status clinique pédopsychiatrique

On peut aussi lui demander : « De quelle façon veux-tu te donner la


mort ? », « Qu’est-ce qui t’a fait penser au suicide ? », « As-tu déjà vu un
mort ou un suicidé ? », « Quelqu’un t’aurait parlé de suicide ? », « Que cher-
chais-tu en prenant des toxiques ? » Le patient était-il en train de vouloir
planer, se sentir ailleurs, ne plus souffrir, en finir avec sa vie actuelle, ne
plus avoir une sensation donnée, etc. ? Quelle signification donne-t-il à ses
actes suicidaires ?
« Pourquoi veux-tu mourir ? », « Quelqu’un sait que tu as ce projet de
mourir ? », « Qu’est-ce qui t’empêcherait de te donner la mort ? », « Quel
est exactement ce projet de mourir ? », « Pourquoi as-tu choisi ce jour ? »,
« Pourquoi voulais-tu le faire à cette heure de la journée ? », « As-tu un
accès facile à des produits létaux (médicaments, produits toxiques, produits
de nettoyage, drogues, etc.) chez toi ? », « Y aurait-il une raison qui peut
arrêter ton projet de mourir ? », « Qui va se sentir mal une fois que tu seras
mort ? », « S’agit-il d’une envie de faire payer à quelqu’un ? », « Qui veux-tu
punir en te donnant la mort ? » Il faut vérifier si le patient a accès aux armes
blanches, armes à feu, produits toxiques et létaux.

Remarque
La plupart du temps, l’évolution des idées noires va vers les idées suicidaires,
puis passe à la tentative de suicide et, finalement, au suicide. Il est essentiel
de rechercher le syndrome présuicidaire et suicidaire chez tous les patients.
Le thérapeute recherche le sentiment de culpabilité survenu dans ce contexte,
la manière dont le patient essaie de réduire sa tension psychique, comment il
s’apaise ou quel peut être le bénéfice secondaire lié aux gestes ou aux actes à
caractère suicidaire ou autodestructeur.

Troubles du sommeil
Insomnie
L’insomnie est le manque de sommeil. Elle peut être totale ou partielle. Il
peut s’agir d’un retard d’endormissement, de réveils multiples ou de réveil
précoce. La qualité de sommeil est plus importante que sa quantité. Un
bon sommeil est encore appelé sommeil réparateur. Certains individus sont
qualifiés de petits ou grands dormeurs selon qu’ils dorment moins ou plus
de 6 heures par nuit.
Plusieurs causes peuvent perturber le sommeil : le changement de rituel
avant le coucher, le régime alimentaire, la prise de médicaments ou de
toxiques, les maladies organiques, les voyages, le changement climatique,
les troubles mentaux, l’angoisse, les stress, etc.
Ainsi, lors de l’exploration du sommeil, le thérapeute demande au patient
si son sommeil est réparateur ou de bonne qualité. Est-ce qu’il supporte

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Affects 329

son manque de sommeil ou non ? Quelles sont les diverses raisons de son
insomnie selon lui ? On décrit avec lui les circonstances d’apparition de
cette insomnie : le début et la durée de l’insomnie, la qualité de l’hygiène
de sommeil (repas, préparatifs et habitudes avant le coucher, environne-
ment de la chambre à coucher : lumière, sons, etc.). Comment ressent-il son
réveil, son sommeil est-il perturbé par des cauchemars ou l’environnement,
etc. ?
L’insomnie est l’un des signes les plus présents dans les troubles mentaux.
La qualité, le type d’insomnie, la capacité du patient à la supporter ou non,
les répercussions de cette insomnie sur ses compétences cognitives ou ses
performances scolaires, etc. sont à décrire ou à rechercher.
Est-ce que l’insomnie est d’origine iatrogène ou non ? Est-elle induite par
une cause somatique ou un trouble mental ?

Insomnie d’endormissement
Le patient n’arrive pas à trouver le sommeil. Il tourne en rond dans son
lit. La cause de cette insomnie peut être des ruminations anxieuses, une
anxiété, une peur de la nuit ou du noir, des angoisses de perte, de séparation
ou de mort, ou bien d’autres causes organiques, iatrogènes ou toxiques,
etc. Cliniquement, cette insomnie d’endormissement est retrouvée chez le
patient anxio-névrotique ou psychotique.

Insomnie de réveils multiples


Cliniquement, le patient dit qu’il se réveille plusieurs fois la nuit. Cette
insomnie peut s’accompagner de cauchemars ou d’autres perturbations du
sommeil telles que les terreurs nocturnes, etc. Cela signe une anxiété retrou-
vée chez les psychotiques, les anxieux, etc. D’autres patients n’arrivent plus
à se rendormir une fois réveillés par leur insomnie, etc.

Insomnie de réveil précoce


Ce symptôme est retrouvé chez les patients déprimés. Le patient se réveille
très tôt plus que d’habitude, et reste au lit. Il est envahi par des ruminations
anxieuses dès son réveil ou des idées noires, voire suicidaires. L’asthénie le
retient au lit et cette fatigue l’empêche de se mouvoir ou de sortir de son lit.
Cette insomnie peut s’accompagner de la clinophilie.
La clinophilie est le fait que le patient reste dans son lit durant la journée
sans avoir rien à faire. Il a du mal à se lever du lit. Cela signe le retrait autis-
tique, la dépression, la phobie, etc.

Insomnie quasi totale


Elle est retrouvée chez le maniaque qui ne dort quasiment pas de toute la
nuit. Il dit le matin à son réveil qu’il se sent en forme. Cette impression de
bien-être peut durer toute la journée. Le patient ou son entourage dit qu’il
a totalisé plus de deux ou trois nuits sans fermer l’œil complètement mais il
est toujours en forme et déborde d’énergie.

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330 Status clinique pédopsychiatrique

Hypersomnie
C’est l’inverse de l’insomnie. Le patient dort plus que d’habitude et son
sommeil se prolonge dans la journée. Ce symptôme peut se retrouver dans
les états dépressifs ou psychotiques comme moyen d’échapper à ses persé-
cuteurs ou d’éviter de se confronter à la réalité interne ou externe.
L’hypersomnie requiert de la part du thérapeute d’explorer les différentes
causes iatrogènes, la consommation de toxiques ou toute autre cause soma-
tique ou psychique.

Exploration du type d’insomnie


Lors de cette exploration, le thérapeute doit poser plusieurs questions pour
éclaircir les causes, le type, les sortes et la conséquence ou répercussion de
l’insomnie sur les compétences ou les performances du patient.
Il peut, par exemple, demander : « As-tu des difficultés avant de te cou-
cher ? », « À quelle heure vas-tu au lit pour dormir ? », « Peux-tu me dire
ce que tu as l’habitude de faire ou de prendre avant d’aller te coucher ? »,
« Que fais-tu ou quels sont les préparatifs que tu mets en place avant d’aller
dormir ? », « Que fais-tu avant de te coucher ? », « Vas-tu au lit aux mêmes
heures le soir ? », « Prends-tu un médicament, un repas copieux, des pro-
duits toxiques avant de dormir ? », « Depuis quand tu ne dors plus ? ».
« As-tu plus envie de dormir ou moins envie ? », « Comment apparaissent
ton mal-être ou des difficultés le soir ? », « As-tu de la peine à t’endormir ? »,
« À quelle heure le soir vas-tu au lit pour dormir ? », « Arrives-tu à trouver
rapidement ou non le sommeil ? », « Combien d’heures dors-tu la nuit ? »,
etc.
« Est-ce que tu te réveilles en pleine nuit, si oui pourquoi ? », « Parviens-tu
à te rendormir ? », « Penses-tu avoir des difficultés à t’endormir ou à garder
ton sommeil ? », « Est-ce qu’il t’arrive de te réveiller la nuit ? ».
« Dors-tu comme d’habitude ? », « Comment supportes-tu tes insom-
nies ? », « Comment occupes-tu ta journée après une nuit d’insomnie ? »,
« Restes-tu seul ou en compagnie de ton entourage ? »
« Fais-tu des rêves ? Est-ce que tu fais des cauchemars ? », « Est-ce que
tes rêves te font peur ? », « Cherches-tu à aller dans le lit de tes parents la
nuit ? Si oui, pourquoi ? », « De quoi as-tu peur la nuit ? », « Réveilles-tu tes
parents la nuit ? »
« Explique-moi comment tu te sens en te réveillant au beau milieu de la
nuit ou le matin », « Comment te sens-tu le matin au réveil, as-tu l’impres-
sion de t’être suffisamment reposé ou pas du tout ? », « Te réveilles-tu
souvent en sursaut ? », « Est-ce que tu te réveilles très tôt le matin ou la
nuit sans arriver à te rendormir ? », « Ces derniers jours, as-tu l’impression
d’avoir besoin de beaucoup de sommeil ou peu ? », « À quelle heure te
réveilles-tu ? », « Es-tu fatigué au réveil ou dans la journée ? »

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Affects 331

On s’informe sur l’environnement de la chambre du patient. Cette explo-


ration peut identifier différentes causes qui interfèrent avec la qualité du
sommeil. Il peut s’agir de nuisances sonores, lumineuses, de changement
de température.
Par ailleurs, on cherche la date de début des insomnies (« Depuis quand
n’arrives-tu pas à dormir ? »), les circonstances d’insomnie, les réveils
nocturnes pendant les week-ends, les vacances, les siestes, le caractère
réparateur du sommeil, la prise de toxiques ou de médicaments, l’usage de
la caféine, des écrans, la somnolence diurne, les activités journalières et,
pour les filles, les cycles menstruels. Est-ce que le patient fait des siestes les
après-midi ou après les cours ? Quelle est la qualité de son réveil le matin
(les parents insistent-ils avant qu’il se réveille ?). Le message que le patient
envoie avant de dormir peut être une source d’anxiété.

Diagnostic différentiel du trouble du sommeil


Plusieurs pathologies somatiques ou organiques peuvent avoir l’insom-
nie comme symptôme. Leur liste n’étant pas exhaustive, voici quelques
hypothèses : l’anémie, l’apnée du sommeil, les amygdales volumineuses,
les dysfonctionnements ou les dérèglements thyroïdiens, les épilepsies,
l’intolérance alimentaire, les troubles ou carences électrolytiques, etc. Ces
pathologies intéressent les autres branches médicales.
L’insomnie se rencontre dans les troubles psychiques tels que le trouble
bipolaire, la dépression, les troubles anxieux, la schizophrénie et les troubles
dissociatifs.

Remarque
Nous avons choisi de ne pas être exhaustifs car les autres troubles du som-
meil comme les parasomnies (les somnambulismes, les terreurs nocturnes,
etc.), les insomnies non spécifiées, les troubles de l’alternance veille-sommeil
(avec avance ou retard de phase, etc.), le syndrome des jambes sans repos,
les apnées centrales du sommeil, etc. peuvent également être recherchés par
le thérapeute en adaptant les diverses questions proposées ici.

Troubles des conduites alimentaires


Généralités
Les troubles des conduites alimentaires ou les troubles alimentaires consti-
tuent une entité psychopathologique à part entière. Dans l’objectif de rester
focalisé sur la sémiologie des troubles psychiques, ce travail apporte certains
éléments pour orienter la démarche clinique.

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332 Status clinique pédopsychiatrique

Lors de cette exploration sémiologique, le clinicien analyse la qualité


de l’alimentation (la fréquence, le rythme, les envies alimentaires, les
restrictions alimentaires, l’évitement d’ingestion des aliments, les inter-
dits alimentaires, la présence ou non du plaisir en s’alimentant, les sortes
d’aliments, etc.) du patient. Il est question de déterminer si l’on est face à
quelqu’un qui présente une anorexie mentale, une boulimie, une hyper-
phagie boulimique, ou tout autre trouble alimentaire (le pica ou le méry-
cisme, par exemple).
De plus, le thérapeute essaie de dater la durée, les causes (celles-ci peuvent
être internes ou externes au patient, etc.), les conséquences sur la santé
physique et psychique, les éventuelles perturbations sociales en famille ou
en collectivité qu’impliquent les troubles des conduites alimentaires. Quel
sens donne le patient à ses refus ou difficultés de s’alimenter ?
Le thérapeute demande si le patient a un bon appétit. Est-ce que cet
appétit est conservé ou diminué ? Le cas échéant, depuis quand ? Quelles
sont les causes qui ont perturbé l’appétit ? Le patient est-il sélectif dans son
alimentation ?
La perte d’appétit est-elle survenue dans le cadre d’une mauvaise image
de soi ? Le patient fait-il du sport ou d’autres activités intensives pour per-
dre ou gagner du poids ? Éprouve-t-il du plaisir quand il mange ? Se fait-il
vomir après le repas ? Mange-t-il pour se remplir ? « Pourquoi cherches-tu
à perdre du poids ? » Quel est son rapport à la nourriture ? S’agit-il d’un
problème familier ou culturel vis-à-vis de la nourriture ?
Enfin, le clinicien devrait analyser lors d’évaluation des troubles des
conduites alimentaires : la qualité ou la nature de l’angoisse, la présence
ou non d’une tension psychique, la culpabilité, les actes de réparation tels
que se faire vomir qui peuvent accompagner les troubles des conduites ali-
mentaires. Le thérapeute essaie de comprendre si le patient fait ses actes de
manière impulsive ou non. Quel est le bénéfice secondaire de ses troubles ?
Le plus important encore est d’arriver à décrire le ou les mécanismes de
défense qui soutiennent ce trouble.

Exploration des troubles des conduites alimentaires


L’investigation clinique des troubles des conduites alimentaires est compa-
rée à la construction d’un édifice, il faut avancer avec tact dès la pose de
la première pierre jusqu’à la fin de la construction. Il ne s’agit pas de se
précipiter pour poser des questions. Le but est d’établir un lien entre les
causes et les effets. C’est dans cette optique que le thérapeute doit trou-
ver un levier pour proposer une prise en charge adéquate et adaptée aux
besoins du patient. Il est important qu’il prépare le patient quand il doit
lui poser les questions qui ont trait à la nourriture et à l’alimentation. Il est
nécessaire de différencier un trouble alimentaire dû à l’excès, au défaut ou
au refus de s’alimenter.

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Affects 333

Lors de cette exploration, le thérapeute peut poser les questions sui-


vantes : « Quel type d’appétit penses-tu avoir ? », « Pourquoi ne manges-tu
plus comme avant ? », « Y a-t-il une personne de ta famille qui a des diffi-
cultés avec la nourriture ? », « Manges-tu en cachette ou entre les repas ? »,
« Quel est ton plat préféré ? », « Quel repas du jour préfères-tu ? », « Manges-
tu d’autres substances ou choses à part les aliments habituels (les papiers, les
cheveux, les chiffons, etc.) ? »
« Comment te trouvent tes proches en parlant de ta silhouette, de ton
physique, etc. ? », « Contrôles-tu ou vérifies-tu les étiquettes ou les compo-
sitions des aliments avant leur achat dans les magasins ? », « Qu’est-ce qui
pourrait t’arriver si tu mangeais comme les autres membres de ta famille ? »,
« Pourquoi n’aimes-tu pas manger ce plat ? », « Arrives-tu à finir le plat
qu’on te sert ? »
« Est-ce que tu te fais vomir après avoir mangé ? », « Que ressens-tu après
avoir vomi ton repas ? », « Depuis quand te fais-tu vomir ? », « Comment
le fais-tu ? », « Quelqu’un de ton entourage est-il au courant que tu te fais
souvent vomir ? », « Pourquoi l’as-tu caché à tes parents ? »

Bibliographie
American Psychiatric Association. (2015). DSM-5 : manuel diagnostique et statistique
des troubles mentaux (traduit par J. D. Guelfi et M.-A. Crocq ; 5e éd.). Elsevier
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des angoisses et problématiques de perte en psychopathologie de l’enfant. Psy-
chologie clinique et projective, 17(1), 29-64.
Golse, B. (2015). Le Développement affectif et cognitif de l’enfant (5e éd.). Elsevier Masson.
Jeanmet, N. (2005). La haine. Dans A. de Mijolla (dir.), Dictionnaire international de la
psychanalyse. Hachette Littérature.
Kaplan, H.I. & Sadock, J.B. (2005). Manuel de poche de psychiatrie clinique (traduit par
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Kapsambelis, V. (2007). L’Angoisse. Presses universitaires de France.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie Médico-
Chirurgicale, Psychiatrie, article 37-213-A-10.
Oppenheimer, A. (2005). La rage. Dans A. de Mijolla (dir.), Dictionnaire international
de la psychanalyse. Calmann-Lévy.
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Roussillon, R. (2014). Manuel de psychologie et de psychopathologie clinique générale
(2e éd.). Elsevier Masson.
Tisseron, S. (2013). La haine. Dans A. de Mijolla (dir.), Dictionnaire international de la
psychanalyse. Hachette Littérature.
Winnicott, D. W. (1971). La Consultation thérapeutique et l’enfant. Gallimard.

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18 Pulsions et fantasmes

Pulsions
Généralités
La pulsion est définie comme un concept limite entre le somatique et le
psychique. On n’a pas à faire avec la pulsion, mais avec sa représentation
et les affects associés. Le père fondateur de la psychanalyse est le premier à
avoir introduit la notion des pulsions. Dans sa théorie, les pulsions sexuelles
s’étayent sur les pulsions d’autoconservation ou les pulsions du moi avant
de s’en différencier et de devenir des pulsions libidinales. Rappelons que
les pulsions libidinales amènent le patient à retrouver un plaisir initial sans
vraiment avoir besoin d’autoconservation. Prenons l’exemple d’un bébé qui
se met à suçoter son pouce entre les repas, ce geste ne signifie pas qu’il veut
manger encore ou qu’il a faim, plutôt qu’il veut retrouver la trace mnésique
du plaisir qu’il ressentait lors des tétées précédentes. Un parent suffisam-
ment bon ne peut pas le contrecarrer dans ce moment d’autosatisfaction en
le gavant avec de la nourriture, en l’occurrence le sein ou le biberon.
Les pulsions sont intimement liées aux mécanismes de défense pour lut-
ter contre l’angoisse. C’est dans cette perspective que les pulsions donnent
l’accès vers la symbolisation telle que bien expliquée par Roussillon (2012)
dans ses travaux.
Pour essayer de donner une définition, nous dirions que la pulsion est ce
qui permet au patient de se relier à l’autre ou à l’objet. On peut encore dire que
la pulsion devient une tentative de mise en lien entre l’un et l’autre ou entre
le patient et l’objet. Cette pulsion permet de saisir ou de comprendre ce qui
se joue chez l’un et l’autre. Elle véhicule le message entre deux protagonistes.
La grande particularité des pulsions est qu’elles ne s’arrêtent jamais,
contrairement à ce que les gens pourraient croire. Elles fonctionnent en
boucle. Elles peuvent partir soit du patient vers l’objet, soit le contraire. Le
thérapeute doit garder en tête que dans le patient, il y a le monde interne
et externe. Ainsi, la théorie des pulsions va de pair avec la théorie de la
relation d’objet, les mécanismes de défense (cf. chapitre 16) et l’idéal du
moi et le moi idéal (cf. chapitre 19).
Avant d’aller plus loin sur les différentes sortes de pulsions, revenons sur
les quatre caractéristiques des pulsions telles que définies par Freud dans ses
trois théories :
• première théorie : Freud dit que les pulsions sexuelles devraient être
opposées aux pulsions dites du moi. Cette année-là, l’auteur n’avait pas
encore développé la théorie sur le moi. Les pulsions du moi sont celle de

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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336 Status clinique pédopsychiatrique

l’autoconservation. Le patient ou le bébé fait tout pour se conserver. Il rem-


plit ses besoins physiologiques et affectifs primaires ;
• deuxième théorie : Freud reformule en 1914 sa première théorie grâce à
ses connaissances nouvelles sur la problématique du narcissisme (cf. son
ouvrage « Pour introduire le narcissisme »). Il explique que les pulsions,
dont la libido était au début sexuelle, tournent soit vers l’objet et devien-
nent une libido objectale, soit vers le sujet ou le patient et deviennent une
libido narcissique. À ce moment-là, la théorie du moi est revisitée. Freud dit
que le moi du patient est investi de manière spécifique. On remarque là de
nouvelles connaissances sur le moi ;
• troisième théorie des pulsions, publiée en 1920 dans ses travaux sur le
destin des pulsions : on voit apparaître une nouvelle organisation des pul-
sions. Freud fractionne deux grandes parties qui sont les pulsions de mort et
les pulsions de vie (celles-ci regroupent toutes les pulsions sexuelles, c’est-à-
dire les pulsions objectales et narcissiques).
D’autres types de pulsions ont été théorisés en référence aux idées de
Freud. Contrairement à lui, Mélanie Klein soutient que les pulsions sont
directement présentes dès la naissance du bébé. Elle « situe la pulsion de
mort chez le bébé en rapport avec la peur d’être annihilé. Cette pulsion est
plus psychologique que biologique et se manifeste dans la relation à l’objet,
en particulier avec l’objet-mère que l’on retrouve dans l’analyse, l’analyste
jouant le rôle d’objet primaire. » (Andjelkovic, 2002) Plus tard, apparaissent
d’autres formes de pulsions telles que la pulsion d’attachement introduite
par Didier Anzieu. Avant de développer les différentes sortes de pulsions,
Freud nous apprend que quel que soit le type des pulsions, nous retrouvons
les quatre caractéristiques suivantes.

Poussée de la pulsion
Elle se traduit par l’exigence de travail imposée à l’appareil psychique dont
le rôle est la maîtrise de l’excitation. La libido (du latin libido : « désir »,
« envie », « aspiration ») est la manifestation dynamique (énergie) dans la
vie psychique de la pulsion sexuelle. Elle est la transformation de la pulsion
sexuelle quant à l’objet, au but (pas forcément sexuel), à la source. La pous-
sée détermine l’intensité ou la force de la pulsion.

Source de la pulsion
Elle est le processus qui surgit dans un organe ou une partie du corps. Il
peut s’agir de l’excitation somatique. C’est un lieu du corps en état de ten-
sion, d’excitation ou de manque. Sur le plan sexuel, n’importe quel point
du corps peut aussi bien être l’origine que l’aboutissement d’une pulsion,
c’est-à-dire érogénéisé (zone érogène). Ces zones sont sources d’excitation,
lieu propice à la perte de contrôle entre le monde extérieur et intérieur. En
fait, les soins (handling et holding) qu’a reçus un patient dès sa naissance

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Pulsions et fantasmes 337

sont très importants pour son développement affectivo-émotionnel. Cet


encadrement dicterait la façon dont le patient vivra plus tard son corps et
comment il essaie d’entrer en relation à l’autre.

Objet de la pulsion
L’objet de la pulsion est défini comme le moyen par lequel la pulsion peut
atteindre son but ou sa satisfaction. Il est très variable et non déterminé à
l’avance dans le sens que la pulsion ne se réalise jamais, elle tend vers un
but. Il y a une tendance à la fixation aux premiers objets et transfert de
l’attachement à des objets substitutifs. Il n’y a pas d’adéquation biologique,
d’objet totalement comblant. L’objet de la pulsion est pris dans le fantasme.
L’objet après lequel on court est constitutif de notre propre identité.

But de la pulsion
En fait, toute pulsion doit avoir un but. On se pose la question de savoir ce
que cherche cette pulsion. En se référant à la première topique (conscient,
préconscient et inconscient), le raisonnement dichotomique conduit à dis-
tinguer seulement le principe de réalité et le principe de plaisir. Le but est
alors la satisfaction et le plaisir qui permettent la levée de la tension, de
retrouver l’homéostasie interne, l’état d’excitation zéro. On parle alors de
principe de nirvana.
D’un autre point de vue, le patient peut exprimer des pulsions agressives
à travers les conduites agressives. Celles-ci sont généralement assorties de
fantasmes d’agression. Elles doivent être comprises comme l’expression de
tendances internes qui seront définies chez Freud en termes de pulsion.
Les pulsions sont du domaine du ça. Elles permettent de voir comment
le moi du patient se réfère aux injonctions données par son surmoi pour
contrecarrer ou exécuter les envies ou besoins du ça. Ces pulsions poussent
ou conduisent le patient vers les différents troubles de conduites sociaux et
instinctuels, troubles du comportement, etc.
Les pulsions agressives et libidinales émergent durant la séance, dans le
contexte de relation d’objet organisée autour d’un noyau affectif. Ces deux
grandes catégories de pulsions peuvent être scindées en pulsions de mort,
de destruction, du moi, d’attachement, d’emprise partielle, d’autoconserva-
tion, de vie et sexuelle, etc.

Pulsions libidinales
Relation avec les autres instances psychiques
Les pulsions libidinales vont du moi idéal à l’idéal du moi. Il est très néces-
saire de rechercher quelles sont les pulsions libidinales du patient. Leur
absence est très dangereuse et signifie que le patient est dans une impasse.
Le thérapeute essaie de trouver le type d’intérêt ou de plaisir que porte le
patient sur soi ou sur le monde extérieur. Est-ce qu’il a du plaisir et de

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338 Status clinique pédopsychiatrique

l’intérêt pour les interactions sociales (le sport, la musique, différentes


activités socioculturelles et récréatives, traîner avec les copains de son âge,
plaisir à appartenir à un groupe, un gang, etc.) ? Les zones érogènes sont-
elles présentes ou absentes ou est-ce qu’il essaie d’en garder le contrôle ?
Pulsions érotiques orales
Il est question d’étudier la zone orale. Au cours de cette démarche, le théra-
peute cherche les conduites alimentaires (les attitudes face aux solides et aux
liquides, refus, dégoût et préférences alimentaires), l’appétit (sa constance ou
ses irrégularités, la conduite à table), les activités de suçage et de mordille­
ment. Quand les affects débordent, par exemple, les enfants qui restent
« coincés » dans l’oralité mordent, mettent des objets dans la bouche, etc.
Pulsions érotiques anales et urétrales
Leur analyse aide à identifier si le patient a acquis la contenance ou s’il
est incontinent. On établit la fréquence des mictions diurnes et nocturnes.
Est-ce que le patient est ordonné ? Quelle est sa réaction vis-à-vis de la pro-
preté ? Est-il économe ? Comment gère-t-il ses biens ou ses affaires ? Fait-il
du collectionnisme ou non ?
Pulsions érotiques phalliques et phalliques-génitales
Leur investigation renvoie vers la recherche des différentes activités telles
que : la masturbation, l’ambition, l’autoritarisme, la compétition, la puberté
(vécu des modifications du corps, de l’apparition des règles et de l’éjacula-
tion), la relation homosexuelle et hétérosexuelle.
On range d’autres types de troubles du comportement liés à des pulsions
libidinales : l’hypersexualité retrouvée chez le maniaque, l’onanisme,
l’exhibitionnisme, le voyeurisme, etc.
Freud avait lui-même théorisé trois différentes sortes de pulsions retrou-
vées chez l’être humain. Il faut un certain équilibre entre ces pulsions pour
que l’individu fonctionne harmonieusement : « la pulsion d’autoconserva-
tion : elle s’oppose à la pulsion sexuelle et permet au sujet de se protéger »
(Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012), et la pulsion de mort.
Pour conclure, il arrive que le thérapeute remarque une certaine défense
contre la pulsion chez l’adolescent qui refuse d’être amoureux ou de côtoyer
ses pairs, ou qui peut aller jusqu’à dire que les autres le dégoûtent ou le gênent.
Loisirs et hobbies
Les loisirs et les hobbies (les activités passe-temps) sont un des moyens par
lesquels s’expriment les pulsions. Le thérapeute essaie de voir comment
le patient arriver à dégager ou libérer le trop-plein d’énergie libidinale ou
agressive qu’il a en lui.
En fait, les jeux, les loisirs, les lectures, les voyages, les lieux préférés
et les diverses activités du patient doivent être minutieusement investis.
Est-ce qu’il fait ses activités tout seul ou en compagnie de ses amis ?

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Pulsions et fantasmes 339

Certaines questions peuvent être approfondies telles que : « Quel rôle


préfères-tu jouer dans un jeu de société, et pourquoi ? », « Quel type de
construction aimes-tu faire ? », « Quel est ton jeu préféré sur ta console
vidéo ? »
Le patient est-il solitaire ou s’entoure-t-il avec ses pairs lors de jeu ou
dans diverses activités socioculturelles ? « Avec qui préfères-tu jouer ? » Est-
il membre d’un groupe de copains et quelle est sa fonction ou son degré
d’influence ? Est-ce que depuis toujours, il préfère jouer tout seul ou avec
ses pairs ?

Jeu de rôle
Celui-ci est une stratégie permettant de cerner le patient. Le thérapeute
l’invite ou lui présente des jouets afin que lui-même puisse mettre en œuvre
l’un des jeux. Il peut ainsi jouer au docteur, au papa et à la maman, ou
encore aux voleurs et aux policiers, à la maîtresse, aux sapeurs-pompiers, etc.
Plus encore, il peut inventer une histoire avec les personnages ou les jouets
que lui-même choisit. Le but est de chercher ses fantasmes, ses pulsions, ses
affects, ses mécanismes de défense.

Jeu solitaire
Certains patients préfèrent jouer tout seul ou exprimer leurs pulsions à
travers les différents jeux (la construction avec les Lego®, les Kapla®, les
puzzles, les mémos, etc.). Il est important de savoir pourquoi le patient ne
joue pas avec ses pairs. Quelles sont ses raisons (est-il victime de harcèle-
ment, se considère-t-il mis à part par ses pairs, a-t-il peur de s’approcher des
autres ?) ?

Jeu de compétition
Le jeu de compétition permet au thérapeute de cerner le type de surmoi
du patient. Il peut s’agir de courses de voitures, par exemple, la police et le
voleur, « Un, deux, trois, soleil », etc.

Jeu de sport
Est-ce que ce jeu procure du plaisir au patient et de quel type de plaisir
s’agit-il ? On peut objectiver la recherche de la dynamique de l’équipe, de la
performance et revalorisation narcissique qui en découle, la compétitivité,
le rythme, etc. À travers le jeu de sport, le thérapeute recherche l’impact
émotionnel et relationnel du jeu sur le patient. Comment se comporte-t-il
dans le jeu avec ses camarades ? Etc.

Hobbies
Les pulsions libidinales nous éclairent sur les différentes activités qui procu-
rent du plaisir au patient. Les hobbies regroupent les diverses activités que
le patient aime faire ou réaliser en solitaire ou en compagnie des adultes ou
de ses pairs. Il peut s’agir de la lecture, d’un voyage, du chant, d’une activité

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340 Status clinique pédopsychiatrique

sportive ou socioculturelle, etc. Ces activités ont pour but soit de l’apaiser,
soit de lui procurer du plaisir, etc. La connaissance de ses hobbies aide le
thérapeute à se faire une idée sur la manière dont il ménage ses émotions,
ses affects, ses pulsions ou comment il dépense ses énergies.
Les hobbies ou passe-temps, tout comme les jeux, sont examinés dans
un premier temps dans l’anamnèse. Lors du status clinique, le thérapeute
revient sur les jeux et les hobbies ou demande à jouer avec le patient afin
de vérifier s’il s’agit bien de jeu symbolique ou non. Nous revenons à la fin
de ce chapitre sur cette notion de jeu symbolique que le thérapeute évalue
durant l’entretien.

Pulsion d’attachement
Golse est revenu sur les notions avancées par Didier Anzieu en 1985. La
pulsion d’attachement fait un rapprochement entre la théorie de l’attache-
ment de Bowlby, la théorie des pulsions et celle d’étayage de Freud. L’auteur
soulève une question : « si l’attachement correspond à un besoin primaire
de l’enfant, pourquoi ne pas imaginer qu’il puisse alors être libidinalisé, au
même titre que tous les autres besoins de l’autoconservation, au sein de
la théorie freudienne de l’étayage ? » (Golse, 2004) Cet auteur souligne le
fait que l’attachement est un pont entre la théorie des pulsions et celle des
relations d’objet.
Cela dit, il est intéressant de rechercher la qualité de cette pulsion
d’attache­ ment lors de l’exploration des relations d’objet ou de la qua-
lité d’attachement ou les différentes pulsions, qu’il s’agisse de la pulsion de
vie ou de celle de mort.

Pulsions agressives
Généralités
Au regard de la théorie de Freud, l’objet est toujours ambivalent. Son ambi-
valence se constitue à partir des liens qui se tissent avec le premier objet
d’amour : la mère (nous considérons actuellement tout adulte qui s’occupe
du bébé dès sa naissance comme étant le premier objet d’amour). Et c’est
dans la déception inhérente devant cette première relation que l’agres-
sivité émerge. L’amour enfantin est insatiable et la seule satisfaction qu’il
recherche est impossible : retrouver l’union originelle avec la mère (idéale,
mythique). Le bébé est sans cesse animé par des mouvements incestueux
qui ne peuvent jamais aboutir à leur but, d’où la frustration.
Il est question de chercher la présence d’une hostilité, destructivité,
hétéro, autoagressivité chez le patient. En général, les pulsions agressives
sont cherchées dans ses relations avec son père, sa mère, ses préférences
ou ressemblances, les relations avec sa fratrie (jalousies, ententes, etc.), ses
grands-parents, ses amis (un vrai ami, des camarades de classe, de jeu), la

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Pulsions et fantasmes 341

relation avec les animaux, sa réaction et son vécu à la séparation, mais


il est également intéressant d’observer comment il réagit à la frustration,
au conflit avec les pairs, etc. Selon Freud, l’agressivité serait la réaction à
l’angoisse. Cette agressivité vise la destruction de l’objet. Le thérapeute
cherche quel plaisir éprouve le patient en découvrant qu’il fait mal à l’autre.
Comment exprime-t-il son agressivité ? L’agressivité peut être présente,
totalement inhibée, contenue ou évitée. Elle peut être exprimée verbale-
ment ou dans le jeu. Celle-ci peut être soit tourné vers soi ou vers l’objet.
La pulsionnalité peut se manifester dans différents moments dans le jeu
(détruire des jouets, des objets, les jeter contre quelque chose, par terre, les
piétiner ou les écraser, etc.) ou par des actes auto ou hétéroagressifs (se jeter
contre quelque chose, se jeter par terre, se faire du mal physiquement ou se
blesser en se griffant, se scarifier, se donner des coups, s’autopunir, proférer
des insultes et toute agression verbale, provoquer, se quereller, etc.). L’agres-
sivité peut avoir comme objectif de mettre l’autre en échec.
On retrouve les troubles de conduites à « type actes compulsifs », non
maîtrisables, impliquant soi-même ou autre (il est vindicatif, insulte et
se dispute à la moindre contrariété, commet fugue, viol, vol, pyromanie,
bagarres récurrentes avec les pairs, agressions, etc.), des comportements à
risque (actes de délinquance sexuelle, jeu de foulard, automutilations, ten-
tative de suicide, suicide abouti, recours irrépressible à l’alcool, aux médi-
caments, aux drogues, etc.). Ces pulsions agressives peuvent être présentes,
absentes, contrôlées, exprimées sous forme de fantasme de mort d’un tiers,
fantasmes de destruction, etc.
Les pulsions de destruction ou pulsions de mort s’observent dans les acti-
vités autodestructrices du patient. Naturellement, la pulsion de destruction
est en lien avec la pulsion de vie. N’est-ce pas le couple éros et thanatos ? Par
exemple, chez le patient présentant un trouble bipolaire ou celui qui pré-
sente un trouble de déficit d’attention avec ou sans hyperactivité, on peut
constater qu’il n’éprouve pas le plaisir libidinal dans ce qu’il pose comme
actions ou dans ses agissements psychomoteurs. Il montre plutôt une
espèce de décharge psychique destructive. Son instabilité interne s’exprime
par la tachypsychie et d’autres symptômes abordés dans les troubles de la
pensée. Il est plus dans la destruction que dans la construction comme le
gaspillage, le comportement à risque, la mise en danger, etc.
Les pulsions agressives peuvent se manifester également par : la haine,
la colère et la rage. Ces pulsions agressives sont des précurseurs sadiques
du surmoi ou surmoi névrotique (sévère et punitif, mais intégré plutôt que
clivé et projeté sous forme de noyaux primitifs). Disons enfin que « la pul-
sion de mort lui est opposée, elle a un caractère destructeur. Il en donne
volontairement une définition imprécise, car ses dernières théories s’éloi-
gnent de plus en plus de l’idée d’un fonctionnement concret des pulsions et
de l’appareil psychique en général. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012)

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342 Status clinique pédopsychiatrique

Exploration des pulsions agressives


Cette exploration peut se faire à l’aide des questions suivantes : « Tu fais
quoi quand tu t’énerves ? », « Embêtes-tu souvent tes amis ? », « C’est quoi
pour toi, se faire embêter par les copains ? », « Depuis combien de temps tu
embêtes tes copains en classe, ou ton frère ? », « Pourquoi les embêtes-tu ? »,
« Est-ce que tu blâmes tes copains même s’ils ne sont pas fautifs ou même si
tu sais bien que c’était toi le fautif ? », « As-tu l’impression que tu t’opposes
très souvent à tout le monde sans raison ? »
La pulsionnalité agressive peut pousser le patient à se donner les coups
de tête contre le mur, à se frapper, à faire des crises sans cesse, etc. Les ques-
tions suivantes orientent cette investigation : « Pourquoi tu crises et cela
depuis quand ? », « Est-ce que tu as toujours été comme ça ? », « Peux-tu
m’expliquer en quoi consistent tes crises ? », « Est-ce qu’il t’arrive d’explo-
ser en colère ? », « Penses-tu être quelqu’un de méchant ou quelqu’un de
vengeur ou de bagarreur ? », « Que cherches-tu en faisant tes crises de colère
ou en pleurant ? »
« Est-ce qu’il y a des choses qui te dégoûtent dans ta vie ? », « Est-ce
qu’il t’arrive délibérément de défier les autres, des adultes ou tes amis ? »,
« Refuses-tu souvent de suivre les consignes de la maîtresse ou de tes
parents ? », « Est-ce que tu fais l’école buissonnière, si oui, pourquoi ? »

Quelques particularités des troubles du comportement


Une des plaintes les plus formulées lors de demande d’évaluation psycholo-
gique, soit par l’école, soit par les parents, c’est le trouble du comportement.
Personne dans l’entourage familial, scolaire, parascolaire ne supporte le
trouble du comportement ou le changement de comportement du patient,
surtout quand ce dernier montre beaucoup d’auto ou d’hétéroagressivité.
Le patient qui présente un trouble du comportement peine à canaliser sa
pulsionnalité. Pour certains, la fonction de « pare-excitation » du moi est
défaillante. À chaque émergence de l’angoisse, l’individu part en éclats. Il
devient moins contrôlable ou canalisable par soi-même ou son entourage.
La sémiologie des troubles du comportement exige du thérapeute d’avoir
un large éventail des hypothèses diagnostiques. Les symptômes sont retrou-
vés dans différents diagnostics catégoriels : les troubles de conduites socia-
lisés et mal socialisés, le trouble oppositionnel avec provocation, le trouble
explosif intermittent, le vol pathologique, la pyromanie, le comportement
antisocial, la psychopathie, les troubles de la personnalité (la personna-
lité antisociale, etc.), les troubles psychotiques et bipolaires, la prise de
toxiques, etc.
En fait, le trouble disruptif du contrôle des impulsions et des conduites
ne passe pas inaperçu, raison pour laquelle un entretien d’évaluation ne
doit pas se terminer sans que le thérapeute recherche ces notions et plus
encore si l’entourage ou le patient lui-même rapporte ses difficultés à être
avec l’autre.
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Pulsions et fantasmes 343

En plus du caractère impulsif et des troubles de l’humeur associés, il fau-


drait examiner aussi la constitution du self et le soi, les mécanismes de
défense mis en jeu par le patient lors d’émergence d’angoisse ou de pulsion-
nalité débordante.
En plus de l’investigation faite des autres items de la grille, le théra-
peute peut pousser plus loin son analyse lors de la recherche de troubles
du comportement. Le patient, en plus de son trouble du comportement,
présente-t-il un manque d’empathie, éprouve-t-il de la culpabilité ou des
remords après les actes ? Est-il insensible aux émotions, à la douleur ou à la
peine que ressent l’autre ? Exprime-t-il ou montre-t-il des sentiments ou des
émotions négatives vis-à-vis d’autrui ? Etc.
En résumé, on décrit la réaction, le ressenti et les affections du patient
après son acte et vis-à-vis de la victime.
Bagarres et disputes avec les adultes ou les pairs
« Comment sont tes rapports avec des amis ou tes copains ? », « Est-ce que tu
brutalises, intimides ou menaces tes copains ? », « Cherches-tu à ce que tes
copains se soumettent à tes règles ? », « Es-tu souvent dans les bagarres
des rues ou contre tes copains ? », « Qui, selon toi, est le provocateur de ta
classe ? », « Est-ce que c’est toi qui commences les bagarres ? », « Pourquoi
règles-tu tes différends par des bagarres ou des disputes ? », « Qu’est-ce que tu
cherches dans tes revendications ? », « Es-tu quelqu’un qui cherche à se ven-
ger souvent ? », « Est-ce que tu exploses en disputant les autres ? », « Qu’est-ce
que tu n’arrives pas à supporter chez l’autre ? », « Fais-tu des crises agressives
de manière impulsive ? », « Te blesses-tu souvent sans t’en rendre compte ? »,
« Qu’est-ce que tu utilises comme moyen pour agresser ou te bagarrer avec
les gens ? », « Est-ce qu’il s’agissait d’un bâton, d’une bouteille, d’une brique,
d’un couteau, d’un sabre, d’une arme à feu, etc. dans tes bagarres ? »
Opposition et provocation
« Est-ce que tu t’opposes souvent aux règles que posent les adultes ou les
copains ? », « Est-ce que les gens pensent que tu es une source de pro-
blèmes ? », « Penses-tu être quelqu’un de perturbateur ? », « Est-ce qu’il
t’arrive de faire des choses dangereuses ou extravagantes pour rechercher
des ressentis ou faire monter ton adrénaline ? », « Te retrouves-tu dans les
altercations avec les copains ? », « Est-ce que tu agresses les gens verbale-
ment ou physiquement aussi ? », « Est-ce que tu embêtes tes camarades ? »,
« Fais-tu aussi porter aux copains les fautes que toi tu as commises ? »,
« Te moques-tu des autres souvent ? »
« Respectes-tu les règles à l’école ou à la maison ? », « Respectes-tu les
heures de retour à la maison en semaine ou en week-end ? », « Est-ce que
tu abîmes les objets (meubles, documents personnels ou d’autrui, maté-
riels, etc.) quand tu n’es pas d’accord avec les autres ? », « Est-ce que tu
t’en prends aux animaux ou aux végétaux quand tu es très enflammé ? »,
« Obliges-tu tes copains à avoir des relations sexuelles ? »
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344 Status clinique pédopsychiatrique

Pyromanie et destruction des biens


« Qu’est-ce que je dois savoir de cette histoire de feu ? », « Raconte-moi ce
qui s’est passé », « L’as-tu fait sciemment ou quelqu’un t’a demandé de le
faire ? », « Qu’est-ce qui s’est passé avant et après avoir allumé le feu ? »,
« Pourquoi as-tu brûlé ce champ ? », « Es-tu excité ou n’arrives-tu pas à te
contrôler dans un moment pareil ? », « Est-ce que tu t’es préparé bien avant
de mettre le feu ? », « Quelles sont les émotions que tu ressens quand nous
parlons du feu ? », « Savais-tu, par avance, les dégâts que tes actes allaient
produire ? »
Vol, fraude et violations graves
« Est-ce qu’il t’arrive de prendre ou de voler les affaires qui ne t’appartien-
nent pas ? », « Que fais-tu de ce que tu as volé ? », « Pourquoi seulement
vouloir voler dans le sac de ta cousine ? », « Qu’est-ce que tu te dis avant de
voler dans les grandes surfaces, dans les magasins, ou dans les boutiques ? »,
« T’est-il arrivé de voler les gens après que tu les aies agressés ? », « Qu’est-ce
que tu peux me dire à propos de vol de sac à main, à mains armées, etc. ? »,
« Il t’arrive d’extorquer de l’argent aux autres ? », « T’est-il déjà arrivé de
pénétrer chez autrui pour le voler ? », « Aurais-tu un jour provoqué des
dégâts chez autrui autrement sans y avoir mis le feu ? », « Pourquoi as-tu
cassé cette voiture ? », « Fais-tu du vol à l’étalage ? »

École et pulsion épistémophilique


En ce qui concerne les pulsions épistémophiliques, disons que c’est l’énergie
qui motive l’individu à apprendre. Dans notre société actuelle, les appren-
tissages se font à l’école. Il est important d’analyser l’amour d’apprendre
chez les patients. La société a tendance à orienter les jeunes dans des moules
de la vie future par les différentes sortes d’écoles (la formation profession-
nelle, les écoles spécialisées, les écoles techniques, les universités, etc.) qui
sont à leur disposition.
L’exploration de la pulsion épistémophilique cherche, en outre, comment
le patient se positionne vis-à-vis de ses apprentissages, est-ce qu’il a mon-
tré ou montre-t-il de la curiosité d’apprendre, d’enrichir ses connaissances
scientifiques, culturelles, artistiques, etc. ? Le thérapeute peut lui deman-
der : « Aimes-tu aller à l’école ? », « Qu’est-ce que tu aimes à l’école ? »,
« As-tu du plaisir à apprendre, à travailler à l’école ? », « Qu’est-ce que tu
préfères faire et qu’est-ce que tu aimes le moins faire à l’école ? Pourquoi ? »,
« En dehors de l’école, qu’est-ce qui t’intéresse (loisirs, passions, etc.) ou te
passionne ? », « Te poses-tu beaucoup de questions, si oui lesquelles ? »,
« Comment t’y prends-tu pour y trouver des réponses ? »
On cherche ainsi à savoir si le patient est capable de mobiliser des res-
sources pour répondre à ses questionnements et, le cas échéant, quelles sont
ces ressources.

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Pulsions et fantasmes 345

Fantasmes
Généralités
Les fantasmes renvoient à la notion du plaisir, de la satisfaction, du désir,
de la vérité, etc. La personne qui fantasme ne souhaite pas que l’idée ou la
pensée puisse se réaliser, car elle a peur ou craint les conséquences néfastes
de cette probable réalisation. Ainsi, l’idée ou l’objet fantasmé reste dans
l’imaginaire ou dans les pensées de la personne concernée. On peut verba-
liser ses fantasmes sans vouloir les confronter à la réalité.
En fait, le fantasme est lié au pulsionnel. On retrouve une idée qui jail-
lit sans que l’on ait un pouvoir dessus. Le fantasme peut se comprendre
comme une construction psychique d’un individu ou son invention qu’il
fait en s’imaginant les groupes des personnes ou des objets qui interagissent
d’une certaine manière.
Le rêve peut aussi contenir ou exprimer un fantasme. Ce fantasme peut
être porteur d’un désir. Il est fait de deux parties : l’une consciente et l’autre
inconsciente telles que les a décrites Freud dans son œuvre.

Quelques exemples de fantasme


1. Le patient qui accepte de jouer différentes scènes avec des Playmobil® lors
de l’entretien. Il s’agit des fantasmes exprimés dans ces jeux symboliques.
L’essentiel est de se demander si l’on peut ou non interpréter ce qui se passe
dans l’ici et maintenant de la séance. Le thérapeute se demande si le patient
est en train d’exprimer ses fantasmes ou une autre réalité psychique.
2. Le fantasme que le thérapeute peut avoir en écoutant les propos du
patient. Il peut alors s’imaginer que le patient a une mère maltraitante. Il
est important de rechercher la partie de la jouissance de la personne qui
fantasme sur une scène ou une situation. Dans cet exemple, disons que le
thérapeute fantasme et jouit du fait d’être celui qui est arrivé à pointer du
doigt cette possibilité que la mère du patient soit maltraitante.
Chez Freud, c’est le patient qui conçoit des fantasmes de vengeance dans
sa tête en réponse aux obstacles à l’amour de sa mère (objet). Ici, la théorie
du traumatisme comme forme de frustration participe au développement
de la personne. La psychanalyse à ses débuts considérait le développe-
ment de l’appareil psychique comme longiligne. Nous savons actuellement
qu’il ne l’est pas. L’appareil psychique se construit à l’aide de nombreux
va-et-vient. Le développement psychodynamique passe par la fixation, la
progression et la régression.
Pour reprendre la terminologie freudienne, en régressant, le patient
revient sur les éléments de son passé et se fixe sur les points ou les stades
de développement. Ces points ont la propriété de capter comme le feraient
les aimants.

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346 Status clinique pédopsychiatrique

Deux exemples méritent d’être cités :


• le fétichisme. On retrouve qu’une partie de l’objet prend la place de
l’objet entier, c’est-à-dire que le patient ne considère qu’une seule partie
de l’objet comme source de plaisir en remplacement de l’objet entier. C’est
ainsi que l’on peut citer comme objets fétiches : les oreilles, le talon, les
orteils, les cheveux, etc. ;
• la perversion. Ici les choses ou les parties de l’objet restent fixées et ne
continuent pas la progression que l’on pourrait attendre. On dirait que le
développement total n’est pas obtenu. La perversion peut être définie comme
le déni d’une partie de la réalité. Celle-ci est aidée par la force du clivage.
La régression peut être comprise comme un passé qui se réactualise dans
le présent du patient. Il s’agit des éléments du passé qui réapparaissent dans
le présent. Actuellement, nous ne pouvons pas seulement prétendre que la
régression est ce mouvement du présent vers le passé. L’inverse est vrai et
possible également. N’est-ce pas que les affects n’ont pas un calendrier ou
ne demandent pas l’autorisation de qui que ce soit avant d’émerger pen-
dant la séance ?
Daniel Marcelli, dans son ouvrage « Psychopathologie de l’enfant », dis-
tingue l’agressivité comme tension interne de l’agressivité qui est prise
comme une conduite objectivable Le thérapeute peut noter différents actes
impulsifs chez le patient qui ne sont pas vraiment orientés vers l’objet. Les
actes agressifs peuvent être là pour assurer la défense de soi ou des actes
qui visent à la destruction de l’objet. Le thérapeute doit faire une distinc-
tion entre les conduites agressives et les fantasmes d’agression qui sont des
représentations fantasmatiques ne donnant pas lieu à des actes.
La conflictualité intrapsychique, les fantasmes classés selon le stade de
développement : oral-cannibale, phallique, anal-expulsif, maniaque, narcis-
sique, dépressif, œdipien, sont repérés dans les jeux et actes du patient. Ces
fantasmes représentent le danger prédominant. Le type de danger équivaut
au type d’angoisse que peut avoir le patient : castration ou pénétration,
séparation ou perte, intrusion ou persécution et fusion ou désintégration
du moi. Le fantasme a un lien avec les mécanismes de défense comme la
transformation en son contraire ou du passif en actif, le déplacement, le
refoulement, etc.
Les conflits entre le moi et le monde objectal peuvent résulter de l’activa-
tion pulsionnelle et de la fragilisation narcissique à l’adolescence ou langage
oral avant. Ceci concerne les objets œdipiens ou des demandes externes. Il
arrive cependant que les pressions de la réalité externe soient telles que les
conflits qui en résultent peuvent être des indicateurs de solidité du moi. Le
fantasme est plus souvent pensé dans l’après-coup. Ainsi, dans le fantasme,
il faut rechercher l’événement premier et le second qui vient réveiller ou
rappeler ce qui s’est passé réellement ou non dans le passé. Le thérapeute
essaie d’expliquer les tensions ou les affects internes que laissent entendre

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Pulsions et fantasmes 347

les mots, les affects dont le patient peut ou ne pas être capable de saisir
le sens. Le risque est que le fantasme se transforme en toute-puissance.
D’autres fantasmes peuvent rendre la réalité supportable car il ne faudrait
surtout pas que le fantasme se fasse dans la réalité.
Peut-on identifier des conflits internalisés entre le moi et surmoi ? Le
thérapeute doit penser aux conflits internes : activité-passivité, masculinité-
féminité, ambivalence, etc.

Conclusion
La pulsionnalité a un lien avec les relations d’objet et le narcissisme.
Le thérapeute évalue succinctement :
• la qualité de la liaison pulsionnelle (de l’érotisme et de l’agressivité),
l’importance respective de la génitalité et des éléments prégénitaux, la
capacité de rêverie et les rêves du patient ;
• l’intensité des mouvements de déliaison, de destructivité intrapsychique
ou d’attaque du corps ;
• le renforcement mutuel ou l’antagonisme entre investissements d’objets et
investissements narcissiques. Progressivement, ces investissements s’influen-
cent et leur interaction se répercute sur le fonctionnement ou la manière
d’exprimer ou pas la pulsionnalité libidinale ou agressive ;
• la qualité dominante de l’investissement narcissique. Il est important de
voir comment le patient gère sa toute-puissance ou pas, sa grandiosité, sa
dévalorisation, la possibilité d’une régulation normale, etc. ;
• les représentations de soi. Comment le soi et l’identification du patient
sont-ils faits ? Le degré d’intégration et l’importance du clivage du patient
dépendent de comment il intègre l’image de lui-même ou quel type d’iden-
tification fait-il de lui-même ;
• la qualité dominante de l’investissement objectal : ce point se réfère
que chapitre 13 consacré à la relation d’objet. Le thérapeute peut voir si le
patient développe une relation idéalisée, anaclitique, narcissique, sadisée,
fétichisée, différenciée, etc. ;
• les représentations d’objets : le thérapeute cherche le degré d’intégration
et l’importance du clivage que présente le patient comme mécanisme de
défense.
Avant de voir les différentes techniques d’exploration des fantasmes ou
des pulsions nous sommes d’accord avec ce que disent Laufer & Laufer
(1989) en ces termes : « Dans notre travail avec l’adolescent malade, ces
modes d’accès à l’inconscient nous ont permis, pendant un temps, d’éla-
borer le fantasme, ce qui facilite ensuite notre compréhension de la moti-
vation, du pouvoir de certaines satisfactions et en fin de compte de la
pathologie. » Le thérapeute doit constamment se demander ce qu’est le
fantasme du patient ou de quelle manière il libère l’énergie qu’il a en lui.

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348 Status clinique pédopsychiatrique

Techniques d’exploration
Le patient exprime ses pulsions et fantasmes de différentes manières. Lors
d’une évaluation des pulsions et des fantasmes, le thérapeute doit garder en
tête que « les désirs et les fantasmes prépubertaires étaient sûrs et acceptables
avant cette période, mais ces mêmes désirs et fantasmes véhiculeront à partir
de la puberté une nouvelle signification incestueuse […] Le corps, qui était
vécu jusqu’à la puberté comme le porteur passif des besoins et des désirs,
devient maintenant une force active dans les fantasmes et les conduites
sexuelles ou agressives. » (Laufer & Laufer, 1989) Qu’il s’agisse d’une commu-
nication verbale ou gesto-posturale ou de jeu, le thérapeute peut décrypter
le type et qualité des pulsions. « En d’autres mots, le setting proposé doit
permettre une expression et une élaboration mentale des conflits psychiques
et de la vie pulsionnelle » (Palacio-Espasa, 2005). On observe la vie fantas-
matique du patient à travers ses rêves, ses dessins, ses jeux, etc.
Rappelons à nouveau qu’un patient « mis en sécurité et libre de ses ini-
tiatives verbales, après une phase d’expectative, de perplexité et de doute
quant à la bienveillance de cet interlocuteur mystérieux qui se contente de
l’observer, engage ou entre dans la conversation. L’art du clinicien consiste
alors à se faire discret et incitatif, à s’effacer partiellement en tant que per-
sonne trop différente, trop étrangère, et de favoriser ce mouvement narra-
tif. » (Brunschwig, 2001)
Le thérapeute cherche :
1. le caractère direct de l’expression des pulsions (allant de l’acting-out pri-
mitif à des formes relativement indirectes d’expression comportementale) ;
2. l’efficacité du délai et du contrôle des pulsions par les mécanismes de défense
mis en œuvre par le moi en référence aux limites imposées par le surmoi ;
3. le degré de tolérance à la frustration du patient. Est-ce qu’il réagit au quart
de tour ou non ? Cherche-t-il à mettre l’autre en échec ? Est-ce que son
agressivité est tournée vers soi ? Arrive-t-il à contenir, inhiber ou réprimer
son agressivité ou laisser exprimer sa pulsion libidinale ?
4. l’expression des pulsions agressives ou libidinales dans la relation, de
même que dans le comportement. On observe si la problématique œdi-
pienne est présente, la différence des sexes et des générations, la place de la
sexualité, mais aussi les différents fantasmes de l’enfant (castration, exclu-
sion du couple, œdipe inversé, anaux, libidinaux, maniaco-narcissiques,
phallico-narcissiques, mélancoliformes, etc.) ;
5. si le patient est en mesure de canaliser sa pulsion à travers une idéation
ou une expression affective ou un comportement manifeste ;
6. l’exploration de la vie ou des manifestations fantasmatiques : comment
le patient voit-il sa solitude, ses rêveries, son sommeil (endormissement et
réveil, son rêve est-il répétitif, agréable, cauchemar) ?

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Pulsions et fantasmes 349

Rêves
Le rêve est la voie royale pour atteindre l’inconscient comme le disait Freud.
Certains patients peuvent rapporter ou raconter spontanément leurs rêves.
D’autres, en revanche, attendent que le thérapeute les invite à le faire. Ce
modèle, qui n’est pas le moindre dans le recueil des éléments ou matériels
cliniques, « suppose aussi que l’on soit capable d’effectuer un travail de
symbolisation fondé sur l’absence de l’objet, voire sur le renoncement à
l’objet » (Roussillon, 2012).
On demande au patient de raconter son rêve le plus beau, joli, terrible ou
affreux, récent ou répétitif. Peu importe ce qu’il choisit de raconter, l’essen-
tiel est d’analyser la manière dont il le fait.
En fait, lors des séances, le thérapeute doit se souvenir que le rêve :
1. est une partie de la narration qu’offre le patient lors des séances ;
2. est un bon signe de la capacité mentale ;
3. comme le reste du matériel psychique, permet d’entrer en relation, de
communiquer entre l’un et l’autre. Il permet d’associer sur les éléments de
la séance passée, présente et celle à venir ;
4. est une façon de voir ce qui se passe dans le moment présent et en même
temps de faire des allers-retours avec les moments qui précèdent le moment
présent.
Le rêve, c’est aussi une manière que l’autre a de nous signifier où nous
sommes avec nos séances. Il donne la qualité de la relation thérapeutique,
où l’on est et quelle vitesse il faut prendre dans les séances. Il faut être
attentif à ce que le patient raconte. Grâce au rêve, son inconscient peut
dévoiler la qualité et l’impact de la psychothérapie sur le fonctionnent de
son appareil psychique. Le rêve peut répondre à ces questions : « Où en est
le patient par rapport à sa prise en charge ? », « Quel est le niveau de progrès
ou quelle est l’évolution thérapeutique ? »
Tous les matériels, rêve y compris, nous aident à comprendre où l’on en
est dans les séances et à pouvoir les remettre dans la relation transférentielle
et contre-transférentielle.
Enfin, il faut écouter avec les oreilles, les yeux, le corps, etc., rester sen-
sible à ce qui nous est communiqué sans des préjugés, des principes, des
idées préconçues.
Quand la fonction onirique ne fonctionne pas, on tombe dans la patho-
logie : hallucination, hallucinose, etc.
Il faut essayer de savoir si le patient fait des cauchemars (leur nature,
comment il les raconte, depuis quand, s’il parvient à les associer librement
à d’autres événements du passé et du présent, sa réaction au réveil, etc.), est-
ce que son cauchemar ou son rêve se répète encore et encore ? Etc.

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350 Status clinique pédopsychiatrique

Capacité de rêverie
La rêverie est la capacité de pouvoir transformer, digérer à la place de l’autre.
L’autre s’enrichit à travers l’expérience qu’il digère à la place du sujet. Ainsi,
la capacité digestive du patient s’améliore à travers cette bonne digestion
venant de l’autre.
Il faut que le thérapeute ne soit pas trop submergé par les émotions ou
angoisses, le vide, l’effroi, etc. Par exemple, s’il a peur des araignées, quand
le patient commence à parler des araignées, tous deux risquent de partir en
courant. À chaque fois que le patient parle des araignées, le thérapeute ne
peut pas capter le message. C’est la tache aveugle de Bion.
La capacité de rêverie appartient au préconscient. Le thérapeute demande
au patient : « Est-ce qu’il t’arrive de te retrouver allongé sur ton lit, ou sur
l’herbe, ou seul dans ta chambre et te mettre à penser ? », « À quoi penses-tu à
ce moment-là ? », « Est-ce quand tu es seul au calme, il t’arrive de penser à ton
avenir, aux jours meilleurs ou prochains, comment peux-tu m’en parler ? »
Comment Bion définit-il le rêve et la rêverie ? Le rêve est considéré par
Freud comme la voie royale pour arriver à l’inconscient. Il amène un maté-
riel important dans la thérapie des enfants. Le récit de rêve pendant les
séances des enfants et des adolescents ne prend pas autant de place que
dans la cure des adultes. On a moins accès à du matériel réel du rêve chez
les jeunes patients.
La capacité de pouvoir rêver chez Bion témoigne de la possibilité de
l’appareil psychique de pouvoir rêver. Ce qui est un bon signe et témoigne
d’une bonne santé psychique. Le rêve permet une mise en scène, une
représentation de quelque chose. C’est un témoin d’une bonne capacité de
l’appareil psychique à pouvoir mettre ou transformer les faits psychiques
en certains vécus.
Le rêve est une mise en symbole. Il continue durant la journée. Racon-
ter un rêve dans la journée est même la continuité du rêve de la nuit. Les
psychotiques donnent des éléments bruts et non encore métabolisés. Cela
dit, il est prudent de prendre des précautions quand on écoute le rêve du
patient psychotique.
Le rêve permet de mettre sous une forme de narration d’un contenu
visuel qui s’insère dans la relation du thérapeute-analyste. Le rêve essaie
d’ouvrir le sens et non le figer. L’interprétation, le cas échéant, doit aller
dans le sens d’ouvrir sur une autre narration ou une histoire.
En fait, plusieurs thérapeutes psychanalystes ont développé cette ques-
tion de rêve, de la capacité de rêverie, du rôle et des fonctions du rêve, de la
signification des rêves et des cauchemars, etc. Les thérapeutes sont invités à
lire les divers manuels et travaux scientifiques qui traitent de ce sujet.
Si l’on revient à l’exemple de l’araignée donné ci-dessus, la question est
de savoir alors à quel moment parler de cette araignée quand le patient

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Pulsions et fantasmes 351

ou le thérapeute ne sont pas prêts à le faire ? Il ne faut pas renforcer l’hal-


lucination ou le déni de réalité, mais trouver un moyen d’informer, ou
d’accompagner le patient et ses proches à élaborer autour de ces araignées.
Les araignées peuvent signifier : des angoisses de mort, des angoisses de
séparation, des angoisses de pertes, des affects négatifs, etc. Quoi qu’il en
soit, le thérapeute doit appliquer le principe de primum non nocere lors de
l’exploration du rêve. La capacité de rêverie est mise à mal. Il faut la garder
et favoriser son fonctionnement malgré ces attaques d’angoisses.
Le rêve permet aussi les feed-back. Le patient a l’impression de voir une
réactualisation des moments passés ou des moments qui précèdent les
moments du récit.
La rêverie en séance est la rêverie maternelle. Il ne faut pas être trop
assailli par des informations inutiles. Il faut que la mère se sente suffisam-
ment bien, suffisamment capable de pouvoir digérer et restituer sa compré-
hension à l’autre de façon importante et enrichissante. Elle joue un rôle de
metteur en scène dans le but de mettre de l’ordre dans le vécu du patient.
Elle peut alors dire : « Ah ! tu as faim, tu es fatigué ! Tu veux que je te
porte… ? ». Il y a une espèce de traduction paraverbale et de vérification si
ça marche ou non afin de pouvoir s’ajuster par rapport à l’autre comme le
disent les spécialistes de l’attachement.

Souhaits
Les souhaits sont systématiquement recherchés lors d’une exploration cli-
nique. Le thérapeute demande au patient de les exprimer. Certains clini-
ciens formulent cette question en proposant aux patients de dire leurs trois
vœux en ces termes : « Imagine-toi qu’il y a ici une fée qui peut tout faire, à
qui tu peux demander de réaliser trois de tes vœux, les trois choses les plus
importantes pour toi au monde, que lui demanderais-tu ? » Ses réponses
peuvent nous donner une idée sur sa vie fantasmatique et ses préoccupa-
tions pulsionnelles ou affectivo-émotionnelles. Aux adolescents, on peut
demander trois changements qu’ils souhaitent dans leur vie.
Le thérapeute demande au patient : « Si j’étais une fée, ou un magicien,
ou quelqu’un qui a des superpouvoirs, qu’est-ce que tu pourrais me deman-
der ? », « Dis-moi, c’est quoi tes plus grands souhaits ? », « Veux-tu bien
me citer trois de tes vœux ou souhaits ? », « Que feras-tu quand tu seras
adulte ? »

Dessins
Le dessin peut être examiné sur le plan cognitif, développemental, la repré-
sentation du patient, la relation d’objet, le self et ses identifications, ses
rêveries, ses pulsions, son surmoi et idéal du moi, etc. Le dessin permet
au patient d’exprimer ses affects, son langage, ses capacités visuospatiales,

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352 Status clinique pédopsychiatrique

sa capacité d’abstraction, de mise à distance, etc. Une bonne compréhension


du dessin donne beaucoup d’éléments cliniques. C’est pourquoi le théra-
peute doit éviter au maximum de suggérer des idées ou d’intervenir bruta-
lement pendant que le patient dessine.
• Dès 3-4 ans, le dessin permet d’apprécier les capacités motrices et sym-
boliques du patient. C’est une activité libre qui lui permet de raconter une
histoire à travers le dessin d’une famille ou de la sienne. Avec le dessin, on
peut demander à l’enfant de faire une association, contrairement au rêve
qui risque de le bloquer. Le thérapeute vérifie s’il accepte ou permet que l’on
modifie l’histoire (par un nouveau personnage, un nouveau thème, de peur,
de recherche de protection, de loi, la loyauté, etc.), s’il reste imperméable à
ces sollicitations, ou alors s’il reproduit le même dessin à l’identique (pour
éviter l’angoisse par la valeur affective émotionnelle de cette répétition,
etc.).
• Avec le dessin sous forme de bande dessinée avec des bulles, on peut
demander au patient de raconter les activités qu’il fait dans une journée
type dans la semaine, un jour de week-end ou en vacances. On peut faire
des cases et le thérapeute remplit la première et la dernière et laisse le libre
choix au patient de compléter sa journée. Il peut arriver que l’on demande
aux parents ou au patient de décrire le jour d’anniversaire. Ceci peut être
l’occasion pour lui d’aborder les émotions, les activités, les conflits et le type
de relation d’objet qu’il a avec son entourage (famille et amis).
• Le dessin à épisodes se complète au fur et à mesure, ou raconte toutes les
activités de l’enfant depuis son réveil jusqu’au soir ; celui-ci peut associer ou
commenter ses dessins.
Il est important d’observer la qualité des traits du dessin. Celui-ci est-
il spontané ou pas ? Existe-t-il des traits plus renforcés que d’autres ? Les
éléments représentés sont-ils plus parlants ou plus représentatifs de la vie
quotidienne du patient ? S’agit-il d’un dessin tout triste ou non ? Certains
patients peuvent dessiner ce qu’ils ont appris en classe, le séjour des der-
nières vacances ou les prochaines vacances, etc.

Squiggle game
Cette technique a été créée par Winnicott. « Il n’y a rien là de particulière-
ment original et il ne faudrait pas qu’ayant appris à utiliser cette technique,
on croie du même coup détenir la recette pour donner ce que nous nom-
mons une consultation thérapeutique. Il s’agit là simplement d’un moyen
d’entrer en contact avec l’enfant. Ce qui se passe au cours du jeu et de
l’entretien dépend de l’utilisation que l’on fait de l’expérience de l’enfant et
du matériel qui s’offre à nous. » (Winnicott, 1971)
Le squiggle donne accès au fantasme de l’enfant car il introduit un objet
malléable et intermédiaire entre l’enfant et l’examinateur. La consigne est

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Pulsions et fantasmes 353

de faire ensemble le gribouillage, tour à tour, l’un des deux fait un gribouil-
lis et l’autre doit faire un dessin à partir du gribouillis. Le but n’est pas de
faire un beau dessin, mais de représenter la première idée qui vient à l’esprit
en voyant le gribouillis. Chacun commente ensuite tour à tour son dessin,
commentaire qui peut donner un véritable récit.
Dans son expérience, Winnicott (1971) écrit : « Je traçai un squiggle pour
qu’il le modifiât. Il savait ce qu’il voulait en faire. Il ombra soigneusement
et dit que c’était un bull (un taureau). Je mis un moment pour comprendre
qu’il avait dit bull au lieu de ball (balle). » Une bonne capacité symbolique
amène l’enfant à faire un gribouillis fructueux. Il permet une associativité
rapide entre patient et thérapeute, peu contrôlée. Le thérapeute doit avoir
fait un important travail sur lui pour ne pas projeter trop de lui-même.

Histoire à compléter
Le thérapeute demande au patient : « Tu vas me raconter une histoire que
je vais écrire et après on la lira ensemble, je t’aide, je commence : Il était
une fois un petit garçon… à toi de continuer. » Cette stratégie donne accès
à la vie fantasmatique du patient s’il n’arrive pas encore à écrire. Dans le
cas contraire, on lui laisse le temps de le faire pour lui permettre d’y arriver.

Jeu et autres associations libres


Le jeu a pris une place de choix dans la clinique psychodynamique depuis
la découverte du jeu de la bobine par Freud. En fait, le jeu de la bobine est
la symbolisation de l’absence de l’autre, plus précisément de la mère ou
du caregiver. En abordant le jeu avec les lunettes de la théorie de l’attache-
ment, le jeu de la bobine peut être compris comme si le patient, en jetant la
bobine, se disait : « Je jette et reprends ma mère quand je le souhaite. » De
ceci, on comprend que le patient passe de la position passive à la position
active. Il exerce du contrôle sur l’objet. Plus tard, il a tendance à traiter
l’autre ou l’objet comme il a été lui-même traité.
Étant donné que « l’expression langagière en face-à-face n’est pas toujours
pleinement maîtrisée, l’intérêt est plus porté vers les actes, tandis que l’actua-
lité du processus pubertaire, la conflictualité débutante avec les parents
laissent peu d’énergie à s’investir dans une attitude réflexive » (Marcelli,
1999), le jeu serait une tentative de vouloir maîtriser le traumatisme par la
répétition. La manifestation d’agressivité en tant que telle ne peut pas être
comprise si on ne la rattache pas à une forme d’activité symbolique.
En effet, « jouer est alors confronté à une expérience nouvelle, non seu-
lement il ressaisit l’expérience subjective qu’il met en jeu, mais en plus il
expérimente l’expérience du fait de symboliser cette expérience, du fait de
jouer » (Roussillon, 2014).

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354 Status clinique pédopsychiatrique

Dans le jeu, il y a la notion de la répétition. En fait, la répétition se passe


du principe de plaisir et de déplaisir :
• la répétition dans le jeu de l’enfant lui permet de retrouver quelque chose
de nouveau qui l’amène à explorer d’autres choses, d’autres facettes du
même objet, d’autres aventures, etc. Ainsi, le jeu se répète encore et encore ;
• il peut s’agir aussi de la répétition du traumatique. Dans ce cas, le patient
cherche à ce que tout recommence au début sans qu’il y ait une transforma-
tion quelconque.
La première répétition permet de progresser et d’avoir de l’excitation et du
plaisir, contrairement à la répétition traumatique qui signe une défaillance
de la fonction onirique. Dans cette situation, le rêve devient un cauche­mar
et réveille le patient en sursaut.
Le fait que le patient demande « encore » à l’adulte pour rejouer au même
jeu, réciter la même histoire, ou relire le même texte, etc. peut être consi-
déré comme faisant partie de la première répétition.
Lors de l’exploration clinique, il est impérieux de se demander si le
patient joue un jeu symbolique, s’il n’est pas capable de jouer ou s’il fait
semblant. Avec lui, le thérapeute joue au papa et à la maman, à la famille,
à la maîtresse, au policier, au pompier, etc. Le jeu permet d’apprécier ses
capacités de symbolisation. C’est un principal outil entre 1 an ½ et 7 ans.
Il permet une mise en scène du monde interne (fantasmes, désirs, affects,
pulsions, défenses, identifications) du patient. À 5 ans, il est déjà capable
de faire un jeu symbolique. Le thérapeute observe s’il s’arrête de compter,
de ranger, de nommer les jouets (animaux, personnages, etc.) ou s’il peut
raconter une histoire exprimant ses affects, ses fantasmes, ses pulsions ou
les conflits internes.
La valeur symbolique du jeu s’appréhende par les affects. Le thérapeute
peut observer soit l’angoisse comme la disparition (départ de la mère, du
père, d’un personnage ou de l’objet), soit la satisfaction du patient (celle-ci
se remarque sur son visage, ou il peut verbaliser son bonheur). À travers le
jeu, le patient répète l’expérience supposée pénible qu’il peut transgresser
en rajoutant un affect heureux.
On peut recourir au jeu avec des petits jouets (des personnages familiers
au patient tels que la police, les pompiers, le fermier, la famille, l’école,
etc.). Mais tout d’abord, le thérapeute le laisse choisir son jeu et, ensuite,
il peut se mettre à jouer avec lui tout en gardant une certaine distance.
Une fois le jeu commencé, le thérapeute peut alterner des moments où il
le laisse décider de la suite (pour voir le libre cours de ses désirs et mettre
en scène son monde interne : se trouve-t-il en difficulté pour déployer son
monde symbolique sans étayage de l’autre ?), et d’autres où il est intéres-
sant d’introduire volontairement, à l’aide du personnage que l’on joue, des
thématiques telles que : le conflit, la rivalité, la peur ou la tristesse afin de
voir comment le patient l’accueille et y réagit. Ceci peut nous donner accès

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Pulsions et fantasmes 355

aux pulsions libidinales et agressives ainsi qu’à la conflictualité intrapsy-


chique à l’œuvre dans l’inconscient du patient.
Dans le jeu, quand le patient utilise les barrières en construisant un ou
des enclos, cela signifie que les contenants sont présents. Il est question,
dans un second temps, de vérifier si les contenants sont suffisamment sûrs,
protecteurs, ou pas. Quelles sont les capacités des contenants psychiques du
patient ? Est-ce que ces contenants tiennent ou non1 ? Le jeu peut donner
une idée sur la qualité de l’environnement ou du milieu social dans lequel
il vit.

Remarque
Il faut veiller à ne pas trop intervenir dans le dessin et le jeu d’un patient mais
l’amener si possible à le réaliser, lui, et projeter le minimum de soi-même.
Une intervention dans le jeu ou le dessin interfère avec ce qui vient du patient.
Cela doit être pensé et réfléchi, non agi ni défensif, au même titre qu’une
interprétation verbale. Le thérapeute devrait user de son sens de la créativité
pour encourager le patient à aborder ou à laisser exprimer son monde interne.

Bibliographie
Andjelkovic, L. (2002). Apport de Mélanie Klein à la compréhension du processus de
séparation. Imaginaire & Inconscient, 8(4), 45-53.
Askenazy-Gittard, F., & Darcourt, G. (2012). Initiation à la psychanalyse freudienne.
Ellipses.
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis-
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Golse, B. (2004). La pulsion d’attachement. La Psychiatrie de l’enfant, 47(1), 5-25.
Laufer, M., & Laufer, M. E. (1989). Adolescence et rupture du développement. Presses
universitaires de France.
Palacio-Espasa, F. (2005). La psychanalyse de l’enfant aujourd’hui : indications et
frontières de différentes formes de psychothérapie. Journal de la psychanalyse de
l’enfant, 37, 257-280.
Roussillon, R. (2012). Manuel de la pratique clinique en psychologie et psychopathologie.
Elsevier Masson.
Roussillon, R. (2014). Manuel de psychologie et de psychopathologie clinique générale
(2e éd.). Elsevier Masson.
Winnicott, D. W. (1971). La Consultation thérapeutique et l’enfant. Gallimard.

1. Cf. la théorie de Tustin sur l’autisme non organique.

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19 Imagos parentales, surmoi,
moi idéal et idéal du moi
Les imagos et les instances psychiques (le surmoi, le ça, etc.) sont difficile-
ment accessibles au travers des questions puisqu’elles sont inconscientes.
Elles apparaissent néanmoins au travers de certains dessins ou dans le jeu
symbolique, ce qui donne au thérapeute le matériel à analyser ensuite.
Le présent chapitre apporte certaines réponses sur la technique d’explora-
tion des imagos parentales du patient y compris son surmoi, son idéal du
moi et son moi idéal.

Imagos parentales
Les imagos parentales sont l’ensemble de toutes les représentations que le
patient se fait des adultes : parents, enseignants, pasteurs, prêtres, imams,
artistes, voisins, professeurs, etc. et qu’il a internalisées en lui.
Les imagos parentales, maternelles et paternelles, peuvent être idéalisées,
dévalorisées, fluctuantes, etc. Il est question de chercher l’image ou l’appré-
ciation que le patient a de ses parents ou des figures paternelles et mater-
nelles internalisées. L’adolescent doit s’individualiser des imagos parentales
et aller vers les modèles d’étayage dans les groupes de pairs. L’adolescence
opère un nouveau mouvement qui amène le jeune à chercher à s’identifier
à de nouveaux objets d’investissement différents des objets parentaux.
Les projections parentales se recherchent dans l’anamnèse du patient et
de sa famille, l’histoire familiale, l’enfant imaginaire qu’avaient les parents,
le projet de vie que mûrissent les parents pour leur enfant. Quel inves-
tissement ou à quoi correspond la réussite de leur enfant ? Le thérapeute
examine, analyse ou vérifie si les parents permettent à leur enfant d’oser
rater, essayer, échouer, montrer sa curiosité, apprendre de nouvelles choses,
s’éloigner du chemin qu’ils pensaient être le meilleur pour lui, etc.
Il est normal qu’un adolescent transgresse la loi sans aller plus loin. Trans-
gresser, c’est faire le contraire, c’est outrepasser les limites imposées par les
adultes ou les parents sans leur demander leur avis avant de poser l’acte.
Nous attirons l’attention du lecteur sur le fait que lorsqu’on reçoit un
patient, il est important de ne pas critiquer ses parents, même lorsque lui-
même le fait. Une partie de ses parents est en lui (parent internalisé), les
critiquer revient à critiquer une part de lui. Il est tout aussi vrai de garder à
l’esprit que la plupart d’adolescents considèrent que tous les adultes ne les
comprennent pas. Ils cherchent à tout prix à se distancier de ces adultes qui
n’ont qu’un seul objectif : les réprimander, les critiquer, et ne pas prendre
pas en compte leurs points de vue.
Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie
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358 Status clinique pédopsychiatrique

Surmoi
Généralités
Le surmoi est l’ensemble des règles et interdits que l’individu apprend
à observer dès l’enfance (naissance) jusqu’à la mort. Depuis la famille
nucléaire, le patient apprend une certaine quantité de règles. Cet apprentis-
sage continue à l’école, dans la vie sociale extrafamiliale, au travail, etc.
Le patient peut se sentir oppressé par les règles. Il existe plusieurs cas de
figure selon l’âge et la réaction de l’environnement, etc. Le surmoi traduit
la contrainte que la culture exerce sur l’individu pour imposer les renonce-
ments pulsionnels nécessaires et éventuellement excessifs ; il est aussi un
vecteur d’un héritage culturel que le sujet doit s’approprier à travers des
processus d’idéalisation des objets et de sublimation des pulsions.
Cette fonction peut être tutélaire, punitive-sadique, destructrice ou inter-
dite. Il renvoie vers les notions de bien ou de mal, de justice ou d’injus-
tice, du permis et du non permis. Est-ce que ces concepts influencent le
fonctionnement du patient ? Est-il préoccupé par des impulsions interdites
ou antisociales ? Peut-il les contrôler ? Les manifestations d’interdiction,
c’est le juge, le senseur à l’égard du moi, la conscience morale, l’auto-
observation, la formation des idéaux chez le patient.
Le thérapeute cherche à savoir comment ces concepts du bien et du mal,
de justice et d’injustice influencent le fonctionnement du patient. Tomasella
souligne que toute insulte est le fruit direct du surmoi, dans la mesure où
c’est une pulsion qui vise à juger et à dévaloriser. « Si le surmoi est trop
rigide, il entraîne une source constante d’angoisse, une inhibition du
comportement, etc. » (Tomassella, 2009) Le surmoi est une instance critique
mais également un gardien protecteur qui négocie les représentations entre
le moi et le ça. Le surmoi résulte, pour l’essentiel, de l’intériorisation de
l’autorité parentale. Il est l’héritier du complexe d’Œdipe. Le surmoi est un
agent critique filtrant les pulsions au travers de normes intériorisées. Il est
l’instance qui génère le refoulement des pulsions jugées inacceptables. Il se
constitue à partir de toutes les situations, de toutes les paroles, de toutes les
émotions, de tous les actes et de tous les événements extérieurs qui influen-
cent le patient.
Si l’on peut essayer de représenter un continuum, ce qui n’est pas facile
car tout est dynamique, on part d’un surmoi non constitué ou non intégré
(borderline), on passe au constitué (chez le névrotique) vers le rigide (obses-
sionnel), et on finit à un surmoi persécuteur, critique, etc.
L’exploration du type et de la qualité du surmoi conduit le thérapeute à
chercher à savoir comment le patient répond au cadre qui lui a été imposé,
soit à la maison, soit à l’école, soit dans la thérapie. Le surmoi provient de la
relation d’objet. C’est une instance psychique ambivalente, lieu autant que

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Imagos parentales, surmoi, moi idéal et idéal du moi 359

fonction d’approbation, de désapprobation, de réprobation et d’injection


à la jouissance. De manière générale, le type de surmoi est observé sur le
long cours. Certains exemples aident le thérapeute dans son exploration,
tels que : le thérapeute se demande si le patient vient toujours en avance, à
l’heure ou en retard à ses rendez-vous. Comment justifie-t-il ses actes vis-à-
vis de l’autre, quel est son rapport au règlement ?
Le surmoi est la résultante de la figure adulte internalisée, elle dépend
des parents mais surtout de la représentation que le patient a intégrée.
Lorsqu’on travaille avec des patients et leurs parents, il est important de
bien différencier le parent réel (traité si besoin par guidance, mesures éduca-
tives, consultations thérapeutiques, etc.) du surmoi du patient (à assouplir,
renforcer, etc. en psychothérapie fondée sur le cadre interne). Parfois, les
deux parents (réel et surmoi) sont nécessaires et parallèles.

Différentes expressions du surmoi


À partir des quelques phrases du patient, le thérapeute peut se faire une
idée sur le type et la qualité de son surmoi. On retrouve dans ses propos des
expressions telles que : « Il faut ou il ne faut pas », « Toujours ou jamais »,
« Tout le monde est… », « On doit ou on ne doit pas », « Je suis obligé »,
« Je ne peux pas faire autrement », « Il n’y a qu’à », « C’est comme ça… »,
« Cela ne se fait pas », « C’est normal », « Totalement », « Absolu », « Pur »,
« Parfait », « Je n’y arriverai jamais », « Je ne suis pas capable », « Je ne
suis pas comme les autres », « Je me dis souvent : aie confiance ! continue
comme ça ! ne t’inquiète pas ! prends ton temps, tiens ! »

Quatre types de surmoi


Surmoi intégré ou constitué
C’est ce que l’on peut appeler les interdits intériorisés. Le patient garde en
son intérieur les règles et lois édictées par ses parents et la société. Il s’y
réfère pour porter un jugement devant une situation donnée afin de pren-
dre une décision. Ce surmoi l’aide à trancher entre ce qui est bien et mal.

Exemples d’un surmoi intégré


• Un patient à qui ses parents interdisent de toucher la prise électrique ou les
plaques d’un réchaud encore chaud peut de lui-même décider de ne pas violer
cette règle en leur absence.
• Certains patients, en entrant dans le bureau dès le début de la séance,
demandent où s’asseoir ou l’autorisation de jouer, de dessiner, de toucher aux
jouets, d’aller aux toilettes, de répondre en présence des adultes ou d’autres
personnes.

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360 Status clinique pédopsychiatrique


• Devant les rayures faites sur le mur ou le livre, le patient s’exclame : « C’est
méchant ce que je fais », « Ça me saoule d’aller à l’école pour être bien dans ma
vie plus tard… »
• En parlant des agents de la police, le patient dit : « Je ne savais pas pourquoi
ces deux pigeons étaient venus demander à mon père de quitter ma maison,
pourquoi ma mère avait appelé la police. »
• Certains patients disent à la fin de la séance ou à n’importe quelle occasion :
« Merci beaucoup » en sortant du bureau, « Je me sens coupable… », etc.

Surmoi non intégré ou non constitué


Il s’agit des interdictions que le sujet n’a pas encore intériorisées en lui.
C’est un surmoi qui est le plus souvent à l’extérieur du patient. C’est l’autre
(c’est-à-dire les parents, la police, le juge, etc.) qui pose les règles à respecter.
Il existe un surmoi persécuteur, préœdipien, etc. Ce surmoi est retrouvé
chez le patient psychotique, avec trouble envahissant du développement
ou trouble du spectre de l’autisme. Ce type de patient n’a pas intégré le
complexe d’Œdipe. Par exemple, lors d’une baignade à la plage, le patient
qui est pris par une pulsionnalité incontrôlée ne fait pas attention au désir
de l’autre, ce qui le conduit à s’exciter en voyant une jeune fille en maillot
de bain. Par la non-maîtrise de ses pulsions, il risque de chercher à abuser
sexuellement de cette jeune fille qui ne faisait que se baigner et qui, par-dessus
tout, n’avait aucune intention de lui faire des avances à caractère sexuel
(c’est-à-dire de la sexualité des adultes).

Surmoi extérieur ou externalisé


Cette instance psychique agit quand le patient doit juger ou prendre une
décision devant une situation quelconque, et qu’il se réfère à l’autre. Ce
n’est pas lui le garant de la loi mais plutôt l’autre. La personne qui doit
faire appliquer ou respecter la loi est à l’extérieur du patient. Il peut s’agir
des parents, de la police, du juge, etc. Le patient n’arrive pas à avoir des
références intérieures de la loi. Par exemple, il dit : « Je ne le fais pas parce
que j’ai peur de la police, du juge, des enseignants, des éducateurs… ». Il
évite de commettre un acte délictueux ou une bêtise, pas parce que c’est
mauvais et interdit, mais parce qu’il a peur de la réaction de la police, du
juge, de la maîtresse, de son éducateur ou de ses parents. Le surmoi externe
se retrouve chez les personnes qui justifient leurs actes ou attitudes en se
référant à autrui : la police, Dieu, etc.

Surmoi intérieur ou internalisé


Contrairement au surmoi externe, ici, les règles sont bien internalisées. Le
patient refuse de commettre certains actes, non parce qu’il a peur de la réac-
tion de l’autre, plutôt parce qu’il sait que c’est interdit de faire ceci ou cela
dans sa société. Il n’a pas besoin que l’autre lui rappelle la loi.
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Imagos parentales, surmoi, moi idéal et idéal du moi 361

Autres caractéristiques du surmoi


Surmoi œdipien ou post-œdipien
Ce surmoi est dit un surmoi bisexué car il est constitué de deux identifications :
paternelle et maternelle. Le patient peut ressentir de l’amour ou de la haine
pour chacun de ses parents. Il arrive que grâce à ce surmoi œdipien, il essaie de
s’identifier à ses deux parents. Ce type de patient a une manière particulière à
réagir après ses actes et a tendance à culpabiliser selon les actes qu’il commet.
Surmoi interdicteur
Le patient trouve les interdits dans tous les domaines de sa vie : sexuel,
plaisir, masochisme, etc. Ses interdits concernent tout ce qui ne va pas en
dehors du plaisir de la vie. Il dit souvent : « On ne me laisse pas faire ceci, ou
cela. » Ce surmoi est le vrai « gendarme », ce qui veut dire qu’il donne des
injonctions au patient, lui intime des ordres ou lui donne des recomman-
dations ou des prescriptions à observer. Par exemple, le patient entend une
voix intérieure qui dit : « Ne jouis pas ! » Il a beaucoup plus d’interdits que
de permissions. Certains patients indiquent qu’ils se sentent plus à l’aise
pour faire certaines choses que d’autres. D’autres disent ouvertement qu’ils
sont moins intéressés ou que telle activité n’est pas à leur niveau, etc.
Surmoi rigide
Le surmoi entraîne une source constante d’angoisse, d’inhibition du
comportement. Le patient a trop d’ambitions. Il essaie de répondre à son
idéal du moi placé haut. Ce surmoi est très exigeant et très sévère. Il est
souvent retrouvé chez les névrosés obsessionnels. Par exemple, le patient
se refuse de prendre une pause ou de reporter à demain la tâche non finie.
Ici, c’est le moi qui est faible. Plus le surmoi est rigide, plus le patient se sent
persécuté et moins il a de place pour commettre une erreur ou une faute.
Il a peur de la punition. Son self est dévalorisé.
Surmoi tutélaire ou dirigeant
Le surmoi tutélaire est protecteur pour le patient. Il est retrouvé chez le
patient qui a intégré les identifications parentales. Le patient considère ses
parents comme ses protecteurs. Ce type de cas ne requiert que très peu de
séances (environ 2 à 5) pour dénouer ces difficultés.
Surmoi sévère
Ce surmoi s’observe dans la gestion d’échecs dans les jeux du patient. Il
peut le pousser à se sentir continuellement coupable, à se faire sans cesse
des reproches, etc. Il s’agit de mauvais perdants ou de patients qui n’arrê-
tent pas de « se mettre la pression » ou la barre haute pour avoir de bonnes
notes à l’école (il se plaint car il a eu 5 sur 6 comme moyenne). Ce surmoi
sévère, on le voit aussi quand le patient range, ramasse, nettoie avec exagé-
ration ou essaie de réparer une faute pendant que le thérapeute juge que la
situation est moins grave en général.
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362 Status clinique pédopsychiatrique

Ce surmoi sévère peut être aussi contrôlant et retrouvé chez les patients
obsessionnels, inhibés, etc. Il entretient la culpabilité, le besoin d’autopu-
nition et la recherche de sanctions. Pour autant, la bienveillance, la dis-
ponibilité et la sollicitude parentale sont bien évidemment indispensables
et irremplaçables.
Surmoi protecteur
Il ne s’agit pas seulement d’infliger des punitions au patient. Ce surmoi
lui permet d’éprouver du plaisir dans ses jeux, ses actes et ses activités. Il
lui permet de faire un lien libidinal ou à entrer dans les apprentissages. Ce
surmoi vient faire le libre arbitre et peut punir le « méchant ». Par exemple :
• dans le jeu où les gens sont en train de se disputer ou de se bagarrer, le
patient fait intervenir la police pour essayer d’arrêter le fautif et le punir ;
• dans son histoire, le patient raconte un récit où la personne appelle la
police pour éviter de rester seul à la maison en l’absence de ses parents ;
• un autre patient voyant son parent à la fin de la séance tient à ce que le
thérapeute dise à sa mère : « Madame, je suis content de votre enfant, il des-
sine ou joue très bien, il faut qu’il continue comme ça. » Ce même patient
peut dire au thérapeute « Bravo ! C’est joli ton dessin ou ton travail… »
Ce surmoi protecteur empêche le patient de faire des bêtises, et lui
explique les choses avec douceur. Il s’exprime par des phrases telles que :
• « Tu ne peux pas faire ça, tu ne peux pas lui répondre mal, tu sais que c’est
mauvais, c’est méchant et c’est mal. »
• « Tu as bien travaillé à l’école, malgré la moyenne de 4 sur 6, tu t’amélio-
reras la fois prochaine. »
• « Tu vas réussir l’année prochaine même si tu redoubles cette année. »

Surmoi primitif ou préœdipien


Le patient fonctionne entre le bon et le mauvais objet. L’autre est pris
comme l’objet partiel. Le patient n’est pas sensible ou conscient qu’à travers
tel ou tel autre acte, il peut faire mal à autrui. Il a du mal à se rendre compte
des conséquences de ses actes, le malaise que cela génère chez l’autre. Ce
type de patient peut continuer à répéter les actes injustifiés jusqu’à ce qu’il
soit réprimandé ou puni par une autorité surmoïque (parent, éducateur,
maîtresse, justice, police, etc.). Il faut une intervention externe afin qu’il
essaie de remettre en cause ses actions et actes ou qu’il soit capable d’être
recadré, d’intégrer et de respecter les règles.
Surmoi sadique ou punitif
Il est retrouvé chez les patients qui ont eu des parents laxistes ou très puni-
tifs. Ainsi, le patient se traite lui-même ou les autres sans empathie. Ce
surmoi intime l’ordre au patient : « Soumets-toi ! » Il est retrouvé chez le
patient ayant une figure paternelle autoritaire ou désirée, et peut amener
à des conduites masochistes. Ces patients font des attaques au corps et à
l’objet sous forme de passage à l’acte auto et hétéroagressif.

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Imagos parentales, surmoi, moi idéal et idéal du moi 363

Certains patients qui ont ce type de surmoi ne se permettent pas de faire


du mal à l’autre. Dans cette optique, ils sont plus conciliants avec l’autre. Ils
essayent de s’adapter aux exigences de l’objet.
Ce surmoi n’est pas suffisant. Il est loin d’être protecteur et laisse le
patient se mettre en danger. Ces sujets ont souvent recours aux mécanismes
de défense suivants : le déni de la réalité et de l’autre, la projection (il pro-
jette sur l’objet ses parties agressives). Par exemple, un patient dans le jeu
demande au thérapeute : « Mais, tu es un bien méchant petit garçon, qu’est-
ce que ces lunettes ont pu te faire ? Ce sont les adultes qui portent de telles
lunettes, allez, à la cave, vilain petit garçon, tout seul dans le noir, pour que
tu aies bien peur. » Ce surmoi punitif inflige de réelles punitions. Souvent,
la personne croit qu’elle mérite d’être blâmée : « C’est ainsi, je suis comme
ça, je ne mérite pas mieux… »

Surmoi trop faible ou surmoi régressif


Ce surmoi permet au patient de passer à l’acte (décharge de la tension)
sans tenir compte des conséquences. On constate de nombreuses décharges
émotionnelles, des troubles du comportement, des patients explosifs, etc.
La personne ayant ce type de surmoi est souvent permissive.

Surmoi persécuteur
Ce surmoi persécute le moi dans l’autoaccusation mélancolique, tandis que
l’euphorie maniaque traduit la coïncidence du moi avec son idéal du moi.
Le plus souvent, le surmoi persécuteur intime l’ordre au patient en ces
termes :
• « Tu es nul, oublies ton bac, tu ne seras jamais avocat ! »
• « Tu es un gros nul et tu veux voler la pomme ? »
• « Tu es nul, les autres ont bien travaillé leur devoir ! »

Surmoi critique, culpabilisateur ou tyrannique


Le surmoi tyrannique pousse le patient à revenir après un acte commis
par le passé, sur les gestes qu’il aurait posés et ceux qu’il n’aurait pas dû
poser. Il rumine sans arrêt de ses gestes maladroits. Il a trop de remords et
se culpabilise encore et encore. Ce surmoi l’empêche d’avancer facilement
vers l’avant à cause de la culpabilité immense et très présente.

Exploration du surmoi
Au-delà de se limiter sur un surmoi intégré ou non intégré, dans l’explo-
ration du surmoi, le thérapeute se pose la question de savoir comment ce
surmoi ou ses règles sont entrés dedans ou sont restés en dehors du patient.
Nous devons aller dans les détails. Est-ce que ce surmoi a été intégré par
effraction ou par introjection ? Le cas échéant, où se trouve ce sac ou cette
rosace du moi introjecté ? Est-ce que le surmoi du patient se trouve en
dehors de son moi ou le contraire ? Est-ce qu’il a intégré le surmoi par

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364 Status clinique pédopsychiatrique

projection ou par identification ? Le thérapeute doit faire un lien entre le


type de surmoi et les mécanismes de défense.
Un surmoi intégré par effraction laisse des « trous ». Il s’agit d’une méta-
phore de passoire. On se retrouve devant de nombreux « trous de fuite »
qui laissent couler du dedans vers le dehors toutes les règles ou les prin-
cipes acquis ou appris. Par exemple, le patient narcissique ressent le vide en
son intérieur. Les « trous » faits par cette effraction l’amènent à dire : « J’ai
besoin d’être rempli, d’être regardé par tout le monde, d’être comblé… » On
peut alors se dire que ces patients narcissiques sont comme des esclaves de
la quantité, voire qu’ils accumulent des tonnes de quantités à l’intérieur, la
deuxième question étant de savoir comment ils les conservent en eux. Ces
patients ne sont pas sans objet, ils sont avec l’objet.
L’évaluation du type ou de la qualité du surmoi nous fait faire un tour vers
le type et la qualité de la relation d’objet, tout en passant sur les qualités
de son self et identification avant de finir sur l’idéal du moi et le moi idéal.
Le patient qui a des troubles du comportement, casse tout ce qui se trouve
sur son passage (bris d’objets, disputes, bagarres, etc.). Ce type de patient
est lui-même terrorisé en son intérieur. La crainte est que la personne se dit
qu’à tout moment, tout peut éclater en son intérieur.

Moi idéal et idéal du moi


Généralités
Le moi idéal est une construction imaginaire du moi. Il est rattaché à l’iden-
tification narcissique. La suprématie du symbolique sur l’imaginaire amène
le patient à un détachement du moi idéal vers l’identification symbolique
que soutient l’idéal du moi. Cette identification ne se fait plus par rapport à
l’image (moi idéal), mais par rapport à l’autre ou à l’objet.

Moi idéal
Il est le résultat de l’introjection idéative que fait le patient dès la naissance.
Le moi idéal est incarné lors des rêveries, c’est le surhomme auquel le moi
s’identifie alors qu’il accomplit des actions héroïques fantasmées. Progres-
sivement, à travers le stade du miroir, le patient se fait une image de soi
(c’est le narcissisme primaire).
Le moi idéal peut être clivé, non intégré, grandiose et inatteignable. Le
thérapeute se demande si le patient est dans l’ordre de la toute-puissance
narcissique ou pas. Ce moi idéal est remplacé plus tard par l’idéal du moi (le
narcissisme secondaire).

Idéal du moi
Il s’agit d’un absolu que l’individu tente ou non d’atteindre. Cet absolu est
considéré comme l’incarnation de sa vision de l’homme parfait. Cet idéal
de moi se présente ainsi comme « celui que j’aimerais être », mais aussi
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Imagos parentales, surmoi, moi idéal et idéal du moi 365

« celui que je voudrais aimer ». En effet, l’idéal du moi correspond à ce que


l’individu souhaite devenir, plus tard dans sa vie. La personne verbalise
une volonté ou aspire à être reconnue, estimée, aimée par sa famille et son
entourage socioprofessionnel. Il est le résultat de l’identification projective.
Cette fonction permet l’équilibrage de l’estime de soi (couple frustration-
gratification dans l’axe objet-narcissique).
L’idéal du moi a pour rôle de mettre de l’équilibre entre les compétences
ou les capacités du patient et ses envies ou ses rêves (futur professionnel,
avenir, projets actuels et à venir), l’omnipotence-autosuffisance (contrôle
omnipotent-autosuffisant) et l’« idéalité » (c’est-à-dire un idéal du moi non
encore internalisé. Il s’agit d’un idéal du moi non intégré.)
La fonction de l’idéal du moi est de décrire ou définir ce que l’on veut être
ou que l’on souhaite devenir plus tard, ce que le patient veut faire ou pas
dans un futur proche ou lointain. Quel est l’idéal pour soi-même ? Quelle
profession ou modèle de vie le patient pense-t-il avoir plus tard ? Il est de
l’ordre du surmoi. On recherche le rêve que fait le patient de sa vie future.
L’idéal du moi permet l’équilibration de l’estime de soi, de l’« idéalité » et
de l’omnipotence-autosuffisance du patient.
Pour explorer cet idéal du moi, le thérapeute demande au patient de
décrire ou de parler de ses projets de formation future, de sa projection
dans le monde professionnel, du rôle ou fonction sociale qu’il souhaiterait
occuper plus tard dans sa vie en général, etc. Certains patients borderline
sont attirés par le métier d’éducateur de la petite enfance ou par les établis-
sements d’aide pour les personnes âgées, car ils ont envie de s’occuper des
autres pour pouvoir les garder près d’eux et réparer avec eux les insuffisances
de leur enfance.
Il faut que l’idéal du moi soit en rapport avec la réalité. « J’aimerais être
un chirurgien, mais je ne peux pas car je suis dans une filière d’apprentis-
sage ». L’idéal du moi doit être un moteur pour avancer dans la vie mais
ne doit pas être placé au plus haut niveau, sinon le patient sera déçu s’il
n’y parvient pas. L’idéal du moi, le test de réalité et la conception du self
s’imbriquent intimement.
L’idéal du moi est ce qui conduit vers le processus du deuil et du renon-
cement devant le principe de réalité. L’idéal du moi doit être un but attei-
gnable par le patient. Le thérapeute se demande quel est l’état du moi écrasé
qui fait que le patient ne peut plus apprendre, oser se tromper, essayer
d’autres expériences, chercher à découvrir d’autres cieux, etc. C’est peut-
être parce que ses parents ont de fortes projections et un idéal de moi qu’ils
ont placé à un niveau très haut.

Exploration de l’idéal du moi ou du moi idéal


Le thérapeute se pose la question de savoir, chez le patient entre le surmoi
et l’idéal du moi, quelle est la fonction la plus importante en relation avec
le moi. Quelle est l’indépendance de ces fonctions par rapport aux objets
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366 Status clinique pédopsychiatrique

externes ? Comment le patient ménage-t-il ses fonctions liées à son envi-


ronnement socioculturel, familial et professionnel ?
• On recherche l’âge préféré du patient : « Quel âge as-tu ? Est-ce que tu te
trouves plus petit ou plus grand par rapport à ton âge ? Quel âge aimerais-tu
avoir aujourd’hui ? En quoi ce serait mieux ? »
• Le thérapeute demande le choix de sexe ou l’orientation sexuelle du
ptient : « Tu aimerais mieux être une fille ou un garçon ? Pourquoi ? »
• « Quelle personne, personnage ou star admires-tu ? », « As-tu une idole ? »,
« Qui aimerais-tu être ? », « À qui aimerais-tu ressembler ? »
• « Quels sont tes projets pour quand tu seras grand ? », « Qu’est-ce que tu
imagines faire comme métier ou profession une fois adulte ? », « Quel autre
métier préférerais-tu faire plus tard ? », « Imagines-tu vivre près ou loin
d’ici ? », « Penses-tu avoir une famille ? Comment serait-elle composée ? »
• « Qu’est-ce qui t’intéresse dans la classe comme matière ? Pourquoi tu
aimes cette matière ? Que penses-tu de l’histoire-géographie, des mathéma-
tiques ou des langues ? »

Intégration dans la personnalité


Cette section du status pédopsychiatrique se remplit dans la discussion
tout en évoquant les hypothèses diagnostiques. Il s’agit de voir comment
la personnalité du patient se construit. « L’axe de la compréhension ou du
sens que peuvent prendre les symptômes (ce qui est différent d’une valeur
causalité) et de leur intégration dans le fonctionnement plus global de
l’enfant, voire de la famille, est à inscrire dans une compréhension psycho-
pathologique complexe qui intègre toutes les théories psychodynamiques
existantes (par exemple, la théorie psychanalytique classique et de la rela-
tion d’objet, la théorie de l’attachement, la théorie de l’intersubjectivité) et
l’approche systémique. » (Brunschwig, 2001) Le thérapeute décrit comment
le moi du patient arrive à mettre en place ses mécanismes de défense afin de
gérer le conflit pulsionnel entre le ça, le surmoi et l’environnement.
Comment le moi constitue sa conception du self et quelle relation d’objet
développe-t-il tout en s’appuyant sur ses mécanismes de défense, répondre
aux exigences de son surmoi et constituer sa structure psychodynamique ?
Comment le moi trouve-t-il (ou non) un compromis entre ses pulsions et
les exigences du surmoi et de la réalité externe ? Quelle fonction joue sa
pathologie ou ses troubles dans son fonctionnement global, ses défenses,
son développement, etc. ?
Comme disait Winnicott (1971) : « L’intégration de la personnalité ne se
fait pas à date fixe, elle se fait et se défait, mais si elle est faite, une circons-
tance défavorable peut amener sa disparition ». Le thérapeute se demande
si c’est parce qu’il y a ces défenses à l’œuvre que le patient « tient encore ».
À quel moment apparaît le déséquilibre chez lui ? Par exemple, pour les

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Imagos parentales, surmoi, moi idéal et idéal du moi 367

personnalités asociales, on se demande quelle fonction ont ses défenses


dans son développement intégral.
L’évaluation psychodynamique tend à déterminer l’organisation actuelle
de la personnalité sur les plans économique et dynamique, à travers
l’examen de la pulsionnalité, de l’agencement fonctionnel du moi et de
ses rapports avec les autres instances du psychisme et le corps propre. Il
est question de dégager une relecture de l’ensemble des observations en
termes de réalité interne. L’évaluation synchronique proposée est celle d’un
moment précis, actuel, du fonctionnement psychique, « arrêt sur image »
d’un processus de maturation en cours, non synonyme de structure. La
formulation globale finale, diachronique, souligne la dimension vectorielle
de ce même processus et tente de préciser les rapports de continuité ou de
rupture d’avec l’enfance, ainsi que l’apparent fonctionnement défensif ou,
au contraire, l’impasse développementale.
Enfin, le thérapeute donne une explication sur le fonctionnement du
surmoi, du moi idéal et de l’idéal du moi et leur intégration dans la person-
nalité du patient. Quels sont les mécanismes de défense auxquels il recourt
pour se protéger ou équilibrer ses pulsions libidinales et agressives dans la
réalité de l’environnement ? Quelle est sa qualité de vie dans ses rapports
à lui-même ou à son entourage ? Par exemple, un patient qui a un surmoi
tyrannique est très psychorigide dans son fonctionnement quotidien. Il
peut développer un trouble obsessionnel compulsif, etc.
Toute cette démarche est soutenue par le fait que « les éléments per-
tinents ne sont plus seulement les comportements et les idées, mais les
manières de dire, les modes de communication ou de non-communication,
les émotions et les évocations mentales, les particularités du récit ; le dire
est devenu objet d’investigation. » (Brusset, 1999)
Le thérapeute doit préciser de manière synthétique la nature des remanie-
ments (qualitatifs et quantitatifs) amenés par le processus d’adolescence : la
construction du sentiment d’identité, le remaniement des identifications,
l’inscription dans la temporalité et la finitude, l’intégration de l’image d’un
corps sexué adulte.

Bibliographie
Brunschwig, H. (2001). Transfert et contre-transfert, deux leviers solidaires et puis-
sants du travail analytique. Imaginaire & Inconscient, 2(2), 91-100.
Brusset, B. (1999). Diagnostic psychiatrique et différence du normal et du patholo-
gique. Encyclopédie Médico-Chirurgicale, Psychiatrie, article 37-102-E-20.
Tomasella, S. (2009). Le Surmoi. Il faut, je dois… Eyrolles, coll. « Les mots de la psy-
chanalyse ».
Winnicott, D. W. (1971). La Consultation thérapeutique et l’enfant. Gallimard.

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20 Hypothèses diagnostiques

Fin d’une évaluation pédopsychiatrique


L’évaluation pédopsychiatrique est un traitement en soi. « À la différence
d’une démarche médicale classique centrée sur une position “défectolo-
gique”, l’établissement du diagnostic se fait dans une perspective dévelop-
pementaliste ; cette perspective évalue simultanément les vulnérabilités et
les ressources de l’enfant et de son contexte environnemental. » (Bochereau
et al., 2011)
Les entretiens en pédopsychiatrie correspondent d’une façon ou d’une
autre à une thérapie brève. Le thérapeute qui mène cette évaluation doit
garder à l’esprit qu’elle se fait normalement sur une période variable. Elle
doit déboucher sur des orientations claires et précises. Le nombre de séances
doit être préalablement défini, ce qui éclaircit le cadre. Le thérapeute et le
patient savent que les entretiens d’évaluation ne se font pas en illimité,
mais qu’il y a une fin à l’horizon. À chaque rendez-vous, le thérapeute tra-
vaille la séparation avec le patient, et se dit qu’il ne reviendra peut-être
plus la prochaine fois. Il oriente le patient également vers d’autres collègues
dans le but de suivi psychothérapeutique ou pour la suite de l’évaluation
(bilan somatique, tests cognitifs, tests projectifs, bilan logopédique, diverses
échelles, etc.).
La technique d’évaluation implique que le thérapeute valorise les compé-
tences et la capacité du patient à aller de l’avant et à chercher de l’aide. Il
faudrait trouver un moment judicieux pour glisser les mots permettant une
ouverture vers l’autre thérapeute si l’évaluation arrive à sa fin. Devant cette
idée de séparation possible en fin d’évaluation, il est question de travailler
ses propres deuils et séparations avant de travailler la séparation avec le
patient. Il est important d’éviter de se prendre pour un « super thérapeute »
au risque de se retrouver coincé dans la toute-puissance. Il n’est pas simple
de se séparer du patient après tant de séances d’évaluation et surtout après
avoir pointé certains focus sur lesquels il est souhaitable de travailler avec
lui. N’est-ce pas une mère suffisamment bonne et suffisamment frustrante
comme le souligne Mme Perret-Catipovic dans ses enseignements et lors
des « grilles du jeudi » (cf. « Avant-propos ») ?
De la même façon qu’il est difficile pour le thérapeute de finir et accepter
de ne pas suivre un patient, il est moins facile pour le patient de démarrer
une évaluation avec un nouveau thérapeute pour de multiples raisons.
Celles-ci dépendent soit du thérapeute (manque de place en psychothé-
rapie, longue liste d’attente, autres bilans complémentaires, départ de la

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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372 Clôture de l’évaluation clinique

consultation ou du cabinet, difficulté d’avoir un lien avec le patient, etc.),


soit du patient (absentéisme, déménagement, refus de soin, etc.).
Le thérapeute doit se demander tout le temps quelles stratégies mettre en
place pour susciter chez le patient l’envie ou l’enthousiasme de demander
de l’aide quand il en ressent le besoin. Il peut aussi se demander quelle est
la meilleure orientation (quand il est question de référer le patient à ses
collègues) à proposer au patient : thérapeute en privé ou en institution, etc.

Hypothèse diagnostique et thérapeutique


Chaque évaluation clinique se termine par la formulation des hypothèses
diagnostiques ou des hypothèses de travail. Celles-ci orientent la prise en
charge du patient. Il arrive que le thérapeute ait besoin d’affiner ses hypo-
thèses en demandant d’autres examens paracliniques.
On peut dire que « depuis quelques décennies, de nombreux travaux ont
fait avancer la mise au point de définitions précises des catégories et des cri-
tères d’inclusion et d’exclusion qui permettent de ranger un cas dans telle
catégorie diagnostique ou, au contraire, de l’en exclure. » (Brusset, 1999)
La CIM-10 et le DSM-5 permettent de faire ce type de travail. La CFTMEA
apporte pour sa part un diagnostic structurel du patient. Ces diagnostics
font un tout et se complètent mutuellement.
Le thérapeute doit tenir compte des événements de vie qui peuvent
influencer ou envahir le développement du patient. Il faut se souvenir de
poser les hypothèses diagnostiques, avec un diagnostic structurel (selon la
CFTMEA) et fonctionnel (CIM-10 ou DSM-5). Les hypothèses différentielles
ont pour but d’écarter les comorbidités, de réorienter une prise en charge,
de faire pencher la balance entre l’urgence d’une telle ou telle autre prise en
charge, de demander un bilan complémentaire, etc.
Ces hypothèses orientent le clinicien sur la bonne décision à prendre pour
la prise en charge. Il doit demander au patient les tests psychométriques, les
résultats d’imagerie médicale et biologique pour affiner le diagnostic final.
La CIM-10 et le DSM-5 ont pour objectifs d’orienter le thérapeute vers
une meilleure décision à prendre sur le choix de médicaments, dans ses
recherches ou ses statistiques cliniques. Ces deux classifications permettent
au thérapeute de dialoguer ou d’échanger les informations cliniques avec
les tiers (assurances, autres thérapeutes, associations étatiques et caritatives,
etc.). La CIM-10 et le DSM-5 ont un grand intérêt par le fait qu’ils proposent
des catégories bien individualisées des psychopathologies. Ces références
diagnostiques partent des symptômes subjectifs et objectifs et permettent
au thérapeute de catégoriser ou de ranger les différents symptômes en des
troubles ou dans des groupes des syndromes.
Pour sa part, « la CFTMEA rend bien compte de la pratique clinique de
nombreux pédopsychiatres dont la formation est essentiellement psychana-
lytique. Si elle dispose d’un axe environnemental qui décrit bien les facteurs
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Hypothèses diagnostiques 373

complexes de l’environnement à prendre en compte en clinique, elle ne


possède pas de glossaire pour définir les diagnostics très détaillés. » (Boche-
reau et al., 2011) Cette classification « privilégie la notion de structure psy-
chopathologique qui prend appui sur une conception du développement et
du fonctionnement psychique issue de la psychanalyse : la structure est à
entendre comme un ensemble de positions libidinales, de types d’angoisse
et de mécanismes défensifs interdépendants, relativement stables, mais sus-
ceptibles de remaniements et d’évolutions en fonction de la maturation,
mais aussi des interventions thérapeutiques. » (Misès et al., 2012) Le diag-
nostic structurel oriente le thérapeute sur les stratégies, méthodes, tech-
niques thérapeutiques (psychodynamiques, cognitivistes, systémiques, etc.)
à mettre en place pour aider le patient. Il s’agit de placer le patient sur un
continuum, de voir ce qu’il présente comme symptômes et comment il
cherche à résoudre ses conflits.
En fait, comme dit précédemment, le thérapeute doit travailler le début et
la fin de l’évaluation. La qualité de lien, la technique de recueil et de trans-
mission des informations ont un effet important, sinon décisif, sur la suite
de la prise en charge.
Il est conseillé de donner des explications concrètes en des termes clairs,
nets et concis au patient et à son entourage. Le patient doit savoir ce qu’est
son trouble actuel, la cause (le cas échéant), les moyens thérapeutiques
actuels (traitement médicamenteux, psychodynamique, TCC, systémique,
socioéducation, rééducation logopédique et/ou orthophonique, psychomo-
trice, etc.), l’évolution de trouble avec et sans suivi, etc.

Diagnostics structurels ou psychodynamiques


Les structures renvoient vers quelque chose de figé, de fixe, de statique,
sauf les structures dynamiques. Il y a aussi la notion des structures et des
états. La question est compliquée quand on essaie de savoir ce qui se cache
derrière tel ou tel autre signe que montre un patient. Il est préférable de
parler de structure dynamique en parlant de pathologie.
La CFTMEA est l’outil qui propose les différents diagnostics structurels
psychodynamiques. L’avantage du diagnostic structurel est d’orienter le
thérapeute sur la forme de thérapie à proposer au patient et à sa famille.
Tout n’est pas sur un continuum, mais les variations ou les allers-retours
d’une structure à l’autre sont possibles et ce, à la suite des aménagements
internes que le moi du patient est obligé de faire pour s’adapter aux événe-
ments environnementaux. Le moi du patient s’appuie sur ses assises narcis-
siques, ses fonctions supérieures tout en tenant compte des règles que lui
présente son surmoi afin de savoir à quel mécanisme de défense adéquat
faire appel pour faire face à l’événement traumatique ou potentiel. Selon la
structure du patient, le thérapeute peut se permettre certaines interventions
ou en éviter d’autres.
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374 Clôture de l’évaluation clinique

Structure névrotique
Généralités
« La lignée névrotique correspond donc à l’articulation des facteurs : Œdipe,
surmoi, conflit génital, culpabilité, angoisse de castration, symptômes
névrotiques. » (Bergeret, 2013) On classe dans cette lignée : la névrose
phobique, la névrose hystérique et la névrose obsessionnelle. Ces classes
diagnostiques ont des caractéristiques communes. Le patient donne une
impression d’être éveillé et intelligent. Il consulte principalement pour
des troubles somatiques fonctionnels (douleurs abdominales, céphalées,
etc.), des peurs récurrentes ou du stress. Certains patients consultent pour
des troubles sphinctériens (encoprésie et énurésie) et rarement pour des
troubles du comportement ou du sommeil.
Sur le plan de sa relation d’objet ou relation à l’autre, le patient est adé-
quat face à la situation nouvelle. Il s’inscrit dans une relation d’objet plus
génitale. Il se montre réservé dans un premier abord, puis se sent vite à l’aise.
Les enfants assez jeunes (moins de 4 ans) montrent parfois des difficultés à
se séparer de leur mère et il faut faire entrer celle-ci dans la salle d’examen.
Mais ils se rassurent au cours de l’entretien, permettant à la mère de repartir,
sans signes d’anxiété (Palacio-Espasa & Dufour, 1994). On remarque géné-
ralement que les patients ayant une structure névrotique type phobique
sont plutôt fuyants et évitants. Pour ceux présentant une structure hys-
térique, ils sont plus séducteurs, complaisants. Reste à souligner que pour
la structure de la névrose obsessionnelle, le patient est sérieux et réservé.
Le patient ayant une structure fonctionnelle dite « névrose » a une estime
de soi satisfaisante. Il accepte sa condition et sa position d’enfant au sein
de sa famille ou à l’école. Son identification est parfois idéalisée, copiée ou
calquée sur les modèles des aspects parentaux.
En ce qui concerne les fonctions du moi, les patients névrotiques sont
plus dans la norme. Leurs fonctions sont plus intactes et bien organisées.
Le thérapeute constate une maladresse avec des symptômes de conversion
chez le névrotique phobique ou hystérique. En revanche, la méticulosité et
la tendance à la retenue sont plutôt en faveur d’une névrose obsessionnelle.
En bref, ces patients ont une bonne capacité de symbolisation car leurs
conflits ont pu être internalisés.
Les patients phobiques, hystériques et obsessionnels ont la capacité de
recourir à la symbolisation, à la sublimation, à la régression ou à l’isolation
des affects. Leur refoulement est en général poreux. Cela dit, ils sont sujets à
des retours du refoulé sous forme de symbolisation et de passage aux actes.
Le conflit se joue entre leur ça et leur surmoi.
En effet, comme dit dans le chapitre 16, en plus de ces mécanismes géné-
raux :
• celui ayant une structure névrose obsessionnelle utilise préférentielle-
ment le contrôle et la formation réactionnelle ;
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Hypothèses diagnostiques 375

• celui présentant une structure phobique utilise plus le déplacement ;


• celui ayant une structure hystérique utilise la conversion.
Les affects des patients névrotiques sont plus adéquats, modulés et
congruents à leur humeur. « L’enfant hystérique se montre plus facilement
jovial, alors que l’obsessionnel est un peu plus grave et sérieux, le phobique
plus craintif. » (Palacio-Espasa & Dufour, 1994) Ces patients présentent des
angoisses de castration accompagnées d’un fort sentiment de culpabilité
envers les objets rivaux. Il est facile de noter des angoisses de perte, d’être
délaissé ou incompris, qui sont interprétées comme des angoisses dépres-
sives modérées.
On retrouve au sein de ce groupe de névroses une prédominance des pul-
sions libidinales. Les patients montrent une sensibilité particulière à l’égard
du thérapeute et dans les jeux.
Le thérapeute note une prédominance des fantasmes œdipiens. « La vie
fantasmatique de ces enfants tourne autour du complexe d’Œdipe, surtout
dans son aspect direct. Celui-ci est source d’angoisse de castration dans la
forme phobique. » (Palacio-Espasa & Dufour, 1994) Les patients abordent
clairement la différence des sexes et de générations. Étant donné qu’ils
sont bien dans la symbolisation, leurs fantasmes s’expriment facilement.
On retrouve chez eux la névrose phobique des fantasmes sous forme des
angoisses de castration. Dans la névrose hystérique, les fantasmes sont diri-
gés vers la rivalité phallique et dans la névrose obsessionnelle, le patient
régresse et présente des fantasmes de nature anale.
Le surmoi des patients présentant une structure névrosée est plutôt pro-
tecteur, pas trop sévère, mais plus rigide dans la névrose obsessionnelle.
Dans cette forme, le surmoi « s’adresse aux fantasmes anaux plus ambiva-
lents » (Palacio-Espasa & Dufour, 1994).

Particularités des structures névrotiques


Cette grande entité regroupe trois sous-structures névrotiques. Ces dernières
nécessitent une étude plus approfondie.
Névrose hystérique de conversion
L’hystérie de conversion a eu sa lettre de noblesse à travers les différents tra-
vaux des psychanalystes, psychologues et psychiatres. En ce qui concerne
sa structure psychopathologique, « l’hystérique de conversion regarde son
symptôme en toute sérénité, n’étant dérangé en cela par aucun retour
intempestif du refoulé qui l’obligerait à mettre en œuvre d’autres dispositifs
et, d’abord, lui apporterait une souffrance ou une inquiétude, un certain
degré de conscience. » (Bergeret, 2013)
Certains éléments qui peuvent permettre au thérapeute de penser à cette
structure :
• sur le plan de la relation d’objet, ils prennent une distance proximale
dans l’intérêt ou l’objectif de mieux maîtriser ladite relation. L’autre élé-
ment à noter est que ces patients développent des rapports sexualisés à
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376 Clôture de l’évaluation clinique

l’égard de leurs parents. Le patient est excité par le parent du sexe opposé.
Il est en même temps soumis à l’interdiction posée par le parent ayant le
même sexe que lui ;
• le mécanisme de défense principal mis en jeu est le refoulement. Nous
pouvons dire que ce mécanisme est suffisant dans les formes hystériques
dites « hystéries pures ». Le refoulement est le mécanisme clé, central ou
principal. Chez certains patients ayant une structure en forme pure, seul
le refoulement suffit. On ne doit pas oublier de rechercher d’autres méca-
nismes de défense que le patient peut utiliser ;
• la principale angoisse que ces patients éprouvent est l’angoisse de cas-
tration. Le patient a la crainte que l’acte parvienne à se réaliser. Ainsi, chez
le patient hystérique de conversion, on peut constater que « même dans les
cas les plus douloureux en apparence, aucune manifestation d’angoisse sur-
moïque n’apparaît ; le sujet réagit comme si le symptôme ne lui appartenait
pas, comme s’il s’agissait d’un véritable corps étranger. » (Bergeret, 2013)
Plus simplement, l’angoisse en elle-même ne le déstabilise pas ;
• au point de vue topique, on ne note pas de régression du moi. Il est
juste important de souligner la régression libidinale partielle qui peut être
observée. Les patients qui ont cette structure ont une primauté du génital
dans leur économie libidinale avec des fixations orales et phalliques ;
• les patients qui ont la structure hystérique ont comme fantasmes des
représentations détachées de l’affect. La conversion somatique observée
chez eux est symbolisée. Ils sont plus dans la symbolisation.
Névrose hystérique d’angoisse
Cette autre structure mérite d’être clarifiée ou plus éclairée. Le terme angoisse
est très central et prend beaucoup de place dans l’appareil psychique du
patient. On y retrouve des objets phobogènes, les attitudes ou comporte-
ments contre-phobiques et l’angoisse qui les accompagne.
Plus simplement :
• la relation d’objet de ces patients correspond à un écran phobique dans le
but de conserver ou d’éviter l’objet ou l’autre. L’autre élément de la relation
d’objet réside dans les rapports aux parents qui sont marqués par la sexua-
lité. Celle-ci génère une certaine excitation mais qui est contrecarrée par
l’interdit formulé par les deux parents ;
• ces patients recourent au refoulement, au déplacement et à l’évitement
comme principaux mécanismes de défense. Ces mécanismes sont là pour
ne pas être confrontés à l’objet phobogène. En parlant de la phobie, les
« éléments phobiques rencontrés dans les structures hystériques d’angoisse
opèrent une double action : à la fois éviter le contact avec l’objet anxiogène
et à la fois le laisser présent “à la portée de la main” ou, mieux, à la portée
du regard (au sens propre du terme quand il s’agit d’un objet, comme bien
souvent, à la fois phobogène et contraphobique). » (Bergeret, 2013) ;

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Hypothèses diagnostiques 377

• le thérapeute note une angoisse de castration dans la crainte que la pensée


puisse se réaliser. Le surmoi du patient essaie de faire régner l’ordre principal
qui est l’interdit formulé par ses deux parents ;
• ces patients ont, du point de vue topique, une absence de régression
du moi et une régression partielle libidinale comme pour l’autre structure
hystérique de conversion. Leur économie libidinale est marquée par la pri-
mauté du génital également, mais cette dernière est plus dominée par des
fixations orales et anales précoces ;
• sur le plan fantasmatique, les affects subissent une modification ou une
transformation au sens que l’angoisse est rattachée à une autre représenta-
tion qui est à éviter. Plus exactement, on observe que les représentations de
ces patients sont détachées des affects.
Névrose obsessionnelle
Cette structure « correspond à une régression du moi de l’acte vers la
pensée […] ; contrairement aux habituelles défenses par le comportement
qui comporte une régression de la pensée en direction des agis. » (Bergeret,
2013) Il y a, en effet, quelque chose qui se joue entre l’activité de penser et
le passage à l’acte.
• Le patient met à mi-distance sa relation d’objet. Dans ses rapports à ses
parents, on note une excitation et les interdits à avoir de la haine du parent
du même sexe ou de l’amour pour le parent du sexe opposé.
• Comme mécanismes de défense principaux, on retrouve le refoulement,
l’isolation, le déplacement, l’annulation puis les formations réactionnelles.
Cela dit, nous rappelons que le patient peut mettre en jeu d’autres méca-
nismes de défense. Le thérapeute peut se rendre compte qu’il a un ou plu-
sieurs mécanismes de défense principaux.
• Le patient a des angoisses de castration devant ses pensées érotiques et
agressives.
• Le patient a une économie libidinale dominée par la primauté génitale. En
plus, on remarque une fixation au deuxième niveau du stade anal. Il y a une
espèce de défusion des pulsions du patient. Du point de vue topique, on observe
une régression du moi. Il y a un net basculement entre l’acte et la pensée.
• Au niveau fantasmatique, le patient détache ou rattache ses affects qui
gênent d’autres représentations fantasmatiques.

Remarque
Certaines entités pathologiques ou non comme : la névrose phobique,
d’angoisse, traumatique, d’abandon, d’échec, de caractère, la dépression
névrotique, l’hypocondrie névrotique et les psychopathies ne remplissent pas
les critères structurels comme les trois grands types de névrose décrits ici.
C’est la raison pour laquelle nous ne les développons pas dans ce guide.

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378 Clôture de l’évaluation clinique

Structure paranévrotique ou trouble léger


de la personnalité
Il existe deux grands groupes dans la structure paranévrotique : les formes
hypomaniaques, et les formes inhibées ou oligo-dépressives. Il est difficile
de mettre une limite très nette entre ces deux sous-catégories et leurs mani-
festations cliniques sont très imbriquées. Cette proximité entraîne un conti-
nuum mobile dans les deux sens.
Les patients qui ont une structure paranévrotique sont moins modulés
que les névrotiques dans leur présentation ou impression générale. Le
patient qui a une structure hypomaniaque est très vivant. Il a une tendance
à être dans la familiarité avec l’autre. Cette vivacité bascule chez le parané-
vrotique inhibé ou paranévrotique dépressif qui se montre plus réservé. Le
patient est peu communicatif et son inhibition n’est pas un frein à sa capa-
cité de symbolisation. Il consulte le plus souvent pour trouble du compor-
tement à type de crises, agressivité, instabilité ou parce qu’on pense à un
déficit d’attention et hyperactivité. Les patients de ce groupe se plaignent
de troubles du sommeil et, sur le plan scolaire, on voit leurs résultats baisser.

Forme paranévrotique hypomaniaque


Sur le plan de la relation d’objet, le patient paranévrotique hypomaniaque
est chaleureux, séducteur, et présente une tendance au contrôle de l’autre.
Il s’identifie aux objets idéalisés (la toute-puissance, la force, la réussite,
etc.). Il donne au thérapeute l’impression d’être en face d’une personnalité
narcissique.
Les fonctions du moi du paranévrotique hypomaniaque sont clinique-
ment dans la norme par rapport à l’âge du patient. Le patient peut afficher
une hyperactivité, un langage adultomorphe avec des fuites des idées. Son
test de réalité est préservé.
Le patient paranévrotique a un refoulement plus important si on le compare
aux patients névrotiques. Ainsi, le thérapeute constate un fort écrasement
des expressions pulsionnelles et fantasmatiques. Ce patient lutte contre les
fantasmes de castration, de perte ou de culpabilité. Comme mécanismes de
défense, il peut utiliser le déni et les défenses maniaques (la toute-puissance,
le mépris de l’objet, etc.).
Les patients présentant la structure paranévrotique ou un léger trouble de
personnalité ont un défaut relatif de modulation des affects. Ils expriment
ou manifestent le plus souvent leurs affects à travers le jeu et le dessin. Le
patient présentant la forme hypomaniaque exprime de la joie et de la gaîté
plus aisément. Il s’agit des émotions contagieuses. L’excitation peut être
telle qu’elle pousse le patient à agir. Rarement, l’entourage ou le patient
rapporte des troubles somatoformes et sphinctériens. Il est aussi sujet à des
peurs.

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Hypothèses diagnostiques 379

Ses pulsions libidinales restent prédominantes. Le patient exprime peu


de pulsions agressives. Son expression est plus symbolisée. La thématique
tourne autour de l’Œdipe avec des moments de régression qui sont plus
importants, ainsi qu’une grande oralité et agressivité.
Le patient paranévrotique hypomaniaque a un surmoi œdipien et rigide.
Celui-ci lui permet de lutter contre les fantasmes agressifs. Le thérapeute
note un idéal du moi haut placé.

Forme paranévrotique inhibée oligo-dépressive


En fait, sur le plan de la relation d’objet, le patient paranévrotique inhibé ou
oligo-dépressif est réservé. La relation se « réchauffe » avec le temps. Ce type
de patient demande au thérapeute de fournir des efforts afin de relancer les
échanges. En général, l’« attitude initiale timide est plutôt craintive envers
l’examinateur […], il persiste toujours une réserve qui pousse l’examinateur
à la relance constamment jusqu’à la fin de l’entretien » (Palacio-Espasa &
Dufour, 1994) Ce patient est à tendance adultomorphe. Le thérapeute a du
mal à le cerner rapidement.
Le patient inhibé oligo-dépressif a de bonnes fonctions de moi, mais
ne les investit presque pas. Le manque d’investissement de ses capacités
entraîne des troubles des apprentissages. Il est dans la réalité et son test de
réalité est préservé.
Le patient paranévrotique a un refoulement plus important comparé aux
patients névrotiques. D’autres mécanismes de défense devraient être décrits
lors de l’évaluation.
Le patient module relativement mal ses affects. Il les exprime ou les
manifeste le plus souvent à travers le jeu et le dessin. Pour la forme inhibée
oligo-dépressive, les affects sont généralement modulés et adéquats, sauf si
le patient est submergé par l’angoisse. Il peut isoler ses affects, se montrer
plus sérieux et plus ou moins triste. Ce type de patients présente rarement
des troubles sphinctériens ou somatoformes. Ils ont peu de peurs.
La structure paranévrotique est caractérisée par un fort écrasement des
expressions pulsionnelles et fantasmatiques. Le patient inhibé oligo-dépres-
sif refoule de manière plus prononcée ses pulsions agressives. Il entre dans
la phase de latence assez précocement. On observe le retour du refoulé sous
forme symbolique, mais répétitive, avec des contrôles et isolement des
affects. On peut avoir des mécanismes projectifs également. Le patient est
plus souvent dans le contrôle. Il est très méticuleux dans son jeu dominé
par des doutes et des hésitations, il est très strict et minutieux.
Les pulsions libidinales restent prédominantes chez des patients qui ont
une structure para-névrotique inhibée oligo-dépressive.
Ce type de patient a tendance à l’inhibition fantasmatique. La thématique
œdipienne est au premier plan, comme pour l’autre sous-groupe autour
de l’oralité et de l’agressivité. Contrairement au surmoi œdipien rigide du

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380 Clôture de l’évaluation clinique

paranévrotique hypomaniaque, le surmoi du paranévrotique inhibé oligo-


dépressif est sévère et critique. Le patient appartenant à cette catégorie place
son idéal haut. Ceci conduit à un sentiment d’échec et il se fait continuelle-
ment des reproches.

Troubles thymiques
Une certaine particularité se dégage dans cette classe diagnostique. Sont
inclus dans cette catégorie les patients dépressifs ou hypomaniaques. Au
cours de leurs travaux, Francisco Palacio-Espasa & Roland Dufour (1994)
ont retenu quatre critères d’inclusion.
1. Le premier critère observé chez un patient souffrant de trouble thymique
est une perturbation des affects de manière durable. On observe de la tris-
tesse et de l’euphorie ou de l’exaltation de l’humeur au premier plan. Les
troubles de l’humeur devraient être analysés de manière systématique en
cas de suspicion de symptômes de trouble thymique. En plus de ce trouble,
le thérapeute doit rechercher la présence du syndrome anxieux.
2. Le deuxième critère est le remplacement de l’exaltation de l’humeur, chez
certains patients, par l’existence d’une forme d’inhibition qui peut être très
marquée par un ralentissement cognitif et psychomoteur. Cette catégorie
des patients a de la peine à produire du jeu symbolique ou un dessin infor-
matif. L’école et la famille soulignent des difficultés scolaires, une baisse de
résultats scolaires, etc., peuvent se plaindre du fait que le patient est trop ou
très calme, voire très timide. Cette inhibition peut atteindre le développe-
ment cognitif, affectif, la conception du self, etc.
3. Le troisième critère correspond à des « manifestations négatives persis-
tantes de l’estime de soi, s’accompagnant d’une difficulté à prendre du
plaisir et par conséquent à maintenir toute sorte d’intérêts. À l’inverse, le
sujet hypomaniaque présente une inflation persistante de l’image de soi
avec notamment une labilité d’intérêts. » (Palacio-Espasa & Dufour, 1994)
Comme dit au deuxième critère, le soi et la conception du self sont fré-
quemment touchés par cette inhibition. Cette difficulté peut aussi se
constater dans la qualité de la relation d’objet que le patient développe
avec son entourage socioculturel et scolaire.
4. Le quatrième critère est la présence d’une symptomatologie dépressive.
Ces patients peuvent exprimer différents sentiments tels que l’abadon, la
solitude, le rejet, l’exclusion, l’ennuie, etc. D’autres présentent des idées
de ruine, de mort ou de perte des personnes familières, ou la crainte de la
maladie. Ce quatrième critère vient fermer la boucle des caractéristiques des
patients qui ont des troubles thymiques. Ceux-ci ont de réelles difficultés
socialement parlant. Les plus jeunes ont du mal à s’intégrer aux groupes de
pairs dans les cours de récréation ou dans le temps parascolaire.
Plus globalement, dans l’impression générale, le thérapeute peut noter
que le patient a des symptômes très évocateurs. Il a du mal à investir les

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Hypothèses diagnostiques 381

objets. Il peut évoquer un trouble de la libido, un manque d’appétit, une


perturbation du sommeil, une faible estime de soi, une fatigabilité. On doit
rechercher l’apathie, l’asthénie ou si le patient n’est pas avachi ou ralenti.
Comme qualité de la relation objet externe, on retrouve une forte inhi-
bition chez le patient dépressif. Le thérapeute doit rechercher les différents
sentiments et affects que le patient a peut-être du mal à verbaliser.
Sur le plan de l’estime de soi, le thérapeute note que les perturbations de la
qualité de soi influent sur la qualité de la relation d’objet que peut dévelop-
per le patient. En général, il montre une baisse d’investissement ou d’intérêt
envers tous les changements qui exigent l’acquiescement de soi. Il a de la
peine à éprouver du plaisir, ou à apprécier ce que l’entourage lui propose. Il
se dit constamment être impuissant, tient des propos négatifs vers lui-même.
En guise des fonctions du moi, on peut observer que les patients dépres-
sifs ont des résultats scolaires faibles. L’état affectivo-émotionnel brouille
leurs compétences cognitives. En revanche, « chez l’enfant hypomaniaque,
on tend plus facilement à remarquer l’expansion du moi à travers des rela-
tions nouées avec des objets plus ou moins idéalisés (objets puissants, forts,
riches, grands, invulnérables, etc.) » (Palacio-Espasa & Dufour, 1994).
Sur le plan de la pulsion, le patient dépressif ou hypomaniaque laisse voir
des attitudes qui plaident pour un état dépressif. Par exemple, il a de la peine
à entrer dans les apprentissages et se trouve confronté à l’échec scolaire. On
relève chez ce type de patients de l’irritabilité, de l’agressivité, des crises de
colères, des accidents, une désobéissance ou des fugues à répétition. Il est
important que le thérapeute étudie les réactions du patient dans son entou-
rage. Comment arrive-t-il à exprimer ses pulsions libidinales et agressives ?

Structure paradépressive ou trouble moyen


de la personnalité
On classe deux sous-types dans cette catégorie : la forme paradépressive
inhibée, retrouvée chez les enfants de moins de 5 ou 6 ans, et la forme
paradépressive mixte, décrite chez ceux de plus de 5 ou 6 ans. Ces patients
consultent très souvent pour des troubles du comportement avec des pro-
blèmes récurrents à l’école. Ils ont des difficultés d’apprentissage et des
troubles de langage. Ils rapportent au thérapeute qu’ils sont constamment
tristes, présentent de la phobie, des peurs et des troubles du sommeil.

Forme paradépressive inhibée


Elle est décrite chez les patients ayant moins de 5 ou 6 ans. En fait, le théra-
peute observe dans l’impression générale que les patients qui ont la forme
paradépressive inhibée ont une expression plutôt triste ou très sérieuse, et
un ralentissement de manière générale.
Au niveau de la relation d’objet, le patient se montre distant sur le plan
émotionnel. Ce manque d’entrain défavorise la mise en place de relations

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382 Clôture de l’évaluation clinique

harmonieuses. Pour certains patients, cette situation ne dure pas tout


l’entretien, plus tard, la relation finit par se « réchauffer » difficilement.
Le self du patient est dévalorisé. Il se dit être incapable de faire quelque
chose. Il est toujours dans l’échec. Ce genre de patients se fait continuelle-
ment des reproches et se plaint des pathologies qui n’ont pas de substrats
somatiques (l’hypocondrie). Le patient de cette catégorie s’identifie aux
objets détruits, l’hypocondrie, et se dévalorise.
Au sujet des fonctions du moi, le patient a une motricité ralentie. Son
intelligence est potentiellement bonne. Le thérapeute note une baisse des
productions symboliques, qui peut être mise sur le compte de l’inhibition.
Le patient présente un ralentissement sur le plan de ses pensées (une bra-
dypsychie), il a tendance à des arrêts de la pensée (« suspension de la pen-
sée »). Le thérapeute ne note pas de processus primaires comme chez les
sujets borderline. Le test de réalité est bon.
Au sujet de ses mécanismes de défense, le patient recourt très souvent
au refoulement des pulsions. Il est rare de retrouver des défenses de type
maniaque. On observe fréquemment un refoulement des pulsions agres-
sives. Ses productions sont pauvres et inhibées. On note des défenses
d’ordre mélancolique qui viennent parier contre les pulsions agressives. Les
pulsions libidinales se manifestent dans la solitude, la perte, l’abandon ou
la mort, etc.
Les affects du patient sont peu clairs. Il est sombre ou très sérieux. On
peut noter une tristesse ou une froideur des affects. Il suscite un sentiment
d’ennui à cause de ses affects peu modulables.
L’évaluation des fantasmes montre une pauvreté d’expression fantasma-
tique. Le patient est plus du versant dépressif. Ses pulsions agressives sont
plus mélancoliques. Il se plaint de son incapacité d’exécuter une tâche, il
se dévalorise, il est hypocondriaque, etc. Le patient a des fantasmes oraux
très avides. Dans les entretiens, il évoque volontiers des sentiments de
culpabilité.

Forme paradépressive mixte


Cette structure est décrite chez les patients ayant plus de 5 ou 6 ans. Le
patient qui a une structure paradépressive mixte donne l’impression d’avoir
une hypomanie. Le thérapeute note des phases d’inhibition importantes
dans l’impression générale durant les différents entretiens.
Le patient de cette sous-catégorie est séducteur, se montre trop à l’aise
dans sa relation d’objet. Il reste important de remarquer son aspect plus
superficiel ou régressé, parfois le patient est efféminé.
Le thérapeute observe, en ce qui concerne les fonctions du moi, une
hyperactivité très prononcée couplée à des périodes d’inhibition de la
motricité. Le patient peut avoir de bons potentiels sur le plan intellectuel,
mais peu de réalisations. L’enseignant peut nous informer du fait que le

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Hypothèses diagnostiques 383

patient n’utilise pas toutes ses capacités intellectuelles. Il a un cours de pen-


sée accéléré, labile avec des « suspensions de pensée », ce qui implique de
nombreux changements des thématiques abordées dans les entretiens ou
dans son jeu. Plutôt qu’un jeu scénarisé, le patient fait une succession de
commentaires.
Sur plan des défenses, le patient recourt aux défenses maniaques. Il s’iden-
tifie aux objets idéalisés. Il parle de la richesse, de la force, de la grandeur,
de la puissance, etc. On retrouve que son refoulement est très massif, ce qui
donne cette perplexité anxieuse avec inhibition. Si ces deux mécanismes
de défense échouent, l’intensité du sentiment de discontinuité augmente,
et ce n’est pas dû aux multiples interruptions des processus secondaires
comme ce qui se passe chez les patients à structure borderline.
Les affects du patient sont une mixité de la gaîté en alternance avec des
moments de perplexité anxieuse. Il aborde des thèmes dépressifs mais sans
reconnaissance de l’affect.
Le patient exprime des fantasmes dépressifs et maniaques (il est très
narcissique ou a des idées de grandeur). Le thérapeute note également des
fantasmes oraux et anaux ou œdipiens ou alors très archaïques.
Le surmoi du patient est non œdipien. Ce surmoi se bat contre les pul-
sions agressives destructrices. Le patient a tendance à se blesser, se scarifier,
etc. Son idéal du moi est très haut placé et très exigeant avec pour consé-
quence des échecs importants.

Structure borderline
Cette catégorie regroupe les patients qui présentent une forme hyper-
maniaque, dépressivo-schizoïde et le trouble d’identité ou narcissique. La
grande majorité consulte pour les troubles du comportement à l’école. Les
adultes rapportent que le patient a du mal de rester en place. Il a la bou-
geotte et n’arrive pas à se concentrer. En classe et à la maison, les adultes
constatent qu’il est distrait et perd ses objets ou ne finit jamais ses devoirs
ou le travail. Le patient fait des crises de colère, est agressif, instable, etc. On
peut noter également des troubles des apprentissages, un retard de langage,
etc. Au niveau familial, on découvre que le patient appartient à une famille
à problèmes, il y a des antécédents de dépression post-partum, des discon-
tinuités dans les soins, des abus par le passé, etc.
Le thérapeute note une impression générale plutôt polymorphe et plus
changeante. Les patients sont hyperactifs et instables. On note une dis-
continuité et des sauts d’humeurs brusques durant les entretiens.
La particularité de la structure borderline est qu’elle a un rapport avec
les objets internes. Le thérapeute note que dans la relation à l’autre, ces
patients ont une plus grande difficulté à négocier les rapports avec l’autre.
Il s’agit d’une relation d’objets anaclitiques. Le patient peine à supporter

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384 Clôture de l’évaluation clinique

l’autorité ou la personne qui a le pouvoir. Il a tendance à rechercher une


relation sadomasochiste avec l’autre. « Sur le plan contre-transférentiel, la
relative absence de réponses organisées à nos interventions nous donne
souvent un sentiment d’inefficacité, étant donné l’importante tendance au
déni des affects conflictuels. Toutefois, cela dépend de la sévérité du trouble
de la personnalité. » (Girard-Frésard et al. 2017) Le patient recherche conti-
nuellement des punitions ou que l’autre lui fasse des rappels à l’ordre. Il
oscille entre l’excès de familiarité et le retrait schizoïde.
Le patient de cette catégorie a un self grandiose. On note des moments
d’effondrement, cela à la suite des pathologies narcissiques. Il évoque son
impression d’avoir une discontinuité de l’image de soi. On retrouve parmi
ces patients ceux ayant des troubles d’identité.
Le thérapeute note que les fonctions du moi sont plus ou moins conser-
vées. Le patient a un bon potentiel, mais peu ou mal utilisé. Il a une forte
inhibition avec des troubles de symbolisation. On note, au niveau moteur,
une hyperactivité, une maladresse, une brusquerie, des passages à l’acte
lors des mouvements régressifs avec un langage perturbé. Les patients ont
une pensée peu désorganisée. On note une fuite d’idées chez les patients
souffrant d’hypomanie. Ils rapportent des troubles d’identité (entre le moi
et l’identité sexuelle). Le test de réalité est parfois défaillant. Le théra-
peute constate des irruptions des processus primaires dans les processus
secondaires.
Sur le plan de mécanismes de défense, le thérapeute note des défenses
du type psychotique. Quelquefois, le patient peut essayer d’organiser ses
défenses sur le mode névrotique. Le thérapeute objective un clivage des
objets ou la forclusion des affects, la projection, l’identification projective,
le déni tout-puissant. On constatera qu’il répète de manière rapide des
déplacements de ses pulsions conflictuelles dans diverses représentations
de destruction, de persécution, etc. Dans ces organisations, le conflit doit
être cherché entre l’idéal du moi et la réalité ou le ça.
Au sujet des affects, les patients rapportent des inquiétudes et angoisses
avec une prédominance dépressive intense. Il s’agit principalement des
angoisses de perte d’objet, de castration ou de mort. Le patient a de la tris-
tesse ou peut évoquer des affects sombres. Il peut montrer des traits d’hypo-
manie. Dans ses moments de frustration, il exprime plutôt de la rage ou du
désespoir.
Les pulsions agressives sont importantes. Bien que le patient n’arrive pas
à avoir un bon contrôle de ses pulsions, il les exprime à travers le jeu, le
dessin ou oralement. Le thérapeute constate de multiples passages à l’acte.
« Une des autres caractéristiques de l’organisation borderline est le déséqui-
libre entre l’expression de la pulsion agressive, entraînant des fantasmes
dépressifs de mort et de destruction catastrophiques des objets, et la pau-
vreté de l’expression de la pulsion libidinale. Ce déséquilibre pulsionnel est

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Hypothèses diagnostiques 385

à la base du sentiment d’être incapable de préserver des liens avec des objets
relativement indemnes. » (Girard-Frésard et al. 2017) Le patient borderline
exprime des fantasmes de manière très crue et effrayante. Ses fantasmes
tendent à interrompre sa capacité de symbolisation.
Le patient a un surmoi très sévère ou défaillant. « Dans toute organi-
sation limite, le surmoi demeure bien incomplet, faute de vécu œdipien
suffisant sur le plan organisateur ; à plus forte raison dans un aménagement
si proche de la lignée psychotique. » (Bergeret, 2013) Le patient borderline
prouve qu’il a fait difficilement preuve de sens moral et d’empathie. Il lui
est difficile de respecter les règles et les contraintes de la société.
L’activité fantasmatique des patients est riche et souvent plus effrayante,
ce qui conduit à des ruptures de symbolisation. On observe ont une insta-
bilité des investissements.
En bref, « chez les enfants borderline, cette partie adulte du moi, ou
objectale, ou névrotique, est déjà plus présente, bien que la partie infantile
ou narcissique reste prédominante dans les formes plus désorganisées. Mais
chez ces enfants, à côté de l’agir et de la verbalisation narcissique expulsivo-
projective, il y a des moments d’expression plus symbolique, qui poin-
tent vers des mouvements transférentiels que nous pouvons leur signaler.
Malheureusement, cette expression symbolique se désorganise facilement,
lorsque les affects sous-jacents deviennent trop angoissants. » (Girard-Frésard
et al. 2017)

Exemple de la personnalité borderline à l’adolescence


Les adolescents borderline donnent l’impression générale d’être dans la
séduction, la provocation dans le lien à l’autre, et ont tendance à devenir le
centre de l’attention. Le patient emmène le thérapeute dans son monde affec-
tif, relationnel, et son intimité psychique.
Il s’agit d’une relation d’objet essentiellement anaclitique. L’objet existe, il est
externe et bien peu différentié. Le patient se démarque par l’avidité relation-
nelle envers l’objet. Il a constamment besoin du regard de l’autre. Il éprouve
un besoin d’être porté. Il reste très dépendant de l’autre. Il s’agit de la relation
décrite comme anaclitique. Le clinicien a l’impression au fil du suivi de chaque
fois recommencer à construire quelque chose avec le patient. C’est la métaphore
du château de cartes. Il le construit et, vite après, il le détruit pour recommencer
encore et encore le même château.
Dans le concept de self et soi, chez certains patients, le faux self finit par être
agaçant pour le thérapeute. Il est important que le clinicien se demande où
est le vrai-self du patient. Le plus souvent, ce vrai-self est soumis et se met loin
derrière l’idéal du moi.
Le self est dévalorisé. La conception de soi implicite est très grandiose tandis
que l’explicite est très faible et dévalorisée, raison pour laquelle ces patients

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386 Clôture de l’évaluation clinique


éprouvent très souvent de la déception constante. Il leur est difficile d’être à la
hauteur de leur attente, ou de leur idéal du moi. Ils sont ainsi confrontés à un
sentiment de nullité, de dévalorisation permanente et de vide.
Ces patients s’identifient à l’objet maternel ou paternel. Ils peuvent parfois
avoir des difficultés à s’identifier ou à avoir une identification claire et moins
vacillante, d’où la solitude qu’ils éprouvent de manière répétitive à chaque fois
qu’ils recommencent une relation. Cette solitude les pousse à se déguiser au
niveau vestimentaire ou look. Le patient cherche des identités d’emprunt pour
camoufler sa solitude, ce qui le conduit encore dans le faux-self.
Généralement, le patient s’identifie à une partie de l’objet pour se faire une
identité. Il se colle à l’objet et peine à s’identifier. Il développe une certaine
adhésivité à l’objet et cela se ressent dans les entretiens cliniques. La thérapie
recherche le support identificatoire afin de donner une énergie à l’adolescent
pour qu’il puisse continuer son travail d’identification et éviter de rester dans le
faux-self. Il est question de rechercher les différentes modalités identificatoires
que présente l’adolescent dans l’évaluation et la psychothérapie.
Les fonctions du moi sont le plus souvent immatures. Pour certains adolescents,
l’intelligence est bonne sur le plan clinique mais pas toujours. Ils sont moins
timides et ont de la facilité à s’exprimer. Mais plus finement, le thérapeute
a l’impression d’être face à un jeune qui a des pensées magiques. Le test de
réalité risque d’être concerné par des dérapages consécutifs à des excès de pro-
jection. Le préconscient est parfois mince ou a contrario très large, ce qui est
préjudiciable à tout travail de rêverie.
Comme mécanisme de défense, le clinicien note directement et sans effort un
défaut de refoulement. Le patient à fonctionnement borderline recourt à la
projection, l’idéalisation et la désidéalisation immédiate, au clivage de l’objet,
aux identifications, au mépris de l’objet, et à la dénégation. Certains sont plus
dans la répétition de ce qu’ils ont déjà entendu, ce qui donne cette impression
d’être plus dans l’intellectualisation et la rationalisation. Le clinicien note des
passages à l’acte ou des actes de passage. La persécution due à l’identification
projective du patient borderline peut se comprendre comme étant un retour de
ce qu’il aurait projeté sur l’objet. Il reçoit littéralement en pleine figure ce qu’il
a projeté à l’autre ou à l’objet.
L’expression des affects reste superficielle chez l’adolescent à structure border-
line. Le clinicien a l’impression d’être devant une belle indifférence affective ou
une espèce d’abrasion affective ou émotionnelle. Le patient évoque ses émo-
tions avec un ton monocorde. Le plus souvent, il est triste et anxieux. Les idées
noires et suicidaires sont à investiguer, ainsi que cette anxiété. Certains patients
sont très « brouillants » sur le plan affectif.
Le surmoi est assez cruel et soumis au moi idéal qui est tyrannique. L’idéal du
moi est très haut placé, comme si le patient voulait obtenir réparation ou
sauver le monde.

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Hypothèses diagnostiques 387

Structure dysharmonique évolutive


Cette catégorie regroupe les patients qui ont un contact plus particulier à
cause de leurs fréquents troubles de l’attachement. Ils peinent à discriminer
le type ou la qualité de relation, leurs réactions sont très inappropriées à
la séparation avec l’autre. Ils ont tendance à être soit trop près, soit fran-
chement très absents.
Les fonctions du moi sont très altérées. On a l’habitude de parler d’un
fonctionnement en mosaïque.

Structure dysharmonique psychotique ou psychose


Cette catégorie est constituée des patients qui demandent la consultation
pour des difficultés relationnelles et interactionnelles. Ils ont essentielle-
ment des retards de langage et de communication. Les troubles du compor-
tement sont majeurs et fréquents.
Ces patients marquent le thérapeute sur le plan de l’impression générale.
Ils frappent par leur caractère étrange. Face à eux, le thérapeute a l’impres-
sion d’« étrangeté ou de bizarrerie ».
Au niveau relationnel, le patient est incapable d’établir ou de maintenir
une relation durable. Il est souvent isolé. Il vit en retrait ou alors il se colle à
l’autre. C’est une relation fusionnelle ou symbiotique, dite « tout ou rien ».
Nous pouvons confirmer « que l’élément fondamental de la psychose
infantile est caractérisé par le trouble grave de la relation » (Girard-Frésard
et al. 2017). Le self et l’identification de ces patients sont mal constitués. Ils
ont une image de soi qui ne tient pas. « L’apparente adaptation à l’environ-
nement de certains enfants déficitaires masque leurs difficultés d’investis-
sement du travail psychique. » (Girard-Frésard et al. 2017)
Les fonctions du moi sont également très altérées, comme pour les struc-
tures dysharmoniques évolutives. Tout est dans la désorganisation jusqu’au
test de réalité qui est très perturbé. Le fonctionnement symbiotique carac-
térise ces patients. « Nous comprenons ce fonctionnement symbiotique
comme le fantasme d’une unité duelle, à savoir la fusion de l’image de
soi avec celle des objets idéalisés, décrite par M. Mahler. » (Girard-Frésard
et al. 2017)
Le patient utilise les défenses de type projection, identification projec-
tive, clivage, dédoublement du moi et déni de la réalité pour pallier ses
angoisses. Le conflit chez lui se retrouve entre le ça et la réalité externe. Face
à des angoisses dépressives sévères, il recourt à la fragmentation du moi.
Le patient exprime des affects très rigides. « L’angoisse dans la psychose
est dévastante, dépersonnalisante, menaçante, persécutive et conduit à
la désorganisation. » (Askenazy-Gittard & Darcourt, 2012) Il rapporte des
angoisses de morcellement, d’anéantissement, de mort, de vide, etc.

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388 Clôture de l’évaluation clinique

Au niveau pulsionnel, on note une prédominance des pulsions agressives.


Les pulsions sont exprimées de manière très crue. Les fantasmes sont quasi
inexistants. « Les fantasmes de fusion avec les objets idéalisés alternent
avec les fantasmes de fusion avec les objets persécuteurs. » (Girard-Frésard
et al. 2017) Le patient a peu ou pas de capacité de symbolisation. Le travail
de rêve est en total échec.
Le surmoi de ces patients n’est presque pas fonctionnel. Il n’y a que
très peu de traces de ce surmoi. Il s’agit d’un surmoi situé au niveau très
archaïque du développement.

Remarque
Une particularité est à souligner à l’adolescence où des signes paranoïdes
sont la manifestation de la projection des adolescents dans la tentative de
répondre au contrôle de leur corps par tous les moyens qui leur semblent
disponibles, et de préférence des passages à l’acte (les tentatives de suicide,
les scarifications, les troubles alimentaires dont l’anorexie mentale, la prise de
toxiques et de drogues, etc.). Le fonctionnement psychotique est une défense
de l’adolescent contre les pulsions libidinales, et diffère de la structure psy-
chotique telle que susceptible d’exister à l’âge adulte.

Bibliographie
Askenazy-Gittard, F., & Darcourt, G. (2012). Initiation à la psychanalyse freudienne.
Ellipses.
Bergeret, J. (2013). La Personnalité normale et pathologique (3e éd.). Dunod.
Bochereau, D., Guédeney, N., & Corcos, M. (2011). Examen clinique de l’enfant en
pédopsychiatrie. Psychiatrie, 8(2), 1-9.
Brusset, B. (1999). Diagnostic psychiatrique et différence du normal et du patholo-
gique. Encyclopédie Médico-Chirurgicale, Psychiatrie, article 37-102-E-20.
Girard-Frésard, J., Palacio-Esapasa, F. & Spillmann, A. (2017). Précis de psychothérapie
psychanalytique de l’enfant autiste, psychotique et borderline. Érès, coll. « La vie
de l’enfant ».
Misès, R., Bursztejn, C., Botbol, M., Coincon, Y., Durand, B., Garrabe, J., Garret-Gloa-
nesc, N., Golse, B., Portelli, C., Raynaud, J. -P., Schmit, G., & Thevenot, J. -P.
(2012). Une nouvelle version de la classification française des troubles mentaux
de l’enfant et de l’adolescent : la CFTMEA R 2012, correspondances et transco-
dages avec l’ICD 10. Neuropsychiatrie de l’enfant et de l’adolescence, 60(6), 414-418.
Palacio-Espasa, F., & Dufour, R. (1994). Diagnostic structurel chez l’enfant. Masson.

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21 Discussion des diagnostics
retenus
La discussion diagnostique est une étape importante pour une évaluation
clinique. Le thérapeute doit dégager deux voies de penser. En fait, ces hypo-
thèses diagnostiques doivent être développées sur le plan fonctionnel et
structurel. Poser un diagnostic pédopsychiatrique a des avantages. « De ce
point de vue, le diagnostic psychiatrique a pour fonction d’entériner, de
rationaliser et de justifier la désignation sociale (culturelle, groupale, fami-
liale) du pathologique avec toutes les conséquences parfois dramatiques
que celle-ci peut avoir. » (Brusset, 1999)

Discussion des diagnostics et des hypothèses


cliniques
Comme nous l’avons dit précédemment, la CIM-10 et le DSM-5 aident le
thérapeute à souligner les points de ressemblance et de différence entre les
diverses hypothèses formulées. Les comorbidités, les éléments d’évolution
et de pronostic du trouble sont clairement discutés dans un rapport médical.
Une discussion fonctionnelle ou catégorielle présente l’avantage de
permettre de savoir quels sont les autres bilans ou analyses demandés afin
d’affiner les diagnostics finaux. De plus, à la fin d’un entretien clinique, le
thérapeute doit se rappeler la place des échelles d’évaluation, qui ont leur
importance et méritent une place particulière. « Ces échelles et question-
naires sont couramment utilisés dans les études épidémiologiques lorsque
celles-ci cherchent à déterminer la fréquence (en termes de prévalence ou
d’incidence) de tel symptôme ou de telle pathologie. » (Marcelli, 1999)
Les différentes échelles et tests psychométriques peuvent être proposés
par le thérapeute. Autrement, il peut s’appuyer sur l’expérience clinique
des collègues. Selon les besoins d’affiner le diagnostic structurel ou catégo-
riel, le thérapeute peut faire passer au patient toute une batterie de tests,
dits échelles d’évaluation. Ces échelles se différencient selon qu’il s’agit
de rechercher une symptomatologie déterminée, confirmer un diagnos-
tic, introduire un traitement, émettre un point de vue sur une évolution
clinique probable et pronostique du trouble, clarifier le fonctionnement
psychodynamique par les bilans ou tests projectifs. Ces échelles permet-
tent aussi d’évaluer le quotient intellectuel du patient (par exemple trouble
cognitif, de mémoire, d’attention), les symptômes psychotiques, bipolaires,
dépressifs, borderline, l’autisme, etc. Le thérapeute peut demander au
patient de faire des tests complémentaires.

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390 Clôture de l’évaluation clinique

La CIM-10 et le DSM-5 aident à savoir quel traitement médicamenteux


proposer au patient en permettant de poser un diagnostic catégoriel ou
fonctionnel. Ces classifications permettent de communiquer avec d’autres
professionnels qui ne sont pas forcément des thérapeutes (pharmaciens,
assurances, écoles, juge, etc.) à travers diverses formes de rapports médicaux.

Discussion structurelle ou psychodynamique


Le thérapeute s’appuie sur les différents diagnostics classés par la CFTMEA.
Il s’agit de parler de la structure du patient. Nous avons montré dans le cha-
pitre 19 comment le patient intègre ou réagit face à sa pulsion, les conflits
et ses angoisses. À quels mécanismes de défense a-t-il recours en tenant
compte des limites que lui imposent son surmoi et son environnement ?
Cette classification « privilégie la notion de structure psychopathologique,
qui prend appui sur une conception du développement et du fonctionne-
ment psychique issus de la psychanalyse : la structure est à entendre comme
un ensemble de positions libidinales, de types d’angoisse, et de mécanismes
défensifs interdépendants, relativement stables mais susceptibles de rema-
niements évolutifs en fonction de la maturation, mais aussi des interven-
tions thérapeutiques. » (Misès et al., 2012)
Il est question de monter les points essentiels qui différencient une struc-
ture d’une autre. Les écarts peuvent s’observer sur le plan des fonctions du
moi, au niveau du type et de la qualité de sa relation d’objet, etc. « C’est dire
l’importance qu’il convient d’attacher aux entretiens d’évaluation dont
l’objectif est triple : évaluer certes les divers “symptômes” dont souffre cet
adolescent mais aussi la dynamique familiale ; tenter de mettre ce jeune en
contact avec l’origine de ses conflits psychiques et lui montrer qu’il en est
à la fois le dépositaire et l’agent ; développer la curiosité de cet adolescent
pour son monde psychique interne et créer peu à peu les conditions d’une
psychothérapie ultérieure. » (Marcelli, 1999)
Le plus important encore est qu’à la fin de la discussion, le thérapeute se
fait une idée sur le type de thérapie ou la prise en charge adaptée à proposer
au patient ou à ses parents. Il se demande si le patient requiert un suivi à
raison d’une, deux ou trois fois par semaine, s’il doit s’agir de consultations
thérapeutiques à la quinzaine ou mensuelles, de thérapies de groupe, de
thérapie type psychodrame individuel ou en groupe, de thérapie type pho-
tolangage, art-thérapie ou systémique familiale, de consultations thérapeu-
tiques familiales, de guidance parentale ou s’il faut proposer une TCC, etc.
Enfin, après la discussion, vient le temps de la restitution au patient,
abordé au chapitre 22.

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Discussion des diagnostics retenus 391

Bibliographie
Brusset, B. (1999). Diagnostic psychiatrique et différence du normal et du patholo-
gique. Encyclopédie Médico-Chirurgicale, Psychiatrie, article 37-102-E-20.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie
Médico-Chirurgicale, Psychiatrie, article 37-213-A-10.
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22 Restitution de l’entretien
clinique
Le moment de la restitution est capital pour tout entretien. Après avoir
recueilli les données et fait les observations cliniques, le thérapeute doit
restituer ses impressions cliniques. Il devrait aborder avec le patient et sa
famille, en des termes clairs, les hypothèses diagnostiques, les modalités
évolutives, les risques et le pronostic, les prises en charge possibles pour
finir par une proposition thérapeutique précise et concise. « Conformément
au “contrat” passé entre le clinicien et l’adolescent lors des toutes premières
rencontres, l’évaluation doit être ponctuée par un entretien où le clinicien
fait part à l’adolescent et aux parents de ses constatations, de son avis et des
propositions thérapeutiques appropriées. » (Marcelli, 1999)
La restitution est un autre moment important non seulement pour le thé-
rapeute, mais aussi pour le patient et sa famille. « Ainsi compris, les entre-
tiens d’évaluation ont non seulement un intérêt diagnostique, mais ont
aussi valeur de consultation thérapeutique. Pour cela, l’entretien ne devrait
pas se limiter à un simple recueil d’informations qu’on peut éventuellement
obtenir par des procédures standardisées, mais devrait toujours restituer à
ce jeune, en termes simples et adaptés, l’information et la connaissance
qu’on a pu obtenir sur lui. L’objectif essentiel est d’aider cet adolescent à
devenir le sujet de ses pensées, affects et émotions afin qu’il n’en soit plus
la victime ou l’otage. » (Marcelli, 1999) C’est au cours de cette séance de
restitution que se discutent les hypothèses retenues, les bilans complémen-
taires à faire, les propositions thérapeutiques disponibles, l’évolution du
trouble et le pronostic sans et avec prise en charge.
La restitution est un moment pendant lequel le thérapeute a un autre type
d’échanges avec le patient. Il arrive, pendant cette séance, qu’il découvre
des éléments ou reçoive des informations qu’il n’est pas arrivé à rassem-
bler lors des entretiens. Cela peut être dû au fait que le patient est habitué
à rencontrer son thérapeute (il a plus confiance, se sent plus en sécurité, il
peut se permettre de dire des choses, etc.).
Le thérapeute informe le patient du compte rendu ou rapport d’évalua-
tion qu’il fera aux personnes tierces qui auraient demandé l’évaluation
(pédiatre, médecin de famille, juge, enseignant, éducateur, service de pro-
tection des mineurs, service social, autre thérapeute, etc.). Il est nécessaire
d’avoir l’accord du patient et de ses parents au préalable avant d’envoyer le
rapport aux tierces personnes. Le secret médical impose au thérapeute de
voir avec le patient et ses parents ce qu’il peut ou non rapporter aux tierces
personnes. La rédaction d’un rapport ou d’un « compte rendu de l’examen

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394 Clôture de l’évaluation clinique

clinique, qui a sa place dans le dossier pédopsychiatrique, comme les divers


courriers et certificats, fait partie intégrante de la mission du pédopsychiatre
et reflète l’intérêt donné à la conservation et à la transmission des don-
nées » (Bochereau et al., 2011).
Soulignons le fait que le thérapeute doit être attentif à différencier un
rapport fait à ses collègues psychothérapeutes et celui qu’il envoie aux
parents, aux assureurs ou à d’autres instances médico-juridiques. Ce dernier
est beaucoup plus succinct et plutôt très pédopsychiatrique tandis que le
premier doit être très élaboré, très vaste et fin dans le but de permettre au
futur psychothérapeute de se faire une idée sur le fonctionnement et la
structure psychodynamique du patient.
La volonté de différencier ces deux types de rapports est due au fait que
le rapport sur fonctionnement psychodynamique du patient est plus tech-
nique et orienté vers le type de psychothérapie à proposer dans la prise en
charge. L’autre à adresser à tout le monde présente une photographie psy-
chique actuelle du patient. En d’autres termes, il s’agit d’une photographie
psychiatrique du patient à l’instant t de la rencontre avec le thérapeute.
Ce rapport contient entre autres des hypothèses diagnostiques catégorielles
retenues ou écartées par le thérapeute, le traitement médicamenteux ou
non, le réseau de professionnels qui voient le patient ou sa famille, etc.
Enfin, l’approche dynamique essaie de comprendre le fonctionnement
du patient en fonction du développement normal attendu à son âge. Avant
de s’étendre sur diverses théories psychopathologiques et développemen-
tales, le thérapeute s’appuie sur la clinique qui est une activité centrée sur
l’observation. Cette approche permet de faire une restitution. Et c’est après
celle-ci qu’il peut considérer avoir fini son évaluation. Cette séance ouvre la
porte à la prise en charge.

Bibliographie
Bochereau, D., Guédeney, N., & et Corcos, M. (2011). Examen clinique de l’enfant en
pédopsychiatrie. Psychiatrie, 8(2), 1-9.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie
Médico-Chirurgicale. Psychiatrie. article 37-213-A-10.

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23 Conclusion
Nous ne pouvons pas prétendre avoir fini ce travail. L’évaluation pédopsy-
chiatrique est complexe et vaste. Cet ouvrage ne fait que l’objet d’un fil
conducteur qui permet au thérapeute de mener son entretien clinique. La
sémiologie clinique pédopsychiatrique est un vaste champ des connais-
sances médicales. Dans ce guide, nous avons pris soin de faire un lien
entre ce qui appartient à la théorie psychodynamique, la neuroscience et la
systémique. La clarification des concepts doit tant soit peu aider le théra-
peute à comprendre sur quelle piste il se lance.
Une fois de plus, l’entretien clinique doit être « adapté à l’âge et aux carac-
téristiques propres de chaque petit patient, il réclame du tact, du doigté, de
la délicatesse, mais aussi de la rigueur et de la méthode. Outil fondamental,
il fait appel, essentiellement, à des qualités d’observation et d’écoute, qui
s’affinent et se perfectionnent avec l’expérience, en requérant toujours un
temps suffisant consacré à l’enfant et à sa famille. » (Bochereau et al., 2011)
En principe, chaque thérapeute doit trouver sa propre technique de
mener un entretien ou une observation clinique. Au même moment qu’il
recherche les symptômes pédopsychiatriques, il acquiert sa spécificité ou
perfectionne sa technique. « L’intériorisation de la posture soignante ou
éducative suppose, par ailleurs, d’être soi-même sans chercher à imiter un
autre. Chercher à imiter un autre conduit à l’imposture. » (Ciccone, 2001)
Parler de la technique d’évaluation pédopsychiatrique revient à inter-
peller le thérapeute à être créatif, attentif et patient à l’égard de ses patients.
Ainsi, « la technique de l’entretien est particulièrement délicate à la préa-
dolescence (de 12 à 14 ans environ). Il existe bien sûr de grandes variations
individuelles en fonction de la maturité, de la capacité d’expression, du
type de problème incriminé. À cet âge, en effet, l’expression d’inspiration
ludique propre à l’enfant (jeu, utilisation du dessin, facilité à “inventer
des histoires”, jeu de marionnettes, etc.) a perdu une grande partie de sa
spontanéité, d’autant que le préadolescent répugne à ces modalités qui lui
rappellent une enfance trop proche. » (Marcelli, 1999)
L’un des objectifs de ce travail était de démystifier la grille d’évaluation
clinique. Cette « grille du jeudi » est un moment formateur destiné aux
cliniciens en formation à Genève (thérapeutes débutants, différenciés, che-
vronnés ou avancés) et qui donne l’impression aux professionnels débutants
en pédopsychiatrie d’être de la magie noire (cf. « Avant-propos »). Pour y
arriver, nous avons scindé ce guide en quatre parties : outils, anamnèse,
status clinique et hypothèses diagnostiques et clôture de l’entretien.

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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396 Clôture de l’évaluation clinique

Nous espérons avoir apporté des éléments techniques et théoriques sur la


manière de mener une évaluation clinique selon que l’on appartient à une
orientation psychodynamique, systémique ou de neurosciences.
Nous avons essayé de concilier la démarche psychodynamique et caté-
gorielle, d’où notre profonde conviction que bien des choses restent à être
développées. Pour expliciter les concepts cliniques et théoriques, ce guide
suggère des questions pratiques pouvant permettre au thérapeute de s’y
référer lors de son entretien. Cet ouvrage n’est pas un guide de psychopa-
thologie psychodynamique ni de thérapeutique, il se veut avant tout un
condensé de sémiologie psychodynamique faisant un lien entre les théories
systémiques, les neurosciences et la psychanalyse.
Pour conclure ce travail, le thérapeute est chaque fois invité à poser un
diagnostic catégoriel (photographie du moment du patient donnant une
image ou une idée sur son fonctionnement) à l’aide des outils diagnos-
tiques internationaux (la CIM-10 et le DSM-5) et un diagnostic structurel
(qui donne des informations sur la structure psychodynamique du patient).
Cette façon de penser clinique et thérapeutique est une marque de fabrique
de l’Office médico-pédagogique de Genève. Le diagnostic structurel soutient
la compréhension des éléments cliniques catégoriels photographiés au
moment de l’évaluation laissant une ouverture de penser que tout n’est
pas figé et que, plus tard, le thérapeute ou ses collègues pourront observer
d’autres symptômes ou éléments identiques ou différents selon l’adaptation
ou les aménagements entre l’individu et son milieu socio-environnemental.
L’avantage de cette manière de penser permet en outre au thérapeute de
comprendre ou d’apporter des clarifications sur les disparitions ou les sur-
venues d’autres symptômes non existants les années précédentes.
Nous ne pouvons pas terminer ce travail sans faire un tour sur l’inci-
dence de la neuroplasticité des patients en croissance que nous évaluons et
la réadaptation ou l’interaction continuelle possible à leur environnement
biopsychosocial. C’est d’ailleurs un élément de plus à avoir à l’esprit quand
on est appelé à évaluer un patient. Le maître mot est donc l’évaluation
pédopsychiatrique, qui consiste à poser les deux groupes de diagnostics :
catégoriels et structurels sur un fond des modifications biopsychosociales
dans un continuum développemental. Souvenons-nous continuellement
que toute rencontre clinique est thérapeutique en soi.

Bibliographie
Bochereau, D., Guédeney, N., & Corcos, M. (2011). Examen clinique de l’enfant en
pédopsychiatrie. Psychiatrie, 8(2), 1-9.
Ciccone, A. (2001). Enveloppe psychique et fonction contenante : modèles et pra-
tiques. Cahiers de psychologie clinique, 17(2), 81-102.
Marcelli, D. (1999). Entretien avec l’adolescent et son évaluation. Encyclopédie
Médico-Chirurgicale. Psychiatrie. article 37-213-A-10.

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Pour en savoir plus
Bee, H. & Boyd, D. (2017), Les Âges de la vie – Psychologie du développement humain
(adaptation française J. Andrews, C. Lord et F. Gosselin ; 5e éd.). ERPI Sciences
humaines.
Freud, S. (1994). L’inconscient. Dans Œuvres complètes – Psychanalyse. Presses univer-
sitaires de France.
Gentaz, E. (2016). La Vie secrète des enfants. Odile Jacob.
Houzel, D. (2018). L’examen psychiatrique. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M. Soulé
(dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (vol. 1, p. 615-631).
Presses universitaires de France.
Houzel, D. (2018). Travail d’équipe, stratégie des décisions, conférence de cas. Dans S.
Lebovici, R. Diatkine, M. Soulé (dir.), Nouveau Traité de psychiatrie de l’enfant et de
l’adolescent (vol. 1, p. 679-692). Presses universitaires de France.
Klein, M. (1946). Notes on some schizoid mechanisms. The Journal of Psychotherapy
and Practce Research, 5(2), 160-179.
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Ladame, F., & et Perret-Catipovic, M. (1997). Adolescence et Psychanalyse : une histoire.
Delachaux et Niestlé.
Meltzer, D., Bremner, J., Hoxter, S., Weddell, D., & et Wittenberg, I. (1980). Explora-
tions dans le monde de l’autisme. Payot.
Mosset, M.-R. (2018). L’examen du langage. Dans S. Lebovici, R. Diatkine, M. Soulé
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Presses universitaires de France.
Feldman, R., Olds, S., & Papalia, D. (2010). Psychologie du développement humain
(7e éd., traduction et adaptation française dirigée par A. Bève). De Boeck.

Guide pratique de sémiologie en pédopsychiatrie


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Index

A Affiliation, 255, 259


Aboulie, 304 ––exploration, 256
Absentéisme scolaire, 94, 99 Affirmation de soi, 257
Abus, 182 ––exploration, 258
––sexuel, 89 Agacement, 308
Acariâtreté, 308 Agitation, 76
Accompagnants, 34 ––désorganisée, 77
Accord harmonique, 51 ––intérieure, 305
Accordage émotionnel, 135 ––motrice, 236
Achats démesurés, 309 Agressivité, 94, 289, 311, 347
Acouphobie, 311 ––passive, 257, 268, 273, 274, 288
Acte –– – exploration, 289
––automatique, 237 ––retournement contre soi, 288
––manqué, 19 Agrippement, 75, 258
––médicolégal, 215 Aide éducative, 2
Acting-out, 298 Akathisie, 237
Activité Alcoolique (faciès), 120
––absence, 82 Alimentaires (troubles), 85, 331
––symbolique, 353 ––exploration, 332
Adaptation scolaire, 2 Alliance, 104
Adolescent ––de travail, 41
––accueil, 49 –– – adolescence, 104
––anamnèse, 95 ––thérapeutique, 40, 53
––entretien, 7 Altruisme, 256, 258, 287
––évaluation, 54, 104 ––exploration, 260
––personnalité borderline, 385 Ambivalence affective, 305
––processus, 98 Amimie, 123
––spécificité, 35 Amnésie antérograde, 178
––symptômes, 65 Amour enfantin, 340
––tentative de suicide, 55 Analyste, 36
Adoption, 115 Anamnèse, 61
Adultomorphe (enfant), 120, 160 ––familiale, 113
Affective rehearsal, 262 Anesthésie affective, 305
Affects, 21, 284, 303 Angoisse(s), 23, 75
––débordement, 198 ––d'abandon, 322
––élation, 309 ––d'anéantissement, 320
––focalisation, 31 ––dans la psychose, 387
––indifférence, 308 ––de castration, 319, 322
––partage, 33 ––de l'accomplissement, 171
––pénibles, 249 ––de l'étranger, 77
––tonalité, 311 ––de l'explosion, 171

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400 Index

––de morcellement, 321 ––processus, 72


––de mort, 83 ––sécurisé, 78
––de nirvana, 171 ––solide, 74
––de pénétration, 323 ––théorie, 72
––de persécution, 322 ––tranquille, 131
––de perte, 172, 322 Attaque
––de séparation, 83, 321 ––du corps, 347
––de vidange, 321 ––du lien, 200
––d'intrusion, 321 Attention, 173
––du danger, 172 ––conjointe, 230
––exploration, 323 ––déficit (trouble de) et hyperactivité,
––primitives, 320 152
Anhédonie, 305 ––exploration, 175
Annulation rétroactive, 260, 263, 272, ––flottante, 39
275, 291 ––visuospatiale, 134
––exploration, 262 Autisme, 142, 179, 234, 389
Anorexie, 55, 85, 120, 332, 388 Autistic fantasy, 284
Antécédents Autoagressivité, 313, 341
––familiaux, 114 Autoconservation, 20
––pédopsychiatriques, 111 Autodestruction, 341
––somatiques, 112 Auto-érotisme, 170
Anticipation, 262, 284 Automutilations, 341
––exploration, 263 Auto-observation, 51, 358
Antisocial (comportement), 342 Autopunition, 341
Anxiété, 201, 318 Autosatisfaction haute, 307
––généralisée, 306 Auxiliaire
Anzieu Didier, 167 ––du moi, 42
Apathie, 77, 306 ––psychique, 40
Aperception, 181 Aversif (comportement), 75
Appareil psychique, 19, 167, 280, 350 Avertissements aux lecteurs, 4
Appartenance à un groupe, 107
B
Apprentissage(s)
––de la propreté, 86 Babillage, 75, 230
––scolaires, 201 Babinski (réflexe de), 242
Après-coup, 346 Bagarres, 343
Articulation (exploration de la qualité d'), Bébé, 33
232 ––anamnèse, 67
Art-thérapie, 390 ––capacités de symbolisation, 64
Asociabilité, 307 ––clinique, 67
Assises narcissiques, 373 ––conduites alimentaires, 82
Associations ––développement psychomoteur, 79
––libres, 353 ––fantasmatique, 70
––relâchées, 198 ––imaginaire, 70
Asthénie, 307 ––méthode d'observation, 114
Athymhormie, 307 ––réel, 70
Attachement, 71 ––sommeil, 82
––adolescence, 98 Bégaiement, 90, 232
––comportement, 74 Bergeret Jean, 163
––exploration, 75 Bick Ester, 114
––figure, 73 Bien-être excessif, 309
––période préscolaire, 88 Bienveillance, 38

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Index 401

Bilan Cénesthopathie, 226


––logopédique, 371 Censeur du moi, 21
––somatique, 371 Censure, 16, 18
Bion (tache aveugle de), 350 Cerveau, 226
Bipolaires (symptômes), 389 CFTMEA, 4, 372
Bipolarité, 152, 198 Chuintement, 232
––exploration, 315 CIM-10, 1, 4, 6, 372
Bizarrerie, 164, 387 Clinique, 25
Blésité, 232 ––d'auto-observation, 51
Blessure narcissique, 255 Clinophilie, 329
Blocage, 264 Clivage, 270, 293, 294, 297
Boîte ––de l'objet, 261, 290
––à jouets, 46, 125 –– – exploration, 291
––à outils, 1 ––du moi, 291, 292
Bonding, 72 Cœur, 226
Borderline Cognitifs (toubles), 389
––personnalité à l'adolescence, 385 Cognitives (compétences), 105
––structure, 36, 136, 138, 152, 255, 383 Colère, 102, 307, 311, 341
––symptômes, 389 Coliques du nourrisson, 83
Bougeotte, 236 Coma, 176
Bougon (patient), 308 Combatif (trait), 160
Boulimie, 85, 120 Communication
Bowlby John, 78 ––canaux, 75
Bradyphémie, 231 ––écrite, 90
Bradypsychie, 196, 229 ––exploration, 231
––gesto-posturo-verbale, 158
C ––non verbale, 41, 124
Ça, 337, 358 ––orale, 89
––revendications pulsionnelles, 20 ––polysensorielle, 37, 171
Cadre ––visuelle, 80
––externe matériel, 45 Comportement (troubles du), 136, 298, 342
––interne théorique, 45 Compte rendu, 393
––socioculturel, 58 Compulsion obsédante, 246
––spatiotemporel, 47 Concentration (trouble de la), 180
Calcul (exploration des compétences en), Conception de soi, 385
234 Concepts, 21
Capacité(s) ––de base, 4
––autoréflexive, 187 Conduite(s), 82
––d'anticipation, 235 ––à risque, 101
––de gnosies tactiles digitales, 241 ––agressives, 337
––de rêverie, 347, 350 ––alimentaires, 338
––de symbolisation, 378 –– – bébé, 82
––de symbolisation du bébé, 64 ––sociale (troubles de), 171
––d'insight, 187 ––violentes, 102
––motrices, 235 Confabulations, 181
––négative, 45 Conflictualité intrapsychique, 346
––réflexive, 39 Conflit
Capgras (syndrome de), 219 ––intrapsychique, 253
Caregiver, 33, 72, 73, 79, 169, 353 ––latent, 249
Cauchemars, 86 Confusion, 188, 194
Causalité (trouble de la), 189 ––des sexes, 157

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402 Index

Conscience Dégoût, 309


––de la réalité, 190 ––de soi-même, 308
––exploration, 177 Déliaison, 347
––morale, 358 Délinquance sexuelle, 341
––rétrécissement, 176 Délire, 194
––sociale, 93 ––de grandeur, 210
––troubles, 176 ––de négation, 226
Conscient, 15 ––de type appartenance, 209
Consolidation de l'information ou du ––de type cosmique, 208
souvenir, 178 ––de type culpabilité, 211
Conspiration, 212 ––de type damnation, 211
Constellation familiale, 107 ––de type érotomaniaque, 209
Constipation à répétition, 87 ––de type fantastique, 209
Construction de l'identité, 150 ––de type féérique, 208
Contenu psychique, 21 ––de type filiation, 209
Contexte ––de type haine, 212
––environnemental, 249 ––de type hypocondriaque, 211
––socioculturel, 125 ––de type influence, 213
––socio-environnemental, 90 ––de type jalousie, 212
––sociofamilial, 73, 81 ––de type mégalomaniaque, 210
Contradictions, 188 ––de type messianique, 210
Contre-expertise, 7 ––de type mixte, 213
Contre-transfert, 34, 139 ––de type persécution, 212
Contrôle ––de type possession, 209
––exploration, 264 ––de type préjudice, 212
Conversion (symptômes de), 374 ––de type référence, 211
Coping, 251 ––de type revendication, 212
Coq-à-l'âne, 195, 197, 198, 230 ––de type ruine, 210
Coronavirus, 44 ––de type surnaturel, 209
Corps ––de type vol, 212
––imberbe, 95 ––évolution, 216
––rapport, 95, 105 ––non systématisé, 215
Cotard (syndrome de), 219, 226 ––systématisé, 214
Covid-19, 44 Demande de bilan pédopsychiatrique,
Crainte, 317 7, 27
Cramponnement, 258 Démantèlement, 289
Cris, 75 Démentiels (troubles), 200
Crises Dénégation
––clastiques, 76 ––exploration, 265
––d'angoisse, 76 Déni, 281, 292
Culpabilité, 21, 150, 308, 319, 332 ––hypomanie, 286
Culturelle (conversation), 161 ––mineur, 265
––névrotique, 265
D –– – exploration, 266
Débordement émotionnel, 198 ––psychotique, 266
Décharges émotionnelles, 363 –– – des affects, 292
Décorporéisation, 225 Dépenses inconsidérées, 309
Découragement, 311 Dépersonnalisation, 191, 308
Défiance, 77 Déplacement, 257, 267, 270, 287, 289
Déficience intellectuelle, 196 ––exploration, 268

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Index 403

Déplaisir, 79 Dissociatif (état), 199


Dépréciation Dissociation, 266, 268, 269, 275, 281, 299
––exploration, 269 ––exploration, 270
Dépressif(s) Douleur(s)
––état, 308 ––abdominales, 306
––symptômes, 389 ––morale, 308
Dépressive (exploration de la phase), 317 Doute, 149
Dérapage, 194 Drogues, 99, 102, 112
Déréalisation, 190, 225 DSM-5, 1, 4, 6, 304, 372
Désanimation, 225 Dualité pulsionnelle, 19
Déscolarisation, 102 Dynamique familiale, 145
Désespoir, 313, 384 Dynamisme
Désincarnation, 225 ––bas, 235
Désir érotique, 319 ––haut, 236
Désorganisation ––inhibition, 236
––psychique, 197 Dys, 227
––psychomotrice, 301 Dyscalculie, 90
Dessin, 351 Dysharmonique (structure)
––à épisodes, 352 ––évolutive, 387
Destruction des biens, 344 ––psychotique, 387
Destructivité intrapsychique, 347 Dyslexie, 232
Détachement émotionnel, 75 Dysorthographie, 90
Dévalorisation, 273, 275, 286, 291, 300 Dysphorie, 308
––exploration, 293
Développement E
––arrêt, 54 Échec scolaire, 94, 99
––de la communication écrite, 90 Échelles, 389
––de la communication orale, 89 Écholalie, 231, 232, 236
––impasse, 54 École, 344
––intégral, 62 Économie libidinale, 377
––normal, 55 Écoute
––psychique, 51 ––attentive, 258
––psychosexuel, 89 ––clinique, 103
Dextérité manuelle, 235 Écriture (exploration de la), 233
Diadococinésies, 235 Effraction, 364
Diagnostic, 67 Effroi, 318, 350
––catégoriel, 1, 4, 51 Égoïste (trait), 161
––structurel, 4, 373 Élan vital, 307
Dialogue tonique, 239, 242 Élation des affects, 309
Difficulté respiratoire, 306 Émotions, 21, 303
Diffusion des rôles, 150 Émoussement affectif, 308
Discontinuité, 383 Empathie, 11, 93, 106, 223
Discours, 227 Encodage, 177
––bredouillant, 231 Enfance
––confus, 198 ––prime, 85
––incohérent, 230 ––seconde, 89
––lent, 308 Ennui, 313
––monotone, 308 Enregistrement audio ou vidéo, 43
––plaqué, 195 Entretien
––rythme, 228 ––clôture, 124

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404 Index

––début, 124 Évitement


––déroulement, 124 ––exploration, 271
––direct, 31 Évocation (trouble de l'), 180
––enregistrement, 43 Excitation sexuelle, 170
––fermé, 31 Exclusion scolaire, 102
––pédopsychiatrique, 7 Exhibitionnisme, 89, 338
––premier, 26 Expertise, 7
––questions ouvertes, 29 Explosifs (patients), 363
––restitution, 49, 393 Expression(s)
––semi-direct, 30 ––corporo-posturo-verbale, 121
––semi-ouvert, 30 ––psychodynamiques, 4
––tiercisant le patient, 32 Extensibilité musculaire, 242
Énurésie, 76, 86 Ey Henri, 172
Envie de mourir, 326
Environnement F
––biopsychosocial, 12, 396 Faits psychiques, 16
––extrafamilial, 91 Familiarité, 133
––familial, 90 Fantasmatisation autistique, 263, 284,
––sociofamilial, 151 286
Épilepsie, 206 ––exploration, 285
Épisode narratif, 31 Fantasmes, 21, 345
Éprouvé corporel, 225 ––bizarres, 190
––trouble, 314 ––d'exploration, 348
Équilibre, 240 Faux self, 22, 148, 152
––dynamique, 235 Feeding, 202
––statique, 235 Fenêtre thérapeutique, 53
Équithérapie, 3 Ferenczi Sándor, 148
Équivalents suicidaires, 326 Fétichisme, 89, 346
Ergothérapie, 3 Filiation, 115
Erikson Erik, 149 Finitude, 367
Érotisme, 347 Fixation, 129
Ésotérique (conversation), 161 ––de l'information ou du souvenir, 178
Espace personnel, 101 ––trouble, 180
Estime de soi, 98, 162, 242, 381 Fonction
Établissement médicosocial, 140 ––alpha, 11, 42, 56, 168
État, 255 ––punitive-sadique, 358
––confusionnel, 120 Fonctionnement
––limite. Voir Borderline, structure ––psychique, 14
Étio-psychopathogénie, 3 ––psychodynamique, 65
Étrangeté, 387 Forclusion du nom du père, 18
Euphorie, 309 Formation réactionnelle, 259, 262, 266,
Évaluation 270, 271, 298
––diagnostique, 51, 67 ––exploration, 272
––historicisante, 35 Foyer thérapeutique, 2
––interactive, 33 Fratrie, 113, 136
––psychodynamique, 367 Fraude, 344
––sémiologique, 4 Freud, 5, 319, 335
––situationnelle, 34 ––deuxième topique, 19
Évanouissement, 306 ––première topique, 13
Évitant (trait), 160 ––stade anal, 150

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Index 405

––stade de l'adolescence, 150 ––visuelles, 221


––stade de latence, 150 –– – exploration, 224
––stade oral, 149 Handling, 75
––stade phallique, 150 ––maternel, 168
Froideur affective, 307 Harcèlement, 88, 93, 137, 182, 339
Frustration, 348 Hétéro-agressivité, 136
Fugue, 206, 341 Hétéroagressivité, 313, 341
Hippocrate (serment d'), 45
G Hobbies, 106, 338
Gaîté, 311 Holding, 75
Générosité, 311 ––maternel, 168
Génitalité, 347 Homéostasie, 18
Génogramme familial, 113 Honte, 21, 149, 308, 309
Gestuelle, 121 ––adolescent, 163
Gilles de La Tourette (syndrome de), 201, Hormones, 95
236, 245 Horreur, 318
Golse Bernard, 340 Hostilité, 319
Grand autre, 5 Houzel Didier, 6
Graphisme, 90 Humeur
Graphomotricité, 234 ––expansive ou exaltée, 310
Grasping, 242 ––exploration, 310, 315
Gribouillis, 353 ––exubérance, 165
Grille ––mauvaise, 308
––d'évaluation, 5 ––tonalité désagréable, 308
––psychodynamique, 4 ––troubles, 343, 380
Grimaces, 243 ––versatilité, 311
Grincheux, 308 Humilité, 308
Grossesse Humour, 272
––à l'adolescence, 159 ––exploration, 273
––déroulement, 67 Hygiène alimentaire, 120
Guidance parentale, 390 Hyperactivité, 76, 88, 94, 137, 152, 243
Hyperesthésie perceptive, 218
H Hypermimie, 123
Haine, 309, 341 Hypersexualité, 309
Hallucinations, 224 Hypersomnie, 86, 330
––auditives, 220 Hypersyntonie, 121, 218
–– – exploration, 223 Hypertonie, 82
––cénesthésiques, 214, 221 ––axiale, 243
–– – exploration, 224 Hypervigilance, 76, 77, 175
––corporelles, 221 Hypnose, 3
––exploration, 223 Hypoactivité, 243
––gustatives, 221 Hypocondrie, 202, 256, 274, 289
––haptiques, 221 ––exploration, 275
––intrapsychiques, 214, 220, 221 ––trouble de la personnalisation, 226
––kinesthésiques, 222 Hypomanie, 123, 198
––motrices, 222 Hypomimie, 123
––olfactives, 221 Hypothèses diagnostiques catégorielles, 66
––psychiques, 220 Hypotonie, 77, 243
––sensorielles, 214, 220 ––axiale, 82
––tactiles, 221 ––globale, 82

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406 Index

Hystérie, 311 Imitation


––de conversion, 164 ––motrice, 230
Hystérique (trait), 164 ––verbale, 230
Hystérophobique (trait), 164 Impasse
––développementale, 54, 367
I
––identificatoire, 159
Iboga, 222 Impression générale, 119
Idéal du moi, 21, 22, 106, 163, 309, 335, 364 Incompréhensions, 188
––exploration, 365 Inconscient, 15
Idéalisation ––freudien, 17
––de l'objet, 294 Incontinence
––exploration, 295 ––affective, 310
Idées, 326, 327 ––fécale, 86
––confabulatrices, 198 Indications thérapeutiques, 7
––de concernement, 192 Indifférence, 122
––de grandeur, 198, 201 Indisponibilité psychique, 74
––de persécution, 201 Infantile (disparition de l'), 96
––de référence, 192 Infériorité, 150
––délirantes. Voir Syndrome délirant Inflation narcissique, 276
––fuite, 195, 197, 202 Informations subjectives et objectives, 119
––noires, 325 Inhibition, 91, 123
–– – exploration, 326 Inquiétante étrangeté, 170
––relâchement d'association, 197 Inscription des traces sensorielles tactiles,
––suicidaires, 325 171
–– – exploration, 327 Insomnie, 328
Identification, 153, 297 ––de réveil précoce, 329
––adhésive, 158 ––de réveils multiples, 329
––autonome, 157 ––d'endormissement, 329
––défensive, 158 ––exploration, 330
––exploration, 156 ––quasi totale, 329
––féminine, 160 Insouciance, 311
––idéalisée, 158 Instabilité, 243
––impasse, 159 Instable (trait), 161
––masculine, 160 Instances psychiques, 15, 19
––mélancolique, 158 Insuffisance (sentiment d'), 313
––projective, 291, 295, 299, 300 Intellectualisation, 276, 279, 280, 286
–– – exploration, 297 ––exploration, 277
––structurante, 158 Intellectuelles (compétences), 105
Illogismes, 230 Intelligence, 172
Illusions, 219 ––exploration, 175
Image Interactions
––de soi, 162, 242 ––affectives, 68
––du corps, 101, 241 ––sociales, 338
––d'un corps sexué adulte, 367 Interobservation, 51
––exploration, 163 Interprétation, 6
Imaginaire, 23, 364 ––délirante, 214
Imagination délirante, 214 Intersensorialité, 170
Imagos, 22, 158 Intersubjectivité, 79, 80, 98, 100
––parentales, 154, 357 Intervisions, 42, 53
–– – internalisées, 158 Intestins, 226

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Index 407

Introjection, 363 Lecture (exploration de la), 233


––exploration, 278 Léthargie, 198
Introspection, 285 Liaison pulsionnelle, 347
––exploration, 286 Libido, 336
Intrusion répétée des pensées, 190 ––retrait, 131
Intuition délirante, 214 Liens
Investissement ––absurdes, 198
––narcissique, 131 ––d'attachement, 76
––objectal, 131, 132, 138 ––objectaux infantiles, 250
––pulsionnel, 131 Logique (trouble de la), 189
––scolaire, 102 Logorrhée, 196, 197
Irritabilité, 311 Loisirs, 338
Isolation, 270, 277, 279 Look, 120
––des affects, 278 Loyauté, 352
–– – exploration, 279 LSD, 222

J M
Jeu, 106, 158, 194, 353 Maintenance du psychisme, 168
––de compétition, 339 Maîtrise de l'environnement, 264
––de foulard, 341 Maltraitance, 53, 182
––de mots, 198 Maniaco-dépressif (trouble), 18
––de rôle, 339 Maniaque
––de sport, 339 ––exploration de la phase, 316
––solitaire, 339 ––fonctionnement, 276
––symbolique, 136, 230, 250 Manie, 123, 198
––théâtral, 133 Masturbation, 89, 96, 250
Joie, 311 Mécanismes
––démesurée, 309 ––archaïques, 252
Jouets, 46 ––de défense, 249
Jugement (fausseté du), 193 Mécontentement, 308
Méfiance fondamentale, 149
K Méfiant (trait), 161
Klein Mélanie, 5, 130, 260, 290 Mégalomanie, 151
Mémoire, 177
L ––à court terme, 178
Labilité affective, 311 ––à long terme, 178
Lacan, 5, 18 ––de travail, 178
Langage, 227, 231, 233 ––eidétique, 179
––adultomorphe, 378 ––épisodique, 179
––compétences, 105 ––explicite, 179
––écrit, 228 ––exploration, 185
–– – exploration, 233 ––implicite, 178
––émotionnel, 41 ––motrice, 178
––exploration, 228 ––perceptive, 179
––extravagant, 236 ––photographique, 179
––laconique, 229 ––procédurale, 178
––oral, 90, 228 ––sémantique, 180
–– – exploration, 231 ––sensorielle, 179
Lapsus, 19 Mémorisation (processus de), 178
Latéralisation, 240 Mensonge, 181, 270, 280

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408 Index

Mentalisation, 31 Névrose, 375, 376


––de soi et de l'objet, 32 ––hystérique, 254, 271, 374
Mépris de l'objet, 291, 293 –– – d'angoisse, 376
Mescaline, 222 –– – de conversion, 375
Métapsychologique (conversation), 161 ––obsessionnelle, 255, 271, 361, 374, 377
Méthode hypothético-déductive, 37 ––phobique, 254, 271, 374
Migrants, 89 Névrotique (structure), 35, 254, 374
Mindfulness, 283 Nombre (exploration de la représentation
Mobilité thérapeutique, 52 du), 234
Moi, 20, 172, 194, 358, 365 Noyau pathogène, 17
––crustacé, 169
––fonctions, 167 O
–– – autonomes, 172 Objet
–– – non autonomes, 194 ––anaclitique, 139
––idéal, 22, 106, 309, 335, 364 ––calmant, 140
–– – exploration, 365 ––clivé, 140
––peau, 167 ––concept, 5
––poulpe, 169 ––destructeur, 136
Monde ––détruit, 154
––bizarre, 190 ––différencié, 141
––fantomatique, 190 ––excrémentiel, 128
––interne, 190 ––fétichisé, 141
––objectal, 346 ––idéalisé, 141
Monotonie affective, 311 ––incestueux, 319
Morbides (états internes), 190 ––indifférencié, 141
Moro (réflexe de), 242 ––malléable, 40, 352
Mort, 326 ––mélancolique, 154
Motif de consultation, 63 ––narcissique, 142, 365
Motricité, 81, 235 ––partiel, 142
––exploration, 238 ––presenting, 171
Muet (patient), 231 ––représentation, 347
Münchhausen (syndrome de), 211 ––sadisé, 143
Mutisme, 308 ––soumis, 143
Mythomanie, 164 ––total, 143
Obnubilation, 176
N Observation, 286
Naissance, 78 ––de soi, 285
Narcissique –– – exploration, 286
––identitaire (trouble), 142 ––participante, 28
––phobique (trait), 165 Obsessionnel
––trait, 165 ––compulsif (trouble), 367
Nasalisation, 232 ––trait, 164
Négativisme, 237 Obsessions, 201, 243
––actif, 238 ––caractéristiques communes, 244
––passif, 238 ––exploration clinique, 244
Nervosité, 311 ––idéatives, 244
Neurologiques (affections), 123 ––impulsives, 245
Neuroplasticité, 396 ––phobiques, 245
Neurosciences, 1 Œdipe (complexe d'), 19, 21, 155
Neutralité bienveillante, 38 Omnipotence, 285, 286, 293, 297

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Index 409

––exploration, 298 Pensée(s), 21


Onanisme, 338 ––abstraite, 200
Opposition, 343 ––appauvrie, 203
Optimisme pathologique, 309 ––barrée, 204
Organisation ––circonstanciée, 203
––délirante, 214 ––confuses, 213
––immature, 254 ––contenu, 201
––limite, 255 ––continuité, 195
––mature, 254 ––cours, 195
Orientation ––devinées, 191, 212
––dans le temps, 173 ––dévitalisées, 199
––dans l'espace, 174 ––digressive, 203
––quant à la personne, 174 ––distorsions, 195, 197
––quant à la situation, 174 ––divulgation, 212
––spatiale, 240 ––exploration, 205
––temporelle, 240 ––floue, 196
––floues, 213
P ––illogique, 196
Palilalie, 231 ––imposées, 191
Palpitations, 306 ––incohérente, 203
Panique, 318 ––inhibée, 203
Paradépressive (structure) ––interrompue, 196
––inhibée, 381 ––irréaliste, 196
––mixte, 382 ––labilité, 196
Parakinésies, 238 ––logique, 196
Paramimie, 123 ––magique, 192, 199
Paranévrotique (structure) ––manque, 314
––dépressive, 378 ––opératoire, 204
––hypomaniaque, 378 ––pauvreté, 196
––inhibée, 378 ––perplexes, 199
––inhibée oligo-dépressive, 379 ––ralentie, 197
Paranoïaque (trait), 161, 165, 201 ––rétrécie, 203
Parasomnies, 331 ––ruminations, 204
Parathymie, 312 ––ruptures du cours, 196
Pare-excitation, 168 ––rythme, 197
Parent ––tangentielle, 203
––borderline, 40 ––verbigération, 205
––défaillant, 160 ––vide, 200
Parentalité, 40 ––vol, 191
Parole ––xénopathique, 204
––exploration, 231 Perceptifs (exploration des troubles), 218
––rythme, 232 Perception, 21
Passage à l'acte, 102, 258, 260, 285, 296, ––accrue, 218
298 ––acuité, 219
––exploration, 299 ––justesse, 190
––hétéroagressif, 212 ––ralentie, 219
Pathognomoniques (signes), 122 Péripartum, 69
Patient (concept), 5 Perplexité, 312
Peau, 168 ––anxieuse, 314
Pédagogie spécialisée, 2 Persécution (sentiment de), 313

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410 Index

Persévération verbale, 204 ––de séparation, 321


Personnalité, 366 ––d'idéalisation, 358
––(troubles de la), 224, 378, 381 ––d'intégration, 292
Perte ––d'interaction, 300
––d'espoir, 313 ––du deuil, 365
Pervers narcissique, 139 ––primaires, 18, 21, 167, 382, 384
Perversion, 346 –– – irruptions, 197
Petite enfance, 82 ––psychiques, 278, 303
Peur, 319, 352 ––psychologiques, 71
––excessive, 77 ––pubertaire, 353
Phénomène du rêve, 15 ––secondaires, 21, 167, 383, 384
Phobie, 312 Professionnel, 7
––d'impulsion, 75, 245 Projection, 260, 268, 277, 280, 293, 296, 299
Photolangage, 390 ––à l'adolescence, 54
Photophobie, 311 ––exploration, 300
Piercing, 120 Pronostic, 111
Plaisir, 79, 309 Propreté (apprentissage de la), 86
––niais, 198 Provocation, 343
Planning familial, 106 Pseudo-cohérences, 189
Pleurs, 75 Pseudo-hallucinations, 214, 220, 222
Pluriparentalité, 71 Pseudo-logiques, 189
Pôle pulsionnel, 20 Psilocybine, 222
Polyurie, 86 Psychanalyse, 50
Post-suicidaires (événements), 326 Psyché, 169
Posturales (modifications), 75 Psychisme, 19
Potomanie, 85 Psychodrame individuel, 390
Praxies, 241 Psychoéducation, 208
Préconscient, 16, 176 Psychomotricité, 3
––conscient, 18 Psychopathie, 342
––exploration, 177 Psychopathologie clinique, 3
Préhension, 81 Psychopharmacologie, 3
Premier âge, 33 Psychose, 75, 199
Préscolaire (période), 87 ––infantile, 387
Présuicidaires (événements), 326 Psychothérapie, 3, 208
Primauté génitale, 377 Psychotique(s), 205
Principe ––état, 308
––de déplaisir, 18 ––structure, 35, 254
––de plaisir, 18 ––symptômes, 53, 193, 389
––de réalité, 18 –– – exploration, 205
Prise ––système, 254
––de contact, 56 ––trouble, 18
––de risque, 101 Puberté, 95
Processus, 197 Pulsion(s), 92, 106, 249, 335, 342
––d'adolescence, 367 ––agressives, 340
––de création, 65 –– – exploration, 342
––de différenciation, 321 ––but, 337
––de maturation, 367 ––d'attachement, 337, 340
––de réception, 228 ––d'autoconservation, 337
––de représentation des idées stressantes ––de destruction, 312, 337, 341
et des affects, 262 ––de mort, 312, 337

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Index 411

––d'emprise partielle, 337 Réflexe(s)


––d'exploration, 348 ––archaïques, 241
––du moi, 337 ––d'agrippement, 242
––épistémophilique, 344 ––d'allongement croisé, 242
––érotiques anales et urétrales, 338 ––de la marche automatique, 242
––érotiques orales, 338 ––de maintien de la tête, 242
––érotiques phalliques, 338 ––de succion-déglutition, 242
––libidinales, 337 ––rotuliens, 242
–– – et agressives, 92, 106 Refoulement, 16, 18, 270, 280, 283
––objet, 337 ––exploration, 281
––orale, 23 Refroidi des affects
––poussée, 336 ––exploration, 282
––sexuelles, 20 Refus, 99
–– – libidinales, 249 ––alimentaire, 85
––source, 336 ––des soins, 27
Pulsionnalité, 341 Regard, 226
––libidinale, 347 ––d'aigle, 50
Pyromanie, 341, 342, 344 ––vide, 77
Régression, 54, 91
Q ––du moi, 376
Quête ––exploration, 301
––affective, 133 Régurgitations, 85
––identitaire, 97, 101, 103 Relâchement des associations, 230
Quotient intellectuel, 389 Relation(s), 127, 128
––anaclitique, 347
R ––au corps sexué, 131
Rage, 311, 341, 384 ––contre-transférentielle, 349
––narcissique, 312 ––différenciée, 347
Raisonnement, 186 ––d'objet
––distorsion, 188 –– – de type génital, 128
––exploration, 188 –– – de type oral, 127
––logique (exploration du), 234 –– – de type sadique-anal, 128
Rapport(s) ––fétichisée, 347
––d'évaluation, 393 ––idéalisée, 347
––sexuels, 96 ––interpersonnelles, 160
––sociofamiliaux, 201 ––modifications, 75
Rationalisation, 277, 279, 300 ––narcissique, 347
––exploration, 280 ––précoce, 72
Rationalisme morbide, 192 ––qualité, 82
Réaction ––sadisée, 347
––au délire, 215 ––scolaires, 161
––excessive à la frustration, 94 ––thérapeutique, 201
Réalité, 194 ––transférentielle, 349
––conscience, 190 Relationnel, 12
––épreuve ou test, 167, 189, 252, 382 Rencontre clinique, 6
–– – exploration, 194 Réparation, 332
––interne, 254 Répétitions thématiques, 199
Recharge libidinale, 171 Réponses
Redoublement, 102 ––à côté, 195, 200
Réel, 23 ––identitaires, 97

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412 Index

Représentation(s), 284 ––continuité, 170


––mentale, 21 ––dévalorisé, 151
Répression, 266, 282 ––exploration, 152
Réservé (trait), 160 ––faux. Voir Faux self
Résignation, 99 ––grandiose, 151
Résonance, 139 ––mal défini, 152
––affective, 37 ––peu incarné, 152
Responsable légal, 43 ––tout-puissant, 151, 152
Ressenti affectivo-émotionnel, 119 ––vulnérable, 152
Retard, 99 Self-assertion, 257
––de langage, 90 ––(exploration de la), 258
Réticence, 122 Self-object, 312
Retour du refoulé, 281 Self-observation, 285
Retrait, 91, 282 ––exploration, 286
––apathique Sémiologie
–– – exploration, 282 ––médicale, 36
––social, 94 ––pédopsychiatrique, 3
Rêverie, 285, 350 Sens
––autistique, 252, 284 ––catégoriel, 6
–– – exploration, 285 ––latent (implicite), 51
Rêves, 19, 347, 349 ––manifeste (explicite), 51
Risque suicidaire, 53 ––structurel, 6
Rituel du coucher, 86 Sensation, 21
Rivalité phallique, 375 Séparation-individuation, 149
Rôle Service de protection des mineurs, 2
––de censure, 16 Setting
––de pare-excitation, 17 ––clinique, 39
Roussillon René, 258, 291 ––systémique, 43
Rupture, 194 ––thérapeutique, 47
––de symbolisation, 385 Sexualité, 53
––développementale, 54 ––infantile, 89
Sidération, 200
S ––émotive, 313
Sadomasochistes (pratiques), 171 Silence, 41, 99
Salades de mots, 198 Sinistrose délirante, 211
Salle d'attente, 46 Socioéducation, 373
Scarifications, 326 Sociothérapie, 3
––exploration, 327 Soi, 162
Schéma corporel, 242 ––constitution, 242
––(trouble du), 226 ––exploration, 163
Schizophrénie, 200, 311 ––individuation, 169
Schizophrénique (trait), 164 Soins études, 2
Scolaire (période), 87 Solitude, 313
Secret Somatique (affection), 1
––médical, 184 Somatoformes (troubles), 378
––professionnel, 43, 184 Sommeil, 331
Sélectif (trait), 160 ––bébé, 82
Self, 22, 147, 242 ––prime enfance, 85
––abandonnique, 152 ––trouble, 83, 328
––constitution, 343 –– – exploration, 331

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Index 413

Somnambulisme, 86, 331 ––non constitué, 360


Somnolence, 176 ––non intégré, 360
––diurne, 331 ––œdipien, 361
Souhaits, 351 ––persécuteur, 363
Soupçonneux (trait), 161 ––post-œdipien, 361
Sourd (patient), 231 ––préœdipien, 362
Sourd-muet (patient), 231 ––primitif, 362
Sourire, 75 ––protecteur, 362
Sphincters (contrôle des), 86 ––punitif, 362
Spitz (organisateurs de), 127 ––régressif, 363
Splitting, 290 ––rigide, 361
Squiggle game, 352 ––sadique, 362
Stade ––sévère, 361
––anal de Freud, 150 ––trop faible, 363
––de l'adolescence de Freud, 150 ––tutélaire, 361
––de latence de Freud, 150 ––tyrannique, 363
––oral de Freud, 149 Susceptible (trait), 161
––phallique de Freud, 150 Symbolique, 23
Status clinique, 71, 104, 117, 366 Symbolisation, 287, 292, 335
Stéréotypies, 243 Symptomatologie actuelle, 50
––motrices, 237 Symptômes, 29, 36
––posturales, 237 ––explicites, 315
––verbales, 236 ––implicites, 315
Stockage ––phobiques, 319
––automatique, 179 ––psychiques, 83
––de l'information ou du souvenir, 178 ––psychotiques, 53
Stratégies d'investigation, 4 Syndrome, 216
Stress post-traumatique (état de), 199 ––confusionnel, 219
Subconscient, 14 ––délirant, 207
Subjectivation, 98 –– – (exploration du), 216
––processus, 99 ––dissociatif, 120
Subjectivité, 80 ––frontal, 201
Sublimation, 260 ––maniaque, 120
––exploration, 287 Syntonie, 121
Succion, 75
Suggestibilité, 181 T
Suicide abouti, 341 Tachyphémie, 231
Supervision, 53 Tachypsychie, 197
Suppression, 282 Tatouages, 120
Surdouance, 194 Technique sémiologique, 25
Surmoi, 20, 21, 106, 155, 358 Télétraitement, 44
––constitué, 359 Tension
––critique, 363 ––psychique, 332
––culpabilisateur, 363 ––pulsionnelle, 253
––dirigeant, 361 Tentative de suicide, 55, 327
––exploration, 363 Terreur, 318
––extérieur, 360 ––nocturne, 86, 331
––intégré, 359, 360 Tests
––interdicteur, 361 ––cognitifs, 371
––intérieur, 360 ––projectifs, 371

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414 Index

Théâtralisme, 164 Traits


Théorie ––de caractère structurels, 163
––de la relation d'objet, 335 ––de personnalité, 160
––des pulsions, 303, 340 Transfert, 34, 139
––d'étayage de Freud, 340 Transgénérationnel, 71
––psychodynamique, 50 Transpiration, 306
––psychopathologique, 13 Traumatisme, 89
Thérapeute Travail scolaire et professionnel, 103
––concept, 5 Tremblement des extrémités, 306
––médecin, 8 Tristesse, 308, 311, 314
Thérapeutique pédopsychiatrique, 3 Tutoiement, 8
Thérapie
U
––biologique, 2
Utilitaire (trait), 160
––cognitivo-comportementale, 2, 4, 390
––de couple, 43 V
––familiale, 390 Validation
––psychodynamique, 2, 373 ––émotionnelle, 312
––systémique, 2, 4, 373, 390 ––empathique, 32, 312
Thymiques (troubles). Voir Humeur, Vécu affectivo-émotionnel, 105
troubles Vertiges, 306
Tics, 201, 237 Victime innocente, 296
Timbre vocal, 232 Vide (sentiment de), 314
Timidité, 314 Vie
Tolérance à la frustration, 76 ––professionnelle, 107
Tonalité ––scolaire, 107
––affective, 134 ––sociale, 107
––négative, 310 Vigilance, 174
––positive, 310 ––exploration, 176
––verbale, 124 Viol, 185, 341
Tonus Violations graves, 344
––axial, 242 Visage, 226
––d'action, 239, 242 Vision large, 50
––d'attitude, 242 Vocalisation, 230
––de base, 242 Voix
––de fond, 242 ––cassée, 232
––de soutien, 242 ––exploration, 232
––postural, 239 ––monotone, 232
Topiques freudiennes, 13 ––rauque, 232
Topographie cognitive et fonctionnelle, Vol, 341, 344
123
Vouvoiement, 8, 43
Torpeur, 176
Voyeurisme, 89, 338
Tortillement, 76
Toute-puissance maniaque, 201 Z
Toxiques (consommation de), 99, 108, Zézaiement, 90, 232
112, 342 Zones
Traduction paraverbale, 351 ––érogènes, 338
Traitement médicamenteux, 112, 373 ––sexuelles, 170

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