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L'employabilité et son rôle sur la satisfaction, la formation

et les réseaux sociaux


Dominique Baruel Bencherqui, Mohamed Karim Kefi, Alice Le Flanchec,
Astrid Mullenbach
Dans Recherches en Sciences de Gestion 2012/5 (N° 92), pages 115 à 132
Éditions ISEOR
ISSN 2259-6372
DOI 10.3917/resg.092.0113
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revue Recherches en Sciences de Gestion-Management Sciences-Ciencias de
Gestión, n° 92, p. 115 à 132

L’employabilité et son rôle sur la satisfaction, la


formation et les réseaux sociaux

Dominique Baruel Bencherqui


Professeur-chercheur
Centre d‟Études et de Recherches de l‟ISTEC (CERI)

Mohamed Karim Kefi


Professeur-chercheur
Centre d‟Études et de Recherches de l‟ISTEC (CERI)
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Alice Le Flanchec
Professeur
Prism Sorbonne
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne

Astrid Mullenbach Servayre


Maître de conférences
IRG
Université Paris Est Créteil

Cet article traite de l’employabilité au sein de l’entreprise et met


en évidence son caractère stratégique pour l’entreprise. Les auteurs
mettent, tout d’abord, en exergue le rôle de la satisfaction au travail
sur l’intention de développer l’employabilité des salariés. Il s’ensuit
que la mise en œuvre de stratégies destinées à favoriser le
développement de nouvelles compétences et donc à accroître
l’employabilité est beaucoup plus forte lorsque ces derniers ne
s’estiment pas satisfaits dans leur travail. Les auteurs montrent
116 Dominique BARUEL BENCHERQUI, Mohamed Karim KEFI,
Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
ensuite le rôle joué par deux outils dans le développement de
l’employabilité : la formation et les réseaux sociaux. La réflexion
s’articule ainsi autour d’une étude de cas réalisée en 2011 qui
triangule les résultats d’entretiens qualitatifs et d’un questionnaire
quantitatif.

Mots-clés : Employabilité, satisfaction au travail, réseau, formation.

This article deals with employability. The authors, first of all,


highlight the role played by one of the determinants of employability:
job satisfaction of employees since the implementation of strategies to
promote the development of new skills and thus increasing
employability is much stronger when they do not feel satisfied in their
work. The authors then show the role played by both tools in the
development of employability: training and social networks.
Reflection and revolves around a case study realised in 2011 which is
used to triangulate the results of the analysis of qualitative interviews
and statistical treatment of a quantitative questionnaire.

Key-words: employabilité, involvement, job satisfaction.


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El presente artículo aborda el tema de la empleabilidad en la
empresa y pone en evidencia su carácter estratégico. Sus autores
ponen de relieve primeramente el papel de la satisfacción en el
trabajo sobre la intención de desarrollar la empleabilidad de los
asalariados. Continúan con el estudio de las estrategias destinadas a
favorecer el desarrollo de nuevas competencias y por consiguiente a
incrementar la empleabilidad que resulta mucho más elevada cuando
estos últimos no se sienten satisfechos con su trabajo. Los autores
analizan por último el papel desempeñado por dos herramientas en el
desarrollo de la empleabilidad: la formación y las redes sociales. La
reflexión se articula de esta manera en torno a un estudio de caso
llevado a cabo en el año 2011 que triangula los resultados de
entrevistas cualitativas y de un cuestionario cuantitativo.

Palabras claves: Empleabilidad, satisfacción en el trabajo, red,


formación.
EMPLOYABILITÉ ET RÔLE SUR LA SATISFACTION, FORMATION ET 117
RÉSEAUX SOCIAUX

Avec l‟employabilité, le salarié devient l‟acteur, voire


« l’entrepreneur » (Pihel, 2010, p.204) de sa carrière professionnelle.
Il lui appartient, dès lors, de mobiliser tous les moyens, tous les outils
mis à sa disposition pour faire évoluer ses compétences et se retrouver
ainsi en situation d‟accéder, de se maintenir et d‟évoluer dans ou hors
de son emploi, sur un marché du travail turbulent, en constante
évolution. Cependant, le concept d‟employabilité évolue et intègre
aujourd‟hui non seulement les facteurs individuels liés à la personne,
mais aussi les facteurs organisationnels liés à l‟entreprise ainsi que les
facteurs collectifs, économiques, sociologiques et politiques (Saint-
Germes, 2006, p. 15). Autrement dit, le développement de
l‟employabilité ne devrait pas incomber uniquement à l‟individu ; la
responsabilité de ce développement devant « être partagée entre les
trois parties qui participent à la relation : l’employeur, l’individu et le
territoire » (Saint-Germes, 2006, p. 16). En effet, la recherche de
l‟employabilité des salariés devient stratégique pour l‟entreprise, parce
qu‟au delà du coût qu‟elle peut engendrer, elle est aussi une nouvelle
forme d‟attractivité pour les salariés et peut lui permettre d‟attirer et
de retenir les compétences clés pour son développement.
Dans cette « course » folle à l‟employabilité, rendue nécessaire
par l‟évolution du marché du travail et son corolaire : l‟apparition et la
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pérennisation de nouveaux modèles de carrières (nomade, sans
frontière1, protéiforme2…), un certain nombre de variables apparaît
déterminant, à commencer par la formation et les réseaux sociaux. En
effet, d‟une part, la capacité à activer son réseau pour adapter son
travail aux besoins, pour obtenir de l‟information utile à sa
progression de carrière et à son projet professionnel, le networking tel
qu‟identifié par Smith (2010), apparaît clairement comme l‟un des
moyens de construire son capital humain et social et, en conséquence,
comme un mode d‟accroissement de son employabilité. D‟autre part,
afin de mieux « s’investir dans l’acquisition des compétences
nouvelles » (Hategekimana, 2004, p.1696), la formation apparaît
comme un moyen privilégié, voire comme LE moyen de prédilection
utilisé par les salariés et les entreprises au travers de différents outils
mis à leur disposition.
C‟est la raison pour laquelle nous proposons d‟étudier le rôle
joué par les réseaux sociaux et la formation sur l‟employabilité des
salariés. Pour cela, nous avons choisi de retenir le concept
« d’intention de développer son employabilité », introduit par

1. Carrière nomade ou sans frontière, en référence à la boudaryless carreer de Arthur et


Rousseau (1996).
2. Carrière protéiforme, en référence à la protean career de Hall (1996).
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Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
Hategekimana et Roger (2000) qui considèrent que la volonté
personnelle du salarié (et donc son intention) est fondamentale dans la
mise en œuvre et la concrétisation de la démarche
Cependant, la littérature des sciences de gestion met l‟accent, de
façon très récurrente, sur le rôle – prédictif – des attitudes au travail
dans la recherche en gestion des ressources humaines. Aussi avons-
nous choisi de nous intéresser également au rôle de la satisfaction au
travail des salariés sur leur intention de développer leur employabilité,
forts des liens déjà identifiés au sein de la littérature (Mignonac,
2001 ; Bernston et Marklund, 2007 ; Hategekimana et Roger, 2000).
Ainsi, après avoir passé en revue la littérature relative au concept
d‟employabilité et à son lien avec la satisfaction au travail, les réseaux
sociaux et la formation, nous exposons successivement notre
problématique de recherche, à l‟appui de trois hypothèses de travail,
notre méthodologie et les résultats de l‟étude empirique réalisée
auprès d‟une grande entreprise internationale, que nous avons
nommée ici l‟entreprise OMEGA.

1. – L’employabilité au sein de la littérature


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Nous définissons tout d‟abord la notion d‟employabilité, avant de
distinguer les notions d‟employabilité initiative et interactive. Puis,
nous montrons le rôle stratégique de l‟employabilité pour l‟entreprise
et enfin nous explorons les relations entre employabilité, satisfaction,
réseaux sociaux et formation.

1.1. L’employabilité : une notion en constante évolution

La notion d‟employabilité a connu de nombreuses définitions


depuis son émergence (Tableau 1). Aujourd‟hui, l‟employabilité
apparaît comme un élément majeur de la relation d‟emploi, voire
comme une nouvelle dimension de la GRH (Mercier, 2011) ouvrant,
en conséquence, la voie à de nouvelles réflexions organisées, au sein
de la littérature, autour d‟une vision anglo-saxonne de l‟employabilité,
également appelée employabilité initiative et d‟une vision française,
voire européenne : celle de l’employabilité interactive.
EMPLOYABILITÉ ET RÔLE SUR LA SATISFACTION, FORMATION ET 119
RÉSEAUX SOCIAUX

Tableau 1 : Quelques définitions du concept d‟employabilité


Auteurs définitions

Laizé (2007, p.7) « ensemble des compétences, des conditions de gestion des
ressources humaines et des modalités organisationnelles et
sociétales nécessaires et suffisantes pour permettre au
salarié de se maintenir en situation d’emploi, dans des
délais et des conditions raisonnables, dans un contexte
dynamique et contraignant de mobilités professionnelles »
Saint-Germes (2006, « aptitude dynamique à l’emploi, c’est-à-dire une aptitude à
p.2) être dans l’emploi, à y rester, à s’adapter et à rebondir le
cas échéant »
Ledrut (1966, p.68) « espérance objective ou probabilité plus ou moins élevée
que peut avoir une personne à la recherche d’un emploi
d’en trouver un »
Gazier (1999, p.39) « le fait pour chaque actif de posséder les compétences
dynamiques et actualisées et de faire preuve d’un
comportement orienté sur le marché du travail »
Tremblay (1998, p.34) « la constitution d’un rapport de congruence maximale
entre l’offre et la demande pour satisfaire aux exigences
d’un emploi »

L‟employabilité initiative est envisagée comme la valorisation


d‟un ensemble d‟éléments discriminants, de caractéristiques
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psychologiques qui prédisposent un individu à s‟adapter de façon
proactive dans son travail et sa carrière et à saisir les opportunités (de
carrière) qui s‟offrent à lui (Fugate et alii, 2003, 2004, 2008). Les
auteurs mettent ainsi l‟accent sur un certain nombre de déterminants,
de caractéristiques d‟ordre individuel qu‟ils nomment
« prédisposition »3. En d‟autres termes, l‟individu « employable » est
celui qui possède certaines caractéristiques, lesquelles sont organisées
en trois dimensions selon Fugate et Ashforth, (2003) : l‟adaptabilité,
l‟identité professionnelle et de carrière et le capital social et humain ;
et en cinq dimensions selon Fugate et Kinicki (2008) : (1) l‟ouverture
au changement dans le travail, (2) la résilience au travail et dans la
carrière, (3) la pro activité dans le travail et la carrière, (4) la
motivation dans la carrière et (5) l‟identité de travail.
L‟employabilité interactive, axée sur les attributs individuels et
psychologiques, met davantage l‟accent sur les caractéristiques du
marché du travail et le jeu des acteurs institutionnels dans la mesure
où l‟employabilité est envisagée comme « la capacité que possède un

3. Dans des travaux plus anciens, Fugate et al. (2004) définissent l‟employabilité
initiative comme un construit psychosocial qui englobe les caractéristiques
individuelles, favorise l‟adaptation cognitive, le comportement et impacte et améliore
les interactions professionnelles.
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Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
individu d’obtenir un emploi satisfaisant compte tenu de l’interaction
entres ses caractéristiques personnelles et le marché du travail »
(définition du Canadian Labor Force Development Board, Gazier,
1999). Elle intègre ainsi les facteurs individuels, les facteurs
organisationnels et les facteurs collectifs, économiques, sociologiques
et politiques (Saint-Germes, 2006, p. 15). En conséquence, et
contrairement à la vision anglo-saxonne « individuelle »
d‟employabilité initiative, dans le cadre de l‟employabilité interactive,
les entreprises sont parties prenantes dans le développement de
l‟employabilité de leurs salariés. C‟est d‟ailleurs ce que mettent en
exergue différentes études récentes sur des accords de GPEC montrant
que l‟employabilité des salariés est considérée, par bon nombre
d‟entreprises, comme une priorité (Baruel Bencherqui et alii. 2011 ;
Chappert et Martinet, 2008 ; Dietrich et Parlier, 2007).

1.2. L’employabilité : un enjeu stratégique pour l’entreprise

Si pendant longtemps l‟employabilité a été centrée sur l‟individu


et donc n‟entre pas dans le champ des responsabilités de l‟entreprise,
cela commence à évoluer. Effectivement, « cette préoccupation de
l’employabilité des salariés prend tout son sens dans un contexte où
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« l’emploi à vie » est en voie de disparition » (Buffard et Tagnola,
2005, p.19). L‟entreprise devient donc « partie prenante » dans le
développement de l‟employabilité de ses salariés. Une nouvelle forme
de contrat psychologique émerge : celui d‟une promesse
d‟employabilité de la part de l‟entreprise contre un échange de
performance de la part du salarié (Cadin, 2005 ; Bravo, 2003 ;
Dietrich et Jouvenot, 2006). Ainsi, comme le soulignent Fraisse et
Guerfel-Henda (2005, p.20) « une nouvelle relation de travail
apparaît, fondée sur un contrat moral ne garantissant plus l’emploi à
vie, mais un moyen de développement personnel permettant de
garantir l’employabilité ».
Le déplacement du curseur, de l‟individu vers l‟entreprise, met
donc l‟accent sur une co-responsabilité dans le développement et le
maintien de l‟employabilité des individus (Dietrich et Jouvenot, 2006 ;
Bader, 2005). « L’aptitude à se repositionner et l’employabilité du
salarié deviennent alors des enjeux cruciaux, relevant d’une
responsabilité double, celle du salarié-acteur mais également celle de
l’entreprise » (Littière et Sardas, 2007, p. 9). De même, comme le
souligne Dietrich (2006, p.124) « l’émergence de la RSE plaide en
faveur d’un devoir d’employabilité de la part de l’entreprise envers
ses salariés ». C‟est ainsi que Fraisse et Guerfel-Henda (2005, p. 19)
font état d‟une enquête de la Sofres qui s‟est déroulée en 2001 et qui
EMPLOYABILITÉ ET RÔLE SUR LA SATISFACTION, FORMATION ET 121
RÉSEAUX SOCIAUX

portait sur la perception de la RSE en France. Selon les résultats de


cette enquête il apparaît, pour 40% des répondants, que la RSE « c’est
aussi le devoir pour les entreprises de développer l’employabilité de
ses salariés pour qu’ils aient de la valeur sur le marché du travail ».
Autrement dit « le discours sur la responsabilité sociale des
entreprises conduit les entreprises à s’engager non plus sur l’emploi
mais sur l’employabilité de leur salariés dans un contrat tacite de
« développement » » (Littière et Sardas, 2007, p. 8). Ainsi, les
entreprises prennent-elles pleinement conscience du rôle qu‟elles ont à
jouer dans le développement de l‟employabilité de leurs salariés.
Mais l‟employabilité ne doit pas être uniquement perçue comme
une action citoyenne, philanthropique de l‟entreprise qui irait contre sa
propre performance. En effet, si celle-ci est certes source de coûts
immédiats, à court terme, notamment en matière de formation, elle
s‟inscrit néanmoins pleinement au sein de la stratégie de l‟entreprise
par les dimensions d‟attractivité et de fidélisation qu‟elle promeut. Il
apparaît ainsi possible, sur le modèle de la théorie socio-économique4,
de concilier des objectifs économiques et des objectifs sociaux
d‟apparence contradictoires (Savall, Zardet, Bonnet, 2008) :
l‟attractivité de l‟entreprise à l‟égard de l‟extérieur et la fidélisation
des talents ainsi attirés, d‟une part ; la satisfaction de ses salariés,
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d‟autre part. Si l‟on se réfère aux travaux de Savall, Zardet et Bonnet,
il en résulte une amélioration de la performance et de l‟efficacité de
l‟entreprise à moyen et long terme. C‟est en cela que les auteurs
évoquent l‟idée d‟une responsabilité partagée (Dietrich et Jouvenot,
2006 ; Bader, 2005) : bénéfique à l‟entreprise comme aux salariés ou
encore d‟une entreprise durablement supportable (Savall et Zardet,
2005)

1.3. Employabilité, satisfaction au travail, formation et réseaux


sociaux

La satisfaction au travail peut se définir par le niveau de


convergence entre ce que la personne désire et ce qu‟elle retire des
différents aspects de son travail (Roussel, 1996). Le champ de
recherche traversant le concept est si vaste qu‟il existe une multitude
de modèles et d‟instruments de mesure de celui-ci ; deux grandes

4. La théorie socio- économique des entreprises et des organisations (Savall 1974 /


1975, 1979, 2003, 2007, Savall et Zardet 1987, 1995, 2004, 2008 ; Zavall, Zardet et
Bonnet 2000, 2008) est un courant de pensée créé par Henri Savall en 1973. Elle fait
l‟objet de nombreux travaux de recherche scientifique fondamentale et expérimentale au
sein du l‟Institut de Socio-Economie des Entreprises et des Organisations (ISEOR).
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Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
dimensions de la satisfaction au travail peuvent, néanmoins, être
dégagées (Mottay, 2003) : la satisfaction extrinsèque et la satisfaction
intrinsèque. La satisfaction extrinsèque est relative à la relation entre
le salarié et son entreprise : elle concerne des aspects extérieurs au
travail comme la stabilité de l‟emploi ou encore les conditions de
travail. La satisfaction intrinsèque est davantage tournée vers les
facettes et caractéristiques du travail, soit le contenu de ce dernier,
mais également les rapports avec les autres, dans le cadre
professionnel. Au sein de travaux relatifs au lien entre la mobilité des
salariés et les attitudes au travail, Mignonac (2001) met en exergue le
rôle de la satisfaction au travail sur le fait pour les salariés de
considérer d‟autres opportunités d‟emploi, sur le souhait d‟envisager
d‟autres opportunités de carrière. Ces travaux nous conduisent, en
conséquence, à penser qu‟il peut exister un lien entre la satisfaction au
travail et l‟employabilité qui apparaît désormais comme un élément
majeur de la relation d‟emploi, voire comme une nouvelle dimension
de la GRH (Mercier, 2011). Cette hypothèse est appuyée par les
travaux de Bernston et Marklund (2007) qui mesurent une corrélation
forte entre l‟employabilité et la satisfaction au travail ainsi que par les
travaux de Hategekimana et Roger (2000) montrant le rôle joué
notamment par la satisfaction au travail sur l‟intention de développer
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son employabilité.
Les deux visions de l‟employabilité envisagées précédemment
(interactive et initiative) ne sont pas antagonistes et peuvent être
réconciliées par une notion commune : celle de réseau. En effet, chez
Fugate et Ashforth, (2003), par exemple, il est question de réseau au
sein de la dimension capital social et humain. Fugate et Kinicki (2008)
évoquent également la pro-activité dans le travail et la carrière via
notamment la capacité à mobiliser son réseau, Gazier (1999) met
l‟accent sur cet aspect en pointant l‟importance des réseaux sociaux.
En d‟autres termes, un individu employable est notamment capable
d‟utiliser et de mobiliser son réseau pour obtenir de l‟information utile
à sa progression de carrière et à son projet professionnel. C‟est ce que
confirment les travaux de Smith (2010) qui identifient le networking,
soit la gestion de son réseau, comme l‟un des moyens de construire
son capital humain et social et, en conséquence, comme mode
d‟accroissement de l‟employabilité.
Les réseaux sociaux mis en avant dans le cadre de cette étude
concernent, plus particulièrement, les réseaux sociaux virtuels ou « en
ligne », c'est-à-dire la mise en relation des individus entre eux via
Internet, ce qui se justifie notamment par le fait que « la recherche
d’information, de soutien relationnel ou plus simplement de
EMPLOYABILITÉ ET RÔLE SUR LA SATISFACTION, FORMATION ET 123
RÉSEAUX SOCIAUX

sociabilité a crû et a été satisfaite par des communautés réelles et, de


plus en plus souvent, virtuelles » (Forsé, 2001, p.213).
Enfin, les enjeux de la formation sont multiples. Les actions et
dépenses engagées par les entreprises en la matière (encadrées
légalement depuis la loi « socle » du 16 juillet 1971, dite loi Delors)
ont, en effet, pour vocation – lorsqu‟elles sont envisagées comme un
investissement - de développer un avantage compétitif pour
l‟entreprise par le biais du développement de compétences clés. La
formation a notamment pour objectif d‟assurer les évolutions de
carrière, les mobilités et de sécuriser les trajectoires professionnelles.
Or, tous ces enjeux passent, à l‟évidence, par la notion de
développement des compétences et d‟employabilité. Ainsi, Baruel-
Bencherqui et alii (2011) mettent en exergue le rôle central joué par la
formation dans le développement de l‟employabilité. De plus, la
formation apparaît régulièrement comme un moyen de développer
l‟employabilité des salariés (Mercier, 2011 ; Hategekimana et Roger,
2000). Ces considérations nous conduisent, en conséquence, à
envisager l‟existence d‟un lien entre l‟intention des salariés de
développer leur employabilité et la formation.
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2. – Problématique et méthodologie

2.1. Le rôle de la satisfaction, des réseaux sociaux et de la


formation dans l’intention de développer son employabilité

Nos questions de recherche découlent de la littérature exposée


précédemment. Nous reprenons ici le concept « d’intention de
développer son employabilité » introduit par Hategekimana et Roger5
(2000) et centrons l‟attention sur les relations qu‟entretient
l‟employabilité avec la satisfaction au travail du salarié, les réseaux
sociaux et la formation.
En effet, la satisfaction au travail du salarié semble influencer
son intention de développer son employabilité (Hategekimana et
Roger, 2000). De plus, il apparaît pertinent de s‟intéresser au recours à
des stratégies d‟accès à la formation, d‟une part, et de développement
de son réseau social, d‟autre part, au regard de la littérature sur le

5. Ces derniers identifient trois dimensions de « l‟intention de développer son


employabilité » : la formation ou le déménagement, la mobilité ou le réseau et
l‟information. Ils étudient alors les facteurs qui influencent l‟intention de développer
son employabilité à partir d‟une étude empirique sur une population de 102 cadres
d‟entreprises. Ils montrent le rôle de la personnalité, des récompenses attendues et de la
satisfaction au travail dans l‟intention de développer son employabilité.
124 Dominique BARUEL BENCHERQUI, Mohamed Karim KEFI,
Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
capital humain et social, afin de mieux comprendre les mécanismes
poussant le salarié à envisager la question et le rôle de chacun de ces
facteurs dans l‟intention du salarié de développer son employabilité.
Ainsi, notre problématique peut-elle être synthétisée à travers
une série de questions :
1) Dans quelle mesure la satisfaction au travail influence t-elle
l‟intention de développer son employabilité ?
2) Quelle est la place des réseaux dans le développement de
l‟employabilité des salariés ?
3) Quelle est la place de la formation dans le développement de
l‟employabilité des salariés ?

2.2. Une méthodologie mixte

Pour tester nos hypothèses de recherche, nous avons choisi de


réaliser une étude de cas au sein de la filiale française d‟un groupe de
dimension internationale, que nous avons appelée ici l‟entreprise
OMEGA. Selon Yin (2009), une étude de cas est « une investigation
empirique d'un phénomène contemporain, pris dans son contexte,
spécialement quand les limites entre phénomène et contexte ne sont
pas évidentes ». Notre étude empirique s‟appuie ainsi sur des
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hypothèses de départ que nous allons chercher à confirmer ou à
infirmer afin d‟obtenir une meilleure compréhension de notre
problématique de départ et de son articulation. Notre travail s‟appuie,
conjointement, sur des méthodologies qualitatives et quantitatives.
Ainsi, quatorze entretiens approfondis ont été réalisés auprès de
salariés de l‟entreprise. Notre échantillon qualitatif est composé de six
femmes et de huit hommes, âgés de 35 à 58 ans, travaillant sur trois
sites différents : en région parisienne et en Province. Les entretiens ont
été enregistrés et retranscrits intégralement à l‟aide d‟un logiciel
d‟analyse des données qualitatives (Modalisa). Ils ont fait l‟objet
d‟une analyse de contenu thématique. A cela s‟ajoute une enquête par
questionnaire, diffusée en interne, par email 6. L‟enquête quantitative a
permis d‟obtenir 101 réponses exploitables de salariés sur lesquels
s‟appuient les résultats statistiques présentés ici. Notons d‟emblée que
la validité externe n‟est pas très élevée, mais cela permet néanmoins
de conduire à un certain nombre d‟enseignements intéressants.

6. Les questionnaires ont été diffusés via un mail envoyé par la direction des relations
sociales à un échantillon de salariés de l‟entreprise. Le mail contenait un lien internet
qui permettait une saisie en ligne. Les auteurs ont recueilli directement sous la forme
d‟un fichier excel l‟ensemble des réponses.
EMPLOYABILITÉ ET RÔLE SUR LA SATISFACTION, FORMATION ET 125
RÉSEAUX SOCIAUX

Pour mesurer « l’intention de développer son employabilité »,


nous reprenons l‟échelle développée par Hategekimana et Roger
(2000) intégrant 15 questions sur une échelle de Likert en 6 points 7 .
Pour mesurer la satisfaction au travail, nous avons choisi le MSQ
(Minnesota Satisfaction Questionnaire) et utilisons la traduction
proposée par Roussel (1996).
A l‟appui de l‟analyse statistique de ces questionnaires (utilisation du
logiciel SAS) et, conjointement, de l‟analyse de contenu des entretiens
qualitatifs, nous arrivons à un certain nombre de conclusions exposées
ci-après.

3. – Résultats de l’étude empirique

Nous exposons successivement les apports de notre étude


empirique autour des trois thématiques de notre recherche : le rôle de
la satisfaction, de la formation et des réseaux sociaux sur l‟intention
de développer son employabilité.

3.1. Le rôle de la satisfaction sur l’intention de développer son


employabilité
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Notre étude met en lumière le lien entre la satisfaction au travail
et l‟intention de développer son employabilité (voir Tableau 2). Il
apparaît que les salariés ont d‟autant plus l‟intention de développer
leur employabilité que leur satisfaction est faible, c‟est à dire que la
situation de leur emploi ne leur donne pas satisfaction. Cela est
d‟ailleurs d‟autant plus vrai que le niveau d‟étude initiale est élevé. Ce
résultat va dans le sens des travaux de Hategekimana et Roger (2000,
p. 7) selon lesquels « l’employé satisfait de son contexte de travail
peut avoir tendance à s’engager dans son organisation, à accepter les
objectifs et les valeurs qu'elle lui propose et à vouloir y rester. Par
contre, la satisfaction au travail n'entraîne pas nécessairement la
recherche par un salarié de nouvelles compétences, car celles-ci
pourraient conduire à une remise en cause de sa situation. Une

7. L‟échelle développée par Hategekimana & Roger (2000) est en 7 points, nous avons
en ce qui nous concerne supprimé le point neutre et ajouté deux questions afin de
développer la dimension relative aux réseaux, que nous souhaitons explorer plus avant
dans notre problématique de recherche :
« En m'inscrivant sur viadeo, linkedln ou sur d'autres réseaux internet du même
type »
« En développant de nouvelles relations professionnelles à l'extérieur de
l'entreprise ».
126 Dominique BARUEL BENCHERQUI, Mohamed Karim KEFI,
Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
certaine dose d'insatisfaction devrait même pousser à faire un effort
pour évoluer vers des conditions de travail meilleures, et donc à se
préparer à changer d'emploi. ».

Tableau 2 : Analyse Logit satisfaction employabilité


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* : Coefficient significatif au seuil de 10%.
** : Khi2 de Wald : coefficient significatif au seuil de 1%.

3.2. Le rôle de la formation dans l’employabilité des salariés

L‟on note un fort sentiment de liberté dans le choix des parcours


de formation des collaborateurs chez OMEGA, ce qui est apprécié.
Ainsi, les entretiens mettent-ils en lumière qu‟il appartient à chacun de
« se prendre en main » et de développer son employabilité, même si
l‟entreprise aide à ce faire notamment par la culture du changement de
poste ou l‟institutionnalisation des réseaux. A ce titre, les outils de
formation encouragés par l‟entreprise et sollicités par les salariés sont
évocateurs : il s‟agit du e-learning et du DIF (droit individuel à la
formation). Ils répondent à un double objectif : d‟une part, former les
salariés et donc développer leur employabilité en les impliquant,
d‟autre part, prioriser les actions de formation. En ce qui concerne le
premier objectif, la mission est pleinement remplie dans la mesure où
tous les répondants se disent satisfaits des formations reçues ainsi que
des outils utilisés. Pour le second objectif, c‟est également une pleine
réussite dans la mesure où le plan de formation et les actions prévues
sont recentrées sur les priorités métiers, les priorités stratégiques et
servent, en conséquence, les « intérêts business » de l‟entreprise. On
EMPLOYABILITÉ ET RÔLE SUR LA SATISFACTION, FORMATION ET 127
RÉSEAUX SOCIAUX

retrouve donc, encore une fois, une approche gagnant / gagnant, même
si deux éléments viennent nuancer le propos : d‟une part, le gel des
dépenses, imposé périodiquement par la stratégie globale qui vient
bien souvent impacter, en premier lieu, les dépenses de formation et,
d‟autre part, le dilemme socio-économique : « est-ce que je libère mes
employés pour qu’ils suivent des formations ou est-ce que je les garde
pour qu’ils soient productifs ? ».
D‟autres outils sont également utilisés, en pratique, comme le
360 degrés, le bilan de compétences, le CIF (congé individuel de
formation), ou encore, une combinaison de ces différents outils8. Il
apparaît nettement que c‟est à chaque salarié de construire son
parcours de formation en fonction de ses souhaits : « C’est moi qui
sollicite le Fongecif ; il vaut mieux se prendre en charge soi même ».
On assiste, en conséquence, à une sorte de séparation de la formation
professionnelle continue en deux volets. Le premier volet regroupe
l‟ensemble des actions de formation voulues par le salarié dans une
optique individuelle de développement de carrière, de projet
professionnel et d‟employabilité pour lesquels il existe, d‟ailleurs, des
outils de formation dédiés comme le DIF ou le CIF. Le second volet
est constitué des actions de formation nécessitées par l‟activité et la
stratégie de développement des compétences de l‟entreprise : « notre
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objectif, c’est que nos compétences internes permettent d’assurer la
croissance recherchée. La priorité, elle est sur mettre OMEGA dans
une position par rapport aux compétiteurs et par rapport au marché
qui doit être la sienne. Ce qui suppose forcément que vous ayez les
compétences en face, sinon vous ne vendez pas ». Mais, ce n‟est,
finalement, là que la traduction des dernières lois en la matière (lois
du 04 mai 2004 et du 24 novembre 2009) qui encouragent le salarié à
devenir le véritable acteur de son parcours professionnel.
Par conséquent, il apparaît que la formation est un outil
privilégié du développement de l‟employabilité des salariés, ce qui
confirme notamment les résultats antérieurs de Baruel Bencherqui et
alii (2011).

3.3. Le rôle des réseaux dans le développement de l’employabilité


des salariés

Cette recherche met en évidence l‟importance que revêtent, pour


les répondants, les réseaux sociaux (intra et inter-organisationnels), et

8. En revanche, la VAE en tant qu‟outil de formation – et donc de développement de


l‟employabilité - est absente des discours, celle-ci étant, au mieux, considérée comme
compliquée, au pire, méconnue.
128 Dominique BARUEL BENCHERQUI, Mohamed Karim KEFI,
Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
notamment les réseaux sociaux « en ligne » pour gérer leurs
compétences et plus largement leur carrière. Ainsi, les salariés ont
bien « intégré » les différents avantages que peuvent leur procurer,
pour la gestion de leur carrière, les réseaux sociaux et, plus
particulièrement, ceux caractérisés par des liens faibles.
Lorsque les salariés de l‟entreprise ont l‟intention de développer
leurs compétences et, par la même, leur employabilité, dans le futur,
ils ont l‟intention de le faire en s‟insérant dans un réseau professionnel
et relationnel interne ou externe à leur entreprise et en échangeant
avec leurs collègues sur leur métier afin d‟identifier les exigences
actuelles et futures afin de se préparer à son évolution (r=.62, p<.01)
ainsi qu‟en développant de nouvelles relations professionnelles à
l‟extérieur de l‟entreprise (r=.65, p<.01). De même, lorsque les
individus ont l‟intention de développer leurs compétences dans le
futur en discutant avec les autres de l‟évolution technique de leur
métier et de son impact sur l‟emploi, ils souhaitent le faire en
rencontrant d‟autres salariés afin de mieux appréhender la réalité de
l‟emploi et ses évolutions envisageables (r=.68, p<.01). On peut, ainsi,
saisir l‟importance qu‟accordent les salariés aux réseaux, en tant que
« vecteurs » d‟informations professionnelles. De même, nos résultats
montrent que les individus sont demandeurs d‟informations sur les
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métiers, et sur l‟emploi en général en terme d‟évolution à venir et de
l‟impact que ces évolutions peuvent avoir sur leur métier en
particulier, le but étant bien, pour eux, de pouvoir continuer à
développer leurs compétences afin de rester « employables ».
Ces résultats sont également confirmés par les entretiens
qualitatifs. Ainsi, la GPEC et donc le développement des compétences
apparaissent-ils, dans l‟esprit des répondants, extrêmement liés à la
problématique de l‟employabilité. En effet, d‟une part, tous les
répondants reconnaissent la nécessité absolue de développer leur
employabilité en raison de l‟internationalisation des marchés, de
l‟exigence croissante des clients, de la concurrence, de la « valeur
marché plus élevée que dans les pays émergents » etc. : « aujourd’hui,
on est obligés parce que tout évolue tellement vite ! ». Et c‟est à cela
que doit servir la démarche. Pour ce faire, différents moyens sont mis
en avant et privilégiés dont les réseaux sociaux et la formation,
unanimement plebiscités. Le réseau social concerne les relations
professionnelles et personnelles qu‟elles soient physiques (anciens
collègues de travail) ou électroniques (réseaux sociaux « en ligne » ou
virtuels) ; les deux étant, par ailleurs, souvent difficiles à dissocier.
Quant à la formation, elle est envisagée sous de multiples aspects dont
les plus récurrents sont les processus d‟accréditation et de certification
propres à l‟entreprise (reconnaisance interne des qualifications) et le
EMPLOYABILITÉ ET RÔLE SUR LA SATISFACTION, FORMATION ET 129
RÉSEAUX SOCIAUX

e-learning. Apparaissent également, dans le discours des répondants,


comme outils de développement de l‟employabilité, la mobilité,
qu‟elle soit géographique, transversale ou verticale et la veille
(curiosité personnelle, connaissance du produit).

Conclusion

Cette étude nous a permis de répondre aux trois questions sous-


tendues par notre problématique. Ainsi, les résultats ont-ils montré
l‟importance de la satisfaction au travail sur l‟intention de développer
son employabilité, ce qui va dans le sens des travaux d‟Hategekimana
et Roger (2000) et de Bernston et Marklund (2007). De plus, la
formation apparait comme un élément important dans le
développement de l‟employabilité. A cet effet, la recherche a
notamment mis en relief deux outils unanimement mis en avant, aussi
bien par les salariés que par l‟entreprise, comme permettant le
développement de l‟employabilité : le e-learning et le DIF. Enfin,
l‟importance accordée aux réseaux par les salariés, qu‟ils soient
internes à l‟entreprise ou externes, est indéniable : les réseaux
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constituent bien l‟une des clés de l‟employabilité, pour les salariés.
Ces résultats concernant le rôle des réseaux vont dans le sens de
l‟étude menée par Mercier (2011) auprès d‟un grand groupe français.
En ce sens, les résultats de notre étude sont utiles parce qu‟ils
permettent de confirmer l‟importance pour l‟entreprise d‟outils tels
que la formation et les réseaux dans l‟accompagnement du parcours
professionnel des salariés.
Nous pouvons ajouter qu‟étudier l‟employabilité au sein de
l‟organisation conduit à aborder le glissement qui s‟est opéré, ces
dernières années, dans le cadre du contrat psychologique (Rousseau,
1995) liant le salarié à son employeur. « Selon plusieurs chercheurs,
l’employabilité représente l’élément clé du nouveau contrat
psychologique, le principe en vertu duquel une saine réciprocité sera
établie dans la relation entre employeurs et employés » (Pascale,
1995, cité par Lemire, 2005, p. 15). Toutefois, l‟entreprise ne peut
plus garantir l‟emploi à vie à ses salariés et, « le contrat
psychologique échangeant la loyauté contre la sécurité fait place à de
nouveaux contrats basés sur l’échange d’une performance contre une
promesse d’employabilité accrue » (Cadin, 2005, p. 45). Avec
l‟employabilité, le salarié devient l‟acteur, voire « l’entrepreneur »
(Pihel, 2010, p. 204) de sa carrière professionnelle. Il lui incombe
« d’assurer sa propre compétitivité sur le marché de l’emploi interne
130 Dominique BARUEL BENCHERQUI, Mohamed Karim KEFI,
Alice LE FLANCHEC & ASTRID MULLENBACH SERVAYRE
ou externe, s’investir dans l’acquisition des compétences nouvelles »
(Hategekimana, 2004, p. 1696). Sa carrière n‟est donc plus
traditionnelle mais devient nomade comme le souligne Guerrero
(2001, p. 12) : « la carrière nomade, par opposition à la carrière
traditionnelle, suppose que le salarié est responsable de sa carrière,et
donc de son parcours professionnel et du développement de ses
compétences ».

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