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ONG-entreprise : les liaisons dangereuses

Anne-Sophie Binninger, Isabelle Robert


Dans L'Expansion Management Review 2007/4 (N° 127), pages 16 à 25
Éditions L'Express - Roularta
ISSN 1254-3179
DOI 10.3917/emr.127.0016
© L'Express - Roularta | Téléchargé le 17/02/2024 sur www.cairn.info (IP: 196.235.82.254)

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Dossier
ONG-entreprise :
les liaisons dangereuses
DU MÉCÉNAT CLASSIQUE AU PARTENARIAT STRATÉGIQUE, LES RELATIONS ENTRE ONG
ET ENTREPRISES SE SONT CONSIDÉRABLEMENT TRANSFORMÉES CES DERNIÈRES ANNÉES.

> Anne-Sophie Binninger tionnelles de responsabilité sociale de


et Isabelle Robert l’entreprise (RSE). Cet engouement

A
lors que les relations entre les progressif pour ces rapprochements
ONG et les entreprises étaient d’un genre nouveau a donné naissance
soit inexistantes soit marquées aux Etats-Unis à des « brokers en parte-
par une profonde opposition, les rap- nariat » qui ont pour rôle de faciliter
prochements actuels observés entre ces la rencontre entre firmes multinatio-
deux acteurs démontrent aujourd’hui nales demandeuses d’expertise et ONG
l’apparition d’un profond changement souhaitant diversifier leurs sources de
de mentalités. financement.
Hiver 2007

Alors que ces formes partenariales pa-


L’incursion des ONG dans raissaient encore insolites il y a dix ans,
16
la sphère des entreprises on observe une certaine convergence
Considérées historiquement comme d’intérêts entre ces deux acteurs. Les
L’Expansion Management Review

des contre-pouvoirs, les ONG ont exercé motivations qui poussent les entreprises
depuis la fin des années 80 un rôle de à tisser les nouveaux liens sont nom-
veille et de dénonciation en attaquant breuses : recherche d’expertise, volonté
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de façon ciblée ou informelle les entre- de s’engager dans le développement
prises non « citoyennes ». Aujourd’hui, durable, d’insuffler des valeurs de ci-
tout en préservant ce mode de fonction- toyenneté à leurs salariés, d’impulser
nement, elles s’attachent à tisser avec une nouvelle culture d’entreprise… Ce-
elles de nouvelles relations, dont les pendant, dans la majorité des cas, les
formes se révèlent très variées : mécé- principales raisons restent centrées sur
nat financier classique, mécénat de com- la quête de légitimité et sur la préserva-
pétences basé sur la mise à disposition tion des actifs immatériels. En effet, la
de salariés d’une entreprise durant une puissance de déstabilisation des ONG,
période de temps déterminée, parte- menaçante pour certaines entreprises
nariat produit, etc. (1) Une nouvelle (Nike (2), Shell, Gap, Total…), dévoilée
configuration des relations commence durant la décennie 1990, a conduit
aussi à apparaître pour donner nais- nombre d’entre elles à se prémunir
sance à des partenariats plus straté- contre les risques éthiques, environne-
giques. Ce type d’alliance particulière- mentaux ou sociaux et à valoriser leur
ment novateur vise à instaurer non image de citoyenneté en élaborant des
seulement un dialogue « durable » avec positionnements « responsables ». La
l’ONG partenaire, mais également à construction de partenariat avec les
construire des stratégies plus institu- ONG va dans ce sens.

Anne-Sophie Binninger est professeur de marketing au groupe Reims Management School et chercheur as-
socié au laboratoire de recherche LEM-CNRS (IAE de Lille). Isabelle Robert est professeur associé à Reims
Management School, où elle enseigne le marketing.
anne-sophie.binninger@reims-ms.fr
isabelle.robert@reims-ms.fr
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Aujourd’hui, les ONG endossent allé- de la responsabilité sociale des entre-


grement leur nouveau rôle de « garde- prises. On peut relier ce phénomène à
fou » de la réputation d’entreprises, basé la montée de l’activisme social se tra-
sur leur capital image inconditionnel- duisant par des manifestations de masse
lement positif auprès du grand public (3). fortement médiatisées et la multiplica-
Cette notoriété et cette confiance sont tion d’actions directes orchestrées par
indubitablement le résultat de leur pro- des ONG nationales ou internationales
fessionnalisation, de la crédibilité de (appel à boycott ou au « buycott » d’une
leurs informations et de leur très grande marque).
proximité avec le terrain. De plus, alors que l’art et la culture
étaient usuellement associés au mécé-
Le mécénat humanitaire, fonde- nat, l’humanitaire et la solidarité sont à
ment naturel du partenariat. La col-
laboration ONG-entreprise aujourd’hui
la plus usitée est le mécénat, qui reste Les points forts
orienté vers le domaine de compétence
de l’ONG et qui se concrétise par un Entre des entreprises en quête
soutien matériel ou financier à celle-ci. de légitimité et des ONG au pouvoir
de nuisance croissant, les mariages
Il se distingue des activités de sponso- de raison ont fleuri, rendant
ring et/ou de parrainage, qui répon- progressivement plus perméables

Hiver 2007
dent à une démarche commerciale dont les frontières entre les deux mondes.
les retombées économiques sont préa-
lablement calculées. Dans les grandes A mesure qu’elles acquéraient 17
entreprises, la mise en place d’une po- du poids auprès des multinationales,

L’Expansion Management Review


litique de mécénat est souvent accom- les ONG elles-mêmes ont vu évoluer
leur statut, leurs compétences,
pagnée d’une création de fondation.
leurs modes de fonctionnement.
Acte de philanthropie, le mécénat vise
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prioritairement à valoriser l’entreprise Ce mouvement n’est pas sans
aux yeux du grand public d’un point danger. Surtout pour les ONG, dont
de vue sociétal. Bien qu’en France il soit l’intégration au marché risque de
historiquement associé à la culture, on les éloigner de leurs fondamentaux et
observe depuis quelques années un glis- de poser des problèmes éthiques.
sement progressif du mécénat culturel
vers le mécénat humanitaire ou de so-
lidarité (4). Cette évolution s’explique présent l’apanage des nouvelles actions,
par le télescopage de trois phénomènes devenant pour la première fois en 2006
disjoints : (1) une demande sociale crois- majoritaires (voir figure page suivante).
sante des citoyens dans un contexte éco- Cette transition peut s’expliquer par le
nomique dégradé; (2) un accroissement caractère trop élitiste, trop prestigieux,
sans précédent des sommes allouées au trop éloigné du grand public, voire
mécénat privé ; (3) enfin, le développe- superficiel dans certains cas, du mécé-
ment de l’expression directe et visible nat culturel. En devenant partenaire >>
> (1) Pour plus de détails sur la typologie des partenariats, se référer à l’article de A. Mach (2001), « Le pou-
voir des ONG sur les entreprises : pression, partenariat, évaluation », site internet : www.covalence.ch
> (2) A la suite des attaques formulées à l’encontre de Nike sur les conditions de travail de ses sous-trai-
tants, cette société a connu une baisse de ses bénéfices de 50 % entre 1997 et 1998 ainsi qu’une chute ver-
tigineuse de la valeur de son action, passant de 76 dollars en 1997 à 27 en 2000.
> (3) Selon une étude réalisée par le cabinet First&42nd les 19 et 20 septembre 2005 auprès de 905 per-
sonnes représentatives de la population française, les ONG avec les organisations internationales sont les
acteurs en qui les Français ont le plus confiance comparativement aux institutions, politiques, entreprises
et syndicats.
> (4) Se référer à l’article de S. Piquet et J.-M.Tobelem, « Les enjeux du mécénat culturel et humanitaire »,
Revue française de gestion, n° 167, 2006.
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Dossier
>> d’une ONG ou d’une association, l’en- ment d’un mécénat d’initiatives. La
treprise accède à l’ère de la proximité : prise en compte des attentes du person-
elle tente de reconstruire le lien social, nel dans les politiques de mécénat et
de tisser des liens de nature affective, l’implication des salariés dans des pro-
d’être plus « transparente ». L’investis- jets de solidarité nationale ou inter-
sement de Total dans le mécénat envi- nationale sont devenues un enjeu
ronnemental après le naufrage de l’Erika déterminant pour l’entreprise en ren-
en est un exemple probant. Plus visible, forçant les liens et la cohésion du groupe
moins élitiste, le mécénat de autour de valeurs ci-
solidarité permet prioritaire- Le mécénat de toyennes. L’ONG est
ment à l’entreprise d’accroître alors un acteur dé-
son capital de sympathie mais solidarité terminant dans la
également de renforcer le senti- permet conduite de projets
ment de fierté des salariés. d’accroître visant à soutenir les
Les budgets consacrés au mé- actions bénévoles des
cénat par les entreprises fran- le capital de salariés et à instaurer
çaises ont ainsi connu un for- sympathie une politique de mé-
midable bond durant les cinq cénat de compé-
dernières années, passant d’un
et la fierté des tences. Ces deux
budget total de l’ordre de salariés. formes de mécénat de
Hiver 2007

343 millions d’euros en 2002 à un solidarité – financier


milliard d’euros en 2005 (5). Cet accrois- ou de compétences – se situent dans le
18
sement a aussi été accompagné par registre du capital relationnel social.
la loi du 1er août 2003, qui double les Enfin, plus facilement repérable par
L’Expansion Management Review

avantages fiscaux de l’acte de mécénat. le consommateur, le partenariat pro-


Cette évolution est arrivée au bon duit ou produit-partage, promotion-
moment pour des ONG soucieuses de partage (6) est également une forme
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rechercher de nouvelles sources de d’engagement associant l’entreprise à
financement. une ONG. Encore peu perceptibles en
La mutation du mécénat privé s’est France, contrairement aux pays anglo-
également opérée avec le développe- saxons, ces actions de marketing socié-
tal se développent. En contribuant bien
évidemment à l’amélioration de l’image
Répartition des actions de de marque, les produits-partage ont
mécénat par domaine en 2006 pour objectifs de singulariser les pro-
duits de l’entreprise mais surtout d’ac-
4%
8% croître leurs ventes. La démarche s’ap-
parente à une action promotionnelle
10 %
classique.
46 % L’ensemble de ces collaborations orien-
tées principalement vers les activités
■ Solidarité des ONG montre l’importance grandis-
■ Culture
■ Environnement sante de ces acteurs dans les démarches
■ Sport
■ Recherche 32 % promotionnelles institutionnelles. Alors
que l’ONG et l’entreprise étaient confi-
Dans le domaine de la solidarité, les actions se nées dans des mondes totalement dis-
décomposent ainsi : actions de solidarité à l’interna-
tional (26,6 %), éducation, éveil et jeunesse (27,6 %),
précarité, emploi et insertion (24,2 %). Les autres > (5) Source : Admical (Association pour le dévelop-
champs d’action sont la citoyenneté et les droits de pement du mécénat industriel et commercial) 2007.
l’homme, la santé, le handicap… Site : www.admical.org
> (6) Action commerciale conjointe sur une marque
Source : Admical, dossier de presse sur le mécénat dont une partie fixe du prix est reversée à l’associa-
d’entreprise, novembre 2006. tion lors de l’achat d’un produit ou d’un service.
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ONG-ENTREPRISE : LES LIAISONS DANGEREUSES

tincts, la quête de légitimité et la préser- lieu dans la valorisation de son image


vation du capital-réputation aboutis- aux niveaux interne et externe : capital
sent à l’introduction progressive des de notoriété, capital relationnel social,
ONG dans le milieu économique et fi- capital relationnel client, potentiel des
nalement à rendre perméables les fron- ressources humaines…
tières de l’entreprise. Les accords entre les deux entités sont
souvent couplés à la mise en place d’une
La RSE, une intégration plus stra- stratégie construite sur un positionne-
tégique de l’ONG. Parallèlement au ment « responsable » qui doit devenir
mécénat et au partenariat produit, le un réel « actif » de l’entreprise pour le
mouvement lié à la prise en compte de futur. Les domaines d’action sont mul-
la responsabilité sociale des entreprises tiples et ont trait aux trois piliers du dé-
(RSE) a également contribué à rendre veloppement durable (social, écono-
les frontières entre mique ou environnemental) :
ONG et entreprises
plus floues. Cette mu-
En échange de prévention des risques, re-
cherche d’expertises opération-
tation se concrétise par contreparties, nelles, construction de référen-
des partenariats plus l’ONG audite tiels, élaboration d’indicateurs
formels, engageant les de performance, missions de
directions des deux or-
le reporting contrôle et d’audit, dialogues

Hiver 2007
ganisations, et non plus environnemental périodiques… Il faut noter
seulement les départe- ou social et d’ailleurs que ces formes de
ments marketing ou partenariat constituent des in-
communication (voir
fait des recom- dicateurs pertinents, utilisés
19

L’Expansion Management Review


figure ci-dessous). En mandations. par les agences de notation
échange d’une contre- sociétale, pour apprécier les
partie financière, l’ONG analyse et au- niveaux d’engagement pris avec les
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dite le reporting environnemental ou so- parties prenantes et plus généralement
cial et préconise des démarches de pour évaluer la performance sociétale
progrès allant dans le sens d’une plus de l’entreprise, ainsi que pour sélection-
grande responsabilité sociétale, souvent ner les titres susceptibles d’intégrer un
accompagnées d’une contractualisation fonds d’investissement socialement res-
des engagements des deux parties. L’in- ponsable. Même si ces relations restent
térêt pour l’entreprise réside en premier toujours perçues comme perfectibles, >>

Les différents niveaux d’intégration des ONG dans l’entreprise

Fonctions Direction générale


Fonctions marketing
Fonctions RH ou direction du
concernées et communication
développement durable

Type de
partenariat Mécénat Partenariat Mécénat Partenariat
financier produit de compétence stratégique

◗ Carrefour/Unicef ◗ Volvic/Unicef ◗ Conseillers philan- ◗ Lafarge/WWF


◗ Schneider ◗ Brita/Action thropiques CISCO ◗ Casino/Amnesty International
Exemples Electric/Habitat for contre la faim ◗ IBM/Planète urgence ◗ Accor/ECPAT
Humanity ◗ La Redoute/SOS ◗ Accor/Association ◗ Carrefour/FIDH
◗ Veolia/SOS Village d’enfants française des ◗ Thomas Cook/Care
Village d’enfants volontaires du progrès France

– +
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Dossier
Pilotage des partenariats : l’entreprise n’a plus le monopole
Maître d’œuvre
ONG

Labels, normes,
chartes, filières :
– environnement
– nature/animaux
– commerce équitable
– commerce éthique

Produits co-construits Mécénat produit-partage


Partenariats stratégiques Mécénat de compétence
et institutionnels

Collaboration Maître d’œuvre


entreprise-ONG entreprise

ces actions sont le reflet d’une certaine sont généralement attribuables à l’émer-
Hiver 2007

volonté existant dans l’entreprise. L’ex- gence des ONG humanitaires ou urgen-
pertise sociétale (droits de l’homme) et tistes dans le sillage du mouvement
20
environnementale des ONG devient in- « sans-frontiériste » des années 70 et 80.
contournable pour les entreprises sou- Parallèlement, aux côtés des ONG
L’Expansion Management Review

haitant prendre le leadership de la RSE, « développementalistes » et « urgen-


même si la prise en compte de tistes », de nouvelles
leurs attentes spécifiques dans L’expertise organisations spécia-
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les choix stratégiques reste en- lisées dans l’écologie,
core occasionnelle. sociétale et en- les droits de l’enfant,
vironnementale la défense des droits
L’avènement de des ONG de l’homme font leur
l’« entreprise ONG » apparition avec une
Si l’intrusion des ONG dans la devient mission particulière :
sphère des entreprises est aujour- incontournable le lobbying et la sen-
d’hui incontestable, leur change- sibilisation du public.
ment de statut l’est également.
pour les L’évolution quantita-
Autrefois petite association ca- entreprises. tive de ces trois types
ritative, l’ONG a désormais un d’ONG est étroite-
statut international, par son mode or- ment liée à l’accroissement de la pau-
ganisationnel, son pouvoir de lobbying, vreté et des inégalités, à la multiplica-
sa transnationalisation, sa capacité à tion des crises économiques, d’origine
s’organiser en réseau et à imposer des naturelle ou politique, aux atteintes aux
référentiels en matière de labels et de droits de l’homme et à la dégradation
codes de conduite. de l’environnement. Ce développement
L’essor des ONG s’est véritablement en nombre et en puissance (7) pallie la
opéré dans le contexte de la décoloni- diminution du rôle de l’Etat en matière
sation et dans la mouvance tiers-mon- de régulation des relations sociales et
diste avec l’apparition des ONG axées
sur le développement. Cependant, la > (7) Selon l’Union des associations internationales
(UAI), le nombre d’ONG internationales a plus que
croissance de leur rôle sur la scène in- doublé entre le début des années 80 et la fin des an-
ternationale et leur grande popularité nées 90, passant de 10 000 à 22 000.
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ONG-ENTREPRISE : LES LIAISONS DANGEREUSES

s’inscrit dans le contexte de diffusion rations de marketing direct (9) et s’éri-


du consensus de Washington. Il met en gent en véritables « marques ».
lumière la montée en puissance des ac- En second lieu, cette professionnalisa-
teurs non étatiques, mais surtout une tion répond aux exigences de contrôle
nouvelle forme de gouvernance prônée des donateurs institutionnels et privés :
par la Banque mondiale. transparence financière, formalisation
Toutefois, si de nombreux auteurs et de leurs procédures, développement
experts s’accordent à mettre en évidence des fonctions administratives… Ainsi,
cet essor, ces organisations ont un sta- au cours des années, les ONG se sont
tut juridique mal défini : elles sont gé- transformées en véritables entreprises
néralement décrites comme des asso- en épousant leur modèle managérial et
ciations non lucratives organisationnel basé sur les
d’intérêt général qui Des politiques principes de rentabilité, de
ne relèvent ni de l’Etat, création de valeur et de perfor-
ni d’une institution in- de marketing, mance. Cette ascension s’ob-
ternationale, émanant proches de serve également par leur rôle
d’un groupe de ci- celles déployées de plus en plus prédominant
toyens volontaires et dans les grandes conférences
organisés à l’échelle lo- par les internationales (par exemple,
cale, nationale ou inter- entreprises, sont au Ier sommet de la Terre en

Hiver 2007
nationale. En France, le 1992), où elles s’érigent en
flou sémantique provo-
mises en place contre-pouvoir, en tentant
qué par le manque de par les ONG. d’orienter certaines décisions
21
statut juridique clair en- de politique publique voire de

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gendre des interprétations diverses qui modifier le droit international.
conduisent dans certains cas à inclure Cette pratique généralisée de lobbying
au sein des ONG des associations de est le résultat d’un accroissement de leur
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toute nature. Bien que les terrains so- expertise, de leur expérience dans des
ciaux occupés par les ONG soient très domaines précis mais surtout de leur
étendus, celles-ci peuvent être regrou- capital de sympathie auprès du grand
pées autour de trois thématiques prin- public. De ce fait, elles combinent au-
cipales en fonction de la cause qu’elles jourd’hui des positions réactives et
défendent : solidarité internationale, dé- proactives en influant sur les agendas
fense des droits de l’homme et protec- des grandes conférences ou pro-
tion de l’environnement. grammes internationaux. Cet essor de-
Cette mutation s’est accompagnée vient plus prégnant au regard des ré-
d’une réelle professionnalisation, liée à seaux internationaux et des alliances
l’érosion du « marché » du don privé (8) se développant entre d’autres acteurs
interrompue lors de grandes catas- sociaux (syndicats, associations de
trophes humanitaires, et à la diminu- consommateurs, organisations de
tion des investissements publics dans l’économie solidaire, mouvement de >>
le milieu associatif. Des politiques de
« marketing », proches de celles dé- > (8) Selon le baromètre de la générosité en France
ployées par les entreprises classiques, (Fondation de France), entre 1999 et 2004, le nombre
de donateurs est resté constant ; en revanche, le
sont mises en place, dont l’objectif pre- montant des dons en argent a tendance à baisser.
mier est la conquête de nouvelles parts L’insécurité économique, la baisse du rendement
de marché. Afin de séduire un grand des campagnes de collecte liée à l’explosion tous
azimuts des opérations de marketing direct et les
nombre de donateurs, les ONG peau- malversations financières de certaines associations
finent leur communication (stratégie sont les principales raisons de cet essoufflement.
> (9) Pour plus de détails, se référer à l’ouvrage de
publicitaire, sponsoring, création d’iden- Quéinnec et Igalens, Les Organisations non gouver-
tité visuelle…), diversifient les opé- nementales et le management, Vuibert, 2004.
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Dossier
>> paysans…), facilités par la globalisation tir une pêche plus responsable. A l’ins-
des technologies de l’information. tar du FSC, MSC gagne en popularité
L’exemple du réseau regroupant ONG auprès des consommateurs avec une
et associations du Nord et du Sud, vente de plus de trois millions de tonnes
constitué pour combattre l’industrie de produits de la mer certifiés. Les
pharmaceutique face au problème de ONG participent également activement
l’accès aux médicaments génériques à l’élaboration de chartes ou codes de
anti-VIH dans les pays du Sud, illustre conduite destinés aux entreprises, qui
cette formidable puissance. A doivent pallier l’inap-
l’image des entreprises, les ONG La plicabilité ou le carac-
se sont constituées, avec une tère unilatéral de cer-
grande pluralité d’acteurs, des multiplication tains codes internes
réseaux d’action leur permet- de normes, ou sectoriels, et le
tant d’être réactives face aux labels, codes de manque de régula-
nouvelles logiques productives tion globale. A titre
des firmes globalisées (10) lors- conduite se d’exemple, le code de
qu’elles constatent une dé- développe conduite établi par
faillance de ces dernières en le collectif Clean
matière de citoyenneté.
parallèlement Clothes Campaign
L’avènement de l’entreprise au droit « dur ». (CCC) (11), coalition
Hiver 2007

ONG est visible également dans d’ONG, d’associa-


sa capacité à créer des dispositifs visant tions de consommateurs et de syndi-
22
à réguler les activités des entreprises. cats, a été créé en 1998 afin de faire res-
En effet, dans la mouvance de la soft law pecter les normes minimales relatives
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ou droit mou, de nombreuses initiatives aux pratiques du travail dans l’indus-


privées se sont développées, dont une trie de la confection. Dans un autre
grande partie encadrée par les ONG, registre, le nouveau programme « Cli-
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pour inciter les entreprises à devenir mate Savers », lancé par le WWF et re-
responsables. La multiplication de dis- posant sur un engagement volontaire
positifs – normes, labels, codes de de l’entreprise, a été initié pour réduire
conduite – se juxtapose ou se développe la diffusion des émissions de carbone
parallèlement au droit « dur ». Ainsi, et appuyer la démarche du GIEC
on recense aujourd’hui au moins trois (Groupe d’experts intergouvernemen-
sigles ou « labels » créés par des ONG tal sur l’évolution du climat).
qui sont devenus des références aux Dans la panoplie des dispositifs
yeux des consommateurs, distributeurs créés ou initiés par les ONG, l’une des
ou producteurs : les labels FSC (Forest normes internationales actuellement re-
Stewardship Council), Max Havelaar connues dans le domaine social, la
(conforme aux principes du commerce norme SA 8000, est également le fruit
équitable) et MSC (Marine Stewardship d’un travail initial réalisé conjointement
Council). par des associations environnemen-
Aujourd’hui, le label FSC de gestion tales et sociales, une association améri-
durable des forêts, créé en 1993 par une caine de consommateurs, des syndicats
ONG internationale du même nom, ré- et des sociétés de certification. Cette
unissant aujourd’hui des ONG et diffé- norme, qui repose sur les textes fon-
rents acteurs de la filière bois, est ap- dateurs des droits fondamentaux, est
posé sur environ 7 % des bois destinés
> (10) Voir F. Palpacuer, « Firme-réseau globale et ré-
à la consommation industrielle mon- seaux transnationaux d’ONG : vers de nouvelles
diale. Dans le sillage du label FSC et de- formes de régulation ? », XVIe conférence internatio-
nale de management stratégique, Montréal, 2007.
vant son succès grandissant, l’ONG > (11) Dont est membre le collectif français De
WWF a créé le label MSC afin de garan- l’éthique sur l’étiquette.
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ONG-ENTREPRISE : LES LIAISONS DANGEREUSES

entrée en vigueur afin de faire respec- rapports, critères de notation… Tout


ter les droits sociaux minimaux dans les semble montrer que ces nouveaux mar-
ateliers de confection. L’ensemble de chés (commerce éthique ou équitable,
ces initiatives souligne l’importance consommation verte…) ou modes d’or-
grandissante des ONG en matière de ganisation (labellisation, certification,
régulation des entreprises mondialisées. contrôle des filières…) préemptés par
les ONG s’insèrent progressivement
Des frontières perméables, dans la culture ambiante. Et qu’ils dé-
mais des enjeux spécifiques terminent des limites aux marchés
La rencontre entre ONG et entreprise classiques, même si parallèlement
se situe donc à un tournant majeur de l’échange marchand s’accommode de
son histoire. L’analyse macroécono- façon généralisée d’autres logiques et
mique du paysage montre qu’une forme impératifs « court-termistes » essentiel-
d’encastrement de l’ONG dans l’entre- lement financiers.
prise commence à s’installer de façon Une approche purement sociale
régulière et organisée. Cet encastrement quelque peu idyllique serait de consi-
est visible dans la mesure où, au-delà dérer que plus la culture ONG est ca-
des rencontres et accords opportunistes, pable de s’encastrer dans les marchés,
de réels partenariats s’organisent sur le plus son pouvoir sera décisif. Ce qui
moyen terme avec, depuis peu, des pose alors des questions éthiques

Hiver 2007
projets développant une coresponsabi- concernant l’identité même de l’ONG.
lité réelle (voir figure page 20). De plus, Une autre approche antinomique et
cette imbrication plus tangible est ren- teintée cette fois de cynisme considére-
23
forcée par l’avènement d’« ONG entre- rait cette interconnexion progressive

L’Expansion Management Review


prises », porteuses de savoir-faire et comme un garde-fou social peu déter-
de compétences dispo- minant et purement cosmé-
sant d’une valeur mar- Le détonateur tique. Sans pouvoir trancher
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ché indéniable, et qui aujourd’hui ce débat existen-
deviennent les maîtres historique de tiel, il apparaît avec certitude
d’œuvre de leur do- toute relation que la porosité de ces frontières
maine de compétence
ainsi constitué.
ONG-entreprise a des effets sur l’ensemble des
acteurs, dont il faut circonscrire
Ce constat est de fait peut se résumer les risques potentiels et les
à l’origine de préoccu- à la recherche enjeux.
pations de légitimité, Le détonateur historique de
de confiance, d’image
d’un bénéfice toute relation ONG-entreprise
et d’interprétation chez d’image. peut se résumer à la recherche
les différents acteurs, d’un bénéfice d’image grâce à
les ONG et les entreprises, voire les la rencontre de deux savoir-faire oppo-
autres parties prenantes de la société ci- sés utilisés pour la même action. Pour
vile. Il est impossible de nier aujour- l’entreprise, il est évident que les béné-
d’hui que ces relations, qui deviennent fices managériaux sont multiples et peu-
pour certaines récurrentes et durables, vent être synthétisés sous la forme de
ont un effet direct sur le marché. A tra- trois axes stratégiques : (1) anticipation
vers ces alliances, les ONG peuvent, au des conflits, crises ou attaques, en adop-
minimum, agir comme aiguillon cultu- tant une démarche proactive à destina-
rel, social ou moral et, au maximum, tion des clientèles et parties prenantes ;
structurer les réseaux au sein desquels (2) reconstruction ou restauration des
elles s’insèrent, notamment grâce aux liens d’image, de confiance et de valeurs
outils visibles interférant dans la vie des lorsque des événements négatifs ont eu
acteurs économiques : labels, normes, lieu; (3) extension ou modification d’une >>
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Dossier
>> image de marque existante vers des (label) auprès du grand public et en par-
domaines encore inexploités par l’his- ticulier de la grande distribution (voir
toire de l’entreprise (culture, humani- figure page suivante), cette organisa-
taire, environnement…). Pour les ONG, tion se voit la cible de pamphlets cri-
les interconnexions en termes d’image tiques de la part des puristes (13), tandis
sont moins évidentes et relèvent plutôt que sa démarche est largement soute-
d’une recherche de crédibilité, grâce à nue ou copiée par les acteurs classiques
une prise directe avec des actions du grand commerce.
« terrain », et de moyens. Ayant contribué L’utilisation de la
Toutefois, pour les unes et les grande distribution et
autres, cette recherche de gains à faire découvrir le revers de la pra-
communs peut aussi s’apparen- le commerce tique des marges ar-
ter à une quête du Graal à double
tranchant. L’intimité entre deux
équitable, Max rière posent égale-
ment des problèmes
acteurs, perçue par les parties Havelaar éthiques importants
prenantes, nécessite en effet un connaît une lorsqu’on représente
caractère irréprochable et une des petits produc-
transparence dans la relation,
notoriété peu teurs du Sud.
qui doit leur permettre d’agir en évolutive. Parallèlement, alors
confiance et de se faire confiance, qu’il a contribué à la
Hiver 2007

conditions minimales d’encastrement diffusion du concept de commerce équi-


efficace pour des acteurs issus de deux table, le label connaît aujourd’hui une
24
mondes antinomiques. On pense bien notoriété qui évolue peu et devient
évidemment d’abord au risque de atone (14), posant aussi la question de la
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« faire-valoir » qui menace toute ONG. valeur de celui-ci pour ces associés ac-
Mais des enjeux plus actuels se présen- tuels et potentiels. Une interrogation
tent aujourd’hui. Ainsi, la multiplica- mérite alors d’être soulevée : la multi-
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tion des partenariats avec les entreprises présence d’une organisation au sein du
peut entraîner une organisation non marché crée-t-elle la dilution de ses va-
gouvernementale à devoir tôt ou tard leurs et de ses signes distinctifs ? Enfin,
gérer une crise de croissance, et rendre le label Max Havelaar se voit confronté
difficile de travailler idéologiquement à des questions éthiques de la part de
« contre le marché » tout en agissant ses partenaires historiques, qui ne se
dans ce même marché. De même, une retrouvent plus dans la multiplication
stratégie diluée, floue, dispersée est un et l’identité des autres participants (15).
syndrome qui guette une ONG, et qui Sans vouloir s’engager dans une ana-
peut avoir des répercussions négatives lyse approfondie de cette situation, cette
sur l’efficacité des partenariats ainsi éta-
blis, en touchant à la fois les entreprises > (12) Les lecteurs intéressés pourront trouver des
qui collaborent avec elle, mais aussi les éléments complémentaires dans la thèse de Ronan
Le Velly, « Sociologie du marché. Le commerce équi-
salariés et les bénévoles en interne. table : des échanges marchands contre le marché et
L’intégration trop poussée dans le dans le marché », thèse de doctorat, université de
marché, avec des méthodes caractéris- Nantes, 2004.
> (13) Voir Christian Jacquiau, Les coulisses du com-
tiques des acteurs économiques clas- merce équitable : mensonges et vérités sur un petit
siques, risque aussi d’éloigner l’ONG business qui monte, Mille et une nuits, 2006.
> (14) Entre 2005 et 2006, le taux de notoriété du
de ses fondamentaux et de ses principes label Max Havelaar est passé de 32 % à 31 % alors
historiques. L’exemple du commerce que celui du commerce équitable oscille autour de
74 %. Source : étude réalisée par Ipsos en mai 2006
équitable et en particulier de Max Ha- et mai 2005.
velaar est à ce titre représentatif (12). > (15) Par exemple, actuellement, Artisans du monde
mènerait une réflexion sur la perception de ses pro-
Ayant opté pour une stratégie tous azi- duits avec ou sans le label Max Havelaar (source in-
muts de développement de son sigle terne).
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ONG-ENTREPRISE : LES LIAISONS DANGEREUSES

L’évolution historique des partenariats Max Havelaar :


Spirale positive ou infernale ?

Etape 1 Etape 2
Acteurs historiques Petites entreprises
du commerce équitable industrielles ou commerciales
(Artisans du monde)
(Lobodis, Méo, Alter Eco)

?? MAX HAVELAAR

Etape 4 Etape 3
Grandes entreprises Marques de distributeur
(McDonald’s, Starbucks…) (Monoprix, Carrefour…)

évolution reste emblématique de l’ex- Enfin, un encadrement juridique et pu-


trême difficulté d’une ONG à entrer blic doit exister pour que les dérives

Hiver 2007
dans le jeu du marché, et montre les marketing encourageant les industriels
risques et les enjeux que la multipli- à « singer » tout attribut externe propre
cation des partenariats et l’utilisation aux ONG (sigle, label, information, ga-
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de méthodes propres au marché peu- rantie de fabrication…) ne puissent se

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vent générer en termes développer, tromper les clien-
d’image et de culture. Le label Max tèles et faire disparaître les nou-
La perte du cœur de veaux terrains conquis.
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métier et des fonda- Havelaar se voit Le temps est révolu où le par-
mentaux constitue un confronté à tenariat ONG-entreprise était
enjeu qu’aucune ONG
ne peut négliger au-
des questions une question finalement assez
aisée, car porteuse de bénéfices
jourd’hui. Pour pallier éthiques de communs. Elle doit aujour-
ce phénomène, trois la part de ses d’hui être examinée à la lueur
modes d’actions non des évolutions et des risques
restrictifs paraissent
partenaires qui s’y rattachent que ce soit
d’ores et déjà indispen- historiques. pour l’un ou l’autre des ac-
sables : (1) définir le ni- teurs. Pour survivre et garder
veau d’encastrement souhaitable avec à la fois toute leur valeur morale et éco-
le marché ; (2) préciser la typologie des nomique, ces partenariats devront s’en-
partenaires souhaités ; (3) envisager de raciner dans un socle social et humain
façon proactive les actions correctrices hors des fictions grossières, ou bien se
à mettre en œuvre sur un plan social, réduire. ■
culturel et humain, celles-ci devant
contrebalancer directement les impacts
négatifs éventuellement générés par > (16) Ainsi, l’emballement de la demande à l’égard
des produits équitables fait que Max Havelaar tend
l’organisation (16). En contrepartie, l’en- à donner la priorité à des producteurs déjà organi-
treprise doit être à même de « contrô- sés, capables de garantir un suivi et des quantités,
en laissant les plus pauvres et démunis en dehors
ler » le processus d’extension voulue du circuit. Des structures sociales de proximité per-
par l’ONG, sous peine de se retrouver mettant à ces populations de se développer pour-
raient pallier ces contraintes imposées par le mar-
face à des partenariats contre-produc- ché et les consommateurs, et qui s’opposent aux
tifs et peu efficients en termes d’image. idées d’origine du commerce équitable.

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