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16 Travail & Sécurité –­­ Novembre 08


Hôtellerie
Remue-ménage
dans les étages
En France, on dénombre 210 000 salariés rénovations d’établissements sont
de la branche hôtelière (hôtels avec à prévoir pour répondre aux obligations
et sans restaurant) (1). Des métiers réglementaires et se conformer
qui se transforment continuellement, à l’ensemble des nouvelles normes.
avec les exigences accrues de la clientèle Les exploitants, soutenus par
ou encore l’apparition de nouvelles leurs organisations professionnelles,
tendances, suivant l’évolution des modes se trouvent face à des problématiques
et des technologies. Le développement nouvelles dont la prise en compte
de la structure hôtelière – qui n’a jamais doit inclure la prévention des risques
cessé – devrait se poursuivre dans les professionnels.
années à venir, puisque de nombreuses 1. Source CNAMTS 2006.

Dossier réalisé par Grégory Brasseur


avec Sylvie Martin

Travail & Sécurité ­­– Novembre 2008 17


Évolution normative
Un surcroît d’exigences à prévoir
T
Trois ans pour se mettre out concourt aux chan­ de nouvelles obligations en ment que les escaliers doivent
aux normes vis-à-vis gements. L’année 2007 matière de mise aux normes être «  protégés  » (à savoir, la
a vu naître 230 pro­ incendie, d’accessibilité au cage totalement encloison­
de la sécurité incendie,
jets de création ou d’exten­ handicap ont vu le jour, et ce, née), dès que l’établissement
un peu plus pour sion d’établissements pour pour l’ensemble des établisse­ possède plus d’un étage. Les
offrir des conditions 13 800  chambres supplémen­ ments recevant du public. « Ce établis­sements recevant plus
d’accueil optimales taires sur l’ensemble du terri­ sont principalement les locaux de 50  personnes par étage
aux personnes toire français. Une dynamique et infrastruc­tures qui seront doivent par ailleurs prévoir
handicapées… à laquelle vont s’ajouter dans touchés, mais ces rénovations, un second escalier. Le rem­
les mois et les années à venir, qu’elles génèrent ou non une placement des blocs-por­
Dans un contexte
l’ensemble des projets de transformation de l’organi­ tes pare-flammes, la mise
également marqué par rénovation poussés par les sation, auront de façon cer­ en conformité du système
l’évolution des normes nouvelles réglementations, taine des répercussions sur les de sécurité incendie (SSI),
de classification, l’évolution des normes de conditions de travail. Il est donc de l’éclairage de sécurité et
les projets de classification hôtelière (1) ou préférable de penser le chan­ des installations élec­
développement durable la recherche de l’obtention gement, plutôt que de “chan­ triques et la forma­
d’un « écolabel ». ger le pansement”  », estime tion à la sécurité
et le changement
Pour les hôteliers concernés, Régine Marc, ergonome deux fois par
des modes dans c’est aussi une opportunité au département Expertise et
le tourisme, les pour anticiper les conséquences conseil technique de l’INRS.
hôteliers ont du pain sur l’organisation et les condi­
sur la planche. Les tions de travail et – a minima –
Mises
répercussions sur les ne pas les oublier : par exemple,
lors de la réfection du réseau
aux normes
conditions de travail onéreuses
électrique, du réseau d’eau ou
doivent être anticipées. de climatisation, réserver une En matière de sécurité
place dans les gaines pour incendie, différentes
installer en même temps – ou mises aux normes sont
plus tard – un système d’aspi­ demandées et doivent
ration centralisé ou un câblage être effectuées avant le 4 août
de signalisation d’occupation 2011. L’arrêté du 24  juillet
des chambres qui peut faciliter 2006, portant approbation
la planification du travail. De de diverses dispositions com­
même, des travaux peuvent plétant et modifiant le
donner l’occasion de trouver un règlement de sécurité
espace libre ou une «  niche  » contre les risques d’in­
À noter. Le salon
pour les chariots de linge cendie et de panique
Équip’hôtel se tiendra
encombrant les couloirs… dans les établisse­
du 15 au 19 novembre
En 2006, on recensait près ments recevant
2008 à Paris-Porte de
de 8 400 accidents avec arrêt du public, sti­
Versailles. La Cramif et
de travail dans l’hôtellerie pule notam­
l’INRS seront présents
(hôtels avec et sans restau­
pour faire connaître aux
rant), pour un effectif global
professionnels les moyens
de 210 000  salariés. Ce qui
de prévention et initier des
représente un indice de fré­
démarches de collaboration
quence de 40 pour mille, alors
susceptibles d’améliorer
qu’il est de 39,4 pour mille
la santé et la sécurité au
dans l’ensemble des autres
travail (Hall 2-2, B150).
secteurs (2). À l’heure actuelle,

18 Travail & Sécurité –


­­ Novembre 2008
an sont également rendus à l’UMIH (3). Les frais induits accessibles en rez-de-chaus­ de Créteil, 27 salariées ont
obligatoires. « Nous organisons peuvent en effet rapidement sée  », poursuit Brigitte ainsi été promues «  agents
des formations pour les exploi­ atteindre plusieurs centaines Montserrat. d’hôtellerie  ». «  Nous avons
tants concernés de manière à de milliers d’euros. étroitement travaillé avec nos
les tenir au courant des aides En complément, l’obligation représentants du personnel
Des conséquences
qu’ils peuvent obtenir et des d’accessibilité aux handicaps et mis l’accent sur l’accompa­
moyens dont ils disposent. Les faite à tous les établissements
sur le travail gnement de l’action, afin que
petits établissements se sen­ recevant du public s’impose Ces projets de rénovation les salariées puissent être cer­
tent parfois démunis face aux au 1er  janvier 2015. Deux viennent ainsi bouleverser les tifiées et que la validation de
objectifs  », explique Brigitte arrêtés précisent les disposi­ espaces de travail, la réparti­ leur expérience se matérialise
Montserrat, responsable tions à mettre en place pour tion des stocks (linge, produits par des emplois  », explique
des affaires réglementaires le neuf et pour l’existant. Des d’entretien…), les flux divers… Marie-Hélène Fernandes, DRH
dérogations sont possibles en Des conséquences pour les du Hilton Suffren.
cas d’impossibilité de réaliser salariés qu’il est souhaitable En matière de services pro­
des travaux ou de consé­ d’anticiper, d’autant que l’in­ posés par la profession, la
quences sur l’activité dustrie hôtelière connaît des gamme s’est, elle aussi, éten­
de l’établissement. difficultés de recrutement : due : évolution des modes
L’ex­ploi­­­tant doit 70 % des jeunes formés aux oblige, thalassothérapie,
alors formuler métiers du tourisme et de sauna ou encore salle de sport
une demande l’hôtellerie quittent l’activité sont autant de prestations
au préfet et dans les cinq ans. Depuis de plus en plus rencontrées.
lui fournir les deux ans, les chiffres sont Si l’on ajoute les nouveaux
pièces néces­ éloquents : les effectifs sala­ concepts de décoration ou
saires à l’ap­ riés des chaînes d’hôtellerie d’équipement (comme l’ar­
préciation et de restauration ne cessent rivée de la couette), on voit
de celle- de diminuer (- 1,1 % en 2006, bien que, au-delà des exi­
ci. «  Dans - 2,3 % en 2007), en totale gences réglementaires, une
certains cas, contradiction avec la dyna­ somme de paramètres sans
les change­­­ mique de la branche dont cesse renouvelés bouleverse
ments à pré­ les besoins en personnel ne les habitudes de travail. Le
voir peuvent cessent de croître. Intégrer la personnel, même formé et
avoir un impact dimension des conditions de informé, acceptera d’autant
sur la surface travail et les valoriser pour mieux aux changements qu’il
dédiée à la vente. accompagner les évolutions en aura été partie prenante.
L’UMIH a négocié le du métier pourrait permet­ 1. De nouvelles normes de classification
fait que les hôtels de tre de réduire l’exposition des hôtelière seront adoptées en décembre
prochain pour un début d’application en
moins de 2 étoiles et salariés aux risques. C’est ce janvier 2009. En mai 2008, le secrétaire
moins de 3  étages qu’a compris l’hôtel Hilton d’État chargé du Commerce, de l’Artisanat,
des Petites et moyennes entreprises,
soient exonérés de Suffren, à Paris, où, dans un du Tourisme et des Services, Hervé Novelli,
l’obligation d’ins­ contexte d’arrêt d’exploi­ annonçait la création d’un « fonds pour
la rénovation hôtelière », pour aider
taller un ascen­ tation de l’établissement, les
INRS

les propriétaires d’hôtels à améliorer


seur, dès lors que femmes de chambre se sont leurs établissements sur la base
our l’

du volontariat. Prônant la création


les prestations vu proposer, sur la base du d’une catégorie « 5 étoiles », il estime
pian p

et chambres volontariat, une validation que le fonds de rénovation correspond


« aux besoins du secteur » et doit permet­
adaptées sont des acquis de l’expérience.
© Maylis Ago

tre de répondre « aux difficultés


Au terme d’une formation de financement des entreprises ».
mise en place par l’associa­ 2. Source CNAMTS.
3. Union des métiers et des industries
tion professionnelle pour la de l’hôtellerie.
formation des adultes (Afpa) G. B.

Travail & Sécurité ­­– Novembre 2008 19


Hôtel Palma
Tout faire… dans les limites du possi
Président de la
Fédération de
l’hôtellerie familiale
nationale (FHFN) de
l’Union des métiers
et des industries de
l’hôtellerie (UMIH),
Bertrand Lecourt dirige
depuis 1979 l’hôtel 2*
Palma, situé dans le
XVIIe arrondissement
de Paris. Depuis
1986, une succession
d’aménagements a

© Yves Cousson/INRS
contribué à améliorer
la qualité du service
et à faciliter le travail
des sept salariés qui
composent l’effectif
de l’établissement.
■ Travail & Sécurité. Comment nir les contours de notre champ Une colonne de vide-linge, inspirée
Entretien. des vide-ordures d’appartement, a
la rénovation de l’Hôtel Palma d’action : nous ne sommes pas
été mise en place, avec une trappe
s’est-elle mise en place ? un grand hôtel où il est possible à chaque palier et une arrivée
d’investir, par exemple, dans directe auprès des machines.
Bertrand Lecourt, président des lits automatisés. Certaines
de la Fédération de l'hôtelle- manutentions sont inévitables les moteurs sont au sous-sol,
rie familiale nationale. J’ai pris et peuvent être sources de et une entrée d’aspiration des
la tête de l’établissement en maux de dos ou de TMS. Pour poussières par étage permet
1979. À l’époque, il a fallu l’ex­ réduire les ports de charge, il a de raccorder les flexibles.
ploiter « en l’état », le temps de fallu prendre en considération Ainsi, avec une seule prise
découvrir ce qu’il était possible l’ensemble de la problémati­ d’aspiration, le ménage peut
de faire pour améliorer la situa­ que et envisager des solutions être fait à n’importe quelle
tion et, surtout, ce qu’il était astucieuses. La rénovation de heure, sans bruit, sans risquer
important d’éviter. Le Palma est l’hôtel a été entamée en 1986, de se prendre les pieds dans
un hôtel de 32 chambres situé avec, au fil des années, des les câbles ni avoir à porter
dans un vieil immeuble pari­ aménagements et une évolu­ les aspirateurs dans les esca­
sien. Les femmes de chambre, tion de l’organisation qui ont liers. Nous avons également
qui exercent un métier déjà permis d’améliorer la qualité mis en place une colonne de
difficile sur le plan des efforts du service et les conditions de vide-linge, inspirée des vide-
physiques à produire, doivent travail. ordures en appartement.
composer avec l’exiguïté et la Nous avions dans un premier
vétusté des locaux. Il était donc ■ Comment avez-vous fait évo­ temps fait descendre l’ascen­
nécessaire d’observer et com­ luer les situations de travail ? seur au sous-sol pour que les
prendre l’activité pour identi­ femmes de chambre ne pas­
fier les risques et les prévenir. B. L. Nous avons installé un sent plus devant la réception
Nécessaire également de défi­ dispositif d’aspiration intégré : avec le linge pour l’amener

20 Travail & Sécurité –


­­ Novembre 2008
ible
aux machines. Malgré tout, Un dispositif d’aspiration
le linge traînait toujours sur intégré a été installé avec
les moteurs au sous-sol
les rampes d’escalier, et les
et une entrée d’aspiration
manutentions n’étaient pas des poussières par étage, qui
toutes supprimées. Nous permet de raccorder les flexibles.
avons donc trouvé l’emplace­
ment pour une colonne libre nouveaux modules de chauf­
circulant dans tous les étages, fage dans les chambres, l’idée
et une trappe a été installée du contacteur clé qui permet
pour chaque palier. Toujours de couper le chauffage a été
pour éviter les déplacements reproduite : pourquoi ne pas
inutiles, nous avons créé un prévoir un contacteur clé qui
système permettant de voir signale l’occupation ? À cha­
à chaque étage si les cham­ que étage, un tableau à dio­
bres sont libres ou occupées. des a été installé. La femme de
Précédemment, une femme chambre tourne une clé et voit
de chambre devait frap­ immédiatement quelles sont

© Yves Cousson/INRS
per à la porte, téléphoner à les chambres libres. Ainsi, elle
la réception ou descendre ne dérange pas le client et ne
pour savoir quels étaient les fait aucun pas superflu. Enfin,
clients présents dans l’hôtel. le mobilier suspendu dans les
Alors que l’on installait de chambres facilite le ménage.

Malgré tout, au moment de exigences nouvelles, quand


l’installation, nous manquions bien même elles peuvent être
de recul et n’avions pas anti­ tout à fait légitimes. Nous
cipé les détériorations et la devons actuellement faire face
casse. En 2008, les salles de à la mise aux normes vis-à-vis
bains ont été refaites avec le du risque incendie, qui est très
même type de mobilier… mais lourde pour les petits hôtels
du solide ! indépendants. La réglementa­
tion impose, par exemple, de
■ Comment ces aménage­ protéger les escaliers, c’est-à-
ments s’inscrivent-ils au milieu dire d’isoler la cage d'escalier
des nouvelles obligations et des autres locaux ou circula­
mises aux normes ? tions (couloirs). Dans la confi­
guration qui est la nôtre, c’est
B. L. Certaines évolutions sont difficile. Sans doute faudra-t-il
dictées par les obligations sacrifier ou réaménager l’en­
réglementaires. Pas toutes. trée du local de rangement
Pour un établissement de que l’on trouve à chaque palier.
petite taille, il n’est pas tou­ Pour le déplacer où ? À partir
jours évident de se plier aux du moment où il n’est pas pos­
sible de pousser les murs, ces
© Yves Cousson/INRS

À chaque étage, la femme de exigences peuvent vite deve­


chambre a accès à un tableau de nir très contraignantes pour
bord qui lui permet de savoir dans
quelles chambres les clients sont les exploitants.
présents. Les déplacements sont
réduits et la clientèle plus tranquille. Propos recueillis par G. B.

Travail & Sécurité ­­– Novembre 2008 21


Linger et équipier
Les atouts d’une démarche ergono
L
Considéré comme eur métier nécessite le
un métier à part déploiement d’efforts
physiques dans des
entière ou intégré à
locaux souvent aveugles.
l’activité des femmes Pour autant, le linger ou la
de chambre, le travail lingère et l’équipier (employé
en lingerie peut générer d’étage) en hôtellerie aiment
des risques d’atteinte voir leur activité présentée
à la santé. L’analyse sous des aspects plus valori­
sants. Confiée aux femmes de
du travail dans le
chambre ou à un personnel
cadre d’une démarche spécifique, leur tâche contri­
ergonomique donne bue à l’efficacité du service
aux responsables d’hébergement et, en consé­
d’établissements quence, à la satisfaction du
les moyens d’apporter client et à l’image de marque
de l’établissement. «  Il faut
des réponses en termes
arrêter de présenter le travail
de prévention d’étage sous des aspects gris et
et d’amélioration sales. Certes, la pénibilité est à
des conditions prendre en compte. Si des sala­
de travail. riés se sont abîmé le dos après
vingt ou trente ans de maison,
c’est que certaines habitudes
de travail doivent être repen­
sées », explique Roland Heguy,
président des hôteliers indé­
pendants à l’UMIH. À Biarritz,
il dirige l’hôtel 3* Windsor

Grande Plage où, depuis long­ problématiques du métier :


Le travail en lingerie temps, le personnel d’étage vieillissement des effectifs et
travaille en binôme. «  J’ai santé plus fragile, démotiva­

L e linger (ou la lingère) est responsable de l’entretien


du linge de l’hôtel. Il rassemble, trie et comptabilise
le linge sale destiné à la buanderie de l’hôtel ou à un
toujours fonctionné comme
ça et le métier n’en est que
plus agréable. Avec la diver­
tion pouvant être causée par
l’isolement, défaut d’évolu­
tion ou de responsabilités,
organisme extérieur. Il réceptionne et contrôle le linge sification des tâches et en ne absentéisme peut-être révé­
propre, gère le stock et les commandes de linge de location. les restreignant pas à un seul lateur d’un certain mal-être
Selon les cas, il peut être amené à entretenir les tenues secteur de l’établissement, nos au travail, etc.
du personnel, assurer le service de nettoyage du linge employées se sentent fières de Les lingers et lingères sont
pour les clients ou entretenir les textiles d’ameublement. leur travail. C’est important », concernés par des risques
Il est placé sous l’autorité d’un chef linger, de la gouvernante poursuit l’exploitant. Les avan­ professionnels spécifiques :
ou encore de la direction et peut lui-même encadrer plusieurs tages du binôme sont nom­ 31 % des accidents du travail
lingers et équipiers. On observe, parmi les atteintes à la santé breux : ce type d’organisation en 2006 sont représentés par
dont peuvent être victimes les lingers et équipiers, une forte crée une dynamique d’équipe, les accidents de plain-pied,
prévalence des pathologies péri-articulaires et des lombalgies favorise l’entraide et l’auto­ 24 % sont dus aux objets
générées par des postures contraignantes, des ports contrôle. Une solution parmi manipulés et 15 % sont des
de charges, des gestes répétitifs… et le stress. d’autres quand les directions chutes avec dénivellation.
d’hôtels sont confrontées aux La sous-déclaration des acci­

22 Travail & Sécurité –


­­ Novembre 2008
Quatre grands axes
mique pour améliorer le travail
• Organisation
Les choix organisationnels (circuits de linge propre et sale,
disponibilité du personnel pour effectuer des tâches annexes,
aux problèmes. L’implication répartition du travail, horaires d’ouverture en continu,
de cadres et employés de diffé­ apparition de nouveaux concepts ou aménagements…)
rents secteurs (hébergement, ont un retentissement sur l’activité. Le management
gestion, maintenance) pour de proximité a un rôle à jouer dans la mise en place
constituer un groupe pluridis­ de l’organisation. Il doit tout faire pour limiter les aléas
ciplinaire ayant pour mission (absentéisme, pénuried’équipements ou de matériel
d’analyser le travail donne lieu d’entretien…) et, le cas échéant, avoir prévu de s’y adapter.
à des échanges d’une grande Il est également nécessaire de prévoir le décloisonnement
richesse. » des services et métiers et l’accompagnement des évolutions
(projets de rénovation, modification de l’activité…), en
Travail prescrit donnant notamment accès à la formation professionnelle.
et travail réel • Outils et équipements (moyens de manutention,
La tâche est en général défi­ machines, outils de gestion informatique, produits
nie par des consignes et pro­ de nettoyage…)
cédures écrites ou orales qui L’introduction de nouveaux outils (moyens de manutentions
déterminent l’enchaînement adaptés et entretenus, machines aux normes, plans
des opérations à effectuer. de travail à hauteur réglable avec sièges assis-debout…)
Mais ce travail prescrit ou doit s’accompagner d’une révision des procédures
théorique est bien distinct et des formations. Les aspects liés au stockage des produits
du travail réel, qui fait appa­ d’entretien du linge dans des zones dédiées, en fonction
raître des différences dans des dangers repérés sur l’étiquette, ne doivent pas être
les enchaînements et maniè­ négligés.
S
NR

res de faire. Quand l’une des


l’I

• Locaux et mobiliers
ur

variables de la situation de
po

ia La conception et l’implantation des locaux et équipements


n

op travail est modifiée (locaux,


s Ag influencent les conditions de travail, en particulier sur
yli organisation, outils…), le
Ma les aspects liés à l’espace disponible, l’accessibilité, l’éclairage,
©
professionnel régule instinc­ la chaleur, l’assainissement de l’air, les déplacements.
tivement la situation pour La connaissance du métier et de ses tâches spécifiques
adapter son activité. Cette doit servir, dans des projets de conception ou de rénovation,
dents est également courante régulation peut, dans certains à faire les choix les plus adaptés.
chez ces professionnels qui cas, induire des risques d’at­
craignent des conséquences teinte à la santé ou à la qua­ • Formation
pour leur emploi ou une mise lité du service. Les origines La formation continue est nécessaire, en particulier
en inaptitude. Par ailleurs, de ces désordres sont multi­ pour accompagner les différents changements.
l’activité physique qu’ils exer­ ples : un espace de stockage
cent au sein d’un environne­ insuffisant qui entraîne des nombre irrégulier de tâches Opéra, ont été choisis pour
ment contraignant peut être manipulations et efforts sup­ qui s’interrompent et se com­ un audit. « Nous souhaitions
source de TMS. « Pour identi­ plémentaires ou une perte de binent, dans un contexte où toucher un groupe tel que
fier et prévenir ces risques, il temps, l’absence d’ascenseur le service hôtelier est toujours Accor car l’impact pouvait
faut comprendre l’activité, en réservé au personnel faisant plus exigeant. être important, commente
recherchant dans les situations naître une désorganisation ou Christophe Ballue, contrôleur
de travail les causes d’atteintes une surcharge du travail, etc. de sécurité à la Cramif. Si les
Une impulsion
à la santé. Tel est le principe de Ce sont les aléas organisa­ mesures de prévention et le
la démarche ergonomique, tionnels auxquels les lingers Dans le cadre de la démar­ plan d’action définis pour un
explique Régine Marc, ergo­ et lingères doivent régulière­ che ergonomique menée établissement donnent lieu à
nome à l’INRS. Il existe sou­ ment faire face. Révélé par la conjointement par l’INRS et la une évaluation satisfaisante,
vent en interne la possibilité de démarche ergonomique, le Cramif, deux hôtels parisiens, pourquoi ne pas les adapter ou
trouver les solutions adaptées travail réel est constitué d’un l’Ibis Lafayette et le Millenium les reproduire ailleurs, dans les

Travail & Sécurité ­­– Novembre 2008 23


Les atouts d’une démarche
ergonomique

futurs projets du groupe ? » Le


Millenium Opéra, quant à lui,
était demandeur de l’audit
car l’établissement vivait des
difficultés dans le secteur de
la lingerie. « Nous avons éta­
bli un diagnostic sur la des­
cente de linge et la lingerie. En
parallèle, un projet d’établis­
sement sur la rénovation du
poste d’accueil était en cours,
explique Agnès Fernandez,
contrôleur de sécurité à la
Cramif. Pour le mener à bien,
l’hôtel s’est inspiré de ce tra­
vail. Nous avons notamment

RS
l’IN
conseillé à la direction d’inté­

ur
grer un architecte ergonome

po
n
en amont du projet. » « L’audit

pia
o
Ag
nous a permis de nous interro­ ylis
Ma
ger sur la pénibilité du travail ©

et les moyens de la réduire :


travail sur l’éclairage et les l’étudierons et le soumettrons sion pour que l’idée fasse des
niveaux sonores par exem­ au siège afin de définir les pos­ petits : tel est l’objectif des
ple, ajoute Anne Papazian,
adjointe à la direction des
sibilités de l’insérer dans notre
projet d’établissement, en par­
préventeurs. «  Il ne faut pas
nier que la réussite d’une telle
Pour
ressources humaines de l’hô­ ticulier pour le réagencement démarche est étroitement en savoir
tel. Un cahier des charges doit
nous être présenté prochai­
du poste de réception. »
Porter un regard neuf sur le
liée à la volonté et l’implica­
tion de la direction  », souli­ plus
nement par l’architecte. Nous travail, donner une impul­ gne Christophe Ballue. Pour
convaincre les exploitants, les Brochures INRS
arguments ne manquent pas. • ED 6033, Lingère,
La démarche ergonomique, linger et équipier
parce qu’elle s’appuie sur la dans l’hôtellerie.
compréhension de l’activité, • ED 991, Femme
permet d’élargir la recherche de chambre et valet
de solutions au-delà des équi­ dans l’hôtellerie.
pements de protection indivi­
Téléchargeables
duelle ou des consignes. Autre
sur www.inrs.fr.
bénéfice notable, son impact
sur la qualité du service et la Travail et Sécurité
© 2008 Jupiterimages Corporation

performance est évident. •N °665, septembre 2006,


« Femmes de chambre :
G. B. la prévention s’invite
dans les hôtels ».
En fonction de l’organisation Téléchargeable
et de la taille de l’établissement,
les tâches de linger ou lingère sont
sur www.travail-et-
confiées aux femmes de chambres securité.fr, rubrique
ou à un personnel spécifique. « Archives ».

24 Travail & Sécurité –­­ Novembre 08


Hôtel U Capu Biancu
Des salariés choyés
U
Sécurité et bien-être n terrain de 5 hectares Notre site étant difficile d’accès, où sont entreposées les bois­
des salariés. Cette de maquis, surplom­ le problème de leur logement sons, de l’office et de la cui­
bant la mer. C’est le était crucial. Nous avons essayé sine, elles-mêmes à un étage
préoccupation est aussi
site qu’a choisi Jean-Louis plusieurs solutions : caravanes, en dessous de la réception et
importante pour Limongi pour créer un hôtel mobil-homes… mais ce n’était des chambres. Sur les conseils
l’hôtel 4* U Capu Biancu 4* en Corse. « J’ai longtemps pas satisfaisant et nous nous de la CRAM Sud-Est, des
que la qualité vécu à Marseille, mais j’avais sommes décidés à bâtir une monte-charges ont été ins­
de son accueil. un besoin viscéral de revenir construction en dur où nos tallés. « Cela n’a pas toujours
Cuisine, buanderie au pays. L’occasion s’est pré­ salariés pourraient bénéficier été facile, notamment pour le
sentée en 1992 de racheter de tout le confort. » monte-charge de la cave dont
et hébergement
un bâtiment non achevé et Les travaux, entamés en 2002, l’installation a nécessité de
des saisonniers ont ses terres. C’est ainsi qu’est né ont été achevés il y a deux creuser dans la roche, expli­
été conçus notre hôtel, retrace son pro­ ans. Aujourd’hui, le personnel que-t-il. Mais c’est le monte-
en s’appuyant priétaire. Nous sommes partis de l’hôtel dispose de 32 cham­ charge de l’office à la réception
sur l’expertise de rien et nous avons tout fait bres, équipées chacune d’un qui est le plus significatif pour
de la CRAM Sud-Est. nous-mêmes, petit à petit, ma réfrigérateur, et avec salle nos salariés. Les femmes de
femme et moi-même. Chaque d’eau indépendante. Une cui­ chambre n’ont plus à porter
année, pendant la fermeture sine, un réfectoire, une salle sur deux étages les plateaux
hivernale, nous entamons de télévision et un salon col­ de room-service, notamment
de nouveaux travaux pour lectifs complètent l’ensemble. les plateaux des petits déjeu­
améliorer notre établisse­ L’aménagement de la cuisine ners. » La même logique a
ment. » Parmi les améliora­ de l’hôtel a aussi nécessité un été appliquée à l’aménage­
tions les plus importantes : la important chantier, s’étalant ment de la buanderie, avec
Dans cet hôtel difficile d’accès, construction d’un bâtiment sur deux ans. Pour concevoir des trappes ouvertes en hau­
le personnel dispose, pour pour loger les salariés saison­ ces nouvelles installations, teur sur des toboggans qui
son hébergement, d’un bâtiment
de 32 chambres équipées niers. « En pleine saison, nous Jean-Louis Limongi a suivi les laissent glisser les ballots de
chacune d’un réfrigérateur, employons 60  personnes, préconisations de la CRAM linge sale directement dans la
et avec salle d’eau indépendante. décrit Jean-Louis Limongi. Sud-Est en matière de concep­ buanderie. Cet espace a, par
tion des locaux de cuisine : ailleurs, été équipé d’un sys­
organisation des espaces tème de ventilation naturelle :
– plonge, cuisine, stockage des « fenêtres » sans vitre qui
– dans le sens de la marche laissent passer l’air (l’hôtel ne
en avant, ouvertures en toi­ fonctionnant pas l’hiver, pas
ture pour créer des puits de de gêne occasionnée par le
lumière, revêtements de sol froid). Dans sa logique d’amé­
adaptés, plinthes sous les pia­ lioration permanente, Jean-
nos pour faciliter le nettoyage, Louis Limongi a encore bien
aspiration des hottes… d’autres projets en tête. Pour
les logements de ses salariés :
installer un téléviseur avec
Des monte-charges
accès au câble dans chaque
à tous les étages chambre. Pour la cuisine :
© Armand Guyader/CRAM SE

Un problème plus spécifique acquérir une camionnette


se posait à U Capu Biancu. poly-benne qui faciliterait
« Le bâtiment est construit en l’acheminement des déchets
partie à fleur de roche, avec au point de collecte, éloigné
d’importants dénivelés », pré­ de l’hôtel de 5 km.
cise Jean-Louis Limongi. De
fait, un étage sépare la cave, S. M.

Travail & Sécurité ­­– Novembre 2008 25


Santé au travail
Sensibiliser les plus jeunes
À la demande ■ Travail & Sécurité. Comment au point du document uni­ peu d’attention est accordée
de l’UMIH de la s’organise le travail des servi- que. 38  établissements sont aux bris de verre, par exem­
ces de santé au travail de Lille allés au bout de la démarche ple… Ce travail a été utile
région Nord-Pas-
auprès des professionnels de et ont reçu une information pour la réalisation d’un plan
de-Calais, un projet l’hôtellerie et de la restaura- sur l’évaluation des risques de prévention dans la région.
d’accompagnement tion depuis 2002 ? au cours de laquelle était Encouragés par les syndicats
des établissements présenté le guide. Quelques professionnels, nous avons
CHR (1) a été mis en Dr Karinne Legrand-Cattan, mois plus tard, nous avons voulu compléter ces données
place en 2002 par les médecin du travail. L’industrie recueilli l’évaluation des ris­ en étudiant plus précisément
hôtelière de la région Nord- ques de 27 d’entre eux. La le vécu quotidien des jeunes
services de santé au
Pas-de-Calais souhaitait participation des salariés à dans leur métier, parce qu’ils
travail. Le Dr Karinne promouvoir une politique l’élaboration des documents constituent la première cible
Legrand-Cattan, de prévention des risques uniques n’a été obtenue que à atteindre dans une action
médecin à l’Association professionnels dans ses éta­ dans 33 % des cas. L’analyse de prévention.
de médecine et blissements. Nous avons été des risques prépondérants
santé au travail de sollicités par la profession pour a permis de relever un défi­ ■ Qu’avez vous-appris sur
la réali­ sation d’un guide (2) cit assez important dans la cette population ?
Lille (Amest), évoque
destiné à l’aider dans l’évalua­ mise en place de la préven­
l’aide à l’évaluation tion des risques. Une étude tion des petits accidents : Dr K. L.-C. L’étude s’est appuyée
des risques mise en a ensuite été lancée pour chutes, brûlures, coupures… sur un questionnaire distribué
place et commente accompagner un échantillon Les vêtements appropriés ne au cours de la visite médicale.
les observations nées d’établissements dans la mise sont pas toujours portés, trop Les candidats étaient sélec­
de plusieurs études, tionnés sur deux critères :
ils devaient avoir moins de
notamment sur le vécu
26 ans et travailler dans la
des jeunes dans branche depuis plus de six
la profession. mois. Nous avions parié sur
200 questionnaires, pour
une population d’environ
3 000 salariés correspondant
aux critères de sélection de
notre service de santé au tra­
vail de la métropole lilloise,
mais n’avons pu en recueillir
que 75, beaucoup ne se pré­
sentant pas à la visite médi­
cale. Le turn-over élevé donne
un élément d’explication à
la difficulté de tracer cette
population. L’analyse des
NRS

résultats n’étant pas termi­


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née, il n’est possible de parler


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que de tendances, avec toute


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la réserve nécessaire quant à


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la représentativité de notre
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échantillon. Plus de 25 % des


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jeunes travaillent à temps


partiel, essentiellement sur
des postes peu qualifiés. Si,

26 Travail & Sécurité –­­ Novembre 2008


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globalement, ils ne déplorent L’enquête plus générale sur la ■ Quelles suites allez-vous de travail. Deux films sont en
pas un mauvais vécu au travail santé de ces salariés révèle donner à cette action ? projet, l’un sur le poste de
et évoquent même un senti­ que 91 % d’entre eux estiment serveur et l’autre sur le tra­
ment de reconnaissance, plus être en bonne ou excellente Dr K. L.-C. Les constats aux­ vail de cuisinier. L’idée est de
de la moitié ne souhaitent pas santé. 42 % des hommes sont quels nous sommes arrivés présenter ce qui peut arriver
évoluer dans la branche. 67 % toutefois en insuffisance vont nous permettre de créer dans une journée type avec
des jeunes interrogés décla­ pondérale, une large propor­ des outils pédagogiques pour un outil interactif. Les ensei­
rent par ailleurs être amenés tion reconnaissant sauter 2009, outils qui seront relayés gnants et l’inspection d’aca­
à traiter trop vite une tâche ou écourter des repas. 21 % par les centres d’apprentis­ démie valideront l’ensemble
qui leur demanderait plus de consomment régulièrement sage. Un groupe de travail a des contenus.
temps. 53 % sont contraints de l’alcool. 67 % sont fumeurs. été mis en place avec les CFA
d’abandonner certaines tâches Enfin, 27 % déclarent fumer de la région. Des outils de 1. CHR : Cafés-tabacs, hôtels, discothè­
ques et restaurants
pour en commencer une autre, régulièrement du cannabis, travaux dirigés, qui pourront 2. L’évaluation des risques professionnels
mais seuls 27 % estiment que dont 5 % quotidiennement. être utilisés par les jeunes en dans les cafés-tabacs, les hôtels,
les restaurants, les bars et
cela les perturbe. Enfin, seule­ L’interprétation de ces résul­ apprentissage, permettront les discothèques, réalisé par l’Amest
ment la moitié des personnes tats devra bien évidemment d’aborder la notion de danger avec l’UMIH et la CRAM Nord-Picardie.
sondées déclarent choisir elles- se faire en regard des statis­ en leur apprenant à décorti­
mêmes leur façon de procéder. tiques régionales. quer et analyser une situation Propos recueillis par G. B.

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