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Compétences individuelles et employabilité : essai de

clarification de leur articulation


Sabrina Loufrani-Fedida, Ève Saint-Germes
Dans @GRH 2013/2 (n° 7), pages 13 à 40
Éditions Association de Gestion des Ressources Humaines
ISSN 2034-9130
ISBN 9782804184506
DOI 10.3917/grh.132.0013
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Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 13

COMPÉTENCES INDIVIDUELLES
ET EMPLOYABILITÉ : ESSAI DE
CLARIFICATION DE LEUR ARTICULATION
Sabrina LOUFRANI-FEDIDA
Maître de Conférences en Sciences de Gestion
Université de Nice-Sophia Antipolis (UNS)
Laboratoire GREDEG UMR 7321 UNS-CNRS
sabrina.loufrani@unice.fr
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Eve SAINT-GERMES
Maître de Conférences en Sciences de Gestion
Université de Nice-Sophia Antipolis (UNS)
Laboratoire GREDEG UMR 7321 UNS-CNRS
eve. saint-germes@unice.fr

Résumé FR

Si l’employabilité est aujourd’hui reconnue comme un objectif majeur de la gestion des res-
sources humaines (GRH), son opérationnalisation et son intégration aux pratiques demeure
un champ de recherche en construction. La gestion des compétences individuelles est l’un
des leviers principaux de cette GRH au service de l’employabilité, mais peu de travaux en
sciences de gestion intègrent compétences et employabilité dans leur analyse, et, s’ils le
font, ce n’est que depuis peu (Van Der Heijde et al., 2006 ; Wittekind et al., 2010 ; Dietrich,
2010 ; Baruel-Bencherqui et al., 2011 ; De Vos et al., 2011 ; Raoult et al., 2011).
Cet article vise à investiguer et clarifier les liens entre ces deux concepts clés en GRH, en
proposant des éléments de réponse à la question suivante : Comment s’articulent la
gestion des compétences individuelles et l’employabilité ? À partir d’une revue
de la littérature sur la gestion des compétences d’une part, l’employabilité d’autre part,
puis croisée, nous proposons trois niveaux d’articulation possible. Tout d’abord, l’articu-
lation conceptuelle s’appuie sur le cadre théorique des capacités dynamiques organisa-
tionnelles pour faire émerger le « savoir-évoluer » comme une compétence constitutive
de l’employabilité. Ensuite, d’un point de vue pratique, l’articulation des compétences
individuelles et de l’employabilité passe par les démarches de GPEC, offrant le cadre
nécessaire au développement de pratiques adaptées d’évaluation, de formation et de
mobilité. Enfin, une articulation critique est proposée à partir d’une discussion de la mise
en pratique du partage des responsabilités de la gestion des compétences des individus
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et de leur employabilité, ainsi que du développement de la communication RH tant du


côté employeur que du côté salarié.

Mots-clés
Compétences individuelles, employabilité, capacités dynamiques, GPEC, pratiques RH

Abstract EN

If employability is nowadays recognized as a major objective of human resources manage-


ment (HRM), its operationalization and integration into practices remains a field of research
in construction. Competence management is one of the main levers of this HRM oriented
employability. Nevertheless, very few and recent studies to our knowledge address both
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competencies and employability (Van Der Heijde et al., 2006 ; Wittekind et al., 2010 ;
Dietrich, 2010 ; Baruel-Bencherqui et al., 2011 ; De Vos et al., 2011 ; Raoult et al., 2011).
This paper aims to investigate and clarify the relationships between these two key
concepts in HRM, offering answers to the following question: How are competence
management and employability articulated? From a literature review on competence
management on the one hand, employability on the other hand, then cross, we propose
three levels of articulation. First, the conceptual articulation is based on the theoretical
framework of organizational dynamic capabilities. We suggest the “adaptative capability”
as a constituent competence of employability. Second, from a practical point of view, the
articulation between competencies and employability is concretized through the “GPEC
agreements” (occupations and competencies forecast management). These agreements
offer the necessary framework for the development of assessment, training, and mobility
practices. Third, we propose a critical articulation from a discussion of the implementa-
tion of shared responsibility for competence management and employability, as well as
the development of HR communication (employer branding and self-marketing).
Keywords
Competencies, employability, dynamic capabilities, GPEC agreements (occupations and
competencies forecast management), HR practices

INTRODUCTION
Si l’employabilité est aujourd’hui reconnue comme un objectif majeur de la gestion des
ressources humaines (GRH), son opérationnalisation et son intégration aux pratiques
demeure un champ de recherche en construction. La gestion des compétences indivi-
duelles est l’un des leviers principaux de cette GRH au service de l’employabilité, mais
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 15

peu de travaux en sciences de gestion intègrent compétences et employabilité dans leur


analyse, et, s’ils le font, ce n’est que depuis peu.
Plus précisément, malgré la multitude de travaux consacrés aux compétences d’une
part, et à l’employabilité d’autre part, un nombre relativement limité d’études a été
entrepris pour comprendre comment s’articulent ces deux concepts clés de la GRH. En
fait, d’un côté, les travaux sur le management des compétences ne s’intéressent que
marginalement à l’employabilité, notamment en considérant cette dernière comme un
objectif à atteindre, une finalité managériale. D’un autre côté, les travaux sur l’employa-
bilité regardent la gestion des compétences comme un levier RH parmi d’autres de sa
politique de développement. Ce n’est que depuis récemment que le couplage entre com-
pétences individuelles et employabilité est au cœur des travaux (Van Der Heijde et al.,
2006 ; Wittekind et al., 2010 ; Dietrich, 2010 ; Baruel-Bencherqui et al., 2011 ; De Vos et
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al., 2011 ; Raoult et al., 2011).
Les recherches que nous avons entreprises ont pour ambition de contribuer à combler
cette articulation déficiente, et cet article vise justement à investiguer et clarifier les liens
entre ces deux concepts centraux en GRH. L’objectif final de notre projet de recherche
est de proposer une représentation rendant intelligible la complexité de l’articulation
entre compétences individuelles et employabilité. En d’autres termes, nous cherchons
à apporter des éléments de réponse à la question suivante : Comment s’articulent la
gestion des compétences individuelles et l’employabilité ?
Pour ce faire, nous proposons dans cet article une approche purement conceptuelle et
théorique, première étape à toute démarche de recherche. En particulier, notre approche
vise à clarifier les concepts et leurs liens, en reprenant la démarche pragmatique pro-
posée par Suddaby (2010), laquelle s’organise autour de quatre éléments constitutifs :
définitions, conditions d’exercice (ou contextuelles), relations entre les concepts (ou
construits), et cohérence logique. Ces quatre éléments nous servent d’unités d’analyse
des compétences, de l’employabilité et de leurs relations.
Cet article, qui se situe ainsi aux interfaces de la démarche compétence et de l’employa-
bilité, comprend trois parties qui prennent en compte les quatre éléments de Suddaby
(2010). Ces derniers ne seront pas repris dans l’ordre établi par l’auteur, dans la mesure
où nous choisissons d’approfondir nécessairement les relations entre les concepts, les-
quelles constituent l’objet central de notre étude. Dans une première partie, nous dressons
un panorama synthétique des travaux portant spécifiquement sur les compétences indi-
viduelles et la place de l’employabilité dans ces travaux. Dans une deuxième partie, nous
présentons une revue de la littérature spécialisée sur l’employabilité et la place des com-
pétences individuelles dans cette dernière. Ces deux premières parties nous permettent de
définir les concepts, de présenter leurs conditions d’exercice, et de poser les fondements
existants des relations entre les concepts. Enfin, dans une troisième partie, nous abordons
la question des interfaces entre compétences individuelles et employabilité, en proposant
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trois niveaux d’articulation : conceptuel, pratique et critique. Cette troisième partie, qui
constitue le principal apport de ce travail, offre une analyse plus approfondie et cohérente
des relations entre les concepts, nous permettant de proposer en conclusion une représen-
tation des trois niveaux de l’articulation entre compétences individuelles et employabilité.

1. REVUE DE LITTÉRATURE SUR LA GESTION


DES COMPÉTENCES INDIVIDUELLES :
QUELLE PLACE POUR L’EMPLOYABILITÉ ?
L’objectif est ici de réaliser une synthèse de la littérature spécifique sur la gestion des
compétences individuelles dans le champ de la GRH (1.1), et de comprendre la place
jouée par l’employabilité dans ces travaux (1.2).
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›› 1.1. La gestion des compétences individuelles
Émergeant d’abord dans le champ de la linguistique, la notion de compétence indivi-
duelle (CI) a connu depuis la fin des années 1980 un succès grandissant dans des disci-
plines aussi diverses que la psychologie, l’ergonomie, les sciences de l’éducation et de
la formation, la sociologie du travail, sans oublier bien sûr l’intérêt accru que lui porte la
GRH. En effet, ces dernières années, face à l’évolution des technologies de l’informa-
tion et de la communication (TIC), la mondialisation de la concurrence et l’émergence
de nouvelles configurations organisationnelles, la compétence individuelle est devenue
l’un des termes clés de la GRH. Pour de nombreux auteurs, la notion de compétence est
vue comme une nouvelle logique de GRH (Courpasson et al., 1991 ; Parlier, 1996), voire
comme le « pivot de la gestion des ressources humaines » (Pichault et al., 2000, p. 128).
Quant à Zarifian (1988), il voit dans la compétence, l’émergence d’un nouveau modèle
d’organisation et de gestion de la main-d’œuvre. C’est ainsi que, dans les années 1990,
la majorité des travaux s’est attachée à définir ce concept, qualifié à l’époque « d’attrac-
teur étrange » (Le Boterf, 1994) et dont le succès tiendrait pour partie « à la polysé-
mie du mot et à la difficulté d’en donner des définitions rigoureuses » (Laroche et al.,
1998, p. 15). Pour notre part, et en nous appuyant sur les travaux des auteurs majeurs
en gestion des compétences (Gilbert et al., 1992 ; Le Boterf, 1994 ; Defélix, 2003 ;
Retour, 2005 ; Retour et al., 2009 ; Dietrich et al., 2010), nous comprenons la notion
de CI comme étant la capacité d’un individu, à mobiliser et à combiner des ressources
(connaissances, savoir-faire et comportements), en vue de mettre en œuvre une activité
ou un processus d’action déterminé. Cette définition présente l’intérêt de décrire à la
fois la nature et les conséquences de la compétence. D’une part, au niveau de la nature
de la CI, c’est encore le triptyque, résonnant comme un slogan, du « savoir, savoir-faire,
savoir-être », qui représente, dans la pratique, l’une des définitions de la CI la plus
répandue (Courpasson et al., 1991 ; Durand, 2000). Même si ce triptyque fait l’objet de
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 17

nombreux débats et critiques, son principal intérêt est son caractère didactique : il est
simple, compréhensible et facile à retenir. D’autre part, au niveau des conséquences
de la CI, les définitions proposées notamment par Meignant (1990), Gilbert et al. (1992)
ou encore Le Boterf (1994), montrent que la CI est fortement contingente à une situa-
tion professionnelle donnée et correspond donc à un contexte. Un individu n’est pas
compétent en lui-même mais par rapport à quelque chose. En effet, des personnes qui
possèdent des connaissances ou des capacités peuvent ne pas savoir les mobiliser de
façon pertinente en situation de travail. Par conséquent, c’est la situation qui révèle les
compétences réelles détenues par l’individu. C’est ainsi que la définition de la CI a été
initialement pensée de manière très « contextualisée ».
En outre, Retour (2005) propose d’aller plus loin dans la caractérisation de la CI, en
considérant quatre niveaux de CI : les compétences requises par un emploi ou un
métier ; les compétences mobilisées par un individu dans l’exercice de sa fonction ; les
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compétences détenues (disponibles) par un individu à un moment donné ; et enfin, les
compétences potentielles d’un individu (non encore mises en œuvre). Concernant les
trois premiers niveaux de la CI (requises, mobilisées et détenues), nous retrouvons bien
l’empreinte de la « contextualisation » (emploi, exercice de la fonction, moment donné).
Toutefois, concernant le 4e niveau de la CI, nous constatons que les compétences poten-
tielles ont été « pensées », mais ne sont pas clairement définies : que devient la situation
de travail lorsque l’on s’intéresse aux CI potentielles ? Elles sont souvent envisagées
comme étant transversales, transférables, de prospective, dans la mesure où, comme
le souligne Retour (2005), les compétences potentielles relèvent du domaine privilégié
de la gestion des potentiels et des carrières. Les chercheurs comme les praticiens en
GRH ont alors du mal à penser une CI qui serait transversale, transférable ou potentielle,
c’est-à-dire moins liée à une situation de travail donnée.
Enfin, depuis le début des années 2000, les chercheurs et praticiens en GRH ont étudié
comment gérer les CI. De là est née la gestion, puis le management des CI. Dans cette
perspective, l’objectif de la GRH est d’obtenir des salariés les meilleures CI, c’est-à-dire
les meilleurs niveaux de savoirs, savoir-faire, savoir-être exigés pour chaque emploi. Nous
considérons, à l’instar de Loufrani-Fedida (2008), que le management des CI désigne
l’ensemble des actions managériales engagées par une (ou des) organisation(s) afin de
les gérer et de les développer. Ainsi, manager les compétences signifie à la fois les gérer,
c’est-à-dire élaborer et appliquer des règles de gestion (Dietrich et al., 2010), et les
développer au moyen de l’un des deux modes d’apprentissage que sont l’exploitation et
l’exploration1 (March, 1991). En effet, à défaut d’être stimulée, entretenue et protégée,
la compétence risque de s’estomper (Prahalad et al., 1990). Les leviers RH qu’il convient

[1] Brièvement, l’apprentissage par exploitation consiste à exploiter des régularités, à apprendre par la pratique
répétée et permet d’affronter des situations de gestion présentant une certaine récurrence, alors que l’apprentissage
par exploration permet la recherche de nouvelles opportunités de développement pour les compétences (March, 1991).
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alors d’actionner reposent principalement sur la gestion prévisionnelle des emplois et


des compétences (GPEC), le recrutement, l’évaluation, la formation, la rémunération, la
mobilité et la gestion des carrières, concourant, conjointement, à instrumentaliser large-
ment le management des CI (Defélix, 2003 ; Retour, 2005 ; Dietrich et al., 2010). L’indi-
vidu est ainsi considéré comme un capital, un « portefeuille de compétences » qu’on peut
entretenir, développer, optimiser par un management et des pratiques de GRH adéquats
(Dietrich et al., 2010). L’entreprise recrute un individu à partir des compétences qu’il
détient (ou déclare détenir), en prenant bien soin qu’elles soient en cohérence avec les
compétences requises et définies dans la fiche d’emploi. Elle mesure et évalue les com-
pétences d’un salarié à partir d’un bilan de compétences, d’un entretien d’appréciation et
d’une grille de niveaux dans laquelle elle le positionne. Elle augmente les compétences
du salarié grâce à la formation, à l’issue d’un entretien qui permet de définir ses besoins.
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L’entreprise améliore l’implication du salarié avec une rémunération équitable et satisfait
son besoin de reconnaissance avec une promotion. La mobilité favorise l’élargissement
et la diversification de ses compétences. La validation des acquis de l’expérience (VAE)
reconnaît ses compétences et lui octroie éventuellement un diplôme. L’entretien de mi-
carrière les réactive et les ajuste à un contexte de maintien en emploi. Enfin, l’entreprise
accroît la fidélité du salarié par une bonne GRH et sa performance par un bon manage-
ment dont on ne cesse de moderniser les termes et les méthodes (Dietrich et al., 2010).

›› 1.2. La place de l’employabilité dans les travaux sur la gestion


des compétences individuelles
Dans la littérature spécialisée sur le management des CI, nous constatons que l’em-
ployabilité joue un rôle « de second ordre », en tant qu’objectif à atteindre. Nous pou-
vons lire régulièrement que l’objectif d’une gestion des compétences est de maintenir
l’employabilité des collaborateurs de l’entreprise. En d’autres termes, selon les travaux
fondateurs de la gestion des CI, l’employabilité est essentiellement une finalité managé-
riale, l’objet de gestion étant les compétences des individus qu’un management efficace
permet d’optimiser. En particulier, et nous le développerons plus loin, la question de
l’employabilité du salarié occupe une place majeure dans les accords et les travaux sur
la GPEC, dans lesquels un des objectifs annoncés est justement de maintenir l’employa-
bilité des collaborateurs.
Dans un essai consacré au management par les compétences, le sociologue Reynaud
(2001) analyse les textes produits par le Medef sur la logique compétence, lors des
Journées Nationales de la Formation à Deauville en 1998. Il y voit l’expression d’une doc-
trine, d’une stratégie de l’acteur patronal pour « offrir aux salariés, aux représentants des
salariés, des règles de vie communes acceptables » (Reynaud, 2001, p. 8). Pour l’auteur,
ce qui est en jeu, c’est bien la relation d’emploi entre employeur et employé et les pro-
blèmes qui s’y posent quand le travail et son environnement changent et surtout quand
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 19

ces changements s’accélèrent. En d’autres termes, c’est bien à un nouveau « deal »2


entre employeur et employé qu’invite le management des compétences.
Du point de vue de la relation d’emploi, la démarche compétences tend à substituer
une obligation de résultat à l’obligation de moyens inscrite dans le contrat de travail.
Le salarié ne doit pas se contenter de mettre ses compétences et son implication au
service de l’entreprise, pendant un temps donné, mais il doit obtenir des résultats.
Pour Reynaud (2001), c’est la question de l’emploi qui est au centre de l’évolution de
l’échange salarial, tel que formulé par le Medef : non pas un salaire contre un emploi,
mais une performance contre une employabilité. L’employabilité définit le contrat d’en-
gagement de l’entreprise à l’égard du travailleur (conceptualisé sous forme de contrat
psychologique) : là où elle ne peut plus garantir l’emploi, elle échange une promesse
d’employabilité contre un résultat. Or, la plupart des travaux sur la gestion des com-
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pétences ignorent ces questions. Ce sont les recherches sur les nouvelles formes de
carrière qui intègrent et analysent cette reconfiguration de la relation d’emploi. En effet,
selon le courant des carrières nomades (Cadin et al., 1997), les contrats psychologiques
de type transactionnels se substituent progressivement aux contrats psychologiques
relationnels. Les premiers s’appuient sur un modèle marchand et décrivent un échange
ponctuel de prestations (Arthur et al., 1996). Les seconds sont élaborés autour de rela-
tions d’emploi durables et fondées sur la confiance et la sécurité. L’employabilité est
alors l’engagement pris par l’employeur, et devient le substitut à la sécurité dans le
contrat psychologique. Dany (2001) précise également que les niveaux d’engagement
sont différents selon les promesses d’employabilité.
La nature du nouveau deal entre employeur et employé est la suivante : en contribuant
à la performance de l’entreprise, le salarié développe des compétences et garantit ainsi
sa capacité à se maintenir en emploi. Pour assurer cette « performance » du salarié,
l’entreprise s’engage à développer ses compétences, à lui en donner les moyens. Pour
Reynaud (2001), ainsi que Dietrich et al. (2010), cet échange est très inégal et peu
favorable a priori au salarié. Coutrot (1999) souligne à cet égard les risques de la « coo-
pération forcée » des salariés dans le système d’emploi social libéral : les nouveaux
modes de GRH ont comme conséquences des pathologies telles que la souffrance au
travail ou le harcèlement moral. L’employabilité est l’une des valeurs et des dimensions
structurantes de ce nouveau modèle social de l’emploi, dans lequel « il s’agit d’offrir à
chacun une chance de lutter à armes égales dans la compétition pour les bons emplois :
formation professionnelle continue, formation tout au long de la vie, développement des
compétences et de l’adaptabilité » (ibid., p. 92). Ce modèle pose la question de la mar-
chandisation du travail et des relations d’emploi.

[2] Nous empruntons le terme de « deal » à Dietrich et al. ( 2010, p. 120) pour qualifier l’évolution de l’échange salarial.
20 @GRH • 07/2013

2. REVUE DE LITTÉRATURE SUR L’EMPLOYABILITÉ :


QUELLE PLACE POUR LES COMPÉTENCES
INDIVIDUELLES ?
L’objectif de cette deuxième partie est de voir ce que la littérature spécifique sur l’em-
ployabilité nous apprend (2.1), et en particulier, concernant la place jouée par les CI dans
ces travaux (2.2).

›› 2.1. La gestion de l’employabilité


Si l’employabilité est une notion ancienne, elle ne s’impose qu’à la fin des années 1990
pour caractériser et traiter les problèmes d’emploi et de formation du côté des pouvoirs
publics et des entreprises (Dietrich, 2010). Elle connaît sa pleine légitimité avec la mon-
tée du chômage, et la recherche d’une sécurisation des parcours professionnels sur un
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marché du travail de plus en plus volatile et nécessitant une flexibilité accrue (Gazier,
2003 ; Van Burren 2003 ; Brown et al., 2003 ; Mac Quaid et al., 2005). En effet, dans un
contexte de changement permanent et de remise en question de la sécurité de l’emploi,
l’employabilité serait la nouvelle condition nécessaire au développement d’un avantage
compétitif durable pour l’entreprise et du succès de carrière pour l’individu (Van der Heijde
et al., 2006). Plutôt développé dans les sciences économiques et par les praticiens dans
un premier temps, le concept d’employabilité intègre les sciences de gestion à la fin des
années 1990, tout en continuant à se développer dans des champs de littérature très
divers, notamment en psychologie et en sociologie (Van der Heijde et al., 2006 ; Fugate
et al., 2008). Cette diversité ne facilite pas le travail de définition de l’employabilité, et
fait objet de débats dans la littérature. Ceci étant, l’employabilité englobe les capaci-
tés à obtenir un premier emploi à la sortie du système éducatif (employabilité initiale),
à conserver un emploi au sein d’une organisation (employabilité interne) et à trouver
un autre emploi si nécessaire (employabilité externe, Hillage et al., 1999). Müller et
al. (2011) interprètent alors ces trois capacités en termes de formation, de mobilité et
d’orientation professionnelle du salarié, permettant de voir émerger les pratiques de
management favorables à l’employabilité. Pour notre part, et en nous appuyant sur les
travaux des auteurs majeurs sur l’employabilité (Hillage et al., 1999 ; Finot, 2000 ; Gazier,
2003 ; De Grip et al., 2004), nous retenons une définition large de l’employabilité, comme
une capacité générale et dynamique à l’emploi des individus, actuelle et potentielle, sur
les marchés internes et le marché externe du travail. Cette définition présente l’intérêt
de considérer l’employabilité comme un processus permanent, reposant sur l’interac-
tion complexe de facteurs individuels, organisationnels et socio-économiques. À titre
d’exemple, Finot (2000) décrit l’observatoire de l’employabilité de l’accord Usinor Sollac
Cap 2000, qui propose d’opérationnaliser l’employabilité en tenant compte notamment
du portefeuille de compétences et de l’adaptabilité (facteurs individuels), de l’ancienneté
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 21

et de la date de la dernière formation (facteurs organisationnels), ainsi que du niveau


d’études et de la catégorie socioprofessionnelle (facteurs socio-économiques).
Dans la littérature, il existe des conceptualisations multiples de l’employabilité, héritées
de son histoire et de sa maturation progressive. Les travaux de Gazier (2003) font ici
référence : en présentant les nombreuses conceptualisations successives de l’employa-
bilité, ils retracent l’évolution de la notion jusqu’à la fin des années 1990. À ce moment-
là, deux versions principales coexistent : l’employabilité « initiative », fondée sur la
capacité individuelle à valoriser ses compétences, et l’employabilité « interactive » qui
met l’accent sur l’interaction des caractéristiques individuelles et de l’environnement.
Ces deux conceptualisations correspondent aux deux perspectives qui structurent les
recherches sur l’employabilité (De Grip et al., 2004 ; Fugate et al., 2008) : celle de l’offre
et celle de la demande de travail. La perspective de l’offre de travail s’intéresse aux
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attributs et comportements individuels, et développe des conceptualisations dites
« absolues » car centrées sur les seuls facteurs individuels (même si ces définitions
peuvent être plus ou moins élargies, De Grip et al., 2004, soulignent l’existence d’une
« strate » de définitions très restrictives, appelées « core définitions »). La perspective
de la demande de travail est consacrée aux facteurs de contexte et « extérieurs » à
l’individu. Elle s’appuie sur des définitions généralisées qui adoptent une vision rela-
tive ou duale en articulant facteurs individuels et facteurs de contexte (Brown et al.,
2003, intégration des côtés offre et demande, des facteurs individuels et collectifs).
Dans cette perspective généralisée, l’employabilité est la capacité et la volonté des
travailleurs à rester attractifs pour le marché du travail (facteurs offre), en réagissant et
en anticipant les changements dans le contenu et l’environnement de travail (facteurs
demande), facilitée par les instruments de développement des RH disponibles pour eux
(institutions) (De Grip et al., 2004). Elle intègre ainsi les caractéristiques individuelles
déterminant la position actuelle et future sur le marché du travail, ainsi que les facteurs
habilitant ou contraignant de l’environnement, dans une approche dynamique et pro-
cessuelle. La notion est centrée sur l’individu, tout en impliquant des conditions et des
dispositifs de GRH favorables au développement d’un projet professionnel individuel
(Baruel-Bencherqui et al., 2011). En effet, « développer l’employabilité, c’est maintenir
et développer les compétences des salariés et les conditions de gestion des ressources
humaines leur permettant d’accéder à un emploi, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’entre-
prise, dans des conditions favorables » (Burgat et al., 2005, p. 8, en référence à Finot,
2000). Les conceptualisations généralisées et interactives facilitent le rapprochement
avec les CI dont l’analyse est liée au contexte et à la situation de travail. Même si de
nombreux débats demeurent, en particulier sur sa définition et sur les facteurs à consi-
dérer, le concept a glissé de la qualité à l’emploi de la personne à la qualité de l’em-
ploi accessible, aujourd’hui et demain, dans une perspective généralisée et dynamique
22 @GRH • 07/2013

(Saint-Germes, 2010). Il convient donc à présent de développer les enjeux et les condi-
tions de management de l’employabilité.
Une GRH finalisée sur l’employabilité repose sur la démarche de gestion des compé-
tences et sur quelques leviers d’action clés : une formation continue, une mobilité active,
une organisation du travail apprenante, ainsi qu’une culture de l’employabilité (Saint-
Germes, 2004). Les modes de management, les processus d’évaluation, les niveaux
de salaires relatifs et autres éléments statutaires complètent les conditions de GRH
nécessaires au développement de l’employabilité (Finot, 2000). Les leviers RH à action-
ner sont donc nombreux (Burgat et al., 2005, en dénombrent dix) et nous pouvons consi-
dérer, à l’instar de Raoult et al. (2011), que c’est l’ensemble des modes de gestion de
l’entreprise qui est concerné. Les pratiques des entreprises en matière d’employabilité
peuvent alors être regroupées en trois familles : l’ouverture professionnelle, le mana-
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gement des RH et l’organisation (Burgat et al., 2005). Ces familles de leviers d’action
et de pratiques sont déployées selon une logique spécifique commune. Pour améliorer
l’employabilité, elles doivent être repositionnées selon un horizon temporel plus large,
glissant vers le moyen et long terme, et être tournées vers l’extérieur de l’entreprise et
les besoins du salarié. Il s’agit alors d’éviter les effets pervers de certains modes d’orga-
nisation, de gestion et de management des hommes qui conduisent les entreprises à
fabriquer de l’inemployabilité (Dietrich, 2010). En effet, l’employabilité « se construit
dans et par l’entreprise, grâce à une organisation qualifiante, un management des com-
pétences impliquant une pluralité d’acteurs (direction, managers, salariés, représentants
du personnel), une anticipation permanente des évolutions des emplois et des métiers
(GPEC), et une stratégie de formation en conséquence. Elle se développe grâce à une
politique de mobilité » (ibid., p. 32). Il s’agit de créer et de développer une dynamique
de développement et de formation au service de l’adaptabilité et de la « compétence
à l’emploi » des salariés. Considérer l’employabilité comme un objet de gestion revient
donc à interroger la qualité des emplois et de la GRH, ainsi que l’appropriation par les
managers des leviers RH. En outre, si la démarche compétence est le « terreau » d’un
développement de l’employabilité, son efficacité suppose un repositionnement et une
ouverture à la fois sur le projet professionnel des salariés et sur les attentes du marché
du travail (Saint-Germes, 2004 ; Dietrich, 2010). L’analyse de la place des CI dans les
travaux sur l’employabilité va nous permettre d’approfondir ce point.

›› 2.2.La place des compétences individuelles dans les travaux


sur l’employabilité
Parmi les quatre niveaux de CI (requises, mobilisées, détenues et potentielles) identifiés
par Retour (2005), seules les CI potentielles sont analysées dans les travaux sur l’employa-
bilité. En effet, la question de la transférabilité des CI en dehors de la situation de travail
et d’emploi de l’individu est centrale dans l’employabilité, que ce transfert s’effectue sur
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 23

les marchés internes ou externes. D’ailleurs, Dietrich (2010) l’explique clairement dans
ses travaux : « l’employabilité met l’accent sur la nécessaire maintenance des connais-
sances et des compétences, interrogeant leur “durabilité”, voire leur transférabilité vers
un autre emploi » (ibid., p. 33). Le concept d’employabilité porte ainsi l’emphase sur le
potentiel de transfert des CI dans une autre situation de travail et d’emploi. Or, cette
dimension de la compétence est complexe à penser et analyser car elle s’affranchit
de la référence à la situation de travail et au contexte, et ouvre sur une multitude de
situations potentielles mal définies et potentiellement très nombreuses. Les travaux sur
l’employabilité s’appuient précisément sur une approche des compétences orientée par
la question de la transférabilité, et donc prospective et dynamique. Il en résulte ainsi
une difficulté d’interprétation et d’opérationnalisation du lien entre CI et employabilité.
Dans les modélisations de l’employabilité, nous constatons que les CI sont des antécé-
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dents ou des dimensions de l’employabilité perçue, elle-même facteur déterminant du
succès de carrière objectif et subjectif 3. Toutefois, une distinction est effectuée entre
les compétences liées au poste et à l’emploi, et les compétences génériques, qui sont
combinées pour évaluer l’employabilité (Van Der Heijde et al., 2006). Aussi, l’employabi-
lité perçue par le salarié est adossée au développement de ses CI, c’est-à-dire toutes les
activités entretenant ou augmentant les compétences fonctionnelles, d’apprentissage
et de carrière, mises en œuvre par l’individu et/ou l’organisation (De Vos et al., 2011).
L’engagement et la participation du salarié dans ces activités, ainsi que le soutien orga-
nisationnel qu’il perçoit aux initiatives de développement des compétences, deviennent
alors des facteurs clés d’employabilité. Ces conditions peuvent être rapprochées de
la notion d’« environnement capacitant », qui « facilite l’accès aux ressources forma-
tives (quelles qu’elles soient), leur identification, leur dynamisation, et qui apprend à
les utiliser » (Fernagu-Oudet, 2012, p. 24). Les conditions de l’environnement sont ainsi
déterminantes dans le pouvoir-agir nécessaire au développement des compétences et à
l’employabilité, et il s’agit d’aider les individus à utiliser et mobiliser leurs ressources et
non pas seulement de les mettre à leur disposition.
Malgré la diversité des approches et les visions divergentes des compétences qui consti-
tuent l’employabilité, il existe, dans la littérature spécialisée sur cette dernière, un rejet
explicite d’une vision des compétences comme un capital humain accumulé et portatif.
En particulier, Van Der Heijde et al. (2006) proposent une approche de l’employabilité
fondée sur les compétences, en précisant s’inscrire dans une approche interprétative
de la compétence, par opposition à une vision rationaliste fondée sur les attributs. Ce
sont ainsi les conceptions, les schémas mentaux et les cadres d’analyse qui sont mis
en avant comme des déterminants de la compétence : la valorisation et l’évaluation

[3] Le succès de carrière objectif est apprécié grâce à des indicateurs de trajectoire et d’emploi (par exemple, nombre
de promotions, niveau de salaire), alors que le succès de carrière subjectif reflète la satisfaction de l’individu.
24 @GRH • 07/2013

portent sur l’usage des savoirs et des savoir-faire au travail, la pratique en situation
étant plus importante que le stock d’attributs. Selon une logique différente, certaines
approches de l’employabilité centrées sur les attributs des individus (dénommées dispo-
sitionnelles4 ) sont justifiées par opposition à une approche classique des compétences
requises par un emploi, jugée non pertinente. Raisonner compétences requises est selon
eux une approche trop étroite et non représentative des caractéristiques actuelles de
l’emploi (Fugate et al., 2008). Lorsque l’approche de l’employabilité est fondée sur les
compétences (Van Der Heijde et al., 2006), les CI constitutives d’employabilité sont clai-
rement contextualisées et articulées à la situation de travail. Les approches centrées
sur les attributs des individus, quant à elles, s’affranchissent de la référence aux situa-
tions de travail, en considérant qu’il existe des déterminants transversaux à l’employa-
bilité à identifier dans les traits de personnalité de la personne.
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Aussi, nous remarquons, à l’instar de Hallier (2009), qu’une des faiblesses importantes
dans les discours sur l’employabilité est la difficulté à décrire et à prévoir précisé-
ment les compétences que les salariés doivent développer. De nombreux employeurs
expriment des attentes (voire des exigences) irréalistes en matière de compétences
de leurs salariés, tout en rechignant à contribuer au coût du développement de telles
qualités (Clarke, 2009), en raison notamment des risques de départ du salarié. En outre,
ils peinent à délimiter et à communiquer leurs attentes complexes chez leurs salariés
actuels ou potentiels, ainsi qu’à développer des outils pertinents d’évaluation de ces
compétences attendues. Il en résulte une permanence des pratiques de management
des RH (recrutement et formation en particulier) qui questionne la généralisation du
message de l’employabilité à l’ensemble des travailleurs (Hallier, 2009). Nous retrou-
vons ici cette difficulté à penser et à opérationnaliser la transférabilité des CI hors de
la situation de travail de référence, qui se confirme comme un angle d’achoppement
de l’articulation CI-employabilité. Ce constat nous conduit à envisager et à proposer
l’émergence d’un nouveau paramètre de la CI constitutif de l’employabilité, le « savoir-
évoluer », permettant de disposer d’une unité de pensée et d’analyse, nouvelle et
nécessaire à l’articulation des deux concepts. Dans la grande diversité des descriptions
des compétences nécessaires et souhaitables pour juger un individu d’employable, plu-
sieurs auteurs identifient un glissement du savoir-faire au savoir-être (Bellier, 1998),
de la capacité à réaliser une activité spécifique aux attitudes, valeurs et dispositions
personnelles à l’emploi (Fugate et al., 2008 ; Clarke, 2009). Nous proposons, dans une
troisième partie, d’aborder la question des interfaces entre CI et employabilité, notam-
ment en introduisant cette notion de savoir-évoluer, distincte selon nous du savoir-être.

[4] Les approches dispositionnelles conçoivent l’employabilité comme un trait de personnalité d’ordre supérieur, une
« constellation de différences individuelles » qui prédisposent les individus à s’adapter de manière (pro-) active à leurs
environnements de carrière et de travail (Fugate et al., 2008, p. 504).
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 25

3. ARTICULATION ENTRE COMPÉTENCES INDIVIDUELLES


ET EMPLOYABILITÉ
Suite à notre analyse indépendante des travaux menés sur la gestion des CI d’une part
et sur l’employabilité d’autre part, nous constatons que le rapprochement des concepts
n’est pas simple. Tout d’abord, l’articulation entre les concepts de CI et d’employabilité
se heurte à des questions de définitions : si ces notions se stabilisent progressivement,
le rapprochement est rendu délicat par l’absence de définition claire des compétences
transversales ou transférables, au cœur de la notion d’employabilité. Ensuite, si les
CI sont bien déclinées en termes de compétences requises, mobilisées, détenues, en
référence à une situation de travail, les compétences potentielles et/ou à transférer
demeurent, quant à elles, floues et mal cernées. Ce flou conceptuel rend l’investigation
de la relation CI-employabilité plus délicate, comme nous l’avons déjà souligné à diffé-
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rentes reprises : il s’agit de s’affranchir de la référence à la situation de travail, tout du
moins en première analyse, pour ensuite réarticuler des compétences à de nouvelles
situations de travail potentielles. La complexité ne réside pas tant dans la disparition
de la référence à la situation de travail que dans la multiplication des situations de
travail de référence. L’employabilité impose une vision dynamique et potentielle des
situations d’emploi et de travail, et la difficulté d’articulation aux CI suppose une analyse
fine et approfondie des relations entre concepts. Aussi, nous pensons que la matura-
tion et l’évolution des concepts facilitent leur rapprochement, en particulier parce que
la littérature sur l’employabilité a adopté progressivement une vision plus généralisée
faisant intervenir des éléments de contexte (Van Der Heijde et al., 2006). L’évolution
du concept, de définitions absolues centrées sur un ensemble de facteurs individuels
vers une définition généralisée et interactive, facilite le rapprochement avec les CI dont
l’analyse est liée au contexte et à la situation de travail.
C’est ainsi que dans cette troisième partie, et selon la démarche pragmatique proposée
par Suddaby (2010), nous offrons une analyse plus approfondie et cohérente des rela-
tions entre les concepts. Pour rappel, dans la démarche de Suddaby (2010), à la suite de
l’étude des définitions et des conditions d’exercice des concepts, ce sont les relations
entre les concepts et la cohérence qui constituent les dimensions d’analyse suivantes.
Afin d’approfondir et de rendre cohérente notre analyse des relations entre les concepts,
nous avons retenu trois niveaux d’analyse de l’articulation entre CI et employabilité :
conceptuel, pratique et critique. D’un point de vue conceptuel, nous proposons de mobi-
liser le cadre théorique des capacités dynamiques pour mieux comprendre les liens
entre CI et employabilité, ce qui nous amène à argumenter en faveur d’un quatrième
paramètre de la CI : le « savoir-évoluer » (3.1). D’un point de vue pratique, nous remar-
quons que la GPEC (et la GTEC), l’évaluation, la formation, ainsi que la mobilité et la ges-
tion des carrières sont des leviers de GRH communs aux deux littératures spécialisées
(3.2). Enfin, nous abordons la question de l’articulation compétences-employabilité sous
26 @GRH • 07/2013

un angle plus critique, en nous posant notamment deux questions : La responsabilité du


développement des compétences des individus et de leur employabilité peut-elle être
partagée dans la pratique ? La communication ne prend-elle pas une place trop impor-
tante dans la gestion des compétences des individus et de leur employabilité ? (3.3).

›› 3.1. Articulation conceptuelle : capacité dynamique et savoir-évoluer


Dans la mesure où nous avons défini l’employabilité comme une capacité dynamique à
l’emploi, il nous semble pertinent de mobiliser le cadre théorique des capacités dyna-
miques (Teece et al., 1997 ; Eisenhardt et al., 2000 ; Teece, 2007), initialement utilisé
au niveau de l’organisation5. Cela nous permettra, tout d’abord, de mieux comprendre
cette capacité particulière détenue par certains individus, puis, d’engager un débat sur
sa place dans les CI en tant que nouveau paramètre émergent et distinct du savoir-être :
le « savoir-évoluer ».
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3.1.1. Proposition d’un cadre théorique pour comprendre l’articulation
compétences-employabilité : la théorie des capacités dynamiques
Darwin, en 1859, considérait que ce ne sont pas les espèces les plus intelligentes, les
plus fortes, qui subsistent, mais celles qui savent s’adapter. À partir de cette conception
biologique et darwinienne de l’évolution des espèces, Nelson et al. (1982) proposent
une théorie de l’évolution des structures industrielles et posent alors les fondements de
l’approche évolutionniste. Dans leur lignée et avec l’émergence des travaux du modèle
des ressources et compétences (MRC) (Wernerfelt, 1994 ; Barney, 1991 ; Grant, 1991),
les années 1990 ont vu apparaître une prise de conscience accrue de l’importance
des capacités relatives des firmes à utiliser leurs ressources et compétences (R&C)
actuelles, à créer de nouvelles R&C, et à concevoir de nouvelles manières d’utiliser ces
deux types de R&C (actuelles et nouvelles). En effet, la compétitivité d’une firme ne
dépend pas seulement de l’ensemble de ses R&C, mais également de sa capacité à les
intégrer et à les mobiliser. C’est ainsi que dans le prolongement du MRC, des recherches
se sont intéressées à la notion de capacité dynamique (traduit de l’anglo-saxon « dyna-
mic capabilities »), mais uniquement d’un point de vue organisationnel.
Notamment, les travaux de Teece et al. (1997) développent une analyse des caracté-
ristiques clés des capacités dynamiques des firmes à créer et à utiliser des R&C. Face
à la forte turbulence de nombreuses industries, la possibilité de s’adapter en temps
voulu et d’innover de façon rapide, ainsi que les capacités managériales de coordina-
tion et de redéploiement des compétences des entreprises, sont des points vitaux pour
ces dernières. Cette capacité d’adaptation correspond aux capacités dynamiques de

[5] Nous sommes conscientes que la transposition que nous proposons du niveau organisationnel au niveau individuel
peut être critiquée ou rejetée pour des raisons conceptuelles ou de conditions de validité. Cependant, nous justifions
par nos développements les conditions et l’intérêt de cette démarche d’analogie pour notre analyse.
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 27

l’entreprise, définies comme « l’aptitude d’une firme à intégrer, construire, et reconfigu-


rer ses compétences internes et externes pour faire face aux changements rapides de
l’environnement » (Teece et al., 1997, p. 516). Les auteurs ajoutent que les capacités
dynamiques sont les mécanismes par lesquels les firmes apprennent et accumulent de
nouvelles R&C, offrant une perspective qui combine nécessairement analyse interne de
l’entreprise et prise en compte de l’environnement. Dans la même lignée, Eisenhardt et
al. (2000, p. 1107) considèrent les capacités dynamiques comme « les routines organisa-
tionnelles et stratégiques par lesquelles les firmes atteignent de nouvelles configurations
de ressources ». Ainsi, le MRC prend désormais en considération les capacités dyna-
miques, à travers lesquelles les organisations identifient, développent et utilisent leurs
R&C. Enfin, les recherches sur les capacités dynamiques partagent un point d’ancrage
commun fort : le concept renvoie à l’idée centrale de changement, soulignant l’intention-
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nalité des acteurs dans le développement de la base des R&C de la firme (Teece, 2007).
De la même façon que, dans le contexte concurrentiel actuel (hyper et chrono-com-
pétition, innovation intensive et répétée), l’entreprise est contrainte d’adapter en per-
manence ses R&C à son environnement pour rester compétitive, nous suggérons, en
suivant un raisonnement par analogie, de considérer que, dans le contexte actuel du
marché du travail (détérioration de la sécurité de l’emploi, flexibilité accrue, tendance
à l’individualisation), l’individu est contraint d’adapter de façon continue son capital
de CI (savoirs, savoir-faire, savoir-être) afin de rester employable aussi bien en interne
qu’en externe. Nous proposons ainsi de transposer cette logique de capacité dynamique
(CD) organisationnelle au niveau des individus et de leur employabilité, c’est-à-dire leur
capacité à se maintenir en emploi à partir de la mobilisation et de la valorisation de leurs
compétences. Cette transposition d’un cadre d’analyse développé au niveau organisa-
tionnel pour penser au niveau individuel l’articulation compétences-employabilité repose
sur la logique suivante : les correspondances identifiées entre les concepts (définitions
et conditions d’opportunité) permettent l’analogie CD organisationnelle-individuelle, et
cette analogie apporte du sens et de la cohérence aux relations CI-employabilité.
En effet, les modèles anglo-saxons de l’employabilité mettent surtout en exergue les
attitudes positives face aux changements et au marché du travail : la volonté de déve-
lopper de nouvelles compétences ou de changer d’emploi, la connaissance du marché de
l’emploi, entendue comme la sensibilité aux opportunités d’emploi, et enfin la confiance
dans ses capacités de recherche d’emploi (Wittekind et al., 2010). Nous remarquons
d’ailleurs que l’émergence et le développement des concepts de capacités dynamiques
et d’employabilité ont été portés par un contexte de compétition et de changements
permanents, en termes de stratégies organisationnelles et de stratégies de carrières.
En reprenant la définition de Teece et al. (2007), nous proposons alors de considérer
par analogie à une organisation, que la capacité d’adaptation d’un individu serait l’apti-
tude d’un individu à intégrer, construire, et reconfigurer ses compétences pour faire
28 @GRH • 07/2013

face aux changements rapides de son environnement de travail. Cette considération


correspond à la vision de la littérature sur l’employabilité, où elle est un potentiel de
carrière individuel, déterminé par l’adaptabilité à des domaines professionnels adja-
cents ou nouveaux, par la capacité à manager ses développements de carrière et à
convaincre ses communautés de sa qualité professionnelle (Van Der Heijde et al., 2006 ;
De Scholarios et al., 2008). Les points fondamentaux de l’approche des capacités dyna-
miques se retrouvent ici : l’employabilité repose sur l’identification, le développement
et l’utilisation des R&C individuelles pour occuper, obtenir ou se créer un emploi (Van
der Heijde et al., 2006). C’est un modèle particulier des relations d’emploi qui est sous-
jacent, celui du « salarié-acteur », qui soigne et développe son employabilité de manière
autonome et proactive. L’image de l’entrepreneur de soi et de son parcours est utilisée
dans la littérature (De Grip et al., 2004 ; Hartshorn et al., 2005). Nous pourrions la com-
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pléter par celle de l’investisseur, qui développe et fait fructifier son capital humain, son
capital social, son capital culturel et son capital de carrière comme dans le modèle des
carrières nomades (Cadin et al., 2003).
Pour Van Der Heijde et al. (2006), ainsi que Fugate et al. (2008), ce sont les change-
ments intervenus sur le marché du travail qui ont conduit à un consensus sur la res-
ponsabilisation nécessaire des salariés vis-à-vis de leur carrière et, à son corollaire,
l’incitation au développement autonome de son portefeuille de compétences. Van Der
Heijde et al. (2006) distinguent la capacité d’adaptation au changement, passive ou
réactive, en termes de flexibilité personnelle et de résilience, de celle active ou proac-
tive, relevant de l’anticipation et de l’optimisation. Les deux formes sont considérées
nécessaires pour l’employabilité et tout l’enjeu est d’apprécier dans quelle mesure ces
capacités sont liées à des dispositions individuelles relevant de la personnalité et/ou
à un ensemble de compétences plus larges. C’est ainsi que nous considérons que de la
même façon que les entreprises sont contraintes d’adapter leurs R&C en développant
des capacités d’adaptation à leur environnement (capacités dynamiques), les individus
sont contraints d’adapter leurs CI (savoirs, savoir-faire et savoir-être) au marché du tra-
vail, et ce, en mobilisant leur « savoir-évoluer ».

3.1.2. L’employabilité, d’une capacité dynamique individuelle à l’emploi


à une nouvelle dimension de la compétence : le « savoir-évoluer »
Pour Bellier (1998) et Béraud (2006), l’employabilité serait un nouveau profil de compé-
tences, recherché par les employeurs, en valorisant principalement le savoir-être. Pour
notre part, nous argumentons en faveur d’un quatrième paramètre de la CI : le « savoir-
évoluer ». Martory et al. (2008) ont été les premiers auteurs à proposer d’appréhender
les compétences requises par un métier sur la base de quatre, et non trois, paramètres :
les savoirs (connaissances requises), les savoir-faire (expériences et pratiques maîtri-
sées requises), les savoir-être (attitudes et comportements favorables requis) et les
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 29

savoir-évoluer (capacités à évoluer). Plus précisément, les auteurs soulignent que le


savoir-évoluer concerne les possibilités de progresser dans un métier ou d’aller vers
d’autres types d’activités. Ils donnent comme éléments d’opérationnalisation de cette
nouvelle dimension : l’adaptabilité, la mobilité, l’aptitude à être formé, ou encore le
potentiel. Certains auteurs, tels que Morin (2010), préfèrent rattacher le savoir-évoluer
au savoir-être, et faire ainsi du savoir-évoluer une catégorie particulière de savoir-être.
Pour Morin (2010), les savoir-évoluer renvoient aux capacités d’un individu à s’adapter à
des situations nouvelles, faire globalement l’apprentissage de nouvelles compétences,
révéler ses potentiels cachés, et même en quelque sorte apprendre à apprendre pour
évoluer au sein d’environnements changeants. « Les entreprises modernes en sont
particulièrement demandeurs dans la mesure où elles ont, au sein d’un environnement
mondialisé et caractérisé par une accélération du progrès technique, une obligation
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d’adaptation très, voire extrêmement rapide à des situations concurrentielles se défor-
mant beaucoup et fréquemment » (Morin, 2010, p. 411).
Toutefois, et à l’instar de Dupuich-Rabasse et al. (2006), nous pensons que dans un monde
où l’incertain et le non prévisible font partie du quotidien, les notions traditionnelles de
savoirs, savoir-faire et savoir-être ne suffisent plus pour définir la CI. Pour Dupuich-Rabasse
et al. (2006), il faut se tourner vers le savoir-devenir qui exprime la capacité à savoir évo-
luer : c’est un état d’esprit qui permet d’élargir et d’actualiser ses points de repère selon
les situations. Nous considérons que c’est dans cette dimension du savoir-évoluer que le
modèle du salarié-acteur prend tout son sens, davantage que dans le savoir-être, et que la
capacité dynamique à l’emploi s’appuie sur le développement et la mobilisation du savoir-
évoluer, bien plus que ceux du savoir-être. Ainsi considérée, l’employabilité, entendue
comme une capacité générale et dynamique à l’emploi des individus, serait une CI parmi
d’autres, qui prendrait toute sa place et sa légitimité dans ce nouveau paramètre de la
CI, actuellement très peu décrit dans les référentiels des emplois et des métiers dans les
entreprises, mais qui devrait se révéler davantage à l’avenir.
Au-delà de cette analyse théorique et conceptuelle, nous proposons, à présent, de nous
concentrer sur l’articulation pratique des CI et de l’employabilité.

›› 3.2. Articulation pratique : les leviers de GRH conjoints aux compétences


et à l’employabilité
L’analyse des littératures spécialisées sur la gestion des CI et l’employabilité nous
conduit à identifier de nombreux leviers de GRH communs. Néanmoins, il convient de
souligner que les outils et les pratiques sur les compétences sont ancrés dans le fonc-
tionnement interne et les processus RH, alors que ceux développés autour de l’employa-
bilité sont plutôt orientés sur l’environnement et la stratégie de l’organisation. Ce sont
ces orientations différentes qui impliquent une difficulté d’articulation pratique et nous
conduisent à mettre en avant le rôle majeur joué par la GPEC (et son corollaire la GTEC)
30 @GRH • 07/2013

comme matrice globale et référence commune aux deux démarches, et par trois pratiques
RH clés (l’évaluation, la formation et la mobilité).

3.2.1. La Gestion Prévisionnelle (et Territoriale) des Emplois et des Compétences


L’emploi constitue selon nous la première porte d’entrée d’une articulation pratique entre
les compétences des individus et leur employabilité. En effet, et comme déjà souligné
(point 1.2), la question de l’employabilité du salarié occupe une place majeure dans les
accords et les travaux sur la GPEC, dans lesquels un objectif annoncé et prioritaire est jus-
tement de maintenir l’employabilité des collaborateurs (Dietrich, 2010 ; Baruel-Bencherqui
et al., 2011 ; Raoultet al., 2011). À notre sens, l’introduction de l’employabilité dans les
finalités de la GPEC peut conduire à occulter sa dimension anticipatrice : si l’entreprise
parvient à maintenir ou à développer l’employabilité du salarié, elle peut alors « relâ-
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cher » son effort de prévision et de prospective. Dès lors, faire de la prévention en
matière d’employabilité diminue la nécessité de sécuriser dans l’emploi et peut amener
à éluder certaines questions autour de l’anticipation. Des salariés employables sauront
s’adapter aux changements, voire ils les susciteront. Cela constitue une contradiction
avec l’esprit de l’ANI (Accord National Interprofessionnel) ayant inspiré la loi du 18 janvier
2005 sur l’obligation de négocier des accords de GPEC, qui visait justement à inciter les
entreprises à une meilleure démarche d’anticipation des conséquences de leurs stra-
tégies sur l’emploi. Au-delà de ce constat, l’employabilité suppose des démarches de
GPEC de « nouvelle génération6 », plus qualitatives et plus individualisées.
Apparue au début des années 1980, la GPEC, qui constitue pour la plupart des entreprises
une politique de GRH incontournable, correspond à la conception et à la mise en œuvre
d’actions préventives permettant d’anticiper des problèmes d’ajustement quantitatif et
qualitatif des emplois et des compétences, à la fois sur le plan individuel et collectif, face
à des contraintes internes et/ou externes (Joyeau et al., 1999). La GPEC désigne ainsi un
ensemble de méthodes et de pratiques destinées à permettre l’adaptation des RH aux
besoins anticipés des entreprises. Les effectifs, les emplois, les compétences font alors
l’objet d’une vision prospective qui fournit un cadre général dans lequel s’articulent les
décisions en matière de recrutement, de formation, de mobilité ou encore d’organisation
du travail. Avec la GPEC, la gestion prévisionnelle des RH (GPRH) s’éloigne de la visée
quantitative et collective, pour revenir à une approche qualitative et individuelle. Les
entreprises semblent devenir plus attentives aux contenus des emplois qu’à la ques-
tion de leur volume. Elles cherchent plutôt à favoriser l’adaptation à un environnement

[6] Baruel-Bencherqui et al. (2010) soulignent que, depuis la loi de 2005, c’est une « nouvelle GPEC » qui est déployée,
parfois aussi appelée « GPEC de seconde génération ». Elles précisent alors que les objectifs de cette nouvelle GPEC
sont triples : gérer par les compétences, éviter les licenciements en traitant les problèmes en amont, et enfin assurer
l’employabilité des salariés.
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 31

perçu comme durablement turbulent et à développer l’employabilité de leurs salariés :


en interne, par le développement de la polyvalence, l’accroissement de la mobilité fonc-
tionnelle et la prévention de l’exclusion ; en externe, en accompagnant le salarié dans
l’acquisition de compétences reconnues et valorisables sur le marché du travail.
Les accords de GPEC développés depuis 2005 suite aux incitations légales peuvent être
considérés comme les dispositifs de sécurisation des parcours professionnels, notam-
ment en faisant des ressources humaines un facteur de développement économique.
C’est alors qu’une démarche de GPEC de « nouvelle génération », plus individualisée,
constitue l’ossature du management de l’employabilité : elle fournit de la visibilité et un
panel d’outils à la fois à l’entreprise et à ses salariés. Selon Dietrich et al. ( 2007), l’enjeu
majeur de la GPEC est la prévention des risques d’inemployabilité, grâce à une bonne
articulation des dimensions individuelles et collectives, de la prévention et de la prévi-
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sion. Raoult et al. ( 2011) considèrent, pour leur part, que la GPEC contribue au processus
de maintenance préventive et prédictive de l’employabilité, sa maintenance curative est
développée après une perte d’emploi, à chaud, notamment dans le cadre des cellules de
reclassement des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE).
Il demeure pourtant difficile de décrire, précisément et en toute généralité, comment la
GPEC permettrait d’articuler concrètement une démarche de gestion des compétences
à celle de gestion de l’employabilité. De notre point de vue, la mise en œuvre d’un
accord négocié de GPEC permettrait de développer un « environnement capacitant »,
c’est-à-dire de créer des conditions favorables au développement du pouvoir-agir des
individus (Fernagu-Oudet, 2012), à la fois selon une logique interne liée à l’organisation
et à ses besoins en compétences et selon une logique externe liée au marché du travail
et au projet professionnel individuel. Ces deux logiques peuvent se heurter ou entrer
en tension, et l’intégration de la finalité de l’employabilité aux démarches de GPEC se
limite souvent à la mise à disposition de moyens de développement autonome de com-
pétences sans incitations ni soutiens pour les utiliser. Or, un « environnement capaci-
tant » suppose d’aider les individus à mobiliser et à utiliser les ressources qui sont à leur
disposition. Les contenus et modes d’organisation du travail, ainsi que les pratiques de
GRH, doivent être mis en cohérence afin de faciliter les situations d’apprentissage et
d’initiative. L’intégration de l’employabilité à la GPEC, et donc son articulation pratique à
la gestion des compétences, passe par la diffusion et la promotion d’une culture de l’em-
ployabilité et des valeurs d’apprentissage et d’initiative auprès de l’ensemble des par-
ties prenantes aux questions de l’emploi et de l’employabilité. Elle suppose un contrat
d’employabilité, décrivant clairement la répartition des responsabilités en matière de
gestion de l’employabilité (voir point 3.3).
Dans la lignée de ces travaux, le territoire est devenu un autre niveau de mutualisation
qui s’impose ces dernières années sous l’impulsion des pouvoirs publics et des syn-
dicats mais aussi des entreprises elles-mêmes, notamment en raison des situations
32 @GRH • 07/2013

nombreuses de co-activité et des impératifs de co-innovation (Defélix et al., 2009).


Si le niveau territorial retenu peut varier (bassin d’emploi, département, région, sys-
tème productif local, pôle de compétitivité, etc.), c’est une autre échelle pertinente pour
développer des pratiques de régulation des ressources humaines visant à contribuer
à l’employabilité par des actions de développement des compétences et d’accompa-
gnement des transitions professionnelles. Le contrat d’employabilité territorial est une
proposition ancienne dans la littérature sur la gestion de l’employabilité lors des res-
tructurations (Pelosse et Giqueaux, 2003), dans des dispositifs considérés curatifs : les
démarches de GPEC territorialisées incarnent la généralisation de cette GRH en réseau
dans une logique de prévention et de maintenance.

3.2.2. Les trois pratiques RH clés : l’évaluation, la formation et la mobilité


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Les composantes des accords de GPEC conclus dans les entreprises peuvent être pré-
sentées sur deux axes représentant les objectifs des différents dispositifs : prévoir et
développer sur l’axe vertical, identifier et valoriser sur l’axe horizontal (Raoult et al.,
2011). Ces auteurs identifient alors quatre types de dispositifs promus dans les accords,
ceux relevant de l’anticipation, de l’évaluation des compétences, de la professionnalisa-
tion et de la mobilité (cf. figure 1).

Figure 1 : Les dispositifs promus par les accords de GPEC

Source : Raoult et al. (2011, p. 148)


Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 33

Cette analyse des accords confirme les leviers de GRH conjoints aux CI et à l’employa-
bilité qui ont émergé des revues de littératures spécifiques à chaque concept. L’évalua-
tion, la formation et la mobilité peuvent ainsi être vues comme les pratiques RH clés
articulant les CI et l’employabilité. L’efficacité de ces pratiques RH repose sur leur asso-
ciation et leur imbrication, lesquelles sont rendues délicates par leurs orientations oppo-
sées dans les pratiques de gestion de CI et de gestion de l’employabilité, les premières
étant orientées sur l’interne alors que les secondes sont plus tournées vers l’externe.
Cette mise en cohérence suppose des séries de traductions et d’interprétations afin de
passer des compétences requises et détenues à celles potentielles ou à développer pour
être employable aujourd’hui et demain, dans l’organisation et en dehors. L’intégration de
l’employabilité à la GRH passe par les pratiques existantes d’évaluation, de formation et
de mobilité. Nous souhaitons souligner ici seulement certains aspects pour chacune de
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ces pratiques RH clés articulant les deux concepts.
L’évaluation est la première pratique RH aux frontières entre CI et employabilité, même
si la logique à suivre peut être assez difficile à cerner. Est-ce l’évaluation des com-
pétences qui permet d’affirmer la capacité à l’emploi d’un individu ? Ou est-ce que
l’employabilité doit devenir une compétence particulière à évaluer, dans la catégorie
« savoir-évoluer » ? L’évaluation des CI est nécessaire dans de nombreuses situations de
gestion (formation, recrutement, rémunération, gestion des carrières, etc.), et la logique
compétence a contribué au développement de nombreuses méthodes d’évaluation nor-
malisées (entretiens annuels d’appréciation, bilans de compétences, centres d’évalua-
tion ou « assessment centers », 360°, etc.). L’évaluation des CI joue un rôle central et
reconnu dans l’évaluation de l’employabilité, même si les outils d’évaluation demeurent
difficiles à élaborer, dans la mesure où il s’agit d’apprécier la durabilité et la transféra-
bilité de ces CI. Le fait de chercher à évaluer l’employabilité revient, en quelque sorte, à
poursuivre un idéal-type pour la GRH, l’appréciation et le développement d’une aptitude
générale à l’emploi des individus, actuelle et potentielle, sur les marchés internes et le
marché externe du travail. Les dispositifs d’évaluation de l’employabilité doivent donc
être élaborés en fonction du contexte et des objectifs de gestion7. Dans cette pers-
pective, les accords de GPEC fournissent un ensemble d’outils négociés et adaptés à
l’organisation et à ses salariés.
La formation est la deuxième pratique RH qui permet d’articuler CI et employabilité. Elle
est reconnue dans les deux littératures comme étant le premier facteur de développement

[7] Selon la situation de gestion et l’évaluateur, les facteurs d’employabilité retenus pour l’évaluation vont varier.
Saint-Germes (2010) analyse ce processus de construction d’une évaluation de l’employabilité. Elle identifie quatre
logiques d’évaluation, correspondant aux quatre conventions de facteurs d’employabilité légitimes en gestion : por-
tefeuille de compétences (logique patrimoniale), capacité de déploiement (logique comportementale), valorisation du
profil (logique de positionnement relatif par rapport aux autres travailleurs), et enfin impact de l’environnement (soutien
dynamique de l’organisation et de la conjoncture).
34 @GRH • 07/2013

des CI et de l’employabilité. Elle répond en fait à la fois aux attentes du personnel et


aux besoins de l’entreprise. Elle contribue au premier chef à l’atteinte de leurs objec-
tifs (satisfaction professionnelle, performance économique), en prenant en compte
l’évolution des métiers. Elle aide également à l’adaptation des compétences requises
et disponibles, ainsi qu’au maintien de l’employabilité des salariés. Dans le contexte
français caractérisé par l’encadrement légal et conventionnel des actions de formation
des entreprises, elle est une obligation pour l’employeur lorsqu’elle permet d’assurer
l’adaptation de ses salariés à leurs emplois. Les évolutions juridiques récentes, avec les
lois du 4 mai 2004 et du 24 novembre 2009 sur la formation professionnelle tout au long
de la vie, visent à promouvoir un accès à la formation plus autonome pour les salariés et
à favoriser les formations de développement des compétences.
Enfin, la mobilité est la dernière pratique RH conjointe de gestion des CI et de l’employa-
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bilité. Élément essentiel de la politique RH, son importance s’est accrue ces dernières
années et sa nature a changé : la gestion des carrières ne peut plus reposer sur des par-
cours fixes et uniquement verticaux. En effet, favoriser la mobilité interne permet d’une
part, pour l’individu, de varier les tâches et de développer ses compétences et, d’autre
part, d’enrichir l’organisation par un « brassage » permanent des compétences. La mul-
tiplication des mobilités renouvelle ainsi la manière individuelle et collective de gérer les
carrières et le salarié a acquis une autonomie plus importante. Lemessage véhiculé par
l’employabilité est en effet une incitation claire et directe pour les salariés à s’engager
individuellement dans un processus permanent de développement de soi et de mobilité
(Hallier, 2009), afin de devenir acteur de son devenir professionnel. Comme le soulignent
Dany et al. (2002), la mise en œuvre de la gestion des carrières doit combiner des outils
à destination de l’individu (pour mieux se connaître et réaliser ses projets), de l’orga-
nisation (pour identifier et satisfaire ses besoins de compétences) et d’articulation de
leurs attentes et besoins (pour co-définir et coordonner les projets de chaque partie). La
démarche de GPEC permet de réunir et d’articuler ces différents outils : en cohérence
avec la logique compétence, l’étude des compétences d’un individu, associée à l’étude
de ses aspirations personnelles et professionnelles, permet d’envisager ses voies d’évo-
lution possibles à moyen terme. Cette évolution professionnelle implique généralement
un besoin d’acquisition de compétences qui peut être réalisée par la formation mais
également par la construction d’un parcours professionnalisant pouvant combiner plu-
sieurs mobilités internes et/ou externes.
L’articulation pratique de la gestion des CI et de l’employabilité passe ainsi par trois
leviers RH clés, dont la complémentarité peut être assurée par la démarche de GPEC.
L’accroissement de l’autonomie et de l’initiative des salariés dans les décisions de for-
mation et de mobilité soulève néanmoins des enjeux que la partie suivante va nous
permettre d’analyser.
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 35

›› 3.3. Articulation critique : les conséquences d’une gestion conjointe


des compétences individuelles et de l’employabilité
Afin de parfaire notre démarche d’articulation, nous voulons porter une analyse plus
critique sur les conséquences d’une gestion conjointe des CI et de l’employabilité.
Notamment, nous posons deux questions : La responsabilité du développement des
compétences des individus et de leur employabilité peut-elle être partagée dans la pra-
tique ? La communication ne prend-elle pas une place trop importante dans la gestion
des compétences des individus et de leur employabilité ?

3.3.1. Le partage des responsabilités entre l’individu et l’organisation


Dans les théories des nouvelles formes de carrières, le développement de l’employabi-
lité est une responsabilité partagée entre le salarié et l’employeur : chaque partie de la
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relation d’emploi a un rôle à jouer pour assurer la capacité à l’emploi. Le modèle de réfé-
rence des carrières nomades (Arthur et al., 1996) répartit ainsi les rôles : l’individu doit
développer ses compétences, se construire un réseau et mettre en sens son parcours
professionnel ; l’organisation doit développer l’employabilité de ses salariés en favori-
sant la mobilité et en adoptant une approche des RH en termes de flux et non de stocks.
Pour Waterman et al. (1994), la carrière résiliente repose sur l’indépendance de l’indi-
vidu (attitude d’auto-emploi) qui implique que l’organisation mette à sa disposition des
outils pour développer ses compétences et son employabilité. Dans un nouveau modèle
d’« emploi/employabilité » qui développerait un scénario gagnant-gagnant, l’employeur
est ainsi responsable de l’apparition d’opportunités d’amélioration du stock de compé-
tences et, de son côté, l’employé doit savoir les saisir et en tirer avantage. Nous retrou-
vons également ici la nature du deal entre employeur et employé avancée par Reynaud
(2001, point 1.2) : en contribuant à la performance de l’entreprise, le salarié développe
des compétences et garantit ainsi sa capacité à se maintenir en emploi. Pour assurer
cette « performance » du salarié, l’entreprise s’engage à développer ses compétences, à
lui en donner les moyens, et à le soutenir dans l’utilisation de ces moyens et ressources
(« environnement capacitant »).
Dans cette perspective, les conditions nécessaires à la mise en œuvre du modèle du
salarié-acteur peuvent paraître inaccessibles ou non généralisables, à moins que les
employeurs soient suffisamment vertueux pour développer des actions pouvant dimi-
nuer l’efficacité opérationnelle et la profitabilité à court terme (Van Burren, 2003). L’au-
tonomie et la proactivité du salarié supposent que l’organisation donne de la visibilité en
partageant des informations stratégiques et opérationnelles, et offre des espaces d’ini-
tiative en matière de formation et de mobilité. Face au constat d’une stabilité des pra-
tiques de recrutement et de formation des employeurs et d’une incapacité à décrire et
évaluer les compétences nécessaires pour être employable, ces analyses sont considé-
rées comme une rhétorique managériale (Clarke, 2009 ; Hallier, 2009). L’objectif implicite
36 @GRH • 07/2013

de ces discours serait alors de préparer les salariés, et surtout les cadres, à s’adapter
en permanence aux changements d’emplois sur les marchés interne et externe, voire
de décourager leur départ avant que l’organisation ne soit prête (Hallier, 2009). Ces
critiques se retrouvent dans la littérature sur la gestion des compétences, autre « rhé-
torique managériale », dont le message relativement clair et consensuel (logique de
développement individuel et primat des compétences génériques transposables, inté-
gration et formalisation de la démarche compétence) contraste avec le « faible degré
d’intégration des pratiques de management par les compétences au sein des politiques
de GRH des entreprises » (Pichault et al., 2008, p. 31).

3.3.2. Le développement de la communication RH : image de marque employeur


et marketing de soi
Selon le paradoxe de l’employabilité (Gaspersz et al., 1996), un management de l’em-
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ployabilité serait fidélisant car il agirait comme un signal de bonne qualité de l’employeur
auprès de ses salariés. Investir dans le développement de CI transférables ne consti-
tuerait plus un dilemme pour les employeurs (De Grip et al., 2004).Même s’il demeure
un déficit de recherches et de preuves empiriques sur cet effet de fidélisation d’un
management actif de l’employabilité8, nous pouvons articuler cet argument théorique
aux démarches de marketing social et de gestion de la « marque employeur » relati-
vement en vogue (Galambaud et al., 2005). La communication sur le management de
l’employabilité mis en œuvre en interne serait ainsi une composante clé de la gestion
de la marque employeur, permettant d’attirer et de fidéliser les compétences. L’enga-
gement de certaines organisations dans les chartes et les labellisations en faveur de
la diversité ou de la responsabilité sociale témoignent de la diffusion de ces logiques
de signalement de leur qualité en tant qu’employeurs, en vue d’attirer et de retenir les
profils les plus employables.
En parallèle, et dans le contexte actuel caractérisé par une guerre des talents de plus
en plus mondialisée, la diffusion du message de l’employabilité conduit à un marketing
de soi par les individus (« personal branding »), lesquels utilisent les multiples canaux de
communication offerts par l’ère numérique (sites personnels, blogs, CVthèques en ligne,
et surtout réseaux sociaux). La gestion de son identité numérique et de l’e-réputation
de ses CI devient cruciale, afin de démontrer en permanence sa valeur sur le marché du
travail, même (voire surtout) lorsque l’individu est en poste. Dans l’amélioration de son
employabilité, la capacité à valoriser et à communiquer ses CI prendrait ainsi progressi-
vement le pas sur les autres paramètres de la compétence (savoirs, savoir-faire, savoir-
être), et le savoir-évoluer reposerait dès lors sur le savoir communiquer.

[8] La recherche de Benson (2006), sur le lien entre les attitudes (implication et intention de départ) et les pro-
grammes internes de développement de l’employabilité, souligne la nécessaire reconnaissance (salariale, carrière,
symbolique) par l’entreprise de l’augmentation de l’employabilité de ses salariés pour les fidéliser.
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 37

En conséquence, le marketing et la communication des RH se développent tant du côté


employeur que du côté salarié. L’employabilité implique une professionnalisation de la
valorisation par l’entreprise de ses pratiques RH, et de la valorisation par l’individu de
ses compétences.

CONCLUSION
Ce travail visait à investiguer et clarifier les liens entre deux concepts clés en GRH : les
compétences individuelles et l’employabilité. Notre analyse de la littérature sur le(s)
sujet(s) nous amène à conclure que l’articulation entre ces deux concepts est à la fois
nécessaire et délicate, dans le sens où les notions demeurent en construction et en
débat dans les littératures et que leurs relations sont plus complexes qu’il n’y paraît.
Dans la figure 2 ci-après, nous proposons une représentation, essayant de rendre intel-
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ligible la complexité de l’articulation entre CI et employabilité, à partir des trois niveaux
d’analyse que nous avons retenus : conceptuel, pratique et critique.

Figure 2 : L’articulation entre compétences individuelles et employabilité

Dans cet article, nous offrons une réflexion globale de l’articulation entre CI et employa-
bilité. Aussi et surtout, nous reconnaissons la complémentarité entre ces deux concepts
clés de la GRH. Une voie de recherche prometteuse consisterait d’ailleurs à mieux com-
prendre comment se complètent et se combinent les compétences et l’employabilité,
en étudiant de manière plus approfondie un niveau d’articulation (théorique, pratique
38 @GRH • 07/2013

ou critique). Cet article et la représentation proposée ici ont précisément pour objec-
tifs de permettre des développements théoriques futurs, mais également d’offrir aux
employeurs et salariés une présentation des liens et des différents leviers d’action
devant leur faciliter la difficile gestion conjointe des compétences et de l’employabilité.
Ensuite, en définissant l’employabilité comme une capacité dynamique à l’emploi et en
soulignant l’intérêt de la prise en compte d’un nouveau paramètre de la CI, le « savoir-
évoluer », nous avons montré que l’articulation entre les deux concepts pouvait être
facilitée par des développements théoriques récents. Comme les travaux ont tendance
à se développer parallèlement dans les différents champs, notre effort d’articulation
est d’autant plus utile. Toutefois, cette notion de « savoir-évoluer » nécessite encore
des recherches complémentaires afin d’en préciser le contenu et les conditions d’exer-
cice. Dans notre réflexion, nous avons dessiné les prémices de ses sous-dimensions,
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au travers notamment de l’adaptabilité et du savoir communiquer. La capacité d’ap-
prendre à apprendre serait une troisième voie possible de réflexion sur le contenu du
savoir-évoluer.
Finalement, en étudiant les littératures spécialisées sur la logique compétence d’une
part et sur l’employabilité d’autre part, ainsi que les quelques travaux menés sur leurs
interfaces, nous dressons un constat qui nous semble intéressant : dans les travaux en
GRH, la notion d’employabilité suit la même évolution dans les années 2000, que celle
qu’a connue la compétence dans les années 1990. En effet, les travaux menés sur la
CI dans les années 1990 cherchaient à définir cette notion pour, dans les années 2000,
s’intéresser majoritairement à ses pratiques de gestion, faisant des leviers classiques
de GRH (recrutement, évaluation, formation, mobilité, etc.) des moyens au service du
développement des compétences des collaborateurs de l’entreprise. Ces travaux por-
tant spécifiquement sur la gestion des CI ne traitaient d’ailleurs qu’épisodiquement de
l’employabilité, en la considérant comme un objectif à atteindre, une finalité managé-
riale. De son côté, la notion d’employabilité a suivi la même démarche : tout d’abord,
dans les années 2000, les auteurs ont cherché à la définir, puis, depuis 2010, la tendance
s’oriente vers un « management » de cette employabilité, qui intégrerait, à son tour, les
différents leviers de GRH, dont la gestion des compétences. C’est alors que les travaux
portant sur l’employabilité ont plutôt tendance à considérer la gestion des compétences
comme un levier parmi d’autres d’une politique de l’employabilité, mais selon une pers-
pective renouvelée avec une ouverture sur les besoins du marché et sur le projet pro-
fessionnel du salarié.
En définitive, nous espérons que notre travail a contribué à une meilleure compréhension
de l’articulation, difficile et déficiente, entre compétences individuelles et employabilité.
Plus généralement, cette recherche se veut être un premier pas dans la compréhension
des interfaces entre ces deux concepts clés de la GRH.
Compétences individuelles et employabilité : essai de clarification de leur articulation 39

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