PERFORMANCE DES INSTITUTIONS DE MICROFINANCE DANS LE

FINANCEMENT DU DÉVELOPPEMENT :
le cas de la République Démocratique du Congo

Simon Wangani

Direction et Gestion | « La Revue des Sciences de Gestion »

2016/2 N° 278-279 | pages 109 à 115

ISSN 1160-7742
ISBN 9782916490496
DOI 10.3917/rsg.278.0109
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2016-2-page-109.htm
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 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 278-279 – finance
Performance des institutions
de ­microfinance dans le financement
du développement :
le cas de la République Démocratique du Congo
par Simon Wangani
Simon WANGANI
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Docteur en Sciences de Gestion
Chargé des cours à l’Université Paris Est Créteil
et d’Evry, Membre du laboratoire IRG Paris Est et
LITEM-UEVE, France
mars-juin 2016
www.LaRSG.fr
109
Mesures de la performance
L
e processus de développement demande d’importants
financements que les seules ressources intérieures ne
peuvent pas toutes seules, combler. Aussi, les États
ont-ils recours au financement extérieur, selon des modalités
différentes en fonction de leur niveau de développement. Les
pays émergents et à revenus intermédiaires ont accès à tous
les instruments de financements extérieurs disponibles, tels
que les investissements directs étrangers, les emprunts sur les
marchés financiers ou auprès des banques commerciales, les
financements de bailleurs de fonds sur prêts et sur dons. En
revanche, les pays à faibles revenus ne peuvent bien souvent
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financer leur développement qu’en ayant recours à l’aide inter-
nationale (P. Gauchon, 2005). Leur besoin de financement est
immense pour financer l’atteinte des Objectifs du Millénaire
pour le Développement OMD d’ici 2015 (S. Amartya, 2010), et
en premier lieu celui de la réduction de la pauvreté. Dans cette
perspective, la communauté internationale s’est engagée à doubler
les montants d’aide publique au développement. Par ailleurs,
pour relever ce défi, les pays en développement cherchent de
nouvelles sources de financement qu’ils trouvent auprès des
bailleurs émergents comme la Chine, de nouveaux acteurs telles
les fondations ou à travers la promotion du secteur privé via de
nouveaux instruments comme la microfinance.
La crise du secteur bancaire classique a mis en exergue un
certain nombre de points conflictuels concernant la crédibilité
des banques et la perception réelle de ces institutions. Les
banques cherchaient à éviter la responsabilité qui est la leur
(comportement irresponsable de certains traders, affaire des
subprimes aux USA). La dégradation de la note de la dette
souveraine de certains États (USA, Espagne, Grèce, Portugal,
Italie) montre que la crise est encore là et pose le problème
deg ouvernance des États. Dans ce contexte, de nombreuses
questions se posent. Quel est le rôle et l’impact de la microfi-
nance dans le développement de la RD Congo ? Existe-t-il des
Dossier II
 110 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 278-279 – finance
Mesures de la performance
liens entre la fonctionnalité du secteur de la microfinance et la
soutenabilité du processus du développement au Congo ? Toutes
ces observations nous ont engagés à mener des recherches sur
le financement du développement et à réfléchir aux nouveaux
instruments financiers qu’un gouvernement, un bailleur de fonds
bilatéral, une collectivité territoriale etc. pourraient développer
pour accompagner ou accélérer la dynamique de développement.
Une étude empirique a été réalisée au Congo auprès d’un échan-
tillon de 30 institutions de microfinance et de 100 personnes
composées d’universitaires, de professionnels, et portait sur leur
perception de l’impact de la microfinance dans le processus du
développement. Les résultats obtenus permettent :
-de recueillir, à travers les entretiens menés, les opinions des
professionnels à l’égard des institutions de la microfinance
(IMF) en confirmant le fait que ce sont des voies alternatives
au financement du développement ;
- d’évaluer à travers un certain nombre de questionnaires, la
perception des emprunteurs des IMF sur le rôle de la microfinance
comme outil de financement des activités et de la croissance
économique.
1. Revue de la littérature
1.1. Les fondements théoriques
de l’économie de la microfinance
Le principal objectif de cette partie est de dégager certains
courants théoriques explicatifs de l’émergence et de la structu-
ration de microfinance. La plupart de ces courants abordent la
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question du fondement de l’économie de la microfinance dans
une perspective d’efficacité productive. Le rôle de l’économie
de la microfinance dans la lutte contre la pauvreté et pour le
développement est aujourd’hui approuvé par la communauté
internationale. En effet, la microfinance est l’offre de services
financiers (crédit, épargne, assurance, etc.) à des personnes
vulnérables, qui n’ont pas accès au secteur financier traditionnel
(M. Yunus & A. Jolis, 2006). Elle vise à améliorer le revenu des
bénéficiaires par l’auto-emploi. Elle regroupe toutes les pratiques
d’épargne, de crédit, d’assurance formelles ayant traitàdes
petites sommes d’argent et visant à assurer un gain ou à éviter
une perte en transformant la position financière des individus
qui y ont recours (M. Yunus, 2003).
1.1.1. La microfinance et l’asymétrie de l’information
On peut en effet, observer plusieurs distorsions (dont le ration-
nement de crédit) entre le prêteur et l’emprunteur. Celles-ci
ont généralement pour cause l’asymétrie d’information et pour
conséquence l’inefficacité de l’intermédiation financière.
Face à ce problème, la microfinance propose quelques mécanismes
dits « novateurs » en vue de préserver l’efficacité du financement
de l’économie et du développement. L’asymétrie de l’information
mars-juin 2016
Dossier II
est l’imperfection de l’information entre prêteurs et emprunteurs
en matière bancaire. En général, c’est l’imperfection de l’infor-
mation entre l’offre et la demande sur un marché donné. Elle
suppose qu’une des parties (emprunteurs ou prêteurs) dispose
d’une information complète mais ne la fournit pas intégralement
à l’autre. Dans ces conditions, elle constitue une entrave à la
réalisation des conditions d’une concurrence pure et parfaite
sur un marché donné. Pour remédier à ce dysfonctionnement,
l’économie moderne a élaboré des outils utiles pour introduire le
traitement des risques et de l’incertitude dans l’analyse de l’offre
et de la demande des biens et des services sur les marchés. Le
marché financier n’échappe pas à ces différents outils, car il est
très incertain en raison des risques de défaut liés aux crédits. En
effet, dans une relation de crédit, l’information apparaît asymé-
triquement distribuée car l’emprunteur dispose d’une meilleure
information que le prêteur sur les paramètres qui vont déterminer
la rentabilité effective du projet et ensuite en gouverner le partage
des revenus (P. Grandin & D. Saïdane, 2011). Il en est ainsi, par
exemple, des flux de liquidité générés par un investissement
financé par emprunt. La distribution effective des flux de liquidité
conditionne directement la probabilité de défaut de paiement
de l’emprunteur, et donc l’espérance de rendement du prêteur.
Il en est de même du risque d’exploitation de l’entreprise qui
emprunte. Celle-ci connaît relativement mieux que le prêteur son
activité, son marché, ainsi que la conjoncture dans laquelle elle
évolue. Dans ces deux cas, l’asymétrie d’information s’observe
entre l’emprunteur et le prêteur au détriment de ce dernier(S.
Allemand, 2011). Conscient du faitque la transaction risque d’avoir
lieu dans les conditions désavantageuses pour lui, le prêteur
peut être amené à rationner le crédit, c’est-à-dire en réduire le
montant ou en refuser l’octroi aux emprunteurs apparemment
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risqués. Cette manière de procéder présuppose l’existence d’une
inefficacité allocative, car le risque est discriminé par les prix.
Le prêteur est confronté à deux types de risques susceptibles
de compromettre son activité dès le départ :
• la sélection adverse (anti-sélection) ou le risque pur du crédit
(souvent lié à l’état de l’économie ou aux états de la nature)
car il ne peut distinguer parmi les emprunteurs potentiels
ceux qui pourront s’acquitter de leurs engagements de ceux
qui ne le pourront pas (B.S. Diakité, 2008)
• l’aléa moral ou le hasard moral dû à l’opportunisme compor-
temental de l’emprunteur. En effet, la rationalité limitée du
prêteur et l’incomplétude des contrats de prêt ne lui permettent
pas de connaître avec précision tous les revenus que générera
l’activité à financer par le crédit et surtout les intentions réelles
de l’emprunteur après la signature du contrat. Il subsiste donc
des informations cachées, c’est-à-dire l’asymétrie d’information
post-contractuelle et le rationnement du crédit n’est pas une
solution adéquate.
Pour mieux faire face à ces risques, les institutions de microfi-
nance recourent souvent à des mécanismes dont certains sont
qualifiés de techniques novatrices. Il s’agit entre autre des
prêts de groupe à base de caution solidaire, du contrat de dette
standard, des méthodes de dissuasion et de l’utilisation des
www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion.htm
 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 278-279 – finance
centrales de risques. Ces mécanismes sont censés résoudre
les problèmes liés à l’imperfection informationnelle en économie
de la microfinance (F. Bédécarrats, 2013)).
1.1.2. Les fondements liés à la théorie du droit
de propriété
La notion de droit de propriété est conséquente dans tout
système de production. Le droit de propriété est le socle même
de règlement des conflits liés à la confusion, des sources de
motivation des agents économiques et de prévention des risques.
En microfinance, l’impact des efforts visant à prévenir les risques
et le cas échéant, à les gérer au mieux, peut être négligeable
ou à la limite annihilé si les motivations des parties prenantes
ne sont pas prises en considération. La connaissance de ces
motivations passe par la définition et la catégorisation des
droits de propriété. En effet, les droits de propriété définissent,
dans uneéconomie de marché, la capacité des individus ou des
entreprises à posséder, vendre, acheter et utiliser les capitaux
et autres biens (P. De Lima, 2007). Les économistes distinguent
plusieurs types de propriété selon les droits que les hommes et
les sociétés adoptent. Dans les formes les plus pures, on peut
distinguer la propriété privée des moyens de production de la
propriété collective. Entre ces deux extrêmes, il y a les systèmes
mixtes et la propriété publique. L’institution de la propriété
privée implique la motivation à valoriser les actifs, à innover,
à prendre des risques ou à créer de nouvelles richesses. Les
analyses économiques de la propriété portent sur deux aspects
essentiels à savoir :
• la possession des droits de contrôle résiduel. Ces droits
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constituent une précaution face à la difficulté d’établir
des contrats précisant l’ensemble des droits de contrôle
possibles (incomplétude des contrats) ;
• l’allocation des bénéfices résiduels, notion qui découle du
droit de possession qui est souvent considéré comme la
marque de propriété. La principale conséquence économique
du droit de possession est qu’il permet au propriétaire de
refuser l’usage d’un actif à toute personne qui ne paiera
pas le prix qu’il demande. De cette manière, le propriétaire
peut recevoir et garder les bénéfices résiduels de l’actif
après règlement de l’ensemble des charges à payer (H.
Defoundoux-Fila, J.-R.  Dirat et C. Mayoukou, 2013).
L’intérêt de ce rappel est de nous aider à analyser le rapport
entre l’efficacité productive des institutions de microfinance et
les droits de propriété grâce au théorème de COASE. Dans cette
réflexion, il s’agit de voir en quoi le théorème de COASE traite-
t-il des problèmes d’efficacité des institutions de microfinance.
En effet, ce théorème stipule queles droits de propriété doivent
être bien définis, cessibles et protégés pour pouvoir assurer
une allocation optimale des ressources. Dans le domaine de la
microfinance, cette notion n’intervient que pour les institutions
détenant un capital propre. Quant aux institutions dont le capital
appartient aux membres ou adhérents (les coopératives d’épargne
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111
Mesures de la performance
et de crédit), elles s’illustrent en termes d’altération des droits
de propriété. En effet, dans ces institutions de microfinance, la
cessibilité des titres de propriété émis (parts sociales ou parts
d’intérêts) n’est pas assurée, alors que leur protection et leur
utilisation exclusive est atténuée (J.-M. Servet, 2006). En réalité,
il n’ya pas de cessibilité, car un adhérent ne peut pas vendre
librement son titre (part d’intérêts) sur un marché (équivalent
d’une bourse de valeur) ou s’en défaire autrement que par le
renoncement explicite auprès de l’institution de microfinance.
Très souvent, il s’agit du retrait du membre et donc de ses parts
d’intérêts de l’institution. Cette incomplétude des marchés ne
permet pas aux adhérents de gérer au mieux leurs revenus sur
une période donnée et de les placer, au prix du marché, en tenant
compte de l’incertitude des événements. En microfinance, on
peut envisager la concentration des droits de propriété comme
piste de solution à ce problème.
1.2. Les indicateurs de performance
du financement de développement
Dans une approche « gestionnaire », la performance est la capacité
à agir selon des critères d’optimalité très variés, afin d’obtenir la
production d’un résultat. C’est un résultat qui représente le niveau
de réalisation des objectifs. La performance de financement du
développement est fonction d’un certain nombre de variables
économiques et financières.
1.2.1. Les perspectives de financement des activités
socioéconomiques par la microfinance
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Le rôle de l’économie de la microfinance dans le financement des
activités socioéconomiques devient de plus en plus important au
fur à mesure qu’elle se structure. L’intermédiation financière en
RD Congo est un système qui comprend deux finances : formelle
et informelle (S. Djefal, 2007).
Les pratiques financières formelles
Les pratiques financières formelles comprennent les banques
agricoles et rurales, les systèmes bancaires mutualistes, les
caisses villageoises et les associations financières villageoises.
Les institutions de microfinance apportent aux agriculteurs indivi-
duels des services financiers adaptés à leurs besoins. L’offre
des ervices financiers adaptés aux besoins des agriculteurs
individuels est une spécificité de la microfinance par rapport aux
institutions bancaires traditionnelles. Rares sont les banques
classiques qui financent les agriculteurs individuels même
ceux impliqués dans les cultures de rentes telles que le coton,
le cacao, le café, l’arachide et le thé. Les populations rurales
demeurent parmi les plus défavorables dans la plupart des pays
en développement. En finançant ces populations, les institutions
de microfinance permettent de réduire la pauvreté et de soutenir
Dossier II
 112 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 278-279 – finance
Mesures de la performance
le développement rural agricole. Par ailleurs, les institutions de
microfinance jouent un rôle prépondérant dans le financement
des infrastructures de base notamment les programmes d’élec-
trification rurale décentralisés (A. Massiera, 2010).
Nous définissons la performance de financement du développe-
ment comme un objectif financier en vue d’atteindre un niveau
satisfaisant d’économie. La mesure financière de la perfor-
mance de financement du développement des institutions de
microfinance s’exprime par l’importance des ressources propres
permanentes, des encours de crédit et d’épargne dont dispose
l’institution. Les intérêts réalisés par les crédits octroyés à la
population permettent l’augmentation et le renouvellement des
fonds prêtables. Les institutions de microfinance procèdent
ensuite au refinancement et au placement de leurs fonds auprès
des banques commerciales et reçoivent en échange des aides
ou des subventions. Toutes ces variables sont prépondérantes
pour la détermination de la performance de financement du
développement.
Les pratiques financières informelles
Les pratiques financières informelles constituent un ensemble
de paradoxes par rapport auxpratiques financières formelles.
Se déroulant au sein d’un circuit fermé ou un réseau, elles
répondent à une logique de réciprocité, de réflexivité où domine
la relation prêt-emprunt. Nous pouvons citer à titre d’exemple
deux mécanismes essentiels financiers informels qui sont les
pratiques financières individuelles et l’intermédiation financière
associative. Dans les pratiques financières informelles indivi-
duelles, les mécanismes utilisés sont le prêt avant épargne et
épargne avant prêt. Les structures informelles sont les collecteurs
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et prêteurs privés (offreurs, usurier, banquier ambulant, hypothé-
caire, amis, voisins, parents) et les emprunteurs (demandeurs)
sont les petits agriculteurs, les entrepreneurs et les ménages.
Alors que les pratiques financières associatives sont effectuées
par les associations d’entraides mutuelles, de clubs d’épargne,
d’assurance, des mutuelles et coopératives informelles d’épargne
et de crédit communément appelées les tontines. Les emprun-
teurs sont les petits agriculteurs, entrepreneurs et ménages
pauvres membres et non membres. Le cadre sous-jacent aux
associations financières émane de la tradition respectée depuis
toujours, des liens étroits et de solidarité au sein de la famille,
du village ou de la communauté.
La relation fondamentale que l’on peut établir entre les deux
composantes de ces pratiques financières informelles (indivi-
duelle et associative) est qu’elles sont toutes les deux issues
de l’auto-organisation des pauvres dans le système financier,
notamment agricole. De ce fait, elles répondent significativement
à leurs aspirations financières et socio-économiques. Elles sont
complémentaires, car l’absence de l’une dans un milieu donné
est compensée par la présence de l’autre dans le financement
du développement notamment des activités agricoles.
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Dossier II
1.2.2. La contribution des institutions
de microfinance à la croissance économique
L’objectif est de montrer le rôle et l’impact des institutions de
microfinance dans la croissance économique en RD Congo. La
question centrale de cette réflexion est de savoir si les institu-
tions de microfinance constituent un levier de développement
économique en RD Congo. Face à cette question, nous suggérons
d’aborder deux pistes de réponse en fonction de la prise en
compte ou non de la croissance économique comme un indicateur
satisfaisant du développement économique :
• La première piste postule que le taux de croissance du Produit
intérieur Brut (PIB) est satisfaisant pour signifier le niveau
de développement économique. Nous cherchons alors à y
« relier » deux indicateurs de l’économie de la microfinance
à savoir l’encours de crédits offerts par les institutions de
microfinance en RD Congo et leurs dépôts dans les banques
commerciales. Un mécanisme d’articulation entre le secteur
de la microfinance et le secteur bancaire devient dans ce
cas une hypothèse plus que réaliste, dans la mesure où
l’économie de la microfinance aurait une évolution davantage
assimilable à une transition vers le secteur bancaire et moins
une affirmation et un développement segmenté d’un secteur
particulier. Cette piste débouche sur différents scénarios,
et le secteur bancaire est considéré comme un canal par
lequel la politique monétaire affecte directement l’économie
réelle notamment l’investissement par le truchement de la
politique du crédit et du taux d’intérêt (H. Defoundoux-Fila,
J.-R. Dirat et C. Mayoukou, 2013) ;
• La deuxième piste postule au contraire que le taux de crois-
sance du Produit Intérieur Brut (PIB) est insuffisant pour
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caractériser le niveau de développement économique dans
un pays. Cette piste suggère des indicateurs de dévelop-
pement économique sur lesquels elle propose d’établir le
lien avec l’expansion des institutions de microfinance. De
nombreux auteurs se sont investis depuis longtemps dans
les analyses théoriques et ont testé empiriquement la
liaison entre l’approfondissement financier et la croissance
économique d’une part et le lien de causalité entre ces deux
entités d’autre part dans les pays en développement (P. de
Lima, 2012). Ces travaux notamment ont démontré que
différents indicateurs de développement financier choisis
sont positivement et significativement corrélés avec des
indicateurs de croissance économique dans plusieurs pays
en développement (dont la République démocratique du
Congo) pour la période 1998-2012.
2. Méthodologie de la recherche
L’accès des pauvres aux services financiers a longtemps été
dominé par la finance informelle dans les pays en développement
car les banques classiques et les autres institutions financières
formelles les ont longtemps ignorés. Cependant, ceux-ci n’ont
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 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 278-279 – finance 113

pas été complètement laissés à leur triste sort. En effet, l’opinion
publique a toujours dénoncé les pratiques abusives des prêteurs
privés et a proposé des solutions qui sont liées au financement
agricole et à l’essor du microcrédit.
Avec l’aide des entretiens, nous allons essayer de déterminer
si les experts considèrent que les institutions de microfinance
par leurs produits et services alternatifs, s’inscrivent dans une
recherche de développement. Dans l’affirmative, les IMF contri-
buent-elles à la soutenabilité du développement en RD Congo ?
La méthode de régression linéaire
Notre panel est constitué de l’ensemble de l’intermédiation
financière en RD Congo entre 1998 et 2012. C’est un système
qui comprend les banques agricoles et rurales constituées des
banques de développement, les systèmes bancaires mutua-
listes, les caisses villageoises, les coopératives d’épargne.
Toutes ces institutions sont réglementées par le ministère de
l’Économie et des Finances. Nous avons retenu quinze variables
explicatives comme indicateurs de performance de financement
du développement susceptibles d’exercer une influence sur la
variable expliquée. Ces variables permettront de répondre à la
question fondamentale du lien existant entre la fonctionnalité
du secteur de la microfinance et la soutenabilité du processus
de développement. En vue de mettre en œuvre cette hypothèse
générale, nous avons utilisé des tests économétriques permettant
l’estimation des variables comme la régression linéaire.
En statistique inductive ou mathématique, un modèle de régres-
sion linéaire est un modèle de régression d’une variable expliquée
sur une ou plusieurs variables explicatives dans lequel on fait
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Mesures de la performance
Le modèle linéaire s’écrit de la manière suivante : y = B0 + B1
x + …….. + Bk k + U.
Y désigne la variable expliquée et le vecteur X désigne l’ensemble
des variables explicatives :
(x1, x2… ; xk). U désigne le terme d’erreur (ou perturbation).
Le modèle de régression linéaire est souvent estimé par la
méthode des moindres carrés ou par maximum de vraisem-
blance. Notre modèle de régression à estimer en fonction des
variables de financement du développement des institutions de
microfinance est déterminé de la manière suivante :
PFD = B0 + b1(EE) + b2(IBC) + b3(CAF) + b4(RP) + b5(EDE)
+ b6(NA) + b7(RH) + b8(CE) + b9(ASE) + b10(AFBC) + b11(IGIBC)
+ b12(EC) + b13(PIB) + b14(PC) + b15(CVA) + U. Les coefficients
b1, b2, b3, b4, b5, b6, b7, b8, b9, b10, b11, b12, b13, b14,
b15 représentent les estimations de variables explicatives ; (B0)
est la constante ; (U) est le terme d’erreur et PFD est la variable
expliquée de performance de financement du développement.
Nous avons estimé les coefficients en vue de déterminer la signi-
ficativité du modèle de régression linéaire. Nous avons utilisé le
logiciel Eviews pour réaliser les différents tests.
3. Résultats et analyses
Dans cette partie, nous procéderons à une analyse théma-
tique portant sur les perspectivesde financement des activités
économiques, la contribution des institutions de microfinanceà
la croissance économique et au processus de développement
en RD Congo.

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l’hypothèse que la fonction qui relie les variables explicatives à la Nous avons utilisé le modèle de régression linéaire. Un des
variable expliquée est linéaire dans ses paramètres. Formellement, avantages de cette méthode est de faire des rapprochements
on modélise la relation entre une variable aléatoire y et un vecteur entre les différentes institutions de microfinance et les variables
de variables aléatoires X. choisies afin d’obtenir des résultats fiables.

Tableau n° 1. Les indicateurs de performance de financement du développement

Les institutions de microfinance participant au processus

Variables explicatives de performance de financement du développement Sigles
de développement
• Les banques agricoles et rurales • efficience économique EE
• Les banques mutualistes • nvestissements de fonds dans les banques commerciales IBC
• Les coopératives d’épargne et de crédit • Intérêts générés par les investissements dans les banques commerciales IGIBC
• Les associations financières villageoises • capacité d’autofinancement CAF
• Les caisses villageoises • Ressources propres RP
• Encours d’épargne EDE
• Nombre d’agences NA
• Ressources humaines RH
• aide financière des banques commerciales AFBC
• Portefeuille de clientèle PC
• Création de la valeur ajoutée CVA
• Encours de crédit EC
• PIB par habitant PIBH
• Activité socio-économique ASE
• Contribution à la croissance économique CE
Source : auteur.

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 114 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 278-279 – finance

Tableau n° 2. Résultats du test de significativité des variables explicatives (1998-

Mesures de la performance

données sans trop de réserves. L’utilisation des données ainsi

2013)
recueillies a permis de valider l’hypothèse du lien existant entre
Variable Coefficient Student. Error t-Statistic Prob. la fonctionnalité du secteur de la microfinance et la soutenabilité
B 0.189775 0.094786 2.400267 0.0834 du processus de développement. Le tableau 2 montre que le
LOG(EE) 0.006175 0.005316 1.278942 0.2754 modèle est significatif au seuil de 1 %. Globalement, il y a donc
Variable Coefficient Student. t-Statistic Prob. une corrélation entre la variable expliquée et les variables expli-
Error catives choisies. La probabilité de test de Fischer est inférieure
B 0.189775 0.094786 2.400267 0.0834 à 1 %. Parmi les 15 variables du modèle et après plusieurs
LOG(IBC) 1.057684 0.003876 1.726553 0.0021 tests, le logiciel n’a retenu que 12. Les variables telles que les
LOG(CAF) 2.582365 2.043272 1.346087 0.3776 ressources propres, la capacité d’autofinancement, l’encours de
LOG(RP) 0.007056 0.006318 1.479831 0.2654 crédit influencent positivement la performance de financement
LOG(EDE) 0.033289 0.005968 0.689718 0.0394 du développement alors que les variables nombre d’agences et
LOG(NA) -0.004507 0.000238 -0.758365 0.0582 aide financière des banques commerciales influencent négati-
LOG(RH) 2.572363 2.136374 1.436087 0.2776 vement la performance de financement du développement des
LOG(CE) 2.876575 2.342463 1.643053 0.3565 institutions de microfinance.
LOG(ASE) 1.068764 0.004965 2.857462 0.0042 Par ailleurs, la masse monétaire injectée dans le circuit écono-
LOG(AFBC) -0.034062 0.010754 -0.176873 0.0832 mique par les institutions de microfinance de la RD Congo,
LOG(IGIBC) 1.006754 0.004683 2.600743 0.0941 rapportée au PIB, influe positivement sur le taux de croissance
LOG(EC) 1.067382 0.003761 1.632804 0.0000 du PIB. La RD Congo a réalisé 7 % de taux de croissance écono-
LOG(PIB) 0.037065 0.008528 1.876805 0.0183 mique en 2013.Ce qui confirme l’hypothèse principale de ce
LOG(PC) 0.004157 0.004098 0.736182 0.7065 papier selon laquelle les institutions de microfinance contribuent
LOG(CVA) 0.012586 0.006497 0.601227 0.7458 au financement du développement en R D Congo.
R-squared 1.100000 Mean dependent 9.986578
variable
Adjusted 1.100000 Student dependent 1.781538 Conclusion
R-squared variable
S.E. of 0.000698 Info criterion -11.12438 Dans cet article, nous avons analysé le rôle de la microfi-
regression
nance dans le financement du développement en RD Congo.
Sum 1.65E-07 Schwarz criterion -10.57826
squared L’argumentation est fondée sur le concept de fonctionnalité
resid qui redéfinit l’efficience des systèmes financiers au regard du
Log likeli- 165.6804 F-statistic 16874325 processus de développement économique. La fonctionnalité
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hood garantit un développement financier et économique stable. Dans
Watson stat. 2.933473 Prob F-statistic 0.100000 ce cadre, nous avons étudié le rôle des systèmes financiers
Source : résultats Eviews formel et informel dans le financement du développement en RD
Dependent variable : LOG (PFD), logarithme de déterminants des Congo, allant de leur force à leur faiblesse. Selon les discours
institutions de microfinance ; 30 tests de significativité au seuil de
5 % ont été pratiqués. des répondants, cette étude a induit la réflexion de la mise en
place de nouveaux systèmes de financement mieux adaptés
Tableau n° 3. Spécification du modèle linéaire aux conditions locales, la microfinance. Les voies et moyens
permettant aux institutions de microfinance d’atteindre l’objectif
Ramsey RESET Test au seuil de 5 %
de fonctionnalité ont été mis en exergue. Notre étude a révélé
F- statistic 0.005754 Probability 0.957406
que les institutions de microfinance contribuent au financement
Log likelihood ratio 0.019676 Probability 0.878768
des activités socio-économiques dans le cadre agricole, des
Source : résultats EViews
infrastructures de base et la création des petites entreprises.
La première étape a permis de recueillir des données sur les La contribution de la microfinance à la croissance économique a
déterminants du financement de développement sur un échan- été examinée dans la sphère de solidarité, et de la valorisation
tillon de trente institutions de microfinance. Nous avons réalisé des capacités individuelles et collectives. Ces différentes études
des entretiens auprès de 100 professionnels et universitaires. Il nous ont permis de nous rendre compte des conditions d’une
ressort du tableau 2 que les variables identifiées conditionnent efficacité des institutions de microfinance dans le financement
l’approche de financement du développement. Au terme de du développement. Les conditions de cette efficacité passent
l’analyse des résultats, il apparaît que le panel des profes- par la promotion des secteurs financiers inclusifs qui est le
sionnels et des universitaires que nous avons pu mobiliser se nouveau consensus en économie de la microfinance. À partir d’une
caractérise par un fort degré de consensus. Les évaluations des vision concertée et partagée du développement des secteurs
déterminants des IMF que nous cherchions à évaluer sont donc de microfinance, mobiliser des moyens et des ressources en
relativement homogènes et permettent d’envisager d’utiliser ces vue de disposer de secteurs financiers ouverts et accessible à

mars-juin 2016
Dossier II
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 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 278-279 – finance
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