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E. Bakalova
Parmi les saints, tout particulièrement vénérés dans les Balkans (et en
Russie ancienne), une place importante revient à sainte Parasceve, connue
aussi sous le nom de Petka (ou Parasceve-Vendredi). L a personnalité de sain
te Parasceve n'est pas suffisamment éclaircie. E l l e avait été inconnue à l'épo
que paléo-chrétienne, son nom n'était pas mentionné dans les premiers sy-
naxaires byzantins et la capitale de Byzance n'avait pas un culte prononcé
pour elle. Mais i l n'en est pas moins vrai qu'elle jouit d'une grande popula
1
rité au Moyen âge et longtemps après, parmi les Grecs, les Slaves et les Rou
mains. 2
Les chercheurs qui se sont penchés sur le culte de sainte Parasceve sou
tiennent qu'une des causes de sa grande popularité est le fait qu'elle assume
les fonctions de quelque divinité païenne, protectrice de l'agriculture, alors 3
que son nom (Petka, Vendredi), lié au cinquième jour de l a semaine, tout
comme une de ses premières figurations — dans une miniature de l a f i n du
I X siècle ornant une des célèbres homélies de Grégoire de N a z i a n z e ( P a r i s ,
e
1
Dans les synaxaires étudiés par H . D e l e h a y e (Cf. Synaxarium Ecclesiae
Constantinopolitannae. Bruxelles, 1902) elle n'est pas mentionnée (sauf dans un seul
colophon fortuit). Parmi les églises de Constantinople, décrites et documentées d'après
les sources et les données archéologiques par R. J a n і n (cf. L a géographie ecclésias
tique de l'empire byzantin, I. Le siège de Constantinople et le patriarcat oecuméni
que. T. III. Les églises et les monastères. Paris, 1969, p. 391) i l n ' y a que deux petites
églises mises sous le vocable de St. Parasceve, d'ailleurs pas plus anciennes que du
X * siècle.
2
I . M a r t i n o v. Annus ecclesiasticus graeco-slavicus. Bruxelles, 1863, p. 185—
186; K . D о u к a к і s. Μέγας συναξαριστής. Athènes, 1893; Κ. Ο η a s h. Paraskeva
Studien, Os tkirchliche Studien, t. 6 (1957), p. 121 — 141; Α. ΟΙκονομίδου, Ή άγια Παρασ-
κενή εϊς τον βίον τον ελληνικού και τον Ρονμανικον λαου, ^Εηετηρίς του Ααογραφικον αρχείου,
tom 9 § 10, 1955—1957, *ΑΦήναι. 1958; F . Η a 1 к і η. L a passion de sainte Parasceve
par Jean d'Eubée, Polychronion (Festchrift Franz Dölger zum 75 Geburstag). Heidel
berg, 1966, p. 226—237; В . В . Ф и л а т о в . Рязянская икона „Параскева Пят
ница". — Советская археология, 1,М., 1971, с. 173—189. Dans l ' I t a l i e méridionale et en
Sicilie la sainte Parasceve est également vénérée (cf. V . R a c i t i t R o m e o , S. Ve
nera v. m. nella storia e nel culto dei popoli. Acireale, 1905. V . aussi F . H a 1 k і η.
Op. cit., p. 228).
3
A . B. M a л и ц к и й. Древнерусские культы сельскохозяйственных святых
по памятникам искусства, Известия ГАИМК, X I , 10, М.—Л., 1932; L . O u s -
p e n s k y , W . L o s s k y . Der Sinn der Ikonen. Bern und Ölten, 1952, p. 138; K .
Ο n a s h. Op. cit., p. 130.
175
gr. 510 ) ou elle tient dans ses mains les instruments du martyre du Christ —
4
venir „une sainte très vénérée et très populaire". Ses reliques reposaient dans
sa v i l l e natale, et chaque année un grand nombre de pèlerins „de toutes les
terres grecques" s'y rendaient dans l'espoir de se faire guérir de maladies
incurables et d'affections paralytiques. Ce sont précisément ces reliques qui
4
S. Der Nersessian, The Illustrations of the Homilies of Gregory of Naziazus:
Paris, gr. 510, Dumbarton Oaks Papers, t. 16, 1962, p. 202, p i . 3.
6
Les recherches de К. O n a s h et D . O i k o n o m i d i s (citées plus haut) sont
entièrement consacrées à l a littérature folklorique sur l a Ste Parasceve aux légendes,
les coutumes et les rites populaires, liées à son culte.
6
Cf. Κ. Ο n a s h . O p . c i t . ; V . aussi G . S u b о t i ć. L'église des saints Constan
t i n et Hélène à Ohrid. Beograd, 1971, p. 89.
7
Архиепископ Сергий, Полный месяцеслов Востока, I I , Владимир 1901, с.
285—6;L. M і г к о v і с. Преподобна Параскева-Петка, Хришпански живот, 1, 3.
Сремски Карловци, 1922, р. 142—150; В . С. К и с e л к о в. Патриарх Евтимий. С.
1933, с. 256. Peu de temps auparavant ils existaient de différents opinions sur l'époque
où l a sainte avait vécu — à Xe—Xle u au Xlle siècle. Dans le récit historique de l'épo
0
que d'Ivan Assène découvert et publié tout récemment par S. Kožuharov (Неизвестен
летописен разказ от времето на Иван Асен II — Литературна мисъл, 2, 1974, с. 123—
135) i l est mentionné qu'à l'époque „du règne du roi Roman à Constantinople" elle a été
glorifiée sur tout le territoire grec. L e dernier empereur byzantin porteur de ce nom était
l'empereur Roman le I V Diogene (1068—1071), ce qui signifie que l a Sainte a vécu dans
tous les cas avant le Χ Це siècle.
176
furent transférées à Tirnovo sur ordre du tzar Ivan-Assène I I qui avait réus8
8
E n ce qui concerne l'époque du transfert des reliques de l a Sainte Parasceve à
Tirnovo, ils existent de différents opinions (Cf. Архиепископ Сергий. Цит. съч., с. 427;
L . M i r k o v i ć. Op. cit. Beograd, 1961, p. 71; П. С ы p к у. Несколько заметок о двух
произведениях терновского патриарха Евтимия. — Сборник статней по славяно
ведению, составленный и изданный учениками В . И. Ламанского по случаю 25-летия
его ученой и профессорской деятельности, СПб., 1883, с. 382; В . С. К и с e л к о в.
Циг. съч., с. 256, etc.). L'argumentation l a plus précise sur l a date de cet événement
après l a victoire près de K l o k o t n i z a , mais avant le mois d'août 1331, lorsque les rela
tions amicales avec les Latins sont rompues voir chez В . З л а т а р с к и . История на
българската държава през средните векове. Т. 3, с. 344—347, с. 345, note 1, laquelle
est confirmée également par les données du récit historique cité ci-dessus (Cf. S. K o -
ž u k h a r o v . Op. cit., p. 134).
В . З л а т а р с к и . Цит. съч., с. 83, 246—265, 345—346.
9
10
Sur l a littérature au sujet delà Sainte Parasceve ν. E . К а 1 u ž η і а с k і. Zur älte
ren Paraskevaliteratur der Griechen, Slaven und Rumänen, Sitzungsberichte der phi-
losophish-historischen Klasse der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften, B d . 141,
Wien, 1899, p. 1—93. Cf. aussi И. И в а н о в . Български старини из Македония. С ,
1931, с. 424 passim; В . С. К и с e л к о в. Цит. съч., с. 317—319; Хр. К о д о в . Ста
рите жития на Петка Епиватска (кратки книгописни бележки). — Духовна култура,
1, 1960, с. 21—23; С. К о ж у х а р о в . Неизвестно произведение на старобългар
ската поезия. Старобългарска литература. Изследвания и материали, I, С , 1971,
с. 289—322.
11
'Ραλλης και Πότλης, Σύνταγμα των δειων και ιερών κανόνων... Τόμος δεύτερος, Ά&ή-
νησιν, 1852, ρ. 453.
1 2
Ε. K a l u ž n i a c k i . Op. cit., p. 55 passim.
12 Бизантинобулгарика, 5 177
bulgare, conservée dans les Menées de Dragan du X I I I siècle. O n connaît aus
e 13
compris les deux récits hagiographiques dus aux métropolites moldaves Bar-
laam (1643) et Dosithée (1682), furent rédigéss à partir de l a V i e composée
par le patriarche E u t h y m e . C'est seulement chez l'hagiographe grec Nico-
19
1 3
Le texte des Menées du Dragan est publié par J . Ivanov (Български старини
из Македония. . ., р. 424—431). A u sujet des services grecs cf. ausssi P . С ы p к у. Нес
колько заметок о двух произведениях терновского патриарха Евтимия. . ., с. 383
sq. A u sujet de l a datation de l a plus ancienne traduction du service de la sainte Pa
rasceve v . С. К о ж y χ a p о в. Неизвестен летописен разказ. . ., с. 133 sq.
1 4
Б . А н г е л о в . Старобългарски текстове, I V , Приложно житие на Петка
Търновска. — Известия на Архивния институт при БАН, 1957, с. 290—292. E n fa
veur de l a conception q u e l a v i e abrégée du synaxaire slave représente une t r a d u c t i o n ^
l'original grec, créé avant le transfert des reliques de l a Sainte à Tirnovo, à côté
des données déjà citées, un témoignage en plus représente le texte dans lequel on dit
que les reliques de l a sainte sont conservées J u s q u ' à ce jour" dans l'église des Saints
Apôtres (Op. cit., p. 291).
1 5
С. К о ж y χ a p о в. Неизвестен летописен разказ. . ., с. 128—129.
1 6
E . K a l u ž n i a c k i . Op cit., p. 65-—69; Idem. Werke des Patriarchen von B u l
garien Euthymius (1375—1393). W i e n 1901, p. 59—77.
1 7
C . К о ж у х а р о в . Неизвестно произведение на старобългарската поезия. . .,
с. 289 sq. E n dehors d'elle i l a été découvert également un canon de prière en honneur
de l a sainte, provenant probablement de l a même époque (Op. cit., p. 295).
1 8
D j . R a d о j ć i с. О Григорију Цамблаку, ГласникСАН I, 1—2. 1949, pp. 172—
175; I. R u v а г а с. Летопис матице српске, 115, 1873, p. 176; S t . N o v a k o v i ć.
Живот св. Петке од патриарха бугарскога Јефтимија, Старине I X . Загреб, 1877, с.
50, A u sujet du récit de Tzamblac sur le transfert des reliques du Tirnovo à Vidine et
de V i d i n e à Belgrade v . П. С ы p к у. Несколько заметок. . ., с. 392—396.
1 9
Е . К а 1 u ž η і а с k і. Zur älteren Paraskevaliteratur. . . p. 1—93.
178
sur les derniers transferts des reliques de sainte Petka de Belgrade à Con
stantinople (1521) et de Constantinople à Iassy (1641). 20
le plus ancien, dédié à sainte Parasceve est consigné dans un monument bulgare
de la première moitié du X I V siècle. Il s'agit des peintures murales de l'église
e
U n autre cycle de onze scènes est conservé dans les peintures murales
couvrant le mur est de la chapelle de l'église des saints Constantin et Hélène
d'Ohrid. Ces peintures qui datent de l a f i n du X I V siècle illustrent elles
e 24
179
„а été faite pour glorifier la sainte comme i l convient à s o n rang et non
pas comme révérende sainte, appelée martyre." 27
Dans les arts plastiques des peuples balkaniques i l y a des oeuvres qui
illustrent expressément le cycle de la V i e de la révérende sainte Parasœve
d ' E p i v a t e . E l l e s datent à partir du X V I siècle. Leur nombre est limité et
e
les savants ne s'en sont pas suffisamment occupés, certaines d'entre elles
n'étant même pas publiées. Toutefois, ces échantillons permettent de suivre
la continuité d'une tradition dont les sources remontent à la c i v i l i s a t i o n du
Second royaume de Bulgarie. Mettre au jour cette continuité, c'est le but
de la présente étude.
L'étude de l ' i l l u s t r a t i o n par la peinture de la V i e d'une des saintes les
plus vénérées par les peuples balkaniques, connue sous le nom de Petka (ou
Parasceve) d ' E p i v a t e , de Tirnovo et de Belgrade (ou serbe) et de Iassy à cause
de la conservation de ses reliques successivement dans sa v i l l e natale Epivate
(en Grèce), transférées plus tard à Tirnovo, capitale du Second royaume de
Bulgarie, à V i d i n e , Belgrade, Constantinople et lassy (Roumanie) représente
un très vif intérêt, d'autant plus que lors de la solution des problèmes de la
diffusion de son culte dans les Balkans, on doit procéder de manière complexe
en tenant compte de toutes les données des recherches dans les différents do
maines de l'histoire, y compris les données livrées par l'histoire des arts.
Il importe tout particulièrement d'éclaircir le rapport entre les pre
miers cycles illustrés de sainte Petka d ' E p i v a t e , conservés en Roumanie et
les textes relatant sa V i e en tenant compte du fait que la littérature la plus
riche concernant sainte Petka fut créée en Bulgarie et que l'auteur de la V i e
la plus populaire de l a sainte est le patriarche Euthyme de Tirnovo.
D'autre part, l'examen et la p u b l i c a t i o n de la scène de la V i e de sainte
Parasceve d ' E p i v a t e représentant le transfert des reliques à Tirnovo permet
tent de dégager certaines représentations inconnues de la capitale médié
vale de Bulgarie.
180
F i g . 1. L'église d'Arbure (1541) — vue générale de la façade ouest
Fig. 2. Arbure. L a Nativité de sainte Parasceve et sainte Parasceve s'en va au désert
2 9
I. D . Ştefanescu. L'évolution de l a peinture religieuse en Bucovine
et en Moldavie depuis les origines jusqu'au X I X * siècle. Paris, 1928, p. 128, p l . L V I I ,
LVIII, L X .
3 0
L'existence d'une scène pareille est impossible en général, non seulement à cause
de l'inscription bien conservée où Гоп l i t très clairement le mot Т^ЬЫОКѢГ^ДѢ (voir ci-
dessous), mais parce que nulle part ni dans les sources ni dans d'autres textes hagiogra
phiques nous ne trouverons de données sur le sujet du transfert des reliques de sainte
Parasceve dans l a v i l l e de Roman. Il est vrai que dans l'église d'évêché de l a même
v i l l e i l y a des scènes de l a vie de sainte Parasceve, mais elles aussi représentent le trans
fert des reliques de l a sainte à Tirnovo, et non pas à Roman lui-même.
182
F i g . 3. L a Venue de sainte Parasceve à Constantinople
main S. U l e a , dans une étude sur l a décoration murale extérieure des églises
de M o l d a v i e , sans s'attarder sur le récit hagiographique de sainte Parasceve
d'Arbure, corrige l u i aussi le point de vue de Ştefanescu et donne une e x p l i
cation intéressante de l'intégration de ce cycle dans le programme icono
graphique des fresques d ' A r b u r e . 32
3 1
H . M a в p о Д и H о в. Старобългарското изкуство X I — X I I I век. С , 1966,
с. 72. Dans le livre de Mavrodinov i l existe une certaine impression: à l a page 71—72
l'auteur parle de l'existence de „quelques scènes de l a v i e de St. Parasceve (Petka) dans
l'église princi ère à Curtea de Argeş" en décrivant l a scène du transfert des reliques de
sainte Petka à Tirnovo, reproduite à l a f i g . 59. E n réalité dans 1 église princière â Cur
tea de Argeş i l n'existe point ni un cycle pareil, ni une scène pareille et les photos de l a
fig. 59 représente une scène des fresques de l'église de l'évêché de l a v i l l e de Roman.
Cf. I. D . Ştefanescu. L'évolution de l a peinture religieuse en Bucovine et en
Moldavie depuis les origines jusqu'au X I X siècle. Nouvelles recherches. Etude icono
e
183
F i g . 4. Arbure. L a Dormition de sainte Parasceve
κλ(ΛΗκ^λτ)ϊλ ( А ) Ц Ј Н Б Л Г О В Ѣ ^ ( Н ) С ) Η Η С Ш О Б О Г ( \ ) Т ( Н N I ) В Л Ь С Т Н Н М Ѣ Ц І Н ,
ниже пькъі нншетож ст (...) . . . Т ј > \ Ж А К Ц Ј Н ) с · W T N H ( ) C ) fo(AH)cA. qui
rappelle le texte i n i t i a l de l a v i e abrégée du synaxaire sert d'introduction
au cycle illustré. E l l e représente un intérieur où l ' o n distingue un grand
l i t et à droite une figure nimbée. Il s'agit sans doute de la „Nati
vite de sainte Parasceve" où l'artiste se servit du schéma iconographique
de l a Nativité de la Vierge.
Dans la scène suivante, sainte Petka, un bâton à la main, est représen
tée sur un fond de paysage vallonné désertique, un haut édifice à droite.
184
F i g . 5. Arbure. L a Mise au tombeau de sainte Parasceve
185
F i g . 6. L ' A p p a r i t i o n de sainte Parasceve à Georges ou Euphémie
186
F i g . 7. L a Découverte des reliques de sainte Parasceve
son corps de la tombe dans laquelle elle avait été enterrée avec un m a r i n .
Une remarque: les figures des chrétiens priants ne sont pas représentées. A la
base de l'interprétation iconographique de la scène, i l y a probablement le
schéma des illustrations de certains chants de l'hymne Acathiste. •*
L a neuvième scène fait songer aux scènes 5 et 6. E l l e représente le moment
où l'on sort les reliques de la sainte du tombeau. L a légende ne garde que
les mots З Д С W T . . . ст . . . ( К ) З Ѣ Ш А .
L a dixième scène est presque entièrement détériorée, l a couche de pein
ture étant écaillée. O n n'y distingue que les contours du paysage architec
tural urbain et d'un groupe compact défigures, limité en haut par une ligne
droite qui représente sans doute le couvercle de la sépulture portée par les
personnages assistant à la cérémonie. L a composition représente probable
ment le transfert des reliques de sainte Petka dans sa v i l l e natale E p i v a t e
ou à Tirnovo, ce qui est peu probable, étant donnée que le paysage architec
tural urbain ne coïncide pas avec le paysage urbain de la scène suivante.
L a onzième et dernière scène est d ' u n grand intérêt pour nous. E l l e re
présente en effet l'accueil réservé au reliques de l a sainte à Tirnovo. L a lé
gende bien conservée dit: З А Є П О С Т \ К Н Ц Ј А C T W В Ь Т ^ Ь Н О К Ѣ , rţ\xn. . .
(Т)0ѴНЦ€ЛВЫ АО С€Г0 AN€.
187
F i g . 8. Arbure. Le Transfert des reliques de sainte Parasceve à Tirnovo
flanqué de deux hautes tours, derrière lesquelles se dégagent les toits à deux
pentes des édifices s'inscrivant sur un plan rectangulaire, ce qui signifie qu'il
s'agit d'édifices civils. A u centre de la composition, devant le mur d'enceinte
est représenté un édifice polygonal — l'église de l a Cour royale où sont dé
posées les reliques de l a sainte. Malheureusement, dans ce groupe des person
nes venues pour accueillir la sainte on ne peut distinguer les figures (sauf
une, l a tête penchée à droite de l'église). E t pourtant on aimerait y distinguer
le tzar Ivan Assène II, sa mère, la tzarine Hélène, de son épouse, la tzarine
Anne-Marie de nationalité magyare et l'archevêque Basile, comme c'est le
cas de la même scène dans le narthex de l'église de l'archevêché de R o m a n . 33
Pour savoir quel est le prototype littéraire que le peintre a suivi pour
illustrer la V i e de la sainte, on doit confronter les scènes avec les textes res
pectifs des Vies de sainte Petka de Tirnovo.
L a présence de l a scène de l ' a p p a r i t i o n de l'ange (ou „adolescent clair")
devant l a sainte qui manque dans la V i e par Basilikos nous oriente sans am
biguïté vers l a V i e composée par E u t h y m e . Certes, i l y a encore des élé
34
188
F i g . 10. Schéma du cycle illustré de l a V i e de sainte Parasceve à Arbure
190
F i g . 11. Roman — scènes de la V i e de sainte Parasceve
191
IwbNNL ЛСѢИЬ, НЗЫДС Н З ГјЈЛДЛ СЪ МЛТ€|>ЇЮ СВОЄЮ, ЦАјЈНЦеК) 6ЛЄИ0Ю, H съ
СВОЄЮ UAj>HU,eK> Л NN ОН) H С Ъ ВСѢМН КСЛМОуЖН СВОИМИ, CL ИНМНЖС H BLCC4L-
стный п л т ^ ' л ^ ъ Kvţh Блснлїс C L ВСѢМЬ MjJHHTOML ц^ъ]кокным, сь тшнже
H МИОЖЬСТКО ВеЗННСЛЬИХГО Νλ^ΟΑλ. Ц ^ Ь ЖС Η В Ъ С Н СОуЦҐІН CL N H M L ПѢШН
НДОШС W T Г|>ЛДЛ Νλ ЧеТЬуН ПЫЛИШЬ C L МИОГОЮ 4LCTÏIO BL CpTCNÎC ПјШ10-
ДОБИѢН, юже н свонмл НЬСТНѢ ОБЫОДШС |>оуклмл, доушею же H ВЬСѢМЬ
садишь лювезио ловзлл)(8. Η пјишесше, положите BL цу[ъ]квн Ц А -
fLClVfcH . .
Il est prouvé que le peintre n'est pas tributaire du prototype littéraire
uniquement par rapport au thème à traiter. Il observe strictement la succes
sion des événements et qu'il représente l'un après l'autre les épisodes-clés
du récit hagiographe. Le peintre dépend donc du prototype littéraire aussi
du point de vue iconographique. Aidé des comparaisons et des métaphores
36
dont se sert l'écrivain, le peintre adapte, pour illustrer, cela va sans dire,
les épisodes spécifiques de la Vie de la sainte, certains schémas iconogra
phiques traditionnels de pareilles scènes de la vie du Christ ou de la Vierge
(comme nous l'avons dit à propos des scènes de la Nativité de sainte Petka,
de l'Entrée de sainte Petka à Constantinople, de la Résurrection de sainte
Petka), mais il introduit aussi des détails caractéristiques, spécifiques du
texte littéraire. C'est le cas notamment de la scène de la Dormition de
sainte Petka (où l'artiste a mis a contribution, dans ses lignes générales, un
des schémas de la mort des saintes, diffusé dans les ménologues illustrés) qui
reproduit la mort de la sainte strictement selon la description faite par Euthyme,
c'est-à-dire le moment où sainte Petka s'adresse à Dieu le priant d'envoyer un
ange pour recueillir son âme: „ . . . В р м е и н ж е Ne МЛЛ8 м и м о ш ь д ш б ,
свое ют^ождеиі* еже W T с о у А 8 f\ß*\fM% лвїе ж е Νλ М0ЛНТВ8 севе W B j ^ T H
H . Paraskeva, p. 66.
Idem. Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 57 passim.
38
192
et des tzars bulgares, protégeant la capitale contre les attaques des ennemis.
A Гарриі, S. Ulea précise que la V i e de sainte Petka figureà Arbure parallèle
ment au Vies des plus illustres saints-guerriers: saint Georges, saint Déme-
trios et saint Nikitas. E n outre, elle y voisine avec l a composition du siège
de Constantinople (de l'hymne Acathiste), où l a Vierge s'illustre comme pro
tectrice de la capitale de Byzance dans l a lutte contre les mécréants. Dans l a
scène du siège de Constantinople, le peintre au lieu de représenter les événe
ments tragiques de 1453, évoque l a défaite des Perses lors du siège de Constan
tinople de 626. Il en est de même pour la V i e de sainte P e t k a , où le peintre
opte pour le récit hagiographique par Euthyme, rejetant l a variante p e s s i
miste" avec le complément de Grégoire Tzamblac qui relate le transfert des
reliques de la sainte de V i d i n e à Belgrade, après l a chute de T i r n o v o . 39
les dernières études, de nos jours sont gardées dans les bibliothèques et les
monastères roumains 7 copies manuscrites du X V siècle de cet ouvrage d ' E u
e
thyme. 43
3 9
S. U l e a . Op. c i t . , p. 45—46.
4 0
E. K a l u ž n i a c k i . Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 17, 35.
4 1
E. T u r d e a n u . L a littérature bulgare du X I V siècle et sa diffusion dans
e
13 Бизантинобулгарика, 5 193
L a V i e de sainte Petka de Tirnovo illustrée par les peintures murales
de l'église d ' A r b u r e à partir du récit hagiographique, fait par Euthyme
44
de recherches, et M m
E . Buculei auxquels je tiens d'exprimer mes vifs remerciements
e
et ma profonde reconnaissance.
С т. M a с л е в. Едно неизвестно у нас изображение на Царевец във Ве
4 6
194
tiques et très simplifiées par rapport à l ' o r i g i n a l . D'autre part, parfois l a
représentation des villes peut être conventionnelle, sans aucun lien avec le
prototype, seul se sujet indiquent de quoi i l s'agit. 47
47
Pour l a représentation des villes dans l'art byzantin voir A . Stojaković-
Архитектонски простор y сликарству средњовековне Србије. Novi Sad, 1970 (avec
l a littérature entière sur ce sujet); idem. Quelques représentations de Saloni que dans
l a peinture médiévale en Serbie, Χαριστήριον είς Αναστάσιου Κ. Όρλάνδου, Athènes, 1964,
p. 25—48.
4 8
И. Д y й ч е в. Миниатюрите на Манасиевата летопис.С, 1962, f. 2. Cf. aussi
H . А н г е л о в , Цит. съч.
4 9
R. K r a u t h e i m e r . Introduction to an «Iconographie of mediaeval ar
chitecture". Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, V , 1942, p. 3—20.
5 0
Voici un exemple: comme l'élément le plus caractéristique d u complexe archi
tectural de Jerusaleme pour l a scène Entrée à Jerusaleme ainsi que pour d'autres scènes
on choisit l a Rotonde Anastasis, pour Théssalonique dans les scènes de l a V i e du saint
Démètre — la basilique de St. Démètre, etc., et en même temps assez souvent d'autres
différences spécifiques et importantes dans l a situation géographique de certaines villes
sont ignorées, s'ils ne se trouvent pas en liaison directe avec le sujet du texte illustré (la
195
Cette approche incontestablement conventionnelle de la représentation
des villes par l'art est très loin de la reproduction latérale réaliste d'un site
architectural. E t par conséquent, i l n'est pas aisé d'attester avec certitude
l'authenticité du complexe architectural représenté.
Les sources historiques ne livrent aucune donnée et aucune description
détaillées sur la topographie et l'architecture de Tirnovo médiévale. Aussi 51
mer, par exemple, à côté de telles villes que Constantinople ou Théssalonique n'est re
présentée que si cela est nécessaire pour l'interprétation du sens d'une scène en question).
Cf. A . S t о j a k o v i ć. Op cit. Архитектонски простор. . ., p. 178—180.
5 1
H . А н г е л о в . Средновековният град Търново според изворите от X I I —
X I V век с досегашните археологически разкопки. — Известия на Окръжния музей
във В . Търново, 11, 1964, с. 1 — 16.
5 2
Une manière d'appréciation différenciée pareille, quoique pas toujours consé
cutivement appliquée, nous trouvons dans l'article de N . Angelov cité ci-dessus.
5 3
E . K a l u ž n i a c k i . Werke des Patriarchen von Bulgarien. . ., p. 72—73;
С. К о ж у х а р о в . Неизвестен летописен разказ. . ., с. 128—129.
5 4
Sur l'église palatine v. С. Георгиева, И. Николова et H . Ангелов. Архитекту
рата на двореца, dans le recueil Carevgrad Tar nov (Le palais des rois bulgares pendant
l e deuxième royaume bulgare ( X I I * — X l V e s). T. I, C , 1973, c. 43, 53, 63. Sur le plan
et l a réconstruction de l'église par l'architecte B . Kuzupov, v. Op. cit. Appendice 9,
I, II et I V . Sur l'inscription v. H . A н г e л о в. Надписи от двореца на Царевец. Carev
grad Tarnov, p. 168—169. Il existe l'opinion que l'église, dans laquelle ont été trans
férées les reliques de sainte Parasceve a été située en dehors du palais à Tzarevec (v. И.
196
L'église, représentée dans la scène des peintures murales d'Arbure ne
coïncide que de l a manière la plus générale avec les détails de l'église de
Tirnovo que nous venons de mentionner. O n n ' y destingue n i le plan c r u c i
forme, ni le clocher, ni les narthex. D'autre part, l'église de l a scène d ' A r
bure s'inscrivant probablement dans un plan polygonal, surmontée d'une
coupole sur un haut tambour portant des ouvertures allongées, avec son naos
annulaire fait songer beaucoup aux martyriums paléo-chrétiens et aussi aux
représentations de la Rotonde Anastasis du Saint Sépulcre qu'on représente
généralement dans la plupart des compositions évoquant des événements
liés a Jérusalem et qui apparaît comme la symbole de la v i l l e sainte. 55
197
Cette approche incontestablement conventionnelle de la représentation
des villes par l'art est très loin de la reproduction latérale réaliste d'un site
architectural. E t par conséquent, i l n'est pas aisé d'attester avec certitude
l'authenticité du complexe architectural représenté.
Les sources historiques ne livrent aucune donnée et aucune description
détaillées sur la topographie et l'architecture de Tirnovo médiévale. Aussi 51
mer, par exemple, à côté de telles villes que Constantinople ou Théssalonique n'est re
présentée que si cela est nécessaire pour l'interprétation du sens d'une scène en question).
Cf. A . S t о j a k o v i ć. Op cit. Архитектонски простор. . ., p. 178—180.
6 1
H . А н г е л о в . Средновековният град Търново според изворите от X I I —
X I V век с досегашните археологически разкопки. — Известия на Окръжния музей
във В . Търново, 11, 1964, с. 1 — 16.
5 2
Une manière d'appréciation différenciée pareille, quoique pas toujours consé
cutivement appliquée, nous trouvons dans l'article de N . Angelov cité ci-dessus.
5 3
E. K a l u ž n i a c k i . Werke des Patriarchen von Bulgarien. . ., p. 72—73;
С. К о ж у х а р о в . Неизвестен летописен разказ. . ., с. 128—129.
5 4
Sur l'église palatine v. С. Георгиева, И. Николова et H . Ангелов. Архитекту-
f>aTa на двореца, dans le recueil Carevgrad Tarnov (Le palais des rois bulgares pendant
e deuxième royaume bulgare ( Х Ц е — X I V * s). T. I, C , 1973, c. 43, 53, 63. Sur le plan
et l a réconstruction de l'église par l'architecte B . Kuzupov, v. Op. cit. Appendice 9,
I, II et I V . Sur l'inscription v . H . A н г e л о в. Надписи от двореца на Царевец. Carev
grad Tarnov, p. 168—169. Il existe l'opinion que l'église, dans laquelle ont été trans
férées les reliques de sainte Parasceve a été située en dehors du palais à Tzarevec (v. И.
196
L'église, représentée dans la scène des peintures murales d'Arbure ne
coïncide que de la manière la plus générale avec les détails de l'église de
Tirnovo que nous venons de mentionner. O n n'y destingue n i le plan c r u c i
forme, ni le clocher, ni les narthex. D'autre part, l'église de l a scène d ' A r
bure s'inscrivant probablement dans un plan polygonal, surmontée d'une
coupole sur un haut tambour portant des ouvertures allongées, avec son naos
annulaire fait songer beaucoup aux martyriums paléo-chrétiens et aussi aux
représentations de l a Rotonde Anastasis du Saint Sépulcre qu'on représente
généralement dans la plupart des compositions évoquant des événements
liés a Jérusalem et qui apparaît comme la symbole de la v i l l e sainte. 55
197
F i g . 12. Gravure du Recueil du métropolite Barlaam de Moldavie (1643)
198
Selon l'artiste-peintre d'Arbure, les edifices et les tours constituaient
autant d'éléments d'appoint de la caractéristique d ' u n v i l l e fortifiée du M o y e n
âge telle que Tirnovo. E t cela d'autant plus q u ' o n trouve cette architecture
conventionnelle" dans la représentation de Constantinople et d'autres com
plexes architecturaux dans les illustrations de l ' A c a t h i s t e occupant presque
toute façade sud de l'église d'Arbure et aussi dans les scènes des Vies de saint
Georges, saint Nicolas, saint Demetrios et autres, disposées au-dessus de la
V i e illustrée de sainte Parasceve. 58
Sans avoir la possibilité d'offrir une étude exhaustive de ces cycles, nous
les examinerons surtout par rapport aux problèmes fondamentaux qui nous
intéressent, à savoir:
a) Quelle est leur source littéraire?
b) Cornmenf y est représentée l a capitale bulgare? .·
E n 1542 (lorsque les peintures murales de l'église d'Arbure sont déjà ter
minées) en la v i l l e de Roman en Moldavie, commence laconstruction d'une église
archiépiscopale, achevée en 1550 au temps de Iliaş, fils et héritier du souve
rain bien connu d'alors Petru Rares. Cette église est dédiée, comme
60
5 8
Les meilleurs reproductions des fresques à Arbure voir chez V . D r ă g u ţ -
Arbore, Bucureşti, 1971.
0 9
E n Yougoslavie i l peut y avoir conservées encore quelques scènes de l a V i e de
sainte Petka. Elles se trouvent dans l'église St Petka au village Trnava non l o i n de Raška,
e
dont les fresques sont datées d'après l'inscription conservée des années 1579/1582. S i
Г on considérela description donnée par S. P e t k o v i ć (Зидно сликарство на подрућју
Пећке патриаршее. . . . p. 179) dans le narthex de l'église au troisième registre du
mur nord sont représentées des scènes de l a V i e de sainte Parasceve de Tirnovo: L ' a p p a
rition de Parasceve devant Georges, l a vision de Georges, l'apparition de sainte Petka
devant Euphémie et sur le mur ouest l a Dormition de sainte Petka. L e même auteur
(op. c i t . , p . 77—78) a noté que dans d'autres monuments — Dolna Kamenica (laquelle est
faussement daté par l u i du X V et début du X V I s ) , Mlado Nagoricino (1628), M r k v a (1704)
e e
sont représentées des scènes des martyres de l a sainte, dont l a source littéraire est d'ori
gine apocryphe tandis qu'à T r n a v a — des scènes dont l a source littéraire est d'origine
canonique (sans préciser laquelle). E n réalité i l s'agit des cycles de l a V i e de deux sain
tes différentes: dans les trois églises mentionnées — celle de l a martyre sainte Parasceve
de Rome, et à Trnava — probablement de sainte Petka de Tirnovo ( d ' E p i v a t , de Bel
grade et de Jassy) laquelle fait objet du présent étude. Je regrette cependant de ne pas
avoir l a possibilité de présenter les scènes de Trnava, n'ayant pas reçu les photos respec
tifs demandés à M . S. Petković.
Les monuments grecs (s'ils existent) ne sont pas pris en considération par manque
de publications de ce genre dans l a littérature grecque dont nous disposons, ainsi que
par manque de possibilités de faire des recherches sur place.
6 0
Istoria artelor plastice in Romania. T. I. Bucureşti 1968, p. 344; cf. aussi G .
B a l ş . Bisericile şi mănăstirile moldovineşti din veacul al X V I - l e a . Bucureşti, 1928,
p. 96—103.
199
F i g . 13. Sainte Parasceve et scènes de sa V i e — icône de la trésorerie
du patriarcat de Peć (1728)
Fig. 14. Sainte Parasceve et scènes de sa V i e — gravure du monastère Fénec (fin
du X V I I l e siècle)
201
tant d'autres construites à l a même époque à sainte Parasceve. Suivant les
6 1
sans doute le plus détaillé de ceux qui sont connus de l a sainte, s'y étale. 63
Sur les murs sud et ouest nous avons quatre scènes sur chacun, et trois autres
sur le mur nord. Les épisodes suivants y sont peints: 1. Sainte Parasceve s'en
va au désert; 2. A p p a r i t i o n de l'ange (ou „de l'adolescent clair") à saine P a
rasceve; 3. Sainte Parasceve en prière à l ' E g l i s e (à ces côtés un groupe d'évêques);
4. L a D o r m i t i o n de sainte Parasceve (avec l'apparition de l'ange); 5. L a
mise au tombeau de sainte Parasceve; 6. L a mise au tombeau du cada\re
du marin; 7. Sainte Parasceve auréolée (entourée d'anges) apparaît à Geor
ges ou Euphémie; 8. Euphémie raconte son apparition à l a foule; 9. Découverte
des reliques de sainte Parasceve et 10. Les reliques sont transportées à l'église
des saints apôtres à E p i v a t e ; 11. L e transfert des reliques de l a sainte à
Tirnovo.
Les sujets des scènes 1, 2, 4, 5, 6, 7, 9 et 10 correspondent parfaitement
aux sujets des scènes respectives d'Arbure.
L a présence d'épisodes tels, l'apparition de l'ange (de ,,1'adolescent
clair") à sainte Parasceve dans le désert et le transfert des reliques d e l à sainte
à Tirnovo, nous renvoie encore à l a V i e écrite par Euthyme, car comme i l
a été souligné, ces épisodes ne figurent pas dans les autres Vies de l a sainte.
D'autre part, dans les différentes scènes de Roman et d'Arbure, on voit se
répéter certains détails iconographiques spécifiques dont l'origine ne peut
être que l a V i e écrite par E u t h y m e (par exemple, l'apparition de l'ange à
la D o r m i t i o n de sainte Parasceve, l'apparition de sainte Parasceve auréolée,
assise sur le trône et entourée d'anges, à Georges ou Euphémie, etc.).
Les différences entre И о т а л et Arbure consisteraient en ceci qu'à Roman
la v i e cle l a sainte Parasceve est illustrée de manière plus détaillée, c'est-à-
dire certains épisodes complémentaires, en dehors des principaux figurant
à Arbure, y sont présentés. Ici manque l'épisode i n i t i a l , ou peut-être plus
d'un (aujourd'hui détruits, disposés sans doute sur le mur est de l'exonar-
thex). E n fait la saga débute au moment où sainte Parasceve s'en v a au dé
64
sert. Plus loin, c'est la Venue de sainte Parasceve à Constantinople qui manque.
6 1
II n ' y a qu'à l'époque de Ştefan Cel Mare (1457—1504) que des églises de Cot
nari. Dolheştii M a r i , R . Sarat, et ŞtefaneŞti ont été mises sous le vocable de sainte Pa
rasceve ( V . Repertorul monumentelor şi objectelor de artă d i n tempul l u i Ştefan Cel
Mare. Bucureşti, 1958).
6 2
Istoria artelor plastice. . . T . I I , p. 137.
6 3
A propos de cette peinture v . I. D . Ştefanescu (L'évolution de l a peinture
religieuse en Boucovine et en Moldavie . . . Nouvelles recherches. . ., p. 136—137) fait
une remarque en passant. Une description brève des scènes du cycle est donnée par J .
Testiban (Prea Cuvioasa Parascheva în frescele d i n Catedrala episcopala de l a Roman,
Mitropolia Moldovei şi Sucevei, X X X V I I , 1961, nr. 3—4, p. 297—300) avec certaines
imprécisions (par exemple, l a scène du transfert des reliques de sainte Petka de l'Épi-
vat à Tirnovo est désignée comme „le transfert des reliques de sainte Petka à Belgrade",
malgré que l ' i n s c r i p t i o n indique ponctuellement кь слькнїн гу&дь ТЈЊНОК". Ces erreurs
ont été partiellement corrigées par St. Metzulescu (op. c i t . , p.501— 516) lequel est le seul
auteur qui met en liaison la source littéraire de ces peintures murales avec l a V i e écrite
par Euthyme.
6 4
J . T e s t i b a n (op. c i t . , p. 297) considère que sur le mur est, où les fresques
ont été détruites au cours de l a construction d'une arcade plus tardive, ont été disposé
4 épisodes de l a V i e de sainte Parasceve, mais c'est peu probable.
202
A la place nous avons la scène: sainte Parasceve en prière à l'église devant
une icône en présence d'un groupe d'évêques. Il s'agit probablement de sa
visite à l'église principale des Blachernesà Istanbul. L e moment reproduit
la sainte adressant une prière chaleureuse à la Vierge, très proche du texte
d'Euthyme: . . . K L п^ѣсвѣтломоу Христовы м*Т€ј*е п^їнде ЭД^моу, нже н
К\\у:уН\ ΗΜίΝΟγΚΤ СЄ ДХЖЄ ДО A ( L ) № C L , Η ТЬМО KL ТОК ЧЬСТЫѢН ПјЈН-
ПХДШН НКОНѢ, Т0ПЛЫК НеЦЈЛДНО НЗЛНВХ\ШЄ CAL3LI : Тевѣ, — Г Л Х Г О Л И Ц Ј Н —
ВЛХДНЧНЦ.Є МНј)8, BLCL МОН кьзложн)<ъ жнкоть, н\ те BLCOX»j МОЮ КЬЗЛЬГЬЮ
ньдождоу, Дѣвнце, не WTJ>HHH оувогоую у е н е . . . ; ou bien la visite de
l'église Ste Sophie: „ . . . B L Б О Ж Ї Л слов* П ^ Ѣ К ^ С Ы Ы Н п^їнде )Cý\ML, что не
ДѢЮЩН н творешн, К О Л Ѣ Н Н М честь* твориш поклонкнїл, слъзные точецін
неточннкы. . . α β δ
Ici (comme d'ailleurs à Arbure) le cycle se termine par les deux épisodes
successifs relatifs au transfert des reliques de la sainte, d'abord à l'église des
saints apôtres à E p i v a t e , ensuite à Tirnovo. Cependant, en raison des écarts
chronologiques (la peinture de Roman est d'environ un demi-siècle plus tar
dive que celle d'Arbure) et surtout des particularités stylistiques (le point
de conservation bien entendu, les fresques de Roman sont beaucoup mieux
conservées tout en étant crasseuses), les scènes à Roman, et en particulier
ces épisodes, revêtent un aspect très solennel et représentatif. Comme d ' a i l
leurs le texte l'indique* . . . B b 3 L M U j e же тѵѵ C L С В Ѣ Ц Ш І Н H K X A H A L I ,
w
203
me, que l'image de Roman donne l'idée „la plus véridique" de Tirnovo d'alors. 68
E n moins d'un demi-siècle plus tard apparaît une gravure qui est déjà
l ' i l l u s t r a t i o n directe d'un texte agiographique. E l l e occupe le folio 116 r
204
єу&гг*лїю пј>очнт\ш8, слышь вож[ь]ствиын W N L Г А Л С , гллголАфїн: Нжс \0- у
une icône de sainte Parasceve avec des scènes de sa vie. L e visage de la sainte
est f i n et très espressif (elle est debout au milieu de l'icône), viennent les m i
niatures exquises des scènes de sa V i e . Les chercheurs en parlant de cette icône,
l'appellent à juste titre „le dernier rejeton raffiné d'une vieille culture et d'une
tradition séculaire" . L e cycle de l a vie se déroule en 9 compositions riches
75
7 2
E . K a l u ž n i a c k i . Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 20—21.
7 3
I. R u v a r a с. Op. cit., p. 174; Χ p. К о д о в. Старите жития. . ., с. 21—23.
7 4
Е. К а 1 u ž η і а с k i . Op cit., p. 37—38.
7 6
L . Mirković est le premier qui a fait l a communication sur cette icône, laquelle
est conservée dans l a trésorerie du patriarcat de Peć (Старине из Дечана, Пећи, Центинње
и Прасквице, Годишнњак музеја јужне Србије, I.Skoplje, 1941,p. 127) et dont l a datte
était déchifrée d'une manière erronée. L a caractéristique citée ci-dessus appartient
à M . Corović-Ljubinković (Пећко-Дечанска иконописна школа од X I V до Х І Χ
века, Београд, 1955, р. 16, p l . X X V I I ) . L'icône est réproduite aussi chez A . Vasilić—M.
Teodorović-Sakota (Каталог ризница манастира Пећке патриаршије, Приштина
1957, p. 10) et également chez S. R a d о j с i ć. Icônes de Serbie et de Macédoine. Beo
grad, 1960, p. 99 (la partie centrale ) et aussi chez M . S a k о t a. Ризницем манастира
y Србији, Београд, 1966, p. 26, p. I. 71.
205
L e premier épisode est le seul que nous n'avons pas rencontré jusqu'à
présent. Il illustre sans doute la première partie du texte d'Euthyme cité
ci-dessus (toujours de la rédaction élargie du manuscrit de Biseriçanï).™ Tous
les autres (excepté l'épisode 8) sont pareils, même dans les détails, aux scè
nes d ' A r b u r e et de R o m a n . L e plan iconographique de l'épisode8 — le trans
fert des reliques sur un char — rappelle de beaucoup le schéma de l'épisode
8 de la gravure du recueil de Barlaam.
Ce qui surprend i c i , c'est l'abondance de détails iconographiques que nous
trouvons rarement dans la peinture d'icônes. A i n s i par exemple, dans la scène
„La mise au tombeau du marin ', l'artiste a peint la colonne avec le stylitě
4
(absente jusqu' alors), et le bateau qui a rejeté le corps du mort (que nous avons
rencontré seulement à Roman); tandis que dans la scène „Accueil des reli
ques de la sainte à T i r n o v o " parmi les milliers de l a foule sont représentés
et le roi Bulgare, et le patriarche et les deux reines. . . E n ce qui concerne la
représentation de Tirno\o, nous devons remarquer que la chapelle royale où
sont mises les reliques est une bâtisse centrique, une rotonde à coupole posée
sur un haut tambour, du type semblable à celle représentée à Arbure. E n fait,
l'église des saints Apôtres à E p i v a t e , de l'épisode 7 de l'icône considérée, est
du même type, ce qui s'explique par le sens symbolique de ce type architec
tural, souligné plus haut, utilisé souvent pour les scènes de marhres, les ense
velissements, etc.
Il est évident q u ' i c i aussi la source littéraire demeure la V i e écrite par
Euthyme.
L e culte de sainte Parasceve fut largement répandu en Serbie moyen
âgeuse, et plus tard en Serbie sous la domination ottomane. P a r m i les images
des saints très vénérés dans les églises édifiées après la rénovation de la pa-
triarchie de Peć, celle de sainte Parasceve tient une place très digne. E n pied,
en médaillon, en torse, elle est représentée (surtout) presque dans toutes les
églises de campagne de la deuxième moitié du X V I siècle à la f i n du X V I I
e e
siècle. Il est entendu que cette popularité est due dans une large mesure au vieux
77
dérée ci-dessus.
7 6
E . К a 1 u ž η і a с к і. Op. cit., p. 20—21.
77
S. P e t k o v i ć . Op c i t . , p. 68. U n témoignage éloquent de l a popularité de
sainte Parasceve représente également le fait que seul dans le territoire de l'éparchie
de Boka Kotorska et de Slepce à l a f i n du siècle passé i l y avait 18 églises sous le vocable
de sainte Parasceve et dans l'une de ces églises—celles de M r k v a — est conservé un cy
cle détaillé de l a V i e de l a martyre sainte Parasceve (Cf. P . M i j o v i ć. Бококоторска
сликарска школа X V I I I — X I X виека, Титоград 1960, p. 25—31.
7 8
И. И в а н о в . Български старини из Македония, С , 1931, с. 433—436, II
est intéressant à noter, que dans l a Russie ancienne, où le culte de l a révérende sainte
Parasceve d'Épi vat n'a pas été particulièrement vénérée (par opposition au culte pro-
206
Il en est de même et de la publication récente d'une gravure intéressante
sur cuivre avec la vie de sainte Parasceve en provenance du monastère Fenek
(à Srem, au sud-ouest de Zemun), dont l'église principale est dédiée à sainte
Parasceve. B i e n q u ' i l existe un écart chronologique relativement petit, entre
79
et même du X V I I siècle elle est Petka de Tirnovo (Elle est nommée ainsi de même dans
e
l'inscription sur la dalle en pierre, posé sur ces reliques dans l'église des Trois hiérar
ques à Jassy (Cf. E . K a l u ž n i a c k i . Op. cit., p. 40—41).
79
D . D a v i d о v. Из историје српског бакрореза X V I I I века, Зборникза лико-
вне уметности 1. Нови Сад, 1965, p. 257—262. p l . 12—19. L a plus ancienne annonce à
propos du monastère Fenek est de l ' a n 1563. A u sujet de l'histoire du monastère v . B .
S t r i k a . Фрушкогорски манастири, Загреб, 1930, p. 177; L . S t o j a n o v í ć. Ста
ри ерпеки записи и натписи. Ср. Карловци, 1923, I, 635, V , 7932; V . Ρ е t k o v i ć.
Преглед црквених споменика кроз повесницу српског народа, Београд 1950,
р. 334—335.
8 0
D . D a v i d o v . Op cit., p. 258.
207
s'engage"par des voeux monastiques (après l ' A p p a r i t i o n à Goerges et avant
la Dormition). Cet épisode représente un moment traditionnel de la V i e du
couvent sans aucun lien avec les textes. Il y est mis probablement en raison
de l'endroit auquel la gravure est destinée — un couvent de religieuses, atta
ché depuis longtemps au culte de sainte Parasceve. 81
* * *
8 1
L a gravure a été commandée par le commerçant de Novi Sad Constantin Théo
dore Gadesa comme un cadeau pour le monastère Fenek. E l l e était exécutée d'après
l ' o p i n i o n des chercheurs, par un certain graveur viennois bien connu, cependant les
scènes, étant plus schématiquement conçues doivent probablement être exécutées par
son aide (D. D a v i d о v. Op. cit., p. 261—262).
8 2
H . А н г е л о в . Към въпроса за старите изображения. . ., с. 9—12.
8 3
A propos des saints nationaux dans l'art v. chez V . D j u г i ć. Историске
композиције у српском сликарству. . ., р. 118—119, п. 13; Cf. aussi Е. Б а к а л о в а .
Изображения на грузински светци в Бачковската Костница. — Известия на Инсти
тута за изобразителни изкуства при БАН. T. X V I , с. 118—121.
8 4
С. К о ж у χ а ρ о в. Търновската книжовна школа и развитието на химничната
поезия в старата българска литература, Търновска книжовна школа. С , 1974, с.281.
208
cycle littéraire: tout d'abord l a V i e , sorte de narration originale donnant
les preuves de sainteté du vénéré, presque toujours semblable à l'acte même
de canonisation, puis le service chantant la gloire du saint. Il faudrait y ajou
ter que l a nécessité d'une image visuelle du saint apparaît encore plus tard.
Or, les textes hagiographiques et liturgiques ont toujours précédé la création
d'un portrait typologique du saint. (Ainsi par exemple, les portraits de C y
rille le Philosophe et de Clément d ' O h r i d , apparaissent pour l a première fois,
au cours de la deuxième moitié du X I siècle, dans les fresques de l'église
e
„Sainte Sophie" à O h r i d , bien que des Vies et services les concernant sont con
nus presque aussitôt après leur m o r t . Autrement d i t , l'entrée d ' u n saint
85
sidération la V i e du saint écrite par E u t h y m e qui est plus tardive, mais con
servent la relation avec celle dite d'inspiration populaire.
L a V i e de sainte Parasceve, écrite par E u t h y m e , se révèle comme la base
littéraire „classique", très populaire et pleinement affirmée qui a su inspi
rer durant environ trois siècles les peintres des différents peuples balkani
ques.
85
С v e t a π G r o z d a n o v . Појава и продор портрета Климента Охрид-
ског у средњовековној уметности.— I n : Зборникза ликовнеуметности, З.Нови сад,1967,
р. 49—72.
8 6
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