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VII.

Le diagnostic des systèmes de coûts


Pierre Mevellec
Dans Repères 2017, pages 103 à 120
Éditions La Découverte
ISSN 0993-7625
ISBN 9782707193940
© La Découverte | Téléchargé le 12/10/2023 sur www.cairn.info par oways CHABEN (IP: 196.70.231.188)

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VII / Le diagnostic des systèmes de coûts
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Les chapitres précédents nous ont permis de nous familiariser avec les
différentes dimensions des systèmes de coûts. L’étude a été conduite
en se plaçant le plus généralement du point de vue du concepteur du
système de coûts. Ce positionnement est exceptionnel. Il est rare
d’avoir à construire un système de coûts à partir de zéro. Le travail du
contrôleur de gestion est plus généralement un travail d’adaptation ou
de réaménagement. À cet effet, il est important de disposer d’un outil
et d’une démarche d’analyse permettant de conduire ce travail en ne
laissant aucune dimension dans l’ombre. C’est donc à un exercice de
synthèse que ce dernier chapitre invite le lecteur.

Les dimensions du diagnostic

Nous reprenons ici les trois dimensions utilisées tout au long des
chapitres précédents : la gestion des ressources, le dialogue avec
l’environnement et l’orientation des comportements.

La gestion des ressources

Trois maîtres mots ont servi à la réflexion sur cette dimension :


traçabilité, causalité et responsabilité. En première lecture, les deux
premiers relèvent de choix techniques et le troisième d’un choix
organisationnel, mais, comme ces choix ne sont pas indépendants,
il est toujours nécessaire de faire des arbitrages entre les différentes
dimensions. Ce sont ces arbitrages, que l’on retrouvera sur les autres
dimensions, qui font qu’il n’y a pas deux systèmes de coûts iden-
tiques. Au-delà des choix discutés dans les chapitres précédents, il
faut ajouter deux grandes mutations dans le domaine de la gestion
des ressources par les organisations. Au risque de caricaturer, on peut
104 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

dire que, dans les organisations industrielles, la gestion des ressources


est confiée aux opérationnels au travers de démarches comme le lean,
les Six Sigma, l’operational excellence, etc. Le propre de ces méthodes
est d’ignorer la dimension économique. La recherche de l’effi-
cience, l’élimination des gaspillages sous toutes leurs formes se font
sans quantification monétaire préalable. Le qualitatif et le physique
suffisent ! Les résultats économiques sont bien évidemment attendus,
mais le lien entre l’action et sa lecture économique est jugé trop diffi-
cile à atteindre en raison des multiples conventions comptables.
Cette position réduit le contrôle de gestion à la gestion budgétaire,
laquelle peut se faire à la direction financière.
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Dans les organisations de services, la gestion des ressources
implique de plus en plus le client qui devient coproducteur. Le
dimensionnement d’une fraction importante des ressources mobi-
lisées par le processus de production dépend de ce fait du comporte-
ment du client, comportement qui échappe à l’influence du contrôle
de gestion.
Ces deux évolutions doivent amener à affiner l’analyse de nos trois
concepts, en fonction du contexte très spécifique de chaque organi-
sation, et non à y plaquer des analyses surannées.

Le dialogue avec l’environnement

Si le rôle des systèmes de coûts se réduit en matière de gestion des


ressources, il augmente indiscutablement au niveau du dialogue avec
l’environnement. Ce dialogue, cantonné hier au prix des produits et
services, est aujourd’hui multidimensionnel. Tant en interne qu’en
externe, les demandes d’évaluation sont de plus en plus nombreuses
et spécifiques. La personnalisation de l’offre conduit à l’explosion de
l’activité devis. Le passage du marketing transactionnel au marke-
ting relationnel implique au minimum l’articulation de deux objets
de coûts, le produit et le client, mais le client n’est que rarement indi-
viduel, il appartient à une chaîne de distribution, à un groupement
d’achat, à un territoire, etc. Le client individuel achète de plus en
plus rarement un produit nu, mais des solutions qui mêlent produits
physiques et services dans des configurations spécifiques. Même si
ces demandes sont nombreuses et diverses, elles relèvent du métier
traditionnel du contrôleur de gestion, calculer un coût pour appré-
cier une rentabilité. Ce qui est nouveau, c’est l’apparition de
demandes d’évaluation pour des objets non transactionnels : le coût
d’un poste de travail, le coût de la mobilité, le coût de la lutte pour
l’environnement. C’est aussi le développement du calcul de coûts
dans des environnements où il était inconnu. Le coût d’une
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 105

formation à l’université, d’une représentation à l’opéra, de l’appren-


tissage dans une région, d’un séjour à l’hôpital, etc. Ces secteurs qui
découvrent le calcul de coûts le font à la fois pour la gestion de leurs
ressources et pour dialoguer avec leurs parties prenantes que sont le
personnel, la société, les catégories sociales, etc.

L’orientation des comportements

On sait que, dans la hiérarchie des facteurs d’influence sur le


comportement, les indicateurs monétaires sont plus puissants que les
indicateurs qualitatifs et que les indicateurs physiques. Il ne faut donc
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pas se priver de l’impact des signaux émis par le système de coûts
sur les comportements. Les signaux économiques émis sont en petit
nombre : coût global de fonctionnement d’une unité d’analyse, coût
unitaire des ressources internes et coût unitaire des objets. L’extrême
variété des configurations des systèmes de coûts rend difficile la mise
en évidence de leviers d’action. Nous y reviendrons plus en détail lors
de l’analyse du substrat technique.
On peut néanmoins avancer une règle. Plus le système de coûts
est détaillé, plus il est à même de fournir des indicateurs de pilotage
économique et moins le tableau de bord sera nécessaire. Inversement,
plus le système de coûts est à grosses mailles, plus le tableau de bord
devra le compléter par la mobilisation d’indicateurs physiques.

Les trois dimensions de l’outil

Les trois objectifs que nous venons de rappeler doivent être


recherchés au travers des trois dimensions des systèmes de coûts que
nous avons mobilisées tout au long des chapitres précédents : le subs-
trat technique, la représentation des relations organisationnelles et la
philosophie gestionnaire.

Le substrat technique

Le substrat technique porte les deux autres dimensions, mais nous


pouvons néanmoins tenter d’en isoler les composantes. La plupart
des briques de base techniques sont utilisables par plusieurs systèmes.
Ce sont les configurations obtenues par l’assemblage d’un certain
nombre de briques de base qui permettent de définir un système ou
une famille de systèmes de coûts.
Le substrat technique est constitué de deux composants majeurs :
les unités d’analyse et les ressources internes. Leur définition concrète
106 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

et leurs relations permettent une différenciation à l’infini. L’analyse


technique a été réalisée au cours des chapitres précédents.
On doit y ajouter l’objet de coût, nécessaire au dialogue avec
l’environnement. Unique ou multiple, transactionnel ou non, l’objet
de coût trouve sa traduction dans le substrat technique sous la forme
d’une fiche de coût.

La représentation des relations organisationnelles

Elle est réalisée au travers de la définition des unités d’analyse et de


leurs relations. On y ajoutera l’articulation avec l’autre représentation
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majeure des relations organisationnelles que constitue l’organi-
gramme des responsabilités.

La philosophie gestionnaire

Elle se traduit par les signaux sélectionnés. Ces derniers sont issus
des unités d’analyse et portés par les ressources internes et par les objets.
C’est donc par l’interrogation de ces signaux que l’on pourra expliciter la
philosophie gestionnaire implicitement portée par le système de coûts.
La confrontation du résultat de cette explicitation et de la stratégie affi-
chée constitue un élément de diagnostic majeur de la pertinence du
système, pertinence que nous allons maintenant tenter de cerner.

La matrice d’analyse de la pertinence des systèmes de coûts

Le croisement des trois objectifs des systèmes de coûts et de leurs


trois dimensions permet d’obtenir la matrice qui va nous servir de base
à l’analyse de la pertinence des systèmes de coûts (figure 57).

Figure 57. La matrice d’analyse de la pertinence

Dimensions Substrat Représentation Philosophie


de l’outil technique simplifiée des relations gestionnaire
Objectifs : organisationnelles
dimension de
la performance

Gérer les ressources 1 2 3

Dialoguer avec
l’environnement 4 5 6

Orienter les
comportements 7 8 9
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 107

Le défi que pose cette matrice, c’est son remplissage. L’idéal serait de
pouvoir lister dans chaque case une série de questions débouchant sur
le diagnostic de la case concernée. La complexité des organisations, de
leur fonctionnement interne et de leurs relations avec l’environnement
rend illusoire une telle prétention. Ce que nous pouvons proposer,
c’est une amorce de questionnement ou un questionnement minimal.
En fonction du système analysé ou du type d’organisation, il y aura
lieu d’approfondir telle ou telle case et de passer plus rapidement sur
telle autre. Autrement dit, cette matrice que nous allons maintenant
remplir est une invitation méthodologique et non une solution clés
en main. On trouvera ci-après une amorce de questionnement pour
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chacune des neuf cases de la matrice.

Case 1

L’apport du substrat technique à la gestion des ressources dépend


de sa capacité à assurer une bonne traçabilité des ressources. Quelle
est la part des ressources externes directement affectées aux objets
et aux unités d’analyse ? Quelles sont les consommations faisant
l’objet d’une affectation directe de manière informationnelle et non
physique ? Y a-t-il plusieurs niveaux de réallocation des ressources au
sein des unités d’analyse ?
Si la traçabilité est une condition nécessaire, elle n’est pas suffi-
sante. La qualité de l’apport du substrat technique à la gestion des
ressources dépend de sa capacité à modéliser les différentes lois de
causalité expliquant la consommation de ressources au sein des
unités d’analyse.

Case 2

En quoi la représentation des relations organisationnelles donnée


par le système de coûts est-elle de nature à favoriser ou non la gestion
des ressources ? La réponse à cette question suppose d’examiner deux
autres questions. La première porte sur la définition des unités
d’analyse. Celles-ci correspondent-elles à des périmètres au sein
desquels se trouvent les leviers d’action sur la consommation de
ressources ? Un premier niveau de réponse est à chercher dans les
analyses conduites dans la case précédente. La seconde question
porte non plus sur les leviers d’action, mais sur les responsabilités et
donc sur la capacité à utiliser les leviers. La réponse à cette question
suppose de confronter le système de coûts à la structure hiérar-
chique. Une unité d’analyse peut contenir plusieurs services et autant
de responsables, ou inversement être située avec d’autres au sein d’un
108 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

centre de responsabilité. On peut aussi trouver des unités d’analyse


empruntant des tâches à plusieurs centres de responsabilité. C’est une
analyse attentive de la situation qui pourra éviter l’inaction ou les
mauvaises décisions, et qui peut conduire à réajuster les contours de
certaines unités d’analyse ou de périmètres de responsabilité.

Case 3

Les modalités d’affichage de la consommation de ressources tradui-


sent implicitement la logique de gestion sous-jacente. L’existence ou
non d’un plan analytique est un premier éclairage sur le mode de
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gestion attendu des opérationnels. Si ce plan analytique existe, sa
construction et sa structure éclairent également sur les points sur
lesquels l’attention est dirigée. D’éventuels affichages de coûts
unitaires par lignes de consommation au sein des unités d’analyse,
l’utilisation d’un classement en charges variables et charges fixes sont
autant de suggestions d’action sur les ressources.

Case 4

En matière de dialogue avec l’environnement, le substrat tech-


nique détermine les objets évaluables et les modalités d’évaluation.
Le substrat technique a-t-il été structuré par un objet particulier ou
a-t-il au contraire été construit indépendamment des objets ? Il y a là
un clivage majeur qui renseigne sur la capacité d’adaptation ou sur la
rigidité du système de coûts face à un changement dans les objets à
évaluer.

Case 5

Quel rôle peut jouer la représentation des relations organisation-


nelles dans le dialogue avec l’environnement ? On aborde ici la ques-
tion de la centralisation-décentralisation. Y a-t-il une ou des unités
d’analyse en charge des relations avec les différentes parties prenantes ?

Case 6

Quelle est la philosophie gestionnaire dans la conduite des rela-


tions avec l’environnement ? Un premier niveau de réponse est
fourni par les objets de coûts. S’il n’y a qu’un objet, celui-ci est
supposé véhiculer toutes les dimensions de la relation avec l’environ-
nement, sans que celles-ci soient explicitées.
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 109

La présence de plusieurs objets témoigne au contraire d’une volonté


de différenciation des différentes modalités de relation avec l’environ-
nement et donc de la nécessité d’un réglage fin de ces dernières.
Enfin, quels que soient l’objet ou les objets, la construction de
leurs coûts fournit également de précieux renseignements sur la
philosophie gestionnaire. L’affichage de la seule fiche de coût unitaire
laisse supposer que toutes les charges varient de la même manière
et que la négociation ne peut porter que sur des coûts unitaires,
supposés indépendants les uns des autres. Un affichage du coût inté-
grant de multiples lois de causalité ouvre la porte à des négociations
ciblées et réfléchies. Enfin, si les lois de causalité vont de pair avec
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une mise en évidence d’attributs ou de bouquets d’attributs de valeur
potentiels, la négociation est préparée sur des bases fondamentale-
ment différentes. Le coût reste important, mais c’est de valeur que
l’on parlera avec ses interlocuteurs.

Case 7

Le substrat technique peut-il influer sur les comportements ? La


réponse est indiscutablement oui. Cette influence s’exerce par le biais
des deux composants majeurs de tous les systèmes de coûts : le choix
des unités d’analyse et celui des ressources internes associées. Plus les
unités d’analyse sont grandes, plus elles risquent d’être hétérogènes
et de peu de sens pour les acteurs individuels.
Plus la relation entre l’affichage du coût unitaire de la ressource
interne et l’action individuelle semble lointaine, moins on peut
espérer voir le système de coûts participer à la construction de la
convergence des comportements.

Case 8

En matière d’orientation des comportements, la vision collective


est de plus en plus importante. Si le système de coûts fournit un
support cohérent avec la vision collective de la construction de la
performance économique, il aura une influence positive sur cette
dernière. Les réallocations des coûts des unités d’analyse secon-
daires sont-elles perçues comme traduisant un apport de service réel ?
La mobilisation de la notion de processus traduit-elle une réelle
coopération sanctionnée par une mesure de performance unique sous
la forme du coût unitaire d’un bouquet d’attributs ?
110 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

Case 9

En matière d’orientation des comportements, la philosophie


gestionnaire s’appuie essentiellement sur la notion de performance.
Le système de coûts est concerné sous deux dimensions. Fournit-il
les bons périmètres pour une analyse des performances ? Même si
celles-ci sont traduites dans des indicateurs autres que ceux produits
par le système de coûts, le fait qu’elles soient mesurées sur les mêmes
périmètres permet de postuler une interaction entre la performance
mesurée par des indicateurs physiques (éventuellement attributs de
valeur) et l’évolution des coûts. La notion de transversalité reconnue
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comme primordiale dans la construction de la performance est-elle
présente dans le système de coûts ?

Figure 58. Exemple de matrice d’analyse de la pertinence


d’un système de coûts

Substrat technique Relations organisa- Philosophie


tionnelles gestionnaire

Gestion des Quelle traçabilité ? Quelle correspondance Quel critère de gestion


ressources Quelles lois de entre les périmètres de traduit la philosophie
causalité ? responsabilité et les gestionnaire ?
unités d’analyse ?

Dialogue avec Quels sont les Quelles sont les unités Quelles relations
l’environne- supports à ce d’analyse concernées ? peut-on faire entre les
ment dialogue, produits supports de valeur
par le système de produits par le système
coûts ? de coûts et les attributs
attendus par les
clients ?

Orientation des Quelle notion de Quelles relations entre Quelles relations avec
comportements performance et au unités d’analyse en les autres systèmes
sein de quel termes de d’évaluation de la
périmètre ? performance ? performance ?

Illustrations

À titre d’illustrations, nous proposons d’appliquer notre grille


d’analyse de la pertinence à deux familles de systèmes de coûts. Il
ne s’agit pas de système « réels », mais de modèles canoniques, c’est-à-
dire des modèles tels qu’ils sont enseignés et promus par les
consultants.
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 111

Time-Driven Activity-Based Costing (TDABC)

Présentation. — Cette méthode de calcul de coûts, comme son nom


le souligne directement, se veut dans la continuité de l’ABC. Ses
auteurs sont Kaplan et Anderson [2008]. Analysant le faible degré de
diffusion de l’ABC aux États-Unis, ces deux auteurs diagnostiquent
que ce résultat est lié à la lourdeur de la mise en place de l’ABC, à sa
coûteuse maintenance, à la complexité de la collecte de données. Ils
insistent également sur le fait que même un grand nombre d’acti-
vités ne permettent pas d’obtenir un coût précis pour les opérations
complexes qui sont menées. Enfin, ils mettent en cause la subjecti-
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vité de l’allocation des temps du personnel ainsi que la non-prise en
compte du taux d’utilisation des ressources.
En réponse à ces critiques, les deux auteurs suggèrent une simplifi-
cation drastique de l’architecture du système de coûts en abandon-
nant la notion d’activité et en se référant aux centres de
responsabilité déjà existants. Au sein de ces centres de responsabilité,
une liste de tâches est élaborée. Chacune de ces tâches est caracté-
risée par son temps de réalisation déterminé par chronométrage ou
par déclaration de la part du personnel concerné. Le temps total mis
en œuvre s’écrit alors sous la forme d’une équation où chaque coef-
ficient est le temps standard de la tâche, et la variable, le volume de
cette même tâche. Chaque centre de responsabilité est caractérisé par
un temps total disponible et un coût global. La mise en relation de
ces deux données donne un coût unitaire de l’unité de capacité. Les
temps standard de l’équation caractérisant la production du centre
de responsabilité sont valorisés par ce coût unitaire. Enfin, l’agréga-
tion des temps standard peut être comparée au temps disponible pour
faire apparaître une sur- ou sous-activité, valorisée au même taux.
D’après Kaplan et Anderson [2008], ce système innovant est simple :
pas d’analyse de l’organisation. Les données à manipuler sont égale-
ment peu nombreuses : l’allocation des coûts aux centres de respon-
sabilité et la détermination du temps global disponible (pas de
subjectivité). Les équations sont très simples à maintenir et à
modifier pour coller au plus près de la réalité : il suffit d’ajouter une
tâche et son temps standard, ou de modifier un coefficient, cela
permet d’augmenter la précision locale sans perturbation des autres
tâches. Enfin, la prise en compte de la sous-activité offre un axe
d’amélioration de la gestion des ressources. Voilà pour l’essentiel de
l’argumentation.

Architecture générale. — Examinons en premier lieu l’architecture


générale du système TDABC, tel qu’il est présenté par ses concepteurs.
112 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

Figure 59. Architecture du système TDABC


TDABC

Organisation Organisation

=
Fonctions
Centres de
responsabilité
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Centres de
responsabilité

Tâches

Coût de l’unité
de capacité = taux
horaire chargé

L’architecture du système (figure 59) réplique l’architecture des


responsabilités telles qu’elles sont représentées par l’organigramme.
Cette similitude diffère fondamentalement de l’architecture des
systèmes ABC, qui tendaient, au moins théoriquement, à s’abstraire
de l’organigramme pour se construire sur la base des flux de travail,
introduisant ainsi la transversalité dans la construction des activités.
On notera que, suivant le pays où le système de coûts est développé,
il comprendra ou non les fonctions administrative, commerciale et
de R&D. Comme le préconisent les auteurs, même si le système est
réduit aux fonctions d’approvisionnement et de production, les
centres de responsabilité qui ne produisent rien pour l’environne-
ment doivent être pris en compte. Leurs ressources doivent être réaf-
fectées aux centres fournissant des services destinés au marché. Toutes
les ressources du périmètre du système de coûts, autres que celles
directement affectées aux objets de coûts, sont donc constitutives des
taux horaires qui caractérisent chaque centre de responsabilité
(figure 60, p. 113). Rappelons pour mémoire que la capacité d’un
centre de responsabilité pourrait être mesurée par une autre ressource
que le temps humain, comme les mégaoctets pour le centre informa-
tique ou les litres de lait pour la laiterie, mais, comme le nom de la
méthode l’indique, il s’agit là d’exceptions. La ressource interne, pour
reprendre notre terminologie, est dans le TDABC un taux horaire
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 113

chargé. Les ressources externes, comme dans tous les systèmes de


coûts, sont issues de la comptabilité financière ; qu’en est-il de la
nomenclature décrivant les objets ?

Des nomenclatures flexibles. — Les auteurs de la méthode insistent


sur sa flexibilité et sa capacité à prendre en compte, sans difficulté,
la complexité des objets ou les prestations fournies. Les auteurs déve-
loppent ce point sur la base des équations de temps spécifiques à
chaque centre de responsabilité. Un nouveau client demandera une
tâche spécifique consommant x minutes de plus que celle du client
déjà connu. Dans le cas d’un centre de logistique, le transfert d’une
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palette entière sera différencié du transfert d’une palette composite
qui devra intégrer les temps de dégroupage et de reconditionne-
ment, etc. Kaplan et Anderson évitent de parler de nomenclatures
pour ne parler que du coût unitaire de l’unité de capacité de chaque
centre. Or les différents coefficients, propres à chaque produit,
service, commande ou client, s’ils sont utiles pour le calcul du coût
unitaire de la capacité, sont d’abord des éléments de la nomenclature
des objets à évaluer. La méthode TDABC (figure 60) incorpore, sans le
dire, dans la procédure de calcul de coûts l’élaboration des nomen-
clatures des objets qu’elle va évaluer. La méthode s’articule autour
d’une ressource unique, le temps. Cette ressource peut avoir un coût
différent selon les centres de responsabilité.

Figure 60. La méthode TDABC

Ressources externes Organisation

Est représentée par

Consomme
Unité d’analyse =
centre
de responsabilité

Consomme
Produit Consomme

Nomenclature =
coefficient Consomme
des équations de temps Ressource interne =
taux horaire chargé
114 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

Il y a ici une inversion du processus traditionnel de fonctionne-


ment d’un système de coûts. Traditionnellement, le service des
méthodes ou le service de gestion de la production élabore la nomen-
clature des objets que l’organisation produit. Le rôle du contrôle de
gestion est de fournir les bases (ressources internes + ressources
externes) qui permettent l’évaluation de ces nomenclatures produi-
sant ainsi le coût de ces objets. Dans le TDABC, il y a une imbrication
entre ces deux fonctions. Au sein de chaque centre de responsabilité,
le responsable élabore une liste d’opérations ou tâches caractérisées
par leur temps de réalisation. Cette liste, très flexible et sous la seule
responsabilité de l’unité d’analyse, doit ensuite être confrontée aux
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listes des autres unités d’analyse pour reconstituer les objets de coûts.
Ceux-ci seront ipso facto évalués puisque chaque coefficient est assorti
du taux horaire chargé du centre où chacune des opérations a été
réalisée. Outre le mélange des fonctions de production et de
méthode, cette façon de procéder fait du responsable de l’unité
d’analyse à la fois le contrôlé et le contrôleur. En sélectionnant les
opérations à inclure dans l’équation de temps caractérisant l’activité
de son unité, il influence la mesure du temps utilisé. Comme le temps
disponible est figé sur la période, cela veut dire que la manipula-
tion de l’équation de temps permet de jouer sur l’élément phare de la
méthode : la mesure du temps non utilisé.
L’attention à la sous-activité n’est pas nouvelle : dès le début du
XXe siècle, Henry L. Gantt y consacre de nombreux développe-
ments ; la question est également formalisée dans le cadre de la
méthode des sections homogènes sous l’appellation « méthode de
l’imputation rationnelle ». La différence entre ces approches
anciennes et l’approche du TDABC, c’est que, dans le TDABC, la capa-
cité non utilisée est évaluée au coût complet horaire, alors que, dans
les autres approches, on distinguait les charges fixes et les charges
variables. Seules les charges fixes déterminaient le coût de la sous-
activité. Sauf à considérer qu’aujourd’hui toutes les charges sont fixes,
il y a de ce point de vue une approximation grossière qui ne peut être
présentée comme une avancée en matière de gestion.

Analyse de la pertinence. — Si nous essayons de remplir notre grille


d’évaluation de la pertinence (figure 61, p. 116), voyons ce que nous
donne l’analyse des trois cases de la diagonale (1.1 ; 2.2 ; 3.3).
Case 1.1 : la traçabilité des ressources est réelle jusqu’aux centres de
responsabilité. Elle s’atténue progressivement ensuite. Les centres de
responsabilité « supports » sont réalloués sur les centres opérationnels.
Lors de cette réallocation, les charges sont globalisées soit dans un taux
horaire, soit dans un pourcentage. Dans les centres opérationnels, la
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 115

même procédure est utilisée pour la détermination du taux horaire


chargé de chaque centre. Ce dernier véhiculant l’ensemble des charges
jusqu’aux objets de coûts, produits ou services. À ce niveau, il n’y a
plus de lien visible entre les ressources (synthétisées dans le taux horaire
chargé) et l’objet dont on calcule le coût, seules les charges externes
directement consommées par les objets sont correctement tracées,
comme dans tous les autres systèmes.
La recherche des lois de causalité de consommation de ressources,
une des innovations majeures de l’ABC, est ici abandonnée. Plus exac-
tement, on n’en conserve qu’une, celle de la proportionnalité entre les
ressources consommées dans chaque centre et son volume d’activité
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mesuré par le nombre d’heures. De ce fait, on peut considérer que la
méthode incorpore une loi de causalité par centre de responsabilité,
mais il s’agit d’une loi peu fiable dans la mesure où le taux horaire
incorpore toutes les ressources, non seulement celles directement
affectées à chaque centre, mais également les ressources des centres
supports qui ont été ventilés sur les centres opérationnels. Cette loi fait
l’hypothèse implicite de l’existence de rapports constants entre les diffé-
rents types de ressources lors de leur mise en œuvre.
Case 2.2 : les relations organisationnelles sont inexistantes. Le
système hiérarchise les centres de responsabilité en centres supports
et centres opérationnels. Seuls ces derniers sont « visibles » et carac-
térisés par leur taux horaire chargé. Chacun est directement lié aux
objets par ce taux. En épousant une structure calée sur l’organi-
gramme, le système conforte le cloisonnement fonctionnel. Les flux
de travaux transversaux, qui sont saisis par des unités d’analyse de
type processus dans d’autres méthodes, sont ici ignorés. Cela veut
dire que la coordination horizontale, considérée comme particuliè-
rement importante pour le pilotage de la performance, devra
s’appuyer sur d’autres outils.
Case 3.3 : cette dernière case comporte un point d’interrogation
car deux situations totalement opposées sont décrites par les auteurs
ou d’autres tenants de la méthode. La philosophie gestionnaire la
plus évidente est celle de la recherche de l’utilisation efficiente de
la ressource humaine en mesurant les temps non utilisés. Quelle
influence sur le comportement ? La réponse est délicate. Si le
personnel est conscient de cet objectif, il n’est pas certain de colla-
borer à la mesure des temps standard qui détermineront le temps
utilisé et, partant, le temps non utilisé. Cela conduit de nombreux
praticiens à abandonner ce volet de la méthode, considérant de facto
que le coût de la ressource humaine est fixe et que la mesure du
temps non utilisé est sans impact sur la performance de l’organisa-
tion. On peut alors penser que la philosophie gestionnaire
116 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

sous-jacente est le service à la clientèle en juste-à-temps, mais comme


les centres de responsabilité ne sont pas reliés au sein de processus,
rien ne dit que l’optimisation des temps locaux conduise à l’optimi-
sation du temps global. Quelle que soit l’option choisie, on a du mal
à voir comment la méthode influence les comportements.

Figure 61. Grille d’analyse de la pertinence de la TDABC

Substrat technique Relations Philosophie


organisationnelles gestionnaire

Gestion des Traçabilité faible sauf Identité des unités Maîtrise de la capa-
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ressources pour les coûts de d’analyse et des péri- cité mesurée par le
main-d’œuvre. mètres de temps humain.
Le temps est la seule responsabilité.
loi de causalité.

Dialogue avec Information détaillée Les unités d’analyse Aucune relation


l’environne- au niveau de l’opéra- sont sans lien. entre les ressources
ment tion, au niveau de internes et les
l’unité d’analyse et attributs de valeur,
des objets, mais sur sauf si le temps
une base standard. humain en fait
partie.

Influence des La performance est Aucune relation entre ?


comporte- réduite au taux d’utili- les performances des
ments sation de la capacité. différentes unités
d’analyse.

Au final, il est difficile de voir dans la TDABC une méthode inno-


vante de calcul de coûts. Elle pèche en matière de gestion des
ressources, sauf à considérer que toutes les ressources sont fixes et
liées par des rapports constants. Elle n’éclaire en rien la production
des attributs de valeur que l’environnement attend. Enfin, en
s’appuyant sur les centres de responsabilité, elle maintient une vision
en silos de l’organisation, ignorant que la performance se construit de
manière transversale.

Le système de coûts par processus à valeur ajoutée

Ce système présenté techniquement dans les années 1990


[Mévellec, 1995] combine l’analyse par activités, telle que présentée
dans les travaux du CAM-I en 1988 pour le calcul de coûts, et
l’approche par processus qui, dans ces travaux, n’était utilisée que
pour la gestion de la performance.
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 117

Présentation. — Sur le plan technique, cette famille de systèmes de


coûts se distingue au sein des nombreuses branches issues des travaux
du CAM-I par trois paramètres de conception : la non-transversalité
des activités, la structuration de la carte d’activité en processus sur la
base de liens de causalité et la double nature de l’inducteur.
Dans la présentation du cadre conceptuel de l’ABC en 1988,
Berliner et Brimson [1988] écrivaient : « Une vision fonctionnelle est
souvent significativement différente d’une vision organisationnelle
car elle a pour objectif d’identifier des activités homogènes. » Cette
formulation a conduit les concepteurs de systèmes ABC à définir les
activités sans référence à la structure hiérarchique traditionnelle.
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Cette liberté est abandonnée, ici, dans la construction des activités
qui seront regroupées en processus à valeur ajoutée. Les activités sont
bien évidemment définies par leur production, mais leurs frontières
doivent respecter les frontières des unités organisationnelles déjà
existantes (service, département, fonction). L’objectif principal de
cette restriction est d’éviter les conflits d’autorité qui paralysent trop
souvent la gestion des activités transverses.
Les activités sont ensuite regroupées en processus sur la base de
liens de causalité, liens qui traduisent également les flux de travaux
coopératifs nécessaires à la production des biens et services proposés
par l’organisation à son environnement.
Enfin, on vérifie que l’inducteur qui caractérise chaque processus
est à la fois un inducteur de coûts et un inducteur de valeur.

Figure 62. Exemple de processus à valeur ajoutée

Réapprovi-
Qualifier Contrôler Payer
Ordon- sionner
les les Stocker Les Inducteur
nancer en
fournisseurs réceptions fournisseurs
urgence
Les bonnes
références
au bon moment
au meilleur coût

Bouquet
d’attributs
de valeur

Dans l’exemple de la figure 62, le processus regroupe l’ensemble


des activités nécessaires à la mise à disposition de la production des
bonnes références (qualité), au bon moment (délai), au meilleur prix
118 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

(coût). L’inducteur — nombre de références spécifiques — est bien


simultanément porteur des attributs qui donnent de la valeur au
couple produit-service délivré.

Analyse. — L’architecture présentée dans la figure 63 met en évidence


deux caractéristiques organisationnelles majeures. L’organisation vue
en termes de fonctions et de services est directement compatible avec
la vision par activités. Les tâches sont utilisées pour la configuration
des activités, mais l’analyse se fait service par service de manière à
éviter toute tentation de création d’activités transverses. Les activités
sont soit équivalentes à un service, soit un sous-ensemble de services.
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La cohérence du pouvoir managérial illustré par l’organigramme n’est
pas remise en cause.

Figure 63. Architecture du système de coûts par processus


à valeur ajoutée
Système de coûts par processus à valeur ajoutée

Organisation Organisation

Fonctions

Services/
ateliers Activités

Tâches

Processus

Inducteurs

La seconde caractéristique mise en évidence est l’existence d’un


second niveau dans l’architecture du système de coûts, le niveau
« processus » (figure 64, p. 119). Les processus, qui agrègent des acti-
vités, sont transverses aux fonctions et services, ils entraînent poten-
tiellement l’existence d’une nouvelle hiérarchie, horizontale, et non
verticale comme dans l’organigramme. Les processus opérationnels
LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES DE COÛTS 119

sont consommés par les objets sur la base des inducteurs (souvent
non volumiques).

Figure 64. Le système de coûts par processus à valeur ajoutée

Ressources
Organisation
externes
Est représentée par

Consomme n activités
Agrège
Consomme
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K processus

Nomenclature Consomme Produit

K inducteurs

Les nomenclatures des objets, produit-services et clients par


exemple, sont des données extérieures. Elles émanent des services en
charge de leurs définitions. Le système de coûts est de ce fait indé-
pendant des objets qu’il évaluera. En ce sens, il est robuste car non
influencé par les objets à évaluer, lesquels sont de plus en plus fluc-
tuants et nombreux.

Analyse de la pertinence. — Reprenons nos trois cases précédem-


ment utilisées (figure 65, p. 120).
Case 1.1 : la traçabilité de certaines ressources externes est assurée
vers les objets dans les mêmes conditions que dans les autres
méthodes. Toutes les autres ressources sont tracées directement vers
les activités sur la base d’une loi de causalité exprimée par l’induc-
teur d’activités (sa mesure de production). Les activités sont ensuite
regroupées en processus sur la base de lien de causalité. On en déduit
qu’il existe également une loi de causalité de consommation des
ressources au niveau des processus. Le système combine en fait une
loi de causalité de court terme au niveau des activités et une loi de
causalité de long terme au niveau des processus. Le système fournit
d’excellents leviers en matière de gestion des ressources.
Case 2.2 : la construction des processus conduit à représenter les
relations de travail existantes au sein des organisations. Les activités
sont la traduction des savoir-faire présents dans l’organisation, et les
processus la formalisation de leur coopération. La formalisation des
processus met en lumière la nécessaire complémentarité entre la
hiérarchie verticale (respectée par les règles de construction des
120 L E S SYSTÈMES DE COÛTS DANS LES ORGANISATIONS

activités) et les besoins de coordination horizontale (fondamentale


pour la création de valeur).
Case 3.3 : la mise en place d’une animation de gestion au niveau
des processus doit mettre en évidence les modalités de création de
valeur par la coopération des divers savoir-faire qui y sont présents.
À la défense de son territoire devrait se substituer l’amélioration de
compétences au service de la dynamique de création de valeur pour
l’environnement.

Figure 65. Grille d’analyse de la pertinence des systèmes de coûts


par processus à valeur ajoutée
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Substrat Relations Philosophie
technique organisationnelles gestionnaire

Gestion des Traçabilité des Pas de remise en Tout le monde est


ressources ressources au cause des relations producteur.
niveau des activités hiérarchiques au La valeur est la clé de
et des inducteurs niveau des activités. la performance.
au niveau des Mise en évidence des
objets. complémentarités de
compétences au sein
des processus.

Dialogue avec Possibilité d’évaluer Les processus sont Mise en évidence


l’environne- plusieurs types des minichaînes de dans tous les
ment d’objets, mise en valeur qui sont, de ce processus de l’articu-
évidence pour fait, le support naturel lation coût-valeur.
chacun de la contri- de dialogue avec
bution des induc- l’environnement ou
teurs de avec les autres
coût-valeur. processus internes.

Influence des Gain de producti- Interdépendance des Développement de la


comporte- vité au sein des performances au sein coopération interne
ments activités. des processus. au service de la créa-
Coût-valeur au sein tion de valeur pour
des processus. l’environnement.

La relecture du fonctionnement de l’organisation que propose ce


système va bien au-delà du simple calcul de coûts. En proposant une
vision combinatoire de la création de valeur sur la base des savoir-
faire repérés au sein des activités, ce système offre un cadre aux inévi-
tables arbitrages coûts-qualité-délai ainsi qu’à d’autres dimensions de
la valeur attendue par l’environnement.

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