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REVUE !NTERNAT!OMALE
ÉD!T!OM FRANÇAISE
SOMMAIRE
Œuvres
Robert ARON et Arnaud DANDIEU Travail et Proiétanat )79
Bernard SÉRAMPUY. Adieu à François Mauriac. 212
foeme~:
HenriFERRARE. La population des Arbres. 221
Elvira ANDREOSSI. Le beau Dimanche. 223
Ludovic MASSÉ Le Mas des Oubells (suite et ~n~ 224
Chroniques
Journal, propos et commentaires d'Ernest Noirfalise,
recueillis par Emmanuel MOUNIER et Jacques
LEFRANCQ 258
~~um.
Edmond
Destin du Spirituel.
Louis-Émile GALEY
André ULMANN
La Cité, projection plane de l'État
Présentationde la police
282
290
POUR LA VÉRITÉ
EN EXTREME-ORIENT
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A NOS ABONNÉS
TRAVAIL ET PROLÉTAR)AT
par Robert ARON et Arnaud DANDIEU
a
Les considérations historiques relatives à l'évolution du
travail sont, d'ordinaire viciées par un malentendu on
néglige de définir précisément le travail. On néglige aussi de
distinguer entre les diverses formes de travail, entre le tra-
vail-besogne et le travail-créateur. L'origine du travail,
comme l'a fait remarquer M. Daniel Halévy, est infâme,
c'est-à-dire servile. L'importance de cette constatation est
non seulement de montrer que le travail correspondait à
l'origine à une fonction inférieure et imposée par la force,
mais que, incombant à une classe d'individus privés de tous
droits personnels et n'intervenant qu'en raison de leur nom-
bre ou de leur puissance musculaire, le travail avait dès le
début un caractère nettement inhumain et numérique. Nous
avons parlé plus haut de l'esclavage considéré comme inven-
tion économique il est hors de doute que l'utilisation des
prisonniers de guerre impliquait une conception déjà pure-
ment abstraite du travail.
Ainsi, dès l'origine, se trouvent liés les deux caractères
du travail-peine il est infâme parce qu'il est purement
quantitatif mais, dans la mesure où l'esclavage (au sens
gréco-romain du mot) est une invention technique, il repré-
sente une étape importante sur la voie qui mène à la division
du travail et par conséquent vers la libération humaine et
le déploiement des forces créatrices. En se reposant sur les
esclaves des besognes matérielles les plus grossières et les
plus mécaniques la société grecque réalisait une économie
d'énergie et un excédent de puissance nécessaire au dévelop-
pement de sa civilisation c'est même la raison pour la-
quelle Aristote déclarait impossible de se passer de l'escla-
vage.
Mettre le travail-peine à la charge des esclaves, c'est-à-
dire de gens qui, au regard du citoyen des premiers siècles
de l'antiquité n'existent pas en tant que personnes humaines
(ils n'ont pas de caput) cela ne peut s'admettre qu'à la con-
dition de donner par contre-partie à l'homme libre, à l'in-
génu, le privilège de la création par le risque et des opérations
intellectuelles qui comportent un effort et une tension
personnelle. Exemple très net, dès les temps antiques, de
ce que nous avons appelé dichotomie, et qui est la séparation
nécessaire entre la partie machinale et la partie spirituelle
de l'activité humaine. Le travail de l'esclave ne comporte ni
but, ni risque spirituel. Il est essentiellement, comme la
matière humaine constituée par le troupeau des esclaves,
quelque chose de quantitatif, d'homogène et d'indifférencié
le développement de l'esclavage marque une des premières
étapes qui mèneront au machinisme ou à l'instrumentalisme
moderne (en Grèce, l'esclave est considéré comme un outil,
opyofvo~)
par ce processus sera libérée de plus en plus,
la partie créatrice et pensante de l'activité humaine, mais
en
même temps, une autre partie subalterne de cette activité
sera de plus en plus mécanisée ou dépersonnalisée. Cette
partie de l'acte humain, qui cessera ainsi d'appartenir au
domaine spirituel ou créateur pour devenir purement tech-
nique, ce sera le travail pur, le travail-peine, qu'aucun élan
ne saurait ennoblir et qui constitue l'irréductible déchet du
progrès d'économie d'énergie,lequel s'opère par dichotomie.
Ainsi, la première analyse historique de la notion de tra-
vail fait apparaître au moins deux fonctions distinctes, qu'il
est inexact de confondre sous le même vocable le malen-
tendu ordinaire vient de ce que tantôt on entend par le
mot travail exclusivement le travail pur, exécuté sous le
poids de la contrainte naturelle ou sociale, et tantôt l'activité
humaine en général, dans la mesure où elle est le ferment et
l'aliment de la vie sociale. Par exemple, on emploiera le
même mot pour parler du travail du manœuvre, du travail
de l'ingénieur et du travail du poète, comme s'il s'agissait
d'activités ayant entre elles le moindre trait commun. C'est
l'erreur que M. A. Tilgher a eu l'honnêteté d'exprimer
complètement.
~Certes, au point d'évolution où est parvenue l'humanité,
il n'est pas d'activité humaine qui ne s'appuie sur une cer-
taine base technique et automatique, il n'est pas d'activité
humaine où, à côté de l'élan créateur, ne subsiste un dé-
chet. Par le fait même que l'homme, dans sa lutte contre
l'univers, a interposé entre la nature et lui tout un arsenal
d'instruments (allant depuis la formule mathématique ou le
signe théorique jusqu'aux plus colossales machines) il a
déprécié une part sans cesse croissante de son activité, allant
même jusqu'à la rendre inférieure spirituellement à l'acti-
vité animale le travail servile, qui est à la fois le précur-
seur et l'équivalent du travail technique, est plus hideux
ESPRIT 2
que n'importe quel geste animal, par le fait que son but est
imposé entièrement du dehors, donc involontaireet étranger.
Or, à l'heure actuelle (et ce n'est certes pas une nouveauté
aussi récente que certains découvreurs de machines sem-
blent le croire) dans toute activité spécifiquement humaine
entre une part de technique, et dans toute technique, quel-
que chose d'automatique, donc de servile.
Mais, du fait que dans presque tous les actes de l'homme
un certain résidu technique cœxiste ainsi avec les facultés
créatrices, il ne s'en suit pas que la différence de nature
entre ces deux formes d'activité humaine ne soit pas absolue.
Entre le travail servile et l'activité créatrice au contraire, il
y a un seuil, une différence de nature, qui sentimentalement
ne peut être ignorée. Quand l'artiste ou le savant crée, les
opérations automatiques, même pénibles ou compliquées,
qu'il est obligé d'accomplir sont pour ainsi dire annulées
ou dépassées par le flot créateur. Là même règle à calcul, le
même ciseau, les mêmes obstacles que présente la matière
à mesurer ou la pierre à creuser, changent entièrement la
qualité en passant de l'effort du travail-labeur à l'effort de
création.
Ainsi, malgré le voisinage constant dans tout acte humain
des deux formes d'activité, la différence foncière entre elles
deux devient de plus en plus nette, à mesure que progresse
la fonction dichotomique. Il s'ensuit deux conséquences
la première est que ce travail quantitatif, où nous avons vu
comme le déchet de l'activité humaine, devient de plus en
plus machinal, homogène et abstrait. La seconde est l'éli-
mination de plus en plus complète et de plus en plus rapide,
du moins dans le domaine de l'industrie proprement dite,
des formes intermédiaires entre le travail quantitatif et
l'activité créatrice.
La première de ces conséquences est en quelque sorte
la rançon la plus choquante et la plus paradoxale du progrès
technique celui-ci, qui a pour but une libération de la
personne humaine, commencepar assujettir de plus en plus
strictement à une besogne inhumaine une catégorie de
travailleurs. La division du travail a, du point de vue social,
deux aspects corollaires d'une part le machinisme qui sou-
met à des gestes uniformes la création des produits d'autre
part, la création de ces produits qui, fabriqués en série,
soumettent à des modèles uniformes la satisfaction des
besoins humains de deux côtés, soit
par la voie de la pro-
duction, soit par celle de la consommation, l'automatisme
pénètre plus profondément dans la vie humaine. Particu-
lièrement, en ce qui
concerne la production, on a pu pré-
tendre que même l'esclavage des temps antiques
est soumis
à un régime moins inhumain
que le prolétaire des temps
modernes. Une curieuse comparaison entre la condition de
i esclave et celle du prolétaire a pu être faite pratiquement
en Amérique quelque temps avant la guerre de Sécession.
L'un des futurs adversaires, les planteurs du Sud, pratiquait
If esclavage l'autre était adepte des nouvelles méthodes
industrielles et représentait le patronat. Or, des
auteurs
récents ont cru devoir conclure d'un approfondi
des faits que l'esclavagisme des planteursexamen
du Sud était sinon
moins cruel, du moins plus susceptible d'être rendu
table par la bonne volonté particulière suppor-
le
que patronat du
Nord. Sous le régime du patronat, les nécessités du système
sont infiniment plus impérieuses, plus oppressives et
sur-
tout plus cohérentes, les lois économiques serrant de près
l'entrepreneur comme l'ouvrier le gaspillage de
temps est
un gaspillage d'argent beaucoup plus évident qu'en régime
esclavagiste. Assurément, le patronat,
en se développant,
octroie certaines compensations à ceux-là mêmes qu'il
opprime divers avantages juridiques et bientôt écono-
miques (notamment par le raccourcissementde la journée
de travail) atténuent en principe les rigueurs de l'automa-
tisme, auquel est soumis l'ouvrier. C'est dire, qu'à la diffé-
rence de l'esclave, obligé de travailler, le prolétaire a le
droit de chômer c'est dire aussi qu'en dehors de heures
de travail, il a une liberté ses
que ne connaît pas l'esclave. Mais,
dans la mesure et dans le temps où il travaille, il est plus
asservi au système que l'esclave, même de couleur. Et la
rationalisation, telle qu'elle est pratiquée l'influence
de Taylor et de ses émules, tend à éloigner sousplus que jamais
le travail quantitatif du
manœuvre industriel d'une activité
spontanée. En effet, l'application de la méthode rationnelle
nombre
à la production a conduit à subdiviser en un certain
de gestes, considérés comme simples, l'ensemble des opé-
rations concourant à la production. C'est grâce à cette
méthode'que la machine, qui n'est, au demeurant qu'une
somme d'outils, peut, progressivement, remplacer la force
de travail humain. Mais, pour servir convenablement la
machine, aussi bien que pour en tenir lieu partout où elle
d'un prix de re-
est impossible à construire, soit par suite
vient trop élevé, soit par l'insuffisance de la technique con-
temporaine, il faut quel'homme copie la machine. La ma-
chine n'étant elle-même, comme on l'a très bien dit, qu un-
« geste automatique » (Luc
Benoist La cuisine des anges,
p. 61), le travail de
l'ouvrier taylorisé sera composé de gestes
du même ordre c'est ce qu'on appelle le travail parcellaire,
qu'il comporte n'a de sens par
car aucune des opérations
elle-mêmeet ne peut se concevoir autrement que comme une
partie infime d'un tout qui la dépasse. Ainsi se trouve précisé
le caractère à la fois fragmentaire et déterministe de la con-
ception moderne du travail servile.
Si nous examinons plus attentivement cette notion de
travail parcellaire, nous trouvons d'abord que pareil travail
de toute finalité.
est dépouillé à la fois de toute qualité et
Taylor a très bien montré pourquoi l'ouvrier accomplis-
initiative, pourquoi-
sant ce travail devait renoncer à toute inconscient,
même il devait s'efforcer de rendre son effort
pourquoi, enfin, des surveillants qualifiés étaient la rançon
nécessaire du « Scientific Management ». Cela revient à
dire que le travail est, autant que possible, dépersonnalisé,
séparé de l'ouvrier en tant qu'individu. L'homme n'est plus
ici qu'une sorte d'accumulateur de force de travail
auquel
certains réflexes sont adaptés par l'habitude scientifique-
ment créée. Mais, en poursuivant notre examen, nous nous
déshumanise l'homme,
apercevrons que ce travail, qui
prive pareillement et parallèlement la matière des caractères
qui lui sont propres. En effet, la matière qu'aura à traiter
le geste automatique de l'ouvrier taylorisé, ce sera une
matière entièrement réduite à l'état de matériaux pour
calcul et pour expérience, une matière entièrement indif-
férenciée, c'est-à-dire dépourvue de toute qualité au sens
propre du mot. Une fois de plus, nous constatons ici que ce
qui se cache derrière l'appellation trompeuse de MATÉRIA-
LISME c'est une conception purement abstraite et théori-
que des rapports de l'homme avec le monde comme de
l'homme avec l'homme. DE MÊME QUE LA THÉORIE MARXISTE
DE LA VALEUR D'ÉCHANGE SUPPOSE L'EXCLUSION DE L'ACTE
CONCRET DE L'ÉCHANGE, DE MÊME LA NOTION DE TRAVAIL
PARCELLAIRE ET DE TRAVAIL MOYEN SUPPOSE L'EXCLUSION
DE LA RÉALITÉ CONCRÈTE DE LA MATIÈRE. Les deux soumet-
tent la réalité à des cadres abstraits et à des formules ration-
nelles.
On voit ainsi quel est le résultat de tout système qui,
de la technocratie américaine au système polytechnique
russe, ne fait pas la dichotomie entre le travail créateur et le
travail parcellaire, et qui, ne distinguant pas entre eux,
les confond, au contraire, en théorie et en pratique:l'appren-
tissage même n'étant fait que pour préparer les jeunes
ouvriers à accomplir un travail strictement limité et divisé,
l'esprit humain, loin de considérer la totalité des actes,
n'aura qu'à connaître l'usage d'un certain nombre de gestes
ou de combinaisons de gestes pour s'adapter à tous les
métiers possibles. Ainsi l'esprit, qui perd tout contact
complet avec la matière, ne saurait plus être ni humain,
ni libre et la matière elle-même, séparée ainsi de l'esprit,
tombe dans le domaine des abstractions irréelles.
La dichotomie est donc une opération nécessaire de l'es-
prit humain elle est l'expression du conflit fécond entre
l'homme et la nature, entre l'homme et la société, entre
l'homme et sa pensée. Nous venons de voir quelle est sa
première conséquence dans le domaine du travail assujet-
tissement de plus en plus grand des travailleurs parcellaires
à une forme d'activité inhumaine. Une seconde conséquence
est à première vue aussi paradoxale et inhumaine, tant que
l'on n'a pas pris conscience que l'une comme l'autre consti-
tuent le déchet de la libération progressive de l'homme et
permettent, par contraste, à l'activité créatrice de se déplo-
yer plus efficacement. Cette seconde conséquence consiste
en l'élimination des formes intermédiaires entre l'activité
créatrice et le travail quantitatif. Entre le travail du manœu-
vre ou de l'ouvrier à la chaîne et celui du savant ou de fin.
venteur, on pouvait concevoir et constater celui de l'artisan
ou du spécialiste qui, réunissant en lui diverses formes
d'action que le progrès de la dichotomie tend à séparer,
possèdent à la fois la main ouvrière et l'esprit d'invention.
De plus en plus le dogme de la spécialité perd du terrain
ou plutôt c'est la notion même de spécialité qui se transforme,
le spécialiste n'est plus un isolé comme l'ancien artisan
il pvend sa {.-la~e dans un de ces ensembles professionnels
qui s'appellent corporation et là, sans se laisser absorber
par les basses besognes de manœuvre que la corporation
confie ou impose à d'autres, il apporte à une œuvre collec-
tive ses qualités personnelles de création et d'initiative.
Si la dichotomie tend à faire disparaître l'artisanat sous sa
forme ancienne, souvent si gratuitement romancée 1, elle
doit permettre de faire entrer toujours plus avant dans les
divers domaines corporatifs le sentiment de la création,
qui ne vient pas du travail dit manuel, lequel a toujours
été plus ou moins automatique depuis l'antiquité, mais du
contact avec les résistances naturelles et les sentiments de
risque et de choix. Celui qui connaît la joie de bâtir, ce n'est
l'oeu-
pas le maçon, mais l'architecte. C'est lui qui conçoit
vre dans sa totalité. En vain dira-t-on qu'il n'y a qu'un archi-
tecte, qu'un ingénieur en chef. qui puisse vraiment avoir
ce sentiment de totalité en réalité, dans la
hiérarchie du
travail qui va du travail indifférencié au travail créateur, du
travail du manœuvre à celui de l'ingénieur, il est une zone,
où l'ouvrier, sans cesser d'exécuter en fait un travail parcel.
laire participe cependant à l'ensemble ou à la totalité de
l'œuvre. C'est justement dans cette zone, que l'on pourrait
appeler zone de communion professionnelle, que se réfugie
aujourd'hui l'esprit de l'artisanat c'est cette communion
d'essence corporative,qui a fait les cathédrales, et qui donne
aujourd'hui encore, en dépit de tous les déchirements de
notre société, naissance à tant de grandes œuvres sans signa-
ture (avions, navires, voies ferrées) qui font oublier par
moment les affreuses tares de notre industrialisme. L'arti-
1. Rutkin.
san isolé redevient ce que l'on pourrait appeler un compa-
gnon dans l'ensemble de la corporation, il garde l'essen-
tiel de ses qualités personnelles tout
en partageant, sous
forme de loisir et de meilleur rendement, les bénéfices d'une
division du travail plus évoluée.
En somme, l'analyse qualitative et humaine à laquelle
nous venons de procéder pour la notion de travail nous
permet d'établir un tableau comprenant trois catégories
de travail ou plus exactement d'efforts de production,
le nom de travail devant, étymologiquement, être réservé
à la troisième catégorie, celle du travail purement quantita-
tif et homogène.
Le premier type de ces efforts, c'est l'effort de création
proprement dit, par exemple, celui de l'artiste ou du savant.
Sa caractéristique est qu'il a pour fin unique t'œuvre. Pour
employer une expression populaire qui a ici tout
son sens,
on dira que celui qui crée NE COMPTE PAS SA FATIGUE. Cela
ne signifie pas seulement que cette fatigue ne saurait être
payée, puisqu'elle est une joie, mais qu'on ne peut l'évaluer
quantitativement puisqu'elle est, en quelque sorte, incorpo-
rée à une œuvre totale, qui porte en elle sa propre fin. Le
second type d'effort sera au contraire le travail proprement
dit, à savoir celui du manœuvre
sa caractéristique est
de n'avoir pour but, du moins aux yeux de celui qui l'accom-
plit, que le salaire. Ce travail est à la fois indifférencié
puisque n'importe qui peut l'accomplir après un apprentis-
sage très bref, monotone, puisque la même opération y
est indéfiniment répétée et, surtout, parcellaire, c'est-à-
dire qu'il ne prend sa signification que lorsqu'on le réin-
tègre dans la construction totale dont il n'est qu'un élément.
Un des effets de la machine et du taylorisme consiste à
définir pratiquement et scientifiquement travail. En vain
ce
quelques pharisiens s'efforcent-ils de persuader
au travail-
leur parcellaire qu'il doit prendre intérêt à
sa tâche parce
qu'elle est nécessaire à la société. C'est là une vue abstraite
le chrétien qui lave les pieds du pauvre peut bien prendre
y
intérêt, car il est en contact avec le pauvre. Le travailleur
parcellaire ne saurait en faire autant, car il est, dans
son
travail, séparé de l'humanité par toute la largeur de cet
instrument d'analyse qu'est la machine, prolongée par 1.
rationalisation.
Reste une troisième catégorie, intermédiaire, parce qu'elle
comporte à la fois une part d'initiative et une part de rou-
tine, qu'elle comporte une vue sur les opérations d'ensemble
et par conséquent un sentiment de totalité sans toutefois
laisser un champ largement ouvert à la liberté de création.
Ce type d'effort correspond assez bien à l'activité artisa-
nale qui implique à la fois un contact avec le consommateur
et une certaine ingéniosité technique, d'ailleurs limitée
à un domaine assez étroit. Le sentiment corporatif com-
pense ,en quelque mesure, ce que cette activité a d'étriqué
et de partiel. On la retrouve sous une forme un peu diffé-
rente chez l'ouvrier industriel qualifié, le chef d'atelier, etc.
Pour toute cette catégorie, l'effort a évidemment une double
fin d'une part, l'œuvre d'autre part, le salaire. C'est
ce qui lui donne un caractère assez trouble. L'artisan et
le
technicien (arts et métiers) sont à la fois séduisants et déce-
vants, fantaisistes et primaires. En dépit des attendrisse-
ments à la Ruskin, il ne faut pas se figurer que les maîtres-
ouvriers du Moyen Age aient entièrement échappé au défaut
d'esprit des artisans modernes. L'étude des débuts de l'im-
primerie, par exemple, suffirait à le prouver (où l'escroque-
rie et le mauvais goût se rencontrent à côté d'une réussite
artistique et technique non dépassée). Ici, comme ailleurs,
la fonction dichotomique qui tend à éliminer les formes
inférieures de l'artisanat industriel, peut bien avoir des
conséquences immédiatement fâcheuses en disqualifiant
certains artisans qu'elle repousse dans la catégorie des
manœuvres elle ne saurait être considérée comme mau-
vaise en elle-même puisque le machinisme doit avoir pour
résultat final une suppression progressive de la catégorie
du travail humain parcellaire.
ESPRIT 3
actuelledu travail d'un côté une production et une consom-
mation variable et dont les variations, comme on a pu le
voir, au cours de ces cinq dernières années, peuvent attein-
dre une amplitude extrêmement forte de l'autre, une force
de travail, un prolétariat, dont les effectifs sont fixés ou tout
faibles
au moins varient dans des proportions extrêmement
et suivant des cadences fort lentes. Cette armée du travail,
dans les périodes de sous-production, est incapable de
répondre à la demande de main-d'œuvre dans les périodes
de crises, elle abandonne une large part de ses effectifs
au chômage. Pour prendre une comparaison dans l'ordre
militaire, tout se passe comme si les états modernes dispo-
saient d'une armée aux effectifs fixes et constants, en temps
de paix comme en temps de guerre, et si pour passer de
l'un à l'autre, ils n'avaient pas la faculté de modifier leur
recrutement et de mobiliser des éléments nouveaux. Le
résultat serait que leur force militaire apparaîtrait, ou bien
excessive en temps de paix, ou insuffisante en temps de
guerre. Nous en sommes là pour l'armée du travail et tant
de
que l'on n'aura pas trouvé un système de recrutement ou
mobilisation assez souple, pour pouvoir s'adapter à des
besoins variables, on courra inévitablement les risques
extrêmes du chômage ou de la disette. Au contraire, en
organisant ce mot de recrutement et ce service civil, on
permettra aux divers procédésd'économie d'énergie d'appor-
ter leur bénéfice on libérera la partie créatrice de l'activité
technique.
a
Tels sont donc les quatre buts à atteindre
1° Supprimer la condition prolétarienne, ce qui en
termes humains, signifie supprimer des destinées consa-
crées entièrement à un travail abêtissant et borné
2° Remplacer le plus possible la main-d'œuvre humaine
disqualifiée par la machine, ce qui assure le libre jeu de la
loi dichotomique, au point de vue de l'économie d'énergie
3° Rattacher de plus en plus le travail technique ou arti-
sanal au travail créateur dans le cadre des corporations, ce
qui assure le libre jeu de la loi dichotomique au point de
vue de la libération du travail créateur. Au lieu de proléta-
riser le laboratoire, il faut rendre à la corporation son carac-
tère spirituel
4° Organiser une force de travail indifférencié
assez
souple et homogène pour pouvoir être utilisée proportion-
nellement aux besoins sans provoquer ni chômage ni
disette de main-d'œuvre.
Ces quatre buts procèdent, nous l'avons vu, d'une
ana-
lyse de la notion de travail, faite en tenant compte des fac-
teurs humains, et non plus des facteurs purement écono-
miques ou matériels du travail. Il ne s'agit plus de chercher
des remèdes partiels à la crise du travail mais, l'ayant
analysée et étudiée dans son ensemble, de voir quel
ensem-
ble de mesures peut y parer. Il s'ensuit que
nos quatre buts
perdent toute leur valeur s'ils ne sont pas atteints simultané-
ment pour mieux dire, on ne peut réaliser un de ces objets
si on ne réalise pas aussi les autres.
Que signifierait, en effet, la suppression de la condition
prolétarienne si on laissait subsister à côté le chômage qui
mène fatalement une partie des travailleurs à une proléta-
risation forcée ? Et comment donner aux corporations un
rôle de création spirituelle, si on laisse subsister
en elles
un prolétariat, entièrement absorbé par des besognes
matérielles et par conséquent dont les seules revendications
portent sur le taux des salaires ?
Il y a donc, sur un plan presque politique, quatre mots
d'ordre
!° Plus de prolétaires, c'est-à-dire plus d'hommes desti-
nés exclusivement aux formes les plus serviles du travail.
Celles-ci seront reportées sur l'ensemble du corps social
2° Développement extrême du machinisme et de la ratio-
nalisation du travail pour diminuer au maximum le travail
servile et indifférencié
3° Organisation des corporations professionnelles desti-
nées à régler et à provoquer les formes créatrices du travail
4° Création d'un service civil chargé de répartir sur l'en-
semble du corps social le travail indifférencié, et permet-
tant, sans s'exposer aux Inconvénientssociaux du chômage,
de n'en utiliser que la plus petite partie possible, et en tous
cas une partie de plus en plus petite.
C'est pour n'avoir pas pris garde à la solidarité de ces
quatre mots d'ordre que tous ceux qui ont proposé jusqu'ici
des remèdes, si révolutionnairessoient-ils, à l'impasse con-
temporaine, ne nous ont mis en présence que de dangereux
ou inutilisables monstres.
Ainsi, quand on parle de la semaine de quarante heures
à titre de remède au chômage, la question se pose de savoir
s'il s'agit là d'une manière détournée (et d'ailleurs classi-
que) d'abaisser le taux des salaires, ou si, au contraire,
on prétend réellement revenir aux hauts salaires en même
temps qu'on supprime le chômage. Dans le premier cas,
au lieu de supprimer la protestation prolétarienne, on l'exas-
père légitimement. Dans le second, on s'expose à la néces-
sité de recourir à l'inflation de crédit et à la concentration
bancaire, qui sont précisément parmi les causes les moins
contestées de la crise actuelle. Dans un cas comme dans l'au-
tre, cette diminution d'un sixième sur la durée de la semaine
de travail ramenée de quarante-huit à quarante heures, peut,
pendant quelque temps, provoquer un certain soulagement
à la crise du chômage mais comme elle ne s'accompagne
d'aucun changement profond dans la répartition du travail,
comme, d'autre part la semaine de quarante heures n'a pas
plus de souplesse que n'avait la semaine de quarante-huit
heures et constitue une approximation aussi rigide, aussi
grossière et aussi provisoire, ce remède n'en est pas un,
tout au plus un palliatif, qui peut, en réalité, finir par empi-
rer le mal.
C'est ainsi encore que les divers systèmes, proposés en
Allemagne ou en Bulgarie, de service volontaire de travail,
bien loin de supprimer les inconvénients de la condition
prolétarienne, les multiplient et les aggravent d'abord
au point de vue politique, puisqu'il s'agit d'une étatisation
renforcée en vue d'une autarchie économique, ensuite au
point de vue économique, puisque le travail fourni par le
F. A. D. ou les Trudowaks ne concerne que des besognes
complémentaires, travaux d'Intérêt public ou administra-
tifs, sans rien changer au régime de l'Industrie privée ou des
industries d'État, qui sont vraiment l'essentiel enfin,
au point de vue psychologique, puisque ces communautés
de travail s'inspirent d'une morale qu'il s'agit précisément
non d'exalter ou de promouvoir, mais de supprimer une
fois pour toutes à savoir celle de la religion du travail
pour
le travail dans le style américain ou soviétique. Le service
de travail ne se justifie pas par les possibilités de dévelop-
pement qu'il donne par ailleurs au travail créateur H
n'apporte aucune solution nouvelle au problème de la répar-
tition du travail au contraire, il marque un progrès de cet
étatisme impérialiste, auquel nous devons la centralisation
administrative et le service militaire, la paix armée et la
guerre, l'inflation et le chômage. En apparence et dans la
forme, il peut prêter à équivoque et à confusion
avec le
service civil, tel que nous l'envisageons. En réalité et
en
esprit, il est tout différent et d'inspiration opposée.
Pourtant, il ne faut pas mésestimer l'importance de
ces
remèdes partiels et insuffisants, sinon en eux-mêmes, du
moins en tant que symptômes ou que préludes des solutions
réelles. Ils sont intéressants non seulement en
ce qu'ils
indiquent un état d'esprit pré-révoiutionnaire, mais par la
convergence qu'ils présentent. Qu'H s'agisse de la semaine
de quarante heures ou du service civil, ce que le réformateur
capitaliste ou socialiste a en vue, c'est à la fois d'éviter le
gaspillage de la force de travail, et, d'autre part, de faire
participer une fraction de plus en plus grande du corps
social à la solution pratique du problème du travail. Les
moyens qu'il emploie sont partiels et imparfaits les buts
qu'il vise, renforcement de l'État ou des trusts industriels,
sont à l'opposé des nôtres. Mais il n'empêche que, sous la
pression des circonstances, apparaissent, un peu partout
et comme spontanément, de nouvelles formes d'organisa-
tion du travail, qu'il nous appartient de préciser et surtout
d'utiliser en vue de buts nouveaux et proprement révolu-
tionnaires. De même que la corporation fasciste est à la fois
analogue et contraire à la corporation que nous envisageons,
analogue par certains détails pratiques d'organisation pro-
fessionnelle, contraire par le but poursuivi et l'esprit qui
règne de même les divers services de travail apparais-y
sent, par rapport au service vicil que nous préconisons,
comme des embryons ou des monstres, qui comportent
peut-être certaines grandes lignes des solutions véritables,
mais qu'il s'agit de rendre viables, efficaces et vraiment
salutaires. Un des rôles de l'ordre nouveau sera de donner
un sens, un but et une forme définitive aux institutions
qui semblent en ce moment naître spontanément un peu
partout, mais qui sont encore trop assujetties au désordre
actuel pour avoir une utilité et une efficacité réelles.
Tâchons maintenant d'oublier pour une minute les con-
ditions économiques particulières à notre siècle et repla-
çons-nous par la pensée en face du grand problème qui a
hanté les esprits durant la fin du monde antique et le haut
Moyen Age celui de la suppression de l'esclavage. Remar-
quons qu'en dépit des apparences le problème à résoudre
n'était pas très différent du problème actuel la suppression
du prolétariat. De même, nous l'avons vu, qu'à la fin du
monde antique la suppression de l'esclavage a été rendue
possible par l'invention d'un certain nombre de procédés
techniques nouveaux, qui permirent de recruter autrement
la force de travail jusque-là demandée à l'esclavage, de même
aujourd'hui les moyens économiques et techniques suffi-
sants pour la suppression de la condition prolétarienne sont
réalisables simplement on recule devant cette réalisation
comme devant provoquer un chômage monstrueux et livrer
au vice et à l'incurie la plus grande partie du corps social
de même, il n'en faut pas douter, que l'homme du X**
ou XIe siècle, qui aurait pu mesurer les possibilités techni-
ques qui s'offraient à lui pour abolir enfin définitivement
l'état servile (esclavage ou servage) aurait reculé d'horreur
en se demandant ce qu'allait devenir la masse des anciens
serfs en face de la possibilité économique brusquement
offerte à eux de changer de résidence et de métier. Et pour-
tant, que se passa-t-11 ? A coup sûr, il y eut, au bas Moyen
Age et au début de la Renaissance, une période de trouble
et de guerre, peut-être comparable à l'époque actuelle.
Mais de cette période, qui est comme la période actuelle,
une période de transition et de non-adaptation, sortit une
des renaissances spirituelles les plus intenses que l'Occident
ait connues. Bien loin de s'accompagner d'une décadence,
la suppression de la condition servile provoqua dans un
monde que l'on considérait comme vieux et pourri un ex-
traordinaire bouillonnement de jeunesse, de découvertes
et d'inventions. Jamais le personnalisme n'a remporté une
série de victoires aussi profondes que de la Renaissancede
l'aristotélisme à l'épopée de Rabelais. Comment donc s'est
opéré, sur le plan économique, ce grand changement des
conditions du travail, qui a permis l'institution d'une civi-
lisation et d'un ordre nouveau ? Les inventions concernant
l'attelage du cheval et du bœuf, la navigation(gouvernail),la
forge, les moulins. ont permis une économie de force de
travail qui a donné lieu à la fois à un accroissement de la
production, et partant à une élévation relativement con-
sidérable du niveau moyen de vie d'autre part, à une cer-
taine augmentation des loisirs dans l'ensemble de la popu-
lation. Ces loisirs et cette élévation du niveau de la vie
donnent lieu à une diffusion et à une création spirituelles
dont on ne peut se faire une idée que par leurs résultats.
Ce que nous avons aujourd'hui à opérer, c'est un chan-
gement analogue, qui est cependant beaucoup plus difficile
réaliser, les économies d'énergie dont nous disposons ne
résultant plus de moyens, somme toute assez élémentaires
et limités comme l'attelage du cheval ou la forge, mais de
machines et de moteurs, dont le rendement est considérable.
Le pas à sauter est donc plus haut, et plus redoutables les
conséquences de toute erreur de méthode d'autre part les
moyens de distribuer et de répartir cette énergie nouvelle
ne peuvent plus être laissés à l'empirisme et à la fantaisie
des événements. Il nous faut une méthode pour passer de
l'actuel Moyen Age à la proche Renaissance sans quoi de
quelles guerres et de quelles crises ne s'accompagnera pas
la transition nécessaire ? En se développant, la technique
est devenue de plus en plus scientifique, et partant de moins
en moins assimilable sans initiation méthodique de plus
le développement de la technique ne va pas sans une cer-
taine concentration des grands foyers de production d'é-
nergie (exemple centrales électriques.). Pour cette dou-
ble raison, il est indispensable, qu'on le veuille ou non, que
la distribution des économies d'énergie, réalisées par la
création humaine, ne soit pas laissée au hasard ni à on ne
sait quelle espérancè vague en l'heureux effet du temps et
des événements mais qu'elle soit faite d'après les plans
de la conscience et de la volonté humaine.
Voici donc la formule qui, à notre sens, doit servir
d'axe à cette distribution répartition égalitaire du tra-
vail quantitatif, c'est-à-dire parcellaire et indifférencié.
On se souvient qu'Aristote voulant prouver la nécessité
naturelle de l'esclavage, écrivait que l'esclavage cesserait
le jour où marcheraient toutes seules les navettes des mé-
tiers. Assurément, à la fin du Moyen Age, les navettes des
métiers ne se sont pas mises à marcher toutes seules, et,
maintenant encore, il faut quelqu'un pour diriger les orga-
nismes mécaniques qui les remplacent ou les font aller
mais dès la fin du Moyen Age, certains travaux qu'on ne
pouvait faire faire que par des esclaves, sous la contrainte
des coups, sont devenus à la fois plus rapides, moins fati-
gants ou moins répugnants il était dès lors possible de les
faire exécuter par une contrainte moins brutale, quoique
aussi inéluctable, celle du salaire. Aujourd'hui, où un nou-
veau progrès technique vient d'être réalisé, susceptible de
diminuer encore la peine des hommes, le pas à faire et le
progrès à réaliser est de remplacer la contrainte du salaire
par celle de la solidarité humaine. Le bénéfice réalisé au
cours des siècles par le développement de la technique indus-
trielle se marquera par deux étapes principales 1° passage
de l'esclavage au servage, c'est-à-dire sous sa forme actuelle,
au prolétariat, ce qui correspond à apporter quelques adou-
cissements politiques au sort d'individus, confinés dans les
parties basses et machinales du travail 2° passage du
servage au service civil, c'est-à-dire d'un état où ce travail
indifférenciéest le triste apanage d'individus et d'une classe
à un état où il est reporté sur l'ensemble du corps social.
Ainsi, si nous parlons de solidarité humaine, il ne s'agit,
point d'une chimère vague et généreuse, mais d'une orga-
nisation précise du travail, où, en fait, cette solidarité serait
réalisée. Nous ne désirons créer dans le domaine étroit du
travail parcellaire ni un enthousiasme collectif, ni une disci-
pline puritaine. Nous envisageons seulement comme remè-
de à une situation autrement sans issue, l'institution d'une
contribution obligatoire et personnelle, extrêmement limi-
tée pour chacun, mais étendue à tous les membres du corps
social, à cet inéluctable déchet de l'activité humaine en
matière économique à savoir le travail Indinerencié. La
force de travail dont on disposerait ainsi pourrait bien
n'être pas immédiatement assez considérable pour abolir
entièrement, du jour au lendemain, la condition proléta-
rienne. Mais cette force de travail serait infiniment homo-
gène et souple bien loin de craindre pour elle le chômage,
il conviendrait de lui appliquer les méthodes de la ratio-
nalisation la plus poussée et de mettre à son service les inven-
tions toujours plus susceptibles de la rendre toujours plus
productive et partant plus économique. Si l'on assimile
cette contribution au service militaire (mais dans un tout
autre sens, et même en un sens contraire à celui du F. A. D.
allemand) on s'apercevra que la pression même de l'opinion
publique s'exercera automatiquement et sans jamais se
relâcher dans le sens que nous venons d'indiquer, puisque
chaque économie d'énergie tendra à réduire le temps et les
peines du service.
Nous montrons ci-dessous comment semblable mesure
peut pratiquement être étudiée en vue d'une application
mais il importe, dès maintenant, de constater qu'elle seule
permet d'attendre en même temps les divers buts énoncés
plus haut abolition de la condition prolétarienne Indé-
pendance des deux formes, créatrice ou Indifférenciée, du
travail humain par le libre jeu de la loi dichotomique
conjuration de la hantise du chômage.
Mais surtout l'intérêt fondamental que présente l'étude
de pareilles mesures au point de vue méthodique est de
préciser ce que nous entendons par révolution personnaliste
le personnalisme peut apparaître comme une donnée philo-
sophique ou une aspiration sentimentale, dont la recherche
se perd en des abstractions ou des utopies il est nécessaire
de marquer qu'une aspiration aussi essentielle et perma-
nente de l'homme peut être satisfaite par des moyens tech-
niques et une organisation sociale précise et détaillée. Ainsi
la révolution personnaliste se situe, par rapport à révolu-
tion utopiste, d'une part, par rapport à la révolution maté-
rialiste d'autre part.
Pour les utopistes comme Saint-Simon ou même Fourier,
la cité future s'édifie dans t'abstrait, dans l'irréel, sans point
de contact direct avec le présent il est facile alors d'être
personnaliste dans un monde chimérique ou aucun obstacle
ne s'oppose à l'affirmation de la personne humaine. C'est
une construction logique à la manière platonicienne, située
hors du temps, une sorte de modèle qui peut bien avoir
une influence indirecte sur le cours des choses (de la même
façon qu'un mirage peut orienter la marche d'une caravane)
mais qui lui reste extérieure et étrangère. Pour les marxistes,
la Révolution se présente comme liée à un but la prise du
pouvoir à partir de la dictature du prolétariat, qui marque
le premier pas de cette révolution, la condition prolétarienne
doit automatiquement être supprimée ainsi que l'État, par
un processus mystérieux dont nous ne pouvons pas plus
nous faire une idée que de la désincarnation d'un pur esprit
ainsi le but véritable,qui est l'abolition de la condition prolé-
tarienne (du salariat, pour employer la terminologie mar-
xiste) est rejeté dans un avenir mythique, sans aucun lien
pratique et direct avec le présent et même avec le but im-
médiat du parti révolutionnaire. A la révolution utopique,
succède la révolution dinérée dans les deux cas, révolution
lointaine et irréelle.
Au contraire, pour nous qui considérons que la condition
prolétarienne doit être définie non pas rationnellement et de
l'extérieur (par la plus-value) mais psychologiquement et
de l'intérieur (par la nature du travail parcellaire), pour nous
qui savons que la technique moderne, bien employée, per-
met de supprimer le prolétariat, l'acte révolutionnaire se
confond avec l'effort, dès maintenant possible, pour suppri-
mer la condition prolétarienne la Révolution peut être
Immédiate et réelle, le but de cette Révolution n'est ni de
parvenir à une utopie, ni d'opérer une synthèse le person-
nalisme est un moteur plus précis et plus humain que les
divers systèmes philosophiques en outre il est réalisable
actuellement, le but de la Révolution, c'est la Révolution
Bernard SÉRAMPUY.
LA POPULATION DES ARBRES
par Henri FERRARE
Henri FERRARE.
LE BEAU DIMANCHE
par Elvira ANDREOSSI
Elvira ANDREOSSI.
LE MAS DES OUBELLS
par Ludovic MASSÉ
(SUITE ET FIN)
III
ou_
morceaux de pain gris. Il mangeait en reniflant et en jetant
des regards furtifs aux gens et aux choses. Minou avait
enfin consenti à s'asseoir à table à la vue de Jacquou,
elle s'était d'abord sauvée en larmes elle ne fut rassurée
que parce qu'il tournait le dos et qu'il semblait, de la sorte,
inoffensif. Jacquou accepta tout ce qu'on lui offrit, mais
ne manifesta pas une seule fois du contentement.
Il parlait avec peine et mal. L'après-midi, Lucien obtint
de lui des réponses confuses, un morne bredouillement
il le sentait déshabitué de tout. Jacquou paraissait com-
prendre les questions que Lucien lui posait et ses efforts
pour y répondre avaient on ne sait quoi de rebutant et
d'héroïque.
Lucien n'insista pas. Il tenait avant tout à conquérir
Jacquou, à s'en faire un allié, un ami. Il comprit qu'il ne
pourrait y parvenir que par étapes prudentes, car le malheu-
reux enfant était abrupt et plein d'inconnus.
Dès la sortie de quatre heures, la nuit tombait comme
un couperet noir.
On viendra te chercher, Jacquou ? demanda Lucien
pour la dixième fois.
Jacquou, enfin, dit oui. Puis il se mit à pleurer avec des
grimaces épouvantables. Une autre épreuve l'attendait sans
doute.
Lorsque la silhouette du Chouline passa sur l'aire des
Cadène, les pleurs de Jacquou s'alentirent. Le Chouline
l'accueillit sans un mot, le poussa devant lui, oppressé par
sa haine du petit misérable dont les pleurs le trahissaient.
Nore, Cadène, Sarcette, la Bouïne, étaient venues pour
ramener leur enfant. Le Chouline les prit à témoin
Quel malheur leur dit-Il, un enfant comme ça.
Ecoutez-le C'est le mal qui
se prépare. Le haut-mal.
le mal de la nuit.
Les femmes hochaient la tête en signe de compassion.
Il commence par ces pleurailles. Et puis le mal va
le rendre. Il va le prendre sur le chemin.
Et la Nore, Cadène, Sarcette et la Bouïne hochaient
toujours la tête.
Et elles regardaient s'éloigner le Chouline qu'aucune
douleur n'épargnait.
Cela dura plusieurs jours ainsi. Les désespoirs de Jacquou
perdirent peu à peu de leur véhémence. Il appréhenda de
moins en moins le contact"des autres enfants dont Lucien
avait réfréné les instincts persécuteurs prévenu les
dédains, en surveillant leurs gestes et leurset réflexions,
les inclinant irrésistiblement à l'oubli du visage, des jambes en
torses, du corps trapu de Jacquou.
Jacquou participait maintenant jeux faciles il fai-
sait l'apprentissage de la joie aux
en commun avec une com-
plaisance touchante. Il lui arrivait de rire, de crier. Au
début, ses camarades de jeu furent impressionnés
par la
drôlerie de ses exclamations. Puis, ils s'y familiarisèrent.
Lucien connaissait une véritable joie. Il
Hernandez. Cette lente transformation de Jacquou en fit part à
l'exaltait
et lui faisait oublier le dessein qu'elle devait servir.
Il entreprit de le faire lire. Mais, là, il n'eut
lusion. Il eut beau souffler que désil-
jaillit point d'étincelle. Jacquousur ce pauvre foyer, il n'en
regardait les lettres d'un
air sournois et résistait à leurs naïves invitations, rondes
simples. Pourtant, il y et
en eut qui l'inspirèrent au bout
d'une certaine familiarité. C'étaient les voyelles. Elles lui
arrachaient des cris pointus
en i, en u, des sortes de rica-
nements en a.
Le lendemain, elles le laissaient indifférent. Il les
reconnaissait plus. Il leur faisait un accueil hostile. ne
Tu as vu, parfois, un âne, Jacquou.
âne. un âne. un
Jacquou regardait Lucien entre
dire. Il n'avait, ses yeux plissés, sans
mot peut-être, jamais d'âne.
Jacquou. tu as bien vu, parfois,vul'âne de Maloune.
Tu sais bien. cet animal qui crie devant l'école quand
vous sortez. Qui fait I. A. I. A.
Le visage de Jacquou
se détendait. Il riait maintenant.
Il le connaissait bien l'âne de Maloune Et sans doute
il l'aimait.
Eh bien Jacquou. l'âne de Maloune connaît
ne
deux lettres de l'alphabet I. A. Les vois-tu, que
sur le tableau ?
I. A. I. A. Montre les-moi, Jacquou,
avec cette baguette.
Jacquou saisissait la baguette, la promenait
sur la théorie
blanche des lettres, l'arrêtait n'importe où. Lucien le com-
plimentait et Jacquou poussait
un soupir où il y avait
peut-être un peu d'orgueil.
Les exercices d'écriture
ne donnaient pas de meilleur
résultat. Jacquou barbouillait
zèle. Lucien essayait de démêler, son ardoise avec un grand
dans le fouillis des lignes,
ESPRIT 5
un détail, fût-il méprisable, qui lui permît d'espérer. Jac-
inimitables, et cette sorte de
quou réussissait des entrelacs
génie ne lui valait qu'une caresse dont il se satisfaisait.
Il n'était qu'un livre où Jacquou lisait avec une véritable
perspicacité c'était le visage du maître. Il le consultait,
il le feuilletait d'un bout de la classe à l'autre, entre ses
yeux mi-clos et comme
méditatifs.
Lorsque Lucien s'approchait de lui, ou parlait haut, il
semblait vouloir se terrer. Lucien devinait que son crédit
tenait à un rien, qu'une brusquerie, qu'un souffle, détrui-
raient l'équilibre. Jacquou avançait dans sa confiance par
des cheminements obscurs, avec lenteur. Lucien pensait à
consultent minutieusement de
ces escargots myopes qui
leurs périscopes de chair sensible, un brin d'herbe, un
angle de roc, avant de s'y engager, et qu'une infime vio-
lence fait refluer, entrer en eux-mêmes de longues heures.
Il sentait que Jacquou, à sa première maladresse, entrerait
pareillement en soi-même pour n'en plus ressortir.
Il se surveilla attentivement, entoura Jacquou d'une
feinte indifférence, le laissa avancer seul dans ses décou-
vertes.
C'est Marie que Jacquou aimait le plus clairement. Il la
lui.
voyait tous les jours, à l'heure du déjeuner. Elle avait vaincu
sa répugnance et accueillait Jacquou avec une bonne excla-
mation qui l'émouvait sourdement. Elle faisait réchauffer
les aliments qu'il portait du mas, dans une marmite ou
mie. Elle le ravigotait
au creux d'un croûton vidé de sa
d'un peu de soupe chaude. Elle lui parlait, d'un peu loin,
mais avec une telle douceur qu'il la sentait tout près de
lui. C'est
Marie qu'il aimait le mieux. Il n'avait connu, dans
deux femmes
sa vie, pour le protéger et le caresser, que femme
sa mère et sa grand'mère.
Marie était une comme
elles, plus douce encore, plus mystérieuse. parce qu'elle
Et
n'était ni vive, ni empressée, comme lointaine, dans le
calme halo de son activité, Jacquou se sentait au chaud.
Parce qu'il l'aimait le mieux, il lui parla le mieux. Elle
le comprenait mal elle traduisait ses pauvres élans recon-
naissants.
C'est à Marie qu'il fit ses premières confidences, un jour
qu'elle l'acculait délicatement aux aveux. Oui, le « padri&
le battait souvent. Il battait marraine. Il battait la mère.
Le padri était bien méchant pour tous. Il le confessait en
tremblant, comme s'il avait conscience de dévoiler un
mal honteux.
Pourquoi le Chouline les battait ? II ne savait le dire. Il
n'y voyai peut-être point d'injustice. Le padri était le
fléau qu'on subit le des vcûté,
une sorte de dieu colé-
reux. Personne ne pouvait rien contre ses foudres.
Maintenant, il venait du mas tout seul, il y revenait seul
il ne redoutait point les ombres ni les rencontres. L'heure
du départ à l'école l'emplissait d'allégresse, et, aux Oubells,
ce bonheur de tous les matins ne passait inaperçu, ni des
femmes que l'espoir embrasait, ni du Chouline, embrasé
seulement de souci. Au retour, Jacquou avait parfois à
répondre à des questions embarrassantes, et son
manque
de subtilité lui coûtait des scènes terrifiantes qu'il clôturait
par l'habituelle crise de nerfs.
Jacquou manqua ainsi l'école de temps en temps. Ces
crises l'abêtissaient plus encore. II en sortait comme d'une
tempête, meurtri et sans souvenir. Marie et Lucien l'inter-
rogeaient en vain Jacquou ne les aidait guère dans leurs
hypothèses. Un jour, il boîtait une autre fois, il portait
au visage des traces bleuâtres. Sa pauvre chair seule
témoignait. Marie touchait ses plaies du doigt
Qui t'a fait ça, mon petit ?
Il réfléchissait profondément
C'est le padri.
C'est tout ce qu'il disait.
Une fois qu'un camarade prit Jacquou aux épaules pour
l'entraîner dans une ronde, il hurla si fort que Lucien s'en
inquiéta, l'emmena dans sa cuisine. Avec Marie, ils l'exa-
minèrent. L'enfant, en bras de chemise, laissa palper ses
épaules bleuies. Il dit encore
C'est le padri.
Les Grégoire se regardaientsilencieusementetils hochaient
la tête comme devant l'incroyable.
En décembre, Jacquou se mit à tousser. Il se recroque-
villait sur sa poitrine étroite comme un bréchet,
pour résis-
ter à cette toux.
Il ne savait pas cracher. Son mal semblait s'accumuler,
dans le creux, y faire une boule grouillante.
Marie l'apaisait momentanément avec des tisanes chau-
des. Puis, il recommençait.
Lucien lui conseilla de rester au mas quelque temps, de
s'y faire soigner par marraine et maman. Mais, le lendemain,
il revint, tout pâle et, cependant, les yeux brillants de
bonheur.
Lucien se pencha avec anxiété
Pourquoi es-tu venu Jacquou ? Qui t'a forcé à venir ?
Dis-le moi, ? Dis-le à Marie ?.
Aucune question ne l'émouvait.
Il toussait.
v
_n__n_
daient avec ma mère. Vous croyez qu'ils me plaignaient,
à cause de cette vieillesse pœmaturee Eh bien! non.
Ils murmuraient
C'est la même graine 1
< Je n'osai plus mettre un pied dehors, parce que,
VI
VI!
SSPMT 6
ne résiste à aucun essor, où la plainte la plus frêle peut
espérer émouvoir le ciel.
Lucien Grégoire rejeta vivement les draps du lit et se
pencha sur Marie pour l'éveiller, mais les yeux grands
ouverts de sa femme firent signe qu'ils avaient compris.
Jacquou est mort
Ils avaient senti leur cœur rouler au fond d'eux. Dans
l'ombre, les yeux de Marie allèrent à la couchette de Minou
endormie. Ceux de Lucien s'y étaient déjà posés.
Ils se vêtirent.
Le réveil marquait sept heures.
La grosse cloche pleurait toujours. L'annonce ruisselait
partout, sonnait aux toits, toquait aux portes. Le glas minu-
tieux s'insinuait dans les intimités, alertait la vie.
Le deuil rappelait les deuils. Les mémoires, au saut du
lit, déballaient le bric à brac des malheurs et des douleurs.
Mille évocations glacées peuplaient les chambres. Cette
minute grave ne devait durer qu'une minute, mais elle
tenait agenouillées et sensibles, des âmes dures elle les
faisait communier dans une noblesse où elles ne devaient
jamais plus atteindre et d'où elles se pressaientde s'évader.
Des fenêtres s'ouvraient. Des voix se répondaient. C'était
fini. Le mort avait déjà sa forme, son nom, son épitaphe.
C'est pour le Jacquou des Oubells
Aï le pauvre
Ça lui vaut mieux.
JOURNAL,
propos et commentaires
D'ERNEST NOIRFALIZE
6 octobre
1. Les hommes qui s'étaient montrés de braves gens avaient reçu pour
récompense une paire de godasses, offerte par la Reine des Belges. Récom-
pense insigne ils continuaient à aller en sabots, leurs bottes liées par des
lacets, pendant en collier à droite et à gauche.
Destin du Spirituel
CATÉGORtES RÉVOLUTIONNAIRES
par Edmond HUMEAU
_u nu _n n_ nu __n __n
plus profond mais plus complexe, d'une culture à laquelle
ils participent en tant que créateurs les mots prennent le
donner. Car l'étrange
sens que les hommes entendent leur le fait
paradoxe d'aujourd'hui réside dans que les vrais
défenseurs de l'Esprit trahissent leur spiritualisme, s ils
le mettent au service d'un désordre dont les effet se tradui-
ou s'ils préten-
sent naturellement dans l'organisme social,spirituelles
dent simplement ignorer que les valeurs sont
maintenant le paravent des profiteurs. Seul, un spiritualisme
ayant rompu avec le mensonge courant, un spiritualisme
absolument fidèle à son destin de liberté, de justice et de
vérité, pourra montrer aux jeunes travailleurs que les
revendications spiritualistes témoignent d'un autre besoin
que le maintien des privilèges bourgeois et qu'elles cons-
tituent une force révolutionnaireauthentique. Mais que peut
signifier la prépondérance du prolétariat, sinon que de nou-
d'une certaine
veaux privilèges individualistes naissent
catégorie révolutionnaire (le parti du prolétariat) et recom-
mencent l'ancienne erreur des féodaux. Ce langage d'une
culture fasciste, sous des apparences pseudo-révolutionnaires,
est l'héritage du plus désuet des impérialismes, avec son
idée nécessaire d'une raison d'Etat prolétarienne, d'une
colonisation des classes vaincues, d'un régime inquisiteur
et policier dont les effets sur la culture seraientaccorde
pires que
le
les libertés démocratiques dont la bourgeoisie
semblant. Alors, il devient trop facile de comprendre le
silence imposé sur l'affaire Victor Serge.
Edmond HuMEAU.
Em. MOUNIER.
ESPRIT
Chronique de la Cité
l'état social.
1. Voir Esprit ire année, n° L La cité projection plane de
C
2. Ces notes primitivement destinées à paraître dans le
travail
?10 d'Esprit,
comme une sorte de projection spatiale des études sur le et les loisirs,
ont été rejetées dans ce numéro par l'abondance des matières.
3. Cet exposé n'est du reste, qu'un résume des différents ouvrages ou arti-
cles publiés par M. le Corbusier, depuis 10 ans.
s'est trouvée être une ville sans classes. Elle est née simplement
de la sollicitude vouée au corps et au cœur humains des
hommes, des femmes, des enfants, des vieillards. ».
Lorsque l'auteur nie la préméditation, je ne pense qu'il
fasse allusion à son travail technique, car je vois pas
ne pas ce
pourrait être une œuvre d'architecte qui n'aurait pas que été
méditée, et préméditée. Non, il apparaît
que monsieur Le
Corbusier tient à ne pas encourir le reproche d'avoir tra-
duit, dans un domaine technique, des conceptions d'ordre
social.
Cela ne veut strictement rien Are. Que peut être une
« sollicitude vouée au corps et
au cœur humains », sinon, au
premier chef, un désir de liberté et de justice sociale ?
Or, « une société machiniste n'est pas forcément
une
société dans laquelle règne l'égalité (nous commençons
à en avoir quelques preuves) et le rationalisme intégral
ne produit pas comme un fruit spontané l'idée de justice.
On peut parfaitement concevoir la cité-radieuse
comme une
somptueuse caserne où l'on juxtaposerait confortablement la
masse des travailleurs urbains dans les meilleures conditions
égalitaires de salubrité et de luxe mais cette population
pourait tout de même constituer une « classe '> dominée par
une autre «classe», minorité de capitalistes savourant égoïs-
tement les plaisirs de la résidence solitaire, à un quart d'heure
d'avion de la Cité.
En vérité, une ville ne peut être « sans classes » que si
l'on a d'abord réalisé une société sans classes, par
révolution spirituelle, politique, économique et sociale. une
Faute d'éléments de discussion, nous ne
nous arrêterons
pas à la question de « l'échelle humaine », encore que nous
posions comme principe qu'il y a une échelle des villes, com-
me des !ogis,et que la ville de 8 millions d'habitants de mon-
sieur Le Corbusier n'est pas à i'écheHe humaine.
Marquons un point particulièrement Inquiétant le
financement et la mise en œuvre de la Ville.
On nous dit « Le Plan réalisera cette thèse la Grande
Industrie s'empare du Bâtiment ».
Je ne sais ce que vous suggère cette formule. Moi, je vois
l'armée bien connue des requins de la « Grande Industrie »,
réduits trop longtemps à la portion congrue, se jetant
gou-
lûment sur une nouvelle et colossalezaffaire. Pauvre société
sans classes de monsieur Le Corbusier Si la conversion des
rentes et la Loterie Nationale ont laissé quelques sous dans
les poches du Français toujours plus moyen, est-ce pour les
livrer au massacre par les Sociétés Immobilières ? Je pense
bien que tout cela part d'un bon sentiment: transformer
les usines du Creusot en entreprise générale du Batiment et
faire du Comité des Forges une vaste gérance d'immeubles.
De ces bons sentiments qui font les gens naïfs.
Ainsi, quelles que soient les qualités techniques du projet
de la « Ville-Radieuse », nous la condamnons pour les raisons
suivantes qui dépassent de beaucoup à nos yeux la portée de
toutes les critiques techniques
!° Elle est une conception purement matérialiste,
ne
tenant aucun compte des besoins de libération spirituelle de
l'homme.
2° Elle n'est pas l'image d'une société sans classes, mais
cette d'un système social dans lequel le majorité des tra-
vailleurs est maintenue, non plus par la violence, mais par
le besoin toujours accru de confort, sous le joug définitif
d'une minorité capitaliste
3° L'égalité apparente, obtenue à l'intérieur de la classe
des « esclaves de luxe » détruit toute originalité, toute diffé-
rence, toute nuance entre les individus. Elle crée un indi-
vidu-standard qui est la négation même de la personne.
4° Elle est la traduction d'une pensée gigantiste qui
ne se
légitime pas, mais tient de la superstition.
5° Enfin et surtout, sous une apparence révolutionnaire
elle n'est que l'expression finale de la société actuelle. Elle
érige en principes de vie des états de fait qui nous révoltent.
C'est du conformismecaricatural, mais c'est du pur conformisme.
a
Dans la première partie de cet article, je me suis e~orcé
de discuter les arguments fournis, en suivant le rythme de
la « présentation » par l'auteur. Mais si l'on recherche le
véritable processus de pensée de monsieur Le Corbusier, on
]. C'est ainsi que telle petite dactylo, devenue par désir de luxe, une pros-
tituée aux « affaires prospères, oublie l'infâme servitude de son état, et, loin
de se révolter, fait des vœux pour le maintien d'un régime dans tequet l'été-
gance du décor, élément désormais indispensable à sa vie, lui est dispensée
par )t c3ste sociale mêmequi est à l'origine de sa déchéance morale.
s'aperçoit que les critiques qu'on peut lui adresser dépassent
le cadre d'une controverse idéologique, et peuvent s'appli-
quer dans cet exemple, à toute la méthode de construction
matérialiste.
Ici, l'architecte est parti d'un certain nombre de consta-
tations de faits la machine, la standardisation, les matériaux
nouveaux, (béton armé aciers spéciaux isolants modes
de couvertures étanches etc.). Il a admis que ces
moyens
nouveaux devaient être employés dans la construction d'une
ville moderne. D'où le changement d'échelle, conséquence
« logique » des grandes portées réalisables d'où la nécessité
d'une cellule organique reproduite à millions d'exemplaires,
usinée suivant la méthode Standard d'où l'aspect impla-
cable de la réalisation urbanistique qui ne tolère
que la
« formule ». La place occupée par l'homme a été chiffrée en
surface et en volume. Il devra donc s'intégrer de force dans
cette cité mathématique. On est parti de considérations techni-
ques, pour aboutir à l'homme c'est le bonheur dirigé. Et c'est,
au fond, ce que monsieur Le Corbusier appelle une réalisa-
tion « sans préméditation ».
Or, nous faisons, dans notre mouvement à nous, le plus
grand effort de préméditation. La cité que nous voulons
réaliser doit tendre à l'épanouissement de l'homme, et nous
ne pensons pas atteindre ce résultat par un certain volume
d'air et une juste surface d'éclairement. La cité n'est que
l'expression naturelle et concrète d'un système social préé-
tabli et c'est pourquoi je disais dans un précédent article
qu'il était impossible à un architecte de séparer ses préoc-
cupations professionnelles du reste de son système idéolo-
gique. J'essaierai donc de faire entrevoir la conception de la
Cité qui nous est propre.
Nous n'avons pas voulu construire dans l'abstrait. Les
solutions auxquelles nous sommes arrivés s'appliquent pour
un temps hélas indéterminé à la seule France de demain
t° Décentralisation La France, depuis le 19e siècle, a
centré son activité sur la région parisienne. La vie intellec-
tuelle ou politique, commerciale ou industrielle,s'est dévelop-
pée autour de Paris. On a trop souvent signalé le danger de
1. Cette objection m'a plusieurs fois été faite, par des gens qui n'avaient ja-
mais rien fait de leurs dix doigts ni de leur cerveau, mais qui se montraient
angoissés à l'idée que les hor"mes pourraient un jour travailler moins long-
temps qu'aujourd'hui
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dard, car elle est un moteur complexe, et un moteur qui
tourne n'est pas composé de pièces identiques entre elles.
Nous recherchons au contraire la variété qui est une richesse
dans une « composition harmonieuse.
Pour développer les possibilités naturelles des productions
régionales, et par hostilité au gigantisme, nous
avons voulu
des groupements de vie décentralisés.Voulant libérer l'hom-
me, nous le faisons échapper à l'emprise climatique des
Métropoles.
Nous croyons avoir fait œuvre révolutionnaire en
refusant à admettre des faits que nous condamnons, et nous
en ne
nous satisfaisant pas d'un bouleversement des formes de
l'architecture.
Que sera l'architecture de demain ? Il y a aussi une « échel-
le » des préoccupations. A l'époque que nous vivons l'esthé-
tique est un luxe. L'éthique une nécessité.
Louis-Émile GALEY.
PRÉSENTATION DE LA POLICE
par André ULMANN
LE MAITRE DE L'ORDRE.
1. Nous n'aurions pas trouvé tout cela seul 1 Tous ces éloges (et ceux qui
suivent) sont empruntés à la presse française et particulièrement à des articles
du Petit Journal, du Petit Parisien, du Mois, etc.
2. Les Annales, oct. 33.
Quant au journaliste, j'aime mieux avouer tout de suite
que ce n'était pas moi.
TABLEAU DE LA POLICE.
ESPRIT 9
Halles et marchés, etc.
3me division
Circulation et Transports, Direction du personnel.
Direction de la comptabilité.
Direction du matériel.
Police Municipale
I. 10 districts de 2 arrondissements par district
1 commissaire divisionnaire, 84 commissaires de quar-
tiers.
2 commissaires officiers de paix.
Inspecteurs principaux, brigadiers-chefs, brigadiers
et 12.402 gardiens de la paix (depuis janvier t93i)
dont 944 à la circulation (des ilotiers, des cyclistes,
des en bourgeois) 3 compagnies en réserve
(caserne de la Cité).
II. 1 compagnie des Halles.
1 brigade fluviale
commissaire de police et des agents qui «assurent
la répression de la prostitution ».
Police Judiciaire
I. Affaires criminelles.
Attributions
Police des garnis
Délégations judiciaires
Ministère public près le Tribunal de
simple police
La P. J. est divisée en districts. Mais il en existe un noyau
central de D!'rec<!on
Brigade mondaine et des notes.
Brigade de la voie publique et des mœurs.
Bureaux, permanence, mandats et réqui-
sitions.
Service des garnis.
Identité judiciaire anthropométrie,
sommiers
photographie.
II. Services
Bourse
Dispensaire (surveillance des prostituées).
Inspection des enfants du premier âge
Infirmerie spéciale
Laboratoire de toxicologie
Voitures des quatre saisons
Fourrière et institut médico-légal (même
service).
REMARQ UE
LA RELIGION ET LE MONDE
1. Lignes directrices, 7.
2. Principes pour la direction de l'Église, 10
rapport du pasteur Nobiling
du Congrès des Chrétiens allemands, 3-4 avril 1933, in Volkund Kirche.
p. 49.
vail négatif, lutte contre « mammonisme et capitalisme,
marxisme et libéralisme elle doit proscrire les manifesta-
tions d'un esprit bourgeois chrétien comme « pacifisme, inter-
nationale, franc-maçonnerie') ( ) 0). Le christianisme social est une
remorque du marxisme. Positif dans t'Ëtat, dans les paroisses,
dans les œuvres de charité. Il s'agit de réinstaller dans toute
leur pureté les institutions divines mariage, « cellule du
peuple et qui « qui n'est conforme à l'ordre de Dieu qu'entre
individus de même race famille, autorité politique, ordres
sociaux, « états par opposition aux classes du régime capi-
taliste ouvriers, paysans, bourgeois, tous sur le même pied
dans l'Eglise. Toutefois les paysans sont l'objet d'une faveur
spéciale « sillon et sol doivent être de nouveau une patrie pour
l'Allemand ». Enfin, comme le mouvement chrétien et natio-
nal est aussi socialiste, on rappelle la doctrine biblique « qui
nomme le travail, service divin et nous laisse l'usage des biens
et propriétés comme de prêts confiés à nous par Dieu. » Dans
les paroisses, à côté de réformes techniques, le but essentiel
est la création et la diffusion « d'une doctrine sociale évangi-
lique et nationale » (Volkstumlich), qui semble donc faire
encore défaut. Enfin la mission intérieure qui groupe les
oeuvres de charité doit être réformée '< les mobiles de son
action ne sont pas compassion,bienfaisance et attendrissement,
mais obéissanceà Dieu. Elle doit tenir compte des nouveaux
résultats de la science de la race et de la théorie de l'hérédité ?
En langage plus clair, les Lignes directrices de 1932 procla-
maient « simple pitié. amollit un peuple. Nous savons ce que
signifient devoir chrétien et amour des malheureux, mais nous
réclamons aussi la protection du peuple contre les incapables
et les minus '). Quant au personnel chargé d'appliquer cette
doctrine on lui donne bien comme modèle Wichern, le grand
fondateur du Rauhen Haus de Hambang où sont recueillis et
aimés les petits déshérités, mais on le prévient que la « Mission
intérieure ne doit pas être un point de rassemblement pour la
réaction. L'esprit du socialisme national et chrétien doit régner»
ou comme le dit avec plus de précision la section de West-
phalie « il doit y avoir liaison étroite et compréhensive entre
les œuvres évangéliques et les grandes organisations nationales
socialistes S. A., S. S., jeunesse de Hitler, etc. » 3.
1. L'évangilesocial des Chrétiens allemands, 25 juin 1933 (pasteurs Hossen-
felder et Thème!), in Unser Kampf, p. 25.
2. « Évangile social des chrétiens allemands », p. 30.
3. Appel des chrétiens allemands de l'Ouest Rhin et Westphalie, 20 juillet
1933.
Ce que j'ai à dire à tout cela est simple je dis,
« sans condi-
tion et sans restriction, non, à l'esprit et à la lettre de cette doc-
trine. Je tiens que cette doctrine ne peut trouver droit de cité
dans l'église évangéilque. Je tiens qu'il vaudrait mieux
les églises évangéliques. retourner pour
aux catacombes de
conclure même de loin la paix avec cette doctrine. Jequetiens
ceux qui l'ont adoptée pour séducteurs ou séduits s Or, le
23 juillet, si l'on en croit les résultats publiés,
presque partout
où un vote intervenait, les 2/3 et quelquefois plus du peuple
protestant se prononçait pour elle.
Il serait vain de chercher à diminuer l'importance du vote
sans doute la participation électorale, forte à cette occasion
permet de supposer que mas mal d'indifférents sont venus faire
là acte politique et non religieux. Mais
en pays protestant
surtout, la ligne est difficile à tracer autour des vrais fidèles
d'une église les temples peuvent se vider, surtout à Berlin et
dans l'Allemagne du Nord, pour 700.000 naissances nomina-
lement évangéliques, il y a 660.000 baptêmes. Ouvriers
et pay-
sans ont leur bible chez eux s'ils se dérangent pour voter,
après un conflit dont les journaux furent pleins pendant 3
semaines, ils savent ce qu'ils font et quels intérêts sont jeu.
On pourrait d'autre part, atténuer le conflit c'est le en
des théologiens dialectiques d'opposer thèse à antithèsepropre
conciliation possible. Pour l'évêque d'empire le dilemme posé sans
par Barth a été évité la nouvelle constitution promulguée en
juillet établit un chef, autrement puissant qu'un « surintendant
général décoratif )\ puisque le parlementarisme lourd
un
de l'ancien système est remplacé par un système depeuconseils
et de dignitaires nommés. Son autorité pourra même s'éten-
dre à la doctrine, si les chrétiens allemands obtiennent le
renouvellement de facultés de théologie; et,
comme le remar-
quait au surplus Barth, on ne crée pas un poste de chef, mais
quelqu'un se présente qui est un chef. Ainsi de Hitler ainsi
peut-être du Reichsbischof. D'autre part un groupement reli-
gieux fondé en 1933 pour résister aux chrétiens allemands,
les « Jeunes réformateurs » s'est déclaré
en accord partiel avec
eux et prêt à une collaboration confiante or, parmi les chefs
se trouvent des théologiens estimés et d'une autorité religieuse
indiscutable Friedrich Gogarten un des plus brillants anciens
collaborateurs de Barth, Wilhem Stahlin, chef d'un important
mouvement liturgique. habitué des conférences internatio-
1. BRUNS, in Die Kirche und Jas ~<<- Reich, Klotz (1932), p. 19.
cette idolâtrie de la race, mais au contraire la croyance « que
ce caractère national spécifique donné à l'homme avec le pre-
mier souffle pourrait être en lui un simple accident et conclut
par le mot de Lagarde '< nous reconnaissons en chaque peuple
une pensée de Dieu Stapel sépare nettement le domaine
métaphysique des vérités de la foi et la psychologie-biologie
où apparaissent les différences raciales Si l'histoire exige
»
la fondation du « Reich, devoir de l'humanité au profit des
allemands, Et consecrat Trinitas Teutonicos 3, c'est semble-t-
il pour des raisons toutes profanes. « La vérité révélée
se pré-
à
sente nous comme une histoire sacrée (Heilgeschichte) qui
se passe derrière, au-dessus, au-delà de l'histoire terrestre.
Elle est métahistorique Or, n'est-ce pas justement le prin-
cipal reproche que pouvait lui faire le peuple, désaxé
par la
guerre, l'inflation, le chômage ?
II ne s'agit pas de nier la vie religieuse des paroisses luthé-
riennes, ce parfum d'intimité et de silencieuse ferveur qui leur
est propre. Mais leur goût même de l'ineffable les rendaient
impuissantes à lutter. Elles n'envisagent encore comme remède
que livres de prières communes, résurrection de l'art chrétien,
du choral populaire, bref de ces manifestations liturgiques dont
les « Berneuchener » sont les meilleurs ouvriers
avec leurs
émouvantes réunions dans le vieux cloître d'Urspring, près
des jaillissements bleus de bras égarés du Danube. Médita-
tions muettes dans la nuit d'un jardin plein de fleurs, prières
psalmodiées au grand soleil de midi, il n'y a là joie et salut que
pour un petit nombre. La masse réclame autre chose depuis
quinze ans, une doctrine qui lui montre la route, une escha-
tologie de son avenir.
La meilleure caractéristique de cette période serait peut-être
en effet la crise de la philosophie de l'histoire, sentie obscuré-
ment mais avec intensité par le peuple. Crise du marxisme om-
ciel oublieux de sa dialectique, crise du protestantisme, sou-
cieux de lutter contre le libéralisme, trop attaché peut-être à
la malédiction luthérienne de ce monde de péché, au conser-
vatisme technique de l'Oberkeit patriarcale. Les socialistes reli-
gieux avaient bien compris cette exigence de leur époque et
s'étaient efforcés d'unir foi et réalité. « Par la lutte des classes
à la croix, par la croix à la lutte des classes » était leur devise,
r
ESPRIT )0
0
entendant qu'un approfondissement simultané des deux
réalités permettrait de retrouver dans le matérialisme histo-
rique une dialectique divine, dans la « situation menacée de
l'homme » le sens métaphysique des luttes de production. 0)t
sait leur échec dans le domaine pratique le plus actif de leurs
chefs passé au communisme en 1931 et exclu du corps pasto-
ral. Mais leurs théoriciens aussi étaient battus en brèche
t La transcendance du royaume à venir est ainsi insérée dans le
présent et l'on obtient le fondement d'une interprétation reli-
gieuse de l'histoire qui ne peut être confondue avec une inter-
prétation de l'histoire à partir de Dieu parce qu'elle s'est
rendu auparavant le transcendant intuitif La Théologie
Dialectique leur barrait la route, comme à toute autre tentative
capable de ternir la pureté de la doctrine. Seule elle fut capa-
ble d'ériger une philosophie de l'histoire qui ne dût rien au
monde, et représentât la réponse originale du christianisme.
Mais uniquement négative un refus perpétuel à tous les pro-
jets humains, un vertigineux oubli de toute critique, de toute
pensée moderne dans le retour à la lettre de la Bible. Encore
faut-il distinguer si Barth lui-même se compare aux « Béné-
dictins de Maria Laach absorbés dans le chant des heures », il
sait par moments parler au siècle en étonnant prophète. Mais
ses disciples savent-ils traduire de même leur soumission
à la Parole de Dieu, sujet et non objet de leur pensée ? L'anti-
rationalisme est une position difficile. L'ontologie des meil-
leurs d'entre eux se rapproche étrangement de celle que non
pas seule l'autonome recherche philosophique mais l'esprit
d'une époque et d'un pays fait souffler sur les universités alle-
mandes. Il suffit de lire « Je crois au Dieu trinitaire », de Frie-
drich Gogarten, pour pressentir combien la réceptivité radi-
calement passive (Hôrigkeit) sous le Verbe divin est favorable,
à travers un agnosticismeintenable, aux reconstructions arbi-
traires. Et des voix bien terrestres risquent alors de se faire
obéir. Mais surtout la théologie dialectique est incompré-
hensible au peuple et détourne de lui. Mal assimilée elle fit
des pasteurs passifs et de langage obscur. Ce ne fut pas une
médiocre disgrâce que les seuls défenseurs de la « pure doc-
trinen, les seuls adversaires du dangereux mélange de politique
et de religion aient été ces théologiensabstrus et farouchement
orthodoxes.
B
Ce que j'écris aujourd'hui pour Jouvet, je l'écrivais naguère,
quoique dans des conditions différentes, pour les Pitoëff qui,
en
dépit de leur labeur désespéré, me semblaient vouloir trop
exclusivement soumettre les pièces qu'on leur confiait à leur
esthétique personnelle.Je me réjouis d'autant plus du succès de
Liebelei qu'ils jouent en ce début de saison.
C'est une pièce de l'auteur viennois Arthur Schnitzler, mort
en 1931, et dont la même compagnie avait donné l'an dernier,
La Ronde, une pièce en dix tableaux, dont
on se rappelle le
sujet une série de chutes mènent un marin
au sortir d'une
maison close dans le lit d'une bonne, la bonne dans les bras d'un
jeune bourgeois, celui-ci chez sa maîtresse, dont le mari flirte
avec une ouvrière etc. Par l'intermédiaire d'un homme de
lettres, d'une actrice et d'un comte, on se retrouvait point de
au
départ, chez la prostituée
Elle finit où elle commence,
La romance.
Mais cette triste romance illustrait surtout, et avec abondance
la mufleriede l'homme. H semble que la constatation de cruel
ce
et parfois tragique égoïsme de l'homme vis-à-vis de sa compagne
de plaisir ait particulièremnet frappé M. Schnitzler puisque
c'est en somme le même sujet, quoique traité d'une façon moins
schématique, que nous retrouvons dans Lt'e&e~et, écrit d'ailleurs,
si je ne me trompe, quelques années avant La Ronde
Liebelei (Amourette) c'est l'histoire d'un grand
amour d'une
gnsette restée pure, Christine, pour un jeune étudiant riche,
Fritz Lobheimer, qui, par hasard, l'a reçue chez lui et lui a
témoigné de la sympathie. L'étudiant, pour une femme du
monde qu'il aime, se fait tuer dans un duel, et Christine, voyant
son rêve mutilé, se suicide quelques heures plus tard.
La pièce est sans prétentions littéraires (au rebours de l'acte
du même Schnitzler qui sert de lever de rideau chez les Pitoëff
et qui cumule tous les poncifs du style 1900). La langue et
la pensée sont d'une absolue simplicité. Pas de grands mots ni de
grandes phrases. Nous sommes aux antipodes de M. Le Trou-
hadec, de cet art de pacotille intellectuelle,étranger de parti pris
aux réelles valeurs humaines. Schnitzler aborde résolument un
problème qu'il faut bien qualifier d'éternel et d'universel. Il
ne
le pose pas à proprement parler. H n'est question dans
pas sa
pièce de droit ni de devoir. On ne sent nullement la thèse.
Schnizler a su faire évoluer des types d'humanité courante
sans
que jamais ils tombent dans le conventionnel. Avant tout. ils
sont vivants et la fraîcheur du tableau qui fait songer à
celle de l'admirable Solitude, au cinéma après trente
ans
n'a pas vieilli.
Il faut dire que l'auteur est puissamment servi
par les inter-
prètes. Madame Pitoëff (Christine) excelle dans ces tragédies
muettes ou la douleur n'a pas de cris. Sa petite taille, son visage
grave et intensément doux, ses gestes fragiles de marionnette
cassée, la justesse de sa voix, la sincérité de son jeu, si absolue
qu'il vous émeut comme la vérité, créent autour d'elle
atmosphère de dévotion et de pitié qui Intègre irrésitiblement une
le
spectateur au drame. Dans Liebelei l'attirance est d'autant plus
forte que ses compagnons l'entourent sans faiblesse.
Il n'y avait pas de rote pour M. Pitoëff. I! s'en est tenu à la
mise en scène et aux décors qui sont parfaits apportant
ainsi par son absence même la contribution de son désintéresse-
ment à ce spectacle harmonieux.
P. Aimé TOUCHARD.
LA OTÉ
FEUILLETS A
FEUILLETS B.
ma:
juin
avril
juin.
353
354
351
350
343
419
422
421
418
410
288
286
282
282
277
=
sept.
août 332
325
393
383
272
268
Mais en même temps, la production, freinée, diminuait
dans des proportions considérables, entramant le chômage.
Ainsi cet indice rassurant des Docteurs Tant-Mieux s'explique
non par une amélioration, mais par la crise elle-même Il
n'est pas inutile de voir, de temps en temps, en économie, com-
bien un signe seul « séparé du contexte peut être trompeur. 1
Par contre il y a un fait dont on parle moins dans la grande
presse, c'est l'étranglement croissant des échanges extérieurs.
Le tableau des mouvements du commerce peut s'appeler
maintenant
Jeunesses
). Voir L'Aube des 9.)2,!3, )4, t6. 18, 21, 23, 26, 28, 30 juillet 1, 3, 5,
8, 12, 13, 15 et 19 août 1933.
Folliet. Une révolution violente tend par définition vers des
objets d'un appétit immédiatement sensible et se fait en géné-
raI contre l'esprit. » Concluant son enquête, Joseph Folliet
s'effraie un peu du « potentiel de signification » du mot révo-
lution il reconnaît sa « puissance mystique il redoute
« l'équivoque où il risque de nous laisser. H importe de noter
que le contenu de ce mot varie suivant la mentalité de celui
<;ùi le prononce. Qu'il répugne à toute définition géométri-
que est peut-être ce qui le rend sympathique à plusieurs.
t
Comme des ombres sur la paroi de quelque caverne platoni-
cienne, GuNT~ER GRUNDEL a dessiné dans Mission de la
jeune génération, les types représentatifs des trois « époques »
pendant lesquelles l'Europe « attendit (et continue d'atten-
dre). « la grande révolution allemande » qui doit se produire
entre )94() et 1950. La première époque fut celle du sang et
de l'épée la seconde, celle du christianisme. Nous vivons
l'agonie de la troisième. « Dans la troisième, l'époque lucifé-
rienne, un esprit nouveau délia toutes les chaînes qui nous
rattachaient au sang et à l'âme, vainquit l'épée et la foi (je cite
Gründel), pour les remplacer par le savoir dispensateur de
« lumière»et par la domination de la matière. La matière devint
alors toute puissante le sang, l'âme et l'esprit furent submer-
gés par elle. L'épée fut vaincue par la foi épée et foi furent
vaincues par la science mais les trois le furent par l'argent ».
On ne reprochera pas à ce jeune allemand de manquer de
vues synthétiques. Le raccourci quelque peu saisissant
de Gründel ne s'arrête là que parce que « la toute puissance de
l'argent est la dernière manifestation de la domination exercée
sur l'homme par la matière. Nous assistons au grand boulever-
sement le sang et l'esprit s'arment contre l'argent. C'est la
révolte de la vie contre la tyrannie de la matière. C'est la chute
de Lucifer. De toute évidence pour Grundel, du moins
l'Allemagne a reçu la « mission de provoquer cette chute de
Lucifer « La révolution allemande abolira la toute puissance
du marchand et rétablira le pouvoir de l'homme vivant. »
D'avance le jeune auteur publie le « manifeste » qui doit inau-
gurer « le quatrième jour de la création occidentale ». Des
trois générations que Gründel distingue dans l'Allemagne
d'aujourd'hui, la sienne lui apparaît chargéede cette « mission ».
A la génération du front qui a puisé à la guerre « un idéal fait
tout ensemble d'honneur. de courage et de sacrifice II oppose
_n -u- -n__n_ _n u
la génération d'après-guerredans laquelle il discerne un certain
« manque de profondeur métaphysique », l'adoration de la
technique et du sport. Les guerriers étaient des idéalistes, des
vertueux. Mais, la guerre finie, ils se trouvèrent « inhabiles à
se refaire une place dans le monde ». Beaucoup durent renga-
ger. D'autres se confinèrent dans une critique acerbe de leur
temps. Les jeunes de l'après-guerreont, au contraire, manifesté
« une aisance remarquable pour s'adapter aux réalités de la vie
pratique ».Entre ces deux générations se place celle de Cunther:
celle qui vécut, sans aller au front, l'expérience de la guerre, à
l'âge où l'âme est la plus réceptive. Les souffrances et les
inquiétudes partagées ont donné à tous ces jeunes un même
fonds de souvenirs une âme identique. « Leur expérience de
la guerre fut moins profonde et moins héroïque, mais plus
complexe et plus féconde que celle des combattants. De leurs
aînés ils possèdent les plus hautes vertus, sans en avoir les
défauts, ce pli tragique qui les caractérise. » Au sens critique
ils joignent la faculté de se débrouiller, de s'adapter rapidement
aux conditions matérielles, techniques, économiques. C'est
cette génération qui doit être aux yeux de Gründel le centre
de gravité de l'Allemagne nouvelle.
N!
Gaetan MOUFET.
"ESPRIT" en Suisse
M~Y.NoiREAU.Caen.
Anonyme, BRIGNOLES (Var)
10
55
Auguste TISSOT, Grenoble
Anonyme, Bourges.
Louis MASSIGNON.Paris.
LA SOUSCRIPTION CONTINUE
a
Le Gérant A. Fichelle.
SJ.LJ.O.. tl, rue du Metz. Lille. 6360-10-33
TABLE DES MATIÈRES
ŒUVRES
Jean
lisme
LABASQUE
historique.
Jean LABADtÉ Le crédit, ou d'un spiritua-
sotu 7 56
id.
Alexandre MARC La machine contre le
prolétaire 10 585
Ludovic MASSÉ: Le Mas des Oubells, roman 9 32)
» » suite 10 637
11-12 687
» »
Adrien MIATLEV Conte et Poème. 11-12 670
Emmanuel MoUN!ER:Que!quesconctusions 10 629
Jean PLAQUEVENT De quelques aventures
de la notion du travail 10 475
TABLE DES MATIÈRES
peuple juif.
Wladimir RABINOVITCH La tragédie du
~0
154
465
Pierre ROBERT La Mort d'une Allemagne 9 298
Denis de ROUGEMONT Loisir ou temps
vide? 10 604
René SCHWOB Protestation d'un chrétien 8 166
André
l'âme sans
ULMANN
lisière.
Pierre-Henri SIMON André Maurois, ou
CONFRONTATIONS
André DÉLÉAGE Littérature et révolution 9 345
René DUPU!S et Alexandre MARC L'U.
R. S. S. sans plan 7 86
Edmond HUMEAU L'Art, fait de liberté 9 353
Jean LABASQUE Un luxe primordial 9 370
Lettre d'un abonné Faillite du Plan
Quinquennal ? 7 83
Emmanuel MOUNIER Note sur un projet
économique 11-12 718
Michel SEUPHOR Le cri du temps présent 9 368
La TroMtème FofM Nouveau Régime Éco-
nomique 11-12 722
CHRONIQUES
Edouard DoLLÉANS De la famille-argent
à la famille-foyer 8 248
Georges DuVEAU Avec les intercesseurs 7 !06
Louis-Emile GALEY
Troisième Force..
Chronique de la
Emmanuel
Moyen.
Romain Laheid, son beau-père
recueillis par les Jeunes et le
MoUNtER
jeunesse
Certitude de notre
11-12 753
8 228
A. MuLLER Situation du communisme
international 9 403
Pierre-Henri SiMON.: Expériences commu-
nistes et théories libérales 11-12 782
Pierre-Aimé TOUCHARD Chronique du
théâtre vivant 8 240
(suite).
André ULMANN Communisme et commu-
nauté
Présentation de l'Agence Havas
9
7
11-12
424
)t6
676
mondiale.
ques à longue période et la crise
Jean DAMEGE: Les vacances du capitalisme
8 275
tête.
» »
8 285
André D~LËAGE Tristan Tzara l'Anti-
7 128
» » Art et vie privée 8 259
J. FOLLIET Quid novl Africa ? 10 658
Léo GuY D.-H. Lawrence, d'après sa
correspondance 8 267
Edmond HuMEAU Du cinéma en
Trois signaux belges
vie. 7 !3t
» » 9 448
» » Bilan de transition 11-12 827
Jean LABASQUE: Bonnard
a giorno. 11-12 819
E.M.:Révo!utionspintueI!e. 11-12 791
TABLE DES MATIÈRES
» » Vision socialiste et
vision chrétienne. 9 437
Raoul ORGAZ L'avenir de la philosophieen
Argentine. !~2
11-12
835
792
S.: Cruz y Raya
Henri
Michel
SAUVEPLANE
certo de
SEUPHOR
Rave!
D'une audition du con-
Quelques poètes et quel-
8 263
DIVERS
Georges IzARD et
Emmanuel MoUNIER Avertissement 10 454
Suzanne JEAN et
t-
Alexandre MARC
Emmanuel
In memoriam
d'Arnaud
MOUNIER
Dandieu.
mort
Vers notre seconde
11-12 841
journée 7 4
Deuxième Année 11-122 664
» »
Cequ'onappeUetapresse 8 288
miUe. 147
Appet.
Cinquante 8
Constitution des Amis d'Esprit 10 457
Dernier 9 295
La Troisième Force. 8 291
Notre souscription 7 3
suite 8 150
Id
id
0
~0
11-12
9 296
463
844
FRANCE
Paris Pour Paris, la Seine et la Seine-et-Oise, s'adresser aux
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Rome Librairie di Scienze e Lettere, Del Dott, Giovanni Bardi,
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-=Librairie Modernissima. Roma.
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Cordoba Librairie Henrique Herrera. 61, Avenida General Paz.
Numéro
Esprit
2 1!œi.
1933