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Dossier

Care, égalité et sécurité sociale

Politique sociale
Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées

International
Assurance-maladie des travailleurs frontaliers

Sécurité sociale
CHSS 4/2014
sommaire Sommaire CHSSNo 4/2014 juillet / août

Sommaire Sécurité sociale CHSS 4/2014

Editorial 201 Politique sociale


Chronique juin / juillet 2014 202 Prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI:
faible croissance des dépenses
(Urs Portmann, Office fédéral des assurances sociales) 237

Dossier Convention de l’ONU relative aux droits des personnes


handicapées: état des lieux et mesures à prendre
Care, égalité et sécurité sociale (Martina Pezzati et Andreas Rieder, Bureau fédéral de
(Brigitte Liebig, Haute école de la Suisse du Nord-Ouest) 209 l’égalité pour les personnes handicapées) 241
Les réformes de l’Etat-providence et leurs conséquences ambi-
valentes (Franz Schultheis, Monika Bütler et Thomas Mazzurana,
Assurance-invalidité
Université de Saint-Gall 212
Evaluation de la qualité de la fourniture d’appareils auditifs
Précarité des prestations de care: tendances et mécanismes
(Monika Sander et Martin Albrecht, IGES Institut) 243
(Bettina Brüschweiler et Annegret Wigger, HES Saint-Gall) 215
Contribution d’assistance: premières expériences
Concilier vie privée et vie professionnelle: une menace pour
(Maryka Lâamir-Bozzini, Office fédéral des assurances sociales) 246
l’égalité et la cohésion sociale?
(Thomas Widmer et Christine Zollinger, Université de Zurich) 219
Peu d’égalité professionnelle pour les seniors en emploi International
(Céline Schoeni, Magdalena Rosende et Nicky Le Feuvre, Assurance-maladie des travailleurs frontaliers: fin d’une solution
Université de Lausanne; Morgane Kuehni, Haute école de sur mesure ou d’un privilège?
travail social et de la santé, Lausanne) 224 (Lionel Tauxe, Office fédéral des assurances sociales) 251
La main-d’œuvre familiale non rémunérée orpheline des
prestations sociales suisses (Yvan Droz et Fenneke Reysoo, Parlement
Institut de hautes études internationales et du développement,
Genève, et Valérie Miéville-Ott, Agridea) 228 Interventions parlementaires 253

«Investissement social» et promotion de la femme Législation: les projets du Conseil fédéral 255
(Eva Nadai, Haute école spécialisée de la Suisse du Nord-Ouest)231
L’égalité, entre valeur revendiquée et réalité inachevée (Sylvie Informations pratiques
Durrer, Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes) 234 Statistiques des assurances sociales 256
Calendrier (réunions, congrès, cours) 258
Livres259

et : dmin .ch
adresse
Intern
o f a s. a
Notre www.

editorial Editorial

A-t-on besoin d’une politique sociale


axée sur l’égalité?

économique. Mais lorsque la situation économique de leur


couple et surtout de leur famille le permet, le modèle tra-
ditionnel répartissant les rôles selon les sexes a encore
tendance à s’imposer à elles. Parfois, dans une version légè-
rement remaniée, leurs compagnons ont un poste à plein
temps et elles, une activité à temps partiel. Les entreprises
elles aussi se sont adaptées aux choix des couples. Elles
offrent davantage de places de travail à temps partiel stan-
dardisées. Mais elles rémunèrent sensiblement moins bien
les personnes dont la disponibilité en temps est réduite, et
Sabina Littmann-Wernli elles limitent souvent leurs perspectives d’avancement.
Responsable du secteur Recherche et Aussi compréhensibles et raisonnables que soient ces
évaluation, Office fédéral des assurances décisions quant à la répartition des rôles et aux conditions
sociales mises en place par les entreprises, tous – hommes et femmes
– sont désemparés lorsque leur couple ne dure pas. Le fort
taux de personnes qui élèvent seules leurs enfants et sont
Les travaux du PNR 60 «Egalité entre hommes et femmes» tributaires de l’aide sociale parce que leur activité à temps
viennent de s’achever. Ils ont examiné en profondeur la partiel ne suffit pas à subvenir aux besoins de la famille, et
compatibilité des obligations familiales et des engagements les lacunes de prévoyance que subissent surtout les femmes
professionnels, ainsi que la couverture sociale qui échoit à seules, d’âge mûr, mettent en évidence la double responsa-
différents modes de vivre et de travailler. Le dossier de ce bilité de toutes les parties concernées. D’un côté, il faudrait
numéro de la CHSS leur est consacré. La conclusion qui que le cadre de la politique sociale intègre une diversité
se dégage de toutes ces recherches est qu’il est non seulement illimitée de projets de vie; à tout le moins, il faudrait systé-
possible et nécessaire d’améliorer encore l’égalité entre les matiquement abaisser les barrières, bien montrées par le
sexes, mais que c’est essentiel pour la société. PNR 60, qui font obstacle à l’activité professionnelle et à
Il n’y a malheureusement pas de voie royale qui conduise la possibilité de concilier vie de famille et vie profession-
à l’égalité. Les facteurs qui peuvent la consolider sont mul- nelle. D’un autre côté, toutes les parties devraient admettre
tiples et variés. Le nombre d’acteurs concernés est impor- que les projets de vie individuels appellent des formules de
tant. Mais seuls les hommes, les femmes et les couples prévoyance particulières, y compris dans le domaine de la
particulièrement entreprenants et courageux ne reculent prévoyance vieillesse.
pas devant les divers obstacles et le prix comparativement Quelle contribution spécifique la politique sociale peut-
élevé – y compris dans l’acception strictement économique elle donc apporter à l’égalité, en termes de prévoyance?
du terme – qu’il faut consentir pour tenter de vivre en égaux. Après quatre ans de recherche, le PNR 60 suggère une
En effet, pour y parvenir, ces personnes embrassent une réponse tout en nuance: il est illusoire d’attendre que la
profession atypique pour leur sexe, tentent des modèles de politique sociale parvienne à compenser entièrement les
partenariat nouveaux en vue de concilier famille et acti- conséquences d’une répartition traditionnelle du travail au
vité professionnelle ou cherchent des moyens permettant sein des couples. Mais on peut écarter les obstacles recon-
de réaliser leur idéal de vie et leur modèle familial. Les nus et introduire des prestations en amont qui facilitent le
approches retenues sont aussi plurielles que les personnes choix des couples; la prolongation du programme d’inci-
elles-mêmes. Elles n’entrent guère dans les structures fon- tation des structures d’accueil extrafamilial en est un
dées sur le rôle respectif des hommes et des femmes (et des exemple. Il est possible d’accroître l’égalité à travers des
pères et des mères) transmis par l’histoire et sur la répar- projets de vie qui conjuguent l’égalité. Cela suppose une
tition traditionnelle du travail qui leur est liée. Le PNR 60 politique sociale adéquate, qui encourage et soutienne
met ici le doigt sur l’un des points hautement conflictuels davantage de femmes et d’hommes à coordonner leurs
qui opposent égalité et politique sociale. activités professionnelles avec leurs obligations familiales,
La plupart des jeunes femmes d’aujourd’hui ont certes à prendre soin de leurs enfants et de leurs proches, à assu-
bien compris l’importance d’une formation professionnelle rer le revenu du ménage et à constituer une prévoyance
et d’une activité lucrative pour leur propre indépendance vieillesse solide pour chacun des deux membres du couple.

Sécurité sociale CHSS 4/2014 201


chronique Chronique juin / juillet 2014

introduire une limite pour les grands et la CdC ont pris les mesures néces-
Affaires internationales sinistres et éviter les surindemnisa- saires pour apporter une solution
tions. Les modifications, convenues rapide et durable à ces problèmes.
Accord sur la libre circulation avec le concours des partenaires so- Aucune des deux enquêtes n’a révélé
des personnes (ALCP) I ciaux et des assureurs, devront être de grandes pertes financières ou des
Le Conseil fédéral a décidé de pro- rapidement mises en œuvre (www. cas de corruption. L’exploitation in-
longer de deux ans les restrictions ofsp.admin.ch ➞ Thèmes ➞ Assu- formatique de la CdC a toujours été
temporaires applicables aux travail- rance-accidents et assurance militaire assurée et les versements mensuels
leurs bulgares et roumains. La prio- ➞ Assurance-accidents ➞ Projets ➞ aux assurés ont été effectués de ma-
rité des travailleurs indigènes, les Révision de la LAA). nière régulière.
contingents ainsi que le contrôle des
conditions de salaire et de travail sont SUVA: exercice 2013 Prévoyance vieillesse 2020
donc maintenus. Cette prolongation La Suva a dégagé un solde positif Le Conseil fédéral a pris connais-
de la phase de transition s’achèvera de 61,5 millions de francs durant sance des principaux résultats de la
le 31 mai 2016, en vertu du protocole l’exercice 2013. Sur ce montant, 50 consultation (achevée fin mars) et
II à l’accord sur la libre circulation millions ont été restitués aux clients. précisé sur certains points l’orienta-
des personnes conclu avec l’Union Après avoir abaissé les primes sept tion de la réforme globale de la pré-
européenne (UE). Ce sera aussi la années consécutives, l’entreprise a voyance vieillesse dont le message
dernière. La Suisse fait ainsi plein annoncé vouloir maintenir une grande sera publié à l’automne:
usage du régime transitoire prévu par partie des primes à un niveau inchan- • Le relèvement maximal des taux de
l’ALCP vis-à-vis de la Roumanie et gé au 1er janvier 2015 et ce en raison TVA en faveur de l’AVS sera de 1,5
de la Bulgarie. de la hausse persistante des coûts de point. Cela permettra de combler
la santé. Pour un quart environ des la lacune de financement prévisible
Accord sur la libre circulation clients, il sera procédé à un ajustement à l’horizon 2030.
des personnes (ALCP) II des primes vers le haut ou vers le bas • Le projet proposera l’abandon de
L’UE rejette la demande de la en fonction du risque. Selon les sta- la déduction de coordination dans
Suisse de réviser l’ALCP. Dans sa tistiques des sinistres, le nombre la prévoyance professionnelle, ce
lettre du 24 juillet 2014, Mme Catherine d’accidents et de maladies profession- qui simplifiera le 2e pilier. Mais les
Ashton, haute représentante de nels a diminué en 2013, tandis qu’il y taux de bonification de vieillesse
l’Union pour les affaires étrangères a eu une hausse du nombre d’acci- seront abaissés, de manière à main-
et la politique de sécurité, a fait savoir dents non professionnels (www.suva. tenir le niveau des prestations.
au président de la Confédération, ch ➞ Médias ➞ Rapport annuel • Le produit du point de TVA («%
M. Didier Burkhalter, que le principe 2013). démographique ») déjà prélevé
de la libre circulation des personnes aujourd’hui en faveur de l’AVS ira
est un pilier fondamental de l’UE. entièrement à l’assurance ; il ne
Comme la préférence nationale et sera donc plus réparti entre l’AVS
l’instauration de plafonds et de AVS et la Confédération. La contribu-
contingents annuels limitant l’immi- tion de la Confédération aux dé-
gration sont contraires à ce principe, Centrale de compensation (CdC): penses de l’assurance sera abaissée,
l’UE se voit dans l’impossibilité de enquêtes administratives et la complexité des flux financiers
prendre la demande suisse en consi- Ces derniers mois, deux enquêtes ainsi réduite.
dération (www.europa.admin.ch ➞ administratives dans le domaine in-
Dossiers actuels ➞ Réponse de l’UE formatique ont été menées sur man- (www.ofas.admin.ch ➞ Thèmes ➞
à la demande suisse de révision de dat de l’Administration fédérale des AVS ➞ Actualité ➞ Prévoyance vieil-
l’ALCP [en anglais]). finances (AFF) à propos de la CdC1, lesse 2020)
l’une visant à examiner la sécurité des
données, l’autre à tirer au clair les faits
révélés par un audit du Contrôle fédé- 1 Organe central de la Confédération chargé de
la gestion des assurances sociales du premier
Assurance-accidents ral des finances sur les acquisitions pilier, la CdC remplit essentiellement des tâches
réalisées en 2012 et 2013. Les rapports concernant l’application de l’AVS et de l’AI
pour les assurés vivant à l’étranger, la gestion
Révision partielle de la LAA relèvent des lacunes dans les proces- de l’assurance facultative pour les groupes
La loi sur l’assurance-accidents sus d’acquisition et dans l’exécution autorisés de personnes domiciliées à l’étranger
ainsi que la gestion de la Caisse de compen-
(LAA) doit être soumise à une révi- des contrats, ainsi que la nécessité sation de l’administration fédérale centrale et
sion partielle pour combler certaines d’améliorer la culture de la sécurité des entreprises proches de la Confédération.
La CdC n’est pas responsable de la gestion
lacunes en matière de couverture, dans le domaine informatique. L’AFF des avoirs de l’AVS, qui incombe au Fonds AVS.

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Chronique juin / juillet 2014

port à 2012, mais ce nombre est paru. Elles aideront les professionnels
Conjoncture proche de la moyenne à long terme, sur le terrain à prendre des mesures
environ 40 000 par année depuis le adaptées pour lutter contre la vio-
Prévisions conjoncturelles milieu des années 1990. Le nombre lence chez les jeunes, à repenser celles
pour l’été 2014 de divorces (17 100 en 2013) et celui qui existent déjà et à en développer
La croissance favorable de l’écono- des partenariats enregistrés (690) sont de nouvelles.
mie suisse s’est maintenue au prin- également stables par rapport aux Le «Manuel pour une prévention
temps 2014. Toutefois, si la dynamique années précédentes (www.bfs.admin. efficace de la violence » rassemble
conjoncturelle interne est vigoureuse, ch ➞ Thèmes ➞ 01 – Population). l’acquis des recherches internatio-
le développement des exportations nales sur la prévention de la violence.
reste timide, en raison notamment de Il présente diverses approches pos-
la progression encore irrégulière de sibles : ateliers destinés aux parents,
la conjoncture internationale. Le Egalité programmes de lutte contre le mob-
groupe d’experts de la Confédération bing ou programmes de prévention
continue de tabler sur un renforcement Accessibilité des sites Internet de la violence dans les relations amou-
progressif de l’essor conjoncturel en de la Confédération reuses chez les jeunes. Quant au guide
Suisse, qui devrait voir son assise Les personnes en situation de han- «Prévention de la violence juvénile»,
s’élargir d’ici à 2015. En raison de la dicap doivent pouvoir accéder sans il donne un aperçu de 26 critères de
reprise hésitante des exportations, restriction aux sites Internet de la bonnes pratiques dans la famille,
l’amélioration conjoncturelle devrait Confédération. Le Conseil fédéral a l’école, l’espace social (www.jeunes-
être un peu moins rapide qu’escomp- approuvé un ensemble de mesures etviolence.ch ➞ Bonnes pratiques ➞
tée en mars. Pour l’année 2014, une allant dans ce sens et décidé de mettre Guide Critères de bonnes pratiques:
croissance du PIB en termes réels de en place un service de conseil pour prévention de la violence juvénile
2 % est désormais attendue (+2,2 % une durée limitée à trois ans. Depuis dans la famille, à l’école et dans l’es-
prévus en mars). La croissance devrait 2004, la Confédération est tenue de pace social, PDF, et Manuel Préven-
être plus soutenue en 2015 et atteindre garantir aux personnes en situation tion efficace de la violence. Un aperçu
2,6% (+2,7% prévus en mars). Vu ces de handicap un accès sans restriction du savoir actuel sur le plan interna-
perspectives conjoncturelles favo- à ses sites web. tional, PDF).
rables, le marché du travail devrait
continuer de bien se développer et le Personnes handicapées
taux de chômage, de reculer davantage. Une formation qui s’améliore, mais
une situation financière qui se dé- Logement
grade, tandis que stagnent l’emploi, la
satisfaction dans la vie en général et Droit du bail
Démographie l’utilisation autonome des transports Mis en consultation, le projet
en commun: dix ans après l’entrée en d’une modification du code des obli-
Mouvement naturel de vigueur de la loi sur l’égalité pour les gations prévoit qu’à l’avenir, dans
la population 2013 personnes handicapées, l’OFS publie toute la Suisse, le loyer précédent
Le nombre de naissances a légère- les premières séries temporelles dis- devra être communiqué au nouveau
ment augmenté, en passant de 82 200 ponibles permettant de mesurer l’évo- locataire par une formule officielle
en 2012 à 82 700 en 2013. Le nombre lution de la situation des personnes et qu’une éventuelle hausse de loyer
de décès est également en augmenta- handicapées entre 2007 et 2012 (www. devra être justifiée. Ce changement
tion (65 000). C’est la plus haute va- bfs.admin.ch ➞ Thèmes ➞ 20 – Situa- répond à un souci de transparence
leur recensée depuis 1918, quand tion économique et sociale de la popu- sur le marché des appartements loca-
survint la grippe espagnole. L’une des lation). tifs, l’objectif étant de freiner l’aug-
raisons invoquées pour expliquer ce mentation des prix, sans pour autant
phénomène est le vieillissement dé- imposer de restrictions matérielles
mographique. L’espérance de vie à la aux propriétaires (www.admin.ch ➞
naissance des hommes est restée Enfance et jeunesse Droit fédéral ➞ Procédures de
stable à 80,5 ans en 2013. Chez les consultation ➞ Procédures de
femmes, elle a légèrement progressé, Programme Jeunes et violence: de consultation et d’audition en cours
passant de 84,7 ans en 2012 à 84,8 ans nouveaux outils pour les spécia- ➞ Département fédéral de l’écono-
en 2013. Dans le courant de l’année listes de la prévention mie, de la formation et de la re-
2013, 39 800 mariages ont été célébrés, Deux nouvelles publications du cherche ➞ Modification du droit du
soit une diminution de 6,7 % par rap- programme Jeunes et violence sont bail dans le code des obligations).

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Chronique juin / juillet 2014

Evolution des prix en 2013 quelques coûts supplémentaires pour but d’y chercher un emploi doivent
Après avoir été forte dans certaines l’assurance-chômage. Ils s’expliquent être expressément exclus de l’aide
régions pendant plusieurs années, la par le principe de la totalisation, mais sociale. Le Conseil fédéral a annoncé
progression des prix s’est ralentie sur aussi par une hausse des prestations cette clarification du droit en vigueur
le marché du logement en 2013. Cela perçues par les membres de l’UE/ en janvier dernier et il a ouvert la
vaut notamment pour l’Arc lémanique AELE exerçant des activités saison- consultation sur les modifications
et la région de Zurich, pour le segment nières. On a pu observer que le taux législatives début juillet. L’inscription
supérieur des prix et pour le marché de perception de prestations sociales de ces dispositions dans le droit fédé-
du logement en propriété. Toutefois, (indemnités de chômage et aide so- ral vise à harmoniser les pratiques
dans les segments moyen et inférieur ciale) des personnes immigrées dans cantonales (www.admin.ch ➞ Droit
de la plupart des régions et dans le le cadre de l’ALCP, qui était inférieur fédéral ➞ Procédures de consultation
secteur locatif, le marché reste tendu. à la moyenne durant les premières ➞ Procédures de consultation et
Telle est la conclusion d’une étude années du séjour, a tendance à aug- d’audition en cours ➞ Département
actualisée traitant des effets de la libre menter au fil du temps (www.europa. fédéral de justice et police ➞ Modifi-
circulation des personnes sur le mar- admin.ch ➞ Documentation ➞ Rap- cation de la loi fédérale sur les étran-
ché du logement, menée sur mandat ports ➞ Accords bilatéraux CH-UE gers (Letr) et de l’ordonnance sur
de l’Office fédéral du logement (www. ➞ Libre circulation des personnes ➞ l’introduction de la libre circulation
bwo.admin.ch ➞ Thèmes ➞ Marché Rapport de l’Observatoire sur la libre de personnes, OLCP).
du logement ➞ Libre circulation des circulation des personnes entre la
personnes et marché du logement). Suisse et l’UE [SECO, ODM, OFS, Demandes d’asile
OFAS] ➞ 10e rapport 2013, PDF). La Suisse a enregistré 5384 de-
mandes d’asile au deuxième trimestre
Aide d’urgence 2014, soit une augmentation de 10 %
Migration En 2013, 13 720 personnes tenues par rapport au premier trimestre
de quitter la Suisse ont obtenu des (4894). Cette hausse est due en pre-
Accord sur la libre circulation prestations d’aide d’urgence sous la mier lieu à l’accroissement du nombre
des personnes (ALCP) III forme de places d’hébergement, de de requérants d’asile de nationalité
L’Observatoire sur la libre circula- nourriture, de vêtements et de soins érythréenne, qui traversent la Médi-
tion des personnes (ALCP) entre la médicaux de base. Ces prestations ont terranée et arrivent dans le sud de
Suisse et l’UE a publié son 10e rap- été accordées en moyenne durant 112 l’Italie. Malgré cette augmentation, le
port. En 2013, l’immigration nette de jours. Par rapport à 2012, le nombre nombre de demandes d’asile pen-
ressortissants des Etats membres de de procédures de Dublin et de de- dantes en première instance a conti-
l’UE/AELE s’est chiffrée à 66 200 mandes d’asile mal étayées a sensi- nué de diminuer. D’avril à juin, 2320
personnes (pour un solde migratoire blement baissé, entraînant une dimi- personnes ont quitté la Suisse ou ont
international de 88 000 personnes). Il nution du nombre de décisions d’asile. été rapatriées, soit 5% en moins que
s’agit principalement d’une migration Cette évolution s’est répercutée sur le trimestre précédent. 678 d’entre
de main-d’œuvre, puisque plus de l’aide d’urgence. En 2013, pour la pre- elles ont quitté le pays dans le cadre
60 % des immigrants issus de la zone mière fois depuis 2008, l’effectif des d’une procédure dite de Dublin.
UE/AELE en 2013 sont venus en bénéficiaires a chuté (de 570 per-
Suisse pour y travailler. L’évolution sonnes en comparaison de 2012). Immigration: mise en œuvre
de l’immigration nette suit étroite- Comme en 2012, les bénéficiaires de l’art. 121a Cst.
ment celle de la conjoncture. Ces der- provenaient avant tout du Nigéria, de Le Conseil fédéral a adopté le plan
nières années, l’immigration a ralenti Tunisie, de Serbie et d’Algérie. 80% de mise en œuvre du nouvel article
le vieillissement de la population et d’entre eux étaient de sexe masculin. constitutionnel sur l’immigration. Il y
soutenu les assurances du 1er pilier, Parmi les personnes qui ont reçu une définit les principaux éléments du
financées par répartition. A long aide d’urgence en 2013, 34 % ont texte de loi qui sera publié fin 2014 et
terme toutefois, le paiement des coti- quitté la Suisse de manière contrôlée y expose la manière dont il entend
sations ouvrira naturellement le droit avant la fin de l’année. Au quatrième fixer les plafonds et les contingents au
à une rente, qui grèvera l’AVS d’ici 30 trimestre 2013, 2356 personnes étaient moyen desquels l’immigration en
à 40 ans. Dans l’AI, le taux de nou- considérées comme bénéficiaires de Suisse sera gérée à partir de février
veaux bénéficiaires de rente diminue longue durée. 2017. A cette fin, le Conseil fédéral
depuis 2002 pour toutes les nationa- s’appuiera non seulement sur les be-
lités. L’AI ne subit donc pas de sur- Aide sociale soins annoncés par les cantons, mais
charge en raison de l’immigration. Les ressortissants européens qui aussi sur les analyses d’un organe
Cette dernière a, par contre, engendré entrent en Suisse uniquement dans le consultatif et sur les positions des

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Chronique juin / juillet 2014

partenaires sociaux. Seront contin- mais il a diminué de 1,6 point depuis cantons, des villes et des communes,
gentés tous les types d’autorisation à le début du relevé des données en a émis des recommandations en vue
partir d’une durée de séjour de quatre 2007 (il était alors de 9,3%). Le taux d’améliorer les conditions de déve-
mois. Afin que les besoins du marché de pauvreté de la population active a loppement physique, psychique et
du travail puissent être couverts, il dans le même temps diminué de 1,3 social de la petite enfance. Les recom-
conviendra d’encourager et de mieux point pour s’établir à 3,5%, ce qui est mandations concrétisent les objectifs
exploiter le potentiel offert par la nettement plus bas que celui des per- du dialogue sur l’intégration CTA
main-d’œuvre indigène (www.dfjp. sonnes non actives de 18 ans ou plus «Dès la naissance – entrer dans la vie
admin.ch ➞ Thèmes ➞ Migration ➞ (15,7%). En 2012, 590 000 personnes, en pleine santé» lancé en novembre
Mise en œuvre des nouvelles disposi- dont 130 000 personnes actives, 2013. Grâce au dialogue, la CTA sou-
tions constitutionnelles sur l’immigra- étaient touchées par la pauvreté mo- haite informer les familles, indépen-
tion ➞ Documents ➞ Plan de mise en nétaire en Suisse, soit 7,7% de la popu- damment de leur origine sociale ou
œuvre, PDF). lation résidante permanente. Si les nationale, des offres médicales, des
personnes de 65 ans ou plus pré- offres de soutien familial et des offres
Population résidante sentent elles aussi un taux de pau- d’intégration à disposition dans leur
d’origine maghrébine vreté élevé (16,4%), il convient d’in- région et les amener à en profiter. Il
L’Office fédéral des migrations terpréter ce chiffre avec prudence, s’agit par ailleurs pour les acteurs de
(ODM) a publié une étude réalisée étant donné que ce taux est calculé pratiquer la diversité et d’établir de
par le Forum suisse pour l’étude des en fonction des revenus de l’activité mieux réseauter (www.dialog-integra-
migrations et de la population sur les uniquement. Or les personnes âgées tion.ch ➞ Dès la naissance ➞ 13 re-
18 000 migrants marocains, algériens sont plus nombreuses à disposer d’une commandations).
et tunisiens vivant en Suisse. L’étude fortune dont elles peuvent se servir
donne un aperçu de l’histoire de cette en cas de besoin (www.bfs.admin.ch Prestations complémentaires
migration, de sa situation socioécono- ➞ Thèmes ➞ 20 – Situation écono- Le Conseil fédéral fixe les grandes
mique et culturelle, ainsi que des rap- mique et sociale de la population). lignes de la réforme des PC.
ports multiples et variés de ces mi- Le projet maintiendra le niveau des
grants avec leur pays d’origine. Elle prestations. Cela devrait écarter le
s’inscrit dans la série d’informations risque que le régime des PC se dé-
sur les diasporas publiées par l’ODM Politique sociale fausse sur l’aide sociale et que la ré-
(Sri Lanka, Kosovo, Portugal, Turquie, forme génère un surcroît de charges
Erythrée/Somalie) et s’adresse en Aide sociale financières pour les cantons.
particulier aux personnes en contact Le Conseil fédéral a adopté un rap- Le projet visera à orienter l’emploi
avec les ressortissants de ces pays dans port élaboré par la Conférence suisse de la fortune propre vers des fins de
un cadre professionnel, privé ou socio- des institutions d’action sociale prévoyance, de sorte que le risque de
culturel (www.odm.admin.ch ➞ Do- (CSIAS) sur mandat de l’Administra- dépendance des personnes âgées à
cumentation ➞ Publications ➞ tion fédérale des contributions (AFC) l’égard des PC diminue. C’est pour-
Etudes diaspora ➞ Les Marocains, les qui analyse les effets de l’imposition quoi il proposera d’interdire le retrait
Tunisiens et les Algériens en Suisse). de l’aide sociale et des autres presta- de l’avoir de prévoyance sous forme
tions de transfert. L’étude porte aussi de capital, d’améliorer et d’unifier la
sur les effets de l’exonération du prise en compte des éléments de for-
minimum vital et de ses conséquences tune dont les ayants droit se dessai-
Pauvreté sur le revenu disponible. Elle s’inscrit sissent, et d’abaisser le montant des
dans la série d’analyses des effets de franchises sur la fortune nette (sans
Avoir un emploi et se former seuil et des effets pervers sur l’emploi inclure toutefois les immeubles ser-
prévient la pauvreté dus à l’imposition (www.estv.admin. vant d’habitation aux bénéficiaires de
Les personnes élevant seules des ch ➞ Documentation ➞ Faits et PC).
enfants, les personnes peu formées et chiffres ➞ Rapports ➞ 2014 ➞ Impo- Le projet visera aussi à réduire les
celles vivant dans des ménages sans sition des prestations de soutien et effets de seuil et les incitations à res-
activité rémunérée sont les plus tou- exonération du minimum vital: consé- ter tributaire des PC. Cela se concré-
chées par la pauvreté. Selon les résul- quences sur le revenu disponible). tisera par des dispositions modifiant
tats de l’enquête sur les revenus et les la prise en compte des revenus effec-
conditions de vie (SILC), le taux de Intégration tifs et hypothétiques, par l’adaptation
pauvreté de la population totale La Conférence tripartite sur les des montants servant à la couverture
(7,6 % en 2012) n’a guère changé par agglomérations (CTA), la plateforme des besoins vitaux pour les familles et
rapport à l’année précédente (7,4%), politique de la Confédération, des par un réexamen de la façon de

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Chronique juin / juillet 2014

prendre en compte les primes d’assu- ➞ Rapport et propositions de la Table participation de l’employeur au finan-
rance-maladie (www.ofas.admin.ch ➞ ronde, PDF). cement de la rente transitoire du per-
Thèmes ➞ Prestations complémen- sonnel de l’administration fédérale. Il
taires ➞ Projets). réduit ainsi l’incitation financière à
prendre une retraite anticipée. Lors
Prestations sociales sous Prévoyance professionnelle de la même séance, il a aussi repris
condition de ressources dans l’ordonnance sur le personnel
En 2012, la Confédération, les can- Adaptation des prescriptions de la Confédération les règles révisées
tons et les communes ont consacré de placement concernant les restructurations et les
environ 12,7 milliards de francs aux Le Conseil fédéral a révisé les pres- réorganisations.
prestations sociales sous condition de criptions de placement de l’ordon-
ressources2. Environ deux tiers de ces nance sur la prévoyance profession-
dépenses concernaient les réductions nelle vieillesse, survivants et invalidité
des primes de l’assurance-maladie et (OPP 2). Il impose des exigences plus Santé
les prestations complémentaires à importantes en matière de sécurité afin
l’AVS/AI. La hausse des dépenses par de tenir compte des risques particuliers Assurance obligatoire des soins
rapport à 2011 s’est chiffrée à 438 mil- des prêts de valeurs mobilières et des L’assurance obligatoire des soins
lions de francs, ce qui représente une prises en pension de titres. Il tire par rembourse désormais les examens
hausse nominale de 3,6%. En compa- ailleurs des leçons de la crise financière, permettant d’identifier la démence et
raison de 2010 et 2011, la croissance en séparant les créances classiques des le cancer de la prostate. De plus, les
des dépenses a une nouvelle fois ralen- produits complexes. La nouvelle régle- frais de lunettes et de lentilles de
ti. La plus forte hausse, soit 298 millions mentation est entrée en vigueur le 1er contact sont à nouveau pris en charge,
de francs (+14,4 %), est imputable à juillet 2014 et s’applique pour la pre- à raison de 180 francs par an jusqu’à
l’aide sociale. Les dépenses pour les mière fois à l’exercice comptable 2015. l’âge de 18 ans.
prestations complémentaires (+160
mio de francs) et pour l’aide sociale CHS PP: adaptation des taxes Coma éthylique
dans le domaine de l’asile et des réfu- Le Conseil fédéral entend éviter que Les personnes qui reçoivent des
giés (+111 mio de francs) ont égale- la Commission de haute surveillance soins médicaux à la suite d’une consom-
ment enregistré une forte croissance. de la prévoyance professionnelle (CHS mation excessive d’alcool et qui ne sont
Les réductions de primes d’assurance- PP) ne dégage des excédents, comme pas dépendantes doivent assumer elles-
maladie (–92 mio de francs), en parti- cela s’est produit lors des deux derniers mêmes les frais médicaux qu’elles occa-
culier, ont par contre baissé (www.bfs. exercices. Il a donc adopté une modi- sionnent. La Commission de la sécu-
admin.ch ➞ Thèmes ➞ 13 – Protection fication de l’ordonnance sur la surveil- rité sociale et de la santé publique du
sociale). lance de la prévoyance professionnelle Conseil national a envoyé en consul-
(OPP 1), qui prendra effet le 1er janvier tation un avant-projet de modification
Propositions pour les victimes 2015. Celle-ci vise à adapter les taxes de la loi sur l’assurance-maladie pro-
de mesures de coercition à des de surveillance à la baisse. La CHS PP posant ce principe (www.admin.ch ➞
fins d’assistance pourra désormais en fixer le montant Droit fédéral ➞ Procédures de consul-
La Table ronde pour les victimes de sur la base des coûts effectivement tation ➞ Procédures de consultation
mesures de coercition à des fins d’assis- occasionnés durant l’exercice. Le ba- et d’audition en cours ➞ Commissions
tance a approuvé toute une série de rème cadre des émoluments pour parlementaires ➞ « Coma éthylique.
propositions à l’intention des autorités l’agrément donné à l’expert en matière Aux personnes en cause de payer les
politiques. Les propositions portent de prévoyance professionnelle a éga- frais des séjours hospitaliers et en cel-
notamment sur les prestations finan- lement été étendu. En effet, le barème lule de dégrisement!»).
cières et les services de conseil et d’aide actuel ne permettait pas toujours de
en faveur des victimes, sur la conser- couvrir les coûts de la procédure, en Coordination des soins médicaux
vation et la consultation des dossiers particulier lorsque l’agrément était Les spécialistes de la santé et les
personnels, ainsi que sur l’étude scien- donné à des personnes morales de institutions de soins devront amélio-
tifique de cette page sombre de l’his- grande taille. rer leur collaboration au niveau du
toire sociale de notre pays. Pour les
participants à la Table ronde, l’Etat et Rente transitoire du personnel de 2 En font notamment partie l’aide sociale, les
contributions pour la réduction des primes des
la société ont une dette envers les vic- la Confédération: participation caisses-maladie, les prestations complémen-
times (www.fuersorgerischezwangs- réduite de l’employeur taires à l’AVS et à l’AI, les subsides pour for-
mation professionnelle, l’aide cantonale à la
massnahmen.ch ➞ Communiqués/ En raison de l’évolution démogra- vieillesse et aux besoins et les avances sur
documents ➞ Documents ➞ Rapports phique, le Conseil fédéral abaisse la contributions d’entretien.

206 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Chronique juin / juillet 2014

suivi et du traitement des patients. Solution définitive pour la


Confédération et cantons entendent gestion des admissions Travail
renforcer la coordination des soins Le Conseil fédéral propose de
pour éviter les doublons, les erreurs donner aux cantons la possibilité de Enquête suisse sur la population
médicales et les souffrances inutiles. gérer eux-mêmes l’admission de tous active (ESPA): travail non rémunéré
Après le oui franc et massif au nouvel les fournisseurs de prestations du Dans les ménages de couple avec
article constitutionnel sur les soins domaine ambulatoire (pharmaciens, enfant(s) de moins de 15 ans, les mères
médicaux de base, les autorités fédé- physiothérapeutes, chiropraticiens, consacrent 67 heures par semaine aux
rales et cantonales réunies aujourd’hui etc. inclus) pratiquant à la charge de tâches rémunérées et non rémunérées;
dans le cadre du dialogue Politique l’assurance obligatoire des soins. Les les pères, tout comme les mères élevant
nationale suisse de la santé ont souli- cantons pourront ainsi prendre des seules des enfants, 68 heures par se-
gné l’importance d’une coordination mesures appropriées en cas d’excé- maine. Les femmes accomplissent gé-
des soins et discuté des prochaines dent de l’offre en soins, mais aussi en néralement davantage de tâches ména-
étapes. La seconde conférence natio- cas d’insuffisance (après avoir gères et familiales que les hommes.
nale Santé2020 qui devrait avoir lieu consulté une commission composée Celles dont les enfants ont moins de 15
début 2015 sera l’occasion de discuter de représentants des assurés, des ans investissent le plus de temps dans
des premières pistes de solution fournisseurs de prestations et des ces tâches: environ 51 heures par se-
(www.ofsp.admin.ch ➞ Thèmes ➞ La assureurs). Ils devront par ailleurs maine pour les mères vivant en couple
politique de la santé ➞ Politique na- régler l’activité des hôpitaux dans le et 45 heures pour les mères seules. Une
tionale de la santé ➞ Dialogue Poli- domaine ambulatoire. Le Conseil personne de 15 ans et plus sur trois
tique nationale suisse de la santé). fédéral disposera d’une compétence accomplit du travail bénévole non ré-
subsidiaire d’intervenir sur les tarifs munéré (organisé ou informel). Une
Lancement de la stratégie si un canton n’a pas pris de disposi- sur cinq œuvre pour des associations
nationale en matière de démence tion et que la croissance des coûts ou des institutions, en y consacrant en
La Confédération, les cantons et les s’y révèle supérieure à la croissance moyenne 13,3 heures par mois. 18,6%
différents acteurs impliqués ont com- des coûts au niveau national (www. exercent des activités bénévoles infor-
mencé à mettre en œuvre la stratégie admin.ch ➞ Droit fédéral ➞ Procé- melles (en moyenne 15,3 heures par
nationale en matière de démence dures de consultation ➞ Procédures mois); ces activités englobent l’aide au
2014-2017. Les premiers projets dans de consultation et d’audition en voisinage, la garde d’enfants, les ser-
les domaines de la sensibilisation, du cours ➞ Département fédéral de vices et les soins à des membres de la
diagnostic, du financement et de la l’intérieur ➞ Révision partielle de la parenté ou à des connaissances qui ne
consolidation des données ont été loi fédérale sur l’assurance-maladie vivent pas dans le même ménage (www.
lancés lors d’une conférence qui s’est relative au pilotage du domaine bfs.admin.ch ➞ Thèmes ➞ 03 – Travail,
tenue à Berne. ambulatoire). rémunération).

Sécurité sociale CHSS 4/2014 207


dossier Dossier Care, égalité et sécurité sociale

Care, égalité et sécurité sociale


L’égalité entre les sexes a été inscrite dans la
Constitution fédérale en 1981. Les articles de
notre dossier montrent toutefois que l’égalité
des chances entre les sexes n’est toujours pas
entrée dans les faits, comme l’illustre notam-
ment l’évaluation différente que l’économie et
la société font du travail des femmes et des
hommes. Des contraintes structurelles (telles
que les différences salariales), mais aussi
l’influence des stéréotypes de genre incitent les
couples à répartir inégalement les tâches
domestiques et les activités salariées, du moins
à partir de la naissance des enfants. Au sein de
la sphère familiale, les conjoints sont confron-
tés à la difficulté de trouver une répartition qui
tienne compte à la fois de leur idéal familial, de
leurs capacités et de leurs besoins. Les solu-
tions qui émergent en pratique sont très
diverses; elles dépendent des structures
sociétales existantes et des possibilités propres
à chaque contexte familial. Différences sala-
riales injustifiées, interruptions de carrière et
Source: Archives Sociales Suisses; carte postale dans le cadre de la réduction du temps de travail pour s’occuper
votation fédérale du 14 juin 1981 sur le contre-projet à l’initiative
populaire fédérale « Egalité des droits entre hommes et femmes» : « Oui à de proches sont autant de facteurs respon-
l’égalité des droits dans la famille, dans l’éducation et au travail. » sables d’inégalités dans la protection sociale
offerte aux hommes et aux femmes.
Aujourd’hui encore, la sécurité sociale repose pour l’essentiel sur un modèle dans lequel le principal
soutien de famille (généralement un homme) travaille à plein temps et de manière ininterrompue
jusqu’à la retraite, l’autre conjoint (généralement la femme) se contentant d’un revenu d’appoint.
Ce modèle offrait une protection adéquate à la famille nucléaire tant que les conjoints restaient
unis toute leur vie par les liens du mariage. Mais avec un taux de divorce qui dépasse les 40%, des
modèles familiaux qui s’éloignent toujours plus de l’idée d’un engagement unique pour la vie et
l’ampleur du travail de prise en charge des parents âgés dans la seconde partie de la vie (une
charge qu’assument principalement les femmes), la société est confrontée au défi d’adapter son
système de sécurité sociale.
Le présent dossier s’intéresse aux effets des réformes intervenues (p. ex. la 10e révision de l’AVS). Il
traite aussi des failles et des lacunes de protection sociale subies par les personnes qui effectuent
un travail de care au sein ou en dehors du cadre familial. Ces personnes sont souvent des femmes,
qu’elles agissent en qualité d’épouse, de mère, de fille, de nourrice, d’employée de crèche ou de
maison, ou qu’elles travaillent dans l’entreprise familiale sans être rémunérées. Les articles qui
suivent montrent comment et par quels mécanismes la persistance d’un modèle du travail essentiel-
lement masculin lamine la protection sociale des personnes assumant les tâches de care, en raison
de la moins-value de leur activité lucrative et d’un système de sécurité sociale fondé sur la primau-
té du travail rémunéré.

208 Sécurité sociale CHSS 4/2014


dossier Dossier Care, égalité et sécurité sociale

Care, égalité et sécurité sociale

Le débat sur le travail de care est très étroitement leur vie avec une carrière professionnelle en point de
lié à la question de l’égalité des sexes: jusqu’ici, la mire.
Les femmes, en choisissant des types de travail et des
responsabilité sociale de ce travail, qui engendre
métiers où les horaires sont plus souples − pour pouvoir
des inconvénients majeurs, incombait avant tout aux accomplir parallèlement des travaux de prise en charge
femmes. Le programme national de recherche PNR 60 − cimentent les inégalités entre les sexes. En effet, ces
« Egalité entre hommes et femmes» étudie le travail emplois sont fréquemment synonymes de salaires mo-
de care dans l’optique de l’égalité des sexes. Ce destes, de conditions de travail précaires et de possibilités
de formation continue limitées. Par conséquent, les pos-
faisant, il met en évidence des interactions complexes.
sibilités d’avancement professionnel y sont faibles, car
pour exercer une position dirigeante il est indispensable,
tant pour les femmes que pour les hommes, d’améliorer
sans cesse ses connaissances spécifiques, d’accumuler une
longue expérience pratique et de travailler à temps plein.

Rationalité d’une répartition inégale

A la lumière des salaires et des opportunités du marché


du travail inégaux, il peut sembler raisonnable de répar-
tir les responsabilités familiales de manière inégale: le
revenu du mari étant supérieur à celui de son épouse, il
Brigitte Liebig consacre un maximum de temps au travail rémunéré,
Haute école de la Suisse du Nord-Ouest, tandis que la femme travaille à temps partiel et assume
présidente du comité de direction du le gros de la garde des enfants et des travaux ménagers.
PNR 60 Donc même si, aujourd’hui, les femmes sont très bien
formées, et en dépit d’une conception plus moderne du
Le travail de care désigne le fait de prendre en charge couple, les jeunes gens continuent de choisir des modèles
des enfants ou des adultes «pour répondre à leurs besoins familiaux traditionnels avec une répartition inégale des
physiques, psychiques, émotionnels et liés au développe- tâches non rémunérées et des activités lucratives.
ment personnel»1. Plusieurs projets du PNR 602 ont mon- D’autres éléments peuvent encourager les mères de
tré que tant les jeunes femmes que les jeunes hommes famille à pencher vers le travail de care non rémunéré:
intègrent à leur réflexion sur les choix de vie la perspec- par exemple, les couples qui exercent deux emplois à
tive de prendre en charge autrui. Les jeunes femmes qui plein temps sont défavorisés sur le plan fiscal. Un récent
prévoient de fonder une famille optent souvent pour des rapport de l’administration fédérale des contributions
formations ou des professions qui pourront être inter- montre en effet que le fisc pénalise un taux d’occupation
rompues ou exercées à temps partiel à la naissance d’un élevé chez les femmes mariées3. En outre, l’offre de places
enfant. Plus tard dans leur vie, elles continuent de tra- d’accueil des enfants est souvent insuffisante ou les tarifs
vailler à temps partiel pour s’occuper d’autres membres des crèches et des structures d’accueil de jour sont trop
de la famille ou de leurs parents ayant besoin d’aide ou élevés. Enfin, il n’existe pas suffisamment de structures
de soins. En revanche, les hommes ne s’attendent guère de prise en charge et de soins pour les adultes dépendants
à être fortement impliqués dans la prise en charge des et les offres existantes sont souvent inabordables, même
enfants ou des parents dépendants et planifient d’emblée pour les salaires élevés.
Paradoxalement, la répartition inégale du travail de
care est renforcée par des mesures que prennent les
entreprises en faveur des familles, mais qui s’adressent
1 Op.cit. BFEG, p. 34.
2 www.pnr60.ch presque exclusivement aux femmes4. Une des études du
3 Op.cit. Peters, p. 2. PNR 60 montre par ailleurs que la palette de mesures
4 Op.cit. Liebig/Peitz. proposées par les entreprises se limite souvent à la phase

Sécurité sociale CHSS 4/2014 209


Dossier Care, égalité et sécurité sociale

Quelques projets du PNR 60 axés sur le care, l’égalité et la sécurité sociale T1


Répercussions des réformes des rentes sur les familles www.pnr60.ch ➞ Projets et résultats ➞ Cluster 3 –
Monika Bütler, Franz Schultheis, Thomas Mazzurana Famille et ménage privé

Tâches de care dans les ménages: redistribuer ou externaliser


Annegret Wigger, Nadia Baghdadi

Naissance et pilotage de la politique d’égalité professionnelle www.pnr60.ch ➞ Projets et résultats ➞ Cluster 1 –


Thomas Widmer, Silke Bothfeld, Andrea Leitner, Gesine Fuchs, Sophie Rouault, Travail et organisations
Christine Zollinger

L’égalité des seniors en emploi (EGALISE)


Nicky Le Feuvre, Magdalena Rosende, Céline Schoeni, Morgane Kuehni

Genre, générations et égalité en agriculture suisse (AgriGenre)


Yvan Droz, Fenneke Reysoo, Valérie Miéville-Ott, Ruth Rossier, Nadine Boucherin,
Federica Manfredi, Sandra Contzen, Jérémie Forney

Politique sociale d’activation comme encouragement aux femmes?


Eva Nadai, Gisela Hauss, Alan Canonica, Loredana Monte

Source: www.pnr60.ch

de création de la famille et aux femmes hautement qua- souvent sans rémunération – dans l’agriculture ou dans
lifiées. A ce jour, les tâches de prise en charge qui appa- une entreprise familiale, mais cela concerne aussi les
raissent dans la deuxième moitié de la vie ne sont que employées à temps partiel bien rémunérées. En cas de
rarement prises en considération par les employeurs. divorce, il est encore plus difficile de concilier tâches de
Un nombre croissant de ménages en Suisse recourt à care et travail rémunéré. Les personnes qui élèvent seules
des services de prise en charge privés pour s’occuper des leurs enfants sont souvent obligées d’avoir des horaires
ainés dépendants. Le PNR 60 démontre que ces services de travail souples et ne gagnent pas assez pour vivre, ni
sont souvent fournis par des personnes venues de l’étran- surtout pour faire des économies.
ger, mal rémunérées et travaillant dans des conditions Dans tous ces cas, le risque de pauvreté après la retraite
précaires, ou même au noir, parce que les ménages privés augmente, parce que les prestations de vieillesse, telles
échappent aux dispositions générales de protection des que les retraites des caisses de pension, dépendent des
travailleurs. Si de telles solutions de care peuvent servir cotisations versées. Il faut donc soit avoir exercé un travail
à renforcer la participation des femmes au marché de à plein temps et cotisé tout au long de la vie profession-
l’emploi, elles ne contribuent pas pour autant à l’égalité nelle, soit bénéficier d’une sécurité informelle, offerte par
des sexes. En effet, cette façon de répartir les tâches de le pourvoyeur de la famille. Actuellement, les rentes pro-
care ne change pas la relation entre hommes et femmes, venant des 2e et 3e piliers sont jusqu’à trois fois plus éle-
mais crée un nouveau type d’inégalité, entre femmes de vées pour les hommes que pour les femmes du même âge
conditions sociales différentes. (cf. graphique G1).

Travail de care et sécurité sociale Mesures pour valoriser et mieux répartir


les tâches de care
Pour bien des femmes, les inconvénients découlant du
modèle familial traditionnel s’amplifient avec l’âge. Le Le fait d’assumer des tâches de care ne doit pas per-
travail de care non rémunéré, les emplois à temps partiel, pétuer les inégalités dans la formation, la profession, au
les interruptions de carrière, phénomènes courants dans sein de la famille et à l’âge de la retraite ni occasionner
le parcours professionnel des femmes, ont une incidence d’inconvénients durables pour les femmes. Ce n’est qu’une
clairement négative sur leur prévoyance vieillesse et leur valorisation de ces tâches par la société et une répartition
sécurité sociale. C’est notamment le cas des femmes qui plus équitable des activités lucratives et des tâches de
travaillent dans des secteurs mal payés ou dans des cir- care entre hommes et femmes qui permettront d’assumer
constances particulières et des femmes qui travaillent – un volume de care qui continue de croître. A ce jour, la

210 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier Care, égalité et sécurité sociale

répartition inégale du travail de prise en charge des en- être améliorés de sorte à couvrir les besoins vitaux. Le
fants et des adultes dépendants limite les possibilités travail de care exécuté de manière professionnelle dans
d’épanouissement tant des femmes que des hommes: ce les institutions publiques et les ménages privés doit
ne sont pas seulement les femmes qui souhaitent s’inves- enfin être correctement rémunéré. Compte tenu des
tir davantage dans leur travail, les hommes aussi veulent grandes exigences et de la difficulté des métiers de care,
consacrer plus de temps à leurs enfants. Toutefois, les il est inadmissible que, dans cette branche, les salaires
deux volontés se heurtent à des préjugés et à un contexte soient insuffisants et que les salariés n’y bénéficient pas
inadapté. toujours d’une protection suffisante.
• Parmi les changements les plus urgents, il y a ceux qui • Le PNR 60 signale plusieurs réformes indispensables
concernent l’organisation du travail : il faut garantir un dans la politique en matière de protection sociale: celle-
salaire égal à travail égal et échafauder des plans de ci doit assurer la sécurité sociale de toute la population
carrière intégrant les tâches de care de sorte à ne pas en dépit du travail de care non rémunéré et permettre
créer d’obstacles, ni pour les femmes, ni pour les à tout salarié d’améliorer sa prévoyance vieillesse indé-
hommes, ni pour les jeunes, ni pour les personnes plus pendamment des conditions de travail. A ce jour, une
âgées. Il faut instaurer des congés parentaux et étoffer répartition équitable des responsabilités de care et de
les offres de garde des enfants, tout en développant des gain n’est pas suffisamment honorée sur le plan fiscal
modèles de temps de travail souples et en s’opposant et pour ce qui est des prestations sociales; là aussi, il
à l’attitude de certains employeurs qui demandent à importe d’adapter rapidement les structures pour tenir
leurs salariés d’être toujours présents. Le PNR 60 met compte des changements sociétaux.
en évidence des lacunes considérables pour ce qui est
des offres de prise en charge : elles concernent non
seulement la garde des enfants en âge scolaire hors des
centres urbains, mais encore les structures de jour
comme passerelles entre établissements stationnaires
et prise en charge à domicile des adultes dépendants.
• Il est, en outre, urgent de réformer le marché du travail
Bibliographie
et la politique salariale. Ainsi, les personnes peu qua-
lifiées ou sans activité lucrative doivent pouvoir acqué- Bureau fédéral pour l’égalité entre femmes et hommes BFEG, Recon-
rir une formation à n’importe quel âge, afin de combler naissance et revalorisation du travail de care. Agir pour l’égalité,
des lacunes éducationnelles souvent dues à la prise en [Berne 2010].
charge non rémunérée de proches et afin de leur ouvrir
Liebig, Brigitte et Martina Peitz, Vaterschafts- und Elternurlaub in der
l’accès au marché du travail et à un emploi rémunéré
Schweiz. Zwischen gesetzlichen Normen und gesellschaftlichem Wan-
qui leur permette de vivre. Les conditions d’engage-
del, dans Frauenfragen, no 2, 2014 (en allemand seulement).
ment et les salaires des métiers dits féminins doivent
Office fédéral de la statistique, Newsletter Démos. Informations dé-
mographiques, no 2, 2012, www.statistique.admin.ch ➞ Thèmes ➞
01 – Population ➞ Newsletter.
Prestations du système de prévoyance vieillesse G1
Peters, Rudi, Steuerliche Ungleichbehandlung von verheirateten und
touchées par les rentières âgées de 64 à 69 ans
unverheirateten Paaren in den Kantonen und beim Bund. Vergleich
et les rentiers âgés de 65 à 70 ans, 2008
der Steuerbelastung von Ehe- und Konkubinatspaaren 2011 (AFC),
97,6 [Berne 2014].
Rente AVS 96,9 PNR 60, Egalité entre hommes et femmes, Résultats et impulsions.
98,1
Rapport de synthèse [Berne 2014].
67,3
Prestation PP 81,7
56,8

32,7
Prestation du 42,3
pilier 3a 25,3

0% 20% 40% 60% 80% 100%


Part de femmes et d‘hommes au
bénéfice d‘une rente, par prestation Prof. Dr. Brigitte Liebig, Haute école de psychologie appliquée,
Total Hommes Femmes HES de la Suisse du Nord-Ouest, présidente du comité de direc-
Source: Office fédéral de la statistique, SESAM tion du PNR 60.
Mél: brigitte.liebig@fhnw.ch

Sécurité sociale CHSS 4/2014 211


dossier Dossier Effets attendus et indésirables des réformes de l’Etat-providence

Les réformes de l’Etat-providence


et leurs conséquences ambivalentes
Les réformes de société peuvent parfois produire des L’influence de l’Etat sur la vie familiale
effets indésirables. Il est possible d’illustrer ce constat
Des changements législatifs majeurs ont accompagné
en examinant deux réformes récentes dans le domaine
l’évolution sociodémographique qui vient d’être esquissée.
de la politique sociale et familiale. Motivées par un En effet, l’Etat moderne exerce depuis son avènement une
souci de promouvoir l’égalité entre les sexes, ces ré- influence sur l’évolution des relations entre les sexes et
formes ont créé des incitations contradictoires. L’expli- entre les générations au sein de la sphère familiale. Cela
cation réside notamment dans la coexistence de concerne bien sûr le droit de la famille au sens strict, mais
aussi les mécanismes de l’Etat-providence, dont l’existence
conceptions concurrentes de l’égalité chez les acteurs
même affecte inévitablement les relations intrafamiliales
de ces processus de révision. en général et les rapports de force entre les sexes en par-
ticulier. De ce point de vue, l’inscription du principe de
l’égalité entre hommes et femmes dans la Constitution

Franz Schultheis Monika Bütler Thomas Mazzurana


Université de Saint-Gall

Le divorce: métamorphoses d’un fédérale (art. 8, al. 3, Cst.) en 1981 a eu des conséquences
risque familial importantes. La 10e révision de l’AVS et la réforme du droit
du divorce, en particulier, ont modifié l’équilibre des pou-
Avec le recul, les années 1950 peuvent apparaître voirs et la répartition des ressources entre les sexes, une
comme l’âge d’or de l’institution du mariage. L’idée était évolution que nous avons retracée dans une étude empi-
encore que chaque personne ou presque allait se marier rique réalisée dans le cadre du PNR 601.
au moins une fois dans la vie. Aujourd’hui, le mariage
concerne moins de deux personnes sur trois et le taux
de divorce a connu une progression spectaculaire. Le Conséquences des deux réformes
divorce s’est en effet fortement normalisé ou banalisé sur les familles
depuis les années 1980 : alors que le taux de divorce
n’atteignait même pas les 15% en Suisse avant les années Les deux premiers piliers du système de prévoyance
1970, il dépassait déjà le seuil des 50 % au début des gèrent une part importante des revenus acquis en com-
années 2000. Evénement autrefois exceptionnel et socia-
1 www.pnr60.ch ➞ Projets et résultats ➞ Cluster 3 : Famille + ménage
lement stigmatisé, le divorce est devenu une étape ordi- privé ➞ Répercussions des réformes des rentes sur les familles
naire de la vie. (HTML, 12.6.2014).

212 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier Effets attendus et indésirables des réformes de l’Etat-providence

mun par un couple au cours d’une vie et instaurent divers d’entretien ou à la prévoyance vieillesse si la faute lui
mécanismes de redistribution. A ce titre, ils ont une in- était imputée.
fluence certaine, quoique pas toujours voulue, sur les L’analyse économique montre que les deux réformes
incitations qui structurent les décisions importantes des qui viennent d’être présentées ont créé des incitations
conjoints au sujet de leur vie professionnelle. La 10e révi- contradictoires. En instaurant une compensation finan-
sion de l’AVS et la réforme du droit du divorce ont cher- cière entre les conjoints, l’AVS contribue à réduire l’inté-
ché à adapter ces mécanismes de redistribution à l’exi- rêt que représente l’exercice d’une activité lucrative pour
gence d’égalité entre les sexes au sein de la famille, en le conjoint dont le revenu est le moins élevé. Celui-ci sait
particulier en ce qui concerne la situation des femmes à que l’amélioration de sa situation économique obtenue
l’âge de la retraite et en cas de divorce. L’idée était notam- en travaillant plus disparaîtra à l’âge de la retraite, puisque
ment de renforcer les possibilités d’action des femmes – et c’est une conséquence de la formule des rentes et de
lors d’un divorce et de réduire leur dépendance financière la redistribution des cotisations – les rentes versées au
par rapport à leur ex-époux. couple seraient déjà proches de leur limite supérieure.
L’adaptation de la législation au nouveau principe Toutes choses égales par ailleurs, l’AVS réduit donc les
constitutionnel de l’égalité entre hommes et femmes était incitations au travail du conjoint dont le revenu est le
au cœur de la 10e révision de l’AVS, parfois qualifiée de moins élevé. Celui-ci, surtout s’il gagne relativement bien
«révision des femmes» (par l’Alliance de sociétés fémi- sa vie, verra dans les cotisations à l’AVS un impôt sur le
nines suisses, p. ex.). C’est notamment le cas de l’intro- revenu et non une contribution à la constitution d’une
duction de la formule des rentes à deux branches qui, lors prévoyance vieillesse. L’AVS revient ainsi à augmenter le
du calcul des rentes, accorde plus de poids au conjoint « coin fiscal » entre son revenu brut et son revenu net.
ayant le revenu le moins élevé, aujourd’hui encore la C’est essentiellement le 2e pilier qui lui permet, en tra-
femme dans la grande majorité des situations. La révision vaillant plus, d’améliorer sa situation économique et de
a également mis en place les bonifications pour tâches bénéficier d’une meilleure couverture d’assurance. Pre-
éducatives, c’est-à-dire un revenu supplémentaire fictif, mièrement, la participation au marché du travail permet
correspondant au triple du montant de la rente de vieil- de maintenir dans le système de la prévoyance profes-
lesse annuelle minimale et crédité sur les comptes indivi- sionnelle le capital de retraite accumulé et de garantir
duels des parents pendant les années durant lesquelles ils une rémunération du capital et une rente sensiblement
exercent l’autorité parentale sur un ou plusieurs enfants plus élevées. Deuxièmement, une participation accrue au
âgés de moins de 16 ans. L’introduction du splitting doit marché du travail entraîne un relèvement du niveau des
également être mentionnée, puisqu’elle implique que cotisations et donc de celui de la rente. Troisièmement,
chaque conjoint participe pour moitié aux cotisations de une intégration dans la prévoyance professionnelle amé-
retraite de l’autre. Enfin, la 10e révision de l’AVS a aboli liore la couverture d’assurance en cas d’invalidité ou de
l’ancienne rente pour couple, qui s’élevait à une fois et décès. C’est donc la prévoyance professionnelle qui contri-
demie la rente du mari, au profit d’une rente individuelle bue, toutes choses égales par ailleurs, à renforcer les inci-
pour les deux conjoints. Le véritable changement de sys- tations à travailler.
tème qui aurait consisté à instaurer une rente indépen- L’analyse économique met par ailleurs en évidence un
dante de l’état civil n’a toutefois pas eu lieu. La rente autre effet inattendu des réformes sur les rapports entre
cumulée des deux conjoints reste en effet plafonnée à les sexes : la redistribution financière opérée par l’AVS
150% de la rente individuelle maximale, une solution que conforte paradoxalement le modèle familial traditionnel
l’on peut de fait assimiler au maintien d’une forme de fondé sur une division sexuelle du travail. Etant donné
rente pour couple. le niveau modeste de la rente maximale et l’absence de
Le principe de l’égalité a également joué un rôle plafond des cotisations, l’AVS assure une redistribution
important lors de la révision du droit du divorce, très forte entre ménages riches et ménages pauvres. Or,
puisqu’un élément central de la révision consistait à en relevant la part de la rente qui ne dépend pas du
équilibrer les effets économiques du divorce et à éviter montant des cotisations versées, la 10e révision de l’AVS
que celui-ci ne se fasse aux dépens du conjoint qui s’est a renforcé cet effet redistributif. Cette redistribution
jusqu’alors occupé du ménage et des enfants. Le partage accrue réduit les incitations au travail non seulement
de la prévoyance vieillesse joue à ce titre un rôle essen- entre les familles, mais encore au sein même de la famille.
tiel, car le divorce intervient dans la plupart des cas avant En effet, le conjoint le plus exposé au premier effet néga-
le départ à la retraite. La réforme a instauré le partage tif sur l’incitation à travailler – l’effet extrafamilial – est
à parts égales du capital de la prévoyance professionnelle celui dont le revenu est moins élevé, car c’est celui dont
(2e pilier) accumulé durant les années de mariage. L’in- l’offre de travail est la plus sensible à la fiscalité. Parallè-
troduction du divorce sans faute a également été un lement, puisque ce conjoint est davantage impliqué dans
facteur de sécurité dans ce domaine : avant la réforme, les activités du ménage, les coûts que représente son offre
la femme pouvait perdre son droit à une contribution de travail pour le ménage sont eux aussi plus importants,

Sécurité sociale CHSS 4/2014 213


Dossier Effets attendus et indésirables des réformes de l’Etat-providence

ce qui diminue d’autant l’incitation à reprendre ou à la prévoyance vieillesse et le droit du divorce à l’exigence
augmenter une activité lucrative. Contrairement aux d’égalité entre les sexes. Si la majorité des personnes
intentions du législateur, la dimension redistributive consultées estiment que les révisions apportées à la pré-
accroît l’utilité pour le ménage de voir le conjoint ayant voyance vieillesse ont amélioré la situation des femmes,
le revenu le plus faible s’impliquer davantage dans les certaines mettent en évidence les contradictions qui en
activités du ménage, alors que l’autre conjoint n’y parti- résulteraient. Les experts interrogés soulignent en parti-
cipe pas davantage de façon proportionnelle. L’utilité que culier que la 10e révision de l’AVS est à double tranchant
ce dernier retire de la division intrafamiliale du travail dès lors que l’on tient compte des exigences accrues que
augmente, sans qu’il ait pour autant à réduire le revenu la révision du droit du divorce impose aux femmes en
de son activité et donc à renoncer à son pouvoir écono- matière de retour sur le marché du travail après un divorce.
mique au sein du ménage. Alors que l’ancienne législation prévoyait d’accorder une
rente à vie aux femmes divorcées de 45 ans ou plus, le
nouveau droit exige de fait un retour sur le marché du
Des conceptions concurrentes de l’égalité travail et une capacité de gain correspondante, même
lorsque la femme a encore des enfants (de plus de troix
L’analyse des débats parlementaires sur les deux ré- ans) à charge. Selon ces experts, l’inconvénient que repré-
formes examinées et les entretiens avec des professionnels sente pour la femme le versement d’une contribution
actifs dans le domaine du droit de la famille (avocats, d’entretien plus modeste sous le nouveau droit ne serait
conseillers conjugaux et juges) montrent que ces incitations pas compensé par les avantages liés à l’amélioration de la
contradictoires sont aussi la conséquence de conceptions prévoyance vieillesse. La situation serait particulièrement
différentes de l’égalité. défavorable aux femmes qui s’inscrivaient dans une répar-
Deux formes de discours féministes, mettant l’accent tition traditionnelle des rôles entre les époux. D’autres
sur deux types différents d’égalité entre les sexes, peuvent personnes interrogées soulignent au contraire qu’un retour
en effet être dégagées à partir des interprétations avancées anticipé des femmes sur le marché du travail après une
par les acteurs: une conception paternaliste et une concep- interruption (partielle) motivée par des raisons familiales
tion émancipatrice. Ces deux conceptions proposent des s’avère profitable à leur carrière et à leur prévoyance vieil-
interprétations différentes de l’écart constaté entre le lesse.
principe d’égalité affirmé dans la Constitution et la réa-
lité sociale. Les solutions qu’elles préconisent pour combler
cet écart sont elles aussi différentes. Résumé
Les représentants d’une conception paternaliste et éta-
tiste du féminisme critiquent le caractère purement formel Les réformes de la politique sociale et familiale re-
de l’égalité de traitement prévue par la loi entre les can- posent sur des conceptions divergentes de l’égalité. Ces
didats au divorce. Le risque est qu’une telle approche, conceptions sont en partie rivales et affectent les pers-
aussi justifiée soit-elle dans une situation théorique d’éga- pectives de vie des hommes et des femmes à des degrés
lité, ait en pratique pour effet de reproduire entre les divor- divers. Déterminer lesquels de ces effets sont acceptables
cés la répartition asymétrique des charges et des tâches ou souhaitables dépend en fin de compte d’un jugement
qui prévalait pendant le mariage. Selon cette façon de voir, de valeur qui relève d’un choix politique.
l’objectif de la révision des dispositions légales devrait être
de corriger les inégalités matérielles causées au sein de la
famille par une citoyenneté différentielle fondée sur le
genre, quitte à créer de nouvelles incohérences en matière Prof. Dr. Franz Schultheis, professeur de sociologie,
d’égalité entre les sexes sur le plan normatif et législatif. Université de Saint-Gall.
La conception égalitaire et émancipatrice du féminisme Mél: franz.schultheis@unisg.ch
aspire quant à elle à une pleine reconnaissance normative,
politique et sociale des femmes en tant que sujets égaux.
Ses représentants voient dans l’affirmation normative de Prof. Dr. Monika Bütler, professeur d’économie, Schweizerisches
l’égalité entre les sexes (citoyenneté universelle) une Institut für empirische Wirtschaftsforschung, Université de
condition nécessaire à la fois à l’émancipation des femmes Saint-Gall.
(mariées) par rapport à leur (ex-)conjoint, et à leur trai- Mél: monika.buetler@unisg.ch
tement égal sur le marché du travail. Le risque d’une telle
approche est de perdre parfois de vue la persistance des
inégalités matérielles concrètes. MMag. Thomas Mazzurana, collaborateur scientifique, Institut für
L’influence de ces deux conceptions divergentes de l’éga- Soziologie, Université de Saint-Gall.
lité est perceptible dans les discours sur la façon d’adapter Mél: thomas.mazzurana@unisg.ch

214 Sécurité sociale CHSS 4/2014


dossier Dossier Prestations de care: tendances et mécanismes

Précarité des prestations de care :


tendances et mécanismes
La précarité de la situation en matière de soins en domicile. Parmi les causes centrales de cette crise, on
Suisse a de multiples causes. L’article qui suit se trouve particulièrement – à côté de la modification des
modes de vie, de la pression croissante à exercer une
penche sur la question des acteurs et des mécanismes
activité professionnelle et d’une augmentation de la
qui influencent la crise du care et l’insuffisance des demande de prestations de care – la pression sur les coûts
prestations en matière de prise en charge, d’assis- dans le domaine social et de la santé, ainsi qu’une offre
tance et de soins. Il examine également qui prend de prise en charge insuffisante du côté des services publics.
en charge ces tâches et à quelles conditions. Comme les tâches relevant du care ne peuvent être sacri-
fiées sur l’autel de la rationalisation, ni remises à plus tard
étant donné leur dimension relationnelle1, les personnes
concernées doivent, d’une manière ou d’une autre, trou-
ver une réponse au manque de prestations.
Les considérations qui suivent reposent sur les résultats
des 25 études de cas du projet de recherche «Tâches de
care dans les ménages : redistribuer ou externaliser ? »
réalisé par la Haute école spécialisée de Saint-Gall dans
le cadre du programme du fonds national «Egalité entre
hommes et femmes »2. Ces études se sont structurées
autour des questions suivantes : qui, en Suisse, comble
finalement l’absence ou l’insuffisance des prestations dans
le domaine du care? Qui, dans la vie quotidienne, effec-
tue le travail de prise en charge des proches ou en assume
la responsabilité? Qui supporte les charges émotionnelles
et les coûts financiers qui en découlent3 ? L’objectif de
Bettina Brüschweiler Annegret Wigger cet article est de mettre en lumière les mécanismes de la
Haute école de sciences apliquées Saint-Gall répartition des responsabilités et d’exposer le problème
de la situation critique qui s’ensuit en matière de division
sociale du travail dans le secteur du care.
Les acteurs et actrices de la production de care se répar-
tissent entre le secteur public, le secteur du marché privé,
Ce sont encore majoritairement des femmes qui, en sus les ménages privés et la société civile (p. ex. organisations
de leurs occupations professionnelles, effectuent le travail sans but lucratif, églises, associations, etc.)4. La part res-
de care ou la prise en charge de personnes à domicile. pective de ces quatre secteurs dans le travail de prise en
Un terme qui recouvre toutes les activités nécessaires charge, d’assistance et de soins dépend au premier chef
aux soins des enfants et des adultes. Le manque de pres- de l’agencement de l’Etat social. Chaque Etat définit sa
tations qui existe depuis longtemps en Suisse dans ce propre politique de care, à travers ses lois, ses transferts
secteur s’exprime à plusieurs niveaux de la société. Ces financiers, ses subventions, ainsi que par le développement
lacunes sont toutefois considérées d’abord comme un ou la réduction de l’offre publique de prise en charge. La
problème individuel de conciliation entre vie familiale valeur attribuée à ce travail, y compris en regard de celle
et professionnelle. La hausse du taux d’activité des de l’activité professionnelle, se reflète dans la structure
femmes n’est toutefois qu’une des raisons de la crise du et l’étendue du secteur public du care5.
care ou du travail de prise en charge de personnes à Une évolution se manifeste actuellement dans la
production du bien-être en Suisse : alors que l’acteur
public a plutôt tendance à se contenir en réduisant son
1 Op.cit. Madörin.
offre, le marché saute dans les brèches, devenant un
2 www.nfp.60.ch ➞ Projets et résultats ➞ Cluster 3 : Famille et ménage
privé ➞ Projet Wigger (HTML, 14.7.2014). acteur en pleine expansion. Le care devient ainsi une
3 Op.cit. Daly/Lewis. marchandise que l’on doit acheter dans un échange
4 Op.cit. Razavi/Staab. commercial de type «argent contre prestation». Prendre
5 Op.cit. Yashodhara Haller/Chorus. soin et être pris en charge faisant partie de l’existence

Sécurité sociale CHSS 4/2014 215


Dossier Prestations de care: tendances et mécanismes

humaine6, et tout un chacun dépendant quotidienne- l’agencement de la coopération dans ces ménages, ainsi
ment d’un certain nombre de prestations, il n’est pas qu’à la question de savoir dans quelle mesure les différents
étonnant que des acteurs économiques investissent arrangements trouvés sont en relation avec les conditions-
dans la marchandise « prestation de prise en charge ». cadre politiques.
Des économies de temps dans les services à la personne Une personne qui engage une employée pour le travail
sont toutefois difficilement réalisables sans perte de de care dans un ménage privé s’aperçoit rapidement qu’il
qualité ; le marché ne peut donc espérer faire des pro- y a beaucoup plus de choses à régler que le seul travail
fits qu’en tablant prioritairement sur une main-d’œuvre de prise en charge. Dans de nombreux cas étudiés, l’ins-
à bon marché. Avec environ 100 000 travailleuses do- tauration des relations de travail est perçue comme l’obs-
mestiques selon les estimations, le secteur des ménages tacle principal. Ce processus est porteur d’insécurité, car
privés représente ainsi un important segment du mar- les deux côtés méconnaissent souvent leurs droits et
ché7. devoirs; en outre, la division du travail dans le ménage,
et donc aussi l’ensemble de la structure relationnelle, doit
être revue. Les arrangements concrètement choisis éta-
Des solutions marchandes pour combler blissent un rapport de pouvoir spécifique entre les par-
les insuffisances ticipants, qui devient visible dans la collaboration concrète.
L’étude définit, en fonction de leur degré d’égalité ou
Les raisons pour lesquelles on recourt à des travail- d’inégalité, quatre différents types. L’éventail va des rela-
leuses domestiques sont multiples. La plupart, toutefois, tions partenariales-familiales jusqu’aux relations de domi-
sont liées à l’insuffisance d’une offre publique abordable nation inspirée du modèle de la domesticité.
et adaptée aux besoins individuels, ainsi qu’à l’irruption Dépendances et situations d’urgence dues aux circons-
d’événements existentiels mettant directement en évi- tances, ressources financières souvent manquantes des
dence cette insuffisance de prestations. Brusquement, les deux côtés, marché des aides ménagères régulé au mini-
proches de personnes qui nécessitent une assistance se mum, ainsi que réglementations complexes d’accès au
trouvent en situation d’urgence. D’une manière ou d’une marché suisse concourent à la précarité du secteur du
autre, il faut assurer cette prise en charge, même si cela travail pour les ménages privés. Ce sont plus particuliè-
passe par l’engagement d’une personne extérieure. rement les migrantes qui sont structurellement désavan-
tagées lors de la négociation des conditions contractuelles,
Ainsi, pour la famille Bell, la naissance du troisième enfant puisqu’elles ont souvent vitalement besoin de leur salaire
a rendu la solution de la crèche logistiquement trop lourde et que les formations professionnelles dont elles disposent
et trop chère. Dans le cas de Mme Sauter, 87 ans, c’est aus- ne sont pas reconnues en Suisse. Un statut de résident
si la survenue d’un événement critique, une chute suivie illégal, comme dans le cas des sans-papiers, ou une situa-
de blessures, qui a amené ses enfants adultes à chercher tion de cohabitation renforcent une fois encore la dépen-
une aide extérieure. Eux-mêmes sont en pleine vie active dance de la migrante du care. Mais de nombreuses em-
et ne peuvent assumer de prendre soin toute la journée de ployeuses tombent aussi dans une dépendance spécifique.
leur mère8. Elles doivent pouvoir faire confiance à leur employée,
qui en général travaille lorsqu’il n’y a personne d’autre à
Ce sont des histoires semblables qui entraînent l’enga- la maison, pour l’accomplissement des tâches et le respect
gement d’une employée de maison pour le travail de des horaires d’arrivée et de départ convenus, par exemple.
soins. Les études de cas menées font apparaître clairement Car l’idée que leurs jeunes enfants soient laissés seuls
les différences de traitement de ces embauches d’une d’un moment à l’autre ou simplement posés devant la
famille à l’autre, ainsi que les motifs pour lesquels les télévision est insupportable à beaucoup de parents. Les
prestataires acceptent ce travail, le plus souvent contre tâches réelles, le soin à prendre ou à prodiguer (doing
une médiocre rémunération. care), sont de fait définies par les travailleuses du care
avec les bénéficiaires, c’est-à-dire avec les enfants à
Par exemple, Mme Gonzalez, 51 ans: elle a émigré en Suisse prendre en charge ou les personnes adultes dépendantes.
il y a quatre ans, afin de se procurer l’argent nécessaire au Les possibilités de contrôle et d’intervention des man-
traitement de sa fille, atteinte d’un cancer. Son mari et ses dants sont en effet fortement limitées par leur absence.
trois enfants sont restés au pays. Aujourd’hui, Mme Gon- Les cas analysés témoignent de manières de faire très
zalez fait le ménage à cinq endroits différents et assume différentes. Certaines employées de maison prennent les
aussi des tâches d’assistance.
6 Op.cit. Chorus, 2013.
Les chercheuses se sont aussi intéressées, outre la situa- 7 www.bfeg.admin.ch ➞ Documentation ➞ Publications ➞ Publications
sur l’égalité dans la famille ➞ Reconnaissance et revalorisation du
tion individuelle et les besoins des demandeurs et des travail de care (PDF, 14.7.2014).
prestataires de care, à la dynamique quotidienne et à 8 Les passages en italique sont extraits des études de cas.

216 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier Prestations de care: tendances et mécanismes

personnes en charge comme si elles faisaient partie de d’une aide, ainsi que les travailleuses du care elles-mêmes,
leur propre famille. D’autres se considèrent comme des n’ont pratiquement pas voix au chapitre dans le processus
prestataires de services professionnels, intégrant aussi politique de négociation.
bien des critères de qualité que ceux d’un échange loyal Lorsque la fourniture de prestations devient un produit
(argent contre prestation). Lorsque les conceptions des économique relevant du domaine privé de partenaires
agents du doing care et la répartition des rôles qui en d’un échange, elle est soumise à une tendance à la ratio-
découle divergent, la relation de travail se fragilise rapi- nalisation qui répond difficilement aux besoins des per-
dement. Les reconstitutions de cas montrent que le trans- sonnes de tout âge en matière de rapport au monde.
fert du travail de prise en charge, d’assistance et de soins
dans les ménages privés est bien plus exigeant que ce que Un exemple nous est donné par l’insomnie dont souffre
suggèrent les promesses du marché, où la prestation de Mme Sauter. Elle discute volontiers avec sa prestataire de
care est présentée comme une marchandise à usage services, la nuit aussi. Mais cette prestataire n’est engagée
privé que l’on achète et consomme. que pour des cas d’urgence et les enfants adultes de Mme
Sauter s’effraient des coûts facturés pour ces services sup-
plémentaires.
La féminisation et la privatisation du travail
de prise en charge Seules les couches supérieures de revenus peuvent se
permettre d’acheter des prestations de care fournies et
Dans le modèle du marché, la responsabilité de la prise payées d’après les dispositions du droit du travail en vi-
en charge est individualisée, privatisée et féminisée. Seul gueur (parmi lesquelles le salaire minimum). Mais même
un petit segment des femmes peut améliorer ses chances dans ce groupe de personnes à fort revenu, quelques-uns
sur le marché du travail par le biais de l’achat de presta- pratiquent des conditions de travail dignes du capitalisme
tions de prise en charge. Dans l’ensemble toutefois, l’éco- manchestérien, avec disponibilité 24 heures sur 24, sept
nomisation de la prise en charge de personnes à domicile
renforce une inégalité structurelle. Celle-ci se manifeste
aussi bien entre hommes et femmes sous l’angle de la
division équitable du travail dans le secteur du travail de
care, qu’il soit sous-payé ou non rémunéré, qu’entre les
femmes qui peuvent acheter des prestations de care et
celles qui vendent ces prestations et se résignent — ou Références
doivent se résigner – à un manque de leur propre côté
en matière de prise en charge. Ce faisant, l’écart s’accroît Chorus, Silke, Care-Ökonomie im Postfordismus: Perspektiven einer
entre les groupes et les pays qui peuvent s’offrir la richesse integralen Ökonomie-Theorie, Münster 2013.
du care et ceux qui doivent acheter la sécurité de leur Knobloch, Ulrike, « Sorgeökonomie als kritische Wirtschaftstheorie
existence en contrepartie de leur propre pauvreté en care. des Sorgens», dans Care statt Crash: Sorgeökonomie und die Übe-
Si l’on considère le cadre légal qui régule actuellement rwindung des Kapitalismus, éd. par Hans Baumann et al., Zurich 2013,
le domaine de la prise en charge privée, il apparaît clai- pp. 9-23.
rement que ce nouveau secteur à bas salaires est consciem- Yashodhara Haller, Lisa et Silke Chorus, «Care, Wert und der Wohl-
ment toléré par le législateur. Car les initiatives politiques fahrtsstaat: Plädoyer für die Berücksichtigung des Staates als zentra-
pour légaliser les relations de travail, comme la signature ler Akteur der politischen Ökonomie», dans Care statt Crash: Sor-
de la convention de l’OIT pour les employés de maison9, geökonomie und die Überwindung des Kapitalismus, éd. par Hans
et les revendications d’augmentation des salaires et de Baumann et al., Zurich 2013, pp. 64-73.
professionnalisation de ce secteur d’activité n’ont été
Global variations in the political and social economy of care: Worlds
abordées qu’avec réticence. Cela traduit le peu de valeur
apart, éd. par Shahrashoub Razavi et Silke Staab, New York 2012.
que la société attribue au travail de care. Visiblement, le
seul fait d’être femme suffit aujourd’hui encore pour Madörin, Mascha, «Im Gesundheitswesen werden keine Autos mon-
accomplir un travail exigeant avec des personnes qui ne tiert – eine Rahmenerzählung», dans Care-Ökonomie: Neue Land-
sont pas des proches. Conséquence logique : les bénéfi- schaften von feministischen Analysen und Debatten, Zurich 2009, pp.
ciaires directs, les enfants et les personnes dépendantes 93-95.
Daly, Mary et Jane Lewis, «Conceptualising Social Care in the Context
of Welfare State Restructuring: Introduction», dans Gender, social
9 Ainsi, la procédure de ratification, par la Suisse, de la Convention no 189 care and welfare state restructuring in Europe, éd. par Jane Lewis,
de l’Organisation internationale du travail (OIT) concernant le travail
décent pour les travailleuses et les travailleurs domestiques de 2011 est Aldershot 1998, pp. 1-24.
toujours en cours. Cf. www.oit.org ➞ Normes du travail ➞ Conventions
➞ C189 – Convention (no 189) sur les travailleuses et travailleurs domes-
tiques (HTML, 14.7.2014).

Sécurité sociale CHSS 4/2014 217


Dossier Prestations de care: tendances et mécanismes

jours sur sept, afin de satisfaire leurs besoins de prise en pour certains groupes comme pour une société vieillis-
charge. sante, débouchera sur un nouveau mouvement du care,
Bien que la fourniture adaptée de prestations soit contribuant à faire passer l’idée d’une aspiration au
quelque chose d’élémentaire dans une économie prospère prendre soin et à être pris en soin. Pour rendre possible,
et dans une communauté qui fonctionne, sa garantie est à long terme, une société orientée sur le soin mutuel, le
considérée d’abord comme une affaire privée et subsi- développement d’une économie propre au care et une
diairement comme celle des pouvoirs publics. La question confrontation critique avec les mécanismes de la mar-
de l’organisation du vivre ensemble, de la valeur du sec- chandisation du «prendre soin » sont nécessaires.
teur de la reproduction dans la société vis-à-vis de celle
de la production, n’est pas considérée comme une ques-
tion de société, mais presque toujours posée comme une
affaire individuelle de conciliation entre vie profession- Bettina Brüschweiler, MSc en Travail social, collaboratrice scienti-
nelle et vie familiale. Les solutions adoptées ponctuelle- fique à l’Institut IFSA-F, Haute école de sciences appliquées, HES
ment, comme davantage de places dans les crèches et les Saint-Gall.
garderies ou un meilleur subventionnement des places Mél: bettina.brueschweiler@fhsg.ch
d’accueil, ne peuvent toutefois pas réduire la domination
fondamentale du secteur de la production sur les intérêts
existentiels liés à la fourniture de prestations de prise en Prof. Dr. Annegret Wigger, chargée de cours à l’Institut IFSA-F,
charge. Reste ouverte la question de savoir si le malaise Haute école de sciences appliquées, HES Saint-Gall.
issu de l’insuffisance de ces prestations, mise en évidence Mél: annegret.wigger@fhsg.ch

© Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes

218 Sécurité sociale CHSS 4/2014


dossier Dossier La politique visant à concilier vie privée et vie professionnelle

Concilier vie privée et vie professionnelle : une


menace pour l’égalité et la cohésion sociale ?
Depuis une quinzaine d’années, des coalitions social- d’accueil extrafamilial dans le domaine préscolaire
libérales formées de partis de droite et de partis de montre des différences considérables entre communes.
Les offres se distinguent par leurs bases juridiques, par
gauche ont favorisé une percée de l’accueil extra-
leur type et par leur ampleur. Le présent article décrit
familial dans de nombreuses communes suisses. Les ces différences en comparant dix communes des cantons
mesures prises pour permettre de concilier la vie de de Berne, Jura et Zurich (voir tableau T1) et met en
famille et l’activité professionnelle varient toutefois évidence les causes de cette hétérogénéité. Nous montrons
d’un canton (ou d’une commune) à l’autre. Selon leur en outre que les différences de conception des offres n’ont
pas seulement une incidence sur l’égalité entre les sexes,
conception, elles risquent d’entraver l’égalité plutôt
mais également sur la cohésion sociale.
que de la favoriser et de nuire à la cohésion sociale.

Communes étudiées (canton, nombre d’habitants) T1


Communes rurales Communes suburbaines
Hirzel (ZH, 2 107) Opfikon (ZH, 15 256)
relativement
Riggisberg (BE, 2 359) Münchenbuchsee (BE, 9 753)
grandes
Les Breleux (JU, 1 414) Courrendlin (JU, 2 595)
relativement Hagenbuch (ZH, 1 096) Greifensee (ZH, 4 946)
petites Mühlethurnen (BE, 1 339) Pieterlen (BE, 3 426)

Des offres de conceptions différentes

Toutes les communes étudiées ont développé leurs


offres d’accueil extrafamilial depuis le début des années
2000. Mais il n’en reste pas moins que de grandes diffé-
rences apparaissent, tant dans l’ampleur que dans la
conception des offres (voir tableau T2). Il existe deux
types d’offres pour les enfants en âge préscolaire : les
structures d’accueil collectif de jour et les familles de jour.
Christine Zollinger Thomas Widmer En dépit du caractère subsidiaire de la réglementation
Université de Zurich de l’accueil extrafamilial pour enfants, toutes les com-
munes étudiées se réfèrent à des lois-cadres cantonales.
Les différences constatées concernent surtout la clé de
financement choisie entre canton et communes, les
consignes cantonales en matière de tarification et les
normes de qualité prescrites. La marge de manœuvre
dont disposent les communes conduit, du fait des diffé-
rences entre réglementations cantonales, à une offre
hétérogène, qui se manifeste par exemple dans les sys-
tèmes tarifaires choisis.
Le développement de l’accueil extrafamilial pour enfants Le canton de Berne, par exemple, connaît un système
peut contribuer à l’égalité professionnelle entre femmes tarifaire unifié pour toutes les offres ayant droit à la com-
et hommes. Depuis le milieu des années 1990, on observe pensation des charges (contribution des parents). On
une densification de l’offre ; il faut noter que la loi fédé- parle de modèle convergent. La tarification centralisée
rale du 4 octobre 2002 sur les aides financières à l’accueil permet un traitement égalitaire des parents de toutes les
extrafamilial pour enfants prévoit d’importantes incita- communes du canton. De plus, les parents paient le même
tions en la matière. Une analyse comparative des mesures montant pour toutes les offres reconnues au niveau can-

Sécurité sociale CHSS 4/2014 219


Dossier La politique visant à concilier vie privée et vie professionnelle

Betreuungsangebot der zehn untersuchten Gemeinden sowie Jahr des politischen Entscheids  T2

Hirzel Hagenbuch Opfikon Greifensee Riggisberg Mühlethurnen Münchenbuchsee Pieterlen Les Breleux Courrendlin
Struc- Oui Non Oui Oui Non Non Oui Oui Oui Oui
tures
d’accueil
de jour
Année 2012 – 1970, 2013 – 2004 2002 2010 1998
d’intro- développe-
duction ment depuis
2000
Familles Non Non Oui Non Oui Oui Oui Non Oui Oui
de jour
Année – – 1994 – 2010 2010 1995 – 2005 1983,
d’intro- développe-
duction ment depuis
2000

tonal : le tarif minimal unitaire de l’accueil d’un enfant, aux différentes formes d’offres au sein d’une même com-
applicable aux structures d’accueil de jour et aux familles mune (structures d’accueil de jour et famille de jour).
de jour, est ainsi de 6 fr. 50 par jour sur tout le territoire Outre les différences inter- et intracantonales dans le
du canton. La différence par rapport aux frais normatifs tarif de base, on observe des différences de coûts qui
occasionnés par une place d’accueil est financée par le s’expliquent par une conception et une professionnali-
canton. sation différentes des offres. Le canton de Berne paie par
En revanche, le canton de Zurich, organisé de manière exemple des frais normatifs d’accueil, par enfant et par
décentralisée, n’édicte pas de consignes tarifaires. On heure, de 8 fr. 96 dans une famille de jour et de 11 fr. 65
parle alors de modèle subsidiaire. Il en résulte des diffé- dans une structure d’accueil de jour. Cette différence
rences de tarifs entre communes, et par conséquent un s’explique principalement par les coûts salariaux plus
traitement inégalitaire selon la commune de résidence élevés des offres professionnelles, mais également par les
des parents. Si on observe par exemple les communes de frais d’infrastructures, qui sont aussi plus importants dans
Greifensee et d’Opfikon dans le tableau T3, on constate les structures d’accueil de jour. Le canton fournit pour
même que dans le modèle subsidiaire (à la différence du ces dernières une clé comprenant des consignes de for-
modèle convergent), différents tarifs peuvent s’appliquer mation à l’intention du personnel chargé de l’accueil. En

Comparaison des systèmes tarifaires des offres d’accueil extrafamilial pour enfants dans trois communes  T3
du canton de Zurich (données 2013)
Opfikon Greifensee Hirzel
Structure d’accueil Famille de jour Structure Famille de jour Structure d’accueil Famille de jour
de jour d’accueil de jour de jour
Plein tarif 109 fr./jour 95 fr./jour 110 fr./jour 7 fr./heure (63/jour 100 fr./jour –
(= tarif maximal) pour 9 h).
Tarif minimal 21 fr./jour 19 fr./jour 33 fr./jour (70% 1 fr. 75/heure 15 fr./jour –
des coûts totaux) (15 fr. 75 plus
repas 10 fr./jour)
Plafond de revenu pour 25 000 fr. 25 000 fr. 55 000 fr. 15 000 fr. 30 000 fr. –
éligibilité au tarif minimal
Plancher de revenu pour ap- 100 000 fr. 120 000 fr. 95 000 fr. 75 000 fr. 65 000 fr. –
plication du tarif maximal
Montant minimal – – 20 fr./jour et – 15 fr./jour et –
15 fr./demi-journée 1 fr. 50/heure

220 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier La politique visant à concilier vie privée et vie professionnelle

revanche, les parents de jour n’ont aucune obligation les pouvoirs publics. Ils ont en revanche soutenu, par
spécifique en matière de formation. Une autre différence l’intermédiaire de l’association Tagesfamilien, une struc-
concerne les heures d’ouverture. Une structure d’accueil ture existante qui permettait à des femmes au foyer de
de jour subventionnée par le canton de Berne doit être proposer à leur domicile un accueil extrafamilial très peu
ouverte au moins 11 h 30 min par jour et 235 jours par cher.
an. Pour les familles de jour, l’accueil est théoriquement En face, une coalition progressiste s’est formée, regrou-
possible 24 heures sur 24 et toute l’année. pant des formations de gauche (PS et Verts) et des partis
Comment expliquer cette hétérogénéité des offres ? du centre (PLR et PEV), favorables à la mise en place
Certaines différences sont souhaitées par les responsables d’une structure d’accueil de jour financée avec des fonds
politiques, elles tiennent à des différences dans la situation publics. Mais les différents membres de cette coalition
des groupes d’intérêt qui interviennent et dans les idéo- avaient des objectifs différents: si les représentants du
logies des décideurs politiques. D’autres différences sont PLR estimaient que la création d’une offre permettrait
dues à des raisons objectives. d’activer, sur le marché du travail, le capital humain de
femmes bien formées, les forces de gauche s’appuyaient
d’abord sur une réflexion relevant de la politique sociale
Causes de l’hétérogénéité des offres et visant à favoriser l’égalité des sexes.
Lorsque le projet a été discuté au Parlement communal,
il est intéressant de noter que c’est précisément une
Une hétérogénéité voulue par le politique majorité du groupe UDC qui a permis à l’idée du finan-
On observe dans les communes étudiées deux niveaux cement public de la structure d’accueil de jour de s’impo-
de formation de l’opinion politique. Un premier «oui de ser. En effet, une majorité des représentants de l’UDC a
principe » à la promotion de l’accueil extrafamilial pour estimé qu’il n’était pas politiquement opportun de s’op-
enfants vient d’une coalition de forces de gauche et de poser en public au projet, du fait de la demande croissante
droite libérale1. Ces forces mettent en avant une politique de structures d’accueil extrafamilial et de la pression
favorisant l’égalité complétée par des arguments d’ordre grandissante exercée sur l’idéal familial traditionnel qui
économique. C’est à un second niveau que se déroule la avait cours jusqu’à cette période, caractérisé par une seule
mise en œuvre concrète des mesures, par exemple dans personne active dans le couple, en l’occurrence l’homme.
des règlements ou dans des directives. A ce niveau, les Il n’en reste pas moins qu’après l’adoption du projet,
décisions intègrent, de manière dissimulée, les conflits l’UDC a continué d’essayer d’affaiblir la structure d’ac-
normatifs qui demeurent chez les différents acteurs pour cueil de jour sur le plan financier, en demandant la réduc-
ce qui concerne les rapports entre les sexes. La part du tion de son budget.
financement des communes et le type du prestataire La conception de l’accueil extrafamilial pour enfants
(privé ou public, famille de jour ou structure d’accueil de ne fait donc pas l’unanimité et a donc dû être régulière-
jour) constituent les principales pommes de discorde. Les ment renégociée. La mise en place d’une coalition majo-
éléments suivants sur la commune de Münchenbuchsee ritaire pour la création d’une offre est déterminée par la
illustrent très clairement cette situation. situation et dépend fortement de la conception des me-
Une majorité de l’exécutif et de l’assemblée commu- sures spécifiques envisagées2. La persistance des deux
nale de Münchenbuchsee a soutenu vers la fin 2003 la coalitions a finalement conduit la commune de Mün-
mise en place d’une structure d’accueil de jour financée chenbuchsee à mettre en place une offre qui s’adresse
par des fonds publics. Le 16 mai 2004, la population a tant aux milieux conservateurs, avec un financement
également voté dans ce sens. Or, durant le processus de public d’heures d’accueil auprès de l’association des fa-
décision en la matière, Münchenbuchsee a connu deux milles de jour, qu’aux milieux progressistes, avec des
coalitions. places dans une structure d’accueil de jour financée sur
Avant la votation, une coalition conservatrice compo- des fonds publics.
sée de forces de droite et d’acteurs de l’association Tages-
familien (familles de jour), s’appuyant sur une conception Une hétérogénéité due à des facteurs objectifs
conservatrice de la famille et de la répartition des rôles On observe dans l’offre des différences dues à des
entre les sexes, s’est opposée à la mise en place d’une facteurs objectifs, par exemple entre communes rurales
structure d’accueil de jour soutenue par des fonds publics. et communes intégrées dans une agglomération. Il semble
Des représentants de l’UDC ont combattu l’intervention d’abord que les habitants de ces communes n’ont pas les
de l’Etat dans une affaire privée, à savoir l’éducation des mêmes besoins. En fonction de la demande, toutes les
enfants, et le financement d’une offre (trop) onéreuse par communes n’ont pas besoin d’une offre d’accueil iden-
tique ou complètement développée. Dans les communes
1 Op.cit. Häusermann/Kübler. rurales, il n’existe souvent que l’une des deux formes
2 Op.cit. Häusermann/Zollinger. d’offres étudiées (structures d’accueil de jour ou familles

Sécurité sociale CHSS 4/2014 221


Dossier La politique visant à concilier vie privée et vie professionnelle

Salaire et horaires d’accueil des parents de jour dans les communes  T4


d’Opfikon, de Greifensee et de Münchenbuchsee
Opfikon (ZH) Greifensee (ZH) Münchenbuchsee (BE)
Revenu de la personne chargée de l’accueil 65 fr./jour (8 heures) 7 fr./heure et par enfant 6 fr. 30/heure et par enfant
Salaire mensuel avec un taux d’occupation de 100% Environ 1300 fr. Environ 1200 fr. Environ 1050 fr.
Horaires d’accueil 24 heures sur 24, toute l’année

de jour). Par ailleurs, certaines communes rurales des Résultats généraux


cantons de Zurich et de Berne se limitent à des offres
s’adressant aux enfants scolarisés et ne fonctionnant sou- L’ampleur et la mise en œuvre concrète de l’offre
vent que quelques jours par semaine. d’accueil présentent de grandes différences entre les com-

Conséquences pour l’égalité


entre les sexes et la cohésion sociale Heures d’accueil effectuées auprès des familles  G1
de jour, ventilées en fonction de la tarification à
laquelle sont assujettis les parents, en %
Conséquences pour l’égalité professionnelle entre les 100
sexes
80
La conception des offres d’accueil extrafamilial pour
enfants peut avoir des conséquences problématiques pour 60
l’égalité professionnelle entre les sexes. Notre étude
montre que ce sont majoritairement des femmes qui 40
exercent une activité d’accueil extrafamilial. Du fait des 100
bas salaires et des faibles taux d’occupation, travailler en 20 18 5
tant que mère de jour au sein d’une association de familles 80 22 3
0
de jour ne permet pas de réaliser un revenu suffisant pour 2009 (28 471 h) 2010 (28 129 h) 2011 (26 937 h)
60
vivre (voir le tableau T4). Cette situation est également
Autres Tarif maximal Tarif minimal
préoccupante du point de vue de l’égalité professionnelle
40
entre les sexes, car une part importante des prestations 100
Source : commune de Münchenbuchsee, 2012.
sociales sont liées en Suisse à l’exercice d’une activité 90
20 18 5
lucrative. 80 22 3
700
Conséquence pour la redistribution Part
60 des places
2009 en h)
(28 471 structures
2010 (28d’accueil de jour,
129 h) 2011  G2
(26 937 h)
De même que des études antérieures3, notre étude a
ventilée
50 enAutres
fonctionTarif
de la tarification àTarif
maximal
laquelle
minimal
mis en évidence des modèles d’utilisation des différentes
sont
40 assujettis les parents, en %
30
100
offres dans le domaine préscolaire qui dépendent du 20
90
revenu. La commune de Münchenbuchsee est à cet égard 10
80
représentative : les formes onéreuses d’accueil extrafa- 0
70
milial pour enfants, associées à une professionnalisation 60 2009 (11,7 places) 2010 (12,0 places) 2011 (17,4 places)
élevée (structures d’accueil de jour), sont davantage uti- 50 Autres Tarif maximal Tarif minimal
lisées par les parents les plus favorisés que l’offre meilleur 40
marché des familles de jour (voir les graphiques G1 et 30
G2). Inversement, ces dernières accueillent davantage 20
10
d’enfants issues de familles défavorisées que les structures
0
d’accueil de jour. D’après les réponses données par les 2009 (11,7 places) 2010 (12,0 places) 2011 (17,4 places)
personnes interrogées, ce modèle d’utilisation des familles
Autres Tarif maximal Tarif minimal
appartenant aux classes de revenus les plus basses n’est
pas uniquement dû au niveau des prix, mais également Source : commune de Münchenbuchsee, 2012.
à la plus grande flexibilité des horaires des parents de
jour.
3 Op.cit. Iten et al., Op.cit. Müller/Bürgi, Op.cit. Schlanser.

222 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier La politique visant à concilier vie privée et vie professionnelle

munes étudiées. Cette hétérogénéité s’explique par dif- d’accueil qui est bien plus utilisée par des couches ayant
férents éléments. Nous observons d’abord des différences des revenus élevés et exerçant des professions réputées
apparues du fait de décisions politiques : une large coa- que par les groupes moins qualifiés ayant souvent des
lition de forces de gauche et de droite modérée a contri- revenus plus faibles. Ces derniers sont ainsi à peine en
bué de manière notable à développer des mesures visant mesure, à Münchenbuchsee, de profiter des offres oné-
à concilier famille et vie professionnelle. Les forces de reuses et professionnalisées d’une structure d’accueil de
droite modérée soutiennent ces mesures pour des raisons jour, et recourent donc souvent à la solution meilleur
économiques tandis que les forces de gauche le font marché et plus souple de la famille de jour. La présente
davantage afin de favoriser l’égalité entre les sexes et étude a par ailleurs montré que tout spécialement le
l’intervention publique. Il y a ensuite des différences qui secteur de l’accueil extrafamilial et des soins génère des
découlent des problèmes et besoins propres à chaque places de travail précaires, mal payées et majoritairement
commune. Mais l’hétérogénéité de l’offre d’accueil s’ex- occupées par des femmes. Pour ces femmes exerçant une
plique également par la situation politique (coalitions, activité lucrative au service de l’égalité entre les sexes,
etc.) et sociale (groupes d’intérêt, etc.) dans la commune on peut tout à fait parler d’un effet rebond ou boomerang
concernée lors de la décision. sur le plan social.
Les « nouvelles coalitions » de forces de gauche et de A l’avenir, il est nécessaire que la réflexion sur les
droite modérée ont favorisé la mise en place d’une offre mesures de politiques visant à favoriser l’égalité, et notam-
ment à mieux concilier vie professionnelle et vie familiale,
prenne davantage en compte les conséquences sociales
et les effets sur la qualité de l’activité lucrative des
femmes. A défaut, malgré les meilleures intentions,
l’égalité entre les sexes, mais également l’équilibre de la
société pourraient s’en trouver affaiblis.
Références
Müller, Franziska et Mirjam Bürgi, Evaluation des Pilotprojekts Be-
treuungsgutscheine für die familienergänzende Kinderbetreuung in
der Stadt Luzern. Zwischenbericht 2010, [Lucerne 2010].
Häusermann, Silja et Daniel Kübler, «Policy frames and coalition dy-
namics in the recent reforms of Swiss family policy», dans German
Policy Studies, n° 3/2010, p. 163-194.
Iten, Rolf et al., Familienergänzende Kinderbetreuung in der Schweiz:
Aktuelle und zukünftige Nachfragepotenziale, [Zurich 2005]. Christine Zollinger, lic. phil., collaboratrice du projet de recherche
«Naissance et pilotage de la politique d’égalité professionnelle»
Häusermann, Silja et Christine Zollinger, «Familienpolitik», dans
(PNR 60), Institut des sciences politiques, Université de Zurich.
Handbuch der Schweizer Politik, éd. par Peter Knoepfel et al., Zurich
Mél: zollinger@ipz.uzh.ch
52014, p. 911-934.
Schlanser, Regula, Qui utilise les crèches en Suisse? Logiques sociales
du recours aux structures d’accueil collectif pour la petite enfance Prof. Dr. Thomas Widmer, responsable du domaine de recherche
(Travail de mémoire IDHEAP), [Chavannes-Lausanne 2011]. Policy-Analyse & Evaluation, Institut des sciences politiques,
Université de Zurich.
Mél: thow@ipz.uzh.ch

Sécurité sociale CHSS 4/2014 223


dossier Dossier Peu d’égalité professionnelle pour les seniors en emploi

Peu d’égalité professionnelle


pour les seniors en emploi
En Suisse, comme dans la plupart des pays européens,
l’heure est à l’allongement de la vie active. Les poli-
tiques de «vieillissement actif» tiennent-elles compte
des trajectoires professionnelles différenciées selon le
sexe ? Qu’en est-il du travail de care durant la deu-
xième partie de carrière?

Nicky Le Feuvre Céline Schoeni Magdalena Rosende Morgane Kuehni


Université de Lausanne Haute école de travail social et
de la santé, Lausanne

Dans un contexte de vieillissement des populations et de une activité lucrative jusqu’à l’âge légal de la retraite. Ce
pénurie de main-d’œuvre spécialisée et de cadres, le main- taux est en augmentation constante chez les femmes âgées
tien en emploi des seniors représente un enjeu social de 55 à 59 ans, dont la part en emploi est passée de 55 %
majeur. Le projet EGALISE (Egalité des seniors en en 1991 à 72% en 2010. La progression de la participation
emploi)1. a visé à mieux comprendre les mécanismes de des femmes seniors au marché du travail alimente une
différenciation sexuée des trajectoires, en examinant au convergence des comportements d’activité des deux sexes
sein de quatre grandes entreprises suisses (dans les sec- au-delà de 50 ans, mais cette évolution ne se traduit pas
teurs de la grande distribution, de la santé et des trans- nécessairement par plus d’égalité chez les seniors en
ports) le recrutement, la formation, la promotion, la rému- emploi.
nération, les conditions de travail et d’emploi des seniors
des deux sexes. Il a réussi de mettre en évidence les lo- Des parcours de vie différenciés
giques structurelles, institutionnelles et individuelles qui En dépit des révisions récentes, le système de retraite
facilitent ou entravent l’égalité dans la seconde partie de en Suisse reste fondé sur un modèle masculin de carrière,
la vie active. présupposant une trajectoire d’activité continue et à
temps plein tout au long de la vie adulte. Cette politique
renforce les inégalités de sexe en seconde partie de car-
Inégalités face à la contrainte au
maintien en emploi
1 www.pnr60.ch ➞ Projets et résultats ➞ Cluster 1 – Travail et organi-
Avec un taux d’emploi de 68% chez les 55-64 ans, contre sations ➞ Projekt le Feuvre (HTML, 12.6.2014).
46 % en moyenne européenne, la Suisse fait partie des 2 www.bfs.admin.ch ➞ Thèmes➞ 13 – Protection sociale ➞ A consulter
➞ Publications ➞ Indicateurs de la prévoyance vieillesse. Résultats des
rares pays où la majorité de la population active exerce indicateurs clés, Neuchâtel, 2011 (PDF, 12.6.2014).

224 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier Peu d’égalité professionnelle pour les seniors en emploi

Part de l’emploi à temps partiel selon l’âge et le sexe en 2010 (en %) G1

100

90
87,76
80

70 71,06
67,35 64,47
60 58,00
52,33
50

40

30 28,72
20
14,56 12,50
10 11,13
10,71 8,85
0
15-24 25-39 40-54 55-64 65 et + Total

Femmes Hommes

Source : ESPA 2010 (nos calculs).

rière. En effet, les parcours professionnels de l’immense trajectoires d’activité différenciées, les femmes qui béné-
majorité des femmes des générations concernées dé- ficient de la prévoyance professionnelle (LPP) touchent
rogent à ce modèle normatif (interruption temporaire une rente plus de deux fois inférieure à celle des hommes
d’activité et de nombreux emplois à temps partiel). En et un capital encore plus faible. En 2008, les valeurs
cause, l’assignation du travail domestique (travail ména- médianes de la rente annuelle LPP sont de 32 400 francs
ger et soins aux proches dépendants) aux seules femmes, pour les hommes et de 18 000 pour les femmes; celles du
le nombre insuffisant de places d’accueil collectif de la capital sont de 150 000 francs pour les hommes et de
petite enfance, ainsi que la politique fiscale défavorable 43 772 pour les femmes2. Par ailleurs, il faut relever qu’une
à l’emploi féminin. En 2013, plus de la moitié des femmes partie non négligeable de la population active, les per-
occupées en Suisse travaillent à temps partiel (59 %), sonnes ayant des revenus annuels inférieurs à 21 060
dont un quart avec un taux d’occupation inférieur à un francs (valeur 2013), est exclue du 2e pilier. Il s’agit de
mi-temps (cf. graphique G1). De ce fait, arrivées à l’âge
de la retraite, les femmes bénéficient de rentes potentielles
très largement inférieures à celles de leurs homologues Prestations du système de prévoyance vieillesse G2
masculins. touchées par les rentières âgées de 64 à 69 ans
et les rentiers âgés de 65 à 70 ans, 2008

97,6
Impact du régime de retraite sur le maintien Rente AVS 96,9
en emploi 98,1

67,3
Si le premier pilier est le plus égalitaire du point de vue Prestation PP 81,7
de l’accès comme du niveau des rentes, les disparités entre 56,8
les sexes sont particulièrement flagrantes dans la pré- 32,7
voyance professionnelle et individuelle (2e et 3e piliers). Prestation du 42,3
pilier 3a 25,3
Ainsi, en 2012, 82 % des hommes bénéficient d’une rente
du 2e pilier, contre seulement 67 % des femmes. Pour le 0% 20% 40% 60% 80% 100%
3e pilier, l’écart est similaire : 42 % des hommes ont cons- Part de femmes et d‘hommes au
titué une prévoyance privée, contre 25 % des femmes bénéfice d‘une rente, par prestation
(cf. graphique G2).
Total Hommes Femmes
Compte tenu de la ségrégation professionnelle du mar-
Source : Office fédéral de la statistique, SESAM.
ché du travail, de l’infériorité des salaires féminins et des

Sécurité sociale CHSS 4/2014 225


Dossier Peu d’égalité professionnelle pour les seniors en emploi

femmes dans la grande majorité des cas. Concernant le portent sur la première partie de carrière : elles visent
3e pilier, les capitaux sont également moins élevés pour l’articulation vie privée – vie professionnelle, surtout en
les femmes que pour les hommes : 45 000 francs pour les présence d’enfants en bas âge, la promotion de la mixité
premières, contre 60 000 pour les seconds. des métiers et le soutien aux femmes diplômées «à haut
La discrimination indirecte inhérente au système de potentiel ». Par ailleurs, sous couvert de soutien à la
retraite contraint un grand nombre de femmes au main- «conciliation» des temps de vie, les entreprises encou-
tien le plus longtemps possible en emploi, dans l’espoir ragent encore les mères de jeunes enfants à travailler
de bénéficier d’une rente suffisante pour couvrir leurs à temps partiel ; ce qui leur sera financièrement pré-
besoins économiques de base. Toutefois, l’analyse com- judiciable en fin de carrière. Les politiques d’égalité
parée des trajectoires biographiques montre que les ne concernent donc pas l’ensemble des salariées et
femmes et les hommes ne constituent pas des catégories ne s’adressent jamais explicitement à celles qui sont en
homogènes. Ainsi, certains hommes sont également deuxième partie de carrière. De plus, les femmes seniors
concernés par la contrainte économique au maintien en sont souvent exclues des mesures d’avancement profes-
emploi : la flexibilisation et la précarisation du travail sionnel et sont laissées sans soutien de la part de l’em-
salarié concourent à morceler les parcours professionnels ployeur lors de l’avènement de difficultés liées à la prise
de certains salariés masculins, surtout migrants et/ou peu en charge de proches dépendants.
qualifiés. Ceux qui ont connu des interruptions dans leur
parcours professionnel (maladie, chômage) ont peu de Aménagement des fins de carrière
possibilités de quitter précocement le marché du travail, Les politiques concertées de « gestion des âges » de-
parfois au détriment de leur santé. Les départs anticipés meurent faiblement développées dans les entreprises
à la retraite sont aujourd’hui le fait des individus les mieux investiguées. Lorsqu’elles existent, ces mesures concernent
qualifiés, les mieux rémunérés et ayant le mieux préparé généralement des groupes professionnels spécifiques –
leurs fins de carrière: les hommes cadres, principalement. cadres, techniciens ou ouvriers qualifiés – dans lesquels
les femmes sont très minoritaires. Les femmes seniors
Le « vieillissement actif»: une notion loin constituent donc un angle mort des politiques d’entre-
d’être neutre prises en matière de «gestion des âges». Par ailleurs, les
Le vieillissement démographique et la volonté de jugu- politiques de santé au travail ne concernent jamais l’amé-
ler les coûts de protection sociale ont encouragé le ral- nagement des postes de travail et ne tiennent pas compte
longement de la vie active dans l’ensemble des pays occi- des effets potentiels de l’usure au travail. Enfin, contrai-
dentaux. La Suisse n’échappe pas à cette tendance qui se rement à une partie importante de leurs homologues
reflète dans les réformes récentes du système de retraite. masculins, les femmes seniors sont souvent employées
Les mesures de promotion du «vieillissement actif» s’ins- dans des secteurs d’activité à faible taux de syndicalisa-
crivent dans une perspective universaliste, apparemment tion; elles ont peu de relais pour faire entendre leur voix
neutre, qui consiste à rallonger le nombre d’années de et faire porter leurs revendications collectives. Le cloi-
cotisation pour tout le monde, tout en alignant l’âge légal sonnement organisationnel entre les dispositifs «égalité
de la retraite des femmes sur celui des hommes. Toutefois, professionnelle » et les dispositifs « gestion des âges »
une telle logique asexuée se heurte à l’inégale participa- contribue clairement à renforcer les inégalités entre les
tion des femmes et des hommes au marché du travail et sexes en deuxième partie de carrière, aussi bien en matière
au travail de care. des conditions de maintien en emploi qu’en termes de
santé et de bien-être au travail.

Les femmes seniors: un angle mort


des politiques d’entreprise Le travail de care : une affaire de femmes

Au même titre que le système de retraite, les politiques La construction des politiques sociales en général, de
d’égalité entre les femmes et les hommes adoptées dans retraite en particulier, sur le modèle de l’homme pour-
les entreprises, tout comme les mesures d’aménagement voyeur et de la femme au foyer apparaît de manière
des fins de carrière, constituent un paramètre déterminant particulièrement problématique à l’échelle des trajec-
pour appréhender l’égalité professionnelle chez les se- toires de vie. De nombreuses femmes seniors sont
niors. contraintes à se maintenir en emploi, en dépit des charges
domestiques et/ou de problèmes de santé. L’injonction à
Actions pour l’égalité la «conciliation» vie professionnelle et vie privée qui est
Les quatre entreprises investiguées ont toutes adopté faite aux seules femmes ne disparaît pas en deuxième
une politique d’égalité entre les femmes et les hommes. partie de carrière. En effet, si la charge domestique qui
Cependant, la grande majorité des mesures d’égalité pèse sur les femmes diminue très légèrement au-delà de

226 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier Peu d’égalité professionnelle pour les seniors en emploi

50 ans, la nature des attentes à leur égard évolue en et les politiques du «vieillissement actif» présupposent
deuxième partie de carrière. Or, les charges domestiques l’existence de trajectoires antérieures indifférenciées
spécifiques des femmes seniors (prise en charge de petits- (continues et à temps plein) chez les hommes et les
enfants, de parents âgés dépendants, d’un conjoint malade, femmes. D’autre part, les entreprises fondent leurs poli-
etc.) ne sont pas reconnues, ni au niveau de la prévoyance tiques d’égalité sur un aménagement des parcours d’ac-
professionnelle (2e pilier), ni au sein des entreprises inves- tivité des femmes, mères de famille, sous la forme de
tiguées. Les expériences concrètes des femmes seniors mesures (congés de maternité prolongés, congés paren-
en emploi soulignent la complexité de l’articulation «tra- taux non rémunérés, réduction volontaire du temps de
vail-famille » à laquelle elles sont confrontées. Nombre travail, etc.), qui produisent des écarts importants (et
d’entre elles sont contraintes au maintien en emploi, voire durables) en matière de carrières, de rémunération et de
à l’augmentation du taux d’occupation en fin de carrière, prévoyance professionnelle. Enfin, la division sexuelle du
notamment du fait de la faible rente de la prévoyance travail demeure un trait caractéristique de l’organisation
professionnelle accumulée antérieurement, tout en assu- sociale et constitue un handicap à l’égalité professionnelle
mant une importante charge de travail de care. en deuxième partie de carrière.

Femmes seniors face à des injonctions


contradictoires

Les principales difficultés auxquelles les femmes se-


niors doivent faire face résultent de la coexistence de
plusieurs injonctions. D’une part, les réformes des retraites

Morgane Kuehni, professeure, Haute école de travail social et de


la santé, Lausanne.
Mél: Morgane.Kuehni@unil.ch

Références Nicky Le Feuvre, professeure de sociologie, Université de


Le Feuvre, Nicky et al., « Le genre du ’vieillissement actif’ : Du principe Lausanne.
de traitement équitable à la multiplication des injonctions contradic- Mél: Nicky.LeFeuvre@unil.ch
toires», dans Schweizerische Zeitschrift für Soziologie, Nr. 2/2014 (en
préparation).
Magdalena Rosende, chargée de recherche, Université de
Kuehni, Morgane, Magdalena Rosende et Céline Schoeni, «Maintien
Lausanne.
en emploi et inégalités de sexe », dans Lien social et politiques 69,
Mél: Magdalena.Rosende@unil.ch
2013, pp. 197-213.
Rosende, Magdalena et Céline Schoeni, « Seconde partie de carrière,
régime de retraite et inégalités de sexe», dans Revue française des Céline Schoeni, chargée de recherche, Université de Lausanne
affaires sociales, 2-3/2012, pp. 130-147. (pour toute correspondance concernant la recherche).
Mél: Celine.Schoeni@unil.ch

Sécurité sociale CHSS 4/2014 227


dossier Dossier La main-d’œuvre familiale non rémunérée orpheline des prestations sociales

La main-d’œuvre familiale non rémunérée


orpheline des prestations sociales suisses
La main-d’œuvre familiale non rémunérée n’est pas
assez prise en compte dans le système des assurances
sociales suisses. Les conjoints, enfants ou autres
membres de la famille qui aident un parent indépen-
dant dans son entreprise sans en être salariés n’ont ni
statut professionnel ni statut juridique. Ils ne bénéfi-
cient donc que d’une couverture sociale minimale. Le
cas des exploitations agricoles familiales suisses est
emblématique de cette lacune.

Yvan Droz Fenneke Reysoo Valérie Miéville-Ott


Institut de hautes études internationales et du développement, Genève Agridea

La situation précaire des paysans et tout particulièrement parce que le droit foncier rural privilégie l’héritier ou
des paysannes a été soulignée par la Suisse dans un rap- l’héritière qui reprendra le domaine afin d’en assurer la
port qu’elle a présenté en 2009 dans le cadre de la Conven- survie économique. Ce cadre légal marginalise les autres
tion sur l’élimination de toutes les formes de discrimina- héritiers même s’ils ont collaboré sur l’exploitation et y
tion envers les femmes (CEDEF). Elle constate d’une ont investi. Notons que cette situation n’est pas le propre
part que le revenu agricole diminue d’année en année et des exploitations agricoles puisqu’elle affecte aussi une
que beaucoup d’exploitations agricoles sont endettées. grande partie des très petites entreprises familiales en
D’autre part, les épouses travaillent très souvent sur Suisse.
l’exploitation de leur mari sans compensation.
La situation se complique lors de coups du sort, tels
que divorce, décès, invalidité, etc. En cas de séparation Les exploitations agricoles dépendent de la
par exemple, la paysanne qui n’a pas le statut d’employée main-d’œuvre familiale non rémunérée
ne touche pas d’indemnisation de chômage. Elle ne peut
pas non plus faire appel à un soutien pour sa reconversion Dans le monde entier, l’agriculture familiale met à
professionnelle. Et souvent, il ne lui est pas possible de contribution les membres de la famille afin d’assurer les
récupérer ce qu’elle a investi personnellement dans l’ex- récoltes et la reproduction des troupeaux. La Suisse ne
ploitation familiale. En cas de décès du mari, la situation fait pas exception à cette règle et les exploitations agri-
de l’épouse survivante est aussi très difficile, notamment coles familiales dépendent du travail de plusieurs per-

228 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier La main-d’œuvre familiale non rémunérée orpheline des prestations sociales

sonnes. Ainsi, il est bien difficile de gérer une ferme sans invalidité et décès du 2e pilier en cas d’accident, qu’il soit
la présence d’une paysanne aux côtés de l’agriculteur1. professionnel ou non professionnel. Ils doivent également
La paysanne consacre 23 heures par semaine à aider son s’assurer à titre individuel pour les indemnités journa-
époux sur l’exploitation (travail agricole, jardinage, admi- lières en cas d’incapacité de travail lors de maladie ou
nistration), alors que ce dernier y travaille près de 60 d’accident. Ainsi de gros risques sont laissés à la seule
heures2. Lorsque l’épouse est absente, une fille, une sœur appréciation individuelle, ce qui peut entraîner des la-
ou un frère, voire une mère, remplit ce rôle ; lorsque cunes de couverture graves en cas de coup dur. En effet,
l’époux est absent, c’est un frère, un père ou un fils qui le en l’absence d’obligation, le risque est grand de se couvrir
remplace. Le fonctionnement des exploitations familiales de manière minimaliste: franchise de l’assurance-maladie
agricoles suisses implique donc la complémentarité de très haute n’incitant pas au recours à des soins de manière
différents membres de la famille. L’agriculture familiale préventive, délai d’intervention des indemnités journa-
est toujours conçue comme fondée sur une famille dans lières le plus long possible. Cette situation comporte des
laquelle chacun respecte ses rôles et participe au fonc- risques de santé physique et psychosociaux3.
tionnement de l’exploitation (article 104 de la Constitu- Salarier l’épouse qui travaille régulièrement pour
tion suisse). Précisons que très généralement, cette orga- l’exploitation pourrait être un moyen de consolider sa
nisation familiale repose d’abord sur un binôme couverture sociale. Mais cela signifie évidemment dimi-
(constitué des conjoints, ou de deux frères, ou d’une nuer le revenu du mari et donc ses droits aux prestations
cheffe et de son père, etc.). Celui-ci recourt régulièrement sociales, ce qui peut être délicat notamment pour des
à des membres plus « périphériques » (frères et sœurs, prestations en cas d’invalidité. Ainsi, une bonne couver-
cousins ou cousines, grands-parents) pour l’accomplisse- ture sociale pour les deux conjoints n’est possible que
ment de tâches secondaires nécessaires. Comme le disent lorsque l’exploitation dégage un revenu total déjà impor-
les concernés: «une ferme, c’est un tout» où chacun rem- tant, ce qui est une vraie gageure actuellement.
plit ses tâches en considérant cette répartition fonction- La main-d’œuvre familiale est donc une catégorie so-
nelle selon l’âge et le sexe comme allant de soi ; la com- ciale d’acteurs économiquement productifs, mais qui – du
plémentarité est souvent définie comme un mode point de vue du droit individuel – ne sont pas salariés: ils
d’organisation où l’on « travaille main dans la main et ne bénéficient pas de facto de toutes les assurances so-
décide ensemble». Or, l’important travail fourni par cette ciales que touchent les salariés. En ce qui concerne l’AVS,
main-d’œuvre familiale non rémunérée n’est pas consi- ils ne sont assurés que par le biais des cotisations du chef
déré comme un emploi donnant droit aux prestations d’entreprise, ce qui représente bien souvent une couver-
sociales garanties par la législation suisse. ture minimale. L’application de la LEg pour les indépen-
dants pose problème. Les revendications, de type « à
travail égal, salaire égal», sont difficilement applicables
Politiques publiques et au sein des petites entreprises agricoles familiales en
sécurité sociale lacunaires raison du faible revenu qu’elles génèrent. En outre, les
politiques d’égalité dans leur conception actuelle ne par-
La loi sur l’égalité suisse (LEg) veille à combattre des viennent pas à appréhender la situation de la main-
discriminations salariales, à promouvoir l’égalité des d’œuvre familiale nonsalariée dans les très petites entre-
chances lors des recrutements et à prévenir et traiter le prises familiales ou chez les indépendants.
harcèlement sexuel au travail. Elle limite donc son champ Cette situation déploie ses effets inégalitaires en cas
d’application au monde du travail salarié. Le secteur de de rupture familiale, tant au niveau de la réintégration
l’agriculture et des petites entreprises familiales que nous professionnelle qu’au niveau des rentes et indemnités
avons étudié échappe à son cadre, puisqu’il se caractérise auxquelles le conjoint qui part peut prétendre. En outre,
par le statut d’indépendant des exploitants ou des entre- dans le cas du divorce en agriculture, le conjoint non
preneurs et par une main-d’œuvre familiale nonsalariée, propriétaire et officiellement nonexploitant – dans la
en majorité féminine. Or, cette dernière n’a ni statut pro- majorité des cas l’épouse – est discriminé par l’application
fessionnel ni statut juridique et ne bénéficie donc pas de de différentes règles qui protègent la survie du patrimoine
la même manière des politiques publiques (que ce soit agricole au détriment des droits individuels.
en matière d’égalité ou d’assurances sociales) que les Certaines dispositions de politique agricole ont des
travailleurs salariés. effets discriminatoires indirects. Dans le monde agricole,
En Suisse, les chefs d’entreprise et exploitants agricoles, le droit successoral connaît des particularités liées à la
ainsi que les membres de leur famille sont assimilés à des conservation du patrimoine. Si ce cadre légal est neutre
indépendants par la prévoyance sociale. Ceux-ci n’ont
pas l’obligation de cotiser à un 2e pilier ni à une caisse de 1 Op.cit. Droz, Miéville-Ott/Reysoo.
chômage ; ils ne peuvent donc prétendre aux prestations 2 Op.cit. Rossier/Reissig.
de ces deux institutions. Ils ne touchent pas les rentes 3 Op.cit. Droz et al.

Sécurité sociale CHSS 4/2014 229


Dossier La main-d’œuvre familiale non rémunérée orpheline des prestations sociales

sur l’aspect du genre, la conjonction des principes de du travail au sein de ces entreprises permet à celles et
succession et la sous-évaluation du patrimoine ont pour ceux qui s’y impliquent d’avoir une protection sociale
résultat un « système » inégalitaire. Ainsi, le droit foncier minimale et des avantages complémentaires (logement,
rural favorise la transmission de l’exploitation dans le denrées gratuites, etc.). Mais ce système est mis à rude
cadre familial, généralement de père en fils, et prétérite épreuve quand l’un des membres de la famille-entreprise
de fait les collatéraux et la mère. Celle-ci peut se trouver ne peut plus s’y impliquer. Dans les très petites entreprises
prise dans des conflits de loyauté difficiles vis-à-vis d’un familiales, qui font reposer une partie de leur compétiti-
de ses enfants – le repreneur –, qui la spolie d’une partie vité sur la mobilisation d’une main-d’œuvre familiale à
de la valeur de l’exploitation. Dans la majorité des cas faible coût, de tels événements peuvent s’avérer particu-
en Suisse, c’est un seul héritier – un homme – qui reprend lièrement fragilisants. Et face à ce type de situation, le
la ferme. Par conséquent, il s’agit d’une discrimination système d’assurances sociales suisse demeure peu adap-
envers les sœurs et les frères qui doivent renoncer à une té pour soutenir convenablement les personnes (le plus
part de l’héritage. En effet, la loi sur le droit foncier rural souvent des femmes) qui en auraient le plus besoin.
estime, dans le cadre familial, la valeur de l’exploitation
à une « valeur de rendement », deux à trois fois plus basse
que la valeur vénale. En cas de divorce et selon les régimes
matrimoniaux, le calcul d’une indemnité équitable de
l’épouse se fera en fonction de cette valeur de rendement,
prétéritant de manière importante la paysanne.
En cas de rupture familiale, les conjoints non salariés Références
rencontrent aujourd’hui d’importantes difficultés pour Droz, Yvan et al., Malaise en agriculture; une approche interdiscipli-
faire reconnaître les compétences acquises sur la ferme naire des politiques agricoles: France-Québec-Suisse, Paris, 2014.
au moment de (ré)intégrer le marché du travail salarié. Droz, Yvan, Valérie Miéville-Ott et Fenneke Reysoo, «Der Landwirt
Et les mêmes problèmes persistent si ces personnes und die Bäuerin in der Schweiz: Ein ungleiches Paar?», dans Schwei-
veulent reprendre l’exploitation à leur nom, notamment zerische Zeit-schrift für Soziologie 2/2014, pp. 37-68.
lors d’un décès ou d’une invalidité du conjoint. L’octroi
Rossier, Ruth et Linda Reissig, Arbeitsleistung der Frauen von bäuer-
d’un statut professionnel et juridique remédierait à cette
lichen Familienbetrieben im Vergleich – eine Zeitbudgeterhebung
situation. Cela impliquerait toutefois de modifier le dis-
(Agroscope), [Tännikon, 2013].
positif légal d’attribution des paiements directs basé sur
un seul exploitant à titre individuel par exploitation. Logique patrimoniale et petites entreprises familiales, éd. par Domi-
Nous avons pris ici l’exemple de l’agriculture pour nique Jacques-Jouvenot et Yvan Droz (à paraître).
évoquer le cas de la main-d’œuvre familiale non rému-
nérée4. Or, cette situation se retrouve également au sein
des très petites entreprises familiales. Toutefois, il convient
de souligner que toutes ne suivent pas systématiquement
cette logique. En particulier, les très petites entreprises Yvan Droz, professeur associé, IHEID, Genève.
familiales nouvellement créées – et donc qui n’ont pas Mél: Yvan.Droz@graduateinstitute.ch
été reçues en héritage – peuvent ne pas être considérées
comme un patrimoine à transmettre, mais comme un
simple outil de travail5. Dans ce cas, les sphères domes- Valérie Miéville-Ott, cheffe de projet, Agridea.
tiques et professionnelles sont souvent clairement distin- Mél: Valerie.Mieville@agridea.ch
guées et la main-d’œuvre familiale dispose d’un statut
officiel et est rémunérée : elle est donc couverte par les
assurances sociales. Fenneke Reysoo, Senior Lecturer, IHEID, Genève.
Nombre de ces entreprises familiales suivent pourtant Mél: Fenneke.Reysoo@graduateinstitute.ch
bien la logique patrimoniale avec une main-d’œuvre
familiale non rémunérée, tout comme dans le monde
agricole. Quand l’entreprise se trouve dans la famille
depuis plusieurs générations et que le souhait de la
transmettre existe, la main-d’œuvre familiale est fré-
quemment mise à contribution, le plus souvent sans
statut, ni salaire.
La fragilité des très petites entreprises familiales face
4 www.pnr60.ch ➞ Projets et résultats ➞ Cluster 1 – Travail et organi-
aux aléas de la vie (maladie, accidents, dispute, séparation) sations ➞ Projet Droz (PDF, 12.6.2014).
est un élément central qui les caractérise. L’articulation 5 Op.cit. Jacques-Jouvenot/Droz.

230 Sécurité sociale CHSS 4/2014


dossier Dossier «Investissement social» et promotion de la femme

« Investissement social » et promotion


de la femme
La notion d’«investissement social» repose sur l’idée l’employabilité des chômeurs (chômeurs inscrits et béné-
que les dépenses sociales, au lieu d’être réduites à ficiaires de l’aide sociale) qui prévaut un train de mesures
alliant formation, orientation et réinsertion profession-
leur dimension purement financière, devraient en
nelle.
priorité être appréhendées en termes d’investisse- L’accès égalitaire à l’emploi se trouve au cœur des reven-
ment de longue durée dans le capital humain. La dications portées par les mouvements féministes, tant il
femme assume à cet égard une double fonction, en sa est vrai que le travail passe pour être l’un des facteurs-clés
qualité de travailleuse potentielle et en tant que mère dans la conquête de l’émancipation et de l’indépendance
financière. Dans le cadre de la présente étude1, nous nous
de futurs travailleurs.
sommes demandé, d’une part, si les investissements sociaux
prennent en compte cette revendication égalitaire en attei-
gnant le public des femmes sans emploi et en favorisant
leur accès au marché du travail, et, d’autre part, si les
mesures mises en place se traduisent, pour les personnes
concernées, par un réel gain d’autonomie. Notre enquête
se base sur six études de cas ethnographiques, ainsi que
sur des entretiens; ces derniers ont été effectués tant dans
des institutions dotées d’un pouvoir décisionnel en matière
d’investissement (un office régional de placement et un
service social). L’accent a été mis sur les personnes non
qualifiées.
Eva Nadai
Haute école spécialisée de la Suisse du Les décisions d’investissement
Nord-Ouest (FHNW) Dans une perspective économique, l’investissement se
définit comme un placement de capitaux destiné à générer
des bénéfices; par conséquent, tout acte d’investissement
Promouvoir l’emploi et stimuler la croissance économique implique la nécessité d’opérer des choix entre diverses
en insérant la population sur le marché du travail, telle est, perspectives de rendement. Transposée dans le domaine
en résumé, la visée ultime de l’investissement social. Il a de la politique sociale, cette notion n’est pas pour autant
pour objectif de développer la productivité des membres détachée d’une utilisation sélective des moyens. Chaque
de la société en les rendant capables de s’adapter aux allocation de mesures d’insertion suppose la sélection de
exigences induites par la flexibilité du marché du travail certains demandeurs d’emploi en fonction de leur renta-
et de s’assumer sur les plans économique et financier. Or, bilité en tant qu’«objets d’investissement»; et pour garan-
dans une perspective de genre, ce type de politique sociale tir le succès de l’investissement, il faut aussi déterminer la
n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes: le nature et l’ampleur des mesures envisagées. Basées sur
paradigme de l’investissement social est en effet basé sur des principes juridico-institutionnels et soumises au pou-
le modèle du travailleur adulte, en vertu duquel tout adulte voir d’appréciation des instances administratives, ces déci-
devrait s’intégrer au marché du travail pour subvenir à ses sions d’investissement procèdent d’un double filtrage.
propres besoins. L’obligation d’assumer des tâches domes-
tiques et familiales n’est dès lors plus considérée ni comme Des filtres institutionnels
un motif susceptible de légitimer un retrait du marché du La première étape qu’une telle décision est appelée à
travail ni comme une raison d’accorder aux mères une franchir est celle des dispositions légales et institution-
protection spécifique. Vu la logique qui la sous-tend, une nelles, différentes selon la politique appliquée: sur le plan
politique d’investissement social devrait prévoir aussi des communal, la décision en matière d’investissement social
mesures visant à promouvoir l’égalité des chances, de sorte incombe aux services sociaux, alors que sur le plan canto-
que les femmes puissent concilier vie familiale et vie pro- nal, c’est l’assurance-chômage qui statue sur l’octroi d’in-
fessionnelle. Mais en s’adressant en priorité à des publics
définis en fonction de déficits, l’investissement social en 1 www.pnr60.ch ➞ Projets et résultats ➞ Cluster 1 : Travail et organisa-
Suisse relève d’une conception plutôt restreinte. C’est tions ➞ Projet Nadai (HTML, 12.6.2014).

Sécurité sociale CHSS 4/2014 231


Dossier « Investissement social» et promotion de la femme

demnités journalières. Bien que les directives de la CSIAS donc proposer des mesures d’occupation non qualifiantes
définissent expressément l’aide sociale en termes d’inves- ou des cours collectifs qui ne débouchent pas sur une
tissement, les services sociaux ne disposent dans les faits qualification formelle ; la possibilité d’améliorer leurs
que de peu de moyens destinés à l’encouragement profes- chances professionnelles leur est donc refusée, et ce pro-
sionnel de leurs usagers. Aussi seule une petite minorité blème continue de toucher davantage les femmes que les
de personnes en recherche d’emploi se voit-elle proposer hommes.
une place dans un programme de réinsertion. Alors que
les programmes de formation continue font largement Les critères de rentabilité
défaut, les frais de formation ne sont pris en charge qu’à Après le crible des diverses réglementations légales, les
titre subsidiaire. L’assurance-chômage, elle, ignore la notion décisions d’investissement subissent l’épreuve de la street
d’investissement, lui préférant l’idée d’une réinsertion level bureaucracy. Par cette notion, le sociologue Michael
rapide et durable sur le marché du travail; mais elle dispose Lipsky désigne les raisons, les formes et les effets caracté-
de moyens d’investissement à la fois plus importants et risant la marge d’appréciation laissée aux instances de
mieux adaptés. Tout en finançant des programmes d’occu- l’administration publique dont les services sont définis au
pation, elle propose des mesures de formation et possède cours d’entretiens avec les usagers. Michael Lipsky a
toute une gamme d’instruments d’incitation destinés aux constaté que ces organismes contribuent, directement ou
employeurs, par exemple les allocations d’initiation au indirectement, à façonner les politiques sociales en inter-
travail – il est vrai peu utilisées. Il y a donc une différence prétant les normes politiques et légales et en régulant
non négligeable entre la situation d’un bénéficiaire de l’accès aux prestations publiques. A cet égard, les a priori
l’aide sociale et celle d’une personne pouvant faire valoir relatifs au caractère légitime ou illégitime des revendica-
son droit aux assurances sociales. tions formulées par les demandeurs d’emploi ou au carac-
Or on constate une sous-représentation des femmes, et tère adéquat ou inadéquat de leur comportement, les
plus particulièrement des ressortissantes étrangères, dans conceptions relatives à la responsabilité individuelle ou
les programmes de réinsertion financés par les budgets de l’appréciation des chances de réussite des mesures mises
l’aide sociale. Il est probable que, dans le cas de couples en œuvre jouent un rôle prépondérant.
tributaires de l’aide sociale, c’est en priorité l’employabi- Nous avons pu observer, dans le cadre de notre étude,
lité de l’homme qui fait l’objet d’un investissement, tandis que les collaborateurs des offices concernés avaient l’habi-
que la femme se voit pour l’essentiel confirmée dans son tude de classer les demandeurs d’emploi en fonction de
rôle de mère et d’éducatrice. Certes, l’assurance-chômage leur disponibilité pour le marché du travail, de la valori-
considère les demandeurs d’emploi en premier lieu sous sation possible de leur capacité de travail, et de leur com-
le double rapport de l’assujettissement à l’assurance et du portement. Parmi les indicateurs utilisés pour ce genre de
droit aux prestations; mais parce qu’elles présentent plus catégorisation figurent l’âge, le sexe, la formation, la situa-
souvent des trajectoires professionnelles discontinues et tion familiale, l’origine ethnique et l’état de santé. La dis-
plus précaires, en raison d’obligations familiales, les femmes ponibilité pour le marché de l’emploi, par exemple, est
sont, là encore, pénalisées lorsqu’elles décident de faire jugée en fonction de l’état de santé, de la nationalité ou
valoir leurs droits. Ce n’est qu’en l’absence de tels obstacles de la validité du permis de travail, de la situation familiale
structurels, et à condition d’être inscrites au chômage, et du sexe. Pour une femme – mais non pour un homme
qu’elles bénéficient des mêmes chances que les hommes –, la présence d’enfants est considérée comme un «boulet».
par rapport aux mesures d’insertion. Il faut toutefois noter Le potentiel de valorisation se déduit non seulement de
que la répartition de ces mesures reproduit les cloisonne- facteurs objectifs tels qu’un diplôme de formation ou
ments basés sur le genre qui existent dans le domaine de l’expérience professionnelle, mais également de l’âge: on
la formation et sur le marché du travail: les femmes sont considère généralement un jeune plus digne d’être sou-
encouragées dans des secteurs traditionnellement dévolus tenu dans sa recherche d’emploi qu’une personne plus
aux femmes, les hommes, dans ceux qui sont habituellement âgée. L’appréciation du comportement contribue, elle, à
réservés aux hommes. L’opportunité de dépasser les sté- formuler un pronostic quant aux chances de réussite des
réotypes de genre au moment de choisir une nouvelle démarches entreprises. C’est ici, notamment, que le critère
activité est ainsi galvaudée, comme celle d’explorer de de l’origine ethnique entre en jeu: on a en effet tendance
nouveaux horizons professionnels. à soupçonner les personnes migrantes d’entretenir, par
L’action de l’aide sociale et celle de l’assurance-chômage rapport aux pratiques et aux exigences ayant cours sur le
se cantonnent pour l’essentiel dans le domaine de l’inves- marché du travail suisse, une distance culturelle susceptible
tissement de substitution. Les mesures d’encouragement de porter préjudice à leur employabilité. Dès lors, on pri-
visent non pas à relever le degré de qualification, mais vilégie les personnes socialement et culturellement inté-
uniquement à maintenir le lien avec le marché du travail grées, proches du marché de l’emploi et libres de toute
en ne changeant rien au niveau professionnel atteint avant obligation extra-professionnelle; autrement dit, des per-
la perte de l’emploi. Les chômeurs non qualifiés se voient sonnes qui peuvent justifier d’une formation et d’une

232 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier «Investissement social» et promotion de la femme

expérience professionnelles, libres de toute entrave familiale et à généralement que le sexe n’est pas un critère de discrimination.
qui on ne saurait reprocher une étrangeté culturelle. A l’inverse, les Exception faite des difficultés de concilier vie professionnelle et vie
mères et a fortiori les femmes migrantes sont considérées sous l’angle familiale, elles ne semblent pas se soucier d’éventuelles inégalités.
de la distance qui les sépare du marché du travail. Il est vrai qu’aussi longtemps que les demandeurs d’emploi sont
considérés comme de simples individus, on ne constate aucune
Une politique d’investissement à petits pas inégalité de traitement. Mais la situation change à partir du moment
Les personnes jugées non rentables ne sont pas pour autant aban- où le facteur familial entre en jeu, et ce au détriment surtout des
données à leur sort; ce serait contraire à la logique de responsabi- femmes: dès lors que leur disponibilité pour le marché du travail
lisation qui veut que les prestations sociales soient conditionnées à n’est pas totale ou a cessé de l’être, les mères passent au rang d’ob-
des efforts de réinsertion accomplis à titre de contrepartie par les jets d’investissement de second ordre.
bénéficiaires. Ce sont parfois précisément les personnes coupées du D’une façon générale, les bénéficiaires de l’investissement social
marché du travail qui trouvent, dans une certaine mesure, un soutien sont les personnes déjà proches du marché de l’emploi. Il s’ensuit,
accru, davantage d’écoute et de disponibilité; dans ces cas, le service paradoxalement, que celles qui ne perçoivent guère le soutien qui
de conseil et d’orientation va au-delà de la simple recherche d’em- leur permettrait d’obtenir une qualification professionnelle appro-
ploi, pour inclure le développement de certaines compétences so- priée sont précisément celles qui disposent de moyens limités et
ciales élémentaires, telles que l’autoréflexion, la faculté de discer- devraient bénéficier d’un investissement élevé. C’est ainsi que les
nement et la capacité de prise de décision.Une approche de ce type personnes non qualifiées restent dans l’incapacité de combler leur
est possible grâce au mandat global confié à l’aide sociale et à ses déficit de formation: inutile, dans ces conditions, d’escompter une
programmes, qui lient étroitement intégration sociale et insertion réduction durable du risque de chômage. En revanche, dans le cadre
professionnelle – sans pour autant en faire une règle contraignante. des prestations fournies par l’aide sociale, les personnes éloignées
Dans cette optique, l’idée de promotion de l’employabilité est com- du marché du travail obtiennent, dans certains cas, davantage de
prise dans un sens très large, en tant qu’analyse critique des problèmes latitude pour faire le point sur leur situation et de temps pour réflé-
de nature sociale qui limitent la capacité d’action et la marge de chir à leur développement personnel et à leur intégration. Le fait
manœuvre des personnes concernées et font ainsi obstacle à la re- d’être encouragées à exprimer leurs aspirations professionnelles et
cherche d’emploi. de trouver un soutien pour effectuer les premières démarches en
Ce point précis est parfaitement illustré par les programmes des- vue de la réalisation de leur projet constitue, pour plusieurs des
tinés aux femmes bénéficiaires de l’aide sociale. Les programmes femmes interrogées, une expérience inédite. Les deux programmes
étudiés dans le cadre de ce travail ont pour but de conduire les spécifiquement destinés aux femmes proposent en outre un travail
participantes vers le marché de l’emploi par le biais d’une approche ciblé sur le renforcement de la confiance en soi. Loin d’être la règle,
indirecte et progressive. Pour avoir été découragées tôt dans leur un programme de soutien aussi intensif et individualisé continue
vie et bridées dans leur épanouissement personnel, ces femmes, telle toutefois d’être une exception.
est du moins la perception dominante parmi les conseillères sociales, Tout compte fait, la pratique de l’investissement social n’apporte
manquent fondamentalement de confiance en elles. C’est la raison que des solutions partielles et limitées aux problèmes spécifiques
pour laquelle ces programmes visent en priorité l’élaboration gra- que rencontrent les femmes sans emploi tout au long du processus
duelle d’une perspective de développement à plus ou moins longue de constitution de leur capital humain. Alors que les efforts se
échéance. Lorsque les femmes sont jeunes, l’opportunité de rattraper concentrent sur le développement individuel, rien n’est fait ni pour
une formation scolaire ou professionnelle est envisagée. L’un des corriger les différences structurelles qui marquent, sur le marché de
deux programmes examinés se propose d’ailleurs explicitement l’emploi, les potentiels d’investissement propres à l’un et à l’autre
d’apporter à ses clientes (de jeunes mères non qualifiées) un soutien sexe ni pour lever les obstacles qui empêchent de concilier le travail
actif dans la recherche d’une place d’apprentissage. De façon géné- et la vie de famille. Tant qu’elles ne peuvent pas travailler à temps
rale, ce type d’approche encourage les femmes à partir à la découverte plein et achever une formation professionnelle, ce sont surtout les
de leur potentiel et de leurs besoins cachés. Or, concilier l’idéal de mères de famille monoparentale qui risquent très probablement de
l’empowerment avec la nécessaire adaptation à ce qui est effective- rester tributaires de l’aide sociale pour compléter leur revenu, même
ment possible s’avère un véritable exercice d’équilibrisme. Si elles si elles parviennent à accéder au marché de l’emploi. Dans ces
possèdent une certaine marge d’interprétation dans la mise en appli- conditions, l’insertion professionnelle équivaut simplement au pas-
cation de leur mandat, les responsables de ces programmes doivent sage d’une situation de dépendance complète à une existence de
finalement viser l’insertion professionnelle. Aussi leurs bénéficiaires travailleur pauvre (working poor), aggravée par les multiples diffi-
sont-elles censées se plier à la norme moderne de la mère active, cultés liées à la précarité de l’emploi et par le poids des obligations
qui assume ses responsabilités en tant que soutien de famille et qui familiales.
accepte de confier, au moins partiellement, la garde de ses enfants
à des tierces personnes.
Prof. Dr. Eva Nadai, chargée d’enseignement à l’Institut Professionsforschung
Un bilan und kooperative Wissensbildung, Haute école de travail social, Haute école
A l’heure actuelle, les institutions chargées de l’insertion profes- spécialisée de la Suisse du Nord-Ouest.
sionnelle de personnes sans emploi et sans revenus considèrent Mél: eva.nadai@fhnw.ch

Sécurité sociale CHSS 4/2014 233


dossier Dossier L’égalité entre valeur revendiquée et réalité inachevée

L’égalité entre valeur affichée et réalité


inachevée
Les programmes nationaux de recherche sont un approfondies et livrent de nouvelles pistes d’action. Nous
instrument du Conseil fédéral, qui ont pour but devons disposer de connaissances actualisées et nous
assurer qu’aucun angle mort ne subsiste, dans les faits
d’apporter des contributions scientifiques en vue de
comme dans l’interprétation.
résoudre des problèmes d’actualité de la société et Quelles sont les informations fournies par le PNR 60?
de l’économie qui sont d’importance nationale et qui Que pouvons-nous en retenir du point de vue de la poli-
présentent une certaine urgence. L’égalité entre les tique fédérale de l’égalité?
femmes et les hommes relève clairement de ce cadre.
Des constats paradoxaux

Tout d’abord, plusieurs projets du PNR 60 mettent en


évidence un paradoxe: tandis que l’égalité est une valeur
largement partagée, les pratiques demeurent inégalitaires.
Il y a donc une évolution certaine, mais celle-ci ne débou-
chant pas sur une concrétisation, ce qui complexifie la
tâche. En effet, tandis que certaines personnes ne voient
pas ou plus l’utilité d’une action forte, puisque l’égalité
est une valeur reconnue, d’autres personnes se sentent
injustement prises à partie, lorsque l’on considère que
Sylvie Durrer leur pratique ne correspond pas à cette valeur d’égalité,
Bureau fédéral de l’égalité entre que pourtant elles partagent. Cela est notamment le cas
femmes et hommes du corps enseignant ou des employeurs.
En outre, ce sentiment que l’égalité est acquise aboutit
aussi au fait que les réformes, qu’elles touchent aux assu-
Année après année, les statistiques nous montrent que rances sociales ou à la fiscalité, n’intègrent pas les savoirs
l’égalité n’est pas réalisée. La dernière, particulièrement spécialisés en matière d’égalité ou de genre, en particulier
décevante, porte sur l’inégalité salariale – 18,9 % en 2012 parce que les responsables de ces processus pensent
vs 18,4 % en 20101 – ce qui constitue un problème pour détenir la sensibilité et le savoir nécessaires.
les femmes d’abord, mais aussi pour leur couple et leur Concernant ce point, une loi existe cependant au niveau
famille et leurs assurances sociales à court et long termes. fédéral. Lorsque le Conseil fédéral soumet au Parlement
L’importance de l’égalité pour assurer à la Suisse un un projet de loi, la loi sur l’Assemblée fédérale lui fait
développement durable occupe une bonne place dans le obligation d’expliquer dans son message les éventuelles
programme de législature (2011-2015)2 : conséquences que le projet pourrait entraîner du point
• La cohésion sociale est renforcée et les valeurs com- de vue de l’égalité3. En 2013, en réponse à une question
munes sont promues, ce qui passe par un encourage- de la conseillère nationale Leutenegger Oberholzer4, le
ment de la conciliation entre vie familiale, activité
professionnelle ou formation (no 17). 1 www.bfs.admin.ch ➞ Thèmes ➞ 03 – Travail, rémunération ➞ Salaires
• Le financement des assurances sociales est consolidé et revenus du travail.
et assuré à long terme (no 19). 2 L’ensemble des informations relatives au programme de législature
2011-2015 sont disponibles sur le site de la Chancellerie fédérale: www.
• L’égalité des chances est améliorée dans les secteurs bk.admin.ch ➞ Thèmes ➞ Planification politique ➞ Programme de la
suivants : rémunération, formation MINT (mathéma- législature 2011-2015 (PDF). Voir en particulier la brochure «Programme
de la Législature de 2011 à 2015 » avec les débats parlementaires du
tiques, informatique, sciences naturelles et technique), programme.
prévention de la violence domestique, présence des 3 Loi sur l’Assemblée fédérale (LParl) du 13 décembre 2002, art. 141
femmes dans les postes de direction des organisations al. 2, lettre i – RO 2003 3543 : « Dans son message, le Conseil fédéral
motive son projet d’acte et en commente au besoin les dispositions.
publiques et parapubliques (no 27). D’autre part, dans la mesure où des indications substantielles peuvent
être fournies, il fait notamment le point sur : (…) les conséquences que
le projet aura sous l’angle de l’égalité entre hommes et femmes. »
Afin d’atteindre ces objectifs, nous avons besoin que les 4 www.parlement.ch ➞ Base de données des objets parlementaires ➞
chercheuses et les chercheurs procèdent à des analyses Cuvia Vista ➞ no d’object 13.1011.

234 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Dossier L’égalité entre valeur revendiquée et réalité inachevée

© Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes

Conseil fédéral a d’ailleurs accepté d’étudier l’améliora- types limitatifs dès le jardin d’enfants, les jeunes hommes
tion de la mise en œuvre de cette disposition légale. Au sont moins nombreux à obtenir une maturité académique,
regard des résultats du PNR 60, on peut se demander s’il les employés peuvent aussi subir du harcèlement sexuel
ne serait pas judicieux que les cantons prennent des dis- dans les entreprises, les mesures de conciliation se foca-
positions analogues. lisent sur les jeunes mères.
Deuxièmement, les pratiques inégalitaires ne sont tou- Quatrièmement, on observe que, bien que les femmes
jours pas en voie de disparition et commencent tôt: dès rencontrent d’indéniables succès tout au long de leur
la garderie pour les stéréotypes, dès le premier emploi parcours scolaire, un grand nombre d’entre elles tend à
pour la rémunération. Une des recherches a fait état d’une opter pour des formations ou des secteurs professionnels,
différence salariale de 7 % soit 278 francs par mois entre non pas en fonction de leurs intérêts ou compétences,
les hommes et les femmes au niveau de leur premier mais en fonction des possibilités de conciliation, réelles
emploi, différence pour laquelle aucune explication n’a ou présumées.
pu être trouvée. Cinquièmement, on constate que certains atouts de
Troisièmement, l’inégalité ne concerne pas que les notre pays, comme la formation duale, peuvent aussi être
femmes, loin s’en faut : les garçons sont l’objet de stéréo- des pièges pour ce qui concerne l’égalité. En effet, pour

Sécurité sociale CHSS 4/2014 235


Dossier L’égalité entre valeur revendiquée et réalité inachevée

une grand partie de la population, le choix de l’appren- de vie. Les femmes et les hommes, les individus et les
tissage intervient à un âge où il est difficile de s’émanci- couples, qu’ils soient mariés ou non, doivent pouvoir
per des stéréotypes de sexe, que l’on soit une fille ou un assumer aussi bien un engagement professionnel que la
garçon. Dès lors on rencontre peu de filles dans les pro- prise en charge de leurs enfants ou de leurs proches. Il
fessions techniques et peu de garçons dans les domaines en va non seulement du bon fonctionnement de la cellule
du social ou de la santé. familiale à court terme que de la cohésion de notre so-
Il en va de même pour le temps partiel, il constitue une ciété et de sa compétitivité économique à long terme.
force dans la mesure où il permet aux mères en particu- En effet, de nos jours, dans la plupart des pays les plus
lier de rester présentes sur le marché du travail, ce qui se développés, la possibilité de concilier travail et famille
traduit par un taux d’activité parmi les plus élevés du apparaît comme un facteur clé de la vitalité familiale et
monde. Simultanément, il limite l’autonomie écono- de la bonne santé économique. Alors qu’au début des
mique des femmes à court et long termes et prétérite leur années 1980, la fécondité était la plus haute dans les pays
accès à certains postes et fonctions, d’encadrement notam- développés ayant les taux d’emploi féminin les plus bas,
ment, sans compter qu’il est difficilement accessible à c’est l’inverse aujourd’hui: elle est la plus haute là où les
toutes les catégories de salaires. femmes sont les plus actives professionnellement. Les
Toutefois, à côté de ces constats décevants, le PNR 60 pays scandinaves sont une bonne illustration de ce nou-
recèle diverses observations encourageantes. Ainsi, tandis vel état de fait.
que les garçons sont nettement moins nombreux que les
filles à prendre le chemin de la maturité académique à
l’issue de l’école obligatoire, une étude longitudinale L’égalité non pas un problème de plus,
montre que, sept ans plus tard, ils sont aussi nombreux mais un élément de la solution
que les filles dans la formation tertiaire, ce qui donne à
penser d’une part qu’ils ont bien compris les enjeux de la Lors de la rencontre de la Commission de la condition
formation et d’autre part que les passerelles fonctionnent. de la femme, qui a lieu chaque année au siège onusien
De même, on observe que les garderies n’ont pas de New York, les pays membres sont invités à faire le
seulement un effet sur le travail des mères, mais qu’elles bilan de leur action dans le domaine de l’égalité. Le mes-
participent d’un fonctionnement de couple plus égali- sage récurrent des pays scandinaves, particulièrement
taire. avancés en la matière, est riche d’enseignement. On peut
le résumer en substance de la façon suivante : « Notre
pays ne dispose pas de grandes ressources naturelles.
Des constats et des recommandations Notre principale richesse réside dans notre population
en partie déjà connus locale. Il nous faut donc impérativement en prendre soin.
Cela signifie trois choses: veiller tout d’abord à sa bonne
A partir de là, quels sont les grands enseignements que santé, ensuite lui assurer une éducation de qualité, enfin
l’on peut retirer de ce programme de recherche? Tout en faire bénéficier également les femmes et les hommes,
d’abord, que l’égalité ne progresse pas assez vite et que parce que nous n’avons pas les moyens de nous passer
les pistes d’action sont en grande partie celles qui sont de la force de travail et de l’intelligence de la moitié de
identifiées depuis longtemps: lutte contre les stéréotypes la population.»
dès le plus jeune âge, encouragement à la transparence Ce message va dans le sens des conclusions du PNR
salariale et mise en place de mécanismes de contrôles, 60, qui montre que l’égalité ne constitue pas un problème
intégration des connaissances scientifiques et surtout de plus mais offre une partie de la solution à un meilleur
renforcement de la volonté des instances dirigeantes, fonctionnement de la société suisse.
économiques et politiques.
De tels constats pourraient paraître évidents, donc
inutiles. Il n’en est rien. Il est indispensable de s’assurer,
à intervalle régulier, de l’actualité des représentations et
des mesures, afin de les adapter si nécessaire. Il s’agit Sylvie Durrer, Dr ès lettres, directrice du Bureau fédéral de l’égalité
aujourd’hui de mettre l’accent sur la prise en compte de entre femmes et hommes.
la diversité des projets et de la spécificité de chaque étape Mél: sylvie.durrer@ebg.admin.ch

236 Sécurité sociale CHSS 4/2014


politique sociale Politique sociale Prestations complémentaires 2013

Prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI :


faible croissance des dépenses
Les dépenses au titre des prestations complémentaires (PC) ont aug- Les besoins dépendent fortement
menté de 2,1% en 2013. Ce taux de croissance est l’un des plus faibles de l’âge. 60 à 70 % des personnes
jeunes qui bénéficient d’une rente AI
enregistrés depuis une bonne trentaine d’années. Les prestations, soit
ont besoin de PC. Ces pourcentages
4,5 milliards de francs au total, correspondent à 12% de la somme des élevés sont dus au fait que les jeunes
rentes AVS et AI versées en Suisse, un pourcentage qui n’a que peu invalides n’ont pas exercé d’activité
varié ces dernières années. Octroyées sur la base de besoins calculés lucrative, ou n’en ont exercé une que
individuellement, les PC garantissent efficacement le minimum vital pendant peu de temps, et qu’ils ne
touchent donc que de petites rentes.
aux bénéficiaires d’une rente AI ou AVS domiciliés en Suisse.
Ils n’ont pratiquement aucune fortune
et, par conséquent, aucun produit de
la fortune. De plus, ils vivent plus sou-
vent dans un home, où ils doivent faire
face à des dépenses plus élevées. Ce
groupe de bénéficiaires dépend long-
temps des PC. Plus l’âge avance, plus
la proportion de bénéficiaires de PC
diminue. Les assurés plus âgés au
moment de la survenance de l’invali-
dité se trouvent dans une meilleure
situation financière, ce qui fait dimi-
Urs Portmann nuer progressivement le taux de béné-
Office fédéral des assurances sociales

Evolution du taux de bénéficiaires: Dépenses des PC de 4,5 milliards de francs T1


16 % des bénéficiaires d’une rente Dépenses des PC par branche d’assurance, 2001 à 2013
touchent des PC
Les PC sont versées aux bénéfi- Année Dépenses des PC en mio de fr. Variation en % à l’année
ciaires d’une rente AVS ou AI qui ne par an précédente
peuvent obtenir un revenu minimal Total PC à l’AVS PC à l’AI Total PC à l’AVS PC à l’AI
– établi sur la base d’un calcul des
2001 2 351,2 1 442,4 908,8 2,8 0,1 7,3
besoins – sans prestations supplémen-
taires. 300 700 personnes touchaient 2002 2 527,8 1 524,8 1 003,0 7,5 5,7 10,4
des PC fin 2013, soit 16 % des bénéfi- 2003 2 671,3 1 572,6 1 098,6 5,7 3,1 9,5
ciaires d’une rente AVS ou AI domi- 2004 2 847,5 1 650,9 1 196,5 6,6 5,0 8,9
ciliés en Suisse.
2005 2 981,7 1 695,4 1 286,3 4,7 2,7 7,5
43 % des rentiers AI étaient tribu-
taires des PC. Ce pourcentage a aug- 2006 3 080,3 1 731,0 1 349,3 3,3 2,1 4,9
menté ces dernières années, car, en 2007 3 246,2 1 827,1 1 419,2 5,4 5,5 5,2
dépit de la baisse de l’effectif des 2008 3 679,8 2 071,7 1 608,1 13,4 13,4 13,3
rentiers AI l’effectif des bénéficiaires
2009 3 905,7 2 209,7 1 696,1 6,1 6,7 5,5
de PC à l’AI a légèrement progressé.
En revanche, les besoins sont restés 2010 4 074,7 2 323,6 1 751,1 4,3 5,2 3,2
relativement constants ces dernières 2011 4 275,9 2 439,0 1 836,9 4,9 5,0 4,9
années pour les bénéficiaires d’une 2012 4 435,9 2 524,5 1 911,4 3,7 3,5 4,1
rente de vieillesse : chez eux, la pro-
2013 4 527,9 2 604,6 1 923,2 2,1 3,2 0,6
portion s’établit aux alentours de
12 %. Source: Statistique des PC, OFAS.

Sécurité sociale CHSS 4/2014 237


Politique sociale Prestations complémentaires 2013

des PC à l’AVS, ce qui ne s’était que


PC à l’AVS et PC à l’AI: l’écart se réduit jusqu’en 2006, puis grandit à G1 rarement produit auparavant.
nouveau depuis 2008 – dépenses des PC par branche d’assurance, 2001 à 2013
Financement des soins
3000,0
Dépenses des PC en mio de francs

Le nouveau régime de financement


2500,0 des soins est entré en vigueur début
2011. Il prévoit un plafonnement des
2000,0 frais pouvant être facturés à l’assuré
pour les soins qui ne sont pas pris en
1500,0

1000,0

500,0

0,0 Qu’entend-on par prestations


2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
complémentaires ?
PC à l‘AVS PC à l‘AI
Source: Statistique des PC, OFAS.
Les prestations complémentaires (PC) sont une
tâche dévolue à la fois à la Confédération et aux
ficiaires de PC, qui n’est plus que de Evolution des finances: faible
cantons. Les PC à l’AVS et à l’AI sont allouées à
28 % à l’âge de la retraite. croissance des dépenses
des personnes bénéficiant d’une rente AVS ou
La tendance inverse s’observe dans Les PC versées en 2013 ont atteint
AI2 lorsqu’elles sont domiciliées en Suisse et que
l’assurance-vieillesse: 8 % seulement 4,5 milliards de francs, ce qui repré-
leur revenu ne suffit pas à couvrir leurs besoins
des nouveaux rentiers AVS – dont la sente une augmentation de 2,1% par
vitaux. Le droit à ces prestations d’assurance
moitié touchaient auparavant une rapport à l’année précédente, soit le
sous condition de ressources est garanti par
rente de l’AI – perçoivent des PC, 2e taux de croissance le plus bas depuis
la loi. On distingue deux types de PC: les PC pério-
contre 24 % des rentiers de 90 ans. Le 1980 (cf. tableau T1 et graphiques G1
diques versées chaque mois, ainsi que les PC ser-
taux de PC augmente donc avec l’âge: et G2). La faiblesse de cette croissance
vant à rembourser des frais de maladie et d’invali-
plus une personne est âgée, plus elle tient à trois raisons principales : la
dité non couverts. Les PC périodiques sont
risque d’être tributaire des PC. Cette baisse de l’effectif des rentiers dans
égales à la différence entre les dépenses reconnues
tendance est liée à la probabilité crois- l’assurance-invalidité, le nouveau ré-
et le revenu déterminant. Les bases de calcul dif-
sante d’entrer dans un home et aux gime de financement des soins et la
fèrent selon que le bénéficiaire de PC vit à la mai-
frais que cela entraîne, des frais que limitation des loyers maximaux pris
son ou en home. Les PC périodiques sont versées
de nombreuses personnes ne peuvent en compte dans le calcul des PC.
mensuellement et représentent 91% des dépenses
plus assumer par leurs propres
globales au titre des PC. Les autres PC servent à
moyens. Assurance-invalidité
couvrir les frais de maladie et d’invalidité.
Différentes mesures ont été instau-
rées pour consolider la situation finan- La contribution de la Confédération aux PC est
cière de l’assurance-invalidité. Ainsi, déterminée par le minimum vital. Indépendam-
le nombre de nouvelles rentes est en ment de la capacité financière d’un canton, la
baisse depuis 2004 : il a diminué de Confédération prend en charge 5/8 des frais servant
moitié entre 2003 et 2013. En outre, à couvrir le minimum vital3, celui-ci correspondant
l’effectif des rentes AI recule depuis à l’ensemble des PC périodiques des personnes
2006. Le nombre de bénéficiaires de demeurant à domicile. En ce qui concerne les pen-
1 Sans les effets imputables à l’introduction de PC à l’AI augmente encore, mais plus sionnaires de home, un calcul ad hoc sert à déter-
la RPT en 2008. beaucoup. Cette évolution se traduit miner le pourcentage du minimum vital. Il consiste
2 Les personnes bénéficiant d’une allocation par un ralentissement manifeste de la à établir le besoin en PC périodiques de la per-
pour impotent ou d’indemnités journalières de
l’AI ont aussi droit aux PC. Les personnes qui croissance des dépenses. Alors que les sonne concernée au cas où elle demeurait à domi-
ne peuvent pas prétendre à une rente AVS ou PC à l’AI affichaient une croissance cile. La part qui dépasse la couverture des besoins
AI parce qu’elles n’ont pas cotisé à ces assu-
rances ou qu’elles ne l’ont pas fait assez long- annuelle de 8% en moyenne jusqu’en vitaux à domicile, considérée comme frais supplé-
temps ont droit à des PC dans certaines condi- 2007, cette hausse n’est plus que de 4% mentaires imputables au séjour en home, est entiè-
tions.
3 Avant l’entrée en vigueur de la RPT en 2008, environ depuis lors1. Ces dernières rement à la charge des cantons. En outre, les can-
la contribution de la Confédération tenait années, à une exception près, cette tons assument les PC servant à financer les frais de
compte de l’indice de capacité financière des
cantons. Elle représentait 10 à 35% des dé- progression était même inférieure à maladie et d’invalidité.
penses des cantons au titre des PC. l’augmentation des dépenses au titre

238 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Politique sociale Prestations complémentaires 2013

charge par l’assurance-maladie. Ce des PC freine lui aussi la croissance Pour les couples et les familles, la pro-
plafond est égal à 20% du tarif maxi- des dépenses. De plus en plus de béné- portion de bénéficiaires dont le loyer
mal de l’assurance obligatoire des ficiaires de PC ont des frais de loyer atteint ou dépasse le plafond est
soins, soit actuellement 650 francs par qui dépassent le montant maximal d’autant plus grande que le cas com-
mois (ou 21 fr. 60 par jour). Dans leur pris en compte, de sorte que les PC prend de personnes. En 2001, le pla-
mise en œuvre du nouveau régime, les ne couvrent plus pour eux l’intégra- fond était atteint dans 16 % des cas
cantons ont également adapté les PC lité des dépenses liées au loyer. PC de deux personnes et 26% des cas
en exploitant leur marge de manœuvre Le loyer – à l’instar des besoins PC de trois personnes. Ces pourcen-
pour le financement des frais de home. vitaux et du montant forfaitaire pour tages n’ont cessé d’augmenter depuis:
La plupart ont choisi de dissocier les la prime d’assurance-maladie – consti- en 2013, le montant maximal a été pris
PC du financement des soins tel qu’il tue l’un des principaux postes de en compte pour 27% des personnes
est défini par la loi sur l’assurance- dépenses pour les bénéficiaires de PC vivant seules, 32% des cas PC de deux
maladie (LAMal). Depuis lors, les vivant à domicile. Il constitue un poste personnes et 45% des cas PC de trois
cantons ne prennent plus en considé- à part dans le calcul des PC. C’est le personnes. Le loyer effectif dépasse
ration, dans le calcul des PC indivi- montant effectif du loyer brut qui est souvent le montant maximal pris en
duelles, ni les soins pris en charge par pris en compte, à concurrence du compte, de sorte que les PC couvrent
l’assurance obligatoire ni la part de montant maximal. Le droit en vigueur de moins en moins souvent les frais
soins comprise dans la taxe de home. prévoit deux plafonds en matière de de loyer de manière appropriée. Le
Ce transfert des coûts s’est traduit par loyer, à savoir 1100 francs par mois Conseil fédéral propose donc de rele-
un ralentissement de la croissance des pour les personnes seules et 1250 ver les loyers maximaux. Il prévoit en
dépenses au titre des PC pour les pen- francs pour les couples et les familles. outre de mieux tenir compte de la
sionnaires de home depuis 2011. Ces plafonds n’ont plus été adaptés taille de la famille et entend opérer
depuis 2001. A l’époque, le loyer effec- une distinction entre les grands
Loyers maximaux tif de 11 % des bénéficiaires de PC centres, les villes et la campagne, afin
Le plafonnement du montant des vivant seuls atteignait ou dépassait le de prendre en considération les diffé-
loyers pris en compte dans le calcul montant maximal pris en compte. rences de charge locative.4

Depuis 2007, les dépenses des PC à l’AI progressent généralement moins que celles des PC à l’AVS G2
Dépenses des PC par branche d’assurance, variation par rapport à l’année précédente en %, 2001 à 2013
16,0

14,0

12,0
Variations en %

10,0

8,0

6,0

4,0

2,0

0,0
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

PC à l‘AVS PC à l‘AI
Source: Statistique des PC, OFAS.

Sécurité sociale CHSS 4/2014 239


Politique sociale Prestations complémentaires 2013

Augmentation des cas PC avec prise en compte du loyer maximal G3


Pourcentage de cas PC avec prise en compte du loyer brut maximal, en fonction du nombre de personnes par cas, 2001 à 2013
50,0

45,0

40,0

35,0
Pourcentage en %

30,0

25,0

20,0

15,0

10,0

5,0

0,0
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Cas avec 1 personne Cas avec 2 personnes Cas avec 3 personnes
Source: Statistique des PC, OFAS.

Fin 2013, le loyer mensuel brut des la péréquation financière et de la ré- aux frais d’administration incombant
personnes seules bénéficiaires de PC partition des tâches entre la Confé- aux cantons pour le calcul et le ver-
était de 900 francs en moyenne. Il était dération et les cantons (RPT) en 2008, sement des PC périodiques. L’an der-
de 1 100 francs pour les cas PC de la contribution de la Confédération nier, cette contribution s’est élevée à
deux personnes et de 1 200 francs pour aux PC est passée de 0,7 à 1,2 milliard 35 millions de francs.
les cas PC de trois personnes. On de francs, ce qui représente une aug-
comptait 200 800 cas PC concernant mentation de 61,5%. Aujourd’hui, la
des bénéficiaires vivant à domicile, ce Confédération assume environ 30% Dr. phil. Urs Portmann, secteur Statistiques,
qui représente près de trois quarts des des dépenses au titre des PC (soit 1,3 domaine Mathématiques, analyses et sta-
cas, tandis que les autres étaient pen- milliard), contre 22% précédemment. tistiques, OFAS.
sionnaires de home. Elle fournit en outre une contribution Mél: urs.portmann@bsv.admin.ch
Les PC sont financées par la Confé-
dération, les cantons et certaines com-
munes, au moyen des recettes fiscales.
Elles sont versées par les cantons.
Avec l’introduction de la réforme de

4 Cf. Schubarth, Katharina, « Relèvement des


loyers maximaux pris en compte pour le calcul
des prestations complémentaires», dans Sécu- Statistique des prestations complémentaires
rité sociale CHSS no 2, 2014, pp. 97 ss ; projet
mis en consultation : Rapport explicatif sur la à l’AVS et à l’AI, 2013
modification de la loi fédérale sur les presta-
tions complémentaires à l’AVS/AI (LPC); loyers
maximaux à prendre en compte, [Berne 2014]: Numéro de commande 318.685.14f (édition française)
www.ofas.admin.ch ➞ Actualité ➞ Informa- 318.685.14d (édition allemande)
tions aux médias ➞ Relèvement du loyer
maximal pour le calcul des prestations com- OFCL, Diffusion des publications fédérales, 3003 Berne
plémentaires (12.2.2014) ➞ Projet mis en Mél: verkauf.zivil@bbl.admin.ch
consultation PC Loyers maximaux (PDF, Internet: www.pc.bsv.admin.ch
17.6.2014).

240 Sécurité sociale CHSS 4/2014


politique sociale Politique sociale Ratification de la Convention de l’ONU sur le handicap

Convention de l’ONU relative aux droits des personnes


handicapées: état des lieux et mesures à prendre
La Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées que son propos est centré sur les capa-
est entrée en vigueur, pour la Suisse, en mai 2014. Ce traité, par lequel cités et les exigences des personnes
en situation de handicap, ainsi que sur
la Suisse s’engage à respecter dans toute leur étendue les droits des
leur contribution à la diversité de
personnes en situation de handicap, offre à la politique suisse de l’humanité: l’accent n’est donc pas mis
l’égalité un précieux outil d’orientation. sur le handicap et les droits des han-
dicapés, mais sur les personnes et les
droits humains. Elle concrétise les
droits universels de l’homme en pré-
cisant qu’ils s’appliquent aux per-
sonnes en situation de handicap.
Une des grandes qualités de la
convention est de montrer clairement
comment cette haute exigence peut
être satisfaite et dans quels domaines
des mesures restent à prendre. Elle le
fait par exemple en ce qui concerne
l’accès sans entraves aux bâtiments,
aux infrastructures et aux services, la
reconnaissance devant la loi, le libre
choix du mode de vie, le respect du
Martina Pezzati Andreas Rieder domicile et de la famille, la formation,
Bureau fédéral de l’égalité pour les personnes handicapées la santé ou encore le travail et l’em-
ploi.

Plus d’un milliard d’êtres humains sous le mot d’ordre «Nothing about
vivent avec une forme ou l’autre de us without us!» («Rien de ce qui nous La convention montre la voie
handicap1. Leurs conditions de vie concerne ne doit se décider sans à suivre et dicte la cadence
sont inférieures à la moyenne, et leur nous »), avec une forte participation
participation à la vie publique, sociale de la société civile, et en particulier La convention indique d’abord la
et économique est limitée. Cela tient de nombreux professionnels en situa- direction à suivre. En effet, la plupart
aussi à des préjugés, à des discrimina- tion de handicap. Adoptée le 13 dé- de ses dispositions n’accordent pas
tions et à une reconnaissance insuffi- cembre 2006 par l’Assemblée générale directement des droits, mais com-
sante de leurs besoins. La Convention des Nations unies, la convention est mencent par rappeler les législateurs
de l’ONU relative aux droits des per- entrée en vigueur après avoir été rati- nationaux à leurs obligations. Mais
sonnes handicapées agit contre cette fiée par vingt Etats, le 3 mai 2008. A par ses prescriptions concrètes con-
mise à l’écart. Elle expose clairement fin juin 2014, elle comptait 147 Etats cernant son application et le suivi au
que les personnes en situation de han- signataires. niveau national, la convention joue
dicap ont droit sans restriction au aussi un rôle de chef d’orchestre.
respect de leurs droits humains et tire Ainsi, elle invite les Etats à mettre en
un trait sur une politique qui voyait «It’s about ability! » place des points de contact, à assurer
d’abord en elles des patients ou des la coordination des mesures prises, à
cas sociaux. Les Nations unies accordent une surveiller l’application de la conven-
La genèse de la convention illustre place importante à la Convention sur tion, cela toujours en impliquant la
de façon exemplaire ce changement le handicap. Ainsi, elle est accessible société civile, et notamment les per-
de paradigmes. Elle a été élaborée, sur le site de l’ONU non seulement sonnes en situation de handicap et les
dans les langues officielles, mais aussi organisations qui les représentent. Les
1 World Report on Disability 2011 (OMS, Banque en version large vision et en braille. Etats signataires doivent rendre pé-
mondiale), pp. 19 ss. Mais ce qui la distingue surtout, c’est riodiquement rapport au Comité de

Sécurité sociale CHSS 4/2014 241


Politique sociale Ratification de la Convention de l’ONU sur le handicap

l’ONU pour les droits des personnes donné le branle à d’autres mesures, tonales et fédérale. Une perspective
handicapées. Ce dernier reçoit égale- en particulier dans le domaine des globale est en effet essentielle pour
ment les recours présentés par des communications (radio et télévision, un respect concret des droits des per-
ressortissants des Etats qui ont signé télécommunications). Des jalons es- sonnes en situation de handicap, vu
non seulement la convention, mais sentiels ont été posés dans le droit des la portée générale de la convention,
aussi le protocole facultatif. enfants et des adultes, avec la mise en qui touche tous les domaines et vise
place d’une curatelle qui permet des la vie de tous les jours.
solutions taillées sur mesure et laisse La convention parviendra-t-elle à
Importance de la convention aux individus un maximum d’autono- donner de nouvelles impulsions à la
pour la Suisse mie, ainsi que dans les assurances politique suisse de l’égalité, ou faudra-
sociales (encouragement de l’inser- t-il encore prendre d’autres mesures
La Suisse a été, le 15 avril 2014, le tion professionnelle, contribution matérielles ou institutionnelles et,
145e Etat à adhérer à la convention. d’assistance). Le système éducatif a dans l’affirmative, de quelle nature?
Un mois plus tard, celle-ci est entrée lui aussi connu un changement de cap, On le saura au plus tard en mai 2016,
en vigueur pour notre pays. Matériel- avec un recours accru à la scolarisa- date à laquelle la Suisse doit avoir
lement, cela n’a pas changé grand- tion intégrée; il en va de même pour rendu son rapport au Comité de
chose : tant les obligations internatio- l’intégration sociale, dans le droit fil l’ONU pour les droits des personnes
nales déjà contractées par la Suisse de la RPT. handicapées. On en attend le résultat
que le droit national sur l’égalité pour En adhérant à la convention, la avec impatience!
les personnes handicapées vont dans Suisse souligne sa ferme volonté de
la même direction. Ainsi, la loi sur poursuivre dans la voie où elle s’est
l’égalité pour les handicapés (LHand) engagée. La convention peut ici Martina Pezzati, Master of Arts,
de 2004 a créé des conditions impor- contribuer à la pérennisation de l’éga- stagiaire BEPH.
tantes pour leur participation à la vie lité pour les personnes en situation de Mél: Martina.Pezzati@gs-edi.admin.ch
sociale en amenant des améliorations handicap: couvrant tous les domaines
dans l’accès à l’environnement de la vie, elle permet une vue d’en-
construit, aux transports publics et semble qui manque au droit national, Andreas Rieder, Dr. iur., directeur du BEPH.
aux services. La LHand a également lequel comprend les législations can- Mél: Andreas.Rieder@gs-edi.admin.ch

© Bureau fédéral de l’égalité pour les personnes handicapées

242 Sécurité sociale CHSS 4/2014


assurance-invalidité Assurance-invalidité Qualité de la fourniture d’appareils auditifs

Evaluation de la qualité de la fourniture


d’appareils auditifs
Le mode de financement des appareils auditifs dans l’AI et l’AVS a d’établir une comparaison de la four-
changé le 1er juillet 2011: un système forfaitaire est venu remplacer niture d’appareils auditifs sous l’an-
cien système et sous le nouveau sys-
le système tarifaire à trois échelons. Une étude commandée par l’OFAS
tème. L’enquête a été menée en deux
a permis d’évaluer dans quelle mesure ce changement a influencé la temps : au premier semestre 2011,
qualité de la fourniture d’appareils auditifs. Elle a également analysé c’est-à-dire le dernier semestre durant
les différences dans les comportements d’achat et l’ampleur des lequel la fourniture d’appareils audi-
services fournis. tifs était encore régie par l’ancien
système, et au premier semestre 2012,
soit le second semestre au cours du-
quel le nouveau système forfaitaire
était appliqué. Au total, 2459 per-
sonnes y ont pris part, dont 1176 ayant
reçu leur appareil sous l’ancien sys-
tème tarifaire.
Pour chacune des périodes d’en-
quête, les données recueillies auprès
des assurés ont été analysées en paral-
lèle avec des données de facturation.
Au terme de cette analyse, des entre-
tiens ont eu lieu avec des experts pour
discuter de certains résultats et pour
en valider ou compléter l’interpréta-
Monika Sander Martin Albrecht tion.
IGES Institut

Résultats

Contexte conventions tarifaires, le montant for-


faitaire n’est pas lié au niveau de perte Pas encore de renforcement du
L’assurance-invalidité (AI) et l’as- auditive. L’expertise finale par un pouvoir de décision des assurés
surance-vieillesse et survivants (AVS) médecin ORL chargé de contrôler la Les résultats de l’enquête n’in-
fournissent une contribution finan- qualité de la prestation d’adaptation diquent pas jusqu’à présent un ren-
cière à l’approvisionnement des assu- est également abandonnée. Dans le forcement du pouvoir de décision
rés en appareils auditifs. Ces deux nouveau système, les appareils audi- des assurés. Ces derniers n’ont pas
assurances ont récemment modifié tifs peuvent aussi être achetés auprès encore tiré profit des options plus
leur système de financement des ap- de pharmacies et de drogueries, voire nombreuses qui leurs sont offertes ni
pareils auditifs. Le système tarifaire à à l’étranger, à condition de figurer sur de l’extension de leur marge de ma-
trois échelons utilisé jusqu’au 30 juin la liste des appareils homologués par nœuvre. Au contraire, certains indica-
2011 et considéré comme étant de l’Office fédéral des assurances sociales teurs utilisés signalent plutôt une
bonne qualité, mais trop coûteux en (OFAS). évolution inverse. On constate, par
comparaison internationale1, a été exemple, que les acheteurs ont moins
remplacé par un système forfaitaire. souvent pris la peine de comparer les
Depuis le 1er juillet 2011, les assurés Méthodologie
reçoivent un montant fixe destiné à 1 Cf. entre autres BakBasel, Internationaler Sys-
couvrir les frais d’acquisition d’un Pour l’essentiel, l’étude se fonde sur temvergleich der kosten- und preisbestimmen-
den Faktoren für Hörmittel, une étude man-
appareil auditif ainsi que les presta- une vaste enquête menée auprès des datée par « hörenschweiz », [Bâle, 2010] ou
Bertoli Sibylle et al., Hörgeräte-Tragerate in der
tions d’adaptation et de suivi. A la utilisateurs et utilisatrices d’appareils Schweiz, rapport destiné au Contrôle fédéral
différence du système fondé sur des auditifs. Elle a été conçue en vue des finances, [Bâle, 2007].

Sécurité sociale CHSS 4/2014 243


Assurance-invalidité Qualité de la fourniture d’appareils auditifs

offres dans le nouveau système que l’acquisition de prothèses auditives à portion nettement plus élevée que
dans l’ancien. Ils ne se sont pas non l’étranger ou auprès d’autres fournis- dans l’ancien système. Il est plus rare
plus adressés à un plus grand nombre seurs (tels que pharmacies ou drogue- dans le système forfaitaire que les
d’audioprothésistes afin de comparer ries) est d’une importance négli- acheteurs d’appareil auditif testent
les prestations. Les audioprothésistes geable. Il faut toutefois préciser que des appareils chez eux avant de les
restent la première source d’informa- les résultats de l’enquête permettent acheter et qu’ils bénéficient de la
tion des acheteurs d’appareils auditifs, uniquement de juger de l’évolution gamme complète des prestations exa-
suivis des médecins spécialistes en de la concurrence au niveau de la minées dans le cadre de l’enquête. Par
ORL. vente des appareils auditifs. Ces résul- contre, le système forfaitaire n’en-
En outre, les acheteurs d’appareils tats ne disent rien des effets suscep- traîne pas de baisse systématique du
auditifs se sentent plus déstabilisés et tibles de se produire plus en amont nombre de prestations de suivi.
moins bien informés avant de procé- sur la concurrence entre les produc- Pour évaluer le volume de presta-
der à l’achat que sous l’ancien sys- teurs. Il ressort des entretiens avec les tions dispensées, il faut aussi tenir
tème. Cela dit, il est probable que les experts que la gamme des produits compte du fait que, dans l’ancien sys-
clients avertis aient eu tendance à proposés s’est étoffée depuis le pas- tème tarifaire, les audioprothésistes
anticiper l’achat de leur appareil audi- sage au système forfaitaire et que avaient une obligation contractuelle
tif pour bénéficier encore des condi- l’offre des vendeurs ou des audiopro- de fournir un nombre déterminé de
tions de remboursement de l’ancien thésistes serait plus riche. prestations. Cette obligation ayant
système tarifaire. Cette hypothèse est disparu avec le passage au système
confirmée par la proportion plus im- Alourdissement de la charge forfaitaire, les clients doivent payer
portante d’assurés ayant bénéficié financière des assurés séparément chaque prestation. Ce
d’un remplacement de leur appareil Presque tous les acheteurs d’appa- changement du cadre normatif pour-
dans le groupe des assurés soumis à reils auditifs ont dû assumer une par- rait expliquer quelque peu la baisse
l’ancien système. ticipation personnelle sous le système du nombre de prestations fournies.
Les résultats des entretiens menés forfaitaire. Cette participation aux Les experts interrogés ne sont pas
avec les experts indiquent que la com- coûts a connu une hausse sensible de unanimes dans leur appréciation de
paraison des prix et des prestations près de 60% en moyenne par rapport la diminution du nombre de presta-
constitue un véritable défi pour à l’ancien système pour s’établir à tions: certains voient dans cette évo-
nombre d’assurés portant un appareil 3 070 francs (médiane). L’étude in- lution une tendance à la normalisation
auditif. Faute de pouvoir s’appuyer dique par ailleurs que les acquisitions d’un système qui avait tendance à
sur des conseils indépendants et sur d’appareils de la catégorie technique multiplier des prestations superflues
une liste de critères permettant la plus élevée et la plus chère ont légè- uniquement en raison de dispositions
d’identifier les offres les plus adé- rement reculé. trop rigides. Dans ce cas, la diminution
quates, il leur est particulièrement Toutefois, ce n’est pas le montant quantitative des prestations n’aurait
difficile de comparer les offres très absolu de la participation personnelle pas de retombées négatives sur la
hétérogènes de service après-vente, qui devrait être déterminant pour les qualité. A l’inverse, d’autres experts
d’adaptation et de suivi. Une autre utilisateurs, mais la charge relative de contestent l’idée que le nombre des
raison mise en avant par certains ex- cette participation par rapport à leurs prestations était trop élevé dans l’an-
perts pour expliquer cette situation revenus. En l’absence d’informations cien système et que la diminution
est que l’habitude de comparer les sur le niveau de revenu des personnes observée puisse ne pas avoir de consé-
prix ne ferait pas partie de la « men- interrogées, il n’est donc pas possible quence sur la qualité de la fourniture
talité suisse ». Les audioprothésistes de se prononcer sur la charge relative d’appareils auditifs. Ces experts cri-
ont, quant à eux, tendance à interpré- de cette participation. tiquent notamment la suppression de
ter le faible nombre de demandes l’expertise finale par les médecins
d’offres comparatives comme une Légère baisse du nombre ORL : cette fonction de contrôle
preuve de la satisfaction et de la de prestations fournies aurait, selon eux, permis de contrer
confiance des clients à l’égard de leurs De manière générale, on observe l’impact négatif de la diminution du
prestations. une diminution du nombre des pres- nombre des prestations sur la qualité
tations fournies dans le système for- de l’adaptation des appareils auditifs.
Les audioprothésistes gardent faitaire par rapport au système tari-
leur position dominante faire. Les séances d’adaptation y sont L’utilisation des appareils auditifs
Les audioprothésistes restent clai- généralement moins nombreuses. et la satisfaction des assurés
rement pour l’heure les principaux Près de deux tiers des personnes n’ont, restent très fortes
fournisseurs dans le système forfai- en outre, pas testé d’autres appareils La satisfaction à l’égard des presta-
taire : malgré le nouveau système, avant de procéder à l’achat, une pro- tions de service et d’adaptation s’est

244 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Assurance-invalidité Qualité de la fourniture d’appareils auditifs

maintenue à un niveau très élevé. De même, aucune différence (signi- donc se poursuivre au moins pendant
Dans les deux systèmes, le degré de ficative) n’a été observée entre les les premières années qui suivent le
satisfaction quant aux prestations de deux systèmes pour ce qui est de changement de système.
service et d’adaptation augmente avec l’adéquation entre les qualifications Il faut en outre tenir compte du fait
le montant de la participation person- professionnelles des porteurs d’appa- que les résultats de l’étude ne portent
nelle. Par contre, la satisfaction a légè- reil auditif et leur activité profession- que sur les personnes ayant bénéficié
rement baissé en ce qui concerne les nelle actuelle ni pour ce qui est de leur d’un forfait de l’AI ou de l’AVS pour
prestations de suivi. capacité à exercer sans difficulté leur la fourniture de leur appareil auditif.
La satisfaction globale est très métier grâce à cet appareil. Par contre, Cela exclut du champ de l’étude les
grande pour les deux périodes exami- la proportion de personnes estimant personnes qui ont dû entièrement
nées (près de la moitié des personnes être capables d’accomplir leur acti- renoncer à s’appareiller faute de capa-
interrogées sont, dans les deux cas, vité professionnelle sans recours à un cités financières suffisantes durant la
très satisfaites et moins de 10 % se appareil auditif était plus élevée dans période d’observation, celles qui ont
déclarent insatisfaites des appareils le système forfaitaire que dans le sys- entièrement renoncé à un forfait de
auditifs). tème tarifaire. Ce résultat pourrait l’AI ou de l’AVS en raison de l’impor-
Si aucune différence significative notamment être lié au fait que les tance de leurs capacités financières et
n’a été constatée dans l’évolution du personnes équipées d’un appareil enfin celles dont le niveau de perte
taux d’utilisation des appareils audi- pour la première fois étaient relative- auditive est inférieur au seuil leur
tifs (en nombre de jours par semaine), ment plus nombreuses dans le sys- donnant droit à un tel forfait.
le taux d’utilisation quotidienne tème forfaitaire.
moyenne, exprimé en heures, a par
contre légèrement reculé. Résumé et discussion
L’amélioration de l’audition appor- Les résultats de l’enquête montrent
tée par l’appareil a été jugée légère- que, mesurée à l’aune des indicateurs
ment inférieure dans le système for- clés – taux d’utilisation, degré de satis-
faitaire par rapport à l’ancien système. faction à l’égard des appareils auditifs,
En outre, les porteurs d’appareils sont intégration sociale et profession- Rapport de recherche
moins souvent d’avis que la dépense nelle –, la qualité de la fourniture
Sander, Monika und Martin Albrecht, Evalua-
occasionnée en valait la peine. Il n’en d’appareils auditifs n’a pas fondamen-
tion der Qualität der Hörgeräteversorgung.
demeure pas moins que, même dans talement changé après le passage au
Aspects de la sécurité sociale 1/14 (texte en
le système forfaitaire, 90 % des por- système forfaitaire. On a cependant
allemand, résumé en français): www.ofas.
teurs d’appareil auditif estiment que constaté des différences dans les
admin.ch ➞ Pratique ➞ Recherche ➞ Rap-
leur qualité de vie s’en trouve (signi- « indicateurs de substitution » de la
ports de recherche
ficativement) augmentée. qualité, tels que le nombre de presta-
tions fournies et le pouvoir décision-
Pas de modification notable quant nel des porteurs d’appareil auditif. Si
à l’intégration professionnelle et la modification des paramètres d’ap-
sociale provisionnement n’a pas encore eu
En ce qui concerne la fréquence des d’impact sur les principaux indica-
problèmes d’audition au quotidien, teurs de qualité, c’est peut-être dû au Dr Monika Sander, collaboratrice
aucune différence significative n’a été fait que l’expérience avec le système scientifique, IGES Institut.
observée entre les deux périodes exa- forfaitaire était encore relativement Mél: Monika.Sander@iges.de
minées. Le nombre de difficultés de limitée au moment où l’étude a été
communication avec d’autres per- réalisée. L’observation et l’examen du
sonnes est un peu plus faible dans le rapport entre les différents indica- Dr Martin Albrecht, directeur IGES Institut.
système forfaitaire. teurs de qualité considérés devraient Mél: Martin.Albrecht@iges.de

Sécurité sociale CHSS 4/2014 245


assurance-invalidité Assurance-invalidité Contribution d’assistance

Contribution d’assistance: premières expériences

La contribution d’assistance a été mise en place dans le cadre de la besoin d’aide. Ces formulaires, ren-
6e révision de l’AI, entrée en vigueur le 1er janvier 2012. Son objectif dus anonymes, sont remis tous les
trois mois aux évaluateurs et
est de promouvoir l’autonomie et la responsabilité des personnes en
servent à calculer la demande de
situation de handicap et d’améliorer leur qualité de vie. Le soutien ainsi prestations d’assistance. Les don-
apporté doit permettre aux personnes concernées de mener une vie nées des formulaires FAKT qui ont
autonome chez elles plutôt que dans un home et faciliter leur intégra- été utilisées pour le premier rapport
tion sociale et professionnelle. intermédiaire rendaient compte de
l’état en octobre 2013.
• Données de facturation: les béné-
ficiaires d’une contribution d’assis-
tance sont tenus de facturer tous les
mois à l’office AI le montant des
prestations perçues. Pour le premier
rapport intermédiaire, on a pris en
considération les données de factu-
ration jusqu’à fin 2013.
• Enquête complémentaire écrite :
chaque personne ayant remis une
facture pour obtenir le rembourse-
ment de prestations d’assistance a
Maryka Lâamir-Bozzini, reçu, dans les six mois suivant ré-
Office fédéral des assurances sociales ception de la première facture, un
questionnaire l’invitant à rendre
compte de son expérience concer-
nant la contribution d’assistance.
Comme toutes les nouvelles presta- fessionnelle ? A-t-elle permis de dé- L’examen représentatif du taux de
tions et mesures de l’assurance-inva- charger les proches aidants? On a donc réponse ne donne pas d’indices de
lidité (AI), la contribution d’assis- relevé certaines caractéristiques socio- distorsion par rapport au sexe, au
tance fait l’objet d’une évaluation démographiques des allocataires et des degré d’impotence ou au type d’in-
continue. Celle-ci s’étend sur cinq ans assistants, et quantifié les prestations firmité.
et prévoit deux rapports intermé- d’aide perçues ainsi que la demande et
diaires et un rapport final. Le premier les coûts. L’évaluation a été effectuée,
de ces rapports vient d’être publié ; sur mandat de l’Office fédéral des assu- Demande
nous en présentons ici les principaux rances sociales (OFAS), par le Bureau
résultats. BASS. Ce dernier a recueilli, structuré Le nombre de demandes présentées
et mis en relation à cette fin des don- a fortement augmenté dès le lance-
nées provenant de sources diverses: ment de la prestation au début de
Objectif de l’évaluation • Données du registre des API : ces 2012 et s’est stabilisé à partir de jan-
et méthode données servent à la fois de valeur vier 2013. Fin 2013, 756 personnes,
de référence et de source pour les dont 100 enfants, avaient envoyé au
L’évaluation intermédiaire avait variables sociodémographiques, les moins une facture pour la contribu-
pour but de fournir une première ap- types d’infirmité ou la situation en tion d’assistance. Le nombre de per-
préciation du degré et de la qualité de matière de logement. Pour le premier sonnes qui, à la même époque, avaient
réalisation des principaux objectifs rapport intermédiaire, elles ren- reçu une décision positive est de
visés par la contribution d’assistance: daient compte de l’état en décembre quelques centaines de plus, mais
celle-ci a-t-elle aidé les bénéficiaires à 2012. toutes n’avaient pas (encore) tiré
mener une vie plus autonome et a-t-elle • Formulaires FAKT: les offices AI parti de la contribution d’assistance.
facilité leur intégration sociale et pro- s’en servent pour déterminer le En effet, un certain décalage entre la

246 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Assurance-invalidité Contribution d’assistance

La contribution d’assistance

La contribution d’assistance (CDA) permet aux personnes au bénéfice d’une allocation pour impotent (API) de l’AI qui vivent à la
maison d’engager elles-mêmes des assistants qui leur fourniront les prestations d’aide nécessaires. Un besoin d’aide est reconnu
pour les domaines suivants:
• actes ordinaires de la vie
• tenue du ménage
• participation sociale et loisirs
• éducation et prise en charge des enfants
• exercice d’une activité bénévole ou d’utilité publique
• formation et perfectionnement professionnels
• exercice d’une activité lucrative sur le marché ordinaire du travail
• surveillance pendant la journée
• prestations de nuit

Les prestations d’aide doivent être fournies par une personne engagée directement par l’assuré sur la base d’un contrat de travail
régulier. L’assuré devient donc employeur.

réception de la décision et la première pour l’instant comment la demande d’aide sont les premiers à se manifes-
facturation est normal, car il est fré- évoluera jusqu’en 2016. ter, et que les cas moins graves et donc
quent que l’assuré doive encore re- aussi moins coûteux seront plus nom-
chercher et engager ses assistants. breux par la suite.
Le message1 tablait sur environ Coûts
3 000 bénéficiaires d’ici à 2016. Avec
756 bénéficiaires à fin 2013, on est En ce qui concerne les coûts, le mes- Adultes : l’appréciation de
encore loin du compte. Ce retard peut sage misait sur un coût mensuel la CDA est positive
tenir à différentes causes : d’une part, moyen de 1 130 francs et un coût total
il faut s’attendre, entre le dépôt de la de quelque 45 millions en 2016. Ac-
demande et le moment où l’assuré tuellement, le coût mensuel moyen Bénéficiaires
envoie sa première facture, à un déca- est pratiquement le double de ce qui L’évaluation intermédiaire montre
lage moyen de 6 à 9 mois (enquête, avait été prévu (et le rapport est même que ce sont surtout des bénéficiaires
décision, engagement des assistants), du simple au triple pour le montant d’API présentant une impotence grave
ce qui peut avoir un impact important moyen octroyé). Même si, pour l’ins- et des rentiers AI souffrant d’une
sur les chiffres, surtout au début. tant, la demande est inférieure aux atteinte neurologique qui obtiennent
D’autre part, la demande diffère beau- attentes, le coût total de la contribu- une CDA. 45 % des bénéficiaires
coup d’un canton à l’autre, ce qui peut tion d’assistance en 2013 a déjà dé- d’une CDA perçoivent une allocation
être dû à la difficulté à trouver des passé les 21 millions de francs. Comme pour impotence grave, alors qu’ils ne
assistants, à la présence au niveau ce premier rapport intermédiaire a sont que 13% parmi les bénéficiaires
cantonal ou communal de prestations été établi deux ans seulement après d’une API vivant à domicile. A l’in-
rendant superflu le recours à la contri- la mise en place de la nouvelle pres- verse, les bénéficiaires d’une API pour
bution d’assistance, ou encore à un tation, il est difficile de faire des hypo- impotence faible sont sous-représen-
manque d’information du côté des thèses sur les raisons de ce surcoût. tés (26% perçoivent une CDA, alors
assurés. Comme il est encore difficile La surreprésentation des cas au béné- que 58% des bénéficiaires d’une API
d’estimer l’importance des différents fice d’une allocation pour impotence vivant à domicile présentent une
facteurs d’influence, on ne peut dire grave y joue certainement un rôle: en impotence faible). 46 % des bénéfi-
effet, ces cas sont aussi les plus coû- ciaires d’une CDA souffrent d’une
teux. Il est toutefois impossible de dire atteinte neurologique et, parmi eux,
1 www.admin.ch ➞ Droit fédéral ➞ FF 2010, pour l’instant si cette situation va se 21 % sont atteints de sclérose en
1647 ➞ Message relatif à la modification maintenir ou si elle est due au fait que plaques. Les personnes ayant subi une
de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité
(6e révision, premier volet). les assurés ayant le plus grand besoin hémorragie cérébrale ou une lésion

Sécurité sociale CHSS 4/2014 247


Assurance-invalidité Contribution d’assistance

de la moelle épinière sont également le marché primaire du travail. La per- en partie au moins à la continuité des
surreprésentées. Par contre, celles qui ception de la CDA n’a eu sur l’inser- soins fournis par les assistants. La li-
souffrent de troubles psychiques sont tion professionnelle hors du domaine berté de décider qui fournit les soins
sous-représentées (9 % des bénéfi- protégé qu’un impact marginal. Il faut est jugée à peu près aussi importante.
ciaires d’une CDA et 23 % des béné- rappeler toutefois que l’enquête a été Plus de la moitié des personnes
ficiaires d’une API vivant en home menée six mois après réception de la concernées expliquent cette diminu-
souffrent de psychose, de névrose ou première facture. 42 % suivent une tion par la qualité des soins et par des
de troubles de la personnalité, contre formation régulière ou travaillent raisons financières. La réduction des
23 % des bénéficiaires d’une API vi- dans le cadre d’un emploi protégé, ce prestations des organisations de soins
vant à domicile). Comme il est fré- qui a valeur d’occupation. 7 % in- à domicile a pour effet de décharger
quent que les personnes atteintes d’un diquent avoir augmenté leur taux les caisses-maladie et les cantons.
trouble psychique soient au bénéfice d’occupation grâce à la contribution
d’une allocation pour impotence d’assistance. La CDA a, pour presque Assistants
faible, ces deux facteurs devront par tous, joué un rôle important. Les bénéficiaires d’une contribu-
la suite être évalués plus en détail tion d’assistance engagent en
pour voir lequel influence l’autre. Il Logement moyenne 2,8 assistants qui travaillent
est encore trop tôt pour faire des Un des objectifs visés par la contri- 8,6 heures par semaine (ce qui équi-
hypothèses et tirer des conclusions. bution d’assistance était de permettre vaut plus ou moins à un 20 %). La
aux bénéficiaires d’une allocation plupart des engagements se font pour
Niveau de satisfaction pour impotent de sortir d’un home une durée indéterminée (87%), mais
La grande majorité des bénéficiaires pour vivre à la maison, ou d’éviter de le taux d’occupation n’est fixe que
d’une contribution d’assistance sont devoir y entrer. Fin 2013, 32 personnes dans 28 % des cas. La grande majo-
satisfaits ou très satisfaits de leur situa- (6 % des bénéficiaires d’une CDA ou rité des assistants sont des femmes
tion, que ce soit au regard des soins 0,25 % des résidents de home) sont (83%) et ne disposent pas d’une for-
(78%), de leur autonomie (75%), des sorties de home2. Un tiers des béné- mation de base ou spécialisée dans le
contacts sociaux (73%), des activités ficiaires affirment que la CDA contri- domaine des soins (78 %). Malgré
de loisirs (55%) ou plus généralement bue de manière déterminante à ce cela, les assurés sont satisfaits ou très
de la qualité de vie (84%). Trois quarts qu’ils puissent continuer de vivre à satisfaits de leurs assistants dans 93%
des personnes interrogées estiment domicile. Par extrapolation, on peut des cas, et 58% estiment que la qua-
que la CDA a légèrement ou forte- donc affirmer que dans environ 130 lité des soins s’est améliorée. Pour la
ment amélioré leur qualité de vie, leur cas, des entrées en home ont pu être moitié des bénéficiaires, il a été facile
situation en matière de soins et leur évitées. Dans ces cas-là, autrement dit, ou très facile de trouver un assistant;
autonomie, alors que dans les autres la contribution d’assistance a permis pour les autres, cela a été difficile ou
domaines son influence était moindre. aux assurés de choisir librement la très difficile. Les assurés ont eu re-
Interrogés sur les expériences les plus forme de logement qui leur convient. cours aux canaux normaux de recru-
positives en relation avec la contribu- tement (insertions dans des journaux
tion d’assistance, les bénéficiaires Proches ou sur Internet) dans 20% seulement
mentionnent les soins et la qualité de Presque trois quarts des personnes des cas. Les principales difficultés
vie. Même au regard de la situation interrogées estiment que la contribu- dans le recrutement des assistants ont
financière, le niveau de satisfaction est tion d’assistance a réduit la charge été les horaires irréguliers (un tiers),
très élevé, avec 49% de bénéficiaires pesant sur leurs proches. 42% d’entre le manque de qualification ou la fai-
satisfaits ou très satisfaits et 36% de elles affirment que, depuis l’introduc- blesse du taux d’occupation.
moyennement satisfaits, contre seule- tion de la CDA, elles nécessitent
ment 15% d’insatisfaits. Un pourcen- moins d’aide bénévole de la part des Charge administrative
tage à peine plus grand (16 %) cite personnes vivant dans le même mé- Les tâches administratives, avec en
comme élément le plus négatif de la nage. Les proches restent cependant moyenne 6 heures par mois pour
CDA les aspects financiers. Pour 67% sollicités, voire fortement sollicités, l’organisation de l’aide (planification
des bénéficiaires, la nouvelle presta- d’après 65% des bénéficiaires. des interventions, salaires, engage-
tion a néanmoins permis une amélio- ments, etc.) et 2,4 heures pour l’éta-
ration légère ou importante dans ce Autres prestations blissement des décomptes mensuels
domaine aussi. Parmi les bénéficiaires d’une contri- à l’intention des offices AI, sont res-
bution d’assistance, 16 % affirment
Taux d’occupation recevoir moins d’aide des organisa-
Un quart environ des bénéficiaires tions de soins à domicile pour les soins 2 Par souci d’exactitude, il faudrait ajouter à ces
32 personnes les 25 qui étaient sorties d’un
d’une CDA exercent une activité sur de base. Pour près de 80%, cela tient home au cours du projet pilote.

248 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Assurance-invalidité Contribution d’assistance

© procap/Patrick Lüthy
Valentin en compagnie de sa mère. Il est l’une des 756 personnes qui – grâce à la contribution d’assistance – peuvent vivre leur quotidien de manière
autodéterminée.

senties comme une charge par 75 % inférieure à 2 000 francs par mois. La
des bénéficiaires. La charge adminis- moyenne est plus élevée (respective-
trative figure aussi parmi les points ment 3 075 francs et 150 heures), du
négatifs les plus fréquemment men- fait que quelques bénéficiaires ont un
tionnés en relation avec la CDA. besoin d’aide très important (12 %
des bénéficiaires perçoivent une
Evaluation intermédiaire
Montant et utilisation de la contribution d’assistance de plus de Guggisberg, Jürg und Severin Bischof, Eva-
contribution d’assistance 7 000 francs par mois, dont 6% de plus luation Assistenzbeitrag: Zwischenbericht 1:
Pour les assurés adultes, la médiane de 8 000 francs). Par contre, si l’on www.bsv.admin.ch ➞ Documentation ➞
de la contribution mensuelle octroyée considère la contribution effective- Publications ➞ Etudes, expertises… ➞
est de 2 455 francs et correspond à un ment facturée, la médiane baisse à Assurance-invalidité
besoin d’aide médian de 132 heures 1 554 francs (et la moyenne à 2 262
par mois. 44 % des bénéficiaires per- francs). Globalement, 20% des assu-
çoivent une contribution d’assistance rés adultes facturent moins de 50%

Sécurité sociale CHSS 4/2014 249


Assurance-invalidité Contribution d’assistance

du montant auquel ils ont droit et sont à prendre avec précaution. Il Si l’on considère la contribution
seulement 50 % facturent plus de vaut néanmoins la peine de souligner effectivement facturée, les valeurs
90 % de ce montant. Dans la suite de quelques points : la qualité de vie de baissent chez les enfants aussi : la
l’évaluation il est prévu d’interroger l’enfant s’est améliorée selon 94 % médiane se situe à 1 566 francs et la
les personnes concernées sur les rai- des parents, et 91 % sont satisfaits ou moyenne à 2 250 francs. Proportion-
sons de cette non-facturation. très satisfaits de la CDA. 61 % des nellement, les montants facturés sont
parents affirment que l’indépendance beaucoup moins élevés pour les en-
de l’enfant et sa capacité à prendre fants que pour les adultes.
Mineurs: allégement pour les des décisions lui-même se sont amé-
parents et les familles liorées. Dans 63 % des cas, la contri-
bution d’assistance a joué un rôle Conclusion
important ou est même la raison
Bénéficiaires principale qui a fait que l’enfant Il ressort de ce premier rapport
Parmi les mineurs bénéficiaires continue à habiter à la maison. Bien intermédiaire que les objectifs visés
d’une contribution d’assistance, on que l’organisation de l’aide et l’éta- par la contribution d’assistance ont
trouve aussi une nette surreprésenta- blissement des décomptes repré- été atteints. Celle-ci a permis aux
tion des bénéficiaires d’une allocation sentent une charge pour 76 % des bénéficiaires de décharger leurs
pour impotence grave (55 %, alors parents, 73 % d’entre eux jugent que proches et aussi de choisir la forme
qu’ils ne sont que 18% parmi les béné- la prise en charge de l’enfant est de logement qu’ils préféraient. Les
ficiaires d’une API), ainsi que de ceux moins lourde grâce à la CDA. La bénéficiaires jugent positivement
au bénéfice d’un supplément pour majorité des personnes interrogées cette nouvelle prestation et l’influence
soins intenses (79 %, alors qu’ils ne indiquent qu’elle leur laisse plus de qu’elle a sur leurs conditions de vie.
sont que 27 % parmi les bénéficiaires temps pour elles ou pour leur parte- S’agissant des attentes formulées
d’une API). La perception d’un sup- naire, et 78 % des familles avec plu- dans le message sur la 6e révision de
plément pour soins intenses d’au sieurs enfants affirment avoir moins l’AI, on constate pour l’instant que si
moins six heures par jour constitue l’impression de laisser pour compte la demande est inférieure aux prévi-
une des conditions d’octroi d’une leurs autres enfants grâce à la contri- sions, les coûts sont nettement supé-
contribution d’assistance pour les bution d’assistance. rieurs. Comme on se trouve encore
mineurs, ce qui peut expliquer en par- dans la phase de lancement, il est trop
tie cette surreprésentation. Il est ce- Montant et utilisation de la tôt pour tirer des conclusions. L’OFAS
pendant intéressant de relever qu’un contribution d’assistance suit néanmoins de près la variation de
tiers des mineurs bénéficiaires d’une La médiane de la contribution ces deux valeurs. Le deuxième rapport
contribution d’assistance y ont droit mensuelle octroyée est plus élevée d’évaluation (prévu pour 2016) mon-
non pour cette raison, mais parce chez les enfants que chez les adultes : trera l’évolution de la contribution
qu’ils remplissent une autre condition 3 033 francs par mois, ce qui corres- d’assistance et permettra de mieux
(intégration dans une classe ordinaire, pond à un besoin d’aide de 175 heures apprécier la situation.
par exemple). par mois. Là aussi, le fait que la
moyenne est plus élevée (3 659 francs)
Niveau de satisfaction et situation tient à ce que quelques bénéficiaires
des proches ont un besoin d’aide très important Maryka Lâamir-Bozzini, lic. phil., collabora-
Etant donné que seuls 41 formu- (17 % des bénéficiaires perçoivent trice scientifique, secteur Médecine et
laires ont été remplis pour les 100 une contribution d’assistance de plus prestations en espèces, domaine Assu-
mineurs qui facturent la contribution de 7 000 francs par mois, dont 9 % de rance-invalidité, OFAS.
d’assistance, les données qui suivent plus de 8 000 francs). Mél: maryka.laamir@bsv.admin.ch

250 Sécurité sociale CHSS 4/2014


international International Droit d’option

Assurance-maladie des travailleurs frontaliers :


fin d’une solution sur mesure ou d’un privilège ?
Depuis le 1er juin 2014, les travailleurs frontaliers résidant en France ne frontaliers, a été introduite dans la
peuvent plus choisir une assurance-maladie privée au lieu des régimes législation française en 2002 pour une
période de sept ans, avant d’être pro-
légaux suisses ou français. La décision des autorités françaises de ne
rogée d’une durée supplémentaire de
pas proroger cette dérogation a suscité un vif émoi. Quelques considé- cinq ans. La France l’a supprimée le
rations pour éclairer cette problématique. 1er juin 2014.
A l’échéance annuelle de leur
contrat, mais au plus tard le 1er juin
2015, les personnes qui ont souscrit
une telle couverture privée bascule-
ront de manière échelonnée dans
l’assurance-maladie française. Une
prise d’assurance en Suisse n’est pas
possible, car l’exercice du droit d’op-
tion est irrévocable.
Le droit d’option est maintenu pour
les nouveaux travailleurs frontaliers.
Ils peuvent continuer à choisir entre
la Suisse et la France pour leur assu-
rance-maladie, plus précisément entre
les régimes légaux des deux Etats.
Lionel Tauxe Rien ne change pour les personnes
Office fédéral des assurances sociales n’ayant pas exercé le droit d’option et
qui sont assurées en Suisse.

Un réaménagement
Le droit d’option, est communément appelée droit source d’inquiétude
une exception d’option.
Des nombreux travailleurs fronta-
Selon l’accord sur la libre circula- liers, dont des Suisses, sont inquiets,
tion des personnes entre la Suisse et Fin d’une notamment parce que les contribu-
l’Union européenne (ALCP), les dérogation temporaire tions dues et l’étendue de la prise en
personnes travaillant en Suisse co- charge des soins en Suisse diffèrent
tisent en principe aux assurances Jusqu’à récemment, les personnes selon que l’assurance en France soit
sociales suisses, même si elles résident exerçant ce droit d’option avaient une publique ou privée. Les personnes
à l’étranger. Toutefois, la Suisse et alternative pour s’assurer en France: assurées en privé avaient générale-
quelques Etats, dont la France, ont soit elles s’affiliaient à l’assurance- ment pris l’habitude de se faire soi-
prévu dans le cadre dudit accord une maladie sociale, soit elles souscri- gner librement auprès de fournisseurs
exception en matière d’assurance- vaient uniquement une assurance de soins suisses, pour certains aussi
maladie. Les travailleurs frontaliers privée. Cette dernière possibilité préoccupés. La faible densité de
actifs en Suisse et résidant en France qu’offre le droit français est déroga- l’offre médicale dans certaines zones
sont notamment concernés. Ils toire par rapport au régime légal frontalières du territoire français a été
peuvent, sous certaines conditions, d’assurance-maladie. L’ALCP laisse soulignée. Diverses mobilisations
choisir de rester assurés dans leur en effet chaque Etat libre de déter- politiques, parfois contestataires, ont
Etat de résidence pour les soins en miner les modalités d’assurance à son eu lieu côté français.
cas de maladie et demander à être propre système. Cette dérogation Côté suisse, plusieurs interventions
exemptés de l’assurance-maladie dans l’exception, choisie par près de parlementaires ont concerné cette
obligatoire suisse. Cette exception 90 % de l’ensemble des travailleurs thématique. En particulier, la motion

Sécurité sociale CHSS 4/2014 251


International Droit d’option

déposée le 17 avril 2013 par le conseil- périeur à celui des autres résidents Suisse. Le principe de la continuité de
ler national Luc Barthassat (PDC/ français salariés en France2. la prise en charge des traitements
GE) ; « Assurance-maladie pour les entamés en Suisse est garanti. Les
citoyens suisses vivant en France »1. travailleurs frontaliers pourront en
Elle demande en substance la négo- L’enjeu de l’accès aux outre choisir un médecin traitant en
ciation avec la France d’une réouver- soins en Suisse Suisse et y recevoir plus facilement
ture provisoire du droit d’option per- certains soins ambulatoires planifiés.
mettant aux frontaliers ayant déjà Selon l’ALCP, les assurés du régime Une récente circulaire ministé-
opté pour le régime français de révo- légal français ont droit en Suisse à la rielle3 détaille entre autres ces me-
quer ce choix pour venir s’assurer prise en charge des soins médicale- sures. La note conjointe franco-suisse
dans le cadre de l’assurance-maladie ment nécessaires, par exemple des explicitant les modalités d’exercice
obligatoire suisse. Elle n’a pas encore traitements urgents pendant la se- du droit d’option a pour sa part été
été traitée par le Parlement, le Conseil maine de travail. Alors que la prise en actualisée4.
fédéral propose son rejet. charge de soins planifiés est soumise
Les autorités françaises ne sont pas à autorisation préalable de l’assureur
non plus favorables à la réouverture français. Les assurés affiliés à l’assu- Vers une transition souple
du droit d’option. Pour elles, des argu- rance-maladie française ont cepen-
ments juridiques internes ou les prin- dant toujours la possibilité de sous- Une assurance couvrant les soins
cipes d’équité, de solidarité et d’uni- crire une couverture complémentaire en cas de maladie de tout un chacun,
versalité légitiment l’intégration de privée. Pour leur part, les travailleurs quel que soit son état de santé, donc
tous les travailleurs frontaliers ayant frontaliers assurés en Suisse peuvent basée sur une large solidarité, consti-
opté pour la France au régime général se faire soigner librement en Suisse tue un élément fondamental des ré-
de sécurité sociale de cet Etat, et leur ou en France. Cette disparité, prévue gimes modernes de sécurité sociale.
pleine contribution à son finance- par l’ALCP, est difficilement compré- Qu’une catégorie de la population
ment. Mais alors que les cotisations hensible pour les intéressés. déroge à cette universalité questionne
dues à ce régime par les salariés actifs L’intégration des travailleurs fron- le principe d’équité à la base du sys-
en France sont quasiment exclusive- taliers dans l’assurance-maladie so- tème.
ment à la charge des employeurs, ciale est une décision française s’ap- Mais les inquiétudes des personnes
celles des travailleurs frontaliers sont pliquant à des résidents français. Il est concernées quant à la juste prise en
fonction de leur revenu fiscal, déduit du ressort des autorités françaises de compte de leurs besoins sont légi-
d’un abattement. Leur employeur déterminer comment leur législation times. Elles ont été entendues, tant à
suisse n’y contribue pas. Les per- nationale doit être appliquée. A divers Berne qu’à Paris. Un dispositif tenant
sonnes concernées ont dénoncé cette niveaux, la Suisse s’est toutefois enga- compte des spécificités de leur situa-
charge financière péjorant leur pou- gée pour attirer leur attention sur tion transfrontalière a été mis en place
voir d’achat, toutefois largement su- l’enjeu que représente un accès le plus pour une transition la plus souple
large possible aux soins en Suisse, en possible.
1 Numéro d’objet 13.3336. particulier s’agissant des soins déjà
2 Rapport des Inspections générales françaises entamés, gardant à l’esprit la situation
des finances et des affaires sociales de juillet
2013, «Intégration dans le droit commun de des personnes atteintes dans leur
l’assurance-maladie des frontaliers résidant en santé et les besoins médicaux d’un
France et travaillant en Suisse », annexe 2,
p. 15. bassin de population transfrontalier.
3 Circulaire DSS/DACI/5B/2A/2014/147 du 23 Avancée importante, la France a Lionel Tauxe, DEA en science politiques,
mai 2014. mis au point dans le cadre de son secteur Conventions, domaine Affaires
4 Disponible sur www.ofas.admin.ch sous ➞
Thèmes ➞ Affaires internationales ➞ assurance maladie un dispositif per- internationales, OFAS.
Conseils / FAQ. mettant un accès élargi aux soins en Mél: lionel.tauxe@bsv.admin.ch

252 Sécurité sociale CHSS 4/2014


parlement Parlement Interventions parlementaires

ment pour les prestations fournies sagé en relation avec l’avis de droit
AVS dans les ménages privés.» Schwenzer sur le postulat Fehr Jac-
queline 12.3607.»
14.3126 – Motion Schneider- Proposition du Conseil fédéral
Schneiter Elisabeth du 19.3.2014: du 6.6.2014 Proposition du Conseil fédéral
Pas de cotisations AVS pour le baby- Le Conseil fédéral propose de re- du 2.7.2014
sitting et les activités domestiques jeter la motion. Le Conseil fédéral propose de re-
La conseillère nationale Elisabeth jeter la motion.
Schneider-Schneiter (PDC/BL) a
déposé la motion suivante :
« Le Conseil fédéral est chargé de Famille, génération et société
modifier l’article 34 alinéa 2 RAVS Enfance et jeunesse
de sorte que les salaires de peu d’im- 14.3292 – Postulat de la Com-
portance versés à des baby-sitters et mission de l’économie et des 14.3232 – Postulat Bulliard-
à des personnes exerçant des activités redevances (CER-N) du 7.4.2014: Marbach Christine du 21.3.2014:
domestiques ne soient pas soumis à Soutien financier aux familles avec Article 12 de la Convention des
l’obligation de cotisation AVS. Si le enfants Nations Unies relatives aux droits
Conseil fédéral devait s’opposer à une La CER du Conseil national a dé- de l’enfant. Bilan de la mise en
modification de l’article 34 alinéa 2 posé le postulat suivant: œuvre en Suisse
RAVS, je le charge de présenter au « Le Conseil fédéral est chargé de La conseillère nationale Christine
Parlement une modification de la loi proposer des solutions visant à sou- Bulliard-Marbach (PDC/FR) a dépo-
qui aille dans le même sens (art. 14 tenir financièrement ou à alléger fis- sé le postulat suivant:
al. 5 LAVS). » calement les familles avec enfants de « Le Conseil fédéral est chargé
manière ciblée. Les coûts, les besoins d’examiner, en collaboration avec les
Proposition du Conseil fédéral du et le nombre de personnes concernées cantons, si le droit d’être entendu
6.6.2014 que ces solutions impliquent seront prévu à l’article 12 de la Convention
Le Conseil fédéral propose d’accep- comparés à ceux de l’initiative popu- des Nations Unies relatives aux droits
ter la motion. laire. » de l’enfant est respecté en Suisse,
notamment dans les procédures lé-
14.3156 – Motion Fehr Hans Proposition du Conseil fédéral gales et administratives, et où il y
du 20.3.2014 : Instituer une du 28.5.2014 aurait des améliorations à apporter.
franchise pour les cotisations AVS Le Conseil fédéral propose d’accep- Il établira un rapport dressant un bi-
payées par les personnes occupées ter le postulat. lan précis de la mise en œuvre de cette
dans les ménages privés convention dans notre pays et s’en
Le conseiller national Hans Fehr 14.3371 – Motion Herzog Verena inspirera pour formuler des recom-
(UDC/ZH) a déposé la motion sui- du 8.5.2014: Droit du mariage et mandations.»
vante : de la famille. Mettre un terme aux
« Le Conseil fédéral est chargé de réformes douteuses Proposition du Conseil fédéral
présenter une modification du règle- La conseillère nationale Verena du 28.5.2014
ment sur l’assurance-vieillesse et sur- Herzog (UDC/TG) a déposé la mo- Le Conseil fédéral propose d’accep-
vivants (art. 34d RAVS) qui prescrit tion suivante: ter le postulat.
que la franchise de 2 300 francs par « Le Conseil fédéral est chargé (Retiré le 3.6.2014)
année déterminante pour le prélève- d’abandonner le projet de réforme du
ment des cotisations AVS vaut égale- droit du mariage et de la famille envi-

Sécurité sociale CHSS 4/2014 253


Parlement Interventions parlementaires

14.3382 – Postulat de la Com- La conseillère nationale Cesla Proposition du Conseil fédéral


mission de la science, de l’édu- Amarelle (PS/VD) a déposé le du 2.7.2014
cation et de la culture (CSEC-N): postulat suivant: Le Conseil fédéral propose d’accep-
Droit de l’enfant d’être entendu. « Le Conseil fédéral est chargé de ter la motion.
Bilan de la mise en œuvre en Suisse présenter dans les meilleurs délais un
de l’article 12 de la Convention des rapport sur l’évolution, l’application 14.3366 – Motion Humbel Ruth
Nations Unies relative aux droits et l’efficacité des contingents et de la du 8.5.2014: Dissocier prestations
de l’enfant clause de sauvegarde (selon l’Accord complémentaires et réduction des
La CSEC du Conseil national a sur la libre circulation des personnes), primes
déposé le postulat suivant: respectivement entre 1960 et 2007 et La conseillère nationale Ruth
« Le Conseil fédéral est chargé, en entre 2012 et 2014. Le rapport pré- Humbel (PDC/AG) a déposé la mo-
collaboration avec les cantons, d’exa- sentera aussi les mesures qui ont été tion suivante:
miner si le droit de l’enfant d’expri- introduites en matière de contrôle «Le Conseil fédéral est chargé de
mer son opinion en vertu de l’article quantitatif par les pays européens.» présenter un projet de modification
12 de la Convention des Nations de la loi sur les prestations complé-
Unies relative aux droits de l’enfant Proposition du Conseil fédéral mentaires de manière à ce que la ré-
(CDE) est respecté en Suisse, notam- du 28.5.2014 duction des primes de l’assurance-
ment dans les procédures juridiques Le Conseil fédéral propose de re- maladie soit indépendante de la
et administratives, et d’indiquer où jeter le postulat. perception de prestations complé-
des améliorations doivent être appor- mentaires et que les cantons puissent
tées. Il établira un rapport qui présen- fixer une prime de référence appli-
tera un bilan précis de la mise en cable aux bénéficiaires de prestations
œuvre de la CDE dans notre pays et Politique sociale complémentaires.»
formulera des recommandations pour
l’avenir. » 14.3307 – Motion Pezzatti Bruno Proposition du Conseil fédéral
du 6.5.2014: Prestations complé- du 2.7.2014
Proposition du Conseil fédéral mentaires et échanges de données Le Conseil fédéral propose de re-
du 2.7.2014 Le conseiller national Bruno Pez- jeter la motion.
Le Conseil fédéral propose d’accep- zatti (PLR/ZG) a déposé la motion
ter le postulat. suivante:
« Le Conseil fédéral est chargé
d’améliorer les échanges de données
entre les organes d’exécution de la
Migration législation sur les étrangers et les
organes d’exécution de la législation
14.3270 – Postulat Amarelle Cesla sur les prestations complémentaires
du 21.3.2014 : Contingents et à l’AVS et à l’AI. Plus particulière-
clause de sauvegarde selon ment, les premiers doivent commu-
l’Accord sur la libre circulation niquer aux seconds l’identité des
des personnes. Bilan concernant ressortissants étrangers qui per-
l’efficacité du contrôle quantitatif çoivent des prestations complémen-
de la migration taires. »

254 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Parlement Législation: les projets du Conseil fédéral

Législation: les projets du Conseil fédéral (état au 31 julliet 2014)

Publ. dans Vote final Entrée en


Projet: No d’objet Date du la Feuille 1er Conseil 2e Conseil (publ. dans vigueur/
(Curia Vista) message fédérale Commission Plénum Commission Plénum la FF) référendum
Loi fédérale sur la surveil- 15.2.12 FF 2012, 1725 CSSS-CE CE CSSS-CN CN
lance de l’assurance-mala- 17.4, 21.5, 18.6, 18.3.13, 4.3.14 23.5, 6.9, 4/5.12.13
die: 12.027 22/23.8, (rejet du renvoi) 24/25.10.13, (refus au
21/22.10, 20/21.2, 26/27.5, Conseil fédéral)
15.11.12; 26/27.6.14 10.3.14
21.1.13 (Adhésion = ne
pas renvoyer
au Conseil
fédéral)
Loi fédérale sur l’assurance- 15.2.12 FF 2012, 1707 CSSS-CE CE CSSS-CN CN 21.3.14 10.7.14
maladie (Correction des 17.4, 21.5, 18.6, 17.9.13, 11.3.14 24/25.10.13; 5.3.14
primes payées entre 1996 22/23.8, 20/21.2.14
et 2011): 12.026 21/22.10,
15.11.12; 21.1,
2.5, 2.7.13
LAMal (Compensation des 20.9.13 FF 2013, 7135 CSSS-CN CSSS-CE
risques; séparation de l’as- 6/7/8.11.13 11.2.14
surance de base et des
assurances complémen-
taires): 13.080
Loi fédérale sur l’assurance- 30.5.08 FF 2008, 4877 CSSS-CN CN CSSS-CE CE
accident. Modification: 20.6, 9.9, 16.10, 11.6.09 (refus 31.1.11 1.3.11 (refus
08.047 6/7.11.08; du projet 1 à du projet 1 au
15/16.1, 12/13.2, la CSSS-CN et Conseil fédéral,
26/27.3, 27.8, suspension du oui pour la
9.10, 29.10.09; projet 2), 22.9.10 suspension du
28.1, 24.6.10 (refus du projet 1 projet 2)
au Conseil
fédéral)
Pour une caisse publique 20.9.13 FF 2013, 7113 CSSS-CE CE CSSS-CN CN 21.3.14 28.9.14
d’assurance-maladie. Initia- 14.11.14 9.12.13 24.1.14 5.3.14
tive populaire: 13.079
Sécurité sociale. Conven- 15.5.13 FF 2013, 2961 CSSS-CN CN CSSS-CE CE 8.4.14 1.8.14
tion avec les Etats-Unis 15/16.8.13 12.9.13 9/10.1.14 11.3.14
d’Amérique: 13.037
Sécurité sociale. Conven- 12.2.14 FF 2014, 1733 CSSS-CE CE
tion avec l’Uruguay: 14.017 3/4.4.14 13.6.14
CC. Partage de la pré- 29.5.13 FF 2013, 4341 CAJ-CE CE
voyance professionnelle en 1/2.7, 27.8, 12.6.14
cas de divorce: 13.049 14.11.13; 15.1,
M 15.5.14
Organisation internationale 28.8.13
A FF 2013, 6215 CSSS-CE CE CSSS-CN CN 20.6.14
du Travail. Convention 9/10.1.14 20.3.14 26/27.5.14 12.6.14
no 189: 13.067
Aider les familles! Pour des 23.10.13 FF 2013, 7575 CdF-CN CN CdF-CE
allocations pour enfant et 30/31.1.14 4.6.14 24/25.3.14
des allocations de forma- CER-CN CER-CE
tion professionnelle exoné- 24/25.2.14., 30.6/1.7.14
rées de l’impôt. Initiative 7/8.4.14
populaire: 13.084
Pour le couple et la famille 23.10.13 FF 2013, 7623 CdF-CN CdF-CE
– Non à la pénalisation du 30/31.1.14 24/25.3.14
mariage. Initiative popu- CER-CN
laire: 13.085 24/25.2, 7/8.4,
19/20.5, 23.6.14
Imposer les successions de 13.12.13 FF 2014, 121 CER-CE
plusieurs millions pour fi- 27/28.3.14
nancer notre AVS (Réforme
de la fiscalité successorale).
Initiative populaire: 13.107
CN = Conseil national / CCN = Commission préparatoire du Conseil national / CE = Conseil des Etats / CCE = Commission préparatoire du Conseil des Etats / CdF = Commission
des finances / CSSS = Commission de la sécurité sociale et de la santé publique / CER = Commission de l’économie et des redevances / CAJ = Commission des affaires juridiques /
CIP = Commission des institutions politiques / CPS = Commission de la politique de la sécurité

Sécurité sociale CHSS 4/2014 255


statistique Statistiques des assurances sociales OFAS, secteur Statistiques

Modification des dépenses en pour-cent depuis 1980

AVS AVS 1990 2000 2010 2012 2013 Modification en %


TM1
Recettes mio fr. 20 355 28 792 38 495 40 824 40 884 0,1%
dont contrib. ass./empl. 16 029 20 482 27 461 28 875 29 539 2,3%
dont contrib. pouv. publics 3 666 7 417 9 776 10 177 10 441 2,6%
Dépenses 18 328 27 722 36 604 38 798 39 976 3,0%
dont prestations sociales 18 269 27 627 36 442 38 612 39 781 3,0%
Résultat d’exploitation total 2 027 1 070 1 891 2 026 908 –55,2%
Capital2 18 157 22 720 44 158 42 173 43 080 2,2%
Bénéficiaires de rentes AV Personnes 1 225 388 1 515 954 1 981 207 2 088 396 2 142 753 2,6%
Bénéf. rentes veuves/veufs 74 651 79 715 120 623 128 744 133 343 3,6%
Nombre de cotisants AVS 4 289 839 4 548 926 5 217 000 5 364 000 5 423 000 1,1%

PC à l’AVS
35%
30%
PC à l’AVS 1990 2000 2010 2012 2013 TM1
20% Dépenses (= recettes) mio fr. 1 124 1 441 2 324 2 525 2 605 3,2%
10% dont contrib. Confédération 260 318 599 644 668 3,7%
0% dont contrib. cantons 864 1 123 1 725 1 880 1 937 3,0%
–15,8%
–10% Bénéficiaires (personnes, av. 1997 cas) 120 684 140 842 171 552 184 989 189 347 2,4%

AI 21,0%
AI 1990 2000 2010 2012 2013 TM1
Recettes mio fr. 4 412 7 897 8 176 9 889 9 892 0,0%
dont contrib. ass./empl. 2 307 3 437 4 605 4 840 4 951 2,3%
Dépenses 4 133 8 718 9 220 9 295 9 306 0,1%
dont rentes 2 376 5 126 6 080 5 941 5 892 –0,8%
Résultat d’exploitation total 278 –820 –1 045 595 586 –1,5%
Dette de l’AI envers l’AVS –6 2 306 14 944 14 352 13 765 –4,1%
Fonds AI2 – – – 5 000 5 000 0,0%
–31,3%
Bénéficiaires de rentes AI Personnes 164 329 235 529 279 527 271 010 265 120 –2,2%

PC à l’AI PC à l’AI 1990 2000 2010 2012 2013 TM1


Dépenses (= recettes) mio fr. 309 847 1 751 1 911 1 923 0,6%
dont contrib. Confédération 69 182 638 686 678 –1,2%
dont contrib. cantons 241 665 1 113 1 225 1 245 1,6%
Bénéficiaires (personnes, av. 1997 cas) 30 695 61 817 105 596 110 179 111 400 1,1%

PP (prestations)
1985-87 aucunes données PP/2e Pilier Source : OFS/OFAS 1990 2000 2010 2012 2013 TM1
Recettes mio fr. 32 882 46 051 62 107 63 427 … 3,0%
dont contrib. sal. 7 704 10 294 15 782 16 944 … 3,2%
dont contrib. empl. 13 156 15 548 25 432 25 196 … –0,6%
dont produit du capital 10 977 16 552 15 603 15 294 … 4,0%
Dépenses 15 727 31 605 43 721 47 546 … 9,7%
dont prestations sociales 8 737 20 236 30 912 32 657 … 3,3%
Capital 207 200 475 000 617 500 667 300 … 7,5%
Bénéficiaires de rentes Bénéfic. 508 000 748 124 980 163 1 026 933 … 2,4%

AMal
1980-85 aucunes données
AMal Assurance obligatoire des soins 1990 2000 2010 2012 2013 TM1
Recettes mio fr. 8 869 13 930 22 528 24 992 … 5,0%
dont primes (à encaisser) 6 954 13 442 22 051 24 458 … 3,5%
Dépenses 8 417 14 056 22 123 23 584 … 3,9%
dont prestations 8 204 15 478 24 292 25 901 … 3,9%
dont participation d. assurés aux frais –801 –2 288 –3 409 –3 705 … 3,6%
Résultats des comptes 451 –126 405 1 408 … 29,3%
Capital 5 758 6 935 8 651 12 235 … 26,8%
Réduction de primes 332 2 545 3 980 3 968 … –2,5%

256 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Statistiques des assurances sociales OFAS, secteur Statistiques

Modification des dépenses en pour-cent depuis 1980

AA AA tous les assureurs 1990 2000 2010 2012 2013 TM1


nouvelle
LAA en Recettes mio fr. 4 181 5 992 7 863 7 599 … –3,6%
vigueur
1.1.84
dont contrib. des assurés 3 341 4 671 6 303 6 117 … –3,6%
Dépenses 3 259 4 546 5 993 6 199 … 2,2%
dont prestations directes avec rench. 2 743 3 886 5 170 5 361 … 2,3%
Résultats des comptes 923 1 446 1 870 1 401 … –22,9%
Capital 12 553 27 322 42 817 47 151 … 5,0%

AC
194,7% AC Source : seco 1990 2000 2010 2012 2013 TM1
Recettes mio fr. 736 6 230 5 752 6 958 6 890 –1,0%
dont contrib. sal./empl. 609 5 967 5 210 6 350 6 269 –1,3%
dont subventions – 225 536 599 611 2,0%
Dépenses 452 3 295 7 457 5 800 6 302 8,7%
Résultats des comptes 284 2 935 –1 705 1 158 587 –49,3%
Capital 2 924 –3 157 –6 259 –3 474 –2 886 –16,9%
Bénéficiaires3 Total 58 503 207 074 322 684 279 023 296 151 6,1%

APG 18,6% 52,9% 56,9% APG 1990 2000 2010 2012 2013 TM1
Recettes mio fr. 1 060 872 1 006 1 753 1 779 1,5%
dont cotisations 958 734 985 1 727 1 766 2,3%
Dépenses 885 680 1 603 1 606 1 638 2,0%
Résultat d’exploitation total 175 192 –597 148 141 –4,5%
Capital 2 657 3 455 412 657 798 21,5%

AF 1990 2000 2010 2012 2013 TM1


–23,3% –21,7%
Recettes mio fr. 2 689 3 974 5 074 5 465 … 6,5%
dont agric. 112 139 149 138 … –2,6%

Compte global des assurances sociales (CGAS*) 2012 AVS


Branches des assurances sociales Recettes TM Dépenses TM Résultats Capital
mio fr. 2011/2012 mio fr. 2011/2012 des comptes mio fr. PC à l’AVS
mio fr. CGAS : Recettes (noir) et
AVS (CGAS) 39 867 1,8% 38 798 2,0% 1 070 42 173 AI dépenses (gris) 2012
PC à l’AVS (CGAS) 2 525 3,5% 2 525 3,5% – –
AI (CGAS) 9 760 2,7% 9 295 –2,0% 465 –9 352 PC à l’AI
PC à l’AI (CGAS) 1 911 4,1% 1 911 4,1% – –
PP
PP (CGAS) (estimation) 63 427 3,0% 47 546 9,7% 15 880 667 300
AMal (CGAS) 24 992 5,0% 23 584 3,9% 1 408 12 235 AMal
AA (CGAS) 7 599 –3,6% 6 199 2,2% 1 401 47 151
APG (CGAS) 1 736 1,5% 1 606 –0,3% 130 657 AA
AC (CGAS) 6 958 –3,7% 5 800 3,7% 1 158 –3 474 APG
AF (CGAS) 5 465 6,5% 5 435 4,6% 31 1 203
Total consolidé (CGAS) 163 623 2,5% 142 081 4,7% 21 542 757 894 AC
* CGAS signifie : selon les définitions du compte global des assurances sociales. De ce fait, les données peuvent différer AF
de celles des comptes d’exploitation propres à chaque assurance sociale. Les recettes n’incluent pas les variations de
valeur du capital. Les dépenses ne comprennent pas la constitution de provisions et réserves.

Indicateurs d’ordre économique comp. CHSS 6/2000, p. 313-315


en milliers
2000 2005 2009 2010 2011 2012
Taux de la charge sociale4 (indicateur selon CGAS) 25,3% 26,2% 25,9% 25,9% 26,4% 26,8% Chômeurs inscrits
Taux des prestations sociales5 (indicateur selon CGAS) 19,1% 21,4% 21,0% 20,7% 20,5% 20,8% depuis 1980
(depuis 1984
­chômeurs partiels
Chômeurs(ses) ø 2011 ø 2012 ø 2013 mai 14 juin 14 juil. 14 incl.)
Chômeurs enregistrés 122 892 125 594 136 524 130 310 126 632 127 054
Taux de chômage6 2,8% 2,9% 3,2%

Démographie Scénario A-17-2010 « solde migratoire 40 000 »


2012 2015 2020 2030 2040 2050
Rapport dépendance <20 ans7 33,2% 32,9% 33,2% 35,0% 34,3% 34,0%
Rapp. dép. des pers. âgées7 29,2% 31,1% 33,7% 42,6% 48,0% 50,4%

1 Taux de modification annuel le plus récent = TM. 6 Chômeurs enregistrés par rapport à la population résidente active.
2 1.1.2011: transfert de 5 milliards de francs de l’AVS à l’AI. 7 Rapport entre les personnes âgées de 0 à 19 ans et les personnes actives.
3 Le nombre de chômeurs se trouve à la fin du tableau. Rapport entre les rentiers et les personnes actives.
4 Rapport en pour-cent des recettes des assurances sociales au produit intérieur brut. Personnes actives : de 20 ans jusqu’à l’âge de la retraite (H 65 / F 64).
5 Rapport en pour-cent des prestations des assurances sociales au produit intérieur
brut.
Source : Statistique des assurances sociales suisses 2014 de l’OFAS ; SECO, OFS.
Informations : salome.schuepbach@bsv.admin.ch

Sécurité sociale CHSS 4/2014 257


Informations pratiques Calendrier

Education par les pairs

Calendrier Lors de la première Académie des pairs en


2011, les exposés et discussions ont donné lieu à
Réunions, congrès, cours
diverses recommandations pour le travail fondé
Date Manifestation Lieu Renseignements sur l’approche de l’éducation par les pairs. Six
et inscriptions blocs thématiques ont été identifiés comme défis
3.9.2014 Congrès national pour la Université Promotion Santé Suisse principaux pour appliquer des projets avec les
promotion de la santé en de Fribourg www.promotionsante.ch
pairs.
entreprise 2014 – La santé à
tous les âges: ce que les Cette année, l’académie souhaite se concentrer
entreprises et leurs sur ces six défis, ou «casse-tête» que présente
collaborateurs peuvent faire
l’approche de l’éducation par les pairs et passer
1-3.9.2014 Université d’été des Hôtel Mirabeau, Unité de formation continue de la
professionnels romands du Lausanne Haute école de travail social et de
en revues les expériences faites dans ce domaine.
travail social – L’urgence dans la santé | EESP | Lausanne Six brefs exposés mettront en lumière les théories
le travail social www.eesp.ch et pratiques propres à ces six champs d’action.
Inscription: tél. 021 651 03 10
formation.continue@eesp.ch
Parmi les intervenants figure Claudia Paiano,
3/4.9.2014 10e journées fribourgeoises de Université Service de la formation continue cheffe de projet du programme national «Jeunes
droit social – 20 ans de Fribourg de l’Université de Fribourg et médias», qui parlera du travail en réseau.
d’encouragement à la propriété Rue de Rome, 1700 Fribourg
du logement au moyen de la Tél.: 026 300 73 47
prévoyance professionnelle formcont@unifr.ch
www.unifr.ch/formcont Politiques de lutte contre la pauvreté
17.9.2014 Académie des pairs 2014 – Zentrum für Groupe d’experts Formation
Education par les pairs : 6 Kulturproduktion, Dépendances (GFD) La déclaration universelle des droits humains
casse-tête à résoudre Berne www.weiterbildungsucht.ch/
(cf. présentation ci-après) peerakademie2014/ considère la lutte contre la pauvreté comme une
18.9.2014 Congrès 2014 de l’ASPS – Le Hôtel Bern, Berne Association suisse de politique
mission fondamentale de nos sociétés. En Europe,
mythe du marché dans la sociale les politiques les plus connues sont celles qui
politique sociale www.svsp.ch/fr/manifestations/ visent à garantir un revenu minimum et les poli-
2/3.10.2014 Colloque – Politiques de lutte Université de Céline Schmid Botkine, Centre de tiques d’insertion. Mais qu’en est-il des politiques
contre la pauvreté Lausanne, IDHEAP compétences suisse en sciences
(cf. présentation ci-après) sociales FORS de formation, de logement, de santé, de lutte
colloquepauvrete2014@unil.ch contre l’endettement, d’aide en nature ou encore
www.vd.ch/evenements-social de l’enfance et de la vieillesse? Qui les organise
10.10.2014 Journée mondiale de la santé HES de Sierre VS Coordination romande des et avec quels résultats ? Quelles sont les ten-
mentale – Mon expérience est associations d’action en santé
une ressource psychique (CORAASP) dances actuelles en matière de politiques de lutte
www.coraasp.ch contre la pauvreté? Ce colloque vise à débattre
23.10.2014 9e mental health forum – Santé Hôtel Bellevue, www.mentalhealthforum.ch/fr de ces questions d’une brûlante actualité entre
psychique, capacité mentale et Berne conférences plénières et ateliers. Les milieux de
emploi en Suisse
la pratique et universitaires pourront échanger
4.11.2014 Journée de l’Egalité 2014 – Hôtel Bern, Berne Conseil Egalité Handicap
Participer pleinement aux AGILE.CH Les organisations de leurs points de vue pour mieux comprendre la
actions et aux décisions : personnes avec handicap situation et tracer de nouvelles pistes.
l’engagement politique des www.agile.ch
Parmi les intervenants, Gabriela Felder, direc-
personnes avec handicap
11.11.2014 Journée d’étude ASFRIS «Du Haute école de Association suisse pour la
trice du Programme national de prévention et de
contrôle social... au travail social, Formation, la Recherche et lutte contre la pauvreté de l’Office fédéral des
contre-rôle» Lausanne l’Intervention sociale (ASFRIS) assurances sociales, présentera la stratégie suisse
http://aifris.eu/08partenaires/
asfris/index.php
de lutte contre la pauvreté.
sempeyta@sunrise.ch
Société suisse du travail social
www.sgsa-ssts.ch
21.11.2014 et EPAS – Séminaire d’aide à la 21.11 à Editions EPAS Prévoyance
27.11.2014 responsabilité propre dans le Yverdon-les-Bains / Professionnelle
2e pilier 27.11 à Lausanne et Assurances Sociales SA
www.pps-epas.ch
20.11.2014 Conférence nationale – Vio- Kursaal, Berne Bureau fédéral de l’égalité entre
lence domestique : un danger femmes et hommes
pour la santé et un thème de www.bfeg.admin.ch
santé publique

258 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Informations pratiques Livres

Livres verte, Paris. 320 p. 30 francs environ. des donneurs de gamètes, GPA – et suscitent
ISBN : 978-2-70717-842-8. des débats très vifs. Toutes questionnent l’orga-
La seule dénonciation globale des nisation actuelle de la filiation que certains
Egalité / Inégalités inégalités sociales ne suffit pas, car souhaiteraient « dénouer » de la procréation.
toutes les inégalités ne se « valent » Allons-nous vers une nouvelle filiation ? Le
Brigitte Liebig et autres. Politiques pas : certaines sont visibles, d’autres droit doit-il accompagner l’évolution de la so-
d’égalité en Suisse : facteurs institu- moins, certaines sont perçues comme ciété? Pour répondre à ces questions, la collec-
tionnels de réussite et d’échec / Gen- injustes, d’autres non. Il faut donc tion «Place au débat» vous propose des ana-
der Equality Policies in Switzerland : pouvoir décrire et mesurer les inéga- lyses différentes d’une juriste et d’une
Institutional Factors of Success and lités sociales, mais aussi savoir ce que sociologue. Bien qu’axé sur le droit français, cet
Failure. 2014, Revue suisse de socio- nous en faisons et comment elles af- ouvrage offre des pistes de réflexion univer-
logie, Vol. 40, cahier 2, Editions Seis- fectent plus ou moins profondément selles.
mo, Zurich. 208 p. 48 francs. la vie et l’action des individus.
ISBN : 978-3-03777-147-1. En effet, si la conscience des inéga-
Ce numéro spécial de la Revue lités semble s’accentuer, elle ne dé- Handicap
suisse de sociologie se consacre aux bouche pas pour autant sur des formes
politiques d’égalité en Suisse à travers d’action collective véritablement inté- Marcel Nuss. Handicaps et sexualités. 2014,
neuf contributions d’auteurs divers. grées et organisées. Pour comprendre Dunod Edition, Paris. 272 p. 30 francs environ.
Le rôle de l’école est notamment mis ce paradoxe, il faut savoir comment ISBN: 978-2-10070-603-7.
en avant ou comment les systèmes ceux qui les subissent vivent avec les Nos sociétés ont par rapport à la question de
éducatifs cantonaux en Suisse gé- inégalités sociales, comment ils s’en la sexualité des personnes handicapées une
nèrent des parcours sexués de l’école accommodent plus ou moins, com- position paradoxale. Alors qu’on ne cesse de
à l’emploi et une ségrégation sexuelle ment l’expérience des injustices est proclamer le droit des personnes dépendantes
du travail. D’autres thèmes sont aussi construite... Il faut aussi connaître les à l’égalité des chances dans tous les domaines,
abordés, de certains usages linguis- principes de justice mobilisés par les on peine encore à reconnaître l’accompagne-
tiques très inégalitaires à la réparti- individus pour comprendre quelles ment à la vie affective et sexuelle comme un
tion du temps entre travail rémunéré, peuvent être leurs réactions face aux véritable sujet de société. Et ce malgré la grande
domestique et familial en passant par injustices. détresse des personnes concernées. En effet le
les écarts salariaux. Les sciences sociales, leurs analyses débat soulève des problèmes tout à la fois
et les critiques qu’elles développent d’ordres éthique, technique, médical, juridique
Martine Chaponnière et autres. sont susceptibles de nous aider à y et économique, mais il nous renvoie surtout à
Apprentissages entre école et entre- voir plus clair et à peser sur la vie nos tabous ainsi qu’à nos représentations des
prise. 2014, Nouvelles Questions politique et sociale. C’est là tout l’ob- personnes en situation de handicap. Marcel
Féministes Vol. 33, No 1, Antipodes, jectif de ce livre original, qui contient Nuss nous livre ici le premier recueil de témoi-
Lausanne. 168 p. 32 francs. les contributions des meilleurs spé- gnages intimes de personnes handicapées, mais
ISBN 978-2-88901-092-9. cialistes de la question. aussi de soignants, de conjoints, d’accompagna-
Au carrefour entre système scolaire teurs sexuels étrangers, d’institutionnels, de
et marché du travail, la formation pro- philosophes et de juristes. Il nous permet ainsi
fessionnelle est un espace particuliè- Famille de faire un point exhaustif et honnête sur la
rement intéressant à soumettre à question. Un collectif d’associations françaises
l’analyse féministe. Lieu majeur de Martine Gross, Claire Neirinck. et de Handicap International, a engagé une
socialisation professionnelle, elle pro- Parents – enfants: vers une nouvelle réflexion sur l’ensemble de ces sujets afin de
duit de futurs travailleurs destinés à filiation ? Question de droit et de promouvoir des échanges et permettre la
des professions fortement sexuées et société. 2014, La Documentation fran- construction de propositions d’actions avec les
ségréguées. A partir d’éclairages fran- çaise, Paris. 192 p. 10 francs environ. personnes concernées et les pouvoirs publics
çais, allemands et suisses, ce numéro ISBN : 978-2-11009-696-8. français.
met au jour quelques invariants : Au cours des dernières décennies
l’interdiction de transgresser les fron- les modèles familiaux ont considéra-
tières du genre, la perpétuation de la blement évolué (monoparentaux, Pauvreté
division sexuelle du travail et des sté- recomposés, homoparentaux…) et de
réotypes de genre et enfin la peur de nouvelles demandes d’adaptation du Claudia Schuwey, Carlo Knöpfel. Nouveau
l’avancée en mixité. droit aux réalités sociales émergent manuel sur la pauvreté en Suisse. 2014, Caritas,
– statut des tiers (beaux-parents, copa- Lucerne. 292 p. 42 francs. ISBN: 978-3-85592-
François Dubet et autres. Inégalités rents), ouverture de l’AMP aux 133-1.
et justice sociale. 2014, La Décou- couples de femmes, accès à l’identité

Sécurité sociale CHSS 4/2014 259


Informations pratiques Livres

Plus d’un million de personnes en lation et de la jurisprudence, notam- pas moins une réalité concrète qui tue, en Suisse,
Suisse vivent dans la pauvreté, ou ment en matière de protection de une femme toutes les deux semaines et qui
juste au-dessus du seuil de pauvreté. l’adulte. coûte des millions de francs par an à la société
Vivre dans la pauvreté, ce n’est pas Rédigé par des juristes et des méde- civile. Dès lors, ce type de violence ne peut plus
seulement avoir des difficultés finan- cins, issus de la pratique comme du être considéré comme relevant uniquement de
cières. C’est par exemple chercher du monde académique, ce recueil de la sphère privée. L’isolement des victimes, dû à
travail longtemps et épuiser son droit textes aborde les thèmes classiques l’incompréhension du phénomène, aux préjugés,
aux prestations de l’assurance-chô- du droit de la santé – consentement à la peur et à l’ignorance de structures d’aides,
mage. C’est s’abstenir de prendre éclairé, secret médical ou responsabi- n’est plus admissible. La violence domestique
rendez-vous chez le médecin en cas lité médicale – et les thèmes plus poin- est un cas complexe et aucune discipline ne
de douleurs ou de maladie, pour évi- tus de la biomédecine, tels que l’ana- peut, à elle seule, y faire face. Les solutions sont
ter des coûts. C’est n’avoir aucune lyse génétique, la procréation médi- donc l’affaire de tous. C’est pourquoi des pro-
formation, aucune perspective, ou un calement assistée ou encore l’assis- fessionnels romands créent le programme
statut de séjour incertain. Avant tout, tance au décès. «C’est assez», au début des années 2000. S’en-
c’est devoir rester à l’écart de la vie En faisant référence à une situation suit un long cheminement pour mettre en lu-
de la société. clinique suivie d’un exposé juridique mière la problématique de la violence domes-
Avec ce « Nouveau manuel sur la chaque fois que le sujet s’y prête, cet tique et construire un réseau de soins, de prise
pauvreté en Suisse» Caritas énonce ouvrage est conçu par son ancrage en charge et de prévention cohérent, soutenu
des faits et des chiffres qui donnent dans la réalité quotidienne comme un tant par le travail d’infirmiers, de travailleurs
une visibilité et une compréhension outil directement utilisable tant pour sociaux, de policiers, de médecins et de psycho-
de la pauvreté en Suisse. La publica- les praticiens du droit que pour les logues que de juges et de politiciens. Cet ou-
tion porte un regard exhaustif sur la professionnels de la santé. vrage parle de succès, d’échecs, d’espoirs, et il
question et en transmet une vue d’en- cherche avant tout à rendre sensible chaque
semble. Ses définitions claires et ses Hélène Martin, Jérôme Debons. Le citoyen à ce qui devrait être une évidence: pré-
représentations concrètes permettent soin et la politique. Cinq médecines venir la violence domestique et en faire une
aux milieux concernés, ainsi qu’à un non conventionnelles et l’assurance- affaire de santé publique.
large public de comprendre les méca- maladie. 2014, Editions EESP, Lau-
nismes de la pauvreté et de la sécu- sanne. 192 p. 35 francs. Christelle Avril. Les aides à domicile: un autre
rité sociale. ISBN : 978-2-88284-063-9. monde populaire. 2014, La Dispute, collection
La pauvreté n’est pas un problème En 1999, cinq «médecines complé- « Corps santé société », Paris. 288 p. 30 francs
individuel, mais un problème de so- mentaires» sont intégrées dans l’assu- environ. ISBN: 978-2-84303-184-7.
ciété. C’est pourquoi il faut mettre sur rance-maladie de base (LaMal). Reti- Ce livre nous fait plonger dans le monde des
pied une politique nationale axée sur rées en 2005, elles y sont réintégrées aides à domicile, dans les coulisses de leur tra-
la lutte et la prévention de la pau- – à l’essai – dès 2012. Quels enjeux vail et de leurs conditions d’existence. Il permet
vreté. Le « Nouveau manuel sur la politiques et financiers sont à l’origine de se représenter les contraintes qui pèsent sur
pauvreté en Suisse » donne des pistes de cette valse-hésitation? A-t-elle des les femmes qui assurent les soins quotidiens aux
pour que la Suisse puisse offrir une effets sur les pratiques d’assurance? personnes dépendantes dans l’isolement des
sécurité sociale qui couvre tous ses Et sur les choix de thérapies ? Cet domiciles privés mais donne aussi à voir toutes
habitants. ouvrage répond à ces questions en les formes de ressources et de gratification
montrant que le débat scientifique et qu’elles puisent dans cette relation.
politique sur la médecine légitime qui Il s’adresse à tous les professionnels du sec-
Santé publique perdure depuis des années a conduit teur (personnels et responsables politiques en
à un système d’assurance-maladie charge de la dépendance, médecins, direction
Romano La Harpe, Marinette Um- labile, complexe et opaque qui n’est et employés des structures associatives, person-
mel, Jean-François Dumoulin. Droit guère en phase avec les pratiques des nel infirmier et aide-soignant, aides à domicile)
de la santé et médecine légale. 2014, assurés. qui souhaitent voir cette activité mieux recon-
Médecine et hygiène, Chêne-Bourg. nue (mieux payée, plus qualifiée, plus protégée).
840 p. 129 francs. Marie-Claude Hofner, Nataly Viens Les personnes âgées et leurs familles, qui se
ISBN : 978-2-88049-316-5. Python. Violences domestiques. Prise posent la question de l’emploi d’une aide à
Succédant aux trois éditions de en charge et prévention. 2014, PPUR, domicile, trouveront des éléments pour les
Médecin et droit médical, ce nouveau Le Savoir suisse, Lausanne. 144 p. aider à faire leurs choix et orienter leurs atti-
manuel Droit de la santé et médecine 17.50 francs. ISBN: 978-2-88915-052-6. tudes avec ces professionnelles. Ce livre
légale offre un vaste panorama de ces Longtemps cachée, déniée, consi- s’adresse aussi aux étudiants des métiers du
deux domaines, en intégrant les déve- dérée comme honteuse par ses vic- social et de la santé, ainsi que ceux en sciences
loppements les plus récents de la légis- times, la violence domestique n’en est sociales.

260 Sécurité sociale CHSS 4/2014


Nouvelles publications

Source, langues,
prix
Assurances sociales 2013. Rapport annuel selon l’article 76 LPGA. 318.121.13F
gratuit*
Assurances sociales en Suisse 2013 (Statistique de poche). 318.001.13F
gratuit*
Evaluation Anstossfinanzierung. Nachhaltigkeit der Finanzhilfen für familienergänzende 318.010.15/13D
Kinderbetreuung und Vereinbarkeit von Familie und Erwerbsarbeit oder Ausbildung gratuit*
(allemand avec résumé en français). Aspects de la sécurité sociale, rapport de recherche no 15/13.
Evaluation chili – konstruktive Konfliktbearbeitung (allemand avec résumé en français). 318.010.14/13D
Aspects de la sécurité sociale, rapport de recherche no 14/13. gratuit*
Evaluation der Qualität der Hörgeräteversorgung (allemand avec résumé en français). 318.010.1/14D
Aspects de la sécurité sociale, rapport de recherche no 1/14. gratuit*
Gesamtsicht über die Finanzierungsperspektiven der Sozialversicherungen bis 2035 (allemand 318.010.16/13D
avec résumé en français). Aspects de la sécurité sociale, rapport de recherche no 16/13. gratuit*
Kooperationsmodelle im Bereich Prävention – Intervention – Repression. 318.010.13/13D
Aspects de la sécurité sociale, rapport de recherche no 13/13. gratuit*
Psychische Gesundheit und Beschäftigung: Schweiz (OECD) (allemand avec résumé en fran- 318.010.12/13D
çais). Aspects de la sécurité sociale, rapport de recherche no 12/13. gratuit*
Statistique des assurances sociales suisses 2013. 318.122.13F
gratuit*

* Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL), vente de publications fédérales, 3003 Berne.
vente.civil@bbl.admin.ch
www.publicationsfédérales.ch
Sécurité sociale (CHSS)
La revue, lancée en 1993, paraît 6 fois par an. Chaque numéro contient un dossier sur un thème
d’actualité. Les dossiers publiés dès 2012:
No 1/12 Travail et soins aux proches
No 2/12 Système de santé suisse
No 3/12 Dix ans d’actions récursoires AVS/AI – un bilan
No 4/12 Vieillissement actif et solidarité intergénérationnelle
No 5/12 Recherche « Sécurité sociale »
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