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Cours

Contentieux administratif

Par : FAYCAL BAROUDA

LICENCE FONDAMONTALE

SEMESTRE 6

ANNEE UNIVERSITAIRE 2019-2020

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Introduction générale
Le contrôle juridictionnel de l’administration est assuré par des
tribunaux chargés de vérifier lorsqu’ ils sont saisis de recours ; si la
conduite de l’ administration a été conforme au droit.
Au Maroc dés son accession à l’indépendance cette forme de contrôle
a été assurée dans un premier temps par la cour suprême (crée par le
Dahir du 27 septembre 1957) et les tribunaux de première instance.
Puis par les tribunaux administratifs institués par la loi n 41/90 ; et les
cours d’appel administratives instituées par la loi n 80/03.
Certes au plan jurisprudentiel ; des avancées ont été réalisée ; mais cet
optimisme ne doit pas dissimuler coexistante d’inconvénients qui
méritent d’être mis en exergue. A cet égard , on peut faire allusion au
nombre très réduit des juridictions statuant en matière administrative.
Seulement 7 juridictions administratives , et deux cours d’appel
administratives. Encore l’ordre administratif marocain souffre de
l’absence d’un véritable conseil d État.
Le blocage du contentieux administratif marocain se voit notamment
au plan du formalisme , de la lenteur, et de la rigidité de la procédure
administrative contentieuse.

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Ces quelques constatations pourront suffire comme introduction à
notre cours dans lequel il sera question d’étudier :
- La juridiction administrative (la première partie).
- L’action administrative (la deuxième partie).

PREMIÈRE PARTIE : aperçu sur la juridiction administrative au


Maroc
Il sera question dans cette première partie de mettre l’accent sur
l’ordre administratif marocain ; ainsi que sur les attributions qui lui
sont accordées .
Chapitre 1 : l’ organisation de la juridiction administrative
marocaine
Il sera question ici d’étudier les composantes de l’ordre administratif
et de son corps judiciaire.
Section 1 : l’organisation de l’ordre juridictionnel administratif
marocain
Les juridictions administratives font partie des juridictions de Droit
Commun spétialisées.

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Le Maroc dispose de trois nivaux de juridiction statuant en matière
administrative. Il s’agit :
- Des tribunaux administratifs en première instance ;1 

- Des cours d’appel administratives ;

- La cour de cassation (la chambre administrative) ;

_______________________________
1- L’actuel projet de loi portant n 38/15 prévoit la création des chambres administratives aux sein des
tribunaux ordinaires. (Article 65)

La doctrine marocaine avait déjà exprimé voici déjà quelques années que pour’’ rapprocher la justice
administrative des justiciables , il aurait été plus indiqué de maintenir une chambre ou une section
administrative, selon le cas, au sein des 67 tribunaux de première instance et dans les 21 cours d'appel,
tout en leur affectant des magistrats spécialement formés en droit public en général et en droit
administratif en particulier"(BOUDAHRAINE. A , le nouveau Maroc politique, Edition Madariss,
p276) .la mème proposition fut adoptée par le comité de rédaction de la la revue Le CENSEUR..Ce
dernier avance ‘’qu’il était anormal de constater que les justiciables continuent à se déplacer des villes
lointaines comme Azilal ou Essaouira vers Casablanca ; ou bien de Laayoune jusqu’à Agadir juste
pour intenter une action contre l’administration. Pour faire face au moins actuellement; il faut instaurer
dans chaque tribunal ordinaire ou d’appel des chambres spécialisées dans les affaires administratives;
chose qui n’est plus délicate pour le ministère ; tout en sachant que le Royaume et que Dieu soit loué
dispose d’un nombre assez important des magistrats compétents qui maitrisent la matière
administrative ‘’( le besoin impérieux de la création des chambres administratives; rev Le censeur
revue des contentieux administratif et douanier ;n 3- novembre 2014 ;p 3.)

Aujourd’hui ; une telle réforme n’a pas échappé au feu de la critique ; certains juristes vont même
conclure qu' il s’agit d’une régression spectaculaire .
،‫المجلة المغربية لالنظمة القانونية و السياسية‬، ‫ افاق القضاء االداري على ضوء مشروع قانون التنظيم القضائي‬،‫مليكي عبد المجيد‬
‫ تطور القضاء االداري المغربي بعد ربع قرن من‬،‫احمد‬. ‫ اجعون‬- ‫ و ما بعدها – انظر كدلك‬87 ‫ ص‬،2016 ‫ اكتوبر‬10 ‫عدد‬
23 ‫ ص‬،2019 ‫ اكتوبر‬،17 z‫ العدد‬،‫ المجلة المغربية اللنظمة القانونية و السياسية‬، ‫احدات المحاكم االدارية‬

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Paragraphe 1 : Les tribunaux administratifs de première instance
Aux termes de l’article deux de la loi portant n 41/90 ; un tribunal
administratif comprend :
- Un président et plusieurs magistrats ;
- Un ou deux commissaires royaux à la loi et au droit ;
- Et un greffe » 1
Le président du tribunal administratif

Aux termes de la loi 41/90 instituant les tribunaux administratifs , les


missions attribuées au président du tribunal administratif sont d’ordre
administratif et judiciaire.
S’agissant des attributions d’ordre administratif , le président du
tribunal administratif désigne le juge rapporteur. L’article 4 de la loi
instituant les tribunaux administratifs annonce à cet égard « le
président du tribunal administratif transmet immédiatement le dossier
au juge rapporteur qu’il désigne » .
L’article 2 de la loi instituant les tribunaux administratifs précise que
le président du tribunal administratif désigne pour une période de deux
ans parmi les magistrats de celui-ci , un ou deux commissaires royaux
de la loi et du droit ; sur proposition de l’assemblée générale. Aussi
veille t- il au fonctionnement interne du tribunal , enfin il préside
l’assemblée générale.

_______________________________________
1- L article 64 du projet de loi n 38/15 dispose que les tribunaux administratifs de première
instance comprennent : un Président ; un vice Président ; un ou plusieurs commissaires
royaux.

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Quant aux attributions d’ordre juridictionnel ; l’article 19 de la loi n
41/90 dispose que « le président du tribunal administratif en sa
qualité de juge des référés ; statue sur les requêtes provisoires et
conservatoires »
En outre, l’article 38 de la même loi précise que le président du
tribunal administratif est juge des référés en matière d’expropriation
pour cause d’utilités publiques et d’occupation temporaire.
Enfin, l’article trois de la loi instituant les tribunaux administratifs
dispose « le président du tribunal administratif peut accorder le
bénéfice de l assistance judiciaire »
Le commissaire royal

L’entretien tenu par le ministre de la justice avec le quotidien ‘’le


matin du Sahara’’ résume en gros les grands traits de l’institution « la
composition de ces juridictions se distingue par l’institution d’une
nouvelle fonction entièrement différente de celle du ministère public ;
qui est celle du commissaire royal de la loi et du droit ; chargé
d’exposer en toute indépendance ses conclusions sur les circonstances
de fait et les règles de droits applicables. Le commissaire royal de la
loi et du droit est désigné pour une durée de deux ans par le président
du tribunal parmi les magistrats de la juridiction sur proposition de
l’assemblée générale ; contrairement aux magistrats du ministère
public. il n’est pas soumis à la hiérarchie administrative et ne peut de
ce fait recevoir d’instructions ; le commissaire royal a pour mission
d’éclairer la juridiction sur les données de fait et de droit de l’affaire et
de lui proposer une ou plusieurs solutions en mettant en valeur les
avantages et éventuellement les inconvénients de chacune d’elle »

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C’est cette mission qui est confiée au commissaire royal dont l’article
6 de la loi instituant les tribunaux administratifs définit les contours :
1 – Il expose ses conclusions oralement en audience publique.
2- Ces conclusions sont écrites et remises au tribunal.
3- Ces conclusions peuvent être communiquées aux parties si elles en
font la demande.
Remarques critiques :
A première vue ; la première question qui s’impose : sur quelle base
s’opère la désignation du commissaire royal1 ; serait-il le criterium de
l’ancienneté ou celui de la performance ?
Au plan de la logique ; la primauté de l’ancienneté relève de
l’irrationnel ; la désignation doit tirer sa légitimité du savoir faire et de
la performance.
Il faut bien savoir qu’au conseil d’État français la fonction de juge
rapporteur est d’ ailleurs dévoluée par principe à un maitre des
requêtes, c’est à dire comme il l’a signalé le britannique Hamson ; à
quelqu’un d’assez jeune pour être le porte –parole d’une idée ou d’une
doctrine nouvelle .
Expérience l’a approuvé la désignation d’un juge bien âgé peut
entrainer le développement d’une jurisprudence conservatrice voire
réactionnaire .
____________________________
1- Aux termes de l’article 2 du décret portant n 2-92-59 « l’assemblée générale propose la
désignation d un ou plusieurs commissaires royaux de la loi et du droit conformément à
l’article 2 de la loi n 41/90 »

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Une autre problématique doit être soulevée ; peut on limoger le
commissaire royal de son poste avant l’expiration de la durée de son
mandat?
En effet ; l’une des imperfections de la loi n 41/90 et qu’elle ne
produit aucun effet juridique dans ce cas de figure.
Aussi ; en désignant le commissaire royal le président du tribunal
administratif ; ne fait- il qu’approuver la proposition de l’assemblée
générale ; ou bien c’est à lui que revient le dernier mot?
Se pose aussi la délicate question : la décision portant désignation du
commissaire royal peut- elle être portée au prétoire du juge de l’excès
de pouvoir ?

La doctrine estime qu’elle fait partie des mesures intérieures du


service soumises sous la direction du président.
Le fondement des mesures d’ordre intérieurs ; est celui-ci « de
minimis non curat pretor ; le juge n’a pas à connaitre des affaires sans
importance » ; telle est la base philosophique du principe . Or ; la
question qui s’impose : la désignation d’un commissaire royal pourrait
on la qualifier de sans importance ?
Par ailleurs ; un examen attentif des dispositions de l’article 19 de la
loi n 42/90 révèle que la version française ne coïncide pas avec le
texte rédigé en langue arabe.
L’article 19 de l’ancien Dahir du 15 juillet 1974 précise que « les
présidents des tribunaux de première instance exercent leur
surveillance sur les magistrats du siège ainsi que sur les services de
greffe »

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Après la réforme ; tel qu’il est rédigé en langue arabe ; l’article 19
dispose que « les présidents des tribunaux administratifs et ceux des
tribunaux de première instance exercent leur surveillance sur les
magistrats de leurs tribunaux ainsi que sur les services de greffe »
Le but visé par la réforme est de permettre aux présidents des
tribunaux administratifs d’élargir leur contrôle pour s’entendre au
commissaire royal.
Tandis que ; exposé en langue française ; l’article en question dispose
« les présidents des tribunaux administratifs et ceux des tribunaux de
première instance exercent leur surveillance sur les magistrats du siège
de leurs tribunaux ainsi que sur les services de greffe »
Il est clair ; on ne peut trouver d’issue à cette ambiguïté qu’en
s’appuyant sur les méthodes d’interprétation.
Certains juristes estiment que l’expression ‘’ les magistrats des
tribunaux’’ s’étend systématiquement au commissaire royal puisque
celui-ci est un membre de la magistrature alors que l’expression ‘’
magistrat de siège ‘’ retenue dans la version française ne le vise pas.
Celui -ci ne fait pas partie des magistrats du siège. Donc ; il reste à
dire que le sens commun associant les deux versions est l expression «
magistrat »
Aujourd’hui ; l’article 103 du projet de la loi n 38/15 semble
reproduire la mème formulation erronée sans prendre en considération
les critiques formulées par la doctrine marocaine auparavant .1
Enfin ; une autre question a été soulevée par la doctrine marocaine :
la présence du commissaire royal est- elle obligatoire dans la phase du
prononcé du jugement ?
_________________________________
1- ‫يمارس رؤساء محاكم اول درجة اشرافهم على قضاة االحكام العاملين بها و يراقبون موظفي هيئة كتابة الضبط بها‬

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Une partie de la doctrine avait estimé que le commissaire royal n’est
pas obligé d’assister au prononcé du jugement ; son rôle se réduit à
présenter ses conclusions ; son absence n’entraine pas la nullité du
jugement en application du principe ; pas de nullité sans texte.
D’autres considèrent que sa présence est obligatoire au prononcé du
jugement ; puisqu il fait partie de la composition juridictionnelle du
tribunal
Paragraphe 2 : Les cours d’appel administratives
Le respect du principe de double degré de juridiction a connu au
Maroc une évolution que l’on peut présenter en deux étapes :
- la première ; s’étend de 1994 qui est l’année de l’entrée en
fonction des tribunaux administratifs jusqu à 2006. Étape durant
laquelle la mission de statuer en appel en matière administrative était
assurée par la cour suprême en l’occurrence la chambre administrative
- La deuxième ; s’étend depuis l’entrée en fonction des cours
d’appel administratives jusqu à nos jours.
A – La première étape : la cour suprême ; juge d’appel en matière
administrative

Durant cette première étape ; la compétence de la cour suprême en


matière d’appel suscitait quelques remarques d’ordre crique formulées
brillamment par la doctrine marocaine ; la première porte d’abords
sur l’ application du principe de collégialité ; la seconde s’attache au
flou de l’article 45 de la loi portant n 41/901 .
_______________________________
1- Avant son abrogation ; L article 45 de la loi n 41/90 dispose « Les jugements des tribunaux
administratifs sont portés en appel devant la Cour suprême (Chambre administrative). L'appel
doit être présenté dans les formes et délais prévus aux articles 134 à 139 du Code de la
procédure civile. »

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1-Le principe de collégialité

Statuant dans le cadre de l’article 45 de la loi instituant les tribunaux


administratifs en tant que juge d’appel ; la question qui a été posée est
de savoir s’il sera tenu compte des dispositions de l’ article 371 du
CPC « les chambres de la cour ne peuvent valablement juger que si
elles siègent en cinq magistrats » ou bien si la cour suprême va siéger
en formation de jugement constituée de trois magistrats conformément
aux dispositions de l’article 7 du dahir fixant l’organisation judiciaire
(15 juillet 1974 )

2-Le flou de l’article 45 de la loi n 41/90

La rédaction maladroite des dispositions de la loi 41/90 a laissé planer


une incertitude autour de l’organisation judiciaire du royaume.
Partant de cette constatation et allant un peu plus loin ; une partie de la
doctrine en a tiré profit pour exposer une construction doctrinale qui
bouleverse ce paysage juridictionnel. Certains juristes estimaient que
la rédaction de l’article 9 1de la loi n 41/90 est loin d’être hasardeuse.
Le législateur insiste vraiment sur la compétence de la cour suprême
en tant que telle pour statuer en matière administrative.
_______________________
1- L’article 9 de loi n 41/90 dispose « Par dérogation aux dispositions de l'article précèdent, la
Cour suprême demeure compétente pour statuer en premier et dernier ressort sur :
- les recours en annulation pour excès de pouvoir dirigés contre les actes réglementaires ou
individuels du Premier ministre ;
- les recours contre les décisions des autorités administratives dont le champ d'application
s'étend au-delà du ressort territorial d'un tribunal administratif. »

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Allant jusqu' au bout de cette logique ; ils en tirent une conséquence
fondamentale : toutes les chambres sont appelées à se prononcer sur
de tels litiges à l’exception de la chambre administrative.

Plus audacieux encore, la doctrine a dû considérer que les dispositions


de l’article 45 de la loi n 41/90 constituent la pierre angulaire d’une
organisation juridictionnelle entièrement nouvelle. En effet, les
rédacteurs de l’article en question ont manifestement et
volontairement mis l’accent sur une précision qui ne peut être passée
sous silence. Cette précision prouve de manière incontestée que le
législateur pose désormais une distinction trop nette entre la cour
suprême qui est juge de Droit et la chambre administrative qui est juge
de fond. Bref on y voit une vrai cour d’appel entièrement
indépendante et autonome.
Cette lecture entraine bien évidemment des conséquences
fondamentales ; premièrement l’interdiction implicite faite aux autres
chambres de se prononcer en appel. Inversement ; les dispositions
selon lesquelles que toute chambre peut valablement instruire et juger
quelque soit la nature des affaires soumises à la cour suprême
désormais ne s’imposent pas à la chambre administrative.
B – La deuxième étape : l’ avènement des cours d’appel administratives

Avec la création des cours d’appel administratives ; la Haute


juridiction a perdu sa compétence de juge d’appel.
Composée de 21 articles ; repartis en 7 chapitres ; la loi instituant les
cours d’appel administratives se présente comme le prolongement
logique et naturel de la loi instituant les tribunaux administratifs.

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1-Composition
Ces juridiction sont composées d’un Premier président ; de présidents
de chambres et de conseillers parmi lesquels le président désigne sur
proposition de l’assemblée générale pour une période de deux ans
renouvelables parmi les conseillers , un ou plusieurs commissaires
royaux de la loi et du droit1
Le rôle du commissaire royal est extrêmement important dans
l’élaboration des solutions données aux litiges. C’est lui qui de par la
loi ; et en toute indépendance ; expose à la formation de jugement ses
conclusions sur chaque affaire soumise à la cour.
Toute en reproduisant presque les mêmes termes de l’article deux de
la loi instituant les cours d’appel administratives , l’article 82 du projet
de loi n 38/15 de l’organisation judiciaire du royaume prévoit de créer
le poste de secrétaire général qui sera chargé d’assister le premier
président de la cour d’appel administrative dans l’administration
interne de la cour.

____________________________________________
1- L article deux de la loi n 80-03 du 4 février 2006 instituant les cours d’appel
administratives dispose « la cour d’appel administrative comprend :
-Un premier président ; des présidents de chambres et des conseillers.
- Un greffe
La cour d’appel administrative peut être divisée en chambres suivant la nature des affaires
dont elle est saisie.
Le premier président de la cour d appel administrative désigne sur proposition de l assemblée
générale , pour une période de deux ans renouvelables parmi les conseillers , un ou plusieurs
commissaires royaux de la loi et du droit »

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2-Le fonctionnement
Les cours d’ appel administratives statuent en matière administrative
en formation de jugement composée de trois conseillers . L’article
trois de la loi instituant les cours d’appel administratives dispose « les
audiences des cours d’appel administratives sont tenues et leurs
décisions sont rendues publiquement par trois conseillers dont un
président ; assisté d’un greffe »
Le commissaire royal à la loi et au droit doit obligatoirement assister à
l’audience au cours de laquelle il lui revient d’exposer en toute
indépendance les faits et le droit applicable au litige. Il peut
développer oralement ses conclusions dont les parties peuvent
demander communication ; en revanche il ne prend pas part à la
délibération de la formation du jugement .
L’assistance judiciaire peut être demandée au Premier président dans
les conditions prévues par le dahir portant loi du 1 novembre 1966
relatif à l’assistance judiciaire.
C’est le premier président de la Cour qui exerce le pouvoir de
récusation des magistrats dans les mêmes conditions que celles qui
sont prévues par le code de la procédure civiles au profit du premier
président des cours d’appels .
Remarques critiques  à propos de la carte judiciaire : la doctrine
s’accorde à dire que les deux cours d’appel administratives existantes
sont insuffisantes au regard des évolutions démographiques et des
enjeux économiques et sociaux du pays.

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Paragraphe 3 : La cour de cassation
C’est une juridiction qui se trouve au sommet de la hiérarchie
judiciaire et dont la création remonte au Dahir du 27 septembre 1975.
Avec la création des Cours d’appel administratives ; la haute
juridiction a perdu sa compétence de juge d’appel .En revanche ; elle a
désormais reçu pleine compétence de juge de cassation des décisions
rendues en dernier ressort par les juridictions administratives .
Elle est désormais juge de cassation pour l’ensemble des juridictions.
Un Dahir du 25 octobre 2011 portant promulgation vient de consacrer
la nouvelle dénomination : Cour de cassation.

A -Organisation de la cour de cassation

La composition de la cour suprême regroupe les trois éléments


habituels que l’on retrouve dans les autres juridictions :
- Les magistrats du siège : il s agit du premier président ; des
présidents de chambre et des conseillers.
- Le ministère public est représenté par le procureur général du
Roi ; qui est assisté par les avocats généraux.
- Comme les juridictions inférieures ; la Cour de cassation
comporte également un greffe et un secrétariat du parquet général.
Au niveau de la haute juridiction ; les magistrats sont spécialisés au
moins dans une certaine mesure.
L’article 91 du projet de loi n 15/38 prévoit la création de sept
chambres : une chambre civile ; une chambre de statut personnel et
successorale ; une chambre commerciale ; une chambre
administrative ;une chambre pénale ; une chambre sociale ;une
chambre foncière .

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Chacune de ces chambres peut être divisée en section.
La cour de cassation statue en formation de jugement constituée de
cinq magistrats.
B - Compétence de la cour de cassation

La cour de cassation exerce deux principales attributions :


- La cour de cassation statue en premier et dernier ressort sur les
recours en annulation pour excès de pouvoir dirigé contre les actes
règlementaires ou individuels du premier ministre ainsi que sur les
recours contre les décisions des autorités administratives dont le
champs d’application s’étend au delà du ressort territorial d’un
tribunal administratif - article 9 de la loi n 41/90
- La cour de cassation se prononce sur les pourvois en cassation
formés contre les décisions rendues en dernier ressort par toutes les
juridictions du Royaume.

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Section 2 : Corps et auxiliaires des juridictions administratives
Le fonctionnement des tribunaux administratifs dépend en grande
partie du corps des magistrats.
Dans l’exécution de leur mission, ces magistrats sont assistés par un
certain nombre d’auxiliaires tels que les gréffiers et les avocats.
Paragraphe 1 : Les magistrats
Au Maroc , les magistrats qui composent les juridictions
administratives sont soumis au même titre que les juges de l’ordre
judiciaire aux dispositions de la loi organique n 106-13 portant statut
des magistrats. il s’agit bien évidemment d’un statut dérogatoire de la
fonction publique . l’article 4 du statut général de la fonction publique
(24 février 1958) avance qu’ « il ne s’ applique pas aux magistrats , ni
aux militaires des Forces armées royales , ni au corps des
administrateurs du ministère de l’intérieur »
Il faut nécessairement savoir que le fait de doter les magistrats d’ un
statut spécial est justifié par la nature des fonctions qu’ils exercent ,et
par l’importance des dérogations que l’on désirait apporter à certains
principes contenus dans leur statut notamment le droit de gréve et le
droit syndical dont l’exercice leur est interdit.1
En principe, ce cadre statutaire est censé incorporer systématiquement
les dispositions régissant, les conditions du recrutement et de ses
modalités , les droits et les obligations professionnelles des
magistrats ; ainsi que les sanctions disciplinaires qui leurs sont
infligées etc…
_____________________
1- Rousset. (M) et Garagnon (J) , Droit administratif marocain, REMALD ; n 99 ; année 2017 ,
p 523.

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A - Le recrutement
Il sera question de traiter les conditions requises pour l’accès au corps
des magistrats des tribunaux administratifs ainsi que des modalités de
leur recrutement , telles qu’elles sont scrupuleusement fixées par
l’actuelle loi organique .
1– Les conditions du recrutement

Pour accéder au corps de la magistrature , il faut tout d’abord remplir


certaines conditions d’ordre général et satisfaire en plus à des
conditions particulières , bien déterminées par l’actuel statut de la
magistrature .
S’agissant des conditions d’ordre général , l’article 7 de la loi
organique n 106-13 dispose expressément « Pour accéder au corps de
la magistrature ; le candidat doit satisfaire aux conditions suivantes : «
- Être de nationalité marocaine ;
- Jouir de ses droits civiques et être de bonne moralité ;
- Ne pas être condamné en justice ou à une sanction disciplinaire
pour avoir commis des actes contraires à l’honneur , à la probité ou
aux bonnes mœurs, même s’il fait l’objet d’une réhabilitation ;
- Remplir les conditions d’aptitude physique exigées pour l’exercice
des fonctions judiciaires. »
Quant aux conditions particulières sont expressément consacrées par
l’article 8 de la même loi organique. celui-ci précise « Outre les
conditions générales prévues à l’article précédant, les candidats au
concours des attachés de justice doivent :

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- ne pas dépasser 45 ans d’age au1 janvier de l’année du concours ;
- être titulaire d’un diplôme universitaire dont la loi fixe la nature et
la durée nécessaire pour son obtention …. »
Les deux articles en question suscitent quelques remarques :
-La première : la décortication minutieuse de l’article 7 et 8 de cette
loi organique révèle que la configuration des conditions d’accès à la
magistrature proposées par le CNDH n’ont pas été entièrement
retenues par les initiateurs de la réforme. On citera à titre d’exemple :
• Le remplacement de l’appellation ‘’ attaché de justice ‘’ par celle
de ‘’ juge stagiaire ‘’
• La nécessité de remplir la condition liée à l’aptitude psychique
( le test psychotechnique) exigée pour l’exercice de la fonction ;
• Être âgé (e) de 24 ans révolus ;
• Le remplacement de l’exigence de bonne moralité par la
production d’un casier judiciaire vierge ;
• Être titulaire d’un Master en sciences juridiques1 ;

___________________________
1- Au plan du droit comparé ; certain pays arabes semblent être plus exigeant en la matière.
C’est le cas de l’Égypte.
D’après la loi égyptienne ; le candidat doit être titulaire de deux diplômes supérieurs, l’un
d’eux en sciences administratives ou en droit public. idem, pour être postulant au poste de
conseiller , il faut être âgé de 38 ans au minimum . (V , ANWAR. Mohamed « Le statut du
juge administratif au Maroc et en droit comparé » ,REMALD, n 80 ,Mai – juin ,p 230 .)

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-La deuxième : les conditions précitées s’imposent comme des
critères standardisée et rigides et ne semblent pas en mesure de fournir
une marge de manœuvre pour sélectionner1 les meilleurs profils .
On est loin de formaliser des critères de sélection flexibles s’appuyant
sur une logique managériale fondée sur la fameuse dualité : Missions /
profil. 2
La troisième : les dispositions citées ci-avant semblent également ne
trouver aucune application concrète puisque l’article 117 de la loi
organique n 106-13 prévoit que « Demeurent en vigueur, de manière
transitoire, les dispositions des articles 4 à 12 du dahir précité et les
textes réglementaires pris pour l’application desdits articles jusqu’à
l'entrée en vigueur de la loi relative à l organisation et au
fonctionnement de l’établissement de formation des magistrats »

___________________________
1-La sélection est une étape parmi d’autres au sein du processus d’ingénierie de recrutement.il
s’agit de huit étapes :1- la définition du poste -2 la définition du profil titulaire -3
l’idetification des roucrces de recrutement 4- la mise en place des moyens de recrutement 5-
la compagne de recrutement. 6- la selection des candidatures 7-la decision d’embauche 8-
l’integration ( v , Aallali Rachida , « le recrutement dans l’administration publique marocaine
permet-il d’acquérir des compétences distinctives ? »,REMALD ,n 142 ,septembre –octobre
2018,p 46 .)

2-

‫ المجلة المغربية لالدارة‬،‫ القضاة‬:‫ تامالت حول بعض جوانب التاهيل الموارد البشرية بالمجال القضائي‬، ‫باهي محمد‬
2012 ‫ اكتوبر‬-‫ بوليوز‬106-105 ‫ المحلية و التنمية‬-

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Cela signifie que se sont inéluctablement les dispositions de l’article
41 de l’ancien dahir du 13 novembre 1974 qui demeurent applicables
en ce qui concerne la détermination des conditions d’accès à ce corps.
ainsi que les dispositions de l’article premier du décret du 21 avril
2006 fixant l’age maximum ( 30 ans) de recrutement et imposant que
le candidat ne peut se présenter au concours d’accès à la magistrature
plus de deux fois .
Enfin, il ne faut pas omettre bien évidemment les dispositions de
l’article trois du même décret.
2 – Les modalités de recrutement
La lecture des articles 8, 9 , et 10 de la loi organique n 106-13 permet
de relever aisément un recrutement qui se déroule selon les modalités
suivantes :
1- Un recrutement suite à un examen d’attitude ;
2- Un recrutement suite à un concours ;
3- Un recrutement direct ou sans concours ;
_______________________
1 -L’article 4 de la loi du 11 novembre 1974 formant statut de la magistrature
dispose « Nul ne peut être nommé attaché de justice :
1° S’il ne possède la nationalité marocaine, sous réserve des incapacités prévues
par le code de la nationalité marocaine ;
2° S’il ne jouit de ses droits civiques et s’il n’est de bonne moralité ;
3° S’il ne remplit les conditions d’aptitude physique exigées pour l’exercice de
la fonction ;
4° S’il n’est âgé de vingt et un ans révolus ;
5° S’il ne se trouve en position régulière au regard des lois relatives au service
militaire et au service civil. »

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2-1-Le recrutement suite à un examen d’attitude
Pour cette première voie de recrutement, les candidats sont invités à
passer un concours d’admission comprenant huit compositions.
l’article 6 du décret n 2-05- 178 du 21avril 2006 prévoit quatre
compositions écrites et quatre compositions orales .
L’épreuve écrite :

Le contenue et l’étendue de l’épreuve écrite sont consacrés à titre


transitoire par les dispositions de l’article 7 du décret n 2-05- 178 du
21avril 2006.celui-ci retient une épreuve écrite comportant
successivement :
1-Une composition, portant sur les aspects sociaux, juridiques,
politiques ; économiques et culturels du monde actuel ( le candidat
dispose de 3 heures ) ;
2- Une consultation juridique ou dissertation juridique- ‫قانونية‬- ‫دراسة‬
(4heurs) ,
4- Une consultation ou dissertation juridique- ‫ قانونية دراسة‬-portant sur
l’une des matières suivantes : le recours en annulation , le contentieux
fiscal , les sources du droit administratif et de ses domaines
d’application .
Les épreuves orales :

Les épreuves orales d’admission sont encadrées à titre transitoire par


les dispositions de l’article 13 du décret n 2-05- 178 du 21avril 2006.
Celui-ci prévoit des épreuves comportant :
1 - Une conversation avec le jury sur un sujet se rapportant aux
aspects sociaux , juridiques, économiques et culturels du monde actuel
(le candidat dispose de 30mn pour la préparation de cette épreuve) ;

23
2- Une interrogation portant sur le droit judiciaire privé et la procédure
pénale ;
3- Une interrogation portant sur l’une des matières suivantes :
l’expropriation, le droit de l’urbanisme ; les contrats administratifs, les
marchés publics , la responsabilité administrative ;
4- Discussion portant sur deux textes l’un en arabe , l’autre porte sur
une langue vivante selon le choix du candidat (français, anglais,
espagnol) ;
Le candidat ayant satisfait aux épreuves du concours est nommé
attaché de justice. Il effectue en cette qualité un stage de formation
initial de deux années reparties entre l'ISM , les juridictions du
royaume et les différentes administrations publiques .
A l’issue de ce stage, l’intégration de l’attaché de justice dans le corps
de la magistrature est soumise à un examen de fin de formation. Cet
examen prévu à l’article 19 du 21avril 2006 comporte deux types
d’épreuves :
- Des épreuves écrites ( article 20) comportant :
1- Une composition écrite consistant en la rédaction d’un jugement
portant sur une affaire relevant du droit civil ou commercial.
2- Une composition écrite consistant en la rédaction d’un jugement
relevant du contentieux de l’annulation et du contentieux fiscal.
3- La traduction d’un jugement du français (anglais, espagnol) à
l’arabe.

24
-Des épreuves orales ( article 21) comportant :
1- Une interrogation portant sur la procédure civile ;
2- Une interrogation portant sur le droit d’expropriation et le droit
de l’urbanisme ou bien sur les contrats et les marchés publics, ou
encore sur la responsabilité administrative.
Au terme de cet examen, les attachés de justice sont :
- soit déclarés aptes aux fonctions judiciaires et seront donc
nommés par le CSPJ et confirmés ensuite dans leur nomination par
Dahir , en application des disposions de l’article 67 et 68 de la loi
organique n 100-13 relative au conseil supérieur du pouvoir judiciaire
( 24 mars 2016)
- Soit écartés de l’accès aux fonctions judiciaires en application
des dispositions de l’article 13 de la loi n 106-13, aux termes duquel
les attachés de justice ne satisfaisant pas aux conditions de nomination
aux fonctions de magistrats feront l’objet d’un licenciement.
2-2-Le recrutement sur concours
Ce deuxième mode de recrutement est consolidé par les dispositions
de l’article 9 de la loi organique n 106-13. Celui-ci dispose « Peuvent
être nommés magistrats dans le corps de la magistrature, après avoir
satisfait aux épreuves d’un concours, les candidats appartenant à
certaines catégories de professionnels et de fonctionnaires , ne
dépassant pas cinquante-cinq (55) ans au moment de la présentation
de la demande , et ayant exercé leurs professions ou leurs fonctions de
manière effective pendant une période de 10 années au moins .
Une loi fixe les catégories des professionnels et des fonctionnaires
habilités à passer le concours ainsi que la nature des diplômes
universitaires requis. »

25
L’article 13 de la loi organique n 106-13 prévoit également que les
attachées de justice ne satisfaisant pas aux conditions de nomination
aux fonctions de magistrats sont remis à la disposition de leur
administration d’origine .
2-3- Le recrutement direct ou sans concours
Le législateur a mis en place une nouvelle voie de recrutement
trouvant sa consécration solennelle dans les dispositions de l’article 10
de la loi organique de l’actuel statut de la magistrature. L’article en
question dispose « sont dispensés du concours les candidats titulaires
du doctorat d’Etat en droit ou dans la Charia ou d’un doctorat en droit
ou dans la Charia ou d’un diplôme reconnu équivalent conformément
à la réglementation en vigueur, dont l’age ne dépasse pas cinquante-
cinq (55) ans au moment de la présentation de la demande et
appartenant aux catégories des professionnels et des fonctionnaires
suivantes :
- Les enseignants chercheurs ayant exercé la profession
d’enseignement universitaire dans l’une des branches de droit pendant
une période de dix ans au moins ;
- Les avocats ayant exercé leur profession de manière effective
pendant une période de dix (10) ans au moins ;
- Les fonctionnaires du greffe appartenant au moins à un grade
classé à l’échelle n 11 ayant exercé effectivement les fonctions de
greffier pendant une période de dix (10) années au moins ;

26
- Les fonctionnaires des administrations appartenant aux moins à un
grade classé à l’échelle n 11 ayant au moins dix (10) années de service
public effectif dans le domaine des affaires juridiques . »
Les rédacteurs de la loi organique n 106-13 ne semblent pas très séduit
par les propositions avancées par le CNDH .
Cette institution avait déjà auparavant proposé de retenir le concours
comme seul et unique voie d’accès au corps de la magistrature.
Effectivement, le concours a le mérite de désigner les meilleurs
candidats, choisis parmi un trop petit nombre de tous ceux qui se sont
présentés au concours. Il signifie la sélection sans discrimination, ni
favoritisme des candidats 1.
A l’opposé, nombre de critiques sont larguées à l’encontre du
recrutement direct. Ce dernier est réputé avoir déjà été jugé contraire à
la constitution. La doctrine2 invoque souvent un grief déterminant : Le
recours au recrutement direct est une pratique jugée discriminatoire et
doit être regardé comme contraire à la constitution (2011) laquelle
garantie le principe d’égalité devant la loi3 impliquant l’égalité des
____________________________
1- SNOUSSI .(B) , Droit de la fonction publique de l’Etat et des collectivités locales ,Ed
2004, p 88 .
2-
‫ المجلة المغربية لالدارة المحلية و التنمية‬، ‫ اليات التوظيف في االدارة العمومية و سؤال النجاعة و الفعالية‬،‫ الحسين‬.‫الرامي‬
180 ‫ ص‬،2012 ‫ اكتوبر‬- 106-105 ‫ يوليوزعدد‬،.

3-L’article 6 de la constitution de 2011 dispose « - La loi est l’expression suprême de la


volonté de la Nation. Tous, personnes physiques ou morales, y compris les pouvoirs publics,
sont égaux devant elle et tenus de s’y soumettre….»

27
chances .et imposant à l’État d’œuvrer à la mobilisation de tous les
moyens disponibles pour faciliter l’égal accès des citoyennes et des
citoyens aux conditions leur permettant de jouir du droit à l’accès aux
fonctions publiques selon le mérite 1 .

__________________________________________

1-L’article 31 de la constitution de 2011 dispose « ’Etat, les établissements


publics et les collectivités territoriales œuvrent à la mobilisation de tous les
moyens disponibles pour faciliter l’égal accès des citoyennes et des citoyens aux
conditions leur permettant de jouir du droit :………………..

-à l’accès aux fonctions publiques selon le mérite; »

28
B -Droits , garanties et devoirs des Magistrats
Quand, on passe en revue l’arsenal juridique qu’il s’agit de la
constitution de 2011 , ou encore des deux lois organiques ,on
s’aperçoit qu’il a été accordé une intention particulière aux droits et
devoirs des Magistrats .
1 - Droits et garanties des Magistrats
Il est reconnu aux Magistrats dans la constitution de 2011 , ainsi que
dans les deux lois organiques , tout un ensemble de droits et garanties
propres permettant de conforter et promouvoir leur indépendance 1.
- Les dispositions de la Constitution de 2011 :
On peut citer :
- Article 107 : « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir
législatif et du pouvoir exécutif. Le Roi est le garant de l'indépendance
du pouvoir judiciaire. »
- Article 108. : « Les magistrats du siège sont inamovibles »
- Article 109 : « Est proscrite toute intervention dans les affaires
soumises à la justice. Dans sa fonction judiciaire, le juge ne saurait
recevoir d'injonction ouinstruction, ni être soumis à une quelconque
pression…. »

___________________________
1- La doctrine a fait remarquer que le fait que le législateur constituant emploie le vocable «
pouvoir » au lieu de celui de « l’autorité » utilisée antérieurement , il tendait par là à donné à
ce principe toute sa signification . ( v , Amine Benabdellah. (M), « l’indépendance du pouvoir
judiciaire dans la constitution marocaine » ,REMALD, n 143, novembre-décembre 2018 ,p
11 . )

29
……...La loi sanctionne toute personne qui tente d'influencer le juge
de manière illicite. »
- Article 111 :« Les magistrats jouissent de la liberté d'expression,
en compatibilité avec leur devoir de réserve et l'éthique judiciaire. Ils
peuvent appartenir à des associations ou créer des associations
professionnelles, dans le respect des devoirs d'impartialité et
d'indépendance et dans les conditions prévues par la loi. Ils ne peuvent
adhérer à des partis politiques ou à des organisations
syndicales.Article 112.Le statut des magistrats est fixé par une loi
organique »
- Article 112 : « Le statut des magistrats est fixé par une loi
organique. »
- Article 113 :« Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire veille à
l'application des garanties accordées aux magistrats, notamment quant
à leur indépendance »
- Article 114 : « Les décisions individuelles du Conseil supérieur
du pouvoir judiciaire sont susceptibles de recours pour excès de
pouvoir devant la plus haute juridiction administrative du Royaume »
- Article 111 « Les magistrats jouissent de la liberté d'expression,
en compatibilité avec leur devoir de réserve et l'éthique judiciaire. Ils
peuvent appartenir à des associations ou créer des associations
professionnelles, dans le respect des devoirs d'impartialité et
d'indépendance et dans les conditions prévues par la loi. »1
______________________________
1- La doctrine rappelle que l’article en question accorde ce droit uniquement aux Magistrats .
L’acceptation des attachées de justice entant que membres constitue une violation de l’ordre
public constitutionnel pouvant entrainer la dissolution de l’association professionnel par le
juge conformément aux dispositions de l’article 7 du dahir de 1958 relative aux associations .

111 ‫ حق القضاة في حرية التعبير و في انشاء الجمعيات المهنية في ضوء الفصل‬، )‫االستاد سعيد بناني ( القاضي الشرفي‬
49 ‫ ص‬،2018 ‫ دجنبر‬-‫ نونبر‬143 ‫ عدد‬، ‫ المجلة المغربية لالدارة المحلية و التنمية‬، ‫من الدستوور‬

30
- Article 115 : « .Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire est
présidé par le Roi. Il se compose :
- du Premier-président de la Cour de Cassation en qualité de
Président-délégué ;
- du Procureur général du Roi près la Cour de Cassation ;
- du Président de la Première Chambre de la Cour de Cassation ;
- de4 représentants élus, parmi eux, par les magistrats des cours
d'appel ;
- de 6 représentants élus, parmi eux, par les magistrats des juridictions
du premier degré, une représentation des femmes magistrats doit être
assurée, parmi les dix membres élus, dans la proportion de leur
présence dans le corps de la magistrature ;
- du Médiateur ;
- du Président du Conseil national des droits de l'Homme ;
- de 5 personnalités nommées par le Roi, reconnues pour leur
compétence, leur impartialité et leur probité, ainsi que pour leur apport
distingué en faveur de l'indépendance de la justice et de la primauté du
droit, dont un membre est proposé par le Secrétaire général du Conseil
Supérieur des Oulémas.
Les dispositions du statut de la magistrature (la loi organique n
106/13)
Les garanties consacrées par la constitution de 2011 ont trouvé un très
large écho dans l’actuelle loi organique n 106-13. Il s’agit des
dispositions suivantes :
- Article 37 : « En application de l'alinéa premier de l'article 111
de la Constitution, les magistrats jouissent de la liberté d'expression,
…. »

- Article 38 : « En application des dispositions de l'alinéa premier


de l'article 12 et de l'alinéa 2 de l'article 111 de la Constitution,les
magistrats, nommés conformément aux dispositions de l'article 68 de
la loi organique relative au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire,

31
peuvent adhérer à des associations légalement créées et poursuivant
des objectifs licites ou créer des associations professionnelles,… »
La doctrine souligne ici ,qu’il faut transcrire les limites
- Article 39 : « Les magistrats bénéficient, conformément aux
dispositions du Code pénal et des lois particulières en vigueur, de la
protection de l'Etat contre les menaces, attaques, outrages.injures,
diffamations ou toutes agressions, quelle qu'en soit la nature, dont ils
peuvent faire l'objet pendant ou à l'occasion de l'exercice de leurs
fonctions.
L'Etat leur assure la réparation des préjudices corporels auxquels ils
sont susceptibles d’être exposés pendant ou à
- l'occasion de l'exercice de leurs fonctions et non couverts par la
législation sur les pensions d'invalidité et le capital décès.
Dans ce cas, I'Etat est subrogé dans les droits et les actions de la
victime contre l'auteur du dommage. »
- Article 48 « En application des dispositions de l'article 109 de la
Constitution, le juge ne saurait, dans sa fonction judiciaire. recevoir
d'injonction ou instruction, ni être soumis à une quelconque pression.
Chaque fois quil estime que son indépendance est menacée, le juge
doit en saisir le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire conformément
aux dispositions de la loi organique relative à ce dernier »
- Article 73 « Le magistrat peut faire L’objet d'une mutation.
conformément aux critères prévus par la loi organique
relative au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, dans le
cas suivants:
- sur sa demande:
- à la suite d'un avancement de grade;
en cas de création ou de suppression d'une juridiction

32
en cas de vacance d'un poste judiciaire ou en vue de combler un
manque d'effectifs. »
-Les dispositions de la loi organique relative au pouvoir judiciaire
( la loi organique n 100-13)
Il s’agit de :
- Article 74 : « Les décisions de refus de rectification de la liste
d’aptitude à l’avancement prise par le conseil est susceptible de
recours devant la chambre administrative de la Cour de cassation dans
un délai de sept jours à compter de la date sa notification…. »
- Article 78 : « Les magistrats ne peuvent être déléguée que
conformément aux conditions et critères prévues par les disposions de
la loi organique portant statut des magistrats.le conseil statue dans un
délai de quinze (15) jours, en tenant compte de l’intervalle entre les
sessions du Conseil sur les doléances qui lui sont adressées par les
magistrats délégués conformément aux dispositions de la loi
organique portant statut des magistrats »1
- Article 111 : « En application des dispositions de l’article 114 de
la constitution, les décisions du conseil relatives aux situations
individuelles sont susceptible de recours pour excès de pouvoir devant
la chambre administrative de la cour de cassation. »
_________________________________
1-La doctrine considère qu’il s’agit d’une réforme à saluer tout en avançant que ‘’ le droit de
mutation des magistrats accordé au pouvoir exécutif (ministre de la justice) pourrait amener
ce dernier à modifier à son gré la composition des juridictions à travers des permutations de
magistrats entre juridiction pour jugé un procès déterminé et viderait le principe de
inamovibilité de toute consistance’’ ( MAMOUNI . I , le Conseil du pouvoir judiciaire :
quelle réforme pour un pouvoir judiciaire indépendant », REMALD, n143, p 31 ) .

33
2 – Devoirs incombant aux Magistrats
Les magistrats des tribunaux administratifs sont assujettis à un certain
ensemble de devoirs trouvant leur consécration expresse dans les
textes précités.
L’article 96 de la loi organique n100-13 relative au Conseil Supérieur
Pouvoir Judiciaire prévoit que « tout manquement par un magistrat à
ses devoirs professionnels ; à l’honneur, à l’honorabilité ou à la
dignité constitue une faute susceptible de faire l’objet d’une sanction
disciplinaire »

- Les dispositions de la Constitution de 2011 :


On peut citer :

- Article 10 : « .Tout manquement de la part du juge à ses devoirs


d'indépendance et d'impartialité, constitue une faute professionnelle
grave, sans préjudice des conséquences judiciaires éventuelles…. »

- Article 110 : « .Les magistrats du siège ne sont astreints qu'à la


seule application du droit. Les décisions de justice sont rendues sur le
seul fondement de l'application impartiale de la loi…. »

- Article 111 : « Ils ne peuvent adhérer à des partis politiques ou


à des organisations syndicales. »

- Article 117 : « .Le juge est en charge de la protection des droits


et libertés et de la sécurité judiciaire des personnes et des groupes,
ainsi que de l'application de la loi »

34
-Les dispositions du statut des Magistrats (la loi organique n 106/13)
Prolongement naturel de la constitution de 2011 , l’actuelle loi
organique n 106-13 du statut des magistrats a le mérite de prévoir les
obligations suivantes :
- Article 37 : « …..devoir de réserve et l'éthique judiciaire, y
compris la préservation de la réputation, du prestige et de
l'indépendance de la justice. »
- Article 38 : « ….il est interdit au magistrat de créer une
association non professionnelle ou de la diriger de quelque manière
que ce soit. »
- Article 40 : « Tout magistrat doit prêter, lors de sa première
affectation dans le corps de la magistrature et avant d'entrer en
fonction, un serment en ces termes « Je jure devant Dieu le Tout
Puissant d'exercer mes fonctions en toute impartialité, loyauté et
dévouement et préserver les qualités d'honorabilité et de dignité, et le
secret des délibérations afin de préserver le prestige et l'indépendance
de la magistrature, et de m'engager à l'application impartiale de la loi
et de me conduire en tout comme un magistrat intègre.
Le serment est prêté devant la Cour de cassation lors d'une audience
solennelle.
Un procès-verbal de prestation de serment est établi et adressé au
secrétariat général du Conseil, dont un exemplaire est transmis à la
juridiction où le magistrat est nommé ainsi qu'au ministère chargé de
la justice.
Tout manquement aux engagements figurant au serment est considéré
comme un manquement aux devoirs professionnels. »

35
- Article 41 : « En application des dispositions de l'article 17 de
la Constitution, tout juge doit veiller. lors de l'exercice de ses
fonctions judiciaires, à la protection des droits et libertés des
personnes et des groupes, et de leur sécurité judiciaire, ainsi qu'à
l'application de la loi. »

- Article 42 : « Conformément aux dispositions de l’alinéa


premier de l'article 110 de la Constitution. les magistrats du siège ne
sont
astreints qu'à la seule application de la loi. Les décisions de
justice sont rendues sur le seul fondement de l'application
impartiale de la loi. »

- Article 44 : « Le magistrat s'engage à respecter les principes et


règles énoncés dans le code de déontologie judiciaire. Il veille
également au respect et à la préservation des coutumes et usages de la
magistrature. I lui est interdit de porter la robe en dehors des salles
d'audiences. »1

- Article 45 « En application des dispositions du premier alinéa de


l'article 120 de la Constitution, le magistrat veille à statuer sur les
affaires qui lui sont soumises dans un délai raisonnable, sous réserve
des délais fixés par des textes particuliers. »

________________________
1-La circulaire n 845 du 16 mars 1979 a incité les Magistrats du Royaume à prendre soin de
leurs robes et tenues, c’est à dire de leur apparance.
Il est signalé :
''"‫ان البدلة هي عنوان مهنة القضاء وأن مرتديها يمثل مباشرة صاحب الجاللة نصره هللا في النطق باالحكام او تمتيل‬
‫ معه أن تلبس هذه البذلة بأناقة وأن تكون في منته‬z‫جاللته في النيابة عن الحق العام الشيء الذي يتعين‬
‫ وفي كل األحوال يجب أن تليس فوق قميص‬. . .‫ فال يسوغ مطلقا ترکها مفتوحة من العنق‬،‫النظافة واللباقة‬
‫"وربطة عنق‬
(111 ‫االستاد سعيد بناني ( القاضي الشرفي) حق القضاة في حرية التعبير و في انشاء الجمعيات المهنية في ضوء الفصل‬
44‫ ص‬2018 ‫ دجنبر‬-‫ نونبر‬143 ‫) من الدستوور المجلة المغربية لالدارة المحلية و التنمية عدد‬

36
- Article 46 « En application des dispositions du dernier alinéa de
l'article 111 de la Constitution.. les magistrats ne peuvent adhérer à
des partis politiques ou à des organisations syndicales
Ils leur est également interdit de mener toute action individuelle ou
collective de nature à arrêter ou entraver la tenue des audiences ou le
fonctionnement normal des juridictions. »
- Article 47 : « Les magistrats ne peuvent exercer en dehors de
leurs fonctions, même à titre occasionnel, une activité professionnelle,
rémunérée ou non, de quelque nature que ce soit. Des dérogations
individuelles peuvent toutefois être accordées par décision du
Président-délégué du Conseil pour les besoins de l'enseignement ou de
la recherche scientifique ou pour effectuer des missions dont ils sont
chargés par l'Etat.
Cette interdiction ne s'étend pas à la production d’œuvres littéraires,
scientifiques ou artistiques. Toutefois les auteurs ne peuvent
mentionner leur qualité de magistrat que
sur autorisation du Président-délégué du Conseil. Le magistrat peut
participer à des activités et des conférences scientifiques, sans
toutefois que cela n'affecte son
rendement professionnel, sous réserve des dispositions des articles 37
et 44 ci-dessus. Les avis exprimés par le magistrat concerné à
l'occasion de cette participation sont des avis personnels et ne reflètent
en aucun cas l'avis d'une quelconque instance officielle, sauf s il en est
autorisée. »
- Article 49 : « Il est interdit à tout magistrat d'émettre son avis
sur une affaire soumise à la justice. »
- Article 52 : « Le magistrat est astreint à résider dans le ressort de
la cour d'appel ou il exerce ses fonctions.Une autorisation de résidence
hors dudit ressort peut toutefois être accordée par le Président-delégué
du Conseil sur la base d'une demande motivée du magistrat concerné.
»

37
C- La procédure disciplinaire à l’égard des juges administratifs
La procédure disciplinaire fait l’objet à de nombreuses dispositions
qui encadrent la compétence du Conseil en ce domaine. Ainsi en vertu
du la loi organique 106-13 portant statut des magistrats, le conseil est
compétent pour statuer sur les manquements susceptibles d'être
imputés au magistrat. La poursuite disciplinaire ne peut avoir lieu
qu'après qu'il ait été procédé aux enquêtes et investigations
nécessaires.
Aussi, conformément aux dispositions de l'article 116 de la
constitution, le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire est assisté, en
matière disciplinaire, par des magistrats-inspecteurs expérimentés,
Le Président-Délégué du Conseil soumet les résultats des
investigations et enquêtes établis au conseil qui décide, en
conséquence, soit le classement, soit la désignation d'un magistrat
rapporteur dont le grade est supérieur ou équivalent à celui du
magistrat concerné, en tenant compte de l'ancienneté dans le corps de
la magistrature.
Aussi aux termes de 88 de la loi organique n106-13 « Une notification
est obligatoirement faite au magistrat concerné sur les manquements
qui lui sont imputé ainsi que sur le nom du magistrat rapporteur
chargé de son affaire qu’il est en droit de récuser devant le conseil »
L’article 89 de la loi n 106-13 précise que le magistrat rapporteur
convoque le magistrat concerné pour son audition . cette procédure
est entourée de toute les garanties nécessaires.
Le magistrat rapporteur établi à l’issue de cette étape un rapport
détaillé, à l’attention du conseil qui décide le classement de l’affaire
ou le déférément du magistrat concerné devant le conseil lorsqu’il
constate que les faits qui lui sont imputés sont sérieux ( article 90)

38
Aussi , aux termes de l’article 91 de la loi organique n 100-13 relative
au pouvoir judiciaire « le magistrat concerné est avisé de la décision
prise. »
Certes, la doctrine avance que l’apport le plus emblématique de la loi
organique relative au CSPJ est que les décisions du conseil sont
susceptibles de recours pour excès de pouvoir devant la chambre
administrative de la cour de cassation. Mais il n’en demeure pas
moins que cette disposition soulève des critiques concernant l’organe
judiciaire compétent pour examiner ce recours. Rien n’empêche le
Président-délégué du Conseil qui n’est rien autre que le Premier
Président de la cour de Cassation de présider la chambre
administrative pour se prononcer sur la légalité des décisions émanant
du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire1 .
Paragraphe 2 : Le greffe
Les greffiers des juridictions administratives sont des fonctionnaires
relevant du ministère de la Justice, recrutés par concours. Ils sont
divisés en deux corps: les greffiers et les greffiers en chef.
Les greffiers sont investis de nombreuses fonctions. Ainsi Outre la
fonction d’encadrement des agents d’exécution, les greffiers sont
responsables du bon déroulement de la procédure et de l’authenticité
des actes établis par les magistrats. À ce titre, ils procédent à la
notification des requêtes et conclusions et des convocations aux
audiances ; ils informent les parties, contrôlent l’écoulement des
délais, dressent les procès-verbaux, rédigent certaines décisions et
s’assurent du respect par le juge du formalisme des actes
juridictionnels. Leur présence est obligatoire à l’audience, de même
que leur signature l’est sur les décisions juridictionnelles du juge.
_____________________________
1- AJAOUN .(A) « le pouvoir judiciaire dans la constitution marocaine de 2011 »,REMALD
144-145 , 2019 .p 85.
‫ منشور بالمجلة المغربية‬، ‫ واقع االدوار المنوطة بالغرفة االدارية بمحكمة النقض و سؤال التحديث‬،‫عبد الرزاق االزهري‬
73 ‫ ص‬،10 ‫ عدد الخاص رقم‬،‫لالنظمة القانونية و السياسية‬

39
Chapitre 2 : la compétence des juridictions administratives

La compétence des juridictions administratives englobe :


- La compétence à raison de la matière ;
- La compétence à raison du lieu ;
Section 1 : la compétence à raison de la matière
Deux volontés interviennent dans la détermination du champ de
compétence des juridictions administratives .
Il y a d’une part, la volonté du législateur. celui- ci peut intervenir
pour fixer la compétence qui sera accordée à ces juridictions .on parle
alors de la compétence par détermination de la loi .
De l’autre part, il y a celle du juge administratif qui peut via des
critères jurisprudentiels et sans l’aval du législateur contribuer au
développement de son de champ de compétence .
Paragraphe 1 : la compétence matérielle à l’initiative du législateur
Cette compétence est fixée en principe par l’article 8 de la loi n41/90
instituant les tribunaux administratifs et complétée par un arsenal de
textes juridiques attestant d’une évolution tendant à favoriser
l’extension de la compétence du juge administratif.
A- L’article 8 de la loi n 41/90 fixe le bloc de compétence attribué
aux juridictions administratives
Au Maroc, c'est effectivement l'article 8 de la loi n 41/90 instituant les
tribunaux administratifs qui détermine la compétence des tribunaux
administratifs marocains .

40
L'énumération énoncée par l'article 81 nous révèle que en dépit, des
efforts fournis en la matière, le bloc de compétence tel qu'il est
développé demeure incomplet . Ainsi on peut relever d'une part
l'existence d'une catégorie de contentieux insuffisamment développée,
de l'autre une catégorie de contentieux qui a été purement et
simplement marginalisée.
1- La catégorie d’attributions marginalisées
Cette catégorie comprend : le contentieux de la répression ,les
attributions non contentieuses, et celui de l’interprétation .
1-1-Le contentieux de la répression
La répression administrative fait partie des attributions de
l'administration. Cependant pour que les droits de l'individu ne soient
pas mis en danger, certains pays ont considéré qu’il serait opportun de
confier une partie de la fonction répressive au juge administratif . Une
solution qui semble malheureusement échapper aux rédacteurs de la
loi instituant les tribunaux administratifs .
_________________________
- L’article 8 de la loi n 41/90 dispose « les tribunaux administratifs sont compétents, sous
réserve des dispositions des articles 9 et 11 ci-après, pour juger en premier ressort, les
recours en annulation pour excès de pouvoir formé contre les décisions des autorités
administratives . les litiges relatifs aux contrats administratifs et les actions en réparation des
dommages causés par les actes ou les activités des personnes publiques, à l'exclusion toutefois
de ceux causés sur la voie publique par un véhicule quelconque appartenant à une personne
publique. Les tribunaux administratifs sont également compétents pour connaître des litiges
nés à l'occasion de l'application de la législation et de la réglementation des pensions et du
capital- décès des agents de l'État, des collectivités locales, des établissements publics et du
personnel de l'administration de la chambre des représentants, de la législation et de la
réglementation en matière électorale et fiscale, du droit des fonctionnaires et des agents de
l’État, des collectivités locales et des établissements publics , le tout dans les conditions
prévues par la présente loi. L'expropriation pour cause d'utilité publique, des actions
contentieuses relatives aux recouvrements des créances du trésor, des litiges relatifs à la
situation individuelle des fonctionnaires et agents de l'État, des collectivités locales et des
établissements publics...Ils sont en outre, compétents pour l'appréciation de la légalité des
actes administratifs dans les conditions prévues …. »

41
-1-1-1-La consécration juridique du contentieux de la répression en
droit comparé
En droit comparé , deux modèles nous semblent édifiants en la matière
. Il s’agit du modéle Français, et celui de l’Égypte.
-Le cas français
Sous la révolution, ce contentieux répressif fut attribué aux tribunaux
judiciaires ; mais le résultat de ce transfert fut si désastreux que les
lois du 28 pluvieuse an 8 et 29 floréal an 10 donnèrent compétence
aux conseils de préfecture pour connaître des contraventions de grande
voirie. Cependant, les atteintes mineures aux voies publiques dites «
petite voirie » relevaient du juge répressif judiciaire quí connaissait
également des infractions commises à propos de la circulation sur les
voies publiques1 .
Mais, cette délicate distinction fut l'objet de critiques par la Doctrine 2
le décret loi du 28 décembre s'est débarrassé de cette distinction , ainsi
la compétence du juge administratif en matière du contentieux de la
répression3 relative :
- Au domaine fluvial : il s'agit notamment des infractions qui
concernent les hypothèses suivantes : occupation sans titre, prises
d'eau non autorisées .
-Contraventions au domaine maritime : extraction du sable sans
autorisation, dommages causés par des navires dans les ports,
infractions à la police des ports, etc.
-Contraventions relatives au domaine terrestre : contraventions des
chemins de fer , chute d'arbres, travaux irréguliers, violation des
servitudes .
____________________________

1- AUBY.(J).(M) , BONNE (P),Droit administratif des biens , Dalloz .p l56 .


2- GAUDEMET (Y), VENICIA (C) , Droit Administratif , p 167.
3-LAUBADERE (A) et autres ; traité du Droit administratif, Éditeur LGDJ , p 160 .

42
S'agissant du juge judiciaire celui-ci connaît : des atteintes aux lignes
de télécommunication , ainsi que des atteintes aux monuments d'utilité
publique et les atteintes à l'intégrité des voies publiques .
Le cas égyptien
La répression disciplinaire est le pouvoir qui appartient aux chefs
hiérarchiques ou (aux juges administratifs) d’infliger des sanctions
disciplinaires aux fonctionnaires lorsque ceux-ci ont commis des
fautes dans l’exercice de leur fonction .
En droit positif Égyptien, c’est les tribunaux disciplinaires régis par la
loi n 47 de 1972 relative à l’organisation du Conseil d’État sont les
seuls qui peuvent prendre la décision de la mise à la retraite ou de la
révocation du fonctionnaire .
Par ailleurs ; le législateur n'a pas laissé à la seule autorité
administrative le droit d'agir en ce qui concerne l'instruction
disciplinaire du fonctionnaire ; craignant un manque d'impartialité et
non respect des garanties de l'instruction et de ses formalités. Il confie
le rôle principal de l'instruction au parquet administratif ainsi :
1) en vertu de l'article 3 de la loi n 117/1958 le parquet administratif
instruit les infractions financières et administratives à la suite d'une
dénonciation de l'organe compétent ou l'un des organismes de
contrôle.
2) en vertu de l'article 3 de la loi n117/1958 ; le parquet administratif
est chargé d'examiner les plaintes portées par des individus au sujet de
violations de la loi
3) en vertu de l'article 4 de la loi nl17/1958 le parquet administratif
intente et exerce l'action disciplinaire par devant les cours
disciplinaires compétentes.

43
-1-1-2-L’attribution du contentieux de la répression au juge
administratif marocain : une nécessité urgente

Il est clair qu’en cette matière le législateur Marocain est invité à


attribuer la conservation répressive du Domaine public ; et plus
précisément celles qui se rapportent aux contraventions de grande
voirie au juge administratif.
L'étirement des compétences du juge administratif en ce domaine est
indispensable à plus d'un titre.
À la différence du juge administratif , l'administration est peu
respectueuse du principe dit de proportionnalité ; les montants de
réparations infligés sont souvent exorbitants par rapport aux
dommages causés 1 .
Aussi, cette pratique s'oppose au principe de " l 'impossibilité d’être
cumulativement juge est partie" impliquant une distinction trop nette
entre les fonctions de la poursuite et du jugement 2. A cet egard
l’experience francaise est très significative .ainsi en matière de
contravention de grande voirie, le rôle du Ministère public est tenu par
le préfet qui transmet le dossier de l'affaire et le procès verbal de
l'infraction au tribunal administratif .
De même  , elle renie la théorie du juge naturel qui interdit aux
pouvoirs publics de dépouiller le juge administratif des attributions
qui relèvent de son champ de compétence naturelle 3.
___________________________________

1-ZEJJARI. (A), « le contentieux du domaine public» , REMALD, n 6, p 29.


2- DELLIS. (G), Droit pénal et Droit administratif ,ouvr cit, p336 .
3-BESSOIUNI .(A) .(H) ,la procédure administrative, T 1, 1999, p l12,(en arabe).

44
Il ne faut pas oublier que dans le contentieux de la répression doit
figurer la répression disciplinaire se rattachant surtout aux
contraventions administratives commises par la catégorie des
fonctionnaires 1 .
Mais; cette réforme enrichissante ne doit pas bouleverser l'ordre
juridique établie en mettant en cause l'efficacité du contrôle
hiérarchique.En effet, pour pouvoir organiser le contentieux de la
répression sur des bases rationnelles; il est nécessaire de créer une
correspondance entre la sévérité de la sanction; le degré de protection
convenable. le juge administratif ne doit intervenir qu'en cas d'extrême
nécessité et uniquement lorsqu'il s'agit de délit administratif
extrêmement grave ; ou alors lorsqu'il s'agit d'infliger au fonctionnaire
une sanction mettant en cause sa vie professionnelle : l'abaissement
d'échelon, l'exclusion temporaire privative de toute rémunération, la
mise à la retraite, la révocation.
Les autres sanctions disciplinaires telles que l'avertissement, le blâme,
la rétrogradation, l'exclusion temporaire de fonction pour une durée
déterminée, la radiation du tableau d'avancement relèveront de la
compétence de l'autorité qui tient le pouvoir de nomination. le juge de
l'excès de pouvoir contrôlera la réalité des faits invoqués par
l’administration suite à ces sanctions

_______________________________________
1- Il est à noter que le statut de la Fonction publique ne propose aucune définition législative
ou règlementaire de la faute disciplinaire.aussi le statut général s'est contenté d'établir la liste
des sanctions applicables, mais pas la liste des fautes que peuvent commettre les
fonctionnaires, entre celles qui sont très graves et celles qui sont moins graves (v . SNOUSSI
(B), Droit de la fonction publique,collection administration et textes 2004 ,les Éditions
Magrébines , p207) . quant à la doctrine, le professeur Rousset définit la faute disciplinaire
comme "tout manquement aux obligations qui s'impose au respect de l'agent" (Institution
administrative,p179) .ces obligations sont : l'obligation de se consacrer à la fonction publique
-l'obligation de désintéressement .l'obligation de discrétion .etc

45
Cette réforme permettra de se passer d'une gestion de personnel trop
archaïque reposant sur une conception autoritaire mal adapté aux
mentalités et aux réalités administratives actuelles1 .
1-2-Les attributions non contentieuses
Il est choquant de constater que les attributions d’ordre consultatif ne
figurent pas parmi le bloc de compétence attribué aux juridictions
administratives .
Indéniablement, la consultation est assurément l'une des compétences
les plus indispensables, dont les implications concrètes seront
bénéfiques au développement d’un droit public marocain solide et
perfectible . A titre d’ exemple : un avis rendu sur la constitutionnalité
d'un projet de loi éviterait les risques de censure ultérieure par la cour
constitutionnelle .
Malheureusement, au Maroc, les attributions relatives à l’exercice des
fonctions de conseil juridique sont confiées au Secrétariat Général du
Gouvernement.

___________________________
1-Il suffit de rappeler la situation précaire des grévistes, en effet à la suite des événements de
1979 les grévistes fonctionnaires ont été révoqués de leurs fonctions, suite d'un circulaire
n319- adressait par le premier ministre aux membres du gouvernement leur rappelant les
termes du décret du 5 février 1958 prohibant "la cessation concertée du service'" ainsi que tout
acte collectif d'indiscipline ajoutant que la sanction de ces faits devait être la radiation des
cadres en précisant que le gouvernement avait "la ferme intention de combattre toute forme de
relâchement dans le service de l'État mesure amnistiée l'année qui suive par sa majesté le roi
sans pour autant d'ailleurs que les directives données à cet effet aient reçu application (v,
ROUSSET. Michel, administration marocaine son droit et son juge , Édification d'un État
Moderne ,p 158)

46
En effet,en tant que conseiller juridique du Gouvernement, le
Secrétariat Général donne son avis sur les questions d’ordre juridique
qui lui sont posées par les administrations et les établissements publics
Cette attribution est relatée avec plénitude via les dispositions de
l’article 4 du Décret n° 2 -09 -677 du 4 joumada II 1431 (19 mai
2010) relatif à l’organisation du Secrétariat Général du gouvernement.
Mais comme prévu, ce système en vigueur au Maroc n’a pas échappé
au feu de la critique. Ainsi comme l’a pu relever une partie la doctrine

___________________________
- L'article 4 dispose « - La direction générale de la législation et des études juridiques est
chargée de coordonner les travaux de préparation et de mise au point des projets des textes
législatifs et réglementaires. Elle veille à la mise en œuvre de la politique gouvernementale
en matière de codification et d’actualisation des textes législatifs et réglementaires. A cet
effet, elle a pour mission :
- de procéder, sur le plan juridique, à l’examen de tous les projets de lois et de règlements en
vue de vérifier leur conformité avec les dispositions constitutionnelles et leur compatibilité
avec les textes législatifs et réglementaires en vigueur ;
- de préparer, s’il y échet, les projets de textes législatifs et réglementaires qui ne relèvent
pas de la compétence particulière d’un département ministériel déterminé ;
- d’inscrire, sur le plan juridique, les consultations qui sont requises du secrétaire général
du gouvernement par le premier ministre, les autorités gouvernementales ou toutes autres
administrations publiques - d’assurer la traduction officielle des textes législatifs et
réglementaires ;
…………………
- de donner, à la demande du gouvernement et en coordination avec les départements
ministériels concernés, les consultations juridiques en matière de conventions de crédits et de
conventions de garantie de crédits ;
- de préparer les documents d’adhésion ou de ratification, selon le cas, des conventions
internationales conclues par le Royaume du Maroc ;
- d’élaborer les notes juridiques relatives aux recours constitutionnels qui seraient présentés
par le gouvernement en ce qui concerne l’inconstitutionnalité de certains projets ou
propositions de lois approuvés par le parlement, ainsi que les notes de réponse du
gouvernement relatives au recours constitutionnels présentés par les membres du parlement »

47
marocaine , le Secrétariat Général du gouvernement est plus qu’un
simple conseiller juridique du gouvernement , il s’agit en réalité
d’un organisme dont la mission est de veiller au filtrage 1 des normes
juridiques pouvant porter éventuellement atteinte à la stabilité de
l’Ordre politique établi . c’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a été
élevé au rang de ministère de souveraineté .
Il est à signaler que les expériences en Droit comparé sont édifiantes,
En France. Le Conseil d’État contrôle tous les maillons de la
production juridique. Ainsi dans le domaine législatif , il est
obligatoirement consulté sur les projets de lois. De même , dans le
domaine réglementaire , il est obligatoirement consulté sur les projets
d’ordonnances, les projets de décrets. Le même conseil donne des avis
facultatifs et obligatoires dans différents domaines ( exemple :
reconnaissance de l’utilité publique d’une association)
En Tunisie2, le tribunal administratif jouit d'une compétence
consultative obligatoire en matière de projets de décrets à caractère
réglementaire. Certes la consultation conserve une valeur d'avis
auquel le gouvernement n'est pas tenu de se railler, il n'en demeure pas
que celui -ci est souvent pris en considération .
En Égypte , en vertu de l’article 190 de la constitution de 2014, le
Conseil d’État est seul compétent pour donner des avis sur les
questions juridiques au profit d’autorités créées par la loi, pour
examiner et rédiger les projets de lois et de décrets-lois .

_________________________________
1- Une question qui est loin d’être innocente a été posée par le Doyen DAKAK :
‫( الحبيب الدقاق‬،‫االمانة االمانة العامة للحكومة مستشار قانوني للحكومة ام جهاز للفيتو التشريعي‬
180‫ ص‬، 2010 ‫ طبعة‬،‫)العمل التشريعي للبرلمان اية حكامة‬
2- DUPTY .(M) , Institutions administratives et Droit administratif tunisien, Édition Paris ;
1973, p221 .

48
D'autres États africains tel que le Niger a aussi bel et bien intégré cette
fonction dans sa législation. la loi 9-10-du 13 juin1990 déterminant la
composition ; la formation; les attributions et le fonctionnement de la
cour suprême dispose dans son article 26 : « la cour suprême peut
donner son avis sur les projets de loi d'ordonnance et de décret
réglementaires »
1-3-Le contentieux de l’interprétation
Aucun passage dans la loi n 41/90 instituant les tribunaux
administratifs ne semble attribuer au juge administratif le soin de
connaitre du contentieux de l'interprétation .
Ce faisant, le législateur semble valider une jurisprudence antérieure,
celle de ‘’Yves Mas’’ en date du 25 novembre 1965.
Dans cet arrêt, la cour suprême a déclaré que « si les dispositions de
l’acte individuel étaient ambigues…le tribunal compétent doit sursoir
à statuer et requérir de l’autorité administrative qui était à l’origine de
la décision de l’ éclairer sur le sens… »1
On peut retenir de cet arrêt que ladite cour défend clairement l’idée
d’une compétence exclusive au profit de l’institution administrative.
Du point de vue doctrinal, cette position jurisprudentielle est
indéfendable à plus d’un titre : premièrement à raison de son caractère
trop réducteur2 . Deuxièmement, parce qu'elle met de manière
exorbitante l’administration en position de force.

________________________
1- Arrêt cité in l’administration marocaine son Droit et son juge ,ouvr cit , p 260.
2-v, Notre professeur JABRANE (A), BOUKARI .(A), « la jurisprudence de la cour la cour
suprême » ouvra cit, p165 en arabe .

49
Plus lucide, une portion de la doctrine marocaine avance que
l'interprétation des actes administratifs doit être perçue comme une
sorte de compétence implicite1 .
Enfin, demeure le problème crucial lié à l’interprétation des
dispositions d'une convention internationale manquant de clarté ?
En pareil cas, le juge administratif doit saisir le ministre des affaires
étrangères. l'interprétation donnée par ce ministre s'impose au juge
administratif et aux autres juridictions .
Pour la doctrine "une telle exception de taille, va donc clairement à
l'encontre de l'indépendance et à l’effort jurisprudentiel des tribunaux
marocains"2 .
En France, par un grand arrêt dit GISTI , en date le 8 décembre 1978
et rendu conformément aux conclusions de M Abrahem, le conseil
d’État a brisé cette pratique extra juridictionnelle datant de 1823(CE,
23 juillet 1823 veuve murat,)

________________________
1-HADAD .M , la justice administrative marocaine à la lumière de la loi instituant les
tribunauxr administratifs, Okad , p208 (en arabe).
2- BOUDAHRAINE. (A), Eléments de Droit public marocain, Edition l'Harmattan. p 213.

50
2- La catégorie de contentieux insuffisamment développée
Dés les premières années d’entrée en fonction des tribunaux
administratifs, l’article 8 de la loi n 41/90 suscitait deux interprétations
diamétralement opposées1. Il y avait d’une part, une position
doctrinale et jurisprudentielle proposant l’adoption d’une
interprétation constructive, de l’autre part, une tendance doctrinale
soutenue par la jurisprudence proposant l’adoption d’une lecture
réstrictive dudit article.
Ce debat fructueux portait surtout sur : le contentieux contractuel , le
contentieux fiscal , le contentieux électoral et la voie de fait liée
notamment au contentieux de l’expropriation .
________________________________

1- Le professeur ‘’Rousset’’ semble être parmi les premiers à mettre l’accent sur le caractère
énonciatif de l’article 8 . c’est d’ailleurs cette thèse même qui semble prédominer par la suite .
Cet éminent docte estimait que ‘’. L’interprétation large de l'article 8 est possible pour
diverses raisons : D'abord en se fondant sur l'esprit de cette réforme capitale du système
juridictionnel, il s'agit en effet, de renforcer l’État de droit et de faciliter pour ce faire la
saisine d'un juge nouveau. Aussi en raison des termes mêmes de l'article 8 de la loi 41/90 « les
décisions des autorités administratives » ou bien encore « actes et activités des personnes
publiques » peuvent permettre une large ouverture de la compétence des tribunaux
administratifs" ( Rousset.M , « la plénitude de la compétence des tribunaux administratifs à
l'égard de l'administration et les insuffisances de l'article 8 de la loi n 4/90» ; REMALD )

A l’opposé d’autres juristes ont soutenu des théses qui renièrent la position précédente .c’est
le cas du commissaire royal ‘’ Hasoun Jaafar’’dans un article publié à la REMALD, ce
juriste affirmait qu’il s'agissait d'une compétence d'attribution, par détermination de la loi, et
donc à caractère limité. Aussi, cette interprétation restrictive de l'article 8 est confirmée par la
technique classique de l'interprétation qui consiste à recourir aux travaux et aux débats
préparatifs . Idem, l’auteur invoque le principe juridique selon lequel « toute compétence
émane de la loi », qui veut que la loi soit seule habilitée à déterminer et attribuer les
compétences, et par des dispositions législatives expresses de surcroît, chose qui été faite par
les rédacteur de la loi n 41/90. Encore l’auteur invoque que le législateur a qualifié d’ordre
public la compétence à raison de la matière . les juridictions administratives ne peuvent, donc,
s'attribuer d'elles-mêmes une compétence qui ne leur a pas été reconnue par la loi sans porter
atteinte à ce principe.Dernier arguments qu’il rajoute ,’’le législateur a voulu laisser aux
tribunaux administratifs le temps de se familiariser avec les techniques du Droit administratif avant de
leur reconnaître "officiellement" le statut de tribunaux de "droit commun en matière administrative".
Cela évoque en quelque sorte l'évolution même suivie par le Conseil d’État. Il y a deux siècles de cela.
C'est la même ligne d'évolution que devait suivre la juridiction administrative en Égypte (Hassou. J, «
A propos de la voie de fait,REMALD , juillet- septembre 1996, p 70-71).

51
2-1-Le contentieux contractuel
Aux termes des dispositions de l'article 8 de la loi n 41/90 instituant
les tribunaux administratifs «....sont compétents pour juger ...les
litiges relatifs aux contrats administratifs ».Ce passage appelle
quelques observations .
Tout d'abord , il est manifestement connu qu'en droit des obligations
1
le contrat n'est pas la seule source d'obligation juridique . On peut
faire allusion ici aux quasi- contrats2 et à l’engagement unilatéral de
volonté3 .

_________________________________
1- Le professeur Gaudemet éstime que l'établissement d'un droit administratif des obligations
est envisageable pour différentes raisons:

- Il y a d'abord le mouvement propre du droit administratif, davantage aujourd'hui droit de la


négociation et du contractuel que droit de commandement. À cela s'ajoute l'influence de
systèmes conventionnels auxquels la France est partie, et d'abord celui des communautés et de
l'union européenne et celui de la convention européenne des droits de l'homme. Ces systèmes
conventionnels intègrent les données juridiques dans l'objectif de non discrimination et
d'égalité d'action dont ils font des principes .

- Bien plus et quittant les sources, lorsque l'on interroge la littérature administrativiste
consacrée aux contrats et au droit de la responsabilité, on constate que l'emprunt à la théorie
générale des obligations sont constant; qu'il s'agisse de la notion même de contrat ou de quasi
contrats, des vices du consentement, de la notion d'ordre public contractuel, du rôle de la
volonté des parties dans l'interprétation du contrats de l'effet relatif du contrat de la
transmission des obligations ou des modes de résiliation, des notions de terme, de condition,
de prescription, de la sous traitante réglée par une même loi de 1975 pour les marchés
publicset les contrats d'entreprise du droit privé, de la responsabilité décennale des
constructeurs, le vocabulaire est le même et les notions de base sont communes.( Gaudemet.
Y , « prolégomènes pour une théorie des obligations en droit administratif français »,
REMALD ; n31, p 9-19.)

2-Les quasi- contrats recouvrent par exemple : l’enrechissement sans cause, la récupération
des plus-values.etc ( V .le doyen BENJELLOUN.A , L’action Administrative,Edition 1985, p
33).

3- C’est le cas par exemple : des dons et legs (voir l’article 92 de la loi organique n 123-14
relative aux communes.

52
Par ailleurs, les rédacteurs de la loi instituant les tribunaux
administratifs se sont contentés de faire mention à la notion dite
contrat administratif dans le cadre de la détermination de la
compétence des tribunaux administratifs . mais nulle part , ils ne
définissaient la notion , ni n’en précisaient le regime juridique.
De même et c’est là l’autre source d’incertitude, les rédacteurs n'ont
pas individualisé malgré leur importance les contrats dits par
détermination de la loi 1 ,
C’est dans la foulée de ces remarques qu’ il convient alors de traiter
les contrats administratifs de nature jurisprudentielle et les contrats
administratifs par détermination de la loi .
2-1-1-Le problème de l’identification des contrats administratifs de
nature jurisprudentielle :
Au plan de la définition du contrat administratif, L’article 8 de la loi n
4/90 se contentait de préciser sur un ton laconique « ...les tribunaux
administratifs sont compétents pour juger ....les litiges relatifs aux
contrats administratifs »
Comme on peut le constater, aucune définition n’a été proposé par les
rédacteurs de la loi n 41/90 . s’agit t-il d’une pratique aléatoire ou
plutôt d’une politique législative résumée voulant conforter les
rapports entre le législateur et la jurisprudence ?
Dans tous les cas, cette difficulté va être régler par la jurisprudence
qui n’est pas restée inactive. Mais avant de s’atteler à l’étude de ses
méthodes et ses critères , qu’en est il d’abord de la doctrine ?

_______________________________
1-SKALI .(M) ,« le contentieux contractuel à la lumière de la jurisprudence administrative »
REMALD, n 47, p58, (en arabe) .

53
2-1-1-1- L’approche doctrinale
L’analyse des différentes définitions doctrinales tissées autour de cette
notion révèle qu’elles n’ont pas été inscrites dans une perspective
favorisant la clarté . Pour les besoins de l’analyse, il est important de
passer en revue les deux exemples suivants :
- « le contrat administratif est le contrat conclu par une personne
morale de Droit public en vu de la gestion d'un service public, …. en
faisant prévaloir dans ce contrat son intention de le soumettre au
procédé de droit public, en y insérant des clauses exorbitantes de droit
Commun '"1 .
- « s'il comportait les trois éléments suivants :l'administration doit
faire partie au contrat, il doit s'attacher à un service public et
comporter des clauses exceptionnelles inhabituelles en droit
commun »2 .
Il est aisé de constater concrètement dans ces deux définitions qu’une
partie de la doctrine s'attache vivement au critère organique comme
seul indice déterminant en matière d'identification des contrats
administratifs. Toutefois, on peut leur reprocher de s’en passer de
l’élément matériel qui fait qu’un contrat passé entre personnes privées
peut aussi recevoir cette qualification, il suffit pour cela que l’une des
personnes contractantes agisse pour le compte d’une personne
publique 3 . c'est évidemment le cas du mandataire d'une personne
publique puisque par hypothèse un mandataire agit au nom et pour le
compte du mandatant .

______________________________
1- ELBADAOUI.Ismail, le contentieux administratif,; 1993, p 479, (en arabe).
2- RATEB .Mohammed Ali et autres, le contentieux en référé,T 1, p194, (en arabe) .
3-Aux termes de l'article 879 du DOC « le mandat est un contrat par lequel une personne
charge une autre d'accomplir un acte licite pour le compte du commettant. le mandat peut être
donné aussi dans l'intérêt du mandant et du mandataire, ou dans celui du mandant et d'un tiers,
et même exclusivement dans l'intérêt d'un tiers ».

54
Par ailleurs, cette même doctrine tombe dans la confusion, lorsqu'elle
appréhende les deux critères, à savoir le régime de Droit public et la
clause exorbitante comme ayant une signification identique . Pourtant
il s'agit en vérité de deux critères jurisprudentiels portant un sens
nettement distincts.
D’ailleurs, cette remarque sera confirmée par notre professeur
Mohammed Amine BENABDALLAH. Celui-ci écrit ‘’ qu'en
regardant de près, le critère du service public implique celui de la
clause exorbitante et vice versa. En effet, si l'on admet grosso modo
que la clause exorbitante est une référence inhabituelle dans un contrat
privé comment ne peut-on pas assimiler à cela une clause par laquelle
le cocontractant participe directement à l'exécution du service public ?
Peut-on imaginer qu'un contrat entre deux personnes privées puisse
valablement conclure que l'une d'entre elle aura à charge d'assurer un
service public, à moins que, et c'est là une autre question, que l'un des
cocontractants soit un mandataire de l'administration. Par conséquent,
lorsque l'administration fait participer l'autre partie à l'exécution ou à
la gestion d'un service public, cette participation est par elle-même
une clause exorbitante du droit commun. Inversement, si un contrat
conclu par une personne publique et une autre privée contient une ou
des clauses exorbitantes du droit commun autres que celle de la
participation directe à l'exécution du service public, l'existence de ces
clauses suppose implicitement que le contrat est en rapport de près ou
de loin avec le service public. Mieux encore, ces clauses ne peuvent
en principe y figurer que si le contrat a pour objet le service public. Au
fond, la clause exorbitante implique une présomption de service public
‘’1

___________________________
1- Notre professeur Benabdallah .Mohammed Amine, « Du critère du contrat administratif » ,
REMALD, n 18 ; janvier- mars 1997, p 14 .

55
Plus averti, la doctrine française résume la définition du contrat
administratif comme "un contrat conclu par une personne publique ou
pour le compte d'une personne publique et qui soit contient des
clauses exorbitantes du droit commun, soit a pour objet l'exécution
même d'un service public, soit enfin est soumis à un régime de droit
public"1 .
2-1-1-2-L’approche jurisprudentielle
On peut dire que dans les premières années d’entrée en fonction des
tribunaux administratifs , l'identification des contrats administratifs fut
imprégnée d'une logique typiquement subjective. Ceci était dû à la
vérité, aux critères qui étaient d'un maniement assez malaisé .et que
par l'imprécision de certains de ces éléments ils laissaient au juge une
grande liberté pour qualifier à son gré la nature du contrat.
Pour constituer une vue d’ensemble, il convient d'examiner la
jurisprudence de la cour suprême et celle des tribunaux administratifs .
-La jurisprudence des tribunaux administratifs

Sans prétendre à une lecture exhaustive des différentes positions


jurisprudentielles, deux grandes tendances peuvent être distinguées :
l'une ou le juge exige la réunion de trois critères (approche
cumulative), l'autre ou il se contente d'un seul (approche alternative).
Ainsi , dans l'espèce BOURSA le tribunal administratif d'Agadir
rappelle « attendu que la jurisprudence de cette juridiction considère
avec constance que le contrat est administratif, lorsque trois conditions
sont réunies :
________________________
1- De Forge . J .M, Droit administratif ,PUF, p 31.

56
1- que l 'un des cocontractants soit une personne publique ;
2- que le contrat concerne la gestion d'un service public ou la
réalisation d'un intérêt général ;
3- que la personne publique recoure à l'utilisation d'un procédé public
dans le contrat »1 .
Aussi , dans l'espèce CHAOUI le même tribunal décide «  si les deux
conditions du contrat administratif sont réunies dans l'affaire , …, il y
a lieu de relever que…., elles ne sont pas suffisantes …... II faut que
le contrat contienne une clause exorbitante du Droit commun »2 .
De même, le tribunal administratif de Marrakech a adopté la même
assertion « ..attendu qu’il ne peut être considéré comme contrat
administratif que s'il répond aux critères adoptés par la jurisprudence
…. : l'existence d'une personne publique faisant partie du contrat ;
l'exécution d'un service public et l'existence de clauses exorbitantes du
Droit commun »3 .
En revanche, le tribunal administratif de Fès et de Meknès ont opté
pour une méthode plus tempérée . Ainsi, sans faire allusion au critère
de service public, le tribunal administratif de Meknès 4 s'est contenté
de la clause exorbitante : «  attendu que ces dispositions sont
considérées comme clauses exorbitantes du Droit commun , le contrat
litigieux est administratif et par conséquent relève de la juridiction
administrative ».

_____________________
1- T.A d'Agadir 19 oct 1995 , BOURSA, cité par BENABDELAH (M) (A) , « le contentieux
contractuel, », REMALD, n 40. p 132 .
2- T. A d’Agadir , 26 mars 1996 ,
3-T. A de Marrakech, 27/9/1994 .
4-T. A de Meknès 7 mars 1996 Boukbir ,cité par le professeur BENABDELAH (M)(A) ,ibid,

57
– La jurisprudence de la Cour suprême
Intervenant en appel conformément aux dispositions de l’article 45 de
la loi n 41/90 , la cour suprême n’a pas pu imposer une ligne
jurisprudentielle constante .Des fois,on la voyait exiger un assemblage
tantôt cumulatif tantôt alternatif des critères. Ainsi dans l’arrêt dit
Boulfarouj, la cour suprême a conclu que la clause exorbitante était
insuffisante pour lui octroyer le caractère administratif1 .
En l'espèce , il est regréttable de voir le juge administratif recourir
audits critères et fournir tant d'arguments pour décliner sa compétence,
alors qu'il est manifestement admis que les contrats conclus par les
SPICS avec leurs usagers ne peuvent relever de la compétence du
juge administratif .
Indubitablement, les litiges qui s'interposent entre les usagers et les
établissements publics relèvent soit de l'ordre judiciaire ou
administratif, selon qu'il s'agit d'un service public à caractère
administratif ou d'un établissement public à caractère commercial 2 .
L’usager d'un service public se trouve dans une situation légale et
réglementaire de droit public , la compétence est d'ordre administratif.
Contrairement au cas précédent, l'usager du service public industriel
________________________
1-la cour supème a estimé que « pour recevoir la qualification de contrat administratif ,il ne
suffit pas d'insérer dans le contrat des clauses et des dispositions exorbitantes du Droit
commun, mais en plus ledit contrat doit satisfaire à une troisième condition : « il faut qu'il
s'attache à l'exécution d'un service public que la nature du contrat ... même si sa conclusion a
été avec une personne publique, qui est l'ONE ...et comportant des clauses exorbitantes du
Droit commun toutefois ledit contrat ne s'attache pas à l'exécution d'un service public et par
conséquent il ne s'agit pas d'un contrat administratif dont la contestation est soumise à la
compétence des tribunaux administratifs . Mais d'un contrat privé.... » (C S, n 367, 21/9/1995
Les principaux arrêts de la Cour suprême, matière administrative, 1958-1997, p. 325, en
langue arabe) .
2-Notre professeur ELYacoubi. (M) ,«le droit de l’ usager de services publics au Maroc, in le devenir
du service public : comparaison France –Maroc », Collection connaissance Économique , p 276.

58
ou commercial se trouve dans une situation contractuelle de droit
privé. Donc la compétence est d'ordre judiciaire. Toutefois lorsqu'il
s'agit du tarif des prestations qui est une composante réglementaire du
contrat. C'est le juge administratif qui serait compétent 1 .
Aussi, dans l’arrêt société nationale d'aménagement de la baie de
Tanger, la cour suprême a mis en valeur deux critères qu'il considérait
suffisants pour imprimer au contrat le caractère administratif, à savoir
le critère de participation à la gestion d'un service public, ainsi que
celui de la clause exorbitante 2.
Par contre , dans l'arrêt dit Ghalali, cette même cour a fait prévaloir
uniquement le critère de la clause exorbitante 3 . Grande erreur de la
cour, la Caisse nationale de crédit agricole est un établissement
public à caractère industriel et commercial. Donc les rapports
individuels qu'elle entretient avec son personnel sont soumis au
régime de droit privé ,et par voie de conséquence relevant de la
compétence de l'ordre judiciaire4 .

______________________
1- Rousset. (M) , le service public au Maroc, Édition la Porte, p100 .

2-« considérant qu'il résulte des éléments du dossier que la société appelante créée par décret
du 26 juin 1967, pour l'aménagement de la baie de Tanger et sa mise en valeur touristique a
été chargé, ...de la gestion d'un service public .
Considérant que l'acte unilatéral de résiliation pris par la société appelante , ayant mis fin à
lamission de l'intimée , en se basant sur des conditions et des pénalités figurant dans le contrat
conclu entre les deux parties, mais inhabituelles dans les contrats de droit privé, dans la
mesure ou elles entraînent un déséquilibre entre les obligations de chacun des deux
contractants »(Arrêt du12 octobre 1995 cité par RAGALA OUZANI,«Élément du contentieux
des contrats de l’Administration », REMALD, n4, novembre-décembre 200, p 64)

141-« considérant qu'il est évident que l'administration a donc utilisé dans ses rapports avec
son contractant des moyens de droit public, en ce sens que la clause prévue par l'article 4 du
contrat est inhabituelle dans les contrats du droit commun ...seules les juridictions ordinaires
sont habilitées à apprécier la gravité de la faute commise par l'une des parties et de dire si elle
justifie ou non la résiliation du contrat sans indemnisation du contractant.
Considérant que compte tenu de ce qui précède, le contrat conclu entre l'appelant et la caisse
nationale de crédits agricoles constitue bien un contrat administratif » (arrêt,le 9 novembre
1995)
4- Lachaume.J.F, Droit administratif , Puf , p 242 .

59
Rappelons aussi que, cet arrêt a remis en cause les affirmations d'un
arrêt antérieur dit Bouchantouf rendu le 24 février 19941 .
2-1-2- La problématique de l'appréhension des contrats administratifs
dits par détermination de la loi
Aujourd’hui, il est naturellement admis et sans aucune réserve que les
marchés publics sont des contrats administratifs par détermination de
la loi2 . Alors que quelques années auparavant il était tout à fait normal
voir même légitime de soulever, la question de savoir si les marchés
publics sont des contrats administratifs par nature ou par
détermination de la loi ?
A cette question la jurisprudence n’était pas catégorique.
Sans s’appesantir sur ce point, deux types de marchés publics vont
nous éclairer sur les fluctuations jurisprudentielles qui caractérisaient
ce type de litige .
2-1-2-1- Le marché de fournitures ou de services
Il s'agit d’un contrat par lequel l'administration achète des biens
mobiliers (fournitures) ou bien se procure des services 3 .
Sans difficulté, la Doctrine s’accorde à dire qu’il fait partie des
_________________________________
1-« Considérant que la loi 23 mars1979 de la caisse nationale du crédit agricole imprimant
à cet établissement le caractère d établissement à caractère commerciale dotée de la
personnalité juridique et jouissant de l'autonomie financière. que le requérant même étant
considéré comme employé audit office, il reste que le lien d'emploi qui le lie à l'intimé est de
la compétence du tribunal de première instance tel qu’il resort des dispositions de l'article
18 du CPC »(,arrêt, n83, du 24/1994)
2- ZOUBAA .(A) , Le régime juridique des marchés publics ;Édition 2011, p 239.
3-FORGES (J) (M) droit administratif, ouvr op cit.

60
contrats administratifs dits par détermination de la loi 1, Ainsi, le
commissaire royal. EL MACHTARAI rappelle que les contrats de
concession et de fournitures ainsi que ceux des Travaux publics
constituent des contrats administratifs par détermination de la loi2 .
De même le commissaire royal A. EL BOUDALI souligne que "le
Marché de fournitures est considéré comme un contrat administratif
par détermination de la loi "3.
En revanche , la jurisprudence marocaine s’est orientée dans deux
directions complétement opposées. Tantôt, elle le qualifie de contrat
administratif par détermination de la loi4 tantôt en faisant référence
aux critéres jurisprudentiels 5 .

__________________________
1- SAROUK. (M) , Droit administratif, 1996, p 307 , (en arabe).

2- EL MACHTARAI .(I), « le contrôle juridictionnel des marchés publics », la revue des


tribunaux administratifs, n 2, 2005, p227,( en arabe).
3-Boudali .(A) « l'article 8 en matière de plein contentieux, quel respect des libertés
individuelles », la rev des tribunaux administratifs, n 2, p197, (en arabe).
4-Dans son arrêt n 788 du 14 novembre 1996 « considerant qu'il ressort du décret du
14/10/1976 relatif aux marchés de travaux, fournitures ou services au compte de l’État, que le
marché constitue un contrat administratif par le texte de la loi ce qui signifie qu'il n'est nul
besoin de rechercher l'existence de conditions inhabituelles dans ce contrat pour considérer
qu'il relève pas du droit privé et ceci contrairement à ce qui a été fautivement relevé par le
tribunal administratif lequel a considéré que l'acte objet du litige n'était pas un contrat
administratif sous prétexte de l'absence de clauses exceptionnelles et inhabituelles dans le
droit privé alors qu'il s'agit en fait d'un marché conclu pour le compte de la commune et que
cela est suffisant pour le qualifier de contrat administratif et d'en déduire la compétence du
tribunal administratif pour connaître du litige. » ( in Arrêts de la chambre administrative,
traduits de l’arabe ,Édition 2007, p 78 )
5- « Attendu qu'il résulte des pièces du dossier et du jugement attaqué que par requête
introductive datée du 25/03/96 l’office national d'électricité a exposé qu'il fourni de
l'électricité, dans le cadre de son activité, à l'agence autonome communale d'éléctricité de
Tétouan, que celle-ci est restée endettée de 9.549.325,25 dhs de 1973 à 1976, qu'elle a payé
2.500.000,00 dhs de 10.000.000,00 dhs et que le montant qui reste à payer est de 7.049.325
dhs malgré de nombreuses correspondances, et a demandé de condamner ladite agence à
payer ledit montant avec les intérêts de droit et une indemnité pour le préjudice causé.
Après ../..

61
2-1-2-2- Le marché des Travaux publics
On entend par marché de travaux : « tout contrat à titre onéreux conclu
entre, d'une part, un maître d'ouvrage et d'autre part, un entrepreneur
une personne physique ou morale et ayant pour objet la construction
_____________________

../..discutions, le tribunal administratif s'est déclaré incompétent pour statuer sur le litige, pour
le motif que les contrats qui lient l'agence et sa clientèle pour la fourniture d'eau et d'électricité
sont des contrats de droit privé que ces clients soient des personnes physiques ou morales.
C'est le jugement attaqué en appel.
Attendu que l'appelant a soulevé la violation de l'article 8 de la loi 41-90 relative à la création
des tribunaux administratifs, la déformation des faits, l'insuffisance de motifs, en ce que le
jugement attaqué a considéré à tord que le contrat qui lie les deux parties est un contrat de
droit privé alors qu'il s'agit d'un contrat liant l'appelant et l'agence qui sont tous les deux des
personnes morales de droit public d'une part, et d'une autre part, il s'agit de contrat
administratif, parce qu'il concerne le monopôle de la fabrication et de la distribution
d'électricité et de leur commercialisation, opération qu'il peut faire lui-même ou par le biais
des agences autonomes de distribution pour satisfaire les demandes des consommateurs, et la
jurisprudence est stable en la matière, elle considère que l'établissement du contrat
administratif nécessite la réunion de trois conditions à savoir :
Que l'une des parties du contrat soit un établissement public.
Qu'il s'agisse de la gestion d'un secteur public ou d'utilité publique.
Qu'ils utilisent un des mayens publics; que ces conditionssont toutes réunie dans cette affaire ;
Et après délibération :
Attendu que, comme l'a constaté l'appelant lui-même, il n'est pas nécessaire que le contrat
relatif à la fourniture de l'électricité liant les deux parties personnes rurale de droit public
fourniture d'électricité qui sont tous deux, personnes morales de droit public, soit un contrat
administratif.
Attendu que si la condition d'établissement public est établi, autre condition fondamentale
doit l'être aussi, c'est une’utilisation de moyens non courants dans les contrats ordinaires
permettant à l’une des parties de recourir à une sanction determinée, dans le cas où à l’autre
partie ne remplie pas ses engagements contractuels.
Attendu que, dans le cas d'espèce, l'appelant ne nie pas que la defenderesse a réglé une partie
des dettes cumulées, selon le budget qui lui a été réservé, elle n'a pas réglé le reste ce qui a
pousse contraint l'appelant ) recourir à la justice pour la réclamation du paiement des
échéances restants dues.
Attendu que, tant qu'une condition fondamentale parmi les conditions indispensables à
l'établissement du contrat administratif n'est pas établie, le tribunal ordinaire reste compéent
pour statuer sur la demande, aussi le jugement attaqué est bien fondé..La Cour, confirme le
jugement attaqué » (Arrêt n° 1428 du 09 Octobre 1997 Dossier n° 1307/1997cité in Arrêts de
la chambre administrative, traduits de l’arabe ,Édition 2007, p 82-84 )

62
d'ouvrages d'infrastructure ou de biens immobiliers dans lesquels la
livraison de fournitures n'est qu'accessoire, l'évaluation de ces
dernières étant comprises dans le coût des travaux » .
Se pose ici la question de savoir , si le contrat de marché des Travaux
publics fait partie des contrats administratifs par détermination de la
loi ?
Dans un arrêt rendu le 20 février 1996, la cour suprême, tout en se
fondant sur la notion de travaux publics largement suffisante pour
l'établissement du caractère administratif du contrat, a fait allusion à la
réunion des trois critères: « considérant que si les contrats
administratifs doivent conformément à la jurisprudence réunir trois
conditions: contrat par une personne morale publique dans un de
service public, comportant des dispositions exceptionnelles
inhabituelles pour être soumis aux règles de droit public, sans quoi, ils
sont réputés contrats Civils, le contrat de travaux public, qui est un
accord entre l'administration et un particulier entrepreneur ou
exécutant de travaux de construction , de restauration ou d'entretien de
bâtiment ou d'infrastructures immobilières pour le compte d'une
personne administrative d'abords un intérêt public fait parties des
contrats administrative par détermination de la loi »1 .

2-2-Le contentieux fiscal.


Aux termes des disposions de l'article 8 de la loi n41/90 « les
tribunaux administratifs sont également compétents pour connaître
des litiges ...de la législation et de la réglementation en matière
..fiscale »

____________________________
1- CSA, Agent judiciaire/c FABIANE.20 fevrier 1996,cité par OUZANI (A) (R) « élément du
contentieux des contrats de l'administration » ,REMALD ,n 41,Novembre- décembre -2001, p
64.

63
Aussi, une lecture fluide du chapitre Cinq révèle que la compétence
des tribunaux administratifs en cette matière comprend
successivement :
-l'enregistrement et le timbre (art 31),la fiscalité des collectivités
territoriales (art 32) la TVA (art 33) l'impôt sur les sociétés, l'impôt
sur le revenu, les décisions de la commission arbitrale relative à la
taxe urbaine, les décisions de la commission préfectorale ou
provinciale relative à la fiscalité des collectivités locales et leur
groupement.
C’est sans surprise que l’énumération en question va faire bruit
puisque par inadvertance, le législateur n'a pas pris en compte certain
impôts  ( exemple : les droits de Douane). C'est un ainsi que s'ouvre
une parenthèse, les dites énumérations ont- elles une valeur
énonciative ou restrictive1 ?
Au terme d'une interprétation audacieuse proposée par la Doctrine,
ainsi que par la jurisprudence ,c'est l'esprit constructif qui a dû à
fortiori être mis en valeur2 .

__________________________________________
1 -Les chercheurs MARZAK ET ABIIA sont les premiers a indiqué du doigt l'ambiguité
énigmatique qui plane autour de cette énumération et se demandèrent à bon droit si celle ci a
une valeur constructive ou restrictive (v, le régime juridique du contentieux fiscal au Maroc ,p
201,en arabe) .
2- Dans l'une de ses études les plus brillantes le feu TOURABI (M) n’ a pas lui aussi tourné
le dos à cette difficulté. Celui-ci écrit " il faut insister sur le fait que malgré l’ambiguïté
flagrante frappant lesdits articles, les tribunaux administratifs et sans exception se considèrent
doter d'une plénitude de juridiction en matière fiscale" justifiant et expliquant cette
observation, précise-t- il "il serait incompréhensible que les tribunaux administratifs aient
pleine compétence pour une partie d'impôts,et que les tribunaux ordinaires en garde le reste
’'ajoute t-il "encore apparemment l'administration fiscale semble bien être de cet avis ,puisque
à aucun moment elle n'a pas opposé une exception d'incompétence à raison de la matière
contre un impôt ne figurant pas parmi l'énumération en question" « le contentieux fiscal à la
lumière à la lumiere de la loi n 41/90 » ; REMALD, n15,(en arabe ).

64
2-3-Le contentieux de la responsabilité administrative
Le contentieux de la responsabilité administrative attribué au juge
administratif est fort compliqué. et mérite bel et bien quelques
remarques .
Tout d’abord, aux termes de l'article 79 du DOC « l'État et les
municipalités sont responsables des dommages causés directement
par le fonctionnement de leur administration et par les fautes de
service de leurs agents . »
A admettre la logique exposée par l'article 79 du DOC, la
responsabilité administrative incombe vraisemblablement à deux
entités : l’État et les municipalités. Ce qui est fort loin de refléter la
réalité.
Il faut reconnaitre que l'originalité de l'article 8 de la loi instituant les
tribunaux administratifs est qu'il a renoncé à cette logique trop
restrictive pour adopter le concept : « personnes publiques ». Ainsi,
aux termes de l'article 8 de la loi n 41/90 « les tribunaux
administratifs sont compétents...pour juger ..les actions en réparation
des dommages causés par les actes ou les activités des personnes
publiques »
Mais, que la chose soit claire, l'article 8 de la loi n 41/90, aussi a le
désavantage de ne pas prendre en considération l’hypothése
s'appliquant aux personnes privées lorsqu'elles gèrent un service
public administratif et lors qu'elles disposent de prérogatives de
puissance publique dont la mise en ouvre provoque un dommage.
(CE,13 oct,1978 association départementale pour l'aménagement des
structures agricoles du rhome.)

65
Il faut noter aussi que le législateur emploie indifféremment le concept
dommage au lieu du préjudice. alors qu'ils sont conceptuellement
distincts.
En effet, le dommage c'est ‘’ le fait consistant dans l'atteinte à
l’intégrité d'une personne, d'un bien, d'une activité, d'une situation
mais qui ne peut pas faire en tant que tel l'objet d'une indemnisation
Alors que ,’’ le préjudice ‘’ peut être défini comme l'ensemble des
conséquences patrimoniales ou extra patrimoniales qui découlent du
dommage à l'égard d'une ou plusieurs personnes et qui est en tant que
tel indemnisable ‘’1 .
Aussi ‘’ le préjudice est la conséquence du dommage’’ 2 .Si l'on prend
l'exemple d'une opération chirurgicale provoquant la paralysie du
malade, il est clair que le fait dommageable est constitué par l'acte
médical aboutissant à ce résultat et le dommage la paralysie. Le
préjudice sera moins immédiatement déterminé en fonction des
dépenses qui déveront être prises en charge pour assurer une
assistance continue au malade, des sommes qui compenseront les
pertes de revenus qu'il subit s'il avait une activité professionnelle (186)
Par ailleurs ,les rédacteurs de la loi n 41/90 n'ont pas pris en compte
que parfois la responsabilité des services de l'État n'est pas toujours
due à son activité mais aussi à son inactivité. c’est d’ailleurs une
hypothèse déjà prévue en droit comparé ( le cas de l’Espagne avec la
Loi sur la Juridiction contentieuse administrative du 29/1998, d
13juillet)

________________________
1- HERMON (Carole), « le dommage écologique dans le contentieux de la responsabilité
administrative », Actualités juridiques tunisiennes. p. 71-86. p 71 .
2- CHAPERLARD .R, le préjudice indemnisable dans la responsabilité extracontractuelle
de la puissance publique, thèse dactyl, Grenoble, 1981, p7-8.

De même la responsabilité administrative peut résulter aussi de


l’obligation qui incombe à l'État d'assurer la paix et les soins
66
nécessaires aux citoyens. 1ainsi que de l'idée du risque sociale ou de la
solidarité nationale 2.
L’autre curiosité de l’article 8 de la loi n 41/90.et que celui-ci exclut
de la competence des juridictions administratives, les dommages
causés sur la voie publique par un véhicule quelconque appartenant à
une personne publique . Annotant ce passage le professeur Rousset a
fait signaler que la limitation aux dommages causées sur la voie
publique n’a pas de justification3 .
Enfin s’agissant de l’identification lie à la faute , le DOC propose le
schéma suivant :
-il y a la faute de service prévue par l'article 79 du DOC. celui-ci
précise que « l'État et les municipalités sont responsables des
dommages causés directement par le fonctionnement de leurs
administrations et les fautes de service de leurs agents ».
Quant il y a faute de service, la victime peut attaquer l'administration
devant les juridictions administratives.

________________________
1- AMZID.(J), recherches sur les nouveautés de la justice administrative , REMALD ,manuels
et travaux universitaires, n 50, p137, (en arabe) .
2- PAILLET (M),le contentieux de la responsabilité, ouvr cit , p172.
3- Rousset . (M) , contentieux administratif, Édition la Porte, p 4.

67
Dans son Arrêt rendu le 14 Décembre 1995, la cour a conclu que le «
Chèque déposé auprès des services du ministère public et égaré dans
des circonstances indéterminées. l'Administration est responsable de la
perte du chèque.
Responsabilité fondée sur une faute de service. Il ne s'agit pas d'une
erreur judiciaire. Pour établir la responsabilité de l'Administration en
pareil cas, il ne serait pas nécessaire d'engager une procédure en
justice contre les magistrats. Article 79 du Code des Obligations et
Contrats. »
-De sa part , l'article 80 du même code a posé les règles de la faute
personnelle « les agents publics sont personnellement responsables
des dommages causés par leur dol ou par des fautes lourdes dans
leurs fonctions. »
L’existence d'une faute personnelle a pour corollaire de principe,
d'impliquer la responsabilité pécuniaire de l'agent qui en est l'auteur
devant le juge judiciaire1 .
Dans son jugement portant n 30-2001-12 le tribunal administratif de
Meknes a eu l’occasion de confirmer la signification de l’article 80 du
DOC :« attendu que si le requérant a tout le droit de réclamer
réparation du préjudice subi , il reste essentiel de déterminer l'auteur
du préjudice à qui revient la charge de responsabilité.
Autrement dit, cette responsabilité est elle une responsabilité de
service, imputable à l'administration seulement et dans ce cas c'est elle

____________________________________
1- Arrêt n° 550 du 14 Décembre 1995 Dossier n° 354/199 , in Arrêts de la chambre
administrative , traduits de l’arabe ,Édition 2007, p 342 .
2.- DEMCHEL (A), LALUMIERE (.P) , le Droit public, Que sais je,p 97.

qui versera la réparation et la compétence relève donc de l'ordre


administratif ou bien la responsabilité est une responsabilité

68
personnelle imputée à l'agent dans ce cas l'exécution portera sur son
propre patrimoine et la compétence revient à l'ordre judiciaire?
Attendu qu'il est admis par la doctrine et la jurisprudence de qualifier
la faute comme personnelle si l'acte dommageable était imprimé de
caractère personnel animé par la mauvaise intention du fonctionnaire
lorsque celui-ci exécute les obligations du service.
Attendu qu'il appert des pièces du dossier qu'il s'agit d'un litige
personnel … entre le requérant et sa divorcée x occupant le poste de
secrétaire au tribunal, que cette dernière reconnaît … qu’elle s’est
emparée de l’acte …ordonnant la cessation de l'état d'indivision ....
Attendu qu'il apparaît des faits précités , le comportement de ladite
fonctionnaire visant la satisfaction d'un intérêt personnel détachable de
sa fonction est une faute personnelle, donc le requérant aurait dû
former son recours dans le cadre de la faute personnelle et les règles
de la responsabilité personnelle de l'agent conformément aux
dispositions de l'article 80 du DOC…., incompétent »1 .
Certes, confronté à la jurisprudence fournie par le juge administratif
français, ce jugement présente l’inconvénient d’adopter une position
périmée (206) .

__________________________
1-T A de Mekenes, n30/2001/12, ABOU EL ALA ABED NABI ,c/le ministre de la justice,
in guide pratique de la jurisprudence en matière administrative , REMALD , T II, n 16- 2004 ,
(en arabe)

69
Il faut rappeler qu’en France, et depuis 1918 le conseil d'État avait
reconnu dans le fameux arrêt Lemonnier qu'une faute unique due
essentiellement au fait personnel de l'agent, entraîne la responsabilité
du service aussi bien que celle de l'agent (CE,26juill, 1918 époux
Lemonnier)
La jurisprudence ultérieure devait élargir le champ d'application de la
théorie du cumul de responsabilités. En effet il suffit que la faute
personnelle soit commise dans le service pour que la responsabilité de
l'administration soit engagée : tel est le cas d'un vol commis par un
receveur des postes dans l'exercice de ses fonctions
(CE,21,avr,1937,delle Quesnel).
De ce qui précède ,on pense qu’il serait opportun d’apporter une
modification fondamentale aux dispositions de l’article 80 du DOC et
ce en y injectant ce passage « l’État est directement responsable des
dommages causés par les fautes personnelles de ses agents qu’elles
soient commises dans le service ou à l’occasion du service,ou hors de
service pourvu qu’elles ne soient pas dépourvues de tout lien avec
celui-ci »
2-4-Le contentieux électoral
Comme on peut s'y attendre , la compétence des tribunaux
administratifs en matière électorale est loin d'être claire.
Une lecture cumulative des disposions de la loi n 41/90 permet de
relever que d’un coté , l'article 8 de la loi n 41/90 se borne à disposer
en termes généraux et péremptoires que « les tribunaux administratifs
sont compétents pour connaître des litiges nés à l'occasion de
l'application de la législation et de la réglementation en matière
électorale »

70
De l’autre , l'article 26 de la loi n 41/90 se contente de délimiter ses
contours . En effet, celui-ci dispose que les tribunaux administratifs
sont compétents pour connaitre du contentieux touchant notamment :
-les élections des conseils communaux ;
-les élections des assemblées de préfectures et des provinces ;
-les élections des chambres d'agriculture ;
-les élections des chambres d'artisanat ;
- les élections des chambres de commerce et d'industrie ;
-les élections des représentants du personnel au sein des commissions
paritaires ;

Une analyse fine des dispositions de l’article en question laisse


apparaitre l’absence d’un certain nombres de litiges1 . et c’est là que
va surgir la question de savoir, s’ il faut attribuer une portée
restrictive ou constructive à l’article 26 de la loi n 41/90 ?
Il faut savoir que cette question a fait l’objet d’un âpre débat
déclenché par les juges administratifs marocains. Ainsi dans la ligne

________________________
1- Il s'agit notamment :
- du contentieux relatif à élection des représentants des Facultes et universités.
- du contentieux relatif à l'élection des assemblées régionales.
- du contentieux relatif à élection des membres des chambres de la pêche maritime.
- du contentieux relatif à l’élection des membres des ordres professionnels (à l’exception de
l'ordre des avocats) .

71
de sa jurisprudence la cour suprême s’est attelée à développer une
interprétation restrictive de l'article 26 de la loi instituant les tribunaux
administratifs1 .
_____________________
1- Dans son arrêt rendu le 22/10/1995 la cour suprême déclare que « L'article 26 de la même
loi 41/90 instituant les tribunaux administratifs a déterminé à titre restrictif les recours
électoraux . ... qu'il en résulte que les élections des ordres professionnels telle que celle des
experts comptables échappent à la compétence des tribunaux administratifs. » (CSA,arrêt
n417,du 22/10/1995 , REMALD, n 14/15,p 49 )
La cour consacre la même position en adoptant presque le même argument « Attendu que si le
législateur a reconnu parmi les compétences des Tribunaux Administratifs, selon l'article 8 de
la loi instituant les dites Juridictions, que celles ci connaissent des litiges découlant de la
législation et de la réglementation en matière électorale, l'article 26 de la loi n° 41/90
instituant les Tribunaux Administratifs a fixé à titre limitatifs les recours électoraux qui
relèvent du ressort du ressort des tribunaux administratifs au lieu des Tribunaux de première
instance.
Attendu que par référence à l'article sus indiqué, il ressort qu'il a limité ces litiges aux recours
visés dans les lois régissant les élections des conseils des communes urbaines et rurales et des
chambres d'industrie artisanales et des élections des représentants à double représentation .
Attendu que l'interprétation de la formulation de l'article 26 sus indiqué fait ressortir qu'à
l'exception des dites compétences en matière électorale conférées aux Juridictions
administratives à titre limitatif, les Tribunaux de pleine Juridiction demeurant compétent pour
connaitre du reste des litiges en matière électorale.
Attendu qu'en conséquence les élections professionnelles institutions réglementées telles que
le conseil des experts comptables ne relèvent pas de la compétence des tribunaux
administratifs » ( Arrêt, n 427 du 12 octobre 1995, Dossier n 419/1995, in Arrêts de la
chambre administrative, traduits de l’arabe ,Édition 2007, p 148 ).
Aussi fidèle à sa ligne jurisprudentielle la cour déclare dans son arrêt rendu le 24/9/1997 « Le
législateur a déterminé dans l'article 26 de la loi instituant les tribunaux administratifs les
types de recours électoraux que les tribunaux administratifs connaissent...à titre restrictif et ne
figure nullement le présent recours relatif à l'élection du président des sections sciences
économiques ...chose qui signifie que c'est le tribunal ordinaire qui est apte à connaître dudit
recours étant donné que ce dernier ne figure pas parmi les recours attribués pour en connaitre
à titre restrictif aux tribunaux administratifs... » (C S , n1253 ,le 24/9/1997)
L’attitude de cette cour va être plus explicite dans l’arrêt Ligue sud de football -« Attendu
que l'article 8 de la loi 41-90 énumère à titre limitatif les attributions des juridictions
administratives et alors même qu'il inclue parmi ces attributions celles donnant compétence
aux dites juridictions de connaître des litiges nés de l'application de certains textes législatifs
et règlements relatifs aux élections, il n'empêche que le titre IV de ladite loi notamment
l'article 26 détermine la nature de ces litiges électoraux qui rentrent dans la compétence des
tribunaux administratifs …. et qui relevaient auparavant des
../..

72
Par contre ,sous le signe du critère de service public , les tribunaux
administratifs se sont attachés à développer un aspect constructif de
l’article en question 1 .

________________________________________
../..tribunaux ordinaires, soit en l'occurrence les recours prévus au dahir du l septembre 1959
relatif aux élections des communes urbaines et rurales, abrogé par le dahir 6/11/1992 ainsi que
les recours prévus au dahir du 28/6/1963 relatif au régime des provinces et préfectures et leurs
assemblées, également les recours prévus au dahir du 24/10/1962 fixant le statut des chambres
d'agriculture, et ceux prévus au dahir du 28/6/1963 fixant le statut des chambres d'artisanat, et
le dahir du 28/1/1972 fixant le statut des chambres de commerce et d'industrie.
Attendu que le législateur a en outre, dans son article 26 alinéa 3, ajouté la compétence
en matière d'élections des représentants des commissions paritaires prévus au dahir du
24/2/1958 formant statut particulier de la fonction publique. Attendu que vu ce qui précède, la
compétence des tribunaux administratifs en matière électorale reste déterminée à titre limitatif
et exceptionnel auquel on ne peut y déroger, encore moins élargir son champ d'application à
d'autres litiges électoraux qui n'y sont pas énumérés.
Par conséquent, la décision du tribunal administratif de Marrakech déclarant celui-ci
compétent, reste infondée, …» ( Arrêt n 573, 5/1/1996, Ligue sud de football, appelante
Mouloudia club de Marrakech ; REMALD, n° 25, octobre-décembre 1998 , p137)
1- Dans son jugement rendu le 19/12/2001, le tribunal administratif d’Oujda décide « attendu
que l'article 26 de la loi 41/90 instituant les tribunaux administratifs même s'il a délimité les
domaines du contentieux électoral dont la connaissance est attribuée aux tribunaux
administratifs , l'article 8 de la même loi est formulé en termes généraux, puisqu'il a prévu que
cette dernière est compétente pour la mise en application des textes législatifs et
réglementaires relatifs aux élections.
Attendu qu'en vu de la mise en application des deux textes...le tribunal considère que le
texte sensé être appliqué en matière électorale est l'article 8 .. que le critère déterminant
la compétence des tribunaux administratifs en matière électorale ...est l'application des
procédés de Droit public en l'opération électorale en vu de l'organisation d'un service public
par les procédés de Droit public, vu qu'il n'existe aucun texte qui détermine l'instance
compétente pour statuer en contentieux électoral , c'est l'ordre administratif qui demeure
compétent.. . » (TA Oujda ,n28/2001,19/12/2001)

73
2-5- Le contentieux de la voie de fait
Il y a voie de fait quand l'administration porte atteinte à la propriété
privée ou à une liberté fondamentale en procédant dans des conditions
irrégulières à l'exécution d'office ,ou bien en excusant par la force une
décision manifestement insusceptible de se rattacher à l'application
d'un texte législatif ou réglementaire .
Si sous l'ombre du système de l'unité de juridiction ,les difficultés
posées par le contentieux de la voie de fais touchaient essentiellement
aux questions de procédure. la création d'une juridiction
administrative avait pour implication de problématiser la question de
la compétence relative à la voie du fait surtout que l'article 8 de la loi
n 41/90 ne dit aucun mot . Un silence qui va conduire à des débats
jurisprudentiels et doctrinals très contrastés ,
2-5-1- Divergence de la jurisprudence
Comme l'enseigne le doyen AUBY dans la notion du contentieux
administratif le litige n'est pas seulement entre partie, mais il est aussi
entre juridictions. le contentieux de la voie de fait en est un parfait
modéle.
En effet,dans son jugement dit Rachele et Consorts, le juge
administratif de Casablanca1 s'est estimé compétent pour faire cesser
______________________________

265- « les circonstances qui ont conduit à la création des tribunaux administratifs et le rôle qui
leur est assigné de rendre justice au administrés ,notamment la sauvegarde de la propriété
privée contre les actes de l'administration,témoigne d'une transformation profonde qui s'est
opérée sur les frontières des compétences des deux ordre de juridictions »(T.A,Casablanca,26
avril 1994,cité in la voie de fait et le droit de BENABDELLAH . M.A,REMALD ,n14-15,
p46 )

74
la voie de fait .Par contre ,le tribunal administratif de Rabat 1 et celui
de Meknès ont conclu à leur incompétence2 .
Mais après avoir avancer une interprétation très restrictive de l’article
8 de la loi n 41/90 excluant la compétence des tribunaux
administratifs ;ces deux juridictions vont respectivement rectifier leur
position dans les jugements dits ‘’Zeroual3’’ et ‘’Akouh’’4 .
__________________________________________
1-« Attendu que le litige concerne l'atteinte de l'administration à une propriété privée …., ce
qui est appelé en doctrine et en jurisprudence une voie de fait
Attendu que lorsque l'administration abandonne sa qualité de puissance publique
jouissant des prérogatives, c'est la juridiction ordinaire, gardienne des droits et des libertés qui
est compétente pour mettre fin à la voie de fait,..incompétence » (T. A Rabat, jugement du 23
février 1995, cité in REMALD, n 13, 1995, p 89 ).
2-« Attendu que le recours vise à se prononcer sur l'irrégularité de l'emprise et la levé de
la main mise sur l'immeuble en question.
Attendu que la partie défenderesse soulève l'incompétence des tribunaux administratifs
considérant que l'examen de la régularité ou l'irrégularité de l'occupation du dudit immeuble
par la partie défenderesse,exige de s'assurer laquelle des parties a un droit certain sur
l'immeuble objet du litige,dans le cadre d'une action en revendication...cette action exige
l'examen des pièces présentées par les parties et leur appréciation conformément aux règles de
droit privé que de ce fait l'action en question ne figure pas parmi le bloc de compétence
reconnu aux tribunaux administratifs, tel qu'il est défini à l'article 8.. » (tribunal administratif
de Meknès /Achour jugement n 95/3 le 95/3/1)
3 -« Le tribunal administratif est compétent, compte tenu de la plénitude de juridiction qu’Il a
dans le cadre du plein contentieux, pour statuer sur tout litige administratif …
Il n'y a pas d'inconvénient pour le tribunal d'abandonner une jurisprudence antérieure qui ne
concorde plus avec l'évolution économique et societale. Le défaut de preuve de voie de fait
entraine le rejet. » (TA. Meknès, 2 mal 1996, Zeroual, cite in ,BENABDALLAH. M.A « Sur
la compétence des tribunaux administratifs en matiere de voie de fait, Note sous T.A.,
Meknès, 2 mai 1996. T.A , Rabat,9 mai 1996 , Akouh,REMALD,n 16, juillet-septembre 1996
p98 )
4- « Attendu qu'il s'agit d'une voie de fait administrative sur la propriété privée du requérant;
et que ce tribunal a estimé antérieurement que la juridiction ordinaire c'est la juridiction
protectrice des libertés publiques et des propriétés privées et que, par conséquent, il déclarait
son incompétence de statuer sur de telles demandes suivant en cela la jurisprudence française.
- Mais attendu que ce tribunal a décidé de revenir sur cette jurisprudence pour :
1. La première tient au fait que cette jurisprudence résulte de racines historiques spécifiques à
un pays étranger et, par conséquent, son application à la réalité marocaine../..

75
De son coté , la cour suprême , dans l’affaire ‘’Biscour’’1 a préféré au
début procéder à une interprétation restrictive de l’article 8 de la loi
41/90 pour finir par la suite à réviser sa position dans l’espèce dit
‘’Amouri’’2 et, quelque mois après, dans un arrêt du 19 septembre
1996, dit ‘’Inous’’3, la haute juridiction va exclure définitivement la
compétence des tribunaux ordinaires pour connaitre en cette matiere:
« Les articles 79 et 80 du Dahir portant code des obligations et
contrats ne s’appliquent pas à la voie de fait administrative car l’article
79 cité concerne la responsabilité de l’État et des municipalités pour
les préjudices causés directement par le fonctionnement de leurs

___________________________
…/..doit être écartée,
2-La deuxième raison est relative au but réel de l'institution des tribunaux administratifs dans
notre pays consistant dans la défense des droits des citoyens et la protection de l'abus de l’État
et de l'autorité administrative qu'elle que soit la nature de cet abus.
-Attendu que, au surplus, les tribunaux administratifs ont plénitude de juridiction
pour examiner tous les litiges administratifs sauf ceux qui ont été exceptés par un texte
spécifique ;et tant que l’article 8 de la loi 41/90 instituant les tribunaux administratifs n'exclut
pas les affaires de cessation de la voie de fait des compétences qui lui sont attribuées ; ces
tribunaux demeurent compétents pour statuer sur cette demande qui de par sa nature concerne
un litige administratif.
- Attendu que face à ces données, et en concordance avec l'intention du législateur
de la loi 41/90 susmentionnée, la juridiction administrative est la juridiction naturelle pour
statuer sur les demandes relatives à la voie de fait.( T.A, Rabat 9 mai 1996, Akouh,in
,BENABDALLAH.M.A,Ibid, p 98 )
1-« Considérant qu'à la lecture de l'article 8 de la loi n 41/90 , il s'est avéré que c'est à bon
droit que le tribunal a soutenu,
Considérant que l'article 8 de la loi 41/90 a limité les compétences des tribunaux
administratifs,
Considérant que cet article limite les compétences des tribunaux administratifs,
Considérant que cet article limite la conpétences des tribunaux administratifs à la réparation
des dommages que cause l'activité des personnes publiques » (CSA20 juillet, 1995 Bisrour)
2- C.S.A, 20 mai 1996, Ammouri, REMALD n° 17, 1996, p. 27.
3- Cité par , BENABDALLAH.M.A « La voie de fait administrative en droit marocain ,
REMALD n°80, 2008.

76
administrations et les fautes de service de leurs agents, tandis que
l’article 80 concerne la responsabilité personnelle des agents de l’État
et des municipalités. Le jugement déclarant l’incompétence du
tribunal ordinaire est confirmé » .
2-5-2- Divergence de la doctrine
La doctrine marocaine s'est investie elle aussi dans ce débat acharnant.
Deux thèses antinomiques se sont élaborées autour de cette question.
-Les adeptes

Fervent défenseur de la compétence des tribunaux administratifs pour


connaitre en matière de voie de fait , notre Professeur Ben Abdellah 1
invoque tout un ensemble d’arguments plaidant en faveur de cette
thèse :
- L'article 8 n’interdit nullement aux tribunaux administratifs de faire
cesser la voie de fait, car il faut bien comprendre que la loi a entendu
ériger les tribunaux administratifs en juridiction de Droit commun en
matière administrative et que son esprit ne s'oppose point à ce que
l'on procède à un transfert vers la compétence du juge administratif de
la connaissance des litiges nés d'une voie de fait. On ne cessera
jamais de le respecter. Historiquement, théoriquement et pratiquement
rien ne l'interdit.
- A la différence du cas français, la création administrative n'est pas
intervenue chez nous pour accorder à des tribunaux l'administration un
privilège de juridiction, mais pour mettre en place des juges
spécialisés afin, d'une part de mieux contrôler l'administration et
corrélativement décongestionner le prétoire du juge civil encombré
par des affaires sadministratives qui le déconcentrent et le dévient de
sa spécialité de droit privé.
_____________________________
1-BENABDELAH .(M) (A), « compétence administrative et voie de fait », REMALD , n13,p
87.

77
-Comparable à une incendie, la voie si elle est établie, doit être éteinte
dans les délais les plus brefs, sinon plus le temps s'écoulera, plus
l'efficacité du jugement s'en ressentira. il faut alors limiter autant que
possible les risques d'errements en reconnaissant sur la base du critère
organique l'exclusivité de la compétence à une juridiction : celle qui a
naturellement habilitée à juger été récemment instituée,
- Il est incontestable que l'article 8 de la loi 41/90 ne prévoit pas
parmi les attributions du juge administratif la compétence en matière
de réparation de voie de fait. On ne doit pas perdre de vue que l'article
19 de la même loi donne compétence au président du tribunal
administratif, ou la personne déléguée par lui d'agir en tant que juge
des référés pour connaître des demandes provisoires et conservatoires.
La voie de fait suppose l'urgence et on ne voit pas quelle est l'utilité
de cet article 19 s'il n'est pas appliqué en cette matière 1 .

-Il suffit de relire le discours royal du 8 mai 1990 pour se rappeler


l'esprit qui a présidé à la création des tribunaux administratifs et ne
pas perdre de vue cette phrase pleine d'enseignements : « nous ne
serons véritablement un État de droit que le jour ou chaque marocain
disposera du moyen de défendre ses droits; quelque soit l’adversaire »
discours royal du 3 mai 1990 discours était interview de sa Majesté le
roi Hassan II » .

-Si les tribunaux ordinaires devaient être compétents en matière de


voie de fait, cela aurait eu pour conséquence de compliquer la
procédure en ce sens que l'on serait devant des cas difficiles
__________________________
1- « la répartition des compétences administratives et civile : le cas de la voie de fait »,
REMALD , n14,1998 , p 54.

78
d'identification ou le juge ordinaire pourrait décliner sa compétence en
soutenant qu'il n'est pas devant une voie de fait et ou également le
juge administratif déclinait la sienne en avançant qu'il s'agit bel est
bien d'une voie de fait. Le requérant serait complètement perdu au
point peut être de renoncer à toute poursuite parce qu'une action en
justice est loin d'être gratuite et outre cela, elle n'est pas sans causer
des angoisses que tout être normalement constitué préfère éviter.
En octroyant la compétence à la juridiction administrative, on aurait
offert des perspectives nettement meilleures .ainsi si devant le juge
administratif, le requérant soutient la voie de fait, le juge de cette
juridiction serait compétent pour la prévenir ou la faire cesser. Si au
contraire devant le même tribunal, il ne s'agit pas d'une voie de fait ce
serait le même juge qui serait naturellement compétent en devenant
juge d'une simple action en réparation d'un dommage de nature
administrative. cela permet au justiciable de faire l'économie d'une
procédure 1.
Aussi , étudiant avec avidité le Droit de propriété au Maroc, le
professeur SERHAN, écrit que ‘’le courant inauguré par le juge
administratif est novateur puisqu’ il couronne un processus de
publicisation du droit de propriété entamé depuis 1957 par la
jurisprudence et intégré par le texte instituant les tribunaux
administratifs.’’2
Sans oublier biensûr l’éminent Michel ROUSSET .celui-ci écrit ‘’ le
fait que les tribunaux administratifs décident avec l'aval de la cour
suprême, de se déclarer compétente pour statuer sur les voies de fait
___________________________
1- BENABDELAH .(M). (A), « d'une réparation de voie de fait ignorant un arrêt de la cour
suprême »,REMALD ,n 47, 2002,p l15-116.
2- SERHANNE. (EL Houssain) « les développements récents du droit de la propriété dansle
contentieux administratif marocain » in jurisprudence de la cour suprême et mutation
economique , p34 .

79
commises par les autorités administratives c'est-à-dire les atteintes,
sans droit à la propriété et aux libertés, est un progrès tout à fait
remarquable de la protection juridictionnelle des droits et libertés 1 .

D'autres juristes2 sensibilisés au même problème affirment que le fait


que la cour suprême tranche en faveur de la compétence du juge
administratif constitue une simplification très appréciable pour les
justiciables :
-Les juridictions administratives sont juges de droit commun de la
matière administrative.
- La cessation de la voie de fait nécessite l'existence d'un corps de
magistrat expérimenté pouvant clairement constater l'existence d'une
voie de fait ou non.
-Les opposants
D'autres prennent le contre-pied de cette position. C'est le cas du
conseiller Skali Hossieni3 . Celui-ci avance qu’ en appliquant le
système de compétence par détermination de la loi le juge
administratif serait le juge d'attribution. En revanche, en maintenant
les dispositions de l'article 18 du CPC. le juge judiciaire serait le juge
du Droit commun de la matière administrative .
De sa part ,le conseiller royal HASSOUN Jafar4 avait écrit ‘’ la
doctrine réclame le rapatriement de la matière dite de voie de fait dans
____________________________
1- ROUSSET .(M) , « Proclamation, protection et devenir des droits et libertés ; point de
repère pour un bilan (1958/1998) »,REMALD ,n l8, p23.

2- OUZZANI CHAHIDI. (H), « Le juge administratif et les droits de l'homme »,REMALD


,n47,p20. – v, aussi son article, « La voie de fait et la compétence du juge des référés »,revue
marocaine de droit, 1985,p 157,et suiv.
3- Skali .(Elhoussaini ), « La voie de fait : entre les juridictions ordinaires et administratives »
,REMALD, n 1,année 1995, (en arabe) .
4- HASSOUN.(Jafar), « A propos de la voie de fait » , REMALD, n16, juillet- septembre 1996
,p 75 .

80
l'ordre juridictionnel administratif tant en ce qui concerne sa
constatation et sa cessation qu'en matière de responsabilité et de
réparation de préjudices qui en résultent.
C'est là une réclamation animée par un certain pragmatisme, mais un
pragmatisme noble, puisque nourri par le souci d'épargner à
l'administré l'embarras d'une alternative entre deux ordres de
juridiction en quête du juge auquel revient de trancher un litige dont
l'urgence n'est nullement contestée.
Nous partageons également ce pragmatisme, que les textes hélas ne
favorisent point, au moins dans l'état actuel de la chose et jusqu'à
nouvel ordre ‘’
B- Nouvelles compétences attribuées aux tribunaux administratifs
par le législateur
Il est à signaler que la compétence du juge administratif découle aussi
d’un certain nombre de textes de lois. Il s’agit bien évidemment de :

- La loi n° 02-03 relative à l'entrée et au séjour des étrangers au


Royaume du Maroc, à l’émigration et l'immigration irrégulières :

Cette loi fixe et délimite le champ d’intervention du juge administratif


en ce domaine1.
___________________________
1 -On peut faire allusion aux articles suivants :
-Aux termes de Article 20 : « L'étranger dont la demande d'obtention ou de renouvellement
d'un titre de séjour a été refusée ou qui s'est vu retirer, ce titre peut formuler un recours
devant le président du tribunal administratif en sa qualité de juge des référés dans le délai de
quinze (15) jours suivant la date de notification de la décision du refus ou du retrait. »
-Aux termes de Article 23 : « L'étranger, qui fait l'objet d'une décision de reconduite à la
frontière, peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification, demander l'annulation
de cette décision au président du tribunal administratif, en sa qualité de juge des référés.

Le président ou son délégué statue dans un délai de 4 jours francs à compter de la saisine. Il
peut se transporter au siège de l'instance judiciaire la plus proche du lieu où se trouve
l'étranger, si celui-ci est retenu en application de l'article 34 de la présente loi.. »…/..»

81
Dans l'affaire Farouk Ben Mustapha Izzat / contre le directeur
général de sûreté nationale, Le juge s'est appuyé également sur la loi
n° 02-03 pour prononcer l'annulation de la décision de refus de
délivrance de l'autorisation de séjour « est opportun de signaler la
jurisprudence du Conseil d'Etat français , qui s'est établie sur la
nécessité de contrôler l'effectivité des fautes constituant « une menace
à l'ordre public » comme raison invoquée pour prendre une décision
d'expulsion d'un étranger …….
Attendu que la prise en compte des éléments humanitaires, au
moment de la prise des décisions concernant l'entrée et le séjour des
étrangers, est devenue un engagement général , après avoir été
consacré par différentes législations, la dernière en date étant la
loi 02-03 relative à l'entrée et au séjour des étrangers au Maroc... dont
l'article 29 consacre le droit de la personne étrangère à ne pas être
éloignée vers un pays si sa vie et sa liberté sont menacées ou s'il
pourrait y subir un traitement inhumain... »1 .

______________________________
…/..Aux termes de Article 24 : « Les dispositions de l'article 34 de la présente loi peuvent
être appliquées dès l'intervention de la décision de reconduite à la frontière. Cette décision
ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa
notification ou, si le président du tribunal administratif est saisi, avant qu'il n'ait statué.

Si la décision de reconduite à la frontière est annulée, il est immédiatement mis fin aux
mesures de surveillance prévues à l'article 34 ci-dessous, et l'étranger est muni d'une
autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'une décision relative à sa situation soit de
nouveau prononcée par l'administration.

Le jugement du président du tribunal administratif est susceptible d'appel devant la chambre


administrative de la Cour suprême dans un délai d'un mois à compter de la date de
notification. Cet appel n'est pas suspensif. 

1- Jugement sans références cité par EL GUEDDARI.(A) , « La condition juridique des
migrants au Maroc » , REMALD, n 129-130, juillet-octobre 2016.

82
- La loi organique n 29-11 du 22 ocobre 2011 relative aux partis
politiques

Aux termes de son article 7 « le tribunal administratif statue


obligatoirement sur la requéte visée au premier alenéa ci-dessus dans
un délai de 15 jour à compter de la date de son dépôt au greffe dudit
tribunal »
- Les lois organiques relatives à l’organisation des collectiités
territoriales du royaume
Il ressort de ces trois lois organiques, que le juge administratif est
chargé aussi bien de sanctionner les institutions décentralisées et leurs
organes pris individuellement que de Contrôler la légalité de leurs
actes1 .
Une partie de la doctrine2 estime que l’intervention du juge est
présentée comme un gage d’impartialité et d’indépendance dans la
mesure ou il n’est pas soumis au pouvoir hierarchique des membres du
gouvernement , plus particulierement du ministre de l’Interieur. Alors
que d’autres Font remarquer que le juge administratif doit se doter de
la sagesse à fin de contribuer à la consolidation des acquis
démocratiques sans tomber dans le piege des tractations politiques
bornées 3.
________________________________

1- On peut citer à titre d’exemple: Article 62, Article 63, Article 68 , Article 72, Article 117
de la loi organique n 113/14 .

2- ZANANE. (A) , «  Le contrôle administratif des collectivités territoriale » , in Le droit


constitutionnel des collectivités territoriales,actes des x émes journées Maghrébines de Droit
organisées par le réseau des juristes Maghébins (REJMA) p 200 .

3-

- ‫ المجلة المغربية اللنظمة‬،‫احمد تطور القضاء االداري المغربي بعد ربع قرن من احدات المحاكم االدارية‬.، ‫اجعون‬
15 ‫ ص‬2019، ‫ اكتوبر‬17 z‫ العدد‬،‫القانونية و السياسية‬

83
Paragraphe2 : Le développement de la compétence matérielle à
l’initiative du juge
Tout au long de l'histoire du contentieux administratif la détermination
de la compétence des juridictions administratives n'était pas toujours
nettement fixée. Elle est le fruit d'un raffinement extrême de critères
de délimitation de compétence.
Il y a d’abord le critère organique selon lequel, échappe à l’ordre
judiciaire tous les procès dans lesquels l'administration se trouve
impliquée.
Le juge administratif a dû retenir par la suite le critère matériel .
L’intérêt fondamental de ce critère réside dans le fait qu’il contribue
amplement à résoudre le problème de la répartition des compétences.
Ce critère est composé de deux branches : le critère du service public,
et celui lie à l’usage des prérogative de puissance publique.
L’arrêt BLANCO demeure toujours célèbre dans ce domaine,ainsi que
l’arrêt « TERRIER » et l’arrêt « THEROND » qui ont marqué
l’évolution de la notion du service public .
Au Maroc , le critère matériel va faire un grand écho dans la
constitution de 2011. L’article118 dispose « Tout acte de nature
règlementaire ou individuelle, pris en matière administrative,peut
faire l’objet de recours devant la juridiction administrative
compétente »
____________________________
- RAGALA OUZANI. A , Élément du contentieux des contrats de l’Administration ,
REMALD , n 41, novembre - décembre 2001 ,p 65 .
-Dans l'arrêt dit Bougibar Abdelkrim, la cour a décidé que «  le directeur général nommé par
Dahir,et ayant pour mission d’assurer l’éxecution de l’ensemble des decisions prises par le
conseil d’administration a la qualité d’agents publics » ( arret cité EL AOUANI A, Le statut
des salariés des E.P.IC et la jurisprudence de la chambre administrative de la cour supreme
,revue Marocaine de droit et d’economie du developement,n 17-1988 p 42 ) –v , ROUSSET
M Les incidences du critere organique sur le traitement du contentieux administratif,revue
juridique politique et economique du Maroc ,n 10 1981, p 39-50

84
S’agissant de la deuxième composante , l’usage des prérogatives de
puissance publique fut consacré par l’arrêt Association syndicale du
canal de Gignac .l’intérêt de cette décision est qu’ elle a fait de ce
critère un élément essentiel de la définition de l’établissement public .

Au Maroc, dans le contentieux des télécommunications, le tribunal


administratif d’Agadir avait considéré que le contrat d’abonnement
téléphonique constitue bel et bien un contrat administratif . Pour
fonder sa compétence en l’espèce , il a estimé que l’Office national
des postes et télécommunication (ONPT) constitue un établissement
public à caractère commercial qui exerce une activité vitale de l’État
( critère du service public) en ce domaine ( Articles 12 et 17 de la loi n
1-84-8 du 10/01/1984) et il est donc à considérer qu’il possède la
qualité de personne morale de Droit public. Mais le plus intéressant
c’est que le juge administratif a fait référence aussi au critère des
prérogatives de puissance publique pour confirmer sa compétence et
ce en invoquant l’article 20 dudit Dahir qui reconnait audit Office le
droit de recourir à la procédure de recouvrement consacrée par le
Dahir du 21/08/1935 .

___________________________
-T.C. 9 dec , 1899 , Association Syndicale du Canal de Gignac .
- Long.M. et autres, les grands arrêts de la jurisprudence administrative,Edition SEEY,29 .
- LAARAJ.M , Contentieux des télécommunications au Maroc ,REMARC, n3-4 2005 ,p 81
- "‫ه‬zz‫يل ديون‬zz‫لت تحص‬zz‫د و المواص‬zz‫ يباشر المكتب الوطني للبري‬1984 ‫ يناير‬10 ‫ من ظهير‬20 ‫وحيث انه بصريح الفصل‬
‫ بشان تنظيم المتابعات في ميدان الضرائب و الرسوم التي في حكمها‬21/8/1935 ‫بطريقة االكراه البدني وفقا الحكام ظهير‬
‫وحيث ان هده الوسيلة القانونية المتاحة للمكتب الوطني المدعى عليه قصد تنفيد عقود االشتراك هي وسيلة من وسائل‬
-19 ‫ بتاريخ‬95-593 ‫السلطة العامة و اليمكن تصور استعمالها في العقود الخاصة" ( المحكمة االدارية باكادير حكم عدد‬
‫ سلسلة مواضيع‬،‫ منشورات المجلة المغربية لالدارة المحلية و التنمية‬،‫ محمد بوعرصة ضد المكتب الوطني للبريد‬1995
) 171‫ ص‬9 ‫الساعة العدد‬

85
portant règlement sur les poursuites en matière d’impôts et taxes
assimilées .
Un troisième critère est pris en considération par le juge administratif
est celui du faisceaux d’indices .L’imprécision du critère lie au service
public a amené la jurisprudence à dégager certains indices permettant
de caractériser l’activité de service public. Parmi ces indices ,on peut
citer :
-La mission d’intérêt général ;
-Un droit de regard exercé par l’administration sur les modalités
d’accomplissement de cette mission ;
-L’organisme chargé de la gestion de service public est doté de
prérogatives de puissance publique .

Commentant l’arrêt dit Ligue sud de football c/ Mouloudia club de


Marrakech et consorts ,l’éminent Rousset avait proposé de retenir la
théorie faiscaux d’indice pour faire prévaloir la compétence du juge
administratif en cette matière .
Ce juriste a repéré les indices suivant : d’abord il s’agit d’un
organisme privé chargé d’une mission de service public.
S’ajoute à ce la que ces associations sont soumises au contrôle du
pouvoir public dés lors qu’elles désirent se placer dans le cadre de la
loi sur l’éducation et le sport.
Ces associations doivent adopter des statuts- types conformes à des
statuts-types établis par décret .

__________________________
- ROUSSET.(M) , Note sous arrêt n 673,5/1/1996 ; Ligue sud football c/ Mouloudia club de
Marrakech, organisme privé chargé d’une mission de service public-elections compétence
administrative,REMALD, n25,Octobre- décembre 1998 ,p 131-132 .
ANWAR. M ,L’action administrative,REMALD, collection Manuels et Travaux
universitaires,n 91, p117.

86
‫‪Enfin, elles disposent de prorogatives de puissance publique ( pouvoir‬‬
‫)‪réglementaire, pouvoir disciplinaire‬‬
‫‪C’est dans l’affaire Ligue de rugby du 6/3/2002 que le juge‬‬
‫‪administratif d’Oujda va admettre ce point de vue. La même position‬‬
‫‪sera adoptée plutard par les juges de la cour de cassation dans un arrêt‬‬
‫‪rendu le 14/09/2017.‬‬

‫_______________________‬

‫حيث لئن كانت الجامعة الملكية المغربية للريكبي من اشخاص القانون الخاص يسري على تاسيسها و تسييرها احكام" ‪-‬‬
‫الظهير الشريف رقم ‪ 376-58-1‬الصادر في ‪ 15/11/1958‬فانه باعتبارها مكلفة بتسيير مرفق رياضي من خالل تنظيم و‬
‫تاطير االندية المنضوية تحت لوائها في اطار القانون المنظم لها مستعملة في دلك وسائل القانون العام و امتيازات السلطة‬
‫العامة طبقا للمعيار المادي دلك ان االقتصار على المعيار العضوي وحده لتحديد‪ z‬القرار االداري انطالقا من الجهة االدارية‬
‫المصدرة له سيؤدي بالقضاء االداري الى النظر نزاعات تدخل في ايطار القانون الخاص من جهة و من جهة اخرى يمنع‬
‫القضاء االداري من النظر في النزاعات المرتبطة بالمرافق العامة و بامتيازات السلطة العامة التي تمنح الشخاص القانون‬
‫الخاص و هدا ما جعل المشرع المغربي يتفهم هدا الوضع باعطاء القضاء االداري امكانية االخد بالمعيار المادي الى جانب‬
‫العضوي في تحديد القرار االداري حيث يعتبر مكمال له اد نصت المادة ‪ 20‬من القانون المدكور على عبارة '' كل قرار‬
‫اداري'' و لم يقتصر كما هو االمر سابقا في ظهير ‪ 1957‬و الفصول ‪ 353‬من قانون المسطلرة المدنية‪ z‬على القرارات‬
‫الصادرة عن السلطات االدارية و من هدا المنظور تبقى قرارات الجامعة المدكورة تكتسي طابعا اداريا مادام انها تدخل في‬
‫امتيازات السلطة العامة بهدف تحقيق المصلحة العامة و تكون المحكمة االدارية مختصة للنظر في الطعون الموجهة ضدها‬
‫طبقا للمادة الثامنة من قانون المحاكم االدارية "(المحكمة االدارية بوجدة‪ -‬حكم عدد ‪ 55-2002‬بتاريخ ‪ ،6/3/2002‬اورده‬
‫استادنا احمد بوعشيق الدليل‪ ،‬العملي لالجتهاد القضائي في المادة االدارية‪ ،‬الجزء االول‪ ،‬المجلة المغربية لالدارة المحلية و‬
‫)التنمية‪ ،‬سلسلة دالئل التسيير ‪ 2004، 16‬ص ‪)158‬‬

‫حيث إن الجامعة الملكية لكرة القدم جمعية رياضة محدثة في إطار القانون المنظم ل لجمعيات كما تم تغييره وتتميمه"' ‪-‬‬
‫وتسري عليها أحكامه‪ ،‬تتكفل بمهام عامة في نطاق اختصاصها وفق المنصوص عليه في نظامها األساسي‪ ،‬كما تمنحها‬
‫السلطات العمومية مهمة العمل على تطوير البنيات التحتية الستقبال الجمهور ولممارسة رياضة كرة القدم والستفادة الجميع‬
‫منها بجميع أشكالها‪ ،‬فإن ما قامت به من أعمال ذات عالقة ب بناء أكاديمية‪ z‬محمد السادس لكرة القدم بسال الجديدة يندرج في‬
‫إطار تدبیرها لمرفق عمومي‪ ،‬تتمتع في ظل ما أوكل إليها في شأنه بامتیاز السلطة العامة‪ ،‬وتبقى بالتالي قراراتها‬
‫وتصرفاتها في هذا اإلطار خاضعة لرقابة القضاء اإلداري‪ ،‬والمحكمة االبتدائية‪ z‬لما خالفت هذا المنحي‪ ،‬تكون قد جانبت‬
‫الصواب ويتعين إلغاء حكمها‪..‬لهده االسباب ‪ ..‬قضت محكمة النقض بإلغاء الحكم المستأنف والتصريح باختصاص القضاء‬
‫اإلداري نوعيا ل لبت في الطلب وإحالة الملف على المحكمة اإلدارية بالرباط للنظر فيه طبقا للقانون " (فرار االغرفة‬
‫االدارية بمحكمة النقض رقم ز ‪ 1 /1130‬المؤرخ في ز‪ 14/09/2017‬ملف رقم ز ‪ 2764/1/2017‬الجامعة الملكية لكرة‬
‫القدم ضد بنقدور بيكري بن داوود و من معه المجلة المغربية لالنظمة القانونية و السياسة عدد ‪ 17‬اكتوبر ‪ 2019‬ص‬
‫‪) 313‬‬

‫‪87‬‬
Mieux encore , la pertinance de ce critére sera validée par le juge
administratif d’Agadir à l’occasion de sa connaissance des litiges
engendrés par l’activité de certains Etablissements tel que "Al
Omrane".
Dans l’espece Ibrahim DBABOU c/ ‘’Al Omrane’’, le juge
administratif d’Agadir s’est livré à la vérification systématique des
critéres susmontionnés et s’assurer de leur éxistence avant de conclure
à sa competence .

______________________________
-« Attendu que même si l’etablissement régional d'aménagement et de construction est
transformé en société anonyme dénommée "Al Omrane" il continue à gérer un service public
visant la satisfaction de l’intérêt général puisque l’article 2 de la loi n 03-27 susmentionnés
lui a confie de procéder aux opérations d'aménagement urbain et de construction, notamment
la création de nouvelles zones urbaines et la réalisation de projets d'habitat, ainsi que l'habitat
social et les lotissements, et les projets de résorption des bidonvilles et de l'habitat insalubre
et les programmes de maîtrise sociale desdits projets et la réalisation d'équipements ou
d'infrastructures liés aux programmes d'habitat. alors que l’article trois de la même loi a
exigé que son capital social soit entièrement souscrit par l'Etat. outre le règlement
intérieurs…disposant que c’est le ministre de l’Habitat qui préside son conseil
d’administration ,ce qui fait qu’il exerce ses activités sous le contrôle de l’Etat .
Attendu que les décisions des sociétés qui gèrent un service public et bénificiant des
prérogatives de la puissance publique sont soumises aux mêmes principes qui gouvernent les
actes administratives .
Attendu que les tribunaux administratifs sont compétents conformément à l’article 8 de la loi
portant sa création pour connaitre des demandes en annulation émanant des autorités
administratives …le ribunal se déclare compétent »’( T.A d’Agadir , jugement n 56/2008 du
11/03/2008 Ibrahim DBABOU c/ Al Omrane,REMALD , n 89 novembre- décembre 2009, p
179 )

88
Section 2 : La compétence territoriale des Tribunaux Administratifs

Paragraphe 1 :Le principe, le demandeur suit la juridiction du


défendeur 
En matiére de compétence territoriale l’article 10 de la loi n 41/90
renvoie à l’application des articles 27 à 30 du code de la procédure
civile .
En principe , les tribunaux administratifs retiennent la régle selon
laquelle «  le demandeur suit la juridiction du défendeur » c’est ce qui
ressort des dispositions de l’article 27 du CPC . celui-ci dispose «  la
compétence territoriale appartient au tribunal du domicile réel ou élu
du défendeur »
Cette régle a pour finalité de simplifier la tâche du défendeur, le
professeur Carbonnier explique ‘’ c’est une faveur à la défense, celui
qui prend l’initiative d’attaquer devra se déranger et venir plaider
devant le tribunal de son adversaire ‘’ . toutefois la doctrine considére
que le probléme est qu’en matiere administrative , le défendeur est
dans la plupart du temps c’est l’administration. on pourrait dire que
l’administration reçoit ainsi un véritable privilége : celui d’être en
principe jugée à son siége .

___________________________
- Carbonnier , Droit civil , TII , p 48
- ROUSSET . M, le contentieux administratif , ouv cit , Edition la Porte.

89
Paragraphe 2 : L’exception
Ces exceptions touchent les contentieux suivant :
-Le recours en annulation pour excès de pouvoir :
L’article 10 de la loi 41/90 dispose « les recours en annulation pour
excès de pouvoir sont portés devant le tribunal administratif du
domicile du demandeur ou devant celui dans le ressort territorial
duquel la décision a été prise  »
-Le contentieux relatif à la situation individuelle des personnes
nommées par dahir ou par décret :
L’article 11 de la loi 41/90 dispose « Sont de la compétence du
tribunal administratif de Rabat, le contentieux relatif à la situation
individuelle des personnes nommées par dahir ou par décret et le
contentieux relevant de la compétence des tribunaux administratifs
mais né en dehors du ressort de ces tribunaux. »
-Le contentieux lié aux contrats administratifs :
Aux termes des dispositions de l’article 28 du CPC « - En matière des
Travaux publics,devant le tribunal du lieu ou les travaux ont été
exécutés. –en matière de contrats dans les quels ou une autre
collectivité publique est partie devant le tribunal du lieu où le contrat a
été signé »
Le contentieux lié au recouvrement des créances de l’Etat :
L’article 141 de la loi n 15/97 dispose «  les litiges qui naîtraient de
l’application des dispositions de la présente loi relevent de la
compétence des tribunaux administratifs à raison du lieu où les
créances publiques sont dues »

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