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Patrick Poucheret
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Chez le même éditeur
Conseils à l’officine. Le pharmacien prescripteur, par J.-P. Belon, 8e édition,
2016, 552 pages.
Botanique. Les familles de plantes, par J.-L. Guignard, F. Dupont, 16e édition,
collection « Abrégés de Pharmacie », 2015, 208 pages.
La médication officinale, par R. Caquet, collection « Abrégés de Pharmacie »,
2012, 216 pages.
Pharmacie clinique et thérapeutique, par l’Association nationale des
enseignants de pharmacie clinique, 4e édition, 2012, 1336 pages.
Femme enceinte : conseils en officine, par C. Mautrait, collection « Abrégés
de Pharmacie », 2008, 96 pages.
Initiation à la connaissance du médicament, par J.-M. Aiache, E. Beyssac,
J.-M. Cardot, V. Hoffart, R. Renoux, 5e édition, 2008, 440 pages.
Pharmacologie, par Y. Cohen, C. Jacquot, 6e édition, collection « Abrégés
de Pharmacie », 2008, 512 pages.
Chimie organique, par H. Galons, 3e édition, collection « Abrégés PCEM 1 »,
2007, 336 pages.
Chimie analytique. Chimie des solutions, par M. Beljean-Leymarie,
J.-P. Dubost, M. Galliot-Guilley, collection « Abrégés PCEM 1 »,
2006, 176 pages.
Abrégés
Pharmacologie à l’officine
Pour la délivrance éclairée de l’ordonnance
Patrick Poucheret
Faculté de Pharmacie Université de Montpellier
Jean Costentin
Faculté de Médecine-Pharmacie Université de Rouen
2e édition
Ce logo a pour objet d’alerter le lecteur sur la menace que
représente pour l’avenir de l’écrit, tout particulièrement dans
le domaine universitaire, le développement massif du « photo-
copillage ». Cette pratique qui s’est généralisée, notamment
dans les établissements d’enseignement, provoque une baisse
brutale des achats de livres, au point que la possibilité même
pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire
éditer correctement est aujourd’hui menacée.
Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans
autorisation, ainsi que le recel, sont passibles de poursuites. Les
demandes d’autorisation de photocopier doivent être adres-
sées à l’éditeur ou au Centre français d’exploitation du droit
de copie : 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. Tél. 01
44 07 47 70.
donne, hors tout, un recul de 3 ans sur les médicaments consommés et/
ou détenus par le patient. Associé à des dispositifs informatiques d’alerte
permettant de détecter des interactions potentielles entre principes actifs,
cet outil professionnel officinal permet de sécuriser la dispensation des
médicaments au bénéfice de la santé des patients. Sachant que de telles
interactions seraient à l’origine de 13 000 décès et de près de 150 000 hos-
pitalisations chaque année, on voit qu’il ne s’agit pas d’un « gadget » mais
d’un appui à l’indispensable précepte « primum non nocere ». Ce Dossier
pharmaceutique a vocation également à enrichir le dossier médical person-
nel (DMP) dont se dotent les médecins.
Plus prosaïquement, des modifications économiques profondes se des-
sinent. Le coût de la santé est de plus en plus élevé, eu égard au vieillis-
sement de la population, à ses exigences en matière de qualité de vie, au
prix très élevé de certains médicaments issus en particulier des biothéra-
pies, aux contraintes de sécurité qui alourdissent les coûts de développe-
ment des nouveaux médicaments, à la multiplication des investigations
de toute nature, au gouffre du budget hospitalier, etc. Tous ces éléments
obèrent le budget des pays développés, dont les dettes déjà contractées
sont abyssales et dont la production de richesses s’essouffle. Une cassure
dans l’évolution de leurs dépenses de santé paraît inéluctable. Déjà, pour
tempérer ces dépenses, les pouvoirs publics s’appliquent à les rationaliser –
se gardant de parler de rationner. On perçoit un désengagement de l’assu-
rance-maladie du petit risque, avec la baisse du taux de remboursement de
divers médicaments et un élargissement, par le jeu du délistage, du nombre
de médicaments vendus sans ordonnance, ce qui facilite l’automédication.
Cette automédication constitue un espace dans lequel le pharmacien doit
retrouver tout le rôle de professionnel du médicament qui lui revient de
façon naturelle. Si pour le médicament « BTC » (before the counter, c’est-
à-dire offert à la vente, au lieu d’« OTC » pour over the counter, c’est-à-dire
relevant du conseil), le pharmacien ne se repositionne pas dans ce nouveau
système de dispensation des médicaments, abandonnant ces produits à la
seule loi du négoce, il n’aura alors pas longtemps à attendre l’apparition
de médicaments sur les gondoles des grandes surfaces – qui les lorgnent
avec concupiscence. Si le pharmacien s’inscrit dans la seule compétition
des prix, ne disposant pas des forces économiques de ces grandes surfaces
et n’étant par ailleurs pas formé à cela par les écoles de commerce, il a
d’emblée perdu la partie. La seule compétition qui vaille pour lui, la seule
dans laquelle il puisse concourir avec des chances de la gagner, est celle
de la compétence. Encore faut-il qu’il la possède, ce qui n’est pas avéré.
C’est pourtant après une (plus souvent deux) première année que le futur
pharmacien est sélectionné par un concours rigoureux et qu’il enchaîne
sur cinq années d’étude, conclues par une thèse d’exercice. Durant ce long
cursus universitaire, il subit un enseignement éparpillé, dispensé par des
IX
Pharmacologue
Chercheur consacrant ses recherches aux effets et au métabolisme des
agents pharmacologiques (candidats au statut de médicament) ou des médi-
caments reconnus comme tels. Les pharmacologues sont formés dans les
facultés de pharmacie, de médecine, de science, par les grandes écoles, les
écoles vétérinaires. Pharmacologue n’est pas synonyme de pharmacien.
Drogue
Le terme « drogue » doit être réservé aux agents psychotropes (c’est-à-
dire agissant sur le fonctionnement cérébral) générateurs d’une pharma-
codépendance : les agents toxicomanogènes ; on dit encore générateurs
d’addiction. Il s’agit de substances d’origine végétale (cocaïne, morphine,
tétrahydrocannabinol, etc.) ou de synthèse (amphétamines, ecstasy, etc.),
dont les premières consommations ont suscité une sensation de plaisir,
incitant à leur réitération. Lors de ces usages itératifs, les effets aversifs se
sont atténués tandis que les effets appétitifs se sont intensifiés ; le plaisir
s’est alors mué en besoin, devenant de plus en plus exigeant, impérieux ;
le sujet vit très mal psychiquement (dépendance psychique) et parfois en
outre physiquement (dépendance physique) le fait d’être privé de cette
substance.
Pharmacologie à l’officine
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4 Le médicament
Promédicament
Un promédicament est une substance qui ne développe pas intrinsèque-
ment (sous sa forme native) les effets pharmacologiques attendus, et qui ne
le fera qu’après sa transformation endogène (souvent opérée par le foie) qui
génère le principe actif.
On prendra pour exemple le racécadotril (Tiorfan®). Après sa résorption
intestinale, lors de la traversée hépatique, la molécule est hydrolysée. Le
métabolite actif (thiorfan) inhibe une enzyme, la néprilysine, autrefois
désignée « enképhalinase ». Il préservera ainsi les enképhalines (peptides
opioïdes) de leur inactivation. Elles pourront alors stimuler les récepteurs
opioïdes de type δ (delta), réduisant ainsi les diarrhées sécrétoires. Cette
stratégie du promédicament est traduite en anglais par prodrug.
Iatrogénie
Le terme « iatrogénie » est communément utilisé pour caractériser les
conséquences néfastes d’un traitement médical, en particulier les effets
délétères d’un médicament prescrit par un médecin. Iatros en grec signifie
« médecin », et gène signifie « qui engendre ». Stricto sensu, ce terme est mal
construit ; il serait préférable de parler :
• de « iatropathogénie », trouble engendré par l’intervention médicale ;
• ou de « trouble iatreux », en relation avec le médecin.
Ausculter
C’est écouter, souvent à l’aide d’un stéthoscope, les sons émanant de l’inté-
rieur du corps (poumons, cœur, vaisseaux, abdomen, etc.). Cela n’est qu’un
élément de l’examen clinique du malade, qui ne se résume pas à cela. De
façon totalement inappropriée, certains font cette confusion, que ce rappel
vise à corriger.
Infarctus
Vient du latin in farcio, « infarcir », « bourrer », et non fractio, « fracture » ;
c’est la conséquence d’une obturation d’une artère coronaire, de là infarctus.
Ce n’est pas une fracture du myocarde ; alors, de grâce, pas d’« infractus » !
Sémantique pharmaceutique 5
Nosocomial
A trait aux infections qui se développent au cours et du fait du séjour en
clinique ou à l’hôpital ; il faut un intervalle libre d’au moins 48 heures après
l’entrée dans ces établissements pour imputer à la fréquentation de ce lieu
l’origine de l’infection bactérienne.
Infection communautaire
Terme équivoque puisqu’il désigne les infections qui seraient contractées en
dehors de l’hospitalisation ; aussi son usage devrait-il être évité.
Fibroscope
Désigne un endoscope qui, par la conduction de la lumière par des fibres de
verres, permet de visualiser sans intervention chirurgicale les organes que
l’on peut aborder à partir de leur embouchure. On devrait parler d’un endo-
scope à fibres de verres et, selon l’organe qu’il permet de regarder, de bron-
choscope, d’œsophagoscope, de gastroscope, de coloscope, de cystoscope,
etc. à fibres de verre.
Neuroleptiques/neuroleptiques atypiques
Neuroleptique
Terme forgé par J. Delay et P. Deniker, par référence aux effets extrapyra-
midaux/parkinsoniens (akinésie, hypertonie, tremblements) du premier
antipsychotique (chlorpromazine) « qui saisit le nerf », phénomène en
relation avec le blocage des récepteurs D2 de la dopamine dans le striatum,
aboutissant aux mêmes effets que la destruction des neurones dopaminer-
giques nigro-striataux à l’origine de la maladie de Parkinson.
Neuroleptique atypique
Expression utilisée pour désigner les antipsychotiques de deuxième généra-
tion, qui sont virtuellement dénués d’effets extrapyramidaux. Cette expres-
sion est illogique ; on ne peut se servir de l’adjectif atypique pour contredire
l’expression neuroleptique. Elle devrait donc être abandonnée et remplacée
par « antipsychotique non neuroleptique ».
Absorption/résorption
Absorption
Faire passer de l’extérieur vers l’intérieur ; le fait d’ingérer. J’absorbe une
tasse de café.
6 Le médicament
Résorption
Passage progressif d’une substance d’un milieu dans un autre, au travers
d’un épithélium. La peau résorbe la trinitrine (Trinipatch®) ou le fentanyl
(Durogesic®) appliqués à sa surface, pour les faire apparaître dans le sang.
Après que j’ai absorbé une tasse de café, mon intestin en résorbe la caféine.
ADME/RDME
Là aussi l’anglais est venu apporter de la confusion. L’ADME des anglophones,
qui caractérise les grandes étapes de la pharmacocinétique (Absorption, Diffu-
sion, Metabolism, Excretion), a été francisée en ajoutant seulement un « e » à
metabolism. Le terme absorption en anglais aurait dû être traduit en français par
« résorption ». Les grandes étapes de la pharmacocinétique doivent donc être,
en français, RDME, pour Résorption, Distribution, Métabolisme, Excrétion.
Ubiquiste
Présent en plusieurs lieux simultanément – avoir le don d’ubiquité. Par
exemple, le caractère ubiquiste des récepteurs CB1 aux endocannabinoïdes
dans le cerveau. Cela se traduit en anglais ubiquitary ; et bien sûr il s’est
trouvé quelques amateurs de néologismes, ignorant le terme ubiquiste,
pour diffuser le terme ubiquitaire.
Réceptogramme
Ensemble des récepteurs qui peuvent être affectés par un ligand à ses
« concentrations thérapeutiques », c’est-à-dire pour des posologies usuelles.
Comme la spécificité d’un ligand pour un type de récepteur est exception-
nelle, lorsqu’un médicament occupe un type de récepteur, il est commun
qu’il occupe simultanément des récepteurs d’un autre ou de divers autres
types, ce qui contribue à forger son spectre fonctionnel.
Thalidomide
Le thalidomide est du masculin, car on dit un amide. Après son usage
comme psycholeptique de triste mémoire chez la femme enceinte, où il
a été responsable de phocomélies, il réapparaît dans certaines indications
dermatologiques, oncologiques (myélome), etc.
2 Les différentes strates
du développement
d’un médicament
Études précliniques
Recherche et découverte de molécule d’intérêt
thérapeutique
Cette phase consiste à identifier/sélectionner des molécules présentant une
activité pharmacologique pouvant avoir un intérêt thérapeutique. Elle met
à profit :
• des cibles biologiques nouvellement découvertes ;
• la révélation d’effets inattendus ou qui étaient encore inconnus de molé-
cules anciennes ;
• la découverte de nouvelles substances élaborées dans le monde végétal ou
animal ;
• surtout, l’exploration d’importantes « chimiothèques » issues de la chimie
de synthèse qui crée des molécules nouvelles ou qui effectue des variations
sur des « leads » donnés.
Ces cibles biologiques, anciennes ou plus récemment découvertes,
sont confrontées à cette multitude de molécules d’origines diverses par le
criblage à haut débit (high throughput screening [HTS]). Son caractère très
automatisé permet la mise en ligne de plusieurs dizaines de cibles et l’éva-
luation, chaque jour, de l’affinité que manifestent pour elles des dizaines
de molécules. Cela permet d’en tester des milliers chaque année. La mise
en évidence d’une interaction entre une molécule et une cible fait de
cette molécule un « hit ». La connaissance d’une affinité élevée (de l’ordre
du nanomolaire [nM]) pour un récepteur déterminé incite à apprécier
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8 Le médicament
Études de pharmacologie
Cette phase explore les actions pharmacologiques et les effets thérapeu-
tiques du candidat médicament.
Les études pharmacologiques sont conduites in vivo et in vitro. Elles
ne font pas l’objet de contraintes réglementaires spécifiques quoique,
désormais, l’expérimentation sur animaux vivants est très encadrée par des
comités d’éthique et des contrôles des services vétérinaires départemen-
taux. La pharmacologie de sécurité est très codifiée, comme les explorations
de toxicologie traitées ci-après.
Études de toxicologie
Cette phase vise à mettre en évidence la toxicité éventuelle du principe actif
tant qualitativement que quantitativement. Le candidat médicament devra
démontrer, pour que son développement soit poursuivi, une innocuité sys-
témique ainsi qu’une bonne tolérance.
Les études de toxicologie comprennent :
• la toxicité aiguë : en « escalade » de doses, dose minimale induisant une
toxicité significative ;
• la toxicité subchronique : administrations répétées, 15 jours à 6 mois ;
• la toxicité chronique : administrations répétées, 6 à 12 mois ;
• la tolérance locale : applications répétées, 15 jours ;
• la cancérogenèse : administrations répétées, 12 mois et plus long terme ;
• la génotoxicité : tests pratiqués in vitro (test d’Ames et test MLA) et aussi
in vivo (test des micronoyaux et test des comètes) ;
• la toxicité sur la reproduction : segments I, II et III (respectivement ferti-
lité, embryotoxicité, péri- et postnatalité) ;
• la pharmacologie de sécurité : analyse des effets sur les principales fonc-
tions vitales (système nerveux central, appareil cardiovasculaire, appareil
respiratoire, etc.).
Ces investigations font l’objet de contraintes réglementaires strictes, dont
les bonnes pratiques de laboratoire, ou BPL (GLP en anglais, pour good labo-
ratory practices).
Études cliniques
Une formulation médicamenteuse entre en essai clinique après autorisation
des autorités réglementaires, du CCPPRB (comité consultatif de protection
des personnes se prêtant à des recherches biomédicales), des patients volon-
taires (consentement éclairé des volontaires), du médecin/clinicien inves-
tigateur. Les essais sont réalisés dans des établissements médicalisés publics
ou privés, suivant les bonnes pratiques cliniques, ou BPC (GCP en anglais,
pour good clinical practices) (tableau 2.1) :
• les essais cliniques de phase I étudient la tolérance ;
• les essais cliniques de phase II sont des études exploratoires d’efficacité
thérapeutique ;
• les essais cliniques de phase III ont pour objet la confirmation de l’effica-
cité thérapeutique ;
• les études de phase IV suivent attentivement le médicament après sa
mise sur le marché. Elles permettent d’optimiser l’usage thérapeutique du
médicament dans la population générale (la plus hétérogène). Ces explo-
rations quantifient les effets secondaires attendus, identifient des effets
secondaires inattendus et/ou des complications tardives, précisent de
nouvelles contre-indications et/ou des interactions médicamenteuses non
répertoriées.
Échelles d’évaluation
Des échelles permettant d’évaluer l’activité du médicament sur les patho-
logies visées sont de plus en plus utilisées, afin de quantifier l’importance
thérapeutique réelle d’un nouveau traitement.
marché (AMM). Ceci étant acquis, il sera alors évalué par la commission de
transparence qui détermine le niveau de prise en charge du médicament par
la Sécurité sociale. Cet avis est fondé sur l’évaluation du score obtenu par le
médicament sur les échelles SMR et ASMR :
• l’échelle SMR (tableau 2.2) évalue la valeur « intrinsèque » du médica-
ment sans le comparer à d’autres médicaments déjà présents sur le marché ;
son score influera sur le taux de remboursement par la Sécurité sociale ;
• l’échelle ASMR (tableau 2.3) évalue la valeur « extrinsèque » du médica-
ment, en le comparant aux autres médicaments de la même classe théra-
peutique, jugés comparables, déjà sur le marché ; son score influera sur le
taux de remboursement par la Sécurité sociale.
Échelles en psychiatrie
La nosologie est apparue en France xviiie siècle, avec le traité princeps du
médecin François Boissier de Sauvages de Lacroix, intitulé Nosologia metho-
dica.
La nosologie étudie les critères de classification des maladies (étiologie,
séméiologie, pathogénie) ; elle donna naissance à la nosographie qui classe
les maladies sur la base des critères nosologiques. Dans ce dessein, l’Organi-
sation mondiale de la santé (OMS) a développé la classification ICD (Inter-
national Classification of Diseases) destinée aux praticiens du monde entier.
Les critères objectifs, spécifiques et précis d’inclusion/exclusion visent à
assurer la rigueur et l’homogénéité du diagnostic.
Parallèlement se sont développés des outils de classification propres à
certains types de pathologies, notamment psychiatriques avec le DSM-V
– Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5e édition (publiée
en 2013), issu des travaux de l’Association américaine de psychiatrie.
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The Project Gutenberg eBook of Contes choisis
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Language: French
Paris
Nelson, Éditeurs
189, rue Saint-Jacques
Londres, Édimbourg et New-York
HOMMAGE CORDIAL
G. L.
Pages
Mark Twain et l’humour 9
Ma montre 21
Le grand contrat pour la fourniture du bœuf conservé 27
Une interview 37
Rogers 45
L’infortuné fiancé d’Aurélia 53
Madame Mac Williams et le tonnerre 59
Notes sur Paris 69
L’article de M. Bloque 73
Un roman du moyen âge 79
Un rêve bizarre 91
Sur la décadence dans l’art de mentir 105
Le marchand d’échos 115
Histoire du méchant petit garçon 125
Histoire du bon petit garçon 131
Sur les femmes de chambre 139
La grande révolution de Pitcairn 143
Comment je devins directeur d’un journal d’agriculture 161
Le meurtre de Jules César en fait divers 169
La célèbre grenouille sauteuse du comté de Calaveras 177
Réponses à des correspondants 187
L’histoire se répète 193
Pour guérir un rhume 195
Feu Benjamin Franklin 201
L’éléphant blanc volé 207
Madame Mac Williams et le croup 237
Histoire de l’invalide 247
Nuit sans sommeil 257
Les faits concernant ma récente démission 265
Économie politique 275
INTRODUCTION
Ma belle montre neuve avait marché dix-huit mois, sans avance ni retard,
sans aucune perturbation dans quelque partie que ce fût de son mécanisme,
sans arrêt. J’avais fini par la regarder comme infaillible dans ses jugements
sur le temps, et par considérer sa constitution et son anatomie comme
impérissables. Mais un jour, une nuit plutôt, je la laissai tomber. Je
m’affligeai de cet accident, où je vis le présage d’un malheur. Toutefois, peu
à peu je me rassurai et chassai mes pressentiments superstitieux. Pour plus
de sûreté, néanmoins, je la portai chez le principal horloger de la ville, afin
de la faire régler. Le chef de l’établissement la prit de mes mains et
l’examina avec attention. Alors il dit: «Elle est de quatre minutes en retard.
Le régulateur doit être poussé en avant.» J’essayai de l’arrêter, de lui faire
comprendre que ma montre marchait à la perfection. Mais non.
Tous les efforts humains ne pouvaient empêcher ma montre d’être en
retard de quatre minutes, et le régulateur dut être poussé en avant. Et ainsi,
tandis que je trépignais autour de lui, dans l’angoisse, et le suppliais de
laisser ma pauvre montre en repos, lui, froidement et tranquillement,
accomplissait l’acte infâme. Ma montre, naturellement, commença à
avancer. Elle avança tous les jours davantage. Dans l’espace d’une semaine,
elle fut atteinte d’une fièvre furieuse, et son pouls monta au chiffre de cent
cinquante battements à la minute. Au bout de deux mois elle avait laissé loin
derrière elle les meilleurs chronomètres de la ville et était en avance sur
l’almanach d’un peu plus de treize jours. Elle était déjà au milieu de
novembre, jouissant des charmes de la neige, qu’octobre n’avait pas encore
fait ses adieux. J’étais en avance sur mon loyer, sur mes paiements, sur
toutes les choses semblables, de telle façon que la situation devenait
insupportable. Je dus la porter chez un horloger pour la faire régler de
nouveau.
Celui-ci me demanda si ma montre avait été déjà réparée. Je dis que non,
qu’elle n’en avait jamais eu besoin. Il me lança un regard de joie mauvaise,
et immédiatement ouvrit la montre. Puis, s’étant logé dans l’œil un
diabolique instrument en bois, il regarda l’intérieur du mécanisme. «La
montre demande impérieusement à être nettoyée et huilée, dit-il. Ensuite
nous la réglerons. Vous pouvez revenir dans huit jours.» Une fois nettoyée et
huilée, puis bien réglée, ma montre se mit à marcher, lentement, comme une
cloche qui sonne à intervalles longs et réguliers. Je commençai à manquer
les trains, je fus en retard pour mes paiements. Je laissai passer l’heure de
mes rendez-vous. Ma montre m’accordait gracieusement deux ou trois jours
de délai pour mes échéances et ensuite me laissait protester. J’en arrivai
graduellement à vivre la veille, puis l’avant-veille et ainsi de suite, et peu à
peu je m’aperçus que j’étais abandonné solitaire le long de la semaine
passée, tandis que le monde vivant disparaissait à ma vue. Il me sembla
ressentir au fond de mon être une sympathie naissante pour la momie du
Muséum et un vif désir d’aller m’entretenir avec elle sur les dernières
nouvelles. Je dus retourner chez un horloger.
Cet individu mit la montre en morceaux sous mes yeux et m’annonça
solennellement que le cylindre était «enflé». Il se fit fort de le réduire en
trois jours à ses dimensions normales. Après cette réparation, la montre se
mit à marquer l’heure «moyenne», mais se refusa obstinément à toute autre
indication. Pendant la moitié du jour, elle ne cessait pas de ronfler, d’aboyer,
de crier; elle éternuait, soufflait avec énergie, à tel point qu’elle troublait
absolument mes pensées et qu’il n’y avait pas dans le pays une montre qui
pût lui tenir tête. Mais le reste du temps elle s’endormait et s’attardait,
s’amusant en route jusqu’à ce que toutes les autres montres laissées en
arrière l’eussent rattrapée. Aussi, en définitive, au bout des vingt-quatre
heures, aux yeux d’un juge impartial, elle paraissait arriver exactement dans
les limites fixées. Mais une moyenne exacte n’est qu’une demi-vertu chez
une montre, et je me décidai à la porter chez un nouvel horloger.
J’appris de lui que le pivot de l’échappement était cassé. J’exprimai ma
joie que ce ne fût rien de plus sérieux. A dire le vrai, je n’avais aucune idée
de ce que pouvait être le «pivot de l’échappement», mais je ne voulus pas
laisser voir mon ignorance à un étranger. Il répara la montre, mais
l’infortunée perdit d’un côté ce qu’elle gagnait d’un autre. Elle partait tout à
coup, puis s’arrêtait net, puis repartait, puis s’arrêtait encore sans aucun
souci de la régularité de ses mouvements. Et chaque fois elle donnait des
secousses comme un fusil qui recule. Pendant quelque temps, je matelassai
ma poitrine avec du coton, mais enfin je fus obligé de recourir à un nouvel
horloger. Ce dernier la démonta, comme les autres avaient fait, et en mania
un moment les débris sous sa loupe. Après cet examen: «Nous allons avoir,
me dit-il, des difficultés avec le régulateur.» Il remit le régulateur en place et
fit un nettoyage complet. La montre, dès lors, marcha très bien, avec ce léger
détail que, toutes les dix minutes, les aiguilles se croisaient comme une paire
de ciseaux et manifestaient dès lors l’intention bien arrêtée de voyager de
compagnie. Le plus grand philosophe du monde eût été incapable de savoir
l’heure avec une montre pareille, et de nouveau je dus m’occuper de
remédier à cet état désastreux.
Cette fois, c’était le verre de la montre qui se trouvait en défaut et qui
gênait le passage des aiguilles. De plus, une grande partie des rouages
avaient besoin d’être réparés. L’horloger fit tout cela pour le mieux, et dès
lors ma montre fonctionna exceptionnellement bien. Notez seulement
qu’après avoir marqué l’heure bien exactement pendant une demi-journée,
tout à coup, les diverses parties du mécanisme se mettaient à partir ensemble
en ronflant comme un essaim d’abeilles. Les aiguilles aussitôt
s’empressaient de tourner sur le cadran si vite que leur individualité devenait
impossible à discerner; à peine si l’on distinguait quelque chose de
semblable à une délicate toile d’araignée. La montre abattait ses vingt-quatre
heures en six ou sept minutes, puis s’arrêtait avec un coup.
J’allai, le cœur navré, chez un dernier horloger et je l’examinai
attentivement tandis qu’il la démontait. Je me préparais à l’interroger
sévèrement, car la chose devenait sérieuse. La montre m’avait coûté à
l’origine deux cents dollars; elle me revenait maintenant à deux ou trois
mille dollars avec les réparations. Mais tout à coup, tandis que je
l’examinais, je reconnus dans cet horloger une vieille connaissance, un de
ces misérables à qui j’avais eu affaire déjà, plus capable de reclouer une
machine à vapeur hors d’usage que de réparer une montre. Le scélérat
examina toutes les parties de la montre avec grand soin, comme les autres
avaient fait, et prononça son verdict avec la même assurance. «Elle fait trop
de vapeur, vous devriez laisser ouverte la soupape de sûreté.» Pour toute
réponse, je lui assénai sur la tête un coup formidable. Il en mourut, et je dus
le faire enterrer à mes frais.
Feu mon oncle William (Dieu ait son âme) avait coutume de dire qu’un
cheval est un bon cheval jusqu’au jour où il s’est une fois emporté, et qu’une
bonne montre est une bonne montre jusqu’au moment où les horlogers, en y
touchant, l’ont ensorcelée. Il se demandait aussi, avec une curiosité, vers
quel métier se tournent tous les étameurs, armuriers, savetiers, mécaniciens,
forgerons qui n’ont pas réussi. Mais personne n’a jamais pu le renseigner sur
ce point.