RCG 030 0015

La gestion comptable des Institutions Financières
Islamiques (IFI) dans l’espace UEMOA : réalités et

perspectives
Han-Madou Ilboudo
Dans Revue Congolaise de Gestion 2020/2 (Numéro 30), pages 15 à 45
Éditions ESGAE
ISSN 1729-0228
ISBN 9791097468200
DOI 10.3917/rcg.030.0015
© ESGAE | Téléchargé le 18/03/2024 sur www.cairn.info (IP: 102.216.27.9)
Article disponible en ligne à l’adresse

https://www.cairn.info/revue-congolaise-de-gestion-2020-2-page-15.htm
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La gestion comptable des Institutions
Financières Islamiques (IFI) dans
l’espace UEMOA : réalités et
perspectives.
Résumé Han-Madou
Cet article a pour objectif ILBOUDO*
d’analyser la gestion comptable
des institutions financières
islamiques dans l’espace
UEMOA. L’analyse
documentaire et les entretiens
semi-directifs ont été utilisés pour
arriver à des résultats et
recommandations. Il ressort
l’absence d’un cadre
règlementaire officiel
actuellement et dans un tel

contexte c’est le plan comptable
bancaire classique qui est utilisé
par les IFI, tout en procédant à
des ajustements. Aussi, certaines *
institutions font recours à l’usage Université Joseph
de logiciels intégrés de finance KI-ZERBO
islamique importés d’autres Burkina Faso
zones. La finalisation du ilboudo1@yahoo.fr
Revue congolaise de gestion, N° 30, Juil. – Déc. 2020 15

La gestion comptable des institutions financières islamiques (IFI) dans
l’espace UEMOA : réalités et perspectives
processus d’adoption des textes relatifs à l’activité de
finance islamique y compris le cadre comptable dans
l’UEMOA est une nécessité pour le développement de
l’industrie de la finance islamique dans la zone. À cet
effet, une présentation des organes de normalisation des
comptabilités des IFI a été présentée. Une analyse
comparative entre les normes comptables classiques et
celles de l’AAOIFI a été faite pour orienter les
perspectives d’évolution du Plan Comptable Bancaire de
la zone UEMOA avec une prise en compte des spécificités
des IFI.
Mot-clés : Gestion comptable, finance islamique,

UEMOA, plan comptable, ajustements.
The Accounting Management of Islamic

Financial Institutions in the West African
Economic and Monetary Union Space.
Abstract
The purpose of this article is to analyze the
accounting management of islamic financial institutions in
the WAEMU (West African Economic and Monetary
Union) space. Documentary analysis and semi-structured
interviews were used to arrive at results and

recommendations. It appears that there is currently no
official regulatory framework, in this context this is the
classic banking chart of accounts that is used by the IFIs
while making adjustments. Some institutions also use the
use of integrated Islamic finance software imported from
other areas. The finalization of the process of adoption of
texts relating to the Islamic finance activity including the
Han-Madou Ilboudo
accounting framework in the WAEMU is a necessity for

the development of the Islamic finance industry in the
area. To this end, a presentation of the IFI accounting
standardization bodies was presented. A comparative
analysis between conventional accounting standards and
those of AAOIFI was made to orient the prospects for the
evolution of the Bank Accounting Plan for the WAEMU
area, taking into account the specificities of the IFIs.
Keywords : Accounting Management, Islamic Finance,

WAEMU, Chart of Accounts, Adjustments.
--------------
1. Introduction
L a finance islamique occupe de plus en plus une place

dans les pays de l’espace UEMOA1. Les 4 et 5
décembre 2019, s’est tenue à Niamey, la capitale
nigérienne le forum de la finance islamique de l’espace
UEMOA, à l’initiative de la Fédération des Associations
Professionnelles de Banques et Établissements Financiers
(F-APBEF) de l’espace, avec la participation de la Banque
Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).
Même si la part de la zone reste encore marginale

dans l’industrie de la finance islamique mondiale, un réel
engouement des populations est constaté, ce qui amène les
autorités de différents pays mais aussi de la banque
1
Union Economique et Monétaire Ouest Africaine, ensemble
économique composé de huit pays d’Afrique de l’Ouest : Bénin,
Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal,
Togo.
centrale à s’intéresser au système. Il faut, toutefois,
déplorer la lenteur avec laquelle l’aménagement du cadre
règlementaire pour la pratique de cette finance, se fait au
niveau de l’autorité centrale.
En effet, on note que c’est en 2012 qu’un protocole
d’accord a été signé entre la Banque Islamique de
Développement (BID) et la BCEAO pour l’élaboration
d’un cadre règlementaire spécifique aux institutions qui
désirent réaliser des opérations de finances islamiques
dans l’espace. Six années se sont passées avant qu’on ne
voit les premiers résultats de cet accord, à travers quatre
instructions portant sur la pratique de la finance islamique
dans l’espace UEMOA. Il s’agit de :
- l’instruction n°002-03-2018 relative aux
dispositions particulières applicables aux établissements
de crédit exerçant une activité de finance islamique ;
dispositions particulières applicables aux systèmes
financiers décentralisés exerçant une activité de finance
islamique ;
caractéristiques techniques des opérations de finance
islamique exercées par les établissements de crédit de
l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) ;
- l’instruction n°005-05-2018

relative aux
islamique exercées par des systèmes financiers
décentralisés de l’UMOA.
La gestion de la banque comme toute entreprise
nécessite la tenue d’une bonne comptabilité. La
comptabilité étant ce système organisé pour la collecte et
le traitement de données chiffrées relatives aux activités

Han-Madou Ilboudo
d’une entité dans le but de répondre aux besoins

d’informations financières par la production d’états
financiers et d’autres documents d’informations
comptables et financières. La règlementation comptable
devient une nécessité pour arriver à des informations
comptables et financières fiables pour l’entité et ses
partenaires, c’est ainsi qu’au niveau des banques, la
BCEAO dispose d’un Plan Comptable Bancaire (PCB). En
fonction du contexte économique, ce plan comptable
bancaire a connu plusieurs évolutions et dont le dernier en
date est celui par décision n° 357-11-2016 instituant le
plan comptable bancaire révisé de l’UMOA2. Aussi, on
note que la spécificité des contrats de la finance islamique
impose une spécificité à leur traitement comptable
(Ilboudo, 2019b).
Comme on le voit, le PCB de la BCEAO date de
2016 et les instructions relatives à la finance islamique
dans l’espace UEMOA de 2018, il y a lieu alors de se
poser la question suivante : le PCB en vigueur dans
l’UEMOA, est-il applicable pour les institutions de
finance islamique ? De façon spécifique :
- le PCB de la banque tient-il compte des spécificités
des opérations de finance islamique ?
- les instructions de la BCEAO sur la finance

islamique, couvrent-elles la gestion comptable des IFI ?
- comment les IFI dans l’espace UEMOA tiennent-
elles leur comptabilité actuellement ?
- des perspectives d’évolution du PCB sont-elles
prévues avec l’avènement de la finance islamique ?
2
Union Monétaire Ouest Africaine.
Notre objectif avec la présente étude est de faire
l’état des lieux de la gestion comptable des IFI dans
l’espace UEMOA. De façon spécifique, il s’agit pour
nous :
- d’étudier le PCB en vigueur pour voir s’il est
applicable pour les IFI ;
- d’analyser les instructions de la BCEAO sur la
finance islamique, pour voir la possibilité ou pas de s’y
référer pour la gestion comptable des IFI ;
- de faire l’état des lieux de la gestion comptable des
IFI en place dans l’espace UEMOA ;
- d’étudier les perspectives pour une gestion
comptable optimale des IFI dans l’espace UEMOA.
L’étude est structurée en trois sections
conformément au plan suivant :
- présentation du cadre institutionnel et de la
méthodologie de l’étude ;
- présentation et discussion des résultats de l’étude ;
- formulation de recommandations.
2. Présentation du cadre institutionnel et

méthodologie de l’étude
Cette première section est consacrée à la

présentation du cadre institutionnel de l’étude à travers le
point des Institutions Financières Islamiques (IFI) et leur
modèle de gouvernance dans un premier temps et à la
présentation de l’approche méthodologique dans un
second temps.

Han-Madou Ilboudo
2.1. Les IFI et leur modèle de gouvernance dans

l’espace UEMOA
Créée le 10 janvier 1994 à Dakar, l’UEMOA a pour
objectif principal, l’instauration d’un espace économique
harmonisé et intégré, au sein duquel il y a une liberté de
circulation des personnes, des biens et des capitaux. Huit
pays composent l’espace UEMOA, il s’agit du Bénin, du
Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée-Bissau, du
Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo. Ces pays sont liés
par l’usage d’une monnaie unique, le franc CFA et une
même banque centrale, la BCEAO. Cette banque gère la
monnaie unique en collaboration avec la France (Ex
colonisatrice) ; elle se charge également de la
règlementation bancaire dans tous les pays membres de
l’espace. L’UEMOA couvre une superficie de 3 506 126
km2 avec une population de 120,2 millions d’habitants, le
taux de croissance de PIB à prix constant, a été de 6,7 %
en 2017 (INS/C UEMOA : RSM juin 2018)
La finance islamique a rejoint la zone UEMOA dans
les années 1980 et une collaboration a débuté entre le
groupe de la Banque Islamique de Développement (BID)
et les pays de l’espace. Ainsi, ont été créées depuis cette
époque la Banque Islamique du Sénégal (BIS) en 1982 et
la Banque Islamique du Niger (BIN) en 1983. Il faut noter
que ces créations ont été faites sans l’existence d’un cadre
règlementaire dédié aux banques islamiques. Ainsi, ces

deux banques ont été créées selon le cadre des banques
conventionnelles et exploitent des exceptions qui existent
dans ce cadre pour offrir des produits de la finance
islamique à la clientèle qui le désirent mais, sans un vrai
succès. Bien que conservant l’appellation de banques
islamiques, elles ont, jusqu’à une période récente,

fonctionner comme des banques conventionnelles au
niveau de leurs offres. Le tournant pour ces deux banques
islamiques de l’espace à revenir vers la finance islamique,
est intervenu avec la participation de la BID à travers la
création du groupe Tamweel Africa Holding en 2009. En
effet, l’acquisition, en 2009, des parts de Dar al-Maal al-
Islami dans les banques islamiques de Guinée, du Niger et
du Sénégal et l’ouverture d’une nouvelle banque islamique
en Mauritanie la même année, a abouti à la création du
groupe Tamweel Africa Holding par la Société Islamique
pour le Développement du secteur privé (SID), une
organisation multilatérale affiliée au groupe de la BID. Le
groupe a en projet la création de sa cinquième banque
islamique au Burkina Faso, et a pour mission de
promouvoir la finance islamique en Afrique, en créant des
institutions financières islamiques modernes et
dynamiques qui contribuent au développement
économique des pays d’accueil à travers une offre de
services financiers conformes aux principes de la finance
islamique.
En dehors des banques islamiques du groupe
Tamweel, d’autres initiatives ont existé en finance
islamique, depuis longtemps dans l’espace UEMOA. On
peut citer en exemple, au Burkina Faso, la caisse

BAITOUL MAAL créée en 1999 où les responsables ont
affirmé à sa création que son fonctionnement sera basé sur
la charia (cf. Statuts), en mentionnant notamment la
prohibition du prêt à intérêt. Il en est de même pour la
caisse LIGDI BAORE créée en 2009 avec pour objectif
principal de promouvoir la finance islamique au Burkina
Faso en fournissant des services financiers adaptés aux
besoins des populations conformément aux prescriptions

Han-Madou Ilboudo
de l’Islam. Des institutions similaires évoluant dans le

domaine de la microfinance avec pour ambition de
proposer des produits de la finance islamique, ont été
créées dans d’autres pays de l’espace, notamment au
Sénégal, au Mali, au Niger et en Côte d’Ivoire.
C’est en 2015 qu’on assiste à la création de fenêtres
islamiques au niveau des banques conventionnelles avec le
groupe Coris Holding à travers ses agences Coris Bakara
au Burkina Faso, au Sénégal, au Mali et au Bénin.
On retient deux faits majeurs qui caractérisent
l’ensemble de ces institutions financières islamiques
créées dans l’espace UEMOA :
- leur création est intervenue avant l’existence de
textes règlementaires de l’activité de banque islamique et
de microfinance islamique au niveau de la Banque
Centrale ;
- la non-effectivité des produits de finance islamique
au niveau de ces institutions qui ont été plus des
institutions de finance islamique de nom que de pratique ;
en dehors des comptes courants proposés à la clientèle, la
Mourabaha reste le seul produit de finance islamique
disponible dans ces institutions (Ilboudo, 2019a) et le
respect des conditions de validité restent un problème pour
l’ensemble de ces institutions.

La seconde phase de développement de la finance
islamique dans l’espace est l’adoption de textes
règlementaires des activités de finance islamique par la
BCEAO à compter de l’année 2018. En effet, un protocole
d’accord signé entre la BCEAO et la BID en 2012, a
abouti à l’adoption de quatre instructions sur la finance
islamique, les deux premières en mars 2018 et les deux
dernières en mai 2018. Les premières institutions

financières islamiques à fonctionner sur la base de ces
textes règlementaires viennent d’obtenir leur autorisation
d’exercice de l’activité de finance islamique, notamment
au niveau des systèmes financiers décentralisés (SFD),
c’est le cas par exemple de Tadaamoun Finance SA au
Niger qui a obtenu son autorisation en décembre 2019.
Le développement de la finance islamique dans
l’espace UEMOA, est appuyé par des structures
associatives créées à cet effet dans les différents pays. Il
s’agit notamment de :
- l’Union d’Action pour la Finance Islamique au
Burkina Faso (UAFI-BF) ;
- l’Association Nigérienne pour la Promotion de la
Finance Islamique (ANEFI) ;
- l’Association Béninoise pour le Développement de
la Finance islamique (ABEFI) ;
- l’Association pour la Promotion de la Finance
Islamique au Sénégal (APFIS) ;
- le Comité National de la Finance Islamique en
Côte d’Ivoire (CNFI-CI).
La finance islamique dans l’espace UEMOA, c’est
aussi l’émission de SUKUK souverains par un certain
nombre d’États comme résumés dans le tableau suivant :

Tableau 1. Émission de SUKUK dans la zone UEMOA.
Code
Libellé Montant Rémunération Maturité
obligation
SUKUK État de
150 Milliards
SUKCI.S1 Côte d’Ivoire 5,75% 5 ans
FCFA
5,75% 2015-2020
SUKUK État de
150 Milliards
SUKCI.S2 Côte d’Ivoire 5,75% 7 ans
FCFA
5,75% 2016-2023

Han-Madou Ilboudo
SUKUK État du
100 Milliards
SUKSN.S1 Sénégal 6,25% 6,25% 4 ans
FCFA
2014-2018
SUKUK État du
150 Milliards
SUKSN.S2 Sénégal 6% 6% 10 ans
FCFA
2016-2026
SUKUK État du
150 Milliards
SUKTG.S1 Togo 6,5% 2016- 6,5% 10 ans
FCFA
2026
Source : construit par nous même
Le tableau suivant résume les institutions de finance

islamique dans la zone UEMOA par pays.
Tableau 2. Institutions financières islamiques dans la

zone UEMOA.
Dénomination Année de création

BENIN
Coris Bank Baraka (fenêtre) 2018
BURKINA FASO
Caisse Baitoul Maal (CBM) 1999
Caisse Ligdi Baoré (CLB) 2009
COTE D’IVOIRE
Raouda Finance 2009
Al Barakat 2009
Fondation Zakat &Waqf 2010
Coris Bank Baraka 2018

MALI
Caisse Islamique de Développement (CID) 2015
NIGER
Banque Islamique du Niger 1983
Fenêtre islamique de ASUSU 2014
Coopec KOKARI 2014
SENEGAL
Mutuelle d’Epargne et de Crédit Islamique du Sénégal 2004
PAMECAS-DEFI 2010

Banque Islamique du Sénégal (BIS) 1982
TOGO
Mutuelle d’Epargne et de Crédit Islamique du Togo
2012
(MECIT)
Source : Construit par nous même
2.2. Méthodologie de l’étude

Pour réaliser la présente étude, nous avons dans une
approche qualitative, utilisé la technique d’entretiens
semi-directifs pour collecter des données auprès de
plusieurs groupes d’acteurs de la finance islamique dans
l’espace UEMOA. Il s’agit notamment des consultants et
experts en finance islamique qui appuient les différentes
institutions dans le développement des produits financiers
islamiques, des responsables des institutions financières
islamiques et des cadres de la BCEAO chargé de
règlementer la pratique de la finance islamique en
collaboration avec différents partenaires.
Nous avons ainsi par choix raisonné constitué les
trois échantillons suivants :
- cinq consultants et experts en finance islamique
choisis au Burkina Faso, au Bénin, au Niger et au
Sénégal ;
- cinq professionnels des IFI choisis au Burkina

Faso, au Niger et au Sénégal,
- trois cadres de la BCEAO choisis au Burkina Faso
et au Sénégal.
Nous avons, avec les individus des échantillons,
procédé à des échanges, en présentiel pour certains et par
des mails pour d’autres, sur la base de guides d’entretien.
Nous avons rencontré des difficultés pour obtenir les
informations voulues dans les échanges par mail avec
certaines personnes, notamment au niveau des IFI et de la
Han-Madou Ilboudo
BCEAO. Néanmoins, les quelques informations obtenues

vont dans le même sens, ce qui permet leur généralisation
et de donner une vue globale de la situation dans les
résultats qui suivent.
3. Présentation et analyse des résultats

Dans cette section, nous présentons les résultats de
notre étude à travers une analyse respective du plan
comptable bancaire en vigueur pour les institutions
bancaires de l’espace UEMOA, les instructions
spécifiques existantes actuellement pour les institutions de
finance islamique, la pratique comptable actuelle des IFI
de l’espace UEMOA et les perspectives d’évolution du
plan comptable bancaire en cours.
3.1. Le Plan comptable bancaire

Notre étude qui consiste à voir s’il existe un
référentiel comptable adapté pour la gestion comptable des
IFI de l’espace UEMOA, a consisté, dans un premier
temps, à faire un examen du plan comptable bancaire en
vigueur pour voir s’il peut être utilisé par les IFI en son
état actuel. À cet effet, il y a lieu de préciser qu’au cours
des dernières années la BCEAO a procédé à une révision

du plan comptable bancaire pour les banques et
établissements financiers de l’Union.
Ainsi, le PCB en vigueur intervenu avec la décision
n°357-11-2016 instituant le plan comptable bancaire
révisé de l’UMOA (PCB). Il est entré en vigueur le 1er
janvier 2018 en remplacement du plan comptable qui était
en vigueur depuis 1996 dans l’espace.

L’article premier de ce nouveau plan comptable
bancaire indique ceci : « Le présent plan comptable
bancaire révisé de l’UMOA (PCB) s’applique aux banques
et établissements financiers à caractère bancaire tels que
définis par la loi portant règlementation bancaire dans
l’UMOA, ci-après dénommés les établissements
assujettis ». Notre analyse de son contenu fait ressortir les
grands points suivants organisés en deux livres et en sept
annexes.
Livre premier : Cadre conceptuel du plan comptable
bancaire révisé de l’UMOA comportant :
- Les dispositions générales ;
- La finalité de l’information financière et les parties
prenantes ;
- Les principes fondamentaux (hypothèses et
principes comptables) ;
- La définition, l’évaluation et la comptabilisation
des éléments constitutifs des états financiers.
Livre II : Les états financiers comprenant :
- Les règles d’établissement et de présentation des
états financiers ;
- Les modèles d’états financiers et les commentaires
des postes ;
- Le plan des comptes ;

- Le contenu des comptes.
Annexes dont :
- Annexe 1 : Modèle de bilan destiné à la publication
et commentaire des postes ;
- Annexe 2 : Modèle de hors-bilan destiné à la
publication et commentaire des postes ;
- Annexe 3 : Modèle de compte de résultat destiné à
la publication et commentaire des postes ;

Han-Madou Ilboudo
- Annexe 4 : Notes annexes ;

- Annexe 5 : Cadre comptable ;
- Annexe 6 : Plan des comptes ;
- Annexe 7 : Contenu des comptes
L’analyse de ce contenu montre qu’il n’est pas pris

en compte la spécificité des opérations et du patrimoine
des institutions qui font de la finance islamique. Cela peut
déjà s’expliquer par le fait que ce plan révisé a été adopté
en 2016 et entré en vigueur depuis le 1er janvier 2018,
alors que les toutes premières instructions instituant la
finance islamique par la BCEAO datent de mars 2018. Le
plan comptable bancaire a donc été adopté avant
l’existence règlementée des IFI d’où l’absence de
spécificités relatives à leurs activités.
La conséquence de cela, ce sont les difficultés pour
les IFI à utiliser ce PCB comme référentiel pour le
traitement comptable de leurs opérations et la présentation
de leurs états financiers. Nous avons alors opté de voir
dans le paragraphe suivant, si les instructions de la
BCEAO, qui ont institué la finance islamique en mars et
mai 2018, comportent des rubriques permettant la gestion
comptable des IFI.

3.2. Les instructions sur la finance islamique
Il existe actuellement quatre instructions de la
BCEAO relatives à l’exercice de l’activité de finance
islamique dans l’espace UEMOA. L’analyse de ces quatre
instructions fait ressortir leur contenu comme suit.

3.2.1. Instruction N°002-03-2018 relative aux
de crédit exerçant une activité de finance islamique
Cette instruction comporte :
Titre premier : Dispositions générales
- Définitions des concepts ;
- Objet : Définir les conditions d’exercice des
activités de finance islamique dans l’UMOA ;
- Typologie des établissements de crédit exerçant
des activités de finance islamique ;
Titre II : Conditions d’exercice de l’activité de finance
islamique par les établissements de crédit
- Conditions d’exercice de l’activité de finance
islamique ;
- Liste des documents et informations constitutifs du
dossier de demande d’agrément des établissements de
crédit projetant d’exercer à titre exclusif les opérations de
finance islamique ;
- Autorisation préalable des établissements de crédit
pour l’ouverture d’une branche islamique.
Titre III : Modalités de contrôle de la conformité aux
principes et règles de la finance islamique
- Désignation d’un conseil de conformité interne ;
- Missions du conseil de conformité interne ;

- Composition du conseil de conformité interne ;
- Information à la clientèle ;
- Dispositif interne de vérification ;
- Obligations des organes délibérant et exécutif de
l’établissement de crédit ;
- Audit de conformité ;
- Risque de non-conformité ;
- Risque commercial déplacé ;

Han-Madou Ilboudo
- Principe de création d’un conseil de conformité

central ou sharia bord central.
Dispositions transitoires et finales
- Avis sur la conformité aux principes et règles de la
finance islamique ;
- Dispositions transitoires ;
- Entrée en vigueur.
Annexe 1 : Liste des documents et informations
complémentaires à joindre à une demande d’agrément en
qualité d’établissement de crédit par les établissements
projetant d’exercer à titre exclusif l’activité de finance
islamique.
Annexe 2 : Liste des documents et informations à fournir
dans le cadre d’une demande d’autorisation préalable de
création d’une branche islamique par un établissement de
crédit
3.2.2. Instruction N° 003-03-2018 relative aux
financiers décentralisés exerçant une activité de
finance islamique
Cette instruction qui est sortie en même temps que la
précédente instruction, comporte le même contenu que
cette dernière, à la seule différence qu’elle concerne les
systèmes financiers décentralisés qui évoluent dans le

secteur de la microfinance. La règlementation reste la
même pour ces deux groupes d’institutions pour l’exercice
de l’activité de finance islamique.
3.2.3 Instruction N° 004-05-2018 relative aux
caractéristiques techniques des opérations de
finance islamique exercées par les établissements de
crédit de l’Union Monétaire Ouest Africaine
(UMOA)

L’instruction a pour objet de définir les principales
opérations que les établissements de crédit, exerçant une
activité de finance islamique, sont habilités à effectuer
dans l’UMOA. Elle décrit les caractéristiques de ces
opérations ainsi que les contrats qui leur sont associés. Le
contenu de l’instruction après l’objet est le suivant :
- Définition des opérations de finance islamique ;
- Conformité des opérations aux principes et règles
de la finance islamique ;
- Garantie des opérations de finance islamique ;
- Entrée en vigueur ;
- Annexe
L’annexe qui décrit véritablement les
caractéristiques techniques des opérations comprend :
Partie 1 : Opérations de financement non participatif
- Qardh3
- Mourabaha4financement
- Moussawama5 financement
- Ijara6 financement
- Istisna7
- Salam8
3
Prêt accordé sans aucun intérêt à verser au prêteur.
4
Achat d’un bien suivi de sa vente avec une marge bénéficiaire

convenue avec obligation de déclaration du prix d’achat par le
vendeur.
5
Vente d’un bien sans obligation de déclaration du prix d’achat par le
vendeur.
6
Mise à disposition d’un bien pour utilisation contre paiement de
loyer avec une option d’achat accordée au locataire.
7
Contrat pour la fabrication d’un bien au profit du demandeur à un
prix convenu.
8
Achat d’un bien dont le paiement du prix se fait intégralement au
comptant à la conclusion du contrat et la livraison à un terme fixé.
Han-Madou Ilboudo
- Arboun9
- Waad10
- Dépôt de bonne foi
- Autres précautions contre le non-respect des
obligations et engagements contractuels
Partie 2 : Opérations de financement participatif
- Moudaraba11 financement
- Moucharaka12
Partie 3 : Opérations de collecte des dépôts et comptes
d’investissement
- Caractéristiques des dépôts et comptes
d’investissement
- Modalités de rémunération des dépôts et comptes
d’investissement
- Compte d’investissement Moudaraba général
- Compte d’investissement Moudaraba spécifique
- Compte d’investissement Wakala13
- Responsabilité de l’établissement de crédit dans la
gestion des comptes d’investissement
- Information de la clientèle sur les règles de
répartition des comptes d’investissement
9
Somme versée par un client à un vendeur pour matérialiser son
engagement à acquérir un bien spécifique.

10
Promesse unilatérale révocable ou irrévocable, d’acheter, de vendre
ou de louer un bien.
11
Contrat par lequel un financier apporte tout le capital d’un projet à
un entrepreneur qui possède de l’expertise pour un partage des profits
obtenus et une possibilité de perte de capital pour le financier.
12
Association entre deux ou plusieurs personnes dans une activité
avec des apports pour un partage des profits et pertes qui en résultent.
13
Mandat donné par une personne à une autre pour réaliser des
investissements pour son compte moyennant une rémunération fixe
convenue entre les deux au profit du gérant.
- Information périodique sur les comptes
d’investissement généraux
- Documentation commerciale sur les comptes
d’investissement
Partie 4 : Services de paiement et opérations de gestion de
la liquidité conformes aux principes et règles de la finance
islamique
- Services de paiement conformes aux principes et
règles de la finance islamique
- Tawarruq14
- Autres types de contrats de gestion de liquidités
3.2.4 Instruction N° 005-05-2018 relative aux
caractéristiques techniques des opérations de
finance islamique exercées par des systèmes
financiers décentralisés dans l’Union Monétaire
Ouest Africaine (UMOA)
Cette instruction qui s’adresse aux systèmes
financiers décentralisés qui évoluent plus dans le secteur
de la microfinance comporte les mêmes éléments que
l’instruction précédente. On fait le constat que ces
instructions ne font pas cas du traitement comptable des
opérations de finance islamique réalisées par les IFI.
Comme on vient de le montrer à travers l’analyse du
plan comptable bancaire révisé de l’UMOA et des
instructions relatives à l’exercice des opérations de finance
islamique dans la zone, il n’existe pas, à ce jour, des

dispositions règlementaires pour la gestion comptable des
IFI dans l’espace UEMOA. Pourtant, comme cela a été
14
Opération de financement aux termes de laquelle un client achète
une marchandise auprès d’un vendeur avec différé de paiement et la
revend au comptant à un tiers pour obtenir de la liquidité.
Han-Madou Ilboudo
présenté dans la première section, des institutions qui

offrent des produits de finance islamique existent bien au
niveau bancaire qu’au niveau des systèmes financiers
décentralisés. La plupart de ces institutions ont existé
avant même l’adoption des instructions de la BCEAO
relatives à l’exercice des activités de finance islamique et
pour leur cas, les instructions ont prévu des dispositions
transitoires où ces dernières devraient régulariser leur
situation en fournissant les documents et informations
requis pour l’exercice de l’activité de finance islamique au
plus tard le 30 juin et beaucoup d’institutions, qui
exerçaient déjà, se sont conformées à cette disposition.
Seulement en absence de dispositions, on se demande
comment ces institutions assurent leur gestion comptable
aussi bien pour le traitement des opérations de
financement islamique que la présentation des états
financiers. La réalité de la pratique en matière de gestion
comptable est présentée dans la partie suivante.
3.3. L’inadaptation des normes IAS15/IFRS16

Comme on le sait, le PCB révisé de la BCEAO est
élaboré sur une prise en compte des normes comptables
internationales IAS/IFRS applicables aux banques et
institutions financières. Ces normes comptables

IAS/IFFRS actuelles ne prennent pas suffisamment en
compte les spécificités des banques islamiques et
nécessitent d’être complétées par d’autres normes
spécifiques (Elhamma, 2015). Plusieurs organes se sont
données pour mission l’élaboration des normes spécifiques
15
International Accounting Standard.
16
International Financial Reporting Standard.
aux banques islamiques. Les principaux parmi ces organes
sont les suivants :
- Accounting and Auditing Organization for Islamic
Financial Institutions (AAOIFI), en français Organisation
de la Comptabilité et d’Audit des Institutions Financières
Islamiques (OCAIFI),
- Malaysian Accounting Standard Bord (MASB),
- Indonesian Accounting Institute (IAI),
- International Islamic Fiqh Academy (IIFA), basé à
Jeddah,
- Islamic Financial Services Bord (IFSB) basé à
Kuala Lumpur,
- International Islamic Financial Market (IIFM) à
Bahreïn,
- Liquidity Management Center (LMC),
- International Islamic Rating Agency (IIRA),
- International Arbitration and Reconciliation Center
for Islamic Financial Institutions (ARCIFI),
- General Council for Islamic Banks and Financial
Institutions (GCIBFI), Conseil Général des Banques et
Institutions Financières Islamiques.
De tous ces organes, l’AAOIFI a réussi à s’imposer
comme l’organe le plus connu et dont les normes

connaissent le niveau d’application le plus répandu. Selon
une enquête menée par le groupe de travail de l’Asian
Oceanian Standar Settes Group et publiée en 2013, 64%
des répondants ont considéré que les normes FAS émises
par l’AAOIFI, s’appliquent dans leurs institutions.

Han-Madou Ilboudo
Dans cette étude, la comparaison entre normes

IAS/IFRS et normes comptables des banques islamiques
se fait sur la base de normes AAOIFI pour le compte des
banques islamiques. Ainsi le tableau suivant donne
quelques différences entre les deux normes.
Tableau 3. Comparaison entre les normes IAS/IFRS et

normes AAOIFI.
Normes IAS/IRS Divergences avec les Normes

AAOIFI
Selon le référentiel IFRS, un Le référentiel IFRS ne tient pas

actif est comptabilisé au bilan compte de quelques aspects, à savoir :
lorsque qu’il est - l’obligation de conformité
- probable qu’il de l’actif aux principes de la finance
procurera des avantages islamique ;
économiques futurs à l’entité, et - l’acquisition au préalable
- mesuré de manière par la banque du droit de détention, de
fiable. l’utilisation ou de cession du bien
(l’obligation de la propriété juridique
et au contrôle légal exercé sur l’actif,
Un passif est comptabilisé au en contradiction avec les dispositions
bilan lorsque : du principe de prééminence de la
- il est probable que le substance sur la forme) ;
- la prise en compte et
règlement de l’obligation qu’il
l’évaluation initiale des éléments
représente provoquera une perte d’actifs sont fortement influencées par
d’avantages économiques futurs la nature de l’accord et les termes

pour l’entreprise, et contractuels convenus entre les
- la valeur est mesurée différentes parties. Selon l’AAOIFI,
d’une manière fiable, - selon l’évaluation est effectuée :
IFRS, les dépôts de la clientèle et
leurs rémunérations (sous formes
d’intérêt fixe) font partie des réalisation.
engagements à honorer par la
banque et à comptabiliser L’AAOIFI laisse à l’entité la liberté de
comme passif au niveau des états choisir l’une des trois critères.

financiers. - les deux référentiels ne
présentent pas de divergences
Selon IAS 32, les actifs et passifs majeures en matière de reconnaissance
financiers doivent être classés et de prise en compte des éléments de
dans l’une des principales passifs, sauf en ce qui concerne la non
catégories d’instruments adoption des méthodes d’évaluations
financiers définies par la norme basées sur les taux d’actualisation.
IAS 39 (remplacé par IFRS 9). - la principale divergence
Les principales catégories réside dans l’enregistrement
d’instruments financiers prévus comptable des comptes
par l’IAS 39 sont : d’investissements restreints et non-
- les actifs et passifs restreints.
financiers évalués à la juste
valeur, L’AAOIFI exige la présentation des
- les créances et les prêts, comptes d’investissements
- les actifs financiers participatifs non-restreints dans une
détenus jusqu’à l’échéance, rubrique séparée entre les fonds
- les passifs financiers propres et les dettes, et prévoit la
disponibles à la vente, présentation des comptes
- et les autres passifs d’investissements restreints au niveau
financiers. de l’hors-bilan puisque la banque
assure uniquement la gestion de ces
Les principes qualitatifs de fonds.
l’information comptable
La norme de l’AAOIFI n°17 «
- la fiabilité, investissements » traite les cas des
- la comparabilité, investissements qui sont :
- la pertinence, - les investissements en
- la compréhensibilité. actions,
- les investissements en
Les principes comptables sont les immobilisations,
suivants : - et les investissements en

SUKUKS17.
- les hypothèses sous-
jacentes, Les instruments de couverture sont
- la comptabilité interdits par la finance islamique. Le
d’engagements, cadre conceptuel de l’AAOIFI ne fait
- la continuité pas mention de la convention de
d’exploitation
prudence.
- les conventions
comptables : la convention de
l’entité, l’unité monétaire, de la
Le principe de la prééminence de fond
périodicité, coût historique, la
sur la forme

Han-Madou Ilboudo
réalisation du revenu,
rattachement des charges aux Certains principes énoncés par le
produits, l’objectivité, la référentiel IFRS peuvent donner lieu à
permanence des méthodes, des situations de non-conformité, ce
l’information complète, qui explique le rejet du principe de la
l’importance relative, la prédominance du fond sur la forme.
prééminence de fond sur la Les normes comptables
forme, la convention de conventionnelles IAS/IFRS exigent
prudence. que l’information comptable soit
présentée en fonction de sa substance
Le référentiel IFRS prévoit que et sa réalité économique et non pas sur
les états financiers doivent la base de sa forme légale.
comprendre : Le principe du coût historique
- un bilan,
- un compte de résultat, L’application de ce principe peut
- un état de variation des présenter quelques difficultés surtout
capitaux propres, avec l’application des spécificités des
- un tableau de flux de banques islamiques :
trésorerie, - au titre de la Zakat,
- des notes explicatives. - dans le cadre de l’évaluation
de la performance des fonds
d’investissement (les normes de
l’IFRS préconisent parfois la
réévaluation des actifs détenus dans le
cadre d’une transaction).
L’AAOIFI prévoit que les états
financiers doivent comprendre.
Pour les fonctions où la banque a un

rôle d’investisseur, elle doit publier :
- un bilan,
- un état de résultat,

- un tableau des flux de
trésorerie,
- un état des variations des
revenus,
Pour les fonctions où la banque est

responsable des comptes
d’investissements restreints, elle doit
publier :
- un état des variations des
investissements restreints ou limités,

Pour les fonctions où la banque

assure un rôle social, elle doit
publier :
- un état sur les ressources et
les emplois des fonds de zakat,
- les états relatifs à la mission
sociale de la banque (compte de la
zakat).
Source : EL OUNI (2017). Mémoire en vue de l’obtention du
Diplôme d’Expertise Comptable, Sousse/Tunisie.
3.4. La pratique comptable des IFI de l’UMOA

Nous avons interrogé un certain nombre de
responsables au niveau des IFI mais aussi des consultants
en finance islamique et cadres de la BCEAO sur la
question. Les résultats obtenus sont les suivantes :
« De nos jours, les IFI de l’espace UEMOA
réalisent leurs états financiers sur la base des normes
comptables conventionnelles en opérant des ajustements »
« En l’absence de plan comptable compatible à la
finance islamique, les IFI ne peuvent se soustraire du
cadre comptable légal. Elles peuvent contrairement
opérer des adaptations dans leur comptabilité en justifiant
l’apparition de certains comptes inhabituels dans une
institution financière (exemple les comptes de stocks de

marchandises, ventes de marchandises dans le compte de
résultat) ; élaborer un lexique pour expliquer certains
termes (dépôts des comptes de PSIA17, seront considérés
comme des dépôts à terme etc.) »
17
Profit Sharing Investment Accounts.
Han-Madou Ilboudo
Ces deux réponses de nos interviews parmi les

professionnels de la finance islamique de l’espace
UEMOA, donnent un aperçu de la pratique actuelle en
matière de gestion comptable des IFI. En réalité, la
situation actuelle est beaucoup facilitée par le fait que les
IFI qui existent, ne sont pas encore entrées dans une
pratique totale de la finance islamique, ce qui facilite pour
elles l’utilisation du plan comptable bancaire classique
avec juste quelques ajustements pour tenir compte des
quelques opérations de finance islamique qu’elles
réalisent. Le problème va donc se poser avec plus de
difficultés quand ces dernières vont évoluer vers une
pratique rigoureuse et totale de la finance islamique, il y a
lieu alors que le problème de manque de plan comptable
spécifique soit résolu en ce moment.
Aussi, la pratique actuelle consiste, selon les propose
de certains responsables des IFI, en l’utilisation de
logiciels de traitement des opérations de finance islamique
avec une gestion comptable intégrée selon les normes
internationales admises par des organisations comme
l’AAOIFI18. Au titre de ces logiciels, on peut citer iMAL
ou encore ERI bancaire. Aussi, des informaticiens locaux
ont pu développer des logiciels qu’ils proposent surtout
aux systèmes financiers décentralisés pour une gestion

comptable intégrée de leurs opérations de financement
islamique.
3.5. Les perspectives d’évolution du PCB
Pour régler les difficultés évoquées ci-dessus pour la
gestion comptable des IFI, il est impératif que la BCEAO
18
Accounting and Auditing Organization for Islamic Financial
Institutions.
puisse adopter des dispositions règlementaires en la
matière avec des modèles de comptabilisation des
opérations et de présentation des états financiers. Au
niveau de la banque centrale les perspectives vont dans le
sens d’adoption d’un cadre comptable prenant en compte
les spécificités des activités de finance islamique comme
le confirme les réponses suivantes que nous avons
obtenues dans nos entretiens.
« La BCEAO est consciente de cette lacune. Il
semble qu’il y a un processus en cours devant permettre
d’élaborer un plan compatible avec la finance islamique.
Je n’ai pas connaissance des délais. »
« À ma connaissance non, mais un projet serait en
cours dans ce sens. »
Sur la question, des cadres au niveau de la BCEAO
ont rassuré qu’un cadre comptable prenant en compte les
spécificités des IFI, sera disponible courant 2020.
4. Recommandations de l’étude
Les résultats de cette étude nous amènent à formuler
des recommandations à l’endroit des différents acteurs de
la finance islamique de l’UEMOA. Ces recommandations
visent à aider les IFI de la zone à pratiquer une véritable

finance islamique bien encadrée à tous les niveaux et qui
respectent les principes et règles de la finance islamique.
Ainsi, à l’endroit des IFI, nous recommandons une
évolution vers la pratique totale des principaux produits de
finance islamique dans le respect des principes et règles du
système. Cela va nécessiter que ces institutions qui veulent
faire la finance islamique, travaillent à la formation de leur
personnel sur les principes et les mécanismes de la finance

Han-Madou Ilboudo
islamique afin de disposer d’un personnel compétent pour

une vraie pratique. Jusqu’alors, on constate que le
personnel de ces IFI est constitué des gens qui ont eu juste
quelques notions de la finance islamique sans une
véritable formation et cela est un handicap pour pratiquer
une finance islamique au sens complet.
Au niveau de la BCEAO, il y a lieu dans un premier
de travailler à la finalisation de tous les textes devant régir
le fonctionnement des IFI comme par exemple le cadre
comptable que nous avons évoqué dans cette étude. Dans
un deuxième temps, il faut concrétiser la mise en place du
Sharia Bord central qui est prévu dans les instructions
pour l’harmonisation et la conformité aux principes et
règles de la finance islamique, des opérations des
institutions qui exercent des activités de finance islamique
dans la zone.
À l’endroit des autorités des Etats membres de
l’UEMOA, nous leur recommandons l’adoption de
dispositions pratiques règlementaires au niveau national
pour la mise en œuvre des instructions de la BCEAO au
profit des institutions qui désirent faire de la finance
islamique. C’est le cas notamment des dispositions fiscales
spécifiques à prendre pour éviter une double imposition
fiscale de certains produits de la finance islamique.
5. Conclusion
Cette étude a analysé la problématique de la gestion
comptable des institutions qui font de la finance islamique
dans l’espace UEMOA. Nous avons dans une phase
théorique procédé à l’analyse documentaire du plan
comptable bancaire en vigueur et les instructions de la

BCEAO relatives à la finance islamique qui existent
depuis 2018. Dans la phase empirique, nous avons dans
une approche qualitative matérialisée par des entretiens
semi-directifs, recueilli les avis des principaux acteurs de
cette finance que sont les responsables des IFI, les
consultants et experts en finance islamique et les cadres de
la banque centrale chargée de la question.
On note l’absence de cadre règlementaire pour la
gestion comptable des IFI de l’espace UEMOA et ces
dernières sont amenées à utiliser le plan comptable
bancaire classique tout en procédant à des ajustements et à
des explications. L’usage de logiciels intégrés pour la
gestion comptable des banques islamiques, facilite cette
gestion pour certaines institutions qui ont pu s’en procurer.
Notre étude, après une analyse comparative entre les
normes comptables classiques et celles de l’AAOIFI, a
formulé des recommandations allant dans le sens d’une
finalisation du processus d’adoption des textes y compris
ceux relatifs à la gestion comptable des IFI, pour faciliter
le développement de ces institutions.
Bibliographie
BCEAO (2016). Plan Comptable Bancaire révisé de l’UMOA.

BCEAO (2018). Instruction n°002-03-2018 relative aux
de crédit exerçant une activité de finance islamique.
financiers décentralisés exerçant une activité de finance
islamique.

Han-Madou Ilboudo
islamique exercées par les établissements de crédit de

l’union monétaire ouest africaine (UMOA.
islamique exercées par des systèmes financiers
décentralisés de l’union monétaire ouest africaine
(UMOA).
Elhamma, A. (2015). La comptabilité des produits financiers
islamiques : Normes AAOFI vs IFRS. Revue de
Management et de Stratégie, pp 10-12.
El Ouni (2017). Mémoire en vue de l’obtention du Diplôme
d’Expertise Comptable, Sousse/Tunisie.
Ilboudo, H.-M. (2019a). Le traitement comptable des contrats
de financement islamique, quelles spécificités ?.
Recherches et Applications en Finance Islamique
(RAFI), 3(2) : 189-204.
Ilboudo, H.-M. (2019b). Pratique des produits participatifs par
les Institutions Financières Islamiques en Afrique (IFI) :
réalités et perspectives. Recherches et Applications en
Finance Islamique (RAFI), 3(1) : 72-87.
Malaysian Institute of Accountants (2020). Accounting for
Islamic Finance, Printexcell Business Firms (M) Sdn
Bhd.
Webographie : www.uemoa.int, consulté le 20 janvier 2020.

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d’une entité dans le but de répondre aux besoins

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2. Présentation du cadre institutionnel et

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2.1. Les IFI et leur modèle de gouvernance dans

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règlementaire dédié aux banques islamiques. Ainsi, ces

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de l’Islam. Des institutions similaires évoluant dans le

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Le tableau suivant résume les institutions de finance

Tableau 2. Institutions financières islamiques dans la

Dénomination Année de création

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2.2. Méthodologie de l’étude

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BCEAO. Néanmoins, les quelques informations obtenues

3. Présentation et analyse des résultats

3.1. Le Plan comptable bancaire

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- Annexe 4 : Notes annexes ;

L’analyse de ce contenu montre qu’il n’est pas pris

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- Principe de création d’un conseil de conformité

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islamique dans la zone, il n’existe pas, à ce jour, des

présenté dans la première section, des institutions qui

3.3. L’inadaptation des normes IAS15/IFRS16