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© Management Prospective Editions | Téléchargé le 27/11/2023 sur www.cairn.info via Université de Bordeaux (IP: 147.210.215.16)
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Résumé
Alors que les organisations doivent de plus en plus faire face à des situations
de changement, le taux de réussite de leur mise en œuvre reste relativement
faible (Meaney et Pung, 2008). De par son positionnement dans l’organisation,
la hiérarchie intermédiaire a une forte incidence sur la réussite ou l’échec des
changements menés. Or, cette population a longtemps été absente de la littérature
sur le changement. En effet, cette littérature se focalisait essentiellement sur
deux acteurs situés aux deux extrémités de l’organisation : le leader et la
base opérationnelle. Les travaux s’intéressant au leader avaient pour objectif
d’appréhender les capacités qui permettaient à ce dernier de mener à bien le
changement dans son organisation (Doz et Prahalad, 1987 ; Nadler et Tushman,
1989 ; Stopford et Baden-Fuller, 1990). Une autre partie des recherches s’est
penchée sur la base opérationnelle en contexte de changement. Deux courants
peuvent alors être ici distingués. Le premier courant s’intéresse à la base
opérationnelle comme acteur des changements organisationnels (vision Bottom-
up). Le changement est alors impulsé par les salariés appartenant à la base
de l’organisation. Le second courant s’intéresse au positionnement de la base
opérationnelle face au changement et notamment à la question de la résistance
au changement (Crozier et Friedberg, 1977 ; King, 1990 ; Bareil, 1997 ; Bareil et
1. L’auteur tient à exprimer ses remerciements au Professeur M. Ewan Oiry pour ses précieux conseils et ses relectures attentives.
2. Jérémy Vignal, Doctorant, Aix-Marseille Université, CNRS - LEST UMR 7317, jeremy.vignal@univ-amu.fr
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contexte de changement, ces travaux présentent, à notre sens, deux limites :
soit ils confondent les différents niveaux composant la hiérarchie intermédiaire
(hypothèse implicite d’homogénéité de cette population) soit ils isolent un niveau
en particulier du reste de cette population. Cet isolement nous prive alors de
saisir l’incidence des interactions entre les différents niveaux de la hiérarchie
intermédiaire.
Conscient de ces deux limites, l’objectif de cet article est d’analyser les rôles
des différents niveaux composant la hiérarchie intermédiaire. Ainsi, la hiérarchie
intermédiaire est appréhendée comme une population hétérogène, composée
de différents niveaux de management tous situés entre la sphère stratégique
de l’organisation et la base opérationnelle. Pour ce faire, nous avons mené une
recherche qualitative sur un cas unique : une entreprise industrielle ayant connu
entre 2008 et 2011 de nombreux changements au sein desquels la hiérarchie
intermédiaire a joué un rôle. Quant à notre dispositif méthodologique, celui-ci
s’appuie sur de l’observation non participante, l’étude de données secondaires
internes et la réalisation d’entretiens semi-directifs.
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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement
Il faut attendre le début des années 1980 pour qu’une recherche nous renseigne
sur les rôles des managers intermédiaires en période de changement. Ainsi, dans
un article publié en 1982, Kanter décrit ces managers comme des champions du
changement (« change masters »). En effet, grâce à leur position de pivot ainsi
qu’à leurs qualités individuelles (persévérance, sens de la persuasion, etc.), les
managers intermédiaires peuvent détecter des nouvelles idées et apporter des
solutions novatrices dans la réalisation du changement. Dans le même ordre
d’idée, pour Nonaka (1988), les managers intermédiaires ne sont pas de simples
relais d’informations mais participent à la création de nouvelles connaissances
indispensables au renouvellement stratégique et donc au déploiement des
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changements. Dans un article datant de 1987, Schilit met en évidence le rôle
joué par les managers intermédiaires dans le processus stratégique, notamment
de changement. Schilit montre alors que c’est à travers leur influence auprès de
la Direction que ces managers intermédiaires peuvent assumer un tel rôle. Ainsi,
ces différents travaux datant des années 1980 avaient déjà mis en évidence
l’importance des managers intermédiaires en contexte de changement et ce en
montrant que leurs rôles se situaient aussi bien dans une logique Top-down que
Bottom-up.
Sensemaking Coordinationand
management
Undertaking personal Keeping the business
Peers/self Change going
Orientation Helping others through Implementing changes
Team change to
departments
Figure 1: Middle managers as change intermediaries.
Source : Balogun, 2003, p.75
Balogun, 2003, p. 75
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Dans un article publié en 2007, Autissier et Vandangeon-Derumez ont focalisé
leurs recherches, contrairement à Balogun, sur la seule population des managers
de première ligne en période de changement. Pour Autissier et Vandangeon-
Derumez (2007, p.115), ces managers de proximité ne sont pas de simples «
vecteurs et prescripteurs naturels du changement en direction des opérationnels»
(logique Top-down). Les managers de proximité ont aussi des rôles d’ « impulseurs
créatifs » à jouer (logique Bottom-up). Selon ces auteurs, les managers de
proximité ont aussi des rôles d’ « impulseurs créatifs » à jouer (logique Bottom-
up). Ces rôles consistent à « faciliter le développement d’initiatives au sein de
leur équipe » ; à « faire remonter les opportunités stratégiques qui émergent
de la base opérationnelle, les vendre à leur hiérarchie directe et supérieure,
qui se chargera de les sélectionner » ainsi qu’à « s’investir eux-mêmes dans
le développement d’innovations » (2007, p.118). Autissier et Vandangeon-
Derumez considèrent enfin que ces rôles d’ « impulseurs créatifs » ne peuvent
réellement être assumés par les managers de première ligne que dans le cas
de changements dits participatifs, par opposition aux changements imposés
par la Direction. Toutefois, il convient de préciser que ces auteurs s’intéressent
plus à la question des comportements des managers de première ligne face au
changement qu’à celle de leurs rôles.
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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement
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génériques et possédant des compétences génériques, Bartlett et Ghoshal
(1997) nous invitent à distinguer les différents niveaux de management qui
peuvent composer la hiérarchie intermédiaire. Au-delà de cette question, il
convient aussi de se poser celle de la participation et des rôles de ces différents
niveaux de management au sein des équipes engagées dans le processus
de changement. En effet, pour conduire les changements, les entreprises ont
généralement recours à des équipes. Pour Cohen et Bailey (1997, dans Allard-
Poesi, 2012, p.9), une équipe peut se définir comme un « ensemble d’individus
interdépendants dans leurs tâches et qui partagent la responsabilité de leurs
résultats ». Cohen et Bailey (1997) identifient alors les quatre grands types
d’équipes suivants : les équipes de travail, les équipes parallèles, les équipes
projet et les équipes managériales. Ces différentes équipes se distinguent par
leur caractère permanent ou provisoire, par leur composition, par leur organisation
ainsi que par leurs objectifs ou vocations.
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Team change to
departments
Figure 1: Middle managers as change intermediaries.
Balogun, 2003, p. 75 66
Changement Changement
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continu proposé
Permanent Rupture
Changement Changement
organisé dirigé
Source : Autissier, Vandangeon-Derumez
et Vas, 2010, p.14
Or, le type de changement peut avoir une influence sur les rôles qu’assume la
hiérarchie intermédiaire en période de changement. En effet, pour Autissier et
Vandangeon-Derumez (2007, p.118), alors que dans le cadre d’un changement
imposé, les managers de première ligne « ont pour mission de faciliter et de
contrôler la mise en œuvre du changement » ; dans le cadre d’un changement
participatif « le rôle des MPL est à repenser, non plus dans le sens d’un vecteur
du changement (relation du haut vers le bas), mais comme un acteur à part
entière (relation du bas vers le haut) ». Ainsi, pour ces auteurs, ces managers ne
peuvent prétendre assumer les rôles « d’impulseurs créatifs » que dans le cadre
de changements participatifs.
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analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement
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hiérarchie intermédiaire, la composition et l’organisation des différentes équipes
engagées dans le changement, le type de changement mené ainsi que les
comportements des managers), notre article a pour ambition de répondre à la
question suivante :
Que font les managers appartenant aux différents niveaux de la hiérarchie
intermédiaire en contexte de changement ?
Pour répondre aux objectifs de notre recherche, nous avons opté pour une
démarche qualitative sur un cas unique. Cette deuxième partie a donc pour
vocation de présenter et de justifier notre méthodologie ainsi que notre terrain
de recherche.
Toutefois, pour Ragin et Becker (1992), une recherche à partir d’un cas unique
se justifie lorsqu’il s’agit d’aller investiguer des sujets de recherche pour lesquels
les phénomènes sociaux sont complexes et nécessitent d’être inscrits dans leur
contexte organisationnel. Par ailleurs, pour Yin (1984), les études de cas unique
peuvent permettre de générer des connaissances précises et inédites lors
d’études qui se veulent « révélatrices ». Enfin, Siggelkow (2007, p.23) considère
qu’une recherche à partir d’un cas unique est justifée lorsque « la théorie peut
tenir sur ses propres pieds », lorsque la « discussion conceptuelle apparaît
plausible ».
Pour pouvoir apporter des réponses à nos interrogations, nous avons alors mené
une recherche qualitative approfondie et diversifiée sur un cas unique.
Les données de notre recherche sont, pour une partie, issues de sources
secondaires internes. Nous avons alors passé en revue diverses publications
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Les données primaires constituent l’autre partie des données recueillies sur notre
terrain. Nous avons alors mené un total de 24 entretiens semi-directifs soit près
de 30 heures d’entretien. Tous les entretiens sauf quatre ont pu être enregistrés
et ont alors fait l’objet d’une retranscription puis d’un codage thématique. Pour
les quatre autres entretiens, nous avons pallié l’absence d’enregistrement par
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une prise active de notes. Ces entretiens ont ensuite été retranscrits sous forme
de synthèses thématiques. Nous avons également pu visiter le site ce qui nous
a permis d’entrevoir son fonctionnement, les différents métiers présents ainsi
que les « transformations physiques » du site engendrées par les changements
menés. Plus fondamentalement, le croisement des données secondaires internes
et des données primaires assure une certaine triangulation venant renforcer la
légitimité de nos résultats. Enfin, nous avons également effectué une séance de
restitution-discussion autour de nos résultats et ce en présence de l’ensemble
des acteurs interrogés.
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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement
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tâches inutiles. Le site de Radiologix a abordé le Lean d’une manière
originale. En effet, deux temps ont été identifiés et clairement distingués
dans la mise en place du Lean. Le premier consistait en une modification
physique des ateliers avec notamment la mise en place dans les ateliers
de la production en « U » alors que le second temps visait la mise en
place d’un système de production nouveau qui reprend les concepts, la
philosophie du Lean. Nos recherches concernent uniquement le premier
temps. En effet, quand nous sommes intervenus, le deuxième temps
n’avait pas encore été entamé.
Ces trois volets ont été menés entre 2008 et 2011 et étaient achevés lors de
nos interventions. Si nous devions caractériser ce changement à l’aide de la
typologie proposée par Autissier, Vandangeon-Derumez et Vas (2010, p.14),
nous le qualifierions de changement dirigé. En effet, le « Projet industriel » a été
imposé par le Top-Management et constituait une rupture dans le fonctionnement
de l’organisation.
Yin (1984) a mis en lumière le fait qu’un cas peut se composer de « mini-cas ».
Aussi, notre travail de recherche n’a en réalité pas concerné l’ensemble de
l’entreprise Radiologix mais uniquement son site de la région grenobloise au sein
duquel nous nous sommes focalisés sur la Direction industrielle. La Direction
industrielle a été l’objet de notre étude du fait qu’elle a connu entre 2008 et
2011 les changements cités précédemment, changements au sein desquels la
hiérarchie intermédiaire a joué un rôle.
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-- Le niveau intermédiaire qui est assuré par les Chefs de service (niveau
supérieur de la hiérarchie intermédiaire).
-- Le niveau de proximité qui est assuré par les Chefs de groupe (niveau
inférieur de la hiérarchie intermédiaire).
Pour coller aux objectifs de notre recherche, nous nous sommes entretenus avec
ces différentes populations de salariés. Plus précisément, nous avons pu nous
entretenir avec le Directeur industriel, les six Chefs de service, quatorze Chefs
de groupe actuellement en poste ainsi que deux salariés qui occupaient le poste
de Chef de groupe durant le Projet Industriel4. Nous nous sommes également
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entretenus avec le Responsable Ressources Humaines du site.
La partie qui suit présente les résultats que nous avons obtenus à partir de nos
recherches menées auprès de la Direction industrielle de Radiologix.
3. Résultats
Les résultats présentés dans cette troisième et dernière partie sont issus d’une
recherche plus large portant sur les difficultés, les rôles et les comportements de
la hiérarchie intermédiaire en contexte de changement.
Nos recherches mettent tout d’abord en évidence que la différenciation dans les
rôles assumés par les deux niveaux de management composant la hiérarchie
intermédiaire de Radiologix n’est pas spécifique aux périodes de changement.
En effet, l’analyse des fiches de poste des Chefs de groupe et Chefs de service
témoigne des différences de fonctions et de responsabilités entre ces deux
niveaux de management.
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des managers en contexte de changement
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quotidien et garantir l’atteinte des en place des solutions industrielles.
objectifs de production journaliers
(plan de production, productivité). • Manager des équipes de production
dans un souci d’implication
• Garantir la conformité des produits de individuelle et d’efficacité collective
son domaine. de manière à garantir le respect des
taux de service (conformité, quantité,
• Assurer des activités de management délai) et la productivité.
des hommes (relayer les informations,
développer l’implication, définir des • Assurer la cohésion des groupes et le
plans d’amélioration et de progrès, développement personnel (formation,
réaliser les entretiens d’évaluation, orientation professionnelle,
etc.) compétences transverses, etc.)
De nombreux travaux ont mis en avant que les périodes de changement tendaient
à complexifier les rôles des managers intermédiaires. Nos investigations
montrent également que les différents niveaux de management composant la
hiérarchie intermédiaire ne sont pas affectés de manière homogène par cette
complexification des rôles. Ainsi, loin d’estomper les différences, les périodes de
changement donnent une nouvelle dimension à ce que nous pouvons qualifier
de partage des rôles.
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Les activités et rôles assumés par les Chefs Les activités et rôles assumés par les
de groupe hors changement le sont également Chefs de service hors changement
en période de changement. le sont également en période de
changement.
• Assurer la mise en œuvre opérationnelle
du changement : participation aux • Participer aux décisions relatives
implantations, développement de la à la réalisation des trois volets que
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polyvalence des équipes, etc. comprenait le Projet industriel.
Nos investigations nous ont donc permis de mettre en évidence que les Chefs
de groupe et les Chefs de service assumaient des rôles différents hors et en
contexte de changement. Ce premier résultat va donc dans le sens d’une remise
en cause du mythe du « Generic Manager », ou, dans notre cas, du « Generic
Middle Manager ». En effet, les entretiens que nous avons menés avec les Chefs
de groupe mettent en évidence la prédominance des rôles Top-down assumés
par ces derniers ainsi que leurs difficultés à investir la logique Bottom-up ou des
rôles d’ « impulseurs créatifs » selon la terminologie d’Autissier et Vandangeon-
Derumez (2007). A l’inverse, l’analyse de notre matériau empirique concernant
les Chefs de service met en évidence que ces derniers ont pu se positionner en
véritables acteurs du changement ayant une influence sur le contenu même du
Projet industriel.
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analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement
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(Chefs de groupe), des professionnels de la logistique et des supports techniques
et étaient dirigées par les Chefs de service. Ainsi, cinq Chefs de service sur six
étaient aussi chef de projet. A travers cette casquette de chef de projet, les Chefs
de service ont pu avoir un réel impact sur la mise en œuvre des changements.
Concernant l’intégration des Chefs de groupe au sein de ces équipes, nos
investigations montrent que celle-ci n’a pas été une condition suffisante pour
leur permettre de dépasser la seule logique Top-down. En effet, plus que leur
intégration à ces équipes, ce sont leurs interactions et la qualité de leurs rapports
avec leur Chef de service qui leur ont permis ou non de pouvoir réellement
assumer certains rôles se rapportant à la logique d’ « impulseurs créatifs »
(Autissier et Vandangeon-Derumez, 2007, p.118). En effet, certains Chefs de
groupe ont regretté avoir été livrés à eux-mêmes ou tenus à l’écart par leur Chef
de Service. De leur côté, certains Chefs de service nous ont avoué ne pas avoir
suffisamment intégré leurs Chefs de groupe dans la conduite du changement.
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leurs rôles au sein des équipes projet et au sein de l’Equipe industrielle, ont eu
la capacité de transformer un changement imposé en un changement négocié.
En effet, pour les Chefs de service, le caractère imposé du Projet industriel a
largement été remis en cause et ce à travers leurs actions, leurs propositions
et leurs relations étroites avec le Top-Management. Nos investigations mettent
ainsi en évidence que le type même du changement peut varier selon le niveau
de management de la hiérarchie intermédiaire que l’on considère. En effet, les
Chefs de groupe ont, quant à eux, bel et bien été confrontés à un changement
de type dirigé. De manière générale, les Chefs de groupe reprochent un style
trop directif, estiment avoir été tenus à l’écart des décisions stratégiques et
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avoir été intégrés au Projet industriel seulement au moment de devoir conduire
les changements. Cette intégration tardive a pu les mettre dans des situations
d’urgence ne facilitant ni leur prise de recul ni leur capacité de transformation
des projets initiaux de changement. Il demeure néanmoins que plusieurs Chefs
de groupe considèrent avoir eu une certaine capacité à transformer les projets
de changements. Mais en réalité, la capacité des Chefs de groupe à transformer
les projets initiaux de changements est doublement limitée. Cette capacité est
d’abord limitée dans le sens où rares sont les Chefs de groupe à l’avoir eue.
En effet, seulement quatre Chefs de groupe sur les douze entretiens que nous
avons retenu pour l’analyse sont concernés. Limitée ensuite par la faible ampleur
des transformations issues de leurs propositions. En effet, de manière générale,
dans les projets de changements, plusieurs niveaux peuvent être distingués : un
niveau stratégique au sein duquel les Chefs de groupe, contrairement aux Chefs
de service, n’ont pas eu, ou peu, d’influence et un niveau plus opérationnel, plus
proche du terrain, au sein duquel ils ont pu émettre des propositions qui ont alors
modifié de manière plus ou moins superficielle le projet initial.
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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement
alors pu distinguer six grands types de comportements : les initiateurs (ils adhèrent
au Projet industriel et arrivent même à initier des changements s’inscrivant dans
le Projet), les adhérents (ils adhèrent au Projet industriel et de ce fait assument,
a minima, leurs rôles de vecteurs du changement), les légitimistes (ils obéissent
à leur hiérarchie et participent ainsi à la mise en œuvre du changement), les
négociateurs (leur contribution à la mise en œuvre du Projet industriel est
ambivalente : ils peuvent participer activement à sa réalisation comme la freiner
lorsque les désaccords sont trop importants), les opposés (ils sont contre le
changement mais ne bloquent pas sa réalisation, la posture adoptée est celle de
la mise en retrait ou du décrochage) et les infructueux (il s’agit d’un cas un peu
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atypique. Le salarié était Chef d’un groupe peu impacté par le Projet industriel mais
voyait dans ce Projet l’opportunité de faire évoluer son organisation. Toutefois, ses
propositions n’ont pas été retenues. Ainsi, malgré son comportement favorable
au changement sa contribution a été nulle). Ainsi, le comportement plus ou moins
favorable au changement des managers appartenant à la hiérarchie intermédiaire
a des répercussions sur les rôles réellement assumés par ces managers durant
la conduite du changement. A ce propos, nos investigations montrent que les
deux niveaux composant la hiérarchie intermédiaire de notre cas se distinguent
clairement quant à leur comportement à l’égard du changement. Si les Chefs de
groupe et les Chefs de service sont bel et bien à la fois destinataires et agents du
changement, nos recherches mettent en évidence que les Chefs de service ont
davantage été agents ou acteurs du changement alors que les Chefs de groupe
ont davantage été destinataires.
Conclusion
En s’étant essentiellement focalisée sur les deux populations que sont le leader
et la base opérationnelle, la littérature consacrée à l’étude des changements
dans les organisations a longtemps fait un « grand écart ». Ce « saut analytique »
peinait à masquer, aux yeux des praticiens comme des chercheurs, que c’est
bel et bien la hiérarchie intermédiaire qui a en charge la mise en œuvre des
changements. Ce n’est réellement qu’à partir des années 1980, puis à la fin des
années 1990 avec l’émergence du courant de la fabrique de la stratégie, que
ce vide dans la littérature a pu être comblé. Toutefois, cette littérature présentait
à nos yeux plusieurs limites auxquelles notre article proposait de répondre. En
effet, en rompant l’hypothèse d’homogénéité de la hiérarchie intermédiaire, notre
article a permis de mettre en évidence que les différents niveaux de management
composant cette population n’assumaient pas les mêmes rôles. Plus encore, nos
recherches permettent de témoigner de l’existence d’une réelle hiérarchie interne
à la hiérarchie intermédiaire. Cette hiérarchie interne a eu pour conséquence
que les deux niveaux composant le management intermédiaire de Radiologix
ont vécu de manière différente le Projet industriel. Sur un plan théorique, notre
recherche invite donc à étudier de manière différenciée et combinée les rôles des
managers composant la hiérarchie intermédiaire en contexte de changement.
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Nos résultats encouragent les praticiens à mieux définir les rôles des différents
niveaux d’encadrement ainsi qu’à travailler sur leur articulation en période de
changement. En effet, plusieurs Chefs de groupe et Chefs de service nous
ont fait part de leurs difficultés à coopérer en contexte de changement. Nos
résultats invitent donc les directions d’entreprise à multiplier les initiatives au sein
desquelles les différents niveaux du Management (Top Management et hiérarchie
intermédiaire) sont amenés à travailler ensemble, cela permettra de faciliter leurs
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coopérations en périodes de changement.
Par ailleurs, il aurait été intéressant de pouvoir réaliser des entretiens avec d’autres
membres de la Direction industrielle. En effet, les périodes de changement
sont propices à la constitution d’équipes chargées d’assurer son déploiement.
Nos recherches ont permis de mettre en évidence la présence de deux types
d’équipe : l’Equipe industrielle et les équipes projet. Dans le cas d’espèce, les
équipes projet étaient dirigées par les Chefs de service, comprenaient des Chefs
de groupe mais aussi des opérateurs et des professionnels de la logistique et
des supports techniques. Ainsi, réaliser des entretiens avec l’ensemble des
membres composant ces équipes projet nous aurait apporté des éclairages
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risque de reconstruction collective de l’histoire ».
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