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ET DE L’ESPACE SOUTERRAIN
Recommandations
de l’AFTES
Caractérisation des
incertitudes et des risques
géologiques, hydrogéologiques
et géotechniques
GT32R2F1
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Les réflexions de l’AFTES sur les risques liés au sous-sol ont suscité l’intérêt du Comité Français de Mécanique des Sols et de Géotechnique (CFMS), du Comité
Français de Mécanique des Roches (CFMR) et du Comité Français de Géologie de l’Ingénieur et de l’environnement (CFGI). A leur demande, ces trois comités ont été
associés à une relecture de la présente recommandation et ont proposé des modifications. Ils considèrent en effet que ce texte, bien que rédigé dans l’optique
« ouvrages souterrains », peut être facilement utilisé ou adopté pour d’autres types d’ouvrages fortement conditionnés par les risques liés au sous-sol.
Le texte qui suit a été validé par le Comité technique de l’AFTES le 23/07/12.
L'AFTES recueillera avec intérêt toute suggestion relative à ce texte.
Synthèse
Synthèse
Objet de la recommandation A titre d’exemple, le risque est défini comme l’effet de l’incertitude sur l’atteinte
des objectifs ; le niveau (gravité) de ce risque résulte d’une combinaison entre
La présente Recommandation se place dans la continuité des travaux anté- la vraisemblance de l’évènement considéré et ses conséquences.
rieurs de l’AFTES qui s’intéressaient aux problèmes posés par les incertitudes
propres aux travaux souterrains :
• la Recommandation du GT1 sur la « Caractérisation des massifs rocheux » (2003), Méthodologie du management des risques
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
• celle du GT32 lui-même, qui avait déjà réfléchi à la « Prise en compte des
incertitudes géologiques dans les DCE » (GT32-1 2004), L’AFTES considère que l’étude des incertitudes et risques géotechniques
• celle du GT25, consacrée aux bonnes pratiques en matière de maîtrise des est un processus itératif, qui doit être répété à la fin de chaque phase du
coûts et de contractualisation des projets (2007). projet (par exemple EP, AVP, PRO…), avant de passer à la phase suivante.
En effet, c’est sur la base de cette étude, et des conclusions qu’en tirera
Elle se justifie par le fait qu’il n’existe pas encore de méthodologie partagée le maître d’ouvrage quant aux risques qu’il veut ou non assumer, que le
pour caractériser les incertitudes géotechniques, ni pour encadrer les analyses maître d’œuvre décidera de lancer des reconnaissances complémentaires,
de risques, et parce que les nouveaux types de contrats (conception-construc- de modifier le projet, de changer de méthode d’exécution, etc.
tion, PPP, concession…) ont parfois conduit à des dérives et des illusions quant
aux modes d’affectation de ces risques. Cette démarche suppose impérativement d’avoir fait des reconnaissances
géotechniques suffisantes (même en cas de consultation anticipée des entre-
Or l’AFTES est convaincue que les incertitudes et risques géotechniques prises), car on ne peut pas affecter ou partager de manière loyale des risques
affectant les projets d’ouvrages souterrains doivent être identifiés, représentés qui n’auraient pas été correctement caractérisés auparavant. Elle comprend
et évalués aussi tôt et objectivement que possible. Pour en maîtriser les effets, trois séquences successives, qui sont à répéter à chaque phase du projet, et
les méthodes constructives et leur mode de rémunération doivent être expli- qui sont schématisées sur le logigramme de la Figure 1 (page 281) :
cités dans le DCE, puis validés par les deux parties avant signature du marché - Le bilan des connaissances et incertitudes géotechniques,
de travaux. Le but de la Recommandation est donc d’inciter tous les acteurs - L’appréciation des risques qui en découlent,
à prévoir à l’avance des moyens nécessaires pour faire face aux évène- - Le traitement de ces risques.
ments géotechniques incertains, afin que leur survenance impacte le
moins possible le coût et le délai de réalisation de l’ouvrage. a) Bilan des connaissances et des incertitudes. Cette séquence recouvre en
grande partie, en la complétant, l’établissement des cahiers A et B définis dans
Le terme « géotechnique » est employé ici au sens large et englobe tout ce la première Recommandation du GT32 ; elle comprend quatre étapes :
qui touche à la géologie, l’hydrogéologie et la géotechnique stricto sensu. • La compilation des données factuelles, qu’elles aient été acquises spéci-
Il peut être étendu par analogie aux « risques anthropiques » liés aux vieilles fiquement pour le projet ou qu’elles proviennent de chantiers antérieurs ou
fondations, galeries, puits et vestiges divers. De même, les risques induits de publications (c’est le cahier A) ;
par les travaux souterrains sur le bâti avoisinant (objet du GT16 de l’AFTES) • L’analyse de la fiabilité des données, qui aboutit à retenir ou écarter
pourraient relever d’une démarche analogue. certaines données pour établir les modèles géologiques et hydrogéologiques,
et définir le contexte géotechnique ; cette analyse critique est à effectuer et
consigner au début du cahier B ;
Terminologie • la rédaction du Mémoire de synthèse géotechnique (MSG), complété par
le Profil en long géotechnique, l’ensemble constituant le cahier B ;
Pour éviter des malentendus très fréquents, l’AFTES a pris le parti de préconiser • enfin, l’établissement du Registre des incertitudes géotechniques, qui est
l’emploi strict et exclusif de la terminologie qui a été définie au niveau en quelque sorte le « négatif » du MSG ; ce registre récapitule toutes les
international, en français et en anglais, par deux normes ISO : inconnues et incertitudes sans analyser leurs conséquences en termes de
• ISO 31000 : 2009 (F) – « Management du risque - Principes et lignes génie civil ; il constitue le dernier chapitre du MSG.
directrices ».
• ISO : Guide 73 : 2009 (E / F) – « Management du risque - Vocabulaire ». b) Appréciation des risques. Cette séquence peut être enclenchée dès que
l’on a une première idée du mode de construction de l’ouvrage, c’est-à-dire
Ce vocabulaire, non spécifique à la géotechnique, est détaillé au chapitre 2 de une première esquisse du Mémoire de conception (cahier C). Elle se décom-
la Recommandation ; il comprend une quinzaine de termes dont l’acception pose en trois étapes :
diffère parfois de ce que chacun croit être le langage courant, mais dont • L’identification des risques, qui consiste à passer en revue toutes les
l’emploi permet d’éviter l’introduction de nouvelles définitions, qui ne feraient incertitudes et à imaginer leurs conséquences positives ou négatives sur
que rajouter à la confusion. les conditions de réalisation de l’ouvrage ; cette étape s’appuie sur
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l’expérience d’ouvrages antérieurs dans des terrains analogues, avec projet (G2), en vue d’une première estimation du coût de l’ouvrage. Le modèle
recherches bibliographiques et consultation d’experts ; géologique issu des reconnaissances permet de bien identifier les conditions
• L’analyse des risques, qui consiste à quantifier au mieux (sinon à qualifier) géotechniques qui peuvent être source de risque et les principes généraux
la vraisemblance des évènements incertains et la gravité de leurs consé- pour en limiter les conséquences (adaptation du tracé, du profil en long,
quences en terme de coût, délai, sécurité du chantier, impact environne- lancement d’une galerie de reconnaissance, dispositions constructives plus
mental... Comme les conséquences d’un évènement peuvent affecter robustes…). Ces analyses conduisent à remettre à jour le Registre des risques.
différemment plusieurs objectifs, le niveau de risque qui en résulte varie
selon les objectifs et priorités définis par le maître d’ouvrage. Pour illustrer c) Phase Projet (PRO). Cette phase comprend une actualisation de l’étude
cette analyse, on utilise souvent une matrice à deux entrées (vraisemblance * géotechnique de projet (G2), en vue d’aboutir à un projet bien défini. Doivent
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
conséquences) avec des coefficients multiplicateurs. être décidées les investigations à prévoir à l’avancement, les valeurs-seuils
• L’évaluation du risque consiste à comparer les résultats de l’analyse associées aux méthodes d’exécution (convergences, tassements, vibrations)
précédente avec les critères d’acceptabilité définis par le maître d’ouvrage ; et les procédures d’auscultation. Comme il n’y aura plus a priori de reconnais-
elle permet de déterminer les risques nécessitant un traitement pour ramener sances nouvelles, le Registre des risques peut être finalisé. Il permettra au
leur gravité à une valeur acceptable. maître d’ouvrage de prendre la mesure des risques résiduels, de vérifier leur
acceptabilité et d’arrêter sa stratégie définitive de gestion des risques et de
c) Traitement des risques. Cette séquence consiste à réduire l’importance la transcrire dans le marché de travaux.
d’un risque, voire à le supprimer en agissant sur un ou plusieurs leviers :
réduction de la vraisemblance par de nouvelles reconnaissances, réduction d) Phase Assistance au contrat de travaux (ACT). Cette phase consiste notam-
des conséquences par modification du tracé, du profil, des méthodes, etc. ment à transcrire les dernières versions des documents antérieurs sous la
Après application de ces mesures, le niveau du risque est à nouveau évalué forme des cahiers A, B et C du DCE, et à les compléter par les chapitres ou
et comparé aux critères du maître d’ouvrage, et ainsi de suite. documents relatifs à la gestion des risques. Conformément au nouveau
Fascicule 69 du CCTG (à paraître en 2012), c’est à ce stade que le maître
Ce processus d’analyse itératif conduit à modifier et compléter à chaque fois d’œuvre doit rédiger le Plan de management des risques, qui doit notamment
le cahier C, notamment si des reconnaissances complémentaires ont été lan- définir l’affectation des risques résiduels en accord avec le maître d’ouvrage.
cées pour tenter de réduire certaines incertitudes. Afin d'assurer la traçabilité
des études, il convient d'établir et de tenir à jour un « Registre des risques », Enfin, des recommandations détaillées sont données en annexe 3 sur le
dans lequel sont reportées toutes les actions de traitement mises en œuvre processus d’élaboration des coupes géologiques, sur le type de données à
avec leurs résultats escomptés. y représenter et sur la manière de figurer les incertitudes. Après avoir défini
la notion de Modèle géologique en 3D, on présente le contenu des documents
successifs à établir, à savoir la Carte d’affleurements et la Carte géologique
Application de la méthodologie interprétée, le Schéma géologique de principe, puis la Coupe documentaire et
à chaque phase du projet la Coupe interprétative. Enfin, on insiste sur l’importance du Profil en long
géotechnique, document récapitulatif qui est l’illustration et le complément
Le chapitre 4 de la Recommandation a pour but d’expliquer comment la métho- indissociable du Mémoire de synthèse géotechnique.
dologie exposée ci-dessus s’applique à un projet classique régi par la loi MOP,
avec consultation des entreprises au stade Projet. On rappelle d’abord la
correspondance entre les phases d’études selon la loi MOP et les missions
d’ingénierie géotechnique définies par la norme NFP 94-500. Le processus
d’étude des risques est ensuite décliné pour chaque phase du projet :
a) En phase Etudes préliminaires (EP). Cette phase, qui coïncide avec la mission
géotechnique (G11) de la norme, comporte un inventaire et une identification
complète des incertitudes et risques du projet, en s’inspirant de l’expérience
de travaux antérieurs (c’est un travail d’expertise). Les documents résultants
comprennent, outre le Dossier d’études préliminaires prévu par la loi MOP :
• une fiche dûment renseignée pour chaque risque identifié,
• le Registre des incertitudes et le Registre des risques potentiels pour le
chantier,
• le programme des actions de traitement à entreprendre, notamment des
reconnaissances géologiques, hydrogéologiques et géotechniques.
b) En phase Avant-projet (AVP). Cette phase comprend à la fois une Etude Réalésage de la descenderie de St-Martin-la-Porte
géotechnique d’Avant-projet (G12) et une première Etude géotechnique de suite à de grandes convergences.
1 - Objet de la recommandation-
1 La recommandation publiée en 2003 (TOS N°177) a remplacé une précédente recommandation, sensiblement plus sommaire, publiée en 1978 (TOS N°28).
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est d’inciter tous les acteurs à prévoir à l’avance des moyens et procédures Ainsi, les annexes 1 à 7 associées au présent document regroupent un ensem-
adaptés pour faire face aux évènements géotechniques incertains, afin que ble de préconisations portant sur des points particuliers non traités dans le
leur survenance impacte le moins possible le coût et le délai de réalisation texte de la Recommandation avec le degré de détail requis. Ces préconisations
de l’ouvrage. n’interfèrent pas avec la démarche générale exposée dans le corps du texte,
mais doivent être considérées comme des aides ou des outils utiles à sa mise
Pour contribuer à cet objectif, la recommandation du GT32 vise principalement en application. Elles portent sur les points suivants :
à: 1 - Correspondance de la Recommandation du GT32.R2F1 avec les textes
• Préciser la terminologie en matière d’incertitudes et de risques liés au existants
sous-sol (objet du chapitre 2) ; 2 - Qualité des données et fiabilité des interprétations
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
• Etablir une méthodologie pour l’étude des risques (chapitre 3) ; 3 - Elaboration du modèle géologique et représentation graphique des
• Situer la place de ces analyses de risques dans le déroulement des projets incertitudes
selon les procédures françaises classiques, en particulier celles régies par 4 - Incertitudes et risques hydrogéologiques
la loi MOP (Maîtrise d’Ouvrage Publique), depuis les études préliminaires 5 - Incertitudes et risques liés aux paramètres géotechniques
jusqu’à la préparation du DCE (chapitre 4) ; 6 - Récapitulation des sources de risque
• Faire des propositions en vue d’améliorer certaines pratiques et outils néces- 7 - Méthodes de quantification des risques
saires comme l’analyse de la fiabilité des reconnaissances, la représentation
graphique des incertitudes sur les coupes géologiques, etc. (cf. annexes).
2 - Terminologie-
Ci-dessous sont reprises, en italique gras, les définitions des principaux termes Identification des risques : processus de recherche, de reconnaissance et
empruntés aux documents ISO ; les notes mentionnées en italique maigre de description des risques.
appartiennent également à la norme ISO. Il s'agit d'extraits (sans modification, → Note 1 - L'identification des risques comprend l'identification des sources
ni commentaire) du texte français de la norme, qui a été également publiée de risques, des évènements, de leurs causes et de leurs conséquences
en anglais. potentielles.
→ Note 2 - L'identification des risques peut faire appel à des données
Risque : effet de l'incertitude sur l'atteinte des objectifs historiques, des analyses théoriques, des avis d'experts et autres
→ Note 1 - Un effet est un écart, positif ou négatif, par rapport à une attente. personnes compétentes et tenir compte des besoins des parties
→ Note 5 2 - L'incertitude est l'état, même partiel, de défaut d'information prenantes.
2 Les numéros de notes figurant dans la norme ISO ont été conservés, même s’il est apparu plus logique d'en modifier l'ordre de présentation.
Événement : occurrence ou changement d'un ensemble particulier de → Note 2 - Les critères de risques peuvent être issus de normes, de lois,
circonstances. de politiques, et d'autres exigences.
→ Note 1 - Un événement peut être unique ou se reproduire et peut avoir
plusieurs causes. Traitement du risque : processus destiné à modifier un risque.
→ Note 2 - Un événement peut consister en quelque chose qui ne se produit pas. → Note 1 - Le traitement du risque peut inclure :
→ Note 3 - Un événement peut parfois être qualifié « d'incident » ou « d'accident ». - un refus du risque en décidant de ne pas démarrer ou poursuivre l'activité
porteuse du risque ;
Analyse du risque : processus mis en œuvre pour comprendre la nature - l'élimination de la source du risque ;
d'un risque et pour déterminer le niveau de risque. - une modification de la vraisemblance ;
→ Note 1 - L'analyse du risque fournit la base de l'évaluation du risque et les
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une valeur de résistance à la compression simple plus élevée sont longues et 2.2.3 - Comparaison avec d’autres documents
nombreuses et que l'écart entre les valeurs réelles et la valeur de projet est traitant du risque
grand.
L'annexe 1 présente une comparaison des termes utilisés dans plusieurs
La vraisemblance du risque (probabilité pour que une ou plusieurs zones documents traitant de la prise en compte des risques : la précédente Recom-
présentent une valeur de résistance à la compression simple plus élevée que mandation du GT 32-1, le document AFNOR NF X 50-117, le « Code of Practice »
la valeur retenue pour le projet) dépend de plusieurs facteurs : de l'ITIG, le manuel RFF pour la maîtrise des risques et les Guidelines ITA/AITES
➨ le nombre et la répartition des sondages carottés le long du projet, (2004) [7].
➨ le nombre d'essais effectués (population statistique),
➨ l'homogénéité du matériau constituant l'unité géologique,
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Les tableaux d'équivalence présentés dans cette annexe révèlent une assez
➨ la dispersion des valeurs mesurées. bonne cohérence entre les divers documents ; cependant, il apparaît que
certains termes importants sont parfois utilisés dans des acceptions diffé-
La vraisemblance est d'autant plus faible que : rentes, ce qui rend nécessaire l'adoption d'une référence unique, d'où le choix
➨ le matériau constituant l'unité géologique concernée présente une grande fait dans la présente Recommandation de s'en tenir strictement à la termino-
homogénéité, logie de l'ISO 31000 [Ref. 10 et 11].
➨ les sondages sont nombreux et répartis de manière adéquate sur toute
la longueur du projet, En complément, le GT32.R2F1 propose que l'utilisation du terme « gravité »,
➨ le nombre d'essais est élevé et qu’ils sont bien répartis sur tous les qui n'appartient pas au vocabulaire proposé par l'ISO 31000, soit néanmoins
sondages, admise pour qualifier l'ampleur des conséquences.
➨ la distribution statistique des valeurs mesurées présente une forte
homogénéité (courbe de Gauss très serrée). 2.2.4 - Recommandation du GT32-1
Dans les documents ISO, l'incertitude est définie comme étant « … l'état,
même partiel, de défaut d'information concernant la compréhension ou la
connaissance d'un événement, de ses conséquences ou de sa vraisem-
blance. » (cf. § 2.1. Définition du Risque, Note 5). Dans la suite de la présente
Recommandation, le terme « incertitudes» (au pluriel) est utilisé selon une
acception correspondant plutôt au résultat de l'incertitude définie ci-avant,
c'est à dire pour désigner des évènements dont les occurrences (nombre et
localisation) et/ou les conditions géotechniques associées sont affectées par
cet état d'incertitude.
Avertissement
La méthodologie du management des risques définie ci-après se superpose au Il convient de souligner que la démarche de Management des Risques
processus d’étude de l’ouvrage souterrain considéré, pour constituer une démarche proposée ici est applicable à toutes les étapes d'un projet, et qu'il s'agit d'un
unique de conception intégrant totalement la problématique des risques. processus itératif à conduire tout au long du déroulement des études.
Pour conduire une telle démarche de conception, qui intègre bien l'ensemble
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3.1 - Bilan des connaissances et l'importance des lacunes de connaissance, c'est à dire de « ce qu'on ne
des incertitudes géotechniques connaît pas ».
Cette évaluation peut être qualitative, semi-quantitative ou quantitative ; parmi
Le bilan des connaissances et des incertitudes géologiques, hydrogéologiques les facteurs à prendre en compte pour évaluer la fiabilité, on peut citer la com-
et géotechniques peut être assimilé à la phase de « Présentation des données plexité du contexte géologique local, la nature des reconnaissances ainsi que
géotechniques dans le Mémoire de Synthèse», telle que décrite dans la leur répartition et "densité" spatiale (cf. annexe 2). C’est à cette étape que l’on
première recommandation du GT32-1 de l’AFTES [2] ; cette phase comporte peut choisir de ne pas retenir certaines données, choix qui doit être dûment
elle-même quatre étapes : justifié, à l’exemple d’un dossier type GBR (Geotechnical Baseline Report).
• Présentation des données brutes disponibles ;
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
3.1.2 - Fiabilité des données Dans les cas où les incertitudes géologiques peuvent conduire à des
modèles géologiques significativement différents entre eux, il est recom-
La deuxième étape consiste à faire une évaluation critique de la qualité des mandé de proposer, au droit des zones incertaines, deux profils en long
différents types de données disponibles : images de télédétection, observations géotechniques prévisionnels correspondant aux deux hypothèses les plus
de terrain, forages, investigations géophysiques, essais en laboratoire et contrastées, la situation réelle pouvant se situer entre les deux. L'étude des
in situ, ouvrages de reconnaissance (puits ou galeries), retours d'expérience risques sera effectuée en parallèle sur les deux profils en long. Si néces-
d'ouvrages avoisinants, etc. Cette étape est fortement recommandée afin saire, le ou les profil(s) prévisionnel(s) peuvent être complété(s) par des
de bien définir la contribution de ces données à l’élaboration du modèle schémas explicatifs jugés utiles pour la bonne compréhension du contexte
géologique, hydrogéologique et géotechnique. Il convient également d'évaluer géologique.
3.1.4 - Registre des incertitudes géotechniques sens de l’ISO et du présent document) comporte trois étapes distinctes :
• l'identification du risque,
La 4 ème étape consiste à récapituler les incertitudes décelées à l'issue de • l'analyse du risque (au sens strict du terme),
l'opération précédente et à les regrouper dans un « Registre des incertitudes » 3. • l'évaluation du risque.
A titre d'illustration, la liste (non exhaustive) ci-dessous présente les principales
incertitudes susceptibles de figurer dans ce registre : 3.2.1 - Identification du risque
⇒ incertitudes correspondant aux lacunes de connaissance géologiques,
hydrogéologiques et géotechniques : elles concernent les zones où le Extraits de la norme ISO 31000 : 2009 (§ 5.4.2 de la norme : Identification
niveau de connaissance est insuffisant pour proposer un modèle fiable ; du risque) :
⇒ incertitudes portant sur la localisation d'évènements certains, par exemple
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
des contacts entre formations géologiques ou entre faciès différents « ...Cette étape a pour objectif de dresser une liste exhaustive des risques
au sein d'une même formation, zones singulières telles que failles, basée sur les évènements susceptibles de provoquer, de stimuler,
chevauchement, zones de cisaillement, etc. ; d'empêcher, de gêner, d'accélérer ou de retarder l'atteinte des objec-
⇒ incertitudes portant sur les conditions géotechniques (extension, nature et tifs… Il convient que l'identification du risque comporte l'examen des
réactions en chaîne des conséquences particulières, y compris les effets
caractéristiques des matériaux constitutifs, hydrogéologie, etc.) associées
en cascade et cumulatifs. Il convient également d'examiner un large
à des évènements certains et éventuellement sur leur localisation (par
éventail de conséquences, même si la source ou la cause du risque
exemple des zones singulières bien identifiées par ailleurs : failles, etc.) ;
peut ne pas être évidente. Tout en identifiant ce qui peut se produire, il
⇒ incertitudes sur l'occurrence d'évènements incertains (possibles ou pro- est nécessaire d'examiner les causes possibles et les scénarios des
bables) bien identifiés, mais dont le nombre, la localisation ou les conditions conséquences éventuelles. Il convient d'étudier toutes les causes et
géotechniques associées ne sont pas connues, par exemple : des zones conséquences significatives.
singulières (failles, etc.), des zones à fortes irruptions d'eau, des karsts ou Il convient que l'organisme utilise des outils et techniques d'identification
des filons de quartz, etc. ; des risques adaptés à ses objectifs et ses aptitudes, et aux risques
⇒ incertitudes résultant de la dispersion (variabilité) naturelle des propriétés auxquels il est exposé. Il est essentiel que les informations utilisées pour
l'identification des risques soient pertinentes et à jour. Il convient autant
du terrain.
que possible qu'elles soient accompagnées d'une documentation
appropriée. Il convient que les personnes ayant les connaissances
Ce Registre des incertitudes se limite à un recensement des incertitudes déce- appropriées participent à l'identification des risques. »
lées, sans en analyser les conséquences. Il doit porter sur l'ensemble de la
Zone d'Influence Géotechnique (ZIG) qui est spécifique à chaque site et à
chaque ouvrage projeté. Cette zone, définie dans la NF P 94-500 [8], corres- L'identification des risques nécessite donc l'analyse des incertitudes vis-à-vis
pond au volume de terrain au sein duquel il y a interaction entre l'ouvrage (du de leurs effets sur les résultats attendus. A priori toutes les incertitudes consti-
fait de sa réalisation ou de son exploitation) et l'environnement (sol, nappe tuent des sources de risques, mais il arrive que certaines soient quasiment
phréatique, ouvrages et bâtiments environnants, etc.). L'étendue de la ZIG sans effet. On peut citer comme exemple l'incertitude portant sur la localisation
dépend des conditions géotechniques, du diamètre de l'excavation, de la du contact entre deux formations géologiquement distinctes mais géotechni-
profondeur mais aussi des méthodes envisagées pour la réalisation. Cette quement semblables, contact qui n'appellera donc aucune modification des
étendue n'est donc pas intrinsèque au site et est susceptible de varier en dispositions constructives ; la position du contact, bien qu'incertaine, n'aura
fonction des différentes options envisagées pour la réalisation ; elle doit donc aucune incidence sur l'atteinte des objectifs.
être constamment actualisée.
Ainsi, seules peuvent être identifiées comme des risques les incertitudes dont
A l'achèvement de cette première phase de « Bilan des connaissances et des les écarts induits par rapport aux modèles géologique ou hydrogéologique (ou
incertitudes géotechniques », les éléments élaborés lors des quatre étapes au profil en long géotechnique prévisionnel) sont suffisamment significatifs
décrites ci-dessus sont rassemblés dans un seul et même document compor- pour engendrer des conséquences notables. Ces écarts peuvent être soit des
tant à la fois un rapport et des pièces graphiques, sans oublier le Registre des opportunités si ces changements de circonstances sont favorables pour le
incertitudes. Lors de l'établissement du contrat de travaux, ce document unique projet, soit des risques (au sens courant du terme) si ces changements sont
constitue le Mémoire de Synthèse Géologique, Hydrogéologique et Géotech- néfastes pour le projet.
nique (tel que le définissait le fascicule 69 du CCTG), ou Mémoire de Synthèse
Géotechnique (MSG) au sens du GT32.R2F1 de l’AFTES [2]. L'étape d'Identification des risques consiste donc à rechercher, parmi les
incertitudes recensées, celles qui sont susceptibles de conduire à l'occurrence
d'évènements dont les conséquences constitueraient des changements
3.2 - Appréciation des risques géotechniques
de circonstances par rapport à celles prises en compte dans les modèles
Pour chacun des risques considérés, la phase d'appréciation du risque (au géologique/hydrogéologique et dans le profil en long géotechnique retenus.
3 Dans bon nombre d'études de risques, le Registre des incertitudes géotechniques est souvent dénommé à tort « Registre des risques ».
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Pour chacune des incertitudes retenues, il peut être imaginé plusieurs L'étape Analyse du risque comporte donc trois opérations :
scénarios comme par exemple : • la quantification des conséquences associées à un événement identifié
➨ pour un évènement donné, un nombre d'occurrences variable, des locali- comme un risque ;
sations différentes ou encore des conséquences plus ou moins graves ; • la quantification de la vraisemblance de cet événement et/ou de ses
➨ pour une « méconnaissance géologique », diverses hypothèses de conséquences ;
configuration du contexte géologique. • la détermination du niveau de risque (importance du risque) par combinaison
des conséquences et de la vraisemblance.
Pour aider à l'identification des risques, il est très utile de procéder à une
recherche bibliographique sur les retours d'expérience d'ouvrages souterrains 3.2.2.1 - Quantification des conséquences associées
à un évènement
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Extraits de la norme ISO 31000: Novembre 2009 (§ 5.4.3 de la norme : Selon les cas, les objectifs peuvent être multiples 4 : coût, délai, environnement,
« Analyse du risque ») : sécurité, performance, juridique, image, etc. En pratique et pour les seuls
risques géotechniques, il apparaît que les objectifs généraux les plus pertinents
« …L'analyse du risque fournit des données pour évaluer les risques et demeurent la sécurité du chantier, le coût, le délai, la performance et
prendre la décision de les traiter ou non, et permet de choisir les stratégies l'environnement. Le plus souvent, la conséquence est estimée comme étant
et méthodes de traitement les plus appropriées. L'analyse du risque peut le surcoût et/ou l'allongement des délais induits par les actions constructives
aussi contribuer à la prise de décisions quand il faut effectuer des choix et nécessaires pour traiter l'évènement rencontré.
que les options impliquent différents types et niveaux de risque.
L'analyse du risque implique la prise en compte des causes et sources de
Des exemples de méthodes de quantification des conséquences sont donnés
risque, de leurs conséquences positives et négatives, et de la vraisemblance
que ces conséquences surviennent. Il convient d'identifier les facteurs affec- en annexe 7.
tant les conséquences et leur vraisemblance, ainsi que d'autres attributs du
risque. Un événement peut avoir des conséquences multiples et affecter 3.2.2.2 - Quantification de la vraisemblance d'un évènement
des objectifs multiples. Il convient de prendre en compte les moyens de L'étape suivante consiste à déterminer la « vraisemblance » de l'évènement
maîtrise des risques existants, leur efficacité et leur performance. identifié et/ou de ses conséquences. La vraisemblance peut concerner soit
Il convient que la façon dont les conséquences et leur vraisemblance l'évènement et ses conséquences, soit seulement ses conséquences :
sont exprimées ainsi que la manière dont elles sont combinées afin de déter-
⇒ Dans le premier cas, il s'agit par exemple d'un événement identifié comme
miner le niveau de risque, correspondent au type de risque, aux informations
possible avec, en cas d'occurrence, des conséquences pouvant être
disponibles et à l'objectif de l'appréciation du risque. Il convient de veiller à
la cohérence avec les critères de risque. Il est également important de tenir diverses. Il convient alors d'envisager plusieurs hypothèses d'occurrence
compte de l'interdépendance des différents risques et de leurs sources. se différenciant par la gravité des conséquences ;
Il convient que le degré de confiance dans la détermination du niveau de ⇒ Dans le second cas, l'évènement est certain mais ses conséquences indé-
risque et de sa sensibilité à des conditions préalables et à des hypothèses terminées. Ce peut être le cas d'une faille dont l'occurrence est certaine
soit pris en compte dans l'analyse et communiqué effectivement aux déci- mais dont la localisation et/ou la gravité sont mal connues.
deurs et, si nécessaire, aux autres parties prenantes. Il convient que les fac-
teurs, comme une divergence d'opinions entre experts, une incertitude, la La vraisemblance de l'évènement lui-même est fonction de plusieurs facteurs
disponibilité, la qualité, la quantité et la validité de la pertinence des infor-
qui caractérisent le niveau de connaissance et qu'il appartient au concepteur
mations ou les limites des modélisations soient mentionnés, voire soulignés.
d'analyser :
L'analyse du risque peut être menée à différents niveaux de détail en fonc-
tion du risque, de la finalité de l'analyse et des informations, des données ➨ le volume des reconnaissances effectuées, leur pertinence (adéquation des
et des sources disponibles. L'analyse peut être qualitative, semi-quantita- reconnaissances au contexte étudié) et leur qualité d’exécution ;
tive, quantitative, ou une combinaison des trois, selon les circonstances... » ➨ la proximité géographique des reconnaissances par rapport à l'ouvrage ;
➨ la complexité du contexte géologique.
4 Dans le document « Guidelines for tunneling risk management » établi par le WG2 de l'AITES, il est proposé sept catégories de conséquences (cf. § 7.3.2) distinguées suivant le domaine concerné.
De son côté, RFF retient quatre classes de conséquences (coût, délai, performance et « autre »).
Au final, la valeur de la vraisemblance dépend essentiellement de la qualité b) Rôle du concepteur et du maître d’ouvrage
du modèle géologique et de sa capacité à bien représenter la réalité ou s’en C'est au maître d'ouvrage qu'il appartient de fixer les valeurs des critères à
approcher au mieux. retenir pour évaluer l’acceptabilité du risque. Ces critères et les valeurs seuils
Le tableau ci-après donne pour la vraisemblance une détermination soit retenues peuvent être différents selon les objectifs attendus. Ce peut être par
qualitative soit quantitative sous forme d'une probabilité. exemple :
➨un coût maximal (ou ayant une très faible probabilité d’être dépassé),
Note Probabilité indicative, exprimé en valeur absolue ou en pourcentage du montant total de l'es-
pour la Échelle
à moduler en fonction timation ;
matrice de vraisemblance
du projet étudié ➨ un délai maximal (ou ayant une très faible probabilité d’être dépassé),
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Le critère peut également, pour un même risque, porter sur une agrégation
1 Improbable 1/200 = 0,5 %
des conséquences propres à chacun des objectifs attendus.
Plusieurs approches pouvant être utilisées pour déterminer la valeur de la Le concepteur procède alors à l'évaluation du risque en comparant le niveau
vraisemblance sont décrites en annexe 2. de risque qu'il a estimé (par la combinaison de la vraisemblance et de la
conséquence) aux critères de risque formulés par le maître d'ouvrage. Pour
3.2.2.3 - Détermination du niveau de risque (importance du risque) chacun des risques, le maître d'ouvrage peut adopter deux attitudes :
Le « niveau de risque » (NR) qualifie l'importance du risque et s'exprime le 1) Refuser le risque et demander au concepteur :
plus souvent par la combinaison de la vraisemblance avec la conséquence, ⇒ soit de reprendre l'élaboration du projet en s'affranchissant totalement de
évaluées l'une et l'autre par le concepteur. la source du risque (en modifiant le tracé en plan et/ou le profil en long,
La combinaison de la vraisemblance et des conséquences peut être soit par exemple) ;
« qualitative, semi-quantitative, quantitative, ou une combinaison des trois, selon ⇒ soit de procéder à un complément de reconnaissance, destiné à préciser
les circonstances ». les valeurs de la vraisemblance et de la conséquence afin d'approfondir la
détermination du niveau de risque.
Le niveau de risque peut être déterminé soit objectif par objectif, soit pour un 2) Accepter le risque, avec ou sans traitement :
ensemble d'objectifs, c'est à dire en faisant la somme des impacts des consé- ⇒ dans le premier cas, le maître d'ouvrage demande au concepteur de traiter
quences sur les différents objectifs. Le niveau de risque est très fréquemment le risque pour en réduire l'impact ;
présenté sous la forme d'une matrice des risques à deux entrées (consé- ⇒ dans le deuxième cas, le maître d'ouvrage décide de « prendre le
quence et vraisemblance), comme indiqué au § 3.2.3c. ci-après. risque » lui-même, en intégrant la possibilité d'une majoration des coûts
et délais de réalisation estimés par le concepteur.
3.2.3 - Évaluation du risque
c) La matrice des risques
a) Textes de référence Pour aider à la décision du maître d'ouvrage, la présentation de l'évaluation
Extraits de la norme ISO 31000 (cf. § 5.4.3 de la norme : Évaluation du des risques par le concepteur peut se faire sous la forme d'une « matrice
risque) : des risques », fixant les critères d'acceptabilité en fonction du niveau de
risque (NR). La matrice des risques présentée ci-après n’est qu’un exemple
d’illustration possible de l’évaluation des risques : dans cet exemple, les
« Sur la base des résultats de l'analyse du risque, le but de l'évaluation
quatre niveaux de risque (associés chacun à une couleur pour améliorer
du risque est d'aider les décideurs à déterminer les risques nécessitant
un traitement et la priorité dans la mise en œuvre des traitements. l’appréciation visuelle) sont définis en fonction du produit de la vraisem-
L'évaluation du risque consiste à comparer le niveau de risque déterminé blance et de la conséquence.
au cours du processus d'analyse aux critères de risque établis lors de
l'établissement du contexte. Sur la base de cette comparaison, il est pos- La matrice des risques est propre à chaque projet et à chaque maître
sible d'étudier la nécessité d'un traitement. d’ouvrage, son utilité étant vraiment une aide à la décision. Il est toutefois
recommandé que les classes de vraisemblance et les classes de consé-
Dans certains cas, l'évaluation du risque peut déboucher sur la décision quences soient en nombre pair afin d’éviter un positionnement central.
d'entreprendre une analyse plus approfondie... »
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Possible 4 8 12 16
Peu probable 3 6 9 12
Tableau 1 - Exemple de matrice des risques à deux
Très peu probable 2 4 6 8 entrées (vraisemblance et conséquence) et 4 niveaux de
Improbable 1 2 3 4 risque. Les coefficients ne sont donnés qu’à titre indicatif
et doivent être adaptés en fonction de chaque projet.
Faibles Moyennes Fortes Très fortes
Conséquences
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Une légende des couleurs correspondant aux différents niveaux de risque est présentée ci-dessous :
Indice NR
Qualification indicative du niveau de risque à adapter en fonction de chaque projet
(Niveau de risque)
Aucune action requise, les facteurs de risque doivent faire l’objet d’un suivi spécifique par le biais
NR < 2 Risque négligeable / Mineur de procédures adaptées.
La construction peut débuter, les facteurs de risque doivent faire l’objet d’un suivi spécifique par le biais de
2 < NR < 5 Risque significatif (mais a priori acceptable) procédures adaptées et le projet doit éventuellement être complété par une série de mesures prédéfinies
pouvant faire l’objet d’adaptations durant la phase d’exécution.
La construction ne peut pas débuter avant que le risque soit réduit ou annulé. Des solutions sont possibles
5 < NR < 10 Risque important (à surveiller) sans changement important du projet.
La construction ne peut pas débuter avant que le risque soit réduit ou annulé. Si le risque ne peut être maîtrisé,
NR > 10 Risque inacceptable il est possible que le projet soit abandonné ou modifié.
Tableau 2 - Exemple de définition et qualification indicative des niveaux de risque (à adapter en fonction de chaque projet).
Après application de ces mesures, il est procédé à une nouvelle évaluation de suivante. Les versions successives du Registre des risques établies pendant
chaque risque. Si, en dépit des mesures de traitement, le risque demeure les différentes étapes du projet doivent être conservées par le maître d'ouvrage,
inacceptable, un nouveau processus de « traitement du risque » est lancé. dans le but d’assurer la traçabilité de l’évolution de l’analyse des risques.
Il est à noter que lors des phases de conception, l'essentiel des actions de
traitement consiste soit en des reconnaissances visant à réduire les incerti-
tudes, soit en des adaptations du projet lui-même, visant à le rendre plus
robuste vis-à-vis des conséquences de ces incertitudes. Lors de la phase de
réalisation, le traitement des risques résiduels prend la forme de mesures
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Étape Missions-types d'ingénierie géotechnique (norme NFP 94-500) Phase d'études de la Loi MOP
« Supervision Géotechnique d'Exécution - G 4 - Phase Supervision du suivi d'exécution » (e) Assistance aux opérations de réception (AOR)
a) A propos des études géotechniques préalables (G1) qui regroupent l'étude géotechnique de site (G11) et l'étude géotechnique d'avant-projet (G12), le texte de la
norme précise que « Ces missions excluent toute approche des quantités, délais et coûts d'exécution des ouvrages géotechniques, laquelle entre dans le cadre
d'une mission d'étude géotechnique de projet (étape 2). Elles sont normalement à la charge du maître d'ouvrage ». Sachant que selon la loi MOP, le coût prévisionnel
de l'ouvrage est établi à l'achèvement de l'étude d'avant-projet, il convient de réaliser, dès cette phase « Avant-Projet » de la loi MOP, une étude géotechnique de projet G2.
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Dans le même esprit, la faisabilité des travaux souterrains étant essentiellement fonction des conditions géotechniques, il peut s'avérer nécessaire de procéder, dès
la phase des études préliminaires, à une étude géotechnique d'avant-projet (G12).
b) Pour les ouvrages souterrains, l'étude géotechnique de projet G2 est pratiquement toujours intégrée à la mission de maîtrise d'œuvre générale (ainsi que le mentionne
le texte de la norme). C'est dans le cadre de cette mission G2 que l'essentiel du Mémoire de Synthèse Géotechnique (MSG) est rédigé, ou tout au moins que sont
rassemblés tous les éléments nécessaires à cette rédaction.
c) Le DCE comporte notamment les investigations géotechniques complémentaires à réaliser en phase d'exécution, les différentes valeurs-seuils associées aux méthodes
(convergence, tassements, vitesses de vibration, etc.), ainsi que les procédures d'auscultation nécessaires pour assurer le suivi des mesures et le contrôle du respect des
valeurs-seuils. La définition de l'ensemble de ces dispositions fait partie intégrante de l'étude géotechnique de projet G2 (cf. Norme 94-500 : Tableau 2 et chapitre 8) établie
par le maître d'œuvre.
d) Cette mission est à la charge de l'entreprise.
e) Cette mission de supervision s'apparente à un contrôle extérieur à la charge du maître d'ouvrage.
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4.2 - Conduite générale des études 4.2.2 - Extrait de la norme NFP 94-500 relatif
au « traitement des risques »
4.2.1 - Place de l’étude des risques dans le déroulement
du projet
...« Face à chaque risque identifié, il convient de définir les actions préven-
Dans le cadre de l'étude d'un projet, l'analyse des risques est globale, c'est à tives possibles pour le réduire (réduction des incertitudes ou de l'impact
dire qu'elle concerne l'ensemble des risques, qu’ils soient de type politique, potentiel de ces incertitudes), les dispositions à mettre en œuvre pour
détecter sa survenance le plus tôt possible (programme de suivi et de
réglementaire, foncier, environnemental, organisationnel, technique, etc. Même
contrôle avec valeurs seuils associées) et les actions curatives pour en
au sein des aspects techniques, l'analyse des risques géotechniques n’en
minimiser l'impact s'il se réalise (adaptation du projet).
constitue qu'une partie, certes très importante compte tenu du rôle joué par
Le traitement des risques est adapté à chaque phase de déroulement du
les conditions géologiques, hydrogéologiques et géotechniques dans la
projet. Le canevas de traitement habituel est le suivant :
construction d'un tunnel.
- le risque associé à un évènement 5 majeur est réduit ou annulé par des
mesures appropriées (modification du projet) dès le stade de l'avant-
Lors des phases de conception, c'est à dire depuis les études préliminaires projet (étape1) ;
jusqu'au projet (de la mission type G11 à la mission G2), l’analyse des risques - le risque associé à un évènement important est réduit ou annulé par des
géotechniques ne concerne que le concepteur et le maître d'ouvrage (celui-ci mesures appropriées au stade du projet (étape 2) : adaptation du projet, suivi
éventuellement accompagné de son assistant à maître d'ouvrage, ou AMO). Le spécifique avec des mesures prédéfinies et des valeurs seuils associées,
concepteur, réputé sachant, doit communiquer au maître d'ouvrage, tout au ainsi que des adaptations possibles à mettre en phase d'exécution ;
long du processus d'étude, les éléments qui lui sont nécessaires pour qu’il - le risque associé à un évènement résiduel a un impact, généralement
faible, sur la qualité, les coûts, la sécurité et les délais, et peut justifier
puisse décider, en fonction de ses propres critères de risque, de la stratégie à
une solution d'optimisation au stade de l'exécution (étape 3).
adopter.
La gestion des risques (et donc de leur coût potentiel) est axée sur leur
détection le plus en amont possible et sur le contrôle de l'efficacité des
Il convient donc d'appliquer à chaque phase d'étude ou à chaque mission type
solutions prévues. Elle s'appuie sur les actions suivantes :
d'ingénierie géotechnique la méthodologie proposée au chapitre 3, avec ses
a) au stade de la conception de l'ouvrage :
trois grandes étapes :
- évaluation des incertitudes et de la variabilité des paramètres influents ;
⇒ Bilan des connaissances et recensement des incertitudes
- reconnaissance de l'environnement, en particulier des avoisinants poten-
⇒ Appréciation des risques = Identification + Analyse + Évaluation de chaque tiellement concernés ;
risque - définition des éventuelles dispositions constructives complémentaires à
⇒ Traitement des risques mettre en œuvre si le contexte géotechnique ou le comportement de
l'ouvrage observé n'est pas conforme aux prévisions ;
La nature et le contenu des documents sanctionnant les diverses compo- - définition des adaptations possibles avec recherche d'opportunités ;
santes de l’étude des risques sont détaillés au § 4.6 pour ce qui est du DCE. - prise en compte des risques inhérents par leur budgétisation ;
Ces documents sont bien entendu plus succincts dans les phases initiales - maintenance inhérente à certains types d'ouvrages géotechniques ;
du projet, mais il est souhaitable de les individualiser dès que possible, b) pendant l'exécution des travaux : suivi et contrôle géotechnique en
au moins sous forme de chapitres distincts, car ce sont des documents continu (en fonction des valeurs seuils associées) ;
vivants qui ont vocation à être développés, corrigés et enrichis tout au long c) après travaux : mise en œuvre éventuelle de la maintenance inhérente
du projet. à certains types d'ouvrages géotechniques, adaptée au contexte géotech-
nique du site et à la spécificité de l'environnement de l'ouvrage. »
5 Afin d'assurer la cohérence avec le vocabulaire préconisé par la norme ISO 31000, le terme
« évènement » remplace ici le terme « aléa » figurant dans la norme NFP 94-500.
4.2.3 - Conduite des reconnaissances et autres investigations à préciser le contexte géologique, hydrogéologique et géotechnique ainsi que
la gravité des problèmes géotechniques susceptibles d'être rencontrés.
Le management des risques géotechniques tout au long du processus de Ce programme est déduit d'un modèle géologique préliminaire synthétisant
conception d'un projet (depuis les études préliminaires jusqu'au DCE), puis les données disponibles, ainsi que les incertitudes et inconnues encore (très)
de sa réalisation, suppose qu'à chaque phase d'étude soient effectuées des nombreuses à ce stade.
reconnaissances pertinentes et approfondies visant à réduire le plus possible
l'importance des risques résiduels. Il convient donc d'apporter une attention Documents à fournir : La norme NFP 94-500 définit très précisément
particulière au déroulement de ces reconnaissances depuis la mise au point (cf. § 7.1 de la norme) le contenu de l'étude géologique préliminaire de site
du programme jusqu'à la réception des résultats. qui est nécessaire à l'établissement du Dossier d'études préliminaires au sens
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
A ce stade des études préliminaires, le traitement des risques vise essentiel- Il en résulte d'une part un modèle géologique plus détaillé et (en principe) plus
lement à proposer un programme de reconnaissances et d'études destinées fiable, et un tableau de description des risques également plus détaillé ;
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on identifie particulièrement les évènements 6 majeurs et les principes géné- prestations ainsi définies au § 8.2 de la norme, le dossier de Projet (PRO) doit
raux pour en limiter les conséquences. Il faut noter que la description des comporter de manière formalisée les mêmes documents que pour les dossiers
risques est également fonction de la méthode d’exécution envisagée et qu’elle d'Études Préliminaires et d'Avant-Projet, mais sous une forme tout à fait aboutie,
pourra aboutir à l’exclusion de certaines méthodes d’exécution. puisqu'en principe cette phase constitue la dernière phase d'étude et que,
sauf cas particulier, il n'est plus procédé à des études et reconnaissances au
Dans un second temps, la loi MOP précisant que le coût prévisionnel de delà de cette phase autres que des reconnaissances complémentaires exigées
l'ouvrage doit être établi à l'achèvement de l'étude d'Avant Projet, il convient pour le traitement de certains risques et les reconnaissances à l'avancement
que dès cette phase la mission G12 soit prolongée par une mission d'Étude réalisées en cours de travaux.
Géotechnique de Projet (G2), qui permette d'aboutir à une conception déjà
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
suffisamment approfondie pour permettre une telle estimation. Cette mission Les risques non totalement traités à l'issue de cette phase sont donc tous des
G2 se distingue des précédentes par un niveau de connaissance nettement risques résiduels, dont le niveau doit être porté à la connaissance du Maître
plus élevé (des reconnaissances spécifiques ont déjà été entreprises), par la d'Ouvrage pour en vérifier l’acceptabilité. Pour ce faire, il est recommandé
prise en compte de méthodes d'exécution déjà définies, par le dimensionnement pour cette dernière phase d'étude de récapituler l’ensemble des risques
des ouvrages et par l'identification des évènements importants et dispositions examinés dans un tableau (Registre des risques) du type de celui présenté
prévues pour en réduire les conséquences (cf. note a du § 4.1). en annexe 7, en présentant de manière détaillée la vraisemblance et les
conséquences sur chacun des objectifs du maître d’ouvrage ; ce dernier
Documents à fournir. Comme pour la phase précédente, la norme NFP 94-500 tableau servira de base au Plan de management des risques à construire
définit très précisément (cf. § 7.2 de la norme) le contenu de l'Étude géotech- dans le cadre de la mise au point du DCE et du contrat.
nique d'avant-projet nécessaire à l'établissement du dossier d'Avant-Projet
(AVP) au sens de la loi MOP. De la même façon, en complément aux prestations Rappel : Comme déjà mentionné (cf. § 4.1, note c), l'Etude géotechnique de
définies au § 7.2.2. de la norme, le dossier d'Avant-Projet (AVP) doit comporter projet définit les investigations géotechniques complémentaires à réaliser en
de manière formalisée les mêmes documents que le dossier d'Études Préli- phase d'exécution, les différentes valeurs-seuils associées aux méthodes
minaires mais avec, bien évidemment, un niveau d'élaboration plus élevé grâce (convergence, tassements, vitesses de vibration, etc.) ainsi que les procédures
aux informations recueillies lors des actions de reconnaissance et de traitement d'auscultation nécessaires pour assurer le suivi des mesures et le contrôle du
apportées entre les deux phases. respect des valeurs seuils.
Enfin, à ce stade, il peut être souhaitable que le maître d'ouvrage mobilise (s'il
4.5 - Phase Projet (PRO)
ne l'a pas fait auparavant) son assureur.
Au cours de cette phase, l'étude géotechnique de projet G2 établie durant
la phase précédente est actualisée et finalisée, en intégrant notamment les
4.6 - Phase Assistance au contrat de travaux (ACT)
compléments de reconnaissances et les dispositions visant à minimiser les
risques. En principe, le projet est parfaitement défini à l'issue de cette phase, Ce paragraphe se limite à la phase de consultation et n’aborde pas le mode
sauf dans certains cas où la mise au point de certains détails se fait dans le de rémunération des risques résiduels, qui relève du GT25 de l’AFTES.
cadre de l'établissement du DCE. C'est également à l'issue de cette phase
qu'est établi, dans sa forme quasi définitive, le tableau de recensement et de Pour présenter l'ensemble des éléments participant à la prise en compte des
présentation des risques proposé ci-après (cf. Annexe 7). incertitudes et risques géotechniques dans un projet d'ouvrage souterrain, il
est proposé une architecture copiée sur celle de la première Recommandation
L'attention est attirée sur le fait que c'est sur la base de ce tableau des risques du GT32-1 de l’AFTES (2004), qui proposait de décomposer le dossier géo-
que le Maître d'Ouvrage arrête définitivement sa stratégie de gestion des technique du DCE en trois cahiers A, B et C.
risques (acceptation des risques résiduels et détermination des provisions
associées), avant de passer au contrat de travaux. Il y a donc nécessité pour 4.6.1 - Données brutes (Cahier A)
le Maître d'Œuvre de procéder pour chacun des risques à une analyse fine
des scénarios et conséquences possibles, à leur description détaillée et à leur Toutes les données brutes disponibles relatives à la géologie, l’hydrogéologie
estimation en termes de surcoût et d'allongement des délais, afin d’éclairer et la géotechnique sont regroupées dans un dossier factuel dénommé
au mieux la stratégie du maître d'ouvrage. « Cahier A ». Ce cahier inclut également les données relatives aux vestiges
anthropiques (puits, galeries, fossés, vieilles fondations).
Documents à fournir. Comme pour les deux phases précédentes, la norme
NFP 94-500 définit très précisément (cf. § 8.2 de la norme) le contenu de En outre, il est proposé de traiter de manière identique les données brutes
l'étude géotechnique de projet nécessaire à l'établissement du dossier de relatives à l’existence, la localisation et l’état pathologique des ouvrages
Projet (PRO) au sens de la loi MOP. De la même façon, en complément aux avoisinants appartenant à la ZIG et susceptibles d'être affectés par les travaux
6 Afin d'assurer la cohérence avec le vocabulaire préconisé par la norme ISO 31000, le terme « évènement » remplace ici le terme « aléa » figurant dans la norme NFP 94-500.
(tels que bâti de surface, infrastructures superficielles ou souterraines, etc.) ; Cette ignorance est parfois dissimulée par la fourniture d'un registre des
ces données ont vocation à être recensées comme les données géotechniques risques censé compenser le faible niveau de connaissance. Cette démarche
et à être intégrées au dossier factuel dit « Cahier A ». n'est pas satisfaisante ; en effet, l'expérience montre que lors de l’élaboration
d’un projet, le déficit de reconnaissance génère souvent une première vision
4.6.2 - Synthèse et Registre des incertitudes (Cahier B) simpliste et optimiste du modèle géologique, vision qui cache sa très forte
incertitude.
Conformément au Fascicule 69 du CCTG -Travaux et à la première Recom-
mandation du GT32, l'interprétation des données géotechniques faite par Les premières reconnaissances ont alors souvent pour effet de faire augmenter
le maître d’œuvre et la représentation qu'il se fait du contexte géologique et significativement l’incertitude « ressentie » par les concepteurs : cela traduit
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
des conditions de réalisation attendues font l'objet du Mémoire de synthèse le fait qu’ils prennent conscience de la complexité de la réalité grâce à ces
géotechnique (MSG). Ce document a vocation à être contractualisé (cf. Fas- premières informations extraites du terrain. Cela signifie qu’à l’exception de
cicule 69) et c’est celui que la première Recommandation du GT32-1 dénom- certains contextes géologiques déjà bien reconnus par ailleurs, il convient
mait « Cahier B ». Le « Registre des incertitudes » décrit plus haut (§ 3.1.4) d’être très réservé sur les études de risques faites avec peu de reconnais-
peut constituer le dernier chapitre de ce Mémoire. sances : elles sont souvent très éloignées de la réalité.
Comme pour les données géotechniques, l'interprétation des données concer- La maîtrise des risques repose donc avant tout sur la pertinence des recon-
nant les avoisinants et l'appréciation qu'a le concepteur de leur état et de leur naissances et sur l’exploitation qui en est faite. Une consultation réalisée sur
sensibilité peuvent être intégrées au Mémoire de synthèse géotechnique des bases incertaines ne permet pas au maître d’ouvrage de s’assurer de la
(Cahier B). compatibilité des risques éventuels avec le respect de ses objectifs.
4.6.3 - Mémoire de conception et Registre des risques Par ailleurs, les maîtres d’ouvrages peuvent parfois croire à tort que le fait
(Cahier C) d’impliquer le constructeur dans la conception va lui faire porter tous les
risques inhérents à la construction du projet. En réalité, on ne peut pas
A l’aval des cahiers A et B, la première recommandation du GT32 a défini un transférer contractuellement des risques qui n’ont pas été caractérisés, au
cahier C ou « Mémoire de conception », dans lequel le maître d’œuvre présente moins sous la forme d’évènements potentiels, tout comme un assureur ne
et justifie les dispositions constructives proposées dans le DCE, lesquelles peut assurer que des risques caractérisés (évènements et conséquences,
peuvent éventuellement être adaptées voire modifiées par l’entreprise dans vraisemblances). Pour qu’un acteur (maître d’ouvrage ou constructeur) puisse
son offre. C'est dans ce document que sont indiquées toutes les mesures assumer ou transférer un risque, d’une façon ou d’une autre, il est nécessaire
de traitement des risques imposées ou proposées par le maître d’œuvre, qu’il dispose des informations permettant d’identifier les évènements
notamment les actions destinées à préserver l’environnement ( bâti, ouvrages potentiels et leurs conséquences, donc d’un niveau de connaissance du
existants, eaux souterraines et superficielles, faune) vis-à-vis de conséquences contexte approprié. Si, lors de l’apparition d’un risque, il est démontré que les
dommageables des travaux entrepris. informations disponibles ne permettaient pas de l’identifier et de le caractériser,
celui qui assumera en dernier recours les conséquences de cette « imprévi-
Le « Registre des risques », présenté sous la forme d'un tableau comme indiqué sibilité » sera bien le maître d’ouvrage.
dans la Phase PRO (cf. § 4.5 ci-dessus), pourrait soit constituer le dernier chapitre
de ce « Cahier C », soit faire l'objet d'un document à part, soit être intégré au Face à cette situation, certains maîtres d’ouvrage pourront imaginer de trans-
« Plan de management des risques » prévu dans la nouvelle version du férer tous les risques possibles et imaginables en les caractérisant selon des
Fascicule 69, à paraître en 2012. Ce Registre des risques constituerait ainsi fourchettes très larges visant à couvrir tous les cas de figure ; ils devront alors
la base de données nécessaire à l'élaboration du Plan de management des de toute façon vérifier préalablement que l’apparition de ces risques reste
risques, notamment pour les dispositions de rémunération envisagées. Un compatible avec leurs objectifs, ce qui sera rarement le cas. Par ailleurs, ils
exemple de présentation de ce Registre des risques est donné en annexe 7. ne pourront pas formellement transférer ces risques, puisque les concurrents
ne disposeront pas des éléments leur permettant de les caractériser et seront
donc incapables de définir leur niveau de couverture. Cela conduira donc à
4.7 - Cas de la conception / construction ou
pousser les concurrents qui décideront de répondre aux appels d’offre à des
autres processus de dévolution anticipés
paris souvent non réellement assumés, qui aboutiront à des contrats malsains
Il est observé de plus en plus fréquemment le recours à des processus dans et non loyaux entre les acteurs, donc au non-management des risques.
lesquels la dévolution du contrat de construction se situe très en amont des
travaux, la mise en concurrence et les offres qui en résultent étant souvent Enfin, il est important de rappeler que ces processus non classiques de
réalisées alors que le niveau de connaissance est très faible. Dans ces cas de dévolution des contrats ont été conçus pour des configurations spécifiques
figure, le niveau d’incertitude et de risque est potentiellement très fort, et de qui doivent être justifiées et juridiquement valides. Elles n’apportent pas
toutes façons mal connu des maîtres d’ouvrage (ou des concédants), mais en tant que telles de solution ou d’améliorations dans la gestion des risques
également des soumissionnaires. d’un projet. Au contraire, on peut même considérer que les opérations à fortes
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incertitudes (donc à forts risques) se prêtent mal à ce type d’approche et processus décrit, le maître d’ouvrage devra se donner les moyens de disposer
de contractualisation, pour les raisons décrites ci-dessus, mais également d’une forte compétence en géotechnique et en travaux souterrains, pour :
parce que :
• On ne peut pas demander aux constructeurs de manager les risques du a) préalablement au lancement de la consultation : effectuer les campagnes
maître d’ouvrage, au sens de « les identifier, évaluer leurs conséquences, de reconnaissances des données fondamentales (géologie-hydrogéologie-
choisir le mode de traitement et/ou de couverture » : les intérêts normaux géotechnique, ouvrages existants, bâti, etc.), dont le niveau sera approprié à
et légitimes des constructeurs ne sont pas ceux du maître d’ouvrage ; la complexité du contexte mais qui devront être encore plus détaillées que
• Si chaque concurrent propose sa propre analyse et sa propre couverture des dans un cas classique, parce que la conception du concepteur-réalisateur ne
risques, les principes d’égalité et d’équité du jugement des offres seront très sera «valide» que dans le cadre de la pertinence de ces données ;
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Dans les cas où, pour des raisons impératives, le maître d’ouvrage doit choisir c) lors de la réalisation : suivre le déroulement des travaux, et être en mesure
ce type de procédure, les principes de management des risques développés de juger de l'acceptabilité des éventuelles demandes en rémunération
dans la présente Recommandation restent pertinents. Pour mener à bien le complémentaire présentées par le concepteur-réalisateur.
5 - Bibliographie-
Recommandations de l’AFTES [10] Norme ISO 31000 : 2009 (F) – Management du risque ; principes et lignes
directrices
[1] AFTES (2003) – Recommandations du GT1 : Caractérisation des massifs [11] Norme ISO Guide 73 : 2009 (E / F) – Management du risque ; vocabulaire
rocheux utile à l’étude et à la réalisation des ouvrages souterrains. Revue [12] Ministère de l’Ecologie – Fascicule 69 (Travaux en souterrain) du CCTG-
Tunnels & OS, n° 177, pp. 138-186. Travaux – Nouvelle version (qui introduit le principe d’un Plan de mana-
[2] AFTES (2004) – Recommandations du GT32 : Prise en compte des risques gement des risques). A paraître en 2012.
géotechniques dans les DCE. Revue Tunnels & OS, n° 185, pp. 316-327.
[3] AFTES (2007) – Recommandations du GT25 : Comment maîtriser les coûts Autres publications
de son projet. Revue Tunnels & OS, n° 201, pp. 128-168.
[13] Piraud, J. (1996) – Vers une meilleure maîtrise de l’incertitude propre aux
Textes normatifs, règlementaires et coupes géologiques prévisionnelles. Journées d’études AFTES, Chambéry,
autres recommandations pp. 245-250. Ed. Spécifique
[14] Lombardi G. (2002) – Les risques géotechniques dans l’évaluation finan-
[4] Loi MOP – Loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 modifiée relative à la maîtrise cière des tunnels non urbains. Revue Tunnels & Ouvrages souterrains, n°
d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée 173, pp. 321-325.
[5] Normes suisses : [15] Bianchi, G.W, Perello P, Venturini G., Dematteis A. (2009) – Determination
SIA 197 - Projets de tunnels ; bases générales of reliability in geological forecasting for tunnel projects: the method of
SIA 199 - Etude du massif encaissant pour les travaux souterrains the R-index and its application on two case studies. Proc. ITA-AITES World
SIA 118/198 - Conditions générales pour constructions souterraines Tunnel Congress, Budapest, pp. 23-28.
[6] AFNOR – Fascicule de documentation n° FD X 50-117 (avril 2003) : [16] Bieth, E., Gaillard C., Rival F., Robert, A. (2009) – Geological Risk: a metho-
« Management de projet – Gestion du risque » dological approach and its application to 65 km of tunnels under the
[7] ITA/AITES, Working Group N° 2 (2004) - Guidelines for Tunneling Risk Mana- French Alps – AITES/ITA World Tunnel Congress, Budapest.
gement – Tunneling & Underground Space Technology, N° 19, p. 217-237 [17] Robert, J. (2009) – L’accompagnement géotechnique indispensable pour
[8] Norme AFNOR n° NFP 94-500 (déc. 2006) – Missions d’ingénierie géo- la réussite d’un projet – 17ème Congrès int. de Mécanique des sols et
technique, classification et spécifications. d’ing. géotechnique, Alexandrie, vol. 3, pp. 2711-2714.
[9] ITIG (2006) – Code of Practice for Risk Management of Tunnel Works. Recom- [18] Gaillard C., Humbert E., Rival F., Robert A., (2011) Le management des
mandations de l’International Tunnelling Insurance Group, versions anglaise et risques géotechniques est-il toujours pertinent ? - Congrès international
française publiées dans la revue Tunnels & OS, n° 214, nov. 2009, pp. 188-224. AFTES, Lyon – 17-19 octobre 2011.
6 - Annexes-
L'annexe n°1 a pour objectif de comparer la présente Recommandation A) En ce qui concerne les trois cahiers, la présente recommandation n°GT32.
aux autres documents traitant de la gestion des risques, notamment à la R2F1 est en total accord avec la GT32-1, dans la mesure où l'organisation du
précédente recommandation GT32-1. dossier géotechnique en trois cahiers A, B et C est conservée et même
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
1 - Recommandation du GT32-1
B) En ce qui concerne la distinction des incertitudes de type 1, 2 et 3, il
Publiée en 2004 [Réf. 2], la Recommandation GT32-1 sur la « Prise en compte convient de profiter de l'approfondissement de la réflexion conduit dans le
des risques géotechniques dans les dossiers de consultation des entreprises pour cadre de la présente recommandation et de substituer à cette distinction de
les projets de tunnels » ne traite, comme son nom l'indique, que de l'établissement trois types d'incertitudes, la liste et la description des incertitudes présentées
du DCE. Dès sa parution, cette Recommandation a été appliquée et elle est au § 3.1.4 « Registre des incertitudes » du texte de la recommandation.
actuellement largement partagée par la profession. Aussi conviendrait-il, pour en L’AFTES va entreprendre une révision de la recommandation du GT32-1.
conserver l'intérêt, de la réviser à la fois sur le fond et sur la forme, afin de la
rendre cohérente avec la présente Recommandation n°GT32.R2F1. C) En ce qui concerne l'application aux DCE que ne traite pas la présente
recommandation n° GT32.R2F1, la révision de la recommandation GT32-1
1.1 - Mise en cohérence sur la forme devra veiller à être cohérente avec le texte du nouveau fascicule 69 (à paraître
courant 2012) et celui du document d'application (à rédiger).
L'application de la terminologie rigoureuse retenue dans le cadre de la norme
ISO 31000 conduit à devoir reformuler certains termes ou expressions.
2 - Document AFNOR : FD X 50-117
Quelques exemples :
• « aléa » est à remplacer par risque ou évènement, Il s'agit d'un fascicule de documentation et non d'une norme. Ce document
• « incertitude » est à remplacer le plus souvent par risque, intitulé « Management de projet – Gestion du risque » [Réf. 6] s'applique dans
• « difficultés » est à remplacer par conséquences ou évènements, le cadre de la mise en œuvre d'un processus de management des risques
• « probabilité d'occurrence » est à remplacer par vraisemblance. d'un projet.
Enfin, la révision de la recommandation GT32-1 présentera l'opportunité de 2.1 - Mise en cohérence sur la forme
rectifier certains points de rédaction, telles que :
• Au § 1 « Objet de la recommandation », la note évoque une terminologie Le « risque d'un projet » y est défini comme « événement dont l'apparition
propre aux risques naturels (comportant le terme aléa notamment) qui n'est n'est pas certaine et dont la manifestation est susceptible d'affecter les
jamais appliquée dans le texte (en dehors du terme aléa). objectifs du projet ». Cette définition demeure très proche de la définition du
• Dans la même note – cf. § 1 « Objet de la recommandation » - il est indiqué risque dans la norme ISO. Par ailleurs, il est assez facile d'établir une grille de
« on évitera d'utiliser le terme d'accident géologique pour parler… », alors correspondance entre les principales définitions (cf. tableau ci-après) en
qu'au § 5.2, 3 ème section : « Description des incertitudes non levées », on soulignant toutefois que le terme « gravité », qui est utilisé ici (ainsi que dans
utilise précisément cette expression et qu'elle apparaît également en légende le manuel RFF examiné plus loin) pour caractériser l'ampleur de la consé-
d'une figure « Éboulement de front ». L’AFTES confirme que ce terme est quence, n'a pas d'équivalent dans la norme ISO qui ne retient pas cette notion.
ambigu et à éviter.
AFNOR FD X 50-117 avril 2003 AFTES GT32.R2F1
1.2 - Mise en cohérence sur le fond
« risque de projet » « risque »
Parmi les principaux apports de la recommandation GT32-1, il pouvait être noté : « gravité » « Ampleur des conséquences »
• la présentation des éléments constituant le dossier géotechnique suivant
« criticité » « niveau de risque »
trois cahiers A, B et C (et notamment la création de ce dernier cahier C :
« probabilité d'apparition » « vraisemblance »
Mémoire de Conception) ;
• la distinction de trois types d'incertitudes : incertitudes de type 1, de type 2 « estimation des risques » « analyse des risques »
et de type 3, ces dernières étant assimilées aux « Imprévus » au sens « évaluation des risques »
« évaluation des risques »
« Évènements imprévisibles » ;
« risque résiduel » « risque résiduel »
• l'application aux DCE.
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Ce document AFNOR propose également une classification des évènements directe. Bien qu'utilisant des termes différents (ou les mêmes termes mais
en quatre catégories comme présenté dans le tableau ci-dessous : avec des définitions différentes), il présente un vocabulaire très proche de
celui de la recommandation du GT32.R2F1 et il est assez facile de construire
Non Identifiable imprévu
une grille d'équivalence entre termes :
Événement virtuel Identifiable Non Quantifiable aléa
Identifiable Quantifiable risque
Manuel RFF AFTES GT32.R2F1
Événement déjà réalisé problème
« acceptabilité » « acceptabilité »
Il faut souligner que l'acception de « risque » retenue dans la recommandation
« action de traitement » « action de traitement »
n°GT32.R2F1 se distingue de cette classification dans la mesure où elle traite
« aléa » « événement redouté »
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également des évènements identifiés dont les conséquences ne sont que très
difficilement quantifiables, et pour lesquels il est nécessaire d'imaginer « cause » « source de risque »
3.1 - Mise en cohérence sur la forme 5 - ITA WG2 : Guidelines for tunneling risk management
Bien qu'utilisant des termes différents ou les mêmes termes mais avec des 5.1 - Mise en cohérence sur la forme
définitions différentes, le document de l'ITIG (International Tunnelling Insurance
Group) présente un vocabulaire très proche de celui de la Recommandation Bien que la différence de langue puisse poser des problèmes de traduction,
du GT32.R2F1. Il est assez facile de construire une grille d'équivalence entre on observe une bonne correspondance entre la Recommandation du
termes (cf. tableau ci-après), en soulignant toutefois qu'il existe une certaine GT32.R2F1 et les termes et définitions utilisés dans ses Guidelines par le
ambiguïté pour le terme « évaluation des risques », qui ne présente pas la groupe de travail WG2 de l’AITES [7] ; il est assez facile de construire une grille
même signification selon les documents. d'équivalence entre termes, comme l’indique le tableau ci-après :
3.2 - Mise en cohérence sur le fond La démarche proposée dans la Recommandation du GT32.R2F1 est cohérente
avec celle décrite dans le Guidelines de l’ITA-AITES. Le document ITA-AITES
La démarche proposée dans la Recommandation du GT32.R2F1 est tout à fait fournit aussi des considérations relatives à la gestion des risques pendant la
cohérente avec celle décrite dans le document de l'ITIG. phase d’Appel d’Offre et de finalisation du contrat, alors que ces aspects ne
sont pas traités dans la Recommandation du GT32 car prises en compte dans
le cadre du GT25.
4 - Manuel RFF de maîtrise des risques
(Document interne RFF)
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Le GT32 recommande donc que le géologue en charge de la modélisation sance des ouvrages souterrains. L’objectif est d’aider à conduire et évaluer
soit le géologue du projet et non un spécialiste de modélisation extérieur au une campagne de reconnaissance, depuis l’élaboration du programme et le
projet. Par ailleurs, rappelons qu’une modélisation 3D n’a de sens que si le suivi sur site, jusqu’à la procédure d’analyse des résultats. De manière plus
nombre et la quantité de données factuelles sont représentatifs de la zone à pragmatique, cette fiche constitue une sorte de pense-bête visant essentiel-
étudier. lement à s’assurer qu’aucun élément technique majeur n’a été oublié et que
les procédures de suivi et d’analyse des reconnaissances correspondent aux
e) Planning des reconnaissances : bonnes pratiques établies par la profession.
On insistera encore sur la grande importance des reconnaissances effectuées
en tout début d’étude, si l’on veut encore avoir le temps d’optimiser le projet, La fiche « Qualité des Reconnaissances », qui reste qualitative, a vocation à
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
notamment en modifiant son tracé. être utilisée très tôt dans un projet, pour conduire une reconnaissance. Elle
peut être remplie plusieurs fois en fonction de l’avancement d’un même projet.
Ensuite, les résultats de la reconnaissance peuvent faire l’objet d’une
4 - Fiche d’évaluation « Qualité des reconnaissances »
estimation quantitative de leur fiabilité, par exemple grâce à une analyse de
La fiche « Qualité des Reconnaissances » donnée ci-après a été bâtie sur le type R-Index (cf. § 2 de la présente Annexe).
modèle des Protocol Sheets élaborés par la Commission « Design Methodo-
logy » de la Société internationale de Mécanique des roches (ISRM Rock Dans la fiche, chaque ligne correspond à une question à laquelle il conviendrait
Engineering Design Methodology Commission). Ces fiches recouvrent des idéalement de répondre par l’affirmative. Cependant, certaines questions sont
domaines aussi précis que les conditions géologiques, les contraintes en place, très dépendantes de la phase de reconnaissance considérée et pourront de
les fractures et les failles, les propriétés du massif, etc. ce fait rester sans réponse, en particulier dans les études préliminaires.
Néanmoins, et surtout lors des études d’avant-projet et de projet, les points
C’est donc selon une approche de type « check-list » qu’une centaine de restés sans réponse ou ayant une réponse négative doivent pouvoir être
questions ont été élaborées spécifiquement pour le domaine de la reconnais- justifiés (par exemple reportés à une phase future, non appropriés au site, etc.)
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coupe géologique dessinée par le géologue sera souvent utilisée telle quelle § 4.1 ci-dessous) ;
par des ingénieurs calcul ou travaux, dont la culture géologique est souvent b) Un Schéma géologique de principe (ou “coupe géologique conceptuelle”) :
faible, il est indispensable de tenir compte de cette réalité dans le mode de c’est un simple dessin, clair mais sans échelle précise, qui est établi par le
représentation des informations géologiques. géologue dès la phase Etudes préliminaires ; son but essentiel est d’expliciter
la logique géologique du site compte tenu de son histoire (genèse, tectonique,
De plus, l’expérience montre que les commentaires et réserves faits par le érosion, altération…).
géologue sont peu à peu oubliés (voire supprimés…) dans les documents c) Une Coupe géologique documentaire : c’est un document de travail inter-
successifs du projet, et que le Mémoire de synthèse géotechnique n’est pas médiaire, à établir dès que l’on dispose de données de sondage et à compléter
véritablement lu ou assimilé par tous les intervenants. C’est ainsi que le profil après chaque phase de reconnaissance. On y reporte à une échelle détaillée
en long géotechnique prévisionnel, que l’on voit affiché dans tous les bureaux toutes les données factuelles disponibles : topographie, logs de sondages,
de chantier, finit par acquérir un « statut » qui dépasse largement les intentions diagraphies, piézométrie, résultats d’essais, horizons géophysiques, affleure-
du géologue qui avait dessiné à l’origine le modèle géologique ayant servi de ments, galeries de reconnaissance… Cette coupe s’articule avec le plan
base à ce profil en long géotechnique. d’implantation des sondages et éventuellement avec la carte d’affleurements.
Son objectif est de permettre la confrontation, sur un même document,
d’informations d’origine diverse, en vue d’esquisser le dessin des interfaces,
2 - Processus d’élaboration des coupes géologiques
de corréler des données dans l’espace à la lumière du modèle géologique, de
Dès la première esquisse d’un projet de tunnel, on établit toujours une coupe déceler des valeurs aberrantes, etc.
géologique prévisionnelle. Ce document emblématique du projet souterrain va
évoluer sensiblement au fur et à mesure de la progression des études, jusqu’à
devenir un outil essentiel de pilotage du chantier. L’objet du présent chapitre
est de définir quelques spécifications pour l’établissement de ces coupes
géologiques, adaptées à chaque stade d’avancement du projet.
“Optimistes”
horizontales ; enfin et surtout, elle permet de superposer en 3D l’emprise des
ouvrages projetés avec la géologie. Ces avantages des modèles numériques
“Réalistes”
“Pessimistes”
} Limites schistes tertiaires / calcaires et grès
de la nappe de l’Axen
sont d’autant plus évidents que la géologie et les ouvrages sont géométrique- Figure 1 - Exemple de représentation graphique de plusieurs hypothèses
ment complexes. géologiques (projet de stockage de déchets radioactifs du Wellenberg, Suisse).
d) Une Coupe géologique interprétative : sur ce document, souvent à une données plus ou moins fiables et plus ou moins abondantes ; elles reflètent
échelle moins détaillée que la coupe documentaire, les données de base la compréhension par l’auteur de la géologie concernée, en cohérence avec
peuvent être en partie gommées au profit d’informations interprétées, qui les données disponibles, l’environnement géologique et les connaissances
représentent la meilleure prévision du géologue : dessin des interfaces les géologiques régionales (cf. Annexe 2). L’abondance et la pertinence des
plus probables (avec si possible représentation graphique de l’incertitude), données influent bien sûr de façon primordiale sur la fiabilité du document,
position supposée des failles, description graphique des rapports entre unités, mais les retours d’expérience sur des contextes géologiques voisins, utilisés
style des déformations ductiles ou cassantes, etc. pour établir ce document, augmentent cette fiabilité.
Afin d’éviter la perte d’information, les documents « c » et « d » peuvent être
confondus en un document unique appelé coupe géologique prévisionnelle. Dans le cadre de coupes géologiques destinées au génie civil, et à la différence
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
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pour éviter toute perte d’informations en cas de changement du géologue en nuités, dolines...) avec l’incertitude qui leur est liée (voir plus loin) ;
charge du projet. • En profondeur, des observations directes peuvent être faites à partir de
forages (notamment carottés) et éventuellement d’ouvrages souterrains
Idéalement, toute carte géologique devrait s’accompagner d’une carte existants (carrières, galeries minières ou hydrauliques…) ou de galeries de
d’affleurements, soit sous forme de document séparé (de type « carte docu- reconnaissance. Elles peuvent être très fiables pour ce qui est de l’informa-
mentaire »), soit sur la carte géologique elle-même par une distinction des tion lithologique (à l’erreur de position près), mais moins précises pour ce
zones d’affleurements (teinte plus sombre/plus appuyée par exemple ou avec qui est des données structurales (dont la mesure en « position réelle »,
contour spécifique), comme sur la figure 2. en forage ou sur carottes, est toujours lourde et délicate).
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Sur la carte des affleurements devront aussi être indiqués les terrains meubles Par ailleurs, les observations en forage ou galerie ne sont pas forcément faites
superficiels qui peuvent avoir des conséquences sur le projet (dépôts dans le plan de coupe. Plus le forage est éloigné, plus l’incertitude liée à la
alluvionnaires, terrains glissés, mouvements de terrain actifs, faciès d’altéra- projection sur le plan de coupe augmente ; en outre, il convient de choisir la
tion, etc.) ; de nombreux tunnels urbains sont entièrement creusés dans les meilleure direction de projection en fonction de l’orientation des couches, ce
formations dites superficielles (meubles ou indurées), qui sont alors à traiter qui nécessite de connaître celle-ci. Les erreurs potentielles de projection intro-
comme toute autre formation géologique. Dans le cas des ouvrages profonds, duisent donc une incertitude supplémentaire sur la représentation des
la représentation des affleurements de formations superficielles a son impor- couches. Il est donc recommandé de reporter les forages sur les coupes (avec
tance lorsqu’elles sont suffisamment épaisses pour masquer complètement leur trajectoire projetée), en distinguant graphiquement (trait plein) ceux qui
le substratum (leur représentation indique alors qu’aucune observation directe sont « proches » du plan de coupe (distance à déterminer en fonction du
sur le substratum n’a pu être obtenue en surface). contexte) de ceux (tiretés) qui s’en éloignent et en précisant la distance (en
En plus des zones d’affleurement, il est utile de reporter sur la carte géologique avant ou en arrière) par rapport au plan de coupe.
Figure 2 - Extrait de carte géologique interprétée avec indication des affleurements. 4.3.1 - Les figurés symboliques
Le choix d’un figuré sur une carte ou une coupe géologique n’est pas anodin :
finale (ou au moins sur la carte documentaire) tous les points d’observation • des figurés anisotropes peuvent être utilisés pour représenter l’anisotropie
géo-référencés (GPS) et numérotés. Des informations particulières relatives à des roches (alternances de bancs sédimentaires, schistosité principale…) ;
ce point d’observation pourront être directement reportées sur la carte (mesure mais cette utilisation n’est justifiée que si l’on a une bonne idée de l’orien-
structurale par exemple). La présence de ces points d’observations sur la carte tation réelle de cette anisotropie. Reporter sur une coupe une orientation
des affleurements atteste de leur observation directe. Ces points et leur potentiellement erronée peut induire en erreur les ingénieurs utilisateurs de
géolocalisation devront par ailleurs être consignés dans une base de données, la coupe ;
ou un tableau type Excel, fournis avec les documents cartographiques. • la représentation de replis multiples du terrain par un figuré de plis a sans
doute moins d’implications, mais il est quand même nécessaire de préciser
4.2 - Données à représenter sur les coupes géologiques s’il s’agit d’un « figuré symbolique » mettant en évidence l’existence répétée
de plis, ou s’il s’agit de plis réels observés in situ ;
Les coupes géologiques sont construites à partir de données de surface et de • dans le cas d’une formation hétérogène, les hétérogénéités (enclaves de
profondeur : taille variable, gros bancs, variations latérales de faciès, cavités karstiques)
• En surface, c’est la carte géologique qui permet de localiser les contacts, ne seront représentés que lorsque leur présence est attestée (ou fortement
les failles et autres données spécifiques (plissements, familles de disconti- supposée) à l’emplacement où elles sont reportées. Dans le cas contraire,
la présence de ces hétérogénéités sera indiquée dans le texte de la légende, n’ont pas tout à fait la même signification s’il s’agit d’un contour ou d’une
et éventuellement par un figuré purement symbolique et non ambigu (et faille) :
localement par un signal d’alerte, cf. plus loin). a) Pour les contours géologiques, l’incertitude figurée va concerner surtout
la trace cartographique du contour (et non son existence, sauf dans certains
D’une manière générale, plutôt que d’utiliser des figurés potentiellement ambi- cas) :
gus, il est préférable de différencier les formations géologiques par des cou- ⇒ Trait plein : il est réservé aux contacts directement observés sur le
leurs « à plat » (ou des niveaux de gris) et de réserver les figurés à des cas terrain (ceux-ci seront mis en évidence par les affleurements reportés
très particuliers. Une autre solution consiste à représenter le style tectonique ou par un point d’observation) ; l’incertitude de localisation est quasi
de détail dans des « zooms », entourés par des cercles, comme si l’on donnait nulle ou négligeable à l’échelle de représentation choisie ;
⇒ Trait en tiretés serrés : le contour est dessiné avec une précision
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
Que ce soit pour les cartes ou les coupes géologiques, la représentation des Actuellement, que ce soit pour les contours ou les failles, cette figuration
incertitudes se fait habituellement en différenciant le type de trait qui marque en différents types de traits est très souvent pratiquée de manière partielle
les contours géologiques et les failles. Nous recommandons trois niveaux de (seulement deux types de traits) ; elle est en général excessivement optimiste
représentation pour chacun de ces éléments linéaires (sachant que ces niveaux (abus des traits pleins).
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5.2. - Représentation de l’épaisseur des failles pratiqué en Suisse. (cf. fig. 1). Ces différentes interprétations ont pu être présentées
en tant qu’hypothèses « extrêmes » (dans les limites du réalisme), ou d’hypothèses
L’épaisseur des zones broyées associées aux failles recoupées par un projet « optimiste » et « pessimiste » que l’on peut définir, comme n’ayant que « peu de
de tunnel est une variable qui intéresse fortement les ingénieurs. Un figuré en chance » d’être dépassées de chaque côté (autrement dit, la réalité a « de grandes
hachures croisées (croisillons) est couramment utilisé et bien adapté pour repré- chances » d’être à l’intérieur des hypothèses maximales et minimales). A noter
senter ces zones broyées, lorsqu’elles sont effectivement observées (et d’épais- que cette notion de configuration géologique optimiste ou pessimiste présuppose
seur adaptée à l’échelle du document). Mais le plus souvent ces zones broyées déjà une idée des conséquences en termes de génie civil.
ne sont pas observables en surface (recouvrement par des formations super-
ficielles). Les forages carottés sont alors le meilleur moyen de les caractériser. Certes, la représentation d’hypothèses extrêmes ne permet pas d’intégrer la
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
5.3.2. - Autres types de représentation des incertitudes Représentation n° 3 : On ne représente plus ici les positions extrêmes des
Il est souhaitable de représenter de manière détaillée, tout au long d’une coupe, contacts par leur géométrie réelle en coupe verticale, mais par des signes
l’incertitude relative à la localisation de chaque objet géologique (contact entre conventionnels reportés sur un bandeau placé sous la coupe principale. Deux
deux couches, faille, etc.). Pour cela, il faut d’abord d’imaginer les positions types de signes peuvent être utilisés (fig. 7) :
extrêmes du contact, telles qu’elles ont été définies ci-dessus. A noter qu’un
passage progressif entre deux formations peut être représenté de la même Type 3a : la barre d’incertitude. On reporte sur le bandeau une barre centrée
manière. Quatre types possibles de représentation de ces positions extrêmes sur la position la plus probable du contact. Cette méthode permet de
sont décrits ci-après : représenter l’incertitude même en cas de contacts rapprochés, en décalant
légèrement les différentes barres pour qu’elles ne se chevauchent pas (quitte
Tous droits de reproduction, traduction, adaptation, totales ou partielles sous quelques formes que ce soit sont expressément réservés
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Fondamentalement, l’Hydrogéologie (c'est-à-dire l’étude des eaux souter- Pour une analyse des risques pertinente, il est nécessaire d’évaluer les effets
raines) fait partie intégrante de la Géologie de l’ingénieur au sens large et elle liés à une mauvaise évaluation de la perméabilité et de définir les dispositions
en est même un élément essentiel. permettant de réduire ces effets (investigations et essais de perméabilité com-
plémentaires, équipements spécifiques dans le tunnel, traitement préalable
Pour les travaux souterrains, les principaux aspects hydrogéologiques à prendre des terrains, etc.).
en compte, comme sources potentielles d’incertitude ou de risque, concernent :
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4 - Débit d’exhaure
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Vu l’impact des venues d’eau à fort débit et/ou à forte pression sur les
opérations de creusement, ainsi que sur la gestion des eaux d’exhaure (débit
instantané, temporaire et permanent), les incertitudes liées à ce facteur
peuvent être à l’origine de risques importants.
Différentes méthodes sont disponibles pour estimer les valeurs du débit, lié
Fig 9 bis - Répartition statistique des perméabilités mesurées en sondage dans la principalement à la perméabilité du massif, à la charge hydraulique et acces-
Craie Bleue du Cénomanien (Tunnel sous la Manche).
soirement à la section de creusement.
Ces informations doivent être clairement indiquées sur les lignes horizontales
travaux un contrôle systématique des caractéristiques des eaux. Il faut pouvoir du profil en long géotechnique (§ Annexe 3). Elles peuvent être avantageu-
adapter en temps voulu les méthodes d’exécution et prévoir les mesures pré- sement complétées par :
ventives à mettre en œuvre pour limiter les impacts ; dans certains cas, des • l’estimation des débits instantanés attendus au front de taille ;
mesures de compensation doivent avoir été étudiées à l’avance afin d’être • l’estimation des débits spécifiques stabilisés à l’arrière du front (exprimé
prêt à les mettre en œuvre dans les plus brefs délais, en cas de perturbation par exemple en l/s/100 m de tunnel ou l/min/10 m de tunnel) ;
avérée de la ressource en eau. • la mise en évidence des points critiques (zones à très fort débit) ;
• l’estimation des conditions de recharge de la nappe (venues d’eau pérennes
ou destinées à drainer progressivement le massif).
3 - Charge hydraulique
La valeur de la charge hydraulique à la cote de l’ouvrage représente une des Dans le processus d’analyse des risques, l’eau à elle seule n’est que rarement
données les plus importantes vis-à-vis de la conception de l’ouvrage un problème crucial : les seuls impacts sont alors la gêne apportée aux travaux,
lui-même. le règlement d’indemnités éventuelles suite au tarissement de points d’eau,
la pose de conduites supplémentaires, le pompage et le traitement des eaux
Dans le cas des tunnels superficiels (on considère comme superficiels les tun- d’exhaure, etc. Ces impacts sont plus importants en cas d’interception
nels avec une couverture et donc une charge hydraulique inférieure à 20 m), d’un conduit karstique majeur et dans le cas de creusement en attaque
l’impact lié à l’incertitude sur la charge peut être considéré comme mineur. descendante.
Par contre, pour ce qui concerne les tunnels profonds, cet aspect revêt une
importance majeure : la détermination de la charge hydraulique peut Enfin, les effets néfastes de l’eau peuvent être fortement amplifiés en cas de
représenter un des objectifs principaux des reconnaissances. conditions géotechniques défavorables (terrains incohérents susceptibles
d’être soutirés, terrains très perméables sous faible couverture, etc.).
Les incertitudes concernant la charge hydraulique sont principalement liées
aux facteurs suivants :
5 - Aspects environnementaux
• L’incertitude liée à la définition des caractéristiques structurales du massif,
notamment des caractéristiques hydrauliques des discontinuités et du degré Les risques pour l’environnement liés à la gestion des eaux d’exhaure pendant
d’interconnexion de ces discontinuités ; le creusement des tunnels sont nombreux, mais le but de la présente Recom-
• Les variations de la perméabilité dans le massif, liées notamment aux mandation n’est pas de les décrire et de les analyser en détail. Il faut toutefois
structures principales (zones de faille et/ou de fracturation). souligner que ces risques doivent être clairement analysés et pris en compte
pendant les différentes étapes du projet, notamment vis-à-vis :
Pour réduire le degré d’incertitude, il est indispensable de prévoir une ⇒ de l’impact des travaux et des ouvrages définitifs sur les sources et
campagne de reconnaissance spécifique pour la détermination des caracté- autres points d’eau utilisés pour l’alimentation en eau du voisinage
ristiques hydrogéologiques du massif, en particulier : (risque de tarissement) ;
- La mise en place d’un réseau de suivi de la ressource en eau en surface, ⇒ de l’impact des ouvrages sur les cours d’eau superficiels (risque de
y compris essais de traçage pour comprendre les circulations aquifères ; pollution).
Les incertitudes géotechniques dans les projets d’ouvrages souterrains Un moyen de remédier à cette lacune serait de prévoir, au niveau des « lignes
peuvent être classées en deux catégories principales : horizontales », une zone de transition équivalente à la zone d’incertitude
• Les incertitudes géotechniques qui dérivent des incertitudes du modèle sur la position du contact géologique (représentation 2 de la figure 10). Les
géologique ; caractéristiques géotechniques QAB (« Q » pour « qualité ») de cette zone de
• Les incertitudes liées à l’indétermination ou à la variabilité des paramètres transition seraient équivalentes à celles de l’une (QA) ou de l’autre (QB) des
géotechniques des unités géotechniques identifiés. formations en contact (les deux hypothèses doivent être prises en compte).
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Les paramètres concernés ont été décrits en détail dans les Recommandations
du GT1 « Caractérisation des massifs rocheux utile à l’étude et à la réalisation
des ouvrages souterrains » [1] et du GT 7 « Le choix des paramètres et essais
Barre d’incertitude sur la géotechniques utiles à la conception, au dimensionnement et à l’exécution
position du contact A/B des ouvrages creusés en souterrain ». Pour chaque catégorie de paramètres,
les incertitudes peuvent avoir les conséquences suivantes :
⇒ les paramètres d’identification (poids volumique, teneur en eau, poro-
Caractéristiques
géotechniques : sité, limites d’Atterberg, granulométrie, état d’altération, etc.) : les
Représentation 1 sources de risque liés à l’indétermination/variabilité de ces paramètres
comprennent, entre autres, le comportement du massif pendant le
Représentation 2 creusement, le choix d’un type de tunnelier (pression d’air/de boue/de
Figure 10 - Exemple de représentation de l’incertitude liée au contact entre terre) et de la stratégie de confinement du front, le processus de mari-
deux unités géotechniques de caractéristiques différentes. nage, le type de traitement du terrain, etc. ;
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⇒ les paramètres mécaniques : paramètres de résistance (résistance à 2.2 - Représentation des incertitudes
la compression uniaxiale, résistance à la traction, cohésion, angle de sur le profil en long géotechnique
frottement), paramètres de déformabilité (module élastique, coefficient
de Poisson). Les risques peuvent être liés à la prévision du comporte- Rappelons d’abord que les paramètres géotechniques – du moins les princi-
ment du massif pendant le creusement, au choix et à la distribution paux d’entre eux – doivent être représentés par des valeurs moyennes, par
des profils types, etc. ; des valeurs représentatives de leur dispersion, mais aussi par une valeur carac-
téristique qui doit être déterminée pour chaque unité géotechnique (cf. GT1,
⇒ les paramètres des discontinuités (orientation, espacement, extension, GT7 et GT32.1). En conséquence, l’incertitude liée aux valeurs des paramètres
rugosité / ondulation, altération des épontes, ouverture, nature du géotechniques peut être illustrée de plusieurs façons sur les lignes horizontales
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remplissage, présence d’eau). Ces paramètres sont déterminants pour du profil en long :
évaluer la résistance globale du massif à partir des valeurs de la roche ⇒ Par l’indication de la valeur caractéristique ;
intacte. En conséquence, une indétermination sur les paramètres ⇒ Par une variation possible, en plus ou en moins, par rapport à la valeur
des discontinuités implique une forte incertitude sur la définition de la caractéristique ; cette variation peut être exprimée en valeur absolue
résistance du massif et donc de son comportement au creusement ; (par exemple 25 ± 5 MPa) ou en pourcentage (25 MPa ± 20%) ;
⇒ Par une fourchette de valeurs, dans le cas où une estimation de la
⇒ paramètres d’excavabilité (dureté, forabilité, abrasivité, fragmentabilité, valeur caractéristique n’est pas possible ou n’est pas considérée
dégradabilité, etc.) : ces paramètres influent directement sur les condi- comme suffisamment fiable ;
tions d’abattage de la roche. Les risques liés à ces paramètres com- ⇒ Par des indications complémentaires dans le rapport de synthèse,
prennent par exemple l’équipement d’une tête de coupe avec des outils notamment sur le nombre et la répartition statistique des valeurs mesu-
non adéquats, la nécessité d’un changement des outils plus fréquent rées, sur leur dispersion par rapport à la valeur moyenne, etc.
que prévu, une puissance de la machine insuffisante, une valorisation
des matériaux différente par rapport aux prévisions, etc.
Après examen, l‘AFTES a considéré qu’il serait illusoire, voire dangereux, de par le GT1 de l’AFTES. Il donne dans la colonne « Exemples » une liste non
vouloir dresser une liste quasi exhaustive de tous les risques possibles liés limitative de configurations géologiques conduisant souvent à l'apparition de
au sous-sol et susceptibles d’affecter un projet d’ouvrage souterrain. En effet, risques, parce que les paramètres géotechniques concernés sont variables,
le danger serait qu’une telle liste soit utilisée « mécaniquement » comme une multiples et/ou difficiles à déterminer précisément.
check-list, qui dispenserait le projeteur de réfléchir sur les conditions géotech-
niques du projet et l’inciterait à oublier que chaque ouvrage souterrain est une L'attention est tout particulièrement attirée sur les sources de risques
sorte de prototype. d'origine anthropique, qui sont des sources de risques fréquentes et souvent
méconnues, car les éléments nécessaires à une bonne prévision ne sont pas
Nous avons cependant rassemblé dans le tableau ci-après, qui n’est bien sûr facilement accessibles, leur trace documentaire est le plus souvent inexistante
pas exhaustif, les sources de risques géotechniques les plus fréquentes en ou inaccessible, et leur répartition parfois plus aléatoire que celle des phéno-
tunnel. Ce tableau est basé sur la description des massifs rocheux recommandée mènes géologiques naturels.
Domaine
Sources de risque Paramètres Exemples d'évènements
de recensement
Faciès pulvérulents dans formation cohérente (lentille sableuse dans un grès), Poche de karst
Cohésion
à remplissage argileux, Niveau de cendres/tufs dans des terrains volcaniques indurés, etc.
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Contraste
Dureté Silex dans la craie, Filons de quartz dans des schistes métamorphiques, etc.
La matrice
Abrasivité Abrasivité excessive de la roche : Quartzite, Grès très dur, Granitoïde riche en quartz, Filons isolés, etc.
Gonflement ou délitage des matériaux après excavation (argile gonflante), Minéraux d’origine
Évolution Matériau évolutif
hydrothermale, etc.
Classe d'orientation Modification de la géométrie des discontinuités, d’origine tectonique (bloc basculé, rejet, plis, etc.)
(OR) ou sédimentaire (modification de la stratification, etc.)
Changement à l'échelle
du front
Les discontinuités Densité de
Zone fracturée, Bande ou zone de cisaillement, etc.
discontinuités (ID)
Perméabilité Venue d'eau importante allant jusqu’à l’inondation, Débourrage hydraulique, Tarissement des sources
Contraste Charge hydraulique Charge de nappe élevée par rapport aux prévisions.
Granularité Bloc rocheux inclus dans une formation meuble, Bloc erratique dans une formation fluvioglaciaire, etc.
Le massif Variation des classes CN 1 à CN3, Anisotropie de contraintes dans le massif rocheux, Décompression,
(Sol ou Roche) Contraintes
Convergence, etc.
Variation de l’épaisseur des couches, Vallée fossile, Cavité karstique vide ou remblayée,
Géométrie des
Approfondissement du niveau d’altération météorique, Remontée du substratum sous les formations
Variation contacts
superficielles meubles, etc.
Caractéristiques
Agressivité des eaux souterraines, Phénomènes de colmatage chimique, Développements bactériens,
physico-chimiques
Pollution des eaux superficielles, etc.
de l'eau
Émanations de gaz nocifs (H2S, CO2) et/ou consommation de l’oxygène (pyrites) pouvant induire
Gaz
l’asphyxie, Présence de gaz explosifs (CH4), etc.
Contraste
Cohésion/Perméabilité/
Le respect Tassements en surface, Endommagement du bâti en surface
Granularité
de la sécurité et
de l'environnement Matériau de nature
Amiante, Radioactivité (présence de radon), Présence de particules siliceuses, Production d’acide
Évolution spécifique et évolutif
sulfurique par altération de pyrites, etc.
(gestion du marin)
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tance des venues d'eau associées, etc. Plusieurs hypothèses pourront être
faites quant à ces caractéristiques. Peu probable 3 6 9 12
Très peu probable 2 4 6 8
A partir de ces nouvelles données, le projeteur définira ultérieurement le Improbable 1 2 3 4
traitement à appliquer (cf. § 3.3 « Traitement du risque »). Néanmoins, pour Faibles Moyennes Fortes Très fortes
être en mesure d'évaluer l'impact du risque considéré, le projeteur devra, sur Conséquences
la base de ces nouvelles données, déterminer en fonction des dispositions
constructives prévues, les conséquences diverses en terme de coût et de délai On trouvera ci-après un exemple de calcul du niveau de risque, construit à
et hiérarchiser ces conséquences. partir des tableaux de valeurs proposés pour quantifier les conséquences (§ 1)
et la vraisemblance (§ 2). Soit un événement redouté A, présentant une vrai-
semblance de 1/20 et des valeurs de conséquences de 18 M€, soit environ
2 - Quantification de la vraisemblance
15 % du montant total du coût de construction et de 4 mois de dépassement
En pratique, comme pour les conséquences et comme indiqué sur le tableau de délai ;
ci-dessous, la vraisemblance peut être hiérarchisée selon 4 classes, notées • les tableaux de correspondance ci-dessus donnent une valeur de vraisem-
de 1 à 4 et correspondant à quatre plages de valeurs de probabilité. blance de 3 et des valeurs de conséquences de 3 (fortes) pour le coût et de
4 (catastrophique) pour le délai ;
Note • La détermination du niveau de risque NR donne ainsi 9 pour le coût et 12
Probabilité indicative,
pour la Échelle pour le délai, résultats à comparer aux valeurs des critères d'acceptabilité
à moduler en fonction
matrice de vraisemblance
du projet étudié retenues par le maître d’ouvrage (cf. § 3.2.3 du texte principal : Évaluation
du risque).
4 Possible 1/5 = 20 %
3 Peu probable 1/20 = 5 %
A noter qu'il aurait également été possible de déterminer directement le produit
2 Très peu probable 1/50 = 2 %
Vraisemblance*Conséquences (18 M€ x 0,15 ou 4 mois x 0,15), et de com-
1 Improbable 1/200 = 0,5 % parer le résultat à une grille d’acceptabilité établie en valeur absolue.
résultats les plus explicites de l’application de la méthode DAT (Decision Aid plus basse que le niveau de fiabilité des informations est faible. Le niveau de
for Tunnelling), système développé à l’origine par le MIT et l'EPFL, puis par connaissance est obtenu par le rapport de la fiabilité des sources de connais-
Geodata à Turin. Le maître d’ouvrage peut ainsi visualiser une fourchette sance et de la complexité du contexte géologique (NC = Fi / Cx).
coût/délai de réalisation de son ouvrage en fonction de la variabilité déterminée
pour chacun des paramètres géotechniques retenus. Élaboré de cette manière, le niveau de connaissance est ainsi justifié en tout
point du tunnel et peut être modifié aisément lors de
l'intégration de nouvelles données dans le modèle, suite
à des reconnaissances ultérieures.
Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (LMR-EPFL)
Figure 12 - Exemple de représentation synthétique des risques géotechniques sur un profil en long.
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La phase de conception est précisée en cochant la case correspondante. Le contenu du tableau, à renseigner à chaque analyse de risque, est explicité ci-après
en détaillant le libellé de chaque colonne.
Identification : Texte libre décrivant au mieux le risque identifié après analyse du contexte spécifique à l'ouvrage considéré : géologie, hydrogéologie, géotechnique,
environnement, avoisinants, etc.
Source de risque : Référence à un ou plusieurs « types d'évènements », tels que ceux définis dans le tableau de l’annexe 6
Vraisemblance : Expression qualitative avec 4 niveaux.
Conséquences : Description détaillée des conséquences possibles en cas d'occurrence de l'évènement redouté, sous la forme de plusieurs scénarios quant aux
conditions de réalisation susceptibles d'être rencontrées, avec éventuellement pour chaque scénario un indice de gravité exprimé qualitativement avec 4 niveaux.
Niveau de risque : Résultat de la combinaison de la vraisemblance et de la gravité des conséquences, avec éventuellement un indice d'importance exprimé
quantitativement (note de 1 à 16).
Traitement préventif : Dispositions prévues pour réduire ou supprimer le risque : abandon de la solution, modification de l'implantation, modification du tracé
en plan et/ou du profil en long, programme de reconnaissances et d'études pour préciser la vraisemblance et/ou les conséquences – Choix de méthodes
minimisant les conséquences en cas d'occurrence de l'évènement redouté, etc.
A l'exécution : Reconnaissances à l'avancement, auscultation etc.
Niveau de risque résiduel : niveau de risque après traitement préventif, accepté par le maître d’ouvrage ou par l’entreprise s’il y a transfert explicite du risque
Traitement curatif : Dispositions constructives appropriées et/ou adaptation des méthodes initiales en vue de réduire la gravité des conséquences en cas
d'occurrence de l'évènement redouté.
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