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MÉDIATHÈQUE de CHÂTEAUNEUF

Journal
des lecteurs

avril 2024 N° 49
Sommaire

La colère et l’envie, d’Alice Renard ...............................................4


Ce que je sais de toi, d’Éric Chacour.............................................5
L’effet maternel, de Virginie Linhart..............................................6
Western, de Maria Pourchet ...........................................................7
La sonate à Bridgetower, d'Emmanuel Dongala...........................8
La jurée, de Claire Jéhanno ...........................................................9
10 villa Gagliardini, de Marie Sizun ..........................................10
Le parfum des poires anciennes, d’Ewald Arenz ........................11
Les sources, de Marie-Hélène Lafon.............................................12
Du même bois, de Marion Fayolle...............................................13
D'or et de jungle, de Jean-Christophe Rufin................................14

Books in English ...........................................................................15

Coups de cœur
À quoi songent-ils ceux que le sommeil fuit ? de Gaëlle Josse ...16
Ce genre de petites choses, de Claire Keegan ..............................16
Le passeur, de Stéphanie Coste ...................................................16
La discrétion, de Faïza Guène .....................................................17
Aussi riche que le roi, d’Abigail Assor .........................................17
Richesse oblige, d’Hannelore Cayre.............................................17

BD .................................................................................................18
Bobigny 1972, par Marie Bardiaux- Vaïente, Carole Maurel
Atatürk, par Marie Bardiaux- Vaïente, Andrea Meloni
Édito


Dis papa, la vie c'est quoi ?
De la poésie à n'en plus finir ! (Aldebert)

Un enfant se pose mille questions, sa curiosité n’est jamais rassasiée, il


y a tant de choses à connaître, il y a tant de choses à voir. Et si nous aussi
nous retrouvions la curiosité des enfants ?
Nous vivons au quotidien dans une société de polémique permanente
qui nous épuise.
Peut-être avez-vous parfois envie de vous en évader…
Les livres, tout au long de l'année, sont là pour vous faire rêver ou vous
ramener à l'essentiel.
Parmi les romans présentés dans ce numéro, certains font du bien
comme Le parfum des poires anciennes ou 10 Villa Gagliardini, alors ne
boudez pas votre plaisir.
Cependant la plupart des romans actuels traitent plutôt de sujets de
société et vous aident à mieux les comprendre : La jurée, L'effet maternel.
Et puis, des premiers romans étonnants comme Ce que je sais de toi ou
Du même bois, d'autres venant d'écrivains confirmés comme D'or et de
jungle.
Une nouvelle page de "Books in English" et une belle sélection toujours


attendue de BD.
De bons moments de lecture en perspective !

Marie-Claude
La colère et l’envie
Alice Renard
Heloïse d’Ormesson

Un premier roman qui ne laisse pas indifférent : l’histoire d’une petite


fille mutique qui vit en huis clos avec son père et sa mère.
Un jour, elle rencontre Lucien, un voisin septuagénaire. Entre ces
deux-là, l'alchimie opère immédiatement. Isor et Lucien ont un secret -
celui de la colère de ne pas être conformes, donc incompris.
Entre eux s'installe une connivence que jalouse la mère mais qui
soulage le père. Peu à peu, Lucien sort de sa solitude, il attend avec
ravissement la visite d'Isor.
« J'aimerais qu'elle pense toujours à moi avec douceur.
Silence. Silence et apprivoisement. Surtout, que cela dure, que cela
dure longtemps. »
Quelques années plus tard, lorsqu'un accident vient bouleverser la
vie qu'ils s'étaient inventée, Isor s'enfuit…
Une histoire éruptive, d'émancipation et de réconciliation.
De la violence, de la colère, mais aussi de la poésie et de l’émotion
Un roman choral – chacun prend la parole tour à tour – étonnant par
son thème et par son style, et la découverte d'une auteure singulière,
Alice Renard, qui a fêté en 2023 ses 21 ans
Un vrai coup de cœur !
Marie-Claude

4
Ce que je sais de toi
Éric Chacour
Philippe Rey

Le Caire 1961-Montréal 2001


Dans une famille respectée de la communauté levantine du Caire vivent
un père médecin renommé ; sa femme d’un caractère assuré et leurs
enfants Tarek et Nesrine, tous les deux dans le rôle que l’on attend d’eux
dans ces milieux : assurer la continuité. Sans oublier Fatheya, la domes-
tique, la consolatrice, la complice.
Un mystérieux narrateur nous invite à partager les morceaux de vie de
Tarek, tels qu’il a pu les découvrir et les replacer bout à bout : son enfance
protégée ; sa jeunesse, dans cette Égypte où il fait bon vivre ! Destiné à la
médecine, il suit les traces de son père, sans vague, sans question, avec res-
pect. Il épouse Mira et crée un dispensaire.
La rencontre avec un jeune homme, Ali, venu le chercher pour soigner sa
mère ne sera rien moins qu’un tsunami dans sa vie. Il quittera tout après le
décès de ce dernier. Que dis-je ? Il fuira !
Une histoire d’amour impossible :
« Ali avait pris la place dans le système. Tu feignais de ne pas voir qu’il
était un intrus dans la maison, au seuil d’une famille que l’on n’intègre
que par la naissance ou le mariage. Qu’il restait un imposteur pour cette
communauté avec laquelle il ne partageait ni la religion ni la situation
sociale ».
Au fur et à mesure l’histoire se construit dans une Égypte qui évolue à che-
val entre tradition et modernité. Depuis que Nasser est au pouvoir, la com-
munauté levantine s’exile, pour beaucoup au Canada. Tarek est dans le
tourbillon de ces changements. Le Caire vit à travers les descriptions évoca-
trices de l’auteur, qu’il ressent lui-même quand il est dans cette ville :
« Le Caire était une entêtante présence olfactive qu’une infinité
d’éléments composait » et « on ne se rend compte de ces choses -là qu’au
moment de les retrouver ».
C’est l’incapacité de dialoguer poussée à son paroxysme, exacerbée par le
milieu et la culture. C’est l’histoire d’un enfant en recherche de son père
qu’il aime déjà sans le savoir. C’est surtout la rencontre d’un père et d’un
fils que toute une vie a tenté d’empêcher !
L’auteur a voulu faire un livre tendre, lumineux et il y est assurément par-
venu. L’écriture est délicate, émouvante.
Marie
Premier roman qui a obtenu le prix Femina des lycéens
Éric Chacour est lui-même né de parents de la communauté levantine du Caire, exilée au
Canada où il est né.

5
L’effet maternel
Virginie Linhart
Flammarion

À propos de la mère, Marguerite Duras disait : « Jusqu'au bout, la mère


restera la plus folle, la plus imprévisible des personnes rencontrées dans
toute une vie ».
C'est pour essayer de comprendre la sienne que Virginie
Linhart entreprend ce récit. Pourquoi cette dernière lui assène cette
phrase terrible, 17 ans après la naissance de sa petite-fille, « Tu n'avais
qu'à avorter, il n'en voulait pas de cette gosse ».
La mère, c'est notre premier amour et notre modèle, quelle qu'elle
soit, même défaillante ou toxique mais l'auteure ne fait pas son procès,
elle énonce les faits, les abandons et la confusion des rôles.
Elle se demande surtout comment échapper à L’effet maternel, ce
malheur qui semble génétiquement transmissible. Elle trouvera une
forme de réponse en réfléchissant sur cette époque singulière des années
68-70 où l’exigence de liberté a effacé tout repère.
Son écrit autobiographique ne semble pas tremper dans le
ressentiment ou la rancœur. Ce n’est pas non plus une écriture
thérapeutique. « L’écriture n’est en rien un remède, c’est un instrument
d’émancipation ». C’est un moyen pour elle de se libérer de l’empreinte
maternelle en décortiquant tous ses effets psychiques.
Ce livre est sans doute adressé à ses trois enfants pour leur donner les
clés de compréhension de leur héritage social et psychologique, mais il
parle à toutes les femmes, filles et mères.
Un roman coup de poing dont l'écriture fluide, directe, nous entraîne
au fil des pages sans que l'on puisse s'arrêter.
Marie-Claude

6
Western
Maria Pourchet
Stock

Alexis et Aurore devaient se rencontrer, car chacun pensait posséder


la même maison, dans le Quercy. C'est là qu'ils font connaissance, une
nuit, tous deux fuyant Paris. Voilà pour la part très romanesque du
roman…
Aurore a quarante ans, un enfant, mais seule. On sait qu'elle fuit un
travail sans intérêt, qu'elle fera aussi bien en télétravail. Pour lui, c'est
plus mystérieux. Il ne s'est pas présenté à la répétition de Dom Juan dont
il doit incarner le rôle-titre. Acteur de renommée mondiale, il fait aussi
partie du jury du concours d'entrée au Conservatoire d'art dramatique.
Sa femme vient de le quitter ; digne incarnation de Don Juan, il est en
train de quitter sa maîtresse. Le voilà prêt à vivre une passion avec Chloé,
jolie candidate qui tombe follement amoureuse de lui. Leur passion se
grave dans un échange de messages voluptueux jusqu'au jour où,
délaissée, Chloé livre leur histoire d'amour à la justice. Les médias emboî-
tent le pas. L'affaire est connue dans le tout-Paris…
Loin, dans la maison refuge du Quercy, les corps d'Aurore et d'Alexis
fusionnent tout de suite ; c'est Aurore qui l'a décidé, qui a osé ; les mots
échangés ensuite rapprochent ces deux assoiffés de paroles et d'écoute.
Quel choix Aurore fera-t-elle quand le voile sera levé sur la vie de cet
homme infidèle et traqué ? Celui du risque d'aimer ? Ou de se garder de
cette emprise ?
Le style, qui oscille entre une certaine sophistication et une langue
brusque, assez crue, emporte ou rebute. Il illustre magistralement, plus
qu'une simple histoire d'amour, une réflexion sur les relations hommes-
femmes d'aujourd'hui.
Comme dans les westerns, dans l'amour, hommes et femmes jouent
leur va-tout ; du moins ceux qui en ont le courage.
Nicole

Maria Pourchet : auteure française née en 1980.


Avant Western, prix de Flore 2023, elle a publié Feu, retenu pour le Goncourt. Ses
romans creusent la nature du sentiment amoureux.

7
La Sonate à Bridgetower
Emmanuel Dongala
Actes Sud

Des casseuses de pierres en Afrique contemporaine aux salons les plus


huppés de Paris, Londres et Vienne à l'époque de la Révolution française,
quel que soit le milieu, Emmanuel Dongala réussit à le rendre si vivant et
réel que l'on a l'impression d'y être.
Toutes les recherches qu'a dû faire ce scientifique n'écrasent en rien
l'histoire, qui est fascinante : un père noir qui emmène son fils métis de
neuf ans, prodige du violon, en tournée dans les plus prestigieuses capi-
tales d'Europe, comme l'a fait Mozart avant lui, fils qui fait sensation par-
tout et auquel Beethoven dédia sa Sonata mulaticca (avant de se fâcher et
de la dédier à Kreutzer à la place - qui, soit dit en passant, ne l'aimait pas
et ne la joua jamais). Faits et anecdotes foisonnent, certains connus,
d'autres moins, le tout formant un tableau d'un monde en ébullition où
tout pouvait arriver.
« Aussi éclatant que fut le succès de quiconque, il ne tenait qu'à un
fil, le sort de tous aussi indécis et changeant que celui des esclaves,
tantôt libérés tantôt de nouveau sous le joug. Garder la tête sur les
épaules, au propre comme au figuré, n'était pas une mince affaire ».
Et pour finir, pourquoi pas l'écouter, cette fameuse sonate ?
Anne

Écrit à la deuxième personne du singulier, Portrait du groupe au bord du fleuve


évoque si bien la lutte des Africaines pour la justice et l'équité - et un salaire décent - qu'on
a du mal à réaliser que l'auteur en est un homme. Pour Emmanuel Dongala, c'est le plus
beau compliment qu'il ait reçu.

8
La jurée
Claire Jéhanno
Harper Collins

L’héroïne de ce roman, Anna Zeller, professeure dans un collège, a


été tirée au sort pour devenir jurée aux assises. Une expérience aussi ver-
tigineuse qu’inédite.
Elle est appelée à juger un couple au casier judiciaire vierge dans un
procès pour empoisonnement et meurtre. Si au départ, la culpabilité des
deux accusés ne semble pas faire de doute, le procès ne s’avère pas aussi
simple qu’il n’y paraît. Non seulement, la défense va semer le doute, de
même que les experts en brossant peu à peu les portraits aussi bien des
accusés que de la victime mais aussi il va réveiller de douloureux souve-
nirs à la jeune femme qui va voir resurgir son passé. Un passé qui la trans-
porte vingt ans plus tôt, sur une aire de jeux en Bretagne. Le jour où sa
mère a brusquement quitté son père, changé de ville et changé de nom…
Le temps du procès (5 jours), ce temps où la vie de deux accusés peut
chavirer à tout jamais, c’est aussi le temps qu’il faudra pour que bascule
la vie d’Anna. Peu à peu, la jeune professeure va lever le voile sur ses sou-
venirs flous et biaisés. Peu à peu, elle va redécouvrir des souvenirs qu’elle
n’imaginait plus.
Pour son premier roman, l’autrice nous emmène au sein d'un tribunal
pour assister à un procès aux assises. Elle s'est largement documentée
pour nous dépeindre, avec précision, le déroulé de ces jours ô combien
éprouvants, un peu stressants, uniques pour tous les participants et évi-
demment décisifs pour les accusés.
L'autrice nous offre un roman finement construit très loin d’une
simple transcription judiciaire. Elle interroge, avec beaucoup de délica-
tesse, diverses notions telles que la fragilité de la mémoire, les évidences
trompeuses, la complexité des liens familiaux, la difficile recherche de la
vérité, la culpabilité… Ses personnages, fragiles, complexes et dépeints
avec finesse, dégagent une profonde humanité et une tendresse inatten-
due.
Un premier roman maîtrisé, remarquable, intelligent… et trop vite
lu…
Éric

9
10 villa Gagliardini
Marie Sizun
Arlea

En franchissant avec l'auteure la porte de ce petit appartement modes-


te du XXe arrondissement, nous découvrons une histoire romanesque.
Mais c'est bien une autobiographie, cela se sent au ton, aux images, aux
sensations… C'est ici que Marie a grandi, a vécu le retour de captivité de
son père après la guerre, l'arrivée d'un petit frère, puis la séparation de
ses parents qui lui a laissé sa mère pour elle seule.
L'appartement, si modeste soit-il, est vécu comme un refuge, un îlot
de fantaisie et de joie où, malgré les difficultés financières, elle vit dans
un monde créé par l'originalité de sa mère, un monde à l'abri des
contraintes sociales. Tout y est source de bonheur : dessiner sur les murs,
découvrir la lecture, écouter sa mère chanter. Chaque objet, chaque
meuble y raconte une histoire vivante.
« Ma vie commence au petit appartement. C'est mon écorce, ma
coquille, mon nid. Je ne sais rien de lui, mais sa lumière, ses couleurs,
son odeur sont à moi autant que la présence de ma mère… C'est un être
vivant, fraternel, jumeau. IL est moi comme je suis lui, comme on peut
s'aimer ou se haïr sans jamais cesser d'être soi ».
Bientôt, l'enfant se sent attirée par le monde extérieur. La porte
s'ouvre sur l'inconnu, l'école, les amitiés, la découverte du cinéma et du
quartier du XXe arrondissement. Ce n'est donc pas seulement le récit
d'une enfance, puis d'une adolescence dans les années 50 mais aussi une
introspection révélant une lutte pour trouver sa place dans l'école et la
société.
Un récit intime et lumineux à l'écriture délicate qui ramène chacun de
nous à sa propre enfance…
À déguster…

Marie-Claude

10
Le parfum des poires anciennes
Ewald Arenz
Albin Michel

Un vrai bonheur de lecture ! À ne pas bouder quand on nous présen-


te dans les romans actuels tant de sujets difficiles…
Deux femmes se rencontrent : tout apparemment les oppose : l’une –
Liss – a la quarantaine et exploite seule une ferme, l’autre, Sally, est une
jeune fille de 17 ans en fugue d’une clinique où elle est soignée pour
anorexie.
Liss l’accueille sans lui poser de questions dans sa ferme, lui propo-
sant sans jamais rien imposer, de participer aux travaux.
Les deux femmes portent leurs secrets et leur fardeau mais elles ont
en commun un besoin irrépressible de liberté.
C’est une histoire d’amitié et de résilience qui se tisse au milieu des
champs de blé, des pommes de terre et des poires anciennes, une histoi-
re touchante.
L’écriture est très charnelle, fondée sur les sensations, un hymne à la
nature réparatrice.
Encore un coup de cœur !

Marie-Claude

11
Les sources
Marie-Hélène Lafon
Buchet-Chastel

Est-ce qu'ils se sont mariés en 1959 parce qu'ils s'aimaient ? La ques-


tion ne s'est pas posée : les grandes fermes de leurs deux familles étaient
proches. Dans le Cantal. Ils auraient la leur, pas loin…
Elle l'a attendu, lui écrivant pendant son service militaire au Maroc.
Très vite ils ont eu trois enfants.
« Elle ». Le récit ne lui donne pas de prénom. Quand l'auteure parle
d'elle, c'est « elle » dont on entend la voix. Lui est nommé Pierre, une
seule fois, quand son père à « elle » lui a dit avant le mariage : « C'est une
belle ferme, mais j'aime pas comment il te regarde ». Le père avait tout
pressenti, mais certainement pas jusqu'aux injures qu'il vomit sur elle et
aux coups qui s'ensuivent, tel un rituel : « le samedi soir… il faut y
passer… elle ne peut pas lutter, on dirait qu'il le devine ».
C'est un homme qui ne boit pas, un travailleur. Elle, elle se voit lente,
grosse et laide, négligée ; « elle est toujours débordée ».
« Il cogne ». C'est comme un fait acquis qu'elle subit, jusqu'à ne plus
savoir ce « ce qu'elle est devenue ».
Jusqu'à quelle limite ?
Heureusement, elle a ses enfants et ses parents, pas trop loin, qui sont
ses boussoles, ses respirations.
En saura-t-on plus sur les ressorts de leur couple quand l'auteure aura
livré les pensées de cet homme ? S'est-il déjà conduit ainsi avec d'autres
femmes ? Avec celle dont sa femme sait qu'il l'a aimée, au Maroc ?
Ce roman au style lapidaire est court, mais foudroyant !
Nicole
Marie-Hélène Lafon : auteure, professeure de Lettres classiques à Paris. L'annonce, en
2009 a été adapté au cinéma. Joseph, Nos vies, Histoire du fils, ont suivi, creusant le
sillon de son Cantal natal.

12
Du même bois
Marion Fayolle
Gallimard

Du même bois, récit court et saisissant dès les premières lignes,


nous plonge au cœur d'une ferme familiale en Ardèche. Trois généra-
tions y cohabitent : les jeunes à gauche, les vieux à droite, les vaches au
milieu. Ils n'ont pas de noms, ni même de prénoms, ils sont seulement
le Pépé, la Mémé, l'oncle, la fille, la gamine, l'orphelin, les enfants, le
petitou, les vaches, le chien, la poule faisane…
Pas de récit non plus à proprement parler mais des instantanés qui
nous décrivent la terre ardéchoise, le quotidien d'une vie simple, âpre,
difficile : celle des taiseux toujours plus démonstratifs avec les animaux
qu'avec leurs semblables.
L'histoire est rude mais la langue, le style condensé de Marion
Fayolle épouse tout à fait le caractère de ce qu'elle raconte : sans tirets
ni guillemets les paroles s'insèrent à même le texte.
Aucune fioriture mais des mots qui coulent en cascade et qu'on a
envie de dire à voix haute.
« Les enfants, les bébés, ils les appellent les “petitous”. Et c’est vrai
qu’ils sont des petits touts. Qu’ils sont un peu de leur mère, un peu de
leur père, un peu des grands-parents, un peu des arrière-grands-
parents, un peu de ceux qui sont morts, il y a si longtemps. Des petits
touts ».
Un étonnant premier roman d'une autrice de BD.
Marie-Claude

13
D’or et de jungle
Jean-Christophe Rufin
Calmann Levy

Nous voici dans l’univers des GAFAM, puissances financières qui en


veulent toujours plus et ne supportent pas d’être limitées par les gouver-
nements.
Alors pourquoi ne pas « s’offrir » un petit état où tout serait possible ?
Dans cette fiction, nous sommes entraînés dans les rouages d’une
opération secrète.
Ronald Daume, la cinquantaine, élégant, brillant et un peu manipula-
teur, monte une agence avec les meilleurs experts dans tous les
domaines : informatique (Fake News - Hackers), économique, sociétal,
géopolitique… et un vieux professeur, M. Delachaux, auteur de la théorie
de l’ébranlement.
Leur objectif : réaliser un coup d’état !
Tous ensemble, ils vont mettre au point un plan pour s’emparer, sans
un coup de feu d’un état, le sultanat de Brunéi, riche, et carrefour de civi-
lisations, dirigé par un dictateur peu scrupuleux.
Au fur et à mesure des événements, le suspense monte.
Nous assistons, haletants, aux aventures des différents protagonistes,
qui en dépit de l’emploi des nouvelles technologies ne contrôlent pas
toujours la situation.
Jusqu’au dénouement… non prévu !
J’ai pris un réel plaisir à plonger dans ce monde technologique et
financier, à suivre ses différents acteurs hypercompétents et pleins d’hu-
manité.
Précipitez-vous dans cette fiction, qui nous montre ce que notre
proche avenir technologique peut engendrer
Jean

14
New books in English

In the Blink of an Eye - Jo Callaghan


Gone – in the blink of an eye ! A gripping thriller in which a
female detective teams up with an ‘Artificial Intelligent Detective
Entity’ to solve two missing persons cases. Unlikely perhaps, but
we are already having to consider the possible roles of AI and
conversely, what it means to be human. Instinct versus logic –
which will come out on top?
This book is very readable in terms of the plot – once you
start you can’t put it down. However, I found the relation bet-
ween the detective and the hologram slightly annoying and
unbelievable, and in a way would have preferred the traditional
two cop relationship.
How far has AI really advanced? It does make you think.

Death and the Penguin - Andrey Kurkov


A novel by a Ukrainian author, set in Kiev in the nineties.
Bleak, satirical and surreal, it is a story of a man and his pet pen-
guin who are caught up in a situation they don’t understand. For
that matter, neither does the reader.
The protagonist is an aspiring novelist who, in order to earn
money to feed the penguin, finds himself writing obituaries for
a local newspaper about people who are not yet dead. He begins
to feel more than uneasy when they start dying and the obitua-
ries are eventually published…
Strange and yet amusing, it is an intriguing read. Something
quite different with a humorous twist at the end.
Joan

15
Nos coups
À quoi songent-ils ceux que le sommeil fuit? - Gaëlle Josse - Notabilia

Le titre est à lui seul une promesse… des petites histoires,des


moments de vie qui font écho à nos propres émotions à l'heure où la
nuit tombe… où le chuchotement s'impose.
Les mots de Gaëlle Josse se faufilent à travers nos sensations et nos
souvenirs.
Une jolie expérience de lecture avant de s'endormir…

Marie-Claude

Ce genre de petites choses - Claire Keegan - Sabine Wespieser

Écouter la voix de son cœur et défier la toute-puissance de l'Église


dans l'Irlande des blanchisseries Magdalen (fermées en 1996 !) –
Ce conte de Noël de nos jours est un pur bijou.

Anne

Le passeur - Stéphanie Coste - Gallimard

Premier roman coup de poing mettant en parallèle la côte libyenne de


2015 et des aperçus de l'Érythrée entre 1993 et 2005, pays dont les
fugitifs désespérés forment la majeure partie des "clients" du passeur
éponyme.
Lui aussi en est originaire, découvre-t-on, et on se demande comment
est-ce possible que le gamin heureux et espiègle du début soit devenu
un tel monstre. On finit par comprendre que l'être le plus cruel n'est
pas forcément celui que l'on croit.

Anne

16
de cœur
La discrétion - Faïza Guène - Plon

Coup de cœur pour Yamina, née au bled il y a 70 ans, ainsi que pour
son mari Brahim, digne et discret lui aussi et qui lui offre des roses
chaque Saint Valentin. Coup de cœur pour leurs quatre enfants,
deuxième génération moins docile, naviguant non sans peine entre
les écueils que l'on connaît - mais qui s'en sortiront la tête haute eux
aussi. Un livre plein d'amour.
Anne

Plus riche que le roi - Abigail Assor - Gallimard

Encore une Marocaine qui n'a pas froid aux yeux ! C'est l'histoire de
la Belle (Sarah, fille pauvre de Casablanca qui ne compte pas le res-
ter) et la Bête (Driss, fils à papa laid et plutôt naïf - ça tombe bien),
qui finit… en une sorte d'apothéose quand même. Comment ?
Conquis, le lecteur sceptique finit par leur souhaiter de réussir leur
pari improbable.
Anne

Richesse oblige - Hannelore Cayre - Métaillé

« Acheter » un pauvre pour prendre la place au service militaire de son


fils de 18 ans dont le nom a été tiré au sort - c’était monnaie courante
dans les familles françaises aisées des guerres napoléoniennes jus-
qu'en 1905.
Or, de nos jours, surgit une descendante assez spéciale dudit pauvre
qui voudrait sa part de l'héritage familial. Avec sa verve habituelle
l'avocate pénaliste Hannelore Cayre, auteure de « La Daronne », réus-
sit haut la main son premier roman historique, tout en promenant
son regard désabusé sur les magouilles du monde.
Anne

17
BD
Bobigny 1972

Scénario : Marie Bardiaux-Vaïente


Dessin : Carole Maurel
En 1972, l’avortement est encore passible de
sanctions sévères.
Marie-Claire Chevalier est dénoncée pour avor-
tement clandestin par son violeur…
Ce récit retrace le procès historique mené par
Gisèle Halimi pour le combat des femmes à
pouvoir avoir le choix de disposer de leur corps.
Le discours militant de ce roman graphique
nous fait revivre ces moments pas si lointains
où les femmes devaient encore lutter pour leurs
droits, leur liberté et leur émancipation.

Très bon album, dont le scénario est


juste, poignant, et le graphisme très
direct. A lire absolument

Martine

18
BD
Atatürk

Scénario : Marie Bardiaux-Vaïente


Dessin : Andrea Meloni
Cette série en 9 tomes retrace l’histoire d’un jeune
allemand timide sentimentalement, d’abord étu-
diant puis soldat, dans le contexte sombre de la
montée du nazisme.
C’est avant tout un grand roman d’amour entre
Martin et Katarina, mais qui n’a été qu’un alibi
pour nous montrer le côté tellement odieux de cer-
tains personnages
Au travers de tous les événements historiques qui
se dérouleront pendant cette période de l’entre-
deux-guerres, nous verrons un jeune homme se
transformer en héros….

S’inscrivant dans la lignée de la


collection « Ils ont fait l’Histoire »,
nous pouvons faire confiance à ce
récit très instructif qui s’appuie sur Martine
le travail de l’historien François
Georgeon

Et les suites de vos séries préférées :


Largo Winch Tome 24 Blacksad Tome 7
XIII Mystery Tome 14
Le Serpent et la Lance Tome 3

19
Médiathèque Municipale
de Châteauneuf
1, rue du Baou
Tel. : 04 93 42 41 71
mediatheque@ville-chateauneuf.fr
site : mediatheque.ville-chateauneuf.fr

Journal des Lecteurs


écrit par et pour les lecteurs

Mise en page :
L’esp@ce Multimédi@
Rédacteur en Chef :
Marie-Claude LAMBERT

Impression :
Zimmermann - Villeneuve-Loubet
Couverture : Maud Roegiers

Ils ont participé à ce numéro :


Éric Bataillou Marie-Claude Lambert
Martine Deprez Nicole Leroy
Marie Gutton Jean Levant
Anne Hannan Joan Meredith

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