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André Gide, parlant de Paul Valéry, disait : « C'est un ami incomparable », tout en
précisant : « Il me fallait dix jours pour me remettre d'une conversation avec lui. » Il
est probable qu'en sa présence le poète mondain s'évanouissait pour découvrir
l'esthète tendu vers un art absolu et qui confiait : « Le beau est ce qui désespère ! »
Paul Valéry en effet poursuivait l'inaccessible. Or pour atteindre ce qui semble hors de
portée, il faut que l'âme appareille à l'extrême du désir. Seule la discipline poétique
crée l'univers particulier permettant de saisir les moindres oscillations de l'être, car
l'artiste, refusant les raisonnements trop lucides du héros de « Mon Faust », accepte
dans la rigueur de l'ascèse poétique de reconnaître une part d'inexplicable.
La poésie, contrairement à la prose qui n'impose pas de règle, invente la clôture
nécessaire au recueillement. Si Paul Valéry a parfois rencontré l'illumination, c'est
dans ses textes poétiques que nous devons tenter de la percevoir puisqu'il nous a confié
: « Dans certains états des choses de ma vie, il arriva que le travail de poésie me fut
une manière de me séparer du monde. J'appelle "monde", ici, l'ensemble d'incidents,
d'injonctions, d'interpellations et de sollicitations de toute espèce et de toute intensité
qui surprennent l'esprit sans l'illuminer en lui-même, qui l'émeuvent en le
déconcertant, qui le déplacent du plus important vers le moins... »
L'homme méditerranéen baigne dans un univers de lumière : l'éclatement solaire qui fixe
des ombres sans nuances délimite l'être unique. Mais les rayons trop perçants peuvent
aussi pénétrer fort loin et briser cette même unicité. Et le jeune Paul Valéry ne put rester
insensible à la déchirure suprême des éclairs lors d'une nuit d'orage à Gênes en 1892. La
dichotomie héraclitéenne entre les ténèbres nocturnes et la foudre violente trouvait un
écho dans l'âme de cet adolescent. « J'étais entre moi et moi », dira-t-il plus tard. Cette
crise profonde devait être le point de départ d'une longue recherche apparentée à la quête
des mystiques : « Il s'agissait de décomposer toutes mes premières idées ou idoles, et de
rompre avec un moi qui ne savait pas pouvoir ce qu'il voulait ; ni vouloir ce qu'il
pouvait1 . »
Cette rupture douloureuse au cœur de l'être même, surgie en écho à la faille étincelante
parue dans la nuit, accompagna longuement le poète. Et sa démarche tentait de retrouver
l'autre part de lui-même toujours plus distante, toujours plus étrangère...
Son désir d'éprouver de nouveau cette unité ou même cette union a lui-même — mais une
union différente qui ne serait pas un simple retour vers lui — lui fit suivre la voie de
l'ascèse la plus rigoureuse. « Je suis dans le plus quotidien mystère, écrivait-il à Pierre
Loups le 25 janvier 1892, tordu par des effets sans nulles causes, contradictoire jusqu'à
une certaine beauté, aussi épars que l'ont éternellement connu tous ceux qui ont —
coupablement — tenté de sortir de leur être et d'oublier l'ombre de leur corps même, à la
recherche de l'Absolu. »
Paul Valéry, mystique sans Dieu, ne tente pas d'accéder à un état de sainteté au sens
religieux de ce terme ; il veut attendre non pas Dieu mais son Dieu, comme l'explique
Ned Bastet, « dans cette expérience limite de l'existence qui communique l'illusion du
divin 7».
Et le poète est le premier à considérer que la discipline qu'il s'impose afin d'épurer son
propre être lui procure les mêmes effets que doit procurer l'ascèse des croyants. Il
reconnaît que « l'existence d'une répulsion égale à l'égard de toutes choses est la forme
négative mais positivement sensible de ce qui doit se produire dans l'état d'oraison chez
les croyants, avec substitution au Moi pur8 dans cette expérience (sienne) d'une sensation-
Dieu »9. Et sans doute regrette-t-il, non sans humour, la possibilité d'une existence toute
2
Cahiers IV, p. 476.
3
Cahiers VII, p. 741.
4
Attente de Dieu (Paris, 1950).
5
Variétés « Cantiques Spirituels » (La Pléiade, t. I, p. 455).
6
Cahiers, XXVIII, p. 534.
7
« L'expérience de la Borne et du Dépassement chez Paul Valéry », article paru dans les
Cahiers Paul Valéry, I, Poétique et Poésie (Paris, Gallimard).
8
Cahiers XXVII, p. 530.
9
« Je ne me suis jamais référé qu'à mon Moi pur, par quoi j'entends l'absolu de la
conscience, qui est l'opération unique et uniforme de se dégager automatiquement de
tout ; et, dans ce tout, figure notre personne même, avec son histoire, ses singularités, ses
puissances diverses et ses complaisances propres. Je compare volontiers ce Moi pur à ce
précieux zéro de l'écriture mathématique auquel toute expression algébrique s'égale [...].
Cette manière de voir m’est, en quelque sorte, consubstantielle. Elle s'impose à ma
pensée depuis un demi-siècle et l'engage quelquefois dans des transformations
vouée à la quête, protégée par une clôture monacale. « Songez doucement à ce cloître,
écrit-il à son ami Pierre Loups, le 23 février 1891, un cloître comme Saint-Michel où
nous ne serions que des amis réunis pour creuser leur fosse ensemble, où nous ferions
tant de poèmes et de musiques et de tout sans noircir des feuillets, mais le soir sur les
terrasses quand les cris se taisent des oiseaux qui virent autour de la lune à son lever.
Esthètes attendris et réfugiés vers les mystiques astres, entre la mer et les astres, abritant
sous les antiques pierres d'encens notre pudeur sacrée que des foules insultent, nous
oublierons tout, et le reste seul demeurera en nous. » Cette montée vers l'absolu dans
laquelle s'engage le poète est en réalité un cheminement vers les sources de l'être. Car la
distance qu'il prend à l'égard du monde extérieur et à l'égard de ses propres affections le
replace en face de lui-même et l'entraîne à entretenir un nouveau dialogue entre son « moi
pur » et sa conscience lumineuse. « La sensation, écrit-il, extraordinaire et terrible d'être
saisi intérieurement par plus fort que soi [...] qui porte au-dessus du rien, le Tout et son
unique, le Moi- Soleil10. »
L'ascèse poétique échappe au temps et crée une nouvelle dimension Mais l'absolu de
l'être ne peut être qu'une figure délivrée du temps. Car, en se référant au passé ou à
l'avenir, la pensée s'écarte de la personnalité et implique une distance entre l'être et le
connaître. La contemplation est un phénomène instantané. Dès qu'elle s'installe, en effet,
entre un passé et un futur, elle se charge de tout ce qui est inutile. Voilà pourquoi Paul
Valéry tâtonne pour trouver l'accès à une autre dimension dans laquelle l'âme
s'épanouirait dans un temps immobile. Or l'art seul permet de briser le carcan de la durée
ou, du moins, de le modeler et de le reconstituer. Le poète s'émerveille devant la danseuse
inspirée : « Regarde, mais regarde ! ... Elle fait voir l'instant... O quels joyaux elle
traverse ! ... Elle jette ses gestes comme des scintillations !... Elle dérobe à la nature des
attitudes impossibles, sous l'œil même du Temps !... »
Il se laisse tromper : « Elle traverse impunément l'absurde. Elle est divine dans l'instable,
elle en fait don à nos regards !... 11» La danseuse évolue dans un autre monde en
obéissant à un « tempo » qui lui est propre, en créant sa propre durée. C'est donc dans le
cadre de ce nouveau temps que pourra s'insérer la révélation de l'être. Et le poème à
forme fixe institue cette autre dimension : « Un poème est une durée pendant laquelle,
lecteur, je respire une loi qui fut préparée12. » Paul Valéry ne pourra être « en
communion » avec lui-même et peut-être découvrir alors la part divine qui est en lui
qu'en unissant cette nouvelle durée au son absolu, c'est-à-dire en devenant poète. Il veut
entendre « le son pur qui éveille l'âme-instant et qui n'appartient à personne, à rien 13 ».
L'art poétique devient donc l'ascèse, la méthode d'investigation des profondeurs de l'être
que s'impose Paul Valéry. « Pour moi, précise t-il, la Poésie devait être le Paradis du
Langage, dans lequel les différentes vertus de cette faculté transcendante, conjointes par
leur emploi, mais aussi étrangères l'une à l'autre que le sensible l'est à l'intelligible, et
intéressantes, comme elle la dégage, d'autres fois, de liaisons tout accidentelles. » Lettre
au R.P. Rideau, 1943.
10
Cahiers XXVII, p. 530.
11
Dialogue : l'Âme et la Danse (La Pléiade, t. II, p. 172).
12
Poésies, p. 62.
13
Cahiers XVII, p. 578.
que la puissance sonore immédiate l'est à la pensée qui se développe, peuvent et doivent
se composer et former pendant quelque temps une alliance aussi intime que celle du
corps avec l'âme14. » L'expérience du silence permet d'écouter le chant primordial L'âme
débarrassée des fantasmes ténébreux, purifiée par l'ascèse, peut enfin accueillir « l'être »
de la sensation comme un absolu ou accéder à l'être dans la sensation : un son jamais ouï
en sa justesse divine, une couleur d'une tendresse sans pareille dans le crépuscule, un
rayon jamais perçu, émanant du soleil du monde extérieur — de ce soleil qui est la plus
belle des choses réelles, et que nul mystique de l'intériorité, jamais, ne pourra faire jaillir
de ses ténèbres. Paul Valéry ajoute ici deux touches très précieuses : il dit que le paysage
prend alors une valeur religieuse et sacrée, et que l'âme fait plus que voir et qu'adhérer de
toutes ses forces à la sensation : elle chante à l'unisson de ce qui l'émeut 15. Elle chante
parce qu'elle perçoit au cœur du silence intérieur et de l'attente le « son pur », la musique
quasi divine. C'est le chant du réveil de la conscience, de l'éveil de la vie. Ainsi que
l'explique le philosophe Heidegger dans son Approche de Hölderlin, « pénétré de l'Esprit
qui s'éveille, un "spirituel" est maintenant destiné à être l'unique poète. Car il doit bien
d'abord y avoir un poète pour que puisse commencer une parole de l'hymne. Le poète
unique abrite l'ébranlement apaisé du Sacré dans la paix de son silence. Comme le chant
de la parole elle-même ne peut naître que du silence, alors tout est prêt ainsi :
Alors promptement émue, l'âme, familière
A l'infini depuis longtemps, de mémoire
Tressaille et, embrasée par l'éclair sacré,
Que lui réussisse le fruit porté en amour, œuvre des dieux et des hommes
Le chant, pour qu'il témoigne des deux16. »
Or cette mélodie qui sourd du plus intime de l'être, Paul Valéry la recompose à travers ses
poèmes. Son œuvre constitue la résonance continue de ce chant de l'âme que Narcisse
invente pour lui-même. Cet adolescent venu des rivages lumineux de la Grèce hante la
poésie valéryenne. Et les fragments du Narcisse représentent en quelque sorte une
symphonie en trois mouvements à la gloire des échos divisés à l'infini qui se répondent et
se déforment continuellement et représentent chacun une parcelle d'une réalité
insaisissable, où le personnage absent semble être plus présent et plus réel que le
personnage de chair. Ce sont ces divers échos que le poète fait entendre et, à travers leurs
sonorités altérées, un des aspects réfractés de sa contemplation.
Toute sensation « résonne » dans l'âme. Les images mêmes peuvent restituer un écho
visuel. Le paysage, la lumière, les êtres reproduisent et reflètent un autre paysage, une
autre lumière, d'autres êtres. L'écho du décor se fait entendre à travers le tremblement de
l'immobilité sensible à la moindre perturbation.
Alors surgit l'écho pictural d'un sentiment d'amour perdu présageant l'écho de la mort qui
poursuit son inéluctable chemin :
Parfois l'écho perçu est à la fois visuel et sonore et joue sur plusieurs claviers à la fois,
comme si la nature tout entière participait à la recherche douloureuse du héros :
L'ombre ici bruit à travers les assonances et les allitérations. Le poète, sans qu'il y
paraisse, pénètre dans le monde de l'impossible, livré à la déformation des songes.
L'amour lui-même résonne en écho à l'amour perdu des amants. La nature en a conservé
le chant :
Narcisse écoute la nature qui l'écoute... tous deux se perdent dans cette attente réciproque
car nul ne sait plus qui parle. Ces ricochets d'écho jouant sur l'eau se répondent sans cesse
17
Fragment, I, v. 8-11.
18
Fragment, III, v. 35 et suiv.
19
Cf. La Jeune Parque, v. 64-68 :
« Je n'attendais pas moins de mes riches déserts
Qu'un tel enfantement de fureur et de tresse :
Si loin que je m'avance et m'altère pour voir
De mes enfers pensifs les confins sans espoir. »
20
Fragment, I, v. 100 et suiv.
21
Fragment, II, v. 72 et suiv.
22
Fragment, 1, v. 35, 36.
et, comme une phrase musicale qui revient et que l'on attend au retour de la mélodie,
scandent la construction de ce poème.
Ce premier vers qui figure l'« ouverture » de ce morceau est déjà ambiguë. S'il signale
simplement l'éclat de la fontaine qui est le but de l'élan de Narcisse qui cherche à se
désaltérer, il peut suggérer aussi que l'heure de sa fin approche et qu'il parvient au terme
de son cheminement terrestre. Le thème resurgit aux vers 91 et suivants :
Ne le sauraient de l'onde extraire qu'il n'expire...
Pire —
Pire ?
Pire destin !
Une troisième fois, le thème se fait entendre avec une acuité encore plus grande au début
de fragment, III.
23
Fragment, I, v. I.
24
Cf. le Cimetière marin : « Je hume ici ma future fumée. »
25
Fragment, II, v. 60 et suiv.
26
La mort hante souvent la poésie de Paul Valéry. Cf. La Jeune Parque, v. 142 et suiv. :
« Si ce n'est, ô splendeur, qu'à mes pieds l'Ennemie,
Mon ombre ! Le mobile et la souple momie,
De mon absence peinte effleurait sans effort
La terre où je fuyais cette légère mort. »
Ainsi l'auteur a édifié son poème sur les modulations d'un écho s'enflant peu à peu et se
déformant sans cesse. Cette notation musicale évoque la marche sûre et inquiétante de la
mort ici cruellement présente. Il nous semble entendre le cri désespéré de la Jeune Parque
: « Mon cœur bat ! » Mon cœur bat ! », cri lancé pour répondre à son angoisse intérieure.
Le poème nous fait participer réellement au drame du héros, parce qu'il est un « charme »
qui recrée la sensation. Or Paul Valéry disait : « Je tiens qu'il existe une sorte de
mystique des sensations, c'est-à-dire une » "vie extérieure" d'intensité et de profondeur
au moins égales à celles que nous prêtons aux ténèbres intimes et aux secrètes
illuminations des ascètes.27 »
Narcisse, en se dédiant à lui-même son chant d'amour, tente de s'enclore, mais, comme
don Juan, il craint le mouvement et le temps, c'est-à-dire le vieillissement et l'altération.
C'est pourquoi don Juan recherche sa jeunesse dans chaque nouvelle conquête et Narcisse
veut immobiliser l'image. Mais en se contemplant dans la fontaine, il perçoit tellement
son double comme un être réel qu'il ne sait plus où est le double et où est la réalité : «
Souffrez ce beau reflet des désordres humains28 », lance-t-il à la fontaine, comme si son
être propre n'était plus qu'un simple reflet. La surface de l'eau qui lui renvoie son image
est donc perçue comme une profondeur habitée s'opposant à son être véritable devenu
miroir. Narcisse transforme le monde et recrée de nouvelles valeurs. Livré à la tentation
absolue de se faire divin, il s'abolit en lui-même pour devenir Dieu :
Or, pour se faire divin, il faut passer par la mort, il faut périr. Et si toutefois Narcisse
refuse les morts qui sont des modifications, des pertes de l'être en l'autre inconnu, il ne
peut, quoiqu'il l'espère, mourir en lui, en s'atteignant intact.
Le héros ne connaîtra pas les morts, et cette déclaration n'est pas ironique. Mais il
n'atteindra pas non plus un corps qui ne peut être identique à son désir, car l'image de ce
corps n'est pas ce corps lui-même : il trahit ; un « esclave » est trop « soi » pour ne pas
trahir.
27
Pièces sur l'art, « Autour de Corot ».
28
Fragment, I, v. 28.
29
Fragment, I, v. 57.
30
Fragment, I, v. 120.
31
Fragment, I, v. 121.
32
Fragment, III, v. 12.
... Voir ma bouche nuancée
trahir33...
Narcisse passera donc par la mort.
C'est précisément quand il est le plus près de s'atteindre, à la tombée du jour, qu'il
comprend ce qu'il avait déjà pressenti auparavant, que l'objet même de son amour est
l'impossibilité de sa réalisation :
() mon corps, mon cher corps, temple qui me sépare
De ma divinité, je voudrais apaiser
Votre bouche36.
Le héros fuit devant lui et les trois échos qui terminent les trois fragments de ce poème
chantent un même désespoir éternellement renvoyé :
33
Fragment, I, v. 142.
34
Fragment, III, v. 41.
35
Fragment, I, v. 38 et suiv.
36
Fragment, III, v. 29 et suiv.
37
Fragment, I.
38
38. Fragment, II
Passe et, dans un frisson, brise Narcisse, et fuit39...
L'adolescent disparaît à la tombée d'un jour émeraude ne laissant subsister de lui qu'un
écho olfactif. Cette subtile saveur de fleur sauvage et amère... ainsi sans doute que le
chant étrange de cet « inépuisable Moi ». Si nous voulons l'entendre dans ce poème de
fuite et de mirage, sa discrète mélodie semble reproduire la musique de la quête poétique
de Paul Valéry. Et peut-être est-ce dans l'œuvre de cet auteur que nous trouverons
Narcisse, à moins que Narcisse ne soit l'écho de toute sa poésie et son but ultime ?
Entre le jour et la nuit, entre la veille et le sommeil, les poèmes de Valéry se situent
souvent à la frontière de la conscience. Même le soleil de midi du Cimetière marin fait
trembler l'air et le voile,
Aux limites de soi, un être est seul à se chercher, à vouloir s'atteindre, à vouloir discerner
un reflet de son existence, et cela désespérément. Comme la Jeune Parque qui se
demande « qui pleure, seule... », Narcisse proclame :
Au terme de la longue ascèse poétique, le poème est une récréation qui permet de tromper
la solitude, l'angoisse et le temps. Il évoque la question indéfiniment répétée que l'homme
pose à la part inconnue de lui-même quand il croit distinguer une empreinte divine :
De cette attente surgit parfois dans un éclair l'illumination qui ne peut être transcrite
puisqu'elle est du domaine de l'ineffable, mais que Paul Valéry suggère dans une
réflexion notée dans ses Cahiers :
« Il faut parvenir à visiter son être jusqu'à toucher le dieu avec le dieu, comprendre
l'amour44.
La réponse à cette longue recherche n'est cependant pas Certitude, elle est Grâce
instantanée, effacée aussitôt apparue, à peine entrevue au détour d'une rime ou entre les
lignes de ces notes du poète sur le Narcisse : « Le miroir de la source : il semble une
vision d'un autre ciel et d'un autre Narcisse où stagne l'intangible bonheur. Où l'on ne
verrait plus que le ciel et Narcisse. »
***
QUELQUES DATES...