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jeudi 30 septembre 2004 15:56:52
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Voici la monographie du CCA - Amplifon sur les Acouphènes.


Remercions tout d'abord Gérard Challier d'avoir fait confiance à l'équipe des auteurs.
Après la rédaction du rapport sur le même sujet à la Société Française d'ORL, ce texte
est plus court, plus orienté vers la pratique.
Il est en 2 parties. La première traite des « fondamentaux » de l'acouphène pour assurer
au sujet qui en souffre que la recherche dans le domaine existe, qu'il y a et qu'il y aura des
remèdes.
L'acouphène est au centre d'un carré dont les coins représentent, pour chaque patient,
son état auditif, la circonstance de survenue de son symptôme, son niveau de stress et
d'anxiété, son environnement familial et professionnel.
L'acouphène est un symptôme simple mais non objectivable. Il contraste avec la
richesse des circonstances de sa survenue. S'autorisant une comparaison triviale, il est un
peu comme un trou de serrure au travers duquel on découvre un riche décor : la sensation, la
classification et les phénomènes de perception, le stress, l'anxiété et la dépression,
l'habituation ou la sensibilisation, le conditionnement… en bref toute la physiologie
sensorielle et plus largement le somatique et le psychisme… Pour un acouphène mal toléré,
ce sont ces éléments qu'on va retrouver en consultation et que nous tentons de vous
présenter dans la seconde partie. Leur présence enchante ou rebute...
Puisse cette monographie nous motiver à entrer dans cette complexité pour soulager
souvent facilement et recevoir beaucoup en retour de l'empathie témoignée.

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Auteurs et co-auteurs

Bruno FRACHET
Service ORL Hôpital Avicenne
125, route de Stalingrad
93009 Bobigny Cedex
bruno.frachet@avc.ap-hop-paris.fr

Bertrand GEOFFRAY
18, rue Gounod
06000 Nice
bgeoffray@yahoo.fr

Sylviane CHERY CROZE


Laboratoire « Neurosciences et systèmes sensoriels »
UMR CNRS 5020
Université Claude Bernard
50, avenue Tony Garnier
69366 Lyon Cedex 07
schery@olfac.univ-lyon1.fr

Jean-Luc PUEL
Unité INSERM U 583
Hôpital Saint-Eloi
80, rue Augustin-Fliche
34295 Montpellier Cedex 5
puel@montp.inserm.fr

Christophe COULVIER
10, avenue Jules-Ferry
03100 Montluçon
ccoulvier@ccagroupe.com

Avec la participation de
Philippe PEIGNARD, Christine PONCET-WALLET, Christine TOFFIN, Caroline CUNY, Antonella VESTUTO
et de
Jean VASSEUR, Isaac SOUED, Nathalie SIBONY, Emilie VORMES

Nos remerciements vont aussi aux associations de patients et en particulier à France-Acouphènes.

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Chapitre 1

Acouphènes : aspects fondamentaux et clinique


Introduction et survol de la question

1.1 Introduction
L’acouphène correspond à la perception d’un son sans source extérieure.
Il est habituellement associé à une surdité mais est parfois isolé, sans hypoacousie1…
Nous sommes de plus en plus confrontés à cette symptomatologie. L’acouphène soit nous
« rebute » car nous pensons qu’il met notre compétence en échec, soit, au contraire, constitue une
de nos « sur-spécialités » dont la complexité et la qualité de la relation médecin-patient qu’il
engendre sont des aspects très motivants.
Cette nouvelle monographie de CCA Amplifon qui paraît après le rapport à la Société Française
d’ORL se veut pratique. Elle présente, en 2 grandes parties :
« Les fondamentaux de l’acouphène », de l’historique aux notions scientifiques de pointe.
« La pratique clinique » avec les points utiles à la consultation.
La « science » en matière d’acouphènes est en devenir. Pour ce symptôme qui siège entre somatique
et psychisme, c’est bien normal : les progrès des sciences dures réduisent les hypothèses de l’esprit.
Du traitement aux classifications, les propositions furent nombreuses.
De multiples traitements ou prises en charge ont été ou sont proposés. On peut citer :
◆ Le soutien psychologique (Scott et al – 1985) ;
◆ La relaxation (Jakes – 1985) ;
◆ Le biofeedback (Carmen et Svikover – 1984) ;
◆ L’hypnothérapie (Marlowe – 1973) ;
◆ La stimulation électrique (Chouard-Meyer-Maridat – 1981) ;
◆ L’iontophorèse à la lidocaïne (Brussi et Loenndien – 1985) ;
◆ Le masquage (Vernon – 1977) ;
◆ De multiples drogues.

La multiplicité de ces propositions, ce « panel » thérapeutique suggèrent fortement que l’efficacité


du traitement ne peut être systématiquement prédit. C’est notre constat quotidien de praticien.
Même si depuis quelques années, on sait que l’habituation est le phénomène évolutif attendu pour
l’acouphène, cette imprédictibilité est en partie en rapport avec le manque de compréhension de ses
mécanismes, manque de compréhension auquel on tente de suppléer par l’élaboration de
modèles…
Les classifications, démarche initiale d’un comportement scientifique, pour les acouphènes sont
nombreuses :
Les premières définitions / classifications de l’acouphène étaient fondées sur des dualités :
◆ Les vrais / les pseudo acouphènes (1928 – Jones et Sandsen) ;
◆ Les vibratoires / les non vibratoires (1939 – Fowler) ;
◆ Les objectifs / les subjectifs ; les extrinsèques / les intrinsèques (1947 – Atkinson).
...
1- Pour Reid (1960), dans une étude sur 200 sujets acouphéniques, 53% ne se plaignaient pas d’hypoacousie…, alors
que Fowler, en 1944, fixa à 88% (sur 2000 sourds) le pourcentage de sujets acouphéniques. Heller et Bergman, en
1953, à 73%...

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

Dans chacune de ces oppositions, la première qualification se référait à un signal mesurable avec
une source physique, la seconde, au contraire, était sans phénomène physique clairement identifié,
sans source définie.
Ultérieurement, la découverte des oto-émissions par Kemp en 1978 a semblé tout résoudre.
En 1978, Kemp a démontré que l’oreille interne, auparavant considérée comme un récepteur passif,
pouvait générer un son.
Dès lors on croyait la question du mécanisme de l’acouphène résolue.
Des acouphènes étaient associés à la présence de ces émissions oto-acoustiques spontanées. En fait
cette association est rare et leur absence ne constitue malheureusement pas un critère de définition
stricte de l’acouphène.
Ainsi, dans l’état actuel de nos connaissances, la définition de l’acouphène reste extrêmement
vague : elle recouvre les perceptions sonores sans base apparente, sans signal sonore mesurable, sans
rapport avec une source précise.
Cette définition peu précise témoigne encore bien de notre méconnaissance.
Notre retard est stigmatisé par l’évolution parallèle de la connaissance médicale dans d’autres
spécialités. En cardiologie, par exemple :
L’angine de poitrine (symptôme) est rapportée à l’insuffisance coronarienne – au défaut de
perfusion du myocarde (mécanisme) – lui-même en rapport avec l’athérome (cause)…
L’acouphène en reste toujours au premier stade : la description du symptôme auditif…

Le lecteur pressé trouvera ci-après maintenant un survol des 2 grands chapitres de ce texte :
◆ Les fondamentaux ;
◆ La pratique clinique de l’acouphène.

Le lecteur passionné retrouvera le développement des notions « survolées ».


Cet ouvrage est le fruit des réflexions de plusieurs praticiens, ORL, chercheurs, audioprothésistes,
psychologues…. Chacun aborde les acouphènes sous un angle spécifique.
Le lecteur ne s’étonnera donc pas de retrouver dans des chapitres différents des notions identiques
qui constituent la base théorique commune.
Des encarts résument des paragraphes, le logo "caducée" signale l’utilité pratique de la notion pour
la consultation.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

1.2 Survol : les « fondamentaux » de l’acouphène

◆ 1.2.1 Le statut de l’audition :


L’audition normale est automatique, irrépressible : nous ne pouvons pas nous empêcher de
comprendre un interlocuteur qui parle notre langue maternelle. L’audition
Communication,
permet de comprendre la parole dans des conditions sonores plus ou moins
alerte et plaisir sont
difficiles, de localiser la source sonore…
intriquées dans la La fonction de l’audition est la communication avec des interlocuteurs et avec
fonction de relation l’environnement. L’audition donne l’alerte qui participe à la survie de
de l'audition. l’individu en prévenant du danger. Elle donne aussi le plaisir de l’écoute,
génératrice d’émotions.
L’alerte sonore est une fonction permanente, même dans l’obscurité… L’attente d’un signal
d’alerte connu permet sa détection rapide à des intensités très faibles, peut-être autrement non
perçues. L’audition est un système à gain variable et le réglage du gain est sous la dépendance
d’éléments cognitifs, psychologiques et émotionnels.

Efficacité et limites du fonctionnement sensoriel :


5 sens concourent à notre connaissance du monde extérieur et à notre survie. L’intégration de
toutes ces informations, pour une bonne part permanentes et continues, est optimisée.
L’intégration centrale se préoccupe en premier des informations considérées de façon innée
ou par expérience essentielles à la survie et aux changements.
Dans notre domaine, le bruit de fond mélangé aux paroles dignes d’intérêt n’est pas entendu
sauf si on décide d’y prêter attention ou s’il est trop intrusif. Mais un signal sonore témoin
d’un danger potentiel extérieur à la conversation sera au contraire « valorisé » jusqu’à
empêcher la compréhension de l’interlocuteur. Ainsi, le mécanisme de la perception
catégorise le signal sonore, valorisant l’alerte qui va pouvoir « occuper la ligne » en
permanence, empêchant plus ou moins la perception d’un signal d’un autre ordre.

◆ 1.2.2 Le statut de l’acouphène :


L’acouphène ressenti comme une menace va profiter de ce statut de danger potentiel : il est perçu
même s’il est d’intensité faible. Il est reconnu même dans un environnement masquant, il
déclenche toutes les réactions de stress possibles. Il « occupe en permanence la ligne », entrave la
compréhension et sa caractéristique même de menace est facteur de pérennisation.
L’acouphène a une composante culturelle :
Désagréable en Occident, il est, en Inde, le signe que Dieu vous parle et ne génère aucune plainte,
bien au contraire.

1.2.2.1 L’habituation :
C’est un élément essentiel dans la physiologie sensorielle, au même titre que « l’oubli » qui
fait que les stimulations sensorielles peuvent se succéder les unes aux autres. L’habituation
est l’évanouissement progressif de la réaction face à la répétition d’une stimulation.
Dans une approche finaliste, tout se passe comme si le système sensoriel « comprenait » que la
stimulation qui ne change pas n’apporte plus d’information sur l’environnement et qu’il peut
libérer ce canal pour une éventualité sensorielle qui serait plus utile. Le système sensoriel
filtre cette information, l’empêche d’atteindre le conscient de la perception mais garde la
possibilité de son rappel volontaire.
Mais si la stimulation porte en soi une information de menace vitale, aucun filtre, jusqu’à
démonstration du contraire, ne va s’instaurer.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

L’habituation est la loi générale de l’acouphène :


Par sa permanence, par la prise en compte involontaire et progressive de son statut de
« non-information » l’acouphène doit profiter naturellement de l’habituation, sauf s’il
continue à être perçu comme une menace, sauf s’il déclenche une émotion : la crainte
traduite par les réactions du système nerveux autonome.
L'habituation
1.2.2.2 Origine et mécanismes de l’acouphène : est la loi
L’acouphène subjectif 1 est la perception d’un signal sonore, bruit ou signal générale de
plus simple, sans source sonore extérieure. C’est un bruit de l'acouphène.
fonctionnement du système auditif. Il n’y a actuellement aucune méthode
paraclinique pour l’enregistrer. L’acouphène est un symptôme bien réel.
Ses mécanismes de production sont au moins multiples, obscurs pour certains. Le
« démontage » de ce symptôme est à un stade encore archaïque. L’acouphène en est encore à
sa caractérisation du symptôme.
Ce statut indémontrable impose de ne s’appuyer pour la démarche diagnostique que sur le
seul discours du patient,discours forcément soumis à sa subjectivité personnelle.

1.2.2.3 Les différents types d’acouphènes :


Les classifications d’acouphènes sont nombreuses et datent au moins d’Hippocrate. Dans un
but très pragmatique, nous distinguerons ici les acouphènes isolés ( environ 25%) de ceux
avec surdité (environ 75%). Il est plus aisé de prendre en charge un acouphène avec surdité
car la prothèse auditive est alors d’un bon appoint.
La sensation perçue est à prendre en compte : les acouphènes décrits comme un bruit
orientent vers un générateur périphérique, l’acouphène à type de sifflement, plus fréquent,
n’a pas grande valeur localisatrice. La typologie exacte de l’acouphène en terme de fréquence,
c’est à dire de hauteur tonale2 n’a pas de valeur clinique nette. Sa caractérisation par
« matching ou masking » 3 est délicate.
Dans le domaine de la sonie, c’est à dire de « l’intensité de l’acouphène », il est fréquemment
décrit comme assourdissant, contrastant avec sa mesure objective.4

1.2.2.4 Le substrat neurophysiologique :


L’acouphène est la perception normale d’une hyperactivité neuronale à un endroit
quelconque des voies auditives. Le sujet perçoit, ensuite, normalement un signal reçu au
niveau de son cortex auditif. Il en a conscience. Ce signal est sans signification.

1.2.2.4.1 Présence d’un générateur :


On émet donc l’hypothèse qu’en un point, entre la périphérie et les centres existe un
phénomène électrique transmis normalement sur les voies auditives. Des générateurs
périphériques ou des mécanismes de genèse périphérique sont recensés. Ils sont décrits
objectivement par expérimentation animale ou construits dans des modèles qui pallient
le manque d’observation expérimentale.

1- On distingue l’acouphène objectif audible et enregistrable de l’acouphène subjectif, celui qui nous occupe.
L’acouphène objectif reconnaît 2 sources :
- Le bruit du flux vasculaire, par exemple le bruit d’une fistule superficielle, ou le souffle d’un rétrécissement
vasculaire ou valvulaire, à rapprocher de l’éréthisme de la carotide interne dans le canal carotidien du rocher en cas
d’hyperthyroïdie. L’examen clinique comporte toujours une auscultation locale.
- Le bruit respiratoire d'une béance de la trompe d'Eustache. L'examen clinique fera la différence.
2- Hauteur tonale ou « note musicale de l’acouphène ».
3- On demande au patient de comparer son acouphène à un son calibré.
4- idem

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

1.2.2.4.2 Défaut d’inhibition et synchronisation excessive :


Les systèmes sensoriels possèdent des mécanismes d’inhibition. L’activité
électrophysiologique d’une structure neuronale est modulée par celle de sa voisine. Des
défaillances peuvent aboutir à un manque d’inhibition donc à un renforcement anormal
d’activité, à une synchronisation anormale des influx qui deviennent - parce qu’ils sont
alors organisés - un message signifiant porteur d’une sensation.

◆ 1.2.3 Constats et modèles :


Pragmatiquement, nous nous limiterons à la présentation d’informations utiles à la prise en
charge clinique du patient, soit parce que leur compréhension permet d’entrer dans l’intimité du
phénomène et de présenter une explication au patient, soit parce qu’ elles expliquent le recours à
certaines thérapeutiques.
Dans ce chapitre, nous n’en présenterons que 2 :

1.2.3.1 Le modèle de Jastreboff (43-48) :


Acceptant l’existence d’un générateur présenté plus haut, son activité est détectée, la
sensation est perçue. On en déduit le fonctionnement du bloc fonctionnel qui représente la
fonction de détection :
Tout signal connu et menaçant est détecté rapidement à des niveaux très
faibles. L'information du
patient est le
La permanence du signal entraîne le système à le détecter de mieux en
point central
mieux. Ce système de détection est piloté par le système limbique, boîte
actuel de la prise
noire de l’émotion, en connexion avec le thalamus et les sensations,
en charge des
l’hippocampe et la mémoire.
acouphènes.
Ce signal menaçant est normalement perçu par le conscient, Les modèles
obscurcissant les autres perceptions et aux dires des patients gênant facilitent
l’audition et la compréhension. Comme toute menace, il déclenche l'explication.
toutes les réactions de stress gérées par le système nerveux autonome. Le
conscient intervient en aggravant la situation : il ressasse les croyances
de non-guérison, il anticipe sur le futur. Le système risque de boucler sur lui-même surtout
si la surdité focalise l’attention sur les tentatives de meilleure compréhension : le sujet « tend
l’oreille pour mieux comprendre »… La prise en charge, en expliquant cette mécanique à la
fois simple et complexe cherche à la démonter.

Perception & évaluation


Aires auditives et autres aires associées - cortex

Processus
conscients

Détection, Processus
Associations émotionnelles
subcorticale inconscients
Système limbique

Hp Hr

Source de Gêne
l'acouphène Système nerveux autonome

D'après Jastreboff. Hp = habituation de la perception - Hr = habituation de la réaction.

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1.2.3.2 Le modèle de l’épilepsie :


Dans plusieurs situations cliniques, comme des traumatismes sonores ou des boucles
artérielles, on peut considérer que l’acouphène est un foyer épileptique sur la voie auditive.
Une approche médicamenteuse reconnaît l’efficacité des produits antiépileptiques. D’autres
modèles existent, comme celui de la douleur, très contributif à la compréhension de
l’acouphène et à sa prise en charge.

◆ 1.2.4 Spécificité de la prise en charge :


L’acouphène constitue habituellement un « épouvantail » pour le médecin, pour plusieurs
raisons :
Il a pour tous, médecins et patients la mauvaise réputation de résistance à la prise en charge : « on
n’y peut pas grand chose », « de toutes façons il ne disparaîtra pas ». Les phrases de défaitisme sont
légion. Or bien souvent, l’amélioration de la tolérance tient à peu de chose, à commencer par une
explication claire et loyale du phénomène.
L'acouphène, hors traumatisme sonore, considéré comme un signe clinique de la presbyacousie1
stigmatise le vieillissement et renforce ainsi le sentiment d’inéluctabilité… Le patient est plus
que le praticien expert dans le domaine. Plus de 60% des sujets porteurs d’un acouphène ont vu
3 médecins différents, ont subi tous les examens complémentaires, essayé tous les médicaments.
Ce nomadisme, à la recherche de la prise en charge efficace est coûteux et la relation
médecin–malade devient, au fil des consultations, de plus en
• La mauvaise réputation de plus difficile à gérer.
l'acouphène. Le praticien répugne souvent à expliquer simplement l’opacité
• Acouphène et vieillissement auditif. du phénomène et la difficulté apparente de la prise en charge.
• L'expertise en matière L’acouphène est pour le praticien un véritable « défi », une
d'acouphène. gestion délicate des échecs antérieurs, dans lequel il vaut
• Acouphène et deuil de l'audition mieux renoncer d’emblée si temps et compétences ne sont pas
normale. disponibles. En effet, les erreurs de langage du médecin qui
• L'acouphène bien toléré/mal théoriquement détient le savoir, sont destructrices. Le
toléré. médecin « suivant », devra d’abord reconstruire une relation de
confiance avant d’envisager la phase positive de prise en
charge. Or, cette prise en charge repose sur des concepts simples.
L’acouphène est une marque de la perte de la santé auditive : le fonctionnement n’est plus
silencieux… dans la plupart des cas, l’acouphène est associé (ou l’inverse) à une surdité : la
fonction auditive est dégradée dans 2 dimensions : la performance et son caractère agréable.
Surtout après un traumatisme sonore chez un sujet jeune, on repérera facilement les phases
classiques du deuil de l’audition normale : déni, révolte, dépression et finalement acceptation
lorsque que le sujet constate que la vie peut générer encore des agréments même avec cette
surdité. Le discours du praticien devra être adapté au moment de l’évolution. Ainsi par exemple,
une explication précoce de l’habituation, à la phase de révolte, détériore la qualité de la relation.
L’acouphène bien toléré, l’acouphène mal toléré… :
Schématiquement, sur 100 porteurs d’acouphènes, 75 % ne consultent jamais ou une seule fois,
et 25 % consultent itérativement . La vraie question clinique est de savoir ce qui fait basculer d’un
groupe à l’autre. L’acouphène étant un symptôme tout à fait « monotone »2, il est clair que son
ressenti intervient pour une part non négligeable dans sa tolérance. C’est cette enquête qui
demande du temps. Le patient vient pour un désordre qu’il juge à juste titre somatique et se hâter
vers un « démontage de sa vie psychique » est certainement contre-productif. C’est seulement
après le bilan somatique (ou en même temps) qu’il faudra approcher cette facette de la pathologie.

1- Les altérations auditives dues au vieillissement naturel de notre système auditif sont, dans une acception large,
aggravées par les expériences « oto-traumatiques » de la vie : traumatismes sonores, oto-toxicité de certains
antibiotiques ou de la chimiothérapie par cis-platine...
2- Monotone au sens de simple, identique, peu riche finalement dans sa présentation…

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◆ 1.2.5 La guérison :
C’est l’exigence du sujet qui estime pouvoir bénéficier de la « pilule miracle » qui fera disparaître
le symptôme. C’est aussi la quête des médecins et chercheurs du domaine. Mais à l’heure actuelle,
elle n’existe pas et force est de « faire avec » l’insuffisance de notre pharmacopée. Il existe pourtant
des disparitions expliquées ou non d’acouphènes.

1.3 Survol : La clinique


La prise en charge va principalement exploiter le développement de l’habituation bien représentée
par le schéma de Jastreboff.
A défaut de guérison, la tolérance est le contrat qu’il est permis de présenter au patient. De façon
simple et compréhensible on explique au patient1 que la prise en charge « va faire de la blessure du
système auditif une cicatrice ». Toute cicatrice, après des soins et du temps, ne dérange plus et ne se
remarque que si on la regarde. Ainsi, pour nous, la guérison
- il vaudrait mieux parler de consolidation - est la tolérance Quitter son habit de grand clerc
au quotidien de cette cicatrice auditive. pour expliquer ... en ne sortant
Certes, si « on écoute » l’acouphène, on l’entend. jamais de ce qu'on sait. C'est une
De même que la cicatrice démange parfois, la tolérance de vraie démarche de vulgarisation.
l’acouphène peut varier.
Pour l’acouphène ancien, si le patient n’a plus l’espoir de sa disparition, il désire essentiellement
qu’il ne s’aggrave pas, ce sur quoi il faudra le rassurer.

◆ 1.3.1 L’examen clinique :


Comme pour tout symptôme subjectif, l’interrogatoire dit
« poussé » est essentiel. L'interrogatoire est le temps
Le succès de la prise en charge provient essentiellement de essentiel de l'examen clinique :
l’échange lors de la consultation. Le patient peut expliquer - on définit l'acouphène,
« son » symptôme et être entendu. Le praticien peut - on en précise la tolérance.
expliquer, au travers d’exemples et de paraboles, le
phénomène, ses tenants et aboutissants, son devenir.

1.3.1.1 La typologie de l’acouphène :


C’est un acouphène subjectif, il ne s’agit ni d’une hallucination, ni d’un acouphène objectif.
L’ancienneté de l’acouphène est impérativement à préciser. On distingue :

1.3.1.1.1 l’acouphène aigu :


Il est présent depuis moins de 6 mois. Le praticien doit savoir où en est le patient de son
parcours de deuil.
L’acouphène récent fait espérer au patient une guérison vraie, c’est-à-dire la disparition
du symptôme. Dans cette phase, la mise en route d’un traitement agressif peut se
justifier, cherchant à faire disparaître la cause et par-là le symptôme.

1.3.1.1.2 l’acouphène chronique :


Il est présent depuis au moins 6 mois. Il demande une approche plus explicative : plus
l’installation est ancienne, plus le patient est sceptique2, mais moins il est inquiet : « si
c’était grave, je le saurais déjà ». Les consultations et examens complémentaires
antérieurs rassurants permettent de se fixer plus sur le symptôme lui-même que sur sa
cause.

1- La consultation pour acouphènes doit être émaillée d’énonciation de paraboles ou de faits de la vie.
2- Mais il consulte néanmoins. Il faut prendre garde à ce que sa démarche soit bien celle d’une recherche de guérison et
non de mise en défaut de la médecine.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

1.3.1.1.3 La localisation de l’acouphène :


Un acouphène unilatéral doit faire rechercher une cause locale, même s’il faut
rechercher par esprit de système une maladie métabolique vasculaire. Les causes locales
sont peu nombreuses : causes auditives, de type trauma sonore et trouble de l’ATM 1.

1.3.1.1.4 La « cause » ou la « circonstance » de l’acouphène :


Il faut distinguer cause et circonstance. Dans le cas d’un sujet âgé presbyacousique,
hypertendu traité (HTA), la cause proximale au sens de la responsabilité immédiate du
phénomène pathologique n’est pas facile à affirmer et il est plus exact de parler
d’acouphène dans le cadre d’une HTA. Quoiqu’il en soit, cet effort de définition rassure
le sujet sur le désir du médecin de trouver un mécanisme somatique..2 ( cf. liste en
annexe n°2 page : 131 )
Il est utile de demander : « d’après vous, c’est dû à quoi ? ». Très fréquemment, le sujet a la
notion d’une circonstance précise ou a réattribué le symptôme, ce qui oriente la prise en
charge.

1.3.1.1.5 État auditif :


Une surdité recentre la problématique sur l’audition. La communication est altérée et
l’acouphène rend l’organe gênant. En permanence, le sujet « tend » l’oreille pour mieux
comprendre. Ce faisant, il perçoit puis écoute « son » acouphène. Petit à petit, la
répétition quasi permanente du phénomène l’obsède. La correction de l’audition par
tous les moyens disponibles, dont l’aide auditive, est primordiale.

1.3.1.1.6 L’hyperacousie est un élément essentiel de la gêne :


Le sujet, plus ou moins sourd qui perçoit mal les sons faibles mais normalement les sons
forts a un système auditif sans progressivité. À la limite, dès qu’il entend, c’est trop fort.
L’inconfort auditif déclenche des comportements de fuite des ambiances bruyantes
(transports en commun, rue, réunions). On peut décrire de véritables « phonophobies ».
L’hyperacousie est fréquemment attribuée à l’acouphène alors que c’est elle qui gêne et
déclenche le trouble du comportement. Elle doit être impérativement prise en charge.

1.3.1.1.7 Existence de pathologies connues et traitées, d’antécédents particuliers :


Le lien n’est pas toujours clair, mais un diabète, une vascularite, des manipulations
cervicales, des chocs cervico-céphaliques seront systématiquement recherchés.3 Il est
aussi essentiel de connaître les prises en charge antérieures et leurs résultats. Ceci évite le
ridicule de l’annonce d’un « nouveau » remède déjà pris depuis plusieurs mois sans aucun
résultat…

1.3.1.1.8 Les symptômes associés :


Ils peuvent avoir une valeur localisatrice, ainsi de la triade caractéristique d’une maladie
de Ménière. Le stress excessif, l’anxiété, la dépression, l’insomnie sont des
co-symptômes à prendre en charge.

1.3.1.2 Evaluation du retentissement et de la tolérance de l’acouphène :


La réponse à la question : « ça vous inquiète ou ça vous gêne ? » oriente grandement la prise en
charge.

1- Articulation temporo-mandibulaire.
2- L’idéal est d’avoir en tête la liste des situations possibles pour répondre à la demande somatique.
3- Aux États-Unis, la question sur l’utilisation de la marijuana est systématique.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

1.3.1.2.1 L’inquiétude :
Pour un acouphène chronique, on l’a vu, le patient témoigne d’une certaine sérénité
somatique étiologique. Son inquiétude résiduelle concerne l’évolution de l’acouphène
lorsqu’il a reçu des informations alarmistes1.

1.3.1.2.2 La gêne est variable d’un sujet à l’autre :


Du sujet porteur d’un acouphène ancien qui consulte pour savoir « s’il y a du neuf » en
matière de médicament, au patient hyperacousique dont l’acouphène obsédant induit des
troubles du comportement, la majorité des patients qualifient l’acouphène « d’énervant ».
Pour évaluer la tolérance, une question est utile : « finalement qu’est ce que cet
acouphène vous empêche de faire ? ». Souvent, la réponse, après réflexion, est « rien ».
C’est aussi sur cette base que va se construire le discours de la prise en charge.
L’acouphène peut constituer une gêne quasi permanente, une véritable obsession. Plus
fréquemment il ne constitue une gêne qu’à certains moments (endormissement, bruit,
silence) qu’il faut faire préciser.
« Considérez-vous que depuis sa survenue, l’acouphène est en aggravation, stable, en
diminution » ? La réponse permet d’évaluer le début de l’habituation, les variations de la
tolérance en fonction de la vie psychique. Bien sûr, ce n’est pas en une seule et unique
consultation que le bilan exact de la tolérance est fait.

1.3.1.2.3 Le stress : L’acouphène peut être générateur de stress :


On le comprend aisément si on accepte la définition du stress comme étant la mise en
rapport d’une situation avec les moyens dont on dispose pour la contrecarrer.
Le stress peut générer un acouphène. Cette assertion est sans doute vraie. La recherche en
neuroendocrinologie met en valeur le rôle du stress au plan somatique.

1.3.1.2.4 L’acouphène et la vie psychique du sujet :


Il peut s’agir d’un axe (parmi d’autres) de réflexion utile à la prise en charge.
Au-delà de la définition du stress : La personne stressée craint de ne pas faire face aux
difficultés de son quotidien. L’acouphène peut apporter un bénéfice secondaire : s’il est
mis en avant dans les relations sociales et autorise des conduites de fuites acceptées par
l’entourage, s’il est donc « utile », s’il est un symptôme qui permet d’éviter conflits et
tensions, sa disparition, inconsciemment, n’est pas mise à l’ordre du jour. À un stade
plus avancé, le stress permanent génère l’angoisse. La crainte de l’insomnie la renforce.
La qualité de vie se dégrade. Plus avant encore, le sujet peut présenter une dépression.
Mais la question reste ouverte de savoir si c’est la dépression qui crée l’acouphène ou
l’inverse.
Dans cette évaluation du retentissement de l’acouphène et des mécanismes favorisant sa
pérennité, se profile la prise en charge. Des médicaments peuvent être nécessaires, une
thérapie peut être mise en place, le recours au psychiatre peut s’imposer.

1.3.1.3 L’examen clinique physique :


Même s’il est limité, il est indispensable et met en valeur la recherche d’une cause
somatique. Il comporte :
● Un examen du conduit auditif externe et du tympan, à la recherche d’un motif de douleur.
● Une auscultation locale et cervicale à la recherche d’un souffle témoin d’une anomalie
vasculaire locale (acouphène objectif) ou propagé à partir du système valvulaire ou
carotidien.

1- L’acouphène rend fou, mène au suicide… ce genre d’informations se trouvent sur des sites Internet ou dans le
discours de certains confrères…

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● Un bilan de l’ATM. Des douleurs péri-auriculaires, un bruxisme, des soins dentaires


suspects d’avoir modifié cet équilibre justifient un examen spécialisé. L’implication de
l’ATM, souvent évoquée, n’est pas totalement expliquée. Néanmoins des mesures
spécifiques ont permis de vraies améliorations du symptôme.

1.3.1.4 La mesure de l’audition :


Elle est indispensable et fournit des éléments essentiels pour la prise en charge. Très souvent,
la gêne mise au compte de l’acouphène est en fait due au défaut de compréhension. L’examen
comprend l’audiométrie tonale et vocale et tous les tests nécessaires pour objectiver
l’hyperacousie.

1.3.1.5 L’imagerie :
Sa nécessité a déjà été évoquée en fonction des cas. Normale même ancienne, son
renouvellement régulier n’est pas une nécessité.

1.3.1.6 Les autres bilans :


Ils sont fonction des orientations étiologiques supposées.
Une fois définis les conditions de survenue de l’acouphène, ses caractéristiques, ses
co-morbidités, son retentissement et sa tolérance, son passé médical et qu’on aura approché
le fonctionnement psychologique du patient, on pourra fixer le profil de la prise en charge.

◆ 1.3.2 La prise en charge a plusieurs objectifs :


● Traiter la cause de l’acouphène si on peut en espérer la disparition.
● Améliorer la qualité de vie en allégeant les co-morbidités : prise en charge du stress, de
l’anxiété, de la dépression par tous moyens lourds ou légers. L’insomnie, symptôme associé
à l’acouphène le plus fréquent, doit être prise en charge. Les hypnotiques, s’ils sont choisis
suivront les règles habituelles de prescription.
● Favoriser l’habituation, par la thérapie auditive et les thérapies comportementales et
cognitives.

1.3.2.1 Les moyens de traitement :


Certains traitements reconnus comme efficaces sont inapplicables : citons la lidocaïne injectable
dont l’action est fugace et le courant électrique continu qui peut bloquer la production anormale
d’influx, mais provoque l’ossification.

1.3.2.1.1 Améliorer l’audition :


C’est la mesure de base. L’absence de surdité associée rend la prise en charge plus
délicate. L’aide auditive est le recours majeur pour la prise en charge. On sait, en France
les réticences à l’appareillage auditif, mais on constate que les sujets acceptent mieux une
aide auditive inscrite dans la prise en charge de l’acouphène. Certaines prothèses
auditives combinent une amplification et un générateur de bruit.

1.3.2.1.2 Développer l’habituation :


La thérapie auditive conçue par Hazel et Jastreboff vise à l’habituation de la réaction :
l’acouphène ne génère plus d’intolérance majeure, puis à l’habituation de la perception
c’est-à-dire à la non-perception de l’acouphène.
Elle comporte deux volets :
Le conseil directif :
C’est l’explication du phénomène avec en appui tout document utile. Il cherche à
faire céder les croyances acquises sur « l’intraitabilité » de l’acouphène. Les
associations de patients jouent dans certains cas un rôle très positif.

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La désensibilisation auditive :
Il s’agit de la diminution de la sensibilité de la détection de l’acouphène. Cette action
est du domaine de l’inconscient, à la différence de la précédente. Elle est mise en
œuvre d’abord en recommandant au patient d’éviter le silence. De façon plus
sophistiquée, un générateur de bruit hébergé dans une prothèse auditive permet de
soumettre le sujet à un environnement sonore permanent. L’idée est de diminuer le
contraste entre l’acouphène et l’environnement sonore. Petit à petit, cette
stimulation sonore prolongée (plus de 6 heures par jour) va déclencher une réaction
normale d’habituation : ce signal n’est pas menaçant, il est amovible. Et la théorie
stipule que l’habituation est généralisable, c’est à dire que les stimulations
ressemblant à la stimulation qui déclenche la réaction visée vont aussi profiter du
filtre de l’habituation. Ainsi l’acouphène est plus rapidement bloqué à l’étage
inconscient. Le développement de l’habituation demande plusieurs mois. Cette
démarche n’est pas dangereuse car le niveau sonore nécessaire est faible.

1.3.2.1.3 Utiliser les méthodes de thérapie cognitive et comportementale :


Elles ont pour objectif non pas tant de faire disparaître l’acouphène que d’en garantir la
tolérance. Les modalités sont parfaitement définies. Il s’agit d’établir avec le thérapeute
les objectifs à atteindre, de les modifier d’une séance à l’autre, d’évaluer la réussite… À la
différence de la méthode précédente, elle fait appel uniquement au conscient.

1.3.2.1.4 Les vasculotropes ou assimilés :


Ils sont prescrits par habitude. Seuls 2 médicaments ont une AMM pour l’indication
acouphène.

1.3.2.1.5 Les psychotropes :


Ils ont leurs tenants et leurs détracteurs
dans cette indication.. Dans la prescription d'un psychotrope, il y
a 3 acteurs :
Ils sont indiqués spécifiquement pour
- l'acouphène : sévérité, retentissement...
traiter la ou les co-morbidités. Pour le
- le sujet : acceptation de la démarche
symptôme acouphène, au-delà de leur
(crainte de l'assuétude, fonctionnement de
effet général et de l’indication de ces drogues...)
l’AMM, certains sont justifiés pour leur - le prescripteur : promotion des
effet ou par les habitudes du thérapeute. benzodiazépines « facilement » ou au
1.3.2.1.5.1 Les antiépileptiques : contraire frein systématique.
Ils ont, on l’a vu, leur justification de
mécanisme.
Le plus utilisé est le clonazepam (Rivotril®) sans AMM pour cette indication.
Aucune étude non critiquable n’est disponible. Comme toute benzodiazépine, sa
prescription en suit les règles habituelles : le moins possible, le moins longtemps
possible. Sa forme goutte (de 5 à 8 gouttes le soir au coucher pour un sujet en
l’absence antérieure de prise
régulière de benzodiazépine) est La sacralisation de la prescription :
parfaitement manipulable. Le Si ce moyen thérapeutique est choisi, il est
coût du traitement est faible. On indispensable d’en présenter la justification,
recherchera la dose minimale les précautions d’emploi, la faible posologie,
efficace. Le clonazepam a une les rares effets secondaires. La découverte de
justification logique, il est sédatif ces informations dans la notice, par le patient,
et améliore la qualité de vie en le déstabilise et gâche à la fois cette
favorisant l’endormissement et le possibilité thérapeutique et la confiance dans
sommeil. On ne peut lui attribuer le thérapeute… qui s’est sans doute trompé
de disparition complète de de médicament.

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l’acouphène, mais nombre de patients le considèrent comme un produit efficace.


Certains auteurs s’opposent à l’usage des benzodiazépines pour éviter toute addiction
mais aussi pour ne pas entraver le développement de l’habituation, car leur effet sur
les médiateurs peut interférer dans ce mécanisme réel de plasticité cérébrale.
1.3.2.1.5.2 Les anxiolytiques :
Ils prennent en charge la co-morbidité anxieuse. La prescription est réfléchie, tout
comme celle des somnifères.
1.3.2.1.5.3 Les antidépresseurs :
Ils peuvent être utiles, surtout si l’acouphène s’intègre dans une dépression masquée.
Là encore, les formes en gouttes sont bien manipulables, là encore il faudra expliquer
le recours à ce moyen thérapeutique et craindre la possibilité des effets secondaires.
Dans l’ensemble, il ne faut pas céder à la tentation de prescrire trop facilement des
molécules, qui peuvent conduire le sujet à une addiction pénible, sans toutefois
négliger un inconfort de vie parfois majeur.

1.3.2.1.6 Les autres méthodes sont nombreuses :


Acupuncture, relaxation, hypnose, sophrologie… Certains patients sont soulagés.
L’évaluation de leur efficacité est complexe. Elles sont à condamner quand elles sont
développées dans un cadre non médical, pour des patients déçus de la médecine
conventionnelle qui n’a pas su proposer le début de la prise en charge que constitue
l’empathie.
L’approche des patients porteurs d’acouphènes élargit le champ de la pratique pour
qui sait que, souvent, derrière ce symptôme épouvantail, se cache la richesse de la
complexité du fonctionnement de chacun.

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Les acouphènes, un mal vieux comme la médecine…

Petite histoire de l’acouphène

La sensation auditive perçue sans stimulation extérieure à l'organisme accompagne l'humanité


certainement depuis son commencement. Aussi loin que l'on peut remonter dans l'histoire humaine dont
nous gardons des traces, ce phénomène est mentionné.

De l'Antiquité au XVIe siècle

Les auteurs se consacrent essentiellement à la description du symptôme. Les théories explicatives sont rares
et curieuses : la présence d’un petit animal protégeant l'oreille pour les Annamites, un conflit entre le froid
qui entre dans l'organisme le long des vaisseaux et les humeurs de vie chaude présentes dans le corps pour les
Chinois, les humeurs venant de l'estomac pour Gallien au II e siècle après Jésus-Christ, qui ne
parviennent pas à s'écouler normalement pour un Alexandre de Tralles au VI e siècle, des vapeurs cérébrales
à nouveau pour Fallope au XVI e siècle.
On voit par là l'absence de progression avec essentiellement des compilations redondantes de siècle en siècle.
Seul Hippocrate et les médecins arabes des X e -XI e siècles émergent, ainsi que les écoles de Salerne en Italie
et Montpellier au XI e -XII e siècles. Leur contribution principale est une classification des acouphènes
associés ou non à une surdité, des mouvements anormaux et autres troubles neurologiques. Certains comme
Guy de Chauliac au XII e siècle constatent l'amélioration nette des patients situés dans un
environnement sonore relativement important, une idée qui fera son chemin plusieurs siècles après.
Quant aux thérapeutiques proposées, elles varient peu durant ces 2000 ans, fondées essentiellement sur des
décoctions administrées localement, à base d’huiles, d’herbes, ou même d'opium, voire des incantations ou
des scarifications des lobes de l'oreille.
Les deux siècles suivants représentent un palier dans l'acquisition des connaissances en matière
d'acouphènes en particulier grâce à Du Verney qui publie en 1683 le premier traité des maladies de l’ouïe,
exclusivement consacré aux pathologies de l'oreille ; il fait en particulier une analogie entre les sensations
visuelles que l'on peut avoir dans le noir et, par exemple, les traumatismes acoustiques et les acouphènes qui
peuvent en résulter. Ce qui est tout à fait passionnant est le fait qu'il ait émis l’hypothèse selon laquelle le
nerf auditif transmet toutes les activités de l'oreille interne au cerveau, quelle que soit la source de cette
activité.
La contribution du XVIII e siècle est la découverte qu'il n'y a pas d'air dans le labyrinthe ce qui,
naturellement, change complètement la perspective en matière de théories d'explication des acouphènes. Sur
le plan thérapeutique de grandes voies apparaissent, la première utilise les propriétés de l'électricité statique
découverte au milieu du siècle, la deuxième se fonde sur les bénéfices supposés de la mastoïdectomie qui
permet la sortie de l'air emprisonné dans la boîte crânienne.
Le XIX e siècle est la deuxième marche qui conduit aux connaissances actuelles.
On remarque d'abord les applications des découvertes de Galvani et Volta en matière de courant continu,
permettant certaines disparitions d'acouphènes. Itard publie en 1821 une série de 172 patients
acouphéniques qu’il classe selon la cause (acoustique, oreille interne, psychique). Il associe cette
classification et l’existence ou non d'une surdité et suggère la technique du masquage d'acouphènes .
Les différentes écoles allemandes sont, durant ce siècle, les plus actives. Elles s’intéressent aux
bourdonnements pulsatiles rapportés à des anomalies de vaisseaux de proximité ou à des atteintes
valvulaires.
- On fait le lien entre eux et la plupart des pathologies de l'oreille avec la possibilité d'apparition d'un
acouphène dans le cadre de l'irritation du nerf auditif.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

- On commence à bien différencier des acouphènes objectifs et subjectifs.


- Des atteintes centrales (typhoïde, syphilis) des médicaments (quinine, acide salicylique, morphine) sont
mis en cause dans l'apparition d'acouphènes.
De même, la description d'une inhibition résiduelle après exposition à un bruit extérieur est rapportée.
En terme d'épidémiologie, on constate l'augmentation de la fréquence des acouphènes avec le vieillissement,
rapportés à un encombrement calcaire de la fenêtre ovale. Les troubles de ventilation de la caisse sont
également considérés comme une cause possible d'acouphènes.
L'hyperacousie est décrite également au XIX e siècle par les écoles allemandes.
On voit ainsi se mettre en place des idées qui n’éveillent en leur temps que faiblement la curiosité des
praticiens. En effet, les nombreux essais thérapeutiques médicamenteux (injection de vapeurs, glycérine,
chloroforme, y compris dans les trompes d'Eustache, utilisation par voie générale, d'arsenic, d'atropine), ne
reposent sur aucun lien avec les théories avancées. Toynbee, fondateur de l’anatomie pathologique, meurt
en 1866 en traitant son propre acouphène par une inhalation de chloroforme et d’acide cyanhydrique.
La dernière marche de l'escalier se met en place après la seconde guerre mondiale, après une cinquantaine
d'années productives sur le plan théorique mais peu de bénéfice pour les patients.
En effet les outils de mesure (audiométrie, test vestibulaire), d'imagerie (radiographie standard, incidence
spécifique et coupes tomographiques), l’électro-encéphalographie voire l’imagerie vasculaire associés à
l'accroissement des connaissances sur le fonctionnement de la cochlée (Barany) sont les soubassements qui
ont permis les avancées actuelles.
L’histoire de ces 50 dernières années se confond avec les chapitres de cette monographie et nous y renvoyons
donc le lecteur.

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Chapitre 2

Les fondamentaux de l’acouphène

Les avancées dans la connaissance des acouphènes sont bien réelles même si le peu d’applications
cliniques à ce jour peut donner une impression contraire.
Pour la pratique, ces notions alimentent la consultation, permettent d’élaborer des paraboles pour
expliquer sans déformer, pour s’adapter au désir de compréhension de celui qui souffre d’acouphènes.
La relation médecin–malade, encore plus qu’ailleurs est ici un vrai moteur pour la prise en charge. Elle
est de qualité si elle est abondée par la connaissance.

2.1 L’audition et les acouphènes


Nous reprenons ici certains paragraphes déjà présentés dans le survol.
L’audition normale est automatique, irrépressible : on ne peut pas s'empêcher de comprendre un
interlocuteur qui parle sa langue maternelle. Elle permet de comprendre la parole dans des
conditions sonores plus ou moins difficiles… Elle permet la localisation de la source sonore…
L’audition normale est sans acouphène…
Dès que la compréhension se fait en dehors de ces conditions, elle impose alors une démarche
volontaire de compréhension, un effort.
La fonction de l’audition est la communication avec des interlocuteurs mais aussi et plus
généralement avec l’environnement.
En effet l’audition permet l’alerte et participe à la survie L’audition normale sans acouphène est
de l’individu en prévenant du danger. Elle permet aussi automatique, irrépressible, binaurale,
le plaisir de l’écoute musicale par exemple, cette écoute permettant la localisation de la source
pouvant générer une réelle émotion. sonore et le débruitage. Elle donne :
Communication, alerte et plaisir s’intriquent - L’alerte.
forcément dans la machinerie générale de la fonction - La communication.
de relation. - L’hédonisme de l’écoute.
Communiquer représente une activité principale au
quotidien et il est reconnu qu’à chaque instant au moins 20% des humains communiquent. Tout
empêchement à la communication retentit lourdement sur le comportement du sujet. Et cette gêne
est pratiquement inéluctable avec le vieillissement de l’organisme .
L’alerte sonore a, par rapport à l’alerte visuelle, l’avantage de fonctionner parfaitement la nuit… ;
cette fonction est permanente… L’attente du signal d’alerte, sa pré-connaissance permet une
détection rapide et pour des intensités de stimulation faibles, peut être autrement non perçue. Ainsi
la responsabilité de la surveillance d’un enfant qui dort sensibilise l’audition de celui qui en a la
charge. Le moindre gémissement attendu le réveille… l’audition est un système à gain variable et le
réglage du gain est sous la dépendance d’éléments cognitifs, psychologiques et émotionnels. La
signature sonore d’un danger attendu rend l’audition en quelque sorte plus performante.
Le plaisir de l’écoute musicale met encore en valeur les relations entre audition et émotion. Telle
musique tire des larmes d’émotion, tel danger déclenche des réactions de stress orchestrées par le
système nerveux autonome : palpitations, sueurs…

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

◆ 2.1.1 Efficacité et limites du fonctionnement sensoriel :


Cinq sens concourent à notre connaissance du monde extérieur et à notre survie. L’intégration de
toutes ces informations, pour une bonne part continues, est optimisée. Dans un souci
d’économie de moyens, l’intégration centrale ne se préoccupe que des informations considérées
de façon innée ou par expérience essentielles à la survie et aux changements.
Ainsi le port du vêtement et la sensation qu’il déclenche sur le tact est silencieux, laissant
disponible à d’autre modalités sensorielles la voie libre pour accéder à une réaction de survie.
Mais si la sensation est silencieuse, elle reste bien présente : le rappel de la sensation est possible
volontairement. Dans le domaine qui nous occupe, le bruit de fond mélangé aux paroles dignes
d’intérêt n’est pas entendu sauf si on décide d’y prêter attention ou s’il est trop intrusif. Mais tel
signal sonore témoin de danger potentiel sera au contraire valorisé allant jusqu’à empêcher la
compréhension de l’interlocuteur.
Ainsi, le mécanisme de la perception catégorise le signal sonore, valorisant l’alerte qui va pouvoir
occuper la « ligne » en permanence, empêchant plus ou moins la perception d’un signal d’un autre
ordre.

2.1.1.1 La transition vers l’acouphène :


L’acouphène ressenti comme une menace va profiter de ce statut de danger potentiel : il est
perçu même s’il est d’intensité faible. Il est reconnu même dans un environnement
masquant, il déclenche toutes les réactions de stress possibles. Il « occupe en permanence la
ligne », entrave la compréhension et sa caractéristique même de menace est le facteur de
pérennisation.

2.1.1.2 L’acouphène a une composante culturelle :


Toujours désagréable en Occident, il est, en Inde, le signe que Dieu vous parle et ne génère
aucune plainte, bien au contraire.

2.1.1.3 L’habituation :
C’est un élément essentiel dans la physiologie sensorielle, au même titre que « l’oubli » qui
fait que les stimulations sensorielles peuvent se succéder les unes aux autres.
L’habituation est la loi L’habituation est l’évanouissement progressif de la réaction face à la répétition
évolutive générale de d’une stimulation. Dans une approche finaliste, tout se passe comme si le
l’acouphène. système sensoriel « comprenait » que la stimulation qui ne change pas
n’apporte plus d’information sur l’environnement et qu’il peut libérer ce
canal pour une éventualité sensorielle qui serait plus utile. Le système sensoriel filtre cette
information, l’empêche d’atteindre le conscient de la perception mais garde la possibilité de
son rappel volontaire. Mais si la stimulation porte en soi une information de menace vitale,
aucun filtre, jusqu’à démonstration du contraire, ne va s’instaurer.
Par sa permanence, par la prise en compte involontaire et progressive de son statut de
« non-information » l’acouphène doit profiter naturellement de l’habituation, sauf s’il
continue à être perçu comme une menace, sauf s’il déclenche une émotion : la crainte
traduite par les réactions du système nerveux autonome.
Le devenir naturel de l’acouphène se caractérise bien par l’habituation. L’habituation est le
phénomène spontané de réduction des réactions à la présence d’un stimulus répété et non
pertinent. S’il n’y a pas d’habituation, c’est peut-être que le stimulus demeure alarmant et
garde une signification émotionnelle.

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

2.1.1.4 L’habituation décrite par Hallam, Rachman, Hinchcliffe en 1984 a 2 phases:


● L’habituation à la réaction :
le signal est toujours perçu Si l’habituation ne se développe pas
mais ne provoque plus de (les 25% de cas d’acouphènes mal tolérés ?)
réactions : c’est l’amélioration - l’acouphène reste une alarme,
de la tolérance. - hypothèse d’un mécanisme pathologique délétère,
● L’habituation à la perception - anticipation de la gêne sur le restant de la vie,
apporte la disparition de la - dysfonctionnement du système limbique ?
conscience du signal. Le sujet - dépression ?
fait abstraction des stimula- - bénéfice secondaire à la persistance de l’acouphène,
tions non pertinentes et non - gestion du stress maladie,
utiles : un stimulus catégorisé - gestion de la communication avec l’environnement,
non pertinent n’atteint pas la - renforcement de l’attention auditive du fait de la
conscience - c’est la guérison. surdité.
Lorsque le stimulus est jugé
important, il est traité de façon contrôlée. Le patient y prête une attention soutenue s’il est
alarmant. Le système nerveux autonome (SNA) prépare le corps à la réaction du
comportement de “faire face ou fuir” (fight or flight).
On observe un renforcement des traces mnésiques avec une identification de plus en plus
rapide du stimulus d’alarme, même s’il est en compétition avec un autre stimulus.

Perception & évaluation


Aires auditives et autres aires associées - cortex

Processus
conscients

Détection, Processus
Associations émotionnelles
subcorticale inconscients
Système limbique

Hp Hr

Source de Gêne
l'acouphène Système nerveux autonome

D'après Jastreboff. Hp = habituation de la perception - Hr = habituation de la réaction.

L’acouphène : acouphène et acouphènes… Définitions


En première approximation, il apparaît raisonnable de reprendre la fameuse définition de
« sensations auditives perçues en l’absence de tout stimulus extérieur à l’organisme ».
Malheureusement ceci ne recouvre pas l’expérience des patients ni celle des scientifiques.
Chacun sait l’existence de bruits générés à l’intérieur du corps tant par l’appareil squelettique
que vasculaire. Sont-ils des acouphènes ?
Cette objection pousse d’une part, à limiter le champ de la définition aux atteintes du système
auditif et en particulier de la cochlée, d’autre part à individualiser acouphène objectif et
subjectif. Cependant les progrès techniques repoussent en permanence la frontière entre ces
deux entités.

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En outre, cette définition n’intègre pas la composante de l’analyse centrale du signal qui est, à
l’évidence, un élément déterminant dans la mise à la conscience, la persistance, le caractère
agressif de l’acouphène.
À l’équipe thérapeutique de séparer acouphène symptôme et acouphène maladie.

2.1.1.5 Acouphène symptôme et acouphène maladie :


Il s’agit, ici, d’une des questions qui sollicite le plus l’expérience clinique de l’équipe
thérapeutique. Le patient se présente avec un symptôme qu’il décrit souvent très richement.
Avant de le considérer comme résumant à lui seul la maladie, une enquête est nécessaire. Elle
ne doit cependant épuiser ni l’équipe thérapeutique ni les finances de l’assurance-maladie.
Il nous paraît indispensable de se fonder d’abord sur les dires du patient, seuls éléments
certains de départ.
Nous suggérons une liste non limitative de circonstances de survenue en partant des plus
vraisemblables étiologiquement jusqu’à celles dont le lien avec l’apparition de l’acouphène
ne sont actuellement pas établies.
Ce tableau apparaît plus loin. (Cf tableau 1 page :73).
Ces causes entrant dans le cadre d’un acouphène maladie, ne doivent pas être confondues
avec les circonstances déclenchantes (acouphène apparaissant ou s’aggravant en serrant les
dents, en déplaçant latéralement les yeux, en se penchant en avant, disparaissant pour de
longues périodes dans le bruit ou en comprimant tels vaisseaux du cou, en altitude, ou au
contraire en redescendant d’un lieu élevé etc.).
La recherche de ces étiologies et de ces circonstances déclenchantes a une valeur importante à
la fois dans l’établissement de la relation avec le patient et dans la rationalisation de la prise en
charge ultérieure. (Est-il par exemple indispensable de réaliser une IRM chez un patient
porteur d’un acouphène unilatéral après le barotraumatisme ou un traumatisme sonore
latéralisé ?).
Avant d’aller plus avant, il importe de distinguer acouphènes et hallucinations auditives.

Les hallucinations auditives


Les hallucinations peuvent se rencontrer lors d’épisodes dépressifs et maniaques sévères.
Elles se manifestent chez 60 à 70% des patients atteints de schizophrénie, la modalité auditive
étant la modalité sensorielle la plus fréquemment affectée.
Ces altérations de la perception concernent souvent le langage : le patient entend des voix qui
s’adressent à lui ou parlent de lui. De plus, les
patients atteints d’acouphène sont parfaitement Si hallucinations et acouphènes
conscients que ces bruits n’ont pas de réalité dans partagent la nature involontaire de
leur environnement bien que, souvent, la l’expérience ainsi que le fait d’être
conscience d’une source de génération interne perçus en l’absence toute
n’aille pas de soi mais émerge comme conséquence stimulation, le caractère rudimentaire
de la perception et l’absence de
d’un raisonnement logique passant par la
contenu sémantique permettent de
recherche vaine d’une source externe, la
distinguer les acouphènes des
confrontation à des situations diversifiées et
hallucinations auditives.
l’interrogation des personnes exposées au même
environnement ; de même, dans les hallucinations
musicales, après une courte période d’adhésion, le patient est, le plus souvent, capable de
critiquer la localisation de la perception et il n’existe pas d’idées délirantes associées.
L’halluciné, au contraire, présente d’emblée une mauvaise attribution de sa perception, le
plus souvent imputée à un agent extérieur qui tenterait de l’influencer.
Acouphènes et hallucinations auditives peuvent présenter une caractéristique commune :
leur lien avec la désafférentation. Certaines théories envisagent l’acouphène comme une
hallucination auditive rudimentaire, premier signe de « l’hallucinose des otopathes » qui,
chez des patients présentant des troubles auditifs, fait succéder dans le temps à une

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manifestation hallucinatoire élémentaire comme l’acouphène, des manifestations de plus


en plus complexes comme les hallucinations musicales puis acoustico-verbales, par
enrichissement ou « habillage progressif » des acouphènes.
Pour ces derniers phénomènes comme pour les acouphènes, des hypothèses périphériques
se sont historiquement affrontées à des hypothèses plus centralistes. Il est cependant
probable qu’ils sont, le plus souvent, dus à la conjonction de facteurs périphériques et
centraux. Il est à noter, qu’alors qu’aucune amélioration n’est rapportée sous traitement
médicamenteux, l’appareillage de la surdité, peut, quant à lui, réduire certaines
hallucinations. Par ailleurs, en présence d’hallucinations musicales, il est indispensable de
rechercher un trouble psychiatrique associé (dépression, trouble obsessionnel compulsif) ;
en effet, le cas échéant, la prise en charge de ce trouble peut exercer un effet favorable sur les
dites hallucinations.
Ainsi, les phénomènes hallucinatoires auditifs pourraient s’envisager comme un continuum
le long duquel se succéderaient divers états sous-tendus par un mécanisme de
désafférentation sensorielle. Cependant, si l’acouphène est relativement fréquent et très
souvent associé à l’existence d’une perte auditive, il n’en est pas forcément de même pour les
hallucinations : l’intervention de facteurs de personnalité et/ou d’environnement semble
nécessaire pour qu’un acouphène se transforme en hallucinations acoustico-verbales.
Toutefois, les résultats des études d’imagerie montrent que ces différentes manifestations
mettraient en jeu une voie finale commune du processus neurophysiologique des
hallucinations impliquant le carrefour temporo-pariétal de l’hémisphère dominant. C’est sur
cette même voie qu’agirait la stimulation magnétique transcrânienne, nouvelle méthode
thérapeutique non invasive qui semble être efficace dans le traitement d’hallucinations
résistantes depuis des années à tout traitement comme dans celui d’acouphènes anciens.

◆ 2.1.2 Le phénomène acouphène analysé dans sa physiologie :


Dans une première partie, nous constaterons l’existence de l’hyperactivité neuronale. Nous
analyserons ensuite ses conséquences au regard des connaissances en matière comportementale, à
savoir l’habituation et le conditionnement.

2.1.2.1 Généralités :
L’origine précise d’une grande majorité d’acouphènes demeure obscure. La plupart d’entre
eux sont considérés comme ayant une origine neurosensorielle. Dans la communauté
scientifique, il existe maintenant un consensus selon lequel le substrat physiologique
potentiel des acouphènes neurosensoriels serait associé à un signal nerveux aberrant car sans
corrélat sonore dans l’environnement. Généré à un niveau quelconque des voies auditives
(Jastreboff, 1990), après avoir circulé dans les voies auditives, il atteindrait le cortex auditif où
il serait interprété comme un véritable son.
Cette activité neurale particulière ou corrélat neuronal de l’acouphène a fait l’objet de
diverses hypothèses et aussi de divers travaux destinés à la
caractériser, d’une part chez des sujets humains mais, aussi et L’acouphène : une
surtout, dans la majorité des cas, cette activité ne peut être reliée à hyperactivité
aucune pathologie sur des modèles animaux d’acouphènes. Elle neuronale à un endroit
résulterait de processus de compensation qui se développent dans des voies auditives et
les voies auditives en réponse à des dysfonctionnements normalement perçue.
périphériques mineurs ou à une perte auditive.
L’implication de structures cérébrales non auditives, en particulier du système limbique
responsable de nos émotions et du système nerveux autonome qui contrôle nos fonctions
végétatives, serait déterminante dans le traitement central de l'activité neuronale liée à
l'acouphène (Jastreboff, 1990, 1996, 1999) et pour le devenir du symptôme. Celui-ci met en
jeu des phénomènes psychophysiologiques connus sous les termes d’habituation et de
conditionnement. Selon les conditions environnementales et psychophysiologiques qui
co-existent avec l’apparition de l’acouphène, la présence continuelle du signal nerveux qui lui

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est lié se traduirait par des modifications plastiques durables au sein du système auditif
comme entre les diverses structures impliquées dans le traitement du signal responsable.

2.1.2.2 Le corrélat neuronal de l’acouphène :


Son niveau de génération comme sa nature sont encore l’objet de controverses.

Où est-il généré ?
Pour certains auteurs, la génération du signal de l’acouphène s’effectuerait en périphérie – à
savoir au niveau des cellules ciliées de la cochlée, de la première synapse ou du nerf auditif 1.
Pour d’autres, en revanche, ce n’est que dans les centres que ce signal apparaîtrait2. Quoiqu’il
en soit, il est nécessaire de souligner que l’hypothèse d’une génération périphérique n’exclut
pas pour autant l’intervention de mécanismes centraux, puisqu’en tant que perception
consciente, l’acouphène implique nécessairement des structures centrales; réciproquement,
l’hypothèse d’une génération centrale n’élimine pas la participation du système auditif
périphérique : la plupart des modèles centraux de l’acouphène font en effet jouer aux
perturbations périphériques (en particulier aux lésions) un rôle déterminant par le biais des
modifications centrales qu’elles entraînent, lesquelles sont, elles-mêmes, directement liées à
la génération du signal.

Quel est-il ?
Les recherches sur les corrélats neurophysiologiques de l’acouphène ont été essentiellement
conduites chez l’animal. Si les études chez l’homme sont facilitées par le fait que
l’expérimentateur peut rapidement savoir si l’acouphène est présent, absent ou s’il subit des
modifications, elles sont en revanche limitées pour des raisons éthiques car, seules les
techniques non invasives, peu précises d’un point de vue spatial (potentiels évoqués,
magnétoencéphalographie) ou temporel (IRMf et TEP) peuvent être utilisées. Chez
l’animal, au contraire, des techniques invasives peuvent être employées, qui bénéficient
d’une excellente résolution temporelle et spatiale pour étudier l’activité nerveuse à partir
d’électrodes implantées directement dans le cerveau.
Des paradigmes comportementaux ont été développés qui permettent de s’assurer de la
présence d’un acouphène chez
l’animal3 ; cependant, à ce jour, la Démontrer chez l’animal le phénomène acouphène :
majorité des travaux menés dans ce
domaine, l’ont été sans contrôle de Moyens connus chez l’homme
Générer l’acouphène
la présence concomitante de la
perception fantôme. Tout comme Enregistrer une réponse A peu près non réalisable chez
neuronale l’homme
les divers modèles développés,
ces études reposent sur la Démontrer la perception Domaine clinique : mise en
présomption qu’un traitement de cette hyperactivité évidence objective difficile
connu pour induire des Démontrer la même Habituation (anticipation,
acouphènes chez l’humain, possibilité chez l’animal affectivité)…
provoque aussi des acouphènes
chez l’animal ou, au moins, les
mêmes modifications du système auditif (périphérique et/ou central) qui leur sont
généralement associées.
Les traitements les plus couramment utilisés pour déclencher un acouphène sont l’injection
de substances ototoxiques - en particulier aspirine ou quinine - et l’exposition des animaux à
une surexposition sonore.

1- Jastreboff, 1990; Eggermont, 1990; Martin et al, 1993; Cazals et al., 1998; Puel et al., 2002 ; Guitton et al., 2003.
2- Au-delà du nerf auditif, Gerken et al., 1996; Salvi et al., 2000; Eggermont and Komiya, 2000; Kaltenbach et McCaslin,
1996; Kaltenbach et Afman, 2000; Zacharek et al., 2002; Brozoski et al., 2002; Noreña et al., 2000; 2002; Noreña et
Eggermont, 2003.
3- Jastreboff et al., 1988 ; Jastreboff et Sasaki, 1994 ; Guitton et al., 2003.

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La nature du signal neuronal de l’acouphène ne fait pas encore l’objet d’un consensus. Trois
hypothèses se partagent les faveurs des divers auteurs. Ainsi l’acouphène, dont l’intensité
perçue est relativement faible, pourrait être lié à une hyperactivité des fibres du nerf cochléaire,
à une modification du pattern temporel des décharges ou bien à une augmentation de
synchronie entre les décharges de différents neurones du nerf auditif. Le schéma emprunté à
Norena (2003) illustre ces trois différentes possibilités de 'codage' de l’acouphène. (figure 2)
Chacune de ces hypothèses est soutenue par des arguments expérimentaux.

Décharges spontanées

Augmentation de l'activité
spontanée des neurones

Décharges selon un mode


particulier "en bouffées"

Décharges spontanées

Augmentation de
la synchronie

Figure 2 - D'après A. Norena (2003) : Les différentes possibilités de codage de l'acouphène.

Dans des conditions associées à l’acouphène, Evans et Borerwe (1982) ont, chez le chat, été
les premiers à rapporter une augmentation de l’activité spontanée dans le nerf auditif. Ceci a
été retrouvé plus tard, en périphérie comme dans les structures auditives centrales1 dans des
conditions similaires et aussi dans des modèles animaux d’acouphènes2.
La modification du pattern temporel correspondrait à l’émergence d’une activité dite « en
bouffées » (caractérisée par des intervalles courts entre les potentiels d’action). Une telle
activité a effectivement été observée dans divers travaux expérimentaux, et dans certains cas,
de manière concomitante avec l’hyperactivité3. Ceci laisse à penser qu’elle pourrait peut-être,
à elle seule, rendre compte de l’augmentation d’activité spontanée déjà mentionnée. Cette
théorie de modification du pattern temporel des décharges est aussi étayée par des
observations réalisées à l’aide d’un moyennage spectral de l’activité spontanée des neurones
chez l’animal 4 comme chez l’humain5 .
Enfin, une augmentation de synchronie entre les décharges des neurones a été rapportée dans
le nerf auditif 6 comme au niveau cortical7.
L’observation d’une diminution de l’activité spontanée périphérique dans des conditions -
administration de quinine (Mulheran and Evans, 1999) ou perte auditive installée - établies
comme fréquemment associées à l’acouphène, sème le doute sur la probabilité qu’une
augmentation d’activité spontanée des neurones puisse correspondre au signal de

1- Jastreboff, 1988; Jastreboff, 1990; Eggermont and Komiya, 2000; Kaltenbach and McCaslin, 1996; Cazals et al.
1998 ; Kaltenbach and Afman, 2000; Brozoski et al., 2002; Zacharek et al., 2002.
2- Jastreboff and Sasaki, 1994 ; Kaltenbach and McCaslin, 1996.
3- Evans et Borerwe, 1982 ; Martin et al., 1993.
4- Schreiner and Snyder, 1987; Martin et al., 1994; Lenarz et al., 1995, Cazals et al. 1998.
5- Martin, 1994.
6- Eggermont, 1990b; Martin et al, 1993; Cazals et al., 1998).
7- Ochi and Eggermont, 1996, 1997 ; Norena et Eggermont, 2003.

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l’acouphène. En revanche, l’amélioration de la synchronie a été retrouvée dans les modèles


d’acouphènes induits par l’aspirine ou par la quinine et, en périphérie1 comme dans les
centres2. On retrouve aussi cette amélioration de synchronie au niveau central après
traumatisme auditif (Norena et Eggermont, 2003). Bien que la question de la nature du
signal de l’acouphène ne soit pas encore définitivement tranchée, les arguments se
multiplient donc en faveur de cette dernière hypothèse.

2.1.2.3 Habituation
On la définit comme une forme d’apprentissage non associatif correspondant à une
diminution des réponses aux stimuli répétitifs (Reuchlin, 1993).
Ce type d’apprentissage consiste à apprendre à ignorer un stimulus qui n’a pas de sens
particulier pour un individu donné. Chacun de nous est habitué à toute une série de stimuli
de l’environnement. Sur le plan de l’audition par exemple, nous sommes habitués aux bruits
répétés et invariants de notre voisinage proche (les voitures qui passent dans la rue ne nous
empêchent plus de dormir, la même musique qu’écoutent les voisins n’attire plus notre
attention). On dit que l’on est ‘habitué’ à ces stimuli.
Le contraire de l’habituation est la sensibilisation qui renforce la réponse de l’individu à tous
les stimuli, y compris à ceux qui n’évoquaient pas ou peu de réponse auparavant. Ceci est
particulièrement vrai dans le cas de réponses qui produisent une émotion. Ainsi, un stimulus
intense ou très fortement connoté sur le plan émotionnel peut entraîner une réponse
exagérée à tous les stimuli qui suivent. Mais des stimuli incohérents, surprenants ou non
attendus peuvent aussi provoquer une sensibilisation : ils sont dits prosexigènes.
Le caractère prosexigène d’un stimulus peut aussi correspondre au fait qu’il se rapporte à un
besoin, à une motivation de l’organisme (signaux de plaisir ou de danger par exemple). La
réaction d’orientation vers une stimulation nouvelle constitue la première réponse à un
stimulus prosexigène. Elle comporte une fonction générale de facilitation sensorielle et
motrice : un stimulus auditif déclenchant cette réaction abaisse le seuil de perception visuelle.
Si un stimulus nouveau ou incohérent se répète, on constate en général qu’il perd sa valeur
prosexigène en même temps que son caractère imprévisible et il y a habituation. Ce processus
d’habituation, au sens psychologique du terme, est aussi véritable sur le plan physiologique,
dans le sens où les messages relatifs à un bruit répété ne sont plus admis dans le système
nerveux central, stoppés par un mécanisme périphérique de filtrage (pour le système auditif,
au niveau du noyau cochléaire).

2.1.2.4 Conditionnement
Il existe deux sortes de conditionnement3 : le conditionnement classique pavlovien
(découvert par Pavlov en 1927) et le conditionnement opérant ou instrumental (décrit par
Skinner en 1935).

2.1.2.4.1 Conditionnement classique :


On le définit comme un apprentissage permettant l’association entre deux stimuli, dont
l’un provoque naturellement une réponse et l’autre pas. Il met en jeu le système nerveux
autonome et répond à une procédure d’apprentissage associatif en trois étapes
(cf Figure 3) :
– un stimulus inconditionnel (SI : exemple la nourriture) provoque une réponse
inconditionnelle (RI : la salivation) : SI ➔ RI ;
– un stimulus neutre (une cloche) est présenté de manière répétitive précédant
l’apparition du SI : SN (cloche) + SI (nourriture) ➔ RI (salivation) ;

1- Eggermont (1984; 1990); Martin et al., (1993); Cazals et al., (1998).


2- (Ochi & Eggermont, 1996, 1997).
3- Bear, Connor et Paradiso, 1997.

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– au bout d’un certain nombre de couplages SN + SI, la réponse inconditionnelle


apparaît dès la présentation du stimulus neutre (cloche ➔ salivation) : on dit que le
SN est devenu un stimulus conditionnel - SC et la RI une réponse conditionnée - RC.
Si l’on présente plusieurs fois le SC seul, la RC décroît puis disparaît : on parle alors
d’extinction de la réponse conditionnée.

SI RI
ETAPE 1 : un stimulus Nourriture Salivation
inconditionnel entraîne une
réaction inconditionnelle.

SN
Cloche
ETAPE 2 : un stimulus neutre est SI RI
présenté de manière répétée
précédant l'apparition du
stimulus inconditionnel.

SC RC
ETAPE 3 : dès l'apparition du Cloche Salivation
stimulus neutre, la réaction se
produit : il est devenu un stimulus
conditionnel provoquant une
réponse conditionnée.

Figure 3 - Les différentes étapes de l'apprentissage par conditionnement classique.

2.1.2.4.2 Conditionnement opérant :


Il est défini comme une forme d’apprentissage permettant d’associer une réponse à un
stimulus signifiant, c’est-à-dire possédant un sens pour l’individu. Il met en jeu le
système nerveux central et reprend le cheminement du conditionnement classique en
trois étapes. Cependant, dans le conditionnement opérant, le stimulus engendre une
réponse qui va elle-même avoir des conséquences ou même provoquer un stimulus
renforçateur de la réponse. Ce renforcement peut être positif s’il conduit à une répétition
du comportement à l’origine de la réponse et négatif, si, au contraire, il conduit à un
évitement du comportement. Par exemple, un enfant qui pleure la nuit reçoit un
renforcement positif de la part de sa mère si elle se lève pour venir le soulager et le câliner,
mais négatif si elle vient le réprimander de l’avoir réveillée. Les conséquences de la
réponse de la mère aux pleurs de l’enfant peuvent donc devenir des renforçateurs.
De la même façon que dans le conditionnement classique, la réponse conditionnée peut
s’éteindre si elle n’est plus renforcée.
De plus, Skinner a montré que l’on peut établir et entretenir des conditionnements par
des renforcements partiels ou probabilistes : au lieu d’être renforcée chaque fois, la
réponse l’est un certain pourcentage de fois seulement. Dans ce cas, la liaison entre SC et
RC est plus lente à se mettre en place, mais elle est aussi plus difficile à éteindre.
L’apprentissage associatif de type conditionnement est très fréquent chez les individus.
Ainsi, certains stimuli peuvent acquérir une valeur prosexigène (cf § Habituation) au
cours de l’ontogénèse par un conditionnement s’étant opéré pendant l’histoire
individuelle du sujet.

2.1.2.4.3 Application à l’acouphène :


Les circonstances durant lesquelles l’acouphène est perçu pour la première fois jouent
probablement un rôle déterminant pour le devenir du symptôme. S’il survient dans une

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période d’équilibre familial, professionnel et social, il est probable que son caractère
prosexigène déclenchera quelques réactions physiologiques et psychologiques de stress.
Cependant, son impact sera limité et l’habituation se développera rapidement. En
revanche, si le sujet traverse une période
difficile, a déjà beaucoup sollicité ses capacités Repérer les circonstances de
d’adaptation, la perception de l’acouphène survenue de l’acouphène.
peut se trouver associée par un mécanisme de L’acouphène permanent remet le
conditionnement simple aux réactions sujet dans ses circonstances de vie
psychologiques et physiologiques induites par difficiles.
la situation. De ce fait, la perception de
l’acouphène et les réactions qui l’accompagnent seront auto-entretenues. De plus,
l’acouphène en lui-même peut représenter un stresseur supplémentaire qui, renforçant
les réactions de l’organisme va pérenniser son caractère prosexigène et s’opposer aux
mécanismes d’habituation.

Tous les acouphéniques ne consultent pas ou l'observation de base :


sur 100 acouphènes, environ 25 sont mal tolérés ; pourquoi ?
Comme tout stimulus continu ou répété dans l'environnement, le signal de l'acouphène
fait normalement l'objet d'une adaptation de la part de notre système nerveux central, ce
que l'on appelle habituation. Celle-ci se traduit par le classement du signal de
l'acouphène comme stimulus non pertinent qui n'est donc plus interprété comme un
son au niveau cortical. Cette habituation se produit dans 75 % des cas, mais pour les 25 %
restant, l'acouphène devient un véritable handicap, perturbant la vie de tous les jours et
pouvant parfois même conduire les acouphéniques au suicide (Lewis, Stephens, &
McKenna, 1994). Maux de tête, insomnies, hyperacousie sont quelques-uns des
symptômes associés à l’acouphène invalidant dont les patients se plaignent le plus
souvent (Erlandsson et al., 1992). Mais qu’est-ce qui différencie cette majorité de
personnes porteuses d’un acouphène et qui le supportent relativement bien (i.e. celles
pour laquelle la qualité de vie n’est pas trop affectée par ce symptôme), de la minorité qui
le perçoit comme un véritable handicap ?
La sévérité de l’acouphène correspond à une évaluation subjective du patient. Pour un
observateur extérieur, elle peut être définie et quantifiée de plusieurs manières : pendant
combien de temps (jours/mois) le patient est-il gêné par son acouphène, pendant
combien d’heures par jour ? de quelle(s) manière(s) l’acouphène détériore-t-il le
sentiment de joie de vivre du patient, pendant combien d’heures par jour ? quelles sont
les conséquences de la perception de l’acouphène sur ses activités quotidiennes ?
Il est impératif de noter que la sévérité de l’acouphène, donc aussi la gêne ressentie par les
patients, est indépendante des caractéristiques physiques de celui-ci (comme la
fréquence ou l’intensité du bruit entendu). En effet, plusieurs études ont montré que les
dimensions mesurables de l’acouphène n’expliquent pas de manière adéquate le niveau
de gêne ressentie par les patients1.
Un écueil important, quand on parle de l’impact de l’acouphène sur l’individu, réside
dans le fait que l’acouphène n’est qu’un symptôme et que de nombreuses pathologies lui
sont associées. Ainsi, il est très difficile, mais pourtant fondamental, de savoir si la
présence seule de l’acouphène entraîne les souffrances de la vie quotidienne qui lui sont
imputées ou bien si ce sont les problèmes associés qui en sont la cause. Zaugg, Schechter,
Fausti et Henry (2002) suggèrent que les acouphéniques surestiment souvent l’impact
de leur acouphène sur leur vie quotidienne par rapport à celui de leur perte auditive. En
effet, d’après ces auteurs et surtout chez les acouphéniques possédant une audition
moyenne à mauvaise, la plupart des plaintes des patients attribuées à leur acouphène

1- Baskill & Coles, 1999; Meickle, Vernon, & Johnson, 1984.

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(comme les difficultés de compréhension par exemple) résultent plus de la perte auditive
que de la présence de cette perception auditive fantôme.
Les observations cliniques ont montré que les facteurs psychologiques sont étroitement
liés à la présence d’un acouphène1. Il est par exemple souvent rapporté par les patients
que l’émergence de cette perception auditive fantôme est concomitante, ou suit de
quelques mois, un événement de vie stressant, c’est-à-dire un trauma psychique. D’après
Erlandsson & Hallberg (2000), la souffrance liée à la présence de l’acouphène pourrait
même être corrélée à la quantité de stress expérimentée par les patients dans leur vie de
tous les jours. Les acouphéniques eux-mêmes rapportent souvent que des périodes de
stress ou de fatigue intenses rendent leur acouphène plus difficile à gérer et plus
insupportable.
Par ailleurs, l’acouphène co-existe parfois avec des psychopathologies, comme une
anxiété ou une dépression potentielle ou avérée2. Il est par conséquent possible qu’une
partie au moins des souffrances liées à cette perception fantôme soient en fait les
conséquences de ces problèmes psychologiques. Zöger, Svedlund et Holgers (2002b)
rapportent, dans une étude
portant sur 70 acouphéniques, L'acouphène est au centre d'un carré dont les
que le sous-groupe de patients coins pointent :
présentant un risque élevé de - vers les difficultés auditives,
développer un acouphène sévère - vers la situation d'anxiété et de dépression,
et chronique est aussi celui qui - vers les problèmes d'environnement familial,
possède une prévalence plus social, professionnel, générateurs de stress,
élevée de désordres dépressifs - vers les conditions de survenue de l'acouphène.
et/ou anxieux.
Enfin, l’étude de Meric et al. (1998) suggère que le retentissement de l’acouphène sur la
vie quotidienne résulterait de l’association entre la perte auditive et un profil
psychopathologique particulier chez un acouphénique donné, plutôt que des propriétés
du seul acouphène. En effet, en étudiant les relations entre les scores de plusieurs traits
psychopathologiques obtenus dans une version courte (Mini-Mult) de l’inventaire
multiphasique de personnalité du Minnesota (MMPI, Hathaway & McKinley, 1940) et
les scores obtenus à partir de trois échelles relatives à l’acouphène (Questionnaire de
mesure du handicap lié à l’acouphène, Echelle subjective de mesure de la détresse de
l’acouphène et Echelle subjective de mesure de la sévérité de l’acouphène), les résultats
ont montré de fortes corrélations entre les scores aux échelles évaluant les traits de
dépression, paranoïa, psychasthénie, schizophrénie et hypochondrie, ainsi que l’index
d’anxiété et les évaluations de la détresse ou du handicap liés à la présence de ces
acouphènes.
Même s'il est important de souligner que l’acouphène correspond le plus souvent à un
désordre physiologique plutôt qu'à un désordre psychiatrique, on ne peut pas nier que ce
symptôme se situe au carrefour entre somatique (difficultés auditives réelles), psychologique
(tenant autant à la personnalité du patient qu'à ses capacités d'adaptation), événementiel
(selon la situation dans laquelle est apparu l'acouphène) et environnemental (facteurs
d'ambiance et d'influence au niveau familial, professionnel ou social). Son évolution vers
l'habituation ou la pérennisation s’explique par conséquent par une causalité circulaire
dans laquelle les différents facteurs se renforcent mutuellement.
2.1.3 Les explications et les modèles
La complexité globale de l’acouphène impose l’établissement de modèles. Ils sont, pour la genèse
de l’acouphène chez l’homme, périphériques et centraux. Les modèles animaux expliqués dans
une seconde partie viennent , avec leurs insuffisances liées aux incertitudes cognitives, en appui
des explications de certaines causes.

1- Erlandsson & Hallberg, 2000; Jayarajan, 2002.


2- Andersson, 2001 ; Erlandsson & Hallberg, 2000 ; Zöger, Svedlund et Holgers 2002.

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L’explication de phénomènes observés complexes est traitée en formulant des hypothèses dont
l’ensemble constitue un modèle. Il
s’agit de définir des concepts et leurs En raison même de leur construction, ces modèles
interactions mutuelles. sont « partiels » et « provisoires ». Personne ne croit
qu’ils sont vrais ; le seul critère de leur valeur est
Lorsque des observations nouvelles, leur capacité à rendre compte des observations et à
fournies par la science, paraissent en permettre des prévisions et au mieux à proposer des
contradiction avec le modèle, celui-ci procédures de prise en charge.
est remplacé.

2.1.3.1 Les grandes hypothèses de la physiopathologie


Diverses hypothèses ont été successivement envisagées au cours de l’histoire pour expliquer
l’existence de l’acouphène. Parmi celles-ci, certaines sont soutenues par des arguments forts.
Nous avons déjà souligné (cf § la physiopathologie) que l’opposition entre partisans de
mécanismes périphériques et tenants de mécanismes
centraux était à l’heure actuelle plus apparente que réelle. Coexistence vraisemblable
En ce qui concerne les hypothèses physiopathologiques de plusieurs mécanismes.
envisagées pour sous-tendre le phénomène de l’acouphène,
on retrouve cette absence d’incompatibilité entre les divers
mécanismes envisagés : compte tenu de la très grande hétérogénéité observée dans la
population des acouphéniques, il est fort probable que plusieurs puissent coexister chez un
même individu.

2.1.3.1.1 Modèles périphériques :


La plupart des hypothèses de génération de l’acouphène font référence à une dysfonction
cochléaire. Elles ont fait l’objet de plusieurs revues1 auxquelles le lecteur peut se référer.
Nous en présentons ci-dessous quelques-unes :
● On sait que les cellules ciliées externes (CCE), plus vulnérables, sont généralement
affectées par des processus délétères avant les cellules ciliées internes (CCI).
La discordance entre les états de dommage affectant CCE et CCI serait à l’origine de
mouvements anormaux de la membrane basilaire et, notamment, de collapsus localisés
de la membrane tectoriale sur les CCI, d’où une augmentation de l’activité de celle-ci.
● Le découplage d’avec la membrane tectoriale des stéréocils des CCE conduirait à une
augmentation du bruit thermique qui, par une
mise en contact plus fréquente avec les stéréocils Tornndorf explique ainsi la triade
des CCI, conduirait à la perception d’un symptomatique du Ménière. Le
acouphène. Des modifications de la découplage des stéréocils
concentration périlymphatique de calcium explique les acouphènes. Il
peuvent induire un tel découplage, de même explique aussi la surdité aux
qu’une modification du diamètre des CCE faibles intensité de stimulation et
(induite par exemple par l’aspirine) ou des le recouplage aux fortes
modifications de l’activité spontanée ou évoquée intensités : restauration d’une
(Figure 4). sensation auditive adéquate à
● Un rôle du système efférent médian dans la l’intensité de la stimulation. D’où
génération de l’acouphène a aussi été envisagé : l’absence de progressivité.
en effet, ce système normalement inhibiteur du
fonctionnement des CCE est, lui-même, l’objet d’une rétroaction s’exerçant à partir des
entrées auditives.
Quand un groupe de CCE et/ou CCI est lésé, l’influx auditif provenant de cette zone de
fréquences est affaibli ; il s’en suit une diminution locale d’activité dans les fibres
efférentes et une levée de l’inhibition qu’elles exercent sur les CCI.

1- Jastreboff, 1990 ; Kaltenbach, 2000.

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Toutefois, comme l’innervation efférente est très diffuse, la levée d’inhibition ne


toucherait pas seulement les CCI de la zone lésée, mais ‘déborderait’ sur les zones
adjacentes non lésées.
L’augmentation de l’activité spontanée des fibres auditives de ces zones bordant la lésion,
pourrait constituer le signal de l’acouphène (Figure 5). Comme on le voit dans la figure,
ce phénomène pourrait intervenir dans la perte auditive avérée comme dans les cas de
dommages discordants.

Figure 4 - Hypothèse du découplage des stéréocils des CCE d’avec la membrane tectoriale
Schéma du haut : Etat normal de couplage des CCE avec la membrane tectoriale (TM), les cils des
CCI ne sont pas en contact avec la TM.
Le découplage entraînerait (Tonndorf, 1980) une augmentation du bruit thermique du système et la
mise en contact fréquente de la membrane tectoriale avec les stéréocils des CCI.

Schéma du bas : La diminution de la turgescence des CCE, sous l’effet des salicylates (altération du
cytosquelette des CCE) entraîne le découplage des CCE d’avec la membrane tectoriale MT et son
rapprochement avec les stéréocils des CCI, entraînant une augmentation d’activité spontanée dans le
nerf auditif.

En effet, le neurotransmetteur de cette synapse est le glutamate, qui, à haute dose, est
connu pour ses propriétés ototoxiques. Il est libéré massivement lors d’une exposition à
un son intense, et entraîne une destruction des dendrites. Dans un premier temps, la
destruction est, au moins partiellement, réversible. Cette réversibilité semble due à
l’augmentation de la synthèse des récepteurs NMDA, impliqués dans des phénomènes
trophiques et dans le guidage des dendrites.
Cependant, ces mêmes récepteurs, seraient par ailleurs, responsables d’activités
anormales ‘en bouffées’ semblables à celles qui ont été observées dans le nerf auditif
après traumatisme sonore (Liberman et Kiang, 1978 ; Burgoyne et al., 1993 ; Puel et al.,
1995) ou traitement répété à l’aspirine (Evans et Borerwe, 1982). C’est pourquoi,
certains auteurs (Pujol, 1992 ; Puel, 1995 ; Guitton et al., 2003a) défendent l’idée que

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Figure 5 - Hypothèse de ‘l’effet de bord’ : schéma explicitant l’intervention possible du système


efférent dans la génération du signal de l’acouphène.
Le caractère diffus de ce système est responsable du ‘débordement’ sur une zone intacte, de la levée
de l’inhibition qu’il exerce sur les entrées en réponse à la diminution de l’influx afférent provenant de
la zone où les cellules ciliées sont lésées.
LePage (1991) a avancé la possibilité d’un rôle des CCE dans le contrôle de la sensibilité des CCI.
Dans les conditions normales, les CCE fixeraient le seuil de fonctionnement des CCI à un niveau
d’entrée du bruit de fond normalement interprété comme une absence de stimulation sonore. Un
dysfonctionnement des CCE perturberait cette fonction, les conduisant à fixer ce seuil à un niveau
plus bas. Ainsi, des signaux du bruit de fond normalement non détectés, pourraient l’être ; après
traitement dans les voies auditives, ils seraient finalement perçus, ce qui expliquerait l’acouphène.
L’observation fréquente de l’apparition d’un acouphène peu après un trauma auditif a suggéré à
certains auteurs qu’un dysfonctionnement de la première synapse pourrait être à l’origine de
l’acouphène. (cf. le chapitre sur les neurotransmetteurs )

l’activation des récepteurs NMDA du glutamate serait un des mécanismes majeurs des
acouphènes. Ils ont récemment obtenu un argument expérimental de poids en
constatant dans un modèle animal d’acouphènes, que le dépôt, à la fenêtre ronde, de
substances antagonistes des récepteurs NMDA, inhibe l’expression du comportement
choisi pour révéler la présence de l’acouphène (Guitton et al., 2003b).
Certains acouphènes périphériques pourraient aussi résulter de la potentialisation de la
fonction excitatrice du glutamate par la dynorphine endogène libérée sous l’effet de
facteurs de stress au niveau de la première synapse (Sahley and Nodar, 2001).

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2.1.3.1.2 Modèles centraux


Différentes observations conduisent à envisager des modèles centraux pour rendre
compte de l’acouphène. C’est ainsi qu’excluant la conception d’un déterminant
périphérique, la majorité des patients continuent à percevoir leur acouphène après
section ou décompression du nerf auditif (House et Brackman, 1981). Des données
expérimentales ont révélé que 66% des acouphènes courants peuvent être modulés par la
mise en jeu d’autres modalités sensorielles ou bien d’activités motrices (Levine, 1999).
Par ailleurs, les études d’imagerie montrent un accroissement de l’activité métabolique
dans le cortex auditif mais aussi (dans les cas rares d’acouphènes "courant" étudiés ;
Sigalowski et coll, 1998), dans le noyau du colliculus inférieur controlatéral à l’oreille
acouphénique. Considérés ensemble, les résultats de ces deux derniers types d’étude
désignent comme origine probable le noyau cochléaire dorsal, qui se projette
essentiellement sur le colliculus inférieur controlatéral après avoir reçu des influx
convergents auditifs et somatosensoriels (Levine et coll, 1999).

Acouphène et réorganisation centrale


A plusieurs reprises, des auteurs ont été frappés par les analogies possibles entre
acouphène et douleur de membre fantôme rapportée à une partie amputée du corps1.
Cette hypothèse a reçu un soutien expérimental récent.
En effet, Norena et coll. (2002) ont mis au
point une procédure psychométrique Ce modèle du membre fantôme
permettant de décrire plus précisément les est intriguant :
diverses composantes spectrales participant à On connaît les douleurs
l’acouphène ainsi que leurs contributions déclenchées dans une telle
respectives à la perception. situation. La construction d’un
La figure 6 montre des exemples de résultats dispositif optique qui permet au
individuels. sujet amputé de « voir » son
L’observation des résultats conduit aux constats bras absent atténue ces
suivants : le spectre de l’acouphène est plutôt douleurs de désafférentation.
large et comprend essentiellement des
composantes appartenant à la bande des fréquences atteintes par la perte auditive ; de
plus, le spectre global de l’acouphène correspond grossièrement à l’inverse de la
courbe des seuils auditifs absolus. Ainsi, dans l’acouphène comme dans la douleur de
membre fantôme, ce serait les informations manquantes qui seraient perçues.
L’équipe de Flor (1998) a montré que la douleur de membre fantôme est corrélée à la
réorganisation corticale du cortex somesthésique. A la lumière de cette observation,
les résultats de Norena et coll. (2002) rapportés ci-dessus, suggèrent que l’acouphène
associé à une perte auditive (soit environ 90% des cas), pourrait être corrélé aux
phénomènes de réorganisation qui ont été décrits dans les centres auditifs, après
dommage cochléaire (Rajan et al., 1993) ou perte de fibres auditives (Snyder et al.,
2000).
Pour expliquer l’émergence de l’acouphène, une théorie a donc été développée
(Norena et coll., 2002; Norena & Eggermont, 2003; Norena, 2003) dans laquelle ce
symptôme résulterait de la réorganisation tonotopique centrale décrite après lésion
périphérique. Cette dernière se traduit par le fait que les neurones centraux (au-delà
du noyau cochléaire) dont la fréquence caractéristique (CF) est comprise dans la
bande des fréquences endommagées, modifient les propriétés de leur réponse en
fréquence. Leur CF se déplace vers la fréquence de coupure de la perte auditive. En
conséquence, cette fréquence de coupure est sur-représentée dans les centres : plus
de neurones y sont sensibles. Originellement observée chez l’animal, cette

1- Goodhill, 1950 cité dans Baguley, 2002, Jastreboff, 1990.

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réorganisation a été mise en évidence chez l’homme à l’aide de la MEG (Mülnickel et


coll., 1998 ; Dietrich et coll., 2001). Ces changements centraux s’expliquent par le
« démasquage » d’afférences préalablement inhibées, sous l’effet d’une diminution de
l’inhibition centrale.
Si les origines des acouphènes sont bien similaires à celles des perceptions de
membre fantôme, ce sont ces modifications induites par le relâchement de
l’inhibition centrale qui jouent un rôle dans l’émergence des acouphènes.
Cependant, ces remaniements mettent du temps à se mettre en place ; s’ils peuvent
bien rendre compte des perceptions fantômes qui émergent plusieurs semaines à
plusieurs mois après une désafférentation sensorielle, ils ne peuvent expliquer
l’apparition immédiate des acouphènes survenant après un traumatisme auditif. Or,
des changements plastiques centraux ont été mis en évidence immédiatement après
désafférentation sensorielle dans le cas de la somesthésie (Calford et Tweedale, 1988)
comme dans celui de l’audition (Calford et al., 1993 ; Snyder et al., 2000 ; Snyder et
Sinex, 2002). Norena et coll, (2003) ont pu décrire des changements des courbes
d’accord des neurones, quelques heures déjà, après un traumatisme sonore : de
nouvelles réponses émergent vers des fréquences plus basses, à savoir en direction de
la fréquence de coupure de la perte auditive (cf figure 7).
L’induction d’une réorganisation centrale pourrait donc être le facteur critique de
l’émergence d’un acouphène, qu’elle résulte (acouphènes liés au vieillissement) ou
non (acouphènes après traumatisme auditif) de remaniements à long terme du
système nerveux central. Quoiqu’il en soit, de tels phénomènes de plasticité à long
terme sont très certainement induits par la présence continue du signal de
l’acouphène et son traitement permanent dans les structures auditives comme
extra-auditives. Ces remaniements sont probablement impliqués dans la
pérennisation du symptôme et dans l’entretien de l’intolérance qu’il induit.

Le modèle neurophysiologique de Jastreboff


Dans ce modèle intégratif présenté par ailleurs (cf. annexe1 page : 130), l’acouphène
résulte de l’interaction de nombreux sous-systèmes du système nerveux. Les voies
auditives jouent un rôle dans le développement du signal nerveux de l’acouphène et
dans l’émergence de l’acouphène en tant que perception auditive tandis que les autres
systèmes, entre autres les systèmes limbique et autonome, sont responsables de sa
pérennisation et de la gêne qu’il induit chez les patients.
Ce modèle très global, qui intègre les grands concepts des neurosciences cognitives
(dont la notion de « réseaux neuronaux » de traitement et celle de plasticité centrale), a
pour avantage essentiel de mettre à disposition du médecin, un modèle synthétique
du phénomène de l’acouphène qui permette d’expliquer aux patients, les
mécanismes à l’œuvre sur lesquels il est d'ores et déjà possible d’agir, et qui puisse
être aisément compris d’eux.

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Figure 6 - Spectre perçu de l’acouphène (ronds rouges, axe des ordonnées de gauche) et seuil absolu d’audition
(ronds blancs, axe des ordonnées de droite) mesurés chez 5 sujets.
Les composantes perçues de l’acouphène représentent une bande de fréquences relativement large et sont situées
dans la perte auditive. Noter la relation grossièrement inverse entre le “spectre” de l’acouphène et la perte auditive.

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Figure 7 - Représentation schématique des phénomènes de réorganisation centrale liés à la perte auditive :
A gauche : état normal avec inhibition latérale et connexions masquées.
A droite : activité des neurones centraux, levée de l’inhibition latérale sous l’influence de la diminution de l’activité
afférente et démasquage des connexions préexistantes non fonctionnelles. Les entrées sensorielles des régions
adjacentes à la perte peuvent stimuler les neurones dont la fréquence caractéristique correspond à celles de la perte
auditive. Cette réorganisation sous-tendrait la perception de l’acouphène : l’activité afférente déviée circulant dans ces
connexions démasquées seraient à l’origine de la perception de l’acouphène.
En bas : activité afférente en périphérie
Au milieu : activité des neurones centraux
En haut :champs récepteurs des neurones centraux.

L’inhibition centrale. Qu’est ce que c’est ?


Dans tout le système auditif, que ce soit dans les centres ou en périphérie, l’organisation
tonotopique des neurones auditifs est responsable d’une relation entre la fréquence
caractéristique des neurones et leur position spatiale dans la structure auditive considérée. Mais il
existe aussi deux autres types d’organisation. Une organisation de "convergence inter-niveaux"
tout d’abord, par laquelle les neurones centraux reçoivent des entrées provenant des étages
inférieurs, entrées qui correspondent à une bande de fréquences relativement larges (Norena et
Eggermont, 2002). Ensuite, une ‘organisation intra-étage’ centrale, retrouvée principalement au
niveau cortical, par laquelle les neurones d’un même niveau envoient et reçoivent des entrées
inhibitrices ou excitatrices, par le biais de connexions horizontales qui peuvent s’exercer à distance
sur des fréquences relativement éloignées de celles correspondant à la zone cochléaire lésée
(Norena et al., 2003). Ces phénomènes d’inhibition centrale seraient responsables des propriétés
de sélectivité fréquentielle des neurones centraux (Norena et Eggermont, 2002). Un type
d’inhibition s’exercerait de manière tonique et dépendrait du niveau d’activité spontanée dans les
neurones afférents ; en conséquence, toute lésion cochléaire s’accompagne d’une diminution de
l’inhibition centrale (Mossop et al., 2000 ; Norena et al., 2003) (cf. figure 7).

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2.1.4 Les modèles animaux


Malgré les enjeux majeurs que représentent les acouphènes en terme de santé publique, ce
symptôme n’a jusqu’à présent généré que peu d’intérêt de la part de la communauté scientifique.
Ainsi, les modèles animaux d’acouphènes sont très rares et le nombre de laboratoires travaillant
sur ce sujet est étonnamment restreint. Ce désintéressement relatif s’explique en partie par les
lacunes dans nos connaissances fondamentales et à
l’absence de modèles expérimentaux. Dans la mesure où les acouphènes
Le laboratoire Inserm de Montpellier utilise plusieurs sont une perception subjective
approches expérimentales chez l'animal pour tester (perception d’un son en l’absence
l’efficacité thérapeutique de certains médicaments de stimulation acoustique
appliqués directement dans la cochlée. extérieure), la mise au point de
protocoles expérimentaux chez
2.1.4.1 Produire des acouphènes l’animal est très difficile.
Une des premières difficultés expérimentales est de
trouver un moyen efficace et sûr pour induire des acouphènes chez tous les animaux testés.
C’est pour cette raison que la plupart des chercheurs utilisent le salicylate, composé actif de
l’aspirine, connu pour provoquer des acouphènes lorsqu’il est administré à fortes doses chez
l’homme et chez l’animal1.

2.1.4.2 Mesurer des acouphènes


L’autre difficulté est la mesure des acouphènes. Dans la mesure où on ne connaît ni le site de
génération, ni les mécanismes à l’origine des acouphènes, les protocoles expérimentaux pour
tester des stratégies thérapeutiques susceptibles de les traiter sont très difficiles à mettre en
œuvre.

2.1.4.3 Evaluer avec des méthodes électrophysiologiques


Pour tester l’efficacité thérapeutique de certains médicaments sur les acouphènes, le
laboratoire de l’Inserm à Montpellier développe des modèles électrophysiologiques in vitro
et in vivo.
Approche in vitro : L’approche in vitro consiste à enregistrer l’activité électrophysiologique
des neurones auditifs sur des tranches de cochlée. Ce modèle, développé par Jérôme Ruel
(Inserm U583, Montpellier) permet d’étudier les mécanismes moléculaires et cellulaires des
acouphènes (Figure 8). Un des résultats majeurs est que le salicylate potentialise l’activité des
neurones auditifs en réponse à l’application de glutamate (le neurotransmetteur des cellules
sensorielles), en activant des récepteurs NMDA normalement silencieux.
Modèle in vivo : Outre ces études in vitro, le salicylate permet de déterminer des corrélats
électrophysiologiques in vivo2. Il est aujourd’hui bien établi chez l’animal que la prise de
salicylate provoque une augmentation de l’activité spontanée de fibres unitaires du nerf
auditif 3 et modifie le spectre moyen d’activité enregistrée au niveau de la fenêtre ronde,
représentant une mesure globale de l’activité spontanée du nerf auditif 4 (Figure 9). Ces
modifications suivent les caractéristiques temporelles des acouphènes provoqués par le
salicylate (Cazals et al., 1998). Fort élégamment, Jérôme Ruel démontre que les antagonistes
des récepteurs du glutamate bloquent les activités parasites induites par le salicylate, sans
affecter l’activité basale des fibres du nerf auditif. L’ensemble de ces résultats suggère que les
acouphènes induits par le salicylate sont, au moins en partie, liés à un dysfonctionnement des
récepteurs NMDA présents au niveau de la synapse entre les cellules sensorielles et les fibres
du nerf auditif.

1- Macht et al., 1920 ; McCabe and Dey, 1965 ; Morgan et al., 1973.
2- (voir notamment Evans et al., 1981 ; Evans and Borerwe, 1982 ; Puel et al., 1990 ; Stypulkoski, 1990 ; Cazals et al.,
1998).
3- Evans et al., 1981 ; Evans and Borerwe, 1982 ; Stypulkoski, 1990.
4- Schreiner and Snyder, 1987 ; Martin et al., 1993 ; Cazals et al., 1998.

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Figure 8 - Tranche de cochlée in vitro.


Ce modèle a été mis au point par Jérôme Ruel lors de son stage post-doctoral dans le laboratoire du Pr. Robertson
(University of Western Australia, Perth).
Cette préparation est développée sur des cochlées post-natales de souris, âgées de 4 à 14 jours. Les compartiments
endo- et périlymphatique sont remplis du gel, et la cochlée est coupée à l’aide d’un vibratome. Les tranches obtenues
(150-300 µm) autorisent des enregistrements électrophysiologiques (patch clamp ou intracellulaire) de toutes les
cellules de l’organe de Corti [cellules internes (ihc), cellules externes (ohc), cellules de soutien] ainsi que celles du
ganglion spiral ou de la membrane de Reissner. Le même type d’approche peut être utilisé pour étudier le saccule et
l’utricule. L’intérêt majeur de cette préparation est de pouvoir étudier la physiologie des cellules sensorielles tout en
conservant leurs connectivités.

2.1.4.4 Evaluer avec une approche comportementale


Faire la démonstration que le salicylate provoque des activités anormales ne suffit pas à
démontrer qu’il induit des acouphènes. Un des rôles majeurs du cerveau étant de « filtrer » les
stimulus non pertinents, il nous fallait démontrer que les activités « parasites » du nerf auditif
sont bien perçues par le cerveau comme un son, donc comme un acouphène. Contrairement
aux patients, les animaux ne se plaignent pas de leurs acouphènes. Une façon de pallier cette
difficulté est d’observer les animaux pour voir s’ils se comportent « comme s’ils avaient des
acouphènes ». Le seul test comportemental jusqu’à présent disponible était celui de Jastreboff
(Jastreboff et al. 1988). Ce test est basé sur des aversions conditionnées, c’est-à-dire qu’il
utilise un paradigme de privation de nourriture ou de boisson. Ce paradigme de privation est
cependant très stressant pour l’animal, les animaux perdant de 10 à 15 % de leur masse
corporelle lors de l’apprentissage. Nous avons donc mis au point un modèle comportemental
d’acouphènes qui n’induit ni stress, ni anxiété chez l’animal
(Guitton et al, 2003). Ce modèle est d’autant plus
L’animal est tout d’abord conditionné à exécuter une tâche exact qu’il évite de
motrice en réponse à un son extérieur, généré par un mélanger plusieurs facteurs,
haut-parleur. Lorsque ces animaux sont traités avec de comme le stress.
fortes doses de salicylate, ils exécutent la tâche en l’absence
de son extérieur. En fait, l’acouphène perçu par l’animal fait office de « son déclenchant »
pour le comportement moteur. L’animal perçoit son acouphène comme un son extérieur et
exécute la tâche.
Nous avons ainsi deux moyens (électrophysiologique et comportemental) pour objectiver et
quantifier la présence d’un acouphène chez l’animal.
L’intérêt de ces modèles est de pouvoir étudier les mécanismes moléculaires impliqués dans
la genèse des acouphènes. Ce modèle « salicylate » est maintenant étendu à d’autres
pourvoyeurs d’acouphènes comme le bruit, la chimiothérapie ou le vieillissement de l’oreille
(presbyacousie). La connaissance des mécanismes et du site d’origine des acouphènes permet
de proposer des stratégies thérapeutiques ciblées. Par exemple, en appliquant au contact de la
cochlée des molécules qui bloquent sélectivement les récepteurs NMDA du glutamate

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

Figure 9 - Enregistrement unitaire des fibres du nerf auditif.


Cette technique permet l’enregistrement de l’activité base (en l’absence de son) des fibres du nerf
auditif chez l’animal durant l’application de drogues susceptibles d’induire des acouphènes.
A gauche, vue de la cochlée après exposition rétro-auriculaire. Cette approche permet la mise en
place d’une pipette de perfusion multicanaux pour l’application de périlymphe neutre ou contenant
divers agents pharmacologiques. Une macroélectrode d’argent est apposée sur la fenêtre ronde et
permet d’enregistrer simultanément le potentiel d’action composite du nerf auditif. A droite, vue de
l’abord du nerf auditif au niveau de la fosse postérieure. Après une cérébellectomie partielle, une
microélectrode de verre est introduite dans le nerf auditif pour enregistrer l’activité unitaire des
neurones auditifs primaires.

Figure 10 - Représentation schématique du protocole comportemental.

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(neurotransmetteur des cellules sensorielles) on stoppe les activités anormales du nerf auditif
et les acouphènes induits par le salicylate ! (figure 10)
Les animaux sont conditionnés à sauter à un mât en réponse à une stimulation sonore.
Chaque série est constituée de 10 essais. Le conditionnement en lui-même nécessite de 4 à
7 séries d’une durée comprise entre 15 et 20 minutes. Une fois conditionnés (critère
d’apprentissage : 3 séries consécutives avec un score ³ 80%), les animaux étaient inclus dans la
suite des expériences. Le protocole de test consistait en une mesure du nombre de réponses
correctes au son (score) et du nombre de sauts pendant les périodes de silence (faux positifs)
au cours d’une session quotidienne de 10 minutes session. Les injections de sérum
physiologique, de salicylate ou de méfénamate étaient réalisées 2 heures avant la période de
test (Guitton et al., 2003).
Une fois conditionné, l’animal est testé quotidiennement pendant 9 jours. Deux types de
mesures sont réalisées : 1) les réponses correctes (le nombre de fois où l’animal exécute la
tâche en réponse au son) et 2) les faux positifs (le nombre de fois où l’animal exécute la tâche
alors qu’aucun son ne lui est présenté). En absence de son, un animal normal n’exécute pas la
tâche et le nombre de faux positifs est quasi nul (contrôle). Si ce même animal reçoit une
injection quotidienne de salicylate (300mg/kg, i.p.), il exécute la tâche alors qu’aucun son ne
lui est présenté. En fait, il se comporte comme s’il entendait un son parce qu’il a un
acouphène. La mise en place d’un gelfoam (Gelita tampon) rempli de périlymphe artificielle
(AP) sur la fenêtre ronde de chaque oreille n’affecte pas le nombre de faux positifs. En
revanche, un gelfoam contenant 50 µM de 7-chlorokynurenate (7-CK), un antagoniste
NMDA, bloque les faux positifs. En conclusion : les faux positifs traduisent la présence d’un
acouphène et les acouphènes induits par le salicylate sont bloqués par l’application locale
d’anti-NMDA. (d’après Guitton et al., 2003)

2.1.5 Neurotransmetteurs et acouphènes


Dans la cochlée, l’onde de pression générée par un son se propage le long de la membrane
basilaire de la base vers l’apex. Le maximum d’amplitude de la vibration est d’autant plus proche
de l’apex que la fréquence de stimulation est grave. Cependant, la vibration passive de la
membrane basilaire ne suffit pas à elle seule à expliquer le haut degré de sélectivité fréquentielle
de la cochlée. En fait, la cochlée doit sa sensibilité et sa sélectivité à la présence des cellules ciliées
externes (CCE) (Figure 11). Ces CCE sont étroitement accordées sur la fréquence à détecter. Au
seuil et aux faibles intensités de stimulation acoustique, les CCE se contractent en phase avec les
déplacements de la membrane basilaire à un endroit précis de cette membrane qui dépend de la
fréquence (feed-back positif), augmentant ainsi considérablement (d’un facteur 100 environ) les
déplacements des structures et l’excitation des cellules ciliées internes (CCI). Les CCI sont les
véritables cellules sensorielles sur lesquelles sont branchées les fibres du nerf auditif. Chacune de
ces fibres est reliée à une seule CCI, et chaque CCI est contactée par environ une dizaine de
fibres. Deux populations de fibres sont à distinguer. Les fibres les plus sensibles (seuils bas) ont
une activité spontanée élevée, et celles à seuils moyens ou élevés (40 % des fibres) dont l’activité
spontanée est inférieure à 20 potentiels d’action par seconde. Le recrutement progressif de ces
deux populations de fibres permet d’expliquer l’étendue de la dynamique cochléaire du seuil de la
perception au seuil de la douleur (de 0 à 110 dB à 1000 Hz).
En retour, le système nerveux central contrôle l'activité via des systèmes distincts : le système
olivocochléaire médian et le système olivocochléaire latéral dont les noyaux d’origine se situent
dans le tronc cérébral. Au niveau de l’olive supérieure, les fibres descendantes se séparent en deux
contingents, formant ainsi deux systèmes efférents distincts. Les corps cellulaires des neurones
du système olivocochléaire médian se situent dans la région du noyau ventro-médian du corps
trapézoïde (NVCT). Le système projette majoritairement vers la cochlée controlatérale et
innerve les CCE dans des régions codant pour des fréquences supérieures à 2 kHz (voir Warr,
1992 pour revue). Les synapses qu’il établit avec les CCE utilisent l'acétylcholine comme
neurotransmetteur.

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

Figure 11 - Représentation schématique de l’innervation afférente et efférente de l’organe de Corti.


L’information sensorielle est envoyée au noyau cochléaire (NC) par les fibres afférentes connectées aux cellules ciliées
internes (CCI). Après leur passage à travers la membrane basilaire (à l’habenula perforata), ces fibres et les corps
cellulaires deviennent myélinisés. La cochlée est innervée par deux types d’efférences : les efférences projetant sous les
CCI et les efférences connectant directement les cellules ciliées externes (CCE). Ces efférences proviennent de différents
endroits du complexe olivaire supérieur dans le tronc cérébral et suivent le trajet du nerf vestibulaire. Les efférences
connectant les CCI proviennent du noyau de l’olive supérieure latérale (OSL). Les neurones efférents des CCE sont
localisés dans le noyau ventro-médian du corps trapézoïde (NVMCT). L’innervation efférente latérale pourrait utiliser
plusieurs neurotransmetteurs tels que l’acétylcholine (ACh), le GABA, la dopamine (DA), des enképhalines, des
dynorphines et le peptide lié au gène de la calcitonine (CGRP). Les efférences médianes utilisent l’acétylcholine et
peut-être le GABA et/ou le CGRP. Le système efférent latéral est représenté en rouge. Les flèches indiquent le sens de
propagation de l’influx nerveux.

Le système olivocochléaire latéral représente de 50 à 70% du contingent des efférences


olivocochléaires. Les corps cellulaires des neurones du système olivocochléaire latéral se situent
dans l’olive supérieure latérale. Leurs axones projettent vers la cochlée ipsilatérale et font des
synapses « en passant » avec les dendrites des neurones auditifs primaires sous la CCI (voir Warr,
1992 pour revue). Liberman (1980) décrit une moyenne de 10 synapses efférentes pour chaque
fibre du nerf auditif connectée aux CCI. Ce nombre varie en fonction des caractéristiques
intrinsèques de la fibre. Les fibres les plus richement innervées (jusqu'à 35 synapses) ont
généralement une activité spontanée faible (< 20 spikes/sec). Le nombre important de synapses
efférentes et leur position stratégique au niveau du site d’initiation du potentiel d’action sous la
CCI suggèrent que la régulation de la neurotransmission des fibres du nerf auditif par le système
nerveux central constitue un élément essentiel de la physiologie cochléaire. Différentes études en
immunocytochimie (voir Eybalin, 1993 et Puel, 1995 pour revue) ont permis de mettre en
évidence, dans l'innervation efférente latérale, un certain nombre de neurotransmetteurs
"classiques" (acétylcholine, GABA, dopamine) ou de neuropeptides (enképhalines, dynorphines,
CGRP).

CCE, efférences médianes et acouphènes


Nous avons vu que les CCE amplifient mécaniquement les mouvements de la membrane
basilaire en un point précis dépendant de la fréquence. Cette propriété effectrice des CCE dans la
micromécanique cochléaire, résumée sous le terme générique de mécanismes actifs, permet
d'affiner la sensibilité et la sélectivité fréquentielle de la cochlée. Une partie de l'énergie générée
par les mécanismes actifs (ou amplificateur cochléaire), non absorbée par la cochlée, peut être
captée grâce à un microphone placé dans le conduit auditif externe; c'est le principe
d'enregistrement des otoémissions acoustiques. Ces otoémissions peuvent se regrouper en deux
grandes catégories. Les otoémissions provoquées par un son et les otoémissions spontanées. Les

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otoémissions spontanées, comme leur nom l'indique, sont des sons enregistrés dans le conduit
auditif externe en l'absence de toute stimulation sonore. Leur découverte a suscité un fabuleux
espoir pour tous ceux qui voyaient là un moyen objectif d'étudier les acouphènes. En effet, les
CCE pourraient se trouver à la limite d'un état oscillant (résonant) que certains facteurs, comme
le bruit par exemple, pourraient déclencher. Parmi les facteurs déclenchants, on a pensé à un
défaut dans la modulation cholinergique exercée par le système efférent médian. Ainsi, les
oscillations spontanées des CCE pourraient exciter les CCI qui transmettraient ce "son
intrinsèque" aux fibres du nerf auditif puis au cerveau.. Paradoxalement, les otoémissions
spontanées ne sont pas corrélées avec la présence d'un acouphène, et lorsque cette éventualité se
présente, la fréquence du son perçu est rarement compatible avec celle de l'otoémission (Voir
Rebillard et al., 1987). Loin de refléter un processus pathologique, les otoémissions spontanées
sont plutôt le témoin de la bonne santé de la cochlée puisqu’on les enregistre chez 80% des sujets
normaux-entendants, et dans l’immense majorité des cas, elles ne sont fort heureusement pas
perçues. L’ensemble de ces données suggère donc que les CCE ne constituent probablement pas
la source majeure des acouphènes.
CCI, dendrites afférentes, efférences latérales et acouphènes
L’étude du complexe CCI - fibres du nerf auditif et sa modulation par les efférences latérales a
nécessité la mise au point d’une technique de perfusion intracochléaire, couplée à
l'enregistrement de potentiels d’action unitaires des fibres du nerf auditif, sur une préparation in
vivo physiologiquement intacte. La maîtrise de cette technique nous a permis de préciser la nature
des récepteurs impliqués dans la neurotransmission synaptique et leur régulation par les
efférences latérales.

2.1.5.1 La piste du glutamate


Les acouphènes pourraient aussi résulter d'un dysfonctionnement de la synapse entre les
CCI et les neurones auditifs primaires (Figure 12). En effet, cette synapse utilise le glutamate
comme neurotransmetteur. Si l’utilisation du glutamate comme transmetteur a des avantages

Figure 12 - Acouphènes et traumatismes sonores.


Une surstimulation acoustique provoque une libération excessive de glutamate dans la fente synaptique sous la cellule
ciliée interne. Le glutamate libéré provoque la dépolarisation des récepteurs glutamatergiques postsynaptiques, et donc
une entrée massive de cations (Na+, Ca2+) et d'eau. Dans une phase aiguë, la suractivation des récepteurs
glutamatergiques est à la base d’un phénomène osmotique provoquant un gonflement, voire un éclatement des
terminaisons nerveuses. Dans une phase tardive, ces dommages peuvent conduire à la mort du neurone. Les neurones
survivants ont cependant la capacité de former de nouveaux prolongements et de contribuer à la restitution des
potentialités de la cochlée en moins de 5 jours. Cette réparation synaptique fait intervenir des récepteurs NMDA.
L’expression des récepteurs NMDA, responsable de réponses de type épileptique, pourrait se traduit au niveau du
cerveau par l'arrivée de sons "spontanés" ou acouphènes.

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certains, comme celui d’être un neurotransmetteur rapide, donc très performant pour coder
les informations sonores, l’utilisation du glutamate présente l’inconvénient d’être toxique
pour les neurones lorsqu’il est libéré en trop grande quantité. Nous avons démontré que les
pathologies qui induisent des acouphènes (traumatisme acoustique, l'ischémie cochléaire,
presbyacousie…), découlent en grande partie de la libération excessive de glutamate, (voir
Puel, 1995 pour revue). A partir de ce constat, il est raisonnable de penser qu'un dérèglement,
une hyperexcitabilité, voire un emballement des fibres du nerf auditif sont à l'origine de
certains acouphènes. En particulier, on pense à tout ce qui est décrit à propos du rôle des
récepteurs glutamatergiques de type NMDA dans l'emballement des activités électriques
cérébrales lors de l'épilepsie. Dans la cochlée, une surexpression des récepteurs NMDA est
observée expérimentalement chez l'animal après traumatisme acoustique, ischémie
transitoire ou pertes de cellules sensorielles. La surexpression de ces récepteurs devrait
entraîner des réponses de type épileptique pouvant se traduire au niveau du cerveau par
l'arrivée de sons "spontanés" ou acouphènes (Figure 12). Cette piste de "l'épilepsie du nerf
auditif" permet d'expliquer un certain nombre d'acouphènes et ouvre des perspectives
thérapeutiques autour de la pharmacologie de la synapse glutamatergique.

Figure 13 - Lutter contre la libération excessive de glutamate.

Nous avons d'ores et déjà montré que l'aspirine, médicament connu pour induire des
surdités et des acouphènes chez l'homme, provoque chez l'animal une augmentation de
l'activité spontanée des fibres du nerf auditif, suivant un mécanisme indépendant de la
cyclooxygénase. Nous étendons nos investigations à d'autres modèles comme le traumatisme
sonore et l'ischémie cochléaire sur lesquels nous testons les substances susceptibles de
normaliser l’activité des fibres du nerf auditif en situation pathologique. Des résultats
encourageants sont obtenus avec des bloqueurs des récepteurs NMDA, mais aussi avec
d'autres molécules anti-glutamate actuellement utilisées dans les maladies
neurodégénératives (Sclérose latérale amyotrophique, Alzheimer, ...) ou l'épilepsie.

La piste de la molécule anti-glutamate est enthousiasmante pour la thérapeutique. Mais ce


neurotransmetteur est diffus et son administration par voie générale risquerait d’induire de
multiples dysfonctionnements, d’où la nécessité de développer des modes locaux d’administration.

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Figure 13bis - Système d'infusion de l'oreille interne.

2.1.5.2 La piste des efférences latérales


Si la fonction de l’innervation efférente médiane est bien connue, celle de l’innervation
efférente latérale reste encore obscure. Notre connaissance du rôle des efférences latérales est
limitée car ce système ne peut être ni stimulé, ni détruit spécifiquement. Aussi, avons-nous
décidé d’étudier le rôle fonctionnel des efférences olivocochléaires latérales par une approche
pharmacologique in vivo. Le système efférent latéral utilise plusieurs neurotransmetteurs ou
neuromodulateurs. Alors que l’acétylcholine et le GABA sont localisés aussi dans les

Figure 14 -Acouphènes et dopamine.a) - Sur cet exemple d'enregistrement unitaire, la fréquence caractéristique (le seuil
le plus bas) de la fibre auditive est 9 kHz et son activité spontanée de 41 spikes/sec. Une perfusion de périlymphe
artificielle contenant 1 mM de dopamine (DA) réduit de 60% l'activité spontanée de cette fibre.Cet effet est annulé par
un rinçage avec de la périlymphe artificielle (Péri). b) - Le blocage de la dopamine endogène par l’antagoniste
dopaminergiques D2 (éticlopride) provoque une levée d’inhibition. La fibre présentée ici, code pour une fréquence
caractéristique (FC) de 12 kHz et son activité spontanée est de 12 spikes/sec. Noter que la perfusion intracochléaire de
50 µM d’éticlopride augmente l’activité spontanée de 7 à 50 spikes/sec. Un rinçage avec de la périlymphe artificielle
ramène l’activité spontanée à des valeurs normales. Une défaillance de ce système d'inhibition tonique pourrait être à
l'origine de certains acouphènes.

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efférences médianes, la dopamine est uniquement présente dans les efférences latérales (voir
Eybalin, 1993 et Puel, 1995 pour revue). Notre étude s’est donc focalisée sur le rôle de la
dopamine.
Le blocage pharmacologique de la composante dopaminergique des efférences latérales
entraîne une augmentation de la décharge suivie d’une extinction de l'activité de la fibre
(Figure 14). L'observation de ces cochlées en microscopie électronique montre qu'un certain
nombre de terminaisons dendritiques ont éclaté. De tels dommages sont décrits après
application de glutamate dans la cochlée, après traumatisme sonore ou ischémie (voir Puel,
1995 pour revue). Comme dans notre étude, ces dommages peuvent être prévenus par des
anti-glutamates (Ruel et al., 1999, 2000). Ainsi, la réduction du taux de décharge des fibres à
haute activité spontanée résulte d’une excitotoxicité qui se développe durant la levée
d’inhibition.
Les efférences latérales exercent une inhibition tonique sur l’activité des fibres du nerf
auditif. Cette action inhibitrice pourrait constituer un mécanisme de protection endogène
contre les pathologies cochléaires liées à la nature glutamatergique des CCI (traumatismes
acoustiques, ischémie). D'un point de vue pathologique, une défaillance de ce système
pourrait correspondre au développement de surdités neurales lors du vieillissement
(presbyacousie) et/ou à l’apparition de sifflements ou de bourdonnements d’oreille
persistants (acouphènes). La compréhension des mécanismes moléculaires de la régulation
des neurones auditifs primaires par le système efférent latéral devrait donc, dans un avenir
très proche, ouvrir des horizons prometteurs dans le traitement des acouphènes.

2.1.5.3 La plasticité synaptique


Nous venons de voir qu’un choc excitotoxique provoque l’éclatement des terminaisons des
neurones auditifs primaires sous les CCI. Toutefois, ces neurones ont la capacité de former
de nouveaux prolongements pour rétablir des synapses fonctionnelles avec les CCI (Puel et
al., 1995). Parallèlement à ces modifications structurales, ces neurones modulent l’expression
de certains récepteurs glutamatergiques, notamment les récepteurs NMDA (Puel et
al.,1995 ; d’Aldin et al., 1997). A l'autre bout de la chaîne, les CCI désafférentées par la lésion
des terminaisons dendritiques afférentes, subissent des modifications moléculaires

Figure 15 - Plasticité synaptique après un choc excitotoxique dans la cochlée.


a. Innervation normale de la cellule ciliée interne (CCI). Les dendrites des neurones
auditifs primaires (de type I) qui sont connectés au pôle basal de la CCI, sont contactés
par les prolongements des neurones du système efférent latéral.
b. Changement d’innervation au pôle basal de la cellule ciliée interne après un choc
excitotoxique. Les fibres efférentes latérales viennent contacter directement la CCI
(d’après Puel, 1995 ; d’Aldin et al., 1997).

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

susceptibles de favoriser de nouvelles connexions synaptiques (Ladrech, 2000). Le


changement d'innervation à la base de la CCI, en particulier la présence de synapses
efférentes, rencontrées au cours du développement (Pujol et al., 1978 ; Pujol et al., 1979),
témoigne de nouveaux modes de communication intercellulaire. Ainsi, l'activation des CCI
par les efférences latérales pourrait participer à la reconnection des neurones afférents avec
leur partenaire sensoriel. Ce nouveau mode d’innervation des CCI pourrait favoriser la
libération de neurotransmetteur (Figure 15). En plus d’une libération accrue, le glutamate va
agir sur une synapse qui n’est plus contrôlée par les efférences, et qui de plus sur-exprime des
récepteurs tels que les récepteurs NMDA (Puel et al., 1995 ; d’Aldin et al., 1997). La
stimulation de ces récepteurs génère non seulement des activités dans le nerf auditif - qui
peuvent être interprétées comme des sons par le système nerveux central - mais aussi activer
en retour les CCI via les efférences qui les contactent. Notons que le même type
d'innervation sous la CCI - à la fois afférente et efférente - est également observé après une
intoxication par des antibiotiques ototoxiques (Lenoir et al., 1999). L’existence de cette
double innervation à la base de la CCI (Figure 15) pourrait donc être à l’origine d’une boucle
de rétroaction positive et permettre d’expliquer certains acouphènes périphériques. Des
expériences sur tranches d’organe de Corti prélevés après un choc excitotoxique montreront
si les CCI répondent aux neurotransmetteurs efférents, comme cela a été démontré pendant
le développement avec l’ACh (Glowatzki and Fuchs, 2000), et si ces réponses se traduisent
par une augmentation des courants postsynaptiques excitateurs. Si tel est le cas, les stratégies à
venir devront s'attacher à briser cette boucle auto-entretenue, en intervenant sur l'un ou
l'autre des partenaires impliqués : CCI - dendrites afférentes - efférences latérales.

2.1.6 La mise en évidence objective de l’acouphène


• Imagerie de l’acouphène, techniques, difficultés
et résultats Tout serait plus simple, dans le
L’application des techniques d’imagerie cérébrale domaine de la recherche et de la
fonctionnelle à l’acouphène, techniques susceptibles clinique si l’acouphène pouvait
d’établir la réalité du signal nerveux sous-tendant cette être traduit objectivement.
perception fantôme, comme d’identifier, à travers les
modifications énergétiques dont elles sont le lieu, les diverses structures cérébrales impliquées
dans son traitement, a bien évidemment représenté une forte tentation pour les chercheurs.

2.1.6.1 Les techniques d’imagerie


2.1.6.1.1 Principes
Ces techniques sont fondées sur deux principes physiologiques. Le premier est que
l’activation ou la désactivation des neurones dans un territoire cérébral donné, s’y
traduisent respectivement par une augmentation ou une diminution du débit sanguin,
afin de répondre à un accroissement ou une décroissance de la demande énergétique par
rapport à la condition de "repos cérébral". D’après le second, l’augmentation du
métabolisme des neurones et des cellules qui les environnent induit la création de
courants ioniques. Après enregistrement à la surface du crâne, ces courants peuvent être
visualisés sous forme de variations de champ magnétique ou de potentiel électrique.

2.1.6.1.2 Méthodes utilisées et difficultés


Deux méthodes différentes ont été employées : la tomographie à émission de positons
(TEP), seule méthode atraumatique et silencieuse qui permet la mesure de paramètres
tant physiologiques (débit sanguin cérébral, métabolisme du glucose, consommation
d’oxygène…) que pharmacologiques (répartition de substances se liant spécifiquement à
certains récepteurs) chez le sujet vivant. Elle a donc de nombreuses applications, aussi
bien en physiologie qu’en pathologie. Elle permet de suivre l’évolution dans le temps et
dans l’espace d’un traceur spécifique faiblement radioactif, injecté au sujet examiné. La

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

radioactivité émise est détectée et son origine repérée au moyen d’une caméra. En
fonction de l’origine de la radioactivité émise et de l’intensité du rayonnement, on peut
reconstruire des images de l’organe étudié, dans notre cas le cerveau. On obtient alors
une carte cérébrale dans laquelle figurent les zones du cerveau activées ou désactivées
pendant l’examen.
L’autre méthode est l’imagerie cérébrale fonctionnelle (IRMf). Elle présente
l’inconvénient majeur d’être très bruyante, ce qui est particulièrement préjudiciable
pour les études touchant à l’audition. Les casques ou les bouchons protecteurs
n’atténuent que partiellement ces bruits susceptibles de parasiter les résultats. Des
protocoles particuliers, dans lesquels l’acquisition des données est décalée par rapport
aux effets physiologiques du bruit de la machine, ont dû être mis au point qui permettent
de s’affranchir des éventuelles interférences avec le traitement auditif. En revanche, cette
méthode ne nécessite pas l’injection de traceur, puisque grâce à ses propriétés
magnétiques, c’est l’hémoglobine du sang qui joue ce rôle : de ses deux formes, seule la
carboxyhémoglobine est attirée par le champ magnétique intense émis.
La plupart des paradigmes employés pour étudier les systèmes sensoriels ou moteurs
reposent sur la capacité à réaliser des contrastes entre des séquences d’acquisition
pendant lesquelles le stimulus est présenté ou bien est réalisé le geste ou traitement
spécifique étudié, et des séquences de repos sans stimulation, mouvement ou traitement.
Or, l’acouphène étant perçu en continu et n’obéissant à aucun contrôle d’origine
extérieure, il est a priori impossible de disposer, pour révéler l’activité nerveuse liée à
l’acouphène, d’une condition de "repos" pendant laquelle le patient n’entende plus son
acouphène. Diverses approches ont donc été développées afin de contourner cette
difficulté. Certaines équipes ont pris le parti de comparer des groupes de sujets
présentant ou non le symptôme tandis que d’autres ont tiré profit de cas d’acouphènes
particuliers, survenant le plus souvent après une chirurgie cérébrale, grâce auxquels les
sujets explorés peuvent constituer leurs propres "contrôles".

2.1.6.1.3 Les résultats


Les données issues de la TEP
Avec l’objectif de révéler des modifications de la fonction des neurones liées à la
présence d’un acouphène, Arnold et coll. (1996) ont étudié le métabolisme du
glucose et comparé les images obtenues chez des patients présentant une perte
auditive associée à un acouphène chronique à celles obtenues chez des sujets
contrôles sans acouphène ni perte d’audition. Une hyperactivité dans le gyrus de
Heschl gauche a été observée chez la plupart des patients, que leur symptôme soit
perçu bilatéralement ou bien uniquement dans l’oreille gauche ou droite. La
comparaison entre elles des données obtenues chez les différents sujets n’a pas
permis de lier le degré d’hyperactivité des neurones à l’intensité subjective de
l’acouphène. Fait intéressant, la gêne d’un des patients ayant évolué au cours de
l’étude, trois examens successifs ont pu être
réalisés dans des conditions distinctes : perception Disposer de 2 états à
de l’acouphène très invalidante, perception contraster par différence.
atténuée et finalement retour au niveau de départ.
L’hyperactivité métabolique observée dans le cortex auditif primaire gauche dans les
conditions invalidantes s’atténuait avec la perception de l’acouphène pour finalement
retourner au niveau initial.
En 1999, lors du congrès mondial de Cambridge consacré aux acouphènes, la même
équipe (Oestreicher et al.) a présenté une étude utilisant la même technique. Etudiant
un groupe de patients acouphéniques très hétérogène, ils n’ont pas retrouvé la
différence significative entre les structures auditives du groupe de porteurs
d’acouphènes et celles du groupe contrôle. En revanche, ils ont observé une
diminution du flux sanguin locorégional dans des structures non auditives qui, par

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ailleurs, sont impliquées dans la gestion de la douleur (cortex cingulaire antérieur,


cortex pariétaux postérieurs, insula). Ces résultats apportent donc un certain soutien
à l’hypothèse selon laquelle l’acouphène chronique pourrait être un analogue de la
douleur chronique, impliquant l’activité d’aires corticales communes : ainsi
l’acouphène lié à un stimulus interne serait traité dans d’autres structures cérébrales
que celles activées par les stimuli sonores externes (Müller 1997).
Afin de disposer de deux états à contraster par différence, d’autres auteurs ont tiré
parti de l’existence de cas particuliers et rares de patients capables, après chirurgie, de
déclencher ou inhiber à volonté la perception transitoire d’un acouphène ou bien au
moins de la moduler en réalisant des manœuvres diverses.
Ainsi, à Lyon, Giraud et al. (1999) ont pu identifier des structures cérébrales dont
l’activité ou les modifications d’activité étaient corrélées à la perception d’un
acouphène déclenché par le regard, apparu chez quatre patients droitiers opérés pour
de gros neurinomes (stade 3) du nerf auditif, localisés à l’angle ponto-cérébelleux.
Ces sujets étaient capables de déclencher l’acouphène apparu du côté de l’oreille
opérée en modifiant horizontalement l’orientation de leur regard, de sa position
primaire vers la droite ou la gauche tandis qu’un déplacement vertical n’induisait pas
d’effet. La direction grossièrement verticale qui n’induisait pas de sensation et celle
plutôt horizontale qui entraînait une sensation maximale ont été repérées chez
chacun des quatre sujets afin de constituer respectivement les conditions “off” et “on”
des acquisitions d’images réalisées en TEP. L’étude révèle une activation bilatérale
des régions temporales et pariétales du cerveau, plus étendue dans l’hémisphère
cérébral gauche, mais plus intense dans l’hémisphère droit quelle que soit l’oreille
affectée par l’acouphène (Giraud et al.,1999) (Figure 16). Les zones dont l’activation
est liée à la perception de l’acouphène appartiennent toutes au cortex auditif
secondaire, territoire du cerveau impliqué dans l’analyse et la compréhension des
sons entendus, ce qui confirme les données de Silbersweig acquises chez des
schizophrènes chez lesquels l’activation des aires auditives primaires (celles qui
recueillent les sons) ne semble pas nécessaire à la perception des hallucinations
auditives.

Figure 16 - Aires montrant un accroissement du flux sanguin cérébral pendant la perception de l’acouphène
déclenché par le regard (4 sujets) (GIRAUD et al. 1999)
Figures de gauche et de droite : activations observées respectivement dans la région temporo-pariétale droite (un
premier pic intéresse les aires 42, 22, 40 de Brodmann, un second, l’aire 21 de Brodmann) et gauche (aires 22, 40 et
21 de Brodmann).
Figure du milieu : activation dans le gyrus occipito-pariétal (aire 7 de Brodmann).
Les zones temporo-pariétales activées appartiennent au cortex auditif secondaire exclusivement. L’activation de la
région occipito-pariétale impliquée dans l’analyse des traits visuels en vue de la réalisation d’un mouvement est
imputable aux différences de localisation des cibles visuelles en condition de référence et en condition active.

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S’interrogeant sur les observations de quelques patients rapportant des modulations


de leurs acouphènes permanents en intensité et/ou en fréquence lors des
mouvements du cou, de la tête ou lors de manœuvres particulières (fermeture
buccale avec pression molaire, pression de la langue sur le palais, constriction des
mâchoires..), Levine (1999 ; 2003) a effectué une recherche systématique des
interférences entre acouphènes et activations d’autres modalités sensorielles. Il en
conclut que cette caractéristique se retrouve chez 2/3 des patients environ et qu’il
s’agit donc là d’une caractéristique fondamentale de ce symptôme. Certains
chercheurs ont pensé à utiliser ces modulations pour réaliser la neuro-imagerie de
l’acouphène "courant".
Ainsi l’équipe de Lockwood (1999) a exploré à l’aide de la TEP trois patients
présentant une surdité sévère associée à des acouphènes unilatéraux de fréquence
aiguë (supérieure à 2 kHz), dont ils pouvaient délibérément modifier l’intensité
perçue à la hausse ou à la baisse en réalisant certains mouvements orofaciaux. Les
patients étaient comparés à un groupe de 6 témoins sans acouphène ni perte auditive.
L’étude a été effectuée dans trois conditions : au repos, lors de stimulations sonores
unilatérales et pendant la réalisation de mouvements orofaciaux (striction des
mâchoires). Les données obtenues chez les sujets contrôlés, révèlent les régions
corticales normalement activées par les mouvements orofaciaux (cortex
sensorimoteur des deux côtés et aire motrice supplémentaire). - Chez les patients
dont l’acouphène augmentait en intensité lors des mouvements volontaires, les
auteurs ont observé une activation du cortex auditif primaire et d’une région située
entre les corps genouillés médians. Chez les patients dont l’acouphène était au
contraire atténué par les mouvements orofaciaux, une réduction du flux sanguin
cérébral a été observée dans le lobe temporal (aires 21 et 41 de Brodmann) et

Figure 17 - Activation nerveuse associée à la perception de l’acouphène.


Haut : Activations liées à la perception de l’acouphène chez trois patients présentant un
acouphène subjectif dans l’oreille droite. Le pic d’activité le plus important est observé dans le
gyrus temporal médian gauche.
Bas : Trois plans transaxiaux montrant la même activation dans des plans situés 4, 8 et 12 mm
au-dessus du plan défini par les commissures antérieure et postérieure. Le site de plus forte
activation est retrouvé dans le gyrus temporal médian, visible de la convexité au cortex
operculaire.
Figure empruntée à Lockwood et al. (1999).

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l’hippocampe de l’hémisphère controlatéral. Les images correspondantes sont


présentées dans la figure 17. Ils ont aussi observé qu’une stimulation acoustique de
l’oreille droite chez les contrôles et chez les deux patients présentant un acouphène
droit produisait une activation bilatérale du gyrus temporal transverse et des portions
adjacentes du gyrus temporal supérieur. En revanche, contrairement aux contrôles,
on note chez les patients une activation supplémentaire située dans l’hippocampe
gauche et ceci seulement pour le stimulus à 2000 Hz. La comparaison, contre la
condition de référence, des sites activés par la stimulation à 2000 Hz chez les patients
et les contrôles, révèle que chez les patients, il existerait une activité nerveuse
intrinsèque présente au repos qui se manifeste par une activation plus forte dans le
cortex auditif primaire, la partie antérieure du lobe temporal gauche et l’insula.
L’équipe de Mirz (1999) a utilisé les effets bénéfiques de l’administration
intraveineuse de lidocaïne et/ou du masquage sonore par un bruit en bande étroite
(1/3 d’octave de largeur ; intensité au seuil de masquage minimum) sur l’acouphène,
pour rechercher chez des patients atteints d’acouphènes invalidants les modifications
d’activité cérébrale liées à sa perception. Les structures cérébrales mises en évidence
dans ce travail sont donc localisées de manière prédominante à l’hémisphère droit en
particulier à un réseau préfrontal-temporal (cortex pré-frontal médian et supérieur
droit, gyrus postérieurs droits), au cortex secondaire ainsi qu’à des structures
corticales associées aux processus attentionnels et de mémoire. Elles ont été
globalement retrouvées dans une étude TEP réalisée par la même équipe sur des
volontaires sains soumis à des stimuli auditifs aversifs (Mirz, 2000).
Ces deux dernières études sont intéressantes car elles ont été réalisées, non pas sur
des curiosités neurochirurgicales, mais sur des patients présentant des acouphènes
‘courants’ associés à une perte sur les fréquences aiguës. De plus, leurs résultats sont
en faveur de l’implication de structures extra-auditives potentiellement liées à la
perte auditive et/ou à l’acouphène. Ainsi, certains acouphènes pourraient trouver leur
origine et les causes de leur pérennisation au sein même des voies auditives centrales.
Les données issues de l’IRMf
Cette technique n’a été encore que peu utilisée pour explorer les acouphènes. Tout
comme la TEP, elle a été employée pour l’étude d’acouphènes particuliers bien que
quelques approches d’acouphènes les plus communément répandus commencent à
apparaître dans la littérature.
C’est ainsi que Ballester et coll. (2001) se sont intéressés à des populations de patients
capables de supprimer ou renforcer leur acouphène volontairement via l’application
de pressions cutanées mastoïdiennes ou pré-auriculaires, et ceci, pendant un temps
suffisant pour pouvoir être exploité en IRMf. Dans cette étude, des aires cérébrales se
sont activées des deux côtés dans les lobes frontaux et temporaux. Durant certaines
périodes de l’examen, les patients ont eu pour consigne de se concentrer fortement
sur leurs acouphènes, indépendamment de toute stimulation extérieure. Pendant ces
phases de concentration, les patients présentant de façon habituelle un acouphène
permanent ont montré des activations cérébrales frontales. Ces résultats (Figure 18)
confirment l’implication probable du système nerveux central dans la genèse et/ou la
modulation de certains acouphènes. De plus, l’activation du lobe frontal (impliqué
entre autres dans la pensée et l’intelligence…) laisse penser que, grâce aux
connexions de ces régions avec le système limbique (intervenant dans la gestion des
émotions et leur mémorisation), il pourrait concourir à l’élaboration de la dimension
émotionnelle des acouphènes, dans son aspect conscient aussi bien qu’inconscient.
Une autre approche a été développée à Boston par Melcher et coll. (2000). Les
données obtenues sur un groupe d’adultes présentant une audition normale et un
acouphène unilatéral, en absence et en présence d’une stimulation masquante bilatérale
de 55 dB SL. En réponse au masque binaural, les acouphéniques manifestent une
activation IRMf particulièrement faible dans le colliculus inférieur controlatéral à

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l’acouphène, alors que chez les contrôles, l’activation de cette structure est
comparable des deux côtés. Les auteurs expliquent ce résultat de la manière suivante :
la perception de l’acouphène serait associée à une activité neurale particulièrement
élevée qui se distribue, au niveau du colliculus inférieur, de la même manière que si
elle était induite par un son externe à savoir essentiellement du côté controlatéral ;
quand les porteurs d’acouphènes unilatéraux sont stimulés par un son, l’activation
particulièrement basse du colliculus inférieur controlatéral s’expliquerait soit par la
limitation de l’effet de la stimulation externe par la saturation d’une activité qui, à
cause de l’acouphène est déjà forte soit par un petit changement d’activité résultante
de deux effets opposés de la stimulation externe : la réduction de l’activité liée à
l’acouphène (la stimulation externe masque sa perception) et, simultanément, une
augmentation de l’activité normale ce qui se traduirait par le petit changement
d’activité observé.
En conclusion :
L’application difficile des techniques d’imagerie à l'acouphène a apporté des résultats
dont la variabilité est une des caractéristiques. Celle-ci est sans doute à mettre en
relation avec la grande diversité des étiologies des acouphènes étudiés ainsi que
l’hétérogénéité des conditions d’expérimentation. En dépit de ces limitations, ces
études ont permis d’asseoir un certain
nombre de notions avancées dans le modèle L'imagerie confirme objectivement
neurophysiologique de l’acouphène présenté l'implication des structures
en 1990 par Jastreboff, en particulier en ce qui extra-auditives.
concerne l’implication déterminante des
structures extra-auditives par conséquent celle des voies auditives secondaires. Leur
plus importante conséquence est sans nul doute d’avoir établi sans conteste la réalité
d’une activité nerveuse corrélée à l’acouphène, apportant ainsi une certaine légitimité
aux plaintes des acouphéniques.

Figure 18 - Cartographie obtenue en IRMf au moyen d’une acquisition Echo-Planar par


méthode BOLD lors d’une étude consacrée aux acouphènes.
Haut : Activations corticales bifrontales et bitemporales observées lors des phases de
déclenchement du stimulus.
Bas : Activations dans des zones du cortex frontal observées en dehors de toute modulation
volontaire de l’acouphène, chez des patients auxquels on a demandé de se concentrer sur leur
symptôme. (Figure empruntée à BALLESTER et al. 2001).

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2.2 L’hyperacousie
C’est le symptôme le plus souvent associé à l’acouphène et souvent le plus gênant. Il commence à
être connu, voire galvaudé au sein du grand public.
2.2.1 Définition
L’hyperacousie est une forme d’hypersensibilité auditive qui se manifeste par une perception
anormalement forte, voire parfois douloureuse, déclenchée par des sons perçus par tout un
chacun comme faibles ou confortables. Les patients qui en sont atteints réagissent souvent par un
retrait social et s’interdisent tout loisir mettant en jeu la fonction auditive (conférences, concerts,
représentations théâtrales, discothèques, pratique ou écoute de musique) et toute activité
s’effectuant dans un bruit de fond (restaurant, rue, métro, centre commercial, etc.). Ils se privent
ainsi de tout plaisir et créent eux-mêmes les conditions
propices au développement d’un véritable handicap. Avec ou sans atteinte du seuil
Ce phénomène peut ou non s’accompagner d’une auditif, le sujet hyperacoustique
perturbation du seuil auditif. Il peut ou non être associé à manifeste gène et modification du
un acouphène. Environ 40% des personnes qui comportement.
présentent un acouphène montrent à des degrés divers
une diminution de la tolérance au bruit (Jastreboff, 1998 ; Pilgramm, 1999) ; compte tenu de la
prévalence des acouphènes, l’hyperacousie concernerait donc un peu moins de 2 % de la
population générale (Lurquin et al., 2001). Inversement, 86% des personnes présentant une
tolérance diminuée souffrent d’acouphènes (Jastreboff et Jastreboff, 2001).
2.2.2 Degré
La diminution de la tolérance au bruit recouvre plusieurs phénomènes (Jastreboff et Jastreboff,
2001).
L’hyperacousie proprement dite se caractérise par une réponse anormalement forte (par rapport à
l’individu moyen) du système auditif à des sons dont les caractéristiques physiques (spectre et
intensité) sont contrôlées.
Le terme de misophonie est utilisé pour les patients qui redoutent certains sons voire même tous les
sons parce qu’ils les trouvent désagréables.
La phonophobie correspond à un type particulier de misophonie dans lequel l’émotion dominante est
la peur du bruit ou des sons générant l’intolérance. Les patients qui en sont atteints redoutent que des
sons normaux de l’environnement puissent endommager leur oreille ou aggraver leurs
symptômes et passent leur temps à élaborer des stratégies destinées à les éviter.
Mais certains auteurs utilisent le terme de phonophobie d’une manière plus générale (Katzenell et
Segal., 2001), pour décrire l’intolérance au bruit qui se manifeste en association avec certaines
pathologies (voir plus bas).
Dans la pratique courante, l’intolérance aux bruits observée chez la majorité des patients
correspond à une combinaison d’hyperacousie et de misophonie et il sera important, dans chaque
cas, de démêler ce qui revient à l’une ou l’autre de ces composantes qui relèvent de mécanismes et
de prises en charge distinctes.
2.2.3 Recrutement ou hyperacousie ?
Aucune des trois manifestations d’une diminution de la tolérance au(x) son(s) définies ci-dessus,
n’admet de relation systématique avec les seuils auditifs mesurés : les patients qui en sont atteints
peuvent ou non présenter une perte auditive associée. En revanche, le recrutement correspond
toujours à une augmentation anormale de la sonie liée à la perte auditive. A la différence de
l’hyperacousie, les sons de faible intensité sont, dans ce cas, tolérés normalement. On assiste à un
pincement de la gamme dynamique de l’oreille avec ou sans diminution du seuil d’inconfort.

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2.2.4 Etiologie et physiopathologie


Les causes de l’hypersensibilité auditive sont variées. Elles ont fait l’objet d’une revue exhaustive
récente (Katzenell et Segal, 2001). D’après ces auteurs, les cas d’hyperacousie se répartiraient en
quatre groupes : ceux impliquant le système auditif périphérique, ceux qui mettent en jeu le
système nerveux, ceux liés à des troubles hormonaux ou infectieux et… ceux de cause inconnue.
Les conditions cliniques pour lesquelles une origine périphérique de l’hyperacousie est probable
sont diverses. Une source cochléaire est logiquement envisagée quand acouphène et perte
auditive coexistent avec l’hyperacousie. Pour Jastreboff et Jastreboff (2000), l’hyperacousie
proprement dite correspondrait à un dysfonctionnement de l’amplificateur cochléaire
objectivable, dans certains cas au moins, par l’exploration des produits de distorsion acoustique.
Bien que de mécanismes différents, une origine cochléaire serait aussi impliquée dans les
paralysies faciales, après stapédectomie, dans le syndrome de Ramsay Hunt, mais aussi en
présence de fistule périlymphatique, ou dans le stade précoce de la maladie de Menière (Katzenell
et Segal, 2001).
Dans l’hyperacousie centrale les neurones auditifs centraux seraient le siège d’une augmentation
de gain (Jastreboff et Hazell, 1993) ; celle-ci permettrait la détection, par le système auditif, de
signaux non pertinents appartenant au bruit de fond neuronal, ce qui expliquerait l’association
fréquente de l’acouphène avec l’hyperacousie. Si pour Jastreboff (1999) comme pour Hazell et
coll, (2002), une réponse auditive anormale est bien à l’origine de l’hyperacousie, c’est une
réponse anormale des systèmes limbique et autonome qui serait responsable des phénomènes de
misophonie et de phonophobie. Niemeyer (1971) explique la concomitance, observée lors des
expositions professionnelles au bruit, entre l’abaissement du seuil d’inconfort et la stabilité
constatée du seuil du réflexe stapédien, par une adaptation centrale sans modification de la
sensibilité périphérique. De nombreux changements plastiques sont d’ailleurs rapportés après
exposition au bruit. Ce sont ces changements plastiques qui surviennent dans les centres après
exposition au bruit qui, pour Szcsepaniak et Müller (1996), seraient le support de l’hyperacousie.
Une origine centrale serait aussi impliquée dans la phonophobie associée aux attaques de
migraine et aux maux de tête d’origine cervicale, dans l’hyperacousie de la dépression, le
syndrome de William, les modifications de la pression du liquide cérébrospinal (Katzenell et
Segal, 2001).
Une des hypothèses physiopathologiques avancée consiste en un trouble du métabolisme de la
sérotonine (Marriage et Barnes, 1995). En effet, ce neurotransmetteur limiterait les entrées
auditives dans le cerveau antérieur et l’on sait qu’un dysfonctionnement sérotoninergique
sous-tendrait migraine et dépression. Une autre hypothèse (Katzenell et Segal, 2001) envisage le
rôle des opioïdes endogènes présents, avec l’acétylcholine, dans les efférences latérales dont le
rôle n’est pas encore bien précisé. Chez l’animal, ces neuropeptides augmentent la sensibilité
auditive. A noter que cette action pourrait impliquer non seulement des mécanismes centraux par
action sur le tronc cérébral mais aussi des mécanismes cochléaires par action directe sur les
neurones primaires (Sahley, Musiek et Nodar, 1996).
L’hyperacousie est aussi observée dans des troubles hormonaux tels que la maladie d’Addison,
l’hypopituitarisme et l’hyperthyroidie et dans des maladies infectieuses comme la maladie de
Lyme et la syphilis.
Conclusion
Bien que le symptôme d’hyperacousie admette de nombreuses étiologies possibles et puisse être
associé à des troubles d’origines variées, la majorité des cas rencontrés en clinique concernent bien
évidemment les expositions au bruit, aiguës ou chroniques. Nous avons cependant tenu à évoquer
la plupart des causes possibles, afin que la grande diversité des étiologies possibles soit claire dans
tous les esprits.

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2.3 Mise au point d’un système d’évaluation des acouphènes


Les échelles multidimensionnelles - les questionnaires
2.3.1 Règles d’établissement
Des outils d'évaluation ont été construits pour une évaluation multidimensionnelle de
l'acouphène, qu'il s'agisse de retentissement ou de facteurs.
Il existe des questionnaires ouverts, des questionnaires fermés, des listes d'adjectifs.
Les questionnaires fermés sont les plus utilisés car le dépouillement et leur exploitation sont plus
aisés...
La difficulté de la fabrication des questionnaires réside plus dans leur validation que dans la
création des questions. Un questionnaire doit réunir des qualités métrologiques :
● cohérence,
● validité,
● fidélité au test-retest,
● sensibilité au changement.
Schématiquement un questionnaire doit donner une information identique même si elle est
obtenue en posant des questions différentes. Il doit donner des informations recoupables par
d'autres moyens, d'autres questionnaires validés
ailleurs. Il doit donner les mêmes informations s'il Connaître les difficultés de
est présenté à deux dates différentes. Enfin il doit l'évaluation par l'outil questionnaires,
être capable de différencier des sujets différents. replace à leur juste valeur les études
La question de la longueur du questionnaire est un cliniques.
autre point clé: un nombre limité de questions assure
une bonne compliance de la part du patient pour se soumettre au questionnaire. À l'inverse un
questionnaire long fournit peut être plus d'informations mais fait plus intervenir le facteur temps.

Il peut s'agir d'un auto - questionnaire, rempli par le patient, à domicile ou dans la salle d'attente,
récupéré sans intermédiaire ou au contraire par voie postale. Le questionnaire peut être
totalement auto - administré ou aidé par le médecin.
En auto - évaluation les questionnaires proposés doivent au préalable avoir été expliqués par oral
ou par des consignes écrites précises et sans ambiguïté.
La cohérence traduit le fait que le questionnaire ou le sous groupe de questions traite bien d'un
même problème. Pour l'estimer, on examine la corrélation entre les réponses à chaque question
et un score total calculé à partir des réponses aux autres questions. Sans entrer plus avant, cette
mesure de cohérence interne est appréciée par le coefficient alpha de Cronbach, utilisé pour
donner une appréciation chiffrée du questionnaire. Une valeur de 0 montre que chaque question
est complètement indépendante des autres; un coefficient de 1 montre une parfaite cohérence du
questionnaire : les différentes questions sont bien rattachées à la même dimension sous jacente.
Les questionnaires établis pour les enquêtes d'opinion, destinés au monde commercial, ne sont
pas toujours validés. Ils recherchent et ne tiennent compte que des corrélations fortes. La
longueur des questionnaires est considérée comme moins critique, à tel point que les "bonnes
réponses" semblent être faites que quand la personne sondée est "fatiguée".
L'exploitation des questionnaires comporte une phase descriptive et une phase explicative qui
cherche à mettre en évidence des facteurs explicatifs du phénomène étudié. Là encore, on analyse
le poids de la variabilité de chaque réponse dans la variabilité totale.
L'utilisation d'un questionnaire rédigé dans une langue étrangère pose le problème de sa
traduction. Théoriquement, pour "récupérer" sa validation, la traduction puis la retraduction
dans la langue initiale doivent redonner les mêmes libellés de questions.

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2.3.1.1 Précautions
La validation d'une version longue d'un questionnaire n'est pas systématiquement extensible
à une version courte, tronquée, du même questionnaire. S'il n'existe pas d'instrument validé,
dans sa propre langue, pour étudier un point particulier, chaque question doit être cotée
comme une information séparée. Il n'est pas légitime d'additionner les scores pour donner un
score global.

2.3.1.2 Les grands thèmes des questionnaires


Ces enquêtes multi - dimensionnelles traitent des grands thèmes de l'acouphène: évaluation
de la composante anxieuse et/ou dépressive, évaluation du retentissement de l'acouphène sur
le comportement quotidien diurne et nocturne…importante en pratique quotidienne.

2.3.1.3 Les différents types de questionnaires :


Nous avons relevé, dans la littérature, 3 questionnaires validés. Il en existe d'autres, et
beaucoup d'autres non validés. L'emploi d'un questionnaire non validé ne supprime pas sa
qualité descriptive. Il permet de définir un profil moyen, de faire des comparaisons avant /
après traitement par exemple.

Tinnitus Handicap Questionnaire (THQ)


Mis au point par Kuk, Tyler, Russell et Jordan, en 1990 (57), ce questionnaire est conçu pour
mesurer le degré perçu par le patient du handicap de son acouphène.
Le THQ est un questionnaire de 27 questions. L'indice alpha de Cronbach est de 0,93. Il
contient 4 échelles: satisfaction de vie, dépression, état de santé physique, insertion sociale.
L'analyse en facteurs cherche à mettre en évidence la corrélation qui peut exister entre des
réponses aux questions et une dimension ou un facteur sous jacent. L'analyse en composantes
principales est un bon outil statistique.
Pour ce questionnaire, 3 facteurs ont été identifiés:
Le facteur 1 traduit les effets de l'acouphène sur le comportement social, émotionnel et
physique du sujet.
Le facteur 2 reflète les capacités auditives du sujet.
Le facteur 3 représente d'une part la vision que le sujet a de son acouphène, s'il va s'aggraver, si
une aide va être trouvée, et d'autre part l'appréciation qu'a l'entourage de l'acouphène.
Le premier facteur explique 42,6% de la variance totale, le second 9,4% et le troisième 5,6%.
Parallèlement à cette enquête par questions dans l'étude, le sujet subit des tests auditifs.
Une faible corrélation a été trouvée entre le score du THQ et le niveau "d'intensité" de
l'acouphène, le MML, le statut de santé.
Une corrélation est modérée (entre 0, 52 et 0,63) entre le score total du THQ et
jugement de l'intensité de l'acouphène, la satisfaction de vie, le seuil auditif moyen, la
dépression et le jugement sur l'état général de sa santé.
Le THQ reflète le statut auditif, émotionnel, physique et le comportement social des sujets
porteurs d'acouphène.
La corrélation entre les jugements subjectifs de l'intensité de l'acouphène et le handicap
suggère que l'intensité de l'acouphène pourrait être un facteur affectant le handicap perçu.
Cependant, la faible corrélation entre l'intensité de l'acouphène déterminée subjectivement
et objectivement suggère que les mesures subjectives et objectives ne s'adressent pas au
même mécanisme d'évaluation.
Enfin manifestement, le handicap perçu vis-à-vis de l'audition n'est peut être pas dû à
l'acouphène en soi, mais résulte en partie de la déficience auditive.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Subjective Tinnitus Séverity Scale STSS ( SEV en français)


Mis au point par Halford, Stewart et Andersson, en 1991 (5), il cherche à estimer la sévérité
de l'acouphène en termes d'intrusion, de dominance et de détresse.
Il groupe 16 questions. Le score total est calculé pour refléter à la fois l'intensité de
l'acouphène, la réaction émotionnelle et le degré du handicap. Un indice global de sévérité est
considéré comme ne pouvant pas être défini qu'au seul regard de l'impact de l'acouphène sur
la vie du sujet. Le coefficient de Cronbach est de 0,84.
Le STSS est corrélé différemment avec le masquage à 1 kHz et le masquage à la fréquence de
l'acouphène. Ceci nous ramène à la discussion sur la méthodologie de la mesure en matière
de masquage, mais aussi sur l'hypothèse suivante: l'expérience subjective de l'acouphène
serait plus difficile à vivre avec un environnement moins perçu du fait de la surdité et donc
moins capable de masquer l'acouphène du sujet sourd.
Le STSS est une approximation utile en clinique pour apprécier la sévérité.

Tinnitus Reaction Questionnaire (TRQ)


(souvent dénommé DET comme détresse en français)
Mis au point par Wilson (129) en 1991, il cherche à évaluer la détresse psychologique due à
l'acouphène. Il comporte 26 questions. L'échelle est en 5 points. Il s'agit de réponses
obligatoires. La procédure de calcul est une simple addition.
Le coefficient de Cronbach est de 0,96. Il semble que le TRQ soit un instrument fiable avec
une bonne cohérence interne et une stabilité dans le temps.
4 facteurs expliquent 66,4% de la variance. Le facteur 1, dans une première série de questions,
reflète la détresse générale et explique 50% de la variance. Le facteur 2 mesure l' interférence
de l'acouphène sur le travail et les loisirs. Le facteur 3 est celui de la sévérité. Il recouvre le
facteur 2 mais avec des signes de détresse plus lourds. Le facteur 4 traduit les comportements
d'évitement.
(3 questionnaires validés THQ, DET et SEV sont présentés en Annexe n°3 page : 132)

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Chapitre 3

Clinique et pratique
Pour traiter de ce chapitre, nous avons choisi de suivre grossièrement la démarche clinique de la
consultation :
◆ Identifier et évaluer l’acouphène
◆ Découvrir les circonstances de survenue
◆ Rechercher une cause
◆ Apprécier la tolérance
◆ Evaluer la personnalité du sujet
◆ Traiter des cas particuliers
◆ Proposer une conduite thérapeutique

En fait, il existe schématiquement 2 situations cliniques :


◆ Celle de l’acouphène récent pour laquelle le thérapeute n’est pas confronté aux échecs
antérieurs. Il ne faudrait pourtant pas croire que la situation est simple, tant est vrai le fait que la
diffusion de l’information, à propos par exemple de la mauvaise réputation de l’acouphène, par
Internet est importante. Le sujet vient souvent en consultation avec son savoir.
◆ Celle de l’acouphène chronique, de plus de 6 mois d’évolution où l’information joue un rôle
encore plus grand.
Dans cette situation où l’expertise est plutôt du côté du patient
-Transformer le praticien en expert
qui souffre que de celui du thérapeute qui ne souffre pas et qui
n’a accès au phénomène qu’au travers des dires du sujet, la - Eviter les hésitations
relation de confiance est délicate à établir. Il faut bien connaître - Eviter les phrases généralistes
le phénomène, anticiper et répondre à toutes les questions. telles que « on ne sait pas à quoi
Nous débuterons ce chapitre en exposant l’acouphène-maladie c’est dû » ou « on n’y peut rien »
et son profil, grâce aux résultats d’une enquête, certes un peu - mais accepter la
ancienne, mais dont les résultats restent valides. complexité clinique de
l’individu qui consulte…

3.1 Connaître l’acouphène


Au travers d'une étude collective après un recrutement particulier, par le biais d'une annonce télévisée,
370 questionnaires ont été recueillis et ont fait l'objet d'une étude clinique. "Connaître l'acouphène"
permet d'anticiper sur les réponses aux questions...
La relation entre les circonstances de
Il ressort de cette étude que l'acouphène, finalement, ne
vie, d’apparition, de renforcement, de
retentit pas systématiquement de façon dramatique sur la
diminution, voire de disparition
personnalité. En particulier, il ne génère pas d'état dépressif
certains jours de l’acouphène et
lourd. Ces données contrastent avec l'impression obtenue
l’acouphène lui-même sont rarement
au travers des consultations. Plusieurs déductions peuvent
claires. C’est une donnée à
être faites, en particulier que l'acouphène profite bien du
exposer au patient. La
temps : C’est l'habituation. capacité de diversion, le
3.1.1 Description des acouphènes comportement vis-à-vis du
L’acouphène est une sensation sonore. bruit sont des
caractéristiques à noter pour le plan
Elle peut être caractérisée comme telle :
thérapeutique.
- une fois sur 3 lors de contrariétés et d'angoisse,
- une fois sur 3 à la fatigue.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.1.2 Facteurs et circonstances le diminuant


Une fois sur 5 (22%), il y a une circonstance qui le diminue toujours. C’est le bruit ou au
contraire le repos. Une fois sur 3, il existe des circonstances qui peuvent le diminuer. C’ est alors
le repos, le travail manuel ou intellectuel qui sont cités.
3.1.3 Facteurs et circonstances l'augmentant
Il est augmenté presque une fois sur 2 (43%) par le bruit.
3.1.4 Autres facteurs et circonstances le modifiant
Peu de circonstances physiques modifient l'acouphène. Les plus souvent cités sont la position
allongée, l'exposition à un son fort, le changement d'altitude, la consommation d'alcool.

Au travers de cette enquête, et malgré la multiplicité apparente des


descriptions, il apparaît possible de définir un profil moyen de l’acouphène.
Il s’agit d’un sifflement situé dans l’oreille, nettement perceptible, évoluant
depuis plusieurs mois, sans changement. Il est pourtant assez nettement
variable en intensité et en tonalité, de façon plutôt imprévisible ou au contraire
systématique lors de contrariétés, d’angoisse ou de fatigue. Il est plus variable
chez le sujet actif. S’il diminue, c’est par les activités de diversion ou par le
repos. S’il augmente, c’est le bruit ou qui déclenche cette augmentation ou le
repos qui le fait plus percevoir. Il gêne le sommeil dans plus d’un tiers des cas,
mais la prise de sédatifs n’est pas corrélée.
Il rend nerveux et irritable une fois sur 3 mais ne gêne ni le travail ni la vie
sociale.
Il est surtout considéré comme gênant ou énervant mais très rarement
insupportable ou suicidaire. Le soulagement est plus fréquent chez le
non-retraité.
Les bruits forts sont souvent gênants.
L’hypertension artérielle et le cholestérol sont bien identifiés comme éléments
associés, souvent affectés d’un caractère causal.

3.1.5 Retentissement de l'acouphène


Cette rubrique a précisé la gêne que constitue l'acouphène

3.1.5.1 Le sommeil
37% des sujets interrogés répondent que l'acouphène gêne le sommeil. Mais ailleurs, 75%
répondent que l'acouphène ne constitue pas un vrai problème vis-à-vis du sommeil.

3.1.5.2 Irritabilité
Il rend nerveux et irritable (31% des sujets interrogés) et est gênant pour la concentration et la
communication.

3.1.5.3 Retentissement sur les activités


Il ne semble pas très gênant pour le travail et la vie sociale puisque 88% répondent non ou ne
répondent pas à la question. 5% seulement font état d'un retentissement sur ces activités.

3.1.5.4 Anxiété
L’acouphène cause rarement une angoisse considérable (14%) ou constitue toujours un
problème insurmontable (6%).

3.1.5.5 En résumé :
Il est considéré comme gênant (60%) ou énervant (37%). Les autres adjectifs cités dans
l'ordre décroissant sont les suivants :

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Adjectifs par ordre décroissant Pourcentages


obsédant 29%
déprimant 20%
harcelant 19%
angoissant 16%
inquiétant 15%
exaspérant 15%
insupportable 9%
pouvant conduire au suicide 5%

L’adjectif le plus souvent cité lors des consultations est « énervant »


3.1.6 Les causes et les facteurs favorisant des acouphènes
3.1.6.1 Les problèmes auditifs
Dans 54% des réponses, il y a une atteinte de l'audition.

3.1.6.2 Les autres problèmes


Parmi les autres problèmes par ordre décroissant sont cités le plus souvent :
● les vertiges,
● l'hypertension artérielle,
● le cholestérol.
On retiendra de ces évaluations la variabilité de l'acouphène, la tolérance relativement bonne,
l'absence d'angoisse majeure permanente, le caractère peu invalidant sur les activités, la
notion parfaitement définie de gêne qui ne fait que très rarement oublier.
On pourrait isoler, pour les patients souffrant d'acouphènes, une sorte de comportement
permanent avec :
irritabilité, besoin de remuer les jambes, mal au dos, sensation de fatigue, absence de
tranquillité intérieure ...
Dans l'ensemble, la population avec acouphènes ayant répondu aux questionnaires présente
des valeurs de vie et des aspirations très positives : sociable, s'intéressant aux autres, bon,
volontaire. Les valeurs négatives sont toujours les mêmes :
lassitude, agitation, tension, inquiétude ...
3.1.7 Evaluation du trait anxieux
Compte tenu du rôle manifeste de l'anxiété sur le retentissement de l’acouphène, il est utile de
préciser les relations entre trait anxieux et symptôme.
Schématiquement, pour ce type de questionnaire, les notes obtenues ne sont pas différentes de
celles d'un groupe de sujets sans acouphène. Entre la population de retraités et de non retraités, il
n'y a pas de différence sauf pour les questions ayant trait au calme (je suis calme, tranquille et en
paix), à la stabilité (je suis une personne stable). Les non retraités sont 34% à répondre qu'ils ne
sont jamais ni calmes, ni tranquilles, ni en paix contre 22% de retraités. Par contre ces derniers se
sentent moins en sécurité (je me sens en sécurité) que les non retraités.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.2 Identifier et évaluer les acouphènes


Nous redétaillerons les tests plus loin.
3.2.1 Evaluation de la tonie : évaluation de la hauteur de l’acouphène
L’évaluation de la tonie de l’acouphène est réalisée par une méthode d’ajustement : la fréquence
d’un son pur, unilatéral ou bilatéral, est ajustée jusqu’à ce que ce signal sonore soit considéré
comme équivalent en hauteur à la raie spectrale prédominante de l’acouphène.
En pratique, la réalisation de cette évaluation en acouphénométrie est simple. On adapte un
générateur de son pur à l’entrée externe d’un audiomètre. Le sujet ajuste lui-même la fréquence
du son généré jusqu’à ce qu’il retrouve une ressemblance avec « son » acouphène. Souvent, après
un temps bref d’exposition, il déclare que ce n’est pas le
même, vraisemblablement parce qu’il démasque les Même si les caractéristiques
autres composants spectraux de son acouphène qui psychoacoustiques (ce que le sujet
n’est finalement pas pur. De plus, le masquage d’un ressent) ne sont pas déterminantes
acouphène peut démasquer un acouphène de faible pour la prise en charge, l’attention
intensité, en controlatéral. que porte le thérapeute à la
Cette évaluation de la tonie a-t-elle une réelle utilité définition des caractéristiques
clinique ? physiques du signal perçu apparaît
• Oui si on considère que l’acouphène est relié par sa importante pour le patient qui se voit
fréquence à la zone tonale qui lui donne naissance. ainsi bien considéré comme un
Ainsi, pour un traumatisme sonore, la fréquence « patient somatique ».
masquante est dans la zone de l’encoche, plutôt en
amont du V vers les fréquences graves. L’explication est rattachée à la sur-représentation (Mac
Dermott) des zones fréquentielles limitrophes du V, au niveau central.(cf .la physiologie de
l’acouphène)
• Non si on considère que l’adaptation du générateur de bruit, en fréquence, ne recherche pas un
masquage exact de l’acouphène – même si le masquage est d’autant plus efficace qu’il se situe près
de la perte fréquentielle.
3.2.2 Evaluation de la sonie : évaluation de « l’intensité » de l’acouphène
Cette évaluation est analogue à la précédente.
Mais techniquement il faut choisir un signal sonore de fréquence adéquate.

L'intensité de l'acouphène peut être appréciée simplement, grâce à :


- une échelle visuelle analogique,
- une échelle numérique,
- une échelle verbale.
Les scores ont une valeur descriptive pour un individu donné et permettent un suivi. Il est
souhaitable d'utiliser l'échelle visuelle analogique (EVA), bien qu’elle ne donne pas d'information
sur la nature exacte de la plainte. Elle ne peut pas servir à comparer les sujets entre eux. Elle aide à
identifier les sujets nécessitant une prise en charge active, sans qu'il existe un lien direct entre le
score obtenu et le type de traitement.
Les échelles numériques, généralement graduées de 0 à 10 ou de 0 à 100 permettent d'obtenir une
mesure de l'acouphène au moment de la consultation, mais également aussi théoriquement de
façon rétrospective. Les échelles numériques peuvent être utiles en cas de difficultés de
compréhension des consignes de l'échelle visuelle analogique.
Les échelles verbales simples sont fondées sur le choix d'un adjectif pour définir l'intensité de
l'acouphène. La mesure se limite à 5 ou 6 niveaux. Elles sont généralement réservées aux
personnes ayant des difficultés à utiliser les 2 types d'échelles précédents.
La sensibilité au changement de l'échelle visuelle analogique, après traitement, est considérée
comme plus grande que celle des 2 autres échelles.
La consommation médicamenteuse n'est pas un bon indicateur pour évaluer "l'intensité de
l'acouphène", mais sur la gêne qu’il induit.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 19 - « réglette EVA ». La réglette comporte 2 faces : le « recto » montre une barre bleue de 10 centimètres avec les
légendes aux 2 extrémités. Le sujet place le curseur au niveau de la sonie de l’acouphène, ou de la gêne si c’est la question
posée. Au verso, on peut chiffrer le positionnement du curseur et comparer d’une consultation à l’autre le ressenti.

Paradoxalement on peut constater (Reid 1960) un son de fréquence plus basse que le signal
sonore externe dont la fréquence est égale à celle de l’acouphène.
Ce comportement paradoxal, s’il existe, est mis sur le compte de la présence d’un recrutement et
donc sur le compte de cette sur-représentation centrale.
En terme d’utilité, l’évaluation de la sonie permet d’expliquer au sujet la différence entre
sensation et tolérance. L’acouphène est dans la plupart des cas un signal de sonie faible de
quelques décibels par rapport au seuil auditif à la fréquence de l’acouphène.
Les courbes de Feldmann orientent vers l’étiologie ou le contexte de l’acouphène (voir plus loin).
3.2.3 Le masquage de l’acouphène.
Dès 1924, Wegel et Lane montrèrent qu’un son pur était le plus efficacement masqué par un autre
son pur de fréquence identique. Sans entrer dans les détails, ces constatations
On peut donc facilement conduisent à dire :
déterminer le niveau en fréquence • Que l’activité électrophysiologique supportant
et en intensité d’un son méconnu l’acouphène n’est pas identique à celle générée par un
en utilisant des sons masquants signal sonore extérieur.
successifs variant en fréquence et • Que le masque est plus prédictible si on tient compte
intensité, en recherchant les du niveau de pression du signal masquant.
niveaux de masque. • Que le masquage de l’acouphène ne dépend pas que
C’est la courbe d’isomasquage. Il de la physiologie cochléaire. En complément, on peut
se fait plus souvent avec des bruits aussi présenter le fait que pour un acouphène
à bande étroite. unilatéral, le niveau du son masquant homolatéral peut
En matière d’acouphène, le être plus élevé que celui de l’homologue controlatéral.
comportement mutuel acouphène
– bruit à bande étroite - n’est pas aussi systématique.
3.2.4 Recherche d'une inhibition résiduelle
L’acouphène peut disparaître pendant un délai allant de quelques secondes à quelques minutes
après exposition à un son masquant. Ce résultat n’intervient pas dans l’indication du générateur
de bruit. Il a le grand avantage de montrer le caractère non permanent de l’acouphène – même s’il
est ancien.
Au total, il faut retenir que, en matière d’acouphènes, les phénomènes de masquage sonore font
appel à des mécanismes centraux. Ils ne sont pas superposables aux phénomènes périphériques de
masque d’un son pur par un autre son pur ou par un bruit.

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Figure 19b - L' audiogramme tonal, vocal et impédancemétrie, la recherche des seuils auditifs sur le
3000 Hz et le 6000 Hz permettent parfois de retrouver un scotome, attestant d'un traumatisme sonore.

3.2.5 L'examen audiométrique et les tests psychoacoustiques.


Lorsqu'un patient se plaint d'acouphène, il est légitime et indispensable de faire un examen
audiométrique complet, sachant qu'une majorité des patients ont une baisse d'audition, qu'ils ont
parfois du mal à reconnaître.
Il faut leur montrer que ce n'est pas l'acouphène qui empêche d'entendre mais que c'est la perte
auditive qui retentit sur leur communication.
Faut-il réaliser d'autres explorations, et dans quels buts ?

3.2.5.1 L'audiométrie classique


L'audiométrie est réalisée classiquement en cabine insonorisée, elle comprend une
recherche des seuils aériens et osseux, avec masquage de l'oreille controlatérale, en tonale,
avec notamment les seuils sur le 3000 Hz et le 6000 Hz, ce qui permettra de visualiser une
éventuelle encoche (Figure 19b).
L'audiométrie vocale avec détermination du seuil d'intelligibilité, complète et corrobore les
résultats de l'audiométrie tonale liminaire, et éventuellement objective une discordance avec
les seuils en tonale, ce qui peut faire suspecter une atteinte rétrocochléaire et nécessitera alors
d'autres explorations. De même, elle revêt un intérêt particulier pour le suivi d'une surdité,
les indications et résultats prothétiques.
L'impédancemétrie et l'étude des réflexes stapédiens font partie du bilan étiologique et
permettent de repérer, puis de distinguer les patients hyperacousiques avec recrutement des
phonophobiques.
L'ORL se doit de commenter les résultats de l'audiométrie, en pointant par exemple que la
baisse des fréquences aiguës entraîne systématiquement une altération de la compréhension
notamment dans les ambiances bruyantes ( repas familiaux, cocktail party).

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Figure 20 - L'Audioscan®, il permet un balayage fréquentiel, fin, jusque 16 000 Hz.

3.2.5.2 L'audiométrie hautes fréquences


C'est l'étude des seuils auditifs aériens pour les fréquences de 8 000 à 20 000 Hz.
Elle est rarement utilisée et d'intérêt limité après 40 ans, puisqu'il n'y a pas de normes bien
établies en fonction de l'âge. Les seules indications sont la surveillance des patients à risque :
traumatisme sonore chronique, traitements ototoxiques, le patient étant son propre témoin.

3.2.5.3 L'audiométrie automatique et l'Audioscan®


Décrite en 1947 par Bekesy, le principe a été repris par Meyer-Bisch qui a créé l'Audioscan®.
Cet appareil permet une méthode subjective de détermination des seuils auditifs avec un
balayage fréquentiel (de 125 à 16 000 Hz) se faisant à niveau constant (64 valeurs par octave).
En pratique, le sujet presse sur un bouton tant qu'il entend et relâche dès qu'il n'entend plus.
Si les frontières d'une encoche sont détectées, la fréquence centrale est calculée par le
microprocesseur qui débute alors un nouveau balayage autour de cette fréquence.
Il permet donc de détecter des anomalies discrètes, telles que des encoches étroites situées
entre les fréquences normalement testées. L'interprétation est facilitée par une représentation
graphique conviviale (Figure 20).
La qualité de l'examen dépend des conditions de l'examen (bruit ambiant, habitude de la
méthode, fatigue auditive), du sujet et de son état de vigilance. L'examen est court pour un
normo-entendant (moins de 5 mn), par contre, il se prolonge avec la nécessité d'affiner les
seuils auditifs dès qu'il y a des anomalies (20 mn environ).
Les limites de la méthode sont aussi l'absence de masquage controlatéral et l'impossibilité
d'obtenir une courbe en conduction osseuse.

3.2.5.4 Les oto-émissions acoustiques


Découvertes par Kemp, elles sont le reflet du fonctionnement des cellules ciliées externes de
la cochlée.
Les oto-émissions acoustiques spontanées sont émises en l'absence de stimulation; elles ne
sont retrouvées que chez 50% des normo-entendants et leur recueil n'a pas permis de
caractériser les patients normo-entendants avec acouphènes.
Les oto-émissions acoustiques provoquées sont émises en réponse à une stimulation brève
par des clicks ou des tone bursts. Ce sont celles qui sont le plus souvent étudiées en pratique
quotidienne. Elles ne sont présentes qu'en cas de bon fonctionnement cochléaire.
De nombreux travaux scientifiques sur des animaux de laboratoire qui ont été soumis à de
fortes doses de produits ototoxiques, ont prouvé que la disparition des oto-émissions

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permettait d'affirmer l'atteinte cochléaire, et qu'elle pouvait être transitoire en cas d'arrêt
immédiat de l'intoxication. Ces travaux justifient donc un suivi grâce aux oto-émissions des
personnes à risque (travail dans le bruit,…), ou recevant des substances oto-toxiques. Elles
permettraient de dépister très précocement une toxicité cochléaire encore réversible évitant
une éventuelle perte auditive.
Les produits de distorsion (PD) correspondent à des sons émis par la cochlée en réponse à
deux stimuli qui sont des sons purs continus appelés F1 et F2. L'étude des PDA est l'analyse
du recueil du son "2F1-F2". Leur étude permettrait d'objectiver pour Jastreboff que
l'hyperacousie périphérique dont souffre certains patients avec acouphènes, soit liée à un
dysfonctionnement des cellules ciliées externes.

3.2.5.5 Les PEA


Ils n'ont d'intérêt que dans le bilan étiologique pour confirmer les seuils auditifs subjectifs et
surtout pour éliminer une pathologie rétrocochléaire, ou une pathologie neurologique
évolutive.

Figure 21 - Les différentes courbes de Feldmann.

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3.2.5.6 Les tests psychoacoustiques


Avant de se lancer dans des tests longs, il est important de faire décrire aussi précisément que
possible les acouphènes : dans l'oreille (uni, bilatéralité), dans la tête, permanents ou
intermittents, caractère variable ou non, grave ou aigu, plusieurs composantes sonores...
Certains patients évoquent un bruit familier : cigales, papier de soie, eau qui coule, cocotte
minute, grésillements, ligne haute tension, cliquetis… C'est un indicateur important qui
permettra de corroborer les résultats des différents tests psychoacoustiques.
La localisation fréquentielle se recherche en demandant au sujet d'ajuster sur une des
composantes ou sur la composante dominante de son acouphène, un son présenté en homo-
ou controlatéral. Ce son peut être un son pur, un bruit à bande étroite lorsqu'il est délivré par
un audiomètre, ou un son complexe nécessitant l'utilisation d'un générateur de bruit (simple
ou informatisé). Du fait de fréquentes erreurs d'octave, il est nécessaire de faire au moins trois
mesures, ou d'avoir recours à des procédures de choix forcé.
Dans la majorité des cas, l'acouphène est situé dans la zone de la plus grande perte auditive,
mais pas au point le plus bas, plutôt sur la pente descendante, parfois même à l'endroit de la
rupture de pente sur l'audiogramme, comme dit plus haut.
La détermination de l'intensité se fait par comparaison en utilisant soit le son déterminé
auparavant, soit en utilisant un son de fréquence grave. Il est préférable de tester l'oreille
homolatérale pour s'affranchir des problèmes de recrutement, et en utilisant une méthode
ascendante pour diminuer les effets d'une inhibition résiduelle.
Pour la majorité des auteurs, l'intensité de l'acouphène L'intensité retrouvée n'est pas
est toujours comprise entre 5 à 15 dB au-dessus du corrélée à la gêne ressentie par le
seuil auditif. patient.
La masquabilité de l'acouphène doit être recherchée
sur l'oreille homolatérale et sur celle controlatérale, grâce à un bruit blanc ou à un bruit à
bande étroite.
En utilisant des bruits à bande étroite centrée sur les fréquences testées en audiométrie
classique et en rapportant les points de masquage sur les tracés audiométriques, Feldmann a
décrit six types de courbes (Figure 21). Si sa description ne s'est pas révélée exacte pour
rapprocher l'étiologie de l'acouphène, elle nous paraît utile pour prévoir l'efficacité d'une
prothèse auditive ou un générateur de bruit.
Le test d'inhibition résiduelle peut être utilisé dans le même but. Il se recherche en masquant
l'acouphène à une intensité supérieure à 10 dB par rapport au seuil déterminé auparavant,
avec un bruit blanc, laissé pendant une minute, puis arrêt brusque. On note alors, si
l'acouphène a augmenté, diminué ou disparu et au bout de quel délai il réapparaît et dans
quelles conditions.
Ces mesures sont encore fréquemment demandées par les patients La pratique des tests
afin d'objectiver et d'identifier leur symptôme. rassure...
Elles sont de moins en moins pratiquées par les médecins car elles
sont d'une utilité très relative, et surtout très « chronophages ».
Néanmoins elles permettent d'évaluer l'intensité de l'acouphène qui ne dépasse jamais plus
de quelques dB au-dessus du seuil auditif, ce qui étonne puis rassure certains patients, et elles
permettent aussi de faire enfin entendre à leur entourage présent lors des examens, ce "qu'ils
ont en permanence dans les oreilles ou la tête".
Pour suivre un patient avec acouphène, on peut aussi évaluer l'intensité de l'acouphène et la
gêne ressentie par le patient grâce à une échelle visuelle analogique (EVA) (comme celles
utilisées pour quantifier la douleur) ou grâce à des questionnaires d'évaluation validés
(mesure du handicap ou THQ de Kuk, mesure de détresse psychologique ou TRQ de
Wilson, questionnaire de sévérité, traduits en français par Méric, et aussi questionnaire de
sensibilité auditive pour l'hyperacousie par Khalfa).

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L'acouphénométrie est-elle essentielle, indispensable ?


Jusqu'aux années 70, l'évaluation d'un acouphène était tout à fait imprécise. Grâce
à de grandes séries de patients analysées de façon rigoureuse, cette évaluation a
beaucoup progressé. Théoriquement elle devait permettre, d'une part de
constituer des groupes homogènes de malades en particulier sur le plan
pronostique, d'autre part, de favoriser une évaluation rigoureuse des traitements
proposés. Malgré la très grande quantité de patients étudiés, et les efforts
prodigués, il ne semble pas que cette acouphénométrie soit un élément
déterminant de l'évaluation du patient avant et après traitement. En effet aucun
des paramètres que nous avons étudiés ne ressort comme significatif.
Il va de soi néanmoins que le temps de l'évaluation est arrivé également pour les
thérapeutiques en matière d'acouphènes. Simplement, elle ne repose pas sur cette
technique acouphénométrique mais plus globalement sur la représentation du
phénomène et la mesure de la tolérance.
Faut-il donc continuer à réaliser ces tests ?
De façon systématique, la réponse est très vraisemblablement non, pour deux
raisons :
- la première est qu’ils ne sont pas très fiables (en particulier pour ce qui
concerne l'évaluation de la hauteur, les patients faisant fréquemment des
erreurs d'octave ; il existe également un effet d'apprentissage important),
- la seconde est qu'ils prennent beaucoup de temps.
Par contre il nous semble utile dans certains cas particuliers, et à but souvent
« pédagogique », d'effectuer ces tests qui apparaissent au patient et à son
entourage comme une mesure objective.
Enfin, l’acouphène est souvent un bruit à bande plus ou moins large, avec des raies
spectrales. Les masquages de la raie énergétiquement la plus importante
démasquent les autres.

Chacun saura pratiquer ces explorations dans le but de préciser le diagnostic, d'éliminer une
maladie grave et d'orienter la thérapeutique. Mais au-delà de ces examens, une grande
disponibilité avec empathie pour un patient souffrant d'une pathologie sans menace vitale,
mais qui retentit de façon importante sur sa qualité de vie, est nécessaire.

3.3 Circonstances de survenue de l’acouphène et étiologie


• Conserver une démarche logique
Dans une approche rapide, on confond volontiers circonstance et étiologie.
Certes, les causes de l’acouphène sont, de notoriété,
multiples. Certaines signent un mécanisme évident, La demande du sujet acouphénique
d’autres, par un raisonnement statistique de (porteur d’acouphènes) quand il vient
prévalence, sont plutôt liées à une circonstance de voir le médecin somaticien ORL est,
survenue, une association. au début du bilan, une définition de
l’étiologie.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Ainsi le schéma ci-dessous fait comprendre la démarche globale du bilan.


● Circonstances de survenue et associations pathologiques

● Causes

● Mécanismes

● Symptôme

− Le symptôme est unique, monomorphe, même s’il est décrit avec un polymorphisme apparent.
− Les mécanismes sont sans doute finalement assez peu nombreux.
− Les causes, c’est à dire les circonstances pathologiques qui donnent lieu à un mécanisme, bien
définies, sont plus nombreuses.
− Enfin les circonstances de survenue et les associations pathologiques le sont encore plus.
Prenons 3 exemples :
● Le traumatisme sonore.
Il représente la grande majorité identifiée des circonstances de survenue :
La circonstance se confond avec la cause : Le mécanisme lésionnel, même s’il est potentiellement
au moins double, -ciliaire ou au niveau des neurotransmetteurs- est identifié.
● L’hypertension artérielle (HTA)
Elle représente une association pathologique fréquente en matière d’acouphènes. Mais le
mécanisme est mal défini.
C’est par supputation que l’HTA accède au niveau de cause. L’HTA est une constatation
fréquente chez les sujets dans la seconde moitié de leur vie, tout comme l’acouphène. Aussi, par
un raisonnement statistique, dans ces situations, l’acouphène est relié à l’HTA.
Certes, des preuves sont observables : la mise en route d’un traitement puissant ou trop puissant
peut aller de pair avec l’apparition d’un acouphène.
Certes une HTA peut s’associer avec un acouphène, et la prise en charge de la maladie peut
permettre d’observer une diminution ou une disparition de l’acouphène.
• Une autre preuve est encore plus éclatante : l’hyperthyroïdie, avec son « erethisme »vasculaire
peut s’associer à un acouphène battant. Le mécanisme explicatif est le battement carotidien
dans son canal, près de la cochlée.
Cette démarche de corrélation entre circonstances de survenue – association et étiologie - doit
scientifiquement s’appuyer sur le théorème de Bayes1 qui fait comparer :
• La présence du symptôme avec la maladie et la situation où la maladie est absente.
• L’absence du symptôme dans les mêmes observations.
On doit dresser le tableau suivant :
Symptôme = présence du symptôme
Symptôme = absence du symptôme
Maladie = présence de la maladie
Maladie = absence de la maladie

Maladie Maladie

Symptôme

Symptôme

1- Calculer la probabilité qu’un événement A survienne sachant qu’un autre événement B s’est produit. On parle de
probabilité conditionnelle de A sachant B.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

2 exemples intuitifs font comprendre la relation de cause à effet.


Pour un échantillon suffisant de cas observés :

Maladie Maladie
Symptôme 90% 10%
Symptôme 10% 90%

Dans cette situation, le symptôme est à la fois spécifique et sensible de la maladie : quand le
symptôme est absent, la maladie est absente. Quand le symptôme est présent, la maladie est
présente.
A l’opposé, la situation suivante ne permet pas de conclure :

Maladie Maladie
Symptôme 50% ③ 50% ②
Symptôme 50% ④ 50% ①

Pour établir un tel tableau pour le symptôme acouphène, le travail est extrêmement difficile.
S’il est facile de remplir la case ① et la case ②, les 2 autres (③ et ④) sont méconnues, car les sujets
référents à la case ③ ne consultent pas, car pour la case ④ les circonstances – causes du symptôme -
sont nombreuses.

En pratique
1 - Il n’y a pas lieu de se laisser guider par l’habitude. L’acouphène de la 2ème moitié de la vie n’est
pas systématiquement en rapport avec un mécanisme vasculaire qui n’a pas été démontré. Le
chaînon est manquant. C’est pour ce manque de preuve que le service médical rendu est jugé
faible pour les médicaments vasculotropes dans les médications d’acouphène. Les
médicaments sont faiblement remboursés.
2 - Il n’y a pas lieu de considérer que tous les acouphènes unilatéraux sont le fait d’un neurinome
de l’acoustique et par voie de conséquence d’imposer une imagerie systématique de l’angle
ponto-cérébelleux.
3 - L’IRM « facile » reste un recours qui n’est pas à proscrire, si cela est vraiment le seul moyen de
rassurer le patient...

3.4 En clinique, utiliser les modèles, pour démontrer et expliquer


◆ Le modèle neurophysiologique de Jastreboff.
Reprenons ce qui est dit plus haut : dans ce modèle intégratif, l’acouphène
résulte de l’interaction de nombreux sous-systèmes du système nerveux. Le schéma est en
annexe,
Les voies auditives jouent un rôle dans le « développement » du signal
page : 130.
électrophysiologique de l’acouphène et dans l’émergence de l’acouphène en
tant que perception auditive tandis que les autres systèmes, entre autres les
systèmes limbique et autonome, sont responsables de sa « pérennisation » et de « gêne » qu’il induit
chez les patients.
Ce modèle très global, qui intègre les grands concepts des neurosciences cognitives (dont la notion
de « réseaux neuronaux » de traitement et celle de plasticité centrale), a pour avantage essentiel de
mettre à disposition du médecin, un modèle synthétique du phénomène de l’acouphène qui

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CLINIQUE ET PRATIQUE

permette d’expliquer aux patients, les mécanismes à l’œuvre sur lesquels il est d’ores et déjà
possible d’agir, et qui puisse être aisément compris d’eux.
Acceptant l’existence d’un générateur présenté plus haut, son activité est détectée, la sensation est
perçue. On en déduit le fonctionnement du bloc fonctionnel qui représente la fonction de
détection :
Tout signal connu et menaçant est détecté rapidement à des niveaux très faibles. La permanence
du signal entraîne le système à le détecter de mieux en mieux. Ce système de détection est piloté
par le système limbique, boîte noire de l’émotion, en connexion avec le thalamus et les sensations,
l’hippocampe et la mémoire. Ce signal menaçant est normalement perçu par le conscient,
obscurcissant les autres perceptions et aux dires des patients gênant l’audition et la
compréhension. Comme toute menace, il déclenche toutes les réactions de stress gérées par le
système nerveux autonome. Le conscient intervient en aggravant la situation : il ressasse les
croyances de non-guérison, il anticipe sur le futur. Le système risque de boucler sur lui-même
surtout si la surdité focalise l’attention sur les tentatives de meilleure compréhension de
l'interlocuteur : le sujet « tend l’oreille pour mieux comprendre »…
◆ Le modèle de l’épilepsie
Dans plusieurs situations cliniques, comme des traumatismes sonores ou des boucles
artérielles, on peut considérer que l’acouphène est un foyer épileptique sur la voie auditive.
Une approche médicamenteuse reconnaît l’efficacité des produits antiépileptiques…
◆ Le modèle de la douleur
Le modèle de la douleur a beaucoup été utilisé :
-Sa définition même peut être adaptée pour l’acouphène : c’est une expérience désagréable
sensorielle et émotionnelle, associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel.
-La douleur, comme l’acouphène, comporte 4 composantes :
Sensorielle : la tonie, la sonie…
Affective : l’émotion qu’il déclenche
Cognitive : le déclenchement, l’anticipation…
Comportementale : le « fight or flight ».
- Il existe des douleurs-symptômes et des douleurs-maladies qui surviennent en dehors de
toute stimulation nociceptive ou pour des stimulations infra-liminaires.
- Elles sont dues à une hyperstimulation, à une atteinte du contrôle, à une désafférentation ou
à une cause d’ordre psychogène.

DOULEUR

MÉCANISMES EXPÉRIENCE COMPORTEMENTS


INTÉGRATION
GÉNÉRATEURS SUBJECTIVE OBSERVABLES

EXCÈS DE STIMULATIONS SENSATION SENSATION


NOCICEPTIVES
TRANSMISSION
DÉSAFFÉRENTATION COGNITION COGNITION

CONTRÔLE
PSYCHOGÈNE ÉMOTION ÉMOTION

FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX PASSÉS/PRÉSENTS


FAMILIAUX - SOCIAUX - CULTURELS

Figure 22 - Schéma de la douleur.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

-Enfin le schéma de Melzack et Wall (Figure 23) peut aussi justifier l’emploi de la thérapie
sonore.

Les similitudes…
• 2 voies nerveuses (CCE, CCI...)
• Désafférentation (cochose
et acouphènes)
• Masquage (Thérapie sonore)
• Verbalisation
• Membre fantôme
• Voie extra-lemniscale,
système pluri-sensoriel
• ...

Figure 23 - Schéma de Melzack et Wall.

◆ La lidocaïne
Barany, en 1935, remarqua La maman qui console et le recrutement :
fortuitement que l’injection "L'enfant tomba sur les genoux. Sa mère s'empressa de
endonasale de procaïne donnait une frotter largement les 2 zones douloureuses..."
suppression momentanée de Les voies amyélimiques de la douleur sont activées par
l’acouphène. le choc - en activant les fibres myélimisées - plus
La lidocaïne est un anesthésique local rapides - du tact (frottement - recrutement par
qui est aussi utilisé pour régulariser frottement d'une large surface), s'exerce une inhibition
les troubles du rythme par effet sur les voies de la douleur par l'interneurone...
stabilisateur de la membrane. Il en
résulte un ralentissement des
échanges ioniques, ce qui diminue la vitesse de dépolarisation. La lidocaïne augmente la durée de la
période réfractaire et réduit la fréquence de décharge sur les fibres.
Si, à partir de 1978, elle a fait l’objet de plusieurs travaux prometteurs, l’impossibilité d’utiliser un
substitut oral « condamne » l’emploi chronique de la méthode. Pourquoi alors parler de ce produit ?
Au plan général, l’efficacité fréquente de la lidocaïne prouve la possibilité d’action rapide d’une
drogue sur l’acouphène..
Au plan individuel, elle est utilisée comme traitement parentéral. Si le résultat est bénéfique, elle
contribue à restaurer la confiance dans la thérapeutique.
La lidocaïne aurait pu servir de base à un système de tri des patients pour la mise en route d’un
traitement à effets secondaires dangereux (carbamazépine et risque hématologique).
Enfin, parce que le produit a une action locale qui peut être étudiée, parce qu’il existe des
modèles animaux,… la bonne connaissance du produit contraste avec la méconnaissance des
autres dont l’action est centrale.
Après administration IV, la lidocaïne est immédiatement active. Sa demi-vie est de 10 minutes.
◆ Les radicaux libres
La minceur de ce paragraphe est sans doute inversement proportionnelle à la largeur de
l’implication des radicaux libres dans le processus pathologique ou dans le vieillissement. Bien
évidemment, les molécules anti-oxydantes pourraient avoir un rôle -de prévention- à condition
d’être administrées « au bon moment ». Nous renvoyons le lecteur à des lectures spécifiques.
◆ Le modèle de Tonndorf a été présenté précédemment

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.5 Les situations de désafférentation :


3.5.1 la section du VIII cochléaire - La neurotomie cochléaire et vestibulaire
Cette intervention n’est plus et ne doit plus être pratiquée, il est pourtant utile au plan théorique
de se pencher sur les résultats qu’elle apportait.
Le résultat immédiat sur les acouphènes était bon mais se dégradait progressivement au fil des
mois. L’existence d’une disparition puis d’une réapparition des acouphènes fait évoquer
l’existence de système de filtres placés à différents niveaux des voies auditives.
Cette méthode avait, en tous cas, la "vertu" malheureuse d’interdire ensuite le masquage
sonore ou électrique de l’acouphène.
3.5.2 Le neurinome de l’acoustique et les boucles artérielles
Si la grande majorité des patients porteurs de neurinomes de l’acoustique (Figure 24a) présentent
des acouphènes au moment de leur diagnostic, tous les acouphènes ne sont pas en rapport avec un
neurinome. Ceci nous renvoie à la discussion probabiliste.
Le mécanisme pourrait être double :
La surdité et aussi un mécanisme de fausses synapses : les ephapses (Figure 24b). Tout se passerait
comme un « court-circuit » interaxonal lors de l’atteinte de la myéline. "L'usure" pourrait être
déclenchée par la proximité vasculaire (boucles artérielles).

Figure 24a - Figure 24b - A propos du spasme de l'hémiface, les


P. M. Bonfils et J.M. Chevalier "Anatomie ORL" éphapses
Médecine-SciencesFlammarion, Paris 1998. R. Charachon et coll. "Le spasme hémifacial"
Rapport à la Société Française d'ORL, 1997.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Recherche de causes générales de l’acouphène.


Quelles recherches faut-il faire dans le cadre de ces acouphènes
(HTA, diabète, cholestérol etc.) ?
Nous avons vu dans le chapitre consacré à « acouphène symptôme et acouphène maladie »
l'importance de l'attention à
accorder à la recherche Inversement, il n’apparaît pas raisonnable de rechercher chez
étiologique. Une fois encore tout patient se présentant pour un acouphène une
l'interrogatoire du patient est hypertension labile, une atteinte endocrinienne, rénale, un
tout à fait fondamental y syndrome d'apnée du sommeil, un reflux
compris pour ce qui concerne gastro-oesophagien ou une hypertension intracrânienne.
Ainsi, dans la pratique quotidienne, en dehors de
ses pathologies non
circonstances particulières à la fois historiques et cliniques
otologiques et ses antécédents
faisant penser à une étiologie otologique, seule l’expérience
lointains (traumatisme cervical
permet de limiter les investigations à ce qui sera utile.
ou acoustique remontant à
En particulier, il apparaît clairement que, en dehors de l'effet
plusieurs années, péridurale,
placebo, la découverte et la correction d'une
chirurgie squelettique, etc.).
hypercholestérolémie, d'un diabète, d’ un reflux
On évaluera alors le caractère gastro-oesophagien, n’ont pas une incidence notable sur
vraisemblable ou non du lien l'évolution d'un acouphène concomitant. La question est
entre ces antécédents et la donc de savoir où s'arrête le rôle de l'ORL et où commence
présence de l'acouphène. (ou continue) celui du médecin traitant garant de la bonne
Il faut naturellement avoir santé de son patient sur le plan général.
constamment à l'esprit le
groupe témoin des personnes qui ont le même antécédent que notre patient sans présenter
d'acouphènes, la discussion probaliste est toujours de mise...

3.7 La recherche, en pratique, d’une cause à l’acouphène


C’est un temps essentiel du bilan : le sujet porteur d’un acouphène vient consulter pour être
soulagé, mais aussi pour faire un « bilan de santé ». La réponse du « somaticien » ORL ne doit jamais
être celle du psychothérapeute qu’il n’est pas, même lorsque la plainte psychologique sous-jacente
lui apparaît clairement.
Les causes / circonstances / associations (voir plus haut) en matière d’acouphènes sont nombreuses.
Cette phase du bilan est exigeante pour le praticien qui doit observer quelques règles :
◆ Eviter les phrases qui génèrent un défaut de confiance telles que :
– « vous savez, on ne sait pas à quoi c’est dû… »,
– « qu’importe l’étiologie, car l’acouphène au bout d’un temps d’évolution (6 mois
correspondant au passage de l’acouphène aigu à l’acouphène chronique …) s’est centralisé ».
Même si cette assertion n’est pas à rejeter, nous avons tous constaté des acouphènes
chroniques qui disparaissent, et les sujets qui ne consultent plus peuvent être des sujets dont
l’acouphène a disparu.
◆ Chercher une cause locale quand l’acouphène est unilatéral.
◆ S’appuyer sur les caractéristiques sonores de l’acouphène pour orienter sa cible de recherche :
– l’acouphène aigu (sifflement) n’a sans doute aucune valeur localisatrice. La définition exacte
de sa tonie, c’est à dire de sa hauteur, a peu d’intérêt diagnostique même s’il est utile, pour un
éventuel masquage, d’évaluer son domaine fréquentiel.
– l’acouphène battant n’est pas à relier systématiquement à une anomalie vasculaire
« grossière » type fistule artério-veineuse. Il peut s’agir d’un dysfonctionnement de l’oreille
interne : témoin l’acouphène de l’otospongiose. Quoiqu’il en soit l’examen d’un sujet
acouphénique doit comporter un examen stéthacoustique, ne serait-ce que pour éliminer un
souffle vasculaire transmis, diagnostiqué avec ou sans examen Doppler.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

– l’acouphène de tonalité grave (bourdonnement) oriente vers une cible périphérique, c’est à
dire oreille moyenne ou oreille interne.
● Pour l’oreille moyenne, le sujet ajoutera souvent des compléments de définition comme

grésillements, froissement, voire comme un bruit déclenché par un insecte ! Il y a lieu


alors de rechercher les manœuvres qui amplifient ou limitent l’acouphène, comme les
mouvements du cou ou de la tête1, de la mâchoire, reliant l’acouphène aux muscles de
l’oreilles moyenne et à tout l’équipement musculaire digastrique de la région.
Malheureusement, la section du muscle du marteau, qui a pu être pratiquée par certains,
n’ a pas abouti à leur disparition.
● Pour l’oreille interne, on parle de Maladie de Ménière ou d’otospongiose par exemple.

● Les deux localisations ont un point commun : le dysfonctionnement de l’analyseur

fréquentiel qu'est la membrane basilaire, et dans ces conditions, il est logique de


retrouver un bruit de tonalité grave compte tenu des répartitions fréquentielles sur la
membrane basilaire : il y a autant de cellules sensorielles dans la partie dédiée de 16Hz à
1000 Hz, que de cellules dans la partie 1000 à 16000 Hz et la sonie (sensation) des sons
graves est plus importante que celle des sons aigus.
Enfin les bourdonnements peuvent être le fait d’une audition distordue avec une perte
importante de sensibilité sur les aigus. Dans cette situation, il s’agit de pseudo
acouphènes : le sujet perçoit beaucoup mieux tous les sons graves que les sons aigus.
– l’acouphène variable dans le temps.
Au delà de pointer sur une cause précise comme sur un dysfonctionnement variable dans le temps
de la périphérie (maladie de Ménière), la variabilité de l’acouphène le teinte d’une composante très
gênante : celle de la non prédiction de la gêne d’un jour à l’autre. Le sujet s’interroge sans relâche sur
les corrélations possibles entre son mode de vie et l’acouphène. Pour ces cas, on peut sans doute
penser que l’habituation spontanée est plus délicate à obtenir :
d’une part parce que le bruit est variable,

d’autre part parce que ces interrogations focalisent l’attention du sujet sur son

symptôme.
Il y a lieu, après un bref tour d’horizon souvent improductif, l’aidant à établir des corrections (prise
d’excitants, comportements alimentaires…) de le dissuader dans cette recherche pour au moins
éviter d’apporter autant d’introspection à son symptôme.
Il est essentiel de garder en mémoire les causes / associations / circonstances de survenue,
d’occurrence statistiquement faible. Les grandes causes ou mécanismes d’acouphène sont
rapidement focalisées par la question suivante : « d’après vous, à quoi cet acouphène est dû ? » Elle
économise un temps précieux ; Ainsi seront servis sur un « plateau » :
Les mécanismes « environnementaux » :
● Le traumatisme sonore
● L’ototoxicité
Les pathologies identifiées de l’oreille :
● Maladies ou chirurgie
– voire les relations avec la vie psychique
En l’absence de cette aide précieuse, c’est au praticien de relancer les étiologies ou mécanismes dits
secondaires : sa réactivité, c’est-à-dire sa capacité à évoquer d’autres causes / circonstances /
mécanismes, le place dans une position d’expert qui pèse lourd dans la relation médecin-malade.
Le tableau de la page suivante résume l’observation plus ou moins courante d’acouphènes
dans différentes circonstances. Même si la preuve de la relation ne peut pas être apportée,
même si l’action thérapeutique est limitée, il n’empêche, redisons-le, que cette enquête
rassure le sujet, écartant par exemple le spectre de la tumeur ou de la maladie vasculaire
généralisée.

1- Mais ceci nous renvoie aussi à l'étude de Lockwood présentée en page 49.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

relation acouphènes
Classification clinique mécanisme
/ clinique
mécanisme ciliaire, ototoxicité du
Traumatismes sonores certaine
neurotransmetteur
Otospongiose certaine au moins double: membranaire, cellulaire
modifications de la statique caténaire,
Catarrhe tubaire, otite séreuse, labyrinthite probable
passage transplatinaire
implication ligamentaire - spasme
Suspicion de dysfonctionnement de l’ATM possible
musculaire
commotion labyrinthique, fuite
Traumatisme crânien certaine
périlymphatique
Surdité brusque certaine non établi
mécanisme inflammatoire, de surcharge,
Anomalies relevant de la médecine interne possible
troubles de la coagulation
Mauvaise nouvelle, deuils possible non établi
Hypo- ou hypertension artérielle possible non établi
découplage des cils de la membrane
Oreille interne certaine
tectoriale
Etiologie cervicale possible non établi
Acouphène postopératoire otologique fréquent non établi
Audition normale fréquente atteinte de sites post-synaptiques
Dépression possible non établi
Suspicion de fuite périlymphatique certaine non établi
Ototoxicité certaine non établi
Pathologie identifiée de l’oreille moyenne probable non établi
Acouphène en position couchée (sieste) probable non établi
Boucles V/VIII hypothétique non établi
Neurinome du VIII certaine non établi
Problèmes psychologiques en dehors de la
possible non établi
dépression
Syndrome d’apnée du sommeil SAS hypothétique non établi
Sténose du conduit externe, exostoses fréquente synalgies ?
Implication des muscles de l’oreille moyenne certaine myoclonies
Problèmes neurologiques complexes probable variés
Migraine probable vasoconstriction de l’oreille interne
En rapport avec le cycle hormonal possible non établi
certain, acouphène
Souffle carotidien perçu mécanique
objectif
Reflux gastro-oesophagien possible non établi
Hypertension intracrânienne possible non établi

Tableau 1 : Classification des étiologies générales de l’acouphène.


Dans ce tableau, les cases remplies sont moins nombreuses que les cases vides… Il faut aborder la classification par
"groupe homogène d'acouphènes"...

Parmi ces causes dites mineures, arrêtons nous sur :


- l’acouphène dit « de la sieste » : c’est l’acouphène parfaitement identifié par le sujet,
survenant ou se renforçant après une sieste post-prandiale. Quel mécanisme imaginer dans
ce cas ? :
-un trouble vasculaire d’hypo ou hypertension,
-un trouble cervico-céphalique,

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-une anomalie de la pression du liquide céphalo-rachidien,


-un rôle de la digestion,

Le débat reste ouvert avec des moyens d’analyse limités.
- l’acouphène en relation avec une dysfonction de l’articulation temporo-mandibulaire
(ATM).
Pour certains auteurs, c’est LA cause principale (ou au moins fréquente) des acouphènes. Par
raisonnement statistique, le dysfonctionnement de l’ATM après un certain âge étant
fréquent, tout comme l’est l’acouphène, la relation de cause à effet s’établit spontanément.
Sur le plan explicatif, on évoque les relations anatomiques musculo ligamentaires entre
l’ATM et l’oreille moyenne.
Au plan clinique, on constate :
- un acouphène plutôt unilatéral, plutôt de tonalité grave,
- un syndrome qui nous focalise sur l’ATM avec :
– douleurs, craquements, ressaut, sensibilité à la pression (doigts introduits dans le
conduit),
– douleurs à la palpation des muscles régionaux péri-auriculaires,
– trouble de l’articulé dentaire avec un plan d’occlusion anormal.
On rapporte des soins dentaires responsables potentiels d’une surélévation à un endroit
quelconque des arcades dentaires.
– un bruxisme
La suspicion de cette cause doit orienter le sujet vers un occluso-dontiste qui prendra en
charge le trouble par un réalignement des réparations, la mise en place d’une gouttière, la
nuit.
Malheureusement, les traitements classiques de « l’arthrose » (anti-inflammatoires et
myorelaxants) sont peu efficaces.

3.8 Apprécier la tolérance :


- en posant la bonne question,
- en évaluant la relation entre stress et acouphènes.
3.8.1 Poser la bonne question : gêne ou inquiétude ?
La réponse à la question : « ça vous inquiète ou ça vous gêne ? » oriente grandement la prise en
charge.
L’inquiétude : Pour un acouphène chronique, on l’a vu, le patient témoigne d’une certaine
« sérénité somatique étiologique ». Son inquiétude résiduelle concerne l’évolution de
l’acouphène lorsqu’il a reçu des informations alarmistes1.
La gêne est variable d’un sujet à l’autre : du sujet porteur d’un acouphène ancien qui consulte
pour savoir « s’il y a du neuf » en matière de médicament au patient hyperacousique dont
l’acouphène obsédant induit des troubles du comportement, la majorité des patients qualifient
l’acouphène « d’énervant ».
Pour évaluer la tolérance, une question est utile : « finalement qu’est ce que cet acouphène vous
empêche de faire ? ». Souvent, la réponse, après réflexion, est « rien ». C’est aussi sur cette base que
va se construire le discours de la prise en charge.
L’acouphène peut constituer une gêne quasi permanente, une véritable obsession, on l’a vu. Plus
fréquemment il ne constitue une gêne qu’à certains moments (endormissement, bruit, silence)
qu’il faut faire préciser.

1- "L'acouphène rend fou", "mène au suicide"… ce genre d’informations se trouvent sur des sites Internet ou dans le
discours de certains confrères…

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« Considérez-vous que depuis sa survenue, l’acouphène est en aggravation, stable, en diminution » ?


La réponse permet d’évaluer le début de l’habituation, les variations de la tolérance en fonction de
la vie psychique. Bien sûr, ce n’est pas en une seule et unique consultation que le bilan exact de la
tolérance est fait.
L’évaluation du trait anxieux : Compte tenu du rôle manifeste de l’anxiété sur le retentissement
de l’acouphène, il est utile de préciser les relations entre trait anxieux et acouphène.
3.8.2 Le stress, l’anxiété, l’acouphène et plus généralement les troubles
cochléo-vestibulaires
En pratique courante, l’ORL est plutôt intéressé par la pathologie de l’oreille et sa réparation que
par les maladies dites fonctionnelles, qui font souvent figure d’épouvantail.
Pourtant ces pathologies renvoient le praticien à quelques questions centrales :
L’environnement psychosocial, les événements de la vie, le stress interviennent-ils sur notre
santé, en particulier sur « nos » symptômes cochléo-vestibulaires ?
Au-delà d’une impression clinique, avec parfois (souvent ?) une personnalité particulière des
patients atteints de maladie de Ménière, d’acouphènes… existe-t-il des données scientifiques ?
Quels sont les mécanismes sous-jacents permettant de comprendre comment certaines situations
de la vie peuvent être un facteur de pathologie ou au moins de symptômes ?
Quelles conclusions en tirer pour la prise en charge ?
L’opinion publique et encore trop de médecins associent psychosomatique à simulation ou à
pathologie psychiatrique. Alors que le symptôme est souvent le seul moyen qu’a trouvé un
individu pour s’exprimer.
En simplifiant, on peut dire qu’à une structure mentale donnée correspondra un symptôme
donné lors de l’émergence de la maladie :
Un individu équilibré, face à une problématique difficile réagit par la recherche d’une solution
logique et adaptée. Selon sa structure mentale, acquise au cours de son développement, le patient
dans une même situation (angoisse, souci, deuil, conflit) réagit par un signe de la lignée
névrotique (anxiété, dépression réactionnelle) ou par un signe de la lignée psychotique
(hallucination, délire).

3.8.2.1 Le statut particulier des symptômes cochléo-vestibulaires


Les symptômes cochléo-vestibulaires relèvent des fonctions de relation.
Surdité et hyperacousie, acouphènes, vertiges et instabilité sont des symptômes qui affectent
le mode sensoriel de connaissance du monde extérieur.
Le patient est à la fois le sujet, le seul observateur, la victime, et parfois, lorsque la pathologie lui
apporte un bénéfice secondaire, le seul bénéficiaire.

3.8.2.2 Statut des symptômes : le handicap induit


Les éléments fonctionnels de ces symptômes sont invalidants lorsqu’ils affectent l’aptitude à
un mouvement harmonieux ou à une audition automatique, irrépressible et sans acouphène.
Les éléments cognitifs de ces symptômes sont parfois difficilement objectivables, ainsi le
sentiment de pénalisation qu’apporte le diagnostic. Le patient, surtout s’il est jeune, se sent
atteint dans la perception de sa propre santé, dans son image de soi. Ces vertiges, cette surdité
ont mauvaise presse, ils sont associés au vieillissement et engendrent un sentiment d’injustice.
Surtout lorsqu’ils sont inexpliqués, ils provoquent l’anxiété, la revendication, l’anticipation
de leur apparition. Le patient entre dans un processus de deuil de sa santé. Très souvent, il
s’isole et peut entrer en dépression.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.8.2.3 Exemple concret du statut des symptômes : la surdité


Différentes caractéristiques sont à prendre en compte dans « l’échelle » du handicap auditif :
- L’atténuation ou diminution de l’audibilité des sons ;
- Les distorsions non décrites par l’audiogramme tonal et mal par l’audiométrie vocale
classique.
– Les distorsions dans le domaine temporel, les distorsions d’intensité qui induisent
recrutement et hyperacousie.
– Les distorsions de fréquence qui perturbent la compréhension de la parole dans des
situations plus ou moins bonnes au plan phonique.
La surdité, lorsqu’elle constitue un obstacle à la communication ou à l’hédonisme de l’audition, entraîne des
troubles du comportement.
L’imprévisibilité de la surdité fluctuante donne un sentiment d’impuissance vis-à-vis des actions de
prévention.
La mauvaise opinion qu’ont les patients des possibilités de réparation et en particulier des prothèses
auditives accentue encore le stigmate de vieillissement que représente la surdité.

3.8.2.4 Statut des symptômes: les acouphènes


L’évaluation de la sévérité de l’acouphène ne peut être faite que par le patient, elle ne peut être
que subjective. Elle est indépendante de ses caractéristiques physiques (psycho-acoustiques).
Il n’y a pas de corrélation entre l’intensité de l’acouphène et sa sonie.
Bien que la gêne résulte plus de la perte auditive, des difficultés à entendre et à écouter, les patients
surestiment très souvent l’impact de l’acouphène sur leur vie quotidienne. Et il est manifeste que les
circonstances dans lesquelles l’acouphène est apparu influent sur sa tolérance.

3.8.2.5 Statut des symptômes : les vertiges


Les vertiges sont un phénomène conscient, la perte d’équilibre évoque l’ébriété.(Figure 25).
La situation est le résultat d'un conflit. L'imprévisibilité de la survenue du vertige déclenche l'anxiété
au quotidien.

Figure 25 - Schéma des vertiges.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.8.2.6 Les syndromes cochléo-vetibulaires


Ils conjuguent les conséquences et le retentissement des 3 symptômes : surdité, acouphènes,
vertiges.
3.8.3 Qu’est-ce que le stress ?
Le stress en théorie :

Le stress (du latin "stringere" : mettre en tension ) est une réponse physiologique de l'organisme,
face à une situation non programmée.
L’ensemble des réactions ou syndrome d'adaptation est commun à tout facteur de sollicitation et
en même temps propre à chaque individu. Chacun évalue la situation en fonction de la
perception qu'il a d’un événement et de sa capacité à y faire face.
● Le stress n’est pas une notion récente :

En 1884, Stiller observe des ulcères gastriques chez des financiers ruinés et, dès 1929 Cannon
démontre la libération d'adrénaline par les médullosurrénales dans le stress. Il propose la mesure
et la quantification des modifications hormonales, créant ainsi la biologie de la
neuroendocrinologie.
En 1936, Seyle décrit le « syndrome général d’adaptation » qui se déroule en 3 phases :
● La phase d'alarme,

● La phase de résistance «fight or flight »,

● La phase de détente et de fatigue avant le retour au métabolisme habituel

3.8.4 Mécanismes physiologiques du stress


Il y a deux systèmes à la base de la réaction biologique du stress : un système neuronal câblé sur
lequel la transmission des informations est très rapide, et un système neuroendocrinien
hormonal plus lent.
A la phase d’alarme, le sujet mis en contact avec la situation stressante développe rapidement une
réaction de stress destinée à permettre une adaptation rapide à la demande soudaine de
l’environnement et une mobilisation rapide de ses ressources. La réaction biologique du stress
facilite l’action rapide, augmente la résistance physique.
Si la situation de stress se prolonge, les réactions aiguës de la phase d’alarme deviennent inutiles.
C’est la phase de résistance. Pour « se battre » ou pour « fuir », il faut « tenir la distance » en
fonctionnant à l’économie. Les substances libérées pour l’endurance facilitent l’action musculaire
et la vigilance (augmentation de la tension artérielle et redistribution sanguine).
Dans la plupart des situations modernes le « fight or flight » est impossible.
Pour le citadin par exemple les réactions musculaires sont normalement inutiles pour répondre
au stress.
Si la phase de détente ne survient pas, le stress prolongé a des effets toxiques qui vont de la fatigue
chronique aux lésions de l’hippocampe, siège de la mémoire et de la régulation des émotions
(stress post-traumatique, cellule de déchoquage).
3.8.5 La dénomination du stress est ambiguë
Le mot stress qu’on utilise au quotidien dénomme en fait le stress chronique, mais aussi :
- les causes de stress ou stresseurs,
- les réactions au stress,
- les conséquences du stress.

3.8.5.1 Le stress chronique


C’est le stress chronique qui est essentiellement pathogène. Tous les mécanismes du stress
(stimulation et hormones) peuvent avoir des actions somatiques.
La liste des affections autres que cochléo-vestibulaires pour lesquelles la relation au stress a
été établie est longue :

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CLINIQUE ET PRATIQUE

●Accélération du vieillissement, déficit nutritionnel, déficit immunitaire, ulcères


d'estomac, problèmes gynécologiques, problèmes de santé mentale.
● Asthme, psoriasis, arthrite rhumatoïde, syndrome de fatigue chronique, maladie de

Crohn, fibromyalgie, migraine, colite ulcéreuse.


● Aggravation de l’hypertension, des maladies cardiovasculaires, du diabète de type II.

Comment imaginer que l’oreille interne n’y soit pas également sensible alors que :
● Les patients décrivent des acouphènes qui augmentent avec le stress.

● L’augmentation du tonus sympathique dans la maladie de Ménière a été évoquée dès

le début des années 1950.


Les données montrent que l’oreille interne est exposée et très sensible au tonus sympathique
et à l’activité neuro-endocrine.
La relation entre stress et immunité pourrait expliquer certaines surdités brusques.

3.8.5.2 Action - Réaction


Les sites d’action des médiateurs :
Des signaux émotionnels activent des sites, un peu à l’image de l’antigène (le signal) et de
l’anticorps (la réponse émotionnelle).
L’amygdale constitue une interface importante entre les stimuli émotionnels visuels et
auditifs et le déclenchement des émotions.
Les stimuli émotionnellement compétents se détectent très vite avant même l’attention
sélective. Les voies sont parallèles.
L’ORL s’intéressera surtout aux connexions entre le thalamus et l’amygdale.

3.8.5.3 Retour sur quelques définitions Le stress n’est pas une maladie, alors que l’anxiété
et la dépression sont des pathologies.
Si les signes dont on se plaint n’existent qu’en
3.8.5.4 Le bon et le mauvais stress : présence du stresseur, il s’agit de stress.
L’anxiété nous pousse en avant, nous Si les symptômes persistent au-delà de la présence
permet de faire plus, multiplie nos du stresseur, il s’agit d’anxiété.
capacités par la mobilisation de nos Le stressé et l’anxieux sont réactifs, le déprimé est
ressources. Elle nous donne l’énergie moins capable d’action.
nécessaire à la vie, de même que
ressentir des émotions est normal et nécessaire.
Mais c’est une énergie à maîtriser.
Lorsque les stresseurs sont importants et répétés, leur succession entraîne l’anxiété puis la
dépression. (le burn-out anglo-saxon).

3.8.5.5 Les stresseurs


Les évènements de la vie, gais ou tristes, importants ou apparemment minimes et les
changements matériels ou affectifs qu’ils entraînent sont des stresseurs.
Le décès d’un proche, un divorce, la perte d’emploi, mais aussi une naissance, un
déménagement sont des stresseurs connus. A titre d’exemple, sur l’échelle de mesure du
stress de Holmes et Rahe la mort d’un conjoint est cotée 100, un mariage 50 et le fait d’avoir
une amende ou une contravention est côté 11.
La frustration est un puissant stresseur :
L’environnement pénible, les « tracas » Cet effet cumulatif mène parfois à
quotidiens prennent de plus en plus l’embrasement : on développe alors des
d’importance. réactions de plus en plus violentes aux
stresseurs de moins en moins importants.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.8.5.6 Conséquences psychologiques et comportementales de la réaction de stress


Le stress provoque des réactions biologiques du stress mais aussi bien sûr des réactions
psychologiques. Le sujet stressé va sélectionner les signaux de menace contrairement aux
signaux de sécurité auxquels il ne va pas s’attarder.
Il développe une sensibilité accrue à la menace : on devient plus sensible à tout ce qui peut
être une menace potentielle. Plus le niveau de stress est élevé plus on est sensible aux signaux
de danger.
3.8.6 Le stress déclenche le symptôme :
◆ Relation 1 : Le stress est responsable du symptôme acouphène :
Le symptôme n’est idiopathique qu’en apparence.
Hypothèses neurophysiologiques :
L’oreille interne normale est soumise et très réceptive au niveau d’activité du système
sympathique et de l’activité neuro-endocrine.
Une communication bidirectionnelle existe entre le système neuroendocrinien et le système
immunitaire (comme l’a montré K.C. Horner), ce qui fournit une explication aux surdités
brusques.

◆ Relation 2 : Le symptôme acouphène est responsable du stress…


L’acouphène et le stress

3.8.6.1 Anticipation

Le phénomène de l’anticipation du symptôme est bien illustré par la parabole de la


nuit passée dans une vieille maison inconnue. Si la maison vous a été décrite comme
un havre de paix, vous apprécierez même les petits craquements du parquet et vous
irez sans hésitation refermer le volet qui bat. Si la maison est réputée hantée, vous
resterez en alerte, à guetter le moindre bruit. Lorsqu’il se produira, qui sait si vous
ne paniquerez pas ?

Ainsi, un patient qui craint la reprise de vertiges adopte souvent une manière de marcher
elle-même génératrice d’instabilité.
La peur d’un renforcement de l’acouphène augmente l’attention portée à son apparition.
La peur des circonstances favorisantes conduit à des conduites d’évitement, et parfois à
l’installation d’une névrose d’angoisse. Les accidents névrotiques sont constitués par les
manifestations d’une angoisse permanente où le sujet est dans l’attente d’un danger.
Pour certains patients, la peur du retour de l’acouphène est accompagnée d’une peur de perte
de contrôle de la raison, d’être conduits au suicide.

3.8.6.2 Acouphènes et conditionnement


La détection de l’acouphène implique l’extraction du signal hors du bruit de fond.
Il est ensuite évalué et catégorisé : à ce signal sont associées des traces mnésiques, des aspects
psychoacoustiques et des caractéristiques contextuelles d’apparition.
Si le signal est nouveau et/ou permanent et/ou alarmant (déclenchant une émotion), il est
responsable de remaniements plastiques et de modifications dans le traitement du signal
auditif : augmentation du gain, augmentation de la probabilité de sa détection.
Le défaut d’habituation et la non-tolérance amènent au conditionnement :
– Initialement, le signal acouphène est neutre, non pertinent. Mais il est conditionné
par des réactions aversives (anxiété, peur, incompréhension, croyances…)

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CLINIQUE ET PRATIQUE

– Le conditionnement associé à la présentation d’un signal neutre conduit à


l’intolérance.

3.9 La pratique des relations médecin/malade


Devant une pathologie fonctionnelle, il est important de ne pas passer à côté d’une pathologie
somatique rare ou atypique. Mais il ne faut pas non plus accroître l’anxiété du patient en multipliant
les examens.
Il faut garder à l’idée que les symptômes cochléovestibulaires peuvent signer un trouble
psychiatrique.
Quoiqu’il en soit, il est important d’écouter le patient, d’entendre sa vérité.
◆ La double évaluation :
Afin de pouvoir mettre une thérapeutique en route, il importe de faire un bilan avec le patient. Il
faut :
Évaluer le stresseur, décrire et mesurer la menace qu’il représente.

Évaluer ses capacités à faire face, répertorier de quels moyens dispose l’individu pour

affronter correctement le stresseur.
A aucun moment, le thérapeute ne peut « lâcher » le patient en lui conseillant de « vivre avec » !
Dans cette évaluation, si le stresseur du symptôme cochléo-vestibulaire est facile à évaluer, la
capacité et les moyens d’y faire face sont plus limités.
◆ Psychopathologie et symptômes somatiques :
La somatisation peut être un mode de défense psychologique, pour celui qui ne peut exprimer par
des mots.
La somatisation peut être une amplification de la détresse pour un appel (inconscient) à l’aide.
La somatisation peut être une demande (inconsciente) de soin, de maternage.
La somatisation peut être une conséquence du recours au système de santé. Pour rendre sa
demande d’aide acceptable, le sujet la « médicalise ».

3.10 Evaluer la personnalité du sujet


Pourquoi certains patients arrivent-ils en quelques mois à gérer leur acouphène sans trop de
difficulté tandis que d’autres n’y arrivent pas en dépit des années qui passent? Les professionnels de
l’acouphène s’interrogent depuis longtemps sur ce point. Si l’on pouvait y répondre avec certitude,
les sujets réfractaires à l’habituation pourraient être identifiés précocement et soumis à un
protocole adapté.
◆ L’acouphène survient-il sur une personnalité particulière ?
Une hypothèse testée est celle d’un profil de personnalité particulier prédisposant à l’acouphène.
Cependant, rares sont les études qui ont utilisé des outils adaptés pour aboutir à un réel diagnostic
psychiatrique. La plupart sont fondées sur des questionnaires ou des impressions cliniques plus que
sur des interviews psychiatriques structurées ou des outils adoptant les critères du DSM (American
Psychiatric Association). Ainsi, peu de travaux apportent vraiment des arguments sérieux quant à
l’existence de désordres psychiatriques chez les acouphéniques. De plus, ceux qui sont disponibles
ne concernent que de petites populations de patients dont la sélection non randomisée est biaisée.
Selon ces études, toutes réalisées à l’étranger, 60 à 78% des sujets ont présenté des troubles
dépressifs au cours de leur vie et 40% à 60% traversent un épisode dépressif au moment de
l’examen. La prévalence des troubles anxieux est aussi importante, voisine de 45%, mais il est à
noter que la majorité (69%) de ces sujets anxieux présentent une comorbidité de dépression. Les
figures ci-jointes dues à Goebel (1998) illustrent bien ces différentes observations.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 26 - (d’après G. Goebel, 1998) : Schéma illustrant la prévalence des affections psychiatriques
(DSMIII-R, selon le Munich Diagnostic CheckLists) chez les patients présentant un acouphène chronique
invalidant.

Quoique les troubles psychiatriques comme la dépression et l’anxiété soient fréquemment trouvés
chez les acouphéniques, d’autres affections peuvent aussi être observées : trouble obsessionnel
compulsif, addictions diverses…
Le fait que beaucoup de sujets porteurs d’acouphènes présentent des perturbations psychiatriques
constitue une observation importante ; cependant, il reste à préciser le lien temporel entre
l’apparition de l’acouphène et celle de ces troubles : préexistent-ils ou non à l’acouphène ?

Figure 27 - (d’après G. Goebel, 1998): Schéma illustrant la comorbidité de troubles psychologiques chez
les patients présentant un acouphène chronique invalidant.

◆ L’acouphène, peut-il modifier la personnalité ?


Une étude réalisée dans une clinique spécialisée des environs de Munich montre que les patients
hospitalisés pour troubles psychiatriques associés à leurs acouphènes avaient le plus souvent déjà
manifesté des désordres psychiatriques avant l’hospitalisation et que, dans ce cas, il s’agissait
souvent d’un trouble dépressif sérieux en association avec d’autres psychopathologies.
La personnalité des patients pourrait donc influer sur leur comportement face à l’acouphène. Les
résultats d’autres études concordent avec cette vue. Ainsi, les patients qui présentent un risque élevé
de développer un acouphène sévère et chronique sont aussi ceux pour lesquels existe un plus fort

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 28 - (d’après G. Goebel, 1998): Schéma illustrant la comorbidité de troubles psychologiques chez
les patients présentant un acouphène chronique invalidant.

danger de désordres dépressifs et/ou anxieux ; de même, les patients présentant des acouphènes
sans éprouver le besoin de consulter, présentent des profils de personnalité moins pathologiques
que ceux qui ont consulté.

Figure 29 - (d’après G. Goebel, 1998): Schéma illustrant la différenciation entre les désordres
psychiatriques pré-existants et subséquents chez les patients présentant un acouphène chronique
invalidant.

Un travail récent concerne un échantillon de patients vus et suivis en TCC à Paris en consultation
libérale et hospitalière en 2002 dont le recrutement « tout-venant » échappe à la sélection
rencontrée dans les pays où la prise en charge est plus développée. La majorité de ces sujets ne
présentait pas de symptomatologie dépressive (54%) mais manifestait cependant un niveau avéré de
symptomatologie anxieuse (62,1%).
L'intervalle des notes possibles s'étend pour chaque échelle HAD (Anxiété et Dépression) de 0 à 21,
les scores les plus élevés correspondant à la présence d'une symptomatologie plus sévère.
Pour chaque sous-échelle, des notes seuils ont été déterminées avec les valeurs suivantes :
- score =11 = trouble avéré.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

- 8 < score > 10 = situation douteuse.


- score < 8 = situation normale.
Par ailleurs, plus le score de sévérité de l’acouphène était élevé et plus la symptomatologie
dépressive (cf. Figure 30) était marquée. Le même lien avec la sévérité de l’acouphène est observé
pour les symptômes anxieux, mais de manière encore plus évidente (cf. Figure 31).

Figure 30 - (D’après Peignard et Chevrolat, 2003) : Evolution des moyennes des scores à l'échelle de
Dépression (note sur 21) en fonction du degré de sévérité de l’acouphène (note sur 16).

De plus, la sévérité de l’acouphène est sans effet sur le score de dépression chez les sujets présentant
un niveau normal ou modéré d’anxiété ; en revanche, chez les patients au profil "anxieux avéré", le
caractère sévère de l’acouphène aggrave les symptômes dépressifs (cf. Figure 32).

Figure 31 - (D’après Peignard et Chevrolat, 2003) : Evolution des moyennes des scores à l'échelle
d'Anxiété (note sur 21) en fonction du degré de sévérité de l’acouphène (note sur 16).

Ainsi, la symptomatologie anxieuse pourrait agir en médiateur entre la sévérité de l’acouphène et la


symptomatologie dépressive. La dépression s’amorcerait
dès qu’un certain niveau d’anxiété (et non pas de sévérité La sévérité de l’acouphène serait
de l’acouphène) est atteint. En définitive, les patients responsable de troubles anxieux,
pour lesquels l’impact psychologique de l’acouphène est lesquels, à leur tour, induiraient des
important seraient donc des "anxieux" qui "dépriment" si symptômes dépressifs. La dépression
la sévérité de l’acouphène augmente. apparaît alors comme « consécutive »
au développement de l’anxiété.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Cette observation montre tout l’intérêt d’intégrer la dimension anxieuse dans la prise en charge
thérapeutique.

Figure 32 - (D’après Peignard et Chevrolat, 2003) : Evolution des moyennes des scores à l'échelle de
dépression (note sur 21) en fonction du degré de sévérité de l’acouphène et du profil anxieux selon
l'échelle d'anxiété.

Quand adresser un patient à un psychiatre ?


Compte tenu de la fréquence des troubles anxieux ou dépressifs chez les
patients porteurs d'acouphène, il faut adopter une stratégie de dépistage et de
prise en charge de ces situations.
Lors de la première consultation il est déjà indispensable d'avoir une démarche
adaptée : c'est ici que l'intérêt des questionnaires semi-quantitatifs et spécialisés
est particulièrement évident. En effet la probabilité de sous-évaluer la présence
d'un trouble psychologique est très élevée, le spécialiste ORL n’ayant pas, dans
la très grande majorité des cas, une formation suffisante sur le plan technique.
Il faut donc, après l'évaluation organicienne initiale, rechercher des facteurs de
risque de présence ou de développement d’une pathologie psychologique :
L’histoire naturelle de l’acouphène (accident du travail, traumatisme physique ou
psychique).
Son caractère invalidant ou pas.
Un score élevé aux questionnaires spécialisés.
L’expression de pensées particulièrement négatives en ce qui concerne les
causes, l’évolution, le pronostic de l’acouphène.
La situation sociale et/ou personnelle du patient (isolement, décès, divorce,
chômage).
L’incompréhension de l’entourage, une hyperacousie.
Une prise en charge psychologique antérieure.
De nombreuses tentatives thérapeutiques inefficaces.

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jeudi 30 septembre 2004 15:57:17
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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.11 Cas particuliers


◆ Acouphènes chez les enfants.
◆ Acouphènes récents, de moins de 6 mois.
3.11.1 Une forme particulière : l’acouphène chez les enfants
Outre le fait maintenant bien établi de la sous-évaluation de cette pathologie chez l'enfant, il
semble indispensable d'individualiser plusieurs problèmes :
– la plupart des enfants ne signalent pas spontanément l'existence d'un acouphène,
– la perception d'un tel symptôme est tout à fait différente de celle que l'on retrouve
chez les adultes,
– la prévention tient ici une place prédominante,
– la prise en charge thérapeutique n'inclut qu'exceptionnellement des médicaments et
se fonde essentiellement sur des techniques de relaxation et/ou instrumentales.
Un acouphène est un symptôme fréquent chez les enfants soit dans le cadre de pathologies
inflammatoires dont l'exemple le plus banal est l'otite séro muqueuse, soit de façon spontanée. Il
semble ainsi que l'on puisse retrouver plus de 10 % d'une population d'enfants scolarisés porteurs
d'acouphène.
Lorsqu'il existe une atteinte neuro sensorielle, le pourcentage peut atteindre 60 %.
Parmi l'ensemble de ces enfants, un très petit nombre, évaluable à moins de 5 %, se plaint
spontanément. De nombreuses explications ont été avancées afin de comprendre cette
sous-évaluation. Outre la plasticité propre à cet âge, il semble que la non prise en compte de la
plainte de l'enfant soit un élément important. Enfin il est bien classique de retenir le
comportement de l'enfant qui tente de faire plaisir aux adultes de son environnement. Le
questionnement devrait donc être indirect. On peut également tenter de sélectionner les
réponses en demandant aux enfants de répondre à des questionnements très pratiques et de ne
retenir que ceux qui répondent correctement. Avec cette technique, on retrouve environ 10 %
d'enfants ayant expérimenté la perception d'un acouphène alors que leur audition est strictement
normale.
Il faut noter que chez les enfants, contrairement aux adultes, autant de garçons que de filles sont
atteints.
La présence d'un acouphène peut entraîner des difficultés de concentration, des problèmes de
comportement et éventuellement des troubles d'acquisitions scolaires.
La difficulté est actuellement d'établir des facteurs pronostiques de sévérité dans cette population
pédiatrique, les questionnaires étant d’une aide inconstante.
Les traumatismes crâniens semblent jouer également un rôle important dans la genèse de ces
acouphènes ; les enfants étant particulièrement exposés à ces accidents, ces acouphènes
post-traumatiques étant susceptibles d'une rapide évolution favorable, on comprend toute
l'attention qui doit être portée à ces traumatismes.
Compte tenu de la fréquence de ce symptôme, il apparaît indispensable de le rechercher lorsque
les circonstances s'y prêtent : antécédents de pathologie otologique, de traumatismes crâniens,
troubles comportementaux, difficultés scolaires.
Il peut être demandé à l'enfant de décrire son bruit s’il le peut (et alors, le vocabulaire utilisé est
bien différent de celui des adultes, faisant appel à son expérience sonore : monstre hurlant,
voiture vrombissante) ; un examen otologique avec test d'audition doit être réalisé. L'utilisation
des questionnaires standardisés employés chez l'adulte est ici impossible dans de bonnes
conditions de fiabilité. Il n'en reste pas moins qu'une appréciation du degré de gêne est possible en
tentant de ne pas suggérer les réponses à l'enfant.
Comme chez l'adulte, les enfants peuvent signaler l'existence d'instabilité, de céphalées, de
difficultés d'endormissement, de concentration, de stress ou de fatigue.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Certains soulignent la gêne à l'audition en particulier dans le bruit, (écoute en classe, télévision),
et ceci, contrairement à ce qui se passe chez les adultes, essentiellement parmi les enfants à
audition normale.
L'évaluation faite, il est indispensable de rassurer les parents qui pourraient, par leur anxiété,
aggraver la situation de l'enfant. Ce point doit être souligné tout particulièrement compte tenu du
caractère extrêmement agressif de la boucle anxiété des parents-réponses des enfants.
Du point de vue thérapeutique, il faut clairement différencier les enfants à audition normale, les
enfants atteints de pathologie inflammatoire transitoire, les enfants atteints de surdité neuro
sensorielle moyenne ou profonde.
Dans le premier cas, l'information est essentielle pour éviter la spirale traditionnelle aboutissant à
une augmentation continuelle du caractère agressif du signal à la fois en raison de l’ anxiété des
parents et de la gêne de l'enfant. La place des médicaments est pratiquement nulle ; certains
enfants nécessiteront l'emploi de techniques de relaxation voire de techniques instrumentales
comme les oreillers sonores lorsqu'ils ont des difficultés à s'endormir.
Il faut insister tout particulièrement sur les troubles comportementaux en classe : certains enfants
vont avoir un comportement agressif, d'autres ne pas supporter le silence d'une classe lors d'un
examen, d'autres enfin fuir les cours de récréation très bruyantes. Bien faire préciser tous ces
éléments par les parents et le relayer auprès des enseignants est un élément très important de la
prise en charge de ces acouphènes avec ou sans hyperacousie.
Enfin nombre d'enfants dans ce groupe a déjà largement mis en place sa propre stratégie
d'habituation. Il est du plus haut intérêt de le faire préciser afin de l’orienter dans la bonne
direction.
La situation des enfants porteurs de pathologie inflammatoire est bien différente puisque, en
dehors de ceux qui développent une labyrinthite séreuse non réversible, ils voient leur acouphène
disparaître lorsque l'oreille moyenne redevient normale.
Le traitement de l'acouphène est donc celui de l’inflammation.
En ce qui concerne les enfants porteurs de surdité neuro sensorielle, le traitement repose
essentiellement sur l'appareillage. Cependant, comme chez l’adulte, il faudra être très prudent
lorsqu'il existe une hyperacousie.
Celle-ci doit être traitée dans les mêmes conditions avant d'envisager la prise en charge de la
baisse d'audition.
A part la situation des cophoses avec implant cochléaire ; on connaît la réponse en général
favorable sur l’acouphène lorsqu’il est présent (environ 75% des cas).
En conclusion, il semble que la présence d'un acouphène dans la population pédiatrique est
fréquente et qu'il est indispensable de prendre en compte avec beaucoup d'attention la plainte
spontanée et/ou indirectement provoquée. Les causes des symptômes et l'environnement général
auditif, sont peu différents de ce que l'on observe chez l'adulte. L’expression, le contexte et la prise
en charge sont cependant sensiblement différents.
3.11.2 Une indication particulière : L’acouphène récent
Son caractère récent, on l’a dit, ne le soumet pas à la lutte contre les préjugés d’inactivité
thérapeutique.
S’il est de survenue brusque, la correction peut être simple en cas d’otite, de bouchon de
cérumen…le diagnostic est simple aussi en cas de surdité brusque.
L’acouphène après la récupération auditive peut constituer la séquelle. L’acouphène peut aussi
aggraver la situation si la surdité ne récupère pas. Le tableau est celui d’une oreille à la fois
inefficace et gênante. Les surdités sévères ou profondes peuvent empêcher un masquage sonore
conventionnel.
En cas de traumatisme sonore récent, le traitement est urgent. On respecte l’étape initiale de
parcours de deuil de l’audition normale. Ce n’est pas le temps de l’explication de l’habituation.

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3.12 La prise en charge


- Nous ne traiterons que du cas majoritaire : l’acouphène chronique, maladie.
Après les généralités seront abordés :
◆ Panorama de la prise en charge de l’acouphène
◆ La thérapie cognitive et comportementale
◆ La prise en charge audioprothétique
Nous terminerons sur le rôle central que joue l’information.
3.12.1 Généralités
3.12.1.1 Qui a des acouphènes ? Approche épidémiologique
Il apparaît très naturel de tenter de définir dans un premier temps la population des patients
porteurs d'acouphènes par une simple réponse positive à la question « avez-vous un acouphène » ?
Or depuis une fameuse expérience réalisée par Heller et Bergman en 1953, on serait tenté de
répondre plutôt à la question « quand ne perçoit-on pas d'acouphènes » ?
Ces auteurs, bénéficiant des avancées technologiques de leur époque (construction d'une
chambre anéchoïque), on pu constater que plus de 90 % d'adultes jeunes sans aucun antécédent
ORL personnel ou familial perçoivent un acouphène en général aigu lorsqu'ils sont mis dans une
telle cabine.
La question se complique encore un peu si l’on fait intervenir un autre paramètre qui est celui de
la représentation de l'acouphène dans une population donnée. En effet, collectivement, l'impact
de la perception d'un acouphène n'est pas le même selon les pays et à l'intérieur des pays selon les
strates sociales, et les moments historiques. (Un acouphène n'a probablement pas la même valeur
pour un soldat de la Grande guerre, un chanteur d'opéra contemporain ou un paysan irakien).
Il est donc difficile de comparer les études publiées sur ce sujet.
En se rapportant aux différentes enquêtes réalisées en Europe occidentale, on peut considérer que
10 % de la population adulte perçoivent un acouphène considéré comme non agressif. Environ
5 % ont un acouphène gênant tandis que dans 0,5 % des cas, il ne permet pas une vie normale..
En rapportant ces pourcentages à la population française on peut considérer que 2,4 millions de
personnes se considèrent comme handicapées, 300 000 très perturbées dans leur vie et qu'il y a
environ 170 000 nouveaux cas chaque année.
Les connaissances en matière épidémiologique sont faibles en France et en particulier en ce qui
concerne le lien entre mode d'existence, environnement sonore, prévalence de l'acouphène. Une
enquête anglaise montre cependant l'augmentation du facteur de risque de présence d'un
acouphène chez des sujets de plus de 40 ans vivant dans un environnement sonore.
À côté de ces données chiffrées, concernant la prévalence de ce symptôme, il semble que
globalement toutes les enquêtes menées sur ce sujet donnent les mêmes résultats : la prévalence
augmente chez les patients âgés de plus de 50 ans avec une décroissance au-delà de 70,
globalement une absence de prépondérance chez les hommes (on pouvait cependant s'y attendre
compte tenu de l'exposition plus fréquente aux bruits intenses), la surreprésentation de l’atteinte
gauche, la très forte prédominance de perception de bruits aigus (plus de 80 % au-dessus de
1000 Hz), la faible intensité subjectivement mesurée (plus de 80 % en dessous de 5 dB au-dessus
du seuil à l'équivalence de fréquence mesurée), l'absence de lien entre cette intensité subjective et
le caractère agressif du signal, la présence dans plus de 90 % d'une surdité neuro sensorielle
associée. Inversement, on montre une forte corrélation entre la présence d'un acouphène et le
niveau d'audition (dans une série de patients de 60 ans en moyenne, ayant une courbe typique de
sujets ayant été exposés aux bruits forts, 50 % d'entre eux présentent un acouphène).
Contrairement à une idée reçue, le profil psychologique des patients atteints d’acouphène est tout
à fait comparable à celui de la population témoin. Néanmoins la souffrance induite par la
présence d’un acouphène induit fréquemment des troubles comportementaux (céphalées, stress,
absence d'humour, irritabilité).

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.12.1.2 Richesse épidémiologique - Rareté des consultants


Les grandes enquêtes internationales montrent toutes, à la fois la grande fréquence de
l'acouphène comme symptôme et, finalement, la rareté (entre 5 et 10 % des sujets
expérimentant un acouphène), des patients qui consultent pour cette pathologie.
On peut donc se poser la question de savoir pourquoi ces patients perçoivent leur acouphène
comme agressif et ne parviennent pas à induire l’habituation, ce phénomène de
l'automatisation de perception de signal.
Il est en effet évident à la fois dans la pratique médicale quotidienne et simplement dans la vie
courante que le cerveau multiplie ses automatisations de perception de signal qui peuvent
d'ailleurs s'intégrer dans le cadre plus général de l'apprentissage ou de la déconstruction. On
peut donc, dans la mesure où ces modes opératoires sont naturellement automatiques (il n'y a
pas de pilule magique pour apprendre l'anglais ou le violon), penser que ces patients font
quelque chose qui bloque le processus d’automatisation. Inversement, la grande masse des
sujets ayant une surdité neuro-sensorielle, même importante, ou ceux qui, un jour ou l'autre,
expérimentent un acouphène, précisément ne font rien qui pourrait entraver le processus.
Il en résulte un certain nombre d'objectifs qui doivent être clairement précisés au patient.
Lorsqu'il est vu pour la première fois, son objectif unique est de voir son acouphène
disparaître. Il n'a naturellement pas la notion du fait qu’un groupe beaucoup plus important
que le sien perçoit également un acouphène mais qu'il ne lui viendrait pas à l'esprit de
consulter pour le traiter. L'objectif de rentrer dans ce vaste groupe de sujets « acouphéniques
sans le savoir » ne peut être présenté en général d'emblée. C'est pourtant ce vers quoi il faudra
s'efforcer d'aller.

3.12.1.3 En pratique comment structurer la prise en charge des patients et organiser en


particulier la première consultation ?
Très concrètement, il faut d'abord que le praticien décide, au niveau de son secrétariat, de
filtrer ou non les appels ; en effet, cette première consultation peut être très difficilement
menée en 10 minutes ou 15 minutes faute de quoi la crédibilité du médecin est fortement
écornée. Il n'y a donc que trois solutions :
– réserver des plages horaires pour ce type de première consultation,
– prévoir systématiquement 30 à 40 minutes au moment de la prise de rendez-vous,
– accepter de prendre 15 à 20 minutes de retard à chaque fois que ce type de patient se
présente.
L'accueil du patient passe nécessairement par l’ écoute de sa plainte qui doit cependant rester
« productive ». Il n’est, en effet, pas rentable de laisser le patient parler sans retenue ni
contrôle. On ne perd pas de vue que l'objectif est la prise en charge d'un symptôme le plus
souvent isolé et qui induit essentiellement un problème de tolérance.
Lors de cette première consultation il est indispensable d'obtenir deux résultats :
– le patient est écouté dans sa souffrance,
– le patient réalise la compétence du médecin.
L'évaluation du système auditif et la recherche d'une étiologie vraisemblable ne doit pas
occuper l'essentiel de cette première consultation, ce d'autant que fréquemment, les patients
arrivent avec un dossier déjà fort complet.
Il est d'ailleurs frappant de constater que nombre d'entre eux ont bénéficié de nombreux
examens audiométriques mais qu'aucune démarche n'a été effectuée pour évaluer
l'acouphène et son retentissement.
Il faudra donc se focaliser sur celui-ci.
Il nous paraît peu productif de laisser trop longtemps le patient décrire « son bruit » sans être
guidé. À ce sujet de nombreux questionnaires ont été validés en français, qui permettent une
évaluation satisfaisante de l'impact de l'acouphène dans la vie des gens, à la fois sur le plan

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général et dans des domaines plus spécialisés. Un certain nombre d'entre eux sont présentés
en annexe.
Globalement, la justification de l'utilisation de ces questionnaires ne pose pas de difficultés
majeures dans la relation que le médecin O.R.L. a avec son patient. Celui-ci, d'ailleurs,
apprécie le plus souvent la démarche qui consiste enfin à s'intéresser à son acouphène. Il va de
soi que ces questionnaires doivent être expliqués et non distribués sans un mot par la
secrétaire.
Le praticien doit organiser sa consultation autour d'une routine (ces questionnaires doivent
être remplis toujours dans les mêmes conditions opératoires (à domicile, dans la salle de
consultation, devant le médecin etc.).
Cette procédure permet de rendre raisonnable cette première consultation et, en particulier,
de ne rien dire des mécanismes en jeu. Il est en effet indispensable que le patient ne réponde
pas aux questions au travers du filtre d'un mini-cours délivré lors de cette première
consultation.

Dès lors, apparaissent plusieurs groupes qui s'agrègent selon l'état auditif, la réalité de
l'acouphène et de sa tolérance.
Schématiquement on peut retrouver les patients à audition « normale », ceux dont l'atteinte
auditive est objectivement évidente mais qui ne nécessiteront pas de traitement spécifique de
cette hypoacousie, enfin ceux qui, plus ou moins spontanément, disent combien leur
hypoacousie est gênante.
Deux groupes très importants sont formés : des patients porteurs ou non d’hyperacousie. Il
n'y a pas de recouvrement entre les groupes selon le niveau d'audition et la présence ou non
d'hyperacousie.
Pour ce qui concerne l'acouphène, on discriminera les patients selon le mode de survenue en
insistant particulièrement sur les modes agressifs (accident, explosion, chirurgie, traitement
divers ou anesthésie, que le patient à tort ou à raison incrimine dans la genèse de son
acouphène).
Les questionnaires ont un rôle majeur, permettant d'obtenir une évaluation assez précise et
fidèle du retentissement de l'acouphène dans la vie réelle des patients. Il faut particulièrement
passer du temps pour expliquer l'importance de ceux-ci et surtout éviter le piège de la
photographie décalée ; fréquemment les patients se focalisent sur une période évolutive de
leur acouphène qui n'est pas forcément celle qui nous intéresse. Il faut donc bien faire
comprendre au patient que l'objectif est d'avoir une vision dynamique de sa situation.
L'analyse comparée de ces différents questionnaires permet d'ailleurs assez souvent de faire
apparaître des contradictions, souvent liées précisément au fait que le patient n'applique pas la
même grille de lecture temporelle pour répondre à chaque questionnaire ; pour le
questionnaire hyperacousie, il répondra sur une situation actuelle alors que le questionnaire
d'agressivité de l'acouphène sera « daté » de six mois.
Enfin un élément tout à fait majeur est le dépistage d'une situation psychologique difficile, à
la fois pour le patient et pour l'O.R.L. a priori peu familier de ces problèmes. Une étude déjà
ancienne a montré qu’une équipe d'O.R.L. seniors rompus à la prise en charge de patients
porteurs d'acouphène « ratent » 25 % des diagnostics d'anomalie psychiatrique et, qui plus est,
chez des patients systématiquement revus ensuite par un psychiatre. Ceci pose naturellement
la question de la compétence immédiate et médiate. Inversement faut-il que tout patient
porteur d'acouphène réputé invalidant soit vu par un psychiatre préalablement à toute prise
en charge thérapeutique ? Heureusement la réponse est négative ; il faut se rappeler que le
profil psychiatrique des patients porteurs d'acouphène est en gros le même que celui de la
population générale. Par ailleurs l’utilisation de ces questionnaires précis permet la plupart
du temps de repérer les patients pour lesquels un tel questionnement sera indispensable.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Il en résulte ainsi, d'une façon à peine schématique, 2 grands groupes de patients : ceux qui
pourront être pris en charge entièrement par l'O.R.L. consultant et
ceux qui nécessiteront une approche multidisciplinaire, nécessitant L'importance d'un
la constitution d'un réseau. Ce réseau doit comprendre au réseau.
minimum un audio-prothésiste « motivé», un neurologue, un
psychiatre et/ou un comportementaliste, un cardiologue et un neuro-radiologue. Comme
dans n'importe quel réseau il est indispensable de connaître la motivation de chacun et un
minimum de ce que les autres intervenants peuvent apporter à l'O.R.L..
Pourront être exclus de ce réseau les patients essentiellement motivés par une réassurance et
qui représentent entre 15 et 20 % des consultants ; de même un certain nombre de patients
qui consultent en urgence ou semi urgence après la survenue de leur acouphène, pourront
être, quel que soit leur niveau auditif, pris en charge individuellement par l'O.R.L.
Les autres patients devront d'une façon ou d'une autre être adressés à l'un ou l'autre des
membres de ce réseau, d'où l'importance de la constitution de ce réseau.
On voit bien qu'un certain nombre de patients seront d'emblée inclus dans le réseau (dans le
cadre d'une recherche étiologique (acouphènes pulsatiles, signes neurologiques associés,
antécédents pathologiques connus, troubles cardio-vasculaires ou métaboliques non traités),
ou dans le cadre thérapeutique). Il est en effet illusoire de vouloir gérer seul un patient
manifestement dépressif, qui présente une importante baisse d'audition, ou qui a déjà
« bénéficié » de très nombreux traitements médicamenteux sans résultat appréciable.
Il n'en reste pas moins que le degré de liberté de l'O.R.L. est naturellement, comme dans
toute pathologie, très lié à son niveau de compétence et un certain nombre d'O.R.L.
expérimentés n’hésitent pas, par exemple, à utiliser des antidépresseurs.
Quelle que soit la situation des patients (traités exclusivement par l'O.R.L. ou intégrés dans le
cadre d'un réseau) il est absolument indispensable que ceux-ci adhèrent au projet
thérapeutique. Contrairement à beaucoup d'autres pathologies de notre spécialité pour
lesquelles l'environnement social du patient n'intervient pas (en général les familles, les
voisins, n'ont pas beaucoup d'opinion sur la décision d'opérer ou d'irradier une amygdale) , la
présence d'un acouphène génère fréquemment une logorrhée environnementale. Si celle-ci
était adaptée et pertinente, elle serait une aide ; malheureusement, il s'agit le plus souvent
d'un flou, voire d’un tissu de contrevérités contre lesquelles il faudra lutter patiemment ; à
chaque étape, il faut s'assurer de la bonne compréhension de l'objectif. En effet, outre ces
fausses données, un deuxième obstacle se présente fréquemment : l'objectif thérapeutique
n'est pas un effet direct du traitement (quel qu'il soit), mais une levée d’obstacle à
l'automatisation de la perception d'un signal. C'est une situation rarement rencontrée par les
patients plus habitués à prendre des comprimés pour faire baisser leur tension ou leur
glycémie.
Enfin un dernier obstacle se présente : la synchronisation du message dans le cadre de la prise
en charge groupée d'un patient porteur d'acouphène : l'explication prenant ici une
importance majeure, le vocabulaire n'étant pas le même dans les différentes spécialités, il en
résulte parfois une difficulté pour le patient qui croit avoir entendu des discours fort
différents. Ceci nécessite un rodage important du réseau.
On peut, à ce niveau de l'explication, proposer quelques tableaux ou des petits arbres
décisionnels à propos de quelques situations bien typées qui feront comprendre dans le
concret ce que l'on entend par réseau en matière d'acouphène (acouphène pulsatile,
acouphène du sujet âgé hypoacousique, patients normaux entendants hyperacousiques).
À l'évidence, une des difficultés est de ne pas faire exploser le compteur du financeur et la
patience du patient en multipliant les connexions dans le réseau.
Dans un certain nombre de cas, l'entrée dans le réseau se fait progressivement. Prenons
l'exemple d'une consultation psychiatrique : son acceptation est directement proportionnelle
à la compétence de l'O.R.L. qui la prescrit. Il n'en reste pas moins que, dans un certain

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nombre de cas, son indication est différée. Il peut en être de même pour un certain nombre
d'examens techniques en particulier de neuro-radiologie.
Le cas particulier des patients « marathoniens » de l'acouphène doit être individualisé car
relativement fréquent et d'abord difficile : il s'agit de sujets consultant pour la 20ème fois un
O.R.L. (éventuellement différent à chaque fois) qui arrivent avec 15 cm linéaires de
documents, 18 médicaments pris, 4 appareils auditifs, mais, la plupart du temps, aucune
évaluation de leur acouphène et, dans la grande majorité des cas, un discours très négatif sur
les prises en charge précédentes. Il est alors indispensable de pouvoir séquencer l'abord de ce
type de patients. Le moyen le plus efficace est de se centrer sur le symptôme acouphène et de
tenter, indépendamment du volumineux dossier, d'en évaluer le retentissement. En effet,
compte tenu de l'investissement temps/argent du patient, un énorme biais est apparu. Il faut
tenter, dans la mesure du possible, de faire la part entre ce surinvestissement et la réalité de
l'acouphène. Nous ne sommes, dans notre spécialité, que rarement confrontés à ce type de
patients porteurs de valises. Un des pièges évidents, en dehors de l'absence d'évaluation de
l'acouphène qui est plus ou moins la règle, est de ne pas avoir, aussi paradoxal que cela puisse
paraître, les éléments nécessaires au diagnostic et à la prise en charge. Encore plus que dans le
cas des patients traditionnels, un contrat de bonne conduite doit être tacite entre l'O.R.L. et
son patient.
Il faut en effet pouvoir le suivre régulièrement.
Dans un certain nombre de situations, nous sommes manifestement face à un échec tant du
point de vue du patient que du point de vue de l'O.R.L. Il faut pouvoir le repérer rapidement
soit pour changer de stratégie soit pour proposer, comme dans n'importe quelle pathologie,
un transfert du patient vers un confrère sinon plus compétent du moins plus neuf.
Plusieurs écueils vont se présenter qui rendent compte d'une grande partie de ces échecs :
nous avons déjà insisté sur l'un d'entre eux, le fait de mésestimer une situation psychiatrique
dégradée. Le résultat thérapeutique ne pourra être que mauvais quelle que soit la compétence
de l'O.R.L.. Il est donc indispensable de reposer la question d'une consultation spécialisée
dans le cadre du réseau, devant tout échec thérapeutique, ce d'autant qu'il peut s'agir
également d'un bénéfice secondaire lui-même mésestimé. Dans la mesure où le symptôme
est invisible, la verbalisation devient un élément majeur du chantage dans la famille.
Ailleurs une cause initiale a été manquée (traumatisme, traitement, chirurgie) ou
sous-évaluée à la fois par le patient et l'O.R.L. Il en résulte un conflit qui pourra, ici aussi, être
au mieux débrouillé dans le cadre d'une consultation psychiatrique (comportementale).
On doit mettre à part les acouphènes survenus au décours d'une thérapeutique, quelle qu'elle
soit .
Le ressentiment vis-à-vis de l'ensemble des médecins, après une intervention iatrogénique,
doit bien être explicité par le patient de telle façon que la prise en charge puisse être
opérationnelle. Il est particulièrement difficile pour l'opérateur d'être efficace sur cet
acouphène. Tout le problème va donc résider dans la capacité de l'O.R.L. à transférer son
patient à un confrère neutre. Ceci n'est pas simple et nécessite une grande transparence de la
part du chirurgien. Il est en effet pris dans un dilemme : « abandonner » son patient ou le
prendre en charge dans les plus mauvaises conditions. Il faut donc arriver à faire comprendre
au patient qu'il est impossible, compte tenu du ressentiment, d'obtenir un résultat satisfaisant
sur l'acouphène sans changer de thérapeute.
En marge de ce problème, on peut décrire la situation très délicate des patients qui engagent
une action légale contre un chirurgien. Il est indispensable que l'O.R.L. qui s'occupe de ces
patients en ce qui concerne leur acouphène soit particulièrement clair sur le caractère
fréquemment dévastateur de ces actions précisément du point de vue de l'acouphène. Le
patient investit énormément de temps, d'argent et d'énergie dans son combat légal, certain de
son bon droit. Il en résulte une survalorisation de l'acouphène et dans beaucoup de cas une
aggravation de celui-ci. La situation est à son comble si le patient est débouté.

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3.12.2 Spécificité de la prise en charge :


L’acouphène est une marque de la perte de la santé auditive : le fonctionnement n’est plus
silencieux… dans la plupart des cas, l’acouphène est associé (ou l’inverse) à une surdité : la fonction
auditive est dégradée dans 2 dimensions : la performance et son caractère agréable. Surtout après un
traumatisme sonore chez un sujet jeune, on repèrera facilement les phases classiques du deuil de
l’audition normale : déni, révolte, dépression et finalement acceptation lorsque que le sujet constate
que la vie peut générer encore des agréments même avec cette surdité. Le discours du praticien devra
être adapté au moment de l’évolution. Ainsi par exemple, une explication précoce de l’habituation, à la
phase de révolte, détériore la qualité de la relation.

3.12.2.1 Les objectifs techniques


La prise en charge a trois objectifs :
● Traiter la cause de l’acouphène si on peut en espérer la disparition

● Améliorer la qualité de vie en allégeant les co-morbidités : prise en charge du stress,


de l’anxiété, de la dépression par tous moyens lourds ou légers. L’insomnie,
symptôme associé à l’acouphène le plus fréquent, doit être prise en charge. Les
hypnotiques, s’ils sont choisis suivront les règles habituelles de prescription.
● Favoriser l’habituation, par la thérapie auditive et les thérapies comportementales et
cognitives.

3.12.2.2 Les objectifs du traitement pour le patient


En matière d’acouphène, l’objectif du traitement mérite d’être défini : les mots de la
consultation tournent autour de ce point crucial pour l’intéressé:
● « l’acouphène va-t-il disparaître ? »

● « je peux vivre avec tel qu’il est mais ne je supporterais pas qu’il augmente »

● « je ne peux pas continuer à vivre avec »…

3.12.2.2.1 Disparition, habituation et tolérance


La disparition de l’acouphène est l’objectif idéalisé, exigé au plus vite, dès la première
consultation, par le patient. Il est obtenu parfois rapidement quand une cause
chirurgicale est corrigée (otospongiose, otite séreuse). La disparition, à distance de
l’installation, de l’acouphène est difficile à apprécier dans sa fréquence. En effet, à terme,
autant que la diminution du bruit, ce sont la tolérance et la redécouverte d’un
comportement normal qui contribuent à l’amélioration.
La disparition de l’acouphène renvoie à la question non résolue suivante : l’acouphène,
du fait d’hypothétiques mécanismes de réverbération et de traces mnésiques, peut-il
réellement disparaître, alors que la cause initiale a disparu ? Mais cette disparition est sans
doute très fréquente, spontanément, naturellement, tant est habituel l’acouphène
passager.
L’habituation est plutôt une consolidation qu’une guérison. A l’état normal, on constate
que, par un système de filtrage, les bruits extérieurs permanents, « affectivement
neutres », voient leur perception progressivement diminuée. Un des mécanismes de
l’acouphène réside vraisemblablement dans l’impossibilité d’établir un filtre pour les
bruits de fonctionnement théoriquement neutres. L’habituation, c’est le rétablissement
de ce filtre. Comme pour les troubles vestibulaires, des freins à l’habituation, de type
médicamenteux, existent-ils ?
Si répondre à la question de la disparition est toujours délicat, répondre à la question de la
tolérance est plus facile : l’acouphène va être de mieux en mieux toléré. Le délai sera
variable en fonction d’éléments qui tiennent à l’acouphène, au patient, à sa prise en
charge. C’est un phénomène naturel. La pathologie de l’acouphène c’est l’obstacle à la
tolérance, c’est la construction et le développement de schémas mentaux défavorables
qui concernent les conséquences probables de l’acouphène, sa signification et la façon
d’y faire face.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Pas d’augmentation
Le « pas d’augmentation » : telle est la demande émise après le constat de l’échec
vis-à-vis de la disparition du symptôme.
Dans certains cas bien identifiés, dans la maladie de Menière en particulier,
l’acouphène, au plan psychoacoustique, présente des variations d’intensité. Mais ce
sont des variations à court terme. L’acouphène est variable dans la journée ou d’un
jour à l’autre. L’augmentation est à prendre en compte sur des délais plus longs. Il
faut alors rechercher un arrêt ou une moins bonne tolérance psychologique mais
aussi une aggravation de la pathologie causale.
La guérison
Elle serait la coïncidence de 3 discours:
Celui du médecin prescripteur : « Vous ne vous plaignez plus autant de ce symptôme et j’avais
avec mon médicament l’ambition d’atténuer ou de faire disparaître ce symptôme, pour moi vous
êtes guéri… ».
Celui du patient : «je me sens guéri ou en tous cas je ne suis plus obsédé par ce symptôme ».
Enfin, celui de l’entourage, qui peut dire «après tout ce qu’on a vécu en spectateurs et aussi en
acteurs de sa souffrance, il apparaît bien guéri ou il va beaucoup mieux ».
Il y a lieu finalement de replacer le patient dans le cursus du deuil de son audition
normale.
Le phénomène de deuil de l’audition (ou d’acceptation de l’acouphène)
Il comporte classiquement plusieurs étapes.
La prise de conscience de la perte en est la première. C’est la prise de conscience de la
présence durable de l’acouphène. Comme nous l’avons déjà dit, chez le sujet jeune, les
mots lors de la première consultation chez le spécialiste sont : « je ne peux pas croire que
ce bruit va exister toute ma vie… »
Dans les atteintes sévères de l’audition avec acouphène, la souffrance engendrée par
l’acouphène peut retarder la prise de conscience de la perte de l’audition. Tant que
l’acouphène est le sujet de la souffrance, le travail de deuil de l’audition ne peut pas
être entamé.
La deuxième étape est le refus, avec parfois une série d’interrogations : « pourquoi cet
acouphène, qu’ai-je fait, qu’est ce qui le modifie ?… ». Ces questions montrent bien
que l’acouphène a bel et bien été intégré. Parallèlement, il y a maintenant volonté
d’annulation avec retour à l’état antérieur avec une révolte qui dans le cas particulier
des acouphènes ne trouve pas individuellement d’exutoire, mais peut le trouver au
plan collectif : la médecine est impuissante !!
La phase suivante est la phase de dépression. On dit que le déclenchement des larmes
est un « bon » signe dans le deuil. Le patient modifie son comportement conformiste
vis-à-vis du regard des autres. Le retour à un comportement moins adulte permet la
régression. Il exprime par les larmes sa détresse qui doit être exploitée pour tenter
d’entamer le dialogue. C’est sans doute à ce stade que toute l’explication de
l’acouphène doit démarrer. Sur le plan somatique, on prendra en charge les troubles
du sommeil. L’asthénie peut être patente. Sur le plan intellectuel le patient présente
ou dit présenter un affaiblissement des capacités d’attention et de concentration.
L’impression d’être moins performant qu’avant dégrade l’estime de soi.
Sur le plan affectif, l’humeur est triste. Une forte anxiété se développe chez le patient
qui devient hypersensible à toute stimulation sonore. Cette hyperacousie provoque
des réactions d’évitement ou de rupture avec son milieu habituel.
Mais, petit à petit l’acceptation du deuil de l’audition normale va se faire.
Le deuil pathologique c’est la prolongation anormale de l’une ou l’autre de ces phases,
avant l’acceptation. Le sujet se complaît inconsciemment dans la réminiscence

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CLINIQUE ET PRATIQUE

heureuse, étrangère à la réalité. Finalement le patient acouphénique peut être victime


de cette dépression «normale », réactionnelle à la perte de l’audition normale.
Relation médecin-malade
Dans l’enquête évoquée plus haut, dans la presque totalité des cas (97%), les
personnes ayant répondu au questionnaire ont parlé de leur acouphène à un
médecin, 60% à au moins trois médecins.
2 fois sur 3 environ (61 %), la demande de soulagement a été bien prise en
considération par le praticien, 1 fois sur 3 peu ou pas du tout.
La prise en charge
81% ont essayé des traitements.
Il est à noter que l’hypnose ou l’acupuncture ont été tout aussi essayées que les
thérapeutiques médicamenteuses.
Efficacité
A la question : avez-vous obtenu un soulagement à la suite de ce ou ces traitements ?,
19% n’ont pas répondu, mais 24% ont répondu oui et 57% non.
Mais aucun traitement n’est cité quand il s’agit de savoir quel est le traitement qui a
été particulièrement efficace.
Cette prise en charge requiert de la part du praticien une bonne dose de « plasticité». Il
faut en permanence pondérer les deux dimensions, psychologique et somatique,
pour choisir alors le type de prise en charge. Il faut aussi une bonne dose
d’ « humilité» du fait de la pauvreté des actions chirurgicales, de la longueur des
traitements, du caractère indigent des explications sur les mécanismes, du flou des
causes…
L’acouphène est complexe et rappelle la situation du vertige avant la mise au point,
grâce aux épreuves cliniques et paracliniques, d’une nosologie précise.
L’acouphène est complexe :
Les causes et les mécanismes sont multiples et incertains. Le temps modèle le
symptôme avec les deux facteurs contraires: la trace mnésique et l’habituation.
Les patients sont atteints de façon très diverses :
De l’acouphène symptôme à l’acouphène maladie, consultant pour certains sans
relâche.
L’inconfort du médecin est évident :
♦ La situation d’échec est fréquente :
La réussite thérapeutique rapide et fulgurante est exceptionnelle. Pour cette
complexité réelle, le nombre de cas donnés à traiter n’est souvent pas assez grand
pour adopter une prise en charge réfléchie et cohérente, personnelle.
♦ Les conduites thérapeutiques sont sans consensus vrai.
Les essais cliniques sont difficilement reproductibles, rarement crédibles.
Il n’y a pas de modèle animal "facile", pas d’évaluation objective.
Médecins et malades sont d’accord sur la mauvaise réputation de l'acouphène, sont
d’accord sur le caractère théoriquement léger de la pathologie, habituellement du
domaine du confort et quelques fois avec un lourd retentissement psychique.
Certains patients peuvent avoir des avis bien arrêtés quant à la méthodologie de prise
en charge. C’est une des conséquences du développement des associations de
patients, véritable pouvoir de santé.

Pour la dimension somatique, la démarche du médecin peut être de 3 ordres :

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CLINIQUE ET PRATIQUE

♦ « Tout d’abord, éliminons une étiologie grave. Comme la cause n’est que
rarement définie, comme le mécanisme
est obscur et comme les thérapeutiques Finalement, dans cette pathologie,
étiologiques n’apportent pas les succès entre ce patient souvent averti par
escomptés : faisons tout pour accélérer l’entourage et aussi par le médecin,
l’habituation ». lui sans acouphène, démuni de
♦ « Attachons-nous à la cause, à l’origine de l’efficacité rapide de son Vidal®, le
l’acouphène. Essayons de la découvrir, patient est l’expert.
supprimons-la et nous pouvons espérer
que le symptôme disparaîtra : c’est l’acouphène symptôme ».
♦ « La cause ayant disparu, on peut observer la persistance de l’acouphène du fait de
la mémorisation du phénomène. Il faut alors soigner l’acouphène en tant que tel:
c’est l’acouphène-maladie »
Ces 3 démarches peuvent constituer des guides rigides ou au contraire être choisies
tour à tour au gré des patients, au gré de l’évolution des symptômes d’un sujet
considéré.
Quel que soit le choix, des erreurs sont à éviter dans cette relation entre le médecin et
le patient qui ne comprend pas l’incompétence de «la science médicale moderne »
vis-à- vis de ce « pauvre petit symptôme » qui pourtant est déclaré comme lui gâchant
la vie.
Parallèlement au choix d’une de ces démarches, il y lieu aussi d’évaluer et de corriger
la psychopathologie, lourde ou légère, par lui même ou en adressant aux « psy- ».
Enfin il faut éviter les erreurs.
3.12.3 Panorama des méthodes
À titre de guide, on peut dégager pour cette prise en charge 4 volets. Des thèmes seront repris plus
avant dans le texte.

3.12.3.1 Le premier volet thérapeutique vise la disparition de l’acouphène :


Trois méthodes sont proposées:
● le traitement de la cause : il est réalisé par des moyens médicaux ou chirurgicaux adaptés à
l’étiologie quand elle est découverte,
● la correction du mécanisme de l’acouphène, en s’appuyant sur différentes explications ou
différentes analogies physiopathologiques,
● la prise en charge de la déafférentation par des techniques de masque sonore, par analogie
avec ce qui a été développé en matière de douleurs chroniques.

3.12.3.2 Le deuxième volet est la prise en charge des co-morbidités


et autres phénomènes satellites, conséquences de l’acouphène : Insomnie, anxiété, dépression.
Sans égard à la relation mutuelle entre l’acouphène et ces situations cliniques, il faut
améliorer le confort de vie.
Ces propositions thérapeutiques relèvent d’une démarche médicale classique. Les deux
derniers volets sont plus spécifiques du symptôme qui nous occupe.

3.12.3.3 Favoriser l’habituation:


C’est donc un phénomène naturel, utile. Elle se traduit par la baisse progressive de l’intensité
d’une réponse à mesure que se répète une stimulation dans le temps, sans que cette
stimulation soit attribuable à la fatigue. Ce phénomène existe à deux échelles, pour un
récepteur ou pour l’organisme.
Grâce à ce phénomène, le port d’un vêtement est possible sans perception consciente,
permanente de l’étoffe sur la peau. Mais le système est en veille : une interrogation du capteur
renvoie l’information. On perçoit le vêtement si on y fait attention…

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Pour l’organisme, au niveau cognitif conscient ou inconscient, l’habituation existe aussi. Face
à un environnement familier et régulier, il ne se fatigue pas inutilement. Par ailleurs, en
réagissant moins à des stimulations connues et reconnues comme étant sans importance pour
l’organisme, le sujet est prêt à répondre à d’éventuels événements nouveaux qui pourraient
intervenir dans le milieu.
Après cette brève présentation générale du phénomène d’habituation et pour revenir à notre
sujet, on peut redire que la physiopathologie de l’acouphène est, soit une pathologie de
l’habituation soit une habituation qui ne se fait pas parce que l’acouphène a valeur
d’information. L’acouphène a une signification : menace quand on dit que l’acouphène est
vasculaire, stress quand il s’agit d’un traumatisme sonore, rappel affectif d’une circonstance
émotionnelle…
Favoriser l’habituation suppose d’analyser le statut de l’acouphène et mettre à profit les lois
de l’habituation comme celle de la généralisation qui permet de répondre moins
puissamment à des stimulations présentant des caractéristiques proches de celle d’un
stimulus familier.

3.12.3.4 Ne pas inhiber l’habituation


La démarche préalable à l’habituation est de vérifier l’absence de mécanisme d’inhibition de
l’habituation. C’est en fait la première démarche psychologique.
Il faut contrôler ou faire contrôler par le psychothérapeute que le sujet n’a pas « besoin de son
acouphène », en d’autres termes qu’il n’y trouve pas un bénéfice secondaire inconscient1.
Cette situation soit garantirait l’inefficacité de la prise en charge, soit détériorerait l’état
clinique après disparition du symptôme.
Finalement, c’est cette dernière remarque qui atteste du caractère cognitivo-
comportementaliste de la prise en charge globale des acouphènes. C’est ce qui fait la difficulté
d’établir un schéma rigide de prise en charge : faut-il réellement le faire disparaître si
l’acouphène permet à l’intéressé de ne pas penser et/ou d’utiliser ce mode de communication
avec son entourage2 ?
On entre de plein pied dans la psychopathologie, domaine qui n’est pas celui du somaticien
de l’audition. Son rôle est de proposer le bilan pour une telle hypothèse de fonctionnement
du sujet.
3.12.4 Moyens
Certains traitements reconnus comme efficaces sont inapplicables : citons la lidocaïne injectable
dont l’action est fugace et le courant électrique continu qui peut bloquer la production anormale
d’influx, mais provoque l’ossification.

3.12.4.1 Améliorer l’audition :(cf. chapitre spécifique)


C’est la mesure de base. L’absence de surdité (27% des cas) rend la prise en charge plus
délicate. L’aide auditive est le recours majeur pour la prise en charge. On sait, en France, les
réticences à l’appareillage auditif, mais on constate que les sujets acceptent mieux une aide
auditive inscrite dans la prise en charge de l’acouphène. Certaines prothèses auditives
combinent une amplification et un générateur de bruit dont la justification est présentée plus
loin.

3.12.4.2 Développer l’habituation : La thérapie sonore (ou auditive)


Conçue par Hazell et Jastreboff, elle vise à l’habituation de la réaction : l’acouphène ne génère
plus d’intolérance majeure, puis à l’habituation de la perception c’est à dire à la non-perception de
l’acouphène.

1- Nous ne sommes pas dans la relation de simulation.


2- Des maux pour le dire…

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Inspirée de concepts cognitivo-comportementaux, la TRT (Tinnitus Retraining Therapy) se


fixe pour objectif de neutraliser la réaction autonome à l’hyperacousie et/ou à l’acouphène.
Elle fait appel au conseil directif et à la thérapie sonore. Le "counselling" est un procédé de
conseil bref et directif, tant au plan de l’interprétation symptomatique qu’au plan de
l’adaptation aux situations, sonores notamment, vécues comme menaçantes. La thérapie
sonore fait classiquement appel aux générateurs de bruits, mais elle inclut autant la correction
auditive que des stimulations auditives d’autre nature ; le principe de base étant que le silence
est à proscrire.
Elle comporte deux volets :
● Le conseil directif, (ou counselling),
c’est à dire l’explication du phénomène avec en appui tout document utile. Il cherche à faire
céder les croyances acquises sur « l’intraitabilité » de l’acouphène. Les associations de patients
jouent dans certains cas un rôle très positif.
● La « désensibilisation auditive »,
à savoir la diminution de la sensibilité de la détection de l’acouphène. Cette action est du
domaine de l’inconscient, à la différence de la précédente. Elle est mise en œuvre d’abord en
recommandant au patient d’éviter le silence. De façon plus sophistiquée, un générateur de
bruit hébergé dans une prothèse auditive permet de soumettre le sujet à un environnement
sonore permanent. L’idée est de diminuer le contraste entre l’acouphène et l’environnement
sonore. Petit à petit, cette stimulation sonore prolongée (plus de 6 heures par jour) va
déclencher une réaction normale d’habituation : ce signal n’est pas menaçant, il est amovible.
Et la théorie stipule que l’habituation est généralisable, c’est à dire que les stimulations
ressemblant à la stimulation qui déclenche la réaction visée vont aussi profiter du filtre de
l’habituation. Ainsi l’acouphène est plus rapidement bloqué à l’étage inconscient. Le
développement de l’habituation demande plusieurs mois. Cette démarche n’est pas
dangereuse car le niveau sonore nécessaire est faible.

3.12.4.3 La thérapie cognitive et comportementale est développée dans un


chapitre spécifique.
3.12.4.4 Les moyens médicamenteux
Les thérapeutiques de l’acouphène : Utilisation des médicaments.
Les spécialités avec l’autorisation de mise sur le marché (AMM) « acouphène » sont peu
nombreuses. Des produits hors AMM sont efficaces, ce qui peut engendrer des difficultés
administratives. L’emploi de placebos peut s’avérer utile.
Plutôt que d’en faire une longue liste, essayons de fixer leur logique d’emploi.

3.12.4.4.1 La logique des produits


On peut établir 3 grandes classes de médicaments :
● Les traitements prouvés mais inutilisables de façon prolongée :
Leurs résultats sont reproductibles lors d’études contrôlées. Le courant électrique continu, la
lidocaïne en font partie.
Leur statut les rassemble : pour efficaces qu’ils soient, ils sont d’un emploi permanent
impossible et pour le premier délétère, à long terme : un courant continu de quelques
milliampères appliqués sur le promontoire provoque une inhibition des acouphènes pendant
le temps de la stimulation. Mais la technique est dangereuse : le milieu se comporte comme
un bac à électrolytes et le passage prolongé du courant continu aboutit à un déplacement
ionique irréversible, dont le témoin est la calcification.
● Les traitements logiques
Ils s’appuient sur une logique de prescription, c’est à dire sur la notion de modèle. Les deux
modèles bien explicatifs vis-à-vis de l’acouphène sont le modèle de la douleur et le modèle de
l’épilepsie.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Le modèle de la souffrance anoxique qui justifie la prescription de produits


vasodilatateurs est ancien. Largement prescrits, les produits vasculotropes ou
oxygénateurs retrouvent un certain intérêt par l’explication de leur(s) mécanisme(s)
correcteur(s) intime(s) tels que l’action anti-radical libre, anti excito-toxique. En
l’absence d’hypothèse de fonctionnement, ils sont à classer au niveau des recettes ou des
traitements communs, parce que d’une part on conçoit mal le chaînon manquant entre la
lésion et le symptôme et d’autre part l’adjectif « vasculaire » fait craindre au patient la
survenue d’une manifestation plus grave, plus dangereuse.

Les divers médicaments à visée vasculaire


Plusieurs notions doivent être très précisées lorsqu'on aborde les médicaments à visée
vasculaire.
1- Il ne faut pas confondre les anti ischémiques (extrait de gingko biloba ou Trimétazidine),
les vaso dilatateurs à type de dérivés de l'ergot de seigle ou les antihistaminiques, les
substances à visée hémorrhéologique (à effet anti sludge, type Naftidrofuryl,
Pentoxifylline, EGB 761), enfin les produits antioxydants.
2- Il est indispensable d'avoir à l'esprit que l'effet placebo de médicaments prescrits à un
patient porteur d'acouphènes est d’environ 40 %.
3- Les médicaments ayant actuellement en France une AMM pour l'acouphène sont très
peu nombreux :
- sans précision d'étiologie : Trimétazidine
- acouphène présumé d'origine vasculaire : Raubasine et EGB 761
4- De très nombreux produits sont actuellement utilisés sur le modèle de la recette ou du
traitement commun c'est-à-dire qu’ils n'ont bénéficié d'aucune étude contrôlée positive.
Dans ces conditions, la prescription de ces thérapeutiques ne peut répondre qu’à deux
logiques : soit on suit le résultat d'études contrôlées permettant de maintenir une
cohérence à la prise en charge des patients, soit, en toute honnêteté vis-à-vis du patient,
on lui prescrit un produit pour lequel on n’a que des présomptions d'efficacité, qui peuvent
d'ailleurs être renforcées par sa pratique personnelle.
Il n'en reste pas moins que l'hypothèse « vasculaire » apparaît comme vraisemblable dans
très peu de cas. Par ailleurs ces études contrôlées sont particulièrement rares en ce qui
concerne la durée d'analyse et les patients porteurs d'acouphènes depuis plus de six mois.

● Les recettes et les traitements communs


Il s’agit des traitements qui n’ont pas fait l’objet d’études cliniques contrôlées. Elles sont
plus ou moins convaincantes et les spécialités proposées ne font pas l’objet de consensus.
Leur prescription est grandement régie par les habitudes individuelles.

3.12.4.4.2 Les grandes classes pharmacologiques


L’utilisation de modèle, aussi brillante qu’elle soit, est là pour pallier notre mauvaise
connaissance. Le mécanisme exact d’action est, pour la plupart des molécules, imprécis et
les sites et modes d’action sans doute multiples.
Considérant que l’acouphène est très vraisemblablement lié aux modifications du taux
de décharge sur les voies du système auditif, les produits qui ont des effets directs sur ce
phénomène sont de bons candidats. Le circuit réverbérant ou oscillateur est un circuit
du système nerveux. Ce type de circuit fonctionne par rétro-action positive à l’intérieur
du groupe neuronal. Le circuit est réexcité par la réintroduction du même signal efférent.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Une fois stimulé, le circuit décharge à répétition pour une longue période de temps.
Dans un tel système réverbérant, le signal efférent peut durer plusieurs millisecondes
voire plusieurs minutes pour un signal afférent qui n’excède pas la milliseconde. Un des
facteurs qui détermine la durée du phénomène est la rapidité avec laquelle les synapses
du circuit s’épuisent.
Comme nous l’avons dit, le modèle de la douleur et celui de l’épilepsie justifient la
prescription de produits antalgiques ou anticonvulsivants.
Il y a quelques années l’anoxie était le grand mécanisme létal. Les produits capables
d’augmenter le flux vasculaire étaient indiqués pour les acouphènes engendrés par les
dégâts de l’anoxie.
Comme dans la thérapeutique antivertigineuse, l’utilisation des drogues varie d’un pays à
l’autre, certain produit « leader » ici n’est que peu ou pas utilisé ailleurs.
Les anesthésiants : La lidocaïne
La lidocaïne est un anesthésique local qui est aussi utilisé pour régulariser les troubles
du rythme par effet stabilisateur de la membrane. Il en résulte un ralentissement des
échanges ioniques, ce qui diminue la vitesse de dépolarisation. La lidocaïne augmente
la durée de la période réfractaire et réduit la fréquence de décharge sur les fibres.
Si depuis 1978, elle a fait l’objet de plusieurs travaux prometteurs, l’impossibilité
d’utiliser un substitut oral condamne l’emploi chronique de la méthode. Pourquoi
alors parler de ce produit ?
♦ Au plan général, l’efficacité fréquente de la lidocaïne prouve la possibilité d’action
rapide d’une drogue sur l’acouphène.
♦ Au plan individuel, elle est utilisée comme traitement parentéral. Si le résultat est
bénéfique, elle contribue à restaurer la confiance dans la thérapeutique.
♦ Enfin la lidocaïne aurait pu servir de base à un système de tri des patients pour la
mise en route d’un traitement à effets secondaires dangereux (carbamazépine et
risque hématologique).
♦ Parce que le produit a une action locale qui peut être étudiée, parce qu’il existe des
modèles animaux,… la bonne connaissance du produit contraste avec la
méconnaissance des autres dont l’action est centrale.
Après administration IV, la lidocaïne est immédiatement active. Sa demi-vie est de 10
minutes.
➤ Utilisation :
Perfusion de 1 à 2mg /kg de lidocaïne à 2%, sans adrénaline, perfusé rapidement.
Précautions d'emploi, effets secondaires et contre-indications :
Les effets secondaires ne sont pas anodins et empêchent la banalisation de l’emploi.
En fait c’est bien plus l’organisation matérielle de l’administration qui est un facteur
limitant : hospitalisation, surveillance électrocardiographique permanente pour
dépister un éventuel trouble de la conduction, mise à disposition d’un
défibrillateur…
Les complications cardio-vasculaires sont en fait relativement rares et fonction de
l’état cardiovasculaire : bradycardie, BAV, hypotension.
Les complications neurologiques sont liées à la dose administrée. Les premiers signes
sont du type confusion, puis agitation et enfin crise convulsive. Ces troubles sont
plus fréquents chez les séniles. La dose toxique est de l’ordre de 300 mg.
➤ Résultats et effet attendu :
Différentes études (rassemblées par Murai 1992) contrôlées ou non rapportent une
action bénéfique assez régulièrement constante : le résultat immédiat est compris
entre 65 et 80% d’amélioration mais après environ 20 mn le bénéfice disparaît et il n’y
a pas d’effet résiduel vrai.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Les substituts oraux de la lidocaïne


Ils ne sont pas efficaces (Tocaïnide hydrochloride) aux doses utilisables. Sa demi-vie
est comprise entre 11 et 23 heures, à peu près 10 fois plus longue que la lidocaïne IV.
Les études ne sont pas convaincantes. L’emploi de doses importantes (jusqu’à
1800 mg par jour) s'est soldé par une intolérance cutanée, des vertiges, une sudation
profuse.
Les anticonvulsivants
L’idée d’utiliser des anticonvulsivants en matière d’acouphènes provient de leur
emploi dans les douleurs rebelles. Comme les autres anticonvulsivants, l’effet
principal est lié à la diminution de la transmission synaptique. Le site d’action
vraisemblable est au niveau des voies centrales.
Les études cliniques ont initialement porté sur la Carbamazépine (Tégrétol®) mais
le risque hématologique et d’autres effets secondaires lui font préférer le
Clonazepam (Rivotril®) qui est une benzodiazépine.
➤ Posologie et mode d’emploi
Le Rivotril® est d’un maniement assez aisé avec des avantages nets :
♦ Facilité d’emploi,
♦ Bonne tolérance,
♦ Maniabilité,
♦ Effet sédatif limité en l’absence de surdosage.
La dose à utiliser est la dose minimale efficace qui dépend largement de l’emploi
antérieur de sédatifs.
La prescription du Rivotril® doit s’entourer d’une sorte de « sacralisation ». L’usage
prolongé d’une benzodiazépine peut inquiéter patient et thérapeute. De même le
terme de convulsion alarme le patient. Il faut expliquer l’analogie avec l’épilepsie, la
maniabilité du produit, l’absence d’effet secondaire aux doses habituellement
utilisées.
Le Rivotril® peut suffire comme hypnotique nocturne. La qualité de l’éveil est
bonne. La forme goutte se prête bien à une adaptation précise au cas du patient.
En l’absence d’utilisation antérieure de produit de ce type, la dose à prendre le soir au
coucher est située entre 8 et 12 gouttes, réduite goutte par goutte dès que possible.
Un comprimé équivaut à 20 gouttes et contient 2 mg de principe actif. En cas
d’acouphène très invalidant, on peut ajouter facilement 2 fois 5 gouttes dans la
journée, sans altérer la vigilance. Si le traitement d’entretien chez un épileptique est
de 0,1mg par kg la posologie préconisée dans cette indication peut être présentée
comme « filée ».
La durée du traitement doit être d’au moins 2 mois et demi.
Le Rivotril® est contre indiqué chez la femme enceinte.
➤ Les résultats :
Dans une étude utilisant en contrôle un antihistaminique pour son action sédative,
Lechtenberg et Shulman (1984) montre que le clonazepam avait un effet supérieur à
l’antihistaminique. La réponse favorable était de 69%.
L’exercice quotidien montre l’efficacité fréquente du Rivotril®. L’expérience
montre que si le sujet souhaite arrêter le plus tôt possible l’usage du Rivotril®, un
arrêt trop précoce semble faire remonter l’intensité de l’acouphène.
Les questions d’effets secondaires et d’assuétude seront traitées au chapitre des
anxiolytiques.
Les anxiolytiques
Il s’agit là encore de benzodiazépines déjà utilisées on l’a vu, comme
anticonvulsivants. Elles ont d’autres propriétés, anxiolytiques, sédatives,

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CLINIQUE ET PRATIQUE

hypnotiques, myorelaxantes, qui motivent encore la prescription. Les


benzodiazépines peuvent donc être choisies pour leur « micromécanisme » neuronal
ou pour leur « macromécanisme » anxiolytique. Le site exact et le mode d’action des
benzodiazépines sont inconnus. Les benzodiazépines semblent agir au niveau du
système limbique, thalamique et hypothalamique.
Elles ne sont pas toutes équivalentes. Certaines sont utiles parce que bien supportées
et d’usage facile comme le bromazepam (Lexomil®). Les myorelaxants
(Tétrazépam-Myolastan®) peuvent être utiles pour préparer l’effet hypnotique du
Rivotril® dans les cas sévères d’insomnie. Enfin l’alprazolam (Xanax®) est très
utilisé outre-Atlantique.
Là encore, les doses seront les plus faibles possibles. Plus que les effets secondaires à
la fois connus et rares aux doses filées, il faut évoquer le
problème de la dépendance. Plusieurs facteurs en Tout traitement par les
favorisent la survenue, comme la dose, la durée du benzodiazépines peut
traitement… La prescription au long cours de ce type entraîner un état de
de produit est toujours inquiétante et peut à juste titre pharmacodépendance
motiver certains médecins à ne pas entamer ce type de physique et psychique.
traitement. Certes il vaut mieux chaque fois que
possible éviter toute prise médicamenteuse. Mais qui peut affirmer que l’insomnie
mal supportée sans médicament est moins dangereuse qu’un sommeil avec
hypnotique. En fait, en matière d’acouphène, le patient, dans la grande majorité des
cas établit assez vite, « à la goutte près » la dose efficace. L’augmentation croissante des
doses, l’adjonction d’autres produits sédatifs doivent faire envisager un problème
plus complexe de personnalité.
Les conducteurs d'automobiles seront prévenus.
La règle générale est, rappelons-le : le moins possible, le moins longtemps possible.
La décroissance de la posologie sera annoncée dès le début du traitement.
Les antidépresseurs
Les antidépresseurs peuvent être utiles dans le traitement de l’acouphène. Les
antidépresseurs tricycliques ont aussi une action anticonvulsive. Ils semblent
capables de bloquer le phénomène «d’uptake » de divers neurotransmetteurs au
niveau de la synapse. Dans une étude réalisée par Goodey, les cas qui profitaient
d’une réduction de l’acouphène par un agent tricyclique étaient aussi ceux qui
pouvait bénéficier de l’efficacité de la lidocaïne. Tout comme pour les
benzodiazépines, les antidépresseurs peuvent être choisis pour leur « micro ou
macromécanisme ». Entre les deux, la différence sera faite par la dose.
Là encore, la prescription, si elle n’est pas motivée par une dépression identifiée, doit
être expliquée. Le terme d’antidépresseur inquiète.
Les effets secondaires, s’ils sont connus (essentiellement hypotension orthostatique
et surtout impuissance) seront annoncés. Leur existence est, avec la réticence
générale à ce type de produit, un facteur limitant de leur utilisation en matière
d’acouphène. En effet nous sommes dans la plupart des cas dans une correction de
l’inconfort et la hiérarchie des symptômes est rapidement faite par l’homme porteur
d’acouphène. De plus l’acouphène reste un symptôme invisible que le patient peut
vouloir ne pas partager avec sa conjointe.
Le produit le plus maniable reste la clomipramine (Anafranil®), à utiliser à dose très
filée de 20 à 30 mg par jour en 2 ou 3 prises. D’autres produits peuvent être choisis
pour leur spécificité. Les qualités essentielles pour les utiliser dans cette indication
sont la maniabilité, l’absence d’effet secondaire et surtout l’existence de forme
faiblement dosées.

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En cas de composante dépressive évidente les produits antidépresseurs plus récents


sont à proposer. Ils seront choisis en fonction de leur composante anxiolytique,
sthénique…
On rappellera les 2 contre-indications : le glaucome et l’hypertrophie prostatique.
La question de l’assuétude et des effets à long terme des produits psychotropes est la
même que celle soulevée au chapitre des benzodiazépines..
Les inhibiteurs calciques
La flunarizine (Sibélium®) est un bloqueur calcique qui évite la vasoconstriction et
augmente le débit artériel cérébral. Elle est indiquée en cas de vertiges périphériques
et comme traitement de fond de la migraine. L’étude en double aveugle de Hulshof
et Vermeij (1986) n’est pas convaincante mais l’expérience montre que certains
patients témoignent d’amélioration. La durée de la prescription dans la fiche
posologie est limitée à 60 jours ce qui apparaît peu par rapport à la dynamique
habituelle du symptôme.
Les vasodilatateurs et vasculotropes.
Ce sont les traitements les plus fréquemment proposés. Un seul dispose de l’AMM1
(Trimétazidine - Vastarel®). Ces substances initialement étaient justifiées par le
souci de réparer une situation anoxique génératrice de l’acouphène. Actuellement les
modes d’action intimes se situeraient près de la synapse influençant l’uptake local
après toxicité du neuromédiateur après un traumatisme sonore.
Les autres produits :
Les produits homéopathiques ou à base de plantes ont leurs partisans. Ils s’accordent
souvent très bien au motif de leur prescription : symptôme léger, excitabilité discrète,
traitement au long cours, absence d’effet secondaire.
Le placebo :
L'effet placebo :
Dans la pratique quotidienne, nous sommes confrontés à l'obligation de plus en plus
pressante d'utiliser des thérapeutiques validées de façon scientifique, selon des
protocoles précis.
Au-delà de ce que l'on observe dans d'autres situations pathologiques, la
thérapeutique de l'acouphène donne lieu à un effet placebo très important. Celui-ci
est évaluable à environ 40 % quelles que soient les techniques utilisées.
Dans ces conditions, on observe un épuisement relativement rapide de l'effet.
Cependant, dans la mesure où l'élément déterminant est le blocage de l'habituation
neuro sensorielle, on comprend l'importance éventuelle de cet effet. (S'il s'agissait
d'une hypertension, l'intérêt du placebo serait nettement moins important).
Comme dans toutes les situations, la relation médecin-patient est essentielle ; il est
noté d'ailleurs que même les médicaments développant un effet significativement
supérieur à un placebo ont également un effet placebo (l'indication négative d'un
traitement modifie globalement son effet par rapport à une indication très favorable).
Il est donc tout à fait important de ne pas proposer des techniques thérapeutiques
avec légèreté.
Nous sommes quotidiennement confrontés à des patients en situation d'échec
thérapeutique non pas tant en raison d'un déficit technique mais à cause d’une
approche du patient et de son symptôme déficitaire.
La réalisation d'essais contrôlés en matière d'acouphène est extrêmement difficile
pour plusieurs raisons : difficultés de constituer des groupes homogènes de malades
et des groupes témoins, difficultés de réaliser la thérapeutique placebo. L'exemple
type est l'utilisation de générateurs de bruit, mais l'on peut étendre cette difficulté à

1- Pour acouphène sans autre précision.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

l'acupuncture, l'hypnose, les stimulations électriques voire la thérapie


comportementale. Enfin, la plupart de ces essais ont une durée extrêmement limitée
dans le temps alors que l'on sait que l'évolution de ces acouphènes s'étale sur plus
d'une année.
En pratique donc, nous devons à la fois ne pas négliger le traitement placebo, tout en
comprenant que les essais randomisés contre placebo ne sont pas nécessairement le
"gold standard" en matière de recherche thérapeutique sur les acouphènes.

On rappelle qu’il y a des placebos actifs et des placebos neutres.


Il apparaît utile de disposer de placebos ne serait ce que pour vérifier l’absence ou la
présence d’effets secondaires avec ce placebo. L’effet nocebo peut en effet être
observé indiquant plutôt une prise en charge non médicamenteuse.
Le placebo sera d’autant plus efficace que le prescripteur est persuadé de l’efficacité
de sa prescription. Immédiatement, le pourcentage d’effets bénéfiques va être de
l’ordre de 35%. L’effet va habituellement s’épuiser au bout de quelques jours.
La liste des produits utilisés est encore longue. Nous en avons présenté
quelques uns, par identité ou par classe. D’autres psychotropes sont candidats.
Dans l’ensemble, les médicaments sont choisis en fonction :
♦ de leur maniabilité,
♦ des effets secondaires,
♦ du déclenchement de l’assuétude,
♦ de l’acceptation par le sujet.

Et pour conclure, l’efficacité du traitement médicamenteux suppose une confiance


du sujet vis-à-vis du médecin (transfert positif) qui est révélé totalement lors de
l’usage du placebo. A contrario, un traitement médicamenteux vrai, peut fonctionner
comme nocebo (effets secondaires exacerbés) en cas de mauvais transfert.

3.12.5 Thérapies cognitives et comportementales : TCC et TRT®


L’apparition de la gêne qui résulte de l’acouphène et de l’hyperacousie dépend du développement
de phénomènes centraux pour l’essentiel constitués d’attributions péjoratives au symptôme et
d’un état d’hypervigilance à la fois diffus et porté prioritairement vers les perceptions auditives
(18). Ainsi se développe un réflexe conditionné obsessionnel d’attention à l’acouphène et/ou aux
bruits (en cas de phonophobie) ou à certains bruits (en cas d’hyperacousie).
Ce phénomène implique plusieurs systèmes neuraux autres qu’auditif, comme le système
limbique, les aires associatives ou le système nerveux autonome, qui sont les principales cibles des
techniques d’habituation largement utilisées dans les thérapies cognitives et comportementales
ou dans la « Tinnitus Retraining Therapy » (TRTâ) (50). C’est, en effet, la réaction
émotionnelle, tant dans son versant cognitif que dans sa dimension somatique, qui joue le rôle
primordial dans la mobilisation attentionnelle accordée au symptôme et dans les réactions qui les
suivent. L’aspect cognitif de la réaction désigne l’acte de connaissance qui préside à sa mise en
œuvre.
Sont ainsi concernés les mécanismes d’acquisition, d’organisation et d’utilisation du savoir sur soi
et le monde extérieur. L’intrication des perceptions somato-sensorielles dans l’élaboration des
cognitions, et l’inverse par la suite, apparaît dès l’énoncé des définitions.
Inspirée de concepts cognitivo-comportementaux (35-36-46), la TRT® se fixe pour objectif de
neutraliser la réaction autonome à l’hyperacousie et/ou à l’acouphène. Elle fait appel au
counselling et à la thérapie sonore. Le counselling est un procédé de conseil bref et directif, tant au
plan de l’interprétation symptomatique qu’au plan de l’adaptation aux situations, sonores

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notamment, vécues comme menaçantes. La thérapie sonore fait classiquement appel aux
générateurs de bruits, mais elle inclut autant la correction auditive que des stimulations auditives
d’autre nature ; le principe de base étant que le silence est à proscrire. Le fondement théorique de
référence pour la TRTâ est que le processus attentionnel est sous-cortical et inconscient, régulé
par des patterns neuraux accessibles à des stimulations sensorielles.
Les thérapies cognitives et comportementales (TCC) ont pour vocation de modifier les
comportements et les pensées corollaires à travers l'application de techniques de
« déconditionnement ». La thérapie sonore est associée par le biais de l’aide auditive dès que
possible et par l’enrichissement phonique sans que le recours aux générateurs de bruit soit
indispensable. Cette thérapie sonore s’intègre au volet comportemental de la TCC quelles que
soient ses modalités. La dimension cognitive est ici beaucoup plus importante que dans la TRTâ.
Ce type d’intervention thérapeutique repose sur un modèle du fonctionnement cérébral humain
où les interactions perpétuelles des processus conscients et automatiques (de l’organisme en
général et du cerveau dans ce cadre général) imposent la combinaison d’une approche cognitive et
d’un volet comportemental.
La TCC est au mieux réalisée après des entretiens motivationnels, assurés par les ORL, qui
empruntent les principes du counselling et préparent les patients à s’engager dans une démarche
structurée à court ou moyen terme.
La stratégie thérapeutique dont relève le patient est élaborée à partir de l’analyse sémiologique du
trouble ; "somatoforme" ou dissociatif, il peut nécessiter une prise en charge plus ou moins lourde
au plan psychiatrique. Des outils psychométriques spécifiques et non spécifiques permettent une
évaluation du retentissement de l'acouphène. Trois mesures spécifiques (la mesure de la détresse
psychologique liée à l'acouphène (129), la mesure du handicap lié à l'acouphène (77) et l’échelle
subjective de sévérité de l'acouphène (57)), et une mesure de l’état anxieux et dépressif à travers
l’échelle hospitalière HAD, indépendante de la nature acouphénique de la plainte, constituent les
principales explorations couramment utilisées. Un journal de suivi de l'acouphène peut être
proposé pour réaliser un inventaire des situations rencontrées, l'intensité de l'acouphène ressenti,
la gêne que cela engendre et les commentaires que fait le patient par rapport à ce qu'il ressent,
pense, fait ou ne fait pas.
La TCC va consister à réduire l’état de tension physique et émotionnelle qui accompagne
l’acouphène et l’hyperacousie. En rapport ou non avec ces symptômes, cette tension fait le lit de la
focalisation attentionnelle à l’origine de la gêne ressentie. La technique de relaxation progressive
de type Jacobson va autoriser des modifications comportementales d’adaptation en permettant
des expositions aux situations redoutées. La connaissance des processus automatiques de pensées
et de croyances va permettre une maîtrise des interprétations et des réactions apprises inadaptées.
La relaxation de type Jacobson fait appel à des contractions étagées préalables à un
relâchement musculaire concernant de proche en proche la totalité du corps. L’évocation d’une
scène imaginaire favorisant la sensation d’apaisement physique et mental constitue la phase finale
du procédé. Une injonction paradoxale d’inattention au contexte sonore ambiant favorise la
distraction à l’égard du signal acouphénique.
Au plan cognitif, la notion de base en matière d'acouphène est que sa négligence (et, par
conséquent, sa tolérance) devrait être la réponse normale au phénomène. Les mécanismes qui
s'opposent au développement de ce processus sont la crainte d’une pathologie sous-jacente
(comme une tumeur ou une surdité) ou l’existence de comportements (actes ou pensées) ayant
pour conséquence de perturber l’activité du patient (écouter une conversation, s'endormir...).
Le but des TCC est de réadapter le sujet face à son acouphène ; sa capacité de détection du signal
n’est pas modifiée. Le « déconditionnement » repose sur trois piliers : information, analyse
critique des croyances, élaboration et confrontation aux alternatives. Une information aussi
actualisée et exhaustive que possible quant aux connaissances en physiopathologie et leurs
implications thérapeutiques est le premier temps de la restructuration cognitive : la convergence
et la cohérence des discours du thérapeute et de l’ORL est un aspect déterminant de l’adhésion du
patient à la suite de la démarche.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

C’est ensuite par une analyse détaillée et méthodique de l’argumentaire fondant les convictions
nuisibles des patients que l’on parvient à mettre en lumière leurs insuffisances ou leurs
inadaptations. Cette démarche critique conduit à l’élaboration d’alternatives des interprétations
et des conséquences concrètes qui en découlent. Enfin, grâce à une exposition graduée, planifiée
et encadrée, des activités redoutées sans justification objective sont réinvesties progressivement :
les anticipations néfastes sont remises en cause.
Après une première phase thérapeutique en rapport avec les préoccupations actuelles des patients,
c’est la mise en évidence de modes de pensée délétères, au quotidien, hors du champ auditif,
entretenant un climat émotionnel négatif, qui va permettre de généraliser les méthodes
cognitives utilisées à propos de l’acouphène et de l’hyperacousie. D’autre part, cette extension du
champ d’analyse cognitive conduit le sujet à dévier son attention vers d’autres préoccupations
concrètes.
La restructuration cognitive procède de la modification de certaines pensées (des "croyances
absolutistes") qui accompagnent l'acouphène et conditionnent des réactions délétères. Ces
pensées sont caractérisées par des excès, des approximations
péjoratives, des erreurs ou des conclusions inappropriées. Quelques Restructuration des
croyances absolutistes concernant l'acouphène sont souvent croyances.
rencontrées : "ça va obligatoirement devenir épouvantable si ces
perceptions sonores ne disparaissent jamais", "ce type de bruit est réellement des plus déplaisants", "il
est injuste que j'aie à souffrir de mes acouphènes", "je suis certain que mon état va s'aggraver si je dois
supporter cela tout le temps", "l'immense majorité de mes problèmes est causée par ces manifestations
auditives", "si ces acouphènes continuent, la vie ne vaut absolument plus la peine d'être vécue".
L'ensemble de ces propositions thérapeutiques va permettre d'élaborer une stratégie d'adaptation
à l'acouphène et aux situations de déclenchement ou d'aggravation. Le patient va apprendre à
"gérer" son acouphène et à rendre cette manifestation aussi neutre que possible.
L’analyse des circonstances de manifestation de la gêne va permettre de faire prendre conscience
de l’influence des facteurs émotionnels, de l'intensité relative de l'acouphène par rapport à
l’intensité sonore de l'environnement, signifiant le pouvoir masquant d’un son naturel comme la
modification de la focalisation attentionnelle selon les activités du
patient. Les réactions sensorielles et la capacité de distraction, Analyse des des
indépendamment de l’acouphène et des circonstances sonores, seront circonstances de
explorées dans la perspective d’une généralisation des apprentissages survenue de la gêne.
en TCC conditionnant pour partie leur efficacité et leur pérennité.
L'analyse comportementale conduit à reconnaître ce qui, par évitement ou inadéquation,
maintient ou aggrave la perception de l'acouphène. La réadaptation comportementale consiste à
modifier les attitudes qui aggravent le trouble : évitements de certains lieux ou situations, pertes
d'activité, environnement trop bruyant ou trop silencieux, stratégies de coucher et de sommeil
anxiogènes ... Par exemple, en cas de trouble du sommeil associé à l’acouphène, le patient repère
ce qui s'oppose au réflexe d'endormissement, par perte notamment de la fonction symbolique
inductrice du lit : il ne fera rien d'autre au lit que de dormir ou s'adonner au plaisir sexuel, au lieu
bien souvent d'y regarder la télévision ou de lire, voire de manger. Il apprend à modifier les
conditions concrètes du coucher et du sommeil (se coucher fatigué, ne pas rester au lit éveillé, se
lever à la même heure tous les jours avec un nombre d'heures de
sommeil nécessaire et suffisant). Il aménage ou corrige les Analyse et réadaptation
anticipations catastrophiques qui précèdent le coucher. De la des comportements.
même manière, une personne qui fuit les magasins perçoit le
brouhaha comme stimulant l’acouphène.
Une réexposition à cette situation, après plusieurs étapes si nécessaire, en prévenant la réponse
anxieuse par un procédé de relaxation va objectiver l’inconstance de la réaction attendue ou de
son intensité : l’anticipation perd son caractère obligatoire (ceci participe de la restructuration
cognitive). Le sujet réinvestit progressivement, de manière hiérarchisée, des plus faciles aux plus
difficiles, des lieux et des activités, en utilisant préalablement des procédés de relaxation et une
réévaluation des anticipations faisant obstacle.

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En pratique, dans le cadre de certaines consultations, hospitalières en particulier, dédiées à


l’acouphène, la TCC consiste en trois premiers entretiens individuels de 60 minutes, poursuivie
en travail de groupe (2 à 8 patients) d’une durée d’une heure et demi chacune, à raison d’une
réunion hebdomadaire durant huit semaines.
Ainsi, dans ce protocole, la TCC comprend onze entretiens de 90 minutes chacun (soit 16 heures
30 au total) sur une période d’environ trois mois. De façon complémentaire, il est
systématiquement proposé d’enrichir son atmosphère sonore au moyen de diffuseurs de sons
(bruits d’ambiance, musique).
Les résultats obtenus par les TCC intéressent et le symptôme et le contexte personnel qui
explique et pérennise l’intolérance au symptôme. Les évaluations chiffrées ont retrouvé des
améliorations, dépassant dans 1/3 des cas 70% des scores de gêne (détresse et handicap), pour près
de 80% des patients dans les populations étudiées. Selon les promoteurs des TTC, il existerait une
différence1 notable entre TRTâ et TCC : il faut 11 entretiens hebdomadaires pour mettre en
œuvre le protocole de TCC, soit environ 3 mois, alors qu’il est nécessaire de prévoir 18 à 24 mois
pour escompter des résultats avec la TRTâ.

3.12.6 La prise en charge audioprothétique


• Justifications.
• Les générateurs de bruit.
• Une étude clinique.

3.12.6.1 Pourquoi redonner de l’audition ?


Parce que dans le cadre d'acouphènes considérés comme gênants, voire invalidants, la
déficience auditive passe au second plan pour le patient; elle est peu sujet de plainte, ou alors
en tant que conséquence de l'acouphène. Le patient est souvent persuadé que la "guérison" de
son acouphène soldera ipso facto son problème d'audition, qu'il ignore parfois, qu’il dénie ou
qu’il néglige le plus souvent.
Or il s'avère essentiel de réduire le plus possible la durée de cette privation sensorielle, afin de
préserver le capital de plasticité.
Par ailleurs, cette privation sensorielle participe de façon extrêmement négative au vécu de
l'acouphène, quelle que soit l'origine de celui-ci. Imposer au patient un appareillage serait
aller au devant d'un échec, puisque n'apportant pas une réponse à sa souffrance émergente.
L'appareillage doit être proposé comme moteur d'une amélioration, pédagogiquement
justifié, pour créer une vraie motivation ; c'est à cette seule condition que l'appareillage sera
d'abord accepté, puis intégré et enfin efficace à la fois en terme de correction auditive et dans
le cadre d'une thérapie. L'audition pourra cesser alors d'être une piqûre de rappel permanente
pour retrouver son rôle de vecteur de communication, et permettre au patient de se tourner
vers l'extérieur, en se défocalisant de sa souffrance.
Cette correction doit s'appuyer sur un interrogatoire et des tests pré-prothétiques encore plus
approfondis que dans le cadre d'une correction auditive classique. D'abord pour mieux
mettre en évidence et cerner une éventuelle gêne sociale, en l'isolant de celle consécutive au
vécu de l'acouphène.
Ensuite parce que le risque d'altération de la dynamique résiduelle est important
(recrutement, hyper-recrutement, phonophobie, …), et qu'une sur-correction entraînerait
un inconfort ressenti comme une agression surajoutée à l'acouphène.
De même, le confort doit primer dans l'adaptation initiale, tant au niveau physique qu'au
niveau acoustique, et ce d'autant plus que le déni du déficit auditif est important, ou qu'il est
situé en retrait par rapport à l'acouphène. Dans ce cas en effet, tout paramètre d'inconfort
prendra un relief considérable, et deviendra prétexte à un rejet de l'appareillage.

1- Elle mériterait d'être mieux explorée.

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Une adaptation prothétique confortable et efficace peut participer à une prise en charge
globale.

3.12.6.2 Le rapport Signal/Bruit


Comment voulez-vous que je comprenne correctement avec le bruit que j'entends en
permanence ?"est certainement la phrase que nous entendons le plus.
Si l'amélioration du rapport signal/bruit est un but constant en matière d'appareillage auditif,
elle l'est plus encore pour un acouphènique.
En effet, meilleure est la qualité de la perception, plus vite s'estompera le retour des
associations émotionnelles (système limbique) consécutif à la gêne, qui augmente le pouvoir de
détection au niveau subcortical.

Perception et évaluation bonne qualité


Audition et autres aires corticales mauvaise qualité

CONSCIENCE

SUBCONSCIENCE

Détection Associations émotionnelles


Subcorticale système limbique

Source Contrariété, gêne


Acouphène SNA

Figure 33 - D'après Jastreboff.

Par ailleurs, l'amélioration du rapport S/B est primordiale pour les sujets acouphèniques
associant une surdité endo-cochléaire (81% des cas C. Puel 2003): à ces surdités, les plus
marquées sur les fréquences aiguës, se cumule une détérioration souvent discriminative de la
discrimination fréquentielle. D'après McDermott et coll. (1998).

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 34 - Chez 5 sujets ayant une chute auditive et des acouphènes, on peut constater la
coïncidence entre la tonie de l'acouphène et l'amélioration des capacités de discrimination
fréquentielle dans la zone de l'acouphène. (D'après Mc Dermott, 1998).

Les aides auditives actuelles étant techniquement incapables de corriger ce type de


dysfonction, il importe d'optimiser le rapport S/B pour restaurer la qualité de la perception de
sonie, et minimiser les conséquences négatives de cette dysfonction sur l'intégration.
Si la privation neuro-sensorielle génère une réduction de l'intégration temporelle et de la
sensibilité aux sons faibles, la plasticité cérébrale permet, suite à l'appareillage, d'obtenir dans
le temps une amélioration significative des capacités d'intégration intrinsèques dans le bruit,
pour des niveaux conversationnels.

3.12.6.3 Appareillage auditif et plasticité cérébrale


Les performances d’identification de mots dans le bruit chez des sujets malentendants
appareillés monauralement ont été testées :

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Taux du S/B pour 50% de performance (dB)(déviation standard)


Intensité signal Oreille aidée Oreille non aidée
65 dB SPL 13.2 1.5 10.0 1.4
70 dB SPL 9.8 1.8 8.9 1.2
75 dB SPL 7.9 1.8 7.1 1.8
80 dB SPL 6.4 1.4 7.9 1.7
85 dB SPL 4.2 1.3 6.8 1.9
90 dB SPL 2.8 1.4 6.5 1.3

Figure 35 - Performances d'identification de mots dans le bruit, chez des sujets malentendants
appareillés en monoural. Gatehouse (1989).

Plus récemment, Hurley a comparé les scores de reconnaissance de mots lors des tests
initiaux et des deux années suivantes pour les oreilles aidées et non-aidées de sujets
appareillés monoralement .

Figure 36 - Scores aux tests diachroniques de reconnaissance de mots, oreilles appareillées ou non.

L'amélioration pour les oreilles aidées est significative dès la deuxième année (supérieure
à 30% pour certains mots), alors qu' "a contrario" une tendance à la diminution des scores
pour les oreilles non aidées est notable.
La plasticité cérébrale participe activement à la réhabilitation aussi bien qu'à
l'habituation, et doit être évoquée dans la prise en charge prothétique de l'acouphènique;
elle est d'abord extrêmement positive, même si elle doit être relativisée pour ne pas
générer de déception à contretemps. Elle permet également de positionner l'appareillage
dans la durée, de façon pédagogiquement motivée.
La réorganisation neuro-physiologique (plasticité) consécutive à une lésion laisse les
neurones associés à la perception initiale: suite à une perte auditive, les neurones dont la
fréquence caractéristique est concernée par la perte deviennent sensibles aux fréquences
proches de la fréquence de coupure. Ceci vient apporter un complément d'explication
aux travaux de McDermott sur la discrimination fréquentielle: c'est la désafférentation
qui est responsable de cette diminution.
Dans ce cadre, par extension à l'acouphène, le spectre de celui ci se situe dans la zone de la
perte auditive (réorganisée), au même titre que la stimulation du visage peut évoquer des
sensations dans un membre manquant (zones corticales voisines).
Ce modèle est corroboré par différentes mesures mises en perspectives, effectuée par
Norena en 2002 et 2003.

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3.12.6.4 Restaurer un confort de communication


L'acouphénique sera appareillé dans un premier temps avec le même soin qu'un
malentendant "ordinaire", en portant une attention toute particulière à :

Figure 37 - Spectre de la perte auditive. Spectre de l'acouphène.

l'anamnèse : survenue de la surdité, dates et/ou circonstances, antécédents médicaux



et chirurgicaux, habitudes de vie, passées et présentes, gêne sociale ressentie,
indépendamment de l'acouphène, etc.;
– la ou les plaintes (à hiérarchiser clairement);
– aux explications, pédagogiquement adaptées à la fois au niveau socioculturel, et au
désir de savoir du patient;
– aux attentes du patient, particulières, compte tenu de sa plainte;
– à ses freins psychologiques, avoués ou non;
– aux tests audiométriques pré-prothétiques: sans redondance, mais complets et
prudents, surtout concernant l'inconfort, même s'il n'a pas été évoqué
précédemment;
– aux objectifs prothétiques (en liaison avec l'équipe pluridisciplinaire de prise en
charge le cas échéant): ils doivent être précis, pour intégrer la prise en charge dans le
temps, positifs et réalistes, pour ne engendrer de déception,
– aux capacités du patient, et adaptatifs.
Le choix prothétique devra s’inscrire dans le possible cadre d'une T.R.T., même si ce n'est pas
le cas initialement, et donc éventuellement prévoir l'adjonction d'un générateur de bruit
thérapeutique.
Particularités concernant l'acouphène:
– anamnèse spécifique: date de survenue de l'acouphène, circonstances, type,
localisation, questionnaires complets (toujours sans redondance) portant sur la
sévérité et la gêne sociale ressentie. Ces questionnaires SEV et THQ (voir en annexe
page : 132) validés présentent un double intérêt en terme de prise en charge: ils
permettent après interprétation de dresser un profil relativement précis du patient et
du vécu de son acouphène, et de suivre l'évolution de ce vécu au fil de la prise en
charge.
La difficulté réside dans la complexité de certaines questions, pas toujours évidentes pour le
patient. Le problème est de savoir si le patient doit les remplir seul, sans faire intervenir la
subjectivité d'une tierce personne, ou s'il doit les remplir avec l'audioprothésiste.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Le questionnaire de détresse doit être réservé à l'équipe médicale le cas échéant (médecin
ORL ou psychothérapeute): le contenu de certaines questions obligeant l'interlocuteur à se
substituer à un rôle de psychologue, qu'il n'est pas forcément, ou qu'il n'est pas suffisamment,
ou pour lequel il n'est pas formé. Un questionnaire d'hypersensibilité auditive est également
disponible: il permet d'établir une classification en cas de diminution de la tolérance au bruit.
A l'inverse du recrutement pur, ni l'hyperacousie, ni la misophonie, ni la phonophobie n'ont
de relation directe avec les seuils auditifs mesurés; les patients atteints de l'une de ces
manifestations peuvent ou non présenter une perte auditive associée.
Une écoute attentionnée est là encore plus importante que pour une prise en charge
"classique". D'un point de vue psychologique (hors prise en charge pluridisciplinaire), le sujet
acouphènique ne demande qu'à verbaliser sa souffrance à quelqu'un qui l'écoute et le
comprenne. Attention toutefois de ne pas verser dans l'excès et se laisser « embarquer » dans
un rôle qui n'est pas le sien et pour lequel on n'est pas armé, au risque d'y laisser des plumes,
et/ou de commettre des impairs pouvant remettre en cause la qualité de la prise en charge
prothétique de façon irrémédiable.
Tests psycho-acoustiques : profil de l'acouphène (encadrement fréquentiel par comparaison
ipsi- ou controlatérale), intensité (recherche du niveau de masquage énergétique
(narrow-band, bruit blanc, ou rose), et/ou informationnel (cocktail party).
Les objectifs doivent s'intégrer dans le cadre d'une prise en charge globale, incluant les
objectifs qui concernent la correction de l'audition. Ils doivent là aussi être positifs, mais
réalistes, et se porter dans la durée. L'objectif principal de la prise en charge prothétique au
niveau de l'acouphène doit rester l'amélioration de la qualité de vie, souvent dans la régularité
et dans le temps (d'où l'intérêt de la réitération de questionnaires de loin en loin), très
rarement de façon immédiate.
L'adaptation d'aides auditives dans le cadre d’acouphènes associés au déficit auditif et en
l’absence de prise en charge pluridisciplinaire, n'est pas un remède miracle; si l'amélioration
sur le plan de la communication est dans la majorité des cas très significative, la disparition de
l’acouphène immédiate, totale et permanente reste rarissime. Il convient donc de fixer
conjointement avec le patient des objectifs possibles, bien perçus et acceptés. C'est la clé de
voûte de la prise en charge.
L'adaptation prothétique doit être progressive, et les réglages motivés par les différents tests
pratiqués. La notion de confort passe d'essentielle à primordiale, tant au point de vue
physique, qu'acoustique ou émotionnel, quitte à sous-corriger l'audition et revoir
rapidement son patient. Le suivi doit être fréquent, pour toujours coller à une correction
optimale et stimuler les zones lésées pour appuyer la réorganisation tonotopique. La
réhabituation mérite d'être surveillée de près. Mais pour qu'il y ait réhabituation, il faut qu'il y
ait port régulier, et pour qu'il y ait port régulier, il faut que l'appareillage soit
CONFORTABLE. CQFD… Ce qui est d'autant plus vrai que la plainte due à l'acouphène
est importante.

la question de l’embout
Dans le cadre de surdités présentant une perte auditive en pente des graves vers les aigus (y
compris les surdités traumatiques), soit environ 80% des cas, la sensation d'occlusion du
conduit auditif est une plainte qui revient de façon itérative, si l'embout n'est pas aéré de
façon suffisante. Le diamètre de l'évent nécessaire pour éviter cette sensation est
proportionnel à la fréquence du point d'inflexion de la perte auditive. En première intention,
et à titre indicatif, un diamètre de 2mm de diamètre correspond à des graves conservés jusqu'à
500Hz, 2,5mm une baisse à 1kHz, 3mm et plus au-delà.
Dans le cadre de la correction de surdité associée aux acouphènes additionnée d'une
détérioration importante de la perception de sonie, l'évent peut accueillir un filtre mécanique
habituellement utilisé dans les protections anti-bruit: l'appareillage cumule alors une
amplification contrôlée par l'utilisation de facteurs de compression importants et d'écrêteurs

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CLINIQUE ET PRATIQUE

puissants, et une protection aux fortes intensités par le filtre, ce que ne permet pas un évent
classique.
Mais avec l'aération se pose le problème du larsen, réultat de la saturation dans la boucle
amplificatrice; l'aide auditive siffle, seule, ou dès que cette boucle est facilitée (passage de la
main dans les cheveux, chapeau, mur frôlé, etc). Ce phénomène est d'autant plus important
que l'amplification nécessaire sur les fréquences aiguës est importante; la fréquence de
résonance se situe en effet autour de 3kHz.
Même si les aides auditives numériques possèdent des dispositifs électroniques anti-larsen, la
réduction chronique de gain (en particulier pour les sons de faible intensité) rend la
correction peu attractive au niveau prothétique, et l'adaptation problématique en raison de la
difficulté à trouver le bon équilibre entre confort et efficacité.
Mais devant l'émergence de la nouvelle génération de surdités légères prêtes à être
appareillées (presbyacousies naissantes pour le papy-boom, et traumatismes sonores "légers"
à répétition pour les amateurs de musique forte), les fabricants ont mis au point des stratégies
"oreille ouverte" permettant entre autres de reculer les limites de l'apparition du larsen, et
ainsi de corriger des pertes auditives jusque là difficiles (Canta Open, Triano TA, Air 60).
Ces aides auditives peuvent être utilisées pour corriger des pertes auditives associées aux
acouphènes, avec un excellent compromis confort/efficacité.
La possibilité nouvelle de corriger ce type de surdité va sans doute aider à faire prendre
conscience aux acouphèniques pour qui la baisse d'audition est tout à fait secondaire qu'un
appareillage précoce favorise une réhabituation rapide et de qualité, et aux médecins ORL
que ce type de surdité, jugé il y a peu inappareillable, peut être actuellement corrigé dans de
très bonnes conditions, en utilisant au mieux le capital de plasticité cérébrale de leurs patients
le plus précocement possible.

3.12.6.5 Le générateur de bruit blanc (GBB)


Plusieurs types de générateurs différents sont proposés, ces derniers peuvent être associés à
des prothèses auditives. Le point important est que le générateur doit répondre à des
caractéristiques électroacoustiques précises. Les qualités du son demandées sont :
● Couverture d’une large bande de fréquence laquelle doit inclure celle des acouphènes.
● Etre le plus neutre et stable possible.
● Etre privé d’associations émotionnelles.
● Avoir la puissance sonore capable d’atteindre le « mixing-point ».
Par rapport au masqueur d’acouphène classique utilisé dans le but de « couvrir »
complètement l’acouphène et d’exploiter le phénomène d’inhibition résiduelle, le GBB dans
la TRT sert à réduire le rapport signal/bruit pour faciliter les procédures de désensibilisation.

Figure 38 - « Mixing point »


En abscisse : l’intensité du son
masquant, en ordonnée : le
développement de l’habitua-
tion. On constate que le son
doit être entendu pour déve-
lopper une habituation. L’in-
tensité du bruit ne doit pas
dépasser l’intensité du
« mixing point », point où le
sujet ne sait plus si ce qu’il en-
tend est « son acouphène » ou
le générateur de bruit.
Au-delà, pour une intensité
plus forte, c’est un masquage,
peu propice au développe-
ment de l’habituation.
D'après P. Jastreboff.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Les avantages portés au crédit du GBB par rapport aux techniques d’enrichissement sonore
ambiant consistent à pouvoir disposer d’un stimulus à large bande bien contrôlable en temps
d’exposition et d’intensité. Ces paramètres de stimulation sont personnalisés pour chaque
patient.

Application du GBB à la TRT


● L’application du GBB doit être effectuée de façon différente en fonction du vrai traitement
(fitting1, counselling2) ou dans la phase successive de suivi du patient (follow-up
counselling).
Le premier rendez-vous dure approximativement 45 minutes et consiste en une explication
claire et détaillée sur la façon d’appliquer l’appareil, son usage, l’utilisation correcte du
volume et le temps d’utilisation.
Les rendez-vous suivants permettent de contrôler, par le biais de questionnaires, l’utilisation
correcte de l’appareil et d’évaluer les éventuels changements à apporter au volume et au
temps d’utilisation sur la base de critères d’évaluation psycho-acoustiques.
Initialement, le patient doit être ré-examiné après trois semaines, ensuite après trois mois et
enfin tous les six mois. Le protocole de traitement doit durer au maximum deux ans.
● Quelle oreille ?
Les générateurs de bruit doivent être si possible appliqués dans les deux oreilles, même dans
les cas d’un acouphène mono latéral. Il faut toujours régler les générateurs de bruit une fois
positionnés dans les oreilles et procéder au réglage l’un après l’autre.
● Quel volume ?
Il faut appliquer le GBB, vérifier sa position, le confort et le caractère non occlusif de
l’embout. Une fois cette première phase achevée, on peut activer le GBB et augmenter le
volume jusqu’à ce que le son soit clairement audible par le patient.
Il faut demander au patient si :
– Le son est agréable et pas gênant.
– L’acouphène est modifié d’une façon ou d’une autre par le biais du bruit.
– Si la réponse à l’une ou à l’autre demande est « oui », lire les points A et B.
♦ A. Si le son n’est pas confortable voire désagréable, diminuez le volume du GBB
jusqu’à trouver le niveau de confort.
♦ B. Si le bruit modifie l’acouphène, diminuez le volume du GBB jusqu’à ce que
l’acouphène ne soit plus perçu comme normal et le bruit du GBB soit audible.
Si le son du GBB est confortable, il n’a pas modifié l’acouphène, il faut alors augmenter
graduellement le volume. Demander au patient de signaler à quel moment le bruit du GBB et
l’acouphène sont mélangés. Laisser le GBB réglé sur ce niveau pendant quelques minutes.
Après quelques minutes, demander au patient si :
– Le son est agréable et pas gênant.
– L’acouphène est modifié d’une façon ou d’une autre par le biais du bruit.
Si la réponse à l’une ou à l’autre demande est « oui », lire les points A et B précédents, sinon
lire le point C.
♦ C. Si le bruit n’est pas gênant et l’acouphène n’est pas modifié, le « mixing-point »
est atteint et il correspond au niveau d’utilisation correct du GBB.
Eteindre le premier GBB. Appliquer le même mode opératoire pour l’autre oreille.
Allumer successivement les deux GBB.

*
1- appareillage.
**
2- conseil.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Demander au patient si :
– Le son est agréable et pas gênant.
– L’acouphène est modifié d’une façon ou d’une autre par le biais du bruit.
– Le bruit des deux GBB est équilibré.
Si le son n’est pas confortable voire gênant, lire les points A et B.
Si le son n’est pas équilibré, augmenter le volume du GBB le plus faible pour atteindre le
niveau de l’autre GBB et réduire successivement le volume des deux GBB vers le
« mixingpoint » le plus bas.
Poursuivre la consultation sans modifier les réglages des GBB.
Montrer au patient la modalité de réglage et le positionnement des piles sur un GBB du
même modèle. Montrer la mise en fonction et la manipulation au moins 3 fois par oreille.

Vérifiez si :
– Le bruit du GBB est confortable, de cette façon, il sera toléré sur de longues périodes.
– Le volume du bruit du GBB est au « mixing-point » ou légèrement en dessous.
– L’acouphène ne doit être altéré en aucune façon.
– Le patient réussit à placer les GBB sans difficultés.

● Protocole type

Suggestions du protocole à discuter et adapter à chaque cas.

Premier mois :
Le GBB doit être réglé à l’intensité minimale audible en conditions de silence et l’intensité ne
doit pas être modifiée pendant le premier mois.
– Première semaine : Le GBB doit être porté 2 heures par jour en conditions de silence.
– Deuxième semaine : Le GBB doit être porté 3 heures par jour en conditions de
silence.
– Troisième semaine : Le GBB doit être porté 4 heures par jour en conditions de
silence.
– Quatrième semaine : Le GBB doit être porté 5 heures par jour en conditions de
silence.

Deuxième mois :
Au début du deuxième mois, l’intensité du bruit du GBB sera légèrement augmentée mais
sans interférer avec la compréhension de la parole et sans masquer l’acouphène.
Le GBB sera porté pendant 6 heures par jour, parfois en continu et d’autres fois de façon
intermittente, en choisissant de préférence les périodes les plus silencieuses de la journée.
Protocole alternatif :
– 1er mois : 1 heure
– 2ème mois : 2 heures
– 3ème mois : 3 heures
– 4ème mois : 4 heures
– 5ème mois : 5 heures
– 6ème mois : 6 heures
– 7ème mois : la majeure partie du temps.
Cette thérapie doit être appliquée pendant plusieurs mois.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

● Instructions pour le patient :


– Les GBB devront être portés au moins 6 heures par jour sans interruption ; si le
patient réussit à les garder sur des périodes plus longues, c’est encore mieux.
– Les GBB devront être portés dans les périodes les plus silencieuses de la journée.
– Le réglage doit être effectué en conditions de silence.
– Une fois le bon réglage effectué, le volume ne doit plus être modifié.
– Si le bruit du GBB n’est plus perçu (par exemple, dans une ambiance bruyante), ne
plus augmenter le volume du GBB car cela serait sans incidence sur l’efficacité du
système.

Adaptation au GBB :
Le patient aura besoin de quelques semaines pour s’habituer au GBB. Si l’acouphène semble
plus invasif (plus gênant) pendant les premières semaines d’adaptation, les causes possibles
sont :
– L’application des GBB rappelle au patient l’existence de l’acouphène.
– Les GBB sont une nouveauté et nécessitent une période d’adaptation pour s’habituer
à leur présence.
– Le patient est anxieux et surveille les effets du GBB sur l’acouphène.
Il ne faut pas oublier de conseiller au patient d’utiliser les GBB surtout à la maison pour se
familiariser avec l’utilisation de ces appareils.

Quelques précisions :
– Si l’acouphène est fluctuant, le GBB peut être porté soit pendant les jours « négatifs »
soit pendant les jours « positifs ». Pendant les jours positifs, on peut baisser le volume
du GBB.
– Les GBB devront être portés pendant au moins 6 mois. Le but est d’arriver au point
où l’acouphène ne représente plus un problème pour le patient, même dans les
périodes où il ne porte pas le GBB. A partir de ce moment, il faudra diminuer
progressivement l’utilisation du GBB jusqu’à son arrêt complet.
– Le but n’est pas de masquer l’acouphène. Si cela arrive, cela signifie que le volume
était réglé de manière trop élevée. Le bruit du GBB et l’acouphène doivent
impérativement se mélanger tout en restant reconnaissables.
– De nuit, le GBB ne doit pas être porté, le patient doit utiliser une radio, posée à coté
de son lit, à volume très bas et syntonisé entre deux stations radiophoniques.

3.12.6.6 Une étude clinique


Apport d’une prothèse acoustique et d’un bruiteur conjoint (Contour d’oreille TCI-COMBI®
de Siemens®) dans le traitement des acouphènes chez des sujets hypoacousiques
La prise en charge thérapeutique des sujets porteurs d’acouphènes invalidants comporte un
axe important : la mise en œuvre des processus d’habituation. La prise en charge des sujets
acouphéniques ET déficients auditifs est complexe, mais bénéficie d’un atout majeur : la
compensation de la surdité. On propose donc classiquement :
– un appareillage prothétique qui comprend toujours une prothèse amplificatrice, à
laquelle on adjoint parfois un bruiteur.
– un soutien psychologique axé sur l’acceptation du symptôme grâce à sa
compréhension.
La conjonction de ces éléments aboutit à l’habituation, phénomène classique de la
psychologie sensorielle : Le sujet, soit par une perception amoindrie, soit par des réactions
aversives diminuées, soit par la conjonction de ces deux processus supporte mieux son
acouphène.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

L’apport d’une prothèse auditive amplificatrice à faible bruit de fond qui peut aussi générer
un bruit blanc à bande large modulable en intensité et réglable en tonalité a été étudié chez 30
sujets pendant le temps habituellement imparti à l’habituation.

Principes de l’étude :
Évaluer l’apport d’un bruit non masquant (déterminé au point de confusion entre
acouphène et bruit ajouté) au processus d’habituation à l’acouphène. Evaluer l’efficacité de la
prothèse auditive TCI-Combi® capable de fournir ce bruit, simultanément à l’amplification
auditive classique, par la mesure de la doléance des sujets par auto-questionnaires.
Les 30 sujets sont appareillés avec le TCI-Combi® (27 sujets en binaural, 3 en monaural)
en 2 phases successives :
Phase A : de 10 à 12 semaines en amplification seule.
Phase B : de 10 à 12 semaines en amplification+bruit. L’ordre des phases est aléatoire.
Le sujet est son propre témoin.
Les sujets se sont engagés à porter la prothèse au moins 6 heures par jour. La compliance
à la consigne est déclarative.
A la fin de l’étude, les sujets pouvaient restituer la prothèse ou l’acquérir.
Pendant les 24 semaines les sujets ont répondu chaque semaine à 3 questionnaires validés
THQ, DET, SEV (76-77).
Sauf réglage inconfortable nécessitant un retour au service, les patients n’ont été revus
qu’au changement de phase (12ème semaine) et à la fin de l’étude ( 24ème semaine)

Résultats cliniques pour les 24 sujets qui ont effectué les 2 phases de test :
5 sujets ont restitué les prothèses en fin d’étude.
1 sujet a restitué les prothèses pour les remplacer par leur version intra. Il a été comptabilisé parmi les
« satisfaits ».
Parmi les 18 sujets qui ont souhaité conserver le TCI-Combi® en fin d’étude, nous
avons distingué le réglage choisi.
6 sujets ont gardé les prothèses en amplification seule :
12 sujets ont choisi de garder l’appareil en position amplification ET bruiteur. Parmi
ceux-ci 2 patients qui avaient déjà essayé des masqueurs d’acouphènes.
Après 24 semaines d’appareillage 60% des sujets gardent le TCI-Combi® dont 67% en
position amplification+bruit.
En résumé :
– 20 % (6/30) des patients sont sortis de l’étude
– 20% (6/30)des sujets ont restitué l’appareil
– 60% (18 /30) des sujets ont gardé le TCI-Combi®.
Parmi ces 60% (18/30) de satisfaits,
– 33% (6 /18) des sujets ont gardé une amplification seule et
– 67% (12 /18) une amplification avec bruit.

Pour les 28 sujets dont les questionnaires étaient analysables:


– Au questionnaire DET, on note une baisse statistiquement significative des scores,
entre le questionnaire à J0 et les questionnaires hebdomadaires
● Conclusion

Cette étude met en évidence un bénéfice potentiel du TCI-combi® pour des sujets qui
présentent des acouphènes invalidants, relativement récents, ajoutés à une surdité

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CLINIQUE ET PRATIQUE

moyenne à sévère. Le modèle est celui d’une thérapie auditive efficace aux moyens
moins lourds que ceux d’une thérapie sonore par l’habituation (TRT) puisque les
entretiens de suivi ont été remplacés par un lien épistolaire et que la période de suivi n’a
été que de 24 semaines.
3.12.7 Le rôle central de l’information
L’information joue un rôle central dans la prise en charge de l’acouphène. Toutes les
thérapeutiques psychologiques s’y attachent. En général, la quantité d’information est plus
grande dans un signal inconnu. Un tel signal mobilise largement le système cognitif du sujet afin
de savoir si le signal est dangereux pour sa survie. L’acouphénique va pendant longtemps tenter de
dépister les raisons de la variabilité de l’acouphène. Il y mobilise son attention, la polarisant sur
l’acouphène. Comme l’ont affirmé nos anciens, il y a peu de relation logique entre le symptôme et
la plainte :
« la douleur est toujours moins forte que la plainte » ( Jean de la Fontaine)
« la plainte surfait toujours un peu les afflictions » (D. Diderot)
De cela aussi il faudra informer le patient pour éviter le cercle vicieux : la polarisation sur
l’acouphène augmente sa détection, qui augmente sa plainte.
La plainte a pour but de manifester « la douleur » pour la diffuser et la répandre…
Elle force la demande d’attention et de soins…
Elle peut aussi protéger la douleur pour que rien ne change. L’acouphène peut apporter des
bénéfices secondaires.
L’information peut être donnée individuellement ou collectivement. C’est ce que nous
aborderons maintenant : les réunions de patients.
Le jeu des questions et des réponses, les paraboles, constituent l’exercice de la consultation.
Enfin le ressenti souvent lourd est à connaître pour estimer à son juste titre la souffrance de
l’acouphénique.

3.12.7.1 Les réunions de patients


Les patients porteurs d'acouphènes se sentent souvent incompris; ils ont l'impression de
souffrir d'une pathologie chronique pour laquelle ils se demandent s’ils ont bénéficié d'un
bilan médical complet et si leur médecin leur a proposé tout ce qui pourrait les soulager. Ils
vont alors consulter de nouveau des ORL "spécialisés"sans relâche et essayer de se renseigner
par eux-même, en ayant recours aux informations collectées par le bouche à oreille, la presse
et plus récemment Internet. Mais il n'est pas facile, pour un novice, de faire le tri de ces
données, les plus sérieuses côtoyant les plus fantaisistes….
Tout médecin a le devoir d'informer mais la pratique en consultation rend difficile de faire à
la fois la consultation médicale "classique" avec approche étiologique, thérapeutique, et aussi
de donner les explications sur les mécanismes physiologiques de l'audition et sur les
mécanismes d'apparition des acouphènes.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

3.12.7.1.1 Pourquoi des réunions regroupant une équipe médicale et des patients ?
Face à une forte demande de consultations, dès 1991, une consultation acouphène
regroupant ORL, psychologue puis orthophoniste, a vu le jour. Cette consultation
n'accueille que des patients porteurs d'acouphènes, dirigés vers cette consultation par des
infirmières formées à cette pathologie. Informés par les médias et séduits par cet accueil
spécialisé, les patients ont afflué; les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous sont
devenus importants, aggravant l'anxiété des patients.
Très rapidement, il est apparu que la majorité des patients qui venaient consulter avaient
vu le plus souvent plusieurs confrères et que s'ils avaient bénéficié de bilan étiologique
complet, ils étaient déçus par ces consultations et réticents aux traitements. Ils venaient
donc re-consulter soit pour être rassurés sur ce qui leur avait été dit et proposé, soit pour
obtenir des explications sur leur maladie et savoir si autre chose pouvait leur être prescrit.
L'idée a germé de faire une information à un groupe de patients, qui ont déjà vu au moins
un ORL, afin de diminuer l'attente anxieuse du premier rendez-vous, et de répondre à ce
besoin légitime d'information.
Cette information se doit d'être accessible à tous, tout en respectant les règles
déontologiques, les principes éthiques de la relation médecin-malade : bienfaisance, non
malfaisance….
Ces colloques sur les acouphènes ont lieu tous les trois mois, au sein de l'hôpital, en
début d'après-midi, ils sont gratuits. Ils réunissent en moyenne 50 auditeurs, certains
sont accompagnés et parfois même certains sont délégués (ils assistent à la place de la
personne concernée qui n'a pas pu se libérer). Des brochures d'information réalisées
dans le service leur sont remises, qu'ils pourront conserver et relire tranquillement.

3.12.7.1.2 Comment se déroule le colloque?


La séance se déroule en deux parties : la première est un exposé théorique par les
membres de l'équipe, et la deuxième est consacrée aux questions des participants à la
condition qu'elles soient d'intérêt général. Il s'agit de faire une information collective et
non une consultation de groupe.
La présentation s'apparente à un cours magistral avec support visuel, chaque membre de
l'équipe prenant la parole successivement : une infirmière pour l'accueil et l'organisation
de la consultation, l'orthophoniste pour l'audiométrie et l'impact d'une surdité
éventuelle sur la communication, la psychologue, et principalement les médecins ORL.
Classiquement l'exposé se déroule en une première partie pédagogique : présentation
physiologique, anatomique, pour très vite aborder le patient dans sa globalité et dans sa
souffrance. La psychologue explique que son rôle est d'entendre la souffrance d'un sujet,
qui a un passé et qui actuellement centre sa souffrance sur ses acouphènes. Et c'est à ce
titre qu'elle recevra le patient à sa demande et celle de l'ORL.
Le bilan audiométrique est incontournable, il sert de témoin pour annoncer dans la
plupart des cas une déficience auditive qui est la vraie cause de gêne auditive, replaçant
ainsi l'acouphène à la place de symptôme.
Les notions acouphène symptôme / acouphène maladie sont identifiées et il est alors plus
facile d'expliquer la prise en charge de l'un ou de l'autre. Le patient comprend que c'est lui
que nous soignons et non pas son acouphène.

La deuxième partie laisse place aux questions des patients, bien que ces questions soient
individuelles, chacun y trouve un intérêt. Certaines questions nous paraissent
redondantes, c'est alors le moment de reprendre ce qui n'a pas été compris ou admis. Il
n'est pas toujours facile de satisfaire tout un auditoire non sélectionné, de tout âge, de
tous niveaux socio-culturels, venu là de son plein gré pour recueillir des informations en
direct d'une équipe spécialisée.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Le fait de se retrouver ainsi en groupe permet aussi de rompre l'isolement de certains.


A l’équipe soignante, ces colloques donnent l'occasion d'échanger avec un groupe de
patients. La transmission de notre pratique à un public diversement informé est riche
d'enseignements : savoir être clair et didactique, adapter son discours à un public
espérant repartir avec la solution miracle (la baguette magique), ne pas les décevoir, leur
fixer des objectifs réalistes. Des simples petits conseils pratiques peuvent les apaiser et
améliorer leur vie quotidienne jusqu'à leur rendez-vous de consultation dont, parfois, ils
n'ont plus besoin.

3.12.7.1.3 Quel est le bénéfice de ces réunions?


De 1999 à 2002, nous avons demandé aux personnes assistant à ces colloques de remplir
des questionnaires anonymes, avant et après les colloques pour apprécier leur
satisfaction, et un éventuel bénéfice sur leurs acouphènes.
Nous avons utilisé deux types de questionnaires :
– le premier (THQ) est un questionnaire un peu difficile à remplir, traduit de l'anglais,
il comprend 27 questions pour lesquelles les réponses sont une cotation entre 0 et
100%. Il a l'intérêt d'être utilisé par de nombreuses équipes qui peuvent donc
comparer leur population. Un premier THQ, avec numéro d'anonymat, était donc à
compléter en tout début de séance.
– un deuxième THQ, même numéro d'anonymat, six semaines après le colloque et il
devait être ré-adressé par courrier.
– Nous avons proposé un autre questionnaire, beaucoup plus simple à remplir, pour
apprécier l'intérêt que la personne a eu pour le colloque, il était rempli dès la fin du
colloque et un deuxième était rempli six semaines plus tard.
Nous avons collecté 258 questionnaires les jours des colloques, et 113 ont été reçus après
six semaines, soit 43,8 % de retour.

THQ bénéfice bénéfice THQ

Colloque + 6semaines

Figure 39 - Chronologie des évaluations du bénéfices des réunions de patients.

Le dépouillement montre pour le questionnaire plus simple à remplir :


– une satisfaction immédiate de 88 % (figure 40)

Figure 40 - Indice de satisfaction. Figure 41 - Indice de satisfaction.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

– après six semaines, 87 % des patients (figure 41) qui ont retourné leur questionnaire,
estimaient avoir un bénéfice global avec dans 42 % des cas une amélioration
subjective de leur acouphène.
Pour le questionnaire THQ, sur 258 questionnaires rendus en fin de colloque, seuls 189
étaient exploitables (les autres étant incomplets, illisibles,…), et, après six semaines, 87
étaient exploitables, avec seulement 73 patients ayant rempli correctement les deux . On
a donc pu voir l'évolution globale (figure 42) et, pour 73 patients, une évolution
individualisée en comparant les variations de réponses pour chacun (figure 43).

Figure 42 - Evolution globale du THQ. Figure 43 - Evolution individuelle au THQ.

Ce questionnaire s'interprète en regroupant les différentes réponses pour avoir plusieurs


scores : F1= retentissement psycho-social,
F2= handicap auditif,
F3= retentissement subjectif,
SG= score global.

Figure 44 - Evolution du retentissement psycho-social et du


score global.

L'analyse statistique a permis de voir une amélioration après le colloque, avec une
différence significative entre le questionnaire de départ et celui six semaines plus tard,
pour deux facteurs : le retentissement psycho-social F1 qui est passé de 49,61% à 43,9%,
et le score global SG qui est passé de 52% à 49,2%.

Le facteur témoignant du retentissement auditif, F2, est resté relativement stable, ce qui
est logique. Il n'y a pas de raison que l'audition change grâce à une simple information.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

L'analyse de ces résultats doit tenir


compte :
– De notre population, sur
laquelle nous n'avons pas de
données démographiques.
Mais en la comparant à d'autres
séries grâce au questionnaire
THQ de départ (figure 45),
nous pouvons constater que les
différents scores sont élevés, ce
qui témoigne d'un
retentissement plus important
des acouphènes. La population
qui assiste à ces colloques a déjà Figure 45 - Comparaison des scores de nos patients à
ceux d’études antérieures.
consulté au moins un ORL
pour les acouphènes, voire dans
60% des cas plus de 3. Ce type de patient avec une symptomatologie bien ancrée, est
probablement plus demandeur d'explications, et/ou séduit par notre type de
fonctionnement en équipe hospitalière.
– De la difficulté à remplir pour bon nombre de patients des questionnaires. Nous
avons choisi d'en élaborer un très simple qu'ils ont "envie" de compléter, associé à un
autre plus complet, mais plus ardu. Nous leur expliquions en tout début de séance, la
façon de remplir le THQ, tout en insistant sur l'intérêt que nous portons à leurs
réponses immédiates et tardives. Malheureusement, le taux de THQ exploitables
(73,25% immédiats, 76,99% à six semaines) est limité. Il permet néanmoins une
analyse statistique fiable.
– Du nombre limité de retour à six semaines, avec un taux de 44%. Ce chiffre est à
comparer aux valeurs usuellement rencontrées par les instituts de sondage; un
mailing commercial avec enveloppe T enregistre un taux de retour de 5 %, et il serait
au maximum de 20%, si le questionnaire est « facile », centrée sur la personne, et si la
population ciblée est convaincue de contribuer à une cause utile.
Ce taux de 44 % indiquerait donc une bonne adhésion des patients.

Grâce à ces résultats, l'intérêt et la satisfaction des patients pour ce type de réunion est
montrée. Pour l'équipe soignante, les consultations ultérieures sont différentes : le
patient arrive moins anxieux, il sait qui il va rencontrer lors de la consultation spécialisée,
comment va se dérouler cette consultation, quelles sont les différentes explorations, avis
et orientations thérapeutiques que le médecin pourra lui proposer. Il sait aussi mieux
formuler sa demande : inquiétude sur une pathologie grave, une éventuelle évolution,
soins adaptés,…. .
D'autres équipes médicales pratiquent également des réunions de patients: le diabète en
nutrition, les troubles du sommeil, les troubles bipolaires ou les conduites addictives en
psychiatrie, …; elles ont montré l'intérêt soulevé par l'apport de connaissances médicales
ciblées, par la réflexion et la discussion sur la pathologie dont souffre le patient et qui
altère sa qualité de vie. Lors de ce type de réunion, les actions éducatives sont
indiscutables, il y a une excellente réceptivité des patients, avec prise de conscience de la
nécessaire modification de comportements inappropriés et modification des conditions
de vie visant à un effet bénéfique à long terme sur la pathologie.

Conclusion
Ces réunions de groupe ne se substituent pas aux réunions de patients proposées par les
associations qui ont un rôle fédérateur, où ils peuvent s'exprimer librement.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Les réunions avec l'équipe médicale apportent aux patients la possibilité d'avoir une
information médicale simple, accessible, intelligible et loyale, ciblée sur leur pathologie
par une équipe multidisciplinaire.
Tout comme les autres équipes soignantes qui organisent des réunions de patients, notre
démarche s'inscrit dans un but éducatif et éthique.
Par ce type de réunion, le patient éclairé participe à sa prise en charge; il devient alors
acteur de son projet thérapeutique, et gère ainsi mieux son acouphène.

3.12.7.2 Le jeu des questions-réponses : les 3 "ritournelles"...


3.12.7.2.1 "C’est vasculaire" :
De très nombreux patients, encouragés par avis de leur médecin traitant, proposent
spontanément comme cause vraisemblable de leur perception sonore fantôme, une atteinte
vasculaire. Il est particulièrement frappant de constater que dans l'immense majorité des cas,
ces explications spontanées surviennent en absence de tout contexte de pathologie vasculaire
connue et /ou traitée. Il apparaît vraisemblable que cette hypothèse est liée aux possibilités de
prescription de produits vasculo-protecteurs, oxygénateurs, vaso-dilatateurs. Il est encore
plus surprenant de voir de nombreux patients utiliser quotidiennement depuis de très
nombreux mois ces produits sans aucun effet mais sans remettre en question l'hypothèse et à
fortiori le traitement.
C'est donc fréquemment dans ce contexte que nous sommes amenés à intervenir pour tenter
de déloger cette affirmation de l'esprit des patients. Les explications techniques sont en
général parfaitement inefficaces et la solution de loin préférable consiste à réorienter le
discours vers les hypothèses neuro-physiologiques maintenant bien admises.
Il est également tout à fait surprenant d'observer que la majorité des patients porteurs de
pathologie cardio-vasculaire grave n’ont pas particulièrement d’acouphène.
En ce qui concerne l'hypertension artérielle, il semble que seule une montée brutale de
pression est susceptible d’entraîner la perception d'un bruit, fréquemment non pulsatile.
Insistons sur le rôle de l'aspirine dans la survenue au moins temporaire d'acouphène.
Néanmoins les doses habituellement employées en cardiologie sont nettement en dessous du
seuil déclenchant les effets secondaires.
Dans de rares cas pourtant, une interruption brutale de la microcirculation labyrinthique
peut aboutir à un acouphène. L'exemple type de cette situation est la cardiopathie emboligène
avec ou sans surdité ou vertige brusques.

3.12.7.2.2 "De toute façon, il n’y a pas de traitement" :


De très nombreux patients commencent l'entretien avec leur médecin O.R.L. par ce type
d'affirmation, probablement à la fois parce qu'ils en sont convaincus et par provocation pour
entendre naturellement une autre réponse que celle qui leur a été apportée par leur
entourage. Celui-ci exerce un pouvoir de nuisance facile à reconnaître et contre lequel il
faudra réagir.
Cette attitude est très surprenante quand on connaît le pronostic des cancers du pancréas ou
des dégénérescences maculaires, pathologies qui ne soulèvent pas ce genre d’assertion.
Il semble donc nécessaire d'avoir une réponse à la fois ferme et précise pour faire comprendre
aux patients que leurs pathologies laissent place à de nombreuses solutions thérapeutiques
ainsi qu'à des améliorations importantes.
– A- un acouphène est un symptôme pour lequel il va falloir faire une évaluation
permettant d'adapter la thérapeutique. Il n'y a pas plus de traitement standard de
l'acouphène que de la fièvre ou de la diarrhée.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

– B- les techniques thérapeutiques sont nombreuses et doivent être présentées


rapidement éventuellement avec un support papier. Celui-ci peut être trouvé sur le
dernier rapport de la société française d'O.R.L. consacré aux acouphènes.
– C- il est également important de bien préciser que cette thérapeutique s'étale sur
plusieurs mois compte-tenu des objectifs recherchés (obtention d'une
automatisation de la perception d'un signal qui s'intègre dans le cadre d'un
apprentissage).
– D- le patient et son médecin traitant se retrouvent alors dans la situation ordinaire
d'un malade face à sa maladie pour lequel un rationnel thérapeutique est proposé.

3.12.7.2.3 "Je vais devenir sourd" :


Le lien acouphène/surdité est une évidence statistique pour tout O.R.L.. Cependant
probablement environ 5 à 10 % des patients acouphèniques ont des tests audiométriques
standards normaux. Inversement un nombre très important bien que non précisable de sujets
atteints de surdité en particulier neuro sensorielles ne se plaignent pas d'acouphène.
Il est donc très important que l'O.R.L. puisse faire partager l'idée d'un découplage évolutif
entre l'acouphène et la surdité. Il faut que le patient soit convaincu du fait que l'on peut
améliorer son acouphène sans que l'audition ne change et que d'autre part, si l’audition se
dégrade avec le temps en lien avec un vieillissement physiologique, l’acouphène n'a aucune
raison particulière de s'aggraver bien au contraire.
Ce point est absolument fondamental à la fois sur le plan théorique pour l'O.R.L. (il valide
bien le fait que le caractère agressif du signal n'est pas en lien avec l'intensité de la baisse
auditive mais avec le processus d'intégration centrale), et sur le plan pratique pour le patient :
s'il faut améliorer l'audition pour diminuer le caractère agressif de l'acouphène, aucune
solution n'est en vue pour de nombreuses années.
Le contre-exemple naturellement est la surdité brusque qui récupère en apparence
complètement laissant en place un acouphène parfois invalidant et qui nécessitera une prise
en charge spécifique.

3.12.7.2.4 Les FAQ de l’association France-Acouphènes

Une permanence téléphonique relève les questions les plus fréquemment posées en
matière d’acouphènes. On devrait pouvoir y répondre…

– Y a-t-il un traitement contre les acouphènes et/ou contre l’hyperacousie ? (90% à 95%)
– Les acouphènes ou maladie de Ménière ou hyperacousie, à quoi c’est dû ? (80% à 90%)
– Comment peut-on "détecter" la provenance des acouphènes ?
– C’est parce que je suis « vieux » ? Est-ce une fatalité due à l’âge ?
– Pourquoi certains ORL prescrivent systématiquement des médicaments ayant des effets secondaires
lourds, sans même essayer de trouver la provenance des acouphènes ?
– Qui faut-il consulter quand on a un acouphène ? Et où ? Existe-t-il des centres spécialisés ?
– J'ai vu un ORL, mais son diagnostic ne me satisfait pas, pouvez-vous me donner des adresses
d'autres ORL qui puissent me donner une solution ? (60 à 70%)
– Quels sont les examens à faire dans le bilan sanguin ? Que doit-on rechercher ?
– Quelle thérapie pourrais-je entreprendre ? Qu’est-ce que je peux faire ? (60% à 70%)
– L'ORL m'a prescrit différents examens et on ne trouve rien mon audition est normale pour mon
âge, alors pourquoi j’ai un acouphène ? Est-ce qu’on m’a bien fait passer tout ce qu’il fallait ?
(60%)
– En plus de mes acouphènes, je souffre d'une perte auditive. Que faut-il que je fasse? (50%)
– Quels sont les médicaments actuellement prescrits ?
– Quelles thérapies sont utilisées actuellement ?
– Que penser de l'homéopathie, de la phytothérapie ?

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CLINIQUE ET PRATIQUE

– Que penser de l'oxygénothérapie hyperbare ?


– Peut-on guérir ? Y a-t-il des personnes auxquelles cela arrive ? (30 à 40%)
– On m’a dit que certains se suicident à cause des acouphènes. C’est vrai ?
– On m’a dit que les acouphènes pouvaient venir de problèmes de dents ou de mâchoires.
Est-ce vrai ?
– Quand va-t-on nous proposer un traitement médicamenteux efficace ?
– Où en est-on de l'évaluation des autres traitements envisagés ?
– L’acouphène s’aggrave-t-il avec l’âge ?
– Est-ce que l’arthrose cervicale peut entraîner des acouphènes ?
– Les saisons ou les climats jouent-ils un rôle ?
– Est-ce que c’est normal que l’acouphène soit plus important le soir ? mais aussi
– Comment se fait-il qu’ils soient perçus plus forts le matin au réveil ?
– J’ai du cholestérol et/ou de la tension. On m’a dit que cela pouvait expliquer mes acouphènes. Si je
les soigne, mes acouphènes vont-ils disparaître ?
– Je suis depuis plusieurs années un traitement de vasodilatateurs qui ne me fait rien, dois-je
absolument continuer à le prendre ?(30%)
– Comment se fait-il qu’avec tous les progrès de la science, en 2000 on ne puisse encore pas guérir un
acouphène ? Pour quand un traitement efficace ?
– Est-ce que mon acouphène va me rendre sourd (brutalement ou progressivement et
prématurément) ?
– On m’a recommandé une prothèse. Pourquoi ? Qu’est-ce que vous en pensez ?
– Qu’est-ce qu’un GBB ? A quoi ça peut me servir ?
– J’ai entendu parler de la TRT. C’est quoi ? Où peut-on se faire traiter par la TRT ?
– Est-ce que ça va empirer ?
– J’ai vu mon acouphène diminuer suite à une prise de corticoïdes. Est-ce un hasard ?
– Depuis l'installation de mon acouphène et/ou mon hyperacousie, j'ai une baisse de mon acuité
auditive, est-ce normal ? (10 à 20%)
– Je ne supporte plus mes acouphènes, je suis très déprimé depuis plusieurs mois, je ne peux plus
dormir ni me concentrer, ce bruit m’obsède, je suis en train de couler. Ca ne peut plus durer comme
ça. Je n’en vois pas le bout et je pense que si cela continue, je vais en finir avec la vie. Qu’est-ce que
je peux faire ?
– On me propose un voyage en Asie, mais il faudrait que je prenne l’avion. Déjà j’ai mal aux oreilles
quand je prends le TGV. Je crois que je vais refuser. J’ai trop peur d’aggraver mon acouphène et/ou
mon hyperacousie. Qu’est ce que vous en pensez ?
– Les acouphènes peuvent-ils apparaître suite à un stress ? Un choc psychologique, etc…? (20%)
– On m’a prescrit un antidépresseur, un anxiolytique, un hypnotique. Est-ce que ça va vraiment
traiter mon acouphène ? Quel rapport entre dépression et acouphènes ? On me dit que mes
acouphènes sont d’ordre psychologique. C’est possible ?
– Le médecin m’a prescrit du Rivotril. J’ai vu dans la notice que c’est contre les épilepsies. Quel
rapport avec l’acouphène ?
– Que peut-on attendre des médecines parallèles (beaucoup souhaitent se tourner vers homéopathie,
acupuncture en se disant que même si cela ne leur fait pas de bien, au moins cela sera moins
dangereux qu’avec des médicaments à action centrale)
– J’ai une bonne audition et des acouphènes : que faire ?
– J'ai une prothèse et je la supporte difficilement. Que faire ? (10%)
– Je ne supporte plus les bruits. Mon oreille est hypersensible. Est-ce que je peux aggraver mon
acouphène/ mon hyperacousie si je m’expose aux bruits forts ?
– On m’a conseillé de suivre une psychothérapie. Qu’en pensez-vous ?
– Mon acouphène me sert à prédire le temps. A chaque fois qu’il augmente, le vent se met à souffler et
la pluie suit derrière. Cela s’explique comment ?
– J’ai un acouphène. Est-ce que je peux faire de la plongée sans danger ?
– Que penser des yoyos ?

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CLINIQUE ET PRATIQUE

– Les Antennes relais (ou les téléphones portables) peuvent elles favoriser l'installation
d'acouphènes ? (10%)
– Je suis une thérapie qui ne m'apporte pas grand chose et qui coûte cher, dois-je la continuer ? (5%)
– N'existe-t-il pas des centres spécialisés pluridisciplinaires ? (5%)
– J'ai des problèmes de thyroïde, pensez-vous qu'il y ait un rapport avec les acouphènes ? (3%)

3.12.7.2.5 Quelques paraboles


Au cours de la prise en charge du patient, il peut être utile d’employer quelques paraboles
qui permettent de bien faire comprendre un élément éventuellement technique qui
échapperait si le discours n’est pas adapté.
● La maison hantée

Vous avez un petit chalet à la montagne. Un soir arrive un premier ami que vous logez
dans une première chambre en lui disant qu’il s’agit d’une vieille maison et qu’il entendra
vraisemblablement de nombreux craquements pendant la nuit mais qu’il ne doit pas s’en
inquiéter. Un peu plus tard arrive un second ami que vous logez dans une deuxième
chambre en lui disant qu’il y a des rôdeurs dans les parages, que le chalet a déjà été visité
et qu’il faut bien faire attention en particulier pendant la nuit. Il va de soi que le
lendemain matin le premier arrivant a particulièrement bien dormi mais que le second
n’a pas fermé l’oeil.
● Le marigot

Nous sommes en Afrique, il fait très chaud et autour d’un marigot de nombreux
animaux se désaltèrent. Vous êtes dans une montgolfière et vous regardez la scène de
haut. Vous avez vu qu’une lionne tente de s’approcher du groupe d’animaux contre le
vent. D’un coup, les animaux s’enfuient. Ils ont entendu le bruit du félin. Le signal a une
valorisation extrêmement élevée pour toutes les espèces en question.
Dans un parc animalier, on recrée, autour d’un bassin, les mêmes conditions acoustiques
qu’autour de ce marigot. Lorsque les animaux en semi-liberté entendent le bruit de la
lionne, ils partent en courant. Mais si l’on répète l’événement de nombreuses fois, ils
finissent par ne plus changer leurs habitudes. Ils ont automatisé la perception de ce signal
pourtant extrêmement agressif.
● L’autoradio

Vous êtes sur l’autoroute à grande vitesse et vous écoutez la radio. Brutalement un
bouchon vous fait ralentir puis vous arrêter. Immédiatement vous réalisez combien le
volume de la radio est beaucoup trop élevé. Naturellement lorsque que vous rouliez
quelques minutes auparavant vous considériez que la situation était satisfaisante. Votre
système cérébral a bien ajusté la perception du signal émis par la radio en fonction de
l’environnement sonore. C’est ce que l’on fait quotidiennement sans s’en rendre
compte. Certains patients ne parviennent pas à intégrer la perception de certains signaux
au niveau du seuil réel.
● Le garde-barrière

M. Durand, employé de la SNCF, a passé 15 ans dans un dépôt dans la banlieue Nord de
Paris. Il habitait près de l’autoroute et n’a jamais vraiment réussi à s’habituer aux
conditions environnementales sonores à la fois sur le plan professionnel et personnel.
Un jour il apprend que le poste de garde-barrière dans son village natal est disponible, le
titulaire ayant pris sa retraite. Malgré l’absence de perspectives de carrière, il se précipite
pour poser sa candidature. Par bonheur il n’y a pas d’autres candidats et il emménage
dans sa nouvelle maison près de la voie ferrée. Trois fois par nuit un train passe à grande
vitesse dans un bruit infernal. M. Durand et sa famille ont quelques difficultés
d’adaptation mais, en quelques semaines, il n’y paraît plus rien. L’été suivant son cousin
Albert qui habitait près de son ancien domicile en région parisienne, vient passer
quelques jours de vacances dans le sud. Il doit malheureusement écourter ce séjour car il
ne peut trouver le sommeil à cause de ces trains qui passent la nuit.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

M. Durand n’entend pas moins bien que son cousin Albert ; il est simplement beaucoup
plus motivé pour adapter le plus rapidement possible son cerveau à la nouvelle donne
environnementale sonore. Le cousin Albert est venu passer quelques jours au calme à la
campagne ce qui n’est pas exactement la même perspective.
D’ailleurs, quelques semaines plus tard, M. Durand se réveille en sursaut une nuit, se
précipite sur son téléphone et apprend que le train de 3 h 24 n’est en effet pas passé, car il
y a eu un incident sur la voie. Il a complètement intégré la stimulation auditive très
intense à heures fixes. On retrouve la même chose en ce qui concerne la cloche du village
qui tape les heures la nuit. Les villageois sont parfaitement adaptés, les touristes ont plus
de difficultés.
● La cicatrice

Par définition, la cicatrice normale se fait oublier, sauf si on la regarde…Avant, la


blessure est passée par les phases de cicatrisation. Prendre en charge l’acouphène, c’est
obtenir d’une blessure le statut de cicatrice…il n’est audible que si on l’écoute.
● Le petit bruit

Vous êtes en auto, seul, la nuit, dans un endroit assez désertique… avec un rendez – vous
important le lendemain, à destination. Il pleut… bref un certain niveau de stress… un
bruit de fonctionnement survient. Vous n’êtes pas mécanicien, vous ne pouvez estimer la
gravité du symptôme moteur. Il est pourtant très faible ce petit bruit… mais vous
n’entendez que lui, même plus la radio de bord. Vous guettez ses modifications, vous
anticipez sur la panne… sur la conséquence de ce rendez – vous manqué, si jamais…
Même bruit, en été, en vacances, avec une voiture qui n’est pas la vôtre….

3.12.7.2.6 Un témoignage choisi dans une longue liste…


"Hé bien pour moi, j'ai des acouphènes depuis une infiltration lombaire qui s'est mal passée en 2001.
En juin 2001 j'ai eu des crises importantes de sciatique et des douleurs lombaires au point de me
paralyser car j'ai des hernies discales à 2 endroits : modérée en L3-L4 et plus importante en L4-L5.
Après plusieurs traitements médicaux, souffrant toujours autant, je décide d'aller voir le rhumato.
Celui-ci décide de passer à l'acte c'est à dire de faire des infiltrations là où j'ai mal. Il ne me prévient pas
des complications possibles, ne m'informe pas, agit, point final.
Donc la première infiltration s'est très bien passée et 15 jours après, la seconde a eu lieu : catastrophe, le
rhumato a malheureusement piqué dans la dure-mère et a injecté le produit de la seringue
(Hydrocortancyl®)
Mais naturellement ce produit est monté au cerveau, sur le coup je ne l'ai pas senti, mon rhumato ne
m'a rien dit non plus, mais les réactions méningées sont intervenues 24 h/48 h après : énormes
céphalées à la limite du supportable, 20 de tension artérielle, le cou qui enflait, le visage écarlate,
obligation de mettre la tête à l'arrière position couchée. UNE HORREUR on croit que notre crâne va
exploser, on se sent mourir.
Les médecins généralistes ne trouvant pas naturellement ce que j'avais, j'ai demandé d'aller au CHU
de ma ville et là, dès mon arrivée, le corps médical de l'hôpital a trouvé immédiatement ce qui se
passait : réaction méningée due à l'infiltration mal orientée, et disent que c'est un accident malheureux
qui arrive rarement mais hélas !!!! ce sont les inconvénients de la pratique d'infiltration près de la
colonne vertébrale, qu'il existe des risques.
Depuis, des acouphènes très importants se sont installés, des vertiges, dépression ...
J'ai consulté aussitôt des oto-rhinos. Résultat des examens : impeccables, pas de souci de surdité.
J'ai sombré dans la dépression rapidement, ne supportant pas du tout ces terribles sifflements étrangers.
Naturellement, depuis je ne peux pas dormir sans somnifères (depuis 3 ans) et sans traitements pour
"accepter mieux" mes "ac".
J'ai fait un travail important sur moi pour "comprendre et accepter ", mais cela a ressurgi rapidement,
j'étais vulnérable.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Enfin ma vie est détruite depuis ce jour, actuellement je suis soigné pour dépression nerveuse installée
depuis juillet dernier, j'ai été obligé de démissionner de mon poste de travail. Actuellement je commence
à avoir des difficultés pour entendre car les "ac " ont pris de l’importance dans ma tête et m'empêchent de
bien comprendre les mots, de me concentrer, ils me fatiguent énormément, m'épuisent.

Pour les avis médicaux, ha là !!! j'en ferais un livre !!!


« mais monsieur ! c'est rien, on vit avec ! « me répond mon rhumato.
« mais monsieur! la médecine est impuissante pour les "ac" » me disent tous les médecins et spécialistes.
avis général médical : « acceptez, monsieur, de vivre toujours avec maintenant »
mon médecin généraliste m'a expliqué que ce qui m'est arrivé est comparable à un traumatisme crânien
lors d'une chute.
L'autre jour, j'ai vu un jeune médecin remplaçant, et sa réaction en lisant mon dossier : « hé bien !!
votre dossier, j'en ai rarement vu comme cela, vous avez eu la totale, vous n’avez pas eu de chance ! »
Lorsque je parle de mes "ac " c'est un mur qui se met devant moi, plus encore, lorsque j'explique la
raison, comment ils sont arrivés, quelle cause, alors là ! les relations s'arrêtent immédiatement. Je trouve
cela indigne du corps médical de pareilles réactions !
Sauront-ils un jour à leur tour ce que c'est que des acs ? ils sont main dans la main, ne voulant pas
donner de jugement sur la situation vis-à-vis de leur confrère rhumato.
Donc en résumé : souffrance physique, morale, médicaments, déstabilisation professionnelle, vie
familiale plus difficile à vivre, difficultés à se faire comprendre et à comprendre les "autres", on pourrait
dire en un seul mot : ENFER !
J'ai une famille autour de moi (trois grandes filles de 34, 29, 25 ans et mon épouse) qui
essaient généralement de me comprendre, pas toujours, mais ce tourment n'est pas facile à vivre.
Voilà, en quelques phrases, mon calvaire journalier depuis 3 années."

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Pour un travail collectif


La recherche en matière d’acouphène relève d’un véritable travail d’équipe - clinique et
fondamentale.
Pour revenir sur les modèles ; les hypothèses de la recherche doivent être confrontées aux
observations cliniques.
La complexité des situations impose de regrouper les cas observés en groupes homogènes.
C’est l’objectif d’un travail collaboratif en réseau
Pour les acouphènes chroniques :
www.orl-france.org
rubrique acouphènes
Pour les acouphènes aigus :
www.resuno.com
« Place d’un réseau de santé dans la prise en charge d’un acouphène récent »

La conduite à tenir devant un acouphène de survenue récente comporte deux démarches essentielles.
Outre la réalisation du bilan causal à la recherche d’une pathologie objective, le praticien doit
observer, dans toute son attitude, le plus profond respect de la plainte du patient. En effet, seul ce
comportement permet l’adhésion de celui-ci et sa participation dynamique au protocole
thérapeutique. L’écoute attentive du patient et sa préparation à une prise en charge globale, parfois
longue, sont primordiales. Par ailleurs, la recherche d’une étiologie s’impose d’emblée, surtout en cas
d’acouphène unilatéral. L’ensemble requiert du temps et une organisation optimale.

Pour assurer au mieux cette démarche de qualité et, en particulier, articuler entre eux les moyens
techniques et humains requis, le modèle du réseau de santé s’impose. Son but est de soutenir le
malade par le biais d’une écoute patiente et de conseils appropriés tout en aidant chaque praticien
dans l’organisation de son exercice quotidien. Comme pour de nombreuses pathologies complexes à
prise en charge délicate (asthme, cancer, diabète, etc…), une coordination des professionnels
impliqués associée à un centre de dialogue et de ressources (pour les patients comme pour les
professionnels) constitue l’ossature du projet. Elle ne remplace pas les intervenants habituels du
patient mais agit en complément et en soutien, pour un meilleur suivi.

RESUNO est un réseau de santé dédié aux urgences neurosensorielles en ORL, dont l’acouphène de
survenue récente (moins de 3 semaines). Développé initialement en Ile-de-France, il rassemble plus de
200 médecins qui ont signé sa charte et s’engagent à respecter les patients dans leur diversité, tout en
suivant les protocoles établis par les groupes d’expert du réseau. Il bénéficie d’un financement et
d’une évaluation spécifiques, selon les lois de 2002 et 2003 en faveur des réseaux. Il est ouvert à tous,
essentiellement par l’intermédiaire de son site Internet : www.resuno.com

Praticiens et victimes d’acouphènes récents sont invités à rejoindre cette structure innovante et
dynamique qui ne se substitue pas aux filières et modalités de prise en charge existantes mais peut
coordonner voire compléter les soins classiques.

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Annexes

5.1.1 Annexe n°1 : Le schéma de Jastreboff

Perception & évaluation


Aires auditives et autres aires associées - cortex

Processus
conscients

Processus
Détection, Associations émotionnelles inconscients
subcorticale Système limbique

Hp Hr

Source de Gêne
l'acouphène Système nerveux autonome

D'après Jastreboff. Hp = habituation de la perception - Hr = habituation de la réaction.

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5.1.2 Annexe n°2 : Le tableau des causes et circonstances


Classification pragmatique des causes et circonstances de survenue
des acouphènes

1 traumatismes sonores
2 otospongiose
3 catarrhe tubaire, otite séreuse, labyrinthite
3 bis baro-traumatisme
4 suspicion de dysfonctionnement de l'ATM
5 traumatisme crânien
6 surdité brusque
7 anomalies relevant de la médecine interne
7 bis anomalies biologiques
8 mauvaise nouvelle, deuils
9 hypo ou hypertension artérielle
9 bis vasculaire SAP
10 oreille interne
11 étiologies cervicales
12 acouphène post-opératoire otologique
13 audition normale
14 dépression
15 suspicion de fuite péri-lymphatique
15 bis problème LCR
16 ototoxicité
17 pathologie identifiée de l'oreille moyenne
18 acouphène en position couchée (sieste)
19 boucles V/VIII
20 neurinome du VIII
21 problèmes psychologiques en dehors de la dépression
22 SAS
23 sténose du conduit externe, exostoses
24 implication des muscles de l'oreille moyenne
25 problèmes neurologiques complexes
26 migraine
27 implication de l'aspirine
28 en rapport avec le cycle hormonal
29 souffle carotidien perçu
30 RGO
31 rétraction tympanique
32 anesthésie générale
32 bis péri-durale
33 thyroïde
34 stress
50 ???
….
100 La presbyacousie

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ANNEXES

5.1.3 Questionnaires 1

SEV

Nom :. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Semaine n° . . . . . . . . . . . . . . . .
Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Cochez la case OUI ou NON aux questions suivantes :
(Vous devez répondre à toutes les questions même si votre accord ou votre désaccord n’est que partiel).

OUI NON

1. Vous arrive-t-il d’avoir des difficultés à vous concentrer à cause de votre acouphène ?

2. Etes-vous presque constamment conscient(e) de la présence de votre acouphène ?

3. Votre acouphène vous gêne-t-il dans des activités physiques telles que vous habiller ou
jardiner ?

4. Votre acouphène vous gêne-t-il pour vous endormir ?

5. Pourriez-vous dire que généralement votre acouphène ne vous dérange pas ?

6. Vous arrive-t-il de passer quelques heures sans prendre garde à votre acouphène ?

7. Votre acouphène est-il très bruyant ?

8. Vous arrive-t-il d’en avoir assez de votre acouphène ?

9. Vous arrive-t-il de passer un jour ou plus sans acouphène ?

10. Oubliez-vous souvent votre acouphène quand vous êtes occupé(e) ?

11. Votre acouphène est-il présent au moins une partie chaque jour ?

12. Votre acouphène vous empêche-t-il de vous relaxer ?

13. Bien que votre acouphène soit très agaçant, pourriez-vous dire qu’il ne vous abat pas ?

14. Parlez-vous souvent aux autres des problèmes que votre acouphène occasionne ?

15. Est-il habituel que votre acouphène vous gène quand vous essayez de lire ou de regarder la
télévision ?

16. Pourriez-vous dire que la vie serait plus agréable si vous n’aviez pas d’acouphène ?

TOTAL

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ANNEXES

5.1.3 Questionnaires 2
THQ
Nom :. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Semaine n° . . . . . . . . . . . . . . . .
Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Instructions : donner une note à chacune des phrases ci-dessous.
Cette note, comprise entre 0 et 100, doit représenter combien vous êtes d’accord avec la phrase proposée :
0 : si vous n’êtes pas d’accord du tout
100 : si vous êtes entièrement d’accord
Toutes les notes intermédiaires sont autorisées.

Répondre dans les cases encadrées en gras


1 Mon acouphène m’empêche d’apprécier la vie.
2 Mon acouphène empire avec les années.
3 Mon acouphène me gêne pour dire d’où viennent les sons.
4 Pendant les réunions, mon acouphène m’empêche de suivre la conversation.
5 J’évite les endroits bruyants à cause de mon acouphène.
Quand je discute avec quelqu’un dans un endroit bruyant mon acouphène
6
me gêne pour comprendre ce qu’on me dit.
7 Je suis mal à l’aise dans mes relations sociales à cause de mon acouphène.
8 Le grand public ignore le caractère dévastateur des acouphènes.
9 Mon acouphène m’empêche de me concentrer.
10 Les acouphènes entraînent des problèmes familiaux.
11 Mon acouphène me rend dépressif(ve).
12 Je trouve difficile d’expliquer aux autres ce qu’est un acouphène.
13 L’acouphène provoque le stress.
14 Mon acouphène m’empêche de me relaxer.
15 Je me plains plus à cause de mon acouphène.
16 Mon acouphène me gêne pour m’endormir.
17 Mon acouphène me donne une sensation de fatigue.
18 Mon acouphène me donne un sentiment d’insécurité.
19 Mon acouphène contribue à une sensation de mauvaise santé.
20 Mon acouphène retentit sur la qualité de mes relations avec les autres.
21 Mon acouphène a diminué ma capacité à comprendre ce qui est dit.
22 Mon acouphène me donne un sentiment de contrariété.
Quand je regarde la télévision, mon acouphène me gêne pour comprendre
23
ce qui est dit.
24 Mon acouphène me rend anxieux(se).
25 Ma façon de voir concernant les acouphènes est saine.
26 En ce qui concerne mon acouphène, mes amis me soutiennent moralement.
27 Je me sens souvent frustré(e) à cause de mon acouphène.

TOTAL

S S Ph Em Au Sub

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ANNEXES

5.1.3 Questionnaires 3
DET
Nom :. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Semaine n° . . . . . . . . . . . . . . . .
Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Parmi la liste présentée ci-dessous, certaines phrases peuvent s’appliquer à vous, d’autres non.
Pour répondre à chaque question, entourez le nombre qui reflète le mieux combien cette phrase s’est
appliquée à vous au cours de la semaine qui vient de s’écouler.

● 0 : pas du tout
● 1 : rarement
● 2 : une petite partie du temps
● 3 : une bonne partie du temps
● 4 : la plupart du temps

1 Je me suis senti(e) torturé(e) par mon acouphène 0 1 2 3 4


2 J’étais moins intéressé(e) par les sorties 0 1 2 3 4
3 J’étais tendu(e) à cause de mon acouphène 0 1 2 3 4
4 Mon acouphène a perturbé mon sommeil 0 1 2 3 4
5 Mon acouphène m’a conduit(e) au désespoir 0 1 2 3 4
6 Mon acouphène m’a contrarié(e) 0 1 2 3 4
7 Mon acouphène m’a donné un sentiment de colère 0 1 2 3 4
8 Mon acouphène m’a donné un sentiment de détresse 0 1 2 3 4
9 Mon acouphène m’a donné un sentiment d’impuissance 0 1 2 3 4
10 Mon acouphène m’a donné un sentiment de frustration 0 1 2 3 4
11 Mon acouphène m’a embrouillé l’esprit 0 1 2 3 4
12 Mon acouphène m’a empêché d’apprécier la vie 0 1 2 3 4
13 Mon acouphène m’a fait désespérer de l’avenir 0 1 2 3 4
14 Mon acouphène m’a fait éprouver un sentiment de panique 0 1 2 3 4
15 Mon acouphène m’a fait éviter les endroits bruyants 0 1 2 3 4
16 Mon acouphène m’a fait éviter les endroits calmes 0 1 2 3 4
17 Mon acouphène m’a fait pleurer 0 1 2 3 4
18 Mon acouphène m’a fait songer au suicide 0 1 2 3 4
19 Mon acouphène m’a gêné(e) pour me concentrer 0 1 2 3 4
20 Mon acouphène m’a gêné(e) pour me relaxer 0 1 2 3 4
21 Mon acouphène m’a gêné(e) pour travailler 0 1 2 3 4
22 Mon acouphène m’a incité(e) à éviter les relations sociales 0 1 2 3 4
23 Mon acouphène m’a rendu(e) dépressif(ve) 0 1 2 3 4
24 Mon acouphène m’a rendu(e) « fou(folle) » 0 1 2 3 4
25 Mon acouphène m’a rendu(e) irritable 0 1 2 3 4
26 Mon acouphène m’a rendu(e) malheureux 0 1 2 3 4
TOTAL GÉNÉRAL

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L’otospongiose dans la pratique . . . . P. Elbaz, D. Doncieux, B. Frachet, F. Leca, G. Fain
Les surdités de l’enfant . . . . . P. Marie, P. Narcy, M. François, P. Contencin
Le neurinome de l’acoustique . . . . J.M. Sterkers
Méthodes d’investigation en oto-neurologie . . M. Ohresser
Actualités et perspectives
Congrès d’oto-neurologie
La chirurgie de l’oreille moyenne vue par P. Fleury . P. Fleury, J.M. Basset, S. Bobin, M. Bre, D. Coupez,
P. Candau
La chirurgie des tumeurs du trou déchiré postérieur . P. Tran Ba Huy, J. Achouche, O. Laccourreye,
B. George, D. Bastian
Le laser en O.R.L. . . . . . . C. Peytral
Nez - Sinus . . . . . . . P. Lerault, C. Freche
Repères et balises
Les otoémissions dans la pratique . . . . P. Elbaz, D.T. Kemp, Ph. Betsch, J.M. Fiaux, F. Leca,
P. Miller, G. Challier
La prothèse auditive . . . . . . M. Bonnevialle, G. Challier
L’ostéo intégration en otologie . . . . P. Roulleau, Y. Manach, C. Hamann
La chirurgie partielle des épithéliomas du pharyngo-larynx H. Laccourreye
La rhonchopathie chronique . . . . . F. Chabolle, B. Fleury
Anatomie du voile . . . . . . P. Lerault, M. Jakobowicz, H. Chevallier, E. Attias
Pratique des tests d’audition en consultation . . F. Legent, P. Bordure, M.L. Ferri-Launay, J.J. Valenza
Troubles de la déglutition de l’adulte . . . J. Lacau St Guily, S. Chaussade
Chirurgie du nerf facial . . . . . . O. Sterkers
Les surdités génétiques . . . . . G. Lina-Granade, H. Plauchu, A. Morgon
Pathologies Temporo-mandibulaires . . . C. Levy, B. Meyer, G. Vincent, K. Marsot-Dupuch
Sinusites : du diagnostic au traitement . . . J.P. Fombeur, D. Ebbo
Le neurinome de l’acoustique : la neurofibromatose de type II J.M. Sterkers, O. Sterkers
Poches de rétraction et états pré-cholestéatomateux . P. Roulleau, C. Martin
Vidéonystagmoscopie, vidéonystagmographie . . Ph. Courtat, A. Sémont, J.-P. Deroubaix, E. Hrebicek
Regard et paupières . . . . . . E. Mahe, S. Poignonec, J. Soudant, G. Lamas
L’otospongiose . . . . . . . P. Elbaz, D. Ayache
Corde vocale . . . . . . . S. de Corbière, E. Fresnel
La dacryocystorhinostomie . . . . . P. Klap, J.-A. Bernard
Rhinoplasties . . . . . . . Y. Saban, F. Braccini
Les surdités, de la prothèse à l'implant . . . A. Casenave, B. Frachet, C. Hamann, M. Mondain,
O. Sterkers
Les tumeurs de la parotide . . . . . P. Gehanno, B. Guerrier, J.J. Pessey, M. Zanaret
Surdité de l'enfant . . . . . . Erea-Noël Garabédian, Françoise Denoyelle,
René Dauman, Jean-Michel Triglia, Eric Truy,
Natalie Loundon, Patrick Bouaziz, Jean de Lorenzi
Nouvelles données en audiologie et appareillage L. Collet, O. Sterkers, D. Bouccara, S. Deys,
stéréophonique . . . . . . . S. Lermigeaux

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