Économie rurale

Sur le principe du développement rural intégré

Raanan Weitx

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Weitx Raanan. Sur le principe du développement rural intégré. In: Économie rurale. N°61, 1964. pp. 3-14.

doi : 10.3406/ecoru.1964.1851

http://www.persee.fr/doc/ecoru_0013-0559_1964_num_61_1_1851

Document généré le 16/10/2015

 SUR LE
DU DEVELOPPEMENT
Directeur du Département
de
parl'Université
Raanan d'Equipement
WEITZ
d'Israël agricole
INTRODUCTION
Le monde entier est profondément préoccupé par
le problème du développement rural. Dans les pays
occidentaux, l'importance de ce problème tient
surtout à son aspect social : on y cherche de nouveaux
moyens de maintenir l'équilibre entre le
développement urbain et le développement rural (1). Dans
les pays en voie de développement, ce problème
est d'une importance plus vitale encore :
développement agricole et développement national y sont
pratiquement synonymes. Cette situation est due à
plusieurs facteurs :
1° L'agriculture se trouve encore à un niveau de
subsistance. Sa transformation en une économie
orientée vers les marchés peut être réalisée avant
tout par une augmentation de la production
agricole : celle-ci permettrait d'approvisionner la
population non-agricole en aliments et en matières
premières, et de fournir aux fermiers les moyens
d'acquérir des produits manufacturés.
2° La majorité de la population vit dans les zones
rurales et est employée dans l'agriculture. Tout
programme de développement préparé pour le total
de la population doit donc commencer par les
régions agricoles (2).
(*) L'auteur adresse ses remerciements à. Madame L. Apple-
bamm pour l'aide qu'elle lui a apportée dans la préparation de
cet article.
(1) De nombreuses publications ont longuement traité de cette
situation ; par exemple — Gee W. : The Social Economies of
Agriculture (New York, McMillan, 1942) ; Steinberg F. : The
Military and Industrial Evolution o/ Our Time (New York,
Frederick A. Praeger. 1959) ; Grûner Plan (Bonn, Deutsche
Bundestag, 1962) ; Proceedings of the International Conference
on « Fundamental Problems of Agrarias Structure and Reform in
Developping Nations » (Berlin-Tagel, Deutsche Stiftung fur
Entwickekungslànder, May 1962).
(2) Là où l'importance de ce point n'a pas été reconnue et où
PRINCIPE
RURAL INTEGRE
3° Le niveau de l'alimentation est bas, et pour
atteindre un niveau de vie plus élevé il faut tout
d'abord augmenter la production agricole.,
4°. A l'état actuel du développement, une
industrialisation à grande échelle, de type occidental, ne
peut pas être la clef d'un progrès rapide, puisque
ces nations ne possèdent ni le capital nécessaire à
investir dans de grandes entreprises industrielles, ni
la main-d'œuvre qualifiée nécessaire à leur
fonctionnement.
Pour ces diverses raisons, le développement rural
est l'un des principaux problèmes auxquels les
nations nouvelles doivent faire face.
Il ne faut pas oublier que les pays en voie de
développement ne peuvent pas se permettre de
consacrer de longs délais aux essais et aux
expériences. Récemment libérés de la domination
étrangère, ils sont bien placés pour savoir qu'ils ne
pourront atteindre leur véritable indépendance que par
le progrès économique. Pressés par. le besoin urgent
les activités de développement sont concentrées dans les zones
•
<
urbaines qui s'industrialisent, un abîme grandissant sépare le milieu
traditionnel ' rural de la vie urbaine qui en est totalement
■
différente. Les villes s'étendent rapidement alors que les villages
végètent ou dégénèrent. Au fur et à mesure, deux classes sociales
distinctes apparaissent dans un même pays, menaçant la base-même
sur laquelle repose le développement futur. Plusieurs études de
'
•
ce problème sont citées dans le livre de B. Higgins : Economie
Development, Problems, Principles and Policies (New York,
VvV W. Norton, 1959). Cf. aussi FAO Mediterranean
Development Project (Rome, 1959, pp. 12-14) ; Salcedo, L. : Some Social
Development and ' Urbanization Problems in Colombia ; Ndem,
E. B. : Rural Development and Urbanization (en Nigeria) et
Mukharji, G. : Urbanization and Regional Planning (en Inde).
Etudes présentées à la Conférence des Nations-Unies sur
l'application de la science et de la technologie au service des pays en
voie de développement. Genève, 1963.
 _ 4 —
de trouver des solutions rapides à une situation
intolérable, il se peut que ces peuples cherchent
refuge dans des attitudes politiques extrémistes. De
telles tendances peuvent déjà être observées dans
certains pays qui récemment encore jouissaient d'un
régime démocratique.
L'expérience d'Israël et d'autres pays en voie de
développement a montré qu'on n'a encore trouvé
aucune solution de valeur générale capable de
résoudre le problème du développement rural dans
ses divers aspects, et ceci en dépit de l'importance
de ce sujet et des moyens technologiques et
financiers proposés au cours des dernières années. Ceci -,
provient probablement des différences
fondamentales qui séparent les attitudes sociales et
psychologiques des pays occidentaux de la vie traditionnelle
des nations nouvelles. Le rôle que certains facteurs
impondérables jouent dans le processus du
développement rural est bien connu (3), mais jusqu'à
maintenant on n'est arrivé à formuler aucun
système général qui en tienne compte et qui en fasse
les leviers du développement. L'expérience du
développement rural acquise en Israël, par exemple, a
montré que ces facteurs complexes sont
probablement les plus décisifs de tous. Il est clair
maintenant-que la plupart des échecs survenus dans
l'établissement des nouveaux immigrants d'origine afro-
asiatique ont été causés par le manque de
compréhension de la part des experts israéliens
I. — LES CONDITIONS DU DEVELOPPEMENT RURAL
Maintenir une société viable dans les zones
rurales signifie essentiellement" combler la différence
entre le niveau de vie urbain et le niveau de vie
rural, et ainsi réduire l'importance de l'attraction
exercée par la ville. Pour atteindre ce but, il faut
remplir les principales conditions suivantes : un
,
progrès économique suffisant pour augmenter le
revenu individuel (5) ; pour absorber l'excès de
main-d'œuvre, des opportunités nouvelles d'emploi
en dehors de l'agriculture mais situées dans les
régions rurales ; et la création d'activités et de
services sociaux et culturels à un niveau adéquat.
.
(3) Hoselitz, Bert F., éd. : The Progress of Underdeveloped
Areas (University of Chicago Press, 1952) ; Ribey, Williams J. :
Social Problems of Development and Urbanization (au Ghana).
Etude présentée à la Conférence des Nations-Unies sur
l'application de la science et de la technologie au service des pays en
voie de développement, Genève, 1963.
gine européenne pour ces facteurs. A la suite d'une
période critique d'essais et après avoir été aux
prises avec la réalité, l'Agence de Colonisation a été
obligée de mieux adapter ses attitudes à l'élément
humain (4). On peut trouver des exemples
semblables dans d'autres pays.
La situation décrite ci-dessus a conduit à
rechercher une nouvelle façon d'aborder le
développement rural, qui permettrait un progrès, économique
rapide sans toutefois miner la cohésion sociale des
communautés rurales.
Dans les pages qui suivent sont esquissées les
grandes lignes d'une telle approche,
particulièrement, en ce qui concerne les nations en voie de
développement, et un essai y est fait de clarifier le
principe du « développement rural intégré » sur
lequel elle est basée. Ce principe sous-entend
l'intégration, dans la zone rurale, de l'agriculture, de
l'industrie et des services nécessaires, tout en tenant
compte des divers aspects de la vie rurale
(économique, social, institutionnel et écologique). Il est
caractérisé par trois traits distinctifs :
1° Un lien étroit entre la planification et
l'exécution ;
2° Une équipe de développement composée de
divers experts travaillant en coopération constante ;
3° Une région délimitée de façon à convenir au
mécanisme du développement, intégré.
A. — Une augmentation rapide
du revenu individuel
La condition première du développement rural est
l'augmentation du revenu individuel. Dans les pays
(4) Shapiro, O. : Gadish. Sociological Report on a New
Immigrant Village in the Jerusalem Mountains (en hébreu), Jerusalem,
Land Settlement Department of the Jewish Agency, 1961 ;
Weintraub, D. et Lisak, M. : Agricultural Settlement of North
African Immigrants in Israel (en hébreu) (Jerusalem, Hebrew
University, Department of Sociology) ; Weitz, R. : « Sociologists
and Policy Makers - A Case Study of Agricultural Settlement
in Israel ». Transactions of the Fifth World Congress of Sociology
(Washington, 1962, pp. 59-75).
(5) Horowitz, .D.. :. The Shadow of Yesterday and the
Challenge of Tomorrow (en hébreu), Jerusalem - Tel-Aviv, Schocken
Publishing House, 1962.
 _ 5 —
développés, ceci signifie qu'il faut l'élever à un
niveau plus ou moins égal au revenu moyen de
l'habitant des villes, c'est-à-dire de l'ouvrier
industriel qualifié. Par contre, dans les pays en voie de
développement, le développement rural doit servir
de point de départ pour le développement national ;
le niveau du revenu y est déterminé, assez
arbitrairement, en fonction des conditions et des
possibilités existantes ; on escompte alors que les revenus
urbains augmenteront au même rythme que les
revenus ruraux. Atteindre ce but implique une
utilisation plus efficace des -ressources naturelles et
l'introduction de méthodes, de production nouvelles
et plus efficaces. Aucune formule générale capable
de guider le planificateur n'a encore été suggérée.
Les trois points suivants sont proposés ici pour,
,
orienter les activités de développement dans ce
domaine.
1 ° La société rurale, dans les nations développées,
a atteint un stade relativement avancé d'adaptation
aux notions technologiques modernes et peut
assimiler rapidement des idées nouvelles. Au contraire,
les peuples des nations en voie de développement
ne sont pas encore prêts à s'adapter aux
changements dus à l'introduction d'innovations
technologiques. Souvent des opérations qui semblent être
simples ne réussissent pas à fournir les résultats
attendus, du fait qu'elles n'affectent pas
directement la vie de l'agriculteur individuel (6)^ Cette
situation révèle la nécessité de changements plus
simples et de moindre envergure qui puissent être
facilement compris par l'agriculteur. Il est possible
que de petits changements, introduits sur une grande
échelle, puissent amener une accélération plus
effective du développement économique qu'une seule
grande entreprise. Ceci est d'autant plus vrai que
le niveau initial du revenu est très bas, et que même
une légère augmentation de revenu est alors
importante pour la famille agricole. Tout changement de
ce genre devrait être basé sur les techniques
agronomiques existantes et ne pas trop en dévier.
Ce point peut être illustré par l'exemple suivant.
Des experts occidentaux décidèrent d'introduire
l'élevage des volailles dans un certain pays
asiatique dont l'agriculture est très primitive. Dans leur
désir d'obtenir les meilleurs résultats, ils
introduisirent les variétés les meilleures et les plus
productives de poulets élevés dans leur propre pays. Mais
ces poulets exigeaient de grands soins, des
nourritures concentrées et des poulaillers spéciaux ;
l'élevage de ces poulets devint, par conséquent, une
industrie spécialisée, détachée de la vie rurale et
n'ayant aucun effet réel sur le niveau de vie
général dans la région (6). Il aurait fallu, au contraire,
introduire une variété de poulets rustiques,
(6) Observation personnelle au cours d'une visite en Extrême-
Orient, 1961.
bles de subsister de restes de nourriture ramassés
dans la ferme. Même avec une production d'œufs
plus basse, ces poulets auraient fourni à la ferme
un supplément pour la nourriture familiale et des
engrais pour les champs. En apparence peu
significatif, un tel changement peut être très efficace.
en-2°voie
On nede doit
développement
pas oublier que
manquent
la plupartdudescapital
pays
nécessaire à de grands investissements ne donnant
aucun profit immédiat. Ces pays doivent plutôt
chercher des résultats maxima et rapides à partir
d'investissements minimes. Pour cette raison, beaucoup
de * projets de développement réalisés selon les
mêmes formules que dans le monde occidental ont
été une source de déception (7) : leurs résultats
n'étaient pas en proportion des efforts financiers et
humains qui y avaient été investis.
L'exemple suivant va illustrer ce. point. Dans < un
pays du Moyen-Orient, l'une des régions
méridionales devait faire l'objet d'un projet de
développement. Cette région avait été irriguée depuis bien
des générations à l'aide d'un système primitif de
canaux de terre qui amenaient l'eau d'une rivière
voisine. Le projet de développement comprenait la
construction d'un grand barrage et de deux canaux
en béton ; cependant ce grand investissement ne
produisit pas les résultats attendus. Les agriculteurs
de cette région étaient encore ignorants des
quantités et des périodes correctes d'irrigation, des
rotations et des méthodes modernes de , culture. En
conséquence, le rendement du coton, du maïs, des
betteraves à sucre et des légumes resta assez bas (8).
Sans la connaissance de l'utilisation correcte de
l'eau dans les champs, aucun projet de
développement ne pouvait être avantageux pour la population
locale et élever son niveau de vie. Par contre, des
résultats positifs auraient pu être obtenus même en
laissant intact ? l'ancien système d'irrigation dans les
stades initiaux du programme de développement, si
tous les efforts, avaient été concentrés à instruire. la
population.de l'utilisation correcte de ; l'eau. Par
!
exemple, un changement de l'irrigation de surface
à une irrigation des plants individuels aurait sans
.
doute augmenté lé rendement et, par conséquent, le
revenu. Ce n'est. que dans les stades ultérieurs du
développement que l'investissement dans un
barrage et dans des canaux de béton était justifié.
3° Le but final d'élever le revenu individuel est
naturellement valable dans tous les pays ; mais les
(7) Un exemple en est mentionné par Michel A. A. : « An
overexpanded Irrigation Project in an Underdeveloped Nation ;
Some problems of Helmand Valley Project in Afghanistan »,
Armais of the. Association of American Geographers, 49, 1959,
p. 200.
(8) Observation personnelle au cours d'une visite au Moyen-
Orient, 1959.,
 —6 —
moyens de l'atteindre doivent être adaptés aux
'
conditions particulières de chaque pays et même de
chaque région. Les exemples présentés ci-dessus
montrent que des méthodes de développement
efficaces dans une région ne conduisent pas
nécessairement aux mêmes résultats dans une autre.
Sans aucun doute, l'élévation du niveau de vie
ne peut être obtenue que si ceux qui s'occupent de
ce problème ont une connaissance approfondie des
conditions existantes et un contact direct avec les
habitants de la région. Tous ceux qui veulent
proposer un plan de développement de cette nature
doivent connaître les conditions locales et — bien
plus — ils doivent être capables de distinguer
clairement entre ce qui est souhaitable et ce qui est
pratiquement réalisable.
B. — L'intégration de l'industrie
Tout> récemment encore, l'industrialisation des
pays occidentaux était concentrée surtout dans les
zones urbaines. De vastes entreprises industrielles
se développaient dans lés grandes villes et
trouvaient la main-d'œuvre nécessaire dans la
population excédentaire des zones rurales avoisinantes.
L'industrie amena la prospérité, mais à la longue
.
son influence sur la société rurale est négative car
elle conduit à un exode des régions rurales. Pour
éviter la destruction complète des communautés
rurales,' les industries doivent être intégrées dans
l'économie rurale. La nécessité de cette intégration
est apparente même dans les pays occidentaux, bien
que la population rurale y ait diminué relativement
à la population totale. Cependant ceci est encore
bien plus important pour les pays en voie de
développement dans lesquels le pourcentage de la
population rurale par rapport à la population totale est
très élevé. Puisque la structure de la vie sociale
dans ces pays doit être préservée, du moins
temporairement, l'introduction d'industries dans les
zones rurales devrait servir de base à une poussée
de développement économique.
La contribution de l'industrie au développement
et au bien-être ruraux a bien des aspects, dont les
plus importants sont brièvement décrits ci-dessous.
1° L'industrie offre de nouveaux emplois pour
l'excès de main-d'œuvre agricole, et la retient dans
le village en lui évitant de chercher fortune ailleurs.
Elle offre aussi de meilleures chances pour les
éléments les plus qualifiés de la population. En
éliminant les causes principales de l'exode rural, le
développement industriel contribue à maintenir la
stabilité de la société rurale. Le genre d'industrie
est sans importance aussi longtemps qu'il est adapté
au cadre général de la vie rurale.
2° Les ouvriers industriels vivant dans les régions
agricoles y constituent un marché pour les produits
agricoles. Ceci est particulièrement vrai dans le cas
des î denrées alimentaires périssables qui donnent
des profits élevés pour chaque unité de travail, mais
qui ne peuvent pas être transportées vers des
marchés lointains à moins que n'existent des moyens
dé transport efficaces. Dans les pays en voie de
développement, où les transports et la
commercialisation ne sont pas encore organisés, seule
l'existence d'un marché local agrandi peut encourager
l'agriculteur^ à produire plus qu'il ne lui faut pour
son usage personnel. C'est le premier pas du
passage d'une économie de subsistance vers
l'économie de marché. L'augmentation de valeur du
produit résultant du développement industriel peut
faire croître directement le- revenu, et en
conséquence le pouvoir d'achat de l'agriculteur.
3° Les profits apportés par l'industrie ne restent
pas concentrés dans les grandes villes, mais se
dispersent sur un • territoire plus ■ étendu, et les
>
'
différences de niveau de vie entre ville et village en
sont réduites d'autant.
L'importance de ces avantages n'est pas toujours
comprise par les politiciens des pays en voie de
développement. Les experts en développement
industriel sont généralement originaires de l'Occident,
et des villes. Leur attitude provient de leurs
expériences précédentes, et c'est pourquoi ils sont enclins
à calculer la profitabilité d'une entreprise
industrielle sur la seule base dû processus industriel. Ils
sont ainsi portés à commettre les erreurs de
jugement suivantes. La première a trait à la taille des
entreprises : d'habitude, plus les entreprises sont
grandes, plus elles sont « économiques » ;
cependant, la grandeur des investissements exigés fait
que ces entreprises ne conviennent pas à des nations
en voie de développement. La seconde erreur a
trait au problème de la localisation qui, pour les
grandes entreprises,, est naturellement limitée aux
territoires urbains ; le résultat est qu'une
importante source potentielle de développement rural est
perdue.
Un exemple illustrera ce point (9). Dans un pays
asiatique, des pressoirs à huile très primitifs étaient
utilisés dans les zones rurales pour extraire l'huile
des arachides et du sésame. Devant la faible
efficacité de ces pressoirs, il fut décidé de les
abandonner et de construire de grandes usines modernes
dans les grandes villes. Il fut décidé en même temps
d'étendre les surfaces cultivées en graines
oléagineuses, et d'augmenter ainsi les quantités
produites. Le résultat, naturellement, fut exactement le
contraire de ce que l'on attendait. Le coût du
transport augmenta énormément : au lieu d'huile qui a
une valeur relativement grande par unité de poids,
(9) Observation personnelle au cours d'une visite en Extrême-
Orient, 1961.
 — 7 —
les graines de valeur réduite devaient maintenant
être transportées vers les villes lointaines. De plus,
aucun usage approprié ne fut trouvé pour les
tourteaux oléagineux. Si l'industrie de l'huile avait été
développée, à l'aide de machines modernes, mais
en entreprises d'envergure relativement limitée,
situées, dans les zones rurales, tous les effets désirés
auraient pu être atteints. Cependant le calcul
économique avait été fait uniquement par rapport au
processus industriel ; il démontrait, à juste titre, que
de plus grandes entreprises sont plus économiques.,
Mais il ne donnait pas une image complète de la
situation : lorsqu'on considère l'effet
économique dans tous ses aspects (industrie, agriculture et
transport), il est évident que l'établissement de
petites entreprises convenablement dispersées dans
les zones rurales conduit à des résultats bien
meilleurs. Cet exemple indique clairement qu'un
programme d'industrialisation ne devrait pas être
évalué d'après sa seule profitabilité, mais d'après son
influence générale sur les zones rurales..,
Du point de vue du développement rural, les
entreprises industrielles peuvent être divisées en
trois catégories (10) : industries de transformation/
industries complémentaires et industries auxiliaires.
a) Industries de transformation. — Une industrie
de transformation située dans la région productrice
élimine les stades intermédiaires entre la ferme et
l'usine. Les coûts du transport en sont
considérablement réduits, et la part de l'agriculteur, dans
l'augmentation des bénéfices, est accrue.
L'établissement de ces industries nécessite un examen
économique approfondi : celui-ci déterminera
:
l'envergure souhaitable et la localisation correcte de chaque
entreprise, en tenant compte de l'éloignement des
champs dans lesquels les ; matières premières sont
cultivées.
La détermination des dimensions et de la situa-
tion d'une sucrerie peut servir d'exemple (11)/ Les
examens et les études économiques préparés en 1954
par un comité spécial nommé par le Ministère des
Finances d'Israël/ ainsi, que les études faites par
l'auteur entre 1955 et 1957, ont montré que lés coûts
de transport de la betterave à sucre du champ à
l'usine constituent une partie considérable des
devises étrangères dépensées dans la production du
sucre. En conséquence, il a été recommandé
d'établir les sucreries à une distance maximum de 30 à
40 kilomètres des champs et de considérer ce
facteur comme une condition déterminante de la taille
optimum de l'usine ■; en conséquence, la
(10) Weitz R. : Agriculture and Rural Development in Israel:
Projection and Planning (Rehovot, National and University
Institute of Agriculture, Bulletin n° 68, 1963).
(11) Weitz R. : « Problems of Industrial Farming » (en hébreu).
Economie Quarterly, 7, 1955, pp. 326-334.
'
tion de l'usine devait se faire dans la région
agricole même.
b) Industries complémentaires. — Dans certaines
zones, la saison agricole n'est pas assez longue pour
assurer la subsistance de la population agricole, et
une industrie bien choisie pourrait combler cette
lacune en offrant du travail durant la saison creuse.
Cette sorte d'industrie doit s'adapter au rythme du
travail dans la ferme et c'est pourquoi on peut
l'appeler « industrie complémentaire ».
L'introduction de l'industrie permet à l'agriculteur
>
•
d'abandonner les productions agricoles peu avantageuses
qui lui servaient uniquement à équilibrer son emploi
du temps annuel ; il' peut alors se consacrer aux
cultures les plus avantageuses .tout en équilibrant
son travail par une activité industrielle.
La culture du tabac en Israël peut être un
exemple de cet emploi du temps (12). Dans. une région
montagneuse au nord d'Israël, les conditions de
climat et de terrain ■ favorisent la culture du tabac
,
qui a une saison creuse entre octobre et février.
Comme la majeure partie de cette saison peut être
consacrée au triage et à la fermentation des feuilles
de tabac, une entreprise industrielle fut installée
dans ce but dans la région. Avec quelques cultures
supplémentaires, la culture du tabac et les activités
industrielles complémentaires forment un. système
économique équilibré et avantageux.
Une autre sorte d'industrie complémentaire
consiste en la fabrication de pièces détachées qui
peuvent être assemblées dans une usine centrale. -C'est
ainsi que les pièces de certains instruments
d'optique et d'instruments électriques sont fabriquées dans
des villages du Japon (13) pour être assemblées
ensuite dans une entreprise régionale.
L'avantage des - industries complémentaires est
.
qu'elles permettent à l'agriculteur et à sa famille
d'intégrer, librement leur travail au travail agricole
durant les saisons creuses, et qu'elles n'exigent pas
un emploi du temps rigide.
c) Industries auxiliaires. — Ce sont des industries
qui peuvent être établies dans les zones rurales sans
pour cela être liées aux conditions locales.
L'établissement d'industries de ce genre dans les zones
rurales a pour but d'absorber l'excès de main-
d'œuvre. Une grande variété d'entreprises peuvent
être classées dans cette catégorie : la taille de
diamants, la production de bijoux, la céramique, etc.
Deux entreprises de ce genre ont récemment été
établies dans des. zones rurales en Israël : l'une
produit des objets de fantaisie (cendriers, bougeoirs,
(12) Weitz R. : Agriculture and Settlement in Israel (en hébreu)
Tel-Aviv, Am Oved, 1959, pp. 273-280.
(13) Observation personnelle au cours d'une visite en Extrême-
Orient, 1961.
 — 8—
etc.) et l'autre produit des récipients pour des»
produits alimentaires concentrés.
Le trait distinctif de ces entreprises, par rapport
aux usines ordinairement situées dans les centres
,
urbains industriels, est que leurs possibilités
d'emploi sont adaptées à la main-d'œuvre existante dans
la zone rurale.
Ces trois catégories d'industries peuvent et
doivent être intégrées dans le plan de développement
rural, et . utilisées comme ' une base importante et
quelquefois essentielle de sa réalisation.
:
C. — L'établissement de services
efficaces
Du fait - de leur taillé relativement ' petite, les
communautés - rurales ■ sont - rarement capables de
maintenir des services convenables, à un niveau
équivalent à celui des zones urbaines. L'existence
de services meilleurs et plus variés attire la
population des villages vers les villes, et ainsi le
processus de l'exode rural se trouve accéléré.
En, particulier, les personnes qui ont un niveau
d'éducation supérieur à la moyenne, s'adaptent
difficilement au mode de vie des communautés rurales.
Elles forment pourtant l'élément le plus créateur et
le plus stimulant de la société rurale, et par leur
départ,' la communauté perd l'un de ses atouts les
plus importants : des êtres capables de contribuer
activement à son développement. De plus, tout
programme de développement exige la participation
IL — LA NECESSITE D'UNE PLANIFICATION INTEGREE
DU DEVELOPPEMENT RURAL
Le développement rural, qui doit répondre à tous
les problèmes décrits ci-dessus, ne se matérialisera
jamais s'il est abandonné au libre jeu des forces
économiques, . politiques et sociales.: La situation
actuelle dans les zones en voie de développement
rend nécessaire une ' planification, un financement
.
et une réalisation soigneusement préparés par une
autorité de - développement capable de coordonner
tous les facteurs en un seul plan d'opération. Pour
cela il faut avoir une compréhension approfondie
des liens réciproques entre les trois activités écono-
(14) The Composite Rural Structure (Jerusalem, Land
Settlement Department of the Jewish Agency, 1960) ; Weitz R. :
,
« A New Concept of Agricultural Settlement Planning »,
International Farmers' Convention, Israel Government Press, 1959,
pp. 263-296.
d'experts et de personnel qualifié venant de
l'extérieur, pour fonder et diriger les diverses entreprises.
Il est essentiel qu'ils résident dans la région, mais
en général ils y sont peu disposés pour cette même
raison qui pousse les habitants de la région à la
quitter. Ce n'est qu'en fournissant des services
suffisants et un milieu social approprié qu'on pourra
les persuader de s'établir dans les zones rurales.
A1 première vue,, ceci semble impossible.
Cependant l'expérience faite dans la région de Lachish,
en Israël, prouve le contraire. Dans cette région, un
mode de colonisation nommé la « Structure rurale
complexe » (14) a été créé. Cinq à six villages y
sont groupés, à une distance variant de 500 mètres
à 3 kilomètres, autour d'un centre rural qui
pourvoit à leurs besoins économiques et sociaux.
Chaque village maintient certains services
fondamentaux — un jardin d'enfants, une synagogue, une
station de secours et une petite épicerie ■ — alors que
le centre rural fournit des services exigeant un
niveau plus élevé d'investissement et d'entretien,
tels qu'une station de tracteurs, une station de
triage, une école, un dispensaire, un grand magasin et
d'autres services culturels. Ceux qui font
fonctionner ces services vivent dans le centre. Etant donné
que le centre rural, dessert une population cinq à
six fois plus. grande que celle, d'une seule
communauté, il peut . entretenir des services plus étendus,
de meilleure qualité et à un coût plus réduit ; il
peut ainsi satisfaire les exigences du personnel
professionnel. De plus, le centre rural forme une
communauté séparée de - professionnels qui peuvent y
créer, l'atmosphère culturelle qui leur est propre.
,
miques — agriculture, industrie et services — dans
tous leurs aspects. Une évaluation du seul lien
économique est insuffisante ; il est essentiel d'adopter
un point de vue plus général qui comprendra tous
les aspects de la vie rurale — économique, social,
institutionnel, politique et écologique. C'est cette
attitude qui forme la base même d'une
planification intégrée.
On fait aujourd'hui beaucoup d'essais pour
trouver des méthodes de planification soi-disant
intégrées, basées sur des principes économétriques (15).
(15) Un résumé de ces essais se trouve dans Fox, Karl A. :
« The Study of Interactions Between Agriculture and the Non-
farming Economy : Local, Regional and National », Journal of
Farm Economics, vol. 44, n° 1, fév. 1962, pp. 1-34.
Ces méthodes supposent que la planification doit
s'appuyer autant que possible sur une évaluation
quantitative qui permettra d'obtenir les résultats les
plus « exacts » (16). A l'aide de calculateurs
électroniques, de plus en plus en usage, des modèles
économiques compliqués et détaillés peuvent être
préparés. Lorsque la bonne méthode de calcul aura
été trouvée, une planification intégrée à grande
échelle deviendra possible. Dans l'esprit des
économistes qui s'occupent de ce problème, l'analyse des
données peut fournir des formules générales pour
une évaluation globale des problèmes dé la
planification à grande échelle. Elle peut aussi conduire
à une évaluation quantitative des liens existant entre
les différents secteurs de l'économie.
Cette méthode de planification laisse supposer
que tous les facteurs — quantitatifs ou qualitatifs —
peuvent être estimés à l'avance. Tout un système,
comprenant, ces facteurs, pourrait donc être
construit à condition d'avoir des données suffisantes et
des règles générales. Cette attitude peut mener à un
malentendu quant à la nature réelle de la
planification intégrée, et par conséquent à de grandes
déceptions comme en ont déjà éprouvées beaucoup
de planificateurs.
Il existe toujours des facteurs importants —
sociaux, institutionnels et autres — qui ne se prêtent
pas à l'application des • techniques mathématiques,
et qui ne peuvent pas être adaptés à des équations
sans perdre leur, signification réelle. De plus, un
nombre considérable de ces facteurs ne peut être
ni prévu, ni estimé d'avance par le planificateur.
Naturellement ils ne peuvent alors pas être pris en
considération dans la technique de la planification.
L'existence même de tels facteurs, et leur influence
sur lé processus de développement, ne se dévoile
qu'après le début de la réalisation du plan, et
quelquefois seulement dans ses derniers stades. Ainsi
iJj* contredisent la notion habituellement acceptée
de planification.
Le fait que le développement rural ne peut être
réalisé sans planification a déjà été mentionné. Il
faut maintenant ajouter que certains facteurs de
base de ce processus de développement ne peuvent
même pas être; planifiés. Ainsi un conflit interne
et fondamental se trouve à la base des déceptions
et des échecs de récents projets de développement
rural dans bien des pays en voie de développement.
En fait, c'est la nature de ce conflit qui a conduit
(16) « Le problème essentiel est de décrire l'économie d'une
nation ou d'une région de telle manière que les effets d'un
changement initial dans l'un de ses secteurs puissent être retracés à tous
les autres secteurs, quantitativement aussi bien que qualitativement.
La quantification est d'autant plus importante que sans elle nous
ne pouvons guère nous élever au-dessus de la déclaration que « tout
affecte tout ». Fox, op. cit., p. 1.
l'auteur à suggérer un changement de structure,
d'organisation et de technique du procédé de
planification rurale, et en réalité un changement total
de ses principes.
Tout ceci est extrêmement important, et plusieurs
exemples tirés de l'expérience israélienne et de
quelques pays en voie de développement vont être
décrits ici. Deux de ces exemples sont tirés de la
vie sociale, un exemple traite du problème de
l'organisation et le dernier a trait aux problèmes
écologiques.
A. — Facteurs sociaux
Deux villages, A et B, furent établis à la même
période à proximité l'un de l'autre dans le sud
d'Israël. Les ressources naturelles étaient identiques,
et les nouveaux colons venaient de la même partie
d'Afrique du Nord. Les deux villages comprenaient
chacun environ soixante fermes et recevaient les
<
mêmes allocations en terrains, eau et autres moyens
de production. Il y avait toute raison de croire que
ces deux villages se développeraient de la même
façon — mais il en fut tout autrement.
Le village A s'est rapidement développé. En
relativement peu de temps, les colons se sont adaptés
à la vie rurale qui leur était inconnue auparavant.
Ils ont acquis une habileté professionnelle
considérable ; leurs rendements et donc leurs revenus ont
augmenté d'année en année.
Le village B, d'autre part, est resté
continuellement en retard. Huit ans ont passé depuis sa
fondation, mais il forme encore une colonie
retardataire, et seuls quelques-uns des colons y sont
devenus des producteurs agricoles. Quelques familles
quittèrent le village, et la plupart dé ceux qui
restèrent trouvèrent leur principal revenu dans divers
travaux en dehors du village. Des 48 familles
habitant le village en 1960, seules 18 vivaient
entièrement de leurs fermes alors que' 19 familles ne
cultivaient pas du tout leurs terres.
Une étude sociologique (17) de ces deux villages
révéla la raison de cette différence frappante dans
•
leur développement économique. Dans le village A
la majorité des familles ont entre elles des liens de
parenté ; elles partagent donc des sentiments de
camaraderie et sont prêtes à s'entraider ; elles
reconnaissent et acceptent une autorité interne
indiscutée. Les chefs du village collaborèrent avec les
autorités de développement et contribuèrent à
(17) Nevo N. : Shikma, a Moshao in the Western Negeo (en
hébreu). Negev Regional Office, Land Settlement Department of
the Jewish Agency, 1961, 46 pp. ; Weingrod A. : « Change
and Continuity in a Morrocan Immigrants Village » (en hébreu),
Mcgamot, 10, 1960.
 — 10 —
l'adaptation ides colons aux méthodes d'agriculture
modernes et à l'accomplissement d'un progrès
économique.
Le village B, par contre, est formé de différents
groupes familiaux, et c'est pourquoi il manque d'une
autorité centrale. Les chefs des différents groupes
travaillent à rebours l'un de l'autre, de sorte
qu'aucune institution ne peut être établie ou fonctionner
avec succès. Cette autorité divisée a découragé toute
initiative, de la part du colon individuel, pour un
développement de la communauté, et celui-ci est
allé chercher son gagne-pain en dehors de la ferme.
Il est bien évident que1 l'approvisionnement en
moyens de production n'était pas suffisant dans ce
cas pour assurer le succès économique. En outre, le
facteur social décisif ne devint apparent qu'après le
début de l'exécution du plan de développement, et
n'aurait pas pu être prédit. A la suite de l'étude
sociologique, les familles n'ayant pas de liens de
parenté dans le village furent transférées dans une
autre communauté et remplacées par d'autres
familles y ayant des parents. Ainsi, lié au processus
de développement se trouvait un facteur qui ne
.
pouvait pas être prévu ; ce facteur ne put être pris
en considération qu'après le début de l'exécution
du plan et une certaine expérience acquise.
Quelquefois, la situation n'est pas aussi simple
.
ni aussi claire que celle décrite ici, comme le
montre l'exemple suivant. Bien que tiré de l'expérience
israélienne, cet exemple rappelle des situations
fréquemment 'rencontrées dans les pays en voie de
développement qui essaient de réaliser une réforme
agraire.
Le type de colonie prédominant en Israël est le
Moshav — un village de petites fermes , à base
coopérative. A l'exception de quelques
professionnels, presque tous les membres du village ont un
travail agricole, visent un but économique commun
et participent à l'organisation coopérative,
responsable de tous les services municipaux et agricoles.
Chaque ferme constitue une unité séparée et bien
définie qui ne peut être héritée que par un
membre de, la famille. Ceci pose un sérieux problème
pour la seconde génération. En vue du nombre
limité de. fermes, et du fait que l'agriculture
constitue la source principale de revenu, beaucoup dé
jeunes sont obligés de quitter leur village natal.
Cette situation est particulièrement sérieuse pour
les colons d'origine orientale pour lesquels les liens
familiaux sont très forts et qui préfèrent
généralement rester au village et dans leur communauté
traditionnelle.
Avec l'introduction récente d'un nouveau mode
de colonisation — la « Structure rurale complexe »
.
(18) — une solution pour l'emploi du surplus de
main-d'œuvre a été proposée : l'intégration
d'industries dans le centre rural. Le problème du
logement des ouvriers industriels devient un problème
à résoudre immédiatement. Du point de vue
économique, la meilleure solution pour les ouvriers
industriels serait de s'installer. dans le centre rural
de façon à vivre le plus près possible de l'usine.
Cependant le problème social n'est pas si simple
à résoudre.
Des travaux de recherche (19) effectués sur le
problème de l'émigration des jeunes des zones
rurales indiquent que. diverses attitudes existent suivant
les groupes culturels. Les jeunes d'origine
occidentale tendent à émigrer vers les centres ruraux ou
même vers lés villes agricoles, et ainsi ne
présentent aucun problème pour le développement
industriel. Avec la hausse du niveau général de
l'éducation et de l'éducation professionnelle en
particulier, cette tendance pourrait devenir de plus en
plus désirable. Par contre, les jeunes originaires
d'une société patriarcale sont mal équipés pour vivre
à l'extérieur de leur milieu traditionnel et feraient
bien mieux de rester dans leurs villages. Ceci
soulève un problème d'organisation tout à fait
différent. Les ouvriers industriels ne partagent pas les
intérêts de la communauté agricole du moshav et
ne peuvent pas devenir membres de la coopérative
sous sa forme actuelle. Par conséquent, le principe
d'une coopération totale devra être modifié, et il
faudra réformer le cadre institutionnel du moshav
pour servir cette nouvelle population non-agricole.
En tout cas, ce problème exige une étude
approfondie dés effets économiques et institutionnels des
solutions possibles, avant que le plan ne soit mis en
exécution. Evidemment, une telle étude ne peut
être isolée des autres facteurs du programme,
,
comme la taille des industries proposées, les conditions
nécessaires à leur développement, etc. Cependant,
même une étude approfondie ne permettra pas à
l'autorité de développement de préparer à l'avance
toutes les bonnes solutions pratiques. Beaucoup de
facteurs resteront cachés, et deviendront évidents
seulement lors de la réalisation du plan. Il faut
reconnaître d'avance que la planification ne doit
être envisagée que comme guide, et que la
flexibilité doit tenir une place importante dans
l'organisation et dans les décisions. C'est ainsi que la
porte restera ouverte à des changements éventuels.
(18) Cf. ci-dessus p. 8.
(19) Weingrod A. et Minkovitz M. : Staying down on the
Farm : A Study of the Younger Generation in New Immigrant
Villages. Jerusalem, Land Settlement Department of the Jewish
Agency.
 — 11 —
B. — Facteurs d'organisation
Beaucoup de détails d'organisation, décisifs quant
au succès ou à l'échec d'un projet de
développement, sont influencés par d'imprévisibles facteurs
de cette catégorie. L'exemple . suivant est tiré de
l'expérience israélienne et de quelques autres pays
du Moyen-Orient (20).
L'allocation et la répartition du budget de
développement parmi les membres d'un village ou d'une
communauté sont d'une importance primordiale.
Ceci peut être réglé de deux manières différentes.
La façon la plus courante est de confier ce rôle au
représentant local de l'autorité de développement.
11 serait chargé de recommander les investissements
annuels, et leur allocation et répartition aux
différentes fermes individuelles. L'autre façon est de
confier ce rôle au conseil du village représentant les
agriculteurs. Ces deux méthodes exigent des
structures d'organisation de l'autorité de développement
tout à fait différentes. L'expérience a montré que
dans certaines conditions la première méthode est
préférable, alors que dans d'autres la deuxième est
la meilleure. Il faut aussi remarquer qu'un
changement intérieur dans la communauté rend
'
quelquefois judicieux de passer d'une méthode à
l'autre. Il n'est pas possible ici d'entrer plus en détails
sur ce point important et parfois décisif dû
programme de développement, mais il faut noter que
voilà un facteur de plus qui ne peut pas être pris
en considération dans la planification telle que nous
la comprenons aujourd'hui.
C. — Facteurs écologiques
La proximité de ses terres est très avantageuse
pour, l'agriculteur, et c'est pourquoi le système de
colonisation par fermes familiales se développa :
toutes les terres du fermier sont situées près de sa
maison, mais les distances d'une ferme à l'autre
sont très grandes (21). Dans bien des pays, en
particulier dans les pays occidentaux, il en résulta
III. — LE PRINCIPE DU DEVELOPPEMENT INTEGRE
développement
Comme rural
il aintégré
déjà été
» estmentionné,
défini ici comme
le « ayant
(20) Weitz R. : « Sociologists and Policy Makers... », op. cit.,
p. 68.
(21) Yalan E. : Private and Cooperative Agricultural
Settlement • Physical Planning. Israel, Ministry of Foreign Affairs.
Department of International Cooperation, 1961, pp. 2-4 ; La
.
Riformia Agraria in Puglia, Luaada e Moiùe, Ban, Arti Grafiche
Laterza. 1957, pp. 37-39.
une désintégration du village en tant qu'unité
cohérente. Un système intermédiaire se développa : des
« villages » élongués s'étendant sur une superficie
considérable, avec de grandes distances entre les
maisons. Bien que satisfaisants du point de vue
économique, ces deux systèmes se sont montrés
nuisibles à la création de communautés. L'expérience
de plusieurs pays a montré qu'il était difficile d'y
introduire des méthodes et des techniques
nouvelles, et encore plus difficile de persuader les
,
agriculteurs d'établir les institutions communales et
civiques nécessaires (22). Par contre, des régions
entières aux Etats-Unis et en Hollande ont été
colonisées d'une façon rapide et satisfaisante selon un
plan de colonisation par fermes individuelles.
Il est donc bien évident que les considérations
.
économiques, même si elles sont partiellement
justifiées du point de vue social, ne s'étendent pas à
tous. les éléments nécessaires à un bon
développement rural. D'autres. facteurs, tels que la
disposition des fermes, mentionnée ci-dessus, jouent aussi
leur rôle ; dans certaines conditions ils peuvent
avoir une importance décisive, bien que même des
planificateurs expérimentés puissent en être
inconscients. Dans ce cas aussi, certains facteurs
deviennent évidents seulement lors de l'exécution. Comme
il est question ici de planification physique, la
meilleure méthode est d'exécuter le plan par étapes
successives et d'appliquer à chaque étape
l'expérience acquise dans l'étape précédente. En tout cas,
l'autorité de planification devrait être prête à
introduire des - modifications et des changements dans
ses plans.
Ces exemples, choisis au hasard, soutiennent la
thèse que certains facteurs du processus de
développement ne peuvent être ni évalués d'avance, ni
mesurés et certainement pas réduits à des équations
mathématiques. C'est pourquoi aucun modèle
préconçu ne peut servir de base à la préparation d'un
plan de développement rural -intégré. Le terme
« planification intégrée » devrait avoir un sens
nouveau.
trois caractéristiques distinctes : les liens entre la
planification et l'exécution ; composition de l'équipe
de développement et ses rapports internes et
externes ; la nature de la zone de développement.
(22) El Plan de Badajoz (Madrid, Instituto Nacional de Indus-
tria. Secretaria Gestora del Plan de Badajoz, 1958),' pp. 59-86 ;
Journées d'Etudes en Italie (Bari, • Associazione Italiana di Inge-
gneria Agraria, 1961),
 12 —
A; — Les liens entre là planification
et l'exécution :
planification intégrée
Les exemples cités ci-dessus ont montré
clairement que la planification intégrée n'est pas statique
et ne peut consister en un acte unique de
détermination du plan de développement pour un
certain nombre d'années. C'est un processus
dynamique, étroitement lié à l'exécution. Les observations
faites . pendant l'exécution procurent lès données
nécessaires à l'évaluation des effets mutuels des
divers facteurs de développement, particulièrement
de ceux qui ne peuvent être estimés à l'avance.
C'est ce mécanisme des réciprocité., (feed-back)
entre la planification et l'exécution, qui est. à la
base du concept de « planification intégrée ». Il
constitue l'instrument qui permet d'évaluer les
différents facteurs et donc de modifier le plan. originel,
tout en - préservant le but . initial; ; quelquefois,^ il
peut»* même conduire à un changement de ce but-
même.
Ainsi la planification ~ intégrée est un processus
évolutif continuel comprenant plusieurs étapes
successives :
•
1° La détermination et la formulation des
objectifs du projet de développement, qu'ils soient
économiques, socio-politiques, financiers ou d'une
nature complexe.
2° L'assemblage des données de base nécessaires
à l'évaluation de tous les facteurs affectant la macro
et la micro-planification.
3° L'esquisse d'une ligne de conduite devant
guider les facteurs mentionnés ci-dessus vers un but
.
prédéterminé.
4° La preparation.de l'exécution du plan,, y,
compris le système d'organisation dont se servira
l'autorité de développement.
5° La soumission de l'étape d'exécution net du
processus de développement à une observation
continuelle ; on pourra en tirer des conclusions
permettant de vérifier la qualité et la valeur pratique
du plan. Ceci peut conduire à une modification du
plan originel, ou à un changement de ses objectifs.
Bien que ce mécanisme de réciprocité
.
(feedback) ;. entre planification et exécution soit bien
connu et que son importance paraisse évidente; les
autorités de développement en tiennent rarement
compte/ Dans beaucoup de cas, des experts
étrangers à la zone de développement (ou même
étrangers au pays) préparent le plan général, alors que
l'exécution en est confiée à une organisation locale
qui a peu ou pas de contact avec les planificateurs.
Le manque de coordination entre les planificateurs
au niveau théorique et les agents de développement
au niveau pratique détruit la continuité du
nisme de réciprocité :et quelquefois retarde
l'exécution du plan. L'évaluation d'une telle situation
conduit: à d'importantes conclusions quant à
l'organisation des autorités 's'occupant du développement
rural et agricole, et quant aux liens entre politiciens,
planificateurs, experts agricoles et. agents
.
d'exécution. Ces liens doivent être étroits et continus, non
seulement au niveau le plus élevé, mais à tous les
niveaux, jusqu'au t bureau , local f journellement en
contact avec i ceux pour lesquels le projet de .
développement a été préparé. ,
B. — L'équipe de développement.
Rapports internes et externes
La planification intégrée ne peut être réalisée que
par, une équipe ayant certains caractères distinc-
tifs (23). Cette équipe doit être constituée , d'un
groupe de professionnels (agronomes, économistes,
sociologues, administrateurs, ingénieurs, architectes,
etc.), travaillant en constante collaboration. La
personne . placée à la tête de cette équipe devrait
avoir une formation spéciale en ((.planification
intégrée ». .En: sa qualité de chef d'équipe, il dirige
,
et coordonne les activités des différents membres
de l'équipe, évalue et compare leurs observations et
finalement décide des étapes successives du
programme de développement. Bref,. il anime le
mécanisme de « réciprocité » ; il est ainsi non seulement
un planificateur, mais également politicien et agent
d'exécution.
Jusqu'à maintenant les planificateurs de ce genre
ont acquis leur. savoir et. leur, position uniquement
par leur expérience pratique, car iFn'existe aucune
institution académique de formation. La demande
en experts de ce genre grandit rapidement dans le
monde, et il est essentiel d'introduire dans les
universités des cours spéciaux qui puissent leur donner
la formation nécessaire (24).
Par ailleurs,. les membres de l'équipe doivent être
en contact direct et constant les uns avec les autres.
De cette façon, ils sont toujours au courant des
problèmes auxquels se heurtent leurs collègues ; de
plus,- ils maintiennent ainsi un libre échange d'idées,
de recommandations et de suggestions concernant
les divers aspects du programme de développement.
Un tel contact permet aussi aux membres de
l'équipe de comprendre et d'évaluer les effets réciproques
des différents facteurs de développement.
(23) Cf. aussi Iatridis D. : An Educational Approach for
Training in Ekistics. Etude présentée à la Conférence des Nations-
Unies sur l'application de là science et de la technologie au
service des pays en voie de développement, Genève, 1963.
-
(24) Plusieurs cours" de ce genre ont récemment • commencé
dans divers pays.
 — 13 —
Les rapports internes de l'équipe de
développement devraient inclure tous les niveaux et toutes les
disciplines. Ceci ne peut être assuré que par un
cadre approprié. Le Département de Colonisation
de l'Agence Juive, qui est l'autorité responsable de
la majeure partie du développement rural en Israël,
a reconnu, au cours de ses opérations, l'importance
de ce point (25). En conséquence, toute son
organisation a été réexaminée, modifiée et adaptée au
principe de la planification intégrée. Ce
département est maintenant organisé en bureaux régionaux,
chacun d'eux formant une entité chargée à la fois
de la planification et de l'exécution. Grâce à leur
taille relativement limitée, ces bureaux sont
capables de s'occuper des problèmes qui se posent dans
la zone de leur juridiction, alors que le bureau
central prend les décisions d'ordre plus général.
Cette structure institutionnelle permet aussi à
l'équipe d'établir des rapports étroits avec la
population locale. Ceci est extrêmement important, car
les attitudes et les réactions des habitants de la
région déterminent, dans une grande mesure, le
succès du programme de développement. La
compréhension des attitudes locales peut souvent menei
à des révisions dû plan originel, de sorte que celui-
ci s'adapte mieux aux besoins et aux traditions de
la population. Il est souvent impossible de prédire
les réactions de la population dans certaines
conditions, et c'est seulement par un contact journalier
et une compréhension mutuelle que l'équipe de
développement est capable d'adapter le plan à ses
bénéficiaires.
C. — La zone de développement
Caractère, étendue et fonction
La troisième caractéristique du développement
intégré est liée à la nature de la zone de
développement. Jusqu'ici aucune référence n'a été faite à
la zone dans laquelle le développement rural doit
prendre place. Une région à développer peut être
définie de beaucoup de manières différentes. Elle
peut être limitée par des frontières géographiques
(comme le bassin d'une rivière, une plaine
d'inondation, etc.) ; elle peut consister en une unité
démographique (la zone occupée par une certaine tribu
par exemple), ou en une unité d'administration (un
district, un pays, etc.). Elle peut aussi être basée
sur la hiérarchie des centres de population selon
laquelle une région est définie comme la sphère
d'influence du plus grand centre urbain qui s'y
(25) The Land Settlement Department : Functions. Structure
and Responsibilities (en hébreu). Jerusalem, Jewish Agency,
1962.
trouve situé. (26). Mais, toutes ces définitions sont
statiques et ne tiennent compte ni de la flexibilité
ni des changements du processus de
développement. Comme le plan lui-même, la zone de
développement est sujette à modifications selon les
résultats obtenus, et doit donc former une unité flexible.
Cette flexibilité est garantie par une définition
fonctionnelle de la zone par rapport à l'envergure des
activités. Chaque facteur a sa propre sphère d'in-
flûence. La zone sera donc la région géographique
dans laquelle le programme de développement
entier fait sentir son effet. Plus les fonctions sont
complexes et plus l'envergure du projet est
étendue, plus grande sera sa sphère d'influence, et par
conséquent aussi la zone de développement.
Cette définition n'indique pas de limites
géographiques claires, car théoriquement on ne peut
définir aucune limite distincte au-delà de laquelle l'effet
du développement ne se fasse pas sentir,
particulièrement si l'on considère des activités très
complexes et très ramifiées. Les effets secondaires et
tertiaires de la plupart des activités peuvent affecter
des zones s'étendant très loin de la zone de
développement proprement dite. C'est justement ce point
apparemment faible qui rend notre définition utile
et pratique. Elle définit les limites pratiques que
l'agent de développement est intéressé à
déterminer, alors qu'en même temps elle suggère, au-delà
de ces limites, des influences qui ne doivent pas
être ignorées.
Le problème qui se pose aux autorités de
développement est de déterminer l'étendue optima de
la zone. Evidemment une seule communauté est
trop petite pour qu'une activité de développement
intégré y soit efficace, car ses fonctions sont
limitées. D'autre part, les connaissances actuelles ne
sont pas suffisantes pour exécuter un plan rural
intégré pour un état entier, à moins que celui-ci ne soit
petit et homogène, et tout à fait inadapté à une
organisation supranationale.
Toutefois, de nouvelles méthodes cherchent à
évaluer les tendances du développement
économique national, pour aboutir ensuite à un plan à
l'échelle nationale (27). Cependant, si ces méthodes
incluent quelques-uns des facteurs économiques et
parmi les facteurs sociaux, ceux qui sont
mesurables quantitativement, elles ne comprennent pas les
(26) Cf. Dickinson R.E. ; City, Region and Regionalism.
London, Routledge and Kegan Paul, 1947 ; Philbrick, Allen K. :
« Principles of Areal Functional Organization in Regional Human
Geography », Economic Geography, 33 (1957), pp. 299-336.
(27) Cf. Tinbergen J. : On the Theory of Economic Policy
(1952) ; Centralization and Decentralization in Economic Policy
(1954) et Economic Policy : Principles and Design (1956) (tous
publiés à Amsterdam, North Holland Publishing Co.) ; Fox,
Karl A. : op. cit.
 — 14 —
facteurs qualitatifs — sociaux, institutionnels ou
écologiques ; le soin de les évaluer est encore laissé
aux politiciens qui manquent des instruments de
recherche appropriés. Aussi longtemps que la nature
et les effets mutuels de ces facteurs ne seront pas
entièrement compris, étudiés et classifies, le
développement intégré ne pourra pas être réalisé • à
l'échelle nationale.
Même les experts qui limitent la planification
intégrée à son aspect économique ont reconnu qu'à
présent, le développement intégré peut être
accompli seulement dans une région de taille relativement
limitée (26). Cependant ils ont tendance à croire
qu'il pourra bientôt atteindre le niveau national par
une combinaison des méthodes économiques et de
la technique des calculateurs électroniques. Pour la
planification intégrée, dans son sens le plus large, il
faudra beaucoup plus longtemps pour préparer la
méthodologie, nécessaire aux opérations à grande
échelle, particulièrement en ce qui concerne les
facteurs qualitatifs qui ont été relativement négligés
jusqu'ici.
L'expérience acquise dans beaucoup de pays
indique qu'une zone de développement rural pourrait
être formée d'un groupe de communautés rurales
liées à une seule ville. Cette ville pourrait servir de
centre industriel et de centre de services, avec ou
sans centres ruraux intermédiaires (29). Lorsqu'on a
essayé de développer des régions plus complexes,
comprenant plus d'un centre urbain, le résultat a
été soit que le plan ne fut jamais matérialisé, soit
qu'il fut finalement divisé en plusieurs régions du
genre décrit ci-dessus.
Il est bien possible qu'avec le temps on trouve
un moyen d'incorporer plusieurs de ces régions en
une seule zone de développement, avec des centres
urbains à un niveau plus élevé. Il faudrait orienter
dans ce sens ceux qui s'occupent de développement
rural.'
Auparavant, tout plan national serait
nécessairement composé de plans régionaux répondant
aux conditions déjà décrites ici. L'agence nationale
de planification définirait les limites des différentes
régions et déterminerait les buts du développement
dé chacune d'elles tout en tenant compte de leurs
conditions spécifiques. Ensuite il faudrait assigner
les priorités, de sorte que l'ensemble des projets
régionaux corresponde aux buts du développement
national général.
(28): Fox Karl A. : op. cit.
(29) Weitz R. : « A New Concept of Agricultural Settlement
Planning », op. cit. ; El Plan de Badaioz, op. cit. ; Mac Fadden,
C. H. : « The Gal-Oya Valley : Ceylon's Little TVA »,
Geographical Review, vol. 44. 1954, pp. 271-281 ; Gaitskell. A. :
Gezira A Story of Development in the Sudan (London, Faber
et Faber, 1959) ; Dozier, C. L. : « Northern Parana, Brazil -
An Example of (Organized Regional Development »,
Geographical Review 46 (1956), pp. 318-333 ; Un Exemple de mise
en valeur régionale en Italie ; La bonification et
l'industrialisation de la Sardaigne (Paris, Documentation Française, 1957) ;
Takes, Ch. A.P. et Venstra, A.J. : « Zuyderzee Reclamation
Scheme », Tiddschrift voor Economisent en Sociale Géographie.
51 (1960), pp. 162-168.