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N+1 et N+2, même combat ?

Vers une analyse différenciée


et combinée des rôles des managers en contexte de
changement
Jérémy Vignal
Dans Management & Avenir 2013/8 (N° 66), pages 13 à 30
Éditions Management Prospective Editions
ISSN 1768-5958
DOI 10.3917/mav.066.0013
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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement1

par Jérémy Vignal2


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Résumé

De par son positionnement dans l’organisation, la hiérarchie intermédiaire


a une forte incidence sur la réussite des changements. Or, cette population
est souvent absente de la littérature consacrée au changement. Notre
article propose d’explorer les rôles de la hiérarchie intermédiaire face au
changement en distinguant les différents niveaux qui la composent.
Abstract

Due to its position in the organization, intermediate hierarchy has a strong


incidence on the success of the organizational changes. However, this
population has not been studied much in the literature. The current article
suggests investigating the roles of these managers by distinguishing the
various levels which compose the intermediate hierarchy.

Alors que les organisations doivent de plus en plus faire face à des situations
de changement, le taux de réussite de leur mise en œuvre reste relativement
faible (Meaney et Pung, 2008). De par son positionnement dans l’organisation,
la hiérarchie intermédiaire a une forte incidence sur la réussite ou l’échec des
changements menés. Or, cette population a longtemps été absente de la littérature
sur le changement. En effet, cette littérature se focalisait essentiellement sur
deux acteurs situés aux deux extrémités de l’organisation : le leader et la
base opérationnelle. Les travaux s’intéressant au leader avaient pour objectif
d’appréhender les capacités qui permettaient à ce dernier de mener à bien le
changement dans son organisation (Doz et Prahalad, 1987 ; Nadler et Tushman,
1989 ; Stopford et Baden-Fuller, 1990). Une autre partie des recherches s’est
penchée sur la base opérationnelle en contexte de changement. Deux courants
peuvent alors être ici distingués. Le premier courant s’intéresse à la base
opérationnelle comme acteur des changements organisationnels (vision Bottom-
up). Le changement est alors impulsé par les salariés appartenant à la base
de l’organisation. Le second courant s’intéresse au positionnement de la base
opérationnelle face au changement et notamment à la question de la résistance
au changement (Crozier et Friedberg, 1977 ; King, 1990 ; Bareil, 1997 ; Bareil et

1. L’auteur tient à exprimer ses remerciements au Professeur M. Ewan Oiry pour ses précieux conseils et ses relectures attentives.
2. Jérémy Vignal, Doctorant, Aix-Marseille Université, CNRS - LEST UMR 7317, jeremy.vignal@univ-amu.fr

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Savoie, 1999). Ce « grand écart » a commencé à s’amoindrir à partir des années


1980 avec la réalisation de plusieurs recherches portant sur cette population
intermédiaire en contexte de changement (Kanter, 1982 ; Schilit, 1987 ; Nonaka,
1988 ; Floyd et Wooldridge, 1997 ; Dutton et al., 1997 ; Huy, 2002 ; Balogun,
2003, 2006 ; Balogun et Johnson, 2004, 2005 ; Balogun, Gleadle, Hope Hailey et
Willmott, 2005 ; Autissier et Vandangeon-Derumez, 2004, 2007 ; Rouleau, 2005 ;
Rouleau et Balogun, 2008 ; Guilmot et Vas, 2011). Ces travaux, s’inscrivant pour
la plupart dans le courant de la fabrique de la stratégie (« strategy as practice »),
nous renseignent notamment sur les rôles joués par cette population. Toutefois,
pour ce qui concerne l’analyse des rôles de la hiérarchie intermédiaire en
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contexte de changement, ces travaux présentent, à notre sens, deux limites :
soit ils confondent les différents niveaux composant la hiérarchie intermédiaire
(hypothèse implicite d’homogénéité de cette population) soit ils isolent un niveau
en particulier du reste de cette population. Cet isolement nous prive alors de
saisir l’incidence des interactions entre les différents niveaux de la hiérarchie
intermédiaire.

Conscient de ces deux limites, l’objectif de cet article est d’analyser les rôles
des différents niveaux composant la hiérarchie intermédiaire. Ainsi, la hiérarchie
intermédiaire est appréhendée comme une population hétérogène, composée
de différents niveaux de management tous situés entre la sphère stratégique
de l’organisation et la base opérationnelle. Pour ce faire, nous avons mené une
recherche qualitative sur un cas unique : une entreprise industrielle ayant connu
entre 2008 et 2011 de nombreux changements au sein desquels la hiérarchie
intermédiaire a joué un rôle. Quant à notre dispositif méthodologique, celui-ci
s’appuie sur de l’observation non participante, l’étude de données secondaires
internes et la réalisation d’entretiens semi-directifs.

L’exposé de nos propos se fera de la manière suivante. En première partie,


notre article proposera une revue de la littérature consacrée à la hiérarchie
intermédiaire en contexte de changement. Nous présenterons dans une deuxième
partie notre méthodologie ainsi que notre terrain de recherche. Les résultats de
nos investigations seront développés dans une troisième partie. Enfin, nous
conclurons par les implications théoriques et managériales de notre étude.

1. La hiérarchie intermédiaire face au changement

1.1. La hiérarchie intermédiaire : nouvel acteur clé de la conduite


du changement
Que fait la hiérarchie intermédiaire en contexte de changement ? Ce n’est
que récemment que la littérature a apporté des éléments de réponse à cette
question.

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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

Il faut attendre le début des années 1980 pour qu’une recherche nous renseigne
sur les rôles des managers intermédiaires en période de changement. Ainsi, dans
un article publié en 1982, Kanter décrit ces managers comme des champions du
changement (« change masters »). En effet, grâce à leur position de pivot ainsi
qu’à leurs qualités individuelles (persévérance, sens de la persuasion, etc.), les
managers intermédiaires peuvent détecter des nouvelles idées et apporter des
solutions novatrices dans la réalisation du changement. Dans le même ordre
d’idée, pour Nonaka (1988), les managers intermédiaires ne sont pas de simples
relais d’informations mais participent à la création de nouvelles connaissances
indispensables au renouvellement stratégique et donc au déploiement des
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changements. Dans un article datant de 1987, Schilit met en évidence le rôle
joué par les managers intermédiaires dans le processus stratégique, notamment
de changement. Schilit montre alors que c’est à travers leur influence auprès de
la Direction que ces managers intermédiaires peuvent assumer un tel rôle. Ainsi,
ces différents travaux datant des années 1980 avaient déjà mis en évidence
l’importance des managers intermédiaires en contexte de changement et ce en
montrant que leurs rôles se situaient aussi bien dans une logique Top-down que
Bottom-up.

Avec l’émergence du courant de la fabrique de la stratégie, à la fin des années


1990, l’effort de recherche sur le management intermédiaire en contexte de
changement s’est intensifié (Balogun, 2003, 2006 ; Balogun et Johnson, 2004,
2005 ; Balogun, Gleadle, Hope Hailey et Willmott, 2005 ; Autissier et Vandangeon-
Derumez, 2004, 2007 ; Rouleau, 2005 ; Rouleau et Balogun, 2008 ; Guilmot
et Vas, 2011). Pour Rouleau et al. (2007, p.15), ce courant a pour ambition de
s’intéresser « à la manière dont les gestionnaires font la stratégie dans leurs
activités quotidiennes ». En examinant les activités, les routines, les discours
et les conversations quotidiennes des managers intermédiaires, ces auteurs
nous ont renseignés davantage sur les rôles de ces managers en contexte de
changement.

A travers ses recherches, Balogun s’est beaucoup intéressée à la population des


« middle managers ». Cette auteure a alors mis en évidence que ces managers
ont à assumer, en période de changement, les quatre rôles suivants : 
Figure 1 : Middle managers as change intermediaries
Nature of activity

Sensemaking Coordinationand
management
Undertaking personal Keeping the business
Peers/self Change going
Orientation Helping others through Implementing changes
Team change to
departments
Figure 1: Middle managers as change intermediaries.
Source : Balogun, 2003, p.75
Balogun, 2003, p. 75

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D’autres recherches menées par Balogun (Balogun et Johnson, 2004, 2005 ;


Balogun, 2006) ont aussi permis de mettre en évidence la capacité d’action et de
transformation des « middle managers » sur le changement. En effet, ces travaux
montrent que les « middle managers » sont de véritables acteurs du changement
dont les actions peuvent venir modifier le projet initial et donc « transformer » un
changement imposé par le « Top-management » en un changement négocié.
Or, en définissant les « middle managers » comme les managers situés entre la
sphère stratégique de l’entreprise et la base opérationnelle, Balogun considère
la hiérarchie intermédiaire comme homogène.
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Dans un article publié en 2007, Autissier et Vandangeon-Derumez ont focalisé
leurs recherches, contrairement à Balogun, sur la seule population des managers
de première ligne en période de changement. Pour Autissier et Vandangeon-
Derumez (2007, p.115), ces managers de proximité ne sont pas de simples «
vecteurs et prescripteurs naturels du changement en direction des opérationnels»
(logique Top-down). Les managers de proximité ont aussi des rôles d’ « impulseurs
créatifs » à jouer (logique Bottom-up). Selon ces auteurs, les managers de
proximité ont aussi des rôles d’ « impulseurs créatifs » à jouer (logique Bottom-
up). Ces rôles consistent à « faciliter le développement d’initiatives au sein de
leur équipe » ; à « faire remonter les opportunités stratégiques qui émergent
de la base opérationnelle, les vendre à leur hiérarchie directe et supérieure,
qui se chargera de les sélectionner » ainsi qu’à « s’investir eux-mêmes dans
le développement d’innovations » (2007, p.118). Autissier et Vandangeon-
Derumez considèrent enfin que ces rôles d’ « impulseurs créatifs » ne peuvent
réellement être assumés par les managers de première ligne que dans le cas
de changements dits participatifs, par opposition aux changements imposés
par la Direction. Toutefois, il convient de préciser que ces auteurs s’intéressent
plus à la question des comportements des managers de première ligne face au
changement qu’à celle de leurs rôles.

La lecture de ces différents travaux permet de mettre en évidence la diversité des


rôles joués par le management intermédiaire en contexte de changement. Or, à
l’exception de l’article d’Autissier et Vandangeon-Derumez (2007), ces travaux
reposent sur une « hypothèse » implicite d’homogénéité de ces managers
situés entre la sphère stratégique de l’organisation et la base opérationnelle.
Pourtant, dans un article publié en 1997, Bartlett et Ghoshal mettent en cause
cette « hypothèse » en s’en prenant au mythe du « Generic Manager ». Pour ces
auteurs, ce mythe peut être représenté par la métaphore de la poupée russe :
« à chaque niveau de la hiérarchie, le manager est similaire mais plus gros que
le manager du niveau inférieur » (Bartlett et Ghoshal, 1997, p.93). Les auteurs
distinguent alors trois niveaux de management (operating-level, senior-level et
top-level) et montrent que ces différents niveaux de management assument tous
des rôles différents.

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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

1.2. Face au changement : vers une meilleure appréhension des


rôles des managers intermédiaires
La littérature consacrée à la hiérarchie intermédiaire en contexte de changement
met en évidence la diversité des rôles assumés par cette population. Toutefois,
une lecture plus fine de cette littérature ou de celle plus large portant sur le
changement permet d’identifier différents éléments pouvant expliquer une telle
diversité.

En s’attaquant au mythe d’un « Generic Manager » ayant des rôles et tâches


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génériques et possédant des compétences génériques, Bartlett et Ghoshal
(1997) nous invitent à distinguer les différents niveaux de management qui
peuvent composer la hiérarchie intermédiaire. Au-delà de cette question, il
convient aussi de se poser celle de la participation et des rôles de ces différents
niveaux de management au sein des équipes engagées dans le processus
de changement. En effet, pour conduire les changements, les entreprises ont
généralement recours à des équipes. Pour Cohen et Bailey (1997, dans Allard-
Poesi, 2012, p.9), une équipe peut se définir comme un « ensemble d’individus
interdépendants dans leurs tâches et qui partagent la responsabilité de leurs
résultats ». Cohen et Bailey (1997) identifient alors les quatre grands types
d’équipes suivants : les équipes de travail, les équipes parallèles, les équipes
projet et les équipes managériales. Ces différentes équipes se distinguent par
leur caractère permanent ou provisoire, par leur composition, par leur organisation
ainsi que par leurs objectifs ou vocations.

La littérature managériale identifie les équipes projet comme celles généralement


mises en place pour gérer les changements. Pour Autissier et Moutot (2007,
p.38), l’équipe projet « a pour mission de réaliser l’action de transformation dans
les meilleures conditions. Tous ses membres doivent être des prescripteurs et
des producteurs du changement ». Si cette littérature invite les entreprises à
intégrer des membres appartenant aux différents niveaux de l’organisation, et
donc de la hiérarchie intermédiaire, au sein de ces équipes, cette littérature nous
renseigne insuffisamment sur l’incidence d’une telle composition. Autrement dit,
nous ne savons que très peu de choses sur les différents rôles qui doivent être ou
qui sont réellement assumés par ces différents niveaux. Par ailleurs, la littérature
ne nous renseigne guère sur la cohabitation, en période de changement, entre
ces équipes projet, par nature temporaires, et d’autres équipes temporaires ou
permanentes. De ce fait, investiguer la participation ou la place des managers
intermédiaires au sein des équipes engagées dans le processus de changement
peut permettre une meilleure compréhension des rôles assumés par ces
managers durant le changement.

Les travaux consacrés à la conduite du changement se sont aussi beaucoup


penchés sur le type de changement conduit dans les organisations. A ce propos,

17
Team change to
departments
Figure 1: Middle managers as change intermediaries.
Balogun, 2003, p. 75 66

Autissier, Vandangeon-Derumez et Vas (2010, p.13) écrivent qu’il existe « autant


de typologies que d’auteurs qui traitent du changement ». Ainsi, à partir de deux
questions qu’ils qualifient de centrales dans la conduite du changement (« le
changement est-il imposé ou négocié ? » et « faut-il faire vite ou prendre le
temps ? »), les auteurs proposent la typologie suivante. 

 Figure 2 : La matrice des changements


Négocié

 Changement Changement
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continu proposé
 Permanent Rupture

 Changement Changement
organisé dirigé



Source : Autissier, Vandangeon-Derumez
 et Vas, 2010, p.14

Or, le type de changement peut avoir une influence sur les rôles qu’assume la
hiérarchie intermédiaire en période de changement. En effet, pour Autissier et
Vandangeon-Derumez (2007, p.118), alors que dans le cadre d’un changement
imposé, les managers de première ligne « ont pour mission de faciliter et de
contrôler la mise en œuvre du changement » ; dans le cadre d’un changement
participatif « le rôle des MPL est à repenser, non plus dans le sens d’un vecteur
du changement (relation du haut vers le bas), mais comme un acteur à part
entière (relation du bas vers le haut) ». Ainsi, pour ces auteurs, ces managers ne
peuvent prétendre assumer les rôles « d’impulseurs créatifs » que dans le cadre
de changements participatifs.

Enfin, les comportements de ces managers face au changement peuvent


également avoir une incidence sur leurs rôles3. La prise en considération de
leurs comportements face au changement se justifie par leur position particulière
dans l’organisation, à la fois agent et destinataire du changement. En effet,
dans la littérature, la notion de résistances au changement est très largement
associée à la population des destinataires du changement. Ainsi, il semblerait
que le rôle d’agent du changement de ces managers ait pris le dessus sur leur
position de destinataire puisque ces derniers ont longtemps été considérés
comme des « vecteurs et prescripteurs naturels du changement en direction
des opérationnels » (Autissier et Vandangeon-Derumez, 2007, p. 115). A notre
connaissance, seul l’article d’Autissier et Vandangeon-Derumez (2007) propose
de s’intéresser aux comportements des managers de première ligne en contexte
3. Nous entendons par Rôles ce que font les managers intermédiaires durant le changement. Notre utilisation du concept de Rôle
peut donc renvoyer aux travaux de Mintzberg (1984). Nous entendons par comportement la posture adoptée par les managers
intermédiaires durant le changement. Notre utilisation du concept de Comportement fait ainsi échos aux travaux portant sur la notion
de résistances au changement.

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analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

de changement. Leurs observations menées auprès de 15 managers de proximité


leur ont permis d’identifier quatre comportements dominants : les légitimistes (ils
obéissent à leur hiérarchie) ; les négociateurs (ils appliquent le changement
tout en faisant valoir leurs spécificités organisationnelles) ; les indifférents (ils
refusent de s’engager dans le changement) et les contestataires (ils s’opposent
au changement). Ainsi, cette typologie met en évidence que certains managers
peuvent refuser d’assumer tout rôle dans la conduite du changement, même celui
de vecteur du changement (cf. le cas des indifférents et des contestataires).

En prenant en considération les éléments précédents (l’hétérogénéité de la


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hiérarchie intermédiaire, la composition et l’organisation des différentes équipes
engagées dans le changement, le type de changement mené ainsi que les
comportements des managers), notre article a pour ambition de répondre à la
question suivante :
Que font les managers appartenant aux différents niveaux de la hiérarchie
intermédiaire en contexte de changement ?

2. Une recherche qualitative sur une étude de cas unique

Pour répondre aux objectifs de notre recherche, nous avons opté pour une
démarche qualitative sur un cas unique. Cette deuxième partie a donc pour
vocation de présenter et de justifier notre méthodologie ainsi que notre terrain
de recherche.

2.1. Présentation de notre méthodologie de recherche


En sciences de gestion, la recherche à partir d’un cas unique soulève certaines
questions et essuie quelques critiques.

Toutefois, pour Ragin et Becker (1992), une recherche à partir d’un cas unique
se justifie lorsqu’il s’agit d’aller investiguer des sujets de recherche pour lesquels
les phénomènes sociaux sont complexes et nécessitent d’être inscrits dans leur
contexte organisationnel. Par ailleurs, pour Yin (1984), les études de cas unique
peuvent permettre de générer des connaissances précises et inédites lors
d’études qui se veulent « révélatrices ». Enfin, Siggelkow (2007, p.23) considère
qu’une recherche à partir d’un cas unique est justifée lorsque « la théorie peut
tenir sur ses propres pieds », lorsque la « discussion conceptuelle apparaît
plausible ».

Pour pouvoir apporter des réponses à nos interrogations, nous avons alors mené
une recherche qualitative approfondie et diversifiée sur un cas unique.

Les données de notre recherche sont, pour une partie, issues de sources
secondaires internes. Nous avons alors passé en revue diverses publications

19
66

internes (lettres d’informations, journal interne, etc). Nous avons également eu


accès aux fiches de poste des différents métiers nous intéressant (Directeur
industriel, Chefs de service, Chefs de groupe) ainsi qu’aux comptes rendus
d’entretiens d’évaluation des Chefs de service et des Chefs de groupe.

Les données primaires constituent l’autre partie des données recueillies sur notre
terrain. Nous avons alors mené un total de 24 entretiens semi-directifs soit près
de 30 heures d’entretien. Tous les entretiens sauf quatre ont pu être enregistrés
et ont alors fait l’objet d’une retranscription puis d’un codage thématique. Pour
les quatre autres entretiens, nous avons pallié l’absence d’enregistrement par
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une prise active de notes. Ces entretiens ont ensuite été retranscrits sous forme
de synthèses thématiques. Nous avons également pu visiter le site ce qui nous
a permis d’entrevoir son fonctionnement, les différents métiers présents ainsi
que les « transformations physiques » du site engendrées par les changements
menés. Plus fondamentalement, le croisement des données secondaires internes
et des données primaires assure une certaine triangulation venant renforcer la
légitimité de nos résultats. Enfin, nous avons également effectué une séance de
restitution-discussion autour de nos résultats et ce en présence de l’ensemble
des acteurs interrogés.

Ce dispositif méthodologique a été déployé pour étudier un cas d’entreprise


unique pertinent par rapport aux objectifs poursuivis par notre recherche.

2.2. Présentation de notre terrain de recherche


Nous avons mené notre recherche au sein d’une entreprise spécialisée dans
l’équipement médical de pointe ayant connu de nombreux changements ces
dernières années. Nous nommons cette entreprise par Radiologix.

L’entreprise Radiologix se positionne sur le marché des sous-ensembles


radiologiques, marché soumis depuis 2007-2008 à une forte pression sur les
prix. Par ailleurs, le site étudié est historiquement spécialisé dans la production
de tubes radiologiques, un produit en fin de vie puisque devant être remplacé
à terme par le panneau radiologique numérique (ou panneau plat). Ces deux
éléments de contexte, conjoncturel et structurel, ont justifié la mise en œuvre de
changements : « Le Projet industriel ». Ce projet comprend trois volets qui ont
pour but de mieux dimensionner l’outil industriel aux volumes de production du
site et donc de réduire les coûts. Les trois volets sont les suivants :
-- La rationalisation des surfaces. L’entreprise Radiologix est locataire
des surfaces qu’elle occupe. Aussi, réduire ses surfaces revenait à
réduire ses coûts fixes. Radiologix est alors passée de plus de 16 000
m² à plus de 13 000 m² de surfaces, soit une libération de surfaces
d’environ 3000 m². La réduction des surfaces a nécessairement
entraîné une réorganisation physique des ateliers : déménagements,

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N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

regroupements, nouveaux agencements, etc.


-- L’évolution des procédés de fabrication. Cette évolution est notamment
passée par la mise en place de divers automates. Les compétences
des opérateurs à leur poste ont alors dû être revisitées. L’objectif
ainsi poursuivi était la rationalisation des opérations nécessaires à la
production des divers sous-ensembles.
-- Une nouvelle organisation des ateliers et des méthodes industrielles.
Le site de Radiologix est passé à une organisation dite en Lean
manufacturing. Cette nouvelle organisation visait trois objectifs : une
production en flux tendus, la réduction des encours et l’élimination des
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tâches inutiles. Le site de Radiologix a abordé le Lean d’une manière
originale. En effet, deux temps ont été identifiés et clairement distingués
dans la mise en place du Lean. Le premier consistait en une modification
physique des ateliers avec notamment la mise en place dans les ateliers
de la production en « U » alors que le second temps visait la mise en
place d’un système de production nouveau qui reprend les concepts, la
philosophie du Lean. Nos recherches concernent uniquement le premier
temps. En effet, quand nous sommes intervenus, le deuxième temps
n’avait pas encore été entamé.

Ces trois volets ont été menés entre 2008 et 2011 et étaient achevés lors de
nos interventions. Si nous devions caractériser ce changement à l’aide de la
typologie proposée par Autissier, Vandangeon-Derumez et Vas (2010, p.14),
nous le qualifierions de changement dirigé. En effet, le « Projet industriel » a été
imposé par le Top-Management et constituait une rupture dans le fonctionnement
de l’organisation.

Yin (1984) a mis en lumière le fait qu’un cas peut se composer de « mini-cas ».
Aussi, notre travail de recherche n’a en réalité pas concerné l’ensemble de
l’entreprise Radiologix mais uniquement son site de la région grenobloise au sein
duquel nous nous sommes focalisés sur la Direction industrielle. La Direction
industrielle a été l’objet de notre étude du fait qu’elle a connu entre 2008 et
2011 les changements cités précédemment, changements au sein desquels la
hiérarchie intermédiaire a joué un rôle.

La Direction industrielle emploie environ 220 salariés. Cette Direction se


décompose en 6 services et en 26 ateliers. Chaque service a à sa tête un Chef
de service alors que plusieurs ateliers peuvent être « dirigés » par un même
Chef de groupe. La Direction industrielle compte alors 6 Chefs de service pour 6
services (3 Unités de fabrication et 3 services supports) et 15 Chefs de groupe
pour 26 ateliers. Trois niveaux de management peuvent-être distingués au sein
de la Direction industrielle :
-- Le niveau du Top-management qui est assuré par le Directeur
industriel.

21
66

-- Le niveau intermédiaire qui est assuré par les Chefs de service (niveau
supérieur de la hiérarchie intermédiaire).
-- Le niveau de proximité qui est assuré par les Chefs de groupe (niveau
inférieur de la hiérarchie intermédiaire).

Pour coller aux objectifs de notre recherche, nous nous sommes entretenus avec
ces différentes populations de salariés. Plus précisément, nous avons pu nous
entretenir avec le Directeur industriel, les six Chefs de service, quatorze Chefs
de groupe actuellement en poste ainsi que deux salariés qui occupaient le poste
de Chef de groupe durant le Projet Industriel4. Nous nous sommes également
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entretenus avec le Responsable Ressources Humaines du site.

La partie qui suit présente les résultats que nous avons obtenus à partir de nos
recherches menées auprès de la Direction industrielle de Radiologix.

3. Résultats

Les résultats présentés dans cette troisième et dernière partie sont issus d’une
recherche plus large portant sur les difficultés, les rôles et les comportements de
la hiérarchie intermédiaire en contexte de changement.

3.1. Chefs de service et Chefs de groupe : sortir définitivement


du modèle de la « poupée russe »
Pour Bartlett et Ghoshal (1997), le mythe du « Generic Manager » explique le fait
que la pratique ait toujours été différente de la théorie. Aussi, nos investigations
remettent également bel et bien en cause ce mythe, ou plutôt, dans notre cas,
le mythe du « Generic Middle Manager ». En effet, nos résultats démontrent
clairement que les Chefs de groupe et les Chefs de service assument des rôles
différents.

Nos recherches mettent tout d’abord en évidence que la différenciation dans les
rôles assumés par les deux niveaux de management composant la hiérarchie
intermédiaire de Radiologix n’est pas spécifique aux périodes de changement.
En effet, l’analyse des fiches de poste des Chefs de groupe et Chefs de service
témoigne des différences de fonctions et de responsabilités entre ces deux
niveaux de management.

Le tableau ci-après présente les principaux rôles et fonctions attribués et assumés


par les Chefs de groupe et les Chefs de service hors période de changement.
Ce tableau a principalement été réalisé à partir de l’analyse des fiches de poste
4. Sur les 16 Chefs de groupe que nous avons rencontrés, nous retenons pour la présentation de nos résultats seulement 12
entretiens. Nous écartons volontairement de l’analyse 4 entretiens pour la raison suivante : les salariés occupaient depuis peu des
responsabilités de Chef de groupe et n’avaient donc pas vécu les périodes de changements comme Chefs de groupe.

22
N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

de ces deux populations. En effet, même si nos entretiens contenaient plusieurs


questions sur les métiers de Chefs de groupe et de Chefs de service, les réponses
alors obtenues ont dû être « manipulées » avec la plus grande précaution car
lorsque nous sommes intervenus cela faisait déjà trois ans que le site n’avait plus
connu de période hors changement. Néanmoins, les témoignages recueillis nous
ont permis de consolider la robustesse des éléments présentés ci-après.

Chefs de groupe Chefs de service


• Piloter l’activité de production au • Piloter le développement et la mise
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quotidien et garantir l’atteinte des en place des solutions industrielles.
objectifs de production journaliers
(plan de production, productivité). • Manager des équipes de production
dans un souci d’implication
• Garantir la conformité des produits de individuelle et d’efficacité collective
son domaine. de manière à garantir le respect des
taux de service (conformité, quantité,
• Assurer des activités de management délai) et la productivité.
des hommes (relayer les informations,
développer l’implication, définir des • Assurer la cohésion des groupes et le
plans d’amélioration et de progrès, développement personnel (formation,
réaliser les entretiens d’évaluation, orientation professionnelle,
etc.) compétences transverses, etc.)

 Orientations à Court Terme.  Orientation à Moyen/Long Terme.

De nombreux travaux ont mis en avant que les périodes de changement tendaient
à complexifier les rôles des managers intermédiaires. Nos investigations
montrent également que les différents niveaux de management composant la
hiérarchie intermédiaire ne sont pas affectés de manière homogène par cette
complexification des rôles. Ainsi, loin d’estomper les différences, les périodes de
changement donnent une nouvelle dimension à ce que nous pouvons qualifier
de partage des rôles.

Le tableau ci-après présente les principaux rôles et fonctions attribués et assumés


par les Chefs de groupes et les Chefs de service en période de changement. Ce
tableau a principalement été réalisé à partir de l’analyse de nos entretiens avec
ces deux populations. L’analyse des comptes rendus d’évaluation de ces deux
populations nous ont permis de consolider la robustesse des éléments présentés
ci-après.

23
66

Chefs de groupe Chefs de service

Les activités et rôles assumés par les Chefs Les activités et rôles assumés par les
de groupe hors changement le sont également Chefs de service hors changement
en période de changement. le sont également en période de
changement.
• Assurer la mise en œuvre opérationnelle
du changement : participation aux • Participer aux décisions relatives
implantations, développement de la à la réalisation des trois volets que
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polyvalence des équipes, etc. comprenait le Projet industriel.

• Informer, communiquer, convaincre, • Piloter des équipes projet :


faire adhérer, vaincre les résistances qui dimension opérationnelle,
peuvent s’exprimer au sein des équipes, dimension managériale et
etc. (dimension managériale). amélioration continue des projets
de changement.
• Consulter les membres de leurs équipes
pour faire émerger certaines idées et
opportunités et ensuite les vendre à
leur hiérarchie (rôles d’ « impulseurs
créatifs »).
- Activité faiblement investie.

• S’investir personnellement dans le


développement d’innovations (rôles
d’ « impulseurs créatifs »).
- Activité faiblement investie.

Nos investigations nous ont donc permis de mettre en évidence que les Chefs
de groupe et les Chefs de service assumaient des rôles différents hors et en
contexte de changement. Ce premier résultat va donc dans le sens d’une remise
en cause du mythe du « Generic Manager », ou, dans notre cas, du « Generic
Middle Manager ». En effet, les entretiens que nous avons menés avec les Chefs
de groupe mettent en évidence la prédominance des rôles Top-down assumés
par ces derniers ainsi que leurs difficultés à investir la logique Bottom-up ou des
rôles d’ « impulseurs créatifs » selon la terminologie d’Autissier et Vandangeon-
Derumez (2007). A l’inverse, l’analyse de notre matériau empirique concernant
les Chefs de service met en évidence que ces derniers ont pu se positionner en
véritables acteurs du changement ayant une influence sur le contenu même du
Projet industriel.

24
N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

3.2. Un changement vécu différemment par les deux niveaux


composant la hiérarchie intermédiaire du site Radiologix
L’analyse du matériau empirique collecté met en évidence l’existence d’une réelle
hiérarchie interne à la hiérarchie intermédiaire. Cette hiérarchie interne explique
le partage des rôles décrit précédemment et ce notamment en se traduisant
dans la composition et l’organisation des équipes engagées dans le processus
de changement. En effet, afin de conduire et de réaliser le Projet industriel, la
Direction du site Radiologix a constitué des équipes projet. Ces équipes, par
définition temporaires, intégraient des opérateurs, du management de proximité
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(Chefs de groupe), des professionnels de la logistique et des supports techniques
et étaient dirigées par les Chefs de service. Ainsi, cinq Chefs de service sur six
étaient aussi chef de projet. A travers cette casquette de chef de projet, les Chefs
de service ont pu avoir un réel impact sur la mise en œuvre des changements.
Concernant l’intégration des Chefs de groupe au sein de ces équipes, nos
investigations montrent que celle-ci n’a pas été une condition suffisante pour
leur permettre de dépasser la seule logique Top-down. En effet, plus que leur
intégration à ces équipes, ce sont leurs interactions et la qualité de leurs rapports
avec leur Chef de service qui leur ont permis ou non de pouvoir réellement
assumer certains rôles se rapportant à la logique d’ « impulseurs créatifs »
(Autissier et Vandangeon-Derumez, 2007, p.118). En effet, certains Chefs de
groupe ont regretté avoir été livrés à eux-mêmes ou tenus à l’écart par leur Chef
de Service. De leur côté, certains Chefs de service nous ont avoué ne pas avoir
suffisamment intégré leurs Chefs de groupe dans la conduite du changement.

Si le Projet industriel a entraîné la constitution d’équipes projet afin d’assurer


sa mise en œuvre, ces équipes n’ont pas été les seules à jouer un rôle dans ce
changement. En effet, les équipes projet ont eu à « cohabiter » avec l’Equipe
industrielle de Radiologix. L’Equipe industrielle, qui correspond à une équipe
managériale selon la catégorisation proposée par Cohen et Bailey (1997), se
compose du Directeur industriel et des Chefs de service. Or, c’est au sein de
l’Equipe industrielle qu’étaient prises les décisions relatives à la réalisation
des trois volets que comprenait le Projet industriel. Ainsi, à travers la direction
d’équipes projet et leur intégration et participation à l’Equipe industrielle, les
Chefs de service ont pu se positionner en véritables acteurs du changement.
A l’inverse, le fait que les Chefs de groupe n’étaient pas membres de l’Equipe
industrielle permet de mieux comprendre leurs difficultés à investir des rôles
relevant de la logique Bottom-up.

Si l’on considère la typologie proposée par Autissier, Vandangeon-Derumez et


Vas (2010, p.14), le Projet industriel correspond bien à un changement de type
dirigé dans la mesure où celui-ci a été imposé par la Direction et qu’il constitue
une rupture avec la précédente organisation de travail du site. Or, à l’instar des
middle managers étudiés par Balogun (2006), les Chefs de service, du fait de

25
66

leurs rôles au sein des équipes projet et au sein de l’Equipe industrielle, ont eu
la capacité de transformer un changement imposé en un changement négocié.
En effet, pour les Chefs de service, le caractère imposé du Projet industriel a
largement été remis en cause et ce à travers leurs actions, leurs propositions
et leurs relations étroites avec le Top-Management. Nos investigations mettent
ainsi en évidence que le type même du changement peut varier selon le niveau
de management de la hiérarchie intermédiaire que l’on considère. En effet, les
Chefs de groupe ont, quant à eux, bel et bien été confrontés à un changement
de type dirigé. De manière générale, les Chefs de groupe reprochent un style
trop directif, estiment avoir été tenus à l’écart des décisions stratégiques et
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avoir été intégrés au Projet industriel seulement au moment de devoir conduire
les changements. Cette intégration tardive a pu les mettre dans des situations
d’urgence ne facilitant ni leur prise de recul ni leur capacité de transformation
des projets initiaux de changement. Il demeure néanmoins que plusieurs Chefs
de groupe considèrent avoir eu une certaine capacité à transformer les projets
de changements. Mais en réalité, la capacité des Chefs de groupe à transformer
les projets initiaux de changements est doublement limitée. Cette capacité est
d’abord limitée dans le sens où rares sont les Chefs de groupe à l’avoir eue.
En effet, seulement quatre Chefs de groupe sur les douze entretiens que nous
avons retenu pour l’analyse sont concernés. Limitée ensuite par la faible ampleur
des transformations issues de leurs propositions. En effet, de manière générale,
dans les projets de changements, plusieurs niveaux peuvent être distingués : un
niveau stratégique au sein duquel les Chefs de groupe, contrairement aux Chefs
de service, n’ont pas eu, ou peu, d’influence et un niveau plus opérationnel, plus
proche du terrain, au sein duquel ils ont pu émettre des propositions qui ont alors
modifié de manière plus ou moins superficielle le projet initial.

Enfin, la littérature sur les managers intermédiaires en contexte de changement


pointe le fait que ces derniers sont à la fois agents et destinataires du changement.
Or, la littérature consacrée aux destinataires du changement s’est largement
interrogée sur la notion de résistance au changement. Ainsi, l’étude des rôles
des managers composant la hiérarchie intermédiaire peut gagner en pertinence
à travers la prise en considération de la question de leurs comportements.
L’analyse de nos entretiens et des comptes rendus d’évaluation nous ont permis
de mettre en évidence que tous les Chefs de service ont eu un comportement
favorable au changement. En effet, les Chefs de service étaient tous convaincus
de la nécessité d’un tel changement pour que le site reste viable. Aussi, le fait
qu’ils aient été intégrés très en amont, qu’ils aient été associés aux décisions
de changement leur ont permis d’avoir une capacité de modification des projets
initiaux de changement facilitant ainsi leur adhésion et leur engagement dans la
conduite du changement. La réalité n’est pas aussi simple du côté des Chefs de
groupe. En effet, notre matériau empirique fait ressortir une plus grande diversité
et complexité concernant leurs comportements face au changement. Nous avons

26
N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

alors pu distinguer six grands types de comportements : les initiateurs (ils adhèrent
au Projet industriel et arrivent même à initier des changements s’inscrivant dans
le Projet), les adhérents (ils adhèrent au Projet industriel et de ce fait assument,
a minima, leurs rôles de vecteurs du changement), les légitimistes (ils obéissent
à leur hiérarchie et participent ainsi à la mise en œuvre du changement), les
négociateurs (leur contribution à la mise en œuvre du Projet industriel est
ambivalente : ils peuvent participer activement à sa réalisation comme la freiner
lorsque les désaccords sont trop importants), les opposés (ils sont contre le
changement mais ne bloquent pas sa réalisation, la posture adoptée est celle de
la mise en retrait ou du décrochage) et les infructueux (il s’agit d’un cas un peu
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atypique. Le salarié était Chef d’un groupe peu impacté par le Projet industriel mais
voyait dans ce Projet l’opportunité de faire évoluer son organisation. Toutefois, ses
propositions n’ont pas été retenues. Ainsi, malgré son comportement favorable
au changement sa contribution a été nulle). Ainsi, le comportement plus ou moins
favorable au changement des managers appartenant à la hiérarchie intermédiaire
a des répercussions sur les rôles réellement assumés par ces managers durant
la conduite du changement. A ce propos, nos investigations montrent que les
deux niveaux composant la hiérarchie intermédiaire de notre cas se distinguent
clairement quant à leur comportement à l’égard du changement. Si les Chefs de
groupe et les Chefs de service sont bel et bien à la fois destinataires et agents du
changement, nos recherches mettent en évidence que les Chefs de service ont
davantage été agents ou acteurs du changement alors que les Chefs de groupe
ont davantage été destinataires.

Conclusion

En s’étant essentiellement focalisée sur les deux populations que sont le leader
et la base opérationnelle, la littérature consacrée à l’étude des changements
dans les organisations a longtemps fait un « grand écart ». Ce « saut analytique »
peinait à masquer, aux yeux des praticiens comme des chercheurs, que c’est
bel et bien la hiérarchie intermédiaire qui a en charge la mise en œuvre des
changements. Ce n’est réellement qu’à partir des années 1980, puis à la fin des
années 1990 avec l’émergence du courant de la fabrique de la stratégie, que
ce vide dans la littérature a pu être comblé. Toutefois, cette littérature présentait
à nos yeux plusieurs limites auxquelles notre article proposait de répondre. En
effet, en rompant l’hypothèse d’homogénéité de la hiérarchie intermédiaire, notre
article a permis de mettre en évidence que les différents niveaux de management
composant cette population n’assumaient pas les mêmes rôles. Plus encore, nos
recherches permettent de témoigner de l’existence d’une réelle hiérarchie interne
à la hiérarchie intermédiaire. Cette hiérarchie interne a eu pour conséquence
que les deux niveaux composant le management intermédiaire de Radiologix
ont vécu de manière différente le Projet industriel. Sur un plan théorique, notre
recherche invite donc à étudier de manière différenciée et combinée les rôles des
managers composant la hiérarchie intermédiaire en contexte de changement.

27
66

Dans un souci de produire des connaissances actionnables ou praticables, nos


recherches présentent également plusieurs intérêts managériaux.

Nos résultats encouragent les praticiens à mieux définir les rôles des différents
niveaux d’encadrement ainsi qu’à travailler sur leur articulation en période de
changement. En effet, plusieurs Chefs de groupe et Chefs de service nous
ont fait part de leurs difficultés à coopérer en contexte de changement. Nos
résultats invitent donc les directions d’entreprise à multiplier les initiatives au sein
desquelles les différents niveaux du Management (Top Management et hiérarchie
intermédiaire) sont amenés à travailler ensemble, cela permettra de faciliter leurs
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coopérations en périodes de changement.

Nos résultats invitent également les Directions à encourager leurs managers de


proximité à investir d’autres logiques que celles appartenant à la vision Top-down.
En effet, leur position particulière, au plus près du terrain, leur permet d’avoir une
vision plus précise du travail des opérationnels et ainsi de pouvoir assurer une
remontée d’informations très précieuses pour la bonne marche du changement.

Plus fondamentalement, nos résultats soulèvent la question du moment de


l’intégration des managers de proximité ainsi que celle de leur participation et place
au sein des différentes équipes engagées dans le processus de changement.
Leur capacité à mener le changement ainsi que leur sentiment d’appartenance
à la ligne hiérarchique en dépendent. En effet, il convient d’éviter les situations
dans lesquelles les managers de proximité doivent conduire un changement pour
lequel ils n’ont ni été consultés ni ne disposent d’une visibilité suffisante sur ce
qui se joue.

Notre travail présente par ailleurs plusieurs limites.


Tout d’abord, le changement peut être défini comme un processus. Plus
concrètement, le changement peut se décomposer en différentes phases
(Autissier et Vandangeon-Derumez, 2004, 2007). Aussi, mener une étude
longitudinale aurait permis de mieux appréhender les différents rôles de la
hiérarchie intermédiaire en rapport avec les différentes étapes du processus de
changement.

Par ailleurs, il aurait été intéressant de pouvoir réaliser des entretiens avec d’autres
membres de la Direction industrielle. En effet, les périodes de changement
sont propices à la constitution d’équipes chargées d’assurer son déploiement.
Nos recherches ont permis de mettre en évidence la présence de deux types
d’équipe : l’Equipe industrielle et les équipes projet. Dans le cas d’espèce, les
équipes projet étaient dirigées par les Chefs de service, comprenaient des Chefs
de groupe mais aussi des opérateurs et des professionnels de la logistique et
des supports techniques. Ainsi, réaliser des entretiens avec l’ensemble des
membres composant ces équipes projet nous aurait apporté des éclairages

28
N+1 et N+2, même combat ? Vers une
analyse différenciée et combinée des rôles
des managers en contexte de changement

complémentaires sur les rôles et comportements des managers composant


la hiérarchie intermédiaire ; d’autant plus que la littérature définit souvent les
managers intermédiaires à partir de leurs interfaces.

Enfin, la réalisation d’entretiens rétrospectifs a constitué une voie importante


concernant la collecte des données à partir desquelles nos résultats ont pu
être établis. Or, ce type d’entretiens comme source de données présentent
des limites. En effet, pour Moingeon et Lehmann-ortega (2010, pp.268-269),
« l’interrogation sur des situations particulières fait appel à des faits vécus, et
donc à la mémoire de la personne interrogée, avec rationalisation a posteriori et
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risque de reconstruction collective de l’histoire ».

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