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Pilotage des projets d'ERP fondé sur les communautés de

pratique : entre architecture hiérarchique et cognitive


Wilfrid Azan, Jean-Philippe Bootz
Dans Management & Avenir 2015/1 (N° 75), pages 169 à 190
Éditions Management Prospective Editions
ISSN 1768-5958
DOI 10.3917/mav.075.0169
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Pilotage des projets d’ERP fondé sur les
communautés de pratique : entre architecture
hiérarchique et cognitive
Wilfrid AZAN1
Jean-Philippe BOOTZ2

Résumé
Nous nous intéressons dans cette recherche aux ERP, qui en tant que
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référentiel informationnel commun, relient les utilisateurs dans et en
dehors de l’organisation, et visent à épouser au mieux les pratiques,
les savoirs et les compétences qui alimentent l’organisation. Certains
travaux laissent apparaître les liens étroits qu’entretiennent les SI
(en particulier l’ERP) et la dimension cognitive de la firme en étant
potentiellement source de rigidifications, de destructions mais aussi
de partage de représentations (Ciborra, 2000 ; Levina et Vaast, 2005).
L’étude, de nature interprétative et qualitative menée sur deux ans,
met en évidence, sur un plan théorique l’enjeu de l’interconnexion des
communautés dans la réussite d’un PERP sur un plan managérial, elle
fournit aux praticiens une grille d’analyse explicite les aidant à concevoir
et à mettre en œuvre des Projet ERP.

Abstract
In this research we are interested in ER P, which as common
informational repository, connect users in and outside the organization,
and aim at fitting at best knowledge, practices, and skills that drive
the organization. Some work let appear the close links between the
IS (especially ERP) and the cognitive dimension of the firm by being
potentially source of rigidifications, destruction, but also sharing of
representations (Ciborra, 2000 ; Levina et Vaast, 2005). This qualitative
and interpretative study conducted over two years, highlights, on a
theoretical level the stake of communities’ interconnection in the

1 Wilfrid AZAN : Maître de conférences, Université de Strasbourg, Faculté de droit, de sciences


politiques et de gestion, Humanis.
2 Jean-Philippe BOOTZ : Maître de Conférences, Ecole de Management de Strasbourg (UdS),
HuManiS, jean-philippe.bootz@em-strasbourg.eu

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success of an ERPP and questioned f lexibility between hierarchical


and cognitive mode as a key success factor. On a managerial level, it
provides to practitioners an explicit grid of analysis helping them to
design and implement ERPP.
Sur un plan théorique, la rigidification (ossification pour Reix, 1999), due à la mauvaise
prise en compte de l’architecture cognitive par les SI est largement évoquée en filigrane
des travaux de Ciborra (2000) sur l’infrastructure. Dans la lignée de la théorie des réseaux
et des travaux de Callon (1999), les SI se propagent et leur implémentation peut être
comprise comme un processus de standardisation (Hanseth et al., 2006) imbriqué dans
un processus socio- technique complexe qui peut, à terme et après une phase de chan-
gement, contribuer à rigidifier l’organisation (Hanseth et Braa, 1999). Pour ce courant
de pensée, il y a nécessité de penser les SI comme des infrastructures. Ils comprennent à
la fois des données, des réseaux et du hardware mais contiennent également des modes
de travail émergents, véhiculent de nouvelles représentations cognitives des tâches,
des processus institutionnels et des pratiques. Huber (1991) s’interroge ainsi sur le
fondement cognitif des SI. Il identifie plusieurs niveaux cognitifs d’interaction entre le
système d’information et les savoirs en place.

Concernant les progiciels de gestion intégrés, Besson (1999) estime qu’à travers sa di-
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mension holiste, l’ERP (Enterprise Resource Planning) permet la confrontation entre
outil et organisation et conduit à l’explication des « lois » de cette dernière. Il permet de
révéler les déterminants essentiels de l’organisation et d’aider les acteurs à imaginer
de nouveaux schémas d’évolution. Dans ce cadre, l’ERP joue le rôle de support d’une
construction progressive de représentations partagées et constitue ainsi un puissant
levier potentiel pour l’apprentissage organisationnel.

Par ailleurs, l’ERP induit une intégration souvent contraignante et parfois rigide (Boudreau
et Robey, 2005 ; Reix, 1999) source d’interdépendance (Kallinikos, 2004 ; Davenport, 2000),
de décloisonnement (El Amrani et al., 2008), d’un langage ou de métanormes (Carbonel,
2001), de transversalité ou dans une moindre mesure d’échecs retentissants (Hershey
Food perd 122 Millions de $ selon Poston et Grabsky, (2001) suite à une implantation
ratée du progiciel intégré SAP). Pour autant, l’essence des mécanismes à l’œuvre demeure
méconnue. L’alchimie transformant une organisation, sous l’impulsion d’un projet de sys-
tème d’information, s’apparente, selon Markus et Tanis (2000) à un ­processus simonien
de type formulation du problème, ingénierie, déploiement, usage et effet.

Dans ce cadre, l’ERP doit tenter de prendre en compte l’architecture cognitive de la firme
(Cohendet, 2003), qui selon l’approche situationniste (Wenger, 1998 ; Brown et Duguid,
1991) se joue essentiellement autour du maillage de structures cognitives intermédiaires,
à savoir les communautés de pratique (CPs).

Mais comment concrètement concevoir un Projet ERP (PERP) qui prenne en compte ces
dimensions cognitives ? Ce mode cognitif constitue-t-il un facteur de réussite des PERP par
rapport au modèle hiérarchique standard ? Les modes cognitifs et hiérarchiques peuvent-
ils coexister au sein d’un même projet ? Quel est l’impact de l’ERP sur l’interconnexion
entre communautés ?

Dans une première partie, l’exploration des approches situationnistes nous permet de
mettre en exergue les caractéristiques principales des CPs et les enjeux que ces structures

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Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

sociales impliquent en matière de PERP. En particulier, la mobilisation des travaux de


Levina et Vaast (2005) éclairent les processus de médiation entre CPs qui reposent sur
l’activation d’objets frontières et/ou la mobilisation d’acteurs interface. Cela nous conduit
finalement à discriminer en termes de dispositifs et de types d’acteurs mobilisés deux
types de PERP (hiérarchique/cognitif). Afin de confronter notre grille de lecture à un
terrain, nous nous appuyons dans une seconde partie sur la description d’une étude de
cas réalisée au sein d’un groupe international de cosmétique et de santé. La discussion du
cas, en troisième partie met en évidence la manière dont le projet a réussi l’implication
des CPs et facilité leur interconnexion. Elle souligne également le caractère dynamique
et hybride du projet au sein duquel les modes hiérarchiques et cognitifs ont coexisté.

1. Constellation de communauté et projet d’ERP : distinction


entre architecture cognitive et hiérarchique

Cette partie vise à exposer notre cadre théorique à travers l’exploration de la littérature
consacrée aux CPs, afin notamment de comprendre comment les ERP peuvent opérer
la mise en relation des CPs. Dans un premier temps, nous mettons en exergue les ca-
ractéristiques principales des CPs en soulignant les enjeux que ces structures sociales
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impliquent en matière de PERP. Nous évoquons, dans un second temps, les modalités
d’interaction entre CPs qui nécessitent une médiation par l’activation d’objets frontières
et/ou la mobilisation d’acteurs interface. Cela nous conduit finalement à discriminer
deux types de PERP (hiérarchique/cognitif). Cette distinction repose notamment sur
les dispositifs et les types d’acteurs mobilisés dans le projet.

1.1. Une relecture des PERP à la lumière des CPs


Les premiers travaux sur les communautés s’inscrivent dans le courant « situationniste »
de l’apprentissage qui met notamment en exergue le caractère réciproque de l’interac-
tion dans laquelle les individus, aussi bien que la cognition ou le sens, sont considérés
comme culturellement et socialement construits (Lave, 1988, 1993). En réaction aux
théories classiques de l’apprentissage qui n’intègrent pas suffisamment la complexité
des contextes sociaux, des pratiques réelles et l’anxiété naturelle des acteurs (Kalika et
al., 2011), ces travaux cherchent à prendre pleinement en compte le caractère situé de
la connaissance (Greeno et Moore, 1993). La pratique est ainsi appréhendée comme
une source de structure sociale et l’apprentissage comme une participation sociale où
se négocient les significations relatives à l’action (Wenger, 1998).

Une communauté de pratique (CP) rassemble ainsi des membres homogènes, engagés dans
la même pratique, et dont l’objectif principal est l’amélioration de l’activité à travers une
réflexion sur les pratiques. Cet objectif est atteint à travers un processus de négociation
de sens3 (Wenger, 1998), la production d’un répertoire partagé de ressources (routines,

3 Wenger déf init la négociation de sens comme l’attribution de signif ications à nos expériences
ou à nos actions. Elle émerge d’un mouvement dialectique entre participation et réif ication (Dameron et
Josserand, 2009). C’est à la fois à travers la participation à la communauté et la construction collective
d’artefacts que les membres négocient le sens de leur action au sein du collectif. C’est également à travers
ce processus de négociation de sens que se joue l’évolution de la communauté et l’équilibre entre les rela-
tions identitaires, affectives et fonctionnelles des membres (Dameron et Josserand, 2007). Ces derniers

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sensibilités, artefacts, vocabulaires, styles…) et l’échange « d’histoires de guerre » (Orr,


1990). Ces dernières permettent la constitution d’un stock de compétences concrètes qui
parvient à compenser les insuffisances des pratiques « canoniques4 » de l’organisation
souvent trop simples pour répondre à la complexité des pratiques organisationnelles
réelles (Brown et Duguid, 1991).

Ces communautés sont auto-organisées, étant donné que leurs membres y adhèrent
volontairement, en dehors de toute contrainte hiérarchique, à la fois par passion pour la
pratique et pour développer leurs compétences individuelles. Au sein des CPs, la connais-
sance est essentiellement constituée du savoir-faire tacite socialement localisé (« know
how ») (Brown et Duguid, 1991). Elles représentent ainsi des lieux de socialisation in-
tense qui contribuent pleinement à la diffusion des connaissances et à leur inscription
dans les pratiques. L’apport des CPs, en matière d’apprentissage et de construction de
compétences, en font un objet d’attention croissante de la part des praticiens qui ont vu
dans ces structures sociales le moyen de répondre à des enjeux managériaux et straté-
giques majeurs : production de bonnes pratiques, amélioration d’activités, développe-
ment de compétences, construction d’identités communes. Mais compte tenu de leur
caractère auto-organisé, elles ont pendant longtemps été considérées par le manage-
ment comme des structures d’apprentissage non identifiées. L’apparition d’entreprises
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cherchant à nourrir et à développer de manière active de telles communautés est ainsi
un phénomène récent. Les exemples d’organisations ayant tenté d’instaurer en leur sein
ces communautés de pratique pilotées se sont ainsi multipliées ces dernières années :
Siemens (Probst et Borzillo, 2007), British Petroleum (Cohendet et al., 2006, 2010), IBM
(Gongla et Rizzuto, 2001), le Conseil de l’Europe (Creplet et Dupouet, 2009), GDF-Suez
(Blanchot-Courtois et Ferrary, 2009 ; Dupouet et Barlatier, 2011 ; Gosselin et al., 2010),
ou Schlumberger (McDermott et Archibald, 2010). Le pilotage par la direction implique
que ces structures se distinguent clairement des CoPs spontanées dont l’émergence est
uniquement contingente à l’auto-organisation de ses membres. Les communautés de
pratique pilotées (CoPPs) constituent ainsi des structures hybrides qui conservent pour
partie leur dimension auto-organisée tout en étant articulées à l’organisation formelle
(Dupouet et Barlatier, 2011). Cela suppose de parvenir à concilier deux logiques a priori
contradictoires : l’auto-organisation et le contrôle (Josserand, St Leger, 2004 ; Bootz,
2013 ; Azan et al., 2011, Azan et al., 2013).

Les PERP en étant source de codification de connaissances se heurtent à un double risque.


D’une part, un risque de résistance et de détournement du produit si les membres des
CPs ne sont pas impliqués dans la construction de l’outil (Lapointe et Rivard, 2005). Ces
derniers peuvent en effet voir dans cette codification une menace par rapport à leur mode
de fonctionnement habituel basé essentiellement sur l’échange de connaissances tacites
via des processus de socialisation. D’autre part, le risque de remettre en cause l’existence
de certaines CPs pourtant vertueuses en matière d’apprentissage organisationnel en
leur imposant cette codification et en remettant en cause leur caractère auto-organisé.
En prenant en compte cette réalité communautaire, les ERP peuvent prétendre à une
véritable modularité cognitive (Goodhue et al., 2005). Le projet et la mise en production

sont ainsi liés par des liens forts au sens de Granovetter (1973).
4 Ce que Brown et Duguid appellent pratiques canoniques se rapproche de ce qu’Argyris et
Schön (1978) ont déf ini comme les « espoused theory » ou ce que Levitt et March (1988) ont appelé les
« routines organisationnelles ».

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Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

doivent ainsi parvenir à établir un juste dosage entre le hiérarchique et le cognitif pour
être efficaces, pertinents et réellement utilisés.

Le PERP : un enjeu d’interconnexion entre les CPs ?

La problématique de l’interconnexion entre CPs constitue une préoccupation majeure


des réflexions de Wenger (1998, 1998b) qui va l’aborder en considérant l’organisation
comme une « constellation de communautés de pratiques ». Ce raisonnement en termes
de constellation permet d’introduire une cohérence globale de l’organisation en assurant
la continuité des pratiques dans l’espace et le temps (Chanal, 2000) et d’éviter les biais
qui peuvent apparaître dans le cas de CPs isolées, comme par exemple l’enlisement dans
la routine ou la création de rigidités. En établissant des liens entre CPs différentes ayant
chacune ses propres systèmes d’évaluations et de croyances, l’organisation dans son en-
semble limite les risques d’aveuglement ou de fausses croyances (Brown et Duguid, 1998).

L’interconnexion des CPs peut être réalisée en faisant appel à des « objets frontière »
(boundary objects) et/ou à des acteurs interface (Wenger, 1998, 1998b ; Brown et Duguid,
1998). Les objets frontière renvoient à des objets physiques (prototypes, logiciels, pro-
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cédures qualité…) ou symboliques (éléments de vocabulaire, concepts, théories…) ca-
pables de s’adresser à des pratiques différentes et de circuler ainsi entre communautés.
Afin d’assurer son rôle de médiateur, l’objet frontière doit remplir un certain nombre
de conditions. Ainsi, pour les deux sociologues à l’origine du concept : Star et Greisemar
(1989), les objets frontière doivent être « both plastic enough to adapt to local needs and
the constraints of the several parties employing them, yet robust enough to maintain a
common identity across sites. (…) They have different meanings in different social worlds
but their structure is common enough to more than one world to make them recognizable,
a means of translation ». Les contrats constituent ainsi un exemple classique d’objets
frontière dans la mesure où ils contribuent, à la convergence de groupes différents autour
d’une signification commune acceptée par tous. Idem pour les plans qui parviennent à
relier architectes, clients, urbanistes et ingénieurs (Brown et Duguid, 1998), ou plus
généralement des documents (Brown et Duguid, 1995).

Le lien entre différentes communautés de pratiques peut être également assuré par des
« acteurs interface » pouvant prendre la forme de « traducteurs » (translators) (Brown
et Duguid, 1998) ou de « courtiers de connaissances » (knowledge brokers) (Brown et
Duguid, 1998 ; Wenger, 1998). Les premiers sont définis comme « individuals who can
frame the interests of one community in terms of another community’s perspective » (Brown,
Duguid, 1998, p. 103). Le rôle du « courtier de connaissances » implique, quant à lui, une
participation active plutôt qu’une médiation passive. Wenger (1998, p. 109) définit ainsi
le courtage comme « le recours à la multi-appartenance pour transférer des éléments d’une
pratique vers une autre pratique ».

De manière plus large, on va parler de boundary spanner (Levina et Vaast, 2005 ; Cross
et Parker, 2004), c’est-à-dire d’individus facilitant le partage d’expertises entre deux ou
plusieurs groupes séparés géographiquement, hiérarchiquement ou fonctionnellement.

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Levina et Vaast (2005), à l’appui d’approches sociologiques5, ont creusé cette réflexion
dans le domaine des SI autour des objets frontière et des acteurs interface en cherchant à
saisir comment cette compétence d’interfaçage émergeait en pratique. En appuyant leur
travail sur la mobilisation de deux études empiriques, une double distinction est opérée.
Tout d’abord, entre nominated boundary spanners et boundary spanners in practice. Alors
que les premiers sont désignés par la hiérarchie, les seconds agissent en tant qu’acteur
interface mais sans avoir été nommés pour accomplir ce rôle spécifique. Ces derniers se
caractérisent par une capacité et une légitimité à négocier les relations entre pratiques
différentes. Leur motivation est surtout liée au développement de leur compétence en
matière d’ « interfaçage » qui leur sera utile dans le cadre d’autres projets. La seconde
distinction s’opère entre designated boundary objects et boundary objects-in-use. Ce sont
les nominated boundary spanners détenant un certains pouvoir qui vont désigner les objets
frontières en s’appuyant uniquement sur leur propre capital symbolique. Ces derniers
ne deviendront pas des boundary objects-in-use. Pour Levina et Vaast (2005), seuls les
boundary spanners in practice ont la capacité de créer des boundary objects-in-use parce
qu’ils vont s’engager dans la construction d’un nouveau domaine commun dans lequel
l’artefact prendra son sens d’un point de vue utilitaire et symbolique.

1.2. Hiérarchique ou cognitif : des modes discriminants pour les PERP ?


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Compte tenu des enjeux et des contraintes que représentent la prise en compte des CPs,
les PERP nécessitent d’être repensés ou au moins réinterprétés à la lumière de cette
nouvelle grille de lecture. Cela implique notamment d’imaginer des dispositifs adaptés
(implication des CPs, d’utilisateurs finaux), des outils pertinents (en termes de codifi-
cation acceptable pour les CPs relevant ainsi des caractéristiques des objets frontière)
et des profils de chefs de projet (en termes d’acteur interface) répondant à cet objectif
cognitif d’interconnexion communautaire.

Dans ce cadre, il est possible de concevoir une distinction entre deux types de PERP. Le
premier s’inscrit dans une architecture hiérarchique classique (Azan et al., 2009 ; Ross
et al., 2002). Le projet repose alors sur un dispositif fondé sur la participation de repré-
sentants hiérarchiques (super-utilisateurs, responsables fonctionnels représentatifs de
la structure de l’organisation). Le rôle d’acteur interface est joué, dans ce cadre, par un
acteur désigné par la hiérarchie (nominated boundary spanner). Ce dernier va notamment
imposer la forme que prendra l’objet frontière (designated boundary object) et enclen-
chera un processus de codification de connaissances contingent à sa propre vision, à son
capital symbolique. Ce type de PERP peut être qualifié de classique dans la mesure où
il correspond à une majorité des pratiques. Son avantage principal est le gain de temps
qu’il implique en mobilisant une structure légère et contrôlée. Il comporte cependant
des risques importants de résistances de la part des utilisateurs qui, au sein de leurs CPs
respectives, peuvent considérer ce processus de codification comme une contrainte et
contourner ou détourner ainsi les outils créés.

Le second type de PERP vise, quant à lui, à reproduire au plus près non pas la structure
hiérarchique de l’entreprise mais son architecture cognitive en prenant notamment en
compte les structures sociales au centre des processus de création et de diffusion des

5 Notamment les travaux de Bourdieu.

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Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

connaissances. Pour ce faire, le dispositif va inclure, au-delà des super-utilisateurs et


des cadres fonctionnels, les utilisateurs finaux appartenant à des CPs. Ces derniers par-
ticipent activement au processus de codification en l’orientant en fonction de leurs CPs,
limitant ainsi les risques de résistances ex post. Le rôle d’acteur interface est tenu par un
boundary spanner in practice qui émergera en fonction de sa légitimité, de sa capacité de
négociation et de la confiance dont il bénéficie au sein des différentes CPs impliquées. Ce
dernier cherche ainsi à produire collectivement un boundary object in-use, c’est-à-dire
un objet-frontière conciliant l’utilité locale (contingente à chaque CP) et la recherche
d’intégration. Ce type de processus, s’il présente l’avantage de limiter les risques de
résistances cognitives, implique un investissement important dans un dispositif plus
lourd que dans le cadre d’un PERP de premier type.

2. Etude de cas : le PERP au sein de Paluda 6

Nous évoquons dans cette partie la méthodologie utilisée, le choix de l’ERP et les résul-
tats obtenus.

2.1. Méthodologie
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Afin de confronter notre grille de lecture à un terrain, nous nous appuyons sur le cas du
PERP mené au sein de Paluda. La méthode de recherche retenue est celle de l’étude de
cas en tant qu’investigation empirique cherchant à analyser un phénomène contemporain
en contexte réel. Son objectif est ainsi de produire des éléments empiriques permettant
de rendre plausible une théorie ou une conceptualisation en ramenant les faits analysés
au cadre d’analyse fourni par la théorie (Dumez, 2013). L’étude de cas consiste en effet à
« rapporter un événement à son contexte et à le considérer sous cet aspect pour voir com-
ment il s’y manifeste et s’y développe. En d’autres mots, il s’agit, par son moyen, de saisir
comment un contexte donne acte à l’événement que l’on veut aborder » (Hamel, 1997, p. 10).

De manière plus spécifique notre étude de cas s’inscrit dans une optique de pattern-
matching. Cette méthode d’analyse des situations consiste à poser des hypothèses a
priori (c’est-à-dire des prédictions sur les situations) qui sont ensuite comparées aux
observations. Elle consiste ainsi à comparer un pattern7 empirique avec celui anticipé.
Ainsi, dans notre recherche, le pattern est constitué par notre proposition d’un double
mode cognitif/hiérarchique des PERP.

L’utilisation de notre cas vise dès lors, à confronter nos conceptualisations des PERP à
un contexte réel. L’objectif n’est pas de valider empiriquement des hypothèses, ce qui
relèverait d’une démarche quantitative et nécessiterait de travailler sur des échantil-
lons représentatifs, mais d’utiliser un cas pour éclairer empiriquement nos propositions
théoriques et éventuellement les amender.

Dans ce cadre, le mode de recueil que nous avons privilégié est le recours aux entretiens
exploratoires et semi-directifs. En effet nous ne souhaitions pas soumettre notre grille

6 Le nom de l’entreprise et des acteurs du PERP ont été changés pour des raisons de confidentialité.
7 Les patterns s’apparentent à des variables dépendantes non équivalentes ou à des explications ri-
vales.

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d’analyse des PERP aux répondants sous forme de questionnaires ou d’entretiens directifs
et imposer ainsi notre vision de la problématique, mais au contraire nous souhaitions
instaurer un rapport égalitaire avec les personnes interrogées en leur permettant de
produire des discours libres. L’idée étant, en accord avec les préceptes constructivistes
et qualitatifs, d’accéder aux situations tels que les individus les vivent et se les repré-
sentent (Wacheux, 1996).

Les interviews effectuées sont approfondies et reposent sur une grille d’entretien évo-
lutive, intégrant à la fois des thèmes issus de la littérature et d’autres émergeant de
l’analyse des données empiriques. Afin de dégager les différents thèmes apparus dans
les entretiens et mesurer leur congruence avec nos propositions théoriques, nous avons
eu recours à une analyse de contenu (Azan et al., 2009). Nous avons ainsi procédé à la
lecture flottante de l’ensemble des entretiens en vue de définir les différents thèmes et
sous-thèmes du corpus.

En amont du projet de SI, deux utilisateurs finaux ont été interviewés. L’un, appartient au
service contrôle de gestion et l’autre, au service gestion de production. En outre, pendant
le projet, les données ont été recueillies auprès du directeur des systèmes d’information,
d’un chef de projet assistant à la maîtrise d’œuvre, du consultant fonctionnel et d’un
programmeur. À ce stade, à part les deux utilisateurs finaux, douze entretiens ont eu lieu,
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deux avant la mise en production, deux en 2007, deux en 2008, trois en 2009, trois en
2010 et 2011). Parallèlement, nous avons dirigé deux stagiaires effectuant une période
de 6 mois dans l’entreprise qui parallèlement sont des utilisateurs finaux du SI. Les en-
tretiens ont ainsi été menés auprès de salariés de différents services de l’entreprise et de
niveaux hiérarchiques hétérogènes afin d’obtenir des regards croisés sur notre objet de
recherche. L’échantillonnage a ainsi été effectué non pas dans une perspective statistique,
mais plutôt afin d’obtenir la diversité, la richesse, la profondeur et la qualité du contenu

En complément une visite du site bavarois d’une journée a eu lieu au cours de laquelle,
l’histoire de l’entreprise, sa stratégie à l’international et sa politique d’innovation pro-
duits ont été largement évoquées. Un dossier de presse a également été constitué d’une
vingtaine d’articles traitant de l’entreprise et du secteur sur la base de données Factiva.
Notre travail a ainsi mobilisé trois des six sources de données à savoir : la documentation,
l’entretien et l’observation directe. Cette triangulation des données nous a ainsi permis
de limiter les biais relatifs à la collecte. Enfin, l’article et les analyses qu’il présente sont
soumis pour validation externe à un des membres du groupe projet chargé de la mise
en place de l’ERP.

2.2. Description du PERP mené au sein de Paluda


Le PERP constitue un véritable enjeu pour la croissance de l’entreprise qui doit prendre
en compte de nouvelles exigences réglementaires et disposer d’une instrumentation
plus précise.

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Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

Paluda : une préoccupation croissante du respect de la législation

L’entreprise allemande Paluda8 est fondée en 1921 en Belgique, le nom de l’entreprise


vient des Celtes qui nommaient « Paluda » (ou « Palluda ») les femmes qui avaient le don
de connaître les vertus curatives des plantes et de trouver des remèdes. Elle est en pleine
transformation, soumise en France à deux autorités de contrôle, la DGCCRF9 qui veille au
respect du consommateur et l’AFSAPS, qui contrôle la qualité microbiologique du produit.

Elle vend des cosmétiques, des médicaments, des produits diététiques et de bien-être.
Entreprise tri-nationale à la fois belge, allemande et française, elle propose des médications
(injectables ou infusables) dont la particularité est d’être naturelles et à base de plantes
issues de l’agriculture biologique. Ces dernières sont cultivées par l’entreprise selon les
principes de l’agriculture responsable et raisonnée. L’entreprise compte 317 salariés en
France. La réglementation joue un rôle croissant puisqu’un des paris de l’entreprise est
de transformer les plantes sitôt cueillies, afin d’en préserver les qualités et d’avoir tout
au long des processus de production une démarche respectueuse de l’environnement.
Elle cultive 250 espèces de plantes sur 20 hectares réparties en microparcelles séparées
par des haies qui servent de niches aux oiseaux et aux insectes. Les plantes récoltées sont
broyées, macèrent ou infusent et sont transformées en extraits et incorporées aux crèmes.
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Les approvisionnements, la gestion du cycle de production ou encore le conditionnement,
sont autant de variables critiques pour l’entreprise. Dès lors, l’instrumentation de gestion
comme les ERP apparaît comme structurante.

L’ERP : une solution technologique adaptée

Le PERP concerne la partie française de l’entreprise qui se trouve à Irzach et a pour


objet principal d’effectuer la bascule d’une ancienne version à une version supérieure
(ERP Sage X3) impliquant un reengineering. 1000 jours de travail ont été budgétés et
plusieurs objectifs ont été assignés à l’équipe projet. Il s’agissait notamment de procéder
à un reengineering visant au respect des normes de production et à moderniser l’ERP
et le cycle de production.

La suite Sage® X3 est un progiciel de gestion intégré qui apporte plusieurs avantages
par rapport à la version précédente, notamment, la vitesse et la simplicité d’intégration.
Edité par Sage Adonix, elle propose aux entreprises moyennes une offre fonctionnelle
complète, dans les domaines de la gestion financière, commerciale, industrielle, de la
gestion de la relation client et de l’e-business. La version précédente était sous-utilisée.
La nouvelle version doit permettre à l’entreprise de garantir une qualité du produit dans
sa globalité, conforme aux futures normes européennes. L’infrastructure est également
légère et facile à administrer. L’argument particulièrement convaincant dans le cas de
Paluda, selon les acteurs, fut l’adaptation sectorielle du progiciel. Il est particulièrement
requis pour les industries comme la chimie et la pharmacie qui constituent précisément
le cœur de métier de l’entreprise. Le PERP apparaît comme un projet de transformation
selon Ross et Beath (2002).

8 Les noms et les sites ont été changés pour des raisons de conf identialité.
9 DGCCRF : Direction Générale de la Consommation de la Concurrence et de la Répression des
Fraudes. AFSSAPS : Association Française de Sécurité Sanitaire et de Produits de Santé.

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N°75 - Janvier 2015

Les dispositifs encadrant le PERP

La solution est déployée en mai 2008. Classiquement, le projet comprend deux entités de
pilotage. Un groupe projet qui se compose de 4 personnes. La maîtrise d’œuvre est assurée
par un Directeur des Systèmes d’information. Le rôle de représentant des utilisateurs est
tenu par le responsable production. Son rôle est central dans le groupe dans la mesure
où il dispose des connaissances métiers. On trouve également un représentant qualité,
ayant intégré l’entreprise en cours de projet. Enfin, l’assistance à maîtrise d’ouvrage est
assurée par un consultant.

Un comité de pilotage dans lequel on retrouve les membres du groupe projet et de la


direction générale. Il se compose de cinq représentants fonctionnels issus des corps de
métiers suivants : Direction générale, Comptabilité, Production et Pharmacie, qualité
et Organisme de normalisation ADN, maîtrise d’ouvrage. Il constitue une structure de
validation.

Afin d’impliquer largement les acteurs de l’organisation à la réflexion, douze groupes de


travail ont été formés. Parmi ceux-ci, on trouve des groupes thématiques tels que le groupe
de travail comptabilité, cosmétique ou encore pharmacie. Ces groupes sont managés par
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l’assistance à maîtrise d’ouvrage (le consultant) et chaque groupe est animé par un pilote.

Les formations sont effectuées dans deux salles, cette unité de lieu contribue à favoriser
les interactions entre les acteurs, la circulation de connaissances. Le consultant à l’as­
sistance maîtrise d’ouvrage participe aux formations.

2.3. Résultats

L’organisation du projet a été, à sa genèse, prise en charge par un directeur informatique.


Dans son équipe, deux développeurs qui connaissent à la fois les aspects métiers et in-
formatiques, ont assuré l’interface. Durant le projet, l’ancien chef de projet utilisateur est
devenu progressivement le responsable du projet. Le responsable projet initial, dans le
même temps, a « hérité » du suivi des consultants maîtrise d’œuvre et d’ouvrage.

La formation au progiciel s’est déroulée du 5 au 25 octobre 2008. Les acteurs projets


connaissaient l’organisation, mais pas les normes ni leur codification. La hiérarchie a
été formée et a encadré les subordonnés. C’est ici l’un des points forts du projet, l’im-
plication des salariés a, en effet, été particulièrement importante. La réussite du projet
doit beaucoup à cette large et rapide appropriation des acteurs de l’organisation. Un
des acteurs du projet nous l’avoue rétrospectivement « la bascule effective de l’ancien
ERP vers le nouveau s’est faite le 8 mai. Il y a eu quelques twists10, mais depuis le projet est
en place ». Le contexte a également été favorable dans la mesure où l’activité était alors
marquée par une forte expansion et que, de ce fait, l’ERP n’avait pas pour objet d’opérer
des coupes sombres mais accompagner une croissance forte de l’activité. Malgré la crise,
l’entreprise a en effet obtenu une augmentation de 20 millions d’euros de son chiffre
d’affaires entre le début du PERP et 2010.

10 Il a fallu assouplir plusieurs procédures peu compatibles avec les processus en place.

178
Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

La confiance des représentants dans le PERP fut sans doute un autre élément déterminant
dans sa réussite. Ces derniers ont été nommés par grands départements (­comptabilité-client,
pharmacie, production). Selon un chef de projet, les gens ont à 90 % confiance dans leurs
représentants qui sont légitimes pour la plupart. Cette légitimité a permis de crédibiliser
et de discipliner les acteurs autour du projet. Elle s’est vue renforcée par la validation
externe qu’a obtenue le projet via la société ADN11.

Un autre facteur de réussite réside sans doute dans la pertinence du dispositif mis en
place pour encadrer la réflexion, en particulier sa flexibilité qui a permis un changement
de responsable de projet durant le processus. Enfin, deux types d’acteurs ont joué un
rôle prépondérant dans la réussite du projet :

– d’une part, la participation de certains programmeurs de Paluda qui, étant donné leur
parcours professionnel, bénéficient d’une double compétence informatique et métier. Ces
derniers ont en effet généralement débuté leur carrière par une fonction opérationnelle
développant ainsi leur connaissance des métiers de l’entreprise. Leurs compétences
informatiques leur ont permis d’évoluer ensuite vers les métiers de la programmation.
Cette double compétence combinée à une connaissance de l’ERP a joué un rôle primordial
dans la gestion des commandes et dans la phase « d’encodage ». Ils ont en effet été parmi
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les seuls à pouvoir établir une codification des articles cohérente.

– d’autre part, les consultants qui ont notamment été mobilisés dans la rédaction du
cahier des charges. Ce dernier a été construit avec une flexibilité suffisante pour intégrer
les évolutions qui ont eu lieu au cours du projet. La réussite du projet leur doit beaucoup.

3. Discussion

L’analyse menée fait ici l’objet d’une discussion. Nous revenons dans un premier temps,
sur les modalités d’implication des CPs dans le PERP. Ensuite la question de la coexis-
tence et de l’alternance des modes hiérarchiques et cognitifs au sein d’un même projet
est discutée. Nous analysons enfin l’impact de l’ERP objet frontière sur l’architecture
cognitive de l’entreprise.

3.1. PERP impliquant les CPs à travers la mobilisation des utilisateurs


finaux
Par l’intermédiaire de nos observations sur le terrain et d’entretiens menés post-projet
(Annexe 1), nous avons pu identifier plusieurs communautés de pratique au sein de
Paluda notamment chez les informaticiens et au sein des personnels de la production ou
de la qualité. Une première communauté existe chez les informaticiens. Ces derniers font
en effet largement appel à des modes de coordination informels. Un des informaticiens
confesse à ce propos que très souvent, les problèmes complexes sont réglés hors des
réunions formelles, lors de la pause cigarette ou de la pause-café. De même, beaucoup se
fréquentent en dehors du lieu de travail lors d’activités de loisirs qu’ils ont en commun.

11 Organisme neutre, ADN est une société leader spécialisée dans la gestion des exigences et des
risques intégrant les contraintes de validation en amont, af in de privilégier la traçabilité de la preuve à la
formalisation documentaire.

179
N°75 - Janvier 2015

Ces rencontres informelles régulières permettent ainsi l’échange d’histoires de guerre


(Orr, 1990) et contribuent au partage de compétences concrètes. Elles entraînent éga-
lement un climat de confiance entre ses membres et l’utilisation d’un langage commun
qui leur est propre. Ce dernier est évidemment empreint de jargon technique mais se
traduit également par des éléments plus originaux et anecdotiques comme par exemple
l’emploi de surnoms entre eux ou pour désigner des personnes extérieures à la com-
munauté. Par exemple, le responsable expédition, chargé notamment d’appliquer des
étiquettes éditées par le système d’entreprise, est systématiquement nommé par les
informaticiens le « terminator ». C’est un moyen pour la communauté des informaticiens
de se comprendre et de se repérer.

Rencontres informelles, échanges d’ « histoires de guerre », échanges de compétences,


langage commun, engagement mutuel, auto-organisation, ouverture sur l’extérieur : on
retrouve bien chez les informaticiens Paluda l’ensemble des dimensions définissant une CP.
Afin de ne pas surcharger l’analyse, nous ne décrivons pas les autres CPs, que nous avons
pu observer au sein de Paluda. Du reste, la prise en compte de l’architecture cognitive
de la firme n’implique pas l’établissement d’une cartographie exhaustive de l’ensemble
des CPs. En effet, ce type de travail est, d’un point de vue théorique, potentiellement
réalisable, mais ne constitue pas en pratique une contrainte raisonnable. Le caractère
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auto-organisé des communautés et le nombre important de pratiques circulant au sein
de grandes entreprises telles que Paluda, impliquerait un travail d’observation long et
coûteux en amont du PERP. Cela entraînerait une inefficience évidente de ce dernier. Nous
considérons ainsi à la fois qu’il existe au sein de Paluda des CPs différentes et d’autre
part que le PERP a pris en compte les CPs à travers l’implication des utilisateurs finaux12.

La réussite du PERP et de sa mise en œuvre semble ainsi s’expliquer par la forte partici-
pation des utilisateurs finaux, notamment en production. Les groupes de travail ciblés
par métier ont en effet permis d’améliorer considérablement le système en place et
d’impliquer largement les opérationnels (utilisateurs). Par exemple, l’un des groupes de
travail a souligné l’existence de points faibles dans les procédures de retour produit et
de stockage. Une réflexion a alors été lancée pour tenter de résoudre ce problème. Les
experts métiers ont largement contribué à cette réflexion. Les synthèses du groupe ont
fait l’objet de rediscutions dans le cadre du groupe projet. Il a ainsi été décidé d’adopter
un processus de scannérisation des produits.

Il ressort ainsi de l’analyse que la mise en place d’un ERP, nécessite un apprentissage
croisé (Huber, 1994) entre les membres de plusieurs communautés. Dans la mesure où il
englobe des pratiques hétérogènes, un PERP va impliquer des communautés différentes
ayant chacune leur propre identité (jargon, langage, artefacts, outils…)13. L’objectif dans

12 Cette analyse entre en résonnance avec des études empiriques menées dans le cadre de divers
terrains (Bootz, 2009, 2011 ; Bootz et Kern, 2009) qui montrent que les CPs existent dans toutes organisa-
tions pour certaines pratiques qui réunissent les conditions à leur développement (rencontres informelles,
engagement mutuel, activité non stabilisée…) mais leur caractère auto-organisé en font une réalité non
visible de l’extérieur. Ces mêmes auteurs montrent par ailleurs que l’implication des CPs dans des dé-
marches de changement est contingente à la dimension plus ou moins participative du projet. Ainsi, l’en-
semble des utilisateurs f inaux dans le cadre d’un PERP n’appartient pas forcément à une CP mais lorsque
la CP existe il est nécessaire de l’impliquer dans le PERP pour contribuer activement à l’amélioration des
processus et éviter les risques de résistance.
13 Brown et Duguid (1998) soulignent que la connaissance circule différemment à l’intérieur

180
Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

ce cadre est de parvenir à construire un ERP compréhensible et accepté par ces com-
munautés hétérogènes. Corrélativement, cela signifie également que pour construire un
PERP qui respecte l’architecture cognitive de la firme, les différentes CPs doivent être
impliquées sous une forme ou une autre aux réflexions encadrant le projet14.

3.2. Un PERP hybride et dynamique


Le PERP mené au sein de Paluda correspond au départ du projet à une forme hybride
relevant à la fois du mode hiérarchique et cognitif. En effet, le dispositif mis en place a
voulu intégrer dans la réflexion non seulement les super-utilisateurs et les experts métiers
mais aussi les utilisateurs finaux. Cette large mobilisation a permis d’intégrer, comme
nous venons de le voir, les membres des CPs qui ont ainsi pu participer activement au
processus de codification. Ce dernier n’a ainsi pas été réalisé « en chambre » par des
représentants hiérarchiques, mais relève bien d’une démarche participative soucieuse
de coller au plus près de l’architecture cognitive de l’organisation. Cette mobilisation
collective a certainement contribué à la réussite du projet en limitant les risques de
résistances des CPs présentes dans l’organisation. La codification n’est pas ici imposée
aux CPs mais construite avec eux.
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Du point de vue du dispositif et de la codification, le projet relève ainsi clairement du
mode cognitif. En revanche, pour ce qui concerne les acteurs interface et le processus
de construction de l’objet frontière, l’appartenance à ce mode est moins claire dans
la mesure où elle s’est construite au fil du projet. Au départ, le responsable du projet
(acteur interface) a été désigné par la hiérarchie. Il constitue à ce titre un nominated
boundary spanner. Il a notamment été choisi pour ses compétences informatiques qui
représentaient, aux yeux de la hiérarchie, un gage de réussite pour un tel projet. Ce der-
nier a ainsi cherché à construire un objet frontière en s’appuyant essentiellement sur
son capital symbolique et sa propre vision (designated boundary object). Il s’avère que
les compétences et la vision du chef de projet sont clairement empruntes de technique
et d’informatique mais laissent peu de place aux autres « métiers » de l’entreprise ou à
d’autres dimensions. Cette forte contingence a impliqué une remise en cause des capacités
d’interfaçage du chef de projet ainsi que de sa légitimité. Il a ainsi été placé au cours du
projet sous la tutelle de l’ancien chef de projet utilisateur qui lui, dispose d’une double
compétence « métiers-informatique ».

Il a, à ce titre, pu bénéficier d’une légitimité plus forte en tant qu’acteur interface. Il re-
lève ainsi davantage du boundary spanner in practice. La réussite du projet repose sans
doute pour partie sur ce glissement qui s’est opéré entre le nominated boundary spanner
et le boundary spanner in practice. Cela a permis de renforcer la légitimité et l’accep-

des CPs et entre les CPs. Dans les CPs la connaissance circule facilement parce qu’elle est intégrée aux
pratiques. Les membres de la communauté partagent de manière implicite l’interprétation de ce qu’est la
pratique et favorisent en cela le déploiement des connaissances. Mais entre les CPs où, par déf inition, les
pratiques ne sont pas partagées, le « know-what » et le « know-how » doivent être séparés pour permettre à
la connaissance de circuler. Ce processus de séparation rend la circulation de connaissances problématique
dans la mesure où les CPs ont des standards différents, des idées différentes sur ce qui est important,
différentes priorités, et différents critères d’évaluation.
14 Boudreau et Robey (2005) et Azan et Beldi (2009) soulignent avec d’autres cadres théoriques la
nécessité de prendre en compte la singularité de l’utilisateur et son inconstance dans le cas de technologies
intégrées.

181
N°75 - Janvier 2015

tation du projet par les acteurs de l’organisation. En tout cas sur la double dimension
acteurs interface - objet frontière, le projet a évolué d’un mode hiérarchique à un mode
cognitif. On constate également, à travers cet exemple, que le responsable du projet ne
joue pas seul le rôle d’interface. Il est épaulé pour cela par d’autres individus. Il s’agit
ici notamment des consultants externes et des programmateurs Paluda. Comme nous
l’avons vu certains programmeurs bénéficient d’une double compétence informatique/
métier. Cette maîtrise d’une compétence en A (Leonard-Barton, 1995) leur permet de
tenir le rôle de courtier de connaissances15. Les consultants et leurs compétences en T16,
jouent quant à eux le rôle de traducteurs, en facilitant les échanges entre membres de
communautés différentes.

3.3. L’impact de l’ERP, objet frontière, sur l’architecture cognitive


Quels ont été au sein de Paluda les principaux impacts de l’ERP sur les CPs ? Le PERP en
suscitant un processus de codification participatif a permis la construction d’un objet
frontière (l’ERP) qui a largement facilité les échanges entre CPs. De plus, cette partici-
pation des CPs au projet a suscité une forme d’institutionnalisation dans la mesure où
en s’appropriant l’ERP les CPs acceptent plus facilement de codifier leurs connaissances
dans le cadre de procédures formelles alors que par définition l’échange au sein des CPs
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est essentiellement tacite. Un an après le projet, une interview d’un des programmeurs,
devenu entre-temps, responsable applications, révèle que l’ERP a en effet renforcé consi-
dérablement des savoirs transversaux. Les activités transversales initient en effet les
collaborations entre collègues (Azan et al., 2010). Les procédures d’une manière générale
se sont multipliées. Ces processus de formalisation et d’interaction entre CPs sont positifs
pour Paluda dans la mesure où ils permettent de bénéficier davantage des vertus des
CPs en matière de production de best practices et de développement de compétence. En
effet, l’ERP contribue à externaliser les connaissances qui circulent au sein des CPs au
sens de Nonaka et Takeuchi (1995), c’est-à-dire à transformer les connaissances tacites
en une forme explicite. L’ERP est donc facteur de transformation au sens de Besson et
Rowe (2011), à savoir un phénomène social caractérisant une organisation qui passe
d’un état initial à un état radicalement différent du premier à la suite d’une initiative.

L’impact de l’ERP, objet frontière, sur le maillage des CPs et plus globalement sur l’archi-
tecture de la firme est partiellement abordé par la littérature SI notamment à travers la
dualité intégration versus transversalité. La notion d’intégration renvoie au processus
de mise en relation des différentes parties du SI pour un partage d’informations utiles.
Elle représente le système dans lequel les différents processus et fonctions sont reliés,
standardisés et fortement couplés. La transversalité, quant à elle, est envisagée comme
la perception qu’ont les acteurs de l’organisation de la nature intégrée et couplée des
différents processus organisationnels permettant la production d’un produit et/ou d’un
service. Cette définition renvoie à la notion de vision transversale de l’organisation, au-
trement dit à la capacité d’un acteur à comprendre les contours de son travail et les dif­

15 Chaque barre verticale du A représente des compétences développées dans deux domaines
spécif iques. Les courtiers sont capables de faire passer des connaissances d’une pratique à une autre grâce
à la maîtrise de cette double compétence et à sa reconnaissance par les membres des communautés.
16 Ce type de compétence permet de combiner d’importantes compétences dans un domaine don-
né (barre verticale du T) avec une capacité à les appliquer dans des domaines et des situations très variés
(barre horizontale du T).

182
Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

férentes interactions qu’il a avec les autres acteurs de l’entreprise. Dans le cas d’utilisation
des modules ERP, ceci se traduit par la compréhension des besoins informationnels des
autres acteurs qui interviennent dans le même processus et par l’impact de son action
dans l’ERP sur le travail des autres (Markus et Tanis, 2000).

Notre étude souligne ainsi que l’ERP peut être un véritable objet frontière épousant une
architecture cognitive dont une partie est préexistante et complémentaire avec une ar-
chitecture hiérarchique initiant les transformations. Azan (2004) montre que les phases
de transformations initiées par les ERP et la structuration qui en résulte trouvent comme
limite les mécanismes de création de valeurs dans des organisations de conception placées
en hypercompétition. L’étude réalisée ici approfondit dans un contexte très différent
l’idée d’un ERP certes représentatif des lacunes organisationnelles (Besson, 1999) mais
également des savoirs et des communautés que détient l’organisation. Ainsi, les modes
hiérarchiques semblent adaptés à la dynamique nécessaire au processus de transformation.
En revanche, la phase de stabilisation paraît plus adaptée à une configuration cognitive.

Conclusion : La capacité de « switch » du mode hiérarchique au


mode cognitif un facteur clé de réussite ?
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Lors de ce projet d’ERP, le succès est atteint grâce à un switch entre architecture hiérar-
chique et cognitive. Ce travail peut ainsi devenir prescriptif à l’égard des praticiens, car
si certaines de nos analyses ou conclusions sont évoquées par d’autres (Markus et Tanis,
2000 ; Beretta, 2002), certains projets ERP auraient pu aboutir par la prise en compte
de ce mécanisme méconnu.

Ce cas suscite un certain nombre de réflexions sur le double mode (hiérarchique/co-


gnitif) des PERP. Tout d’abord, les deux modes que nous avons voulu mettre en avant
constituent avant tout des idéaux-types au sens Wébérien, c’est-à-dire des formes pures
de l’entendement qui ne se retrouvent jamais telles quelles dans la réalité mais dont la
fonction heuristique facilite l’appréhension sensible de situations (Wacheux, 1996). En
effet, en pratique l’on constate l’existence de formes hybrides et évolutives. Un PERP
peut très bien relever dans un premier temps d’un mode hiérarchique et glisser par la
suite vers un mode cognitif. Les deux modes peuvent également coexister à un moment
donné en fonction des choix réalisés en matière de dispositif, de codification, d’acteur
interface ou d’objet frontière.

Cette nature évolutive et hybride des PERP pose des questions qu’il serait intéressant
de creuser dans le cadre de futures recherches. On peut par exemple se demander s’il
existe des phases dans un projet PERP dans lesquelles un mode serait plus efficient que
l’autre. Le début du projet pourrait davantage plaider pour une approche hiérarchique
afin de gérer sa genèse en maîtrisant le plus d’éléments possibles. Puis, des phases pour
lesquelles le mode cognitif deviendrait incontournable afin de faciliter sa mise en œuvre
effective. Il semble bien que la réussite du PERP réside dans cette capacité de passer d’un
mode à l’autre. Le facteur clé de succès pourrait résider dans la flexibilité des dispositifs
encadrant les PERP. Le phénomène de « switch » en SI n’est pas sans rappeler les travaux
d’Adler et de Newell et al. (2003) sur l’ambidextrie. Adler et al. (1998, 1999) revisitent
la traditionnelle opposition entre flexibilité et efficience. Newell et al. (2003) adaptent

183
N°75 - Janvier 2015

la typologie d’Adler et al. à l’introduction simultanée dans une très grosse entreprise
d’un ERP et d’un outil de KM. L’ERP semble l’outil de la transversalité des processus
dans l’organisation (El Amrani, 2008). Son point faible est alors le manque de souplesse.
L’hypothèse de départ est que l’ERP est source d’efficience et que l’outil de KM amène
de la flexibilité.

Il convient, pour finir, d’insister sur les limites de l’étude. Elle est effectuée sur une
période courte (2 ans) et ne porte que sur un cas. Il pose les bases d’un certain nombre
de réflexions qui nécessitent un approfondissement grâce à d’autres terrains. Il nous
semble que l’approche par les communautés et la grille d’analyse de Levina et Vaast
(2005) constituent des outils validés empiriquement, issus d’une épistémologie situa-
tionniste et bourdieusienne moins fréquemment mobilisée que d’autres théories sociales,
qui permettent d’apporter un regard original et éclairant sur les PERP. Ces approches
constituent ainsi à nos yeux des perspectives de recherches futures fécondes.

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Pilotage des projets d’ERP fondé sur les communautés de pratique :
entre architecture hiérarchique et cognitive

Annexe 1 – Questionnaire utilisé afin de repérer l’existence de


communautés de pratique
Fonction, ancienneté, service concerné.

Combien de personnes dans l’entreprise sont concernées par cette pratique ? Appartiennent-elles
au même service ? Vous arrive-t-il sur certains sujets de consulter des personnes concernées
par cette pratique mais appartenant à d’autres organisations ?

Avec les personnes partageant la même pratique que vous, vous arrive-t-il de résoudre collecti-
vement certains problèmes spécifiques en dehors de réunions planifiées, de manière informelle ?

Réalisez-vous des partages d’expériences en dehors de processus de KM planifiés, de retours


d’expériences ?
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Quelle est la fréquence de ces échanges informels ?

Gardez-vous des traces écrites de ces échanges afin de les faire remonter à la hiérarchie ?

Avez-vous l’impression que ces échanges contribuent à améliorer vos compétences ? Votre
identité de professionnel ? Si oui comment cela se traduit-il concrètement ?

Partagez-vous avec ces personnes un jargon technique particulier, des codes qui vous sont
propres ?

Annexe 2 – Architecture informatique

– 1 serveur HP type DL380 avec HD internes pour la base de données. ORACLE 64 bits
sur OS windows 64 bits (64 bits afin d’augmenter la rapidité des traitements de la base).

– 1 serveur HP type DL380 pour le serveur de traitement. X3 est monté en 32 bits.

– 3 serveurs frontaux type DL360 (plus petits), les serveurs de connexion utilisateurs en
TSE (1 maître et 2 esclaves et redondance en cas de crash des esclaves).

– 1 serveur de type DL360 : serveur d’impression (des états X3).

– 1 serveur de supervision HP DL 360 : il tourne une appli de HP qui supervise les organes
hardwares de tous les serveurs HP.

– les postes clients : PC normaux en mode TSE. Certains utilisent un client lourd (en cas
de problème de continuité de service liée au serveur maître TSE).

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– Un gros PC supporte la configuration X3 et les bases pour pouvoir faire les développements.

– Un serveur accède à la base de données X3 et au serveur de traitement X3 pour lancer


des requêtes interactives en Webservices (architecture SOA) avec une appli spécifique
permettant de gérer nos stocks par emplacement avec des scanners.

– une sauvegarde centralisée sur un robot HP, 1 serveur, 1 application Netvault.


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