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Christiane Bughin, Olivier Colot, Mélanie Croquet, Claire Dupont, Alain Finet
© Management Prospective Ed. | Téléchargé le 16/10/2021 sur www.cairn.info via CNRST Rabat (IP: 196.200.131.104)
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Résumé
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ce type de société. Nos résultats montrent qu’il y a lieu de privilégier une
reprise de type interne, ce qui permet de réaliser les choix stratégiques
adéquats, et d’obtenir la confiance du personnel. Trois hypothèses ont été
testées auprès d’un échantillon de PME familiales belges ayant fait l’objet
d’une transmission, au moyen de la méthodologie du pairage statistique.
Chaque PME transmise de notre échantillon a été appariée avec une PME
« jumelle » non transmise. Une dichotomie a ensuite été réalisée selon que
la PME a été transmise à un repreneur interne ou externe. Les résultats
globaux montrent que la performance sociale des PME est affectée par la
transmission (hausse de la productivité par travailleur occupé, diminution
des salaires et contraction de la masse salariale). Toutefois, seule
l’hypothèse portant sur une diminution de la rémunération des travailleurs
a pu être validée au niveau du repreneur interne. Ce constat rejoint les
conclusions d’études antérieures mettant en exergue une divergence des
débats concernant le lien entre la performance des entreprises transmises
et la nature du repreneur.
Abstract
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Transmission des PME familiales et
performance sociale
Tant au plan international que sur le marché belge, la PME familiale est le type
de sociétés dominant (Colot, 2007). Le problème majeur pouvant avoir des
conséquences importantes sur la pérennisation des activités réside dans le
passage générationnel (Cadieux, 2006). La question est de savoir s’il convient
de privilégier une reprise de type interne ou externe car le succès de l’opération
est fortement contingent à ce choix.
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On dispose d’un certain nombre d’études portant sur l’évolution des performances
économique et financière d’entreprises familiales selon qu’elles sont cédées à
un repreneur interne ou externe. Ces analyses se fondent sur une conception
financière de la performance ignorant les déterminants situés plus en amont.
Très peu de travaux s’intéressent à l’impact des transmissions d’entreprises
familiales de plus petite taille, et notamment sur les performances sociales,
lesquelles déterminent pourtant leur succès, particulièrement dans le contexte
étudié (Esteve et Mahé De Boislandelle, 1999, in Saoudi, 2007, p.1).
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Nous constatons un manque d’homogénéité des résultats obtenus par ces études
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qui s’appuient sur une vision réductrice de la performance, en l’occurrence
financière, et s’intéressent généralement aux grandes entreprises cotées. Par
contre, les petites ou moyennes entreprises ayant un caractère familial, le plus
souvent non cotées, font l’objet de peu de travaux. En fonction de ce constat,
notre étude empirique se focalise sur une approche sociale de la performance
des PME familiales, marquées par une empreinte sociale très spécifique : la
notion de performance sociale est fondamentalement liée à la satisfaction,
l’adhésion et la cohésion des effectifs (Houot, Imbs, 2004) et sera appréhendée
selon la productivité, le maintien de l’emploi et le niveau de la rémunération. Ces
composantes de la performance sociale s’expriment de manière spécifique dans
les entreprises familiales, et pourraient dès lors être affectées par la nature du
repreneur en cas de transmission ou de cession.
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Transmission des PME familiales et
performance sociale
Par ailleurs, les entreprises familiales sont caractérisées par un capital social
spécifique (théorie fondée sur l’approche RBV – Habbershon, Williams, 1999) qui
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correspond, selon Baron et Markman (2000), aux ressources que les individus
acquièrent par la connaissance d’autres individus, soit en appartenant à leur
réseau social, soit en étant reconnus et appréciés par eux.
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en termes de productivité est dès lors plus importante en cas de reprise par
un repreneur extérieur car le fait de ne pas connaître l’entreprise s’ajoute aux
risques « classiques » de la transmission (Picard, Thevenard-Puthold, 2004).
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observées auprès des salariés lors d’une transmission sont probablement
atténuées en cas de reprise interne. Cela nous amène à formuler l’hypothèse
suivante :
Hypothèse 1: le choix d’un repreneur interne influence positivement la productivité d’une
entreprise familiale après sa transmission.
2.3.2. Transmission et emploi
Selon Sraer et Thesmar (2007), la gestion des ressources humaines (GRH) est
plus protectrice lorsque l’entreprise familiale est dirigée par l’héritier, qui dispose
d’une vision de l’entreprise à plus long terme, plutôt que par un manager externe
dont la durée des mandats est souvent plus réduite. Pour ce dernier, une manière
à court terme d’améliorer la rentabilité est donc de licencier du personnel.
Sur le plan affectif, « la proximité du lien préalable avec l’entreprise est donc un
élément décisif de légitimité du repreneur » (Culliere, 2008, p.14).
Sur le plan culturel, Allouche et Amann (1998) notent l’engagement important des
employés dont l’entreprise est transmise à un membre de la famille, en raison
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Transmission des PME familiales et
performance sociale
Hypothèse 3: le choix d’un repreneur interne influence négativement les salaires d’une
entreprise familiale après sa transmission.
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3. Méthodologie
Notre étude empirique porte sur des PME familiales belges créées avant le 31
décembre 1990, afin de repérer l’influence familiale dans l’entreprise, et se base
sur des données financières extraites de Belfirst31 complétées par une enquête
par questionnaires. A l’intérieur de ce groupe de PME belges, il a été procédé à
un échantillonnage aléatoire simple sans remise de 2.000 entreprises.
La PME est familiale si elle satisfait à au moins deux des critères suivants (Colot,
2007) :
- une famille détient au moins 50 % des actions de l’entreprise ;
- une famille a une influence décisive sur la stratégie de l’entreprise et sur
les décisions de transmission de l’entreprise ;
- la majorité du conseil d’administration est composée de membres d’une
famille.
31. Comptes annuels des entreprises belges soumises à l’obligation de dépôt auprès de la Banque Nationale de Belgique.
32. Même si l’échantillon est représentatif sur la base des critères testés, un biais reste possible du fait des non réponses.
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paires « PME transmise / PME non transmise ». Enfin, deux groupes de PME
familiales transmises ont été distingués : celles avec repreneur interne et celles
avec repreneur externe.
La valeur ajoutée brute (différence entre les ventes et le coût des entrées) est la
valeur que la société a ajoutée au coût des entrées par l’organisation. Plus le taux
de valeur ajoutée est élevé, plus l’entreprise transforme elle-même ses achats
grâce à son personnel et son équipement. Cette VAB est ensuite exprimée par
personne occupée (VABp) afin de rendre compte de la productivité.
33. Il a parfois été nécessaire d’assouplir ce critère de sélection. Le code NACEBEL à trois chiffres a été utilisé pour 23 entreprises,
et à deux chiffres pour 34.
34. Lorsque plusieurs entreprises non transmises correspondaient au profil recherché, celle présentant le total bilanciel le plus proche
de celui de sa jumelle transmise a été retenue.
.
35 Cette méthode ne suppose pas la normalité des distributions (Heldenbergh, 1999, p. 205), ce qui est particulièrement intéressant
dans la mesure où de nombreux ratios ne sont pas distribués normalement (Ooghe, Van Wymeersch, 1990, p. 392). Par ailleurs, il est
conseillé d’éliminer les différences aberrantes. En effet, une trop grande différence pourrait être due à un élément isolé, indépendant
des caractéristiques des sociétés transmises. Le test de Cochran permet précisément d’éliminer ces valeurs extrêmes. Pour chaque
indicateur retenu, nous avons calculé les différences des paires d’entreprises (appelées Di). Ensuite, à partir des valeurs Di, nous
avons calculé des valeurs Gi correspondant au rapport des Di² de chaque paire sur la somme des Di² de l’ensemble des paires pour
un indicateur. Nous avons alors éliminé les valeurs Di auxquelles correspond un Gi > 0,12.
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Transmission des PME familiales et
performance sociale
En outre, nous avons classé les entreprises dans un intervalle de temps compris
entre n et n+3 (afin d’éviter d’autres effets non liés à la transmission en tant que
telle), avec n correspondant à l’année de la transmission.
4. Résultats
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Nous avons comparé les performances des PME familiales ayant fait l’objet
d’une transmission à celles des PME familiales non encore transmises. Les deux
tableaux suivants36 présentent les observations sur l’échantillon ainsi que les
résultats des tests de comparaison37 :
Inférieure Supérieure
VAB / personne n+3 7,838 40,957 5,522 -3,23 18,91 1,419 54 ,162
VAB / personne n+2 2,018 31,970 4,127 -6,24 10,27 ,489 59 ,627
VAB / personne n+1 -3,130 32,602 3,869 -10,84 4,58 -,809 70 ,421
VAB / personne n-1 -1,785 30,556 3,705 -9,18 5,61 -,482 67 ,632
VAB / personne n-2 -5,002 32,235 3,909 -12,80 2,80 -1,280 67 ,205
Effectif moyen n+3 -,200 4,956 ,639 -1,48 1,08 -,313 59 ,756
Effectif moyen n+2 -,437 5,318 ,664 -1,76 ,89 -,658 63 ,513
Effectif moyen n+1 -,400 5,454 ,629 -1,65 ,85 -,635 74 ,527
Effectif moyen n-1 ,471 5,614 ,671 -,86 1,81 ,702 69 ,485
Effectif moyen n-2 ,652 5,635 ,678 -,70 2,00 ,961 68 ,340
Rémunération moyenne n+3 -308,742 12515,291 1735,558 -3793,02 3175,53 -,178 51 ,860
Rémunération moyenne n+2 1681,260 12697,505 1727,911 -1784,49 5147,01 ,973 53 ,335
Rémunération moyenne n+1 -652,632 10805,416 1310,349 -3268,10 1962,83 -,498 67 ,620
Rémunération moyenne n-1 1507,238 13378,392 1685,518 -1862,06 4876,54 ,894 62 ,375
Rémunération moyenne n-2 2533,223 13684,578 1752,130 -971,56 6038,00 1,446 60 ,153
36. Le premier tableau comprend les indicateurs de performance ; le second, les évolutions de ces indicateurs entre n-1 et n+1, entre
n-2 et n+3, et la moyenne avant et après transmission de l’ensemble des indicateurs.
37. Les valeurs statistiquement significatives sont grisées dans les tableaux.
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suivants :
l’effectif moyen entre n-1 et n+1 (valeur inférieure) et en moyenne avant-
après transmission (valeur inférieure) ;
la rémunération moyenne par travailleur entre n-1 et n+1 (valeur inférieure) ;
la valeur ajoutée brute par personne occupée entre n-2 et n+3 (valeur
supérieure) et en moyenne avant-après transmission (valeur supérieure).
La valeur ajoutée brute par personne occupée passe d’une moyenne des
différences négatives avant transmission à une moyenne des différences
positives après transmission. La transmission aurait une influence positive sur
l’accroissement de la productivité par personne occupée à long terme. Ce constat
peut s’expliquer par une décision des successeurs de compresser le personnel
et leur rémunération. De tels résultats s’opposent à ceux de Deschamps (1998)
qui observe une diminution de l’implication des salariés après la transmission.
Enfin, l’effectif moyen à court terme (entre n-1 et n+1) ainsi que l’effectif moyen
avant-après transmission (entre n-2 et n+3) diminuent pour les PME familiales
ayant fait l’objet d’une transmission (résultat statistiquement significatif), ce qui
contredit les résultats de Diwisch, Voithofer, et Weiss (2006). Ainsi, dans notre
base de données, l’effectif moyen du personnel passe de 6,41 unités en n-1 à
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performance sociale
6,07 unités en n+1 alors que dans le cas des PME familiales non transmises, il
augmente de 5,94 unités en n-1 à 6,47 unités en n+1.
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PME familiales transmises à celles de leurs jumelles non encore transmises.
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Cependant, quel que soit le type de repreneur, la valeur ajoutée brute par
travailleur est en général supérieure à celle des PME familiales non transmises.
La démotivation des salariés tendrait à s’atténuer suite à l’arrivée d’un repreneur,
pouvant être perçu comme le garant de la continuité des activités de l’entreprise.
Cependant, les gains de productivité pourraient uniquement provenir de la
compression du personnel et de ses rémunérations à court terme.
Par ailleurs, les résultats du tableau 4, même s’ils ne sont pas statistiquement
significatifs, mettent en évidence une évolution positive à court et à long terme de
la productivité par travailleur occupé beaucoup plus importante lorsque l’entreprise
est transmise à un repreneur externe, ce qui correspond aux résultats de Huson,
Malatesta, et Parrino (2004) et de Morck, Strangeland et Yeung (1998).
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Cette évolution de la productivité pourrait aussi s’expliquer par la confiance du
personnel et la crédibilité qu’il accorde à un repreneur interne (Culliere, 2008)
qui arriverait plus facilement à motiver la communauté développée autour du
précédent dirigeant. Le personnel accepterait donc plus facilement de sacrifier
une partie de son salaire si cette décision est prise par une personne interne
plutôt que par une personne externe susceptible de modifier les pratiques de
GRH pour s’affranchir de son rôle de dirigeant (Saoudi, 2008).
Conclusions
Parmi les trois hypothèses testées, seule l’hypothèse 3 a pu être validée : ainsi, le
choix d’un repreneur interne influence négativement les salaires d’une entreprise
familiale après sa transmission. En ce qui concerne la diminution des effectifs,
notre base de données ne nous permet pas de cerner la nature des sorties du
personnel. La réalisation d’entretiens auprès des nouveaux dirigeants des PME
analysées pourrait nous en apprendre davantage sur la nature de ces départs. Il
serait également intéressant de prendre en compte les perceptions du personnel,
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Bibliographie
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