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ERP et métiers des contrôleurs de gestion

Aziz El Atiki El Guennouni, Khalid Chafik


Dans Management des technologies organisationnelles 2019/2 (N° 9), pages 135 à 147
Éditions Les Presses des Mines
ISSN 2553-3851
ISBN 9782356715081
DOI 10.3917/mto.009.0135
© Les Presses des Mines | Téléchargé le 20/05/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.115.238.84)

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précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
Aziz EL ATIKI EL GUENNOUNI et Khalid CHAFIK
Aziz El Atiki El Guennouni est enseignant chercheur à Ecole Supérieure de Technologie de Meknès
(ESTM).

Khalid Chafik est enseignant chercheur à l’Ecole Nationale de Commerce et de Gestion de Tanger
(ENCGT). Il est Responsable de la formation Doctorale « Économie et Gestion » à l’Université
Abdelmalek Essaadi et responsable du groupe de recherche « GREMSI » à l’ENCGT.

ERP et métiers des contrôleurs de gestion


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L’impact des ERP sur le contrôle de gestion est un sujet très débattu ces dernières années. La revue
de la littérature sur cette thématique montre des perspectives différentes concernant l’évolution des
pratiques et des métiers de cette fonction dans les organisations.

En se basant sur une étude de cas comparative, les principaux résultats mettent en évidence que les
changements demeurent conditionnés par la prise en considération du degré d’intégration de l’ERP.
Toutefois, ces transformations doivent être examinées en tenant compte de la façon avec laquelle
les structures et les comportements interagissent dans un contexte donné.
Mots clés : ERP, contrôle de gestion, étude comparative.

ERP and management controller profession

The impact of ERP on management control has been a subject of considerable debate in recent
years. The review of the literature on this topic shows different perspectives regarding evolution
of practices and professions of this function in the organizations. The main results of our
research show that changes remain conditioned by the integration of the ERP. However, these
transformations must be examined taking into account the way in which structures and behaviors
interact in a given context.

Keywords: ERP, management controller, comparative study


ERP et métiers des contrôleurs de gestion

Aziz EL ATIKI EL GUENNOUNI et Khalid CHAFIK


Groupe de Recherche « GREMSI » - École nationale de commerce et de gestion (ENCG) de Tanger

L’introduction des ERP a fait du contrôle de gestion (CG) un sujet très débattu
ces dernières années : a-t-il changé ou non ? Devrait-il changer ? Le débat est
toujours d’actualité (Kholeif, 2011). L’examen de la littérature sur ce sujet nous
a permis de mettre en évidence deux perspectives. D’une part des études qui
confirment des contributions valorisantes des ERP à l’évolution du rôle des
contrôleurs de gestion vers des tâches d’analyse et/ou de conseil, d’autre part,
des études qui considèrent ces progiciels comme une menace pour leur place et
leur importance dans les organisations. Ces divergences concernent également
les autres aspects de la fonction : son organisation, ses techniques, les tâches des
contrôleurs, etc. (Chafik et El Atiki El Guennouni, 2015).

De leur côté, les ERP ne représentent pas un concept statique (Rowe, 2009) : ils ont
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subi plusieurs changements depuis leur apparition et sont en constante évolution
sous l’impulsion des innovations technologiques et des facteurs organisationnels
(Bidan, 2006). Du côté des éditeurs, plusieurs ambiguïtés persistent : ils décrivent
seulement ce que leurs logiciels peuvent faire et ne disent rien de ce qu’ils ne
peuvent pas faire (Dechow et Mouritsen, 2005).

Les ambigüités concernant l’évolution des pratiques du contrôle de gestion


dans un environnement ERP, ainsi que les difficultés conceptuelles relatives à la
définition des ERP, nous ont poussés à nous interroger sur les facteurs influençant
leurs relations dans les organisations.

Afin d’essayer d’apporter des réponses à cette question, nous allons d’abord
rappeler les principaux éléments de débats qui existent dans la littérature sur le
sujet. Ensuite, nous allons présenter le cadre méthodologique de notre recherche
basée sur une approche qualitative. Dans le dernier point, nous allons exposer les
principaux résultats et les pistes futures de cette recherche.
136 Numérique et territoires

1.  Cadre théorique et conceptuel de la recherche

Prisonnier d’une logique hiérarchique orientée vers les fonctions, le modèle


traditionnel du contrôle de gestion, conçu dans les années 1920, a rapidement
montré ses limites devant les nouvelles exigences et la complexité de l’environnement
actuel des organisations. Face aux critiques adressées à la véracité de ce modèle,
plusieurs théoriciens ont apporté des réflexions visant à moderniser sa logique et
ses outils. Parmi les rénovations les plus reconnues, on retrouve la méthode de
calcul des coûts ABC (Activity Based Costing). Le principe de cette méthode vise à
améliorer l’exploration et la répartition des charges indirectes devenues de plus en
plus importantes dans la structure des coûts des entreprises. La démarche du Target
Costing (coût cible), pratiquée surtout dans les firmes japonaises, s’inscrit également
dans cette même logique de rénovation en répandant les coûts tout au long du cycle
de vie du produit (Kaizen Costing), à travers la recherche des améliorations en
continu dans toutes les étapes, depuis la conception jusqu’à la distribution (Gautier
et Giard, 2000). Pour le suivi des réalisations, Kaplan et Norton (1992) ont conçu
le tableau de bord prospectif ou équilibré (BSC : Balanced Scorecard) visant à
rénover les mesures de la performance traditionnelle en distinguant entre quatre
axes : financier, apprentissage, processus et clients.

Cependant, malgré ces tentatives visant à moderniser les pratiques du contrôle


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de gestion dans les entreprises, les interrogations sur la pertinence de résultats
exclusivement financiers et sur la nécessité de recourir à des indicateurs qualitatifs
et opérationnels sont toujours posées.

Néanmoins, l’avenir du contrôle de gestion se base aujourd’hui essentiellement sur


la capacité des systèmes d’information et des outils de gestion à rendre contrôlables
les nouveaux modes de management et les nouvelles exigences de l’environnement
(Bouquin, 1998). Parmi ces systèmes d’information, les ERP sont présentés comme
ayant des potentialités à répondre à certains problèmes du contrôle de gestion
(Bouquin et Fiol, 2006).

Toutefois, l’appréhension de ce qu’on entend par un ERP n’est pas une tâche
facile et nécessite des précisions sur plusieurs niveaux. Selon Rowe (2009), les ERP
possèdent particulièrement des possibilités dynamiques d’évolutions en termes
de périmètre et de nature. Actuellement, ces systèmes ont changé sous l’influence
de plusieurs innovations : Intégration d’applications d’entreprise (EAI), Web,
architecture orientée services (SOA), BigData, le Cloud, Mobilité, etc. Parallèlement
à ces évolutions, leur couverture est toujours en croissance : informatique
décisionnelle (BI : Data warehouse, Data mining), traitement analytique en ligne (Online
ERP et métiers des contrôleurs de gestion 137

Analytical Processing : OLAP), gestion de la relation client (CRM), gestion du cycle de


vie des produits (PLM), gestion des connaissances (KM), réseaux sociaux.

Dans la littérature plusieurs recherches ont traité la relation entre les ERP et le
contrôle de gestion. Parmi les recherches les plus importantes, nous citons la
recherche de Granlund et Malmi (2002) et de Rom et Rohde (2006). Les premiers
montrent dans leur modèle que le contrôle de gestion et les contrôleurs de gestion
(variables dépendantes) sont affectés directement par l’implémentation de l’ERP
(variable indépendante) et indirectement par les changements des pratiques et des
processus de gestion (variables médiatrices) (Figure 1).

Figure (1) : Modèle de Granlund et Malmi, adapté de Granlund et Malmi (2002)

Pour leur part, Rom et Rohde (2006) proposent, à partir de la littérature, un cadre
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théorique très riche pour étudier l’impact des systèmes d’information intégrés
(SII) (en particulier les ERP) sur le contrôle de gestion (Figure 2).

Figure (2) : Modèle de recherche proposé par Rom et Rohde (2006). À l’aide de ces cadres théoriques
et conceptuels, nous avons mené une étude de cas dans deux entreprises marocaines disposant d’un ERP
(Cim1 et Cim2). Ce choix a pour objectif d’établir une première conclusion sur la base d’observations
issues d’une série de cas différents.
138 Numérique et territoires

2.  Méthodologie de la recherche

En nous basant sur les principes d’échantillonnage théorique, nous avons mené
une étude de cas comparative auprès de deux entreprises marocaines appartenant
au secteur de la cimenterie. Le choix de ces deux entreprises nous a permis de
stabiliser certaines variables de contingence, notamment les caractéristiques
de l’environnement externe, la nature de l’activité, la taille, la technologie de
production, la stabilité du contexte social, la taille du service contrôle de gestion,
la couverture opérationnelle des principaux domaines fonctionnels, etc.

En outre, le choix de ces deux entreprises émane d’une réflexion d’échantillonnage


par contraste dont le but est d’ouvrir les voies à la comparaison (Pires, 1997). En
effet, les systèmes d’information de ces deux entreprises affichent des différences
extrêmes : notre objectif est donc d’étudier deux cas semblables, mais la finalité
théorique est le contraste (Pires, 1997).
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Figure 3 : L’architecture opérationnelle de la recherche

Pour réaliser notre recherche, nous réalisé une période d’observation (de quatre
semaines) au niveau du service contrôle de gestion dans une entreprise (Cim1).
Cette période d’observation nous a permis de nous faire une idée du contexte,
des acteurs et des configurations locales. Par la suite, nous avons planifié une
vague de visites (pendant une année) pour effectuer des interviews, centrées sur
le thème de l’impact de l’ERP, avec le responsable administratif et financier et son
contrôleur de gestion. L’approfondissement des investigations au sein de ce cas
ERP et métiers des contrôleurs de gestion 139

a été motivé par les recommandations de Bogdan et Biklen (2007). Ces auteurs
préconisent aux chercheurs, dans le cas d’une étude multiple, de focaliser leur
travail sur un seul site. Après avoir terminé le premier cas, le chercheur verra que
les cas ultérieurs sont plus faciles à aborder : le premier cas sert de référence pour
définir les paramètres des autres (Bogdan et Biklen, 2007, p.70). Ainsi, dans une
seconde étape, nous avons effectué une série de visites auprès d’une entreprise
concurrente (Cim2) afin de comparer ses pratiques avec celles de (Cim1).

3.  Résultats et perspectives de la recherche

Afin de préparer le terrain pour la discussion des résultats, nous allons présenter
d’abord le contexte général des deux cas, les caractéristiques de leurs systèmes
d’information et la place de la fonction contrôle de gestion dans chaque
entreprise. Ensuite, nous allons procéder à une comparaison pour identifier les
ressemblances et les différences.

L’entreprise Cim1

Cim1 est une usine de ciment qui a été construite en 1953. C’est une SA qui
compte environ 142 employés. Les ventes annuelles sont d’environ 973 000 000
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DH. La production annuelle s’élève à 1 156 000 Tonnes. L’entreprise est dans la
phase de maturité et le mode de production est en processus continu.

Le marché de l’entreprise est très dépendant du secteur de l’immobilier et des


grands projets qui concernent les infrastructures du pays et de la région. La
concurrence par les prix est très limitée vu l’existence d’une forme d’alliance
stratégique entre les concurrents et une élasticité prix très faible à cause des
coûts du transport. Concernant la qualité des produits : c’est un secteur est très
règlementé. L’innovation des produits est marginale et ne concerne que le béton.
Les achats des matières premières et combustibles sont centralisés au niveau du
siège qui organise des appels d’offres pour bénéficier des avantages en matière
de prix. Dans sa politique énergétique et environnementale, l’entreprise favorise
l’utilisation des énergies vertes et alternatives (éoliennes, pneus déchiquetés…).

L’entreprise dispose d’une solution Oracle JDE qui a été mise en place depuis
2004. C’est la même marque qui se retrouve chez toutes les filiales du groupe.
Les caractéristiques actuelles du SI de l’entreprise sont présentées dans le tableau
suivant (Tableau 1) :
140 Numérique et territoires

Tableau 1 : Les principales caractéristiques du SI de Cim1

Module Même éditeur ? Remarque


Achat Oui
Comptabilité Oui
Production/Exploitation Non Suivi réel dans un autre
logiciel, non intégré avec JDE
Maintenance (GMAO) Non Non intégré avec JDE
Le processus qualité Non Non intégré avec JDE
Ventes Oui Fichier Excel saisi sur JDE
RH Non HR access et Gestor
(workflow)
Logistique Non
Contrôle de gestion NA Non appliqué
Business intelligence NA Non appliqué au niveau de
l’usine
Stockage, archivage, inventaire Non Une autre solution

L’administration de l’ERP est assurée au niveau du groupe. Le département


SI développe du spécifique pour l’entreprise à travers le service des cabinets
externes. Par rapport à l’ancien système, la mise en place de JDE dans l’entreprise
a réduit les paperasses et a permis d’éviter certaines redondances.
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Comme nous pouvons le constater sur l’organigramme ci-dessous (Figure 4),
le service contrôle de gestion est rattaché hiérarchiquement au responsable
administratif et financier (RAF) de l’usine. Les dirigeants de l’entreprise sont
sensibilisés aux activités et à l’importance du contrôle de gestion. Ils soutiennent
les activités des contrôleurs au niveau opérationnel et stratégique : la seule
information qui compte est celle du contrôle de gestion.

Figure 4 : L’organigramme de l’entreprise Cim 1


ERP et métiers des contrôleurs de gestion 141

Le contrôleur de gestion a 15 ans d’expérience dans l’entreprise et 8 ans dans le poste


actuel. Elle était responsable de trésorerie avant de postuler pour le poste actuel
après le départ d’un ancien contrôleur de gestion. Le responsable administratif
financier (RAF) a deux ans d’expérience dans le poste actuel et il a déjà travaillé au
niveau du siège en tant que contrôleur de gestion pendant quatre ans.

Pendant longtemps, la fonction contrôle de gestion était mal perçue à cause


du comportement de l’ancien RAF. Le RAF actuel et le Contrôleur de Gestion
(CrG) déploient un effort pour promouvoir la culture financière aux niveaux des
responsables de production. L’objectif est d’arriver à ce que ces derniers puissent
s’approprier l’optimisation de leur coût.

Le degré de méfiance de la fonction est assez faible. Le RAF et la direction


essayent de faire du contrôle de gestion une fonction de conseil. Toutefois, le CrG
intervient trimestriellement dans le cadre de la SOA (Sarbane-Oxly Acts) en tant
qu’auditeur interne pour réaliser quelques tests (trésorerie, achat, magasin, GL,
investissement, etc.). Cette dérive nuit à l’image de la fonction dans l’entreprise.

L’entreprise Cim2

L’entreprise Cim2 a été créée en 1991. C’est une SA qui compte environ 115
employés. Les ventes annuelles sont d’environ 1 400 000 000 DH. La production
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annuelle s’élève à 1 000 000 Tonnes. Pour certains projets (par exemple les ports,
les ponts, etc.), la qualité du ciment demandée l’oblige à modifier tout le processus
de fabrication. L’environnement externe de Cim2 est identique à Cim1.

L’entreprise dispose d’une solution SAP EBM qui a été mise en place
progressivement depuis 2004. C’est la même marque qui se retrouve chez toutes les
filiales du groupe. La dernière mise à jour a été réalisée en 2014. L’automatisation
du processus de production a été réalisée en 2012 en partenariat avec ABB qui
a mis en place des capteurs qui alimentent SAP avec des indicateurs techniques
en temps réel. Le processus d’automatisation concerne tous les domaines
fonctionnels de l’entreprise.

Les caractéristiques actuelles du SI de l’entreprise sont présentées dans le tableau


suivant (Tableau 2) :
142 Numérique et territoires

Tableau 2 : Les principales caractéristiques du SI de Cim

Module Même éditeur ? Remarque


Achat Oui
Comptabilité Oui
Production/Exploitation Oui/ABB Automation avec SAP
en 2012
Ventes Oui
Maintenance (GMAO) Oui/ABB
Le processus qualité Oui/ABB
RH Oui
Logistique Oui
Contrôle de gestion Oui
BI Oui Business objects (BO)
Stockage, archivage, inventaire Oui

L’administration de l’ERP est assurée au niveau de la France. Le service IT envoie


au contrôleur de gestion le manuel d’utilisateur avec la possibilité d’entrer en
contact, en cas de problème, avec des consultants.

Le CrG Cim2 est rattaché hiérarchiquement au directeur ddministratif et financier


(DAF) au niveau du siège au Maroc et opérationnellement au directeur de l’usine
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(Figure 5).

Figure 5 : L’organigramme de l’entreprise Cim 1


ERP et métiers des contrôleurs de gestion 143

Le contrôle de gestion est une fonction stratégique dans l’entreprise. Les dirigeants
de l’entreprise sont sensibilisés aux activités et à l’importance du contrôle de
gestion. Ils soutiennent inconditionnellement les activités du contrôleur au niveau
opérationnel et stratégique.

Le CrG communique avec le DAF par écrit et par téléphone. Ce dernier dispose
d’une expérience dans un autre secteur d’activité. Au niveau du siège, c’est le
contrôleur de gestion corporate qui est chargé d’analyser la performance de
l’ensemble des usines du groupe. Le contrôleur de gestion de Cim2 a actuellement
huit ans d’expérience dans le poste. Il a passé 18 mois de formation avec la société
en tant que stagiaire. Pendant cette période, il a fait plusieurs formations au Maroc
et à l’étranger. Il maîtrise Excel et il a un bon niveau en informatique (il a des
connaissances sur la technologie des bases de données et le langage SQL). Il a
des compétences en programmation avec le JAVA et le WB ce qui lui a permis de
comprendre facilement la méthode du paramétrage de SAP (surtout les Business
Objects). Il dispose également d’une forte formation financière : il vient d’avoir
son diplôme d’expertise comptable.

« Au début de ma carrière, j’éprouvais beaucoup de difficultés pour maîtriser


le système. Je rentrais du travail à 2 heures du matin et je retournais à
8 heures pour pouvoir s’adapter au système. Maintenant, et avec toute mon
expérience, je n’arrive pas à exploiter toutes les fonctionnalités du système ».
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A déclaré le CrG (Cim2).

Après cette brève description de nos deux entreprises et de la place de la fonction


contrôle de gestion dans celles-ci, il est temps maintenant de faire une analyse
thématique transversale (cross-case analysis) (Creswell, 2007).

Discussion des résultats

En stabilisant plusieurs facteurs de contingence entre deux entreprises Cim1 et


Cim2, nous avons retenu une proposition qui lie le changement des pratiques du
contrôle de gestion au degré d’intégration de l’ERP. Cette variable a été évoquée
d’une façon implicite dans l’étude de Granlund et Malmi (2002) qui ont étudié
deux entreprises qui disposent uniquement des modules de comptabilité. Les
auteurs s’interrogent si ces deux cas peuvent vraiment être considérés comme des
entreprises ayant implémenté un ERP ! Cette interrogation a émergé également
dans notre recherche en comparant le degré d’intégration faible de Cim1 et élevé de
Cim2. Dans cette recherche, nous présentons plusieurs éléments organisationnels
et comportementaux qui nous ont amenés à questionner l’importance de cette
variable en tant que source de différence. Dans un souci de concision, nous allons
144 Numérique et territoires

présenter les comparaisons entre nos deux cas sous forme de tableaux (Tableaux
3, 4 et 5).

Le premier tableau (Tableau 3), décrit les principales différences entre Cim1 et
Cim2 en matière de techniques utilisées.
Tableau 3 : Techniques du CG chez Cim1 et Cim2

Cim1 Cim2
Calcul des coûts Coût complet ABC
Sur Excel (révision Automatisée : Budget
Gestion budgétaire
trimestrielle) glissant
Tableaux de bord Sur Excel Automatisée
Reporting Sur Excel Automatisée

À partir de ce tableau, nous remarquons que Cim2 pratique la méthode ABC,


alors que Cim1 est toujours dans la vision traditionnelle du calcul des coûts.
La gestion budgétaire est également automatisée et plus détaillée dans le cas de
Cim2 ; de même, ses tableaux de bord sont automatisés, alors que le CrG Cim1
utilise Excel. Concernant le reporting, le CrG Cim1 utilise Excel pendant que
celui de Cim2 est automatisé.

Les différences entre les systèmes d’informations et les modes organisationnels


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en place mettent en évidence également des particularités au niveau des profils
des contrôleurs de gestion comme le montre le tableau suivant (Tableau 4).
Tableau 4 : Aspects organisationnels et profils des CsG de Cim1 et Cim2

Cim1 Cim2
Niveau d’encadrement Elevé Faible
Formation RAF (Usine) DAF (Siège)
Tâches Gardien de scores Business partner
Profil Licence gestion Expertise comptable

Dans le cas de Cim1, la fonction contrôle de gestion est assurée par le CrG et
supervisée directement par le RAF. Par conséquent, les actions et les propositions
du contrôleur de gestion sont fortement liées à la volonté du RAF. Ce dernier
profite de son expérience au niveau du siège pour encadrer le travail du contrôleur
de gestion et l’orienter vers les choses les plus importantes et stratégiques pour
l’entreprise ; le RAF passe la moitié de la semaine dans le siège avec la direction
générale du groupe et il est membre du comité de direction de Cim1. Par contre,
l’encadrement du CrG Cim2 par son DAF se place sur un autre niveau d’analyse.
Le DAF de Cim2 possède une expérience au niveau d’une autre activité et
ERP et métiers des contrôleurs de gestion 145

maîtrise moins le niveau opérationnel du métier. Ce niveau faible d’encadrement


est compensé par le niveau élevé de standardisation des livrables et du reporting
entre les deux responsables.

Les profils et les compétences des CsG sont également différents. L’environnement
du travail du contrôleur de gestion Cim2 nécessite la maîtrise de l’informatique
pour les besoins de paramétrage des business object (BO). Par contre, la maîtrise
d’Excel est la seule compétence informatique requise pour le contrôleur Cim1. La
pression des reporting et le besoin d’analyse des chiffres poussent les deux CsG
à adopter plusieurs stratégies. Nous avons catégorisé ces comportements en trois
types : offensifs, stimulants, et pacifiques (Tableau 5) :
Tableau 5 : Stratégies comportementales des contrôleurs de gestion

Cim1 Cim2
Stratégie Pacifiques × ×
comportementales Stimulantes × ×
Offensive ×

À partir du tableau ci-dessus, nous remarquons que le CrG Cim2 utilise


essentiellement les stratégies stimulantes et pacifiques, alors que le CrG Cim1 a
parfois recours à des stratégies offensives pour obtenir l’information. Toutefois,
il faut signaler que le comportement stimulant nécessite une maîtrise assez
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importante de l’activité pour pouvoir challenger les opérationnels ; c’est un
comportement intermédiaire puisqu’il y a utilisation du pouvoir de la maîtrise de
l’activité (offensif) et en même temps basé sur la négociation avec les opérationnels
(pacifique).

D’une façon générale, les résultats de cette recherche mettent en évidence que
les pratiques du contrôle de gestion demeurent conditionnées par la prise en
considération du degré d’intégration de l’ERP. Toutefois, les transformations
du métier des contrôleurs de gestion doivent être examinées en tenant compte
de la façon avec laquelle les structures et les comportements interagissent dans
un contexte donné. Les facteurs de contingence se retrouvent à l’intérieur des
processus observés : l’interaction des conditions et des éléments du contexte
détermine les stratégies et les comportements adoptés par les contrôleurs de
gestion. Ces stratégies conduisent l’évolution de leur métier vers de nouvelles
perspectives : analyste, business partner ou à l’obstination de leur rôle traditionnel
de gardiens de scores (Figure 6).
146 Numérique et territoires

Figure 6 : Degré d’intégration de l’ERP et métiers des contrôleurs de gestion

Conclusion

Le contexte théorique des recherches portant sur l’impact des ERP sur le contrôle
de gestion est un sujet de controverse dont les grands traits se caractérisent par
l’existence de deux visions antagonistes : l’une valorisante, l’autre dévalorisante.

Après avoir achevé une recherche comparative entre deux environnements


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ERP différents, plusieurs idées et conclusions nous ont conduits à établir un
protocole de collecte de données (guide d’entretien semi-directif). Ce guide a
été soumis à l’évaluation de la part des contrôleurs de gestion de Cim2 et de
Cim1 et du responsable administratif et financier de Cim1. Les discussions de ce
protocole avec les responsables avaient comme intérêt d’éviter d’inclure dans le
questionnement des éléments qui ne soient pas tirés du terrain de la recherche et
qui n’auraient alors que très peu de chances d’être significatifs (Aktouf, 1987). En
nous basant sur ce guide, nous avons mené une étude de cas plus élargie auprès
des entreprises qui manifestent des variations concernant les caractéristiques de
l’intégration de l’ERP. Les résultats de cette recherche seront prochainement
publiés.

Bibliographie
Aktouf, O. (1987), Méthodologie des sciences sociales et approche qualitative des organisations.
Presses de l’Université du Québec, Montréal.

Bidan, M. (2006), Intégration du Système d’Information de Gestion, e-thèque.


ERP et métiers des contrôleurs de gestion 147

Bogdan, R. C., et Biklen, S. K. (2007), Chapter 1, in Qualitative research for education: An


Introduction to theory and methods, 1-53, Allen and Bacon, Boston.

Bouquin, H. (1998), Les fondements du contrôle de gestion, PUF, Paris.

Bouquin, H. et Fiol, M. (2006), Contrôle de gestion : repères perdus, espaces à retrouver,


communication au congrès AFC, Poitiers.

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