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"Tu ne dois pas accumuler,

collectionner, classer, interpréter,


tout cela est démesuré. Émonde ce
que tu prétendais savoir. Jette la
totalité de ce qui est lourd de
signification. Sois un enfant
incertain, et cependant empli de
certitude ; un enfant faible, mais
jouissant d'une puissance inouïe".

Le bulletin est rédigé à l’intention des participants


du séminaire. Son contenu n’engage que les
auteurs. Il sert de carte pour s'orienter sur "les
terres jungiennes".

FONDATION LÊ QUANG
Penser Soigner Former

Le séminaire jungien
24 juin 2021
Les Figures de l'Ombre
ABSOUDRE LA MORALE

Ce quatrième bulletin va clore notre séminaire sur l'Ombre. Ronald


BUGGE rendra compte de l'ombre patriarcale de JUNG, qui pendant
longtemps a jeté un clair-obscur sur ses relations avec Sabina
SPIELREIN et Toni WOLFF, tour à tour - patientes, collaboratrices
et intimes qu'il imposait à son épouse Emma JUNG. Nous verrons
avec Duc LÊ QUANG comment se constelle le pouvoir dans la
relation d'aide, entre désir (libido) et pouvoir (licence). Il s'agira pour
le soignant de réussir à con-tenir les contraires (énantiodromie), c'est-
à-dire d'admette d'abord son potentiel destructeur pour être en
mesure de faire advenir la guérison ! Pour terminer, nous suivrons
François JULLIEN dans sa proposition d'une morale sans le mal -
dégagée de toute justice divine, en manipulant le négatif comme
potentiel générateur du vivant qui caractérise la pensée chinoise
(L'Ombre au tableau. Seuil, 2004).
L'empire des lumières. Magritte. 1953-1954
L'empire des Lumières de Magritte surprend par la coexistence du jour
Librement réinterprétée
et de la nuit. Mais c'est bien à partir de minuit que l'on compte les
heures du matin ! Et c'est à midi, au moment où l'ombre est la plus
Absoudre la morale 1 11 courte, que le démon (diable > diabolos > sépare) surprend les
hommes. Le jour et la nuit comme l'ombre et la lumière, tout en étant
L'ombre dans la relation d'aide 2 opposés, s'alternent dans leur cours, c'est ce que (dé)peint Magritte. Il
faut bien de l'ombre pour que la lumière soit perçue ! L'ombre au
L'ombre résumé et commentaires tableau - le mal, rehausse les couleurs du tableau de la Création : il
sur l'ombre de CG Jung 8
faut de tout pour faire un monde !

Pour insister sur la vision chinoise du négatif qui défait l'ombre, nous
avons librement fait tomber du ciel comme des gouttes de pluie (Cf.
Golconde Magritte 1953 ici) les idéogrammes du chap. 3 du TAO TE
KING qui parle du fameux "non-agir" chinois wu wei qu'il faut
traduire par dé-faire avant que "les jeux soient faits"! ./.

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Le séminaire jungien Jeudi 24 juin 2021

Pouvoir dans la 1. Pourquoi parler de pouvoir alors qu'il est question d'aide et
de soins. N'est-ce pas déplacé voire hors propos ?
2021
relation d'aide Pas du tout ! Aider nous replonge d'emblée, de manière prototypique,
dans ce qui fut jadis la relation à la fois consciente et inconsciente de
l'amour de la mère pour les besoins de l'enfant : take care. Par extension,
Duc LÊ QUANG toute relation asymétrique d'un individu qui désire-libido combler un
manque-à-être par faiblesse (malade), par immaturité (élève) ou par
carence (assisté) et qui quémande à une autre personne possédant le
pouvoir-licet de le lui donner, respectivement, le soignant, le maître,
l'assistant-social, relève de l'archétype du guérisseur-blessé.
b Suivons le schéma ci-contre : 2 pôles guérisseur-blessé se
distribuent inversement entre les plans conscient et inconscient
de l'aidant[A] [B] et du patient [a] [b]
a

(b > A) : "Je te désire car tu es ce dont j'ai besoin pour satisfaire mon manque-à-
être (incomplétude)"
(A > b) : "En effet, je peux prendre soin de toi …
Charles CHALVERAT 2000. La dynamique
(B > b) : … car je sais ce que être blessé signifie pour l'avoir vécu et surmonté
de l’archétype "guérisseur blessé" à l’œuvre
dans la pratique et la formation des jadis et en faire mon art…"
praticiens de l’aide. (A > a) : … duquel je vais créer les conditions pour le faire advenir chez toi…
PDF en ligne ici (a > b) : … afin que tu puisses toi aussi devenir ton propre guérisseur "

Si on laisser évoluer uniquement sur le plan conscient la relation (A


< > b), il se crée un rapport de dépendance. L'aidant se sent surinvesti
et risque de soigner sa propre part blessé (B) à travers (b) coupant ainsi
tout contact avec son propre inconscient blessé (A < > B). Il prive le
patient de développer sa propre capacité de guérir (a) et renforce son
immaturité. En rendant plus conscient le niveau inconscient, l'aidant
favorise l'activité inconsciente (a < > b) et développe un dialogue
d'inconscient à inconscient (B < > a) je sens qu'il sent ce que je ressens qui
participe à la guérison de sa part blessé (B) et renforce la capacité
guérisseur (a) du patient.

Répondre ou ne pas répondre au désir (libido) nécessite la maîtrise du


non, autrement c'est la confusion de langage (FERENZI 1933 :
Adolf GUGGENBUHL-CRAIG l'adulte tient un langage de passion sexualisée face à la demande de
Pouvoir et relation d'aide.
tendresse de l'enfant qui ne peut pas l'élaborer). La négation marque
Pierre Mardaga Ed. 1985
la naissance du moi autonome (3è formateur du moi entre 2 et 3 ans
SPITZ 1959). Elle relève de l'identification au non protecteur de la
mère. Elle est au départ un acte sécurisant et devient ensuite un moyen
d'individualisation. La nécessité, en particulier pour le soignant, de se
confronter à la destructivité a valeur initiatique (GUGGENBUHL
1985) : le non est à la fois maîtrise de soi et maîtrise de l'autre. Si je suis
capable de construire c'est parce que je suis capable de détruire ! Soumis aux
projections, le fantasme érotique est la manifestation d'un désir
(libido) qui reste bloqué au niveau sexuel (sensuel), s'il n'est pas amené
par le professionnel au plan de l'amitié (philia) et de l'alliance (agape).
L'archétype du guérisseur-blessé, comme tout archétype porte en lui à
travers le symbole, une intensité émotionnelle hautement réactive :
aimer-haïr ou sauver-détruire. Un excès du pouvoir "d'amener de la
lumière" (lux-ferre > Lucifer) engendre les figures de l'ombre comme
le faux prophète, le médecin charlatan ou l'assistant-social inquisiteur.

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2. Qu'est-ce que le syndrome du crochet ou du soignant ?

Un théâtre d'ombres, sous l'effet de la projection, se manifeste


fréquemment dans la relation d'aide entre idéalisation et diabolisation du
thérapeute. Idéaliser l'autre - en faire parfois même un héros, c'est
reconnaître en lui son pouvoir de combler un manque-à-être, une lacune
en moi (incomplétude). Et inversement, le diaboliser (diabolos : ce qui
Fig.1 désunit) revient à renforcer le clivage de la qualité des affects, bonne ou
mauvaise, que je lui attribue. Par exemple, si le patient a subi un abus
dans son enfance, la représentation d'objet interne d'un abuseur en lui
est désavouée et est projetée sur le thérapeute (Fig.1). En cours de
thérapie, le thérapeute peut commencer à sentir ou à se comporter
comme l'objet en devenant colérique, voire abusif avec le patient (Fig.
2). A d'autres moments, c'est le patient qui pourra être colérique et
Fig.2 vindicatif. Et c'est au tour du thérapeute de se sentir comme une
victime car il s'identifie à la représentation du moi victime du patient.
(GABBARD 2010). Tout l'art du thérapeute réside en sa capacité de
contenir le vécu pénible projeté, de métaboliser le mélange à la fois du
vécu du patient et du sien puis de le restituer à son patient dans une
forme qui lui sera plus digeste (Fig.3). On reconnaît là, le processus
alchimique propre au travail d'individuation décrit par Jung.
Fig.3
Au contact d'un patient, si le soignant ressent, de manière inhabituelle
: "Je ne suis pas moi-même" (anormalement indulgent, inhabituellement
colérique ou excessivement voyeur) alors il doit être particulièrement
attentif à l'effet "crochet", soit la présence latente d'un terrain en lui qui
fait qu'il a été poussé à l'action (= mise en acte du contre-transfert) par
la sollicitation du patient : vouloir le sauver, le séduire ou au contraire,
le détruire (GABBARD 2010) ! Le risque de la démesure (hubris)
identifie le soignant comme tout puissant (donc guetté par le
surmenage) et le patient comme éternel patient soumis (donc exigeant).
On reconnaît par-là, l'esquive du soignant de "rester en contact avec
ses fragilités, ses ombres et ses faiblesses", pris dans "l'illusion d'avoir
une fois pour toutes tout résolu". (CHALVERAT 2000).

Glen O. GABBARD. Elsevier 2010 3. Mais alors qu'est-ce qui guérit en définitive ?

L'image est parlante : Ambroise Paré chirurgien du Roi, célèbre


médecin sur les champs de bataille, soigne. La relation est asymétrique -
polarisée. Le médecin -le soignant, assis, élégamment vêtu, tenant un
carnet et une plume - le savoir, inspecte. Et un soldat - le soigné, blessé,
couché, en partie dévêtu, portant bandage à la tête, se laisse examiner.
A droite, un aide-soignant, affairé à sortir remèdes et bandages d'un
coffret de pharmacie. A gauche, casque et hallebarde sont déposés à
terre. Dans le dos du médecin (son ombre), un officier probablement
(car bien vêtu), debout mais amputé d'une main et s'appuyant sur une
canne de son bras encore valide. Dans le fond de la salle (dans le
Ambroise PARÉ soignant des soldats
pénombre), du côté du soldat, un autre blessé pensif semble s'assoupir.
blessés. Edouard Jean Conrad HAMMAN Le fusil posé contre le poteau paraît veiller sur les soldats blessés. A
19è. Pain et vin (le corps et le sang du Christ) l'avant-plan, une assiette contenant un morceau de pain fait écho à la
sont les indices de la Providence : "Je le barrique de vin, séparée par le coffret de pharmacie. La scène se déroule
pansai, Dieu le guérit." à l'intérieur, à l'abri du champ de bataille. Une lanterne, accrochée au-
dessus du malade, éclaire faiblement comme un signe d'espoir.

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Le séminaire jungien Jeudi 24 juin 2021

Metz, hiver 1552, l’armée française est assiégée par l’armée de Charles 2021
Quint. On souffrait famine, l’aide de camp d’un capitaine cherche
pitance auprès des paysans qui en retour lui percèrent de douze coups
d’épée. Son capitaine s’apprêtait à jeter le corps dans une fosse mais
Ambroise Paré (1510-1590), chirurgien du roi, voulut qu’on lui confît le
blessé, persuadé qu’il pouvait le sauver. Il écrit « Je lui fis office de médecin,
d’apothicaire, de chirurgien et de cuisinier : je le pansai jusqu’à la fin de la cure, et
dieu le guérit ». Tout comme dans une fracture, écrit DOLGHIN (Les
saisons de l'âme 2009), ce n’est pas le médecin mais l’os, la force vitale
du sujet, dont le médecin réussit à mobiliser l’action bénéfique. Comme
un chirurgien débridant une plaie, le psychothérapeute décante le
trauma, créant ainsi les conditions de guérison : la cicatrisation se
déroulera d’elle-même !

Ce que montre l'image en creux c'est la destructivité (du mal, du négatif)


comme ombre portée initiatique de toute relation qui soigne. Le
potentiel de guérir du soignant passe par sa capacité à se rétablir de sa
propre blessure. Tout comme Chiron de la mythologie grecque, le
centaure doué de pouvoir de guérison, précepteur d'Esculape - père de
la médecine (arraché du ventre de sa mère par un coup d'épée porté par
son père Apollon, punissant l'adultère de son épouse !), ne se remit
jamais d'une blessure au genou causée par une flèche tirée
accidentellement par Hercule. En gardant contact avec sa blessure
refoulée, le soignant peut s'identifier par empathie à la part-blessé du
malade pour le soigner, en toute conscience. Toutefois, il doit se
préserver de l'inflation du sentiment de toute-puissance (hubris) induit
par identification projective de la part-guérisseur refoulée du malade,
Marie-Claire DOLGHIN. qui se coupe ainsi de toute possibilité d'activer les facteurs de guérison
Les saisons de l'âme. Dervy, 2009.
qu'il porte en lui (Cf. 2).

Que l'on ne s'y méprenne, le dieu qui guérit en question n'est Providence que
- 1° si soignant et malade prêtent une attention suffisamment religieuse
(dans le sens ancien d’une attention scrupuleuse, d’attitude privilégiant
la conscience - relegere et religio, et non pas au sens religare, repris par
les Pères de l’Église dans cette autre acception qui a prévalu et qui met
l’accent sur le lien avec la divinité) - 2° pour accueillir de manière
créative un troisième terme (rêve, vision, symbole, événement), un tiers-
inclus qui permet de transcender une situation de polarisation des
opposés a priori insurmontable : "L'événement inattendu qui retourne la
situation ou qui la place sur un autre plan" (CHALVERAT 2000). Il n'est
plus question dès lors d'une simple relation d'influence de l'aidant
envers l'aidé mais d'une transformation réciproque des protagonistes
par activation de la fonction transcendante en chacun.

La fonction transcendante, selon Jung, est un


processus de mise en relation du conscient et de
l'inconscient conçus comme des opposés. Jung a
appelé cette fonction transcendante car c'est "une
fonction psychologique pouvant à sa façon être
comparée à une fonction mathématique du
même nom et qui est une fonction des nombres
imaginaires et réels". (Dictionnaire Jung)

4
encouragements dont il avait tant besoin

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4. Comment se repérer et se comporter dans le transfert de la
relation d'aide ?

Toute relation humaine qu'elle soit amoureuse, amicale, professionnelle


ou thérapeutique se construit sur un même schéma de projection à partir
de la triade père-mère-enfant : la libido de parenté (DOLGHIN 2015).
(Fig.1 Triangle bleu et jaune). Libido car l'autre moi-même figure le désir
de mon manque-à-être (incomplétude) et parenté car chacun fut jadis
Fig. 1 La triade père-mère-enfant organise la un enfant.
libido de parenté. Animus/anima sont les
représentations inconscientes chargées de Le père est la figure de l'autre qui va permettre à l'enfant de se
sens (archétypes) des figures du père (ou fils différencier de la (con)fusion maternante comme tiers-séparateur. Il est
rajeuni) et de la mère (ou fille rajeunie)
appelées aussi imagos. une figure de rivalité sexuelle pour le petit garçon (complexe de
castration). Il est une figure d'attachement sexué pour la petite fille
(complexe d'abandon). Ainsi se crée un sentiment de proximité illusoire
par la projection sur l'autre de cette passion (emprise) qui anime chacun
mais fondée sur une (m)éprise : le transfert.

Le dispositif est thérapeutique dans la mesure où il démultiplie la figure


du soignant comme projection de la figure du père, de la mère et de
l'enfant permettant au soigné de réenvisager sa relation à l'autre comme
image en miroir de sa relation à lui-même. L'âme en peine, le soigné
cherche de l'amour à travers celui qui consolera son âme "non comme
un technicien de l'amour du prochain" (GUGGENBUHL 1985) mais
comme un individu véritablement humain c'est-à-dire faillible.

Les images père-mère-enfant chargées d'affects se transfigurent de


manière métaphorique et archétypique dans l'espace de symbolisation
qu'est le lieu de la consultation. Si le soignant répond à cette demande
de manière symbolique et non littérale (mise en acte) alors il se produira
une véritable communion des âmes (PINTEROVIC 2004). C'est ce
qu'illustre Le Rosaire des philosophes par ses images hautement
Fig.2 Image extraite du Rosaire des symboliques et non impudiques du coït du Roi et de la Reine. "En les
philosophes (traité alchimique publié en
1550 dont JUNG met en parallèle avec les
transfigurant par l'esprit, les passages les plus osés du Cantique des
phases de la cure thérapeutique). La Cantiques…, l'union au niveau biologique représente l'union des
communion des âmes du Roi et de la Reine opposés au sens le plus élevé (JUNG). (Fig.2)
passe par la ligne du cœur : leur main à main
gauche. Les 2 triangles de la Fig. 1 font un 5. Comment saisir de manière intuitive et profane ces notions
parallèle avec la triade de parenté.
curative vs destructive de la relation d'aide ?
> Antoine PINTEROVIC. Deux symboles hautement significatifs, la Croix-Rouge et le Svastika,
Le transfert 2004 PDF en ligne ici
vont nous aider à mettre en lumière la conjonction des opposés
(énantiodromie), la dynamique et l'énergétique de la cure (l'émotion que
suscite tout symbole - émouvoir) et la nécessité pour le soignant de
réguler la différence de potentiel entre les pôles contraires (comme un
générateur) soit se muer en véritable trans-formateur physiologique pour
son prochain !

Identifiable par tous comme emblème de la protection, la Croix-Rouge


génère une dynamique vivante des contraires en son sein. Du point de
vue symbolique, la couleur rouge de sang ou de feu est à l'image de la
vie et de la chaleur qui anime le vivant et qui se retire lors de sa mort.
Marie-Claire DOLGHIN.
Les concepts jungiens. Entrelacs 2015.
La couleur blanche est partielle dans le croissant rouge qui préfigure sa
forme pleine lunaire. ./.
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Le séminaire jungien Jeudi 24 juin 2021
Le blanc est par contre bien visible au centre du cristal rouge comme la
2021
somme de toutes les couleurs de la lumière ou de sa totale soustraction
: du trou noir jusqu'à l'espace vide transparent disponible pour toute
inscription. La forme de la croix identifiable comme signe de mort et de
résurrection du Christ mais aussi comme la croisée des chemins dans les
La Croix-Rouge (1863). Le Cristal-Rouge quatre directions ou une totalité à forme humaine. La forme du croissant
(2005). Le Croissant-Rouge (1929).
insiste sur le temps cosmique cyclique, celle de la lune dans son rapport
de décroissance avec le soleil, qui règle le temps fini terrestre des
hommes. Sa résorption est plus manifeste sous la forme de la faucille de
la mort mais marque aussi la promesse d'un commencement, là où il y
a une fin. La forme cristal, un cadre carré fait de deux chevrons rouges
fait écho à la croix qui dessine sa structure. Elle délimite un espace
précis, entrouvert dans le croissant et totalement absent dans la croix
dont le centre est commun aux trois figures.

Signe de protection inconditionnel, l'emblème de la Croix-Rouge est né


dans le sang des guerres : historiquement la bataille de Solferino (1859)
puis celle de l'empire Ottoman avec la Russie (1876) qui impose le
Croissant Rouge pour forclore l'image des Croisades. Depuis 2005, le
Cristal Rouge se veut neutre de toute connotation religieuse, politique
ou culturelle. Il permet à l'organisation humanitaire israélienne MDA
(Magen David Adom) de secourir à l'étranger sans afficher l'étoile de
David. Cette neutralité apparaît en rémanence lorsque les yeux fermés
perçoivent, après avoir fixé intensément la croix rouge, la croix blanche
helvétique. Cette impartialité reste cependant bien une illusion optique
Monument commémoratif du symbolique qui interprète l'imaginaire, comme dans le bouquet inversé
Charlotte Germann-Jahn de Lacan : ce que je crois être "moi" n'est qu'une collection d'images
HEIDEN /Appenzell auxquelles je m'identifie. C'est pourquoi l'emblème de la Croix-Rouge a
suscité tant de controverse depuis plus de cent ans, pris dans le réseau
> Une histoire des symboles de la Croix-
Rouge ici des signifiants.
> Schéma du bouquet inversé PDF en
ligne ici La puissance archétypale qui se dégage de l'emblème bouddhique ou
nazi est fascinante. Le SVASTIKA qui signifie en sanskrit "bonne (su)
existence (asti)" ou en chinois 卐 (wan) "dix mille/éternel" identifie le
Bouddha. Il s'agit cependant d'un symbole universel présent dans toutes
les cultures et les périodes de l'histoire y.c. au néolithique. Il rappelle le
mouvement cosmique tournoyant par ses quatre branches vers la
gauche (bouddhisme) ou la droite (inde, nazi) autour d'un centre
immobile qui peut être assimilé au moi mais vu selon les pôles d'un axe
Le Svastika, une croix pointée dans les céleste-humain. Le svastika est une figure hautement symbolique d'une
quatre directions qui tourne. Le sens gauche régénération perpétuelle qui accompagne l'image des sauveurs de
ou droit devient secondaire si l'on considère l'humanité comme le Christ ou Bouddha. Hitler a dérivé la notion de
1° que le centre est immobile assimilable au
moi stable et 2° que la rotation (du monde) classe noble (de cœur) de la société hindoue sacrée (arya en sanskrit)
est vue d'un point de vue axial selon deux pour prôner l'idéologie raciste aryenne. Aujourd'hui, l'affichage de la
pôles, céleste ou humaine. (Dictionnaire des croix gammée nazie (gamma grec Γ ) reste la plupart du temps
symboles. Jean CHEVALIER et Alain condamnable quel que soit les lieux car elle est la figure du Mal absolu :
GHEERBRANT. Laffont 1990 11è éd.). l'ombre du Soi.
Mort et renaissance, yin-yang, positif-négatif, systole-diastole, ombre-lumière évoquent tour à tour la même
tension dynamique des contraires : l'énantiodromie. C'est la capacité de maintenir dynamique (vivant) l'écart entre
les contraires, con-tenir (tenir ensemble) les opposées qui permet de trouver une co-hérence (adhérer
ensemble) soit donner du sens à ce qui nous dépasse humainement dans l'épreuve. Telle est la leçon des
symboles de la Croix-Rouge et du Svastika dans l'Histoire des sauveurs.

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encouragements dont il avait tant besoin

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6. En quoi la "course en sens contraire" (énantiodromie) permettrait


d'absoudre la morale, en particulier dissoudre le mal - surtout le mal
absolu, s'il existe vraiment ? (réponse retravaillée à partir de l'Ombre au
tableau F. JULLIEN 2004)

L'ombre du mal qui serait une privatio boni (absence du bien) se pose
comme une incomplétude et suscite du désir et de la tentation par son
manque-à-être. Dans l'Occident chrétien, le mal relève d'une justice
divine (théodicée) qui se pose en dualité s'excluant mutuellement : bien
ou mal. Le mal est transgression dont le jugement premier a exclu Adam
et Eve du Paradis. Pour retrouver la Lumière, l'âme doit son Salut à
Le symbole du TAIJI ou YIN-YANG l'effort à fournir pour expier la faute commise et à se garder du mal : ne
librement placé en lieu de la croix solaire nous induit pas en tentation nous rappelle la prière Notre Père.
dans cette reproduction de Jung (N°125 du
Livre Rouge 2011) insiste sur les forces en
tension qui animent le vivant. Cependant à y regarder de près : vouloir à tout prix le bien, c'est déjà
une inclination douteuse basculant du côté du mal ! Que manque-t-il
donc au bien pour qu'il soit bien ? Si ce n'est ce mal qui le sert si bien
… Le bien a besoin de son opposé, d'être inquiété dans la plénitude
Le symbole doit être regardé en vue axial (complétude) du tout positif pour sortir de son ineffectivité. Le bien se
stable (et non tournoyant) : les points découvre insuffisant à l'égard de lui-même. L'inégalité de soi avec soi
grandissent jusqu'au retournement. Il est porte le soi à se dépasser et l'élève en sujet. Car en se niant lui-même (qu'il lui
comparable au systole et diastole qui manquerait quelque chose pour être complet), au lieu seulement de
animent le remplissage les quatre cavités du
cœur. s'opposer (extérieurement et secondairement) à l'autre (le négatif est
projeté dans cet autre conscience), celui-ci se trouve enfin pensé dans
Enantiodromie : " Littéralement, course en son développement, à la fois dans sa concrétude et dans son intégralité
sens contraire; [cette notion] exprime - à quoi il accède à la conscience de manière dialectique (HEGEL). On
l'antagonisme du devenir, l'idée que tout ce reconnaît là les mécanismes de l'identification projective (Cf. 2).
qui est se transforme en sens contraire. […]
J'appelle énantiodromie l'apparition en la
contreposition inconsciente, notamment A l'opposition duelle, figée, déterministe des contraires (où s'exhausse
dans le déroulement temporel. Ce un "en-soi quant à soi" hors de la variation alternée des phénomènes :
phénomène caractéristique se produit le sujet - l'Être de l'ontologie du monde grec), François JULLIEN
presque toujours lorsqu'une tendance propose la résorption des contraires dans la continuité et le
extrêmement unilatérale domine la vie
consciente, de sorte que peu à peu il se renouvellement sans fin, à partir du dispositif de régulation du monde
constitue une attitude opposée tout aussi chinois Ciel-Terre (où le sujet épouse le cours viable - par où ça passe,
stable dans l'inconscient. […] La le fonctionnement du monde - Tao). Ainsi la hiérarchisation morale est
psychologie de saint Paul et sa conversion interne au procès naturel : en haut l'expansion du yang, en bas la
au christianisme est un bon exemple condensation du yin. En haut le prince, en bas le peuple tout comme
d'énantiodromie". (Dictionnaire Jung)
raison et passion. Aucun des deux n'est à exclure, ni l'un plus important
François JULLIEN. que l'autre même hiérarchisé : le plus de valeur et le moins de valeur
L'ombre au tableau. contribuent également au cours du procès. Le négatif coopère, tout
Du mal ou du comme les scieurs de bois : l'un tire, l'autre pousse. Le sens du négatif
négatif. Seuil. 2004
vient de sa co-hérence : prendre ensemble les opposés à la fois comme
unité et identité contraire : vie/mort, bien/mal, l'il-y-a/l'il-n'y-a-pas,
systole/diastole, inspiration/expiration s'engendrent mutuellement et se
font advenir l'un par l'autre. Au salut prôné par la sainteté, le sage
chinois s'enquiert des règles d'accord qui font que le monde - ce monde
est justement composé comme il est. Le mal est ainsi déviation, l'écart du
Avec CG JUNG, François JULLIEN pivot permettant, à partir du centre du cercle, de se tourner aussi bien
(1951), philosophe, helléniste et sinologue
inspire les travaux de notre fondation. Ses de l'un que de l'autre côté de rester ainsi également, et donc inépuisable,
concepts à partir de l'écart du monde ouvert aux deux. Le négatif vraiment négatif ou le mal absolu serait alors
chinois, l'autre pôle de l'expérience la paralysie ou la fixation : la non communication intérieure (préférer la
humaine, obligent de retravailler les souffrance à la guérison dans la compulsion de répétition p.ex) ou la
catégories européennes prises dans l'impensé clôture à tout l'émoi du monde (être étanche, ne plus réagir à
du monde grec.
l'intolérable qui arrive aux autres - les camps de concentration p.ex.)
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Le séminaire jungien Jeudi 24 juin 2021

L'ombre selon 1. L’ombre est la contrepartie naturelle de tout développement 2021


: on ne
choisit pas d’avoir ou de ne pas avoir une ombre psychologique. Nous
l'approche distinguons l’ombre personnelle de l’ombre collective. Seule la
première peut être intégrée et seulement jusqu’à un certain point.
jungienne 2. L’idée jungienne est celle d’une prise de conscience progressive,
Un résumé et quelques soit d’une reconnaissance de l’existence d’une ombre personnelle. Ce
commentaires sur l'ombre de processus prend souvent la forme d’une épreuve morale car l’ombre
CG. JUNG représente ce qui est inférieur, inadapté et moralement condamnable,
ou considéré comme tel. Pour confronter l’ombre, un certain courage
Ronald BUGGE est nécessaire ainsi qu’un moi (ego) assez solide pour supporter la
critique et les sentiments négatifs.

3. L’ombre personnelle est constituée d’un conglomérat d’aspects


entremêlés, aspects plus ou moins honteux mais non pas tous et
toujours négatifs.

4. Le travail sur l’ombre commence par l’acceptation de l’épreuve qui


se présente, par le tri des éléments rencontrés et par une certaine
humilité dans le sens de "toucher notre terre intérieure"
(humilité…humus). Il s’agit d’instaurer un dialogue entre le moi et
l’ombre pour que celle-ci perde de son autonomie et de sa capacité de
nuisance psychologique - c’est cela l’intégration de l’ombre. Dans ce
travail, nous prenons conscience de nos projections et nous nous
exerçons à "décoller" celles-ci de leurs objets.
Une "danse-dialogue" souvent malaisée,
accompagnée de tensions, et qui peut se 5. Le refoulement de l’ombre – "vendre son ombre au diable" - est à
détériorer en un combat déclaré mais qui double tranchant car, tôt ou tard, le refoulé va faire retour. Être amputé
peut également apporter une nouvelle
de son ombre signifie souvent un appauvrissement de la personnalité
énergie, un surplus de vie.
Source : R. ROBERTSON. Guide de Psychologie car l’ombre contient des dynamismes et une partie de notre vitalité
jungienne. Georg. Genève, 1994 enfouie.

Pour réduire notre parti pris sur l'ombre de Jung, nous avons choisi
deux extraits du TEMPS publiés en 2011 par Anna LIETTI qui discute
sur la tendance polygame de Jung. Figurent également deux extraits des
correspondances de Jung, comment il a découvert l'ombre à ses dépens,
issus de l'article "L'œuvre de Jung : ombre et clarté" de Jef DEHING
paru en 2007 dans Les Cahiers jungiens de psychanalyse.
PDF en ligne ici

Le Temps Week-End 24-25.09.2011 Pour approfondir : Kaj NOCHIS, CG JUNG Vie et psychologie dans
Anna LIETTI la collection Le savoir suisse 2004 et Nadia NARI Les femmes autour
de Jung édité par Les cahiers jungiens de psychanalyse 2002.
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encouragements dont il avait tant besoin

Le séminaire jungien Jeudi 24 juin 2021

L'ombre du patriarche Sabina et les autres

Le fait est que le côté "ombre" de La tempête émotionnelle sévit aussi sur le plan amoureux. Jung a
Jung, indispensable à la épousé une femme formidable, pleine de charme et d’intelligence, qu’il
compréhension de son œuvre, a aime sincèrement. Mais il semble que, sa vie durant, le charismatique
longtemps été tenu dans l’ombre. médecin des âmes ait eu la plus grande difficulté à se contenter de la
Ou plutôt, "mis en avant par ses seule Emma. D’abord, dans la première étape de sa carrière au
seuls détracteurs", comme le déplore Burghölzli, l’hôpital psychiatrique de Zurich, il y a eu Sabina Spielrein,
le psychothérapeute lausannois Kaj une jeune étudiante russe en médecine, libre et passionnée, qu’il a
Noschis, auteur d’une biographie du d’abord soignée, puis prise comme collaboratrice, puis aimée. Avant
maître dans la collection Le savoir d’opter pour la paix des ménages, en endossant le rôle de l’innocent
suisse. Les adeptes de Jung, au docteur persécuté par une patiente amoureuse. De tous les épisodes
premier rang desquels ses héritiers, de la vie de Jung, c’est l’un des moins glorieux. Il implique aussi
se sont fait les gardiens d’une Sigmund Freud, vers lequel Sabina s’est tournée dans son désarroi.
biographie édulcorée, expurgée de Nombre d’experts l’admettent aujourd’hui : les deux grands hommes
"pans entiers" de sa trajectoire. La se sont comportés comme des mufles avec Sabina Spielrein. Et pas
fabrication de l’histoire officielle, seulement à cause de la confusion entretenue entre relations privées
note Kaj Noschis, a commencé du et professionnelles : au temps des pionniers, il était considéré comme
vivant de Jung: à la fin de sa vie, ce normal d’analyser sa femme (Jung) ou sa fille (Freud), puis de les
dernier était prêt à se raconter de adouber analystes à leur tour. Ce qui est reproché aux fondateurs de
manière "explicite", et notamment à la psychanalyse, c’est un manque de respect dont ils n’auraient pas fait
parler du rôle décisif joué, dans preuve vis-à-vis d’un homme.
l’élaboration de sa théorie, par Toni
Wolff, ex-patiente devenue une "Regardez toutes ces femmes qui s’ouvrent comme des fleurs autour
sorte de deuxième épouse de facto . de lui", aurait lâché Emma Jung à un congrès (selon Deirdre Bair). Le
Ses anges gardiens ne l’ont pas laissé fait est que, dès son premier cours à l’Université de Zurich, le
faire; lui-même parlait ironiquement fondateur de la psychologie analytique s’est découvert une aura
du processus de "tantification" de proprement magnétisante pour le sexe féminin. Réciproquement, les
ses Mémoires ( Ma Vie , publié après femmes ont occupé une place centrale dans son univers. Comme
sa mort en 1961), réduits à l’édifiante amantes parfois, mais aussi et surtout comme inspiratrices et
histoire qu’une tante peut sans éclaireuses privilégiées du cosmos intérieur. Sur ce terrain plus que
rougir raconter à son neveu… jamais, la vie et l’œuvre de Jung s’entremêlent.

A ce même congrès, Emma aurait ajouté, en désignant Toni Wolff:


"Elle, elle a obtenu ce que toutes voulaient avoir." S’il ne s’agissait que
des faveurs sexuelles du mâle dominant, la blessure d’Emma ne serait
pas si profonde. Outre la passion amoureuse, il y a eu, entre Jung et
son ex-patiente, une profonde communion des âmes. La notion
d’"anima", la figure féminine guidant l’homme dans les méandres de
son inconscient, doit beaucoup à Toni Wolff. Durant la période
houleuse de rédaction du Livre rouge, pendant qu’Emma est occupée à
tenir la maisonnée, c’est surtout elle qui est là, au deuxième étage,
accompagnant le psychiatre dans ses débordements pulsionnels et
imaginaires.

Lorsqu’elle rencontre Jung, en 1910, Toni Wolff est une Zurichoise


de 22 ans bien née, passionnée de mythologie, de religions comparées
et de philosophie, en pleine dépression après la mort de son père. Jung
vient de quitter le Burghölzli pour se consacrer à sa florissante clientèle
privée. Le déclic thérapeutique se produit lorsqu’il compare la douleur
de Toni à divers épisodes de la mythologie grecque. C’est le début
d’une complicité intellectuelle qui durera 30 ans. Le jour de la mort de
Toni, en 1953, c’est Emma qui sert thé et gâteaux aux visiteurs qui
affluent à Küsnacht. ./.
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Le séminaire jungien Jeudi 24 juin 2021

./. Avec les années, les relations entre les deux femmes, devenues
2021
elles-mêmes analystes, ont fini par s’apaiser. Mais la souffrance qu’elles
ont endurée n’en est pas moins réelle. L’une dans son personnage de
"grande dame sereine" qui reste aux côtés du maître malgré ses
faiblesses. L’autre dans celui d’une "tante Toni" vouée au célibat et
houspillée par les enfants du psychiatre.

Alors, le formidable docteur Jung n’était-il finalement, dans la vraie


vie, qu’un mâle chauviniste rétrograde ? Pas si simple, bien sûr. "Il a
eu indubitablement une manière très patriarcale de régler les situations
délicates, juge Kaj Noschis, et la psychologie jungienne doit se
distancer clairement des pratiques abusives qu’il a pu avoir. Mais il ne
faut pas oublier qu’il a également permis à un grand nombre de
femmes remarquables de s’épanouir et de s’affirmer." Parmi elles,
Esther Harding, figure tutélaire du mouvement féministe américain et
fondatrice de l’Institut Jung à New York.

C. G. Jung, "Lettre au Dr Theodor Bovet, "[...] Je n’aurais probablement guère été en mesure de formuler le concept d’ombre,
du 9 novembre 1955", Correspondance 1955- si l’existence de l’ombre n’avait été une expérience majeure de ma vie, faite non
1957, Paris, Albin Michel, 1995, p. 101-102. seulement sur les autres mais aussi sur moi-même. [...] Mon ombre est, de fait,
tellement grande, qu’il m’était impossible de ne pas en tenir compte dans mon projet
d’existence, et que je devais même la considérer comme une partie essentielle de ma
personnalité, tirer de cette vérité reconnue les conséquences et en assumer la
responsabilité. J’ai dû reconnaître, à travers beaucoup d’expériences amères, que le
péché que l’on a ou que l’on est, on peut le regretter, certes, mais non le supprimer.
Je ne crois pas au tigre qui s’est converti une fois pour toutes au végétarisme et ne
mange plus que des pommes. Ma consolation a toujours été Paul qui ne tenait pas
pour en dessous de sa dignité d’avouer qu’il portait une écharde dans sa chair. Mon
péché est devenu pour moi ma tâche la plus chère. Je ne m’en décharge sur personne
pour ensuite me prendre pour un sauveur qui sait toujours ce qui est bon pour
autrui."

S. Freud, C. G. Jung, "Lettre à Freud, no 133 "[...] Mes intentions ont toujours été pures. Mais vous savez bien que le diable
J, 1909", Correspondance I, 1906-1909, éditée peut employer les meilleures choses pour produire de la boue. J’ai appris un nombre
par les soins de W. McGuire, Paris,
Gallimard, 1975, p. 283. indicible de choses, à cette occasion, en philosophie de la vie conjugale. Malgré toute
l’auto-analyse, j’avais en effet, auparavant, de mes composantes polygames une
connaissance tout à fait inadéquate. Maintenant je sais où et comment on saisit le
diable. Ces prises de conscience douloureuses et cependant hautement salutaires
m’ont par-là précisément, je l’espère, assuré des qualités morales dont la possession
me sera d’un grand avantage dans ma vie future. Ma relation avec ma femme y a
beaucoup gagné en assurance et en profondeur."

Bas les masques ! Participants du séminaire


Hôtel Alpes et Lacs. Neuchâtel. 24.06.2021

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encouragements dont il avait tant besoin

Le
Leséminaire
séminairejungien
jungien Jeudi 24 juin 2021
PROGRAMME
Jeudi 22 avril 2021
Exposé (Bugge): La persona et l’ombre selon l’approche de C.G. Jung
Éléments de définition - exemples, figures et illustrations
Atelier (Bugge): Découvrir son ombre personnel

Jeudi 6 mai 2021


Exposé (Bugge): Dans le "théâtre de l'âme" avec Edvard Munch
Lumière et ombres - ombre et (auto-)destruction - vie et mort
Atelier (Lê Quang) : Amplification de l'ombre
à partir des œuvres de l'exposition Ombres 2019 Fdt. de l'Hermitage

Jeudi 10 juin 2021


Exposé (Lê Quang): Deux contes
L'homme sans ombre de Chamisso et l'Ombre d'Andersen
Atelier (Lê Quang): Commedia dell'arte

Jeudi 24 juin 2021


Exposé (Bugge): Résumé sur l'ombre et commentaires sur l'ombre de Jung
Exposé (Lê Quang): L'ombre dans la relation d'aide

Les figures de l'Ombre

Le séminaire ./. ABSOUDRE LA MORALE


Par opposition au sujet ontologique (Europe), comment penser la
conduite du sujet processif (Chine) qui se passe du mal pour juger ?
jungien Il faut rester branché "en phase" sur l'émoi du monde et maintenir
circulante en soi la vitalité. Autrement dit, le Je est passage/passager par
Fondation LÊ QUANG où de la vie continue de se pro-mouvoir sans s'enliser par l'ouverture
A la découverte de l'Asie en nous continue à l'autre.
Rue du Marais 46
2300 La Chaux-de-Fonds
Le laid - c'est moche* ! (l'ombre au tableau) relève ce qui fait tache dans
Suisse
la situation : il s'agit d'un jugement esthétique (qui promeut l'humanité)
qui ne juge l'écart que par rapport à la circonstance, à la situation, à la
composition (du tableau). Tandis que le mal condamne, le laid que
décèle un regard critique laisse analyser de lui-même pourquoi il y a eu ici
faiblesse et, par suite, comment la reprendre (comme on reprend une
phrase, un tableau) et avec soin la corriger.

L'abject - c'est à vomir* ! se fonde sur un refus a priori ce qui met en


péril l'humanité, la dignité commune. Tout comme l'abréaction qui
permet de se décharger de l'excès de peine en l'absence de toute
possibilité d'élaboration. Il s'agit d'une réaction immédiate (ce qui me
révulse) face à l'intolérable : le verdict a été prononcé et le rejet est déjà
accompli.

Le douloureux - c'est atroce* ! (ater=noir) promeut la conscience : la


Duc LÊ QUANG est psychiatre et psychothérapeute doléance déploie l'humanité. C'est un émoi par quoi le sujet participe à
FMH. Ses travaux retravaillent les catégories de la
santé mentale dans la pensée européenne à partir de la la vie. Mais il faut com-prendre, c'est-à-dire prendre l'un "avec" l'autre. A
pensée chinoise classique. la fois je perçois la mort impliquée dans le travail de la vie et donc
Ronald BUGGE est psychanalyste SSPA/IAAP, inséparable d'elle - donc je me débarrasse des récriminations comme des
diplômé de l’Institut CG Jung-Zurich et responsable
de l’Antenne Romande (Lausanne) du même Institut. supplications, et je fais passage en moi à l'émoi de la perte. Je rejette la
plainte mais je garde la peine. Le deuil est à porter : c'est le travail, dans la
douleur, du négatif. * notre propre interprétation

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