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L'ECRITURE AUTOBIOGRAPHIQUE DANS L'OEUVRE D'AHMED SEFRIOUI :

LA BOITE A MERVEILLES

Introduction 

Première partie : L'autobiographie dans la littérature maghrébine


d'expression française
Premier chapitre  : La littérature maghrébine d'expression française :

1-1 Définition

1-2 Contexte historique où elle est née

1-3 La boîte à merveilles : Sa genèse et sa réception

Deuxième chapitre  : L'autobiographie :


2-1  Définition
2-2 Typologie autobiographique
2-3 L'autobiographie dans la littérature maghrébine d'expression française

Deuxième partie : Présentation de l'œuvre La boîte à merveilles et


son auteur Ahmed Sefrioui
Troisième chapitre : Présentation du roman autobiographique ; la boîte à merveilles :
1-1 L'acte énonciatif dans la boite à merveille
1-2 Un roman ''Carte-postal'' ?
1-3 Le pacte autobiographique
Quatrième chapitre : L'auteur Ahmed Sefrioui :
2-1 Biographie de l'auteur
2-2 Ahmed Sefriou et ses contemporains
2-3 Style d'écriture d'Ahmed Sefriou

Conclusion
INTRODUCTION

Sous la colonisation française des trois pays du Maghreb dont le Maroc fait partie, on a vu
naître une littérature maghrébine d'expression française. Cette littérature était aussi diverse,
variée et quantitativement grande que son homologue arabe. Et comme l'écriture de soi a été
de tout temps la forme la plus favorisée des écrivains lors de l'écriture de leurs premières
œuvres, question de se définir à soi et au yeux de l'autre, le lectorat, la boite à merveille,
roman autobiographique, a vu le jour sous la plume de son écrivain maghrébin, marocain de
nationalité et de culture, Ahmed Sefrioui. Ledit roman autobiographique fut longtemps
considéré comme le premier roman en langue française avant que le récit Mosaïques
ternies d'Abdelkader chatt, publié en 1932, ne soit réhabilité comme tel.
Dans le cas du Maroc, l'apparition de l'autobiographie dans la littérature maghrébine
d'expression française s'est vu naître avec la publication de l'œuvre d'Ahmed Sefrioui : La
boite à merveilles. Cette forme d'écriture, qui n'a été présente que dans la littérature
occidentale jusqu'alors, se voit assurer un processus cathartique dans une littérature où
l'épanchement, l'introspection, l'écriture de ses tréfonds reste à peu près mal perçue de par le
conservatisme sociétal caractéristique de cette écriture fraîchement naissante. Etant la
première œuvre à consonance autobiographique d'Ahmed Sefrioui, La boite à merveilles,
roman ethnographique, constitue un témoignage authentique des particularités identitaires
marocaines en langue française à l'époque du protectorat. Laquelle langue est venu se joindre
au trilinguisme existant : arabe marocain/ amazigh/hassani, créant ainsi un multilinguisme
enrichissant de par la charge sémantique et culturelle dont la langue française est véhicule.
Etant donné que l'écriture autobiographique est une écriture de soi, un ''soi'' avec, entre
autre, une culture exprimant les différents caractères du narrateur-protagoniste, le ''je'' dudit
narrateur va nous mettre d'emblée devant nombre de problématique dont on étudiera deux
dans le présent mémoire, et aux premiers rangs desquelles figure la différenciation entre le
''je'' du narrateur adulte et du narrateur enfant, Sidi Mohamed. Concrètement, quand est ce
qu'on pourrait dire, en lisant le roman, que c'est le narrateur adulte ou enfant qui produit
l'énoncé. Il va sans dire que l'auteur est distinct du narrateur- personnage principal vu que de
roman autobiographique qu'il s'agit. Aussi, avons-nous le dessein de relever le caractère ''carte
postal'' du roman tout en l'ancrant dans son contexte.
Ce caractère ''carte postal'' du roman, raconté par un narrateur-personnage ne pourrait
qu'alimenter richement le présent mémoire et crédibiliser le récit en lui conférant une véracité
vérifiable. Car dans cette œuvre, le narrateur- personnage principal, fait la description
culturelle de la société marocaine d’où le caractère ''carte postal'' nous parait justifiable. Ledit
caractère va être acheminé de façon à ce qu'il mette en avant les particularités de l'écriture
autobiographique dans la boite à merveilles.
C'est du fait de l'insuffisance des études se rapportant à l'écriture autobiographique dans
ce roman, que nous avons décidé de se pencher sur cette thématique, d'en faire notre sujet de
mémoire, afin de montrer le respect ou le non-respect du pacte autobiographique sous-
tendant cette œuvre.
Notre travail se déclinera en deux parties : La première en est théorique et ou, disons-
nous, allons essayer de présenter l'œuvre d'Ahmed Sefriou en mettant l'accent sur son
paratexte, son contexte : Ce serait une étude théorique. La deuxième partie est pratique dans la
mesure où l'on va approcher la construction de l'œuvre susmentionnée, autobiographiquement
parlant, afin de faire ressortir le ''je'' du narrateur enfant, tout en faisant le distinguo avec le ''
je'' du narrateur adulte.
Nous allons clore, en conclusion, notre sujet avec une réflexion sur l'apport de l'écriture
autobiographique à la littérature marocaine d'expression française ainsi que, ce qui peut
constituer un inconvénient problématique dont les dimensions est à reconsidérer, selon nous,
afin de garantir une écriture de ''soi'' aussi passionnante que représentative d'un ''soi'' référant
parfois à la collectivité.
Première partie :

L'autobiographie dans la littérature


Maghrébine d'expression française

PREMIER CHAPITRE :
La littérature maghrébine d'expression française
1-1 Définition
La littérature maghrébine d'expression française est une production littérature née
principalement vers les années 1945-1954 dans les pays du Maghreb : le Maroc, l’Algérie et
la Tunisie. Les auteurs de cette littérature sont des aborigènes, c'est-à-dire des littérateurs
originaires desdits pays. La littérature maghrébine d'expression française va devenir une
forme d’expression reconnue après la seconde guerre mondiale.
C'est donc, une littérature appartenant à la grande famille de la littérature francophone qui
couvre des espaces géographique très diversifiés, et culturellement parlant, très variés :
l'Océanie, Les île de Haïti, Les île de la Martinique, l'Afrique subsaharienne, une partie du
Moyen Orient, etc.
Pour ne parler que de la littérature maghrébine d'expression française, elle a été le point
de confluence de la charge sémantique et culturelle véhiculé par la langue Moliéresque, et du
legs culturelle prédominant dans les sociétés maghrébines conservatrices. C'est le lieu de
rencontre de deux mondes : le monde maghrébin riche de ses diversités culturelles et le
monde de la langue française et de la culture dont elle est vectrice.
En effet, c'est au lendemain de la deuxième guerre mondiale que des écrivains marocains,
algériens et tunisiens ont écrit des romans en langue française où ils ont parlé des coutumes
et traditions de leurs sociétés respectives, des souffrances de leurs peuples écrasés par la
colonisation, de leur vie d'être humains sujets à des traitements, parfois, inhumains.

La littérature marocaine d’expression française est de ce fait, une résultante de la


colonisation du Maroc par la France (1912-1956). N’ayant pas de précédent, l'arrière plan
fictionnel du roman marocain d’expression française s’est basé sur la réalité sociale et
culturelle du pays, tout en gardant une certaine conformité avec les règles classiques du roman
français du XIX siècle, notamment en ce qui concerne la progression chronologique des
événements et la mise en valeur de l’expérience personnelle de l’auteur.

Les avant-gardistes du roman marocain d’expression française, comme Ahmed Sefrioui,


l'auteur de La Boîte à Merveilles, ont manié la langue de façon à ce qu'elle leur serve de
moyen d'expression en vu de raconter une histoire bâtie, en fait, sur l’usage de la narration de
contes et d’anecdotes, éléments importants dans une culture, marocaine en l’occurrence, de
tradition orale, de colportage.

En 1954, Driss Chraïbi a également élaboré la fiction autobiographique de son roman sur


la réalité socioculturelle de son pays, le Maroc, mais il est plus virulent dans son ouvrage
intitulé Le Passé Simple. Un roman qui a défrayé la chronique de l’époque car il y expose, les
failles, les défaillances, les dysfonctionnements sociétaux marocains de par le figement de ses
traditions séculaires, jugées caduques.

Après s'être indépendantisés, le nombre d’écrivains marocains d’expression française a


considérablement augmenté. Ces derniers, littérateurs appartenant à une même contrée, se
distinguent à travers leurs écrits par une problématique récurrente : ils se trouvent confrontés
à un problème identitaire et biculturaliste. Nous touchons du doigt, à travers leurs textes, une
dichotomie entre langue arabe et langue française, Maghreb et l'Occident, tradition et
modernité, d’ou leur tentative de s’éloigner à la fois de la tradition orale, legs national, mais
aussi de l'héritage traditionnel de l’écriture française. Le roman marocain s’en impacte en se
livrant alors à une écriture qui se veut sciemment fragmentée. Dans Harrouda ou dans Moha
le Fou, Moha le Sage de Tahar Benjelloun par exemple, le lectorat se voit d'emblée devant
une écriture complexe et compliquée, car elle ne se tisse pas selon la structure schématique du
roman traditionnel, ce qui risque de dérouter le lecteur. Dans La Mémoire tatouée
d’Abdelkrim Khatibi, nous pouvons dégager des thèmes tels que la question de la culture
populaire, la question identitaire, le tout fait à travers une écriture morcelée et déstructurée. Il
n’y a plus de récit à proprement dire, mais seulement une écriture fragmentée.

Aujourd’hui, l’antagonisme langue arabe / langue française, pour réfléchir et écrire les
conflits identitaires et la crainte de la dépossession de soi, ne sont plus des thèmes dans l’air
du temps. Il y a une propension vers une écriture plus réaliste et linéaire de nouveau. Et la
''première'' génération d’écrivains marocains d’expression française se trouve enrichie par
l’apparition de nouveaux jeunes écrivains comme par exemple, Youssouf Amine El Alami
avec Un Marocain à New-York ou Fouad Laroui avec Les Dents du Topographe.

La littérature maghrébine d'expression française, c’est peut-être aussi, ces jeunes talents
qui éclosent sur la terre d’accueil que ce soit en France, en Belgique, en suisse ou ailleurs.
Ainsi, des littérateurs originaires du Maghreb, nés ou installés depuis leurs tendre enfance sur
la terre française, écrivent leurs parcours en langue française et souligne les rapports, à la fois
passionnels et ambigus au sol d’accueil et sa langue.

Il s'impose de souligner également le caractère pionnier de la littérature maghrébine


féminine francophone en la personne de Si Taos Amrouche, Assia Djebbar et Fatima
Mernissi, et d'autres, encore plus nombreuses, qui ont écrit les souffrances, les inspirations,
aspirations et espérances des femmes à travers des personnages-féminins et masculins
tiraillés, voire même écartelés, entre l’émergence de l’individu en tant qu’entité libre de ses
choix, et le poids de la collectivité, fardeau sociétal dissolvant, qui a tendance à invisibiliser
l’individualité, jusqu’à la diluer dans le groupe.

1-2 Contexte historique où elle est née


La colonisation du Maghreb, à partir de 1830, a accouché d'un phénomène d'acculturation
qui a établit de nouvelles données dans la société locale. Les trois littératures modernes :
marocaine, tunisienne et algérienne sont produites sous la colonisation ; cela a posé une
question on ne peut plus grande pour les écrivains : est-il possible de transcrire ses maux en
recourant aux mots de la langue du colonisateur sans être aliéné mais, maître de soi ? Cette
question ne cessera pas de hanter la littérature maghrébine d'expression française. Imposant
aux trois contrées le joug de l'occupation, le système invasif devient gestionnaire aussi la
formation de culture : il diffusait sa langue par le biais de l'école, de l'administration, de la
justice et de la presse. Or, la colonisation du Maghreb a favorisé l'émergence d'une littérature
écrite par des ''indigènes'' dans la langue du colon, mais dont le système de pensée est
fortement dépendant du milieu socioculturel auquel appartenaient ces écrivains.
En effet, la politique coloniale de dominance pratiquée par les fils des gaulois s'est
doublée d'une mise à l'écart des cultures et des langues locales. Le colonisateur, en imposant
son système d'éducation aux populations autochtones, sous le couvert de ''missions
civilisatrices'', ne visait en fait que leur ''assimilation'' pure et simple. C'était peut-être en
faisant fi des langues arabes et berbères de la culture musulmane.
D'ores et déjà, quand des maghrébins écrivent, ils s'expriment en français et ils composent
des textes d'une dimension littéraire et identitaire complexifiés eu égard au contexte. Les
littérateurs maghrébins ont produit des livres appartenant à différents genres littéraires.
L'essai est le premier genre adopté : il offrait à l'auteur une chaire d’où il pouvait revendiquer
une place dans l'espace coloniale. Lorsque l'écrivain se sentait en droit et en devoir d'apporter
sa contribution à un débat d'ordre culturel ou politique, il recourait à l'essai.
Mais, les formes narratives seront les plus fréquentées par la suite. La nouvelle et le roman
comportent souvent les traces du conte ou d'autres genres traditionnels. Les narrations sont
multiples : elles prennent pour sujet une vie exemplaire, la vie même du narrateur
(autobiographie posant le problème de l'identité et de l'assimilation). Les faits quotidiens de la
société reflètent une autre image du Maghreb distincte de celle ''colporté'' par le colonisateur.
Avec Mohamed Dib, Driss Chraïbi, Mouloud Mammeri, Mouloud Feraoun etc. C'est Ahmed
Sefrioui qui, le deuxième, en 1949, a secondé à l'inauguration de la littérature marocaine
d'expression française avec son roman fondateur ''le chapelet d'ambre''. Grâce à la publication
de la boîte à merveilles en 1954, il ouvre la voie à d'autres écrivains qui ont choisi, eux
aussi, la langue française comme outil d'expression. Dés 1954, Driss Chraïbi s'impose avec
éclat en publiant son récit le passé simple, puis en 1955 son roman Les boucs.
Quant à Abdellatif Laabi, il fonde en 1966 la revue Souffles et publie en 1969 L'œil et la
nuit. Mohamed Khair-Eddine s'introduit en 1967 dans le champ littéraire avec son roman
Agadi. De son coté, Khatibi publie La mémoire tatouée en 1971 et Tahar Benjelloun
Harrouda en 1973.
La littérature maghrébine d'expression française a connu plusieurs phases et aux premier
rangs desquelles la phase des fondateurs dont Ahmed Sefrioui fait partie. Ces pionniers des
belles lettres francophones, aux trois pays du Maghreb susmentionnés, ont conduit une
réflexion critique sur leurs sociétés doublée d'une prise de conscience identitaire (Driss
Chraïbi, Mouloud Feraoun, Mouloud Mammeri (1920-1989), Mohamed Dib, Kateb Yassine
(1929-1989). Quoiqu'ils se soient penchés sur les mêmes thèmes que leurs prédécesseurs, La
génération des années 1970 avait une écriture virulente, violente.
En parcourant le XXème siècle, force est de constater l'émergence d'une forme d'écriture
peu prisée par les écrivains : l'autobiographie. C'est la boîte à merveilles, roman que nous
étudions ici, qui fut le premier roman autobiographique marocain écrit dans la langue du
colonisateur. Comme toute nouveauté à caractère pionnier qui débarque, elle a défrayait la
chronique de l'époque, fait couler assez d'encre qui ne fut pas toujours noir. La genèse est la
réception de la boîte à merveilles est de l'étude la plus digne, sans conteste, pendant cette
période du siècle précédent, jalonné d'une pléthore de nouveautés littéraire.

1-3 La boîte à merveilles : Sa genèse et sa réception


L'expansion coloniale française a donné naissance à une littérature dite maghrébine qui,
en évoluant, a pris des formes multiples. D'abord, une littérature adoptant une réflexion
critique sur la société maghrébine doublée d'une prise de conscience identitaire dont Ahmed
Sefrioui est représentant. Ensuite, une littérature se penchant sur la même thématique que son
aînée, mais plus virulente. Puis, une littérature engagée socio-politiquement et enfin, une
littérature embrassant tous les domaines de la vie humaine maghrébine.
A ses débuts, la littérature maghrébine d'expression française était centrée sur la notion
d'exotisme à travers les récits de voyages. Elle cherchait à susciter l'émotion par la description
de contrées féerique ou légendaires et par la peinture de cultures, de civilisations et de
peuples étranges et étrangers. Pour comprendre leurs mœurs, leurs histoires et leurs arts,
l'écrivain pénétrait par vocation ethnographique à l'intérieur de ces catégories sociales
considérées comme ''inférieure''.
Par la suite, l'exotisme s'étant révélé une parfaite méconnaissance de l'autre, la littérature
coloniale a pris une tournure plus réaliste. Elle a renoncé à son registre pathétique et a opté
pour une observation ethnographique pratique et une représentation objective des peuples qui
faciliteraient le dialogue avec eux.
Ainsi à sa naissance, la littérature marocaine francophone est venue, peut-être, se greffer à
la forme autobiographique. C'est pourquoi, le roman la boîte à merveilles, considéré comme
le texte inaugural de cette littérature, a été condamné à cause de son caractère
ethnographique. Son auteur Ahmed Sefrioui a été accusé de flatter le gout d'un public
étranger assoiffé d'exotisme.
L'intelligentsia marocaine, nationaliste et révolutionnaire, qui menait son combat pour
s'autonomiser, notamment politiquement, a reproché à Ahmed Sefrioui de ne pas faire
mention du colonisateur, de ne pas formuler de position claire sur la situation coloniale et en
conséquence à stigmatiser âcrement son absence d'engagement.
Ecrit en 1952 est publié en 1954, le roman autobiographique la boîte à merveilles a fait
beaucoup parler de lui. Le lectorat contemporain avait surtout reproché à Ahmed Sefrioui de
ne pas citer dans son roman le nom du colonisateur, de ne pas plaindre sa société, soumise au
joug invasif, par une condamnation qui soit sans appel est prégnante dans son œuvre.
Reproche auquel Ahmed Sefrioui répond par le fait qu'il ne voulait aucunement peindre les
horreurs et exactions du protectorat mais, juste percer à jour l'identité marocaine en vue de la
faire connaitre, non pas comme le colonisateur voulait, mais sous la plume d'un marocain
patriote. C'était sa façon de condamner, les exactions du colon sont du ressort de la presse.

Deuxième chapitre : L'autobiographie


2-1  Définition
Est autobiographie tout récit écrit qu’une personne réelle fait rétrospectivement de sa
propre vie. Le mot « autobiographie » est composé de trois racines grecques : graphein
(écrire), auto (soi- même) et bio (vie). C'est donc, écrire sa vie par soi-même. Les récits
autobiographiques font référence à des lieux, des personnes et des événements réels : ils se
différencient en cela des textes de fiction .L’ autobiographie se caractérise par le fait que
l‘auteur, le narrateur et le personnage principal ne font qu’un .Le récit autobiographique est
mené souvent à la première personne d'où la présence du ''je''.
Un des premiers chercheurs à s'être penché sur la question de l'autobiographie est
Philippe Lejeune dans Le pacte autobiographique, en 1975. Pour lui, l'autobiographie est le
« Récit rétrospectif en prose qu'une personne réelle fait de sa propre existence, lorsqu'elle
met l'accent sur sa vie individuelle, en particulier sur l'histoire de sa personnalité» (1975,
p. 14).
Jean Starobinski, historien suisse des idées et théoricien de la littérature, donne une
définition plus longue et moins restrictive de la littérature :
« La biographie d’une personne faite par elle-même : cette définition de l’autobiographie
détermine le caractère propre de la tâche et fixe ainsi les conditions générales (ou génériques)
de l’écriture autobiographique. Il ne s’agit pas ici, à proprement parler, d’un genre littéraire :
réduites à l’essentiel ; ces conditions exigent d’abord l’identité du narrateur et du héros de la
narration ; elles exigent ensuite qu’il y ait précisément narration et non pas description. La
biographie n’est pas un portrait ; ou, si on peut la tenir pour un portrait, elle y introduit la
durée et le mouvement. Le récit doit couvrir une suite temporelle suffisante pour
qu’apparaisse le tracé d’une vie. Ces conditions une fois posées, l’autobiographe apparaît
libre de limiter son récit à une page ou de l’étendre sur plusieurs volumes ; il est libre de «
contaminer le récit de sa vie par les événements dont il a été le témoin distant :
L’autobiographe se doublera alors d’un mémorialiste (c’est le cas de Chateaubriand) ; il
est libre aussi de dater avec précision les divers moments de sa rédaction, et de faire retour sur
lui-même à l’heure où il écrit : le journal intime vient alors contaminer l’autobiographie et
l’autobiographe deviendra par instant un « diariste » (c’est encore une fois le cas de
Chateaubriand). […] Il convient d’insister néanmoins sur le fait que le style ne s’affirmera
que sous la dépendance des conditions que nous venons de mentionner : il pourra se définir
comme la façon propre dont chaque autobiographe satisfait aux conditions générales –
conditions d’ordre éthique et « relationnel », lesquelles ne requièrent que la narration
véridique d’une vie, en laissant à l’écrivain le soin d’en régler la modalité particulière, le ton,
le rythme, l’étendue, etc. »
L'autobiographie, genre littéraire assez récent, est donc, à partir de cette définition, un
récit retournant en arrière, de forme prosaïque, qu'un individu, en chair et en os, fait de sa
propre existence quand elle met en exergue sa vie individuelle, en particulier, quand il narre
l'histoire de sa personnalité. C'est un récit de vie où l'auteur effectue un retour sur son passé,
une analepse, espèce de rétrospection dans laquelle il ne parle pas de la vie d'un autre comme
c'est le cas dans la biographie ou d'autres forme de littérature intime (journal intime,
autoportrait…) mais, bel et bien de sa vie ou de pans, de tranches de sa vie. L'autobiographie
est donc nécessairement écrite à la première personne et suppose l'écriture de soi.
A la fin du IVème siècle, Saint Augustin, un théologien, écrit Les confessions, première
autobiographie reconnue. Il raconte l’itinéraire de sa formation jusqu’à sa conversion. Au
XVIème siècle, Montaigne, dans Les Essais, fait le projet de se peindre lui-même dans
l’intention de mieux se connaître « Je suis moi-même la matière de mon livre». Au XVIIème
siècle, les écrivains classiques s’interdisent de parler d’eux-mêmes « Le moi est haïssable »,
dit Blaise Pascal. A partir du XVIIIème siècle, l’individu triomphe comme valeur nouvelle
avec la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et les révolutions. Avec les
Confessions, Rousseau est le fondateur d’un genre qui va loin dans la peinture et l’analyse de
soi. Au XIXème siècle, c’est l’essor de l’individualisme romantique avec Chateaubriand,
Stendhal, George Sand etc. Au XXème siècle, c’est un genre à succès évoluant grâce aux
travaux de Freud et la psychanalyse. On peut citer en guise d'exemplification André Gide,
Jean-Paul Sartre et Nathalie Sarraute…
Dans l'autobiographie, la relation entre l'auteur et son public s'établit dans le respect d'une
triple règle : auteur, narrateur et personnages sont confondus, ils ne font qu'un ; c'est une
narration autodiégétique dans laquelle l'auteur s'engage à dire la vérité. Une véracité
identitaire et événementielle dont le lectorat sera juge en dernier ressort.
Si on parle des raisons d'écriture d'une autobiographie, Les récits autobiographiques
abordent généralement les mêmes thèmes, les mêmes motifs, les topoï : récit d’enfance, récit
d’une vocation, portraits des membres de la famille, premières rencontres, connaissance de
soi, écriture de bilan (triomphant, frustré, nostalgique), justification de ce qu’on a fait, de son
parcours, de ses choix de vie, de ses erreurs : visée argumentative, témoignage personnel sur
une époque, une société.
D'ailleurs, l'auteur narrateur et personnage principal livre une synthèse de son
expérience. Il embrasse l'ensemble de sa vie individuelle, reconstitue l'histoire de sa
personnalité. Le narrateur considère rétrospectivement son expérience passée sur laquelle il
jette un regard neutre, attendri ou ironique, dépendamment des cas.

2-2 Typologie autobiographique :


Autobiographie historique, autobiographie discursive, diachronique et
synchronique
On distinguera entre les types d'autobiographie celle qui intègre, plus ou moins, ce
moment de l'écriture. En reprenant l'opposition de Benveniste entre histoire et discours, on
peut dire qu'il existe des autobiographies centrées sur l'histoire, c'est-à-dire sur le ''Je'' de
l'énoncé, et des autobiographies centrées sur le discours, c'est-à-dire sur le ''Je'' de
l'énonciation. Vu que ces deux ''Je'' sont inextricablement mêlés dans l'usage de la première
personne, les unes tendraient à créer l'illusion d'un passé en soi, qui se proférerait de lui-
même. Les autres à abandonner le récit proprement dit pour devenir des méditations au
présent.

À mesure que le présent de l'énonciation prend le pas sur le récit au passé et néglige sa
dimension rétrospective, on se rapproche de genres distincts de l'autobiographie au sens strict
du terme : soit de l'autoportrait, défini précisément comme un parcours au présent de
l'écriture, au fil duquel l'individu, qui revient sur lui-même, s'efforce de saisir les traits
généraux de sa personnalité, soit du journal intime qui ne fait, à la limite, que traiter du
présent de l'énonciation, présent qui se déplace de jour en jour, sans chercher à synthétiser la
signification de l'existence.

Les textes autobiographiques traitent soit de toute la vie d'un écrivain soit d'une partie de
celle-ci. Cet ancrage se fait selon l'importance des faits à relater. On peut, à la lumière de cette
différentiation, distinguer entre deux types d'autobiographie :

Le premier type d'autobiographie tend à reconstituer le vécu de l'auteur dans sa globalité.


La dimension élargie du récit permet de suivre l'évolution ou les fluctuations du "moi"
autobiographique tout au long du passé de l'auteur. A cette catégorie, nous réservons
l'appellation d'autobiographie diachronique.

La seconde autobiographie rend compte d'une expérience importante ou d'un événement


particulier qui survient en brusquant la vie de l’auteur. Cette coupure chronologique montre
ainsi l'état du "moi" autobiographique durant une courte durée. C'est ce que nous appellerons ;
autobiographie synchronique.

La définition de John-Barrett Mandel résume bien cette typologie. Pour lui,


l'autobiographie "est un récit rétrospectif de la vie entière d'une personne ou une partie
significative de sa vie, écrit comme une vérité avouée et dans un but spécifique de la personne
en question" [20].

Nous proposons d'étudier quelques passages, tirés du roman autobiographique la boîte à


merveilles, à la lumière de cette typologie.

L'autobiographie diachronique :
Ce type d'autobiographie met en scène une partie importante du parcours d'une personne.
Les différentes étapes que recouvre le récit se présentent comme des lieux communs
de l'autobiographie diachronique ; des topos. La descendance, la naissance, l'enfance,
l'adolescence et l'âge adulte sont des phases – ou du moins quelques-unes parmi elles – quasi
incontournables pour tout récit rétrospectif d'une personne qui met l'accent sur sa vie
personnelle, en particulier sur l'histoire de sa personnalité. Les auteurs retiennent un
événement significatif qui a marqué leur vie pour le mettre en avant soit au début du texte,
soit au liminaire.

Dans certains textes, la naissance peut constituer, quand autobiographie diachronique il y


a, un événement notable qui annonce la narration. D'autres textes s'ouvrent sur le premier
souvenir qui a marqué la mémoire de l'auteur. La naissance prend, en conséquence, une valeur
secondaire.

Certes, la naissance ne peut être racontée que par le biais d'une tierce personne comme le
parent du narrateur-personnage. Dans le cas contraire, elle devient l’objet de fantasme ou un
élément obsessionnel susceptible de prendre des dimensions variables.

L’autobiographie diachronique prend la forme d'une entreprise où la vie ne constitue qu'un


moyen et non pas une finalité du projet autobiographique. Ce projet pourrait être culturel,
intellectuel, etc. Le récit débouche ainsi, souvent, sur une morale ou sur un enseignement
précis.

L'autobiographie synchronique :
Le terme synchronie suggère une coupure paradigmatique qui circonscrit une expérience
vécue dans un laps de temps. Vincent de Gaulejac parle de "tournant d'une vie interprété
comme un changement de direction, soit que l'individu se démarque d'une destinée qui
semblait toute tracée, soit que le destin lui-même se charge de bouleverser le cours de la vie".

Dans cet extrait de l'incipit, qui constitue le pacte autobiographique, l'auteur met
l'accent sur sa propre expérience avec la solitude, à l'âge de six ans. Il est question d'une
reproduction des faits qui ont marqué la vie de l'auteur. Le récit raconte, en effet, les
moments de sa solitude.
Ce type d'autobiographie, dit synchronique, ne répond pas à un projet conçu au préalable.
Il est la conséquence d'une conjoncture de faits endurés d’une manière inopinée. Ce processus
de mue constitue le déclic qui engendre le besoin de se dire afin de rendre compte d'une
période qui a bouleversé la vie de l'auteur. Nous sommes, ainsi, loin des récits
autobiographiques qui cherchent à "élaborer le mythe personnel" et encore à "mettre l’accent
sur la genèse de la personnalité". Le récit marque une rupture avec le passé généalogique. Il
est centré davantage sur une expérience vécue tardivement et son impact sur le devenir de
l'auteur.
2-3 L'autobiographie dans la littérature maghrébine d'expression
française :
On a beaucoup spéculé sur le nom à donner à cette littérature essentiellement naissante
dans l'époque du colonialisme des trois pays maghrébins susmentionnés. C'est ainsi qu'on
parle de littérature maghrébine d'expression ou de graphie française, de littérature
francophone ou française du Maghreb... La référence géographique, le Maghreb ou la
maghrébinité, peut être spécifiée en Maroc-marocanité, Algérie-algérianité ou Tunisie-
tunisianité. Dans tous les cas, on notera qu'aucun vocable n'articule la référence arabe qui, ne
l'oublions pas, est constante dans la plupart des discours, y compris ceux des écrivains
"francophones" eux-mêmes[1] . Dénomination problématique et "oubli" d'une dimension au
moment où s'ouvre, de nouveau, un débat international sur la francophonie.
  Pour ne pas enfermer davantage la lecture de cette littérature dans une identité
nationaliste, est-elle française ? arabe ? berbère ?..., il nous semble plus important et, par
conséquent, plus urgent d'ouvrir cette lecture sur la genèse et mutation de l'autobiographie
dans la littérature maghrébine francophone.
Les écrivains marocains de langue française ont composé pour l'essentiel des récits à
caractère autobiographique. Cette dominance, qui est une caractéristique principale de la
littérature marocaine, parait paradoxale et soulève d'autres interrogations se rapportant à l'acte
d'écrire et la langue support d'écriture.
Le projet autobiographique repose sur une identité du narrateur et de l'auteur ainsi que le
personnage principal, identité que nous avons détaillée dans le liminaire et dans laquelle il y a
lieu de distinguer lesdites trois instances la constituant. D'abord, L’auteur doit s'affirmer en
tant qu'être autonome, indépendant, libre et responsable de sa propre vie.
Dans l'autobiographie des littérateurs maghrébins s'exprimant en français, le sujet au
centre de l'écriture est le ''Je'' qui parle de son ''Moi''. Lequel ''Moi'' est valorisé parce que
conscient de son identité comme différente des autres. Le ''Je'' représente à la fois l'auteur, le
narrateur et le héros, celui qui écrit et celui dont il s'agit, un être ayant une existence
historique. Pourtant, au Maroc, société traditionnelle où la religion occupe une place
prégnante. Le ''Moi'' est haïssable comme le postulat pascalien l'affirme, Un ''Je'' on ne peut
plus détestable voire même exécrable. L'individu n'y est envisagé que dans le cadre de son
dépendance vis-à-vis du groupe. C'est un être soudé à une communauté. Celle-ci est elle-
même soumise à dieu et aux autorités politico-religieuses. En conséquence, la notion
d'individualité présente dans les autobiographies marocaines relève d'une conception de la
société étrangère au Maroc.
L'écrivain marocain visait en priorité le colon, destinataire lettré pour qui, ni l'acquisition
du livre, ni l'accès à l'écrit ne constituaient des difficultés majeures. Il était aussi naturel que la
langue d'écriture ait été celle du colonisateur. Le français était la langue séduisante du
modernisme, le moyen aussi à travers lequel il était possible de marquer sa différence et sa
révolte contre la domination de l'envahisseur. Et c'est pourquoi les premiers récits, en partant
du vécu personnel et du parcours de vie, se sont focalisés sur la description introspective des
mœurs locales de façon à singulariser et souligner les différences de la société autochtone, et à
dénoncer les tentatives réitérées de l'assimiler, annihiler les marques la distinguant, enfin ;
l'acculturer.
Les écrivains maghrébins d'expression française utilisent le français comme langue
d'écriture, d'abord, la langue arabe étant ''marginalisée'', l'écrivain n'avait pas d'autres
alternatives. Le français était la langue acquise à l'école et qu'il maîtrisait mieux. C’était aussi
la langue de l'autre. Laquelle langue constitue un système de signes linguistiques à travers
lesquels il était possible de dialoguer avec l'altérité colonisatrice et de lui signifier une
inclination maghrébine nationaliste ; le rejet. Ensuite, l'arabe n'autorisait pas l'expression libre
du ''Moi'' et ce discours nouveau dans lequel le sujet ''Je'' parlait de son propre être et donnait
sa vision du monde à travers le regard qu'il portait sur les siens.
Alors, comment Sefrioui organise-t-il la présence de ce ''Je'' dans son roman qui porte
essentiellement sur le ''nous'', sur les mœurs, la tradition et la vie de la société authentique
dont il est issu ? Comment cet écrivain avait su respecter un pacte autobiographique sous-
tendant une œuvre romanesque dont l'instance ''Je'' est chargée de voix aussi pléthorique que
stratifiées ?
Deuxième partie :

Présentation de l'œuvre
La boîte à merveilles et de son
auteur Ahmed Sefrioui

TROISIEME CHAPITRE :
Présentation du roman autobiographique
La boîte à merveilles
1.1 L'acte énonciatif dans La boite à Merveille
En linguistique, L'énoncé englobe à la fois la forme et le contenu de ce qui est dit, tandis
que L'énonciation désigne l'acte de produire un énoncé. Cet acte a toujours lieu dans une
situation particulière que l'on dénomme la situation d'énonciation : elle englobe le locuteur,
l'interlocuteur, les circonstances (de temps, de lieu, etc.) dans lesquelles est émis l'énoncé.

L'idée qui préside à ces considérations linguistiques est que l'énoncé n'est pas seulement
un message, mais un acte accompli par un locuteur pour déclencher une réaction de
l'interlocuteur. Ainsi, l'inscription sur un mur des mots « à six heures », peut aussi bien
signifier une déclaration de guerre qu'un rendez-vous amoureux ; il peut s'agir du matin ou de
l'après-midi, d'un moment passé (je t'avais dit six heures !) ou à venir… tout dépend de la
situation d'énonciation.

Tous les énoncés portent des marques (ou indices) de la situation d'énonciation. Il s'agit :


des indices de personne tels les pronoms personnels, pronoms et adjectifs possessifs,
des indices spatio-temporels, des déictiques qui « pointent » le monde où se situe
l'énonciation, qui réfèrent à un contexte donné.

C'est dans les ruelles de la ville de Fès qu'Ahmed Sefrioui tisse la diégèse de son roman
La boîte à Merveille, un témoignage de visu, authentique, de la réalité marocaine dans les
années 20 à travers le regard d'un enfant de six ans. Quoiqu'il y ait immixtion du ''Je'' adulte
au début de l'œuvre dont le propos est cité exhaustivement ci-dessous, le regard enfantin
domine et s'exprime par un écolier de six ans.
En lisant l'œuvre d'Ahmed Sefrioui, force est de constater un ''Je'' biface, versatile. En effet,
dans l'incipit ouvrant ce roman autobiographique, l'on distingue un narrateur adulte posant un
regard de grande personne sur l'enfant de six ans qu'il était. Ici, la valeur du présent permet
une actualisation dans le temps. Dans le premier pan de cet incipit, c'est Ahmed Sefrioui,
l'auteur adulte, qui semble produire l'énoncé :
«Le soir, quand tous dorment, les riches dans leurs chaudes couverture, les pauvre sur les
marches des boutiques ou sous les porches des palais, moi, je ne dors pas. Je songe à ma
solitude et j'en sens tout le poids. Ma solitude ne date pas d'hier. Je vois au fond d'une impasse
que le soleil ne visite jamais, un petit garçon de six ans, dresser un piège pour attraper un
moineau mais le moineau ne vient pas. Il désire tant ce moineau ! Il ne le mangera pas, il ne le
martyrisera pas. Il veut en faire son compagnon. Les pieds nus, sur la terre humide, il court
jusqu'au bout de la ruelle pour voir passer les ânes et revient s'asseoir sur le pas de la maison
et attendre l'arrivée du moineau qui ne vient pas. Le soir, il rentre le cœur gros et les yeux
rougis, balançant au bout de son petit bras, un piège en fil de cuivre.»
A partir de « Nous habitions Dar Chouafa, la maison de la voyante…», s'opère le retour
du narrateur-enfant, et c'est à travers son regard que le récit est d'ores et déjà perçu.
Comme nous avons déjà soulevé, dans le roman autobiographique qu'est La boîte à
Merveille, une autobiographie dans un roman, l'auteur s'apparente grandement au narrateur.
Lequel narrateur ne devrait pas être amalgamé pour autant avec l'auteur, comme la nouvelle
critique le veut. Ce dernier pourrait lui-même se voir dissocié du personnage principal comme
Philipe Lejeune affirme dans son œuvre le pacte autobiographique.
Donc, l'identité du narrateur et du personnage principal que suppose l'autobiographie se
voit protubérante le plus souvent par l'emploi de la première personne. C'est ce que Gérard
Genette appelle la narration autodiégétique dans sa liste classificatoire des voix du récit.
Dans le cas de La boîte à Merveille, il y a présence prépondérante de la première
personne d’où le caractère autobiographique est indéniablement justifié. Le narrateur, Sidi
Mohammed, enfant âgé de six ans, nous plonge dans son univers, essentiellement onirique, à
travers un ''Je'' vraisemblable, et ce, de par la véracité des noms des lieux '' Bab Jiaf, Quartier
Kalkliyne, Zankat Hajama'' ainsi que le bain maure, autant de lieux renvoyant à Fès, sa ville
natale, la ville du récit.
Comme les lettres des mots constituant ce mémoire ont avancé précédemment, nous
relevons qu'il y ait un regard adulte posé sur un parcours de vie enfantin. En effet, l'auteur
adulte pose un regard sur l'enfant jeune qu'il était. La question est de savoir si le ''moi adulte''
ne transforme pas les faits. Autrement dit, Comment peut-on écrire un passé sans le
considérer selon un prisme de l'âge adulte ?

1.2 Un roman ''Carte-postal'' ?


Si l'on croit à la psychocritique naissante de la nouvelle critique du XXème siècle, et
qu'on essaiera de comprendre l'ossature de l'œuvre à la lumière et des mots la constituant et de
la biographie de l'auteur, nous dirions que le caractère carte postale de La boîte à Merveille
est on ne peut plus évident, que cela va sans dire, et que dire que ce roman est aussi
autobiographique qu'ethnographique est l'évidence même.
En effet, les mots en arabe dialectal marocain que l'on trouve dans La boîte à Merveille
sont systématiquement définit juste après « Dar Chouafa ; la maison de la voyante, Gnaoua ;
Les gens de guinée ainsi que le tadeffi, potage parfumé à la menthe sauvage.» Cela montre, à
notre sens le souci de l'auteur à vouloir servir de guide et de faire montre d'un certain
exotisme. N'oublions pas qu'il était lui-même guide de sont état et que le français n'était
point la langue de son pays.
Le narrateur ne manque pas, à chaque fois qu'il introduit un lieu romanesque, de le
décrire méticuleusement comme c'est le cas du bain maure « Dès notre arrivée, nous
grimpâmes sur une vaste estrade couverte de natte. Après avoir payé soixante quinze centimes
à la caissière nous commençâmes notre déshabillage dans un tumulte de voix aigue, un va-et-
vient continu de femme à moitié habillées, déballant de leurs énormes baluchons des caftans
et des mansourias, des chemises et des pantalons, des haïks à glands de soie d''une
éblouissante blancheur…»
De là, l’on pourrait déduire que La boîte à Merveilles, roman autobiographique
s'inscrivant dans la littérature maghrébine d’expression française de première génération, est
ethnographique ou plus exactement documentaire, exotique et folklorique. Elle cherche à
montrer, à l'instar d’une carte postale, aux lecteurs francophones la vie de tout les jours des
Marocaines et des marocains : c’est-à-dire les coutumes, les fêtes, la gastronomie, les souks,
les marabouts, les conditions de la femme, l’autorité de l’homme, le patriarcat dominant,
l’habillement, les croyances etc.  

Nombreuses sont les passages expliquant notre adhésion quant au caractère ''carte postal''
dudit roman, nous pourront corroborer notre postulat par nombre d'extraits mettant en exergue
une volonté claire et nette de peindre la société marocaine, de façon à créer un certain
exotisme, et au premier rang desquels la scène du bain maure susmentionnée, ajoutons à cela,
les préparations à l'Achoura, le nec plus ultra de la gastronomie marocaine tel le couscous, le
tadeffi, le beignet marocain, les pieds de mouton aux pois chiches sont aussi joliment
présentés.

1.3 Le pacte autobiographique


Le pacte autobiographique pourrait se définir comme étant l'engagement pris par l'auteur
de restituer avec exactitude et fidélité son passé, même s'il est confronté à des souvenir
imprécis ou à des aveux gênants à formuler. Donc, le pacte autobiographique peut
s'apparenter à un contrat moral entre l'auteur et le lecteur consistant à faire part au lecteur, de
l'engagement de tout lui révéler. L'écriture autobiographique pose donc le problème de vérité,
de véracité et de sincérité de l'autobiographe.
Si l'auteur, dont le nom figure sur la couverture du livre, est lui-même le narrateur et le
personnage principal de l'œuvre, c'est que les prémices de la franchise de l'auteur à l'encontre
de ses lecteurs est confirmée.
En commençant son récit de vie par le pronom personnel ''Je'', en ancrant le récit dans une
réalité vérifiable d'une époque historicisée, en recourant à une espèce de mimèsis spatio-
temporelle, Ahmed Sefrioui, auteur de La boîte à Merveilles, s'engage, vis-à-vis du lectorat,
à se raconter sans déformation outrancière de la réalité.
En effet, l'identité de l'auteur Ahmed Sefrioui, du narrateur et personnage principal Sidi
Mohammed est assez palpable en ce qu'elle est une histoire d'un enfant originaire de Fès,
étudiant au Msid, et évoluant à l'époque du protectorat, autant d'analogie avec l'auteur.
Discours de l’écrivain s’adressant à son lecteur pour lui présenter son intention d’écriture,
le pacte autobiographique pourrait s'illustrer à travers le thème du récit «Je songe à ma
solitude» ou le moment de l’histoire racontée « Je ne dors pas » ainsi que les raison poussant
l'écrivain à en parler, se voulant comme un désir de partager sa solitude «Ma solitude ne date
pas d’hier».
Cette narration autodiégétique, si l'on veut employer un terme de Gérard Genette,
implique qu'en écrivant son récit de vie, l'auteur soit souvent confronté aux problèmes de la
mémoire. Les souvenirs, les événements relatés dans une autobiographie sont-ils ceux de
l'auteur ou proviennent-ils de ce que les autres lui ont appris sur sa vie d'enfant ?
Il est vrai que la mémoire d'un être humain ne retient pas tout, alors, par quel biais peut-on
distinguer ce qui est vrai de ce qui est recomposé dans le récit de vie ? Et ce, malgré le souci
de vérité recherchée par certains auteurs. Il faut dire que, souvent, l'autobiographie se fait
malgré les défaillances liées à la mémoire.
Dans l'autobiographie romancée qu'est La boîte à Merveilles, l'auteur se distingue du
narrateur-enfant, personnage principal, de par l'âge, le statut et l'expérience. Ahmed Sefrioui
est cet écrivain en chair et en os publiant l'œuvre de façon anthume, alors que, Sidi
Mohammed n'est que le personnage principal imaginaire et imaginatif s'apparentant à l'auteur
à l'âge de six ans. En outre, ce roman autobiographique raconte des événements, exprime des
émotions, reprend des visions qui ont eu lieu, majoritairement, à une période lointaine de la
vie de l'auteur ; les années vingt.
Par ailleurs, L'œuvre s'accorde les libertés du roman ou fiction et souvenirs sont
inextricablement mêlés, difficilement identifiables.
Si l'on voudrait relever la différence cruciale entre l'autobiographie et l'autofiction, nous
dirions que cette dernière recourt à l'imagination pour mieux atteindre la vérité des faits et des
émotions. Dans le roman autobiographique, le narrateur et le personnage principal peuvent se
ressembler sans se confondre, pourtant le personnage emprunte beaucoup de traits à l'auteur.
Sur le plan de l'écriture, le théoricien de l'autobiographie, Philipe Lejeune considère que «
Si l'on reste sur le plan de l'analyse interne du texte, il n'y a aucune différence » entre un
roman autobiographique et une autobiographie. C'est à l'extérieur, sur la couverture du livre
qu'on se rend compte que le nom de l'auteur n'est pas celui du narrateur-personnage. Le récit
prend pour sujet la vie intérieur d'un personnage, et celui-ci est pur fiction : On a affaire à un
pacte romanesque ; mais cette vie intérieure peut refléter des pans de la vie du romancier ou
du moins, sa vision du monde, voire ses prises de position idéologiques. Le personnage
s'avère donc, un substitut de l'auteur.
Quoiqu'il en soit du pacte établit et respecté par Ahmed Sefrioui dans La boîte à
Merveilles, autobiographique, romanesque ou mélange des deux, cet auteur marocain s'est
engagé d'emblée à se raconter intérieurement et extérieurement, et ce, dans un souci de
véracité des plus louables.
QUATRIEME CHAPITRE :
La biographie de l'auteur Ahmed Sefrioui
Ecrivain marocain, Ahmed Sefrioui est né en 1915 à Fès. C’est l’un des premiers
fondateurs de la littérature marocaine d’expression française. Il a grandit à la médina, d’où la
présence dominante de cet espace dans son œuvre et particulièrement dans La Boîte à
Merveilles. Ses parents sont d'origine berbère et son père était meunier.
Ahmed Sefrioui a été, comme la majorité des enfants de son âge et de son époque, à
l'école coranique. Les souvenirs du fqih et de ses méthodes particulièrement brutales à
l'encontre des apprenants, sont vivaces dans son œuvre. Il aura aussi l'occasion de fréquenter
l'école française puis le collège de Fès. Plus tard, il assurera des fonctions dans la gestion et
la protection du patrimoine de la ville de Fès puis aura la direction du tourisme à Rabat.
Ahmed Sefrioui nous lègue une œuvre colorée qui nous invite à réfléchir sur l'évolution
que connait notre société :
Le Chapelet d'ambre, Seuil, Paris, 1949 ;
La Boîte à Merveilles, Seuil, Paris, 1954 ;
Le Jardin des sortilèges, L'Harmattan, Paris, 1981 ;
La Maison de servitude, édition Marsam, Rabat, 2001 ;
Passionné de patrimoine, cet écrivain a occupé des postes administratifs aux Arts et
Métiers de Fès, puis à la direction du tourisme à Rabat.
Versé dans le tourisme, ledit écrivain sera à l’origine de la création de nombreux musées
comme Batha, Oudaya et Bab Rouah. Il est mort en mars 2004.), Premier roman où il évoque
Fès, Le Chapelet d’ambre (Le Seuil, 1949) obtiendra le grand prix littéraire du Maroc.
La Boîte à merveilles (Le Seuil, 1954) : C'est la ville de Fès vue à travers le regard du
petit Mohammed. Ce roman ethnographique apparaît comme le texte inaugural de ce qui est
aujourd'hui, appelé communément, la littérature marocaine d'expression française. S'ensuit La
maison de servitude (Marsam, 2001) ainsi que le recueil de quinze contes Le jardin des
sortilèges (L’Harmattan, 1989).
Quelles traces dans son œuvre ? C'est l'crivain marocain qu’on a tendance à considérer
comme le pionnier de la littérature marocaine d’expression française. Le parcours de cet
écrivain, est celui de ces petits marocains scolarisés sous le protectorat : l’école coranique est
un passage obligatoire pour tout élève avant que celui-ci n’accède aux écoles du colon, dites
écoles de fils de notables ou d’indigènes.
L’auteur de La Boîte à Merveilles ne pourra pas s’affranchir de l’héritage exotique et
pittoresque de ses maîtres .Il adoptera un style et une technique d’écriture qui laissent
entendre que ses œuvres sont destinées à un lectorat étranger plutôt que marocain. Certains
ont vu dans l’œuvre de Sefrioui, en plus du caractère "ethnographique", une absence
d’engagement contre l’occupant français et un manque d’intérêt vis-à-vis de tout ce qui se
passait dans le pays. Le lecteur de son roman est plongé dans une sorte « d’autofiction » où la
réalité se mélange avec la rêverie. « On y relève certes, une authenticité et une fraîcheur que
lui permet la focalisation par le regard d’enfant, mais aussi des procédés qui rappellent le
roman exotique comme l’insistance sur le pittoresque et la présence de mots arabes traduits en
bas de page ou commentés dans le contexte, dont la visée implique un lecteur étranger à la
culture marocaine».
En plus de ces caractéristiques, des critiques vont jusqu’à percevoir chez Sefrioui une
certaine aliénation. Mais des spécialistes de la littérature marocaine d’expression française,
moins virulents, estiment au contraire que l’absence manifeste du colon dans le récit est une
façon biaisée d’ignorer « cet Autre » et « avec beaucoup de mépris ». Ils n’hésiteront pas,
dans un effort de réhabilitation de Sefrioui, à dire que l’intégration, par ce dernier, de l’oralité
et des expressions culturelles populaires ou de la vision soufie de l’existence dans ses romans
est une méthode savante de combattre l’ethnocentrisme et l’égocentrisme de l’européen
colonisateur, qui considérait ces formes d’expression comme du folklore, voire comme de la
''sous-culture''.
2-2 Ahmed Sefriou et ses contemporains
Parmi les écrivains contemporains d'Ahmed Sefrioui, l'on trouve nombre de littérateurs
maghrébins dont le nom restera gravé dans l'histoire littéraire. Ces fondateurs de la littérature
maghrébine d'expression française ont conduit une réflexion critique sur leur société doublée
d'une prise de conscience identitaire, tels que Driss Chraïbi et Mouloud Feraoun.
Pour ne citer que ces deux écrivains ancrés dans leur époque, chacun ayant sa manière
propre de résister à l'occupant par le biais de son écriture, force est de soulever, à notre sens,
les analogies et dissemblances avec Ahmed Sefrioui car, comme nous allons le montrer,
quoique contemporains, Leurs écrits sont peu ressemblants.
Algérien de nationalité, Mouloud Feraoun est un écrivain d'expression française né le 8
mars 1913 à Tizi Hibel en haute Kabylie (Algérie) et victime à Alger le 15 mars 1962, avec
cinq de ses collègues inspecteurs de l'Education Nationale, de l'assassinat de Château Royal
attribué à l'organisation armée secrète, organisation qui avait pour but d'abattre tous ceux qui
militaient contre la francisation de l'Algérie.

Élève de l'école normale de la Bouzareah (Alger), il enseigne durant plusieurs années


comme instituteur, directeur d'école et assurant des cours complémentaire, avant d'être
nommé inspecteur des centres sociaux. Feraoun commence à écrire en 1934, son premier
roman est Le fils du pauvre. Salué par la critique, l'ouvrage obtient le Grand prix de la ville
d'Alger. L'écrivain est abattu le 15 mars 1962 à Alger, à quatre jours seulement du cessez-le-
feu, par un commando de l'organisation armée secrète (l'assassinat de Château Royal).

Né le 8 mars 1913 dans le village de Tizi-Hibel (ancienne commune mixte de Fort-


National), son nom est Aït-Chabane, Feraoun étant le nom attribué par l'état-civil français. Il
fréquente l'école de Tizi-Hibel à partir de l'âge de 7 ans.

En 1928, il est boursier à l'école primaire supérieure de Tizi-Ouzou. En 1932, il est reçu
au concours d'entrée de l'école normale de Bouzaréah Alger (actuelle école normale
supérieure de lettres et sciences humaines). Il y fait la connaissance d'Emmanuel Roblès. En
1935, il est nommé instituteur à Tizi-Hibel où il épouse sa cousine Dehbia dont il aura 7
enfants. En 1946, il est muté à Taourirt-Moussa. En 1952, il est nommé directeur du cours
complémentaire de Fort-National. En 1957, nommé directeur de l'école Nador de Clos-
Salembier, il quitte la Kabylie pour les hauteurs d'Alger.

En 1951, il est en correspondance avec Albert Camus, le 15 juillet, il termine La Terre et


le Sang, récompensé en 1953 par le Prix du roman populiste.

En 1960, il est inspecteur des centres sociaux (créés sur l'initiative de Germaine Tillion) à
Château-Royal près de Ben-Aknoun. Avec cinq de ses collègues, dont l'inspecteur d'académie
Max Marchand, c'est là qu'il est assassiné par l'organisation armée secrète française le 15 mars
1962.

Mouloud Feraoun a commencé son premier roman autobiographique Le fils du pauvre en


1939 ; il n'est publié qu'en 1950 à compte d'auteur. Ce n'est qu'en 1954 que Le Seuil le publie,
expurgé des soixante-dix pages relatives à l'école normale de Bouzaréah.
Mouloud Feraoun a su, pendant la guerre d'Algérie, concilier l'identité Kabyle, la culture
française et l'aspiration à l'indépendance. Cet écrivain, tout comme Ahmed Sefrioui le fut,
était engagé dans les structures socio-éducatifs, n'ont pas dans les musées, mais dans
l'enseignement, les structures d'alphabétisation et d'actions sociales envers les plus
défavorisés de ses compatriotes.
Dans ses écrits, Mouloud Feraoun témoigne d'un engagement implacable contre le colon,
contre la pauvreté généré par celui-ci et contre la colonisation du Maghreb. Publié en 1950,
son roman autobiographique raconte sa propre enfance tout comme le fait Ahmed Sefrioui.

Compatriote d'Ahmed Sefrioui, Driss Chraïbi est né en 1926 à Mazagan El-jadida. Après
des études secondaires à Casablanca, il a fait des études de chimie en France où il s’installe en
1945. Il fait tous les métiers avant de devenir ingénieur. La parution de Passé simple, en 1954,
est très bien accueillie par la critique française, mais beaucoup moins par les intellectuels
marocains qui l’accusent de trahir son pays natal par ses critiques acerbes de la société
traditionnelle. Il a fallu attendre que la revue Souffle lui consacre son premier numéro, en
1967, pour qu’il soit réhabilité auprès d’une intelligentsia qui avait moins pour préoccupation
de combattre un Occident envahissant, que de lutter contre le conservatisme étouffant d’un
despotisme en train de s’installer.

Driss Chraïbi fait ensuite une brillante carrière d’écrivain, et écrit une quinzaine de livres.
Plusieurs de ses dernières œuvres sont des romans policiers. Avec le temps, l’enfant terrible
de la littérature marocaine se fait moins féroce, mais plus ironique sur les travers de la société.
Il écrit des romans historiques qui le rapprochent du Maroc, mais garde son humour féroce
pour une série de roman policier plutôt loufoque dont le personnage central est l’inspecteur
Ali. Si avec l’âge Driss Chraïbi avait perdu de sa rage, il avait conservé sa pleine liberté de
ton.

Il a reçu de nombreux prix littéraires dont celui de l'Afrique méditerranéenne pour


l'ensemble de son œuvre en1973 ; le Prix de l'amitié franco-arabe, en 1981; le prix Mondello
pour la traduction de Naissance à l'Aube en Italie. Driss Chraïbi est mort en avril 2007 dans
la Drome, en France, où il résidait.
Dans son roman autobiographique Le monde à côté, paru en 2001, il explore la religion
islamique et son histoire, sous forme de fresque romanesque, relevant ainsi le poids du surmoi
religieux sur les individualités.
2-3 Style d'écriture d'Ahmed Sefriou
Ahmed Sefrioui est un des précurseurs incontestables du roman marocain d'expression
française. L'originalité de Sefrioui ne se limite pas à décrire minutieusement et avec insistance
la fonction génératrice de bonheur de la machine narrative dans la société marocaine, mais
c'est à travers elle-même qu'il tente de véhiculer toute sa pensée à la fois métaphysique et
mystique, c'est ce que l'on peut essentiellement relever comme caractéristique typique à cet
écrivain avant-gardiste décédé en 2004. 
Les textes de Sefrioui se distinguent par la cohabitation des deux codes oral et écrit,
lesquels constituent la base même, linguistiquement parlante, de son roman autobiographique
La Boîte à Merveilles. Cet auteur n'hésite pas à créer des interférences, en intégrant la réalité
du vécu par le biais des expressions arabes ou françaises calquées sur l'arabe. Ces emprunts
linguistiques sont présents de manière très voyante, faisant savoir qu'elles témoignent d'une
certaine véracité et franchise incitant à une rénovation du discours littéraire d'expression
française qui se trouve ainsi enrichi par la langue maternelle de l'auteur. 

Une autre spécificité des textes du défunt auteur réside dans le fait que Sefrioui nous
invite à entrevoir leur profondeur symbolique qui apparaît réelle et vraie. L'univers de l'auteur
est jalonné de portes ouvertes sur l'invisible et l’éternel. 
L'écriture d'Ahmed Sefrioui est à la fois un travail sur les formes esthétiques du langage et
sur le message poétique et spirituel, et ce, à travers le même fil conducteur : l'oralité et la
mystique". 

Décliné en trois parties, Oralité et écriture, Interférences et intertextualités, et L'ascension


mystique, l'œuvre de ce précurseur de la littérature maghrébine d''expression française
témoigne dune richesse et formelle et esthétique.
CONCLUSION

Nous avons choisis de travailler sur le roman autobiographique La Boîte à Merveilles


d'Ahmed Sefrioui qui fait partie des classiques de la littérature marocaine et maghrébine.
Notre mémoire a été divisé en deux parties ; la première est théorique : elle présente les
étapes historiques de la littérature maghrébine d'expression française, notamment le concept
de l'autobiographie, en second lieu elle met en exergue l'écriture autobiographique
caractéristique de La Boîte à Merveilles.
La deuxième partie, quant à elle, a fait l'objet d'une étude pratique, il s'agit de l'application
de ce que nous avions jugé applicable à ladite œuvre, et ce, à la lumière du support le pacte
autobiographique de son auteur Philippe Lejeune.
Durant cette analyse, aussi textuelle qu'extratextuelle, nous avons essayé, autant que faire
se peut, d'acheminer notre étude de l'œuvre sur ses points saillants sans s'attarder sur les
détails de manière pointilleuse ni s'attacher aux profondeurs les plus abyssales. Et ce dans un
souci de concentration des idées de par le nombre délimité de feuilles sur lesquelles nous
devrions peindre ce phénomène littéraire.
En guise de conclusion, nous pouvons dire que l'exploitation du sujet, qui est le notre,
n'est point exhaustive, et ne prétend nullement avoir épuisé le sujet, qui est d'ailleurs presque
insondable.
BIBLIOGRAPHIE

Ahmed Sefrioui, La Boîte à Merveilles, édition du Seuil, Paris, 1954.

Philippe Lejeune, Le pacte autobiographique, édition du Seuil, Paris, 1975.

Ecrivain anonyme, Mémoire sur l'opposition tradition/ Modernité dans le roman


autobiographique La Boîte à Merveilles, édition et année de parution anonymes.

Natacha Allet et Laurent Jenny, L'autobiographie, Département de Français


moderne – Université de Genève, 2005.

Charles Bonn, Naget Khadda et Abdallah Mdarhri-Alaoui, Introduction de La

littérature maghrébine de langue française, Paris, EDICEF-AUPELF, 1996.


Dédicace

Je dédie ce modeste travail à ma chère mère qui m'a souvent soutenue


et grâce à qui j'ai pu poursuivre mes études, à mon cher père et à tous
mes condisciples de la faculté des lettres et des sciences humaine.
Je vous offre, en guise de reconnaissance, ce modeste travail en vous
souhaitant santé, bonheur et longue vie.
Remerciements

Nous tenons à exprimer notre vive reconnaissance à Madame Naima


Mennor qui, compréhensive, encourageante, ayant une main de fer dans
un gant de velours, a permis à ce mémoire de voir le jour. Qu'elle trouve
ici l'expression de notre profonde gratitude.
Que tous ceux qui, d'une façon ou d'une autre, ont contribué à la mise au
point de ce modeste travail soient ici profondément remerciés.
Annexes
Liste des mots Arabes contenus dans le texte

Achoura : fête du jour de l'an musulman.


Aacha : Prière du soir.
Amine : Amen.
Baraka : Effluves spirituelles, manne, aubaine.
Bendir : tambour primitif.
Caftan : Robe de drap.
Chahada : Profession de foi musulmane.
Cherif : Descendant du prophète.
Chouafa : La voyante.
Derb : La ruelle.
Fassi : Habitant de Fès.
Jnoun : Démon.
Kaaba : Temple de la Mecque.
Kissaria : Marché aux tissus.
Lalla : Maîtresse.
Makhzen : Gouvernement.
Moqadma : Gardienne de sanctuaire.
Moudden : Personne chargée d'annoncer l'heure de la prière.
Negafa : Marieuse.
Nzaha : Partie de plein air.

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