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SEANCE 4 : DIRIGER / PLANIFIER

PARTIE I : DIRIGER AU XIXEME SIECLE

Introduction

On se situe dans un contexte favorable. En 1791, le décret Allarde et la Loi le


Chapelier mettent fin aux corporations et impliquent une plus grande liberté
d’entreprendre, ce qui permet une libre concurrence entre les commerçants (en effet,
chacun peut exercer n’importe quelle activité dans l’ensemble du pays (ce qui n’était pas le
cas avec les privilèges et les corporations qui géraient qui peut ou non rejoindre un métier).

C’est un contexte favorable à l’éclosion de nouvelles entreprises, mais ce n’est qu’à


partir de 1830 qu’on parle du « temps des pionniers » (Lambert-Dansette).

Il y a tout de même une instabilité politique. La Révolution française, des guerres


napoléoniennes, mais aussi l’embargo imposé par l’Angleterre retardent l’arrivée de la
révolution industrielle en France. Elle ne commence qu’en 1830.

Nous allons tout d’abord essayer de comprendre : quelle était la figure du dirigeant
au XIXe siècle, et comment s’est structuré un savoir théorique pour le dirigeant ? Enfin nous
traiterons des grandes tendances en matière de stratégie industrielle qui seront mis en
œuvre durant cette période.

Difficultés de l’époque :

• Prévoir – difficulté à anticiper l’évolution : des techniques, de la demande


(débouchés), du contexte politique
• Administrer – difficulté à être « bon » partout : innovateur, fabriquant,
négociant (achat, vente)
• Administrer – difficulté à déléguer : volonté du patron de tout surveiller-
contrôler, temps « consommé » à la réalisation de tâches autres que
l’administration

à On a donc un besoin croissant de « principes de gestion », de formation et de stratégie.

I. Comment devient-on dirigeant ?

Deux voies d’accès essentielles au début du XIXe siècle :

- Dynasties familiales
- Réussite entrepreneuriale (peu ou pas de dirigeant salariés)

Être dirigeant ne s’apprend pas encore (peu d’école d’ingénieurs et peu ou pas d’écoles
de commerce), et le passage de l’invention à l’innovation est le point central.
1) La figure de l’entrepreneur

L’entrepreneur n’est pas seulement un innovateur, plusieurs compétences clé se


dessinent. Une des qualités indispensables est d’avoir la capacité à savoir gérer
simultanément l’aspect production et l’aspect commercial.
Au XIXème siècle on devient dirigeant de deux manières. Soit on hérite ou on fait partie
d’une dynastie familiale. Soit on est un entrepreneur ayant réussi, cet entrepreneur est un
inventeur qui a réussi à transformer ce qui était au départ une invention en innovation et qui
va acquérir au fur et à mesure des compétences pour gérer l’aspect production et l’aspect
commercial.

Exemple : Itinéraire d’un inventeur entrepreneur type, Paul Héroult (1863 – 1914)

Ecole des Mines de Paris : Il suit les enseignements d’Henri Le Chapelier


(connaissance de procédés électrochimiques). Il est le camarade de Louis Merle (fils d’un
fabriquant l’aluminium). Il va s’associer avec plusieurs camarades. Il va investir son héritage
paternel pour transformer la tannerie familiale en laboratoire. Il fait une série d’essais-
erreurs... puis dépose un brevet sur l’électrolyse de l’aluminium en 1886.
Il crée la Société électrométallurgique française (SMEF) en 1888, puis on a une
industrialisation et une baisse du prix de production de l’aluminium. Il dépose d’autres
brevets. Grâce au « réseau des Mines », il a accès au monde des affaires et trouve des
financements ultérieurs pour ses investissements. Il fait ensuite une carrière « internationale
» (France, Suisse, USA).

2) La figure dynastique

A l’époque la direction de l’entreprise par un dirigeant non propriétaire était


extrêmement rare. A l’image de Peugeot, il y avait des dynasties familiales, ce qui signifie
que la structure, y compris juridique, de l’entreprise se voit modifiée en fonction de la
structure de la famille. Le développement d’une ou de plusieurs affaires au sein de la famille,
par les membres de la famille, les partenariats noués par la famille et selon les évènements
familiaux (décès, mariage, majorité des enfants, etc.) est facilité par plusieurs éléments :
- La réunion de fonds propres est plus facile
- La famille fournit une meilleure garantie pour l’obtention de crédit
- On est plus facilement incités à réinvestir les profits en pensant aux générations à
venir et donc pour augmenter le capital de l’entreprise (elle sera léguée aux enfants).

On retrouve des sociétés en commandite simple ou par action. On avait également des
sociétés en nom collectif où il y a deux propriétaires qui se partagent la gestion de
l’entreprise (responsabilité illimitée). Les membres peuvent y jouer différents rôles :
apporteurs de capitaux ou gestion de l’entreprise. Il y a une séparation des rôles au sein de
la famille.
Exemple : la dynastie Peugeot

Les Peugeot sont originaires Montbéliard (Franche-Comté). Ils sont meuniers au


XVIIIe siècle et s’occupent du coton au début du XIXe siècle (armée napoléonienne). A partir
de 1810, ils vont transformer un moulin en fonderie d’acier. Chaque frère crée sa société
liée à l’acier : horlogerie, lames de scie (1832), moulins à café (1840), etc.

Politique de mariage comme moyen de transmission du capital :


- Peugeot, Japy & Cie (horlogerie et sidérurgie dès les années 1810)
- Peugeot, Jackson & Cie (sidérurgie après 1840)
- Peugeot frères (lames de scie, 1832) : croissance au XIXe siècle, accumulation de
capital, famille et proches cumulent les fonctions de financiers, d’ingénieurs et de
commerçants

En 1892, la société Les fils de Peugeot frères est créée. Ils y construisent des voitures, il
y a 8 associés (dont 6 de la famille Peugeot). Les femmes ne participent pas à la gestion,
mais seulement au capital.

3) Les formations des entrepreneurs

Le CNAM (Conservatoire nationale des arts et métiers) créé en 1894 joue un rôle
particulier dans la formation des futurs dirigeants d’entreprise, car il permet de compléter
une formation commencée ailleurs avec les cours du soir. Il permettait également d’assurer
une formation en même temps que l’activité en entreprise. Par exemple, Jean Baptiste Say
est professeur d’économie au CNAM. L’enseignement est avant tout oral mais ne forme pas
les ingénieurs. A côté du CNAM on a de grandes écoles d’ingénieurs qui ont participé au
développement de l’industrie. Par exemple, l’école Centrale a permis de former des
dirigeants pour les entreprises industrielles privées. Certes Polytechnique existait déjà,
mais elle formait des dirigeants pour le secteur militaire ou étatique.

Aucune formation ne proposait un enseignement purement économique et


gestionnaire jusqu’à la deuxième moitié XIXème siècle. La seule exception était l’école
spéciale de commerce (ESCP), crée en 1820, qui fournissait des cours d’économie politique,
d’économie industrielle mais toujours pas de cours sur les aspects financiers, comptables et
commerciaux. A l’université c’est le même problème. L’école spéciale de commerce (qui
s’appelait à l’origine l’école de commerce et d’industries) se retrouve durant toute la
première moitié du XIXème siècle la seule école à offrir un enseignement gestionnaire.
Beaucoup de dirigeants étaient sceptiques quant à l’ouverture de cette école car ils
considéraient que le savoir-faire en termes d’affaires ne s’apprenait mais était quelque chose
d’inné. Le sens du commerce peut-il vraiment s’enseigner ?

De grands noms vont venir y enseigner notamment Jacques Lafitte et Guillaume


Ternaux, ce qui va permettre à cette école de prospérer. La formation se fait en 3 ans. On y
enseigne des matières comme la production, l’achat, la vente et la comptabilité. Au début
seulement 60 étudiants sont inscrits mais deux ans plus tard ils sont 170 (mais très peu
étaient diplômés). Les ESC de Rouen, du Havre, et de Lyon sont créées en 1870. En 1881, HEC
voit le jour.

Date de création des écoles d’ingénieur :


- 1747 : Ponts et Chaussées
- 1783 : École des Mines
- 1794 : École Polytechnique – corps d’armée et Etat
- 1794/1803 : Écoles d'Art et Métiers (enseignement oral)
- 1829 : École Centrale – ingénieurs et dirigeants

Date de création des écoles de commerce :


- 1819 : ESC de Paris (ESCP Europe)
- 1881 : École des HEC
- 1906 : EDHEC
- 1907 : ESSEC

II. La constitution d’un savoir empirique

Au début du XIXème, on remarque l’absence de « modèles d’entreprise » à enseigner


dans les grandes écoles. Quand l’entrepreneur doit essayer d’imaginer un modèle
d’organisation, il va s’intéresser à des modèles extérieurs à celui du commerce en général.
On recherche des modèles pour s’inspirer (Lambert-Dansette) : modèle familial, domanial-
féodal, étatique (gouvernement, administration), couvent (église), armée. On va s’inspirer
de l’Angleterre, en avance dans la révolution industrielle.

Début de formalisation et de diffusion :


- L’enseignement (les premiers cours)
- Les ouvrages (les premiers manuels)

1) Les modèles existants

a. Le modèle familial

L’organisation s’inspire d’un modèle familial à travers un certain


vocabulaire (paternalisme, entreprise familiale). Souvent la relation patron ouvrier repose
sur une hiérarchie inspirée du modèle père enfant : le patron considère ses employés
comme ses enfants, il se considère comme un père. Cette relation va au-delà de la simple
relation marchande puisqu’on a une rémunération contre le prêt de sa force de travail, mais
avec des devoirs moraux, un respect très exacerbé et de l’autre côté un patron qui aide ses
employés.

Il y a une véritable relation entre le patron et ses ouvriers : autorité du maître,


échange de la force de travail contre la rémunération. Le patron doit savoir se faire respecter
et craindre. On a même des termes relatifs à l’amour filial qui peuvent lier les deux. Ce
pouvoir s’instaure dans le temps au même titre que la famille. Cette association fait qu’il y a
une confusion entre le périmètre de la sphère privée et le périmètre de la sphère de
l’entreprise (transmission aux enfants, reprise par le conjoint en cas de décès, etc.). Faillites
nombreuses dû à la mauvaise séparation entre sphère privée et sphère publique.

On a même une dimension « religieuse » dans cette relation : filiation, instauration


d’une relation dans la durée (au-delà du strict échange marchand). Le point positif est que le
patron va donner des avantages à ses ouvriers, mais le point négatif est que la relation
d’autorité est beaucoup plus forte, les ouvriers n’ont pas de libertés.

Exemple : Claude Lucien Bergeris. Publie un manuel de management, « sachez vous faire
respecter afin que les ouvriers vous respectent, mettez à la fois de la bonté, de la gravité,
dans vos relations avec eux afin qu’ils vous aiment et vous craignent, soyez justes et sévères
afin de les encourager ou bien de les aider à fuir le mal » = figure du père du XIXe.

b. Le modèle domanial, relatif au domaine féodal

L’entreprise est vue comme un domaine où s’exerce une autorité unique, celle du
patron, comme dans l’ancien temps s’exerçait celle du seigneur féodal sur ses terres, où il
faisait travailler des serfs. Les ouvriers sont vus comme des esclaves.

Le patron est ainsi le chef mais aussi le législateur et le magistrat au sein des
entreprises, puisqu’il rédige les règles formelles au sein de l’entreprise et supervise
l’application des sanctions. Le chef d’entreprise est le juge, c’est lui qui décide des
sanctions. Tout cela va être atténué avec l’émergence de droits sociaux pour les employés
(mais cause lente).

c. Le modèle étatique

L’Etat était organisé en deux avec d’un côté le gouvernement et de l’autre,


l’administration. On passe d’un patron « de droit divin », digne de la monarchie absolue, à
une forme plus démocratique de pouvoir, avec une dilution de ce pouvoir entre plusieurs
mains (ex : Saint Gobain où on prend les décisions de manière de plus en plus collégiale).

A partir du milieu du XIXème siècle on voit se créer plusieurs niveaux hiérarchiques


avec d’un côté ceux qui administrent, et de l’autre côté, les ingénieurs et les contremaîtres.
Quand les chefs d’entreprise vont avoir besoin de déléguer des fonctions, ils vont utiliser le
modèle étatique.

d. Le modèle du couvent

Il fait référence à une forme de vie communautaire inspirée du couvent (« usine-


internat », « cloître industriel »). L’ouvrier a un statut de pensionnaire dans l’internat. On
avait parfois la présence d’une discipline religieuse. Les enfants ouvriers étaient protégés
contre les tentations de la grande ville, contre tout ce qu’il y avait à l’extérieur. On avait un
dortoir, un réfectoire voire d’un préau pour les récréations. On logeait les ouvriers dans un
local à côté organisé selon des règles religieuses strictes (temps de prières, pour manger).
Règle de conduite, sanction…

e. Le modèle de l’armée

L’armée a été une source importante d’inspiration pour les entreprises, notamment
pour l’atelier ou l’usine (valeurs, travail, discipline, formation, encadrement du personnel).
L’armée va offrir des officiers au monde de l’entreprise, on va recruter des officiers. Les
principes de fonctionnement de l’armée sont repris dans les grandes écoles (ex : l’uniforme).

2) L’influence anglaise sur l’enseignement et la connaissance technique en


France

Au niveau technique, la France accuse un retard important au début du XIXème


siècle. Pour combler son retard, elle achète des licences d’exploitations de brevet en
Angleterre et fait venir des ingénieurs anglais pour former les ingénieurs français.
Guillaume Ternaux va faire venir plusieurs ingénieurs pour l’aider dans la construction de ces
machines. Quand il souhaite passer de l’industrie lainière à l’industrie cotonnière, il achète
un brevet anglais en 1825 pour une machine qui tire et file la laine.

L’Angleterre n’est pas qu’une source d’inspiration scientifique mais également un


réservoir de connaissances très concrètes pour le terrain et pour les usines françaises. Un
anglais du nom de Babbage, précurseur du management scientifique, va rédiger un ouvrage
en 1831 (« Traité sur l’économie des machines et des manufactures ») dans lequel il
développe une méthode pour observer et diagnostiquer les usines qui se base sur la
distinction des tâches de l’entreprise. Andrew Ure, mais aussi Henri Fayol, vont fortement
influencer des professeurs au CNAM. Fayol distingue trois principes d’actions, de systèmes
organiques dans les entreprises (le système mécanique le système moral et le système
commercial).

3) Vers une généralisation des modèles

L’expérience va se formaliser, on va créer les premiers manuels de gestion. Jean


Baptiste Say est le cas le plus emblématique, car c’était à la fois un théoricien et un
entrepreneur. A la suite de l’écriture de son ouvrage en 1803, il dirige une entreprise de
filature du coton. Cette expérience va l’amener à rédiger un nouvel ouvrage beaucoup plus
pratique, s’inspirant de l’économie politique (« Cours complet d’économie politique
pratique »). D’autres entrepreneurs comme Ternaux vont tirer des leçons de leurs
expériences entrepreneuriales et vont essayer de les généraliser.

On va se focaliser sur plusieurs aspects : vendre (débouchés), produire (et la


question de la technique, sujet d’évolutions permanentes au XIXème siècle), administrer
(relations au niveau de l’industrie, dans la fabrique).

Exemple d’ouvrages d’entrepreneurs :

- Guillaume Louis Ternaux (1810) : séparation des fonctions d’achat, de production et


de vente
- Jean-Gustave Courcelle-Seneuil (1854) : rôle du dirigeant de prévision,
administration et délégation (ne pas s’attacher à surveiller tous les détails, il ne faut
pas tout contrôler mais commencer à déléguer les tâches)

4) Genèse du management et de la planification

De manière générale, les ouvrages du XIXème siècle évoquent la figure de l’entrepreneur


de façons différentes :
- Approche d’économie générale : ils s’intéressent alors à comment optimiser la
production
- Approche technique : ils exposent de manière minutieuse tous les principes
techniques liés à la gestion des ateliers, de la comptabilité, du capital

Dans la seconde moitié du XIXème siècle on a une évolution où l’on voit apparaitre les
prémisses des principes managériaux. Courcelle-Seneul rédige un traité « Manuel des
affaires » dans lequel il affirme dans une introduction que son ouvrage néglige les détails
infinis de la technologie, il pense son ouvrage comme une aide au dirigeant à travers
plusieurs dimensions. Selon lui, l’intelligence de l’entrepreneur prévoit sa volonté prépare les
moyens d’actions, et ses forces physiques et morales sont mises en œuvre pour atteindre les
buts de l’entreprise.

Technonomie (Christian, 1819) :


- Statistique industrielle
- Direction spéciale de la fabrication
- Systèmes d’achats de matières premières et de ventes des produits fabriqués
- Comptabilité manufacturière
- Influence de la consommation et du goût sur le système de fabrication et
réciproquement
- Rapports moraux du chef d’entreprise avec les ouvriers ainsi qu’avec les
consommateurs

III. Les stratégies industrielles

A la fin du XIXème, on assiste à l’émergence de la grande entreprise en France. Les


stratégies industrielles (l’innovation, l’intégration, la diversification) ont rendu possible une
telle transformation d’ateliers et de laboratoires en grandes entreprises.

1) Stratégies d’innovation

Le XIXe siècle voit se développer une industrialisation de la recherche. On assiste à la


mise en place d’une politique volontariste visant à développer une recherche en interne.
Des lieux dédiés à la recherche sont créés, comme des laboratoires de recherche, et on va
développer des outils scientifiques.

On va assister à la mise en place de liens étroits entre la sphère de la recherche


académique et la sphère de l’entreprise : Nicolas Clément-Desormes (CNAM), Charles-
Bernard Desomes (Polytechnique) et François Gay-Lussac (Polytechnique et Faculté des
Sciences) vont participer à la gestion de l’entreprise Saint Gobain. Ils vont permettre à Saint
Gobain d’avoir de nouveaux produits à vendre en rapport avec la chimie (ex : engrais).

2) Stratégies d’intégration

Il existe deux types d’intégrations :

- Intégration horizontale : « L’intégration horizontale consiste pour une entreprise à


étendre son réseau, en acquérant ou développant des activités économiques au
même niveau de la chaîne de valeur que ses produits. » à Ex : je rachète un
concurrent, je grossis mon entreprise mais au même niveau.

- Intégration verticale : « L'intégration verticale consiste pour une firme à fabriquer


des facteurs de production qui auparavant étaient achetés sur le marché ou à
transformer des produits qui étaient auparavant vendus sur le marché. On parle
d'intégration amont et aval. » Un entrepreneur qui commence à avoir des premiers
succès commerciaux et qui décide de réinvestir ses profits peut rechercher une
forme d’intégration, en amont ou en aval. :

à L’intégration en amont, c’est l’approvisionnement ou les étapes de production en


amont.
à L’intégration en aval, c’est l’accès au consommateur final ou l’intégration de phases de
transformation préalables à celle déjà réalisée.

Exemple : ils vont chercher non pas à acheter de la matière première mais à la produire eux-
mêmes. Je suis capable de produire mais aussi contrôler mes débouchées. Si on voit qu’il
peut y avoir des problèmes d’approvisionnement (ex : conflit entre des pays), il vaut mieux
produire nous-même pour garder le contrôle de la matière première.

Exemple : entreprise de lavage de laine, située assez loin de la production de la laine et des
tisseurs qui font la suite de l’opération à il va acheter en amont la laine pour la produire et
il va faire toutes les opérations de textile, plus seulement le lavage de la laine. Il prend la
totalité du processus pour pouvoir tout contrôler. Il s’attribue la totalité de la plus-value.

Exemple Ternaux :
Il avait un troupeau permanent de dix milles bêtes pour fabriquer les MP, atelier de lavage
conçu en 1756 par Louis Ternaux à Sedan. Développement progressif de l’activité en
intégrant les différentes étapes en aval par Louis ensuite par son fils Guillaume.
à Premier exemple d’intégration verticale en France.

3) Stratégies de diversification

De grandes entreprises se forment durant le XIXème siècle. La diversification se fait


assez naturellement dans les entreprises familiales, qui détiennent déjà un capital important
ou qui sont réputées auprès des banques et qui ont un réseau important de par les
associations entre familles. Comme il y a du profit, il va y avoir un réinvestissement
systématique.

Les stratégies de diversification consistent à acquérir des savoir-faire multiples de


façon à pouvoir exploiter des métiers différents, sans relation technique ou commerciale
entre eux. Elle peut se mettre en place par :

- Une diversification géographique : même produit sur un marché différent (ex : on


modifie la communication ou le conditionnement) à je ne me contente pas du
marché national, je vais vendre à l’étranger

- Une diversification conglomérale : intégration d’entreprises sans liens entre elles,


objectif assure un max de rentabilité. à Regroupement d’activités ou d’entreprises
qui n’ont pas de lien entre elles pour avoir du bénéfice ultérieurement

- Une diversification liée : développement d’activités en synergie avec l’activité de


base (ex : dans une station-service, on vient pour faire le plein, elles sont ouvertes
tard le soir, on va diversifier l’activité en vendant de la nourriture à vu que je suis
ouvert et que je consomme de toute façons, je vais vendre l’essence mais aussi de la
nourriture pour rentabiliser au maximum / La Poste a une activité historique sur le
courrier, progressivement elle est rentrée dans une activité de banque, et le facteur
peut parfois faire des activités bancaires).
PARTIE II : DIRIGER AU XXEME SIECLE

I. Emergence du vocabulaire de la stratégie

1) Historicité du terme

En français les termes « plan » et « stratégie » sont fréquemment utilisés comme


synonymes.
Pourtant le mot « planifier » a une connotation politique. On faisait tout d’abord de
la planification sur le CT : tache journalière, processus de fabrication (qui fait quoi, quel
emplacement des ouvriers, quels manuels de production).
Le premier à utiliser le terme est Fayol (1916) en y introduisant les concepts de
« prévoyance » et de « programme », il introduit la notion du long terme. Fayol (ingénieur
français) est considéré par les américains comme un fondateur du management. Il est le
premier d’utiliser la planification sur le LT dans « administration générale et industrielle ».
Il parle d’un programme d’action qui aborde le résultat, la ligne de conduite, les moyens
employés, les étapes à franchir, la marche de l’entreprise prévue et préparé depuis un
certain temps.
À partir des années 1930 c’est l’expérience soviétique qui nourrit le terme. Après
1945 des projets planistes et technocratiques se développent : déplacement de la gestion
« à l’américaine » des usines vers l’organisation en générale. Suite à la crise de 1973, la
planification devient stratégie.

Planification VS stratégie (Diagram viewer)

2) Les acteurs de la stratégie


II. Autonomisation et « outillage »

On a un changement du profil des dirigeants par rapport au XIXème siècle, il y a moins


de fils de famille et plus de dirigeants salariés venant d’écoles d’ingénieurs, d’écoles de
commerce, on va importer les modèles étrangers.

Exemple : L’Oréal
Histoire de l’Oréal : Eugène Schueller
En 1909, création de la Société Française des Teintures Inoffensives pour Cheveux. En 1912
la marque achète de la nouvelle revue « La coiffure de Paris ». Durant l’entre-deux guerre,
la marque L’Oréal s’exporte. En 1928, elle rachète Monsavon (savons), et en 1935, elle lance
« Ambre solaire » (protection solaire). Elle renforce sa position aux Etats Unis.
En 1963, L'Oréal entre en bourse. A partir du milieu des années 60, on assiste à une série
de rachats de marques et d'associations.
Avec Lindsay Owen-Jones (1988) la marque connaît sa plus forte expansion : implantation
dans 130 pays, vente dans tous les circuits de distribution, couverture de tous les secteurs de
la beauté (coloration, soin du cheveu, soin de la peau, maquillage, parfum) et 23 marques
mondiales.

1) Influence des Etats-Unis

Après 1945, on importe des pratiques de stratégie des Etats-Unis : d’abord des
cabinets de conseils pour aider l’introduction de la rationalisation dans les ateliers, puis le
conseil de direction générale pour soutenir la mise en place de la planification stratégique
(en parallèle de l’introduction des techniques de marketing).
L’appropriation des pratiques américaines est contrastée : le rythme est différent selon les
pays, secteurs, entreprises, etc., il n’y a pas de transfert massif ni uniforme.

2) Les dirigeants français

Les participations croisées et les rencontres dans les CA facilitent les coopérations
intellectuelles et industrielles. On a une diffusion des idées et méthodes, des apprentissages
communs.
Ex : Wilfried Baumgartner (Rhône Poulenc), Ambroise Roux (CGE), Jean Reyre (Paribas),
Pierre Jouven (Pechiney) ou encore Jacques de Fouchier (CCF).
Le rôle central des consultants se développe dans les années 20, puis on a l’arrivée des
cabinets US de conseil en direction générale et en stratégie dans les années 60.

3) Le soutien de la presse

En France, en 1964, on assiste à la publication du premier article scientifique


entièrement consacré à la planification.
À parti de 1967, il y a un essor des articles d’analyse sur les pratiques et méthodes des
grandes entreprises américaines et européennes.
Finalement la stratégie, grâce à ces articles d’universitaires, trouve un terreau fertile pour se
légitimer.

III. Formation croissante des modèles

Changement de contexte (post-1960)


Mouvements :
- Mondialisation de la concurrence et ouverture des frontières (CEE)
- Concentrations industrielles (grandes entreprises compétitives)
- Informatisation
- Nécessité de consolider les comptes

On a une réflexion sur la structure de l’organisation (ex : développement de la


décentralisation et de l’entreprise multidivisionnelle, dite forme en M suivant A. D.
Chandler). Les cabinets de conseil vendent des produits à utiliser, à appliquer
immédiatement. Ceux sont des activités très standardisées, procédurales. Ils appliquent des
recettes.

1) L’adoption de la forme en M

Opposée à la structure dite fonctionnelle, la structure multidivisionnelle possède


une organisation par produits ou marchés, une décentralisation, et elle facilite la
diversification. Recette de la fin du XIXe.

Tout en haut on a les dirigeants (PDG), puis on crée des divisions (A, B, C), et
ensuite on fait une division fonctionnelle. Cette division fonctionnelle se fait dans un
second temps et non pas dans un premier temps comme dans la structure fonctionnelle
(ex : je ne travaille pas au marketing, je travaille au marketing de la section B).

Une entreprise est organisée autour du marché et non des capacités de personnels. Il
faut attendre les années 70 pour que les entreprises françaises les utilisent.
2) L’exemple de Total

En 1954, Total est une marque du groupe CFP qui se développe sous contrôle de
l’Etat.
A partir des années 50, s’installe une compétition internationale des grands
pétroliers. CFP et CFR vont se séparer à cause de problèmes de doublons.
On recherche un modèle pour CFP auprès de concurrents (Shell et Standard Oil – ESSO – en
1969). Cela a un intérêt pour Shell, on assiste à l’intervention de McKinsey et à la
suppression de 2 500 postes. BP est également cliente de McKinsey (bureau de Paris).
McKinsey va donc restructurer Total (en même temps que son concurrent Elf Aquitaine...)
en 1970-71. On n’a pas strictement une forme en M mais on s’en inspire + introduction de
la planification stratégique pluriannuelle formalisée.

3) L’exemple de McKinsey

McKinsey restructure de nombreuses entreprises françaises dans les années 1960-


70 (Total, Crédit Lyonnais, Lafarge, Pechiney, etc.). Elle utilise un « modèle » standard.
On a une évolution de la structure fonctionnelle, il y a un passage de la structure
fonctionnelle à une structure :
- Plus décentralisée (notamment en termes de décision stratégique)
- Plus orientée vers le marché (l’aval) que vers la technique (production en amont)
- Plus de formalisation
- Avec adaptations selon les entreprises (s’adapte au coût par coût)

Le management stratégique conjoint d’autres « modernisations » : rationalisation des


ventes et de la logistique (on dit aux salariés comment vendre, on ne leur laisse pas
d’initiatives), développement du marketing, etc.

IV. La « pratique » de la planification stratégique

1) Exemple du cas Air France

La société Air France est fondée en 1933 et nationalisée en 1945. Elle se développe
rapidement après 1960. Elle absorbe Air Inter, UTA et autres compagnies françaises avant
1990 et se restructure (recapitalisation étatique) en 1992, devenant ainsi le Groupe Air
France. Sa « privatisation » est achevée en 2003-2004.
Vers 1950, elle adopte le contrôle budgétaire et une planification opérationnelle par «
programmes d’exploitation » annuels.
En 1964, elle fait face à une crise de surcapacité, d’où la volonté de passer au « plan ». Une
« Direction contrôle et études de gestion » est créée pour établir le plan quinquennal en
1968.

On passe ensuite à une forme multidivisionnelle avec McKinsey (1969-1972). Il y a


un couplage de la planification avec les « programmes d’exploitation ».
A partir de 1966, il y a une diversification.
La planification en 1973 est élaborée par une « Direction du programme de
développement » (DPD) et coexiste avec un « Comité d’étude des stratégie groupe » et
avec un « Service des filiales et de la diversification » :
- Pour les spécificités de jet Tour, Air Charter international, Méridien, etc. (25 % des
activités du groupe) à activité liée à l’aérien mais qui n’est pas directement reliée à
celui-ci
- Elaboration de nombreuses études dans les années 1980 à notion de synergie et de
cohérence stratégique ainsi que d’économies d’échelle (ex : on peut identifier les
périodes où les avions ne volent pas, et donc on peut procéder avec un voyagiste
pour rentabiliser la flotte aérienne)

On peut voir l’influence de l’Etat sur Air France avec le décret de 1955 sur
l’investissement des entreprises publiques passant par le FDES (Fond de développement
économique et social).

Après l’élection de 1981 :


- Obligation des entreprises publiques de « Plan avec l’Etat » : lutte pour l’emploi,
renforcement de la compétitivité de l’économie française
- Synchronisation du plan d’Air France avec le Plan national : Scénarios à 2 ans avec
l’INSEE et le Commissariat au Plan et négociation des orientations avec l’Etat – et
avec son représentant dans l’entreprise (le « Chef de la mission de contrôle »)

Avec la fusion avec Air Inter et UTA en 1990, on passe au plan à 2 ans, le plan à 5 ans
devient plus « qualitatif ». Chaque année, au premier semestre, il y a une mise à jour.

2) Exemple de Danone

C’est un groupe qui a l’essentiel de son activité dans le verre (pots). Antoine Ribout
va contribuer à réorienter complètement le groupe. Il tente la première OPA hostile, qui va
rater. Danone n’arrive pas à avoir une présence suffisante sur le marché du verre. Il va donc
commencer à faire des yaourts et devenir le leader que l’on connait aujourd’hui.
La réflexion sur la stratégie est la façon dont une entreprise peut complètement changer
en une décennie. Danone est passée du contenant (pot) au contenu (yaourt).

V. Les évolutions dans les « pensées stratégiques » ces dernières décennies

Comment peut-on penser la stratégie d’une entreprise à partir d’un certain nombre d’écoles ?

1) Ecole de la conception

Il faut regarder l’environnement, l’entreprise doit être en adéquation avec son


environnement pour que sa stratégie soit efficace.
- Evaluation externe : on en déduit des menaces et des opportunités qui viennent de
cet environnement à ainsi on peut déterminer les facteurs clés de succès
- Evaluation interne : on définit les forces et les faiblesses de l’organisation à elles
vont permettre de déterminer les qualités, les compétences distinctives de
l’entreprise

Les facteurs clés de succès et les compétences distinctives permettent la création et le


choix de stratégies, on va avoir la mise en œuvre de stratégies avec les valeurs managériales
et la responsabilité sociale.

2) Ecole de la planification

On quantifie et rationalise tout le processus stratégique, toutes les opérations.


Mais, il y a une décadence de la planification : illusion de la prédétermination (on pense que
les choses sont acquises alors qu’elles ne le sont pas), illusion du détachement (on pense
avoir suffisamment de distance avec la réalité, mais cela peut nous amener à nous tromper)
et illusion de la formalisation.

3) Ecole du positionnement

Il existe un nombre limité de stratégies (appelées positions). Le secteur d’activité joue


un rôle important dans la définition des stratégies de marché. La structure du marché dicte
le positionnement qui dicte la structure.
Le type d’ouverture que l’on va proposer va être différent de celui du concurrent.
L’entreprise est là pour répondre au marché.

4) Ecole entrepreneuriale (Schumpeter)

L’élaboration de la stratégie renvoie à un processus visionnaire, comme l’innovation.


Le succès repose sur le leader et sa vision stratégique.

5) Ecole cognitive

Pour expliquer l’élaboration de la stratégie, il faut comprendre la psychologie et la


manière de raisonner du (ou des) stratège(s). Le dirigeant ou stratège interprète le monde.
Ainsi, plusieurs mécanismes distordent le réel et induisent des biais dans les prises de
décision :
- Le raisonnement par analogie : plaquer une solution déjà étudiée sur la situation
actuelle (mais problème : deux situations ne sont jamais totalement similaires)
- L’illusion de maitrise : le dirigeant a l’impression de maitriser son environnement
- L’escalade dans l’engagement
- La focalisation sur un choix considéré unique : on voit une solution qui nous parait
bonne, de fait on exclue toutes les solutions

6) Ecole de l’apprentissage

Comment les stratégies se forment ?


Elles se forment progressivement tandis que les acteurs assimilent progressivement les
données sur leur environnement et leur entreprise. C’est un processus d’apprentissage et
de construction.
Incrémentalisme décousu (Lindblom) et incrémentalisme logique (Quinn).

7) Ecole du pouvoir

Logique inverse de l’école du positionnement. Il s’agit d’influencer la structure


sectorielle par un jeu de pouvoir (autre qu’économique) à contrôle de l’extérieur,
manœuvre stratégique, élaboration coopérative de la stratégie.
On voit l’importance par ailleurs du micro-pouvoir dans le façonnage de la structure interne
de l’entreprise.

8) Ecole de la culture

La stratégie est enracinée dans une force sociale : la culture de l’entreprise. Elle
mêle un ensemble d’individus à priori hétérogènes dans une entité intégrée et dont
transparait une identité.
La culture constitue une lentille qui distord la réalité. Elle entretient à ce titre une relation
étroite avec la stratégie :
- Style de prise de décision
- Résistance au changement à comment le surmonter
- Valeurs dominantes (innovation, qualité…)
- Choc culturel

9) Ecole de l’environnement

L’environnement est acteur principal dans l’élaboration de la stratégie (le stratège


est un leurre). Si l’entreprise ne s’adapte pas à son environnement, elle disparait.
L’entreprise doit faire face aux forces environnementales sinon elle est éliminée, fait faillite.
Les entreprises tendent à se positionner sur des niches écologiques.

Conclusion :
Du 19ème au 20ème on passe à un environnement très concurrentiel. On doit anticiper les
changements de l’environnement pour mettre en place une stratégie. Aujourd’hui les
dirigeant doivent plus veiller à la stratégie.
Au 19ème siècle, le dirigeant propriétaire est l’acteur le plus important dans l’entreprise, au
20ème on a un déplacement vers un dirigeant qui doit servir les actionnaires, il sort d’écoles
d’ingénieurs ou d’école de commerce.
Travail méthodologique :

En quoi Péchiney illustre l’évolution de la réflexion stratégique au XXème siècle ?

I. Contexte de la planification stratégique (début du 20ème siècle)

II. Arrivée des méthodes de planification stratégique des américains

Résistance française aux méthodes américaines

III. Impact des différentes vagues de stratégie sur la structure organisationnelle de


l’entreprise

Stratégie : élaborer un diagnostic interne/externe


Management stratégique : réfléchir à comment conduire la stratégie

EXPOSE :

La situation de départ : comment et dans quel contexte Guillaume Ternaux est-il devenu
dirigeant ?

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