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LA VIE DE SAINTE PARASCEVE DE TIRNOVO

DANS L ' A R T B A L K A N I Q U E D U BAS M O Y E N A G E

E. Bakalova

Parmi les saints, tout particulièrement vénérés dans les Balkans (et en
Russie ancienne), une place importante revient à sainte Parasceve, connue
aussi sous le nom de Petka (ou Parasceve-Vendredi). L a personnalité de sain­
te Parasceve n'est pas suffisamment éclaircie. E l l e avait été inconnue à l'épo­
que paléo-chrétienne, son nom n'était pas mentionné dans les premiers sy-
naxaires byzantins et la capitale de Byzance n'avait pas un culte prononcé
pour elle. Mais i l n'en est pas moins vrai qu'elle jouit d'une grande popula­
1

rité au Moyen âge et longtemps après, parmi les Grecs, les Slaves et les Rou­
mains. 2

Les chercheurs qui se sont penchés sur le culte de sainte Parasceve sou­
tiennent qu'une des causes de sa grande popularité est le fait qu'elle assume
les fonctions de quelque divinité païenne, protectrice de l'agriculture, alors 3

que son nom (Petka, Vendredi), lié au cinquième jour de l a semaine, tout
comme une de ses premières figurations — dans une miniature de l a f i n du
I X siècle ornant une des célèbres homélies de Grégoire de N a z i a n z e ( P a r i s ,
e

1
Dans les synaxaires étudiés par H . D e l e h a y e (Cf. Synaxarium Ecclesiae
Constantinopolitannae. Bruxelles, 1902) elle n'est pas mentionnée (sauf dans un seul
colophon fortuit). Parmi les églises de Constantinople, décrites et documentées d'après
les sources et les données archéologiques par R. J a n і n (cf. L a géographie ecclésias­
tique de l'empire byzantin, I. Le siège de Constantinople et le patriarcat oecuméni­
que. T. III. Les églises et les monastères. Paris, 1969, p. 391) i l n ' y a que deux petites
églises mises sous le vocable de St. Parasceve, d'ailleurs pas plus anciennes que du
X * siècle.
2
I . M a r t i n o v. Annus ecclesiasticus graeco-slavicus. Bruxelles, 1863, p. 185—
186; K . D о u к a к і s. Μέγας συναξαριστής. Athènes, 1893; Κ. Ο η a s h. Paraskeva
Studien, Os tkirchliche Studien, t. 6 (1957), p. 121 — 141; Α. ΟΙκονομίδου, Ή άγια Παρασ-
κενή εϊς τον βίον τον ελληνικού και τον Ρονμανικον λαου, ^Εηετηρίς του Ααογραφικον αρχείου,
tom 9 § 10, 1955—1957, *ΑΦήναι. 1958; F . Η a 1 к і η. L a passion de sainte Parasceve
par Jean d'Eubée, Polychronion (Festchrift Franz Dölger zum 75 Geburstag). Heidel­
berg, 1966, p. 226—237; В . В . Ф и л а т о в . Рязянская икона „Параскева Пят­
ница". — Советская археология, 1,М., 1971, с. 173—189. Dans l ' I t a l i e méridionale et en
Sicilie la sainte Parasceve est également vénérée (cf. V . R a c i t i t R o m e o , S. Ve­
nera v. m. nella storia e nel culto dei popoli. Acireale, 1905. V . aussi F . H a 1 k і η.
Op. cit., p. 228).
3
A . B. M a л и ц к и й. Древнерусские культы сельскохозяйственных святых
по памятникам искусства, Известия ГАИМК, X I , 10, М.—Л., 1932; L . O u s -
p e n s k y , W . L o s s k y . Der Sinn der Ikonen. Bern und Ölten, 1952, p. 138; K .
Ο n a s h. Op. cit., p. 130.

175
gr. 510 ) ou elle tient dans ses mains les instruments du martyre du Christ —
4

témoignent du fait que Petka a été avant tout la personnification du vendre­


di saint.
L ' i m p o r t a n t e littérature sur sainte Parasceve renferme un grand nombre
d'oeuvres canoniques, des légendes hagiographiques sur ses actes de protec­
tion, de guérison, etc., des récits apocryphes livrant une vague caractéristi­
que de genre, surgie à l a suite de l'influence réciproque des créateurs anony­
mes de légendes populaires. I l n ' y a pas longtemps, les ethnographes pou­
vaient assister au rites spécifiques liés à l a vénération de sainte Parasceve
dans plusieurs régions de l a Péninsule balkanique (et aussi en Russie). 5

Il importe pour les investigateurs de l a culture médiévale de distinguer


de l a vague folklorique les étapes initiales de l a formation et du développe­
ment du culte de sainte Parasceve. A ce propos i l y a lieuderelever que des
résultats heureux ont été obtenus par l'étude de l a littérature religieuse.
L ' a f f i r m a t i o n , l'élaboration et l a diffusion du culte de sainte Parasceve
(Petka) s'avérèrent étroitement liés à des événements historiques concrets,
à des contacts culturels spécifiques entre les peuples balkaniques. De cette
manière le culte de sainte Parasceve devient un des thèmes communs à l ' h a -
giohraphie, à l'hymnographie, au folklore et, à un moindre degré, aux arts
plastiques.
E n vérité, l ' E g l i s e chrétienne d'Orient vénérait trois saintes sous le nom
de Parasceve. L a Parasceve l a plus ancienne et la plus populaire (que les Sla­
ves nommaient aussi Petka) dont l a fête est l a journée du 26 juillet, est l a
martyre romaine bien connue de l'époque de l'empereur Antoine P i e (138—
161) et M a r c Aurele (161—188). L a deuxième Parasceve d'Iconie est martyre
elle aussi, périe à l'époque de l'empereur Dioclétien (284—304). Sa fête est
le 28 octobre, mais le culte de cette sainte n ' a pas été très répandu dans les
Balkans, et son incidence dans l a littérature est très limitée. 6

L a troisième est l a révérende Parasceve d ' E p i v a t e de la f i n du X et du e

début d u X I siècle. E l l e jouissait d ' u n grand prestige et ne tarda pas à de­


e 7

venir „une sainte très vénérée et très populaire". Ses reliques reposaient dans
sa v i l l e natale, et chaque année un grand nombre de pèlerins „de toutes les
terres grecques" s'y rendaient dans l'espoir de se faire guérir de maladies
incurables et d'affections paralytiques. Ce sont précisément ces reliques qui

4
S. Der Nersessian, The Illustrations of the Homilies of Gregory of Naziazus:
Paris, gr. 510, Dumbarton Oaks Papers, t. 16, 1962, p. 202, p i . 3.
6
Les recherches de К. O n a s h et D . O i k o n o m i d i s (citées plus haut) sont
entièrement consacrées à l a littérature folklorique sur l a Ste Parasceve aux légendes,
les coutumes et les rites populaires, liées à son culte.
6
Cf. Κ. Ο n a s h . O p . c i t . ; V . aussi G . S u b о t i ć. L'église des saints Constan­
t i n et Hélène à Ohrid. Beograd, 1971, p. 89.
7
Архиепископ Сергий, Полный месяцеслов Востока, I I , Владимир 1901, с.
285—6;L. M і г к о v і с. Преподобна Параскева-Петка, Хришпански живот, 1, 3.
Сремски Карловци, 1922, р. 142—150; В . С. К и с e л к о в. Патриарх Евтимий. С.
1933, с. 256. Peu de temps auparavant ils existaient de différents opinions sur l'époque
où l a sainte avait vécu — à Xe—Xle u au Xlle siècle. Dans le récit historique de l'épo­
0

que d'Ivan Assène découvert et publié tout récemment par S. Kožuharov (Неизвестен
летописен разказ от времето на Иван Асен II — Литературна мисъл, 2, 1974, с. 123—
135) i l est mentionné qu'à l'époque „du règne du roi Roman à Constantinople" elle a été
glorifiée sur tout le territoire grec. L e dernier empereur byzantin porteur de ce nom était
l'empereur Roman le I V Diogene (1068—1071), ce qui signifie que l a Sainte a vécu dans
tous les cas avant le Χ Це siècle.

176
furent transférées à Tirnovo sur ordre du tzar Ivan-Assène I I qui avait réus­8

si à les obtenir des Latins „pour la gloire de sa capitale", grâce au prestige


dont jouissait ce souverain dans le Sud-Est européen après l a brillante v i c ­
toire q u ' i l remporta à Kjokotnitsa, tout comme avant l u i le tzar Assène 1 er

avait fait transférer dans sa capitale les reliques de saint Jean de R i l a et le


tzar Kaloïan — les reliques des saints Hilarión de M o g l e n , de Philothée,
Michael d e P o t u k a et de Jean de P o l y b o t u m . Cet événement très remarquable
9

pour l'époque qui se déploya avec un faste solennel marque le commencement de


la popularité et l'affirmation du culte de sainte Parasceve en Bulgarie et
dans les autres pays balkaniques.
A i n s i cette sainte dont le culte au début était très limité et de caractère
local se range parmi les saintes nationales les plus vénérées de Bulgarie. P l u s
tard, après le transfert de ses reliques à Belgrade (1396) et à Iassy (1641),
son culte acquiert une importance internationale. A sa renommée de gué­
rir les malades et de protéger les déshérités s'ajoute celle de protectrice de
Tirnovo, capitale des tzars bulgares, ce dont témoignent les oeuvres littérai­
res qui l u i ont été consacrées après le transfert de ses reliques à Tirnovo.
Cet événement stimule l'apparition dans l a littérature bulgare des oeu­
vres hagiographiques et hymnographiques, originales ou traduites, dédiées
à la révérende sainte Parasceve. 10

Les renseignements sur le premier récit hagiographique de sainte Paras­


ceve d ' E p i vate proviennent du commentaire de l a 63 règle d u V — V I concile
e e

fait par le canoniste Théodore Balsamon selon lequel le patriarche Nicolas


Musalon (1147—1151) chargea le diacre Basilikos d'écrire l a biographie de
la sainte pour remplacer le récit hagiographique apocryphe qui existait jus­
qu'alors. Le texte de Basilikos n'est connu que dans sa version s l a v e .
11 12

A la même époque fut créé probablement un service liturgique en l ' h o n ­


neur de sainte Parasceve qui l u i aussi n'est connu que dans sa version

8
E n ce qui concerne l'époque du transfert des reliques de l a Sainte Parasceve à
Tirnovo, ils existent de différents opinions (Cf. Архиепископ Сергий. Цит. съч., с. 427;
L . M i r k o v i ć. Op. cit. Beograd, 1961, p. 71; П. С ы p к у. Несколько заметок о двух
произведениях терновского патриарха Евтимия. — Сборник статней по славяно­
ведению, составленный и изданный учениками В . И. Ламанского по случаю 25-летия
его ученой и профессорской деятельности, СПб., 1883, с. 382; В . С. К и с e л к о в.
Циг. съч., с. 256, etc.). L'argumentation l a plus précise sur l a date de cet événement
après l a victoire près de K l o k o t n i z a , mais avant le mois d'août 1331, lorsque les rela­
tions amicales avec les Latins sont rompues voir chez В . З л а т а р с к и . История на
българската държава през средните векове. Т. 3, с. 344—347, с. 345, note 1, laquelle
est confirmée également par les données du récit historique cité ci-dessus (Cf. S. K o -
ž u k h a r o v . Op. cit., p. 134).
В . З л а т а р с к и . Цит. съч., с. 83, 246—265, 345—346.
9

10
Sur l a littérature au sujet delà Sainte Parasceve ν. E . К а 1 u ž η і а с k і. Zur älte­
ren Paraskevaliteratur der Griechen, Slaven und Rumänen, Sitzungsberichte der phi-
losophish-historischen Klasse der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften, B d . 141,
Wien, 1899, p. 1—93. Cf. aussi И. И в а н о в . Български старини из Македония. С ,
1931, с. 424 passim; В . С. К и с e л к о в. Цит. съч., с. 317—319; Хр. К о д о в . Ста­
рите жития на Петка Епиватска (кратки книгописни бележки). — Духовна култура,
1, 1960, с. 21—23; С. К о ж у х а р о в . Неизвестно произведение на старобългар­
ската поезия. Старобългарска литература. Изследвания и материали, I, С , 1971,
с. 289—322.
11
'Ραλλης και Πότλης, Σύνταγμα των δειων και ιερών κανόνων... Τόμος δεύτερος, Ά&ή-
νησιν, 1852, ρ. 453.
1 2
Ε. K a l u ž n i a c k i . Op. cit., p. 55 passim.

12 Бизантинобулгарика, 5 177
bulgare, conservée dans les Menées de Dragan du X I I I siècle. O n connaît aus­
e 13

si une v i e abrégée du synaxaire en vieux bulgare traduit probablement l u i


aussi du grec. 14

O n pourrait admettre que les versions bulgares des originaux grecs de


ces textes ont apparu peu après le transfert des reliques de sainte Parasceve
à Tirnovo pour l a glorifier. O n trouve des renseignements plus précis sur cet­
te question dans un récit datant de l'époque ГІѵап Assène II, découvert
récemment, selon lequel le moine J o a c h i m , futur patriarche de Tirnovo, appor­
ta de K a l i c r a t i e un service liturgique, un épître et un récit hagiographique
sur sainte P e t k a qui avaient été traduits par l'auteur du récit afin de n'avoir
pas recours au service liturgique et à l a vie de la martyre Parasceve pas
plus que de ne confondre les deux saintes. 16

U n nouveau cycle d'oeuvres littéraires, consacrées à sainte Petka appa­


raît au X I V siècle en connexion avec les activités de l ' E c o l e littéraire d ' E u -
e

thyme. Il faut retenir que le patriarche E u t h y m e lui-même a écrit une V i e


détaillée de l a sainte en donnant une description nourrie du transfert de ses
reliques à T i r n o v o . U n service liturgique dédié à sainte Petka, à T i r n o v o ,
16 17

doit être attribué au patriarche E u t h y m e ou à un des écrivains de son école.


U n e nouvelle version complétée de l'ancien service liturgique slave fut créé
à l a f i n du X I V ou au début du X V siècle en Serbie, après le transfert des reli­
e e

ques de l a sainte à Belgrade, l'année de l a prise de V i d i n e en 1396 par les


Osmanlis. O n admet généralement que cette version fut faite par Grégoire
Tzamblac, disciple d ' E u t h y m e qui y ajoute un récit historique du transfert
18

des reliques de l a révérende de Tirnovo à V i d i n e et de V i d i n e à Belgrade.


L a plupart des Vies détaillées de sainte Petka plus tardives, diffusées
au X V — X V I I I siècle en Grèce, Serbie, Bulgarie, Russie et Roumanie, y
e e

compris les deux récits hagiographiques dus aux métropolites moldaves Bar-
laam (1643) et Dosithée (1682), furent rédigéss à partir de l a V i e composée
par le patriarche E u t h y m e . C'est seulement chez l'hagiographe grec Nico-
19

dème Hagioritis du X I X siècle qu'on trouvera de nouveaux renseignements


e

1 3
Le texte des Menées du Dragan est publié par J . Ivanov (Български старини
из Македония. . ., р. 424—431). A u sujet des services grecs cf. ausssi P . С ы p к у. Нес­
колько заметок о двух произведениях терновского патриарха Евтимия. . ., с. 383
sq. A u sujet de l a datation de l a plus ancienne traduction du service de la sainte Pa­
rasceve v . С. К о ж y χ a p о в. Неизвестен летописен разказ. . ., с. 133 sq.
1 4
Б . А н г е л о в . Старобългарски текстове, I V , Приложно житие на Петка
Търновска. — Известия на Архивния институт при БАН, 1957, с. 290—292. E n fa­
veur de l a conception q u e l a v i e abrégée du synaxaire slave représente une t r a d u c t i o n ^
l'original grec, créé avant le transfert des reliques de l a Sainte à Tirnovo, à côté
des données déjà citées, un témoignage en plus représente le texte dans lequel on dit
que les reliques de l a sainte sont conservées J u s q u ' à ce jour" dans l'église des Saints
Apôtres (Op. cit., p. 291).
1 5
С. К о ж y χ a p о в. Неизвестен летописен разказ. . ., с. 128—129.
1 6
E . K a l u ž n i a c k i . Op cit., p. 65-—69; Idem. Werke des Patriarchen von B u l ­
garien Euthymius (1375—1393). W i e n 1901, p. 59—77.
1 7
C . К о ж у х а р о в . Неизвестно произведение на старобългарската поезия. . .,
с. 289 sq. E n dehors d'elle i l a été découvert également un canon de prière en honneur
de l a sainte, provenant probablement de l a même époque (Op. cit., p. 295).
1 8
D j . R a d о j ć i с. О Григорију Цамблаку, ГласникСАН I, 1—2. 1949, pp. 172—
175; I. R u v а г а с. Летопис матице српске, 115, 1873, p. 176; S t . N o v a k o v i ć.
Живот св. Петке од патриарха бугарскога Јефтимија, Старине I X . Загреб, 1877, с.
50, A u sujet du récit de Tzamblac sur le transfert des reliques du Tirnovo à Vidine et
de V i d i n e à Belgrade v . П. С ы p к у. Несколько заметок. . ., с. 392—396.
1 9
Е . К а 1 u ž η і а с k і. Zur älteren Paraskevaliteratur. . . p. 1—93.

178
sur les derniers transferts des reliques de sainte Petka de Belgrade à Con­
stantinople (1521) et de Constantinople à Iassy (1641). 20

Toutefois, malgré l a grande popularité de sainte Petka dont le culte se


mêle souvent au culte de la martyre romaine Parasceve et l'important cycle
d'oeuvres littéraires qui l u i sont consacrées, malgré le grand nombre d'égli­
ses qu'elle patronne, malgré l a présence de son image parmi les figures des
saints en pied dans le registre inférieur de beaucoup d'ensembles de peintu­
res murales, l'illustration de l a V i e de sainte Parasceve est très rare dans l a
peinture des Balkans du Moyen âge et du Bas Moyen â g e . L e cycle pictural 21

le plus ancien, dédié à sainte Parasceve est consigné dans un monument bulgare
de la première moitié du X I V siècle. Il s'agit des peintures murales de l'église
e

de la Sainte-Vierge du village de D o l n a Kaménitsa près de Kniajevats (au­


jourd'hui en Yougoslavie), datant de l'époque du despote M i c h e l - C h i c h m a n . 22

H u i t scènes y sont conservées à l'étage supérieur de l a tour sud. E l l e s repré­


sentent la V i e de l a martyre romaine. (Seule une scène évoque sans doute
la V i e de Parasceve d'Iconie). O n n ' y trouve ni l a composition caractéristique
du transfert des reliques de sainte Petka à Tirnovo, n i aucun autre épisode
de la V i e de la sainte d ' E p i v a t e . 23

U n autre cycle de onze scènes est conservé dans les peintures murales
couvrant le mur est de la chapelle de l'église des saints Constantin et Hélène
d'Ohrid. Ces peintures qui datent de l a f i n du X I V siècle illustrent elles
e 24

aussi la V i e de la martyre de Rome, ce sujet étant choisi de propos délibéré


par le donateur cultivé de l'église, le moine Parthénios q u i , après l a mort de
son fils cadet, fit construire l a chapelle dédiée à l a martyre romaine, réputée
comme protectrice des morts. 25

Il ressort de ces exemples que jusqu'à l a f i n du X I V siècle, l a peinture


e

balkanique n'avait traité que l a V i e de sainte Parasceve, martyre romaine.


Il est vrai que le culte de cette sainte commence à se mêler, surtout au sein
des masses populaires, au culte de sainte Parasceve d ' E p i v a t e et que les tex­
tes plus tardifs mélangent des éléments des Vies des trois saintes. Cependant
les gens cultivés de l'époque, comme le note très justement l'historien des
arts serbe G . Subotić, se rendaient parfaitement compte de l a différence qui
séparait les trois saintes portant le même n o m . A l'appui de cette thèse on
26

pourrait produire certains passages du récit historique, cité plus haut, de


l'époque d ' I v a n Assène II, qui soulignent expressément que la traduction
de l'épître, de la V i e et du service liturgique de sainte Parasceve d ' E p i v a t e
2 0
Cf. Χ p. К о д о в . Старите жития на Петка Епиватска. . с. 22. I l existe
également un texte grec tardif du service liturgique de sainte Parasceve dans lequel on
s'adresse à l a „viile moldave" e t o n l ' a p p e l l e „à triompher" ce qui signifie q u ' i l a été ré­
digé après le transfert des reliques de l a Sainte à Jassy (v. С. К о ж y χ a ρ о в. Не­
известно произведение на старобългарската поезия, с. 299) et en outre — un autre ser­
vice liturgique slave plus tardif, rédigé probablement en Russie ou en Roumanie (op.
cit., p . 294—295).
2 1
G . S u b o t i ć . L'église des saints Constantin et Hélène à O h r i d , p. 89 s q . ;
cf. aussi S. Ρ e t k o v i с. 3 идно сликарство на подрућју Пећке патриаршје. N o v i
Sad, p. 77, 197.
2 2
Л . М а в р о д и н о в а . Църквата в Долна Каменица. С , 1969, с. 10—16;
Д . П а н а й о т о в а . Църквата в Долна Каменица от 1323—1330 г. и изкуството
от тази епоха. — Проблеми на изкуството, I V , 1970, с. 43—52.
2 3
G. S u b o t i ć . Op. cit., p. 100—101.
2
M d . Op. cit., p. 89—104.
2 6
Ibidem, p. 102—104.
2
M b i d e m , p. 100—101.

179
„а été faite pour glorifier la sainte comme i l convient à s o n rang et non
pas comme révérende sainte, appelée martyre." 27

Dans les arts plastiques des peuples balkaniques i l y a des oeuvres qui
illustrent expressément le cycle de la V i e de la révérende sainte Parasœve
d ' E p i v a t e . E l l e s datent à partir du X V I siècle. Leur nombre est limité et
e

les savants ne s'en sont pas suffisamment occupés, certaines d'entre elles
n'étant même pas publiées. Toutefois, ces échantillons permettent de suivre
la continuité d'une tradition dont les sources remontent à la c i v i l i s a t i o n du
Second royaume de Bulgarie. Mettre au jour cette continuité, c'est le but
de la présente étude.
L'étude de l ' i l l u s t r a t i o n par la peinture de la V i e d'une des saintes les
plus vénérées par les peuples balkaniques, connue sous le nom de Petka (ou
Parasceve) d ' E p i v a t e , de Tirnovo et de Belgrade (ou serbe) et de Iassy à cause
de la conservation de ses reliques successivement dans sa v i l l e natale Epivate
(en Grèce), transférées plus tard à Tirnovo, capitale du Second royaume de
Bulgarie, à V i d i n e , Belgrade, Constantinople et lassy (Roumanie) représente
un très vif intérêt, d'autant plus que lors de la solution des problèmes de la
diffusion de son culte dans les Balkans, on doit procéder de manière complexe
en tenant compte de toutes les données des recherches dans les différents do­
maines de l'histoire, y compris les données livrées par l'histoire des arts.
Il importe tout particulièrement d'éclaircir le rapport entre les pre­
miers cycles illustrés de sainte Petka d ' E p i v a t e , conservés en Roumanie et
les textes relatant sa V i e en tenant compte du fait que la littérature la plus
riche concernant sainte Petka fut créée en Bulgarie et que l'auteur de la V i e
la plus populaire de l a sainte est le patriarche Euthyme de Tirnovo.
D'autre part, l'examen et la p u b l i c a t i o n de la scène de la V i e de sainte
Parasceve d ' E p i v a t e représentant le transfert des reliques à Tirnovo permet­
tent de dégager certaines représentations inconnues de la capitale médié­
vale de Bulgarie.

I. Scène de la Vie de sainte Petka de Tirnovo


dans les peintures murales d'Arbure

L e plus ancien parmi les cycles illustrés de la V i e de sainte Petka de


Tirnovo qui nous sont parvenus est le cycle de fresques de l'église du village
d'Arbure en Roumanie, au nord-ouest de Suceava, édifiée en 1502 par les
moyens du féodal local L u c a , Arbure et décorée au plus tard en l ' a n 1541,
ce dont témoigne l ' i n s c r i p t i o n dans le naos et qui signale aussi le nom du
décorateur: Dragos. (fig. 1).
28

L a façade ouest de l'église d'Arbure — un des monuments les plus re­


marquables de l a peinture monumentale moldave du X V I siècle—porte onze scè­
e

nes de la V i e de sainte Petka de Tirnovo dont la dernière représente le transfert


des reliques de l a sainte d ' E p i v a t e (ou de Kalicratie) à Tirnovo.
L'existence de ce cycle de fresques parmi le grand nombre de figurations
illustrant le cercle traditionnel de thèmes eshatologiques, de thèmes tirés
de l a B i b l e , de l a V i e de la Sainte-Vierge et autres, communes à la décora-
2 7
С. К о ж y χ a p о в. Неизвестен летописен разказ. . ., с. 128—129.
2 8
A . G r a b a r . L'origine des façades peintes des églises moldaves, Mélanges
offerts à Nicolas Jorga. Paris, 1933, p. 365—382; Istoria artelor plastice i n Romania,
v o l . I, Bucureşti, 1968, p. 365 sq.

180
F i g . 1. L'église d'Arbure (1541) — vue générale de la façade ouest
Fig. 2. Arbure. L a Nativité de sainte Parasceve et sainte Parasceve s'en va au désert

tion extérieure de toutes les églises de M o l d a v i e à l'époque de Petru Rares,


fut pour la première fois signalée par le savant roumain I. D . Ştefanescu en
1928 dans son grand ouvrage sur l'évolution de la peinture religieuse en Bucovine
et M o l d a v i e . Cependant le savant roumain ne fait que mentionner briève­
29

ment ce cycle sans donner l a description de chaque scène. D'autre part,


le savant roumain, déchiffrant le texte de la dernière scène, fait erreur et
croit qu'elle représente le transfert des reliques de sainte Petka à „Novigrad"
qui selon l u i désigne Roman, important centre episcopal en M o l d a v i e . 30

P l u s tard, Nicolas Mavrodinov corrigea Ştefanescu en démontrant qu'à


Arbure est représenté Tirnovo, mais le savant bulgare n'aborda pas l ' i l l u s -

2 9
I. D . Ştefanescu. L'évolution de l a peinture religieuse en Bucovine
et en Moldavie depuis les origines jusqu'au X I X * siècle. Paris, 1928, p. 128, p l . L V I I ,
LVIII, L X .
3 0
L'existence d'une scène pareille est impossible en général, non seulement à cause
de l'inscription bien conservée où Гоп l i t très clairement le mot Т^ЬЫОКѢГ^ДѢ (voir ci-
dessous), mais parce que nulle part ni dans les sources ni dans d'autres textes hagiogra­
phiques nous ne trouverons de données sur le sujet du transfert des reliques de sainte
Parasceve dans l a v i l l e de Roman. Il est vrai que dans l'église d'évêché de l a même
v i l l e i l y a des scènes de l a vie de sainte Parasceve, mais elles aussi représentent le trans­
fert des reliques de l a sainte à Tirnovo, et non pas à Roman lui-même.

182
F i g . 3. L a Venue de sainte Parasceve à Constantinople

tration de l a V i e de sainte P e t k a . Tout récemment l ' h i s t o r i e n de l ' a r t rou­


31

main S. U l e a , dans une étude sur l a décoration murale extérieure des églises
de M o l d a v i e , sans s'attarder sur le récit hagiographique de sainte Parasceve
d'Arbure, corrige l u i aussi le point de vue de Ştefanescu et donne une e x p l i ­
cation intéressante de l'intégration de ce cycle dans le programme icono­
graphique des fresques d ' A r b u r e . 32

3 1
H . M a в p о Д и H о в. Старобългарското изкуство X I — X I I I век. С , 1966,
с. 72. Dans le livre de Mavrodinov i l existe une certaine impression: à l a page 71—72
l'auteur parle de l'existence de „quelques scènes de l a v i e de St. Parasceve (Petka) dans
l'église princi ère à Curtea de Argeş" en décrivant l a scène du transfert des reliques de
sainte Petka à Tirnovo, reproduite à l a f i g . 59. E n réalité dans 1 église princière â Cur­
tea de Argeş i l n'existe point ni un cycle pareil, ni une scène pareille et les photos de l a
fig. 59 représente une scène des fresques de l'église de l'évêché de l a v i l l e de Roman.
Cf. I. D . Ştefanescu. L'évolution de l a peinture religieuse en Bucovine et en
Moldavie depuis les origines jusqu'au X I X siècle. Nouvelles recherches. Etude icono­
e

graphique. Paris, 1929, p. 136—137, p l . 462; A , G r a b a r . Influences musulmanes


sur l a décoration de manuscrits slaves balkaniques. — Revue des études slaves. T . X X V I I ,
1951, p. 125 sq.
3 2
S. U l e a . Originea şi semnificaţia ideologica a picturii exterioare moldove­
neşti (II). — Studii şi cercetări de istoria artei. T . 19, nr. 1. 1972, p. 45—46. S t . M e -
t z u l e s e u (Sfìnta Cuvioasa Parascheva în istoria Bisericilor ortodoxe d i n Sud-Est
european şi i n documente plastice romaneşti, M i t r o p o l i a Oltenei X X I V (1972), nr. V —
8, p. 501—516) cherche raisonablement l a base littéraire d'autres représentations (par
exemple de scènes à l'église de l'évêché de Roman) dans l a V i e du partiarche Euthyme
sans discuter spécialement les scènes de l a V i e de St. Parasceve à Arbure.

183
F i g . 4. Arbure. L a Dormition de sainte Parasceve

L e cycle illustré de l a V i e de sainte P e t k a de Tirnovo comporte onze


scènes occupant l a bande horizontale inférieure de figures de la façade ouest
de l'église (fig. 1). Au-dessus sont représentés les récits hagiographiques
des célèbres saints-guerriers: saint Georges, saint Demetrios et saint Nicolas,
surmontés de quatre scènes de l a Genèse. L a partie inférieure des
peintures murales est très détériorée: décolorées ou écaillées par les i n ­
tempéries. Néanmoins, leur base thématique se prête au déchiffre­
ment. L a plupart des scènes gardent leurs légendes en langue slave qui. une
fois déchiffrées permettent d'identifier les scènes. L'exposé successif
des épisodes commence par l a partie nord de l a façade.
L a scène i n i t i a l e est très détériorée par le manque de sa moitié à gauche.
Sa légende en trois lignes: . . . w п^скевн W T BCCH тнвхте H W T Г ^ Д

κλ(ΛΗκ^λτ)ϊλ ( А ) Ц Ј Н Б Л Г О В Ѣ ^ ( Н ) С ) Η Η С Ш О Б О Г ( \ ) Т ( Н N I ) В Л Ь С Т Н Н М Ѣ Ц І Н ,
ниже пькъі нншетож ст (...) . . . Т ј > \ Ж А К Ц Ј Н ) с · W T N H ( ) C ) fo(AH)cA. qui
rappelle le texte i n i t i a l de l a v i e abrégée du synaxaire sert d'introduction
au cycle illustré. E l l e représente un intérieur où l ' o n distingue un grand
l i t et à droite une figure nimbée. Il s'agit sans doute de la „Nati­
vite de sainte Parasceve" où l'artiste se servit du schéma iconographique
de l a Nativité de la Vierge.
Dans la scène suivante, sainte Petka, un bâton à la main, est représen­
tée sur un fond de paysage vallonné désertique, un haut édifice à droite.
184
F i g . 5. Arbure. L a Mise au tombeau de sainte Parasceve

Il s'agit de toute évidence du départ de sainte Petka pour le désert. L a com­


position porte l'inscription suivante: (H)3L KLC шел къ п 8 с т ъ і . . .
L a troisième scène est garnie à peu près du même paysage. Dans l'angle
supérieur à droite on distingue une segment céleste qui signifie l ' a p p a r i t i o n
de Dieu. L a composition traite probablement, l'épisode où un messager de
Dieu — archange ou '„adolescent c l a i r " — l u i signifie l'ordre de quitter
le désert et de retourner dans le monde.
L a quatrième scène portant la légende: тоу гуТнл* вь Ц ^ Н Г Ј > А * repré­
sente l'arrivée de la sainte à Constantinople. Son schéma rappelle l'Entrée du
Christ à Jérusalem: sainte Petka marche de gauche à droite sur le fond d'une
colline rocheuse, alors qu'à droite la composition représente un mur d'enceinte
avec une porte flanquée de hautes tours derrières lesquelles sont disposés sur
deux plans des toits à deux pentes — représentation conventionnelle d'une
cité fortifiée.
L a cinquième scène ne garde que les deux derniers mots de sa légende:
ской coy. E l l e représente un édifice religieux de type basilical — à une nef,
l'abside semi-circulaire, devant lequel sainte Parasceve, dans l a pose de pros-
kynesie, la tête posée sur le seuil de l'église. Au-dessus est représentée la f i ­
gure d'un ange, à droite un groupe de deux ou trois figures. Dans l'angle su-

185
F i g . 6. L ' A p p a r i t i o n de sainte Parasceve à Georges ou Euphémie

périeur à droite apparaît le céleste segment avec la dextre bénissante de Dieu.


Il s'agit sans doute de la D o r m i t i o n de sainte Petka.
L a sixième scène portant la légende: (з)де norj>ec\Nïe стъіж тело re­
présente l'enterrement de sainte Parasceve. A l'arrière plan un paysage
architectural urbain assez développé. A u milieu, une grande tombe où gît le
corps de la saint, entouré d ' u n groupe compact de figures.
L e schéma de la septième scène est quasi identique avec la scène précé­
dente. A u milieu, deux tombes, entourées de deux groupes de figu­
res. L a légende est illisible, sauf le commencement: зде. Il s'agit sans doute
de la représentation de l'épisode de l'enterrement du corps du marin en train
de se décomposer où les terrassiers découvrent le corps intact de sainte Paras­
ceve. Les deux tombes au milieu de la composition, tout comme les poses
mouvementées des personnages présents, dont les visages expriment l ' a d m i ­
ration et la peur en disent long sur le sens de la représentation.
L a huitième scène représente sainte Parasceve sur trône, entourée d'une
auréole, flanquée des figures de deux archanges (l'auréole a été aussi sans
doute couverte des figures d'archanges). Au-dessous, une figure, peut-être la
sainte sortant de la tombe. Les premiers mots de la légende presque effacée
disent probablement: зде A R H C A С Т Ь Ь . . . Ici i l s'agit de l ' a p p a r i t i o n de
la sainte (ou de la Vierge) devant Georges (ou Euphémie) le priant de sortir

186
F i g . 7. L a Découverte des reliques de sainte Parasceve

son corps de la tombe dans laquelle elle avait été enterrée avec un m a r i n .
Une remarque: les figures des chrétiens priants ne sont pas représentées. A la
base de l'interprétation iconographique de la scène, i l y a probablement le
schéma des illustrations de certains chants de l'hymne Acathiste. •*
L a neuvième scène fait songer aux scènes 5 et 6. E l l e représente le moment
où l'on sort les reliques de la sainte du tombeau. L a légende ne garde que
les mots З Д С W T . . . ст . . . ( К ) З Ѣ Ш А .
L a dixième scène est presque entièrement détériorée, l a couche de pein­
ture étant écaillée. O n n'y distingue que les contours du paysage architec­
tural urbain et d'un groupe compact défigures, limité en haut par une ligne
droite qui représente sans doute le couvercle de la sépulture portée par les
personnages assistant à la cérémonie. L a composition représente probable­
ment le transfert des reliques de sainte Petka dans sa v i l l e natale E p i v a t e
ou à Tirnovo, ce qui est peu probable, étant donnée que le paysage architec­
tural urbain ne coïncide pas avec le paysage urbain de la scène suivante.
L a onzième et dernière scène est d ' u n grand intérêt pour nous. E l l e re­
présente en effet l'accueil réservé au reliques de l a sainte à Tirnovo. L a lé­
gende bien conservée dit: З А Є П О С Т \ К Н Ц Ј А C T W В Ь Т ^ Ь Н О К Ѣ , rţ\xn. . .
(Т)0ѴНЦ€ЛВЫ АО С€Г0 AN€.

Malheureusement, la figuration est très détériorée. L a mieux conservée


est la partie supérieure où Гоп distingue les contours d ' u n mur d'enceinte,

187
F i g . 8. Arbure. Le Transfert des reliques de sainte Parasceve à Tirnovo

flanqué de deux hautes tours, derrière lesquelles se dégagent les toits à deux
pentes des édifices s'inscrivant sur un plan rectangulaire, ce qui signifie qu'il
s'agit d'édifices civils. A u centre de la composition, devant le mur d'enceinte
est représenté un édifice polygonal — l'église de l a Cour royale où sont dé­
posées les reliques de l a sainte. Malheureusement, dans ce groupe des person­
nes venues pour accueillir la sainte on ne peut distinguer les figures (sauf
une, l a tête penchée à droite de l'église). E t pourtant on aimerait y distinguer
le tzar Ivan Assène II, sa mère, la tzarine Hélène, de son épouse, la tzarine
Anne-Marie de nationalité magyare et l'archevêque Basile, comme c'est le
cas de la même scène dans le narthex de l'église de l'archevêché de R o m a n . 33

Pour savoir quel est le prototype littéraire que le peintre a suivi pour
illustrer la V i e de la sainte, on doit confronter les scènes avec les textes res­
pectifs des Vies de sainte Petka de Tirnovo.
L a présence de l a scène de l ' a p p a r i t i o n de l'ange (ou „adolescent clair")
devant l a sainte qui manque dans la V i e par Basilikos nous oriente sans am­
biguïté vers l a V i e composée par E u t h y m e . Certes, i l y a encore des élé
34

ments qui témoignent que le peintre suit strictement le texte d'Euthyme.


C'est d'abord la scène représentant l'accueil des reliques de la sainte Petka
I. D . Ştefanescu.
3 3
L'évolution de l a peinture religieuse en Bucovine et
en Moldavie. . . Nouvelles recherches. . . p. 136—137, p l . 462. Cf. aussi N . M a v г o d i -
n o v . Op. cit., p. 71—72.
E . К a 1 u ž n і a с к і. Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 55—61.
3 4

188
F i g . 10. Schéma du cycle illustré de l a V i e de sainte Parasceve à Arbure

190
F i g . 11. Roman — scènes de la V i e de sainte Parasceve

à Tirnovo, qui manque elle aussi dans les V i e s antérieures de l a sainte. I l


est vrai qu'un bref renseignement sur le transfert de ses reliques à Tirnovo
est consigné dans la V i e abrégée d u s y n a x a i r e e n tant que complément, com­
me le relève St. Kojoukharov à la V i e traduite de la sainte d'après les don­
nées du récit historique. Ce complément n'est qu'un bref enseignement
35

de l'événement. L a factologie laconique de la chronique (les renseignements


fournis par la V i e abrégée du synaxaire coïncident presque littéralement
avec le texte du récit historique) ne permet pas de créer une grande compo­
sition à personnages, telle qu'elle existe dans les momuments de l'art
plastique.
D'autre part, le tableau représentatif, net et détaillé, dans la V i e par
Euthyme constitue une riche source de conditions, personnages, détails sus­
ceptibles de fournir un matériel imagé suffisant pour aider le pentre à créer

la formule iconographique. . . . H ш<о w όγκο прА^лы П^ѢНА« ф^ж*скык


Н ВЬ СВОЮ njTlHA* CT^N8, ВЬСН OKjJbCTNÏH СЬТѢК\)(8 ce, CL СВѢЦШЛН H K\
АНЛЫ H MVfbl ΒΛλΓΟΒΟΝΗΜΜΗ П|>0В&ЖАМ0ШЄ fXKOy ПрПОАОБИЫГС Kb СЛХБНОМб

Η ί|.λ(ΚΤΒ0γΚ)υυ·Μ0γ Γ|>λΑθγ Tj>ÏN0B8. Η ΙλΚΟ CÇ ΟγΒ^Α'β Б Л Ь Г О Ч Ь С Т Н В Ы Й UAjIb


Idem. Op. cit., p. 65—69; Ibidem. Werke des Patriarchen von Bulgarien Euthy-
3 6

mius. . ., p. 59—77. С. К о ж у х а р о в . Цит. съч., с. 134.

191
IwbNNL ЛСѢИЬ, НЗЫДС Н З ГјЈЛДЛ СЪ МЛТ€|>ЇЮ СВОЄЮ, ЦАјЈНЦеК) 6ЛЄИ0Ю, H съ
СВОЄЮ UAj>HU,eK> Л NN ОН) H С Ъ ВСѢМН КСЛМОуЖН СВОИМИ, CL ИНМНЖС H BLCC4L-
стный п л т ^ ' л ^ ъ Kvţh Блснлїс C L ВСѢМЬ MjJHHTOML ц^ъ]кокным, сь тшнже
H МИОЖЬСТКО ВеЗННСЛЬИХГО Νλ^ΟΑλ. Ц ^ Ь ЖС Η В Ъ С Н СОуЦҐІН CL N H M L ПѢШН
НДОШС W T Г|>ЛДЛ Νλ ЧеТЬуН ПЫЛИШЬ C L МИОГОЮ 4LCTÏIO BL CpTCNÎC ПјШ10-
ДОБИѢН, юже н свонмл НЬСТНѢ ОБЫОДШС |>оуклмл, доушею же H ВЬСѢМЬ
садишь лювезио ловзлл)(8. Η пјишесше, положите BL цу[ъ]квн Ц А -
fLClVfcH . .
Il est prouvé que le peintre n'est pas tributaire du prototype littéraire
uniquement par rapport au thème à traiter. Il observe strictement la succes­
sion des événements et qu'il représente l'un après l'autre les épisodes-clés
du récit hagiographe. Le peintre dépend donc du prototype littéraire aussi
du point de vue iconographique. Aidé des comparaisons et des métaphores
36

dont se sert l'écrivain, le peintre adapte, pour illustrer, cela va sans dire,
les épisodes spécifiques de la Vie de la sainte, certains schémas iconogra­
phiques traditionnels de pareilles scènes de la vie du Christ ou de la Vierge
(comme nous l'avons dit à propos des scènes de la Nativité de sainte Petka,
de l'Entrée de sainte Petka à Constantinople, de la Résurrection de sainte
Petka), mais il introduit aussi des détails caractéristiques, spécifiques du
texte littéraire. C'est le cas notamment de la scène de la Dormition de
sainte Petka (où l'artiste a mis a contribution, dans ses lignes générales, un
des schémas de la mort des saintes, diffusé dans les ménologues illustrés) qui
reproduit la mort de la sainte strictement selon la description faite par Euthyme,
c'est-à-dire le moment où sainte Petka s'adresse à Dieu le priant d'envoyer un
ange pour recueillir son âme: „ . . . В р м е и н ж е Ne МЛЛ8 м и м о ш ь д ш б ,
свое ют^ождеиі* еже W T с о у А 8 f\ß*\fM% лвїе ж е Νλ М0ЛНТВ8 севе W B j ^ T H

Η СЛЪЗЬМН 3CMALN№ ЮБЛНВЛЛШС ЛНЦ,Є · ЧЛОВѢКОЛЮБЧС ВЛЛДЫКО, — ГЛЛГО-


л ю ш н — д л м е Ne прз^ншн, свою о у в о г б ю ј>лвоу, н ж « ј>лдн твокго преветлго
HMCNe BLCX ѴѴСТ\КЛЬШ8К> H ТСБѢ П0СЛѢА*КЛВШ8Ю. H N[Ll]Nf& BLCeiJJCAj>€ ГОС­
ПОДИ, ПОВеЛН ЛГГЄЛ8 MHfNOy П ј Ј Н К Т Н МНјЖО 8Б0Г8Ю MH Д 0 у ш 8 , Η Д Л NC BL3-
Β ^ Λ Ν Κ Ν Μ Η Б б Д С Т Ь BbCJCWA W T NC4HCTLI)< H CKB^NNLIH)C H Л8КЛВЫН)< БѢC0BL . . , " 3 7

Les autres récits hagiographiques ne font que mentionner laconiquement la


mort de la sainte. 38

Pour quelles raisons le donateur et l'auteur du programme iconographi­


que des peintures murales d'Arbure introduisent la Vie d'une des plus popu­
laires saintes de Tirnovo longtemps avant que ses reliques n'eussent été trans­
férées dans la ville roumaine Iassy?
A cette question S. Ulea donne une réponse intéressante. L'historien de
l'art roumain estime que la vie de sainte Petka figure dans la décoration
murale d'Arbure parce qu'elle était réputée comme protectrice du peuple

A u sujet du travail du peintre médiéval sur l'illustration de textes littéraires


36

déterminés voir V . D j u r ić. Историјске композиције у српском сликарству сред-


њег века и њихове книжевне паралеле. — I n : Зборник Радова Византоложког ин­
ститута, V I I I . Beograd, 1967, p. 69—90; Х І . Beograd, 1968, p. 99—127.
E . K a l u ž n i a c k i . Werke des Patriarchen von Bulgarien. . ., Leben der
37

H . Paraskeva, p. 66.
Idem. Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 57 passim.
38

192
et des tzars bulgares, protégeant la capitale contre les attaques des ennemis.
A Гарриі, S. Ulea précise que la V i e de sainte Petka figureà Arbure parallèle­
ment au Vies des plus illustres saints-guerriers: saint Georges, saint Déme-
trios et saint Nikitas. E n outre, elle y voisine avec l a composition du siège
de Constantinople (de l'hymne Acathiste), où l a Vierge s'illustre comme pro­
tectrice de la capitale de Byzance dans l a lutte contre les mécréants. Dans l a
scène du siège de Constantinople, le peintre au lieu de représenter les événe­
ments tragiques de 1453, évoque l a défaite des Perses lors du siège de Constan­
tinople de 626. Il en est de même pour la V i e de sainte P e t k a , où le peintre
opte pour le récit hagiographique par Euthyme, rejetant l a variante p e s s i ­
miste" avec le complément de Grégoire Tzamblac qui relate le transfert des
reliques de la sainte de V i d i n e à Belgrade, après l a chute de T i r n o v o . 39

Il se peut que l a V i e de sainte Petka de Tirnovo, dans le contexte des


autres thèmes, spécifiques de l a décoration extérieure des églises de M o l d a ­
vie ait eu une pareille résonance et importance idéologique. Toutefois, nous
croyons que la raison du „choix de l a V i e faite par E u t h y m e pourrait s'ex-
u

liquer de manière plus simple.


Selon les études de E . Kalužniacki, l a littérature roumaine ne connaît
pas de traductions du récit hagiographique fait par Basilikos. E l l e ne connaît
que le texte abrégé, diffusé par les synaxaires et les Menées slaves et aussi l a
V i e de sainte Petka d ' E u t h y m e , délestée des figures rhétoriques et des com­
pléments tardifs. L a V i e de sainte Petka, composée par le métropolite Barlaam
paraît en 1643 et l'oeuvre du méthopolite Dosithée fut imprimé en 1682. 4Ü

Il s'ensuit qu'avant l a X V I I siècle, l a V i e de sainte Petka par Euthyme


e

constitue l'unique prototype littéraire pour une pareille illustration, d'au­


tant plus que, selon les investigations dans le domaine de l a littérature mé­
diévale roumaine, cette V i e de sainte Petka avait été très diffusée en R o u ­
manie au X V - X V I siècle. E . Turdeanu estime que les oeuvres du patriar­
e e

che Euthyme pénètrent dans l a littérature des principautés roumaines dans


la période de 1438 à 1441 et qu'„à l a même époque parviennent toujours de
Tirnovo, par l'intermédiaire de copistes anonymes, les deux versions ancien­
nes de la V i e de sainte Parasceve" . Sans nous attarder sur les discussions
41

au sujet de l'époque et les voies de pénétration en Roumanie de l a V i e de


sainte Petka par E u t h y m e , nous croyons utile de relever le fait que d'après
42

les dernières études, de nos jours sont gardées dans les bibliothèques et les
monastères roumains 7 copies manuscrites du X V siècle de cet ouvrage d ' E u ­
e

thyme. 43

3 9
S. U l e a . Op. c i t . , p. 45—46.
4 0
E. K a l u ž n i a c k i . Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 17, 35.
4 1
E. T u r d e a n u . L a littérature bulgare du X I V siècle et sa diffusion dans
e

les pays roumains. Paris, 1947, p. 139.


4 2
J . D . L ă u d a t (Euthyme de Tirnovo et l a littérature Slavo-roumaine. Re-
cueuil „L'ecole littéraire de Tirnovo". Sofia, 1974, p. 59), par exemple est d'avis que ces
questions ne peuvent généralement pas être précisées en ce qui concerne l a V i e de sain­
te Petka.
4 3
Les chercheurs plus anciens ne connaissaient que 4 copies slavo-roumains de
l a V i e de Parasceve (Cf. E . K a l u ž n i a c k i . Zur älteren Paraskevaliteratur. . .;
I. D . Ştefanescu. Viaţa sfintei Paraskeva cea noua de Matei al Mirelor. —
R i v i s t a istorica romana, I I I , 1933, p. 347—377; E . T u r d e a n u . Op. c i t . , p. 90—
98; П. Д и н e к о в , К. К у e в, Д . Π е τ к а н о в а. Христоматия по старо­
българска литература. С , 1967, с. 390—391; I. J u f u (Mănăstirea M o l d o v i t a — cen­
trul cultural important din perioada culturii române în l i m b a slavonă sec. X V — X V I I I ,

13 Бизантинобулгарика, 5 193
L a V i e de sainte Petka de Tirnovo illustrée par les peintures murales
de l'église d ' A r b u r e à partir du récit hagiographique, fait par Euthyme
44

constitue une preuve incontestable de l'influence de la culture ancienne bul­


gare sur l'art roumain au cours du Bas Moyen âge.

2. Tirnovo dans la peinture murale d'Arbure

Dernièrement en Bulgarie ont paru quelques articles sur la représenta


tion dans l a peinture ancienne de Tirnovo, capitale delà Bulgarie médiévale
U n e polémique s'engagea dans les pages de la revue Arkeologia sur la ques­
tion de savoir si ces représentations reproduisent l a r é a l i t é . Les peintures
45

murales d'Arbure demeuraient hors de cause, puisque la plupart des auteurs


les considèrent comme non pubuliées. 46

L a légende de la scène représentée à Arbure indique q u ' i l s'agit du trans­


fert des reliques de sainte Petka à Tirnovo (voir plus haut).
Maintenant la question se pose de savoir si l'église, représentée dans la
composition, les édifices c i v i l s au toit à deux pentes et les tours répondent
réellement au paysage architectural de Tirnovo d'antan, en d'autres termes
s ' i l y a coïncidence de l'architecture, peinte par l'artiste et de l'architecture
réelle qui aurait pu l u i servir de modèle.
L a solution de cette question implique une approche „individuelle" et
une analyse stricte et approfondie. Toute assertion généralisante à priori
ne serait pas de mise, étant donné que le rapport entre l'architecture repré­
sentée par le peintre et l'architecture réelle change d'une peinture à l'autre.
O n ferait erreur de soutenir que l'architecture dans l ' a r t byzantin, sur
tout l a représentation des villes, est représentée de manière abstraite, conven
tionnelle et stéréotypée. B i e n entendu, i l y a les formules iconographique
affirmées une fois pour toutes, mais dans l a plupart des cas elles gardent tou
jours un lien avec le prototype réel, la différence étant dans le degré de coïn
cidence du modèle et de l'image. Parallèlement aux exemples de reproduc
tion directe de détails architecturaux, i l y a des formes moins caractéris-

Mitropolia Moldovei şi Suceavei, 1963, 7—8, p. 429—432), signale l'existence de 3 co


pies en plus dans des maniscrits provenants du monastère de Moldovifa (Cf. aussi I. J u
f u . Despre prototipurile literaturii Slavo-romane din Secolul al X V - l e a . Mitropolia
Oltenei. 1963, 7—8).
4 4
Dans le but de recueillir une documentation pour cette publication, ainsi que
pour étudier les liens bulgaro-roumains dans l'art du Bas Moyen âge, j ' a i visité l a Rou­
manie au mois de novembre 1972 et j ' a i étudié les monuments de l a peinture monumen­
tale du X I V — X V I I siècle en Transylvanie, Moldavie et partiellement en Valachie.
e e

A u cours de mon séjour en Roumanie l'Institut d'histoire de l'art de l'Académie des


sciences sociales et politiques de l a RS de Roumanie et plus spécialement son Directeur
M . R. Theodorescu m'ont accordé son patronage et son aide précieux, ainsi que M . S.
Ulea, chef de l a section de l'histoire de l'art byzantin, M m
C. L . Dumitrescu, chargée
e

de recherches, et M m
E . Buculei auxquels je tiens d'exprimer mes vifs remerciements
e

et ma profonde reconnaissance.
С т. M a с л е в. Едно неизвестно у нас изображение на Царевец във Ве­
4 6

лико Търново. — Археология, 2, 1967, с. 1 — 13; Idem. Изображението на Царевец


в Брашовския миней в светлината на ново проучване. — Векове, 1975, 1, с. 16—31;
Т. Г е р а с и м о в . Ново тълкуване на рисунката на Велико Търново от Брашов­
ския ръкопис. — Археология, 1, 1968, с. 32—42; Н. А н г е л о в . Към въпроса
за старите изображения на средновековния град Търново. — Известия на Окръж­
ния исторически музей Велико Търново, I V , с. 1 —16.
С т. M а с л e в. Цит. съч., с. 11; Н. А н г е л о в . Цит. съч., с. 14.
4 6

194
tiques et très simplifiées par rapport à l ' o r i g i n a l . D'autre part, parfois l a
représentation des villes peut être conventionnelle, sans aucun lien avec le
prototype, seul se sujet indiquent de quoi i l s'agit. 47

E n outre, on doit tenir compte du type d e la représentation de l ' a r c h i ­


tecture: représentation au contenu profane (ou dessins marginaux sans aucun
lien avec le texte religieux, comme c'est le cas des Menées de Braşov) ou repré­
sentation faisant partie d'une composition ou d'une série de compositions
religieuses, comme c'est le cas de la représentation de Tirnovo dans le cycle de
la vie illustrée de sainte Petka. Dans le dernier cas, l'artiste, étant donné
la spécificité des idées religieuses, concentre son attention moins sur la re­
présentation exacte des détails architecturaux que sur la signification symbo­
lique du type architectural si tant q u ' i l tient avant tout au contenu idéolo­
gique des figures. Dès lors on ne doit pas s'attendre à trouver dans la pein­
ture médiévale une caractéristique topographique précise de Tirnovo, surtout
quand i l s'agit de peinture murale qui suppose une plus grande généralisa­
tion des formes. C'est ce qui fait que l a miniature est plus riche en détails.
Et ce n'est pas le fait du hasard si la représentation de Tirnovo dans l a Chro­
nique de Manassès est la mieux fournie en détails géographiques et ar­
chitecturaux. 48

Dans son étude «Introduction à l'iconographie de l'architecture médié­


vale", l'historien eminent de l'architecture R . Krautheimer dégage le prin­
cipe général de la reproduction d ' u n original architectural: la déformation,
parfois très grossière, au point de vue de l'homme de nos jours, de la repré­
sentation de la forme, le plan et de l a construction. Cependant, i l importe
pour l'artiste de s'en tenir toujours à un type architectural déterminé de si­
gnification essentiellement symbolique. L a célèbre Rotonde Anastasis du Saint
sépulcre à Jérusalem était représenté dans des copies — répandues en très
grand nombre du V au X V I I siècle dans toute l'Europe—sel on un plan qui dif­
e e

férait d'une représentation à l'autre: circulaire, polygonal ou autre. Cependant


dans toutes ces copies hétéroclites l'artiste ne négligeait pas l'édifice sur plan
central et la coupole de l ' o r i g i n a l . Ces deux particularités avaient pour l ' a r ­
tiste du Moyen âge la valeur d'un contenu idéologique déterminé. 49

Il en est de même de la représentation des villes. L'artiste du Moyen âge


choisit un nombre limité d'édifices cultuels ou civils, particulièrement impor­
tants au point de vue du contenu concret de l a scène q u ' i l produit pour édi­
f i e r — négligeant souvent leurs rapports réels — l'image symbolique de l a
v i l l e représentée.
50

47
Pour l a représentation des villes dans l'art byzantin voir A . Stojaković-
Архитектонски простор y сликарству средњовековне Србије. Novi Sad, 1970 (avec
l a littérature entière sur ce sujet); idem. Quelques représentations de Saloni que dans
l a peinture médiévale en Serbie, Χαριστήριον είς Αναστάσιου Κ. Όρλάνδου, Athènes, 1964,
p. 25—48.
4 8
И. Д y й ч е в. Миниатюрите на Манасиевата летопис.С, 1962, f. 2. Cf. aussi
H . А н г е л о в , Цит. съч.
4 9
R. K r a u t h e i m e r . Introduction to an «Iconographie of mediaeval ar­
chitecture". Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, V , 1942, p. 3—20.
5 0
Voici un exemple: comme l'élément le plus caractéristique d u complexe archi­
tectural de Jerusaleme pour l a scène Entrée à Jerusaleme ainsi que pour d'autres scènes
on choisit l a Rotonde Anastasis, pour Théssalonique dans les scènes de l a V i e du saint
Démètre — la basilique de St. Démètre, etc., et en même temps assez souvent d'autres
différences spécifiques et importantes dans l a situation géographique de certaines villes
sont ignorées, s'ils ne se trouvent pas en liaison directe avec le sujet du texte illustré (la

195
Cette approche incontestablement conventionnelle de la représentation
des villes par l'art est très loin de la reproduction latérale réaliste d'un site
architectural. E t par conséquent, i l n'est pas aisé d'attester avec certitude
l'authenticité du complexe architectural représenté.
Les sources historiques ne livrent aucune donnée et aucune description
détaillées sur la topographie et l'architecture de Tirnovo médiévale. Aussi 51

pour apprécier l'authenticité de toute représentation picturale de Tirnovo


importe-t-il de savoir dans quelle mesure le texte religieux conditionne la
signification symbolique de la composition d'une part, et d'établir les coïn­
cidences concrètes avec les données des recherches archéologiques de l ' a u t r e . 52

L a représentation de la capitale médiévale bulgare à Arbure constitue


le fond de la scène „Transfert des reliques de sainte Petka à Tirnovo". Il en
est de même de toutes les représentations des cycles hagiographiques de la
sainte. L'élément le plus important de la représentation ďArbure, au point
de vue du critère en cours au Moyen âge, est l'endroit où on été déposées les
reliques de la sainte là où elle „тонн ЦѢЛБЫ A * сего A N S " comme le veut
la légende de la scène. Cet élément est l'église palatine qui résume le centre
de l a composition et de la signification de la scène. Dans la V i e de sainte
Petka par Euthyme, i l est d i t : „н гуншсіш, положишь кь цу(ъ)квн lUfbcu/tH"
alors que dans le récit historique susmentionné, on l i t : „Sa réception par le
tzar et ses subordonnées fut grandiose. E t ainsi avec gloire et grand respect,
avec joie et réjouissance i l la déposa dans sr*n église (souligné par l'auteur) —
témoignant respect et louange à la sainte pour la gloire de Dieu qui avait daigné
l u i faire obtenir cette grâce." 53

Selon les recherches archéologiques, l'église palatine se trouvait dans


la partie est du complexe du palais, l'espace devant sa façade conservée d i ­
visant le complexe en deux moitiés: moitié nord dite officielle et moitié sud
réservée aux services auxiliaires. C'était un édifice harmonieux cruciforme
avec coupole ronde, un narthex surmonté d'un clocher et un exonarthex. O n
y a mis au jour une dalle en marbre portant un décor en relief avec l'inscrip­
tion en bulgare moyen: Пг^лсксвж—Parasceve. Selon les savants, cette dalle
faisait partie de l'inscription du donateur de l'époque du transfert des reliques
de sainte Petka à Tirnovo. C'est ce qui leur fait dire que l'église était dédiée
à sainte Parasceve. 54

mer, par exemple, à côté de telles villes que Constantinople ou Théssalonique n'est re­
présentée que si cela est nécessaire pour l'interprétation du sens d'une scène en question).
Cf. A . S t о j a k o v i ć. Op cit. Архитектонски простор. . ., p. 178—180.
5 1
H . А н г е л о в . Средновековният град Търново според изворите от X I I —
X I V век с досегашните археологически разкопки. — Известия на Окръжния музей
във В . Търново, 11, 1964, с. 1 — 16.
5 2
Une manière d'appréciation différenciée pareille, quoique pas toujours consé­
cutivement appliquée, nous trouvons dans l'article de N . Angelov cité ci-dessus.
5 3
E . K a l u ž n i a c k i . Werke des Patriarchen von Bulgarien. . ., p. 72—73;
С. К о ж у х а р о в . Неизвестен летописен разказ. . ., с. 128—129.
5 4
Sur l'église palatine v. С. Георгиева, И. Николова et H . Ангелов. Архитекту­
рата на двореца, dans le recueil Carevgrad Tar nov (Le palais des rois bulgares pendant
l e deuxième royaume bulgare ( X I I * — X l V e s). T. I, C , 1973, c. 43, 53, 63. Sur le plan
et l a réconstruction de l'église par l'architecte B . Kuzupov, v. Op. cit. Appendice 9,
I, II et I V . Sur l'inscription v. H . A н г e л о в. Надписи от двореца на Царевец. Carev­
grad Tarnov, p. 168—169. Il existe l'opinion que l'église, dans laquelle ont été trans­
férées les reliques de sainte Parasceve a été située en dehors du palais à Tzarevec (v. И.

196
L'église, représentée dans la scène des peintures murales d'Arbure ne
coïncide que de l a manière la plus générale avec les détails de l'église de
Tirnovo que nous venons de mentionner. O n n ' y destingue n i le plan c r u c i ­
forme, ni le clocher, ni les narthex. D'autre part, l'église de l a scène d ' A r ­
bure s'inscrivant probablement dans un plan polygonal, surmontée d'une
coupole sur un haut tambour portant des ouvertures allongées, avec son naos
annulaire fait songer beaucoup aux martyriums paléo-chrétiens et aussi aux
représentations de la Rotonde Anastasis du Saint Sépulcre qu'on représente
généralement dans la plupart des compositions évoquant des événements
liés a Jérusalem et qui apparaît comme la symbole de la v i l l e sainte. 55

On connaît bien la renommée exceptionnelle dont jouissait l a Rotonde


Anastasis dans le Moyen âge chrétien, comme gardienne des reliques les plus
vénérées du monde. Il y a lieu cependant de relever que cet édifice sur le plan
central à coupole acquiert au Moyen âge un sens symbolique bien déterminé
(sans égard de la forme de base: circulaire ou polygonale). Désormais i l signi­
fiait le lieu de la souffrance et du martyre (martyriums ) ou de l a résurrection
(Rotonde Anastasis). De là la reproduction du type architectural du marty­
r i u m dans les scènes représentant le martyre ou l'enterrement de saints. 68

L'aspect architectural de l'église palatine, représentée dans l a scène du


«Transfert des reliques de sainte Petka à T i r n o v o " à Arbure est en liaison évi­
dente avec ce type d'édifice, d'autant plus que, étant donné le contenu de l a
scène, l'artiste considérait l'église platine avant tout comme un lieu où l ' o n
gardait les reliques de sainte P e t k a . C'est là l a fonction principale de l'église
palatine. Comme nous l'avons déjà mentionné, pour le maître-constructeur
du Moyen âge les différences dans les détails et la construction étaient d ' i m ­
portance secondaire par rapport à la symbolique des formes architecturales.
Dès lors l'artiste-peintre était fondé de faire valoir le sens symbolique d ' u n
type d'édifice donné et plus que les particularités de la construction.
Il y a aussi les autres composantes du complexe urbain: les édifices au
toit à deux pentes derrière l'église (trois agauche et quatre à droite) et les deux
tours reliées par un velum, mais elles sont d'importance secondaire. I l serait
très difficile d'établir une coïncidence exacte entre ces composantes secondai­
res et les édifices du complexe du palais de Tzarevets tels qu'on peut les voir
dans le plan de reconstruction mis au point après de longues recherches arché­
ologiques. L e maître de M o l d a v i e qui a décoré les murs de l'église d ' A r b u r e
vers le milieu du X V I siècle n'a pas eu certes l a possibilité de voir l a capi­
e

tale médiévale de Bulgarie, alors que le miniaturiste, auteur de l a Chronique


de Manassès n'a certainement pas laissé échapper cette possibilité.

Н и к о л о в а . Църквата „Св. Параскева" във Велико Търново. — Известия на Ок­


ръжния музей. В . Търново, I V , 1968, с. 22—23) ce qui est en contradiction avec les
données des sources.
6 6
M. Ильин. Изображение Иерусалимского храма на иконе „Вход в Йе­
русалим". Благовещенского собора, Византийский временник, T. X V I I , 1959; А.
С т о я к о в и м . Об изучении архитектурных форм на материале некоторых рус­
ских икон. — Византийский временник. T. X V I I I , с. 116 — 123.
5 6
A . S t o j а к о v i ć . Pokusai odredjivanja realnih vrednosti jednog slikanog
arhitektonskog tipa. — In: Zbornik Arhitektonskog fakulteta Universiteta u Beogradu,
sv. 3. Beograd, 1961, p. 7.
5 7
C. Г е о р г и е в а , И. Н и к о л о в а , H . А н г е л о в . Архитектурата на
двореца. . ., Appendices 5, 6, I — I V .

197
Cette approche incontestablement conventionnelle de la représentation
des villes par l'art est très loin de la reproduction latérale réaliste d'un site
architectural. E t par conséquent, i l n'est pas aisé d'attester avec certitude
l'authenticité du complexe architectural représenté.
Les sources historiques ne livrent aucune donnée et aucune description
détaillées sur la topographie et l'architecture de Tirnovo médiévale. Aussi 51

pour apprécier l'authenticité de toute représentation picturale de Tirnovo


importe-t-il de savoir dans quelle mesure le texte religieux conditionne la
signification symbolique de la composition d'une part, et d'établir les coïn­
cidences concrètes avec les données des recherches archéologiques de l ' a u t r e . 52

L a représentation de la capitale médiévale bulgare à Arbure constitue


le fond de la scène „Transferi des reliques de sainte Petka à Tirnovo". Il en
est de même de toutes les représentations des cycles hagiographiques de la
sainte. L'élément le plus important de la représentation d'Arbure, au point
de vue du critère en cours au Moyen âge, est l'endroit où on été déposées les
reliques de la sainte là où elle „тонн ЦѢАБЫ A O сего A H € * comme le veut
la légende de la scène. Cet élément est l'église palatine qui résume le centre
de la composition et de la signification de la scène. Dans la V i e de sainte
Petka par Euthyme, i l est d i t : „н гундесше, положите кь цр(ъ)ккн цг^шцзн"
alors que dans le récit historique susmentionné, on l i t : „Sa réception par le
tzar et ses subordonnées fut grandiose. E t ainsi avec gloire et grand respect,
avec joie et réjouissance i l la déposa dans s^n église (souligné par l'auteur) —
témoignant respect et louange à la sainte pour la gloire de Dieu qui avait daigné
l u i faire obtenir cette grâce." 53

Selon les recherches archéologiques, l'église palatine se trouvait dans


la partie est du complexe du palais, l'espace devant sa façade conservée d i ­
visant le complexe en deux moitiés: moitié nord dite officielle et moitié sud
réservée aux services auxiliaires. C'était un édifice harmonieux cruciforme
avec coupole ronde, un narthex surmonté d'un clocher et un exonarthex. O n
y a mis au jour une dalle en marbre portant un décor en relief avec l'inscrip­
tion en bulgare moyen: Пл^скєвж—Parasceve. Selon les savants, cette dalle
faisait partie de l'inscription du donateur de l'époque du transfert des reliques
de sainte Petka à Tirnovo. C'est ce qui leur fait dire que l'église était dédiée
à sainte Parasceve. 54

mer, par exemple, à côté de telles villes que Constantinople ou Théssalonique n'est re­
présentée que si cela est nécessaire pour l'interprétation du sens d'une scène en question).
Cf. A . S t о j a k o v i ć. Op cit. Архитектонски простор. . ., p. 178—180.
6 1
H . А н г е л о в . Средновековният град Търново според изворите от X I I —
X I V век с досегашните археологически разкопки. — Известия на Окръжния музей
във В . Търново, 11, 1964, с. 1 — 16.
5 2
Une manière d'appréciation différenciée pareille, quoique pas toujours consé­
cutivement appliquée, nous trouvons dans l'article de N . Angelov cité ci-dessus.
5 3
E. K a l u ž n i a c k i . Werke des Patriarchen von Bulgarien. . ., p. 72—73;
С. К о ж у х а р о в . Неизвестен летописен разказ. . ., с. 128—129.
5 4
Sur l'église palatine v. С. Георгиева, И. Николова et H . Ангелов. Архитекту-

f>aTa на двореца, dans le recueil Carevgrad Tarnov (Le palais des rois bulgares pendant
e deuxième royaume bulgare ( Х Ц е — X I V * s). T. I, C , 1973, c. 43, 53, 63. Sur le plan
et l a réconstruction de l'église par l'architecte B . Kuzupov, v. Op. cit. Appendice 9,
I, II et I V . Sur l'inscription v . H . A н г e л о в. Надписи от двореца на Царевец. Carev­
grad Tarnov, p. 168—169. Il existe l'opinion que l'église, dans laquelle ont été trans­
férées les reliques de sainte Parasceve a été située en dehors du palais à Tzarevec (v. И.

196
L'église, représentée dans la scène des peintures murales d'Arbure ne
coïncide que de la manière la plus générale avec les détails de l'église de
Tirnovo que nous venons de mentionner. O n n'y destingue n i le plan c r u c i ­
forme, ni le clocher, ni les narthex. D'autre part, l'église de l a scène d ' A r ­
bure s'inscrivant probablement dans un plan polygonal, surmontée d'une
coupole sur un haut tambour portant des ouvertures allongées, avec son naos
annulaire fait songer beaucoup aux martyriums paléo-chrétiens et aussi aux
représentations de l a Rotonde Anastasis du Saint Sépulcre qu'on représente
généralement dans la plupart des compositions évoquant des événements
liés a Jérusalem et qui apparaît comme la symbole de la v i l l e sainte. 55

O n connaît bien l a renommée exceptionnelle dont jouissait l a Rotonde


Anastasis dans le Moyen âge chrétien, comme gardienne des reliques les plus
vénérées du monde. Il y a lieu cependant de relever que cet édifice sur le plan
central à coupole acquiert au Moyen âge un sens symbolique bien déterminé
(sans égard de la forme de base: circulaire ou polygonale). Désormais i l signi­
fiait le lieu de la souffrance et du martyre (martyriums ) ou de l a résurrection
(Rotonde Anastasis). De là la reproduction du type architectural du marty­
r i u m dans les scènes représentant le martyre ou l'enterrement de saints. 50

L'aspect architectural de l'église palatine, représentée dans l a scène du


„Transfert des reliques de sainte Petka à T i r n o v o " à Arbure est en liaison évi­
dente avec ce type d'édifice, d'autant plus que, étant donné le contenu de l a
scène, l'artiste considérait l'église platine avant tout comme un lieu où l ' o n
gardait les reliques de sainte P e t k a . C'est là la fonction principale de l'église
palatine. Comme nous l'avons déjà mentionné, pour le maître-constructeur
du Moyen âge les différences dans les détails et la construction étaient d ' i m ­
portance secondaire par rapport à la symbolique des formes architecturales.
Dès lors l'artiste-peintre était fondé de faire valoir le sens symbolique d ' u n
type d'édifice donné et plus que les particularités de la construction.
Il y a aussi les autres composantes du complexe urbain: les édifices au
toit à deux pentes derrière l'église (trois agauche et quatre à droite) et les deux
tours reliées par un velum, mais elles sont d'importance secondaire. I l serait
très difficile d'établir une coïncidence exacte entre ces composantes secondai­
res et les édifices du complexe du palais de Tzarevets tels qu'on peut les voir
dans le plan de reconstruction mis au point après de longues recherches arché­
ologiques. L e maître de Moldavie qui a décoré les murs de l'église d ' A r b u r e
vers le milieu du X V I siècle n'a pas eu certes la possibilité de voir l a capi­
e

tale médiévale de Bulgarie, alors que le miniaturiste, auteur de l a Chronique


de Manassès n'a certainement pas laissé échapper cette possibilité.

Н и к о л о в а . Църквата „Св. Параскева" във Велико Търново. — Известия на Ок­


ръжния музей. В . Търново, I V , 1968, с. 22—23) ce qui est en contradiction avec les
données des sources.
5 5
M. И л ь и н . Изображение Иерусалимского храма на иконе „Вход в Йе­
русалим". Благовещенского собора, Византийский временник, T. X V I I , 1959; А.
С т о я к о в и ч . Об изучении архитектурных форм на материале некоторых рус­
ских икон. — Византийский временник. T. X V I I I , с. 116 — 123.
5 6
A . S t o j a k o v ić. Pokusai odredjivanja realnih vrednosti jednog slikanog
arhitektonskog tipa. — In: Zbornik Arhitektonskog fakulteta Universiteta u Beogradu,
sv. 3. Beograd, 1961, p. 7.
5 7
C. Г е о р г и е в а , И. Н и к о л о в а , H . А н г е л о в . Архитектурата на
двореца. . ., Appendices 5 , 6 , I — I V .

197
F i g . 12. Gravure du Recueil du métropolite Barlaam de Moldavie (1643)

198
Selon l'artiste-peintre d'Arbure, les edifices et les tours constituaient
autant d'éléments d'appoint de la caractéristique d ' u n v i l l e fortifiée du M o y e n
âge telle que Tirnovo. E t cela d'autant plus q u ' o n trouve cette architecture
conventionnelle" dans la représentation de Constantinople et d'autres com­
plexes architecturaux dans les illustrations de l ' A c a t h i s t e occupant presque
toute façade sud de l'église d'Arbure et aussi dans les scènes des Vies de saint
Georges, saint Nicolas, saint Demetrios et autres, disposées au-dessus de la
V i e illustrée de sainte Parasceve. 58

3. Le sort du cycle de la vie de sainte Parasceve de Tirnovo


dans l'art balkanique au XVII — XVIII s.e e

Nous pouvons juger de la vulgarisation et de l'évolution plus tardives


du cycle de la V i e de sainte Parasceve de Tirnovo, en nous appuyant sur cer­
taines oeuvres de peinture murale, d'icône et d'art graphique des X V I I et e

X V I I I s., conservées en Roumanie (les fresques de l'église„SteParasceve"


e

à Roman au début du X V I I s. et la gravure décorant le célèbre Recueil de


e

sermons dominicaux et de grandes fêtes de l'année du métropolite B a r l a a m


de Moldavie, publié en 1643) et en Yougoslavie (l'icône de ste Parasceve et
sa V i e à Peć, 1728, et la gravure du monastère Fénec à Srem de. 1782). 59

Sans avoir la possibilité d'offrir une étude exhaustive de ces cycles, nous
les examinerons surtout par rapport aux problèmes fondamentaux qui nous
intéressent, à savoir:
a) Quelle est leur source littéraire?
b) Cornmenf y est représentée l a capitale bulgare? .·
E n 1542 (lorsque les peintures murales de l'église d'Arbure sont déjà ter­
minées) en la v i l l e de Roman en Moldavie, commence laconstruction d'une église
archiépiscopale, achevée en 1550 au temps de Iliaş, fils et héritier du souve­
rain bien connu d'alors Petru Rares. Cette église est dédiée, comme
60

5 8
Les meilleurs reproductions des fresques à Arbure voir chez V . D r ă g u ţ -
Arbore, Bucureşti, 1971.
0 9
E n Yougoslavie i l peut y avoir conservées encore quelques scènes de l a V i e de
sainte Petka. Elles se trouvent dans l'église St Petka au village Trnava non l o i n de Raška,
e

dont les fresques sont datées d'après l'inscription conservée des années 1579/1582. S i
Г on considérela description donnée par S. P e t k o v i ć (Зидно сликарство на подрућју
Пећке патриаршее. . . . p. 179) dans le narthex de l'église au troisième registre du
mur nord sont représentées des scènes de l a V i e de sainte Parasceve de Tirnovo: L ' a p p a ­
rition de Parasceve devant Georges, l a vision de Georges, l'apparition de sainte Petka
devant Euphémie et sur le mur ouest l a Dormition de sainte Petka. L e même auteur
(op. c i t . , p . 77—78) a noté que dans d'autres monuments — Dolna Kamenica (laquelle est
faussement daté par l u i du X V et début du X V I s ) , Mlado Nagoricino (1628), M r k v a (1704)
e e

sont représentées des scènes des martyres de l a sainte, dont l a source littéraire est d'ori­
gine apocryphe tandis qu'à T r n a v a — des scènes dont l a source littéraire est d'origine
canonique (sans préciser laquelle). E n réalité i l s'agit des cycles de l a V i e de deux sain­
tes différentes: dans les trois églises mentionnées — celle de l a martyre sainte Parasceve
de Rome, et à Trnava — probablement de sainte Petka de Tirnovo ( d ' E p i v a t , de Bel­
grade et de Jassy) laquelle fait objet du présent étude. Je regrette cependant de ne pas
avoir l a possibilité de présenter les scènes de Trnava, n'ayant pas reçu les photos respec­
tifs demandés à M . S. Petković.
Les monuments grecs (s'ils existent) ne sont pas pris en considération par manque
de publications de ce genre dans l a littérature grecque dont nous disposons, ainsi que
par manque de possibilités de faire des recherches sur place.
6 0
Istoria artelor plastice in Romania. T. I. Bucureşti 1968, p. 344; cf. aussi G .
B a l ş . Bisericile şi mănăstirile moldovineşti din veacul al X V I - l e a . Bucureşti, 1928,
p. 96—103.

199
F i g . 13. Sainte Parasceve et scènes de sa V i e — icône de la trésorerie
du patriarcat de Peć (1728)
Fig. 14. Sainte Parasceve et scènes de sa V i e — gravure du monastère Fénec (fin
du X V I I l e siècle)

201
tant d'autres construites à l a même époque à sainte Parasceve. Suivant les
6 1

dernières recherches les peintures de l'église datent du début du X V I I siècle e

(1601). Dansl'exonarthex de cette église, le cycle de l a V i e de Ste Parasceve,


62

sans doute le plus détaillé de ceux qui sont connus de l a sainte, s'y étale. 63

Sur les murs sud et ouest nous avons quatre scènes sur chacun, et trois autres
sur le mur nord. Les épisodes suivants y sont peints: 1. Sainte Parasceve s'en
va au désert; 2. A p p a r i t i o n de l'ange (ou „de l'adolescent clair") à saine P a ­
rasceve; 3. Sainte Parasceve en prière à l ' E g l i s e (à ces côtés un groupe d'évêques);
4. L a D o r m i t i o n de sainte Parasceve (avec l'apparition de l'ange); 5. L a
mise au tombeau de sainte Parasceve; 6. L a mise au tombeau du cada\re
du marin; 7. Sainte Parasceve auréolée (entourée d'anges) apparaît à Geor­
ges ou Euphémie; 8. Euphémie raconte son apparition à l a foule; 9. Découverte
des reliques de sainte Parasceve et 10. Les reliques sont transportées à l'église
des saints apôtres à E p i v a t e ; 11. L e transfert des reliques de l a sainte à
Tirnovo.
Les sujets des scènes 1, 2, 4, 5, 6, 7, 9 et 10 correspondent parfaitement
aux sujets des scènes respectives d'Arbure.
L a présence d'épisodes tels, l'apparition de l'ange (de ,,1'adolescent
clair") à sainte Parasceve dans le désert et le transfert des reliques d e l à sainte
à Tirnovo, nous renvoie encore à l a V i e écrite par Euthyme, car comme i l
a été souligné, ces épisodes ne figurent pas dans les autres Vies de l a sainte.
D'autre part, dans les différentes scènes de Roman et d'Arbure, on voit se
répéter certains détails iconographiques spécifiques dont l'origine ne peut
être que l a V i e écrite par E u t h y m e (par exemple, l'apparition de l'ange à
la D o r m i t i o n de sainte Parasceve, l'apparition de sainte Parasceve auréolée,
assise sur le trône et entourée d'anges, à Georges ou Euphémie, etc.).
Les différences entre И о т а л et Arbure consisteraient en ceci qu'à Roman
la v i e cle l a sainte Parasceve est illustrée de manière plus détaillée, c'est-à-
dire certains épisodes complémentaires, en dehors des principaux figurant
à Arbure, y sont présentés. Ici manque l'épisode i n i t i a l , ou peut-être plus
d'un (aujourd'hui détruits, disposés sans doute sur le mur est de l'exonar-
thex). E n fait la saga débute au moment où sainte Parasceve s'en v a au dé­
64

sert. Plus loin, c'est la Venue de sainte Parasceve à Constantinople qui manque.

6 1
II n ' y a qu'à l'époque de Ştefan Cel Mare (1457—1504) que des églises de Cot­
nari. Dolheştii M a r i , R . Sarat, et ŞtefaneŞti ont été mises sous le vocable de sainte Pa­
rasceve ( V . Repertorul monumentelor şi objectelor de artă d i n tempul l u i Ştefan Cel
Mare. Bucureşti, 1958).
6 2
Istoria artelor plastice. . . T . I I , p. 137.
6 3
A propos de cette peinture v . I. D . Ştefanescu (L'évolution de l a peinture
religieuse en Boucovine et en Moldavie . . . Nouvelles recherches. . ., p. 136—137) fait
une remarque en passant. Une description brève des scènes du cycle est donnée par J .
Testiban (Prea Cuvioasa Parascheva în frescele d i n Catedrala episcopala de l a Roman,
Mitropolia Moldovei şi Sucevei, X X X V I I , 1961, nr. 3—4, p. 297—300) avec certaines
imprécisions (par exemple, l a scène du transfert des reliques de sainte Petka de l'Épi-
vat à Tirnovo est désignée comme „le transfert des reliques de sainte Petka à Belgrade",
malgré que l ' i n s c r i p t i o n indique ponctuellement кь слькнїн гу&дь ТЈЊНОК". Ces erreurs
ont été partiellement corrigées par St. Metzulescu (op. c i t . , p.501— 516) lequel est le seul
auteur qui met en liaison la source littéraire de ces peintures murales avec l a V i e écrite
par Euthyme.
6 4
J . T e s t i b a n (op. c i t . , p. 297) considère que sur le mur est, où les fresques
ont été détruites au cours de l a construction d'une arcade plus tardive, ont été disposé
4 épisodes de l a V i e de sainte Parasceve, mais c'est peu probable.

202
A la place nous avons la scène: sainte Parasceve en prière à l'église devant
une icône en présence d'un groupe d'évêques. Il s'agit probablement de sa
visite à l'église principale des Blachernesà Istanbul. L e moment reproduit
la sainte adressant une prière chaleureuse à la Vierge, très proche du texte
d'Euthyme: . . . K L п^ѣсвѣтломоу Христовы м*Т€ј*е п^їнде ЭД^моу, нже н
К\\у:уН\ ΗΜίΝΟγΚΤ СЄ ДХЖЄ ДО A ( L ) № C L , Η ТЬМО KL ТОК ЧЬСТЫѢН ПјЈН-
ПХДШН НКОНѢ, Т0ПЛЫК НеЦЈЛДНО НЗЛНВХ\ШЄ CAL3LI : Тевѣ, — Г Л Х Г О Л И Ц Ј Н —
ВЛХДНЧНЦ.Є МНј)8, BLCL МОН кьзложн)<ъ жнкоть, н\ те BLCOX»j МОЮ КЬЗЛЬГЬЮ
ньдождоу, Дѣвнце, не WTJ>HHH оувогоую у е н е . . . ; ou bien la visite de
l'église Ste Sophie: „ . . . B L Б О Ж Ї Л слов* П ^ Ѣ К ^ С Ы Ы Н п^їнде )Cý\ML, что не
ДѢЮЩН н творешн, К О Л Ѣ Н Н М честь* твориш поклонкнїл, слъзные точецін
неточннкы. . . α β δ

Après l'apparition de sainte Parasceve à Georges ou bien à Euphémie vient


la scène (absente à Arbure) où l ' u n des deux (probablement Euphémie) ra­
conte à la foule son apparition, la prière de sainte Parasceve d'être transpor­
tée à Epivate, et la foule se dirige vers l a tombe. V o i c i comment cet épisode
est relaté par Euthyme: „ . . . Бъ НОЦЈН же тон н Н Ѣ К Х Х ѵѵт Б Л Ь Г О Г О В Ѣ Й -
NLI)C ЖСЫЬ — 6νφΗΜΪλ ТОН Γψ03ΒλΗΪ€ — ПОДОБНО ТОМОуЖДС ВНДѢНІЮ ВНДѢНІС
В Н Д Ѣ , н WBOH Ηλ ογτρϊχ BLC13M по д^оБНоу В Н Д Ѣ Н Н Х Х склзьше. Д х Ш<0
€ÏX WHH СЛЫШМШ, BLCH OyTCKOML 0yCTj>LMHUJe C€ Η, TW CL MHVS^ML OyCjJL-
дїемь нзьмше, њкоже нѣкокмв ск^овнщоу неѵѵвычноу, многоцѣнноу же
чюждха^сб с е . . , " 6 6

Ici (comme d'ailleurs à Arbure) le cycle se termine par les deux épisodes
successifs relatifs au transfert des reliques de la sainte, d'abord à l'église des
saints apôtres à E p i v a t e , ensuite à Tirnovo. Cependant, en raison des écarts
chronologiques (la peinture de Roman est d'environ un demi-siècle plus tar­
dive que celle d'Arbure) et surtout des particularités stylistiques (le point
de conservation bien entendu, les fresques de Roman sont beaucoup mieux
conservées tout en étant crasseuses), les scènes à Roman, et en particulier
ces épisodes, revêtent un aspect très solennel et représentatif. Comme d ' a i l ­
leurs le texte l'indique* . . . B b 3 L M U j e же тѵѵ C L С В Ѣ Ц Ш І Н H K X A H A L I ,
w

bj>WMVTLI ЖЄ H ΒΛλΓΟΒΟΗΪΗ, B L Цу[ъ]КВН СЪ j)\A0CTÏ8 СВСТЫ)СЬ H BLCC}CB&AHLIH}C

положнше ьпостоль, B L нейже лежешн, ΜΗΟΓλλ н чюднх зн\менїь т в о ^ ь ш е . . . u 6 7

sont représentés les participants de la grandiose procession. Habillés somp­


tueusement, civils et ecclésiastiques se dirigent vers l'église des saints apô­
tres, portant des encensoirs et de grands chandeliers. Encore plus représen­
tative et plus riche en personnages, est la cérémonie solennelle accompagnant
le transfert des reliques d ' E p i v a t e „ B L С Л Х В Н І Н Г ^ Ь Д Ь T J J L H O B « . Près du
cercueil contenant les reliques de la sainte, l'image du roi Ivan
Assen, de la reine mère E l e n a , de son épouse la reine A n a et
du patriarche V a s s i l i i , à l'intérieur de la chapelle royale. E n ce qui con­
cerne la présentation de la capitale bulgare, le chercheur bulgare N . A n -
guélov, jouissant d'un renom, consacré aux études de l'ancien Tirnovo, esti-
6 5
E . K a l u ž n i a c k i . Werke des Patriarchen von Bulgarien. . ., p. 65—66.
6 6
I b i d . , p. 68—69.
6 7
Ibid., p. 69.

203
me, que l'image de Roman donne l'idée „la plus véridique" de Tirnovo d'alors. 68

Il me semble que l'architecture très «conventionnelle" des remparts et des


bâtiments à l'intérieur de l'enceinte qui de toute façon se répète et dans les
autres scènes de l'ensemble pictural, nous suggère à être plus réservés dans
l'estimation de cette représentation. L'architecture de la chapelle royale
est en effet plus particulière, mais la question d'une fidélité à l'original ne
pourrait être résolue que lors d'une comparaison minutieuse avec les détails
de la reconstruction existante de la chapelle palatine de Tzarevetz (celle-ci
selon B . Kouzoupov est un édifice à une seule coupole tandis que celle de
Roman est à trois coupoles). 09

E n moins d'un demi-siècle plus tard apparaît une gravure qui est déjà
l ' i l l u s t r a t i o n directe d'un texte agiographique. E l l e occupe le folio 116 r

du Recueil traduit connu, contenant les sermons dominicaux et des grandes


fêtes de l'année, composé par le métropolite Barlaam de Moldavie et publié
en 1643 à l ' i m p r i m e r i e du monastère des Trois Hiérarques à Iassy; i l conti­
ent et la V i e de sainte Parasceve à la base du texte d ' E u t h \ m e . 70

A u centre de la gravure, sainte Parasceve sur le trône/couronne à la tête,


une croix martyre à l a main d r o i t e , et tout autour 9scènes de sa vie à Tir­
71

novo: 1. Sainte Parasceve distribue ses vêtements aux pauvres: 2. Sainte


Parasceve dans le désert; 3. A p p a r i t i o n de l'ange („l'adolescent clair") à sainte
Parasceve dans le désert; 4. Pèlerinage de la sainte à l'église principale des
Blachernes à Istanbul; 5. D o r m i t i o n (et mise au tombeau) de la sainte P a ­
rasceve; 6. Découverte des reliques de la sainte; 7. x n^Nectuïc W T Ш Н В Л Т
#

KO Τψ№Έ lw\N Лс\нь; 8. Transfert des reliques à Constantinople („в. ПЈК-


NKtNïeСелнм солтлыомъ т8^скТмъ ; 9. Transfert des reliques de Constanti­
а

nople à Iassy par le voiévode Vasile L u p u („TţtTtt nţtm. WT Цлрнг^д


во Acw Ivv вьсїлїш воєвод").
Les épisodes 2—7 nous sont déjà connus des cycles de la vie de sainte
Parasceve à Arbure et à Roman. Certes, l'iconographie est plus simple (ceci
s'explique par la nécessité d ' u n traitement laconique, exempt de détails,
v u l'expression spécifique assez p r i m i t i v e du maître graveur). L a „topogra-
phie" — caractéristique de Tirnovo ne se fait comprendre, par exemple, que
par l a colline étroite aux bâtiments à coupoles dans l a partie gauche de la
scène (épisode 7), tandis que le transfert des reliques à lassi est représenté sur
un paysage de fond neutre.
L'épisode i n i t i a l peut être également lié au passage déterminé du texte
d ' E u t h y m e , de l'édition dite élargie (selon le manuscrit en provenance du
monastère de Biseriçanï) qui d'ailleurs figure dans la traduction de Barlaam:
„. . . ДссАтом8 же Л Ѣ Т 8 тож B b 3 f x c T \ њко пртшедшв, въ ц,у[ъ]квь прчн-
СТЫЖ H П^НСНОАѢВЫ МХјЧЖ ПО ОБЫЧМО ПуїНДЄ, H WCblHN^ сож[ь]сткном8
6 8
H . А н г е л о в . Към въпроса за старите изображения. . ., с. 9—-12. cf. aus­
si С. Г е о р г и е в а , И. Н и к о л о в а , H . А н г е л о в . Цит. съч., с. 39—40.
6 9
Recueil Carevgrad Тагпоѵ. . ., Appendices I — I V (sans reproduction).
70
C'est E . K a l u ž n i a c k i (Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 35—38) qui
a signalé le premier l'existence de cette gravure. L a traduction précis et des inscriptions
slaves v. chez S t . M e t z u l e s c u (op. cit., p. 515—516).
7 1
A u sujet de l'iconographie du „portrait" de l a sainte, laquelle est représentée le
plus souvent comme une martyre v. В . Ф и л а т о в . Цит. соч., с. 35.

204
єу&гг*лїю пј>очнт\ш8, слышь вож[ь]ствиын W N L Г А Л С , гллголАфїн: Нжс \0- у

ШеТЬ ПО MNC НТН, Д Ь ІѴТВуЪЖСТ CA ССКС Η ВЪЗМСТ Kj>[b]CTL СВОЙ Η ПОСЛѢ-


Д 8 С Т ΜΗ. Η ΙλΚΟ 8GO CU ВЪ ОуМѢ П|)ЇЄМЬ. . Η ΙλΚΟ СТјГСЛОЖ НѢКОТО^ОЖ
ОуѣЗВСНХ БЫВШН, ХБЇС H3L ^^[ъ]КВС НЗЬШСДШН Η ΟγΒΟΓλ ЫѢКОСГО СТрТШН,
С Ъ Н Ш Ш С CL ССБС fH3LI СВОД H BLCft, АЖС ΝΟΟΙλΜΙΚ, ДѢBHЧLCKЖA ΟγΤΒλ^,
томоу В Ъ С Ѣ оус^дио ю т д ь с т . . . " 72

L e dernier épisode (9) reflète un événement historique, très important


pour la vie religieuse en Roumanie. E n 1641 (soit, à peine deux ans avant l a
création de la gravure) le voiévode Vasile L u p u , profitant des difficultés f i ­
nancières de la patriarchied'Istanbul, achète les reliques de sainte Parasceve
et les fait solennellement transporter à Iassy, à l'église des Trois Hiérarques,
où elles sont conservées jusqu'à nos jours. Pourtant, cet événement, ainsi

que le transfert précédent des reliques à Istanbul (dont on ne se sert i c i que


pour donner la „préhistoire" nécessaire à l a scène finale), n'est pas mentionné
dans le texte de Barlaam (pour l ' i l l u s t r a t i o n duquel la gravure est destinée).
Aussi, E . Kalužniacki admet-il que cet événement très essentiel pour l'his­
toire religieuse et politique de la Roumanie, a su trouver sa place dans une vie
de la sainte Parasceve qui nous est restée inconnue, du temps du transfert
des reliques à Iassy (écrite peut-être par ce même Barlaam) qui avait à sa
base des extraits de la vie écrite par E u t h y m e , mais en même temps relatait
l'événement historique du point de vue de l'observateur d i r e c t . 74

E n 1728 a Peć, un des principaux centres artistiques des Balkans depuis


le X V I siècle, un artiste inconnu peint pour le patriarche Moïse de Serbie,
e

une icône de sainte Parasceve avec des scènes de sa vie. L e visage de la sainte
est f i n et très espressif (elle est debout au milieu de l'icône), viennent les m i ­
niatures exquises des scènes de sa V i e . Les chercheurs en parlant de cette icône,
l'appellent à juste titre „le dernier rejeton raffiné d'une vieille culture et d'une
tradition séculaire" . L e cycle de l a vie se déroule en 9 compositions riches
75

en détails iconographiques: 1. L a petite sainte Parasceve prie à l'église de


l a Vierge et entend la voix de Dieu qui l'appelle à le suivre; 2. Sainte P a ­
rasceve dans le désert; 3. L ' a p p a r i t i o n de l'ange („l'adolescent clair") à l a
sainte Parasceve dans le désert; 5. L a mise au tombeau du cadavre en
décomposition du marin où l ' o n voit le corps de l a sainte; 6. L ' a p p a r i t i o n de
la sainte à Georges; 7. Le transfert des reliques de sainte Parasceve à
l'église des saints Apôtres à E p i v a t e ; 8. L e transfert des reliques à Tirno-
vo; 9. Accueil des reliques de sainte Parasceve à Tirnovo.

7 2
E . K a l u ž n i a c k i . Zur älteren Paraskevaliteratur. . ., p. 20—21.
7 3
I. R u v a r a с. Op. cit., p. 174; Χ p. К о д о в. Старите жития. . ., с. 21—23.
7 4
Е. К а 1 u ž η і а с k i . Op cit., p. 37—38.
7 6
L . Mirković est le premier qui a fait l a communication sur cette icône, laquelle
est conservée dans l a trésorerie du patriarcat de Peć (Старине из Дечана, Пећи, Центинње
и Прасквице, Годишнњак музеја јужне Србије, I.Skoplje, 1941,p. 127) et dont l a datte
était déchifrée d'une manière erronée. L a caractéristique citée ci-dessus appartient
à M . Corović-Ljubinković (Пећко-Дечанска иконописна школа од X I V до Х І Χ
века, Београд, 1955, р. 16, p l . X X V I I ) . L'icône est réproduite aussi chez A . Vasilić—M.
Teodorović-Sakota (Каталог ризница манастира Пећке патриаршије, Приштина
1957, p. 10) et également chez S. R a d о j с i ć. Icônes de Serbie et de Macédoine. Beo­
grad, 1960, p. 99 (la partie centrale ) et aussi chez M . S a k о t a. Ризницем манастира
y Србији, Београд, 1966, p. 26, p. I. 71.

205
L e premier épisode est le seul que nous n'avons pas rencontré jusqu'à
présent. Il illustre sans doute la première partie du texte d'Euthyme cité
ci-dessus (toujours de la rédaction élargie du manuscrit de Biseriçanï).™ Tous
les autres (excepté l'épisode 8) sont pareils, même dans les détails, aux scè­
nes d ' A r b u r e et de R o m a n . L e plan iconographique de l'épisode8 — le trans­
fert des reliques sur un char — rappelle de beaucoup le schéma de l'épisode
8 de la gravure du recueil de Barlaam.
Ce qui surprend i c i , c'est l'abondance de détails iconographiques que nous
trouvons rarement dans la peinture d'icônes. A i n s i par exemple, dans la scène
„La mise au tombeau du marin ', l'artiste a peint la colonne avec le stylitě
4

(absente jusqu' alors), et le bateau qui a rejeté le corps du mort (que nous avons
rencontré seulement à Roman); tandis que dans la scène „Accueil des reli­
ques de la sainte à T i r n o v o " parmi les milliers de l a foule sont représentés
et le roi Bulgare, et le patriarche et les deux reines. . . E n ce qui concerne la
représentation de Tirno\o, nous devons remarquer que la chapelle royale où
sont mises les reliques est une bâtisse centrique, une rotonde à coupole posée
sur un haut tambour, du type semblable à celle représentée à Arbure. E n fait,
l'église des saints Apôtres à E p i v a t e , de l'épisode 7 de l'icône considérée, est
du même type, ce qui s'explique par le sens symbolique de ce type architec­
tural, souligné plus haut, utilisé souvent pour les scènes de marhres, les ense­
velissements, etc.
Il est évident q u ' i c i aussi la source littéraire demeure la V i e écrite par
Euthyme.
L e culte de sainte Parasceve fut largement répandu en Serbie moyen­
âgeuse, et plus tard en Serbie sous la domination ottomane. P a r m i les images
des saints très vénérés dans les églises édifiées après la rénovation de la pa-
triarchie de Peć, celle de sainte Parasceve tient une place très digne. E n pied,
en médaillon, en torse, elle est représentée (surtout) presque dans toutes les
églises de campagne de la deuxième moitié du X V I siècle à la f i n du X V I I
e e

siècle. Il est entendu que cette popularité est due dans une large mesure au vieux
77

culte syncrétique de sainte Parasceve la martyre, alimenté par les nombreu­


ses légendes et croyances populaires, proches aux superstitions et à la magie.
(Pourtant la tradition populaire ne différencie pas les trois Parasceve).
E n Serbie le culte de l a sainte est encore plus renforcé par le transfert
de ses reliques à Belgrade. Après l a prise du royaume de V i d i n par les Turcs
(1396), l a princesse M i l i r a de Serbie obtient du sultan les reliques de la sain­
te (se trouvant à V i d i n après la chute de Tirnovo) et les fait transporter à
Belgrade, ce qui nous est rapporté par Grégoire Tzamblac. Voilà pourquoi
certains monuments font mention de sainte Parasceve de Serbie ou de B e l ­
grade. Cependant ces deux épisodes ne sont pas illustrés dans l'icône consi­
78

dérée ci-dessus.

7 6
E . К a 1 u ž η і a с к і. Op. cit., p. 20—21.
77
S. P e t k o v i ć . Op c i t . , p. 68. U n témoignage éloquent de l a popularité de
sainte Parasceve représente également le fait que seul dans le territoire de l'éparchie
de Boka Kotorska et de Slepce à l a f i n du siècle passé i l y avait 18 églises sous le vocable
de sainte Parasceve et dans l'une de ces églises—celles de M r k v a — est conservé un cy­
cle détaillé de l a V i e de l a martyre sainte Parasceve (Cf. P . M i j o v i ć. Бококоторска
сликарска школа X V I I I — X I X виека, Титоград 1960, p. 25—31.
7 8
И. И в а н о в . Български старини из Македония, С , 1931, с. 433—436, II
est intéressant à noter, que dans l a Russie ancienne, où le culte de l a révérende sainte
Parasceve d'Épi vat n'a pas été particulièrement vénérée (par opposition au culte pro-

206
Il en est de même et de la publication récente d'une gravure intéressante
sur cuivre avec la vie de sainte Parasceve en provenance du monastère Fenek
(à Srem, au sud-ouest de Zemun), dont l'église principale est dédiée à sainte
Parasceve. B i e n q u ' i l existe un écart chronologique relativement petit, entre
79

l'icône de Peć et la gravure de Fenek, l a dernière relève d'une toute autre


conception artistique, d'une étape nouvelle dans l'histoire de l'art. E l l e fait
partie des meilleures oeuvres de l'art graphique baroque serbe, ou plus pré­
cisément de la symbiose d'éléments baroques et rocailles, si typique de l'art
du territoire de la métropole de K a r l o v c i à l a f i n du X V I I I siècle.
e 80

A u milieu, sainte Parasceve sous des nuages orageux en mouvement et


anges volants (l'un d'eux l u i met sur la tête une couronne martyre). E l l e
est représentée avec un dynamisme cher au baroque et une surcharge émo­
tive, cependant sans les excès de l'exaltation hypertrophiée. Au-dessous d'elle,
une représentation du monastère de Fenek auquel l a gravure est destinée, et
de côtés, en encadrements baroques exquis, par trois (six au total) sont dispo­
sées les scènes de la vie de la sainte: 1. П Ј Г С П О А О Б Н ^ А П^хскекх пбетнннос
A
ПЈ№)<ОАНТ жнтнс; 2. ВОЗВѢЦШТСА ЬНГСЛОМЪ пріАБИѣ н сжс ѵѵт MHţ\ по­
селені'*; 3. СТ\А ІКЛАСТІ А М8ЖВ НССТН8 ВО СНѢ СЛ ВѢШССТВІѴ СВОШЪ ТѢ-
А А

леен; 4. П Ј Ш Б Н Л А пј>|'мдет чннъ монмшекїн; 5. ьспенне П ^ С П Н Ы А п^ьскевы;


6. ПјКНССНТс МОШСН П ^ П Б Н Ы А К О С Т Ь Н Ъ ВО Г ј Њ Д тс^новъ.
Tous les épisodes (excepté le 4) nous les connaissons déjà fort bien, ont pour
base la V i e de la sainte écrite d ' E u t h y m e . Mais les scènes de la V i e , marquent
i c i , un début net de déformation et de décadence de la v i e i l l e tradition mé­
diévale. Si dans l'icône de Peć les épisodes suivaient de manière précise la
succession des événements du texte, ici l a chronologie est brutalement atteinte
(„L'apparition de sainte Parasceve à Georges" est donnée avant „LaDormi-
tion de la sainte"). Si les détals de Peć, peints avec beaucoup d'amour, ont
pour but de fournir plus de matériel „littéraire", ici l'iconographie de cer­
taines scènes perd tout lien avec le texte (dans „L'apparition de la sainte
à Georges" — une composition baroquş conventionnelle à la dra­
perie lourde au-dessus du l i t du dormant, — sainte Parasceve est représentée
debout à côté de l u i , tandis que dans les monuments précédents l'accent est
mis sur l'apparition de la sainte en tant que reine, auréolée et entourée d'an­
ges). Le fruit d'une même attitude „libře" à l'égard de l a source littéraire
et la tradition iconographique est l'insération de l'épisode „La Révérende
ondément enraciné de la martyre connue depuis une époque plus ancienne. Là le plus
souvent elle est appelée sainte Parasceve de Serbie ou de Belgrade (v. В . А н т о н о в а ,
H. M H ë в a. Каталог древнерусской живописи Государственной Третьяков­
ской галереи. М., 1963, I, с. 260, 340) en même temps que pour les Roumains du X V I e

et même du X V I I siècle elle est Petka de Tirnovo (Elle est nommée ainsi de même dans
e

l'inscription sur la dalle en pierre, posé sur ces reliques dans l'église des Trois hiérar­
ques à Jassy (Cf. E . K a l u ž n i a c k i . Op. cit., p. 40—41).
79
D . D a v i d о v. Из историје српског бакрореза X V I I I века, Зборникза лико-
вне уметности 1. Нови Сад, 1965, p. 257—262. p l . 12—19. L a plus ancienne annonce à
propos du monastère Fenek est de l ' a n 1563. A u sujet de l'histoire du monastère v . B .
S t r i k a . Фрушкогорски манастири, Загреб, 1930, p. 177; L . S t o j a n o v í ć. Ста­
ри ерпеки записи и натписи. Ср. Карловци, 1923, I, 635, V , 7932; V . Ρ е t k o v i ć.
Преглед црквених споменика кроз повесницу српског народа, Београд 1950,
р. 334—335.
8 0
D . D a v i d o v . Op cit., p. 258.

207
s'engage"par des voeux monastiques (après l ' A p p a r i t i o n à Goerges et avant
la Dormition). Cet épisode représente un moment traditionnel de la V i e du
couvent sans aucun lien avec les textes. Il y est mis probablement en raison
de l'endroit auquel la gravure est destinée — un couvent de religieuses, atta­
ché depuis longtemps au culte de sainte Parasceve. 81

* * *

Tous ces monuments considérés jusqu'à présent — des peintures murales


à Arbure, un des plus importants monuments, de hautes qualités artistiques,
de la peinture de M o l d a v i e de X V I siècle, à la gravure de Fenek, oeuvre cu­
e

rieuse du baroque serbe—sont suffisamment représentatifs et significatifs,


chacun en son genre et à son époque. Créés dans les milieux cultivés de l'aris,
tocratie, du haut clergé ou du monachisme instruit, exécutés par des artistes
bien formés, ils sont tous liés à la tradition „savante" et non folklorique de
l'art balkanique. Aussi, peuvent-ils servir de base dans l'étude d'une tradi­
tion iconographique très intéressante bien que sans grande étendue.
Il serait difficile de dire où et comment est formée l'iconoraphie du
cycle de la V i e de sainte Parasceve de Tirnovo dans les arts plastiques des
Balkans. O n suppose l'existence d ' u n manuscrit illustré de la V i e de l a sain­
te, utilisé comme modèle par les artistes des ensembles de fresques de M o l d a v i e . 82

Il est possible, cependant, que l'interprétation picturale du texte de la vie


de l a sainte, voit le jour juste en Moldavie au X V I siècle, à la base de la tra­
e

dition littéraire d ' E u t h y m e .


Dans la solution de cette question nous touchons le problème (qui jus­
qu'à présent n'a été pas l'objet d'une étude spéciale) relatif aux étapes
dans l'évolution ou la formation des cultes des saints au niveau national ou
local, qui apparaissent relativement tard, à partir de l a période médioby-
zantine, dans le cadre de différentes cultures nationales, en parallèle avec
les cultes d'un grand nombre de saints communs à tous les chrétiens, confir­
més dans leur majorité encore à l'époque paléochrétienne. 83

Dans son étude sur l'évolution de l'hymnographie dans l'ancienne litté­


rature bulgare, St. Kozoukharov écrit: ^Ordinairement la composition hym-
nographique „service" est déterminée comme une série de cantiques consacrées
à une saint reconnu (canonisé) et chantées le jour de sa commémoration. Très
souvent le service vient après la vie du saint e η t a n t q u ' é t a p e f i n a l e
(mise en r e l i e f — E l . В . ) , couronnant la canonisation (l'affirmation) et le traite­
ment artistique du culte envers le saint, par l'incorporation au cycle litur­
g i q u e . " Cette disposition régulière concerne avant tout la suite naturelle du
84

8 1
L a gravure a été commandée par le commerçant de Novi Sad Constantin Théo­
dore Gadesa comme un cadeau pour le monastère Fenek. E l l e était exécutée d'après
l ' o p i n i o n des chercheurs, par un certain graveur viennois bien connu, cependant les
scènes, étant plus schématiquement conçues doivent probablement être exécutées par
son aide (D. D a v i d о v. Op. cit., p. 261—262).
8 2
H . А н г е л о в . Към въпроса за старите изображения. . ., с. 9—12.
8 3
A propos des saints nationaux dans l'art v. chez V . D j u г i ć. Историске
композиције у српском сликарству. . ., р. 118—119, п. 13; Cf. aussi Е. Б а к а л о в а .
Изображения на грузински светци в Бачковската Костница. — Известия на Инсти­
тута за изобразителни изкуства при БАН. T. X V I , с. 118—121.
8 4
С. К о ж у χ а ρ о в. Търновската книжовна школа и развитието на химничната
поезия в старата българска литература, Търновска книжовна школа. С , 1974, с.281.

208
cycle littéraire: tout d'abord l a V i e , sorte de narration originale donnant
les preuves de sainteté du vénéré, presque toujours semblable à l'acte même
de canonisation, puis le service chantant la gloire du saint. Il faudrait y ajou­
ter que l a nécessité d'une image visuelle du saint apparaît encore plus tard.
Or, les textes hagiographiques et liturgiques ont toujours précédé la création
d'un portrait typologique du saint. (Ainsi par exemple, les portraits de C y ­
rille le Philosophe et de Clément d ' O h r i d , apparaissent pour l a première fois,
au cours de la deuxième moitié du X I siècle, dans les fresques de l'église
e

„Sainte Sophie" à O h r i d , bien que des Vies et services les concernant sont con­
nus presque aussitôt après leur m o r t . Autrement d i t , l'entrée d ' u n saint
85

dans les arts plastiques et en particulier dans l a peinture murale, l'art le


plus représentatif de la sphère culturelle byzantine, est considérée comme
la dernière phase de l'affirmation de son culte.
Les cycles de la V i e illustrés apparaissent encore plus tard, sans être
phase obligatoire dans l'évolution du culte. Nous ne les rencontrons que
dans certains cas, et en plus comme la conséquence logique d'une popularité
spéciale et continue, ou bien le rapport aux circonstances historiques et p o l i t i ­
ques déterminées. Souvent, la distance de quelques siècles les sépare de l ' o r i ­
gine de la source littéraire. A i n s i par ex. des scènes de l a V i e de saint Jean de
R i l a , apparaissent pour la première fois au X I V s. (vers 1342) — des fres­
e

ques de la chapelle de la Transfiguration de la Tour de H r e l i u au monastère


de R i l a . Ceci est lié au rôle renforcé des moines, aux tendances mystiques
80

de l'hésychasme propagées au sein de la société bulgare du X I V s. L a source


e

littéraire, c'est la V i e dite „populaire" du saint, apparue quelques siècles au­


paravant. O r , le texte qui a servi à l a base littéraire, c'est celui qui était le
plus largement connu, affirmé et approuvé par l a tradition littéraire séculaire.
Or, i l est fort possible que l'interprétation imagée de l a V i e de sainte
Parasceve, écrite par Euthyme, soit née en M o l d a v i e au X V I s. Une fois
e

créé, le schéma iconographique du cycle de la vie se propage et dans d'autres


pays au cours de plusieurs décennies avec de légères modifications par rapport
au nombre d'épisodes illustrés, ou bien par rapport aus détails iconographiques.
De nouveaux textes apparaissent mais le schéma demeure immuable. Voilà
pourquoi dans les deux monuments serbes le cycle se termine par le transfert
des reliques de la sainte à Tirnovo, de même que les icônes du cycle de l a V i e
de Jean de R i l a , par exemple, du X V I I — X V I I I s. ne prennent pas en con­
e e

sidération la V i e du saint écrite par E u t h y m e qui est plus tardive, mais con­
servent la relation avec celle dite d'inspiration populaire.
L a V i e de sainte Parasceve, écrite par E u t h y m e , se révèle comme la base
littéraire „classique", très populaire et pleinement affirmée qui a su inspi­
rer durant environ trois siècles les peintres des différents peuples balkani­
ques.

85
С v e t a π G r o z d a n o v . Појава и продор портрета Климента Охрид-
ског у средњовековној уметности.— I n : Зборникза ликовнеуметности, З.Нови сад,1967,
р. 49—72.
8 6
Л . Π ρ а ш к о в. Хрельовата кула, С , 1973, с. 57—62.

14 Бизантннобулгарика, 5 209

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