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Amphibiens et dispositifs de franchissement

des infrastructures de transport terrestre

Collection | Connaissances
Collection | Connaissances

Amphibiens et dispositifs de franchissement


des infrastructures de transport terrestre

Comment citer cet ouvrage :


Cerema. Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre
Janvier 2019
Cerema, 2019. Collection : Connaissances. ISBN : 978-2-37180-328-2

Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement


Infrastructures de transport et matériaux - 110 rue de Paris - 77171 Sourdun
Siège social : Cité des mobilités - 25, avenue François Mitterrand - CS 92 803 - F-69674 Bron Cedex
L’ouvrage est une œuvre collective réalisée sous la direction du Cerema.
Rédacteurs
• Alain MORAND (Cerema Est)
• Jean CARSIGNOL (Cerema Est)
Relecture
• Luc CHRETIEN (Cerema Est)
• Marine PAULAIS (DGITM)
• Nora SUSBIELLE (DGITM)
Remerciements pour leurs contributions notamment lors des deux ateliers conduits en région
Auvergne-Rhône-Alpes et Grand-Est, la mise à disposition de documents et d’illustrations :
• Damien AUMAITRE (CEN Lorraine)
• Laurent ARCELLIN (CD Moselle)
• Jérôme BACQUERT (CD Pas de Calais)
• Thierry BOHNENSTENGEL (karch)
• Guy BERTHOUD (Econat)
• Virginie BILLON (Cerema Centre-Est)
• Christian BULLE (CD Doubs)
• Marc CHEYLAN (EPHE, CEFE CNRS Montpellier)
• Audrey COCU (Cerema Est / Université de Lorraine)
• Hervé COFFRE (LPO Isère)
• Anne-Sophie CROYAL (CD Isère)
• Jean-Christophe De-MASSARY (MNHN/AFB)
• Lucile DEWULF (ARB Ile de France)
• Sébastien DIDIER (LPO Alsace)
• Baptiste DOUTAU (LPO Haute-Savoie)
• Cécile DOUAY-BERTRAND (Cerema Est)
• Rémi DUGUET (Alcedo Faune & Flore)
• Marc GIGLEUX (Cerema Est)
• Laurent GODE (Parc naturel régional de Lorraine)
• Fanny GOSSELIN (BUFO)
• Jean-Luc GROSSI (AVENIR)
• Jean-Paul GULIA (Photographe naturaliste bénévole)
• Christophe HERVE (LPO Champagne-Ardenne)
• Pierre JOLY (Université Lyon 1 & CNRS)
• Marion JOUFFROY (SHF/Natagora)
• Jonathan JUMEAU (CD Bas Rhin / Université de Strasbourg & CNRS)
• Fabrice LEVRESSE (CD Bas-Rhin)
• Fabien LANTOURNE (SODILOR)
• Olivier LEBRUN (SODILOR)
• David LESBARRÈRES (Laurentian University, Dpt Biology (Canada))
• Grégory MAILLET (RNN Etang du Grand Lemps)
• Claude MIAUD (CEFE CNRS Université de Montpelllier)
• Victoria MICHEL (BUFO)
• Jean-Louis MICHELOT (ECOSPHERE)
• Alix MICHON (LPO Franche-Comté)
• Thierry MOUGEY (Fédération des Parcs naturels régionaux)
• Céline MULLER (Cerema Est / Université de Lorraine)
• Jean MURATET (Ecodiv)
• François NOWICKI (Cerema Est)
• Julian PICHENOT (Cerema Est)
• Jérôme PRUNIER (CNRS Station Biologique de Moulis)
• Anaïs QUILGHINI (Cerema Est / Université de Lorraine)
• Dominique ROBERT (ATENA 78)
• Gérald TEKIELAK (Cerema Est)
• Guillaume TESTUD (CEFE CNRS Université de Montpelllier)
• Jean-Pierre VACHER (BUFO)
• Thomas WALTZER (Atelier des Territoires)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 4


Sommaire

1 - Les amphibiens : des espèces étonnantes, utiles et menacées 6


1.1 - Un cycle de vie complexe entre la terre et l’eau 6
1.2 - La dispersion et les migrations 7
1.3 - Les amphibiens en France : menaces, protection et statut 8
2 - Les mesures et dispositifs de franchissement des infrastructures
de transport terrestre 17
2.1 - La fermeture temporaire des routes pendant les migrations 17
2.2 - Les installations temporaires de protection 18
2.3 - Les installations permanentes de protection 25
2.4 - Les ouvrages non spécifiques à amphibiens 39
3 - Mesures compensatoires et d’accompagnement 40
3.1 - La création d’habitats aquatiques (mares de substitution) 40
3.2 - Habitats terrestres (sites d’hivernage, territoire de chasse, etc) 41
4 - Mesures « E, R, C » : éléments de coût et acceptabilité socio-économique 42
Bibliographie 43
Annexes 47
Annexe 1 - Liste des espèces d’amphibiens et de leur statut de protection 48
Annexe 2 - Exemple de détermination chez les Anoures et les Urodèles 51
Annexe 3 - Créer et entretenir un plan d'eau à amphibiens : quelques principes généraux 53
Annexe 4 - Mesures « E, R, C » : quelques éléments de coût 55

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1 - Les amphibiens : des espèces étonnantes, utiles
et menacées
Environ 8000 espèces d'amphibiens se distribuent aujourd’hui à la surface de la terre sur presque tous les
continents [1]. Ils se répartissent en trois groupes : les Anoures (grenouilles et crapauds), les Urodèles
(salamandres et tritons) et les Gymnophiones (amphibiens apodes ou sans membre). Seuls les deux premiers
groupes sont présents en Europe et la France métropolitaine compte une quarantaine d’espèces dont plusieurs
espèces introduites (voir Annexe 1) [2].

1.1 - Un cycle de vie complexe entre la terre et l’eau


Si quelques espèces d'amphibiens demeurent toute leur vie dans l'eau ou sont au contraire totalement affranchies
1
du milieu aquatique , la grande majorité des amphibiens européens occupent les milieux d’interface [3, 4] et
présentent un cycle de vie complexe ou biphasique « type » (voir figure ci-dessous), avec l’alternance d’une
phase aquatique (œufs et larves aquatiques) puis, au terme d’une métamorphose, d’une phase terrestre (stade
juvénile, puis adulte). Ils ne retournent dans l’eau qu’à maturité sexuelle, pour se reproduire. Ils effectuent des
allers et retours autant de fois que leur longévité le permettra.

Figure 1 : Illustration du cycle de vie complexe et biphasique « type » d’un amphibien :


exemple du Crapaud commun (Bufo bufo) (Source : © A. Morand et J-P Gulia)

L'espérance de vie adulte (ou longévité en milieu naturel) est en moyenne de 5 à 10 ans mais il est courant de trouver
des individus âgés de plus d'une quinzaine d'années chez certaines espèces longévives (Triton crêté, Sonneur à ventre
jaune). La maturité sexuelle est atteinte entre 1 et 3 ans selon les espèces et le sexe de l'individu, elle est variable
toutefois selon la latitude et l’altitude [5].

1 Font exception en France, plusieurs espèces d’Urodèles totalement affranchies du milieu aquatique : les salamandres noires alpines
(Salamandra lanza et Salamandra atra), au mode de reproduction « vivipare » ; le Spélerpes de Strinatii (Spelerpes strinatii), ovipare et
unique représentant en France de la famille des pléthodontidés, habitant les grottes et les ripisylves ; les populations de la sous-espèce de
Salamandre tachetée (Salamandra salamandra fastuosa).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 6


Le caractère amphibie de ces animaux leur impose de disposer de plusieurs types d’habitats pour accomplir leur
cycle de vie : un habitat de reproduction, un habitat d’alimentation (de chasse), un site d’estivation (quartier d’été)
et un site d’hivernage (quartier d’hiver). Selon les espèces, les amphibiens ont développé des capacités
locomotrices et de comportements migratoires plus ou moins marqués. Les différentes formes de
déplacement sont liées à la reproduction (migration pré et post-nuptiale), à la métamorphose (migration post-
larvaire), à des mouvements restreints à l’intérieur du territoire de chasse, aux déplacements plus conséquents
vers les quartiers d’hiver ou d’été.

S’ajoute la dispersion et les déplacements exploratoires d’individus qui en assurant la conquête de nouveaux
territoires contribuent au fonctionnement de la population voire d’un ensemble de populations subdivisées mais
connectées entre elles (fonctionnement en métapopulation). Les populations déclinent si les pertes par les
processus de “mortalité/émigration” excèdent les gains par ceux de “recrutement/immigration » [6, 7].

1.2 - La dispersion et les migrations


La plupart des amphibiens ont de faibles capacités de dispersion, notamment en raison de leur morphologie et
de leur comportement [8]. Leur peau très perméable, leur dépendance à l'humidité voire à l'eau (stade œuf et
larve) expliquent leur faible mobilité et leur grande dépendance aux zones humides. S'ajoute un caractère assez
sédentaire de plusieurs espèces d'amphibiens, tout du moins lors de leur vie adulte. Qu'ils s'agissent d'espèces
semi aquatiques (Grenouille verte) ou au mœurs davantage terrestres (Crapaud commun ; Pélobate brun ; Triton
crêté ; Triton alpestre ; Salamandre tachetée), beaucoup sont reconnues comme étant très fidèles à leur site de
ponte, qui correspond souvent aussi à leur site de naissance. Toutefois, il existe parfois des distances importantes
entre les différents types d'habitats d'alimentation et de croissance ou encore les refuges hivernaux, des habitats
aquatiques de reproduction. La distance entre les différents types d'habitats, le lieu de naissance et d'autres sites
visités peut donc varier de plusieurs centaines de mètres à quelques kilomètres. Lors de la migration de
reproduction, il a été mesuré quelques distances records allant jusqu'à 10 km pour la Grenouille rousse et la
Rainette arboricole et jusqu’à 15 km pour la Grenouille « verte » de Lessona [9] !

Pour minimiser les coûts énergétiques des déplacements, éviter les risques de dessiccation et de prédation, les
amphibiens recherchent généralement la plus courte distance pour se déplacer (trajectoire « en ligne droite »).
Ils tentent de franchir les obstacles sans chercher à les contourner, entraînant de fortes dépenses d’énergie et
du stress. Il est par conséquent fréquent de voir des individus épuisés au cours des migrations prénuptiales. Lors
des déplacements, les amphibiens exploitent le maximum d’informations de leur environnement qu’ils sont en
mesure de détecter et d’analyser. L'expérience et l'acquisition d’informations même sommaire de leur
environnement s’acquiert au cours du développement de la larve à l'adulte.

Encadré 1 - Les mécanismes de l’orientation


L'orientation chez les amphibiens repose sur un système multi sensoriel incluant des informations acoustiques,
magnétiques, mécaniques, olfactives, et visuelles. Certaines espèces privilégient un sens plutôt qu’un autre et
cette spécificité peut avoir lieu au niveau de la population, de l’individu et son stade de vie ou de son sexe !

Si la vision joue un rôle incontestable sur de courtes distances, elle offre peu de « hauteur de vue » de la part
d’animaux vivant au ras du sol. Les amphibiens, qui se déplacent, sont donc d’abord sous l’influence de
caractéristiques grossières de l’habitat et répondent à une certaine ambiance de l’environnement pour s’orienter.
Ils peuvent suivre ainsi un gradient d’humidité. Il a été démontré également durant la période de reproduction que
les salamandres ou crapauds peuvent utiliser les étoiles ou la lune pour s’orienter pendant la nuit ou bien encore
le soleil pendant le jour. L’utilisation du champ magnétique terrestre a été démontré chez différentes espèces.
e
Des cellules photoréceptrices dans la glande pinéale ou épiphyse du cerveau (dite aussi 3 œil des vertébrés) et
des particules métalliques interviennent, la direction générale est donnée par un « compas » comme chez les
oiseaux migrateurs. Près du site aquatique de reproduction, les salamandres et les tritons comme plusieurs
espèces d'anoure utilisent les odeurs pour s'orienter plus finement. La nature chimique des odeurs mises en jeu
n'est pas identifiée mais l’odeur de la mare d'origine est mémorisée et permet d'y retourner lors des migrations
prénuptiales. Enfin, s'il est communément admis que les amphibiens anoures utilisent les sons et en particulier
les signaux sonores de leurs congénères, des études expérimentales récentes montrent que plusieurs espèces
de tritons utilisent des chants d'appel sexuel d'autres espèces d’amphibiens syntopiques (qui vivent dans le même
environnement) pour repérer leurs mares de reproduction [10, 11, 12].

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Photos 1 et 2 : Les tritons marbrés, en vue de repérer leurs mares de reproduction, peuvent utiliser les chants d'appel sexuel
d’amphibiens anoures, ici d’une rainette méridionale mâle au sac vocal gonflé (Source : © A. Morand, Cerema Est)

1.3 - Les amphibiens en France : menaces, protection et statut


Le déclin des amphibiens partout dans le monde et l'extinction de leurs populations sont aujourd’hui confirmés
[2, 13, 14]. Parmi les vertébrés terrestres, c’est le groupe le plus menacé et si rien ne change, 1/3 des espèces
pourraient disparaître dans les deux décennies à venir.

Sur la quarantaine d'espèces en France métropolitaine qui se répartissent respectivement chez les Anoures
(8 familles) et les Urodèles (2 familles), plus de la moitié des espèces indigènes sont menacées ou quasi-menacées
(voir Annexe 1). Six espèces exotiques (voir Annexe 1) sont considérées comme potentiellement « invasives » [2]
sachant qu’une seule, la grenouille taureau, est inscrite sur la liste européenne (règlement 2016/1141).

1.3.1 - Les impacts globaux

• La destruction et fragmentation de l'habitat sont les causes les plus importantes pour la disparition
2
des amphibiens . Sous nos latitudes tempérées et dans nos régions urbanisées, de telles menaces sont
essentiellement liées à l'agriculture intensive (remembrements et disparition des haies, monoculture
intensive et drainage, simplification des paysages), l’exploitation d’autres ressources naturelles
(enrésinement des forêts, extraction de granulats dans les plaines alluviales, pêche de loisir dans les
lacs d’altitude) et l'urbanisation (assèchement des zones humides) ainsi qu’aux transports (voies ferrées,
routes et canaux). Les caractéristiques biologiques des amphibiens et leur fonctionnement
biodémographique les rendent particulièrement vulnérables à de tels impacts sur les paysages. En effet,
la plupart des espèces présentent des populations de plus en plus éloignées et isolées les unes des
autres limitant les contacts et les échanges génétiques. Les déplacements réguliers au sein du domaine
vital et la dispersion nécessaire par les corridors naturels entre les populations se font de plus en plus
difficilement. Ils sont pourtant indispensables au maintien de populations viables pour de telles espèces
en raison même du fait que la survie des populations en dessous d'une certaine valeur "seuil" (ou "taille
minimale viable") est souvent compromise.

• La dégradation de la qualité des milieux : le mode de vie terrestre et aquatique des amphibiens et
leur peau très perméable les rendent plus vulnérables que les autres espèces de vertébrés terrestres
aux toxines (pesticides, métaux lourds, biocides, nitrates, sels de déverglaçage) présentes dans
l’environnement. Tous ces agents polluants, pris individuellement ou par effet « cocktail », sont des
composés à l'origine de phénomènes de mortalité, de malformation et difformités ou d'échec de la
reproduction voire de stérilité.

• Les agents pathogènes et nouvelles maladies émergentes : enfin, au côté de ces menaces déjà bien
identifiées s’ajoutent de nouveaux dangers liés aux changements globaux. Un nouvel agent pathogène
Batrachochytrium dendrobatidis appelé aussi "chytride" n’épargne désormais aucune région de France
et ni même les zones protégées [15]. L'existence en France d'un Ranavirus [16] est une nouvelle menace
pour des populations déjà fragilisées par la prédation élevée des écrevisses, amphibiens et poissons
introduits dans les milieux aquatiques [17,18].

2 http://www.globalamphibians.org

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 8


1.3.2 - Les impacts spécifiques liés aux infrastructures de transport terrestre
En France, une part non négligeable de la mortalité des amphibiens conduisant en certains lieux à l'extinction de
populations est liée à la densification du réseau des infrastructures de transport terrestre (ITT). La perte d'habitats,
la fragmentation des milieux et leur dégradation en sont les principales causes. Les possibilités de déplacement
des amphibiens dans de tels paysages se réduisent de plus en plus alors même que la plupart des espèces ont
un cycle de vie qui impose des dispersions et migrations entre les milieux terrestre et aquatique.

Les infrastructures de transport terrestres (ITT) impactent les amphibiens de deux manières :

Effets directs Effets induits

Barrière Attraction, Emission Autres changements au


mécanique, Collision chimique niveau des milieux
évitement et et mortalité (hydrocarbures, aquatiques et dans les
filtre aux sels) relations interspécifiques
mouvements, (compétition, prédateur-
Perte et proie, parasitisme, etc.)
fragmentation
des habitats
Pollution Pollution Vibration
thermique lumineuse et bruit

Figure 2 : Les infrastructures de transport et les deux types d’impacts sur les amphibiens
(Source : adaptée d’après [17, 18])

L'impact indirect des ITT

Les émissions chimiques


La pollution des milieux adjacents est un facteur à prendre en compte qui est de deux ordres : chimique, à la suite
des rejets des véhicules, et sonore, de par le bruit de ces mêmes véhicules. Le réseau routier, en raison des flux
importants de véhicules, contribue donc à l'apport global de pollutions dans les cours d'eau et habitats aquatiques
de reproduction qu'il longe ou traverse. On appelle effluents l'ensemble de ces apports polluants ou non dont le
risque s'accentue considérablement lors d'épisodes de pluie violents. Les conséquences sur les amphibiens ont
fait l'objet de plusieurs types de travaux portant sur le degré d'exposition et les effets à plus ou moins long terme
sur les organismes. Une toxicité aiguë peut se produire allant jusqu'à la mort rapide des individus exposés, elle
concerne des composés chimiques tels les chlorures de sodium attribuables au salage des chaussées ainsi que
métaux lourds (plomb, zinc) au risque non nul en l'absence de piégeage par les sédiments ou les végétaux, etc.
Une autre toxicité plus insidieuse implique des molécules "d'hydrocarbures aromatiques polycycliques" (HAP) qui
ne présentent pas par elles-mêmes de dangers particuliers mais induisent des interactions avec le matériel
génétique [21, 22].

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 9


Encadré 2 - Les bassins d’orage : quelle qualité d’habitat de reproduction pour
les amphibiens ?

D’une manière générale, il est recommandé d’empêcher l’accès aux amphibiens des bassins de traitement des
eaux des plateformes routières fortement polluées. Des dispositions doivent être prises pour empêcher
l’accessibilité des bassins de traitement aux amphibiens, notamment par des clôtures adaptées [23] tout autour
du bassin, la pose de barrière canadienne ajustée à leur entrée, etc. En revanche, les bassins de rétention des
eaux du bassin versant ou bien les bassins d’écrêtage à l’aval des bassins de traitement peuvent être
des milieux d’accueil et de reproduction des amphibiens sous réserve d’une surveillance régulière de la qualité
des eaux. Dans certain contexte, notamment les régions très urbanisées ou agricoles, les bassins d’orage, malgré
ces mesures, sont colonisés. Ils jouent le rôle d’habitats-refuge dans un paysage particulièrement hostile aux
amphibiens posant la question du succès de la reproduction dans un tel milieu [24], etc.

Photos 3 à 8 : En haut à gauche : Site de Molsheim et son paysage agricole à culture intensive de grande surface ;
En haut à droite : Crapaud vert (Epidalea - anciennement Bufo - viridis) en migration à la recherche de sites aquatiques potentiels
de reproduction ; Au centre à gauche : Crapaud vert écrasé ; Au centre à droite : Bassin de rétention, entouré de grillage à grande et
petite faune, barrière protectrice en acier et barrière canadienne à l’entrée de l’ouvrage pour entretien. Il est observé quelques chanteurs
de Crapaud vert dans de tels bassins ; En bas à gauche : Buse de grande taille sous la chaussée de la 2x2 voie ;
En bas à droite : Mare artificielle creusée sur affleurement de la nappe réalisé dans le cadre de mesures compensatoires
(Sources : © J-P Vacher / Bufo & A. Quilghini, A. Morand, Cerema Est)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 10


Pollutions sonore et lumineuse
Les bruits d’origine anthropique sont connus pour leur impact et dérangement sur les communautés animales
[25], en partant de l’hypothèse que l’augmentation du bruit perturbe tout particulièrement la communication
acoustique alors même que ces échanges de signaux agissent sur le rapprochement de partenaires lors de la
reproduction, la défense de territoire voire la perception de prédateurs. Il suffit d’un passage de véhicule pour
inhiber un chanteur isolé de rainette arboricole, mais pas un chœur, probablement parce que l’émergence du
chant est affectée seulement dans le premier cas [26]. Certaines équipes de recherche étudient, de manière
expérimentale et en conditions contrôlées, le stress physiologique chez les rainettes. Les individus mâles soumis
au stress développent des taux de corticostérone plus élevés à l’origine d’une déficience immunitaire et visible
sur la coloration des sacs vocaux chez les mâles devenus moins attractifs pour les femelles [27].

En ce qui concerne la lumière, peu d’études démontrent des effets avérés sur les amphibiens même si l’on peut
supposer raisonnablement qu’avec le bruit, l’implantation d’un giratoire éclairé peut perturber les déplacements
et les migrations. Par ailleurs, les lampadaires attirent les insectes mais aussi les amphibiens prédateurs s'en
nourrissant avec des risques accrus d’écrasement. L’éclairage des voies de circulation n’étant plus une priorité,
le risque devrait s’amenuiser. Il peut toutefois subsister à proximité des agglomérations.

L’impact direct du trafic routier sur les populations


En plus de la destruction et fragmentation des milieux, les collisions mortelles avec les véhicules affectent
directement la démographie de nombreuses espèces mais peu d'études et suivis à long terme évaluent
précisément l'importance de ces impacts [28, 29] sur la dynamique des populations même s'il est très probable
qu'elles contribuent fortement en certains lieux à leur extinction.

Perte d’habitats et fragmentation des milieux (effet barrière, rupture des corridors)
La destruction et la fragmentation des milieux se traduisent par une cascade d’effets sur les habitats et les
populations d’amphibiens : morcellement des habitats en mosaïque, allongement des lisières, augmentation des
distances entre les habitats d’hivernage et de reproduction, isolement des populations, difficulté des amphibiens
à se disperser et à conquérir de nouveaux territoires. Les conséquences sont un déficit démographique, l’absence
de flux d’immigration. Dans les paysages fragmentés, les connectivités spatiales et fonctionnelles sont altérées.
La colonisation de nouveaux territoires et les migrations liées à reproduction ou à l’alimentation sont rendues
difficiles voire impossibles.

Figure 3 : Illustration du phénomène de fragmentation des habitats - Les infrastructures de transport terrestre,
en particulier les routes sont à l’origine d’une perte et dégradation de l’habitat dus à la destruction directe et l’effet
des perturbations (ou effet bordure) de part et d’autre de l’ITT (en gris) et l’isolement. Lorsqu’un tel réseau d’ITT s’accroît,
la superficie des habitats naturels (en beige) diminue et ils deviennent inaccessibles. Les fragments d’habitat peuvent être aussi
trop petits et/ou dégradés pour satisfaire l’écologie du cycle de vie des différentes espèces d’amphibiens, entraînant l’extinction
de leurs populations à court, moyen ou plus long terme (Source : adapté d’après [30] ; © J. Muratet, Ecodiv)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 11


Encadré 3 - Les effets directs (emprise et terrassement) et induits des Aménagements
Fonciers Agricoles et Forestiers (AFAF) liés aux chantiers lors des projets
d’aménagement routier ou de voies ferrées
La consommation d’espace et destruction des habitats naturels lors des travaux de dégagement des emprises et
les terrassements sont les facteurs qui affectent le plus les populations d’amphibiens. En moyenne, pour
1 kilomètre d’autoroute ou LGV, environ 10 à 15 ha disparaissent et il est très difficile de compenser à l’identique
la perte de certains habitats n’ayant pas tous la même fonctionnalité et le même rôle dans l’écosystème. Les
emprunts et les dépôts de matériaux peuvent transformer des surfaces importantes d’habitats naturels. La prise
en considération de ces destructions est à envisager de la même manière que les pertes d’habitats sous emprise
des ITT. Toutefois les emprunts et dépôts peuvent faire l’objet de réaménagements écologiques favorables aux
amphibiens en milieux secs et humides.

Dans le cadre de l’autoroute A 31 (gestionnaire APRR), la carrière de la Chalandrue a servi à fournir les matériaux
de remblais nécessaires au contournement de Dijon. L’emprise de la carrière est de 15 ha partagée en deux par
l’A31, la profondeur de fouille de 17 m. En fin d’exploitation, une mare de 17 000 m² est creusé dans ce milieu sec.
Un an après l’aménagement les premières pontes de Grenouille rieuse, d’Alyte accoucheur et de Pélodyte ponctué
sont observées, les conditions favorables à leur développement ayant été réunies dans ce milieu neuf tant au niveau
du plan d’eau (ceintures d’hélophytes et hydrophytes) qu’au niveau de l’environnement immédiat terrestre (éboulis,
etc.). Débutée en 1992, cette expérience a fait l’objet d’une convention de suivi de 10 ans durant laquelle un conseil
de gestion s’est réuni auprès d’APRR qui reste propriétaire du terrain. En ce qui concerne ce type de projet, la
création de milieux aquatiques et terrestres favorables, une certaine expérience a été acquise et améliorée au fil
des années. Toutefois, le maintien de milieux pionniers favorables à plusieurs espèces patrimoniales d’amphibiens
pose la question de leur entretien sur le long terme.

Photo 9 : Une exploitation de granulats en Auvergne-Rhône-Alpes (Source : © A. Morand)

Les AFAF, accompagnant la construction des ITT, entraînent également une perte d’habitats et une banalisation
des paysages qui impactent directement les populations d’amphibiens. Les restructurations foncières favorisent
la disparition des éléments fixes du paysage (mares, haies) et l’abandon des cultures prairiales au profit de
cultures annuelles intensives. Si les AFAF sont toutefois moins impactantes que les remembrements historiques
réalisés sans études d’impacts, ils n’empêchent ni les changements d’usage des sols et les disparitions d’habitats
favorables aux amphibiens, ni les ruptures de corridors qu’ils empruntent. Les grands projets d’infrastructures
(LGV, Autoroutes) sont réalisés dans des conditions particulières : rapidité d’exécution, tensions liées aux
disparitions d’emprises (10 à 12 ha/km), importance des linéaires et surfaces restructurées (250 ha/km). De ce
fait, les AFAF intègrent avec difficulté les éléments fins du paysage (micro habitats, corridors locaux, sites de
croissance et de chasse, d’hivernage ou de reproduction) indispensables à la conservation des amphibiens. Les
conséquences sur les dynamiques de population aux échelles locales ou régionales ne sont pas évaluées, elles
sont probablement élevées si l’on considère les surfaces impactées et l’importance des changements d’usage
des sols.

A contrario, les grandes ITT génèrent des « dépendances vertes » non négligeable en termes de surface et
de linéaire. L’idée de les utiliser comme habitats de substitution ou comme trame verte longitudinale fait son
chemin. Les dépendances vertes offrent potentiellement un intérêt pour la faune terrestre dans son ensemble (y
compris les amphibiens). Leur contribution au fonctionnement des réseaux écologiques doit considérer les
éléments favorables (surface, naturalité, linéaire) et défavorables (pollution de proximité, risques d’écrasement,
modes de gestion souvent incompatibles avec une gestion conservatoire), sans oublier que les dépendances
vertes sont toujours des corridors en « pas japonais » interrompus à chaque franchissement de l’ITT par des
voies secondaires (risque d‘écrasement élevé à chaque intersection).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 12


Mortalité par collision
Les écrasements par les véhicules automobiles affectent directement la démographie de nombreuses espèces.
Peu d'études et de suivis évaluent précisément les conséquences, à long terme, sur la dynamique des
populations même s'il est très probable qu'elles contribuent fortement, en certains lieux, à leur extinction.

Un trafic de 10 véhicules à l'heure entraînerait la mort de 30 % des crapauds communs adultes en migration tandis
qu'entre 24 et 40 voitures par heure, 50 % des Crapauds communs seraient éliminés et 90 % avec 60 véhicules /
heure [31, 32, 33]. Cette mortalité est aussi évaluée pour d’autres espèces d'amphibiens (anoures et urodèles) entre
34 et 61 % lors de la traversée d'une route à fort trafic (3200 véhicules / jour). La mortalité augmente entre 89 à
98 % sur autoroute (trafic supérieur à 20 000 véhicules par jour) [28, 34]. Les données chiffrées du nombre
d’amphibiens tués sur les routes sont rares. Après une nuit d'orage, c'est 456 tritons palmés, 314 rainettes
méridionales, 2 crapauds calamites et 2 grenouille rieuses qui ont été trouvé écrasés sur un tronçon de 60 m d'une
route à faible trafic, située près de Montpellier (Cheylan com. pers.). A titre de comparaison, après une nuit ou une
matinée de comptage lors de déplacements d’amphibiens en migration de reproduction, il est trouvé respectivement
près de 800 et 3600 amphibiens écrasés (Grenouille rousse et Crapaud commun, pour l’essentiel) sur un tronçon
de route d’une longueur respective comprise entre 300 m (Le Cheylas en Isère) et 1,5 km (Kruth-Wildenstein dans
le Haut-Rhin). Ces valeurs sont élevées et renforcent l’hypothèse que certaines populations subissant de lourdes
pertes peuvent s’éteindre en quelques années si aucune mesure correctrice liée à l’impact de la route n’est
effectuée. L’évaluation du nombre d’amphibiens tués sur les routes peut aussi être effectuée, de manière indirecte,
par le biais des dispositifs temporaires et le nombre d’individus collectés chaque saison de reproduction. En France,
différentes équipes de bénévoles recensent dans les dispositifs temporaires de franchissement en une saison des
quantités allant de 10 000, 20 000 jusqu'à 45 000 individus qui traversent une seule route. C’est donc quelques
centaines de milliers d’amphibiens qui sont sauvés chaque année de l’écrasement mais pour combien d’amphibiens
tués sur les routes !
3
Les biologistes et herpétologues suisses estiment à environ 5 millions d’amphibiens adultes écrasés en
Suisse chaque année lors de leur migration (principalement de reproduction). De cette évaluation, c’est entre
25 à 50 millions d’amphibiens adultes qui périssent, en France, chaque année [35]. A ces chiffres déjà
impressionnants s’ajoutent plusieurs millions de juvéniles qui subissent très probablement le même sort. Un trafic
de 60 véhicules par heure élimine presque la totalité des crapelets en migration post-métamorphique.

Illustration et Photos 10 à 13 : En haut à gauche : Vue du pneu (Source : dessin de Marion Jouffroy pour le Colloque de Namur, 2016) ;
En haut à droite : Grenouille agile (Source : © ATENA 78) ;
En bas à gauche : Triton crêté (Source : © ATENA 78) ;
En bas à droite : Crapaud commun (Source : © A. Morand, Cerema Est)

3 www.karch.ch

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 13


Encadré 4 - Fragmentation des populations et isolement génétique
La connectivité des habitats est un élément clé de la viabilité régionale des populations d’amphibiens [36]. Les
amphibiens sont un excellent modèle pour tester en grandeur nature et selon une approche en génétique,
l’hypothèse d’une barrière infranchissable à la dispersion que jouent les grandes infrastructures dans les
paysages fragmentés [37]. En France, deux études récentes montrent que le cloisonnement du paysage par les
ITT (ferroviaire et autoroutière) est une problématique complexe et que la barrière génétique ne s’exerce pas de
manière systématique même sur des autoroutes anciennes ou des LGV récentes dépourvues de passage
spécifiques à la petite faune (et de crapauducs).

Une première étude de génétique du paysage, par le programme Copafaune en partenariat avec les gestionnaires
d’infrastructure RFF et APRR [38, 39, 40], montre que l’autoroute A6 en Bourgogne ne constitue pas une barrière à
la dispersion du Triton alpestre. Dans le contexte étudié, les tritons alpestres empruntent accidentellement et en
nombre suffisant des ouvrages hydrauliques non dédiés. Ils franchissent l’autoroute avec succès et assurent un
brassage génétique. De plus, le travail réalisé sur l’A6 laisse également apparaître que les fossés de drainage de
l’autoroute faciliteraient la dispersion le long de l’infrastructure. Dans le programme « Trans-fer » [41], quatre
tronçons d’environ 20 km constitués de deux voies ferrées classiques, la LGV Est-Européenne en Lorraine et la
LGV Paris-Lyon en Bourgogne ont fait l’objet d’une analyse génétique appliquée à la Salamandre tachetée. Malgré
une structuration génétique des populations liée à la distance et la surface de l’habitat, le réseau ferré n’a aucun
effet barrière sur les populations. Les quelques individus qui franchissent avec succès les voies ferrées et les LGV
assurent un brassage génétique suffisant à cette échelle d’étude. En absence d’ouvrage dédié aux amphibiens, il
existe donc malgré tout une transparence interne aux LGV avec des possibilités de traversées tous les 310 m sur
la LGV Est-Européenne et 390 m sur la LGV Sud-Est.

Les LGV offrent en définitive, suffisamment de possibilité de traversées occasionnelles d’individus pour éviter
l’isolement génétique des sous populations. L’analyse génétique appliquée au Triton alpestre (A6) et à la
Salamandre tachetée (quatre tronçons de voies classiques, LGV Est et Sud-Est) conclue à l’absence de barrière
génétique. Les ITT agiraient comme des filtres plutôt que comme des barrières. Ces résultats confirment l’intérêt
de concevoir les ouvrages hydrauliques et les ouvrages agricoles ou forestiers comme des ouvrages mixtes
utilisables par les amphibiens. Chez la Salamandre tachetée en région parisienne, un effet négatif des voies
routières rapides a été détecté. En revanche, la même étude a démontré l’absence d’effet de la ligne RER et des
LGV situées dans l’aire d’étude [42].

Il faut néanmoins être prudent sur l’interprétation de tels résultats et les liens de cause à effet ou au contraire
l’absence de lien. Ces résultats confirment d’une part l’intérêt des petits ouvrages hydrauliques à concevoir
comme des ouvrages mixtes facilement utilisables par la faune terrestre - y compris les amphibiens - et d’autre
part le rôle que pourraient jouer certaines emprises pour assurer la transparence génétique et un fonctionnement
envisageable en métapopulation aux échelles locales et régionales. Il s’agit toutefois d’associer à de telles études
de génétique du paysage, d’autres approches complémentaires, notamment de dynamique des populations
cibles. Il se pourrait que l’extinction de la population advienne peu après la création d’une infrastructure même en
l’absence d’un effet de différenciation génétique. Les conséquences de la fragmentation sont une problématique
qui doit être considérée au cas par cas selon le contexte, chaque espèce ainsi que les populations étudiées.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 14


1.3.3 - Les services rendus par les amphibiens
Les amphibiens rendent de nombreux services méconnus et sous-évalués [43]. Ils sont à la fois prédateurs
(fourmis, vers, limaces, cloportes, etc.) et proies, à l’état adulte, notamment de différentes espèces de reptiles,
d’oiseaux et de mammifères (couleuvres, héron, chouette, putois, loutre, etc). Leurs larves et têtards sont une
nourriture de choix pour les poissons et les invertébrés prédateurs aquatiques (dytique, larve de libellules). Ils
recyclent la matière organique et contribuent aux transports de matières entre les milieux aquatiques et le milieu
terrestre [3]. Plusieurs découvertes médicales majeures se sont appuyées sur les amphibiens (test de grossesse)
ou font l'objet d'enjeux majeurs actuels de recherche (régénération des membres après amputation). L’asthme,
les maladies de peau, certains cancers en ont bénéficié également ou font l’objet de pistes de recherche actuelles.

Enfin, du point de vue socio-culturel, ils sont omniprésents en Occident et trouvent aujourd'hui un capital
"sympathie", tout particulièrement les rainettes et tritons, auprès des citoyens de nos sociétés urbaines. Ils sont
utilisés très fréquemment et à juste titre comme l'un des symboles d'une bonne qualité de notre environnement !

1.3.4 - Quelle protection et quel statut ?


Le statut des différentes espèces eu égard au droit est précisé en Annexe 1 :
• le droit international (convention de Berne, 1979) engage les parties signataires à prendre les mesures
nécessaires pour assurer, entre autres, la conservation des espèces animales listées dans deux
annexes. L’annexe II cite les espèces à protéger strictement, et l’annexe III celles dont l’exploitation, qui
reste autorisée, doit être réglementée en vue de leur protection ;
• le droit européen avec l’annexe IV de la Directive « Habitat-Faune-Flore » (92/43/CEE) du 21 mai 1992 liste
les espèces bénéficiant d’une protection stricte. Les espèces en France inscrites à l’annexe II de cette
directive bénéficient d’une protection stricte incluant leurs habitats. Les espèces de l’annexe V voient
leur exploitation réglementée en vue de leur protection ;
• le droit national français avec l’article L.411-1 du Code de l’Environnement et par l’arrêté du
22 juillet 1993 du B.O. (remplacé par celui du 19 novembre 2007) fixe la liste des amphibiens et reptiles
protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection (tous les amphibiens sont protégés,
avec des dérogations ou non selon les départements - pêche, capture et mise en vente - pour la grenouille
verte commune et la grenouille rousse). La simple manipulation d’un individu en vue de son identification
doit faire l’objet d’une demande d’autorisation de capture à la DREAL de la région concernée ; lorsque
des destructions d’individus sont inévitables, une demande exceptionnelle de dérogation motivée est
adressée au Conseil Scientifique Régional de Protection de la Nature (CSRPN) et au Conseil National
de Protection de la nature (CNPN). Les déplacements d’individus font également l’objet d’une
autorisation. Le CSRPN et le CNPN sont particulièrement exigeants lorsqu’il s’agit d’espèces faisant
l’objet d’un Plan National ou Régional d’Action.

Ces statuts de protection contribuent à établir certains Plans d’Action Nationaux définissant des actions de
conservation et de restauration des espèces menacées à l'échelle du territoire. Des déclinaisons régionales
concernent les espèces les plus menacées. Trois plans nationaux d’action ont été réalisé (PNA Sonneur à ventre
jaune 2011-2015, PNA Crapaud vert 2014-2018, PNA pélobate brun 2014-2018). Plusieurs plans régionaux d’actions
(PRA Sonneur à ventre jaune, Pélobate, crapaud vert, etc.) ont été également effectués.

Le tableau en Annexe 1 synthétise pour chaque espèce située dans son groupe taxonomique (ordre et famille),
les niveaux de protection et les statuts de même que l'existence d'un PNA.

Les listes rouges d’espèces menacées sont bien connues des spécialistes et médiatisées auprès du grand public.
Elles sont devenues des instruments largement utilisés pour attirer l’attention publique et politique sur les
problèmes d’érosion de la biodiversité, aussi bien à l’échelle mondiale qu’au niveau national et régional.
L’attribution d’une espèce à une catégorie de menace repose sur l’avis de plusieurs spécialistes, réunis lors de
sessions de travail nationales ou internationales. Les listes rouges sont évolutives et sans cesse améliorées ces
dernières années, de même que l’IUCN s’est lancée dans l’élaboration de listes rouges régionales. Nous
4
renvoyons au site de l’IUCN .

4 http:/www.iucn.org

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 15


1.3.5 - Les méthodes de dénombrement et de suivi
Les amphibiens de France occupent des milieux très variés. Les méthodes d’observation et de détection des
différentes espèces dépendent de leurs exigences écologiques, de la période de prospection et de l’objectif
poursuivi (présence / absence, dénombrement qualitatif, quantitatif).

En fonction des groupes d'espèces et des objectifs de l’étude, il existe aujourd’hui un panel de techniques
d’échantillonnage et de détection assortis de précautions d'emploi. Nous renvoyons aux travaux existants [44,
45, 46].

Quels que soient les techniques, il s’agit de bien connaître l’écologie des espèces que l’on souhaite observer et
notamment les conditions météorologiques qui leur sont favorables. Deux facteurs influencent tout
particulièrement l’activité des amphibiens : l’humidité et la température. Les déplacements se font souvent lors
des nuits tièdes et humides. Des redoux exceptionnels lors de certains hivers avancent la migration. Inversement
une chute brutale ou tardive des températures stoppe ou retarde les migrations. Les activités de chant sont aussi
largement sous l’influence de la présence ou non de vent.

Figure 4 : Calendrier des périodes de reproduction dans une région du centre de la France
(Source : D’après [43]).

Chaque observation doit faire l’objet d’une détermination précise à l’aide de guides et clés d’identification,
d’enregistrements audio tous reconnus comme valides [8, 47, 48]. Les confusions en matière d’identification sont
possibles malgré le faible nombre d’espèces (à nuancer cependant avec le grand nombre de stade de vie
possibles chez les amphibiens : œuf, larve, adulte), par conséquent il est nécessaire de s’adjoindre la
collaboration et les conseils de naturalistes et scientifiques reconnus aptes à obtenir des autorisations d’études
et de prélèvement auprès des instances administratives compétentes.

L'Annexe 2 illustre pour quatre espèces (2 anoures ; 2 urodèles) et différentes écophases (larve et adulte)
différents critères de détermination morphologique utilisés par les spécialistes.

Recommandation importante : en raison de la possibilité de propagation de maladies émergentes d’une


population infectée à une population saine, quelle que soit la technique utilisée (pour les milieux aquatiques), il s’agit
de réaliser, après chaque inventaire et campagne d’observations dans un secteur, un nettoyage complet du matériel
5
utilisé - dont les bottes ou le pantalon de pêche - à l’eau de javel diluée à 10 % (trempage et brossage) .

5 Dejean T., Miaud C. & Ouellet M., 2007.- Proposition d’un protocole d’hygiène pour réduire les risques de dissémination d’agents infectieux
et parasitaires chez les amphibiens lors d’intervention sur le terrain. Bulletin de la SHF, 122, 40-48.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 16


2 - Les mesures et dispositifs de franchissement
des infrastructures de transport terrestre
La doctrine "Eviter, Réduire, Compenser" (E, R, C) invite, en théorie, à prévenir plutôt que guérir [49], donc à
prendre en compte, dans un premier temps, la présence de sites d'intérêt biologique en amont des travaux. Les
sites de reproduction, les routes migratoires et de déplacement privilégié des amphibiens constituent des sites à
éviter. Le choix du tracé de nouvelles infrastructures de transport terrestre de même que les projets de
requalification de voies existantes doivent tenir compte et éviter, dans la mesure du possible, les impacts.

Les dispositifs de franchissement des infrastructures par la faune, et en particulier par les amphibiens, souffrent
encore d’une forte carence en matière de retour d’expérience, et s’appuient sur des techniques qui ont peu évolué
depuis plusieurs décennies. Pourtant dans le même temps, l’évolution négative des milieux, l’état des populations,
l’émergence des préoccupations de trame verte et bleue imposent de proposer des solutions techniquement,
écologiquement et économiquement efficaces. Il ressort des différents colloques et rencontres qui ont été
effectués au cours de ces trois dernières décennies [33, 50, 51] et de différents travaux de recherche (méta-
analyse, revues) en Europe ou à l’international [34, 52, 53, 54, 55] que cette problématique n’a que peu progressé.
Même s’il existe quelques tentatives de guides et préconisations sur cette problématique en ce qui concerne les
amphibiens, on manque encore de solutions d’ingénierie pleinement efficaces et au meilleur rapport coût-bénéfice
à déployer en différents contextes [46, 56, 57, 58]. Il n’empêche que différentes mesures et dispositifs plus ou
moins pérennes dans le paysage visant à réduire la mortalité, et rétablir les flux de part et d'autre de l'infrastructure
sont à la disposition des gestionnaires et spécialistes en charge de l’ingénierie des routes et de la planification
des transports, entreprises de BTP, etc.). Cette seconde partie a pour objectif de les lister et contribuer à leur
meilleure utilisation dans l’attente de leur amélioration et/ou d’innovations futures.

2.1 - La fermeture temporaire des routes pendant les migrations


La déviation de la circulation par fermeture d’une section de route protège efficacement les amphibiens en
migration. La mesure ne peut être que provisoire (quelques semaines lors des migrations de printemps). Elle est
économique mais ne s’applique que si la circulation routière peut être déviée temporairement ou fermée durant
la nuit (voie forestière ou touristique).

Citons pour exemple la fermeture de la RD13 (contournement du lac de Kruth-Wildenstein, Haut-Rhin). Un arrêté
préfectoral autorise la fermeture de cette voie secondaire (usage touristique essentiellement) sur 4,5 km, de 20h
à 7h du matin, durant la migration de reproduction. Une barrière, un panneau d’interdiction et des
tri-flashs signalent la fermeture temporaire. Dans le Parc naturel régional « Oise Pays de France », l’Office
National de la Forêt et l’Institut de France ferment une section de voie forestière privée (4800 m) lors des
migrations prénuptiales des Crapauds communs, Grenouilles agiles et Tritons ponctués. Cette fermeture nocturne
(23h-5h) semble offrir le meilleur rapport coût/efficacité.

Dans les autres zones d’écrasements d’amphibiens, il est aussi possible d’observer des panneaux plus ou moins
« artisanaux » alertant du risque de chaussée glissante et d’information sur les migrations d’amphibiens. Cette
signalisation temporaire, en période de migration, a comme principal objectif d’inciter les automobilistes à ralentir.
Elle prend encore davantage d’importance lors des opérations de comptage et de sauvetage (cf. 2.2) par des
bénévoles du fait d’un risque d’accident humain. Lorsque cela est possible, il est recommandé d’associer le signal
de danger à un tri flash et une limitation de vitesse pour avertir de la présence de piétons à proximité des
chaussées. A notre connaissance, la pose de ralentisseur pérenne n’a jamais été mise en œuvre dans le cadre
de ce type de projet, ce type d’accompagnement pourrait être un dispositif pourtant bien utile en particulier pour
la sécurité des bénévoles et/ou professionnels qui interviennent sur ces opérations de sauvetage.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 17


Photo 14 : Panneau d’interdiction temporaire Photo 15 : Panneau signalétique informant des enjeux
de la circulation d’une voie forestière proche de la RD 85, du site Forêt de Carnelle - (Val d’Oise) dont des généralités
Forêt de Carnelle (Val d’Oise) sur les amphibiens, groupe d’animaux qui bénéficient
(Source : © A. Morand, Cerema Est) d’une telle mesure d’interdiction de la circulation
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

2.2 - Les installations temporaires de protection


Les dispositifs temporaires sont mis en place, notamment lors de l’isolement d’un chantier, d’opération de suivi
préalablement à un projet de voie nouvelle, ou de protection temporaire en attendant un aménagement définitif
(sur voie existante). Le principe général est celui de poser cet obstacle le long de la route ou autour de l’emprise
d’un chantier pour bloquer son accès. Lorsqu’il s’agit de collecter les amphibiens, elle est associée à un dispositif
de piégeage tel que des seaux enterrés dans le sol. Les animaux piégés sont ramassés quotidiennement, durant
la nuit ou tôt le matin. Une hauteur minimale de la barrière de 40 cm (optimum 60 cm) est recommandée pour
être efficace. Pour dissuader les amphibiens et les autres espèces de grimper, il est aussi important de prévoir un
rabat ou d’incliner la barrière. La barrière doit également être enterrée (20 à 40 cm) ou rabattue au sol et lestée par
un cordon de terre ou de sable ou bien fixée par des broches. Dans les opérations de comptage ou de protection
temporaire, les barrières sont mises en place pour quelques semaines. Pour protéger un chantier, elles peuvent
être mise en place pour 3 à 4 ans. Elles doivent alors être solidement fixées au sol et leur efficacité doit être
régulièrement vérifiée.

2.2.1 - Les barrières provisoires : différents types de matériaux


Différents matériaux peuvent être utilisés pour la barrière provisoire. On peut les regrouper en 4 grands types :
• les grillages « amphibiens » sont couramment utilisés sur chantier. Ce treillis improprement désigné
« grillage batracien » n’est pas une barrière totalement étanche. La maille (6,5 x 6,5 mm) stoppe les
crapauds et grenouilles adultes mais laisse passer les tritons de petite taille (adultes et juvéniles). Le
treillis métallique n’est pas réutilisable (démontage délicat, encombrement, poids, coût). Son utilisation
se généralise sur autoroute pour clôturer les emprises, en complément des treillis grande faune. Il est
réservé à la protection de la petite faune et son efficacité vis à vis des amphibiens est partielle. Pour
stopper l’ensemble des amphibiens y compris les tritons (juvéniles et adultes) des mailles de 3 mm sont
nécessaires. Ces très petites mailles n’existent pas en treillis métallique mais sont disponibles en grillage
de plastique extrudé (polyéthylène) ;
• les films ou géo membranes bâches (polyéthylènes, polychlorures de vinyle) sont déclinées en
différentes épaisseurs (30 microns : film mince et fragile, 50 à 80 microns : film à usage agricole).
Au-delà, les bâches gagnent en résistance et longévité mais deviennent lourdes à manœuvrer. Elles
peuvent être renforcées par une grille de polyester (bâche de sous toiture). Les bâches en polyéthylène
3
sont plus économiques que celles en PVC. La toile polypropylène tissée (80 à 130 g/m ) utilisée en
horticulture comme toile de paillage est souvent utilisée comme barrière. Les films, bâches et toiles
peuvent être équipés d’œillets de fixation et fabriqués sur mesure. A la différence des grillages, le vent,
le « souffle » des camions, les venues d’eau peuvent détériorer les bâches, il s’agit donc d’éviter autant
que possible les écoulements d’eau et de s’éloigner des chaussées ;

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 18


• les dispositifs mixtes : il s’agit de treillis métalliques (« grillage à poule » ou « grillage à mouton ») associé
à un treillis en plastique souple. Ce dispositif combine les avantages des deux produits et permet
d’adapter facilement un retour de grillage ou bavolet présentant un angle infranchissable pour les
animaux. Il s’agit d’installer ce dispositif du côté opposé au sens du déplacement par les amphibiens
que l’on souhaite empêcher ;
• les géotextiles non tissés, les brises vues, filets pare grêle (maille de 0,5 x 0,7 mm) sont à éviter
(possibilité d’escalade, fragilité).

Photo 16 : L’un des enjeux est d’éviter que les amphibiens


(ci-contre adultes de petits tritons et juvéniles de Salamandre
tachetée) ne grimpent l’obstacle. Ci-contre, la bâche lisse
et l’absence de bavolet n’empêchent pas les amphibiens
d’escalader et passer de l’autre côté
(Source : © M. Gigleux, Cerema Est)

2.2.2 - Les piquets et les seaux de capture des amphibiens


Les piquets sont généralement en échalas ou tuteur en différentes essences (châtaigner, acacia, eucalyptus, mélèze)
fournis en différentes formes (rond, demi rond, fendus ou sciés). Les tasseaux de pin (13x27, 32x32 mm) sont fragiles
et de coût élevé. Les piquets de bois sont mis en place à la barre à mine ou à la masse (avec ou sans pré trou).
Ils s’abîment après quelques années d’utilisation et sont parfois difficiles à déterrer.

Les piquets de clôture électrique équipés de passe fil et d’un appui pour enfonçage peuvent être une solution
efficace. Les piquets de fer à béton (diamètre 0,8 cm), sont facile à planter et à déterrer, et ils sont durables. Peu
volumineux, ils sont faciles à stocker mais nécessitent des dispositifs particuliers de fixation (type clôture
électrique pour bétail).

Pour ne pas gêner les déplacements des amphibiens le long de la bâche, les piquets sont placés à l’intérieur des
emprises.

La tension de la bâche est assurée par un fil de fer fixé sur le sommet des pieux en bois par des cavaliers ou bien
sur un fer à béton, accroché à des isolateurs électriques ou passe-fil pour clôture électrique. Des tendeurs
améliorent la tension. La fixation est assurée par des agrafes ou les œillets intégrés à la bâche. La pose est
simplifiée en doublant la bâche à cheval sur le fil de tension (pas de fixation, gain de temps mais on double la
surface de bâche utilisée).

Les seaux de capture : ils doivent avoir une profondeur de 25 à 40 cm. La distance recommandée entre
les seaux est de 10 m (urodèles) à 20 m (anoures). Ils sont percés (quelques trous de 3 mm à la mèche à bois)
et posés, de préférence, sur un lit de gravier pour faciliter l’évacuation de l’eau et éviter la noyade des animaux
piégés. Le bord des seaux doit être situé au niveau du sol, au plus près de la bâche. Ils peuvent être remplacés
par un tuyau de PVC (même diamètre).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 19


Photo 17 : Dispositif le plus utilisé, soit un seau enterré dans Photo 18 : Exemple d'amélioration d’un seau
le sol placé près de la clôture pour recueillir les amphibiens, avec l'existence d'une section de tube PVC ouvert directement
ici des crapauds communs. Attention, il ne semble pas y avoir sur le sol nu et muni d'un couvercle lorsque il s'agit d'interrompre
sur ce dernier des trous évacuant l’eau, etc. la capture sur la RD 940 - (dunes de Slack)
(Source : © A. Morand, Cerema Est) (Source : © A. Morand, Cerema Est)

Les seaux alimentaires à bords verticaux (obtenus dans les restaurants collectifs) possèdent un couvercle
qui peut être découpé au cutter en laissant un rebord de 2 à 3 cm pour empêcher les animaux de s’échapper
(Ø 27 cm, h 26 cm).

Les conteneurs horticoles offrent des dimensions intéressantes et sont équipés d’orifices à la base pour évacuer
l’eau (Ø 26 cm, h 28 cm ou diamètre 30 cm, h 27 cm). Les seaux à eaux, évasés (diamètre 26 à 32 cm, h 24 à
28 cm) selon les contenances (10 à 15 l) n’ont pas de couvercle et sont facilement escaladés par les tritons.

Pendant le pic de migration et en fonction du nombre d'animaux, il est recommandé d'inspecter très régulièrement
les seaux (1 relevé tôt chaque matin complété par 1 à 3 relevés selon les nuits).

Afin d'éviter le risque de dessiccation, en particulier des plus jeunes individus de certaines espèces, il est
recommandé d'ajouter au fond du seau, des feuilles mortes, un peu de terre afin de conserver une certaine
humidité. Une éponge régulièrement mouillée peut également être utilisée.

Dans l’objectif d’anticiper la mise en place d’un éventuel dispositif pérenne, il est fortement suggéré de numéroter
les seaux dans la partie supérieure au marqueur indélébile ou au stylo de blanc correcteur. La toile peut aussi
faire l’objet d’une numérotation. La numérotation correspond à un numéro d’ordre croissant ou parfois au métrage
à partir du point d’origine, elle sera indispensable pour identifier les zones de passage privilégiées par les
amphibiens utiles à la localisation des traversées sous-chaussées (cf. 2.2.6).

2.2.3 - Où se les procurer ?


Il existe de nombreuses solutions « fait-maison » et aussi de très nombreux fournisseurs quant aux choix des
barrières, des seaux et piquets. Aujourd’hui, certains se sont même spécialisés (Maibach, Diatex, Agrotel, etc.)
et proposent différents kits solides prêts à l’emploi. Les barrières mobiles comprennent une bâche en PVC
de 0,70 m de large (rouleau de 50, 100, 500 m), des piquets de maintien tous les 2 m, des épingles de fixation
au sol lorsque la barrière n’est pas enterrée, des tendeurs. Le dispositif intègre un bavolet anti-escalade.
Le matériel est complet, léger, mobile (installation et désinstallation rapides). Ces systèmes robustes, réutilisables
durant plusieurs décennies sont parfois utilisés comme barrière définitive associée à des traversées sous
chaussée.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 20


Photos 19 et 20 : Un exemple, en cours de montage sur la voie RN 57 des Mercureaux (en 1999) de « kit » de dispositif
de protection temporaire qui comprend une bâche polyester de 50 cm de large, des piquets ajustables en hauteur,
des éléments de fixation coudés (45°) en partie supérieure pour former un bavolet infranchissable à placer tous les 2 m
(Source : © M. Gigleux, Cerema Est)

2.2.4 - Illustration et exemples des grands types de barrières provisoires


En ce qui concerne la pose de ces dispositifs temporaires de protection, on peut distinguer plusieurs
configurations qui répondent à différents objectifs et mouvements d’amphibiens.

Le dispositif « simple » d’un seul côté de la route

Généralement, le dispositif de protection temporaire avec seaux est placé d’un seul côté de la voie. C’est le cas
le plus fréquent qui protège les amphibiens adultes, en général, des espèces à reproduction explosive traversant
les chaussées routières en migration prénuptiale (durée environ 2 mois tout au plus). Lorsque les migrations aller
et retour se chevauchent, les amphibiens en migration retour se retrouvent piégés par le dispositif. Une solution
pour minimiser ce risque, est d’adapter du côté de la barrière, un système incliné (ou bavolet) qui permet aux
animaux sur le retour de franchir l’obstacle. Il n’empêche toutefois qu’un certain nombre d’animaux adultes
risquent malgré tout d’errer sur la chaussée et de mourir écrasés. L’enlèvement du dispositif suffisamment tôt
évite ce risque. Lors de l’émergence des métamorphosés par centaines de milliers d’individus, le risque
d’écrasements demeure évidemment fort si le trafic est dense à cette période !

Le dispositif « double » des deux côtés de la route

Les doubles barrières avec seaux sont rarement mises en œuvre en protection temporaire sur la voirie existante
(coût plus important du matériel, durée de l’opération). Au droit du lac du Der-Chantecoq (Marne), la LPO
Champagne Ardenne a installé les bâches plastiques durant plusieurs années au préalable de la construction
d’un passage pérenne de chaque côté de la RD 13 sur 700 ml (x2) durant les 3 mois des migrations pré- et post
nuptiales des amphibiens reproducteurs adultes.

Un très faible nombre d’installations temporaires a été utilisée, de manière volontaire, en France pour la migration
retour des jeunes métamorphosés depuis les sites aquatiques jusqu’à leurs habitats terrestres. L’opération
conduite par le gestionnaire EDEN 62 sur la dune de Slack (site N2000, Grand Site de France) est l’une des rares
expériences dans l’attente de la construction d’un dispositif permanent (solution à l’étude par le Conseil
départemental du Pas-de-Calais). Elle concerne, notamment l’aide au franchissement d’une espèce à fort enjeu
(le triton crêté, Annexe 2 et 4 Directive Habitats) et est conséquente en moyens humains mobilisés chaque année,
bien que localisée à un tronçon réduit (150 ml) présentant le plus grand risque d’écrasements.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 21


Photo 21 : Un dispositif temporaire, installé seulement du côté de Photo 22 : Un exemple de dispositif quasi-pérenne sur
l’habitat terrestre (ici une forêt), qui bloque pendant quelques la RD 940 - dunes de Slack et site du Conservatoire
semaines le déplacement des amphibiens en sortie hivernale et (Atelier Chantier Insertion Rivages Propres & Eden 62) :
migration prénuptiale (RD 71) en direction de l’étang - Il est barrière permanente d’une centaine de mètres des deux côtés
recommandé de ne pas implanter les piquets du côté d'où arrivent de la voie (RD 940) avec collecte des amphibiens 6/12 mois)
les amphibiens (Source : © A. Morand, Cerema Est) (Source : © A. Morand, Cerema Est)

Le dispositif en protection de chantier est placé de chaque côté des limites d’emprise, sans seau de comptage
(le but étant d’éviter toute incursion sur le chantier). Les bâches ou treillis peuvent rester sur site durant 4 années
(nécessité d’une surveillance régulière).

Photo 23 : Dispositif avec bavolet sur le chantier de la voie rapide Photo 24 : Dispositif avec bavolet sur le chantier de la RN4
de Pierre-Villers (Source : © A. Morand, Cerema Est) à Heming (Source : © A. Morand, Cerema Est)

2.2.5 - Les dispositifs temporaires de protection : coût-efficacité et préalable aux dispositifs pérennes ?
Les installations temporaires de protection, correctement mises en place et régulièrement entretenues
(sur chantier ou sur infrastructure existante) sont très efficaces. Toutefois, l’efficacité doit être évaluée sur
plusieurs années.

La mise en place et la gestion quotidienne des installations temporaires nécessitent des personnes en nombre
qui circulent sur les accotements à proximité immédiate des véhicules. Les intervenants traversent les voies de
circulation. Parfois des visites d’enfants sont organisées à titre pédagogique. Le danger est permanent de nuit
comme de jour. Un tel dispositif doit être signalé aux automobilistes (signalisation temporaire de danger) et tous
les intervenants (bénévoles, prestataires, scolaires) doivent porter des gilets fluorescents. Il s’agit de s’assurer
de ce strict minimum en matière de sécurité en informant les services compétents (services gestionnaires de
la voie et Mairie).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 22


Le coût total des dispositifs temporaires est sous-estimé parce que ces installations sont, le plus souvent, mises
en œuvre par des bénévoles. Les barrières temporaires sont considérées comme étant une alternative
économique aux crapauducs. Il a été évalué toutefois que sur 10 années de cette opération de sauvetage, le
dispositif de protection temporaire et sa gestion représente environ ¼ du coût de l’aménagement d’un dispositif
permanent. Pour autant, ce type d’opération ne dure généralement pas au-delà de 10-15 ans (lassitude,
épuisement et non renouvellement des bénévoles). Sur le barrage réservoir du Der, l’opération « SOS
Grenouille » a duré 11 ans (2001 à 2011) puis le Conseil Général de la Marne a réalisé le crapauduc, fonctionnel
en 2012 [59]. Sur ce site, la LPO Champagne-Ardenne a mobilisé au total 24 bénévoles pour assurer les relevés
quotidiens des seaux durant 3 mois sur 1,4 km de bâche. La mise en place du dispositif a mobilisé une dizaine
de bénévoles durant une journée. La gestion des relevés quotidiens (de 30 mn les jours de gel à 4h lors des pics
de migration), représente 300 h de présence auxquelles s’ajoutent une cinquantaine d’heures nécessaires à
l’organisation des plannings de relevé et à la saisie des données. Lorsqu’elles sont installées et suivies par des
salariés, le coût peut vite devenir élevé, motivant une pré-étude pour la création d’un dispositif permanent de type
« crapauduc ». C’est le cas de plusieurs espaces protégés ou services « environnement » en charge de ce type
de dispositifs depuis ces dernières années.

Quelle que soit la motivation à l’abandon d’un dispositif temporaire en vue d’étudier une solution pérenne,
il s’agit d’envisager avec rigueur les avantages et inconvénients, de même que la faisabilité d’une telle solution
en ce lieu. L'un des enjeux majeurs est de connaître l’ensemble des points chauds d’écrasements et d’évaluer
où un dispositif pérenne est le plus prioritaire.

2.2.6 - Les conditions d’implantation et ses enjeux associés


Il est essentiel de bien connaître la répartition spatiale des déplacements lors des migrations pour le choix de
l'emplacement des barrières et passages sous la chaussée de même que la longueur de l'ouvrage. Une étude
préliminaire est donc nécessaire. Elle s’appuie généralement sur les données déjà disponibles par la pose d'une
barrière temporaire (dans le sens des migrations vers le site de ponte) et de seaux enterrés numérotés. En
fonction des quantités d’amphibiens trouvés chaque matin dans les seaux, il est possible de définir les routes
migratoires ou couloirs préférentiels de migration et en conséquence le linéaire qu'il s'agit d'aménager voire le
nombre de tunnels nécessaires. L’information sur les stades de vie peut être très instructive également. Cette
connaissance fine, de la nature et de la quantité des individus qui se déplacent, peut s'accompagner de la
recherche des sites d'hivernage et de l'ensemble des autres sites de ponte. Ces nouvelles informations font appel
à d'autres méthodes de prospection pouvant être utiles afin de préciser encore davantage les enjeux du projet,
à savoir quelles espèces occupent le site en phase terrestre et ses alentours, celles communes et abondantes
ou encore celles patrimoniales. Elles feront alors l'objet d'attentions spécifiques en amont du projet, etc.

Figure 5 : Amphibiens comptabilisés dans les seaux en 2003 de la réserve naturelle nationale de l’Etang du Grand Lemps (Isère).
Les Tritons, en particulier les espèces de petite taille représentent l’essentiel des animaux capturés dans le dispositif.
Le diagramme détermine la section à enjeux de conservation (seaux 278 à 702) sur laquelle a été aménagée le batrachoduc
à raison d’une traversée tous les 40 m. Aux extrémités, les mouvements sont plus réduits
et les inter-distances entre les traversées sont plus importantes (Source : Figure extraite d’après [60])

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 23


Encadré 5 - Identifier les sites d’écrasement et les hiérarchiser : une action prioritaire
à l’échelle des territoires de grande superficie
Deux exemples ont été choisi en vue d’illustrer cet enjeu important : en régions Auvergne-Rhône-Alpes dans le
département de l’Isère (38) et Ile de France dans le PNR Oise et Pays de France.

Dans les années 2000, le Conseil général de l’Isère (devenu Conseil départemental), en partenariat et sous
l’impulsion du monde associatif local (principalement la FRAPNA, le CORA Isère - devenu aujourd’hui la LPO
Isère - et AVENIR) se sont donné pour objectif d’établir les priorités d’études et d’actions en ce qui concerne le
problème de l’écrasement des amphibiens sur les routes. Une grande enquête et mobilisation citoyenne est
effectuée en 1997 afin de réaliser cette expertise des sites d’écrasements auprès de 533 communes iséroises
ainsi que des associations communales de chasse agréée (ACCA), de pêche et de protection de la nature.
40 sites d’écrasement sont identifiés [61] et notés de 1 à 3 en fonction de plusieurs actions à réaliser. 4 sites ont
fait l’objet d’une opération de sauvetage dans l’année, 10 sites ont nécessité une évaluation quantitative et
localisation plus précises, 26 sites présentaient des données insuffisantes et de nombreux autres ont été évalués
comme étant à écrasements nuls et/ou très faibles. De cette expertise de grande ampleur, différents réseaux
(d’alerte, de comptage), une centralisation et une base de données sont nés peu après. Ces outils ont dynamisé
le réseau de bénévoles et favorisent encore aujourd’hui une plus grande réactivité de la part des pouvoirs publics.
Ils ont permis également de capitaliser l’expérience acquise sur cette problématique en bonne synergie avec le
monde associatif. Cette collaboration a été à l’origine de la construction de plusieurs ouvrages permanents de
type « crapauducs » mis en place sur les sites prioritaires et à enjeux élevés.

Le PNR Oise et Pays de France couvre 60 000 ha dont 20 000 de forêt pour 62 communes. Dans le cadre de
ses missions de protection et gestion adaptée des milieux naturels et du paysage accompagné du monde
associatif, de nombreux sites d’écrasement ont été identifiés. Sur les 11 sites suivis de manière approfondie,
10 sont équipés chaque année d’un dispositif de barrières provisoire (4,5 km de voies privées, communales et
départementales) et 1 est en interdiction temporaire de circulation (4,8 km de voie forestière). 26 000 adultes sont
capturés et transférés lors des migrations prénuptiales. Face à cette mobilisation bénévole conséquente depuis
plusieurs années, le PNR a confié en 2008 une analyse comparative des sites sous protection temporaire au
CETE de l’Est et une pré-étude technique et financière des sites à aménager en priorité (4 sites) [62]. Cette
réflexion globale à l’échelle d’un PNR a permis de hiérarchiser les interventions et d’évaluer les difficultés
techniques. Ainsi, lorsque sur le territoire du parc, des travaux sont programmés sur le réseau routier, le PNR
dispose des éléments techniques (pré-étude de faisabilité des dispositifs permanents) à intégrer au projet. L’Ile
de France, via Naturparif devenue en 2017, l’Agence Régionale de la Biodiversité, s’est doté d’un observatoire et
d’une cartographie dynamique de la répartition des observations d’écrasements d’amphibiens et des dispositifs
mises en place (voir carte ci-dessous).

Les observatoires régionaux de la biodiversité qui se mettent en place progressivement dans les différentes
régions de France devraient permettre une meilleure prise en compte de cette problématique en lien avec
l’Agence Française pour la Biodiversité.

Figure 6 : Cartographie dynamique de la répartition des zones et points chauds d’écrasement


(Source : Naturparif)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 24


2.3 - Les installations permanentes de protection
Les installations permanentes améliorent durablement la transparence des ITT et réduisent localement les
conséquences liées à la fragmentation et à la mortalité.

Elles sont aménagées sur :


• la voirie existante (route départementale et communale) pour rétablir une section de route traversée par
les amphibiens (forte mortalité) et préalablement identifiée par des comptages pluriannuels. Les
installations permanentes remplacent alors les installations temporaires ;
• dans les projets neufs, elles sont considérées comme des mesures de réduction d’impacts et sont
envisagées dans les évaluations (étude d’impact, Natura 2000) ou les dossiers de dérogation relatifs
aux espèces protégées. Elles sont aménagées sur route et autoroute (peu de réalisation sur les LGV,
les concepteurs considérant que les passages petite faune suffisent).

Les installations permanentes de protection des amphibiens sont des passages spécialisés pour la faune
sauvage. Ils ont comme objectif essentiellement de rétablir les mouvements migratoires pré et post-nuptiaux des
adultes reproducteurs, les déplacements massifs et groupés des juvéniles et les déplacements liés à la recherche
de nouveaux territoires. Dans la typologie nationale [46], ils correspondent au type II déclinée en IIa, IIb, IIc selon
le type et la fréquence des traversées sous chaussée. Ce type d'ouvrage appelé "crapauduc" ou "batrachoduc"
est, parmi les mesures de protection, celle qui est la plus médiatisée et la plus spectaculaire.

Encadré 6 - Attention, les passages « petite faune » ne sont pas des batrachoducs !
Les passages « petite faune », ne sont pas des batrachoducs. Un batrachoduc ou crapauduc est prioritairement
installé et conçu pour assurer les traversées des amphibiens. Il peut être utilisé par d’autres espèces de la faune
sauvage mais ne doit pas être confondu avec un passage à petite faune (Type I dans la nomenclature nationale).

Les passages « petite faune » sont aménagés tous les 300 m environ alors que les traversées pour amphibiens
sont espacées de 30 à 100 m selon les situations.

En définitive un passage petite faune (type I) au sens strict correspond à une traversée sous chaussée (pouvant
être aussi utilisée par des amphibiens) alors que le crapauduc correspond à plusieurs traversées sous chaussée
et est placé sur des sections d’ITT reconnues comme dangereuses pour les amphibiens. Ces traversées sont
espacées de 30 à 40 m pour les types IIa et IIb et 100 m pour le type IIc. Elles sont également utilisables pour la
petite faune et c’est pourquoi en certaines régions ou départements de France, ce type d’ouvrage porte
l’appellation de passage petite faune, appellation qui favorise l’acceptation d’un tel ouvrage au coût non
négligeable mais qui peut être utile à plusieurs groupes d’espèces et pas seulement les amphibiens en fonction
de sa conception, etc.

2.3.1 - Les différents types d’installations permanentes de protection


Il existe en France plusieurs dizaines d’ouvrages pérennes ou « batrachoduc » de franchissement des
infrastructures de transport terrestre qui concernent essentiellement le réseau routier et autoroutier et plus
rarement les voies ferroviaires [63, 64, 65].

On peut les réunir en quelques grands types selon qu’il ont été réalisés :
• sur des départementales et routes communales, la très grande majorité ;
• sur des voies rapides (2 x 2 voies) et autoroutes ;
• sur des voies ferrées (classique ou LGV).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 25


Sur les routes départementales et routes communales, les dispositifs de traversées sous chaussées sont
de types :
• double conduits à sens unique, chaque traversée (type IIa dans la typologie nationale, Sétra 2005) est
constituée de deux conduits étroits (0,40 x 0,40 m), l'un pour la migration aller, l'autre pour la migration
retour. La collecte est réalisée dans un caniveau en U. Des fosses de captures sont placées aux entrées.
Des rampes ou des entonnements sont placées à la sortie. Ces dispositifs à doubles conduits sont
efficaces pour les amphibiens. Ils sont peu utilisables par les petits mammifères terrestres et en définitive
ne servent que quelques mois dans l’année aux amphibiens ;
• simple conduit à double sens de circulation, le dispositif de traversée est constitué d'un seul conduit (ou
dalot) unique, en général de 1 m de large et 0,60 à 0,70 m de haut. Dans ce type de conduit (type IIb
dans la typologie nationale, Sétra 2005), les amphibiens réalisent plusieurs types de déplacements (aller
et retour des adultes reproducteurs, jeunes imago en migration post-nuptiale, déplacement aléatoire
d'individus et des juvéniles « disperseurs » en fonction de l’exploitation de leur domaine vital tout au long
de l’année). Leur conception les rend utilisable pour la petite faune, en particulier les reptiles et
micromammifères ainsi que quelques mammifères de taille moyenne bien que sensu stricto, ils ne sont
pas des « passages petite faune » (voir encadré n° 6).

Figure 7 : Schéma de principe d’un passage de type II a. Figure 8 : Schéma de principe d’un passage de type II b.
(Source : Guide technique Aménagement et Mesures (Source : Guide technique Aménagements et Mesures
pour la petite faune, Sétra 2005). pour la petite faune, Sétra 2005).

A l’origine, les crapauducs de type IIa (doubles conduits à sens unique espacés de 30 à 40 m) sont construits
pour les populations d’amphibiens dont les migrations de reproduction sont les plus visibles, notamment celles
qualifiées d’espèces précoces à reproduction explosive chez les anoures (Crapaud commun, grenouilles
« brunes » (rousse et agile)). Les populations abondantes de Tritons palmé et ponctué de même que
l'emblématique Salamandre tachetée bénéficient également de ce type de dispositifs pérennes. Les individus
métamorphosés de ces espèces utilisent aussi en théorie les crapauducs lors de leur première migration depuis
le plan d’eau jusqu’à leur territoire terrestre. Aujourd’hui, la tendance est moindre d’effectuer des traversées de
type IIa spécialement dédiées aux amphibiens. Ces installations ont tendance à être remplacées par des simple
conduits (IIb) à double sens espacés également de 30 à 40 m. Ces dispositifs plus simples à mettre en œuvre, a
priori plus économiques, se généralisent. Les passages de type IIa ne seraient utilisées qu’une courte partie de
l’année pour les amphibiens mais risquent d’être sous utilisés, le reste de l’année, par les autres groupes
fauniques, en raison notamment de la taille des conduits et de la forme des entrées difficilement accessibles.
A l’inverse, les passages de type IIb seraient utilisés par les amphibiens non seulement durant les périodes de
pic de migration mais ils offriraient aussi l’avantage d’être utilisable par l’ensemble de la petite faune sauvage tout
au long de l’année. Cet avantage leur a valu quelquefois l’appellation faussement justifié de « Passage
à petite faune ».

La controverse demeure entière toutefois sur la différence d’efficacité de l’un ou l’autre de ces dispositifs,
notamment en relation à la collecte ou piégeage forcé du type IIa et le libre choix a priori du type IIb, etc.
En effet, dans le premier cas, les amphibiens, une fois collectés, ne peuvent s’en échapper et sont donc contraints
de traverser. Au contraire les passages de type IIb sont un peu moins contraignants par principe pour les
amphibiens et autres petits animaux (reptiles, micro mammifères) qui ont la possibilité de ne pas s’engager dans
le conduit mais, à contrario, toutes ces espèces peuvent s’engager plus facilement dans les traversées qui
resteront fonctionnelles toute l’année.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 26


Depuis les années 2005 avec l’émergence de la notion de corridor et la politique TVB/SRCE et des avis plus
exigeants des CSRPN et du CNPN, une attention particulière est portée aux habitats et aux espèces les plus
menacées dont celles bénéficiant de Plan national d’actions (PNA) [exemples : 66, 67]. Pour ces espèces à
enjeux patrimoniaux élevées, souvent qualifiées chez les amphibiens, d’espèces vagabondes et pionnières aux
déplacements plus aléatoires et dispersés (ex. : Crapauds vert et calamite, Rainette arboricole, Sonneur à ventre
jaune, etc), il a fallu adapter ce type de dispositif appelé type IIc avec des inter-distances de 100 m entre chaque
traversée. Le dispositif IIc est un compromis entre les simples passages à petite faune placés tous les 300 m
environ et les dispositifs permanents et spécialisés pour les amphibiens placés tous les 30 à 40 m. Il est préconisé
en protection permanente des espèces pionnières. Il est également recommandé dans les projets neufs lorsque
l’ITT traverse des habitats d’espèces, bien que sédentaires (à reproduction explosive) mais dont les sous
populations sont installées durablement et se déplacent de manière diffuse hors des grands axes de
déplacements migratoires liés à la reproduction. On trouve de tels dispositifs sur des voies rapides ou le réseau
ferroviaire à grande vitesse (voir encadré n° 7).

En ce qui concerne les aménagements sur voie ferrée classique (voir illustration ci-dessous) ils consistent à
aménager des vides sous les rails pour y placer un demi-tuyau en polyéthylène de 25 à 30 cm de large. Un butoir
guide les animaux qui circulent sur le patin du rail. La distance entre les passages sur rail est de 15 à 25 m.

Photos 25 et 26 : A gauche : Une demi-buse posée sous la voie ferrée


(Source : D’après © U. Bolz [68])
A droite : Une cloison en feuille d’acier oblige les amphibiens à sauter dans la demi-buse
(Source : D’après Müller & Berthoud, 1994 ou [57])

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 27


Encadré 7 - La traversée de la forêt de Vigneulles par la LGV Est Européenne
Le bois de Vigneulles (25 km²), dans le département de la Meuse, est traversé par la LGV sur 5 km. Le domaine
forestier est parcouru par un réseau dense de ruisseaux, et d’étangs forestiers. Les espèces présentes et
abondantes sur le site ont un fonctionnement en métapopulation. Les mouvements sont diffus à l’intérieur du bois
et aucun déplacement privilégié et important n’a été identifié. Dans ce contexte, pour rétablir la transparence
écologique sur un linéaire de 5 km, aménager un crapauduc de type IIb (inter-distance de 40 m entre les traversées)
revenait à créer une centaine de traversées occasionnellement utilisées (faible rapport coût/efficacité). Pour
maintenir les échanges entre les sous-populations, le gestionnaire RFF a opté pour l’aménagement d’une dizaine
de traversées ou dispositif de protection de type IIc sous la voie distante de 100 à 200 m ainsi que deux passages
inférieurs grande faune.

Photos 27 à 29 : Dispositif de protection permanent de type IIc


En haut à gauche : sur le réseau ferré, les lignes LGV sont
infranchissables par les amphibiens en raison de la forme du rail et
de sa hauteur (17 cm). Le ballast compacté offre peu d’interstice.
Le souffle des rames lancées à 320 Km/h est mortel pour les
animaux qui parviennent à s’approcher des rails ;
En haut à droite : un conduit en béton associé à une clôture
(type grande faune + grillage à amphibien). Il existe une dizaine
de traversées sous la voie distante de 100 à 200 m ;
En bas à droite : un passage inférieur « Grande faune », plusieurs
ont été construits ;
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 28


2.3.2 - Les éléments constitutifs des installations permanentes de protection
Une véritable technologie s’est développée autour des crapauducs ou batrachoducs. Quel que soit le type choisi
(a, b ou c), le dispositif est constitué de deux éléments :
• le « collecteur », construit le long de la chaussée, il empêche les animaux d’accéder aux voies de
circulation sur une portion délimitée et fait ainsi office de barrière et de guide ;
• et les « traversées sous chaussées » régulièrement disposées sur toute la longueur du collecteur à
intervalles réguliers (entre 30 et 40 m ou 100 m selon le type).

ü Le dispositif de collecte et de guidage : il empêche les amphibiens d’accéder aux voies de circulation et
les guide vers les traversées sous chaussées. Des petits aménagements (corniche de retour) empêchent
toute tentative d’escalade. Il est essentiel d’éviter les obstacles qui ralentiraient ou immobiliseraient les
animaux. Il s’agit d’éviter les « accidents » de parcours source de stress, de pertes d’énergie et de risque
de dessiccation. La hauteur (hors sol) du collecteur est supérieure ou égale à 0,40 m (0,60 m si présence de
Grenouille agile). Le collecteur doit constituer un obstacle infranchissable dans le sens de leur migration.

Il existe deux familles de collecteurs :


• les collecteurs en U (ou caniveaux) constituent l'installation standard des traversées de type IIa. Les
amphibiens tombent dans ces caniveaux, ils ne peuvent plus en sortir et sont obligatoirement guidés
vers les traversées. Les dimensions sont imposées par le comportement locomoteur des amphibiens.
La profondeur de 40 cm est minimale pour empêcher les animaux de ressortir en sautant. L'épaisseur
conseillée de 5 cm doit offrir une résistance suffisante aux tassements de terrain créés par des véhicules
qui stationnent en bordure de chaussée, pour éviter d'écraser le caniveau. Les collecteurs en U sont
associés aux dispositifs de traversée à double conduit. Ils comportent des échappatoires, des fosses de
captures et des fosses d’entonnement en sortie qui complexifient le système de protection et augmentent
les coûts. Pour ces raisons, ils sont de moins en moins utilisés et sont de moins en moins recommandés
sauf configuration particulière. A ces difficultés, s’ajoute la maîtrise de l’eau qui ne doit en aucun cas
stagner dans les caniveaux en U. Cette accumulation d’eau peut favoriser la ponte ou provoquer la
noyade. Il est indispensable de dissocier le réseau d’assainissement de celui des collecteurs.

Photo 30 : Collecteur standard en U des installations de type IIa Photo 31 : Collecteur en U (côté migration aller)
(béton préfabriqué avec couvercle, bavette, fosse de capture). à l’étang de Bonne famille
Ils sont, par leur poids et leur stabilité, durables. Leur efficacité (Source : © Conseil départemental de l’Isère)
est reconnue (supérieure aux collecteurs en L) mais les
difficultés de mise en œuvre et d’entretien sont suffisamment
importantes pour que ce dispositif soit peu à peu remplacé
par les murets de collecte (Source : PNR Gâtinais français,
marais de Larchant ou d’après [69])

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 29


• Les collecteurs en L (murets, ou cornières) représentent l’installation standard des dispositifs de type
II b et II c. Ils sont utilisés soit dans des conditions particulières telles que la proximité immédiate d'un
étang, des talus d'accotement trop raides ou simplement parce que l'espace disponible est trop limité,
soit par choix d'une contrainte moins importante. Les amphibiens sont bloqués par ces murets de 0,40
à 0,60 cm de haut qu'ils ne peuvent pas escalader (présence, en général, de corniche anti-escalade de
3 à 5 cm à la partie supérieure). Ce type de dispositif aller ou retour bloque les animaux au pied de
l'obstacle mais ils peuvent faire demi-tour ce qui est impossible dans un caniveau en U. La base horizontale
du muret en L placée à l’extérieur de la route offre une bande dégagée (berme) qui facilite le déplacement
des amphibiens et surtout l’entretien. Le collecteur est enterré de 0,30 m pour empêcher les
micromammifères de construire des galeries qui seraient immédiatement utilisés par les amphibiens. Selon
la nature du dispositif de guidage, la partie enterrée peut être un béton maigre, ou une paroi métallique.

Photo 32 : Installation standard ou collecteur en L préfabriqué en Photo 33 : Collecteur préfabriqué en béton avec corniche anti-
béton avec une petite corniche en béton. Source : Le Lac du Der escalade ou bavolet conséquent « en prévision » de la Rainette
(Source : © A. Morand, Cerema Est) arboricole sur le site du Cheylas (Source : © H. Coffre, LPO 38)

Photo 34 : Collecteur métallique (0,40 m en acier) avec pied Photo 35 : Collecteur en plastique recyclé, matériau prometteur
empêchant le développement de la végétation, et qui facilite mais très fragile en l’état actuel
l’entretien et le déplacement des animaux. Exposés au soleil, (Source : © A. Morand, Cerema Est)
les pieds métalliques peuvent toutefois devenir très chauds pour
les juvéniles et entraîner un risque de dessiccation
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

Photo 36 : Barrière mixte : glissière de sécurité en bois Photo 37 : En bois. Sur le batrachoduc de Sorques (dpt 77)
et tablier métallique pour protection des motards à Condé en région Ile de France
sur Vesgre (dpt 78) (Source : © ATENA 78) (Source : © A. Morand, Cerema Est)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 30


En résumé, quelques avantages / inconvénients de ces matériaux :
• le bois : malgré la résistance de certaines espèces (robinier, mélèze, douglas, chêne), les installations
sont soumises à de fortes contraintes et se dégradent rapidement. En raison de l’alternance de périodes
de forte humidité et de sécheresse les planches en bois se disjoignent, les amphibiens passent au
travers. Des traverses épaisses résistent mieux aux contraintes routières mais sont hors de prix en
comparaison d’autres matériaux (béton, acier). Le bois est donc à déconseiller sauf sur de petits linéaires
dans des conditions très particulières où la recherche de l'esthétique peut être une priorité ;
• l’acier devient assez utilisé en obstacle de guidage voire directement en application contre la clôture.
• le plastique recyclé est un matériau prometteur sous réserve d’une forte épaisseur souvent nécessaire.
Il est une solution d’avenir probablement mais demande encore à être expérimenté. A notre connaissance,
il n’existe pas de conduit en matériau plastique qui a été construit et testé sur ce type d’ouvrage ;
• le béton polymère reste très utilisé. Il a fait ses preuves en terme de résistance et de durabilité.

ü Plusieurs types de traversées sous chaussée sont envisageables, nous présenterons des exemples en
type II b et c :
Différentes formes et des dimensionnements variés existent pour ce type d’ouvrage. Certaines dimensions sont
imposées par la route (largeur, nombre de voies) et son trafic ainsi que le type de véhicules qui circulent.

• Cadre fermé en béton

Figure 9 : Schéma d’un passage de type II b avec cadre fermé


(Source : Guide technique Aménagements et Mesures pour la petite faune, Sétra 2005)

Photos 38 à 40 : A gauche, tunnel sous chaussée de type II b (batrachoduc de Gaumont) ;


Au centre, tunnel sous chaussée de type II b (batrachoduc de Soufflenheim) ;
A droite, tunnel sous chaussée de type II c (Molsheim) (Source : © A. Morand, Cerema Est)

Plusieurs fournisseurs proposent ce type de produits (Bonna Sabla, Chapsol, Matière, Silix). Les cadres
(dimensions intérieures = 1,00 x 0,60 m) sont posés sur un lit de pose compacté ingélif (calcaire) de 0,10 à 0,20 m
d’épaisseur. Le remplissage latéral est réalisé sur 0,40 m de large (matériau ingélif). Pour des parois standards
de 0,10 m d’épaisseur, le recouvrement est réalisé avec un remplissage de 0,20 m de calcaire et 0,55 m de grave
non traitée. Avec une couche de roulement, il faut compter une profondeur de fouille de 1,80 à 2,00 m. Il est possible
de limiter le remplissage en choisissant des dalots à parois épaisses et renforcées (20 cm, contre 10 cm pour les dalots
standards) ou en plaçant une dalle de répartition. La fourniture et pose de cadres fermés en béton est évaluée entre
400 et 535 € le mètre linéaire.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 31


• Cadres ouverts en béton

Photos 41 et 42 : A gauche, passage de type IIb avec cadre ouvert en béton) ;


A droite, avec cadre ouvert en mini-tunnel (l=0.50 m) (Source : Maibach)

La société allemande Maibach (fabricant) et Sodilor (importateur), commercialisent un cadre ouvert en béton de
1 m de large décliné en 0,60 - 0,80 et 1 m de haut (intérieur). Ces éléments sont fournis en 2,50 m de long. Ils
sont placés sur un lit de pose (0,10 à 0,20 m). L’épaisseur des parois (0,20 m) et du plafond (0,25 m) permet de
les utiliser sans recouvrement de grave bitume ou de grave laitier. Ces éléments sont particulièrement bien
adaptés aux amphibiens en raison d’une circulation sur un sol naturel humide. Une hauteur intérieure de 0,60 m est
suffisante et correspond à une fouille de 1 à 1,20 m de profondeur avec comme avantages des terrassements
et matériaux de remplissage et de fondation limités (absence de blindage).

La fourniture et pose de cadres ouverts en béton est évaluée entre 300 et 535 € le ml.

Le tableau ci-dessous est extrait du dernier ouvrage international (ou Handbook) en écologie routière [56].

Les auteurs tentent une synthèse et aide à la décision en ce domaine, intégrant la forme et longueur des
traversées à partir de quelques données en Europe et en Amérique du Nord. Sans être une norme, ce tableau
donne une tendance générale qu’il s’agirait d’améliorer en ajoutant et comparant plusieurs autres ouvrages
construits en France et en Europe sur lesquels nous avons un retour d’expérience suffisant en terme d’efficacité.

Longueur des traversées sous chaussée


Forme
20 20-30 m 30-40 m 40-50 m 50-60 m

Rectangulaire 1,0 x 0,75 m 1,5 x 1,0 m 1,75 x 1,2 m 2,00 x 1,5 m 2,3 x 1,75 m
2 2 2 2 2
0,75 m 1,5 m 2,1 m 3m 4m
2 2 2 2 2
Circulaire 1,0 m 1,2 m 1,6 m 2m 2,5 m

Arche 1,0 x 0,7 m 1,4 x 0,7 m 1,6 x 1,1 m - -


2 2 2
» 0,50 m » 0,70 m » 1,3 m

Pour les routes départementales et nationales, nous recommandons autant que possible le dalot par rapport à la buse.
Selon plusieurs observations, différentes espèces d’amphibiens, en particulier chez les Urodèles (salamandres
et tritons), auraient tendance à vouloir grimper le long des buses circulaires, compromettant sérieusement leur
chance de traverser et augmentant le risque de dessiccation. En ce qui concerne la longueur des traversées, elle
doit être fonction de la largeur de la voie et ne pas être inférieure à une certaine taille minimale en hauteur comme
en largeur. Pour le revêtement, les gestionnaires d’ouvrages existants plaident en faveur d'un sol naturel et
humide au niveau de ces tunnels, ce que confirment aussi les rares travaux scientifiques en ce domaine [55, 70].
Si les Crapauds ne réalisent que peu de différence, les grenouilles « brunes » et « vertes » semblent préférer les sols
naturels. Cette préférence est à relier très probablement à une influence des odeurs des différents types de substrat
plus ou moins "favorables", une différence d'humidité pour laquelle il existe des préférences variables selon les espèces
et les stades de vie, les crapauds étant moins sujets à la dessiccation, etc.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 32


2.3.3 - Le nombre et l’espacement (ou inter distance) entre les traversées
Le nombre de traversées sous chaussée ou tunnels dépend de la longueur de la route à équiper, estimée
optimale, pour réduire les écrasements et correspond généralement à la longueur du dispositif temporaire de
collecte. Cette longueur peut s'étendre de quelques centaines de mètres à rarement plus d'1 km. Pour exemples,
elle est de 400 m à Kruth-Wildenstein (Dpt 68), 700 m au Lac du Der (Dpt 51), 1 km à l'étang du Grand-Lemps
(Dpt 38) et 1,6 km au site du Gaumont (Dpt 57).

Ces distances sont issues d’études préalables, souvent conduites à l’aide d’un dispositif temporaire durant
plusieurs années par les équipes de bénévoles à l’origine du projet d’ouvrage pérenne. Un espacement optimal
de 25 à 30 m est généralement recommandé, tout particulièrement chez les urodèles. Il peut être porté à 60 m
au maximum, notamment si une longue distance est à équiper. L’objectif étant d’éviter une trop longue errance,
un stress ajouté et un risque mortel de dessiccation voire de prédation, le plus faible écartement doit être
privilégié. Son extension se fera sous réserve de l’avis de spécialistes et de données de suivi des routes
migratoires suffisamment précises.

2.3.4 - La lumière et l’aération


Il est communément admis de respecter le phototropisme des amphibiens, aux déplacements en général
nocturnes. Il s’agit, qu’au terme du tunnel à traverser, la lumière soit visible et les attire etc. Il est donc préférable
d’isoler la traversée de toute lumière à l’exception de la sortie, etc. Nous ne recommandons pas les chaussées
ouvertes au niveau de leur toit et éclairant l’ensemble du tunnel. L’un des autres points négatifs des ouvertures
tout le long de la chaussée, directement sous le revêtement de la route, est le risque loin d’être négligeable
d’apports d’eaux à forte concentration de sels sur les routes soumises à des opérations de dessalage, éléments
très toxiques pour les amphibiens à la peau nue et vulnérable !

Photo 43 et 44 : Lumière au bout du tunnel et substrat végétalisé naturellement dans le conduit, respectivement
sur le batrachoduc de Sorques (77) et celui de l’étang de Laurêtre (25) sur la RD 14
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

2.3.5 - Fosses (ou sas d’entrée) et rampe d’accès


Les amphibiens adultes, lors de leur déplacement migratoire en direction des sites aquatiques de reproduction,
se heurtent à l’obstacle que constitue le collecteur. Ils sont ainsi empêchés d’aller tout droit pour peu que ce
collecteur et barrière empêche de le grimper, l’objectif étant qu’ils soient guidés ou dirigés vers l’entrée des
tunnels. Au niveau de l’entrée des traversées sous chaussée, il est parfois possible de créer des fosses pour
forcer le passage. Une fois tombés à l’intérieur, ils sont amenés à traverser le conduit en direction de la lumière.
Les fosses peuvent ne pas être totalement identiques de part et d’autre de la voie. L’un des enjeux de ce petit
aménagement est de faciliter la traversée lors de la migration prénuptiale des adultes. La pente ne doit pas être
trop importante au cas où un animal envisagerait de rebrousser chemin sans s’épuiser de même qu’il est censé
de permettre la remontée des individus adultes ou juvéniles, la période de reproduction passée, en direction de
leurs habitats terrestres, etc.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 33


Photos 45 : Batrachoduc du lac de Der : une rampe à pente douce Photos 46 : Batrachoduc de Gaumont : la pente est un peu
(Source : © A. Morand, Cerema Est) « raide » au point que le Parc naturel régional de Lorraine,
l’un des porteurs du projet, a dû posé du géotextile sur
les traversées les plus fréquentées par les amphibiens
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

2.3.6 - L’évacuation des eaux


La prise en compte de l’hydrologie du site est cruciale pour l’efficacité de l’aménagement. En effet, l’ennoiement
sur une durée longue ou prépondérante au cours de la migration de reproduction, peut rendre le dispositif
complètement inopérant. Il est fondamental que l'eau ne stagne pas à l'entrée ou dans les tunnels, sa présence
pouvant empêcher le déplacement de certaines espèces (risque de noyade des salamandres) ou déclencher les
pontes d'espèces opportunistes (Grenouille agile) qui se contentent parfois de petites pièces d'eau.

Photo 47 et 48 : Une buse perpendiculaire au pied d’une clôture renforcée sur le dispositif temporaire de la Dune de Slack
Dpt du Pas de Calais (Source : © A. Morand, Cerema Est) ;
A droite, un aménagement conséquent « drain-fossé » pour évacuer les eaux sur le site d’Esh-Belval (dpts 54/57)
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 34


2.3.7 - Mise en sécurité
La mise en sécurité du site peut imposer des aménagements complémentaires d’autant plus importants qu’il
existe des rigoles, fossés proche de la chaussée. La pose d'un caniveau en U, au niveau du sol, présente ainsi
un danger pour les usagers. Afin de répondre aux conditions de sécurité routière, le système de blocage, lorsqu'il
est situé proche de la chaussée, est constitué d'un Mur Véhicule Leger (MVL), en béton coulé sur site.

Photos 49 et 50 : Mur Véhicule Léger en bordure de chaussée


A gauche, Batrachoduc du lac de Der ; A droite Batrachoduc de Gaumont (dpt 57)
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

2.3.8 - Accès aux emprises privées (terre agricole) ou d’intérêt général (parking, accès chemin)
Selon la longueur de la section à aménager, il peut être nécessaire d’envisager un aménagement permettant la
sortie des véhicules vers le chemin ou autre site desservi, mais empêchant les animaux de pénétrer sur l’emprise,
et les guidant vers le dispositif de collecte.

Photo 51 et 52 : Une grille de type passage canadien en droit d’un chemin d’accès
(Source © A. Morand, Cerema-Est)

2.3.9 - Entretien et suivi des installations permanentes

L’entretien
Des différentes expériences connues et valorisées sur ce type d’ouvrage, il ressort que l'entretien est nécessaire
sous peine d'un risque de le rendre inopérant à moyen terme. Cet entretien est peu coûteux en temps et en
qualification. Dans les zones enneigées (exemples : site de Kruth-Wildenstein, étang du Grand-Lemps), il s'agit
de visiter le dispositif à la sortie de l'hiver, en tous les cas avant les migrations printanières. L'enjeu est de vérifier
les puits (fosses) d'entrée et d'enlever les feuilles mortes, pierres, terres accumulées etc. On peut nettoyer aussi
tout le long des collecteurs tout en laissant un minimum de végétations favorables aux amphibiens. La présence
de déchets diminue également l’efficacité des ouvrages.

Il est important dès le projet d’évoquer l’entretien du dispositif (collecteurs et traversées et petits équipements
associés) et sa prise en charge par une convention qui rappelle les engagements de chacun (Conseil
départemental, commune, organisme gestionnaire d’espace naturel, association, etc.).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 35


Suivi de l’efficacité
Il nous faut insister sur l’importance des suivis des ouvrages de franchissement réalisés ainsi que des autres
mesures compensatoire et d’accompagnement. D’une part, en vue de réajuster certains aménagements et
finitions rapidement après la construction. D’autre part afin de pouvoir évaluer l’ouvrage au regard des objectifs
définis à sa genèse. Il s’agit donc de respecter une certaine méthodologie avant la mise en œuvre d’un suivi. Il
faut définir et prioriser les objectifs du suivi et répondre à quelque unes de ces interrogations : Pourquoi un suivi ?
Quelles espèces suivre, toutes ou certaines plus particulièrement ? Comment évaluer l’adaptation des
populations d’amphibiens à l’ouvrage ? Quelles catégories d’individus souhaite-t-on suivre (adulte ou juvénile) et
quelle migration (pré ou postnuptiale) ? Enfin, quels moyens y consacrer au regard de ressources financières et
humaines limitées ?

Une fois une réflexion commune entre les partenaires au projet, menée autour de ces quelques questions, on
peut envisager le suivi au cours de la période « optimale » de migration et fonction de la détectabilité des espèces
cibles (ex. février-mars pour les espèces à reproduction explosive de type Grenouille rousse ou Crapaud commun,
avril-mai pour les espèces à reproduction plus tardive comme la Rainette arboricole, le Crapaud vert). Il s’agit de
conduire un suivi, si possible sur plusieurs saisons de reproduction afin d’atténuer le poids des facteurs
climatiques et de dynamique naturelle des populations. A titre d’exemple, pour un suivi post création,
l’espacement du pas de temps peut être, après un premier suivi l’année qui suit la création de l’ouvrage, de 3 à
5 ans puis 10 ans.

Pour tout projet neuf de passage à amphibiens et dans l’objectif d’évaluer l’efficacité de l’ouvrage, nous
recommandons d’envisager en amont un dispositif adapté dès la conception. A l’image de certains ouvrages
existant, il peut être ainsi envisagé une trappe en béton (avec couvercle) directement à la sortie (et/ou l’entrée
également) du tunnel des traversées sous chaussée en veillant à ce qu'il n'y ait aucun risque d’ennoiement de tel
dispositif préjudiciable à la survie des individus capturés.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 36


Photos 53 à 58 : Illustration de quatre techniques de suivis utilisées - De la gauche vers la droite et de bas en haut : le dénombrement
d’animaux vivants ou écrasés réalisé sur une portion de route de l’ouvrage ainsi qu’à ses extrémités, ici un amplexus de crapaud commun
et une salamandre tachetée (Source : © A. Morand) ; les dispositifs « trappe », à relève régulière et sur une durée définie - ici sur le PPF
ou batrachoduc du Gaumont ou intégré de manière pérenne, exemple du PPF de l’étang de Laurêtre (Source : © C. Muller, Cerema Est) ;
les pièges photos (Source : © G. Tekielak, Cerema Est) ; la télémétrie - suivi des déplacements du crapaud commun, via une antenne
portative à l’étang du Grand Lemps (RNN), étude sous le pilotage de P. Joly et G. Maillet (Source : © J. Prunier)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 37


Encadré 9 : Quelques retours d’expériences sur le suivi de l’efficacité de plusieurs
batrachoducs suivis6
Durant tout le mois d’avril 2013 sur le site du Cheylas (Isère) [71], toutes les nasses ont été inspectées, de même
qu’en parallèle un suivi a été mené sur la route durant deux mois (fin février-avril) pour évaluer les écrasements
à proximité de l’ouvrage sur plusieurs centaines de mètres et différents tronçons de route. Sur 500 individus et 5
espèces d’amphibiens (Crapaud commun pour l’essentiel ; autres espèces : Grenouille rousse, Rainette
arboricole, Salamandre tachetée et Triton palmé) qui ont tenté le franchissement de la route, c’est près de 80%
qui utilisent l’ouvrage construit. Certaines buses étaient plus utilisées que d’autres. Par exemple, un seul individu
(Grenouille rousse) a été retrouvé dans l’une des buses retour. C’est aussi environ une centaine d’individus (20%)
qui ont emprunté une voie de migration hors ouvrage de franchissement !
En conclusion, malgré des réserves sur la période de suivi, la détectabilité des cadavres d’amphibiens, notamment
en raison d’un trafic élevé et d’un lessivage de la chaussée par la pluie, deux résultats se dégagent : l’efficacité de
l’ouvrage pour la capture et le franchissement de l’ouvrage par la Rainette (une première en France) ainsi qu’une
diminution des effectifs d’individus écrasés, toutes espèces confondues, après la création de l’ouvrage. Ces
premiers résultats doivent être toutefois confirmés sur le plus long terme.

A l’étang du Grand-Lemps, dans le département de l’Isère également, un suivi de plus de quinze années, révèle un
bon fonctionnement en migration aller des adultes des différentes espèces avec la restauration de l’ouvrage et des
aménagements complémentaires en 2013 [72, Maillet, com. pers. 2016]. La migration retour des métamorphosés
quittant le milieu aquatique est beaucoup plus mitigée en ce qui concerne l’efficacité des tunnels ; elle pose aussi
de nombreux problèmes en terme de méthodologie de suivi [73, 74, Joly, com. pers. 2017]. Récemment, l’analyse
des données cumulées suggère une tendance inquiétante et continue à la baisse des populations de plusieurs espèces
d’amphibiens, notamment pour le Crapaud commun, espèce parmi les plus abondantes (Joly, com. pers. 2017).

Sur le passage à petite faune du Lac de Der-Chantecoq (Marne) [59], un bilan de quatre années (2012-2015) de
suivi, dont deux années avec un dispositif de capture, a été effectué. Il est positif pour les anoures (90 % des
Crapauds communs et Grenouilles rousses) mais demeure préoccupant pour les tritons (Triton alpestre et
ponctué), certaines observations nocturnes montrant l’errance de nombreux individus le long de la barrière
collectrice (Hervé, com. pers. 2016).

Sur le passage à petite faune de la commune de Larchant (PNR Gâtinais, Ile de France) [69], un suivi de
l’efficacité de 73 jours pendant la migration prénuptiale (entre le 25 janvier et le 8 avril 2011), via l’utilisation de
trappes à amphibiens semble démontrer l’utilisation de tous les tunnels (à l’exception d’un tunnel ennoyé) par les
5 espèces présentes (Crapaud commun, Grenouille agile, les Grenouilles « vertes », Triton palmé, Triton ponctué)
avec toutefois des effectifs très faibles d’urodèles.

En ce qui concerne les autoroutes, un suivi du réseau « Vinci autoroute » [75] sur plusieurs dizaines d’ouvrages
(22 traversées sous-chaussée dont certaines atteignant une cinquantaine de mètre) a démontré à l’aide de pièges
à vibration et pièges photos en time-lapse (déclenchement minute), la présence et le passage de plusieurs
espèces d’amphibiens en période de reproduction et à l’automne (Salamandre tachetée, crapaud commun,
notamment).
Ces données par les pièges-photos demeurent toutefois qualitatives en regard d’autres suivis, par piégeage des
individus, semi-quantitatifs sur les routes départementales… Toutefois, le choix du type de piège-photo est
important. Ceux, à la fonction « Time-lapse » (avec paramétrage du nombre et de la fréquence de vue en seconde
et à des horaires pré-programmés) peuvent être très performants mais ils génèrent de grande quantités d’image
à analyser. Des logiciels de traitement et d’automatisation des images capturées sont à l’étude…

D’autres techniques sont testées (de type Radio Frequency Identification ou RFID) dans les suivis de l’efficacité
des ouvrages de franchissement des ITT ou écopassages. Elles peuvent donner de riches informations sur le
comportement et la dynamique des populations d’amphibiens mais sont toutefois lourdes à mettre en œuvre, le
plus souvent dans le cadre d’un programme de recherche. Par ailleurs, elles font l’objet d’une demande
d’autorisation argumentée très sérieusement de par le caractère invasif de telles méthodes (marquage d’un
échantillon d’individus par transpondeurs ou pit-tags) sur les amphibiens.

6 En Suisse, une enquête a été menée sur 17 ouvrages de type « crapauduc » démontrant d’une part l’efficacité supérieure d’une grande
ouverture des tunnels chez deux espèces (Crapaud commun et Grenouille rousse) et d’autre part la difficulté de cette comparaison dans
l’interprétation des résultats en raison de la fluctuation naturelle des populations étudiées et le fait que chaque installation est une
combinaison unique de type, longueur, largeur de tunnel et système de guidage. Rapport complet téléchargeable sur le site du karch.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 38


2.3.10 - Panneau d’informations et autres outils de communication et de sensibilisation
La signalétique permanente visant à informer le public n’a pas le même objectif que la signalétique temporaire
de danger. Il s’agit ici d’informer le public sur les enjeux du site et justifier l’argent public utilisé pour de tels
aménagements. Le rôle des associations est prioritaire et très dynamique en ce domaine [81]. Des articles de
presse, des lettres d’informations, des animations (grand public et scolaire), des documentaires télévisuels [82]
et reportage peuvent utilement compléter le dispositif d’information et d’acceptation sociale etc.

Photo 59 : Panneau du crapauduc de Kruth-Wildenstein Photo 60 : Panneau du batrachoduc de Gaumont


(Source : © A. Morand, Cerema Est) (Source : © A. Morand, Cerema Est)

2.4 - Les ouvrages non spécifiques à amphibiens


Différents travaux scientifiques en génétique du paysage (voir aussi Encadré 4) ont mis en évidence, le long des
voies ferrées, le rôle des petits ouvrages hydrauliques auparavant sous-estimés, comme étant des zones de
déplacement pour les amphibiens (Salamandre tachetée, Triton alpestre) et favorisant un brassage génétique
suffisant pour les espèces considérées.

Les passages spécifiques pour la petite et grande faune ainsi que les passages non spécifiques destinés à rétablir
la circulation pour les activités humaines (agriculture, randonnée) ou le passage d’un cours d’eau peuvent
constituer des zones pouvant être utilisés naturellement par les amphibiens lors de leur déplacement. Dans
certaines configurations très favorables (pour exemple, le cas ci-dessous de la RN59), il est même possible de
trouver plusieurs espèces d’amphibiens. Cet exemple de l’un de ses passages inférieurs pour la grande faune
(voir photos ci-dessous) reste toutefois une situation relativement rare. L’ouvrage se trouve d’une part, en plein
cœur d’un massif forestier « coupé en deux » par la route. Cette forêt abrite d’autre part, des populations
abondantes de différentes espèces d’amphibiens, dont celle de Sonneur à ventre jaune (espèce à enjeu élevée
bénéficiant d’un PNA décliné à l’échelle régionale). Enfin, la relative forte richesse batrachologique dans l’ouvrage
s’explique par la grande taille du passage inférieur et une luminosité suffisante de par la hauteur du toit, qui favorise
le développement d’une végétation aquatique et terrestre. Il existe également un ruisseau traversant un substrat
naturel et limono-sableux, l’ensemble offrant des conditions ambiantes humides favorables aux amphibiens.

Photo 61 et 62 : Exemple de conditions favorables aux amphibiens sous un passage inférieur « grande faune » :
la présence d’un cours d’eau, de flaques sous l’ouvrage favorise l’occupation et la présence de juvéniles de Crapaud commun,
Grenouille verte et Sonneur à ventre jaune, ici en position ventrale. Quelques adultes et têtards de Sonneur
à ventre jaune ont été également trouvés attestant d’une possible reproduction
(Source : passage inférieur sous la RN59 © A. Morand & M. Gigleux, Cerema Est)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 39


3 - Mesures compensatoires et d’accompagnement
3.1 - La création d’habitats aquatiques (mares de substitution)
Selon le type de projet (projet neuf, requalification, etc), les conséquences sur les milieux aquatiques utiles à la
reproduction des amphibiens sont variables. Destruction totale ou partielle, dégradation, séparation et isolement
des autres milieux favorables aux amphibiens sont autant d’exemples de situations possibles. La création
d’habitats aquatiques peut donc avoir comme objectif de remplacer (ou déplacer), lorsqu'il se trouve sur le tracé,
les sites détruits ou isolés situés de l’autre côté de la route, et réduire les franchissements ou encore d’attirer les
animaux et favoriser la traversée, etc. Les mesures de compensation ou d’accompagnement peuvent être de
créer, restaurer et entretenir un (ou plusieurs, de préférence) plan(s) d'eau. C’est un moyen concret et qui peut
être efficace pour pallier la disparition de zones humides naturelles ou plans d'eau d’origine par le projet
d’aménagement et préserver la continuité écologique entre les milieux. Cette solution a fait quelquefois ces
preuves mais la réussite d’une telle entreprise doit faire appel à des compétences avérées d’ingénierie écologique
tenant compte à la fois de la complexité du fonctionnement des écosystèmes et des exigences écologiques des
espèces cibles d’amphibiens [76, 77, 78].

Quels que soient les objectifs à l’origine de la création d’habitats aquatiques pour les amphibiens, il faut réfléchir
à tous les aspects du projet avant son aboutissement, ce qui permettra d'éviter bien des erreurs lors du
creusement et bien des problèmes qu'il ne serait plus possible de résoudre lors de la mise en eau. Un certain
nombre de questions doivent être posées, parmi lesquelles : Combien de sites et quelle configuration ? Où seront-
ils le plus utile ? La distance par rapport aux autres sites est-elle raisonnable par rapport à ce que l'on sait des
capacités dispersives des espèces dans la région ? etc.

Il existe différents exemples de création de mares dans le cadre d’une mesure compensatoire ou
d’accompagnement mais peu d’entre eux ont été suivis afin d’évaluer de la réussite de l’opération, notamment la
colonisation par les espèces locales ou bien leur fonctionnalité et succès du développement larvaire. Il s'agit
pourtant de répondre à ces questions par une étude spécifique en s'appuyant avant tout sur la connaissance du
terrain (sol, hydrologie, etc.), le contexte naturel et humain aux échelles locales et du paysage. La colonisation
naturelle du plan d’eau n’est pas immédiate et seul un suivi rigoureux sur plusieurs années est en mesure
d’évaluer le succès de l’opération. Nous renvoyons à l’Annexe 3 pour quelques grands principes ainsi que
d’autres références pour aller plus loin [79, 80].

Dans la plupart des cas, Il faut tenir compte :


• des règles de sécurité (l'eau attire les riverains, etc.) ;
• des pluralités d'intérêt (pêche, chasse, loisir, conservation, etc.) et des usagers à prévenir pour obtenir
un accord durable et éviter les conflits d'usage ;
• des peuplements naturels dans l'environnement immédiat et régional qu'il s'agit d'évaluer pour tenir
compte de l'évolution globale de son propre site et favoriser son intégration et sa complémentarité
possible avec les autres sites aquatiques.

Photo 63 et 64 : Mares créées lors du projet de la LGV Est (Source : © A. Morand, Cerema Est)
et à proximité de la RN 59 (Source : © M. Gigleux, Cerema Est)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 40


Encadré 10 - Quelles précautions en cas de translocation d’individus
et de populations d’amphibiens ?
Dans le cas d’une mesure compensatoire, suite à destruction programmée d’un site aquatique et habitat de
reproduction d’amphibiens, pour accélérer le processus de colonisation et sauver l’essentiel des reproducteurs
privés de leur habitat de reproduction d’origine, le transfert d’un lieu de ponte à l’autre peut s’envisager
directement par la capture des adultes reproducteurs. Pour contraindre les reproducteurs à pondre dans ce nouvel
habitat, on peut les forcer via la pose d’une bâche les empêchant d’en sortir. Le transfert des pontes récoltées
sur le site condamné vers la frayère de remplacement est une autre solution. Cette méthode est moins
contraignante et donne de bons résultats. Dans les deux cas, le transfert est obligé si l’impact menace les
individus, bénéficiant pour la plupart d’un statut de protection. Par ailleurs, cette opération doit se poursuivre
durant 4 à 6 ans pour capturer l’essentiel de la population menacée. L’un des enjeux est aussi de s’assurer de
l’adaptation de la population à son nouvel environnement. En effet, les individus adultes sont désorientés et pour
certains leur attirance que l'on appelle "homing" est forte de retrouver leur habitat d'origine. Les animaux capturés
peuvent revenir immédiatement vers le lieu de ponte qui les a vu naître. Ils n'ont, par ailleurs, pas toujours la
connaissance des contraintes de leur nouvel habitat et peuvent subir de lourdes pertes liées à des accidents et
prédations jusqu'alors inconnus, etc.

3.2 - Habitats terrestres (sites d’hivernage, territoire de chasse, etc.)


Les habitats terrestres à recréer (terrain de chasse, zone d’hivernage) sont, en comparaison des habitats
aquatiques, très peu pris en compte en tant que mesures compensatoires ou dans le cadre de mesures
d’accompagnement. Ils constituent pourtant un élément fondamental (et facteur parfois limitant) au cours du cycle
de vie de la plupart des espèces d’amphibiens concernés par l’aménagement d’infrastructures et leur emprise. Il
y a, malheureusement, peu d’expérience en la matière. Il peut s’agir pourtant de mesures simples et peu
onéreuses comme l’apport de bois morts, de murets de pierre qui constitue un site d’hivernage (ou hibernaculum)
directement à proximité de sites de reproduction aquatique [79]. On peut citer, toutefois pour exemple,
l’expérience de la communauté de commune « Val de Moselle » (devenue en 2017, la communauté de communes
"Mad Moselle") dans le cadre du projet de batrachoduc du Gaumont avec la création d’une prairie entre le plan
d’eau et la route, à la place de terres cultivées (voir photo ci-dessous).

Photo 65 : Prairie créée sur d’anciennes terres cultivées


à proximité immédiate du batrachoduc du Gaumont
(Source : © A. Morand, Cerema Est)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 41


4 - Mesures « E, R, C » : éléments de coût et acceptabilité
socio-économique
La doctrine "E,R,C" invite en théorie à prévenir plutôt que guérir [49]. Le choix du tracé de nouvelles infrastructures
de transport terrestre doit tenir compte de la présence de sites d'intérêt biologique et chercher à éviter, notamment
les lieux importants de passage des amphibiens lors de leur migration.

Pour un projet au tracé défini mais à l’impact non négligeable sur des zones à enjeux, seules les mesures de
réduction et de compensation pourront être mises en œuvre. Dans un projet neuf, le budget affecté pour réduire
et compenser les impacts environnementaux, comprenant des ouvrages pérennes de type « batrachoduc », est
proportionnellement faible par rapport à l’enveloppe globale du projet. En effet, les postes budgétaires les plus
importants d’un tel ouvrage d’art, pour exemple, les prix généraux du marché, les travaux préparatoires et le
chantier de terrassement/chaussée sont déjà compris dans le projet neuf. Il en est de même dans les gros
chantiers de requalification d’ITT (création de piste cyclable, évolution d’une RD vers une 2x2 voies, etc.).

Dans les autres cas, c'est-à-dire sur les infrastructures déjà existantes, les mesures qui peuvent être prises pour
éviter, limiter ou compenser l'écrasement des amphibiens sont assez diverses dans leur efficacité, leur facilité de
mise en place et leur coût en moyens financiers et humains. Le tableau (voir Annexe 4) rend compte de mesures
de la séquence « E, R, C » citées dans cet ouvrage et/ou options choisies comprenant le contexte, une fourchette
de prix à titre indicatif et les principaux facteurs de variabilités. Ces estimations de coût des passages à
amphibiens, subdivisées en plusieurs « postes », s’appuient sur une quinzaine d’ouvrages spécifiques
à amphibien recensés en France, qui ont été construits sur trois décennies et au coût total individuel allant de
50 000 à 550 000 euros. La fourchette indicative de prix est donc parfois basée sur un seul retour d’expérience
ou alors quelques-uns ainsi que sur la note d’information [83]. Nous retenons, de manière globale, pour la
conception d’un batrachoduc, une fourchette variable, entre 600-1000 € mètre linéaire environ (évaluation à 900 €
en Suisse). Il existe une grande variabilité selon les caractéristiques topographique et éco-géographiques du site,
les matériaux, les quantités et la dimension des dispositifs principaux de ces ouvrages, à savoir les barrières
collectrices et les traversées sous-chaussée. A titre de comparaison, un rond-point coûte en moyenne près de
300 000 euros, ce qui relativise aussi leur coût.

Toutefois, ces ouvrages d’art ont fait l’objet, dans le passé et font l’objet encore aujourd’hui, de controverses.
Dans une perspective globale de croissance des infrastructures et de véhicules, il semble prioritaire d’améliorer
sur ce type de projet de création de « passage à faune », une information efficace très en amont et de sensibiliser
davantage. Il s’agit de convaincre de l’importance d’avoir de « bonnes » infrastructures de transport pour les
usagers mais aussi pour toutes les autres espèces animales, à la recherche d’un équilibre de notre environnement
naturel et aménagé. Ajoutons que des chantiers de réinsertion ainsi que de nombreuses entreprises locales en
bâtiment peuvent être partie prenante des travaux engagés.

Cette question d’acceptabilité sociale est un sujet qui dépasse très largement la seule question des passages à
amphibiens ou des ouvrages « faune » en vue d’améliorer la transparence écologique [84]. Cet enjeu nécessite
un travail étroit entre élus et techniciens. La recherche de la transparence écologique des infrastructures n’est
pas un luxe, elle n’est pas non plus une simple réponse à des exigences réglementaires. Elle est l’un des
éléments-clefs d’un développement réellement durable des territoires.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 42


Bibliographie
[1] www.globalamphibians.org

[2] Lescure J. & Massary de J-C. (coords.), 2012.- Atlas des Amphibiens et Reptiles de France. Biotope, Mèze ;
Muséum national d’Histoire naturelle, Paris (collection Inventaires & biodiversité), 272p.

[3] Joly P. & Morand A., 1997.- Amphibian diversity and land-water ecotones. Pp 161-182 in Bravard J-P. and
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[65] Quilghini A., 2017.- Inventaire des dispositifs permanents de franchissement d’infrastructures de transport
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Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 45


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[72] Maillet G., 2013.- Aménagements complémentaires sur le passage à petite faune de la route D51b. 13p.

[73] Lagauzère H., 2005.- Les passages à petite faune : un exemple d’évaluation lors de la migration d’amphibiens
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[76] Barnaud G., 2014.- La restauration écologique des zones humides, une longue saga. Chapitre 17, Pp 191-200
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Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 46


Annexes
Annexe 1 - Liste des espèces d’amphibiens et de leur statut de protection
Annexe 2 - Exemple de détermination chez les Anoures et les Urodèles
Annexe 3 - Créer et entretenir un plan d'eau à amphibiens : quelques principes généraux
Annexe 4 - Mesures « E, R, C » : éléments de coût et acceptabilité socio-économique

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 47


Annexe 1 - Liste des espèces d’amphibiens et de leur statut de protection
Espèce - Nom France Convention de
DH (annexes,
Famille scientifique (articles 2, 3 Berne (annexes LR monde LR France PNA
II, IV, V)
et commun et 5) II, III)
ANOURES
Pelophylax
kl.esculentus Art.5 III V LC NT -
Grenouille commune
Pelophylax kl. grafi
Art.3 III - NT NT -
Grenouille de graf
Pelophylax lessonae
Art.2 III IV LC NT -
Grenouille de Lessona
Pelophylax perezi
Art.3 - V LC NT -
Grenouille de Perez
Pelophylax
ridibundus Art.3 III V LC LC -
Grenouille rieuse
Ranidae Lithobates
catesbeianus - - - LC NAa -
Grenouille taureau
Rana temporaria
Art.5 III V LC LC -
Grenouille rousse
Rana pyrenaica
Grenouille des Art.3 III - EN EN -
Pyrénées
Rana dalmatina
Art.2 II, III IV LC LC -
Grenouille agile
Rana arvalis
Grenouille des Art.2 II IV LC EN -
champs
Bufo bufo
Art.3 III - LC LC -
Crapaud commun
Bufo spinosus
Art.3 III - LC LC -
Crapaud épineux
Bufonidae
Epidalea calamita
Art.2 II IV LC LC -
Crapaud calamite
Bufotes viridis PNA
Art.2 II IV LC NT
Crapaud vert 2014-18
Hyla meridionalis
Art.2 II, III IV LC LC -
Rainette méridionale
Hyla sarda
Art.2 II IV LC LC -
Rainette sarde
Hylidae
Hyla arborea
Art.2 II IV LC NT -
Rainette arboricole
Hyla molleri
Art.2 III - EN VU -
Rainette ibérique
Pelobates fuscus PNA
Art.2 II IV LC EN
Pélobate brun 2014-18
Pelobatidae
Pelobates cultripes
Art.2 II IV NT VU -
Pelobate cultripède
Pelodytes punctatus
Pelodytidae Art.3 III - LC LC -
Pélodyte ponctué
Alytes obstetricans
Art.2 II IV LC LC -
Alyte accoucheur
Discoglossus
montalentii Art.2 II II, IV NT NT -
Alytidae Discoglosse corse
Discoglossus sardus
Art.2 II II, IV LC VU -
Discoglosse sarde
Discoglossus pictus
Art.2 II IV LC NAa -
Discoglosse peint

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 48


Bombina variegata
PNA
Sonneur à ventre Art.2 II II,IV LC VU
2011-15
jaune
Bombinatoridae
Bombina bombina
Sonneur à ventre - II II, IV LC NAa -
de feu
Xenopus laevis
Pipidae - - - LC NAa -
Xénope lisse
URODELES
Salamandra atra
Art.2 II IV LC VU -
Salamandre noire
Salamandra lanzai
Art.2 II IV VU NT -
Salamandre de Lanza
Salamandra corsica
Art.3 III - LC NT -
Salamandre de Corse
Salamandra
salamandra Art.3 III - LC LC -
Salamandre tachetée
Lissotriton vulgaris
Art.3 III - LC NT -
Triton ponctué
Ichtyosaura alpestris
Art.3 III - LC LC -
Triton alpestre
Salamandridae
Lissotriton helveticus
Art.3 III - LC LC -
Triton palmé
Triturus cristatus
Art.2 II II, IV LC NT -
Triton crêté
Triturus marmoratus
Art.3 III IV LC NT -
Triton marbré
Triturus carnifex
Art.2 II II, IV LC NAa -
Triton crêté italien
Calotriton asper
Calotriton des Art.2 II IV NT VU -
Pyrénées
Euproctus montanus
Art.2 II IV LC LC -
Euprocte de Corse
Speleomantes strinatii
Plethodontidae Art.2 III II, IV NT LC -
Spélerpès de strinati

Tableau 1 : Liste des 40 espèces et/ou taxons d'amphibiens (nom commun et scientifique en rouge, les espèces
introduites) classées selon les groupes et familles, statut de protection et de menaces. DH = Directives Habitats ;
LR = Liste rouge ; PNA = Plan national d'actions.

Arrêté national du 19 novembre 2007. Liste des espèces d'amphibiens et de reptiles protégées sur le territoire
national métropolitain

L'article 2 désigne les espèces intégralement protégées ainsi que leurs habitats

L'article 3 désigne les espèces intégralement protégées

L'article 5 désigne les espèces partiellement protégées

Convention de Berne (1979, 1990, 1996) : règlemente tous les aspects de la conservation du patrimoine naturel

L’annexe 2 cite les espèces animales totalement protégées

L’annexe 3 fixe la liste des espèces protégées dont les populations peuvent dans certains cas faire l’objet de
prélèvements

Directives « Habitats, Faune, Flore » (Annexe, II, IV et V), appelée communément Directives Habitats, s’applique
aux pays de l’Union Européenne depuis 1992. Elle a pour objet d’assurer le maintien de la diversité biologique
par la conservation des habitats naturels, ainsi que de la faune et de la flore sauvages. La Directive Habitats est
le socle d’un réseau d’espaces naturels gérés durablement appelé Natura 2000.

L’annexe 2 regroupe des espèces animales et végétales d’intérêt communautaire dont la conservation nécessite
la désignation de zones spéciales de conservation (ZSC).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 49


L’annexe 4 liste les espèces animales et végétales d’intérêt communautaire qui nécessitent une protection stricte :
elle concerne les espèces devant être strictement protégées.

L'annexe 5 concerne les espèces animales et végétales d’intérêt communautaire dont les prélèvements dans la
nature et l’exploitation sont susceptibles de faire l’objet de mesures de gestion.

Liste rouge nationale réalisée en 2015, par le Comité français de l'Union Internationale pour la Conservation, le
Muséum d'Histoire naturelle et la Société herpétologique de France : 8 espèces menacées et 12 espèces quasi-
menacées de France métropolitaine CR : en danger critique d’extinction ; EN : en danger ; VU : vulnérable ; NT :
quasi-menacée (espèce proche du seuil des espèces menacées ou qui pourrait être menacée si des mesures de
conservation spécifiques n’étaient pas prises) ; LC : préoccupation mineure (espèce pour laquelle le risque de
disparition de France métropolitaine est faible). 5 espèces introduites en métropole mais non soumise à
l'évaluation (NAa), le statut de la grenouille rieuse est sujet à controverse selon les régions.

Liste rouge mondiale : Cette liste évalue le statut des espèces à l'échelle de leur aire de répartition globale.
La dernière évaluation date de 2004 (sauf pour les espèces récemment décrites).

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 50


Annexe 2 - Exemple de détermination chez les Anoures et les Urodèles
(Avec l’aimable autorisation d’exploitation des photos de J. MURATET)

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 51


Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 52
Annexe 3 - Créer et entretenir un plan d'eau à amphibiens :
quelques principes généraux

Nombre : Une ou deux mares principales accompagnées d'un chapelet de mares et flaques paraissent
souhaitables (modèle du continent-archipel)

Surface : Elle dépend du nombre d'espèces et de la taille des populations que l'on veut favoriser. Une surface
minimum d'une centaine de mètres carrés s'impose pour les amphibiens.

Profondeur et volume: Elle est liée à la permanence de l'inondation pendant toute la durée du développement
des espèces attendues. Une profondeur maximale des mares de 1,20 m à 1,50 m est souhaitable pour certaines
espèces (Triton crêté, Triton marbré, Pélobate cultripède). Des flaques peu profondes entre 15 et 30 cm sont
suffisantes parfois pour les espèces à développement rapide (crapaud calamite et vert, pélodyte...).

Hydropériode (ou durée de mise en eau): Le caractère temporaire des plans d'eau n'est pas un facteur limitant
si la présence de l'eau est assurée jusqu'à la métamorphose des larves. A l’inverse, une longue durée de mise
en eau favorise le risque de communautés structurées de poissons et d’invertébrés prédateurs de larves
d’amphibiens.

Pente des berges : Les berges seront de préférence profilées en pente douce pour permettre une gradation des
conditions écologiques. Elles favorisent également le développement de la végétation dans laquelle les poissons
auront plus de difficulté à trouver les têtards ou les œufs. Elles permettent aussi aux adultes et aux juvéniles
d'entrer et de sortir facilement du site.

Forme et longueur des rives, présence d'îlots : Si on souhaite créer de nombreux micro habitats, il est important
de réfléchir à la forme que l'on donnera à la pièce d'eau. En particulier, il est bon d'augmenter la longueur des rives.
La sinuosité du plan d'eau et la présence d'îlots en favorisant les écotones et les refuges (anses, péninsules) sont
aussi souhaitables pour les amphibiens. Dans tous les cas, la forme de la pièce d'eau sera modelée au cours des
années par suite du développement de la végétation installée sur les berges peu inclinées.

Nature du substrat : La nature des sols va influencer l'étanchéité du plan d'eau. Elle conditionne aussi le
développement d'invertébrés benthiques dont se nourrissent les larves d’urodèles et l'abondance du périphyton
dont se nourrissent les têtards. Lorsque la nature géologique du fond rocheux n'est pas connue, elle sera
recherchée dès les premiers travaux. C'est dans les fonds de vallée qu'on a le plus de chances de trouver des
épaisseurs d'argile imperméable. Dans le cas des plans d'eau bâchés, un apport d'argile sur une 30 cm
d'épaisseur suffit parfois à empêcher les fuites.

Alimentation en eau : L'alimentation en eau détermine les aménagements envisagés. On peut souhaiter une
alimentation par eaux de pluie essentiellement, eaux de pluie et eaux d'infiltration, eaux de ruissellement d'un
cours d'eau raccordé...Une nappe d'eau permanente proche de la surface du sol peut être suffisante pour se
passer de tout artifice de création. Il est possible de repérer de tels endroits en parcourant le terrain, les sols y
sont constamment gorgés d'eau. Cette alimentation n’est pas sans relation avec la durée de mise en eau (ou
l’hydropériode) et la température de même qu’elle influence un certain nombre d’autres paramètres.

Ensoleillement et température : Lorsque la mare est peu profonde, les rayons du soleil réchauffent si fortement
l'eau au printemps que les algues et les têtards se développent plus rapidement et dans de meilleures conditions.
La luminosité est un facteur d'échauffement mais aussi d'oxygénation. Cependant, une production trop élevée
d'algues peut entraîner un phénomène d'eutrophisation avec dégradation du surplus de matière organique et
consommation d'oxygène dissous dans l'eau.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 53


Mare temporaire créé pour le Crapaud vert
(Source : © A. Morand)

pH, teneur en oxygène et salinité : Le pH et l'oxygène sont rarement des facteurs limitants dans la nature. Les
espèces, en particulier les larves, ont besoin d'une oxygénation satisfaisante de l'eau. La plupart d'entre elles
présentent une marge de tolérance assez large pour le pH (6,5 < pH < 10). Les variations journalières de
température et d'oxygène, d'autant plus accusées par suite du faible volume du plan d'eau, rendent difficile
l'évaluation du pH en milieu naturel. Enfin, il est bon de rappeler que les amphibiens (pendant le développement
embryonnaire et larvaire) ne supportent pas les salinités élevées (en général < 4-5 g/l NaCl) même si certaines
espèces (comme le crapaud vert) dépasse du double ses valeurs…

Végétaux aquatiques : L'introduction de végétaux n'est très souvent pas nécessaire dans la mesure où la
colonisation est naturelle et relativement rapide. Plusieurs espèces pionnières profitent de cette situation
provisoire (ex. les Characées). L'accélération des phénomènes ou la volonté de conservation d'espèces
végétales rares peut motiver des transferts.

Coexistence avec les poissons : La présence de poissons peut être liée à plusieurs origines : une connexion
directe à un cours d’eau ou lors de crue, l’apport par des particuliers à des fins de loisirs, l’apport naturel par d’autres
voies (transport d’œufs via de la végétation aquatique sur les pattes des oiseaux, etc.). Les conditions d’oxygénation,
la taille et le caractère plus ou moins temporaire de la mare peut favoriser l’élimination régulière des poissons ou
leur régulation à des densités faibles. De même, la présence d’herbier aquatique dense constitue autant de micro
habitats favorables aux larves des amphibiens particulièrement sujettes à la prédation par les poissons !

Gestion et entretien du plan d’eau : La dégradation rapide de la qualité des eaux (eutrophisation) et les
processus d’atterrissement confèrent à ce type de milieu une espérance de vie faible. Dans de nombreuses
situations, l’excès d’éléments nutritifs peut provenir de la décomposition de matériaux organiques (feuilles mortes,
etc.). Les engrais agricoles, les éléments toxiques des eaux pluviales s’ajoutent à ces apports naturels. La
restauration de la qualité de l’eau et la gestion des niveaux d’eau sont d’une importance cruciale pour la viabilité
du site et des populations. Il est donc recommandé de ne pas connecter les mares créées à des drains ou
ruisseaux qui peuvent recevoir beaucoup d’éléments riches en MO.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 54


Annexe 4 - Mesures « E, R, C » : quelques éléments de coût

Fourchette de prix Principaux facteurs de variabilité


Type de mesures Contexte
(unitaire) en € (HT) et commentaires

EVITER
Fermeture de route et installation de Si et seulement si une déviation Panneaux : 100-500 € • quantités
panneaux préventifs aisée de la circulation est possible • conception/fournisseur
et si le tronçon de route fermé ne
comporte pas d'habitation ou peu
REDUIRE
Dispositif (ou opération) de Lorsque la configuration le permet 1 000 - 5 000 € • fournisseur et type de matériaux
sauvetage temporaire (accotement suffisamment large, Hors main d’œuvre • quantité (linéaire à équiper)
= barrières / seaux / piquets) peu de chemins d'accès latéraux... salariée ou bénévole
(en général)
Dispositif permanent (batrachoduc ou crapauduc)
Lorsque la configuration des lieux le permet (topographie, accotement de la route suffisamment large, longueur raisonnable des traversées sous
chaussée...) et lorsque le corridor de déplacement des amphibiens est suffisamment étroit et bien délimité le long de la voie à équiper…

Avant projet sommaire, étude préalable à une assistance à maitrise d'ouvrage, 10 000 - 20 000 € • Maître d’ouvrage
étude de faisabilité, etc. • Données et connaissances
antérieures disponibles
• Objectifs
Barrière collectrice (Fourniture + pose) 100 - 200 € ml • matériaux
• quantités (linéaire à équiper)
Traversée sous chaussée (Fourniture + pose) – 300 - 550 € ml • matériaux
(Exemple d’ouverture « tunnel » = 1,2/1,5 m2) • quantités (linéaire à équiper)
• dimension
• profondeur
Petits aménagements (système d’évacuation des eaux, fosses d’entonnement, 5 000 - 10 000 € • quantités (linéaire à équiper)
barrières canadiennes, etc.) • type
Entretien (quelques journées en début de chaque saison de reproduction) 2 000 - 3 000 € • type et coût de la main d’œuvre
• quantité (linéaire à entretenir)
Suivi de l’efficacité 10 000 - 20 000 € • Objectifs/précisions du suivi sur
quelques années
COMPENSER
Création d’habitats aquatiques 30 - 100 € m2 • question du foncier
(mares de substitution ou • savoir-faire
d’accompagnement) • quantités
• dimension
• imperméabilisation
Le(s) nouveau(x) site(s) doit(vent) • si intégré à un chantier ou non
assurer l'ensemble des conditions (léger surcoût si en surplus)
favorables aux amphibiens, à • autre rôle (ex. mare incendie)
Création d’habitats d’hiver et d’été minima équivalent à l'ancien 100 - 500 € m2 • question du foncier
(refuge hivernal, prairies ou territoire • savoir-faire
de chasse et de croissance) • quantités
• types

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures de transport terrestre 55


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Le Cerema, l’expertise publique pour le développement et la cohésion des territoires.

Le Cerema est un établissement public qui apporte un appui scientifique et technique renforcé dans l’élaboration, la mise en œuvre
et l’évaluation des politiques publiques de l’aménagement et du développement durables. Centre de ressources et d’expertise, il a
pour vocation de produire et de diffuser des connaissances et savoirs scientifiques et techniques ainsi que des solutions innovantes
au cœur des projets territoriaux pour améliorer le cadre de vie des citoyens. Alliant à la fois expertise et transversalité, il met à
disposition des méthodologies, outils et retours d’expérience auprès de tous les acteurs des territoires : collectivités territoriales,
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Mise en page › Cerema Infrastructures de transport et matériaux

Illustration couverture › Crapaud commun (Bufo bufo), traversant une route de nuit, a peu de chance de s’en sortir vivant - Source : © H. Coffre

ISBN : 978-2-37180-328-2
ISSN : 2417-9701

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La collection « Connaissances » du Cerema
Cette collection présente l’état des connaissances à un moment donné et délivre de l’information sur un sujet,
sans pour autant prétendre à l’exhaustivité. Elle offre une mise à jour des savoirs et pratiques professionnelles
incluant de nouvelles approches techniques ou méthodologiques. Elle s’adresse à des professionnels
souhaitant maintenir et approfondir leurs connaissances sur des domaines techniques en évolution constante.
Les éléments présentés peuvent être considérés comme des préconisations, sans avoir le statut de références
validées.

Amphibiens et dispositifs de franchissement des infrastructures


de transport terrestre
Les infrastructures de transport terrestres (ITT) font courir 2 risques majeurs aux amphibiens : la fragmentation
(disparition, diminution, dégradation et isolement des surfaces d’habitats favorables, extinction des petites
populations) et la mortalité directe par les collisions. Divers dispositifs associés aux mesures « Eviter, Réduire,
Compenser » (ERC) sont destinés à éviter l’impact ou le supprimer, atténuer ou réduire ces risques ou tenter
de compenser les dommages.
Après un rappel des principales caractéristiques biologiques des amphibiens et des menaces qui pèsent sur
ce groupe, le présent ouvrage précise les enjeux de protection et les impacts des ITT, en particulier les routes.
Il présente les dispositifs temporaires et permanents de protection des amphibiens, en particulier les
« crapauducs » (ou « batrachoduc »), et les principes de conception.
Les méthodes de dénombrement, les mesures d’accompagnement, l’entretien et le suivi de l’efficacité de ces
mesures, la pérennisation des corridors rétablis (politiques foncières) et quelques estimations de coût sont
également abordés.
Cet ouvrage s’adresse principalement aux concepteurs de ces installations et aux gestionnaires d’infrastructures
mais également à tous les autres acteurs qu’ils appartiennent à des structures associatives ou institutionnelles
intéressées et impliquées dans l’initiative et la mise en œuvre de ces mesures.

Aménagement et cohésion des territoires - Ville et stratégies urbaines - Transition énergétique et climat - Environnement et ressources
naturelles - Prévention des risques - Bien-être et réduction des nuisances - Mobilité et transport - Infrastructures de transport - Habitat et bâtiment

Prix 32 €Gratuit
ISSN : 2417-9701
ISBN : 978-2-37180-328-2

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