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Chapitre2

L’intertextualité
(La mise en abyme)
Historique de l’intertextualité est riche et complexe. Le terme lui-même a été
introduit dans le champ de la critique littéraire par Julia Kristeva dans les
années 1960, s’inspirant des travaux de Mikhaïl Bakhtine sur le dialogisme.
Kristeva a utilisé le terme pour décrire la manière dont les textes littéraires se
comprennent et se définissent en relation avec d’autres textes.
Selon Kristeva l’intertextualité est :
«…tout texte se construit comme une mosaïque de citation, tout texte est
absorption et transformation d’un autre texte ».1
Pour approfondir l’explication de l’intertextualité selon Kristeva, considérons
que chaque œuvre littéraire est un nœud dans un réseau infini de textes. Cette
idée suggère que chaque texte est non seulement le résultat de l’influence
d’autres œuvres, mais qu’il est aussi actif dans la création de nouvelles
significations lorsqu’il est lu en relation avec d’autres textes.
Elle se voit le texte comme un espace ou plusieurs écrits se croisent et se mêlent
Ainsi, un texte ne peut jamais être complètement isole ou autonome ; il est
toujours interconnecté avec le vaste univers des textes existants. Lorsqu’un
auteur écrit, il ou elle engage un dialogue avec les œuvres qui l’ont précédé,
que ce soit par l’adoption, la transformation ou la contestation de leurs idées et
formes.

«...Kristeva a davantage défini l'intertextualité comme


fondement de toute textualité et comme façon par laquelle un texte s'insère
dans l'histoire en tant que pratique discursive spécifique. »2
Pour Kristeva, l'intertextualité est le fondement de toute textualité, ce qui
signifie que chaque texte est constitué d'une multitude de références et
d'influences provenant d'autres textes. Elle voit l'intertextualité comme une
façon pour un texte de s'insérer dans l'histoire en tant que pratique discursive
spécifique, c'est-à-dire que chaque texte est ancré dans un réseau de textes
précédents et contemporains, et qu'il contribue à façonner et à être façonné
par cette histoire textuelle. En d'autres termes, les textes ne sont pas des
entités isolées, mais plutôt des éléments d'un dialogue continu avec d'autres

1
Julia Kristeva. Semiotike .recherche pour une semanalyse.145.
2
https : //www.erudit.org/fr/revues/pr/2005-v33-n1-pr1041/012270ar/.(Lamontagne, 1992 : 5).
textes, et leur signification sont souvent enrichis par les références et les
connexions intertextuelles.
_*L’intertextualité* est un concept complexe qui englobe différentes définitions
selon les théoriciens et les contextes.

-pour Roland Barthes, théoricien littéraire français, l’intertextualité fait


référence à l’idée que les textes sont interconnectés et influencés par d’autres
textes, formant ainsi un réseau complexe de références, d’allusions et de
relation. Cela met en évidence le fait que les textes ne sont pas des entités
isolées, mais plutôt une partie d’un réseau plus vaste de signification et de
discours culturels.
– "Tout texte est un intertexte ; d'autres textes sont présents en lui, à des
niveaux variables, sous des formes plus ou moins reconnaissables : les textes de
la culture antérieure et ceux de la culture environnante ; tout texte est un tissu
nouveau de citations révolues. […] L'intertexte est un champ général de
formules anonymes, dont l'origine est rarement repérable, de citations
inconscientes ou automatiques, données sans guillemets."34
- Roland Barthes, dans sa théorie de l'intertextualité, suggère que tout texte est
le résultat d'un tissage de multiples textes antérieurs, qu'ils soient littéraires ou
culturels. Selon lui, chaque texte est un "intertexte" où des fragments d'autres
œuvres sont intégrés à différents niveaux et sous différentes formes, souvent
sans que l'on puisse identifier clairement leur origine. Ces citations peuvent être
conscientes ou inconscientes, et elles ne sont pas toujours clairement indiquées
par des guillemets. Cela signifie que chaque œuvre littéraire est construite sur
les fondations de la culture précédente, et que les auteurs s'appuient sur les
travaux existants pour créer quelque chose de nouveau. Cette idée souligne la
complexité de la création littéraire et la richesse de la lecture, car elle invite à
explorer les multiples couches de signification qui se tissent entre les textes.
La différence principale entre Julia Kristeva et Roland Barthes dans leur
approche de l'intertextualité réside dans leurs fondements théoriques et leur
mise en application du concept.
-Julia Kristeva, Pour elle, l'intertextualité est un processus dynamique où les
textes se lisent et se comprennent à travers l'interaction avec d'autres textes.

3
http://expositions.bnf.fr/contes/pedago/chaperon/indinter.htm#:~:text=Roland

4
Roland Barthes, article "Texte (théorie du)", Encyclopaedia universalis, 1973.
Kristeva voit le texte comme un espace de convergence de multiples discours
culturels et littéraires.5
-Roland Barthes, quant à lui, met l'accent sur la notion de "texte comme tissu"
(ou "texte comme intertexte"), où chaque œuvre littéraire est un tissage de
citations et de références à d'autres œuvres. Pour Barthes, l'intertextualité
implique également la participation active du lecteur dans la création de sens,
car c'est à travers l'interaction du lecteur avec le texte que la signification
émerge.
… En soutenant Kristeva dans sa conception de texte
«
comme productivité, Barthes expose dans un article paru en 1973 dans
L’Ecyclopédia Universalis les concepts définis par Kristeva dans le cadre de la
théorie du texte «Le texte est une productivité. Cela veut dire qu’il est le produit
d’un travail (tel que pouvait l'exiger la technique de la narration et la maîtrise
du style) mais le théâtre même d’une production ou se rejoignent le producteur
du texte et son lecteur : le texte « travaille » à chaque moment et de quelque
côté qu’on le prenne ; même écrit (fixé) il n’arrête pas de travailler d’entretenir
un processus de production.6 »7
En résume, Kristeva met l’accent sur les dimensions dialogiques et transformatif
des textes eux-mêmes, tandis que Barthes se concentre sur le rôle du lecteur
dans la création de sens à travers l’intertextualité. Ces deux visions ne sont pas
nécessairement contradictoires, mais elles mettent en lumière différents
aspects de la relation complexe entre les textes et leurs significations.
2- Michael Riffaterre
S’intéresse aux aspects cognitifs et esthétiques de l'intertextualité qu'il étudie
sur de multiples exemples comme une interaction entre l'écriture et la lecture. 8
L’intertextualité, selon lui est une méthode herméneutique qui permet de
découvrir le sens d’un poème en régulant strictement la façon dont le lecteur
perçoit les signes poétiques. Rifaterre considère l’intertextualité comme un
mécanisme propre à la lecture littéraire, ou l’intertexte est la perception par le
lecteur des relations entre une œuvre et d’autres qui l’ont précédés ou suivie.

Julia Kristeva’s concepts of intertextuality - V.M.


Simandan. https://www.simandan.com/kristevas-concepts-of-intertextuality/.
6
Intertextualité: aspects définitoires Hassina ouldammar Université de Khanchla
7
file:///C:/Users/HP/Downloads/intertextualit%C3%A9_-aspects-d%C3%A9finitoires.pdf
8
https://books.openedition.org/pufc/4507?lang=fr.
« …L'intertextualité est la perception, par le lecteur, de
rapports entre une œuvre et d'autres, qui l'ont précédée ou suivie. Ces autres
textes constituent l'intertexte de la première. La perception de ces rapports est
donc une des composantes fondamentales de la littérarité d'une œuvre. »9
Comme l’avance Michael Riffaterre :
«…“literature is indeed made of texts. Literariness, therefore, must be
sought at the level where texts combine, or signify by referring to other texts
than to lesser sign Systems ».10
La citation souligne l'importance de l'intertextualité dans la littérature. Pour
Riffaterre, la littérarité se trouve non pas dans les textes isolés, mais dans la
manière dont ils se réfèrent et se connectent à d'autres textes. Cela signifie que
pour comprendre pleinement un texte, il faut prendre en compte les autres
œuvres auxquelles il fait référence ou qu'il évoque, consciemment ou
inconsciemment. L'intertextualité est donc une opération obligatoire de l'esprit
du lecteur, nécessaire à tout décodage textuel. Elle régule la perception du
lecteur en identifiant dans l'intertexte les signes poétiques qui rendent un texte
littéraire. C'est une méthode herméneutique qui aide à découvrir la signification
d'une œuvre en reconnaissant les structures ou les signes poétiques qui la
caractérisent.
*Gérard genette :
L’intertextualité, selon Gérard genette, est un concept clé dans l’étude des
textes littéraires, elle fait référence à la manière dont un texte ( hypertexte)
s’insère dans un tissu d’un autre texte ( hypotexte ) .
… "Je définis [l'intertextualité], pour ma part, de
manière sans doute restrictive, par une relation de coprésence entre deux ou
plusieurs textes, c'est-à-dire […] par la présence effective d'un texte dans un
autre."11.
L'intertextualité, telle que définie par Gérard Genette dans son ouvrage
**Palimpsestes**, est une forme de transtextualité qui se manifeste par la
relation de coprésence entre deux ou plusieurs textes. Cette relation peut être
évidente, avec un texte qui est physiquement présent dans un autre, ou plus
9
M. Riffaterre "La trace de l'intertexte", La Pensée, no215, octobre 1980, p. 4.
10
Michael Riffaterre. “Compulsory Reader Response : the Intertextual Drive”. Intertextuality.
Théorie (...)
11
Gérard Genette, Palimpsestes, 1982.
http://expositions.bnf.fr/contes/pedago/chaperon/indinter.htm
subtile, c'est-à-dire par la présence mentale ou conceptuelle d'un texte au sein
d'un autre.
Genette développe cette idée en définissant l'hypertextualité comme une
relation spécifique où un texte, l'hypertexte, est dérivé d'un texte antérieur,
l'hypotexte, soit par transformation directe, soit par imitation¹. L'importance de
cette relation intertextuelle réside dans sa capacité à enrichir le texte par des
références, des allusions ou des emprunts, créant ainsi une profondeur et une
résonance qui transcendent le texte individuel.
… « relation de coprésence entre deux ou plusieurs
textes, c’est-à-dire eidétiquement et, le plus souvent, par la présence effective
d’un texte dans un autre ».12

Gérard genette a développé un concept littéraire qui est ** la transtextualité**


qui se définit par "tout ce qui met un texte en relation, manifeste ou secrète,
avec un autre texte". Une théorie complexe, elle inclut plusieurs types de
relation textuelles telles que :
1- L’intertextualité :
C'est la relation de coprésence entre deux ou plusieurs textes, par
exemple, par la citation, le plagiat ou l’allusion.
2- La paratextualité :
« la relation que le texte entretient, dans l'ensemble formé par une
œuvre littéraire, avec son paratexte : titre, sous-titre, intertitres ;
préfaces, postfaces, avertissements, avant-propos, etc., notes
marginales, infrapaginales; [etc.] », tous les signaux autographes ou
allographes qui procurent au texte un entourage ».1314
3- La métatextualité :
C'est la relation de commentaire qui unit un texte à un autre dont il parle
sans nécessairement le citer.

4- Hypertextualité :
12
Gérard Genette. Palimpsestes. La littérature au second degré. 8.
littératuredegré. 8https://books.openedition.org
13
https://www.fabula.org/ressources/atelier/?Les_relations_transtextuelles_selon_G%2E_Genette.

14
G. Genette, Seuils, 1989.
L'hypertexte est un texte dérivé qui se transforme, imite ou s'inspire
d'un autre texte préexistant, l'hypotexte. Cela inclut les adaptations, les
parodies, les pastiches, les séquelles, etc.
5- Architextualité :
C'est la relation la plus abstraite, qui concerne la catégorisation d'un
texte dans un genre littéraire (roman, poésie, théâtre, etc.) sans référence
directe à un contenu spécifique. L'architextualité fournit un cadre général pour
l'interprétation d'un texte.
« Toute relation unissant un texte B (hypertexte) à un texte antérieur
A (hypotexte) sur lequel il se greffe d'une manière qui n'est pas celle du
commentaire. » L'hypertexte est un texte dérivé d'un autre texte préexistant au
terme d'une opération de transformation. : Transformation simple (transposer
l'action du texte A dans une autre époque : Ulysse de Joyce) ou transformation
indirecte (ou imitation : engendrement d'un nouveau texte à partir de la
constitution préalable d'un modèle générique ; ex. : L'Énéide) ».15
Chaque type de relation permet de comprendre le texte dans un contexte plus
large et explorer les différentes couches de signification qui se construisent à
travers ces interactions textuelles.
La Transtextualité révèle ainsi la dimension dialogique de la littérature, ou
chaque œuvre s’inscrit dans un réseau de référence et d’échos avec d’autres
œuvres.
Les relations textuelles enrichissent l’étude de l’intertextualité en révèlent les
multiples dimensions de la communication entre les textes.

- La mise en abyme
Dans le dictionnaire français La mise en abyme
15
Fabula - Atelier de théorie littéraire.
https://www.fabula.org/ressources/atelier/?Les_relations_transtextuelles_selon_G%2E_Genette
«..est un procédé géométrique sollicitant un effet de perspective continu sur
un seul et même objet. Celui-ci est placé en plus petit dans
son double plus grand et possède lui-même une réplique plus petite que
lui, ainsi de suite, jusqu'à créer une distorsion infinie.
Ce procédé vient des mathématiques et est reproduit en art ou en littérature . »16
De l'ancien français « mise en abysme » qui signifie
« incruster une pièce dans un blason », la mise en abyme (ou « mise en abîme
») est un procédé littéraire qui consiste à placer à l'intérieur de l'œuvre
principale une œuvre qui reprend les actions ou les thèmes de l'œuvre cadre.17
Signification de l’expression

« Cette expression française désigne une œuvre emboîtée dans une autre de
même type. Par exemple, un récit dans un autre récit ou bien un tableau dans
un tableau.

Origine

Elle tire ses origines à la fin du XIXe siècle. L’écrivain André Gide a lancé
l’expression de « mise en abyme » pour désigner le fait de placer une œuvre
dans une œuvre

Exemple

« Les Faux-Monnayeurs » d’André Gide est un très bon exemple de mise en


abyme.

En effet dans cet ouvrage, le personnage principal écrit un roman intitulé « Les
Faux-Monnayeurs ». L’écriture de ce roman devient donc le sujet du roman
« Les Faux-Monnayeurs ».18

La relation entre l'intertextualité et la mise en abyme est intrinsèquement liée à


la notion de réflexivité dans la littérature.

L'intertextualité se manifeste par les références, les allusions et les dialogues


qu'un texte entretient avec d'autres œuvres, tissant ainsi un réseau de sens qui
dépasse les frontières du texte lui-même. C'est une reconnaissance que chaque

16
https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/mise-en-abyme/.
17
https://www.cairn.info/les-procedes-litteraires--9782200619947-page-159.htm#
18
https://www.edilivre.com/une-mise-en-abyme/
œuvre littéraire s'inscrit dans un continuum culturel et artistique, où elle
dialogue avec le passé, le présent et parfois l'avenir.

La mise en abyme, d'autre part, est une forme d'autoréférentialité où un texte


contient en son sein un écho de lui-même. Cela peut prendre la forme d'une
histoire dans l'histoire, d'un tableau dans un tableau, ou même d'un
personnage reflétant les traits d'un autre. Cette technique crée un effet de
miroir qui permet une introspection sur la structure narrative et les thèmes de
l'œuvre.

En combinant ces deux concepts, on obtient une couche supplémentaire de


complexité. La mise en abyme peut servir de pont entre les textes, où l'écho
interne à l'œuvre (la mise en abyme) résonne avec les échos externes
(l'intertextualité). Cela permet non seulement une réflexion sur la construction
de l'œuvre elle-même, mais aussi sur sa place dans le vaste paysage littéraire .

Ainsi, la mise en abyme peut être vue comme une manifestation concrète de
l'intertextualité au sein même d'un texte, où l'œuvre se commente et se critique
elle-même

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