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Revue de Neuropsychologie

1998, Vol. 8, n° 1, 125-154

Troubles de l'attention après


traumatisme crânien sévère : aspects
théoriques et rééducation
Philippe Azouvi, Josette Couillet et Nathalie Agar

Résumé

Les troubles de l'attention sont, avec les troubles de mémoire, parmi les
déficits les plus fréquents dans les suites d'un traumatisme crânien
sévère. La lenteur du traitement de l'information est une constatation
quasi-constante. L'existence, en plus du ralentissement, d'une altération
spécifique des mécanismes attentionnels, reste discutée. Un déficit spé-
cifique de l'attention divisée a pu être rapporté dans certaines études.
L'attention focalisée, étudiée par la résistance aux interférences, et
l'alerte phasique semblent en revanche relativement préservées. Les
résultats sur l'attention soutenue sont plus contradictoires. La rééduca-
tion des troubles de l'attention a fait l'objet de relativement peu d'études.
Douze publications ont été retenues. Elles ont en quasi-totalité utilisé des
techniques de ré-entraînement et de stimulation en faisant largement
appel à l'informatique. La majorité de ces études font état d'un bénéfice
thérapeutique. Toutefois, la généralisation dans la vie quotidienne n'a
pas pu être démontrée à ce jour.

Mots clés : traumatisme crânien sévère, troubles de l'attention, réédu-


cation neuropsychologique.
Key words: traumatic brain injury, attention disorders, neuropsycho-
logical rehabilitation.

Adresse de correspondance : Philippe Azouvi, Service de Rééducation


Neurologique, Hôpital Raymond Poincaré, 92380 Garches, France (e-
mail: philippe.azouvi@rpc.ap-hop-paris.fr).
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INTRODUCTION ASPECTS THÉORIQUES

Les difficultés de concentration et d'attention font partie des plaintes De nombreux travaux expérimentaux ont essayé d'élucider la nature
les plus fréquemment rapportées au décours d'un traumatisme crânien des mécanismes déficitaires (voir les revues de Van Zomeren et
sévère. Parmi les difficultés signalées par un groupe de 57 traumatisés Brouwer, 1994, pp. 63-94, et de Van Zomeren, 1995). Nous utiliserons
sévères deux ans après l'accident (Van Zomeren et Van den Burg, ici la classification proposée par Van Zomeren et Brouwer (1994). Ces
1985), la lenteur et les difficultés de concentration étaient présentes dans auteurs considèrent l'attention comme un état cognitif comprenant deux
33 3 des cas, la fatigabilité dans 30 3 et l'incapacité à faire deux choses dimensions : la sélectivité et l'intensité. La sélectivité correspond au
simultanément (c'est à dire un trouble de l'attention divisée) chez 21 3 nombre restreint d'informations qu'un sujet prend en considération. Il
des patients. Ponsford et Kinsella (1991) ont étudié les troubles de l'at- faut ici distinguer l'attention focalisée et l'attention divisée. L'attention
tention chez 50 traumatisés sévères à partir d'une cotation réalisée par focalisée correspond à la capacité à concentrer l'attention sur un stimulus
leurs rééducateurs (orthophonistes et ergothérapeutes) sur une échelle à pré-déterminé, et à ignorer les stimuli non pertinents, ou distracteurs.
15 items cotés chacun de 0 à 4, l'Attentional Rating Scale. Leurs résul- L'attention divisée correspond à la capacité à partager les ressources
tats étaient tout à fait comparables à ceux de Van Zomeren et Van den attentionnelles entre plusieurs stimuli pertinents simultanés. La notion
Burg (1985), puisque les deux troubles les plus fréquemment constatés d'intensité renvoie à l'état de vigilance ("alertness"), elle-même partagée
étaient la lenteur sur des tâches mentales et l'incapacité à faire attention en deux dimensions, tonique ou phasique. La dimension phasique cor-
à deux choses en même temps. Les études basées sur des évaluations respond aux changements rapides et soudains de la vigilance, par exem-
subjectives ou sur l'observation des patients sont donc concordantes sur ple en réponse à un signal d'alerte. La dimension tonique (attention
ces points. Les troubles de l'attention sont bien corrélés à la sévérité du soutenue) correspond à des variations plus lentes et' plus durables par
traumatisme. Dans l'étude de Van Zomeren et Van den Burg (1985), le exemple au cours du cycle nycthéméral, ou lorsqu'un sujet doit main-
pourcentage de patients se plaignant de troubles de l'attention était de tenir son attention sur des durées longues, dans l'attente d'un événement
173 chez ceux qui avaient présenté une phase d'amnésie post-trauma- peu fréquent (surveillance radar).
tique (APT) de moins de 7 jours et de 403 en cas d'APT de plus de 7
jours. Selon Van Zomeren (1995), la lenteur et l'incapacité à faire deux
choses en même temps sont les deux variables les mieux corrélées à la La lenteur du traitement de l'information
sévérité du traumatisme (mesurée par la durée de l'APT), avec des
coefficients de corrélation de Spearman de 0,47 et 0,52 respectivement. Mise en évidence du ralentissement cognitif. La lenteur mentale est
Les mesures de temps de réaction sont également significativement cor- une conséquence très fréquente des traumatismes crâniens. Elle a été
rélées à l' APT et à la durée du coma (coefficients de .66 et .62 respecti- mise en évidence dès les premières études expérimentales (Conkey,
vement selon Van Zomeren et Deelman, 1978). Les déficits attentionnels 1938 ; Ruesch, 1944), et largement confirmée par la suite (Norrman et
sont de plus bien corrélés avec le devenir socio-professionnel. Ainsi, van Svahn, 1961 ; Miller, 1970 ; Van Zomeren et Deelman, 1978 ; Van
Zomeren et van den Burg (1985) ont constaté que les deux plaintes fonc- Zomeren, 1981). Le ralentissement est un phénomène central chez les
tionnelles les mieux corrélées au statut professionnel, à deux ans, étaient traumatisés crâniens sévères, et même chez les traumatisés légers (à la
l'incapacité à faire deux choses à la fois (r = .56) et la lenteur (r = phase initiale au moins).
.36). Plusieurs études ont utilisé, pour mettre en évidence cette lenteur, des
mesures de Temps de Réaction (TR). L'allongement des TR est propor-
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tionnel à la sévérité du traumatisme (Van Zomeren et Deelman, 1976). en 1981, d'autres aspects du traitement de l'information (comme les
Cette lenteur régresse en partie au cours du temps, mais les patients les aspects perceptifs du traitement du stimulus, ou les aspects moteurs de la
plus sévères (coma > 7 jours) continuent à présenter un ralentissement Rp<>nse) sont également ralentis. L'hypothèse d'une atteinte sélective du
significatif 2 ans après l'accident (Van Zomeren et Deelman, 1978). Les traitement contrôlé de l'information n'a pas été confirmée par les études
TR simples, correspondant à une réponse unique à un stimulus toujours , ultérieures. Van Zomeren et Brouwer (1994) ont réalisé une méta-
identique, sont beaucoup moins allongés que les TR complexes, ou à eoalyse de plusieurs études de TR réalisées sur des protocoles expéri-
choix, pour lesquels le sujet doit choisir une réponse parmi plusieurs ' mentaux très différents. Ils ont constaté qu'il existait un rapport assez
possibles en fonction du stimulus (Norrman et Svahn, 1961 ; Miller, éttoit entre les TR des patients et des contrôles, quelle que soit la com-
1970 ; Van Zomeren et Deelman, 1976 ; Ponsford et Kinsella, 1992). plexité de la tâche utilisée. Ce rapport était également comparable à celui
Les différences de TR entre les patients et les contrôles sont d'autant constaté dans d'autres tâches faisant intervenir la vitesse (comme le Trail
plus nettes que le nombre de possibilités de réponses est grand et donc Making Test). Le rapport entre les patients et les contrôles était seule-
dépendent de la complexité de l'épreuve (Miller, 1970 ; Van Zomeren et ment légèrement plus élevé pour les épreuves très complexes.
Deelman, 1978). Cet effet persiste si la mesure du TR ne prend en Le problème de la lenteur a été abordé par certains chercheurs par le
compte que le temps de décision, éliminant le temps de mouvement mais du modèle du facteur additif (Smith, 1968 ; Sternberg, 1969), dans
(Ponsford et Kinsella, 1992). Toutefois, les temps de mouvements, cor- . a but d'essayer de préciser à quelle(s) étape(s) de la chaine de traitement
respondant aux aspects purement moteurs des TR, sont également allon- '. de l'information siège le ralentissement. Ce modèle postule les étapes
gés (Van Zomeren, 1981). successives suivantes entre le stimulus et la réponse : - encodage du sti-
Une autre méthode permettant de mettre en évidence le ralentissement , mulus, - comparaison en mémoire, - prise de décision, - sélection de la
est le Paced Auditory Serial Addition Task (PASAT) (Gronwall et . dponse, - exécution de la réponse.
Sampson, 1974). On présente oralement aux sujets des suites de chiffres ·· Dans ce type d'approche, il est possible d'explorer spécifiquement
à différentes fréquences. La tâche consiste à additionner chaque chiffre : chaque étape du modèle en faisant varier différents facteurs expérimen-
avec le chiffre immédiatement précédent, et à donner la réponse immé- taux. Plusieurs études ont pu démontrer un effet de la complexité du
diatement. Il s'agit d'une tâche d'attention divisée, nécessitant d'effec- stimulus et de la compatibilité stimulus-réponse, en faveur d'un ralentis-
tuer simultanément plusieurs opérations : écouter les chiffres présentés, sement de la prise de décision et de la sélection de la réponse (Gronwall
les mémoriser, effectuer le calcul mental et répondre. Les patients sont et Sampson, 1974 ; Miller, 1970 ; Van Zomeren et Deelman, 1976,
particulièrement sensibles à la fréquence de présentation et, à l'intérieur 1978). Stokx et Gaillard (1986) ont analysé séparément, sur un groupe
du groupe des patients, il existe une interaction entre la sévérité du trau- . de traumatisés sévères chroniques, quatre étapes : l'encodage du stimu-
matisme et la fréquence de présentation (Gronwall, 1987 ; Stuss et al., . lus, la comparaison en mémoire, la sélection de la réponse et la prépara-
1989 ; Ponsford et Kinsella, 1992). lion motrice et n'ont pas constaté d'atteinte spécifique de l'une de ces
étapes chez leurs patients. Ils concluent à un ralentissement non spéci-
Origine du ralentissement. L'origine du ralentissement cognitif des :fique, global, de la chaîne de traitement de l'information. Shum et al.
traumatisés crâniens reste discutée. En interprétant leurs résultats dans le (1990, 1994) ont obtenu des résultats différents, les patients à un stade
cadre du modèle de Shiffrin et Schneider (1977), Van Zomeren et al. ~ilUbaigü étant spécifiquement ralentis aux étapes d'identification du
(1984) proposent l'hypothèse que le ralentissement concerne essentielle- • «imulus et de sélection de la réponse, alors que les patients chroniques
ment le traitement contrôlé de l'information (par opposition au traite- · étaient ralentis à l'étape de sélection de la réponse uniquement.
ment automatique). Toutefois, comme cela était noté par Van Zomeren Sclunitter-Edgecombe et al. (1992) ont constaté chez un groupe de trau-
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Attention et traumatisme crânien sévère 131

matisés sévères chroniques ( 1 d 18 .


des étapes d'encodage du sti!u~~s :t d m~1s) dun ~a~e?tisse_men~ sélectif sieurs auteurs ont constaté que les traumatisés crâniens sévères étaient
réponse · l'éta e d . e_ pn~e ~ dec1s10n/select10n de la plus lents que les contrôles dans toutes les conditions du test de Stroop,
patients. ' p e comparaison en memo1re etait respectée chez leurs
mais qu'ils n'étaient pas plus sensibles à la situation d'interférence
(Chadwick et al., 1981 ; Stuss et al., 1985 ; Ponsford et Kinsella, 1992).

tisé~:~:~~~1:8~~n~i~;~ ~~sd~s mo~trent que le ralentissement des trauma- Des résultats différents ont été rapportés par d'autres auteurs. Mac Lean
et al. (1983) ont constaté que les traumatisés les plus sévères étaient
ment de 1'informa( Il un ru~eau spécifique de la chaîne de traite- spécifiquement sensibles à l'interférence, mais seulement à la phase
. , ion_. est possible que certaines éta es (co
~~~fi::a~~~ ~o:i::~;~a~~:nt relativement préservées, ~eut-êtrr:;:r~= subaigüe (avant 6 mois). Plus récemment, Vakil et al. (1995) ont étudié
l'attention sélective avec le test de Stroop, mais en rajoutant deux condi-
Edgecombe et al 1992) V en ressources attentionnelles (Schmitter- tions : habituation et inhibition par priming négatif. Cette étude était
plutôt en faveur d'un ral~nti~~m~~~~~~ ~t Brouw~r _(1994) concluent basée sur des données suggérant que l'attention sélective peut être divi-
portance dépend de la complexité de la t:chenolnl spec1fique, dont 1'im- sée en plusieurs mécanismes (Tipper, 1985) : un mécanisme excitateur
thèse ph · th 1 · · s proposent une hypo-
y~10pa o og1que du ralentissement basée sur une d. . . . (sélection du stimulus pertinent), un mécanisme inhibiteur (inhibition du
rapport signal/bruit dans le t . 1mmut10n du distracteur), et l'habituation (survenant quand des stimuli sont présentés
ra1tement de I 'i fi · -
secondaire à une diminution de la ti d . n ormat1on, peut-etre de façon répétée). L'expérience consistait à dénommer la couleur de
orce u signal
Toutes les études convergent donc . , . stimuli dans 4 conditions (Tipper et al., 1989) :
lenteur dans le traitement de 1·1· ti . pour affirm~r 1 existence d'une - neutre : des X colorés,
n ormat10n La question ·
est de savoir si cette lenteur suffit à elle . 1 , . qm se pose alors - Stroop : noms de couleurs,
. patients et les difficultés constatées 1~eu e a expliquer_ les plaintes des - habituation : seul le mot VERT est présenté, dans différentes couleurs,
existe-t-il chez les traumatisés - ~ar e_ntourage. Ou bien au contraire - priming négatif : pour chaque stimulus, la couleur de l'encre est la
certaines fonctions attentionnell~:a~:nps1sevdères ul n ~éficit spécifique de même que le nom de la couleur précédente ; le priming négatif corres-
tique ? ' us u ra ent1ssement non spéci- pond au ralentissement de la réponse lorsqu'un stimulus cible correspond
au distracteur qui a du être inhibé à l'essai précédent.
Vakil et al. (1995) constatent, contrairement à la plupart des études
L'attention focalisée précédentes, que les traumatisés crâniens modérés et sévères en phase
subaigüe (avant un an) étaient plus sensibles que les contrôles à l'interfé-
Les difficultés à se concentrer 1 d. . .. , rence (effet Stroop). L'effet d'habituation n'était pas en revanche diffé-
signalées chez les traumatisés crâ '. a istra~t1b1hte sont fréquemment rent des contrôles. De plus, un résultat original de cette étude était la
sélectivité de leurs réponses p mens, suggerant une diminution de la mise en évidence d'une abolition de l'effet de priming négatif chez les
· ourtant les résultat d ,
mentales sont relativement disco d ' ' . s es etudes expen- traumatisés. En effet, alors que les contrôles étaient significativement
1'attention focalisée reste débattue.r ants et 1 existence d'un déficit de plus lents en condition de priming négatif qu'en condition Stroop,
aucune différence significative entre ces deux conditions n'était constatée
Etudes basées sur le test de Stroo PI . , chez les patients. Vakil et al. (1995) concluent à un déficit des méca-
de Stroop dans lequel, en condition f.inte~;~;urs etudes ?nt u~ilis~ _le tes_t nismes inhibiteurs de l'attention sélective.
la tendance spontanée à lire le ~ce, le SUJet doit res1ster a
mot, pour en denommer la couleur. Plu-
132 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 133

TR complexes. Stuss et al. (1989) ont réalisé une tâche de TR com- L'attention divisée
plexes, dans laquelle les sujets devaient répondre à des stimuli définis
selon leur couleur, leur forme et l'orientation de lignes à l'intérieur des Si les données concernant l'attention focalisée sont discordantes, en
formes. Dans une condition dite "redondante", les sujets devaient détec- revanche, il existe un large consensus en faveur d'un déficit de l'atten-
ter un stimulus parmi 4 distracteurs. Il était possible de répondre en se tion divisée. L'attention divisée dépend cependant de nombreux facteurs,
focalisant sur une seule des caractéristiques du stimulus (par exemple la qu'on peut schématiquement diviser en deux groupes (Shallice, 1988) :
couleur), car aucun des distracteurs ne partageait une des caractéristiques les ressources, ou capacités, de traitement, et les opérations de réparti-
de la cible. Les sujets contrôles avaient dans cette condition des TR tion des ressources, comprenant également le "switching" d'une tâche à
identiques à ceux obtenus en condition dite "facile", dans laquelle les une autre. La notion de ressources est étroitement liée à la vitesse de
stimuli utilisés étaient des formes géométriques simples, définies par le traitement de l'information. En cas de ralentissement cognitif, la quantité
seul critère de forme (pas de couleur ni de lignes dans les formes). Cer- d'informations qu'un sujet peut traiter par unité de temps est diminuée,
tains traumatisés crâniens avaient un allongement spécifique des TR dans le sujet ne peut alors traiter avec efficacité des informations venant de
la condition "redondante", c'est-à-dire qu'ils n'arrivaient pas à ignorer plusieurs sources différentes. La lenteur cognitive peut donc bien par
les informations redondantes inutiles. Toutefois cet effet était limité à un elle-même entraîner un déficit d'attention divisée. Les opérations de
sous-groupe de patients et à une des sessions expérimentales, et était répartition des ressources correspondent, quant à elles, aux processus
donc considéré par les auteurs comme inconstant. supérieurs de contrôle attentionnel, comme la flexibilité, la capacité à
Enfin, Van Zomeren et Brouwer (1987) ont également constaté une intégrer des tâches, la répartition stratégique des ressources attention-
sensibilité à la distraction dans une tâche de TR visuels complexes, dans nelles.
laquelle les stimuli étaient des boutons lumineux qui s'allumaient de Brouwer et al. (1989) ont étudié ces aspects chez des traumatisés
. façon aléatoire. Les patients devaient répondre en appuyant sur le bouton crâniens sévères vus à un stade tardif (plus de 5 ans après l'accident). Ils
allumé. En condition "distraction", des stimuli distracteurs, identiques ont pour cela utilisé une tâche de simulation de conduite sur ordinateur,
aux stimuli cibles et situés à proximité d'eux, s'allumaient en même associée à une épreuve de détection de cibles visuelles. L'épreuve était
temps, mais les patients ne devaient appuyer que sur les boutons préala- réalisée après ajustement individuel de la difficulté de chaque épreuve
blement définis comme cibles. Les patients étaient testés en phase subai- isolément, de telle façon que les patients et les contrôles obtiennent un
güe (3 à 6 mois après l'accident) et présentaient un effet d'interférence même niveau de performance sur chacune des deux tâches. Ainsi, un
significatif. L'interprétation de ces résultats est cependant discutée par éventuel effet de la tâche double ne pouvait selon Brouwer et al. (1989)
Van Zomeren et Brouwer (1994), qui prétendent que cet effet n'était pas être attribué au ralentissement. Puis la tâche double était réalisée dans
obligatoirement dû à un déficit d'attention focalisée, mais pouvait sim- différentes conditions, en demandant aux sujets d'accorder alternative-
plement correspondre à une plus grande lenteur dans les processus con- ment la priorité à l'une des deux tâches ou aux deux simultanément. Les
trôlés d'inhibition de la réponse interférente. résultats indiquent que des traumatisés sévères chroniques étaient capa-
bles de diviser leur attention aussi efficacement que les contrôles. Toute-
En conclusion, selon Van Zomeren et Brouwer (1994), l'attention fois, une limite de cette étude était le critère de sélection des patients,
focalisée serait préservée chez les patients en phase chronique (après 6 qui avaient tous pu reprendre la conduite après leur accident (ce qui
mois ou 1 an). En revanche, à une phase plus précoce, les traumatisés suggérerait une bonne récupération). Veltman et al. (1996) ont repris ce
crâniens semblent présenter un déficit de l'attention focalisée, en particu- même paradigme expérimental chez des traumatisés sévères en phase
lier des mécanismes inhibiteurs. subaigüe (moins de 6 mois). Comme dans l'étude de Brouwer et al.
134 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 135

(1989), les patients réussissaient aussi bien que les contrôles à partager d'apparition du stimulus en appuyant sur un bouton situé soit à droite
leur attention et à se conformer aux consignes visant à privilégier l'une soit à gauche. En condition de tâche double, les sujets devaient en plus
ou l'autre des tâches. Dans cette même étude, les auteurs ont aussi dire si les deux lettres étaient identiques ou différentes. Les patients
utilisé une tâche d'attention divisée basée sur une épreuve de temps de étaient significativement plus ralentis que les contrôles par la situation de
réaction. L'épreuve associait un temps de réaction visuel et un temps de double tâche, ce qui évoquerait une atteinte spécifique des mécanismes
réaction auditif. Les patients n'étaient pas plus pénalisés par la tâche de prise de décision et de coordination des réponses. Vilkki et al. (1996)
double que les contrôles. ont proposé un paradigme de tâche double à trois groupes de patients :
Ces résultats semblent montrer que les capacités de partage atten- des traumatisés crâniens de toutes gravités en phase aigüe (moins d'un
tionnel sont préservées. Van Zomeren et Brouwer (1994) concluent que mois), des traumatisés en phase subaigüe, et des patients frontaux non
le déficit d'attention divisée des traumatisés crâniens sévères est dû avant traumatisés. L'expérience associait une tâche de barrage et un comptage
tout au ralentissement du traitement de l'information. Toutefois, dans les à l'envers. Seul le groupe des traumatisés récents présentait un effet
deux études que nous venons de citer (Brouwer et al., 1989 ; Veltman et significatif de tâche double. Dans une étude plus récente, Azouvi et al.
al., 1996), à l'intérieur du groupe des patients, une corrélation signifi- (1996) ont proposé à des traumatisés sévères en phase subaigüe une
cative a été constatée entre la sévérité du traumatisme (durée de l' APT) tâche double associant une épreuve de génération aléatoire de lettres et
et les performances en attention divisée. Plus précisément, dans la tâche une tâche de classement de cartes, de complexité variable (Baddeley,
de conduite, les performances des patients ayant une APT de plus de 2 1966, 1986). L'épreuve était réalisée à un rythme imposé par l'examina-
semaines étaient moins bonnes, ces patients ayant tendance à privilégier teur (les sujets devaient produire une lettre et classer une carte simulta-
une des tâches (le temps de réaction visuelle). Van Zomeren et Brouwer nément à chaque fois que survenait un bip sonore). Les auteurs ont
( 1994) proposent une interprétation basée sur les mécanism~s de constaté que les patients présentaient un effet de tâche double significati-
"coping" (ou d'adaptation). Selon eux, les traumatisés les moins graves vement plus important que les contrôles, mais surtout que cet effet per-
obtiendraient, grâce à un effort mental particulièrement important pour sistait après contrôle statistique de l'effet lié au ralentissement (par une
compenser leurs difficultés, des performances meilleures que les contrô- analyse de covariance). La lenteur ne pouvait donc pas expliquer entiè-
les ; en revanche, les traumatisés les plus sévères auraient quant à eux .rement le déficit d'attention divisée des patients dans cette étude.
des performances déficitaires. En moyenne, les performances du groupe
des patients ne seraient donc pas différentes de celles des contrôles. En conclusion, le mécanisme du déficit de l'attention divisée reste
Cette absence de différence entre les groupes cacherait donc, selon cette largement discuté. Le rôle du ralentissement du traitement de l'informa-
hypothèse, une hétérogénéité à l'intérieur du groupe des traumatisés. tion n'est pas contesté. En revanche, l'existence d'un déficit additionnel
De plus, trois études récentes ont également fourni des arguments en des mécanismes de contrôle et de coordination est un sujet de contro-
faveur d'un déficit des mécanismes de coordination en tâche double, au verse. Ce déficit semble présent à la phase très précoce, selon Vilkki et
moins dans certaines conditions (Stablum et al., 1994 ; Vilkki et al., al. (1996). A la phase secondaire, il pourrait être limité au sous-groupe
1996; Azouvi et al., 1996). Stablum et al. (1994) ont étudié 14 trauma- de patients les plus sévères, ayant une durée d' APT de plus de 2
tisés sévères ayant une bonne récupération apparente mais des plaintes semaines (Veltman et al., 1996).
subjectives, plus de 6 mois après l'accident. Les stimuli étaient des cou-
ples de lettres apparaissant l'une au-dessus de l'autre sur un écran d'or-
dinateur, à gauche ou à droite du point de fixation central. En condition
de tâche unique, les sujets devaient répondre en fonction du côté
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L'alerte phasique détection de cibles survenant avec une fréquence faible sur une durée
prolongée. Plusieurs études ont montré que les patients réalisent ces
Une méthode classique pour évaluer les capacités d'alerte phasique tâches moins bien et plus lentement que les contrôles, mais que leur per-
repose sur le raccourcissement des TR quand un signal d'alerte est donné formance ne se modifie pas plus que celle des contrôles avec le temps
au sujet avant le signal d'exécution de la réponse. Une traduction élec- (Van Zomeren et al., 1988 ; Stuss et al., 1989 ; Van Zomeren et
trophysiologique en est la "variation contingente négative" (VCN). Il Brouwer, 1994 ; Spikman et al., 1996). Ponsford et Kinsella (1992) ont
s'agit d'une onde électroencéphalographique négative qui est observée même constaté que les traumatisés crâniens sévères réussissaient aussi
entre le signal d'alerte et le signal d'exécution. Plusieurs études électro- bien que les contrôles sur une épreuve de TR à choix continue d'une
physiologiques ont montré une diminution de l'amplitude de la VCN durée de 45 minutes.
chez les traumatisés crâniens sévères (Rizzo et al., 1978 ; Curry, 1981 ; Van Zomeren et Brouwer (1994) rattachent à l'attention soutenue la
Rugg et al., 1989). Segalowitz et al. (1992) ont de plus montré que l'am- variabilité individuelle des performances et les pertes brutales d'attention
plitude de la VCN chez des traumatisés crâniens était significativement ("lapses of attention"). Stuss et al. (1989) constatent une variabilité plus
corrélée aux résultats de tests frontaux (labyrinthes, test de Wisconsin, grande des performances chez les traumatisés crâniens, à l'intérieur
Trails). d'une session expérimentale ou d'une séance à l'autre. Ces résultats sont
Ces résultats sont cependant discordants avec les études de TR. discutés par Van Zomeren et Brouwer (1994), pour qui la variabilité ne
Ponsford et Kinsella (1992) ont étudié chez un groupe de traumatisés semble pas plus importante chez les patients que chez les contrôles, ou
sévères à un stade subaigü les TR sans et avec signal avertisseur. Le du moins est proportionnelle à l'allongement des TR.
bénéfice entraîné par le signal avertisseur était comparable chez les Ces études suggèrent une relative conservation de l'attention soutenue
patients et les contrôles, ce qui suggère de bonnes capacités d'alerte chez les traumatisés sévères. Mais Van Zomeren (1995) souligne que la
phasique. Des résultats comparables ont été obtenus plus récemment par plupart des études ont utilisé des épreuves laissant le patient libre de ses
Whyte et al. (1997). Ces discordances avec les études électrophysiolo- temps de réponse. Il n'est pas sûr que les performances des patients
giques restent à expliquer. Selon Van Zomeren et Brouwer (1994), il est seraient comparables sur des tâches mettant en jeu la vitesse de traite-
possible que la VCN corresponde à plusieurs phénomènes différents, ment ou une plus grande partie des ressources attentionnelles. De plus,
dont seuls certains seraient liés au raccourcissement des TR. En particu- un travail récent a remis en question ces conclusions (Whyte et al.,
lier, il semble que seuls les composants précoces de la VCN soient 1995). Cette étude a porté sur des traumatisés modérés et sévères étudiés
diminués chez les blessés (Rugg et al., 1989 ; Segalowitz et al., 1992). à la phase subaigüe. L'épreuve durait près de 15 minutes et consistait en
Or, cette composante correspondrait surtout au traitement du signal aver- un test go/no-go de détection visuelle très simple. La difficulté était en
tisseur, et non à la préparation de la réponse. partie adaptée à chaque sujet en faisant varier la durée de présentation du
stimulus à détecter. Les patients avaient un niveau de vigilance initial
inférieur à celui des contrôles, caractérisé par des TR plus lents et plus
L'attention soutenue (vigilance ou alerte tonique) variables, et un biais de réponse plus conservateur (une tendance à ne
pas répondre plus élevée). Surtout, la détérioration des performances au
Selon Van Zomeren et Brouwer (1994), l'attention soutenue corres- cours du temps était plus importante chez les patients que chez les con-
pond avant tout au maintien et à la stabilité de l'attention sur de plus ou trôles. En particulier, l'allongement des TR, la variabilité des TR (aux
moins longues périodes de temps (effet du temps sur la tâche). Pour dépens de la partie supérieure de la distribution des TR) et le biais de
l'étudier, on utilise habituellement des tâches de TR continus ou de réponse se détérioraient plus vite chez les patients. Ces résultats suggé-
138 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 139

raient soit une baisse de l'état de vigilance, soit un plus grand nombre Cinq études ont porté sur des patients en phase subaigüe (durant la pre-
d'éclipses attentionnelles au cours du temps. De plus, l'analyse indivi- mière année), cinq sur des patients en phase chronique (après un an), les
duelle a montré que seuls 15 % des patients avaient une attention soute- deux autres publications ayant indu des patients à des stades très divers.
nue totalement dans les limites du groupe contrôle. De plus, les pathologies étudiées ne sont pas toujours homogènes. Cer-
tains travaux ne se sont intéressés qu'à des traumatisés crâniens, deux
études n'ont inclu que des accidents vasculaires cérébraux, mais quatre
Conclusion publications ont mélangé ces différentes populations, dont pourtant les
déficits ne sont probablement pas comparables. Pour les études de
Les mécanismes des troubles de l'attention des traumatisés crâniens groupe, l'existence d'une randomisation n'est pas toujours explicitement
restent en partie discutés. Seule l'existence d'un ralentissement du traite- mentionnée (elle ne l'est que dans quatre cas). L'évaluation des effets
ment de l'information fait l'unanimité. Il s'agit d'un ralentissement glo- thérapeutiques n'a été réalisée en aveugle que dans l'étude de Wood et
bal, non spécifique, proportionnel à la difficulté de la tâche. L'existence Fussey (1987). Seules deux études (Wood et Fussey, 1987 ; Ponsford et
d'un déficit de l'attention divisée semble admis, mais son origine est Kinsella, 1988) ont cherché à évaluer de façon objective la généralisation
débattue. Ce déficit est rattaché en partie, mais peut-être pas unique- des effets thérapeutiques sur le comportement attentionnel dans la vie
ment, à la lenteur du traitement de l'information. L'existence d'un défi- quotidienne. Enfin, les présupposés théoriques ne sont pas toujours
cit additionnel des mécanismes de coordination des tâches et de partage précisés, et les cibles thérapeutiques pas toujours clairement identifiées
attentionnel serait peut-être limité à la phase aigüe et/ou aux patients les (attention sélective, attention divisée, vigilance, vitesse de traitement...).
plus graves. L'attention focalisée, étudiée par la résistance aux interfé- Le trouble de l'attention est ainsi souvent présenté comme un déficit
rences, semble relativement préservée, sauf à la phase précoce, en par- llDÎque, que l'on traite avec un programme global à vocation exhaustive.
ticulier pour les mécanismes inhibiteurs. L'alerte phasique (capaèité à
profiter d'un signal avertisseur) semble respectée. Quant à l'attention
soutenue, les résultats sont aussi discordants, mais des données récentes
laissent penser qu'elle pourrait être déficitaire, notamment sous forme
d'une plus grande variabilité des performances au cours du temps. Dans trois études, l'effet thérapeutique a été jugé absent ou très limité
alec et al., 1984 ; Wood et Fussey, 1987 ; Ponsford et Kinsella,
, 988). Malec et al. (1984) ont utilisé, pour traiter l'attention soutenue,
RÉÉDUCATION · jeux vidéo basés sur la capture de cibles en mouvement, avec ou
distracteurs. Dix patients ont été traités, moins de 6 mois après le
La littérature sur la rééducation des troubles attentionnels est encore tisme. Ils étaient partagés de façon randomisée en deux groupes,
relativement modeste puisque, depuis 1983, nous n'avons pu retenir que AB ou BABA (A étant la période de jeux vidéo, B la période contrô-
12 publications (Tableau 1). Il s'agit soit d'études de groupes (six cas), . Les périodes thérapeutiques duraient une semaine, comprenant deux
soit d'études de cas (trois publications), soit de travaux associant à la de 30 minutes par jour durant 4 jours. Les évaluations étaient
fois les deux approches (trois cas). La comparaison de ces travaux est isées le cinquième jour de la semaine et comprenaient un test de
toutefois difficile, du fait de la diversité des populations étudiées, des , deux tests de barrage, et une mesure de TR. Les périodes de
techniques de rééducation utilisées, et des méthodes d'évaluation, aiusi -ne se sont pas accompagnées d'une amélioration plus importante
que du fait de l'existence d'un certain nombre de biais méthodologiques. ·les périodes contrôles. Wood et Fussey (1987) ont traité 10 trau-
140 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 141

1
ma tisés sévères (2, 4 mois d' APT en moyenne) à un stade chronique (27
+· ·+ 1 •++++++ mois en moyenne après le traumatisme). Ce groupe était comparé à un
groupe contrôle de 10 traumatisés crâniens appariés en termes de gravité
et de délai (mais sans randomisation) et à un groupe de sujets sains, pour
++++ •+++++++ contrôler un effet de répétition des tests. Le traitement consistait en une
tâche informatisée de détection et d'appariement de symboles visuels se
1 1 + 1 déplaçant sur l'écran, avec une forte contrainte temporelle. La durée du
traitement était d'une heure par jour pendant 20 jours. Plusieurs mesures
neuropsychologiques ont été effectuées (tests de vitesse psychomotrice et
1 + 1 + + ' + de vigilance), mais aucune n'a mise en évidence de différence significa-
tive entre les groupes. Toutefois, une amélioration significativement plus
1 Cl)
importante a été constatée en faveur du groupe traité pour les deux
o·-
..i::
Ill) mesures comportementales : enregistrement toutes les deux minutes de la
.... 0
,cu-
E .g participation du sujet durant les séances de thérapie et cotation globale
par les thérapeutes de l'attention en rééducation sur une échelle visuelle
analogique (sans que les intervenants ne soient informés de l'apparte-
nance du sujet à l'un des deux groupes). Ponsford et Kinsella (1988) ont
étudié un groupe de 10 traumatisés sévères récents (moins de 9 mois)
selon un protocole comprenant quatre périodes : A = ligne de base ; B
= traitement spécifique ; C = traitement spécifique avec feed-back et
u
> ::;g renforcement positif par le thérapeute ; puis nouvelle période A. Pour
Cl)
"@i
0 -< .... faire la part de l'effet de la récupération spontanée, deux durées de ligne
0 Q) ;;; Q) uQ) u
.s uuuuuuuu>uu> de base différentes (trois ou six semaines) ont été utilisées de façon ran-
"'o.. E-< E-< E-< E-< E-< E-< E-< E-< -< E-< E-< -< domisée. Chaque période thérapeutique durait trois semaines et compre-
nait 15 séances de 30 minutes. Le traitement, réalisé sur ordinateur,
visait à améliorer la rapidité et la sélectivité du traitement de l'informa-
tion visuelle. Les mesures choisies pour évaluer les résultats de l'inter-
vention comprenaient des tests psychométriques de vitesse de traitement,
, mais aussi une évaluation comportementale par l'Attentional Rating
.''Scale (Ponsford et Kinsella, 1991) et par un enregistrement vidéo des
sujets durant une rééducation. Aucun effet significatif du traitement n'a
·~âé constaté pour aucune de ces mesures. L'analyse individuelle a toute-
"f'ois montré que trois sujets ont paru répondre positivement durant la
phase de rééducation avec renforcement positif par l'examinateur.
142 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 143

Les études ayant rapporté une efficacité limitée sujets étaient divisés de façon randomisée en deux groupes, le groupe
expérimental recevant le traitement de l'attention, le groupe contrôle
Certains travaux ont pu démontrer une certaine efficacité de l'inter- recevant une rééducation de la mémoire. Chaque groupe a été traité
vention thérapeutique, mais qui restait limitée à certaines mesures. Les durant neuf semaines, à raison de deux séances de deux heures par
travaux de Gray, Robertson et collaborateurs en sont un exemple (Gray semaine. La double dissociation escomptée entre les deux groupes a été
et Robertson 1989 ; Gray et al., 1992). Dans une première publication, en partie observée : l'amélioration des tests attentionnels était significati-
Gray et Robertson (1989) rapportent une étude de cas sur trois patients vement plus élevée dans le groupe expérimental ; en revanche, la disso-
traumatisés crâniens à des stades très variables (de 6 mois à trois ans). ciation inverse n'a pas été observée pour les tests de mémoire.
Pour mettre en évidence l'effet du traitement, ils ont utilisé une méthode Toutefois, aucune généralisation n'a pu être démontrée sur une deuxième
de ligne de base multiple selon les comportements (multiple baseline batterie de tests attentionnels.
across behaviour). Le principe est de comparer l'évolution d'une mesure
cible, dont on espère l'amélioration, à celle d'une mesure non-cible, qui
n'est pas supposée être sensible au traitement, et qui ne devrait donc pas Les études positives
se modifier au cours de l'étude. Dans les trois cas, l'effet attendu a été
observé, ce qui était en faveur d'une efficacité spécifique de l'interven- Ben-Yishay et ses collègues (Ben-Yishay et al., 1987) ont été parmi
tion thérapeutique. Les rééducations étaient toutefois assez différentes les premiers à proposer une méthode systématique et hiérarchisée pour
d'un cas à l'autre, ainsi que les mesures utilisées, ce qui rend les compa- traiter les troubles attentionnels, l'Orientation Remedial Module (ORM).
raisons difficiles. Les mêmes auteurs ont réalisé ensuite une deuxième Ce module électronique comporte cinq programmes successifs destinés à
étude avec une méthodologie très rigoureuse sur un groupe de 31 pa- lé-entrainer des fonctions attentionnelles de base. L'étude a porté sur 40
tients d'étiologie variée, mais majoritairement des traumatisés crâniens. ·traumatisés crâniens à un stade chronique (plus d'un an). Les patients
Les patients étaient randomisés en deux groupes, l'un recevant le traite- ,ont reçu 36 heures de traitement réparties sur neuf semaines. Les résul-
ment spécifique sur ordinateur et l'autre des jeux non spécifiques, égale- "~ ont montré une amélioration significative des performances sur les
ment sur ordinateur. Le traitement comprenait 14 séances de 75 minutes hes utilisées dans le module thérapeutique, mais aussi sur certaines
sur 3 à 9 semaines. Les objectifs thérapeutiques portaient sur l'alerte, la ures psychométriques (TR visuel, span de chiffres et complément
vigilance, la mémoire de travail et l'attention divisée. Une différence a 'image de la WAIS et une épreuve de description d'image). Dans un
été constatée entre les deux groupes sur certaines mesures psychométri- -groupe sélectionné de patients, les résultats se sont avérés stables
ques, en particulier les mesures de mémoire de travail (le PASAT, le is mois après la fin du traitement et même {pour cinq patients) après
span de chiffres à l'envers, et l'arithmétique de la WAIS). Ceci contras- mois. Ben-Yishay et al. (1987) illustrent leur étude par le cas d'un
tait avec une absence de différence pour des mesures non-cibles. Toute- · nt traité 21 mois après un traumatisme sévère. Le traitement dura
fois, les effets thérapeutiques n'étaient significatifs que sur l'évaluation peures réparties sur trois mois. L'amélioration constatée sur les tests
réalisée à distance, 6 mois après la fin de l'étude, et non au moment de _ mpagna d'une amélioration du comportement du patient et de sa
la fin du protocole. L'effet était limité à des mesures proches des tâches ité à s'adapter à son environnement. Malgré son intérêt, cette étude
travaillées et ne se généralisait pas à d'autres épreuves attentionnelles ve un certain nombre de problèmes méthodologiques. Il n'y a aucun
telles que des épreuves de barrage, ni à des épreuves frontales. . le de l'effet d'éventuels facteurs non spécifiques tels que la récu-
Niemann et al. (1990) ont réalisé une étude de groupe sur 29 trauma- n spontanée, l'effet re-test, ou un effet de stimulation globale non
tisés crâniens modérés à sévères au moins un an après l'accident. Les "tique. Ce dernier point pourrait être très important car les patients
144 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 145

étaient inclus, en dehors du traitement spécifique de l'attention, dans un pas être transposés directement à des sujets souffrant de lésions diffuses,
programme plus global de prise en charge rééducative, psychothérapique comme les traumatisés crâniens. Ces études méritent toutefois d'être
et de réinsertion sociale. Par ailleurs, le transfert des acquis dans la vie mentionnées ici, du fait de leur méthodologie rigoureuse et originale.
quotidienne n'a pas été évalué de façon systématique, même si les Dans un premier travail, Sturm et al. (1983) ont traité 30 sujets, majo-
auteurs font état de corrélations significatives entre les performances sur ritairement des traumatisés crâniens mais aussi des accidents vasculaires
la batterie ORM et certains comportements quotidiens. cérébraux. Le traitement comprenait des épreuves de TR visuels et/ou
Sohlberg et Mateer (1987) ont réalisé une étude de cas méthodologi- auditifs et des tâches de comparaison en mémoire de travail. Les patients
quement bien contrôlée, en utilisant également un programme global et étaient séparés en deux groupes avec cross-over et ils étaient également
hiérarchisé, l'Attention Process Training. Ce programme permet de comparés à deux groupes de sujets normaux appariés (pour éliminer un
traiter spécifiquement différents composants attentionnels : l'attention effet test-retest). Les résultats ont mis en évidence une efficacité théra-
focalisée, l'attention soutenue, l'attention sélective, la flexibilité (ou peutique, avec une certaine généralisation. Toutefois, l'effet le plus im-
alternance attentionnelle) et l'attention divisée. Quatre patients ont été portant concernait les tests proches de tâches travaillées en rééducation.
inclus (deux traumatismes fermés, un traumatisme par balle et une rup- L'effet était par ailleurs stable lors d'une évaluation réalisée un mois
ture d'anévrysme), tous après une délai d'au moins un an. La mesure plus tard. Dans un deuxième travail, Sturm et Willmes (1991) ont traité
cible était le PASAT, la mesure non-cible un test de perception visuo- 35 patients ayant été victimes d'un accident vasculaire cérébral au moins
spatiale (paradigme de la ligne de base multiple selon les comporte- quatre semaines auparavant. Les lésions hémisphériques gauches étaient
ments). Le protocole comprenait quatre périodes successives : ligne de largement prédominantes (27 cas). Les cérébro-lésés gauches ont été
base, rééducation de l'attention, rééducation de la perception visuelle, séparés en deux groupes, précoce et tardif, selon la date à laquelle ils
rééducation de la mémoire. Pour le quatrième sujet, seules les deux pre- débutaient la rééducation. Du fait du plus faible nombre de patients avec
mières périodes de rééducation (attention et vision) ont été utilisées, mais ·~ion hémisphérique droite, un seul groupe a été constitué (tardif). Le
dans un ordre inversé (pour éliminer un effet d'ordre). La durée du trai- .ptVtocole comprenait trois périodes successives, débutant après la pre-
tement de l'attention était de quatre à huit semaines, avec sept à neuf •llllière évaluation neuropsychologique : une première période de trois
séances par semaine. Les résultats n'ont pas fait l'objet d'un traitement ines correspondant à la première période thérapeutique (pour le
statistique mais seulement d'une analyse visuelle des courbes de perfor- upe précoce) ou à une période de ligne de base (pour les deux grou-
mance. Le score du PASAT s'est amélioré pour tous les sujets de façon tardifs) ; une deuxième période de trois semaines correspondant à
plus marquée durant le traitement spécifique, et l'effet; est resté stable période de ligne de base pour le groupe précoce, ou à la période
dans le temps. En revanche, le test de perception visuelle n'a pas montré peutique pour les groupes tardifs ; enfin, une dernière évaluation de
d'amélioration systématique durant la phase de traitement de l'attention, ·vi était réalisée après une interruption de traitement de 6 semaines
ce qui suggérait bien un effet spécifique. Les auteurs n'ont pas étudié le les trois groupes. Lors de la première évaluation (ligne de base),
transfert dans la vie quotidienne, mais ils signalent que les quatre sujets auteurs constatèrent que la nature des déficits attentionnels était
ont pu obtenir une réinsertion socio-professionnelle après cinq à huit rente selon le côté de la lésion. Les patients souffrant d'une lésion
mois de prise en charge. · hérique droite présentaient un déficit plus marqué de l'attention
Sturm, Willmes et leurs collègues ont réalisé plusieurs études (Sturm et de la vigilance, alors que les lésions hémisphériques gauches
et al., 1983, 1997 ; Sturm et Willmes, 1991), qui ont surtout porté sur pagnaient d'un nombre plus élevé de fausses alarmes dans une
des troubles attentionnels secondaires à un accident vasculaire cérébral. de TR complexe (suggérant un déficit d'attention sélective). Les
11 s'agit donc de lésions focales, et leurs résultats ne peuvent peut-être tats furent les suivants : les trois groupes s'améliorèrent significati-
146 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 147

vement, mais l'amélioration était moins nette dans le groupe des lésions gèrent en plus l'idée d'un traitement hiérarchisé, l'intensité de l'attention
droites ; la généralisation à des tâches non entraînées était plus limitée semblant une fonction plus basale que la sélectivité, faisant appel à des
que dans l'étude précédente. Devant cette absence de généralisation, les processus plus complexes. Plusieurs questions se posent néanmoins à la
auteurs concluent qu'il serait peut-être nécessaire de proposer des traite- . suite de ce travail : il serait intéressant de savoir si une telle spécificité
ments plus spécifiques de telle ou telle fonction attentionnelle perturbée, pourrait être retrouvée chez des patients souffrant de lésions cérébrales
plutôt que des traitements globaux et peu sélectifs, tels que ceux utilisés ·. diffuses, tels que les traumatisés crâniens ; le transfert des acquis dans la
jusqu'alors. C'est cette hypothèse qui a été testée dans leur étude · ,vie quotidienne n'a pas été étudié dans ce travail. Sturm et al. (1997)
suivante (Sturm et al., 1997). Ce travail a porté sur 38 patients ayant ·,prétendent qu'avant d'étudier l'impact d'une rééducation sur la vie quo-
présenté un accident vasculaire cérébral (22 lésions gauches, 16 lésions . lidienne, il est indispensable de préciser quel type de traitement agit sur
droites). Le délai depuis la lésion variait de deux à 35 mois. Chaque quelle fonction attentionnelle. Dans la vie de tous les jours, il est en effet
patient recevait un pré-test portant sur quatre domaines attentionnels lrês difficile de faire la part des différentes composantes impliquées dans
distincts : l'alerte, la vigilance, l'attention sélective et l'attention divisée. 'œ qu'on dénomme "l'attention". La question de la validité écologique de
Les deux domaines les plus sévèrement déficitaires étaient alors choisis ·cres thérapeutiques est cependant posée et devra certainement être étudiée
comme cibles successives de l'intervention thérapeutique. Le domaine dans l'avenir.
traité en premier était choisi de façon aléatoire. Chaque patient recevait
donc deux périodes thérapeutiques successives comprenant chacune 14
séances sur une durée de trois semaines. Ce protocole expérimental per-
mettait d'évaluer l'effet d'une thérapie spécifique sur différents domaines
attentionnels. L'hypothèse de départ a été en partie confirmée par les ! Les études que nous venons de passer en revue ont toutes utilisé une
résultats. Ceci était surtout net pour les domaines liés à l'intensité de rapie de stimulation, basée sur le principe qu'une fonction attention-
l'attention (alerte et vigilance). Pour ces deux domaines, une améliora- lie déficitaire pourrait être "réparée" par un réentraînement plus ou
tion a été constatée uniquement lors des périodes de traitement spéci- ins spécifique de cette fonction. Or, on connait bien, par des études
fique. Pour les domaines liés à la sélectivité de l'attention, la spécificité isées dans d'autres domaines de la neuropsychologie, les limites de
de l'effet thérapeutique était moins marquée. Une amélioration spécifi- type d'approche restaurative. D'autres approches peuvent être propo-
que a été constatée pour les TR en attention sélective et pour le taux , dont le but ne serait plus de restaurer une fonction déficitaire, mais
d'erreurs en attention divisée. Toutefois, une amélioration non spécifi- façon plus pragmatique, d'en compenser les conséquences dans la vie
que des TR dans ces deux tests a également été notée lors de périodes de ·tous les jours. Pour cela, différentes solutions sont envisageables,
traitement de l'alerte ou de la vigilance. Cet effet non spécifique est que l'utilisation d'aides externes, une modification de l'environne-
interprété comme étant lié au fait que la sélectivité de l'attention est un t, ou encore des techniques de conditionnement comportemental.
domaine plus élaboré, qui peut profiter, pour1 la composante liée aux TR, peu d'études ont utilisé ce type de stratégie pour traiter les déficits
d'un traitement des composantes de plus bas niveau. Les auteurs ont ·onnels.
également réalisé une analyse individuelle des résultats, qui confirme la ilson et Robertson (1992) ont utilisé une technique de conditionne-
spécificité des effets, et qui montre de plus dans certains cas une détério- comportemental et d'auto-suggestion pour traiter les éclipses atten-
ration dans certains domaines lors des périodes de traitement non spécifi- lles durant la lecture chez un traumatisé crânien sévère. Le sujet
que. Ces résultats montrent bien l'intérêt d'un traitement spécifique des "t s'entraîner à domicile à augmenter progressivement sa durée de
fonctions attentionnelles, en fonction des domaines déficitaires. Ils sug- sans éclipse attentionnelle. Il devait se préparer avant de corn-
148 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 149

mencer sa lecture, par des techniques de relaxation et de respiration, (1996) avec le Test of Everyday Attention. Ces outils n'ont pas encore
puis se donner un objectif de durée de lecture qu'il devait s'efforcer de fait l'objet d'une large utilisation en dehors de leurs auteurs. II sera
tenir. Dans un deuxième temps, le sujet devait pratiquer ce même type également nécessaire dans l'avenir d'utiliser une base théorique et un
d'exercice mais en introduisant un bruit de fond distracteur, plus proche vocabulaire qui soient bien définis et communs à tous. En effet, trop
d'un contexte professionnel. Les résultats ont mis en évidence une aug- souvent les termes utilisés et les concepts sous~jacents ne sont pas définis
mentation progressive du temps de lecture sans éclipse attentionnelle. de façon très claire.
Une généralisation sur des textes non travaillés (textes professionnels) a
été de plus constatée lors de la phase de travail avec bruit de fond.
Plus récemment, Fasotti et Kovacks (1995) ont rapporté un travail REMERCIEMENTS
préliminaire basé sur l'apprentissage de stratégies visant à mieux gérer la
pression temporelle dans des situations concrètes de la vie quotidienne. Les auteurs remercient Michel Leclercq pour son aide bibliographique
Le principe est tout d'abord de bien identifier les situations dans les- précieuse.
quelles une pression temporelle risque de survenir (par exemple la con-
duite ou la préparation du repas). Puis une pré-planification est réalisée,
pour éviter cette pression autant que possible ; enfin des programmes ABSTRACT
d'urgence sont préparés, pour le cas où cette pression surviendrait, et le
sujet est entraîné à appliquer ces programmes. Dans une étude de cas Attentional disorders are, together with memory disorders, among the
préliminaire, les auteurs ont pu montrer une amélioration de l'efficacité most frequent neuropsychological deficits following severe traumatic
dans une tâche de préparation des repas. b~ain inj~ry. They are significantly correlated with severity of injury and
w1th social and vocational outcome. The underlying mechanisms remain
partly unknown. The most consistent finding is mental slowness, related
CONCLUSION \o a ~lobai, non specific, slowing of information processing. Whether
attent1onal functions are additionnaly specifically impaired remains
Les résultats des travaux que nous venons de passer en revue sont largely debated. Van Zomeren and Brouwer (1994) claimed that when
encourageants. Ils démontrent que des patients cérébro-lésés sont le plus ~Io~. info~ation processing is controlled for, there is little 'if any
souvent capables de bénéficier d'une thérapeutique de ré-entraînement de , âdd1t1onal 1mpairment of higher level aspects of attention. However a
l'attention. Certaines limites doivent cependant faire nuancer ces ,few studies f?und specific deficits of divided attention, independently' of
conclusions. Tout d'abord, il existe dans plusieurs études des problèmes _w p~ocessmg. Focused attention and phasic alertness seem relatively
méthodologiques qui incitent à la prudence dans l'interprétation des ~aired, at least at the chronic stage. The existence of a specific
résultats. Surtout, une des plus importantc;s inconnues reste la capacité fic1t of sustained attention is still debated. There are only few studies
de ces traitements à entraîner une généralisation des progrès dans la vie reha~ilitation of attentional deficits. Twelve published papers have
quotidienne. Aucun travail à ce jour n'a permis d'apporter une réponse n rev1ewed here. Most of these studies have used stimulation retrain-
claire à cette question pourtant essentielle. Pour cela, la validation d'ou- • techniques, mostly computerized. Most studies (except three) have
tils d'évaluation de 1' attention dans la vie quotidienne sera une étape n positive results, at least at the level of psychometric measures.
nécessaire. Certains auteurs ont proposé de tels outils, comme Ponsford , wever, the generalization to everyday attentional skills still remains to
· et Kinsellà (1991), avec l'Attentional Rating Scale, ou Robertson et al. demonstrated.
'!

150 P. Azouvi, J. Couillet et N. Agar Attention et traumatisme crânien sévère 151

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