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La distance en formation

Premier jalon pour une opérationnalisation de la théorie de la


distance transactionnelle
Annie Jézégou
Dans Distances et savoirs 2007/3 (Vol. 5), pages 341 à 366
Éditions Lavoisier
ISSN 1765-0887
ISBN 2746220744
DOI 10.3166/ds.5.341-366
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La distance en formation
Premier jalon pour une opérationnalisation de la théorie
de la distance transactionnelle
Annie Jézégou

École Supérieure des Techniques Industrielles et des Mines de Nantes


Centre de Recherches Éducation-Formation. Université Paris X Nanterre
annie.jezegou@emn.fr

RÉSUMÉ. L’article pose un premier jalon pour une opérationnalisation de la théorie de la


distance transactionnelle (Moore, 1993 ; Moore et Kearsley, 1996). Cette théorie a fondé le
principe selon lequel la distance en formation est principalement transactionnelle et non
spatiale ou temporelle. Bien qu’elle ait plus de vingt ans d’existence et une certaine
notoriété, elle n’a jamais été validée. La principale raison tient à l’absence de définition
opérationnelle des deux variables clés de la distance transactionnelle que sont la structure et
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le dialogue. Face à ce constat, nous proposons une définition pour chacune d’entre-elles en
capitalisant nos propres recherches sur l’ouverture structurelle des environnements
éducatifs, tout en intégrant les apports de Garrison et d’Anderson (2003) sur le dialogue à
travers les notions de présences sociale, cognitive et éducative. Puis, nous proposons un
modèle opérationnel permettant d’appréhender la notion de distance transactionnelle. Enfin,
nous mettons ce modèle à l’épreuve d’une première étude empirique afin de tester son
caractère opérationnel, tout en livrant ses principaux résultats.
ABSTRACT. This article paves the way to put the theory of transactional distance into operation
(Moore, 1993 : Moore et Kearsley, 1996). This theory founded the principle according to which
distance in education is mainly transactional and not spatial or temporal. Even though this
theory is more than twenty years old and has a certain notoriety, it has never been validated.
The main reason for this is the absence of an operational definition for the two key variables in
transactional distance, namely its structure and its dialogue. Faced with this problem, we have
come up with a definition for both of these variables while capitalising on our own research
concerning the structural opening of educative environments, and including the contributions of
Garrison and Anderson (2003) on dialogue through the notions of social, cognitive, and
educative presences. We will then suggest an operational model which allows one to grasp the
notion of transactional distance. Finally, we will test this model using an empirical study for the
first time to elucidate how well it operates followed by our main results.
MOTS-CLÉS : distance transactionnelle, structure, ouverture, libertés de choix, dialogue,
présence sociale, cognitive et éducative.
KEYWORDS: transactional distance, structure, opening, freedom of choice, dialogue, social,
cognitive, and educative presence.

DOI:10.3166/DS.5.341-366 © Cned/Lavoisier

Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007, pages 341 à 366


342 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

Introduction

Plusieurs tentatives ont été menées, en France et en Amérique du Nord, pour


clarifier la notion de « distance » en formation (Jacquinot, 1993 ; Moore, 1993,
Bernard, 1999 ; Bouchard, 2000 ; Garrison, 2003). Toutes insistent sur le fait qu’elle
ne se limite pas uniquement, comme il est couramment avancé, à la dimension
spatio-temporelle. En effet, elle ne se réduit pas uniquement à la distance
géographique qui sépare l’apprenant des formateurs ou de ses pairs. Elle ne se limite
pas plus au décalage temporel existant entre l’acte pédagogique et l’acte
d’apprentissage.
Moore (1993) est certainement l’auteur qui a le plus contribué à clarifier cette
notion. Il a fondé le principe selon lequel la distance en formation est principalement
transactionnelle, et non spatiale ou temporelle. Il emprunte ici le concept de
transaction à Dewey (1938) pour signifier que toute expérience formative intègre un
degré de distance dans les transactions existantes entre l’apprenant et son
environnement éducatif. Moore définit la distance transactionnelle comme « un espace
psychologique et communicationnel entre l’enseignant et l’apprenant mais aussi entre
les apprenants, dans une situation éducationnelle » (Moore, 1993, p. 23).
Garrison (2000) estime que la théorie de la distance transactionnelle est
essentielle « pour guider la complexité de la pratique d’un processus rationnel tel
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qu’enseigner et apprendre à distance » (p. 3). Pour Jung (2001), elle fournit « un
cadre conceptuel utile pour définir et comprendre la distance en formation tout en
ouvrant un nouveau champ de recherches » (p. 527). Toutefois, bien que cette
théorie ait plus de vingt ans d’existence et une certaine notoriété, elle n’a jamais été
validée totalement. Pour nombre de chercheurs du domaine, la principale raison tient
à son manque de précision (Garrison, 2000 ; Power, 2002 ; Gorsky et Caspi, 2005).
Cet article pose un premier jalon pour une opérationnalisation de la théorie de la
distance transactionnelle. Ce jalon s’appuie sur une importante investigation
bibliographique que nous avons menée sur les principaux écrits portant sur cette
théorie. Nous l’avons ensuite étayé en capitalisant nos propres recherches sur
l’ouverture structurelle des environnements éducatifs (Jézégou, 2005, 2006) tout en
intégrant les apports de Garrison et d’Anderson (2003) sur le dialogue à travers les
notions de présences sociale, cognitive et éducative. L’objectif de cet étayage
théorique est de proposer un modèle permettant d’appréhender la notion de distance
transactionnelle. Enfin, nous avons mis ce modèle à l’épreuve d’une première étude
empirique pour en vérifier le caractère opérationnel. Cette étude est décrite dans la
seconde partie de l’article.

La théorie de la distance transactionnelle

La théorie de la distance transactionnelle (Moore, 1993 ; Moore et Kearsley,


1996) est peu connue en France. En revanche, elle est très répandue aux Etats-Unis
La distance en formation 343

et fait l’objet, depuis plus de dix ans, de plusieurs recherches empiriques visant à
vérifier sa validité (Saba et Shearer, 1994 ; Bischoff et Wood, 1996 ; Chen et
Willits, 1998 ; Faust, 1999 ; Bouchard, 2000 ; Garrison, 2000 ; Jung, 2001 ; Chen,
2001 ; Power, 2002 ; Gorsky et Caspi, 2005).
Suite à un important travail d’analyse des publications liées à ces recherches,
nous avons constaté qu’elles ne soutiennent que très partiellement la théorie de
Moore. Par conséquent, elles ne permettent pas de la valider totalement. En effet, les
chercheurs ne disposent pas d’un soubassement fiable dans la mesure où les deux
variables clés de la distance transactionnelle ne sont pas clairement définies par
Moore. Or il les présente comme les mécanismes fondamentaux permettant
d’appréhender et d’évaluer la distance en formation.

La structure et le dialogue : deux variables clés non définies

Selon Moore (1993), le degré de distance transactionnelle est déterminé par les
deux variables clés que sont la structure et le dialogue.
« La structure renvoie à la rigidité ou à la flexibilité des objectifs éducatifs, des
stratégies d’enseignement et des méthodes d’évaluation » (Moore, 1993, p. 26).
Certains précisent que cette première variable porte sur la présence, ou l’absence,
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d’une structure pédagogique plus (ou moins) contraignante (Bouchard, 2000) ou sur
le niveau d’hétéro-structuration du dispositif pédagogique (Jézégou, 2006). Pour
d’autres, elle interroge la manière dont le dispositif répond aux besoins individuels
des apprenants (Saba et Shearer, 1994) ou encore les règles et les ressources que
propose le dispositif pour la réalisation du projet de formation (Paquelin, 2006).
Bischoff (1996), quant à lui, réfère la structure au degré d’individualisation de la
formation évalué en fonction du nombre d’apprenants.
Le dialogue porte sur « l’interaction ou les séries d’interactions ayant des
qualités positives que d’autres n’ont pas. Il peut y avoir des interactions négatives
ou neutres, mais le dialogue, par définition, améliore la compréhension des savoirs
par l’étudiant » (Moore, 1993, p. 23). Cette seconde variable est associée, pour
certains, à la quantité d’interactions verbales entre le formateur et l’apprenant (Saba
et Shearer, 1994) ou au nombre de communications entre ces derniers (Bischoff,
1993). Pour d’autres, elle correspond au flux d’informations produit de façon
synchrone ou asynchrone entre les apprenants et les matériels didactiques, entre les
apprenants eux-mêmes et entre les apprenants et les formateurs (Power, 2002) ou
encore à la fréquence et à la durée des interactions entre ces deux catégories de
personnes (Bunker et al., 1996).
Ce rapide tour d’horizon, même s’il est loin d’être exhaustif, montre la variété
des définitions opérationnelles attribuées à chacune de ces deux variables de la
distance transactionnelle.
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Afin d’illustrer plus finement le concept de distance transactionnelle, Saba et


Shearer (1994) ont proposé un modèle examinant la relation entre la structure et le
dialogue. Il peut se résumer à deux dynamiques :
1) à mesure que l’ampleur du dialogue augmente, la distance transactionnelle
diminue ;
2) l’augmentation de la structure du dispositif diminue les possibilités de
dialogue qui, à son tour, augmente la distance transactionnelle.
Cependant, nous constatons que ces deux chercheurs mentionnent le fait que les
résultats obtenus dans leurs travaux manquent de constructions théoriques fiables.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, nous en déduisons, avec Gorsky et
Caspi (2005), que la théorie de la distance transactionnelle n’a jamais été validée
pour une principale raison : Moore n’a pas proposé une construction opérationnelle
de sa théorie « amenant les chercheurs du domaine à employer des définitions
opérationnelles qui différaient clairement des formelles, compromettant ainsi la validité
de la théorie » (Gorsky et Caspi, 2005, p. 7). Par ailleurs, les définitions formelles des
deux variables de la distance transactionnelle, telles que proposées par Moore, ne sont
pas suffisamment précises pour pouvoir évaluer chacune d’entre-elles.

Deux variables clés difficiles à évaluer


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Comme le précise Garrison (2000), Moore a principalement travaillé sur les
ressources médiatisées et non sur l’environnement éducatif global. Or, la flexibilité
des objectifs, des stratégies d’enseignement et des méthodes d’évaluation dépendent
principalement de la structuration de cet environnement et pas des ressources elles-
mêmes. Ensuite, toujours selon Garrison (2000), la variable structure est difficile à
évaluer et plus particulièrement à déterminer quantitativement. Enfin, bien que la
quantité de dialogue entre les formateurs et les apprenants, mais aussi entre les
apprenants eux-mêmes soit relativement facile à mesurer, elle ne donne que des
indications de volume. La qualité de ces interactions est plus difficile à évaluer.
Malgré ces limites, Bouchard (2000), en s’appuyant sur les relations dynamiques
établies par Saba et Shearer (1994), proposait de situer tout environnement éducatif,
et ceci quel que soit le degré d’éloignement géographique qu’il comporte, à la
convergence des deux axes de la structure et du dialogue (figure 1)
Selon l’auteur, un environnement doté d’un faible degré de distance
transactionnelle recourt fréquemment au dialogue tout en présentant une souplesse
structurelle. En revanche, un environnement pédagogique rigide et recourant peu au
dialogue présente un degré élevé de distance transactionnelle. Ainsi, tout
environnement pédagogique présente son indice propre de distance transactionnelle
(Bouchard, 2000).
La distance en formation 345

Toutefois, cette caractérisation ne peut être qu’approximative. En effet, elle ne


s’appuie pas sur une définition précise des deux variables de la distance
transactionnelle, ni sur une démarche permettant d’évaluer chacune d’entre-elles.
C’est à ces deux problèmes que nous contribuons plus particulièrement à apporter
des solutions dans cet article.

Faible recours au dialogue

Stucture rigide Structure souple

Fort recours au dialogue


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Figure 1. Caractérisation des environnements éducatifs d’après Bouchard (2000,
p. 70)

Essai d’opérationnalisation de la théorie de la distance transactionnelle

Ce premier jalon d’opérationnalisation de la théorie de la distance


transactionnelle s’appuie sur deux axes : la structure ou le niveau d’ouverture de
l’environnement éducatif (Jézégou, 2005, 2006) et le dialogue ou le niveau de
présence sociale, cognitive et éducative (Garrison et Anderson, 2003).

La structure ou le niveau d’ouverture de l’environnement éducatif

« La structure renvoie à la rigidité ou à la flexibilité des objectifs éducatifs, des


stratégies d’enseignement et des méthodes d’évaluation » (Moore, 1993, p. 26).
Les objectifs, les stratégies d’enseignement et les décisions
d’évaluation définissent ensemble l’environnement éducatif. Trois grandes logiques
peuvent se présenter ici (Jézégou, 1998, 2005). La première renvoie à une situation
où l’environnement éducatif est totalement créé par l’apprenant en dehors de tout
cadre institué ; elle correspond à une démarche d’autodidaxie ; c’est-à-dire à une
auto-structuration par l’apprenant lui-même de son propre environnement éducatif.
La deuxième logique se réfère à une situation où l’environnement éducatif est
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entièrement conçu et prédéterminé par l’institution éducative; elle correspond à une


démarche d’hétéro-structuration de cet environnement. La troisième reflète une
situation où l’environnement éducatif est structuré conjointement par l’apprenant et
par l’institution dans un cadre d’une négociation régie par les ressources et les
contraintes des deux parties en présence (Jézégou, 2006) ; elle correspond à une
démarche de co-structuration de cet environnement. Chacune de ces trois grandes
logiques renvoie à un niveau spécifique de souplesse ou de flexibilité structurelle de
l’environnement éducatif.
Ce niveau de flexibilité renvoie principalement au degré de libertés de choix
ouvert à l’apprenant dans la détermination des différentes composantes de son
environnement éducatif (Jézégou, 2005, 2006). Ainsi, la flexibilité est importante
lorsqu’il dispose de libertés de choix conséquentes pour structurer par lui-même ses
propres objectifs et méthodes d’apprentissage, les conditions spatio-temporelles ou
encore les moyens nécessaires à ses apprentissages. Ici, l’environnement éducatif est
hautement ouvert. En revanche, dans le cadre d’une formation instituée fortement
hétérostructurée, la flexibilité est inexistante dans la mesure où l’institution
n’accorde aucune liberté de choix à l’apprenant ; ce dernier devant s’inscrire dans un
cadre rigide et prédéterminé par l’institution. Ici, l’environnement éducatif est
totalement fermé. Entre ces deux extrêmes, il existe des niveaux intermédiaires de
flexibilité qui varient selon le degré de libertés de choix ouvert par l’institution
éducative à l’apprenant dans la détermination des différentes composantes de son
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environnement éducatif (Jézégou, 2005).
Tout environnement éducatif intègre 13 composantes susceptibles d’ouvrir à
l’apprenant des libertés de choix (Leclerc et al., 1988 ; Prévost, 1994 ; Jézégou,
1998). Nous les répartissons en trois grandes catégories (Jézégou, 2005) :

Les 3 Catégories Composantes associées

Composantes spatio- Temps, lieu, accès, rythme


temporelles

Composantes purement Cheminement, séquence, objectifs, contenu, format,


pédagogiques méthodes, évaluation

Composantes de la Ressources – humaines


communication éducative
médiatisée Moyens : supports médiatisés d’apprentissage et outils
de communication distants

Tableau 1. Catégorisation des composantes d’un environnement éducatif (Jézégou,


2005)
La distance en formation 347

Il existe depuis 1988 un protocole d’évaluation1 qui permet d’allouer, à chacune


de ces 13 composantes, un score correspondant au degré de liberté de choix ouvert à
l’apprenant (Leclerc et al, 1988). Nous avons apporté à ce protocole quelques
évolutions, sans pour autant en modifier la méthodologie (Jézégou, 2005). Elles
permettent tout d’abord, d’allouer à chacune des composantes un degré de liberté de
choix exprimé en pourcentage puis, d’estimer l’ouverture ou le degré de liberté de
choix ouvert par le dispositif. Il est alors possible de caractériser cette ouverture - ou
cette flexibilité structurelle - en s’aidant du tableau suivant :

Ouverture obtenue en % Catégorie descriptive du dispositif

100 ≥ score > 90 Hautement ouvert +

90 ≥ score > 80 Hautement ouvert

80 ≥ score > 70 Hautement ouvert -

70 ≥ score > 60 Moyennement ouvert +

60 ≥ score > 50 Moyennement ouvert

50 ≥ score > 40 Moyennement ouvert -

40 ≥ score > 30 Peu ouvert +


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30 ≥ score > 20 Peu ouvert

20 ≥ score > 10 Peu ouvert -

10 ≥ score Fermé

Tableau 2. Catégorisation de l’ouverture des dispositifs (Jézégou, 2005, p.135)

Par conséquent, nous disposons à la fois d’un cadre opérationnel qui précise la
définition formelle donnée par Moore à la variable structure et d’un protocole
permettant d’évaluer son niveau d’ouverture ou de flexibilité. Cette perspective
contribue à apporter une réponse à la préoccupation de Garrison (2000) concernant
la difficulté à évaluer cette variable de la distance transactionnelle et plus
particulièrement à lui donner une expression quantitative.

1. GENIP : Grille d’Évaluation du Niveau d’Individualisation d’un Programme (Leclerc et al,


1988). Ici, l’individualisation est définie au travers des libertés de choix offertes à l’apprenant
par l’environnement éducatif.
348 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

Le dialogue ou le niveau de présence

« Le dialogue porte sur l’interaction ou les séries d’interactions ayant des


qualités positives que d’autres n’ont pas. Il peut y avoir des interactions négatives
ou neutres, mais le dialogue, par définition, améliore la compréhension des savoirs
par l’étudiant » […]. Chaque personne engagée dans le dialogue est un auditeur
respectueux et actif dans le cadre d’un rapport éducatif orienté vers une meilleure
compréhension des savoirs par l’étudiant » (Moore, 1993, p.24).
Le dialogue renvoie plus particulièrement aux interactions non seulement entre
l’apprenant et le formateur mais aussi entre les apprenants eux-mêmes (Moore et
Kearsley, 1996). Les deux auteurs insistent sur le fait qu’elles sont, d’autant plus dans
un contexte d’éclatement spatio-temporel, fondamentales pour des apprentissages
réussis. C’est dans cette perspective que Moore qualifie l’aspect positif de ces
interactions, leur donnant ainsi le statut de dialogue entre les interlocuteurs (Moore,
1993, 1996).
Plusieurs recherches Nord américaines ont démontré que ces interactions créent à
distance, notamment dans le cas du e-learning, une présence qui favorise les
apprentissages autodirigés (Rourke et al, 1999 ; Garrison, Anderson et Archer,
2000 ; Garrison et Anderson, 2003). Selon le modèle proposé par Garrison et
Anderson (2003), cette présence recouvre trois grandes dimensions : sociale,
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cognitive et éducative. Chacune de ces dimensions renvoie à plusieurs catégories
d’indicateurs qualitatifs validés empiriquement dans l’ensemble des travaux.
Garrison, Arderson et Archer (2000) définissent la présence sociale comme « la
capacité des participants d’une communauté d’apprentissage à se projeter eux-mêmes
socialement et émotionnellement, dans toutes les dimensions de leur personnalité, au
travers du média de communication qu’ils utilisent » (p. 94). Afin d’évaluer le niveau
de présence sociale au sein d’un environnement éducatif, les auteurs proposent des
indicateurs qui témoignent de réactions affectives, de l’ouverture à la communication
et de réactions de cohésion dans les interactions entre le formateur et les apprenants
ainsi qu’entre les apprenants (Garrison et Anderson, 2003).
La présence cognitive, quant à elle, renvoie au « degré auquel les participants
sont capables de construire et de confirmer le sens grâce à la réflexion et au dialogue
dans une communauté d’apprentissage » (Garrison et Anderson, 2003, p. 55). Les
auteurs proposent des indicateurs qui font référence à quatre phases : la révélation,
l’exploration, l’intégration et la résolution.
La présence éducative, telle que définie par Garrison et Anderson (2003), a trait
à « la facilitation et la direction des processus cognitifs et sociaux pour atteindre des
résultats d’apprentissage personnellement significatifs et intéressants d’un point de
vue éducatif » (p. 66). Elle renvoie au rôle joué par le formateur dans l’animation de
la communauté d’apprentissage. Elle se réfère à trois catégories d’indicateurs
proposés par Garrison et Anderson (2003) : l’organisation, l’instruction directe et la
facilitation du dialogue.
La distance en formation 349

Il est important de préciser ici que Garrison et Anderson (2003) ne proposent pas
de protocole d’évaluation du niveau de présence lié à ces trois dimensions. Par
conséquent, leur modèle ne permet pas d’évaluer de façon précise le niveau global de
présence ou de dialogue (Moore, 1993) existant au sein d’un environnement éducatif.
Toutefois, la force de leur travail est de livrer un cadre de référence qui permet de
recueillir et d’analyser différents types de données en s’appuyant sur plusieurs
catégories d’indicateurs proposées. Ainsi, dans les environnements éducatifs, soumis à
un éclatement spatio-temporel et intégrant une plate-forme, les interactions entre les
acteurs sont généralement enregistrées automatiquement. Cet enregistrement constitue
une source de données importantes telles que : les noms des interlocuteurs, le volume
des communications opérées et leur historique, la nature et le contenu des messages et
des documents échangés, etc. D’autres types de données peuvent être recueillis avec
des questionnaires et des interviews. Au regard de l’ensemble de ces données, certaines
sont de nature quantitative et peuvent être facilement traitées statistiquement. D’autres
permettent d’obtenir des résultats qualitatifs au travers de l’analyse des données
textuelles ou encore de l’analyse des questionnaires et des entretiens.
Ce cadre méthodologique permet, dans une certaine mesure, d’estimer le niveau
global de présence au sein d’un environnement éducatif. Cette estimation ne peut
être qu’imprécise, à défaut de disposer d’un protocole d’évaluation spécifique.
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La distance transactionnelle d’un environnement éducatif

Au terme de ce développement théorique, nous proposons de caractériser la


distance transactionnelle d’un environnement éducatif à l’aide d’un continuum croisé
constitué par deux axes figure 2.
Niveau de présence +

- Niveau d’ouverture Niveau d’ouverture +

Niveau de présence -

Figure 2. Caractérisation de la distance transactionnelle d’un environnement


éducatif
350 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

Dans ce repère, l’axe « niveau de présence » renvoie à celui proposé par


Bouchard (2000) allant « de faible à fort recours au dialogue », tandis que l’axe
« niveau d’ouverture du dispositif » se réfère à celui allant « de structure rigide à
souple »2.
Dès lors, les relations établies par Bouchard (2000) peuvent être affinées en les
formulant de la manière suivante :
– un environnement hautement ouvert et manifestant un niveau élevé de présence
comporte un faible degré de distance transactionnelle.
– a contrario, un environnement peu ouvert et manifestant un niveau faible de
présence comporte un haut degré de distance transactionnelle.
Ces relations peuvent être complétées par une autre relation dynamique mise à
jour par Saba et Shearer (1994) et que nous préciserons de la manière suivante : plus
l’ouverture d’un environnement éducatif augmente, plus il offre des possibilités de
présence et, par conséquent, des perspectives de réduction de la distance
transactionnelle.
Par ailleurs, Moore et Kearsley (1996) ajoutent aux deux variables de la distance
transactionnelle un autre paramètre : l’autonomie de l’apprenant. C’est à dire le fait
que « c’est plutôt l’apprenant que le formateur qui détermine les objectifs, les
expériences d’apprentissage et les décisions d’évaluation » (Moore, 1993, p. 26). Ils
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renvoient ici l’autonomie aux caractéristiques de l’autodirection (Moore et Kearsley,
1996) sans pour autant lui donner une définition opérationnelle. Tout au moins, ils
supposent qu’il existe une relation entre le degré de distance transactionnelle de
l’environnement éducatif et l’autodirection de l’apprenant.
Pour notre part, nous avons montré que plus l’ouverture de l’environnement est
importante, plus l’apprenant peut exercer un contrôle sur les différentes composantes
de cet environnement et donc, diriger par lui-même sa formation et ses
apprentissages (Jézégou, 2005). Par conséquent, il nous semble qu’il existe un lien
entre une réduction de la distance transactionnelle de l’environnement, notamment
par une élévation de son niveau d’ouverture, et une augmentation des possibilités
d’autodirection offertes à l’apprenant. Ce lien serait notamment consolidé par de
plus grandes possibilités de présence induites par l’élévation de ce niveau
d’ouverture (Saba et Shearer, 1994).
Nous ne sommes ici qu’au stade des hypothèses. Elles demandent à être étayées
par une solide construction théorique de l’articulation entre distance transactionnelle
et autodirection. Ce travail nous permettra notamment de poser un deuxième jalon
pour une opérationnalisation de la théorie de la distance transactionnelle.
Mais avant, nous avons lancé un programme dont la finalité est de mettre le
modèle, tel que développé dans cet article, à l’épreuve de plusieurs études
empiriques. Nous proposons de présenter, dans cet article, le contexte et le

2. Voir la figure 1 de cet article


La distance en formation 351

déroulement de la première étude menée dans le cadre de ce programme, ainsi que


les principaux résultats obtenus.

Distance transactionnelle d’un dispositif d’accompagnement individuel

Le dispositif retenu pour tester le modèle proposé s’inscrit dans le cadre d’une
formation continue diplômante à distance. Cette formation prépare des adultes à un
niveau I de qualification équivalent à un master professionnel dans le domaine des
sciences de la matière et de l’ingénierie. Ces personnes se situent géographiquement
sur tout le territoire français et exercent une activité professionnelle en tant que cadre
intermédiaire ou supérieur. La formation comporte cinq dispositifs : autoformation,
accompagnement individuel à distance, travail collaboratif à distance, regroupement
en présentiel.
L’étude empirique, présentée dans cet article, porte uniquement sur le dispositif
d’accompagnement individuel à distance. Cet accompagnement est assuré par
chaque responsable pédagogique d’unité de valeur. Il se réalise de manière
asynchrone via la messagerie d’une plate-forme et par téléphone.

Le niveau d’ouverture de l’accompagnement individuel


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Nous avons évalué le degré d’ouverture de chacune des 13 composantes de ce
dispositif puis, par déduction, son niveau d’ouverture ou de flexibilité structurelle.
Nous avons appliqué ici le protocole d’évaluation évoqué précédemment. Nous
rappelons que les étapes et les bases de calcul de ce protocole sont détaillées dans
notre dernier ouvrage intitulé Formations Ouvertes : libertés de choix et
autodirection de l’apprenant (Jézégou, 2005). Par conséquent, nous nous
contentons, dans cet article, de présenter succinctement les principales phases de ce
protocole en les appliquant au dispositif de cette étude.
La première étape du protocole a consisté à estimer la répartition horaire entre
l’accompagnement via la messagerie de la plate-forme et l’accompagnement par
téléphone. Le cahier des charges du dispositif précise que chacun des apprenants
peut bénéficier d’un accompagnement individuel à distance pour un volume horaire
global estimé à six heures sur une année universitaire. Quatre heures sont dédiées à
un accompagnement via la messagerie de la plate-forme, soit 67 % du volume
horaire. Les deux autres heures sont consacrées à un accompagnement par téléphone,
soit 33 % de ce volume. Le cahier des charges précise également que cet
accompagnement n’est pas obligatoire. Par ailleurs, les demandes d’aide par
téléphone doivent être formulées à l’avance via la messagerie, afin de négocier des
créneaux horaires convenant à chacun des interlocuteurs.
Lors de la deuxième étape du protocole, nous avons recueilli des données auprès
de chacun des sept responsables pédagogiques, à l’aide d’un questionnaire
352 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

comportant 26 questions fermées. La moitié d’entre-elles portait sur


l’accompagnement via la messagerie de la plate-forme, l’autre moitié sur
l’accompagnement par téléphone.
Pour chacun de ces deux moyens d’accompagnement, ils ont répondu aux
13 questions suivantes :

Composante L’apprenant peut-il choisir :


Lieu le lieu à partir duquel il peut être accompagné ?
Temps le moment de son accompagnement ?
Accès d’accéder ou non à l’accompagnement ?
Rythme le rythme de l’accompagnement ?
le cheminement à suivre dans le cadre de son
Cheminement
accompagnement ?
la séquence d’apprentissage à aborder lors de
Séquence
l’accompagnement ?
Objectifs les objectifs de l’accompagnement ?
Contenus le contenu abordé lors de l’accompagnement ?
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Format d’être accompagné seul, à deux ou à plusieurs ?
Méthodes la ou les méthodes mises en œuvre lors de l’accompagnement ?
Evaluation les modalités d’évaluation en œuvre dans l’accompagnement ?
Moyens les moyens d’accompagnement ?
Personnes/ressources les personnes/ressources mobilisées dans cet accompagnement ?

Tableau 3. Grille de questions soumises à chacun des sept responsables


pédagogiques pour chacun des deux moyens d’accompagnement (messagerie et
téléphone)

Pour chacune de ces 26 questions, quatre réponses leur étaient proposées :


liberté de choix nulle faible liberté de choix
grande liberté de choix très grande liberté de choix
Ces réponses renvoient respectivement à un degré type de liberté de choix (DLC
attribué), allant de zéro (liberté de choix nulle) à trois : très grande liberté de choix
(Leclerc et al., 1988). Lors de la troisième étape du protocole, nous avons calculé,
pour chaque composante, le score de chacun des sept responsables pédagogiques en
La distance en formation 353

utilisant la formule suivante : [(0,673x DLC attribué pour l’accompagnement via la


messagerie) + (0,334 x DLC attribué pour l’accompagnement par téléphone)] x
coeff. de pondération de la composante. A titre d’exemple, le formateur A estime
que l’apprenant dispose d’une faible liberté de choix des personnes ressources pour
l’accompagner via la messagerie. Par conséquent, le degré de liberté de choix
attribué par ce formateur à la composante « personnes-ressources » est de
1 (DLC = 1). Ce formateur estime que l’apprenant n’a pas de liberté de choix des
personnes - ressources pour accompagner par téléphone (DLC = 0). Le score du
formateur A est 1,67. Il s’obtient en réalisant l’opération suivante : [(0,67 x 1)
+ (0,33 x 0)] x 2,5
Le coefficient de pondération de chaque composante est préétabli dans la grille
GENIP (Leclerc et al., 1988). Nous avons ainsi obtenu sept évaluations ou scores
individuels pour chacune des 13 composantes du dispositif. Le rapport entre la
moyenne de ces scores et le score maximum possible5 nous a permis d’exprimer le
degré d’ouverture de chaque composante en pourcentage. Le graphique, ci-dessous,
montre les résultats ainsi obtenus.

Graphique 1. Degré d'ouverture de chacune des 13 composantes


du dispositif d'accompagnement individuel à distance
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100
lieu
90
temps
80
accès
degré d'ouverture en %

70 rythme
60 cheminement

50 séquence
objectifs
40
contenus
30 format
20 méthode
10 évaluation
moyens
0
personnes-ressources
Les 13 composantes du dispositif

3. 0,67, car l’accompagnement via la messagerie correspond à 67 % du volume


horaire global dédié à l’accompagnement à distance.
4. 0,33, car l’accompagnement par téléphone correspond à 33 % du volume horaire
global dédié à l’accompagnement à distance.
5. Score maximum possible = coefficient de pondération de la composante x 3
354 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

La somme de la moyenne des scores individuels, attribués par chacun des sept
responsables pédagogiques, est de 35,3. Le score maximum possible est de 90,36.
Par conséquent le niveau d’ouverture du dispositif d’accompagnement individuel à
distance est de 39 %. Il entre donc dans la catégorie des dispositifs « peu ouverts + ».
Le graphique, ci-dessous, précise le degré d’ouverture de chacune des trois
catégories de composantes.

Graphique 2. Degré moyen d'ouverture de chacune


des 3 catégories de composantes du dispositif

100
degré moyen d'ouverture

90 78 spatio-
80
temporelles
70
60
en %

pédagogiques
50
40
27
30
20 communication
10 3 éducative
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0 médiatisée

les 3 catégories de composantes

Nous constatons que la catégorie regroupant les quatre composantes spatio-


temporelles est « hautement ouverte »7. Ainsi, les apprenants sont tout à fait libres de
choisir d’accéder8 ou non à l’accompagnement, ce dernier n’étant pas obligatoire. Ils
peuvent également choisir le lieu9 à partir duquel ils peuvent être accompagnés dans
la mesure où ils disposent d’un point d’accès à la plate-forme. Ils sont relativement
libres de choisir le moment10 où ils souhaitent bénéficier, à distance, de cet
accompagnement individuel, soit en déposant un message dans la plate-forme soit en
téléphonant aux responsables pédagogiques dans des créneaux horaires négociés à
l’avance avec eux. De même, ils peuvent décider du rythme11 de l’accompagnement
en fonction des difficultés qu’ils rencontrent et de leurs besoins.
En revanche, la catégorie regroupant les sept composantes pédagogiques est
« peu ouverte ». Par conséquent, elles sont sous le contrôle des responsables
pédagogiques. Ainsi, les apprenants ne sont pas vraiment libres de choisir le

6. Score maximum possible pour le dispositif = somme des scores maximum possibles de
chacune des 13 composantes.
7. Voir tableau 2 de cet article.
8. Degré de liberté de choix de la composante « accès » : 97 %.
9. Degré de liberté de choix de la composante « lieu » : 79 %.
10. Degré de liberté de choix de la composante « temps » : 57 %.
11. Degré de liberté de choix de la composante « rythme » : 79 %.
La distance en formation 355

cheminement12 à suivre dans leur accompagnement et encore moins son contenu13.


Ils peuvent choisir, dans une certaine mesure, les objectifs14 visés au travers de cet
accompagnement ainsi que la séquence15 à aborder. Ils ne sont pas vraiment libres
de choisir les méthodes16 d’accompagnement et encore moins de s’associer à deux
ou à plusieurs17 pour être accompagnés18.
La catégorie regroupant les deux composantes de la communication éducative est
« fermée ». Par conséquent, les apprenants ne peuvent pas choisir les moyens19
d’accompagnement ainsi que les personnes-ressources20. En effet, ils ne peuvent
solliciter que le responsable pédagogique de chacune des sept unités de valeur, soit
en utilisant la messagerie de la plate-forme ou le téléphone.

Le niveau de présence dans l’accompagnement individuel à distance

Dans ce dispositif, les apprenants et les responsables pédagogiques peuvent


interagir de façon asynchrone via la messagerie de la plate-forme. Ils peuvent
également communiquer par téléphone. Ici, les trois formes de présence - sociale,
cognitive et éducative – ont été étudiées. Nous n’avons retenu que certains
indicateurs proposés par Garrison et Anderson (2003) pour mettre à jour les
interactions interpersonnelles entre les responsables et les apprenants dans le cadre
de l’accompagnement individuel.
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La présence sociale
Les réactions affectives L’expression des émotions
Le sens de l’humour
L’expression d’anecdotes personnelles
L’ouverture Le maintien du fil conducteur de l’objet de la communication
à la communication
Le respect de l’autre

Tableau 5. Indicateurs retenus pour l’étude des interactions de la présence sociale

12. Degré de liberté de choix de la composante « cheminement » : 46 %


13. Degré de liberté de choix de la composante « contenus» : 22 %
14. Degré de liberté de choix de la composante « objectifs » : 54 %
15. Degré de liberté de choix de la composante « séquence » : 56 %
16. Degré de liberté de choix de la composante « méthodes » : 9 %
17. Degré de liberté de choix de la composante « format » : 3 %
18. Degré de liberté de choix de la composante « évaluation » : 3 %
19. Degré de liberté de choix de la composante « moyens » : 3 %
20. Degré de liberté de choix de la composante « personnes-ressources » : 3 %
356 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

La présence cognitive
La révélation L’expression de sa perplexité au regard d’un problème ou d’une
situation
L’explication ou la présentation de son point de vue au regard d’un
problème ou d’une situation
L’exploration L’expression de son accord ou de son désaccord au regard du
traitement d’un problème ou de l’analyse d’une situation
Le partage des idées et des informations sur ce problème ou cette
situation
La confrontation à l’autre et la négociation
La résolution La proposition d’applications des solutions
La communication et le partage des résultats des tests réalisés

Tableau 6. Indicateurs retenus pour l’étude des interactions de la présence


cognitive

La présence éducative
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L’instruction directe La présentation des objectifs et des contenus d’apprentissage

La proposition d’activités

Le diagnostic et l’explicitation des incompréhensions

L’orientation vers des sources de connaissances

La réalisation de feedback en termes d’explication et


d’évaluation

La facilitation du La création d’un climat relationnel favorable aux apprentissages


dialogue
L’encouragement au dialogue

Tableau 7. Indicateurs retenus pour l’étude des interactions de la présence


éducative

Le recueil de données a été réalisé auprès des sept responsables pédagogiques à


l’aide d’un second questionnaire. Ce questionnaire comprenait 20 questions fermées
à choix unique. Chacune de ces questions envoie à un indicateur retenu.
La distance en formation 357

Voici deux exemples de question :


1. « Selon vous, les émotions des uns et autres s’expriment dans les échanges via la
messagerie de la plate-forme:
pas du tout pas vraiment plutôt tout à fait

2. « Selon vous, les émotions des uns et autres s’expriment au téléphone :


pas du tout pas vraiment plutôt tout à fait
Nous avons attribué à chacune de ces quatre réponses possibles une valeur
spécifique. La réponse « pas du tout » correspond à la valeur « zéro », la réponse
« pas vraiment » à la valeur « un ». La réponse « plutôt » correspond à la valeur
« deux », la réponse « tout à fait » à la valeur « trois ».
Pour la première de ces questions, quatre responsables pédagogiques ont répondu
« plutôt » et trois « pas vraiment ». Nous avons ainsi obtenu un score moyen
équivalent à 11. Le score maximum possible est 2121. Par conséquent, nous en avons
déduit que le degré d’émotion exprimé dans la messagerie est de 52 %.
Toutes les questions sont construites sur le même modèle. Le traitement des
réponses est identique à celui que nous venons de présenter. Cette méthode de calcul
nous a permis d’estimer les niveaux de présence sociale, cognitive et éducative en
fonction des indicateurs retenus pour cette étude.
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Nous rappelons ici que ces estimations ne peuvent être qu’approximatives. D’une
part, il n’existe pas, à ce jour, de protocole d’évaluation spécifique de ces trois
niveaux de présence. D’autre part, nous avons uniquement recueilli des données à
l’aide d’un questionnaire soumis à chacun des sept responsables pédagogiques. Or,
nous aurions également pu envisager de recueillir le contenu des messages déposés
sur la plate-forme ou de mener des entretiens auprès des responsables chargés de
l’accompagnement individuel. Ces deux modalités auraient permis de compléter le
recueil de données réalisé pour cette étude et d’obtenir des résultats certainement
plus précis.
Dans cette perspective, une autre méthode de recueil de données aurait pu
consister à soumettre ce questionnaire aux apprenants. Nous l’avons volontairement
écartée pour deux principales raisons. La première est liée au nombre réduit
d’apprenants de ce dispositif, c’est-à-dire 25 inscrits à la formation mais 19 d’entre
eux réellement engagés. La seconde raison tient au fait que notre seule possibilité
était de leur soumettre ce questionnaire par courrier électronique via la messagerie
de la plate-forme. Par expérience, nous savons que cette modalité de passation ne
garantit pas toujours un taux de retour conséquent. Nous avons donc décidé de
soumettre ce questionnaire aux sept responsables pédagogiques qui, par ailleurs,
s’étaient engagés à participer à cette étude.

21. Ce score maximum correspond à la situation où tous les responsables répondent


« tout à fait », soit 7 x 3 = 21.
358 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

Les six graphiques, ci-dessous, illustrent les résultats obtenus.

Graphique 3. Degré de présence sociale par indicateur :


messagerie de la plate-forme

100
90
degré de présence en %

80
expression des émotions
70
60
sens de l'humour
50
40
expression d'anectoctes
30
personnelles
20
10 le maintien du fil
conducteur de la
0
communication
le respect de l'autre
indicateurs de présence sociale
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Graphique 4. Degré présence sociale par indicateur :
téléphone

100 expression des émotions


90
degré de présence en %

80
sens de l'humour
70
60
50 expression d'anectoctes
40 personnelle
30
le maintien du fil
20 conducteur de la
10 communication
0 le respect de l'autre

indicateurs de présence sociale

Le niveau moyen de présence sociale au sein de la messagerie est de 54 % et de


63 % au téléphone. Par conséquent, le niveau de présence sociale dans
l’accompagnement individuel à distance est de 5 %.
La distance en formation 359

Graphique 5. Degré présence cognitive par indicateur :


messagerie

100
90 exlicitation ou la
80 présentation du point de
degré de présence en %

vue
70 expression d'accords ou
60 de désaccords

50 le partage des idées et des


informations
40
30 la confrontation à l'autre
et la négociation
20
10 la proposition de
solutions
0
indicateurs de présence cognitive la communication des
résultats
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Graphique 6. Degré présence cognitive par indicateur :
téléphone

100 exlicitation ou la
90 présentation du point
de vue
degré de présence en %

80 expression d'accords
70 ou de désaccords
60
le partage des idées et
50
des informations
40
30 la confrontation à
l'autre et la
20
négociation
10 la proposition de
0 solutions

indicateurs de présence cognitive la communication des


résultats

Le niveau moyen de présence cognitive au sein de la messagerie est de 26 % et


de 28 % au téléphone. Par conséquent, le niveau de présence cognitive dans
l’accompagnement individuel à distance est de 27 %.
360 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

Graphique 7. Degré présence éducative par indicateur


: messagerie
100
présention des objectifs
90
de l'accompagnement
80
degré de présence en %

70 proposition d'activités
d'apprentissage
60
50 diagnostic et
40 explicitation des
incompréhensions
30 orientation vers des
20 sources de connaissances
10 réalisation de feedbacks
0
indicateurs de présence éducative création d'un climat
relationnel favorable

Graphique 8. Degré présence éducative par indicateur :


téléphone
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100 présention des objectifs
de l'accompagnement
90
degré de présence en %

80 proposition d'activités
d'apprentissage
70
60 diagnostic et
explicitation des
50
incompréhensions
40 orientation vers des
sources de connaissances
30
20 réalisation de feedbacks
10
0 création d'un climat
relationnel favorable
indicateurs de présence éducative
incitation au dialogue

Le niveau moyen de présence éducative au sein de la messagerie est de 59 % et


de 77 % au téléphone. Par conséquent, le niveau de présence éducative dans
l’accompagnement individuel à distance est de 68 %.
La distance en formation 361

Niveau de présence

Messagerie téléphone

Sociale 54 % 63 % 58 %

Cognitive 26 % 28 % 27 %

Éducative 59 % 77 % 68 %

46 % 56 % 51 %

Tableau 8. Niveau de présence dans l’accompagnement individuel

Au regard de l’ensemble de ces résultats, nous constatons que le niveau de


présence le plus élevé dans l’accompagnement individuel est celui qui relève de la
dimension éducative. Le score de 68 %, relatif à cette dimension, montre que les
responsables pédagogiques sont significativement présents auprès des apprenants
malgré la distance géographique qui les séparent. Cette présence est davantage
manifeste au téléphone bien qu’elle soit également significative par le biais de la
messagerie de la plate-forme. A l’aide de cet outil de communication, les
responsables réalisent des feedbacks pour expliquer et évaluer les apprentissages
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menés. Ils centrent ici leurs efforts sur la création d’un climat relationnel favorable et
sur l’incitation au dialogue, de façon plus prononcée que pour les autres aspects de
la présence éducative. Ils les mettent également en œuvre au téléphone tout en se
consacrant au diagnostic et l’explicitation des incompréhensions, à la proposition
d’activités d’apprentissage et, dans une moindre mesure, à l’orientation des
apprenants vers des sources de connaissances. En revanche, que ce soit par le biais
de la messagerie ou du téléphone, ils ne présentent pas vraiment aux apprenants les
objectifs de l’accompagnement proposé.
Le niveau de présence sociale dans l’accompagnement individuel est également
significatif avec un score de 58 %. Ici, l’usage du téléphone y contribue davantage
que la messagerie de la plate-forme. La principale différence est qu’il véhicule plus
de réactions affectives au travers de l’expression des émotions et d’anecdotes
personnelles. Quel que soit le moyen utilisé, le fil conducteur de la communication
est relativement bien maintenu entre les responsables pédagogiques et les
apprenants, à un degré acceptable de respect de l’autre.
Le niveau de présence cognitive est le plus faible (27 %) que se soit par le biais
de la messagerie de la plate-forme (26 %) ou du téléphone (28 %). Dans les deux
cas, la confrontation à l’autre et la négociation de solutions sont peu présentes. Il en
est de même en ce qui concerne le partage, entre les responsables et les apprenants,
de ces solutions pour résoudre un problème ou une situation. En revanche,
l’explicitation ou la présentation du point de vue de l’un ou de l’autre est un peu plus
362 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

élevée. D’une manière générale, il n’existe pas de différence significative entre le


niveau de présence cognitive par le biais de la messagerie et celui du téléphone.
Toutefois, quel que soit le niveau étudié, il apparaît que le téléphone véhicule
davantage de présence que la messagerie de la plate-forme.
La compilation des résultats obtenus montre que le niveau global de présence
dans l’accompagnement individuel est 51 %. Dans ce dispositif, les interactions entre
les responsables pédagogiques et les apprenants sont moyennes. Nous sommes
toutefois prudente dans l’interprétation de ce résultat pour les raisons évoquées
précédemment. Par ailleurs, cette démarche de quantification du niveau de présence
s’est appuyée sur un recueil de données auprès d’un nombre réduit de personnes
(7 responsables pédagogiques). Or, il nous semble qu’elle aurait trouvé davantage
d’intérêt en s’appliquant à un nombre bien plus conséquent de formateurs ou encore
à un échantillon important d’apprenants, mais cela n’a pas pu être le cas pour cette
première étude.

Le degré de distance transactionnelle de l’accompagnement individuel

Malgré l’éloignement géographique, parfois important, qui sépare les


responsables pédagogiques et les apprenants, l’accompagnement individuel présente
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un degré moyen de distance transactionnelle. Cette estimation résulte du niveau
d’ouverture du dispositif et du niveau de présence qu’il comporte.
Ce dispositif présente un niveau d’ouverture qui le situe dans la catégorie des
dispositifs « peu ouverts + ». En s’appuyant sur la relation dynamique établie par
Saba et Shearer (1994), il offrirait donc des possibilités relativement réduites de
présence. En effet, son niveau d’ouverture limiterait ainsi les possibilités
d’interactions sociales, cognitives et éducatives entre les responsables pédagogiques
et les apprenants.
Cette proposition n’explique que de façon globale le niveau moyen de présence
que comporte l’accompagnement individuel. La principale raison tient, selon nous,
au fait que les apprenants ne peuvent pas choisir les moyens, ni les personnes-
ressources de cet accompagnement. Ces deux composantes de la communication
éducative médiatisée sont fermées22. En d’autres termes, les apprenants ne peuvent
solliciter que le responsable pédagogique de chacune des sept unités de valeur, soit
en utilisant la messagerie de la plate-forme ou le téléphone. Une telle fermeture
réduit considérablement les possibilités de présence.
Toutefois, ces dernières semblent être compensées par l’engagement et
l’implication des deux catégories d’acteurs dans les interactions sociales et
éducatives existantes, que ce soit par le biais de la messagerie de la plate-forme ou

22. Degré d’ouverture de la composante « moyen » : 3 % ; degré d’ouverture de la


composante « personnes –ressources » : 3 %.
La distance en formation 363

du téléphone. Ainsi, le niveau moyen de présence que comporte l’accompagnement


individuel résulte de cette stratégie, volontaire ou non, de compensation de l’état de
fermeture des deux composantes de la communication éducative médiatisée.
En s’appuyant sur les propositions de Moore et Kearsley (1996), telles que nous
les avons précisées dans la première partie de cet article, cette distance peut être
réduite en apportant davantage d’ouverture structurelle à ce dispositif. Un des leviers
peut consister ici à offrir aux apprenants la possibilité de choisir, dans un panel
identifié, une ou plusieurs personnes-ressources pour les aider dans leurs
apprentissages. Ce panel peut-être constitué des responsables pédagogiques,
d’enseignants ou d’intervenants extérieurs de chacune des unités de valeur. Un autre
levier, complémentaire au précédent, consiste à laisser aux apprenants le choix des
outils de communication pour dialoguer à distance avec les personnes-ressources
qu’ils sollicitent. Il peut s’agir du téléphone, la messagerie de la plate-forme ou
encore d’autres outils tels que la visio-conférence interpersonnelle.
Ces deux leviers, en offrant ainsi davantage de libertés de choix aux apprenants,
peuvent contribuer à augmenter le niveau d’ouverture structurelle du dispositif. De
plus, ils permettraient d’augmenter les possibilités de présence dans
l’accompagnement individuel et réduire ainsi le degré de distance transactionnelle de
cet accompagnement. (Saba et Shearer, 1994). Un tel objectif ne peut toutefois être
atteint qu’à condition que les personnes-ressources, tout comme les apprenants, se
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mobilisent dans les interactions qui manifestent leur présence au sein du dispositif
d’accompagnement à distance (Garrison et Anderson, 2003 ; Jézégou, 2007).
Toutefois, même si cette condition est remplie, rien ne permet de dire que ces
efforts de réduction de la distance transactionnelle puissent avoir un effet positif sur
l’autodirection des apprenants. En effet, il ne suffit pas de leur ouvrir des libertés de
choix pour qu’ils dirigent par eux-mêmes leurs apprentissages (Jézégou, 2005). Une
autre dimension entre en jeu : celle liée au contrôle psychologique qu’ils exercent
sur leur formation (Long, 1989). Ce contrôle psychologique est soutenu par deux
dynamiques. La première est la motivation des apprenants à l’égard de la formation
tandis que la seconde renvoie aux stratégies d’autorégulation qu’ils mettent en œuvre
(Viau, 1997 ; Zimmerman, 2000 ; Carré, 2002; Jézégou, 2002). Ces deux
dynamiques ont un rôle prédominant dans la réussite des apprentissages autodirigés
(Long, 1989, Carré, 2002).

Conclusion

Au terme de la première partie de cet article, nous proposions de caractériser la


distance transactionnelle d’un environnement éducatif à l’aide d’un continuum croisé
constitué par deux axes :
364 Distances et savoirs. Volume 5 – n° 3/2007

Niveau de présence +

- Niveau d’ouverture Niveau d’ouverture +

Niveau de présence -

Figure 2. Caractérisation de la distance transactionnelle d’un environnement


éducatif
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Afin de mettre ce modèle à l’épreuve du terrain, nous avons mené une première
étude empirique pour vérifier son caractère opérationnel. L’évaluation du niveau
d’ouverture du dispositif retenu pour cette étude s’est appuyée sur un protocole que
nous avions éprouvé dans une recherche antérieure (Jézégou, 2005) ainsi que dans
plusieurs travaux non publiés à ce jour. Il s’avère que ce protocole est viable et
opérationnel.
Afin de combler le vide entre le modèle théorique proposé par Garrison et
Anderson (2003) et ses applications pratiques, nous avons élaboré, à l’occasion de
cette première étude, une méthode et des bases de calcul qui nous ont permis de
mettre à jour la manière dont se manifestent les trois dimensions de la présence au
sein de ce dispositif. Par conséquent, bien que les estimations des trois niveaux de
présence ne soient qu’approximatives, elles apportent quelques premières indications
qui permettent de décrire cette présence.
La démarche élaborée ici s’avère opérationnelle mais incomplète pour une autre
raison qui tient notamment au choix des indicateurs de présence retenus mais aussi à
la méthode de recueil et d’analyse des données.
Par conséquent, pour consolider, d’un point de vue empirique, le modèle présenté
dans cet article, beaucoup de travail reste à faire dans la construction d’un protocole qui
permet d’évaluer le niveau de présence existant dans un environnement éducatif donné.
Il sera alors possible d’évaluer plus précisément son degré de distance transactionnelle
et de préconiser, si besoin, des solutions d’ingénierie afin d’optimiser la qualité des
transactions entre les différents acteurs de cet environnement.
La distance en formation 365

Tout au moins, le travail présenté dans cet article a le mérite d’ouvrir un nouveau
chantier en posant un premier jalon qui contribue à opérationnaliser la théorie de la
distance transactionnelle. Ainsi, la question posée par de nombreux auteurs concernant
la définition et l’évaluation des deux variables clés de la distance transactionnelle est
partiellement levée, même si beaucoup de chemin reste à faire à l’issue de ce travail
pour étayer ce premier jalon, du moins d’un point de vue empirique.

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