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0

BCU - Lausanne

1096181410
-
LES

OEVVRES
D'AMBROISE
P A RE
CONSEILLER ET PREMIER
CHIRVRGIEN DV ROY
HVÍCTIE ŚME EDITION.
Reueuës & corrigees en pluſieurs endroicts; & augmentees d'yn fort
ample Traicté des Fiebures,tanten generalqu'en particulier , & de la
curation d'icelles, nouuellement treuué dans les manuſcrits de l'Autheur.
Auec les Portraicts esfigures tant de l'Anatomie que des inſtruments
de Chirurgie, de pluſieurs Monſtres.
OM
O

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A
PO
,
M
CV

ME
ME

A
n
e

0.51
n

A PARIS
Chez NicolasBvon ,ruë S. Iaques,à l'enſeigne
de S.Claude & de l'Homme ſauuage.
M. DC. XXVIII.
A VEĆ PRIVILEGE DV ROY.
}
DUINO
i 意

yasi

1071!2.CUE COVEGNA ;
LAUSANNE
UNIVERSITAIRE
1

A
!

AV TRES - CHRESTIEN
Roy de France & de Pologne
Henry troiſieſme.
IR E, commeil faut que tous les membres du
corps humain ſoient chacun à par ſoy , pour la
conſeruatió de ce tout,duquel ils ſont parties,en
deuoir ſelon les offices & fonctions, à quoy Na
ture les a produicts:auſſi eſt-il raiſon qu'au corps
public d'vn eſtat & police chacun ſoir ententifà
ſuyure celle vacatio,à laquelle il a pleu àDieu de
l'appeler, ſans que l'vn ſehazarde& ingere indi
ſcretement ſur l'autre, & femelle de ce dequoy il
n'a aucune experience : car autrement ce ſeroit alterer l'ordre , & cauſer
confuſion enlachoſequi de ſoy eſt bien dreſſee , & parfaictement agen
cee,& compoſee. Ce quemoy conſiderant, & meſentant eltre vn mem
bredu corps de la France, ſuiect à voſtre Majeſté ( qui eſt en l'ame & le
chef) & me voyant non du tout inutile , ny oiſif, ay taſche aullide faire
paroiſtre mondeuoir, & entendreen quoy eſt-ce que ie fers & profite au
public, & quelle vtilité ie peux apporter aux particuliers. Car ( Dicu
meltteſmoing, Sire, & leshommes ne l'ignorent point) il y a plus de
quarante ans que ie trauaille & me peine à l'eſclairciffement & perfection
de la Chirurgie,& m’oſe vanter de cesdeuxpoincts, que i'ay donné de ſi
viues atteintes à ce que ie pretendois empoigner, quotes anciens , la trace
deſquelsi'ayſuyui pasà pas,ſeront par cy-apres mieux entendus en cequ'ils
onttrauaillé &eſcric de l'inuention despreceptes , & que la poſterité ne
pourra iuſtement nous blaſmer de pareſſe:ce que ie ſupplie qu'on ne pren
ncenmauuaiſe part , puisque tant qu'ilm'a elté poſſible, ie n'ay ſouffere
que les chreſors des bons Peres furrent cachez & tenus fecrets, les mettant an
eneffectneceſſaires
&euidence: penſeauoirchacun
& leſquelsiedeformais
addicions
tellement enrichis de bel
pourra lit qu
les & ,que les ë ec
plus deplaiſir ,& non fansrecueillir profit & contentement. En tout cecy
ay-iceſté ſiprodigue de moy-meſme ,demon labeur , & de mes facultez ,
que n'y eſpargnant letemps pourletrauail par moy faict nuict & iour, ny
lesfrais, yayant employévne grande ſommede deniers pour ſatisfaire',&
á iij

1
au deuoir tequisen vncuure ſipenible, & important, &audeſir des pau 3,Spar
ures eſcholiers , leſquelseſtans inftruicts enla theorique, ſe fuſſent refroi.
dis, nevoyans ny lesmoyens , ny la voye pour effectuer,& practiquer la
ſcience:lespreceptesde laquelleils auroientapprisen l'eſchole. Caeſté la
cauſe,que poſtpoſant toutgain, & ayant eſgard au ſeul profit de laporte
rité , & à l'ornement de l'Empire François ;ſujetà
‫ز‬ voſtre Majeſté,i'ay par
tous moyens poſſibles mis la Chirurgie plus au netque iadis , ſoit pourla
rudeſſe des ſiècles paſſez, ou enuiede ceux qui en faiſoient profeſſion. le
dy que ie l’ay miſe au net,augmentee, & enrichie,non ſeulement de raiſons
& preceptes propresà la choſe que ie traicte , ains de plus de trois cens plā.
ches quei'ay fait tailler ,& eſquelles ie comprens plus de cinq cens figures
& pourtraicts ,tant de l'Anatomie, que desinſtrumenspropres pour l'ope
ration de noſtre art Chirurgique, à chacun deſquels i'ay donné nom pro
pre , & declarélvſage de chacun , àfin queles figures ne ſoient vainement
repreſentees. Et bien que ( par la grace de Dieu )il y ait peu d'hommesde
tra qualité qui puiſſent auecplus de raiſon & experience ſe faire accroire
de ce qu'ilspropoſent: ſin’ay-ie pourtant eſtéſi preſomptueux, que vou
lant faire ſortir celiure en lumiere , ie ne l'aye communiqué à pluſieurs ex
cellens hommes, tant Medecins que Chirurgiens, leſquels m'ontencoura
gé à paſſer outre , & venir iuſques au boutdela carriere. La pluſpart def
quels ſouhaitoient queceſte piece fuſten Latin, pour le plaiſir des eſtran
gers: ce queien'empeſche point que quelqu'un d'entreux ne leface ſi bon
luy ſemble, à fin qu'ils ayent auec moy vne pareille gloire de faire ſentir
aux nationseſtranges , qu'il n'y a eſpecede ſçauoir ſous le Ciel , qui ne ſoit
auec dexterité manié & declare auec perfectió en ce Royaume, ſur lequel
yoſtre Majeſté comande heureuſement. Auſſi oſé-ic dire , ſans craindre de
memeſprendre,que ie ne içache home ſi charoüilleux, ou difficile à con
tenter, qui ne puiſſe apprendre quelque cas en ce liure,ieparle & de ceux
qui ſçauent la Chirurgie, & de ceux quien voyent les experiences ordinai
res.Etpour-ce (SIRE)eſtant cecy vn chef d'auure, & l'amas de tous les tra
uaux d'vn de vos anciens feruiteurs & ſujects: i'ay bien oſé m'enhardir de
le poſer aux pieds de voſtre Majeſté , tantpour monſtrer l'obligation &
ſeruice que ieluy dois , pour l'honneur qu'il vousa pleu me faire,me con
tinuant en l'eſtat & feruice de voſtre premier Chirurgien,où i'ay ſeruitrois
Rois predeceſſeurs d'icelle voſtre Royale Majeſté: àlaquelle i’eſpere faire
recognoiſſanče tres- fidele de feruice & tres humble affection à iamais.
Eſperant par cemoyen donnerhardieſſe à ce liure d'allerle front leué par
tout le monde, ayantla faueur du plus grand & redoubté Monarque d'en
tre les Chreſtiens : lequel ayant elgardà mes anciens ſeruices, & auxfrais
quei'ay faits à preſent en l'impreſſion de ce liure , ne deſdaignera aufli &
de ſupporter ma foibleſſe, & deferuir de garand à ceſtuy ſien client,quiluy
offretout cequ'il a de precieux & de rare. Auſſi eſt-il vray que feu de bon
ne memoire leRoy CHARLES IX. voulutveoirceliure , à ce induit par la
Royne ſereniſſimemere de voſtre Majeſté, laquelle me commanda le pu
blier ſousle nom Royal , auec promeſſe que mes labeurs & ſeruices neſe
royent point ſans recognoiſſance: vos Majeſtez n'ignoransja combien de
Princes & Seigneurs ont eſté parmoy ſeruis & garantis,par vos commana
demens , & parlagracede Dieu , & diligenceloigneuſe de ma main , & ex
periencede l'eſtat duquelie fais profeflion.De RoyaRoy,comme mes de
farsonteſté ſucceſſifs, & mes feruices continuels: aulli d'vn Roy puiſſant å
vneautreheureux,grand & inuincible ierapportemes væux,&les fruicts,
comme l'on dit d'une ſeconde annee:mais mieux ſaiſonnez , & plus meur's
queiamais: Et vous dedie toutce quei'ay(çeu faire pourvoſtreferuice, &
pour lebien public devos ſujets: aſſeuréque la Royne, & le plusgrand
Roy de l’vniuers fauoriſeront leur humble ſuject & ſeruiteur enuieilly au
feruice de ceſte treſ-chreſtienne maiſon de France : & honoreront celiure
auec le frontiſpice heureux & admirable du Nom de HENRY , protecteur
des Muſes, & des gens lettrez , enfantde Mars , le miroir de toute vertu ,d
finqu'ilme ſerue de defenſe & fauuegarde pour me targuer , & preualoir
contre les langues des enuicux & descalomniateurs,le venin deſquels i'ay
deſiaſenty,& croy qu'encorel'enuie n'a pris fon affouuiſſement: mais fá
rage faudra que celle, parl'ombragement du nom demon Roy,& par les
rayons de la faueur,& grace pleine de iuſtice.Au reſte ,SIRE,mes liures font
ſans aucun fard de paroles,me ſuffiſaộc que ieparle proprement, & vſe de
mots qui ſoient ſignificatifs , & leſquelsſoient proprespour le profit du
François , auquel cet ouure eſt communiqué & addreſſé, & à vous SIRE,
dedić , commeau Roy & Seigneur ſouuerain , & d'eux & de moy : qui
prieDieu Sire, vous donner à voſtrecontentement,longue proſperité &
felicité eternelle.

Voſtre tres -humble & tres -obeiſane


ſeruiteur & ſuject A PARE.

a ii ‫زن‬

7
SONNET DE L'AV THE VR .

E -Liuremaintenantque je mets enlumiere,


Demon art l'heritier contient tous les ſecrets,

Que iadis bien au long les Arabes en les Grecs

Ont laiſſé par eſcrit a la race derniere.

Plein d'exemples il eſt de diuerfe manieres

Ainſi que nous voyons de mille beaux pourtraicts


Les prez ſebigarrer geſchauffez par les rais

Du Soleil , lors qu'il fait ſa courſeprintaniere. .

Or ſusdonc maintenant, va t'en mon filstref - cher,

Que depuis quarante ans n'ay ceſſé delecher:


Va priant un chacun qu'il leur plaiſe d'enfuiure

Lyſippe,qui reprint Apeles doucement:


Mais arriere enuieux : car eternellement

On verra maugré- vous ce mien ouurage viure.

D. IOANNIS LE CLERC , REGIS A CONSILIIS


ET SVPREMI SENATVS PARISIENSIS

Præſidis , Epigramma.

AD PAR ÆVM .

LORVIT , & famam longos extendit in annos ,


Chirurga & Chiron mirus in arte fuit.
E Hic Argonautas, fortemquc inftruxit Achillem ,
Vulncre cardatos refticuitque Duces .
Hoc potuit Diuus, mundique ætate priore ,
Semine cùm cæli cerra caleret adhuc .
Purus aër , telluſque recens , herbæque potentes ,
Humanum poterant ſponte iuuare genus.
Occubuit Chiron , ſed adhucſi viueret, vnus
Pro numero ægrorum vix ſupereſſe queat.
Gallicus in terras delapſusab æthere Chiron ,
Curat ab innumeris putria membra malis .
Semiſepulta virûm ſubducit corpora lecho ,
Abdita doctrinę dat monumentum fuæ .
Hoc mortalis agit, laſſa tellure, nec herbis
Fæcünda , infe & o fëmine : Maior yter ?

VOTVM PRO PARÆI LIBRIS .

I v E diu , ſed viue tuis , ce poſtera norint


Secula, communi viue, Paræe, bono :
Erbene ſoſpes eas, ſic te fortunet Apollo
Delius , & multa luppiter aucerope.
Sed qu or ſum hæc ? inquis ,mecommoda verba Parze
Deficiunt : poſſum nec tacuiffe tamen .
Miratus tua ſcripta ardenti incenſus amore ;
Ingenijque finul tot monumenta tui.

Vſque adeo tibi ve inuideat Podalirius , & quos


Ob medicas artes ſccla priora ferunt.
Viue diu ,quamuis mortalia facta peribunt,
1 Dođe Paræe , tuum ſtat line morte decus,
1
Æternum tibi nomen enim peperêre labores:
Poftcineres viuet pars quoque magna tui .
Inde futurus eris multò poft fa & a fuperftes,
Vindex nempe cux poſteritatis habes.
Ære perenne magis monumentum , quodque vetuftas,
Neclouis ira nocens vnquam abolere poteft.
Sic natis natorum , & qui naſcentur ab illis
Profueris, cerca ſcilicet atte tua .
Communitu nate bono , ſecliſque fucuris.
Ergo Paræc tibi viuc ,Parxe tuis.

IACOB'vs MARISCAL, domus

Regia fifci procurator.

SONNET:

faire en quarante ans d'eſpace.


Out cela que peut

Le labeur, l'artifice , le dočte ſçauoir :


Tout cela que la main ,l'uſage & le deuoir,

Laraiſon en l'eſprit commandent que l'on face:

Tule peux voir, Lecteur,comprins en peu de place,


En celiure qu'on doit pour diuin receuoir :

Carc’eſt imiter Dieu , queguarir ,& pouvoir


Soulager les mal-heurs denoſtrehumaine race.

Si iadis Apollon,pouraider aux mortels,


Receut en diuers lieux @temples autels,

Noftre France deuroit ( ſila maligne Enuie


Ne luy ſilloit les yeux ) celebrer ton bon -heur :

Poëte gouvoiſin j'aurois ma part en ton honneur,

D'autant que ton Laual eſt presde ma patrie.

P. DERONSARD .

QVATRAIN DV MESME AVTHEVR .

I lit ce liure pour apprendre,


Val io
L'a utre le lit commeenuieux ,

Ileft aiſé de le reprendre,

Mais mal-aiſe de faire mieux.


VsQves icy, Pare ' , ie n'auois rveu en France

Rien que feu , rien queſang,quemeurtres, que morts,

Qu'allarmes, que combats ,qu'aſſauts,qu'effrois, qu'efforts,

, que cruauté,que terreur,que ſouffrance :


Sibien que ieprenois une fermeaſſeurance,

Voyant nos champs pauez detant tant de corps,

Les proyesde la Mort,pour nos ciuils diſcords,

fait de nous de noſtre efperance.


Que c'eſtoit
Depuis voyant ton liure où les mains tu formas

A noftre Medecin , qui n'auoit pointde bras,


X
Alors plus aſſeuré par ceſte Chirurgies
le viens dore/nauant laguerre deſpiter:

Car quand meſme la guerre auroit braué ma vie,


Tonliure me pourroit faire reſſuſciter.

IV . DE CIVERSE V S.

Ntre lestiens tu as le premierlieu


E Et ſita main heureuſe run chacun dit,

Tu dois la gloire en referer à Dieu ,

Qui teslabcurs contamain abenit.

UM
B. DE MAVROM.

On Roj; qui eſt ſurtout en ſçauoir admirable,,


Pour fon Chirurgien premieri'a retenu ,
Pour auoir ( mon PARE ') par tes eſcrits cogneu ,

Partes Ocuures auffi, que tu n'as ton


ſemblable,

PIGRAY
SONNET

N ſçait comme iadis le riche Aſſyrien


..: ST
Metroit ſur les cheminsles malades en cuenë,

A fin que le paſſant, à la douleur cognaë i'rreis :

Seruit de Medecino de Chirurgien : .. ::

Maisores cet Autheur donne unplus ſur moyen


‫دان‬
Voulant eſtre en public fa doctrine entenduë;
ja
Carla methodey eft de guarir contenuë',,

Swiuane des mieux experts les labeurs le fien.

Ainſidoncque le Coq, pour ſa grand vigilance,

Et le Serpent auecpourſa caute prudence,


!
Sont dº £ fculapeau temple appoſezpourfymbole : ini 31.2
• Soit la Cigoigne encor'à ce PAR E 'donnee , 1
.
Qui d rune charité ſainètement ordonnee,
Aux patiens ſubuient de l'un à l'autre Pole.

IN AMBROSII PARÆI PRIMARII REGIS


CHIRVRGI OPUS , 10. AVRATUS

Poëta Regius.

Elix primahominum cælo generaca propago,


V

Quæ nullis,paucis fuitautobnoxia morbis:


M
6

Et paucos habuitmcdict cunc fimplicis arcis


Artifices:paucis fuic & contenta modelis,
Quas vno poterac perdiſcerc quilibcranno,
Necchartis mandare fuic præcepus ncceflc ,
Scd memori ſolini fucrantcommittere menti

A patribus quæ quiſque fuis acceperat: atque


Exſeprogenitis cadem poft traderc natis :
Vemedicina foret gentilis,auiraque cercis
Rex domibus:di&timedicorum filij & indo
Suntolim medici:quorum laus maxima primis
Eft Aſclepiadis, Aſclepius cſt quibus auchor.
Nec diuiſa fuit vctus,ratioque medendi
.
In gemina:quamuis Podalirius acque Machaon,
Hicberbis nomen , fed pugnisdebcac ille:
Eemedicina herbas tradec ,Chirurgia plagas,
Altera ſecretis medicans ars alcera apercis

Vulneribus,morbiſque ſed idem erat author vcrique,


Chiron Cencauros inter iuſtiſſimus ynus:

Cui nomen dedic ipfa manus medicina ſalubris:


Vel quod primafuit, vel quod celeberrima quondam
Donec adhuc homines concenti fimplice vištu ,
Præter quàm in bellis,Medicæ nihil arcis egebant.
Arnunc deterior quàm ferrea cùm viget ætas,
Ecplures gula quàm gladius plureſque libido,
Alea nequicies, & inercia pallida vulcum ,
Quàm labor aus ſenium ,luxusquàm occidar egeſtas:
Multiplices morbi ſunt,multipliciartc leuandit
Inque arces diuiſa duas ars yna mędentum .
Quæque prior fueratChirurgica pofterioríam
Fađa, tamen dignum perſecula feruat honorem ,
Simodò non ſtolidis conſoribus,inque perinis sta
s ſa e
Empiri commiſ ,ſed art vſú qus pol iti s stigli
Chirurgis, quales tulerit cùm Gallia paucos ,
In paucis noſtro numerabilis emineikuo
AMBROSIVS, Chiron nuncRegius ille PABXVS
Quo non alter ab arte paratior eftaeque pluresa post
Ambroſix quiſucco, & odoriferæ Panacea , 3
A noxis variis curauerit arte ſalubri:
Quam didicit puer à teneris ſub fore docentum6037
Septem annis : deinde à libris traduzic in vfüm 1.1.17
Intermille ægros,quoshoſpita publica curanr:16 : 43 :. 1

Mille vbi morborum ſpecies,& corpora mille . j

Contemplans,mox in tantum proceflichonorem


Arcis ,ve in caftris primùm ,cum Regis in aula
HENRICI,regúmque aliorum ponè fequentum 4

Ordine perpetuo Chirurgus Regius vfque 1

Tertij ad Henrici primum peruenerit annüm ,


Egregiam præftans operam vel pace vel armis
ue multa
uoqque
Multa manu medica tractans,fcribens qquo
Ipfe manu ſuper ärre fua : Quiæ cuncta volumen
Nuper in boc congeſtă , ſuiſque osnáta figuris 0 4

Pluſquam quingensis,quibusars expreſſa fecandi,


Artis & inftrumenta , nouis & corporå formis
Prodigioſa , ſuo ſumptu magno atque labore,
Edidit in vulgus pius a &ta ætate colonus:
Qui non contentus præſens prodefle peræuum ,
lam ſenior varias diſponit in ordine plantas ,
Vnde legane varij gratiſſima poma ncpotcs..

A MBROSIO PARÆO CHIRVRGORYM


REGIORVM PRIMICERIO .

Hirurgo primas Reges tribuêrePar Æð


CHir
Vſu natura reliquos quia vincit& arrc.
STEPH. PASCHASIV S.

OR TIBVS auxilio hæcmanuseſt,resMartia,per quam


E Seruata eſt medico fæpe miniſterio .
Mortales eadem ve pafſit iuuet omne per zuum
His quoque Pæonijs eſt operata notis .
Ice alacres in bella viri , nam dextera præſto
EminusAMBROSIA : cominùs A MBROSIA.

‫فر‬
F. Marivs.
Aucheurs
AVTH EVRS RECHERCHE 2 , ET CITEZ

en ce preſent Oeuure.

lelus. Philoxene . Pierre Gellie.

Moyfe. Æcius. Pierre Rhodien .


Sain & Matthicu . Vefalius.
Aſclepiades.
Sainct Luc. Theodoric .
Theophraſte.
Dauid . Albucraſis. AulusGellius.
lob . Auicenne.
Plutarque
Salomon . Gourdon . Tite -Liuc.
Amos . Botallus. Herodote .
Sainct Auguſtin . Amatus Luſitanus. Franciſcus Valeriola.
Eſdras. louianus Pontanus .
De Vigo.
Elaye. Damaſcene. PaulÆg
us ineta.
loſué. Petrus Aponenfis. Rhafis.
Samuel Vitruue. Soranus.
Ezechias. Ælien . Manardus.
Platon . Apollonius. Haliabas.
Empedocles. Iean Leon . Gorræus.

Seneque. Socrates.
Alechamp.
Alexander Benedictus. Philippes Ingarſias. Leonellus Fauentinus.
Pline. Iulius Paulus. Melué.
Ciceron . Philippes de Cómines. Tagaut.
Marianus Sanctus. Macrobe. Gabriel du Preag .
Antonius Muſa. Marc Aurelle. Leuinus Lemnius.
Lanfranc. Boiſtuau .
lean Baptiſte Theodoſ
lean Viuier. Cælius Aurelianus.
George Agricola.
Simon Vallambert. Pierre Franco . Nicolas du Haut- pas
1
Valeſien de Tarente . Sextus Cheronee. Lactance .

1 lacques Greuin. Hippocrates. Homere.


Columbus. Galien . André Theuet.
Syluius . Celfe.
Chryſippus.
Fallopius Ariſtote. Antoine Mizauld .
Nicander.
Pythagoras. Claude Paradin .
Hollier.
Guidon. Ouide.
Rondelet. Fuchſius. Nicolas Godin .
Herophile. Alexãder ab Alexandro Thierry.
TO)

1
Guillelmus Anglicus. Pierre de Ronfard . Symphorianus,

Maſſurius. Louys Lauater, Phocilides.

Ferrand Ponzer, Cardan .. Caton.

Sauonarola . Albert le Scoliaſte. loubert .

loannes Langius. : Bartholomæus Magnus Jean de Lery


Montanus . Munfterus. Muſee.
Martinus Cromerus. Pierre Meſlie .
Orphee,
Franciſcus Picus, Fallopius. Le cenſeur Varron ,

Licofthene. Paracelſe.
Oppian .
Matthiole . Heliodore.
Cælius Rhodiginus.
Garfias ab Horto . Serenus .
Hector Boetius .
Petrus Crinitus . Conciliator. Sexe Cheronenſe .

Andreas à Cruce,
Olaus Magnus. Fulgoſe.
Liebaut . Egnatius. Adrianus.

Horace . Polydore Virgile. Caſſianus.

Fernel. Arnaldus de Villa noua . Martin d'Arles.

Lean Marconuille. Diophanes Pierre de la Palude.

Auega. Bodin.
lacques Ruel .

Gefoerus. Melchior Guillandin . luſtin .


Conſtantin . Valefius de Tarenta:
Leon l'Africain .
Philippe Foreſtus. Simeó de Prouáchieres. Heſiode.
Antonius Beniuenius . Iſaac. Iacobus Ruffus.

Platarius. Ariſtomachus Philoſos


Baptiſte Leon.
Maſſa.
Volaterranus. phe,

Fin des Autheurs.

S
O
R
B
mag
0

1
1
0 I
0 I

31
O
P
O
D

A V LECTEVR.
'HOMME n'eſtant point nay pour ſoy ſeulement,ny pourſon ſeul L'homme
proffit , Nature luy a donné vn inſtinct & inclination naturelle à nay
n'eſtpour
point
aimer ſon ſemblable , & en l'aimanc caſcher de le fecourir en ſes af loy.
faires:tellement que de ceſte mucuelle affectio eſt venuë ceſte loy ,
non eſcrite ,mais grauce en nos cæurs . Sois tel enuers audruy , quel
tu voudrois qu'on fuſten ton endroic. De forte, que ſi quelqu'vn Loy de Na
n’eſt eſpoint deceſtecourtoiſie,ileſt pluſtuſtà nombrer entre les beltes qu'entre les cure.
hommes vfans de raiso Entãt que ceſte ſocieté qui nous fepare des irraiſonnables,
nepeuceſtre practiquee que par le ſecours mutuel des hões ,leſquels viuans pour
1 eux,& fanseſgard des autres,nemeritent( come diet cſt) le tiltre de raiſon ny le nõ
d'homes,dela douccurnaturelle deſquels a prins fource le nõd'humanité &cour . Originedu
toiſie. C'eſt pourquoyie ſuis iniré & recogncu par deſſus ceux de ma vacacion , & manité.
reſpecté par ceux inelme qui ne me cognoiſſent ( car il m'eſt loiſible de parler ainſi,
eſtá en l'aage où ie ſuis)veu que touſioursi’ay ev celte charité graueceninoname,
que la comodité de mon frere & mon prochain m'a eſté aggreable ,& qu'en toutes
mes actiós ie meſuisefforcé de ſeruirau public, & teſmoigner à chacun quelie ſuis: Charité de
ce que ie ſçay,come ie l'entends,d'où ie l’ay puiſé, & enquelle ſorte ie lepractique. l'Autheur
.
Similcude
Le laboureur abeau parler des faiſons,diſcourir de la façon de cultiuer la terre,de priſe du la
duire quelles ſemences ſont propres en chacun terroir: car tout cela n'eſt rien s'il ne bourcus.
met lamain auxoutils,s'iln'accouple ſes bæufs, & ne les lie àla charruë.Auſli n'eſt
ce grande choſe ( bien que ce ſoit quelque cas) de fucilleter des liures ,de gazoüil.
ler & caqueter en vnc chaire de la Chirurgie,deſes perfections, & comme c'eſt le
premier inſtrument du medecin,le premier cogneu ,& leplus ancien, & le plus an
ciennement vſité & practiqué, la premiere cogneuë, la plus ancienne , & plus an
ciennement vſitee, & ſi la main (ſuyuant la ſignification du vocable ) ne beſongne,
&s'il n'eſt mis en vlage par bõne raiſon. Voila l'occaſion qui m'a fai&t forcir en cam- Pourquoy
pagnepour rendre compte de ma ferme affe& ion,& donnerraiſoindece que i'ay ap- al'Authe ur
eſcrit celi
prins par l'eſpace de quarante cinq ansou plus ,qu'il y a que ie traide practique la ure,
: Chirurgie,các loüec iadis,& laquelle les Princes& les Roys ne deſdaignerentd'ap. anNõbre des
s par ler
prendre pourl'vtilité,& pour la veoir plusque neceſſ aire pour noſt re vie . Dôc que s quels l'Au
de toutce que i'ay veu & cogneu par l'eſpacedudiêt temps,i'ay fai& vneentiere re- até
theurla atrai
Chi
colle& ió,n'ayant rien cſpargné pour en tirer la moüelle ,& pour eſclaircir ceux qui rurgie
viendront apres nous, des choſes,non peut eſtre cogneuës par cy-dcuant:ou lielles Nellité de
l'ont eſté, non ſi bien eſclarcies qu'il eſtoit requis. Carles arts ne ſont encore ſi ac . Ja Chirur
complis , qu'on n'y puiſſefaire addition :ils ſe parfont & poliſſent par ſucceſſion de biens
Rien n'eſt ai
temps ilss'eſclarciſent par certaines definitions,diuiſions demonſtracions,prece- parfaict
pres & reglesvniuerſelles. C'eſt laſcheté trop reprochable des'arreſter à l'inuentió qu'on n'y
des premiers en lesimitans ſeulement , à la façon des pareſſeux, ſans rien adiouſter foufter.
& accroiſtre à l'heritage qu'ils nous ont laiffe,non pour le laiſſer deuenir en friche, deReſtentplus
choſes à
mais pour le culciuer & einbellir,leur demeurane ,comıne à peres & autheurs l’hon cherches
neurdela premiere inuention : mais à nous quelque petite portion de gloire , pour aqu'il n'y ca
de trou
l'enrichirleinent & illuſtration,reſtantà la verité plus de choſes à chercher qu'il ny uces.
chade trouuces. Parquoy neſoyons ſi ſimples de nous repoſer & endormir ſurić
é ij
1
Au Leeteur.
labeur des anciens,comme s'ils auoienttout fçe , ou tout di&, ſansrien laiſſer à ex
cogiter & dire à ceux qui viendront apres eux Nous avons appris du bon pere Gui..
don ,que nous ſominescomme l'enfanc, qui eſt ſur le col duGeant:c'eſt à dire que
.

par leurs eſcrits nous voyons ce qu'ils ont veu , & pouvons encore veoir & entendre
dauantage. Autrement il faudroit que Nature euft faid ſeulement le deuoir de
vraye mere enuers ſes premiers enfans, & enuers nous comme puiſ-nez ſe fuſt mon
ſtree maraſtre,nouslaiſſans denuez decouceſprit,& ſteriles en inuention, ce qu'on
ne luy peut improperer ſans luy fuire grand corr, & fans ſe rendre coulpables de cri
me de parricide,accuſant iniufteinenevncſi juſte mere. Il eſt bien plus raiſonnable,
quechacun de nous s'efforce à cinployer les graces & dons d'eſprit receusd'elle au
profit du public.Pour à quoy parueniri'aysõdé lescæurs& ſecrets depluſieursEin
piriques,deſquels ie confell auoir appris,non ſans grands frais,des choſes forc ſin
gulieres,& deſquelles ayant vſé auecraiſon,i'ay veu reüſlirdes ceuures admirables.
ice Or ſuiuantmondeſſein ,decout ce que i'ay oncques peu apprendre de rare & deſin
Au- gulier , i'en fais en ce liure,liberale ,voire prodigue largeſle , ne me ſouciant de ma
deſpenſe,du labeur,ny du ſoing que i'ay eu à le rechercher, pourueu que ie ſerue au
public ; & face choſe aggreableàmon Roy , plaiſante aux Princes , & profitable à
toute la nation Françoiſe : & ce,à l'exemple de pluſicurs tant Medecins, que Chi
rurgiens qui ſous vn pareildeſſein one mis lamain à la plume, ſoit pour fuppleerau
defaut des anciens, ſoit pour polir ce qu'ils ſembloient auoir touché tropſimple
ment, & fans deuë intelligence. Car pour ne mentir point,bien que les anciens ayệc
elté excellenes hommes,en ce qu'ils ont clcric,fieſt- ce que n'ayās tout veu,ny trait
ciens té, ſi d'autres apres cuxn'cuſſent continué d'eſcrire,nous ſerions à longer ſur la plus
coir. parc des occurrences,comme ſi de noſtre temps nous faiſions la nouueauté des ma
ladies ſuruenantes, & dcdans le corps , & dehors. De meſme ceux qui viendroient
apres nous,auroientgrande raiſon denous blaſmer,ou d'ignorance , ou depareſſe ,
ou d'enuie, ou de tous les trois enſemble,veu que de iourà autre, comme la corru
ption des hommes va en croiſſant,les maladies auſſiſediuerfifient & renonuellent,
urs
lics
de ſorte que les Medecins , qui ne ſçauroient que ce que les anciens ont clcrit, de
uuer mcurcroient aupres des patiens,ſans leurdonnerautre renede que de patience.Es
no . Dicuſçait, combien de maladies ſe ſont deſcouuertes de noſtre temps,l'ignorance
emps. deſquelles, & de leur cauſe, & alteration de l'interieur a cauſé la mort d'yn nombre
ciens
infiny de pauures miſerables langoureux.
fer Ce que ie veux dire cſt,que bienque les anciens nous ſeruće d'eſchauguecces,pour
o'cl-veoir deloing,& que par leurmoyen le fondement de l'art nous aic eltéeſlargy,&
guet- comme laiſſé en heritage,lieſt-ce que noſtre bon naturel ,pouſſé d'vne viuacité d'e
ſpric.a parfaict & polyce quiauoit ie ne ſçay quoy de rudeſſe , & cccy non fans gráde
que cómodité,eu eſgard à la diverſicé des céps,faiſons,téperatures des corps,& des ma
- porte ladics: Sibié qu'il ſemble , que chaſque ficcle porte sõ renouuellemétdemalheurs,
enou
ment yffans ſur nous,cóme de la boërte de Pandore.Par ain li l'art ſe parfaict en l'inuenció
al des remedes,am lopriez aux qualitez des corps,& ſelő les differences des maladies,
s.
& letout aueyrugemét qu'il a pleu àDieu nous departir, & lequel ne nous eſt pas
He dõné pour lelailler aneantir,& ſeulemēts’arreſter ſur les premiers traits del'art que
ini- no'ont dreſſcz & baſtis nos anceſtres. Eſtát choſe toute aſſeuree,quele iugemét du
opera
bie s. cēps deſcouure en fin les occulces fauces, & le defaut, & qui pour eſtre pere de veri
mps té; & iuge ſanspaſſion ,a touſiours accouſtume de donner iuſte ſentence de la vie
ouure ou de lamortdes eſcritures:deſquelles ſien ce mien cuurei’ay pris quelque choſe
( comme il eſt impoſſible qu'en ſi grand nombre de raiſons & experiences,ie ne me
emps
de fois aidé infiniment du labeur des anciens)ſieſt-ce que ie ne pretend leur defrober,
ny reſſembler lesPlagiaires,leſquelsfaisās parade du ſçauoir d'autruy,le deſguiſans
Heftie par eſchange de paroles, ſe l'attribuent comme propre. Etau reſte , àfin que quel
' Au . ques trop ſeueres cenſeurs ne penſent,que ic foisentré en leurs cabinets,& qucie
me fois enrichy de leur doctrine, & auſſi à fin qu'ils n'ayent occaſion de ſe plaindre
demon entrepriſe , commed'homme qui ait inoiſſonné aux champsdes autres ,&
vſer de larcins ſans les recognoiſtre:ic diray hardiment,que ie ne veux frauder les
anciens de leur gloire , ny les accuſor d'auoir peu touchécequi concerne la perfe
&ion de la Chirurgic.
:
-
1
Au Lecteur.
Neantmoins,ne veux-ieme faire ce core, que de rauirà ma diligence, ce qui luy
eft deu,pourl'accribuer à autre, à qui ie n'en ſuis redeuable le dy doc, que tout cec
Quure eſtàmoy& n'en puis eſtre fraudé,conmc accentant nouuclleté,puiſquei'ay
baltien mon propre fond,& que l'edifice & les materiaux in'appartiennent. Ecce
que i'ay d'ailleurs, font ſeulement quelques acceſſoires,que pour ſuiure lafaçon
cómune de traicter de toutes choſes methodiquement , i'ay prins cóie reigles ge
nerales des eſcrits des anciens. Ec ne faut qu'on ſe picque fi quelquefois ie ſemble
pafferlesbornes de ma vacacion ,ceque toutesfois ienefais; ny ne prerend faire, ſi
cen’eſt en la liaiſon, & accointance qui eſt entre les ſciences; comme lors que par
lanc des fiéures, quelqu'vn penſera qucie córrefais le Medecin ,là où ceſte cognoiſ.
ſance n'eſt poinchorsdu ſçauoir & pratique du Chirurgien , eſtane impoſſible que
l'exterieur du corps ſoit alteré par bleſſeure , que le dedans ne ſe reſſente de telle Lacognoiſ.
pallion,commel'vne des parties du corps compatillant auec l'autre,à cauſe de leur doitfićures ne
eſtre du
vnion naturelle .
tour ;
Ecpar ainſieſt-il beſoin de diſcourir des fiéures, & en autoir au vrayla cognoiſſan- lu Chirur
ce,pour remedier au dehors,mais d'en cotreprendre la curation,i'en laiſſela charge gien.
aux Medecins , & me contente de ce qui m'eſt loiſible par l'art,duquelie fais pro
fellion, & pour l'accompliſſement duquel i'ay faict pluſieurs belles recherches, &
proficables recueils , qui ſeruiront à rafreſchir la ineinoire de ceux qui n'ont loiſir
de fucilleter cane de liures. Attendu que ie ne ſçache æuure parlātdela Chirurgie,
duquel la moëlle ne ſoit compriſe en cesmiens eſcrits, non pour ſimplemétende Quelsmoy
duire,ains cômeen ayant faict l'experience,& pratiqué dema mnain propre,hors mis l'Aucheur
ensacu
l'inciſion de la pierreenla veſſic, & l'amputació des teſticules;s'ils n'eſtoiét gangre pour faire
nez,&du coucſphacelez. Et à fin qu'on voye quelsmoyensi’ay cu de faire de telles lescipe
& figrádes experiences,fautſçauoir,que par l'eſpace de trois ansi'ay reſidé en l'Ho ricoces,
1
ſtel-Dieu deParis,où i'ay eu le moyen de veoir & cognoiſtre (eu eſgard à la grande
diuerlicé des inalades y giſans ordinairement)cour ce qui peut eſtre d'alteration, &
maladie au corps humain, & enſemble y apprendre ſurvne infinité de corps morts,
courcequi ſe peut dire & conſiderer ſur l'Anatomie,ainſi queſouuenti'en ay faict l'Autheur a
preuue cres-ſuffiſante, & celapubliquementà Paris aux eſcholes de Medecine. ſeruy quatre
Rois de
C'eſt beaucoupce que deſſus, pour paruenir à la cognoiſſance des grands ſecrets France.
de la Chirurgie. Maismon bon heur m'a faict veoir encore plus outre : car eſtant
appellé au ſeruice des Roys de noſtre France (quatre deſquels i'ay ſeruy ) il n'y a eu
temps,nymoyens que ie n'aye employé à ce que ic peuilleauoir la grace des Mede.
ciens,& Chirurgiens les plus ſçauants & mieux experimentez,ayancceſte conlide
ration,que bien que le ſçauoirſoic grande choſe , li eſt- ce que l'ainegiſt en l'expe Experien
tience, deſquelsi'ayapprins pluſieurs ſecrecs , qui ne ſont auſſi cenus cachez en ce ce,mairtreta
liure. Ce n'eſtoit aſſez pour raſfaſier mon defir curieux d'apprendre tout cequi ſe ſes.
fedes cho
peur ſçauoitpour la vacation à laquelleie ſuis appellé , ſi encorc ie n'cuſſe veu les
guerres, où l'on traicte les bleſſez fans fard,& ſans les mignarder à la façon des vil- L'Autheur
les.Caricme ſuis trouué en campagne,aux bacailles , eſcarmouches, alfauts, & fie- aſujuylong
ges de villes & fortereſſes, commei'ayeſté auſſi enclos és villeç auec les aſſiegez, guerres.
ayant charge de traitter les bleſſez.
Et Dicu içait,combien leiugement d'un hommeſe parfait en ceſt exercice,où le Bonne re
gain (ſtanc eſloigné,le ſeulhonneur vous eſt propoſé, & l’ainitié de tanide braves nõmeed re
foldars,auſquels on ſauuela vie,ainſi qu'apres Dieu,ie me peux vanter d'auoir faict putation de
l'Autheur.
àvn nombre infiny.Eren ſomme i'ay apprisce dcquoy ic traitre tant és licux ſuf
dits,quedepuis en ceſte tres grande & fameuſeville de Paris,où ( Dieu graces) i'ay moyés
Quels
1
couſioursveſcuen tres-bonne reputation entre tous , & n'ay tenu le dernier raig nul'Autheur
a te
entre ceuxdemoneftat :veu qu'ilne s'eſtfaictcure,tant grande & difficile fuit-elle, pour doner
où &mamain,& mon conſeil n'ayét eſté requis, ainſi que ie le fais veoir par ce mié foy àſeshi
@ uure,diſcourant de pluſieurs choſes ſingulieres aduenuës en mes pratique:és hi. ftoires.
ſtoires deſquelles,pour leur doner plus de foy,ie nomme les lieux ,lespatiens, & les A qui l'Au.
aliſtans,à fin que lesieunes Chirurgiens s'encouragent de faire comme moy ;ou cheurad .
mieux s'ils peuuét,& d'y gaigner le los que i'ay acquis parmadiligence. En laquel- dieléponti
le,s'ils voient( car c'eſt à eux,non aux doctes que i'adreſſe ceseſcrits ) queie man- ure
Vnreul hó
queen quelquc endroict ( comme il eſt impoſſible qu'un ſeul homme ſçache, ou ne ne peut
puiſſe cout faire,ils me ferontplaiſir de pluſtoſt me remonttrer ma faute gracicuſa toutfaire.
ē 11 )
Au Lecteur.
Facilité de
pas vſes de calomnie,veu que ie ne ſuis homme ſientier en mes opi .
l'Autheur. ment,quenon
Mauuaife nions, que ic nc recognoiſſe facilementmafauce , quand elle me ſera monſtree. le

volőté des ſçay bien toutesfois,que les Chirurgiens,qui me deuoient preſter la main , pour me
Chirurgies. Couleuer le menton , de peur que iç n’allaſle au fond de l'eau, m’onc voulu plonger
theur.
la teſte pour me faire noyer, m'ont voulu rendre odieux au Magiſtrat ciuil, à l'Ec
Conftance
del'au cleſiaſtique, & au populaire;n'ont laiſſe pierre à remuer , pour me faire chopper s'ils
cheur. pouuoient:mais ayant le cæur bon , & ne ſongeant à danger quelconque,moyennāt
que ie puiſſe laiſſer à la poſterité quelque teſmoignage de ma vie , i'ay ſurmontépar
Les raiſons diligence coure difficulté. Car la bonté de ma cauſe m'aſſeuroit tanc, & l'iniquité de
des Chirur leur fait me donnoit relle défiance de leur party, que le cæur me eroiſſoit de iouren
Autheur iour pour aduācer mon dellein. Le deſir de faire ſeruice à mon pays , & faire plaiſir à
la poſterité m’eſguillonnoic,mais l'enuic qu'ils auoientdu ſoulagemét de ceux qui
doreſnauant le voudroient meſler de la Chirurgie , les eſmouuoit à me donner em
Refutation peſchement:Ils diſoient que i'auois creuć les yeux aux Corneilles,que i'auois oſté le
des raiſons voile de deuant les yeux de ceux qui voudroient par cy- apres practiquer la Chirur
ſuſdictes.
gie , que ie leur auois mis l'inſtrument en main pour ſortir aiſément, & auec hon

Belle fimi. neur de toute affaire qui appartient au fait de la Chirurgie .S'ils diſent vray , ils con
litude. feſſent l'honneur quim'eſt deu . S'ils en fonc faſchez , ils monftrent l’enuie qui leur
ronge le cour ,come la roüille le fer ,& le ver le bois . Penſent ils que les bornes de
Bonnevo bonnerenõmce , ſoient encloſes en ſi peu d'eſprit, qu'il ne leur reſte plusrien pour
lonté de
ſe faire paroiſtre en la practique de la Chirurgie ?Deina parc , i’ay defparty liberale
l'Autheur:
mencà toutes perſonnes les biens que Dieu m'a conferez, & ſi pour cela n'en ay pas
moins,ainſi que la lumiere de la chandelle ne diminuë en rié encores que pluſieurs
y viennent allòmer leurs flambeaux. Mais un caur abie &t qui eſt empriſonné & en
ſerré en quelque eſtroicte cahuette , ne s'o ſe deſcouurir,de peur( par maniere de di
mited
re ) d'eſtre frappé du vent.le voudrois auoir ſi bien faict , qu'il n'y euſt perfonne qui
nedeyint parmes eſcrits beaucoup plus habile que moy , ie ne penlerois pas pour
Affinité & cela mourir de faim par faușe d'eſtre employé . Au moins ceux qui auroient appris
liaiſon dela de mes liures , confeſſeroient auoir eu l'addreſſe de moy . I'en rends l'honneur à
Medecine, Dieu ,& en prends la peinepour moy:.

surgic en Les Medecins diſoient que i'auois paſſé les bornes & limites de la Chirurgie , &
ſemble.
Chirurgie principalement en traictant des fiéures.Orieleur demanderoisvolontiers qui a fait
premiere le parcage de la Medecine & de la Chirurgie , & où aucun en ſeroit fait , qui ſont
partie de la ceux qui ſe ſont contentez de leur part , ſans quelque entrepriſe ſur l'autre : Car
Pourquoy Hippocrates , Galien , Æcius,P. Æg.Auicenne,bref tous les Medecins,cant Grecs ,
l'Aucheur
eſcrit en á Latins, qu'Arrabes,n'ont iamais traicté de l'vn , qu'ils n'ayent traicté de l autre,pour
François. la grande affinité & liaiſon qu'il y a entre les deux : & ſeroit bien difficile en faire au
Excellen- crement.Chirurgie a eſté eſtimecla premiere partie de la Medecine , & l'vne& l'au
ce de la Metre a eſté traictee par meſmes Autheurs n'ayans autres preceptes que la Medecine ,
decinc .
Ignorance ny autres rcigles pour eftre enſeignez ſeparément. Or diſent-ils , que ie ne deuois
ennemie de eſcrire en François , & que par cemoyen la Medecine en ſeroit cenuë à meſpris : ce
vertu &
ſcience . qui me ſemble le contraire, car ce que i'en ay faia eſt pluſtoſt pour la magnifier &
La Mede . honorer. Mais qui eſt celuy qui pourroitaneantir & denigrer vne doctrine tantinfi
traduide.co gne & precieuſe, ayant eſté reuelce & enſeignec de Dieu , & traictee des plus fça
diuerſes lan . uans perſonnages qui oncques furent viuans ſoubs le ciel , & faut entendre que les
gues feló la ſciences,cant plus elles ſont cogneuës de pluſieurs , tant plus elles ſont louces : veu
Dacions . que fçience & vercu n'ont plus grand ennemy qu'ignorance . Dauantage, ie deman
Auicenne
Prince de la derois volontiers ſi la Philoſophie d'Ariſtoce, la Medecine du diuin Hippocrates,
Medecine & de Galič, ont eſté obſcurcies & amoindries, pourauoir eſté tradui &tes de Grecen
Arabique. Latin ,ouen lágage Arrabic ,ainſi que firent Auerrhoës:Æphadius,& autresArabes
Excellence foigneux de leur Republique ; Auicenne Prince de la Medecine Arabique,n'a -ilpas
de la langue
Françoiſe. traduit pluſieurs liures de Galien en sõjargó , au inoyen dequoy la Mcdecine a eſté
Les fautes decorec en ſon pais d'Arabie ? Poạrquoy femblablemér ne meſéra il permisd'ofcri
que peu .
ucnt faire re en ma langue Françoiſe,laquelle eſt autantnoble que nulle autre eltrāgere. Da .
les Chirur- uancage, il eſt cres - neceſſaire que les Chirurgiens ayent cognoiſſance des fiéures: &
kaičs par de s'ils manquenten cela , ils feront vne infinité
de fautes ay danger de la vie des hom
gnoillince mes . Exemple, comme bailler à manger & boire au commencement de l'accés &
des fiduses paroxyſme des fićures,en ce faiſant d'vne fieure ephemere , en feront vne putride .
Au Lecteur.
Car nature en lieu de cuire & digererles viandes, elle fera yne pourriture , parce
que la digeſtion ſe faiæ parlebenefice de la chaleur naturelle , & le inalade eſtant
aucommencement de l'accés, nature ne peut çuire les aliments , & contrarier à la
féure : ainſi queſouventpar ce moyen on reuoque Nature de ſon mouuement à
l'expulĝon des humeurs qui lamoleſtentpourl'empeſcher àla concoction des
viandes.Autreaccident. Sile Chirurgienfait ynę ſaignce pendant quelemalade
aura friſſon de fiéure,ſouventſera caute de grand mal. A raiſon que la chalcur na
turelle, & les eſpritsſoncretirezau centre du corps , alors que les parties externes
ſont vuidesdeſang & lion en tiroità l'heure , on dobiliceroic grandementlesver
tus, voire ſouucncon cauſeroic la iorcdes inalades. Autre accident. Sile Chirur
giendeſcouuroit lemaladepour le penſerde quelque playe,ou autre indiſpoſiciou
{qu'il euftau corps à l'heure du friſſon de l'accez,ilſeroitcauſe de l'augmentation
dela fićure,ou autre plus grand accident,pourle froid qui pourroit ſaidir le malade.
Plus đi le Chirurgien necognoiſt ſon bleſſé auoir la fiéure,ilne luy oſtera le vin ny
les viandes,quipourroient augmenter & enfrecenir la ficure.Ec pour ces raiſons, 8c
pluſieurs autres ( queic laiſſe de peur d'ennuyer le liſeur.) Ceux qui ont eſcric de
uane inoy de la Chirurgie :commeGuidon de Vigo , Gourdon,& autres , n'oncia
mais voulu laiſſer en arriere d'eſcrire des fiéures, pour rendre leurs cuures plus
parfaiđes.Ce que i'ay bien voulu faire à leur imitation,à cauſe qu'en coutes les ma
ladies ( ou la plus part) où la main du Chirurgien eſt neceſſaire,comme playes,fra
&tures,luxations,apoſtemes,chcuties,picqucures & morſures,& autres,quafi ordi
nairement les fiéures interuiennent. Voila pourquoy i'auoy eſcrit des fiéures:& en
enſuiuant mes deuanciers au plus pres qu'ilm'a eſté poſſible.
Ec pour rcuenirà mon æuure, i'cn ay faictela diviſion parcy dcuant, mais crai
gnant que paricellelecorpsdeſpecé en parties,ne vint à quelqueancanciſſement,
eltanç ainſidecoupé,eſchantillonné,ie l'ay (auec bonçonſeil) reduit en vn volume, Pourquoyá
autant que le cout ainſi affemblé pourra mieux reſiſter aux iniures du temps,que s'il mistoutes
alloir ça & làſeparé & mis en pieces.Mais plus ay-je elté incité à ce faire, pource ſesauures
quc i'ay veu ( ou me ſuis faict à croire ) queles plus doces & moins paſſionnez les enva volu
ontcy-deuant leuz auec quelque contencement. Au reſte eſtant François , & ſça . Chaque
chant bien que peu de liures de la Chirurgic , compoſez parles Grecs, Latins & langueeft
Arabes,ſontà preſent traduicts en noſtre langue,quifait que d'une infinité de Chimieter Les
rurgiens,la plus partn’apprend ceſte ſcience qu'on ſon vulgaire,l’oyant par lesDo- arts.
& eurs Medecins traicter & interpreter en François,dontnous voyons pour vnChi
rurgien Latin , qu'il s'en trouue mille François & plus,bien exerçans la Chirurgie.
le n'a voulu auli l'eſcrire en auçre langage, que le vulgaire d'un autre nation ,ne
voulant eſtre de ces curieux,&par trop ſuperſtitieux,qui yeulét cabaliſer les arts,&
lesſerrer ſous les loix de quelque langue particuliere ,en tant que i'ay appris , que
lesyciences ſon compoſees dechoſes,nonde paroles ,& que les ſciences ſont de
l'eſſence,les paroles,pour exprimer & ſignifier. Et ainſi chaque langue eſt propre à
trai&er les arcs , & à les donner à entendre.
rç. Ce
Ce que
que Celle nousa bien monitré, Celleen ron
quand il adja ,que les maladies ne ſont point gucrics par paroles,ains par les teme- premier
des quedeúëmentony applique.
L'adre parmoy obſerue encet cuure, eſt queie le diuiſo en vingt-ſix liures. & obferueca
L'ordre
chacun d'iceux eſt partie en chapitres,cnſuivant lamethode communede ceux qui cer Quure .
1
mettent pareſcritles conceptions de leurs ames. Car en premierlieu , ſelon le pre
cepte duPhiloſophe, ic mets la definition de chacune choſetraictee , puis les diffe
rences en icelle conſiderces, les ſignes cauſesprognoſtiques:& apres cela curege
nerale, puis la particuliere,auec lesinſtrumensproprespour la curation de quelque
maladic que ce ſoit : partie deſquels eſt de mon inuention : en quoy ( Dicu mercy)
j'ay eſtéaſſezheureux, & le reſte ie l’ay retiré de l'antiquité , ainſi que i'en ay vſő és
figures de l'Anatomie:la plus part deſquelles i'ay empruntez d'André Veſal, hom
merare,& le premierde ſon liecle en ceſte partie deMedecine: leſquelles pourla
commodité du Lecteur, i’ay fair reduire en petites planches,quoy qu'aucc frais ex
cellifs, quci’eſtimeray bien employez, pourueu que cela ſoit aggreable aux gens de
bicn,& que ceux dema nation en puiſſent tirer quelque profit.Aufli le ſeul eſpoir
de ce ſuccez m'a fait ſurinonter toutes les difficulcez qui le pourroient offrir en cer
cndroit. Veu mcſmcs, que ie voyois , qu'entre toutes choſes compriſes en voc &
& illj
Au Lecteur.

l'autre partie de Medecine, l'Anatomic eſt celle qui eſt plus neceſſaire,tant pour les
Medecins, que pour les Chirurgiens : eſtant obligé chacun ouurier (ſelon le diet du
Neceflité de bon vieillard Guidon ) de cognoiſtre le fubje & ſur lequel il s'exerce . Car faillanc
l'anatonu.c . cncecendroit, outre ce qu'il commettra vne infinité de fauces , & s'acquerra vn

La cognoil- perpetuel diffame,encore liazardera - il folement la vie de ceux qui ſe feront fiez ,&
lünce du
mis entre les mains. Et m’eſtonne, que les hommes ſont fi fols , que de rechercher
lubjet ſur les
quel on ce qui n'eſt ſubjet à leur cognoiſſance, quepar coniectures, & qu'ils s'arreſtent au
s'exerce eit nombre certain des eſtoilles, qui ſelon l’Eſcriture ſaincte ſont innombrables : veu
tres . necel
laire lens ſçauoir le cours des cieux, les mouuemens du Soleil & de la Lune,les dimen
fions de la terre , & cependant ne ſe ſoucient de ſe cognoiſtre cux meſmes, & de
Le nombre ſçauoir l'excellente & merueilleuſe compoſition de leurs corps,compoſé de parties
des innu
ett eftoslles
me infinies par le ſouuerain facteur & createur de coutes choſes : chacune deſquelles a
sable . ſubſtance propre , ſon office , ſa faculté & vtilicé neceſſaire, tant pour ſon viure &
CO
mouuement, que pour ſentir & entendre. En quoy ſont compriſes les perfections
Negligen
ce de le co de ce Tour , qui repreſente le grand corps delvnion, auec ſes quatre qualicez con
-
gnoiſtre ſiderees aufli bien au corps de l'homme, qui pour ce regard cít appellé Microcoſ
loy -meſme me, c'eſt à dire petit monde. Et tout cecy eſt en ſigrand nombre,auec telle varieté
L'homme & liaiſon des parties , que de toutes les cuures de Dieu,le corps de l'homme eſt le
appellé Mi plus parfaict, comprenant en ſoy l'harmonie accomplie des choſes contraires , lef
crocoſme,& quelles accommodees ſelon leur office, fonc leur accord le plus beau , & excellent
pourquoy qu’on ſçauroic deſirer. Et pour ce ( comme dict eſt) l'hommeporte le cilere de petit
monde, n'ayant defaurde rapport en ſoy, & aux choſes celeſtes , & à ce qui eſt cer
reſtre ou aqueux, ou plus ſubtil ,tenant de l'Etheré . Et qui plus eft à admirer , ayant
celle ameraiſonnable, qui comme l'ame de l'vniuers va s'eſpandant parce petit
137
monde, le regit & guide , & ſe ſerc de ſes parties , comme de ſesinſtrumens & orga.
nes . Tout cecy pourroit eſtre contemplé par celuy qui verroit l'Anatomie ( choſe
dignc d’eſtre cognuë par tout homme de bon eſprit )comme d'autre coſté il y au
L'Anatomic roit dequoy rabaiſſer ſon orgueil ,voyantque l'ame oftee de ce beau chef d'auure,
cft digne
defrc co - ce n'eſt plus qu'vn vaiſſeau plein de corruption , & la plus freſle choſe de la terre .
gneuë de Maisi’entre ſur le diſcours excedant noſtre propos , auquel iercuiens touchant ce
cout hom mien æuure , que i offreau benin & ſtudieux lecteur auec ce petitmot, que jaçoit ,
me de bon
clprit. que pluſieurs tant ancies que modernes , ayent eſcrit de l'Anatomie, fi verras-tu par
Que c'eſt le preſent æuure,que pas vn d'eux n'a gardé telordre que ie fais ,ny ſuiuy la mecho .
qu’ve
lan corps
s amc . de auec celle facilité, & de cecyie feray iuge tous ceux qui ſans ſe paſſionner pren
dront la pacience d'en donner ſentence , auec equicé& droidure. Recoy doc ( amy
Lecteur) ce qui de ſi bon cæur , & auec celle liberalitéie te depart : & pour recõpen
Pourquoy ſc,aye memoire , que ma vie n'a cſté oiſine pourla Republique,cherchanttouſiours
la Medeci- l'auácement desieunes apprécifs en la Chirurgie , auſquels mes eſcrits s'addreſſent.
ne feitable Et ncantınoins, toutes les peines que i'ay priſes par cy dcuant,i’ay occaſion de lòüer
licur. Dieu , de ce qu'il luy a pleu m'appeller à l'operation Medecinale, que vulgairement
on nommeChirurgie, qu'on ne ſçauroic acheter par orny par argent,mais par la ſeu.
le vertu & longue experience.Ec coutesfois eſt ſtable en tout pays : A cauſe que les .
La Medeci . loix de la ſacree Medecine ne ſont ſubjectes à celles des Roys, & autres Seigneurs,
neapris ſon ny à preſcription de temps , comme prenant ſon origine de Dicu ,lequel ie Tupplie .
originc de
Dicu. qu'il luy plaiſe arrouſer ceſte mienne entrepriſe, à fin qu'il en ſoit glorifié eternel
lement. Ainſi ſoit - il.
1
1
1
GVE ES
ALO DES LIVR
CAT

us e
conten en toute ceſte Oeuur .

Neroduction ou voye pour paruenir à la vrage cognoiſſance de la chirur.


pag.i
1 SS
gie .
animaux .
Traicté desom s 84
De l'Anat ie contenant les parties naturelles de generariue .
138
3 Contenant les partiesvirales . 160
Contenant les parties animales contenuësnen la reſte. 1
64 Contenant les muſcles, os de tout le corps , avec deſcriptio de toutes les autres parties des 1
S 179
247
extremirez 288
Des tumeurs contre nature en general.
§7 Des rumeurs contre nature en particulier. 322
Des plages recentes ſanglantes en general. 337
911 ue bu rt es nte s s
on uli er he s s s
à fe.w ,flec , dard , de acci de ns d' el
ic
10 Des plages
Desplag es rece cq ſangla
d'hantes , & autres
en ba
parſttic
321
451
les.
ons ows enes. 484
12 Des combuſti , contuſi , gangr
id e s 508
, fiftules hemorrho .
13 Des vlceres 517
Des bandages. 540
14
iſ Des fractures des os.
17 De ieio
uſat s indiſpoſicions& operations particulieres appartenantes aw Chirurgien.
urns 586
16 De slplux ,
656
ent
la aloſ e
di Arll
aſe tritique lgairem pnpelleea goeuste.cidens qui aduiennent à icelle.
19 DDeelamgr
jó vero e dicte mvauladie veneriean , c d ac 668
726
20 De la petite verolle, rougeolle, og vers des petits enfans, O. delo Lepre.
s es
21 Des venins morſures des chiens enragez , & autres morſure or picqueur de beftes ve
748
816
ne ne uſ es
. encou par accident. 891
23 Des mogens & artifices d'adiowfter ce qui defaur naturellem
22 De la peſte. 910
1004
24 Delageneration de lhomme.
cu lt é rc i de s me di ca me ns ſi mp le s , en ſe mb le de la co mp oſ ic io n do vl ages
26 De la fa & ve
25 Des Monſtres da prodiges.
1083
1146
d'iceux.
Quant awliure des fiebures, il a eſtétranſporte de accommodé auliure des tumeurs contre
27 Des diſtillations. 816
nature ,pour mieux inſtruire le ienne Chirurgien . 1177
er
28 Des Rapports, & du moyen d'embaum les corps mores . 1190
e ol og ie au ec le s vo ya ge s fa ic tspa r l' Au ch eu r. er
Apicte de, toutes ſortes deFiebures ,tant en general qu'en particuli ,auecle sr em edes
30 Vn
29 Le Tra
1229
ſes enfans.
O curations d'iceles , treuué dans les manuſcrits de l' Autheur par
1

F I N.
EXTRAICT DV PRIVILEGE

du Roy .

AR grace & Priuilege du Roy donné au Camp devant la Rochelle le dix .


huictieſme iour de Ianuier 1628. figné par le Royenſon conſeil Renoüard ,
ſeellé du grand ſeawfur ſimple queuë de cirejaune. Il eſt permis à Nicolas
Byon ,marchand Libraire à Paris, d'imprimer ou faire imprimer tant de
fois & en tel volume que bon luy ſemblera , pendant le temps eſpace de
D huict ans , les Ocuures de maiſtre Ambroiſe Paré, viuant Conſeiller

& premier Chirurgien du Roy & iuré à Paris : reuevës , & de nouueau corrigees &
augmentees d'un ample Traité des Fiebures , tant en general qu'en particulier , &
de la Cucation d'icelles, treuué dans les manuſcrits de l'Autheur. Auec defences in
tous Libraires , Imprimeurs, & autres perſonnes de quelque eſtar , qualité & condition qu'ils
ſoient, de ne les imprimer ou faire imprimerſuivant ſelon ceſte preſente correction or aug
mentation, entieres ou ſeparees ,de n'en vendreny diftribuer en aucunefaçon maniere que ce
ſoir, d'autres que de celles qui auront eſté imprimees ou faict imprimer par ledit B von , ou de
ſon conſentement, ny faire railler, pocher , ou contrefaire les figurescontenuës dans les dietes
Oeuures : A peine de mille liures tournois d'amende ,de tousſesdommages & intereſts, Gde
confiſcation de roustes exemplaires qui ſe trouueront auoir eſté faicts au contraire au preise
dice dudit priuilege:commeil est porré plus à plein par l'original d'iceluy. Signé ,

Par le Roy en ſon Conſeil.

RENOVARD .

1
2
1
AVNO
ÆTATIS : 25

Gialis HORVECE
FEET
0
0

Humanain AMBROSII confinet


were'hæcΑμβροσίζ
pictura ειparej
Effigiem ſed Opus
-
P R E F A CE,
DE L'INVENTION ET EXCELLENCE
de la Medecine e Chirurgie.
A

OV S les anciens & modernes tiennent que la Medecine a cu Origine de


S

ſon originedu ciel. Et premieremét ceux quiont le mieux ſen- la Modecisa


U

ty de la creation du Monde,ont eſcrit qu'apres la creation des nes


Elemens ( lors qu'il n'y auoit encores homme vivant) les herbes
& plantes ſortirent par le commandement de Dieu, descauer.
nesdela terre , de diucrſe & preſque incomprehenſible gran
deur, couleur , odcur , fauer & figure: & eniemble doüecs de
propres vertus tant excellentes & diuines, qu'iln'y a inuention
d'ouurage ou art,quelqu'il ſoit, qui à meilleure occaſion ſoit attribuce à Bicu : &
eut elté impoſlible à l'hom.ne de rechercher & cognoiſtre les natures & puiſſances
de telles choſcs, ſi Dieu ne les eult premierement enſeignces. De faict, ce grand
archite&cur & facteur de l'yniuers, li toſt qu'il eut formć Adam , & inſpiré en luy la
B lumiere de vie, luy monſtra & declara generalement les proprierez de tout ce que la
terreprodui & & nourrit : de ſorte que liquelqu'vn penſe telles choſes pouuoircftre
inuencees des hommes , celuy-là à bon droiå melmes par le iugement de Pline )
doit cltro eſtimé ingrat enuers Dicu , & mallentanc de fa puiſſance. Or apres
Adam telle cognoiſſance n'a eſté enfeuelie auec luy , mais a eſté encores reuclee de
Dicuà certainshommes,quionteſté appellez pouradminiſtrer la Medecine,& com
mispouren departir & ordonner à ceux qui en auroient neceſſité.
Ec ceſte opinion a cſté receuë non ſeulement par le commun accord des hommes .
en general, mais auſli prouuée par Moyſe, diſant que le ſouuerain a creé & produict
dela terre les herbes & plantes, deſquelles toute la poſterité d'Adam ſe pourroit
ayder & ſoulager pour guerir les maladies. Ce qui a cſté auſſidepuis confirmépar
Iefus filsde Syrach,tres-lage entre les Hebrieux,lequelen ſon liure eſcritce quis'en
fuit:HonorcleMedecin :carle Tres-hautl'a créé pourla neceſſité: auſſitoute ſanté Chap. 38.
& guariſon procede du Dicu ſouuerain . Noſtre Seigneur a produict de la terre
Сtoutes les choſes medicinales, & ne les doit meſpriſer l'homme ſage. Donne lieu
& fais honneur au Medecin : car il a eſté creé du Seigneur. Les Grecs , quiſem .
blent les premiers auoir fai & ouuercure d'une plus pleine & illuſtre profelſion de la
medecinc, eſcriuent conformément à ce propos, qu'Apollo eſt l'inuenceur d'icelle:
cequin'eſtſans quelque apparence de raiſon. Car ſoic que ſelon leur maniere & Apollo in
Car ſoit
couſtume de parler,parApollo ils entendent le Soleil (planette quide ſachaleur laMedecir
benigne & temperec viuific toutes choſes , inſpirant les facultez aux plantes ,les ne.
nourrit& encrecient , pour produire les effects tels que nous voyons en nos corps:)
ſoitaullique par iceluy ils entendent vn homme , lequel ſuſcité d'un eſpric diuin &
excellenc pardeſſus tous les autres de ſon temps , a le premier enſeigné & pra & iqué
l'vfage des herbes: comme ſemble l'auoir entendu Ouide , le faiſant ainſiparler en
ſes Metamorphoſes :
1

1
Preface

Medecinereſt mon inuention , A

le fuis de tous l'aide & ſubuention,


Subiecte m'eſt des herbes la puiſſance,
Dont giſten moy de ſanté la fiance.
Vrayement touſiours l'origine de la Medecine ſera diuine & celeſte. Or le moyen
Jſemla- par lequel elle a eu credic entre les hommes , eſt preſque tel . Apres Apollo Ælcula
pius. pius ſon fils s'entremic de la medecine , laquelle cftoit encoresrude & ians methode :
celuy-là commença à l'augmenter & reduire en meilleur ordre , au moyen dequoy
il a eſté ſi grand , qu'on l'a cſtimé comme Dieu . En ce meſme temps Aeuriſſoit Chi.
Chiron.
ron Centaure , lequel auoit vne grande cognoiſſance des herbes :& pource Pline
& pluſieurs autresont eu opinion qu'ileſtoit inuenteur de la medecine , pour auoit

veſcu non ſeulement d'un meſmetemps auec Æſculapius, mais auſſi pour auoir eſté
Li. 7 . cb.2
ſon maiſtre en la cognoiſſance des ſimples. Or Æſculapius eut deux enfans, ſçauoir
Podalirius & Machaon , qui luiuans la crace de leur pere, firent profeſlion de la me
Podalirius. decine , & ſur cour de ceſte partie qu'on appelle Chirurgie, de laquelle pour ce ils
Machaon . B
ſont eſtimez inuenteurs . Apres cux la famille d'Aſclepiades l'a grandement aug .
mentee, & laiſſee à ſes ſucceſſeurs , comme choſe hereditaire : car par leur moyen le's
remedes des maladies internes ont eſté inuentez . De ceſterant illuſtre famille Hip .
Hipocta- pocrates fils d'Heraclides , natif de l'Iſle de Coos , comme Prince de tous les Me.
tes .
decins qui furent deuant luy, paracheua ceſte ſcience, la mettant en lumiere pararts
& preceptes cícrits en la langue macervelle , qui eſtoit la Grecque . Six cens ans

Galien . apres lequel vint Galien , qui tres expert en medecine a expliqué tour ce qui eſtoit
obſcur & difficile en Hippocrates. Doncques tel a eſté le commencement, accroil
ſement & perfection de la Medecine, entant qu'elle a peu eſtre miſe eſt auant par l'in
duſtrie des hommes:combien que ſi nous en voulons parler à la verité , l'experience,
comme en toutes choſes ,a cu grande puiſſance en la medecine pour l'aduancement
d'icelle. Car les hommes ayans obſerué telle & telle plante auoir cſté propre à la
guariſon de celle & telle maladie ,de pluſieurs choſes particulieres ils en ont faict vne
generalle , auec des regles , par leſquelles toute la poſterité auroit à ſe gouverner.

Polidore Ainſi lilons nous dansleshiſtoires anciennes , que la medecine n'eſtant encores re- ' C
Virgile. digee en art & precepte , les Babyloniens & Aſſyriens auoient de couſtume de po
ſer leurs malades és portes & entrees de leurs maifons, ou és places & grands che
mins,afin que par les paſſans,qui auroiçnt autrefois eſté tourmentez de pareilles ma.
ladies , ils fuífent aduertis des remedes dont il auroit vlé, pour en receuoir guari
ſon.Strabo liure 8.de la Coſmographie,raconte ceſte couſtume auoir eu lieu ancien
nement en Grece,queles malades te retiraffent en Epidaure , au temple conſacré au
Dieu Æſculapius,où dormans ils etoient aduertisen ſonge par iceluy des remedes
qu'ils auoient à chercher pour recouurer ſanté : laquelle recouuree , ils deſcriuoient
auec le diſcours & hiſtoire enriere de toute leur maladie , les remedes enſeignez par

le Dicu , cn vn tableau qu'ils laiſſoient pendu en quelque autel ou pilier du temple


en recognoiſſance du bien receu d'Æſculapius: deſquels tableaux comme des me
inoires & inſtructions recueillies , on dia Hippocrates s'eſtre ſeruy à compoſer ſes
@uures de l'arc de medecine tant profitables & laborieuſes, comme deſcric Vola
terran .
Les beftes Pareillement les beſtes brutes ont enſeigné aux hommes pluſieurs remedes de D

ont enfes medecine, par leur inſtinâ naturel,conſiderant qu'aucunes ſe guariſſent & cherchét
gné 4ux
bo nmes leurs remedes ſans aucun Medecin , comme nous deſcrirons cy- apres parlant de la

pluſieurs nature des beſtes. Oricelle Medecine eſt digne de recommandation plus que nulle
remcdcs. autre ſcience , veu le ſubiet ſur lequel elle exerce ſes operations , qui eſt le corps hu

main : lequel eit le plus excellent & parfaiĉ que nulautre , & pour lequeltoures cho
ſes de l'vniuers ont eſké creées . Ce quia elmeu Herophile, ancien Philoſophe, con
téplanı l'excellence & vtilité de cet art , de nommer le Medecin la main des Dieux.
Carcommel'homede ſes mains leue vn autrerõbé: ainſi le Medecin & leChirurgien
do &te & ſçauát en ſon art , guarit & chaſſe les maladies du corps humain , le releuant
en ſa premiere ſanté , comme diuinement . Homere le Prince des Poëtes Grecs , ap . 1

Au liure pelle le medecin le paragon des hommes pour l'heureuſe iſſuë de ſes cuures & expe
pnzjelme riences , & ſemblemeriter louanges & graces pluſtoſt diuines qu'humaines. C'eſt
delliade, aufli pourquoy les anciens auoiêc en ſigráde reuerence les Medecins ,lelquels ils eſti
Preface.
A moient& honoroient comme Dicux, ou enfans des Dieux ,tant eſtoient eſpouuen
tez & rauis des effects eſmerueillables que les Medecins & Chirurgiens fonc appa
roultreiournellement, pour la conſeruationdela viedes hommes,par lemoyen delesMede
cins eftimen
leursremedes& quures de la main , qui les font reluire de quelques marques & ra honored
yons deladiuinité. Outre plus ces excellens Poëtes , Orphee,Muſee , Heſiode, & comeDicux
ces grands Philoſophes, Pythagoras , Placon , Ariſtote, Theophraſte ,Chryfippe,
Cacon le Cenſeuſ ,Varron,n'ont rien eu plus cher ,plus exquis, ny en plus grande
recommandation,quede cognoiltre la vertu des medicaments, meſme d'en rediger
quelque choſe par eſcrit. D'auantage cet art ennoblit tellement celuy qui en eſt
doüé,& le faiæ finoble & franc, qu'il commande non ſeulement à toutes perſonnes
de quelque qualité qu'ils ſoient,mais auſſi aux Empereurs ,Roys,Princes, pour lades
Franchiſe
Mede
conſeruationde leur ſanté,& guariſonde leurs maladies. Et ſi le gain rend en quela cins.
queforce les ſciences recomandables,il ſe troquera que ceux qui ont faict profeſſion
de la Medecine,n'en ontemporcé,comme l'on die, honneur ſansprofit. Qui a eſté
l'occaſion pour laquelle ceux qui ont cxercé cet Arc par le paflé , ont eſté en ſingu ,
liererecommádation,ainſi que pouuons cognoiſtre par Pexemple meſme d'Hippo Honnears
B crates allant en Abdere pour traicter Democrite : car lors non leulement les cito . faictsàHip
yens,maisauſſi les femmes, & meſmes iuſques aux pecics enfans, aduercis de fave. pocrates.
nue,luy allerent au deuant,le laluans, & l'appellans conſeruateur& pere de la patrie.
D'avantagele Senat & peuple d'Athenes,pour ce qu'il auoit dechaſſé la peſte de leur
pays,celebrerent en ſon honneurdes ieux & triomphes , & fur couronné d'une cou
ronned'or pelantmileſcus , tellement riche qu'cile eſtoit digne d'un grand Roy:
d'abondancluy erigerent vne ſtacue pour perpecuelle memoire. Eraſiſtratus fils d'v.
nedes filles d'Ariſtote,receur cent talens d'or* duRoy Prolomce , pour auoir guary * Soixante
Antiochus ſon fils, Auſli Antonius Muſa fur decoré & honoré d'vne ſtatue d'or par mil eſcus de
Auguſte Ceſar Empereur pourl'auoir guary de la bleſſure. Quant à Quintus Sier- noftré
tinius, ilauoit d'eſtat de l'Empereur douzemil cinq cents clcus cous les ans. Que noye, lesom
dirons-nous que dutemps denos ayeuls, Petrus Aponenfis , ſurnommé le Conci vallant 45
liateur ,eſtoic entel honneur en l'Italie,qu'ilne ſortoitpoinc hors la ville pour vi-fols ſelon la
fiterquelquegrandperſonnage,àmoins decinquante elcus pariour : & quemel: desupputation,
Bwdi.
c meeſtantquelquefois appelle pourviſiter Honorius, lorsPape de Romc, il rappor
cadeluy quatrecens eſcus pour chacun iour de ſes vacations. Nous ſçauons aſſez
! par nos Annales de France, en quelle authorité & credit a cſté Maiſtre Iacques LacquesCoro
Cortier Medecin ,enuers le Roy. Loys vnzieſme, duquel pour la reputation deſon tier Mede
haut ſçauoir, ilreccuoir de gages bien payez , tous les mois dix mil eſcus, com cin du Roy
menousa laiſſé par eſcrit le SeigneurPhilippes de Comines, en ſon hiſtoire de la Loys X1.7c
vic&geſtes de ce Roy. Et d'abondanc elle aeſté en celle eſtime par le paſſé, que les ceuoir tous
lesmessdox
anciésRoys,partie pour faire plaiſir à la poſterité, partie pour perpetuer leurmemoi. mileſcus de
teenicelle ont impoſé leur nó à certaines plantes par eux trouuces& deſcouuertes. sages.
Delàeſt venu quela Gentiane apris ſon node Gentius Roydes Illyriens, & laLy.
fimachie de Lyſimachus Roy des Macedoniens, & le Scordium a eſté appellé her
beMithridate , de Mithridates Roy de Pont & de Bichynie , l'Achilleia d'Achil
les,lc Centaurium de Chiron le Centaure , l'Artemiſia d'Artemiſia Roynede Ca.
rie, Attale Roy de Pergamc , Salomon Roy des Juifs, Euax Roy des Arabes , luba
D Roy de Mauritanie, ont eſténon ſeulement curieux de cognoiſtre les plantes,mais
la pluſpartd'euxen ontdiligemmēr eſcrit quelques craidez: les autres ont au grand
profit deshommes inventé pluſieurs mixtions medicamenteuſes, compoſces des
plantes. Outrecela,les Roys & Empereurs Romains entretenoient à grands frais
&deſpens en pluſicurs lieux & pays,hommes pour la cognoiſſance des limples mc
dicaments,quieſtoiene de bonté cingulicre pour s'en ſervir eux-meſmes, & en don
nerla notice àla poſterité:laquelle meſme tant vtile curioſité ne s'eſt monſtrec c
fteinte éscours de nos Princes. Telmoin m'en ſera l'herbe, appellee des anciens
Petum ,à preſent Catherinaire , ou Medicee ,ou herbe à la Royne: parce que l'vſage
d'icelle citantincogneu ennoſtre France, nous a cſté deſcouuert, au grand profit berbe Tanon
d'infinis hommes affligez d'vlceres malings, & autres ſolucionsde continuité, par cherinaire.
l'induſtricuſe diligencede la Royne MerodesRoys Catherine de Medicis. Parco
moyen lesherbes, leſquelles cous les ans reviennent , repullulent , & reuerdoient
auccleurs racines,tiges,fucilles,fleurs,ſemences& fruicts,d'vne indicible diuerfité,
‫زن و‬
Preface.

grandeur,couleur, figure,fontſouuenir aux hommes de ceux qui les ont trouuecs , А


ou qui en ont laiſſé à la poſterité quelque clcrit des vertus & proprierez d'icelles.Et
d'auantage louſtiendray mon proposeſtre vray , & pluſieurs grands Roys ſe preſen .
teront pourapprouuer mon dire, leſquelsdeučment informez par les eſcrits des Sa
ges de l'artifice ducorps humain,non imitableà choſe viuante , pour eſtre le domi .
cile de l'ame immortelle , ſeule entre toutes les creatures faicte à l'image de noſtre
Dieu , ſe ſont eſtudiez d'entendreſon architecture admirable par diſſections anato .

Roysquions miques:deſquelles tant s'en faut qu'ilsayentretiré leur æil , qu'eux-meſmes les one
mislamain faictes de leur propre main : fi nous ne voulõs accuſer de menſonge l'hiſtoire des an .
à l'Anato.ciens ,qui nouspropoſententre les Roys d'Egypte, a pis , Ofiris , Prolomee , au vou
mie. deſquels n’a eſté ſatisfaict iuſques à ce que leur deſir le toit affouuy à l'ouverture des

Secrets que nature auoit cachez à l'ail exterieur. Le ſemblable deuons , nous croire
de Salomon ,d'Alexandre le grand , de Mithridate , d’Attale Roy de Pergame , que
tous ne peuuent auoir merité fi haur nom en l'art de Medecine ſans la familiere co
gnoiſſance de l'Anatomie , premier & principal fondement de la Medecine : aul
quels ie ne faisdoute aucune qu’on ait propoſé pluſieurs diſſections , veu qu'ils n'e . B
ſtimoient choſe digne de ſi grande contemplation que l'homme , & ſes parties : ores
qu'ils euſſent trauerſé infinies prouinces , & en icelles veu des miracles incroyables.
Diuifion de Or la Medecine de laquelle on fait auiourd'huy profeſſion ,eſt composee de trois
la Medeci- parcies : la premiere eſt dite Chirurgie qui par manuelle operation guarit les mala.
ne. dics : La ſeconde, Diecerique,laquelle dõne ſecours aux maladies par bonne manie.
re de viure :La troiſieſme, Pharmaceutique, laquelle par medicaments guarir les
infirmitez .Pluſieurs grands perſonnages tant anciens que modernes debatent, &
non fans cauſe, quelle eſt la plus digne derecommandation: car tant l'vne que l'au
treeft grandement aduantagee de raiſon . Et quant à la Pharmacie ,Herophile dit
que lesmedicamentsopceſtě inuentez de la main d'Apollo , qui eſtoit eſtimé com
mc Dieu. Quant à la Dietetique, Pline telmoigne que touslesiours le plus pauure
du monde prenten ſes repas les vrays remedes des malades. D'auantage les plus ex
perts qui ont eſcrit de la Medecine , diſent, la cure des maladies faite par regime
,
ſurpailer celle quiſe fait par autre voye : meſme qu'il eſt plus expedient ſortir d'une с
maladie parbonne maniere de viure, que par medecines , qui ſont faſcheuſes à pren
dre difficiles à retenir,penibles en leuroperation . Ce qui donna occaſion à Aſcle.
piades derejecter les Medecines comme choſes nuiſibles à l'eſtomach : toutesfois
finous nous rapportons à Celſe , ny l'vn nyl'autre ne ſera tellement à louër , que la

Chirurgie :veu qu'en la curation des maladies faites par medicaments , & diecte , na
turea grand pouuoir, & ce qui aura profité quelquesfois, autresfois ne ſert de rien ,
tellement que l'on peut douter, fi la ſanténous eſt rendue ou par le benefice de na
ture ,ou par la faculté des medicaments & regime.
D'auantage nous voyons pluſieurs maladies ſe guarir d'elles meſmos, ſans l'ayde
des medicaments , ny diecte , comme vne douleur desyeux,vne tumeur , ou fieure
quarte.Mais la Chirurgie ne s'exerce point ſur le corps humain ſans extreme neceſ.
ſité de ſon induſtrie, & vrgence du mal important qui requiert ſon aide , & mcſmes
ne peut eſtre guary denature : commeremettre une fracture ou luxation ,crepaner,
( ecourir vne femme à vn enfantement laborieux, ou pour vne precipitation dema
D
trice, oſter vne pierre,ouurir yn empyeme, extirper vn membre gangrené ou ſpha
celé: D'avantage ceſte partie icy eſt plus ancienne quenulle autre , parce qu'en la
guerre de Troye , Podalirius & Machaon fils d’Eſculape , ſeruirent le Roy Aga
memnon , & donneront grand ſecours , non pour guarentir les maladies internes,
commefieures , & principalement la peſte , quilors par l'ire de Dieu rauageoit par
le.camp des Grecs ,mais ſeulement pour penſer les bleſſeures auec medicaments &
ferremens ,comme tres -bien nous monſtre Homere en ſon ſecond livre de l'Iliade ,

Pareillemét pour la difficulté qui eſt en elle, nous dirons outrepaſſer les deux autres
Homero. parcies de Medecine;conſidere que les ſciences tant plus qu'elles ſont difficiles à ap
prendre , eſtre auſſi plus excellentes : or il eſt ainſi que la Chirurgieeſt la plus dif
ficilc : ce qui nous eſt demonſtré par Gal . liure 3. de la compoſition des medi
camens en general , diſant , la Chirurgie eſtre plus difficile que les deux autres
parties,ſçauoir pharmacie & dietce , parce qu'elle ne ſe peut paſſer ſans les deux au .
tres parcics; & chacune d'icelles ſc pcuuent bien paſſer de Chirurgie. Parquoy ic
Preface .

A concluds ceſte parcic qui eſt la Chirurgie, pour ſon antiquité, neceſſité, certitude, comparàs
difficulté, outrepaſſer le pharmaceutique & dietetique : coucestois l'vne ſans l'au. fon de los
treneſçauroit faire choſe grandement à profir. Car elles ſont cellement conjoin. Chirurgie
&es enſemble, que ficlles eſtoientſeparées & ne s'encr’aydoient, iamais le Chirur. auec les
gien & Medecin ny Apoticaite ne paruiendroient au bur qu'ils ſe propoſent . Et autres para

pource anciennement vn ſeul homme exerçoit les troisparties : mais depuis quelo
mondecît grandement accreu , & au contraire que la vie du genre humain
elt decreuë de beaucoup, li qu'elle ne fembloic ſuffire pour les ap
prendre & exercer coutes trois parfaiđemene , on les a le
parees, chacun eņ prenant vne partie , conſiderant que
pour la difficulce de l'art, vnc ſeule perſonne
cſt aſſez empeſchee à la comprendre
B & bien exercer .
1
Į

Table des Chapitres de l'Introduction

de la Chirurgie.

Que c'eſt que Chirurgie , Chap. Du mouuement orrepos. xviii

. ii Du dormir eg veiller. xix


Des operations de Chirurgie

Deremettre en la place ce quieft forry. Dereplerion, inanition ou vuidange


. xx
iii Des accidens ou perturbations de l'A
Des chofes naturelles. ilii me . xxi

Des Elemenis. v Des choſes contre nature. xxii

Des Temperaments. vi De maladie. xxiij

De l' Aage. vii Des Gypromes. xxiv


Des Humeurs. viïi Des indications. xxv

Signes de l'homme fanguin. ix L'ordre de curer les maladies compli

Practique & exercice fur les regles don xxvi


quees.

nces destemperamense humeurs


. * De diverſes manieres de guariſon.xxvii
Des Facultez : xi Pourquoy la fiéure quante & autres
Des Actions. хіі maladies pouuent eftre guaries par

Des eſprits. xiii une grande


peur , onpar une grande
Des annexes des choſes naturelles. xiiii ioje. xxviii
1
Des choſes non naturelles. xv Exemples des maladies
faictes par ima
De l'air. xvi ginations fantaſtiques. xxix

Du manger er du boire. xvii certains impoſteurs.


De
A

568

LE PREMIER LIVRE
DE L'INTRODVCTION
OV ENTREE POVR PARVENIR
A LA VRAYE COGNOISSANCE
B de la Chirurgie.
PAR AMBROISE PARE DE L AV AL
AV MAINE , CONSEILLER IT
premier Chirurgien du Roy.

Que c'eſt que Chirurgie.


CH A P I T RE 1.

HIRVRGIE eſt un arc qui enſeignc à methodiquement


curer,preſeruer & pallierles maladies, cauſes& accidensquiDefinition}
aduiennent au corps humain , principalement paroperation de chirus
manuelle. Quelques vns font vnc autre deſcription, diſans gie:
C
que Chirurgie eſt vne partie de Medecinc, curâne lesmala
dies ſeulement par operation de la main,comme couper,cau
teriſer, trepaner,reduire fractures & luxations, & autres æu .
ures que dirons bien toft: comme l'autheur desdefinitions
en Galien lors qu'il definit ,Chirurgie vnc habilité & indu.
ftrieux mouuement d'vne main affcuree auec experience, ou vne action demain in
duſtrieuſe, tendance à quelque bonne operation de Medecinc. Toutesfois il eſt
impoſſible faire telles choſespar artifice ſans les deux autres inſtrumens, ſçauoir eſt
regime de viure, & ce que nous appellons vulgairement medecinc , qui conſiſte en
purgation & alteration ouchangement du corps , & ſans les ſçauoirdiuerſifier ſelon
les cauſes, maladies & accidens,& autres choſescontenuës ſous les choſes naturelles, 1

non naturelles,& contre nature,& leurs annexes,qui ſeront deduites en brefcy apres
en leur ordre. Et li aucuns veulentmaintenir qu'ily a pluſieurs quicraictentla Chi
rurgie ſans auoir la cognoiſſance des choſes ſuſdites,quitoutesfois fontdes cures de
ſeſperees : A ce ie leur reſponds que celles cures ſont faites pluſtoſt par accident que
Dpar le benefice de l'art, & fols ſont tous ceux qui en iceux ſe fient. Car s'il vient par
aduenture qu'vne fois ils facent bien,ils feront apres dix mille maux,comme tres bić
aeſcrit Galien en pluſieurs lieux de ſa Methode,parlantdes Empiriques.Or puis que
nous auons dit que Chirurgie eſt operation manuelle, s'aidant demedecine & diece,
ilfaut (çauoir quelles ſont les operations.
Des operationsde Chirurgie. CHAP. 11.
E S 'operacions de Chirurgie ſont cinq en general , à ſça
voir , oſter le ſuperflu : remecere en la place ce qui cn cſt forty :ſc.
parer le continu: ioindre le ſeparé : adiouſter &aiderà nature en Operationi
ce qui luy defaut : leſquelles operacions ſe peuuent mieux appren de Chirur
dre" , faire & pra&iquer par l'exercice & vlage, que par le gie.
moyen des liures, ny meſme par la parole de l'homme, tant ſoit elle clai.
á ilij
ila
2 Le premier Liure de
re & elegante, pe pouuant ſi vivement exprimer ny montrer, cep me fait la veuë A
& le toucher.
Exemple d'ofter le ſuperfiu.
Commecoupervn ( xicíme doigt en nombre luperflu,ou vn bras,ou autre partie 8601
monſtrucule : amputer yn nicmbre pouiry & Iphacelé : extraire yn entant mort , ou cade
l'arriere-faiz, ou vre mole, ou autre niavuaisgeime hors le ventre de la mere : am vid

puter les excroiſſances, comme louppes, verruës, polipes, chancres & auties chairs
ſuperfluës, extraire vneballe d'arquebuze ou dragee, maille, fers,fleches, bois,bour.
re ,drappcau, cſquilles d'os,cſpine, areſte, & generalement toutes choſes eſtranges
qui ſonten quelque partie de noſtrecorps : arracher les poils des cils des yeux qui ſe
ierres renuerſent au dedans, couper vn vngula , occupant la conion &tiue & partie de la
ndvět cornee : curer toutes apoftemes, extraires les pierres de la veſlie, ou en autre partie
tes les du corps : arracher vnedentpourrie ou lupeifluë, vn ongle entrant en la chair, cou.
is du
per vne portion de la vule troprelachee, ou vne partie de la palpebre de l’æil , abba.
tre vne catara &te:amputer l'ombilic des enfans nouvellement nez, on le prepuce ou
les pterigomates des parties genitales desfemmes, ou les nymphes , c'eſt à dire, ca. B
runcules fortanteshors la nature des femmes.
Auſli extraire les choſes eſtranges qui ſont entrees dedans les yeux, quiſe fera en
chofes renuerſant les paupieres auec la queuë d'vne eſprouuette , puis tirer toutce qui eſt
zesan * eſtrange auec petites pincettes ou autres choſes propres à ce faire: s'il y a du pus en 4

tre la cornee & Pvuce,ſera vacué par inciſion : la cataracte lera abbatuc par Pelguille,
comme ſera dit cy apres .
les. Les choſes quipeuuenteſtre entrees aux oreilles ſont diuerſes, cóme petites pier
rettes , dragees de plomb , & autre petit corps qui ne s'enfle point par l'humidité des
excrémenscontenusaux oreilles : & pour les curer ii faut mettre de l'huile dedans,
fermer le nez & la bouche, & faire eſternuer le malade auec yn ſternutatoire : & fi on
ne le peut faire par ce moyen , il faut eſſayer à les tirer auec vn cure oreille , perites
pincettes ou crochet : & li c'eſt vne petite balle de plõb, ſera tirée auec vnetire balle
figuree aux playes des hacquebuttes. Ce que i'ay fait, à cauſe que la pointe du tire
balle s'inlere dedans le plomb. с
Les anciens commandent de faire pancher la teſte du patient ſur vne planche,
(quand il eſt grandelet) & luy attacher la teſte bien ſeree, puis efleuane Pendroit de
la planche où la ceſte eſt attachec, la laiſſer tomber à plomb . Quant à moy,ie ne ſuis
decetaduis , parce que par la grande commotion & esbranlement du cerueau , les
veines , arteres , & fibres nerueux qui entrent & fortent par le crane , ſe pourroient
rompre,& lelang eſtanthorsde ſon vaiſſeau ſe pourriroit : & par conſequent la morc
s'enſuiuroit. Sice ſont de noyaux de ceriſes , poix , febues, & autresgraines ſembla
bles, il les faut tirer le pluſtoſt qu'il ſera poſſible, auant qu'elles s'enflent par l'humi.
diré contenuë aux oreilles. Car depuis qu'elles ſont enflees & germees , elles font
grand douleur par leurextenſion ,& nepeuuent plus eſtre tirees entieres, & partano
les faut rompre en petites pieces : & apres les auoir cirees , on appliquera aux oreil
les de l'huile roſar ,moyeux d'eufs, & autres choſes qu'on verra eſtrede beſoin . Si
quelques petites beſtioles y ſont entrees ,comme perce- oreilles, puces , ou autres
ſemblables, on mettra en l'oreille de l'huile & du vinaigre , qui toſt apres les fera
mechi mourir.
D
S'il y a quelquecorps eſtrange entré dedans le nez , s'il n'y a moyen letirer auec
pincettes qu'autrement, on eſt quelquesfois contraint faire inciſion en long , à fin
de retirer hors ce qui ſera entré dedans.
bou- Il y a pluſieurs choſes qui peuvent eſtre entrees en la gorge , comme arreſtes de
poiſſon, petits oſſelers, vndé, vnc piece d'or ou d'argent, vne aiguille , ou eſpingle,
leſquelles tiennent en la gorge , & nepeuvent eſtre cirees ny auallees. Sion les peuc
voir la bouche ouuerte ,quelquefoisaisément on les peut tirer avec pincettes ou Xey
bec de corbin :ſielles ſont ſiauant qu'on ne les puiſſe veoir , il faut faire vomir le pa
cient , luy faiſant mettre les doigts profondement en la gorge : ſ: par ce moyen
moy on
ne peut rien faire, il faut faire aualler quelque morceau de mie de pain tendre ſans
maſcher, ou des figues retourées. Autres attachent vn morceau d'eſponge bar
boüillée de terebentine , ou de quelqueſyrop,ou vn morceau de poulmon de veau
ou de mouton cru , attaché bien dextrement à yn filet double & fort, & le font aual.
L'Introduction à la Chirurgie. 3
A ler , puis le retirenc en amont.
Sic'eſt vn morceau de pain ou dechair,il faut faire comme ie feis à l'un des ſerui.
reurs de Henry Hazard, maiſtre tailleur d'habits demeurant ſur le pont S. Michel. Hiffoires
L'hiſtoire eſt telle : Ils eſtoient ſix ſeruiteurs,leſquels ſe delibererent de faire vn bon
delieuner, & ſe cortiferent de chacun vn liard pouremployer à auoir des trippes,
fouis ſe mirent en deuoir de bien eſcrimer de la dent : vn d'entr'eux princ vn mor
ccau de gros boyau cullier, l'ayant mis en fa bouche , il luy tardoit qu'ilne fuit en
ſon eſtomac:ill’aualalansmacher pour retourner au reſte: ce morceau luy,demeu
fa au milieu de la gorge, & nepeutpaſſer : qui luy cauſa vne tres grande difficulté de
reſpirer, & tomba comme epileptique, ietcant le lang par la bouche, par le nez &
oreilles, le viſage tout liuide & noir , de façon qu'on cítimoit que le pauure goulu
mourroiede ce morceau de trippe: le fusenuoyé querir, & Içachant la cauſe de ſon
maliele fis lever & mettre en vne chaire , & pris vn porreau , luy ayant coupé la
teſte & delpoüillé de deux robes , luy ouuris la bouche auec vn (peculumoris , &
pouffay le porreau bien profondemencen la gorge aſſez violentement, & le frappay
B de la main entre les deux eſpaules, ſi bien que le morceau comba en l'eſtomach.Et
eſtant horsde ce danger , prompremenc ierta fa veuë ſur le plac où eſtoient les trip
pes, il ſe print à crier contre les compagnons , qu'ils auoient tout mangé ſans luy,
dilanc qu'il falloit qu'ils luy rendillent ſon argent. Alors maiſtre Henry fon mai
ſtre, voyant qu'au lieu de rendre graces à Dieu de l'auoir tiré du peril de fuffocation
& de mort,au contraireilcrioit à latrippe , tout à l'heure luy paya ſes gages , & luy
donna ſon congé, luy diſanc, Adieu goulu. Et depuis entre lescompagnonstailleurs
de ceſte ville,‫ ܝ‬aa eſté coufiours appellé goulu , & par deſpit s'en eſt retourné en fon
pays,qui n'eſt pas grande perce pour Paris. Ceſte hiſtoire pourra feruir au icuveChi
rurgien pour ſecourir quelqu'vn en cas ſemblable. Si quelqu'vn auoit auallé vne
langſuë,& ſe fut attachec à lagorge,ou à l'eſtomach,on luydoibt donner à boire de
l'huileou du vinaigre , & elle le decachera .
Les choſeseſtráges qui peuuent entrer en la verge,ſont ces choſes que i'ay veuës: Delaverge
Vniourie mis vne petitelondede plomb de longueur d'un doigt , en la verged'un
C grandſeigneur:pour quelque indiſpoſition qu'ilauoit : trois heures apres eſtoit en
tree iuſques pres le liege, & n'eult eſté que je l'auois vn peu temployee par le bouc
à fin dela mieux recirer,ie croy qu'elle fuſt entree en la veſſie: & fut auecquespeine
quc ie la retiray, en preſſant, & en la pouſſant doucement à l'extremité de la verge. Hißoises
Sionneme veut croire que la veſlic atcire à ſoy les choſes eſtranges, ie les renuoi.
say à Collo qui trouua à yn nommé Tire- vit , vneaiguille enucloppee en vne pierre
apres la luy auoir tiree , & par excellence me l'a donné , que ie garde paradmira
tion, Ceſte aiguille auoit eſté fichee par Tire.vit au bout d'vn petit baſton , lequel
mit en la verge pour repouſſer vne pecice pierre qui eſtoit deſcenduë au conduit de
I'vrinc,& s'eſtant ladite aiguille departie du baſton, la veſlie la cira à loy, & par fuc
ceſſion de temps fut enueloppee dela matiere pierreuſe.
Siau col de la matrice d'une femme on auoic appliqué vn peſſaire , & qu'elle ne le Du col de la
peuſtretirer ,il faudroit appliquer le fpeculum Matricis , & letirer auec vn inſtru matrice.
ment nommébec de corbin,oupied degriffon ,de peurqu'il ne ſe pourriſt là dedans,
ouengardaſtla femme de conceuoir.
D Ecquancà extraire l'enfantmort ou vif,ou l'arriere-faix ,ou vne mole , on trouue
racy- apreslesmoyens bien au long au liure dela generation. Ecauſli pour extraire
leschoſeseſtranges, comme balles,Reches,& dards, & autres choſes, cela ſe dira
-apres aux playes faictes par hacquebutes.
cyOr
quant au ſiege,ſouuenton a veu les clyfteres & ſuppoſitoires eſtre rendus par
labouche, qui eſtchoſe forteſtrange. Dw fiege

Exemple de remettre en ſaplace ce qui en eſt forty. CH A P. III.


Ommc reduire les os luxez,lesinteſtins & omentum combez en la bourſe,
ou hors le nombril , ou par vne playe faicte au ventre , auſſi la matricere.
laſchee, ou le bras & jambe d'vn enfantſorry hors la matrice , afin que plus
facilement l'enfant ſoit iecté hors d'icelle , ou le gros boyau hors du ſiege, & le pre
pucequiſeroit
orbite.
renuerſé au deſſus du glan , ou l'ail eftant crop eminent hors de lon

1
4 Le premier Liure de i

Exemple de ſeparer le continu .


A
Commcſeparer les doigts vnis enſemble, ou autres parties , vice qui aduient par
le defaut de la vertu formaceice, ou par accident , comme par bruleure , playe ou
autrement. Auflicouper l'hymen , ou vne cicatrice faicte au conduit de la femme:

couper le filer qui eſt ſouz la langue qui empeſche les enfans de reter & parler , ou
celuy de la verge qui empeſche que le prepucene toit deſcouvert : couper vne vei
nevariſqueuſe,ou vncarcere qui cauſe vn aneuriſine , ou yn netfon tendon à de
my coupé faiſant ſpaſme : trancher quelque membrane qui eſtoupe le conduir de
l'oreille, yeux ,nez, bouche ou ſiege: inciler la reſte & ventre d'vn enfantmortau
ventre de la mere pour vuider lesventoficez, & aquoſitez , & autres excreinens, à fin

que l'on le puiſſe apres plus librement extraire : leparer les palpebres des yeux : cou .
per le cuirmuſculeux & pericrane qui couurent leteft, & trepaner, à fin d'oſter les
os qui compriment & picquent les meninges , ou vacuer le lang tombé ſur icelles,
ou quelques aquoſitez aux hydrocephales; ouurir vne femme recentement morte
pour lauuer l'enfant eſtantencores viuant : ouurir lesapoſtemes pour vacuer les hu. B
Vrilisez des meurs, & autre choſe eſtrange contenuë en icelles : appliquer des cauteres , tant
contenes. actuels que pocentiels pour curer les nodus , caries & alteration des os , ou faire ou
uercurc ou vlcere pour diuertir & cirer l'humeur au dehors , comme par ruiſſeaux
ou cuyaux : ainſi que l'on fait au derriere du col , pour diuertir l'humeur qui fuë ſur
les yeux , auſſi ſont appliquez aux bras & jambes & autres parties pour divertir la flu
xion qui ſe fait aux poumons & iointures des gouteux : phlebotomie , application de
ſangſúës, ventouſes auec ſcarificacions pour faire vacuation , deriuation & reuul
fion des humeurs ſurperflus coulans ſur quelque partie. Picquer les boyaux eſtans
fortis hors du ventre par vne playe, pour vacuer les vents qui engardent eſtre re
duits . Vice des os : on perce les os , ratiſſe, ſcie, lime , coupe. On les perce en trepa
nant letelt, ou les coſtes aux hydropiques , thauraciſques où l'cau eſt contenuë au
thorax , & les osnoirs, pourris & vermolus. Onſcie les dents ebrechees , noires &
i
pourries : auſſi les cartilages vermolus.
Exemple de joindre le ſeparé.
Comme reünir les playes par le benefice des coultures , compreſſes & ligatures :rc
pos & ficuation bonncde la partie : reduire les, fra & ures : lier vne veine ou arcere
pour arreſter vn flux de ſang : rejoindre les léures fenduës, dictes bec de licure , cu
rer les viceres & fiftules.

Exemple d'adiouſterce qui defaut de nature , on paraccident.


Comme adjouſter vncoreille, vn'ail , vn nez , vne ou pluſieurs dents , vne plati.
ne d'or ou d'argent;ou vnetente pour eſtoupper quelque trou du palais, à caule quc
la vcrolle auroic corrodé ou corrompu l'os,de façon que le malade ne pourroit eitre
entendu par ſa parole ſans aide de ces moyens : vne lāgue artificielle en defaut d'une
portion qui auroit eſté couppee à quelque perſonne,à vnemain ,vn bras, vne jambe,
yn corps de fer , ou vn pourpoint cótrepointé, afin de tenir le corps droiæ & menu ,
vn ſoulier releué à voe perſonne boiteuſe , vn chauffon attaché d'vne liſiere à la
Lu Chirur. ceinture pour faire marcher vne perſonne droiæ : toutes leſquelles operatiós ſeront
gie ne le amplement deduites en ce preſent cuure. Or telles operations à la verité ne ſe peu .
pene don
ans fasre uent accomplir fans douleur : car comme ſeroit -ilpoſſible couper vn bras ou voe
leur jambe ,couper & dilacerer le col de la veſlie , & y mettre pluſieurs inſtruments ſans
D
vne extreme douleur ? Aufſi reduire vneluxation où il faut tenir , tirer & pouſſer la
partie qui eſtja elpriſe de douleur : ouurir les apoſtumes, paracheuer de couper vni
nerfou tendon à demy coupez , faire points d'eguille , couſant la chair pour reünir
les léures des playes ,appliquer fers ardens & brullans,cirer vn enfant more & pour
ry hors le ventre de la mere, & autres quures,leſquelles iamais ne ſe peuuent faire
ſans grandes & ſouuent extremes douleurs ?& toutesfois ſans l'aide du Chirurgien
en tels cas on mcurt ſubitement ou miſerablement en languiſſant. Et failant telles
Quures,faut il pour cela appeller les Chirurgiens cruels & inhumains , & les avoir
en horreur? Ou leur faire ainſi que le peuple Romain fie iadis à Arcabuto, l'vn des
Arceburo premiers Chirurgiens que les Romains receurēr en leur Republique , ainſi que Sex
premierCbi
. tus Cheroneeneueu de Plutarque raconte. Iceluy pource qu'il coupoit bras & jam
rurgiend bes, & faiſoit autres æuures cy -deſſus mentionnecs , fur en celle horreur au peuple
Rome. de Rome , qu'il fut tiré de la maiſon, & lapidéau champ de Mars. O quelle ingrati,
L'Introduction à la Chirurgie . Ś
A tude, d'auoir employé tout ſon bien ,eſprit & temps pour apprendre ſon art, & en
l'exerçanteſtre ainſi maſſacré & cué ! Or iaçoit que le peuple ſemblaſtauoir quel
quccouleur en ce faict, ſi eſt ce qu'il ne fut aduoüé du Senat , quine pouvant au
treinent reparer vne ſi grãde faute& meſcognoiſſance de ceſte populace(lequelſou
uent eſt inconſiderée en ſes faiets) pour recognoiſtre les ſeruices & perfections d'ice
luy, luy fic eriger pourperpetuellememoire vne ſtaruë d'or, qui fut poſee au Temple
d'Æſculapius.Orquantà moy, ie ſuis de l'aduisde Celſe, qui admoneſte le Chirur. Sentence de
gien d'eſtre aſſeuré en ſes deuures, & non piteux & craintif,en ſorte quequand ilope. Celle
1
re deles mains, il ne loit pour la
clame ur e
du malad , ny moins des affiftans, retardé
plus qu'il n'eſt debeſoin , & qu'ilne le haſte point plus qu'ilfaut: mais qu'il accom
pliffe ion æuureſans auoir eſgard au dire de ceux qui par leurignorance meſpriſent
ic Chirurgien : car on dicen commun prouerbe , que le Chirurgien ayant la face pi. Prouerbe
rcuſe rend à ſon malade la playe venimeuſe. communi

Deschoſesnaturelles CH A P. IIII.
B
Õur dcuëmét accomplir les ſuſdites operations, & methodiquemét
curer les maladies , le Chirurgien rationel doit auant toutes cho NiceBité
ſes avoir cercaines indications & enſeignemens de ce qu'il doit fais des indics :
re :autrement il ſeroic Empirique,deſticuë de toute raiſon , faiſant tions.
ſes operations au hazard & àl'aduencure , pluſtoſt qu'aucc vne fer
meaſſeurance fondee en bonne ſcience & du tout infaillible, qui ne
veut que l'on procedeen aucuneguariſon , que par la conduitedes indications me
thodiques,leſquellesſont generalement priſes des choſes naturelles,nõ naturelles, &
contre nature enſemblede leurs annexes,quiloncles trois poincts cõcenansenſom 1

mecoutelaChirurgie,ainſi que ſagement les ontinuentez nos anciés aucheurs,gens 1


debon eſprit : à ceſte cauſe nous deduirons toute la contemplation & theorique de
noſtre are ſuruanc cet ordre. Or les choſes naturelles ont eſté ainſi nommees , à cau . Pourquoy
ſe qu'ellesdeclarent& contiennent la nacure du corpshumain ,quidepend de la com- beschofesnai
C mixtion & temperaturedesquatre premiers elemens : ainſi que l'a bien deſcrit Hip- turelles font
ainſi nomo
pocraresen ſon liurede la nacure humaine : & pourtant la conſideration d'icelles ap
partientàla premiere parcie de Medecine , dicte Phyſiologie, comme la contempla
cion des choſes non naturelles appartient à laſeconde, qui ſe nomme Hygiaine ou
Dlairetique ,àcauſe qu'elletaſche à garder la ſanté par l'vſage raiſonnable decelles Parties de
choſes :ne plus ne moins que l'incelligence des choſes di& escontre nature,cſt devë Medecines
àlatroiſieſmenommee Therapeutique, c'eſt à dire curatiue des maladies & aurres
affe&tionsqui l'offeriſene& la bleſſent. Orceschoſes naturelles ont eſtá reduittes en
nombredeſept,ſans leurs annexes , ſçauoir eſt.
( Elemens , 3 ( L'aage,
Temperaments , Le ſexe,
Humeurs, Et leurs annexes , La couleur ,
Les {Parties,ou membres, i quifont , { La commoderation ,
Facultez , | Letemps,
A &tions, | La region ,
D
( Eſprits. ( L'arc & maniere de viure.
Des elemens. CHAP 1.

Que c'est
Lemene , ainſi que communément eſt pris en la Medecine , & qu’ Elemër.
que le definit Galien au liure des Elemens ,eſt la tres ſimple &
nioindre portion de la choſe qu'il conſtituë : & à ſimplement &
abſolument parler , Elemens ſont appellez les quatre corps ſim
ples , ſçauoir eſt le feu , l'air , l'eau & la terre , qui font la matiere
de tous les corps naturels ,mixtes , parfaiets ou imparfaicts,eſtans Quels font
ſous la concauité du ciel , ſelon l'opinion des bons Philoſophes les clemens
! naturels. Tels clemens ſont ſeulement cogneus par l'el. ſelon Hipo
prie , non par aucun ſens exterieur : toutesfois Hippocrates laiſſant les propresprodutes.
doms des ſubſtances d'iceux , les a voulu plus facilement declarer par leurs quali.
6
Le premier Liure de

rez, diſant chaud , froid, humide & ſec, à raiſon qu'en chacun des elemens il y a une A

En chaque de ces qualitez qui luy eſt propre , eſſentielle & domine non ſeulement ſelon toute
element , il ſa latitude , mais auſſi ſelon laforce entiere d'agir : laquelle eſt accompagnee d'une au
gy a deux tre , qui vrayement eſt auſſi exceſſiue & en ſouuerain degré comme Pautre en chacun
qualieztiz element , non pas en ſouucraine vertu d'operer , comme dit Galien au piemier liure
me intenſe des Elemens . Comme par exemple, en l'air nous remarquons deux qualitez,chaleur,
qai enſuit & humidité, toutes deux exceſliues,autant chaleur qu'humidité. j'ourquoy donc

sure de la dira quelqu'vn ) la chaleur en l'air n'opere elle pas auſſi exceſſivement comme au
choſe , & feu ? Pourceque ( comme nous avons dit) bien que la chaleur ſoit exceſſiue en l'air
l'autre re- ſelon ſon eſſence , latitude & degré , auſli bien qu elle eſt en l element du feu , routes.
miſe qui fois elle ne l'eſt pas ſelon la vertu d'agir & operer. La raiſon eſt , qu'icelle vertu d'ef.
n'est de la chauffer en l'air eſt empeſchec, & comme bridee par la qualité qui luy est compagie ,
gride actio.
ſçauoir l'humidité , laquelle hebece la vertu d'eſchauffer, comme au contrante la lic
cité l'aiguiſe. Donc les quatre clemens ſont cellement qualifiez, que
B

Noms des ſubſtances. Qualitez premieres.

Le feu Chaud & ſec ,


L'air Humide & chaud ,
L'eau eſt Froide & humide ,
La rerre . } Seiche & froide.

Orces clemens en la compoſition des corps naturels retiennent leurs qualiteztel .


les qu'auparavant, ſinon qu'elles ſont remiles & adoucies , à raiſon de la contrarieté
quieſt eldi&tes qualitez : & au reſte par tour entr'rux ſi bien mixtionnez , qu'il ne de
Mixsiondes meure rien ſimple ou pur , non plus qu'en la compoſicion de l'emplaftre dicte Dia
elemens. calcithcos , iln'eſt poftible monſtrer huile, axunge , licharge & chal.itis à part , en .
tant pecite quantité que ce ſoit , tant ces quatre corps ſont bien meſlez & amallez
auec la chaleur qui les aſſemble ainſ. Telle mixtion des quatre elemens pourra eſtic C
Exemple de cogneuë par la reſolution d iceux, faide au buis verd brulant : car la fl . ribe nous re
pouxeir vait preſente le feu , la fumée ,l'air, l'huniidiré qui relude dudit bois,reſſemble à l'eau , & la
los elemens .
cendre à la cerre. Par tel exempletant ſenſ ble, il est facile à imaginer la diffolution
qui eſt vrayc corruption de ſubſtance : & au contraire , lamas & vnion d'iceux telle,
que rien ne demeure fimple, autrement jamais ne te feroit generation : car ſi la cha
leur quieft au feu extréme, demeuroit telle au corps , elle le corromproit : tout air ſi
de la frigidité, humidité, & Gccité . laçoit que deux d icelles qualitez ſoient dictes
actiues, à cauſe qu'elles ont plusgrade force que les autres , qui ſont chaleur.& froi
deur : les autres paſſiues, à raiſon que leurs vertus ne ſont decano grande efficace que
les autres, & pour la pluſpart ſont touſiours plus tardiues à leurs effects. De telle mix
tion des ſubſtances, & qualitez des elemens viennent les temperamens & comple .
xions des corps , qui eſt la principale cauſe quinous contraint d'eſtretant curieux de
la cognoiſſance des elemens . Les vertus & effe & s d'icelles qualırez ie delaiſſeray à
plus hautecontemplation , pour declarer quede ces quatre premieres qualitez (ainſi
appellées , pource qu'elles conuiennent premierement & eſſentiellement aux qua- D
tre premiers corps & clemens) en proviennent d'autres commepar conſequence ,lef.
quelles pour ceſte cauſe ſont appellees qualitez ſecondes, ſçauoir legerecé & graui
té, diuiſees auſſi par les quatre elemens, ſelon qu'ils ſemblent plus parciciper de cha
leur , froideur, ficcire ou humidicé : car deux d'iceux elemens ſont legers , à cauſe
qu'ils montent couſiours en haut : deux pelans , à cauſe que leur propre eſtde defe
cendre en bas , comme l'on void. Le feu tres - leger qui eſt le plushaur. L'airleger
cſtant au deſſous du feu . L'eau peſante miſe ſoubs l'air. La terre tres pelante miſe &
conſtiruce au plus bas.

A cette cauſe les corps ou parties legeres retiennent des clemens legers , les
Quels font peſantes au contraire. Tels ſont les elemens du monde , cogneus ſeulement de

les elemens l'eſprit: toutesfois il y a vne autre differenced'element provenans de la commixtion


de noftre des premiers ſuſdicts, comme elemens de generation , & elemens de noſtre corps :
generation . leſquels certainement ſont plus fenfibles que les premjers : qui eſt la cauſe pour .
quoy
}

L'Introduction à la Chirurgie. 7
A quoy Hippocratesen ſon liurc dela Nacuredel'homme, les a incontinentdeclarez,
apresauoir traiêté du chaud,froid,ſec,& humide. Les Elemens de noſtregeneration Elemensde
&decoutesles beſtesayans ſang,ſont la ſemence & lefang menſtruel. Les Elemens moffre
denoſtrecorps ſont les parties colides & fimilaires, faites & produites des Elemens corps.
de generation : celles ſont les os , membranes,ligamens, veines,arceres,& autres deſ.
quelles dirons cy-apres en l'anatomic: qui ſont faciles à cognoiſtre, à cauſequ'ils ſe
repreſentenc au ſens de la veuë,

Des Temperamens. CHAP. V I.


1

EMPERAMENT ou complexion, cſt vne confulon ou mellangede Definitione


chaud, froid, ſec, humide. Autres diſent que c'eſt vne harmonic & ac- de temper
cord des quatre ſimples qualitez elementaires, à ſçauoir chaleur , froja rameni.
B
deur , humidité & ficcité, leſquelles ſont entre elles directement con
traires : cet accord & conſentement vient de ladite confuſion & mere
lange desquatrepremiers Elemens de l'vniuerſel monde , qui ſont le feu , l'air,l'eau,
& la terre. Ceſte harmonie , quides Grecs eſt auſſi autrement nommee Craſis, eſt
l'ame tånedes beſtes bruecs que des plantes , laquelle comme eſtant leur forme cf.
ſentielle, leur donne eſtre & vic. Mais comme les plantes ſont infericures en excel
lence& vercu aux beſtes,ainſi leurameeſt beaucoup plus imparfai& e & de moindre
Vertu & efficace : car elle et ſeulement vegetatiue, c'eſt à dire, qu'elle leur donne
force& vertu de ſucceder & prendre leur nourriture de leur merela terre ,pour en
tretenirleur eſtre & vie, & aulli decroiſtre iuſques à vn certain but & grandeur limi
tecde naturc, & puisfinalement d'engendrer ſemence pour l'entretenement de leur
cſpece. Mais celle des beſtes brutes outres ces trois operations vegetaciues à ſçauoir
attirerleurnourriture, croiſtre , engendrer ſemence , leur donne ſentiment & co 1
gnoiſſanceinterieure& exterieure detoutesles choſesqui leur nuiſent &portér pro
fit à l'entretcnement de leur vie, & auſſi de ſe mouuoir volontairement d'yn licua au.
Excellence
C tre,ſelon leur appetit ſenſuel, Orcelle de l'homeſurpaſſant en nobleſſe & perfe& ion de l'ame de
toutesles aucres, neprocede poine deceſte harmonic & accord des quatre Elemens, l'bomime.
comme il ſera cy-apres declaré. L'on diuiſe le temperament en deux premieres dif. Temperede
ferences : carou il eſt temperé ou intperé. L'intéperé eſt dedeux ſortes,d'autant qu'il ment of
yadeux manicres d'intemperaturc: la premierc eſtvicicuſe, & l'autre excede bien de double.
vray la mediocritéde la cemperature ,maiselle eſt encore dedans les limites de ſan
té, comme celle qui n'offenſe pas les a &tions trop evidemment, mais ſeulement eſt
cauſe qu'elles ne lont point fi devëment & parfaitemenc faites comme par la tempe
rature temperce.Maisla vicieuſeempeſche du tout les operations, cequ'elle faiten
trois façons,ſçauoir eſt, les affoibliſfant, les deprauant, ou du tout les aboliſſant.
Aiolila ſtupcurdebilice & rend le mouuement plus cardifqu'ilne doit: la conuullion
ledeprauc: la paralyſiel’oſte & l'abolic entierement. Le temperament temperé eſt
auffi dedeux ſortes: car il eſt cel, ou au poids & egalité, ou à iuftice. Le temperé au
poids(que l'onappellead pondus)eſt celuy quia cgales portios & meſures des eleméts, Le tempoo
1
deſorte quenulicqualitépaſſe l'autre, ains eſt exa&emét mis en mediocrité des qua: rament ad
o trequalitcz. Telleeſt la peau intcricurc des extremicez des doigts d'vn hommetem- pondus.
perėàiuſtice:carle ſensdu ta& , qui principalement conſiſte en celle partic,& y eſt le
plus exa&, doit eſtreſansaucun excez desqualitez:autrement il n'cuftſccu faire bon
iugement, ny eſtro certain de chaleur,froideur,humidité & ficcité.Or telle tempera.
eure aduient àcelle partic,d'autāt qu'elle eſtcompoſec de chair quieſtchaude &hu.
mide, & detendons froids & ſecs:toutes leſquelles partics mellccs enſemble, font la
partic ainſi cemperce. Ainlil«cil qui eſt inſtrumentdela veuë pourdiſcerner les cou
leurs, acſtéfait lans aucuncapparence de cercaine couleur:l'oüye ſemblablementn'a
eſté doüec d'aucunſon diſtin & ,pourauoirplus certaine cognoiſſance des ſons:la lan
gucauli pourbien iuger des ſaucursd’areceu aucunc faueur de ſon propre nacurel.
Letempéréàiuſticeeſt celuy quin'aegaleny pareille portion des elements, ains de Le semper
telleproportion & meſure defdices qualitez à celle quieft conucnableà bien & deuë. rament
ment exercer lesa & iós de tout le corps ainſi temperé: & celtemperament eſt cogneu iuftice.
par la bonté & perfe & ion deſdices actions. Il eſt ainfi nommé , d'autant que tout de
b

1
8 Le Premier Liure de

meſme que juſtice diſtribui la recompence & la peine,ainſi qu'il appartient , ſelon la А
dignité & le merite d'vn chacun : auſſi nature faiſant à chacune partie denoſtre corps
ſelon la nature & excellence, a baillé vn tel temperament qui ſuffiſe à faire ſes a & tios
tres -parfai& es:cóme pour exemple l'os eſt conſtitué & composé des quatre elemens
comme les autres parties ſimilaires ; mais toutesfois nature ayant eſgard à l'uſage de
los qui eſt de ſouſtenir & porter , y a mis dauantage de l'element ſec, quieſt la cerre,
que d'autre, à fin qu'il fuft plus dur & ftable. Le ligament quine deuoit auoir telvſa
ge, a eu moindre partie de l'elemět ſecque l'os : toutesfois pourle regard de ſon vſa
ge , il en a receu dauantage que la chair,ou autre celle partie. Ainſi a eſté gardée vne
louable diſtribution & proportion des elemens à chacune partie , ſelon cequ'il luy
appartient , que nous appellons temperament à iuſtice. Es plantes , beſtes & autres
corps naturels, cel temperament ſe trouue , quand pour leurs actions ils ont telle me
ſure & proporcion qu'il appartient à leur nature. Par comparaiſon ,au temperament
de iuſtice nous auons huic differences des temperamens intemperez , ſçauoir eſt,
Chaud ,
Froid , { temperez en humidité & ficcité. B
Quatre ſimples
| Humide ;
( Sec , { temperez en chaleur & froideur.

r Chaud & humide.


Chaud & ſec .
Quatre compoſez Froid & humide .

( Froid & ſec.

Leſquels temperamens ſont ou de cour le corps , ou d'une

)
du Cerueau.
( principale , comme du Cæur .

partic du Foye .
ides Teſticules.
non principale , comme de toutes С
les autres parties du corps .

Et iceux téperamens ſont dicts ſains ou ſalubres, quád ils ſuffiſent à bien exercer les

.
a & ions:ou maladifs quand ils defaillent grandement à l'exercice de quelque a &tion.
Les ſignes de cels téperaments ſont deſcrits par Galien au 2. liure des Temperamės,
Conimeni, & au liure de arte Medicinali. Et faut icy noter , quand nousdiſonsyn corps ou partie
une partie
est diete chaude,qu'il faut entendre plus chaude que la temperee à iuſtice de meſmeelpece
:
chaude ox comme quand nous diſons qu'vn homme a le foye chaud,faut entendre qu'il l'a plus
froide, chaud que n'eſt celuy de l'homme teperé à iuſtice :car à tel corps faut reduire & rap
porter tout temperament, ſoit du corps entier, foit d'vne partie , auquel en la cura
tion des maladies faut principalemēt auoir eſgard: car il doit eſtre gardé par ſon ſem
blable,commenous dirons cy apres . Et pour autant qu'il eſt tres neceſſaire entendre

la diſtin &tion des temperamens, ie deſcriray briefuement les temperatures des par
ties du corps,desaages, des parties de l'an ,des humeurs, & des medicamens.
Des parties de noſtre corps ſelon leiugement non ſeulement duract de la main de

Les tempe- l'hommetemperćà iuſtice(qui ſouuét efttrompé par la chaleur fluente , quieſpăduë D

parties de par tout le corps,fait qu'à l'atouchement toutesparties du corps ſemblentchaudes)


,compoſition & ſubſtance d'icelles parties eſt tel,
noftre corps. mais d'auantage ſelon laraiſon
L'ors tres ſec & tres - froid .

Le cartilage moins que l'os.


Galien i.li Le ligament moins que le cartilage .
wie destem . Le tendon moins que le ligament .
peramens. Le rendon plus froid & ſec que la membrane.
La membrane plus que l'artere & veine.
Les pårties En apres ſont mis les nerfs durs :car les molstiennent mediocrité en l'humidité &
du corps ficcité, commela peau : combien que tous , tant mols & ſenſitifs que durs & motifs,
fanguines. ſont froids. Toutes leſquelles parties ſont froides & exangues deleur nature , toutes
fois les veines & arteres ſont chaudes à raiſon du ſang qu'elles cótiénent: lequel ſang
L'Introduction à la Chirurgie . 9

routesfois prend la chaleur du cæùr , qui eſt de toutes les parties du corps le plus ſan .
A
guin & ie plus chaud & le plus mol que la peau : le foye ſuit apres en l'ordre des par
ties chaudes , plus mol beaucoup que la peau.Car fi de l'opinion de Galien à la fin du
premier liure des temperamens, lccxeur eſt vn peu moins dur que la peau , & que lo
cæur ſoic plus dur que le foye,comme il appert par l'accouchement, il faut que le foye
ſoit beaucoup plus mol que la peau :i'entensla peau ſimple, ſans comprendre la chair
qui au deſſousluy eſt adherance . La chair eſt plus humide & chaude que la peau , à
cauſedu ſang.La moëlle del'eſpine du dos eſt plus froide & humide que la peau :le Lesempen
cerucau plus humidequ'icelle , & la greffe encores d'auantage que le cerucau . Les Tament des
Aage.
poulmons ſont moins humides que la grėſle , tout ainſi que la chair de la ratte & des
reins . Toutes leſquelles parties ſont plus humides que la peau. Selon les ages, la tem
perature cant du corps que des parties ſe change . Qu'il ſoit vray , l'os eſt plusdur , ſec
& froid en vieilleſſe qu’en ieuneſſe ou puerilité , d'autant que la vie de l'homme
tend touſiours à ficcité : laquelle eſtanc excreme en vn corps,cauſe la mort : qui eſt la
B raiſon pour laquelle faut parler des temperamens des aagcs , apres avoir premiere
ment expliqué par definition que c'eſt aage.

Del Aage. CHAP . VII.

'Aage donc eſt vn cours ou eſpace de la vie , par lequel la conſtitu


Definitions
tion & temperature du corps ſe change euidemmene de foy.mcſmc daage.
& fans ſuruenuë d'aucun accident. Or nous diuiſerons les aages en
quatre , à ſçauoir , Puerilité, Adoleſcence , leuneſſe ou virilité ,Vieil
leſſe . La puerilité, qui commence depuis la naiſſance de l'enfant, & Pucrilite.
dure iuſques à dixhuict ans , eſt de temperature chaude & humido
' ſçauoir fang & ſe
pour elre fort prochaine des principes de noſtre generation ,
mence , quide leur temperacure ſont chauds & humides . L'adoleſcence qu
quii com .
Adola
mence depuis dixhuict ans, iuſques à vingt & cinq, eſt la temperee & moyenncentre ſcence.
tous cxceż . La ieuneſſe ou virilité eſt priſe depuis vingt cinq ans iuſques à trente Icuneife?
с
cinq. Tel aage eſt chaud & ſec de ſon propre temperament:partant la chaleurdu

corps eſt fort acre & mordante , quien la puerilité eſtoit douce & amiabic, à raiſon vieillele:
de l'humidité du corps , qui puis apres a elté deſleichee. Vieilleſſe eſt diviſée en deux
parties : la premiere dure depuis crente cinq ans iuſques à quarante neuf:auquelaage
les hommes ſont appelez en Latin , Senes , c'eſt à dire vieils. La ſeconde partie de
vieilleſſe,ſelon Galien eſt diſtribuce en crois degrez : La premiere eſt, quand leshom- Gal.li.si
mes ont encores la vertu virilepour vacquer auxnegoces ciuiles : ce que ne peuuent Apk.18.
faire ceux du ſecod degré,pour l'imbecillité de leurs vertus . Ceux qui sõt au tiers de
gré , ſone vexez d'extremes imbecillitez & angoiſſes, impotens tant du corps que des
cſprits:i's ſont recourbez ,idiots, & en enfance retournez , & sõt du tout inutiles, def
quels eſt dit
, Bispueri ſenes .Ceux du premier degréſont ioyeux & encores vertueux,
on lesappelle communément, verds vieillards:lesſeconds ne demandent que la table
& lelia ,& les derniers que la foſſe. Or en vieilleſſe les hommes ſont froids & ſecs, Pourquoi
la vicillest
iulques aux parties ſolides, pour la conſomption de l'humidité ſubſtantifique ou ra
eft froide
dicale,prouenant de la multitude des ans:ce quipeut auſſi aduenir par maladie febri
ſeiche
D le . Mais ſiquelques ynsvouloientdire que l'hommevieil ſouuopt mouche & crache
grande abondance d'humidité, ie leur reſpondray que le vieillard ne doit pource
eſte die humide : car ( comme dic quelque bon docteur ) yne bouteille pleine d'eau
rend grande liqueur de la concauité, neantmoins elle a le corps ſec : ainli le vieillard
eſt humide d’excremens, par fauce de chaleur naturelle. Toutesfois né faut tant
aftraindre ces deſcriptionsdes aages , qu'il les faille touſiours definir par les ans , veu
qu'aucuns ſont plus vieils en l'aage de quarante ans , que les autresà cinquante. Ec
Pythago ?
pour le dire en bref : le grand Philoſophe Pythagoras diuiſe la vie des hommes en
raso
quatre anges , la comparant aux quatre temps de l'annee :diſant que l'enfance eſt le
Printemps auquel toutes choſes ſont en fleur, commencent à croiſtre & augmenter .
La ieuneſſe eſt comparee à l'Eſté, pour la force & vertu que les hommes ont en cec
aage. L'aage viril eſt comparé à l'Automne,pource qu'en cec aage l'homme a l'expe .
tience,elt meur & de bon conſeil , auec cognoiſſance certainc de pluſieurs choſes,
bij

1
10 Le premier Liure de

La vieilleſſe cſt comparce à l'Hyver, tęps ſans fruiet,ennuieux , & qui n'a le bien d'au
cun fruie , ſinon qu'ils ſoient procedez d'autre Or A
temps . quant à l'aage caduque &
decrepitee , qui dure iuſques à quatre vingts ans , eit froide,leiche & melancholique,
tellement que ceux qui paruiennent iuſques à icelle , font faſcheux ,chagrins, deſdai

gneux , deſpits , & ſouvent perdent la veuë & memoire, l'ouye, le parler & cheminer ,
& veulent couſiours eſtremaiſtres, ſuperieurs & obeys , & en fin retournent en enfan
ce, & font le ſemblable que les enfans. En decrepitude le corps eſt fort appeſanti, &
le iugement & entendement commence à diminuer & defaillir, tellement qu'ils de
Ariftot. uiennent en enfance ,& ne viuent qu'en douleur. Toutesfois le ſens & entende
lib . z.de
anima. ment demeure en ſa pureté & vertu , & ne defaut que par l'impuiſſance des inſtru
mens,où ſont contenus les facultez animales , vitales , & naturelles qui ſont ſubiects
à pluſieurs alterations& corruptions : parce qu'ils ſont corporels & materiels, & non
Vide com .l'eſprit , lequel ne vieillit point, mais bien le corps. Tels cont les temperamens des
Gal. in
aages qui-muent pareillement les mæurs : car les vieillars aiment l'exercitation de
apb. 1.fe &t.
1.lib.i. l'eſprit, & lesieunes l'exercitation du corps . Auſſi les vieillars ſont fort ſubjects à

Epid. l'auarice & crainte : & les ieunes au contraire ſont prodigues, gaillards & hardis. B
Faut auſſi declarer ceux des parties de l'annee , qui ſont quatre , comme auons
dit cy-deſſus. Le Printemps , l'Eſté , l'Automne, l'Hyuer. Le Printemps , qui
commenceau douzieſmcou treizieſme de Mars , & finit enuiron la moitié du mois
de May , a eſte conſtitué d'Hippocrates , chaud & humide. Opinion qui n'eſt
tant procedée de la verité , comme nous pouuons colliger de Galien au premier
liure des temperamens , que de la ſentence des anciens Philoſophes, qui ont voulu
meſnager & departir les quatre temperatures des aages proportionnément aux qua
tre ſaiſons de l'an . Car à vray parler le Printemps eſt de la propre nacure tempe
ré, eſtant mis au milieu de tous excez , de chaleur , froideur, humidité , ficcité. non

Aph.g. par.comparaiſon qu'ilſoit pluschaud que l'Hyuer , ny plus humide que l'Eſté : car
il eſt ainſi atcrempé de ſa propre nature : par ce moyen Hipocrates a dir , que le
1.3.
Av. 3. li. Printemps eſt cres-lain & tres - ſalubre, n'eſtant pointſubie & à maladies qui puiſſent
des aph . & cauſer la mort : ce qui eſt entendu quand le Printemps garde la nature & propre
auli.de
temperature :cars'il a quelque intemperature , ou bien s'il ſuccede à quelque ſaiſon
l'air des С
lieux , intemperée de l'Automne ou de l'Hyuer , il eſt cauſe de pluſieurs maladies que
deſcric Hipocrates : non qu'il face telles maladies , mais parce qu'il les demonſtre
& mer en evidence , les inuitant à ſortir dehors par ſa tiedeur. L'Eté qui commenco
L'Efté.
à la my.May & dure quatre mois ou enuiron , eſt chaud & lec de la nature, fore ſub

ie & t aux maladies provenantes de cholere , laquelle eſt en ce temps faire du ſang
quia abondédu Printemps. Toutes les maladies qui ſuruiennent en Eſté , ſont ren
Automne. duës briefues & de pecice duree. L'Automne ,qui commence depuis que le Soleil eſt
entré en Libra , & dure preſque autát que le Printemps,eſt ſecde la nature, mais tou
resfois en chaleur & froidure inegal:car le matin & le ſoirsõt frais, le midy eft chaud :
partant il eſt fort ſubiect à maladies, leſquelles ſont fort longues , principalement

Hip. lib. z. quand elles tiennent yn peu de l'Hyuer : au reſte fort pernicieux , pource que quoti
Aphe. diennes & repentines mutations dechaud & froid ſont fort perilleuſes. L'Hyuer,
L'Aguer. qui dure le reſte de l'an ,decelle durée quel'Eſté, eſt froid & humide de ſon tempe
rament : à ceſte cauſe il augmente noſtre chaleurnaturelle ,l'appetit & le phlegme:
D
la chaleur quidem par antiperiſtale, qu'on appelle , c'eſt à dire , par contrariecé de
l'air voiſin , quieſtant froid , retient , & par ce moyen augmente & fortifie la cha .
leur internc au dedans: mais le phlegme, parce qu'augmentant l'appetit , il rend les
hommes plus voraces , dont s'enſuit crudité : parquoy il rend les maladies plus lon
gues & difficiles à guerir , que nulle autre partie de l'an . Sous la contemplacion des
parties de l'an on peut comprendre la varieté des temperamens des iours particu .
liers qui ne ſont à meſpriſer pour faire elleâions quand rien ne nous preſſe,ſùiuant le
alph. 4. dire d'Hippocrates en les Aphoriſmes,quád en vn meſme iour ilfaitchaud & froid,
il faut attendre auoir des maladies automnales : & de ce eſt priſe l'indication de l'air
ambient', comme nous dirons cy - apres parlant des indications curatoires : car s'il eſt
Le tempe ſemblable à la maladie , il nous falche beaucoup : mais au contraire , s'il contraric

gamens des au mal,ilnous aidegrandement. Les temperamens des regions & pays chaud ou
bwmeurs. froid ne font pas de petite importance, mais ie les laiſſeray à meſſieurs les Phyſiciens,
à fin de dire des temperatures des humeurs. Le ſang, comme repreſentant la naturo
/

L'Introduction à la Chirurgie . 11

A delair eſteſtimné chaud & humide ,ou pluſtoſt temperé , comme teſmoigne Galien
ſurla ſentence 36. du liure 1. de natura humana :ileſt, dit - il , tout aſſeure que le ſang
n'eſtchaud & humide, mais temperé: & tellement temperé , qu'en iceluy nulledes
quatre qualitezcontraires ne ſurpaſſe euidemment l'autre , comme le meſme Ga
lien repete ſur la ſentence trente neufieſmedu meſme liure. Le phlegme eſt froid
& humide , ſemblable à l'eau. La cholere eſt chaude & ſeiche , tenant de la nature
du feu. Le ſuc melancholique eſt ſec & froid , eſtant de la nature de la terre : coutes
fois les eſpeces du ſuc melancholique & du phlegme ne ſont pas toutes froides: car le
phlegme ſalé eſt de temperament chaud & ſec, auſſi toutes les eſpeces de melan
cholie contre nacure , ſont fort chaudes , à railon qu'elles ſont faites par aduftion ,
comme nousdironsau chapitre ſuivant. Les temperamens des medicamens ne ſont Les tempez
pasconſiderez en la maniere que les autres cy-deſſus, ſçauoir eſt dela qualité de l'é- ramens
medicaodes
lement quia eſté le maiſtre; ains par les operations nous iugeons des temperatures
B
des medicamens, quand ils ſont appliquez ſur vn corps temperé . Car vn medica- mens.
mene eſtant mis ſur tel corps , s'ileſchauffe , nous diſons que cel medicament eſt
chaud :s'ilrefroidit , nous le renons pour froid : s'il ſeiche, il ſera dit ſec : s'ilhu
mecte , il ſera dit humide : & ainſi par leurs effects nous les conſtituons chauds,
froids,ſecs& humides , ainſi quenousdeclarerons cy -apres plus amplement au pro
pretraité des medicamens,où nous declarerons les temperez & autres tanc chauds,
froids , fecs, que humides , au 1. 2. 3. 4. degré : auquel traicté dirons auſſi des
temperatures des faueurs , à cauſe que par icelles nous cognoiſſons certainement
les qualitez des medicamens. luſques à preſentauons parlé des cemperamens: faut
venir aux humeurs , qui ne ſont de moindre vſage & confideration qu'iceux tem
peramcns.

Des Humeurs. C H À P. VIII..

A conſideration des humeurs eſt de grande importance , tant au vfage des


C Medecin qu’au Chirurgien , à raiſon que toute maladie ayant ma. bumeurs.
tiere au corps , eſt engendrée de quelqu'vn des humeurs , ou de
pluſieurs aſſemblez. Ce qui a eſmeu Hippocrates au liure de Ne
tura humana, à dire , que ſelon la diſpoſition d'iceux, humeurs,
l'homme en tout ſe
porte bien ou mal. Qu’ainſi ſoit , toutes les fiéures putrides
ſont faites d'humeurs putrefiez , & corrompus au corps humain : auſſi toutes ſortes
d'apoſtemes & tumeurs contre nature dependent de quelqu'vn deſdits humeurs:
& ſelon la diuerſité d'iceux, les differences des tumeurs ſont faites, ainſi que nous
dirons cy-apres au propre chapitre desApoſtemes. Les vlceres, & playes ,& fractu
res ſone guaries par le beneficedeshumeurs, nourriſſans les parties offenſées: qui eſt
la cauſeque bien ſouuent en la curation cant des apoftemens qu'autres ſolutions de
continuité , nous ſommes contraints de rectifier le ſang , c'eſt à dire , ies quatre
humeurs conſtituans la maſſe ſanguinaire, quand il peche en quantité ou qualité:
y a vice au ſang par quantité , comme quand il eſt en trop grande abon .
car s'il
i dance,ou s'il y a mauuaiſe qualité, comme quand il eſt tropchaud, trop froid,
D trop cſpais& cras, trop coulant & Auxile , ou ayant autre qualité ſemblable, nul
1

le a& ion de nature ſe pourra deuëment faire. A ceſte cauſe ont eſté inuentez
deux remedes louables : la ſaignée, pour corriger la quantité du ſang , & la pur
gation , pour oſter la mauuaife qualité : à preſent declarerons ſeulement leidies
humeurs, commençans à leur definition .Humeur , et cout ce quieſtAuxile , cou- Definition:
lant , liquide , tant és corps de l'homme que de toutes beſtes ayans ſang, lequel eſt
ou naturel, ou contre nature. Le naturel eſt ainſi appelé , à raiſon qu'il conſti Diuifion
tuë le corps , & le maintiene en ſon eſtre: faut entendre le contraire de celuy qui
eſt contre nature. Celuy qui eſt naturel a deux differences : car ou il eſt bon &
profitable pourrnourrir les parties denoſtre corps , ou il eſt inutile à ce faire , ains
Quct - ce
aautrevlage au corps que de nourrir, & eſt excrement du naturel , qui eſt nour que fang en
riſſement,ainſi que dironscy-apres. Le naturel propre & conuenable pour nour - general, cam
rirnoſtrecorps , eſt l'humeurcontenu és veines &arteres d'un corps bien diſpoſe enlier.particu,
& temperé ſelon nature, lequel nous appelons ſang , qui eſt tout ce qui apperc
1 b iij

!
12 Le premier Liure de
ſortir des veines quand on fait vne ſaignée. Et telle eſt la ſignification generale du A
lang : car en particulier il eſt prins pour vne diſtinction de couleur rouge, eſtant en
ration la maſſe ſanguinaire. Et pour declarer cecy plus facilement, je commenceray à la
generation du'lang, tant par ſa caule efficiente que materielle:qui n'eſt autre choſe
que noſtre boire & manger, lequel eſtanc attiré par la vertu atıra &trice du ventricu .

le, & là retenu , par la vertu coctrice dudit ventricule , eſt tourné & conuerti cn vne 1

ſubſtance ſemblable à vn laict d'amandes : jaçoit que telle matiere ſoit fort diffem
blable & de parties bien diuerſes,ainſi qu'il ſe void en tant grande varieté des vian
des quenousprenons. Telle matiereeſtant ainſicuitte audic ventricule, eft appelée
Chylus, laquelle eſt apres pouſſée és inteſtins greſles, & ſuccée & attirée d'iceux par
WA ,
les veines meſaraiques, puis diſtribuée à la veine- porte , où aucunement elles'altere,
& de la veine porte eſt enuoyée au foye qui par ſa chaleur & vertu de faire ſang à
luy ſeul propre & particuliere la conuertit en vne ſubſtance rouge ſembiable à vin,
laquelle nousappelons ſang : & en ceſte operation du foye font faits tous les hu
meurs naturels, tantpropres à nourrir , que non propres. Le ſang eſt celuy qui doit B
nourrir , lequel certainementnepourroit ce faire, s'iln'eſtoit purgé de deux ſorces
la cho- d'excremens : deſquels l'vn cſt attiré par le folicule du fiel, que nous appelons bilis
flaua,c'eſt à dire , cholere iaune : l'autre par la vertu ateractrice de la ratte, que nous
(uc me-appelonshumeur mclancholique, qui ſont deux humeurs naturels , non toutesfois
voligac. de nourriſſemens,mais de quelque autre vlage : deſquels nous dirons plus ample
ment cy.apres ,& aufli des trois ſortes de concoctions quilont au corps. Lelang
eſtant ainſi purgéde ces deux ſorces d'excremens , eſt porté par les veines & arteres à
toutes les parties du corps pour leur nourriſſement :lequeliaçoit qu'ilſemble eſtre
ſimple, toutesfois on y peut trouuerquatre corpsdifferens, qui lont, le lang , ainſi
fiinElion eſté
particulie rementnon
diſtinguez dit,lephlegme, &lclucmelancholique: leſquelsont
la cholerc
ſeulement par coule urs,maisauſſiſaueurs & effects : caron trou
:hu
urs par uera auſdits humeurs , faueurs differences, comme dit Galien au commentaire ſur
leurs, le livre de la nature humaine : car l'humeur melancholique eſt aigre , la cholere
ears Gamere , le ſang doux , & la pituite naturelledouce , inſipide , n'ayant aucune ſaucur
cits. apparente. Les effe & s d'iceux ſont trouuez auſſi fort differens, tanten leurs qua
litez qu'en la nourriture du corps& generation des maladies : à ceſte cauſe il y aune С
certaine proportion & meſure deſditshumeurs , laquelle eſtant gardée donne ſanté
au corps : mais ſi elle eſt corrompuë , elle apporte & cauſe maladie. Qu'il ſoit vray,
nous diſonsqu'vn ædeme eſt fait de ſang phlegmatique , vn ſcirrhe du melancholi.
que,vn eryſipelas du bilieux & cholerique, vn phlegmond'vn bon ſang & naturel.
-elle com
Or pour declarer & demonſtrer facilement les quatre humeurs eſtre compriſes au 5

raiſon delang prins generalement pour la maſſe ſanguinaire , Galien donnecxemple aſſez 4

sleen.
familier du vin nouueau , auquelon peut trouuer quatre corps differens:car il y a
la fleur qui eſt au deſſus, la lye qui eſt au fond, la verdureouaquoſité , & la bonne
liqueur ,douce & amiable : la fleur repreſente la cholere , qui eſt la plus ſubtile des
humeurs , ſe monſtrant touſiours au deſſusdecouleur d'or & luiſante : la lye repre
ſente l'humeur melancholique , qui eſt touſiours au deſſous à cauſe de ſa peſanteur,
& eltcome la fece & lye du ſang:la verdure ou aquoſité eſt ſemblable au phlegme.
Car tout ainſi que la verdure,ſi elle n'eſt trop grande , par la chaleur naturelle du
vin ſe peut tourner en bonne liqueur: auſſi le phlegme , qui n'eſt autrechoſe qu’vn
ſang imparfai&, peut eſtre fait par noſtre chaleur naturelle bon ſang : à ceſte cauſe D
naturen'a deſtiné aucun lieu propre pour le ſeparer du ſang, comme elle a fait des
autres. La propre liqueur du vin repreſente le ſang ,à cauſe que tout ainſi que tello
liqueureſtlapartic meilleure & plus louable du vin , ainſi le ſang eſt le plus parfait
des humcurs. Parcel exemple familier il et facile à entendre la diſtin &tion des hu
meurs,laquelle ſera plus ample & claire par la table ſuiuante.
L'Introduction à la Chirurgie. 13
A Nature. Cõſiſtēce. Couleur Saueur: Vlage.

Le De la nature Mediocre , Rouge & Doux . Il nourrit principalement


fang. de l'air chaud ny trop vermeil. les parties muſculeuſes:eftdi
& humide , eſpais,ny Atribuépar les veines á arte
ou pluſtost trop. clair. res , donne chaleur à tout le
temperé. corps.

Le De la nature Fluxile. Blanche. Douce ou plu Elle nourrit le cerueau , com .


phle- del'eau ,froi iftoft fade: car me auſſi toutes autres parties
gme ou de@hamide. ainſi eſtimós froides humides: módere le
pituite. nous ceſte eau ſang , da aide le mouuement
bonnequin's | des articles.
B aucun goust.
Lacho-l De la nature.Ténuë do laune ou Elle excitela vertu expultri
lere. du feu ,chau- fubtile. palle. ce des intestins , attenuë le
de & ſeiche. phlegmequi eſten iceux :ce que
Amere. i'entēds de l'excrementitielle:
commeaußi l'alimētaire nour
rit les parties qui approchent
plus prés de fonnaturel.
L’hu . De la nature Cras,eſpais, Noir. Acide e poi llexcite l'appetit, ilnourrit
meur de la terre , e limo gnant. la ratte , & toute autre partie
melan- froid & ſec. neux. qui luy eſt ſemblable en iempe
cholic. rature, comme lesos.

с
Le ſang eſtfait de la partie la plus benigne de tout le chylus , contenués veines , & Dequos
principalement eſt formé au foye, ainſi qu'auons dit : Il eſt procreé des alimensde en quel tệps
ſe fait le
bonſuc,prinsapres exercicesmoderez : & plusen vn aage qu'en vn autre : & en vnebon lang.
partiedel'année conuenable plus qu'en l'autre,quieſt le Printemps , lequel du rouc
approche à la nature du ſang :(donts'enſuit que le ſang ſoit temperé en ſes qualitez ,
Confirma:
non chaud & humide , come ainli ſoit que ſelon l'opinion de Galien au premier des cion de la
Temperamens, le Printemps eſt auſſi temperé,commeaeſté touché par cy.deuant .) Temperature
Parquoy en ce temps ſont fai& es couſtumierement les bonnes ſaignées.L'aage fort du fang.
propre à engendrer tel humeureſt l'adoleſcence, ou commedic Galien, depuis
vingt-cinq ans iuſques à crente- cinq:ceux,auſquelstel humeur abonde , ſont mode.
rez, rouges,coulourez,amiables & vermeils, ioyeux & plaiſans.
Le phlegmeeſt fait des alimens froids & cruds,maisprincipalement en hyuer & en
vieilleſſe à raiſon de la conſtitution froide & humide, tác de l'aage que de telle partie
de l'an.Il rend l'home endormy , pareſſeux & gras,ayant troptoſt lescheueux blács.
DLacholere eſtcommela fureurdeshumeurs, laquelle eſt engendrée auec le ſang au
foye,& portée és veines & arceres : & celle qui excede,eft enuoyée en partie au folicu
ledu fiel,en partie s'exhale par inſenſible traſpiration & ſueurs:car le ſang des arteres
cſtplus ſubtil, & plus iaunc que celuy des veines,ainſi que dic Galiē. En ieuneſſe & en
Eſté eſt fait tel humeur,tât des viandes acres,ameres ou ſalées, que du trauaild'eſprit Au liure
6.de locis
& du corps :auſſitel humeur eſt principalement purgé en cel temps. Il rend l'homme affcctis.
leger,fubit,facile àſe cholerer , & prompt à coutes choſes, maigre , agile , qui a coſt
fair digeſtion des viandes qu'il a priſes . L'humeur melancholique eſt la partie la plus
groſſe du ſang, lequel en parcic eit reietté du foye, & atciré parla ratte pour la nutri
tiond'icelle ,& expurgation du ſang en partie porté auec le ſang,pour nourrir les par.
ties de noſtre corps les plus terreſtres. Il eſtfait des alimens de grosſuc & difficiles à
cuire , & aullides ennuis & faſcheries de l'eſpric: il redonde principalement en Au.
tomne , ou enl'aage declinant & premiere vieilleſſe: & rend cel humeur les hommes
b ii ‫زن‬
14 Le premier Liure de

criſtes,faſcheux ,fermes,leveres & rudes,envieux & timides . Et faut entendre , que A


tels humeurs ſe meuuentà certaines heures duiour : comme le fang domine depuis
les trois heures apres minuiet iuſques à neuf, la cholere depuis neuf iuſquesà trois
apres midy : & depuis trois heures iuſques à neufdeloir la melancholic : depuis neuf
heures iuſques à trois apres minui& le phlegme ou pituite . Lequel mouvement des
humeurs clairement le cognoiſt, entre autres en la groſſe verolle , ainſi quedironscy
Des bus apres.lly a deux humeurs quiſontſeparez de la maſſe languinaire comme excremés
meurs ſepa de la ſecõde co &tió , deſquels I'vn eft gros, & l'autre eſt lubtil :ceſtui-cy eft appelécho
rez de la lere , ſimplement dite,ou auec vne addition ,cholere iaune : l'autre eft dit cholere noi .

wale ſan- re,en Latin melancholicushumor,qui eſt attirée par la ratre , de la portion d'icelle la plus
guinaire, & tenuë & elabouree par la chaleur des arteres, qui ſont en ce lieu cres- inſignes,la ratte
de leur vla- ſe nourrit iuſques à tant qu'elle la faſche pour la quantité ou qualité : & alors icelle +

eſt portée de la racte par le vaiſſeau veineux à l'orifice du ventricule , pour inciter
l'appetic , & ayder les a & tions dudic ventricule. L'autre cholere eſt attirée par le foli
cule du fiel,où elle demeure tant qu'elle ne peche en quantité ou qualité : & alors elle B
palle par les inteſtins , pour les purger & nettoyer par ſon amertume & acrimonie ,&
pour irriter la vercu expultrice d'iceux,auſſi pour tuer les vers quiy lonc quelquesfois
engendrez : cel humeur a couſtume detcindre de couleur iaune les vrines . Il y a vn
L'humeur autre humeur ſereux,inutile à nourrir ,mais au reſte fort profitable ,lequel n'est excre .
Sereux est ment de la ſeconde coction , mais de la premiere : coutesfois n'a esté separé du chylus,
excrement comme l'autre excrement gros , ains gardé pour delayer & deſtremper le ſang trop
viile de la
gros ( & pour ce eſtappellé le vehicule du ſang) qui autremết ne pourroit etre facile
premiere
coction . nient porté par les veines capiMaires, tant de la partie ſime, que de la gibbe du foye
iuſques à la veine caue : & iceluy humeur ſereus,auec quelque portion du ſang, est at
tire des reins par les veines emulgentes, & ſeparé du ſang / lequci eſt la propre nourri
ture des teins ) puis eſt enuoyé à la vellie , & fait vrine , & de là ietré hors. Touſiours
quelque portion d'iceluy demeure auec le ſang , qui eſtpurgé par ſueur, & eft la pro

pre matiere d'icelle.Ily a quatre humeursde nourriſſemens, ainſidi &ts non queceux
Des quatre qu'auons parauant diet eſtre contenus en la maſſe ſanguinaire, ne nourriſſent auſſi:
humeurs(c- mais parce qu'ils ſont la matiere plus proche de l'aliment: comme les quatre conte
С
condsins. nus en la malle ſanguinaire ,lamatiere plusremote & eſloignée)inuentez des Arabes ,
que l'on nomme ſeconds.Le premier d'iceux n'a point de nom qui eſt l'humeur eſtát
encores en l'extremité des pecices veines , & là encores pendant comme vne petite
gource.Le ſecond eſt appellé Ros,quieſt l'humeurja imbu à la partie pour ļarroſer, &
ja preparé à nourrir . Le troiſieſme s'appelle Cambium ,qui eſt ja changé & aglutiné, &
peu s'en faut ja tourné en nourriſſement. Le quatrielme eſt appellé Gluten ,qui eſt la
propre humidite ſubftantifique, & parfaict nourriſſement des parties ſimilaires: leſ.
deſcrits
quels quatre humeurs ſeconds ſont fort ſemblables aux degrez de nutrition ,
par Galicn és liures des facultez naturelles : qui font, qu'il faut que le lang affluë à la
partie qui doit eſtre nourrie : puis qu'il ſoit fiché & aglutiné : & finablement qu'ilſoit
aliimilé, & fait ſemblable à la partie . Les humeurs contre nature ſont ceux , qui eſtans
corrompus alterent le corps , & les parties où ils ſont, cauſans ordinairement mala
Des ha- dies . Ils reciennent les meimes noms des humeurs naturels de nourriflement. Tous
meurs con
leſquels par putrefaction ſont faicts chauds , iaçoit qu'aucuns d'iceux ſoient froids
tre nature.
de leur nature: d'iceux les vns ſonc faiếtstels aux veines ſeulement, les autres non és
D
veines , mais auſſi hors d'icelles .
Ceux qui ſont engendrez és veines ſont le ſang & la melancholie : la cholere , & le
phlegme lont faicts tant hors des veines , que dedans icelles. Le ſang en ſe corrom
pant , ſelon Galien , ( a portion plus ſubtile eft tournée en cholere , & la groſſe en cho.
lere noire, parquoy le Tang eſt corrõpu ou de luy meſme à raiſon de la pourriture , ou
parmeſlange de ſubſtance eſtrangere comme d'autres humeurs , enuoyez és veines
par les autres parties , comme du foye,de la ratelle & poulmons. La melancholie qui
eſt faite és veines.eſt de trois differences. L'vne eſt faite d'humeur melácholique,par
vnechaleurpourriſſance ou autre, & cournéeen cendre : partant celle melancholie eſt
brufléc,chaude,acre, & mordante . L'autre eſt engědrée de la cholere vitelline, c'eſt à
dire ſemblable à moyeux d’aufs: laquelle par aduſtio eſt faicte porracée , apres airu

gineuſe ,& à la fin rouge, & de rouge noirc, qui cſt lamelácholie pirede toutes : car el
leeft maligne,boüilláce ,rongeáte,cxulcerante , & iamais n'eſt cirée hors du corps ſans
L'Introduction à la Chirurgie. IS
A dommage.Latroiſicſmeeſt faire de phlegme pourry és veines, & tournéen phlegmo
falé ,& apres par grande chaleur eſtrange en melancholie.
( Es veines , ( L'aigre ou acide fortcrud , lequeln'arecen aucuneaction outrecelle
Le phle i duventricule , ou bien petite.
sme către Le ſalé eſtfaitdudoux eštant pourry& bruslé,parlemoyēqu'au.
nature eft | Horsdesveia cunepartie du doux eſtmeſlee avec les parties bruſlees.
engendré, j nes font en
comme gendrez ex- (L'un est tenu & fubtil,come l'eau diſtilantedu cerueau parle nez,
auonsdit, cremensſem-| L'autre eſtſemblable à morue ainſi e peſſepar le benefice d'unepe
04 blables à tite chaleur.
>
(phlegme,def L'autreeſt sēblableau verrefödu,ouaubinsd'eufs,qui eſttres froid
( quels Le quatrielme est gipleus,àcauſe qu'il adhere & s'amaſſe tout ainſi
Il quedu plastre,comeapert ésiointures des doigts & auxpoulmós.
B
[ comme
Es veines , ( Cellequireſsēble aux iaunes d'æufs,quipourcete cauſe a eſtéappel
qui eftquafibruslée & cuite extrememētparunecha
leur acre ,de, laquelle
léevitelline
quelquesfoisésgrădes maladies eſt faiteche
Vlere airugineuſeou verte,commeporreau ,darfemblable à pastel.
Lacholere
contre na 1. Cellequialacouleur deporreau,dicteporracée.
ture eft 2. L'airugineuſe ayant couleur de verd degris.
faite ou Dedislevie
Dedūs levča! 3. Celle decouleurdepaſteldite 1fatodes.
tricule, s'en-< 4. La rouge ſemblable auſang quantà la couleur , differente d
igendre. I raiſon qu'elle ne ſe prend point.
(s. La plusquerouge qui engendre filuresardantes.
Telles ſortes decholeres font quelquefois iertées lors parvomiſſement, leſquel.
les on ſent fort acres & mordantes,aucunefois ameres, & faiſant malés parties par ou
с ollespaſſent: ce qui aduient principalement à la declinaiſon des fićures.
CH A P. I X.
Lesſignes de l'hommeſanguin.
R puis que du ſang s'engendre la chair , il eſt manifeſte que l'homme
bien charnu, & muſculeux, & qui a vne habitude de corps ferme, auec
vae exhalation de tout le corps vaporeuſe & benigne, eſt fanguin. La Quel of
perſonne ſanguine a pareillement la couleurbelle, vermeille,8. melléc de l'homme
blanc& derouge: de blanc,àcauſeducuir partie ſpermatique relle
& blanche de rouge, jünguin.
couleur reluit en
à raiſon du ſang quieſt an deſſous:car pour le dire en vn mor ,
la face,quel eſt l'humeurcaché deſſous lecuir : ſes mæurs ſont paiſibles , ioycuſes &
faceticules: eſtanı tel homme liberal,doux, benin,gracieux, courtois, & de bonne na
ture,riant,& amoureux des Dames. Il ſe courouce difficilement : car quels ſont les
humeurs, telles ſont les inclinations des mæurs. Or eſt-il que de tous leshumeurs, i

il n'y en a point de plus doux & paiſible que le ſang : l'homme ſanguin en outre ,
boit & mange beaucoup , à cauſe qu'il a grande chaleur naturelle,illuë volontiers,
D. illonge choſes ioyeuſes & plaiſantes, il eſt fuiet aux maladies cauſees du ſang, com
me aux phlegmons , puſtules ſanguines eſpanduës par cour le corps , au flux de
fang , par lesnarincs, & grande abondance de flux menſtruel: il endure ſansdanger
la ſaignée, il eſt promptement offensé des choſes chaudes & humides, & foulagé des
contraires : au reſte ila le pouls fort grand & plein, l’vrine copieuſe en quantité,mais
mediocre en couleur & ſubſtance.
Les ſignes de l'homme cholerique.
Ils ont la couleur citrine ou iaunaſtre,& le corps maigre & greſle, & forc velu , les Quel est
peines & arteres fortgroſſes & amples,le pouls fore & frequent:on trouue au coucher l'homme
leur corps chaud & lec, dur, aride & aſpre, auec vne vapeur acre qui exhale de coue choleric.
leurcorps: ils iettentbeaucoupdecholere par les ſelles, vomiſſemens & vrines: d'a
1
uantageils ſont adextres d'entendement, & merueilleuſement prompts & vigilás:ils
ſontauſſifelons, audacieux, conuoiteux de gloire , aſpres vengeurs des iniures à eux
fautes, de ſorte que le lang leur boule d'ardeur, leår face, leur voix , leur geſte, leur
16
Le premier Liure de

mouuement, font chágez & muez:aufli ſonoliberaux , voire ſouuent prodigues . Leur A
dormir eſt petit , & leger, leurs ſonges ſont de choſes bruſlátes , furieuſes & luiſantes:
ils ſe delectent à manger & boire choſes froides & humides : dauantage ils ſont ſujets
aux fiéurestierces, & aux ardantes , & reſueries, & alienations d'entendement, aux
iauniſſes, aux herpes,cryſipeles ,& autres puſtules choleriques , & ont ſouvent amer
tumede bouche, & lont ſuiets au fux de ventre,appelez diarrhées & dyſenteries.
Qul is Signes de l'homme phlegmatique.
I bomme
Ils ont la face blanche , & quelquesfois plombine & liuide , & enſemble bouffie :
phlegmatic la maſſe du corps elt gralle & molaile , & froide aucoucher :ils ſont ſuiets auxmala
que.
dies faites de phlegme, commeſædemes , tumeurs molles & inſenſibles, aux hydro
piſies, aux ficures quotidianes, à l'alopecie , aux frequentes diſtilations & rheumes ..
ſur la trachée artere & poulmós :ils ont l'eſprit lourd , groſſier & ftupide: ils ſont forc
pareſſeux, & dorment profondement : ils longét ſouuent qu'il pleut & neige, & pen
ſent nager & noyer : ils vomiſſent beaucoup de phlegme & aquofitez, & fouuent
crachent grande quantité deſaliue, & jettent excremens ſemblables par les narines :
B
ils onc la langue fort blanche & humide: ils ſont inſatiables, & ont vn appetit canin ,
quand la pituite predominate eſt de l'eſpece de celle qu'on appelle acide : & cuiſent
leurs viandes tardiuement , dont s'enſuit qu'ils engendrene grande quantité d'hu
meurs froides & picuiteuſes , leſquelles le plus ſouuent s'amaflent au boyau nommé

D'ou pro Colon ,lequelpar ce moyen ſe tend & faic vn bruit grenouillant , preſque ſemblable
pro aux cris des grenouilles , & one grandes douleurs , & leur semble que les parties do
grenouillane lentes ſoient tirées & bandecs, dont s'enfuit la colique paflion : A raiſon que telle
anx boyaux matiere humide & pituiteuſe par vne chaleur imbecille, quelle eſt celle des hommes
phlegmatiques , s'eſleuent aisément des ventoſicez ,quide leurlegereté portées çà &
là par les circonuolutions des inteſtins, les enflent, & cherchansifluë dehors font yn
bruit tel que le vent paſſant par vo lieu eſtroit & anguste.
Les lignes de l'homme melancholique .
Le premier ſignceſt pris de la couleur, c'eſt que la face cſtbrune ou noiraſtre, auec
vn regard inconſtát, farouche & hagard, triſte, morne , & renfrongné. Le ſecond
eſt
pris des maladies, principalement lors que l'humeur melāscholique eſt mellé aucc C
la choleré , & qu'il s'eſt tourné en aduftion : car lors il aduient rongne & gratelle
crouceuſe , morphée , noire, chancre vlceré & non viceré , ladrerie , & pfora , qui eſt
eue c'est
vne rongne puante, où ileft trouuéde petits corps farineux, maladie quieft dite du
que plora.
vulgaire,malſainct Main : ils ſont ſubiečtsaux (chirhes ,hemorrhoides,varices, fieures
quartes,continuës, intermittances& frequentes, quintaines ,ſexcaines, lepcaines , qui
toutesfois aduiennent fort rarement : à dureté & tumeur de la ratelle . It's ont les
veines & arteres forreſtroites, à cauſe de la frigidité de leur temperament , le propre
de laquelle eſt de reſtraindre, comme le propre deta chaleur eſt de dilater : que fi
quelquesfois les veines en telles perſonnes ſemblent enflées, ce n'eſt point un bon
lang , mais pluſtoſt d'vne ſubſtance facueuſe , à cauſe dequoy ils ſont difficiles à lai.
gner,non ſeulement parce qu'il ne ſort rien ou peu la veine eſtant ouuerte , pour la
terreſtrité & cardicé de leurs humeurs : mais à cauſe que la veine ne fait pas beau ieu
à la premiere impreſſion de lancette, tant pource que le cuir des melancholiques
eſt dur & rude , que auſſi qu'elle n'eſtantpreſque pleine que de vent , elle Auctuë &
Quel off ondoye çà & là . Leur corps eſt froid & dur au coucher , ils ont fonges & idées en D
Tbomme
dormant fort eſpouuentables : car quelquefois leur eſt aduis qu'ils voient des dia
melancho- bles , ſerpens, manoirs obſcurs, ſepulchres & corps morts , & autres choſes ſembla
lique.
bles , leſquelles impreſſions ſont faites au ſens , à cauſe des vapeurs fuligineuſes de
l'humeurmelancholique, qui monte au cerueau , ainſi que nousvoyons aduenir à
ceux quitombent en hydrophobie. Ils ſont graues & malins , fraudulens, trompeurs,
chiches , & extremement auares , cardifs à payer leurs debtes , craintifs, criſtes, cha
grias , grongnars , de peu de parole , pleureux, penſifs , ingenieux , deſirans grandes
& excellentes choſes,& ſont fortſoupçonneux, ſolitaires, haïffansla compagnie des
hommes,fermes & ftables en leur opinion, tardifs à ire , mais quand ils fe courrou
cent , ils s'appaiſenc difficilement. Et lors que l'humeur melancholique a excedéſon
degré de juſtice , ils deviennent par pourriture & aduftion dudit humeur furieux,
maniaques , & ſouuent ſe precipitenr & tuent . Ils ſont cruels,opiniaſtres,inexorables,
& leur eſprit n'a point ou peu de repos : dont toutefois ne faut faire reigle generale
L'Introduction à la Chirurgie. 17
А

ains conſiderer ce que Socrates reſpondit à ſes diſciples, qui ſe mocquoit du phy .
lionome qui auoit iugé leur maiſtre (qu'on eſtimoit le plus continent & chafte de ſon
temps ) eſtre paillard: l'eſtois ( dit - il , tel de nacure , mais la Philoſophie m'a enſeigné
autres mæurs . Car la bonne nourriture , & les lettres peuuenc changer l'inclination
naturelle. Les gens de cæur & magnanimes ont eſté pour la pluſpart melácholiques,
aulli fort ingenieux , ſages & prudens. On void pareillement aucuns auoir le viſage
d'vne vierge, & le courd'vn lion ,commeAlexandre le Grand . Plurarque dir que
ceux qui ne ſont pas cocalement bien nez, eſtás (ccourus par bonne doctrine & exer
citation , peuuent recouurer le defautde leur nature : ainſi qu'une cerre aride & pier
reuſe plus qu'il ne ſeroit de beſoin , eſtant neantmoins bien cultiuée,porte bon fruit.
Il eſt vray que lelon la diuerſité des humeurs & temperamēs , les hõmes ſont ioyeux ,
riants & amoureux,audacieux,conuoireux de gloire,vengeurs des iniures , iniuricux,
liberaux,prodigues,d'eſprit lourd & tardif,grolliers, pareſſeux, malins , frauduleux,
B trompeurs,chiches, auares, craintifs, triſtes,penſifs, ingenieux,ſolitaires, fermes,ſta
bles en leur opinion ,furieux & maniaques, menteurs , faciles à accoſter , miſericor
dieux, enuieux,ignares, fols ,ſocs,badins,variables, querelleux ,prudens, & ont autres
affections de l'ame. Or il faut icy noter qu'vn hõmequi ſera de temperature & com
Par quel
plexió ſanguine, peut venir en cóplexion cholerique,ou melácholique,ou phlegma. moyen fe
cique: comme le ſanguin pourra deuenir cholerique , vſanc d'alimens trop chauds & peut chan
er a om
ſecs (car chacune choſe engendre ,cõlerue & augmére ſon ſemblable , & 'deſtruir ſon gger l c
contraire ) faiſantgrands exercices :auſſi par intermiſſi on d'euacuati on des excremés plexionna,
cho ler iqu es i
,qu ſou loi t eſt re u
faite ,ou par arto natu re ll em en t. Aufli toute perſonne iurelle.
de quelque temperature qu'il ſoit,peut venir melácholique ,vſant de viandes quien
gendrene vn gros ſang , comme chair de bæuf,de cerf,vieils lieures,porcs,fourmage ,
e
& autres viandes trop ſalées.D'auantag la vie triſte empeſchéede beaucoup d'affai
res,ſoins,cogitations ,contemplations , lolicitudes, procez , eſtudes ou lectres ,& pour
eſtre trop ſedentaire : car par faute d'exercice la chaleur naturelle s'aſſopit, & les hu
meurs deuiennentgros & terreſtres :auſſi la demeureen vne region froide & ſeiche:
C pareillementfauted'euacuation accouſtumée de l'humeurmelácholique,qui auoit
accouſtumé de fluer par les hemorrhoides,méſtruës,ou de l’euacuation des humeurs
par le ſiege. Toute perſonne pour comber en temperature phlegmatique, ( non par
tranſmutation du ſang en phlegme , mais par eſcháge & mutation de maniere de vi
ure )s'ilvſent d'alimés froids & humides ,s'ilprend auſſi viandes exceſſiuemét & hors
detemps & heure deuë, & deuant que les premieres ſoicot cuites, digerées & diftri
buées: auſſi s'il fait grands mouuemens deuant que la conco &tion ſoit faice :pareille.
ment la demeure en vne region froide & humide :la vie oyſiue ſans aucun ſoucy ne
triſteſſe :l'intermiſſion delcuacuation du phlegme faire naturellemét,ou par l'arti
ficedes medicamens, par vomiſſement, cracher, moucher , luer, toutes ces choſes
amaſſent le phlegme en noſtre corps, & rendent le ſang phlegmatique, & par conſe
quent chágent toutel'habitude de noſtrecorps . Ce qui eſt bien à noter pour ſçauoir
liceluy quieſtpituitcux, melancholic,ou d'autre temperament, eſt cel denature dés
La premiere conformation, ou deuenu & fait tel par maniere de viure deſordonnée.
D Quant aux parties du corps ou membres, ſerói deduites cy-apres bien amplement
en l'Anatomie , & pource n'eſt beſoin icy d'en parler : parquoy laiſſanc icelles nous
viendronsaux faculcez, apres auoir premierement enſeigné par exemples plus par
ticuliers la pratique des reigles generales des temperamens données par cy -deuant.

Pratique & exercice furles reigles données des temperamens e humeurs.


CH AP.

Our accommoder la theorique des temperamens à la pratique , il m'a Lesbómez


ſemblé bon ,pour euicer la confuſion qui aduiendroit ſi nous voulions ſui- fone dilem
ure les differences qui ſont és temperamens des hommes de toutes les blables
R
prouinces de la terre , nous propoſer les quatre extremitez d'icelle : [ça- pour la di

voir l'Orienr , l'Occident , le Septentrion, le Midy : & puis le milieu & quafi tion desrea
comme centre de ces quatre parties du monde habitable : Afin que les tempe gions.
samcns des hommes de telles regions expliquez en couleur , en mæurs, en action,
cludes , & façon de viure ,feruent comme de, rcigle & conduite à cognailtre

OTHEQUE CANTONE
LAUSANNE
COLTAIRE
18 Le Premier Liure de

& iuger du temperament de chacun en particulier,ſelon que le cognoiſtrons eſtre ou A.


approcher de ceſte region ou de celle - la.
Les Meridionaux , commeles Æthiopiens, Afriquains, Arabes, Ægyptiens& au
tres , ſonc ordinairementplus difformes, maigres,& defaics, de petice ſtature,la cou .
leur cánce,obſcure & baſanée, les yeux noirs,lesléures groſſes& elleuces,les cheueux
creſpus, & la voix grelle ,caffee, & feminine.Les Septentrionaux, comme les Scythes,
Polaques, Allemans, & autres,lonc au contraire de ſtaturcgrande & bien diſpoſec, le
plus ſouuent de pleine & graſſe habicude de corps. Ils ont.couleur blanche, la peau
delice ,les cheueux vnis,longs,blondsou roux, les yeux de couleur de ciel , auec vnc
voix aſpre, forte & enrodee. Ceux d'entre deux ,comme les Italiens, François , & au
tres,font de couleur vn peu brune,beaux,gaillards, robuſtes, velus , grelles,charnus,
ayans les yeux de cheure,ou tannez,la voix pleine,claire , & douce.
Comparai LesMeridionaux eſtans plus foibles de corps, ſont fort excellens en gentilleſſe
son desMe d'eſprit , au contraire des Septentrionaux qui l'ont lourd & groſſier, mais
ſurpaſſans
ridionaux les autres en force corporelle. Ce qui ſe cognoiſtra par les diſcours des hiſtoires, par B
1 auec les Se- leſquelles nous voyons couſiours les Scythes , les Gocs & les Vvandales auoir fait in fi
ptentrio- nis rauage par l'Afrique & l'Eſpagne:breftouſiours les grandes Monarchies ſe ſont
DAHX.
dreſſees du Septentrion vers le Midy , & peu ou point du Midy vers le Septentrion .
C'eſt pourquoy les peuples dece pays ne vuidoiệt leurs querelles autrement que par
le duel, comme on void és loix anciennes des Lombards , Anglois , Bourguignons,
Danois , & Allemans, meſmes que Fronton Roy de Dannematc ordonna les diffe
rensn'eſtre vuidez par autre moyen , comme dit Saxon l'hiſtorien : couſtume quieſt
generale en tout le pays de Moſcouie. Laquelle au contraire à touſiours eſté reprou
uce comme choſe beſtiale par les Meridionaux : & n’a iamais eſté receuë & pratiqueo
des Affyriens Perſes ,Hebrieux,& Ægyptiens quien recompenſe ſe ſont balty & eri
gévne Monarchie ſur leslettres & ſciences occulces par leur bon eſprit , d'autant
qu'eſtans naturellement melancholiques, à raiſon de la ſiccité de leur temperament,
s'addonnent volontiers à ſolitudes & contemplations, eſtans tres-ſubtils & inge
nieux.Parquoy les Æthiopiens, Ægyptiens,Lybiens,Hebrieux,Phæniciens,Perles,
Affyriens, & Indiens, ont inuenté pluſieurs belles ſciences , deſcouuert les ſecrets de
С
nature ,dreſſé les Mathematiques,oblerué lesmouuemērs celeſtes, & premierement
dreſſé l'eſtat de la Religion , iuſques là meſme que les Arabes , qui ne viuent que do
larcin & brigandages , & qui pour toutes maiſons n'ont que leurs chariots, ont plu
ſieurs belles obſeruationsde l’Aſtrologie, qu'ils baillentdemain en main à leurs luc
ceſſeurs, & augmentent tous les jours , comme recite Lcon l'Africain . Mais les Se
prentrionaux , comme les Allemans, pour l'abondance de l'humeur & du ſang qui
empeſche la ſpeculation , s'appliquent plusaux choſes ſenſibles & aux ars mechani

ques, cítans leurs eſprits groſſiers & lourds par la peſanteur du corps retirez du ciel
embas versla terre ,içauoir à la recherche des mecaux & conduite des mines , à fon
dre & forget ouurages en fer ,acier ,cuiure ,airain , eſquels ils sót admirables, iuſques à
auoir inuēté la canonneric & Imprimerie.Les peuples d'entre- deux, n'eftans naisny
1
aux ſciences occulces comme les Meridionaux , ny aux mechaniques comme les Se .
ptentrionaux , s'addonnent aux affaires d'eſtat,à la Police, & au trafic :eftans au reſto
doüez de ſuffiſante force corporelle pour domter les ruſes & fineſſes de ceux du Mi.
dy , & d'aſſez bon conſeil & aduis pour rompre l'impetuoſité de ceux duSeptentrion.
D
Cela ſe cognoiſt par l'exemple des Carthaginois , Africains, qui ayans long.temps
trauaillé l Italie par ruſes , fineſſes & ſurpriſes , n'ont toutesfois peu cuiter qu'ils ne
ſoient combez ſous lcioug & monarchie des Romains . Les Gots, Huns, & autres
Aquilonaires , ont fai & pluſieurs ribleries ſur les Romains , mais faute de prudence
n'ont ſceu garder & retenir ce que la force corporelle leur auoitacquis . Parquoy les
hiſtoires nous teſmoignent queles bonnes loix , la façon de bien regir vne Republi.
que, la Diale & ique & Eloquence ſont venuës de la Grece , Italic ,& France : quionc
fourny & fourniſſent encores auiourd'huy ( principalement les deux dernieres )plus
d'eſcriuains & gens de lettres, que tout le reſte du monde enſemble .
Donc pour attribuer à chacune region ce qui luy appartient:les Meridionaux

ſont propres à cſtudier : les Septentrionaux ,à guerroyer & execucer :'ceux d'entre
deux, à regir & commander : l'Italien cſt prudent : l'Eſpagnoleſt graue : le Fran
çois diligent & a & if, de ſorte qu'on le diroit courir lors qu'ilacvaque le pas ,au re.
gard

}
L'Introduction à la Chirurgie. 19
A gard de l'Eſpagnol: qui pour ces'aide volontiersd'vn ſerviteur François, à raiſon de
fon allegreſſeen couces ſes actions. Les Orientaux entre eux ſontplusvigoureux
&fermes d'encendement , ne celans rien : car par droi&t nous diſons l'Orienteſtre de
nature ſolaire, & parcane ceſte partie du jourdoiteſtre eſtimec plus virile & dextre:
aulli voyons nous és animaux les parties dextres eſtre plus robuſtes: au contraire les
Occidentaux ſont plus effeminez , mols & ſecrets: car ceſte particeſt deuë à la Lu.
ne qui ſe monſtre touſiours vers l'Occident, entre leseſpaces interlunaires: au moyen
dequoy ceſte partie eſtantoppoſee à POrient, eſt comme nocturne, reputee ganche
ouinitre. L'Occidenc eſt moins temperé & falubre, de ſorte qu'entre tous les vents
il n'y ena pointde plus propice & falutaire, que celuy qu'on appelle Subſolanus, qui
ſouffle d'Orient. Car bien que le Zephyrus, vent fauorable , ſouffle de POcci.
dent,coutesfois il ſouffle fort rarement, & preſque ſeulement lors que le Soleilſe cou
che. Les Septentrionnaux mangent bien & boiuentencor micúx , libres à parler
B
apres le vin, non cauteleux, le deportans aisément de leur promeſſe, au reſte fort
chaſtes. Les Meridionaux au contraire ſont ſobres, ſecrets, rulez, & laſcifs en toute
vilennie de paillardiſe.
Ariſtote en les Problemes dit , que les nacions tant celles qui ſont trauaillees de
chaleur cxcelſiue que de froidurc,lonc barbares & fieres: d'autant que la bonnctem
perature de l'air rend les mæurs plus douces. Parquoy les Scythes,Allemans,& au
tres Septentrionaux ,& pareillement les Africains & Meridionaux ſont cruels : ceux
là-d'vne brauade,audace militaire, & pluſtoſt de cholere , que d'vne vengeance pre
meditée, parce qu'ils ne peuvent par raiſon dompter& brider leurs premiers mouue
!
mens & imperuoſitez : ceux-cy de pure & cauceleuſe malice & de propos deliberé,
à raiſon de leur natureltriſte & melancholique. Des Septentrionaux nous fera foy Hiſtoire
la cruauté deceux de Tranſilvanic contre le ledicicux Duc Georges , lequel ils fei
renc deſchiser vif à belles dents par leurs ſoldats , qu'ils avoient pour ce faire tenus
trois iours ſans manger : puis Payans fait roſtir à la broche, le firentdeuorer par ceux Autre bi
qu'ils renoientcaptifs deſon party. Pour les Meridionaux nous ſuffira l'exemple dufoire.
Carthaginois Hannibal: qui voyant quelques captifs Romains , leſquels il faiſoit
C ſuure ſon camp à pied , eſtre ſi las & du chemin & du fardeau, qu'il lescontraignoit
porcer,qu'ils ne pouuoient paſſer outre, leur faiſoit couper le deuant des pieds, & les Valere lim.
abandonnoit ainſi par le chemin. Les autres qui ne s'eſtoient monſtrezrecreus, & y. Chap.as
eſtoienc parúenus iuſques où ils pretendoient , il les faiſoit combattre frere contre
frere, parent contre parent,& amy contreamy:ne ſe raſſafiant de leurſang reſpandu
tant qu'il les euſtrous reduictsà vn ſeul vainqueur. Regardons les Meridionaux de
l'Amerique: ils baignent leurs enfans dedans le ſang de leurs ennemis,en apres ils
fuccent & ſe repaiſſent de leur chaic eſprainte entre deux pierres. Or comme les
Meridionaux ſont exempts d'vne infinité de maladies plethoriques qui viennent
d'abondance de lang,auſquelles ſont ſubie&ts les Septentrionnaux, comme fiéures,
Auxions , tumeurs , fólies auec riſee qui les incice à dancer & ſauter durant Paccez,
qu'ils appellentmalS . Vitus, & le guariffentpar muſique :aufli au contraire,ils ſont
fubie& s auxfrenaiſies qui viennent auec fureur & rage, prediſans quelquesfois les
choſes aduenir,ayanspluſieursſongeseſtranges, & parlans pluſieurs langages inco
gneus durant l'accez:à toutes ſortes de gratelle & ladrerie , maladie ſi commune en
tre eux ,qu'on ne rencontre par les champs en l'vne & l'autre Mauritaniepreſque
D qu'hoſpitaux pour les ladres.
LesMontagnarsſont plus farouches & durs au trauail. Ceux qui habitent en la Leon PA
plaine, ſont plus mols: principalement ſi elle eſtmareſcageuſe,commenous cognoil- fricain , can
ſons par l'exemple des Holádois & Friſons. Mais ſi elle eſt batcuë de chaleur & Couf. Alwarez.
fice de pluſieurs vents impetueux , ils fone d'eſprit turbulent , mutin , cupide denor.
ucauré, impatient de ioug , & ſeruitude,comme nous cognoiſſons par l'exemple de
ceux de la Gaule Narbonoiſe.Ceux qui habitent en terroir ſterile, ſont ordinaire .
ment de iugement plus accort & plus excitez au trauail, comme nous monftrent
lescxemplesdesAtheniens en comparaiſon deceux de la Bæoce de Grece, les Ro.
mains encomparaiſon de ceux de la terrede Labour , & les Geneuois en comparai
voiſins
ſon de leurs .

C
20
Le premier Liure de
Des facultez. CHAPITRE XI .
Aculté ou vertu ,eft vne cauſe efficiente prouenant du temperament
de la partie,laquellefait quelque a &tion au corps. Ily a au corps hy
main irois facultez principales qui le regiſſent & gouuernēt ,& eſquel
les conſiſte toute noſtre vie quand elles ſont entires, à fçauoir ,l'Ani
male, Vitale, Naturelle. L'Animale eſt aſliſe au propre temperament
lafacul. du cerueau, quila diſtribuëà touteslesparties denoſtrecorps,par lemoyédes nerfs,
par leſquels eſt donné ſentiment & mouvement. Icelle eſt de trois fortes,
L'vneeſt motiuc, l'autre ſenſitiue, & la tierce appellée princeps, c'eſt àdire , princi
pale. La ſenſitiue conſiſte en cinq ſens exterieurs, ſçauoireſt, laveuë, l'ouye, le gouſt,
le fair ou odorat . , & Partouchement. La motiue conſiſte principalement és nerfs &
muſcles, qui ſont inſtrumensdu monuement volontaire. La principale eſt celle qui
faic la ratiocination,la memoire, la fantaſie ou imagination, ſous laquelle Galien cõ .
prend le ſens commun & interieur,bien qu'Ariſtoteles diſtingue l'vned'auec l'autre,
la facul. La Vicale eſt ſituee au cæur , qui diſtribuë chaleur & vie aux parties de noſtre corps
vitale. par le moyen des arteres. Telle faculté eſt principalement empeſchee és affe&tions de
la poi&rine ou thorax,comme la ſuperieure,quád ſuruient quelque affection du cer
ueau, la plus remarquable : cariaçoit qu'elle ſoit impoſſible deloy, ſi eſt -ce qu'en ces
inſtrumens elle peut ſouffrir beaucoup. Action de faculte vitale eſt la pulſation & ba A
tement continuel du cæur & des arceres : de laquelle il furujent trois profits & yſagesà
tout le corps : car par la dilacion du caur & des arteres i’eſpric vital par l'air ambient
fage de le attiré eſt nourrie par leurcontraction la fuligine eſt chaſſee hors : & par tous les deux
ullutiondu la chaleur de couc le corps eſt rafraiſcije & temperee. La troiſieſme eſt la faculté na A

ehtGoar- curelle eſtant au foye principalement : & celle qui donne nourriture à coutes les par
res.
de la faculties ducorps laquelle vniuerſellement eſt diuiſee en trois, çauoireſt,generatrice,fer
naturelle. uant à la generation & formation de toutes les parties du corps au ventre de la mc
re : l'auêtrice ou augmentatrice, qui commence depuis la delineation & conforma
tion , & dure iuſques à ce que les parties ſpermatiques ayent prins leur grandeur &
magnitude ſuffiſante en latitude,longitude& profondité. Car ainſiles parties deno
ſtre corps s'augmentent, & tout par le benefice de la nutritiue, laquelle ſert à la gene.
ratrice & au &trice. La nutritiue donc eſt celle qui repare & reſtablit la triple ſubſtan
E
аче пwtri cede noſtre corps.quia eſté perduë & diſlipee par le côtinuel flusd'iceluy, s'il eſt ainſi B
jon. que nutrition ne ſoit que repletion de ce qui a eſté vuidé. Ceſte faculté commence
désle premier commencement de la formation denoſtrecorps , & dure iuſques à la
diſſolution d iceluy : parquoy elle eſt de grande contemplation. Icelle eſt accomplie
par l'aide des quatre autres facultez naturelles ſpeciales, çauoir eſt, Attractrice, Ře.
centrice,Concoctriceou Alteratrice, Expultrice & Sequeſtrice.
Des
quatre L'attra&trice eſt celle qui a le moyen d'attirerà ſoy leſuc & aliment qui luy eſt con
aculiczna uenable ( & telſuc eſt celuy qui peut eftre fait ſemblable à icelle partie) commeaffez
urelles sp. cuidemmenrelle le monſtre en vn homme affamé: car auant que le morceau ſoit
tales,cha8 malché,ileſt rauy & attirépar la vertu attra& rice: ainſien vn quia grád ſoif,le boire
eruanics cſt promptement attiré.Laretentriceeſtcelle quigarde & recient ce quia eſté attiré,
les trois iuſques à tantqu'il aye eſté cuit, digeré & preparé à nutrition :partát elle ſertgrande.
remicres. ment à la vertu coctrice : car la chaleur naturellene peut faire coction,fil’alimēr n'eſt
comprins, gardé & arreſte pour cftrcalceré, & du tout entierement changé & fait sē
blable : comme pour exemple,la viáde eſtant attiree au ventricule, fiellen'y eſt rete
nuë,elle ne pourra eftre tournee'en chylus.L'alteratriceou cóco &trice change & tour С
ne ce quiauraeſté prins & retenu , & le fait du tout ſemblable à la partie dont elle eſt
faculté, le tout par le propretemperament & chaleur naturelle d'icelle partie. Ainſi
le ventricule faic vn chylusde tout le boire & manger quenousprenons : ainſi le foye
par ſa vertu coctricetourne & chágele chylusen ſang:auſſi le nerf & l'osmuenc& chá
gent le ſang qui leur eſt apporté par lesveines capillaires, en ſubſtance blanche & ſo
lide,qui auparavant eſtoit rouge & fluxile. Tellecoction en l'os & nerfeſt plus diffici
D'ex fortes le à faire, qu'elle n'eſt en lachair muſculeuſe, carà icelle le ság eſt fort ſemblable:par
d'excreměs. quoy auec petite alteration & deſiccation eſt tourné en chair: toutesfois telle altera
tion & coction ne ſe peur deuëment faire, ſi l'aliment n'eſt expurgé & nettoyé de ſes
excremens, & choſes qui luy ſont eſtranges. Parquoy non ſeulement à la premiere
& ſeconde coction (commenousauons die) y a deux ſortes d'excremens, ſçauoir eſt
le gros,& le ſubtil, mais auſſi en la troiſieſme, qui ſe fait en chacune partie : l'vn eſt
cognu par l'entendement quenous appellonsinſenſible tranſpiratio ,l'autre eſt au.
L'Introduction à la Chirurgie. 21
A canesfois cogneu par ſueurs, autresfois par la generation du poil & ongles, quiſone
engendrez des excremes fuligineux, gros & terreſtres de la troiſieſineco&tio:à ceſte
cauteily a vne quatrieſmefaculté naturelle quiayde à la nutrition qu'on appelleex.
pultrice, dedice àcxpeller & cierterles excremésſeparez par la vertu lequeltrice,où
leschoſes n'ont peu eltre alcerees & cuites , ny du cout aſſimilees. Tellesfacultez ai
dancesà la nutrition , ſont en acunes parties doubles,ſçauoit eſt, communes à tout le
corps,& outre propres & particulieres à elles, comme au ventricule ,au foye,aux vei
nes,cr aucunes,toutes quatre enſemble:cõmeaux parties cydeſſus diētes :en aucunes
deux ſeulement,comeau fiel à la ratte,és reins,& à la veſlie:és autres parties ſontſeu
lement particulieres& proprescomme és parties ſimilaires, & fanguines,eſquelles fi
l'une de cesquatre defaur,la partie eſt mallaine,demeurantaucunesfois atrophiee &
difforme, autresfois vlceree,autresfoisreçoit d'autres affections,à raiſon qu'elle n'eſt
bonnement nourrie. Qr celles facultez faiſans devëment leur deuoir , l'aliment ſera Que c'c
fait propre ſubſtance de la partie , qui eſt la vrayeaſſimilation,pardegrez & moyensqu'aſsimi
B quis'enſuivent:car il faut premierementqu'il affuë àla partie , puis qu'il ſoirapposé lation.
& mis : eſtant apposé, qu'il ſoit agglutiné , & fiché :-finalement apres l'agglutination
qu'il ſoit aſſimilé & fait du tout ſemblable. La faculté ſequestrice ou ſeparáre, eſt celle
qui peut tirer & faire choix des matieres entierement confuſes & mellees, de bon &
mauuais . Exemple:La veſlie du fiel attire à ſoy la cholere du ſang,laquelle n'apparoiſt
auſensde la veuë dedans le ſang: & les rongnonstireoc la leroſité du lang, & lamet
cent à part qui eſtiercee par l'vrine, Aulii le laic elt envoyé des māmelles à la mairie
ce,paſſantau trauers des veines remplies de lang. Et la bouë d'vne apoſtume faiete au
brasou ratelle,poulmons ou foye,& autresparties internes , eſt vacuee par les vripes ,
& par les ſelles,paſſant par leſang,ſansſe mixtionner auec luy.On void cela aux cho
ſesinanimees,comme és vaiſleaux de verrenommez monte vins,le v : n paſſer au tra.
uers de l'eau,& l'eau au travers du vin , ſans ſe meſler enſemble. Par plus forte raiſon
il ſe fai&t ſeparation desexcremens,par la vertu & faculté ſequeſtrice quieſt au corps
humain. Maintenant faut parler des actions qui viennent d'icelles.
с
1
Des actions. CH A P. X II.

CTION , ou fonction ,ou operation , eſt vn mouvement actif prouentde


la faculté:cartout ainſiquela faculté depend du téperament, ainſi Pa & ió de d'act
Difference
ion en
la faculté, & de l'action l'æuure.Et iaçoit que bien ſouuent font confondus Quares
a &tion & æuure , toutesfois il y a difference entreles deux : car l'action de.
monſtrele moduement à faire quelque choſe,& l'æuurela choſe ia faicte, & du couc
accomplie: comme nutrition , generation de chair,eft action de nacure: les parties ia
nourries,la chair engendree en yn vlcere caue, eſt æuure d'icelle. Parquoy l'æuure
depēdde Paction,toutainſi que l'action depēd de lafaculté, par le benefice des inſtru
mencs bien diſpoſez, & entiers : car ſila faculté defaut,ou qu'eile aye receu quelque 1

offenſe,nulle a tion ſe pourra faire:de meſme ſi les inſtruméesn'ont conuenablecon.


formacion ( qui eſt leur propre ſanté par laquelle les inembres & inſtruments ſont
prompts à faire quelque a &tion )l'a&tion ſera nulle,ou peu louable. A ceſte cauſe pour
1
D labonté & perfe&tiondesađions,ilfaut que les facultez , & les inſtrumensd'icelles
ſoienten deuë diſpoſition, & en leurencier. Lesactions ſontde deux differences :card fides
ou elles ſont naturelles,ou volócaires: les naturelles ſont ainſi appelleesà raiſon qu'el. A Ćos.
les ſont non volontaires ,& ont yne necellité en ſoy, laquelle nous ne pouuõsempel
cher,commele mouuement du cæur,le poulx de l'artere, l'expulſion desexcremens,
&autres telles actions naturelles,qui neſegouuernēt point ſelon noſtre propre vou
loir,Teilesactions procedent & viennent ou du foye,& des veines,ou ducæur,& des
arteres:parquoy on les pourra fpecialemēc appeller vicales & naturelles: car à chacu
nefaculté faut attribuer vne action ,autrements'enſuiuroit qu'vne faculté ſeroit oiſi
ue, & ſans yſage. Les non volontaires vitales, ſont Dilatation du cour,Contraction
desarteres, que nous appellons poulx. Par ladilatation ſont attirees les matieres, &
pat la contraction ſontdechaſſees.Les non volontaires naturelles ſont celles; Z!
Generation , Generatrice.
Auction prouenant de la faculté Auctrice.
Nutrition, suenant Nutrice .
22 Le premier Liure de

Dela geme Generation , n'eſt autre choſe qu'vne conformation de matiere , ou acquiſition A
Tation , de forme ſubſtancielle en la matiere, laquelle eſt accomplie par le moyen dedeux ver
que c'eſi. tus & facultez : l'vne eſt alteratrice , qui prepare & altere la ſemence & fang men
ſtruel, pour en faire os, chair, nerfs, ligamens,membres,& autres telles parties:l'autre
eft formatrice,quiforme & figure la matiere ia preparee, & luy donne ſituation.com
poſicion , & figure conuenable.
De l'au . Auction,elt ampliation ou augmentation des parties ſolides, en longueur , largeur,
Etron .
& profondité, gardant touçesfois lapremiere forme & figure & folidice. Or eft: il dict
en ceſte definicion , au & ioneſtre ampliacion des parties ſolidès, parce que d'icelles
ſeules depend toure l'eſſence de l'augmentation :car vn corps,pour amplifier en char
nure ou greſſe, n'eſt pas dit s'augmenter, maisſeulementſi quant & quant les par

ties ſolides s'augmentent, & principalement les os : de tant qu'iceux s'augmentans,


tout le corps pareillement s'augmente, encores que peut eltre il amaigriſſe.
Delanneri Nutrition eſt parfai& te aflimulation de la choſe quidoit nourrir , auec la partie qui B
rion . doit eſtre nourrie.Icelle ſe parfait par le moyen de quatre autres actions particulieres,
ſçauoir eſt attraction , recention, co &tion , & expuition. Les actions volontaires , qui
tiennent entierement de noſtre volonté , ſont ainſi appellees,à raiſon que ſelo noſtre
vouloir,nous les pouuons arreſter,ou excitei , & faire bafter, ou retarder , ainſi qu'il
nous plaiſt. Icelles ont trois differences: car où il y a ſentiment , ou mouuement , ou
De la fer action principale & princeſſe. Le ſentiment,ou lenſation , eſt fait en cinq fortes, qui
Sarion. font veoir,ouyc,odorer ,gouſter & artoucher :leſquelles actions ſont faictes par la cõ .
currence de trois choſes, à ſçauoir, d'vn organe ou inſtrumene, d'vn moyen , & d'vn
obiect. L'organe, cu inſtrument,eſt principalement l'eſprit animal duquelnous par
leronscy.apres )conduit & mené par les nerfs és propres parties où doiuent eftre faits
Pourquoy tels ſentiments: partant icelles parties ſeront priles à preſent pour inſtrumēts & orga
les parties, nes.Le moyen eſt un corps,qui porte l'obiea, & lerepreſente à l'inſtrument ou orga
antres , ne. L'obie & eft vne qualité exterieure, quia vertu d'elmouuoir l'organe par fayde
font priſes du moyen bien diſposé & affe&té.Ces choſes ſeront plus faciles,en declarant particu.
pour inftru- lierement vne chacunc a & ion par ces trois poinets neceſſaires. La viſion ,eft a &tion de
mens. la faculté viſuelle ,la quelle eſt faite en l'ail, quieft cóftitué de cuniques & d'humeurs o
Trois choſes ſeruants à faire telles a &tions:partakeſont pour l'inſtrument de ladite viſion. L'obiet
fort requi. & qualité viſible repreſentee audic inſtrumét,eft double:car ou ileſt viſible de la pro
fesa voir.
pre nature,commela lumiere, le foleil,le feu, la lune & les eſtoilles : ou par le benefice
d'un autre, comme par la clarté les couleurs nous font repreſentees : toutesfois tels
obicêts ne ſontconduits à l'inſtrument, ſi ce n'eſt par le moyen d'vn corps qui eſt
diaphane & tranſparent, comme l'air ou leau , ou la glace ou le verre.
L'ouyr a pour inſtrument le conduit ou trou de los petreux, nommé mamillaire,
Onyt. auquel il y a pannicule, nerfauditoire, & quelque air ou eſprit contenu audit trou de

l'os petreux.Son obie & eſt tout ſon ,quielt engendré de la percuſſion de l'air, & causé
de la colliſion & rencontre de deux corps,deſquels l'vn a receu le coup , l'autrela dó.
Odorer. né . Lemoyé eſt l'air exterieur qui porte le ſon à Poreille.Le ſentit & odeur eſt faict és
apophyſes māmillaires,produictes de la propre ſubſtance du cerucau , & alliſes ſur l'os
emoide, ſelon Galien . Toutesfois il eſt fait és ventricules anterieurs du cerueau : telle

ació eſt fort petite à l'homme au regard des autres animaux: ſon obie& eft route for
Gonfter. re d'odeur, quieft vne exhalation qui ſort des corps . Le moyé par lequel tel obiect eft
repreſenté à l'odorat,eft l'air,& aux poiſſonsl'eau.Legouſter eſt faict à la langue bien D
diſpoſee par le benefice du nerf venat de la troiſieſme & quatrielme coniugaiſon des
nerfs du cerueau, & diſpersé à la ſuperficie de la lágue.Son obiecteſt touteforte de fa
ueurs,deſquellesnous parlerons cy - apres en noſtre antidotaire.Lemoyen par lequel
Toucher.
relobiect eſt conduit à l'inſtrumét, elt exterieur ou interieur : l'exterieur eſt vneſaliue
humide & vnctueuſe de la lágue : l'interieur eſt la chair ſpongieuſe d'icelle lágue . Le
toucher , ou attouchement,eſt faict en toutes partiesayásnerfs , mais principalement
en vne peau nerueuſe diſpoſee par tout le corps , & mile ſous la peau :coutesfois le pre.
De la mo mier inſtrument eſt le cuir des doigts , comme auons dit au chapitre ſixieſme des
tion .
Temperamens. L'obie &t, eſt coute qualité całtile, ſçauoir eſt premiere,chaud.froid,
humide, & ſec :ou ſeconde, rude, poly , leger,peſant,dur, mol, fare , denſe, friable ,wn
& ueux, ſubtil & cras.Le moyen ,qui porte telobie &t à l'inſtrumét, eſt à la peau , ou à la
chair qui a beaucoup de nerfs meſlez auec elle . La ſeconde action animale , eſt mo
tion , ou mouuement ſpecialement dit volócaire, quieſt fait par le muſcle , appellé le
L'introduction à la Chirurgie. 23
A propreinfrument du mouuement volontaire. Les differences principales detelle a Comment
ction ſont,flexion & excenſion : toucesfois il y a autant de diuerſité de celles actions, la respird
quilya deſortes de poſitions ou differences locales:car le mouuemét eſt fait haur ou tionef aft:
bas, à dextréou à ſeneſtre, deuant ou derriere , eſquelles on pourra rapporter tant volontaire .
de fortes de mouuemens que nous auons au corps , proucnans d'vne infinité de muſ.
cles. Au nombre de telles actions volontaires faut referer la reſpiration ,à raiſon qu'i.
celle et faicte par le moyen des muſcles , nonobſtant qu'elle lerué à la refrigeration
ducæir: car nousla pouuons arreſter pour quelque cemps, quand il nous plaiſt, & la
faire plus frequente, ou rare, qui ſont les propres conditions du mouuement volon. tab le ion
Decif de no.
la
caire.Bre f,pour faire nité ie s
ſatis à vne infi d'ob &tion qu' fait cou on cha nt nt
ce poi , respiration .
nous dirons , que l'action de reſpirer appartient à la faculté animale , mais l'vlage & /

vtilité appartient à la vitale .


L'action principale , & premiere en dignité entre les actions volontaires, eſtdiui.De la prima
ſee en trois:car ou il y a imagination, ou cogitation & penſee, ou memoire. L'ima- cipale; dite
B gination eſt vne apprehenſion & recognoiſſance des choles & obiccts qui nous font Princeps:
repreſentez par les cinq actions ſenſitiues, cy deuanc declarces. La cogitation,ou ra
tiocination eſt leiugemenc , ou eſtimation, qui eſt faict des choſes conceuës & appre
liendecs,en les comparant & aſſemblant les voies auec les autres,ou les ſeparantlvne
d'aucc l'autre. Telle a &tion eſt communement appelee raiſon , & eſt la plusexcellen
te des crois. La memoire eſt la garde & conſeruation des choles apprehédees & im3
ginees, de là iugees & examinees, comme lechreſor, quieft quelquesfois deſployć &
ouuere quand les autres a&ions ceſſent. Ortoutescelles actions, tant natureiles , qu '.
animales & volontaires,lont faictes parkmoyen & benefice des eſprits,deſquels faut
à p:eſent parler.
Des eſprits. C H 4 P. X III .
ET

Sprit eſt vne ſubſtance lubtile , aërec , tranſparante & luiſan- dae reſ
parr qu'esprit
quee pa
ce faiete dela partie du ſang lapluslegere & tenuë, afin qu
OL

icelle la vertu des facultez principales , qui gouvernent noſtre


corps , foit conduite & portee aux autres parties, pour faire
с leur propre action. Car ſi celle verru n'eſtoit portce aux par
ties pourfaire leur propre action , elles periroient incontinent.
Tel cloric eſt communément fait triple, animal,viral,& natu De l'esprit
rel. L'eſprit animal eſt mis & logé au cerueau : car és veines & animal.
arteres dudit cerueau il eſt faic & elabouré , pour diſtribuer par les neufs, & porter le
ſentiment & mouuement és parties denoſtre corps. Qu'il ſoit vray, il eſt manifeſte,
qu'en hyuer, à cauſe de l'interception, ou glaciation dudit eſprit faicte par le froid és
parties externes comme la main,ily a deprauation ,ou diminution du mouvement &
{carimét. Il eſt appellé animal,non qu'ilſoit ſubſtáce de l'ame, mais à raiſon que c'eſt
le principalinſtrument d'icelle, quieſt logec au cerueau. Teleſprit eſt vne ſubſtáce
foreſubtile & ignee,laquelle ſelonladiuerſité des cinq ſens excerieurs,a diversnoms:
celuy quifaięt la veuë ou viſion , eft die viloirc ou viſuel ,lequel nous pourrons veoir
ſenſiblement ſaillir hors l'ail quád nous le frotons & agitons auec le doigt, & princi.
palement la nuiet.Celuy quieſt porté à l'ouye,eft dit auditif:celuy du gouſt guſtatif:
D celuy du coucher , ta&tif. lleſt fait és anfractuofitez des veines& arteresdu cerocau
dels partie la plusſubcilede l'eſprit vital,portéen haut par l'artere carotide,en partie
aulide l’air,ou vapeurs,ou odeurs que nous attirós,inſpironsparle nez és ventricu
les anterieurs du cerueau : & nous faiſons interception decel eſprit par ligatures fort
eſtreintes quand nous voulons amputer quelque membre. En vne paralyſie aufli ou
apoplexie ,à raiſon de l'obftru & ion qui ferme la voye audit eſprit, quelquesfois la
partic eſtpriuée de mouuement, quelquesfois de mouvement & ſentimene.
De leßris
L'eſprie vital, ſecod en dignité,eft allis au cæur, principalement au ventriculeſc. vital.
neſtre d'iceluy,& eſtporté par lesarteres à coutes les partiesdu corps,pour entretenir
& garder la chaleur fixe & allifedechacune partie, laquelle autrement periroit fielle
n'citoic maintenuë par la chaleur Auente , qui viēt auec ledic eſprit par les arteres en
chacune partie. Il eſt le plus ſubtilapresl'animal: partát il a eſte diligemment gardé
envnc tunique fort eſpiaffe, & preſque sčblable au nerf,ſçauoir la tunique interieure
del'artere, quieſt cinq fois aullieſpeſſe que celle de la veine,comme de l'opinió de
Herophilecité en Galien pluſieurslieux. Teleſpriteſt faic de la partie la plus ſubcile
dulang,& de l'inſpiracion del'air:parquoy s'il ſefaittrop grandetráſpiration,ouva
c iij
24 Le premier Liure de
cuation exceſſive, ou quelque corruption d'humeurs, ileſtincontinentperdu : auſi A
s'il letaict quelque inſpiration d'un air peſtilent,ou autrement putrefié & malin , ou
de quelque odeurinfecte, il eſt promptement corrompu, qui eſt la cauſe de la mort
tant ſubite des peftiferez.Quelquefois par obſtruction & redodance,ou quelque trop
grande inflammation,telesprit ne peut bonnement reluire à la partie, & entretenir la
chaleur naturelle d'icelle : dont s'enſuit corruption detoute la partie , que nous ap
pellons fpacelle ou fyderation,de laquelle nous parlerons cy-apres.
L'eſprit natorel ( fi d'auenture ily en a vn) eſt aſſis au foye & veines:ileſt plus gros
l'esprir beaucoup que les precedents,auſliinferieur en dignité,a & ion & vlage:lequel eſt d'ai
tarel.
der la nutrició dechacune partie,& conduire leſang & chaleur àicelle. Il y a d'autres
cſprics fixes & inferez és parties ſimilaires ou ſimplesdenoſtre corps quiſont ſembla. .

blemét naturels & engendrez en vne chacune partie d'iceluy. Er d'autant qu'ils ſonc
ſubſtances ætherees & ignees,ilsſont tellement conioinets auec la chaleurnaturelle,
que ſans icelle ils ne peuvent non plus ſubliſter ne demeurer que la fame du feu ſans B
ps esprits chaleur: leſquels auſſi auecicelle ſont comme lesvagabons & Auans,les premiers in
es en ſtruments des facultez & operations d'vne chacunepartie de noſtre corps. Or cesel
1cune prits fixes ſont nourris & entrerenus en noſtre corps de l'humeur radical, qui eſt de
nie.
ſubſtance aëree & huilleuſe, cărcnu és parties ſimples & ſimilaires lequelhumeureſt
le fondement & ſubſtance de ces eſprits fixes,& de la chaleur naturelle :pourtantnul
homme ne peut viure vo momēr de temps ſans iceluy, pource qu'ileſt la mariere ſub
iecte tanc de ces eſprits icy, que de la chaleur naturelle,ſansleſquels nulanimal peuc
viure . Car les premiers inſtruments de la vie de l'animal , ſont les eſprits & la chaleur
naturelle , deſquels l'ameſe ſert pour faire ſes operations: pourtát ſi ceſte matiere ou
humeur radicale eſt diſlipec ,quieſtlepropre liege des eſprits,& dela chaleur naturel
le commentſera-il poſible que leur lubitance puiſſe plus perfifter & demeurer ? Si
donc ceſteſubſtance radicale & ſubſtantifique perit , il eſt certain que la chaleur na
turelle s'eſteint, & par conſequét la morts'enſuit,quiprouient par la reſolucion dela
chaleur naturelle .Puis dóc que ceſte eſpece d'eſprits auec chaleur naturelle , eſt con
tenuë en vne chacune partie ſimilaire de noſtre corps,( car autremét elle ne pourroic
perſiſter )il s'enſuit qu'il y en a autant comme de parties ſimilaires : car vne chacunc o
d'icelles a ſon propre eſprit & chaleur naturelle , pource qu'elle a ſa propretemperan
ce & cóplexion,delaquelle l'eſprit & chaleur naturelle procede: pourtant l'eſprit qui
eſt en l'os , n'eſt pasceluy du nerf;ny celuy du nerf ,des veines .Ainſi peut -on iuger de
tous les autres qui ſont en vne partie ſimple.Et ceſte varieté & diverſité des eſprits fi
xes prouient de la variabletemperature & mixtion des quatre elemens d'où ils pro
cedent . Or telle conſideration des eſpritsn'eſt de petite conſequence, car en iceux
conſiſtent nos vertus & forces : de là vient que nous ſommes affoiblis & deſtituez
quafi de toutes forces, quand ils ont ſouffert par trop grande reſolutio. Parquoy faut
auoir diligemmenreſgard à la conſeruation & maintien d'iceux :car s'ils ſont foibles,
route indication curatiue des maladies ceffe, & bien ſouuent ſommes contraints laiſ
ſer la propre cure pour les reſtaurer & reſtablir en leur entier . Ce que nous faiſons par
viandes ja du tout preparées à nutrition , par bon vin , odeurs douces & amiables.
Autresfois ils ſontretirez au dedans pour quelque grande oppreſſion de nature,à ce b
fte cauſe par odeurs puantes & fecides ſommes contraints les reuoquer de dedansau
dehors. Iuſques à preſent auons declaré les choſes qui conſtituent & compoſent no.
ſtre corps, que l'on appelle naturelles ,& quelques vncs de leurs annexes : reſte encore D
à parler d'aucunes d'icelles.
? ? ( L'aage, duquel auons traité aux temperamens.
Le ſexe .
Les annexes La couleur.
des choſes La commoderation ou ſanté des parties inſtrumentaires.
naturelles Le temps, duquel auonstraicté aux temperamens .
fone , La region . 7

iL'art ,ou eſtat & maniere de viure.


L’Introduction àla Chirurgie . 23
A
Desannexesdeschoſes naturelles. CHAPITRE XIII

E ſexe n'eſt autre choſe que la difference du malle & de lafemelle:


en laquelle faut conſiderer que la femme a touſiours moins de cha
leur que l'homme , aufli qu'elle a quelques parties peu differentes , &
firveesen autre lieu quel'homme:d'auantageque lesparties ſperma.Du fete?
tiques d'icelle,ſontplus froides, plus molles & moins ſeiches que celles
de l'homme,& queles actions naturelles ne ſont tant parfaites en elle
qu'en l'homme. A la nature de la femme faut rapporter les chaîtrez‫ܪ‬,car ils degene.
rent en tel ſexe , & retiennent la nacure d'iceluy commeon voit par la voix feminine;
& defaut de poil par l'imbecille chaleur:coutesfois faux auoir elgard qu'aucunes fem 1

mes approchent grandement de la nature de l'homme,comme appertà la voix virile;


& quelquesfois on les voit porter barbeau menton. Au contraire aucuns hommes
B
retiennent de la nature de la femme,pourautant on les appelle effeminez. L'herma ?

phroditė, àraiſon qu'ilcienc de la nature de l'homme , & de la femme, il eſt moyen


entre les deux, participantde l'vn & de l'autre.
Lacouleur externe & adherente à la peau naturellement, demonſtre le tempera- De la comment
ment;car ainſi que Galien dit au comm .ſurle 2. Aphoriſme de la premiere lect. & leur.
autres lieux,la couleur ſe monſtre celle à la peau , quel eſt l'humeur contenu deſſous
elle:& pourtant ſi elle eſt rouge, vermeille & luiſance, elle monſtre l'abondance du
ſang & boncédes eſprits: ſi elle eſt iaune,elle declare la domination de cholere : fiel
leelt palle ou blanche, elle teſmoigne aſſez la mulcitudede picvice & phlegme;ſi elle
eſt noire ou canec,elle monſtre l'humeur melancolique dominer. Es excremens:na
turels,elle eſt de grande conſideration :comme pourexemple , en vn vlcere 'le pus
fortant blanc,demonſtrebonne diſpoſition de la partie vlceree : mais d'autre cou
leur,comme rouge & ſanglant,ou verd ,ou liuide,ou de pluſieurs autres meſlees en -
ſemble,il declarel'imbecillité de ladice partie , qui n'a eſté aſſez forte pour le faire
ſemblable à ſoy .Auſſi és tumeurs contre nature, la couleur monſtre la difference
C deſdites tumeurs ou complication d'icelles. La commoderation ou ſanté des par
tiesorganiquesconſiſte en figure,‫از‬magnitude;nombre, ſituation & connexion con .
uenable de chacune parcie. En figure , comme ronde des parties excernes , à fin
qu'elles ſoient moinsłubie &tes aux offenſes & dommages exterieurs. En grandeur De la coro
& magnitudeſeante,comme ſi elles ſont graſſes & groſſes , ou maigres & excenuees. moderation
Nombre des parties entier ou defaillant:entier ,comme de cinq doigts à la main : ou ſanté
defaillanccommeſi quelque partie naturelle defaut pour quelque empeſchement des parties
denature. En ſituation & connexion conuenable , comme quand chacune partie inftrumen
eſt en la ſituation naturelle, & bien vnie & aſſemblee l'vne avec l'autre. La partie de caires,
l'an a eſtéja declaree és temperamens. La region auſli eſt comprinſe ſous l'ait,duquel
nous dirons aux choſes non naturelles .
L'arc & maniere deviure & couſtume changent beaucoup , & du rout le tempera. De la regiõ
ment,parquoyſonrà conſiderer : mais elles ſont tant diuerſes & variables , qu'elles
!
ne peuvent bonnement eſtre deſcrites. Car ſi l'arc eltde grand crauail, comme des Deľ'art, on
laboureurs ,mariniers, & aucres artiſans quitrauaillent baucoup, elle rend les par de l'eſtat
D ties du corps plus ſolides, fermes, dures & plus ſeiches :toutesfois ceux qui conuer . O manie
ſentſur l'eau , iaçoit qu'ils s'exercent beaucoup , ſont ſubicêts à maladies froides:au re de vinte.
contraire,ceux quitravaillent au mecaux , commemareſchaux, ſerruries, fondeurs,
fonteſprins ordinairement de maladies chaudes ,comme fiéures , & autres. Sielle est
de petit trauailcomme de couſturiers , & autresquien exerçant leur art ne trauaillent
pas beaucoup le corps elle rendra le corps plus mol & excrementeux . Autant en fait
la maniere de viure oiſiue ſans trauail de corps & deſprit ,auec abondance des vian
des,laquelle ordinairement eſt ſubiecte à pierres, grauelles & gources . Celle qui a
quelque occupation , & non trop laborieuſe, & auecmediocrité des viandes ou abſti
nence,rendra lecorps moins excrementeux ,& legardera aucunemenc en lon tépera
ment naturel . Lebon eſprit & iugement naturel du Chirurgien pourra d'auantage
comprendre en chacun particulier. Et puis qu'auons ſuffiſamment & briefuement
declaré tant leschoſes nacurelles que les annexes, faut venir maintenant aux nonna .
turelles.
с iiij
1
26 Le premier Liure de
Des choſes non naturelles. CHAPITRE XV. А 14

Ovs auons declaré le plus briefuement qu'il a eſté poſſible les


iurquoy choſes naturelles,qui font la conſtitution de noſtre corps,leſquel
sbles
dictos les ſont compriſes en la premiere partie de Medecine, nonimee
malu Phyſiologie:faut à prelent deſcendre à celles quigardét & main .
is . tiennentlecorps,eſtant ainſi conſtituépaturellement,c'eſt à dire,
qui ſont hors la nature & eſſence de noſtre corps. Telles choſes
Galien appelle conſeruatrices,à raiſon qu'ellesconſeruent & gar ..

dent le corps en fanté: les modernes les ont nommees non naturelles , à raiſon qu'ela
les ne ſont de conſtitution ou compoſition du corps de l'homme , on les peut dire
neutres ou indifferenītes:car elles tiennent le licu moyen entre les naturelles, & celles
qui ſont contre nature:join & auſſi queſi elles ſont deuëmentappliquees,elles appor
cerontſanté: & au côtraire,fielles ſont maladminiſtrees:à ceſte caule icelles ſont com.
priſes en la ſeconde partie de Medecine,dite Hygiainc,c'eſt à diregarde de ſanté :non
pas qu'aucunes d'icelles ſoient celles qu'elles ſoienc touſiours ſalubres, autresinſalu. B
bres deleur nature? mais ſeulement pource qu'elles ſont faites & renduës telles par
vſage commode ou incommode,
Tel vſage conſiſte en quatre conditions,ſçauoir en quantité , & qualité, en l'oc
caſion, & en la maniere d'vler : leſquelles fi cu obſerues , cu feras que ces choſes quide
ſoy loneindifferentes, ſeronr touſiours ſalubres: car deces quatre dependenttoutes !

les regles& preceptes de ceſte partie de Medecine , qui a eſgard à la conſervation de


la ſanté.Ceschoſesnon naturelles , comme dit Galien au premier livre De fanitate
sliě ans . tuenda , ſont compriſes en quatre genres & di&tions vniuerſelles, que l'on nomme
Clamore." fumenda,admouenda,educenda,facienda. Sumenda , c'eſt adite , choſes qui ſe prennent au
dedans ſoit par la bouche,ſoitautre part,fontl'air, boire & manger. Admouenda, c'eſt
à dire ,choles qui s'appliquent pardehors, ſont tous medicamens , &toute autre
choſe que l'on approche tant au corps qu'à quelque partie que ſoit. Educenda ; c'eſt
à direcequi eſt tiré dehors, ſont tous excremens quiſortent hors du corps , toutes
choſes eſtranges que l'on tire d'iceluy. Facienda, c’eſt à dire ce qu'il faut faire ,fonc c
trauail,repos,dormir,veiller, & altres :coutesfois communément on les diuiſe en ſix,
qui font,
L'air.
Boire & manger .
Travail , ou exercice & repos.
Dormir & veiller.
Excretion & recention,ou repletion & inanition .
Les perturbations de l'ame.
Del Air CHAPITRE XVI.

'Air eſt celuy ſanslequel nous ne pouuos viure,s'il eſt ainſi que la ref
Neceßisé
Clir .
piració ne puiſſe cître lepareedela vie d'avãrage,c'eſt celuy lans lequel
ne pouuosgarder la lanté,ny guarir lesmaladies,ainſique dit Galien au
neufieſme de laMethode;pourceſte cauſe il eſt degrádeconſideration
en la Medecine & Chirurgie. Qu’ainſi ſoir,ileſt trel.neceſſaire cognoi
D
freceluy quieſt bon,& celuy qui eſtmauuais,aufliquieft cótraire à la maladie,ou qui
aide icelle & luy donne force , comme eſt celuy qui eſt du touc ſemblable à icelle à ce
ſte cauſe il doit eſtrechangé ,s'il eſt naturel , & rendu artificiellement contraire à la
maladie .Qu'il ſoit vray,en hyuer s'il furuient playe de teſte ,en la penſant & traictanc
faiſons vn air chaud , par la reuerberation de quelque fer eſchauffé auparauant au
feu (carle froid eft du tout contraire au cerueau & playes de ceſte ) & ainſi és autres ‫ܐ‬
Cefroid en maladies qui demand
ent air accommodé à leurnacure. Quand l'air eſt trop chaud
zemy des & tiré au dedans par l'inſpiration , il eſchauffe les poulmons, le cậur & les eſprits,
olaves de la & fait que les forces ſont affoiblies par dilipation , à raiſon de la ſubtilité d'eſprits.
efte. Auſli lorsqu'il eſt trop froid,ildebilite les vertus & les ſuffoque, ránt par ſupprel.
fion des excremens fuligineux , que par incraſſation des eſprits. L'air donc naturel
& treſſalubre,eſt celuy qui eſt exactement pur,ſubtil,clair, & libre de toutes parts , e
Itant hors de toute corruption , tant de beſtes que d'autres choſes putrefiees, eſloi
gné dutout d’eſtangs, mareſcages, & cauernes:ny eſtant fait nebulcux par vneriuiere
L'Introduction à la Chirurgic . 27

prochaine.tel air eſt conuenable ( s'il eſt temperé ,comme aduient au Printemps já
A
coutes maladies, & leur aide grandement . L'air qui eſt contraire au precedent , & du
couc mal -lain , eſt celuy qui eit pourry ſans aucune perflation , humide, enclos entre
montaignes, corrompu de quelque mauvaiſe vapeur, ou exhalation de quelque ma
rez,eltang,ou riuiere prochaine. Tel air eſt nuiſible & dommageable,non pas ſeule.
ment à toutes aages & temperatures , mais auſſi à couces maladics. Or puiſque l'air 1
propre à chacunemaladie ne peut etre icy bonnement deſcrit , à raiſon qu'il eſt par
ticulier & diuers ésmaladies,ie mecontenceray de declarer ce qui eſt entendu gene.
talement par l'air.
Parl'air les autheursMedecinsentendent trois choſes,la preſente conſticucion de Ce qui est
l'air, la regionoù nous ſommes ,& la partie de l'annee . Du temperament de la dernie entendu
reauons traicté éschoſes naturelles , parlansdes temperamens : donc nous parlerons par l'air
ſeulement des deux autres .

La preſente conſticucion de l'air,aucunesfois eſt quelques iours ſemblable au Prin


temps( c'eſt à dire temperce ) partant forc falubre & peu maladiue :autresfois elle re- De la con
B preſèncel’Eſté,c'eſt à dire , elle eſt chaude & ſeiche: quelquesfois l'Autónc, autresfoisSirutiera
preſente de
İHyuer,c'eſt à dire elle eſt pluuieuſe,froide, & humide : & ſelon ſes diuerſes con . Pair.
Ititucionselle engendre ſouventesfois fiéures,apoftemes, & autres maladies , ſuiuant
ledire d'Hippocrates au troilielme des Aphoriſmes . Quand en vn meſme iour,can
toſt il fait froid, tancoſt chaud,il faut attendre maladies de l'Automne . Or celles va
riecez & mutations de la conſtitution de l'air aduiennencà raiſon de la diverſité des
vcars qui ſoufflent, la nacure deſquels eſt grandement à conſiderer : car par iceux
nous cognoiſſons ſenſiblement les mutations de l'air : partant les deſcrirons le plus
briefuement que faire le pourra.
Le vene d'Orient , qui eſt dit en Latin Subſolanus, en François ſolaire, eſt de nature
chaude & ſeiche ſalubre & lain . Le vent d'Occident, dit Fauonius, & vulgairemét Ga. Desverks
lerne, eſt froid & humide,maladif &i inſalubre.Le vent de Midy eſt chaud & humide,
cauſe de corruption & maladies prouenantes de pourriture. Le vent de Septentrion ,
dit communément la Bize, eſt froid & ſec ,ſain & ſalubre , lequels'il ſouffledurancles
jours caniculaires, apporte ſalubritéà toute l'annee, & amēde inſalubriré ſi elle a pre
C
cedé.Ortelle delcription des quatre vécs eſt faite ſeulemēt ſelon leur nacurel & pro
pre qui eſt pris du nacurel de la region ,doncils commencent à louffler :car autrement 5

nous experimentons ſouvéc des effe&ts aux vencs tous contraires à leur propre natu .
re ſelon les lieux par où ils paſſent comemõcagnescouuertes deneige,mers, cſtangs,
rivicres, foreſts,campagnesſablonneuſes, & autres lieux , deſquels ils empruntent les
qualitez ,& nous les apportent venans vers nous . Ainſi auons-nous dit le vent Fauo ,
wius,c'eſt à dire,fauorable,cſtre neármoins maladif & inſalubre pour le reſpe &t de ſon
naturel particulier , & de la region occidécale ,froide & humide dont il part : & cel l'ex
perimentent les Gaſcons,cellement à leur dommage, que bien rarement il ſouffle en
leur pays,ſans quelque inſigne detriment és hommes,ou biens de la terre , & toutes
1 fois les Grecs & Italiens l'ont couſiours loué comme le plus ſalubre. Leleuer auſſiou
coucher des eſtoilles les plus'inſignes,efleue quelquesfois tels vents froids,qui refroi
diffent grandement l'air,ou le changent en autre qualité,& eſleuent les exhalations

D & vapeursdoneprocedent les venes,nuces,orages, tourbillons,eſclairs, foudres ,con .


neres, grelles,gelees neiges,pluyes,tremblemens deterre, inondation d'eaux, auec
Aus & refusdemaree,& autres calamitez:maisl'entiere cognoiſſance & contempla
tion,cant des vents que du mouuement des eſtoilles,appartientà l'Aſtronomic,com
mela ſpeculation des regions & des climats aux Coſmographes & Geographes.Tou
tesfoisHipocratesen a traiếté en ſon liurc de l'Air des lieux & caux , où il deſcrit les
pays qui luy eſtoient cogneus & voiſins. Auſſimanifeſtementnouscognoiſſons com
bien nuit & profite l'air d'voe region plus que l'autre,& qu'il eſt plus convenable
à les player
vne maladieque l'autre, ainſi que dit Guidon deCauliac ,que les playes de la teſtesõt de la telhe
plusfaſcheuſes à guarir à Paris qu'en Auignon , & au contraire lesviceres des jambes ſontfal
plus faciles à guarir à Paris qu'en Auigno : à raiſon que ľair deParis eſt froid & humi- cheuſes a
de auprisdeceluy d'Avignon , partant ileſt ennemy des playcs de la teſte :toutesfois guarir à 1
iceluy parſa conſtiturion condenſe les humeurs, & les rend moins Auxiles, dont lone Paris', com
les vlceres
plus facilement guaris les ylceres des jambes,la curation deſquelles eſt le plus ſouuent des iambes
retardee,à raiſon des Auxions qui ſe fonteſdits vlceres. Parquoy ileſt notoire ,que en sui

les lieux chauds & approchansdel'Æquino & ial,font grande dillipatio de noſtre gmo .
n
{

28 Le premier Liure de
ſubſtance & chaleur nacurelle,dontelle eſt affoiblic,comme aduient és pays d’Italic A
& Afrique:le contraire faut entendre des lieux eſloignez dudit Æquino&tial, eſquels
eſt fait moindre reſolution de la chaleur nacurelle : dont les forces & vertus lont plus
grandes eſdics lieux,qu'autre part,àceſte cauſe ils endurent mieux la ſaignee:ceux du
pays chaud portent mieux la purgation,& ſont plus difficiles à eſmouuoir :& faut ac
tribuer cels accidens & qualitez de l'air à vn pays chaud , que nous donnons à l'Efté,
leſquelles ſont doublesen ceſtepartiede l'annee audit pays,& plus remiſes en Hyụer,
mais toutesfois ſemblables à l'Eſté. Plus curieuſe diſtinction des habitations ie laiſſe
aux Geographes,auſquels appartient telle concemplation :ſculemencie diray que l'air
ich an- change & altere la conſtitution de noſtre corps: ou par la qualité, commes'il eſt trop
offie froid ,chaud,ſec,ou humide:ou par ſa ſubſtance,s'il eſt crop elpais,ſubtil,ou corrompu
ipar d'exhalations purrides:par ſon changementſoudain , comme li detranquille qu'il e
ſtoic,ſoudainementil vient à eſtre impetueux . Me contentant au reſte d’auoir rude
ment eſcript ce qui ſe peut pra & iquer & mettre en yſage, pour venir à parler du boire
& manger, qui apres l'air eſt la choſe plus neceſſaire au maintien & fubftentation du
corps .
Du Mangere boire. CHAPITRE XVII. B

O v R traicter bricfuement du mager & boire,il nous faut parler de


la bonté tant des viandes quedu bruuage , de la meſure & quanti
té,qualité, couſtume & plaiſir ,ou delectation : aufli de l'ordre , du
temps, de l'aage, & de la partie de l'annee . La bonté , ou malice eſt
Enquoy
Bolte la
é ou
lice de R. conſideree ſelon que celles viandes engendrent bon & mauuais
ſuc:car le mauuaisſang, que les Grecsappellent Cacochymic , cſt la
ſource & la cauſe de toutes maladies : au contraire , le bon ſang re
liment. fiſte à toutes maladies,& ne cauſe iamais icelles, s'il ne peche en quantité : parquoy
-

il eſt grandement neceſſaire & requis à ceux qui veulentgarder leur ſanté, & obuier
541
aux maladies, qu'ilsvſent des viandes de bon luc:telles ſont le bon vin,iaunes d'eufs,
bon laict,bon pain,bonne chair dechappon,perdrix ,griues, alouettes , veau ,mou
ton , chéureau , & autres que verras au liurede Galien des facultez des alimens , où
cu trouueras auſlicellesquiſont de mauuais aliment , leſquelles cognoiſtras par vne С
qualité, & ſaueur manifeſte,comme acre,amere , ſalee ,aigre , auſtere & acerbe. Or la
bonne viande celle qu'elle ſoit, ne peut faire profit au corps, s'elle n'eſt prinſe en deuë
quantité:m.is au contrairezélle nuit grandement & caule maladies tout ainſi que la
mauuaiſe,prinſe en petite quantitéaucunesfois ne nuit point , ou bien peu : parquoy
faut bien tenir melure au boire & au manger;mais principalement aux maladies.Car
Ipbru. 65. comme dit Hippocrates,la viande eſt forcepour les ſaius, & maladie aux malades , ſi
it . 7 .
la meſure & quantité n'eſt bien obſeruee: parquoy il eſt fort neceſſaire cognoiſtre les
maladies qui requieren diette eſtroitre,ou l'aage,leſquelles Galič a eſcrit au premier
de l'art curatiuead Glauconem : dilant qu'és maladies aigues , & qui viennent inconti
nent à leur vigueur,il faut peu nourrir:éslongues,du commencement il faut donner
viandes plus largement, à fin qu'on puiſſe reliſter & ſupporter le mal : ce qui a eſté
aut avoir
auſſi confirmé par Hippocrates au premier des Aphoriſmes. D'auantage quand le - ‫ܠܢ‬
gord àla mal vient à ſon eſtat ,il faut nourrir fort eſtroitement , ſelon l'Aphoriſme huidieſme
du premier liure :telle eſt la meſure du boire & manger qu'ilfautgarder és maladies D
Erfume ayant toutesfois couſiours eſgard à la force & vercu du patient , & couſtume d'iceluy .
e viure. Car la couſtume ſe doit changer peu à peu és maladies , & non tout à coup. Telle
couſtume eſt certainement forcdiucrſe & variable , & depend du bon iugement &
prudence du Medecin,ou Chirurgien :aufli és ſains ne peut eſtre diſtinguee telleme
ſure & quantité par poids certain :car aucuns demandent plus grand nourriſſement,
les autres moindre, ſelon que la reſolution , ou diſſipation de la triple ſubſtance eſt
plus grande ou plus petite. Qu’ainſi ſoic, les hommes à raiſon de l'activité de leur
chaleur , & reſolution plus grande, appetent dauantage , & mangent plus que les
femmes:ne plus ne moins qu'aux ieunes doiuenc eſtre alimens plus copieux qu'aux
vieils , & toutesfois encores aucunsdes hommes ieunes ont beſoin de plus grande re
Sentence festion que les autres , ſelon leur couſtume & maniere de viure & temperament.
doreee de Táty a qu'ily a vne meſure commune & vniuerſelle,quieſt de ne máger iuſques à ſa
Hipocrates. tiuté,ſelon le dired'Hippocrates,diſant qu'il y a deux moyens de garder ſa ſanté,l'vn
den'eſtre oiſifne cardif à faire exercice & trauailler:l'autre, de ne ſe réplir par trop &
L'Introduction à la Chirurgie. 29
A
foulerdesviandes. Telle doic eſtrela quantité ou meſure du boire & manger. Il faut
aufidiligément conſidererla qualité, tant pour les ſains que pour les malades : elle
eltoupremiere ,comme chaude, froide, humide , ſeiche : ou icconde , comme atre
nuante,incraſſante,obſtruence,ou aperiente, & les aucres,lelon letquelles qualisez la
maniere de viure doit eſtre diuerle és malades & ſains. Car les ſains demádent vian.
des quilespuiſſentmaintenir & garderen ſanté:parquoyfunt qu'elles ſoient ſembla
blesſelon les qualicez à leur céperament & nacure,laquelle ſi elle eſt enciere,noustiệc
en ſanté:comme à vne nature & temperature chaude & humide (cels font les enfans)
fautdonner viandes chaudes & humides:à vne nature froide & {eiche , comme ſont
vieillards,faut donner viādes ſemblables à leur temperature, s'il eſt vray que la ſanté Vicilepa
doit eſtre maintenuë & gardee par choſes ſemblables. Toutesfois parce que la vieil- uneof comme
espect
Jelle, quelque gaillarde qu'elle ſoit, eſt de la nature comme vne eſpece demaladie, il de mala :
ſemble meilleur la nourrir des viádes contraires à ſon temperamét, ſçauoir chaudes dur.
& humides , pour couſiours retarder les cauſes de la mort,frigidité& ficcité , quila
B talonne debien pres:car à vne maladie ne faut doner viandes temblables, puis qu'el
leeſt contre nature,pourautác que l'on l'augméteroit, & on luy dóneroit veriu,mais
concraires & diſſemblables en qualité , afin qu'elles puiſſent cõbattreladite maladie:
à ceſte cauſe vnemaladiechaude,comme phlegmon, ou eryſipelas,demāde viandes
refrigerantes;vne froide,comme ædeme ou ſcirrhe , eſchauffantes. Quielt la raiſon
pourlaquelle Hippocratres a dic en ſon 1. des Aphoriſines , que la maniere de viure
hume&tance eſt conuenable à toutes fićures, puis quelafićure eſt affection feiche: Aphor. 16.
faut dontbien entendre la nature dela maladie, pourluyordonner dietecontraire feét. 1.
en qualice premiere ou ſecode. Or ce n'eſt pas aſſez ſeulemnēt d'auoir cogneu la quan
tité & qualité des viandes , mais auſſi il faut entendre la couſtume & maniere de les
prendre,s'ileſtainſique ſelon le dire des principaux Medecins , la couſtume ( c'eſt à
dire,maniere de viure ) eſt vne autre nacure, Caricelle aucunesfois change le propre
temperament naturel , & en laiſſe vn autre acquis : parcant la couſtume nõieulemenė
eſt à garderés ſains,maisauſſi és malades:car ſipromptemét vous la voulez chāger de
pireen meilleure,vous ferez certainemētplus demal quede bié,fuiuát le dire dHip- Apho. srå
C
pocrates,queles mutations ſubices & repētines ſonc dágereuſes. A ceſte cauſe ,ſi nous sečt. 2.
voulonschangerla maniere de visure accouſtumee,quieſt vicieuſe,ou quiengendre
mal,ou l'entretient,peu à peu faut faire ce cháge,afin que nature ne ſe faſche, & que
ſansgrandeperturbation elle puiſle prendre nouuelle couſtume: car encores qu'une
viádene ſoit de ſoy -meſme de bon nourriſſement,elle ſera moins ou plus tard cuicte choſe die
& digerec qu'vne autre pire & accouſtumee. Qu’ain ſi toit,nous voyons que gens ru gre d'eſtre
Itiques cuiſent pluſtoſt lard ou bæuf,deſquels ordinairemēc ils vlent, qu'vne perdrix buen noice.
ou chappon,ou autre viande de bon ſuc , laquelle ſe corrompra en leur eſtomach: &
nefauc atcribuertelle choſe leulement à leur chaleur naturelle force , mais à leur cou
Nume,laquelle pour la familiarité , conuertit & tourne en ſang les viādes de treſ.dif
ficiledigeſtion:tantade vertu & grace la couſtume, laquelle fait toutes viandes dele.
&ables & plaiſances,à raiſon dequoy elles ſont mieux recenuës en l'eſtomach, & ſans
donner aucune peſanteur ou vomiſſemét,ou nauſees ,cuitces, digerces & diſtribuees.
Teleffect n'ont celles qui viennent à cõrre- cæur,& deſplaiſent à nature:carau con .
traire,en les abhorrant, elle fait rots aigres & puans, degouſtement, nauſee ,vomiſſe.
D ment,peſanteur,malde teſte & faſcherie de tout le corps.Parquoy faut diligemment
s'enqueſter quelles viandes plaiſent au malade, afin de le mettre en gouft & appetit,
1 principalement quand il eſt fort degouſté ou debilité de quelque grande euacuation
& vomiſſement.Carſi les viandes luy viennent à gré,il en pourra mieux eſtre rellau.
ré,iaçoic qu'aucunesfois elles luy ſoient peu cõuenables & profitables, ainſi qu'Hip
pocrates aeſcrit.Leboire & manger qui eſt baillé, ſoit aux ſains ou malades,eſt meil. Au.38 .
leur & plus conuenable ,s'ils lecrovučc bon , & eft à leur appetit , encore qu'il leur ſoit aph. du 2.
vn peuplusmauuais que celuy qui leur eſt meilleur , combié qu'il ne leur ſoit pas ſi a- liure.
greable,ne à leur goult:par leſquelles paroles Hippocrates mõitre aſſez qu'il faut bič
ſouuēt auoireſgard au plaiſir du malade,pour lay ordóner ſa maniere de viure. L'or.
dre du boire & măgern'eſt de moindre regard que les precedens:car encores que les L'ordre du
manger
viādes ſoient bonnes,plaiſantes,& accouſtumees,s'elles ne ſont priſes par ordre,elles boire.
font mal cuicces & digerees,ou baillent grád trauail à l'eſtomach : parquoy faut con
fiderer quelles doiuenteſtre les premieres,& quelles les dernieres :car les viandes de
I.I
30 Le premier Liure de Da

facile digeſtion ne doiuent eſtre miſes apres celles de difficile co &tion : ny les aſtrin- A
gentes ou feiches deuant les lubriques:mais au contraire faut prendre premiereméc
viandes faciles à cuire ou lubriques,come choſes graſſes, humides , douces, pour laſ
cher le ventre:puisles viandesde difficile digeſtion, ou aftringentes, ou ſeicties ſui
uront , pour fermer l'orifice de l'eſtomach , à fin que par ce moyen il embraſſe de
toutes parts les viandes, & que la chaleur ſoit contenuë & ramaffee en iceluy , & par
ppo, de ces deux moyens la viande foit micux cuitte. A ceſte cauſe Hipp. a touſiours inten
7. ral.in
1. Achiis . tion le matin & à diſner de bailler viandes qui faſſent deſcendre les excrements de la
1

premiete coction, & au ſoir celles qui peuuent nourrir. Aulli faut entendre ſelon le
dire dudic Hipp. que le manger doit touſiours preceder le boire , ainſi qu'ila eſcrit és
liures des Epidemies. De moindre conſideration n'eſt le temps de prendre le boire &
manger que l'ordre.Car és malades ileſtbeaucoup plus difficile qués ſains,pour cau
ſe qu'és ſains leur heure accouſtumce ſe peut bien garder, ou quand ils ontappecic ils
peuuent manger,moyennant toutesfoisque l'exercice ou labeur ait eſté faict aupa .
rauant : car il faut tant qu'ileſt poſſible ,dit Hipp. que le trauail & labeur precede le
boire & manger , pour faire euacuation des excremensde la croiſieſme co &tion, &
augmenter ceſte chaleur naturelle,& conforter les parties ſolides : qui ſont les vſa- B
ges d'exercitation requis & neceſſaires pour bien & deuëment prendre la refe& ion. .

cmps de Es maladies ne faut auoir eſgard ny au matin , ny ſoir , ny à l'heure accouſtumee, TAS
wwrrir les ains à la declination de leur accez : car ſi au commencement de l'accez , ou autro
shades .
temps d'iceluy,la viáde eſtoit donnee, elle ſeroit corrompuë, & faicte matiere pro
pre de la maladie,principalement aux fićures. A cette cauſe, dic Hipp . la viande eſt
force & vercu pour lesſains,& maladie aux malades , ſi elle n'eſt priſe à l'heure deuë,
es vide ayant touſioursla conſideration de la vertu du malade , & de la vigueur & eſtar de
s
oiuent la maladie. Il faut auſſi auoireſgard que noſtre manierede viure,ceſt à dire, que no dare
tre diner ſtre viande ne ſoit couſiours vne, ſimple & ſemblable , de tant que nature en fin ab
fires auxhorreroit telle viande,& ne l'appeteroit aucunement, dont aduiendroit qu'elle nc
salades. la pourroit retenir ne cuire. Et nefaut croire à ces ſuperſtitieux Medecins , qui pen
ſenc que la varieté des viandes trouble la conco & ion , d'autant que nous cuiſons malil
touſiours & recenons mieux les viandes que nous appetons. Or noftre nacure ap
pere couſiours varieté . D'auantage, comme ainſi loitquenoſtre corps ſoit compo. c
ſé de ſubſtance ſolide, humide , & aëree , & que pour les exercices & autres occupa.
tions,iladuienne ſouuent qu'vne ſubſtance eſt plus diſſipee que l'autre, il eſt neceſ. *" 181

faire d'vler de diverſité d'alimens,depeur que quelquechoſe ne defaille à la repara


tion de ce qui eſt perdu. Auſſi l'aage & partie de l'annee nous monſtrela maniere
d'ordonner le regime de viure : car autres viandes conuiennent à vn jeune qu’à vn
viçil,ne plusnemoins qu'en Hyuer faut vſer d'autres viandes qu'en Eſté. Parquoy
il eſt bon cognoiſtre quelles viandes ſont propres à chacun aage , & partie de l'an.
Aux enfans communément viandes humides , & en grande quantité , ou par plu.
ſieurs fois priſes, afin que non ſeulement ils ſoient nourris, mais auſſi prennent ac.
croiſſement, à ceſte cauſe ils ne peuuent porter la faim . Le contraire aduient aux
vieils , leſquels à raiſon de leur chaleur naturelle imbecille portent plus facilement
la faim quc tous autresaagès,eſquels conuiennent viandes chaudes & humides, pour
humecter & eſchauffer leurs parties ſolides ja froides & leiches. Auxieunes & d'aa
geconſiſtant, à raiſon de leur chaleur exceſſiue, ſont conuenables par fois viandes 0
D
1

de contraire qualité ,pour moderer ceſte chaleur. A l'aage moyen & temperé,
comme adoleſcence,viande ſemblable. Ainſi en Hyuer faut vſer de viandes chau .
des & deſſeichantes, comme roſty ,vins forts, eſpiceries , pour raiſon de la conſtitu
tion du temps froid & humide,& de l'abondance de la chaleur naturelle , qui eſt
grande en ce temps , commeauſſiau Printemps , ſelon le dire d'Hippocrates : Qu'en
Hyuer & au Printemps ſont les ventricules naturellement tres- chauds. Faut faire le
Aph. is. contraire en Eſté : car en ce temps , à raiſon de l'excelliue chaleur de l'air ambient,
feft. I. faut v ſer de viandes froides & humides, pour corriger ceſte chaleur exceſſiue &
comme febrile: auſſi en ce temps le boire eſt plus grand qu'en Hyuer, & le manger
moindre. Au Printemps faue vſer de viandestemperees , à raiſon qu'il eſt temperé.
En Automne nous commençons à prendre vn peu des viandes d'auantage qu'en
Eſté,&boire moins, & moinstrempé:afin de peu à peu deſcendre à la maniere de
viure deüe à l'Hyuer ,
Dw
L'Introduction à la Chirurgie. 31
Du Mouuement a repos. CH A P.
А
Armouuement en ce lieu (comedit Fuchlius en ſon introdució dequ'il faut
Medecine ſe doit ent@ dreroute eſpece d'exercices,cóme cheminer, ensēdre pat
dáſer,courir,aller à cheual,ioüer alapaume,porter fardeau, & autres monument.
ſemblables : & ſous iceux eſt cóprinte la Friction ,l'vlage de laquelle
a eſté desanciés en grande eſtime,& cſt encores à preſent İlsen ont
faic pluſieurs elpeces & differēces qui ſe peuuét reduire en trois,c'eſt
àlçauoir dure,molle,mediocre.Friction dure elt, quand I'on trotte tout le corps, ou
vne partie ſeule,fore & afpremér,ſoit auec la main ou toile neufue,cſponges, ou d'au- De la fria
tres choſes. La vercu & qualité d'icelle eſt de condenſer & altraindre & rendre la ction .
chair dure, Et ſi elle eſt longuement & ſouuentesfois continuee, rarefie,euapore,re
ſour,extenuë & diminuela chair,& autre ſubſtance de noſtre corps. Outre plus faic
reuulſion , & diuercit la fluxion des humeurs d'vne partie en aurre. La molle eſt,
quand l'onfrotte doucement , laquelle fait le contraire de la dure:pource qu'elle
Bamolliſt & relaxe,& rend le cuir doux& poly, coutesfois ſi elle eſt briefueou peli Jon
gue,elle nerēd aucun effe &t.Lamediocrecientle moyé entre les deux ſufdices, pour
cequ'cile fait augmentation d'aliment& nutrition,à cauſe qu'elle retient leſang , &
Jeseſpritsqui onteſté par icelle attirez ſans les euaporer & reloudre, ainſi qu'il eſt te
ftifié par Galien chapitre troiſieſme liure ſecond defanitatetuenda.Voila les effects des
frictions en general, leſqueiles ne faut nullement meſpriſer. Pareillement les com.
moditez de l'exercice ſontgrandes, ainſi que dit Galien au deuxieſme liure de fanitate Veilié des
tuenda : c'eſt qu'ilaugmente auſſi la chaleur naturelic , dont s'enſuit meilleure dige. exercices.
ſtion, & par conſequent bonne nourriture & expulſion des excremens , & les eſprits
plus prompts à leur office : à cauſe que leurs conduits ſont par ce moyen purgez, &
d'abondanc ledic exercice laiſle l'habitude du corps, & la reſpiration & aucresađions
plus fortes,dures , & robuſtes, aumoyen de l'attrition mutuelle des parties qui ſe
heurtentľvne contre l'autre,dont ne font ſi fort & fitoft travaillees : ce quieſt mani.
felte aux ruſtiques, & autres manieres de gens quiſontde grand travail. Voila les
Csommoditez de l'exercice,moyennant que l'on Ic face entemps oportun,en quanti
té legitime, en qualité competente, & par repetition & reïteration raiſonnable. Le
temps opporcun ſera auant le paſt, pour exciter la chaleur naturelle à appeter les vià. Le temps
des,& apres auoir mis hors les excrements : de tant que nature affamée pourroitatti de faire
rer par les veines meſaraïques, pour porter au foye vn ſuc mauuais, & en ce faiſant icxercices
l'habicude du corps pourroit eſtre vicice. Aufli n'eſt conuenable faire exercice coſt
apres le repas , & l'eſtomach eſtanc remply , de peur qu'ilne ſe faceattraction des vian
des non encore cuites. La me
s lure & qu
antité legitime de l'exercice eſt, quand le
corpsſecumefie & enfe, dont apparoiſt vne couleur rouge & vermeille , & qu'ilſur. /

viene vnc petite ſueur , & quand la reſpiration commence à ſe cháger , & à eftre gran
de & frequente, & quád auſſi les membres ont leurs mouucmens libres ſans grande
laflicude: & alors que ces ſignes ſe monftrent, faut defifter, de peur de trop gran
de laſlicůdc, & reſolution dela ſubſtance de noſtre corps : à cauſe qu'aucc vne gran.
de fueur lebon ſuc ſubſtantifique, & les eſprits Te reſoluent & conſument, donc
advient que le corps deuiencmaigre & froid. La qualité competente eſt miſe en la
D mediocrité des qualitez exceſſiues d'agitation du corps : tel eſt l'exercice qui n'eſt
nycrop leger,nytroptardif ou trop lent, ny croprobuſte, ny crop debile, ny trop
vehement , ny cropremis & laſche, ny trop gaillard & bruſque, ny auſſi trop aſſou- Diuerfilé
py, & qui trauaille par egaleproportion coutes les parties du corps. Telexercice eſt d'exercices
propre pour les corps ſains & temperez:mais s'ils ſont intemperez, il faudra choiſir ſelon la dia
exercices qui de leur qualité ſoient propres à corriger la qualité deleur intempera. uerfusé des
ture;carlescorps remplis d'humeurs froids & eſpais , choiſiront vn exercice plus ve. corps.
hement,robuſte & de plus longue durec :tellement toutesfois,qu'ils ne s'y addonnét,
que la premiere & feconde co &tion ne ſoit en eux paracheuce : ce qu'ils cognoiſtront
àleurvrine , laquelle lors , & non deuant , apparoiſtra teinte quelque peu deiaunc :
mais s'ilsſont bilicux , ils choiſiront exercices legers , & pluſtoſt gais que bruf
ques & contentieux , & ſans attendre que la ſecondecoction ſoitparachcuce en leur
foye& veines :car la chaleur de leurs parties ſolides,quieft acrc,requiert telle matiere
non du couccuitte,de laquelle autremét ne feroic ſon profit la rotiſſant,de ſorte qu'il
nciclteroit humidité & glucinoſité competente , pour eſtrc agglutinee aux parties,
d

$
32 Le premier Liure de

Quancà la repetition de l'exercice, il faut autát de fois retourner au trauail que nous A
auons enuie de faire de repas : car fi ainfi eft que l'exercice reluciilela chaleurnaturel
le,ſanslaquelle la co &tion des viādes ne pourroit eítse faicte,s'enſuitquene ſçaurions
faire noſtre profic de l'alimenc, fi l'exercice n'a precede . Or la derniere partie d'exer
citació parfaite & conuenable,eft vne friction mediocre , de laquelle yſent les joueurs
de paulme,le ieu eſtanc finy, quand ils ſe chauffent, frottene & eſſuyent. Ladite fri.
etion expurge , neccoye & ſeiche la ſueur , & autres excremens qui ſont demeurez en .
trecuir & chair , & prohibeles laſſicudes.Et comme d'exercice devëment fait aduien .
nent grandes vtilitez , auſſi fait grand detriment le repos oileux: car ilengendre cru .
direz, humeurs gluans,obſtructions,pierres ,tant és reins que dedás la vellie ,gouttes,
apoplexies , & autres mille maux .
Du dormir veiller . CHAPITRE XIX .
OvR auſſi briefuement traicter du dormir & veiller ,nous faut de
clarer leurs vtilitez & incommodirez , le temps & heure , & la ma

nicrede ſe coucher , les fonges que l'on fait en dormant , & com B
neon fe trouue apres le dormir .
Ledormir n'eſt autre choſe que repos de tout le corps & princi
Doi pro palemêt de la faculté anıın.le.Iceluy prouet d'vne humidité vcile ,
wient le imbuë en ia ſubftáce du cerueau, qui l'appelantılt & ggraue :ou bič
dormir. d'une defe &tuoſité d'eſprits, quidiſlipez par le trauail,fõr que le corps de peur demeu

rer debout , & contraignét le cerueau à le repoſer pour en reparer d'autres des viādes
priſes en l'eſtomach .Iceluy deuëment pris aide à la concoction à cauſe qu'en dormát
le ſang,lesclyrics & la chaleur naturelle le retirét aux parties interieures leſquelles c
ſtās eſch auffies,cuilent & digerent,ou alterent mieux , non ſeulemée en Peſtonach,
mais auſſi en toute l'habitudedu corps . Ourre, efface par oubliāce les paflions & tal
cheries de Pulprit, & guarit leslaſliçudes du corps faites par grād labeur . Letēps le plus
cómode à dorm reſtlanui&t,pource qu'elle meſme incite à dormir ,tāt pour sõ humi.
Les incom- dite , tráquillité ,que pour lon obſcurité, au moyé delaquelle aduiēc que la chaleur &
modirez dem les eſprits font contenus au dedás du corps : cõme au cótrairc ils ſont reuoquez & re.
dormur de cirez en l'habitude du corps par la lumiere, quileur eſt aucunement ſemblable . dont C
jour. s’enſuu le veiller :join & qu'elle a le teps aſſez ſuffiſant pour faire la parfaite conco & io .

Au contraire ,dormir de iour eſt mauuais, à cauſe qu'il interrompr la digeftion :parce
que le tērs auquelon dort de iour n'eſt ſuffiſant pour deuëment faire la concocio ,&
par cemoyē ſont faites cruditez en l'eſtomach , & ro & s aigres , & ſont efleuees groſſes
vapeurs & humiditez ſuperfluës au cerueau ,dont s'enfuicdouleur & pefanteur dete
ſte & inal .dies froides. Et dauantage , cõbien que le dormir de nui& ſoit lain , ſi faut
il qu'illoit mediocre : car celuy qui eſt immoderé & fuperflu, fait que les excrements;
tant par haut que par bas,ne ſont iertez hors en temps deu : & eltās recenus dedans , la
chaleur naturelle & vercu atrractiue attire d'iceux quelque ſuc mauvais , dont s’en
fuiuent piu Geurs maladies. Le temps d'auoir aſſez dormy, ſe cognoiſt à la parfaiete
concoction des viandes , & non par certaines heures decerminées : car aucuns cuiſene
pluſtoſt, les autres plus card ,combien que le plus ſouucnela concoction ſe fait en ſept
ou hui & heures, laquelle ſe cognoiſt ,parce que l'eſtomach eſt lalchc & non tendu , &
Gentil diſ auſſi que l'vrine eſt dorée & iaunc : & au concraire , l'indice de la concoction impar . D
cours de la faicte, ſont roats aigres, tenſion du ventricule , douleur de teſte , & peſanteur de
firmation du tout le corps . Outre plusen l'obſeruation du dormir , faut prendre garde à la forme
corpsen dor de coucher: car premierement ſe fautcoucher ſur le coté droiết, à fin que la viande
delcende au fond de l'eſtomach , d'autant qu'il eſt charneux & moins membraneux
que le deffus, par conſequét plus chaud & propre à la concoction : puis quelque eſpa
ce de tempsſur le gauche , afin que le foye ſe couche mieux ſur l'eſtomach: ce faiſant
la digeſtion ſera mieux faite ,d'autant que le foye qui eſt plus chaud que le ventricule,
l'embraſſant du cour , luy ſeruira comme d'vn braſier. Ilne ſera impertinent ce ſecod
ſommeil acheué , le matin ſe retourner ſur le coſté droi&t, afin que par telle ſituation
l'orifice de l'eſtomach demeurant ouuert, les vapeúrs fuligineuſes excitées de l'ebulli
tion du chylus, puiſſent mieux s'exhaler. Ceux qui ſe pourront garder de dormir
ſus le dos,feront bien,craignans de trop eſchauffer les reins , & engendrer grauelles,
pierres, & autres grandes maladies,commeparalyſies, convulſiós & toutes eſpeces de
Cacharres & Auxions qui ſe font par les nerfs le long de l'eſpine. Quant au dormir ſur
-
L'introduction à la Chirurgie . 33
A leventre ,il n'eſt mauuais pour ceux qui s'y peuuent accouſtumer, ſinon'en cas qu'ils
foient ſubieêts au mal des yeux: car parcelle licuacion la fuxion s'encline davantage
furieux:mais au reſte la concoction en eſt bien aidée, d'autant que la chaleur n'eſt
pas ſeulement retenuëenuiron le ventricule, mais outre eſt augmentée par la tie
deur de la delicate plume du lie.
On doit auſſi conſiderer les fongesqu’on a cu en dormant , pour cognoiſtre les af. 1.2 atrodo
fections & la nature des humeurs fuperflus & mauuais. Auſſi conſiderer fivnmaladefortes deng
desă >

ſetrouue micux ou plus mal apres le dormir , pource qu'Hippocrates dit , qu'alors curels qui
qu'en maladie le dormir ſe tourneen peine,c'eſtſigne demort:au contraire,non. LeJuruens li
veiller pareillement doit eſtre moderé :car l'immoderé corrompe la bonne tempera- semperatu.
ture du cerueau,debilice les ſens,altere les eſprits,excite erudité , peſanteur de reſte, re de l'home
conſomption de chair , & amaigriſſementde tout le corps, rendles vlceres arides & meus dominequi
d .
feiches, & plus malignes. Il y a autres conſiderationsleſquelles appatriennent plus au animaux
B
Medecin qu'au Chirurgien : parquoy te fuff ſe ſçauoir que le dormir & veiller im guinous re
moderez lont mauuais pour les raiſons prcdites . preſenter les
muilt ce que
De repletione inanition , ou vuidanje. CHAPITRE Χ Χ. nous ANONS

Deu le lont,
Lyadeuxſortes derepletion ou abondance :l'vne eſt de qualité en laquel. O defuper
nat
lela ſimple & ſeule qualité appellee Phlogloſa excedeſans humeur , comme nousureditlsque
udin
il appert és intemperatures ſans maciere : l'autre eſt de quantité,quiſe fait Sons en di
par trop grande abondancedeviandes ou humeurs , doncs'enſuiuentpluſieurs ma-'uinson disa
ladies. Orl'abondance des viandes fe nomme facuricé ou ſacieté, laquelle ſelon Ga- boliques.
lien a deux eſpeces:l'vne dite vulgairemēr ad vaſa,l'autre ad vires;La ſaturitéadvala, Aphor. 1.
eltlors tque
s'enflen l'on atantmangéqueles vaiſſeaux,comme pourexemple l'eſtomach,feel. 2:
& diſtendent. La laturité ad vires, eſt quand l'on prend plus de viandes quecomment.
noſtrenaturelneporte. De meſme, l'abondance & repletion d'humeurs eſt double: ſur l'Aph.
car ou elle eſt d'un ſeul humeur , ou detous. Celle qui le fait de tous les humcurs eſt 17.duż.li.
nommee Plethore ou plenitudo,ce que teſmoigne Galien , diſant: que les humeurs
C ſont egalement augmérez,cela eſt dic plenitude ou Plethore. Iaçoit qu'ildit que ple- 13. Meth.
nitudeſefait quand lelang ſeulelt augmenté , routesfois lors par ledit lang, ilentend cbap. 6.
lesquatre humeurs commemonſtre tres-bien Fuchſius en la methode. La repletion medic.
2. de côposs
loc.
ie gne
quiſefait d'un ſeul humeur,eſt dice Cacochym ,cómenous enſei Galié.Qua nd
doncle corps eſt pleinde cholere ou melácholie, ou phlegme, ou d'humeurs ſereux, Mer
chap.. s. 13.
cela ſe nomme Cacochymie. Or quant à inanitionou vacuation,cen'eſt autre cho . D'inanitio.
ſe que ſeparation des humeurs,qui par leur trop grande quantité ou qualité moleſtér
le corps humain. De celte cuacuation il y en a vne generale, qui vniuerſellemér fait
euacuation des humeurs contenus en noſtrecorps,commepar les purgations,vomiſ.
ſemens,ſueurs ,ſaignees ,& pluſiçurs autres que declareronscy.apres. L'autre euacua Evacuation
tion eſt particuliere, laquellea elgard à quelquepartie : commelecerueaufepurgegenerale.
par lesnarines,palais,yeuxoreilles:les poulmonspar le crachement,le ventricule par Emarunioni
le vomiſſemět& liege,les inteſtins par le ſiege, le foye,& ratele par les vrines & ſiege. particuliere.
Or desſuſdites cuacuations, les vnes viennent de leur propre mouuemēc ſans aucun
medicament,ſçauoirpar le benefice de nature, chaffanc ce qui luy eſt cõcraire:autres
D
par artifice,nature eliant aydee de quelque medicament. De ce te-cy l'vne eft dite
vulgairement legitime,l'autre illegitime. La legitime eſt,quand l'humeur pechăc các
en quantité qu'en qualité,eſteuacué: l'illegitime ou extraordinaire, eſt celle quand
l'humeur ſain, & non corrompueſt cuacué. Toutesces euacuations ſefont, ou par le
pruric & demangeaiſon ,à cauſe de quelque humeur cholerique, ou pituite falec qui
eft cótenuë & arreſtee entre cuir & chair , ou bie en lieu d'icelle quelque matiere Aa
rucuſe.Sic’eſt humeur,en ſe gratrane on luydonne iſſuë par euacuation manifeſte de façons di
quelque matiere ſereuſe ou autre séblable ,dont quelquesfois s'enſuiuentpetitespu- werſes d'o
ſtulles & galles,& fouuét vlceres , ſi l'humeur contenu eſtoit groſſier & cſpais : mais ſi uacuations.
c’elt matiere flatueuſe,iſſuë luy eſt dónee inſenſiblement:d'autant que par gractemét
& frixiõ,lecuireftant rarefié & ouuere,telle matiere , comme miſe en liberté, s'eſua
gouyt & dillipe aiſement:parquoy celgratiemet ne doit eſtre empeſché ne defendu,
finon entác qu'il fuſt rácexceſſifqu'il cauſaſt chaleur exceſſiue en la partie, dont peuſt
s'enſuigre perperuelle delluxió de nouuelle matiere en icelle. Par apoſtemes, vicores
& hitules, eftſemblablement euacué grande quantité d'humeurs:auſſi par ſucurs,les,
d ij
34 Le premier Liure de
xellesdoirquelles ſone profitables ez maladies aigues, pourueu qu'elles ſoyent vniuerſelles,& A
ne oſtre aduiennent ez iours critiques par vomiſſeměc:car louuét il purge les humeurs que les
jueurs. medecines forces ne peuuerit euacuer, faiſant reuulſion d'iceux de cour le corps , par
la violence de ſon mouvement, attirant meſmes des iointures, commeil levoid en la
paralyſie & ſciatique. Par cracher & bauer ſe fait aufli grande euacuation , ce qui eſt
manifeſte par l'experience de ceux qui ſont vexez d'apoſtemesaux coſtez , nommee
pleureſie: car lorsquela ſuppuration eſt faite, la lanie eſt iettee par la bouche en cra
chát;Et quant au bauer,il eſt bien manifeſte que les pauvres verolez le purgét par ice.
luy: cóme auſſi par le cracher , par l'eſtrenuer& moucher , nature euacue Touuentce
qui eſt ſuper flu ou nuiſible, quand le cerueau de ſon propre naturel& mouuemét or.
dinaire,ou par artifice appoſant au nez, des ſternutatoires ſedelcharge par ce coduit:
ce que l'on void manifeſtement à ceux qui ont le cerueau humide, comme petits en
fans leſquels le purgent fort par cet endroit. Par rottement & ſanglot il ſe fait vacua
cauſe de tion desventolicezcontenuesen l'eſtomach , iettees par la vertu expulcrice d'iceluy, B
orcemene leſquelles ſont procreés par crudité, comme pour auoirpris trop deviādes,ou pour
en langlor. auoir pris viandes flatueuſes & vaporeuſes, comme pois, fèves,nauets ,raues ,& leurs
ſemblables, ou pour auoir trop beu de vin nouucau.Parles vrines ſe fait vacuation,
ce que l'on void :d'autant que paricelles ſe terminent grandes maladies, comme lou.
uent aduient aux verolez,qui n'ayant peu auoir aucun flux de bouche , par ie moyen
del'alexitere,qui eſt l'onction vif argentine , leur ſurvient flux d'vrine,donc ilsgna
riſſent: par la meſme euacuation ſe terminent aucunes fiévres & plutieurs autresma
ladies . Aulli par flux de ſang coulant par le nez nacure fait ſa deícharge , dõt pluſieurs
malaties leguariſlene, Pat Aux menſtruelles femmes ſe purgent de beaucoup de ſu .
perAvitez.comme par les hemorrhoïdes ſe fait grande euacuation tant aux hõmes
qu'aux femmes. Par Aux de vencre ſe fait auſſi grandes vacuations d humeurs pechas
en quantité & qualité.Ilſe fait pareillement par medicamens laxatifs diverſes eua
cuations: d’auantage pluſieurs excremens du corps, auec les eſprits, par les porot tez
du cuir s'éuacuent & exhalét par inſenſible tranſpiration & lueurs : ce qui ſe peut co
gnoſtre aux tumeurs qui ſe reſoluent , voire encore qu'il y eult du pus ; ce qui ſe fait C
par le ſeulbenefice denature,ou aidée par medicamens reſolutifs. Aufli par grand
exercice , par diete , par bains & eſtuues , par long dormir , par pleurs , par ſuccer de la
bouche le laiet d'vnenourrice,ou quelque matiere venimeuſe ,d'vne niorſure ou pic. Y

queure, ou quelque lang contenu en quelque partie , auſſi par ventouſes & cornets , ‫ܝܬ‬

par ſeringues & par ſangſues. En toutes ces euacuatios il faut conſiderer trois points ,
la quantité ,la qualité,& la maniere de faire excretion d'iceux : conjme pour exemple , ཐན།
en l'ouuerture d'un empyeme,il faut que la boue qui en ſort, reſponde par proportio
Trois points à la quantice de la matiere qui peut etre contenue dansla capacité du thorax :autre .
confiders- mene ſi elle eſt enmoindre quantité , il y aura recheute. Ilfaut qu'en la qualité elle
MacWations.
ſoit blanche, égale, & la moins puante qu'il eſt poſſible en tel accident. Quant à la ma GM
niere de l'excretion ,il faut qu'elleſorteà plulieurs fois, & peu àpeu ,non tout à coup:
car ainſi s'enſuyuroit la mort par la dilipation des eſprits, enſemble auec celle ma
niere inutile, comme admonefte Hippocrates.
Des accidens ou perturbations de l'ame. C H 4 P. X XI .
D
Aph . sl . e s accidens ou perturbations de l'ame ſont ainſi appellez,parce qu'ils
du 2. li. ſont en l'ame tout ainſi que les accidens corporels ſont au corps. Or
le Chirurgiēneles doit meſpriler, tant pource qu'ellesont grăde effi
cace & vercu, que pouraucát qu'elles cauſent degrades émotios.com
meioye,eſpoir & amour, fontmouueméspar leſquels le ſang & les eſ.
pricsſone doucemér & peu à peu ou de viſteſſe reſpādus par la fruitio du bien preſent
De la soye. ou aduenit:& celsmouuemēs ſontfaitspar la dilatation du cæur, par laquelle ſenible
que nous embraſſions l'obie& preſent, & partant la face ſe montre vermeille, joyeu
le & riante , Oril eſt vray ſemblable que l'obiect eſmeut la puiſſance par laquelle le
cæur eſt eſmeu : car parauant qu'elle ſe meuue à couroux, ou à ioye , ou à autre paſ
fion , il faut qu'elle cognoiſſe l'iniure, ou le plaiſir, ou autres paſſions par les objects.
Car les ſens apperçoiuent premieremét leurs objects, & delà ſont ſubic preſentez au
ſens cominun , lequel par vneprovidence divine, & en vn moment les tranſmet aux
facultez qui ſonten diverſes parties du corps. Exemple: nous nerions iamais ſans co.
gnoiſtre ic fait ou dit: & tout ſubit l'auoir cogncu , nous nous mettons à rire pour
a 35
A
la promptitude duconſentement qu'ont les facultez ľvne auec l'autre. L'affection Belle defcri.
rulifquedonceltmile sous la paflion de l'amenommee ioye ,laquelle comme dic eſt, prioca
procededu cæur , lequel eſtant frappédece qui luy eſt agreabie,ſedilate & eſlargit
(süefuement come pour embraſſer l'obiectpreſencé: & en celte dilatacion il eſpand
beaucoup de chaleur naturelle auec le lang, & encore plus d'eſprits, deſquels en eſt
enuoye bonne porcion à la face,lors que l'on rit de boneaffe & ion,au moyen dequoy
elle s'enfle & ellirgic. Parquoy le front eſt rendu clair & poly, & les yeux relplēdıllás
& luylansàcauſe qu'ils ſonc pleins d'eſprits qui ſont montez en haur, quifretillent de
foror: les ioües demeurent vermeilles, les léures plattes , & toute la bouche aucune
men: ſe retire, façonnans aux deux ioües d'aucuns deux peiires foſſectes ou cauitez, }

que l'on nomme gelatines,quiſe fonc par la corra &tion, que les muſcles endurét par
la repletion &abondancedes clprits qui y montēc lors que le cour te dilate. Er pour
le dire en bref, ioye fortifie les vertus animales & naturelles, reſueille les eſprits;aide vrilirez qâi
à la digeſtion, & generallemenc à couce l'habitudedu corps:car par icelle(come nous procedēt de
B auós dic) le cæur enuoyebeaucoup dechaleurnaturelle auec le lang, & encore plus 103e.
d'eſprits à couce l'habitude du corps, dont les membres ſont imbus, arrouſez & hu
mettez par l'humidité contenuë en la maſſe ſanguinaire, & par ainſi les parties s'en
grofiſſene & engraiſſent. Bref, de toutes les perturbacions d'eſprit, ceſte-cy leule eſt
vtile,ainſiqu'ila eſtédit.Ce qu'il faut entendre de la joye moderee : car celle quieſt
immoderee & inſolente eſpand de telle vehemence le ſang & les eſprits du cæur en
l'habitudeducorps , que le cæur entierement deſtitué dechaleur, on tõbe en ſynco
pe,& on meure próprement ;Comme eſcrit pline de Chilon Lacedemonien , lequel Chilon.
mourut de ioye voyant venir ſon fils des jeux Olympique, où il auoit triomphé.
Aulugelle, li.3. chap.6 .racore,que Diagore Rhodien rendit l'ame deuant les trois fils Hiffoire.
les voyanttous victorieux, & couronnez en vn melme iour. Pareillement Valerc le
grand eſcrit liu . 9. cha.13.que deux femmes moururent ayás veu leurs fils,cótre toute
ciperance ſauucz d'vne bataille:ce qui aduiệt à ceux principalemét qui ne ſont dena.
Dela cho
!
tureſiforre comme aux femmes & vieilles gens. La cholere fait meſmes effets en lere.
nous, & mouuement de chaleur & de lang, mais par beaucoup plusgrande veheme
C ce que la ioye: parquoy elle crfláme les elprits humains , & en fin tout le corps , cau
1

ſant fiévres putrides,filecorps eſt cacochyme . L'homme eſtác en cholere delireeſtre


vengedes iniures,& rendre le deſplaiſir qu'on luy aura fait: en ſorte que le ſang & el
pritsbouillonnée en ſes entrailles,quicauſenc qu'il fait pluſieurs & divers mouuemēs
deſordonnez ,& autres choſes telon la temperature, vehemēce & cauſe de la cholere,
lla ſes yeux ardans & eltincelans avec un regard furibond ,lescournano çà & là: Tou
te la face rouge & fort enfámee , & à aucuns eſtfore palle & liuide,reſſemblant plus à
vn mort qu'à un vif,en ſorte qu'on le decognoilt, nereſſemblantplus à luymeſme, &
ſemble eftretransformé en beſte lauuage. Boiſteau au Theatre du monde eſcrit qu’
Alexádre le Grand ſe voyant en vne extreme peur de la vie en quelque bataille qu'il
cuccontreles Indiens , eſtant abandonné de tout ſecours , la cholere s'alluma ſi bien ,
qu'il ſuoic le ſang cout par couc ſon corps ,& lembloit aux Barbares tout encerné de
fámes de feu, qui leur engědra ſi grande cerreur,qu'ils furent contraints l'abandon .
per. Il a le fronc refrongné, ridé & amoncelé,ſescheueux fe heriſſent & dreſlene, ſes
D léures tremouſſent & fouuent les mord.Ilgrince & craquetre lesdents. Ilbauc & el
cume comme vn ſanglier qui eſt aux abbois,remuant la teſte & frappant ſes mains : il
frappe laterre de ſes pieds.Il a tout le corps tremblant commes'ileſtoit au commen
cement du frillon d'vne fiéure:fa reſpiration eſt contrainte ayant la parole interrom .
puë ncla pouuác bić proferer.lly en a eu qui ſesõt ſuffoquez & eltaincs faute de reſ
piration,autres ſe font precipicez.Il iure & fait pluſieurs blaſphemes: il inuoque& ſe Il n'ydrien
donne aux diables,& ditpluſieurs paroles hors depropos, dont apres s'en repent : & au monde
pour le dire en vo mot, la cholere eſt ennemie de la raiſon , & rend l'homme fol & in-quioffuſque
plus la rai.
leníč. Ornousdiſons quel'homme qui eſt ſans cholere eſt ſans encendement , mais son que
elle ne doit paſſer les bornes de raiſon. Au contraire de la ioye la triſteſſe deſſeiche cholere.
tout le corps & rend l'eſprit lentement tencbreux. Dont il aduient que l'homme eſt
du tout h:beté,ie cæur perd toute ſon allegreffe, & la perſonne viét iuſques à ſe haïr
foy. meſme,tõbe en deſeſpoir & enrage, de ſorteque pluſieurs ſe ſont tuez eux- mel De la tric
mes. Comme feit Herenne Sicilien,qui eſtant mené priſonnier poureſtre de la co Hellecome
dpiració de Caius Gracchus,eſtõné du iugemét futut & ſaiſi de peur,frappade la teſte lancholic.
figrandcoup contrevn polteau qu'ilſetua. Auli Plautius Numide voyát ſafemme
d ji
36 Le premier liure de
morte,en printſigrand ennuy, quene pouvant ſouffrir la douleur ſe donna deſonel.A
pecdans le corps.Larailon eft, que par la criſteſſelecæureſtreíferré & eſtreint, donc
nele peut engendrer allez grande quantitè d'eſprits, & fi peu qu'il y en a,encore ne
peuuent ils citre alémentdiſtribuez par les membres auec le lang , partant la vertu
Delacrain. vitale & ſes compagnes ſoncaffoiblics, & par conſequer la viue couleur de la face eſt
com p :41. effacee, & preſque aneantie: & par ainſi tout le corpsdeuient maigre & atrophié ,dóc
le plus louuenela mort enſuit. Semblablemét la crainte reuoquc & attire , mais plus
fubitement, & auec plus grande rapidité,que la triſteſſe, le ſang & ciprits au cæur, 8 .
partant on veoid que le viſage pallic , & les extremitez demeurēt froides, auecerem
blement vniucrſel, & le ventre à quelques vns ſe lache , & la voix eſt interrompue
auecgrád batcemenc de cæur, parce qu'eſtouffé de la multicude du ſang & des eſprits
qui ſerecirent ſubicement vers luy, il ne ſe peut mouuoir libremét, & deſire à ſe refri
gerer & deſcharger de ſi grád faix :dont aduiet qu'vne ſoudaine& tres.gtáde crain .
te eſt quelquesfois cauſed'vne more ſubire,à raiſon que le ſangſe retireau cæur , qui
eſtouffe,fuffoque & eſteine du tour la chaleur naturelle, & les eſprits,doc la mort s'en B
fuit.C'eſt pourquoy auſſi les hõmes qui ont peur,dreſſēc ſouuét les cheveux,pource
que pendát qu'ils ſont en cette peur,la chaleur, le ſang & les eſprits ſe retirencau cen .
tre du corps pourſecourir le cæur, qui fait que les parties exterieures demeurét froi
Honte.
des,dont les pores du cuir au quelseft fichéle poil ſe refferrent, qui eſt cauſe que les
cheueux ſedreſſer & heriſſent.Hóceelt vne affectio meſleede courroux & de crain
te, & ſi la crainte ſurmõre le courroux, elle fait que le ſang ſe retire au cour : adonc le
vilage pallit, & ſelon que celle affe&tion ſera grande ou pecite, s'enſuiurõt les accidés
deſſus nómez : au concraire, file couroux ſurmõte la crainte, elle eſmeutle ſang, & le
fait mõter au viſage, & eftinceler les yeux,& ſouuent eſcumer par la bouche. Or il y a
vne honte,quc les Latinsappellent Verecundia, quicauſe que les elprits ſe retirent au
centre , & à l'inſtant meſme reuiennét, laquelle choſe eſt fort familiere aux enfans &
aux vierges:elle peint la face d'vne couleur vermeille, plaiſante & agreable: mais cel
mouuemét de ſang & d'eſprits ſe fait ſi doucement, que de là le cæur n'en eſt ny op .

De
nie..
l'Ago- primény deſticué:parquoy de ceſte honte ne s'enſuiuent grāds accidens.Mais Ågo
nic,c'eſt àdire combateſtant cóposé & mellé de crainte & de cholere , affaut le cæur
de tousces deux mouuemens: parquoy en icelle le danger y eſt bien grand pour la fa
culté vitale. A ces ſix perturbations d'eſprit ſe rapportent toutes les autres commela
hainc, ( qui eſt vne ire enracinee, laquelle ne peuretreſans cupidité de malfaire) la
diſcorde, à la cholere: la gaillardiſe & la vanité, à la joye: la tremeur , l'exanimacion,
Commenele à la crainte:l'enuic,le deſeſpoir, leslamentationsà la triſteſſe: l'eſperáce ſouuenr pro
Medecin os: fice aux malades, tellement que le Medecin ou Chirurgie fort deſiré, ou l'amy de l'a.
Chirugien mie , appaiſe de ſon arrivée la grádeur du mal. Car la force del'ame quiauparauano
appailent ſuccomboit au mal , eſt excitee & releueede l'efpoir, & alſauc la maladie auec celle
10 douleurconfiáce,qu'enfin elle lafurmonte. Orpour concluſion, lesperturbationsde l'ame
lide en font grádemutation en noſtre corps , pour autant qu'elles ſone cauſes du mouue
les viſitane mentdes eſprits, & de la chaleur nacurelle: parce qu'icelles dilacét ou compriment le
Seslement cæur , au moyen dequoy les eſprits ſont reſolusou aftraines,& par ainſila couleur de
ſans auires la face eſt muce. Car c'eſt le propre du cæur mettre en icelle cercaines marques de
Teinedes.
ſes affe& ions, quien elle , pour la rarité de ſon cuir, ſont ſi apparentes, que par la face
ད་ ༩ལ།
on cognoiſt lę ieune d'auec le vieux, l'homme de la femme: la temperaturedu corps,
comme le ſanguin du cholerique, le picuiteux d'auec le Melancholique , les Mores D
d'auec les Sauuages,le Fráçoisd'auec l'Eſpagnol,le courroucé d'auec lejoyeux, auſſi
le lain d'auec le malade,& le vifdu mort:meſmes aucuns ont voulu dire, qu'en la face
on pouuoit lire & cognoiſtre les mæurs del'homme. La face deſcouure les affections
de Pame, & le propre du caur eſmeu , poſe en la face les marques de ſon affection.
Tous les viſages ſont differens les vns desautres,afin que chacun fuft recogneu. Or
Vtilisez des de ces perturbations d'eíprit cy.deuant expliquecs,il n'en reuient aucunprofit à
tions. l'homme ſain ,quelques mediocres qu'elles ſoient, ſice n'eſt(peut eſtre )de la ioye par
le moyen que nous auons declaré . Car la triſteſſe n'eſt vcile à aucun, ſinon d'auáru
reen cas qu'il fult eſperdu & cout reſolu de trop grade ioye. La cholere n'eſt vtile à
aucun,lino au caſanier,endormy, & pareſſeux,ou à celuy quiauroit quelque maladie
d'humeur froid & pituiteux. La crainte n'eſt profitable à perſonne , ſinon à ceux qui
d'une exceſſiue lueur, flux de ſang, ou autre extreme euacuation ſeroient preſts à
perdre la vie : par ainſi le Chirurgien rationel aduiſera à ne precipiter ſon malade
en aucune de ces perturbations , linon pour occaſion de quelqu'vnc de ces raiſons

1
L'Introduction à la Chirurgie. 37
A expliquees,ouautres ſemblables.Ceux quiſoncde cæur foregrand rare,& lafche,ne
reriennene pas bien leurs eſprits lors qu'ils ſont en falcherie , & fontordinairement
coüars:29 contraire,les hardis onc lecæutpetit, eſpais & ferrc :au moyen dequoy les
elprits vicaux ne ſont facilement diſlipez. Ariſtote dir que les beſtes peureules font
celles quione grand caur& fletry: & les hardies & courageuſes l'ont petit & denſe.
Parquoy leſdites paſſions ne ſe doivent ſimplement referer àl'ame,mais aux partiesLib.z.des
delquelleslatriſteffe& lecourroux prennentleur origine.VoilapourquoyAriftote pareus des Animaux ,
aiuge que l'ame eſtoit impaflīble. Que diray - ie dauantage des perturbations de l'a. baP : 4:
me:Gal.liu.4.des Cauſesdu pouls , chap. 2. parlant de ces percurbations , dit que le
pouls fechange par le courroux,&alors eſt haut,grand ,vehement,viſte, & frequeno:
& par la ioye elt grand,rare,& tardif,ne differant en rien du courroux , Au contraire,
par la triſteſſe eltpetit,languiſfanc,cardif & rare.Auli de la peur recéte,eſt vehemét,
viſte, ellancé , deſordonné & inegal :quant à la craince inueceree ,elle eſt ſemblable à
la triſteſſe. Deces propos ilappert euidemment que le mouvement des arteres eft al
B teré & changé par les paſſions de l'ame . Ce qui ſe peut confirmer par raiſon en ceſte
maniere : Les arteres ſontmuees par le moyen du caur, d'vn mouvement tout ſem
biable au ſien : à ceſte cauſe les pallions de l'ame peuvent eſtre cogneuës par la diuer
fcé du mouuement du pouls.
Des choſes contre nature. CH A P IT RE XXII.

PRE s auoir craicté des choſes naturelles , & non naturelles , ilne reſte Definition
plus pour parfaire noſtre introduction , qu'à declarer les choſes contrena de choſe căs
cure , qui ſont celles qui empirent noſtre corps en quelque maniere que ide naluje .
celoit. Ecſont trois en general, à ſçauor: Cauſe de maladie , Maladie, &
Symprome. Cauſe de maladie , eſt affection contre nature , precedente & faiſant
la maladie.Icelle eſt diuiſce en pluſieurs ſorces , & premierement en externe & in
terne.L'Externe ( dicte procatarctique,ou primitiue ) eſthors de noſtre corps,com
me les viandes , baſtons ; & ferremens qui bleflent. Mais l'interne a ſon eſſence &
fiege au corps,& eſtſubdiuiſee par la pluſpart des Autheurs en antecedente , & con
idince. L'antecedente eſt celle qui precede la maladie, & ne la fair encores a & uelle
ment,combien qu'elle en ſoit furic poin &t , comme les humeurs Auans , ou preſts à
Auer font cauſes antecedentes des apoitemes. La conjointe faict actuellement & im.
mediatemēt la maladie,auec laquelle a telle affinité, que l'vne & l'autresortouſiours
abſences ou preſentes enſemble. De toutes ces cauſes predictes, les vnes ſont nces a. D'où vien -
uec nous,commela mauuaiſe quantité & qualité des deux ſemences & du ſang men- nērles ma
ſtrucl,prouenancedes parens mal diſpoſez,font cauſes de pluſieurs maladies , & meſ- ladies bez
mede celles que l'on nõme hereditaires. Les autres viennentdepuisnoſtre natiuitė, reditaires.
comme le mauuais regime,les coups, cheures,& ſemblables. Celles qui sót neesauec
;
nous font coutes inevitables : mais il n'eſt pas ainſi des autres , deſquelles aucunes ſc
peuúenceuiter,comme les coups & cheuces : aucunes non , ains allerene neceſſaire
mene noſtre?corps, comme l'air , qui nous enuironne, le boire & manger,&c. Et di
quelqu'vn veur concer entre les cauſes internes nces auec nous,& ineuitables,la con
ſomption de l'humidité radicale que fait peu à peu la chaleur naturelle en vieillif
D fane:ienem'en ſoucie pas beaucoup,non plus que de la diviſion des cauſes que font
lesPhiloſophes,en la materielle ,formelle ,efficiéte, & finale , ou d'autres påreilles di.
uiſions.Carcela n'eſt du gibier du ieune Chirurgien, lequel ie pretens enſeigner par
les moyens plus faciles, & partantil ſe concentera de ce qu'en auons dit.
Des Maladies. CHAPITRE XXIII.
Definition
& diuifion
Aladie eſt affection contre nature , qui bleſſe l'action des parties im. de maladie.
mcdiatement. Icelle eſt triplé, à ſçauoir Intemperature, Mauuaiſe com Intempe
poſicion , & Solucion de continuité . La premiere diete Intemperature, eſt rature n'eſt
propre aux parties ſimilaires, eſlongnees de leur bon & naturel tempera. autre choſe
ment. Cetellongnementſefait en deux manieres : l'vne , quand iln'y a vice qu'en ces qu'on ex,
vnc ſeule oppoſition de qualitez , dont eſt diete Intemperature ſimple, & y en a on dedonple u
quatre ſortes àſçauoir chaude,froide, humide , & ſeiche :l'autre, quand il y a vice en heurs quae
toutes les deux oppoſitions : & ce pareillement en quatre façons , comme chaude & lisena
d inj
38 Le premier liure de

humide ,chaude & ſeiche, froide & humide , froide& ſeiche, & eft telle intemperat
ure A
dicte compoſee .Auſſi quelques fois l'intéperatu
re n'eſt que de leule qualité ,comme
en Phlogolis : & quelquesfois eſt accompagnee de mariere , comme és tumeurscătre
nature . Derechfl'intemperature eſt egale, comme en Sphacele : ou inegale , comme
2. diviſion.
en Fegmon. La ſeconde, à ſçauoir mauuaiſe compoſition , eſt maladie propre aux
3. diuifion
Maxweilfe parties inſtrumentaires,dont elle peruertit la bonne coſticucion , & a quatre eſpeces .
compoſicion La premiere eit quand la cõformation de la partie eſt vicieuſe en figure,loit naturel .
ejes qus- lement,ou par accident : en la cauité,commeſi la partie qui doit eltre caue , eſt ſolide,
wie especes, matliue,ou autreméremplie & eſtoupee :en aſprecé & leuité , ſi au lieu d'eſtre aſpre &
1.c.pec . rude la partie eft liffee & polie,ou au contraire.La ſeconde eſpece conſiſte en magni

2. espire. tude diminuec,ou augmentee outrele naturel. La troiſieſme, quand le nombre d'au .
3. e pecc. cunes parties defaut ou abonde , come s'il n'y a que quatre doigts en la main ,ou s'il y
en a fix . La quatrielme giſt en la ſicuation ou connexion vicieuſe, quand les parties
4. espece. leſquelles dcuroient eſtreconiointes enseble , lont ſeparees & hors de leur place na
turelle,comme il appert inanifeſtement és luxations . La tierce maladie , generale , à
Solarion ſçauoir Solucion d'vnité ou de continuité : eſt commune tant aux parties ſimilaires B
dvnué. qu'aux inſtrumentaires: & meſmes a diuers noms , ſelon la diverſité deſdites parties,
comme en la chair eſt nommeç playe ,en l'os fracture, & ainſi des autres .

Des Symptomes. CH A PIT RE XXIIII.

Ovs ne prenons pas icy Symptomeod accident generalement, pour


Double ac couc changement qui aduient à l'hommcoutre ou contre ſon naturel,
cepcion de mais particulierement, pour celuy quiſuruient à la maladie , & la ſuit,
Symptome. comme fait l'ombre le corps. Ce Symptome proprement pris , a trois
Neſpece
s.La premiere eſtadion abolic diminuec & deprauce : comme

Action A- par exemple ,la veuë eſt abolie és aueugles , diminuee en ceux qui ne voyent que de
bolie,dimi. prez,deprauee en ceux auſquels la cataracte commence à s'engédrer, qui penſe veoir
nuce code de petites mouches,poil,rets montans & deſcendans, ou qu'vne choſe en ſoit deux,
prance. Laſecondeeſpeceelt des affections du corps qui lont comine qualitez chágees :com .
Qualiter С
me la couleur natureile eſt changee en rougeur par flegmon , en liuidité & noirceur
ſecon des
changees. par gangrene. L'odeur ou fairer natureleſt changé en feteur ,par vn polypus és na
rines ,ou par vn vlcere pourry en la bouche, & c.Legouſt & fauourer naturel eft mué

és icteriques, auſquels toutes choſes ſemblent ameres. Pareillement le ſentimenc du


tact en ceux qui ſouffrent douleur, & qui ont la peau calleuſe,afpre & dure. La croi.
fieſme eſpece deSymptome concerne la recention & vacuation des choſes qu'ilne
faut euacuer,ou retenir.Car l'euacuation eſt córre nature, par laquelle les choſesbon .
nes en ſubſtance,qualité,& quantité, ſont miſes dehors commel'hemorragie ou Aux
Enarmation de lang ſuruenant au corps non plethorique : auſſi eſt bien la retention des choſes,
a veten- deſquelles la ſubſtance, quantité,& qualité ſont vicieuſes, comme de la pierre en la
tion contre veſlie ,des menſtruës,des vrines,& ſueurs. Semblablement il y a pluſieurs maladies &
nature.
Symptomes, qui empruncenc les noms des animaux .
Exemples .
Talpa, ainſi appellee ,à cauſe que les patiens ont vne apoſtume en la teſte, reſſemblanc
D.
à vne caupiniere .
Teſtudo,parce qu'elle eſt ſemblable à vne torcuë.

Polypus,vne chair croiſſance au nez , ſemblable au pied de Poulpe ou poupre.


Rarula ,elt vne tumeur ſous la langue , reſſemblant à vne grenouille , & fait que les
malades en parlant imitent le coax des grenouïlles .
Chærades,eſcroüelles,venác du mor Grec Choiros, quiſignifie vn pourceau : parce que
les pourceaux ſont ſujets à auoir de ſemblables tumeurs ſous la gorge : ou pour ce que
ceux quimangent de la chair de porc , y logg; plus enclins que les aucres. Les Latins
appellent ce mal Scrophule , du mot Scropha, quiſignifie vnc truye .
Cancer,eft vne tumeur quireſſemble à vn cancre de mer .
Elephantiaſis,ainſi appellec,à cauſe que les malades ont les bras & iambes groſſes &
cubercuſes comme les Elephans .

Bubo,ainſi nommé,parce que les apo tumes qui viennent és cauitez des aines & ail
celles des malades,y ſonc cachees , comme le hibou és creux des arbres,

Lagophthalmos ,ainſi dir ,à cauſe que l'oeilſe tient ouuerc comme ceux des lilures. Co
L'Introduction à la Chirurgie . 39

А moteſt compoſé de Lagos,'eſt à dire liéurc , & Ophthalmos, æil .


Bec de lieure,à cauſe que les liéures ont la léure ſuperieure fenduë.
Leonina ,à cauſe que les malades ont vn regard hideux & fier com melions.
Alopecie, vient du morGrec Alopex ,qui ſignifie vn regnard : parce que les malades
onscheute de poil comme les regnards.

ophiaſis, pelade: ainſi diete,à cauſe que les malades ont cheute de poils par ondes , à
la figure d'un ſerpent nomméen Grec Ophis.
Vicere Vermineuſe,à cauſe qu'il s'y engendre des vers .
Vicere teigneuſe ,parce qu'elle ronge la chair, comme la ceigne le drap .
Vlcere louuetiere, à cauſe qu'elle ronge la chair & les os , comme feroient les loups.
Vlccre cuniculcuſe, à cauſe qu'il y a pluſieurs creux & cauicez, comme aux clapiers .
des condins .
Loup garou , parce que les malades vont de nuict, & hurlent comme chiens &

loups.
Formicatio , lone cercaines verruës és parties du corps , qui fourmillent & deman
gent comme s'il y auoic des fourmis.
B. Dragonneau ,ſelon A ëce de l'authorité de Leonidas , eſt vn animal ſemblable à yn

verlong & large,qui ſe meuc entre cuir & chair , aux iambes , & quelquesfois aux mul
cles desbras.Soranus , comme recite Paul Aeginere , dit que ce n'eſt point vn animal,
mais quelque ſubſtance nerueuſe , qui baille ſeulement opinion de mouuement. Il eſt
ainliapeile, à cauſe qu'il a forme en longueur & tortuoſité d'un petit ſerpent.
Morbuspedicularis,àcauſe qu'on a grande quancité de poulx.
Satyriaſis, à cauſe que l'on a touſiours la verge virile tenduë & droiće , comme les
Satyres.
Punais à cauſe que les malades ont vne haleine qui put comme punaiſes.
Bouquin , parce que la ſueur & vapeur des malades eſt puante comme vn bouc.
Appecic canin , à cauſe que les malades one vn appecic depraué comme les chiens ,
ne ſe pouuans ſaouler , & eſcachent les morceaux ſi gros que quelquesfois ils leur de
meurent au milieu de la gorge .
Verminatio ,vne maladie de vers qui aduient quaſi en toutes les parties du corps.

С Bulimos,faim enragee comme ſi on deuoir deuorer vn bæuf: eſt yn mot cõpoſé de


Bous, qui ſignifie vn bæuf, & Eimos , qui ſignifie faim .
literus, la iauniffe , vient du mot Ictis, qui eſt à dire vne belecce : à cauſe qu'elle a les
yeux de couleur d'or.
Conuulfio canina, pource qu'en ceſte conuulſion on monſtre les dents comme yn chien
qui veic mordre.

Myocephalon , eſt vne eſpece de cheure ou relaſchenient de l'vuce, qui eſt vne des
membranes de l'ail , qui ne faic que commencer , & eft ſemblable à la teſte d'vnc
mouſche.

Des maladies de l'æil,qui retiennent le nom d'aucuns animaux .

Oeil de bæuf, eſt vne maladie d'æil,quand il eſt gros & eminent ſortant hors la
teſte,comme l'on void les bæufs les auoir .

D Oeil de cochon , eſt quand l'æil eſt rond & pecit & peu fendu , comme les ont les
cochons.

Oeil de chat , qui ſe dit à raiſon que l'on vcoid de nuict ainſi que font les chats .
Hippos en Grec, equus en Latin ,ceſte maladie eſt ainſi dire, pource que l'æil ſaurel
lecomme yn cheual . 1

Aigisen Grecæil de chéure , maladie qui vient à la cornee de l'ail , comme taches
blanches,ainſi qu'on void aux chéures.
Myacephalon,en Grec, Muſacaputen Latin , teſte de mouche , c'eſt vne cheute & del .
cente de la mébrane vuce la corneeeftát relaſchee , laquelle cheute repreſente la ce
fte d'une mouche : ce mot eſt compoſé de Myon, qui ſignifie mouche, & Cephaliceſte.
Ocil de loup ou de mauuais garçon,maladiede l'ail, quand ils ſontnoirs enfoncez,
regardans de trauers ,comme les ont les loups , & ordinairement les trahiſtres & mau
vais garçons.

Oeils verrons,quieft quand les yeux ſonc blancs & noirs,comme ont quelquesfois
les chcuaux,dont eſtdit le chevalauroi l'ail veron .

1
40 Le premier Liure de
Leoninusoculus,qui eſt quand les yeux ſont eſtincelans,comme les ont les lions ; ve А
nant du mot Latin Leo,qui fignific vn lion :ainſi les ont les ladres confirmez.
Des Indications. CHAPITRE XXV.

Pres auoir amplement diſcouru des choſes naturelles , non naturelles,


Definition contre nature,& leurs annexes : maintenant il nous faut parler des Indica
' indica
10n .
tions , leſquelles ſont neceſſaires , ſçauoir au Chirurgien methodique &
rarionel. Or nous dirons premierement , que Indication methodiqueeſt
vnc conduitceou voye leure pour paruenir à quelque incention ,quiguide& conduit
le Chirurgien à conſeruer, preſeruer,ou guarir le ſujetqui luy eſt mis entre les mains.
Car ainſi Galien au deuxielme liure de la Methodechap. 7.definic en general indica
tion , vne entree àagir & operer : au liure de optimaſecta , chapitre 11. definic , India
cation eſtre vneprompre apprehenſion de ce qui peut profiter ou nuire. Les Chi.
rurgiens & Medecins vſent de ce mot Indication , qui eſt propre à eux & hors de B
l'vlage du vulgaire : car il faut conſiderer que chacun art a certaine façon de parler,
Chacun att qui n'eſt
pas commune aux ao res, comme les fauconniers ont certain langage qui
àfio mnanie leur eſt propre : auſſi les mariniers , laboureurs & ſoldats : & generalement tous
reuepurier.artiſansontchacun vn iargon à part.& meſmes qu'ils n'ont nul inſtrument qui ne
ſoit nommé par ſon nom . Les Philoſophes & gensdelettres parlent de leurs ſcien
ces en autres termes quelecommun peuple. Ainſi pareillement nous appellós indi
cacion en Chirurgie , ce que le Chirurgien ſe met deuant les yeux , come vneenſei.
gne, pour aduiſer quelremede il doit prendre pourguarir ou preſeruer la perſonne,
tout ainſi que les enfeignes des hoſteliers monſtrent qu'on y loge,ou qu'il y a duvin
à vendre:& les boites penduës aux maiſons desChirurgiens,donnét à entendre que
leans on guarit des playes,& autres maladies appartenantes à la Chirurgie:& les bar.
Troisefpe biers desballins , pour monſtrer qu'ils font des barbes. Or ily a trois eſpeces gene
ces d'Indi rales d'Indications,deſquelles chacune ſe diviſe en pluſieurs autres elpeces particu
carion . licres:la premiere eſpece eſt des choſes naturelles:la ſeconde,deschoſes non naturel
les:la tierce,des choles contre nature.Leschoſes naturelles indiquent & enſeignent
qu'ellesdoivent eſtreconſerueesparleur ſemblable:&ſousicelles ſont compriſesC
toutes les Indications que l'on prend du corps & ſuier mis entre nos mains , quelles
ſont les indications priſes des forces du malade,la temperature,laage,le ſexe,l'habi.
tude, l'accouſtumance,& manierede viure. Les choſes non naturelles,comme eſtans
de ſoy indifferentes, maintenant font indication ſemblable que les choſes naturel.
les, c'eſtà dire , coindiquent auec les choſes naturelles, forces, & temperament de
noſtre corps :maintenác font indication ſemblable que les choſes contre nature , c'eſt
à dire,nouscoindiquent,& demonftrent meſmes moyens que la maladie. Or Ga-.
lien au neufielmeliure de la Meth.chapitre neufieſme au lieu où il dir , que pour lc
Ong
faiat des indications,ilfaut conſiderer trois choſes, la maladie,la nature du corps ma.
lade,& l'air qui nous environne : pour toutes les choſes non naturelles , il ne confi. DO
dere & nemet en compre que le ſeul air.La raiſon eſt,dit-il,que toutes les autresma
ticres non naturelles ſont en noſtre puiſſance de les prendre,ou fuir, ce qui n'eſt pas
del'air:car il faut,voulionsou non ,porter & endurer la condition preſente de l'air.
L'air donc nous donne quelque indication,oupluſtoſt coindicacion: car s'il et ſem . D
blable à la maladie,il ſymboliſeen indicationsavec la maladie,& pource l'indication
eſt decorriger : s'il eſt contraire à la maladie , il indique & monſtre qu'il doit eſtre
Qu'indi- conſerué. Les choſes contre nature nous indiquent qu'elles doiuent eſtre oſtees, &
qierne les prohibees, ou corrigees par leur contraire. Donc pour deduire le tout par le menu,
ba (9
wen.ature . les clpeces des indications,ou enſeignes priſes des choſesnaturelles ,que nous appel
lons conſeruatiues, ſont pluſieurs. Les vnes onteſgard à la force & vertu du malade,
pour laquelle conſeruer,fautbien ſouuent laiſſer la propre cure & principale , pour
leur ſubuenir :comme en rigueur ou tremblement , ou comencement de l'accez des
fiéures,rien n'eſt tant contraire,prenant indication de la maladie,quele manger:car
mangeant lors le malade augmence la matiere morbifique: toutesfois cas aduenant
que les forces fuſſent canc debiles,quele malade ne poult reſiſter à l'effort de l'accez,
il faut nourrir le malade,prenantindication des forces. Les autres indications ſont
priſes de la temperature du corps:comme s'il eſt ſanguin ,choleric, pituiteux , ou mc
lancholique. Aucunes deſdices indications appartiennent à ſon habitude, en conſi
L'Introduction à la Chirurgie . 41

derant s'il eſt delicat,mince , & de petite corpulence,& rare , ou robuſte & charnu &
A
denſe. Aucunes indications ſont priſes de la nature,ou complexion de la partie où eſt
le mal , de laquelle on tire aduis & indications : comme de la ſubſtance,fi elle eſt fimi.
laire, ou organique. De la ſimilaire on cõlidere ſi elle eſt chaude,froide,ſeiche,ou hư
mide, ou chaude & leiche,chaude & humide,froide & ſeiche, froide & humide :aufli
fielle eſtmolle comme la chair ,dure comme l'os,moyenne comme les nerfs & mem
branes.Del'organique,ſiclle eſt principale & noble,ou ſeruance à la moins noble, ou
non noble du tout.Pareillement on prēd indicació du ſentiment aigu ou heberé de la
partie,de la forme, figure,magnitude,ou grandeur,nombre,colligáce, ſituation ,& fi
nalement de ſon action & vlage : car de toutes ces choles le Chirurgien rationel doit
prendre indicatió en la cure des maladies quiaduiennent en chacune partie , pour les
conſeruer en leur naturel, luy oſtát ce qui eſt cotre nature.Come l'vlcere des yeux ne
le guatic come celles des aureilles , le Flegmon en la gorge ne ſe curecómeen vnc au Notable
tre partic : car on ne faict repercuſion par dehors ,de peur de faire réuoy ay dedãs , indication
quiieroit cauſe deſuffocation : ſemblablement on n'vſe point de repercuſlifs,princi comebant
B palement ſi la Auxion eſt faicte de cauſe ancecedére pris les parties nobles , cómeon Irfage des
feroic ſi clic eſtoit loing d'icelles,Autli la ſolution de continuté ne ſe guarit en partie repercußifs
neueuſe ,comme en partie charneuſe,en la partie feiche , come en la partie humide.
Les indications donc priſesde la partie , ſont tirees de la temperature d'icelle , de la
principauté & noblefle, de la forme, figure, & ſubſtance, de la ſituation , & ſenſibilité .
Latemperature d'icelle ,comine ſi elle eſt humide,doit touſiours eſtreconferuee,en
coresque la maladie tul humide,come s'il y auoit vn vlcere . Sa principaurérequiero
des aſtringens,encorequ'il fuſt queſtion de reſolutifs:commeen obſtructio du foye,
laquelle li prenancindication de la ſeule maladie ,on pente guarir par les ſculs refolu
tits, ſans y meſler des aſtringens & roboratifs ,on rendra la partie ſi latche , qu'elle ne
pourra plus ſuffire à la ſanguification neceſſaire pour tout le corps . La formation &
ſubſtance de la partie,monſtre que ſi elle eſt de ſubſtance plus rate , comme la ratelle,
elle ſera moins ſubiecte à obſtruction: ſi elle eſt moins rare,commele foye, y ſera plus
ſubietre,de tát que les conduics eltás plus eſtroits ,l'humeur y eſt retenu plus obftiné

C ment.Sa ſituation ,ſielle eſt profunde, monſtre qu'il faut que les medicamens ſoient
plus fores & liquides pour penetrer plus auant à icelle : ſi elle eſt ſuperficiele, donne
indication qu'il ſuffic que le medicament ſoit de mediocre force & conliſtence. La
ſenſibilité de la partic fait & monſtre qu'il faut eftre plus doux en medicamens , &
s’eſpargner dauantage : car le Medecin ſeroit eſtimécruel,& defraiſonnablc , quien
l'vlcere delacorneede l'eil appliqueroit medicamens auſſi acres & deterſifs comme
afl'vlcere de la jambe. On prend pareillement indicacion du ſexe, de l'arge , attendu
quechacun aage porte ſon indication.Car nous voyős qu'il y a des maladies qui ſont '
curables és ieunes gens,& incurables ésvieils: ce qui eſt prouué par Hypocrates, qui
dir,que les longuesmaladies de vicilleſſe,commelemaldes reins de la veſſie, la toux, Linear
la courte haleine,& pluſieurs autres maladies , ſont incurables, & les accompagnent Apho. 40 .
iuſques à la mort . Quant à la ſaiſon ,il eſt aſſez clair que la fieure quarte ne ſe guarit & linse 6.
point en Hyuer,& bien peu la quotidienne. Auflitouc vlcere eſt plus difficile à curer Aph. 6.
enHyuer qu'en Eſté. Semblablement chaque temps ou faiſon de l'annee requiere
ſonmedicament:car autre medecine faut aux jours caniculaires , qu'en Hyuer : auſſi
D
la dicte ne ſe fait pas en Hyuer ſi bien qu'auPrincemps. Il faut auoir pareille indicatió
del'air naturel,ou autre: car ſi quelqu’vo ſe trouue malade en vn autre air qu'en celuy
de ſon pays ou dela demeure ordinaire, & de longtemps habitué , ne ſe pourra guarir
par meſmes moyens , prenát indication de la difference desairs & regions : car autane
d'airs & regions,autanty a - il de moyens de guarir : cóme vne playe faideà la teſte à
Romc,ou à Naples , ou bien à la Rochelle ,mal. aiſéméreſt guarie,dequoy l'experiéco
fait foy. Paraillement faut auoir eſgard au temps des maladies : car autres medica.
mensſonc requis au commencement qu'en l'augment,en l'augment qu'en l'eſtat , en
l'eſtatqu'en la declination .Auſſi on prend indication de l'eſtat, couſtume & maniere
de viure du malade:car autrement faut medicamenter les hommes robuſtes, comme

laboureurs,mariniers,crocheteurs,charciers ,que ceux qui ſont demeurās aux villes,


vſans des viádes delicates ,& ne faiſans grands exercices. Sous ceſte maniere de viure
fuur comprendre quelque particularité ou proprieté cachee du naturel : car aucuns La
toft qu'ilsontpris quelques viādes ou breuuages, vomiſſenr,voire leur eſt ſi contraire
qu'aucuns en font morts. Ce qui eſt celmoigné par Gal.liu . De conſuedine, Darius Pcs
42 Le premier Liure de

ripareticus,lequel en ardeur de fiéure eſtant contraint par les Medecins qui luy affi- A
ſtoient,de boire de l'eau froide,mourut ſubitemēt eſpris de cóuulſió :non pour autre
raiſon , linó pource que ſe cognoiſſant auoir l'orifice de l'eſtomach fioid, il ne s'eſtoic
Hifoire. iamais voulu accouſtumer à telbruuage.Symphorianus recite, qu'iladuint à vn qui
dam , lequel auoit les medecines en celle horreur& deſdain, que l'odeur ſcule dicel
les ſentie contre ſon gré ,luy deſuoya tellemér le venire , qu'il fut cótrainc d'aller ſepo
fois à ſes affaires à l'inſtant, iuſques à en auoir vn accez de fieure,là où celuy qui auoit
prins ladice medecine de bonnevolonté,n'en fic que trois . Pour le reſpect des indica
rions qui ſe prenner des choſes contre nature ,cõme de la maladie , elles ſont priſes do
la logueur,largeur,profondité des playes & vlceres : de la figure ,ficuació droičte, obli.
que,haure, ou bafle :deſon egalité,ou inegalité, de ſon apparenceou couuerture , c'eſt
à dire, ſi elle eſt caue ou cuniculeuſe. Semblablement leChirurgien prend indication
de la grandeur & vehemence de la maladie, de la cauſe antecedente ou coniointe , &
des accidens & complications d'icelle.Car la cauſe ſouuent requiert remede tout cõ .
traire à la maladie , come quand la fiéure eſt engendree d'humeurs froids & eſpais.De
meſme, le ſymptome & accident requiert ſouuent & indique ou enſeigne remede
contraire à la maladie :eſquels cas il faudra touſiours ſuiure l'indication de celuy qui B
preſſe plusle malade : commefien la fiéureſuruient fyncope ou defaillance de cæur,
nous ne craindrons donner du vin au malade , nonobſtant que la fićure , maladie
chaude,donne indication debrevuage d'eau froide. Or voila les indications qui font
trouuer les moyens de guarir & cöſeruer,ou preſeruer les perſonnes.Mais quelqu'vn
pourroit dire, qu'il n'eſt pointde beſoin rechercher tác d'indicatiós à guarir vne ma
ladie ,voyát que pluſieurs ont bruit d'eſtre bős Chirurgičs, qui n'en viene que d'vne,
à ſçauoir ,de celle qu'ils prennent de l'eſſence de la maladie, laquelle indication eft
de guarir la maladie par ſon contraire . Ec pour ce regard il s'enſuiuroit , que celle in
dication ſeule priſe de l'eſſence de la maladie , eroit ſuffiſante pour trouver le moyen
de curer ladite maladic ,& n'en faudroit point d'autre. La conſequence n'eſt pas bon
nc . Toutesfois l'indication prinſe de l'effence de la maladie eſt bien eſtimee pour la
premiere & principale,mais non pas pour ſeule. Car elle n'indique pas le moyen , s'il
eſt poſſible de guarir la maladicou non , commefont les autres indications ſuſdites,
deſquelles quelques vnes pour ce regard , & autres conſiderations ſont auſinõbrecs
с
1 cntre elles principales , & neceſſaires. Or de dire qu'vne maladie eſt curee par ſon
contraire , cela comprend auſſi qu'il eſt beſoin de ſuiure les autres indications , lel.
quelles commenous avons diet ,enſeignent pluſieurs moyens pour venir à l'effet de
ceſte guariſon .Ioint que celle indicatič n'eſt pas touſiours ſuyuie,mais lors ſeulemét
que les autres indications prinſes des autres circonſtances mentionees s'y accor
dent. Car pour exemple, la plethore de ſon eſſence requiere que l'on tire du ſang,par
indicacion cirec de lon contraire : toutesfois qui eſt celuy , quia vn enfant plechori
que aagé de trois mois ,voudroit à celleintention ouurir la veine : Adiouſté que cello
indication n'eſt pas propre au chirurgien , eſtant commune au ſimple populaire, voi
re à vn enfant : car en ceſte indication iln'y anul artifice qui ne ſoit commun , & ma.
nifeſte à vn chacun :meſmes les ſimples gens , mechaniques & arciſans, s'ils voyene
quelque fracture ou luxation , diront bien qu'il faut reduire les os en leur place natu .
En quoy el relle :mais ils ne ſçauroienc dire les raiſons & moyens, par leſquels on doicces choſes

diftingué accomplir & mettre en execution . Ecc'eſt cela en quoy eſtdiſtingué le vulgaire d'a .
D
le vwless vecleChirurgien ,vray curateur de celles indiſpoſiciós, lequel pourra inuéter les cho.
re, du chi ſes
par leſquelles ſera mis en effect ce qui nous eſt inſinué & donné à entendre par la
targen ( 4
tione . premiere indication .Ortoutesces raiſons & moyens qu'il faut inuenter pour venir à
cet effe &t,ou pour cognoiſtre ſile mal eſt curable ou nõ , nous les trouuetõspar les in
dications particulieres cy - deuát deduites & declarecs ,tant des choſes nacurelles,non
naturelles, que contre nature ,leſquelles reſtraignent & limitent ladite premiere in
dication ,eſtans adiouftez auec elle. Pareillement le ſimple populaire si empiriques
diront bienquetoute ſolution de continuicé requiert vnion , & qu'en toute maladie
Quelles fon contraire eſtneceſſaire : toutesfois c'eſt le faid du Chirurgien ſçauantde cognoi.
parties ne ftre ſiladite vnion ſe peut faire en toutes parties,ou ſi aucunes non . Car le ſimple po
Je peuvent pulaire eſt ignorant que la partie nerueule du Diaphragmeeſtantbleſſee , ne ſe peut
conſolider. conſolider ,ny les inteſtinsgrelles,le cæur,les poulmons,le foye, eſtomach , cerucau,
veſic. Et pour le dire en vnmot,les empiriques ne ſçauent pas beaucoup davantage
que l'ignare & ſimple populaire, quoy qu'ils facent grand cas de leur experience , la
quelle,
L'Introduction à la Chirurgie . 43

A quelle,iaçoit qu'elle ſoit l'un des deux inftrumens decoure inuention, toutesfois elle
ne peut,comme la raiſon ( qui eſtl'autre inſtrument d'inuentio) crouuer ny enſeigner
la ſubſtance de la partie où eſt le mal, ne ſon action ,ne ſon vlage, vtilité, ſituation ou
colligance,ne les autreschoſes dont on prend indications particulieres : moyennant
leſquelles tout Chirurgien rationel pourra preuoir,non ſeulement les maladies cura .
bles, & les remedes auec leſquelies elles ſeront guaries,maisauſli celles qui ne ſe peu
uent guarir.
L'ordre de curer les maladies compliquees. CH A P. XXVI.

R les maladies compliquees requierent eſtre curces par ordre , les vnes
aptes les autres , linon qu'vnereltaſt ſans pouuoir eſtro guarie . S'ily ama
ladie compliquee , vrgente & perilleuſe , elle nous indique & enſeigne
eſtre de beſoin de commencer la cure par elle meſme,nonobſtantque par
cemoyen il en reſtalt vncincurable,ou que l'on fuft contrained en faire vne autre : ce
qu'ordinairement nous faiſons pouroſter les choſes eſtranges , comme yne balle ou
eſquille,carpour ce faire on aggrandit la playe:ou l'on couppe & deſchire le col de la
B
veilic pour oſter vne pierre contenuë en icelle,faiſant vne playe quelquesfois quide
genere en fiſtule incurable :car le mal qui eſt vrgéc & perilleux , eit de telle conleque
ce,que pour le guarir il faut lailler vn autre malincurable. Comme ſi vn nerfettoit

picqué, & qu'il ſuruint ( palme ou conuulſion à laquelle ne fuft pollible remedier par
medicamencs , lors en inciſant lę nerfde crauers nous guariſſons la conuulſion , mais
nous priuerons la partie où s'inſere le nerf,decertain mouuemét volontaire . Auſli fi
en quelque grádeiointure il ſuruient luxació auec playe,fi nous eſſayons à la reduire ,
nous cauſerons conuullion :parquoy faudra pour cuicer ladite convulſió, vaquer ſeu .
lemér àla playe , & laiſſer la luxation ſans eſtrereduite. Mais aux maladies cõpliquees
quand iln'y a rien qui nous preſſe,ny tire hors de la cure principale , c'eſt à dire de la
maladic propoſee,nous tiendrons cet ordre , que ſuivantl'indication de la choſe qui
empeſche le plusla principale cure de la maladie , & l'a &tion denature ,nousguarirons
icelle choſe la premiere:puis ferons ainſi des autres ( s'il y en a pluſieurs) tout par cet
ordrc, & par cete raiſon ,tellement que nulle ne demeurera lanseſtreguarie. Comme
pour exéple,polonsvo vlcere licuéà la iambe, auec alceration d'os accompagné d'vne
C varice,& autourdudit vicerc'vneсumeur & intemperature phlegmoneuſe, le corps
cacochyme& plethore , l'ordre ſera de cómencer aux choſes vniuerſelles par l'aduis
dudođcMedecin , qui luy ordonnera ſa maniere de viure,purgations, ſaignee, & rc.
ifiera en ce qui luy ſera poſſible la cacochymie : cela fait, on ſcarifiera la tumeur, &
ſcrót appliquees ſanglues,afin de deſcharger, & vacuer la matiere conioin & te : puis ſe .
1 ront appliquez cauceres pour corriger l'alteration de l'os , & en cauteriſane on fera en
forte,quela figure ronde de l'vlcere ſera de figure longue ,ou triangulaire : cela fait on Aux ulcea
coupera la vatice , & l'vlcere ſera traicté comme l'arc le commande,puis conduit à ci res deiam
catrice :& pendant la cure, le malade ne ſetiendra debout ny allis, mais couché , & ſera bestemals
laiambebandee comme il appartient , ce qui ſera plusamplement declaré cy-apres. de ſe dois
Orily a quelquesfois des indicacions contraires , ſçauoir et que toute'l'habitude du tenir con
ché.
corps ſera de cemperature humide , & toutesfois la partie vlceree ſera de téperature
leiche:& au cótraire, la temperature du corps ſera leichc , & celle de la partie ,humide:
ſouuentque tout le corps , & la partie
D pareillement en calidité & frigidité, aduient
ſonede diverſes complexiõs,& par ainſi faudra touſiours meſler, & en ceſte mellange
augmencer ,ou diminuer la doſe de tels, ou tels remedes , ſelõ que deſdites indications
contraires les vnes ont plus deforce que les autres. Come pour exemple , ſila partie
vicerec eſt incemperee naturellement de quatre degrez de ficcité , & cour le corps ſoit
de trois degrez d'humidité,il eſt certain que le medicamēc que Pon appliquera à ladi
te partic,doit eſtre plus ſec d'vn degré , que celuy que l'on appliquera à vne partie té
perce.Au contraire, poſons le cas que la temperature de tout le corps ſoit intemperea
d'vn degré d'humidité ,& la partie lefoie d'un autre degré de ficcité, alors il ne faudra
tien augmenter ny diminuer audit medicamét,à cauſe que le degré du ſuperflu d'hu- Sommaire
midité,recopenſéceluyde ficcité :choſe à la verité quicóliſte plus en artificieuſe con . dece eraient
des indicans
ieđure, qu'en certitude de raiſon. Sur tout pour la fin de ce trai&té ſovucnons-nous,
tions.
que des choſes cy deſlus mentionees , qui nous cõduiſent à ce qu'il faut faire, les ynes
44 Le premier liure, de
ſont indicatiues , les autres ſont coindicatiues , les autres ſont repugnantes , les au. A
tres Lont correpugnantes. Les indicatiucsſont celles , qui de loy. melmes , & de leur
nature enſeignent ce qui eſt à faire. Coindicatiues ſont celles qui monftrent & en
ſeignent le melme que les indicaciues, mais ſeulement par accident, & non propre
ment & eſſentiellement. Les repugnantes ſont celles quidemonftrent d'elles mef
mes , choſe coute contraire aux indicatiues. Les correpugnantes ſont celles,quiaulli
conſeillent autres choſes que les indicatiues , mais ſeulement par accident , Içauoir
entant qu'elles s'accordent auec les repugnantes. Exemple de ce : la plechore de loy
demonſtre qu'il fauc tirer du ſang , & lemeſme coindique la ſaiſon du printemps:
mais à cela repugne directement la faculté imbecile , & enſemble y correpugnel'aage
de l'enfance. Balance doncen ton cſprit, quand tu delibereras de ce que tu auras à
faire, & luy pour la guariſon des maladies ces quatre choſes, & te comporte de fa .
çon, que tu executes pluſtoſt ce que te conſeilleront & demonſtreront les choſesin
dicaciues & repugnantes,qui ſont la maladie & les forces du malade , que non pas ce B
que te conſeilleront les choſes coindicatiues & correpugnantes , deſquelles la force
& matiere de prendre indication eſt moindre. A ces diuerſes indicacions nous en
pouuons adiouſter deux autres clpeces: l'vne priſe de fimilitude, l'autre de ruſe &
ſubtile inuention , que les plus recens Medecins ont appellé ſtratageme. Nous pre
nons indication de ſimilitudes, és maladies qui ſuruiennent tout nouvellement, lors
queleureſſence eſt incognuë , ne pouuans eſtre penſees par medicaments inuentcz
par indication priſe du contraire. Parquoy pour la fimilitude, que telles maladies
ont , ou leurs ſymptomes & accidens , auec celle ou celle autre maladie vulgaire &
communc, ſont penſees de meſme façon: ainſi que du commencement nosperesont
practiqué ſurla verolle, laquelle ils penſoient comme la ladrerie , pour la ſimilitude *

des accidens de l'vne à l'autre maladie. Mais nous prenons indicacion de guariſon
parruſe, & quaſi comme ſtratageme, lors que la maladie nous eſtant du toutinco
gneuë , ou pour eſtre d’yne nature eſtrange, & bigearre , ou pour prouenir d'altera
tion d'vn ſubie &t à nous incognu , comme de l'eſprit, ſommes contrain &ts, parde
faut d'indications tirees d'aucune choſe naturelle, auoir recours à quelques ſubtili 게

tez, & comme ruſes de guerre,commenousentendons auoir eſté pra&tiqué ésmala


dies d'affc& ions melancholiques, deſquelles les eſpeces ſontplus difformes, mon
ſtrueuſes, & bigearres, que les ſonges que l'on fait de la Chimere,comme l'on dic en
commun prouerbe. !

>

ino
L'Introduction à la Chirurgie. 45

TABLE DES INDICATIONS


Pour leſquelles conſeruer , faut laiffet la propre cure & pridcipale
La force & vercu du malade pour leur ſuruenir. Cir oùles forcesdu maladedefaillent, le Chic
rurgien nepeut venir à la fin pretendue.
Sanguin
La temperature du Choleric . Laquelle doit eſtre contregardee , encorequ'ellēfuit mauuaia,
corps,cómes'il eſt Pituiteur. ſe , comme choſe accouſtumee. Gal . 2. de la Merh.
( Melancholic.
Delicar, Chaude , Chaude & leiche.
Son habitude, Mince . Froide , com . Chaude & Humide
Similaire poſee Froide & ſeiche.
De petite corpulence. Seiche ;
Rare ou charau . Humidë, Froide & humide.
Subſtance
Principale ou noble.
( Organique Seruante àlamoinsnoble.
La complexion de la nature Non nobic du tout,
de la partieoù eſt le mal, de )
laquelle on cire aduis & in Aigu. Comme l'ail ne peut porter medicamens
dications: commede la Sentimée Hebete. Sforts que la chair.
Naturelles,
leſquelles
indiquent& $
Forme , figure, magnitude, nombre, colligance, ſituation, action ,vlage.
enlogoent
qu'elles doi L'aage,attendu guechacunscar nous voyons qu'ily a des maladies qui ſont curables aux ied
uent eſtre aage porte ſon Indication . 3 nes gens, & incurables aux vieils : aulli les vieils endurenr la faim
conſeruees { plus facilement que les ieunes.
par leurs
ſemblables
dont les v {
Du Sexe: 3 Attendu que les femmes ne peuuenr endurer remedes Si forrs que les hommes,
nesfontpai- l'annee
fes de La ſaiſon: de {s Car
fons autres medicaments fone requis en Hyuer qu'en Eſté , & ainl des autres fata
de l'annce.
Indication eſt
TaC conduite ou Conſideré qu'autant qu'il y a de regions , autant y a -il de manieres de guarir : qu'il
voye leure pour
paruenir a quel La region. ne ſoit ainſi,vneplaye derelte eſt plusdifficile à guarir à Paris qu'en Auignon , & les vice
les des iambes plus faſcheales en Auignon qu'à Paris , comme nous avons dit cy
que intention , dellus. Ce qui elt melme teſmoigné par Guidon,
qui guide &
conduit le Chie Cóinencement
sargien à con Du temps: car autres medicaments Cont Augmear Sdes maladies.
fever ,pre ſeruer requis & conucnables au Eltat
ouguarir le fu. Declinaiſon .
istgui luy eſt
mis cotre ſes
mains. Icelles ( Delicats, comme ceux ( Sur icelles nous rapportons quel,
font sizces des
La maniere de viure,la- ) Parquoy qui font és villes, nour- que particularité , ou proprieté
choles ice commele propreSfauttrai-> Robuſtes
cemporainent. Eter
, commechar-}&toftqu'ils ontpris de la peilane,
tiers , crocheteurs ,ma- pomme, ſole ,perdrix , cau ,
les ou all
riviers , laboureurs. lerecholá, vomiſſent.
( ſemblable à la maladie, ſymbo.s Et pour ce l'indicacion eſt
Non naturelles, qui indiquét choſes ſemblablesaux lifant en indication auec elle. I de ſe corriger.
naturelles, & contrenature, deſquelles nous ne con
liderós, ſelon Gal. 9. de la Method, quel'air qui ſera ; Ou contraire à icelle : & qu'il dois eſtre conſeruć.
( & lorsmonſtre {
Grandeur. L'vrgent , ) Grande douleur en
Maladie Parquoy pour va ylcere.
Contre nature , lef prenant la guariſon des
quelles indiquent & indicacion d'Com plication
icelles , maladies com- La caule,
demandent eſtre de la pliquces , nous Fluxion qui ſe faiết
Loltees : commc renonsdeindcesi- { Et celle fans comme { à la parcie.
Ypcation
Cauſe de leſquelles nous
maladie, indiquent rc- trois poines, laquelle la
medes ſouuenr qui ſont maladie ne Caric ou intempera :
Sympto- contraires à la peut eſtre cure qui la peut ac
.me, maladic , altce.
( compagner.
cij
M
76 Le premier Liure de
Table methodique , pour cognoiſtre les maladies par les cinq ſens.
Si l'vrine d'vn malade eſt :rouge & enflammee,onſ
cognoiſt qu'il a la fitureeſtant boüeuſe , avoir
vlcere auxreins ou veſlie , ou autre partie. Toscana
Si la mariere fecale eſt meſec avec boüe ; on
iuge auoir vlcere aux boyaux : la bouë qui
fort d'vn vlcere eft noiraſtre & færide , demon
ſtre corruption d’os : li elle eſt blanche,l'integri.
Couleur , té de la partie.
Si quelque perſonne a la couleur iaunaſtre,
( commc on le iugera eſtre Icterique, & principalement
G le blanc des yeux eſt cel.
Si vne tumeur eſt rouge en couleur , on co
gnoiſtra qu'elle ſera faicte de fang : fi elle eſt
jaunaſtre, de bile : ſi elle eſt blanche, de pituite:ſi
elle eſt liuide ou plombine , de melancholie.
Si vne iambe ou bras lone luxez , on
lecognoiſtra en les comparant à l'au
tre qui ne l'eſt pas : voyant vne cauité
Figure d'où eſt party l'os, & vneeminence ou
il eſt tombé.
veuë , colan- Mauuaiſe
( fidcrant | Si l'os de la cuiſſe eſt horsdela boit Tous leſquels cing ſens exterieurs
conforma te,on verra la iambe eftre plus courte, ne reçoiuent , ſinon que ſuperfi ‫| ܐ ܚ ܕܬܘ‬

tion en a la luxation eſt en dehors : & plus ciellement les obiects, comme
( longue ſi elle eſt faicte en dedans . vn miroir faict , non pour autre
Si vo maladea lesyeuxcauez,lestem - fin que pour les repreſenterà l'en
Chara- ples abbatues, & le nez poinctu, on tendement , comme à leur prince
Aere cognoiſt qu'il eſt proche dela mort. & feigneur , afin deles difcerner
Lors qu'vn malade tantoſt amaſſe tourà luy tan par la raiſon , qui diuiſe & iuge
toſt penſe amaffer de petits feftus, oniuge qu'il en dernier reflost , penetrant iul
eſt proche de la mort . ques à la profondite des choſes .
Geſtes , Sivn maladefait beaucoup de fingeries, vacil- De ſorte qu'elle is uente le vray, ACAS

comme lant en les faicts & paroles , & peredeuanthon-; iuge le faux,& diſtingue ce que
neſtes perſonnes ſans honte ne vergongne, on del'vn & de l'autre s'enſuit , ou
( cognoift qu il eſt malade de l'entendement, repugne , en rapportant les
j choles veui's , ouyes, odorees,
( Quelque luxation, & principalement celle des gouſtees & touchecs. Aquoy
l'elpauleou cuiſſe eſt reduite , on le cognoiſt par aide grandement la memoire,
vn lon qui fait clocq . laquelle eſt comparee au groffe ;
Si on fonde en la veſlie,& qu'il y ait pierre, on auquel ( comme apres en procez
Son , com oit vn fon qui faict cocq . debatu ) on recire & garde ce qui
me li S'il y a de la bouë ou autre humeur contenuëau a eſté arreſté par l'entendemeng
Le Chirurgien & railon qui l'imprime,afin qu'il
thorax ,onoit vn ſon , comme d'une bouteille ſoit
cognoiſt & iu à demy pleine qui gourgouille. gardé , & qu'on s'en puiſſe
ge des mala Si quelqu'vn parleRenault ,on cognoiſt le pa aider quand il ſera neceſſaire. Ec
dies par la Ouye , en lais eſtre troué, ou eſtre entoiié. pour ceſte cauſe , Dieu curieux
tendant Quand on oitſortir vo ſon d'vneplayefaite au de noſtre perfection, nous a don
quelque thoraxauec fimement,on cognoiſt la playe pene né ce ſingulier remede , prompt
trer audedans. Si on oit desvents eſtre contenus & comniode contre l'ignorance
Vents au ventre inferieur , que Hippoappelle Borbory- & oubliance des choſes ,afin que
comme gmes , oniuge eſtre vne colique venteuſe. par l'aide d'icelle memoire nous
Ředuiſant vne hargne, fi on oit des vents,comme venions à cognoiſtre ce qu'auons
1 Syn gourgouillement, on la iuge inteſtinale. veu & apperceu par les ſens, qui
Paroles
Quand vn malade dit tantoſt d'vn & tantoſt font laveuë , ouye, odeur, gouſt
d autre, & eft du routinconſtant en ce qu'ildit , & tact , qui ſeront plus ample
oniuge qu'il eſt malade de l'entendement, ment deſcrits par cy - apres.
Vne perſonne eſtre punais :
Vne vicere pourrie & gangreneuſc.
La carie des os. stomer
Odeur , par laquelle on La bouë eſtre ioüable ou non .
cognoiſt Les ſueurs , vrines , & matieres qui ſortent, eſtre
(naturelles ou non.
On cognoiſtra que la cholere redonde , ce qui eſt Amit
manifeſte à ceux qui ont la iaunille ou filure
tierce . Aunes
Amer,,
ſ Sallé On iugera que le phlegme fallé abonde.
Semblable , Il monſtre auoir grande corruption en l'eſto
àceufs mach ,&
mach , & en toute l'habitude du corps par ex
Gouft , có- 3 pou rris ; cez de chaleur .
me s'il eſt ſemblable à s Il monltre auoir corruption en l'eſtomach par
( vinaigre. excez de froidure .

( Vn febricitant
vne debilitation
touchant le Poulx. .
Tact , par deLaforces,
boue d'vne apofteme eſtreptoche ou profonde parl'inon.
lequel on 3 dation. Vne aneuriſme, par la pulſation,& quelquesfois par 193
cognoiſt yn ſifflement qu'on ſent en prefant deſſus. condo
Lotus

side
L'Introduction à la Chirurgie. 47
A Dediuerſes manieres de guariſors. CHAPITRE XXV 11.
L ſe faitd'autresguatiſons par choſes eltranges commeon peut voir par les
hiſtoires ſuiuantes,Alexanderab Alexandro , & Pierre Gilieafferment que
laPoüille,concreed'Italie, ilya vnccipced'araignees,queceuxdupays triffoires
1 nomment Tarantule,le P. Rhodien la nomme Phalange, qui ſont au commence.
mencde l'Eſtélivenimeuſes, que quiconque en eſt mords, sil n'eil bien ſoudaine
mene ſecouru,il perd le ſentimene & meurt:& fi quelqu'vn eſchappe de la more, il de
meure inſensé & totalement hors deſoy..Auquel mal l'experiēce a trouué vn reme. La muſique
de,quieftla muſique. Ce que les autheursen diſent, eſt comedetelmoins de l'auoir estmedecza
veu, dilans que ſicoſt que quelqu'vn en eſt mords, on fait venir le pluftoit que l'on nalen
pourdeuantluy des gens quiioüent de violles , fleutes, & autres inſtruments, dont ils
Connent & chantentdiuerſes chanſons: laquelle muſique entéduë par le nauré, il co.
mence à baller faiſane diuerſes muances, comme ſi tout le temps de la vieileuſt eſte
accouſtumé au bal : en laquelle furic & force de baller il continuë iuſques à ce que ce
venin ſoic diſlipé. Le meſme Alexandre dit auoir veu , que des ioueurs ſe trouvans
B
lallez de ſonner àfaire dáſer vn qui auoit eſté bletle de celiebeſte, ayant cellé pour ſe
repoſer, le pauure nauré comba inconcinent en terre comme mori, ayant perdu ſes
forces:mais ſicolt qu'ils recommencerer à ſonner, il veit le pauure inaladeiereleuer
denouueau , & recommécer aueccelle force qu'auparavant iuſques à ce que le venin
fur diſlipé.Encoresdic-il plus qu'il eſt aduenu que quelqu'vn qui n'auoit pas eſté bie
guaty auec ceſte muſique,aucun temps apres oyát ſónner des inſtrumens, commen .
çoicà demener les pieds,& eſtoit force qu'il ballaſt iuſques à pleine guariſon . Ce qui Lesphrenen
eſt veritablement eſmerueijableen nature. Aſclepiades eſcric,quele chanter douce- riques par
ſont
ment & ſonner de meſme de quelque inſtrument de muſique, ayde beaucoup aux aiden
phrenetiques.Theophraſte &Aulu-Gelle diſent, que lamulique appaiſe ladouleur la muſique
de laſciacique,& de lagoutte.Encores trouuós-nousen l’Eſcriture ſain &te,que Dauid
auec la muſiqueoftoit à Saülla paſſion que le mauuais eſprit luy donnoir . Herodorc
hitorien Grec,au liure deſon hiſtoire inciculé Clio,recite,queCrælus RoydeLydie Hilfoire
o cutvn fils qui iuſques à grand aage fue muet:aduint que la ville où eſtoit leRoy,eſtát Anire mai
priſe,vn ſoldat Perſan eſtoit preſtà tuer le Roy ſon pere , luy tenant le poignard ſur la niere de
gorge :lors fondit fils(auparauát muet )s'efforça tantpar la force apprehenſó qu'ileuc guariſons
C de lamortdeſon pere ,qu'il rompir les liens de la langue ,& dift,ne tuë pas cet homme
ſoldat, c'eſt Crælus leRoy mon perc :& depuis le reſte de ſa vie parla fort bien . Plu Autre.
tarqueauliure auquel il mõſtre, que l'on peuttirer quelque profic de les ennemis el.
critqu'vn Theffalien nommé Prometheus , fut frappé d'vn ſien ennemy d'un coup
odelpee,fur vn vieilvicere,duquelil n'auoit peu guarir , combié qu'il en euſt eſté pen Autres
sé parpluſieurs annees,& en fuc entierement guary auec la nouuelle playe . Tite Live
eſcrit,que Quincus Fabius Maximus eue la fiéure quarte par lógues annees , & qu'en
donnanc la bataille aux Sauoiſiés ,de la grande ardeur qu'il auoit de combatere,chalſa
lafićure,& oncques plas ne l'eut. L'homme de chambre de M. de Lanſac le jeune, di.
ſoit a’agueres , qu'vn gentil homme François eſtanc en Poulogne , ayant la ficure Autres
quarte,ſepromenant le long de la Viſtule feuue au commencement deſon accez fut
pouſſé par vn ſien amy, en riant,dedans ledit fleuue , dont il euc celle frayeur, cõbien
qu'il fçeuſtnager,cómeſçauoic bić celuy qui l'auoit pouſſé, quedepuis n'eut la fiéure.
D Au camp d'Amiens,le Roy Henry mecommanda d'allerà Dourlan pour pēſer plu. Autres
lieurs Capitaines & ſoldats quiauoient eſté bleſſez par les Eſpagnols en vne ſortie de
la villequ'ils firất ſur eux :le Capitaine ſain& Aubin demeurant presd'Amiens, gen- Hiſtoire du
tilhomme ,& vaillant s'il y en a en France,auoit la fićure quarte, neantmoins qu'il fult capitaine S.
en ſon accez , ſe leua du liet,monta à cheual pour commander à vne partie de la com- Aubin .
pagnie,futbleſſé d'vn coup d'arquebute tout au trauers du col,dõt il eutvnetelle ap-Autrema.
prehenſion dela mort,qu'à l'inſtant perdit ſa fiéure, & depuis fue guary defa bleſſeu- nierede
re,& eſtencores à preſent viuant. Monſieur louberc recite vne hiſtoire d'un ſinge,guariſon,
quifur cauſe de la guariſon de ſon maiſtre,medecin de profeſſion, abandoné des Mc
decins de Montpellier. Cemedecin eſtoiteſtranger, ſans femme, & enfans, ſeruyde
gens quiattendoient ſa deſpoüille : le voyansfortbas, chacun d'eux ſe ſaiſie dequel.Autre.
quechoſe. Le linge regardant ce remuëmēt demeſnage,print pour la part lechape.
ró rougefourré,queſon mailtre portoit aux actes ſolemnels,duquel il s’affubla d'vne
fi bónegrace deuantluy,queledit Medecin print li grád plaiſir à le contempler,qu'il
e iij
m i e r 1
48 Le pr e liure , de
(aiſon de fut cótraint de rirdfi fort , queceſte eſmotion eſpáduëpar toutle corps eſmeuttelle- A
sfantère- ment nature (par la continuation de l'aiſe qu'ilen prenoit qu'ilen recouura la ſancé.
Suwerte
C'eft que le lien duquel les forces denature eſtoientempelchees, fut rompu delim .
er le vis. pecuoſité,cauſee par leris. Car celle ioye eſmeuc la chaleur naturelle languiſſante, 8
comme enſeuelic, & la relpandanc par tout le corps , la fic venir au ſecours de nature,
laquelle embraſſant ce moyen & propre inſtrument,renforcee de celſecours, vint à
combatre la maladie auec plus grande hardieſſe,cant qu'elle vint à lurmonter le ma!.
Car c'eſt nature proprement qui guarit les maladies : Ic Medecin & les remedes ſont
Hiſtoire les ſecours qui fauoriſenc nature. Que diray-ie plus? N’agueres yn Gaſcon eſtant en
funGuf- ceſte ville au logis d'Agrippa,ruë panee,malade d'vne fiéure ardente,tombé en plıres
conique.phrene-neſie, fe ietca denuict par vnefeneſtre du ſecond eſtage ſur le paué,& febleſſa en plu
fieursendroits de ſon corps. Ic fus appellé pour le medicamenter : & incontinent
qu'il fut posé en ſon lict,comença à ratiociner, & perdit du tout ſa phreneſie, & quel
quetéps apresfut dutout guary .Montieurd'Orcoman Docteur regent & profeſſeur B
du Roy en l'Vniuerſité de Montpellier , m'a affermé qu'vn meuſaier demeurant à
Broquiersen Albigeois,phrenetique,lejetta par vne feneftre dedans l'eau,d'où eſtác
tiré lubitement,perdicla fićure phrenetique. Qui voudroit faire recherche de celles
hiſtoires,ils'en trouueroit vn grand nombre. François Valeriola , Medecin cres- re
Autre manomé d'Arles,eſcrit en l'Obſeruation 4.du 2.liure de les Obſeruations,d'vn habitant
miere de d'Arles nommé lean Beclé,lequel auoit eſté par pluſieurs annces confiné en vn lią,
guariſon. à raiſon d'une paralyſie : aduinc que le feu ſe mit en la chambreenlaquelle il eſtoit
couché,qui fuccel ,qu'il bruſla le plancher, & melmequelques meubics de la chambre
proches de ſon liet: ſe voyant en dangerd'eſtre brudé,ficcantqu'il ſe leue,gaigne vne
feneſtre, par laquelle il ſe iette en bas, & comença incontinent à cheminer,& fuc gua ve

ry de la paralyſie.LemeſmeValeriola eſcrit audit lieu, vne hiſtoiremerueilleuſe d'vn


Autre. cas aduenu en la perſonne d'vn ſien couſin maternel,nõmé lean Sobirat, lequeleſtoit
en Auignon, perclus de l'vſage de ſes jambes ayantles jarets retirez de conuullion, y
auoit enuiron ſix ans.Ceſtayvniour ſe cholera tellement contre ſon valet, & s'effor
ça de forceà l'atteindre pourle battre,qu'àl'inſtant ſes nerfs s'eftendirent & amolli- c!
rét:dont ilrecouura la force de les iambes, & marcha droiệt, come il a touſiours fait
Hißoire. depuis.Galien à la fin du dernier chap.du liure de la maniere de guarir par laſaignee,
recite qu'il auoit eſté appellé pour arreſter le ſang à yn hõme,auquel auoit eſte coup
pee l’artere enuiró la cheuilledu pied,lequelfut guary (ans aneuriſme: & outrece par
le moyen de ceſte playe, fortuitement fue guary & deliuré d'vne douleur de hanche
qui l'auoit tourmenté parl'eſpace de quatre ans:laquelle gariſon, bien qu'elle ſoit fo .
Hiſtoirs. dee en raiſon ,à cauſedel'cuacuació de la matiere conioin & e, qui ſe fit par l'ouuercure
de l'artere du malleolle:toutesfois pource qu'elle aduint forcuitement ſansart,& fans
meſme qu'aucun Medecin ou Chirurgien l'euſt osé entreprédre,elle m'a ſembléme
riter eſtre couchee au rang de celles-cy. Pline eſcric d'vn nomméPhaleree,qui auoit " tt
vne maladie incurable deAux de ſang par la bouche,dontil ſe deſplaiſoit, & cherchát
fa mort, ſe preſenta à vne bataille lapsarmes:aduintqu'il fut nauré en la poi&trine, &
de la playe lortitgrande abondance de ſang, celant leAuxpar labouche:depuis les *
Chirurgiens guariſſans la playe,conſoliderēt la veine rompuë , qui luy cauſoit le Aux
par la bouche, & demeura ſain, & guarit, tant dela playe, que de ſon premier mal. le D
ne veux laiſſer à dire , qu'aucuns guariſſent les playes auec cad pure, apres auoir dit
deſsº certaines paroles,puis trépent en l'eau des linges en croix,& les renouuellét ſou
uět. Ic dy que ce ne ſont les paroles,ny les croix,mais c'eſt l'eau qui netcoye la playe,
& parſa froideur garde l'inflammation &la fluxion qui pourroit venir à la partie of
fenſec, à cauſe de la douleur. Ceſteguariſon ſe peut faire lors que la playe eſt en vnc
partic charneuſe, & en vn corps icune & de bonne habitude, & aux playes ſimples,
Maintenant declarerons pourquoy la fieure quarte, & autres maladies pcuuent aftre
guaries par vnc grande pour, ou par yno grande ioyc. wil
L'Introduction à la Chirurgie. 49

A Pourquoy lafilure quarte , & autres maladiespeuvent efire guariresparunegrande


peur, ou par une grande ioge. с на Р. XXVIII.

Erſonne ne doute que les perturbations de l'amen’ayér grande efficace, &


ne produiſent de merueilleux effe &tsen nos corps, par la refraction & con
denſation , retraction & effuſion des humeurs & des clprits , quilopi com
me yoi& uriers d'iceux . Hippo . dir , que ſelon la diſpoſicion des esprits &
des humeurs, le corps humain eſt diſpoſé à maladie ou à lancé : d'autant qu'cn la me . De natu
ra huma .
decine, les choſes ſont trouuces pour principales & elemens , deſquels nos corps ſont
na
compoſez. Parquoy ccn'eſt de merueille,ſi les perturbatiós de l'eſprit , & entr'autres ,
la crainte & la joye apportent ſubitement & inopinément guariton à des maladies
qui autrement par art ſembloient incurables . De ce nombre & forre de maladie

eſt la fićure quarie,delaquelle pluſieurs longuement affligez, & ayans en vain expe
simentétous remedes de l'art , ont en fin elté guaris par vne peur. Or quand nous

parlons icy de peur , nous n'entendons pas vne petite peur pour eſpouuenter vn en
fant:mais vnc peur ſubite ,non preueuë ,& forie , c'eſt à dire conjointe auec l'appre
B benſion d'vn grand & preſent danger de la mort , ſuffiſante pour ébranler vn hom
me,quelquefort ,conſtant & courageux qu'il ſoir . Telle peur peut donner fin & gua
riſon à la fićure quarte par deux moyens , par leſquels tous les Medecins recognoil.
ſent & auoüent coutesfieures receuoir guariſon à ſçauoir par concoction , & cuacua
rion de la matiere qui faict la fiéure. Par la concoction , en ce que par la peur la cha .
leur naturelle , auec les eſprits venans à ſe retirer au dedans du corps:eſt diſperſee,qui
eltoic route vnic & aſſemblec au dedans du corps , par conſequent fortifice & com.
meredoublee, a plus d'efficace pour cuire , & digerer , diſliper & reſoudre la matiere
qui entretenoit telle fiéure. Par euacuation , en ce qu'auec la peur & veheméte appre
henſion du danger preſenc, ſuruient vn effroy,horreur, ou tremblement en cout le
corps : & par celcremblement eſt faite vne lecouſe & concuſſion de tous les humeurs

contenusdedás lecorps. Ainſi qu'on vient à rouler vn muid de vin , par telle agitation
la lie qui eſtoic ralliſe au fond, vient à s'elpandre , meller, & confondre partout le
rvin : auſſi l'humeur feculent & melancholique , qui comme vne lie peſante & terre.
1
eſtre, enferméau creux & voûce du foye ,de la ratie & menſentere,ou en vn autre licu
"ſecret du corps , faiſoit la fićure quarte , venant par tremblement & agitation horri
fique d'une forte & ſoudainc peur à eſtre eſmcu , & comme deſracine de ſon gifte 80
foyer,d'où par les medicamens, horreurs & treblemens ordinaires il ne pouuoit eſtre
elbranlé & deſplacé ,ſe melle & reſpand egalemēc par tout le corps: & par conſequent
eſt plus aisément cuic & digeré par la chaleur nacurelle, ou plus facilement cuacué &
challe horsdu corps,eſtácja eſbranlé & deſraciné de la miniere & foyer, où l'humeur
melancholic ſe nourrilloic & retenoic.D'auátage, on veoid pluſieurs perſonnes cour
mentez d'vne excreme douleur de dents,leſquels voyans arriuer l'arracheur qu'ils a
voient envoyé querir,decrainte & d'apprehéfion du mal,differer à vne autrefois,ou
de ſentir plus de douleur,laquellefouuenc elt du tout perduë. Il le peut faire quel'hu .
meur (c deſtourne & tranſporte du lieu malade à quelques autres parties du corps .
Voila donccomme la peurpeutguarir pluſieurs grandes maladies.
Par voegrande ioye aucunes maladies peuuét eſtre guaries , parce qu'elle fait eſmo. Delaioye.
tion de la chaleur naturelle, láguiſſante. & cõmcenſeuelie: la reſpád partout lecorps ,
D & delà viércóbatre la maladie.Icy faut noter , que d'vne trop gráde & extréme joye
ou peuron peut mourir, cómcauons monſtré cy - deuár,ch.18. Car par la gráde peut
leccur eſt ſerré de faço ,qu'il ne peur faire ſon mouvemét:partát la chaleur naturelle
& l'eſprit vital font eltouffez. Par grande ioye le caur eſt fort dilaté , de ſorte qu'il ne
peut retenir le ſang & l'eſprit vitaldót il eſt reſoulc ,qui fait que l'ame s'en va . Èc faut
entendre,quela vie ne ſe perd ſeulemét par le defaut du cour,maisauſſi par le defauc
des autres facultez eſtás en diuerſes parties du corps, quiſe comuniquét iubit les ynes
aux autres.Carcómeauós dit ,les fens apperçoiuent premieremér leurs obiects: de là
ſont preſentez au ſens cómun, lequelen vo momēr les tranſmetaux facultez qui ſono Monfiens
en diverſes parties du corps:ainſi que les roues d'vne horloge , leſquelles vonc toutes loubenr .
coséble,mais diuerſemét, & toutes par vne premiere , qui fait mouuoir les autres.Par . Les facut
quoy nousdirons,que les facultez ,animale , vitale ,naturelle , ont vneſympathie & scz ontcon.
conſentement eníemble,en ſorte que quand vne ſouffre, les autres font de meſme. fentement
Nous declareronsmaintenant les maladies fai &tes par imaginations fantaſtiques. enſemble .
cilj
Le Premier liure de
so

A
Exemples des maladies faictes par imaginations fantaſtiques.
CHAPITRE XIX .

Ls'eſt veu yn qui penſoit eftre vn vaiſſeau de terre cuitte & pour
ceſte occaſion le reculloit & retiroir des paílans de peur d'eſtre
Gal.chsp.
caſſé.Vn autre oyant chanter les cocos , & comme ils ſe battent
Solu.3. de
lo. affc t. des ailes en chantant , ainſi auec ſes bras il frappoit les coſtez, &
coqueliquoit commeles cocqs.
Holier en Va cercain Bourguignó eſtant à Paris , logé pres l’EgliſeS.Iulien
ja pratique és preſences de pluſieurs celebres Medecins affermoit qu'il eítoir 8
au commen. mort ,& ſon frere auſſi quieftoit couché aupres de luy . Peu apres ſa fantaſie eſtant
saire qu'il changee , il declamoit & prioit les Medecins , qu'ils n'empeſchaſſent plus ſon amcde
a faill ju voler du Purgatoire au Ciel.
le chap . Autre .
de inelan .
Vn autre penſoit eſtre mort , & pour ceſte cauſe craignoit toute lorte de viandes , &
sbolique 17.
n'en vouloit point , diſant que les morts ne mágent point. Ala parfin ,par un bon con . B

leil & aduis,on feignit va corps mort eltre allis a table à l'exemple duquel il mangea.
Autre.
Elins ch .
Vn avere penſoit n'auoir point de teſte , auquel Philotimie feit faire vn bonnet de
9 tetrabi
plomb à fin qu'eſtane greué de la peſanteur du plomb , il cogneut & enuft qu'il avoit
ble ſermo
ne 2 . vnetelte. Le inelmeautheur au meime chapitre dir ,que les vns penient auoir la teſte
pleine & peſante, les autres legere & vuide, les autres leiche.
Auile.

Auicenneau chapitre des Signes de la Melancholie , qui eſt au liure 3.fen ... traicté
4. chap . 18. dir ,
que quelques vns pentent eſtre Rois , ou loups , ou demons , ou oy.
( caux ,ou inſtruments artificiels:d'autres tient perpetuellement , principalement ceux
qui ont vne melancholie fanguine , pource qu'ils s'imaginent des choſes qui leur
plaılent.
Autre .

Depuisn’agueres vn Gentil homme d'hõneur amena ſa femme en ceſte ville, pour


С
avoir conſeil demeſſieurs le Grand,Durer,& moy , pour lçauoit la cauſe qu'elle peu.
roit & rioit lansoccaſion ,& ne s'en pouvoic garder. On luy feic pluſieurs remedus,
mais ils luy leruirent peu ,en fin s'en recourna comme elle citoic venuë .
Autre ,
Vne Dame de noſtre Cour diſoit eſtre empoiſonnce par du vif argée de façon qu'il
luy ſembloir le ſentir courir par ſes membres. Elle appella pluſieurs ductes Medecins,
pour luy donger remede à ceſte poilon : qui ne luy Iceurent oſter celte fantalie. Enfin
conclurent, que pour luy oſter ceſte opiniungun la baigneroit , & qu'on mettroit cec
s
taines herbes au bain , qui accireroient le vif -argent, s'il y en auoit en ſon corp . On
ierta dedans le bain crois ou quatre onces de vif argent: & ladire dame eſtant hors, on
lecrouua au fonds de la cuue, qui luy fut monftré . Alors fue bier. ioyeuſe , & creut
eſtre guarie : & depuis perdit ceſte fauſſe opinion , eſtimant pour certain qu'on luy
D
auoic tiré le vif -argent par le moyen du bain .
Autre .

Le Curé de Mõlehery print opinion d'eſtre empoisóné.Il vinr en ceſte ville, appel
la meſſieurs Holier, & Syluius Medecins celebres,& moy : le plaignant ſencir grandes
douleurs par tous les membres ,nous affirmant qu'il ſçauoit eſtre empoiſonné.Apres
l'auoir bien examiné,i' ſe retira à part :où nouscócluſmes ( le voyát auoir ceſte ferme
opinion , & que ja auſſi il auoit appellé autres Medecins ,qui luy auoient faict pluſieurs
choſes qui ne luy auoient rien profité ) qu'on luy bailleroit du lyrop violac, & qu'il en
print trois cuillerees deux heures deuát máger par l'eſpace de neufiours, & quc pour
certain ilguariroit: alors fut fort reſouï , & voulut auoir noſtre ordónance par elcrit:
ce qui luy futrefuſé.Car où il l'euſt cu , cela ne luy cuft aucunement profité. L'Apo
ticaire luy donna ledit ſyrop en vne fiole , penſant eſtre vne excellente drogue pour
luv oſter ſa poiſon. Eccour ainſi qu'il print opinion auoir eſté empoiſonné, aulli fie il
d'eſtre del-empoi õné par ledit ſyrop. Vn mois apres il retourna vers nous ,pour nous

rédrc graces du bencfice qu'il auoit receu par notre moyen ;& eſtoit gaillard & bien
L'Introduction à la Chirurgie.
A joyeux,nc ſentantplus de douleurs,& nous fit part à chacun d'ynlićure.
Autre .
1
Vn autre diſoit qu'il auoit des grenouilles dans le ventre,& eſtoit impoſſible de luy
pouuoir ofter celte opinion.En fin ily cuft vn Medecin , qui luy promift de luy faire
jercer leſdites grenouilles hors de ſon venere par le moyen d'vn clyftere. Ayant pris
leclyſtere,ainli qu'il lerendoit , par derniere de ſa chaire percee ilfit couler cinq ou
fix pecites grenouilles,leſquelles n'ayansaccouſtumé viure en tels mareſts,commen
cerent àſauteller par la place. Le malade par opinion fut bien joyeux voir leſdites
grenouïlles, & perdit ceſte fole fantaſie.
Autre.
Vagentil homme de bonne part , auoit opinion auoit la cervelle pourrie. Il s'en
alla prier le Roy,qu'il luy pleuſt commander à monſieur le Grand, Medecin,à mon
ſieur Pigray Chirurgien ordinaire duRoy,& à moy,de luy couper le teft, & ofter ſon
cerucau ,diſant eſtre pourry, & luy en remettre d'autre: nous luy filmes beaucoup
B dechoſes,mais il nous fut impoſibleluy racouſtrer ſa ceruelle.
Autre.
l'ay veu vn homme s'eſtimant auoir la groſſe verolle:& ne pouvant gaigner ſur luy
partoutes remonftrances ne l'auoir point,il me dit qu'où ie ne le penſerois comme il
defiroit,qu'il s'en iroit à un autre pour ſe faire froccer.Le voyancentelle volonté, de
peur qu'il ne tombait en quelque melchance main,qui l'euſt poſſible frotté à boneſ.
cient,ic luy accorday qu'il ſeroitfrotté comme ceux qu'on guarit delaverolle.le pris
vneliure de beurre,battu en vn mortier de plomb,pour avoir la couleur de l'vnguét,
beurre, & ſua par trois diuerles matınces
Il fut frotté dudit beurre,&
auquel entre le vif argent.Il
& chacun ipur ſe diſoit allegé de ſes douleurs.Ainſi il fut guary par opinion,ſansnul.
le offente de ſon corps. 1

On dicy en auoir eu d'autres,quiopiniaſtrementſe preſuadoient avoir des cornes,


de ſorte que tellefantaſieneleur a peu eſtre arrachee de leur melácholique & bizar.
fecerueau,iufqu'à tant que leurs yeux eſtant bandez,on leur euft eſgracigné le front
decoſté & d'autre auec des cornes de bæuf, à ce que par l'effuſió douloureuſe de leus
С propre fang, ils te perſuadaſſent celles cornes leur avoir efté arrachees de fait & de
force. Il y a pluſieursautres hiſtoires ſemblables ,que ie delaiſſe à caule de briefueté.
1
De certains impoſteurs. CH A P. XXX.
Ricy ie veux parler des certains impoſteurs,qui s'entremellét de traicter
aucune partie dela Chirurgie , comme aucuns font ſi impudens, qu'ils ſe
vancentde remettre les os rompus &deſloüez, affirmanique ceſte ſcien
ce leur eſt acquiſe de race,c'eſt à dire de pere en fils : qui eſt vne choſe fore
sidicule,& hors de raiſon , veu que l'homme naiſt ſansſçauoir aucune chole:car s'il
fultnay auec quelque art , il n'euft voulu iamais apprendre les autres. Il eſt vray que
Dieu a dónéà chacun des autres animaux quelque choſe de particulier & de naturel
delear premiere eſſence, ce qu'il n'a faic à l'homme: mais en lieu que l'hômeelt deſ
pourueu d’art,il eſt doué de raiſon ;par laquelle ilpeutapprendre tous arts & ſciences
Dcommenous dirons au liure de la Generation , chapitre de l'ame. Donc de vouloir
croire,quele fils d'vn bon Chirurgien peult eſtre Chirurgien, ſi premierementiln'a
cfté inftruit:ce ſeroit choſe auſſi peu vray-ſemblable,que le fils d'vn Gentil-homme,
lequel ſçauroitbien picquer,& voltiger vn cheual,& courir la bague, peut faire com .
mc ſon pere , ſi premierement il n'auoit montépluſieurs fois à cheual,& qu'on ne
luy cuft monſtré celte induſtrie. Partant ce ſeroit vnechoſe fort temeraire de vou.
loiraneantir l'auctorité de tant d'hommes do &tes & iluſtres, fondee en raiſon & ex
perience,pourſuivre l'opinion des choſes vulgaires & menſongeres, laquelle non
obſtanteſt ſi enracinee non ſeulement au cerueau du ſimple populaire , mais auſſi
en l'eſprit de pluſieurs eſtimez doctes.Ily a encores vne autre manieredegens beau .
coupplusfaſcheux & importuns,qui affirmée pouvoir remettre les os fracturez & lu
xezpar paroles,moyennantqu'ilsayent lenom & la ceinture du malade: mais je m'efe
merueille commeil eſt poſſible aux hommesqui ont entendement ( ou le doivent a.
voir)de croire vn méſonge ſi appert,veu que la loy ſacree des Medecins anciens,prin
cipalement du diuin Hippocrates , duquel pour reduire, les os fracturez & luxer
52 Le premier liure de

il faut tenir ,tirer & pouſſer,pour laquelle choſe ils ont inuenté vne infinité de machi
A
nes & inſtrumens(appellez Gloffocomes ) lors que par force des mainson ne peut af.
ſez ſuffiſammen tirer les membres pour faire la reduction . Ec ces importeurs veulent
perluader qu'ils feronc par parole ce que la main & les machines ne peuuent quel
quesfois faire.

Il s'eſt crouué n'agueres vne autre impoſture en Allemage,c'eſtqu'ils prennent d'y


ne pierre nommee Bein . bruch ,laquelle ils pulueriſent, & en dónent à boire à celuy qui
Impoſture
Irowyce aura quelque partie rompuè ou luxee , & maintiennent qu'elle a puillance de guarir
n'agueres telles diſpoſicions.Il y en a encores d'autres en Allemagne,qui prennét vne eſpee ou
en Allema- daguc,ou autre celinſtrument qui aura bleſſé le maladc , laquelle ayár accommodee
gre. en vn licu reclus, comme celuy quieſt bleſſé, la penſent & y appliquent les medica .
mens quiſeroient requis à la propre playe,laiſſans le malade ſans y faire aucunccho
ſe, & à meſure qu'on penſe ladice eſpee,la playe le guariſt ce diſent-ils.
Or n'eſt - il vray ſemblable, qu'vne chole inanimeepuiſſe receuoir aide d'aucun me
dicament, & encore qu’ainſi fuſt, ſeroit il poſſible qu'vn malade en peuſt reſſentir
quelque effe &t : le laiſſetelle impoſture au iugement des idiots ,tant ayent- ils peu d'ef. B

prit . Ec quant à moy celles choſes me font incroyables, & encores que ie le veiſſe de
mes yeux, ſi croiroy-jepluſtoſt que ce ſeroit vne vrayemagie & impoſture. A la der.
Hiſtoire niere prinſe de Hedin , monſieur de Martigues l’aiſné fut bleſſé d'un coup de harque
de mon . buzo au trauers du Thorax, lequel ie penlois auec lesMedecins& Chirurgiens du de
foeur de
funct Empereur Charles,& de ceux de Monſeigneur le Duc de Sauoye , lequeldeſi
Martigues. ro 1
it fort
roit fore qu'il fuſt guary.Pour ce en fit faire vne conſultation , par laquelle tue reſolu
de tous , qu il mourroit de ladite bleſſeure, attendu que la balle auoit paſſé au trauers
des poulmons , & qu'en la capacité du Thorax eſtoit decoulé vne bien grande quan
tité de ſang. Il ſecroqua vn inpolteur Eſpagnol, qui entreprenoit le guatir, à lapeine
de perdre la vie : qui fut cauſe que mondit Seigneur le Duc de Savoye , voyant le
prognoſtic qu'en avions fait, le mit entre les mains de ce venerable impoſteur : où
tout lubit deinanda lyne des chemiles dudit ſeigneur de Martigues, & la mic par pe
tits lambeaux ,qu'il poſa en croix ( avec cercaines paroles) ſur les playes , & luy permit
manger & bo re tout ce qu'il voudroit , luy diſant qu'il feroit diete pour luy : ce qu'il с
failoit,ne mangeant que peu de pruneaux, ne bcuuant que de la biere : nonobſtant
tout cela , deux iours apres ledit ſeigneur de Martigues deceda, & mon Eſpagnolgai.
gna le haut : & croy que ſi on l'euſt peu attraper , il euſteſté pendu & eſtranglé, pour la
faulle promeſſe qu'il auoitfai & e. l'embaumay le corps mort dudit Seigneur deMarti
gues , en la preſence tantdes Medecins , Chirurgiens, quede pluſieurs Gentils hom .
mes , & autres : & ayant fait l'ouverture , crouuay les poulmonspercez ,& dilacerez,
avecques vne bien grande quantité de ſang eſpandu ſur le Diaphragme, qui fut cau
ſe de la mort dudit leigneur. Et vrayement c'eſt vne grande impoſture devouloir
faire accroireà vn malade, qu'vn autre faiſant la diete pour luy , & luy donnant ce
pendant libercé de manger & boire tout ce qu'il aura en volonté, il puiſſe guariren
impofteurs aucune façon. Ily aencores vne autre eſpece de ces impoſteurs qui le diſent guatic
qui difene
guarir par toutes playes auecques charpie ſeiche, ou moüiilec en cau ou huille,ou autre liqueur,
Charpie sea-dilans quelques paroles, & bandencles playes auecques compreſſes & ligatures, dont
16.
quelques vnsguariffent: ce que veritablementi'ay vcu: mais celontplayes Gimples, D
quine deſirent qu'vnion , laquelle ſe fait par le ſeul benefice de nature , ainſi qu'on
voit aux beſtes brutes , qui auront quelque jambe , ou autre partie rompuë , le callus
eſtre refait ſans aide de nulmedicament . Mais où il y aura complication de diſpoſi
tions , comme vne playe auec grande contuſion & fra & ure d'os & inflammation ,
ou autres ſemblables diſpoſicions, leur charpie & parole ne pourront apporter auma
lade que la mort : & partanr ceux qui ſe fient à tels impoſteurs, ne ſont pas trop ſages
ny aduiſez pour la conſeruation de leur ſanté & vie : & pour ce les Magiſtrats ne
doiuent permettre que cels impoſteurs ayent lieu en leur Republique , mais les pu
nir ſelon leurs merites , & non leur permettre faire celles impoſtures ſur les Chre.
Itiens. Auicenne fen 3. faiet priere, que le feu du Ciel, & l’Eſprit de tourment
Impefore rende le Medecin impoſteur & auare , ſemblable aux habitans de Sodome & Go.
faites par les morrhe. Les ſorciers enchanteurs, deuins , magiciens, charmeurs, cmpoiſonneurs,
forciers. exorciſeurs, ſe vantent de guarir pluſieurs maladies : ce qu'ils font par les machina
tiós fraudes erreurs, fureurs,ruſes & puiſſance des diables,à ſçauoir par paroles , coa.
iurations,charmes,chara & ercs, liaiſons,billets pendus au colou aux poigncts ,par an.
L'Introduction à la Chirurgie. 53
A peaux,images,vnguens,poudres,drappeaux appliquez en croix ,auſſi par eux,atcou
chemens,& autres ſemblablesreleueties infernales: & gaſtent, au preiudicede la vie
des hommes,la loy ſacree deMedecine,laplus ancienne& neceflaire de toutes les au.
tres ciences. Les Magiſtrats les doiuent chafier de leur republique. Ils eſtoient non
keulementchaſſez,maispunisen la vieille Loy par l'Edit de Moyſe: Vous n'endure. Deuter.18.
rezpoine viurelesempoiſonneurs. le ne veuxicy reciter les guariſons miraculeuſes
du fils de Dieu 1 E svs-CH R IST, & de les Sain & s & Apoſtres:car nul Chreſtien n'en
doie douter,attendu que les ſainetes Eſcritures en ſontpleines , comme faire voir les Guariſons
aueugles,ouïrles ſourds,marcher les paralytiques , chaffer les malins eſprits qui poſ. mraules
ledene les perſonnes,guarir les ladres,rendre les femmes ſteriles,fecondes:teſſuſciter frs.
les morts,& vne infinité d'autres choſes ſupernaturelles & miraculeuſes , qui ſe fai 'Marib.8.
foient par la vertu du faina Eſprit. Lequel ic lupplie qu'ilnousconlerve & defende Luc17,
des malins eſprits diaboliques , & nous face la grace que dirigions touſiours noſtre
chemin au Ciel,& que noſtrcanchrey louc perpecuellement attachce. Ainſijoit-il.

100

kom

1
54

Table des Chapitres du traicté

des animaux .

E la nature des belles brutes. Chapitrej B


Duprognoſtic des animaux . chap.i
De l'artifice & induſtrie des Animaux . chap.ių
Del'induſtru & artifice des oiſeaux à faire leurs nids. chap.iij
De l'artifice des Araignees. chap.v
Des Mouches à miel.
chap.vi
Dugouuernement des mouſches à miel. chap. vij
Des Fourmis . chap. viij
Des vers quifont la foye. chap.ix
De l'induſtrie des animaux , & de la conferuation & amitié qu'ils ont , & principalement de
leurs petits . chap.x
Du temps que les animaux s'accouplent enſemble. chap.xj
De l'amour & charité des oiſeaux. chap.xij
De la nature de l Elephant. chap. xiij
Desbeſtes qui font és eaux . chap.xiiij
с
Que les belles peuuent eſtre appriuoiſees. chap.xv
Comme les animaux ont appris aux hommes à fourbir & aguifer leurs armeures, & faireem .
buſcades. chap.xvj
Des armes des beſtes. chap.xvi
Des beſtes quifont dociles. chap.xml
Les oiſeaux ontmonſtréaux hommes à chanter en muſique. chap.xix
Des
oiſeaux quiparlent,ſublent & bfflent. chap.xx
Del Antipathie & Sympathie, chap.xxj
Comme l'homme eſt plusexcellent parfaict que toutes les beftes enſemble. chap.xxij
L'homme a le corps deſarmé. chap.xxiij
Comme Dieu s'eſt monſtré admirable en la creation de l'homme. chap.xxiiij
La cauſe pourquoyles hommes ne preſagentcomme les animaux, chap.xxv
L'homme a la dexterité d'apprendre toutes langues. shap.xxoj D
55
#

GIMO

LE SECOND LIVRE DES

1 Animaux, & de l'excellence de l'homme .


B

De la nature des beſtes brutes: CH A PIT RE 1.

VPARAVANT que venir à la deſcripció & declaration parti- Gal, am 1:


de l'usage
culiere du corps humain que l'on appelle Anatomie , il n'y aura
des parties
point de mal ,ce me ſemble ,detoucher quelque choſe ſommai
remét des animaux & beſtes bruces en general . Les beltes bru.
tes doncſonc autác differétes entre elles, que la nature des vnes
differe de celle des autres.Cardes animaux les vns fonc naturel.

lemér hardis ,les autres timides , les vns farouches ,les autres pri
uez , & come ciuiliſez ,autres comme ſolitaires ,aucunsſont ar

mez decoquilles ,& eſcailles, cómele Crocodile, & la Torcvë , & pluſieurs poiſſons:
autres d'aiguillons & eſpines.Le Cheuala l'ongle force,& cóme animal leger,ſuperbe
& courageux ,il a eſté pourucu & fait braue de les crins . Le corps du Lyo magnanime,
Chautain & cruel,eft armé de déts,d'ongles ,& de queuë. Le Taureau & le Sanglier ſo
rendēt formidables , le Taureau c'eſt à ſçauoir auec les cornes , & le Sanglier auec ſes
dées ou defences eminétes , & deſcouuerces,qui lonc come leurs armes naturelles. Le Le Breure
lićurc animal paoureux & craintif,a le corps delarmé, & totalement nud :mais en re coure de
compéſe, il eſt viſte & ſoudain à la fuite :car auxanimaux paoureux , la viſteſſelcur eſt grande vis
dónec , & aux hardis les armes . Il y a vncinfinité d'autres proprietez admirables, & de ielle.
fingulier artifice aux animaux , en ſorte qu'il eſt impoſſible les cõprédre & eſcrire. Ső .
meles animaux ont chacun vne choſe particuliere , come le boeuflaforce, le ſerpent
l'aſtuce, le taurcau la furie, le mouto patiéce & la douceur,le crapaut la fierté,le renard Les beftes
laruſc & ſubtilité ,l'alnc la ſtolidité,le tygrela cruauté , la colőbe la douceur, le fourmy deüees de
la preuoyáce ,le cellon ou bletcau la negligence, le chien la fidelité, le mulec l'infideli- certaines
verius na
té,le loup la gloutonnie, l'elephant la prudence, le porc la ſaleté, la netteté l'eſcuricu, turelles.
& aingi desautres, cómcil ſera plus amplemét declarécy -apres.Sinous voulons con
templer leurs façons de faire,nous trouuerons qu'elles ſont douées de certaines ver .
D tus naturellesen chacune affe & io ,de courage,prudéce,force, clemence,diſcipline,El
les ſe cognoiſſenc les ynes les autres,diſcernent entre elles,appecentles choſes quilcur
ſont veiles, fuyenc le mal , cuitent le peril, pouruoyent à l'aducnir, amaſſent ce qui
leur eſt neceſſaire ,prelagentle beau & mauuais tēps: elles ont monftré pluſicurscho
ſes aux hommes ,elles ont vn ſentiment exquis ,elles chantée en muſique,ellesont vne
induſtrie & amicié à la conſervation de leurs petits , elles ont intelligence du pays où
elles naiſſent,elles gardér vne ſinguliere chafiecé, concorde & amour les vnes enuers
les autres:elles ſoncarmees pour combattre & fe defendre, elles ſe laiſſent appriuoiſer
aux homes, ellesparlent & liment, elles cognoiſſent la voix l'vne del'autre, elles font
entre elles comme vne petite republique,elles cognoiſſent ce qui leur eſt bó ou mau
uais, tantpour preſeruer leur ſanté, que pour ſe guarirelles meſmos : ſçauene quelle
diete il leur faut tenir, & de quelle viande elles doiucne vſer, & quels remedes elles
doiuent chercher contre leurs maladies, & fi n'ont point apprins cesſciencesdes hô .
mes :mais au contraire,elles les ont appriſes en parcicaux hommes. Cequ'eſtantcon.
sideré de pluſieurs anciens Philoſophes, ils n'ont point cu honte de diſputer ou reuo .
quer en doute, li les beſtes brutes eſtoient participantes de raiſon : meſme le fage Sa,
f
56 Le ſecond liure des Animaux ,

lomõ nous renuoye quelquesfois à leurs eſcoles, & Eſaye reproche aux Ifraëlites leur A
Salomar. ingratitude enuers Dieu, leurpropoſant pour exéple le bæuf & l'afne, qui recognoil
Efare. ſent leur maiſtre , mais Ifraëla meſcognu ſon Seigneur. Pareillement Pline die, que

les hommes doiuét rendre graces aux beſtes de pluſieurs medecines & remedes qu'ils
Pline liu.8 . onc apprins d'icelles :qu’ainſi ſoit, les Cerfs nous monftrent que l'herbe nommee Di
shap. 27. Atame,eſt bonne pour tirer les traiets,ou les cronçons de fleche du corps de celuy qui
en eſt frappé,puisque les meſmes Cerfs quand ils en font naurez , vſene dece melme
remede.Ariſtote dit que les chéures ſauuages de Cádie font le ſemblable.La proprie .
Ariftose. té de l'herbe nõmce Eiclaire nous a eſté enſeignee par les hirondelles ,& qu'elle eſtoit
propre pour la veuë,voyantqu'elles en yſoient pour les yeux de leurs petits. Les fer
pens vſent de fenoüil, & fillans les yeux s'en froitent les paupieres pour recouurer la
vevë. La Tortuë mange de la fariette contre la morſure des viperes. Labelecceman
ge de l'herbe nommee Tapſiusbarbarus , & s'en frotte cour le corps,ſc couchát & trai
nant par dellus.Les Ours enuenimez pour auoir mágé des pommes de Mandragore,
fe guariſſent en mangeant des fourmis :auſſi apres s'eltre long -temps veautrez , ſorcás
B
deleurcauerne , mangent l'herbe appellec Aron lauuage, pour leur amollir le venire,
Les Oars qu'ils ont eu touſiours dur & conſtipé pendant qu'ilsont eſté en leur cauerne , & apres
mangene s'en vont à vne fourmillere, où ils ſe couchent, tirás la langue,de laquelle il degource
des four- quelque humidité douce , la cenanstouſiours tirec iuſques à ce qu'ils ſentent qu'elle
pour le ſoit couuerte de fourmis, lors qu'ils ſe ſentent malades,puis les auallér pour le purger.
purger. Nous voyons ordinairement
les chiens , qui mangenide l'herbe nommce Dene de
chien , pour ſe vuider par vomiſſement. Les Pourccaux cherchent les eſcreuiffes, &
les mangent quád ils ſont malades.LesRamiers,les Merles ,lesPerdrix v ſent de fueil
les de laurier pour leur purgation: les Pigeons,Tourterelles & Pouliailles pour le pur
ger mangentde la Pericoire. L'Ibis & lemblablement la Cicongne , nous a monſtré
LaCicongne l'ylage des clyfteres lequelſe ſentant aggraue d'humeurs ,ettant au riuage de la Mer,
a enſeigné remplic ſon bec & ſon cold'eau marine,puis ſe ſeringuepar la partie par laquelle iliet
les clyfteres. te ſes excremens , & peu de temps apres le vuide , & íe purge . L'inuention d'abbattro
Lachéure,a les cayes des yeux appellees cacaračres,fur trouuee par vne chéure,quiauoit vne taye
abbatre les deuant la pupille,ſe froccane & gallane contre des eſpines,abbatir ladite tayede deuất c
sayers des la pupille , & par ce moyé recouura la veuë.L'Hippopotame (quieſt vn cheual de la ri
yeux . viere du Nili no'a enſeigné la phlebotomie , lequeleſtác de nature gourmãt & glour,
L'Hippola- ſe lencant aggraué de plenitude de ſang , ſe frotte contre les roſeaux rompus les plus
me außya picquás , & s'ouure vne veine de la cuiffe,pour ſedeſcharger tant que beloin luy eſt,
enſeignée, puis ſe veaucranc dedans la fange s'eſtanche le ſang. La Tortuë lors qu'elle a mangé
faisels for
de la chair de ſerpent, mange de l'origan ,autrement mariolaine ſauuage. Les anciens
gnér.
entre leurs ſecrets ont experimenté certaines choſes, qui reſiſtent aux tonnerres &
foudres, & encre les autres les plumes d'aigles portees en panache: aufli la ceinture
de veau marin empeiche que ceux qui l'ont, n'en ſont iamais attaints . Or qui vou
droit raconter par le menu toutes les medecines & remedes que les beſtes ont enſei
gnees aux hommes, deſquelles Ariſtote & Pline , & autres ſemblables ont eſcrit , la
choſe ſeroic fore longue : car ils fone vnlong recir des herbes & remedes qu'elles ont
monſtrez aux hommes . Dauantage, nos veftemens ſont faicts des leurs , comme
peau , laine , poil, & ſommes nourris de leur chair : la greſſc, moüelle , os , & excre
D
mens nous ſeruent à nos infirmitez & guariſon .

Exemple des brebis. l

Le laine Delalaine des brebis nous ſommes veſtus, laquelle eſtant bläche peutprendre cou
bläche peut tes ſortes de teintures : on en fai & capiſſeries,auſſifourrures & autres choſes. Delcur
prēdre son pesu on fait parchemin pour eſcrire, & coutes manieres de veſtemēs , & autres v ſages
tes fortes de à diuerſes choſes. Leur chair eſt tres- bonne & delicieuſe à manger : de leur ſuif ſont
teiniures.
faicts flambeaux , chandelles , onguens , & pluſieurs autres choſes : de leursboyaux
ſont faites cordes ſeruans aux inſtrumens muſicaux. Leur decoction ſert à faire clyfte.
res , & fomentacions remolliences.Ec quant à leurs crotces & vrine, il ne ſe trouuenul
fient plus excellent pour engraiſſer la cerre. Dauantage , leur os & moüelle ſeruent à
faire Fards pour embellir les femmes:meſmes leur cornes ſeraent à faire produire des
aſperges en abõdance, cftans enterrees auec leurs racines . Et pour concluſió, les brc

1
Et de l'excellence de l'Homme. 57
А bisſontgrandementprofitables pour Pyſage des hommes. Auſlitrouuerons-nous en
l'Eicriture ſaincte que la plus grande richeſſe d'aucuns Roys conſiſtoic en croupeaux
ilaine, leſquels meſme ils daignoient bien garder en leurs propresperſonnes (pour le
profit & excellence de ces beſtes) comme nous liſons d’Abrahanı, Iſaac, lacob, La
ban, Moyle, Dauid, & autres.
Du prognoſtic des Animaux. CH A P. 11.
AVANTAGE , les animaux cát terreſtres qu’aquatiques & volatil
les ontdóné aux hommes la cognoiſſance de la mutació du céps:
s'ildoit faire vécs,pluyes,orage, & tépelte,froidure,gelce,grelle,
ou beau cemps : cõme nous voyons les beliers & aigneaux , lors
qu'ils s'entreheurtenc, & choquét l'vne către Paucre ,corncà cor
nc,lespieds en l'air auec le petit laut leur corps esbranlanc, ligni.
fiếcchangement decéps. Le peril nous eſt demöſtré par le bouf ,
quãdil ſe lechecontre poil,& hauſſe lemuffle versle ciel,&mu
B
gil & faire la terre, & s'efforce măger auidēment: Auſli quád les fourmisplus dru &
en plus grand nobre que de couſtome, s'entrerencontrent l'vne Pautre come eſtour
dies,elles denorrenc la pluye ſoudain aduenir.Siles taupes belongnér en terre plique
de couſtume, & la rõpēc en pieces bien menuës,c'eſt ſigne de piaye. Si le chat paſſe ſa
pattepardeſſus le col,come s'il ſe peignoit, c'eſt ligne infallible de pluye.Les poiſſons Les poiſſons
ont aulli vne merucilleuſe propriecé à ſentir la mutation du temps,quád en temps ſe entendene
rain ils ſe ioüent ſus l'eau,en ſe lançantau deſſus,ils ſignifient pluyo.Quand les Dau- la mutatione
phins & Marſoüins ſautent , & ſe deſcouuréc ſur l'eau ,c'eſt ſigne de grand orage & té. du temps.
pelte ſur la Mer: ce que voyans les mariniers moüillent l'anchre, & donnentordre à
İcurs vaiſſeaux. Quád on voit les orties de mer nager ſur l'eau ,c'eſtligne de tépeſte:
elles ſont de couleur decriſtal,reluiſant auec du persmellé:de ſubſtáce ſi fragile, qu'à
peine en peut- on cirer d'enciere dela mer. Sion en frotce vn baſtó , il reluit de nuict,
Quand auſſi lagrenouil? Les oiſeaux
cóme ſi c'eſtoit vne torche allumee,quieſt choſe admirable.
le chance & crie plus haut que de couſtume.Les oyſcaux ne ſontfruſtrez decepriuile.
ge:caron peutautant ou plus parlerd'eux à ce propos,que de coutes les autresbeſtes.
C Silesgrues volent en l'air ſans faire bruit,c'eſt ſigne de beau ceps: ſi elles crient & võt
lans ordre ,c'eſt ſignecórraire.Quand les oiſeaux aquatiquesſortent de la mer,& vié
: nenc aſſez auant ſurterre,c'eſt ligne de pluye, & grande tépefte. Sila cheuechecháte plmarque.
beaucoup en têps de pluye,elle denore que le temps ſe veuteſclaircir: & aucontraire,
ſi ellechante en beau cemps,c'eſt ſigne depluye.Plutarque dir que quand le Corbeau
1
chanteen voix enroüec , & qu'il ſe bat des ailes, c'eſt ſignede vent & detempeſte.
Quand les poulles & autres oiſeaux domeſtiques ſe bacienc des ailes & ſaucérenchá .
tant,c’eſt ligne de pluye,& degrands vents. Quand les oyes , canes & canars ſe bai
gnent volontiers & s'épluchent,& dreſſent leurs plumesauec lebec , & enſembleiar
gongnent, c'eſt ſigne de pluye. Şiles hirondelles volent ſi pres de l'eau & de la terre
qu'elles frappentcontre,cela denore que coſt il pleuura:aulli quand elles volent hauc
en l'air,en s'esbattant cherchans les mouſches, cela ſignifie beau temps. Le petit roy
telec ſe reGouyſſant plus que de couſtume,ſaucelant & plaiſammentchantant,denote
lapluycaduenir . Lors que la Pie crie & ſe tempeſte pres des hages ou buiſſons : cela
demonſtre qu'elle voit le loup,ou renard,ou quelque ſerpent.Silecoq chance incon
D tinent aprçs le Soleilcouchant(commel'on dit entre chien & loup ) outre ſa couftu.
me,& que ſa voix ſoit enroüce,c'eſt ſigne de pluye. Si lesmouſches & puces mordene
& picquent & aiguillonnent plus que decouſtume,c'eſt ſigne de pluye. Quand le He
son vole fort haut , ildenote beau temps , & s'ii volepres de l'eau en criant, il preſage
de lapluye.Lorsque les pigeons ſe retirée au ſoir en leurs colombiersplus tard que de
couſtume, c'eſt preſage devent & depluye. Les milans fuyent l'air infe &t & peſtilent
& le quittent,de ſorte qu'iln'y a rien ſi certain qui monſtre la ſerenicé & bon air, que
les lieux où les milans habitent. Pareillemét autres oiſeaux laiſſent leurs aufs & leurs
pecits & s'enfuyent. Quand les chauue ſouris volent au veſpre, pluſtoſt que de cou
ſtume,& en plus grád nombre,c'eſt ſigne de chaleur & de beau temps pour le iourſui
uant. Le crocodile fait ſes æufs iuſtement à la hauteur que la riuiere du Nildoit des
border & couvrir la terre,de façon que le paaiſant qui premier les creuue defortune,
ſçait,& predit à ſes compagnons,iuſquesoù le feuuedoit monter & desborder l'ENÉ
enſuiuanc :meſurant & compaſſant iuſtement ce qui doit eſtre couuert d'eau,afin que
fij
58 Le ſecond liure des Animaux ,

luy fans eſtre baigné,puiſſe couuer ſes eufs. Or cela eſt plus vne precognoiſſance de A
ceſte beſte, procedance de diuinacion , quede raciocination , choſe digne d'admira
tion. Nous dirons en paſſant, quand la Lune eſt rouge , ſignifie vents : palle ,ſignifie
pluyes : claire, beau temps . Et auſſi qu'en la pleine Lune ne faut couper le bois pour
baſtir, mais en la declinaiſon : & fion le fait, il ſe rend vermolu & pourry .

De l'Artifice & induſtrie des Animaux . CHAPITRE III .

Plutarque. ES poiſſons de la mer en general , toutes & quantes -fois qu'ils ſen
tent les flors ou tempeſtes,venir , ils ſe chargent d'arcne , a fin qu'ils
Antifice des
ſoient plus fermes , & qu'ils ne ſoient ſi facilement tranſportez &
poißass. agitez par la cempeſte ſuruenante. Aucres ſe muffent en certaines

cauernes, & trous de rochers . Ec quant à ce que les poiſſons nagent


contre le fil de l'eau , cela aduient afin que les ondes & vagues ne
B
leur leuent & rebourſent leur eſcaille & ouye , leſquelles remplies ne pourroient au
cunement reſpirer : & par ainſi l'eau venant par la partie de deuane , leur ſerre les
ouycs , & applanic leur eſcaille : qui fait que plus facilement ils nagent . Le ſemblable
eſt des gruës, leſquelles volent contre le vent : afin qu'iceluy ne fouffle par le derriea
re leur plume, quiſeroit cauſe eſtant ainſi eſcartee, de rendre leurs corps nuds & def
couuerts,ce qui les empeſcheroic de voler.

De l'induſtrie & artifice des oiſeauxà faireleursnids. CHAPITRE IV.

Artifice des ' Induſtrie & artifice laquelle tous les oiſeaux ont à faire leurs'nids ,
oiſeaux.
eſt faite cant proprement, qu'il n'eſt pollible de mieux : tellement
L qu'ils ſurpaſſent tous les maçons ,charpentiers , & edificaccurs: car il
n'y a homme qui ſceuſt faire edifice plus propre pour luy & ſes en
fans , que
que ces petits animaux les font pour eux , tellement que nous
en auons un prouerbe , que les hommes ſçauent tout faire finon les nids des oi
ſeaux. Et ont cet artifice, qu'ils les garniſſent de plume , laine,ou d'autre matiere
La fig ure nolle, comme s'ils leur preparoient vne coulte ou yn matelas pour les loger plus à
conde con leur aiſe. L'hirondelle fait ſon nid en figure ſpherique & ronde, laquelle figure eſt
siene plus plus ferme, & contient plus que toute autre : elles le baltiſſent de fange & petits
que contes ferus, comme s'il eſtoit de ciment & de chaux . Les oiſeaux qui font leurs nids ſur
les autres , les arbres , choiGiffent les plus fortes & couuertes branches, afin que leurs nids y puiſ
Ariftor. de
aniina.li.6 . ſent eſtre, comme ſur vn fondement bien aſſeuré, plus fermes & micux couuerts. Or
cap . 8 . pendant que la femelle eſt empeſchee à couuer ſes aufs , & à faire ſespetits , le malle
La femelle luy ſert à ton rour , pour dóner loiſir à la femelle d'aller querre ſa vic : & quand les pe
omalle tics ſono eſclos , le malle, & la femelle enſemble neceſſentiamais à leur porter vian
des oiſeaux de , & l’oltant de leur bec , l’eſpargnant pour leur bailler : quicft cauſe qu'ils en fonc
counčs sont plus maigres lors qu'ils les nourriſſent , pour le grand ſoin qu'ils en ont, neles abana
tomy .
donnansiuſques à ce qu'ils inangent d'eux melmes. l'ay en ma maiſon allez bonne

quantité de paſſereaux,qui fontleursnids en certains pots de terre , & lors que leurs
D
petics ſont grandelers, & couueres de plume, i'en fais denicher & mettre en vnecage
pour le plailir de mes amis & de moy,à voir que le pere & la mere lesvićnent appalte
ler ; & quãd il y en a vn quiia a receu ſabecquee, & ncantmoins qu'il ſe viennerepre
ſencer ogurát le bec, le pere & la mere le laiſſent,cognoiſſansceux à quiilen faut bail

Experience ler: & ainſi font leur diſtribution come il appartient , ſelon l'ordre & regle de iuſtice
faite par diſtribuciue.l'ay fait mercre vn paſſereau cftráger auec les autres de meſme âge , pour
l'autheur. cognoiſtre & ſçauoir ſi le pere & la mere des autres auroientcure de l'appaſteler:mais
ic trouuay au contraire qu'ils le laiſſoient mourir de faim , encore qu'ilouuriſtle bec

come les autres legitimes. On void auſſi les petits cheurcaux & aignelets , eſtant aux
cháps en grand nõbre , que chacun recognoiſt fa mere, combien qu'elles ſont veſtuës
toutes d'vne couleur : pareillement la merenepermettra vne autre l'alaiéter. Leché
ureau,l'aigneau , le poulain , & ſemblables animaux, fitoſt qu'ilsſont pez,d'eux meſ.
mes cherchent & courent aux mammelles de leurs meres : Içachansnaturellement
que là eſt leur nourriture , & deuenus grands , ils choiſiſſent.de mille diverſes plan
ees en vn terroir & paſturage, celles qui leurſont propres pour les alimenter.
‫عمومی‬
Et excellence de lHomme,. 59
A
De l'artifice des araignees. CHAP

'Araignce fait ſa coille d'yn merueilleux artifice traverſant maintes


nant d'un coſté, & maintenanc de l'autre , cmpoignant tout ce qui
luy peut ſeruir pour l'eſtendre & attacher. Et encore qu'on rompe
& desface ſouuenc ſon ouurage , & qu'on la dechafle d'vn coſte ou
d'autre , ce neantmoins elle n'eſt point tant craintiue , qu'elle dello
ge de ſon logis pourcela,mais touſiours retourne à ſa beſogne, de lor.
ce qu'on neluy en (çaaroit tantdéfaire& gaſter qu'elle n'en reface & racoutre,faiſant
coulioursouurages nouueaux, & ce d'vn merueilleux artifice: tellement que les tiſſc.
rans,& lingeres,tapiſſiers,brodeurs,paſſementiers,pecheurs, veneurs,& autres vien
nencà l'eſchole pourapprendre d'elles à faire leurs ouurages & leurs ters , ſoit qu'on
B regardcà la perfe&tion & fubtilité du fil, ou aux næuds indiſſolubles de la coile fans
filamens, eſtant commevne peau delice & gluante comme s'ily auoit de la colle. Fi. Laroile dea
nalemcar on necroiroit iamais qu'elles fuffent tant bien enſeignees àretirerleurs fi raigneeof
lets, &legouuernement de leursourages,tellement ques'il ya quelquemouche ou mirtix
sváte pour
prea
autre proyeprinſe à leurs filces , la ſenteni , & cour en vn moment retirent leur coile, die lesinoma
& coureneſus comme vn chaſſeur bien experimenté : que ſi ne le voyons tous les ches.
jours deuant nos yeux , on penſeroit que ce fuſt fable.
Des Mouſches à miel. CHAPITRE V I.

E neveux laiſſer en arriere la prudence des mouches à miel:c'eſt


qu'elles ſont entre elles comme vne petite republique,ellesont vn
Roy,lequel eſt plus beau, plus gros & felfu deux fois que les autres
mouches,il a les ailes courtes& les iábes droictes,vn marcher plus
graue que les autres ayant vnetacheaufront, qui luy ſert de dia.
deme ou de couróne,qui eſt le ſignal Royal , d'au &torité & de ma. Lepieguer
0 ieſté:ileſt plus poly que les autres mouſches à miel. Elles ont vn of dönéaux
aiguillon pour leurs armes & defences,coutefois le Roy n'é a point , ou pour le moins monſthes al
1 il n'en vſe point:lorsqu'il marche,il a ſa garde qui l'enuironne , & toute la crouppe le miel pour
fuit.Ilne fortpoint de la ruche ſinon quăd tout ſon regiment doit ſortir,ce qu'on co- leurs armes
gooiſt parlebruit qu'elles font dedās la ruche,bruyans& bourdonnans, comme crõ. o defences.
pes & tambours,pour annócer qu'il faut debuſquer pour aller aux champs. Chacune
d'elles deſire eſtre pres le Roy , & s'il eſt las,leportér , & en quelquc part qu'il s'arreſte
tout le ictton s'arretera & ſc campera;s'il mcurr,rouces ſont triſtes & mornes , & nc
forcéepoint dehors pour aller en queſte,maiss'aſſembiée à l'entour de ſon corps,puis Les abeilles
leportent dehors,& luy font cõpagnie comme és funerailles, & l'enſcueliſſent en ter ne permeni
ICl'a:cola
il
fait en elliſent vn autre promptement,car elles ne peuuene viure ſans Roy.Ila viure lans
par tout cependant que toutes les mouſches travaillent leurdonnant ceur,vol. on Roy.
eigcantautour de ſa beſongne,cóme s'il vouloirexhorter les ouuriers. Apres qu'elles
D
ont tragaillé,ſielles veulent ſortir dehors,elleséliſent vn temps propre,carveritable. Lesmoaches
à miel ſenso
mene ellos preuoyent & ſentenc les pluyes ;vents & tempeſtes lors qu'ils doiucnt ve tenele beas
nir. Elles ont ceſte iuſtice & equité,que ſur les cháps iamais ne fone malaux animaux, mannais
telsqu'ils ſoient, & ne picquent aucun de leur aiguillon ,finon pour la defence de leur temps.
mailon , & peut-on dire qu'elles ont quelque portion de l'eſprit diuin .
:
Du gouuernement des mouſches à miel. CH APITRE V11.

! Lles fe gouuernent en leur fait commes'enſuit : de iour ellas


font faire le guet à la porte , & repoſent denui& iuſques à ce
qu'vne les reſueillc auec deux ou trois ſons de leurs bourdon
nemens , comme d'vne trompette qui leur commande aingi
1
qu'en vn camp: lorss'aſſemblent pourvoir s'il fera beau teps,
& s'il fait beau, ſortent & s'en vonten quefte. Les vnes appor
cenc leurs fleurs à leurs pieds & cuiſſes, les autres de l'eau en
leur bouche, les autres qui ont encore quelque menu poil,
apportent l'eau ſur leurs corps en forme de petite roſce. Et ainſi chargecs entrent
f iij
60 Le ſecond liure , des Animaux ,

Promiden e dedans la ruche,où promptement il y en a qui les deſchargent, puis les diſtribuer aux A
auxmouches lieux & places à coordonnées. Or celles qui vont aux champs, ſont les plusicunes
a miel ,
& menuës:que fi de fortune eſtás dehors il s'elleue vent,accédent qu'il ſoit paſsé pour
eftre plusaisément cõduites : s’il dure crop , & qu'illeur ſoit contraire,ſe charger d'vne
perite pierre, de peur d'eſtre emportees , & volet bas contre la terre. Elles ſont fort vi

gilátes en leurs affaires , & ont l'oeil ſur celles qui ſont faitardes ,& ne font rien , & quel
quesfois les chaſtient iuſques à la mort . Les vnes baſtiſſent, les autres poliſſent, autres
apportēc viures. Elles comencēc à baſtir en leursruches , en voulte, d'yn artifice mer
ueilleux,depuisle bas iuſques en haut du plácher ,laiſſans deux limites , l'vn pour l'en
tree, & l'autre pour la ſortie, & viuent toutes enſemble ,a fin qu'il n'y aic inegalicé en
Les mouches tre elles , ny cn viandes , ny en trauail . Elles tiennent le manoir fort nettement,ietcans
ričnene leur toutes ordures dehors , & ont ynechoſe encore digne d'eſtre bien nocee :c'eſt qu'elles
maisõneve. chaſſent de leurs ruches les bourdons , & les abeilles baſtardes, qui ne leur ſeruent de
rien ſinon à manger leur miel , & à gaſter leur ouurage , & parcantelles les chaſſent &
B
les cuent commeleursennemis . Celles quiont perdu leur aiguillon,font du cout inu .
tiles , & peu apres leurs entrailles ſortent & meurent . Elles ſon de grand profit à leurs
maiſtres, leur laiſſans cire & miel. Ariſtomachus Philoſophe dir en auoir nourry cin
quante huict ans , auec cres- grande diligence , pour cognoiſtre cource qu'elles fai
ſoicnt, & dir qu'elles ſont compagnables & aſſociables enſemble de leur nature.

Des Fourmis. CHAPITRE VIII .

E S Fourmis ne sóc pas de moindrcadmiració que les mou .


ches à miel en leur induſtrie , prudence & diligence: de forte
que Salomō n'a pas cu hõre d'enuoyer les pareſſeux à l'eſcho .
Salomon
donne pour le d'iceux. Orceteroit choſe incroyable fi n'en auios i'cxpc

maiſtrefies vjēce pour telmoin, queces beſtioles tát petites puiſsét amal
les Fonymis ter les biệs qu'elles an aſſent pour leurprouiſio, & tenir entre
Aux pares elles yn telordre qu'elles tiénét. Pline dit qu'il y a entre elles C
fenx. ordre de republique , memoire , ſoing & cure . N'eft.çe pas
vn paſſe-temps de leur veoir mordre les fruicts qu'elles veu
Pline liv. lent porter ? s'ils ſont trop gros,elles ſe tournent en arriere, & s'appuyent contre leurs
II. G 30 • eſpaules, & les pouſſentdeleurs pieds . Ec à celle fin que les ſemences qu'elles cachent
en terre,ne puiflent germer & reprédre, elles les rongent auát que les mettre en leurs
greniers. Et ſi les grains ſont trop gros, & qu'ils ne puiſſent facilemét entrer par leurs
trous,elles les partiſſent par le milieu : 8 s'ils ſont mouillez de pluye, elles les meccent
dehors & les fontſeicher. Elles labouret de nuict quand la lunceft pleine,& ceſſent au
defaur d'icelle , en quoy ellesmõſtret quelles eniēdēt quelque choſe en aſtronomie.
Mais en leurs æuures, quel labeur & qu'elle diligencey a il? & pourtát qu'elles amaſ
ſent leur prouilió de divers lieux, & que l'on ne ſçait rien de l'autre , Plineteſmoigne
qu'elles ont certains jours de foires , pour le cognoiſtre l'vne l'autre . Vn chacun peut
penſer quelle courſe , & quelle diligence il y a entre elles . Mais qui les contépleroit,ne
diroit il pasqu'elles parlent enſemble , & qu'elles interrogent & reſpondent l'vne à D
Foires de l'autre Nevoyös nous pas les pierres & cailloux rongez & engrauez en leur chemin ,
fourmis.
Pline. de la trace de leurs pieds, & le ſentier qui eſt fait par leur æuure?en quoy nous pouuos
bien cognoiſtre combien la diligece & exercice valent& peuuét en ynechacunecho
ſe : car ſi les pieds cant petits que ceuxdes Fourmis vſent & cauent les pierres par fora
ce, & par continuation d'aller & de venir , que peut le continuel labeur des hommes?
mais outre tout cecy, il eſt encore eſcrit d'elles, qu'elles s'enſeveliſſent les vnes les au
tres, comme les hommes.Plutarque s'accorde en ce que Pline en a eſcric, mais auſſi il
monſtre mieux en ſpecial, & par le menu , les grandes vertus qui ſont en celles petites
beſtes ,deſquelles il parle ainli : Mais comment eft- il poſſible de parler aſſez dignemēc
Plutarque, de la diſcipline & induſtrie des Fourmis? fi ne les faut-ilpas paſſer ſans en parler aucu .
3. Opuſcule
Plonel.co . nemét , nature n'a point de plus grand miroüer des grandes & excellences choſes: car
cb4P 30. en iceluy reluit le ſignalde route vertu , comme en vne pure gourelette. Ceſte com
munication qu'elles ont entre elles , eſt l'image d'amitié : ceſte force & allegreſſe
qu elles ont aux trauaux , eſt vne image de force & magnanimité : ſomme, elles ont

beaucoup de ſemence & deteſmoignage de temperance, & de prouidence, & deiu .


Et de l'excellence de l'homme, 61
A ftice;chacun peut cognoiſtre leur beneuolence lors qu'elles ſe rencontrent , quand
cellesquiloncvuides fonc place aux chargees, afin qu'elles paſſent à leur aile , quand des
Benenolice
four
aufliellespartiſſent en beaucoup de pieces vn fardeau trop pelant , ou à porter ou à misa
erainer:ſemblablement quandelles mettét les grains au ſoleil, pour les faires ſeicher,
lors qu'ils ſentent,qu'ilsſe niellent, ou flecriſſent, ou pourriflent Et encores d'abon
dantque le ſoingqu'elles ont que leurs grains ne germent,ſurpafle tout entendemét:
carelles rongentlenombril du grain ,quieſt la parcie par laquelle iliettele germe , le
chaltrent long cēps deuant. On dit que la premiere deſcence & entree de leurs caver
nes n'eſt pas droicte, afin qu'il n'y aic point d'autres beſtes qui y puiſſent aller ; mais
qu'elleeſtcortuë,auec de grāds retours & circuits,ayans pluſieurs ſentiersde travers,
leſquels ſe rendencen trois cauernes : l'vne eſt celle là où elles font leur aſſemblee &
parlemens : l'autre où elles recirent leurs prouiſions de toute l'annce:& la tierce eſt le
cimerieredes morts. Dauantage iamais ne fonc malles vnes aux autres , & viurone
cent mille enſemble en leurs petites cauernes decerre: & deux hommes le plus ſou
ß ucbtnepeuvent viureen paix dansla republique. Voila ce qu'en eſcrit l'hyuer
Plurarque.
,&
Les mouſches à miel,les fourmis, & d'autres animaux , recueillent pour
ſemblent auoirquelque ombre de raiſon :maisce qu'elles font, n'eſt ſeulement que
par vn inftin & nacurel,& non par prudencé. Les beltes appellees inſectes ſont com
me fourmis,& aucces petitesbeſtioles:pource qu'elles ontdes inciſions, taillades, ou
1
decoupures par deſſus le dos ou par deſſous , ou en tous les deux , qui ſont accou
plees &coniointes d'un petit filet creux,ſelon Pline & Ariftote.

Des versoqui fontla foyé. CH A P I T RE IX .

Ous pouuons auli adjouſter à ces beſtes les vers qui font la ſoye, delo
quels les Philoſophes ont eſcric merueilles , à ſçauoir de la maniere de
Faire leurs nids , & de leurs laines & toilles , deſquelles elles font bra Les perits
N ucs les Rois,Roynes, & aucres hommes & femmes. Mais qui eſt ce- vers fone
luy qui ne ſe doiue grandement eſmerueiller de l'induſtrie & enten braues les
dement quitonten ces petites beſtioles:La providence deDieu ſe monſtre en la na. Rois.
ture qu'il a donnce aux animaux : elle ſe manifeſte encore mieux en ce que les plus
petitsd'entr'eux,ſont ceux auſquels il a plus donné d'induſtrie & de prudence : à fin
quepar icelle ils puiſſent recompenſer la force qui leur defaut.
Del'induſtrie des animaux ,& dela conferuation damițié qu'ils ont,& principale
ment de leurspetits. CHAPITRE X.

E's animaux portent vne ſiextreme amitié enuers leurs faons ou pe.
tits , que ſouuent elles ſe pourroient ſauuer & eſchaper , en fuyant le
chaſſeur quiles vent prendre. Mais s'il faut par ce moyen abandon
ner leurs petits , elles aiment mieux eſtre'miles en pieces , que les per
dre & laiſſer en arriere. Et la ſaiſon qu'elles ſont plus furieuſes , c'eſt
alors qu'elles les nourriſſene.
D Plutarquedia quetoutes les beſtes en general aiment ardemment ce qu'elles en
gendrent,& le nourriſſent ſoigneuſement, & one vne affectio & fineſte finguliere en
tellemariere.Ecquant à l'induſtrie de conſeruer leurs petits, les perdrix Vlent en cela Les perdrix
d'vnegrande fineſſe ,car tandis que leurs petits ne peuuent encore voler pour leur vſene de
icunc aage,elles lesaccouſtumenc à ſe coucher ſur le dos,& àſe couurir de motres de finesse.
terrecomme de quelque couverture. Quand les chaſſeurs ſont prés d'elles , elles les
menent d'un autre colté ,& tournoyent & volent comme à peine, & fone ſemblant
qu'elles nepcuucnc plus courir , & fe feignent ainſi iuſques àce qu'elles ayent retiré
les chaſſeurs loing de leurs petits . Voyladonc vne grande fineſſe, conioinâe auec yn
amour & vn grand ſoing enuers ſes petits.
Cequenousliſons desliéures à ce meſme propos,n'eſt moins digne d'admiration:
1
car lesliéures le voulans retirer à leurs giftes menét leurspetics I'vn à vn lieu, & l'au.
treà vn autre:& quelquefois ils lesſeparét l'un de l'autre bied'vn arpét de terre , afin Des liés
queli d’auancureilſuruicnt vn homme ou va chien,ils ne ſoient pas tous en vn mel- ures.
f iiij
62 Leſecondliure ,des Animaux .

me danger. Et puis apres auoit bien traquafić & voltigé , & imprimé force traces de
A
leurs pieds,faiſans vn grand faulc ,ils ſe retirent delà , & vort en leurs giſtes.
Or fi lelićurceft fin & caut pour la garde de ſes petits , le heriilen ne l'eſt pas moins ,
Le beriffon
eft cant non ſeulement pour nourrit ſes petits, mais auſli à le fauuer luy meſme, & pcuice
pour la oyez ce que Plutarque en a eſcrit. Quand le renard pourſuit le heriffon , il s'enroulle
garde de dans ſes eſpincs ,ainſique la chaſtaignceſt cachee en fa coquille ou eſcotce,& par ces
les perus. moyens il le tient là caché en embuſcade, ſans pouvoir eſtre nullement bleflé. Mais le
ſoing qu'il a de les petits eſt encore plus digne d'admiration .Il s'en va aux vignes , au
temps des vendanges, & avec ſes piedsils abbat en terre les grains des raiſios:puis il le
roulle par deſſus,& les picque de ſes eſpines. Plutarque quien a eſcrit ainſi, introduit
vn perſonnage auoir veu cela de ſes yeux . Et pourceildia : Il me ſouvient que quel
eſtimions que ce fult yn railin qui cheminaft,
Plutarque. queiour nousen viſmesvn, quenons
tant ileſtoic chargé de graines. Quand ileſt entré en fa caverne , il en met vne partie
pour ſes petits , & retient l'autre pour ſoy . Il fai & le ſemblable des pommes , poires
& autres fruids,& ſçait bien choiſir les meilleures & les plus meures , le roullant def
ſus, & en porte tant qu'il peut & ſi peu qu'il luy plaiſt. Il ſe trouve en la Floride yne B
ſorte de beſte,laquelle tant pour ſa rerité que deformité,ie n'ay voulu obmeture en ce
traicté,cn ayant pris le pourtrai & de Thevet,liu.zz.chap.1. Tome2.de la Coſmogra
phie.Elle et nommec dece peuple Succarmh, & des Canibales Su.Cefte beſte la pluſ
Deſcription part du temps fait la reſidence au riuage des fleuues,& eſt raviſſante , & d'une façon
du .Succa- forc eltrange,relle que la voyez figuree. Si elle eſt pourſuiuie, elle prend ſes petits ſur
ſon dos leſquelselle couure de ſa queuč ,qu'elle a aſſez longue & large ,& fe fauue à la
fuite. Toutesfois les Sauvagespour la prendre, font vnc foſſe, dedans laquelle elle
combeſans ſc douter de celle embuſcade.

Pouriraict du Succaraih.

16

Entre les animaux,la nature peſe autant d'un coſté que d'autre, quant au courage,
& à la hardieſſe ,& ne cede point la femelle au malle,ſoit à ſupporter les trauaux pour
le recouurement des viures, ſoit à combattre pour la defenſe de leurs petits.
Les biches font ordinairement leurs faons pres de grands chemins,pource- queles
beſtes rauiffantes,qui viuent de proyc, n'y hantent pas communément.
Ec de l'excellence de l'homme. 63

л Le temps que les animaux s'accouplentenſemble. CHAPITRE XI.

La prime-vere les animaux ſon efpris du deſir de s'accoupler : car alor's


ils ſont excitez à mettre hors la concupiſcence generaciuc , ne plus ne

moins que la ſeuc, & les boucons des arbres ou herbages , à fin de per
petuer leur ſemblable. Les Layes attirent leurs ſangliers, & les ché.
ures leurs boucs , & autres femelles leurs malles , par leurs propres
odeurs : les oiſeaux s'encrefone l'amour des ailes & du bec , les autres par leurs chants
& voix diuerſes s'entre-appellent chacune en leur iargon , s’entrefaiſans careſſes, ſe
refouïſſans pour l'eſperance qu'elles one'de s'accoupler, monftrans par cela quena .

eure les incite à ce faire. Ce qu'on void aux grenouilles, qui commençans à entrer c' & **
en amour s'entre-appellent auec vn chant de nopces , d'vne voix amoureuſe : puis principe de
quand lemalle a fait venir ſa femelle, ils attendent à s'accoupler de nui &t , pource les can ?"
B quededans l'eau elles ne peuuent habiter ny auoir compagnie i'vne dėl'aucre, & fur maux iaf
la terre elles craignent le jour qu'on ne les trouueliez enſemble : mais quand la nuiet chent de
eſt venuë , clle ſortent de l'eau ſeurementoù elles s'entre -embraſſene. Cela vient de entretenir
- la (apience diuine , qui adonné aux animaux le ſoin de ſe garder d’eſtre frappez ,bleſ- leur vie et

1 ſez ou tuez autant qu'illeur eſt poſſible. Aelian die que ſi la Lionnea cu compagnie leurs corps:
d'vn autre Lion , ſon malle le cognoiſt à l'odeur, la chaſtie & bar cruellement. Au- Plines
cuns animaux font pluſieurs petits, les autres n'en fonc iamais qu'vn ſeul en leur vie;
comme l'Elephant , lequel neantmoins vit deux ou trois cens ans .

Del’amour & charité des oiſeaux & chiens. CHAPITRÉ X11.


1
A Cicongne nourriſt ſon pere & ſa mere en leur vieilleſſe , & les petits (ça
chans bien voler aident aulli , & ſupporcent ceux d'entr'eux , qui ne peu .
ste uent encores bien voler. Et par ainli ils ne ſont pas ſeulement humains en La Cicognes
uers leurs peres & meres , mais auſſi entr'eux, comme freres & fæurs les vns enuers
les auſres.Lapoulle porte vne figrandeaffe & ion à ſes petits pouſſins, qu'elle les con
Ć grege & aſſemble, les gardantſous ſes ailes,& s'il viene un chien , ou vn loup , ou vý
ours, quiſont de terribles beſtes aux prix d'elle , pour en empoigner vn , elle ſautera
contre eux ,voire & fuft ce vn hómcarmé de toutes pieces , pour les defendre, ſans La Poulles
avoir elgard à ſa vie,ny av danger auquelelle ſe met :aatant en font toutes les autres
beſtes.Il ſe faut eſmerueiller de la loyaucé que le chien tient à ſon maiſtre , & de l'affe
tió qu'il a enuers luy , & de la memoire & nourriture qu'il en a receu : car ia mais il ne Du Chien.
Pabandonne,& quelque deſplaiſir que ſon maiſtre luy face ,encore qu'il luy donnaſt
cent coups de balton ,ſi ne le peut il delaiſſer, qu'il ne retourne couſiours vers luy. Il
n’ya beſte qui cognoiſſe ſibié ſon maiſtre;encore qu'il aye eſté longteps ſans le voir,
ille recognoiſt couſiours. Il encend la voix des domeſtiques. Lecomun de tous chiens
cft degarder la maiſon , & abbayer aux eſtrangers,& eſtre mauuais aux pauures mal
veſtus.Ees'ileſt queſtió de crouuer des gardes bien leures ,on n'en pourra pas trouuer
de plus certaines que celles des chiens . Et pourtant Ciceron leur faict cec honneur,
qu'il les appellegardefidele par deſſustous autres animaux.Ila vn ſentiment exquis,
par lequel il cognoit à la trace ſon maiſtre & laproye . Aucuns chiens ont demeuré
D long temps ſur
le tõbeau de leur maiſtre,touſiours heurlás pireuſemét, ſans qu'ils en
peuſſent eſtre deſch aſſez ,ne voulās máger ny boire.Plinc recice qu'vn chiế ne depar -- Lim.B.cbari
titiamais près du corps de ſon maiſtre ,qui auoit eſté executé par iuſtice ietrát de tri . 40 .
ftes hurlemens ,cnuironné d'un grand cernedepeupleRomain ,& quelqu'vn luy ayát Hiſtoire
ietté de la viande,ce chien la porta à la bouche de ſon maiſtre.Puis quád ont eut iecté d'un Chik.
le corps dedans le Tibre , le chien ſe mit à nager , eſſayant de le ſauuer & ſouſtenir.
Dótlepeuple Romain fur grandement eſmerueillé dela fidelité de ceſte beſte.On lit
pluſieurs hiſtoires de la fidelicé des chiens , qui ſeroient icy trop long temps à reciter.
Ils abayent & clabaudent oyans le brui&t destrompettes, & le cry des aſnes & autres
grands bruits, & ce clabaudemét & abbayement leur eſt vn pleur pour l'impatiécede
leurire. Le Cheual ſemblablement cognoiſt ſon maiſtre ,ce que Plutarque a laiſſé par

eſcric du chcual d'Alexandre nómėBucefal:quandil eſtoic nud, il enduroitbien que


lepalefrenier moncaſt à poil deſſus luy ; mais quand il eſtoit paré de ſes harnois ro
yaux, & de ſes riches couleurs iln'en ſouffroit pas vn ſeul monter ſur luy, qu’Alexan .
dre coue ſeul;& fi autres s'efforçoient d'y moncer,illeur couroit ſus, cn rõfat & han .
pia
62 Le ſecondliure , des Animaux .

me danger . Et puis apres auoir bien traquaffé & voltigé , & imprimé force traces de
A
leurs pieds, faiſansvn grand fault , ils ſe retirent delà , & vont en leurs giſtes.
Ora le liéurc eft fin & caut pour la gardede ſes petits , le heriílon ne l'eſt pas moins ,
Lo beriffon
eft came non ſeulement pour nourrir ſes petits, mais auſſi à le fauuer luy meſme, & pource
pour la oyez ce que Plucarque en a eſcrit. Quand le renard pourſuit le heriffon , il s'enroulle
garde de dans ſes eſpines, ainſi que la chaſtaignceſt cachee en fa coquille ou eſcorce,& par ces
jes peris . moyens il le tient là caché en embuſcade, ſans pouvoir eſtre nullement bleſſé. Mais le
ſoing qu'il a de ſes petits eſt encore plus digne d'admiration . Il s'en va aux vignes,au
temps des vendangcs , & auec ſes pieds ils abbat en terre les grains des raiſins:puisille
roulle par deſſus,& les picque de ſes eſpines. Plutarque qui en a eſcrit ainſi, introduic
vn perſonnage auoir veu cela de ſes yeux . Et pourceildi&t : Il me ſouvientquequel
Plutarque. queiournous en viſmes vn, que nous eſtimions que cefult yn raiſin qui cheminaft,
tant il eſtoit chargé de graines. Quand il eſt entré en ſa cauerne , il en met vnc partic
pour ſes petits , & retient l'autre pour ſoy . Il faiet le ſemblable des pommes , poires
& autresfrui&ts, & ſçait bien choiſir les meilleures & les plus meures , le roullant del
ſus, & en porte tant qu'il peut & fi peu qu'il luy plaiſt. Il ſe trouue en la Floride yne B 4
ſorte de beſte,laquelle tant pour ſa rerité que deformité, ie n'ay voulu obmettre en ce
trai& é,en ayant pris le pourtrai & de Thevet ,liu.23.chap.1. Tome2.de la Coſmogra
phie .Elle eſt nommee dece peuple Succarath , & des Canibales Su. Ceſte beſte la pluſ
Deſcription part du temps fait la reſidence au riuage des fleuues,& cft rauiſſance , & d'une façon
du .succa-fort eſtrange,celle que la voyez figurec. Si elle eſt pourſuiuic, elle prend ſes petits ſur
fon dos leſquelselle couurede ſa queuč , qu'elle a aſſez longue & large, & ſe ſauue à la
fuite. Toutesfois les Sauvages pour la prendre, font vne foſſe, dedans laquelle elle 2010
combeſans ſc douter de telle embuſcade.

Pourireilt du Succarath.

с
W

TI
D

Entre les animaux,la nature peſe autantd'un coſté que d'autre, quant au courage,

& à la hardieſſe, & nccedepoint la femelle au mane,ſoità ſupporter les trauaux pour
le recouurement des viures, ſoit à combattre pour la defenſc de leurs petits.
Les biches font ordinairement leurs faons pres de grands chemins, pource que les
bcltes rauiſſances ,qui viuent de proye, n'y hantent pas communément.
Ecde l'excellence de l'homme. 63
A Letempsquelesanimaux s'accouplent enſemble. CHAPITRE XI.
La prime.vere les animaux ſon eſpris du deſir de s'accoupler : car alors
ils ſont excitez à mettre hors la concupiſcence generatiue , ne plus ne
moins que la ſéuc, & les boutons des arbres ou herbages , à fin de peca
petuer leur ſemblable. Les Layes attirent leurs ſangliers, & les ché
ures leurs boucs , & autres femelles leurs malles, par leurs propres
odeurs : les oiſeaux s'encrefont l'amour des ailes & du bec , les autres par leurs chants
& voix diuerſes s'entre-appellent chacune en leur iargon , s'entrefaiſans careſſes, ſe
clouïſſans pour l'eſperance qu'elles ontde s'accoupler, monftrauis par cela quena.
eure lesinciteà ce faire. Ce qu'on void aux grenouïlles, qui commençans à entrer c'olf **
en amours'entre-appellent avec un chant de nopces , d'vne voix amoureuſe : puis principe de
nature, 96
quand le maſle a fai & venir ſa femelle, ils attendent à s'accoupler de nuict , pource
B quededansl'eau elles ne peuuent habiter ny avoir compagnie
l'vne de l'aucre, & fur maux iaf
t
laterreelles craignen le iourqu'on ne les trouue liez enſemble : mais quand la nuiet chent de
eſt venuë , clle forrent de l'eau ſeurement où elles s'entre -embraſſene. Cela vient de entretenir
.
la (apience diuine , quiadonné aux animaux le ſoin de ſe garder d'eltre frappez,bleſ- leur vie cor
fez ou tuez autant qu'illeur eſtpoſſible. Aelian dit que ſi la Lionne a eu compagnie leurs corps:
d'un autre Lion , ſon maſle le cognoiſt à l'odeur , la chiaftie & bar cruellement.Au- Plincs
cuns animaux font pluſieurs perits, les autres n'en fonc iamais qu'vn ſeul en leur vie;
comme l’Elephant , lequel neantmoins vir deux ou trois cens ans.
1

Del’amour & charité des oiſeaux & chiers. CHAPI İR É XIÍ. 5

A Cicongne nourriſt ſon pere & ſa mere en leur vieilleſſe, & les petits ſça
chansbien voler aident auſli, & ſupporcent ceux d'entr'eux, qui ne peu .
ucne encores bien voler. Ecparainſi ils ne ſont pasſeulement humains en- La Cicognē.
uers leurs peres & meres , mais auſſi entr'eux, comme freres & fæurs les vns enuers
les autres.Lapoulle porte vneſigrande affe &tion à ſes petits pouſſins,qu'elle les con
Ć grege& aſſemble, les gardantſousſes ailes,& s'il vientun chien , ou vn loup, ou yn
ours, quiſont de terribles beſtes aux prix d'elle , pour en empoigner vn, elle faucera
contre eux,voire & fuft ce vn home armédetoutes pieces , pour les defendre, ſans La Poulles
auoir elgard à la vic,ny au danger auquel elle ſe met:aatant en font toutes les autres
beſtes.Il ſe faut eſmerueiller dela loyaucé que le chien tient à ſon maiſtrc, & de l'affe
& iö qu'il a enuers luy,& de la memoire & nourriture qu'il en a receu :car iamaisil ne Du Chien.
labandonne,&quelque deſplaiſir que ſon maiſtre luy face,encore qu'il luy donnaſt
cent coups de balton,ſine le peut il delaiſſer, qu'il nerecournetouſiours versluy. Il
n’ya beſte qui cognoiſſe ſi bič ſon maiſtre;encore qu'il aye eſté long tēps ſans le voir,
illerecognoiſt couſiours. Il encend la voix des domeſtiques.Lecómun detous chiens
cltde garder la maiſon, & abbayer aux eſtrangers, & eſtre mauuais aux pauures mal
veſtus, Ees'ileſt queſtió de crouuer des gardesbien leures ,on n'en pourra pas trouuer
de plus certaines quecelles des chiens . Et pourtant Ciceron leur faict cec honneut,
qu'il les appellegardefidele pardeſſustous autres animaux.Ila vn ſentiment exquis,
par lequel il cognoit à la trace ſon maiſtre & la proye. Aucuns chiens ont demeure
D longcempsſur letóbeau de leurmaiſtre,touſiours heurlás pireuſemét, ſans qu'ils en
peuſſenteſtre deſchaſſez ,ne voulās máger ny boire.Plinc recite qu’yn chić ne depar-.Lim.8.cbai
titiamais prés du corps de ſon maiſtre,qui auoiteſté executé par iuſtice iertar de tri. 40 .
ſtes hurlemensenvironnéd'vn grand cernede peupleRomain , & quelqu'vn luy ayat Hiffoire
ietré de la viande,ce chien laporta à la bouche de ſon maiſtre. Puis quãd ont eut letté d'un Chit.
le corps dedans le Tibre,le chien ſe mit à nager , eſſayant de le fauuer & ſouſtenir.
Dótlepeuple Romain fur grandement eſmerueillé de la fidelité de ceſte beſte.On lic
pluſieurs hiſtoires de la fidelité des chiens, qui ſeroient icy trop long temps à reciter.
Ils abayenc & clabaudent oyans le bruit des trompecces, & le cry des aſnes & autres
1
grands bruits,& ce clabaudemét & abbayement leur eſt vn pleur pour l'impatiéce de
1
leur ire.LeCheual ſemblablement cognoiſt ſon maiſtre,ce que Plutarque alaiſſé par
cſcritdu chcuald'Alexandre nómė Bucefal:quand ileſtoic nud, il enduroit bien que
lepalefrenier moncaſt à poil deſſus luy ; maisquand ileſtoic paré de ſes harnois ro
yaux, & deles riches couleurs,il n'en ſouffroit pas va ſeul moncer ſur luy,qu'Alexana
dretourſcul;&cfi autres s'efforçoient d’y monter,illeur couroit ſus, en rõÃat & han .
64 Le ſecond liure,des Anima ,
ux bien coſt de ſe A
niſſant fe cambroit ſous eux, & les fouloit aux pieds,s'ilsne ſe haſtojent
retirer arriere,& s'enfuir.Combien que la Colombe loir des beſtes bien fertiles,tou.
tesfois cane le male que la femelle garder vne finguliere chaſteté,concorde & amour,
& charité l'un enuers l'autre,& ne commettentpoint d'adultere,& ne violéc point la
foy en leur mariage:ſi la femelle a vn maſedifficile & faſcheux,elle le ſupporteneát
moins en toute patience:apres le couroux ils ſe flatrent & baiſent,en failant paix , &
retournent l'vn aupres de l'autre.Ils ſont d'amour egales enuers leurs petits. Les tour
L. Tour
terelles en font autant, & dauantage:car en ligne de viduité, iamais nc couchent ſus
torelle. branche verte,apres qu'elles ontperdu leur party, & demeurent en perpetuelle vi
duité,fairsprendre autre party.Ils ont vnamour mutel & reciproque.
Delaforce de l’Elephant, delareligion,docílité clemenie,bonté,chafteté,vengeance
des mauxqu'on luy a faicts , & recognoiſance des biens.
CH A P IT RE XIII.
Lne ſe trouuebeſteterreſtre plus grande , plus puiſſanteny eſpouuentable
Del'Ele que les Elephans.Car il faut qu'ils ſoientmerueilleuſemēc puiffans & robu.
plesni. ftes , quand ilspeuuent porter en bataille de ſi gros edifices & de ſigroſſes
coursdebois pleines de gens- darmes , qui combattent en icelles. 'Etqu'ils B
ſoient eſpouuantables,quand ils viennentequippez en tel ordre, il appert par la
peur & frayeur que l'armee des Romains en cut , lorsqu'Antiochus Roy de Syrie
commença premierement à les amener en bataille contre eux.Car les gens d'armes,
qui n'auoient iamais veu tels monſtres,conccurent ſi grande frayeur,devoir cels ani.
maux, qu'ils ne ſceurent faire que ſe mettre en fuite. Depuis les Indiens auoiene de
couſtume en la guerre, de lier au boutde la trompe deſdits Elephans , vne eſpeelon
gue de deux coudees,auec laquelle ,cſtans chaſſez tuoiétleurs ennemis. Ils meccoicpe
pareillement des bas,qu'ils lioient de chaiſnes de fer ſous le vétre, & deſſus mettoient
vn chaſteau de bois,en maniere de cours , ou quatorze hommes eſtoient debour , &
batailloienr de toutes ſortes de leurs armes & baſtons. Mais depuis ſçachansleursen
nemis , que les Elephans craignent lefeu , ceite façon eſt abolie, à cauſe desbaſtonsà
feu qu'ilsont , & auſſi des torches allumees qu'ils preſentent aux Elephans deſquelles
ils ſont tant eſpouuentez , qu'ils fontplusdemalà leurs maiſtres en s'enfuyant,qu'ils
ne font aux ennemis en bataillant. Ceneantmoins tant eſtranges beſtes qu ils ſoićt, с
Pline li. 8. c'eſt vne choſe incroyable des vertus que les Philoſophes leur attribuent , & les cho
chap. s.
ſes qu'ils en racontent. Pline di&t , qu'ils approchent fort des ſens humains , & qu'ils
ont quelque intelligence du langage du pays auquel ils ſont nez: & qu'il y a vnegran .
de obeiſſance en eux, en ce qui leureſt commandé, ayans memoire des ſeruices &
offices qu'ilsont accouſtumédefaire: mais qui plus eſt, bonté & clemence ſe trou.
pluearque.uent entr'eux. Quant à la religion , Plucarquea eſcrit qu'ils font prieres aux Dieux
immortels: car deleurbon gré ils le purgent & lauent en la mer, & adorent le Soleil
Pline. leuant,auec vne grande reuerence,leuans leur trompe en haut vers le ciel, au lieu des
mains. Er Pline à cemeſme proposteſmoigne, qu'ils font honneur & reuerencenon
ſeulement au Soleil,maisauſſi àla Lunc,& aux eſtoiles, & apres auoir faiết leur adora.
tion , ils s'en retournent au bois , & portent deuant eux leurs petics veaux ou faons,
qui ſont las.Les Arabes en font bon teſmoignage,quivoyent ordinairement grande
quantité d'Elephans à la nouuelle Lune delcendre à grandstroupeaux aux rivieres,
où ils ſe lauent & baignent , & apres qu'ils ſont purifiez , il ſe mettent à genoux , & D
Plutarque. font leur adoration,puis s'en retournent au bois, & le plus ancien conduit la troupe ,
& celuy d’apres les aſſemble. On dit auſſi qu'on a trouué que de nui& ils penſoient à
ce dequoy ils auoiêc eſtéchaſtiez de iour. Plutarque teſmoigne qu'il eſt tour certain,
que comme aucuns Elephans euſſent eſté inftruits àRomelong.tempsdeuant,pour
apprendre à faire des tours merueilleux,& difficiles à refaire, on en trouua vn ayant
l'entendemēt plus dur que les autres, & pource il eſtoit hay de tous les autres,& bac
tu ſouuent,parcequ'il ne pouuoit recenir tels tours de paſſe paſſe, lequel toutesfois
les repetoit à par foy, & s'efforçoit les faires de nui&t à la Lune. Adrianus recite auoir
veu vn Elephant, lequel ayant deux cymbales penduës aux oreilles , les touchoit
d'accord alternaciueinent de ſon muſeau ( ou trompe ) & danſoit ſelon la meſure de
l'accord , & les autres le luiuoient en danſant comme luy. Auger deBuſbecq aſſeure
en l'vnede ſes Epiſtres, en auoir veu vn à Conſtantinople quidanſoit au londec
inſtruments , & ioüoit à la paulme. Les Elephans porcent leurs petits deux
1
Et de l'excellencede l'homme . 65
А ans en leursmatrices,pourla grande corpuléce de leurs corps, parce qu'vn grosfruiet
n'eſt fitoſt meur qu'vn perit. Ils ſont denaturecár amiables,& pitoyables , que jamais
nefontrien à perſonne, lion ne les.yprovoque. Iamais le maſle & la femelle neſeco .
1 gnoillenc eniemble qu'en ſecret, à cauſe dela honte qu'ils ont. On tiene qu'ils ont fi Ariftote
Bonentendement,qu'ils n'entreront iamais en vnenauire pour paſſer la mer , & eſtrelim .4. des
menez en pays eſtrange, que leur gouuerneur n'aye promis & iuré les ramener en Anie (

leurpays.Auſſi eſtansirritez , ils chargent les hommes ſur leurs cornes , & les iet- maux.
rent li haut , que devant qu'ils tombent , ils ſonceſtouffez & morts . Nous parlerons
encores de la nature des.Elephans cy-apres au liure des Monſtres , où la figure de
l'Elephant defaur.

Des beſtes quifonsés eaux. CHAPITRE XI .


1

B
Pres auoirparlé des beſtes qui conuerſent ſur la terre , il faut pareillemenc
1
dire quelque choſe de celles qui ſont és eaux, dont la Lamproye emporte
1
le prix ,& merite la palme par deſſus tous les poiſſons, en cas d'amour pa.
ternel , & de bonté & douceur cnuers leurs petits. Premierement elles
1
font leurs aufs, & puis les petits : mais elles ne mettent pas hors leurs pe
ties comme font les autres poiſſons: ainsles nourriſſent en leurs vencres, comme s'ils
Jes engendroientdeux fois:& quand ils ſont grandelecs ſont iercez dehors leur ven
tre,leurenſeignant à nager , & à s'eſbatere à l'entour d'eux : puis ſubic elles les rc
çoivent«lerechef en elles-melmes par leur bouche, & leur baillent leurs corps pour
habiter , leur donnanc viande & refuge, canc qu'elles cognoiſſent que leur aide leur
cſt certaine & aſſeuree.

Quelesbeftespeuuest eſtre appriuoiſies. CHAPITRE XV ..


Heuer en la Coſmographie Tome ſecond, chap. 7. dit que le Turc faic
nourrir de coutes forces de beles , comme Lions , Tigres, Leopards,
C
Loups.ceruiers , Chameaux , Elephans , Porcs-eſpics,& autres beltes Lamproge.
eſtranges: & ſouvent les hommes quiles gouuernent, ſont en Conſtan
tinople,ou au Caire. Ils les meinentpar la villeauec yne groſſe chaine de
fer,& principalement les lions , ayans de pecites clochetes, afin que le peuple ſe reci
re,& quecesbeltesne gaſtent quelqu'vn :ce que ſouucntesfois cft aduenu. Et fi ceux
quilesgouvernene , ſont aduertis que quelque grand ſeigneur ou ambaſſadeur ſoit
arriué,ilsne faudront luy amener en ſon logis ceſdics lions,auec compagnie d'autres
beſtes eſtrangesauſquellesilsfont faire mille paſſetemps: Icurs maiſtres ſemblable .
mencioüentdepluſicurs forces d'inſtrumens à la Turqueſque , meſme ioüent Co.
medies, & luctene, eſperans tous d'auoir quelque preſent du leigncur qui aura re,
ceu telpaſſe comps.
66 Le ſecond liure ,des Animaux .

Figure comme les lions


font conduitsparla ville de Conſtantinople.

CO !

A
Y

Mais ce n'eſt choſe merueilleuſe que les beſtes terreſtres puiſſent eſtre appriuoiſees
Plutarque. avec les hommes , veu que les aquatiques le peuuent c tre ,entre leſquelles on nommo
les anguilles . Pluſieurs autheurs onteſcrit de la Murene : ſemblablement que Craſſus
a eu vne Lamproye laquelle eſtoit ſi appriuoiſec, qu'elle luy obeiſſoit, donc luy auoit
donnévn nom comme à vne beſte domeſtique , & l'appellant la faiſoit venir vers luy.
Icelle eſtant mortc , il en pleura : ce que Domitius luy ayanc reproché d'auoir ploré ſa
Murenc, luy reſpondit,qu'il auoit eu crois femmes, & n'en auoit pleuré yne ſeule.

Comme les animaux ont appris aux hommes à fourbir& aiguiſer leurs armeures,
O faire ambuſcades. CHAPITRE XVI .

La dent de es guerriers ſont fort ſoigneux à contregarder leurs armes, à fin qu'elles
D
l'Elephant ne ſe rouïllent & gaſtent, & pource ils les font louuentesfois fourbir:
oft Lyuoire mais il y a pluſieurs beſtes quine leur en doiuent rien de retour.Ec quát
qui fere and à ce poin &t, les Porcs ſangliers aiguiſent leurs déts.Les Elephans,pource
pluſieurs que l'une de leurs dents,auec laquelle ils fouillent arrachans les plantes,
onurages , herbes & racines dont ils ſe nourriſſent,on eſt ordinairement mouſſee,
O meſme vſee & eſpoin & ce ,ils cótregardent touliours l'autre poin & uë & affilec, pour s'en ſer.
en medeci
ne . uir aux combats contre les Rhinoceros, & autres ennemis, Ledic Rhinocéros eſt auſſi

Rhinoceros, long que l’Elephant,mais plusbas de jambes & a ſon pelage decouleur de boüis, pic
core en pluſieurs endroits , & façonné & armé , comme il ſe verra par la figure cy
apres .
Les Sano Les ſangliers aiguiſent pareillement leurs defenſes pour affaillir ou ſe defendre
gliers. Du Lion
1

& excellence de l'Homme. 67


A E Lion chemine toulours les pattes fermees, afin que ſes ongles ſoient en.
1 ſerrez au dedascomme en yne gucine, de peur que la pointe ne ſerompe, &
aufli qu'on ne les puiſſe ſuiure à la trace : carà peine la peut-on trouuer, ains
ſeulement des petites marques de ſes pieds , & peu apparentes: & ainſi lesanimaux
contregardentleurs armes, pour s'en ſeruir aubeſoin. Les TaureauxpreſententleLe Torcava
combat auec leurs cornes, & s'equippentau combat comme vaillans gens- darmes &
Cheualiers. LeRatd'Inde, commeditPlutarque, nedifferc en riend'yngendarmc Raid'Inde.
pour batailler, tantbien il le ſçait couurir de bouë & de fange, qu'il ſemble propre
ment qu'il ſoitarméd'vn halecret & cuiraffe, lors qu'il doit batailler contre le Cro
codile.Ercombien que ledit Crocodille ſoit vne beſte li force & cruelle, qu'elle man.
geles hommes , le Racd'Inde neantmoins le fait fuïr,encore qu'il ſoit fort petit.Ce.
la ſe faic par vne choſe indicible , que nature mec aux cæurs des grands animaux pour
les elpouuanter d'une peur & crainte,meſmeiln'y a point de danger pour eux : com .
Bme l'Eleph
ant eſt elpouuanté par vn pourceau, & le Lion par vn coq, veu qu'ileſt ef
critdu Lion,qu'ilne leretournepoint pour quelque choſe que ce ſoit. Telles crain. Arneesmi
tes autresfois fonc aduenuës à de bien grandes armees preſtes à combattre , qui ont les on rente
eſté miſes en routte & fuiste par vn lieure, qui ſortit d'vn buiffon : car depuis qu'ily par leliéure.
cu eur eu vn ou deux effrayez par la ſoudaine ſortie de ce liéure , tous les autres fu
rent ſemblablement effrayes & eſpouuantez ,conime ſi tour euſteſté perdu & decon
fir,penſansqu'il y euſt quelque grand danger. On trouue à ce propos en l'hiſtoire
de Philippes deComines, que des chardonsqui eſtoient en vn champ , feirent peur Chardons
i aux Bourguignons aupres de Paris,en la guerre qu'cut le RoyLouysvnzieſme, auccfirenepens
Aux Bonto
le ComtedeCharolois. Iladuintqu'aucuns de l'armee veirent deschardons en grád gwignons
nombre, plantez en.vn champ, prés Charanton : & pource que letemps eſtoiccou-prés Paris.
uert & obſcur, il leur ſembloit quec'eſtoic larmee du Roy qui eſtoit ſortie de Paris,
& làarreſtec, faiſant alce : & apres qu'ils en curent porté les nouuelles à leur armec,
& qu'on en eut enuoyé d'autrespour les recognoiſtre trouuerentque ceſtcarmeede.
meuroir touſiours là plantee ſans bouger, dont la peur leur fur encore redoublec, &
Croute la nuict ſecindrent cous en armes: & le lendemain le iour eſtant eſclaircy ,ils co
gnurene que c'eſtoient chardons: parquoy ce n'eſtoit pas mcrucille s'ils auoienc cenu
bon ſans reculer ( mais auſſi ils n'auoientpoint auancé :) & ceux quien auoient por
téles novuelles,furent bien fort honteux ,toutesfois ils furent excuſez pour l'obſcuri
té du temps.
Des Cocas.
Les Coqs ſont oiſeaux Royaux auli lont ils couronnez, & exercent leur regne en Coqso
quelquelieu qu'ils ſoient de leur hardieſſe & courage , & bataillent du bec & des ar
gots,commel'experience le monſtre, donnans crainte& peur aux Lionsqui ſont les
plusnobles& courageux entre les beſtes ſauuages. Et decefteffroy du Lion tu pour
fas vcoirce que Proclus en a eſcrit au liure, deſacrifi.& magia,où il en rend vnetres
curieuſe & do&teraiſon,ſelon la doctrine & façon de philolopher de la ſecte.
Des Connins.
Les Connins ont montré aux hommes à faire les mines ſous terre, pourminer & Connins.
D renuerſer s'en deſſus deſſous les forcereſſes de leurs ennemis , Marc Varron dit,qu'en
Eſpagne y cut vn gros bourg fitué en pais ſablonneux ,qui futcellementfouy & caué
parles connins , qu'il en fut finalementabandonné par leshabitans, & puis ruïné.
Des Loups.
Les Loups ont monſtré à faire la guerre aux hommes : ils ſe mettent en troupes &
demeurenten embuſcades à l'entrec d'vn village: il y en a vn qui entre dedanspour Lompas
donner l'alarmcaux chiens,puisrecouro vers ſes freres & compagnons, & les chiens
apres,& lors qu'illes a paſſez,recourne vers les chiés:leurfaiſant teſte :cependāc l'em
buſcade deſcoche,prennentchacun vn chien , luy coupent la gorge , & le mangent.
! Du Regnard.
LeRegnardeſt le plus caut & le plus fin de routes lesbeftes en general.Lors qu'il Regnard
eftchaſſé des chies, & qu'illes ſentprés delaqueuë,il leur ietre ſes excremensau mu.causafim.
ſtau,& aux yeux:& les ayāt ainfiesblouys & eſtonnez, il gaigne'le deuant, & les laiſſe
enarriere. Ila auſſi vne aſtuce,que pour fairedeſnicher les poulles ,il feint de leur iet
terſaqueuë,& par ceſte peur les dećniche, & à la deſcente en prend vne,& l'emporte.
Pateillement s'ilveut paſſer vneriuiere, encorequ'elle ſoit gelee& prinſe, marche
doucement ſur la glace, & approche ſon oreille,& s'ilpeutentendreaucunement le
09
68 Le ſecond liure , des Animaux ,
bruit de l'eau cachée, il cognoiſt quclaglace n'eſt pas eſpeſſe,ni aſſez ferme:parquoy a
il s'arreſte,& ne paſſe outre : & ainſis'il ne peut entendre le bruit,il paſſe de l'autreco
ſté hardiment. Or ne ſçauroit on dire que cela ſoit ſeulement vne vivacité de ſenti
ment de l'ouye, ſans aucun diſcours de raiſon :car c'eſt vne ratiocination : & conſe
quence tiree du ſens naturel , en ceſte ſorce: ce qui fait bruit , ſe remuë , ce quiſere
muë n'eſt pas gelé: ce qui n'eſt pas gelé ,eft liquide:ce qui eſt liquide ploye ſous le faix,
& ne tient pa
pass ferme ; ergo ,& c.
DesPourceaux .
Silespourceaux oyent crier en vne foreſt l'un d'entr'eux, ils s'aſſemblent tous pour
le ſecourir, comme ſi vnetrompette auoit ſonné pour aſſembler vne compagnie de
gens- darmes, afin d'aller au ſecours de leur compagnon, & tous bataillent pour luy .
Du Poiſſon Scares & Anthes.
Plutarque dic des poiſſons appellez Scares & Anthes, qu’auſſi-toft qu'ils ont auallé
le haim du pecheur, les autres quilors font preſens, accourent touspour les ayder ,
rongent le filet & le pecic cordeau, & ainfieſchappent. Les Anthes le ſecourent pa B
reillement les vns les autres auec plus grande violence : car ilsietrent ſur leurs eſpau
les le filet & le petit cordeau auquel l'ameçon eſt attaché , & dreſſent leurs eſpines &
cſcailles , dont ils le couppent & rompent .
Du Poiſſon appellé Gonuerneur.
Ilya vne grăde admiration de ſocieté & amitié qui eſt entre le poiſſon appelléGou
uerneur,& la Baleine.Quantau Gouuerneur,il n'eſt plus grád qu'vn Goujon , lequel
cít touſiours auec la Baleine, & va deuancelle,luy dreſſant lon chemin ,la conduilano
de peur qu'elle ne ſcieite en quelque deſtroit, ou en la fange,dont elle ne ſe puiſſe re.
tirer. La taleine le ſuit, & louffre volontiers eſtreconduite par luy :s'il ſe veut repo
{er, il ſe mer en fagueule & y doit,& elle auli,ne le laiſſanc iamais ne journenuict.
Des Grues.
Les Gruës , lors qu'elles departent pour aller en pays loingrain, ſe elles mettentſi
bien en ordonnãce,que iamais capitaine deGendarmeriene ſçauroit tenir meilleur
ordre:car auant qu'elics delogent,elles ont leur heraut & leurstrompettes , qui les
afſemblent: quand elles marchent,elles conſentēt toutes enſembic , &volene en haut С
pour regarder de loing:elles elliſent yn capicaine, lequel elles ſuiuent: elles ont auſſi
leur ſergent de báde, & aucunes diſpoſentau derrieredela băde pour hucher & crier
chacuneen ſon tour,afin d'entrecenir touſiours la bande en ordonance par leur voix.
Elles ont leurs veilles bien diſpoſees , & ieurs guettes qui font leur guet denuict.
Plutarque dic qu'elles ſouſtiennent vne petite pierre de leurs pieds,afin que ſi la guer
te s'endort,la pierre l'eſueille en tombant,& la reprennede la negligence.Le capitai
ne a la ceſte leuce,& col eſtendu ,regardant au loing & les admoneſte des dangers auf
quelles elles peuuent eſtre. Ec quand elles ſont en ordonnance, les plus fortes ſemer
tenc deuant pour rompre l'air,& quand les vnes ſonlaſſes , les autres vont en leurs
lieux pour les ſoulager, & ſouſtenir la peine à leur tour: & pourmieux trencher l'air ,
elles ſe mettent en ordonnance de gens de pied ,eſtroitte de front, & large par derrie
re,en forme detriangle : & fiont encore ceſte prudence & ſcience d'aſtronomie ,qu'
elles preuoient les tempeſtes, & fe iettent en terre ſubit qu'elles les ſentent , & ſe re.
poſent.
Des Oyes. D

Les Oyes de Sicile vſent d'une fort bonnegrace ,pour ſe garder de ſe deſcouurir
parleurgazoüillement:car combien qu'il leur ſoit naturel,fieſt-cecoutesfois qu'elles
ont bien Içeu trouver le moyen de corriger ce vice, afin qu'il ne les miſt en danger de
leurs aduerſaires. Plutarque dir, que quand il lear faut paſſer la montagnenommee
Taurus craignansles Aigles,elles metcent chacune vne pierre aſſez large en leur bec,
afio d’empeſcher leur gazouillement & bruit naturel ( quelles feroient ) iuſques à ce
qu'elles ayent paſſé leurs ennemis, leſquelles elles trompent en ceſte ſorte. Le Cerf
ſe ſentant preſſé des chiens, ſe couche, & met ſes quatre piedsſous le ventre, & expi.
re ſon haleine contre terre , tellement que les chiens paſſent & repaſſent contre luy
ſans en auoir le ventny ſentiment. Voyla comme nature donne à chacun animal co
gnoiſſance de lauuer leur vie.

>
Et de l'excellence de l'Homme , 69

Icy te font repreſentees deux figures de Dragons qui tuent les Elephans.

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70 Le ſecond liure , des Animaux,

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Des Dragons.

En cet endroit les Dragons n'auront pas moins de gloire ,car par leur fineſſe & ma.
lice ils vainquent bien les Elephans , qui ſont les plus fortes beſtes que la terre porte::
ce qu'ils ne pourroient faire par leur force : & pourcanc ils ſe metcent en embuſches,
& auguet , & ſe ruent ſur cux partrahiſon, & puis les embraſſent ſoudain , & envelop
pent , & s'entortillent autour d'eux ,& leur lient lesiambes de leurs queuës , pour leur
empeſcher de marcher: & cachent leur reſte dedans leurs narines, leur oftác l'haleine,
les picquenc & mordent en la chair qu'ils trouuent la plus tendre , & leur creuent les
yeux , & leur ſucccnc le ſang, en ſorte qu'ilfaut que ies Elephansmeurent. Pline dir ,
qu'il y a desDragons en Ethiopie de dix coudees de longueur. Et en Indie, il s'en eſt
Pline lix . trouué de cent pieds de long , & aucuns voler ſi haut en l'air,qu'ilsprenoient les oi .
8. cháy. II . ſeaux volans . leá Leon Africain eſcrit en ſon liure des nauigations, qu'à Calicuc on
B
12. trouue des ſerpêsd eſtrange façon,ettát de la hauteur & groſſeur d'un gros pourceau
aucc vne teſte plusgroſſe & plus laide que celle du pourceau, ils ont quatre pieds &
ſont lógs de quatre braſfeeseſtant fort dómageables aux habicans.lly en a quiſontli
venimeux que par leur morſure la perſonnecombe lubicemét morte. Etſi quelqu'vn
auoit tué vne de ces beſtes, le Roy le feroit mourir comme s'il auoit tué un homme.
Le Roy & habicans de ce pays ontvne folle ſuperſtition & opinion de ces beltes,eſti
más qu'elles ſoient les eſprits de Dieu , dilans que li ainſi n'eſtoit, ils n'auroiếc la puiſ
ſance de meccre vn homme à mort par lcur ſimple morſure,de ſorte que ces animanx
Hiſtoire. ont ce credit de ſe promener par la ville , cognoiſſans bien ceux qui ne les craignent
pas, auſquels ils ne fontmalquelconque. Combien ,dit - il, que de ſon temps ilſoit
aduenu , quepar vne nuic , l'un de ces animaux entra dedás vne maiſon ,où ilmordic
ncufperſonnes, quel'on crouua au matin couces mortes, & enficcs, & nonobſtant ce.
la ilsne laiſſent de les auoir en grande admiration: cellement,que ſi en allanten quel
que voyage , ilsrencontrent vne ces beltes, ils les reputent de bon heur , eſperans
de cela que leurs affaires & entrepriſes ne peuuent venir qu'à bon port. Ildic qu'au
Royaume de Senegua, y avoir des Serpens longs de deux pas , & plus , qui n'ont ailes
ne pieds : mais ils ſont ligros, qu'ils transgloutiſſent vne cháurcentiere , lansla def
membrer,

Du Poiſſon appellé Peſcheur.

Ariflos de Le poiſſon appelle Peſcheur, à cauſe qu'il chaſſe aux autres poiſſons,vſedemeſme
Dalwr .
Anin . fincſſc quefeit la Seiche . Il a vne pecice poche qui luy pēd du col , laquelle il retire &
laſche comme il luy plaiſten vn moment, ainſi que fait le coq d'Inde ſa creſte. Or il
l'allonge en forme d'vn haim , & la preſente à maſcher aux petits poiſſons, qui nagét
aupres de luy,puis la retire à loy, pecit à petit , li pres qu'il puiſſe happer les petits poil
fons de la bouche.
De la Seiche.

Or combien que les beſtes ayent cent milles telles fineſſes, ruſes, & eſchapatoires,
que ie pourrois icy alleguer pour exemples , toutesfois ce que Plutarque eſcrit de la p
Seiche me ſemble meriter de cenir lieu de tous autres , diſant qu'elle a comme vnc
veſlie penduë au col , touce pleine deliqueur noire comme encre , laquelle elle iette
quand elle ſe ſent prinſe, caſchant par ce moyen à ſe deſrober de la prinſe ,& tromper
ccux qui la penſent tenir .

Des armes des beſtes. CHAPITRE XVII.

ES beſtes ont coutes leurs armures naturelles , parquoy elles n'ont beſoin
d'en faire forger d'autres , ou d'emprunter d'ailleurs commeles hommes .
llen ya meſmes quiont telles armes, qu'elles prennent par icelles ceux qui

Torpille. les veulent prendre . Et pour exemple, la Torpillene bleſſe pas ſeulement ceux qui la
touchent à nud , mais auſſi par entre les rets, elle iette víc diſtillation , qui ſtupefie,

& engourdiſt les mains des peſcheurs, en ſorte qu'ils ſont contraines de tout laſcher:
& ainſi elle fauuc.
71
& excellence de l'Homme.
А
Figure du Hériſſon de Mer.

VITATS
te
Si
1
E

WA

1
Ndré Theuer eſcrit, que la Mer Perſique vers l'Arabie, nourrir vn poil- 21.10.chs.
lon de la grandeur & groſſeurd vne carpe , garnyd'iguillons& pointes 10. tom . I.
comme noſtre Heriſſon , auec leſquelles il combat contre tous autres de ſe colo
! poiſſons. C'elt choſe toute aſſeuree ques'il en a donné vne atrairte à mographie.
vn homme , ou belte , comme aufli deies dents , en vingi & quatre heu.
ses on ſe peut tenu preſt pour mourir..
Des Cancres .

i Les Cancres & Ecc cuiſſes, encores qu'ils ſoient petits animaux, à comparer aux
fuſdies, ſi eſt ce qu'ils ſe teruent de leurs i'ieds de devant qui font fourchus, non lcu
D lementà manger, mais aulli à le defendre, ou atlaillir.
gij

1
72 Le ſecond liure , des Animaux ,
Les beſtes font dociles. CH A P IT RE XVIII.
A
ES beſtes ſont dociles pour apprendre ce que les hommesveulent
enſeigner : en quoy elles nous baillent quelqueceſmoignage ,qu'el.
les ne font pas lans quelque participation de raiſon. On lesvoit eſtre
Plutarque enſeignees par les hommes , y prenans leurs eſbats & plaiſirs outre
Toin. 2 . leur naturel: comme les Chiens , Singes , Cheuaux , paflent & repaſ.
ſent par les cercles des baſteleurs , & s'efleuent ſur les pieds , ſaucans
& dançans, & font pluſieurs autres cours de paſſe-paſſe. Plutarque recite qu'vn
chien leruoit à vn baſteleur, lequel ioüoit vne fi& ion de pluſieurs mines,& pluſieurs
pertonnages , & ce Chien y repreſentoit pluſieurs choſes conuenables au ſubiect
que l'on traitcoit , & qui s'offroit: mais ce qui paſſoit toute admiration ,c'eſt que luy
iettant d'une certaine drogue qui auoit le pouuoir d'endormir,il contrefailoit naïf
uement le mort. Il prenoit le pain où la drogue eſtoit meſlec , & peu d'eſpace apres
l'auoir auale,commeçoit,ce ſembloic, à trembler, commes'il cuſteſté toutellourdy:
finalement s'eſtendant & le roidiſſan: commes'il euſteſté mort , il le laiſſoit citer &
trainer d'un lieu en aurre,ainſique porroic le lubiet delafarce:puis quand ilcognoil. B
ſoit à ce qui ſe faiſoit & diſoit qu'il eſtoit temps , alors il commençoit premierement
à le remuer tout bellemene comme s'il fuſt reuenu d'vn profond ſommeil, & leuant
la teſte regardoit ça & là,dontchacun desaſſiſtans eſtoit fort esbahy : puis 1c levant 1.

du cour, s en alloit deuers celuy qu'il falloit qu'il receuft, & lecareſſoit:de ſorte que
tous les aſſiſtans, & melmes l'Empereur Veſpaſien ,eſtant en perſonne dedans lechca
tre de Marcellus où cela ſe failoit, en demeurerent tous reliouys.
Du Singe.
Le Singe eſt un animalridicule , beau toutesfois au iugement des enfans , & leur
Du Singe. eſt vn palletemps pour tire: cars'eſſayant d imiter tous actes d'homme , il ne le peut
1. De l'oſs faire, & partác appreſte à uire àdanſer
ceux qui le regardent. On a veu ,dıc Galien , vn Singe
& eſcrire, & faire autres choſes quel'homc peut
ge des par s'efforcer a ioüerde la fuſte,
ries. bié faire.Ilme ſouuient auoir veu en la maiſon du Duc de Some , vn gros Singe mal.
Hitoire faiſant, & pour ce on luy coupa les deuxmains,fouffrant eſtre habillé de ſes playes.
d' vn Singe. Eitátguary,le voyát ſans mains,deuint doux ,əffable & docile : on luy bailla vn habit C.
verd & ceint autour du corps:& à ſa ceindareeſtoit pendu vn eſtuy de lunettes , auec
vne paire de couteaux,& vn mouchoüer,comme l'on baillc aux enfans. Eſtant aingi
habillé,le mailtre cuiſinier vouluc eſtresó pedagogue, àcauſe qu'il faiſoit lademeure
à la cuiſine,à vn coin de la chemince. Il l'inſtruit a luy faire faire pluſieurs ſingeries, &
où il faillois, coups de baſton ne lay manquoient no plus que la parole,luy diminuant 6

ſa portion,le faisát ſouuent diſner par cæur:car come dic Perſe,le vétre eſt ingenicux
Perſ levě & maiſtre desarcs(& celuy qui baille l'entendement:) & par ce moyen le cuiſinier en.
treeft inge- feigna au Singe à jouer de paſſe paſſe, à ſauter & dáſer au ſon d'vn petit flagcol,courir
mohse con lalance,paller & repaſſer entre les jambes : il portoit la viande auec les pages pour la
niente
des arts. poſer ſur la table avec grandcreuerčce, & failoit pluſieurs autres bonsſeruices,tenát
touſiours ſa vaiſſelle netre avec la langue, de façon qu'on l'appelloit frere lean fac
torum. Apres le diſner & louper ,on le mettoir dans vpechaire,contrefaiſantle pref
cheur tournát les yeux s'en deſſus deſſous,frapantſa poi&trinedeſes moignons,en di
ſant les parenoltres,claquerantdes dents, & monſtroit ſon cul, qui eſtoictouſioursà
deſcouviere,à cauſe que lon habit eſtoic court,de peur qu'il ne fuſt ſaffrané: bref, fai. D
ſoit pluſieursautres îngeries & riſees,marchant couſiours debout,à cauſe qu'ilne ſe
pouuoit tenir autrement , s'il n'eſtoit ſur ſon cul,parce qu'il auoit perdu ſes mains.
Des Oiſeaux de proye.
On voit ſemblablement les Faucogniers qui apprenent aux Oiſeaux deproye, aller
L'oiſeau de cobicrecn l'air autres Oiſeaux , & les abbatire en terre:voire vollét ſihautau profod
progo ftie des nuës qu'on les perd de vevë.Et le Faucon ayant gaigné le deſſus d'vnHeron & ſe
14
guerre voyát eltre preſque vaincu , met ſon bec long & aigu ſousſes ailes, la pointe en haut,à
GHY superfin que le Faucon le voulár abbattre,donnecórre iuſques à entrer au trauersdu corps
aux liễures quieft cauſe que tousdeux quelquefois tombér en terre morts.Et où le Faucon Paura
connins. abbatu ſans entre bieffé,cſtanc delcendu en terre,le Fauconier l'appellant,retourne ſe
remettre ſus lon poing.Dauantage,aucuns petits oiſeaux ſont enſeignez à beſongner
des pieds & du beg,de quels ils vlenc en lieu demains,tiransde peties vaiſſeaux pēdus
à vne corde, (auſquels eſt leur manger & boire ) comme vn homme tireroit des ſeaux
& de l'excellence de l'homme, 73
A d'vn puits avec lesmains.Ec quár au Chien ,chacun ſçait comme ileſt docile, & com
me:I va querir ve Cane au profond de l'eau,& l'apporte à ſon mailtre viucov mora
te : & tuite: core plufieurs autres choſes,outre celles deuant dides,quiſeroient trop
longues à deſcrire.
Des Chameaux .
Le Chameau eſt un animal fort domeſtique, qui s'appriuoiſe facilement, appre
nant à quoy on l'addreſſe,pour s'en ſeruir.Il eſt bien vray,qu'ily en a de bien farou.
ches & tauuages , lesquels pour n'auoir eſté apprivoiſez lont faſcheux , &mordent &
.
tüentauili bien que pourroit faire le plus vicieux cheual qu’on Içauroit trouver. Le
loir qu'on eſt à repos,on n'a peine que les laiſſeren la campagne pour paiſtre un peu
d'herbe,oubrouter quelqueeſpine,chardon ou rameau , & le lendemain les rechar
ger,& fi ne feront iamais faute.On ne leur met point la ſomme ſur le dos ,qu'ils n'a de
yeile quatre ans pour le moins. Les Arabes ont ceſte aſtuce de les chaſtrer jeunes, afin Temps
qu'ils s'en ferucne plus longuemēr,& ne ſontlifurieux au Printemps,fors qu'ilsvien-porter. for
nét en amour.Celte beſte louffre huict iours la faim & ſoif. Elle eſtde douce & amia
B blentare, veu que les eſclaues & marchands Turcs , la voulans charger ou deſchar
ger deicur fardeau,ils ne fót quecoucher d'vne vergecte ſur le col;& loudain ſe cou
che parterre,& ne ſe leue qu'elle ne ſe ſente aſſez chargee,ou qu'on la face releuer. 11
a quatre genoux,pourceſtecauſe il fechiſtſes cuiſſes dederriere,comme les jambes Pourquoy
dedeuant : & partant il demeure à genouil cant qu'il ſoic chargé. Telle chole a eſté ils flechil
faicte par vne grande providence denature,pour latisfaireà la commoditéde la hau-fēr les cuiſ
teur:car autrement il cuft fallu des eſchellesou eſcabelles à l'homme pour le charger.ſes
ricrede dere
comm
! Il y en a qui n'ont qu'vne boſſe ſur le dos,qui ſont d'Afrique ou Arabie.Il y en a d'au celles de
tres qui en ont deux,qui ſont amenez d'Alie & Tartarie :les vns ſont grands,& bons deuant.
à portergrande charge:les autres petits,propres à faire iournce,comme nousfaiſons
furnos cheuaux.La viande qu'ils aimentlemieux ſontles féucs,& ne leur en fautque
quatre poignees pour les contenter tout vn iour.C'eſt la plus grande richeſſe queles
Arabesayent,cellement ques'ils vouloient monſtrer quelqu'un d'entro eux eſtre
opulenc & riche,ilsne dilent point , Vn tel a tant de mille cicus vaillant, mais bien
C diront ils,Il a tant de cent,ou mille chamcax.Le grand Turc ( comme dit Theuer)
a vn Capitaine,qui a ſous luy nombre d'eſclauesMores & Chreſtiens , quia le ſoing
desChamcaux,leſquelsſont penſez,froccez & eftrillez par leſdits eſclaues. Et me ſuis
laifledire,cedit Theuer aux Arabes, Mores , & à quelquesmarchandsIuifs, qui
eſtoient du temps que Sultan Selim premier du nom viot en Egypte,pour allieger &
prendrelavilledu Caire , qu'il auoit pour le moins ſoixante mille Chameaux , & vn Lim. 6. ch .
grand nombre de Mulers.Ec l’Eſcuriedu grand Seigneur,qui eſt fort ſuperbe àcauſe 7.
du grand nombre des plus beaux Chameaux qui foient au monde. Leſeigneur du Tom. I. de
Hallan hiſtoriographe,liurc 7.en ſon Hiſtoire de France dit que lesChreſtiensdon .So Coſmge.
nerent vne bataille contre Corbane Lieutenant de l'armec du Roy de Perſe, en la.
quelle demearerent morts ſur la place,cent mille des ennemis , quinze mille Cha.
meaux & lumens. Les deux Hiſtoriographes nous donnent à cognoiſtre quel'on ſe
ferrdeſditsChameauxen paix & en guerre, & qu'ils'en trouuc ynnombre infiny en
Arabic & Afrique.
g iij
74 Le ſecondliure ,des Animaux ,
Figured'un Chameau d'Afie , ayant deux boſſes ſur ledos. A

Les oiſeauxontmonſtréaux
CHAPITRE
hommesà
XIX
chanteren muſique. C
.

es Roſſignols ſont chantres forç excellens, feignansà former la voix


humaine : ils gringotent & deſgorgent ainſi que peut faire le plus par
L Fait Chantre du monde , en ſorte qu'on dit par excellence. Il chante il
fe deſgoile,ilgringote comme vnRoſſignol:& partant quand les hom.
mes veulent rendre vne belle harmonie par leur chant, ne ſont-ils pas
contraines de contrefaire leurs yoix, & d'emprunter celles des beſtes brutes ? Et par
tant les oyſeaux ont bien l'auantage par deſſus les hommes:car nature leur apprend
à chanter ſans labeur , & ne leur a point fallu tirer les oreilles à l’eſcole de Muſique
pour leur apprendre leur chane , comme les Chantres les tirent aux enfans auſquels
ils les fonc longues comme celles des aſnes. Ils diſcerncnt & cognoiſſent leurs voix
par certame cognoiſſance qu'ils ont. Il ſemble aufli qu'aucuns animaux parlent : 8
auſſi apparence de rire eſt veuë en cux, quand en blandiſſant des oreilles , ilsretirenc
D
les nizeaux,& regardent doucement. Cobien que l'homme parle autre langage que
les beſtes, toutesfois la voix & le langage quieſt donné aux beltes, leur ſert autant en
leur endroit , que celuy quieft dõně aux hommes.Car toutes les beſtesd'vne eſpece,
de quelque pays qu'elles ſoient,s'entendent l'vne l'autre :ce que nous ne pouuons di
re des hõives.Carily a autát de differéce de lágage entre eux , non ſeulemét qu'il y a
de diuerſes natiðs,mais autár qu'il y a de villes & de villages ,tellemét qu'à peine l'vn
L'bine 67 peut entendre l'autre ;mais ſemble, quand les hommes depaïs eſtrange ſe recontrent
fort I'vn avec l'autre, qu'ils ſoient ſourds & muets:car ils ne peuuent parler le langage,par
die es elon lequel l'vn entède l'autre.Parquoy autátleur profice parler,cómes'ils eſtoiét muers,
ué ſe trou-& celuy qui l'oir,n'entend nõ plus que s'il eſtoit ſourd Or que ce ſoit vray, cõbien de
uits en pays fois nous trouuons-nousfort eſtonnez, quand nous paſſons par des païs eſtranges,à
einange. cauſe que nous nepouvons pas demander ſeulemétcequ'il nous faue,nyentendreco
qui nous eſt dit, non plus que les beſtes nous entendent, ou que nous les encendons,
nous ne nous pouvons ſeruir ny des veux,ny des oreilles,ny dela langue,que le Dieu
de nature nous a donnez, mais nous faut parler des yeux,dela teſte, des mains, & des
1

& de l'excellencede l'homme. 75


А pieds,& par ſignes,& mines & geſtes,comme ſi nous eſtiós baſteleurs, & nous faut cõ .
erefaire nosmembres àautre vſage que Dieu les a creez , pour nous feruirau lieu de
langue & d'oreilles.Lesbeſtes ne lont point tantmiſerables:car encores que nous ne
les entendions point , ny elles nous , toutesfois vne chacune d'elles s'entend encores
mieux en ſon cipece,ic ne dis pas ſeulement de diuerſes nations, mais aulli ceux d'vn
meſme pays. Ilſeroitbien neceſſaire que les hommesn'cufſent qu'vn langage, par
lequel ilsſepeuſſent bien entendre les vns les autres. Car quioirroit vn Alleman ,vn
Breton bretonnant,vn Baſque,vn Anglois,vn Poulonnois,vnGrec,ſans les veoir,il
ſeroic fore difficile à iuger s'ils ſont hommes ou beſtes.
Desoiſeaux qui parlent , fublent & fifflent.
CH A P. XX.

B
es Linottes , Cocheuis,Pies ,Corneilles , Chucas,Corbeaux,Eſtour
neaux,Perroquers,& autres ſemblables,parient & chantent, fifflent &
imicenc la voix humaine, & celle des autres animaux. Les Papegaux
Perroquets ſont à louer ſur tous,pour parler , & prononcer les paroles
qu'ils oyent , & ſontfort ioyeux & gais, principalement quand ils ont
1 beu duva... eſt auili vn plaiſir comme ils ſe tiennent du bec,quand ils veulent mon.
ter ou deſcendre. Plucarque raconte,qu'il yauoit vn Barbier àRome,lequelauoit en
ſa boutique vne Pie merueilleulement babillarde, laquellclans contrain &te, mais de
ſon bon gré parloit,ſi e'le oyoit parler les hommes,& córrefaiſoit toutes beftes qu'ela
le pouuoit ouyr,meſme le ton destabours Auſtes, & trompectes, & autres inſtrumens,
& nedelaiſſoit rien qu'elle ne s'eſtudiaſt à contrefaire & imiter. On a veu des Cor
beaux parler & chancer des chanſons comme les hommes , voire meſmes de Pſeau
mes d'vn aſſez long traict.Macroberaconte ceſte hiſtoire plaiſance d'vn Corbeau. Il
dit que quand Auguſte Ceſar reuint de la guerre contre Marc Antoine , entre ceux
quiluy venoient faire feſte, & dire la ioye de ſa vi&o.re , il s'en crouua vn qui tenoit
vn Corbeau,auquelil auoit appris à dire parolles , qui valenc autant que ſi nous di
С fions:Dieu te garde Cæfar Empereur viétorieux. Auguſte eſtant eſmerueillé de cet
oiſeau tant ſeruiable, l'acheta mille pieces d'argent. Pline & Valere ont eſcrit entre
les prodiges , qu’ontrouucles bæufs & aſnes auoir parlé. Il y a encores beaucoup de
choſes à eſcrire de la nacure des animaux,quiſeroient trop longues à raconter : mais
Ariffore,
ilſuffira d'auoir recicéen brefce que ces grands perſonnages,comme
veritablem
Ariſtote , Pla. Plat
quece ne plineon ,Plu
ton,Plutarque,Pline,nousont laiſſé par eſcrit. Er ent ic croy ,
ſont par fables,& qu'il n'en ſoit quelque choſe, &qu'ils n'en ayent eu quelque expe. Farque,
rience, ou bon teſmoignage. Car puis qu'ils ont eſté hommes ſçauans, & de grande grandsPhi
anchorité & renom , ilnenous faut pas eſtimer qu'ils ayent eſcrit à l'auenture pour ſe lofophes,one
fairemocquer d'eux,fçachans bien que leurs eſcrits ſeroienc bien examinez par plu . «fcrue dece
fieurs hommes de ſçauoir ,qui auronc experimenté les choſes deſquelles ils onteſcrit.fte maliere.
Parquo y il nenous fautpas reietter comme fables tout ce quen'auons pas vcu, & qui
nous eſt nouueau .
Del'Antipathie & Sympathie. CH A P. XXI.

D Pres auoir deſcrit lanature des beſtes, il m'a ſemblé n'eſtre hors de pro
pos mettre icy certaines choſes remarquables , qui ſe rrouuent entre
icelles touchant leur ſympathie & antipathie : c'eſt à dire qu'ellesont v
ne certaineamitié & inimitié , non ſeulement eſtans en vie , mais auſſia
!
pres leur mort , par vne occulte & ſecretce proprieté ; au moyen dequoy les ynes ſe
cherchentles autres ſe fuyent, autres ſe fontguerremorcelle, nedemandans que la
fuïne des vnes des autres. Et pour preuue dece, le Lion prìnce des beſtes, quieſtle
plus fort, & de plus grand cæur que toutesles autres , & combien qu'il ſoit auſſi fier,
& plein de grande animoſité & fureur, rugiſſant & cruelcontre les furieuſes& terri
bles,neantmoinsıl a vne peur merueilleuſe du coq ,comme nousl'auosdic cy -deffus.
Carnon ſeulernene ille fuit en levoyant, mais auſſi en leſentant de loing, ou l'oyanc
chanter.L'Elephancàyneſemblable peur du pourceau auſſi, ayát vne telle haineaux
fats& ſouris,que s'ilapperçoit ſa paſture eſtre touchee ou ſentie d'iceux,ilnela vou
dracoucher. Le Rhinoceros & l'Elephant ont vne guerre mortelle,lequel Elephant
76 Le ſecond liure , des Animaux ,

eſtant en furie ,la remer , & s'addoucit ayant veu & apperceu yn Mouton.Lecheuala A
telle horreur & inimitié , & crainte du chameau , qu'il ne peut ſouſtenir ſa prelence.
Le Chien hait le Loup , le Liéurele Chien : la couleuurecrainc l'homme nud , & lc
pourſuit eſtane veſtu .L'Alpica vne perpetuelle guerre contre le Rard Inde, lequel ſe
barbouille, couure & enduit de limon de terre graſſe,puisle ſeiche au Soleil : & eftanc
ainti arméde pluſieurs cuiraſſes deterre,il marche au combat, eſleuant la queuë, pre
ſentát touſiours le dos iuſques à ce qu'ilaye eſpié la comodité de ſe ietter de trauers
à la
gorge , ce qu'il fait pareillernent au Crocodille , comme nous avós die de l'Afpic.
LeLezard verd eſt ennemy iure & capical duSerpent , & grand amy de l'homme,ainſi
que par pluſieurs belles hiſtoires & diſcours on le pourra veoir & cognoiſtre en liſaat
vn Dialogue eſcrit parEraſme de diverſes ſympathies & antipachies depluſieurscho

Antoine ſes, lequeldialogue le trouue imprimé auec l'harmonie du Ciel & de la terre , n'a

Mizauls. Gueresmiſe en lumiere par Antoine Mizaut, homme de grande recherche & erudi
tion.lly a vne grande inimitié & contrarieté entre l'Homme & le Loup , laquelle ſe 2
declare en ce que ſi le Loup void l'Hõme , premier que l'Home le Loup,il luy fait per
dre la voix , & l'empeſche decrier.La Beletre voulanı faireguerre à ſon ennemylar
pic ,quieft vne dangereuſe clpece de Serpét,le premunit & arme deuát toutes choſes B
de l'herbe appellée ruë. Le lingea vne linguliere frayeur , crainte & horreur de la
Torcuë,ainſi qu'on le pourra facilement cognoiſtre d'vne plaiſance hiſtoire traietee
au Dialogue d'Eraſme,cy. deuant allegué . Comme auſſi la mortelle, & iurce inimitié
qui eſt entre l'Araignee, le Serpent & Crapauc :choſe pleine de plaiſir ,& finguliere
recreation. Il y a pareillemét vne mortelle inimitié entre le Chahuan , & les Corneil .
les de façon qu'il n'oſe ſe monſtrer le jour : & ne vole que de nuiet , faiſant ſes proui .
fions la nuict pour viure le iour.L'Oiſeau de riviere craint ſi forc le Faucon , que s'ille
ſent, & oitſes fonnettes, le laiſſe louuent aſſommer à coups de baſtó & de pierres,plu
ſtolt que s'eſleuer:ceque i'ay veu pluſieurs fois. L'Alouëtte ſemblablement ſe laiſſe
prendre à la main de l'homme,de peur qu'elle a de l'Emerillon ,ou Eſprcuier. L'Aigle
a pour ennemymortell'Oiſeau de proye.'La Creſcerelle de ſon naturel eſpouuente
les Eſpreuiers,de ſorte qu'ils fuyent fa veuë , & la voix . Le Corbeau & le Millan ont
touſiours guerre : car leCorbeau luy rauit touſiours la meilleure viande. Les poullail
les haïſſenc amerementleRenard. Lepetit Poullet n’eſtant à grande peinceſclos ,nc с
craint ny le Cheualny l'Elephant;mais il craint le Milan :de ſorte que l'ayant apper
ceu voire de bien loing, ſoudain court & ſe cache ſousles ailles de la poulle .L'aigncau
& le Chéureau s'enfuyent vers leurs meres , s'ils ſentenc leLoup ,cõbien que jamais ils
nel'ayent yeu.Pareillement il y a vnecelle ancipathic entre le Cerf & le Serpent,quc
ic Cerf paſſantpar deſſus le trou où ſe retire le Serpent,s'arreſte tour court, & parſon
haleine l'accirehors & le cuë .Or quant à l'amicié qu'ont les beſtes enſemble , cela ne
merite eſtre eſcrit ,parce qu'on le veoid ordinairement : les gruës auec les gruës , les
eſtourneaux auec les eſtourneaux,les pigeons auec les pigeons lesmoineaux auec les
moineaux : & ainſi de toutes les autres beſtes de meſme eſpece.
Inimitiez implacables ſont entre les brebis,Moutons,Aigneaux,& les Loups,voire
Inimitié
ſi grandes, qu'apres la mort des vns & autres, fi deux cabourins ſont faicts,l'vn de peau
Apres la
mort. de Brebis , & l'autre de Loup ,eftansſonnez & frappez tous deux enſemblement,bien
difficilement la pourra ouyr le ſon de celuy de Brebis,tát ſont immortelles les inimi.
tiez & diſcordances de cesanimaux , ſoient vifs ou mores. Meſmes aucuns eſtiment,
D
que ſi vn Luth ou autre inſtrument eſt monté de cordes faites de boyaux deBrebis &
de Loup , il ſera impoſſible de l'accorder.Pluſieursdisēt auoir cſprouué, quela tefte ou
queuë du Loup , penduë ſur la mangeoire ou creche des Brebis, ou bie cachee en leur

eſtable , pour la peur & frayeur qu'en conçoiucnt lefdites Brebis, elles ne pourront
manger , & ne feront que ſe mouuoir , & periller, iuſques à ce que tout ſoit dehors.
Il'y a voe grande cótrarieté & inimitié entre les Rats & la Belette, laquelle inimitić
> ſemanifeſte en ce , que ſi l'on adiouſte quelque peu de la ſubſtáce de la Ceruelle d'une
Belette , avec la preſeure pour faire formages, iamais les rats & ſouris n'approche
ront de cels formages , & ne ſe pourront aucunement corrópre. La Linotte haït celle
Hyene be ment le Bruant, que l'on tient pour aſſeuré,que leur ſang ne ſemelle iamais.La Pan
fe d'Egg chere & Hyene one vne figrande inimitié , que ſi les peaux de toutes deux ſont pen .
pre .
duës vis à vis l'une de l'autre,cout le poil de la Panthere cherra, demeurát en foncn .
tier celuy de la Hvene : cout ain Gi que l'odit eſtre des plumes & plumages des oiſeaux
mcllez aucc celles de l'Aigle :car elle les conſomme & met à neant,lesliennes demeu
& de l'excellence de l'homme, 77
A rans en leurentier.Vn Taureau farouche & furieux,attaché à vn figuier,deviét doux
& apprivoiſé. Les Eſcarbots meurent à l'odeur des roſes. Sion tire auec lesmains la
barbed'vneCheure rágee au troupeau d'aucres,tour s'arreſtera & lairra la paſture, &
coures deviendront eſtonnees, & ne ceſſerõr de s'eſmarmeller,iuſques à ce qu'õ l'aye
laiſſee. Il ne le trouueſeulementcontrarieté entre les animaux , mais auſlicntre les
plantes.Exempledu Chou & dela Vigne. Le chou & la vigne ſont pernicieux l'vn à
l'autre,& leur combat eſt digne d'eſtreconſidere. Car combien que la Vigne par ſes
tendrós ou caprcoles tortues ,ſoit accouſtumée d'embraſſer toutes choſes,ncátmoins
1
elle haic leChou,tant grande eſt l'inimitié qu'elle porte à ceſte plante,queſeulement
1 prés de ſoy,elleſeretourne en arriere ,cõme li quelqu'vn l'auoit admoneſtee, que ſon
: ennemy fult prés d'elle.Au contraire aime les Ormeaux & les Peupliers ,voire ſiheu
reuſement,qu'ellecroiſt & ſe faiet plantureuſe aupres d'eux :car elle eſtant prés d'eux
eſpart ſes tendrons montant en haut, & embraſſe comme liens les branches , & ainſi
s'eſgayant apporte foiſon de raiſins. Ily a vne concubination de maile & femelle aux
B
choſes vegetatiues,comme toutes ſortes de plantes & arbres, ce qu'on veoid s'ils ſont
plantez l'vne prés de l'autre, ils font grandedemonſtration de leur parurelle amitié:
carles branches du maſle ſe iettent hors de leur lieu naturel pour s'enclineryers ſa fe .
melle,comme s'illa vouloit embraſſer.Ceſte merueilleuſe amitié d'arbres ſe monſtre
fore apparente en la Palme plus qu'en nulle autre : car ſi la Palme femelle eſt plantee
prés ſon maſle,les branches & fueilles d'iceux s'entremellent & ioignent ſi eſtroicte.
ment enſemble, qu'à peine on les pourroit diſioindre ſans les rõprc.Les Citroüilles La cirroit
aymér l’eau,en ſorte que ſi on mer vn vaiſſeau ſous leur fruict, eſtantpēdu à leurtige, le dime
il s'allongera cuidant aller à l'eau:ce qu'on veoid iournellement à ceux qui ſont cu. l'eau .
rieux,mettre des vaiſſeaux remplis d'eau deſſous le vin:quand la grappe commence
à Acurir . Il lemble auſſifleurir , lors qu'il eſt en vn voire. Les Aulx ou Oignons , &
generalement toutes plantes ayant teſte ,lors que les autres commencent à germer
dedans la terre,meſmes pendus en l'air,germent & ſencét tres-fort,pourucu qu'elles
neloient rances,leiches & pourries.Car la vertu naturelle ,ingeneree, qui eſt dedans
- les vnes & les aucres,alors ſuruient.Dauantage,le Sanglier,leCerf,
C
& lors qu'ils ſont
ed rut,& qu'on en ait mis au falloir long temps auparauant, les faiſant cuire, s'endur
ciſſent &enflent ſi fort dans le pot:qu'iceluyn’eſtát qu'à demy plein ,s'enfuit par deſ
fus, ietrane vreeſcumc de mauuaiſe odeur,de ſorte qu'à peine on n'en peut manger.
Lapeau de Bouceſcorchee , ſeiche & conroyee par lestanneurs ſens le bouquin en
la faiſon que les Boucs ſont en rut, conuerſant auec les Chéures, ainſi commefaid le
Bouc viuanr.Cequidemonſtre vne grande ſympathic & harmonie aux choſes natu .
relles.La diſpoſicið ſeule de ces beſtes peutfaire ceſte ſympathie,& fimilitude de sétir
lapeau du mort,& en vn autre viuant.Parquoy on peut dire que la premiere & prin
cipale cauſe demal ſentir eſt en icelle habitude & temperament du corps : mais l'ac
croiſſement de la cauſe eſt la coïtion & compagnie de leurs femelles. L'onguent
roſat,& eau roſe perdent leur force & odeur au temps que les roles ſont en fleur & vi
gueur,qu'ils auoient auparavantqu'elles fuſſent fleuries, & paruenuës à perfe& ion :Longmens
10fat perd
ce qui ſe fait parvne doleance mutuelle de nature,qui eſt entre les choſes qui ſefont fa fentext
parſympathie.Il ya pluſieurs autres antipathies & ſympathies cachees , deſquelles la au temps
D conie&ture & penſeedel'humain entendement nepeut fureter & declarer les cauſes, que les rod
nylescomprendre: car elles giſent enſeuelies enl'obſcurité de nature, & en vne ma- ſesfoneflens
jelté cachee.Au moyen dequoypluſtoſt on lesdoit admirer, que rechercher la con-ries.
fufion: car elles ſontſeulementcognuës de l'incomprehenſible puiſſance de la gran
deur deDieu.
Que diray- je plus ? Entre les plantes & animaux ſont lesZoophytes , c'eſt à dire,
plantes beſtes,quiont ſentiment & mouuemét,tiransleurs vies par leurs raines atca.
chees contreles pierres,commeles Eſponges. Entre les animauxterreſtres & aquati
quesſont lesAmphibies:cõmeſont les Bicures,Louſtres,Torcuës,Cancres,Eſcrevif
ſes,Camphur,& Crocodile. Entre les aquatiques & les oiſeaux,ſontles poiſſons vo
lans:& entre les autres beſtes & leshommes ſont les Singes:lesCorails ſont plante la
pidifices,quiproduiſent racines & branches.

1.
3 e
78 Le ſecondliur , des Animaux ,

А
Comme l'homme eſt plus excellent ebparfaict que toutes les beſles enſemble.
>
CHAPITRE XXII .

Aintenant nous viendrons à deduire la grande excellence de l'Hôme , &

que ce grand Dieu, fa &teur de l'Vniuers,eſt grandemenc à admirer,quin'a


point aciribué à l'Homme certaines commoditez, come il a faict aux ani
UNO
M
maux,ſçachát que la ſapience luy pouuoit rédre ce que la codicion de Na
turc luy auoit denié.Carencores qu'il viennenud ſur terre, & ſans aucunes armes (ce
quin'aduient aux beſtes qui ont cornes,dents,ongles,griffes,poil,plume,& eſcailles )
il eſtpour ſon grand profit & auátage,armé d'entendemēt ,& veſtu deraiſon ,non par

dehors ,mais par dedās : a mis ſa defence,no au corps,mais en l'eſprit:de ſorte qu'il n'y
1
a grádeur,ny force des beſtes,ny la fermecé de leurs cornes , ny lagrăde maſſede chair
& d'os,dequoy ils ſont cõpoſez, quipuiſſe empeſcher qu'ils ne ſoiệt dõptez , ou prins ,
& affubiectis ſous la puiſſance & authorité de l'hõme.En luy ſe trouue religio , iuſtice,
prudéce, piecé modeſtie ,clemence , vailláce, hardieſſe ,foy , & relles vertus , bien autres B

& differentes, qui ne ſont trouuees aux Animaux ;ce quiſera declaré preſentement.
Tout ce que nousauons eſcrit de la nature des beites,n'eſt pour donner matiere aux
Nacuraliſtes,Epicuriés & Atheiſtes, qui lone sās Dieu , de cóclurre par ces raiſons, qu'il
n'y a point de difference entre les hommes & les beſtes :mais pour monſtrer à l'home
qu'il n'a matiere de ſe glorifier qu'en Dieu . Car quelque choſe que nous ayons dicte
des beſtes & de l'homme, il n'y a point de comparaiſon de luy à elles.Car l'hõme tout
ſeul, a en ſoy touc ce qui peut eſtre excellent entre tous les autres animaux , & eſt plus
parfait que nuld'eux .Carpuis qu'il a eſté creé à l'image deDieu ,il n'eſt poſſible, quel.
que abolition qu'il ait en luy de ceſte image, qu'iln'en ſoit demeuré quelque traict &
rayon de la puillance, ſageſſe, & bonté de Dieu ſon Createur . Et iaçoit qu'il ſoit vne

creature fort debile & foible ,au prix de certains animaux ,toutesfoisils n'ont puiſláce
ne force digne de căparer à la fienne,fi nous en voulons parler à la verité. Car Dieu a
imprimé en luy vn cel caractere de la puiſſance, qu'il n'y a nul de tous les autres ani
maux qui ne le craigne & quineluyſoient ſuiers & cõtraint de luy obeyr . Et nonob. с
ftant qu'il ſemble par les choſes deuant di&tes que la raiſon ait eſté donnee à tous ani
maux,toutesfois,comme ditLa &tance,elle a eſté donnée leulement pour la conſerua
tion de leur vietorporelle ,,mais à l'homme , pour viure eternellement . Et pource
que celle raiſon eſt parfaite en l'Homme, elle eſt comme fapience & ſageffe , qui lo
faict excellencen ce,qu'à luy ſeul eſt donné à entendre les choſes divines :de laquelle
choſe Ciceron a eu vraye opinion , diſant, qu'en tous les genres & eſpeces d'animaux
il n'y en a aucun , excepté l'Homme,quiait cognoiſſance de Dieu . Ec luy a donné par
grádcexcellence la raiſon ,la parolle & les mains,& par ces prerogatiues , l'a ſeparé des
autres animaux , & doué d'vne nature pl' ſinguliere, quepas vne des autres creatures .
Il a trouué premieremét par raiſon les choſes plus neceſſaires. Il a impoſé nõ à toutes
choſes, inuété les lettres,dreſſé les arts mechaniques & liberaux , iuſques à meſurer la
terre , & la mer,reduire par inſtruction la tres -ample maſſe du ciel , & la varieté & di
ſtination des altres, & l'entreſuitte des iours & nuiets,mois & ans,continuellemét re
naiſſans,& l'obſeruation du cours des eftoiles ,& leur pouuoir q'uelles ont icy bas . Il a D
eſcrit les loix , & generalement forgé tous les inſtrumés des artsA
. redigé par eſcrit les
memoires, & fpeculacions des Philoſophes, tellement que par ce moyen nous pou
uons maintenant parler & diſcourir auec Platon ,Ariſtote , & autres anciensaucheurs.
L'homme ale corps deſarmé. . CH A P. XXI11 .

R comme l'homme a le corps deſarmé, & defpourueu d'armes , aullia if


l'ame deſtituee d'arts . Et en recompenſe de ce qu'il eſt nud & deſarmé, il
a la main ; & en lieu que ſon ame n'a aucun art, il a la raiſon & parole : &
de ces crois eſtant garny, il arme ſon corps , le couurant & remparant en
toutes choſes , & enrichiſt ſon ame de cous arts & ſciences. Or s'il auoit quelques
armes naturelles , il auroit touſiours celles là ſeules : ſemblablement ſi de nature il
ſçauoit quelque are, iln'apprendroit iamais les autres . Pource donc qu'il luy eſtoic
trop meilleur s'ayder de toutes armes,detous arts, Nature ne luy a donné ne l'vn ne
l'autre: Parquoy Ariſtote dit de bonnegrace , la main eſtrel'inſtrument qui ſurpaſſe
tous
1 & de l'excellence de l'homme , 79
A cous autres inſtrumens. Et ſemblablement quelqu'vn à l'imitation d'Ariſtote, pour.
roie dire:la raiſon cftre vo art,qui ſurmonte tous les arts. Carainſi que la main eſt in
ſtrument plusnobleque tous inſtrumens, pource qu'elle les peut faire, manier , &
mettre en beſongne, combien qu'elle ne loit aucun des inſtrumens particuliers:
auli la raiſon & la parole n'eſtant aucun art particulier , les comprend natureliemene
cous. A ceſte cauſe, la raiſon eſt un arc quiaduance tous les aucres. L'Homme donc
ſcul entre tous les animaux, ayant en ſon ame yn art plus excellent que tous autres, à
ſçauoir,la raiſon àbon droictpoſſede vn inſtrumentplus noble quetous autres, ſça
voir , la main .
Etainfil'Homme animal ſcul diuin entre tous ceux qui ſont en terre, pour toutes L'homme à
armesdefenfiues,a lesmains quiluy ſontinſtrumens à tous arts, & non moinscon-laquelleex
raiſon par
ucnables en guerrequ'en paix. Il n'a cu beſoin de cornes naturelles, comme le To cede tous
reau,ny de defences commele Sanglier, ny d'ongles comme le Cheual , ny d'autresAnttes and
B ainſi qu'ont les beſtes: car ilpeut prendre auec ſes mains des armes , qui ſont marito
armncs ,
meilleures , comme yne picque, vneeſpee,vne hallebarde , vne percuiſane, quiſont
armes plusaduantageuſes, qui coupent & percent plus aisément que les cornes, & les
dents. Il n'a cu auſſibeſoin des ongles comme le Cheual: car vn caillou ou vn lcuier
aſſenent& froiſſent mieux qu'vn ongle. En outre on neſe peut aider de la corne, ou
de l'ongle,que de pres:mais leshommes ſe ſeruentde leurs armes de pres,& de loing,
commed'vne hacquebure & d'vne fonde & fleſche, & d'vn leuier plus commodė.
menc qued'unecorne. Voire mais, dirà quelqu'vn , le Lion eſt plus viſte & leger que
l'Homme. Et bien que s'enſuic il pour cela : l'homme auec ſa main & ſa lageſſe, qui
aura domtéleCheual,animal plus viſte que le Lion, maniant le Cheual, ilchaſſe &
pourſuit le Lion : en reculant & fuyant il ſe ſauuede deuant luy :cſtant aſſis ſur le dos
du Cheual,comme en lieu haut & releué, il choiſit & frappe, & cuë le Lion d'vnc .
picu,ou d'vne percuiſane,ou d'une piſtole,ou aucre armequ'il voudra choiſir.Et par
tantl'homme à tous moyens pour ſe defendre des autres animaux:il ne ſerempare L'homme
point ſeulement d'un corcelet,mais d'une maiſon, d'une tour ou remparc.Il fait tou tons moyens
tesarmesauec ſes mains: il ourdic yn habillement, il lance & tire yn rets , & vn filer àpour le deg
pelcher, & faic toutes autreschoſes plus commodement que les animaux, &par lafendre.
C puiſſance qu'il a euë de Dieu ſon createur, il domine ſur les animaux qui ſont en ter
re. Il charge l’Elephant , & le rend en ſon obeyſſance, mais auſſi ceux qui ſont en la
mer,commecet horrible monſtre & grand , la Baleine ,la tuë & l'ameine au riuage.
Pareillement ceux qui ſon en l'air : car le volnoſauue l'Aigle du traict de l'homme,
combien que de loing ilierte ſa veuë. Ec pour le dire en vn mot,ilne ſe crouue beſte,
tant ſoit elle armee de forces de corps ou pourueuë de ſens, quel homme ne vienne
audeſus.Ce qui eſt prouué par le grand Poëte diuin, quand ildir :
Regner le fais ſur les vuures tant belles Pleast. &
Detes deux mains comme ſeigneur d'icelles :
Tu as de vrayfans quelqueexception,
Mis fous ſes pieds tont en fubiečtion.
Comme Dieu s'eſt monſtré admirable en la creation de l'Homme.
CHAP X XIV.
1 D

parez enlelaVprouidence
s'eſtmonſtréadmirable & excellenten la creation de l'homme,&
autour d'iceluy. Caril ne la manifeſté ſigrande aux
beſtes brutes , leſquelles il n'a creées ſinon que pour ſeruir l'homme,
1
Nous pouuons bien eſtimer combien elle eſt plus grande autour des
hommes , & quel ſoing il en a dauantage , & de quels donsil les a doüez
plus quelesbeſtes brutes,veu qu'illes a creez les plus excellensde tous les animaux:&
comme ſon chef-d'auure entre iceux , il a voulu faire reluire ſon image, comme vne
image de la maieſté diuine, incomprehenſible à l'eſprit humain. Parquoy il n'a pas
1
eftéſans bonne cauſe appellé d'aucuns anciens Petitmonde , à raiſon qu'en iceluy, Architecte
Le grand
. commeaugrand móde , toutes choſes reluiſent, par la puiſſance, bonté & ſageſſe de par une
Dicu.Dica creantl'homme, a fait unchef-d'ouure d'une plus excellente perfe&tion { Tes-grande
quetout le reſte, à cauſe des graces qu'il luy a donnees. Quelques ſagesd'Egypteap- admiration,
pellerent l'home Dicu terreſtre,animal diuin & celeſte ,meſſager des Dieux,ſeigneur acomposé ce
des choſes inferieures, familier desſuperieures, & finalement miracle de nature. petit modern
h

!
80 Le ſecond liure , des Animaux ,
A
La cauſepourquoy les hommes neprefagent comme les animaux.
CH A PITRE XXV .

A cauſe pourquoy les hommes n'ont del ſentiment, pour apperceuoir


& preiuger la mucation du cemps & les fucures tempeſtes & orages de
l'air, c'eſt parce qu'ils ſont doüez de la prudence naturelle, par laquel.
le ils peuuent venir à la cognoiſſance des choſes par leur certain iuge
Les beſtes ment. Ilsne ſuiuent pas ‫ܐ‬la diſpoſition de Pair , & du temps , comme
n'ont point les beſtes : car ils pourront eſtre ioyeux en temps trouble & tempe
de ingemene ſtueux, triſtes en beau temps & clair,ſelon leurs apprehenſions, & affections, & l'oc
currence de leurs affaires.Mais les beſtes ſont elmeuës à ioycou à triſteſſe,non pas par
certain dan
alleuré. iugement qu'elles ayent, comme les hommes ; mais ſelon que le temps eſt propreou
mal conuenable à leurs corps , & ſelon que maintenant il ſe relaiche & ouure en
elles, ce quieſtoit auparavant clos& ferré en leurs corps : & par ainſi elles fuiuent B
la diſpoſicion de l'air & du temps , & donnent ſigne de ce qu'elles en ſentenc. Ec quát
à ce queles hommes imitent quelquesfois la voix des beltes, cela ne leur doit eſtre
reputé à deshonneur , mais à leurgrandelouange,ayant pouuoir quand il leur plaiſt
de contrefaire lesvoix de toutesſortes d'animuax. Car

Ils glapiſſent comme Regrards, Ils raucoulent comme Colombes ,


Ils miaullent comme les chats, Ils brament comme les Cerfs,
Ils grongnent comme Pourceaux , Ils trompettent comme les Grues,
Ils magiſſent comme Toreaux , ils puputent comme les Huppes ,
Ils muglent comme Balaines, Ils gazouillentcomme Hirondelles,
>
Ils hanniſſent comme Cheuaux , Ils brayent comme les Afnes,
ils croüaillent comme Corbeaux , Ils bellentcomme les Cheures,
Ils gringottent comme Roſignols, Ilsfiflentcomme Serpens,
Ils hurlent comme les Loups , Ils huyentcomme Millans,
Ils gemiſfent comme les Ours. Ils coaxent comme Grenouilles,
Ils rugiſſent comme le cry des Lyons, Ils clabaudent comme Limiers,
Ils grefillonnent comme Grillons , Ils claquetent comme Cigalles,
Ils caquettent comme Cicognes , Ilsbourdonnent commeles Mouſches,
ils coqueliquent comme les Coqs , ils abbayent comme les chiens ,
Ils couffint comme les Poulles , Ils crocaillent comme les Cailles.
Ilspiolent comme Poullets , Leſeigneurdu Bartas au cinquiefme iourde la
Ils cageollent comme les Gays , Sepmaine contrefaict le chant del’alouëttechan
Ils cacabent comme Perdris , tant, Tire,lire,alire,& cireliranttire,adieu,
Ils baricquent commeElephans, adieu, adieu, adieu.
Ils iargonent comme les lars ,

L'homme Et pour le dire en vn mot les hommes contrefont toutes le voix des animaux. Et
apprivoiſe quantà ce que les oiſeaux chantent,ce lan'eſtrien au prix des Muſiciens: leſquels rc
les belles ſonnans enſemble ,fontvne voix fort melodieuſe & plaiſante à ouyr,voire aux oreil. D
fawwage
cruelles.
s & les des Rois & Princes, & plus harmonicuſe ſans comparaiſon ,quetous les oiſeaux
ne ſçauroient faire enſemble. D'auantage, l'homme appriuoiſe, non ſeulement les
beſtes domeſtiques,mais auſſi les fauuages, & les pluseſtranges de toutes, comme les
Elephans, Lions, Ours, Tigres, Leopards, Pantheres, Crocodiles & autres.
& excellence de l'Homme, 18
A
La figure d'un Crocodile s'eſt icy repreſenteer

1 ‫ال‬ ‫شغالات‬

‫سنگیالکسعلی‬
n
e
m
B

Plutarque teſmoigne que les Crocodiles qui ſont beſtes inhumaines & tres-cruela
les, necognoiſſent pas tant ſeulement la voix des hommes qui les appellent , mais
aulli permettent& endurent qu'ils les manient : & quiçlus eltovurent la gueulle,&
ſouffrent que on leur touche aux dents, & queon leur eſſuye de quelque linge ou au
cre choſe. Ec combien que nacure ait donné aux beſtes quelque cognoiſſance de
Medecine, toutesfois c'eſt bien peu de choſe de tour ce qu'elles en ſçauent, au prix
decequ'vn homme ſeul en peut ſçauoir, pour peu qu'il ait eſtudié en Medecine, &
pourle peu d’experience qu'il en puiſſe auoir. Il eſt vray qu'elles n'apprennent pas
C leurs Medecines des hommes , d'autant qu'elles n'ont l'encendementcommeiceux.
Or quant à ce qui eſt eſcrit touchant la religion des Elephans , leſquels à ce que l'on
en dit adorenc le Soleil & la Lune , ce n'eſt pas pour aucune cognoiſſance qu'ils ayent Les belles
de la diuine Maieſté . Car à parler proprement, elles n'en ont aucune qui procede de n'ont nulle
lumiere & railon qui leur ſoit donnce pour eſtre capables de telle cognoiſſance, la- cognoiſſance
quelle a eſté baillee au leul homme.Eccombien que l'Elephant ſe tourne vers le So. de Dieu.
leil, & qu'il ſemble qu'ill’adore, finel'adore il point par intelligence, ny foy, ny par
raiſon qu'ilayeque le Soleil ſoit leur Dieu , & qu'ils ſoient tenus de luy porcer hon.
neur & reuerence:mais le font par vn inſtin & & mouuement de nature, ſelon qu'ils
ſetrouuene diſpoſez naturellement par la conuenance que le Soleil a auec leur na.
eure,& par le bien qu'ils en ſencent,ſanspenſer neantmoins à ce qu'ils font,ſinon ain.
fi que nature les pouſſe, ſans religion qui ſoit en eux. Et pourtantlors quenous leur
attribuons religion, nous ne la prenons pas en la propre ſignification, mais parvne
maniere de dire , & par abuſion de langage, & par comparaiſon , à cauſe de la limilitu .
D
de & façonde faire qu'ont les Elephans.
L'homme a la dexterité d'apprendre toutes langues.
1

CH A P. XXVI.

OVS voyons l'hõme auoir celledexterité, qu'ilneſçaic ſeule


ment pas apprendre les diuers langages qui ſontentreceux de ſon
eſpece, mais auſſi apprend ceux des oiſeaux :ce qu'on void par ex
perience d'aucuns bons compagnons, qui contrefont couschants
! des oiſeaux, & la voix de toutes beſtes, comme nous auons dit cy
deffus, & entendēc lejargon de pluſieurs autres animaux.Ec pour
verifier cecy: A pollonius Philoſophe,quieſtoit excellent en celte Hiſtoire de
: ſcience, vniour eſtanc en vne grande compagnie de ſes amisoù il regardoit desPaf: Apollonius,
fcrcaux ,qui eſtoienc branchez ſurvn arbre,auſquelsil vint vn autre d'ailleurs, qui
hij
s
82 Le ſecond liure , des Animaux ,

commença à gazoüiller au milieu d'eux , puis s'en va , & tous les autres leſuiuirent: A
Apollonius ayant veu cela ( & tous ceux qui eſtoient auec luy ) dit,ce paſſereau a an .
noncé à les compagnons qu'vn aſne chargé de froumont , cftoit tombé pres la porte
de la ville , & que le bledettoit versé en terre: & ceux qui ouyrere cela , voulurent ex
perimencers'ildiſoit vray , & allerent ſur les lieux , où trouuerent la choſe comme il
auoit dit , & quant & quant les paſſereaux , qui eſtoient venus pour manger le bled .
Os quant aux Corbeaux , Pies , & autres oiſeaux, quiparlent pour delguiſer leur
ramage , & leur gazoüillemét, & fifflement , & lon de voix humaine , ils ontbié -coſt

dic tout ce qu'ilsiçauenc, & qu'ils ont apprins de long temps . Ec quoyqu'ils ſçacheng
gazoüiller , ils demeurent couſiours beſtes brutes fansrailon. Mais à l'homme, la rai
ion luy a eſté donnce naturellement de monter plus haut que celles des beſtes ,deſirão
couſiours ( cauoir , & ne le contentant point ſeulement d'auoir la cognoiſſancedes
choſes qui appartiennent à la vie preſente: mais s'enquiere des choſes plus hautes , &
des celeſtes & diuines : qui eſt vn certain argumêt que la nature de l'homme , & l'ame
qui luy eſt donnce ,eſt bien differente à celle des autres animaux ,laquelle ne peut nul
lement eſtrecognuë. L'homme a en ſon ame trois principales puiſſances neceſſaire.
B
ment concurrentes à coute loüable & vertueuſe a & ion : à ſçauoir l'encendement , la
volonté , & la memoire : vne pour comprendre ce qu'il faut faire, l'autre pour l'execu.
Les fens
l'entend ter : & la memoire comme fidele tutrice, qui gardece qui a eſté conclud & arreſté en
ment ensla l'entendemét . Aucuns Philoſophes l'ont appelleele threſor de ſcience,d'autátqu'el
Deriu de le eſt commc yn cabinet, auquel eſt gardé ce que nousapprenons& voyons. Ces
cognofre ca puiſſances & perfe &tions,ſontgraces ſingulieres & dons ſpeciaux, prouenans de la fa
de suger. geffe diuine du ſainą Eſprit , qui ne ſont donnces aux beſtes: leſquelles puiſſances ſe .
ront cy apres plus amplementdeclarees au livre de la generatió , parlant desfacultez
de l'ame.Ec pour concluſion l’hõmeeſt ingenieux , age,ſubtil,memoratif,plein de co
ſeil,excellent en condition ,qui a eſté fait du ſouuerain Dieu, & luy ſeul entre cous les
animauxa eſté orné de raiső & d'intelligéce,de laquelle tous animaux ont eſté priuez,
& en luy rcuit vnc image de l'eſſence diuinc, qui ne ſe trouuc en nulle autre crcature.

с
Sentence d'Euripide
.

L'homme a bien peu de force corporelle ,

Mais la prudence & raiſon naturelle


Va iuſqu'au fond de la mer : captiuant:
Sur terre außy s'eſtend iuſqu'aux epeces,
on plusy a de rufe & de fineſſes .

1
83
A

Table des Chapitres du troiſieſme 1

Liure de l'Anatomie.
IM luiſion du corps humain . Chapitre ja
B
Enumeration des parties contenantes , auec l'inſtruction pour commencer
la diſſection anatomique. Chap. ij.
Du cuir. Chap.ij.
Du vray cuir. Chap. iij.
Dupanicule charneux. Chap. v.
De la greje. Chap. vj.
De la tunique commune desmuſcles. Chap uỷ .
Definition du muſcle, & declaration de ſesdifferences. Chap. viij.
Des parties du muſcle. Chap. ix .
Declaration particuliere d'une chacune partie dumuſcle. Chap. x .
Des muſcles de l'Epigaſtre. Chap. xj.
De la ligne blanche ,& du Peritoine. Chap. xij.
Del'omentum, ditdu vulgaire Coëffe, & des Arabes Zirbus. Chap. xiij:
Du ventricule ou eſtomach. Chap. xiiij.
с
Des inteſtins. chap. xv.
Du Neſentere. chap.xvj.
!
Des glandules en general, d. Pancreas. chap xuij.
Dufoye. chap xong.
De la veßie du fiel. Chap. xix .
!
De la ratelle. Chap. xx.
De la veineporte,&diftribution d'icelle. chap.xxi
Del'originede l'artere,dodiuifion duramean defcendantauxpartiesnaturelles. Chap. xxij.
Desnerfsdiftribuez aux parties naturelles. Chap. xxiij.
Inftrullion pour ofter lesinteſtins. chap. xxiiij.
Origine da diſtribution dela veine came deſcendante. Chap. xxv.
Des reins. Chap. xxvi
Des vaiſſeaux ſpermatiques. Chap. xxvij.
Des teſticules.
D
Descorpsvariqueux ,qu’onappelle Paraftates::desvaiſſeaux eiaculatoires &corpsglanduleux
nommez Prostates. Chap. xxix.
|
Des vaiſſeaux ureteres. Chap. xxx .
1 De la veßie. Chap. xxxj.
! De la verge virile. Chap. xxxj.
De lamatrice & parties appartenantes à icelle. chap. xxxiij.
De la matrice particalierement. Chap. xxxiiij.
Destuniques qui contiennent l'enfantau ventre dela mere. Chap.xxxv.
1 D# nombril. Chọ. xxxvi.

h üj
84

LE TROISIESME LIVRE

TRAICTANT DE L'ANATOMIE DE

TOUT LE CORPS HUMAIN , ILLVSTREE DES B

figures de chacune partie d'iceluy .

PAR AMBROISE PARE DE LA VAL A V


MAINE , CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy.

P R E F A C E.

VIV ANT l'ancienne. couſtume de ceux qui par cy


deuant ont eſcrit , auant que venir à la declaration des
parcies du corps humain , qui eſt noftre fin pretenduë , nous
declarerons premierement la neceſité qu'il y a de les co
gnoiſtre : Puis l'vtilicé, afin d'inciter le Lecteurà la cognoif. c
Que fert la iance d'icelles : Tiercement , quel ordre il y faut cenir.
cognoſlance
del Anato Quartement , nous dirons que c'eſt qu'Anatomic , en la
detinillant & expliquant les parties de la definition . Quant au premier , il me
ſemble ( lauf meilleur iugement ) celle cognoiſſance eſtre plus que neceſſaire, mef
mement à ceux quidefirent paruenic à la fin pretenduë de la Medecino :qui eſt de
pouuoir conſeruer ( chacun en ſon endroict, c'eſt à ſçauoir le Medecin , Chirurgien
& Apoticaire ) la ſanté preſente de tout le corps, & de chacune de ſes parties : ou
En quoy en chaſſer la maladie . Car comment eſt - il poſible que le Medecin & Chirur
cenffte gien puiſſent conſeruer & garder par choſes ſemblables, la ſanté , laquelle condi.
fansé. ſte au temperament , commoderation & vnion naturelle des parties ſimples pour
la conformation du corps : ou chaffer la maladie laquelle eſt corruption d'iceux,
par eſgal vſage de ſon contraire, s'il ne cognoit le naturel du corps , & par telle co
gnoiſſance combien il eſt eſloigné d'iceluy? & pourtant a tres bien dic Hippocrates
au commencement du Livre de l'Officine du Medecin vulneraire , que le Mede
Hippocido cin & Chirurgien appellez pour guarir vn malade , doiuent conſiderer ſi les choſes
D
sont ſemblables ou diſſemblables , c'eſt à dire, ſi le corps auecques toutesſes parties
n
& actions, reviennent leur naturel en complexion , commoderatio & vnion , ou
non : afin qu'ils puiſſent conſeruer en ſon citat, ce qui retient encores ſon naturel , &
reduire en iceluy ce quien eſt eſloigné . Ce qui eſt confirmé par Galien au commen
En quoy cement du livre desos , quand ildir, qu'il faut cognoiſtre le naturel des os , & conne
confifte gua- xion d'iceux , ſi on veut entendre quand ils en ſont eſloignez pour les reduire en ice.
1 rifono luy . Outre- plus , veu que la guariſon neconſiſte point ſeulement en la cognoiſſan
Pourquoy
ce dela maladie , ains en la ſcience de bien & deuëmentordonner, & appliquer remc.
dimerſes
parties re- des propres,tant à tout le corps qu'à ſes parties, leſquelles quaſi toutes à cauſe de leur
quierent di. diuerſe nature , requierent diuers medicamens : celmoin Galien au commence

wers medi ment du premier Liure des parties malades , & au troiſieſme de la Methode , parlant
cameris. de l'encens. Ic te prie , qui eſt celuy qui pourra bien & deuëment ordonner ſelon
De l'Anatomie 85

1
A l'exigence,cant du tout que de ſes parties, ſansaucir la cognoiſſance d'icelles , qui eſt
acquiſe par l'Anatomie: Le ſemblable pouvons nous dire de l'Apoticaire , lequel
ignorant la ſituation des parties du corps humain , ne pourra bien & devëment, ſelon
l'ordonnance des Medecins & Chirurgiens, appliquer emplaftres, linimens ; cata
plaſmes,epithemes, fomentacions, eſcullons, & autres remedes auſdıres parties ma .
lades, comme aux ſucures du Crane, & parties d'iceluy , à la region du cæur, du foye,
du yenere, de l'elomach ,ſuperieur orifice dudic ventre, de la ratie , des reins , mairi .
ce , veſlie, & generalement de toutes les autres parties qui requierenc tels medica
mens : mais au contraire il commettra de tres grands erreurs, appliquant lus vne par
tie ce qui eſt propre à la voiſine,ou indifferemment à toutes deux, de peur de faillir.
Comme pour exemple, Poſons le cas que le foye ſoit trop elchauffé :& l'eſtomach Rsifort
ou ventricule trop refroidy (ce qui aduiencordinairement:à cauſe que le foye chaud pourquoy
enuoyanc beaucoup defumées au cerucau , cauſe diſtilacions froides ſur l'eltomach ) cenx qui
fi par l'ordonnance du Medecin ledit Apocicaire doit appliquer choſes chaudes à ont be foxe
chiud ont
l'eltomach pour la guariſon , & il l'applique indifferemmér tant ſur la region du foye
B l'eftomach
quedudiccſtomach (ce qu'il pourra faire ignorant leur diuerle ſituation , qui eſt defroid.
l'eſtomach cirant au coſté ſeneltre, & du foye au coſté dextre ) n'augmentera il pas
l'intemperature dudit foye,fansapporter aucun profit à la partie malade , fruſtrát par
ſon ignorance l'intention du Medecin , & diffamant ledic medicament pour l'in .
deuë application ? Parquoy coures ces choſes ainſi conſiderées , il eſt plus que mania
feſte à vn chacun , combien la cognoiſſance de l'Anatomie eſt neceilaire à cous ceux
quidefirent heureuſement, à l'honneur & gloire de Dieu , & à l'vtilité de leur pro
chain , faire la Medecine , Chirurgie , & Pharmacie : à la faveur deſquels nous don
nerons en diuers endroics de ce preſent æuure, figures ,où ſeronc demõltrées les para
ties du corps humain ,les plus neceſſaires d'eítre cognevës. Quant à ſon veilice , il y
en a quatre principales : dont la premiere nous meine & conduit à la cognoiſſance Quatre
whitez de
du Createur ,comme l'effect à la cognoiſſance de ſa cauſe ; ainſi que teſmoigne faint
la cognoiſe
Paul , diſant que les choſes inuiſibles de Dieu ſont manifeſtées & cogneuës par l'in- fance de
telligence deschoſesfaites & ſenſibles. La ſeconde , eſt que par icelle nous auons la l'Anato
C cognoiſſance du naturel du corps humain , & de toutes ſes parties: au moyen dequoy mie.
nous pouvons iuger de la ſanté ou de la maladie . La tierce , eſt qu'en cognoiſſant le Lapremiere:
1
corpshumain & ſes parties , & par ce moyen leurs affe&tions, nous pouvons predire la fecondes
les choſes à venir , & dependantes d'icelles. La quatrieſme & derniere , eſt que pat Laquasrief
ice les nous ſommes rendus capables de bien & deuëmenç ordonner & appliquer me.
medicamens, ſelon l'exigence d'vne chacune partie .
Puis donc que la cognoiſſance de l'Anatomie eſt li neceſſaire & profitable, reſte
maintenancàdeclarer par quel ordre elle peut eſtre acquiſe. Laquelle chole , afin
qu'vn chacun puille mieux entédre fauc noter qu'il y a trois ordres, par leſquels les
Sciences ſont trouuées & demonſtrées : C'eſt à ſçauoir ;ordre de compoſition , qui Troisordres
elt propre pour enſeigner, lequel Ariſtocca vſurpé en fa Logique& Phyſique, com- pour 10w
mençantdes parties ou choſes les plus ſimples aux plus compoſées. L'autre elt de aer cona
frigner ks
diuifion ,lequeleſt propre pour trouuer les ſciences:& procede deschoſes plus comfriencess
poſées aux plus ſimples : lequel ordre a enſuiuy Galien au livre des Adminiſtrations
anatomiques : & de l'uſagedes parcies . Le ciers, eſt l'ordre de definition , lequel des
D
mófrel'efence & la nature des choſes,commeappert au livre de Gal . De arte parka. Galieris

Et pourautant que cet ordrcelt expliqué par diuilion,à ceſte cauſe il peut etre com
prins ſous le ſecod, lequel nous enſuiurons en ce preſent traité, en diuiſant le corps L'ordre
humain en ſes parties:coutes leſquelles ie declareray non ſeulement par cognoiſſan-qu'on doin
ce, mais aullipar ſcience :conioignant ce que Galien a eſcrit en ſes Adminiſtrations tenir pour
anatomiqucs,& Vlage des parties: eſquels liures, & premjerement en celuy deſdites avoir lá co
ilsnce
Adminiſtracions anatomiques, nous ſont declarées les parties du corps humainpargno
cognoiſſance, c'eſt à dire demoſtrées à l'æil telles qu'elles ſont : & au livre de l'vlage de ! Anam
lomie,
des parties,elles nous ſontdeclaréespar ſcience, c'eſt à dire, pourquoy elles ſonttel.
les,& en quel vſage elles ſont ain G faites. Ces choſes ainfi bricfuement declarées , il Plaion .
conuient demonſtrer:quec'elt qu'Anacomie , afin que ( comme die Platon en ſon Ciceron .

dialogueiniculéPhædrus,& apres luy Ciceron ) vn chacun fçache & entēde quelle que ich
ella choſe delaquelle on doit traicter. Ec pour autant que telle cognoiſſance eſt que defoni
acquiſe par la definition ( qui eſt vne oraiſon briefuc faite de genre & difference, ion.
h iiij
86 Le troiſieſme liure
parties eſſentielles de la choſe definie par laquelle eſt briefuement declarée la nature A
& eſſence d'icelle)premicrement nous la definirons, puis expliquerons vnechacune
parcie d'icelle.
Definition
Anatomie donc, ſelon ſon etymologie , eſt vne entiere & parfaite diuiſion ou re
ď41410 ſolution artificielle du corps humain en ſes parties , tant vniuerſellesque particulie.
mie. res,ſimples que compoſées.Ec cſt à noter, auant que paſſer plus outre, que ceſte de
finition eſtbonne & 'eſſentielle ſelon les Medecins & Chirurgiens : lesquels eſtans
operaceurs ſenſuels,admetcent & reçoiuent les qualitez propres & communes, pour
les differences & formes eſſentielles , au contraire des Philolophes, leſquels reprou.
differquy
e la uent toute definition qui n'eſt faitc de genre & difference eſſentielle : laquelle pour
é de noſtre nature,nous eſtant cachée,ſommes contraints au lieu d'icelle,
vlaye defi. l'imbecilit
nition de la aſſembler pluſieurs qualitez propres & communes pour compoſer noſtre definition ,
deſcription. que nous appelons plusproprementdeſcription , pource que où elle nous deuroic
monſtrer lamatiere & forme, qui conſtituent l'effence dela choſe definie , clle ne
nous monſtre que la matiere enucloppée de certains accidens. Ce qui eſt manifeſte
en ceſtedite definition , en laquelle diviſion & reſolution tient le lieu de genre , à B
cauſe qu'elle conuient à pluſieurs. Quant à tout ce qui s'euluit , il obtient lieu pour
la difference,à cauſe qu'elle la ſepare de toutes autres diſſections, qui ſont faites ſans
Diuifion artifice. Car il faut entendre,que diuiſion artificielle n'eft autre choſe que ſeparation
artificielle d'vne partic del'autre,ſansaucun intereſt d'icelle , ſuiuant la circonſcription d'une
chacune,en ſorte que toute diuiſion autrement faite, ne peut & ne doit eſtre dite ar. DA

tificielle. Er voila quant aux parties vniuerſelles de ceſte definition . Quant à l'ex
plication des di&tions, i'ay dit ,du corps humain , pource que nous procurons canc
qu'il nous eſt poſſible ,la conſeruation de ſanté, & chaſſons les maladies d'iceluy , &
Corps hu- non d'autres . Et dece appert qu'il eſt ſuiet de toute la Medecine , non commecom
main fue poſé de matiere & forme,ou comme humain , ains comme ſuiet à ſanté & maladie.
dela Me. Par partie n'eſt entēdu autre choſe(come declare Galien au 1. chap. du r . liure deliv. C
decine.
Que c'eft fagedesparties) qu'vn corps qui n'eſt pas du tout ſeparé,ny du toutconioint aux au
quepanie tres, compoſant toutesfois (ſelon Galien au premier liure de la Methode) le couc
Paries auec les autres, auſquels il eſt en partie conioint, & en partie ſeparé. Outre plus par
vniuerfel. parties vniuerſelles i'entends comme la Teſte, Thorax, Ventre, aucc leursapparte
les con par- nances : par particulieres, comme les parties d'icelles : les ſimples, comme les partics
ticuliers. ſimilaires, leſquelles ſont neufen nombre, àſçauoir,cartilage,os, ligament, mem
brane,tendon,nerf,vene , arcere , chair moſculeuſe. Aucuns adiouſtent les fibres, la
greſſc , la moüellc , les ongles , & le poil :les autres les laiſſent comme excremcns. Er
noterasles ſuſdites partieseſtre pluſtoſt appelées ſimples au ſens de la veuė,queſelon
la verité:car ſi on veut diligemmér examiner la nature d'icelles,on n'en trouuera pas
Pariesfim vne ſeule limple attendu que toutes le nourriſſent,viuent,& ſentent,manifeſtement
ples.
ou occulremét,ce quin'eſt ſans participation de veine,artere,& nerf.Ec li quelqu'vn
Comment
m'obic &tc, que hormis les dents, on ne void point qu'aucun nerfſe communique
les os ont aux os : le reſponds,que quand il ſeroit ainſi,encor ſont-ils faits ſenſibles, par certai
ſentimens. nes fibres nerueuſes quc leur Perioſte leur communique , ſe liansparicelles à eux:
ainſi que nous voyons faire auxmembranes, qui enveloppent lesviſceres: & pour ce
petit ſentimér animal eſt faire deſdits os exupulſion ou repulſion des mauvaiſes hu D tikel
meurs entr'eux & le Perioſte : lequel Perioſte, comme plusſenſible ,nousaduertit &
monſtrc,ainſi que ſon office porte, du peril eminent auſdits os, fi nous n'y mettons
Pourquoy ordre.Parquoy nous conclurrons qu'iln'y a nulle partie en noſtre corps,ſimple ſelon
ſont les par. la verité,maisſeulement au ſens de la veuë: ou bien ſi nous le voulons prendre à la
ties dutes rigucur,nousle dirons ſimple, ſelon la ſeule propre chair d'vne chacune. Les com
Famples oupoſées ſont celles quiſont mediaremét ouimmediatement faites des ſuſdites, qu'on
fornilaires.
Pourquogy appelle parties organiques ou inſtrumentaires : comme lebras,la iambe , la main , le
sontlespar pied,& autres ſemblables. Où noteras qu'elles ſont appelées ſimplesouſimilaires,
sies dues pource qu'elles ne ſe peuuent diuiſer qu'en parties ſemblables, ou de ſembiable na.
daßımıldı- ture, comme dic Galien au premier de la Methode.Mais les compoſées ſont dites dif
res o in
ſimilaires au contraire de ce que nous avons dit.Elles ſont auſi appelées inſtrumen
ftrumenta
yes , on or .
taires & organiques , à raiſon qued'elles meſmes peuvent faire vne parfaite a &tion,
conſpirante à la coleruation d'elles, & de leur tour. Commepour exemple , l'ail lans
zaniques. aided'autrepartie,void, & en voyant conſerueſontour, & conſcquemment loy
De l'Anatomie . 87
A meſme:& pourtant eſt il dit inſtrument & organe, 8: non point ſes parcies,leſquelles
nepeuuentdeſoy faire l'action, à laquelle elles ſont deſtinées , comme les cuniques
& autres parties.Ecdece nous entendons qu'en chacune partic inſtrumentaire faut En chacunt
conſidererparticulierement quatre parties propres à elle :I'vne,par laquelle l'actionpartie in
eſtaccomplie,commel'humeur cryſtalın en l'vil : l'autre , ſans laquelle l'ađion ne ſefrumentaire
peut faire,cóme le nerf & les autres humeurs: la tierce,par laquelle l'action eſt mieux fame confe
fairecommeles tuniques & muſcles : la quatre , par laquelle l'action eſtconſeruée, dever putio
commeles palpebres,l'orbite, ou concauité , en laquelle eſt poſėledic veil. Leſem : quair
vndberement
e pat .
blablepouvons-nousdire de la main, propreinſtrument de l'apprehenſion : laquelletues propres
elleaccomplitpremierement par le muſclee,, co
commepar parcie principale: ſeconde: å stelle .
ment,parle ligament , comme celuy ſans lequel telle action nepourroit eſtre faire:
tiercemér , par les os & ongles, commeceux par leſquels ladite action eſt mieux faite : 1

quartement,parles veines , arteres & cuir , comme ceux par leſquels tous les autres
lone conſeruez , & conſequemment l'action. Dauantage fautnorer , que les parties Parties in
inſtrumentaires ſont conſiderées en quatre manieres , & redigées en quatre ordres : Arumentaja
B dont celles du premier ordreſonc, qui eſtans compoſées immediatemée des ſimples, ses redgécs
fone dediées à vnc ſeule action , comme les muſcles & vaiſſeaux ;les autres ſont celles ord qua. ire
en ics
quiſontcompoſées des ſuſdites , & autres , comme les doigrs: les cierces ſont com
polées de ceux -cy & autres , comme la main prinſe vniuerlellement : les dernieres &
pluscompoſées ſont tout le corps ,organe & inſtrument delame . Et faut entendre ,
que quand nous diſons que les muſcles & vaiſſeaux ſont parties ſimples,nousparlons
: quant au ſens de la veuë ,& par comparaiſon aux autres plus compoſées.Mais ſi nous
auons égard à leur eſſence & coniticurion , nous trouuerons qu'elles ſont compoſées,
comme nous auonsdit par cy deuant,
Reſte maintenant à encendre & ſçauoir,qu'en chacune partie,ſoit ſimple,oucom
poʻée,faut conſidererneufchoſes:c'eſtà ſçauoir, la ſubſtáce, quárité ou magnitude, Nuf them
lesaerconfia
figure,compoſition, nombre, colligance ouconnexion , ( ſous laquelle eſt compriſe der ex
l'origine & inſertion )complexion ou temperament, action & vcilité:àcellefin qu'en ibicune
lescognoiffant,vn chacun puiſſe heureuſement & purementexercerſon art,en con partie.
С feruant & gardant la ſanté,guarillant la maladie, ou prognoſtiquát la fin d'icelle. Fi.
nablement ilfaut encendre,qu'entre les parties organiques il y en a trois priocipales,
quiregiſſent & gouuernéc couces les autres,à ſçauoir,le foye, le cæur , & lecerucau. 2
Ecſont nommées principales,non pour la neceſlité dela vie ( car le ventricule , tra
chée artere ,poulmons, reins,velſie, & autres ſemblables,ſontaulli neceſſaires Jains
pourceque de chacune des trois , procede vne vercu ou mariere neceſſaire ! ce que
ne fait desautres)àtout le corps: comme du foyc, la macierenutritiae enuoyée par
lesveines àtoutes les parties du corps pour leur nourriture :ducæur,la vercu vitale
enuoyée par les arteres,pourleur donner vie : du cerucau, la vertu animale enuoyće
par les nerfs pour donner ſentiment & mouuement aux parties quien ont beſoin .
Gal.au liuredel'Art medicinal , neufieſme chapitre , adiouſte les teſticules entre les
partiesprincipales,non pour la neceſſité de l'indiuidu, & corps particulier, mais bien T.ficules
pour la cõſervation de l'eſpece,pluralité & multitude: & au premier liure Defemine,parties
les conferantaucclecæur lesfaitplusnoblesqu'iceluy,diſant, que d'autant qu'il estprincipales.
meilleur de bien viure,queſeulement& ſimplement viure,d'autant leſdits teſticules
D font plus excellens,failansbien viure,quele cour faiſant viureſeulemét ,comme on
voidauxEunuques ou chaîtrez:donc à bon droiticeuxſont mis au nombre des par
ties principales. Ornature deſirant que ſon ouurage fuſt immortel,a excogicé telles
parties pour le rendre immortel , à l'exemple d'vn ſage fondateur d'vne cité, quine Gal. li.14
regarde pas ſeulemét pour l'heure qu'il a baſty,de la peupler, & faire habiter degrád chopo
nombre decitoyens, mais comme elle ſe puiſſe conſeruer à iamais ainſi frequentée,
ou pour le moins d'vn long eſpace de temps. Et toutesfois nous n'auons memoire
d'aucune cité , de laquelle auecle temps le nom du fondateurneſoit pery , & misen
oubly.Mais l'ouuragede nature a ja duré par pluſieursmilliersd'anées,& durera pour Admirde
l'aduenir,parce qu'ellea invétévnmoyen admirable de ſubſticuer vn autre nouveau ble innētion
animal, au lieu de celuy qui eſt perdu & more. Et parcant nature a donné à tous ani de nature
maux des membres pourconcevoir , & auſdits membres cercaine veriu & faculté in Imer pourlesperpen
ania
ligne,pour cauſerplaiſir & delectation .Et àl'ame qui doitvſer deſdit- inſtrumens& maux en

membres, vneindicible & incroyable enuic de cefaire, de laquelle cítans incitez 8 leur effece.
1
88 Le troifieſme liure

eſguillonnez les animaux,encore qu'ils ſoient totalement priuez de rajſon ,ou enco- A
res ieunes,ilspreuoyent ncantmoins, & s'employent à faire que leur race dure, com
mesil eſtoient ſages & en leur bon ſens. Carnatore ſçachant bien que la ſubſtance,
de laquelle elle fabrique les animaux,n'admet & reçoit point yne perfe &tion de la fa
gelle du Createur , pour la rendre eternelle , au lieu d'icelle elle a o & royé & concedé
ce qu'elle a peu à ſçauoir vne amorce & vn allechement dedié à la conſervation &

propagation de leur race, ioignant à lvſage deſdics membres vne volupté grādillime
& inenarrable : ce que tu pourras voir plus amplement au liure de la Generation ,cy.
apres.Oriuſques à preſent nous auons ſuffiſammentdeclaré la neceſſité & vtilicé de
la cognoiſſance de l'Anatomie ,enſemble demonſtré l'ordre qu'ily faut tenir, & fina .
blement expliqué la definition d'icelle, & pourſuiuy les parties . Parquoy reſte que
ſuivant noſtre promeſſe, nous declarions vne chacune partie du corps humain par
cognoiffance & par ſcience ainſique s'enſuit.Et combien que la vraye cognoiſſance
d'icelle ſe face par voir & manier toutesfoisil ne faut refuſer d'expoler la cõllruction
du corps humain par eſcrit,pour refraiſchir la memoire de ceux quionc anatomiſé
& decoupé les corps, & auſſi pour mercre en chemin ceux qui iamais n'ont pris peine
à entendre l'Anatomie . B

Diuiſion du corps humain . CHAP . I.

Arce que la diviſion du corps humain ne peut eſtre dquëment entenduë,


ſans la cognoiſſance de la diviſion de l'ame raiſonnable, pour l'vtilité & ne
R ceſſité de laquelle & de les faculcez , ledịt corps a cſté ainſi organiſë & dis
ulé : à ceſte cauſe nous auouscrouué bon de l'expoſer en peu de paroles ,

afin que par icelle plus facilement & certainement on puiſſe venir à la vraye & el
ſentielle diviſion dudit corps humain. Comme l'ame donc , qui elt perfe &tion du
Trois far
culiez dos corps, & principe de toutes ſes actions,ſelon la communc opinionde tous, eft diviſée
Ame. en trois facultez premieres & vniuerſelles, c'eſt à ſçauoir ,en l'animale, vitale , & na
curelle : & derechefl'animale en principale , ſenſitiue, & motiue. Comme auſſi vne
chacune d'icelles en pluſieurs autres, c'eſt à ſçauoir la principalle en l'imaginatiue,
raiſonnable, & memoratiue : la ſenſitiue, en la faculté viſiue, auditiue,odoratiuc,gu. c
ſtatiue, & ta &tiue: la motiue en progreſſiue ou ambulatiue, & apprehenſiue : la vitale
auſſi, en faculté dilatatiue & conftri& iue du cæur & des arteres , qui ſont entenduës
par la faculté pulſatiue : & la naturelle , en la faculté nutritiue,augmentatiue & gene
tatiue : leſquelles toutes ſont faites & conſeruées par cinq autres facultez , qui ſont
attra & rice,recentrice,conco &trice,afſimilatrice,expultrice. Ainſi ſon organe & ſujet,
qui eſt le corps humain , ſe doit diuiſer tout premierement en trois parties premieres
& vniuerſelles, c'eſt à ſçauoir aux animales,vitales,& naturelles : & d'abondát toutes
celles - cy particulierement enautres ,ſelon la diviſion deſdites faculcez , ſubalternes&

inferieures, afin qu'vn chacun entende l'organe de chacune faculté aux vſages & co.
moditez qui ſe preſentenr, Car ainſi que les Anatomiſtes le diuiſent communément
en quatreparties vniuerſelles,ils ſemblent ſeparer les extremitez des trois;& nuln'eſt
inftruit, en laquelle destrois elles doiuent cltrereduices & compriſes.Au moyen de D
quoy pluſieurs difficultez nous ſont propoſées dedans les Autheurs : auſquelles pour
obuier nous pourſuiuronsla noſtre comme nous auons commencé.
Les extre- Le corps humain donc eſt diuiſé , ainſi que nous auons ja dit , en trois parties vni
mirez forie uerſelles,c'eſtà ſçauoir, animales , vitales, & naturelles . Par les animales ſont enten
compriſes duës , non ſeulemét les parties de la teſte ,definies depuis le ſommet iuſques aux cla
fousles
uicules , & premiere vertebre du Thorax ,mais auſli les extremitez : entant qu'elles
partiesani
males. ſont organes & inſtrumens de la faculté motiue : ce que Hippocrate confirme au
‫ܕܐ‬
fixieſme liure des Epidemies ,dilant que ceux qui ont groſſe teſte ,ont ſemblablemét
grosos , gros nerfs , & bref, gros membres : & en vn autre lieu , Ceux qui ont groſſe
teſte, & quand ils la baiſſent,mõſtrene vn gros col,cels ont coutes les parties , & prin
cipalement animales , ſemblablement groſſes. Non pas qu'il yueille pour cela de
montrer que la ceſte ſoit le principe , ny cauſe de la groſſeur des autres parties; mais
il dit cela d'icelle, entendant que Nature eſt tres- iuſte & infaillible en ſes operations
libres. Queli Nature n'a rien oublié à la fa &turc de la teſte à tous manifefte, ils'enſuit

6
--
Del’Anatomie . 89

A bien qu'elle a fait la pareille aux autres qui font cachées . l'ay adiouſté cecy , parce
qu'aucuns onc eſtimé que ledit Autheur vouloit inferer par ſes authoritez ,que non
leulement les os, les membranes, ligamens,cartilages, & toutes autres parties anima.
les,mais auſſi les veines & arceres , dependoient de ladite teſte , comme de leur prin
cipe,ne prenans poſſible point gardeà noſtre diviſion .
Par les parcies vitales ſont encenduës ſeulement le cæur,arteres ,poulmons, trachée
artere , auec les appartenances. Et pour les naturelles , touces celles qui ſont conte .
nuës dans la circonſcription vniuerielle du Pericoine, & apophyſes Erythroïdes , qui
cnucloppent en ſecond lieu les teſticules. Car quant à touces les autres parties , que
nous appelons contenátes,elles appartiennent aux animales : lelquelles derecheffaut
diuiſec en principales, ſen liciucs, & motiues : comme auſſi d'abondant vne chacune,
ainſi ques enfuit.Et premierementla principale,en l'imaginatiue , qui eſtla partie an-Diviſion
scricure du cerueau , aucc ſes deux ventricules, & autres choſes à iceux appartenātes . animaleso
lcom en la raiſonnable , qui eſt la partie pofterieure du cerueau , comprenant le ciers
ventricule auec les parties .Finableméten la memoratiue , qui eſt le cerebelle & ven
B tricule contenu en iceluy.Secondement, la ſenſitiue ,en la viſiue, qui eſt l'æil:auditi
ue, qui eſt l'oreille : odoratiue , qui eſt le nez :guftatiue ,qui eſt la langue & palais:cacti
Je,quieſt generalemejt rour le cuir du corps,mais principalemēr de la main . Tierce
ment,la mociue en la progreſſiuc, qui eſt les iambes: apprehenfiue , quieſt les mains :
& ſimplementmotiue, quiſont les parties contenantes & bornátes les troisdits ven .
tres , ſelon la plus grande partie d'icelles. Et quant aux vitales, l'organe de la faculté
dilataciue du cæur & des arteres,font les fibres droites & les tráſuerſes de la coſtricti
uc, & tous les crois genres des filamens, tant du cour que deſdites arteres de la pulſa .
tile.Ou ſi cu les veux diuiſer autrement ,en parties ſeruantes à la reſpiration , comme
ſont les poulmons , & trachée artere , & aux autres ſeruantes au mouuement vital , qui
font le cæur & les arceres par le genre des fibres ſuſdites. Reſte maintenar la diviſion
des naturelles ,quieſt en nutritiues, augmentariues , & generatiues, diſtribuées dere
chefaux attractrices,vniuerſelles , & particulieres, retentrices , conco & rices,diſtribu
ciues,allimilatiues,& expulfiues. Les attra &trices ſont l'Oeſophague , & le ſuperieur

1 C orifice du ventricule : la retentrice eit le Pylorus : la concoctrice, le corps du ventricu.


le : la diſtribuciue ,les crois inteſtinsgrelles :l'expulcrice, les trois cras & gros.Et autant
en peut- on imaginer du foye,lequel attire par ſes veines Meſeraïques & la veine Por
te,retientpar l'anguſtie de l'orifice d'icelles concenuës dans le foye, cuit par la pro
prechair,diſtribuée par la veine caue,expellée par la racce , folicule du fiel, & reins.
Le ſemblable voyons nous aux teſticules, qui attirent par les vaiſſeaux preparans,
retiennent par les anfra & uofitez variqueuſes d'iceux, cuilent & elabourent en iceux
dies vaiſſeaux par l'arradiation de leur propre chair diſtribuent par les Eiaculatoires
aux Proltares & cornes de la macrice , cenans le licu d'icelles en leur endroit : & fina Chacune

blement expellent par leſdites Proſtates & cornes , & autres parties à eux appartenáparlie anii
tes.Et quant à la particuliere attra & ion d'vne chacune partie ,retention ,conco & ion, reſon nours
diſtribucion ,aſſimilation ,elles appartiennent à la temperature ou proprieté d'icelle , viſimene
qu'on appelle propriecé occulce d'vne chacune partie ſimilaire & limple. Et ne dif- par une
ferenc les actionsdes parties communes à celles des ſimples en autre chole , fors que proprieté
fpecifiquc.
lescommunes le font par les trois genres de fibres : & les particulieres , par leur pro .
D prieté occulte,redodant & proucnant de leurtemperature, qu'on peut appelerPro
pricté ſpecifique. Oren la compoſition du corps humain , Nature à eu trois princi .
! pales fin :ou intentions.La premiere eſt qu'elle a fait des parties , leſquelles ſont ne .
cellairesàla vie , comme le cæur, le cerucau , & foye : la ſeconde, qu'elles ſont faites
pour plus commodément viure commeles yeux , le nez , lesoreilles, les bras, & iam
bes:la tierce ,afin qu'elles ſoiét dediées pour la propagation & inſtauration de l’eſpe
ce commeles parties honteuſes, les celticules, & la matrice. Ec voyla ce qui me ſem .
ble de la vraye & eſſentielle diuiſion du corps humair., faic & ainſi organiſe pour la Angredie
varieté ,& multiplicité de ſes facultez,tant vniuerſelles que particulieres, laquelle cu silion com
reccuras , s'il te plaiſt: ſinon cu reuiendras à la commune & vulgaire, qui eſt faite en mune des
trois ventres,ſuperieur, moyen , & inferieur, nommez par ces noms, Telte, Thorax , panties dome
& Epigaſtre,& les extremicéz. Où par la Tefte ne ſont entenduës toutesles parties corps.
animales, mais ſeulement celles qui ſont compriſes depuis le ſommet de la teſte iuſ
ques à la premiere vertebre du col,oubien la premiere vertebre du Mccaphrene, lià
Le troiſieſme liure
୨୦

l'imitation de Galien eniſon liure des Os , parlát de l'articulation faite par enarthroſe
A
& arthrodie , nous referons lecol entre les parties d'icelle . Parle Thorax , dit ventre
moyen , tout ce quieft compris depuis les clauicules iuſques à l'extremité des coſtes ,
tant vrayes que fauſſes, & Diaphragme : par l'Epigaſtre, le demeurant du tronc du
corps ,contenu entre le Diaphragme, & l'os Pubis: & par les extremitez , les bras &
les iambes. Laquelle diviſion nousretiendrons , pour autantque ſelon l'ordre ana
tomique nous ne pouuons pourſuiure les parties du corps humain ſelon noſtre pre
miere diuition : parce que leſdites parties ſont mellées les vnes parmy les autres.
Nature n'a voulu faire ce ventre inferieur ofleux ,afin que l'eſtomach , apres le man

ger & boire , peult eſtre dilaté , & aulli afin que les enfans puiſſent prendre accroiſſe
Reifor ment, & que l'on peuſt ſe plier & courber . Nous commencerons à iceluy , pour faire
pourquoy la diffe & tion : à raiſon qu'il eſt ſuiec à corruption plus que nulle autre partie ,tant pour
on comence la temperature humide & froide de les parties , que pour les excremens feculens &
la diffection vicieux contenus en icelles . Toutesfois auantque paſſer plus outre , s'il eit queſtion
demonftra- de faire demonſtration publique, apres avoir deučmene ficué le luier, & pourucu
rine as ven
B
pe infe aux inftrumens, & autres choſes à ce faire requiſes, faut diuiſer ledit ventre en ſes
pleur. parties, qui ſont contenantes, & contenuës : dont les contenantes ſont celles quicon
Itituent toute la capacité definie parle Peritoine , deſquelles la partie plus chinente
oſt definie ſelon Galien , par la ſituation des muſcles droits, & eft appelée generale
ment de cenom Epigaſtre, lequel eſt diuilé en trois parties: c'eſt à ſçauoir,en celle qui
eſt deſſus le nombril,quiretient le nom decout : en l'autre , qui eſt alentour du nom
bril ,nommée vmbilicale ou moyenne : & troiſieſme,quieft deffous le nombril,nom .
mée Hypogaftre,ou petit ventre . En chacune deſquelles faut conſiderer deux par
tics laterales, à ſçauoir en l'Epigaſtre,lesHypochondres dextre & ſeneſtre, leſquelles
ſont finiesdepuis l'extremité des fauſſes coſtes, juſques à la plus haute montée des
cartilages d'icelles,& du Diaphragme:en la partie vmbilicale,deux lombales compri
ſes depuis l'extremité du Thorax iuſques aux Iles,leſquelles vulgairement on appel
leles Hancs : en l'Hypogaftre, les deux Iles definis des os des Iles, & os barré . Com
bien que ie ſçache bien que Ilia , que les Grecs appellent Lagones, ſignifient toutes les
parties qui ſont vuides entre la derniere coſte & l'os des Iles , leſquelles les Grecs ont с
appellées Ceneonas : c'eſt à dire , vuides,pource qu'ils n'ont point d'os, commcteſmoi
gne Galien au deuxieſme commentaire ſur le Prognoſtique : toutesfois pour diuiſer
plus clairement tout le ventre , il faut appeler les parties laterales du nombril, Lom
bales, & les parties laterales du ventre inferieur , Iles . Où fautnoter , que les anciens
nous ont marqué ajn li ceſditesparties contenantes,afin denous deſigner le plus pres
Sirnacion qu'il ſeroit poñible, les parties contenuës audit ventre , leſquelles ſont fous diuers
des paries lieux, diverſes : comme ſous l'Hypochondre droit, la plus grandepartie du foye :Sous
de tone le le ſeneſtre, la plus grande du ventricule, & la ratte fous l'Epigaſtre,l'orifice inferieur
.

rentre in du ventricule, & la pluspetite partie du foye: au Aancdextre & partie ſuperieure, le
ferienr.
rein dextre : à l'inferieure & commencement des lles, l'inteſtin Cæcum : & au milieu,
partie de l'inteſtin Colon , & l'autre du leiunum : au ſeneſtre, partie ſuperieure , le
rein , & moyenne,l'autre partie du leiunum
& du Colon : & lous la partie vmbiltcale
deſcend l'Ecphyſis & partie ſuperieure de l'Epiploon , & tranſuerſe leColon :aux dex.
tre des Iles & ſeneſtre ,la plus grande portion de l'inteſtin Ilcon ,& les cornes de la ma
D
trice aux femmes enceintes & vaiſſeaux ſpermatiques, tant de l'homme que de la
femme : & ſous l'Hypogaftre partic inferieure, l'inteſtin droit , la vellie , & l'amarry , &
lc demeurant de l'Epiploon : & ce afin que nous puiſlions mieux diſcerner leſdites
parties malades , & y remedier par deuë application de medicamens, ſans dommage
d'vne partic ny d'autre ,ny tromperies de prendre vnc parcie pour autre , ny vne ma
ladie pour autre . Ceſte diuiſion eftant par nous trouuée forc bonne , l'auons bien
voulu enrichir & illuſtrer par ces deux figures, auſquelles ſont marquées non ſeule
ment les parties ſuſdices, tant contenantes que contenuës , mais auſſi generalement
rouces les autres du corps vniuerſel , que nous auonscogneu pouuoir apporter quel

quc vcilité à la cognoiſſance des parties ſuietres : leſquelles figures auec leur declara .
tion ſont telles.

1
de l'Anatomie. 91
A
Figure anterieure .

Declaration de la figure anterieure.

A Le næud de la gorge.
BB Les deux clauicules , ou os furcu
* laires.
C La region du cæur. ;
D La fourchetce,oucartilage Xiphor,
de.
E Hypochondregauche , là où le ven
B tricule ou eſtomach eſt ſitué.
F Hypochondre droit , où cſt ſitué le
foye.
G L'epigaſtre proprement pris , ſous
lequel eſt contenu l'orifice infe
rieur du ventricule , comme le ſu
perieur ſur la cinquieſme vercebre
du Thorax.
H La region vmbilicale, ſous laquelle
eſt poſce la plus grande reuolution
de l'inteſtin leiunum.
II Les deux flancs ou Lumbes à la par.
cie ſuperieure , eſquels ſont licucz
les reins. Ec à l'infericure du coſté
droic , le Cæcum inteſtinum . Ec
du ſeneſtre , la reuolution du Cou
lon.
C K L'Hypogaftrc, autrement dit Petit
ventre , ſous lequel eſt contenuë la
plus grande partiede la reuolution de l'inteſtin Ileon , la veſſie , & amarry aux
femmes, & lc Redtum inceſtinum .
LL Les Iles tous leſquellesſont contenuës le demeurant de l'inteſtin Ilcon , les Tc.
ſticules, cornes , & vaiſſeaux ſpermatiquesde l'amarry eſtancempeſché, & les
vertebres,
M L'os barré, ou du penil, aux deux coſtez duquel ſont les aines.
N La partie anterieure & moyenne de la cuiſſe, en laquelle communément on ap
plique les ventouſes pour faire prouoquer les purgations des femmes.
o Monttre l'endroict deſſous le Malcole , où il faut ſaigner la vcinc Saphone.

i
92 Le troiſieſme liure ,
Figure poſterieure. A

Declaration de la figurepofterieure.

P Monſtrele derriere du col, où come


munément on applique le Seton.
RQL'affieệc de l'Omoplare , vn petic
plus haut de laquelle on appliqueles
ventouſes, marquee
R La ſituation de la ratte, ſous laquel
le t'eſt monftré l'endroic des reins,
par 3. 4
S L'endroit de l'inteſtin Gæcum.
T L'Os ſacrum , où aux affe &tionsde
l'inteſtin droit fauc appliquer les re B
medes propres pour ſa cure.
V L'endroit de la ioincture de la cuil.
ſe, auquel il faut appliquer les reme
des propres à la curation de la goute
Sciatique.
X Le larret & endroit, où on ouure la
veine poplitique. 20
Y Le talon.
ON

Enumeration des parties contenantes, auec l'inſtruction pour commencer


la diſection anatomique. C H 4 P. 11 .

ES parties contenantes de l'Epigaſtre,fontl'Epiderme, le vray cuir, le Pan


nicule charneux mellé auecques la greffe, les hui& muſcles de l'Epigaſtre,
auecques leur tunique commune , le Peritoine,les cinq vertebres des Lom
bes & toucl'osSacrum , les os des Iles, os barré, la ligne blanche & Diaphragmedeſ
quelles les vnes ſont communes à tout le corps,comme les trois premicres: les autres
propres aux parties contenues ſous ledit Epigaſtre generalement prins. Pour leſ
quelles voir chacune ſelon ſonordre, faut tout premicrementcerner le nombril couc
à l'entour,enfonçant ledic cerne & inciſion iuſques à la ſuperficie exterieure des mula
cles, pour iceluy reſeruer , iuſques à ce que la commoditė ſe preſente de monſtrer les
vaiſſeaux vmbilicaux, plongez dedāsledic ventre,qui ſontvne veine,deux artercs,& D
le porc Vraque ſi aucun cny a. Ce fait, faut prédre vne droitelignc du milieu de l'os
Pectoraldit Sternõ,par deſſus le cartilage Xiphoïde, dic la Fourchette iuſques à l'os
Pubis,laquelle diuiſeleſdites parties contenantes, communes iuſques à la ſuperficie
des muſcles,ou ligne blanche, & conſequemmēt deux autres tranſuerſales demelme
profondeur,cõduites des parties laterales de la cerneure du nombriliuſques aux Ló
bes : & ce afin que plus facilemét on puiſſe ſeparerd'un coſté & d'autre ledit cuir des
partics ſubiacentes, & faire qu'il n'empeſche point de les bien voir & contempler.
Tour cecy fait,faut cómencer deſeparer le cuir des autres parties,les angles deſignez
entour ledic nombril , & mõltrer comment il eſt double,à ſçauoir vray,& non vray, &
comme ils ſont appellez de propre nom, rendant raiſon de leur appellation . Ce quo
nous ferons non ſeulemét icy,mais en toutes les autres parties,tant qu'ilſera poſible:
& pourſuiurons en icelles les neufchoſes par nous declarees au Proëme dece preſent
liure, commençant au cuir,commelapartic qui s'offre la premicrc auſens delavcuë.
!
de l'Anatomie. 93
A Du Cuir. CHAPITRE 111. Pourquoy le
1
E cuir, premiere & vniuerſelle partie de noſtre corps , eſt double :vn Uray wir
vray,& l'autrenon vray. Le vray eſt dit Derma en Grec , pource que eft appellé
ſelon la plus grádepartie, il ſe peut eſcorcher & ſeparer des autres lu. Dermas
1

1
ieces:ie disſelon laplus grande parcie , parce qu'és parties de la face,
1 és oreilles, à la paume de la main , & doigts d'icelle,és parties honteu .
ſes,plancedespieds & doigts d'iceux , il eſt tellement infilıré & mellé
auecques les partiesſuiertes qu'õne le içauroit ſeparer d'icelles. Le non vray (lequel
toutpremierementnous declarerons, comme celuy qui premier ſe prelence au ſens
de la veuë ) eſt appellé des Grecs Epidermis,parce qu'il s'eſtend & couche ſur le vray:
nous l'appellons en noſtre langage cuticule,ou pecite peau, duquel la ſubſtanceeſt de
1
l'excrement ou effloreſcence relleichee du vray cuir. Car que la ſubſtance ne ſoit de
la ſemence, il appert en ce que , comme aisément elle ſe perd , auſſi aisément elle ſe
B
repare ( ce qui n'eſt des parties ſpermatiques.) Ceſte cuticule , tant par ſoy que ſepa
ree & abſtrai&te, nous elt clairement demonſtree en deux façons,ſçauoir eſt paradu
ition faite par feu , ou bien par vehemenc ſoleil és perſonnes freſches & delicates,qui
ne lont accouſtumé. Sa quantité ou magnitudeen profondeur eſt bien perite,mais
en largeur elle eſt d'autant plusgrande pource qu'iceluy deuoircouvrir le vray cuir,
pour la raiſon qui ſera dice cy -apres. Quant à la figure, il eſt rond & long , comme
les parties qu'ilcouure. Sa compoſition eſt obſcure: touresfois puis qu'ileſt excrc.
mene du vray cuir , il eſt composé de la ſuperfluité excrementeule desnerfs ,veines
& arteres, & proprechair d'iceluy. Il eſt vnique comme le vray cuir,lequel exterieu.
rement il cueſt commenous auons dit,&ſurlequel il eſt ficué: afin qu'il fuſt moyen
entre l'obie &t du ta &, & la faculté tactiue fixe,diſtribuee par tout le vray cuir, auec le
quel ſeul il eſt conioin&t. Quant à la complexion & temperament , il eſt moyen entro
tous,ſelon la communeopinion des Medecins : pource qu'eſtant moyé entre l'obie&
& la facultés'il cufteſté chaud , froid ,ſec,ouhumide en exuperance, il euſt repreſenté
C à la faculté toutes choſes ta &tiles de la meſme qualité : ainſi que nous voyons toutes
couleurs eſtre repreſencees de couleur rouge ou verce, par les lunettes rouges ou ver
tes,pourlaquelle meſme raiſon il n'a aucun ſentiment. D'action il n'en a point, mais
ila vlage, qui eſt de conſeruer, & polir,tantqu'illuy eſt poſſible,le vray cuir, en ſorte
qu'il ſemble que nature l'ait ainti produit , afin qu'il luy fuſt parement & dernier or
nement. En cecy les bons ouuriers l'imitent, leſquels pour embellir leur ouurage, la
tabotene & raclent,& en fin la poliſſent.Et par cetu encédras que toutes parties n'onc
pas a& ion,mais toutes ont quelque vlage, ſuiuant ce que dit Ariſtote , que nature
n’atien faitforsen vain.Dauantagetu noteras,quccedit cuir deperduſe peut regenerer L'Epider
mis fe pent
partout , queſur la cicatrice: puis que iamais il n'a faute de matiere ny faculté rengendrer.
formatrice, fors qu'au ſuſdiēt lieu cicatrice.
Du vray Cuir. CH A P. I V.

E vray cuir, que nous auons appellé Derma,cft de ſubſtance ſpermatique,& Subſtances
Daceſte cauſeliportion d'iceluy deperduë ne ſe peut regenerer telle qu'elle
her eſtoit. Parquoy en licu d'icelle s'engendre vne autre,qu'on appelle cicatrice,
laquelle elt faite de chair deſſeichee outre la propre nature. Il eſt de quantité aſſez quantité.
grande en profondeur, comme vn chacun peut voir par la diſſection & ſeparation
d'auec la chair; eñ largeur il cnueloppe toutle corps , horſmis les yeux , la bouche,ler
extremitez des doigts,la part où les onglesſont actachees , les narines oreilles,mem
bre viral, fiege,vulve , partics dedies à jetterhors les excremens. Sa figure eſt cela
leque nous auonsdit de l'Epidernie , à ſçauoir ronde & oblongue , auccques cer
taines productions deſcendances aux extremitez. Où tu noteras que ladite figuro
luy aeſté baillee ainſipreſque qu'à routes autres parties , comme la plus parfaicte &
moins ſujette aux maux & incommoditez externes, & plus capable que nulle autre. Compofitit.
Ileſtcomposé de nerfs,veines,& arteres, & de la propre chair ou ſubſtance,que nous Levragomir
auonsditeſtrelpermatique,comme venant de l'apophyſe du Chorion , autremer dit prend con
Secodine,laquelle conduit les vaiſſeaux ſpermatiques iuſquesau nombril:auquel en - Chorion
origme du
.
droic en laiſſant al'er leſdiets vaiſſeaux chacun en ſon lieu ordonné de nature , elle
s'eſtend & dilate à la generation dudit cuir,ainſi qu'il appert par la diſcētion, & limi
94 Le troiſieſmeliure
licude de l'un à l'autre:car ſi le Chorion eſt doubie ,inſenGible,enueloppăt tout le Fæ
cus eſtant legeremér lié auec la premierecunique dicte Amnicos: aufli eſtle cuir dou A
ble,inſenſible de foy ( autremēc en vain luy ſeroient baillez les nerfs des parties ſuiec
tes)enueloppant coue le corps,eſtant legerement lié auec le Pannicule charneux pro.
duit de l'Amnios. Queſi onm'obiecte que l'Epidermis n'eſt partie du cuir produite
d'vne des membranes du Chorion,veu qu'elle eſt inſenſible & ſeparable de Pautre in
terne, & entieremêt differente d'icelles:ie te reſpos,que ſi eft,fi on y regarde de pres :
car que l'incerne ſoit eſpeſſe, ſenſible, viuante,charnuë, elle ne l'eſt de loy, mais plu
ſtoſt par le benefice des parties qu'elle reçoit destrois parcies principales au contraire
de l'extericure:laquelle,combien qu'elle receuſt pareils benefices des ſuſdites parties,
fieſt-ce qu'à raiſon des incómodicez exterieures,quicontinuellement agiſſenc à l'en
contre d'elle (qui ſont l'accouchement des qualitez,tant premieres queſecondes) ne
Nombre. luyprofiteroientde rien . Il eſt vnique : pource qu'il n'auoità couurir qu'vne choſe
ſeulement,à ſçauoir le corps humain , tout à l'encour duquel il s'eſt ficué, excepté és
Sirmation, parties cy -deſſus predites. Sa connexion eft,qu'ilſe lie auec les parties ſubiacétes, par
Connexion. nerfs,veines, & arceres,produites des parties ſubiacentes,afin qu'il y ait entre coutes B 1

les parties du corps communication des vnes aux autres,tantdubien quedu mal.Son
temperament propre,eu eſgard à la compoſition, corps & tubſtance , eſt froid & lec ,
Tempera
menn pource qu'ileſt fait entierement des parties ſpermatiques, leſquelles ſont naturelle
ment relles,combien qu'eu eſgard aux particules des nerfs,veines artcres,& filamens
charneux qui ſe mellent parmy ſon propre corps & ſubſtance ,il eſt temperé en toutes
qualitez, comme mellé d'egales portions de parties froides,ſeiches,chaudes & humi.
Vlage. des. L'vlage & vtilité d'iceluy , eſt d'enierrer & contenir en bonnevnion toutes les
parties du corps en les defendant des iniures externes : à cauſe dequoy principalemēr
il a eſté fait partout ſenſible:mais en aucunes parties plus,auxautres moins,ſelon leur
dignité & neceſſité, & ce afin que toutes parties ſuiectes fuflent aduerties par le ſentie
ment d'iceluy , des choſes à eux contraires ou conuenables. Finablement, il faut en
tendre qu'il eſt poreux,& tranſpirable, ainſi qu'on peut voir par les ſueurs : afin quc
par cels pores les arteres puiſſent attirer à loy l’air ambient,pourrefrigerer, & nourrir
ja chaleur naturelle fixe, & expeller dehors les excrements fuligineux,leſquelsen hy- C
uer par le froid bouchent leſdics pores,ouentre chair & cuir ou entre leldites peaux,
principalement entre les parties expoſees à l'air ambient . Iceux excrements eſtans
retenus font noirceur & immondicité eſdites parties : laquelle eſt chaſſee par chaleur .

conioin &te auec humidité , qui au contraire ouure ceſdits porės , & ſubtiliſe les hu
meurs. L'attraction d'air faite par les arteres eſt demonſtrec aux femmes qui ont
ſuffocation de l'amarry , leſquelles ne demonſtrent auoir autre fruition d'air, que de
celuy qui eſt attiré de la ſuperficie du corps par leſdites arteres .
D# Pannicule charneux. CH A P.

PRES le vray cuir, s'enſuit vnemembrane,que les Anatomiſtes appel.


lent Pannicule charneux , lequel afin que nous puiſſions mieux expli
quer nous declarerons que c'eſt que membrane, & en combien de for W

teselle eſt prinſe,puis nous rendrons raiſon pourquoy elle eſt appellce icy
Membrane. Pannicule charneux, Membrane donc eſt vne partie ſimple , large,platte, & delice, D
toutesfois forte & denſe, blanche & nerueule , & ſansgrad danger ſe pouuant eſten ‫ܐܐ‬

dre & aſtreindre. Elle préd quelquesfois le nom deTunique,à ſçauoir lors qu'elle re .
Diuerjes ueſt vne autre partic. En ce lieu -cyelle eſt appellee Pannicule charneux, pource qu'é
aucuns endroičts elle prend chair , & ſe rendmuſculeuſe,comme à l'hõme,depuis les
appellations
demonbra- clauicules iuſques à la region du poil de la ceſte: & pource eſt appellee audit endroit
ne.
Muſcle large:auxautres endroitsdu corps, elle n'eſt que mébrane ſimple, meſlee par
cy par là auec la greſſe aſſez ſubiacente: & poarce peuteſtredite , Pannicule adipeux.
Mais aux beſtes (deſquelles elle a pris la denomination relle , comme de la partie do
minance )elle eſt manifeſtemērcharneuſe, & muſculeuſe par tout le corps,ainſique
l'on peut voir aux chevaux & aux bæufs : & ce afin qu'eftant mobile,ils puiſſent chal
fer les mouſches, & autres animaux qui les poignent. Ces choſes ainfi conſiderees,
Subliance. nousdiſons ledic pannicule charneux eſtre ſon propre corps deſubſtácenerueuſe,ou
&

membrancuſe , comme venant de la membrane prochaine du Fætus, nommee Am .


de l'Anatomie . 95

A nios , dilatee pour ſa generation ſur la racine du nombril. Où il faut noter que tout
ainſi que le Chorió , Amnios, membranes liees enſemble par petites fibres nerucuſes,
pallans de l'un à l'aucre, & cxtremité des vaiſſeaux, enucloppene & enuirõnent le pe
tit Fæcus durát le temps qu'il habite en la matrice: ainſi le cuit & pannicule charneux
vais & conioines par meſmes liens, cnucloppent & enuironnent tout le corps durant
le temps qu'il habite dansla grande matrice mondaine. Et pource elle eſt egale , &
Quantité.
ſemblable en quantité & figure au vray cuir , horſmis qu'elle eſt contenuë d'iceluy,
Figure.
quelquesfois en aucuns lieux meſlee auec greſſe auxautres augmencec de chair , aux
autres coute ſimple.Sa compoſition telle que nousla voyons à l’vil,eltde veines,arte- Compofitið.
res & nerfs, & propre chair,meſlee auec greſle & chair muſculeuſe, ſelő aucunes par . Nombre.
ties du corps.Il eſt vnique,pour l'vtilicé qui ſera dice cy- apres , eſtá ſitué entre le cuirConnexion .
& greſſe ; ou tunique comune des muſcles:auec leſquelles parties & autres à luy ſub
jacences, il eſt conioin & principalement par les veines, arteres , & nerfs, qui montent Tempera
B des parties incernes en la ſubſtance, & par icelles au cuir excerieur. Son temperament ment.
el diuers , ſelon la diverſité des parties qui le compoſent. Son vtilité eſt d'enforcer, Vrilité.
conduire & conſeruer les vaiſſeaux, qui vont au cuir & ſuperficiellement aux autres

parties : aux beſtes dauantage, pour mouvoir le cuir , pour la raiſon ſuldite.

De la grefje. CHAPITRE V I.

A Greſſe eſtant ( ainſi quenous avons dit , parlant des parties fimi
laites ) plus excrement que partie, eſt de ſubſtance oleagineuſe, prouc- Subſtances
nante de la partie du ſang aëree & vapoureuſe , laquelle reſude par les
porofitez des tuniques , ou bien par l'extremité des veines & arteres , à
I'encour des tuniques & membranesnerueuſes & froides, au moyen
dequoy ladiete vapeur oleagineuſe eſt conuertic en greſle par la froideur deſdites
parties. Et de ce l'on peut entendre, quola cauſe efficiente d'icelle eſt la froideur, c'eſt

à dire chaleur plus tiede, remiſe & moins efficace : & conſequemment,qu'autantque
l'animal ſanguin eſt plus froid , d'autant a il plus de greſſe : commenous voyons par
experience,non ſeulement entre animaux de diuerſe eſpece, mais auſſi demeſme
C cipece, non ſeulemententre malle & femelle, mais entre deux maſles, ou deux fe .

i melles, quand l'on eſt plus froid que l'autre. D'où procede que la quantité d'icelle
greſſe eſt plusgrande ou plus pecite, à raiſon du temperament de tour le corps & de
:
ſes parties. Quant à la compoſition , elle eſt faite de la ſubſtance ſuſdice meſlee auec . Quanrite.
ques certainesmembranes, ou fibres ncrueuſes, veines & arteres . Et eſt ſituee de cöpofition.
ſa plus notable & infgac quantité entre le pannicule charneux , & la tunique com
mune des muſcles. Ie dy notamment la plus inſigne partie , pource qu'on la trouue
preſque par tout le corps, ſelon plus ou moins , toutesfois ( ainſi que nous auons dit)
touſiours pres des parties nerucuſcs , auſquelles elle eſt annexce . Quelques Anato- Sienation .
miſtes ont icy demandé , ſi la greffe cftoit lus le pannicule charneux, ou deſſous:
mais ceſte queſtion me ſemble inutile, car on la trouue ſouuent & deſſous & deſſus.
Son temperament eſt mediocre , entre chaude & froide, comme venant de la par
tie plus aërec du ſang, combien que ſelon fa cauſe efficiente qui eſt le froid ,dcuft eſtre
D froide, au reſte humide inſignement.Son vcilité eſt d'humc &ter les parties,leſquelles connexion

par trop grande abſtinence, & vehemens exercices, & chaleursimmoderees peuuent a tempes
e tre par trop delleichees. Semblablement d'eſchauffer, mais plus par accidentque soment.
de la nature. Te dy par accident, pource qu'eſchauffec, elle eſchauffe leſdietes par- Pilué.
ties:ou bien à cauſe qu'elle empeſche que la chaleur naturelle ne s'exhale, comme fait
lefroid en Hyuer ,dontles ventres ſont faits plus chauds en ce temps- là , qu'en Eſté. 1
Iciçay bien que quelques do &tes Medecins de noſtre temps ont eſcric & debatu, que
lagreſſe eſt chaude de ſon temperament , & que la cauſe efficiente eſt chaleur tempe
fce,& non le froid :mais ie laiſſe ces queſtionsplusſubtiles aux Phyſiciens,Oreſtà no . Hippoc.
ter, qu'aux iointures des parties ,quione frequenc mouuement , on trouue vne autre 15. aphor.
eſpece de greſſe beaucoup plus ſolide & durc, que celle de laquelle nous auons parlé, dn 1.line.
quieſt ſouvent accompagnee d'un humeur viſqueux & gluant , comme le blác d'vn
cuf,pour plus longuement les humeéter & lubrifier ſelon leurexigence, afin queleur Diverſesef
mouuement ſoit plus libre : à l'imitació dequoy nous voyos qu’on lubrifie des choſes peces degreso
vnducuſes les corps durs & folidesagitez par frequent mouvement, comme la rouëſ.
i iij
1

me
96 Le troiſieſ liure ,

d'une charrette,& autres choſes. Il y a encores yneautre eſpece de greſſe , que nousap . A
pellons le Sein , laquelle nc differe de la vrayegreſſe, ſinon qu'elle eſt plus ſeiche, la
partie d'icelle plus humide,ſubtile, & molle, eſtant conſommee par la grande chaleur
du lieu à raiſon de la multitude des veines & arteres : & le trouue principalement au
Meſentere, à l'encour des reins, & ſur les lombes , & baſe du cæur . La greſſe le consó .
me par vne longue abſtinence, par faute demanger, ſc deſleiche & endurciſt par lese .
xercices velemés, & chaleur immoderee. Ainſi la voyons - nous au dedans de la main
& plante des pieds , ſous l'æil, enuiron le cour , eſtre plus fer me & preſque charneuſe 3
en denſité & dureté à raiſon que par celmouvement & chaleur , la plus ſubtile & hu
mide portion eftant comme fonduë & diſlipee, reſte la plus groſſiere & terreſtre.

De la tunique communedesmuſcles. CHAP , VII.

Subſtance.
PRES ceſte greſſe l'on voit vne tunique eſpanduë par deſſus
Quantné. B
tous les muſcles: à cauſe dequoy elle eſt dice conimune d'iceux .
Sa ſubſtance eft nerucuſe comme de toute autre membrane . Sa

quátité & largeur eſt definie & cerminee des parcies qu'elle cou .
Figure.
căpoſuiion . ure,à ſçauoir des muſcles de l'Epigaſtre , celle qui couvre leſdits
Origine muſcles, & ainſi des autres . Sa figure eſt ronde Sacópofition ,de
veines, arteres, nerfs, & propre chair tiſſuë des trois genres de
fibres. Son origine eſt du Perioſte, la part où les os baillent liga
ment à leurs muſcles ,ou bien felon aucuns, des fibres nerueules & ligamenteuſes del
dies muſcles ,leſquels ſortans à la ſuperficie de la chair , s’vniſſent pour ſa generation .
Orvenanrladite membranedu Perioſte ( come fait tout autre, contenuë ſousla reſte
immediatement ou mediatement ) elle s'aualle ſur leſdits muſcles par leurs tendons.
Que ti quelqu'vn m'obiecte que la preſente membrane ſeparee du ventre du muſcle
vers te ligament,ſemble finir en iceluy:ie reſpons, que la nature de la partie nerueuſe
eſt de fe lier tellemét à vne autre à ſoy ſemblable , que difficilement les peut - on ſepa. C
rer : telmoin les A poneuroſes desmuſclesobliques , & tranſuerſaux, & Peritoine de
Nombre. l'Epigaſtre. Celle qui couure les muſcles de l'Epigaſtre, eſt vnique , ſi vous n'aimez
Connexion. mieux en faire deux:vne dextre, & l'autre ſeneſtre ,diuiſec par la ligne blanche . Sali.
tuation eſt entrela greffe & les muſcles, auec leſquelles parties elle eſt conioin &e par
Vrilisé.
filets plus deliez que filets d'araignee, & par ſes vaiſſeaux auecques les trois principa
Timpera- les parties : & eſt de temperament froid & ſec. Son vtilité eſt de conſeruerles muſcles
mone.
en leur naturelle conion &ion , les preſeruant tant qu'en elle eft, du danger de pourri
ture, qui leur peut aduenir de la ſuppuration qui ſe fait entre les parties ſimilaires 86
ſeparation d'iceux . Et pource feparant la greſſe de l’Epigaſtre, par la diffe &tion du
quel tu comméceraston operation anatomique , tu tegarderas de la coupper, & pre
mier que toucher aux muſcles, regarderas à la bien ſeparer , afin que plus aisément
puiſſes leuer leſdits muſcles , voyant la ſeparation d'un chacun par vne ligneblanche, 2004
laquelle eſt faite de la concurrence des tuniques propres à chacun muſcle.

Definition du muſcle ,&-declaration de ſes differences . CHAPITRE VIIT . D

Definicion
duh muscle. Vſcle eſt l'inſtrument du mouuement volontaire , qui ſe fait en ſix ma
nieres ſimples, c'eſt à ſçauoir, en haut,en bas, deuant,derriere, à dextre, &
M feneſtre : & en vnecompoſee nommee circulaire ou en rond , qui ſe fait
par la continuelle ſucceſſion du mouuement des muſcles ſituez à l'entour
de la partie qu'ils meuuent , ainſi qu'on voit au mouuement du bras du faucon

Camſe da nier, quand il leurre & duit ſes oiſeaux. Il y a certaines parties en nous , quiontmou
mounemens uement ſans muſcle, & auſſi tel mouvement n'eſt volontaire : commelecæur , l'c
des mēbes ftomach , les inteſtins, les deux veſſies , ſçauoir de l'vrine , & du fiel, la matrice &
en rond. pluſieurs autres parties de noſtre corps , ont mouuement , leſquels leur ſont naturels,
qui ne conſiſtent point en noſtrevolonté , arbitre, & deliberation , parce qu'ils n'ont
point de muſcles : toutesfois font attraction , expulſion & retention, qui ſe fait parce
Difference qu'ils onc les trois eſpeces de filamens. Par les filets droicts il ſe fait attraction , &

desmuſcles.par les trauerſiers expulſion, & par les obliques la retention . Les differences des mu
Del’Anatomie. 97
A ſcles,leſquels ſont pluſieurs,fontprinſes de leur ſubſtáce,origine, inſerció, de la
partie
laquelleils meuuēr,de leur forme ou figure,destrous, de la magnitude dela couleur,
de leurlicuation des genres de fibres,dela coherence & cõnexion d'icelles:desceites
d'iceux,deleurs vencres,destendons del'oppoſition d'iceux en leur action , & de leur
office. Deleur ſubſtance:car les vns ſont diēts nerueux,veineux, & arterieux, pource La Jubftanto
qu'ilsont lenſiblement nerf,veine & artere, comme leDiaphragme,lesIntercoſtaux,
ceux de l'Epigaſtre, & pluſieurs autres:les autres nõ,pource queſenſiblemérils nere
çoiuét nerf, veine ny arcere, iaçoit qu'occulement ils en reçoiuent quelque portion
pour eſtre animez, viuifiez & nourris,comme ceux du poignet,& les lumbricaux de
la main & du pied:combien que par aduécure on puiſſe obſeruer quelques nerfs ſen
fiblos bien petits,inſerez en ces muſcles:mais nousmettonscecy pour exemple. Au
cuns veulent que les muſcles differenten leur ſubſtáce,en relle force que les vns ſoiếc
plus charnus, les autres plus nerueux, les autres plus membraneux.
1 Del'origine:car les vns naiſſent des os, comme ceux qui meuvent bras & iambes:
lesautresdes cartilages,comme ceux du Larynx:aucunsdes membranes,qui reueftéc >

1
les tendons, commeles lumbricaux tant des pieds que des mains:aucres des ligamés,
B
cóme ceux de la partie ſuperieure du pied ,quenous appellosAbducteurs des doigts,
ou Pedicux:les autres dumuſcle,commeles deux plus bas de la verge, leſquels proces
dene du Sphinder du ſiege,lesautres n'ont aucune origine. Mais lamembrane,que
nous auons appellee Pannicule charneux, en certains endroits prend chair, & fe faiet
muſcle,comme aux muſcles ſuſpenſoires des Teſticules, muſcle large de la face, & fi
tuveux,au Diaphragme, lequel eſt faict de deux tuniques ( c'eſt à çauoir de la Pleu
retique & du Peritoine)prend chair pres ſon centre eocreicelles. Dauantage , les vns
ſortentd'un ſeulos,commeceux quiflechiſſent& eſtendent le coulde,&c.Les autres,
depluſieurs,comme les obliquesdeſcendans,dorſaux, & pluſieurs du col , leſquels
Sorcene de pluſieurs coſtez des Spondyles. Autres, ſelon aucuns forcent des os, & cara
tilage de l'osPubis,commelesdroitsde l'Epigaſtre.Ce qui me ſemble autrement, du
L'origine
muſcle
faufleur reuerence,d'autantque l'origine du muſcle,ſelon la commune opinion,doit ofteſtimce
eſtreeltimee de la part qu'il reçoit le nerf.Or leſdits muſcles prennent le nerfdeceux de la part
qui ſortée parmy les coſtes.Parquoy à bon droi& leur origine doit eſtre alignee aux quil refosa
C partieslaterales du Carcilage,nommé Scutiforme,commeilſera declaré en ſonlieu. Le nerf.
De l'inſertion :car les ynss'inſerenc à l'os,comme ceux qui mouuent la teſte,bras &
iambes:les autres au Cartilage,commeceux duLarynx,des palpebres,du nez,& obli De Linda
ques aſcendansde l'Epigaſtre :aucuns à tous deux,comme les droits de l'Epigaſtre &fertion.
le Diaphragme:d'autresau cuir ,comme ceux de léures:aucuns aux tuniques comme
1 ceux des yeux:les autres aux ligamens,commeceux du membre viril.
D'auantage de l'inſertion & origineon peut prendre celles autres differences. Auſti
desmuſcles lesvos ſorcent de pluſieurs parties, & s'inſerentà yne ſeulement, comme
ſontpluſicursqui meuuent le bras & le paleron: leſquels ſortans de pluſieurs parties,
c'eſtàſçauoir des Spondyles,s'implantent ſur l'os du bras,ou paleron.Lesautres ſor.
tentd'une partie,& s'attachée à pluſieurs, come celuy qui ſorc de la baſe dupaleron,
lequel s'eſtend &inſere ſur les huictou neufcoſtes ſuperieures,pouraiderà faire la re
D ſpiration:& lesFlecheurs& eſtendeurs des doigts,cant du pied que de la main.Les au.
tres ſortent de pluſieursos,& s'inſerent auſſi à pluſieurs:comecertains ſeruãs à la re
ſpiration,quenous appellos Dentelez poſterieurs,& le Demi-lpineux, qui enuoyevn
tendon àtoutesles coſtes. Les autres ſortes de pluſieurs os,& deſinentauxcartilages
des ſeptcoltes vrayes,comme les deuxcachez ſous leSternon.Outre plus de ces deux
differences enſemble conſiderees,celle difference peut eftrepriſe deſdits muſcles,que
les vns ſortent d'vn os,& s'inſerét au plus prochain, pour iceluy mouuoir & affermir
auccluy,cóme les trois dela feſſe :les autresſortēcd'vn os ſuperieur, ſans s'attacher à
ſon prochain,mais à va autre,cóme les muſcles Couturiers, que nous appellerõsau.
tremene Muſcles longs. De la partie qu'ils meuuét:car les vns fontappellez Tempo. fiDee qula'ipro
ls
raux,pourcequ'ils mcuuent les tempes : les autres ſont dics Maſticatoires, pource menuent .
qu'en forme demeule de moulin ils font tourner la maſchoüere en maſchát les vian.
des,& fone appellez maſcheurs. De la forme oufigure : car lesvns ſont ſemblables à De la fora
rats,& Iczardes,auſquelleson acoupé les iambes,pourcequ'ils ont ventreou corps & me on f
rendon ſemblables à la ceſte,vétre&queue deſdits animaux:au moyen dequoyont gure.
efténommez decenom Muſcle ou Lezard. Tels & ſemblables ſontceux qui Aechil.
i iiij
1
e
ſi eſm
roi re
98 Le t liu

ſent le Carpe, & ceux qui adherent à l'os de la iambe , qui eſtendent le pied : comme
А
aulli le Tenar de la main , & autres ſemblables. Aucuns lont triangulaires, comme ce
luy quilcue le bras,dit Epomis , autrement Deltoïde , & celuy qui le meine vers le
Thorax,nonimé Pectoral. Les autres ſont quadrangulaires, comme le Rhomboïde
Des poin de l'Omoplate ,& lesdeux Dentelez pofterieurs ſeruans à la reſpiration : & ceux du
presqu'on Poignet quifontlamain prone.Les autres ont plusde quatre angles, commel'Obli
guarrez. que deſcendant,& celuy de l’Omoplate qui le ioint auec luy.Les autresſont ronds &
larges , commele Diaphragme: les autrescirculaires, comme les Sphincteresdu ſiege
& de la veſlic.Il y en a d'autresde figure pyramidale, comme le ſeptieſme de l’æil , li
!
tué autour du nerfOptique aux beltes ,non à l'homme . Les autres ſont faicts en for
me de demy - cerclc ou Croiſſant,comme ceſtuy qui ferme l'ail , ſitué autour du petit
angle dudit cil . Aucuns ſont de figure de capuchon ou cahuecde moyne , comme
les Trapezes de l'Omoplate . Dauantage aucuns ſont eſtroirs en leur origine, & lar
ges en leur fin , comme le dentelé de l'Omoplate, & les tranſuerſaux de l'Epigaſtre :les
autres au contraire , comme les trois des feſſes. Aucuns font d'egale largeur , tátà leur
connexion qu'à leur fin , commelesIntercoſtaux, & ceux du Poignet. Autres ſont B
longs & grelles, comme le long dela cuille, qu'auons nommé Couſturier: les autres
ſont longs & larges , comme les obliques deſcendans de l'Epigaſtre. D'autres au con
Des trous. traire, comme les intercoſtaux qui font peu larges.Des trous: car les vns ſont trouez ,
comme le Diaphragme , auquely a trois trous, & les obliques & tranſuerſaux de l'E
pigaſtre,pourbailler iffuë aux vaiſſeaux ſpermatiques ,preparansentree aux Eiacula .
De la ma- toires,reconduits par la tunique Erythroïs : les autres n'ont point de trou. De la ma
gniende. gnicude:car les vo's ſont tres - grands , cóme deux des feſſes: les autres treſpetits, cóme
les huiet petits du col , & lespropres duLarynx , & lesLumbricaux :les autres moyés en
De lia com- tre iceux.Dela couleur : car les vnsſont blancs & rouges commeles Crotaphites,qui
leur. du milieu de leur ventre produiſent leurstendons : les autres ſont liuides , comme le

trois plus grands du Pommcau de la iambe ; laquelle couleur eſt dõnce par la mellan .
ge de la cunique blanche ou Aponeuroſe tendineuſe auec leur chair rouge : laquelle
tunique par ſon eſpeſſeur retenant la couleurde la chair qu'elle ne reluiſe, facilement
repreſente delle couleur.De la ſituation :carles yns ſont ſuperficiels,comme ceux qui
Delafiena.apparoiſſent ſous le cuir & greffe: les autres ſont profonds & cacheż,comme ceux du C
sion . Iarret, & les quatre Gemeaux . Aucuns ſont ſicucz directement ſelon la longitude de
la partic où ils ſont commeceux de la cuiſſe mouuans la iambe ,excepté lePoplitique :
les autres obliquement , comme les obliques de l'Epigaſtre: les autres tranſuerſale

ment comme les tranſuerſaux dudit Epigaſtre. Où noteras, que combien que toutes
fibres de muſcle ſoient droictes, neantmoins nous les appellons Obliques ou Tranſ
uerfalcs,par comparaiſon aux muſcles droits :pource que par la concurrence de leurs
Genre. de fibres,l'vn fait un angle aigu , & l'autre droit. Des genres de fibres : car les vns n'ont
fibres.
qu'vne force de fibres,comme preſque tous les autres en ont deux,venant d'en haut,
& en bas, leſquelles aux yns le croiſent en forme de X. comme aux Pectoraux , &
Maſticatoires:aux autres ne le croiſent point, commeaux Trapezes . Les autres font
Dels cobe tous les trois genres de fibres, commele Muſcle large,couurant la face . Dela cohe.
rence & cö. rence & connexion, ou texture des fibres nerucuſes d'iceux : car les vns ont leurs fi
nexion . bres plus diſtantes en leur origine qu'autre parc , comme ceux des feſſes :les autres les

ont plus diſtantes au ventre ,lequel ils ont fortgros, & leur teſte & queue petite, com. D
me pluſieurs de la iambe, & du bras : auſquels la grăde multitude de chairmeſlee par
my les fibres ,les rend ainſi diſtantes. Les autresles ont plus diſtantes à la fin , comme
legrand Dentelé,ſortantde la baſe du Paleron , ou Omoplate :autres egalement par
De la refle. tout commeceux du Poignet , & les Intercoſtaux. De lateſte : car les vns l'ont char
nuë , & des fibres rares ,comme ceux des feſſes : les autres l'ont totalement nerueuſe,
comme le cres - large commun au bras & à l'Omoplate: & les trois de la cuiſſe, fortans
de la cuberoſité de l'osIſchion . Aucuns l'ont nerueuſe & charnuë, comme le Brachial
tant interne qu'externe.D'auãtageles vns n'ont qu'vne teſte : les autres en ont deux , inthe
comme le flecheur du bras, & l'externe de la iambe . Les autres en ont crois , comme le
Nõde nerf. Triceps de la cuiſſe.Ec eſt à noter que ce nom de Nerfeſt icy vlurpé largement pour
ligament,nerf & tendon , ainſi que dit Galien en ſon livre des Os . Outre plus fauc
entendre quela teſte du muſcle quelquesfoiseſt en haut ;autres- fois en bas ,aucunes
Du ventre. fois au milieu ,comme au Diaphragme : ce qu'on cognoiſt par l'inſertion du nerf,le.
quela decouſtume de s'inſerer au muſcle par la ceſte d'iceluy . Du ventre : car les ons
De l'Anatomie . 99

A ont leur ventre des leur origine,commeceux des feſſes :les autres l'ont prez delcur in
fertion ,ou à l'inſerció meſme,commele Diaphragme : aucuns l'onttoudain apres leur
teſte, comme ceux du Pommeau de la jambe : les autres quelque peu loin , comeceux
qui mcudent les bras en arriere ,& quificchillenc les jambes: aucuns l'ont depuis la te.
fte iuſques à la queuë , comme les Intercoſtaux ,8: ceux duPoignet : les autres l'ontloin
en icur inſertion ,commele Palmaire,& Plantaire.llen y a aulli qui ont deux ventres,
diſtinguez parſubſtance nerueuſe,comme ceux qui ouvrent la bouche, & qui montēc
de la baſe de l'apophyſe Coracoïdede l'Omoplate . Des tendons : car les viis n'en ont
poine,au moinsmanifeſtes,commeceux des leures , & les Sphynderes , Intercoſtaux, Des rõlens
& ceux du Poignec : les autres en partic en ont,en partie n'en ont poinc,comme le Dia
phragme: lequel à l'extremité des fauſſes coſtes n'en a point,mais à la premiere verte
bredes Lumbes , où il deſine, il en a deux . Aucuns vrayement en ont :mais d'iceux les
yns meuuent les os, qai ſont aſſezmanifeſtes,les autres n'en meuvent point , comme
ceux des yeux. D'auantage de ceux- cy les vns les ont larges & membraneux , comme
1 ceux des yeux , & ceux de l'Epigaſtre,excepté les droicts : les autres les ontgros & rõds ,
B comme ceux qui flechiſſent les doigts:aucunsmoins ronds , & plus larges que gros
elpés, commeeſt le cendon fait desGemeaux , & Solaire de la iambe. Autres les ont
courts, comme ceux qui font la main prone : les autres longs , comme le Palmaire &
Plantaire. Outre plus les vns produiſent leurs cendons du bouc de leurs ventres , qui
font aſſez notoires: les aucres du milieu , comme les Croraphires . D'avantage, les vns
produiſent de leur ventre pluſieurs cendons : comme ceux quifiechiſſent les doigts de
La main ,& eſtendent le pied :les autres en font vn ſeulement, quiſe diviſe quelquesfois
en pluſieurs comme les Aecheursdes tierces articulations du pied , & toutes celles des
1 doigts.Autres pluſieurs enſemble ne font qu'vn tendon , comme les trois du Pómeau
dela iambe, & ccux qui eſtendent le coudc & la iambe . Ils ſont tous engendrez ,
lors que les nerfs & ligamens eſpanduspar la chair du muſcle pecit à pecit ſe raſſembléc
C & à la fin deſquelslors qu'ils ſe lient & s'attachentaux iointures : s'ellargiſſent, afin
qu'elles fuſſent mieux Alechies & dreſſecs. De l'oppoſition ou contrarieté de leurs Oppofitions
ađions :car les vns ont en leurs actions muſcles contraires ,comme les flechiſſans, & les deleurs
eſtendans:les autres n'en ont point , comme les Suſpenſoires des teſticules , & les Rele actionso
ueursdu boyau droit, & autres.Del’office: car les vns ſont deſtinez à faire mouuemēs
droicts,comme ceux qui eſtendent les doigts du pied, & de la main , & ſemblables : les
autres å les faire obliques,commeceux quitournantla main vers leCiel , nommez Su . Deloffices 1

pinaccurs: & ceux quila tournent vers la terre,nommez Pronateurs.Aucuns font l'vn
& l'aucre,comme le Pectoral, lequel meine obliquemét le bras en haut & en bas,ſelon Vrilisé de
que les fibres d'enhaur ou d'embas ſe retirent:& droitement,fi toutes enſemble opc. la cognois
renr,comme fait auſſi le Deltoïde & Trapeze. l'ay bien voulu monſtrer ces differen . Sance de la
ces : pource qu'en les entendant on peut mieux prognoſtiquer,& deüement appliquer difference
remedes propres à chacune partie, & faire inciſion en icelle, en cas de necellicé, & fui des oraſelesa
Muſcle a
turc : ou n'en faire point, à raiſon de la partie affligee qui eſt nerueuſe.
parties foma
ples con
Des partiesdu Muſcle. CH A P. IX.
poſres.
Qu'ilt-ce
D PRES auoir entendu que c'eſt queMuſclc ,& les differences d'iceluy , faut que la rete
noter qu'il a parties compoſees ou vniuerſelles, ſimples ou particulieres , du muſcle.
Les compoſees, ſont la teſte, ventre , & queue : les ſimples ſont ligament, Qu'est-ce
nerf,chair, veine , artere, & cunique. Or quant aux compoſees, par la que le ven
tre , la
teſte,eſtentendu le commencement du Muſcle, quelquesfois ligamenteux & ner:
quenë dus
ueux , quelquesfois auec ces deux- làcharnu par le ventre , toute la partie charneuſe: mulde.
par la queue, le tendon fait partie du nerf , parric du ligament, quiconfuſément ſor. Parties pro.
tent du ventre dudit muſcle. Quant aux ſimples, qui ſont fixen nombre , trois ſont presdu
dictes Propres, & trois Communs
. Les Propres, ſontligamens venans de l'os , nerfs muſcle.
venant du cerucau,ou de l'eſpine medullaire , & la chair faicte du ſang. Les Commu . Parties că
munes du
Des ſont la veine venant du foye, ou tronc ſortant d'iceluy : l'arcere venant du cæur,
mufele.
pu vaiſſeau produits par iceluy : & la Tunique :laquelle eſt faicte de fibres nerueuſes & Vriliré des
ligamenteuſes dudit muſcle abordantes ſur la ſuperficie.
parties fiun
Er quantà l'vſage de couces ces parties ſimples ,le nerfcommepartie principale d'i- plis du
cely,luy baille ſentiment & mouuement par le moyen de l'eſprit animal :le ligament muſcle.

i
Іоо Le troiſieſme liure,
le rend fort:la chair concient ſes fibresncrueuſes & ligamenteuſes, & les renforciſt,ré A
pliſſant leseſpaces vagues,quiſont entre leur diuiſion.Dauantage elle conſcrue l'hu
midité lubftantifique, & chaleur naturelle allumee en icelles,comme auſſi les defend
contre touces les iniures externes,s'oppoſant commcombrage , contre la trop grade
chaleur:concre la froidepr,comme couuerture:contre cheute ou choſes contundan .
tes , cõme vn couſſin :córreles vulnerantes,commeun bouclier & defenfoire. La vei .

ne le nourrift,l'artere le viuifie,la cunique conſerue l'harmonic de couces ſes parties:à


fin qu'il n'en ſoit fai & e aucune ruption que lesGrecs appellés Rhegma,ou própte cor
ruption, lors qu'il ſe fait quelque abiccz entre leſdits muſcles, cómenous voyos eſtre,
faiet en Gangrenc, lors que ceſte mébrane eſt gaignce pour la pourriture de l'abſcez .
Declaration particuliere d'une chacunepartie du Muſcle.
CHAPITRE X.

es choſes ainſi conſiderces,reſte que demonftriós particulieremét vne cha. B


cune parcie,àfin que riēne puiſſe eſtre deſire,lifaire ſe peur.Ec pour comen
Definition cer,Ligament propreméc dir,eſt vncpartie ſimple du corps humain, la plus
de ligament terreſtre apres l'os & le cartilage,ſciche,dure,froide & blache,prenātſanail
ſancedes os ou cartilages mediatement, ou immediatement: deſquellespartics les
Ligament muſcles ſortent(au moyen dequoy n'a aucun ſentiment) licen’eſt que d'ailleurs il re-.
n'a aucun çoiue quelque nerf:car par ce moyen les ligamens,qui conſtituent la verge & langue,
ſentiment. & quitiennent ferme ladicte verge,oncſentiment,& 's'inſerent à l'os & cartilage pour
les lier enſemble,forcifier,& veſtir, qui ſont les trois principaux vſages du ligament,
& fediſperſent pareillemenc és membranes & muſcles pour les r’enforcir.
Definition Lenerf,cn parlant proprement, eft aulli partie ſimple de noſtre corps,faicte&nour
denerf. ric d'humeur picuiceux & cras , comme eſt le cerucau , qui eſt ſon commencement &
origine,comme la nucque,ayantſeulement ſentiment, ou aucc ce mouuement. Ily
ades parcies qui reçoiuent des nerfs,quin'ont mouuement volontaire,maistant leu
lement ſentiment,commelesmembranes,veines,arteres,inteſtins,& generalement с
toutes les entrailles. Ie luy nerfeſt couuert de deux membranes dudit cerucau,àſça
Trois mem . uoir,Dure,& Pie : mere, & d'vnctierce y ſſantedesligaments, qui liene l'Occiput és
branes duevertebres,ou bien du Pericrane & perioſte:par les fibres duquel, com.nedu ligament
nerf. n'eſtentenduëautre choſe que filets longuecs & grelles blancs , ſolides, froids, forts
plus ou moins,ſelon leur ſubſtance:laquelle en partie eſt necucuſe & ſenſible , en par
tie ligamenteuſe & inſenſible. Le ſemblable te fauc imaginer des fibres de la chair en
Ily a trois leur genre.Oùfauc noter,qu’entre ces filets il y en a de droits, pour attirer : des obli.
g'nres de ques ,pourrecenic ce qui leur eſt conuenable :des tranſuerſaux, pour expeller ce qui
fibres. leur eſt contraire. Or quand les fibres tranſuerſaux s'eſtendent , leur largeur s'ape
tiſſe: & quand les droits, la longeur s'amoindrift: & quand cous enſemble, tant les
droits,tranſuerſaux, que lesobliques,s’amoncellent en eux melmes , tout lemembre
ſe recire & ride, comme auſſi ſe deſploye & eſtend, quand ils s'allongiſſent. D'iceux
les vns ſont conſacrez aux parties animales,pouraccomplir leur mouvement, & fonc ‫ܕܬ‬
dits Animaux:les autresnomme, Vicaux, aux parties vitales , pour l'ađion du caur man die
& des arteres: les troiſicſmes,aux parties naturelles, tant pour l'attra & ion , retention, TO
que expulſion des alimens, & excremens , & ſont appellez Naturels. Où faut noter KO
que l'attraction d'une chacune partie ſimilaire n'eſt point faite paraucuns des fila
Chuir .
mens (uſdics :mais pluſtoſt par la chaleur allumec en icelles,ou vacuité faite en la chair
paricelle,ou familiarité deſubſtance. La chair eſt pareillement parcie fimple & molle,
faite de la partie plus pure du ſang ,s'inſinuant parmy les fibres des parties ja di&tes, en
lesreueltant pour les vſages ſuſdits. Icelle eſt vne defenſe & rempart contre le chaud
& le froid,contreles chcutes & percuſſions, comme un feucre, ou balle de laine, qui
obeït doucement aux choſesquil'accouchent. Il y en a de trois fortes: Vne plus rou
ge,comme celle des muſcles des animaux ſanguins & parfai& s , à cauſe quelachair
Trois for des veaux encores jeunes, pour la grande humidité du ſang eſt blanche , & des poiſ.
tes de ſons, & autres animaux viuans en l'eau.L'autre plus blanche, meſmes aux ſuſdits ani
chair. maux,comme celle du Caur , du Ventricule & de l'Oeſophague, des Inteſtins, de la
Vellie, & de l'Amarry. La tierce maniere de chair cſt prile pour la propre ſub tmco
Del’Anatomie . 101

A d'un chacun viſcere , comme du Foye: ce qui demeure apresauoir oſté veines , artereš,
runique,& vellic du fiel. Ainſi du Cerucau, des Reins , & de la Ratce. Aucuns adjou
ſtér vne quacrieſmeeſpecefungueuſe & entrelacee, qu'ils attribuent à la ſeule lāgue .
La Veine eſt le vaiſſeau ou cuyau du ſang ,ou matiere d'iceluy , fait de ſubſtance fper- Definitions
matique : lequel en vne ſeule tunique a trois genres de filamens, c'eſt à çauoir,Droits, de wine,
Tranſuerſaux , & Obliques , à l'vlage des filamens ja cy - deuant declarez. L'arrere eſt
ſemblablemene vaiſſeau à lang ,mais plus ſpirituel & Haue,compoſé auſſi de ſubſtance Definition
ipermatique,mais en deux cuniques ,comprenans les trois genres de filamens ſuldits: de Carteres
dont l’excerne eſt deliee, & tiſſuë de filamens droicts, & aucuns obliques . L'Inter
ne,cinq fois plus eſpeſſe que l'autre , eft tiſſuë de filamens tranſuerſaux : & eft nommee
! Artere ,pource qu'elle contient plus largement d'eſprit , comme la vellic de ſang : à
celte cauſe elle eſt ainſi appellee, Icelle ne contient leulement du ſang , mais auſſi des
ferofitez ,qu'il ſoit vray ,Nature a produit deux arceres emulgences , cõme deux vei
nes. Or la conique del'artere eſt beaucoup plus eſpeſſe que la veine , à raifon qu'elle Pourquony
contient yn lang chaud, ſubril & fpiritueux ,& l'eſpric eſtanclubrii & leger, & qui per- ta tunique
peruellement ſemeut,ſeroic en danger qu'il ne s'eſconla ſt; s'iln'eſtoit enclos & reler. de l'artere
B At plus eft
ré dansdes tuniques denſes & eſpeſſes. E quant à la Veine, elle contiene en loyvn
paiſles
lang pondereux & tardifà mouuement , & li ſa tunique eſtoit dente & eſpeſe, il ne
pourroit eſtre diſtribué aux parties circonuoiſines , ainſi ſon veilicé ſeroic abolie . Pre
voyantcela ce grand Architecteur & maiſtre ouvrier de notre corps , a fabriqué les
tuniques des vaiſſeaux contraires à la nature & conſiſtance de la mariere qu'ils con
tiennent.Orcecy eſt grandement à noter , que ces vaiſſeaux, à ſçauoir veines & arre
tes, onevne mucuelle applicationdeleur orifice , qui de l'vne s'ouurēt & desbouchent Abouclea
en l'autre : & ainfi mutuellement ſe communiquent & prennent l'voe de l'autre , le ment des
ſang & l'eſprit par voyes forreſtroites & inuiſibles :toutesfois cela ſe peut aſſez mani. vernes con
feſtement voir de laveine & artere qui ſont au ply du coude ce que i'ay nionſtré aux arteres.
Eſcoles deMedecine,faiſant les diffcätions. Quant à leur diuiſion , & autres vtilitez ,
elles celeronc di &tes en leur lieu .
Action du Muſcle , de comme il ſefaict& accomplit.
C L'a &tion du Muſcleeft de mouuoir , ou affermir, & aſſeurer la partic en laquelle il
C s'inſere , ſelon la determination de la volonté : ce qu'il fait quand ilſe retire vers ſon Action doo
origine,laquelleeſt ( comme nous auons dit , & pouuonsentendre de la mode d'ope muſcles
rer ) à l'endroit par lequel le nerfs'inſere.

Des Muſclesdel'Epigaſtre . CHAPITRE XI .

YANT iuſques icy declaré que c'eſt que Muſcle, & differences d'iceluy ,en
ſemble ſes parties , tant ſimples que compoſees,& l'vlage d'une chacune
en iceluy, & ſon a &tion & maniere de l'accomplir & parfaire , il faut mainte
nant venir à l'explication particuliere d'vn chacun , commençant à ceux de
l'Epigaſtre, comme aux premieres en l'ordre de diſfe & io; leſquels ſont huict ,ſçauoir
cſt,quatre obliques,deux de chacun coſté ,deux droicts, vn de chacun coſté : & deux
o tranſuerlaux, vnde chacun coſté ,leſquels ſont ſemblables en force, grandeur & a . Huiclmal
des de l'E
& ion:i'entends ſi on conferel'oppoſite auec l'oppoſite, comme l'Oblique deſcendant
d'un coſté à l'Oblique deſcendant de l'autre , & ainſi des autres . pisufre.

Nous pouuons outre ceux - cy adjouſter les deux petics,qui des os du penil mon .
tent ſur l'inſercion des droiếts, en forme pyramidale , que inonſieur Syluius appelle muſcles o
Succenturiatos: nous les pouuons appeller triangulaires du Penil , ou acceſſoires. Des bliques des
deux obliques Grucz de chacun coſté,vn monte, & l'autre deſcend :au moyen dequoy cendans.
fone appellez Obliques aſcendans & deſcendans. Or les premiers d'iceux qui le
preſentene premierement ſont les deſcendans : la ſubſtance deſquels eſt en partie ſan . Subfiance.
guine, & en partie ſpermatique, d'autant qu'ils ſont charneux , nerueux,& ligamen
teux,veineux,arcerieux , & membraneux :coutesfois plus charneux , ayant elgard à la Aui . liure
partiepardeſſus toutes les autres dominantes , où regardant Hypocrates , il a diteltre des Praktu
chair ſimple.Leur magnitude eſt moyenne entre les plus grands & plus petits. Leur res,ſens.12 .
figure eſttriangulaire.Leur compoſicion eſt de toutes les parties cy -deuantdeclarees. Qusnis : é.
Lenombre eſt de deux,comme nous auons dit . Leur ficuation eſt oblique , prenant Figure.
Coposition,
leur cómencemét és ligaments dentelez de la fixielme & ſeptielme des vrayes coſtes, Yomb re.
& decoutes lesinfericures ,partic anterieure de leurs muſcles plus avant que d'elles: Situation .
102 Le troiſieſme liure

d'où ſans deſcendre aux vertebres des Lumbes , les vont inſerer charnuës au ſourcil
A
externc, & ſupericur de l'os Ilion , & membraneux au demeurant dudit ſourcil infe .
rieur de l'os Pubis & ligne Blanche.Voila la commune deſcription desmuſcles Obli
qucs deſcendans:coutesfois Columbus les deſcric bien autrement , & eſtime qu'ils ſe
Opinion
contraire de terminée en la ligne Blanche ,non en l'os Pubis : car comme ildir, Pourquoy s'intere.
Columbus.'roicnr ils à l'os Pubis quin'a point de mouvemét : Mais pource que ce ſeroit vne cho
ſe infinic dedeclarer tout au long les opiniós des Anatomiſtes, ie me cócenceray d'en
Connexion. aduertir le Lc &teur en paflát.Leur connexió eſt auec les Obliques aſcendás, couchez
Tempera- par deſſous cux , & aucc les droicts.Leur téperament eſt double : vn chaud & humide,
ment .
appartenant au ventre, & partic charneuſe:l'autre froid & ſec,appartenantà ſa partie
ligamentcule & cendineuſe.Leur a & tio eſt de tirer les parties,clquelles ils s'attachent,
Aition , verslcur originc, ou les affermit enſemble ,come nous auons dit de tout muſcle :mais

particulicrement(ſeparant chacun à par ſoy )cirent la hanche obliquemét vers le car


tilage Scutiforme.S'enſuiucnt maintenant les Obliques alcendans, leſquels ſont de
Obliques melme ſubſtance, quarcite ,figure,compoſition ,nombre,& temperament que les ſuf
afiendans. dits . Leur ficuation eſt entre les ſuſdits , & Tranfuerſaux , auec leſquels ils ont conne
B
xion ,principalementpar les vaiſſeaux qui leur ſont donnez des parties ſubiacétes . Ils
montent tout charnus de coure la ligne, autrement diete Eſpine des os des Iles , aux
Situation. extremitez des fauſſes coſtes,leſquelles il sēble de receuoir cát par deſſus que pardel.
Connexion. Tous :eſtás charnus iuſques à la quarrieſme,& de la faits membrancux, s'en vont à la li.
gne Blanche par ync double Aponeuroſe, laquelle paſſe tant par deflus que par def
Tous les muſcles droits,ainlique facilement on peut vcoir depuis le nombril en bas .
Ils prennent leur origine & commencement, quant à leur partic charncule , ſelon la
ligne droi& e, ou eſpinedes os des lles , vn peu plus bas que les deſcendans ne deſi.
gnent fclon leur meſmo partie charncuſe :mais quant à la membraneuſe de l'os Pubis ,
par deuant & par derriere , des eſpines de l'os Sacrum , & des vertebres des Lumbes,
Origine.
montanten haut obliquement vers la ligne Blanche , à laquelle ſe finiſſent & termi

.
nent ſelon leur Aponeuroſe ou tendon membraneux (lequel ſemble paſſer tanc del.
ſous que deſſus le muſcle droict , & plus clairement ſous I'vmbilic ) å ſelon la partie
charneufe à l'excremnité de toutes les fauſſes coſtes, leſquelles ſemblent prendre & re .
с
ccuoirtint deſſus que deſſous. Et d'autant que ces muſcles ſe terminent à la ligne
Vſage. Blanche,ils ont auſſi vn autre vlage, cõmun toutesfois à tousles muſcles de l'Epiga

ſtre, quieſt de comprimer les boyaux.Leur a & ion cft (s'ils operent enſemble )de tirer
Action. la poitrine en bas, & dilacer le Thorax , & operant chacun à part , le tirer vers la hache
obliquement. A presceux -cy viennentles Droits longitudinaux,ainſi appellez,pour
ce qu'ils deſcendent ſelon la rectitudedu corps , ioint auſſi qu'ils ont leurs fibres droi
Muſcles
droits. tes.Quant à leur ſubſtance, & autres choſes,quiſont ſemblables aux precedens,nous
n'en parlerons point,pour éviter prolixité:ce quenous ferons auſſi en declarat les au

Sublanc . tres parties . Leur ficuatio eft en la partie plus haute du Ventre ,bornane ( ſelon Galien
Sicwatton . au liure de l'vſage des parties)l'Epigaſtre generalement pris, dit autrement vērrein
ferieur. Ec ſont diuiſez notanıment par la ligne Blanche, iuſques au deſſous du nom.
bril : auquel endroit apparoiſſent eſtreioints l'vn auec l'autre iuſques à leur inſertion .
Ils prennent leur origine,non de l'os Pubis, comme aucuns veulenc,ains comme l'en .

Origine. tree de leurs nerfs monſtre, naillent des parties laterales du cartilage Scuciforme,
come de l'extremité de la fixieſme,ſeptielme,& hui& ieſme coſte :& fe finiſſent à l'os
Pubis ,où ils font yn commun cendon affez gros & court. Syluius eſtime leur com .
mencement eſtre à l'os Pubis , & auſli Veſalius & Colūbus,d'autantqu'ils ne peuuent
eſtreinſerez à l'os Pubis,qui n'a point de mouuement. Econt ceſdits muſcles certai.
nes interceptions nerueuſes & tranſuerſes, le plus ſouuent trois , deſquelles Galien
n'a point faic mention , combien qu'elles ſoient trouuees auxSinges,pour la corrobo .
ration d'iceux,comme auſſi en leur partie de deſſous, quatreveines, & quatre arteres:
dont les vnes viennent des parties ſuperieures, les autres des inferieures. Les ſupe
rieures nommees Mamillaires deſcendent des Axillaires par les parties laterales &
inferieures duSternon ,baillantcour le long de leur chemin petitesportionsde ſoy au
Mediaftin , & enuiron la quatrieſme& cinquieſme coſte aux Mammelles , doù elles
prennent leur appellation: & le demeurant forcans par lesparcies laterales du cartila
ge Scuciforme,s'inſere dedans leſdits muſcles, deſcendans preſqueiuſques à l'Vmbi.
lic:auquel endroits’vniffent manifeſtement ( i'entends veines auec veines , arteres a.
uccarteres ) aucc les Epigaſtres, qui de la partie ſupericure des Iliaques montent de
cha

?
de l'Anatomie .
103

chacun coſté par deſſous leſdits muſcles, iuſques au'rencontre des quatre ſuperieu. Abouche,
A niei nosable
del
ses.Et pour trouuer l'vnió deſdites veines & arteres à l'endroit, ou quelque peu dos reines
ſusl'Umbilic,ilte faut ſuiure canc les ſupericures qu’inferieures, bien auant dedans la mammelli
chair failanecouler le ſang de haut en bas, & debasen haut,à meſure que les detc ou res avec les

uriras , iuſques à ce que tu ayes çrouuéleur connexion , laquelle ce ſera apertement de- Epsg altri
monſtree ,lile ſang coule de l'vne en l'autre : autremenc il fera impoſible , ou cres -dif. queso ,
ficile de l'apperccuoir, pour la tenuicé des vaiſſeaux exangues : ce que l'on n'a peu co
gaoiltre par cy.deuant .Quant à la neceſſité de telle connexion des mammelles avec
l'Amarry ( combien qu'aucuns s'en mocquent ) elle eſt toute manifeſte en la nour
riture de l'enfant, les nourrices perdans leurs mois lors que le laiet leur monte aux
mammelles: & au contraire perdans leur laict , leurs mois leur coulenr abondam
ment . Car n'eſtoit cela ,dequoy ſeruiroit telle connexion de vaiſſeaux, qui eſt depuis
les mammelles iuſques à l'Amarry :aux parties laterales duquel ſont produites veines
& artcres de la racine des Epigaſtriques,ainſi que nous verrons par la diſflection . Car
à la verité les veines Epigaſtriques , lelquelles en montant rencontrent les Mammil .
laires , ne vont à l'Amarry , mais ſont fort prochaines , & fortent d'vn meſme tronc
B
auec l'Hypogaftrique veine de l'Amarry.L'action deſdits muſcles droits ,eſt d'appro
cher les parties H pogaſtriques aux Precordiales , ou Hypochondriales. L'uſage le
lon Columbus cſt de tirer le Thorax en bas , afin qu'il ſoit dilacé. Et faut icy noter,
: que ſur l'extremité de ces muſcles , nature en a produit ( comme nous auõs dit) deux
autres petits de la partie ſuperieure des os barrez, qui ſont de figure triangulaire, Muſcles ara
: pour la prote &tion de leurgros & commun tendon , afin que par iceux il fuſt conſer- ceflores of
ué & defendu de couces injures cant internes qu’externes . Aucuns veulent ( ie ne ſçay triãgulaires
i pour quelle raiſon ) qu'ils aydent à l'erection de la verge , Columbus eſtime que ces de l'os Pk
bis.
muſcles ne doiuenc eſtre ſeparez des droiêts, & que ce ſont ſeulement principes char
nus d'iceux : mais Fillopius au contraire prouue cuidemment que ce ſont muſcles ſe
Muſcles
parez , & declare leur vlage.Reſte maintenant à pourſuiure lestranſuerſaux , leſquels cvāfuerſaux
lont ainſi appellez à caute de leurs fibres, leſquelles auec celles des muſcles droi & s, de l'Epiga
fone vn angle droict. Leur figure eſt quadrangulaire. Leur ſituation eſt par deſſus la stre.
plus grande partie du Peritoine , aueclequel ſont conioin & s,& ſifort adherens, qu'à Figure.
Situation .
grand peine les peut -on ſeparer d'iceluy . Ils prennent leur origine des Apophyſes
Origine.
des Lumbes,du ſourcil , ou bord de los llium , des Apophyſes tranſuerſes des verte

bres des Lumbes, & extremité des fauſſes coſtes,contre l'opinion de pluſieurs , vain
Aetion .
cuspar l'inſertion du nerf, & finiſſent à la ligne blanche ainſi que tous les autres . Leur
a&tion eſt decomprimer les inteſtins,principalement à l'expulſion des excremens.Et
L'utilité
outre ces vlages particuliers d'vn chacun de ces muſcles , il faut entendre , que tous
comune de
enſemble ſeruent de muniment & defence aux parties ſubiacentes, & aydent à l'ex
tous les mufa
pulſion, ſoit d'excremens ou du Fætus , ou de l'air à l'exhalation de la voix , comme cles de L'E
parexperience nous voyons en ceux qui ſonnent les trompettes , & autres inſtru .
pigaſtre.
mens ſemblables. Orleſdits muſcles preſſent le ventre egallement de toutes parts, & Bille utilité
le Diaphragme aydé par les muſcles intercoſtaux pouſſe parhaut; qui fait que les ex . du Dia
cremens ſone iettez par le ſiege: & n'euft eſté le Diaphragme , leſdits muſcles euſſent phragme.
aucane preffe les exciemens par haut : c'eſt à dire par la bouche que par bas . Ec ce n'eft
allez que les muſcles de l'Epigaſtre, & le Diaphragme, & les muſcles intercoſtaux
D compriment le ventre , mais il faut auſſi que ceux du Larynx ſoient clos : car fion
auoit labouche ouuerte , les excremens ne pourroient bien ſortir ,à raiſon que la bou
che eſant ouuerce, l'haleine ſort, & l'effilation qui fait l'expulſion dela matiere fecale,
ſera empeſchée & retardee. Et pource les Aporicaires lors qu'ilsdonnentvn clyftere,
commandent au malade tenir la bouche ouuerte , afin que le clyftere ſoit mieux

ierté & retenu : ce qui ne ſe pourroit faire eſtant fermce, attendu qu'il n'y a rien
en nous de vuide , & que le clyſtere ne pourroit trouver place, ſinon qu'en entrantil
pouſlaſt l'air quicít en nouspar la bouche, qui eſt cauſe que ne faiſons nullc efllation
& cxpulſion .

к
104 Le troiſieſme liure ,
A
La premiere figure du ventre Declaration de la premiere figure

inferieur. du ventre inferieur.

AAAA Monſtrēt la circonſcription


du Peritoine ſcparc des
muſcles de l'Epigaſtre.
e
ur BB La ligne blanche continuce
' ༦::ང ssit :. :༌དeཔུ་cངོ (དtང༌་་་དང་༥་
it depuis le Cartilage nommé
a bl M
K Scuciforme , iuſques à l'os
Pybis : en laquelle adhe
rent les membranes des
muscles de l'Epigaſtre .
C Le nombril referue à la dif
ſeation des muſcles pour la
B
demonſtració des vailleaux
V mbilicaux.
DD Les vaiſſeaux Spermatiques
deſcendans par les proceſ
fus du Pericoinc pour aller
aux Teſticules .
EE Les veines & arreres Epiga
Atriques , montans en hauc
par les muſcles droicts , &
Pericoine.
FF Les veines & arteres mam .

millaires deſcendantes, tanc


par les muſcles longitudi.
naux , que par le Peritoine ,
iuſques à ce qu'elles ſe ioi
gnent par Anaſtomoſe aucc
les ſuſdits. G
G Vne portion des veines venant au Peritoine de la propagation de la veineAzy.
gos. H " Le muſcle tranſuerſal ſeparé de la ligne Blanche vers l'eſpine. I L'os
des Iles deſnué de chair. KK Les muſcles longitudinaux renuerlez en bas, el
quels appert la plus grande portion des veines & arteres Epigaſtriques. LL Les
deux petits muſcles coadiuteurs aux longitudinaux, leſquels aucuns diſent eſtre pour
l'erection de la verge . M Le cartilage Mucronata.

De la ligne Blanche , & du Peritoine.

CHAPITRE XII.
onden

A ligne Blanchen'eſt autre choſe que la termination des muſcles ſuf


Que c'est dits, fituec au milieu du vérre : & eſt appelce Blanche , tant à raiſon de D
que de la ſa couleur,que pour autát qu'il n'y a pointde partie charneuſe ny del 2
ligne Blan ſous ny deffus elle.Ec eſt plus large par deſſus le nombril , & plus eſtroi.
cbe.
te par deſſous, d'autāt queles muſcles droits s'yniſſent.S'enſuit main.
cenant la tunique ou membrane nommee Peritoine,pource qu'elle eſt
Peritoine. tenduë tour à Pentour de cour le ventre inferieur , & particulierement de chacu .

ne partie contenuë en iceluy, leur donnant vne tunique commune . Sa ſubſtance


Subſtance, eſt ſpermatique, comme de toutes membranes. Sa quantité en profondeur eſt
Quantité. fort petite : car il eſt ſemblable à vn parchemin delić , & fi eft inegale ,tant aux hom .
mes qu'aux femmes ,ſelon diuers endroi& s : car aux hommes par deſſus le nombril,
il eſt plus eſpais & fort qu'au deſſous d'iceluy , afin qu'il endure & ſouſtienne la di.
ſtenſion qui ſe fait en cet endroict par le ventricule , quelquesfois trop remply ཀུག
de viandes:le contraire eſt aux femmes, leſquelles par deſſous le nombril ſemblent
l'auoir double , & plus fort & denſe qu'aux parties ſuperieures du nombril , au .
quel lieu elles l'ont ſemblable à celuy des hommes pour meſme raiſon , afin qu'il
de lAnatomie .
105

1
A peult mieux porter la diftention faite par le Focus. La largeur & lögucur eſt cognuë
par la circonicription du ventre. Sa figure cft ouale
, produiſant certaines apophyſes, Figura
comme doigts de gand, tant pour conduire tes vaiſſeaux ſpermatiques, & muſcles ſu
ſpenſoires desteſticules,& ramener les eiaculatoires , que pourdoner tant auſdits te .
fticules , qu'à coutesautres parties naturelles couuercure , comme nous auons dit . Sa
cöpoſition eſt de petites fibres membrancuſes & nerueuſes aucc petites ramifications Copofitions
des veines & arteres qu'il prend de ſes partics adherantes pour la nourriture & vie . Nombre.
Quant au nombre,il eſt ſeul & par tout vny.toutesfois ſelon Galien au premier liure
1 De jemine,ileſt percé à l'endroit que les vaiſſeaux ſpermatiques deſcendent aux teſti
cules : mais à la verité il ne faut point appeller cela crou,mais apophyſe & production ,
come la voye d'vn gand ainſi que nous auons dit.D'auantage les recens Anatomiſtes
ont icy obſerué, que le peritoine eſt double ſous le nõbril , & qu'entre ceſte redupli . Situation .
cació les arceresvmbilicales , & l'vrachus montent au nombril.Sa ſicuation eſt, comme
nous auons dit ,tour à l'entour des parties naturelles , que nous auons appellccs con.
Connexion
B tenues,auec leſquelles il eſt conioinēt par la tunique qu'il leurbaille : tout ainſi que de
ſes parties laterales auec les vertebres ou Spondyles des lumbes , des ligamés deſquels
ou pluftoft du Periode illec posé , prend ſa naiſſance,& ſes parties compoſantes. De ſa
partie interieureil eſt conioinet auec l’os Pubis , & de la ſuperieure auec le Diaphrag- Origine.
me lequelentierement il reueſt ſelon la partie inferieure : & de la partie anterieure &
exterieure,auec les muſclestranſuerſaux ,deſquels tres difficilemēc il ſe ſepare à cauſe
de la complication des fibres d'iceluy auec ceux de la membrane propre deſdits muſ.
cles : laquelle membrane ſelon Galien au fixieſme de la methode., eſt de la compoſi
tion dudit Peritoine . Parquoy ne le faur elbahir , ſi en voulant ſeparer les deux cuni.
! Temperas
ques,facilemét on les deſchire & rompt. Quant à ſon temperament , ileſt froid & ſec, ment.
come routes autres membranes,ayant pluſieurs veilitcz. Dont la premiere eſt de cou
urit & enuclopper toutes les parties du ventre inferieur, & l'Omentum ,à ce queledit viilité
Omenrum en grandes compreſſions & autres grands mouuemens ne ſe miſt & inſe.
raſt encre les diſtinctions & leparations des muſcles, comme il ſe fait queiquesfois és
Noras
playes de l'Epigaſtre ſi les labies de ſon vlcere ne ſont bien reunies : & lors on void à
C l'endroi & del'vlcere,cumeur faite par les inteſtins ou l'Omentum , leſquels deſcendet
hors du Pericoinc parmy les muſcles, dont s'enſuiuent grandes douleurs , comme
l'on void aux Sargues . La ſeconde vtilité eſt, qu'il ayde à expeller les excremens, có
primane de la parricancerieure, tout ainſi que le Diaphragme de la ſuperieure, com
me deux mains ioinetes, le ventricule & les inteſtins, parties dedices à l'expullion des
excremens. La troiſieſmeeſt, qu'il defend apres l’excretion , que leſdites parties ne
ſe rempliſſentde vent , en les comprimant & refferrant : leſquels vents introduiâts à
raiſon de leur qualité , pourroient exciterintemperature & douleur aufdites parties.
La quatrielmesederniere , eſt de contenir coutes les parties en leur lieu naturel,& les
lier principalement à l'eſpine du,dos,afin que par grands & violents mouuements,
comme ſaules & cheutes, leſdites parties ne ſorcent hors de leur place. Finalement
il fautentendre , que ledit Pericoine le peut grandement eſtendre, ainſi que nous
voyons aux hydropiques , & femmes groſſes, & aux tumeurs contre nature.

De l’Omentum , dit du vulgaire Coëffe, & des Arabes Zirbus.


D CH A P. XIII.

PRES les parties contenantes ſuiuent les contenuës: deſquelles la pro


miere eſt l'Omentum , autrement dit Epiploon , vulgairement la Coëf
fe, pource qu'il nage, & eſt rendu entierement par deſſus cous les inteſtins
le plus ſouuent,laquelle reſſemble à vncrets à prendre poiſſon. Sa ſubſtá Subſtances
ceclt adipcule & fpermatique. Sa quantité en profondeur eſt plus groſſe ou plus dc. Quansité
lice, ſelon le temperament des hommes . Sa largeur eſt limitee par la partic ante
ricure & laterale des inteſtins. Sa figure eſt comme vnegibbeciere, à cauſe qu'il eſt Figure.
double Sacompoſicion eſt degreſſe,vcines,arteres , & d'vne membrane,quideſcen- cöpoficion,
dant de la partie gibbeuſe du ventricule , & caue du Duodenum , & ratre ſus les inte.
ftins, ſereflechitdu pecie ventre iuſques au plus haut du Colon . Il eſt ſeal & vnique, Nombre.
fizuć ( comme nous auons dit ) ſur les inteſtins: & eſt conioin & principalement auec situation.
les premieres vertebresdes Lumbes, duquel endroit aux beſtes il ſemble prendre la connexion
k ij
106 Le troiſieſme liure ,
tunique comme en l'homme de la partie caue de la racce, & la gibbeuſe du ventricu. A
le,& caue de l'Ecphyſis, & s'en aller finir redoublé à l'anterieure & ſuperieure de l'in
teſtin Colon . Ecc'eſt pourquoy Galien'a eſcric au ſixieſme liure de l'adminiſtration
Anatomique ,que la ſuperieure membrane de l'Epiplooneſt attachee au ventricule,
& l'inferieure à la partie la plus laſche de l'inteſtin Colon : des vaiſſeaux deſquelles
Tempera- parcies ilprend ſes veines,arceres & nerfs. Son temperament aux maigres eſt froid &
meni. ſec,àraiſon qu'en telles gens il eſt ſansgreffe : & aux gras froid & humide, à raiſon de
Valité. la greiſe. Son vtilité eſt double: vne, pour eſchauffer & humecter les inteſtins, & leur
aider à faire concoction ,combien qu'il le face paraccident, çauoir eſt pour eſtre pre
micrement eſchauffé du ſang & eſprits de ſes vaiſſeaux , ou pour les parties ſubiacen
tes , pour empeſcher de la denſité de la greſſe, tant que l'airfroid ambient ne penetre
au dedans, que auſſi quelachaleur internene ſe diſſipe au dehors ,pluſtoſt que de fa
nature. L'autre vtilité eſt, qu'en defaur d'alimens aux grandes abſtinences il nourrit
& entretient par quelque temps la chaleur naturelle , tant du ventricule que des au
tres parties, comme celmoigne Gal. au quatriefme de l’vſage des parties. Dauantage B
Galien. faut entendre,qu'à la rupture ou dilatation du Peritoine en la partie inferieure, ledic
Omentum defcend dedans le Scrocum , dont celle affe &tion eſt nommee Epiploce ilico
Epiplocele. le :& aux fêmes trop graſſes deſcend entre la veſlie & le coldel’Amarry: lequel em OKU
peſche par la compreſſion que la femence ne ſoit receuë en ſon integrité & vertu de
dans lacapacité dudit Amarry,& conlequemment empeſche la conception . Outrea
plus, lors qu'ila eu perdition de la lubſtance,comme playcou autre choſe, la partie fio
Cauſe de
llerilué aux tuee à l'endroic,demeure froide,pourles railonscy deuant alleguces de la chaleur.
‫با ما‬
fémes grafi
fes. Laſecondefigure du,ventre inferieur.
A
AAAA Monſtrent le Peritoine diuisé
ſelon la ligne blanche & de
l'vmbilic, iuſques aux Iles , & 20.000

par apres renuersé ainſi que


les lettres te monftrent.
H B Lenõbril ſeparé du Peritoine,
с La veinc vmbilicale entrant G
dans la cauité du foye.
DD Les deux arteres vmbilicales
deſcendantes aux arteres fa
crecs.
E Le Porus Vrachus , fi aucun en
y a à l'homme , deſcendant au
fons de la veſſie , como
F. La vellic ou fons d'icelle .
G La connexion du Peritoino
auecques la vellie.
H La face anterieure du ventri.
cule deſcouuert cant du foye
D .Co
A que du Pericoine ,
IIII L'Omērum ou Zirbus, ou Epi
ploon, eſtendu par ſus tous les
inteſtins: à cauſe dequoy a eſté
nommé Epiploon , commena
geant ſur les inteſtins.
2920
KKKK Les veines & arteres qui ſe iet
tent tant de la partie dextre que ſeneſtre au fons du ventricule : auecques la diſtribu ,
tion d'icelles par deſſus l'Omentum . LL Le foye.

L
de l'Anatomie . 107
1
1
A Du Ventricule . .CHAPITRE Tv
XIV

AINTENANT faut parler du ventricule, qui reçoit les viandesneceffai


1 res à tout le corps,inſtrumentde l'appecit, quinous fait deſirer les viandes
1
par le benefice des nerfs qui sõr en ſon orifice fupericur & en toute ſa ſub - Subfiance:
Itáce, la ſubſtáce du quel eſt pl’ſpermatique que sāguine,à cauſe que pour
1
vne membrane charnuë ilen a deux nerucuſes. Sa quátité eſt diuerſepourla varieté Quantités
des homes,deſquelsles vns boiuēt & mangēc beaucoup,les autres moins:les vnsplus
gráds, les autres plus petits:qui faitqu'on nee'en peut bailler vraye certitude.Sa figu. Figure.
Peelt ronde& oblongue, lemblable àvne muſetce ou cornemuſe : & eftcomposé deCopofition.
deux cuniques propres, & vnc commune venant du Peritoine, enſemble de nerfs, vei
nes,& arteres,& deſes propres tuniques. L'interne eſt membraneuſe , tiſſuë de fila
menes droicts pour attirer les viandes en temps de neceſſité : & s'eſtend iuſques à la
bouche, au moyen dequoy les affe ions d'une partie ſont communiquecs à l'autre.
Icelle runiqueprend fonorigine des membranes ducerucau , quiaccompagnent les Origine:
B nerfs de la troiſieſme & quarrieſme coniugaiſon deſcendantà la bouche, & d'au
ties apophyſes deſcendantes par lesaucres trous de la teſte. D'où on peutcirer vno
autre raiſon, outre celle qu'onallegue ordinairement des nerfs de la lixieſme con
jugaiſon , pourquoy és playes de la teſte leventricule compatit ſi promptement au
cerueau. L'externe plus charnuë & eſpeſſe tiſſue de fibres obliques pour retenir
& expeller, prend ſon origine du Pericrane , lequel en telles parties , depuis le com
mencement de l'Oeſophague, prend certaines fibres charnuës. Les nerfs font en
voyez audic ventricule dela ſixieſme coniugaiſon ,ainſi qu'ilte ſera demonſtré en ſon
licu. La veine & artere viēnent de la Gaſtrique, Galtrepiploique, Coronaire,& Sple Veine
nique,desdiſtribucions de la ſeconde tierce& quacrietme de la veine porte , & tier Artere.
ce de l'artere deſcendantes aux parties naturelles, ſitoſt qu'elle eſt ſortie hors du
Diaphragme, commeauſſice ſera demonſtrécy apres ſur la diſtribution deldies vaiſ
ſeaux. Quant au nombre , il eſt ſeul & vnique, ficué principalement & ſelon la plus
grande partie au coſte ſeneſtre, entre la ratre & la partie caue du foye, & les inteſtins: Nombre.
afin que parla chaleur deſdites parties,commed'un feu allumé entour vn pot, il puiſ
femieux cuireles viandes. Ieſçay que Galien dit au quatrieſme liure Devlupartium,
que ſelonla plus grande partie il eſt au coſté droit : mais au ſens de la veuë eſt au con
traire,& la raiſon :car d'autant qu'il reſte plus deplace aucoſté gauche,pource que la
ratte eſt plus petite que le foye , ila eſté raiſonnable que la plusgrande partie du ven
tricule fult au coſté gauche. Sa connexion particuliere eſt auec l'Oeſophague & les Connexior .
inteftins par ſes deux orifices, deſquels nous parlerons tantoſt : par ſes nerfs auec le
cerueau , par les veines auec le foye & la ratte, par les arteres auec le cæur , & par la
membrane commune auec coucesles parcies naturelles. Son temperament aux hom. Těperamin.
mes bien habituez eſt moderé, à cauſe qu'ileſt fait de parties prelque cgales, à ſçauoir
languines & ſpermatiques : ou ( commc veut Galien au neufielme de la mechode )
froid de ſoy , & de la compoſition ; & chaud à cauſe des parties voiſines & circumia
centes:aux autres plus chaud ou plus froid, ſelon les diucrſes complexions & habitu
D desdescorps. Celuy doit eſtretenu & eſtimé bien temperé, lequelattire fort bien à Signes de
ſoy la viande & le bruuage, puis le retient & embraſſe iuſques à ce qu'elles ſoient leftomach
bien tema
cuitres & digerces, & reduitces en ſuc & creme,que les Grecs appellent Chylus: & fina ré
1
lementqui reictce & pouſſe hors les excremens & ſuperfluirez de la premiere conco.pe .
ction ,oucuiſſon faite en iceluy . Or l'eſtomach ,quicit cropchaud ſc cognoit,d'autant Signes de
qu'il cuic mieux les viandes dures & difficiles à cuire , comme la chair des bæufs,æufs peltomach
durs,moruë,viandes froides, & autres ſemblables , que les molles & qui facilement ſe trop shaud.
cuiſent:ce quieſtmanifeſte d'un petit poullec roſty à vn grand feu ,qui ſera pluſtoſt
deſſeiché & bruſlé , que cuit. Auſti il corrompt & conuertit les viandes qui aisément Signes
ſecuiſene , & les change en crudité : pour ceſte cauſe ilprouoque des rots puanes de leftomachde
ſenccur,comme ſont les æufs pourris. L'eſtomach qui eſt trop froid', appete grande trop froid .
mert à manger,& cuit lentement les viandes,principalement cellesqui font froides, Quelle est
& de difficilecuiſſon : audi facilement s'aigriſlenr en iceluy , qui excite des rots aigrestation de
à la bouche. L'action du bien remperé eſt double : vnecommune, l’aurre propre. l'eftomach
Lacommune et de mixtionner & cuire les viandes pour la nourriture, tant ſienne bientëpert,
K iij
108 • Le troiſieſme liure ,
que de toutes les autres parties du corps , apres l'elaboration faide du foye,avant la A 0

quelle le ventricule ne iouyc du Chylus ( qui eſt commeorge mundé , lequel est en
L'eftomach uoyé aux inteſtins) que pour ſe refroidir & hume &ter à l'encontre des parties circum
elt ausbeur jacences eſchauffantes & deſſeichantes, & à ceſte cauſe eft dit autheur de la premiere
de la pre. conco&ion . La propre eſt d'attirer, retenir & aſſimiler ce qui luy eſt convenable , &
miere con- expeller ce quiluy eſt ouilible , ou en qualité , ou en quantité, ou de toute ſa tublian .
coction , ce, quieſt faite tant pour ſa chaleur,quepour euiter vacuité en ſa chair ſpongieule, &
continuellement elpeſſe & leiche par la chaleur allumee aux parties ſolides & fpera
Double ori matiques. Outre toutcecy,fautnoter que ledit vétricule a deux orifices, à ſçauoir vn
faceduven-
ricule.
ſuperieur nommé l'eſtomach ,& vulgairementcæur;& l'autre inferieur,nominéPy
lotus. Le ſuperieur eſt ſitué en la partie ſeneſtre, prochaine de l'eſpine du dos : & eft
beaucoup plus ample que l'inferieur , à railon des viandes quelquesfois mal mar.
chces, & autres gros morceaux & durs , que l'homme aualle & tranſgloutit. Dauan.
tage il eſt fort ſenſible , à caule que c'eſt l'autheur& lieu de l'appetic, au moyen des
nerfs, leſquels principalement tiſſent ledit orifice , ſe croilans enſemble comme rets,
B
dont ila vn ſentiment, par lequel il cognoitſon indigence & inanition, relueillant &
aiguillonnant l'animal à chercher ſa nourriture. Combien que les autres partics de
l'animal ayent quatre facultez ſemblables,nature toutesfois ne leur a baillé ſentimit
de ce qu'illeur faut & eft neceſſaire, mais le nourriſſent, tirans inceſſammene des vei .
ne: leur alıment comme font les plantes & herbes de la terre. Quant à la ſituation do
ce ſuperieur orifice, nous l'auons mis par cy deuant ſur la cinquielme vercebre du
Thorax : maisi'aimerois mieux le mettre ſur la neufieſme, ou pluſtoſt ſur la douziel
Anneau. me du Thorax, & premiere des Lumbes : car en cet endroiât là l'Oeſophague perce
le Diaphragme, & conſtituë le ſuperieur orifice de l'eſtomach . L'inferieur eit à la par
tie dextre ſous la cauité du foye pres du cartilage Scutiforme, & eſt plus eſtroit que le
ſuperieur, afin que rien ne paſſepariceluy , quineſoit bien cuic & digeré , & mué en
Chylus : & ce par le moyen d'un anneau lemblableau Sphincter du ſiegequ'aucuns
ontappellé Glandule,qui eſtfait de la tranſpoſition de la membrane charnuë interne
du ventricule à l'externe des inteſtins. le ſçay bien que Colombus ſe mocque de cet
anneau glanduleux:mais tout homme qui regarderade pres,trouuera le Pylorus glā- C
'duleux.Ledic ventricule en la partie interieure& fons d'iceluy a pluſieurs rides ,qui
ſeruent de retenir la viande iuſques à ce qu'elle ſoit digerec. Ila auſſi partie caue &
gibbeuſe: la caue regarde le Diaphragme & le foye: la gibbeuſe, les inteſtins: deſ
quels nousparlerons lors que nous aurons diet que le ventricule qui eſt laxe & re
ſout, peur deſcendreiuſquesdeſſous le nombril pres de la veſlie : ce que vericable
ment auons veu à aucuns apres leur decez.
Il y a deux glandulescouchees ſous l'Oeſophague , à l'endroict de la premiere di
Defcente du uiſion de la Trachee artere,au commencement du Thorax,quiarrouſent de la ſaliue
wenricule. eſpeſſe & glueuſe l'Oeſophague,& auſſi la Trachee artere , & toutes les parties de la
bouche, & les empeſche de deuenir ſeiches. Auſſi boiuent & hument comme eſpon
ges le phlegmetombant du cerucau , afin qu'il ne decoule aux poulmons & en l'c
ſtomach, quite ſeront monſtrez par la figure ſuiuante.

D
Del'Anatomie. 109
A
La troiſieme figureinterieure du Ventre inferieur.
A Demonſtre le commencement de l'Ôe.
A ſophague,continué auec la partie dela
bouche, nommée Fauces.
B B Amygdales .
CC Vn corps glanduleux,lequel ſe trouuc ſuc
la cinquieſme vertebre du Metaphre
ne : duquel endroit ledit Oeſophague
cede à la grande artere,declinant aucu
nement au coſté droit. André Veſal li
ure s. chap. 3. & Columbus chapitre
dernier , liure 9. diccelle glandule con
cenirvne cercaine humidité, par laquel
B le eſt enroulé ledit Oelophague , afin
que la viande puiffe mieux & plus faci
lement couler,ne demeurant à ſec, touc
ainſi que les glandules Proſtates con
tiennecyn humeur cras & huileux pour
adoucir le canal de l’rine ,afin qu'icelle
coule plus librement .
H
DD Les nerfs de la ſixieſme coniugaiſon , qui
deſcendent à l'orifice ſuperieur dudit
ventricule,& confequemment à toute
ſa ſubſtance , comme tu peux voir par
G les Ramifications.
E L'orifice ſupericur du ventricule . F L'inferieur appelé Pylorus.
GL'Ecphylisou Dodecada& ylon .HHHH Les veines& arteres dudit ventricule ,

La quatrieſme figuredu Ventricule tournéce deuant derriere.


IlI

!
VIIIl
! 。

A Demonſtre le principe de l'Oeſophague .


ВВ Les deux corps glanduleux, ſur leſquels
B ledit Oeſophague eſt comme attaché
1
ſur la cinquieſme vertebre du Meta.
phrene, auquel endroit il ſe deſtourne
D pour la raiſon predite.
CC Deux nerfs dudit Ventricule.
D L'orifice ſuperieur.
E L'orifice inferieur.
! F L'inteſtin Duodenum .
GG Les veines & arteres dudit Ventricule.
HH La partie poſterieure dudic Ventricule.
I L'entrée du Pore Cholagogue dedans
L
a
!t

l'inteſtin Ecphyſis.
!!

K La partie caue du Vencricule .


L La partie gibbeuſe , ou autrement dicele 11

Fons d'iceluy.
1

k mij
PE
Le troiſieſme liure .:461
110
A
Des Inteſtins. CHA P. XV.
Es inteſtins, qui ſont nommez infrumens de diſtribution & cxcre
Subliance
tion, ſont de ſubſtance & compoſition ſemblable à celle du ventricule,
e Compo
horlmis que le ventricule a ſes propres cuniques au contraire des in
ition.
teſtins :car celle qu'il a au dehors , les inteſtinsl'ont au dedans : & celle
qu'il a au dedans, les inteſtins l'ont au dehors . Quant à leur quantité ,
ntie.té.
Fight
Qua il y en a degrelles & de gros , ſelon plus ou moins , pour la variete des corps . Leur 74

figure eſt ronde , fiſtulaire ou creuſe , ſelon plus ou moins , pour la diuerſe quantité
Nombre: d'iceux. Ils ſont fix en nombre , à ſçauoir croisgrelles , appelez Ecphyſisou Duode
Duodenu .
num, leiunum , & Ilcon : & trois gros nommez Cæcum ,Colon , & Rectum :cous leſ
quels ont eſté ainſi nommez , à ſçauoir le premier , à cauſe qu'il eſt ſans reuolucion ,
reply ou entortilleure ,& quaſi comme vn changement de ventricule en inteſtin , le
lon la longitude de douze doigts : laquelle longueur eſt veuë aux grands hommes , 18.
comme pouuoient eſtre au temps de Galien , pluitoſt qu'à preſent : Car on n'en ſçau . , B
roic trouuer delongueur , pour le plus , que lepe ou huic doigts. La cauſe de celte
longueur eſt pour donner illuc à la vcinc Porte ſortant du foye, & paſſage à l’artere, ‫وفد عن‬

& au nerf , qui vont en iceluy: pource que ledic inceſtin montant quelquesfois iuſ
ques à la plus haute partie du foye ,lous le fiel duquel il eſt reint , s'il failoit illecre
uolution , il occuperoit le lieu & eſpace par où il faut que leſdics vaiſſeaux paſſent.
"Ou bien il a eſté fait de longueur ainſidroite, afin que rien n'em.peſchaft, que faci 5 ๒๒

lement & promptement la viande cuitte nc deſcendiſt aux inteſtins. Le ſecond eſt AAR

nommé leiunum ,non pource qu'il ne contient rien , mais pource qu'il contient bien
***

Icinnum . pou au regard des autres ſuiuans. La cauſe de ceſte inanition eſt triple: La premiere
eſt, la multitude des veines & arteres Meſaraïques ,quilont autour d'iceluy , leſquel .
lesplus prompremét épuiſent leChylus deſcendant par iceluyque celles quieſtoient
en plus petit nombre. La ſeconde eſt, la proximité du foye, par lequel ledit Chylus
eſt plus promptement tiré & fuccé , que des autres qui en ſont plus lointains . La
nte de la cholere en iceluy, ſortant du Cyftis fellis, laquelle par ſon c
acrim eſt, la&deſce
tierceonic mordacité le racle & nettoye , & l'irrite continuellement àexpulſion
des matieres fecales. Le troiſielme eſt nommé Ilcon , pource qu'il eſt ſitué ſur les
Ileon . parties lliaques ,ou pour la multitude desreuolutions qu'il fait entre tous les autres:
lequel ne differe des ſuſdits,nyen ſubſtance ,ny en grofleur, mais à raiſon de la ma
tiere contenuë en iceluy en plus grande quantité qu'aux ſuſdics , pource qu'il reçoit
plus petit nombre de vaiſſeaux. Parquoy nete faut eſmerueiller , li exactemet on nc
L'inteftin te peur demonſtrer la diftin &tion d'iceux . Le quatrieſme eſt nommé Cæcum , à cauſe
Cacū abon. qu'eſtant ample & gros,il n'a qu'vne voye , tant pour receuoir , que pour expeller les
uit , c « matieres qu'il a reccuës . Ec a ledit inteſtin vne longue& eſtroite apophyſe ,laquelle
vme perite jelon aucuns (contre toute raiſon ) tombe quelquefois dedans le Scrotum ,à la ruptu
alonge reou dilatation du Peritoine, veu que de ſon naturel cſt eſtenduë dedans le petit
eftroute eta ventre , & afleurément attachée contre lePetitoine , qui empeſche telle deſcente, che
retorcillée Illemble aduis quc par l'inteſtin Cæcum , Galien ait entendu ceſte apophyſe longue
comme la- & eſtroitre, & de fait le commun des Anatomiſtes l'entend ainG :mais Vefalius à bon
ver
quelle n'a droit auroit en cela reprins Galien : parquoy Syluius l’excuſant , veut que par le Cx. D
qu’one few-cum nous entendions le commencement du Colon . Le cinquieſme eſt appelé Co
entréeun lon , à cauſe qu'ileſt plus grand & capable quenul des autres. Lefixis eſmc & dernier
lecomme
cſt nommé Rectum , à cauſe de la rećic ude. nu
Et eſt conte iceluy plus aux
dedan
fac. beſtes qu’à l'homme , certaine greſſe pour lubrifier , & defendre que les excremens
Colon .
Re&tum . .durs, ſecs, & acres , ne viennent exulcerer & bleſſer en paſſant par ledit inteſtin . La
ſituation deſdits inteſtins eſt celle, que l'Ecphyſe eſt au coſtédroit contre l'eſpine. Le
Siru.uion. Ieiunum occupe la plus grande partie ſupericurede la region vmbilicale, s'eſtendanc
d'autre
les reuolutions , quaſi ſemblables à celles de l'Ileon , tant d'un coſté que
par
iuſques aux flancs.L'llcon eſt ſitué à la partie inferieure de la region vmbilicale , fai
ſant par luscous les autres multitude de reuolutions ,& s'eſtendant iuſques à la cavité
delos Sacrum ,ſur la veſlic, & parties laterales de l'Hypogaftre , nommées Iles. Le
Cæcum eſt ficué à la partie dextre, quelque peu deſſousle Rein , ou ſur la cinquieſme
& quarrieſme vertebre des Lumbes . Le Colon eſt eltendu comme en forme d'vn
arc Turquois bandé,comprenant depuis le Cæcum pardeſſus le Rein dextre , iuſques
De l’Anatomie .
ala partie cauedu Foye : & delà par la partie gibbeuſe ventricule, par deffus les
А
inteſtinsgrelles ,s'en va iuſques à la partie cauc de ladu
Ratre , & d'illec deſcend
leRein ſeneſtre en bas , faiſant quelque reuolucion iuſqu'à ce qu'il ſoit venupar
ſur
l'eſpine des Lumbes,où il finit. De toutesleſquelles reuolutions il eſt aiſe de diſtin
guer la douleur nephritique,quieſt fixe & arreſtéeau Rein ,d'auec la colique ainſi
errante & vagabonde par lefdites reuolutions du Colon.Le Retum eſt ſitué vn peu
obliquementvers le coſtéſeneſtre ſur l’eſpine del'os Sacrum , iuſques à l'extremité
du fondement. Leur connexion generale eft, que tousſont conioints enſemble par
leurs tuniques,pource que depuis l'oeſophage iuſques au fondemétil n'y a qu'vne
voye : &auec lestrois parties principales,par les veines, arteres, & nerfs. La particu
liere, c'eſtque l'Ecphyſisde la partie ſuperieure eſt annexé auec le Pylorus:& de l'in .
ferieure, auecleIeiunum & parties ſubiacentes, par la cunique du Peritoine : le lc
junum auec l’Ecphyſis & I'lleon : l'Ileon auec luy & le Cæcum : le Cæcum auec
llleon & Colon,& coſté droit de l'eſpine ,où il eſt attaché aſſez eſtroiteement:le Co.
lon auec le Cæcum & Rectum , & de la partie moyenne auec les Reins tant'dextre
vent
part gibbeuſe du vencs,
ricu : aut,moy
leerti deq coli
en ricuque
en primeuoyle vent Cauſ e des
pal. vomisſe.
B fion, ledit inceſtinla rempiely & enflé de
queſeneſtre,& ſubu & com le,dõt
s'enluit vomiſſement.Le dernier nommé Rectum , auec le precedent & le fonde- mens en
ment,à l'extremité duquel eſt ſitué vn muſcle de figure ronde & circulaire, nommé
Sphin &ter,iſſu du corpsdes vertebres inferioares del'os Sacrum , & Cropion, quieſt colique.
Muſcle
comme yne barriere & ſerrure pour clorre & retenir les excremens iuſques à la vo- Sphinéter,
lonté de nature :afin qu'à tous propos , & en tous lieux indifferemrnent, & contre o fon viie
noſtre volonté & honneſtece de vieciuile , il ne ſoit faite expulſion deſdits excremés.
Ceux auſquels ce muſcle eſt tombé en paralyſie, les excremens ſorrent hors ou liié.
tre la volontédu malade , qui eſt choſe vile & orde . Ecoutre , en l'extremité dudir
boyau eſt ficué un corps de moyenne ſubſtance entre chait & peau , comme eſtant Gal.liu. 5.
mixtionné del'vn & de l'autre , ſemblable aux bords des léures . Son vlage eſt ſem . de vfupart.
!
blable quele muſcle Sphincter , ſinon qu'il n'a pas ſi grande force en ſon action. Da -chap. 14.
uantage autour d'iceluy ſont certaines veines nommécsHemorrhoides , deſquelles
nous parlerons cy - apres . Outre plus en l'extremité dudit inteſtin deſcendent deux
autres muſcles larges & membraneux vn de chacun coſté , prenans leur origine des
parties laterales & internes de l'os Pubis & Iſchion : leſquels s'inſcrans pardeſſus le
Sphinđer , retirent & releuent le fondement quand il eſt deuallé , au moyen dequoy
nous le pouuons appeler Releuateurs du ſiege: & quand celdies muſcles font pat2 MuſclesRés
lytiques ou foiblès ,ou bien que ledit ſiege & inteſtin droit ſont remplis & agravez leustears
deplenitude d'humeurs pituiteux & falez, ſereux ou bilieux auec peine & difficulté duforge.
on remonte ledit boyau , tellement que quelques foisil faut employer les mains à le.
remettre au dedans .
Lecemperamene deſdits inteſtins eſt ſemblable à celuy du venrricule . Leur action
& vcilitéeſ de diſtribuer le Chylus par les veines Meſaraïques Tempera
trois greſles: & de receuoir les excremens des ſuſdics , & les ret,eni juſapp
ce rqui queart ientem
s au ps Alion
t aux
mens .

commode & opportun,pourles expeller : ce qui appartient principalement au trois com viis
D cras. Dauantage iceux inteſtins greſles digerent & parfont le Chylus, iaçoit qu'ils lué.
n'ayenteſté faits pourceſtefin : mais Nature abuſe de quelque membre fouuét pour
vne meilleure fin Orileſtà noter ſur la compoſition deſdits inteſtins, qu'iceux n'ont
quefibres tranſuerſespour l'expullion, horſmis au commencementdu Colon,& à la
findu Rectü:auſquels endroitsils enont aucunes droites pour renforcir
ſt latra
ſes, depeur que les matieres dures , & de quantité plus grande que n'eles capnfu
acier

1 d'iceux aux beſtesplus qu'à l'homme,ne les rompent & deſchirent,quand par la vio
lencedenatureelles ſont pouſſées dehors , Et ſi on demande,veu qu'ils n'ont point
d'Obliques,commentlaretention eſtfaite le reſpons, qu’au Rectum elle ſe fait par Occupation,
le Sphinder;& au Cæcum quelquesfois de la trop grande quantité& dureté dela
matiere contenuë en iceluy qui ne peur deſcendrepar le Colon. A quoy aufli aident
grandementles circonuolutions& vireuouſtes preſque infinies deſdits inteſtins . Or
lesboyaux onteſté faits longsſeptfois autantquele corpseſt grád,& auec pluſieurs
reuolutionsou encoreillemens,afin que l'alimenenes'écoulaft croptoft,& quen’cul
fions vncinſatiable gloutonnic,& voracité,& quetelle choſe neicuoquartieshom .
mesde leurs arts& faciendes. Ce qu'on voidaux animaux qui n'ont qu’yn boyan
112 Le troiſieſme liure
tout droit , qui vient de l'eſtomach au ſiege, comme le Loup ceruier,& le Cormo A
ran : & tels ſont inſatiables & gloutons , demandans inceſſamment nourriture,
commeles plantes. Este ſuffiſe des Inteſtins.

Cinquieſmefigure du Ventre inferieur.


A Monſtre le Cartilage
Enfiformis.
BB Le Peritoine renuer
D ſc aucc les coſtes
rompuës.
C Le ligament ante
rieur & principal
du Foye .
DD La partie gibbeuſe B
du Foye.
E La veine vmbilicale
entranceau Foye.
FF La partie anterieure
du Ventricule.
HHHH Monſtrent le Colon .
I Le commencement
du Rectum ,
K Lc Cæcum inteſti
num .
LLL La face exterieure
des deux inteſtins
greſles nommez loiunum & lleon :dontle leiunum eſtle plus haut pardeſſus lvm
bilic ,& l'Ileon pardeſſous. M Lefonds ou corps de la Veſlie. с
Du Meſentere. CHAP . XVI.

Subftance. Pres les Inteſtins s'enſuit le Meſentere, lequel eſt deſubſtance en par. An

Quantité. tie adipeuſe , en partie membraneuſe. Sa quantité eſt aſſez grande , tou
Figure. tesfois aux vns plus qu'aux autres , ſelon leur grandeur & habitude de
Compofitio. corps. Sa figure eſt ronde & plate:& eſt compoféededouble cunique,priſe
Grădnom . de l'origine & racine duPericoine: laquelle au milieu deſoy reçoit nerfs du Coſtal
bie de peti. Venans dela ſixieſmeconiugaiſon , veines de la veine Porte, arteres de l'artere en.
tesglandes
font trou uoyée auxparties inferieures,auecgrādequantité degreſſc, & pluſieurs corps glādu Hot
uées du leux pour ſouftenir & conferuer les diviſionsdes vaiſſeaux contenus en iceluy , en
Meſentere ſemble entretenir leur humidité naturelle , par la communication de certaine roſée 3001
Nombre. ou humeur viſqueux qu'il leur communique. Ledit Meſentere eſt ſeul & vnique,
Situation. ſicué au milieu des inteſtins, au moyen dequoy eſt ainli appelé : par lemoyen du
Nicandsr quel les inteſtins ſont accachez contre le dos . Aucuns toutesfois le diuiſent en deux D
in Alexi- parties, à ſçauoir , en Melareon , quieſtla partie dudit Meſentere , contenuë entre
pha
ca rma cis, les inceſtinsgreſles: &cnMeſocolon,quieſtl'autre contenuë entreles inteſtins gros.
Hippo
lib. Epide. Saconnexion eſt, par ſes vaiſſeaux aucc les parties principales :par toute la ſubſtan
6. Apho. ce, auec les inteſtins& aucunement auec les reins,à l'endroit deſquels il ſemble pren
Cola bomo dre ſes tuniques.Son temperament eſt froid & humide , fion a égard à ſa ſubſtance
canis. ficut
halber adipeuſe:mais fion regarde les autres parties, il eſt froid & ſec.Sőačio & vtilité eſt de
Connexion . lier & contenir leſdits inteſtins chacun en ſon ordre , afin qu'ils ne s'entorcillent les
vnsauec les autres : & par les veines Meſaraïques ( dites les mains du foye ) conduire
memicus le Chylusen iceluy.Ecfauticy noter, que touteslesveinesMelaraïques viennent
Altion du Foye , ainſi quenoustrouuons par la diſſection : combien qu'aucuns ayene vou .
o vilité. lu direy en auoir aucunes nourriſſantes les inteſtins, leſquelles n'appartiennent en
Maiøs du rien à iceluy , ains deſinent en certains corps glanduleux,lemezparmy le Meſenterc:
Fyye. de l’ylagedeſquelles ſera parlé bien coſt,

!
De l'Anatomie . 113

Des glandules en general, & Pancreas. CH A P. XVII.


A

LANDVLE eſt une partie ſimple du corps , de ſubſtance quelquefois Subitanie.


(pongieuſe & molle q
, uelquefois dure & denſe: Spongieule & molle,
comme les Amygdales ou Saliuales, la Phagouë dite Thymus, le Pan
creas, Teſticules, Proſtates,& autres :Denſe & dure , comme les Parcti
des,& celles qui ſont à la racinedela lágue nomées Amygdales , au Me
ſentere, & ailleurs . Leur quantité & figure eſt differente: car les vnes ſont plus gran- Quanties
des,les autres plus petites , comme tu peux voir en la diffe & ion . Les vnes ſont ron . & figure.
desplus ou moins lesautres placces, comme la Phagouč nommée Thymus,& le Pan . Cöpoficion.
creas. Leur compoſition en aucunes eft de veines , arteres , & nerfs, & propre chair,
comme les Amygdales,cellesdes mammelles & teſticules. Aux autres n'y a poinc de
nerf, au moins qu'on puille voir , comme aux Parocides , Axillaires , & autres . Leur Nombre.
nombre eſt incercain pour la multicude d'icelles , & variecé de Nature . Elles ſont Sirmation
ficuées par tout , où ſonc faites grandes diuiſions de vaiſſeaux , comme au moyen
B ventricule du cerueau , à la partie ſuperieure du Thorax, au Melentere , & pluſieurs
autres lieux. Ou bien elles ſontficuéesaux endroits que Nature atrouué bon que
leſdites glandules engendraſſent humeur voile à l'animant , comme à la racine de la
langue,les Tonſillesou Amygdales : les mamillaires , aux many melles : & les genitoi
ses au Scrorum , ou aux coſtez de l’Amarry :où aulli a pleu à Narurecuacuer les trois
parties principales,comeau deſſous des oreilles , aux aiſſelles , & aux aices . Leur con Connexion .
nexion eſt,non ſeulement auec les parties , deſquelles elles trouvent quelques vaif
ſeaux de leur compoſition , mais auſſi auec celles , deſquelles elles reinpliſſent & con
ſeruent la diuiſion. Elles ſont de temperament froid , & pourtant le ſang eſt dit par Tempera
,
Gilien eſtre fait crud aux mammelles , prenant la forme de lact . Au demeurant, les mens .
vnes ont action , comme les Tonſilles ou Amygdales , leſquelles font la ſaliue pour Action
с hume &er toute la bouche : les mammillaires pour faire le laict : & les teſticules,pour oulage
engendrer la ſemence. Les autres ont vſage ſeulement , comme celles qui ſont faites
pour cõleruer, ſouſtenir , & remplir les diuiſions des vaiſſeaux. Outres les choſes dites
en general des glādes ,il faut ſçauoir que le Pancreas eſt vn corps glanduleux , carni.
forme, lequel eſt ainſi appelé , pource qu'il a par tout fimilitude de chair . Il eſt ſitué Pancreas.
en la partie caue du Foye,ſous l'inteſtin nomméEcphyſe , auquel il a grande conne- Sienation .
xion ; & alentour de la veine Porte , pour luy eſtre comme couſſinet & conſervateur iveilité.
de ſes diviſions, en rempliſſant les vacuitez qui font entre icelles , & pour defendre
auſſi que par violens mouvemens ou cheutes , telles diuiſions ne ſoyent rompuës .

Du Foye. CH A P. XVII .

Es choſes ainſi conſiderées, il conuient maintenant,ſelon l'ordre de diſſe.


dion , declarer la diſtribucion dela veine Porte : mais pource que celle di

ftribution nepeut eſtre deuëment expliquéeny bien entenduë , fans la co


gnoiſſance du Foye , duquel elle ſort : à ceſte cauſe differant celle declara .
tion en licu plus commode , nous pourſuiurons le Foye le plus bref quc faire le
pourra .
D
D LeFoyedonc ( ſelon Gal. au liure de la Formation de l'enfant) eſt le premier par- Definition
fait des membres principaux. Il eſt authcar de la fanguification , ſource, & origine du Foye.
des veines. La ſubitance duqueleſt comme gros ſang coagulé. Sa quantité eſt diffe. Subſtance,
Qusntiré.
fence, non ſeulement aux corps de diuerſe eſpece,mais auſſi entre ceux d'vne meſme
cſpece: comme entre deux homes , deſquels l'vn eſt glout & craintit,& l'autre ſobre l'homme
a
& hardy. Celuy qui eſt glout & craintif, a beaucoup plus grand foye que l'autre: à grandFoye.
cauſe de la plus grande quantité qu'il a à receuoir de chylus pour conuertir en ſang.
Toutesfois cant
à l'vn qu'à l'autre lefoye eſt touſiours grand, à cauſe que l'homme
auoit indigence de beaucoup de ſang , pour retaurer la grande quantité d'eſpries , &
humidité radicale qui ſe reſoluenc en luy , cant par labeurs que ſolicitude & contem
plation.Sivous demandez pourquoy les craintifs ont le foye plus grand , on peut
reſpondre, que d'autant que la faculté vitale & animoſité , qui eſt au
cæur eſt imbc
cile , d'autantla naturelle , qui eſt au foye,recompenſe :car nous voyons volontiers
ledefauc d'ync faculté etre recompenſé par la vertu d'une autre . On peut dire aulli
:

114 Le troiſieſme liure


que les hommes craintifs eſtansfroidsde nature , appetent &mangent dauantage, à А
raiſon de la frigidicé; comme dic Galien en l' Ars parua ,d'où vient qu'ils font plus de
chylus : de l'abondance duquel le foye eſtant plus copieuſement nourry , ſe fait auſſi
plus grand.Il eſt diviſé à aucunes beſtes,en cinq lobes ou plus , comme au chien & au
porc : en l'homme ne s'en trouue quelquesfois qu'vn ,quelquesfois deux , autresfois
trois , & peu ſeparez : leſquels embraſſent la partie ſuperieure & caue du ventricule , 1

pour l'échauffer, & aider à faire la concoction . Donc quant aux lobes du foye,volon
tiers n'y en a qu'vn:ileſt vray qu'il a comme une fiſſure & petite diuiſion ,pourlaiſſer
Figure. paſſer la veine vmbilicale,& en la racine auſſi par deſſous on y peut obſeruer vnperic
lobe. Sa figure eſtgibbeuſe & éminente , egale, & polie vers le Diaprahame, & cauc
Căpoſition. Vers le vétricule, & aucunemét inégale pour la diuiſion des lobes,origine de la veine
caucou creuſe, & ſituation de la vellie du fiel.Il eſt cópoſé de veines ,arteres & nerfs,
tunique & propre ſubſtance, que nous auons appelé gros ſang coagulé , dic de Grecs
Parenchyma. Lesveines(ſelon Galien au lieu prealegué ) luy ſont communiquées par
I'vmbilic, comme aufli ſont les arteres:combien que mediatement les nerfs, comme B.
dic Hipp. luy ſont baillez de ceux quideſcendent au ventricule. Où tu noteras , qu'i.
ceux nepenetrent point ſenſiblement en la ſubſtance d'iceluy , pource qu'il n'auoit
beſoin de grand ſentiment:mais ſont diſtribuez ſuperficiellement en la runique , à
faiſon qu'eſtant fait pour diſtribuer aux autres parties, il ne reſerue aucun humeur
acre ou maling ,pour le ſentiment duquel il ait eu beſoin que le nerfait eſté diſtribué
par ſa ſubſtáce,ſice n'eſt par le moyen de la Tunique ,laquelle plonge certaines fibres
nerueuſes de ſoy , dedans la propre chair du foye : comme il appert à la ſeparation de
ladice Turique d'un foye cuit , & ainſi faut eſtimer des autres viſceres . Sa Tunique 40

lay eit donnée du Peritoine accenué : Sa propre chair , de la veine vmbilicale , lors
qu'elle ſc diuiſe pour faire les deux veines , à ſçauoir Porte & Caue , teſmoin Galien
Nombre. au liure de la Formation de l'enfant. Quant au nombre , il eſt vnique : ſitué ſelon ſa
Situation. plus grande partiedu coſté droit: & ſelon la plus petite,du coſté ſeneſtre, au cõcraire
Connexion. du ventricule. Sa connexion eſt premierement auec le ventricule& inceſtins par les
yeines & membranes du Pericoine,parl'artere & veine caue auec lecæur, parlenerf
Tempera- aucc le cerueau ,& par le moyen d'iceux à toutes les parties du corps. Il eſt detempe- C
meni .
ramenc chaud & humide. Orceux qui l'ont trop chaud , ont leurs veines groſſes &
larges,&: le ſang chaud & boüillant:au contraire, ceux quil'ont trop froid , ont les
Action. veines fort eſtroites, & la couleur paſle. L'action dudit foye, eſt de tourner le chylus
en ſang: quieſt la ſeconde concoction. Car bien que lechylus commence à prendre
couleur de ſang, dés qu'il eſt tombé dans les veines Meſaraïques : toutesfois il n'ac
quiert point la yrayeforme & haute couleurdeſang, tant qu'il ait eſté clabouré au
foye. Et noteras que leditfoye eſt lié & attaché par trois ligamés,à ſçauoir ,deux col
laceraux , entre lemilieu des fauſſes coſtes , pour ſouſtenir ſesparties laterales : & vn
ſupericur & fort, deſcendant du cartilage Scutiforme, pour ſouftenir la partie ſupe
rieure d'iceluy,depeur qu'ilne comprime l'orifice inferieur du ventricule , & conſe
quemment ne face baiſſer la poiĉtrine ou fourchette. Er faut noter que ce que i'ay
dit,doit eſtre entendu de fes ligamés propres.Car il en a d'autres communs, comme
les veines, arceres, nerfs , & la cunique qu'il a du Pericoine , par laquelle il eſt attaché
aux Lumbes, & auec les autres parties naturelles. Dauantage faut nocer, qu'outre
ces trois ligamens en quelques vns s'en trouue d'autres par leſquels il eſt attaché aux D
fauſſes coſtes, commeobſerueSyluius en ſes Obſeruations Anatomiques, & Hollier
en la Pratique , chapitre de pleuritide.
De laveſie du Fiel. CH A P. XIX.
Subſtance.
Quantité.
L faut maintenant venir à la Veſſie du Fiel , qui eſt de ſubſtance nerueuſe,
Figure. & de magnitude & figure d'vne bien petite poire , vulgairementnommée
de Cerceau , à ſçauoir, ronde, & plus capable vers ſon fonds: & oblongue,
& plus eſtroitte versſes orifices. Elle eſt compoſée de double tunique : vnc propre,
Cõpoſition. tiſſuë de trois genres de fibres: & l'autre du Peritoine,de veine & artere venans de
la partie cauedu foye,à ſçauoir de la veine Porte ; quelquesfois eſtant encore ca
chée dedans la ſubſtance du foye, quelquesfois apres eſtre lortie :& l’artere; de celle
Nombre. qui vient en iceluy: & d'vne pecice portion denerfvenant du nerfdela fixieſmc con
iugaiſon. Quant au nombre, elle eſt ynique , ſituée ſous legrand lobe du foye, à la
partic
de l'Anatomie. 115
A partiedexere, dedans laquelle elle eſt àdemycachee.Sa connexion eſt premieremét Sirmarion.
aueclefoye, tantparſon corps que par ſes orifices, & conduicts deſtinez à ton action , Connexion.
qu'auec l’Ecphyſe par un autre conduit: quelquesfois auec le ventricule par vn con.
duit. Finalement à toutes ſes autres parties par ſesveines , arceres , nerfs, & tunique
commune. Elle eſt detemperamentfroid, comme toute autre partie nerueuſe. Son Tempersa
action eſt d'attirer du foye, & feparer l'humeur bilieux non naturel , mais excremen- mene.
ticiel d'auec leſang par ſes fibres droictes, comme aux rongnons , l'vrine : & iceluy Action .
jaattiré retenit parles obliques, iulques àce que par ſa qualité,quantité ou ſubſtance
cocale,deluy ſoit moleſté, & alors l'expeller par les fibres tranſuerſes en l'Ecphyſe :
au moyen dequoy la faculté expultrice des inteſtins eſt incitee à Jelter les excremens
dehors,commenous auons declaré par cy-deuant. Ie Içay bien que Fallopius a eſti
mé,que la vellic du fieln'apoint varieté desfibres, pourfaire ceſte varieté d'actions:
mais Velalius luy a ſuffilamment reſpondu en l'examen qu'il a fait de les obſeruations
B Anatomiques de Fallopius.
Outre toutes ces choſes, ilfaut entendre que l'attraction & expulſion ſont faites
par diuers organes & conduits. Car ladite veſſie eftant paruenue par ſon col aſſez Annotatið.
eftroit, iuſques presl'origine de la veine Porte,elle ſe divide en deux conduits ou plu
fieurs: dont l'on le plus ſouuent, ſans aucune diuiſion de ſoy , s'en va à l Ecplyſe : &
quelquesfoisen aucuns ilen enuoye.vn autre petit au ventricule , comme eſcrit Ga.
lien au deuxieſmeliure des temperamens , & ceux - là viuent milerablemenr, & ſong
contraints auec grandes douleurs de teſte & d'eſtomach, vomir la bile, ſpecialement
quand ils ſont à jeun.Et de telles natures parleGalien en ſon Ays medica ou Arsparua.
chap. 74. L'autie apres s'eſtre diuiséhors la ſubſtance du Foye, en deux ou pluſieurs
conduits, derechef entrezdedans le Foye,ſe divile ſelon la diuiſion de la veine Por
te, laquelle ilsaccompagnenttout partout , s'inſerant par petites portions,& diuers
lieux , dedans ladite veine : afin que par ce moyen le ſangfait & elaboré par la vertu
du Foye dedans ladire veine Porce, fuſt repurge auant qu'entrer en la veine Caue.Co
© quieſtmanifeſte par la diflection du Foye.
La fixiefme figure du Follicule du Fiel.
!
A Monſtre le fonds dudit Follicule.
: B Le meat commun tant à l'attraction de
l'humeur cholerique,qu'à l'expulſion ,
lequel ſe termine à C.
D Le meat propre à l'ateraction de l'hu
meur cholerique du foye.
E Le meatpour l'expulſion qui ſe fait dans
l'Ecphyſis, marqué F.
G La portion de l'Ecphyſis.
H L'orifice inferieur dudit ventricule.
II Veines & arteres d'vn colté,qui vont de
la veine Porce , & artere Hepatique au
Cyſtis fellis, reſpondances aux deux pa.
; reilles de l'autre coſté non marquees.

De la Ratte . CH A P. X X.

Ource que nousneſçaurions monſtrer deuëmēt la diſtribution de


la veine Porte , ſans pareillementleuer & ofter la Ratte de ſon lieu,
à ceſte cauſe avant que paſſer plus oultre,poureviter confuſió, nous
parleros d'icelle. LaRatte donc eſt de ſubſtance moile , rare & fpo. Subſtance,
gicule,pourplus facilement attirer & receuoir les gros humeurs du
foye,plus noiresquele foye, tenant la couleur de la chair , de la lie
du (ang, dontelleet faiae & produicte. Sa quantitéeſt aſſez grande, toutesfois aux Quantité.
vns plus qu'aux autres, ſelon la diverſe complexion des perſonnes. Sa figure eſt au. Figure,
cunement criangulaire, & boſſuc du coſté qu'elle ſ'attache aux coftes & Dia phrag.
116 Le troiſieſme liure ,
Cöpoſition. me, & caue vers le coſté qu'elle regarde & touche leventricule.Sa compoſicion eſt de А
Tunique, propre chair,veine,artere,& nerf:dont la Tunique luy eſt baillee par le Pe.
ritoine:la proprechair ,dela lie du ſang, ou pluſtoſtde Thumeur melcáholique natu
rel,veu qu'elle le nourrit d'iceluy, & non du nõnaturel. La veine luy eſt baillee parle
quatrieſme rameau de la veine Porte: l’artere, du premier rameau, produit de la grā .
infertion de artere au deſſous du Diaphragme : & le nerf du Coſtal de ſon coſté, venant de la .

euidente du ſixielme coniugaiſon, par la racine des coſtes interieurement :& on voit ce nerf icy, 4

nerf Coltal non ſeulement le diſtribuer par la Tunique, mais auſſi entrer dedans la ſubſtance
dans la auecques les vaiſſeaux,ainſi que nous auons obſerué aux Poulmons & au cæur.Quát
chair de la
rille .
au nombre, elle eft ſeule fituee en l'Hypochondre leneſtre, entre le ventricule & les
Nombre. fauſſes coſtes, ou pluſtoſt Diaphragme, quidescend iuſqu'à l'extremité d'icelles: auf
Sirmation. quelles elle eſt le plus ſouventadherente & conioin & e naturellemét,de fa partie gib
beuſe par la tunique du Pericoine,cõme de la partic caue au vērricule,canı par certai
Connexion. nes veines qu'elle luy baille, que par l'Epiploon. Elle a auſliconexion aucc toutes les
autres parties du corps niediatement ou immediatement,par les vaiſſeaux. Elle eſt
Action. de nature froide & feiche. Son action & vtilité eſt d'attirer l'humeur melancholique
naturel , en temps & lieu, s'elle n'eſt empeſchee. Or tel ſang gros ,gras & limoneux, B
eſtantattiré par la ratelle, eſt digeré par les arteres qui ſont en nõbre infiny en la ſub
ſtáce, & par leur mouvement alliduel, & la force de la chaleur naturelle qui vient du
cæur,il lecuit & fubtilic & altere la groſſeur & eſpeſſeur : & eftant ainſi digerć & lub
tilié, la ratelle s'en nourrit, & celuy quieſt fuperflu, eft enuoyé par les cõduits qui luy
ont eſté donnez de nacure pour ce faire:qui lont yne veine montant d'elle au ventri.
cule, pour luy porcer quelque petite portion de l'humeur melancholique, lequel eſt
acide ou aigre,pour aucunemēt irriter la vertu appetitiue: auſſi de ſon aditriction ro.
borer le ventricule, & vne autre,iaquelle deſcend quelquesfoisdu rameau ſplenique,
ou bien de la veinePorte lous l'orifice d'icelle au ſiege, pour faire les Hemorrhoïdes.
De la veineporte & diſtribution d'icelle. С НА Р. XXI.

A veine Porte ainſi que toute autre , eſt ( comme nous auons dit)
Substance
de ſubſtance ſpermatique, & de quantité aſſez grande , de figure
ronde & caue , comme vn cuyau . Sa compoſition eſt d'vne tuni
Quanuisé. que propre , & vne commune qu'elle reçoit du Peritoine. Elle eſt
Figure.
Cõpoſition. ſeule & vnique , ficuee à la partie caue du foye duquel elle ſort ( ou
Nombre. pluſtoſt de l'vmbilicale ) & au milieu de tous les inteſtins : auec leſquelles parties
Situation. elle a connexion : pareillement auec le ventricule , la ratre , le Sphinder du liege, &
Cinn xion. le pericoine par ſa cunique. Son temperament eſt froid & ſec. Et eſt faicte &
Tēperament
Viilité.
conſtituee denature pour recevoir le chylus de l'eſtomach , & des inteſtins & iceluy
contenir , tant que le foye l'ait changé en pur ſang , pour par apres l'enuoyer par
1
la veine caue , à tout le corps. Or elle ſortant dela partie caue du foye, le diui
ſeen fix rameaux : à ſçauoir quatre ſimples, & deux compoſez, & diuiſibles en plu. NAN

Diviſion de fieurs autres . Le premier des ſimplesmonte de la partie anterieure de ſon troncà la
veine, veſlie du fiel, ſelon leconduit Cholagogue, auec pareilles arteres, pour apporter en
laPorte.
Premier IA icelle la vie & nourriture: & eft appellee celte diſtribution Cyſtique, ou bouteillere
TW €41 . qui eſt double. Le ſecond nommé Gaſtrique,deſcend ſemblablement dela partie an D
Second. tericure dudit tronc au Pylore, & partie caue & pofterieure dudit vécricule prochain 2001
à iceluy. Letiers nomme Gaſtrepiploïque dextre ſortantde la parcie laterale dextre
Tvorgeline. de la veine, s'é va à la partie gibbeuſe du ventricule,prochainedu Pylore & Epiploon
Quatrief dextre. Le quatrieſmeiffantquaſide la partie poſterieure & dextredela veine, ſur la
racine du rameau Meſenterique,monteiuſques au commencemét de l'inceſtin leiu
num ,tout le long du Duodenum : & pource eſt appellé inteſtinal. Et voila quant aux
Cinquiſme quatreſimples.Maintenantdesdeux compoſez, le premier eſt ſplenique,lequel ſe di isla
uile en la nianiere qu'il s'enſuit. Premierement, de ſon commencement & partie ſu ***3$
perieure,fait la veine nommee Coronale du ventricule , laquelle monte par la partic
poſterieure d'iceluy, en la partie ſuperieure & caue, où eſtant paruenuë , ſediviſe en 1
deux ramcaux : deſquels lvn monte vers l'orifice ſuperieur, & l'autre deſcend vers
l'inferieur, produiſant chacun en ſon chemin des rameaux tant à la partie poſterieu
re qu'à l'anteriéure , leſquels ceignent & embraſſene ledit corps du ventricule,
de l'Anatomie . 117
A cóme vne couronne, d'où elle a prins ſon nom. Ielay trouué quelquesfois ſortir du
cronc quelque peudeffus l'orificede la Splenique. Apres ceſtuy-là de la partie infe
rieure prochaine,elle produit le plus ſouuent leur ramcau nomméHemorrhoïdal,lc.
1
queldeſcendantpar deſſus le Lumbe ſeneſtreau ſiege, communique vne bõne partio
de ſoy à l'inteſtinColon feneſtre,& Re&um:à la fin duquel le plus ſouvent ſe crouue
diuisé en cinq veinesHemorrhoïdales quelquesfois plusquelquesfois moins.Siluius mo
Veines
rrhoiHe
eſcrit que le rameau Hemorrhoïdal deſcend du Meſenterique, & de fait l'auós quel
quesfoisainfiobſerué:toutesfois ileſt plus raiſonnable qu'il deſcende du Splenique,
d'autant que par iceluy eſt purgéleſang melancholique, & ſouuene l'auons ainſi veu
& noté. Tiercementde la partie ſuperieure, & quaſi moyene,enuoye vn ciers ramead
à la partie gibbeuſe du ventricule,& Epiploon,produit dudit endroit : & cft appellee
Gaſtrepiploïde maieure , moyenne & ſencître. Quartement,de lapartie inferieuro
pres delaratte,elle fait la ſimpleEpiploïde, qu'elle diſtribucpar l'Epiploon ſeneſtre.
B Quincement de la partie ſuperieure prochaine au corps de la ratte , où deſia eſtant
plogee dedans elle enuoye un petit rameau nommé Vasvenoſum ,à l'orifice ſuperieur
du ventricule pour exciter l'appetit. Souvent & quafi touſiours auons obſerué ce
vaiſſeau, que Galien au quatrieſme liure de l'vfagedes parties appelle V asbreue,ſortir
du corps de la ratte,& ſe terminer versle milieu du ventricule partie ſeneſtre, & n'en
trer point à trauers les deux tuniques dudic ventricule :dont on pourroit douter co
me par iceluyl'humeur melancholique peut eſtre jecté en la capacité du ventricule.
Ledemeurant dudit rameau ſe perd dedans la chair de la racce.
S'enſuit l'autre rameau nomméMeſenterique,lequelſe diuiſe en crois parties:dőt sixiem .
l'vne & plus petite s'en va à l'inteſtin Cæcum , Colon dextre & moyen , diuiſee par
grande multitude d'autres rameaux . La ſeconde & moyenne ſe perd dedans l'Ileon ,
comme la troiſieſme & plusgroſſe au leiunium , & eſt appellec de ce nom Meſenceri Veine Med
que , pource qu'elle eſt diſſeminee par preſque tout le Meſentere,tout ainſi que la Saraique oia
Splenique,parce qu'elle s'en va perdre & terminer en la cerre.Où noteras que com- meſenterin
meladire veine ſorcant du Foye , ſe diuiſe aux parties ſuſdites par rameaux plus grāds que
puis plus petits , tant que la diviſion ſoitvenuë iuſques aux rameaux capillaires : ainſi
fait elle, ſe plongeancdedansle foye. Et voila quant à la diuiſion de la veine Porte,
C laquelleſi quelquesfois tu ne trouues ainſi qu'elle eſt deſcrite, ne t'en eſbahispoint: Aunotatif
carà peinela trouueras cuiamais ſemblable en deux ſuiets, pour la varieté de l'indiui.
du, laquelle eſt ( comme diſent les Philoſophes) à vn chacun particuliere & propre.
Ainfiimagine des autres vaiſſeaux : toutesfoisc'eſt ainſi que nous l'auons le plusſou.
uent trouuee & obſeruee en nos diffe& ions, tant publiques que priuces.
Del'origine de l'artere, & diuiſion du rameau deſcendant auxparties naturelles.
CH A P. XII.

PRES ces choſes ainſiconſiderees il conuiendroit oſter les inteſtins ; mais


pource qu'en ce faiſant on perd la diuiſion de l'artcre deſcendante aux
parties naturelles ,à cete cauſe ſembleeſtre raiſonnable, qu'auant qu'oſter
leſdits inteſtins, nous parlions deladiſtribution d'icelle. Quoy faiſantil originesdes
D faut ſçauoir,que tout ainſi que toutes les veines,ſelon Galien , ſortentdu foye, ainſireines
fontles arteres du cæur, leſquelles eſtans en leurcommencement diuiſees en deux ra- arteres.
meaux ( comme te ſera demonſtré en leur lieu ) le plus grand deſcend en bas vers les
parties naturelles par deſſus l’eſpine du dos , commençant depuis la cinquieſme ver
tebred'iceluy, depuis lequel endroit fait celles ramifications qui s'enſuiuent.
La premiere appellee Intercoſtale, va entreles muſcles intercoſtaux & ſpinaleme
dulleparles trous par leſquels les nerfs ſortent, tant à dextre qu'à ſeneſtre, qui re- Intercobales
ftoientdepuisla cinquieſme vraye coſte,iuſques à la derniere fauſſe. Où noteras que
paticellesnous entendons les ſept animaux diſtribuez, ainſi que nous venos de dire:
leſquels
tercoſtal
ſortent de leur tronc deſcendant ſur l'eſpine à l'endroit de chacun muſcle in
.
La feconde eſtant double , va au Diaphragme tant d'vn coſté quc
d'autre, & pource nous la pouuons appeller Diaphragmatique.
La tierceaffez groſſe, ſortant de la partie ſuperieure de l'artere,iſſuë hors du Dia . Diaphraga
matiq uet
phragme, ſediuiſe quelque peu apres en deuxinſignesramcaux: dont l'on s'en va au
ventricule, àla ratte & à leurEpiploon, dauantage à la partie caue du foye & vellie
1 ij
118 Le troiſieſme liure ,
du fiel: l'autres'en va au Meſentere & inteſtins, faiſant ramifications toutes ſembla- A
bles à celles des veines Meſaraïques: à cauſe dequoy elle eſt appellee Caliaque, ou
Caliaque. (s'il faut ainſi parler).Ventrale. Et faut entendre que les extremitez tant des vnes que
des autres penetrent les inteſtins iuſques à la derniere tunique , afin que par leurcon w

tact & accouchemét elles puiſſent micux ſuccer & attirer le Chylus contenu en iceux. .

La quatrieſme va aux reins,& pource eſt appellee renalcou emulgence,parce qu'el


Regale o: le ſucce & tire le ſang de la maſle ſanguinaire.
Eaulgence. La cinquicſme aux teſticules ,auec les veines ſpermatiques preparantes : & cft pa
rcillement appellecartere ſpermatique: laquelle du coſté dextre ſortant du tronc de
Spermaii. l'arcore , pour aller trouuer la veine ſpermatique du meſmecoſté, paſſe quelquesfois
que . pardeſſus, quelquesfois par deſſous la veinc caue: Parquoy le fautbien donner gar
de qu'en la deſcouurant on ne la rompe.
La fixieſmeſorcane de la partie anterieure & ſuperieure de l'artere, deſcend auec les
veines hemorrhoïdales au fondement, enuoyant dés ſon commencement certains B
Mefenteri- ramcaux iuſques tout le long preſque de l'inteſtin Colon, & s'vniſſent par leurs ana
que infe- ſtomoſes auecques autres rameaux de l'artere Coeliaque: en ſorte que ſion regardo
THC116 .
de bien prés , on trouuera ſouuent celles ynions entre les veines & arteres chacun à
part, & quelquesfois entre l’arcere & veine. Or anaſtomoſe eſt communication de
veine auecques arcere, afin quc ſi elles ont indigence , qu'elles s'aydenc: comme ſi la
Anaſtomoſe veine a indigence de ce quieſtcontenuen l'artere, qu'elle l'attire del'artere : & pa
reillement ſi l'artere a beſoin de la veine.
La ſeptielme ſortant du trong par autant de ramcaux qu'il y a de vertebres aux
Lumbes,s'en va à iceux , & parties à eux appartenantes,comme la medulle de l'eſpino
pentru
Lumbaire. à l'endroit des Lumbes:& autres parties enucloppans leſdites vertebres : & pourtant
eſt appellee Lumbaire.
La hui&ticlmefait les Iliaques, iuſques à ce qu'elle ſoit hors du Peritoine, oùles
Crurales commencent.Etde laditelliaqueſont faites pluſieurs autres diviſions, leſ
quelles pource qu'elles ſont ſemblables à celles des veines Iliaques, pour cuiter proli- C
Iliaqué. xité, nous differerons à en traitcer iuſqu'à ce que nous ſoyonsvenusauſdices veincs.
La ſeptie ſmefigure du Ventre inférieur.
A Monſtre la partie caue & Lobes du foyo
renuersé en haut. ut

B Vn des ligamens lateraux du foye,par


leſquels eſt attaché au Diaphragme.
С La veine vmbilicale entrantau foye.
D La veſſie du fiel. ‫ܐ‬
E Le tronc de la veine Porte infuſe auec
l'implantation des inteſtins , où ſont
ki
demonſtrees les petites veines clyſti na
ques par 00 , & les autres ſansmar.
ques,ſont les arteres clyſtiques. D
G L'artere du foye, autour de laquelle eſt
trouuee vne ramification de nerf de
la fixieſme conjugaiſon par 2.
H Le conduit du Pore Cholagoguc inci
sé, qui deſcend dans l'inteſtin nommé
Duodenum,
I La partie caue de la ratte.
K Le tronc de la vcinc Caue.
L Le tronc de la grande artere.
M L'artere allant au ventricule & Epi.
ploon , Meſentere & à la racce.
NN Les veines adipeuſes.
00 Les reins .
PP Lesveines & arteres emulgentes.
QR Les vaiſſeaux vreteres,
de l'Anatomie ,
119

RR Les veines Spermatiques , & leur diſtribution au Pericoine.


A
SS Les arteres Spermatiques.
T L'artere qui ſe diſtribuë au Meſentere du Colon & du Rectum .
V La diuiſion de l'arcere Vmbilicale aux deux Iliaques.

XX Deux ramcaux des veines & arceres qu'on appelle Muſculeuſes.


YY Les arceres & veines Hypogaſtriques.
ż Le Re &um inceftinum coupé & lié .
& La Vellie.
a3 Les vaiſſeaux Spermatiques deferans, nommez Eiaculatoires ou Expellens.
bb La tunique Erythroïde deſcendant du Pericoine aux Teſticules,
CC Vne pecite veine produite du vaiſſeau Spermatique , ſur la cunique Dartos,
1

CHAPITRE X X111.
Des Ners diſtribuez aux parties naturelles.

ESTE maintenant, auant qu'ofter les inteſtins , à declarer les Origine de?
B
nerfs diſtribuez aux parties naturelles , afin que rien ne ſoit nerfs diffria
obmis . Et pour commencer, faut ſçauoir que leſdits nerfs vič . brez aux
nenc deceux de la ſixieſme coniugaiſon , leſquels deſcendent parises nuo
tant à l'eſtomach cout le long de l'Oeſophague, & parties late. tare beso
! rales d'iceluy, que par les racines des coſtes intericurement,cát
d'un coſté que d'autre:leſquels eſtát venus par deſſous le Dia
phragme , ſe diſtribuent aux parties naturelles chacun de ſon
R
coſté , comme les veines & arceres. Où noceras que ces nerfs
fuiuent principalement l'artere: & pource ſi tu veux monſtrer la plus grande ramifi.
cation d'iceux, il la faut chercher à l'endroi&t que l'artere ſe diviſe aux inteſtins deſſus
les Lumbes . Or ces nerfs n'ont eſté fort gros , atcendu que les membres nutri .
tifs n'ont eu meſtier que de pecies nerfs,pour le croiſieſme vlage,quieſt de cognoiſtre
& difcerner ce qui les peut faſcher : car s'ils eſtoient priuez de ceſte cognoiſſance de
D'auoir ſencimens de leurs paſſions, rien n'empeſcheroit qu'en vn moment de temps,
C
l'homme ne fuſt perdu & deftruiết: car ſubit que nous ſentons quelque mordication
aux inteſtins,nouspous haſtons d'y remedier . Et s'ils n'auoientaucun ſentiment, ſe .
roient viccrez,rongez,& pourris des excremens quiiournellement y fuent : & partát
ayans ſentimeot ne permettent cant ſoit peu de temps, aux excremens acres & cor.
roſifs y demeurer cequi nous monſtre affez manifeſtement, que nature ſageouurie.
se n'a iamais rien fait ſans cauſe , & ſans vne grande , artificicuſe & admirable indu
ſtric. Maintenant faut ofter les inteſtins

inſtruction pour ofter les inteſtins. С на Р. XXIV .

Vand on veut oſter les inteſtins, il faut commencer au Rc&um , lequel fauc
lier quatre doigts ou enuiron prés de ſon excremité , en deux lieux ellon .
e
gnez de deux ou trois doigts i'vn de l'autre : puis les faut couper entr les
) deux ligatures, & en coupant monftrer leurs tuniques tantpropres avec leurs fibres,
que celle qu'ils ont du Peritoine. Cela fait ,faucauſſi lier le cronc de la veine Porte lo
D
plus prés qu'il ſera poſſible, de ſon origine : afin que par ce moyen tous ſes ramcaux
foient liez, & par conſequent Hemorrhagie euitec . Le ſemblable feras à l'artere Coc .
liaque, à l'endroit du Rein ſeneſtre , & à celle qui deſcend au Re&um auec les Hemor
shoides:& cela fait , leueras leſdits inteſtins iuſques au Duodenum , lequel doit eſtre
pareillement lié en deux lieux par deſſous l'implantationdu pore Cholagogue, afin
qu'on voyel'implantation oblique d'iceluy dedans ledic inteſtin : quieft cauſe que la
cholere coulee par iceluy à la compreſſion dudit inteſtin faite debas en haut , nepeut
1 segurgiter dedans ladite Veſſie du fiel , qui eſt deux ou trois doigts présle Pylore : &
ſoit coupé au milieu des deux ligatures commele Re &um , & le tout mis à part hors
du corp
s.

1 iij
126 Le troiſieme liure ,

Origine dediſtribution dela veine Caue deſcendante . CHAPITRE XXV . А

Ource que les autres parties naturelles dependent preſque toutes


de la veine Cave deſcendante , à cefte cauſe il faut , auant que
paſſer outre , demonſtrer l'origine & diuifion d'icelle . Ila efté de
claré par cy.deuant, que toutes les veines ſortent du Foye , toutes
fois de diuers endroicts. Car comme nous auons monftré ,la veine
E
P Porte ſort de la partie caue d'iceluy : au contraire la veine Cave
de la partie gibbeuſe en forme d'vn tronc d'arbre , lequel ſortant
dudit Foye,le diuiſe en deux grādes branches, deſquelles la plus petite mõre aux par

ties virales, animales, & excremitez d'icelles , comme nousdirons en ſon lieu.La plus
grande deſcendant par la partie poſterieure du foye lur l'efchine des Lumbes, vaaux
parties contenuës ſous iceluy,en la forme & maniere qui s'en ſoit.Sa premiere diuifio
efttant d'vn coſté que d'autre, à la membrane des Reins, vonantau Peritoine & par.
ties voiſines : & ſont dietes veinesadipeuſes,pour la multitude de greſle qu'elles engé- B
Veines adi
drent en ces endroicts. Leur origine eſt diuerſe : car la dextre vient le plus ſouuenede
peufes.
la renale destre , à cauſe qu'elle eſt plus haure.Lc leneſtre vient du tronc meſme de la
veine Caue à cauſe que la Renale de ſon coſté eſt par trop baſſe : rarement on voit au .
trement . La ſeconde, qui cſt nommce Renale, ou emulgente,va aux Reins , auſquels
ſur l'entree,ou vn petit deuant, elle ſe diviſe en deux rameaux comme l'artere : vn (u
Renale ou perieur , & l'autre inferieur, & iceux encores conſequemment en plufieurs autres par

Emulgente. dedans la ſubſtance deſdits reins , comme cu peux micux voir à l'ail , qu'entendre par

sleliure. Elles ſont groiles & larges, afin que l humeur aqucux y puiſſe paſſer plus li
brement , & lans y faire long leiour. Leur origine eſt diuerie: car la veinc dextre lort le
plus ſouuent de ladite veine caue , quelquepeu plus haut que la ſeneſtre, afin qu'ayát
la charge de repurger le ſang de l'humeur ſereux & bilieux, ſi quelque portió cíchap

pedes laqs de l'vn, elle puillecomber aux laqs del'autre: ce qui n'euft eſté fait, s'elles
cuſſent eſté ficuces vis à vis l'une de l'autre, à raiſon de leur oppoſition & contrarieté

en leur action. Er noteras en ceſt endroit , que pluſieurs fois en faiſant difle & iõs & ou

Annotatio. uertures de corps morts, nous auõs trouuéà des calculeux iuſques à lepe veines emul
gentes, & autát d'arteres , quatre venās d'un coſté ſeneſtre, toutes de divers lieux ,dór
la derniere forcoit de l'Iliaque: & trois de l'autre coſté , venās aufli de diuers endroits o
de ladite veine . La tierce diviſió nommee Spermatique ,va aux teſticules, de laquelle
l'origine eſt celle quela dextre vient du tronc de la veine Cauc partic anterieure, & la

Spermati ſeneſtre de la veine Emulgente le plus ſouvent. Quelquesfois auſion trouue tãt d'un
que. coſté que d'autre eſtre accompagnees, la dextre d'yn autre venat de l'Emulgére dex
tre , & la feneſtre d'un autre venant de la veine caue : en aucuns ſeulement d'un coſté,
aux autres de deux quelquefois auſlii'ay veu l’Emulgête ſeneſtre ſortir de la Sperma
tique. On peut auſſi obſeruer pluſieurs autres varietez ,leſquelles ſi on vouloit toutes
cxpliquer , iamais on n'auroit la fin . La quatricſmcaux Lumbes, & pource eſt appellcc
Lumbalco: Lumbale: laquelle en origine & diſtribution eſt toute ſemblable à l’artere lumbale. Il
Lumbawe. faucnoter qu'il y a de chacun coſté quatre lúbales,à ſçauoir aux quatre interſtices des
cinqvertebres des lūbes . La cinquieſme fait les Iliaques iuſqu'à l'iſſuë du Pericoine,
où elles prenent le nom de Crurales : & le diuiſent premieremêt aux mufculeuſes,ain
finommees,pource qu'elles võr aux muſcles obliques Alcédans & Tráſuerſaux, & au D
Iliaques. Peritoire. Leurorigine eſt quelquesfois à l'extremité du tronc . Secõdemét font les
ſacrees,leſquelless'en võtà la moüelle de l'os ſacrum , par la voye des nerfs iſfans d'ia
celle. Tiercement elles produiſent les Hypogaſtriques,ainſi nõmees , pource qu'elles
ſont diſtribuecs à toutes les parties de l'Hypogaſtre, commeà l'inteſtin droit , muſcles
d'icelwy,& cuir muſculeux (où quelquesfois elles excitét les Hemorrhoïdes , comme
auons predit)dediez pluſtoſt à vuider le ſang qui peche en quantité ,comme celles qui
Stiries.
de la veine Porte viénene du Rameau ſplenique,à purger celuy qui peche en qualité,
Hypogaftri.& à la veſlie & cold'icelle , voire iuſqu'à l'extremité de la verge : & à l'Amarry de la
que.
Annotatio . femme, & cold'iceluy , iuſqu'aux extremirez des parties honteuſes, d'où le peut faire
qu’apres la conception de la femme,s'il luy furuient Auxion menſtrualle,elle ſoit faite
par les rameaux de ladite veine deſcendás au colde l’Amarry.Ceque meſme eſt vray
séblable à d'aucunes filles vierges.Outre plus ceſte veine jerte vne porció de ſoy hors

de l'Epigaſtre par le trou commun à l'os Pubis & Iſchio, laquelle renforcie d'vnc au
tre de la Crurale interne,deſcend (ſe comuniquant auxmuſcles Obturateurs , & au
!
De l'Anatomie. 121

A tres internes)iufqu'au iarrer ouenuiron:Quartement, produiſent les Epigaſtriques, Epigapris


leſquelles tanc d'vn coſté que d'aucre, mócent tout le long de la parcie inferieure des ques.
mulclesdroits,reſpondansaucunsrameaux aux muſcles oblique; & tranſuerſaux , &
Pericoine. Quincemenc & finablement,font les Honceuſes,ainſi nomices,pource Hortenſen
qu'elles vont auxparties honteuſes des femmes,&e à l'homme au Scrocum pour faire
lacunique charncuſc,laquelle eſtpleine de veines, & au cuir de la verge. Leur origine
eſt par deſſous les Hypogaſtriques.
Des Reins. CHAP XXVI.
1

Enſuiuent maintenanc les Reins , leſquels pour bien monſtrer,


apres auoir contemplé leur ſituation,les faut deſcouurir de leur
greſſe, s'ils en ont,& membrane qu'ils ont du Pericoine,puisde
clarer les choſes qu'il faut conſiderer en iceux , commençant
à leur ſubſtance, quieſt de chair denſe , dure ou eſpeſſe, de peur Subſtances
B
qu'ils ne fuſſent facilement bleſſez par l'acrimoine de l'vrinc.
Leur quantité eſt aſſez grande ,commeru le peux veoir à l'æil :& Quantité.
fontdefigure ronde & oblongue, quaſi en forme de croiſſant , comprimee aucune
nement par deſſus & deſſous ,& ayant partie caue & gibbeuſe . La caue regarde la Figure.
veine caue, & par icelle partie reçoivent les veines & arceres Emulgentes , & pro
duiſent les Vreceres : & en cet endroit font entaillez comme vnc mortaile . La gib .
beuſe regarde les lumbes. Ils ſont compoſez d'vne tunique venant du Peritoine,
deleurpropre chair ,qui eſt faiđe par effuſion de ſang, comme des autres viſceres au- cöpofition .
tour deleurs veines & arteres,que nous auons dit Emulgentes,nou ſucçantes, & d'vn
pecic nerf,lequelvenant des Coſtaux de la fixielmeconiugaiſo , chacun de ſon co
ſté,eft diſtribué à la cunique d'iceux ,cóbien qu'il ſemble ſuiure la veine & artere. Et
non ſans cauſe Fallopius,hommeſubcil & diligent, a obſerué, que ce nerf n'eſtpoint
ſeulement eſpandu par la tunique des reins , mais auſſi qu'il penetre & encre en lcur
fubſtance.Ils ſontdeux en nombre ,afin que s'il aduenoit nuiſance à l'vn,l'autre peuſ Nombre
ſatisfaire à l'office pour lequel ils ſont ordonnez. Et ſont ficuez ſur les Lumbes au co . Situation,
C Até des grands vaiſſeaux,auſquels ils ſont ſuſpendus par ledrs veines & arceres , ainſi
qu'ils ſont attachez auſdics Lumbes, comme par vne ſeconde tunique , de peur qu'ils
ne ſoyenteſbranlez par mouuements violents:en ſorte que nous pouuonsdire iceux
auoir deuxtuniques,ou membranes , vne propre adherante à leur propre ſubſtance,
&l'autre commc venant du Pericoinc,à l'endroit qu'ils adherent audit Peritoine.Le
dextre le plus ſouuent eſt plus haur , & le ſeneſtre plus bas , pour les raiſons decla.
Tees ſur la diuerſc origine de leurs vaiſſeaux.leſçay bien queColumbus cſcrit au con Connexion
traire , mais ic m'en rapporce à la veuë. Leur connexion eſtpar leurs veines , arteres
& nerfs,auec les membranes principaux,par leurs tuniques auec lesLumbes,&autres
parties contenuës au ventre inferieur, & ſpecialement auec la Vellie par leurs Vrete.
resou vrinaires.Ilsſontde cempcramentchaud & humide,comme eſt toutepartic Tempera
charneuſe.Leur a tion eſt de repurger la maſſe ſanguinaire,pourla plus grande partie ment.
o del'humeur ſereux & bilicux. Iedy pour la plus grăde partie,pourcequ'il eſt neceſſai. AEt100.
requ'vnc portion d'iceluy aille auec le ſang iuſqu'aux partiesſolides,pour luy ſeruir,
de vehicule & chariot,quieſt deſoy pourſa cropgrande craſſitude ineprcà couler par
les veines capillaires,eſquelles il fautqu'ilpaſſe.Outre ceschoſes faucentendre ,que Annoras ;
dedansvn chacun d'iceux y a yne cauité circonſcripce d'yne membrane, enuironnce tion.
dela diyiſion des veines &arceres Emulgentcs,dedanslaquelle cauité eſt faicecrãſ.
colation de l'vrine,partie par la vercu expultrice des Reins,partie par la faculcć attra.
Arice des Vreteres,plongeedeſſous leur cauitépar toute leur ſubſtance, comme eſt
lePore Cholagogue dedans la Foye.
1 ii ‫زن‬
122
Le troiſieſme liure
La neufieſmefigure,enlaquelle te ſontdemonſtrez bien apertement les vaiſſeaux A
tantSpermatiques, que ceux qui appartiennent àla veſie:auſi
la Veſie auecſesparties,
-

A Demonſtre la veine Caue.


B Artere Aorta .
CC Veines & arteres Emulgences entrans dans
les Reins.
DD Vaiſſeaux Vreteres ,
EE Veines Spermatiques.
FF ArteresSpermatiques.
G Endroit où la grande Artere cheuauchela
grande Veine, pour n'eſtre comprimee
de l'os Sacrum.
HH Conion &tion & mellange de la veine & ar B
tere ſeminales, degenerant en texture
variqueuſe, finiſſant à la membre nom.
mee Epididyme .
IL Deux teſticules.
KK Vaiſſeaux Expellens ou Eiaculatoires.
N I La partie anterieure du corps de la Vellie.
M Lc propre orifice & commencement du col 4

de la veſlie . si

NN Face anterieure des deux grádes Proſtates.


00 Veines & arteres qui deſcendent depuis le
col iuſqu'à l'extremité de la Verge.
PP Deux ligamens ſpongieux faiſans la Verge.
Q Canalcõmun tant à l’yrine qu'au Sperme .
R Balanus , fin ou extremité d'icelle.
C
ſuſdites renuerfees.
La dixie/mefigure , qui te demonftrekesparties

A Monſtre la grande Artere.


B Veine Caue .
A
DD Vaiſſeaux Emulgens aux Reins.
EE Les Vreteres auec leur entree dás la veſſie.
FF VeinesSpermatiques.
GG Arteres Spermatiques.
HH Vaiſſeaux variqueux.
II Teſticules.
KK Les Paraftates Variqucux , faiſans les vaiſ
foqux Eiaculatoires .
LL La conionction & concurrence des vaiſ
ſeaux Expellens , paſſant par dedans les D
Proſtates, pour aller au conduit du col
de la Veflic.
MM Deux glandes nommees Proſtates,
H N Sphincter du col de la Vellic .
B
OO Ligamens Spongieux ſeparez de leur origi
ne , qui eſt à la parcio inferieure de los
Pubis.
P Canal commun de l'vrinc, & de la matiere
Spermatique.
De l'Anatomie. 123
A Des vaiſſeaux spermatiques. CHAP. XXVII.
Lconuiendroit maintenant parler des Pores Vreteres , pource que ( comme
nous auons dit)ils ſont produits & naiſſent deſdics reins,pourporter l'vrine
àla veſlic: mais àcauſe qu'on ne les ſçauroit desfaire ,ny monſtrer ſans gaſter
& corromprela ſituation des vaiffeaux Spermatiques, ſous lesquels ils deſcendenc en
la vellic:à ceſte cauſemeſemble bon de paſſer à ladeclaration d'iceux vaiſſeaux Sper
matiques,& des parties à cux appartenantes. Et premierement pour les bien & claire.
mencdemonſtrer,tu les ſepareras doucement de la cunique qui provient du Peritoi.
ne,& greſſe qui les couure iuſqu'à l'os Pubis,contéplant leur naturelle ſituation, aváč
queles leuer:puis demonſtreras que leſdits vaiſſeaux ſont de ſubſtance ſemblableaux Subſtances
veines & arceres :aulli ne ſont- ils autres que veines & arteres.Leur quancité eſt petice Quantué.
en profondeur,mais en longueuraſſez grande,pourla diſtáce de leur origine aux Tc
ſticules:coutesfois aux hommes plus qu'aux femmes, à cauſe qu'iceux ont leſdics Te.
ſticules hors du ventre , & les femmes au dedans. La veine eſt beaucoup plus groſſe
B queľarcere. Leur figure & compoſition eſt coute pareille à celle des veines & arceres,
horsmis que depuis qu'ilsſortenc hors de la grande capacité du Pericoine,ils ſe refle. Figurt,
Cöpofirion :
chiſſene en pluſieurs replis,faits en forme de varice,iuſqu'auxTeſticules : à fio qu'en fi
long chemin lamatiere de la ſemence ,qui n'eſt encores que ſang, loic preparee à con
coction & albification , ou pluſtoſt cuitce du touc en iceux par l'irradiation des Teſti
cules. Ils ſont ſix en nombre :quatre Preparans , & deux Ejaculatoires ou Deferens ,c'eſt Nombrea
à dire,ietcans:deſquels nous parlerons puis apres. Des Preparans il y en a deux de cha
cun coſté àſçauoir,veine & artere,prenansleur originedelà où nous avons dit,parlás
dela diſtribution de la veine Caue: & s'inſerenc aux Teſticules par leur Tunique , no
meed'aucuns Epididymis,des autresDarros cómenous dironstantoit.Leur ficuacion Sirmation
eltobliqueſur les Lumbes & Iles,deſcendans entre les excremitez de l'os Pubis & Iliū. Connexiona
с Er ſont liez & atcachez auec les parties ſubiacentes , tant par certaines ramifications
qu'ils leurenuoyent de ſoy -meſme,quepar les membranes du Pericoine, quilesreueſt Tempera
&couure. Leur temperament eſtrel quedes veines & arteres. Leur vtilité eſt de por- meni.
ter leſang requis pour la generation de la ſemence aux Teſticules, deſquels mainte. L'Vtilités
nane faut parler.
Desteſticules. CH A P. XXVIII.

Es Teſticules ſont de ſubſtance glandulcuſe, blanche,molle , & laxes


pour meſme raiſon que la ratre, à fin depouuoirmieux receuoir la ma. Subhance
cicre du Sperme. Leur quantité & figure , eſt comme un petit cufde
poulle aucunement comprimé . Et ſont compolez de veines , arteres, Quantités
nerfs,tuniques , & propre chair.Les veines & arteres leurs lone baillees Figure.
desvaiſſeaux ſpermatiques, les nerfs, de ceux de la fixieſme coniugai. Cõpoſision.
ſon, qui deſcendent le long de la racine des coſtes ,& de ceux de l'os Sacrum. Leurs
D Tuniques ſont quatre en nombre,à ſçauoir deux Communes , & deux Propres. Les
deux Cómunes,ſontle Scrotum venant du vray cuir,& la Charnuë, qui eſtfaicte du Quatre in.
pannicule Charneux , receuant illec grande multicudede vaiſſeaux, à cauſe deſquels miques des
eſt ainſiappellee.Les deux propres ſont,l'Erythroïde,qui vient de l'apophiſe du Peri
toine, deſcendantauec les vaiſſeaux Spermatiques , laquelle appert rouge, tant pour Eryibroi
ſes vaiſſeaux,que pour les muſcles ſuſpenſoires des teſticules: & l'autre Epididymis ou de
Darcos, prenantſon originede la membranc desvaiſſeaux ſpermatiques Preparans.
Leur chair cft effuſion de matiere autour des vaiſſeaux,commenous auons dit des au- Epididy
tres viſceres.Et noteras , que la ſuſdite Erythrois eſt ſeulement contiguë au Teſti-me.
cule tout autourd'iceluy,fors que deuers ſa ceſte, auquel endroic elle adhere con.
crel'Epididymc: laquelle eſt concinuë par tout à la propre ſubſtance du Teſticule.
Elle aeſte creće , parce que les Teſticules eſtoient laxes, rares,cauerneux & mols, & pourquoy
ne pouuoienc eſtrc à ſeureté, & iointes auecques les vaiſſeaux ſpermatiques, qui ſont « efiéidcreée
denſes & fort durs. A ceſte cauſe , Nacure a youlu vnir & aſſembler ces deux corps, meEp, id y.
c o r p s, l'
quiont leurſubſtance ſi contraire , & s'eſt eſtudiee de faire vn lien moyen entre eux,
qui les accouplecn vne bonne vnion. L'Epididyme aux femmes ſe void à grande
peine,parce qu'ileſt fort petic. Les deux autres Tuniques communes ſont adheren
!

1
Le troiſieſme liure
124

tes par lesvaiſſeaux,non ſeulement entr'eux,mais auecques l'Erythroïde.Dauantage A


Muſcles eu entendras ,que les muſcles ſuſpenſoires, ou cremalteres, ſont de melme ſubſtance
Suspenso que lesautres ,fort perits & grelles,defigure oblique & large , fortans de la membrane
foires. du Peritoine, qui(commet'a eſté dit)prend chair des Iles, quiefleuent en haut leſdits
teſticules d'vn mouuement obſcur.
La compoſition deſdics muſcles eſt telle que desautres : & ſont deux , vn de chacun
cofté , ſituez depuis les extremitez des Iles , iuſques aux teſticules, ayanıt connexion
auccques l'apophyſe du Pericoine & leldics Teſticules. Leur complexion eſt telle que
des autres .

Alion . Leur a &tion eſt ſuſpendre & retirer les Teſticules vers le ventre, d'où ils ont eu le
Nombre. nom ,Suſpenſacoires. Quant au nombre des Teſticules, ils ſont deux le plus ſouuſt, va
de chacun coſté,quelquesfois trois, quelquesfois moins, comme auſſi il aduient quel
Situation . quesfois des reins : car en aucuns il ne s'en trouue qu'vn . Leur ſituation eſt dedans
Connexion . le Scrotum , lous l'extremité inferieure de l'os Pubis : & ſont connexez par leurs

vaiſſeaux, auec les parties principales, & le col de la vellic, & membre viril : par leurs
B
7 mpera- cuniques , auec les parties deſquelles ils les prennent. Leur cemperament eſt froid &
inenn.
humide , pour eſtre glanduleux , combien que par accident ils puiſſent eſtre chauds
Signes de par la mulcitude des vaiſſeaux qu'ils reçoiuent . Ceux qui ont les Teſticules trop
Teficules
chauds, ſont prompts & enclins à l'vſage Venerien : leurs parcies honteuſes & celles
chauds. qui ſont voiſines , ſont fore reueftuës de poil : & leſdits Teſticules ſont gros & ſolides.
Ceux qui ont les Teſticules trop froids,neſont pas beaucoup aptes à l'acte venerien ,

Signes de & n'abondent en lignees : & s'il leur en aduicnt, engendrent pluftoft des femelles que

teſticules des mafles. Ils ont peu de poil autour des parties honteuſes :leurs Teſticules ſont pe .
trop froids. tits & mols,aucunement applacis . Leur a &tion eſt de faire la ſemence pour la gene
ration , & de renforcer toutes les parties du corps, par leurs irradiacion virile : comme
tu peux vcoir par experience aux chaſtrez , leſquels priuez deſdits Teſticules, n'ont
Wation .
non plus de force queles femmes , & quelquesfois moins: comme demonſtre Hippo,
crates au liare De locis,aère, & agua,parlantdes Scythes.

Descorps variqueux ,qu'on appelle Paraftates:des vaiſſeaux Eiaculatoires,en с


corps glanduleux , nommez Profiates. CHAP. XXIX.

Es Paraftates Variqueux , ſont corps nerueux & blancs, faits quaſi comme
Subſtance, des parties nerueuſes , annulaires , coniointes enſemble eſtroittement :lef
Situation .
quels ſont couchez depuis la ceſte des Teſticules iuſques au bas , dont ils
produiſent les vaiſſeaux Eiaculatoires , y prenans leur ſortic. Sinous ne diſtin .
guons icy diligemment les mots, il y aura confuſion . Car ce que i'appelle Paraſta
te, quieft comme la teſte du Teſticule , ayant quaſi forme d'un autre Teſticule , Ga.
lien au premier liure Defemine, l'appelie Epididymis: & moy , ſuiuant pluſieurs Ana
tomiſtes, par ce nom Epididymis i'entends la propre Tunique des Teſticules , de

quoy ie t'ay bien voulu aduertir en paſſant. Leur a &tion eſt d'empeſcher par leurs
Aflion . anfractuoſítez ,comme vn Portier , quela ſemence ne paſſe des vaiſſeaux Preparans és
Eiaculatoires ,tant qu'elle ſoit entierement preparee,digerec, cuite , & a !bifiee eldies
vaiſſeaux par les Teſticules:car és premieres circonuolutions & entortilleures,le ſang
cft pur , 8c aux dernieres n'eſt plus du tout rouge, mais ja eſt un ſuc bláchiffanr. Et d'at D

tirer d'iceux ce qui eſt parfai &tement elaboré,ou pour le moins permettre qu'il ſorte.
Car c'eſt une maxime, quand nature veut arreſter longuement en quelque lieu aucu
ne matiere, elle prepare & fait ſon paſſage difficile ,à ſçauoir eſtroit , ou tortu, ou obli
que ainſi qu'on peut veoir au rets admirable , & aux boyaux leur entorcillemét, les ru
gofitez du fondde l'eſtomach , comme auſſi le Pylorus & les veines ſubtiles & delices
au foye,afin que le Chylusy demeuraft iuſques à ce qu'il fuſt changé & digeré en ſang.
Ainli Nature a fait le ſemblable aux vaiſſeaux fpermatiques.Leur quãtité & figure eſt
Quantité. aſſez notable à l'æıl , & eſt aucunement ronde tendante en poinde.Leur compoſition
Figure.
eſt de nerf,veines& arceres , qu'ils ont des vaiſſeaux des Teſticules , & de la tunique
Côpoſition .
Tempers venant du Peritoine:ou ſi tu veux, de l'Epididyme , & leur propre ſubſtáce. Leur tépe
inent. rament elt froid & ſec. Ils ſont deux en nombre , à ſçauoir vn en chacun Teſticule : &
font appellez Paraſtates Variqueux , cóme Aſliſtans ſuperficiellement , entorcillez ſur
Nombre. lelong du teſticule, comme veines Variqucuſes. Ec d'iceux ſont produits les vaiflcaux

7
De l’Anatomie , 125
A Eiaculatoires ou Expellens,ainſiquenous auós dit:leſquels ſont de meſme ſubſtance sublauer.

queleursprogeniteurs àſçauoir folide, & bláche,& cõmenerueuſe , mais vniecom . Quanti .
meau nerf.Leur quácité eſtmoyennè,&leur figureronde & fiftulaire,à fin quela ſè . Figure.
1 mence puiſſe couler par iceux : toutesfois il ſemble qu'il n'ayent aucune cauité ma
nifefte, ſicen'eſt en ceux qui ont eſté cravailiez d'vne longuegonorrhee ,cómenous
dironscyapresencechapitre. Leur compoſition& temperamenteſtpareilauxlul Copolitana
diescorps entreleſquels & les Proſtates
Tempera
du col de la vellie, ils ſont ſituez ; ayans col ineni .
liganceimmediatement auec iceux,& coldela veſie,com nie par leur cunique,& au- Colligance.
tres vaiſſeaux,auec les parties dont ils les prennēt. Et faut noter,que leſdits vaiſſeaux
eſtans ſorcis des paraſtates,ainſiqu'il a eſté dit, montent du bas desTeſticules iuſques
au plus haut,où rencontrans les Preparans, montent par le proceſſus ou voye du Pe
ricoine dedās le ventre,ſe lians auec eux par certaines fibresnerueuſes, iuſques à l'in. 1

cernc capacitédudic ventre,où ſe reflechiſſans laiſſent leídicsPreparans pour defcen


dre au deſſous de l'os Pubis,au milieu de deux corps glanduleux nommez Proſtates
ou alliftans ſituez au commencement du col de la veſſie,pourillec le rencontrer & V
B
nir enſemble,faiſansvn meat & conduit commun , premierement de deux Giens,puis
apres vn autre auec celuy de la vellic,ch ſorte que de ces trois coduits,à ſçauoir deux
des Eiaculacoires, & vn de la veſlic,en eſt fait vn commun auxhõmes, tant à l’vrine,
qu'à lamatiere ſpermatique.Laquelle vnion nous eſt mõſtree par vne petite Carun
cule elleuce dedans l’entree du col de la veſlie comme une fraile, laquelle receuát le
ditcrou aſſez patér,eſt ſouuét prinſe pour Caruncule non naturelle par ceux qui ſon
dent,ignorans l'Anatomie,meſmement lors qu'elleeſt enfice par quelque occaſion,
Leur nombre eſt de deux,à ſçauoir vn de chacun coſté. Leur actio & vtilité eſt d'ap . Nombre
porterlafemence claborec des Tedicules , aux Proſtates, & pariceluy au col dela Action
veſſie,poureſtrede là iettee hors par la voye cómune. Ec premier que la ſemiéce s'in. Vrilice.
ſere,ſefontpluſieurs reuolutions ,dans leſquelles eſt autant cõrenudeſemēce,qu'vn
hommeictceàchacune fois qu'il embraſſe la femme.En quoy ſi on nousdemande,à
ſçauoir ſi le conduit commun fait de la concurrence des deux vaiſſeauxEiaculatoires
catreles deux corps glanduleux ,eſt patent & manifeſte au ſens de la veuë,quád il en.
1 tre dedans le conduit de l'vrine:nous reſpondons que non , cõbien qu'il y ſoit,à rai
1 C ſonde la matiere illec portce,laquelle eſt craſſe & viſqueuſe.Et la cauſe qui nous em
peſche de la voir, c'eſt poſſible qu'apres la mortcous petits trous ſont bouchez par la
froideur,& lesgráds,bien fort eſtrellas:ou pour la procidéce des parties deſdits trous
l'vneſur l'autre.Toutesfois quoy que ce ſoit ,il faut que leſdits trous foient bien pe
tits,l'hõme eſtant en vic,veu qu'apras ſa morcon n'y ſçauroit meccre la pointe d'vne
petite oſpingle.Aumoyen dequoy il ne faut craindre quádon ſonde quelqu'vn ,que
laſondeeſtanededansla veſſie,penetrededáslecomun meat des vaiſſeaux Eiacula- Poiniz
sable rio.
pour
toires,quideſcédentrela Carūcule, li par accidet il n'eſt dilacé par gonorrhee, ou au la fonde
tremēc par inflámation.l'en'ay veu depuispeu de téps ençà de ſi patents, qu'ils rece qu'on met
uviétforeailemēc tere
la peti te teſtede mõcſpatule :qui nousaducrtit de ſonderbičlage- en la vefie
ſfer ledit monticule ,lequel le plus ſouuent eſtant touché par la
mene,de peard'in
ſondeiette du ſang,s'il eſt enflammé.Dauantage ,fion demande come par vn fi petit
D troula ſemenco ,qui eſt viſqueuſe & craſſe,peut eſtre promptement iettee en ſi grade
abondance au coït: ie reſponds que cela eſtfait par l'impecuoſité & rauine des eſprits
enuoyez de cout le corps ſurletemps dudit coït, auec l'aide de chacune partie par le
commandement de la faculté imaginatiue,chefde telle coure:leſquels eſprits eſtans
parucnusaux Proſtates promptuaires & receptacles du ſperme,s'inſinuans parmy, prola
sul tes. ,
iceluy en le rendant animé,le pouſſent dehorsainſipromptemét.Apres ces vaiſſeaux er temper
s'enfuyuent les corps glanduleux nommezProſtaces leſquelsſont de ſubſtáce & tem . rameni .
perament tel quelesautres glandes.Leur quantité eſt affez grande:leur figure ronde Quantité.
& aucunemétoblongues, produiſant chacun de ſon coſté vne apophyſeaſſez longue Figure.
&molle.Leurcompoſition etdenerfs,veines,arteres,& tunique qu'ils ont de leurs cöpofition.
parties circonuoiſines( cõmedeleurpropre chair,qu'ils ont de leur premiere confor. Silu.:lion
Nombre. .
mació.Ilsſont deux en nõbre,ioinets enſemble, &fituez à la partie inferieure du cõ
Colligania
mencement du col de la veſlic, ayans colligance particuliere auec iceluy, la veſlie & Annuid
vaiſſeaux differécs, & partiesannexees à iceux.Où noteras en general,que toute par-tion.
ticayant pourriſſement,vie & ſentiment,a cõnexion mediatemécou immediatemēt Vſages
auec les partiesprincipalespar les vaiſſeaux qu'ilsen reçoiuent.L'vſage deſdits Pró. 1

1
162 Le troiſieſme liure

ſtates eſt de receuoirle ſperme produit des Teſticules, & iceluy conſeruer en leur A
corps , iuſques à ce qu'il leur nuiſe ou en quantité ou en qualicé, ou en tous deux
enſemble : & de contenir vn humeur glaireux ou faliueux ,& viſqueux,qui eſt engen
dré au corps glandulcux d'icelles , lequel diſtille ordinairement au canal de l'vrine
des maſlcs,& quand ils habitent auec les femelles, eſt ietté avec la ſemēce dans la ma
trice: & aux femelles degoutce en leur matrice & hors d'icelle . Cet humeur a plu
ſieurs vtilitez tant aux malles qu'aux femelles ,c'eſt qu'il donne énuie de s'aſſembler,
& s'aſſemblant il donne vn cres -grand plaiſir:auſſi ilarrouſe le canal de ľvrine d'vne
moüilleure profitable,afin que ſe deſfeichaneil ne ſe retire & replie , empeſchant par
ce moyen que ladite vrine & la ſemécen’ayent leur paffage libre & aiſé:er.duiſant en
outre tout ce conduit de ſon vn & uofice, à ce qu'il ne fuſt parfois, & à la longue eſcor.
ché de l'acrimonie de l’yrine. Qutre - ce , nous auons obſerue des deux coſtez de ces
Proſtates,autres glādes, queRondeleten la Pratique(s’illa faut appeller fiennejnom
me Appendicesglanduloſas, eſquelles meſmes la ſemence eſt gardec.

La dixieſme Figure, ai t'eſtſeulementdemonftree, la difference B


d'icelle à la precedente.

+
-7 - A Monſtre le ligament du foyedeſcen .
dant entieremét deſſous le Xiphoïde.
B B La partie gibbeuſe du foye,
R
CC La partie caue du foye
DD Lamembrane Adipeuſe des reins ren
verſez,
EE La bifurcation vnic du vaiſſeau ſperma
tique ſeneſtre , qui ſe faict de la veine
Caue , & de la veine Emulgence , la
quelle rarement ſe trouue .
FF La connexion ou cõionction de la vei
nc & artere ſpermatique, en laquelle
commence à s'entorriller en forme
de capreole de vigne.
G L'entrec des vaiſſeaux preparans aux te
ſticules,par laquelle les vaiſſeaux Pro
parans communiquent la matiere
ſpermatique aux Teſticules.

M H Teſticule enueloppé de la Tunique


nommce Dartos .

II Paraſtates Variqueuſes,où comměcent


les vaiſſeaux Spermatiques, Expellens
ou Eiaculatoires.
K Lecorps de la veſſie.

L Les corps glanduleux nommez Proſtates,entre leſquels les vaiſſeaux Spermati


que s'en vont vnir pour entrer au mcat & conduit de la veſſie , quieft commun
álvrine & à ladite matiere ſpermatique.
D
M Muſcle Sphinder du col de la veſlie.
N Veines & arteres qui ſe diſtribuent à la verge.
00 Deux ligamens ſpongieux conſtituans la verge.

Dės vaiſſeaux Vreteres. CHAPITRE XXX .

R ſommes nous maintenant venus au lieu propre & commode


pour parler des Vreteres , Vellie , & parties appartenantes à icelle.
Subſtance. Doncles Vreteres ſont de ſubſtance fpermatique, blanche , denſe, &
Quantité. ſolide, de quantité notable ,tant en profondeur qu'en longueur . Leur
figure eſt ronde , canulaire ou creuſe : & ſont compoſez de deux tu
Figure.
Copofition. niques : vne propre , tiſſuë de fibres droiđes & tranſuerſes , laquelle vient des
Nombre. veines & arteres Renales ou Emulgentes : l'autre commune , venant du Peri
Situasion. toinc. Ils ont auſſi veines , arteres , & nerfs, leſquels leur ſont donnez des parties
voiſines
.
de l Anatomie . 1
127
A voilines. Ils ne ſont que deux, vnde chacun cofté, & ſont fituez entre les reins ( de la Grande
patrie caue deſquels ils ſortent) & la vellic. Or lamaniere comme les pores v receres merueilles
s'inſerenc à la vellie, & leconduit qui vuide la colere dedans l'inteſtin ,lurmontetous le prowidēce
autres miracles denature : car ilss'implancent obliquement pres l'orifice d'icelle, & 'de' matars.
penetrentiuſquesà l'internoſpacioſité, comme entrecoupant & ſoufleuant par deſ
ſous yne languetce membraneuſe du corpsdela partie , qui ſe renuerle & s'ouure à
l'encree & venuë de l’excrement, c'eſt à dire, de l’vrine & de la colere: & en autre
temps ſe reſerre & bouche fermement comme vn couuercle , que non ſeulement
lexcremét ne peut regorger ou refluer en arriere, non pas ſeulement le vent : ce que
nousexperimentonsà vne veſſie de porc ou autre animal , remplie de vent : car en
icelle nous voyons l'air qui aeſté ſoufflé dedans, y demeurer , encores qu'on preſſe
bien fort deffus.Cartoutainſique par l'impetuoſité des humeurs qui accourent , ce
ſte languecce eſt renuerſce& ſubuertie au dedans: ainſi parcequi interieurement, la Connexion
comprime,elleſe plaque & preſente corre le conduir. Telle choſe nous monſtre, que
naturceſt grande ouuriere& maiſtreſſe.Leur propre connexion eſt auec les ſuſdites
parties , & muſclesdes Lumbes , par deſſus leſquels ils deſcendent des reins à ladice
B
veſſie:parquoy rien n'empeſche que la pierre deſcendant par leſdits vaiſſeaux vrete
res,ne puiſſe faire ſtupefa&tion à la cuiſſe,auſlibien que s'il eſtoit aux reins. Leurtem. Tempera
perament eſt froid & ſec,& l’vſage d'iceux eſt de ſeruir de voye & canal à l'vrinc paf- meni.
ſantdes reins à la vellie. Et voila quant aux vaiſſeaux vreteres, apres lequel s'enſuit
l'explicationde la veſſic.
De la veſie. C H 4 P. X X X I.

A Vellieeft de meſme ſubſtáce que los vreteres,à ſçauoir nerucuſe,afin Subſtance


qu'elle ſe peuſt mieux dilater. Sa quantité eſt aſſez grande, coutesfois Quantité.
aux vns plus aux autres moins,cançpour raiſon de l'aage,que plus grā.
de ou plus pecite corpulence & habitude du corps. Safigure eſt ronde Figure.
& quali nommee Pyramidale. Et eſt compoſee de deux tuniques:vnc cöpoficion.
propre,laquelleeſt fort eſpeſſe, tiſſuë de trois genres de fibres, à ſçauoir,droites en ſa
C partie interieure,tranſuerſes en l'extericure ,& oblique en la moyenne : l'autre com
mune, qu'elle a du Peritoine. Elle a auſſiveines &arceres, vne dechacun coſté des
vaiſſeaux Hypogaſtriques deſſus l'os ſacrum , & nerfs tant d'un côté que d'autre , de
ceux dela ſixieſmeconiugaiſon meſlezauec ceux qui ſortent de l'os ſacrum , iuſques Nombres
à la fin duquel leſdits nerfs deſcendent depuis lecerueau . Elle eſt ſeule & vnique: fi. Sirwalion .
cuec aux hommes au petit ventre deſſusl'inteſtindroict ſous l'os pubis:& aux fem . Connexion
męs entre l'amarry & ledicos, auquel elle eſt attachee par ligamens membraneux ,
comme auſſià laverge par ſon col, & à l'inteſtin droi & par la tuniquecommune, & Cöplexion.
parſes vaiſſeaux. Sa complexion eſt froide & ſeiche. Son action &vlage eſt d'attirer Action ,
parfesfibres ,& receuo contin
& puis apres l'expeller irpar ſon couel,llpar
l'vtin : la rete qu' eneſtbe , ofage.
entpour lae compreſſniiortn anſoitt,qu'ilelle aduiſoeninne
emtie
de ſoy,ou pluſtot des muſcles de l'epigaſtre, & Diaphragme,attendu que tel mouuc
ment eſtane volontaire , doit eſtre fait de muſcle,qu'elle n'a point: partie auſſi par la
dilacation deſon muſcle Sphincter composé de fibres tranſuerſes , commeceluy du
D liege, afin declorre l'orifice de ladite velie , de peur que l'vrine ne fuë & forte outre
la volonté. Or la veſſie en ſe rempliſſant s'eſtend, & en ſe voidant ſe referre comme
vnebourſe qu'on ouurc & ferme. Et eft ce muſcle, ainſi que tu peux voirordinaire- Le Sphina
ment à la vellie d'un pourceau , eſtendu depuis l'orifice de ladite veſke, & commen- cier de la
cement du meat commun à l'vrine & au ſperme,iuſqu'aux parties honteuſes,meſme. veßice
mentaux femmes: mais aux hommes il ceſſe au Perincum, lors qu'illaiſſe l'inteſtin
droit,ouquelque peu apres. Ora-il eſté ainſieſtendu,afin que par la compreſſion Pv .
rine fuſt entierement jeccechors du col de la veſſic, laquelle par ſon acrimonieen ſc .
journant là,l'cuſt peu bleffer. Voila la communc opinion touchant le Sphinêter de la
veſlie:coutesfois Fallopius reprend ceſte opinion. Car (comme il dit ) li ce muſcle
eſtoie deffous le corps glanduleux , iamais la ſemence ne pourroit ſortir au coït ſans
quelque partie de lvrinc. Parquoy il eſtime que ce muſcle eſt par deſſous les Pro
ſtares, & n'eſtautre choſe que le commencement du col de la veſſieplus charnu , & Le col dels
tillude fibres tranſuerſes. Quant au col , il ne differe rien en ſubſtance, compoſition, veßic.
nombre & complexion de la veſſie:maisſeulement en quantité , laquelle n'eſt point
m
128 Le troiſieſme liure ,
Quan:icé. fi capable ,ny fa figure ſironde,ains oblongue , repreſentant aux hommes avec la ver. A
gevne / S ) Romaine. Sa ſituation eſt aux hommes ſurl'extremité de l'inteftin droit, &
Figure. du Perineum , montant en haut iuſqu'au commencement de la verge , & auec icelle
Lecol de la ſe reflechiſſant en bas. Aux femmes il eſt court , large,& droit,fe finiſſant fur l'orifice
veßir des du col del'Amarry ,entre les corps nerueux dics Nymphes . Sa connexion eſt és hom
femmes of mes auec ladite veſſie,vaiſſeaux eiaculatoires l'inteſtin droit,& la verge : & aux fem
CONII, droict mes aueclecol de l'Amarry, & parties honteuſes ſeulement.Son a &tion aux hommes
Colar ze. , .. que
Connexion
Action
eftd'apporter au dehorsla ſemence & vrine:aux femmes la ſeulevrine.Et faut noter,
pour bien voir toutes ces parties en leur entiere & naturelle ſituacion , faut diui .

ſer les os barrez ou pubis,par leur commiffure , & les ſeparer tant qu'il eſt poſſible,cou
tesfois ſans rien d'eſchirernyrompre. Outre plus faut entendre , que par ce nom de
Que cej? Perineum ,n'eſt entendu cant auxhommesqu aux femmes, que l'espace conter : u dc
que Pe
neum ,
ri
puis le ſiege iuſqu'aux parties honteuſes, appellé d'aucuns l'entrefeffon : la ſucure
Taurus. duquel eſtnommcc Tausus,tout ainſi que celle de la verge , Raphi.
Raphi. B
L'onzieſme Figure de la Veſie & Verge.
АВ Monſtrent les deux ligamens fpongicux qui
font la verge virile.
F
CC Leur commencement.
D Le gland.
E Le muſcle Sphincter.
F Le corps de la veilic.
G Glandes Proſtates.
HH Pores vreteres .
II Vaiſſeaux Spermatiques expellens.
XXII.
De la Verge. CH A P.
'Enſuit maintenant la declaration des parties honreuſes tant de G
l'home quedela femme, & premierement de l'homme : le mébro
duquel eſt de ſubſtáceligamenteuſe ,d'autant qu'il ſont des os. Do
quátité aſſez notable,ſelő les trois dimenſions:toutesfoisaux vns
plus,aux autres moins.Sa figure eſt ronde cſtát toutesfois par der
Subſtance . (us & par deſſous aucunement cõprimec . Sa compoſition eſt de
Quantisé. double cunique,de nerfs,veides& arteres,de deux ligamens,con
Figure. duit dei'vrine , & quatre muſcles.Les Tuniques luy ſont donces tant du vray cuir que
du Pánicule charneux Les veines & arteres auſſi de deſſus l’os facruin ,que nousauós
Cặpoſition. nómez vaiſſeaux Hypogaftriques , leſquels vaiſſeaux vont audit mēbre par la partic AU

inferieure ,comme par les hôteuſes en la ſuperieure.Quant à ſes ligamehs,ilsluy ſont


baillez des parties laterales & inferieures de la commiffure dudic os pubis , tant d'un
coſté que d'autre : au moyen dequoy nous luy donnons double ligament furlon
commencement: mais incontinent apres leur origine ils s’vniſſenc en ſorte qu'ils ne
font plus qu'vn quieft faicſpongieux . Le con mic del'urine eſt ſitué par deſlous le
dit membre entre les deux ligamens , lequel vient du col de la veſſie. Quant aux D
muſcles , les deux collateraux conftituans & compoſans aiv ſivne grande partie do
la verge , ſorcent de l'internetuberoſité de l'os llchion , & apres leuroriginc eflargiſ.
ſent, & deuiennent foretcnuës & minces. Les deux autres infericurs prennent leur
origine des muſcles du ſiege , acconipagnans le conduit de l'yrine le long du Peri
ncum ,iuſques à cequ'il entrenc dedās la verge: & ſont celdies muſcles vnis fieſtroi.
tement qu'ils ſemblent n'eſtre qu'on fait en triangle. Tous ces quatre muſcles icy
faiſanc leur operation , ouurent & dilatent le conduit commun à l'urine, & auſper.
me au temps du coït , afin que fedit ſperme tout à coup ſans interruption & auec
toutes ces forces ſoit iecté au champ de nature humaine: ioinēt auſſi qu'au coïc ils
ferment en deuë ſituation & ere &tion ledir membre , ſans qu'il decline ne flechiſſe
ny d'vn coſté ny d'autre . Il y a deux muſcles à la verge , qui procedent de l'os Pu
bis , attachez à chacun coſte dela verge , quiaydent à le dreſſer. Il y en a deux au.
tres qui procedent de la partie de deuant le muſcle Sphincter , quis'implantent au
de l'Anatomie ,
129

A conduir de l'urine,paſſent ſous l'os pubis, & ſe recourbée vers le laur. Ces deux mur.
cles ellargiſſent le conduit de la verge,depeur qu'il ne ſe ferme en ceſte recourbeure , Nombre :
lors que la ſemence eſt iertee par ce conduit . Ses parties ainſideclarees , faac ſçauoir Situations
H
qu'il et foulvnique , ficué ſur lesparties aucunement infericures de l'os barré , à fin Connexion.
qu'il fuſt plus ferıne à ſon cre &io . Sa connexion eſt aucc ledicos, & autres parties cir-Tempera ,
conuoilines par les parties qui le compoſent. Son temperament eſt froid & ſec. L'v- meni.
Valité .
cilicé eſt de porter & iecer la ſemence dedansl'amarry pour la conſeruation du genre
humain .Et noteras,que là où finiſſenc ces tendons ; la teſte dudit membre commen
ce: laquelle à raiſon de la figure qu'elle a , cft appellee Glans, autrement Balanus : & le Glans , oss
Balanus.
cuir quicouure ladice ceſte , Prepuce . La chair dudic Glans eſt moyenne entre la
Prepиcto
chair de glandule, & la vraye chair. Outre plus, faut entendre que leſdi & s ligamens
font ſpongieux,preſque ſemblables à la ſubſtancedela ratte où ſe trouuent pluſieurs
samifications,& entrelafleures de petites veines,arteres,& filamens nerueux , contre
la naturedes autres , contenans gros ſang & noir , lequel aſſiegé de l'eſprit de concu .
B
pilcence, & agitt par le feu d'amour illec enuoyé ,ente & erige ledit membre viril.

Dela Matrice, & parties appartenantes à icelle. CHAP. XXXIII.

Aintenant ( ſuiuant ce que nous auons dit ) il conuiendroit parler des para
cies honteuſes de la femme : mais veu qu'elles dependent du col, & pro
pre corps de l'amarry , nous conimencerons à parler d'icelle, apres toutes.
Differecedes
fois que nous aurons demonſtré la difference qui eſt entre les vaiſſeaux vaiſſeaux
ſpermatiques ,& tefticulesdes femmes auec ceux des hommes. Donc pour commen . spermati
cer , il faut entendre que les vaiſſeaux ſpermatiques des femmes ne ſont en rien diffe ques des
rensàceux des hommes quant à leur ſubſtance, figure , compoſition , nombre, colli. hommes
gance,complexion, origine , & vtilité , mais ſeulement à raiſon de leur quantité & di- des fémes.
ſtribution : car elles les ont plus amples & plus courts. Plus amples , pource que non
C ſeulementil falloir qu'ils apporcaſſent matiere pour la generation & nourriſſement Diviſió dels
eaux
des teſticules, mais aulli de la matrice du fætus en temps requis. Plus courts , parce vaiſ
C qu'ils ſe finiſſent dedans le ventre à leurs teſticules, & matrice. En quoy fautnoter , prep arans
des femmes
que leſdits vaiſſeaux ſpermatiques preparans quelque peu auant que venir aux teſti
cules , ſe diuiſent en deux rameaux inegaux : dontle plus petit , ainſi entortillé que
nous auons dit de ceux des hommes , s'en va inſerer à la teſte des teſticules, par la Les vaifa
quelleilenuoye quelque pecit rameau de ſoy aux cuniques d'iceux pour les viuifier & jeaux per
nourrir: & non ſeulement icelles , mais auſſi les vaiſſeaux ciaculatoires , ainſi qu'il a matiquesne
eſté die parlano de ceux des hommes . Le plus grand rameau ( i'entends touſiourscant fone, quevei
de la veine que de l'artere de chacun coſté )deſcend tant d'un coſtéque d'autre par la nes cartes
partie ſuperièure du corps de la matrice, & entre la cunique propre & commune du "es.
Peritoine , où il ſe diuiſe en pluſieurs rameaux . Ec voila la differencedes vaiſſeaux La femme
ſpermatiques des hommes & des femmes,de laquelle cu pourras tirer la raiſon ,pour- ietle sa se
quoy les femmes iettent moins de lemence que les hommes. Quant aux teſticules,ils mence
ne different de ceux des hommes preſque en rien , ſinon à raiſon deplus & de moins : fond de fa
D car leur ſubſtance, comme tu peux entédre,eſt blanche & glanduleuſe comme celle matrice .
deshommes.Ils ſont aulli pluspetits & de figure plus platce, pour le defaut decha. Difference
desteſticules
D leur,qui ne les a peu faire leuer ny croiſtre :& decompoſition plus ſimple, car ils n'ont des homes
mais en o desfem .
pointdeſcrotum ,ny decunique charncuſe ,ny d'erythroïde, ſelon aucuns ,
ſon licu ils en ontvne du Pericoine quicouure la proprenómee Epididyme ou Dar- mes.
t0s, comme liſerychroïde naiſſoit du Pericoine . Monticur Syluius eſcrit, que les tc
ſticules des femmes n'ont point d'Erythroïde : toutesfois il eſt certain queoutre leur
proprecunique nõmee Dartos , ils en ont vne du Pericoine , qui eſt l'Erythroïde, ou
piuttoſt ( comme Fallopius la veut appeller ) Elythroïde , c'eſtà dire , ſemblable à vne
gaine. Et penſe que cet erreur ſoit venu d'un lieu de Galien mal entendu au quator
zielmeliure Devſu partium , où il eſt eſcric, que les teſticules des femmes n'ont point Nobre
d'epididymis : ce qu'ilne faut pas entendre d'vnecunique , mais du Paraftate vari
queux,comme par cy-deuant i'ay declaré. Quant au nombre ,ils ne different en rien ,
mais en la ſituation . Car aux hommes(cometu as entēdu ) ils ſont pendus hors duvé.
tre àľos pubis',au deſſus du perineum : aux fémesſont dédásleventre aux coſtez de
l'amarry,pres deſon fons,coutesfoisfans toucher ſon corps . Et ſont leſdits teſticules
mij
130 Le troiſieſme liure ,

annexez auec l'amarry ,tăt par la tunique du Peritoine, que par les vaiſſeaux Eiacula. A
toires deſcendás aux cornes d'icelle , & à tout le demeurant du corps par les vaiſſcaux
preparans & nerfs prenans leur origine de l'os ſacrum & du coſtal. Ils ſontauſſi de té
Difference perature plus froide que ceux de l'home . Leur a & tion eſt celle qu'aux hommes . Quand
des vaif à leurs vaiſſeaux eiaculatoires ou expellens,ils different de ceux des hommes , pource
ſeauxciách qu'en leur commencement ils ſont amples , de ſubſtance & conſiſtence de veine , en
Pstoires, des ſorte qu'auec difficulté cu les peux diſcerner d'auec la tuniqueda Pericoine , puis de
femmes quiennent eſtroits & nerueux: mais à l'endroict où ils commencent eſtre cels,ils ſem
des bõmes. blent aux fpe & ateurs ( fauſſement toutesfois ) caſſez & rompus:& comme ils appro
chent des cornes de ladite matrice , derechef ſe dilatent & amplifient. Leur ſubſtance,
nombre, compoſition ,temperament, action ou vtilité eſt melme qu'aux hõmes. Leur
quantité en groffeur, & longueur moindre . Leur figure ronde, mais plus entortillce
qu'aux hommes :afin , ce croy.ie ,que tel entortillement leur ſeruiſt devariqueux pa
raftates. Leur ſituation eſt entre les teſticules, & l'amarry : car ils ſortent de la teſte B
d'iceux, & portez & conduits par la cunique du Pericoinc, ſe vonc implanter dedans
l'amarry par ſes cornes, au moyen dequoy ils ſont connexez auec ceſdites parties .

La douzieſme figure , de la Matrice.

A A Monſtrent les vaiſſeaux ſpermatiquesprepa


rans, quiſont deux veines & deux arteres.
BB Rameaux qui vont à la membrane des teſti
cules deſcendans du Pericoine .
CC La connexion dela veine & artere ſpermati
que deſcendans aux teſticules.
N DD Portion des ſuſdits vaiſſeaux,à ſçauoir veine
& artere qui deſcendent au fonds de la ma
trice .

EE
Mõſtrēt la texture variqucuſe des vaiſſeaux.
FF Les corps des teſticules .
GG Vaiſſeaux ſpermatiques, diéts ciaculatoires ou expellens.
HH Commencemens des ſuſdies vaiſſeaux , leſquels font les Paraſtates vari,
queux autour des teſticules iuſqu'à la lettre GG.
II Fonds de la matrice , où leſdits vaiſſeaux ſe terminent.
K Monſtre le propre orifice de la matrice .
L Le col de la matrice.
M Meat de la veflie.
N
Les vaiſſeaux qui ſe terminent au col de la matrice .
O Orifice du col de la macrice .

De la Matrice particulierement. CHA P. XXXIV.

Pres les ſuſdites parties sēluit l'amarry ,qui cſt vne partie du corps appar
tenáte ſeulemét à la féme,laquelle nature luy a donnce au lieu du ſctocúàD.
l'hõme, come auſſi a fait ſon col , & parties d'iceluy , au lieu du mēbre viril
de
de l'home : en ſorte que ſi tu contéples les parties tant de l'homme que
Pourqu oyie la feme,tu ne les trouueras differentes l'une de l'autre touchát le nombre des parties,
les part s
ains ſeulemét en la diuerſe ſituació & vlage d'icelles . Vray eft qu'elles n'ont point de
generatiucs
jone cachees glandes proſtates, ny lamembrane erythroïde, mais elles ont la leur proprenómee
'dedans aux cpididyme. Carce que l'hõme a au dehors , la femme l'a au dedans , tant par la proui
femmes. dence de nature , que del'imbecillité d'icelle , quin'a peu expeller & ietter dehors leſ.
dites parties, cõme à l'homme. L'amarry eſt de ſubſtance nerveuſe, & mébraneuſe,
afin que plus aisément ſe peut dilacer
& eſtedre plus ou moins, ſelõ la neceſſité de na

Subtance. ture. Sa quácité eſt diuerſe,cant pour raiſon de l'aage,de l'acte venerié , & expulſiódu
Quantité. [ang menſtrual,que du tęps de la conception : car la fille qui eſt vierge , ou n'a encore
attaint l'aage de puberté , ny en Auxion menſtruale, comme pareillement la ieuno
femme quin'a point encore porté d'enfás, l'ont plus petite que les autres quineſonc
telles.Dauantage, celle quia ſculemét exercé l'ade vencrien , l'a plus peciteque celle

1
De l'Anatomie. 135
A Verruës, Dilaceré par un enfantement laboricux,
Rhagadies, Charbons,
Condylomes, Gangrene,
Phymolis, Ethiomene , & autres qui ſeront cy -apres
Prurit, declarez.

Des Tuniques qui contiennent l'enfant au ventre dela mere.


CH A P. XXXV .

Ovtes ces choſes ainſiconſiderées ,reſte maincenant à parler des mem


branes,qui durát le temps que la femme eſt groſſe, enucloppent le petic

B
TA enfant dans leur Amarry. Leſquelles ſont de ſubſtance ſpermatique &
nerueuſe,venant dela ſemēcede la femme,afinqueplusaiſémentelles Substance:
ſe puiſſent dilater & eſtendre, ſelon l'exigence de la choſe contenuë.
Leur quantité en largeur & profondeur eſt grande, meſmement ſur le cemps que
l'enfant eſtpreſt à ſortir. Leur figure ronde comme l'Amarry. Leur compoſition eſtQuantité.
de reines, arteres & propre ſubſtance:les veinesdonc & arteres leur ſontcommuni- Figure.
quées de l'Amarry (ſenſiblement ou inſenſiblement, & plus ou moins ) par ſes Coty. Cópofition.
lcdons, leſquels tiennene meſme lieu en l’Amarry ( s'il eſtoit queſtion denourrir le
Fætus ) que les mammelles aux meres nourrices , lors que l'enfant eſt né : En ſorte
quecommenous voyons, la mere nourrice apres la naiſſance de l'enfant,luy preſen .
ter ſon mammelon pour en épuiſer du laict pour ſa nourriture : ainſi l'Amarry (mere
nourrice de la ſemence à elle commiſe, & curieuſe de la conſeruation apres qu'elle Prowidence
l'areccuë) preſente & avanceſes Cotyledons ou veines en iceux deſinentes, par les admirable
Nat
tuniques:au moyen dequoy,nous diſons icelles receuoir autant de veines & arteres, de ara
qu'ilen deſine auſdits Cotyledons. Leur propre ſubſtance leur eſt conferée de la
parcie plus humide dela ſemence de la femme, comme nous avons dit. Quant à
leur nombre ,elle ſont crois ſelon Galien , à ſçauoir l'vne appelée Chorion ,autre .Nombre.
ment dite Secondine , Arriere -faix ou deliurance ( combien que les vulgaires ap Chorion.
C pellent ainſi toutes les tuniques enſemble ) l'autre eſt appelée Allancoïde, & la tierce
Amnios : pour mon regard ie trouue bien aux beſtes le nombre de ces cuniques , Alläсi des
commeil le deſcrit :maisàla femme non ,fionn'enmetpourvnelesCoryledons Amnios,
cnflcz & eminens en maſſe de chair , ainſi qu'aucuns cres.experts en l'art Anatomi .
que ſemblent faire : laquelle choſe toutesfois nous ne pouuons admettre comme
Vraye, car on ne trouue point l'Allantoïde , ou pour le moins nous ne l'auonsiamais
ſccu trouuer,nonobſtant que nous l'ayons cherchée par cous les moyens qui nous
onteſté baillez ou que nous auons peu imaginer de nous-meſmes)aux femmes grof
ſesdeſix, fept, huict, & neufmois,ſans que ſage femme aucune y euft touché, qui
cuſt peu rompre quelque cunique.Or les moyens que nous auons ſuiuy en ce faiſant,
ſonttels,qu'apres auoir fendu en croix le ventre de la femme morte,fur laregion de Moyes, pour
les
l'Amarry, l'auons en meſme force inciſée ;puis ayant ſur le ſuiec meſme , oſté tout ce Tuniques.
D quinouspouuoit empeſcher , auonsſeparé le plus ſubtilement qu'auons peu , non
ſculementcour l'arriere- faix de la face interne dudit Amarry , auquel il eſt attaché
par les Cotyledons,ainſique nous auons dit,mais auſſi lapremiere tunique,que nous
auonsappelée Chorion ,dela ſubiacente, que nous appelons Amnios : & ce ſans rien
rompre. Carnous n'auons eſpanché aucun huineur à ladite ſeparacion , dequoy on
puille direque quelque cunique contenant humeur, ait eſté rompuë. Ce fai & nous
auons diligemmene regarde en bonne compagnie,par pluſieurs fois, ſi nous verrions
aucuneſeparation des deux Tuniques,c'eſt àſçauoir Allantoïde& Amnios,tantpar l'Allan
la ſeparation des humeurs contenus en icelles qu’autres choſes. Dont n'en apperce-roide ne se
uantaucuneen ſorte que ce ſoit ,auons prins l'Āmnios remplie d'humeur à la partie trouve en
plushaute,& l'ayant ouuerte, deux ſeruiteurs cenans ſuſpenduë l'ouuercure', afin nous.
qu'aucun humeur n'en ſortiſt à la circõference du Chorion & Amarry,l'auõsepuiſée
entierement par cſponges,encores y eſtantcontenu leFætus preſt à ſortir:afin qu'a
presauoir épuiſé ladice tunique,nouspuiſſions voir s'il y auoit autre humeur con
tenuenaucre tunique qu'en icelle : & ce fait, n'auons apperceu autre humeur ny
ſeparation de cuniques : en ſorte que quant à moy , ic n'y en penſe que deux telles

Le troifiefme liure
136
que nous avons dit. En outre , non concent de cela, pour eftre plus affeuré de ladite
Allantoïde , aprés auoir paſſé les deux tuniques ſuſdites , & eſtre venu au Fæcus: A
ayant fait yne ſonde à l'endroit de la Vellie d'iceluy , & fait ſouffler icelle, pour voir ſi
par ce ſoufflemét ic pourrois faire paſſer le vent dedans la tunique dont eſt queſtion,
comme ancuns ont eſcrit : ie n'ay iamais ſceu faire paſſer d'icelle aucun vent par
l'vmbilicen ladite cunique Allancoïde, ains ay troqué le vent ſortirà l'humeur con
tenu dedans la Veſlic , par les particshonteuſes : ce qui me fait croire afſcurément,
qu'iln'y a point d'Allantoïde en la femme : ioinc auſſi que ie n'ay iamais (ceu trou .
uer, ny aucunchient apperceuoir en l'vmbilic , le mcat , dit Vrachos , qu'on dic eſtre
le principe & ſource d'icelle . Or quand il n'y en auroit, quel mal & inconuenient
s'en enſuiuroit- il,veu que la ſueur, & l'vrine d'vn pecit enfant peuuent eſtre commo
dément colligées & concenuës dedans vne meſme cuniquc, pour la petite difference
Occupation. qui peut eſtre encre icelles? Et ſi cu m'obic &tes ,que l'vrine , à cauſe de ſon acrimonie,
blefieroit les Færus , s'elle le couchoic : le reſponds,que celle acrimonie , quine peut
eſtre bcaucoup mordante en vo Færus , peur eſtre moderée par la vapeur halicueuſe
& douce,laquelle eſt meſlée parmy la ſueur. Et dauantage , ſi nous regardons l'vtilicé
B
& vlage de tel humeur ( quieſt de ſouſtenic & ſupporter leFæcus , aħn que par la pe
ſanceur il ne rompe les liens, par leſquels il eſt attaché à l'Amarry ) noustrouuerons
qu'il n'y a humeurplus ſuffiſant à ce faire que le Sereux , lequel à raiſon de la terre
ftrité & groſſeſſe & craſſicude,peutſans comparaiſon , plus facilement ſouſtenir quc
nul autre: ainſi que nous voyons , pour exemple , l'eau de la mer , laquellc , à raiſon
de telles qualitez,louſtient & porte , ſans comparaiſon , plus facilement que la douce
Conclufion. des fleuucs, laquelle eſt plus rare & aërée.Parquoy ie conclus ſelon mon iugement,
qu'il n'eſt point beſoin que l'vrinc ſoic reſpanduëen vne cunique, & la ſueur en l'au
tre : & files Anciens l'ont eſcrit , cc a eſté pour l'auoir veu aux beſtes, & par ainſi
nous n'en ferons quedeux ,à ſçauoir le Chorion & l'Amnios : leſquelles eſtans con
tenuës l'vne dedans l'autre , cnueloppent tout alertour le petit enfant. Fallopius,
homme fort diligent,s'accorde aucunement auec moy , & non du cout : car il eſtime
Situation . qu'iln'y a que deux tuniques,à ſçauoir le Chorion & l'Amnios , & que le Fætus ictto
Connexion . ſon vrincen vne partie du Chorion , comme tu pourras lire plus amplement en ſes
obſeruations Anacomiques. Et ſont connexées enſemble par petites fibres nerucu . C
ſes, qui paſſent de l'vneà l'autre, & certains petits vaiſſeaux , qui du Chorion ficué
exterieurement, deſcendent à l'Amniosincerieure: & pource ſi on n'y prend gardo
Tempera-
mini. on lo rompra à tous lecoups, en le ſeparant . Leur temperament eſt tel, que toutes
Vilné. autres membranes. Leur vcilité eſt differente : car le Chorion eſt fait pour la con
ſeruation , tant des vaiſſeaux qu'il reçoit de l'Amarry pour la generation des veines
& arteres vmbilicales , que des parcies qu'il contient : l'Amnios , pour la retention
des excremens ſereux , que l'enfancpeut excerner ou ietter pendant le temps qu'il
eſt au ventre de lamere, & cſt ceſte cunique deſliće comme coilc d'araignée , douce 3
& molle, de peur que par ſon attouchement elle ne bleflaſt ledit Facus, à cauſe de.
quoy elle a eſté nomméc Agnina.

Du Nombril. C H 4 P. X XXVI.

PREs ces Tuniques s'enſuit le nombril de l'enfant, quin'eſt autre cho D


Subjtance. ſe qu’yn corps blanc , fait comme un cordon de cordelier , fors qu'il n'a
pas ſes nouds fi releucz & eminens par dehors tout alentour , ains eſt en
diuers lieux boſſu , en forme de noeud cfleuć ſeulement d'un coſté. Il
Situation. commence & fort depuis la maſſe de chair , que nous auons appelée Cocylodons
cnicz , & ſe va implanter au milieu du ventre inferieur de l'enfant, & de tout le
corps, duquel il eſt dit eſtre la racine : pource que comme l'arbre eſt nourry par
l'ymbilic. Sa quan
{ a racine , ainſi eſt le corps de l'enfant au ventre de la mete par
Quantité.
tité , quant en groſſeur & largeur , eſt comme celle du pecit doigt bien delié mais:

en longueur il eſt cnuiron d'vn pied & demy , en ſorte qu'on trouue les enfans eſtra
ceints ou encorcillez quelquesfois par le milicu du corps , quelquesfois encour

Figure. lecol , iambes ou bras . Sa figurceſt ronde. Sa compoſition eſt de deux arceres , V.
cöpofirion. ne veine, & deux cuniques. Les arteres & veines ſont ramaſſées en iceluy de cou
to ceſte grande multitude d'arceres & veines quafi capillaires , ſemées parmy le
De l'Anatomie. 137
.

A Chorion ;commecelle du Meſareon àla veine Porce , & arcere Celiaque ou inteſti.
nale.Donc la veine enſcuelic dans ledičnombril, s'en va implanccr à la partie cauc An lim. de
dutoye : où le diuiſant en deux,elle fait, ſelon Galien , la veine Pořte & Caue. Et les la forma
arterés ſeparées tout le long du nombril,ſe vonc iccter deuans les Iliaques , leſquels l'e
tionnfantde,
1
ils conſtituent, comme toutes les autres , ainſi que nous auons dic de la veine , pour
porter leſprit vitalàtoutes les parentie s
t de l'
enfant. Les deux tuniques viennent du
l
Chorion ,& eſtans inſeparablem conioinces , & parcout lenombri aſſez denſes &
c{peiles,ſemblent conſtituer le cuir exterieur ,& Panniculecharneux de l'enfanc. le
içay bien que pluſieurs y mettent des veines auſſi bien que des arteres , & l’Vrachos ,
parlequel I'vrine coule dans l'Allantoïde qu'ils imaginenc: mais d'autant que cefte
cuniquene ſe trouve aux femmes, ains ſeulement aux beſtes brutes,ic m'en tais.com .
men'ayant intention de monſtrer autres parties que celles de noſtre ſujet. Toutes
fois s'ilya quelqu'un qui puiſſe monſtrer en la femme ce qui eſt dauantage aux be
ftes bruces , icconfeſſeray le tenir & auoir appris de luy. Quant au demeurant, qui eſt
Son nombre,ſituation ,connexion , temperament , & vlage, ils font aſſez notoires Vlage de
B par ce quenous auons dir cy-deuant: comme eſtauſli ſon vrage, que nous avons dit nombre.
eftre de nourrir le Fætus, commela racine fait l'arbre, par la continuation de ſes
vaiſſeaux auec les Spermatiques Preparans de la meré , ainſi ordonnez de Dieu , au
ſculnom duquel, pour la concluſionde ce preſent liure , loichonneur & gloire aux
fiecles des liccles. Amen .

Fin du troiſiemeliure, traictant de l'Anatomie.

0
Table des Chapitres du quatrieſme liure
de l'Anatomie.
Efinitiondu Thorax ,diuiſion &explication d'iceluy. , Chapitrej
Des partiescontenantes contenuedu Thorax. Chap.ij.
Des Mammelles. Chap.iij.
Des Clauicules &coſtes. Chap.iiij.
La maniere de leuer leSternon . Chap.v.
al Dela membrane nommée Pleura. Chap.vj.
Du Mediaftin . Chap. vij.
Du Diaphragme. Chap.vij .
Des Poulmons, Chap.ix.
Du Pericade. Chap. x .
Du Cæuy, Chap.xj..
D Des ventricules du' Cæur . Chap.xj.
Des orifices & valuules du Caur. chap.xim .
Diſtributiondelaveine Artcricuje, & Artere veineuſ. Chap.xiiij.
Diſtribution delaveineCaueafcendante. Chap.xv.
Diſtribution desnerfsdelafixiemeconiugaiſon , Chap.xvj.
Diuifiondes Arteres. Chap.xuij.
Dela Phagonë,autrementdireThymus. Chap-xoi
Dela Trachée artere. Chap.xix.
1 Deroeſophague. Chap.xx.

1
138

9
0

LE QV ATRIES ME LIVRE

TRAICTANT DE L'ANATOMIE ,

LEQVEL CONTIENT LES PARTIES VITALES,


B
contenuës davsle Thorax nommé des .

François , Poictrinc.

PREFACE.

Pres auoir ſuffiſamment pourſuiuy & declaréles partiesna


cureiles contenuës au vencre inferieur, & en icelles auoir con .
clu & finy le premier liure denoftre cuure : reſte maintenant
que nous pafſions à la declaration du Thorax : afin que les
parties ja aucunement demonſtrées ( i'entends veines & arte

res ) par vn mcſme ordre & filde do & rine , ſans interception
de matiere, loient entieremenc declarées . Et dauancage, afin
que nous puiſſions plus parfaitement & clairement demon С

Atrer lesdeux autres parties, ſçauoir eſt , la ceſte & les extremitcz , cognoiſſant au
parauant l'origine & ſource de leur vaillcaux.
Et pour ce faire , premierement nous definirons le Thorax , puis le diuiferons en
ſes parcics: tiercement conſidererons icelles , cane concenances que contenuës , afin
que nous cheminions touſiours par la voye & methode ja commencéc .

Definition du Thorax , diuifion de explication d'iceluy.

CHAPITRE 1.

E Thorax donc eſt le ventre moyen ( comme nous auons dit au com.
Circon
mencement ) contenant depuis les clauicules iuſqu'à l'extremité
ſenprion
du Tho des Fauſſes coſtes , ayant en la partie ſuperieure les Clauicules , en
Com
Tax , l'inferieure le Diaphragme, en fa partie anterieure le Sternon , en D
la poſtericure les douze vertebres du Mecaphrene : & és parties

Raiſon de laterales , les coſtes tant vrayés que fauſſes , & muſcles Intercoſtaux
la fabrica & Intercartilagineux . Où entendras, que la cauſe de telle fabricacure a eſté, afin
ture du qu'en ſeruant aux parties Vitales comme d'vn rempart & propugnacle contro
Thorax. touces iniuręs externes , il n'endommageaſt point la reſpiracion :laquelle n'eſt moins

neceſſaire pour la conſeruation de la chaleur naturelic eſparſe en l'eſprie vital conte


nu dedansle cour , à l'encontre des iniures incernes , que les ſuſdites parties à l'en
contre des externes . Car s'il eut eſté cour ofſeux , il eſt bien vray qu'il cuc eſté plus ist

fort: mais auſſi ileuſt empeſché la reſpiration , laquelle eſt faite par la dilatation &
conſtriction d'iceluy. Parquoy afin qu'en proficác à l'yn , on n'incommodalt l'autre,
Nature

)
de l'Anatomie, 139
A Narure l'afaiten partie oſſeux & cartilagineux,en partie charnu.Aucuns dõnent vne
autreraiſon, diſans que Nature l'a faitaintipour l'obſeruation de l'ordre,duquel elle Autrerais
aaccouſtumed'vier en conioignant deux parties totalemétdiuerſes,quiloneleven -Sono
cre inferiçur cout charnu,& lateſte oſſeuſc, par vn moyenparticipar des deux : cóme
nous voyons auſſiauoir eſté obſerué àla connexion& pallage du feu à la terre, parle
moyen de Pair & de l'eau. Les parties du Thorax ſont trois, vne ſuperieure, l'autrein .
ferieure,iatierce moyéne entre eux. La ſuperieure eſt faire des Clauicules, l'inferieu Diuiſion da
redu Diaphragme: lamoyenne de l'os Sternon , lequel ſelon Galien a eſté composé Thorax.
deleptos. Ce qui peut bien auoir eſté aux hommes de ſon temps & de la region , à
cauſe de leur infigne grandeur :maintenant nous le trouuons le plus ſouuenc detrois,
quatre ou cinq : combien que nous nevoulions nier l'auoir veu pluſicurs fois ( & fpe
cialement aux ieunes)de ſept & de huict. Ec pource à ceux quien ont moins , Nature
les a faiâs plus larges ,afin qu'ils puiffent recevoir les coſtes. Voyla la commune opi
nion couchant lesos du Sternon . Ie Içay bien que Fallopius a bien autremene def
B crirledic Sternon , mais ierenuoyeray le Lecteur à ſes obſeruations. Ec note qu'en
l'excreimité inferieure de ſeſdits os eſt pendu vn cartilage , nommé vulgairement
Fourchette ,parce que quelquesfois on le trouue fourchu , & pource qu'c!le a la figu .
rede baluſtre,qui eſt la Aeur de Grenade, Pomum Granatum , autrement Scutiforme,
lequel eſt illec mis comme vn rampare de l'orifice de l'eſtomach , & de la partie du Cartil.ge
Diaphragme qui eſt en cet endroit , pour ſouſtenir le Foye , ſitué par deſſus l'orifice Scursforme
inferieur du ventricule:& ce par le moyen d'un ligamentdeſcendant de la partie in- vulgaire,Deni

fer:cure dudit cartilage en la ſuperieure du Foye, commea eſte dit au premier liure . fourcherre
Lecommun eſtime quelcdit cartilage combe,mais il eſtſi bien attaché à l'os du Scer efor veili
non qu'il n'a garde de choir : combien qu'imbu & abreué de beaucoup d'humidité ré.
ſereuſe qui ſouuent nage en l'orifice ſuperieur du ventricule ,cel cartilage puiſſe cître
relaiché & auachy , de ſorte qu'on le diroit eſtre combé & ſeparé de lon os Srernon :
pouuant meſme eſtre redreſſé ,cant par la main que par leschoſes aſtringentes & del
feichantes ,appliquees par dehors & priſes par dedans. Ec elt ce cartilage en ſon com .
C mencement eſtroit,& vers la fin large & mouffe, & aucunement ſeparé en forme de
pointed’eſpee, à cauſe dequoy eſt appellé Enlforme.Où noteras,qu’čaucuns corps,
ilya double poin &te,ésautres vneſeule,& aux vieils il eſt oſſeux, pource que les car.
tilages deuiennentos ,à raiſon de l'aage & temperament plus ſec. Or puis que nous Definition
parlonsdu carcilage,nous definirons,& expliquerons ſes differences,afin que quand deCartila ,
nous en parleronscy aprés,on entende que c'eſt auecques ſon vlage. Cartilage donc ge.
cftvnepartie ſimilaire de noſtre corps, apres l'os la plus terreſtre,froide,feiche,dure,
malfiuc,& priucc de ſentiment du cact :ne differant auec l'os,qu'à raiſon de la ſeiche
reſc,quieſt plus grandeaudir os qu'en iceluy :& pource il ne ſe peut r'engendrer differêtede
cſtanc deperdu, ce qu'auſſine fait l'os ſansle Callus. Sos differences ſont priſes preſ. Carulage.
quede meſme que de l'os,comme tu verras en ſon lieu : ſçauoir eſt de la conſiſtance,
lubſtáce,magnitude nóbre,ſituatio,figure,conion & io,actio, & vlage.Toutefois pour
cuiter prolixicé, ie ne pourſuivray que celles-là qui ſont prinſes de la ſicuation, con
ionâion & vſage. Ec pour cómencer,faut entédre que les cartilagesou tiēnent à l'os,
ou de loy för yne partie, come lont ceux du Tarle des Cils,de l'Epiglotte,du Larinx,
&autres.Ceux quiciénent à l'os,ouils le conioignent,ou ils ſont ſeulement pēdus en
D iceluy. Ceux quiles conioignent, où ils les conioignent immediatement, come ceux
quiſontmis entre les os du Sternon ,& des Clauicules, & des os barrez, lles,& autres:
oupar interpoſition de ligament, come ceux qui ſont ficuez à l'extremité des ſept co.
ftesVrayes,leſquelles ſone conioin &tes au Sternon par leſdits cartilages,ligamencin
terposé entr'eux & ledit os : afin que par tels ligamens plus mols que les cartilages ,
les mouuemens du Thorax fuſſent plusaisément & ſeurémentfaicts ſans dommage. Vſage des
Ceux qui pendencà l'os,fortifientnon ſeulemét iceluy , mais auſſi ſoy -meſmes & les Carrilages,
parties pareux contenuës,lespreſeruās des iniures externes qui briſent & meurdriſ c'eſt à dire
ſent. Tels ſont ceux qui ſont poſez à l'extremité des fauſſes coſtes, & de l’os Sternon , en Fräçois
que nous avons appellé Enſforme,ou PomumGranatum ,& autres.Ec de cenous pou tendons: qui
eſt vne par
pons conclure l'uſage des cartilages eſtre en plufieurs manieres, ouellepour polir & vnir tie ſolide ,
les partics,qui de ce auoiétbeloin ,pour mieux parfairece à quoy s ſonc delinees : mosēneen
comme ceux qui ſont aux articles,ſeruent de oindre & polir lesos , afin que le mou- sre l'os o
uement ſoit plus libre :ou,commenousavons ja touché , à ſçauoir pour les preſeruer les ligsmēs.
n

L
::
140 Le quatriefme liure
& garder des iniures externes, ſinon en tour, au moins en partie rompant l'imperyo A
ficé d'icelles , en obeyſſantaucunement , tout ainſi que font les ſacs pleins de laine de
Fausſe opi- uant l'impetuoſité de l'artilleric. Celuy qui eſt à la fin de la pojetrine appellé Scutifor
nion die me,& duvulgaire la fourchette,ferccóme de rampart , & ſauuegarde del'orifice in
vulgaire. ferieur de l'eſtomach. Le commun populaire eſtimequ'iltombehorsde lon lieu : ce
qu'il ne fait, & ne peut, à cauſe qu'il eſt ſifort attachécontre l'os du Sternon, qu'il ne
peut nullementcõber. Aufli les cartilages du Larynx fervent à former lavoix. Ceux
quilont aux palpebres des yeux ,ſeruent à les couurir: ceux qui ſont à l'extremité du
rez ,pour attirer l'air,& faire ſeparation des nazeaux: les deux oreilles feruent à la fa
culté auditiue.

Despartiescontenantes , &contenuës du Thorax. C H 4 P. 111.

ES parties contenantes du Thorax ſont le double cuir,Pániculechar.


neux , Greſſe ,Mammelles ,cunique commune des muſcles , & iceux
muſcles là ſituez , & les os parcy deuant nommez, & la Tunique dite B
Pleura,& leDiaphragme.Lescontenuës,ſontle Mediaftin, Pericardo,
Cæur,Poulmons, & vaiſſeaux d'iceluy . Or quant aux contenanies, les
vnes font communes à cout le corps,ou à pluſieurs de ſes parties,come le double cuir,
Pannicule charneux, & Greſle: deſquelles à cauſe qu'elles ont elté declarees au pre
Admini- mier liure,nousne parlerons maintenant.Les autres ſontpropres audit Thorax, cõ.
ftratio ans.du melesmuicles,deſquelsnous trai&terõsen leur lieu,les Mammelles, os ſuſdits ,Pleura
tomique
Thorax, & Diaphragme:coutes leſquelles nous pourſuiurons particulieremét chacune en ſon
ordre, ſi premierement ie t'ay aduerty de la forme de ſeparer ledit cuir, qui eſt telle.
Tu cõdurras vne droite ligne aucc to raſoir depuis là où tu as laiſſé l'inciſiódu cuir du
veocre inferieur,iuſqu'au menton ,enfonçant con raſoiriuſqu'à l'entiere diviſion d'i
celuy : puis apres à l'endroit des Clauicules cu feras vne autre inciſion tranſuerſale de
coſté & d'autre,iuſqu'à l'omoplate:& ſepareras quant aux parties inferieures deſdites
Clauicules,li tu veux euiter prolixité,ledouble cuir,le Pannicule charneux,la Greffe,
& Tunique comune des muſcles tout enſemble :pour autant que ceſdites parties ont С
cſte demonſtrees au ventre inferieur, reſeruant toutesfois aux femmesles Mammela
les.Aux ſuperieures parties deſdites Mammelles, cu ſepareras le plus ſubtilemét qu'il
te ſera poſible lecuir des partiesſubiacentes,afin que tu puiſſes demonſtrer le Panni
cule,faiten cet endroit charnu & muſculeux eſtendu par tout le Col & parties de la
Face juſqu'au poil de la teſte.
Des Mammelles, CHAPITRE IV.

ES Mammelles,comme nous auons dit parlans des Glandules,ſont de ſube


Itance glanduleuſe ,blanche,rare, & ſpongicuſe: leſquelles aux pucelles & fé .
wit mes qui n'ont point de laiet,ou qui n'allaitent point, lont fort dures, & fer
substance.. mes,& pluspetites qu'aux autres. Ec pourtant leur quantité eſt variable , combien
qu'elle loit en toutes norabie, commetu peux voir.Leur figure eſt ronde , & aucune
Quantité. 'mentoblongue,reuenantpreſque à la figure pyramidale. Leur compoſition eſt de D
cuir, Pannicule charneux,Glandes,Grefle,Nerfs,veines & arceres,leſquelles deſcen
Figure.
dent des Axillaires par deſſous le Sternon, auſdicesMammelles , entre la quatrieſme
& cinquieſme,& quelquesfois ſixieſmcdes yrayes coſtes:ſe diuiſent & diſtribuent par
ladite Grelle & Glandes par vne infinité deramcaux,afin que par icelle loir apportec
Cõpoſition. matiere propre pour faire le laia de couleur blanche & ſaueur douce,pouralimenter
& nourrir l'enfant hors de la matrice. Nous ne te dirons autre choſe des parties tuſdi
tes,pource qu'elles ont eſté ſuffiſammentdeclarees par cy.deuant, i'adioufteray leu
lement,quedes Glandules les vnes ont nerfcommecelles-cy, leſquelles le reçoivent
des parties ſubiacentes,à ſçauoir des intercoſtaux, & cauſe dequoy elles ont ſentimét
fortexquis. Les autres n'en ont point, comme celles qui ne leruent qu'à remplir la
diviſion desvaiſſeaux , & qui n'ont autre action, mais ſeulement vſage. Leur nom .
breeſt dedeux, vnede chacun coſté : eſtansſitueesaux parties laterales du Scernon,
Nombre. entre la quatrieſme, cinquieſme & fixielme des coſtes vrayes.
Situation , Et par ainſi elles ſont connexecs auccques les ſuſdices partiespar leur corps, pac
1
de l'Anatomie . 141
A leurs vaiſſeauxàtoutesles autres, & aux femmes ſpecialement à l'Amarry par lereſte Connexion
desveines&artcres Mammillaires, qui depuis lesrameaux qui viennent aux Mam- des Mam
melles par où nousauonsdit, deſcendenc iuſqu'aux parties laterales du cartilage En- mellesamec
fiforme,auquelendroit s'inſinuas parmy les muſcles,ſe vontioindre(come aetédit) l'Amarry
โles vei
vnpeupar deſſusl’vmbilic,auec les aſcendāces Epigaſtriques,deſquelles l'origineeft per
aucunemēc oppoſite aux Hypogaftriques, leſquelles enuoyče rameaux audic Amar .
ry,ainſicomme il a eſté dit:au moyen deſquels celleconion &tio eſt faite pluſtoſt, qu'à
autres petits,& quaſi capillaires rameaux,quiquelquesfois ſont trouuez deſcendre de
la racinedes Epigaſtriques vers ledit Amarry . Orya-il vne ſympathie des Mámelles
à la matrice.Carchatouillant le tetin , la matrice ſe delectc aucunemenc, & ſene yneti.
tillation agreablc,parceque ce petit bout de la Mammelle a lc lentimét fort delicat,
àcauſe des nerfs qui y finiſſent:à celle fin que melmes en cela les terins euſſent affini.
té auec les parties qui ſecuenc à la generation , & auſſi à ce que la femelle offriſt & ex
B hibaſt plus volontiers ſes Mammelles à l'enfant qui la chatouille doucemét de la lan
guc & bouche.A quoy la femme ſene yne grádcdele& ation, & principalement quád
le laiết y eſt en abondance. Outre plus quand la féme a conceu,à meſure que l'enfant
croiſt,& que la matrice ſe dilace , les Māmelles font de meſme: & l'enfantmis dehors
ſubit elles reçoiuentle ſang, qui leur eſt enuoyépour eſtre conuercy en laict pour fa
nourricure. Et comelesfemmes ont perdu leurs fleurs par vieilleſſe, lamatrice & les
Mámelles ſe retreciffent peu à peu,& dcuiennent ridees & peaufſiues.Leurtempera. Tempera ment.
ment eſt froid & humide,& pource dic- on que le ſang ſeconuertiſſant en laict, deuiēc
crud,& eſtfaict plilegmatique & blanc par la proprieté d'icelles , commenous auons Adion
ditdes Teſticules.Leuraction & vlage eſt de preparer le nourriſſemétà l'enfant nou- vlage.
uellement né,& eſchauffer le Caur,eſtans d'iceluy premieremét eſchauffees,oui pour
la multitude du ſang & eſprits en icelles contenus : & d'orner la poi& rine.Ec de cetu Des Gliūdes
entedras,quç des Glandes les ynes ont action ,les autres vſage, & les autres tous deux , les unes one
1
commcaeſtédeclaré en partie par cy.devant . Reſte que tu entendes,qu'à l'extremi action , les
cé & partie plus prominente deldites Mammelles , y a vne petite ruberoſité ,que vul- autres vfa
gairement on appelle Mammellon, par lequel le petit enfant tire & prend ſon nour- gé, ancanes
tiſſement d'icelles par certains pecics trousanfractueux:leſquels combien qu'ils ſoiét tousles deux
Mammellon
C patens & manifeſtes au ſens de la veuë , lors que par expreſſion des Mammelles on ou papille
faitſortir le laict, toutesfois le lai&t ſorty on ne les ſçauroit apperccuoir ,ny dauantage des Mama
mettre en iceux vne poin &te d'eſpingle ,tant deliee qu'elle ſoit,à raiſon des anfractuo- melles.
fitez,leſquellesont eſté faites de nature,mere de coutes choſes, afin que le laiat ia ve
du àlaperfe & ion & prés du Mammelon ,fuſt par telles anfractuofitez retenu iuſqu'au
temps commode de l'expulſion , ainſi que la ſemence par les Proſtates.
Des Clauicules & Coſtes. CH A P. IV .

N ſuiuant l'ordre vulgaire , il conuiendroit à preſent decla.


rer les muſcles du Thorax , mouuans le bras , & ceux qui ſer
uent à la reſpiration: pource qu'ils s'offrent les premiers au ſens
de la veuë : mais veu qu'ils ne peuuent eſtre commodément
D demonſtrez,ſans gaſterceux de l'Omoplato & du Col , à ceſte
cauſe ie trouue meilleur de differer l’explication deſdias mul
cles , iuſqu'à ce qu'ayons demonſtré le demeurant des par
ties contenantes & contenuës , non ſeulement dudit Thorax,
maisauſſide la celte : afin que ce faict , nous puiſſions venir à la declaration de
coutle reſte des muſcles, commençans à ceux de la Face , qui s'offriront les pre
miers, & pourſuiuans tous les autres iuſqu'à ceux du pied ,ainſiqu'vn chacun s'offri.
raplus commodément à la diſſection , afin que confuſion ſoit tant qu'il ſerapoſible,
parnouscuitee. Reuenant donc à noftre propos, apres les ſuſdits muſcles viennent
les Clauicules,le Sternon & les Coſtes. Pour l'intelligence deſquelles parties faut en .
tendr
noſtre
e que c'eſt os , & d'où ſont prinſes ſes differences. L'Os donc eſt la partie de Definition
corps , la plus terreſtre, froide, ſeiche,dure , & exempte de touc ſentiment dos.
ſenſible & manifeſte , excepté les dents:Ic dy ſenſible & manifefte, pour ce demon- Doublefen
1
ſtrerqu'aux parties y a doubleſentiment duta &t: vn manifeſte & ſenſible, lequel eft timene du
en la chair, au cuir, membranes , nerfs, dents , & quelques autres parties. L'autre iaft.
nij
142 Le troiſieſme liure ,
eſt obſcur & nómanifeſte,coutesfois ſuffiſant à iuger & diſcerner les choſes nuiſibles A
& proficables: & ceſtuy eſt aux viſceres & aux os:auſquelles parties ſont diſtribuces
fort perices porcions de nerf, par le trauers de leur tunique ou membrane, en ſorte
qu'à peineles peut-on diſcerner (commedit Galien au premier liure des parties ma
ladesj ſi ce n'eſt en arrachant les coniques deſdites parties . Il ne ſe fauc cibahir ſi nacu.
Te leur a donné des veines & arteres li petices, qu'àpeine on lespeut voir ſi clairemét :
au contraire,au poulmon & aux muſcles on en voit de groſſes & apparentes. Nature
a fait cela iuſtement,baillantaux parties autant d'aliment qu'ils en oor beſoin : car la
ſubſtance des os eſtant froide,dure,ſolide,eft moins elpuiſee & conſommee:parquoy
n'ont eu beſoin de beaucoup de ſang pour leur aliment & nourriture,comme les au
tres parties qui ſont chaudes & molles: coutesfois les petits os n'ont veines ny arte
res, mais par vne vertu attra &tiue qu'ils ont, attirent leur nourriſſement par leurspoo
rofitez. Quant aux differences des os, elles ſont prinſes en pluſicurs manicres, à ſça
voir des Apophyſes, Epiphyſes,Cartilages, Cols, Teftes,Solidicez ,Cavitez,Sourcils,
Gal.liv.13 .Moüelle, conſiſtance, magnitude ,nombre ,figure ,ficuation.
cbat : 9 . Toutes leſquelles differences ſeront demonftrees, ainſi qu'elles s'offriront en la de. B
Difference ſont
dos.
claracion des os. Et pour commencer, reuenant aux Clauicules, tu entendras que ce
deuxos de conſiſtence fort dure & folide , ſans aucune cavité notable , leſquels
font ſituez vn de chacun coſté entre la partie ſuperieure & lacerale de los Sternon, &
l'Acromió de l'Omoplate,pour cõfirmer ces deux parties enſemble:au moyédequoy
Clauicules ont e té ainſi appellees. Leur figure eſt ſemblable à vn inſtrument deChirurgienom .
OsFurcules,mé Eleuatoire , ainſi que tu peux mieux voir lur le ſuic & , que dedans les livres. Où
Wille des fauc nocer queceſdiesosſemblent eſtre connexez auecques le Sternon, par vn moyé
Clauicules.
Figaro. os cartilagineux: & dauantage, que l'eſpace & cauité contenuës deſſous leſdites Cla
uicules,elt appellee des Latins lugulum , & des Frāçois la Fourchetce ſuperieure,pour
ce que les vaiſſeaux iugulaires y paſſent. Ceſte Fourchette eſt attachee auecques la
creſte de l'Omoplate par vn cartilage,lequelGal. au liure 13. chap. 11, de l'vſage des
parcies , appelle petit os cartilagineux :toutesfois ce pecic os n'eſt autrechoſe que l'E.
piphyſe dudit os lugul. Quant à l’os du Sternon , que nous auons dit eſtre fait de di
L'os de uers nombre d'os,ſçauoir, 3.4.5.6.7.8.te ſuffira d'entendre qu'iceux ſont fort ſpoo.

3GB
Simon . gieux & poreux,& de conſiftence plus molle que les ſuſdits, & pource plus ſubie& s à c
corruption , conioin&s par cartilages. Leur vlage eſt de ſeruir commed'un bouclier
aux parties vitales. Quant aux coſtes, leſquelles ſont communément en nombre de
Vſage du vingt- quatre,douze dechacun coſté,elles ſontdiuiſeesen ſept vrayes & cinqfaulſes:
Sternon .
Des costes
dont les vrayes ſont ainſi nommees , pource qu'elles parachcuent le cercle,ſe ioignans
wrayes a auccques le Sternon :& les fauſſes ſont ainſi dietes,pour autant qu'elles demeurent en
faulſrs. la voye du cercle,les vnes plus aduácees,les autresmoins.Econtleſdices coſtes vrayes
double aſſiete: vne anterieure à l'os Sternon par le moyen des cartilages & ligamens:
Situatiin . l'autre poſterieure,ſurles vertebres tranſuerſes de l'eſpine du dos, & partieslaterales
du corps deſdices vertebres.Quant aux faulces,elles n'ont que ceſte derniere Gruació,
laquelle eſtappellee generalementla racine descoſtes. Leur extremité cſt cartilagi
neuſe, afin qu'elles ne fuſſent rompues,& ſe puiſſent ellargir & efleuer lors que Peſto.
mach eſt trop plein de viandes. Elles ſont de conſiſtance aſſez dure, toutesfois plus
Confiſtence. vers la racinc, que vers le Sternon , où elles ſontplus cntretenantes, & pareillement
&fi

plusdifficiles à rompre:entieremēc polics au deſſus & au deſſous, & àleur milicu ayát Di
veftige de Diploé,pourla reception desveines & arceres qui leur baillent nourriturc.
Leurfigureeſt faite en archer,à ſçauoir interieurement caue,& exterieurement boſ.
Figure. ſuë. Leur vtilité eſt telle que du Sternon , & de receuoir & accommoder les muſcles
Vulté. de la reſpiration principalement.
2
La maniere de lever le Sternon . C H 4 P. r.

ENSV IT maintenant la tunique Subcoſtale , nommco du vul


gaire des Anatomiſtes Pleura , la derniere des parties contenantes du
Thorax : laquelle pource qu'elle eſt cachee en iceluy , en ſorte qu'on no
la ſçauroit bien monſtrer ſans la voir , auant que paſſer plus outre à l'ex
plication d'icelle ,nous demonſtrerons la modo de l'ouurir,en ſorteque ny l'origino,
ny l'inſertion des muſcles ne ſoit gaſtee. Quoy faiſant, faut entendre, que quivcut
de l’Anatomie . 143
A garder l'origine ou inſertion des muſcles Pectoraux, des Maſtoïdes, des deux de l'os Admini
Hyoïde,desdeux Souſclauiers, & des Incercartilagineux , pour les demonſtrer cha- firatio awa
cun en ſon lieu , ainſi qu'ilsſont,& les bien diſtinguer les vnsdesautres, doit premie- comiques
sement leuer tant d'un coſté que d'autre, les deux ſuſdits muſcles Pectoraux de l'os
Sternon,& les cartilages des vrayes Coſtes : Ce fai& , doic couper tout contre ledit os
celdies ligamens depuis la fixielme vraye Coſte, iuſques aux Clauicules:puis demon.
frant leMediaſtin accaché au milieu dudit Sternon ,ſelon toute la ceneur & lõgueur,
1
il le leuera en haut vers leſdites Clauicules,deſquelles il ſe ſeparera en reſeruant dili
gemment auecquesluy les quatre muſcles, ſçauoir les Maſtoides, & les deux de l'os
1 Hyoïde,veu qu'ils ſortent ou en tout, ou enpartie duditos: FinablementlesClaui
cules aucunement releuees en haut,renterſera les Carcilagestācd'vn coſté que d'au.
cre,au dehors vers lebras (eló leur teneur( ce qui eſtfacile à faire)afin que parce moyé
il puiſſe non ſeulement monſtrer les parties contenuës du Thorax,ains auſſi reſeruer
encierement en leur lieu & ſituation naturelle leſdiets muſcles:iuſqu'à ce qu'il ſoit ve
nu à leur ordre de diffe &tion. Et pource qu'il fauc releuer les Clavicules bien haut,
B
pour mieux demonſtrer les nerfs recurrens, & diſtribution des veines & arceres , il
monſtrera en paſſant les deux petits muſcles ſouſclauiers,ynde chacun coſté, qui pré.
nêntleurorigine de la partie interne & anterieure , des Clavicules,& obliquement Origine et
deſcendent vers le Cartilage de la premiere Coſte vers le Soernon : & ce pour autant inſertion des
qu'on ne peut releuer leſdites Clavicules ſans les rompre & gaſter. On peut auſſi ſcier muſcles
leSternonpar ſon milicu , pour demonſtrer en leur entier les muſcles Pecoraux in. foubselao
ternes,ayant ſeparé les muſcles qui ſortentde la partie ſuperieure. Toutes ces cho- wers.
ſesbien & deuëment faictes & accomplies,fautvenir à la ſuſdice membrane Pleura, &
d'icelle au Mediaſtin,pource qu'il eſt faict d'elle.
De la Membrane nommer Pleura. CHAPITRE VI.

Leura , vulgairement di&e & proprement & Subcoſtale,derniero


partie contenanceduThorax,cftynemembrane large & ſpacieu-deDefinition
pleura .
C ſe, reſpondante au Pericoinc du ventre inferieur en lon action & Action en
vſage. Car tout ainſi que ledit Pericoine couure vniuerſellement uſage.
& particulierement toutes les parties naturelles , les lianr enſem .
ble, & contenant chacuno en ſon lieu , ainſi fait ladice Pleura aux
parcies vitales, les couurát vniuerſellement,encantqu'elle eſt eſtē- Situation.
duëentierementpar tout le circuitinterieur du Thorax , & particulierement baillác
vnetuniqueà chacune partie d'iceluy . Son origine eſt du Periofte,ou ſelő aucuns du Origine.
Pericrane, reueſtant les vertebres du Metaphrene ſur les racines des coſtes: au moyen Connexion.
4 dequoy eſt eſtroitementannexcé auec leſdites coſtes, en ſorte qu'auec grande diffi
culté
la
peut-on ſeparer d'icelles:commeeſt auſſi auec toutes les autres parties termi
nantesimmediatementle Thorax ,& contenuës en iceluy.Veſalius a reprins Galien,
de cequ'ildiſoit icelle cunique, tant au coſté dextre , que ſeneſtre, cître double : en
quoy coutesfois Columbus a defendu Galien . Et de fait, on la trouuedouble par de. Nombre.
dans le Thorax ſous la face incerieure des coſtes & muſcles d'icelles , afin qu'entre
D deux membranes,les veides,arteres,& nerfs puiſſent paffer. Aucuns l'ont voulu faire
double,la diuiſans en interne & externe,comme ceux quiont conſtitué deux eſpeces
de pleurelic,vraye & non vraye, mettans l'excernelur coutesles coſtes & muſclesin .
terpoſez , & l'interne ſous la face intericure deſdites coſtes , & muſcles d'icelles le
Diaphragme & le Sternon. Quant à nous, cuicans toute ambiguité & obſcurité de
paroles,nousnous arreſtons ſeulement à ce qui ſe verra à l'ail , difans les coſtes eſtre
couuertes de double cunique:l'vne,qui obſtinément & immediatement eſt attachee
de toutes parts à icelle,nommee perioſte,quileur eſt commune & à tous les autres os:
l'autre qui couchee ſur ce perioſte, reueſt interieurementleſdites coſtes : & pource
nommee proprement Subcoſtale. Quant à ſa ſubſtance, temperament, & compoſi Quantiré.
țion,elle eſe toute telle que nous auonsditau premier liure,dela declaration desMé. Figure.
obranes. Sa quantité quant en largeur & longueur , auec ſa figure, eſt toute celle que
linterne capacité du Thorax : mais en profondité, elle eſt fortdeliee. Et faut noter,
que ceſcemébranca eſcédite Pleura , pource qu'elle reueſt toutes les coſtes ingericus
n iij

!
14.4 Le quatrieſme liure,
rement, comme nous auons dit : leſquelles ſont appellees des Grecs wheregli. Ec cout A
ainſi quecelte di&e Tunique a pris ſon nom des coſtes, ſemblablement la defluxion
qui ſe fait entre elle& le Periolce d'icelles,a eſcénommce Pleureſie , vraye ou fauſſe,
ainſi qu'il a eſté diccy- deuant ,

Du Mediaftin. CA A P. VII.

Mediaſtin
ở xne me
PRE S auoir iuſques icy declaré les parties contenances , faut ve
brane , qui nir aux contenuës : commençant au Mediaſtin , comme à celuy
repare les qui à l'ordre de diffe &tion ſe preſente le premier : lequel eſt de ſub
parsies du ſtance , quantité , compoſicion , nombre , temperamene , tels que
Thoraxen nous auons dit de Pleura. Car ſa ſubſtance eſt membraneuſe coin .
deux. me l'autre. Sa quantité en longueur contient tout le Thorax , & en profon.
Subſtance, dité eſt delié quaſi comme coile d'araignee. Sa compoſition auſſi eſt pareille à B
Quantité. l'autre : car cout ainſi que la ſuſdiéte reçoit nerfs, veines , & arceres de toutes les
Căpoſition. parties, auſquelles elleeſtannexec( qui fontparticipantes deſdiets vaiflcaux)ainſi
Nombre, fait cedit Mediaſtin, mais principalement des vaiſſeaux di&ts Mammillaires , delcen
dans par deffous le Sternon. Quant au nombre , il eſt unique , fait de deux membra
nes produi&tes dePleura , laquelle eſtant montee cantd'un coſte que d'aucre , iuf
qu'au plus haut du Sternon , le reflechitversle corps des Vercebres, ou origine de
ladite Pleura. Où noteras, que depuis la reflexion , ſeparation eſt faite entre les deux
membranes telle qu'on pourroit mettre deux doigts entre deux. Et la cauſe de celle
ſeparació a eſté,pource qu'il eſtoit beſoin que ceſdites tuniques fuſſent reflechies iuf.
qu'aux Vertebres: & à cauſe qu'elles ne pouvoient penetrer le cæur pour deſcendre
en icelles , il a fallu que chacune de ſon coſté ſe reciraſt l'vne de l'autre vers les coftez
du Pericarde,pourvenir au licu pretendu.Quanteſt de vacuité entre ces deux mem
branes,il n'eny a aucunc:car l'eſpace quieſt entre deux , eft tiſſu & remply de petites
fibres nerueuſes deliees come pecics filets entrelacez confusémét l'vn parmy l'autre.
Toutesfois Columbus dit , que quelquesfois en cer eſpace eſt contenu vne humeur ,
lequel peut eſtretiré en perçant le Sternon. Mais ie luy voudrois volontiers demana
der,comme nous cognoiſrons querel humeury ſoit contenu. Quant à la figure du . G
Mediaſtin, ſi nous l'adiouſtons auec la Pleura , ils repreſenterót d'vn chacun coſté la
Figure. figure d'vn Aacon de cuir , ayant pour ſa partie platte lc Mediaſtin : & pour la boſſaë
la Pleura vers les coſtes : pour le fonds, la portion d'icelle eſtenduë ſurle Diaphrag.
me:pour l'orifice,l'extremité d'icelle quieft deffous les premieres coſtes. Sa ſicuation
Sirnarion .
& connexion ont eſté declarees parlant de ſon origine. Son veilité eſt de ſeparer les
Connexion. parties vitales en deux,à ſçauoir dextre & ſenetre,afin que ſil'vne eſtoit bleſſee,l'au
Vrilié. cre demeuraſten lon entier : & auſſi pour ſoutenir, & tendre le Pericarde à l'entour
du c«ur, de peur qu'il ne tombe ſur iceluy : & conſequemment qu'iceluy ne decline
de coſté ny d'autre par aucuns mouucmens.
Du Diaphragnie. CHAP VIII.

Ombien que le Diaphragme ſemble pluſtoſt partie contenante D


que contenuë, & pource devoir cſtre declaré auec les autres : tou.
tesfois ayant plus d'elgard à la commodité qu'à l'ordre, pous l'a
uons differé iuſques en celieu cy . Or donc tu entendras,quec'eſt
vn muſcle rond & oblong , terminant la partie inferieure du Tho.
rax . De ſubſtance , compoſition , & temperament , tels que les
substance, muſcles de l'Epigaſtre, & eſt fait en la ſorte que nous avons dit,
Cõpoſition, parlans de la difference d'iceux:à ſçauoir des deux cuniques, vne venant du Pericoi
G rempe- ne, ſçauoir eſt l'inferieure : & l'autre de la membrane Pleura,ſçauoir eſt la ſuperieu
rameni.
re:leſquelles prenans chair,non par tour,ainsen leur circonference par le ſang porté
des veines & arteres diſtribuees entreicelles , font & conſtituent ledit muſcle en ſon
milieu & origine nerueux & membrancux, & en ſes extremitez & inſertion , partie
charnu,commcà la circonference des fauſſes Coſtes:parcie tendineux, commeſur la
premiere & ſeconde vertebre des Lumbes,auſquellesil deſine par deux tendons aſſez
De l'Anatomie . 145
A infignes LeditDiaphragmeeſt ſeul ſicué obliquement cotre les parties vitales & na
turelles.Eceſtconjoint auec l'extremité inferieure,canc du Sternon ,que de toutes les Nöbre, fia
faufles Coltes,& deux premieres vertebres des Lumbes . Semblablemēc auſſi parſes rustion,G
vaiſſeaux & tuniques auec lespartiesd'où il les reçoit. Sa quantité & largeur eſt telle Quconnexion.
antité.
que la profondité inferieure duThorax: en longueur, depuis le cartilage Enfiforme
juſqu'àlapremiere & leconde vercebre des Lumbes. Quant à laprofondeur, elle eſt
difference:car en ſon extremité charnuë, il eſt beaucoup pluseſpés qu'en ſon origine
& milicu membraneux.Son action & vtilité eſt d'aider l'expulſion ( ainſi que nous a
uons dit au premier liure,parlansdel'aciódes muſcles de l'Epigaſtre)pour faire la re. Action:
{piration libreau corpsſain, de laquelle il eſtle principalinſtrumét,& eftcommevne cu prilité.
haycou paliſſade pourfaire ſeparation (cómenous auós dit)desparties vitales d’aueç
les naturelles:au moyen dequoy eſt dic Diaphragme, ou septum tranfuerfum , comme
vn mur metoyen,& des anciens phrenes:pource que l'inflámation ,& áueres affections
d'iceluy,promptement induiſent celsaccidensque celles de la teſte, à cauſe des nerfs
infignes,vn de chacun coſté ,qui luy ſonc enuoyez de la troiſieſme,quacrieſme,& cin
B quielme Vertebre du col,fans eſtre diſtribuez en autre parcie. Cedic muſclc eſt diffe
rent des autres,principalementpour la figure.Oùnoteras,qu'ileſt croüć en trois lieux
pour baillerpaſſage tanc à la veine Caue aſcendante,qu'à l'arcerenommee Aorta , &
Oclophague deſcendant aux parties naturelles, à l'eſtomach.
Des Poulmons. CH A P. IX.

Outes ces choſes conſiderees, fauc maintenant venir aux Poulmons,


leſquels ſont de ſubſtance & chair molle , rare ,& ſpongicule, plus que Subſtance.
nulle autre partie du corps ( pour la commodité de l'air tranſcolé au
caur par icelle , & expellé dudit cæur par l'expiration de la bouche ) de
couleur changeant , encre rouge & palle. Leur quantité eſt inGgne,
diuifee leplus ſouuent en quatre Lobes , à ſçauoir deux de chacun coſté , afin quequantité..
plus facilement ils ſe dilacent & compriment, & qu'auſſi l'air s'inſinuë & penetre
plus promptement :leſquels ſont le plus ſouuent ſeparez a veuë d’æil , autresfois
Cobſcurement. L'ay dit notamment le plus ſouuent, pource que quelquesfois aux
grands hommes ayans le Thorax long , on trouuevn cinquieſme petit Lobe , faiet
du ſecond coſtédroit , pour ſupporter en forme de couliner , la veine Caue des
ſon origincou Diaphragme , iuſques au cøur. Aux pecits hommes , & qui ont le
Thorax court , pource que le cæur couche au Diaphragme , le ſuſdit Lobe ne le
trouue point , pour cequ'il n'en eſt beſoin comme ileſt aux grands. Et touſiours Gal. 7. lin.
aux chiens cc Lobe cinquieſme ſe trouue. Leur figure eſt ſemblable aux ongles chap. 1o.
d'va pied de bæuf, qui eſt eſpés deſa bale, & en ſa circonference plus mince & de-de lvlage
lić, comme cu peux aiſément veoir en les ſouflant & rempliſſant d'air par la Trachee des pare.
artere avec un ſoufflet,ou autrement . Ils ſont compolez d'vne cunique venant du Figure.
Pleura , laquelle reçoic des nerfs de la fixieſıne coniugaiſon en aſſez grand nombre Cõpoſition.
tant d'un coſté que d'autre. D'auanrage, d'vne veine arterieuſe fortát du dextre ven .
D tricule du cæur,& d'vne artere veincule ſortantdu ſeneſtre,comme ce ſera demoſtré
en l'Anatomie du cæur.Semblablement,de la Trachee arcere venant du goſier & de
ſapropre chair,telle qu'elle eſt deſcrite cy-deſſus,laquelle n'eſt autre choſe que cócre . 1

tion deſang bilicux,eſpandu comme clcume,à l'encour de la diuiſion des ſuſdits vaiſ. Nombre.
ſcaux,comme acftédit des autres viſceres.Ils ſont vniques, ſi tu ne le veux diuiſer en
deux,àraiſon de leur double ſituation,à ſçauoir dextre & ſeneſtre:auſquels licux s'e. Situation .
ſtendans,reueſtent & enucloppée preſquetout le cæur, pour luy eſtre defenſe & pro : Connexion.
pugnacle contre la dureré des os circoniacens. Ec pour ceſte cauſe ils occupent coute
l'ełpacedemeurát entour lePericarde.Et ſont connexez principalement auecle cæur chacune
en la baſe,& auec la racine des coſtes, & vertebres d'icelles,par la cunique qu'ils en re . choſe ſe
çoiuét en cetendroit ,& par leurs vaiſſeaux ,auec les parties d'où ils les reçoiuēt :quel, nourrist
quesfois auſſi on les trouúe naturellement attachez à la circonference des coſtes,
perites Apophyſes mébraneuſes qui defcender descoſtes eſdits poulmons:quelques blab
mensleſem
à
fouss'accachene par exceżPleurecique.Lanutritið du poulmõelt toute differente des
autres parties de noſtre corps :car ilneſe trouue partie fi rare, nel legere , ny ſi pleine oy.
Tempera
d'air,& quiſonourriſſed'vnság Gi fubcil & vaporeux.Leurtemperamet eſt plus chaud ment.
nilij
(

146 eſme
Le quatri liure

que froid , à raiſon de leur chair faiete de matiere chaude, afin que promptement ils
А
puiſſent preparer l'air alteré par iceux à l'vlage du coeur,lequel par la froideur ou au

tre qualité,cuſt peu bleſſer ledit cæur.LePoulmó eſt inſtrument de la voix , & reſpira.
Le poulmon
of le reſer ciò par le moyen & benefice de la Trachee artere : car les annelers d'icelle ſont organe
soir ow ca - de la voix ,& les ligamés quila joignent,de la reſpiratio :mais le Larynx ou ſoufflec eſt
bines de principal inſtrumet de bien former la voix : car ladice Trachee artere appieſte premie
l'air qui rement la voix au Larynx , & y eſtant ja formec elle eſt augmentee par le palaisqui luy
fers la ſerc ,cõme au lucſon vétre,pour la faire retentir & relonner : & la luette luy ſert come
voix com
d'vne touche delaquelle on frappe les cordes des inſtrumens muſicaux , comme vio
respiration. Jons,& autres ſemblables.Ec eft à noterque lors qu'on retient ſon haleine ,on ne peut

Plufieurs aucunement parler : car de toutes parts nous comprimons les muſcles du Larynx, des

cauſes de Coſtes, du Diaphragme, de l'Epigaſtre,& lors ſe fait violente action. Où faut noter,
lis rareté que Nature a ainſi faict les Poulmons rares , pour pluſieurs cauſes. Premjerenient , à
des poul- fin que n'ayans mouuementd'eux melmes ,par leur rarité & legereté peuſſent prom
mons.
ptement enſuivre le mo yuement du Thorax , lequel quand il ſe ſerre, les pouſſe 8
Premnicte
comprime , & quand il ſe dilate,toute la capacité ſuperieure eſt remplie d'iceux , com B
Cauſe.
me lors que nous inſpirons l'air entre par la bouche, & d'icelle à la Trachec arcere , &
en toutes ſes ramifications diſperſees aux Poulmons , & l'ors s'enflegrandement:qu'il

Secon.de ſoit vray ,lors que l'on ſouffle dás vneTrachecartere,le poulmó ſegroflit & enfe.Se.
condement,afin que celle rarité ſans aucune violéce peult admettrel'air,lequel quel.
quesfois eſt introduit en grăde quantité & violence , comme on voit en ceux quione
Tierce.
couru violentement.Finablement,àfin que plus facilemencés Empyemes enluyuans
Pleureſics, ou autre tumeur interne du Thorax,en laquelle y a effuſió de matiere , icel
le puiſſe eſtre vuidee & attirce ,comme par tranſpiration ou tranſcolation , par leſdits
Vſage de
poulmons , à cauſe des rameaux de la Trachee artere dilatez , & comprimez en la rela
de la ſua
15:poration ,piration.Orl'uſage de la reſpiration ſe faict,pource que le coeur,quia beloin
Itance de l'air, & bouïllant d'vne feruente chaleur,deſire cſtre refraiſchy. Orileſtre
fraiſchy par l'inſpiration ,quiluy apporte vne qualité froide: & par l'expiració, qui ier.
te horscequi luy eſt trop chaud, & bouïllant,parles vapeurs fuligineules ,comme va
peurs venans de la ſuye.À ceſte cauſe il a double mouuement, compoſé de deux par
cies contraires,à ſçauoir en attirant l'air quand il s'ouure & s'eſlargit, & s'euacuant С
quand il ſe reſſerre & comprime : & pource lion attire quelque air chaud , eſpés& cras,
comme fumec de charbon,Couucnc ilfait mourir l'homme , parce que celair gros &
cras ne peut etre ſubcilié pour entrer dedansle cæur ,quieft cauſe qu'il eſt ſuffoqué &
eſtouffe:ainſi qu'il ſe faiđ ésſoufflets des mareſchaux ,quien ſe dilarant attirent l'air,
& en ſe comprimant le pouſſent.Ainſi ſe fait au Diaſtolé & Syſtolé, qui ſont les mou
uemens du coeur : & par ces deux mouuemens il attire le ſang, l'elprit & l'air , & expelle
ſes excremens fuligineux.
‫مرجع‬

C H 4 P. X.
Du Pericarde.
‫یک‬

'Enſuit maintenant le Pericarde , autremérnomméDomicile du Cæur,

Origine. lequelnaiſſantde la baſe & fondement du Cæur ( loit des ligamens des
Vertebres illec ſituees ou des vaiſſeaux dudit Cæur)eſt de ſubſtáce du .
re, denſe & eſpeffe , ſans aucunes fibres recenár la figure dudit Cæur,& D
Subſtance. A laiſſant interieuremét eſpace & licu ſuffisát pour le mouvemér d'iceluy.
Figure. Sagrădeur par ce moyen excede aucunement celle du coeur.Eteft copoſéede double
tunique: l'vne propre , de laquelle auons parlé : l'autre commune , venant du Pleu .
Quantité. ra : & de veines,arceres& nerfs,venans en partie des Mammillaires,en partie du Dia
cöpofirion.
phragme,principalemér en ceux ,auſquelsle Diaphragmc couche au Pericarde : & les
nerfs viennentde la fixieſme conjugaiſon cant d'vn coſté que d'autre. Il eſt ſeul & v
Nombre. nique fitué à l'entour dudit Cæur, & annexé par ſes membranes auec la baſe d'iceluy,
Situation . & auec ſes vaiſſeaux & origine des poulmons & vercebres ſubiacentes, & par ſes vail
Connexion .
Tempere ſcaux auec les parties d'où illesreçoit.llelt de temperament froid & ſec, cóme comte
meni. aucre mébrane.Son vlage eſt de loger leccur , & le cóſerueren sõ humidité naturelle
Vlage. par vne cercaine humidité lereuſe qu'il côtient: ſi tu ne veux dire que ceſte humidité
eſt engendree apres la mort par lexhalation & concretion des eſprits. Ce qui ncmc
Lemble yray.ſemblable, veu que nous voyons aux viuans icelle croiſtre quelquesfois
Del'Anatomie.
147

A en ſigrandeabódance,qu'elle empefhe le mouvement du ecur , & luy cauſe yne pal


pitation,quileplus ſouuent l'eſtouffe. Et pour aduenir ladite palpicacion decæur, à
gens quiont le cæurchaud ,& le lang aqueux , pour l'imbecilice du vécricule ou foye.
Cet humeur peut eſtre faitdes vapeurs ,qui à l'ébullition du ſang qui ſe fait dedans le
cæur, s'cuaporent par les parties laterales hautes & baſſes d'iceluy dedans le circuit
du Pecicade , lequel les conuertit en humidité ceinte de colere , ſoit par la froideur,
ou autrement, pour ne luy bailler iſſue, ainſi que nous voyons eftre fait en vn Alan.- Confiliensa
bic.Or Nature a fait le Pericade de telle conſiſtence ,à ſçauoir dure & ferme , afin que
le caur fuſt conſerué en vn eſtat moyen.Carli Nature l'eurt faict oſſeux, il euſt rendu
1
lecæur ſemblable à ſoy , feroce & cruel , & s'ellei'cuſt faict molcõme les poulmons
il cuſt rendu ledit cæur partrop mol & effeminé. Et par ainſi Nature le voulár main
tenir, comme la plus noble partie du corps , & fontaine de vie , des parties les plus con .
traires du corps,quiſont les os & les poulmons , luy a baillé vn conſeruateur moyen
entreces deux contraires,commeelle faic touſiours, àfin qu'il ne declinaſt ny à l'vn
nyàl'autre , comme vicieux.
B
Du Caur. CHAP X 1.

E Cæur ( qui eſt domicile de l'ame , organe de la faculė virale, prin


cipe de vic, fontaine & ſource de l'eſprie vital & de la chaleur naturel- Deſcrip::**
le fluante ,& pource premier viuát & dernier meurát à cauſe qu'ilde. du Caur.
voit auoir mouuemét de foy melme, eſt fait de chair grofle & dure, &
plus ſolide qu'autre de tout le corps : laquelle eſt riſuë de trois genres
de fibres, à ſçauoir droites en la partie interieure, deſcendant de la
baſe en la partie aiguë , pour iceluy dilater , & conſequemment introduire lang de
la veinc Caue aſcendante, & eſprit ou air des poulmons par l'artere veineuſe. Ila
с auſſi fibres tranſuerſes en la partie exterieure , qui coupent & diuiſent en angles
droits les ſuſdits pour reſerrer ledit caur, & repouſſer l'eſprit vical en la grande arte
renommee Aoria, & lelang bilieux aux poulmons pour leur nourriture,parla veine
artericuſe.

Semblablement ilen a d'obliques, miſes & fituces entre ces deux , pour retenir le
ſang & l'air, introduits par les fuidits vaiſſeaux,iuſqu'à ce que ledit Cæur aic faict lon
profic & deuoir ,& qu'il jouïſſe de ce qu'il a attiré . Or toutes ces fibres icy font leur
a &ion, ſe recirans vers leur principe,commeles droites en ſeretirant de la poin &te du
caur vers la baſe, au moyen dequoy iceluy eſtant dilaré par ceſte retra&tion de fibres
eft fait plus court, mais plus large en ſon milieu & corps:cour ainſi qu'à la retraction
des tranſuerſes il eſt faiæ plus long & plusgreſle en ſon corps &milieu & par la retra
&ion des obliques, il eſt aucunement enfoncé & comprimédu colté qu'il regarde les
Vertebres du dehors au dedans,ce qui appert principalement vers la poinde . Sa
quantité eſt aſſez notable ,toutesfois aux vns plus grande,aux autres plus petite ,pour quantité.
la varieté de la complexion & temperature des hommes plus froids ou plus chauds,
D ainſiqu'actédit du foye.Sa figure eſt pyramidale, àſçauoir large en ſabaſe , & eſtroit.
teen la poin &te. Il eſt compoſé dechair fort ſolide & la plus dure du corps , comme il
Figure.
aeſté dia , laquelle a eſté illec engendree par effuſion de ſang à ſa propre generacion Copoſiciona
comme des autres viſceres, ſur la diuiſion & racine de tant de vailleaux .Car, commc.
D
tu ſçais,le lang eſtane vn peu plus deſſeiché que celuy du foye, par ceſte deſiccation &
elaboration degencre en lubitáce charneuſe , comme cu peux voir aux vlceres caues,
tont ainſique s'ileſt encores deſeiché d'auantage, il degenere en ſubſtance ſemblable
aucuir. Il eſtfait auſſi de veines & arreres nommees Coronales , leſquelles luy ſont
baillees ou de la veine Caue du coſté droict, ou du coſté gauche ſur l'illuë de l'árcere Nerfs de
Aorta tout ſur la baſe . Quant aux nerfs , il n'appert point au ſens de la veuë en auoir cæur .
d'autres
que ceux qui luy peuuenc eſtre baillez auec lacunique venant de la Pleura :
touresfois i'en ay trouué aux beſtes brutes qui ont grand cæur, meſme à celuy d'un
pourceau,aſſez norables & apparensdeſſous les veſtiges de la greſc, laquelle couure
tous lesvaiſſeaux, & bac du cæur : les accompagnant partout leur chemin , pourla
pourroit eſtre conſumee par la grá .
conſeruation de leur humidité ſubſtantifique qui
dechaleurdudit cour : laquelle chaleur autre qu'elementaire, permet qu'icelle greſe
ſoit engendrer ſur les ſuſdites partiespar froideur naturelle : choſe digne de grande

l
ieſme
148 Le quatr liure

Nombre. contemplation. Il eſt ſeul & vnique: ſitué ſur la quatrieſme vertebre du Mecaphrene,
A
Situation. le plusſouuent, quieſt le milieu du Thorax : toutesfois aucuns cuident qu'il ſoit plus
incliné au coſté leneſtre,parcequ'on y lentle battement:mais cela aduient à caulede
ſon lencſtre ventricule,qui eſt ſource des arteres ,auquel ſe faic grande pultation . Or
Nacure l'amis & placé en tel licu ,à raiſon que celle partie eſt la plus aſſeuree & mieux
Connexion , remparee de coutes les parties du corps : d’auantage il eſtenueloppe de toutes parts
des poulmons comme d'une main . Saconnexion eſt auec les luidites Vertebres , &
par les parties compoſantes auec celles d'où il les a , & auec les pou ! mons par la veine
Arterieufe , & arcere Veineuſe, & vniuerlellement à toutes les parties du corps par les
arteres qu'il leur diſtribuë.Son temperament eſt chaud & humide , comme toute aus
Tempera- trepartie charnuë.Quantà ſon aâion ,c'eſt premierement de preparerle langen ſon
ment .
Allion o dexcre ventricule pour la nourriture des Poulmons . Et pource adıc Galien , que ce
utilité. dextre ventricule a eſté fait & ordonné de Nacure pour la neceſſité & vſage des Poul.
mons. Secondement,de faire l'eſprit viralen ſon ventricule ſeneſtre, pour l'vſage de
tout le corps : lequel eſprit n'eſt autre choſe qu'vne ſubſtance moyenne encre ſang &
air,propre & conuenable à la conſeruation de la chaleur naturelle Auence : à cauſe de. B
quoy eſtappellé vital , c'eſt à dire , conſeruateur de l'auteur de vie , enclos en nos

Que d'eff cæurs ,quieſt la chaleur naturelle preparec à vn chacun laquelle nous pouuons com
quesprit parer à la flammed'vne lampe, & i'etprit à l'huille.Ec voila ce que tu peux conſiderer
oual.
exterieurement du caur . Quant à l'interieur , il faut outre les choſes ſuſdires con .
templer les Ventricules , & parties contenuës en iceux , & entre iceux , qui ſont les
Valuules ,Orifices ,& vaiſſeaux appartenantes à iceux, auec leur diſtribution dans les
Poulmons , & Entre - moyen , ſans oublier les deux Epiphyſes du Caur , nommees
Oreilles d'iceluy , à raiſon de la ſimilitude qu'elles ont aux oreilles : leſquelles nous
pourſuiurons premierement, pource qu'elles appartiennent rant à l'excerieur qu'à
l'interieur . Et pour commencer,fautentendre que ceſdites oreilles ſont de ſubſtance
Des oreil
les . Leur molle & nerueuſe,tiſſuë de trois genres de filamens: afin que par leur moleſſe & ſub
Subſtance. ſtance aerucuſe plus promptement peuſſent enſuyure le mouvement du cæur , & pac
ce moyen rompre l'impetuoſité desmatieresapportees audit cæur lors qu'il ſe dila.
te:leſquelles autrement par leur entree violente euſſent peu celiemēc remplir le cæur с
uſage: qu'elles l’euſſent ſuffoque.Et noteras qu'elles ont eſté ainſi ordonnees deNaturc,&
fai &tes de telle capacité,afin qu'elles peuſſent(commc vne deſpenſe ) receuoir le lang
ou air, qui durant le temps du Diaſtolé,pourroit eſtre introduit au cæur,afin que par
apres ledit cæur en puiſſe iouyrà ſon aile, & en celle quantité qu'illuy eſt beſoin ,en lc
prenant deſdices oreilles,ainſi que bon luy ſemble. Et ſi cu demandes a leſdites matie MA

Cauſes de res ſont ſeulement introduites dans ledit cæur au Diaſtolé pour euiter vacuité : lete
Pinerodu. reſponds que no.Carcelle introduction ſe fait auſſi par la chaleur dudit cæur,laquel
stion de
le attireleldites matieres,commela flammed'vne chandelle attire le ſuif, & l'air am P
l'air du
song dans biens pour ſa nourricure . Lors que le cæur ſe dilate,ilactire l'air, & quand il ſe com
le seur . primc, il l'euacue : & tel mouucment ſe fait parſa vertu naturelle , & le mouuement
des poulmons par la faculté animale. Aucuns adiouſtent vne troiſieſme cauſe, nom
mce Similicudedecoute ſa ſubſtance :mais ſelon mon iugement, elle ſerc & appartiếc
pluſtoſt à l'attraction , quieſt faite pour la nourriture de Caur par ſes veines Coro
nales , que pour l'introduction des luſdices matieres , action commune & neceflaire
Quantité.
à tout le corps. Quantà leur quantité , elle eſt differente : car la dextre eſt beaucoup D
plus grande & plus capable que la ſeneſtre, pour la reception de plus grande quanti

Nombre. cé dematiere. Elles ſonc deux en nombre , vne de chacun coſté : ſituees à la baſe du

Situation . caur : la plus grande,contre l'entree de la veine Caue dans le cæur : la plus petite , con
tre l'entree de l'artere Veineuſe, & grande artere , auec leſquelles parties font anne
xees.Leur vtilité eſt telle que nous avons dit cy.deuant , à lçauoir pour en recevant
les matieres introduites au cæur par leDiaſtolé ,rompre la vehemence & imperuoſité.
Connexion • d'icelles:Auſli pour ſouſtenir & ſeruir de couſſinec à l'artere Veincule & grande arte
Vrilice.
re , qui eſtans deſubſtance plus delicate , n'euffent ſccu porter la vehemence d'un
mouuement ſi rapide, qu'eſt celuy du cæur.
Del'Anatomie. 149
A Des ventricules du Cwnr. CHAP XII.

L fauc maintenant veniraux ventricules du Cæur , leſquels font deux en


nombre,àſçauoir l'vn dexcre, & l'autre ſeneſtre, ſéparez & diuilez par vn Nombre
Entre -moyen charnu & d'eſpeſſeur aſſez norable , apparant tant dcion
coſté dextre que ſeneſtre,croué par pluſieurs endroits en la ſuperficie: ia- Mur me -
çoit que leſdits trousnepenetrent point au ſens de la veuë d'un coſté à l'autre. Orde logen .
cesdeux ventricules le dextre eſt plus ſpacieux, grand & capable , & enuironné de
chairplusgrelle& molle que le ſeneſtre quieſtaudouble & triple pluseſpés, & faca- Quantité.
pacitémoins ample. Et la cauſe a eſté, pource que le dextre vencricule dcuoit eſtrere
ceptacle du fang apporté,& introduit par la veinc Cauc , lequel devoit eſtre diitri
buétant aux Poulmons par la veine Arterieuſe pour leur nourricure, qu'au ventricu
leſeneſtre par l'Entre-moyen,en forme de reſudacion , pour la continuelle genera .
cion del'eſpric viral.Il adoncfalluqu'il y euſt aſſez grande quantité de ſang ,& con.
ſequemment,eſpace ſuffiſant pour le receuoir.Et pource que ce ſang contenu au dex. Pourqan
B
treventricule cſtoit encores gros & cípés, il n'a eu beſoin d'eſtre enuironać dechair le dexrre
i eſpeſſe que celle du ſeneſtre,lequel nature aainſi ordonné, le peur que l'eſprit vital , ventricule
elus
fore ſubcil& aëré,auec la chaleurnaturelle fluence,ayantdittecſon origine & fource, 57 TL
nes'exhalalt,penetrant ladite chair,ſielle euft eſté autant delice qu'au dexte. Dia plus Sander
rare
uantage,ceditVencriculo a eſté fait plus petit afin que l'eſprit & chaleur fuffent mieux que lefene
ynis,& conſequemment rendus plus forts,ſelon le dire du Philoſophe, quieſt , que la fire.
vercu bien vnicen ſoy eſt plusforteque celle quieſteſparſe:ou bien fi tu veux , pour .
ce qu'iln'eſtoit requis ſi grande quantité d'eſprit,quede lang :veu que l'eſprit au rel.
CC

pea du ſang, eſt cel qu'en ſa pecice quancicé il peut aurant ou plus que le ſang en la
{icnne grande. Parquoy concluant ce propos, ie dy qu'il y a deux ventricules feparez vtilisé.
parvnSeptumou Entre-moyen ,ou Mur-mecoyen ,vndexcre,&zl'autre ſeneſtre, dốc
le dextre eſt deſtinéà la preparation & elaboration du ſang , pour nourrir les poul
mons,&engendrer l'eſprit vital,comme lespoulmonspourlapreparation de l'air :lel
quelles elaborationsdeſang & air eſtoiết neceſſaires, li le diredesMedecins eſt vray, Le coeur et
qu'vne chacune choſe veuteſtre nourrie & entretenuë par ſon ſemblable ,comme les
C poulmons rares,flaucs& ſpongieux,deſang ſemblable:& tecæurgros, de fangfemm: nourry, de
blable:au moyen dequoy ces veines Coronales luy onceté baillees de la veine Caue, bouré en
afin qu'ilenpeult eſpuiſer commed'une deſpenſe,deplus conucnable à ſoy,& ainſide les venerie
l'eſprit. Le ſeneſtre eſt faicpour l'elaboration de l'eſprit vital, & conſeruation de la cules.
chaleur naturelle Auente .
Des orifices &valuules du Cæur. CH A P. X111.

Pres ces Ventricules faut conſiderer les Orifices & Valuules d'iceux:
leſquels Orifices ſont quatre en nombre , deuxau dextre Ventricule , & Nimbre.
autant au ſeneſtre.Desdeux premieres le plus grand baille entree à la vei
ne Cauc dcdans le Caur, ou au ſang porté par icelle: & le plus petit iſſuë à
la veinc Artericuſe, ou au farg bilieux porté par icelle pour la nourriture
D des poulmons.Des autres deux le plus grand baille iſfuë à l'arcere Aorca , & à l'eſprit
vitaldiſtribuépar coutes les parties du corps : & le plus petit,entree & iſſue tant à l'ar
tere veineuſe,quc matiere apportee & chaſſee par icelle. Et pource qu'au Diaſtolé,
c'eſtà dire dilatation du cæur,il eſtoic requis,qu'introdu & ionde matiere fuſt faite par
va orificeen chacun ventricule ,comme au dextre par le plus grand , & au ſeneltre
parle pluspetit , cour ainſi qu'au Syſtolé,c'eſt à dire conſtriction, expulſion deſdites Ily 4 ONKE
maticres de chacun ventricule par ſon autre orifice. Aceſte cauſe Nacure a mis aux Epiphyſes
ſuſdits orifices onze Epiphyſes, ſçauoirſix au dextre ventricule, trois en chacun orifi- oh Valmua
ce&cinq au ſeneſtre,trois au grandorifice , & deux au plus petic , pour la raiſon quite les aucaur.
ſeradite cy-apres.Etſont celles Epiphyſes differentes en pluſieurs choſes; Premiere. Quinevois
ment en a& ion:car les vns apportent matiere au cæur , les autres les empeſchent d'y lefdites
l'correrlors qu'elles en ſont forries.Secondemét en ſituation :car celles quiapportér, ilohin
viennét du dehors au dedás:les autres qui expellét, du dedās au dehors.Tiercemēren polible les
1
t dale
figure:car cellesquiapporté ,ſont qual defigure pyrami ,& celles qui emp eſchéc oir
poun
l'incrodu & ió,ſont faites à la limilitude d'vn grădić ) Romain.Quartemet en ſubſtă- encendre.
clicarlespremieres des ſuſdites ſont en leur plus gráde parcie charneuſes ou cifluësde
150 Lequatrieſmeliure
filamens charneux , deſinens en vne petite cuberofice charneuſe vers la poince du A
Cour:les ſecondes ſont tocalement membraneuſes. Quinteoét en nombre:car cel
les qui apportent,ne ſontquecinq,trois au dextre ventricule ſur le grand orifice, &
deux au leneſtre ſur le pecit:les autres ſont fix, trois à chacun vēcricule ſur l'autre ori
fice. Finabiement en motion :car les charneuſes s'ouurent au Diaſtolé pour introdui .
reſang ou air,& au Syſtole ſe ferment pour recenir les matieres introduites du tout,
ou en la plus grande partie : & les membraneuſes, au contraire , au Syſtolé s'ouurent
pour laiſſer ſortir le ſang & l'eſprit du cæur aux partiesexterieures : & au Dialtolé le
ferment entierement,ou peu s'en faut pour defendre que leſdites matieres eſtás chal
Annota- fecs dehorsny r'encrent.Ounoteras pour la concluſion de ce propos ,que Naturen’a
tion ,
mis que deux valuules à l'orifice de l'artere Veineuſe, pource qu'il eſtoit neceflaire
quc cedic orifice fuft touſiours ouuert,ou du cout,ou pour le moinsen vnetierce par.
tic,afin que l'airfuſt continuellement par ceft orifice introduiten l'inſpiratio, & par
Ls confri- cemcímechaffé horsauec les excremens fuligineux en l'expiration. Er de cenous
Etion et
plusbrief. pouvons conclurre,que del'air introduitparcedit orificetout ouuert,n'en eſtreiette
lo que la tierce partic en l'expiration, veu que Nature ne luya laiſlé pour ſon iffuë que B
ddalacion. la tierce partie de l'orifice: parquoy l’expiration & Syftolé des arteres & cæur doit
eſtre plus briefue que l'inſpiration, en ſorte que nous pouuons dire l'inſpiration eſtre
ayſi longue que l'expiration ,iointe auec le repos qui eſt entrecos deux mouvemens:
& pourtant nous auons dit , qu'au Syſtolé leldices Valuulcs charneuſes ſe ferment du .

touc,ou pour la plus grande parcie.


Diſtribution dela veine Arterieuſe,& artereVeineuſe. CH A P. XIIII.
y
Yane demonſtre parcy dcuácl'origine d'unchacun vaiſſeau,reſte à decla. .
rer leur diſtribucion ,quieft teile qu'il s'enſuit. Chacun des deux lortant de
ſon propreVétricule,à ſçauoir dextre & feneſtre,ſediviſe en deux inſignes
rameaux:I'vn cēdác à dextre,& l'autreà ſeneſtre,en ſorte que les deuxplus
inſignes ſe croiſent en forme de la lecere Grecque ( X) venant l'vn du dextre au ſene. T:
ſtre,&l'autre du lenettre au dexcrc:la veine pardeſſus l'arcere,comme tu peux mieux
voir à l'ail, qu'entendre par liure. D'auárage,les deux ſuídics rameaux d'vne chacune
ſur l'entrec des poulmons, ſe diuiſent encor en deux autres inſignes qui s'en võrcha 1292
cun à ſon lobedes poulmons iceux encoren pluſieurs autres ,& preſque infinis,diftri
buez de trois coſtez par iceluy,ainſique tu pourras veoir,ſitu veux prendre peine d'y
regarder.Oreſt à noter que ces vaiſſeaux ſonr ainſiappellez pour la traſmutation qui
eſtfaicte de veine en afcere, & d’artere en veine,pourla commodité de la vie.Nature
Otware
eft incomparablement lage d'auoir changé les tuniques des vaiſſeaux du poulmó,fai
admirable fant la veine comme l'artere, & l’arcerecomme la veine.Car ſi la vcineArterieuſe cuſt
de nature .
retenu la propre nacure deveine,leság bilieux ſubtilié dėdás lecæur,quieft porté par
***
icelle aux poulmonspourleur nourriture,ſefuſt peu cuaporer parla tenuitéde ladite
veine. Dauantage Naturen'cult peu venir à ſon intérion,quieſt de nourrirlespoul
mons dudic lang,à raiſon de la continuelle agitation d'iceluy faicte dedás ladite veine ..
par le Diaſtolé & Syſtolé des poulmons :cõmeainſi ſoit que l'aliment ne le puiſſe ag
glutiner& aſſimiler à la partiequien doit eſtre nourrie ,s'il n'eſt fixe,fermc& ſtablc, &
touſiours preſent & adherantà icelle.Ce que Nature preuoyāt a coſtitué ceſte veine D
auſſi ſolide & durc,afin que demeurant immobilc au mouuemét des poulmons(i'en
tends au regard qu'ellecuſt fait, retenát la nature de veine)ils euſſent l'alimée qui les
Paffagedes ſuiviſt en toutes leursmotiós,ſansqu'au Diaſtolé il fuſtnature
attiré par iceux , & au Syſtolé
maticres chaſſé vers le caur.Quár à l'Artcre,ie dy qu'elle apris de vcine,afin que par ſa
dudexere moleſſe promptemenc& facilement elle ſe peuft ſerrer & dilacer ſelon l'exigence de
ventricule nature,pour apporterl'air au cæur, & en rapporter la vapeur fuligineuſe d'iceluy, &
anfenetre. du ſang,& eſpritncceſſaire pour leur vie.Ilſepreſente icy vne difficulté,à ſçauoir par
quellevoye le ſang eſt porté du vécricule dextre auſeneſtre.Galien a eſtimé,qu'en la
paroy d'entre -deux y a des trous:& certes ily a quelque comencement deſdits crous,
mais ils ne paſſent point touc outre.Parquoy Columbus a inuété vne nouuelle voye,
& a eſtiméqueleſang entre dudextre vérricule au poulmon par la veine Arterieuſe,
non ſeulement pournourrir ledit poulmon ,maisauſſi pour yeftreelabouré , & de là
porté par l'arcerc Veincuſe au ventricule ſeneſtrc,laquelle ne ſerc ſeulement d'intro
duire.
de l'Anatomie. ist
A dairel'air àce ventricule,mais auſſi le ſang.Ceſte opinion eſt fort probablc. Botallus Botallissa
en lön trai&é De catharro,atrouué & premieremenčinuēcé vne tiercè voye , à ſçauoir
vnc veine,laquelleil appelle, Vena arteriarum nutrix , & ſe trouue vn peu pardeſſus la
coronale presdel'oreille dextre,& s'en va en l'oreille gauche, & entre au cậur. l'ay
grandedoutequeceſte veine obſeruce par Bocallus ,ne ſoitlevaiſſeau, lequelFallo
piusa obſerué,commençantà parler des arteres,par lequel la veine arceriale eſt ioin. Aulin, vsa
chap.uso6.
Ae à l'Aorta,& par lequel tout le lang vital eſt porté pour former & nourrir les poul, De
mons,cependant que l'enfant eſt au ventre dela mere:duquelaulli a parlé Galien , &partinm .
toutesfois depuis luy n'a eſcć obſerué que par Fallopius.
Difribution de la veine Caueaſcendante oumontanteen haut. CH A P. XV . >

A veine Caue fortant de la partie gibbeuſe du Foye, ramaſſee en for. Aulinzi de


med'vn cronc d'arbre (ainſi que nous pouuons comprendre par le direla Confor.
B de Galien des rameaux diſtribuez partoute la ſubſcance du Foye,dela de l'enfant
plus grande partie de la veine Vmbilicale, qui entre par la partie caut
d'iceluy , pour illec faire & conſticuer de la plus petite portion la veine
Porte, & de la plus grande, la Caue, le diuiſe en deux rameaux inſignes & inégaux,
comme nousauonsdicau premier liure : dont le plus grand deſcendpar la partie po.
ſterieure duFoye ſur l’Eſpine comme tu as encēdu,recevant quelquesfois en delcen.
dant,certains rameaux de la ſubſtancedu Foye,qui n'onteſté ramaſſez au grád tronc
entierement. Quelquesfoiscu trouueras ce tronc couuert de la ſubſtance du Foye
plus ou moins iufques ſur l’Eſpine, où il le laiſſe : en ſorte qu'il ne ſemble exterieure
ment lortir du commun tronc auec l'aſcendante, iaçoit qu'il le face couſiours: L'au
tre ramcau d'icelle, & plus petit , monte aux parties ſuperieures,ſe diviſant en la mas
piere qu'il s'enſuit.Premierement, montantparle Diaphragme versla Telte, diſtri Veines Did
bueen iceluydeux petites veires, vnc de chacun coſté,à cauſe dequoy fontdi&tesphragmatis
Diaphragmatiques. Secondement , eltant patuenuë à ladextre oreille du cøur, elle ques.
C faicies Coronales, ainſi nommees,pource qu'elles enuironnent lecour en formede coronales.
couronne. Tiercement eſtant entree & enfoncee dedans ladite oreille par ſa plus Arterieuſe
grande partie ,produiet la veineArterieuſe .Quartement eſtant montec au deſſus du Aryges.
cæur,elle conſticuë & fait du coſté droi& la veine nommce Azygos , laquelle deſcen . Pogos.
dant ſous la quatrieſme coſte ( contant dehaut en bas ) nourric les muſcles interco fans conso
pague .
ſtaux, & membranes cant d'un coſté que d'autre , des hujat coſtes infericures, diſtri
buant entre chacun muſcle de la membrane, tout ioignant la partie ir ferieure de la
coſte, vn ramcan fulapepour la nourriture deſdites parties. Quelquesfois & le plus
ſouuent aux petnes gens,celte veine nourrit encicrement routesles coſtes, par cer-
tains rameaux qu'elle enuoyedés ſa deſcente aux quatre ſuperieures. Quelquesfois
aulli, mais peu ſouvent, elle ſe trouue double, vnedechacun coſté: & alors chacune
nourrit ſon coſté. Icy faut noter ſingulierement,que ceſte veinc Azygos ayátnour Choſe digne
tytoutesles coſtes, ſonreſtedeſcend ſous le Diaphragme,& du coſté gauche ſecon. L'ebre una
joint auecl'Emulgére: & ainſi la voye,par laquelle la matiere de la pleurelie ſe vuide ees.
parlesprines , facilement nous eſt demonſtree. Du coſté droit deſcend plus bas, &
D ſe ioin & auec les Lumbaires , ſpecialement auec vnc qui deſcend à la cuiſſe : & de
celaFallopius collige , qu'au commencement d'vne pleureſie il ſeroic vcile de cou.
perla veinc du iarret. La cinquielme diſtribution eſt au deſſus de l'Azygos , pour la
pourricure des muſcles intercoſtaux des quatre coſtes ſupericures au defaut de l'A.
zygos, & eftappellee intercoſtale. Quelquesfois ceſte.cy eſt trouuce ſortir des Axıl . Intercofale.
laires, que Syluius appelle Souſclaviers. La fixieſme fait les mammelles ainſi nom. Mamma
mees, pourceque leur plus grande partie deſcendentre la quatrieſme & cinquief.
mecoſtesauxMammelles, pour les vſages ſuſdi&ts, leſquelles forcent aux hommes &
femmes des Souſclavieres , vnc de chacun coſté. On lestrouue quelquesfois iffan .
tes par vn commun orifice de la veine Caue , deuant qu'elle ſe diviſe aux Souicia.
viers : mais c'eſt aux beſtes brutes pluſtoft qu'aux hommes. Ces veines cy deſcen .
dans parles parties laterales du Sternon,baillene nourriture aux deux muſcles Peđo.
faux internes,cltendus ſous la partie interieure d'iceluy , & à ceux qui ſont entre les
cartilagesdesſepe coltes vrayes, & audic os Sternon, & cartilages& ligamens d'ice.
luy-au Mediaftin,& à la particfuperieuredes muſclesdroits,& parciescirconiacétes.
O
152 Le quatrieſmeliure
Cervicale. La ſeptieſme diete Cervicale,vatant d'vn coſté que d'autre par les trous des apophy. A
ſes tranſuerſes des vertebres du col , iuſques à la teſte ( à cauſe dequoy elle eſt aindi
nommec,ſeconſommant en certains petits rameaux diſtribucz en laSpinale medul.
le parletrou des nerfs,8c aux membranes, ligamens, cartilages,os, & leurs prochains
Muſimleuſe muſcles.Lahui& icſmedite mufculeuſe,ſortant encores des Souſclauieres, va nour.
Thorachi- rir les muſcles poſtericursdu col, & lesplus haurs du Thorax, à cauſe dequoy elle eſt
que. ainſi nommce. La ncuficſmc dicte Thorachique,ſortaulli des Souſclauieres ſe divi
fant en deux : dont lyne va par deſſusle Thorax iuſqu'aux mammelles, nourriſſant
les muſcles anterieurs d'iceluy. Parquoy aux pleurelies noches ou faulles, pcuuent
eſtre heureuſement appliqueesventouſes ſur cet endroi&t. L'autre rameau deſcend
aux muſcles poſterieursduditThorax , & principalement au muſcle nommé Treflar
ge.Apres toutes ces diuiſions eſt faire l’Axillaire, de laquelle ce ſera parlé en ſon lieu,
Axillaire. qui fai&t la dixieſmc diſcribution , ainſi que l'Humerale l'onzielme, delaquelle auſſi
Humerale . Tera parlé en ſon lieu.La douzieſme & derniere fait la iugulaire proprement dice : qui
Tugulaire. clt double,interne, & externe. L'internc plus petice, monte tant d'vn coſté que d'au .
double.
Interne. tre, dés ſon commencement par les parties laterales de la Trachee arcere , juſqu'àla B
bouche,& au Crane,baillanc nourriture aux parties, par leſquelles elle paſſe, comme
aux membranes prochaines,& nerfs qui ſe rencontrent en ſon chemin . Mais icelles
eſtant à la baſe du Crane , ſe diviſe en deux rameaux : dont le plus grand retournant
par la baſe da Crane vers la partic poſterieure d'iceluy, apies auoir baillé quelque
pecit rameau au muſcle longdu col couché ſous l'Oeſophague, entre dedans lediæ
Crane auec la petice Carotide par le crou de la ſixieſme conjugaiſon des nerfs, où el
les font vn vaiſſeau commun . Le plus petit,apres auoir baillé quelque petit ramcau à
l'inſtrument de l'oüye par le trou nommé Cæcum , s'en va dedans le Crane,où ilſe
perd par la Dure. mere pres le trou de la croiſicfınc & quatrieſme paire de nerfs.
L'excerne plus grande & infigne, le plusfouuent ſimple, & quelquesfoisdouble , ou
lugulaire dés ſon commencement, ou tantoſt apres, monte luperficiellement tant d'un coſté
extcine .
que d'autre,par les parties laterales du Col,entre le muſule large, die Pannicule char
neux illec manifeſte , & lesautres ficuez aux parties laterales dudit Col : auſquels
( comme fait auſliau Cuir ) diſtribue cercains petics rameaux pour la nourriture d'ie
ceux. Mais elle eſtane venuë à la baſe de la Teſte , le diuiſcen pluſieurs ramcaux: C
deſquels l'on s'en va auxmuſclesde l'os Hyoïde, du Larinx,de la langue,& en la par
tie inferieure d'icelle , où elle eſt ouuerte aux Synanchies,& autres inflammations de
la bouche, pareillement à la runique du nez. L'autre s'en va à la Dure-mere, pal ‫܀ܠ ܗ ܂‬
ſant cant d'vn coſté que d'autre , par le trou ficté ſousl'os Maſtoïde: lequel monte
obliquement tant d'vnc part qued'autre par l'os Occipital , iufques à la haute par DC
tie de la ſucure Lambdoïde, auquel endroi&t leldi&s rameaux le rencontranssivnif
ſent dans le reply de la Dure-mere,diuiſans le cerueau anterieur, comme te fera de
monſtré ,pourillec vnis enſemblefaire le Torcular. Le tiers montant par deſſus la Coroni
partie pofterieure & baſſe de la maſchoire inferieure, ſe diſtribuë aux léures,aux ailes
du nez, & de leurs muſcles : ſemblablement au grand angle des yeux (i'entends tou. V
fiours chacun de ſon coſté) au front , & autres parties de la face: faiſant à la parfin ſur De 130
la partie anterieure du front, vnis enſemble, la vcinenommee Recta , ou Frontis. Le
Vensveeta, mcaux
quartmontant parlesglandes deſſous l'oreille,apres leur auoirbaillé pluſieurs ra
, ſe conſommeencore en deux plus inſignes : leſquels paſſant l'vn deuant & 4.ไม่
os Frontis. D
l'autre derriere l'oreille, ſe perdent au cuir de latefte. Le quint & dernier paſſant par
route la baſe de la ceſte& au cuir muſculeux, s'en va à l'Occiput faire la veinc Pupis,
laquelle s'eſtendant le longdela ceſte ſelon la future ſagittale, s'en va vnir auec celle
VenaPupis du front, chacune deſon coſté: laquelle vnion fait que ſiladite teſtecîtmaladeexte. .ad
rieurement en la partie anterieure ou poſtericure, pour la reuulſion de la matiere fai
fant tellemaladic,nousinciſons l'vne ou l'autre. Et noteras , qu'en aucuns Cranes la
Rewulfron dite veine Pupis enuoye quelquesfois par l'vnou pluſieurs trous aſſez inſignes, vne
par phlebo:portion de ſoy à la teſte interieurement, par laquelle peut eſtre faite cuacuation &
tonie en Serie
domleur de Teuulſion dela matiere, quiincericuremét la molefte. Parquoy concluant ce propos,
defte. ie prieray tour homme qui ſe mellera des diffc&tions,que lid'aduentureil crouue au
trement ces diviſions de veines,pour cela ilne s'en eſmerveille. Car Nature en la di
ftribution des vaiſſeaux eſt fi diuerſe, qu'à peinc la trouue-on ſemblable en deux ou
trois ſuic&ts,ainſiqu'auons dit par cy.dcuant.
De l'Anatomie. 153
A Figure des veines.
s'enfuit la declaration de la veine
Caue: en laquelle les Characteres mar .
1
quent ſeulementun coſté. Le tronc de
ſcendanteſtmarqué au coſté gauche,
l'aſcendant au coſté droit : duquel tú
pourrasingerautant del'autre coſté.
A A Monſtrent les veines,leſquel
tes iffances de la partie gib
beule du Foye, produiſent &
font le tronc de la veine caue ,
ou creuſe.
BB Veines Adipeuſes.
CC Emulgentes ou Renales .
DD Spermatiques .
B

B
EEE Lumbaires.
F La Muſculeuſe.
G Diuilion du cronc aux deux
Iliaques.
H Veine Sacree.
I Hypogaftrique.
K Epigaſtrique.
L La Honteuſe .
M Le Principe de la veinc Cru ..
rale, laquelle produit fix no.
tables rameaux.
N La Saphene.
O La Sciatique peritc.
С PP Muſculeuſes internes & cx
e Poplitique. R La Surale. terncs,

Ś Reite de la veine Crurale , qui s'en va iuſques aux doigts du pied.


V Malcole externe .
T Sciatique grande.
Y Malcole interne. a Commencement du tronc de la veinc Cauc aſcendante.
b Les Diaphragmatiques .
ç Ouverture dela veinc Cauc au cour , auquel endroiâ la vcinc Artericuſc eft
produite.
à la Coronale. е La veine Azygos.
f Lecommencemenc dela Souſclauiere,quiau bras eſt appellee Axillaire.
& Laveine Mammillaire, qui va au deuant de l'Epigaſtrique.
h L'Intercoſtale. i La Ceruicale.
kk Les Thorachiques . 1 La ſugulaire interne.
m La lugulaire externe , les quatre ramcaux de laquelle tc ſont monſtrez par
D 1.2.3.4 .
n La veine du front. O La veine Torculairc.
p Petice veine de I Humeraire allant exterieurement au col.
9 L Humerale qui quelquesfois prend ſon origine de l'Axillaire.
r Endroict de la Muſculeuſe.
ss Veines del Humerale allant aux muſcles prochains de l'Omoplate.
I L'Axillaire quicoſt apres ſe diviſe en la Profonde & Superficiaire: dont la Pro
fonde eſtmarquee par 1. & la Superficiaire par 2.
v Diuiſion de l'Axillaire ſuperficiaire, dont le ramcau interne auec l'internc de
l'Humerale , faiô la Mediane : l’Externe s'en va le long du coude iuſqu'à
la main ,
X La Mediane, zz Diuiſion de l'Humeraire , dont le rameau interncaido
àfaire la Medianc : l'Excernc paſſant par deſſus le rayon , va faire la veino
Saluarelle.
o ij
154
Le quatriefme liure
А
Diſtribution des nerfs de la foxieſme coniugaiſon . CHAP. XV Í.

Ource que la diſtribution de l'artere ne ſe peut commodément mó .


ſtrer ſans gaſter & rompre les nerfs diſtribuez parmy le Thorax : à
ceſte cauſe auant que proceder en icelle,nousles pourſuivrós le plus
bref qu'ilnous ſera poſſible. Et pour commencer, tu encendras que
leſdits nerfs ſont trois parcies en nombre, provenans de la fixielme
coniugaiſon , laquelle apres eſtre ſorcie du Crane, baille en deſcen .

Nerf Condant au Thorax,certains pecits ramcaux,à aucuns muſcles du Col du Larynx , & aux
falo trois montás tant d'un coſté que d'auţre du Sternon ,& des Clauicules en haut : puis le
demeurát à l'endroit des Clauicules deſcendár dedans ledit Thorax , fediuiſe de cha

cun coſté en trois parties :donc la premiere fait le nerf nõméCoſtal : la feconde,le Re.
currens ou remontanc: la tierce, le Stomachique. Où tu noteras que le premier eſt ap
B
pellé Coftal,pourcequ'il deſcēd par la racine des coſtes iuſques à l'os Sacrum ,ſe com
Nerf re
CNTrens , muniquant mutuellemēc auec ceux qui ſortent de chacune vertebre de l'eſpine : & fc
diſtribuent chacun de ſon coſté aux parties naturelles , come nous auons dit . L'aurre
eft dit Recurrens : pource qu'il recourt & remonce du Thorax en haut . Où cu enten
dras , que ces deux nerfs Recurrens ne recouvrent point de meſme lieu ,ains le dextre
remonte dedeſſousl'arterenómeed'aucuns Axıllaire dextre , des autres Şouſclauie .
re:& le ſeneſtre par deſſous le grand rameau de l'artere deſcendance aux parties na .
turelles : & montans chacun de ſon coſé lateralement le long de la Trachecartere
iuſqu'au Larinx, de là ſe ietcent par les ailes du cartilage Scutiforme,autrement nom
mé Thyroïde dedans lesmuſcles propres ouurans & fermansle Larinx. Tát plus les
nerfs ſont proches de leur origine , à fçauoir du cerueau ou de la nucque, & plus lont
mols: au contraire ,cát plus ils en ſont loing ,& plus ſont durs & robuftes: & voila pout
quoy nature a fait la reAexion aux nerfs recurrens, afin qu'ils fuſſent plus forts à faire
Pourquoy le mouuement des muſcles du Larinx. Le tiers ſe nomme Stomachique, pource qu'il
mature ac deſcend à l'eſtomach ou ventricule. Ceſtuy.cy ( i'entends de chacun coſté)deſcendão
recurrens. par deſſus les Lobes despoulmons par les parties laterales de l'Oeſophaguc diftribuë
Nerf Sto. pluſieurs rameaux de ſoy aux poulmons incerieurement, & à leur tunique, & auſſi o
mathique. au Pericarde , & au coeur: & s’approchant de l'orifice luperieur dudit ventriculcou
cſtomach, ſe conſomme en pluſieurs rameaux , leſquels ſc croiſans en pluſieurs & di
uerſes manieres, tiſſent principalement ledit orifice de l'eſtomach , pource qu'il eſt
le lieu de l'appetit & faim animale , & eſt fait comeiuge des choſes profitables & nuia
Gibles audic ventricule : & puis apres ſont cſpars par tout le corps dudic ventricule :
ſauf qu'aucunsde ſes rameaux deſcendent exterieurement du ventricule au Foyemit
à la veſſie du fiel, donnant & baillant largement à chacune partic ce qui leur en eſtoit
meſtier,comme un homme liberal, ſoigneux & magnifique. Icy faut noter , que le
ſtomachal ( de chacun coſté vn .) deſcend attaché & adherantà l'Oeſophague,& en
deſcendant fe diuiſe en deux rameaux ,deſquels l'yn va au coſté oppoſite pour ſeioin
drc auccle nerfdudit coſte: & faut noter que le dextre monte par deſſus l'Oelopha
gue, & le gauche par deſſous , de façon que de deux ftomachiques s'en font qua
tre , & de quatre deux , comme il ſe peut monſtrer par la figure cy - apres declarec. D
Diuiſion des Arteres. C H 4 P. XE 1 .
' Artere ſortant du ſeneſtre ventricule du caur & de la baſe , ou
alleres
Coronales fondemenc,comme l'a eftédit ( après auoir faict les deux autres Co
de CaNT.
ronales diſtribuees par le cour , ainſi que nous avons dit des veines
Coronales ) fe diuiſe tout incontinent en deux rameaux inegaux :
dont le plus gros deſcend aux parties infericures de ſon origine ,
diuisé ainſi que t'a eſté dit au premier livre. Le plus petit tour ſoudain apres
montant auſſi aux parties ſuperieures de ſon origine ,fe diuiſe encores en deuxra
meaux inegaux : dont le plus petit monte du coſté gauche , ſans faire aucune
diſtribution de ſoy'iuſqu'à la premiere coſte du Thorax , auquel endroict prenant
triere 10 le nom d'Artere Souſclauiere,fe diuiſeen lamaniere que s'enſuit. Premierement el.
tercostale . le produit l'Intercoſtale, par laquelle elle donne vie auxtrois muſcles Intercoſtaux
Mämillaire de quatrecoſtes ſuperieures, & à leurappartenance. Secondement elle fait la Mam
millaire , la diſtribution de laquelle eſt toute ſemblable à celle de la veine Mam.
de l'Anatomie . 155
A millaire. Tiercemét elle fait la ceruicale,laquelle mõte par les apophyſes tranſuerles, Cerricale.
tout le long du col iuſqu'à la Dure mere du cerveau , faiſanttelies & lemblables di
ftribucions de ſoy, quela veine ceruicale,aucc laquelle elle monte. Quartement, iffan .
te du Thorax,produitde la partie potterieure la muſculeuſe , par laquelle elle donne m «ferikuſc.
vicauxmufciespoſterieursdu coliuſqu'à l'occipue. Quincemenc,cſtant du coue for
ciedudit Thorax , fait l'Humeraledouble :donc vne partie s'en va aux muſcles de la Humcule.
partie caue de l'Omoplate :l'autre à l'articulation du bras ,& muſcles cane illec ſiruez,
qu'à la partie gibbeuſe de l'Onoplare .Sextement & finablemét,faicla Thorachique, Tbırachi
quieſtdouble àſçauoir ,vne qui s'en va aux muſcles anterieurs du Thorax , l'autre quie
aumuſclecres-large,ainſi que nousauons dit de la veine : & ledemeurant de ce coſté
faitl'Axillairc,de laquellece ſera parlé en ſon licu. L'autre rameau plus grand, mon
tantducoſté droiât ainſi que l'autre, iuſqu'à la premiere coſte fait aufli de fon coſté la
fouſclauiere, laquelle outre ce qu'elle fait celles & ſemblables diviſions de ſon colté
quela precedente ,elle en fait encor vne autre, qui conſtitue les Carotides tant dextre Carolides.
B queleneitre:leſquellesmontans ſans aucune diuiſion auec le nerfdela ſixieſme con
iūgailon,& veine iugulaire interne,par les parties laterales de la trachce artere, quád
elles ſont paruenuës au Pharınx,fediuifent chacune de ſon coſté , en deux rameaux,
l'vn interne,& l'autre externe :dont l'interne plus grand & plus gros ſe diſſemine au
Pharynx, Larinx & à la langue: puis entrant en la reſte par le longtrou, & partie po
fterieure de lamäſchoireluperieure, enuoye pluſieursrameaux au nez , aux yeux,
aux muſcles temporaux, partie interieure , & à la dure taye : & le demeurant dudic
sameau entrant parles trous lateraux de l’os baſilaire, s'en va aux apophyſes Clinoï
des duditos, pour illec fairele Plexus admirable tel qu'il eſt: & puis apres il ſe conſom .
me par la baie du cerucau , ſe diſtribuant plantureuſement par la Picmere,& la mem Plexus ada
brane Choroide , autrement nommeeplexas Choroides. L'externe & plus petit ra mirubli.
meaus'en va auxiouës ,aux temples , derriere les oreilles , & finablement envoyevn
peritrameau au muſcle long du col , lequel ſe va terminer avec la veine iugulaire in
ternc àlaDure- mere, paſſant par le trou des nerfs de la ſixieſme coniugaiſon.
С Figurede i Artere.
Declaration de la figure des Arteres.
a Monſtre l'endroict du cæur ,
principe des arteres.
b Le tronc au comencement des
arteres, lortant hors du cæúr.
с Mammillaire doicte prenant
ſon origine de la loulclauicio
droicte .
d Diuiſion des arteres en l'Axil
laire gauche, & vn tronc droit,
qui derechef ſe diviſe en trois
rameaux .
e Soutclauiere gauche.
f La ceruicale gauche.
g Mammillaire gauche.
D
h Intercoſtale pecite.
i La Muſculeuſe.
K Axillaire & principe d'icelle.
1 Rameau allant au Deltoïde , &
quelquesfois accompagnant la
veine Humerale.
m L'arcere interieuremér enuoyee
à la partie caue du Palleron, &
muſcles illec fituez.
n La Thorachique.
o Artere qui accompagne la vei.
ne, va le long du muſcle tres .
large
o iij
156 ſme
Le quatrie liure

PP Les rameaux diftribuez par les muſcles du bras iuſqu'au coude. A


r L'arcere qu'on touche au poignet.
S
L'artere qui paſſe exterieurement entre le premier os du poulce & l'auano
main .

L'autre grand rameau deſcendant interieuremér tout le long du coude iuſqu'à


la main ,là où il eſt diſtribué aux doigts commc ſon compagnon .
v Le tronc droict de l'arcere qui ſc diuiſe en deux Carotides qui montcat en

haut, & la ſouſclauiere qui tranſuerſalement va au bras.


A La Carotide dextro ,en laquelle B tedemonſtrele ramcau qui va à la langues

Larinx, & à la bouche,


C Le ramcau qui va dedans la ceſte incericurement, pour faire le plexus Choo
roïdes.
D Le rameau montant exterieurement vers les oreilles , & touce la face.
E Tedemonſtrele ramczu allant aux muſcles de la face,
F Lo ramcau des temples. G Le ramcau qui eſt derriere les oreilles.
H Letronc deſcendanc vers les parties naturelles par deſſus l'eſpine.
B
III Les atteres incercoſtales ,quilont huic en nombre.
K Les Diaphragmatiques. L La Coliaquc.
M La Meſenterique ſuperieure. N Les Renales ou emulgentes.
OO Les Lumbaires encl oſes entr e ces deu x char acteres , OO.
P La ſpermatique droiệc . Q La Meſenterique infe ricure .
R Les muſcles. S L'iliaque qui s'en va à la jambe.
T L'hypogaſtrique . V L'artere qui s'en va aux muſcles de la feſſe.
X Le demeurant de l'epigaſtrique, qui paſſe par letrou de l’os pubis , & ſe finit à
la cuiffe.
Y L'epigaſtrique. Z La crurale .
II Les muſcles interne & extcrnc de la cuiſſe.
2 La poplitique . 33 Les arteres des genoux.
44 Les arteres diſtribuces au muſcle de la iambc.
S La maleole interne deſcendant entre la malcole internc iuſqu'au bout des
doigts .
6 с
Les arceres de l'articulation du pied .
7 La maleole externe deſcendant comme l'incernc,
8
L’artere qui va par deſſous le pied .
9 La diſtribucion des arceres par le pied inferieur à tous les doigts:

Nors qu'ily a beaucoupplus de veines que d'arteres , auſi ſont - elles beaucoup plus infignes
'
du grofjes:carpour cöſeruer parfaictement la chaleur naturelle, lesparties n'ontpareilbeſoin des
inftrumés dediez à cet uſage. Or
fouuent on trouue des veines fans arkres, do iamais les arteres
Jars veines. Nous entendons icy l’artere eſte accompagnee de veine, non pas quand elle l'attov
che, ou qu'elle eſt conjointte auec icelles par communes membranes, commepour la plupart elles
Jontroutes,mais quand elle eſt conſtruite & ordonncepour l'uſage d'une meſme partie.

De lá phagouë, autrement dicte Thymus. CHA P. XVIII.


D

A Phagouë -eſt ync glande de ſubſtance fort mollc , rare &


Subiance.
ſpongicuſc:de quantité aſſez notable: fituee ſur les parties ſu
Quantité.
perieures du Thorax ,entre les diviſions des veines & arteres
ſouſclauieres ou iugulaires, qui ſont faites d'icelles , encores
contenuës dedans ledic Thorax : & ccafin qu'elle ſeruiſt do
Veiluté.
defenſe tant à la vcine qu'à l'artere , à l'encontre de l'os du
Thorax : & dauãtage,afin que celles diſtributios de vaiſſeaux
fuſſent confirmces & enforcies, ainſi que nature a ordonné
eſtre fait en toutes autres inſignes diuiſions,
On la trouue fortnocable & apparente aux beſtes & ieunes gens , mais à l'homme
qui eſt paruenu à ſon aage, elle n'appere plus ou bien pou .
de l'Anatomie, 157
A
Dela Trachée arterc. C H 4 P. XIX

'EN SUIT maintenant la Trachéeartere,laquelle eſtaneinſtru.


ment dela voix & de la reſpiration , eſt de ſubſtance catcilagi,
neuſe & ligamenteule, & de pluſieurs pieces : car fielle cuſt cíté Substance.
coute d'une piece & le Larynx , ils n'cuſſent ſceu ſe dilater &
comprimer,termer ny ouurir, ny former la voix qui le faic de
volonté,principalement par les muſcles du Larynx.lcelle eſt de Quantité.
quantité aſſez grande,& figureronde & creuſe.Sa compoſicion Figure.
eſt de veines procedantes des lugulaires internes, & d'arteres Còpofsien,
Venantes des Carotides,& nerfs venans des Recurrens, & de double membrane, vne
exrerne & l'autre interne:l'externe venant duPerioſte ,l'interne plus forte & eſpeſſe, 2

& tillue de fibres droites de la runique interne de la bouche , quieft commune aucc
l'interne de l'Oeſophague, & de cartilages annulaires , toutesfois incompletes, ran
B
gées en forme de Canal, & liées ainſi par ordre l'vneauec l'autre par ligamens ſorrans
mucucllement tant de leurs parcies laterales, que deleur extremité:leſquels ligamens
fone & accompliſſent le reſte du circuit de ladice Trachée arcere , cítans couchez lous
l'Oeſophague. Ce quia eſté faic, afir queceldies ligamens peuſſent obeïr & bailler
licu ſe contraignans vers le dedans de ladice Trachee artere, lors principalement
qu'on tranſgloucie les viandes lolides & malmaſchées. Or de ces deux genres deli
gamens qui ontaux carcilages de la Trachéc arcere , les vns arcachent les anneaux
! enſemble, qui font qu'elles s'alongent : les autres qui acheucne leur rondeur fonc
qu'eiless'élargiſſent.Lesſuldics ligamens ſont par dedăs, & les cartilages par dehors,
afin qu'ils ne tuſſent bleſſez des choles externes, & aufli qu'ils euſſent å obeïr à la Miracle de
tranſglucion dumanger & boire. Or li les annelers euſſent eſté tous cartilagineux , Narwe.
C ilseuiſene engardé le paſſage des viandes qui paſſenc par le mery ou Oeſophague, en
lecomprimant, quandonaualle quelqucgros morceau. Et noceras, que par la com
munion des tuniques inrernes , tant dela Trachécarcere que de l'Oclophague, pour
lai onudité de leur action , quand l'vn deualle & le baille , l'autre monte,ainſi
qivecorde aucour d'une poulie :comine quand l'Ocſophague ſe baiſſe pouraual
ferquelquechoſe, la Trachée arcere fehauffe : & au contraire , quand par vomiſſe
mit Oefophague monte , ledice Trachée arcere deſcend & le baiſſe. Elle eſt vni Nombre
9'211 eile, licu seentre le Larinx ( duquel elle prend ſon origine) & les Poulmons, Sination .
aque's elc leſine,ſediuiſant premieremene en deuxgrands & inſignes ramcaux,
cenian; l'vn i dexerę ,& l'autre à ſeneſtre : & vn chacun d'iceux entrant en la ſubſtan
ce des Poulmons,re diuiſe encores en deux autrement diſtribucz parciculierement
à vichacun Lob :, & iceux encores en aucresinfinis ,par coure la ſubſtance d'iccux.
E.Conttrouvez tous ces rameaux cartilagincux ,iuſqu'à leur extremité , eſtans Gruez
eure les cameaux de l'artere Veineuſe, & veine Arcericule , afin que promptement
D & facilement ils peuſſent communiquer & cnuoyer l'air au coeur par l'artere Vei .
neuſe, ou recevoir les excremcns fuligineux, & prendre nourriſſement de la veine
Arterieuſe. Et par ce moyen elle eſt annexéc auec les ſuſdites parties par ſes extremi. Connexion.
Tempera
tez , & par les autres parties conſticuances auec celles d'où clle les a . Soo tempera meni .
mentelt froid & ſec. Son a&ion & veilité eſt d'apporter l'air aux Poulmons , & au Valité. 1

Caur,en ſe tulacant , & rapporcer l'air fuligiacus en ſe comprimant, & rcſerrantras


Cartilages I'vn contre l'autre,
o iiij
r i e ſ m e
158 Le quat liure
Figure de la Trachée artere, ouchiflet. A

A Demonſtre vn petit corps glanduleux


nominé l'Epiglotte , qui ſe couche
par ſus le chef de la Trachécartere,
pour prohiber qu'en la deglutition
rien n'entre en ladite Trachée ar

GOUT B
С
tere.
Le cartilage nommé Scuciforme.
La Trachée artere annulée comme tu
vois.
DD Les deux glandules ſituées auxparties
laterales du commencement de la
Trachée artere .
EE Les nerfs de la ſixieſme & ſeptieſme B
coniugaiſon paſſans par le Thorax,
& allans au Ventre inferieur pour
e illec ſe reſpandre par toutes les par
Lantern ties .
F Lenerfdextre Recurrens fous l'artere
P Axillaire le long de la partie late
rale de la Trachée artere iuſqu'aux
muſcles propres du Larynx.
G Le nerf ſeneſtre Recurrens par ſous le le
tronc deſcendant de l'arrere.
M
HH Les deux nerfs Recurrens couchez le
long de la Trachée artere.
II La diviſion de la Trachée artere en
deux rameaux , le dextre pour aller
aux Poulmons dextres , ainli de l'au- C
tre :leſquels deux rameauxfe piuiſent en pluſieurs aucres, comme tu vois.
K L'orifice de la grande arcere ſortant du cæur .
L Les arceres Coronales dudit cæur ,
M La grande artere deſcendante aux parties inferieures,
NN L'intercoſtalegrande allant aux muſcles Intercoſtaux.
O L'Arcere Souiclauiere gauche.
P.Letronc aſcendant de l'Artere , qui ſe diuiſe en trois rameaux .
Q L’Artere Axillaire dextre .
RR Les arteres Carotides tanc dextre que ſeneſtre.

De l'oeſophague. CHAP XX.

’ O ESOPHAGVE( voye dumanger & boire ) eſt de ſubſtance mo.


Subſtance. yenne entre chair & nerf, à raiſon qu'il eſt compoſé d'vne mem
brane nerucule , & l'autre charnuë.La nerueuſe eft ficuće au dedatis, D
Cõpoſition.
& concinućeaucc la cunique de la bouche iuſqu'aux léures ( au mo
yen dequoy les léures tremblent auxmaladies, qui ſe doiuent iuger
par vomiſſement ) & auec l'interne de la Trachée artere. Et eſt til
ſuč de filamens droits , pour l'attraction de la viande que nous voyons quelquesfois
eſtre ſi ſubite aux gens fameliques, qu'à peine on a le loiſir de la maſcher : & eft au
dic endroit plus craſſe & plus durc qu'en autre lieu . La charnuë miſe au dehors , eſt
tiſſuë de filamens tranſuerſaux , pour accelerer tant le boire & manger ,que les vo .
miſſemens, ou vents reiettez de l'eſtomach au dehors . Ces deux cuniques conti
nućes auec celle du ventricule , tiennent vn meſme lieu qu'icelles . Il a encores
parties compoſantes, comme veine de la veine Porte & Caue aſcendante, nerfs de
la fixic meconiugaiſon ,& artere decelle qui va au ventricule auec la veine Gaſtri
Quantisé. que , ou des arteresaſcendantes en la partie caue. Et ſur tous ces vaiſſeaux il peut
avoir vne tierce tunique venant de la Pleura. Sa quantité eſt aſſez grande , tou

1
De l'Anatomie . 159

A cesfois aux vos plus aux autresmoins,ſelon la varieré des corps . Sa figure eſt ronde,
afin qu'il fult pluscapable à tranſgloutir couces viandes , & qu'il fult moins ailé à eſtre Figure.
offenlé. Il eſt ſitué entre l'eſpine & la Trachée arcere , depuis le Pharynx iuſques au
ventricule. Et noteras , qu'iceluy deſcendant tout lelong de l'eſpine , quand il eſt Sismation .
venu à la quatrieſme vertebre du Meraphrene , il ſe fouruoye vers le coſté droit,
pour donner lieu à la grande artere nommée Aorca , deſcendance aux parties infe .
ricures, ainſi qu'ilt'a eſté dit : puis apres récourne à la partie ſeneſtre vers l'orifice de
l'eſtomach. Nature l'a ſuſpendu au Diaphragme par aucunes forces membranes , de
peur qu'en s'appuyant ſur l'artere, il n'empeſchaft les eſprits de deſcendre aux parties
baffes. Il eſt leul & ynique, conioint auec les parties cy -deſſus nommées , tant par ſes
membranes,que par ſes vaiſſeaux.Son temperament eſt plus froid que chaud ,commė Tempera
routes parcies quiſont plus nerueuſes que chatneuſes. Son action & vtilité eſt d'ac- mene.
A tion .
tirer & apporter les viandes , & toutes autres choſes aualées & cranſglouties ,& les re
lors qu'elles ſonemoleſtes au ventricule ,ou en qualité ,ou en quantité ,ou deValité. !
ieter
toute lcur ſubſtance. Et eſt à noter que lors quenousaualons , l'Oclophague eſt tiré
B contre- bas, & la Trachécartere contre -mont, qui eſt caule que nouspouuons reſpi
B
ter & aualer enſemble : laquelle choſe a eſté faite par la grande prouidence de Dieu ,
lenom duquel ſoit loüc eternellement .

Fin du quatriefme liure.

Table des Chapitres du cinquieſme liure ,

3 de l'Anatomie .

.
1 Eſcription generale dela Tefte . Chap.ja
Du cair muſculeux de la tefte , & du Pericrane. Chap.j.
· C
с Des Sutures . Chap.ij.
Du Crane , ou eſtu , du Cerucas . chap.iig .
Dela Dure Pie Mere. Chap.v.

Du Cerueau . Chap.vj.
Des ventricules du Ceruesu , & Apophy ſesmammillaires. Chap.vij.

Desſeptconiugaiſons ,paires ou couples desnerfs du Cerucas :appeainſ lez , pomyce qu'ils ſont
touſiours deux à deux :/çauoir eſt l'un d'un coſté,& l'autre de l'autre. Chap.viij.
Chap.ix.
Du Rets admirable, & glandule Bafilaire.
Des trous de la baſe interne du Crane . Chapt.
Chap.xj.
Des trous de la baſe externe du Crane.
Cbap.xij
Del Espinemedullaire.

>
160

LE CINQV I ESME LIVRE


CONTENANT LES PARTIES
ANIMALES SITVEES EN LA TEST E.

Deſcription generale de la Teste. C'H A P. 1.

YAN t iuſques icy declaré deux parties de noſtre ſujet,


c'eſt à lçauoir Naturelles & Vitales , il faut que nous par. A
fions à la croiſielme, qui eſt ſiquée en la Teite : laquelle
Defcription
premierenient nous definirons : puis la diuileroos en fes
de la tefte. parties : tiercement deſcrirons vne chacune: quarrement : 44
declarerons ſes parties tant contenáres que contenues, ainſi
qu'elles ſe preſenteront au ſens de la veue , ſelon l'ordre de
diſſection . La Teſte donc cſt le ſiege des ſens, & rempart
deraiſon & de fapience :de laquelle comme d'vne fontai
ne , ſortent diueriesoperations, & pluſieurs commodicez,
Situation que nous declarerons cy-apres. Elle eſt ſituée ſur tout le corps , & Dieu a voulu
delstelke. qu'elle fuft elleuée en hautversle ciel , afin que l'homme cogneuſt que ſa vraye ori.
gine & naiſſance venoit plus haut que de la terre, & des autres elemés corruptibles,
& que de là tout ainſi que d'vne haute forcereſſe qui commande à ce qui eſt en B
bas: l'eſprit Animal peut regir , gouuerner , & conduire tout le reſte du corps , &
diſpoſer de les parties , aux actions ordonnées par la nature. Comprenant ſous icel. ZOO
le cout ce qui eſt depuis le ſommet nommé Sinciput , iuſques à la premiere Spon. deco
Pigure. th
Diviſion dyle , ou vertebre du col. La figure de la teſte eſt bonne, lors qu'elle eſt ronde, &
des parties aucunement comprimée vers les parties laterales , ayant eminence yn peu au front
contenues. & au derriere : & demonſtre lesſens eſtre bons. Au contraire, celle qui eſt du tout
Face.
Fron !.
ronde, n'eſt pasbonne , ne celle qui eſt aiguë , ou en pointe : & quant à ſes parties,
elle eſtdiuilée en la face, front, temples ,linciput, vertex, & occiput. Par la face eſt
Temples. encendu tout ce qui eſt contenu entre les ſourcils & le menton. Par le front,ce qui
Sincepur. eſt depuis les ſourcils, iuſques à la ſucure Coronale. Par les temples , ce quieſt ſitué
Vertex .
entre le perit Canthus , ou petit angle de l’ail & l'oreille. Parle'Sinciput, ce qui eſt
Occipue.
depuis l'extremité ſuperieure du front iuſques à la ſucure Lambdoïde de long & ic
delarge,iuſques aux ſutures ſquammeuſes. Par le Vertex ou Sommet., la fonte
nelle, ou bien ce qui eſtégalement aumilieu de la ſuture Sagittale. Par l'occiput,
ce quieſt finy & terminé par la ſucure Lambdoïde , & partie poſtericure de la pre
miere vercebre du col. Orde couces ces parties les vnes ſont ſimples, & les autres
compoſées. Dauantage les vnes ſont contenantes & les autres contenuës : Mais des
Parties con- contenantes les vnes ſont communes à toutes les ſuſdites parties de la teſte , com
tenantesca me le Cuir , Panniculecharneux & le Pericrane : Les autres ſont peculieres à certai
contenuës
en la tefte. nes parties , commele Pannicule charneux au Col , à la Face , au Front , & au cuir
Auires qui couure le Crane. La tunique commune aux muſcles, à lagreffe, & à la Face.
parties con Le Crane , la Dure & Pie-mere, au cerucau. Les parties contenues ſont, la ſub
ienuës en la Itance du cerueau , les quatre ventricules & corps contenus en iceux , les nerfs &
tefte. procez mammillaires : le Plexus choroïde , & admirable , glandule Baſilaire , &
de l'Anatomie , 161
A sutrc deſquelles nous craiderons cy-apres. Maintenant faut pourſuiurc les parties
contenances, en commençant au Cuir : carl'ordre d'enſeigner eſt de premierement
eraider des parties ſimples : toutesfois ie parleray premierement du poil couurant le vfagedu
Crane, duquelen peu deparoles diray ce qu'ilm'en ſemble. Et pourtant cunoteras, poils
qu'iceluy n’eltautre choſe qu'vn excrement produit & formé de la partie pluscraſſe
&terreſtrede la ſuperfluitéde la tierce conco&ion , laquelle ne lepeut exhaler ne
cuaporer par inſen Gble tranſpiration. L'vtilité duquel poil eſt, en conſommant lesMiilisé.
excremens gros , cras & fuligineux du cerucau , enſemble de ſervir de couuercure &
ornement àlateſto.Ecfaut entendre, que ce poil eſt fait de la premicre generation ,
comme eſtauſſi celuy des ſourcils : &l'autre vient à meſure que le corps croiſt & lc
delſeiche, comme eſt celuy cant de la barbe que de deſſous les aiſſelles, parties hon
ceuſes,& autresendroits de noſtre corps : cc quieſt manifeſte à tous,
Du Cuir muſculeux dela tefte, & du Pericrane.
B СНА Р ТІ.

E cuir quicouure le Crane , & qui eſt couuere de poil, eſt ſans com. Defcription
parajſon plus charnu ,gros , eſpes, dur, & ſec, qu'en nulle autre par des cuir
tie où il n'eſt couuere de Poil. Dauantage où il ne le couure , il eſt muſculeux
1 mellé & infilçré aux parties ſubiacentes , comme aux léures , au front, delacefte.
auec le Pannicule charneux , & pour ce eſt dic mufculeux : & és au
cres endroits , auec, cartilages , comme aux ailes du nez , & tarles des
yeux , & pourtanteſt dit Cartilagineux. Il a connexion auec le Pericrane, à cauſe
qu'ileft infiltré & mellé auec luy. Il reçoit des nerfs qui viennent de la premiere &
ſeconde vertebre du col,& dela troiſicime partie du cerueau , qui ſe dilleminent &
Ceſpandenc parcouce la ſubſtance : au moyen dequoy les playes, contuſions & apofte. Pericrane
mes faites en iceluy ne lonc à meſpriſer. Le Pericrane eſt vnemembrane for deliée, que celf,
laquelle reueltant immediatement tous les os de noſtre corps, eſt appelée en la teſta e d'où il
{pécialement pericrane, pour l'excellence du Crane : & à tous les autres os, Perioſte. vient.
Ecroutainſiqueceſtemembrane prend ſon origine de laDurc mere, parlesfutures Perife.
ou commi[ures du Crane: ainſi toutes les aucres de noſtre corps ſont faites & pro-neprend
duites ou de ceſte cy , ou bien de la Dure-mere, faiſant apophyſes oy productionsnaiſſanceds
tant parlestrous de la Telte, que par ceux de la Spinale medulle , iuſqu'à l'excremité la DMTC
de los Sacrum .Cequi fe peut prouuer, pource que lors qu'vne membrane en quel- mere.
que partie du corps que ce ſoit, eſt endommagée, la melme affection eſt communi.
quće iuſqu'à la Dure mere. Ce qui eſt fort manifeſte en ceux qui ſouffrent douleur
en quelquepartie,& fuſt-ce en l'extremicé du pied : lors qu'on eſternuë ou touſſe, la
douleur s'augmente ,s'eſtendant & communiquantiuſquesau cerueau. Son vtilicé vuilité de
eſtdecogurir le Crane,& luy donner cognoiſſance des choſes nuiſibles, par ſon ſen . Pericrane.
timent, ainſi quc fait le Perioſte à cous les autres os. Dauantage , il Touſtient &
D fufpend la Dure mere contre le Crane , par les commiſſures , depeur qu'icelle par la
pelanceur ne tombalt en bas , & ne bleflaſt la Pic.mere , & conſequemment em.
peſchaſt la pulſacion canr du cerueau que des arteres, leſquelles ſont en grand nom .
brediſtribuées à la Dure& !Pic.mcre,ainſique declarerons en ſon licu . Le Pericrane di
agrande connexion à la Durc.mere,au moyen qu'il en prend la naiſſance , & parNor
conſequene de toutes les autres membranes de noſtre corps, laquelle cholene faut
negliger pourle preſent trajáté.
Des Sutures . с 4 Р. III.

AINTENANT faut parler des Sutures appelées en Grec Raphe,qui in Crane


conjoignent enſemble les os du Crane : leſquelles ſone cinq , c'eſt à naturel y a
ſçauoir trois Vrayes,& deux Mendeuſes ou Fauſſes. Les Vrayes ſont cing fwing
nommées,l'vnc Coronale en Grec Stephaniea, quieſt en la partie ante.res.
SWINKE Coa
rieure , deſcēdant du Sinciput tranſuerſalemēt vers le milieu des Tem . ronale.
ples,Etelt ainſidite, pource qu'en cet endroit on a accouſtumé d'impoſer les cou Swimre Sam
ronnesàceux qu'ilapparcicat. L'autre eſtdiceen Grec Obelas, Sagittale ou Droite piesele.
4

5
wa

162 Le cinquieſme liure


en François, quieſt en la partie ſuperieure : pource quedroitement elle diuiſe toute А
la teſte en deux parties égales , s'eſtendant par deffus la longitude d'icelle , depuis la
Swimre Coronale iuſques à la tierce & pofterieure,nommée Lambdoïde : ainſi dite ,à cauſe
Lamb
de.
doi- qu'elle repreſente ceſte lettre Grecque capitale dire Lambda , V. Où cu noceras,
que tout cecy ſe doit encendre le plus ſouuent, pource qu'on trouve quelquesfois
des Cranes n'ayans point du ſucurcanterieure,les autres de poſterieure, les autres ny
l'vne ny l'autre, fors les Mendeuſes. Tu trouueras auſſi principalement,que la future
Cell. lio, 8. Sagittale deſcend iuſques à l'harmonic ou conion &tion desos du nez. Pareillement
skap. 4. on trouuequelquesfois trois ou quatre ſutures à l'os Occipital , tellement que le
nombre n'eſt pas couſiours cercain. Ce que Cornelius Celſus anoté diſant, qu'Hip
pocrates a laiſſé par eſcrit , qu'il a eſté trompé au nombre deſdites ſutures, eſtimano
que l'Occipuc fuſt diuiſé & rompu , pourle rebouchement & afperité quela ſeconde
ſuture Lambdoïdc faiſoit à ſon eſprouuerte , pendant qu'aucc icelle il fondoit la
Deux ſu playe. Les autres deux ſutures ſontditesen Grec Lepidoydes en François Mendeuſes:
fures Men parce qu'elles ont failly à la forme des vrayes futures, prenant forme d'application B
deuſes. d'os contre un autre, e tantchacun de la baſe gros & elpés, & au rencontre l'vn de
l'autre attenué, & fait en forme de taillant de couſteau, l'vn ſe couchant ſur l'autre,
ainſi qu'eſcailles de poiſſon : Au moyen dequoy ſont dites Squameuſes, ainſi que les
vrayes ſont dites Serratiles , pource qu'elles ſe ioignent enſemble en forme dedents
Pourquoy deſcic , entransl'vne dedans l'autre en leur rencontre. Et fion demande pourquoy
Mathema
fair le Cran la Teſte (qui eſtl'organele plusnoblede tout le corps)n'a eſté faited'vn ſeulos,afin
ne ďyn qu'elle fuſt plusforte & ſeure : le reſponds , que c'eſt afin qu'elle fuſt conſeruée, &
seul os. micux defenduëdes iniures tantinternes qu'externes : car le Cranec tant en noſtre
corpscómc vnc cheminée ou fourncau de la maiſon,auquelcoutes les fumécs mon
tent,liNature l'euſt fait tour d'vn os , les fumées n'euſſent peu s'exhaler , & par ainſi
cuſſent eſteint & ſuffoqué tout le corps.
Gal.de Doncques de peur que cel inconucnient ne vint à l'homme, Nature luy a fait le
fupars. Cranc de pluſizurspieces , afin que par les commiſſures d'iceluy , telles fuméespeuſ.
low . 9. ſenteftrceuaporées :& les ſubtiles au trauers du Crane, à raiſon qu'il eſt porcux.
chup. I. Voila quantaux iniures internes . Aucuns ont leurs commiffures fort entr'ouuertes C .

Diuerfité & apparences, les autres fort ſerrées. Et à ceux principalement qui n'ont point de
des com- commiſſure, Nature apreueu à tel accident: c'eſt qu'à deux doigts pres ou enuiron
migures. de la commiſſure Lambdoide, elle a fait vn , & le plus ſoutent deux trous , par où
entre la vcine Pupis dans le Crane,qui ſont fi amples, qu'on pourroit preſque metro
va fer d'aiguilletce, par leſquels les vapeurs s'exhalent,autrement l'animane mour
roit. Pour les iniures excernes,a voulu qu'il fuſt fait cel,afin que li vnos eſtoit fractu .
ré de quelque choſe quece fuſt, les autres pour raiſon de leur diuiſion , demeural
ſent entiers, & ſans dommage : & conſequemment que la playe fuſt moindre , &
moins dangereuſe. En quoy faut entendre , que ſi l'os eſtant frappé d'vn coſté , ſe
rompe de l'autre part, cela aduiencàraiſon qu'il y a defaut de ſutures, ou bien qu'el
les ſont imparfaites. Autrement il eſt impoſſible quecelles fractures ſe fiffent, veu la
diuiſion & Teparation deſdits os.Et fitu m'obic&tes qu'on ne trouue gueres de Cra
nes manques en ſutures: Icte reſponds, qu'auſſi peu Touucnc void on telles fractu .
res aducnir.
Raifon Or pour concluſion ,fautquele Chirurgien [cache le nombre des ſucures , & leur D
pourquor
le Chirur Situation,afin qu'ilſçache diſcerner les fractures ſciffurées d'aucc les commiſſures:de
gien doit peur qu'il n'applique ſon Trepan ſur icelle ( tant qu'il luy ſera poſſible ) à raiſon qu'il
Sfumoirle romproit les veincs & arteres, & quelques fibresnerucux, quicommuniquent des
nombre des parties interieures aux cxterieures : dont s'en pourroit enſuiure Aux de ſang, qui
ns foruscom deſcouleroit entre le Crane & la Dure- mere , & pluſicurs pernicieux accidens: co
{wintes,
le
sion . quieſt prouvé par Hippocrates : siin ventrem » & c. Quand le ſang eſt hors de ſes
Hippo. lim.vaiſſeaux, neceſſairement il s'altcre, & pourr it. Pareillement la Ďure-mere, ſes
s. aphor. filamens coupez, pourroit tomber ſur le cerucau , qui ſeroit cauſe qu'iln'auroitſon
30, mouuementlibre,au dommage de l'animant.
De crane
De l'Anatomie. 163
А
Du Crane ou eſtwy du Cerucau. C H 4 P. IV .

Aintenant faut venir au Cranç , que nous appellons le Teſt, lequel Le Craneet
auſlieft nommé des Grecs Cranium , des Latins Caluaria ,& elt deſſus la composé de
teſte, comme un heaume. Ileſt composé de huict os, comprenant l'os buretos.
24 criſte,dont aucuns ſont plus durs & elpais que les autres. Lepremier eſt os Occipia,
l'os Occipical ſitué en la partie poſtericure, lequeleſt plus dur & eſpais tul.
que nul des autres.Naturela creé ainſidur & eſpais, pour preuenir aux dágers & in
iures externes qui peuuent ſuruenir,cõme cheures & coups, pource qu'é la partie po
Aterieure n'y a point d'yeux poury preuoir,nyde mains pour ſedefendre. Ec eſt ledit
os circonſcriptparla ſucure Lambdoïde, & l'os Baſilaire. Les eminéces de cer os ſont
receuës de la premiere vertebre , ſur laquelle la ceſte ſe Alechic en deuant & derriere,
parle benefice desquatorze muſcles (que declareronscy-apres) & debien forts liga
mens,quilicat & ioignent lescornes dudic Occiput,auec les cauitez d'icelle premiere Os Coronale
B
vertebre ducol. Le ſecond os eſt en la partic anterieure, nommé l'os Coronal, lequel Cauité fous
tient le ſecond lieu en force & eſpeſſeur.Ec eſt limité par la ſuture Coromale, & les ex- les ſourcils.
tremitez de l'os Bifilaire ou Cuneïforme: auquel eſt ſouuéttrouue vno grăde cauité Dequoyſer
uent les ca
fous les ſourcils,pleine d'vne matiere gluáte, craffe & viſqueuſe, de couleur blancha- uiter , qui
Are quiaide à elaborer l'air pour fairer ſentir& diſtinguer les odeurs: laquelle caui Soni fows
téet au Chirurgien digne d'eſtrebien noree, pource qu'alors qu'il ſuruient fra &ture les ſourcils.
en cer endroict iln'y aquelquesfois que la premiere table de l'os rõpuë. Au moyēde. Anatomie
quoy le Chirurgien ignorant celle cauicé, penſe & croit que l'os loit enfoncé du cout neceſſaire
au dedans & qu'il comprime les membranes ,& par conſequent le cerueau. Età ceſte a Chirur
cauſe iceluy(au grand dommagedupatient)amplifie la playe,& appliquetrepanesel,le& Sile
sien, Chic
autresinſtrumespour elleuer la ſecode table dudit os:ce quin'eſt beſoin ' qu
n'aeſté rompuë. Etainſi tels Chirurgiensignaresſouuent font cauſedelamort des rurgienest
pauures pati+s: ce que ie puis atteſter auoir veu. Dont il eſt beſoin au Chirurgien co- Anatomie
gnoiſtre telle cavité,ce qu'il fera en rompane pluſieurs teſtes de mort , pouren auoir fonuent el
plas ample & parfaite cognoiſſance. Letroiſieſme& quarrieſme des os ſuſdi&ts,ſontcauſe de la
C deuxnommez Parietauxou Bregmatis,tenans le tiers licu en dureré & eſpaiſſeur,cõ. mort des
bien qu'icelleſoit ingale & diuerſe en ſes parties, & principalement au lieu appelle patiens:
Os Pirie
Sincipue,vulgairement la Fontenelle,ou le ſommet de la teſte,laquelle n'a point for. 140X.
med’os aux icunes enfans auant qu'ils ayenc toutes leurs dents de ſorte qu'en cer en. Sansenten
droić on ſene yne molleſſe au cact, & vne palpicatió,pource que leldics os n'y ſont en- dre cenx qui
cores formez entierement. Cela ſe fait afin que la redondance des excremens humi. contre con
des & vaporeux cõrenus au cerucau ſe puiſſeexhaler par le moyen de ſa dilatation & Stume naiſ
contraction qui ſont les mouuemens, qui peuuenteſtre nommez Syſtolé & Diaſto . fent auec
lé. Concluſion,ceſditsosſont touſioursplustendres & plusdeliezque les autres:tel- quelques
lement qu'on les voit ſouuent en aucunsendroicts n'auoir non plus d'eſpeſſeur qu'v. Lesmongea
ncongle. Parquoy les reinedes qu'on applique pour le Cerveau ,dviuent eſtre appli- mensnais
quez ſurla Fontenelle,parce que le lieu eſt le moins eſpés, & eſt le plus rare. Par ainſi rels du cer
donc eſtbien neceſſaire au Chirurgien de cognoiſtre diligemment l'eſpeſſeur des os nesne peu
du Crane,lors qu'il faut crepaner Et ſont circuits ces deux os quarrez en la partie ſu- uent cftre
D pericure,dela ſucure Sagittale, & de l'inferieure, des futures mendeuſes ou Squam. appelle z Sy .
Stolé en
meuſes,ouMenſongeres: de l'anterieure ,de la Coronale : & de la poſterieure, Lamb. Diafolé ,
doïde. Le cinquielme & lixieſme ſont deux autres nommez os Perreux, qui ſuiuent Annotations
les ſuſdits en cipeſſeur & force: leſquels ſont limitez de la future Mendeuſe, & d'vne digne d'efre
portió de la Lambdoïde, & de l'os Baſilaire. Le ſepcielme,eſt l'os Sphenoïde ou Bali- obſeruce.
laire,ainſinommé pource qu'il eſt fondement de la teſte, portant tous les autres en OsOs Petieux.
sphenoi
leurpropre& deuëſituació, ſansqu'ils ſe puiſſent desfaire à ceſte cauſe a eſté appellé
os Cuncïforme, qui eſt comparé à vne pierre qui eſt au milieu d'vn arche ou vouſte, filaire.
quibande
fté
le couc& gardede's'enfondrer. Ec eſt ledic os finy & terminé tant d'un co
que d'autre, par les os du front, Perreux , Occipical , & du Palais : & eſt de fi.
gure ſemblableà vnechauue-ſouris, & principalement ſes apophyſes, nommees en
Grec Prerygoïdes, & ſemblent repreſenter les oreillesd'icelle.Dauantage, il y a
vn autre os liqué en la baſe de l'os Coronal, qui eſt le huictieſme , auquel ſe finiſ
1
ſentlesprocez mammillaires, lequel a elé nommé des autheurs Grecs Ethmoïde,
р

1
1

164 Le quatriefme liure ,


des Latins Spongieux ou Cribleux,pourcequ'en luy y a pluſieurs trous, comme aux A
Os ethmoi. cſponges, & non pas droits commevn crible, & ne ſe rencontrēt pas droitement les
de ou (pon- vns aux autres. mais ils ſont tortilleux & anfractueux, afin que l'air attiré ne paruinc
gleHx.
tout à coup au cerucau, lequel eſtãt froid le pourroit endommager,mais qu'il s'y ela
bouraſt premierement quelque peu : leſquels auſſi dõnent iſſuëaux vapeurs en eſter
nuác,& aux humeurs morucux:cellementque les perſonnes morfonduës & enroüees
parce que ces trous font eſtouppez, ne ſontent point d'odeur bõneny mauuaile, & ne
peuuent rien ietrer par lepez quand ils ſe mouchent. De cet os procede vn cartilage
Ineas.
qui ſepare le nez endeux. Icem ſont ſix autres petics offelersconcenus és os Perreux,
Malleolus. dans le trou des oreilles,àſçauoir trois dechacun coſté,nommez Incus, Malleolus, &
Slapes. Scapes pour raisõ de leur figure, quieſt séblable l'vne à vne cnclume,l'autre à vn mar
L'enclume. tcau, & l'autreà vneſtrier de cheualReiſtre: l'yſage deſquels te ſera declaré cy apres,
Lomarican lors que parlerós de la faculté auditiue. Outre- plus on trouue en aucuns Cranes cer
L'effrier. caines diuiſions d'os , comme picces rapportesdegrandeur d'vn pouce ou enuiron, B
ayans commiffures propres à elles, qui ſont choſes dignes d'eſtre bien cogneuës au
Le Pericra- Chirurgien, lors qu'il eſt beſoin d'vier de crepane: & telle choſe pourra eſtre cognuë,
me elf fore lors qu'il ſeparera le Pericrane d'auec le Crane. Car à l'endroi, des commiſſures le
adherenedu Pericranc elt plus difficilement ſeparé qu'és autres endroits,où il n'y a pointde com .
Crane al miſſures, à raiſon des vaiſſeaux & fibres nerueux,quicommuniquent de la Dure.me.
l'endroit
des com re par les commiſſures,au Pericrane à luy contenu. Aufli les os des femmes ſont plus
des femmes. Ceux auſſi
miſures. delicz & mols que ceux des hommes,& desieunes enfans que
quin'oncencores accomply leurs trois dimenſions, les ont moins durs & eſpés, que
ceux qui ſont parfaits. Parcillement les Æthiopes ou Mores, & rous autres qui habi
tencés lieux chauds vers le Midy & l'Equinoctial, ont le Crane fort dur , & n'ont
point ou peu de ſutures. Ecrouc ce, eſt pourcolliger,ainſi que dic Hippocrates,qu'en
Qui fone ceux quiönt fracture au Crane mol & delié, les accidents ſont plus grands, & la mort
ceux quione ſera plus proche , qu'en ceux qui l'auront eſpés& ſolidc : à raiſon qu'ilfaut plus de
les os' de la temps pour alterer & pourrir l'os dur, qu'il n'eſt requis à vn mol, & delié.
refteplasdur Autre raiſon , c'eſt que l'os cendre & delié ſera pluſtoſt coupé par la crepane , que
Hip.anlıu. celuy qui eſt dur & eſpés. Outre plus , aucuns ont vncou pluſieurs prominencesou
des, plages enleucures en rondeur au crane ,outre le naturel: laquelle choſe aulli eſt bien àno G
de la tefte,ter pourdeux raiſons.La premiere,pourlaconſiderationducoup, pource ques'ilad
uicncſur icelles grande & longue diuiſion, il ne peut eſtre que la playe ne penetre au
dedans : carileſt certain qu'on ne peutcouper & faire grande diuiſion en vne choſo
ronde ( comme en vne boule ) qu'on ne penetre plus fort au dedans , qu'en vnecho
ſe platte , & non point eſleuec. La ſeconde raiſon c’eſt, qu'icelle prominence fait
changer la figure & la ſicuation des commiſſures. Au contraire la playe peut eftre faj.
te grande ſur la figure oblogue, ſans qu'elle penetre au dedans. Dauantage, faut que
le Chirurgien ( çache, qu'au Crane ſont deux cables , entre leſquelles eſt le Diploé,
quieft vne iubſtanceſpongicuſe, où s'inſerent pluſieurs veines & arteres, & quelque
Au Crane fimilitude de chair . Ce quiaeſté fait par vne prouidence de Nature, afin quele Cra
3. deux ne ne fuſtcrop peſune,& auſſi pour contenir le ſang pour la nourriture & vie du Cré . »
ollis. ne,& pour donner paſſage aux vapeurscontenuës au cerucau. Quant à la cable ſupe .
rieure du Crane, elle eſtpluscſpcre,forte & polic que l'inferieure . L'infericure eſt D
plus mince , ſubtiic , & inegale, pourbailler lieu aux veines & arteres internes ( l'im
preſſion deſquelles eſt euidente en ladice ſeconde table, partie interieure) deſquel
les cercains rameaux entrée dedás ledit Crane,par certainspetits trous auſſi apparéts
à l'ail: Au moyê dequoy la Dure mere eſt ſuſpendue & accachec au Crane, tant par
Pour un les ſucures quepar lesſuſdiâts petits ramcauxchoſes dignes d'eſtrenotees au Chirur
giē.Car par vo grád couporbe(encore qu'il n'y ait fracture à l'os ) à cauſe de l'eſbran
fait lementduCerucau, ilſe fait
e se coup
grand
orb ſouuentesfoisruption deſdices veines & arteres, dont le
Corruption
ſang decoule entre l'os & les membranes ,& le plus ſouuene la mort s'en enſuit . Ce
des vaif- qui ſera declarécy apres , quandie parleray de la commotion du Cerueau . Dauan
Jesux, done tage fautque le Chirurgien ait bonne cognoiſſance de la ſubſtance ſpongicuíe ,qui
bamore sē eſt entre les deux tables , nommee Diploé,laquelle eſt fort molle au regard deſdiêtes
fuit. tables lors qu'il crepane , & qu'auecques diſcretion il conduiſe la trepane, prenant
indication de la cenuité ou eſpeſſeur dela ſecondetable: de peur que tout à coup en
Diploé. appuyāt crop fort, il ne l'enfonce au dedans,dont ſe pourroit enſuiure conuulfion , &

1
de l'Anatomie. 165
A
parconſequent lamort. A quoyi'eſpercobuierpar le moyend'vneTrepane , que
l'ay inuentec, comme on verra au Traité des playes de la Teſte.
De la Dured Pie-mere. CH A P. V.
} ។
1

Yant ainſi demöftré tout le Crane,il faut venir à la dure Tayé,


quiçſt vne despremieres & principales membranes de tout le Le Dure
corps.Elle ſort par les Sutures, & par les trous des nerfs qui ſor- mere cftpr.
tết hors du Crane , & les tro ’ des os Echmoïdes ou Collatoires: ne des pré
mieres
à celle fin que l'air & les odeurs puiſſent aller au cerucau , lors principales
1
qu'il en eſt beſoin,& que les excremēs fuſſent purgez par le nez. membranes
Elle reueſt la cunique interieuredu nez. Pareillemét lort par le del noſtre
grand crou, par où deſcend la nucque quien eſt reueſtuë, & ge- corps.
neralement chacun nerf & membrane de tout le corps : à cauſe dequoy s'ily en a au
B cunc de bleſſee en quelque partie du corps que ce ſoit,ainſique nous auós dit par cy .
deuant, ſoudain par la connexion ou continuation qu'elle a auec la Dure mere, elle Gal. amz.l.
cómunique ſon affection au Cerucau:comme par exéple,nouspouvons entendre de des parties
celuy quiayane vlcere en ſon pied,partie fore membraneule ) lentoit morter tout le
long deſon corps certaine matiere,ou vapeur froide,iuſques au cerueau, dont puis a
pres s'en enluiuoit Epilepſie. Et ficu m'obie &tes que cel ſentiment eſtoit porcépar les
nerfs:ie reſpons qu'iceux ſont conſeruez, & veſtus de la plus grande partie deſdites
membranes duCerucau.Laſubſtance d'icelle Dure mereeft cipelſc,& dureplusque ceLafubfian.
de la Du
nulleautremembrane ,donc elle a obtenu le nom de Dure - mere : à raiſon qu'elle en re- mere cost
gendre& prodentui&t,conſerue & entretient toutes les autres.Son vçilité eſt d'enuelop: espelje a
per enticrem tout le Cerucau , & de garder qu'il ne ſoit bleſſé du Crane ,lors qu'il date.
fait ſon mouuement :qui eſt la couſtume de Nature demettre entre deux contraires Vrilité dela
vn moyen . Pource entre le Crane qui eſt dur, & le cerucau mol , elle a mis ladite mé. Durc -meneo
brane, qui eſt de ſubſtance moyenne entre les deux, & laquelle eſt ſuſpenduë & aça
C chce aux Sucures par veines,arçeres & filaments nerueux, qui entrentau Cerueau, &
en ſortent, & n'eſt adherante audit Crane ( lice n'eſt commea cſté dit)ny au Cer. Autre uits
ucau : mais y a eſpace , afin que le mouuement loit d'iceluy libre.
Dauantage elle a autre vtilité,c'etde ſeruir de conduire aux veines & arteres eſtans lié de la
Dure-mere.
entrees au Cranc , leſquelles s'inſerent en la duplicature d'icelle,faiteà la diviſion du
cerebelle & du cerueau : & ſont ainſi conduites cát d'un coſté que d'autre , par les par. Les vairo
ties laterales dudit cerebelle , iuſques à la ſommité d'iceluy. Auquel endroict icelles (feaux qui
s’vniſſent & s’infinuent dedans l'autre duplicature d'icelie Dure mere: laquelle diui entrene A8
ſele Cerueau en deux parties,àſçauoir dextre & ſeneitre. Eccelle vnion s'eilendiul
s
Crane, s'vo
ques au front, ſelon la rectitude de la future ſagitale : & a cſté nomineed’aucun Tor- niſent au
cular,autrementPreſſoir :pource que d'iceluy eft exprimé lelang quinourriſt le Cer- Torcular.
ucau par vn grand nombre de vaiſſeaux qui ſont fort manifeſtes. Finablement le der. Cul V ein e Tor
ay , #
nier vlage de la Dure -mere , eſt de diuiſer par ſa duplicature tout le Cerveau , princi
palement en deax parties,anterieure, & pofterieure. Puis apres en melnie forte elle plu
Cacsto, st
da tia
diuiſc encores le Cerueau en partie dextre, & ſeneſtre, afin qu'vne partie eſtant bleſ. nelte ,atten
D ſce,l'autre demeuraſt entiere,faiſantſon actio ,aio ſi qu'il nous eft cognou aux Paraly- du que ce
tiques. Et te ſuffiſe pour le preſent de la deſcription de la Dure mere : combien que vaiſſeau
nous pouuons noterauecques Columbus,qu'icelle membrane eſt double,commeeſt reçoir.
Dernier ya
1 declarćamplement en ſon Anatomie , ce quecertes auons trouué veritable.
La ſecondemébranedu Cerueauetnommee Piamater,ſubrile & foredelice,tiffucLage
Dure de
merela
s
de pluſieurs veines& arceres pour la vie & nourriture,& aullidu Cerueav. Ellen'en Premiere ,
ueloppe ſeulement le Cerucau come la Dure-mere,mais auſſi s'inſere dcdans les pro- appellee des
fonditez & anfra & uofitez d'iceluy, pour le lier & tenir enſemble de toute part , iuf- Grecs
ques à la capacité des ventricules auecques pluſieurs petits fibres,parleſquels eſtcon- nuis
winx.
me
iointe auecques le Cerueau : & à raiſon de la tenuité& adherece neſe peut aisément Lesmer
ſeparer. Parquoy la faut voir & conſiderer en la ſicuation, & la leuerauecques la ſub des ducere
ſtance dudic Cerueau . Oricelles raebranesquand ellesſont aftligces,cxcitentgrand font
douleur:pour lavehemēce delaquelle voudrois affermer,que lefdites mēbranes ſont comme d'amo
pluscauſedu ſentiméc, que n'eſtla propre ſubſtáce du Cerueau : aux maladies duquel ſenciment.
n'apparpiſt que petite douleur,comcon peut voir en la maladie nommee Lethargus. Leshargus.
p ij

3
166
Le cinquieſme liure
A

La Figure premiere de la Tefte, apres auoir ofté le Crane.

Mi
li
ca

a La face exterieure de la Dure- merc . b La veine Torcular. c la veine lugu.


laire interne , diſtribuee en pluſieurs & diuers rameaux . dd Certains petits camcaux
dela veine Torcular, qui vont au trauers du Crane ou Diploé, & au cuir exterieur de
la Teſte.ee. Certaines fibres produites de la Dure. mere , paſſant par la ſuture Coro
nale , & confequemment des autres ſutures pour la production du Pericrane.

C
Du Cerucau . CH A P. VI.

í ' Enſuit maintenant le Cerucau , qui eſt principe des nerfs, & du
mouuement volontaire, inſtrumēt de la premiere & principale
faculté de l'ame , c'eſt à ſçauoir, animale & raiſonnable : lequel
eſt plus grád à l'home qu’à nul autre animant,rempliſſant qua.
fi tout le Crane , le dis quali : car s'ill'euſt remply du tout , ſon
ry
mouuement n'euſt peu eitre accomply. Son temperament eſt
froid & humide. Les ſignes pour cognoiſtre que le Cerueau eſt
Les ſignes bien temperé , c'eſt lors que l'on cognoiſt les fenstát interieurs
du cerucau qu'exterieurs , faire fort bien leur deuoir & office , c'eſt à dire, quand l'hommeco
bien rem . gnoiſt & apprehende fort bien toutes choſes qui luy ſont obiectees: pareillement
peré. quand il n'eſt point trop endormy ny veillant , qu'il ratiocine & diſcourt fort bien ,
n'eſtant point opinialtre,ne lubitement muable en quelque opinion qu'il a conceuë
Signes du
( erhea " 24 & apprehendee,mais muë & change fa ſentēce, lors qu'vne meilleure raiſon ou veri- D
cunement fimilicude apparoiſt. Lors que le cerucau eſt trop chaud , c'eſt ce que nos ſens & mou
chuud,ex- uemens du corps ſont legers, & le dormir bref & peu profond :nousſommes auſſi in
cedane le conſtans d'eſprit & d'entendement , & combien qu'apprehendions & apprenions ſu
sempert., bitement & facilement , nonobſtant cela,nousſommes legers & muables en nos ap
Signes du
Cerne.1 prehenſions & opinions , & oublions ſubitement ce que nous auons apprins: auſti

froid exce les choſes chaudes vous offenlent ſubicement, commele Soleil , & eſtre prés du feu .
dantletem Ceux qui ont le Cerueau froid , ſont les plus tardifs de cous à conceuoir en l'enten
poré. dement , & apprendre les arts & diſciplines, mais en leurs opinions & aduis ils ſont
Signes du plus fermes & ftables que cous les autres . Ils ont leurs mouuemens lourds , cardifs, &
cerneau ſer pareſſeux: leur dormir peſant & profond. Ceux qui ont le Cerueau ſec, ſont auſſitar
excedane le difs à apprendre:d'autant( commenous diros ) que l'on engraue à plus grande peine,
temperé.
ce que l'on veut marquer & imprimer és corps durs ,qu'en ceux qui ſont mols. Ils ont
Del’Anatomie. 167
A qu'ilsont reccuès en leur entendement ouintelligence:ils one pareillement les mou- Signes do
uemens de leurs corps prompts & habiles.Ceux quiontle Cerucau beaucoup humi. Cerucamhuri
de,facilementapprennent les arts & ſciences, auſſi ſoudainement les oublient: car mide exce
comme vo telle ſubſtancemolle reçoit aisément les formes & images des choſes qui pedans
ré. le sē
luy font preſentees parles ſens extcricurs, ainſi facilement & roft les laiſſe couler ſans
lespouvoirretenir longuement,à cauſe de ſon humidité & molelle. Ce que l'on voic
en vnc terre molle , en laquelle on imprime promptement & aisément celles images
que l'onveut,maisauſſibien coſt fonceffacces : pource que les parties deceſteterre,
quieſtoiét diſioin& es pourfaire place à ceſte figure & image,ſont bientoft reünies & action
Cerucim .du
raſſemblees, à cauſc de ceſte moleſſe. Vn tel cerueau rend tousles ſens peſans, & les
mouuemens du corps tardifs , & ledormirlong & profond. Son action & vlage, eſt Le Cerwezo
d'elaborer l'eſprit animal neceſſaire àtout le corps ,& deſeruir commed'organe aux eft double
1

operations de laprincipale faculté de l'ame,quicît la raiſonnable.Le cerucau eſtdou .


bic,anterieur,& poſtericur,diuisé par les replis de la Duremere , comme nous auons Cerebelle. Ceruess
parcy.deuant dit. Doncques le poſterieureſtnommé Cerebelle : à raiſon de la pc

ВB. titelfe, & l'anterieur à raiſon de la grădeur,a retenu le nom du tout, à ſçauoir de Cer- dextre a
ucaulequeleſt encores double , dextre & ſeneſtre: eſtant aulli diuisé par laſeconde(enefires
Le nom de
duplicacure de la Dure-mere. Où notcras, que le nom dediulio en ce lieu icy ne doit dimifion om
eltre prinsà la rigueur,pour corale ſeparation l'vn de l'autre, mais pluſtoft cómecho- ce lien ne
ſeſelon la plus grande partie diuiſee, comme nous diſons des lobesdes poulmons & doit eftre
du Foye. Cartout ainſi qu'iceux ne ſont point totalement ſeparez & diuiſez l'vn de prins à la
l'autre, ains contenus en leur baſe: ainſi pouuons-nous dire des parţies du ccrutau, rigueur.
leſquelles comme lobes, ſont vnies en chacunc diuiſion ſur leur baſe & fondemenr: La superfi
cie exterieur
commel'anterieur cane dexcre que ſeneſtre auccques le poſtericur, au commence re du Cove
ment de la nucque ou medulle ſpinale. La ſuperficic exterieure du cerucau eſt molle, acamelmol
& l'interieure dure, calleuſe & forc vnic , au contraire de l'exterieure, laquelle eſt an - le, Glin
fra & ueuſe, & repreſentant vers entortillez les vos auec les autres en diverſes manio- rerieure des
res à l'encour deladite ſubſtance callcuſe,

C Seconde Figure, demonftrant le Cerneau à deſcouuert.


AAA La Dure -mere
incilce.
BB La cauité de la
veine Torcu
lar, delaquelle
eſt arrouſee &
nourric toute
la ſubſtáce du
ccrueau .
CC Les veines iffan
tes du Torcu.
lar , liccs & in
ſerecs par la
D
Pic . mere , par
leſquelles la
nourriture &
aliment eſt porté au cerucau . DDD La Pic-mere rcueſtant tout le cerucau ,
auecques les veipes& arteres d'icelle.
Ecquant à la ſubſtanco ſuperficielle du Ceruca u, quieſt comme vers entrelacez ou
cacorcillez enſemble, eller’eſt manifeſtee à l'ail.

piij

!
168 Le cinquiefme liure ,
A
Troiſieſme Figure, demonſtrantle Cerebellum & Vermiformis.
AA Monſtrent le Cerebellum cou
ucrt de la Pic.mere.

BBB Le Vermiformis tant anterieur


que pofterieur , dont l'ante.
rieur eſt entierement ſeparé.
CC L'endroict du Cerebellum qui
produi&t l'Eſpine medulle.

Des Ventricules du Cerueau & Apophyſes mammillaires.


CH A P. VII .
.

L'ordreana Pres ces choſes veuës & cõliderces,fautvoir les ventricules. .

tomique res Et pour ce faire eſt beſoin de couper vne bonne partie de
quiere la la ſubſtance du Cerucau , & en le coupant de contëpler vne
contempla
tiõdes Wen
reſudation de ſang qui ſort des porofitez d'icelle. Outreplus
tricales du faut auſſi conſiderer la ſubſtáce ſpongieuſe en laquelle fonc
cerAl44 .
contenus les excremés , qui puis apres ſont expurgez par La
cuna ou Colatoire . Ce faict , trouueras dedans la ſubſtance
d'iceluy tant anterieur que pofterieur, quatre vērricules ou
08
concauitez cõioin &tes enſemble par certaines voyes,parleſ
colatoire. " quelies les eſputs informez parles eſpeces ſenſibles & intelligibles, peuuent paſſer &
Quatrevě. comuniquer.Iyn à l'autre. Doncques les deux premiers& plus grāds ſont mis & col
tricules. loquez au Cerueau anterieur,vn de chacun coſté,letiers ſous iceux ,tout au milieu du
Cerucau.Le quart & dernier eſt ſur la deſcére dela nucque,lequelon attribuë totale- G
ment au cerebelle ou petit Cerveau,pource qu'ó dit que la nucque ſemble plus pren
dre dudit cerebello que du Cerueau.Or quant aux deux ventricules premiers & an
terieurs, ils ſont couchez & eftédus tout le long du Cerueau en forme de deux Croiſ
Ventricules ſans les cornes deſquels regardent vers le dehors : iceux ſont fort grands & ſpacieux,
Anieriemi's . pource qu'il falloir que l'eſprit eſtát encore auec tous ſes excremens fuſt là elaboré, &
repurgé d'iceux.Aumoye dequoy telle grandeur leur aeſté baillec plus qu'aux autres
vécricules,où l'eſprit eſt defiareceu,& en tour elaboré & quaſi parfaict.Lefdits vētri
cules sõi fort blács, vnis & polis en leur ſuperficie & face interieure,horſmisqu'ils ont
ſur le milieu du Croiſſant vne excuberance tant d'un coſté que d'autre , couchec ſur
la baſe de la Colomne du vétricule moyen ,tendant vers le nez ſous leSeptú lucidum,
lequel diuiſe & fepare les deux premiers vécricules. Ledit Septum lucidú n'eſt autre
Septum lu- chole qu'vnc partic du Cerucau mediocremét ſolide, toutesfois tranſparante & luci
cidum.et de :au moyé dequoy les eſprits animaux des ventricules anterieurs comuniquert en D
une par:ie ſemble : & combien que ledit Septum ſoit aſſez ſubtil & tranſparant, neanimoins il
du ceruesh eſt fort denſe,veu que l'eau contenuë dans l'un des ventricules,nepeut au travers d’i
lacido celuy paſſer dedans l'autre ,ainſiquei'ay ſouuét obſeruć, & non ſans grande admira
tranſpară. tion, en l'ouuerturedes gensmores de paralyſie,auſquels i'ay trouué le ventricule du
coſté de la paralyſie, dilaté & eſlargy de la quantitéd'eau en iceluy contenuë , cóbien
qu'en l'autre n'y en euſt point , ou nõdavantagepour le moins que l'on en trouue à
ceux qui ne meurent de paralyſie. Toutesfois aucuns ont voulu dire qu'on trouue
La canle de
touſiours certaine aquoficé dans les vētricules , qui ſe fait par la concretion des vapo.
Селя , qu'onreux eſprits animaux ,faite par la froidure qui viét quant & quant la mort.Davantage
trouve aux ilfaut entendre que ces deux ventricules ſe terminent en vn comun conduit,comme
ventricules deux ſoufflets de forge, par lequel l'eſprit deſdiâsventricules anterieurs informé
ducerneau. des eſpeces, eſt porté au moyen ventricule. Outre plus il faut conſiderer eſdiêts
ventricules un corps nommé Plexus choroides: auſſi le conduit ou voye, par laquelle
les excremens gros & limóneux ſe purgent par la glande picuitaire ou colacoire.Orle
De l’Anatomie. 169
А Plexuschoroides n'eſt autre choſe qu'vne epiphyſe de laPie mere illec enuoyee,farcy &
cilludeveines& arteres differétesdes autres, entortilleesen forme de recs enſemble, Plexus
qu'elle aen toute la circóferencedu cerucau,ſeulementen quátité ,& toutesfois ſuffi- choroides
lante,các pourſa propre nourriture & vic, quepour la generació deselprits animaux, eft vneepi
lelquelsprennétde tels vaiſſeaux produitsaudit Plexus choroides:de l'artere poſtericu-phyſe dela
re & veine Torculaire,matiere idoinc & propro , ſoit qu'elle ſoit vaporeuſeou autre, Pie-mete.
commeaullide l'air par les apophyſes mammillaires,qui lonc voyes comunes tant à
luyqu'aux odeurs&excremens fuperflus: veu que l'abondáce dematierecrop craſſe
& viſqueuſe empeſche l'air,& les odeurs deparuenir au Cerueau , comme l'on voidà
ceux qui ſont catharreux, & enrhumez:àcauſe dequoy s'enſuiuenc douleurs de teſte ,
& eſternument, lors que la faculte'animale cxpulcriceeſt forte, & la matiere n'eſt pas Deux fora
trop craſſe & viſqueuſe.Et quant aux excremens du Cerucau ,leſquelsluy ſon appor tes d'excre
tez parles veines& arceres,ou autrement , les vnsſont rares & aëreux ,leſquels s'eua mens AN
porene inſenſiblement par les ſutures du Crane,ainſiqu'auons dit parlans des vtilitez COTHSAN .
d'icelles:les autres ſont cras & viſqueux, leſquels ſontcuacuez des ventricules par les
fuldies procez mámillaires (ſelon l'opinion de Galien d'vn coſté & d'autre,enſemble,
B
ouàpart.Erpartant les vns diſent auoir vne narine bouchee ſculement ,quand la ma. Opinions
de Galien .
ricre ou excrementmorueux deſcend ſeulement par vne de ces apophyſes : les aucres
couces deux ,quand elles ne diſtillent ny de l'vneny de l'autre .L'vcilité parciculiere &
L'viilité
principale d'iceux vencricules ,eſt de loger la faculté imaginariue & eſtimatiue, lors des deux
qu'ileſtqueſtion quel'ameparicelle examine toute & chacune piece illec rapportee ventricu ,
parlesſens exterieurs,les conferant enſemble , & mettát par ordre pour en auoit vray lesante
& iuſte iugement de la faculté raiſonnable, laquelle tient ſon cõſiſtoire au ventricule rienos.
moyen.Leciersventricule,quieſt le moyen ,eſt ſituéentre l'extremite poſterieure des
deux ventricules anterieurs,& le ventricule poſterieur.Maisauant que faire mention Tiers vena
du quare & dernierventricule ,il faut conſiderer les fix parties qui s'enfuiuent, à ſça- setricule , ,
ſituation
uoir le Plalloide,le Conariõ ,le corps nommé Natés ,l'apophyſe Vermiformis,le Pel.
uis & le conduit paſſant & tranſuerſant de ce ventricule au dernier. Or quant au pre : Pſalloïde
micr nomméPſalloïde ou Fornix , ce n'eſt autre choſe que le tect ou couuerture du ou Fornix,
ſuſdit moyen ventricule, lequel repreſente vne vouce ſituee ſur trois pilliers , dont youre on
l'vn s'eſtend iuſques pres le nez ſous le Septum lucidum : les deux autres vers les par berceau ,
ties poſterieures du cerueau ,yn de chacun coſté.
La caule de celle figure,quieſt par dehors boſſuë, & par dedás creuſe,a eſté afin qu'il
i
ypuiſſe auoirlibre eſpace & aiſce pour le mouuement que fait leans l'eſprit animal, &
auſſiqu'il peult micux ſouſtenir & porcer la gráde quácité du cerucau,qui eſt appuyé
& miscant d'vn coſté que d'autre: cartelle figure ou vouſte ſouſtientplusgrandfaix
que toute autre. Quant au ſecond c'eſt vne petite glandule de la meſme ſubſtance du
cerucau,ronde& oblógue en forme d'une pomme dePin ,àcauſe dequoy a eſténom .
mec Conarium : laquelle eſt ſituee vis-à -vis du petic trou qui deſcend au dernier ven. Conarium .
tricule,eſtantattachee aux partieslaterales d'iceluy,& parcie baffe par continuatio de l'utilisé
D ſubſtance de ladite glandule & du cerueau.Son vcilité eſt de renforcer la diuiſion des du Cona,
Vaiſſeaux illeccõduits auec vne apophyſe de la Pie mere,pourla generació de l'eſprit vium .
animal, & donner vie & nourritureau cerueau.Leciers ,que nousauos appelléGlou
tiaouNatés,eſtun corpsde ſubſtáce fort ſolide & tres-bläche , mis par ſousla ſufdice
glandule,lequel eſtainſiappellé ,à cauſequ'il repreſentedeux petites feſſes d'enfant, N.ates on
toutesfoismieuxdesbeſtesquedeshommes,& encores mieuxdu mouton, quenulfelfesde
autrcanimal. Ec a eſté fait ainſi ſolide,àfin qu'ilſupporcalt d'auácage le trou quenous
ayons dit deſcendre de cedic ventricule au poſterieur,par le moyen duquelle cerueau
eſtconioineauec leCerebelle.Le quatrieſmeeſtvne apophyſe dudicCerebelle & por
tion d'iceluy la plus haute, fai & c comme pluſieurs pieces circulaires ,ou reüelles ioin
tes enſemble par petites mēbranes:laquelle pour la ſimilitude qu'elle a auec ces gros
vers blancsquel'ontrouue au boispourry,aeſté appellee Vermiformis,cóme quidi- Vermifor.
roit Ver ſemblanc.Son veilitéeſt deferuir audit conduit comme de portier,lequelen mis, ode
temps& licu laiſſe paſſer les eſprits,tantqu'ilen eſt beſoiauvécricule
n poſterieur: de ſon vilité.
peur que s'ils y paſfoienttrop ſubics,ilsne fiflene confuſion deschoſes memorables :&
partant aeſtéſituéſur le commencement duCerebelle, pourclorre & ouurir ledic co
duir.Quantau cinquieſme ,c'eſt le conduit à cuacuer les excremensgros & cras par Choana.
lepalais, lequel pourla figureeſt appellé Choanaou Peluis,pourcequ'ila ſemblance Peluis.
Piij
170 Le cinquieſme liure ,
d'un petitballin ,oubien d'yn entonnoir,pourſon vlage:& amſi pource qu'vn encon А
noir de la parcie ſuperieure eſt large,deſcendant touſiours en apetiſſant, auflice con
Caphophy- duit eſt ainſi fait.Ildeſcenddepuis lefuſdicventricule iuſquesàla glandule fituce en
Clinoïdes. tre les apophyſes Clinoïdes,cõme cu pourras veoir à l'ail : coduiſant d'en hauten bas
quelquc verge ou quelque ſpatule bien delice & mince , poſee dedans le creux dudic
conduir. Reſte le ſixielme & dernierdes choſes propoſees, qui eſt le condait paſſant
de ce ventricule au dernier,poureſtre le canal del'eſprit ,& des concluſions priſes au
moyen ventricule,au poſtericur,comme en vn liure deregiſtres,ou dedas vn threlor,
duquel on les puiſſerepeter & prendre en cas de necelice. Or cedit conduit deſcend
de ſon origine,auec le Peluis,puis bią coſt apres le laiſſant,s'en va pardeſſus Nacés au
Philofo dernier ventricule àceſte cauſe pour le monſtrer, faut căduire la queuë d'vne ſpatule
phie iman toutau lög d'iceluy iuſques au ventricule poſterieur, lequel cu trouueras par cemoyé
ginatinc. deſchirant leditconduic, & diuiſant parmyNacés. L'vtilité & vſage du ventricule
moyen ,elt de ſeruir comme de tribunal & cõhiſtoire à la faculté raiſonnable, lors que
Quatrida l'ame paricelleveut fairelesiugemens,& prendre les concluſionsdeschoſesàloy
me ventri
cule. preſentces par l'imaginatiue,eſtimatiue, ou fantaſie. Le quart & dernier ventricule 1

cſtſitué( commea eſté di& en la conjonction du cerueau anterieur & pofterieur ) ſur
la deſcente de lanucque,lequelon attribuë totalement au Cerebelle , pource que la B
1

ſuſdite nucque ſemble plus proceder d'iceluy que du cerucau. Ileſ entre tous le plus L

pecit,& aufli plus ſolide:Plus petit,pour ce qu'il n'auoir à reccuoir que l'eſprit parfai
Vilité des tementelaboré:& pource moindre en quantité:plus dur & plus ſolide, pour le mieux
guarrieſme & plusſcurementcontenir. L'yſage & vtilitéd'iceluycft de garder & cóſeruer ce qui
Jenericol. aura eſté cõclud & deliberé de l'eſprit,à fin que toutes les fois que la perſonne ſe vou
La memoi- dra ayder des concluſionspriſes avparauant,ou des choles notables qu'elleaura vou
refle lu recenir,elle puiſfe tirer de la commed'vn chrelor, ce dont il ſera beſoin en temps &
ebrelor de licu :ce quiſera declarécy-apres plus amplement au livre dela Generation.le ſçay bić
gardienne queGalien & lesMedecinsGrecs n'ont point mis les troisfacultczſuſdites endiuers
licux,mais ontvoulu que toutes trois ſoient en toute laſubſtance du cerucau,comme
de ce qu'on
epprend. meſme a diſputémonlicur Fernel en laPhyſiologic :mais i'ay luiuy la plus communo
opinion des Arabes, comme la plus facile.
Les inſtrumens & conduits de la faculté odoratiue(que nous appellons Apophyſes
Upoply., mammillaires
fesmammil
)ſont certaines produ & ions ou auancemonsde la meſme ſubſtance du
laites. cerucau,faiếtesen forme de nerf,leſquelles deſcendét des cornes poftericures des vé С
cricules anterieures,& aux os nommcz Ethmoïdes,ſpongieux ,cribleux,ou colacoires
du nez,afin que par icelles la faculté odoratiue porcee par l'eſprit conuenable à ce fai
Veilité des re,puiſſe prendre& receuoir les eſpeces des odeurs, & d'illecconduire icelles iuſques
spopbyſes ventricules,ainſi qu'ilaçſté neceſſaire pour le iugement qu'il faut qu'elles reçoi
mammil . aux
laires. uent de la faculté raiſonnable,ſçauoir eſt deboncé ou malignité, ou mediocrité des
deux.Orne ſont-elles point appellees nerfs, iaçoit qu'elles en ayent la forme, pource
qu'elles ne ſorte point hors du Crane.
Quatriemefiguredu Ceruchu.
AAA La ſubſtance calleuſe du
cerucau .
TUMAI

BBB B Les anfractuoſicez du cer


Исаи .

CC Les cauitez des deux ven.


tricules anterieurs.
&

А
DD Les PlexusChoroïdés.
B EE La figure exterieure du
Fournix .

F La partie ſuperieure duSc


ptum lucidum ,feparant
Wir
e
WO
TE
a ics deux ventricules an
tcricurs.
umma - AATHU
de l’Anatomie. 171
A
Lacinquieſme Figure.

W
AA Monftrent le fornix ren.

G
uerſt du deuant au der
riere , & couure le cicrs
ventricule .
BB Le PlexusChoroides.

с L'endroit de la glandule
nommee Conarium .
A
DD Certains vaiſſeaux produits
B
de la partie anterieure
B du Plexus Choroïdés.
+

UNISI

La fixiefmefigure.
A A Monſtrent les portions du Cerueau qui produiſent
l'Elpine medulle.
B Leconduit qui defcend du tiers ventricule au qua
trieſme , par deſſous les deux corps nommez
Gloucia ou Natés .
С Le quatrielme ventricule.
D Le Conarium .
EE Les corps nommez Glouria ou Natés.
FF Lecommencementdel'Eſpine medulle.
H
G La cauité de l'Eſpinc niedulle.
H Le commencement de l'Eſpine medulle ſortant
hors du Crane.

Deſept coniugaiſonss,paires
, ou couples de nerfs du Cerueauainſi appellez pource qu'ils
ſonttous
joursdeuxà deux : ſçauoir eſtl'undu dextre coſté, & l'autre du
coſtéjeneſtre. CHA P. VIII.

D Es nerfs ſont les voyes & inſtruments ou organes del'eſprit animal,


& des faculcezportees par iccux : & ſont faictsd'une partie limple
au dedans du cerucau , ou de la Spinale medulle , mais fortis hors
tant de l'vn que de l'autre. Ils ſont faits & compoſez parla rcue Sepe coniga
ſture ou couuerture des membranes du cerucau , & d'vne cierce paguifo ns ou
ires de
( ſelon aucuns Anatomiſtes )venans des ligamens , tanc ceux qui nerfs.
licne les vertebres,qu'autres. Laquelle choſe, ſaufmeillicur iugemene , me ſem
ble eſtreimpertinente, veu qu'icelle membrane eſt totalementcontraire ,comme
inſenâble au nerf, qui eſt de bailler ſentiment & mouuement. Leur ſubſtance &
portion contcnuë encores dans le cerucau , n'eſt en rien differente de la ſubſtance
d'iceluy quant en conſiſtence & ſolidité : mais leur quantité eſt diuerſe pour la plus Quan tité.
Figure .
grande ou plus petite neceſſité de la partie où ils font inſerez. Lcur figure eſt ronde cöpofirion .
en forme d'un canal ou cuyau . Leur compoſition.cſt dcdans lc Crancde la ſimple
ſubſtance calleuſe du cerucau : & paſſans au trauers des trous du Cranc, les membra
nes ducerucau ſe percent y qauans destrous , nonqui les pertuiſent d'outre en outre ,
maiss’elargiſſent en figured'vne fluſte, come il ſe fait auprocez du Pecitoinc qui va

i
172 Le cinquieſme liure
aux teſticules,que nous diſons eſtre comme la voye d'vn gant , tellement qu'ils ſont A
reueſtus de la Dure & Pie. mere.Ils ſont nourris & viuifiez ,ou par les veines & arteres
Vtilisé capillaires ,qui deſcendent en iceux auec leſditesmembranes ou par avtres conduits
imperceptibles exterieuremét en iceux.Ilsſont faicts pour dóner ſentimét aux mem
bres capables de ſentir,mouuemétaux mobiles,& cognoiſſance de ce qui eſt nuiſible.
Ecoutre que les nerfs donnenc ſentiment à toutesles partiesdu corps,Natureadon
né vn ſentiment ſpecialà ceux qui doiuent ſeruir à la vertu & faculté d'un chacun des
ſens corporels que les autres n'ont point.Exemple:Des nerfs optiques pour ſeruirà la
vertu viſuelle:ceux du nez pour odorer , ceux de la langue pour gouſter, & ceux de la
main pour le tact,comme nous deduironscy -aprcs, le toutpar la grande prouidence
de Dieu.Et quant au nombre principal,lequel mediatement ou immediatement ſore
Trente fepe du cerueau,ileſt de trence ſept paires:dont ilyen a lept ou hui& quiſortét immedia
paires de
Herfs.
tement du cerucau ,& les trente par lemoyen de la Ipinale medulle,comme tu enten.
dras tant en ce liureicy qu’au liure ſubſequent:car à ceſte heure nous parleronsſeule .
ment de ceux qui immediacemene viennent du cerucau , & au liure ſubſequent de B
Premiere
ceux qui viennent de la Spinale medulle.
coningsi La premiere paire des nerfs du cerueau eſt plus groſſe que toutes les autres,laquelle
fon. va aux yeux,pourillec bailler voye & paſſage à l'eſprit viſuel: & toutesfois avant que
ſortir hors du Crane,ils s'inſerent enſemble en forine de fer de moulin ,faiſans& con
ftituans de leurs cauicez non apparentes à l'ail,vn comun conduit, par lequel l'eſprit
apporté par ſes deux nerfs, le communique del'vn à l'autre. Ec qu'il ſoitainſi,celle
Pourquoy chore nous eſt bien demonſtree cant par les hacquebutiers qu’abaleſtriers , qu'autres
les borgnes ayans perdu l'un des yeux, ou bien clos, qui voyene plus ſubcilement & plusloing de
viſene
VIICHX , l'æil quidemeure ouuert, quenon pas desdeux enſemble :ce qui nele feroit,fil'eſpric
qui eſtoic porté à l'ail clos & bouché,ne paſſoit à l'autre. Et la cauſe de celle ſubtilicé
de veuë par vn cil , eſt la plus grande vnion dela vertu viſue, qui eſt en plus grande
quantité de l’eſpit viſuel,ainli quenous enſeigner lesPhiloſophes, quidiſent, quela
vertu ynie eſt plus grandeque la diſperſee. Oricelle coniugailon eſtác venuë iuſques
à l'humeurvitreux del’æil, ſe conſomme enla ſtructure& compoſició de la cunique
Amphibli d'iceluy,nómee en Grec Amphibliſtroïde,ouReciforme,laquelle reueſt parderriere, c
proide, Re & nourriſt cet humeur vitreux , ainſi qu'il ce ſera demonſtré en la diſſection de l'ail.
tiforme. Or que le nerfOptiqueaye cauité manifeſte, cela ne peut eſtre exactement cogneu:
Gal. lin.8. car la ſituation & figure des parties neſe peuuent cognoiſtre parfaitemér lors que l'a
chap. 8.denimal eſtmort,parce quel'ameen eſt hors : & par ce moyen eſteuacué grandequan
Pufuge destité d'eſprit, & vapeurs : Ioint que la chaleur naturelle eſteſteinte, & leshumeursqui
pair.
1

Is ſeconde . cſtoienten la partie,ſont comme congelez ,& pris du froid. La ſecõde conjugaiſon ſe
diuiſe en portions ſur l'iſſuëdu Crane: & à la racine de l'orbite rediſtribuë auxſepc
muſcles de l'æil pour faire les mouuemens d'iceluy.La tierce eſt double,& en forcano
La rierce. pareillement hors duCrane,ſe diuiſeen pluſieurs rameaux dontles vns s'en vont aux
muſcles téporaux, & aux maſticatoires, & au cuir de la face du fronc, & parties du nez 1
qui ſont capables de ſentir.Les autres rameaux vont à la mádibule ſuperieure & par.
Lesos de la tiesappartenátes à icelles:comme aux dents,genciues,& aux muſcles de fa léure.Les
face font troiſieſmes branches ietcans ramcalix tant d'un coſté que d'autre,vonc à la mádibule
periuifex
döner infericure, & partie d'icelle comme aulli aux dents,genciues,& muſcles de ſaléure,& D
pour
papuga
aux ronds:leſquels circonſcriuent interieurement les parties laterales de labouche,
aux nerfs comme ilte ſera cy apres declaré en ſon licu.Les derniersrámcauxs'inſerét & perdéc
1 de la troi en la tunique de la langue, pour la rendre apre à diſcerner des faueurs: au moyen de
fieſine quoy Galien les appelle Guſtarifs.La quatricſme coniugaiſon & plus petite ſe perd,
coniugaiſori & conſomme preſque coute en la cunique du palais,la rendant apte auſſi à iuger auec
Lo qua- ques la langue,desſaucurs. La cinquieſme eſtdouble,& a ſon origine dans le Cranc,
trieſme. & enuoye la plus grande portion au trou del’oreille , pourbailler paſſage à la faculté
La cin
guieſme.
auditiue,faite par la rouerberation de l'air,de laquelle ſontfaits les ſons.L'autre por
tion plus petite va aux muſcles Téporaux par letrou prochain,duquel ſortle nerfde
la ſeconde coniugaiſon.La fixieſmc apresles Optiques plus grande,eſtantſorcie hors
Lafixieſmedu Cranetoute entiere, baille certains petits ramcauxà aucuns muſcles du col, & du
erher role Larynx: puis deſcend dansle Thorax ,& fait lesnerfsRccurrensou Reüerſifs,puis
La Septieſ deſcendent en toutes les parcies des deux ventres infericurs, iuſques à laVellie & aux
Teſticules,ainſique cu as entédu au premier liure. La ſeptieſme cóiugaiſon ſe perd &
De l’Anatomie. 173
A s'inſereaux muſcles de l'osHyoïdc & de la langue,& en aucunsduLarynx,pour faire
le mouuement d'iceux,& ſort hors le Crane par le crou de l’os Occiput pres des emi.
nences d'iceluy : tous leſquels te ſeront demonſtrez par ceſte figure.
Figureſeptie[me,qui eſtdes huict coniugaiſonsdes nerfsdu cerueau .
AAA Monſtrent la face exce .
rieure du cerueau, qui
eſt come vers entrela
H
cez enſemble.
BB La face exterieure du
Cerebellum.
CC Les inſtruments de l'o
dorat .
D Leprincipe ou racipe de
B l'Elpine medullo , cõ.
tenát en partie le qua
rrieſme ventricule .
Α.
E La ſpinale medulle ſor
‫اوری‬ tant hors le Cranc,cõ.
mençant à deſcendre
aux vertebres.
1 FF Les nerfs optiques , qui
ſont les premieres
res .
G La conionction derdits
nerfs qui eſt en formo
de fer de moulin .

C
HH Les tuniques de l'oeil, nommees Amphibliſtroïdes, faictes des nerfs Opti,
ques.
II Laſeconde paire des nerfs mouuans les yeux.
KK Latroiſieſme paire des nerfs qui s'en va au palais.
pres.
LL Laquatrieſmepaire desnerfs qui ſediſtribuéc,ainſi qu'il ſera monſtré cy apres.
MM La cinquieſme quis'en va aux oreilles, où en lon extremicé ſe dilate , & faict
membrane du Cæcum foramen , laquelle c'eſt monſtree par OO.
NN La ſixieſmepaire , laquelle deſcendcomme ilte ſera cy.apres monſtré.
00 Leſquels ſont ſous les NN.monftrent la ſeptieſme paire, laquelle s'en va à la
langue pour le movuement d'icelle .
DPP La huidicſme paire,delaiflcc desanciens Anatomiſtes.
174 Le cinquieſme liure ,
Huittieſme Figure.
AAA Montrent la face exterieure
du cerucau delnuec de les
membranes.
B La face du Cerebellum .
С Vn des inſtrumés de l'odorat. .

D L'un des procez mámillaires. 4

E L'vn des nerfs Optiques.


F L'un des nerfs de la ſecondo
paire.
G Vne portió de la tierce coniu.
gaiſon , de laquelle vn ra
meau va au front marqué
par(i)d'ouvne portió va à la
mébrane du nez , marquce
12 par( 2 )& vne autre portion B
va à la mádibule ſuperieure 1

marquee par ( 3 ) vne autre


portion va au muſcle Tem
poral, marqué par 4 .
H Monſtre la plus grande portio
de la tierce paire,dõi lapre 1

miereramification, quit’eſt
marquee par ( s )va aux décs
& aux genciues de la mādi.
bule ſuperieure. L'autre
TOOTH

qui c'eſt marquee par (6 )s*ć


va à la mandibule inferieu
re : duquel vnc portion qui
t'eſt marquee par (7 )s'en va
à la léure inferieure . Ec le .

С
reſte qui c'eſt marqué par
( 8 ) s'en va perdre en la tunique de la langue. .

I Monſtre la quatrieſme paire des nerfs, laquelle s'en va perdre à la Tuniquedu


palais,qui c'eſt marquee par 9 .
K Monitre le plus petit nerf du cerveau , lequel ( laiſſe des anciens Anatomiſtes)
s'en va aux muſcles mouuans la mandibule inferieure: ſon origine eſt coute
prochaine du nerf auditif, laquelle auons marquee en la figure des nerfs
pour la huictielmc pairc.
L Montre la cinquicſmepairedesnerfs, laquelle ſe diviſe en trois portions , dont
la plus grande marquee par ( 10 ) fait la cunique de l'ouye. Les deux autres
plus petites,quite ſont marquces par(11)& (12) vontau muſcle Téporal aucc
ques vne portion de la troiſieſmepaire, laquelle eſt faicte en maniere de ca
preoles de vigne,ainſi que tu peux vcoir en le figure & trait dudit nerf. D
MM Montrent les nerfs de la fixieſme pairc,leſquels ſe diſtribuent ainſi que s'enſuit.
Premierement,ils enuoyét leur premier Rameauaux muſcles poſterieurs du
col, quic’eſt marquee par (13).Secondement,ils enuoyét vne autre portion à
aucuns muſcles du Larynx, quit’eſtmarquee par(14 ).Tiercemét,ils ſe redui.
fent en deux rameaux,dõtľvn deſcéd lélög dela racine des coſtes interieu
rement , le mellăc auec les nerfs Intercoſtauxpar certaines pecites produ & ios
marquees par( YY)qui ſortent de l'eſpine medullaire, pour aller aux muſcles
Intercoſtaux,quic’eſt marquce par(ss) : l'autre portion quit'eſt marquec par
(16)deſcend à l'eſtomach, & fe diuiſe ainſique s'enſuit.Premieremất,ils ren
uoyent deux petits rameaux aux muſcles, qui montene du Thorax,& Claui
cules vers le Larynx,quiteſont marquees par(17):puis fait le nerfs Recurrés,
quit'eſt marquépar ( 18 ) du coſté droit: car du coſté gauche il eſt apres la
diſtribucion
1
de l'Anatomie . 175
А diſtribution quis'enſuit : ſçauoir eſt, aux Poulmons , & au Pericarde: dona
ceux des Poulmons ce ſont marquez par ( 19), & ceux du Pericarde par (20) &
le reſte va à l'orifice ſuperieur du Ventricule , & en tout ſon corps.
NN Monſtrent la feprieſme paire des nerfs, laquelle ſc diuiſe comme il s'enſuit:
par(21):
Premierement aux muſcles ſorcans de l'os Styloide ou claual,marqué
Secondement aux muſcles de la langue , & à ceux de l'os Hyoïde,& en aucuns
du Larinx, quice ſontmarquez par (22 ): Ledemeurant le melle auecla fixieſ
me paire, comme tu vois par (23.)
! O Monſtre vneportion de la Spinale medulle, iſſuë hors le Crane. 1

:
D# Rets admirable do glandule Bafilaire. CHAP IX.

R de l'eſprit Vital eſt fai& l'eſprit animal, enuoyé du cấur par les arte. Dequos,con
res Carotides internes au cerucau , pource qu'il eſtoic requis qu'il fuſt resprit ani
В mieux cuit & digerć , d'autant que l'a&tion animale eſt plusnoble que la ma.
Si vitale. Et pourtant Nature a produiet & baſty vne diuiſion d'artcres
en petits filets entrelacez enſemble en diuerſe forme, paſſant l'vn par deſſus l'autre,
parpluſieurs fois le coupant & diuifanc maintenant envne ſorte, maintenant en au
tre,auec pluſieurs circonuolutions , & cntorcilleures comme vn petit labyrinthe ,
faiſant vne merueilleuſe texture en maniere d'vn filer ou rets. Et pour celte cauſea Rats admi
eſté appellé des anciens rets admirable: & a eſté ainſi fait , afin que l'eſprit y fiſt plus cable.
longue demeure , pour illec eſtre mieux agité & elaboré, ſubciliſé & misen excréme
perfe&tion: ce quefait l'animal prompt & idoineà rendre les fonctions & actions ia
declarees de la faculté animale : laquelle auſſi a obtenu de Nature les inſtrumens plus
parfaids, d'autant qu'elleexcede la vitale. Or eſt ledit rees double , ſitué aux parties
laterales des apophyſes Clinoïdes , diuisé & ſeparé par la glandule colatoire ,laquelle
eſtmiſeau milicu deſdites apophyſes Clinoïdes ſous la Dure-mere, auſquelles il y a
certains petitstrous ſpongieux , par leſquels paſſe & tranſcoulc la picureexcremen
C reuſe & ſubtile, quideſcend du moyen ventricule, par le conduit appellé Peluis ou paritta la
Lacuna , pour puis apres eſtre iettee par les deux trous lateraux de l'os Baſilaire du piruite des
.
palais, & delà expurgétantparlenez quepar le palais: dontie penſe que la ſaliue eſt cerucam
faite en partic: atcendu que teuxqui ont locerucau humide, abondenc en icelle, la s'expurge.
iettant quaſi continuellement par la bouche. Les apophyſes Clinoïdes, ſont certai. Lacuna
Pelwis. .
nes productions d'os faites intericurement de l'os Balilaire, entre leſquelsladiteglá. Definition
dule Colatoire cft ſicucc aucc vne portion du rets admirable. Quant à ceſte partie, il des apophy's
yagrande diſſenſion entre lesAnatomiſtes: Veſalius nie qu'elle ſetrouue aux hom .ſes clinoia
mes:Columbus l'admet,mais il ſemble qu'il la confonde auec le Plexos choroïdes : dedes.
ma part,ie l'ay touſiours veuë au licu & en la façon quc iclay deſcrice , comme Syl
uiusadiſpucé contre Veſalius. Toutes cesparcies demonſtrees,reſtera ſculement le
Crane , duquel iete conteray les trous ,à raiſon qu'ils profitent grandement à enten
drcoù vontlesvcincs, arteres , & nerfs.

Newfie ſme figure du Rets admirable .


D
AA Monſtrent les artcers Carotides qui entrent en la teſte
par les coſtez des apophyſes Clinoides, leſquelles s'en.
trelacent enſemble , puis ſe reüniſſent toutes à CC
pour aller par toute laſubſtance du Cerucau, & au Plc
xus Choroïde.
D Monſtre la glandule Baſilaire reccuant le conduir du
Peluis , par laquellcellc reçoit la pituite du moyen ven
tricule .

9
1
170 Le cinquieſme liure ,
Des trous de la baſe interne du Crane. C H 4 P. 3 ,' .

ES premiers ſont les Ethmoïdes. Les deuxieſmes, ceux des nerfs


Opriques. Les troiſielmes, des nerfs motifs de l'ail, & d'aucunes


portions de la tierce paire. Les quatrieſmes ſont pour vne partie de
la quatrieſme paire des nerfs, qui va aux muſcles Crocaphites , ou
des Temples. Les cinquieſmes ſont pour la tranſcolation de l'hu.
meur aqueux & lubril , deſcendanc du moyen ventricule du cerueau
au palais,faisát l'humiditéValiuale:& font quali inſenſibles à l'ail, leſquelsſont ſituez
ſous la glandule colatoire, entre les apophyſes Clinoïdes.Le fixieſmeeſten l'os Sphe.
noïde,cuneïformeou Baſilaire, pour donner entrec aux arceres Carotides internes,
faiſantles rets admirables , s'en allant rendre dedans la grande creuaſſe ou fente. Le
ſeptieſmeeſt double le plus ſouvent, pour donner entree à vn rameau de la lugulai
reincerne . Le huiĉielme eſt oblong en forme ouale,par lequelſorc vne partie de la
troiſieſmepaire,& toute la quarrieſme paire des nerfs. Le neufiefme fait ceux de
l'ouye. Les dixieſmes ſont fort petits, & baillent paſſage à vne veine & artere pour B
aller au conduit de l'oreille , ſiguez au deſſus du trou du Cæcum . Les onzielmes ſont
les deſchirez, quidonnene iſſuë à la fixieſme paire des nerfs à vne partie de la Caroti
de, & à vn rameau de la lugulaire interne. Le douzieſme, pourdonner iſſuë à la ſe
prieſme paire. Letreizieime, eſt legrand trou de l'Occiput pour donner iſſuë'à la
nucquc. Le quatorzieſme , eſt celuy qui eſt le plus ſouuent derriere ce grand crou,
par lequel entrent les arteres & veinesceruicales.

I)yHf
//
/
Des trous de la baſe externe du Crane. C H 4 P. x 1.

VX ſourcils y a vn trou de chacun coſté, par lequel paſſe vn pecic nerf


de la tierce coniugaiſon , ſortant de la cauité de l'orbice , pasſant à tra
uers de l'os du front, à l'endroiât du ſourcil , pour donner mouuement
aux deux muſcles du ſourcil ſuperieur, & au front: mais le plus ſouuent le
trou neſe trouue qu'en vn coſté, quelquesfoisvne fente, quelques-foisdutout point.C
Le ſecond , eft celuy du grand Canthus, par lequel deſcendvne portion de la troi.
fielme conjugaiſon des nerfs à la tunique dunez ,dans lequel eſt ſituee la gladule La
chrymale. Le troiſielme eſt ſitué au deſſous de l'ail pour la deſcente d'une autre
portion de la croiſieſme paire, pour aller aux parties de la face,& aux dents de lamen
dibule ſuperieure. Le quatrielınceſtau commencementdu palais , entre lesdents
inciſiues, parlequel paſſe quelquepetite veine & artere, & la cunique du Palais. Les
cinquielmes ſone contenus dans les os du palais, par leſquelsdeſcendent les nerfs de
la quarrieſme coniugaiſon, pour faire le gouſt. Les ſixiełmes ſont les grands trous du
palais,ſeruansà la reſpiration, & pour vuider le phlegmetombant du cerveau par de
dans le nez . Reſtevne fendaſſelous le Zigoma montansdansl'orbite , par où paffent
tant les nerfs de la troiſieſme paire aux muſcles Crotaphites, qu'aucunes veines &
arteres. Plus vn autre ſitué entre l'apophyſe Maſtoïde, lequeline paſſe outre ſenſi
blement. Dauantage vn autre qui eſt à la racine poſterioure de l'apophyſe Ma
ſtoïde, appellé d'aucunsprocez mammillaire, par lequel vn petit rameau dela veine D
Iugulaire va dedans le Torcular. Quant eſtdunombre de ces trous, quelquesfoistu
en trouueras plus,autres.fois moins:Leſquels ſeruent de quatre choſes :la premiere, à
donner iſſuë aux nerfs, la ſeconde à reccuoir les veines & arteres,la troiſiełme à don
ner entree à l'obiect prochain de l'ouye & du flairer, la quatrieſme à vuider les excre
mens du cerueau ,

De l'Epine Medullaire. CH AP . XII.

Origine de ainſi que


Motos A moüelle ſpinale eſt comme vn ruiſſeau coulant du cerueau , ainſi
la moü : 2 . d'vne fontaine , laquelle enuoye par toutes lesparties d'entour d'elle, qui
del'espme. ſont ſouslateſte des nerfs pour leur bailler ſentiment & mouuement , les
ramifiant ainſi qu'un tronc d'arbre en pluſieurs branches , qui ſont au n'ombre de
trente de chacun coſté, que deſcrirons cy apres, Icelle eſt enucloppee de deux mem
branes qui couuront le cerucau ,à ſçauoir de la Dure & Pic-merc, & n'ya nulle incer,
Del'Anatomie. 177
A valle entre les deux comme il y a au cetucau ,parce qu'elle n'a mouuement comme le
cerucau.Elle a vne autre membrane par deſſus,qui les environne,fort dure & eſpeſſe, maladies
qui ſertdegarder que ladite moüelle ſpinale neſoit rompuë, quand nous mouuons delsmoüebe
ledos. Les maladies d'icelle ſont ſemblables à celles du cerueau , à ſçauoir que le le spinales
mouuement & ſenciment de toutes les parties inferieures ſont intereſſecs, quand
quelque roüelle de l'Elpine eſt bleſſce:cóme quandquelques- vnes ſont hors de leur
place,& quand elles en ſont eſloignees,lors il ſe faitcontorſion de lamoüeile: & fivno
ſeule ſe ietce hors de ſon allierte , la moüclleeſtant fechie en ſi peu d'eſpace & eltroit,
ſeragriefuement erauaillee:& la roüelle eſtane ſorciehorsde ſon lieu, la comprimera
படப்படபடபடபடIUப்

pourlemoins,ſi elle ne la rompe & deſchire.Les nerfs ſorcans des roüelles de l'eſpine,
lesveines & aricres y entrent par les meſmes trous , pour nourrir la moüelle & les
roüelles ou vertebres.

Figure de la finale Medulle.


B A Monſtre le commencement de l'Eſpine medulle, lequel ſort
de la fin du ccrueau.

B La moüelle du dos ſorcane de la capacité du caiz,commence


LL(

icy à entrer en la premiere vercebre du col.


C La moüelle du dos commence à n'apparoiſtre plus ſimpleen
la deſcente , ains reſſemble à pluſieurs cordeletces,leſquel-,
2

les ioinetes enſembles deſcendent droit en bas.


more

3.4.5.6.7. Les racines des nerfs ſontmarquees parces chara& eres, lef
quelles racines ſortent de la moüelle du dos douant qu'elle
forte hors la capacité du taiz.
С D.7. La partic de la moüelle du dos contenuë dedans les verec
bres du col marquez depuis B, iuſques à D. au coſté droit,
& iuſques à 7. au coſté gauche.
19 E. 19 . Lapartie de la moüelle du dos contenuëdans les vertebres
d'iceluy.
F.24. La partie de la moüelle du dos, qui remplit les vertebres des
Lumbes.

G.30. La partie de la moücllc du dos , contenuë dedans les fixos


dudit Osſacrum .
30 G
L'extremité de la moüelle du dos.
D Fin du cinquieſme liure.

q ij

1
178

Table des Chapitres du fixieſme liure ,

Es os de la Face . Chapitre j.
Des Dents , Chapitre ý .
Du muſcle large ou Peancier. Chap. iij.
Des Paupieres & Sourcils. Chap.iij. B
Des Teux . Chap. v .
Des muſcles des Teux . ( .. ) Chap. vj.

D Du Nez . Chap. vý.

Des muſcles de la Face. Chap. viij.


Chap.ix ,
Des muſcles de la Maſchoire inferieure.
Des Oreilles & Parotides. Chap. x .
Chap. xj.
De l'os Hyoide, & defes muſcles.
chap.xy.
De la Langue. (... )
De la bouche, Chap. xiij.

De l' uule , ou Luette , ou Gargareum . Chap. xiij..

Du Larinx ou nxud de la Gorge. Chap. xv .

Du col, & de ſes parties. Chap. xvj.


Chap. xvj.
Des muſcles du Col.
Des muſcles du Thorax, & des Lumbes. Chap xoj.
Chap. xix .
Des muſcles de l'omoplate.
Chap. xx .
Deſcription de la Main generalement priſe.
Chat: xxj
Diſtribution de la reine du Bras, & premierement de la Cephalique.
Chap.xy.
Distribution de la veine Axillaire.
Diſtribution de l'artere Axillaire. Chap. xxiij.
chap. xxiii ..
Des nerfs du Col, du Metaphrene, & du Bras.
Chap. xxv.
Deſcriprion de l'os du Bras, e des muſcles quile meuuent.
Chap.xxi.
Deſcription des os du Coulde, & des muſcles qui le menuent.
Chat .
Declaration des os du Carpe, Metacarpe , & des doigts.
Des muſcles du Coulde. Chap. xxviij.
Chap. xxix .
Des muſcles de la main interne.
Chap.xxx.
Deſcription de la Iambe generalement priſe .
Diſtribution de la veine Crurale. chap. xxxј.

Diſtribution de l'artere Crurale, (...) Chap. xxxij.


Des nerfs des Lumbes, de lºos Sacrum , & de la Cuiffe. Chap. xxxiij.

Des parties propres de la Cuiſſe. Chap. xxxiiij. D

Des muſcles qui meuuent la Cuiſſe. Chap. xxxv.


Des os de la lambe. Chap. xxxvj.
Des muſcles de la lambe. Chap. xxxvij.
Des os du Pied. chap. xxxviij.
Des muſcles mouuans les doigts du pied. chap. xxxix.
(
.
) ..

Des muſcles mouuans le Pied . chap. xl.

Briefue recapitulation de tous les os du corps humain. chap. vlj.


Recueil du nom de la connexion des os . chép, xi.
Recapitulation de tous les muſcles du corps humain . chap. xi
179
A

LE SIXIESME LIVRE,
B AAVQVEL SONT CONTENVS PRIN .
CIPALEMENT LES MUSCLES ET LES OS
de tout le corps , auec deſcription de toutes les
autres parties des extremicez. -
P R E F .ACE.

OVRCE que quelqu'vn ſe pourra eſmerueiller de ce que deb


aant qu'auoir pourluidy & 'demonſtré toutes les parties de la Telte,
ainG quellesonteſté propoſees, i'ay finy le quatrielmeliure de no
tre @uure auquel elles ſemblent appartenir : à ceſte cauſe, avant
que pafler plus outre , i'ay proposé rendre la raiſon ,laquelle m'a
címeu à ce faire , qui eſt celle , que i'ay deliberé de pourſuiure tout
cd'vn trai& l’Anatomie des Muſcles. Et pource que desſuſdi&tes parties de la Te.
ſte,cellesdeſquelles n'auons encore parlé ,ſontconſtituees, & faites, ſelon leur plus
grande partiedesmuſcles: à ces fins ie les ay voulu traieter auec les extremitez , com
mençant à la plus haute partie de la Face , qui ſont les yeux , quand i'auray premiere
ment declaré lesos d'icelle, ſans la cognoiſſance deſquels ic ne reſçaurois ſuffiſam
mene nyà ton profit deſigner l'origine & inſertion deidiets muſcles. Or auons nousLa Face.
dic aucommencement du livre precedent, faiſantladiviſion de la Teſte, que par la
Facceſtoit entendu cour ce qui eſt contenu entre le ſourcil& le mencon : en laquelle Pierre Boy.
eſtvnemerueilleuſe fabrication de Nacure d'avoir fait, qu'en ſi pecite eſpace entre ftwau en
dix millionsd'hômes ily ait tantdedifference, quedeux ſeulement ne peuuent eſtrelom lim da
trouucz ſemblables ,queſubitne ſoiene diſtinguez par certaines notes & fignes , afin monde.
qu'on peuſt cognoiſtrel'vn d'auec l'autre. Pareillement Naturc y a produit la bar.
bepourornement , & faire la difference de l'homme auec la femme, & la maturité des
corps,aages, & temperamens. Et ya faitauſſivne beauté ſigrande,qu'aucuns deli
Drent mourir de leur bon gré,pour la beauté d'aucunes perſonnes,comme font les fols
amoureux:& ſont tant agitez,qu'aucunesfois deuiēnentinſenſez, & perdentdu touc
leurentendement pour les aiguillons de ceſte belle face , qui penetre iuſques à la plus
viue partie de leur ame : qui fait que les pauures amoureux & paſſionnez la rendent
martyree,obeyſfante & chambriere à leur concupiſcence & deſir. Dauantage il y a
encore vne autre choſe admirable à la Face, combien qu'elle ne ſoit plus grande que
de demy pied , toutesfois en la moindre mucation d'icellenousapparpiſſent les diffe
rences des hommes & femmes,ſelon qu'ils ſont ioyeux, elperás ou amoureux ,triſtes,
crainrifs, honteux, malades ou lains, vifs ou morts.
Parquoy comme ainſi ſoit que la Face ſoit en dous decelleconfequence & reſpect, loye.
nous recournerons à l'Anatomie d'icelle : pour laquelle bien aisément declarer,com. Espoir.
mencerons aux os,ſans la cognoiſſance deſquels on ne ſçauroit bien deſcrire l'origine Amont,
& inſertion de les muſcles.
q iij
1
1 180 Le fixieſme liure

Des os de la Face, СНА Р. 1. A


3
ES os de la Face font en nombre ſeize ou dixſept, Et premierement il
Six os en
y en a fix,à ſçauoir trois de chacun coſté , liquez autour de l'orbite de
l'orbire,
l'ail,dont ily en a vn grand; & vn autre pecit , & l'autre moyen , tant
en grandeuf qu'en ſituation :tous trois touchentl'os du front en leur
partic ſuperieute. Dauantage , le plus gros eſt conioinct par future ,
auec vnc production & apophyſe de los Petreux ,& confticuë & fait
le Zygoma, l'os lugal,ou l'os Paris : qui a elté faic de Nacure, pour la conſeruation du
Zygoma. muſcle Temporal,ainſi qu'il ſera declarécy apres . Auditos il ſe trouve vne cauité,où
L'os Paris. eſt contenuë
yne ſubſtance morueuſe pour la nourrituredes dents molaires , & d'un
air implanté pour l'odorat . Le plus petic eſt ficué au grand Canchus de l'ail , dedans
lequel eſt vn trou allant au nez, ſur lequel eſt vne glande , à laquelle le fait l’Egilops .
Lemoyen os eſt preſque au fond de l’æil , qui eſt fortdelié quaſi comme parchemin.
A celte cauſe ſont dies eſcailleux, pource qu'ils reſſemblent å vnecrouſte ou incruſta
Deux'os du tion :parquoy ils ſe briſent aisément. Apres ces trois ſuſdits os , ſuiuét les deux du nez , B
nez. leſquels ſontconjoinetspar ſucure auec l'os du front & enſemble en leurpartie ante

ricure par harmonie, c'eſt à dire , de droitce ligne , & de leur partie laterale ou poſte
rieure auecques les autres deux os , vn de chacun coſté, qui deſcendent depuis l'os
du front (auec lequelils ſont auſſi conioin & s par ſucure) viennent receuoir toutes les
dents . Iceux ſe crouucnt peu louuent ſeparez, ce dit Galien . Or ſont ces deux cy les
plus gros & plus eſpés des os de la Face , nombrez iuſques icy , & font connexez & af
ſemblez parlucure,auec le plus grand os de l'orbite de l'æil , & deuers ſa partie porte
rieure auec l'os Bafilaire, & parcie interne auec les deux petits os du palais interieurs,
leſquels conſtituent interieurement l'extremité d'iceluy: au moyen dequoy nous les
Deuxosin. pouuons appeller les os du palais interieurs & pofterieurs, & lont l'onzieſme & dou.
ternes du zieſme os en nombre: & reçoiucne ces deux petits os par leur partie laterale pres les
palais.
apophyſes Pterygoïdes de l'os Bafilaire ( chacun de ſon coſté ) vn des nerfs dela qua
trieſme coniugaiſon , leſquelsnous auons diccy.deſſus, ſe perdre en la membrane du
Deux os palais . Il y en a encores deux autres ſelon Galien ,en la mandibule inferieure qui ſont
en la man. conioinás au menton : combié qu'aucuns ont voulu dire n'y en auoir qu'vn , pource

dibale infe- qu'il n'appertauſens de la veuëaucune diuifionentre eux . Mais ceux quile nient, ie
les prie de les vouloir chercher en vn ieune enfant, & jeles puis bien aſſeurer qu'ils les c

ON
OD
trouueront: & la preuve en fera foy. Maisaux parfaits d'aage ne peuuent eftre apper
ceus , & font en nombre treizieſme & quatorzieſmc. Ces deux os donc , faiſans la man .
dibule inferieure , ont en leur partie pofterieure deux apophyſes de chacun coſté , de
la part qu'ils regardent la mandibule ſupcricure : deſquelles l'vne eſt faite en pointe
d'eſpec; appellec vulgairement Coroni:& l'autre mouſſe & ronde , laquelle s'inſero
dedans la cauité ficuec en la racinede l'apophyſe de l'os Petreux , qui ayde à faire le
Luxstion de Zygoma pres le crou de l’oreille : laquelle le peut luxer vers la partie anterieure, ça
la mandi- baaillant , quiſe fai & par la retraction des muſcles qui naiſſent des apophyſes Preri .
bule infe- goïdes , & deſignent aux angles inferieurs, qui ſont en la partie plus largedeladite
rieure. mandibule . Oreſt ceſte mandibule cauee comme la ſuperieure, & principalement en
Nora quela ſa partie poſterieure : contenant en la capacité yn humeur blanc, glaireux, propre &
mandibule familier pour la nourriture & accroilement continuel des dents. Lequel eſt illec fait
inférieure
& engendré du ſang,receuantde la partie poſterieure & interieure , ſous la racine de
eft caue , ca
contient unl’Apophyſe ronde,lesvaiſſeaux, c'eſt à ſçauoir veines ,arteres,nerfs , & eſprits appor
bumeur tez par leſdies vaiſſeaux auecques le nerf dela tierce conjugaiſon ,par yn trou aſſez in
D
propre & ſigne.Au moyen dequoy ſes parties ſont nourries & viuifiees, & les dents outre lesau .
familier tres parties , renduës ſensibles par certaine porcion deldiets nerfs , illec apportez & di
pour l'ac ftribucz auecques veine & artere ſuffiſantes pour leur nourricure & vic, par certains
1 croiſſement
petits trous ſituez viſiblement aux profonditez des racines deſdites dents: à cauſe de .
& nourri .
ruire des quoy en douleur de dents,eſt ſenty douleur pulſatine, pour la fuxion faite par les ar .
dents. teres. Qu'il ſoit vray ,lors qu'on les cire , on trouue en leurs racines quelque perit vc
ſtige de ſubſtance nerucuſe. Dauantage ilfaut conſiderer,comme ladite mandibu .
le produit de la capacité interne deux nerfs aſſez inſignes à coſté du menton , à l'en
droi & de la dent Caninc inferieure , & de la premiere des plus petitesdesmolaires,
pour le mouuement & ſentiment des parties à ſoy appartenantes:ainſi que je l'ay do
claré en parlant de la diſtribution de la tiercé coniugaiſondes nerfs. let'ay bien voulu

)
1

De l'Anatomie. 131
A admoneſter de cecy, afin que tu ce donncs garde d'iceux , lors qu'il ſera beloin de
faire inciſion aux fýldics endroits. Orilen reſte encores vn autre fitué ſur le palais,
duquel vicncle Sepcum carciloginoſum du nez , diviſant le nez en deux nazcaux, &
leparant les deux trous du palais,lequel a eſté obmisde tous Anatomiſtes queie ſça
1 che.Or afin que chacun puiſſe plus facilement recenic, & mettre en memoire le nom. Sepinut
bredesſuſditsos,nousferons vné bricfue & generale repetition d'iceux. Premiere. cartilagi.
menculyen afix,àfçauoircroisde chacun colté,que nous pouuons appeler orbitai :nojumi
res,alencourdesyeux.Les ſept & hui& ſe peuuent appeletnazeaux . Lencufieſme & quinze os
dixiclme,Maxillaires.Les onzielme & douzieſme peuuenc eltre dics Os internes du de la Faco.
palais. Les creizieſme& quacorzieſme, Os de la mandibule inferieure. Le quinziel
mepeut eſtre dit le Mur mccoyen , ou Septum du nez. Ces os ain ſi briefuement &
ſommairement nommez , nous faut maintenant parler des dents, ſourcils, cuir,pan
nicule charneux,muſcles, & conſequeminent des autres parties de la Face.
.
Des Dents. CHAP. ii.
B
Esdents ſont du nombre des os , dont le nombre eſt de trente: deux au plus,
aux hommes : ſçauoir cftſeizeen chacune mandibule : ſicuées par ordre :del Trère deux
* quelles en la partie anterieure en y a quatre deffus , & autant deſſous, tren- deuts.
chances & larges, nommées Inciſiues , pour couper les viandes : & n'ont chacune
qu'ync ſeuleracine : puis y en a deux de chacun colté cane deſſus que deſſous, nom - Denis tren
mées Canines,pource qu'elles ſont aiguës & fortes comme denes de chien ,pour com- chantes .
pre,briſer & caſſer les choſes ſolides :aucuns lesappellent Denis æilleres ,en haur prin.
cipalement, & n'ont pareillement chacune qu'vne ſeule racine , plus longue toutes. Dêrs willen
foisquenulledes autres. Apres s'enſuiuent les Maxillaires ou Molaires , qui ſont dix "S.
de chacun coſté tane en haut qu'en bas : & ſont ainſinommées , pource qu'elles maſ. Dents Mer
chent,briſent, & comminucncles viandes , afin qu'elles ſoient plus facilement dige- laires.
récsdansl'eſtomach :ce qu'on die volontiers , La viande bien maſchée eſt à demy di
gerée.Cellesqui ſont fichées à la mandibule ſuperieure ontle plus ſouuent trois raci
nes,& bien ſouueno quatre . Celles de la mandibule inferieure n'en ont que deux , &
c quelquesfois crois:pource qu'icelle mandibule eſt plus dure quela ſuperieure ,& aufli
àcauſe que ces dents eſtansalliſes ſur leur racine, & non ſuſpenduës, comme celles de
la mandibule d'enhaut , n'auoient beſoin de tanc de racines pour leur ſtabilité &
affcurance. Les dents inciſiucs, ou trenchantes, mordent & taillent les morccaux , &
lesailleres Canines lesfroiſſent, & les groſſes Maxillaires , ou Molaires , qui ſont du
ses, larges , & afpres, pilent, briſent, & menuiſent ce quia eſtétaillé par les inciſiues,
& æillercs.Orfileſdites dents Maxillaires eſtoient liſſes & polies,elles ne pourroient
cxercerleuroffice commodément: Pource que plus aiſémentcoutes choſes ſont bri. Gomphores
Alucales.
ſées de ce qui eſt aſpre,raboteux , & rudc : pour ceſte cauſe on pique à pointe de mar
tcau les meules demoulin ,quand elles ſonttrop applanies, pour les rendre aſpres &
D raborcuſes à mieux moudre & faire farine. Les déts ſontconjointes aux mádibules ,
paryneeſpece de connexion,qui eſt ditc Gomphoſis, c'eſt à dire , fichées dans les man
dibulesen certainescauitez appelées Alucoles, comme vn pau fiché en terre, ou vn
gond dans du bois :car melmes en quelques vnson trouue queleurs dents ſont con
!
iointes & vnies auec les mádibules li fort,qu'alors qu'on les arrache,on emporte por
tion deſditesAlucoles ou mandibules : ce que i'ay veu ſouuencesfois auec grande he
morrhagic,laquelle à grande difficulté on pouuoit eſtancher.Dauantageen leurs ra
eines ſontattachéespar certains ligamens,là où le nerf eſt inforé, ſemblablement les
veincs & arteres.Orleldites dents differentdes autres os , parce qu'elles ont action, à
Difference
raiſon qu'elles maſchent : auſſi parce qu'elles ſe peuuene regenerer quand elles ſonc des Dents
perduës, & ont croiſſement cotinueliuſques à la mort,à raiſon qu'en frayant, & prins d'auceles
cipalement en lamaſticacion,l'vne contre l'autre,ſecomminuent & s'vſene , ce qu'on aurres os.
voidmanifeſtement à ceux qui en ont perdu quelques vnes : celle qui n'aura plus la
rencontre de celle qui eſt perduë, demeurera plus longue , parce qu'elle ne s’vſene
comminuè commeelle faiſoit , lors qu'elles ſe rencontroient l'vne contre l'aucre.Da .
uancagedifferencencore des autres os , à raiſon qu'elles ſont plus ſolides & dures , &
aufi qu'elles ont ſentiment : lequel leur eſt porté par certains rameaux de nerfs qui
fortenedela troiſieſme coniugaiſon ,leſquelsentrenc dans leur ſubſtance:& pourras
q iiij
1

182 Le ſixieſmeliure ,
apperccuoir leſdits nerfs en caſſant quelque dent recentement arrachée de la bou . A
che de quelqu'vn, lequel verras manifeſtement : dont par le ſentiment d'icelles eſt
fenty douleur ineſtimable, lors qu'il s'y fait quelque defluxion,ou quád quelque grád
froid lestouche, Tel ſentiment leur a eſté donne,afin qu'elles euſſent conſentemenc
auec la langue , pour diſcerner & iuger des faucurs ,comme ont les autres parties de la
pourquoy bouche.On pourra demander comme il ſe peut faire que les dents ayenc ſentiment:
les déis one veu qu'ellesle peuvent ſcier & limer ſans douleur. Mais en cei’approuue forc l'opi .
ſentiment. nion deFallopius , quieſtimequ'elles ne ſentenc poiot en leurs parties excericures,
mais ſeulement par vne membrane laquelle elles ontau dedans. Tu pourras voir co
que cetAutheur en eſcrit plus amplement. Leſdites dents ont encor vne autre gráde
vtilité, & principalement celles de deuant,c'eſtaider de bien proferer la parole.Qu'il
ſoit vray,ileſt cogneu par experience en ceux qui les ont perduës , qu'ils ne peuuenc
bien profcrer la parole, ainſi qu'ils faiſoienc auparavant les auoir perduës , mais au
contraire balbutient.Ainſi font ceux qui les ont trop courtes ou crop auancées au de
uant,cheuauchans les vnes ſur les aucres.Dauancage,ileſt cogneu aux petits enfans,

.
leſquels ne parlét ny ne proferēt bien leur parole,iuſquesà ce qu'ils ayenc leurs dents
de deuár. Pareillement les vieillards,apres qu'ilsles ont perduës, ſe trouueno begues,
& ne peuuent bien diſtinctement prononcer ce qu'ils veulent dire. Er noteras en cet B
endroit, que les dents ſont ſolides, & ja oſſeuſes aux enfans eſtans encores au ventre
dela mere. Ce que pourras voir à l'æil (come i'ay fait)en diſſequant vn enfant mort,
Les camilezſubitement apres l'enfantement. Plus cu notcras qu'il y a deuxaſſezgrandes cavitez AR

qu'on tron.Tous lesſourcilsremplis d'aucun humeur viſqueux,quiſeruentà l'odorat,cõmeaeſté


ne ésos de dit cy-deuár.Dauantage ſont deux autres cauitez aux apophyſes Maſtoïdes, ou pro
La Facc.
cés mammillaires,eſquels eft concenu vn air implanté pour l'ouye. Item deux autres
cauitez aux mandibules , dans leſquelles eſt contenu vn humeur viſqueux, eſpés &
gluant, qui eſt pour la nourriture des dents , comme nous avonsja predit.

1
‫کر‬
Dumuſcle Largeou Peaucier. CHAP. III.
Es choſes ainſi conſiderécs, il conuiendroit maintenant pourſuiure les par.
cies concenantes de la Face, quiſont le cuir,pannicule charneux, & la greſſe.
Mais veu qu'elles ont eſté par cy-deuant ſuffiſamment declarées,avant que
venir à la diffe& ior, del’æil,ic te pourluiuray ſeulement le pannicule char С
neux ,afin que tu puiſſes entierement & paifaictement entendre les mouuemens faits
par iceluy, tantaux parties de la Face qu’au Front. Et premierement pour le bien
voir, il faut ſubtilement ſeparer la peau, en quelque endroit de la Face : car ſi cu ne
te donnes garde, cu lcueras ce muſcle large auec leditcuir , auquel immediatement
il adhere, & en aucuns endroits , comme aux léures,aux paupieres desyeux , & cout
Inftru &tion le front;fi eſtroitement,qu'on ne les ſçauroit encicrement ſeparer l'un de l'autre,Na
pourleChi-ture luy ayant donné mouucment volontaire , afin que s'eſtendant & repliant alter
Targien .
natiuement il puiſſe ayder à ouurir & à fermer l'ail. Pour monſtrer tout ce que con
tiene ledit muſcle,& ſes adherences & mixtions auec le cuir , il le faut ſeparer le plus
ſubtilement que faire ſe pourra. Puis ledit pannicule eſtant deſcouuert de tout le
cuir,le faut ſeparer, commençant à l'endroit de la Clauicule antericure,& montand
ſelon droite ligne,iuſqu'au mencon, le conduiſant tant qu'il ſera poſſible, vers le der.
riere.Cefaiſant,cu monſtreras comment il lemelle aueclecuir&muſcles des leures:: D
& quand tu ſeras paruenu aux yeux ,monſtreras que c'eſt celuy quiles ferme & pyure ,
Mouneměs & non autre à raiſon des trois genresde fibres,deſquellesil eſt compoſé & fait:com
des
163.
paspie- bien que ſelon tous les Aucheurs qui en ont eſcrit iuſqu'au jourd’huy, telles a &tions
loient attribuées à deux muſcles propres à ce faire ,l'vnſicué au grand anglepartieſu
perieure:& l'autre qui eſt fait en forme de Croiſſant,au petic angle,s'eſtendác iuſqu'à
la moitié du Tarſc,auquel endroit l'anterieur deſine,& dela parcie baſſe,comprenác
Notable tout le ſourcil, au moyen dequoy il eſtrendu aucunement mobile. Et iaçoitqu'aux
lediscoursf"
muſcle demonftrationsordinaires & publiquesonles marque ainli quc ic t'ay dit, fi eſt-ce
despampie que i'ay opinion que ceux qui les moſtrent,en ſont auſli incercains que moy -meſme.
TES . Et ce qui me le fait dire,c'eſtqu'en leuant ledit Pannicule charneux, autrementnom.
mémuſclelarge, on ne trouueauſditsendroits autre chair muſculeuſe, que celle du
dit Pannicule, ſoitqu'on le conduiſe du front en bas, ou de la ioüe en haur. Outre,
De l’Anatomie . L
183
A pluss'il etbeſoin de faire inciſion ſur les ſourcils au front, il eſt defendu de la faire
tranſuerſalement de peur que ledic muſcle Peaucier tombant vers l'ail , ne rende la 1

pfupiere ſuperieure immobile. Et ſi d'auantare telle inciſion ſurvient par accident,


pour retenir le mouuemenc de ladice paupiere,illa faut coudre. Laquelle choſe nous
et encores plusgrand argument, que le mouuemenc de la ſurdite paupiere depend
dudit Muſcle large, ou Peaucier. Davantage s'il y auoit muſcles particuliers, ainſi li
tuezcommenousauons dit , veu que quand l'vn opere, ſon oppoſite celle: & quello
peration du muſcle(ainſi comme nous auos dic ) eſtde retirer la particqu'il meut vers
lon principe:il s'enſuiuroit que quand le muſcle ouurant l'ail opereroit,& ſon oppo
fitecederoit,il tireroit la paupiere aucunement vers ſon origine, ainſi que nous vo
yons eſtre fait aux conuullions. Parquoy veu que nous ne voyons cel mouvement,
c'eſt vocertain argument , que tout le mouvement de ceſte paupiere depend dudit Origina
muſcle large. L'origine dudic Muſcle,eſt dela parcie it pericure du Şcernon ,de coutes
les Clauicules de l'Eſpine de l'Omoplate, & detouresles eſpines des vertebres du col,
de l'occipat& partiehautede la teſte depilees. A ceſte cauſe diuers mouuemensſon
fairs en la face,en laquelle il define,lacouvrant comme vn maſque,par iceluy ſelon la
B diuerfité de ſon origine,& diuerſes productions de fibres.len'ay pourſujuyence mul.
cle icy les neufcholes,ainſique je fais aux autres parties, pour autant qu'elles ont eſté
fuffilamment declarees parlant des muſcles de l'Epigaſtre. Parquoy d'oreſnauane ne
faut attendre autre choſedemoy couchant les muſcles, que leur origine, inſertion,
action, & compoſition, quand en iceux y aura quelque vailleau inligne, & digne
d'obſeruation .,

Des Paupieres de fourcils. CH A P. IV .


Aincenác puis que nous ſommes tombez ſur le propos des Paupieres &
ſourcils,veu auſſi que c'eſt l'ordre de diſfe &tion,il faut dire que c'eſt de
quoy, & comment,& à quelles fins telles parties ont eſté faites de Naru
re.Donc pour commencer:Les ſourcils ne ſont autre choſe que le poil Defaripcions
des fourcils.
ordonné en forme de Croiſſant,ſurla droite lignede l'orbite ſuperieu Vlage des
Credel 'cil,depuisle grandiuſqu'au peticangle d'iceluy:lefquelsNature a ainſi ordon -fourcils.
nez pour l'ornement
du corps,comme quelque autre poil,& afin qu'ils ſeruiſſent aux
yeux comme de propugnacle & defenſe encontre la fueur acre & mordicante , qui
pouuoitcouler du frontſurles yeux. Quant aux paupieres, qui ſont deux de chacun Vſagedes
coſté,inferieure & ſuperieure, elles ne lont autre choſe que la porte des yeux, pour panpieres.
iceux ouurir & clorre en temps de neceſſicé, & pour challer l'ail au dedans de l'orbi
te,cuitant les choles exterieures. Leur compoſition eſt de cuir muſculeux , cartilage, Copofition.
& poil , lequel eſt mis ſur l'extremité d'icelles ,commeun palis, pour la defenſe des viſage des
yeux ouuerts , principalement à l'encontre des petits corps ſubcils, leſquels par le poil des
moyen de l'air pourroient entrer dedansiceux ,& les endommager.Ilsſont touſiours paupieres.
D
en yne pareille grandeur, & onceſté plantez ſur yne partie cartilagineuſe , afin qu'ils
demeutaſſentdroits,& non baiſſez & repliez : ce qu'ils euſſentpeu faire, s'ils euſſent Döld.com
creu ſus vne ſubſtancemolle. Ilsn'ontelté ſituez fort prés les vns des autres : attendu mene er 1

qu'ils ſoffoqueroient,& obcenebreroient l'æil, s'ilseuſſent eſté fort prez : & partantpourquoy
par vnegrandeprovidence de Natureils onteu vne ſeparation conuenable.Quant momente
i au cartilage,ſur lequel ledic poil eſtfondé,il eſt enucloppéduPericranc iuſquesil . fmos a efe
leceltendu,auane que faire la Coniunctiue :Ec a eſté illecpoſé& ſitué, à cellefin que fait.
quand vne partie d'icelles ſeroit tiree en haut , ou en bas, par le muſcle large , ou ſi cu
aimes inicux,parles muſcles propres d'icelles, toutes les paupieres ſuiuiſſent; à raiſon
Tarſe de l'ail . La difference de la ſuperieure & inferieure n'eſtautre, ſinonque la ſu ,difference
de la pau.
perieureeſtplus aperçement mobile, & l'inferieure obſcurement , comme vnchacun piere fupe.
peut elprouuer en ſoy-meſmeregardant en vn miroir :autrement en vain Nature au- rieure de
foitmislubſtance muſculeuſe à Ventour d'icelle . On peut auſſi dirc , que leurs mou- l'infericu
uemensſe font par le benefice du Pannicule charneux .

1
's

184 Le ſixieſme liure ,


Des Yeux . CHAP. V.
Eeste maintenant à parler des yeux, leſquels eſtans organes & inſtrumens A
de la faculté viſiue à eux apportée par l'eſprit viſuel, quieſt comme vne
perice flamme de lumierc,laquelle procede de l'ame , conduit par les nerfs
Subſtance. Optiques , ſont de ſubſtance molle , & quantité notable : toutesfois aux vns
Quantité. plus , aux autresmoins,pour la grădeur ou petiteſſe des corps où ils font. La ſituation
Sitwarion .
deſquels eſt au plus haut de la teſte , pour illuminer & conduire le corps , & luy feruir
de ſentinelle , pour deſcouurir les choſes exterieures qui luy peuucnt nuire : car la
veuë opereen vn inſtant , & comprend ſoudain par un moyen indicible, l'image des
choſes quiſe repreſentent à elle,& eſt le principal des ſens de l'animal . Car par l'eil
L'homme
efleue fa on conſidere l'architecture admirable des cieux , & des autres corps:on void par l'vil
pewë as leurs couleurs,& grandeur,leurs formes,le nombre, les proportions & meſures , leur
ciel, lieu aſſiette , leurs mouuemens & repos. Dieu a voulu que l'homme ſculeuſt la face elle
deja naiſ- uée en haut au ciel. Ce que Ouide apres Pithagorasa fort bien exprimé , diſant:
fance. Et neantmoins que tout autre animal
lette touſiours fon regard principal
Encontre bas,Dieu à l'homme a donné
La face en haut , & luy a ordonné B
Deregarderl'excellence des cieux,
Etefeueraux eſtoiles ſes yeux.
Leur figure eſt pyramidale,ayans leur baſe au dehors,& leur poincc au dedans vers 27

Ville
Figure. de les nerfs Optiques, ainſi qu'on peut voir par leur orbite,qui eſt leur propre domicile
l'orbite, ou lcquel Natureleura ainſi baillé, afin que par celuy ils fuſſent preſcruez des choſes wiki
cofret de externes contondantes , & generalement de toutesautres choſes à cux nuiſibles par
l'æil. leur dureté. Leur compoſicion eſt de ſix muſcles,cinq runiques, crois humeurs , d'un
Copofition. eſpritluiſant, qui continuellement leur affluëdu cerucau, deuxnerfs, double veino
& vnc arterc : dauantage debeaucoup de greſſe : & finablemenc d'vne glandeſicuće
Vrilité deau grand angle d'iceux ,lurle trouaſſez inſigne& cuident, lequel deſcend dedans les
la glande narincs tant d'un coſté que d'autre : & ce pour prohiber & defendre, que les excre.
Fituée au
grandangle mens du cerucau,deſcendans par leſdites narines, ne regurgitent auxyeux, ainſi que
desyeux conci
nousvoyons aduenirà ceuxqui ont laſuſditeglandulc cóſomméc, leſquels pleurent
nuellement : & telle affe& ion eſt appelée Fiſtule lachrymale. Apres s'enſuit la
Fiftulela greffe,laquelle eſt illec miſe entre lesmuſcles en aſſez bone quantité, en partie pour с Ao
chrymale. rendre les yeux plus lubriques & faciles à mouuoir,ainſique font lesglandes,à raiſon
Vtilité de
la grelle
de quelque humidité qu'elles leur communiquent : en partie aulipour la conſerua
des Jeux. tion de l'harmonie,& temperacure despartiesnerueuſes deſditsyeux,leſquelles par
leur continuel mouuemenc cſtoicnt ſuiettes à deſiccation exceſſiue.
ic
Figure desnerfsobliques.
D
de l'Anatomie, 185
А Des muſclesdes Teux . CH A P. VI.
Ly a ſix muſcles en l'ail , quatre deſquels font la flexion droite ; leſquels Origina
onc leur origine du fonds de l'orbite , di vontdeſiner en melme lieu à l'æil,
à ſçauoir au milieu, & cnuironnent le nerf optique : & lors qu'ils font leur
action cous enſemble,cient l'æil en dedans:( le luperieur, enhaut : fi l'infe .
rieur , en bas: & file dextre à dexcre:& le feneſtre , à ſenetre. Les deux autres cour
nenc l'ail,deſquelslepremier,qui eſtle pluslong & grelle ,prend ſon origine preſque Affiona
! dumeſmelieu quefait celuy qui tire l'æilà dextre vers le grand Canthus, & lors qu'il
cltparucnu à l'excerieure partie de l'angle interieur , où la glandule lachrymale eſt
eminente,finiten vn pecic tendon greſle,qui paſſe au trauers d'une petitemembrane.
ou anneau : puis ayant pallé au trauers, faiſant vn angle droit , en le recournane, va
finir vers la ſupericure partie de l'ail , entre l'inſerción de ces deux muſcles, deſquels
l'vn tire l'oeil en haut , l'autre directement à l'angle exterieur, comme Fallope elcrit,
ou pluſtoſt come i'ay obſerué, entre le muſcle qui cire en haut , & celuy qui tirevers
l'angle interieur. Cecinquieſme muſcle, lors qu'il ſe recire en dedansversſon prin
B
cipe,par lon tendon qui eſt circulaire , entortille l'eil par ce mouuement, l'attirant
augrand Canthus. Leſixieſmeluy eft contraire,lequel a ſon origine de l'inferieure
partic de l'orbite, pres vne petite fiflure , par laquelle paſſe le nerfdela troilieſme
coniugaiſon,& eſtant for delié tranſuerſalement monte à l'angle exterieur,& ayant
embraſé læil cranſuerſalenient, par vn petit tendon s'inſere à iceluy,pres l'inſercion
du cinquieſme,tellementque ſouuentesfois le tendon del'yn & l'antrene ſemblené
:
eſtre qu'un ſeulcendon. Pour bien obſeruer telle diſſection , il ne faut pas arracher
l'aildel'orbice,mais il faut rompre ladice orbite,afin de voir leur origine plus mani
feſte. Quant aux cinqcuniques, la premiere, quien diſſequant ledit « ilſe preſente, Des Tania
vientdu P'ericrane, & s'eſtend pardeſſus tout le blanc de l'æil,iuſqu'au cerclenommé ques
Iris.Son vtilité eſt de firmer ,lier , & recenir ledit ail dedans ſon orbite , au moyen de
C quoyelle eſtappelée Conioin& iue,& d'autres Adnata,en Gal.liu.dixieſmc del'vlage veiklé de
desparcics, en Grec Epipephycos. La ſeconde eſt nommée Cornée,pourla fimilitudela Conion
qu'elle a en conſiſtence & couleur auec vnc corne de lanterne bien deliée & claire, Stine.
differéte en ſoy,pource qu'en la partie anterieure circonſcrite de l'Iris , elle eſt lucide Tunique
& tranſparente , & par derriere eſt obſcure, à raiſon de la diverſe poliſſure d'icelle.Cornée.
Dauantage elle eſt denle en la partie anterieure , afin qu'elle ſoit procection de l'hu
meur, tant Aqueux que Chryſtalin : & aufli tranſparente & lucide , afin qu'elle peuſt
mieuxtranſmettre & donnerpaſſage aux couleurs. Son origine eſt de la Dure.mere,
produite par les crous incericurs de l'orbite de l'ail,lequelelle enuirõne entierement ,
La troiſieſme appelée Vuée , pour la fimilitude qu'elle a en couleur auec vn grain de Tunique
raiſin noir ( i’entens quant à la partie exterieure )eſt produite de la Pie mere, & enui. l'hér.
ronnctout l'ail, horſmisla pupille, auquel endroit elle eſt croüće. Ec cſt adherente à
laCornéepar les veines & arteres,leſquelles elle luy communique pour ſon nourril
D fement & vie. Mais quand elle eſtparuenuë iuſqu'à l'Iris,laiſſant la Cornée,deſcend
interieurement,& aucunemene ſe reflechiſſant vers le cercle & circõference plus am
pledeľ'humeurChryſtalin,à laquelle adhere eſtroitemēc, & par ce moyen circonſcric
licuàl'humeur Aqueux,ainſi qu'ilte ſera demonſtré en ſon lieu :& defend que l'hu
meurAlbugineuxn'enſeueliffe& couure tout l'humeur Chryſtalin.Outre-plus ceſte Poliquoy.
tunique eſt en la partie interieure, ceinte de pluſicurs & diuerſes couleurs , c'eſt à ſça. I'Vuée elle
inte
pointeement
uoir,noire,fuſque,cerulée ou verde , & autres comme l'arcdu Ciel,& ce pour les vci. ricur
litez qui s'enſuiuent.Premieremét,à raiſon que ſi elle euſteuvne ſeule couleur,toutes plusieurs
choſes viſibles euſſent repreſenté celte couleur,comenousvoyons en vn verre rou . du couleurs.
ge , ou verd ,ou iaune, ou d'autres couleurs , toutes choſes repreſenter la meſme cou.
leur rouge ou verde. Secondementellea cſté noire pour congreger & vnir les eſprits
dillipez par la lumiere,ainſiqu'on void qu'on plombe par derriere les miroirs. Tier
cement, fuſque, cerulée ou verde , pour la conſeruation & reſioüiſſance de la veuë,
Cartoutainlique les excremes couleurs corrompent la veuë , ainſi les moyennes la
conſervent:combien que les vnes plus , les autres moins , ſelon qu'elles approchene
plusoumoinsde mediocrité. Dauantage elle a eſté faite molle & trdüée : molle , des
peurqu'ellene bleſſa & l'humeur Chryſtalin , à la circonference duquel elle deline:
troüće audeuancdudichumeur,craignantquepar ſon obſcurité elle n'empeſchaft les
couleurs de venir à ecluy;ains par fa noirceur externe, les eſpeces des couleurs fuf,
189
Le fixi liure
e ſme
ſent plus vnies, recueillies, & congregées comme par leur contraire , ainG que nous
A
voyons la chaleur eſtre renforcic par l'oppoſition de froideur. Aucuns l'appellent
Choroïde,à raiſon qu'elle eſt tiſſuë abondamment de veines & arceres, comme l'ar
Tunique
Amphi. riere -faix ,ou ſecondine des femmes.S'enſuit la quatrieſine nommée Amphibliftror.
biliqiroide, de , c'eſt à dire, Retiforme, laquelle prenant ſon origine du netf optique conucrty
en tunique, eſt tiffuë en formederecs , des veines , arceres & nerfs qu'elle reçoit de
l'uVée, tant pour ſon nourriſſement & vie, que pour l'humeur Vitreux , lequel elle
Vtilité rcueſt par derriere. La principaie vtilité de ceſte cunique , eſt de ſentir quád l'humeur
cſt alterć par l'introduct
ion des eſpeces à luy tranſmiſes & cnuoyés , ou de conduire
l'eſprit viſuel,auec la faculté viſive parle trauers de l'humeur vitreux , juſqu'à l'hu
meur Chryſtalin , principal inſtrument de la vcuë. Elle eſt aulli plus molle que nulle
aucre , depeur d'endommager ledit humeur. En quoy cu noteras l'ordre de nature
auoir eſte tre bien obſerué en la poſicion deſdices tuniques ,comme auſſi aux autres
Providence parties.Carcout ainſi que nature nepaſſe point d'un contraire à l'autre , ſi ce n'eſt par
du grand va ou pluſieurs moyens:ain ſi icelle voulát adapter vne choſe dure & terreſtre , come
Arcbi.
la cunique Cornée , à vnc molle & aqueuſe, comme les humeurs , a vſe de pluſieurs B
tecte Di
moyens differens en conſiſtence de deux extrenies , ſelon qu'ils approchenc plus ou
win .
moins de l'vn d'iceux, comme cu peux voir.Car apres les deux plusterreſtres& tuni
ques , c'eſt à ſçauoir, Cõion &tiue & Cornée , elle a fait l'Vuće en degre plus molle quc
les precedentes : cour ainſi que la Retiforme encore
plus molle que ladite Vuée , 4
afin que commepar degrez de dureſſe en mollefle, Nacure paffait d'un contraire à

Tunique l'autre
. La cinquicſmc & derniere eſt nommée Arachnoïde, pour la conſiſtence
Arach . qu'elle a ſemblable à toile d'araignée . On la peut auſſi comparer à bon droict à vne
noide, cercaine petite tunique lucide,bláche& tres - deliéc, laquelle eſt ſituée entre les eſpa
Vtilisé.
ces d'vn oignon.Icelle tuniquc enuironne l'humeur Chryſtalin en la partic anterieu
re,paraduenture à celle fin qu'elle le preferuc & defende, come principal inſtrument
emily
de la veuë , lors que les aucres humeurs ſeroienc intereſſez : & dauantage à celle fin
qu'elle luy ferue come de verre à vn miroir, & que par ce moyen les eſpeces des cho
ſes viſibles introduites de la part de l'obicct , ſoient retenuës audit humeur parcelle
connexion del'vnauec l'autre, ainſi que nous voyonseſtre en vn miroir fait de verre Ç
& de plomb , ou autre mariere opaque , denſe & obſcure , qui ait force d'empeſcher
queleseſpeces ne paſſentoutre le verre , ains ſont retenuës en la ſuperficie bien ra .
maffées. Son origine peut eſtre de la matiere excrementeuſe dudit humeur , ainſien
Origine. durcie toutalentourd'iceluy par la froideur des parties circoniacentes ,ainſi que la
petite tunique de l'aufenuironnant le blanc d'iceluy . S'enſuivent maintenant les
humeurs cótcnuës er l'æil ; leſquels nous auõs diteſtre trois en nombre: dont le pre .
Humehr micr eſt appellé Aqueux , pour la ſimilicude qu'il a auecques l'eau : & eſt mis & ſitué
entre la parcie de la cornée tranſparente, & la partie de l'humeur Chryſtalin deſcou.
Aquenx.
uerte en la pupillo ( en laquelle on void vne image commeen vn miroir , & eſt la fe
neſtre de l'oeil par laquelle nous voyons ) & la reflexion de l'Vuée,depuis l'Iris iuſqu'à
la circonference dudit humeur Chryſtalin,commeil a cſtédit ,afin qu'en rempliſſant
tel cſpace vuide,il diſtende la Cornće , & par ce moyen defende qu'elle ne tombe ſuç :cidad
l'humeur Chriſtalin ,quiſeroit au dommage de la veuë. Et dauantage,afin que par
ſon humidité il defende que ledic humeur Chryftalin ne ſoit par trop deſſeiché. Il
pcut eſtre engedré par la reludation de la ſeroſité apportée par les vaiſſeaux des tuni. D
ques, leſquels ſelon leurplus gráde partie , produiſent leurs anaſtomoſes & cxtremi
Humene
posed
tez ,iuſques à la pupille, & lieu dudit humcur A queux. Le ſecond humeur, & moyen
Cloryfslin . wat
Lesbu- en ſituation, eſtappellé Chryſtalin ,pourla couleur claire & luiſante qu'il a ſemblable
mewrs de au Chryſtal, ſi on luypeut attribuer aucunecouleur : car à la verité les trois humeurs,
l'ail n'one & principalement le Chryſtalin , cltans inſtrumens & organes de la veuë , n'ont deu
den avoir auoir couleurs aucunes , de peur qu'ellesn'empeſchaſſent leur a & ion , qui eſt de re
Alcune
preſenter les couleurs deschoſes viſibles , telles qu'elles ſont actuellement, comme
couleur.
vn miroir les eſpeces de co que nous regardons . Ce qu'ils n'euſſent peu faire , s'ils
cuſſent eſté teincs de quelque particuliere couleur . Car tour aingi que les lunettes

des bu ceintes de couleur rouge,nousrepreſentér toutes les eſpeces viſibles de leur couleur,

meurs de combien qu'elles ne ſoient relles :ainſi cufſent fait les humeurs à la faculté imaginati
tail. ue , ou ſens conimun ,s'ils euſſent eu aucune certaine couleur, ainſi que nous auons dic
par cy.dcuát.Parquoy à bon droit le Philoſophe a diccſtre necoſſaire, que le ſuier ou
matiere
de l'Anatomie. 187
A matiere quideuoitreceuoir quelquc forme fuſt exempte totalement d'icelle, à cau .
lede l'empeſchemétquien pouuoit enſuiure. Et pourtant nature a fait la matiere ſans
forme,les humeurs de l'ailſanscouleur,la cire lans figure,l'encendement ſans aucu
necognoiſſanceparticuliere , pource qu'ils deuoient eſtre receptacles deſdi&tes for,
mes.Safigure eſt ronde,coutesfois aucunement comprimee deuant & plus par le der
fiere,afin queles couleursdes choles viſibles ſoientpar te!le cõpreſſion retenues ſans Figure de
qu'elles eſchappent decoſtéou d'autre , comme elles euſſent fait,filadice figure euſt Chr
Phumeur
yſalina
elté parfaitementronde, & afin aufli que par vn couporbe il ne peult eſtre tourné fa
cilement de la place,pourceque ce quieſtappuyé ſurla circonferéce exterieure d'vne
rondeur,facilementeſchappe & fuit,commenetouchant le plan ſur lequelileſt ſitué,
que par vnpoin & indiuiſible. Dauantage cet humeur eſt porté à moictié dedās l'hu.
meur Vitreux,duquelileſt nourry quali partranſpoſition de matiere del'vn à Paucre,
ou pluſtoft(veu qu'ileſt entiercment environné de la cinquielme tunique,à cauſe de
quoy ne peut eſtre faite tranſiompcion de matiere)des vaiſleaux conduicts iuſques à
B luy,cant par la cunique Retiforme que l'Vuce,& par deuant de l'humeur aqueux & Gal. chapi
l'eipace de la pupille(quicſt encores audeuant) elt pleine d'eſprit acré & luiſanc.ce qui liw.1o. de
ſe peuc cognoiſtre,actendu que durāt la vie nous voyons lærlfort eltendu & plein de vlupart.
tous collez, ſans qu'aucune partie d'iceluy ſoit laxe ny ridee: mais apres la mort on le
trouueridé,parce que l'eſprit en eft euaporé. On peutencores prouuer & aperceuoir
telle choſe: car en fermant yn æil,on voit la pupille de l'autres'elargir & remplir, d'
autant que l'eſprit eſt comuniqué & renuoyéd yn oilà autre. Davantage és perſon
nes fortaagez la tunique cornce ſe ride & ſe amoncelle , & les rides combent les vnes Raison
ſur les autres, & lors la pupille s'eſtreciſt :quifait qu'aucuns ne voyērgueres ,lesautres pourquoyla
rien du tout , à cauſe que la ſuſdite humidité & eſprit ſe conſomme& delleiche parvené ledio
l'antiquité du temps , & parcane l'eſprit y aflluë moins de la ſource & principe . Pareil . minue on
lement la cunique cornce à l'endroict qu'elle commčce des limites ou parties proche s'ab olit
vie aux
de l'Iris,ſemble eſtre fort proche de l'humeur Chryſtalin , parce qu'en ce lieu là cou illes per:
tes les tuniques & humeurs ſont coherentes ,& d'autant plus qu'elle s'aduance en de Tonnes.
hors , s'en recule couſiours de plus en plus , & eſtant la plus eloignee qu'elle peut
eſtre à l'endroict de la pupilie: ce qu'on peut voir par l'Anatomic ,& par l'operation
qui ſe fait lors qu'on abat la taye ou cataracte: car eſtant la taye au milieu de la tuni
c que cornec , & de l'humeur Chryſtalin , l'eguille qu'on pouſſe dedanspour l'abaiſſer,
ſemeine deſſus & deſſous, ça & là , & tournoye en rond de tous coſtez par vne fort
grădeſpatioſité, ſans toucher l'vne ny l'autre partie , à ſçauoir la cornee,nylhumeur
Chryſtalin, parce qu'elles ſont ſepareesd'vne fort grande diſtance,pleined'eſprit & Lieu où se
d'humidité ſubcile. Son vtilicé elt de ſeruir commede miroir à la faculté viſuelle,il-faict la cam
leccondui&te par l'eſprit viſuel. Le ciers & derniereſt le Vitreux,ou pluſtoſt Albugi-saracte.
neux, ainſi nommé, à cauſe qu'en conſiſtence & couleur il eſt ſemblable au verre , ou
bien au blanc d'vn æuf. Sa licuation eſt en la partie poſterieure du precedent, pour
feprimer aucunement l'impetuoſité de l'eſprit deſcendant audic humeur Chryſtalin: Vrilité.
ainli que nous pouuons pareillement dire l'humeur aqueux auoir eſte mis de Nature Humeur
audeuant dudit humeurChryſtalin, pour refrener l'imperuofité des couleurs qui Albugia neux.
font preſentees à iceluy . Cet humeur Vitreux eſt nourry de la cunique Reciforme. Situation ,
Quant auxnerfs,ils ont eſté ia declarez. Parquoy reſte que nous parlions des vei
nes, deſquelles les vnes ſont internes illec produiées auec lestuniques des vaiſſeaux
du cerueau. Les autresſontexternes , eſtenduës ſeulement & apertement aux par
D tiesexternesd'iceluy, comme aux muſcles, & tunique conjoinctiue, par leſquelles
fouuentesfois ſont faites iofámations & rougeurs en ladite partie externe:au moyer
dequoy faut inciſer la veine Puppe , & appliquer cornecs & ventouſes ſur la partie
poſterieure de la teſte, du col,& du palleron : ainfi comme és affections internes de
l'ceil fautouurir la veine Cephalique, pour deriuer,rcucler, & euacuer la matiere qui
faitlamaladie, ſelon que la choſe le requiert.
1

188 Le ſixiefme liure ,

Figure de l'æil.
A
А Monſtre la partie anterieure
D de l'æil circonfcripte par
l'Iris .
B Nerf Optique ſortās du Cra
ne pour entrer en l'eil.

CCCC Quatre muſcles droits .

DD Deux obliques .

E Le ſeptieſme Pyramidal ſe.


lon Galien , lequel ne ſe
trouue qu'aux beftes.

Du Rez .. CHAP . VII .

Eſte maintenant à parler du Nez , que les Grecs appellent Rhis, à cauſe
que par iceluy coulent & fuent les excremens des ventricules anterieurs du

Sulltance. cerucau . Sa ſubſtance eſt diuerſe, comme tu entendras par la compofi

Quantiré, tion . Sa quantité, figure & ficuation eſt aſſez notoire & manifeſte à vn cha
figure , e cun . Quant à la compoſition, il eſt composé de cuir ,muſcles ,os ,cartilages, membra
formation. ne ou runique,nerf, veine , & arrere . Le cuir & les os tant contenás que contenus ont
Cöpofusion. eſté par cy.deuát ſuffiſammét demonſtrez,cõnieaufli les nerfs ,veines & arteres . Par .
Six cartila quoy il nous conuient parler des cartilages, leſquels ſont fixen nõbre . Le premier eſt
double ,ſeparát les deux narines au bour du Nez,s'eſlendás iuſqu'à l'os Ethmoïde.Le
ges dunez.
Premier carſecod eft ficué au deſſousdu ſuſdit. Le troiſieſme & quarrieſme ſont cõrenus auec les
tilage dom . deux os externes dudit Nez . Le cinquieſme & ſixieſme aſſez tenues & delicz , deſcé. С
ble.
dás par la partie laterale, tant dextre que ſeneſtre du Nez ,conſticuēc les ailes d'iceluy,
Second.
leſquelles fontpriſes pour ſa partie mobile . L'vtilité deſdicts cartilages eft, afin que
Troiſieme le Nez en lon extremnité ſoit mobile , & conſequement moins ſubiect aux iniures ex
qua
ternes , comme d'eſtrerompu & froiſſe, & plus conuenable à la reſpiration. Pour la
trieſme.
Cinquief. quelle parfaire, Nature luy a baillé quatre muſcles,deux de chacun coſté, vn externe
me & l'autre interne.L'externeprend ſon origine de la pommette, & d'icelle deſcendant
xieſme. obliquement, & aucunemét annexéà celuy qui ouure la léure ſuperieure, ſe termina
Vrilué des à l'aile ou pine du Nez , laquelle il ouure . L'interne ſore intericurement de l'os Maxil .
Cartilages laire , & deline au commencement des cartilages qui conſtituent les ailes , pour icelles
do Nezo ferrer. Quanc'à la cunique,laquelle interieurementreueſt les narines, & conduits du
mufiles du Nez, elle procede de la Dure -mere par lesos cribleux ou ſpõgieux, ainſi que celle du
Ner palais, Larinx : Trachee artere, Oelophague, & l'interne du ventricule: & pourcene
Muſile ex le faut eſmerueiller , ſi facilement & promptement les affections deſdices membranes
terne . ſont communiquees au cerueau. Dauantage ceſte tunique reçoit ( i’entens tant d'vn
D
Misſile in. coſté que d'autre) vne portion de nerf de la tierce coniugaiſon , par le trou qui par le
lerne.
grand angle de l’æildelcend au Nez . Le temperament du Nezclt froid & ſecſelon
Les ailes du
toutes ſes parties. Son action & vtilité eſt de conduire l’air , & auecques luy quelques
nez font
mobiles. fois lesodeurs iuſques aux procez Mammillaires , & delà aux ventricules anterieurs
Tempera- pour les vtilitez ſuſdites,à raiſon dequoy Nature l'a ordoné creux . Et pource que les
mene du fuldies procez Mammillaires , conduits de Pair & odeurs , ſont doubles commele cer
Re ” ucau, & queľvn ſans l'autre pouuoit eſtre bouché : à ceſte caute Nacure a ſemblable.
Action & mentdiuisé lecreux du Noz en deux par vn moyé cartilagineux , à celle fin que ſi l'on
prilité.
eſtoiceſtouppé, l'autre demeuraltouuere, pour porter air au cerueau , pour la genera
Pourquoyle zion & conferuation de l'eſprit animal. Les deux trousduNez montenc en haut, puis
nez, eft dou.
ble . deſcendét en bas au dedans de la bouche : & vont ainſi anfractueux , de peur quel'air

froid & lapouſſiere n'encre en la canne du poulmon.Iceux trous ſont auſſi conſtruias
pour aider à la reſpiration. Les autres vtilitez du Nez ſont, qu'il preſerue & garde des
dangers extericurs l'inſtrument de l'odorar. Dauantage ilſert à embellir la face.
De l'Anatomie, 189
A
Des muſcles de la Face. С на Р. VIII.

Pres auoir ainſi demonſtré les ſuſdites parties, fauc venir aux
muſcles de la face,appartenáscant aux leures qu'à la maſchoi Dix.bwist
re baſſe,pour l'accõpliſſement de leurs mouuemés,leſquels sõt muſcles de
dixhuict en nombre ,neuf de chacun coſté,à ſçauoir quatre des la Face.
leures ,deux en la ſuperieure , & autant en l'infericure : & cinq Premier
de la maſchoire inferieure. Des fuperieurs le premier plus long maſcle dels
& plus eſtroit , prend ſon origine de la pommetce , ou osiugal, lénre fupe .
& defcend par l'angle de la boucheà la léure infericure pour riente,
icelle amener à la ſuperieure, & conſequemmentfermer labouche. L'autre plusMufele
cond . fe.
court & plus large , ſort de la cavité de l'os Maxillaire tout au deſſous du trou dudic
B os(par lequel vne portion des nerfs de la troiſieſme coniugaiſon deſcend à ces deux
muſcles, « autres parties de la face ) & deſine à la partie ſuperieure de ladice lévielu
pericure,laquelle ilconſtitueauec le Pannicule charneux & le cuir, & l'ouure la ren
uerlant vers le nez par ſes fibres exterieures , & recirant au dedans vers les dents par
les interieures. Quant à ceux de la léure in fericure ,le premier plus long & plus Premier
grelle, fore d'entrele trou externedela maſchoire (par lequel le nerfſortdela partie muſcledela
incerne d'icelie auldies muſcles)& le muſcle Maſticatoire, duquel ſera parlécy- apres: lénre infe
&mórát en haut par l'angle de la bouche,deſine à la léure ſuperieure,pouricelle ame. rienie,
neràl'inferieure. L'autreplus coure , a ſon commencement du bord du menton , & muſcle ſe:
partie caued'iceluy,& fecermine à la léureinferieure,laquelle il conſtituë, l'ouurant cond.
vers lapartie interne& externe, par ſes fibres tant internes qu'externes , comme ſon
oppoſite: & pour le dire en vn mor, Nature pour le mouuement de la bouche a fa
briquécroisgenres de muſcles, deſquels les vns l'ouurent , les autres la ferment, les
autres la tournent en diverſes façons. Où fur noter que quand les muſcles d'on Action
meſme genre font enſemble leur a &tion ( comme les deux ſuperieursque nousauons
deſcrits lespremiers,c'eſt à ſçauoir va de chacun coſté, qui amenent la léure inferieu
reàla ſupericure, & leurs oppoſites ) ils font le mouuement droict. Mais quand
C l'vn d'iceux opere ſeulement& à part , il faiết lemouuementoblique,comme quand
on tourne la bouche de trauers. Orceſdi&ts muſcles ſont infiltrez aucc le cuir, ſi bien
que ceſte melange & commixion eſt ſi grandemenc confuſe , qu'on ne peut ſeparer
ny muſcle ny cuir, en ſorte qu'on les peut appeller peau muſculeule ou muſcles de
peau ( autant en eſt il au dedans des mains & picds,) leſquels meuuent les couës & lé
ures,iaçoit que la mandibule ne bouge, & ceſſe du toutdeſon mouuement.
Figure qui demonſtre les muſclesprincipaux de la face.
A Monſtre le muſcle Tem
poral.
B L'os Paris , ſous lequel il
paſſe.
D С Muſcle Maſticatoire.
B
D Le muſcle petit.
E Muſcle de la léure ſupe
rieure.
F Muſcle de la léure infea
ricure.
GHIKL Muſcle de l'os Hyoïde.
M Lc Maſtoïde.
N Partie du Trapeze .
Le Scalcnc.
P L'aile du nez .

1
Le fixiefme liure ,
190

A
Des muſcles de la maſchoire inferieure.

CHAPP. : IX .

Aintenane faut venir aux muſcles motifs de la malchoire in ferieuse ,


Muſcle Të que nous auons dit eſtre cinq, à ſçauoir , quatre quila ferment , & vn
poral.
quil'ouure ,i'entends touſiours de chacun cofté. Des gnatre qui la fer
ment, le premier & plus grand nommé Crotaphicè c'eſt à dire tempo .
ral , prend ſon origine des parties laterales du front & de l'os Parietal ,
bien auant vers le haut , & deſcend adherant audir os , & au Perreux par deſſous l'os
lugal : s'inſere à l'apophyſe de lamaſchoire inferieurenommee des Grecs Corone,pour
icelle amener directement vers la ſuperieure pour fermer la bouche . Er noteras, que

Plages mor . ce muſcle eſt tendineux iuſqu'au milieu de ſoy, lequel remplit & confticuë lacemple,
celles du & cſt ſubiect plus que nul autrc, à playes mortelles, à raiſon de la multitude des nerfs

Croraphise. diſtribuez par la ſubſtance: leſquels pour la propinquité de leur origine, promptemét
apportent danger demort,à cauſe de la conuulſion quiordinairement & le plus ſou- B
uent enſuit les affections dudit muſcle:pareillementfiebure, alienation d'eſprit,& vn
dormir profond: & pour ceſte cauſe, afin qu'il ne fuſt fubiet aux iniures externes, Na.
ture luy a baſty vne retraite creuſe come vne foſſe en l'os, puis á mis vne leuee & vn
bord fait de l'ós tourné vers ledic muſcle , afin qu'il fuſt mieux preſerué & gardé des
MuſcleMi
choſes exterieures . Le ſecond preſque auſſi grád appellé Maſticatoire ou Maſcheur,
fricatoire.
faiſant la iouë deſcend de la partie baſſe & droite ligne du plus grãd os de l'orbite de
l'ail (lequel s'eſtend en arriere pour faire vne portion de l'os lugal, ainſi qu'ilt’a eſté
dir cy deuant ) & s'inſere à la maſchoire baſſe depuis l'angle d'icelle iuſques à la fin de
la racine de l'apophyſe Coroni , pour icelle maſchoire amener en auant & en arriere,
comme en forme de meule demoulin :à cauſe dequoy Nature l'a conſtitué de dou.
bles fibres, les vnes qui ſortent de la pommette ( faite en partie du plus grand os de
l'orbice de l'ail, en partie de l'os Maxillaire maieur ) & deſcendent obliquemét & ex
terieuremene vers l'angle & partie poſterieure de la maſchoire baſſe,pour icelle ame
ner en auant.Les autres ſortent de la partie pofterieure duditos lugal, & deſcendans C
auſſi obliquement par deſſous les ſuſdites ( leſquelles ils croiſent en forme de croix
Bourguignonne)s'implancent à ladice maſchọire pres la racine de la ſuſdite apophy:
ſe Coroni, pour icelle mener en arriere.Ec à cauſe de ces deux contraires mouuemēs,
& quafi orbiculaires, ce muſcle eſt appellé Maſcheur. Le croiſicline nommé Rond,
Muſde prend ſon origine de toute la genciue laterale de la Maſchoire ſuperieure, & s'inſere
Rind .
à toute la laterale de l'inferieure, circonſcriuantles parties laterales de la bouche , de
la cunique de laquelle il eſt interieurement reueſtu , & exterieurement couuert de
greſſe ,plus que nulautre muſcle. Son action eſt non ſeulement d'amener la maſchoi.
re inferieure à la ſuperieure , mais auſſideſeruir conime de pelle ,pour ramener ſous
Aflion dia les dents la viande qui eſchappede deſſous icelles vers le dehors ,
ainſi que la langue
‫او‬
muſcle rod. fait du dedans.Le quatrielmeplus court & plus petit de tous les ſuſdicts, fore du creux
Miufeliqua. de l'apophyſedel'os Bafilaire nommce Pterigoide,& s'inſere intericurement à l'an

lamafchoire sle de la maſchoire inferieure,pouricelle auſſimenervers la ſuperieure. Et aumoyé


inferieure. de ce muſcle eſt faicte luxation deladite maſchoire, ainſi que nous avons dit . Quant D
Muſclecin- au cinquieſme & dernier des muſcles de ladite maſchoire , il monte de l'apophyſe centrode
TAI
quieſme o Stiloïde de l’os Perreux à la partie interieure du menton , pres la cõmiſſure des deux
dernier cho- os de ladite maſchoire,pour icelleramener de la ſuperieure en bas en ouurant la bou
Teesdigne
d' tre no che. Et eſt ledic muſclegreſle & tendineux en fon milieu pour ſon renfort, & char
tee . neux en ſes extremicez . Or tous ceſdiets muſcles ont eſté faicts par vne grande
prouidence & ſageſſe de Nature, pour faire diuerſes a &tions en maſchant, par di
uers mouuemens cxercez les vns apres les autres alternativement, pour piler, bri.
ſer, & broyer la viande en tres petites picces par les dents , leſquelles ſont ramenees,
remuees,tranſporteespar la langue, ſans toutesfois qu'elle ſoit aucunement offenſee,
ny priſe entreicelles dents. Et voila quant aux parties de la facc, tant contenantes
que contenuës.
3
de l'Anatomie. 191
А
Figure des muſcles de la maſchoire inferieure.
A Demonſtrele muſcle
Temporal.
B Muſcle Maſſeter, ou
Maſcheur.
С Muſcle Rond tiſſu de
diuerſes fibres.
D Muſcle puurant la
bouche , lequel a
uons dit cftreten .
dineux en ſon mi.
lieu.
E L'os Hyoïde ou de
de la langue .
B
F Vndes muſcles de l’os Hyoïde ,qui vient de la coſte ſuperieure de l'Omoplate ,le
quel elttendineux en lon milieu, ainſi que celuy quiouure la bouche.
GG Deuxmuſclesdu col,quimontent de la partie ſuperieure du Scernon.
H Muſcle releueur de l'Omoplate .
Des Oreilles & Parotides. CH A P. X.

ES Oreilles ſont les organes & inſtrumens du ſens audicif, quidi


ſtingue des voix , des ſons & des tons : compoſees de cuir & peu de
chair,cartilage,vcine, arcere, & nerfs. Elles ſont plices &entorcillees, cöpofition.
fans que pour cela elles ſouffrent aucun mal : pource qu'eſtansaucu
neméc molles & carcilagineuſes,elles obeyſſent à ce que l'on met del
ſus, comme un chappeau , ou bonner , ou morion , ou autre accouſtre .
С menedeteſte. Et ſi nature les eult fait oſſeuſes, telles choſes n'euſſent peu commo.
démentſefaire, & fe fuflent ſouuentesfois rompuës. Le molle où on pend volon
tiers les bagues,eſt nommé des anciens Fivra, & le deſſus Pinna. Et onceſté faites par
vne prouidence de Nature, de figure anfractueuſe, comme une coquille de limaçon res
ou eſcargot, faiſant la voye tortuě, auecques circuits & deitours obliques, touſiours Figu
Fibre.
allant en diminution iuſques à l'extremice du trou d'icelle , appellé Cecum foramen , pinna.
pour mieux reccuoir , & retenir l'air , & ramaſſer les eſpeſſes & differences des ſons &
voix:& generalement toures choſes que nous comprenons par l'ouye,diſperſees par
iceluyCæcum :afin que par apres elles puiſſent eítreconduites iuſques à lame
ſon
mbra
ne, qui eſtmediocrementdure, faicte des nerfs de la cinquieſmeconiugai , appel . Cacam fo. Yamen .
lez audicifs. L'vtilicé deſdites oreilles fere à la beauté de la teſte : ce qui appert eui
demment par ceux qui les ont couppecs , combien ils ſont difformes & mal- plaiſans
à voir. Pour ceſte cauſe, on les coupe à ceux qu'on veut rendre diformes & infames
pour quelque grande meſchanceté. Auſli pour auoir la ioüyſſance de la diuerſité Viilicé des
D des ſons, & principalementde la parole , & le plaiſir des harmonies & melodies qui oreilles.
ſont en divers cons & chants , tant de la voix humaine que des oyſcaux , & autres
animaux , & des inſtrumens de muſique.
Pateilement par l'ouye nous entendons en bien peu de temps, ce que le Maiſtre Bodin en
qui nous enſeigne, a acquis & preparé par vn bien long temps. D'autre part , elles ſa Repas
nous ſont comme guettes & ſentinelles, pour ouyr & entendre les commoditcz ou blique.
incommoditez de tout noſtre corps .
L'inſtrument premier & principal de l'ouye,eft vn air fortſubtil, contenu en la ca
uité diête Maſtoide ou tabourin , & nay en iceluy des noſtre premiere naiſſance, cou
yerte d'unepetite peau fort delice,faire du nerf auditif , & par l'eſprit animal eſt faite
la vertu audiciue. Semblablement ladite anfractuoſité a eſté faicte, depeurque l'air
& lesſons n'entraſſene trop impecueulement dans les oreilles, leſquels euſſent peu
beſſer ou du tout gaſter l'organc auditif: & auſi file trou eſtoit percé droict,les fons
nes'entonneroient pas ſi bien ,comeils font és lieux recourbez, eſquels ils ont rencõ.
tic,pourles faire arreſter, & mieux relonner. Auſſi qu'elles les receuroiét trop grāds
.

rinj
Le Gxieſme liure
192

& trop à coup : par ainſiils en ſeroient plus confus, & ne les pourroient pas bien diſcer- A
ner & entendre. Et neantmoins ladite anfractuoficé, on voit aduenir que l'air eſtang
trop fort agité , rompt , eſclatte , & dillipe quelquesfois cet organe auditif:cõme il ad
uient par la trop grande vehemence de l'arcillerie, du connere, groſſes cloches , & au .
tres grands bruits ſemblables.Dauantage ladice anfractuoſité a eſté faite de peur que 1
l'air troid n’entraſttrop à coup au cerucau,ny aucun corps eſtrangen'offenſait l'orga
ne auditif. Plus,Nacure a enuoyévn humeur colerique, gros & gluant , dans le trou
d'icelles pour purger le cerueau : mais principalement , afin que ſiaucunes petites be .
ſtioles eltoient entrees dedans,qu'ellesy fuſſent priſes commcen de la glux .
Or pour bien entendre comme ſe fait l'ouye , il faut premierement cognoiſtre &
La maniere conſiderer la ſtructure & fabrication de la ſuſdite anfračtuoſiçé , dõt le fait l'audition
comme fe au moyen de la membrane , quieſt compoſee de la tunique du nerf auditif, & eft con
fait l'ouyc. duë interieurement dans le trou de l’oreille, comme la peau d'vn tabourin . Car icelle
eſt enfee & réduc de l'air implanté des noſtre premiere naiſſance par l'eſprit auditif,
B
lequel eſt enclos dans la cauité de l'apophyle Maſtoïde, de laquelle avõs parle cy del.
ſusau Cecum foramen :à ce qu'eſtác frappee de l'air exterieur,ceſtemembrane reçoiue
l'obiect, quieſt le ſon & la voix : qui n'eſt autre choſe qu’vne qualité permanente du
departement & fraction de l'air,faite par la colliſion & rencontre de deux corps durs
deſqueis l'vn a receu le coup , & l'autre l'a donné . Orceſte colliſion & fro :ſſementse
L'obicat de ſpand en l'air , comme d'une pierre iettee en l'eau,dont nous voyos parlagiration d'i
ponye fone celleles cercles & rondeaux ou circonuolutions, s'eſtendre en rond dedans l'eau , non
les ( yons &
1 noix. par tout , mais en vne certaine clpace . Ou comme l'on voir és fontaines & tuilleaux
qui par vn canal eſtroit & ſinueux,coulēc à travers de quelques licux fort rõpus,rabo.
teux & pierreux , l'eau venant à heurter contre les obſtacles & empeſchements quiſe
::21
rencontrent oppoſez au deuant de ſon cours , repouſſee contremont , faire pluſieurs
tours,plis & replis ,quiſe reieccent, s'eſtēdans & s'eſlargiffans fior apres flot, les vns ſur
les autres ,diminuans ſuccelſiuement & preſque inſenſiblemét tant qu'ils ſoient finis.
Demeſme ceſte fraction d'air renduë en lieux couuerts & cauerncux côme és ciſter

nes,puits,Egliſes,ou és eſpeſſes foreſts,rēd pluſieurs ſons las vns ſur les autres ,dunela
duplication eſt appellee Echo . Ainſi eſt faicte en ceſte façon l'audition par l'air , qui
eſt le moyen de l'ouye : lequel eſt double, à ſçauoir exterieur & interieur. Parl'exte. G

rieur ſont porcees lesinondations , dont eſt fait ledit Echo . L'interieur eſt celuy , qui
L'air est eſt enclos dans ladite cauité Maſtoide, appellé tabourin des oreilles , où il y a petites
moyen de
cachetres, deſtours & contours où ſont elabourez les cons, & ſons diuers, ayans des
l'ouye.
Tabourin oppoſicions & rencontres , commel'on voit que les choſes creuſes ſont plus propres
des orcilles, à receuoir les ſons queles choſes malſiues,ainſique voyons d'vn tabourin , tromper
72103
tc , & aux inſtrumens de muſique, & au Cæcum foramen ,lequel n'eſt pas pur, maisté.
peré par l'eſprit audicif , nay auec nous . Et qu'il ſoit vray , les operations de tous les
ſens ne le font que par l'eſprit qui eſt en eux , comme le ſens auditif eſt pour receuoir
**
leſdites inondations, ou circuitions : & iceluy touche ladice membrane , laquelle ainſi
que la peau du tabourin ,reçoitles ſons de ſon air , quieſten iceluy enclos,appellé air
implanté . Parquoy de là vient le tintement ou cornement d'oreilles, quand au dedas
d'elles il y a quelques vapeurs contre le naturel, ce qui trouble ledit air temperé , &
l'eſprit auditif. Or cour cela n'eſt aſſez pour parfaire l'ouye : car encore pour mieux D
diſtinguer les ſons & voix , Nature a produict crois petits offelets : l'vo appellé incus,
l'autre Malleolus,en noſtre langue enclume , & marreau : & le troiſieme Stapés,pource
qu'il repreſente vneſtrier d'vn cheualReiltre:ou Deltoïde , à raiſon qu'il reſſemble à
Grandean. Yn Delta des Grecs ,ſituez derriere ladice mébrane : leſquels Malleolus & incus eſtans
notation . meus & agitez des inondations de l'air exterieur frappans ladite membrane,conſti
tuent les differences des fons & voix , ainſi que fait la corde ,quieft au travers de la
peau poſterieure d'vn tabourin . Comme pour'exemple, quád ces petits of eletsſont
Trois offe. legerement meus & agirez, ils repreſentent à la faculté auditiue & au ſens commun ,
lets feruans vn ſon graue & obſcur :mais lors qu'ils ſont fort agitez ; ils luy repreſentene vn ſon ef
à l'owyc. clatant & violent,commeen la commoció de l'air faicte par le tonnerreou artillerie ,
cloches , clairons , & ſemblables: & finalement ſelon qu'ils tont agitez entre ces deux
extremes , approchans plus ou moins de l'un ou de l'autre, reprelentent diuers ſons
au ſens commun, deſquels ie te donneicy la figure.

1
De l'Anatomie. 193
A Figure delincus,Malleolus, & Stapés,
7
A Malleolus,
B Incus,leſquels ſont adherans enſemble.
A Malleolus,
B Incus,ſeparezl'un d'auec l'autre .
C Stapés ou Eſtrier. L'vlage duquel nul Anatomiſte n’a encores eſcrit,au moins
que ie ſçache, Eſt ce poinc pour ſouftenir la membrane du Cæçum foramen
elleué en haut,àfin que la faculté audiciue loic plus parfaide?
Ette
ſuffiſe dela declaration dela vertu Auditiue :maintenant nous
fautretourneràparlerdes Parotides.
Apres les Oreilles ſelon l'ordre Anatomique,faut conſiderer & monſtrer les glan- Dés PATO
B des canedes Emundoires du cerueau ,nommeesParotides ( leſquel'es ſone lituees, & rides.
miſesſous,& aucunement derriere la partie bafle de l'Oreille ) que celles quiſont au
deſſousde la mandibule inferieure, & plus vers la partie poſterieuc pardeflus les mu
íciesdel'os Hyoïde,& aucuns de la Langue , aulquelles ſe'font les Eicroüelles, & au L’vfage
tres abſcez froids: detoutesleſquelles cu noteras ſeulemencen ce liew -cylvlage. Fr des Parori
premierement des Parotides,leſquelles ont eſté faictes de Nature , àfin de recevoir la des.
matiere veneneule & virulente , repouſſee par le cerueau en icelles , par la multitude
des veines,& arteres illec diſtribuces.Quantaux autres , elles peuuene ſeruit à la diui
fion des veines illec diuiſees, & humectation de la mandibule , ou ligamens, & mem . Vlige des
branesd'icelles , qui pouuoient eſtre deſſeichez par le concinuel & frequent mouue- Glandules
ment de ladite malchoire. Les autres conſiderations requiſes en icellesont eſté de.
clarees au premier liure.
De l'os Hyoide, é de ſesmuſcles. CHAP. XI.

С
Aintenant faut pourſuivre & monſtrer les muſcles de l'os Hyoïde : pour
laquelle choſecommodément faire, il faut premierement deſcrire ledicos
& la ſicuation. Et pour commencer, tu noteras que ſa lubſtance eſt celle Subſtance.
que des autres. Sa figure eſt telle que la lettre Grecque ( Y ) aumoyen Figure.
dequoy il a eſté ainſi appellé. Sa compoſition eſtde pluſieurs os conjoints & liezen . Copofirion.
ſemble par cartilages : & auſſi aux beſtes brutes , par ligamens , eſquelles il ſe trouue
beaucoup plus long & en plus grand nombre. Eceltcedicos ſitué ſelon la baſe ( en la siləstions.
partic anterieure boſſud,pour plusgrande aſſeurance : & en l'interieure vouſtee)pour
contenir & receuoir la racine de la langue)ſur la partie ſuperieure du cartilage du La
D ryoxdoméScuciforme(duquel il ſemble eſtre ſouſtenu par deux apophyſes,montan
tes d'iceluypres de la baſe dudit os ) & de la ſuſdite racine de la langue. De laquelle ba
ſe aſſezlargeil dreſſe deux cornes vers les parties laterales de la langue, vne de cha.
cun coſtė)i'entends aux homes ) leſquelles s'attachentpar certains ligamés produits
d'icelles,àl'apophyſe Styloïde: au contraire desbeſtes, auſquelles parmultiplication
d'os conjoints/commenous auons dit) par ligamens , elles deſcendent iuſques à la ra . Connexion
cinc deladite apophyſe Styloide. Saconnexion eſt auec les ſuſdices parties , & autres Tempera
quite ſerontcy-apres declarees.Son temperament eſt telque des autres.Sønvlage eſt Vlag
meni.e.
debaillerligamens à quelques muſcles de la langue,quiſortent d'iceluy : & de bailler
inſertion,cant aux deux anterieurs & fuperieurs du Larynx, qu'aux ſiens propres,deſ.
quels nous fauc maintenant parler.
Or ſonc les muſcles de l'osHyoïde,ſelon aucuns,huilt en nombre , quatrede cha- Des mus
cuncoſté:deſquels il y en a deux que Galié refere,l'vn entre lescommuns duLarynx,cles de l'as
Taurreentreceux qui meuuent l'Omoplate vers le haut. Toutesfois commée que ce Hyoide.
ſoir,lepremier des quatrepréd ſon origine de l'apophyſe Styloïde,& paſſant par del.
ſuslapartie nerueuſe du muſcle ouurant la malchoire inferieure, s'inſere aux cornes
duditos Hyoïde. Ce muſcle eſt forstenuë delié,& aucunement large, & facile à cou. Premier,
rinj muſcle.
194 Le ſixieſme liure ,
per,fion ne ſe donne de garde,en ſeparantceluyqui ouure la machoireinferieure.Le A
Second . Iecond monte de la partie ſuperieure de l'Omoplate pres ſon Apophyſe Coracoïde,
ou bec de Corbin , obliquement au commencement des cornes dudit os. Er eſt ce
ſtuy.cy rond & nerucux au milieu , pour ſon reforciſſement, comme celuy aufli qui .

ouure la ſuſdite machoire . Galien , comme nous auons dit , le refere entre ceux qui
mcuuent l'Omoplate en haut . Le ciers a ſon origine de la partie ſuperieure du. Ster
Le tiers. non , & ſon inſertion en la racine ,& baſe duditos Hyoïde :coutesfois Galien le refere
entre les communs du Larinx :le dire duquel doit auoir pluſtoſt lieu aux beſtes brutes
qu'en l'homme , veu qu'en iceluy nous netrouuonsce muſcle ſortir , ou eſtreinſeré 11
.

Le quart. au Larinxcómeon le trouue aux beſtes. Le quatrieſme & dernier deſcend interieu .
rement du menton à la racine de l'os Hyoïde, & meuuent ceſdirs muſcles auec leurs
Axion . compagnonsledicos Hyoïde vers le haur ,comme les premiers :vers lebascomme les
ſeconds :vers lederriere , commeles troiſieſmes : vers le deuant , comme les quatrief
mes & dernieres . Icte declarerois d'où tous les muſcles ont leurs vaiſſeaux , ſine l'a
uois faiet parlant de la diſtribucion des nerfs ,veines ,& arteres .
Dela Langue, CHA P. XII.
B
A langue eſt deſubſtancecharneule, rare , laxe , molle , & toute diverſe de
Subfiance. l'autre chair , & principalement depuis quelque peu apres l'originede fes
muſcles : qui a eſmeu quelques-vns à faire vne quatrieime elpece de chair
propre à la langue , differente dela chair muſculeuſe, fibreuse, viſcereuic. Sa quan .
Quantité. ticé eſtcelle, qu'elle ſe peut aiſément nouuoir & remuer dans la bouche : dedans la
quelle a fallu qu'elle füſt encloſe comme dedans vne caverne, pour les caules quite
Figure. ſeronc declarees cy. apres.Si figure eſt criangula te, plus grofle,& mieux exprimee en
ſa baſc,qui eſt contre la racine del'os Hyoïde , qu'en la poincte: auquel endroit per
Copofition. dant la figure de Triangle,eſt faicte plate & large. Sa compoſicion eft d'vne membra
ne(qu'elle a de celle qui reyeſtintericurenienttoutela bouche ) de muſcles qui teſe
font expliquez à ceſte heure :de quatre portions de nerfs, deux de chacun coſté, ve
nans,l'vnde la tierce conjugaiſon en la fuſdice cunique,& l'autre de la ſeptieſme,efté.
du par la luoſtance des muſcles iuſques àſon extremité , pour icelle mouuoir, celle
mét que les nerfsſenſitifs tiſſent & ourdiſſent la cunique excerieure ſans toucher aux
muſcles qui ſont deſſous, auſquels ſe diſtribuent les nerfsmotifsdela ſeptielme con. С
iugaiſon. Orles ſenſitifs ſont pour diſcerner des ſaueurs , & les autres pour faire les
mouuemens d'icelies.Plus elle eſt compoſee de deux veines , & deux arteres , vne de
chacun colté,qu'elle reçoit des lugulaires cxcernes & Carotides : leſquelles s'en von
manifeſtemēc iulqu'au bout de la lungue par ſa partie inferieure àfin qu'aux affe& iós
de la bouchc, & parties , d'icelle , comme auflidu Larynx, puifle eſt faicte miſſion de
fang:Et func telles veines appellees vulgairement Renalcs,ou noires.
Quant à les muſcles, ils ſont dix en nombre, cinq dechacun cofté :deſquels lepre.
Vsmes
males . Re mier eſtroicen lon commencement,& large en la fin,deſcend de l'apophyleStyloïde
Dix mul au haut coſte de la langue,laquelle il tire en haut auec fori compagnon.
origine interieurement de la baſſe maíchoire à l'endroit des
des de la Le ſecond prend ſon
langue. dents molaires, & s'implante au coſté bas de ladite langue,pouricelle cirer en bas.
Letroiſieſme procede de la partie interieure du menton, & s'en va à la racine de la D
langue,pour icelle chaſſer & pouſſer hors de la bouche.
Le quatrieſme& le plus grand & large de cous,& tiſſu de tous genres de fibres, Cort
de la baſe de l'os Hyoïde, & deſignc tout en la parrie baſſe de la langue , laquelle auec
ſon compagnon il ramene en arriere dedans la bouche .Par le benefice de ces muſcles
clles’alonge,ſe retire ,ſc hauſſe,ſe baiſſe,ſe recourbe,quand elle veut,& ſert àprendre
les viandes .
Situation Le cinquieſme & dernier vient le plus ſouuene de la partie ſuperieure des cornes de
Nombre. l'os Hyoïde,& s'en va au coſté de la Langue entre les deux premiers,pouricelle ame. 3

Connexion , ner à la partie laterale & coſté de la bouche . La ſituation , nombre & connexion de
Tempera- ladite langueteſont aſſez notoires ,par ce quia cſté cy-deuant dit ſur la compoſition
ment.
& ſituation d'icelle.Son temperamenteſtchaud & humide , comme de toute autre J

Action,
wtilisé.
« chair. Son adion & vtilice'eſtpremieremétde ſeruir d'organcàla falcultéguſtatiue,
au moyé dequoy elle a eſté faite rare & fpongieuſe, afin que plus facilemétellepeuſt
de l'Anatomie . 195
A admettre & receuoir par ſa fungofité,les ſaveurs, par lemoyende la ſaliue, vehicule
d'icelles.Secondment , pour la confirmation & articulacion de la voix : à caule de.
Pourquoi
quoy elle aeſté fexile & mobile par toutes les parties de la bouche.Telle action eſt la la langue
plusexcellente qui ſe face par lavertu & faculté de l'ame, pource qu'elle eſt cruche oft spon
ment &meſſagerc descogitatiós de l'eſprit,& pour glorifier Dieu par deſlus tous les gicule a
autres membres . Tiercement,pour ſeruir à maſcher & briſer les viandes, & à les aual mobile.
Jer:& pource a eſté fai& e comme vne pelle ,delaquelle on remet le blcd qui eſchappe
fous lameule : Etapres que la viande eſt bien maíchee, elle la ramaſſe en forme de pi
lules, afin qu'elle loit mieux auallce .
Orpourceque ladice Langue, quand elle eſt deſſeichee , devient plus tardiue & in
habileàfaire ſon mouuement ,commeil eſt manifefte à ceux quicntgrand ſoiftanc
par fiéure ardente que par autre cauſe;Nature y a merueilleuſement pourucu,qu'elle
ne fuſtmoleſtee de relaccident,en ayant mis à la racine d'icelle deux glandules fort
ſpongieuſes,nommees Tonſillesou Amygdales ,vnedechacun coſté :leſquelles com Tonfilles
me eſponges,ſuccent& reçoivent perpetuellement cane du cerucau qued'ailleurs, un de la lana
B humeuraqueux& ſaliual,par lequelelles lubrifiene & humectent continuellement, que
non ſeulement la langue , mais auſſi toutes les autres parties de la bouche, comme le
fiflet,& l'eſtroic de la gorge,& deux autour du filter, & deux autour del Oelopha
gue.

Dela Bouche. CH A P. XIII.

Vis que nousſommes tombez ſur le propos des parties contenuës


dedās la Bouche , ilfaut pourſuyurebriefuement ce qui reſte digne
d'obſeruacionen icelle.Et pourtant noteras,que ce nom de Bouche
emporre- & ſignifie la capacité miſe entre la maſchoire ſuperieure &
inférieure & les dencs & leures ,le Larynx & Ocſophague.
L’vlage de laboucheeſt pourcótenir la langue, & luy ayderà faire
& accomplirles actions.Ěc combien queiuſqu'àpreſent pluſieurs deſes partiesayentvfagede la
eltédeclarees, commeléures , dents , machoires, langue , confilles, & aucunement bouche.
les trousdu Palais deſcendans du nez , ſi eſt ce qu'il reſte encores à declarer que c'eſt
qu'on appelle le Palais , la Luette , & Pharynx ou Faucés . Et pour commencer , le
Palais n'eſt autre chole ,que la partic ſuperieure de la Bouche, circonſcripre des Du Palais
denrs& genciues de la malchoireſupcricure,laquelle reueſtuë dela tunique commu- LePalais.
nedela Bouche ,eſt faite ridec , aſpre, & inegale , afin que par celle aſperité & inega etfait ri
litélaviande remuse & agijec entre la langue & le Palais , fuſt mieux brilce & coro -dé, aspre,
minuce. Et quant aux nerfs qui deſcendent de la quatrieime coniugaiſon en ceſte inegal, a
partie,ſi tu les veuxtrouuer, il te faut ſeparer ladite tunique du deuant de la bouche pourquoy:
Lit manie .
au derriere, & tu les trouveras ſur les parties laterales & pofterieures des os dudit Pa re d e irone
D lais,leſquels circonſcriuent & cerminent iceluy,lur le commencemée des trous inter HOT les
nesde la Bouche,qui deſcendent ( comme nous auons dit du nez , & de l'endroit des nerfs ve
apophyſes Clinoïdes.Ecceſdits trous ont eſté ainſi ordonnez de Nacure, afin que par nans de la
iceux la reſpiration fuſt faicte en dormant,ou en autre temps, & aufli à fin que le nez me
quatrief
conin
1

cſtant intereſſe & empeſché,les excremensdeſcendans par iceluy, peuſſent eſtre euaguiſon 116
cucz& deriuez par la bouche. Dauantage , elle eſt cilluë de filamens nerueux , pour Palais.
diſcerner des laueurs comme la langue ,leſquels compoſent vne cunique entre dure& V lige des
molle. Car ſi elle euſt eſté trop dure, comme vnos ou cartilage , elle n'eut peu ſentir: 170ms du
eſtant auſſienta
par crop molle , les viandes trop dures , acres , & poignantes , la mcurtri. Palais.
toient & meroient,

Del'Vuule ou Luette ,ou Gargarcon. CH A P. XIII .

Vant à la Luette , par icelle nous entendons vn petit corps charnu &
ſpongieux, de figurequaſi d'vne pomme de Pin , ſuſpendu perpendiculaj
rement à la fin du Palais , & baſe de l'os Chriſtæ , qui diuiſe les deux trous Vlage de
dudit Palais deſcendans du nez ſur l'entree du Larynx , à fin qu'iceluy le Luelle.
corps illec mis & ſitué puiſſe rompre l'imperuolité de l'air inſpiré , & par ce
moyen retardanc , puiſſe faire qu'il ſoit aucunement moderé de la trop gran
196 Le fixieſme liure

de froideur , par la chaleur de la bouche : Et d'auantage , afin qu'il ſerue comme de


A
Plectre à la voix ,diuisát l'air expiré,en force qu'il puiſſe eſtre diffus par toute la bou

che,pouren icelle reſonanceſtre articulé & formé de la langue.En quoy ladite partie
La luette, n'appert auoir pecic vſage,veu qu'on void par experiệce,que ceux eſquels ceke partie
partie à la
eſt inciſee, ou par aucres accidenes corrompuë iceux ont nó ſeulement la voix viciee,
wie necesa
faire. parlans du nez, mais auſſi en la par fin ils ſentent leur inſpiration plus froide dedáš les
Poulmons : au moyen dequoy , s'ils viuent long temps , ils deuiennent Phtiſiques.
DA Pbe Pareillement elle garde que la pouſſiere n’entre par la cannedu Poulmon en chemi.
‫גמרי‬.. nát par la pouſſiere. Or par le Pharynx ouFaucés nous eſt ſignifiec la partie intericu
Vlage du re & pofterieure de la bouche,qui eſt miſe, deuant l'écree duLarynx & Oeſophague,
Pharynx. laquelle eſt ainſi appellee, pource que c'eſt vn lieu anguſte & eſtroit,pourramaſſer &
duLarynx ou de l'Oeſophague.
adaper l'air reçcu dedans la bouche,ouvidc,au trou

Du Larynx ,ou Næud dela gorge. CHAPS, XV.

Eſte maintenant que nous pourſuyuions l’Anatomic du Larynx, B


en laquelle premierement fauc demõſtrer que c'eſt qui eſt enten
Aucuns
du par iceluy : puis apres pourſuyure les choles accoultumees.
l'apepllent
le morceau Doncques pour cõmencer, fauc ſçauoir que par ce nom de La
d'Adam , rynx n'eſt encēdu autre choſe que la teſte & extremité de la Tra
Qu'eſt- ce chee artere,qu'o appelle vulgaireméc , Le morceau d'Adā ,lequel
que La eſt pl' de ſubſtáce carcilagineule,qu'autre.Sa quátité eſt aflezno.
yynx. cable ,coutesfoisdiuerle ſelon les aages,téperamés , & grandeur ou peciteſſe des corps.
Subſtance. Sa figure repreſente plus qu'autre choſe ,la ceſte d'vne Auſte d'Allemand.Sa compoſi.
Quantité. cion eſt de dix huia muſcles, c'eſt à ſçauoir, neufranc d'un coſté que d'autre , pareils
Figure.
en quantité,force, & a&ion : & de trois cartilages joints enſemble par harmonie des
Copofirion.
Trois carti- veines,arteres, & nerfs,ainſiqu'ile'a eſté demonftré parlantdesvaiſſeaux Semblable.
lages as ment de doublecunique, vne interne, & l'autre externe,ainſiqu'auósdit pourſuyuans
Larynx. la Trachee arterc.Ily a trois Cartilages conjoints enſemble par certains ligamens &
Le Carti- muſcles.L'anterieur, & le plus grand eſt appellé desGrezs,Thyroïde, & vulgairement c
lage ScH-
tiforme og Scutiforme,pourla ſimilitude qu'ila à vne rondelle , ou vn pauois . Le ſecond moyen
en quantité & poſterieur,eft celuy qui n'a point denom ,& partant eſt appellé des La
Thyoide.
Le carvila - cinsCartilago innominata. Le tiers & dernier & pl petit de tous,eft couché ſurlesbords
geſansnom . laceraux & ſuperieursſur lequel il fait & conſtituë vne figure ſemblable à vn biberon
Cartilago de poc à huile ou aiguiere : à cauſe dequoy a eſté appellé des Grecs Arytenoïde , & fc
innomins- peut ſeparer en deux. Ces Carcilages ainſi conjoints & adaptez enſemble , font la ge
neration & diftin & ion de la voix par lebenefice de l'Epiglotte , duquel parlerõs bien
Le Carti
colt : enſemble de leurs muſcles, leſquelsdilatent & ouurent , compriment & ſerrenç
lage Ary
tenoïde leſdits Carcilages , & en ce faiſant font les diuerſitez des voix. Exemple. Lors qu'ils
Semblable s'ouurent ils font la voix ,groffe,come Baſſe-contre. Au contraire,quád ils ſont com
à un bibe- primez, ils fonc la voix greſle ,come vn Deſſus: & ainſi ſelon qu'ils ſeroncaſtraints ou
ron. ouverts,plus ou moins, ils feront diuers tons de voix . Pource donc qu'il eſtoit beſoin
L’ufage du que ces Cartilages fuffene
mobiles,au moins l'Arytenoïde,& Thyroide,Nature a dó .
Larinx.
Dix -huit nédix- huic muſcles auſdits Cartilages , à ſçauoir neuf de chacun coſté :deſquels il en
y a trois communs, & fix propres.Lepremier de communs,qui eſt caché ſous le croi . D
muſcles au
Larynx. ſieſme des muſcles mouuansl'os Hyoïde , prend ſon originede la racine duditos , &
***
deſcendant obliquemenc, s'inſere å la baſe du Scutiforme, pour le dilacer en haut &
en bas.Le ſecond monce obliquement de la partie intericure du Scernon , tout le lóg
de la Trachee artere ( au moyen dequoy il eſt appellé Bronchique ) en la partie baſſe
& laterale dudit Scuciforme, pour l'ouurir & dilater par ſes ailes : & eft trouué cedic
muſcle dés ſon origine,iuſqu'à quelque partie de ſon chemin , adherác eſtrojtcement
auec le ciers de l'os Hyoïde:ſous leſquels ſe manifeſte vn corps glanduleux tant d'vn
coſté que d'autre , tour à l'entour de la partie anterieure & fuperieure de la Trachee
artere,à l'endroitqu'elle ſe lie auec leLarynx :lequel corps glanduleux refere pluftoft
vneſubſtance charneuſe que nulle autre :jaçoit que ce ſoit vne gládule , laquelle pour
Galien au auoir eſté arrachiee par vn Empirique és affections nommees Eſcroüelles, apporta
lin.de lo conſequence de perdicion de voix d'vn coſté pour l'cuulſion dunerfRecurrens,mon
cis affectis. tant par deſſus ceſte -diteglandule pouraller au Larynx , comme dit Galien au liure
de l'Anatomie. 197
A
Delocisaffectis.Le croiſieſme muſcle& dernier vient de la partie antericuredes ſpon
dyles dúcol,couché tranſuerſalementſur les parties laterales de l'Ocſophagucaux
ailes & coſtez du Scuciforme,pour le ſerrer către le ſecod cartilage. Oriceux muſcles
foncappellezCommuns,pource qu'ils prenentleur origine d'autre particque du La
rynx,pour s'inſereren aucuno partic d'iceluy,tout ainſi queles propres,à cauſe qu'ils
viennent despartiesdu Larynx melmes:leſquels nous auos direltrelix de chacunco.
Até, done le premier forc de la partie anterieure du ſecond cartilage, achevanc lecercle
ſous la baſe du Scutiforme,& montant obliquement,s'inſere à la baſe dudit Scurifor- Premier
meverslederriere pourlaconfirmation & dilatatio diceluy.Leſecond vientparcıl-muscleprom
pre au
lemene du deuxieſme Cartilage de l'endroit où il s'accache auec le premier,& s'en va ynx .
obliquement croiſant le premier en croix Bourguignonne en la partie interieure , & second.
anterieure du Carcilage nomméThyroïdepres de la bale,pouriceluy ferrer contre le
ſecond. Letroiſieſmemontedire &tement de la bale poſtericurc du second Cartilage, Troiſieme.
& àla baſe du ciers appellé Arytenoïde,pourl'ouurit & fermer auec le ſecond mulcle. Quatrief
Lequatrieſme monte auſſi du coſté du ſecond Cartilage pres l'origine du ſecond mu. me

B fcleaux coſtez del'Arycenoide ,pour aulli l'ouurir & lerrer auec le ſecond. Lecin . Cinquies
quieſmeprendſon origine du milicu interieur du Scuriforme,& detine à la partie an- me.
terieure de l'Arycenoïde, pres la fin & inſertion du quatrielmo pour ſerrer leditcar- Sexieſme.
eilage.Le fixieſne & derr er monte de la baſc pofterieure de l'Arycenoïde,en la bate
anterieure delay-meſmes pourle ſecrer. Ecnoreras,quctous ces muſcles cy (leſquels
onc leur origine debas en haut) reçoiuenc ramcaux des neits Recurrens, mais princi.
palemenc ceux quiovurét & ſerrét l’Aryrenoïde.Estefutiſe des muſcles du Larynx. situation .
Or quant à la ſituation,connexion,temperament, & vlage dudit Larynx , il tepeurConnexion.
cítremanifeſte & cogneu,parce que nous auons traicté d'iceluy iuſqu'à preſent.Tou. Temper4-,
tesfoistu noreras, quec'eſt vne choſetres difficile de pourſuyure les choſes accouftu- mens com
mees aux parties organiques , pour la diuerſité de leur compoſition. Parquoydeſor- uſage.
c mais,quant à la ſubſtance,temperament,& autres,que pourbriefuetévous laiſſerons,
cu auras recours aux parties ſimples & ſimilaires,deſquellesces organiques ſont com..
poſees:Comme ſi pour exempleon demande de quelle ſubſtance & temperament eſt
le Larynx,cu reſpondras qu'ileitde ſubſtance cartilagineuſe & charneule , & par ain.
li de temperament froid & ſec,chaud & humide. Dauantage ilfaut entendre, que de De l'Epin
la racine dela Langue eit drefié vn corps cartilagineax & membraneux ,afin qu'il ſe glorte on
puiſſe micux mouvoir,à ſçauoir elleuer & baiſſer :car ce qui eſt plus molquede raiso, langueire.
tombe afliduellement, & auſſice qui eſt trop dur, ne permet eſtre renucríé : doncila
fallu qu'ilne fuc trop durny trop mol , afin qu'il demeuraſt elleué quind nous inſpi
rons,& qu'ilſe couchaft & baiflaſtquád nous auallós. 11 eſt le principalinituumenede
lavoix,laquelle ne pouuoit eſtre bien faire,ſile paſſage n'eſtoit eſtroic. Il ſert de com
primer le paſſage & conduit des cartilages du Larynx , & principalemči l'Arytenzide:
il eſt touſiourshumided'une humiditénaturelle ,& lors qu'il eſt deíleiché par fieure
D ou autremét,on nepeut parlers'iln'eft humecté, & toutes les autres parties de la bou. La figure
che.Il le vient lier & attacher d'un coſté & d'autre , par la commune membrane de la de l'Eps
bouche,avecles parties laterales de l'Arycenoïde iuſqu'à la partie porterieure, pour lomblable
gloese off
couurir& deſcouurir l'orifice du Larynx , ainſi qu'un couvercle couure va pot, à fin ‫ܬ܀‬lanche
qu'en deglouciſſant & auallant le boire oumanger,rien ne deſeendepar ledit Larynx d'unhaus
1 dedansla Trachee artere: i'entends en ſigrande quantité,qu'il empeſchaſti'air de for-bois.Ga.de
cit,& entrer à ſon aiſe.Car ilne faut penier qu'ille couure ſi exactement qu'ilne cou - iv . des
le touſiours quelque perite liqueur par les parois interieures du Larinx, pour aucune parties.
ment humecter les poulmons:autrement en vain on ordonneroit le Lohothsés affe. Qu.stre
đions pectorales. Et pour ce que celcorpseſtoit capable du mouvement volontaire, l'E pigloide
muſcles re,
à ceſte cauſe,ſelon aucuns,luy ont eſtébaillez quatre muſcles , deux qui l'ouurent , & deux
deux qui le ferment,vnde chacun coſté.Ceux qui l'ouurenč; defcenderit de la racine ouurans to
delosHyoïde,& s'vniſſans en leur inſertion,deſinent à la racinepofterieure de l'Epi deux fer
glotte.Lesautres qui le ferment ( aux animaux eſquels ils ſe trouuent) viennent inte- munca
qu
tieurement entre la cunique d'iceluy,& ſon cartilage. Les atic
1
1 Orquant à ces quatre muſcles,ie nelesay iamais veus ny diſcernez aux hūmes, ainſi muſcles de
que i'ay fait aux beſtes brutes , jaçoit quei'aye mis toute peine & diligence à les trou -l'Epiglotte
ne ſe trous
uer.A ceſte cauſe aucus ont voulu dire, quece petit corps icy ,quali fait en forme d'v. Hent ***
nepetite langue,n'eſtoitcouchény adapté ſurle Larynx,en mangcác ou beuuãt, que bommes.
ſme
198 Le ſixie liure

par la peſanteur des choſes tranſglouties : & qu'en autre temps àraiſon de la cocinuel A
le reſpiration , ildemeuroit releué, pour delcouvrir ledit Larinx . Finablement reſte

ſeulement ſur ce propos ,à conſiderer deux petites ſinuoſitez ou fiffures, leſquellesNa.


cure a miles ſous ledit Epiglotte dedans le Larynx : vne de chacun coſté à fin que fide
forcune quelque choſe eſchappoic du boire & manger,dedans ledit Larynx , il fuft là
retenu :& àfin auſſi que l'air entrant trop impetueuſement, fuſt aucunement rebou .
ſché & refrené par ceſdites ſinuoſitez , ainſique le ſang & eſpric encrant au cæur par
les oreilles d'iceluy.

Du Col& de lesparties. CHAP . VI.

Outes ces choſes ainſi declarees, il faut maintenant paſſer au Col , lequel
nous definirons premierement , & puis pourſuyuronsſes parties cane com
munes que propres, deſquelles iuſques icy n'a eſté rien dit. Car de reperer
le cuir , le Pannicule charneux, les veines, arteres ,nerfs, oeſophague , Tra
chee artere, & muſcles qui montent & deſcendent toutle long dudic Col aux parties B
clquelles ils appartiennent,celeroic crauailler en vain.Parquoy ne faut que tu attēdes
par cy -apres que l'explication des Vertebres propres parties d'iceluy, & ligamensd’i .
celles tác propres ,que cómuns avec laceſte ,& deles muſcles tát communs auec ladice
Teſte & le Thorax ,que propres à luy ſeul.Pourſuyuár donc noſtre propós ,leColn'eſt
j
autre choſe que la partie de la teſte contenuë depuis l'os Occipital,iuſques au premier
Dobaition Spondyle du Metaphreneauquel nous faut premierement considerer ſes vertebres,
monſtrás ce qu'ellesont de commũ, & differét enſemble, afin que plus cómodément
& au profit du le &teur nous puiſſiõs mõltrer l'origine & inſercion des muſcles naiſſans
& finiſſans en icelle.Le Col eſt faict de ſept vertebres,eſquelles faut cõſiderer premie.
rement leurs corps:ſecondemét leurs trous , par leſquels deſcend la Spinale medulle :
tiercement,leurs apophyſes:quarcement,lestrous , par leſquels les nerfs forcent de la
nucque aux parties externes,& ceux des Apophyſes Tranſuerſes,par leſquels les vei
nes & arteres, que nous auons appellecs Ceruicales,montēt tout le long dudit Col , &
finablcmécles connexions des ſuſdites vertebres , Orquác au premier,par le corpsde с
Difinition la vercebre nous encédons la partie anterieure d'icelle , ſur laquelle l'Ocſophague eſt
du corps de couche.Quárau trou, il ne faut conſiderer autre choſe , ſinon qu'il n'eſt pas touſiours .:L
la vertebre. plus grand aux vertebres plus.prochaines du Cerueau , & eft circonſcript dudic corps,
& des crois genres d'Apophyſes partout,forsqu'au premier : c'eſt à ſçauoir , Droites,
Obliques, & Tranſueries:donc par les Droites nous entédons les eſpines du dos ,leſ
spophyfis
Droites quelles eſtásficuees à l'oppoſite du corpsdeſdites vertebres , deſcendent droitement
des verie. tout le long de l'eſpine,aucunement enclinees en bas,ainſi que celles du Meraphrene
bres du
iufqu'àl'onzieſme,où laditeeſpinecomence à ſe dreſſer en haut, ſur le changemét de
Col.
l'ordre de recepcion . Parles apophyſes Obliques nous encendons les eminences, par
-leſquelles leſdites vertebres ſelient enſemble par ginglyme, en receuát la ſuperieure,
Apophyſes
& eſtant receuë de l'inferieure . Et ſont ſituces entre les apophyſesDroites faiſans l'El.
Obliques.
pine,& les Tranſuerſes : par leſquelles nous entendons les eminences prochaines du
corps ,qui par droide ligne diuiſent la vertebre . Et ſont celdites eminences troüees ,
pour dõner paſſage aux
veines & arteres ,qui t'ont eſté nommees par cy.dcuant , leſ.
quelles entrás parle trou desnerfs vont nourrir la Spinale medulle, & leſdites verte. D
bres , & partiesappartenátes à icelles.Outre -ce ,il faut noter que le trou , parlequelles
nerfs ſortent de la Spinale medulle aux parties externes,en l'eſpinc du coleſt mis ſous
l'apophyſe Tranſuerſe,eſtant fait & conſtitué de la vertebre tane ſuperieure qu'infe
rieure , au contraire des autres , qui ſortent des vertebres de toute l'eſpine ,leſquels
font faicts de la vercebre ſuperieure : & pource en cas de luxation des vertebres,celle
qui ſe fait au Col , peut bleſſer le nerf & a &tion d'iceluy , au contraire des autres qui ſe
plans

foncau demeurane de l'eſpine. Quant à leur connexion , il faut entendre que coutes
Connexion
de verteo les vertebres de l'Eſpineont chacune fix connexions , à ſçauoir deux en leurs corps , &
bres de quatre en leurs apophyſes obliques : par les premiers,le corps d'vne chacune vertebre

l'espine. eſt cõioin et avec celuy de la ſuperieure & inferieure:par les autres ,avec les apophyſes
obliques inferieuresde lavertebre ſuperieure, deſquelles elle eſtrecetë,ainſiqu'elle ra
çoit les obliques & ſuperieures de la vertebre inferieure.llen faut excepcer la premie
revertebre,parce qu'elle n'a que quatre conexiós par ſes apophyſes obliques, tát lupe
rieures
De l'Anatomie : 199
A rieures qu'inferieures par leſquelles elle reçoit les apophyſes obliques,tác de l'os Oc
cipicalque du ſecodSpondyle. Sīblablemét faut excepter la ſeconde,pource qu'ello
n'aquecinq conexios,àſçauoir quatre par ſes apophyſes obliques,& vneparsó corps
par laquelle elleeſt coiointe auec lecorps de la tierce vertebre. Et faut icy noter, que
Naturen’ayıt point baillé d'eſpine au premier Spondyle, l'a recompēsé d'une petite
eminéce & cuberoſité ;ſemblablemér ne faiſant point yn comun trou auec le ſecond
pourl'illuc du nerf,ila eſté troué aux parties laterales de ſon corpstát d'vncoſté que
d'autre.Eraeſté fait auſſi en la partie anterieure crené & tenuë,& quaſi sás corps pour
receuoir l'apophyſe anterieure dreſſec au corps ſuperieurdu ſecod Spondyle,qu'Hi.
pocratc appelleDent,auquel leprincipalligamét de la ceſte s'attache : lequeldeſcend
interieuremét de l'os occipicalſous les apophyles Clinoïdes : & par celle articulació la
reſtes'eleue & ſe baiſſe en deuát & derriere,toutainſi qu'elle ſe meut lateralemēr,par
l'articulació du premier auec le ſecod Spondyle.Celte apophyſeeſt attachee par deux
.
ligamés,deſquels le premier eſt exterieur plus large & plus grád ,cóprenát entieremét
B toutàl'encour la ſuſdico articulació montát des Spondyles, à la telte ou pluſtoſt del
3 cendárdela teſte aux Spondyles,ainſique fait tout ligamēc paſſant mutuellemēc d'vn
os en l'autre.Lelecód eſt plus fort, & enuiróne l'articulatio; auſſiſe meſlát auec le car
cilage,lequel par ſon incerpoſició conioinet coutes les vercebres enſemble, horſmis la
premiere,ainſique cu peux voir à l'eſchine d'vn pourceau ,diviſant les vertebres Pune
del'autre.Ec detels ligamés eſt coniointe toute l'eſpine, & partie d'icelle,laquelle Na.
ture n'a voulu faire d'un ſeul os,parce que l'hõme euſteſté commeembroché ou em Pourquoi
pallé & immobile, & ſeroit cõme vneſtatuëdebois ou depierre.Quant à l’os ſacrum , mature
ileſt cóposé de quatre picces,ſansl'os appelleCaudę.Iceluy reçoit & porre les os defait l'Espio
la háche,& toutes les autres vertebres comeſur leur fondement, & vonc iuſques à la'ne d'un
reſteendiminuat couſiours de basen hauc:veu que ce qui eſt porté & ſouſtenu, doitſeml os,
cltre moindre que ce qui porte & ſouſtiết. Il y a encre icelles vertebres yne humidité
glaircuſe & eſpeſſe, ſemblable à celle qui eſt entre les autres iointures, pour faire que
lemouuemétſoit plus facile:lequel lors qu'il ſe fait, leſdites vercebres s'eſloignent &
C cſcartent les ynes des autres.Les vcilicez del’Eſpine ſont quatre: la premiere , qu'elle
cſtcome ſiege & fondement de cour l'aſſemblage & liaiſon du corps,comme la carine
eſtle fondementdetoutle navire. La ſeconde, qu'elle eſt comme le chemin de la Viilitez de
moüelle.Latroiſieſme qu'elleeſt le répart & aſſeurance d'icelle.La quatrieſme, qu'el.l'Epine.
leeſt comme le bouleuerc des entrailles, quipar dedans ſont couchees ſus icelle.
เd
M. Figure de l'Eſpine du dos.
N

SB
L'Eſpine eſt diuiſee en cinq parties , ſçauoir eſt le
8C Col,Metaphrene , Lumbes , l'os Sacrum , & la
10
Queuë.
11
Lecol eſt composé de ſept vercebres contenuës de
puis A iuſqu'à B, & marquees par 1.2.3.4.5.6.7.
LeMecaphrenede douze, lignces par C. D. entre 8.
& 19 .
DO Les Lumbes de cinq , marquees par E. F. depuis 20.
ng D
iuſqu'à 24.
201
L'os Sacrum de fix figurees par G.H. & depuis 25.
iuſqu'à 30. lequel eſt composé de trois os, & eſt le
fondement des arteres.
La queuë ou le Coccyx,marqueeentre I. & K.de
puis 31.iuſques à 34.
LL
Le corps des vertebres depuis la ſeconde iuſqu'à la
L 4 vingrquatrieſme.
ΖΟ

25 G La ſeconde vercebre nommee d'Hipp . la dent , pour


Σ

1266
ſon apophyſe quieſt icy cachcepar la premicrc,
Les Apophyſes Tranſuerſes.
Les Eſpines des Vertebres.
136H
1 f
200 Le ſixieſme liure ,

Or pource que nous ſommestóbez ſur le propos des ligamens, il me ſemble n'eſtre A
impercinenc que briefuemét nous declarions ce qu'il en faut ſçauoir . Er pour ce faire
premierement nous definirons ligament , puis monſtrerons la diucrſe accepció d'ice
Definició de luy , tiercement pourſuiurons les differeces. Quant au premier , Ligament ( ainſi qu'a
ligament.
uons dit au premier liure ) n'eſt autre choſe qu'vne partie ſimple du corps humain , la
plus terreſtre apres l'os & le cartilage , prenant le plus ſouuent ſpn origine de l'vn ou
de l'autre,mediatementou immediatement, & deſinant auſſi en l'vn d'iceux ,ou muſ
cle, ou autre partie : au moyen dequoy il eſt exangue , ſec , dur , & froid, inſenſible com
me les parties d’où ilſort ,eſtác toutesfois ſemblable à nerf , pour raiſon de lablácheur
Double aca & conſiſtence,laquelle neantmoins il a plusdure que ledit nerf. Quant au fecond , il

ception de fauc entendre que ligament cſt vſurpé generalement & ſpecialement. Generalemēr,
ligament. pour toute partie du corps,laquelle conioinct vne partie auec l'autre : en laquelle ac
ception le cuir peut eftre dit ligament , pource qu'il contiér toutes les parties internes
.
ioinetes enſemble :ſemblablement le Peritoineconioignant enſemble toutes les par
ties nacurelles , & les aſſeurane córre l'Eſpine ainſi que la membrane Pleuretique faict
des parties vitales . Semblablement les tuniques du cerveau , nerfs, veines , & arteres,
B
muſcles,membranes , & autres ſemblables parties du corps , peuuent eſtre dites Liga
mens, pource qu'elles lient yne partie auec l'autre:commeles nerfs, tout le corps auec
le cerueaue, les arteres auec lecæeur, & les veines avec le Foye . Mais Ligament ſpe
cialement pris ne ſignifie que la partie de noſtre corps , telle que nous avons dit cy.
deſſus.Les differences de ligament ſont pluſieurs. Carl'ın eit large , membraneux &
Differences
deligament. tenuë, l'aucre eſpés & rond : lyndur , l'autre mol : I'vn grand , l'autre petit : l'vn cartila.
giveux ſimplement, l'autre tenant moyen entre os & cartilage , pour l'exigencedu
plus ou moins fort & violent mouuement des parties par iceux liecs. Et voila ce qui
m'a ſemblé bon de declarer en general des Ligamens, en attendantmonſtrer toutes
les ſuſdices differences ainſi qu'elles s'offriront ſelon l'ordre de diſſe & ion .

Des muſcles du Col. CHAP XV 11 .


Muſcles
communs
dy Col. Etournant maintenant au premier propos , faut declarer & demonſtrer les
muſcles du Col,tantcommuns que propres :leſquels ſont vingt ou vingt- C
deux en nõbre,dix ou onze de chacun coité,deſquels ſepc meuuent la ceſte
ſeule , ou auec elle le premier Spõdyle, & les aucres trois ou quatre meuuent
ledit Col. Des ſept mouuásla telte , & auec elle le premier Spõdyle , les vns l'eſtēdent
& relevér ,les autres la flechiſſent & abaiſſent,lesautres la meuuenç obliquement , &
tous enſemble par leur mouuement ſucceſſif circulairement. Et ainſi faut eſtimer de
Inſtruction
ceux du Col.Mais auant que proceder à la deſcripció de l'origine & inſertion d'iceux,
pour le diſ
ie te veux aduercir qu'il faut leuer deux muſcles de l'Omoplate,nomniez Trapeze & Hoy
secteur.
Rhomboïde , deſquels afin que tu puiffes mieux monſtrer l'origine & inſertion , ou
pluſtoſt leur action ,par laquelle nous cherchons ladice origine& intertion, il lesfaut
leuer par leur inſertion qui eſt à l'Omoplate (ainſi qu'il te lera demonſtré en ſon lieu )
en les réuerſant vers leur origine quieſt à l’Eſpine. Outre plusfaut leuer le plus petic
Rhomboïde puſterieur & ſuperieur(nommé auſſi petit Dentelé )de ſon origine , qui
eſt és trois vercebres inferieures du Col , & premiere Metaphrene, & le renuerſer vers
Ion inſercion, qui eſt aux trois eſpaces de quatre coſtes ſuperieures, tout contre l'an- D
gle poſterieur & luperieur de l’Omoplate , ainſi qu'il ce ſera demonſtré par cy-apres.
Ces muſcles ainſi deſcouuerts, faut commencer à leuer les quatre qui leuent la Te
fte , & confequemment les deux qui lameuvent obliquement ,& à la parfin vn qui la
flechic & baiſſe: & ceà raiſon que tel eſt l'ordre Anatomique.Toutesfois ſi tu veux , cu
peux leuer tout le premier ſans intereſt des autres , celuy qui eſt nõméMaſtoide , qui
baiſſe & fechit la ceſte. Quant aux quatre qui la leuent & dreſſent , le premier pour
raiſon de la figure nommé Splenique,monte des cinq fuperieures eſpines du Thorax
Muſcle fple
nique. & quatre inferieuresdu Col, obliquemēr en l'occiput cõrre l'apophyſe Maſtoïdeou
Mammillaire, duquel endroit cu le réuerferas vers ſon origine . Le ſecod à raiſon dela
Muſcle En- texture eſt nommé Entrelacé , ou Entortillé , iſſant de la 3.4.& 5.apophyſes tráſuerſes
trelacé. du Mecaphrene , & le plus ſouuent de la premiere du Col , mõce droitemét en l'occi

put,enuironnanc de ſon coſté la partie inferieure & laterale d'iceluy . Cecuy.cy ſele
uccommodément du colté de l'eſpine vers leſdites apophyſes Tranſuerſes, & procez
de l'Anatomie . 201
A Mámillaires de l'os Occipital.Dauantageon le peur diuiſer en deux ou en trois , cõ
bien qu'aucc grande difficulté, pour la complicatio & entrelaceure qui eſt en iceluy.
Lecroiſielme& quatrielme, qui ſont deux des huiết pecics , quatre de chacun coſté,
montéc quelquepeu obliquemét:le premier, de toute la parcie laterale du ſecod Spó
dyle:le ſecond,decoure la partie laterale de l'apophyſe du premier qui luy a eſté don
nee en lieu d'eſpine,à l'occiput au droi& de l'eipine. Ces deux cy ſont nõmez de cous Muſcles
Anatomiſtes muſcles droits,mouuanslateſte ſeule, leſquels ne fautqueleuer & lier droits
ſans les ſeparer,nyde leur originc,nyde leur inſertion.Ec voila quant auxquatre qui
clleuét & dreſſentla teſte.S'enſuivent maintenát deux obliques de chacun coſté: der.
quels I'vn meutlateſte ſeule, & l'autre le premier Spondyle premierement , feconde
ment & par accidét la ceſte. Quant au premier contrel'opinion d'aucuns,il prend ſon
origine de l'apophyſetráſuerie du premier Spõdile,& le va inſerer deſſous l'inſertion
du premier droit : lequel ne fautpareillementque lever par deſſous ſans le couper.
B L'autre ſortde l'eſpine du ſecond Spondyle , & s'en va inſerer à l'apophyſe tráſucrſe
premier ſpõdyie,contrel'origine du precedent(combien qu'aucuns veulēc le con.
traire ) lequelte faut leuer comeles autres: afin que lescótemplant cous ainſi leueztù
puiſſes voir comeilsfont enſemble vn criangle égal. Cedernier muſcle a ſon action
contraire au precedent , cóme monſtre tres-bien ſon origine & inſertion. Ec pource
quád le premier Oblique mene la teſte obliquement versle deuant,le ſecód la rame
ne par lepremier Spondyle.Ceſtuy auec ſon cõpagnon, de l'autre colté, peuuét eſtre
dits vrayement muſcles propres du Col,pource qu'ils n'appartiennent à autre partie,
au contraire de tous les autres ſuſdits, Icy fautnoter que la teſte, ſelon Galien , à deux
mouuemés:l'vn ,droit en deuant & arriere come en ceux qui accordent ou refulent
quelque choſe:l'autre, quaſicirculaire. Le premier,ſelon Galié,le fait la premierever
tebreeſtãtremuee ſus la ſeconde:le ſecond,la teſte eſtant remuee ſus la premiere ver
tebre.En quoy il a eſté repris par lesrecens Anatomiſtes, remonſtrás que la reſte ne
peuc eſtreremuee circulairemét ſus la premiere vercebre ſansluxatio .Quant au der Muſcle
nierquifechit ladite teſte,il monte de la parcie ſuperieure & lacerale du Sternon , & Mastoide:
de la prochaine partie de la clauicule,obliquement à l'apophyſe Maftoïde de l'os Oc
cipital,aumoyen dequoy eſt appelé Maſtoide. Et ſe peur diuiler pluſtoſt en deux ſur
С la diverſeorigine, qu'en crois. Or il euft eſté meilleur tourner la teſte de tous coſtez
autanc en derriere qu'à dextre & ſeneſtre:mais ſitelle choſe euſt eſté, il ſe fuſt fouuent
faitluxation,qui euſteſté à noſtre grand deſaduancage,& au perildemort,parceque
telle facilité de mouuement ne peut eftre ſans que la ioinete ſoit fort laſche. Parquoy
Nature a mieux aiméo &troyer à la ceſte peu demouuemés & aſſeurez, que pluſieurs
& dangereux,qui eſt cauſe qu'elle n'a point fait ſa ioin &te laſche, ains forte & robuſte.
Apreslademonſtració des ſuſdicsmuſcles,faut paſſer aux trois ou quatre du col : del- Gal.lin, 12.
quels deux (qu'aucuns reduilent en vnl'eſtendenc:vn le fechiſt, & le dernier le meut chap. 6. de
lateralement, & tous par leur mouuement ſucceſſif, circulairement , comme nous ivfage des
auons dit des muſcles de la Tefte. Le premier de ceux qui l'eſtendent (i'entends tou- parties.
fiours de chacun coſté)prenant lon origine des fix apophyſes Tranſuerſes des ſix ver
!
tèbres ſuperieures du Metaphrene,ou pluſtoſtdela racinedes obliques,mõte droite
ment àBeſpinedu ſecodipondyle du col , & apophyſe oblique d'iceluy: aucuns l'ont
D appelé Tranſucrſaire.Situ le veux leuer, il ce faut prendre du coté de l'eſpine,leren
uerſant versles apophyſes Tranſuerſes: ou bić, veu que c'eſt le dernier & plus proche Muſcle
des os,ficu veux,tu ne ferasque le ſeparervn petit de ſon cõpagnon parla diftin & io Tranfuer
de leurorigine:laquelle ſicu trouuesdifficile ,net’en eſmerueille: car à la verité il lefaire.
trouuc obſcure ſeparation diſtin &te de celuy.cy avec ſon compagnon nommé Efpi.
neux,lequel ſorcant le plus ſouuent des racines desſept ſuperieures eſpines du Meta
phrene,& de la derniere du col,s'inſere aux autreseſpinesdu col: Et pource à bódroic Muſcle EL
ceſtuy-cy auecle precedent,ſontredui&s par Galien à vn ſeul. Letiers qui le fechit, pineux.
monte interieurement du corps des cinq ſuperieurs Spondyles du Metaphrene ( deſ
quels il ſort aſſez obſcurement, meſmement aux gens extenuez ) par deſſous l'Ocſo.
phague,touc le long dudit coliuſqu'à Pos Occipital , à la partie interieure duquel ob
ſcurementils'inſere: à cauſe dequoy il peut aucunement ayder à fechir la teſte. Ce
muſcle eſt fai& de filecs obliquesvenans du corps de la vercebre par tout le long de
ſonchemin aux apophyſes tranſuerſes de l'autre vertebre : & auecſon compagnon
deľautre coſté ſemble conſtituer ſur le corps des vertebres , vne pecite voye aucune.
rij
202 Le ſixieſme liure

Mafcelog. ment cauc à l'Oeſophague, & cft appellé muſcle long . Le quatrieſme & dernier , que A
Muſcle fra nous auons dit mouuoir lateralement ledit col , qu'on appelle Scalene , à cauſe de la
lene.
figure, monce de la plus grande partie poſterieure & fuperieure de la premiere coſte
du Thorax, à coutes lesapophyſestranſuerſes du col , s'inſerant en icelles par ſes fila
ments, leſquels il a proportionnez en longueur & briefueté, pour le pouvoir attacher
depuis la derniere apophyſe du Col ,& plus prochaine de laditecoſte, iuſqu'à la pre

miere . Et ſemble ce muſcle cy eſtre double àraiſon de la diſtinction faite en iceluy


par l'iſſuë des nerfs du bras . Quantaux veines & arteresappartenans tant au col quả
ſes parties,elles ont eſté ſuffiſamment declarees ſur la diſtribution d'icelles. Parquoy
reſte quecu entendes que tous les ſuſdits muſcles reçoiuent nerfs des Spondyles,des.
originc .
quels ils prennent leur

Figure quatrieme des muſcles.

AD Demonftrent les deux muſcles qui flechiſſent, B


tant la teſte que les vertebres du col , leſquels
deſcendent iuſqu'à la quatrieſme vertebre du
Metaphrene .

1. 2. 3. 4. Lecorps des vertebres du Metaphrene.

Figure cinquieſme des muſcles.


с
7
AAAA Monſtrent les deux Spleniti
ques qui eßeuent la teſte,com
:
me nous auons dit aux figures
precedentes .

BB Deux ſeconds, nommez entrela


A y cez ou entortillez ,

CC
Deux releueurs de l'Omoplate.

DD Deux muſcles Sacrolumbus, qui


ſeruent à l'inſpiration.

EE Deux my - eſpineux.
D

F Partic du Sacré , ſi tu n'aimes


mieux en faire vn à pare, qui

pourra eſtre appellé Rachicca,

GG Muſcles Intercoſtaux excc


rieurs.
2
De l'Anatomie.
203

Figure fixieſme des muſcles.

AAAAA Lemuſcle encortillé , Entrela.


cé ou Complexus.

B Muſcle Eſpineux.

С Le muſcle tranſuerſal appar


tenant au col

1 D. My-eſpineux.

EE
Les deux Rachites , ſi tu n'ai.
mes à lcs reduire au Sacré ou

à l’Eſpineux , que tu as veu


B
marqué par B.
B
FFFF Les coſtes. 1

1. C
Figure ſeptie ſmedes muſcles.
7.
.
2 AA Les deux Splenitiques .

H
BB Second muſcle nommé Entor
tillé ou Entrelacé.

C Releucur de l'Omoplate.

D La Clauicule .

D Portion du muſcle Dentelé

pofterieur & ſuperieur.

D FF Muſcles poſtericurs de l'O


moplate , nommez Rhom .
boïdes, la tirant en arriere.
En

2 GG Les deux muſcles tres- larges,


abbaiſſans lc bras .
iij

j
204 Le ſixiefme liure ,
А
Figure huictiefme des muſcles.
A Splenitique gauche.
BB Second muſcle nommé Entortillé
ou Complexus.
с Releueur de l'Omoplate .
D La Clavicule.
E Le muſcle de l'os Hyoïde, cédineux
au milieu qui prend ſon origine de
la coſte luperieure de l'Omoplate.
F Le muſcle qui ouure la bouche.
GG Deux petits muſcles Dentelez po
ſterieurs & ſuperieurs,quidilatent
les quatre coſtes ſupericures du
Thorax.
***
H Muſcle Sacrolumbus. B
1 Muſcle à demy eſpineux.
K Portion du mulcle Sacré.
LL Petic Dentelé poſterieur & infc
ricur , qui dilate les quatre coſtes
inferieures.
M Muſcle du bras fiqué en la cauité ſu .
pericure de l'Omoplate,qui ſe peut co
nommer Epomis ou Etpaulier.
N Le Suſeſpaulier ou muſcle du bras
ficué en la partie gibbeuſe de l'O
moplate.

Neufuieſme figure des muſcles.


AA Deux muſcles Droiểs , venans de l'Eſpi
ne de la ſeconde vertebre , & s'n e
rent à l'os de l’Occiput : ſous leſquels
deux autres pecies ſont cachez , qui
prennent leur origine de la premiere
vertebre pour s'inſerer au meſme os
de l'Occiput.
BBCC Les quatre muſcles obliques.
DD L'apophyſe Maltoïde.
EE Les releueurs de l'Omoplate , coupez
par le milieu .
FF Deux Scalenes . D
GG Deux Eſpineux.
H Le Sacrelumbaire,
de l’Anatomie , 205
A Desmuſcles du Thorax , Ó- des Lumbes. CH A P. XVIII.
Res ces choſes ainſi conſiderécs , il conuient pourſuiure les muſcles , tant
du Thorax , quiſeruent à la reſpiration , que ceux des Lumbes, afin que plus
aiſément nous puiſſions par apres traicter ceux des extremitez. Mais auant
que cefaire, il faut ſçauoir quela partie poſtericare du Thorax, nommée Mecaphrc
ne , eſt faite dedouze vertebres , & les Lumbes de cinq , leſquelles ne different en
autre choſe de celles du Col , ſinon que couces ces vertebres ſont plus groſſes en leur
corps,que cellesdu col , mais non moindresen leur trou . Davantage; ces vertebres En quoy
n'ontpointleurs apophyſes tranſuerſes croüées comme celles du col , pour la con . differenles
duite des veines & arceres ceruicales. Semblablement chacune de ces vertebres duvertebres col d'a
couteſeule fait & conſtituë dela parcie inferieure tant d'un colté que d'autre , le trou uec celles
pour bailler paſſage au nerfiſſantde la Spinale medulle aux parties circoniacétes : au d'en bas.
contraire de celles du Col, leſquelles deux enſemble font le ſuſdit trou , ainſi que
nous avons dit. Quant aux apophyſes, ſoientDroites, Obliques, ou Tranſuerſes du 1

B
dit Thorax , elles ne ſont en rien differentes de celles du Colli'encendsiuſqu'à la
dixielme)fors que les Tranſuerſes n’eſtans crouées , commea eſté dir , ſouftiennent
en partie les coſtes cítanseſtroitementannexées aucc icelles par forts ligamens cano
propres que communs. Mais depuis la dixieſme, les deux qui demeurent du Mera
phrene & des Lumbes , ſont diuerſes non ſeulement de celles du col , mais auſſi des
dix premieres, par leurs apophyſes obliques : pource que depuis l'onzieſme, quieſt
receuë tant de la ſuperieure que de ſon inferieure, pourla cófirmation de ladite eſpi.
ne , & plus facile flexion d'icelle , ſans danger de fracture ou ouverture , les ſuſdites
apophyſes des vertebres inferieures , qui ſouloient receuoir, lontreceuës, comme
celles quiſouloienc eſtrereceuës,reçoiuent. Elles ſonc auſli differentes de routes les
fuldıres par leurs apophyſes droices,c'eſtà dire, Elpines,à cauſe que depuis l'onzieſme
elles commencentde les dreſſer peu à peu vers le haut , au contraire des ſuperieures. Occupa
C Etſion demande commenc la dixielme vertebre du Metaphrene peut eſtre dice leciono
milieu del'Eſpine, veu qu'icelle eſt faitede vingt-quatre vertebres : le reſpons que
cela doit eſtre entédu,quand on reduit les ſix osdel'os Sacrum , & les quatre de l'os
Caudæ plus cartilagineux qu'oſſeux, entre les os de l’Eſpine. Car alors depuis l'arci .
culation de la teſte iuſqu'à ceſte dixieſme vertebre, il en y a dix- ſept, & de là en bas
autres dix -ſept. Reuenant donc aux muſcles du Thorax ſeruans à la reſpiracion, fauc
noter qu'ils ſont quatre vingts & neuf, quarante -quatre de chacun coſté , pareils en es
force, groſſeur, ſituation & action , & vn moyen qui eſt appelé Diaphragme . Des Muſcl di
larans le
quarante -quatrevingt, deux dilatenc ledit Thorax en l'inſpiration , c'eſt a ſçauoir , le Thorax 22.
Soulclauier,le grád Dentelé ſelon ascuns ,les deux Rhomboides, ou Dentèlez poſte. Muſcles son
e t re
ricurs , l'obliqu aſcendan del'Epigaſt , les onze Intercoſtaux, & fix Intercartila - ferrans le
ginaux exterieurs: les autres vinge deux reſſerrent en l'expiration , c'eſt à ſçauoir , le Thorax 22.
D
Sacrolumbus ,l'oblique deſcendant, le Longitudinal & tranſuerſal de l’Epigaſtre: le
triangulaire interne ,ou reſſerreur de Carrilages : les ſix Intercartilaginaux , & les Homme
Muſcle
onze Intercoſtaux internes. Des vingt-deux dilatans le Thorax , le premier nommé
Souſcle
Souſclavier, à cauſe de la ſicuation , deſcend de la partie interne & anterieure de la mich.
Clauicule,obliquement au cartilage de la premiere coſte iuſqu'au Sternon, laquelle Maſele
ileltend . Leſecondappelé grand Dentelé ,prenant , ſelon aucuns, ſon origine inte. nommé
sicurement de coure la baſe de l'Omoplare , s'en va tranſuerſalemêt inſerer aux neufgrand Den
coſtes ſuperieures, produiſant certaines apophyſes dentelées plus auant ſur les coſtes telé.
qu'aux eſpaces moyens d'icelles , ou muſcles Intercoſtaux, à cauſe dequoy il a eſté
ainſi appelé.Aucuns ont referé ce muſcle entre ceux de l'Omoplare. Letiers deſcend
destrois eſpines inferieures du Col,& de la premiere du Mecaphrene, par vn ligamés
membraneux & fort delié , aux trois ou quatre coſtesſuperieures, ſe finiſſant plus Muſclenoma
auant aux trois eſpaces ou muſcles Intercoltaux d'icelles, qu'aux coſtes ,à cauſe de- méDentelé,
quoy il eſt appelé Dentelé poſterieur & luperieur. Le quartmõteſemblablement par pollerieur
ynligamenr delié & membraneux des trois ſuperieures eſpines des Lumbes , & des c fupe rieur.
deux dernieres du Meraphrene , aux crois ou quatre coſtes fauſſes & inferieures ou Muſcle Das
dernieres,s’auançant plus auant ſur leſdices coſtes qu'entre les eſpaces ou muſcles In po
tercoſtaux d'icelles , à raiſon dequoy eltauſſi appelé Dencelé poſterieur & inferieur . Tel ſt
rieuér ene
Econt eſté ces deux derniers muſcles nommez Rhomboïdes à raiſon de leur figure inferieur.
quieſtcommevnclozange , laquelle pour parler en Mathematicien , ayant les coſtez
f inj
me
206 Le fixieſ liure

Voy Eucli oppoſez , & les angles oppoſez égaux , n'eſt pas toutesfois quarrée , ny re &tangle. Le A
de liare 1. cinquicſme,que nous auons dit Oblique, aſcendár de l'Epigaſtre ,a eſté ſuffiſamment
declaré en ſon lieu . Quant aux onze Intercoſtaux externes, ils deſcendent oblique
propos.
xxxy . ment du derriere vers le deuát de la partie laterale & inferieure de la coſte luperieu
re,en la partie laterale & ſuperieure de la coſte inferieure: Au contraire des ſix Inter

cacilaginaux, leſquels ayans ſemblableorigine & inſercion entre les cartilages , que
les Intercoſtaux entre les coſtes,deſcendentobliquement du devant vers le derriere.
Muſclesqui Et voila quant à ceux qui dilatent & eſtendent le Thorax en l'inſpiration :des autres
referrent" le vingt -deux, qui le referrencen l’expiration ,le premier prenant ſon origine de l’os Sa.
Thorax . crum , & des apophyſes obliques des Lumbes ,monte ( eſtroitement & confulemenc
Muſcle fa - adherant & annexéauec le muſcle Sacré , qui ce ſera declaré cy.apres ) à la racine des
ré, pource douze coſtes,baillant à vne chacune vn petit rendon à meſure qu'il monte , par lequel
qu'il vient
leſdites coſtes vers les apophyſes Tranſueries:& eft appelé'de nous
de los fa il reſſerre & retire
cruin Sac Sacrolumbus, à raiſon de ſon origine.Lelecond,croiſieme, & quatrielme, que nous
. auons appelez Oblique deſcendanc, Droit,& Tranſuerſal de l'Epigaſtre , one clé de
crolumbus
B
Animad- monſtrez en leur lieu . Et faucicy noter , que ces trois derniers muſcles de l'Epigaſtre
uerfion de aident l'expiration par accident ,pluftoft que d'eux -melmes , à ſçauoir en repouſſant
PA4
cheur. le Diaphragme vers les Poulmons , par les Inteſtins qu'ils repouſſent auſſi en haut,
pendant qu'ils tirent les parties eſquelles ils ſont inſerez, vers leur origine .
Muſcle Le cinquieſme, que nous pouvons appeler le Reſerreur des Cartilages, ſortant in
Pectoral terieuremêt des coſtes du Sternon ,va à tous les cartilages desVrayes coſtes. Ceſtuya
interne.
cy eſt plus apparent & 'manifefte aux beftes brutes ſous ie Brichet ,qu’és homes, com .
Mufiles in- bien qu'en iceux ne ſoit point par trop obſcur. Quant aux onze Intercoſtaux inter
tercoffaux
interes , nes,ſelon moniugement , ils prennentleurorigine de la partie laterale & inferieure
de la coſte ſuperieure, & deſcendans obliquement du deuant au derriere , s'inſerent à
la partie laterale & ſuperieure de la coſte inferieure: tellement que ceux.cy enfuiuent
la production des fibres des Cartilaginaux externes , ainſi que les ſix Cartilaginaux
incernes enſuiuenc la ſituation des Intercoſtaux excernes, procedans du derriere au
deuant : en ſorte que cant les Intercoſtaux que les Intercartilaginaux ſe coupent &
diuiſenc en forme de croixBourguignone.le Içay bien qu'aucuns ont voulu dire,que c
lesmuſcles internes,ſoientIntercoltaux ou Intercartilaginaux , montent de la partie
ſuperieure & lacerale de la coſte inferieure vers le deuant ou vers le derriere. Mais ſi
cela eſtoit vray , il s'enſuiuroit que cels muſcles receuroient le nerf par leur queuë , &
non par leur teſte , veu que le nerf va touſiours pardeſſous la coſte, & non par deſſus.
Quant au quatre-vinge neufieſme & dernier , qui eſt ſans compagnon , que nous
auons appelé Diaphragme , il a eſté ſuffiſamment declaré en noſtretiersliure . Par
Mufites des
Lambes. quoy reſte que nous paſſions aux muſcles des Lumbes , lelquels ſont lix en nombre,

Muſcle crois de chacun coté, pareils en groſſeur, force & ſituation ,dont l'vn flechit & plie
Trang lai les Lumbes , les deux autres les dreſſent & eftédenc.Quantau dernier nommé Trian
reflexeur
des Lum gulaire, à raiſon de la figure, ilmonte de la plus grande partie de la coſte poſterieure
bes. des os des Iles aux apophyſes Tranſuerſes des Lumbes,& à la derniere duMecaphre .
Milele ne interieurement,à cauſe dequoy ileſt fait des fibres briefues,longues, & moyennas,
efendeur correſpõdantes à la proximité ou ellongnemécdeſdites apophyſes. Des autres deux,
des Lum- qui dreſſent & eſtendent les Lumbes , le premier ( lequel à raiſon qu'il prendiuſqu'à D
bes. !
la moitié de ſon corps , origine des eſpines de l'os Sacrum & des Lumbes ,eſt appelé
Muſcle S4 . Demy eſpineux ) monte par ſes fibres obliques de toutes les tuſdites eſpines, aux
cré.
apophyſes Tranſuerſes, tantdes Lumbes que du Thorax. L'autre nommé Sacré , å
raiſon del'origine qu'il a de l'os Sacrum ou coſtez d'iceluy , monte par ſes fibres obli
ques aux eſpines,tant des Lumbes, qu'aux onze inferieures du Thorax.

Desmuſcles de l'omoplate. CH A P. xix.


Pres auoir fait demonſtration de tous les ſuſdits muſcles, il faut paſſer
aux muſcles dex extremitez , & pourſuiure ceux de tout le bras,commen
çant aux muſcles de l'Omoplate.Pour leſquelsplus deuë mér demonſtrer
& facilement entédre , ilfaut premierement obſeruer le natureld'icelle,
ainſi que des autres os meus & agitez par muſcles , afin que rien nede 200
Deſcription
deFomo- meure de ce qui nous peut conduire à plus facile cognoiſſance de la choſe pre
plate. tenduë. Parquoy il faut entendre , que la nature de l'Omoplateelt d'eſtre aucun
Del’Anatomie . 207
A nement enfoncée de la partie qu'elle eſt appuyée , & couchée ſur les coſtes & conſe
quemment en la partie oppolice aucunement gibbeuſe & prominente : ayant deux
coſtes, vneluperieure & l'autre infericure.Par lalupericure n'eſt encédu autre choſe
quel'excremité ou ligne droite, laquelle regardant vers les cemples, eſt conduite de. Coße Supea
puisl'angle ſupericur de l'Omoplate par deſſous la Clauicule , julqu'à l'apophyſe l'Omoplare.
ricare de
Choracoïdcou bec de Corbin , laquelle ceſte colte ſupericure produit de ſon excre. Colte infe
mité.Par l’inferieure, nous entendons l’excremité interieure, laquelle regarde l’E. ricuit.
pigaſtre & Fauſſes coſtes.
Outre plus, le naturelde l'Omoplate eſt d'avoir vne baſe ,,vne teſte & vne cſpine.
Par la baſeetentenduë la partie plus large de l'Omoplate, regardant l'espinedu dos. Baſe de
Par la reſte,la partie plus eſtroite d'icelle, & par laquelle elle reçoit le courrillon ou l'Omoplate.
B teſte du bras,par le moyen d'vne petite boere ſuperficielle, qu'elle fait tác de ſoy, que Teſte de
certains cartilages qui ſontimplantez , fichez, ou annexez tour alentour de ladice l'Omoplate.
boëte, laquelleeſtappelee Glene. Icelle eſt ioince auec l'os du bras par vn fort liga
ment quienuironne la ioince pourla cerir fermement, lequel' eſt conimun à rouces
lesautres iointures.Iceluy naiſt des bords de la cauité de l'Omoplate , & embraſſeen
rond toucela jointure , s'attachant au commencement de la celte du haut du bras . Il
y a encores outre ceſtuy d'autres, qui lient pareillement ladice ioince.Par l'eſpine eſt
entenduël'Apophyſe ,quief peu à peu dreiléeſurla parriegibbeuſe deladiteOmo. Esfine de
platepresde la coſteſuperieure, depuis la baſe d'icelle,quelquepeu ſous l'anglela: "'Oinoplazt.
perieure,iulqu'à l'Acromion , lequelladite eſpine conſtituë pareillemét de ſon extre
mité.Ora nature machiné deux productions d'os, i'encédslAcromion fait de l'eſpi. Vtilité de
ne,& le Choracoïde ou bec de Corbin, fait de la coſte fuperieure, pour la confirma: l'Acromion
tion de l'articulation du bras auec ladiceOmoplace,& depeurque le bras ne ſe demiſt 6 du Chow
C vers le haut & deuant. Dauantage , la Clauicule elt receuë de l’Apophyſe & promi. yai ödede
nence dite Acromion ,ainſi qu'on peut mieux voir à l'ail,qu’entědre par liure. Tou. l'Oinoplasc.
tes ces choſesainſi obferuées de l'Oinoplace, reſte que nous venions aux muſcles
Six maſcles
qui lameuuent,leſquelsſont Gxen nombre : quatre propres, & deux communs auec moskan s
le bras . Des quatre propres le premier ſicué en la partie anterieure , monte des os des l'Oinoplete
fix, & le plus ſouuentdes cinq coltes ſuperieures au Choracoïde, lequel il tire à la quatrepro
partie anterieure : & eft nommé ce muſcle icy,Petit Dentelé : pour lequel bien de pres , o
monſtrer,fauccerner le Pectoral de la Clauicule , iuſques preſqu'à la moitié du Ster- 'denz com
non.Le ſecond oppoſite du ſuſdit,eſt ſitué en la parcie poſtericurc ,lequel prenant ſon muns avec
origine des trois eſpines inferieures du col , & trois fuperieures du Metaphrene ,vale Muſ
bras.
cle
interieurement à coure la baſe cartilagineuſe del'Omoplate , laquelle il rire en arrie . Denrelé.
re}:& eſtappelé cedit muſcle Rhomboïde. Leciers , à cauſe de ſon action , nommé 110ſcle
Releueur,licuéen la partie ſuperieure,deſcend de l’ApophyſeTranſuerſe des quatre Rhombot
Spondyles ſuperieures, entre l'angle luperieur, & eſpinede l'Omoplace. Le quartde.
appelé Trapeze vulgairement Capuchon de moine, eſt ſitué à la parcie pofterieure: Muſcle 16
D
& prenantſon origine, comme membraneux, mais bien toſt charnu, de la plus gráde lencer.
parcie de l'Occipur, de toutes les eſpines du col , & des hui& vertebres ſuperieures du
Thorax, s'en va inſerer par Aponeuroſe, enuiron le milieu de la my-baſe de l'Omo.
place,s'eſtendancpar deſſus les muſcles d'icelle , iuſques à la demic eſpine, en coute
laquelle ils’implante,toue charnu iuſques à l'Acromió & partie ſuperieure de la Cla.
uicule, & aucunement à la coſte ſuperieure. Or a ce muſcle triple a &tion , à cauſe de
fadiucrſcorigine.L'vne eſt de tirer l'Omoplate vers ſon origine del'os Occipital,& Le mafde
eſpine du col. L'autreeſt de la tirer de la baſe droitement vers l'eſpineen arriere. La Trapeze an
tierce eſt de la tirer en bas vers le dernier auſſi par l'origine qu'il a de la cinquielme, triple action
fixielme,ſeprieſme, & hui&ieſme eſpinc des vertebres du Thorax. Et noteras icy,que a cauſe de
tellesactions diverſes ne ſont pointfaitesen cemuſcle par vn nerf, ains parpluſieurs fa diuerſe
qui luyſonecommuniquez dela Spinale medulle , par les crous des vertebres tant du origine.
colque du Metaphrene , deſquelles il prend ſon commencement. Quant aux deux
communs à l'Omoplace, & au bras,nous les declarerons cy- apres, quand nous pour. Máſcle
ſuiurons ceux dubras. Parquoy te fufira pour le preſent d'entendre que cesdeux là Treflarge.
Muſcle
ſont,l'vn nommé Treflarge,montantde l'os Sacrum à l'Omoplate ,& au bras:l'autre Pectoral.
appelé Pe& oral,venantdu Scernon & de la Clauicule , auſſi à l'Omoplate & au bras.
L'Omoplate eſt auſſi attachée par les muſcles venans des vertebres & de la ceſte .
Celte attache & conionctionelt nomméc Syflarcoſe.
203 Le ſixieſme liure ,

XX.
Deſcription de la Main ,generalemeutpriſe. CH A P.
А

L conuiendroit maintenant par vn meſme traict pourſuiure les muſcles du


bras : mais auant que venir là , il faut entendre que c'eſt que nous appelons
Bras :laquelle cholene pouuans commodément faire ſansauoir l'incelligen
ce de la Main , de laquelle le bras fait vne partic, à ceſte cauſeil eſt neceifaire
premier que parler dudic bras, definir que c'eſt que Maio: puis la diuiſer en ſes par
ties . Ordeuantque venir à la definition , il faut premierement nocer , que ce nom de
Le nom de Main eſt prins & vſurpé en deux manicres , c'eſt à çauoir, generalement, & ſpeciale
main eft ment . Main , generalement priſe, ſignific tout ce quieſt contenu depuis l'Archrodie,
pris en
deux ma ou articulation de la teſte de l'Omoplate,iuſqu'aubout & excremisé des doigts. Mais
nietes , geo ſpecialement, ilne ſignifie que ce qui eſt contenu depuis le bout des os du coulde, ou
neralen:ent, commencement du poignec iuſqu'à ladice extremité des doigts . Ces choſes ainſi pre
o specis- miſes & conliderées,faut venir à la definition & diuiſion pretenduës. La Main donc
lemene. en general eſt l'organc des organes, & l'inſtrument des initrumens humains , deſtiné

Main gen pour prendre & tenir quelque choſe. Elle eſt compoſée de trois grandes parties , à
neralement
içauoir, du bras, du coulde,& de la main ſpecialement priſe : laquelle ſe divile dere
priſe.
Main spe chefen trois autres , à ſçauoir,au Carpe ou Poignet,au Metacarpe ou Auanımain , & B
cialement les Doigts. Toutesces parties cy (cõmeainſi ſoit qu'vne chacune ſoit non ſeulement
proſe. partie organique,ainsaufi partie de partie organique ) ſont compoſées de toutes , on
Definition de la plus grande part des parties limilaires, c'eſt à ſçauoir, cuir double , pannicule
de la main, charneux,greffe, veines,arteres,nerfs,muſcles ou chair , & cuniques tant communes

de la main .que propres, d'os ,cartilages, & ligamens : deſquelles les vnes appartiennent comme
communes à toutes les ſuſdites parties,lesautres ſont propres à chacune partie . Quát
aux communes,ce ſontle cuir double,le pannicule,la greffe , veines , arteres, & nerfs.
Les propres d'vne chacune font ,les muſcles d'icelles ,os, cartilage,& ligamens , quite
ſeront declarez le plusdiligemment qu'il nous ſera poſſible, quand nous ſerons venus
à leur lieu & ordre de diffe & ion. Laquelle choſe afin que bien toſt ſe face ,nous entre !
rons ſans plus long delay, à declarer ce qui demeure des parties communes ,fi premic
rement ie t’ay aduerty des differences de la main priſesſelon la diuerſe ſituation d'i .
celle : qui ſont fix en nombre,c'eſt à sçauoir, deuant , derriere. dedans , dehors, haur,
bas , Par le deuant eſt entendu la partie d'icelle , quiregarde du poulce droit vers l'O
moplate . Par le derriere,ſon oppoſite,qui regarde du petit doige vers la baſe de ladice С
Omoplate . Par le dedans , la partie d'icelle qui regarde les parties laterales du corps:
i'entēds lors que la main retient la ſituati) naturelle.Par le dehors ,la partie oppoſite.
Par le haut, la plushauic & par le bas , la plus baſſe partie d'icelle. Ectoutes ces diffe
rences prinſes de la filuation , tu pourras conſiderer particulement en toutes autres
parties ſingulieres.Deuãoque retourner à noſtre propos, ie te declareray la main par

Deſcripsion ticulierement priſe, La main eſt diuiſée en cinq doigts ,afin qu'elle puiſſe prendre cou.
de la main tes figures :à ſçauoir,rõdes,triangles, quarrées,
& autres, & recueillir les corps fort pe EU

particulie- tics ,auec les extremitez des doigts,comme eſpingles,areſtes, pois ,& autres.Nature a
re .
fait deux mains, afin que l'vne aide à l'autre , & que les deux deçà & là ſe rencopcrans
Gal. lin. l . des parties oppoſites, ſoynt auſſi fortes, & accommodées qu'vne ſeule, Or pour pren .
de vfu
dre les petits corps,ilfalloit que les extremitez des doigts fuſſent mols & garnis d'on
part.
chap.s. gles : car s'ils euſſent eſté ſeulement de chair ,ils euſſenteſté trop mols : & auſſi s'ils euf
D
Nombre. fent eſté ſeulement d'os ou d'ongles ,ils euſſent eſté crops ſolides:mais Dieu par ſa pro.
L'uſage de uidence en a fait vne mediocrité pour parfaire mieux leur a &tion. Iceluy ongleſert
l'ongle. d'appuy à la chair mollc , laquelle enprenác vn corps dur ſe renuerſeroic,n'eftoit qu'il
l'appuye par derriere , & partant on ne pourroic prendrevne eſpingle , ou vn poil,ou
Viilité. autre choſe ſemblable.Leur vtilité eſt degracer,racler , eſcorcher , deſchirer quelque

choſe ,ou accacher & deſtacher, prendre & tenir , eſcacher & tuer les petits animaux.
Cöpoficion. Ils n'ont eſté faits durs, depeur qu'ils ne fuffent rompus comme les os, & parranc Na
turc les a faits d'une dureté mediocre,afin qu'ils obeïſſent à ſe fechir, & depeur qu'ils
ne fuſſent rompus:coutesfois Nature les a faits aux autres animaux durs, commeaux
Figure. chars,liéures, lions,pour grimper & lcur ſeruir d'armes.Lafigurca eſté rõde , à raiſon

que celle figure eſt fort parfaite & moins ſuiette aux iniures excerieures,n’ayāt aucun
angle eminent,qui puiſſe eſtre froiſſë & briſé : & en recompenſe qu'ils s'vſent,Nature
a fait qu'ils ont croiſſance,comme le poil, & les dents.En l'interieure partie & coſtez
de l'Anatomie. 209
A desdoigtsNature a voulu mettre de la chair, afin qu'ils ſoient plus apres à ſerrer les
choſesapprehendées de la main :& aux coſtez, afin qu'en ſerrantles doigts l'yocon .
tre l'autre qu'ilspuiſſent tenir quelque liqueur ſanseſtre épanchée : & quác au deſſus
des doigts,fielle y euftengendré de la chair,ileuſteſté nuiſible,pource qu'elle euſt
cmpeſché le mouuement d'iceux & de toute la main , & pource Nature n'en a point Inegalité
mis. Les doigts ſonținégaux en magnitude,afin que lors qu'ilsſont ſeparez & eſten- des doigts.
dus les yns des autres,ilsfaceni vnefigure circulaire : & parcant la main peut prendre
cout corps,& principalement ronds. Parquoyrcuenansà noſtre premier propos,nous
auons declarédepuisle comencement de noſtre labeur, que c'elt que cuir, pannicule
charneux , greffe, & tunique , ſoit propre ou commune desmuſcles :dauantage que
c'eſt que veine,arcere, & nerfs.Donc reſte ſeulement que nous pourſuiuions la diftri.
bution de ces trois vaiſſeaux communs ,quieſt faite par toutesles parties de la main, !

generalement & ſpecialement priſe :à celle fin que mieux & plus aiſément nous puiſ.
lions par apres pourſuivre les propres parties d'vnechacune partie ſinguliere de la
main,generalemementpriſe,ſans faire aucune repetition des fuldies vaiflcaux.
Diſtribution de la veinedu bras, epremierement de la Cephalique.
C H 4 P. XXI.

R donc afin que ſans plus long propos nous pourſuiuions noſtre inten .
cion , il faut ſçauoir que deux veines inſignes & notables deſcendenc de
a Souſclauicrc, l'vne de plus bas , l'autre de plus haut , quelquesfois & le
plus ſouuent toutes deux ſortansd'icelle par vn commun orifice, comme Origine e
à petitesgens , au bras : dont l'une eſt nommée Axillaire , l'autreHumeraleou Ce infèrtson de
phalique :laquelle forcant de la Souſclauiere ( comme nous auons dit ) deſcend la veine i
phal
C luperficiellement & anterieurement entre la diviſion du muſcle Deltoïde , & lę Ceque.
tendon du muſcle Pectoral,entre la Tuniquedes muſcles, & le Pannicule charneux,
iuſqu'au ply du coulde : auquel endroit aux charnus & emaciez , elle appert claire .
mene au ſens de la veuë , au contraire des bras , auſquels , à raiſon de la greſſe quila
couure & cache , à grande difficulté elle le peut voir. Ceſte veine apres avoir baillé
en deſcendant, quelques petites porcions de ſoy tane au cuir , qu'aux muſcles , par
delfusleſquels elle deſcend quelque peu deſſus l'Apophyſe excerne du bras , elle ſe
diuiſe en deux rameaux :deſquels l'vn deſcendant obliquement vers la partie ance .
rieureducoulde , s'en va voir (vn peu deffous le ply dudit coulde ) auec yn autrera
meau ſemblable à ſoy ,deſcendantaudit endroit de la veine Axillaire , comme te ſera
demonſtrécy-apres .Orla veine qui eſt faite des deux, eſt appelee vulgairement Me Veine dite
diane, à raiſon qu'elle eſt faite de deux rameaux , & ſituée entre iceux. Ereſt ladite mediane.
D
Mediane inciſée aux affe &tion qui requierent miſſion de ſang , tant de la Teſte que
du Foyc . Et au cas que ladite Mediane ne ſoic affez apparente , quand tu la voudras Indruktion
ouurir pour la totale euacurion du corps, on pourra inciſer vn des ramcaux qui la pour le
font, ceſtuy qui ſemblera plus cómode. Etpource qu'vn chacun rameau cire pluſtoſt'chirme -
de ſespartiesprochaines & ſicuées en ſon endroit , que des oppoſites, ilfaut que ſi pargien.
vndeſes rameauxtu veux euacuer auſſi bien de la ceſte que du Foye , ou au contrai
re,qu'ayantouuert( commepour exemple) le rameau venant de la Cephalique,rout
ſoudain eu preſſes avec ton poulce tout le rameaud'icelle, iuſques à ce queſuffiſante
cuacuation de lang ſoit faite du Foye,par la veine Baſilique ou Hepatique. Laquelle
choſequand tu verraseſtre faite, cu leuerascon doige, & permettras Auerdu ſangRiglede
.
de la teſte par ladite Cephalique, ouuerce iuſques à ce que tu en ayes ce qu'il t'en
faut,ou
que
fois paruenu à con intencion. Car ſi tufaiſois autrement , tu n'euacuerois
d'vne parcie ſeulement, c'eſt à ſçauoir de la reſte, comme cu ne ferois que du
Foye,ouurant lerameau quivient de la Baſilique pourfaire la Mediane. Dauantage
siladuenoitqu'en voulanc ouurir de neceſſité la Baſilique, elle neſe manifeſtalt
aucunement,ou bien peu ,parla peticeffe, & que la Cephalique ou Mediane s'offre
au ſensdela veuë bien apparente,cu peux en lieu de la Baſilique , inciſer la Mediane:
ouficelle ne s'offre,la Cephalique, preſſant(ainſi qu'auons dit, du poulce le tronc
deladiceveine,de peur quel'euacuation ne ſe facede la Telte, au lieuqu'elle ſe doit
faireduFoye.Etainfi cu imagineras falloir faire de la Baſilique, s'il aduenoit que
210 Le fixierme liure

voulant ouurir la Cephalique,elle ne ſe manifeſtaſt point . Pour ce iourd'huy la plus A


grande partic de ceux qui laignent, prennent & ouurent pour la Mediane, le rameau

Chemin de la Baſilique, qui monte pouraller faire ladice Mediane auec celuy de la Cepha
que tiene la lique,ainſi qu'il acſté dit. Apres ces choſes ainſi conſiderées, reuenant à noſtre pre
Mediane, mierpropos,il fauc entendre que ceſte veine Mediane deſcend entre le deux os du
coulde iuſqu'à leur extremité :duquelendroit elle s'en va perdre,diviſée en pluſieurs
Chemin rameaux , en la main exterieurement, derriere le poulce, Index & Medios, ou Mc
que tiene la tacarpe d'iceux : & quelquesfois s'en va remettredans le cameau qui s'enſuit , & alors
Cephali- pres du poignet ſe diviſe & ſepare d'iceluy , s'en allant finir au lieu luſdit . L'autrera
que.
meau de la Cephalique, quenous pouuons appeler Cephaliqueanterieure & exte .
ricure, deſcendant directement ſur l'os nommé Radius : juſqu'à ſon milieu ou'enui
ron , ſe fouruoye d'iceluy obliquement vers la partie poſterieure du bras : où le ren
forciſſant d'un rameau venant de la Baſilique, s'en va diſtribuer excerieurement par
toute la main , laquelle il nourrit auec la Medianc. Et noceras , que ces rameaux ne
deſcendent point ſansſe coinmuniquer aux parties par leſquelles ils paſſent, ſelon
l’exigence d'vne chacune,ainſique tu peux voir dedans la figure des veines : à l'imi . B
tacion dequoy tu vois qu'il faut que les voituriers de marchandiſe payent le pall.ge
de leurmarchandiſe & voiture , par toutes les terres qu'ils paſſenc, au ſeigneur d'i.
celles,

Diſtribution dela veineAxillaire. CHAP. XXII.

Este maintenant que nous paſſions à la veine Axillaire , laquelle com .


mençant à l'endroit de l'inſertion du muſcle Pectoral , ou quelque peu
plus haut, apres auoir produit les deux Torachiques , le vient diviſer' yn
Veine dire
pecit deſſous le ſuſdit tendon en deux inſignes rameaux , nommez l’vn ,
Axillaire Axillaire profonde , & l'autre Axillaire ſuperficielle . La profonde, deſcendant rou
interne con Gours aucc l'arcere Axillaire , & la cierce paire des nerfs, apres avoir produit le petic
profonde.
muſcle externe du bras , s'en va au milieu du ply du coulde : auquel endroit ſe plon .
geanc & inſinuant auec l'artere & nerf parmy les muſcles du coulde, ſe diuiſe en trois
с
portions , donc l'vne deſcendant auec le rayon, entre par deſſous l'anncau , en la main

interieurement, & baille deux petits rameaux au poulce , deux autres à l'indice , &
vn au moyen , leſquels montent par leursparties laterales. L'autre portion deſcen .
dant auec l’arcerc ainſi que la precedente lelon le coulde , entre ain li que l'autre de
dans la main ,ſe diſtribuant aux autres doigts ainſi que la precedente. La troiſieſme
va anterieurement entre les deux os, iuſqu'au poignet & mulcle quarré . Et faut icy
noter que ceſdites veines font non ſeulement celles diuiſions qu'auons maintenant
pourſuiuy, mais autres infinies, tant par les lieux où elles paſſent,qu'és muſcles inter
nes de la main , leſquels ſont nourris par icelles . Ec voyla quant à l’Axillaire interne
Veine & profonde. Quant à l'externe & ſuperficielle ( laquelle lemanifeſte premieremenc
Axillaire ſous le cuir , aux maigres principalement quelque peu deſſus l’Apophyſeinterne du
externe g bras ) elle ſe diviſe audit endroit ou enuiró en deux ramcaux ,dont l'un deſcédant vers
fuperficieb-
le. le ply du bras , s'en va mettre & vnir auec celuy de la Cephalique, quelquefois plus
pres du ply ,quelquesfoisplus loing , pour faire la Mediane,ainſi qu'auons declaré par
cy.deuant. L'autre ramcau , 2pres avoiremployé vn certain nombre de ramcaux,les D
vns plus grands & plus gros, les autres plus courts & pluspetits, tant au cuir , qu'au
tres parties voiſines deſcendant ſelon la partie infericure de l'os , proprement apa
pelé l'os du coulde,s'en va à la parfin ietter dedans le ramcau' Cephalique anterieur &
deſcendre le long du rayon : & ainſi vnies s'en vonc à
cxterieur , que nous auons dit
toute la main , en laquelle,ſi c'eſt la dexire , elles vont faire , entre le doigt moyen &
indice , la Saluarelle : ſi c'eſt la ſeneſtre , co meſmc endroit la Splenitique. Or pour
Admoni- concluſion de ces diſtributions de veines ,cu reuoqueras en memoire ce qui a eſté dic
sion au
vne autre fois ,c'eſt à ſçauoir que les diſtributions des vaiſſeaux ſont ſi diuerſes,qu'on
Lecteur.
net'en ſçauroit donner vne reigle certaine & vraye tout par tour . Parquoy excuſe
nous,lien aucuns luiers cu crouues plus de diviſions ou moins, ou autres que nous nc
mettons , te perſuadant que nous ne mettons rien , que n'ayons trouué le plus lou
uent en nos diffc &tions.

Diſtribution
de l'Anatomie. 211
A Diſtribution del’artere Axillaire. CHAP. XX111.
L conuient maintenant ſelon l'ordre de diſſection,monſtrer la di
ſtribució de l'artere Axillaire, laquelle depuis ſon commencemét,
qui eſt tout ſoudain apres les deux Thoraciques, en deſcendācen
trele muſcle à deux teftes, & le bras auec la veine Axillaire profon
de diſtribue vo rameau aſſez inſigne aux muſcles externesdu bras,
qui eſtendent le coulde,& s'en va perdreaux muſcles externes d'i
celuy,qui prennent leur origine des apophyſes du bras exterieure
ment : & tel cameau eſt appelle muſcle , comme eſt auflila veinc quil'accompagne.
Puis laditcartereeltantparuenuë au ply du coulde,ſe profondant dedans les muſcles Artert .
qui plient les doigts,communique certains petits rameaux aux parties appartenantes Muſcle.
a particulation du coulde auec le bras, & autres partiesillec fituees,ainſiqu'elle a faict
aux parties luperieurès ,par leſquelles elle eſt delcenduë:en ſorte que c'eſt vne regle
B generale, que touevaiſſeau baille certaine portion de ſoy à toute partie par laquelle
ilpaíſe,& en chacune ſelon l'exigence d'icelle, comme auons predic. Et pourtant li Occupation.
cumedemandes,pourquoy ie n’ay pourſuiuy toutes ces productions:ie te reſponds,
que noſtre intention ne fuc iamais que de marquer les rameaux grands & inlignes de
quelque vaiſſeau que ceſoit,deſquels peuc aduenir inconueniét demort,ou quelque
grande maladie,pardiuiſio,inciſion, ou autrement. Carde te pourſuivre entieremér
lesdiſtributionsdes veines ,arceres, & nerfs, ranţgrandes que petites,ourre ce que ſe
roit labeurinfiny, & non ſans confuſion , tel labeur leroit inutile & ſans profit: veu
qucles petites diſtribucions que nous laiſſons à cſerire & noter,lontſi petites,queſoie
quenousles ſçachions ou ignorions , elles ne nous profitent ny incommodent pas
beaucoup.let'ay bien voulu aduertir de cecy,afin que li par aduanture en diſſequant
tu trouues autres diſtributions que celles que ier’ay noté, cune penſes que nous les
ayons ignorees', & à ceſte cauſe teuës& laiſſecs. Orpourretourner au premier pro .
pos,ceſteartere ainſi plongec dedans les ſuſdi&ts muſcles ,quand elle eſt paruenuë en
uiron le milicu du coulde tout ſoudain , ou quelque peu apres,elle ſe bifurche en deux
infignes & notables rameaux,leſquels s'en vontI'vo ſelon le rayon, & l'autre ſelon le
coulde , par deſſous l'anneauinterieurement en la main : en laquelle cous ces deux
C rameaux ſe diſtribuent & conſument,ainſiqu'auos dic des rameaux de la veine Axil
laire internc,c'eſt à ſçauoir apres auoir payé le paſſage tout par tout où ils ont paſſé.
A la parfin de leur relidu,celuy qui delcéd parle rayon, baille deux rameaux au poul. Exhortation
ce, vn dechacun coſté,deux à l'Index pareillement ,& vn au Medius . L'autre qui del 44 Leeteur.
cend ſelon le coulde,fait le ſemblable au petit ou Annullaire ,& au moyen , comme tu
verras par experience en c’exerçant en l'art de diſſequer, lequel ie te conſeille vouloir
apprendre : autrement tu ne ſçauras iamais rien en cecy de certain .
Des nerfsduCol, du Metaphrene, & dubras. CH A P. X XII.

Aintenant ilnous faut pourſuiure les nerfs du Bras,leſquels afin queplus


facilement nous puiſſions entendre , nous promettrons quelque choſe de
D NE ceux du col,& du Metaphrene,pource queceuxdu bras procedent & for .
tentd'iceux. Et pour cómencer faut entèdre que du col ſortent ſept paires
denerfs :dont la premiere lort d'entre l'os Occipital , & la premiere vertebredu col:
tout ainſi que la premiere du Mecaphrene d'entre la derniere du col , & premiere Du colfor
d'iceluy. Or ſont tous les nerfs diuilez en deux, ou pluſieurs rameaux: dont les deux res
tēt deſepspai
nerfs.
delapremiere paire i'entends de chacun coſté ) vont , l'vn au petit muſcle droiâ , La premiere
montant dela premiere vertebreducol à l'os Occipital ,l'autre au muſcle long du col pairede
anterieur. Ceux de la ſeconde ſe diſtribuent,les vns auec vne portion qu'ils reçoivét nerfs fortas
de la tierce,àtout le cuir de la celte: les deux autres rameaux qu'elle produit , vont tát du col.
aux muſcles du ſecond Spondyle à l'occiput , & du ſecondau premier , qu'au muſcle Seconde.
long foldit.Ceux de la troiſielme ſont comuniquez , Pyn à la ceſte,ainſi qu'ila eſté dit,
les autres aux muſcles,qui releuent tant la reſte quele col,ſemblablemét aux lateraux Troiſieſme.
d'iceluy, & du long. Ceux de la quarrieſme s'en vont , I'vn aux muſcles tant du col Qu
que de la teſte, atriefmo i
& muſcle large: l'autre,apres auoir bailléquelque portio de ſoy au long
& lateraux muſcles du col, deſcend auec vne portió de la cinquieſme & fixieſme paire Cinquiefs
au Diaphragme,comme nous auós dit. Ceux dela cinquieſme ſe communiquét , l'vn me.
[
212 Le fixieſme liure
‫وه‬
aux muſcles poſterieurs du col & de la teſte:l'autre au muſcle lõg & Diaphragme:ain- A
fi qu'il a elté dir:le tiers aux muſcles releuans le bras & l'Omoplate. Ceux de la fixieſ.
me ſe diſtribuēr l'vn aux muſcles poſterieurs du col, & de la celte, l'autre au Diaphrag.
Sixieſme. me : comme auonsdit :le tiers , avec uneportion de laſeptieſme paire du co!, & pre
miere & ſeconde du Mecaphrene,aubras & muſcle releuans l'Omoplate. Ceux de la
ſeptielmes'en vone : vn au muſcle Large , & ſes voiſinstantduColque de la teſte:
Sepsieſme. l'autre, le mellant auec vne portion de la cinquieſme& fixielme paire du col , & vne
autre de la premiere & fecode du Metaphrene,deſcéd au bras iuſqu'à la main. Ec fauc
icy noter auant que paſſer plus outre , queles muſcles qui prennent leur origine de
pluſieurs vertebres, loit de haut en bas, ou au contraire de bas en haut, reçoivent nerf
non ſeulement des vertebres d'où ils ſortent,ains auſſi de celles , par deſſus leſquelles
ils montent ou deſcendét. Quant aux paires des nerfsſortās du Metaphrene, qui ſont
douze en nombre;la premiere paire fortát d'entre la derniere vertebre du col, & pre.
pai miere dudit Mecaphrene fe diuiſe(i’entēds chacun nerfde ſon coſté) en deux ou plu
res de menfis fieurs portions,ainli que font routes les autres. Les rameaux ou portions de ceſte pre
fortans du miere paires'en vont,lesvns aux bras comme il r'a efté dir,les autres aux muſcles,cant B
Metaphrene du Thorax,qu'autres ayans illec leur origine,ou paffans par ledit endroit.Ceux de la
Premiere paires
paire.
ſeconde ſe diſtribuent
iuſqu'à de meſme
la douzieſme,fe ſorte que les precedents.
communiquent Ceux deintercoſtaux
les vns aux muſcles toutes les autres
, s'e
Seconde.
ftendant fous les vrayes coſtes iuſqu'à l'os Sternon , & aux mendeuſes & faulles iuf
qu'aux muſcles droits & longitudinaux : & de ces rameaux intercoſtaux , ſont renfor.
cez les nerfs coſtaux de la ſixieſme conjugaiſon à meſure qu'ils deſcendent par la raci
nedes coſtes.Lesautresportions deſdiets nerfs ſe comuniquentaux muscles, tant du
Thorax que de l’Eſpine,ſelon que leſdits muſcles ſortent ou paſſent ſur les vertebres
par leſquelles ils ſortent. Apres ces choſes ainfi conſiderées, & auoir entédu l'origine
des nerfs du bras, reſte maintenant que nous pourſuiuions & monſtrions le nombre
Lerfs du & diſtribution d'iceux. Quant au
nombre, ils font cinq,ou ſi tu veux ſix , prouenans
bras. des vertebres cinquieſme,lxieſme,& ſeptieſme du col, & premiere & deuxieſme du
Mecaphrene: doni le premier ſans femeller aucunement auec les autres, s'en va dela
Premier cinquieſme vertebre du col, au muſcle Deltoïde, & au cuir qui le couure. Les autres с
nerf du quatre ou cinq, apres s'eſtre entremeſlez & entrelacez, non ſeuleméi dés leur origine
bras. & ſource,ainss'eſtane deſentrelacez ſous l'aiſſelle,ſediſtribučt par apres en la manie.
re qui s'enſuit. Le premier d'iceux,& fecond à celuy qui a eſté cy -deſſus declaré,def
Second. cendant quelquesfoisiuſqu'à la main , ſe communique lur ſon chemin , premieremét
au muſcle à deux teftes:ſecondement, par deſſous iceluy auec le tiers nerf:ciercemét
au muſcle cres- long du coulde,ſur le ply duquel il ſe diviſe en deux rameaux,deſcen
dans ſelon les deux osdudit coulde,conduit par le Pavnicule charneux : finablement
ſe perdau cuir,cant du coulde que de la main. Letroiſicſme deſcendant plus bas que
le precedent, premierement s’vnit ſous le muſcle à deux teſtes auec le ſecond: puis le
ſepare & baille vue ſienne portion au muſcle Brachial:ſemblablement au cuir du bras
Troiſieſme. anterieuremét : finablement eſtant deſcendu iuſqu'au ply du coulde anterieuremét,
ſe iettededansle cinquieſme.Le quatrielme & plus grand de tous , deſcendant encor
par deſſous le tiers, ſous le muſcleà deux teſtes,auec la veine Axillaire interne & l'ar
Quarrieſme tere, ſe reflechit & retourne vers lapartieexterieure, & derriere du bras,pourillec ſe D
communiquer aux muſcles dudit bras qui eſtendent le coulde: ſemblablement au
cuir interieur du bras , & exterieur du coulde , le demeurant dudic nerf, apres qu'en
deſcendant ileſt paruenu à l'articulation du coulde, deuallant par deſſus l'olecrane
d'iceluy, ſe diuiſe en deux ramcaux : dont l'un deſcend le long du coulde , ſe delinc
& perd au Carpe exterieurement,l'autre deuallant par le long du Rayon,s'en va per
dre exterieurement par deux pecits ſurgeons, au gros doigt:par deux autres,à l'indi
ce: & par vn cinquieſme, au moyen toutesfois aſſez obſcurement. Le cinquieſme
deſcendantencorplus bas que le precedent , & entre les muſcles du bras, quieſten
Cinquief- dent & flechiſſent le coulde, apres eftre paruenu ſous l'apophyſe interne du coulde
(auquel endroić nousauons dit que le tiers ſe venoit iecterdans ceſtuy.cy ) le com.
munique aux muſcles internes d'iceluy: puis ſe diviſe en crois portions, dont l'voc
s'en va cnuiron la moitié du coulde exterieuremer bailler deux petits rameaux au pe
tit doigt,deux au doigt nommé Medecin, & vn au moyen.Les autres deux s'en vone ,
l'vn par deſſus,l'autrepar deffous l'áneau dás la main ,oucous deux,apres auoir baillé
De l'Anatomie . 213
A chacun de ſon coſté aux muſcles de lamain de ce qui leurappartient, ſe conſument &
perdent en cinq pecices portions. Dont celles du nerf quipaſſent par deſſus l'anneau
vone deux au pecit doigt,deux au doigt Medecin ou annulaire, & vn au moyen . Et Le fixieſme
celle de ceſtưy quipaſſe par deſſous, vont tour ainſi aux autres, c'eſt à ſçauoir, deux aus dernier
gros doigt,deux à l'indice, & vn au moyen.Le fixieme & dernier eſtant encores par bra nerf. dm
delloustousles autres , deſcend entre le cuir & le Pannicule charneux parmy,l'Apo
phyſeinterac du bras, & ſc va perdre au cuir du coulde.
Figure des nerfs.
Le commencement
de la moüelle de l'.
Eſpine à l'endroict
où elle entre dedans
B la premiere verte
bre .
1234567 Sepe vertebres du
Col , & les paires
qui ſortent d'elles.
891112 13 14 Douze vertebres du
15 16 17 18 19 Thorax ou Me.
taphrene.
20 21 22 2324 Cinq vertebres des
Lumbes.
25 26 27 28 29 Sixos de l'os Sacrű.
30 . Au reſte nous ne
<
t'auons point icy
figuré l'os de la
С queuë ou Coccyx
à raiſon qu'il ne
contiene point de
moüelle , & que
nul nerf vient de
luy.
bb Vne partie des netfs
de la ſeconde pai
re du col , qui va à
l'Occiput ou Ver.
tex de la teſtc.
ç Vne partie de la premiere pairc.
Aureſte,Toisaduerty,Lecteur, quenous ce repreſentons ſeulement la face antericure
des nerfs, & qu'vneparcie de ceux que nous te baillons,va par derriere pour ſe per
dre aux muſcles là ſicucz.
D d Diſtribution du rameau de la ſeconde paire qui vient pardeuant.
1
ce Lenerfdiaphragmatique,quieſt fait des rameaux anterieurs de la quatrieſmo,
1
cinquieſme & lixieſme paire du Col.
1 f Rameau ancerieur de la cinquieſme paire du Col , qui ſe diſtribuë aux muſcles
voiſins du bras & de la Clauicule.
§ Portion de la ſixieſme paire du Col, qui s'en va diſtribuer au bras.
h Porcion de la feptieſme paire du Col, dela premiere & ſeconde du Thorax,
Ordepuis fiuſques à h ,ſont les ſix nerfs qui ſe vonc diſtribuer au bras,qui premic.
1 remene s'entrelacent, & puis s'eſtans deſueloppez, vont au bras comme cu auras.
ži Premiere paire des nerfs qui va en la peau du bras.
k Second nerfcaché ſous le muſcle à deux reſtes.
1 Portion du meſmenerfà l'endroi& où il cient compagnie à la Mediane.
mm Troiſieſme nerfdu bras,qui ſe va perdre aux doigts dela main en deux rameaux
au poulce : deux à l'index , & vn au moyen , & quelquesfoisdeux , & alors yn
au Medecin .
tij
Le ſixiefme liure
214
hn Le quarrieſme nerf du bras , qui s'en va par derriere le bras perdre en la plus A
grande partic aux muſcles, qui prennent leur origine de l'apophyſeente .
ricure : mais vn rameau s'en va perdre à la peau iulques ſur le poignet.
00
Cinquieſme nerf du bras, qui ſe va perdre à la main pour fournir de rameau
1 aux doigtspar dedans , qui n'en ont poinceu de la troiſieſme paire .
PPP Sixieſme paire qui s'en va toufiours à la peau du bras iuſques au poignet.
.
99999 Les nerfs Intercoſtaux qui ſe diſtribuent aux muſcles prochains
rrrrr Partie des nerfs Intercoſtaux qui renforciſſent le neaf Coſtal, qui eſt vne
partie de la ſixieſme paire du cerveau , laquelle ſe diſtribuë parcout le ven
tre inferieur.
frir Les nerfs des Lumbes , qui ſe diſtribuent aux muſcles de l'Epigaſtre.
IC
Vn petit nerf venāc des Lumbes, qui tient cõpagnie à l'arrere Spermatique.
VVV Le premier nerf quiva à la cuiſſe pour ſe perdre en la peau d'icelle,
XXXXX Second nerfdela cuiſſe ,dont vne partie s'en va auec la Saphene iuſques au
bour de pied.
у Troiſieſme nerf de la cuiſſe,quiva auec le reſte de l'Hypogaftrique, qui va B
par le trou de l'os Pubis .
ZZZ
Quarrieſme nerf de la cuiſſe, lequel ſe diſtribuë par toutes les parties de la
cuiſſe, de la jambe.& du pied ,& ſe perd aux doigts d'iceluy , de ſorte qu'il
baille deux nerfs par deffous, & deux par deſſus.
&
Partie des nerfs venantde l'os Sacrum , qui ſe diſtribuent au muſcle voiſin
de l'os Ilium .

Deſcription del'osdubras, & des muſcles qui le meuuent.


CHA P. XXV .

Pres ces choſes ainſi conſiderees,ilconuiédroit parler des muſ.


cles mouuans le bras:mais veu que nous ne ſçaurions parfaicte
mét deſigner , & mõſtrer leurs origines ( au moins des deux bra
chiaux ) ſans auoir premieremétmõſtré & baillé la deſcripció du
naturel de l'os du bras : à cece cauſe nous parlerõs premieremét C
S
E

d'iceluy puis rcuiendrós auſdics muſcles . Le naturel doncques


S

de l'os du bras ,eft d’eſtre le plus grád d'entre tous les autresos,
excepté los de la cuiſſe : dauátage d'eſtre rond , moüelleux,cauc,
ayant vne aſſez grande epiphyſe, ou condyle, ou teſte en ſa partie ſuperieure alliſe ſur
Defcription va moyē col par Peſpece d'articulation ,nõmee Symphyſe,ainſi qu'eſt toute autre epi.
du naturel
de los dos phyſe . Era en la partie inferiçure deux apophyſcs ou prominēces, ou tubercules : l'vn

bras. antericur, & l'aucre poſterieur, & entre les deux cõmevne demic orbitede poulie : les
deux extremitez de laquelle deſinent, l'vneen vn trou exterieur , & l'autre interieur.
Quác à la relte , elle a double connexion ,vnc auec lecol de l'os du bras,par l'eſpece de
connexion que nous auons nõmce Symphyſe,qui n'eſt autre choſe à dire , qu'vnion
naturelle d'vn os auec l'autre , ſans mouuement aucun . L'autre connexion eſt auec
la ceſte ou bočice ſuperficielle de l'Omoplate , que nous auons appelle Glene, par

Quet-ce vne eſpece de Diarthroſe, nommee Arthrodie .Or eſt telle connexion ſtable & con
que Syin- firmee ; tant par les muſcles deſcendans de l'Omoplate au bras , que par les ligamens D
phyf . propres qui deſcendent de l'orbite & ſourcil de la boërte de l'Acromion , & Cora
coïde à la teſte dudicos. Dauantage ladite teſte eft en la partic interieure plus qu'à
l'anterieure , comme fiſſuree & cauee , pour bailler deſcente à vn des ligamens du
muſcle à deux teſtes venant de l'Omoplate.Quant à la partie infericure ( qu'auons dit
auoir deux apophyſes, l'vne anterieure l'autre poſtericure,& entre les deux , comme
vne demie orbire de poulie , terminee par vn trou exterieur, & vn autre interieur,
pour la retenció de la Acxion : ou extenſió parfaite du coulde nouspouuos dire qu'el
le eſt conioin & c par deux eſpeces d'articulació auec le coulde generálemét pris : à ſça
uoir par ginglyme auec l'os du coulde propremét dic , & par Arthrodie auec le Rayon
lequel par vneboërte ſuperficielle reçoic l'apophyſe anterieure du bras , à l'entour de
laquelle il voltige & tourne au mouuemét de la main . L'apophyſe pofterieure eſt fai
te principalement pour la conſeruation des veines, arteres, & nerfs. Ces choſes ainſi
de l'Anatomie. 215
A demonſtrees,reſte ſeulement quenousadiouſtions la figure de los contenu entre les
deuxextremitez, afinqu'en cas de fra & urenousle ſçachions reduire à fon naturel,
comme il appartient. Et pource faut encendre,que cedit os eſt aucunement cave in
cericurement ſous la lciſſure de la teſte dudit os, & extérieurenient & aucunemét an
tericurement boſſu :au contraire dela partie inferieure,où anterieurement il eſt cauc,
& poſterieurement & exterieurement aucunement boſlu. Orcet osicy eſtancmobi- des
Huiclmal
monna's
le,cancdeuant &derriere, que haut & bas, Nature luy a produit pouraccomplir ſon le bras.
mouvement,huict muſcles:ſix propres , & deux communsavec l'Omoplate. De tous
leſquels, deux lemeuventà la partie anterieure,deux à la poſterieure , deux à la ſupe
rieure,& deux à l'inferieure. Et fauc noter,que quand nous diſons que deux le meu . >

uenc àla partie anterieure,deux à la poſtericare,deux à la ſuperieure,& deux à l'infe.


rieure, ilne faut pas entendre que deux le meuvent droitement en la partie anterieu
re,ſansdecliner en haut ou enbasiny les deux qui le meuuét en hautſans decliner ou
B en auant,ou en arriere,& ainſi des autres.Mais ilfauc entendre telles commigrations
de muſcles,en quelque façon qu'ils meuuenc ledit os,que ſi c'eſt le Pectoral & ſon có.
pagnon,touſiours ils retirent vers le deuane, ainſique fait le Delcoïde auec ſon com
pagnon,en haut: & ainſi faut eſtimer des autres. Orquantà l'origine & inſertion deſ
diesmuſcles,desdeuxquimeuuentlebrasversledeuant, l'vn nômé Pectoral,àcauſe PeMuſcle
ctorale
de ſon origine, ſort plus quedu milieu dela clauicule de la plus grande parc du ſternő,
& de la fixieſme,ſeptieſme, & huictielme coſte , & s'en va lier au bec de corbin par vnc
mébrane aſſez forte au cendon membraneux ( à raiſon dequoy il eſt dic commun au
bras & à l'omoplate ) au bras entre le muſcle Delcoïde, & celuy à deux teſtes, par vn
fort & gros tendon fait de fibres qui ſe croiſent en croix Bourguignonne : deſquelles
les vnesdeſcendēc de la clauicule, & partie ſuperieure du ſternon:lesautres montent
de la partie ou origine inferieure d'iceluy,venár de la ſixieſme,ſepticſme, & huictief.
mecoſte. Et combien que l'action dudit muſcle ſoit diucrſe, à raiſon de la diuerſité
deles fibres,prenās leuroriginede diuers endroicts, ſi eſt -ce toutefois que touſiours
ilcire le bras anterieurement , ſoit qu'il le tire en haut , ou en bas,ou vers la poitrine.
L'autre quieſtſon compagnon ,deſcend de coure la léure ou ſourcil de la partie cauc
del'Oinoplace,laquelle ilrépliſt à la partie anterieure du bras pres ſa teſte.Quant aux Muſclepel.
C deux qui le leuent, le premier appellé Deltoïde, pour la ſimilitude qu'il a auec vnc shoide.
Jerere Grecque nommee DelcaV. deſcend preſque de la moi&tié dela clauicule, de
l'Acromion ,& de toute l'eſpine del'Omoplate ,à la partie antericure du bras, enuiró
quatre doigts ſous l'articulation. Et a diuerſes actions ſelon la diuerſité de ſes fibres
comme tout autre muſcle :toutefois en quelque ſorte qu'il ſe retire , ſoit de ſes fibres,
clauales ſeules, ou ſpinales de l'Omoplate ſeules, ou desdeux enſemble, couſiours il
tire le bras vers le haur. Son compagnon deſcend de la partie gibbeuſe de l'Omo
plate, contenuëentre la coſte ſuperieure d'icelle & l'eſpine,entre l'Acromion & co. Ces deux I
racoïde, a4 coldu bras , lequel nous appellerons Epomis, ou Eſpaulier. Maintenant nommé
pour umEL
desdeux qui letirent vers le derriere, Ic premier& plus grand prend ſon origine de
la plusgrandepartie dela líurcexterieure delaparticgibbeuſe de l'Omoplate quiex paulier.
ſous l'eſpine d'icelle, & couché par deſſus ladite Omplate, s'en va à la partie poſte
rieuredu bras ſur ſon col. Son compagnon plus petit fort de la partie ſupericure &
D exterieure de la coſte inferieure de l'Omoplate : & s'eſtendantaucunement ſur la
partiegibbeuſe , voifine de ladicte coſte, & s'en va auſſi au bra. Ceſtuy -cy ſemble
eltre vn melmeauecquesle precedent , & eſt charnu exterieurement, meſmes iuf
ques deſlus la ceſte dubras. Les deux quiletirenten bas, ſorcent,l'vn & plus petit,
de la ligne droicte delacoſte inferieure de l'Omoplate , & s'en va à la partie inferieu
redu brasàl'entour de ſon col : l'autre nommé tres-large monte des eſpinesde l'os
Sacrum,des Lumbes, & le plus ſouuentdesneufinfericures du metaphrene parl'an- Muſcle
gleinferieure de l'Omoplate, auquel il s'inſere par vn rendon membrancux, & à la nommé
partie interieure du bras pres du col par vn autretendon fort & robuſte. Et àceſtetres-large.
cauſece muſcle icy eſt dit commun au bras & à l'Omoplate. Et fauc noter , que lors .
qu'ily a quelque playe en cedit muſcle, on ne peutaisément leuer le bras.
>

t iij

Y
1

216 Lelixieſmeliure

Deſcription des os du Coulde & des muſcles qui le meurent. A


CHA P. XXV I.

PRE S ces muſcles icy viennent ceux qui ficchiſſent & eltendent le
Coulde : mais attendu que ie ne ſçaurois monſtrer commodément leur
inſercion , ſans t'avoir premierement declaré les os d'iceluy , à ceſte caule
Le nom de
Coulde et nous les deſcrirons avant que faire autre choſe, & puis apres reviendrons
pris en trois auſdiêts muſcles. Or pour commencer afin que l'ambiguité de cenom
manicies . de Coulde,par les diuerles ſignifications ne puiſſe troubler perſonne, il faut Iça.
Premiere
uoir que le Couldccft vſurpéen trois fignifications. Car quelquesfois il eſt pris pour
accepison toute la partie de la main , compriſe entre le bras & le poignet. Quelquesfois pour
du Coulde. l'os infericur de la ſuſdicte partic . Quelquesfois pour la partie luperieure dudie
Seconde aca
os , laquelle tourne dedans l'orbite du bras , comme vne corde dedans l'orbite
ceprion..
Tience acce . d'vne poulic, & eft appellee Olecranon : nous l'vſurpons icy ſelon la premiere ac
prion. ception. Et pourtant diſons qu'il eſt fait deux os , vn nommé Rayon , autrement B
Olethanon. pecic focile du bras : l'autre proprement & ſpecialement dit l’os du Coulde. Ces
deux osen leurs deux extremitez ſout adherans , & eſtroictement liez enſemble par
Le matural fores ligamens, & entre ces extremitcz ſont ſeparez aſſez loing I'vnde l'autre, & plus
du Ragon. en bas qu'en haut : pour la ſituation & paſlage des muſcles & vaiſſeaux de la partiein
terieure à l'extremité,ainſi qu'il ſera demonſtré en ſon licu . Quant au Rayon , ſon na

Apophyſe turclcft d'avoitdeux epiphyſes ou aspēdices,vne à ſon extermité ſuperieure, & l'au
ich one creà l'infericure.Laſuperieure eft róde & caue luperficiellement en formede ballin ,
eminence on & reçoit l'apophyſeanterieure de l'os du bras , à laquelle elle eſt attachee par forts li
emboizure games,deſcendanttát de ladite apophyſe de los du bras,que de l'olecrane,cout à l'en
d'os, owco - cour de ladicte epiphyſe ronde du Rayon , & connexion parfymphyſes auecques l'os .
me une re- L'uſage de telle connexion eſt de tourner couc à l'encour de ladite apophyle, & parce
generation
dos. moyen faire la main prone & ſupine. Mais l’inferieure epiphyſe dudit rayõ eſt au de
dans caue,pour mieux reccuoir les os du Carpe : & au dehors gibbeuſe pour l'aſſeurá

ccd'icelle. Dauantage ledit rayon eſt plus gros & plus mol par bas, & plus petic & plus C
dur
par haut : auquel endroi& vn peu vers le dedans , ila yne petite cuberoGicé par la
quelle il reçoit le muſcle à deux teſtes.Outre plus en la partie exterieure & moyênc, il
eſt quelque peu boflu & rond pour l'aſſeurance d'iceluy, à l'encătredes iniures extcr
Sirnation de
nes :& en l'interieure plat,pour la comodité de l'apprehenſió de la main.Mais ſur l'en.
los Radios. droit qu'ilregarde l'os du couldeproprement dit, il eſt fait en das d’aſne, afin que les
Le nasurel
de los du muſcles euſſent plus plantureuſe origine & priſe dudit endroit. Son aſliette eſt ſur l'os
coulde pro du coulde , vis à vis du poulce. Quant à ſon compagnon , que fpecialemét nous appel

premět pris.lós l'os du coulde, il a pareillemétdeux epiphyſes,vnc ſuperieure & l'avere inferieure.
La fupcricure & plus grandes'adapte auecques l'orbite du bras, dedāslaquelle elle va
& vient à l'extenſion & Alexion du bras , comme vne corde de dodás l'orbice ou cauité

d'vne poulic,horsmis qu'elle ne faitpoint le trou entieremét à cauſe des deux procez
d'icelle en grădeur inegaux , leſquels ſont arreſtez par les trous de l'os du bras à la par
faite extenſion, le procez plus grand que nous auons appellé O ! ecrane par le trou ex
terieur: & en la parfaite flexió, la plus pecite & plus courte,par le trou interieur. Or eſt
celle articulació faire parginglyme , come nous auos die , & le ſtabilie ou atcache non ‫ܝܐ‬
ſeulemét par ligaméscomunsvenāsdes muſcles qui les meuuét, mais auſſi par ligamés
propres,leſquels deſcendēt des apophyſes du bras, & bords des trous,tout à l'entour
de l'epiphyſe dudic coulde. L'autre epiphyſe inferieure, & plus petite eſt au dedās au
cunement caue,pour mieux reccuoir les os du Carpe , & audchors ronde tendant en
pointe : à cauſe dequoy eſt appellee en Grec Styloïde.Dauantage , cet os eft plus gros
deuers le bras , & plus petit deuers le Carpe, tour au contraire du rayon . Semblable
menc ſur ſa plus groſſe partie il cft interieurement plat , & au meſme endroit exterieu .
rement quelque peu boffu :au reftc, droit & rond, fors que del'endroict qu'il regarde
le rayon, par deſſus lequel il eſt aſſis: auquel licu ila vne ligne faite en dos d'aſne pour
la plus ſeure origine & inſertion des muſcles iſſus de telles partiesdes ſuſdicts os Fina
blement il eſt caue & moüelleux ainſi que ſon compagnon . La ſituation du Radius
La filustion eſt oblique, & celle du Cubicus droite, afin que le mouuement du bras fuft mieux fait

du radius, & accomply , pource que le mouvement par lequel le bras eft cftendu & flechy, ſe faict
G Cubigus. de droite ligne: & lemouuemét,parlequel ſe fait que l'on tourne le bras , à ſçauoir ,en
De l'Anatomie. 217
A
figure prone & fupine,ſefaic laterallement, & à ceſte cauſc lc Radius eft oblique , & le
Cubicus droit;car l'osdu coulde eſt depuré pour faire l'extétion & flexio , & le Rayon
aux mouvemens latcraux & tournemens, & pour ceſte raiſon la jointure de ces deux
os auecle brachium ou haurdu bras eſt difference. Et voyla couchancla deſcription
des os du coulde , laquelle ie t'ay voulu bailler lemieux qu'ilm'a eſte poſible, afin Muſcles
qu'en cas de curacion des fractures,cu puille prendre du natureld'vne chacune telles mouuans le
indications qu'il apparcient à lesbien & deuëment curer.Parquoy reſte que mainte . ner
Couldegem
alernent
nant nous rcuenions aux muſcles mouuans le couldegeneralement pris : leſquels ſont pris.
quatre en nombre,deux quile plienc ,& deux qui l'eſtendent. Des deux premiers I'vn Muſcle Big
eſt appellé Biceps, à cauſe de les deux teſtes qui deſcendent, l'vnc de l'apophyſe Co. ceps.
racoïde, & l'autre du bord de la boëte del'Omoplate ,par la ſciſſure de la teſte de l'os Muſcle
s t
ВB. du bras:ſous le colduquel commençan à ſe faire charnuës, s'vniffent eſtroittemen Brachial.
ſur le ventre & milieu du bras:puis ainſi vnies ,s'en vonc implanter par un fort tendon
à la cuberoſité interieure du Rayon.L'autre nommé Brachial,à raiſon de l'adherence
& ferme connexion qu'il a avec l'os du bras, deſcend obliquement ſous le ſuſdit muſ. Muſcles
cle,depuis la partie poſterieure & ſuperieure dudit os dubras , iuſqu'à l'os du coulde, Coulder
plus que du rayon interieurement. S'enſuyuenc maintenant les deux qui l'eltendent, ſendeurs.
deſquels le premier nommé Long ,deſcendde la coſte inferieure de l'Omoplate, & Muſcle lös.
adherant à l’osdu brass'en va(meſlé auec ſon compagnon forteſtroitement, & prin
cipalement prés du coulde(là où cu orras parcy.apres. L'autre ſon compagnon, que
nouspouuons appeller le Court , deſcend de la parcie poſterieure du col de l'osdu Le Comil .
bras,adhere à iceluy, & faiſane vn tendon commun & large aucc le ſuſdic, charnu au
dehors & nerucux au dedans,s'en va inſerer & embrafler toutl'Olecrane , pour en
ſemble eſtendre le coulde.
C

Declaration des osdu Carpe,Mecacarpe,& desdoigts. CH A P. XXVII.


Outes ces choſes ainſi deučmét faictes & accóplies,ilfaut venir
à la declaration des os,cát du Carpe,Metacarpe, que desDoigts;
parce que nous ne ſçauriós autrcmét expliquer bien & deuëmēcspeciale fi
l'inſertion desmuſclesqui reſté encoresà declarer. Etpourtant gnification
ſans pluslóg delay,il te faut reduire en memoire ce quecy -deſſus dela main.
auos dit parlás de la main:auquel licu nous diſions qu'icelle pri
ſe ſpecialement,ſignifiece quieft cótenu entre les os du coulde, Le carpe
& l'extremité des doigts : que cous les Anacomiſtes diuiſent en el compoſé
Carpe,Metacarpc,& Doigts . Quant au Carpe,les parties communes appartenantes, de bwilt os,
tantà luy qu'au Metacarpe & Doigts,l'ont elté ſuffilammēc declarecs iuſqu'à preſent: quafont
mais que tu ayes entendu que le cuir ,cantde la main quedu pied ,eſt moyen entre pur blables.
cuir & pure chair,cõme celuy du front ,cóbien qu'il ſoit immobile : dauantage fore & Les osdo 1

denſe,pluscoutesfois au pied qu'à la main,depeur d'etre ſi facilement bleſſé en mar- Corpsne


D chantdeſſus.Outre cesſúſdites partiescõmunes,ledit Carpe eſt compoſéde huict pe fons poins
citsos licz parrangs,& conjoints auec les deux os du coulde par diarthroſe,& enlem- menclleux.
ble par ſynarthroſe auec cartilages & ligamens , tant communs venans des muſcles,
quepropres,deſcendanstouſiours des premiers aux autres qui s'enfuyuent. Or ſont
ceſdits os les vns plus petits que les autres,dauantage durs &ſans mouelle, exterieu.
rernent gibbeux , pour plus grande ſecurité & beautédela partic:&interieurement
caues,pourle paſſage des tendons qui vont aux doigts.Ils ſont dirigez & diſpoſezen
deux rangs,dont au premier n'en ya que trois, & à l'autrecinq. Les crois dupremier
ſontdetelleſorte,quel'vn reçoit l'epiphyſe Styloïde ducoulde:l'autre, la connexion
desdeuxos enſemble:letiers eſt receu du Rayon. Des cinq du ſecond rang, crois ſou
ſtiennent les quatre os duMetacarpe,auec leſquelsilsſont conioints par ſynarthroſe,
ainſi qu'ils ſont auſſi auec ceux du premier rang. Le quart ſouſtient le premier os du
poulce, auquel il eſt conjoint ( commeauecceux du premier rang ) par ſynarthroſe.
Lecinquieſme& dernier eſt affis intcricurement vis à vis du coulde,principalement
furlosdu premier rang,qui reçoit le Scyloïde du coulde. Ceſtuy.cy eſt le plus petit L'annean
decous & plus foible,à raiſon de la ſubſtance cartilagineuſe, laquelle conſtituë l'an de lamain
neau auec certainsligamens,paſſans & tranſuerſansd'vnedes extremitez laterales & Gjonvja.
interieures du Carpe àl'aucre. Lequel anncau a eſté fait, tant pour la conſeruation ge.
t iiij
?

218 Ľe fixieſme liure ,


des nerfs, veincs,& arteres,qui paſſent par deſſous luy de peur qu'en nous appuyanc A
ſur la main ou Carpe , celles parties par ceſte compreſſion ne fuſſent offenſees ) que N

pour la commodité de l'action des moſcles plians les doigts , leſquels en faiſans leur
action & le retirans,euſſent peu difformer la main,fortanshors dela cauité du Carpe,
Le M61.6 à raiſon que l'actraction faite par cordes, pourueu qu'elle ne ſoit empeſchec, eſt faite
Carpe et par droicte ligne.S'enſuyuentmaintenant les osde la ſeconde partiedela main,nom .
compoſé de mec Metacarpe,leſquels ſont quatre en nombre,boſſus excerieurement, & interieu
quatre os . rement faicts en archer, à ſçauoir caues au milieu ,duquel eſt faicte la paulme & creux
de la main , ou la plus grande partie. Ils ſont diſtans les vns des autres entre lcurs ex.
trcmirez ,pour illec ſituer les muſcles nommez Entre oſſeux,& ont epiphyle en leurs
deux extremiſez , commecu peux facilement veoir en yn Scelece d'vo peticenfane.
Etfaut icy noter que par le premier os du Carpe & Metacarpe nousentendons celuy
quicft en lapartic'antericure,à ſçauoir qui eſtdeſſous le poulce au Carpe , ou l'indice
Les os des au Metacarpe, comme ceux qui en leur ordre ſouſtiennent les doigts plus dignes. A
pres ceux- cy s'enſuyuent les quinze os des doigts , trois d'vn chacun, caucs & fiftu
doigtsfont
quinze en leux,pleinsde moüellelubtile&liquide,non groſſe& eſpeffe,commeésos desbras
nombre, & cuiſſes:auſſi exterieurement boſlus, & intericurementcaues & placs,pourl'affiecte
des tendons qui montent interieurement le long des doigts iuſques à la derniere B
iointure. Où noteras, que pour la confirmation & conſeruation de telle aſſiette de
tendons , Nature a produic des bords des cauitez incernes deſdits os , vn ligament
membraneux & forc,lequel allant tranſuerſalemét d'vn bord à l'autre,ioint ſi bien les
tendons concre leſdits os,qu'ils ne peuvent ſortir deleurplace, ny decliner d'un co.
ftény d'autre, Ilsons eſté faiets connexes & courbez par dehors , pour mieux ſervir
à l'action :car de leur parcie interieure les doigts ramolliffent,broyent& prennét tou
tes choſes , ce qu'ils feroient mal- aiſément s'ils n'eſtoient connexes & courbez .Or
quant aux cinq premiersos des doigts , quatre ſont conioincs aucc les quatre os du
Metacarpe parfynarthroſe,veu queles os duMecacarpe nc ſe meuuent point manife.
ſtement. Le cinquieſme par meſme connexion le lic auec le ſecond rang des os du
Carpe. Et ne peut cet os eſtre dit du Metacarpe, ainſi qu'aucuns ont voulu dire ,veu
qu'ilamouuement manifefto, & eſt conjointpardiarchroſc, au contraire de ceux du
Metacarpe, leſquels ſont liez par ſynarthroſe ſeulement.Quant aux ſeconds & tiers
ils ſontconioints,les ſeconds aux premiers,& les tiers aux ſeconds, par d'iarthroſc &
archrodie: pource qu'outre le mouuementqu'ils ontmanifeſte,ils reçoiuent parca- c
uicé ſuperficielle , c'eſtà ſçauoir les premiers,ceux du Metacarpe:les ſeconds, les pre
miers des doigts:& les troiſieſmes, les ſeconds. Ec font tous leſdits os des doigtsen
leur baſe plusgrands, & en leurextremité plus petits , & liez enſemble par ligamens
principalement propres, leſquels ( commenous auons dit cy. deſſus) delcendent des
premiers os aux Ieconds: en ſorte que les derniers n'ayans à qui communiquer leur
Dequoy ligament, ils en font & produiſent les ongles.Parquoy leſdits ongles ſont engendrez
ſonifaits des fibres, des ligamens,& del'excrement des tendons qui ſecerminentà l'extremité
les ongles. de la racine des ongles.Reſte maintenant que nous pourſuyuions les os Selamoïdes,
Lesossefar
. leſquels ſont dix -neuf auxarticulations internes,de chacunemain,& autant à chacun
pied : c'eſt à ſçauoir, deux à la premiere articulation & iointuredes quatre doigts, 8
ſeconde du poulce , & vn en chacun des autres. Quant aux parties internes deſdites
iointures,on en trouục le plus ſouuent yn en ynechacunciointurc,fors qu'à la ſecon .
L'uſage des. de du poulce,où il en y adeux ſur les deuxtendons, lelquels ſont quelquesfois carci. D
os sejamoj lagineux. L'vſage deſditsos,eſt de ſtabilir & confirmer leſditesarticulations, à celle
fin qu'en s'eſtendant ou pliant , les os des doigts ne ſe renuerſene & ſortent de leur
place par quelque fortmouuement ainſi que faitla rotule du genoüil. Ils ſont appel
lez Seſamoïdes, pour la ſimilicudo qu'ils ont auec la ſemence deSclame, quiet lon
guette & platte.
219
de l'Anatomie ,

A Troiſieme figure des Os.

La face interieure de la main droite,


en laquelle A B C monftrent le
premier rang des os du Carpe , le
quel immediatement eſt articulé

auec le Rayon .

D Demonſtre le quatrieſme os du
meſme ordre , lequel auec ſon
oppolice marqué par E , rouſtien
nent le ligament qui fait l'An.
PO
neau .

EFGH Marquenc les quatre os poſterieurs


arriculez auec les os du Mecacar
B
pe & premier du poulce .

3 IKLM Monſtrent les quatre os du Meca


M
carpe.

Te monſtre vn os Seſamoïde , du
R quel tu pourras iuger des autres
D qui ſont arrangez deux à deux 1
à la premierc articulation des
С. КВ
doigts.

NOPQR Monſtrent les cinq os du premier rang des doigts.


STVXY Les cinqos du ſecond rang des doigts & du poulce.

1.2.3.4.5. Les os du dernier rang .

Quatrieme figuredela face exterieure desos de lamain droitte .


C

En ceſte Figure , les lettres quecu vois, mar


quent les melmes os du poignet ou

Carpe.

GH
F
*)

220 Le fixieſme liure
Desmuſcles du Coulde. CHAP. XXVIII.
L faut venir maintenant aux muſcles qui meuuent les ſuſdites parties, &
Quatorze premierement à ceux du Coulde:ſecondement aux internes de la main, 88
Muſcles det
Coulde,
劉 finablement aux muſcles Entre oſſeux. Quant aux premiers, à ſçauoir da
Coulde , ils ſont quatorze en nombre , ſepc externes,& ſept internes. Des
.

fept extc
nes & lepe ſept excernes,deuxrenuerſent le rayon premieremét & ſecondemét, & par accident
internes , lamain encontre- mont , à ſçauoir , que la paulme regarde vers la face ou le ciel,
Muſclesex. au moyen dequoy ſont appellez Supinateurs ou Mains-renuerſeurs :deux eſtendeurs .

temes .
du Carpe, & deux des doigts:& le dernier,Abdu &teur ou Obliquateurexterne. Quác
Muſclesnõ- aux deux premiers nommez Supinateurs,l'vn nommé Treſlong, parce qu'il eſttel,
mez Supi-
NAICNTS .
deſcend de la partic externe du bras, environquatre doigts par deſſuslesapophyſes
d'iceluy :& s'en va inſerer par yn tendon rond & fort,àl'epiphyſe inferieure, plus in
tericure qu'anterieure duRayon.L'autredeſcendobliquemene del'apophyſeexter
ne & ſuperieure du bras enuiron la tierce partie du Rayon , auquel il s'ınlere par liga. B
Muſcles ment membraneux & charnu anterieurement & interieurement. Apres ceux.cy
aftendeurs viennent les deux Eftendeurs du Carpe : deſquels le ſuperieur deſcendant de l'ex
doCarpe. cerne & fuperieurcApophyſe du bras pardeſfúsleRayon s'en va implanter par deux
tendons au premier& ſecond os duMetacarpe, qui ſouſtiennent l'indice & le moyen
des doigts.L'autre & inferieure deſcendant de meſme lieu que le precedent par deſ.
ſus le coulde, s'en vainſerer au quatrieſme os du Metacarpe , qui ſouſtient le petit
doige. Ces muſcles operans ſeuls chacun auec ſon oppofice anterieur , nommeFle
cheur du Carpe,meuuent toute la main ſpecialement priſe, obliquement en haut ou
Muſcle. en bas. S'enfuyuent maintenant les deux Eſtendeurs des doigts, deſquels le pre.
Ejendeurs mier & plus grandprenantſon
des doiges. origine de l'Olecrane , ou os du coulde , deſcend fu
perficiellement entre les deux osdudic coulde iuſqu'au Carpe,auquel endroit il ſe di
uiſe en quatre tendons leſquelspaffans par deſſous l'anneau illec ficué, deGnent ( en i

fermez chacun à part par vo ligament commun deſſus les os du Metacarpe ) à la der.
niere joincurc desquatre doigts,adhcrans toutesfois eſtroitement aux osd'iceux pre-
cedentsla ſuſdite jointure.L'autre & plus petit, prenant lon origine d'enuiron le mi
lieu du Rayon,s'en vaobliquement au poulce,auquelil deſine pardeux tendons,vn w

plus gros,qui s'inſere à la racine dudit poulce,lequel il recire des autres doigts,auec v
ne partie de ceux qui ſont dedans la main;l'aucre plus petit, qui va iuſqu'à la derniere
articulation d'iceluy,lequel il eſtend quand il opere.Reſte le ſeptieſme & dernier Ab 4

Muſcles du&eur,ou autrement Obliquatcur,versla partie poſtericure,c'eſt à dire,vers le petit


Abdu-
Пеr оu
doigt,lequel on trouue le plus ſouuenc diuilé en deux : nous l'auons trouué ceſte an.
nee en crois ou quatre ſubie&ts diviſé en trois :dór l'vn alloit au coſté poſterieur du pe.
obliqua cic doigt & annulaire,pardeux cendons:l'autre ſemblablement,au moyen & indice:
tour .
le tiers , au poulce. Eccombien qu'il ſoit ainſi diuiſc, quelques yns ne l'ont compré
que pour vn , à raiſon de ſon vnique origine,& ſemblable action qui eſt demener les
doigts vers le derriere. Aucuns ont encores adiouſté l'Eſtendeur du poulce auecques
ceſtuy.cy ,à raiſon deleur commune origine:& ainſi de quatre en one cóſticué vndi
uiſé en fepe tendons,diftribuez ainſi qu'ila clé dit. Or quand l'Obliquateur du pecit D
doige & annullaire defauc,comme il fait le plus ſouvent,l'Eftēdeur des doigts ſupplec
le defaut d'iceluy par certaines produ &tions des fibres tendineuſes. Il en y a auſſi qui
Annolto onc voulu dire,quece muſcle jadit de ſepetendos,n'eſtoit qu'vne production du mu
tión .
ſcle profond anterieur,laquelle eſtoit enuoyce par entre la diftin & ion des os du coul
de : toutesfois i’aimerois mieux dire que ce ſoit vn muſcle à part , veu la fermeadhe
rence contre l'os tant du Coulde que duRayon. Ec voila quant aux muſcles externes
du Coulde,leſquels cu peux reduire,s'il te plaiſt, au nombre de ſept, comme nous a
võs fait,ou de fix :en faiſane vn de quatre ,ou de neuf,du precedent en faiſant quatre,
Muſcles in commeGalien, ou dehuiết,dudit precedent n'en faiſantque trois. Car à la verité , le
termesdu quatrieſme Abducteur ou Obliquateur du pecit doigt & annulaire , ne ſecreuuc pas
coulde. fouuent aux hommes. Maintenanc fauc venir aux ſept incernes , deſquels le premier
Muſcle no. conſtituë le cuir de la palme de la main,à cauſe dequoy il ertappellé Palmaire. Leſe
mé Palmas- cond & croiſieſme compagnons en office , cournent le Rayon, & confequemmenela
main ,en ſorte que la paulme regarde en bas vers les pieds,& pource sõt appellezPro.
De l'Anatomie. 221

A nateurs ouCouche-mains. Le quatrieſme & cinquielme auſi compagnons en cu. Muſcles


ure,plient le Carpe:&pourtant on lesa nommez Flecheurs ou PlieursduCarpe. Lc Prona teurs
fixieſme & feptieſmeſemblablement deſtinez à plier les premieres , fecõdes, & tierces Muſcles
joine uresdesaidoig rs,ſont appellez Flec heur
l
s des doigts.Quát àleur origine &inſer.- Flecheurs
n lm
tio , le pa re us ti
le pl pe & ſu t pe rf
d'ic ie entre us ſcend arnude apophy
to , de ch l' ou Pli eurs
ſepoſterieuredu bras interieurement , & quelque peu apres delinác en vn rēdon fort du Carpe.
long &greſic, s'en va perdre au cuir de la paulme de lamain ,iuſques à l'extremité Muſclesfie
desdoigts.Car il eſtoit neceſſaire, que ledit cuir pour la commodité non ſeulement cheurs des
del'apprehenſion ,fuſteſtroitementattachéauec lesparties ſubiacétes,de peur qu'en doi gts.
Leur origi
ladite apprehenfið ledit cuir ne ſeridaft,& efleualt de la paulme de ladice main & ſen
des ne e infer
doiges,& par aink ilempeſchaftl'apprehēlion :mais auſſiafin que la main euſt vn tion.
B timene plus exquis à diſcerner le chaud, froid,fec,humide,pelant, leger,eſgal, aſpre,Vislité dm
mol,dur,grand,petit , & autres choſestangibles. En apres viennent lesdeux Prona- mufilepal
teurs,deſquelsl'on nõmé Rond,viét de la partie interieure de l'apophyle pofterieure maire .
3
du brasobliquementenuiron le my.Rayon, auquel ils’atcache parvn cendon mem
braneux & charnu,iuſqu'àladice inſertion :l'autre nomé Quarré, eſtane large de trois
àquatre doigts, aſſez tenu ,& ſitué interieurement ſous tous les muſcles qui interieu
rement deſcendentou au Carpe, ou aux doigts ſurl'extremité des os du coulde, mó .
tecranſuerſalement du plus bas de l'os du coulde au plus haut Rayon , où il deſi
nepar vo tendon membraneux. Les Flecheurs du Carpe prennent tous deux leur
origine del'apophyſe poſterieure, mais interne ,deſcendansobliquement ſelonplus Poing
oumoins,l'vnTelonl'osdu coulde,& l'autre du Rayon:& s'inſerene, celuy quidelfloans
cend ſelon le coulde,au hui& ieſmeos duCarpe,que nous auós dit faire en partie l'an
C
neau:l'autre qui ſuit leRayon ſelon la plus grande partie à l'os duCarpe ,& du demeu
ranes'en va iuſqu'au premier os du Metacarpe, qui louſtientl'indice.Řeſtent encores
les Flecheurs des doigts,leſquels à raiſon qu'ils font couchez l'on ſur l'autre , le ſupe
ricur eſt appelléSublimeouSuperieur,& l'inferieureProfond.LeSublime ou Supe.Flecheur
zieur,prenantson origine de lapartie interieure & inferieure de l'apophyſe poſtericu des dogies,
se du bras, & des parties ſuperieures tancdu coulde quedu Rayon , deſcendentre les Sublime ens
deuxosfans diuiſion aucune , iuſqu'au Carpe ſur l'endroit de l'anneau :auquellieu Superiew .
apres s'eſtre diuiſé en quatre tendons , s'en va implanter aux ſecondesiointures des
quatredoiges , leſquelles il fechic & plic de la propre inſercion ,come il fait lapremie.
re,tant par le ligament commun,que certaines portions qu'en paſſaneilleur laiſſe. Et
ſont ces quatre tendonstout contre leur inſertion fendusen deux pour bailler paſſa
ge & plus grande afleurance aux tendons du muſcle Profond, deſcédans à la tierce &
derniere iointure desdoigts.Or cedir muſcle Profond,prenát ſon origine des parties Flecheni
ſupericures& internes,tane du coulde queduRayon,deſcend entr'eux deux par del.des doiges
Profond.
ſous le Sublime ou Supericur , indiuiſe iuſqu'au Carpe, auquel endroit il ſe diuiteen
cinq tendons,leſquels ilproduit par deſſous le ligament commun , & fiſſure des ten Nosa.
dősduSublime, iuſqu'à la derriere iointure de tous les doigts lelquelles ils flechiſſent
D par leur propreinſertion, & lesdeux precedentes parle ligament commun, & certai
nes produ&tions qu'en paſſant ils leur communiquent & laiſſent. Il y a vn ligament
membraneux,quienuironne les tendonsautourdes doigts.
Des muſcles internes de la Main. CHA P. XXIX.

Es muſcles tant externes qu’internes du coulde ainſi declarez , s'enſuyuent


ceux de la main incernes , leſquels ſont ſept en nombre , dont le premier eſt
appellé Tenar, à raiſon qu'il conſtiruë la plus grande partie de la paulme Sepemul
de la main :le ſecond Hypocenar,à raiſon de la ſituation : le tiers Abducteur des de la
cxternedupoulce à l'indice : les quatre autres lont nommez Lumbricaux , à raiſon main in
de leur figure,ou Abducteurs des quatre doigts vers le poulce . Le premier nommé lernes,
cy.deffus Tenar,plusgros & cras detousles autres, prend ſon origine de tousles os
du Metacarpe,commençant depuis le commencement de celuy qui ſouſtiene le pe.
tit doigt, & montantſelon la ligne Vitale iuſqu'àl'extremité dupremierosduMeca. Muſcles nõ
més Tenay
Carpe,qui ſoutient l'indice,& fcva implanter par ſes plus longues fibres, iuſqu'à la
derniere iointure du poulce: & parlesmoyennes & pluscourtes, preſque partoute
laparcieinterieuredesosdes deux iointuresprecedétes. Et à ceſte caule ledicpoulce
cſtamenéà touslesdoigts,& ramenéd'iceux parſonorigineplus baſſe. Aucuns l'ont

2
222 Le ſixieſmeliure ,

diuiſé en trois pour raiſon de ſes actions diuerſes ,aſſignans l'origine de l'vo à la racine
de los du Metacarpe ſouſtenant le petit : de l'autre ,du milieu de celuy qui ſouftient le A
moyen , & du tiers, de l'extremicé luperieure de celuy qui ſouſtient l'indice : & l'infor
tion de tous celle que nous auons di& . Nous eſtudians à briefueté ſans rien obſcur

Hypotenar. cir, aimons mieux n'en faire qu'yn . Le ſecond nomméHypotenar ,lorc du quarrieſme
os du Metacarpc , & d'iceluy du Carpe qui le ſouſtient, & le va implanter par ſes fibres
plus longues à la ſeconde iointure du petic doigt, & à la premiere par les plus courtes .
Cabda Ecpour ceſte cauſe , & à raiſon aulli deſa double action ,aucuns i'ont fait double : vn
Fleurexter. qui le retire des autres , & l'autre quilamene au poulce. Le troiſieſme Abducteur ex .
ne de l’in- terne du poulce ,deſcéd du premier os du Metacarpe à la premiere & ſecode du poul .
dice..
ce: & cft double ſelon aucuns.Lesquatre qui reſtent nommez Lumbricaux ,autremét
Lumbri
CAHX . Abducteurs internes des quatres doigts,ſortentde la membrane, reueltans & relians
enſemble & aux aucres parties les tendons des Flecheurs des doigts , & le vont definer
par vn petit cendon lateralement vers le coſté du poulce iuſqu'à la ſeconde articula .
tion des quatre dogits . Reſte maintenant à parler des Incerofſels du Metacarpe , leſ
Interofjels quels ſont ſix en nombre,deux en chacune elpace , l'vn interne, & l'autre externe : dot
du Mera- l'interne deſcend par fibres obliques,de la partie laterale du premier os du Metacarpe ,
carpe.
tirant auſſi vers la partie laterale des doigts, pour ſerrer leſdits os du Metacarpelyn
B
contre l'autre , comme quand on chaille des gantseftroits, ou quand on fait la main
creuſe. Aucuns ont voulu dire ,qu’ıl aide aufli à l'adduction des doiges vers le poulce.
L'excerne monte aufli par fibres obliques des parties laterales du ſecond os du Meca
carpe, vers les premieres articulatiós des doigts , croiſant le ſuſdıc en forme de la lecare
Grecque ( X ) pourcfterdre la paulme de la main , & aider l'abdu &tion des doigts du
poulce, Parquoy concluant la deſcription des muſcles de la main generalement priſe ,
cunoteras qu'ils ſont trente neuf en nombre,c'ext à ſçauoir hüict pour le mouuement
du bras,quatre pour le mouuement du coulde generalement pris,lept de la partie ex
terne du coulde, & autant de la partie interne :lepe de la parcie interne de la main , &
ſix Interoffels. Aucuns en content dauantage, en meccans neuf en la partie externe
du coulde , & dedans la main onze ,

Deſcription de la l ambe ,generalementpriſe. CH A P. XXX .

Pres la declaration de la main , s'enſuit celle de la jambe : en pourſuyuane

laquelle , apresauoirofté toute ambiguité de ce nom de lambe, premie С


rement nous la definiron's, puis la diuiſerons en les parties plus compo
ſées : tiercement diviſerons encores celles cy en celles qui ſont moins
grandes & plus amples : quartement pourſuyurons les particscommunes à coutes
les parties de ladice lambe, & finalement les propres d'vne chacune . Ce faict , nous
Double acconclurtons & mectrons fin à notre petit labeur, remercians le Createur , & reco .
Tilambe. gnoiſſans que ſi nous auons fait quelque choſe de bon , c’eſtluy qui l'a fait en nous , &
Definition non point nous de vous meſmes. Mais afin que ce ſoit en bref, il faut entendre , que
de la lambe ce nom de lambecft vſurpé en deux fortes, à ſçauoir generalement,&i fpecialemét ;&
generale . ſpecialement encores en deux manieres , à Içauoir, ſimplement,ou auec addicion.Sim
ment priſe. plement pourtout ce qui eſt cõcenu entre le genoüil & le pied , mais auec addition ſe
Diuifion de
lalembe ge. prend pour le plus grandos d'icelle ,qu'on appelle l'osde la lambe . Quant à la lambe
neralement generalement priſe , ce n'eſt autre choſe que l'inſtrument du mouuement progreſif ,
D
priſe. comprenant tout ce qui eſt contenu entre l'os Iſchion ,& l'extremité du pied . Elle eſt
Qeft ce diuilee en trois grandes parties c'eſt à ſçauoir , en la cuiſſe, en la lambe ſpecialement
que cuifle. priſe , & au pied. Par la cuiſſe eſt entendu tout ce qui eſt compris depuis l'os Iſchion
r ſpecialement diete ,nous entendons ce quieſt contenu
de la lam . juſqu'au genouïl.Pa lalambe
Definition
depuis le genouïl iuſqu'au pied : & par le pied , ce quidemeure depuis l'extremité de
be speciale
mene dicte.ladite lambe,lequel eſt encores diuiſé en trois parties ,c'eſt à ſçauoir au Tarſe, Pedion
Qwell-ce & Doigts: prenantpourle Tarſe ,ce quieſt contenu par les ſept premiers os , qui reſ
que pied . pond au Carpe de la main : par le Pedion, ce qui eſt contenu par les cinq os enſuyuans,
Diuifion qui reſpond au Metacarpe :& le demeurant , pour les doigts. Et comme ainſi ſoic que
du Pied. toutes ceſdices parties ayent parties communes & propres ſuyuane noſtre propos,
Tarſe du
nous pourſuyurons ſeulement la diſtribution des veines,arceres & nerfs, ayans ſuffi
Pied .
Pedion . ſammenc expliqué toutesles autres, quand nous auons parlé en general des parties
contenantes de tout le corps .
Diſtribu
De l'Anatomie, 223 )

A' X X X I..
Diſtribution de la veine Crurale. CHAPР.

Ommençant donc à la diſtribution de la veine crurale,quicom


mence depuis qu'elle ſortdu Peritoine,nous trouuos qu’eftár pat.
uenue pardeſſus l'os Iſchion , & parties laterales des os barreziul
qu'aux ainnes, elle ſe diuiſe premierement en deux inſignes ra.
incaux:deſquels l'vn deſcend interieurementſelon les os de toute
la jambe auec l’artere & lenerf,ainſiqu'il te feratătoft demonſtré:
l'autre deſcend ſuperficiellement & interieuremēc tout le long de
la cuiſſe entre la greſſe ſubiacente au cuir,& les muſcles iuſqu'au pied, au cuir duquel veine sa
elle ſe perd : & pourtác qu'elle peut eſtretouſiours apparéte, cftappelée des Grecs Sa- phene ,
phena,& vulgairement faphene:laquelleſur ſon chemin,loudain apres ſon origine,le dimiſions
diuile premieremét en deux rameaux, l'vn interne, & l'autre externe: dont l'interne d'icelle.
demeure parmy les glandes des ainnes,& le cuir du parement par leſquels ſont faites par
ucinequelle
fc
aux ainnes les fuxions nommées Bubons:l'autre plus ample le perd au cuir de la par font les
B
ticanterieure , & extericure , & plus haute de la cuiſſe. Secondement quelque peu a bubons.
3 pres environ trois ou quatre doigrs , ſelon la grandeur du ſujer , fe diuiſe en vn ſeul
ramcau ,quile perd au cuir interieur & pofterieur de ladite cuiſſe. Tiercement,quel
que peu plusbasque lemilieu de la cuiſſe, derechef fe diuiſe en deux autres , l'vn au
cuiranterieur,& l'autre au poſterieur . Quartement, le diſtribuë par deux autres ra
meaux aſſez petics,aucuir de la partie cantanterieure que poſtericure du genouil : lef
quels quelquesfois ne ferrovući point , meſmemét lors que la Poplitique eſtfortam .
ple.Quincemene vn peu deſſous legenouil fait deux autres rameaux,ſortansl'vn del
Tous l'aucre au cuir de la partie antericure & poſterieure d'icelle : & faut noter que le
sameau quideſcéd au cuir de la partie poſtericure, ſe va iecter par un ſien rameau de
dás vn aucie de la Poplitique ſortant entre les deux gemeaux,deſquelsnousparleros
cyapres. Sextement à l'endroit du plus gros de la iambe ſe diuiſe en deux rameaux ,
leſquels ſemblablement ſe diſtribuent tantau cuir de la partie anterieure, que poſte
С rieure de la iambe.Finablement,apres pluſieurs autres ramifications leſquelles icrais apertion
àcauſede briefuetéjeſtant parucnuë iuſqu'à la partie anterieure de la cheuille internede laſaplo.
auquel endroit elle eſt ouverte aux affectionsdes parties contenues lous le diaphrag
me,qui requierentmiſſió deſang)elle ſe diuiſe encore en deux autres ramcaux : del Diuifion de
quels le plus peti deſcendvers le talon: i'autre le conſomme en pluſieurs rameaux au la urine
cuir de route la partieſuperieure & inferieure du pied ,& des orteils. L'autre rameau Convale
de la ſuſdite veine crurale, que nous auós dit deſcendre interieureinent auec l'artere profonde.
& lederf iuſqu'au pied,faittelles diviſions que s'enfuir. Premierement, ſe profondát
ilfait quatre ramificacions:vne interne,dcſcendát par deſſous l'origine de la Saphene Veine ſchia.
ſurle muſcle obcurateur externe, & en aucunsdes internes: les autres crois s'en vonc lique
Veine
perite:
exterieuremér,la premiere vers l'os Iſchiő,par laquelle eſtfaite la goutte ſciatique, &
lesdeux autresauxmuſcles anterieurs deladire cuille.Ectelles ramificationsfortent Muſcale.
l’vne pres de l'autre. Secondement il ſe diuiſe tout en deux autres rameaux, vn ſupe.
sicur,vn inferieur, accompagnez tous deux de l'artere: deſquels l’inferieur ſe perd &
D conſommepar pluſieurs muſcles poſterieurs de la cuiſſe,ſecerminant pres le iarrer: le
ſuperieur outre ce qu'ildone pluſieurs rameaux aux muſcles interieurs & anterieurs
deladitecuiſſe,deſcendansvers le iarrec,produitla Poplitique , faite quelquesfois de Peplitiques
deux rameauxiffane l'un de plus haut,l'autrede plus bas , laquelle deſcédātpar le ply
du jarret ſe perd maintenant au cuir du gras de la iambe,quelquesfois iuſqu'au calon,
maintenācrenforcie des rameaux de la ſaphene;s'en va au cuir de la partie ſuperieure
du pied,& quelquesfoisde l'inferieuredela cheuille externe. Tiercement quelque
peu deſſousl'originede la Poplitique , & ſous le ply du genouil fait la ſurale, laquelle
le perd aux muſcles de ſura , c'eſt à diredu gras dela iābe, & au cuir de la partie inter- Surale.
ned'icelle & du pied, s’aduançant quelquesfois juſqu'à la partic interne du poulce.
Quartement, ſous la reſte du ſolaire,ou l'Epiphyle poſterieuredes os de la iambe , il
produi&t entre celdies deux os vne autre veine,laquelle nourriſſant les muſcles ance
fieurs delaiambe,ſe va perdre ſousle pied.Quintement &finablement fait laſchiati-Schiatique
quegrande,laquelleſediuiſeen deuxramcaux inegaux,à ſçauoir l'vn grád,& l'autregrande,
petit:dont le plus grád.deſcendanc depuis la diuiſion ſelor,ia partie interieure
u
de l'os
224 Le ſixiefme liure
de la iambe par deſſous les muſcles du gras de ladite iambc, s'inſinuë entre icelle & C A
calon dedans la plance du pied , en laquelle il ſe perd, diuisé en deux petits furgcons à
içauoir deux au cofté de chacun doigt. L'autre & plus petit deſcendant ſelon l'os de
l’eſperon ou petit focile de la iambe, ſe perd en iceluy & letalon :neantmoins quel
quesfois ileſt trouué s'avancer non ſeulement iuſqu'au muſcle Abducteur des doigts
(duquel parlerons cy-apres)mais auſli par cinq petits ramcaux , iuſqu'au petic doigt 1

annulaire & .parcie laterale du moyen.


MIR

Diſtribution de l'Artere Crurale. CH A P. XXXII.

A diſtribution finie de la veinecrurale , il conuient paſſer à celle de


200
l'artere aulli crurale ; laquelle commençant demeſme endroit que la
Urtere dire ſuſdicte veine , & deſcendant ſelon la crurale interne , fe diuiſe ainſi
maſculeuſe. qui s'enſuit: premierement en la muſculeuſede la cuiſſe, laquelle ſe
diſſeminant par les muſcles d'icelle , rencontre l'extremité de lHy- B
pogaſtrique deſcendancc auec la veine par le commun trou de l'os Pu.
bis & Iſchion , & s'adiouſteauec icellc. Secondement, ſur le reply du genoüil elle
ſe diſtribuë en deux petits ramcaux, qu'elle enuoye à la iointure du genoüil,entre les
condyles,ou apophyſes de l'os de la cuiſſe. Tiercement quelque peu apres fait vn au.
tre ramcau, qu'elle enuoye aux muſcles exterieurs de la jambe . Finalement eſtang
paruenuë enuiron la my.jambe entre les muſcles genieaux & le ſolaire, elle ſe diuiſe
en deux rameaux, vo interieur, & l'autre exterieur. L'interieur, apres avoir commu.
1
niqué certains petits ſurgeons aux parties par leſquelles ildeſcend , & principale
ment à la ioincture de la iambe auec le pied , ſc ietre ſous la plante d'iceluy entre l'ex
tremité inferieure d'icelle , & le talon : & illec paruenu ſe conſomme en cinq fur .
geons , leſquels il enuoye deux au poulce , deux autresà l'indice, & vn au moyen.
L'extericurdeſcendantſemblablement à la plante du pied entre le petit focile & le DATE

talon , outre les autres ramificacions qu'il peut faire, il en fait vne à la ioin &ture de la
iambe exterieurement , & vne autre au muſcle Abducteur ou rameneur des doigts, c
& aux parties du tarſe & pedium : & ce qui demeure ſe perd & conſomme aufli en citou
cinq porcions , leſquelles ſontenuoycesdeux au petit doige , deux à l'annulaire , &
vn au moyen .
TKIVOS
Des nerfs des Lumbes, de los Sesrum , & de la cuiſſe. caccia
AP

CHAP XXXIII .

AU

Efte maintenant que nous pourſuivions lesnerfs,leſquels come * 24


ainſi loit qu'ils deſcendét tane desLumbes que de l'osſacrū ,nous a que
Cing paires parlerons premiereméc de ceux des Lumbes , & diſtribution d'i 1.121
de nerfs ceux,puis reuiendrons à ceux de l'os ſacrū. Il ſort donc des Lubes
Dent des cinq paires de nerfs diviſees en rameaux interieurs & extericurs.
Zambes.
Lesexterieurs ſe diſſeminée aux muſcles de l'eſchine,au demy-el.,
pineau lacré,& au cuir quiles couure.Lesintericurs võt aux mul. D
cles de l'epigaſtre obliques aſcendás & tranſverſaux,au pericoine,& pareillement aux
Lúbaux & Thorachiques iſſus dudit licu ,mais differément:car les vosy vont entiere
mét,come ceux de la premiere paire des Lūbes , & le plus ſouuét de la ſecode, horſmis
que quelquesfois ils enuoyét vne petite brancherec aux teſticules,lors que le coftalde su
la fixieſme conjugation n'y en enuoye point. Les autres inferieurs en partie s'y diſtri
buét,en partie no :car leurs plus grandes porciós voies premierement enſemble , puis
apres auec ceux de l'osſacrú ,s'en voncà la cuiſſe,ainſi que tu orras par cy-apres, quád
nous aurops parlé des nerfs,quiſortent de l'os ſacrum :& des diſtributions particulie
res d'iceux. Et pour commencer,il faut entèdre , que dudit os ſacrum fortēt ſix paires
de nerfs, contant pour la premiere celle qui ſort entre la derniere verrebre des Lum
bes,& premier os dudit os ſacrum : & pour la lixieſme,celle qui ſort entre le dernier
ſacré, & premier de la queuë ou Ooccyx. Ceſdites paires deneifs le diuiíent en ra
meaux externes & internes.Les externes & plus petits ſorcás par les trous externes &
poftericurs de l'osſacrum ,ſe diſtribuent par les parciesappartenantes exterieuremeno
de l'Anatomie.
225

A à iceluy ſoient muſcles d'iceluy,ſoitle cuir qui le reueſt. Car c'eſt vne reigle de Natu
re, que chacun nerf fournit premierement de ce qu'il peut aux neceſſitez de ſes paç
ties prochaines,puis apres aux autres,s'il peut, & les voiſines en ont affaire. Parquoy Indruction
fituveuxſçauoir d'où vnechacune partie a lesvaifleaux deplas pres,c'eſt àſçauoir pour le chi
veines, arteres, & nerfs, ilte faut obſeruer le diſcours d'iceux , & tenir par courl'afiliere Targien.
de chacune partie : & entendre , que quant aux veines & arceres , elles ſe iettent &
fourrene dedans les parties ſelon leur plus grande commodité, maintenant par la te.
fte, & principe d'une partie, maintenant par le milieu , & vne autre fois par la fin,ainſi
qu'il ſe rencontre: mais le nerf,meſmement aux muſcles,ſe iette dedansiceux par leur
telte,ou quelque peu apres , & iamais par la queuë . Ec par ainſi encendant le diſcours
deldies vaiſſeaux,& autres choſes predices, vn chacun pourra venir facilement à la
cognoiſſance de quel ramcau de veine , artere & nerf, chaque partie eſt nourrie,viui.
fice ,& faite ſenſible. Les autres rameaux internes des ſudites paires des nerfs, s'en
vont , meſmement les quatre ſuperieurs vnis dės leur commencement, auec les trois
B inferieurs des Lumbes,en toute la iambe , ainſi quecu orrascy pres. Mais les deux in
terieurs fe perdent aux muſcles releuateurs du liege , & au Smincter d'iceluy , plus
B
aux muſcles du membre viril & col de la vellie aux hommes, & aux femmes au col de
l'Amarry & dela vellie:car leſdites parties en reçoivent vne autre par leur fonds, du
Coftalde la ſixieſme coniugaiſon du cerucau . Toures ces choſes ainſi conſiderces & Nerfs de la
obſeruees, fauevenir aux nerfs de la cuiſſe , leſquels ( comme nous auons dit ) eſtans cuisſe
tamaſſez & vois dés leur principe , de la plus grande portion descrois rameaux inter
nes & inferieurs des Lumbes, & quatre luperieurs de l'os ſacrú, le diuilent en la cuiſſe
par quatre rameaux. Dont le premier & plushaut deſcendant par deſſus le peritoi .
deflus le
ne vers le petit Trochancer ,ſe perd aux mul.les internes & ſuperficiels de la cuiſſe, &
au coir qui les couure , deſinant quelque peu deſſus le genouil. Le ſecond deſcen
dantauec la veine & arterecrurales par lainne,le diviſe ainſi que la veine en deux ra
E meaux, vn interne ,& l'autre externe : dont l'interne deſcendant aucc la veine & arte .
3 re,ſedepart aux muſcles interieurs & profonds de la cuiſſe, le finiſſant auſſi par deſſus
C legenouil : mais l’externe deſcendanc auec la faphene ſuperficiellemét iuſqu'au pied ,
baille par tout ſon chemin certains petits rameaux au cuir qui le rcueſt & couure. Lo
2
C troiſieſme ſitué par deſſous les ſuſdi&ts,deſcendant par le trou du penil commun à l'os
pubis & Iſchion, baille certains ramcaux aux ainnes aux muſcles Obturateurs , & à
ceux des trois celtes, & quelquesfois à ceux du membre viril : & ſe finit environ le mi
licu de la cuiſſe. Le quatrielme& plusgrosde cous ceux ducorps,plus dur & ferme, origine con
diftribusion
forranc entierement des produ &ions delos ſacrum , & deſcendantexterieurement
duplusgros
entre la partie inferieure dudir os facrum ,& del'os des Iles , par la cuiſſe, baille cer- nef de sont
tainstameaux aux muſcles pofterieurs d'icelle , ſortans de la cuberofice de l'os de la le corps.
E hanche , & autres ſemblablement au cuir des feſſes, & qui reueſt les fuldiets muſcles:
5 puis quelque peu apres ſe diuiſe en deux rameaux leſquels deſcendans ſans aucu .
De diuiſion juſqu'au ply du genouil , tous deux ſe communiquent par diucrs ra
5 meaux aux muſcles de ladiete iambe , en telle ſorte toutesfois , que le pluspetit pro
dui & vn ſien petit rameau de ſon reliquat par la partie anterieure de la jambe lelon
lepetit focile , au deſſus du pied : où le diuiſant en dix petits ſurgeons quaſi inſenſi
bles , les enuoye deux à chalque doigt. L'autre plus grand deſcendant auſſi de
D ſon reliquat par la partie poſterieure de la iambe , ſe iecte à la plante du pied auec
les veines & arteres , entre le talon & l'os de ladi &te iambe : où ſe diuiſant premierc.
5 ment en deux rameaux, puis un chacun en cinq , s'en vont deux aux parties laterales
dechaſque doigt. Et celles ſont les diſtributionsdeſdicts vaiſſeaux plus infignes, &
qui ſe trouventleplus ſouuent, & deſquelles on a le plus affaire : laillant à conſiderer
àun chacun toutes les autres petites , & preſque infinies diſtribucions faites deſdicts
vaiſſeaux par toutes les parties,par leſquelles ils paſſent,ſoient internes externes , ou
moyennes .
Des parties propres de la Cuiſſe. C H P. XXXIV.

Xpliquees & declarees toutes les parties communes de la iambe generalc.


ment priſe , reſte que deſcendions aux particulieres d'une chacune,com
mençant à la cuiſſe: les parties propres & particulieres , de laquelle ſont les
muſcles , os , & ligaments . Mais attendu que nulneteſçauroit pertinem
mene monſtrer lesmuſcles, leſquelsen celieu icy ſe repreſencent au ſens de la veučja
u ij
226 Lefixieſmeilie

pres les parties communes de cour le corps, li premierement tu n'as cogncules os def.
quels ils ſorcent , & elquels ils definent; à ceſte cauſe nous auons proposé , ſuivant le
chemin quenousauons cenu à la tra & ation des muſcles du bras , te detcrire les os &
arciculacions d'iceux , premier que les muſcles,commençantaux osioinets à la partie
Les os de la ſuperieure del’os factú ,qui ſont deux,vn de chacun coſté ,leſquels ſont appellez vul
hanche . gairement les os de la hanche,ou des Iles. Chacun d'iceux eſt composé de trois os , va
L'os des luperieur,l'autre interieur & anterieur, & le tiers moyč, & aucunement pofterieur.Le
Iles.
ſuperieur eſt nõmétpecialemenc os des Iles , & eſt fort ample & grand,ayant vne cpi
phyſe cartilagineuſe couc à l'encourde la circonference, iuſqu'à la connexion qu'il a
auec les aucres os : la partie luperieure de laquelle nous appelós la droite ligne d'iceluy
1
& la baſe,qui eſt vnic auecluy parfymphyſe, ſe nomme le bord, ou léure,ou ſourcil, +
cauſe qu'elle panche aucunement dehors & dedas en forme de ſourcil: mais ce qui eſt
entre la baſe & la droite ligne s'appelle la Coſte.Dauantage cedic os ſuperieur a deux
faces ou ſuperficies caues,yneinterne , & l'autre externe .Sacõnexion par ſymphyſe
Ifchion eſt double:vne auec la partie ſuperieure de l'os ſacrum ,come nous auons dic, l'autre,
Coryle.
auec l'os Iſchion ,querous auós appellé moyen , & aucunement pofterieur ,lequelco . B
mençant dés la partie plus eſtroicte de l'os des Iles, fait la boëtte dedans lequel l'os de
la cuiſfe eſt receu ,nõmcedes Grecs Coryle ,des Latins Acetabulü : & ſc finit lelon la par
tie laterale du trou comun à luy, & l'osanterieur & inferieur,qu'on appelle en Latinos

Pubis,en François l'os du Penil , ou l'os Barré . Ec ne contient ledit os Iſchion que la
ſufdi &te bočce , horſmis que de la partie poſterieure & inferieure il produiết vne aço .
Tubercule phyſe,laquelle ſe va adiouſter auec le tuldir os barré à l'endroit de la párcie plus baſſe
cu Tubero. du trou comun ,auquelendroit elle appert forc inegale & aſpre , & eft nommee cuber .
fité de l'os culeou tuberoſité de l'os Iſchion :cout au dernier de laquelle il produit d'abondát va
Iſchion.
L'os du pe. petit tourillon , fait à la fimilitude de l'apophyſe de la maſchoire inferieure , que les
milou barte, Grecs appellent Coronne. Le tiers & dernier, à ſçauoir l'os du Penil , ou barié , s'avance
juſques à la partie plus haute du Penil ,où rencontrant ſon cõpagnon, s'unit auecques
luy par ſymphyſe,tout ainſi qu'ils font eux trois enſemble . Ec ce dernier icy s'ouure és
femmes en leur enfantement,ſelon aucuns, ce que ic n'ay peu appercauoir. Situ veux
Annotatiö. bič voir la diſtinctio & ſeparatió d'un chacun à l'ail , il te faut auoir le ſcelere d’un pe- C

tic enfant. Car depuis que l'homme eſt deuenu grand ,les cartilages, qui ſont entreles
connexions deſdits os, degenerenten ſubſtance & conſiſtence d'os , en ſorte que tu
Defcriprion ne ſçaurois diſtinguer la ſeparation de l'un à l'autre.S'enſuitmaintenantla deſcriptió
de l'os dela de los de la cuille, que les Latins appelléf os femoris lequeleſt le plus grãd & plus gros
cuiſje.
de tous , rond , & vouſté en forme d'archet en la partie exterieure & anterieure , pour

la defenſe à l'encontre des iniures externes : & en ſa poſterieure & interieure fait en
dos d’aſne, pour plus grande aſſeurance de l'origine & inſertion des muſcles illec cô .
mençans ou finiſſans: lequel d'os d'afne quelque peu deſſous ſon milieu fe diuiſe en
deux ligncs, tendances, l'vne à la cuberoſité interne , l'autre à l'externe de l'epiphyle
inferieure de ladice cuiſſe. Et les marqueras en ron eſprit diligement , pource que les
fibres obliques des muſcles vaſtes prennent leur origine d'icelles , vn chacun de celles
de ſon coſté, ainſi que nous dirons en ſon lieu . Dauantage , cedir os a deux Epiphyſes
en ſes deux extremicez , comme tu peux voir auxos d'vn ieune pecic enfant : vne en la
parcie ſuperieure, l'autre en l'infericure. La ſuperieure fait la teſte ronde dudit os , la D
quelle allile ( comme coute autre épiphyſe ) ſur yn aſſez grand col , declinát à la par
tie incerieure ,eſt receuë,ainſi que nous auósia dit, dedás la boëtre de l'os iſchion ,auec
laquelle elle eſt conioin & e par enarchroſe, & aulli eft confirmce dedas icelle par deux
genres de ligamens : à ſçauoir vn cómun venát des muſcles , qui de la partie ſuperieure
deſcendár à l'encour de ſon col , & parcie ſuperieure duditos: l'autre propre, lequel eſt
double ,à (çauoir vn mébraneux & large,deſcendant de tout à l'entour de l'orbite de
ladice boëtce,à l'entour de coure l’aſliece de coutela ceſte ſur le col : l'autre gros & rõd
deſcendát dela ſeconde cavité de la boëtte , laquelle s'eſtend iuſqu'au trou commun
Trochunter
au plus haut de ladice teſte ou enuiron .
Outre plus , lous ladire tefte ceditos a deux
grand.
rochanter apophyles ,vne grande & groſſe,l'autre petite & courte . La grande fituee en la partie
perir. poſtericure eſt nommee grand Trochanter : la plus petite allile en la partie interieure,
Trochanter eſt appellec petit Trochăter Ecnoteras, que de la partie plus haute & poſtericure que
fignifie vi - legrand Trocháter,regarde la reſte duditos,ilfait vne petite finuoſité,en laquelle les
Teur .
muſcles Gemcaux , & autres (deſquels nous parlerons cy-apres )ſe yone inſerer. Il faut
De l'Anatomie. 227
A aulliconſiderer la multitude des trousqui ſont tout à l'encour du col, entrela teſte &
lesdeux Trochanteres , leſquelles baillent entree aux vaiſſeaux (ſoienc veines, arte Le move ilc
ses,ou nerfs à lamoüelle dudicos :au moyen dequoy la moüelle eſt engendree & fai a ſentimens
ecſenſible en la cunique,l'os viuifié & nourry.Le ſemblable cu feras en la boëtretant exquis.
interieurement qu'exterieurement,afin que cu fçaches par quelmoyen la ſchiacique
le peutfaire. L'autre epiphyſe duditos,quenous auonsdit inferieure,eſt fort grande
& groſſe,faiſant comme deux teſtes à l'extremité d'iceluy,diuiſces par deux cavitez,
vneplusſuperficielle & anterieure, par laquelle ladite epiphyſe reçoit la palette du
genoüil& l'autre pluscreuſe & poftericure,parlaquelle elle reçoit le ligamene carti
lagineux,& quallioſſeux,produit del'eminence d'entre les deux cauiteż de l'epiphy- Diaphyſe.
fe ſuperieurede l'os de la iambe,qu'Hippocrates au liure des fra& ures appelle en ſon
langage Diaphyſe.
La fixieſme Figure des os Femoris dextre.
B
L'os Femoris ſelon la partie pofterieure
auquel( A )monſtre la ceſtcou Epiphyſe
duditos,laquelleentre dedans la boët
te de l'os Iſchium .
9 b' Perite cauité en la meſme teſte, qui re
çoit le ligament rond deſcendant dela
parcie caue de la ſuſdice boërce.
La connexion de ladite teſte ou epiphy
ſe, c'eſt à dire, exccroiſſance ou allonge
auecques ledicos de la cuifle.
d Le col dudit os.
LaTro
cauité qui eſt entre le col & le grand
chanter.
f Legrand Trochanter , die Tourneur, ou
apophyſe dudit os.
g La racinc dudit Trochanter.
G h La ligne pofterieure duditos,en laquelle
les fins ou qucuës dumuſcle nõmé Tri
ceps,ou à troisteſtes ,ſont attachees.
i Le pecic Trochanter.
kk Les deux Tubercules laterales & infe.
m
rieures dudit os, leſquelles ſont receuës
dans les cotyles de l'os de la jambe.
La connexion faite par la ſimphyſe de
l'Apophyſe dudit os.
m La cauité d'entre les tubercules , en la
quelle s'attache leligament cartilagineux de la ioin &ture du genouil.
L'autre figureduditos de la partie antericure,en laquelle ſeulement fauc nocer la ca
uité quic'eſtmonſtré par n ,qui reçoit la rotule du genoüil: car a & c ſignifient les
D melmes choſes qu'en l'autre figure.
Des muſcles qui meuuent la cuiſſe. CHAP X X XV.

Outes ces choſes ainſi conſiderces, reſte que nous pourſuivions les muſcles Muſcles
mouuans la cuiſſe, leſquels ſont quatorze en nombre : à ſçauoirdeux qui nouuans la
la plient,& pourtant ſont nommez Flecheurs : trois quil'eſtendent,& pour cuille fone
ceappellez eſtendeurs: trois quila meuuent au dedans, reiettans le genoüil quatorze.
vers ledehors, & lecalon vers le dedans, commequand on croiſeles cuiſſes. Aucuns
decescrois n'en fontqu'vn,& le nomment muſcle à trois teſtes. Six,quila rameinenc
dehorsen la deſployant & ouurant , comme en l'acte venerien :dont quatreſont ap
pelezGemeaux, à raiſon deleurgrofſeur, preſque egale,meſmeorigine, inſertion Muſclesflow
& a&tion : les deux autres lont di & s obturateurs, à raiſon qu'ils bouchent le trou cheurs de
communaux os , Barre & Iſchion. Quant aux deux flecheurs, l’yn ronddeſcendant la cuisſe.
intericurement par fibres en longueurinegales, de toutes les apophyſes tranſuerſes
u iij 1

3
228 Le ſixiefme liure

des Lumbes par deſſus la commiſſure poſterieure de l'os Ileon & Pubis s'en va inſerer A
au pecic Trocháter,l'aurrelarge & ample en lon origine , ſort de tout le bord ou four
cilinterieur de l'os des Iles, & rempliſſantla cauité interne d'iceluy , s'en va par deſſus
la partie antericure de la teſte de los de la cuiſſe, inferer au petic Trochanter par vn
gros tendon qui eſt produict de luy & ſon compagnó ,melmedepuis leur partie char
Muſcles neuſe. Ec pour ce tu netrauailleras point de les ſeparer. S'enſuivent les trois qui
oftendenrs l'eſtendent qui font les feſſes:deiquels le premier plus gros , ample & exterieur , pre
de la cuiffe. nant ſon origine du cropion ,oslacrum , & de la moitié ou dauācage du bord ou lour.
cil exterieur & pofterieur de l'os de la hanche ou des Iles , ſe va implanter par fibres
obliques depuis le grand Trochanter , iuſqu'à quatre doigts, plus ou moins ſelon la
grandeur des perlonnes à la ligne droite que nous auons comparé à vn dos d’aine . Le
ſecond moyen en grandeur & licuation deſcend du demeurant du ſourcil, & de la
coſte anterieure & exterieure de l'os des lles : & couché par deſſusla moi &tié dudicos,
ou enuiron , ſe va inſerer au plus haut du grand Trochancer,faiſant ſon inſercion cria
gulaire ſur la partie ſuperieure & exterieure d'iceluy : Letroilieſme plus peci , ccourt , &
menu que les precedens,couché par deſſous iceux , foridu milieu de la face externe de
B
l'os des Iles , & ſe va inſerer à la plus grande partie de la ligne droide du grand Tro .
chancer . Ces crois muſcles icy ont grande & large origine, & cftroitte inſertion faite
commede fibres obliques aux lieux ſuſdicts.Apres ceux.cyfrut venir à ceux quiſer
rent les cuiſſes ou rameinent l'unę ſur l'aucre en croix , en ſorte que le genouil ſort&
tire vers le dehors , & le calon vers le dedans ,comme cu pourras entendre par leur in .
ſertion & origine, & non au contraire, ainſi qu'aucuns ont voulu dire . ' Or leſdicts
muſcles tous trois prennent leur origine en partie chiarneule, en partie ligamenteule,
de la partie ſuperieure & anterieure de la circonference de l'os barré ou os pubis : 8
s'en vont inſerer à la ligne poſterieure de l'os de la cuiſſe, toutesfois l'vn plus avant,
les autres moins . Car le plus pecit & plus court demeure ſous la racine du petit Tro
chanter: le moyen en grandeur & groſſeur,deſcend quelque peu plus bas : le tiers &
dernier plus grand & plusgrosdeſcend par ſes fibres plus longues juſqu'à la fin de la
ligne,beaucoup plus bas que le milieu de la cuiſſe. S'il eſt donc ainſi que cesmuſcles
venans de la partie anterieure & ſuperieure, s'inſerenc à la ligne pofterieure de l'os de
la cuiſſe; en faiſant leur action tous leuls, en ſerrant les cuiſſes, ils les renuerſeront vers C
lc dehors ,comme quand on croiſe leſdites cuiſſes I'vne ſur l'autre, & non point qu'vn
genoüil cire vers l'autre, & le talon dehors . Car telmouuement eſt faict & accomply
par le vaſte interne de la cuiſſe mouuant la jambe . Finablement s'enfuiuent les lix
qui font remuer les feſſes : deſquels quatre ſont appelez Gemeaux , & deux obtura.
teurs . Des Gemeaux le premier & plus haut fort d'entre la commiſſure de l'os Sa.
Muſcles Ge
crum aucc le cropion ,ou pluſtoſt de l'extremité inferieure dudit os Sacrum : & ſe va
meaux .
inferer dedans la cauité du grand Trochanter par vn notable & allez long tendon .
Le ſecond venant de la partie caue ou fiſſure qui eſt entre le bort de la boëtte & la cu
To
beroſité de l'Iſchion , s'en va auſſi à la cavité du grand Trochanter . Le troiſieſme mó .
te de la partie interieure de la ruberoſité de l'llchion , & quelque peu plus haut , entre
les deux Trochanteres,dedansle creux du plus grand . Le quatrielme & dernier,le
plus bas & plus large de tous,ſort de touce la tuberoſité exterieure de l'Iſchion , & fc
de la
va inſerer au grand Trochanter. Et ſont ces quatreicy cachez ſousle plus gros
feſſe :au moyen dequoy pour les bien deſcouurir , il les faut renuerſer vers leur origi- D
ne. Reſte maincenát les deux Obturateurs, c'eſt à ſçauoir interne, & externe, leſquels
tous deux prennent leur origine de la circonferéce du trou qu'ils bouchent , à ſçauoir
commun à l'os pubis & Iſchion ; mais l'interieurmonte à la racine exterieure du grad
la fiſſure moyene entre lapartie ſuperieure de la cuberoſité de l'Ilchio ,
Muſcles ob . Trocháter par
Purateurs, & l'eſpinedrefree en la baſe poſterieure de Pos Ilium : & l’externe de la cauité exterieu
re entre le Tubercule de l'Iſchion , & la partie inferieure de la boëtçe à la partie caue
du grand Trochanter auec les Gemeaux . Situ veux bien voir l'Obturateur externe,
il te faut ou couper l'origine du muſcle à trois teſtes, ou le bien & deuëment ſeparer,
& puis les eſtendre & renuerſer, & les verras par deſſous. L'interne ſc void facilemét
apres auoir ofté la vellic .
de l'Anatomie , 229
A
DesosdelaIamle. CA P. XXVI.
Pres ces muſcles cy deſſus declarez , afin qu'vn chacun puiſſe plus faci
lementvenirà la cognoiſſance de ceux qui s'enſuiuenc, à ſçauoir , qui
meuuent la lambe: maintenant nous pourſuiurons la declaration deles Larotule
os , commençant à la Rocule ou paletre du genouil :laquelle eft vnos op palette
exterieurement cartilagineux, rond en fa circonference & partie exterieure:& en dugencivily
la partie interieure aucunement boſlu ſur ſon milieu , deſcendant en applatiſfant
vers les parties laterales , afin que commodement ſans aucun vice de commodera.
tion , elle ſe peuit adapter ſur la jointure du genoüil , dedans la cauicé anterieure
des deux epiphyſes de la cuiſſe , & fupericure & anterieure de la iambe. Son I'vfage de
vuilité eſt de confirmer ladice iointure du genoüil , & contenir la iambe en deuë ex- la palerte
tenſion , ſans qu'elle ſe plie en quelque mouuement que ce ſoit vers la partie ante- du genoül.
rieure,ainſiqu'elle fait vers la poſterieure. Il faut maintenant venir aux os de la iam .Deſcription
de lo para
B be , ſpecialementpriſe,leſquels font deux , vn plus gros , nommé particulierement ticulieres
l'Osdela iambe:l'autre plus petit,nominé l'Osde l'Esperon,ou pecic Focile. Le plus men) nom.
gros aucunement cauc & moüelleux , eft ficué en la partie interieure de la iambe, méros de
ayant deux apophyſcs ,vne plus grofic, l'autre plus petite. La plus groſſe eſtancaſſiſe la jambe.
ſurle plushautdudicos , & conjointe auec lay parfymphyſe, faic deux cauitez ſuper
ficielles & laterales , diſtin &tes & feparées par vne eminence moyenne d'icelle :au
moyen dequoy ledicos et conioinc avec l'os de la cuiſſe par ginglyme,carpar ſes ca
uitez ilreçoit lestuberoſitez inférieures & pofterieures de l'Épiphyſe de l'os de ladi
ce cuiſſe , & par ſon eminence quieſt au milieu , eſt receu de l'os de la cuiſſe entre les
deux ſuſdites cuberoſitez . Or eſt ceſte articulation confirmée non ſeulement par la
deſcente des tendons des muſcles illec deſinans, mais auſi par trois forts & robuſtes Ligamens
c ligamens : deſquels l’yn viene de toute la partie exterieurede laditeconnexion: l'au. du genoitili
tre de l'interieure : le tiers & dernier,d'entre les deux , que nous avons appelezſelon
Hippocrates , Diaphyſe. L'autre apoplyſe de l'os de la iambeproprement dit, que
nous auons dit eſtre plus petite , eſtant fituée en la partie inferieure , faic vnecauité
quaſi double, par laquelle ledit os reçoit laſtragale, & de la partie interieure fait le
malleole incerne , autrement dit la cheuille , tout ainſi que l'osdel'Eſperon ou petic
Focile ( commetu orras cy apres ) fait l'externe : entre leſquelles chevilles le ſuſdit
aſtragale eſt receu ſelon ſes parties laterales , en ſorte qu'il tourne entre elles & la fuſ.
dite cauité, comme une noix dedans l’arbaleſtre , lors qu'il eſt beſoin d'eſtendre ou
flechir le pied. Outre-plus le fuldir os de la iambe fait en triangle a trois eminences
faites en dos d'aſne la plus aiguë' , delcendant ſelon la partie anterieure, quieft nom .
méedesGrec Anticnemion: la ſeconde , ſur la partie interieure : & l'autre ſur l'extę
une .des
rieure. Toutes leſquelles, mais principalement l'anterieurc , rc fauc diligemment Hipp
D obſeruer, pource qu'en cas de fracture de jambe , elle te lere de guidon pour la bienfraclures.
remettre. S'enſuitmaintenanc le plus petit os, que nous auons appelé l'Os de l'Efpe Deſcriptions
fon : lequel eſtant ſitué vers le dehors,& aucunement derriere la iambe;meſmement de los de
ſur la partie ſuperieure , a deux epiphyſes ainſi que lon compagnon ,caues fur leur l'Esperen .
partie interieure,& gibbeuſes ſur l'excerieure: par I'vne deſquelles, à ſçauoir , ſupe
rieure,ledit os s'inſere, & s'appuye ſous l'epiphyſe interne,&aucuneméc poſterieure
deladice iambe,ne couchanten rien l'articulacion d'icelle auec la cuiſſe , ains luy ſer
uant (eulemēc d'vn ſous- appuy : & par l'autre,à çauoir,inferieure, cemeſmeos non
ſculemenc eſt receu tant du bas de los de la iambe , que dumeſmecoſtéde l'aſtraga
lc:mais auſſi il reçoit la partie d'iceluy quidumeſmecoftë ſe joint auec le calon , lors
principalement qu'on plie le pied leul vers le dehors. Ec eſt conjoint cedit os auec les
ſuſditsparſynarthroſe, & lié par forts ligamens produits de ces os , & enuoyez mu
tuellenient de l'un àl'autre , ou ſi tu veux ,du ſuperieur à l'inferieur, comme nous a
uonsditau bras.'Audemeurent, il eſttriangulaire ,ayant la ligne plueelleuée de la
parric
leinure
exterieure : & des autres deux , l’yne à la partie anterieure ,& l'autre à la pos

U 111
Le ſixieſme liure
230

A
Des muſcles de la lambe . CH A P. XXXVII .

E fait, il eſt cemps de venir aux muſcles par leſquels ſont faits tous les
mouuemēs de la lambe:leſquels ſont onze en nombre,ſıx anterieurs
Onze muf & cinq poſterieurs:deſquels les vns mequent la lambe ſeule , comme
cles de la
iambia ceux quionc leur origine de l'os de la cuiſle : les autres meuuent bien
auſſi la iambe,mais auec la cuille , comme ceux qui ſortent plus haut
que de la cuiſſe ,à ſçauoir des trois os Ilium ,lſchion & Pubis . Quant
Mufele
long jou au premier des anterieurs ,qu'on appelle muſcle long ,autremet cou .
Conturier. Iturier,il prend ſon origine de l'extremité inferieure & anterieure de l'eſpine, ou epi
Action phyle de l'os des Iles,& deſcendantobliquemēt par deſſus les autres muſcles,ſe vain
dw muſcle (crer par vn largetendon & membraneux à la partie anterieure & interieure ſous le
long.
genoüil de la iambe.Son a & tion eſt de croiſer les sábes l'vne ſur l'autre ,pliće premiere.
ment des muſcles qui te ſeronç declarez cy.apres.llạide aufli au muſcle à croisteltes à
faire la meſıne action que nous auósdit.Le ſecond des ſuſdies anterieurs nõmé mem
marifele
membra braneux,à raiſon qu'il
eſt par tout cel,fors qu'en ſon origine,deſcend charnu de lara
COX . cine & baſe de la ſūſdice eſpine del'os des Iles,obliquement par ſon tendon membra. B
neux & large(mellé auec la membranecommune des muſcles )en la partie exterieure
de la iambe,laquelle il chaſſe au dehors , & la cuifle auec les gemeaux : & s'ils operenc
auec le precedent, ils aident à l'extenſion de ladite iambe . Car comme nousauons
dit,de deux mouuemens obliques concurrens enſemble , eſt fait vn mouuemét droit:
& qual cous ceux du corps ſont faits en la meſmeforie: & les muſcles qui fone reis
mouuemens ſont ſituez de mcſmc , à ſçavoir obliquement par oppoſition , comme
cu as peu voir aux mouuemens & ficuations des muſcles de la main generalemit pri .
ſe, & autres. Letiersnommé Droit ( pource qu'il deſcend par deflus le Crurallelon
Muſcle
Droit. la droite ligne ancericure de la cuiſſe , entre les deux Vaſtes ) ſort d'entre l'extremice
de l'epiphyſe de l'os des Iles & dela boëtre , par vn ligament fortrobufte , & s'en va
inſerer à la partie anterieure de la iambc , paſſant par le milieu de la paletce du ge
noüil: laquelle iambe il eſtend de ſoy.meſmeaueclestroisautres qui s'enſuiuent,&
Maſcles par accident peut aider ceux qui plient la cuiſſe. Le quatrielme & cinquieſme ſont
Vaftes. appelez Vaſtes,à raiſon de leur groffeur:dont l'vneſt interne & l'autre externe.Tous
les deux ſont faits de fibres droites vers leur origine , & vers leur inſertion d'obliques: с
au moyen deſquelles tous deux ſemblent auoir action compoſée de mouuement
droit & oblique : le droit , ſeruant à eſtendre la iambe : & l'oblique , à ramener un ge
noüil vers l'autre, ou le chaſſer l'vn de l'autre . Quant à leur origine , l'interne vient
ſelon ſes fibres droites de la racine du petit Trochanter : & ſelon ſes obliques , de la
ligne interieure deſcendante du dos d’aſne dudit os . L'externe par ſes fibres droites
Cort de roure la racine du grand Trochanter , & par ſes obliques, de la ligne exie .
ricure deſcendante auſſi dudir dos d'alne : & toutes ceſdites fibres mellees en aucuns
endroits auec le muſcle crural , en ſorte qu'on ne les íçauroit feparer lansgaſter I'vn
ou l'autre ,s'en vonren la iambe ( chacun de ſon coſté } pardeſſus la Rotule du ge
noüil , ſelon les parties laterales du muſcle Droit , aucc lequel ils font vn petit cen .
don inſeparable,commetu orras tantoſt.Le fixieſme & dernier des anterieurs,nom .
mé Crural, pour la grande adherence & connexion qu'il a auec l'os de la cuiſſe , del.
D
cend d'entre les deux Trochanteres , par deſſous le muſcle Droit & les deux Valtes,
ſur la partie anterieure dudit os , iuſqu'à la pailece du genouil . Et noteras, queces
quatre derniers font vn commun tendon gros & large, par lequel ils couvrent ladite
palette, & coute l'articulation anterieure du genoüil , de ſorte qu'il eſt impoſſible,
de les ſeparer l'vn de l'autre ſans les déchirer & rompre , & en ce lieu il ſert de liga
ment au genoüil. Dauantage , cous ceſdits muſcles operans enſemble eſtendent la
Muſcles iambe. A pręs ceux cy s'enfuyuenc les cinq pofterieurs, deſquels trois naiſſent de la
pofterieurs taberofité de l'os Iſchion , & le quatrieſme de la partie moyenne de l'os Pubis : &
de laium -
be. s'en voor trois à la partie interieure, & vn nomméBiceps à l'exterieure dela iambe.
Où noteras, que l'un des deux internes ſortant de la ſuſdite tuberoficé , deſcend liga
menceux ,cnuiron la moicié de la cuiſſe : & delà fait charnu , ſe va inſerer par vn cen
don ,ainſi qu'auons dit. L'autregreflc ,fortant auſſi du meſmc lieu , s'en vameller par
ſon condon auec celuy du muſcle Long , & deſiner à la partic interieure de la iambe,
(

De l’Anatomie. 231
laquelle auecſon compagnon il cire au dedans , & ferre contre l'autre: ainſi qu'il faic
A la cuiſſe,aidé du'muſcle à trois teſtes. Le troiſielie interne ou poſterieur, deſcend de
la partie moyenne de l'os Pubis par vn ligament large & delié , & le vainſerer parvn
rendon rond à la partie interieure de la iambe, comeleșdeuxluidits. Le quarrieſme
eſt nommé Biceps,ou muſcle à deux ceftes,leſquelles il prend,I'vnede la fuſdice tube
rofité,l'autre dela ligne extericure de la cuiſſe,deſcendant du dosd’aſne, & s'en va in
ſereråla parcie exterieure de la iambe,comme nous auons dic.Lecinquielme& der-Muſule die
nier,nommé Poplitée,delcend charnuobliquemét du Condyle externe de la cuiffe, Popurée,on
àla partie interieure & pofterieure de laiambe, pres de la commiſſure du petit Focile
adecl'os d'icelle. Son action eſt de courner aucunemenc la iambe vers le dedans .
Des os du Pied . CH A P. XXXVIII.
B
Eschoſesfaites,il conviendroit, ſelon l'ordre Anatomique , pourſuiure les
muſcles de la lambe qui meuuent le pied : Mais veu que pour neant & en
vain nouse'aſſignerions leur inſercion ,lipremierement tu n'entendois l'or.
dre & le naturel des os du pied, à ceſte cauſe nous les declarerons premiere
ment , ainſi que nous auons fait des aucres parties cy -deuant declarées. Ecpourcom.
mencer,cu noteras qu'ils ſont vinge fixen nombre,diſtinguezen crois ordies, c'eſt à Nombredes
ſçauoir,ſepe du Tarle,cinq du Pedion ou avant pied, & quacorze des doiges . Des lepe os de pied.
du Tarſe, quatrelonenommez ,& trois n'ont point denom . Le premier des nommez
fuiuancapres ceux dela iambe, c'eſt l'Aſtragale , lequel a trois connexions : Vne de la Ajir.ga
partie ſuperieure & plus large auecques les osde la iambe,deſquels il eſt receu , ainfile.
qu'auonsdit:l'autre,de la parcie infericure & pofterieure, par laquelle il reçoit l'a
pophyſe ſuperieure & interieure de l'os du talon : La tierce, anterieure , par laquelle
Cileſt receu dedās la cauité du nauiculaire.Par la premiere connexion , le pied s'eſtend
& feplie: par la ſeconde,auecques le talon le meur vers les coſtez : par la tierce , il
conduit
quant-& -foy le demeurát du pied vers l'endroit qu'il ſe meur. Les deux pre
mieres connexions ſont faites par diarthroſe,laderniere par ſynarthroſc: & fontcon
firmées par forts ligamens & larges,deſcédans & mõrans d'vn osà l'autre, ainſi qu'ils
ſont connexez enſemble tout alentour de l'articulation , comme cu peux voir en
deſpoüillane vn ſuict. Elles ſont auſſi confirmées par membranes, muſcles, & aſſiettes
detendons, deſcendans au pied pardeſſus ou deſſous celles articulations. Au reſte,
cedicosa trois apophyſes faites comme trois pieds aſſis ſur l'os du talon : dont la pre
miere & plus petite eſt deſſous la cheuille exterieure : la plusgrande ( que Galiendit
faire vneceſte ronde alliſe ſur vn colaſſez long ) eſt au deuant du piedà l'endroit du
poulce & de l'indice : la moyenne en groſſeur, eſt derriere la iambe vers le calon . le
tais pluſieurs autres choſes,commede la poliſſure ou afperité dudit os , & autres ſem
blables,leſquellesie deſire que tu apprennes pluſtoſt à l'ail que par le liure.Le ſecond L'os Calcon
os ſituéſousceſtuy -cy, eſt appelé Calcaneum , qui eſt le plus gros d'entre les autres, nenes.
D & fur lequel nous marchons & ſouſtenons tout le corps. Il a deux apophyſes ſupe.
ricures,vncgrande,& vne pecite : La grande eſt receuë de l'apophyſe pofterieure &
exterieure de l'altragale : & la petite eſt receuë interieurement dela tierce dudicos,
que nous auons dit faire vne ceſte ronde ſur vn aſſez long col.Oucre- plus,en ſa parcie
poſtericure il eſt rond & fort reculé de la iambe , & en ſon anterieure & plus auancée,
ileſtcóioine parfynarthroſe auecques l'os Cyboide, la partie inferieure & interieure
duquel il ſemble receuoir. Au demeurant,ilaſa ſuperficiecoute inégale ayant plu. Pourquos
ſicurscuberoſitez:& en la partie interieure , il fait comme vn canal,pour bailler palle fracture
fagetant auxvaiſſeauxqu'aux tendons,qui vont à la plante du pied& aux doiges. Fi- dutalon
nalement ilfaut conſiderer les trous des vaiſſeaux, qui entrent dedans ledic os pour eſt mortelle.
fanourriture: au moyen deſquels en fracture d'iceluy la curation eſt renduë diffici
le, àcauſe de l'expreſſion & concuſion deſdits vaiſſeaux, comme dic Hippocrates au
deuxieſme liure des Fractures. Quant aux ligamés d'iceluy , ils ſone tels que ceux de
l'aſtragale,à ſçauoir,tendons,membranes & ligamensproprement dics , venans d'vn
os à l'autre.Letiers eſt appelé Scaphoïde,c'eſt àdire Nauiculaire , à raiſon de la Gmi.
litude qu'ila auec vne petite nacelle: car de l'endroit qu'il regarde la ceſte de l'Aſtra. Los Scam
gale,il eſtcaue:& de l'autre qu'il regarde les trois osinnominez ( leſquels il louſtiene, ploide,
& defquelsil eft receu,toutainſi que par ſa cauité ilreçoit la teſte dudic Aſtragale ) il
eftboliu comcle dos d'vacnauire. Ses connexions ſont faitesparfynarchrole, & ſong
232 Le ſixieſme liure ,

confirmées par les ligamens ſuſdits. Dauantage ledit os ſur ſa partie ſuperieure eſt
A
faic en forme de vouſte, & en l'inferieure aucunement il s'applatic : & en la particin .
terieure il deſine en pointe comme la proüē d'vne navire , & eo l'exterieure mouſſe &
obcus ,comme la pouppe d'icelle. Le quarrieſme & dernier des nommez, eſt appelé
Cyboïde,pour la Gmilitudequ'il a auec yndé, combien qu'il ne luy reflcmble gue .
L'os Cyboi
de. res . Cec os de la partie anterieure louſtient le doigt annullaire & auriculaire , & defa
poſterieure eſt ſouſtenu de la partie poſterieure du talon . De l'interieure , il eftioine
auec le Nauiculaire, & celuy des Innominez,qui ſouftientle doigtmoyen :& del’ex .
tericur ,il dreſſe vne eminence faite en dos d'aine, laquelle s'eſtend tranſuerfalement
tout le long de la partie inferieure dudit oś : aux deux coſtez de laquelle il y a deux
Les trois os petites cauitez faites comme yn canal . S'enſuiuent maintenant les trois os qui n'ont
ſans nom . point de nom ,dontle premier & plus grád louſtient le poulce : le plus petit & fecond
l'indice: le tiers & moyen en quantité , louſtient le doigt moyen . Tous ces trois os
ſont en leurs parties ſuperieures vouſtez , & inferieures aucunement caues . Leur
Connexion connexion eſt par ſynarthroſe auec les trois os ſuſdits, deſquels ils ſont reçeus : & de
des trois as leur partie pofterieure auec le Nauiculaire ,lequel ils reçoivent. Il faut maintenant
Sans nom. venir aux os du ſecond ordre , à lçauoir , de l'Auant pied ou Pedion , qui ſont cinq en
Deſcripcion nombre, ſouſtenās les os des cinq doigts :leſquels en leur partie ſuperieure ſont aucu. B
des os de
nement boffus, & vouſtez , & en l'infcrieure aucunement caues. Er ont chacun deux
Pawāt pied epiphyſes en leurs extremitez : dont par les inferieures & premieres ils reçoiuent
on Pedion.
les trois os innommez , & le Cyboïde : & par les ſuperieures faites en ceſte ronde,

Connexion ſont reçcus des premiers os des doigts . Leurs connexions ſont par lynarthroſe , cano
propres, font
des as du auec les doigts que les os du Tarle . Leurs ligamens tant communs que
Pcdion , tels que nous auons dit des autres. Reſte maintenant à declarer ceux du dernier or
Deſcription drc , que nous auonsdit faire & conftituec les doigts du pied , leſquels ſont quatorze
des os des en nombre,à ſçauoir deux au poulce , & trois à chacun des autres doigts.Les premiers
deigos do font aſſez longs, les autres enſuiuant fort courts ,excepté celuy du poulce. Eccous en
Pied.
leur partie ſuperieure ſont ronds & vouſtez , & en leur partie inferieure aucunement
caues & plats ſelon leur longueur, afin que lestendons qui les plient, plus ſeurement
Annota & droitement ſans decliner ny d'vn coltény d'autre,puiſſenteſtre coduits iuſqu'aux
tion de la dernieres articulations : iaçoit que celle conduite ſoit grandement aidée par le liga
prowidence ment membrancux & cõmun , qui ſortant des parties lateralesdeſdits os cnueloppe
de Nature. leſdics rendons commenous auons dit des doigts de la main . Dauantage chacun os,
excepté les derniers a double connexion faite par diarthroſe. Et lont tous de quátité
inégale , à ſçauoir gros en leur commencement ( par lequel ils reço : uent la teſte de
leurs precedens , ſur laquelle ils ſe meuuent comme ſur vn piuoc Jrendantcouſiours
en aperiſſant juſqu'à leur fin , par laquelle ils ſont receus de ceux qui les enſuiuent.
Finalement , en leurs extremitcz ils font deux eminēces laterales , & entre icelles yng
cauicé à cauſe dequoy ils ſont plus gros en leurs extremirez qu'en leur partie moyen
ne. Les ligamens, par leſquels leurs connexions ſont confirmées & ſtabiliées, ſont
tels que nous auons die des precedens. Quant aux os Seſamoïdes , ils ſont ſemblables
Les es sefa .
maid'es . à ceux de la main en nombre & ſituation . Parquoy noteras ſeulement , qui ceux qui
ſont en la premiere articulation ,ſont aſſez gros, ronds , & oblongs exrerieurement, &
incericurement caucs & plats : fituez entre deux cauitez aſiſes encre trois prominen
ces,deux laterales , & la tierce moyenne de l'extremitédu premier os du Pedion , qui
D
louſtient le poulce principalement , & tousles autres . Et lont ainſi appelez , à cauſe
qu'ils reſſemblent à la figure de la ſemée de Seſame, longuette & platte. Leur vlage
eſt,qu'ils tiennent fermement les iointures des mains & pieds par où ils ſe pliene , afin
qu'ils ne ſe renuerſent, & ſortent hors de leur place , quand ils ſont fort tendus . Fina
lement , auant que venir aux muſcles , ils faut noter que le pied a elté fait pour deux
1
Double intentions.L'vne eſt,pour affermir & ſtabilir tout le corps , lors qu'il eſt queſtion de
vlage du ſe cenir debout : à cauſe dequoy Nature n'a point mis le poulce oppoſite des autres
Pied .
doigts,ainſiqu'à la main , depeur que celle confirmation ne fuſt vicieuſe. L'autre in .
tencion eſt , pour l'apprehenſion : & pour ce Naturel'a fait & compoſé de pluſieurs
doigts mobiles & articulez comme la main . Ec dauantage , d'autant qu'ilnous falloit
marcher ſur le pied , Nacure l'a fait en la partic infericure cauc & creux en aucuns
lieux , aux autres plat : & pareillement de figure triangle , afin qu'il fult capable de
nous porter partout pays, ſoit boſſu ou plat,égal, ou inégal .
de l'Anatomie . 233
А
1
La feptieſme figure exterieure ouſuperieure
du Talon .

AA Monftrent le Talon.

B L'Aſtragale.
С Le Nauiforme.
EN
D Le Cubiforme.

farar
EEE Les trois os ſans nom.

FFFFF Les cinq da Pedion : apres leſquels demeurenc


lesquatorze os des doigts du pied , deſquels
B chacun en a trois , horſmis le poulce , qui .
n'en a que deux.
B
GGGGG Le premier rang deſdits os.

с
F

Lafigure interieure de inferieure du pied.

ON Laquelle monſtre principalement les os Sclamoides,


marquez pas les hhhh.

1
D
234 Le fixieſme liure
.

A
DesMuſclesmouuanslePied. CHAP. xxxix.
Newf mas Pres ces choſes ainſi conſiderées , reſte à declarer les muſcles de la iam
cles du
pied. be qui meuuent le pied ,leſquels ſont neufen nombre , trois à la partie an.
Muſcles terieure , & fix à la poſtericure. Des crois anterieurs deux fechiſſent le
anterieurs. pied, faiſans leur action enſemble , & chacune à part le tire de ſon coſté:
le ciers eſtend principalement les doiges : le dy principalement , à cauſe qu'il ſem
ble par ſon tendon plusdelié & long (lequel demeure à l'os du Pedion qui louſtient
le petit doigt ) aider la flexion du pied. Les deux premiers ſoncnommez , l'vn Eſpe
ronnier , à cauſe qu'il deſcend ſelon l'os de l’Eſperon ,nommécy.deuanc pecic Focile:
l'autre lambier anterieur , pource qu'il deſcend ſelon l'os dit ſpecialement l'os de la
Muſcle iambe :letiers, à raiſon de ſon action , eſtappelé Eftendeur des doigts.Quant à leur
Esperon- origine, l'Eſperonnier, qui ſemble auoir deux teftes,deſcend de l'Epiphyle ſuperieu
nier.
re de l’Eſperon par la premiere teſte: & par l'autre, enuiron du milieu d'iceluy,de la
partie antericure à la poſterieure, ainſi que le monſtre la ſuperficie d'entre la ligne B
anterieure & exterieure duditos:mais eitant paruenu à l'endroit de l'epiphyſe infe
rieure & pofterieure dudit os , il produit double cendun par derriere la cheuille ex
terieurc: leſquels eſtans conduics par ligamens tant propres que communs , s'en
vont , le plus gros ſous la plante du pied,le delinant à l'ósCyboïde,& à l'os duPedion
ſouſtenant le poulce:le plus pecit s'en va extérieurement au Cyboïde & dernier os
& plus pecit du Pedion , lequel louſtient le petit doigt. Quelquesfois vne petite por
Tambier
tion d'iceluy
aucres. s’auance
Le lambier iuſqu'au
anterieur coſté du
ſortant petit doigt,lequel
de l'epiphyſe il eſtend
ſuperieure en le recirant
& exterieure de l'osdes
de
anterieur. laiambe , deſcend par deſſus la ſuperficiedudit os,quieſt entre la ligne anterieure & le
exterieure,auſquelles il adhere , comme fait auſſi à la ſuperficie juſques preſque à leur
milieu : duquel endroit il produit vn ſeuleendon ,lequel deſcendant par la partie an
cericure & inferieure,s'en va deſıner'interieurementà deux os innommez ,c'eſt à ça.
uoir au premier & plus gros,& au moyen,& par vne ſienne petite portion au premier
& plus gros os du Pedion, par laquelle il eſtend le gros doigt , l'amenant interieure. с
ment vers l'autre pied. Orce muſcle auecques le precedent plient ledic picd ,s'ils opc
rent enſemble :mais s'ils operent chacun à part,ilsle tirent chacun deion coſtć. Lc ARA

Ejendens tiers eſtendeur des doigts eſt double ,l'vn prend ſon origine du plus haut de l'os de la
des doigts. iambe , & inſerécout lelong de l'Eſperon,ſe cette par deſſous l'anneau , au pied : au
quel il ſeterminepar cinqrendons , quivont à toutes les iointures des doigis, & par
vn ſixieſme à l'os du Pedion qui ſouſtient le petit doigt , par lequel il aide laflexion condi
du pied ,ainſi que nous auons dit. L'autre deſcéd enuiron le milieu dudicos del Eſpc 2000
ron : & inſeré quelque peu en iceluy , s'en va par vn ſeul & forc tendon paſſant par COD
ſon anncau ,au poulce. Er noteras , que tous ces tendons ont leurs fibresnerueules,
ligamenteuſes , & charneules , tellement ſeparées l'vne del'aurre , que chacun peut g
faire ſon action à pare, comme ſi c'eſtoit vn muſcle ſeparé :& ainſi fauc eſtimer des au
Muſcles tres leſquels dés leur partie charneuſe ont tendons ſeparez. S'enſuyuenc maintenant
Pofterieurs. les ſix poſterieurs,delquels les deux premiers ſont appelez Gemeaux à raiſon de leur
pareille groffeur, origine,inſertion,& a &tion : le ciers eſt nommé Plantaire , pource D
qu'il ſe perd à la plance du pied,ainſique le Palmaire à la paulme de la main : le qua
trieſmeeſtdit Solaire , pour la ſimilicude qu'il a auec vn poiſſon nommé Sole : le
cinquieſme lambier poſterieur, à cauſe qu'ildeſcend ſelon la partie pofterieure de
l'os dela iambe : le fixieſme & dernier eſt appelé Flecheur , ou plicur des doigts , cor.
reſpondant au profond de la main . Aucuns deceſtuy -cy & du lambier poſterieur en
font vnſeul,quiproduit trois tendons : les autres en font trois,àſçauoit vn lambier,
Mufales
Geme aux.. l'autreFlechcur des quatre doigts,& letiersFlecheurdupoulce.Quantauxdeux
Gemeaux ,l'vn eſt interne,& l'autre externe. L'interne ſori de la racine du Condyle
interieur dela cuiſſe, & l'externe de l'excerieur : & ſe faiſans tout incontinent char
neux/plus'en leur partie exterieure qu'interieure,s'aſſemblent quelque peu apres par
leurs parties charneuſes, & s'en vont faire auec le Solaire vn gros & grand tendon
enuiron le milieu de la iambe, qui ſe va attacher à la partie poſterieure du talon,
ſur lequel ſe font les mules tant douloureuſes. Son action eſt de faire marcher ſur le
Plantaire. bout du picd : en tirant le talon vers ſon origine. Le Plantaire,quieſt le plus pecit,&
plus
de l'Anatomie . 235
А plus greſe decous,fort charnudu Condyle externe de la iambc, & enuiron trois ou

quatre doigts apres le deſine envn fort long & grelle tendon , Icquel il enuoye entre
les Gemeaux & le Solaire,à la plante du pied, pour illec faire la membrane qui couure
la plante du pied,& muſcle reſpondant au Accheur ſublime ou ſuperieur de la main. Solaire.
Le Solaire leplus gros de tous , & fitué par deſſous les Gemeaux,deicod de la commiſ.
fure de l'os de la iambe & de l'Eſperon,& ſur le milieu de la iambe , apres avoir mellé
fon tendon auecques celuy des Gemeaux , s'en va au lieu ruſdic, pour eſtendre le pied
à l'uſage luſdic.Leiambier poſterieur deſcend de l'epiphyſe fuperieure de la jambe & lambier
de l'Elperon & adherant preſque tout au long d'iceux,le va inſerer par vn fortiendopo:terient.
ſur la fin quaſi oſſeux,à l’os Scaphoïde , & aux deux premiers innommez,pour ayder
l'extenſion oblique du pied. Le dernier flecheur desdoigtseſt double: l'vn prend ſon Flechens
origine de l'os de laiambe là où le Poplitee deline:& eſtant inſeré audit os,s'en va iuf- des doigts.
qu'à lacheuille interne parle derriere de laquelle il s'en va diuisé en quatre rendons,
auxdernieres ioincures des quatre doigts . L'autre prend ſon origine enuisõ le milieu
B del'os dic l'Eſperon ,& inſere quelque peu cn iceluy, s'é va par l'os du calon & l'Aſtra
gale au poulce,eſtant mellé auec le precedent.Leur action eſtde plier la premierear
riculation desdoigts,plus par le ligament commun, que par quelque portion de ten
don illec deſignante: & la derniere par leur propre intertion .
XL .
Des muſcles mouuans les doigts du pied. CH A P.
'Enſuiuent maintenant les muſcles du pied mouuans les doigts d'iceluy,
leſquels ſont huid en nombre , vn en la partie ſuperieure, & lept en l'infe
rieure. Le premier fort de l'Aſtragale du talon , & Cyboïde pardeſſous la Huict maila
cheuillc exterieure,ou du ligament deldies os auecques la iambe : & couché dodesigtsdesdu
obliquement vers le plushautdu pied ,le va perdre par cinq petits tendons,aux par pied.
ties laterales des cinq doigts,pouriceux amener exterieurement vers ſon principe:au
moyen dequoy eſtappellé Abdu&cur d'iceux, ou bien Pedieux pource qu'il eſt cou.
С chéſurle Pedion. Quant aux lepe de la partie inferieure, le premier nómé Flecheur Mufde ab .
ſupericur,prendlon originede los du talon,& couché tous le long du pied ſous vne duétew des
forte membrane(quidudictalon ſevaattacher cſtroitement à l'extremité des os du doigts.
Ped:on,pourconfirmer les parties contenuës ſous icelle)le va jnſerer par quatre ten- Flecheur
dons,auxſecondes articulations des quatre doigts leſquelles il flechic.Oùfaut noter ſwperieur
que tout contre ſon inſertion il ſe fend ainſi que le ſublime de la main pour bailler
paffageau muſcle profond, lequel ( comme nous auons dic )deſcend tout le long des
doigts, conduit par vn commun ligament membraneux , qui l’enueloppe & Terre
corre l'os tout lelongde la partie interieure des doigts iuſques à la derniere arcicula.
tió. Le ſecond,qui reſpond au Tenar de la main, ſicué en la partie interieuredu pied,
préd ſon originede la partie interieure & caue du calo & eſtragale, & ſe va deſiner à la
partic laterale & intericure du poulce,lequel il ramene desautres, vers la partie ince
ricure.Etſe peut diuiſer en deux ou trois commeleTenar de la main, pouramener le
poulce vers les autres doiges ,tát qu'il eſt beſoin ,ainſique nous auõs dit de la main.Le
troigeſme reſpódão pareillemétà l'Hypotenarde lamain f,ort de la partie exterieure
D du calon,& montant par la partie laterale du pied,ſeva inſerer à la partie aulilaterale
du petitdoige,pourleramener des autres à quoypeutleruirauſſi certaine chair con.
tenuëſouslapláce du pied,laquelles’aduáceiuſqu'auſdits doigts:conime auſſi le peut
aider àfairele pied creux.S'enſuiuent les quatre Lumbricaux ou Vermiculaires , lef- mauſcles
quels fortans de la mébrane du Flecheur des doigts profond,ſevõr inſerer à la partic Lumbri
laterale & interne des quatre doigts,pouriceux tirer vers la partie interieure,au con - caux .
trairedu Pedieux.Reſemaintenantà declarer lesmuſcles Interoſſels de l'Auát-pied Mufiles in,
ou Pedion,leſquelsſont huict en nombre:quatre ſuperieurs, & quatre inferieurs,dif- nerofſels.
ferens en origine,inſertion ,& action. Car les ſuperieurs, d'autantqu'ils amcinent le
pied avec lePedicux en dehors,prennene leur origine de la partie anterieure & inte
ricure de l'os de l'Auát-pied ,quiſouſtientle pecit doigt,& ainſi des autres chacun en
ſonordrc;& ſe võrinlerer àla partic exterieure & anterieure de l'os enſuiuát.Lesin .
fericursau contraire ſortent dela partic anterieure & exterieure de l'os du Pedion
ſouſtenant lepoulce,& ainſidesautres ,chacun en ſon ordre:& levont inſerer à la par.
х
236 Le ſixiefme liure

tie interieure & ſupericure de l'os enſuiuant, pourceux amener auec lesLumbricaux A
vers le dedans, ou bien pour faire le pied creux comme les excericurs , ou le pied plat
ou depoulé,ainſique nous auons dit de ceux de la main .

Briefue recapitulation de sous les os du corps humain: 6 fautque le Chirurgien [cacheleur ſub
fance , magnitude,nombre , ſituation aſſemblage.

CHAPITRE XLI.

Pres auoir exactement pourſuiuy par le menu couces les parties


La tefte of
faise de du corps humain , reſte, avant que mettre fin à noſtre labeur,

foixante, que lommairement nous declarions le nombre des os ,les pous


ou ſoix an luiuans de partie en partic . Parquoy pour commencer nous
TE ITow os.
auons dit que la ceſte generalementprinſe(c'eſt à ſçauoir auec .
Huilt os
ques ſes parties , eſtoit faire de ſoixante os pour le moins , & de
In Crane,
ſoixante & trois pour le plus : ſçauoir eſt quatorze du Crane,
Six os dans
les oreilles. quatorze ou dixſept de la Face , & crente deux dents . Deceux B

Quatorze du crane , il y en a huic contcnans, & fix contenus . Les contenans font l'os du front,
om dixiepi l'Occipital, deux Pariccaux,deux Petreux ,leBaſilairc, & l'osEthmoide ou Cribleux.
de la face . Les contenus fonc les ſix qui fonc enclosdans les trous des oreilles, qu'on appelle In
cus , Malleolus , & Stapés,c'eſtà dire ,enclume, Marteau , & Eſtrier. Quant à ceuxde
la Facc,premierement ilen y a ſix dedans ou autour de l'orbice de l'æil, crois de cha
cun coſté, que nous auons appellez orbitaires des yeux : deux au Nez , nommez auſſi
de nous Nazeaux :deux Maxillaires mineurs , & deux maieurs , quitouſiours aux be.
ftes bruces à quatre pieds ſe trouuent ainſi ſeparez : mais à l'homme, ſi rarement,que
ic n'en ay point encores veu bien apertement , ains ſeulement les deux qui contien
nent coutes les dents ſupericures:deux appellez os internes du Palais: deux ,en la maſ.
3.09 II. OS choirc inferieurc aux petits enfans: & le dernier, los Criſtæ , d'où le Mur metoyen ou
de l'OsHyor.cartilage moyen du Ncz prend ſon origine . Outreceux- cy il en y a encores trente &
de . deux qui ſont les dents , à ſçauoir (cize en la maſchoire ſupericure, & aurant en l'in . С
34.osale ferieure: ſçauoic eſt , huiæ cnciloires,quatre canines, & vingt molaires. Plus il en y a
ſchine. yn à la racinc de la langue nommé Hyoïde, fait de trois ou touſiours, & quelquesfois

2.Claui- de vnze. Apres ces osicy , faut venir à ceux del'Eſchine ou Rachis , qui font trepte
24. Coſtes. quatre :ſepe au col : douzeau Thorax, cinq aux Lumbes , fix à l'os Sacrum , & quatre
3. e4 7. du à l'os Caudz .Outre plus il y a deux Clauicules : vingt - quatre coſtes ,quatorze vrayes,
Sicinon . & dix fauſſes : & trois à l'os Seernó le plus ſouuene, ou lept au moins qui ſont trouuez
62. Os aux quelquesfois aux icunes.Apresvenant au bras , nous en trouvons, commençant de
bras,
l'Omoplate, ſoixante & deux : à ſçauoirdeux pallerons , deux os du bras : quacre du
Osseſsmoi coulde , à ſçauoir deux couldes propremenc dits , & deux rayons :ſeize du Carpeou
62... 66. poignet,huict du Metacarpe ou avant - main , & trente les doigts.D'auantage on trou
OS 4WY. ue les os Seſamoïdes , qui ſont douze interieurs couſiours,& quelquesfois beaucoup
jambes. d'auantage,deſquels la plus grande partic merite micux le nom de cartilage que d'os:
& quelques vnsexcerieurs, linouscroyons Syluius . Reſtent ceux de la cuiſſe,leſquels
( linous prenos les os des hanches pour trois chacun ,cómeils ſont aux petits enfans)
font ſoixante & fix,ſans les Seſamoides:à ſçauoir deux des Iles,deux Barrez,deuxIl. D.
chions , deux des cuiſſcs,deux Rocules, quatre aux lambes,ſçauoir eſt deux eſperons,
& deux os de la lambe : quatorze du Taiſe ,c'eſt à ſçauoir deuxTalons,deuxAſtraga
les deuxNauiculaires , deux Cyboïdes , & fix ſans nom : dix à l'Avant - pied , cinq en
chacun , & vinghuic aux orreils. Quantaux Selamoïdes , ils ſont egaux en nombre à
ceux dela main . Lenombre donc des os du corps humain , ſonc deux cens quarante
ſept, y adiouſtant l’os Hyoïde , & les ſix perics , qui ſont dans les conduits des oreilles,
fans toutesfois y comprendre lesSeſamoïdes,parceque le plus ſouvent aux ieunes,ne.
fone que cartilagines , & que leur nombre ſe trouuc couſiours incertain.D'auátage cu
obſerueras ,que les trois cartilages du Larynx ſont pour vray oſſeux aux hõmes . Età
fin que tu puiſſe micux voit à l'oeil le cout,nousc’auons baillé les figures ſuiuances.
De l'Anatomie, 237
A
Declaration des lettres de la premiere figuredes os.
A L'os Coronal .
B Deux os Pariccaux , yn de chacun
coſté.
C Deux osPetreux ,vn de chacú coſté.
D LeZygoma .
E La mafchoire infericure.
F autannt de
La Clauicule droi& e , & auta
l'autre colté.
G L'apophyſe ſupericure de l'Omo
plate,dirc Acromion.
H L'apophyſe antericure de l'Omo.
B pale,nommccCoracoïde,ou bec
de Corbin .
B
I Le Scernon quireçoit les ſept coſtes
Vrayes.
K La Carcilagenommee Xiphoïdc,la
Fourchette en François.
? L Les vingt quatre coſtes, douze de
chacă coſté:deſquelles il en y a 7
vrayes, & cinqfaulſes,quite ſont
marquees par 1.2.3.4.5.6 . & c.
M Le Bras, ou Brachium , ou Humerus,
vulgairemencl’Adiutoirc.
N L'osduCoulde,vulgaircmcnditlo
gros Focile du bras.
O LeRayon ou Radius, vulgairement
le petit Focile du bras.
C с P Le poignet ou Carpe, compoſé do
huic offclcts.

Q L'auanc.main ou Metacarpe contenant quatre os.


R Les os des doigts,trois en chacun ,qui fontquinze ca touc.
S L'os de la cuiſſe, dit Femur ou Crus.
T La Palette ou Rorulc dugenoüil.
XV L'os de la jambe.
L'eſpe ron dit Peroneou Fibula,vulgairement le petit Focile de lajambe.
Y L'Aſtragale.
Z Le Naviformc ou Naniculaire.
a Les quatre os du Tarſe.
b Les cinqos du Pedion.'
Dc Les quatorze os desdoigts,crois en chacun , &deux aux poulce. 3
sy
238 Le ſixiefme liure 4

A
Declaratiox des lettres de la ſeconde figure des Os.
A Fait l'endroit dela Sucure Coro.
nale .
B La Sucure Sagirale.
C Deux Sutures Mendeuſes,
D La Sucure Lambdoïde .
E L'os Occipital .
F Le Palleron ou Omoplate .
G Lecol de l'Omoplace .
H Lacoſte du bras.
I L'eminence du coulde , die des
Grecs olercanum .
K Les ſeptSpondylesdu col, & à co. 14

fé vn peu plus bas ſont les co.


ſtes marquees par 1.2.3 &c. B
L Lesdouzelpondylesou vertebres
du Metaphrene.
M Les cinq des Lumbes.
N L'os Sacrum .
O L'os de la qucuë,dit os Cauda,ou
/
Coccyx.
P L'os Amplum ou Ilium ,fait aux ieu.
nes enfans de trois os,& vulgai
rement nommé de trois noms:
car la partie ſuperieure eſt dicc
Ilium :cellequi reçoit la teſte de
l'os Femoris , Iſchion : & la par
tie anterieure,Pubis.
Q Latete de la cuiſſe dite vertebrú. C
R Legrand Trochanter.
T Le petit Trochanter. f

V Lc Calx, Calcaneum , ou Talon.


Recueil du nom de la connexion des os. CHAP. XLII.

Ev qu'il eſt autant neceſſaire au Chirurgien ( çavoir la naturelle


3 reparation des os rompus,que la reduđion des luxations ou dif
locations: ce qui luy elt du tout impoſible ſans la cognoiſance
de la connexion des os : i'ay penſé de beaucoup aider le jeunc
Chirurgien,ſi en brief ie luy deſcriuois comment, & en combien
de ſortes les os ſont conioinets entre eux :ſans obmettre l'expli
acation d'aucuns mots qui ſont vGtez tant en Grec qu'en Latin.
La compoſicion done vniuerſelle ou contexcure des osdu corps D
Sreleros.
humain s'appelle des Grecs Sceletos, qui ſignifie Anatomie ſeiche. Or la manic
Article. re , par laquelle tous ces os ſone conioin&s , eſt de deux genres : les vns ont
Diarthrose leur conion & ion par Arthroſe , ou Article , que les Grecs appellent anthron:
Synarbro- les autres par ſymphyſe , naturelle vnion d'iceux. De l'vn & l'autre genre plu
fe. ſieurs cſpeces ſe trouuent : carraticle ou arthron a deux eſpeces, à ſçauoir Diar
throſe & Synarthroſe : entre leſquelles il y a telle difference , & que Diarchroſe
eſt vne conionction d'os , en laquelle le mouuement eſt manifeſte apperceu à.
veuë d'ail : & Synarthroſe a mouvement quin'eſt point du couc li apperceu & ma
nifelte . Derechef cesdeux cípeces ont encores deflous elles quelques autresſortes:
Exarthro- car Diarthroſe a ſousſoy Enarthroſc , Arthrodic & Ginglyme. Enarthroſe donceſt
fe. cſpece de Diacchroſe , en laquelle vne profonde & crcuſc cauité reçoit vne longue
de l'Anatomie, 239
A &groſſeceſte, commeceluy dela cuiſſe, auec celuy de la hanche, Arthrodie, quand 1
vae cauicé legere ſuperficiaire reçoit vne ceſte fort pecite & peu avancé,commeil ad. Arthrodia
uient en la connexion du bras aucc l'eſpaule, & en la premiere auec la ſeconde verte
bre.LesGrecsont diſtingué cesdeux ſortes de teſtes,& ces deux ſorces de cauitez par
certains mots à eux coultumiers,car quand la teſtcelt gcoffe & longue,ils l'ont appel
lecCephale,les Latins Caput:& quád elle eſtcourte & aduancec, ils l'ont appellee Coro
ne ou Coronor.Pareillement auſſi la cauicé, qui eft creuſe & profonde, a elté appellec
Cotylé ou bočctc:& la pcu creuſe & preſque ſuperficiaire , Glené. La troiſieſmeeſpece
appellce Ginglyme,lefaitquád les oss’entrereçoiuất, c'eſt àdire,quád en vn meſme Ginglyme.
os,ily a vnecauicé qui reçoitla teſte de l'autre os,comme principalement aduient au
coulde, & au genoüil:c'eſt à dire,en la connexion de la cuiſſe aucc l'os de la iambe : &
ce ſuffiſe deDiarthroſe,& deſes trois'eſpeces.Synarthroſe,qui cſtl'autrc eſpece d'Ar
cicle ou d'Archroſc, a auſi trois eſpeces,ſelon Galien au liurc des os,(çauoireſt Sutu.
re,Gomphoſe, & Harmonie. Suture eſt vne compoſition d'os , faiaeàla ſemblance Sueuro.
deschoſes couſuës, commele mot Lacinl'emporte : auſſi comme tu as entendu en la
B connexion des os de la teſte.Gomphoſe eſt faicte, quand vn os cft fiché dedans l'au.
tre enforme d'yn clou ou d'un gond,commeles dents ſont fichces dcdás leurs creux Gompbofei
ou alucolcs, en l'vne & l'autremaſchoire.Harmonic,troiſieſmeeſpece deSynarthro. Harmonie.
ſe, eſtfai & e,quand les os ſont conjoints & vnis tellement, qu'iln'y a qu'vne Gimpleli
gne,comme aux deux osdunez, &en quelques vnsde la face.Oriulqu'àpreſent auos
parlé du premier genre deconjóction ,& deſesdifferences:relte maintenátquenous
parlionsdeSymphyſe,quieſt le ſecond genre principal de noſtre premiere diuifion.
Symphyſe donc n'eſtrien que naturelle vnion des os,commenous auos dic,maiselle Symphyſes
ſe faiten deux ſortes:car quelquesfois telle vnion eſt faire par moyé & benefice d'au
tre maticte, autresfois ſans aucun moyen. Sans aucun moyen ſe joignent les os de la
maſchoirc infcricure, quiaux pecits enfans ſe trouuent fort bien diſtinguez,maistoſt
C apress'yniſfent enſemble.Lesos ſont vnis par moyćne maciere en trois fortes,ou par
cartilage au milieu:laquelle vnion les Grecs ont appellé Synchondroſis , comme il ad- Synebon
vientà l'osPubis, & quelques epiphyſes des icunes enfans : ou par ligament , & cefte drofis.
eſpece les Grecsont appellce Synenroſis,en prenátce mor de nerflargemét:carquel- Syneuroſso
quesfois ileſtpris pourya tendon , autresfois pour vn ligament, autresfois pour yn
derfproprementdit,qui vientdu cerucau ou de la nucque. Telleconnexion de Sy
neurofispeut eſtre trouuec à quelques os duSterno, & des flancs:oùpar quelques múl.
clesſeconjoignent &affermiſſent les os, laquelle ſorte d'vnion les Grecs nomment
Sycatoutes
[ arcofas les
commela chair desgencincs,quiconferme& rend lesdents immobiles.Orsalfarcofisa
iointures qui ont mouuemēc manifeſte, Nature y a produit vn humeur
glaireux & vifqueux,afin quc le mouuement ſoit plus libre: & à l'imication de ce les
chartiers en greffentlesmoyeux de leurs charretes, afin qu'en roulant ils tournenc
pluslibrement & promptement. Er de ce t'ay bien vouluaduertir ſur la fin de mon
D liute,afin quecu n'euſſes à y delirer choſe quisébleappartenir à la matiere Anatomi.
que,delaquelle cu feras con profic: Louantcegrand Archite@eur, facteur de toutes
choſes, qui a fai && compoſe aucc vn di indicible & incomparable arcifice touces les
partiesde noſtre corps:ce quinous eſt monſtré par l’vſage d'icelles. Or de cognoiſtro
ſa vertu & cognoiſſance,par laquelle il parfait toutes ces merueilles, c'eſt choſe qui
excedel'intelligence humainc,parce que Dicu les faiet par puiſſance,vertu ,& fapica,
ce,parquoynous ac pouuons,linon le loüer,remercier & magnifier.

* jij

?
24.0 Le Gxieſme liure

QVE SI TELLE DIVISION NE PLAIST A VN CHACUN ,


pour pluſieurs obſcuritez dont elle pourroit ſembler cnueloppee , ie me ſuis ad . А
uisé de celle-cy,de laquelle m'a premieremécouuert le chemin M.Germain Cour
tin, Do &cur Regent en la faculté de Medecine , laquelle à celuy quila conſidere .
ra bien ; ſemblera plus intelligible, & hors de couc hazard de reprehenſion .

( unis enſemble par Symphyſe: c'eſt à dire union de connaturation, eftans quaſi come
entez l'un auec l'autreſçauoir quădeniceux iln'y a rien d'eſtrange & diſſemblable
qui ſe puiſſeapperceuoir:Telle vnió ſe voidés deux osde la maſchotre inferieure para
denantau mentõzés os du brichet enſemble, és os desflancs auec les os des hanches,&
barrez . De telle unió d'os iln'y a qu'une eſpece: carà parler à la verité, les os qui pa
rauant eſtoient diuers, font vnis
par un ſeulmoyen ,ſçauoi r
parle cartilage, qui de
faict n'eſt pluscartilage, mais est degeneréenós.

( Emboiture ,qu’ò appelle Enarthroſe,ſça


uoirquand tout eſtdedans,c'eſt à dire, B
quãdtoute la teſte de l'us eſtreceuë , e
du tout cachee en la boette d'un autre 2
os. Telle eſt la jointure de l'os de la
cuiſſe auec Pos de la hanche.
ſàlaſche,quel'on dit Enfonceure ,qu’on dit Arthrodie ,cõme
par Diarthroſe: qui ſi on vouloit dire une telle quelle ioin .
eſt une eſpece de ture : quãd toutela teſte de l'os n'est pas
iointure per ferree, logee & plongee dansſaboëtte,ainsſeu .
faite ainfi , afin que lement eſt placeecome à demy: deforte
les os peufſentiouër? queſi Nature d'ailleurs, come des liga
à plasfir , & par mens desmuſcles voiſins,n'euſtbaſtien
1
telle commoditéfai. I cauéreceptacle à ladite tešte d'os, ileust
Les osqui re diuers mouue- efté ſubiect à toutes heures à luxation .
comme mens. De telle ioin . Telle eſt la iointure de l'os de l'eſpaule,

fou
poulx ture nous avós trois I qu'on dit Humerus, auec lepalleron . C
ftiennent epeces. Enclaueure, qu'odit Ginglyme,grăd
toutle ba les os fe reçoiuent & logentl'un l'au
ftimet du tre . Telle eſt la iointure de l'os du
affemblez arcel
corps bu coulde, ou bras , auec l'Humerus.
main , qu'on appelle articu .
lation , c'est à dire où à l'eftroit, que [ Par fiche,qu'odit Gomphoſe, quádonos wi
font_04
iointure : ſçauoir i l'on dit par Synar. eft receu dăsl'autre,come unclou ou göd
quand iceux osfont throſe :quãdla ioin- dãs fon trou .De telle façõeſt la iointure
tellement abuttez 1 ture des os eft ferree ou aſseblage desdēts,auec leur maſchoi
& alliez , qu'entre d adiutee de prés. re dedans lesalueoles: Carles dents font
iceux ſe void quel ce que nature a enchaſſees dans les maſchoires,comme
I que choſe de diuerſe faict, à raiſon que une pierredans le chaton d'un anneau .
nature de façon tels os ne deuoient Parcouffure, & icelle dentelee ou cre

qu'on peut apperce- auoir aucun mouue nelee à la façon des dents de Sie , come onze

noir la diuerſaté de mēs, ains ſedeuoiét jeſtlaiointure des os du Craneenſemble D


l'aſſemblage . Or tel tenir aburtez l'un ou eſcaillee , comme eſt la couffure des 3
affemblage d'os par contre l'autre. De los Pierrtux auec les Parietaux .
iointure eſt faicten tel aſſemblage d'os Par allignemēt,que l'on dit harmonie,
deux façons:fçauoir nous auons trois ef- ! quăd les os oppoſez & appariez vis- à
016
peces : car les os font i vis , & reste à teste l'un de l'autre,
1 afſemblez àl'eſtroit, | font ioinits par le moyen d'une ſeule
lou ligne, comme est la iointure des deux
Los du nez .
--
De l'Anatomie, 241
A Ferapitulationde tous lesmuſcles du corps humain,leſquelsnous auons ofénommer ( au moins
delapluspari) un peutrophardiment,comme il ſembleraà d'aucuns: mais le plusproprement
qu'ila efté poſsible, pournoſtrelangue Françoiſe,afin d'euiterles mots Grecs & Latins quiſe
trouuenten l'Anatomie de Syluius.
CHAPITRE
CH A PITRE XLIII.

Our ainſi comme nous t'auons baillé le nombre de cous les os


de noſtre corps:auſſi auons- nous deliberé de faire le meſme de
tous les muſcles,la deſcription deſquels tu prendras au chapitre
où nous en auons parlé. Commençons donc à la Face,& pour
ſuiuons iuſqu'au bout des pieds.En la face ſe trouue premiere.
ment celuy qui eſt appellémuſcle large ou Peaucier, venant du
B
pannicule charneux , couurane tove le col & prelque toute la
3 face. Outre ceſtuy-lå ſetrouuentles quatrequi appartiennent Mufelelava
à la paupiere ſuperieure de l'ail. Plus dedans l'orbite ou cauité ſe trouuent les qua. cier.
Seon PCAN .
torze muſcles des yeux , ſept pour chacun , ſçauoir quatre droits , deux obliques , & Quaire
vn Pyramidal. Les quatre du nez vont apres , deux pardehors , un de chacun cofté, mmefeles de
& autant dedans lesnazeaux. Les externes ouurene , & les internes ferment lenez . la paupiere
Les dix de la malchoire infericuretiennent leur rang apres , ſçauoir eſt , deux crota- fuperieure.
phites ou temporaux,deux malleteres ou maſcheurs, deux ronds ( lelquels me ſem . Quatorze
blentpluſtoſtappartenir aux léures qu’à la maſchoire ) deux cachez dans la bouche muſcles
des yeux.
qui viennent des apophyſes pterygoides ,& deux ouure- bouche tendineux par le mi. Quatre
lieu. Les huiêt des léures ſe monftrent apres , ſçauoir quatre ſuperieurs & autanc in muſcles du
ferieurs,quiouurent & ferment la bouche, à cauſe dequoy nous les pouvons appeller nez.
ouures-léures & ferme léures. Dedans le creux de la bouche ſe trouve la langue & les cles muſla
Dix de
dixmuſclesquiluy appartiennene :parquoy en toute laface nous trouuons cinquan
te& vnmuſcles. Ala partieanterieuredu colon trouue les muſclesquiappartiennent inferieu
mafchoirere.
à l'os Hyoïde qui eſt l'os de la langue,& au Larinx. L'os Hyoïde eſtattachépar huid Huicimus.
muſcles, deux luperieurs venansdu mencon , deux à coſté venans de l'apophyſe ſty- cles des lé.
Cloïde , leſquels ſont percez au milieu , à trauers deſquels paſſentles deux ouure bou wres .
che,qui aceſt endroit-là ſont tendineux :deux viennent du ſteroon , & deux delaco. Dix muſ.L
fte fuperieuredel'Omoplare pres du Coracoïde,qui auſſi ſont tendineux au milieu à des pour
l'endroict où les deux maſtoïdiens ſone couchez par deſſus eux. Le Larinx compoſé Huiclmal
langue.
des trois cartilages , comme nous auons dit en ſon licu , a dixhuict ou vintg muſcles:
fix ouhui& communs,& douzepropres.Descommuns, deux ſontfuperieurs,deux "os Aryai
inferieurs ,deux à coté de la premiere cartilage : auſquels cu peux adiouſter les deux de.
quiſeruent à ouurir l'Epiglotce,quitouſiours ſe trouuentaux gros animaux à quatre Muſcles dos
pieds pour rabbaiſſer intericurement ledit Epiglotie: mais aufli peu apparents aux Larynx.
hommes,come manifeſtement ils ſe trouvent auſdices beſtes.Lespropresſont douze
leſquels viennent preſque tous de la ſeconde cartilage,pour s'nſerer à la premiere &
troiſielme,deſquels les vns ſont pardeuát,& les autres par derriere le Tyroïde.Outre
ceux-là ſont deux Maſtoïdes,qui Aeſchiſſent la ceſte. Età la parcie poſterieure du coly Quatorze
D en a douze pour la teſte,de ſorte qu'elle a ſon mouuementpar ces quatorze muſcles, muſcles
deux maſtoidiens ancerieurs, & les autres poſterieurs,ſçauoir eſt deux ſpleniques, ou pourmow
{pleniciques:deux cptrelacezou entortillez,quatre droias & quatreobliques,qui sót Muirlate
Re.
fort petits,nepaſſant point lapremiere & ſecondevertebre. Le col a hui & muſcles, Huidt
deuxlongs,pardeuant,ſur le corps des vertebres :deux ſcaneles,quiſont à coſté :deux muſcles
cſpineux quiſont le long de l'eſpine des vertebres:deux tranſuerſaux qui vont aux a. pour le
pophiſes tranſuerſes dumetaphrenc. Le Thorax ou poiĉtrine a quatre vinges & vo mounemës
mulcles ,dont les vns ſont pardeuant lesautres par derriere , les autres à coſté , & ſont de Col.
tous accouplez horsmis le Diaphragme.Ils ſont deux ſouſclauiers :deux grands Den . Quatre
Omopeslate:quatre pecits Rhõboïdes,deuxſursperieurs muſc
telez,qui viennét de la baſe de l'ba vinentles da
& deux inferieurs ,deux ſacrolom ir ,deux dedans la poitri ne reu
reſſer de car Thoras.
tilage. Plus vingt deux entrecoſtaux exterieurs, & autant interieurs:vinge quatreen
tre-cartilagineux,(çauoir douze exterieurs,& douze interieurs,de ſorteque les entre
coſtaux & entre cartilagineux ſont ſoixante huict:auec les douze ſuldies ſont quatre
vingts, & le Diaphragme qui eſt ſcul: par ainſi le Thorax aura quatre vingts ya
xiiij
242 Le ſixieſme liure
Muſcles de muſcle pour ſc dilater & reſſerer.Etfi cu y veux adioulter les muſcles de ľEpigaſtre,ic a
l'Epigaffre. n'en debattray point beaucoup:à raiſon que par accident ils feruent à l'expiration &
inſpiration .Deshuic muſclesdel'Epigaſtrcdór il y en a quatre obliques,deux deſcé.
dans & deux aſcédans: deux droicts,auiquels tu pourras adioufter lesdeux petits qui
Muſcles.des viennent de l'os pubis,li tu les veux ſeparerde la teſtedes droicts:deux tranſverſaux.
Lumbes
Outre ceux -là,nous pourrons nõbrer ceuxdes Lubes,qui ſontſix ou huiết:deux qui
les feſchiſſent qui ſont triangulaires :deux my.cſpineux,deux ſacrez,& deux qui ſont
Cremale
au milieu du dos, que nous pourrons appeller Rachices. Orà preſenc, à fin quenous
res, ayons les extremitez à part,nousconterons les muſcles qui ſont aux parties hôteules.
Pour les teſticules donc tu trouueras deux Cremaſteresou Suſpenſeurs. A la racinc
de la verge,ou au Perincó,tu crouueras quatre muſcles,parcie pour le coduit de l'vri.
Quatre nc & ſemēce,partic pour aucuneméterigerla verge.A la veſie tu trouuerasle Sphin
muſclesdla & ter ou fermcur: & au bout de l'inteſtin droict tu trouueras trois muſcles, deux pour
racinede la relcuer le Gcge, & vn ſphincter ou fermcur.Reſte maintenant,quc nous venions aux
verge.
Spbin&ter extremitcz, & premierement au bras:& nous ſemble meilleur d'en clcrire ſeulement B
de laveſie ,afin que tu en puiſſes iuger autant de l'autre. Le bras doncques commençant dc
vn
Tros muf l'Omoplate,a pour le moins quarante deux muſcles, & peuuéceſtre en beaucoup plus
des du fic- grand nombre,maispour ceſte heure tu te contenteras de cocy. L'Omoplate donca
quatre muſcles,le bras ſept ou hui&,le coulde trois ou quatre,ou cinq. Ad coulde in
quarante cerne ſont ſept muſcles, & autanc à l'externe :puis en la main ,treizepour le moins. Les
deux muf
cles du bras quatre muſcles de l'Omoplate,ſontvn trapeze reſſemblant à vn capuchon de moine,
Quatrs qui erleuc,abaiſſe & tire en derriere l'Omoplate.Le ſecond eſt le releueur. Le croifel
muſcles de meeſt le grandRhomboïdc ou Lozenger, quieſtaudeſſous le Trapeze.Le quatrief
l'omoplate, me eſtle petit Dentelé,qui s'inſcre au coracoïde. Le bras ſc meut en deuát,en derric.
Sepe“maf- re, en haut,en bas,& en rond . Le pe &toral venant de la clauicule du ſternon & des co
des du
bras.
ftes prochaines
l'Omoplace. LeleDelcoïde
tircen deuant:le
le rire enBaſſer le tire en large
haut,&letres derriere venátdela
le cire en bas, &baſſo coſtepeu
quelque de
enderriere:les trois qui ſont licuez autour del'Omoplate le mcuuét enrond.L'Epo
mis ou eſpaulier, le circ en haut : lc Sureſpaulicr qui ſe peur diuiſer en deux , le tire en C
derriere & en bas:leSoul.elpaulicr quieſten la cauité de l'Omoplace,le cire en deuár.
Ainſi parsó a&ió fai& e I'vne apres l'autre,le bras ſe meuten rod. Le coulde ſe pliepar
deux muſcles,dőr l'vn elt å deux teſtes, l'autre eſt leBrachial.Il s'eſtēd parvo,ou deux,
ou trois muſcles :car ſi tu regardes l'origine , il a deux ou trois teftes, mais vne ſeule
inſerció .Aucoulde interieur a ſept muſcles,va paumier , deux poings- plians ou Car
piflexeurs,deuxPronaccurs oucouche-main ,l'vn quarré,l'autre aucunemēt rõd:deux
Deux mus doigts plians,l'vn ſupcricur qui va à la ſeconde iointure des doigts , l'autre inferieur,
cles du com !. aucc lequel nous remercósle poulce- plicur. Les muſcles du coulde exterieur sõtdeux
de. ſupinaccurs ou renucrſemain ,deux c tendeurs de poignec ou maineſtendeurs,deux
Quatorze cliendans les doigts ou doigts-eſtendeurs , & vn abdużeurou obliquateur.Lestreize
muſcles foo de la main ſont ceux-cy ,l'vn ſitué à ligne vitale,nommé Thenar ou Molet ſeruant au
tuez an
coulde. poulce,lequel ſe pourroit diuiſer nonſeulement en deux,mais en fix, tant pour les 2.
&ions diverſes,que pour les ſeparacions qui s'y treuuét. Le ſecond eſt l'Hypochenar,
ou le Lezar,qui eſt pour le perit doigt.Letroiſicſmeeſt l’Abducteur du poulce.Apres
ces trois ſe trouuent lesquatre Lumbricaux ou Lamproyons, & les fix entre offelets,
cóbien qu'on en puiſſe bien trouuer hui&t.Ec te ſuffiſe dela main . La iambe touce en D
lomain . de tiere a cinquátcmuſcles pour le moins:car pourla cuiſſe nous en
Muſcles trouuons quatorze,
pour la iambe,vnze: & des ſituez en ‫ܐ‬la iambe,neuf:trois pardcuát,fix par derriere qui
Cinquante feruent pour le pied & pour les doigts :au pied , ſeize. Des quatorze quiſeruentàla
mades de cuiſſe,deux la plicnt,l'vn appelle Lumbaire, l'autre viene du creux dei'os des Aancs.
la iambe. Les eſtendeurs ſont les troisfeſſusqui conſtituent la feſſe ,le muſcle à trois teſtes, que
Quatorze, cu pourras diuiſer en trois ſi tu veux.Outre ceux- là,pourtourner la cuiſſe sóc les qua
mwjcles de tregemcaux,& les deux obturateurs ou boucheurs,l'vn interne,l'autre externe.Les
hocaille , vazede leiambe ſont, le long,le membraneux , les quatrepofterieurs,dontles trois
Vaze muf
eles de la viennent de l'os Iſchion , & l'autre de la commiſſure de l'os Pubis:le droit, les deux
jambe . vaſtes, le Cuiſſier , & le larrettier.
Muſcles fo- Les muſclesſitucz en la iambcſeruent partic au pied ,particaux doiges, & font trois
iambe. la pardcuant,& fix par derriere.Deuxdes
suezen anterieursAcchiſſentle pied deſquelsI'vn eft
appellé lambier anccricur,l'autre Eſperónicr,qui ſe peur diuiſer en deux .Lcrroiſiel.
1
Del’Anatomie 243
A meelt le Doige.eſtendeur,combien que partie de luy flechiſſe le pied, auquel meſmo
on reduit lePoulce.eſtédeur.Deceux quiſont derriere,l'vn ſert à Aechir les doigts,&
les autres pourle pied,leſquelsſe trouuent en celordre:deuxGemeaux,vn Planrairc,
vn Solaire,vn lambier poſtericur, & le grand Doigt-plieur:auquelon remet le Poul
ce-plicur.Des ſeize ſicuez au pied,l'vn eſt ſuperieur ſitué ſus l'avanc.picd, quenous a.
uons appelléAbdu&teurdes doigts:L'aucreen la plante du pied,quieſt lepecitDoigt ſcles
pleur,qui va à la ſeconde ioincure des doigts pardedanslepied.Il y en a vn pourle Mufirez an
poulce,quenous pouvons appeller Chaſſe.pulce. En dehors le pied y en a vn autre pied .
pour le peticdoigt:auec ceux-cy ſe trouuent lesquatre Lumbricaux ou Lamproyós:
plus les inui&Entre oſſels,ou dix,ſi cu veux.Et ce lúfficedu nombre desmuſcles,pour
lequel eltregeneral ,cu les chercheras chacun en la partie,
Figure neufieſme & premiere des muſcles, laquelle te repreſente au cofté gauche,
B
l'homme auec ſa peau :doas coſté droit,tous les muſcles ſeparez les
unsdis auires,& encores en leurlieu : & cepardeuant.
Montre le muſcle qui ferme l'ail:
Celuy qui l'ouure.
c Le Crotaphicc ou Temporal.
d Le Zygoma.
c. Le mulcicMaffeter ou Maſcheur.
f Muſcle ſuperieur deſcendant à la le.
ure inferieure.
g Le muſcle qui deſcend à la léureſu .
pericure:& aux ailes du nez .
ܽ‫ܕ‬
h Lemuſcle Ród caché de la Tunique
interne de la bouche.
i Le muſcle inferieur quimoncc à la
С leure ſuperieure.ivid
k Le muſcle qui fait remuer la léure
inferieure
| Le muſcle qui ouure la maſchoirc
inferieure.
m Le muſcle Maſtoïde.
n L'elleueur de l'Omoplate.
o La Clavicule .
P Muſcle Souſclauier.
9 Le petit Dentelé anterieur, mócant
des cinqou ſix coſtes ſuperieures
au Coracoïde de l'Omoplate.
r L'origine du muſcle Pectoral, qui
prend de l'os Sternon ,
Muſcle Pectoral.
Deltoïde .
D v Muſcle Biceps ouDouble teſte , Flo
chc.coulde .
x Brachial Flecheur auſſi du coulde.
y Voaddicament ou extenſion du muſcle precedent , aydant à Mechir & plier le
meſme coulde.
2 Le Pronaccur de la main .
& Letreſlongou Renuerſe.main .
A A Les Plieurs du Carpe ou Poing.plians .
B Leluperieur Doige. plicur .
C Le profond Doigt. plicur.
D Le Palmairc.
244 Le fixieſme liure
A
Ces huict petites lettres qui ſuiuentde la petitefigure , te repaufintent
lamain unpetitplees amplement quel'autre.
EFG Les muſcles du poulce, quifcchiſſent le premier & ſecond os.
HH . Lesmuſcles Lumbricaux.
I Le muſcle qui retire le pecit doige derriere les autres.
K L'anncau du Carpe.
L La fiſſure des quatre tendons du muſcle Doigt pliantſupericur : par laquelle
dezuzsota

les tendons du profond montent à la troiſicſmc articulacion des doigts.


M Les tendons du Profond.
N Legrand Dentelé ſeparé, quiſert pour dilacer le Thorax .
O L'Oblique deſcendant de l'Epigaſtre.
P Le Tranſucrfal.
e Le Droict.
R Lcnombril auec la ligne blanche.
S Vndes petits muſcles quimontent de l'osPubis dellus latcfte desDroits.
T L'Oblique Aſcendant. B
V Le Membrancux de la cuiſſe.
X Lc Droit de la cuiſſc.
Y Le Treſlong dit le Couſturier.
ZZ Les deux Valtes ou Maſlifs.
1.2.3.LemuſcleTricepsdeſcendant de l'osPubis à l'os Cruralintericurement.
4 Lapallece du genoüil.
S L'os de la jambc.
6 Vncportion du muſcle lumcau .
7 Vnc autrcporcion du Solairc.
Muſcle lambicr interncou poſtericus. C
9.10 Les Flecheurs du pied.
1 Eſtendeur des doigts.
12.13.Deux Mallcoles.

1
i

de l'Anatomie, 245
A A
Figurequatorzieme, & fixie/medes Muſcles, demonſtrant l'homme au cofté
gauche, auec ſa peau ,o au collédroit tout les Muſcles.
2 Monſtre l'os Occipical encierement
deſcouucrc .
b Muſcle Splenitique renuerſé ſur le
couſté gauche.
C Muſcle entorcillé,ou entrelacé .
d Muſcle Efpineux.
c Muſcle Oblique moncár de l'eſpine
du ſecond Spondyle à l'Apophy
ſe Tranſuerſe du premier.
f MuſcleOblique qui monte de la lul
dite Apophyſe Tranſuerle à l'Oc.
B
cipur.
g Muſcle droit, ſous lequel eſt couché
ſon compagnon .
В hh Deuroit monſtrer le Trapeze , mais
il eſt demeuré à figurer.
i Muſcle Rhomboïde de l'Omopla
te .

к Releveur de l'Omoplare.
1 Le petic muſcle qui eſt couché à la
cauicé , qui eſt deflus l'Efpinc de
l'Omoplate.
m Muſcle Delcoïde de l'Eſpine de l'O
С moplate.
C
no Le Suſeſpaulier,lequel par d'aucuns
pour neanteſt diviſé en deux .
P Muſcle qui deprime & tire en der
riere le bras venant de l'angle in.
ferieur de l'Omoplate.
9 Muſcle Treflarge. If Deux muſcles qui eſtendent le coulde. • Vne portion du
muſcle brachial quiplic le coulde . v Origine du muſcle creſlong réuerfeur de main.
u Olccrane ou cuberoſité du coulde. x Os du coulde. yy Vne portion des deux muſ.
clesquiflechiſſentle Carpe, z Muſcle quieſtend les doigts. & vndes Eſtendeurs du
Carpeàdoubleteſte,& double qucuëou tendon . A L'aurre eſtendeur ſon compa
gnon.BB Muſcle Abducteur du poulce.C L'eſtendeur dudit poulce, D L'annulusou
D ligament des tendons.E RhomboïdeouDentelé ſuperieur & poſterieur.F LeSacro
lumbus à douzecendons. GH Demy- eſpineux. I Muſcle Rhomboïde ou Dentelé
poſterieur & inferieur. K Muſcle Lumbal ou pluſtoſt Triangulaire . L Le premier &
plus gros muſcle de la feſſe, renuerſé ſur le conté gauche . M Leſecond en affiette &
grandeur.N Letiers & plus petit. 0000 Quatre Gemeaux . P Muſcle obturateur
interne. Q Muſcle obcuratcur ou bouche externe. R Le grand Trochanter . 'S Le
muſcle Vaſteexcerieur.T Le premier des Flecheurs de la iambe , lequel ſe peut ap.
pellerrenforcy.V Le ſecond .Š Létiers ,tousdeux internes .Y La plusgrand portion
du muſcle nomméTriceps.aa Muſcles Gemcaux . b Muſcle Solairc. 1 Muſcle Tenar
dapicd. 2Le petit doige plicur du pied .
246
A

For

Table des Chapitres du feptielme liure,


des tumeurs en general. T
B
Vec’eſt queTumeur contre nature quiſe nomme vulgairemět Apoſteme,eudes diffe
rences d'icelle Chapitrej.
Des cauſes des Tumeurs en general. Chap.j
Desſignes des Tumeurs en general, Chap.iy.
Du Prognoſtic engeneral des Apoſtemes. Chap.iij.
Curgen
e erale desTumeurs contre nature. Chap.z
Des quatre Tumeurs 0 Apoſtemes en general ,& d'autres reduites fous icelles, chap.vj.
Du Phlegmon. Chap.vi.
Des cauſes et lignes du phlegmon . Chap. vii.
De la cure du phlegmon . Chap.ix.
Curegenerale duPhlegmon ,lors qu'il eſt degenré en abſcés. chap,x.
nt Phlegmon,ácaration d'icelles,
Deseſpeces des fiéures,quiforniennean chap.xj.
De l'Eryſipelas. chap xü.
La cure d'Eryſipelas. chap.xij.
De Herpes.
chap.xing.C
Desfiéures quiſuruiennentauxTumeurseryſipelatcules, chap.xv.
De l'Oedeme. chap.xvj.
Des Tumeurs venteuſes & aqueuſes. chap.xvi.
Dela cure des Tumeurs venteuſes &aqueuſes. (.. ) chap.xong.
De Atherome, Steatome O Meliceride. chap.xix.
Des Louppes, & autres ſemblables. chap.xx.
Des Scrophules ou eſcrouelles. chap.xx ]
Du Ganglion. chap.xxij.
Des Verruës ou porreaux,dictes Myrmeſies,Acrochordon.Caluus ou olom,Thymus , Sarcoma ou
Fungus. chap.xxiij.
fiéure quiſuruient auxTumeurs oedemateuſes.
Dela chap.xxiiij.
Du Scirrhe. chap.xxv,
De la curation du Scirrhe. chap.xx0j.
Du chancreja faict . Chap.xxog
Des cauſes, eſpeceson differences e prognoſtic du Chancre. chap.xxviij. D
Lacure du chancre, qui commence , & n'eſt encor ulcere. Chap. xxix .
Cure du Chancre viceré, chap.xxx.
Cure du Chancre paræuuremanuelle du Chirurgien. chap. xxxi.
Remedes locaux pour la curation du chancre antvlceré ,que noxvlceré. chap. xxxii.
Des fiéures qui ſurviennent aux Tumeurs ſcirrheufes. chap. xxxiij.
De l'Aneuriſme. shap. xxxiiii.
LE SE
247
A

LE SEPTIESME LIVRE
B
TRAICTANT DES TVME VRS
CONTRE NA TVRE EN GENERAL.
B

PAR AMBROISE PARE' DE LA VAL AV


MAINE , CONSEILLER E T PREMIER

Chirurgien du Roy.

Que c'eſt que Tumeur contre Nature , qui fe nomme vulgairement


Apofteme, des differences d'icelle.
CHAPITRE PRE MIE R.

POSTEME eſt vne diſpoſition contre nature, com . Definitions


C polec de trois genresde maladies aſſemblees en vnc magni- d'apoftema.
cude & grandeur: c'eſt à ſçauoir intemperature , mauuaiſe
compoſition , & ſolution de continuicé , en laquelle il y a
humeur, ou autre macicre duigible à humeur, diminuang
ou aboliſfant manifeſtement l'action du corps , ou dela par
cie affectec.
Les differences d'icelles apoftemes ſont priſes de cinq Different
choſes : la premiere de la quantité: la ſeconde,de la matiere: des apoke
la troiſieſme, des accidens : la quarrieſme, des parties où elles ſont : la cinquieſme, mes
cingo
, fone
dos cauſesefficientes,qui ſont fluxion & congeſtion ( deſquelles nous traitceroos au
chapitre ſuiuant.) Quant à prelent, pour plus facile incelligence il m'a ſemblé bon de
reduire en cable & cn ordre, coutes ces differences ,ainli qu'il s'enſuit.
!

รา 5
248 Le ſeptielme liure

A
Table des Tumeurs contre nature .

Leſquelles Galien au liu. des Tumeurs côtre nature,


' (Grandes 3 & 4x 2. al Glauc.comprēd generalementſousle nom
des Phlegmons, qui vičnent és parties charneaſes.

( Dela quantité,
} dons ſontnom . Moyennes,com 1

mes mefuruncles,

B
( Petites. ( Leſquelles ſelon Auicenne font petites emi :: ‫ا‬

3 nences , bothores ou puſtules, comme toute


forte de gratelle ,& lepre.

( Blanches , Rouges ,

( Couleur , dont font dites? Liuides,,Noires, ,

les autres .

Des accidens, j
comme de la Douleur , eo autres acci- ( Douloureuſes ,
dens, comme dureté ,mor ; Non douloureuſes ,
leffe , & autres , dont font . Dures , Molles, 12:01
nommees la femblables .

(Natu . r Chaude Sanguine,dont eſt faictle phlegmon vray.


relle , Bilieuſe, dont eſt faict le vray Eryſipele.
they

Les differen
ces des Apo
1 200
ſtemes ſont ? Les
( Froide S Pituiteuſe ,dot eſt engědré levray Oedeme.
prinſes' ; ou ? Melancholique, qui faict le vray Scirrhe.

psäguine. S Carboncle ,Gangrene, D


De la matiere Eftiomene, Sphacele.

dont ellesſont non naturelle , Bilieufe.S Plus elpelle, fe fait Herpesexe


engendrees.
| laquelle eftant dēt :plº fubtile,Herpes miliaris .
Icelle eft
hors deſa pro pre
faict la Pituiten. ( Apoſtemes aqueux Coventeux's
nature ,
tumeurno uraye , Ise. 3 /crophules, nodofitez , excroiſ
come de la matie . Jances phlegmatiques.
( re non naturelle, Ти
Melan . sLe Schirshe exquis , les Tu
Labolique. Imeurs chancreuſes.

Des parties où elles sOpthalmie en l'æil, Parotide és oreilles, Paronichic és

il cont , comme doigts & racine desongles.

Nota que la s . cauſe ek obmi .


Des Tumeurs en general. 249
A
Des cauſes des Tumeurs en general. CHAP. II.
ES cauſes generales desapoſtemes ſont deux,à ſçauoir fluxio,& con. Cauſes de
geſtion.Lafluxion (quieſt vn ſoudain deſbordemenc d'humeurs,auec sumcars.
plusgrande quátité qu'il n'eſt de beſoin à la partie pour la nourricure.)
Les cauſes de Aluxion procedent de la parcie mandáce oureccuante: la cauſes de
partie mandance enuoye à cauſe que les humeurs pechent en quátité,flux.ex.
ou qualité, ou en tous les deux enſemble , irricencla vercu expulliue à
ierter ce qui luy eſtcontraire:la partie receuante reçoit parchaleur,douleur & imbe.Cauſes
chaleur . de
cillité naturelle ou accidételle laxité des conduits & ſituació baffc. Les cauſes de cha Caujes de
leur en quelque partie que ce ſoit,lont crois, à ſçavoirmouucmensimmoderez (lous douleur.
leſquels ionecóprinsles fri&tions)chaleurdu feu ou du ſoleil,alıments & medicamécs
acres Lescauſes dedouleur ſontquatre. La prerniere eſt dyſcraſje og alceration (ubi.
3 te, laquelle eſt faite par l'a &tion des premieres quealicez a &tiues, qui ſont chaleur &
B
froideur.La ſecondeeſt,parſolucionde continuité,comme playe,dislocation,fractu .
se,diſtorſion ,contulion,diſtenſion,obftru &tion ,ventofité. La tierce eſt, ſenſibilité de
laparcic: car en vne ſolution ou dyſcraſie faite en vnosou autre partie inſenſible,n'y
aiamaisdouleur. La quarte , diſpoſition ou affe & ion de la faculté animale:cequi eſt cauſes de
montré par l'exemple & conte qu'on fait d'vo amoureux , qui trenchant de la chair l'imbecilné
en la preſence de ſon amie, ſe couppoit les doigts, & ce neantmoins n'en ſentoit rien, delapartic.
pource que la faculté animale eſtoic diſtraicte à ſes amours. La partie eſt imbecille
naturellement, ou paraccident:naturellement,comme les glandes des cmon&oires,
& toutes autres : par accident, commepar intemperature ou autrement affligec par
longuesdouleurs & Auxions d'humeurs ſuperflus, comme és douleurs arthritiques,
С done la fluxion par longue continuation a dilacé les conduits par leſquels s'eſt faice la
Auxion. Aulli, commenousavons dit,la ſicuation baſſeeht cauſe de receuoir. L'autre Cauſes de
cauſeeftcongeſtion ,c'eſt à dire , la matiere dela nourriture, qui eſt multiplice par
limbecillitédelapartie,& n’elt autre choſe que ce qui doitetrecommué&affimile congeftion.
en la ſubſtance. Ses cauſes ſont deux principales: la premiere eſt la debilité de la ver
tu digeſtue ou concoctrice de la partie, doot il aduicnt qu'elle nc peut faire aſſimila .
tion de l'humeur & aliment depraué qui luy eſt enuoyé. La ſeconde, l'imbecillité de
la vercu expultrice, laquelle ne peut expeller le ſuperfu: & lors ſe fait amasd'humeur Camſesspea
en la partie,& par conſequent apoſteme: & celsſontfaiếts le plus ſouuentd'humeurs ciales des
froids, lencs,gros,& glueux. Et ſont leſdits apoſtemes de longue & difficile curation. apoftemes.
Les cauſes ſpeciales ſont trois, à ſçauoir primitiues & externes,antecedentes & inter
ncs,conioindes ou contenantes, comme declarerons cy-apres.

Desfignes des Tumeurs engeneral. C H 4 P. III.

D R pour parucnir à la guariſon des apoſtemes, le principal poin& & le Moyë pour
premier depend de la cognoiffance d'icelles , & deleur difference, ler. paruenit à
queiles nous cognoiſſons parles ſignes qui leur ſont propres , comme en la guariſos.
couces autres maladies: mais d'autant que les principaux ſignes pour co .
gnoſtre les tumeurs concre nacure ſont tirez de l'eſſence de la partie où elles ſont,
en premier lieu faut cognoiſtre la nature d'icelles parties , & quelle eſt leur eſſence
& diſpoſition : ce qui ſe cognoiſt par l'anatomie , & auſſiparla leſion de leur action.
Et voila
quantà celles que nousnepouuons voir à l'ail. Mais celles qui ſont aux
parties externes & apparentes ſont ailees à cognoiſtre, par la comparaiſon de ce qui
eltnaturel,àce quieſt contre nature : comme par exemplede la partie cumefice, à
cellequine l'eſt point , & en regardant & couchant la partie affigec, s'il y a rien d'ac.
creu & augmenić: & alors la vcuë pourra iuger y eſtre vnetumeur. Or d'autant que
cen’eſt aſſez au Chirurgion d'auoir la cognoiſſance de cels ſignes vniuerſels ( car au
tremene ce ne ſeroit eſtre aucunement different du vulgaire ) il doit conſiderer les
.
plus proches & particuliers , leſquels nous cognoiſtrons par la difference de la matie.
Ic& humeurs, deſquels ils ſont compolcz , ſelon ce que dic & demonſtre Galien au
2. ad Glauc.13.de La Mech. que touce la diſtinction & difference des tumeurs naiſt,
yij

4
250 Le feptieſme liure

& prouient de la condicio & nature de la matiere quijpfluë & fait la tumeur , & par les
A
accidens quiy ſuruienent , come par la couleur,chaleur,froideur,durcié,molefle,dou
leur,tenſion ,renitence , & par le teps depuis le comencemét de la fluxion iulques à la
Signes de terminatio & curacion d'icelle.La douleur, chaleur , tenſió , rougeur , nous ſignifie l'hu
meur eſtrc ſanguio : la froideur, molleſſe , auec peu de douleur , l'humeur etre pitui
Signes de la teux: la tenſion , dureté & liuidité de la partie & ponctions par interuale l'humeur
melächelie, cître melancholique : ainſi la couleur blafarde & launaſtre, mordication ſans dureté
Signes de de la partie , l'humeur etre bilieux : nous parlerons plus amplementen leur propre
la bile
licu de chacun en particulier . Dauācage les apoftemes ont leur periode & paroxylme
conforme à l'humeur dont elles ſont engendrecs : car ſelon le mouuement d'iceux
la difference de l'humeur ſera cognuë : car le ſang s'elmeur au marin , tour ainſi qu'au
printemps:la cholere iauneou bile au midy , comme en l'eſté: l'humeur melancholi.

que au ſoir, ainſi qu'en l'Automne. La pituite la nuict,ainſi qu'en Hyuer : ce quinous
eſt demonſtré par Hippocrates & Galien , qui diſent que les quatre parties du iour
& proportion pour le regard du mouuement des humeurs , quc B
11.2. Epid. ont meſme puiſſance
les quatre ſaiſons de l'annee. Pareillement les apoſtemes curables ont quatre temps ,
commencement , augment,eftat, & declination : Et en iceux temps faut diuerſifier les
remedes ,pour bien & deuëment les curer . Lecommencement eſt cogncu lors que la
Lescements
partie commence à tumefier & enfer : l'accroiſſement , quand la cumcur, douleur , &
ont quatre autres accidens croiflenclenſiblement : l'eſtat, quád les accidens n'augmentent plus,
temps.
matiere qui fait la tumeur, nedegenere & ſecháge
Commence mais demeurent en leur eſtre,a la
meni. en aurre forme & {ubſtance . La declination eft, quand la tumeur,doulcur, frétite in .
Accroiſſe. quietude & tous autres accidents ſe diminuene manifeſtement. Et par ainſi le Chi
meni. rugier cognoiſtra comme la rumeur ou apofteme ſe doit terminer .Ce qui ſe fait par
Flul. quatremanieres,moyennant qu'elles ne ſoient empeſchees par repercuſion , ou d'el
Declinatio. les - mel ves ſans aucune occaſion manifeſte ne s'en retournent par deliceſcence : car il
Comme le aduient ſouuene que quelques - vnes ſe terminent par inſenſibletranſpiration , qu'on
lestumcurs. appelle reſolution , autres par ſuppuration , quandla matiere ſecuit: les aucres paſlene
en diſpoſition dure ſcirrheuſe, di &te vulgairement induration , eſtant ſeulement re.
ſoulce la plus ſubtile partie de l'humeur . Autres encores beaucoup pires , deſquelles c
les parties eſtans vaiocuës par grandeur de la Auxion , ou par mauvaiſe qualité , ou
tous deux enſemble, deviennent en ſi grande intemperature,que leur adion ſe perd ,
& ſecournent en gangrene, quieſt corruption & putrefaction .La meilleure voye des
ſuſdites terminatios,eſt reſolution : & la pire,corruption :les aneres deux ſont moyen
Signes de nes:coutesfois ſuppuration eſt meilleure que ſcirrhoſité,ou dureté.Les ſignes par leſ

refolutian. quels le Chirurgien cognoit que l'apoſteme ſe termine par reſolution , font quand la
tumeur,douleur,pulſation ,tenſion ,chaleur,& autres accidents ſe diminuent, & par
la legereré du membre , & lors que le malade ſe ſent grandement allegé,aprerceuano
vne demangeaiſon à la partie : ce quiaduientcommunément és apoftemes chaudes ,
Signes de à raiſon que te humeur eſt plusſubtil & tenu . Les ſignes que ſuppuration ſe fait ,ſont
fururată
, grande douleur, chaleur, tumeur, pulſation , ficure,ainî que dit l'oracle d'Hippocra. meeto
220
Hp apio . res . Quand le pus le faiet, il y a douleur & fiéure , plusque quand ileſt ia fai& t. Or il
47.11.
faut qucle Chirurgien loit bien attentifà cognoiſtre ledic pus : car ſouuencil eſt ca
ché,cellement qu'on ne le peut apperceuoir , à cauſe de l'eſpeſſeur du licu , & du pus: micC

Document Ce qui eſt monitré par Hippocrates . Quand la ſuppuration eſtantau corps n'eſt co D
pororle Chin gneuë,cela aduient à cauſe dela craſlicude de la matiere ou du lieu . Les ſignes pour
cognoiſtre qu'vne apoſteme ſe cermine en ſcirrhe ou dureté , ſont diminution de la
rurgien .
Les fign :s tumeur & durere delaiſſee en la partie par l'imbecillité de nature & deshumeurs cras
quidenorēs & gluans, ou par l'ignorance du Chirurgien qui aura par trop vsé des medicaments
le fcirrhe. refolutifs, leſquels reſoluene la mariere la plus lubeile , & la plus terreſtre ſe deſfeiche
& s'endurcit , eſtant ſemblable à ceux qui font pots & tuiles , qui par deſiccation au
ſoleilou au feu endurciſsér la terre en dureté de pierre : ainſi le Chirurgie ignorăt bić
ſouvent par trop grand vlage de reperculſifs condenſele cuir ,& elpeflitla matiere, &

Signes de eftfouuentcauſede ſcirrhe. Les ſignes de putrefaction & corruprion , ſont quand les
putrefactio.accidenes ſont plus grands que n'auons dit en la fuppuration ,& lors que la putrcfa
& io & mortification eſt faire, la douleur ceſſe , & la couleurdela partie deuiếclivide,
poire, & bien louuency eſt trouuégrande puanteur : ce qui ſeracy apres declaré , lors
que parlerons deGangrenc, ſphacele, ou mortification . La loudaine diminution de
Des Tumeurs en General: 251
A la cumeur,eſt ligne quela fluxion retourneau dedans , tellement qu'elle n'apparoit
plus: & aduicntladite diminution ou deliteſcence aucunesfois à cauſe d'vnegrande Csuſede des
refrigeration, & fouuentesfoispour la venenofice dela matiere, ſans qu'on y aye rien litefcēce, care
appliqué par le dehors,nature ſuccombant & n'eftantaſſez force pour la chaſſer hors, desſignes.
& ſoudain la fieure luictellediminution d'enfleure, & pluſieurs autresmauuaisſym
promes , comme defaillance de cæur , & quelquesfois conuullion, ou flux hepatique
ielon quele cour , le cerucau , & le foye en ſeront premierement attaquez.
D# prognoſtic general des Apoftemes. : CH A P. IV.
ES Tumeurs qui ſont faictes d'vn humeurmelancholique ou phleg.
matique,gros,gluancou viſqueux, ſont de plus longue & difficile cu
ration,quecellesqui ſont faites de ſang & de cholere : auſſi celles qui
( ontfaites d'humeurs non naturels , ſont plus difficiles à guarir que
celles qui ſont cauſées d'humeurs naturels, à caule que les ſuſdits hu.
3 meurs pechent plusen qualité qu'en quantité , & ainli ſeconuerciffent en diuerſes & Galien enla
alienées ſubſtances, quine reſſemblent en rien aux humeurs, mais à pluſieurs choſes methodeli.
Beltranges,comme ſuif, boullic, miel, fece d'huile,& lie de vin , & meſmes à des corps 14. e an
ſolides, comme pierre , ſablon , charbon , feftus : ſemblablement à des animaux, ſecond
comme vers,ſerpens, & autres choſes eſtranges : principalement quand la matiere Glami.
demeure longtemps ſans etre euacuce. Les tumeurs qui viennent aux membres
principaux , & plus auxpartiesinternes qu'externes, ſont perilleuſes & mortelles le
plus touuent, comme auſſi celles qui ſe font aux iointures , & prés d'icelles ſont diffi.
cilesà curer:pareillement celles qui ſont faictes pres les grands vaiſſeaux, comme
veines, arteres, & nerfs, ſont dangereuſes pourle Aux de ſang, reſolution des eſprits,
& conuulſion quiy pourroit ſuruenir.LesApoſtemes enormes, c'eſt à dire,excelliues
en grandeur, ſontſouuentesfoismortelles , pour la grande reſolution quiſe faitdes
eſprits,lors qu'elles sõt ouuertes. Toucesapoſtemes qui ſont degenerees en ſchirrhes;
ſont long temps & difficiles à guarir, comme cellesqui ſont faites en corps cacochy
mes , hydropiques , elephantiques, & autres de mauuaiſe habitude: car tels abſcez de
C generent ſouvent en vlceres cacoeches & maligncs.
Cure generale des Tumeurs contre nature. CH A P. Vi

N la curation des apoftemes on doit obſeruer crois choſes:premierement


l'eſſence de l'apolteme : ſecondement,laqualité de l'humeur faiſant ladi.Hipp.aph.
lim . 6.
teapoſtemc:ciercement , la temperature de la partie où elle eſt faide. La 8.
premiere indication priſe de l'eſſence ( c'eſt à dire de la grandeur ou peci
tefle de la cumeur ) varie la cure, pource que ſelon la quantité de la rumeur, faut aug- Premiere
menter, diminuer, ou changer les remedes. La ſecondeindication ,qui elt prinſe de indicaiien.
la nature de l'humeur cauſant la tumeur , varie auſfi la cure , pource qu'autrement
fauc curerphlegmon, qu'Eryſipelas,autrement cedema que ſcirrhe,autrementla ſim Seconde in:
ple que la compotee. Auſſi lacure de celles qui ſont faites d'humeurs naturels , n'eſt dicasion.
semblable à celles qui ſont faictes d'humcurs non naturels , comme auſſi cellequi eſt
D faiếte par congeſtion,eftcuree en autre maniere qu'vne autre faite par defluxion.La
tierce indication eſt priſe de la nature de la partie où la tumeur eſt faicte ,par laqucl
le nous entendons leur temperament,formation ,ſituation, faculté. Car lecempera-
ment nous demonſtre qu'il conuient autres remcdes aux parties charneuſes comme Tierce indias
cítans plus humides, qu'aux nerueuſes, qui ſont plus leiches : autres à l'æil,autresà la carion.
gorge,& ainſi des autres parties, deſquelles aucunes ſont plus luiertes à defluxion que
les autres pour leur rarité : les autres moins,pourcequ'elles ſont plus malliues & den.
ſes
par laquelle diucrſité & façon on pourra aisément coniecturer quelsmedica
menscant en quantité qu'en qualité ſeront conuenables : auſſi la ſicuation de la par
ticeſt grandement à conſiderer, pour la connexion qu'elle a quelquesfois avec des
grands vaiſſeaux , enſemble pour faire l'euacuation plus facile de l'humeur quiy eſt
contenu. Semblablement la facultéd'icelle , à laquelle Galien redui&t l’vſage & le
ſentiment, diverſifie la curation : car les vnes ſont principales , commele cerucau , le
caur,& le foye,dõtleur vertu eſt departie partoutle corps par lemoyé des nerfs, ar.
tcres & vciacs :les autres ſont moins principales,coutesfoisneceffaires,d'autant que
у iij
252 Le feptieſme liure

fans icelles on nefçauroic viure longuement, comme l'eſtomach : & d'autres qui ont A
Cute des vn ſentimenc exquis, comme l'ail,les membranes, nerfs & tendons, qui ne peuuenc
tumeurs en ſouffrir medicamens acres ne mordicans . Ces indications conſiderees, la curation
general. " s'accomplica par ces trois intentions quis'enſuiuent : à ſçauoir, ayanc efgard à la ma.
riere antecedente quidecourt , ou qui eſt en voye de Auer : à la matiere coniointe , &
Premiere à la corre &tion des accidens , en obſeruant touſiours l'ordre , l'vrgenc, & la caule. Donc
intention .
au commencement pour la matiere antecedente faut appliquer repercuſſifs fores &
Six shoes debiles, ayant elgard àlatumeur quiſe fait encores,excepté en ſix cas, comme nous
obſeruer en enſeigne le Docteur Guidon . Le premier, c'eſt quand lamatiere ou l'humeur eſt ve.
bapplicatiš neneux : le ſecond lors qu'elles ſont faites par criſes:le tiers ,quand elles ſont faites pres
des reper
des membres principaux : le quarrieſme,quand la matiereeft groſſe, craſle, gluante ,
cußifs. glaireuſe, & mucilagineuſo: le cinquielme,quand la maticre eſt profonde : le fixiel
me , quand elle le fait auxernun &toires, principalement lors qu'elle eſt faire decauſe
antecedente. Or s'il y a repletion en tout le corps,faucordonner la dietre,purger,ſci
gner, faire frictions & baings . Et quant à la cacochymie, elle ſera corrigee par la ma. B
niere de viure , & par purgations: fi la fluxion eſt cauſee par l'imbecillité de la partie
receuante,illa faui fortifier : fi la ſituacion d'icelle eſt baſic, ſoit le malade ſitué en tel
artifice que la partie bleſſee ( ſi faire le peut ) tiennc le plus haut lieu : fi c'eſt à cauſe de
la douleur , nous l'appaiſerons par medicamens anodins & contraires : & fi l'humeur
Seconde in . eſt trop ſubtil , il ſera engroſſy par medicaments & aliments . Quant à la maciere con
tension . ceruë en la partie , d'autant qu'elle eſt contre nacure , demande eſtre euacuce par ic
Troifieſme Tolutifs, parvencouſes,cornets,ſcarifications, & autres choſes ſemblables, comme ca
infension . caplaſmes, emplaſtres,fomentacions:ou bien faiſant ouuercure de la cumcur , apres l'a
uoir ſuppurce. La troiſieſme incention ſera accomplic en corrigeant les accidents,
comme fićure, douleur, & autres : çe qui ſe fera par medicamens anodins , lenitifs &
relaxans, cominc dironscy - apres .

Des quatre Tumeurs on Apoſtemesen general, & d'autres reduites fous icelles.
C H 4 P. 1 Ꮴ Ꭵ .
с
E S principales Tumeurs engendrées de fluxion d'humeurs font qua

Quatre tre,à ſçauoir Phlegmo,Eryſipele,Ocdeme,Scirrhe,auſquelles on peut


reduire & ſous icelles comprendre innumerables autres tumeurs , qui le
principales
turneurs . excedent la meſure de nature, combien qu'elles ayent diuers noms , ſe C
lon la diucrficé des cauſes & parties où elles ſont. Les tumeurs reduites
ſous Piegmon ſort,phygethlum ,phyma,furancuous,carbiculus,ou anthrax,
ophthalmia ,ſynanche, bubo, & autres, leſquelles tumeurs ſon chaudes & humides. Sous

Eryſipele ſont compris, herpes miliaris , /thiomenos exedens,formica,imperigo, leſquelles


Tumeurs
redaictes à ſont faites d'humeur colerique,comme exanthemata :d'aucuns, qui ſont petites pultu .
les ſemblables à la pecite verolle . Sous Oedeme ſontcompris atheromata, où la matie 2010
phlegironi
ble à fuif, & melicerides ſemblableà miel:
Eryſipelas, reeft ſemblable à boullie,ſtearomata,lembla
Teftisda, qui eſt yne tumeur molle, talpa,ganglion nodus, ſcrophula,lupia,hydrocele ,aſcites,
Oedema. ' leucophlegmatia,ou hypoſarca, & toutes facuoſitez & aquofitez, leſquelles font faictes

Schiribe. de phlegme.Les tumeurs reduictes aux Scirrhes , ſont, cancri,lepra,clepanhtiaſis, po


reaux ou verrues, myrmecia, clauus, thymus, varices, morphea nigrac alba:leſquellestu D to
meurs ſont faictes d'humeur melancholique . Maintenant faut traitrer d'icelles en le
ſpecial, & premierement du Phlegmon . werk
en

Du Phlegmon . CH A P. VII.

Gal. liu . i . Hlegmon , ſoit vray ou non , eſt nom general de toutes apoſte.
des diffre mes & inflammations cant ſeiches qu'humides particulieres , fai
ses des ma
tes de fang:le vray eſt celuy qui retiene le propre nom de Phlegmo, 12
ladies.
qui eſt fait de ſang bon & louable , ne pechant qu'en quantité . La
cumeur ou apoſteme phlegmonneuſc prend autre nom , comme
charbon , anthrax peftifereux , cancer , gangrene ,mortification ,
fous lesqueis iunt contenus pluſicurs puftules malignes & crouſtcuſes : com.
meaufli quand il ſe fait mixtion d'autres humeurs auec leditſang loüable, comma
Des Tumeurs en general. 253
A phlegme, cholere o, u melancholic :car adonc ledit apofteme ne doit eſtre appelé
ne traictécomme ſi lelang y eſtoit leul , mais prendra denomination de l'humeur
qui eſten plus grande quantité.
Exemple : Sil'humeur phlegmatique eſt mellé auec le ſang, & que le ſang domi
ne, la cumcur ſera nommé phlegmonædematodes : au contraire , li la pituite domine
leſang, elle ſeranommécædema phlegmonodes: & ainſi lera-il des autres humeurs en
donnant rouſiours la denominacion à l'humeur qui ſurmonte & domine . Or toutes
ces diſtin &tions viennent de ce que le ſang qui fait tumeur, peche ou en quantité ſeu
lement , ou en qualité : s'il peche en quantité , il faic cumcur que proprement on ap
pelle Phlegmon :s'il peche en qualité, ilfait vnecumeurdite Phlegmonneule, pource
qu'elle retient de la nature du ſang. Or le ſang peche & eſt vicieux en qualité ou par
mellange de ſubſtance eſtrangere,come de phlegme,cholere & melancholic, dont le
fait phlegmon Oedemateux, Eryſipelateux , & ſcirrheux : Ou par corruption de la
propre lubſtance, dont le fait le Carbuncle Anthrax,& toutes ſortes degangrene:
Ou par concretion , nacure cítanc fruſtrée de la ſuppuration à laquelle elle tendoit,
& clperoic, par quelquefaute , ou de l'air, ou du malade, ou du Medecin , dont le fait
Atheroma, ſtearoma, & Meliceris,
B Toutesfois il fauc icy noter , que neantmoins que pluſieurs anciens ayent eſcric Il neſe fait
qu'il ſe faitapoſtemes vrayes d'vn ſeul humeur pur & louable , ne pechant qu'en apofemes
quantité, ſansadmixtion d'autre humeur ,fieſt-ce qu'il fauc eſtimer qu'il ne ſe fait d'un fent
iamais apoſteme de pur & fimple humeur : car il y a touſiours mixcion d'autre , pour- humekt .
ce que les humeurs ſont touſiours mellez auec le lang, principalement aux apofte.
mes vrayes,c'eſtà dire,qui font faites d'humeurs naturels , leſquels no pechentqu'en
quantité : mais celles qui ſont faites d'humeurs non vrais , le plus ſoutent ſont trou
uées eſtrecaulées d'un ſeul humeur . Or il faut à preſent retourner à l'apofteme qui
retient le propre nom de Phlegmon , qui eſt faic de ſang louable ( comme a eſté die )
lequel eſtdefiny par Galien en ceſte maniere :Phlegmon vray, eft tumeur contre na- Diffinition
ture , faire de ſang pur & louable , Aluant ſur aucune partie en plus grăde quãtité qu'il du Phle
n’eit beſoin , lequel le fair communément & le plus couuent en parties charneuſes ,& gmon .
aucunesfois és aucres,&meſmement ésos , comme dic Hippocrates & Galien . La
generation duquel ſe fait en ceſte maniere. Lors que le ſang Auë en quelque partie Gal.lin.des
plusqu'ilne doit, premierement lesplus grandes veines & arteres qui ſont en la par- Tuments,
tieblēliée le rempliffent, & conſequemment les moyennes iuſques aux plus petites Glauc.
2.
C nommées Capillaires . D'icelles eſtans ainſi remplies ſortle ſang par reſudation , tant Definition
par leursporpoſitez ,que par leurs orifices en forme de roſée. de Phle
Decelang ſontpremièrement remplis les licux & cſpaces vuides ,qui ſont entre gmont.
lescorpsſimilaires ou ſimples: puis s'imbibent & abbruuene dudit lang toutesles au- Hippolish
tres parcies circonuoiſines, & premierement la chair, car elle eſt plus capable de rece desplages
la teftes
voirAuxion ,àcauſe qu'elle et plus ſanguine & Ipongieuſe : puis les nerfs , tendons , deGal.liw.des
membranes,liganienss'imbibent: parquoy neceſſairemene s'enſuictumeur, pource Tuineurs .
qu'il y a repletion outre meſure, de laquelle s'enſuit pareillement tenſion & reniten. Gil lib.de
cc ou reſiſtance, aulli y a douleur tantpourla tenſion que pour la chaleur eſtrange. inequali
Dauancayceſt ſenti pulſation ,& principalement,commeauons dit , quand la ſuppu- inteinperic.
ration ſe fait ,à cauſe que les veines , arteres & nerfs premierement & ſur coutesles La maniere
D autresparties ſouffrenedouleur, eſtans interieurement échauffées par la fluxion , & rõme ſe fase
exterieurement neſontpas ſeulement échauffées,mais auſſi preſfees & comprimées lephlegmon.
des autres parties. Comme ainſi ſoir dóc,que toutes ſoient aulli douloureuſes à cauſe fuiette
qu'ellesſont échaufées,imbuës,comprimées ,& tumefices dudit ſang ( ce qu'elles ne fluxion.
fonc eftans en leur habitude naturelle ) leſdites arceres qui ſont en perpetuel inouue. Cauſe do
ment,lequel eſt appeléDiaſtolé & Syſtolé, qui eſt à dire, eleuation & compreſſion, tumeur se
en leur eleuation frappent contre lesparois deſdices parties enflammées, & par cel renitence.
moyenfontladite douleur pulſatile. Adiouſte, que les arteres eſtans en telcas rem. Cauſe de
plicsdu ſang plus abondant & plus feruent, ſe dilatent, & heurrent les parties voiſin doul eur am
pblegmon .
nes,plus que decouſtume,pourchercher refraichiſſement, par attraction de l'air am
biene,& pour ſoy,& pour leſdites parties ,qui fait ce lymprome propre au Phlegmon ,
qu'on appelle puilus :qui n'eſt autre choſe,commedit Gal. ſur le comment. 21. de la
feat.7.ſinon yn battement d'arcere douloureux , & lenſible au malade . Car autremene
cant que le corps en toutes ſes parties le porte bien , nous ne feutons point les arteres
у iii)
254 Le ſeptieſme liure
batere &mouuoir en nous-meſmes: parquoy ſont bien remarquables ces deux caui A
Cauſe dela fesdepulſation és Phlegmons , fçauoir la ferueur &abondance fangcompreſio
vaiſſeaux qui incite les arceresà le debattre plus que de couſtume ,de contenu ésn
douleur & la
pulfarine. & anguſtie deſditesarceres par la repletion des parties voiſines : qui eſt cauſe que
heurtées par leſdites arteres ellesſentent douleur.Et à ceſte raiſon lesvulgairesvexez
de Phlegmon diſent ſentir à la partic affectée vn batcement comme coups de mar
tcau.Ecoutre la pulſacion faite par lesarteres , en y a vn autre qui ſe fait és humeurs,
lors qu'ils viennent à luppuration & putrefa &tion par le moyen des vapeurs, cauſes de
faire vne pulſation pruriciue , & principalement és apoſtemes chauds. La cauſe de
Cauſe de
(baleut en chaleur au Phlegmon ,cſt pource que le ſang Auant à la partie plus qu'elle n'a beſoin,
phlegmon. eſt conculqué & amaſſéfaiſant obſtruction , dont l'euacaucion eſt proliibćeés cſpa
Cauſe de ces vuides,& parce ledit ſangſeputrefie,& acquiert vne chaleur eſtrange. Finable
rongeur en ment il y a rougeur à raiſon du fang qui eſt rouge. Car chacun humeur dominant ſur
Phlegmon. aucune parcie,donnela ceinture au cuir,& partic où il abonde.
Des cauſes &fignes de phlegmon. CH A P. VIII.

Es cauſes de Phlegmon ſont trois à ſçauoir , primitiues , aprecedentes, & B


conioinces. Les primitiues ſontcheutes ,contuſions,extenſion ,trauailim .
Cauſes .pri.The moderé , frictions, application d'onguent acre , ou d'eſtre tenu trop long
mirines
cemps pres du feu , ou demeuré aulli par trop au Soleil: pareillement mauvais regi NI
me, mulciplianc le ſang en trop grande quantité.Lescauſes antecedentes ſont abon
Cauſes an- dance de ſang. Les cauſes conjointes ſont la multicude du lang amaſſé & impact à la
Tecedentes.
Cauſes con partic affligée , & autres quionteſté dires au chapicre general. Les ſignes & indices
zointes. de Phlegmon , ſont cumeur, tenſion , renitence , chaleur febrile , douleur , pulſation
Signesde ( principalement quand ilvientà ſuppuration )couleur rouge, & autres lignesſigni.
Phlegmon, fians le ſang, que ic delaiſfc à cauſe debriefueté.Les petics phlegmons ſe terminent
Leprogno- les plus ſouvent par reſolution , les grands par ſuppuracion , & aucunesfois en ſcirrhes C
Stic on in- ou durecez, pareillement engangrene & autres eſpeces de maladies:lors que la natu
gement
re & faculté de la partie eſt ſurmontée par la malignité ou abondance de la fluxion ,
comme eſcric Galien au liure des Tumeurs contre nature : & toutes ces choſes doi.
uenc eſtre conſiderées par le docte Chirurgien, à fin qu'il applique les remedes idoi
nes ſelon l'eſſence de lamaladie,le temps d'icelle , & nature des parties affectées. 3200

De la curede Plegmon vray. CH A P. LX.

E Chirurgien en la cure du vray Phlegmon ſe doit propoſer quatre poinas


La premie principaux. Le premier conſiſte à la maniere de viure, laquelle (parce que
ne intētion . his le Phlegmon de ſoy eſtant chaud, excice la fiéurc ) doit tendre à frigidité &
humidité, ce qui s'accomplıra par les ſix choſes non naturelles , qui ſont l'air, man.
ger, & boire , mouuemenc & repos , dormir & veiller , repletion & vacuation , & les
Les fix cho- accidens de l'ame. Donc ilélira l'air pur & clair, non trop humide nc rheumatique, D
fes non na-toutesfois vn peu froid :ſon manger & boire tendra à frigidité & humidité modeiée,
turelles.
L'sir,
ſans vſer de viures quiengendrent trop grande quantité de ſang. Parquoy il vſera
Minger de boüillons non gras, auſquels auront cuit bourroche, buglofſe , laiduës , elpi.
et boire, nards , ozeille , chicorée. Il delaiſſera touteseſpiceries : ails , oignons, & generale.
ment toutes choſes quiéchauffene le ſang : cuitera toutes choles graſſes & douces,
d'autant que ſoudain elles s'enflambent : ſon boire ſera de vin fort delicat , bien
trempé , & où ily aura ſoupçon de fiéure , vſera de priſane,cau boüillic,cau d'aman
des,boucher, toutesfois faudra auoir égard à l'aage, force & couſtume de viure du
malade. Car s'ileſt vieil,ou qu'ilne ſe puiſſepaſſer de vin, come pluſieurs, il en vlera
Monuemče
repos.
moderément. Il doittenir le repos , cartous mouuemens échauffent, & principale
Veiller 6 ment n'exercera aucunement la partie malade , craignant d'y faire novuelle fluxion
dormir. Iltiendra mediocrité en ſon dormir , & s'il cſt repler, nedoit dormir de iour , prin
Replerian cipalement coſt apres diſner.Letropboire& manger luy eſt du cour contraire ,mais
e enacua- ſenourrira peu ,tant qu'illuy ſera poſſible, & reglement , non dauantage que ſon na.
tion .
turel le peut porter. Son ventre ſera touſiours mol , & s'il ne l'eſt de ſoy, le ſera par
art,prenát clyfteres & fuppofitoires par interuales. Ileuitera toutes affections vehe
Des Tumeurs en general. 255
A mentes de l'ame,noiſe,contention ,fafcherie , debats.Or d'autant quelacompagnie Les affe
1 desfemmes luy eſt fort pernicieuſe, ſur toutes choſes s'en abftiendra. Sa maniere de Elions on
viure ainſi ordonnée,faudra auoir égard au ſecond poinct , qui eſt diuertir la fuxion, accidens de
laquelle ſera deſtournée li nous oſtons les cauſes d'icelle , à ſçauoirla cacochymie , ou l'ame.
plethore:ce qui ſe fera par purgations,phlebotomie,ſi l'aage & forces le permettét:
& li la partie receuante eſt foible, ſera fortifiée en referrane la largeur des conduits, Le second
retiranc vers les parties cótraires l'impetuoſité de l'humeur coulant , par applications pornit, qus
devétouſes,fri&tions & ligatures. Ec ſi la partie eſt vexée de douleur , qui eſt ſouuen eft divertir
cesfois cauſe de Auxion ,ſera appaiſée par medicament ledatif dedouleur contrariani la fiuxion.
à icelle . Pour obtenir le troiſieſme point , nous conſidererons le Phlegmon en ſon Trofieme
commencement,augment,eftat, & declination . Et pour ce eſt beloin vier des medi- pornet.
camensqui ontdiuerſe faculté :car au commencementnousrejettons & repouſſons Remedes pour le
la matiere du phlegmon par medicamens repercuſſifs,comme blanc d'æuf , oxycrat , coin m inte

B
iusou eau de ioubarbe, de plantin , de roſes, cataplaſmes faits de hyoſcyame, écorce ment au
de grenade , de balauſte ,bol armene,terre ſigillec, huile rolat , de coings , de myrtils, phlegm on. 1

de pavor,delquels ſimples ferez pluſieurs medicamens compoſez . Exemple d'vn'ca. Cald


taplaſme.24.far.hord .z.ij.lucciſuperui.plantag. an.z. iij.pul.malicor. balauftiorum plajme.
B & roſar.añ.z. ij.olei myrtill . & roſar, añ. Z. j . fiat cataplaſ . Autre catapl. 24. planrag .
lolan ,hyolcý.añ ñ ij.caudæ equinæ , tapt,barbat .centinod . an . í.j. coquant. pera
feâè in oxycrato ,piſtentur , paffentur addendo pul, myrtill . nucis cuprelli & rofar.
rubra ,an 3.iij.far .fabar. z.ij. olei rofarum & cydonior . an. zii.ß. miſce , & fiat cata
plaſma ad formam pultis latis liquidæ . Semblablement on pourra vier de ce linimēt ,
duquelon trempera des cóprelles qui ſeront appliquées ſur la partie 24.oleinymph .
& roſar.añ.3.11).aq. roſar.Iolani & plantag.añz.ij.aceci3. iij. alb. ovor.nu. iij.fiaclia
nimencum.Pareiilement on vlera de l'vnguentum rolatum ,album raſis,camphorat.
Emplaftrum diachalcith ,diſfolutum in aceto & oleo roſato, Populeum . En l'augméc Remedes
nous aurons égard à la fluxion & à la matiere qui eſt impacte à la partie,cellemét que pour l'aug .
C les medicamens ſeront compoſez de repercuſſifs & reſolutifs , mais en force que les ment.
repercuflifs ſoient en plus grande quantité que lesreſolutifs:comme. 24. fol. mal. ab cataplaſme
finth.plantag.an. ñ. 111.coquant, in oxycr. piſt.paff. adde farinæ fabar. & hord. an. " percußif
c Ž.j.pul.rol.rub.&abſinth.añ z.ij.olei roſa.& camomil.añ.3.j.fiat cataplaſma ad for. refola
mam pulcis fatis liquidæ.Autre.2.far.hord.3.iii.far.ſem.lini& fænug.añ.3.i.coquá- Autreca
tur in aquacom.addendo ſub finem pul,myrtil.roſar, & canomil. an. z. B. axung an . taplaſme.
fer.&oleiroſ.añ.3.i.miſc.& fiat catapl.En l'eſtat fauc vſer des medicamens repercuſ Remede
fifs& reſolucifs en pareille quácité:& s'il y a douleur, meiler enſemble des mitigatifs, pour l'efiat.
comme 2. rad. alth .z. iii.mal. parier.añ. in. ii,coquanturſub cineribus addendo far. Cataplafme
fabar.& lent.añ.3.ij.pulu cainomill.& melilot.an Ž. B.olei camomill. & rofar, añ.3.1. reperensif
o relola
axung.gall.3 ij.fiat catapl. A ucre , 24. micæ panis triticei in aqua calid.macerat . tb.B. tof do ano
pul,roſar.rub & ablin.añ .z. vi. olei anec. & mel.com.ań. Z.ij. miſceoinnia fimul,& din .
fiat catapl.adformá pulc.fac.liquid. duquelon vſera principalemēc lors qu'il y a dou. Autieca
leur.Etquand la douleur& aucres accidens ſerói diminuez , on peut coniecturer que raplaſme
anodin .
D
lc Phlegmon cſt en la declination, & parcane faut reſoudre plus vigoureuſement , en
vſant de purs & ſeuls reſolucifs,commençant aux plus benins , craignant de reſoudre
D ſeulemenc le plus ſubtil , & que le gros nedemeure:comme.21.mal.biſmal.ann.í.iij.
coquantur addédo far.hordeiz.ij.melliscom.z.j.olei camomil.& melilot.ann.3.j.B. Remedes
fiatcataplaſ.Autre.2.rad. bryoniæ & cucumer. ágreſt.ann . Z.ij.camomill . & meli. pourla
declination.
lot, añ.ìñ.iij.coquant, in hydromelite, addendo far.ſem . lini& fænug.an.Z.ij, olei Auire ce
anet.& axung. ant. & anat.añ.3. 1. fiat cataplaſ.Autrement aide-toy del'emplaftre caplasme
fuiuant2.Emplaft.diachil.mag. Z.ij.emplaft,demelilot.z.j.olei anet. & camomil. plus rigon 6

ań.3.B liquef.omnia fimul, & fiat medicament.ad vſum . Autre. 24. Emplaft.de mu- reux.
cag.& oxycro.añ.z.ij.emplaſt.diachil ireat. Z. j.oleililiorum aut camomelini quan Emplaftres
tum ſatis,vcinde fiat emplaftrú ſatis molle.Le quatrieſme poin &t giſt en la correction refolutifs.
des accidens,entreleſquels la douleurtient le principallieu , & pource faudra que le
Chirurgien face diligence de l'appaiſer. Caroutre qu'elle abbat & affoiblit les ver. Quarrieſme
tus, elleempeſcheles actions, & fait nouvelles fluxions,tirant leſang & eſprits à la penet,
Accidens
partie. Parquoy ilconuiene incontinentappliquer remedes quila mitigene, leſquels qui (uiuens
ſerontdiuerſifiezſelon qu'elle ſera : comme 2. Micæ panis albi in lacte tepido ma- la doulsur.
cera.lb.$. vitell.ouoc.nu.iij.oleirolat. z. ij. crociə s.fiatcataplaſ. Autre . 2.flor.ca

'
256 e
Le ſeptieſm liure

momillæ & meliloti, añ.ß. iij . far.ſeminis lini & fænug, añ.3.j. mucag . pſilij & cido. A
nior.añ.3.B.olei camomil. & viol.añ.3 . j . fiat cataplaſma ad tormā pulcis ſatis liquidæ .
Autre . 27.mucag.rad.alth .& fenug.añ.3.iij.obei roſar. & anet.añ. Z.) . far. ſeminis lini
quant.ſatis ,vtinde formecur cataplar, ſacis molle. Or ſi la douleur perſeuere , & ne
puiſſe eſtre appaiſée par les ſuſdits medicamens , faut auoir recours aux plus forts, &
meſmes iuſques aux narcotiques, ſile cas le requiere, toutesfois vſant d'iceux ſi ſage
mét ,q l'on ne rende la partic mortifiée,en refrigerát plus qu'il ne ſeroit beſoin ,cóme.
2.fol. hyoſch . & papauer. fub cinerib.co &t.an.3. iij.adipis fuil. & oleirofar ,añ.z.in
Cataples Croci m.ij.fiat cataplar.Ou 22. fol.oxalid,mandrag. & femperui.añ.ñ .ij. piſtentur&
mes ftupe
fallifs. paſſentur , addendo olei violar. Z. ij . fiat cataplaſ. Autre. 22. fol. cicur . & ſolani furioſ,
an Z.iiij.coquant , ſub cinerib. piftencur, paſſentur, addendo vnguent. popul . & olei
rolar.añ.3.j.far.fænug.vrinde formet.catapl.ad formam pulcis ſatis liquidæ.

Cure generale du Phlegmon , lors qu'ileſt degeneré ex abftés.


CH A P. X.
B
R quelquesfois l'humeur eſt tellement impact à la partie , qu'il ne peur
cſtre repercuté ny relout : ce qui ce ſera nocoire pour la grande inflamma
Signes de
tion , tumeur eminence & rouge , auec douleur poignante , ficure, pulla
fuppura
Bion . tion & pclanceur, & autres que nous avons dit cy deffus. Ec lors que
Galien 2. tels lignes apparoiſſent, & qu'il ne reſte aucune cſperance de reſoudre , faudra des
ad Glauc. reſolutifs paſſer aux ſuppuratifs. Et pource Galien fométela partie aucc eau tiede , ou
chap.7, huile , ou tous lesdeux enſemble: aufli applique vn cataplaſme tel qui s'enfuit. 7.
Cataplafme far. crit. vel mic. panis. Z. ijij.oleicomm .z .iij. aquæ comm . quancum ſufficit , & fiat
suppuratif. cataplaf. Tu pourras vier de ceſtuy- cy. Ž.rad.lilior. alb . ahh . an . Z. iij. fol . mal. pa
Autre CA
riec . & fencc.añ. ń.j.co quant. in hydromel. pift. paff.addendo far.Teminis lini.Z. ij .
taplaſme.
axungiæ ſuillæ & olei lilior. añ.3.j. B. fiac cataplaſma. A utre . 22.mal.biſmal, viol.an .
ń.j. caricar. ping num .10. pafful. z.ij.coquant, in aqua comm . piſt. paff.adde mellis
Mediiyměr communis z.ij.vnguen.bafilic .& butyri recen.añ.3.j. fiac catapl
. Dauantage, tu pour
Juppurasif. Tas vſer deſemplaſtrede diachylon magnum , ou de vnguentum baſiliconis, ou bien C
2.Emplaſt.diachyl.mag.3 .iij. vnguent.baſilico.z.j.olei,lilior.3.B.miſse omnia fimul,
& fac medicamentum ad eum quem præſcripſimus vſum . Lors que la chaleur eſt re
miſe, enſemble la douleur , fieure , & autres accidens ceſſent, & que la tumeur s'éleue
en pointe , & que l'on ſont vne inondation ou fluctuoſité à la partie , à ſçauoir , quand
on preſſe les doigts ſurla tumeur,elle obeït facilement,trouuanı vne moleffe, & laſa
Signe que nie va çà & là, fuyant ſous les doigts , lors tu pourras iuger que le pus eſt fait.Ec parcant
le pas ef deuant que d'attendre plus longuement,tu viendras à l'apercion ,craignantqu'elle nc
fast.
mine & corrode les parties voiſines , dont puis apres pourroient demeurer vlceres
Le moyen finueux & fiſtules, & principalement lors que la matiere eſt veneneuſe , ou pres des

Are l'inon . iointures , ou au fondemét,& en autres parties chaudes & humides. Cartelles aporte
dition . mcs, comme nous enſeigne Hippocrates, doiventeſtre ouuertes deuant la parfaide
fuppuration , & ne veut qu'aux autres parties on ouure trop ſubit les apoſtemes, ex
cepté aux parties pudibondes : car le pus quieft ia fait, aide à fuppurer ce qui n'eſt pas
encore cuit. Orl'apertion ſera fáire ou auec la lancette , ou auec le caucece actuel ou
Le moyen potentiel. Car où le malade ſeroit craintif, & ne voudroit endurer le fer,cu v ſeras
D
d'adapter pluſtoſt d’un ruproire,c'eſt à dire,caucere potentiel. Ily a des malades qui craignent
L'annean
tane l'ouuercure ,qu'ils s'éuanouiſſent ſeulement voyans la lancette , de la crainte de
qui s'en .
douleur, auant quel'inciſion ſoit faite : Ouils recireront & deſtourneront la partie,
fuit.
qui fera que l'inciſion ne ſera faite au lieu qu'elle doit , ou moindre, ou plus grande
qu'elle ne deuroit . Parquoy faut que le Chirurgien face l'ouuerture , auant que le
malade aye loiſir d'y penſer , en l'abuſant comme faiſant vne fomentation ou autre *

choſe à la dérobée , ayant vne pointe de lancette , laquelle ſera attachée au milieu
d'vn gecron ou autre pieced'argent, laquelle ſera miſe ſur vne emplaſtre ou cata
plaſme: & la poincc d'icelle libien couuerte d'onguentou du cataplaſme , quclema
lade ny les aſſiſtansnc la pourront apperceuoir : & eſtant ainſi accommodée , ſera

appliquéeſurl'endroit où lon doit faire l'apertion, & lors le Chirurgien fubit preſſe
ra en l'endroit dudit getron ou piece ,tant & fi peu que ladite pointe ſoit entré en
l'apoſteme. La figure c'eſticy repreſentée, l'vne grande, & l'autre pecite , & l'auçre
moyennc,deſquelles tu pourras vſer ſelon ca commodité.

.
Des Tumeurs en general. 257
А Figure de trois pointesde lancettes inferées en vngelton .
A Monſtre legercon , danslequeleſtinſerée
la pointe de la lancerte,

Figure de l'Anneau.
A
C

Autre moyen de tromper le malade , c'eſt que le


Chirurgien aura au doigt index vn anneau , auquel
fera inſeré unepetite lancette , propre à faireouuer
ture à l'apoſteme: ou avec un petitpiſtolet, comme
B
tu vois par ces figures.

6. Figure dupiftoles quiſe débande parun refurt.

A Monſtre la groſſe cannulle.


B Autrecánulle qui entre dedás la groſſevis.
C La pointe du piſtolet qui ſorc dehors.
D Lereſfort quifaitdébander le piſtolet.
Or en ces trois manieres d'apertions , lept Sef choſes
choſes ſontà confiderer. Premierement, que a conſide
C
la ſection ſoit faite à l'endroit qui eſt le plus ver en l's
mol, & quienfonce ſous les doigts , & fait lou, pertion de
uent vne pointe . Le ſecond, qu'elle ſoit faite contes tu ,
au plus bas lieu , à fin que la matiere contenuë meur.
С ne croupiffe , & le puiſſe mieux écouler. Le
tiers, qu'elle ſoit faite ſelon les rides du cuir , &
re&itude desmuſcles . Le quarrieſme , qu'on :
cuite les grāds vaiſſeaux ,comme nerfs, veines,
& arteres. Lecinquielme, que la matiere ne
ſoit poincvuidée tout à coup, principalement
aux grands abſcez ,à fin que ne s'enlujue debi.
lication de la vertu par la crop grande cuacua
tion qui ſe pourroit faire des eſprics, auec la
matiere. Le fixieſme, que le lieu ſoit traiąć
doucement ſans exciter douleur le moins qu'il ſera poſſible. Le ſeptielme , qu'apres
1
D l'ouuerture le lieu ſoit mondifié, incarné, puis conſolidé & cicatrizé. Apres telle aper
tion couſtumierement reſte encore quelque porcion de la tumeur , laquelle n'aura
pas dutout eſté ſuppurée: & parcant le Chirurgien doit aouir égard qu'ily a compli.
cation de diſpoſition ,à ſçauoir cumeur & vlcere. L'ordre de curation , c'eſt de guarir Document
premierement la tumeur que l'vlcere : car elle ne peut cftre guarie,quela partie ne pour le
ſoitrenduëen la nature. Donc tu continueras les medicamens ſuppuratifs cy - deſſus Chirur.
declarez ,& l'vlcere ſera craictée l'eſpace de deux ou trois jours auec telmedicament. girn..
2.vitell.vnius oui,cerebent.Venec. & oleiroſac, añ.3.ß. fiat medicamentum. Puis tu DigiBir
mondifieras auec yn cel medicament . 24.mellis roſac.3.j.ſirup.toſat. & terebint. Ve.
net, an 3.j.ß.far. hord.3. 11. fiac medicamentum ad vſum . Semblablement le mundi Mundificao
ficatif de Apio.elt ſingulier, duquel la deſcription eſt telle.24. ſucci apij , abfinth. tif.
plantag.beton ,anzj.mell.commžv tereb . Venet.Z.iiij.fárinæ hord . & orobian
3.1.pul.aloës.rad.ircos Florentiæ ,myrrhæ ,an.z.j.coquatur mel cum ſuccis , quibus
conſumptis addantur farinz & puluercs , & mifceantur omnia ad formam vnguenti:
258 Le ſeprieſme liure
& où tu voudras dauantage mondifier,vſerasdel'apoftolorum , ou bien de l'unguentum A
Aureumd agyptiac, mellez enfemble ſelon ta diſcretion :& cltant mondifiés ſera in
carnéc & cicatriſée comme les autres vlceres, ainſi qu'il te ſera declaré en leur cura.
cion propre.
Des eſpeces de fiéures qui ſuruiennentau Phlegmon , & curation d'icelles.
C H 4 P. Xi.

Ntre les accidens qui plus communément accompagnétles Phlegmons,


& plus gencralement affligent les malades, ſont les fiéures, c'eſt à dire, in.
of temperacures chaudes & ſeiches, excitées & allumées au caur,& d'iceluy
deparcies à tout le corps, par les conduits des arceres: Icelles au Phlegmon
Definition ſont ou diaires ou ſynochesnon putrides,ou ſynoches pucrides. Ficure eſt uneebol
de fiente. licion de ferueur & d'inflammation ,que les Grecs appellent feu :car de quelquc ef
pece que ce ſoit,eſt couſioursfondée en chaleur contre nature. Dela nature & cura 3

tion delquelles ic diray icy bricfuement ce quc i'en ay appris de Meſſieurs nos Mai
ſtres les Doctcurs en Medecinc , aucc leſquels i'ay hanté & pratiqué .
Fićure diaireou ephemere , eſt uneintemperaturechaude & leichée , allumée és B
Delafieure eſprits vicaux,ainſinommée quaſicomeJournaliere, du mot Lacin dies, qui ſignific
draine. lour, pource que de la nature elle fait& parfait ſon cours en vn accez , qui ne dure .

pas plus de vinge quatre heures, quieſt l'eſpace d'yn journaturel,& ce à caule qu'elle
eft aliumée en vn luiec cenu & ſubcil,aiſément& en peu de temps diffipable, ſçauoir
és eſprits, &negiſtpoint en pourriture,mais en vn eſprit exlialatifembraſé.
Les cauſes des fičures ephemeres ſont , faim , ebrieté, laſſitude,ire ou cholere , fu
Cauſes des reur,criſteſc, veilles, denſation ou aftrictiondecuir,ſoitparrefrigeration oupar
fiéures ephe aduſtion ,bains, mutation de vie declinant à chaleur, par application ou priſe de mc.
meres . dicamens acres,commevenins, & alimens chauds : Brief, coutes les cauſes nommées
С .

des Medecins,cauſesefficientes des fiéures, horſmisla pourriture : car icelle eſt pro
pre à la generacion des fićures putrides. Le bubon' meſme qui ſuit l'inflammation
ou Phlegmondes glandules , excite ceſtefiéure , ſelon l'Aphoriſme qui die, que los
fiéures qui ſuruiennent aux tumeurs des glandules , ſont toutes malignes, excepté
les diaires. Lequel Aphoriſme doit eſtre bien entendu , & pris auec la diftin &tion de
Aphor.
liw.
55. Galien , diſant, cela s'entendre ſeulement des rumeurs qui viennent aux glandules
t.
Lans cauſe manifeſte .Carautrement les fiéures qui en ſuruiennent, ne ſont touſiours
dangereuſes,comme nous voyons par les bubons qui ſurviennent ſouvent aux en
fans, & par les bubons venericns,qui ſontſans inflammation, ou corruption de foye:
car tels ſont ordinairement ſans fiéure dangereule : aduertiſſeinenc que doit bien
norer le icune Chirurgien.
Les ſignes communs de la fiéure diaire , ſonr chaleur douce , haliteuſc, & fuaue à
l'accouchement, le pouls viſte & frcquent, quelquesfois grand & fort, comnie fila
diaire eſt cauſée de courroux:autresfois pecite, ſielle cft cauſée de faſcherie, triſteſſe,
faim ,froid ,crudité,au reſte égal & bien reglé. D
Les lignes tres- certains de lafiéure diaire ſont, ſi la fićure eſt ſuruenuë non lente
Sigues de la ment & peu à peu, mais ſubitement & inopinément de quelque cauſe externe & eui.
fičare diai- dente , ſans que le malade ait eſté premierement degouſté ſans auoir lenty lallitude
ſpontanée, c'eſt à dire,venuë ſanscauſe manifeſte, laps oſcication ou baaillement : ſi
le malade eſt ſans grande douleur , ſans iactation de corps, ou inquietude , ſans hóc
reur ou friſſon ,fansprofond ſommeil:bref,ſansaucun faſcheux ſymptome.
Lafiéure diaire n'ayant de la propre nature qu'vn accez d'un ſeul iour : comme
nous auons dit : neantmoins quelquesfois elle s'eſtend iuſques à deux ,trois, voire
quatre iours. Et alors ſe change aiſément en fleure putride, ſi quelque erreur ſe
Des filures commer par le malade ou le Medecin , ou quelque choſe exterieure. Elle ſe termine
Synoches
ou parinſenſible tranſpiration, ou par moiteur , ou par vnc ſueur naturelle , douce &
non putri. no
des.
n feride.
Signes de la Les fiéures Synoches'non putrides,s'engendrent de ſang non corrompu, mais ſeu.
filure Sy- lemēcéchaufécoutre meſure,faiſantgrádc euaporation partout le corps.D'où vient
noche, non que les veines ſe monftrent enflécs,la face enfambée,les yeux rouges & ardás ,l'expi
puerideration chaude , toute l'habitude du corps humide :lc touc à raiſon del'ebullition da
lang
Des Tumeurs en general. 259
A fang,&deſdiđes vapeurs,quieſt cauſeque celle fiéure quelquesfoiseſtappellecHu.
morale. Les petits enfansy lont ſubiects, comme auſſitoute perſonneſanguine ſans
cacochymic. La façon de guarir celle ficure,elt ſemblable à la cure de la fićure diaire.
Parquoy ce que nous dirons de l'vne,ſe pourra accommoder à l'autre : ſinon que la
ſaigoce eſticy bien requiſe.
Ďoncqueslacure delafićure diaire conſiſte en lvſagede fix choſes non naturelles CNtation de
contrariás à la cauſc originale du mal. Les bains d'eau tiede& naturelle fonctres- vti- la fémre
les, pourucu que le malade neſoitpoint plechorique, plein d'excrcmens, ou autre. diaire,
menc fubic&t à catarrhes & dcAuxions , parce qu'en liquefiantles humeurs , ou relala
chanc,ilpourroit exciter ou augmenter le catarre: Parquoy en tel accidenton euite
rales friàtions & on&ions d'huile tiede : leſquelles toutesfois en la fiéure diaire font
aucremene fore veiles , principalement quand elle eſt cauſee par trauail excellf, par
aftri & ion des pores, & par le bubon, Aureſte que ceſte regle loic generale d'oppoſer
à chacune caaſe d'où ceſtefićure aura eſté excitee, ſon cõrraire pour remede:comme
au trauaille repos,aux veillesle dormir , à la colere & faſcheric choſes plaiſantes,pro.
B pos ivyeux & recreatifs,au bubon la curation d'iceluy.Levin mediocrement trempé,
Ielon la couſtume du malade , eſt vtile à coutes les cauſes dela fiéure diaire , excepce
quand il y aura douleur deteſte ,quand elle ſera excitee de courroux & d'vn bubon.
Car en ce dernier cas principalement faudra du tout retrancher le vin , tant que l'in
fiammation ayant paſſé ſon eſtat,ſoit en la declinaiſon. Ceſte ſorte de fiévre trauaille
aſſez ſouvent les petits enfans. Lorsdonc leurs nourrices doiuent eſtre penſces com
me ſi elles meſmes auoientia fićure, afin de rendre leur laid medicamenceux. Il ſera Pour les pea
auſli bon debaignerl'enfant: & apres le bain ,loindre d'huile violac le long del'eſpine tits enfans.
du dos & poitrine.
Que lilephlegmon eſt en vnepartieinterne ou fort grand , ou voiſin de quelque
partienoble, de ſorte qu'il puiſſe enuoyer de ſoy continuellementau cæur quelque Des fróures
e portion & vapeur de la ſubſtancepourrie, & non par la ſeule qualité dechaleur córre Synoches
C nature, par continuation des parties de l'vne l'autre,il fera l'eſpece de fićure que nous parrides
dilons Synoche putride , li le ſang qui par contagion ſe pourrit dans les grands vaiſ
ſcaux,eſt composéd'égalemeſlange & permiſtiõdes quatre humcurs. Ceſte fićurc ſe Signesdela
cognoiſt à ce qu'elle n'a aucune remiſſion ou exacerbacion , encores moins d'inter- filure Symo.
milion. Elletientle febricitantoutreles vinge-quatre heures,ne finiſſantpointlorscheputrides
àlamode des intermittétes parvomiſſemens,ſueurs,oumoiteurs,ou peu à peu inſen
liblement,maisperfeuerant, dure iuſquesàce qu'elle ſe termine & quitte du tout le
malade. Elle ne ſurpréd ſinon ceux qui ſont de bonne nature,en temperament & cố.
plexió,abondansen bcaucoup de ſang,& iceluy iuſtemēt mellé des quatre humeurs.
Celte fićure eſt de peu de durce :d'autant que le ſang par ſapourriture degenerant en Curation
bilc ou melácholie,fait incontinêr yncaucre eſpece de fićure,ſçauoir tierce ou quarre de la fieure
continuès. La curacion de ceſte fićure ( ſelon que i'ay appris des bons Medecins)con- Synochepar
filte premierementen phlebotomie. Car le ſang eſtanc tiré,la plenitudeeſt oſtee: doc trides
s'enſuit que l'obſtruction ſoit colluë,& par conſequentlapourriture.Orcomme ainſi
)
D loit qu'en ceſte fiéureil n'y ait pointſeulementvice de la maciere par la pourriture du
ſang,maisaulli de la temperature par l'excez de chaleur: certes la phlebotomie nere .
medic pas ſeulement à la pourriture,commenousauons dit, mais auſſi à l'intemperie
chaude. Car le ſang (auquel conſiſte toutela chaleur ) eſtant tiré, enſemble auecques
luy les excremens acres & fuligineux s'exhalēt,qui retenus augmentoienc l'ardeur de
la fieure.Ecoutre,en lieu du ſang cuacué, les veines attirent beaucoup d'air froid pour
la fuitede vacuitéque nature abhorre,dont s'enſuit rafraichiſſement de toute l'habi.
cude du corps. Melmeà pluſieurs par le benefice de laphlebotomie le ventre s'ouure,
& les ſueursſortentabondamment , choſes fort deſirables en ceſte eſpece de fićure.
Cequiaeſmeu quelquesvns, à dire qu'ilfalloit icy ſaigner iuſques à lipothymic.
Toucesfoisd'autantque pluſieurs parce moyen ont auec lelang rendu l'ame entro
lesmainsdes Medecins,ie ferois pluſtoft d'aduis , aduenant le cas que le malade cuſt
beſoin degrande cuacuació de ſang,de partir icelle euacuacion, oftant du ſang par in
teruallestantque les forces du malade le pourrótporter.La phlebotomic ainſi deuč.
mentfaiđe,il faudra incontinent donner vn clyftere remollienc, & moderément ra.
freſchiſſant.Carceuxquirafreſchiſſenterop,aſtreignene pluſtoſ le ventre qu'ilsne le *
laſchent.Lelendemain faudra par vn legermedicament de Caſſe ou de Catholicum ,
Z2
260 Lefeptieſmeliure
faire minoration de la matiere. En apresordonner ſyrops, qui ayent non ſeulement A
force de rafreſchir,mais auſls de reſiſter à la pourriture. Tels ſontceluy de limons, de
Berberis, l'acereux,de acerofitate citri,de granatis,oxylaccbar ſimple: auſquels il fau
dra meller des eaux de pareille vertu, come de l'eau d'ozeille, deroſes ,& lemblables,
Le viure en tout ſoit rafreſchiſſant & humc&ant , au reſte cenu , pour la pluſpart de
boüillons de poullets,de chair de veau,alterez aucc ozcille, laiētuë & pourpić, & fc
mences froides. Car la chaleur naturelle ayanceſté fort amoindric par la grande
phlebotomie, ne pourroit cuire beaucoupde viáde.Lebruuage ſoiteau d'orge,fyrop
violar,deftrempéaucc beaucoup d'eau,iulep roſac,dir autrement Alexandrin ,ſi prin
quatrieſme iour; car ſi l'on apparoiſt quelques lignes de conco &tion,la criſe ſe ferale
Rolul
Alexan . cipalement il ſurucnoit quelque grand flux de ventre. Sur toutilfaudra obſeruer le
dsins font ſeptieſme,quelquesfois par vomiſſement, flux de ventre,vrines ſueurs,mais plus ſou
Synonymes. uent par hemorrhagie. Ec lors ne faudra rien řemyer dauantage,ainslaiſſer Nature
faire con devoit ſelon le chemin qu'elle aura pris, Gal. liu. 9.de la Mechode , chap. s.
ordonne de boire grande quantité d'eau froide au plus fort de la ficure ardante & des
fićures ſynoches:telle choſe profice, & amolliſt la chaleurfebrile, comme quand on B
icccc force eau au feu pour l'eſteindre:coutesfois il n'en faudra donner au malade, que
premierement on ne voye les ſignes de concoction , ineſme ſur la declinaiſon ne fera
hors dc propos donner du vin pour eſmouuoir les ſueurs.
De l'Eryſipelas. CHAP. XII.
PR ES auoir traiêté des Tumeurs , qui ſont engendrecs de ſang na
curel , il faut maintenant que nous parlions de celles qui ſont faictes de
cholere , pour la grande affinité qu'elle a auecques iceluy ſang. Or
les tumeurs qui ſont engendrees de cet humeur colerique naturel, lont
nommees des anciens Eryſipelata ,qui eſt une inflammation fort ardente, laquel
Definition, le principalement occupe le cuir , & quelquesfois quelque partie & portion de
d'Erappele la chair fubiecte , eſtant fait deſang,qui eſt de cenuë fubftance (Icquel par ſon
1:14.dela ebullition ſc tourne facilement en cholere ) ou de fang & cholere plus chaudsqu'il c
Merbo e n'eſt requis, & quelquesfois de cholere mence parmy quelquefanic aqueuſe. Cc
2.aGlaucõ.luy qui eſt faict de vraye & pure cholerc eft appellé de Galien vray & exquis. Et
Galien 2. quand la cholere eſt meſlee avecques les aůtres humeurs,elle fait trois cfpeces ou HY

a Glancon. differences d'Eryſipele : comme ſi elle eſt meſlee & en plus grande quantité auec
ques le fang, ſera appellé Eryſipelas phlegmonodes : fi auec la picuite, Eryſipelas Oede
matodes: fi auec la melancholie, Eryſipelas ſcirrhodes : de ſorte que le premiernom 8
ſubſtantif ſignifiera couſiours l'humeur fuperabondát:le ſecond & adic&tif, l'humeur
Trois dir qui eſtmellé en moindre quantité. Auſſi les humeurs eſtans proportionncz enſem 10

ferences d' ble & en melme quanciré,ferontEryſipelasphlegmon, Eryſipelasædeme,Eryſipelas


Erzſipel: ſcirrhe. Galien en faic deux differences, vn ſans vlcere,& l'autre auec vlceration.Car
lors que la cholere eſt reparee du ſang, pour ſa ſubtilicé venantau cuir , elle faict l'vl.
cere : mais eſtant meſlce auec le ſang , quiluy eſt comme vn frein , elle l'engarde de
Autre dif. paruenir iuſques àla ſuperficie, & fait pluſtoſt tumeur qu’vlcere. De la cholcrenon
ference. naturelle , pareillement ſont engendrces pluſieurs cípecesde tumeurs , commeherpes D
exedens,miliaris ,& brieftoutes tumeurs & vlceres,c @ pris depuis herpés iuſqu'au chā.
Gal. 14 . cre , comme nous auons dic cy.delos. Les ſignes d'Eryſipelas ſontcognuspar trois
Met. principaux poin&s : premierement par la couleur qui eſt rouge, tendance à couleur
Signes d'E . cicrincou iaunaſtre:laquellecouleur s'eſuanojiit ſi toſt qu'on la preſſe du doigt,qui ſe
tyſipelas. fait à cauſe de la ſubtilité de la matiere , qui conſiſte plus au cuir qu'on autre partic,
Gil.2. à d'autaneque la matiere n'eſt point contenuë au profond , & parcant eſt appellec d'au
Glauc.
cunes des anciens paſſion de cuir:tiercemét ,pour les accidens:comme chaleur, pulla
Auicenne. tion & douleur. L'eryſipele eſt beaucoup pluschaudque le phlegmon,d'autant que
la manicre eſt plus chaude & ſubtile:auſſi la pulſation n'eſt fi vchemente, pource que
les parties ne ſont comprimees comme en phlegmon , & qu'il n'y a ſigrande obſtru
&tion pour la maricre, qui n'eſt en ſigrande quárice:auſſipour la ſubtilité ſe refoule fa .
cilement,& ne demeure cachee. Dauantage la douleur n'est ſemblable:car celle d'E
ryſipelas eſtpoignante & mordicáteſans aucune cenſió ne pelanceur. Les cauſes ſont
ſemblables à celles de plegmon , à ſçauoir primitiucs,antecedentes, & conjoin

D
Des Tumeurs en General. 261
tes. Ceſte tumeur,iaçoitqu'elle puiſſe aduenir à chaſque partie,touresfois principa
A lement occupe la face pour la rarité d'icelle , & fubtilité de la cholere. S'il ſuruient Cauſes d'E ;
Erylipelas aux playes & vlceres,c'eſt mauuais ſigne. Semblablement s'il vient à lup- ryſipele.
puration:car ildemonſtre qu'il y a quelquc obftru & ion, à caule de quelque humeur Prognoftic.
grosmelle auec ladite cholere , dont s'enſuit corroſion aux parties qui ſontſous le Hipp.liu.7
cuir, l'Eryſipelas le plus ſouuent ſe terminc par reſolution Quand ilretourne du de apho.19,
Hip.biu.6.
dans au dehors, c'el bon ſigne:mais aucontraire, quand ilretourne du dehors au de apho.25.
dans, c'eſt mauuais ſigne. Semblablements’il furuient Eryſipelas à la macrice , c'eſt lines:
cholc mortelle. Il eſt auſli dangereux , s'il occupe la face en grandequantité,à cau. aph. 43
fe qu'il communique auec les membranes du cerucau.
De la cure d'Eryſipelas. CH A P. XIII .

B
OV R la curation de l'Eryſipelas nous devons auoir deux in Gal. 14 .
Lentions , à ſçauoir vacuation , & refrigeration. Mais d'autant mel .
qu'ily a plus de beſoin de refrigerer pour la grande ardeur,
qu'en phlegmon , noſtre principal but lera de refrigerer: ce qu' Premier.
ayant fait, la maciere contenuë fera oftce par reſolutifs medio.
cres, & pource nous aurons quatre poinas principaux à confi.Jerepes
derer. Le premier conſiſte à la maniere de viure qui ſera froi. Second .
de , humide & incraſſante : qui ſe fera par les fix choſesnon naturelles, rendantes
à frigidité & humidité, plus toutesfois qu'en phlegmon. Le ſecond poin &t confi
fte à l'cuacuation de la matiere antecedente, ce quiſe fera par la phlebotomic, Gales,met
2. Ad,
& par medicamens cholagogues : comme ſi l'Eryſipelas eſt à laface, & s'il occupe Glana
grandement icelle ,la phlebotomie ſera faicte de la veine cephalique. Sembla
blement convient la phlebotomie s'ily a quelque portion de langmellé avecques
ladiđe cholere : mais s'il eſt en autre partic, & qu'il ne loic en grande quantité,
C ou qu'il ſoit fait de pure cholere , la phlebotomie n'eſt peceſſaire , veu que le ſang
eſt frein de cholere , lequel pourroit eſtre euacué par icelle phlebotomic , dont la Ga.com.at
malice de l'humeur cholerique ſeroit augmentée. Mais s'il y a repletion au corps,fc-l'aph.is.de
C
ra fortexpedient de tirer du lang,d'aucant que ſouuentesfois telleplethoreou reple. boliure.
tion eſt cauted'Eryſipele,commcnousmonſtre Galien. Ordeuant que ce faire, fera Troifiſme
ſcope.
bon & expedient donner vn clyftere remollient & refrigeranc. Quant aux medi Gal. lin.de
camens cholagogues , comme apozemes & potions , ſeront ordonnees par le prudenc compoſimea
& do&e medecin. Le troiſeſme poinct s'accomplira par medicamenstopiques , lel- dicament.
quels ſeront au commencement & augment froids & humides, & non fecs neaſtrin- Hipp.apho.
gens, dautant que la maciereeſtant acre & boüilláre,pourroitpour leur aftrictióeſtre 2.1.6.
repouſſee au dedás, qui vlcereroit & corroderoit la partie. Galien & Auicéne loitent Remedes
grandement ce remede.21.aquæ frigid. Z vi.aceti opr. z. i. fiac oxycrat. auquel crepe. les
propte
Eryspour
ipe
rez des cópreſſes,puisſerót appliquees deſſus & autour la partie,& renouuellecs fou. las.
uent:ou bien tu vleras deceſtuy. 22.ſucc.ſolan.planta.& femp. ana.Z.ii. acetiz.B .mu
D cag.ſemin. phill.3. ii,ſucc.hyoſc.zi. miſce. Or li l’Eryſipelas eſtà la face,vſerez de cel
remede.22.vng.rolat Z.iii.ſucc.plant. & ſemper ana. Z.i.troſcic. de camph.z.B. aceti
parum , miſceantur fimul, & fiat linimentū.Ši la douleur & l'inflammation font live
hementes,qu'ellesne puiſſent eſtre ſupportees, faudra vſer de medicamens narcocia
ques:comme. 2. ſucc.hyoſch ,ſola cicat.ana.Z.i.alb.ouor,num. ii. acetiz. B.opii, &
camph.g.iiii.croci 3.B.mucag.ſeminispſillii & fænugr.extra & .in aqua roſar. & plan
taganai ioleide PaPau.3.11.jar liniment.addend. vng. refrig. Galeri,camph,quan
cum latis. Le Chirurgien ne doit continuer long terops tels medicamens, de peurde
fuffoquer lachaleur naturelle, & rendre la partie mortificc, comme auons couché,
parlans de phlegmon :par ainſi ſeront appliquees auec diſcretion ,à ſçauoir en téps & Gal. 14 .
licu. Ce que tu cognoiſtras par crois raiſons.La premiere eſt,quand le malade ne ſent met. Paul.
ligrandedouleur,ardeur,inAammationne punction. La ſeconde, quand tu cognois 19.4.chape 21 .
tanepar la vevë que par l'accouchement, la partie eſtre plus temperec que de couſtu
me. Latierce lors que la couleur rouge & jaunaſtre commence à changer en liuidité
& noirceur:adócſúbitcu deſiſteras d'appliquer tels medicamens, vſant de reſolutifs
& roboratifs,afin de cõforter & reuoquer la chaleur naturelle. Cõme. 24. farin,hord.
& orob.ana.z.i.far.ſeminislini.3.1.8.coquát.in hydromel.veloxycr.added.pul,rofar.
zij
262
Le feptieſme liure

Fomentario rub . & camomil.ana.3.B.olei anet. & camomill. ana.z.i. fiar catapl. Ou bien feras vne
А
fomencation qui s'enſuit 24. rad , akh , Z. ii . fol. mal. bilmal. pariet, ablinch . ſal . ana .
m.i.for.camoinil.melil.& roſar.rub.ana.m.ii.coquantur in æquis partib.vını& aquæ,
& fiat focus cum ſpongia. Apres laquelle appliquerez vne emplaftre de diachylon
ireatum , ou de diagalma diſſout en huile de camomille & melilot, ou autres ſembla
bles medicamens reſolutifs. Le quarrieſme poin & , qui eſt la corre &tion des accidens,
Quarrieſmae fe fera ainſi que nousauonsdit du Phlegmon , diuerfifiant les remcdes ainſi que le
scope.
Chirurgien verra eſtre neceſſaire.

Des Herpés. CH A P. XIV .

Definită de
Erpés eſt vne rumeur faire de la pure & fincerc cholere, ſeparec
Herpes.Ga
lien 2. & fequeftree des autres humeurs,laquelle pour ſa renuité s'elle.
Glauc. ue iulques à l'Epiderme , & occupe ſeulement la luperficie d'ice.
luy . Galičen fait crois eſpeces. Car ſi la pure cholere mediocre B
en ſubſtáce, c'eſt à dire ,nó groſſeny craſſc,eft caule d'icelie,lors
clt faict Herpes ſimpic ,retenant le nom du genre. Si l'humeur
n'eſt ſiſubtil , & eft accompagnéde quelque portion de pituite,
Care'de fait de pericesvellies au cuir en forme demillet, quiest caule que
Herpes. les ancies luy onc dönélenom de Herpes milliaris. Auſſi ſi auecque ia cholere quelque

porció de l'humeur melancholique y eltmellé, lors eſt engedré Herpesexedens, c'eſtà


direrongeant, corrodant , & vlcerát le cuir & la chair de deffus.Quant à la curation,le
Premier Chirurgien aura elgard à trois poin & s. Le premier eft, touchant la maniere de viure,
poinct. qui doit eſtreieinblable à celle qu'auons dit au chap . d Eryſipelas. Le lecond , cuacuer 7
Secondo la matiere antecedéte qui ſe fera auec medicamenspurgatifs , euacuans l'humeur pc
chant:à quoy faire les clyfteres ſeront quelquesfois ſuffiíans, li le ventre de ſoy eſt
mol , & li les vrines auſſi coulent facilemēr, d'aucant qu'auec icelles grande quantité
de cet humeur ſe purge.Le troiſieſme poina eſt, ofter la matiere conioincte, qui ſe C
fera par medicamenstopiques, ayancelgard à la tumeur , & à l'vlcere. Donc le Chi
Trusſieſme.
rurgie ſe propoſera double intention ,àſçauoir reſolution de la tumeur, & deſiccation
de l'úlcere . Car tout vlcere requierceſtre deſſeiché : ce quine peut eſtre accomply que
la tumeur ne ſoit oftce. Et pource que le Chirurgien doit clire atcensif à l'intention
principale, lanslaquelle l'autre ne peut eſtreoftce,compoſera & appliquera tel medi.
Remed's camcnc,lequel ſera reſolutif & deſiccatif.2.cerul.& tuth . præpar.ana.Z.i.olei rofar.
pour les & adip.capr.ana.z.i.cortic, pini víti & lociz . B.ceræ quantum ſatis, & fiac vnguentū.
Herpes. Autre.4 .Far.hord .& lenc.ana.zii.coquant.in decoct.core.malı gran balauft. plantag.
addendo pulu.rolar.rub.& abfinch.ana.z..B.olei myrtil. & meli.communis ana. 3.vi.
fiac-
medicamét,vearis eſt.Remedes pour l'Herpés miliaris.2.pul.gall.malic.balauſt.
boliarmé.ana.z.i.aqux rolar.Z.vii.aceci acerrim.z.i.axung .anſèris & olei myrtill.ana .
Alresta.
promenade 3.1.f.terebent.ž.1.fiae vnguen.ad vfum , l'ay pluſieurs foisexperimentelonguent enu
Auteur. latum cum mercurio ,où i'ay trouvégrand effect plusqu'à nulautre , parce qu'il mor
tifie les puftules , & conſomme l'humeur contenu en la partie .Et pour arreſter l'hu. D
meur qui chemine & corrode , tu vleras à l'vlcere & bords d'icelled'vn medicament
acre, comme au forte, ou huile de vitriol , ou autre ſemblable , & crouueras en celle
choſovn merueilleux cffect; ce que i'ay pluſieurs fois experimencé.
med

Des filures qui ſuruiennent anx tumeurs Eryſipelateuſes.


: CHA P. X V.

Omme aux tumeurs Phlegmoneuſes , auſſi aux Eryſipela


ccules , ſuruicnncne fićures quelquesfois , quiretiennent& fercl
ſentent de l'humeur duquel elles ſont exciices, ſçavoir de la bile
Pourquoy
ou cholere . Laquelle pource qu'elle a cela de propre d'auoir des
les fiéures
mouuemens de crois en trois iours :pour cela au ili aux grandsEry ,
quifuruien
Hent 40X ſipeles excite ſouucnc fićures cierces , qui ont leurs accés de deux

Eryſipelas iours l'vn . En general, les cauſes primitiues decelles fiéures ſont
fome tierces. grands & violens exercices,principalement co temps chaud, long víage des cho.
Les calefa &tiues & deliccatiucs,ſoientmedicamēs,ſoientalimens,exceſſiue abſtinence,
Des Tumeurs en general. 263
A
de manger & boircaucc trauail,ſoing,veilles,& faſcheries. Les cauſes antecedentes
ſontgrandeabondance d'humeurcholeric. La temperature de tout lecorps ou da Canfest
foyeículement,cendant à chaud & ſec. Les cauſes conioin &es ſont amas & putrefa
&tion d'humeurscholeriques , hors des grands vaiſſeaux , ou en toute l'habitude du
corps , communiquce & eſpanduë iulquesau cour. Leslignesſont horreur ,commesigness
quand en Hyuer apres auoir vrinc on creſlauc.Rigucurfoste & poignante , comme ſi
l'on ſentoit quelque choſe aiguëqui poigniſt par tout le corps , à cauſe del'acrimonic
del'humeur bilieux,poufle & porté violemment au commencemét de l'accez , par les
membranes & corps ſenſibles. Dés le commencement chaleur acre, le feu eſtantalo
lumé comme en bois ſec. Pouls grandement elleuć, lubit, egal,ficcité de langue , vri
ncrouge,enflambcc ſouuenttenue & ſubcile. Les accidens ſontveilles , coif, delires Accidens.
ou relucrics,promptitude à ire pour legere occaſion,comme pour ouyrparler, ou au
tre pecic bruit,eſmotion de tout le corps & inquietude . Ceſte fiéureaflaut plus cou
ſtumierement les hommes choleriques,iauncs,maigres, & en Efé.Elle te termine or.
B dinairement pargrandes ſueurs,ou par vomiſſemēs bilicux,ou deicationsiaunes, qui
meſme terminent ſouvent les accés particuliers. Elle a l'intermillion pure , fans au
cún ligne ou reliqua de fiéure iuſques à tant que l'accez ſuiuant reprenne: à caú .
ſe quela matiere bilieuſe qui donne l'accez ,aeſté par la concuffion d'iceluy route dil.
fipee,à raiſon de la tenuité & ſubcilité. Ce qui n'aduient és fićures quotidiēnes : d’au.
cape qu'elles laiſſent couſiours quelque inegalité, moleſtie, & pelanceur de corps à
cauſe de la peſanteur & tardiueté de la picuitc, qui ne peut eſtre ducout reſoluc & di.
gerec.L'accésdure 4.5.6.8.11.12.quelquesfois 15.& 18 ,hçures.Siceſte fićure eſt exqui.
fe, c'eſt à dire vraye tierce,elle finic au ieprieſme accez,comme dit Hippocrates en l'a
phoriſme 59. au 4.liure. Au reſte elle eſt ſans dáger comme generalement toute fié
ure intermittente par l'Aphoriſme 43. du meimeliure: pourucu qu'il ne ſoit commis
crreur parlemedecin ou malade . La fiéure tierce en Eſté eſt courte , & en Hyuer plus
longue. Lccommencement eſt auec rigueur,l'eſtat & declinaiſon auec ſueur. Sien la
fiéure tierce ſurviennent vlceres au nez , ou à la bouche , ou aux leures , c'eſt ſigne de Que fignio
bricfue terminaiſon.Car par cel accident e& monftree la force de nature,qui peut jet- fient les olo
C terla matiere febrifique du centre ou interieur du corps, en l'exterieur. Eten outre, ceresde la
par ce moyen ſe fait euacuation de quelque portion de la matiere conjoinde. Telles bouche aux
vlceres toutesfois n'apparoiſſent pasen la declinaiſon de toute fićuro tierce,maisſeu- féurestier,
lemër en celles deſquelles la bile cauſede celle fiéure)eſtcõrenucou pouſſee de quelle et lew
queautre partie delapremiere region dás le vétricule. Car de la pluscenuë & ſereuſe caufe.
portion d'icelle,portce par la continuité de la tunique interieure dudit ventricule à la
bouche & aux lévres,s'excitét aiſémenc vlceres.La curation cõſiſte en la diete , & aux Cwrea
medicamens.Le regime foic ordonné ſur les ſix chofes non naturelles, declinantes à Dietc és fiés
froideur & humidité leplus qu'il ſera poſſible:d'autant que l'humeur bilicux qui faict ures sierce
ceſte fićure,eſtle plus chaud & ſec que cout autre humeur du corps. Il faut donc que Viandes.
le malade inſpire air frais & humide,mange choſes refrigerances & humc&tantes, en
tant qu'illes pourra cuire,commclaictue , ozeille, courge, concombre ,poiree , orge Vin .
7 mondé,vin bien trempé, perit, tenu,& en petite quantité,& celors ſeulemer que l'hu
meur aura commencé à fe cuire, mitifier ou addoucir: car au commencement il n'en Temps de
faut aucunemene vſer.Mais en declinaiſon,il ſera permis d'en yſer plus liberalement, nouvrir le
D pourueu toutesfois qu'il ne ſoitny fort,ny vieil.Quant au temps propre pour nourrir malade.
lemalade,ilſe faur donnergarde le jour de l'accés luy bailler àmanger plus tard que
troisheures auant ledic accés: de peur que la chaleur febrile rencontrant les viandes En quel cas
encores crues enl'eſtomach,nc lescorrompe,putrefie & tourne en humeurbilieux, nourrir
leppermis,
augmentant par ce moyenla matieredela fićure,prolongeantl'accès,& en outre rede
voquantoaçure delacoco &tion & 'expulſion del'humeur morbifique,pour s'emplo. meſmeen
yeràcuireles viandes priſes.Et toutesfois ceſteregle ſe doit entendre,pourucu que la l'accez.
vertu ſoit forte.Caroù le malade ſeroit debile,faudroitnon ſeulementdonner nour. Medicamės
riturevn peu parauant l'accés, mais auſſi en l'accés meſme,cõbien qu'en petite quan. Quand og
cité. Quant aux medicamens , il faut preuoir ſi la vertu dumaladeeftfuffiſante, & li pourquoyne
les humours ſontfurieux & mobiles .Alors faut ordonner du Diaprunum ſimple,cal.Jarguer
ſefreſchement mundee,deco &tion de violes,myrobalás cicrins,fyropsviolat,degre- beaucoup.
nades,oxyſacchar.Autrementli les forces du malade lont perices , ne faut purger ne
ſaigner quebien pecitement : de peur que la dilipation des eſprits ( à laquelle lesbi.
z iij
264
Vingt-feptieſmeliure

Clyftere cõ. lieux ſont ſubiects)n'induiſe ſyncope. Semblablement ſoient faicts clyfteres de deco. A
trele delive. &tion de pruncs,iuiubes, violes,ſon orge.Sile malade par reſiccation du cerueau tom
boit en delire, qu'on luy rafraichiſſe la teſte auec huile violat, rolat, & autres ſembla
bles. Les pieds & cuiſſes ſoient mis en eau tiede & douce, la plāte des pieds ſoit oinac
Bain .
auccques huyle violar , ou ſemblable. En la declinaiſon generale de la fiéure , eſt bon
faire bain d'eau douce , auccques fueilles de vigne,laictues, & aucres refrigerans, & cc
loin d'vo leger repas . Meſme l'humeur ja cuit & mitific, les purgations generales
Vrilité des ayans procedé , fera bon provoquer les ſueurs par l'vſage de vin blanc , bien tenu &
fueurs és trempé.Vrayement les lycues en couce fićure putridelone bonnes quand elles vien .
focuses fw- nent en temps & lieu : pource qu'elles cuacuent les matieres conioinctes de la mala
dorifiques. die. Mais ſur couc en la fieure tierce : d'autant que cel humeur ſe relour aisément
en ſucurs pour la cenuité . Pour ayder à la ſueur, lera bon avecques le vin blanc men .
tionné , prendre decoction de figues, rafins de damas mondez,chiendenc & autres
racines aperitiues . Par delors ont prend elponges imbues en la deco & tion d'herbes
chaudes, commeroſmarin , tym , lauande, mariolaine ', & autres , elpreintes & appli
quees chaudement aux aines,aiffelles,encre eſpaule du malade , lenu couuert en fon B
Diuretic lią .Autresrempliffenc à demydes velfies de porc , decelie deco &tion , les appliquent
ques. aux coſtez & entre les iambes, comme aux pieds , des bouceilles decerre remplies de
Temps de meſme . On doit ceſſer de faire ſuer, lors que la ſueur commence à ſe refroidir xur le
la Sargne •malade. Les vrines te provoqueront par deco &tion de fenoüil & d'aner . La fa : gnec
doic eltre faite non apres le tiers accés , mais dés le commenceinent comme le com
mande Galien.Carcomme ainſi ſoic quęceſte fieure ſe rermine en ceft accés(ſielle eſt
vnc rierce , comme nous avons dic )qui attendra apres le crers accés , il ſaignera lors que
Aph. 29. la fiéure ſera en ſon eſtat. Or Hippocrates defend de ne rien movuoir en l'eſtat , de
lin . 2.
crainte de deſbaucher nature de la conco & ion & mjcification qu'elle veut faire de
l'humeur qui cauſe la fiéure. .
C
De l'Oedeme. CH AP. XVI.

AR dy - dewant nous auons traiêté des tumeurs chaudes : reſte

maintenant à clcrire des froides ,qui ſont deux en general , à lça

Aph. os . voir Oedeme , & Scirrhe. Or le nom d'Oedenie eſt pris ſelon
liu. 5 . les anciens , comme Hippocrates , pour toute tumeur , occupano
Definition le nom de genre. Mais les modernes le prennent plus eftroittc
d'Oedeme.
ment , à çauoir pour eſpece. Doncques Oedeme eſt vne que
Gil. de ra .
e plegmatique , combani ſus
14. Me mcur mollc , laxe, ſans douleur , procedant d'humeur
th. & 2.4d quelque parcie. Les anciens ont fai & hui&t differences decumeursengendreesde
Glanc. , phlegme. La premiere eſt le yray Oedeme, faic de phlegme naturel . Er dunon na .
Difference curel mellé auecques les autres humeurs , ſe font crois autres eſpeces : comme s'il eſt
d'ocdeme. auecques le ſang,lera faict:Oedema phlegmonodes, & ainſi des autres . Dauantage le
phlegme non naturel,eſtou facueux & vaporeux, & engendre la tumeurventeuſe:
ou a queux , & fair l’aqueuſe: ainfi le gros & gypſeux fait les tumeurs noueuſes & D
‫ܐ‬e
phlegmaciques , comme lont ntheromata , Siestornata & Melicerides : ſemblablement
le phlegme corrompu & pourry , les ſcrophules dietes couftumierement eſcroüel
les. Pour comprendre toutes leſquelles eſpeces d'Oedeme methodiquement ,
fauc noter que la picuire , dont ſe faic cumeur , eit ou naturelle , peçhanc ſeulement
en quantité , dont fe fait ce que proprement nous appellons Oedeme : ou eſt
non naturelle , ainscorrompuë. Orelle ſe corrompe ou par mellange de ſubſtance
cſtrange, comme ſang, bile , & melancholie , dont le font les trois eſpeces d'Oedeme
cxpliquez ; ou par pourriture de ſa propre ſubſtance, dont ſe font les ftrumes & ef
crouelles: ou par concretion ,dont ſe fonc les glandules , & toutes ſortes de loupes &
nodoſitez;ou par reſolution ,dontſe font les tumeursaqueux & Matueux , commel'hy
Caufes d - drocele,pneumatocele, & coure ſorte d'hydropiſic, ſçauoir la picuite amaſſeeen cer
Signes d ". tain lieu eſtant reſoluc , amplifice & eſtendue en eaux, ſerofitez ou vendoſicez. Les
Oedeme. caules ſont fluxion d'humeur picuiteux , ou vaporeux , ou vn amas d'excremens
phlegmatiques ou véreux,amaſſez en quelque parcie , à raiſon de l'imbccillité de cuiro
l'alimét ,& chaffer les excremens.Les ſignes Tone couleur bláchaftre, ſemblable au cuir
ne les changeát beaucoup , à cauſe que l'humeur cft ſemblable en couleur , cumeur
Des Tumeurs en general. 265
mollerare,laxe pour lagráde humidité,ſansdouleur,à raisó quel'humeurn'eſtchaud
A ne ferucne,comme en Phlegmon, laquelle enfonce ſi elle eſt comprimee du doigt , la
parcie demeurác caue,laiſſantle veſtige dudit doigt,parcequel'humeur eſt gros,cras,Progrolic.
& de card mouuemenc.kceux Oedenies viễnent plultoft eu Hyuer qu'on Efte:car lors
il s'amaſſe grande quantité de picuite. Les parties nerueuſes & glanduleuſes ſont plus
ſuiccces à telles indiſpoſicions, d'autant qu'elles ſontexangues, ayās moins de chaleuc
que les autres:pareillement plus laxes & aptes à receuoir la Auxion. Les corps caco
chymes,crapuleux & vieils, & qui font peu d'exercice,lonccouſtumieremēc vexez de
· telles cumcurs.Orl'Ocdeme eſt terminé par relolution ou induration le plus ſouuét;
.

& ratenienc par ſuppuration,pourla pecite quantité de chaleur qui y demeure. Celuý
quiclt ſymprome,commed'hydropiſie ou phtiſie,ne reçoit aucune curacion , ſi pre
micrement la maladic, quieſt la cauſe , n'eſt oſtee. La curation generale conſiſte en Premieyt
deux poincts,à ſçauoir à l'euacuation de la matiere antecedente,& de la conionte:ce Int( nilom
que nous obtiendros par quatre intētions. La premiere s'accõplira par bõne maniere
3
de viure,& le moyen deſix choſes non naturelles contrarians à la maladie,qui eſt froi.
de & humide,& pource cendrontà chaleur & ficcité. Donc il ellira l'air chaud , lec
& ſubtil.Son boire ſera de bon vin gracieux & delicat : ſon pain ſera bien cuict ,man
B gera viandes quiengendreront bon ſuc,& pluſtoſt roſties que bouillies:il s'abſtiendra
defruicts,potages,& de toutes choſes faices de laid,lelquelles engendrée mauuais hus
meurs,iln'vſera de poiſſons, ſinon de ſaxatiles :ceſt à dire, ceux quiviuenc entre les I

pierres & graviers:ilmangera peu , & boira le moins qu'il pourra,craignant d'engen
drer crudiecz.Al'iſſuë de les repas,ilpourra vſer des pouldres digellives,ou de dragee
commune:ſon ventreſeta couſiours laſche, & s'il ne l'eft nacurellemér , le ſera par are.
Il s'exercera moderément & principalement deuát le repas,afin de difliper touſiours
quelque portion de cec humeur, & d'exciter la chaleur naturelle.Il dormira peu , àfin
de n'accumuler par le troplong dormir grande quanticé d'excremens. Ilneprendra
aucun chagrin ,& fuira la compagnie des femmes,tant que faire pourra , s'ila le corps
imbecille,foible & maladif de nacure:car par l'exercice venerien eſtant encores d'a
vantage debilicé & morfondu, ilamaſſe dauantage de cruditez : comme au contraire
s'il eſt fort de corps, de ferme & robuſte complexion,cel exercice moderément pris, &
с en temps& licu,l'eſchauffera davantage , & ſeichera ſes humiditez & cruditez : car
ainſi faut il encédre la reigle 23 d'Hipp.au 6.desEpidemies ſect.s.queVenuselt reme
de & guariſon aux maladies qui viennent de pituite,commel'expliquefortbien Ga. Seconde
lien.La ſeconde intention aura eſgard à l'habitude de tout le corps,ou de la partie quiontention,
ſera la ſource de cet humeur. Car s'il provient de l'eſtomach,ſera conforté :& ainſi des
autresparties.Side toute l'habitude du corps, on luy preſcrira medicamens accenųás,
inciſifs & aperitifs, & dece on aura recours au docteMedecin. La croiſieſme conſiſte
à l'euacuation de l'humeurimpact à la partie,cequi ſe fera par medicamens topiques, Tro fieſme
lequels ſeront diuerſifiez ſelon les quatre temps. Car au commencement & augmentintention .
Galien liurc 2.ad Glauc.chapitre 3.& 14.Meth.commanded'appliquer vn oxycrat a.
uccques vnc eſpongecrépee en iceluy: & fi l'Oedemc eſt à vn bras, ou à vne jambe,la
2 ligaturc cxpulliue eſt bienneceſſaire,en commençant de lapartie inferieure,finiſſant
àla ſuperieure. Ou bien on vlera detels medicamens. 21 lixiuii ex cinerib, ſarment.
& caul.an.ziij.cartar. & alum.añ.3l, acetizij.miſce omniafimul, & fiatdeco &tio : en
D laquelle ferastremper eſponges ou compreſſes, & en ſera fomentee la parcie. Aufli
pourras vſer de ce cataplaſme.2.farın ,hord. Ziiij.coquant. in lixiuio com.addendo
pul.nucis cupreſ.balauft.añ.zi.myr.aloës & alumi,añ .zß.oleimy tyll.Zij. fiat catapl.
En l'eſtat & declination on vſera des medicamens qui fonc deſiccarits & reſolucifs,
comme2.nuc.cuprel.cort gran.ſumach ,balauſt.añ.3j.laluix ,origa.calamér.hyllop.
meliſ.añ.ñ. j.abſinth.plantag.caud.equi.caplı barbar.centinod . an.in.s.alum, tars. {

& falis communis anzi.coquant.cum lixiuio,fiatfocus cuni ſpongia Apres la fomen


tation on appliquera cel cataplaſme.2.cad. Bryoniæ Zij.abline.plantag.centinod.ca
momill.melilot.puleg.añ.ñ.ß.coquantur in hydromedil.piſtent. paſſentur , adden
do pul.roſar.rubra.camomil.& melil.añ.3.far,fabar. & hord.añ.žı. olei anec. & ca
momil.añ. Zj. fiat cataplaſına,lequel ſera appliqué apresla fomentation.D'auantage
tu pourras vſer d'autresremedes reſolucifs,comme emplaſtres, & vngués ſelon tadil.
cretion. Toutesfois il faut premicremenceſchauffer lapartie, ſur laquelle on doit ap .
pliquertels romedes,comme par fomencations,frictions, & euaporations .Car autres
z iiij
268 Ľe ſeptieſme liure
Fomencas mét leſdites emplaſtres ne pourroiếteſtre reduites de puiſſance à effe&,pour la gráda
tion pour incemperature & froideurde la partie,laquellene peut cuirc,allimiler le nutrimentà A
confortes elle neceſſaire, & encore moins chaſſer l'humeur cõcenu en la parric .Lesfonétacions
la panic. ſe feront de deco&ió fait de ſauge,roſmarin ,thym ,lavāde,Acursde camomillc,meli
loc,roſes racines d'ireos,ftecas, &autres choſes ſemblables,cuittes en vin blác,adiou
ſtát vn peu de vinaigre,en laquelle deco & io ſerõt eſteinresbriques,puisenueloppees
auccques linges, & appliquees autour de la parcie.Card'icelles ſorc vne chaleur & van
peur,laquelle a vercu de iubcilier,attenucr,inciſer,reſoudre, & cõforcer ladire partie.
D'auantage en licu d'icelles on vſera de bouteilles ou veſſies debæuf,ou de porcàde
my réplies de la fuſdice deco&tion,leſquelles ſeront appliquees chaudes ſurla partie.
Friktions. Les fri&tions ſe feront auec linges chauds,continuant quelque temps: carelles rcuo
quent & attirent le ſang & les eſprits,reſoluant quelques humeurs fuligineuſes dece
nuës entre le cuir & la chair, dont la partie eſt rendue plus forte & vigourcuſe.
Des tumeurs venteufes & aqueuſes, CHA P. XX I.
Qus l'Oedeme ſont compris les tumeurs Aarucuſes ouventeu .
les, aqueuſes & dures , comme Atheromata , Steatomata ,& Meli. B
ceades. Les tumeurs flasucules ou venteufes ſont faitesd'vne va
peur flatueule,qui eſt aucunesfois encloſe ſous les membranes &
le cuir, & fouscelles qui couurent les 06, comine perioſte & pe
ricrane, quicaufc vnccxcreme douleur pour la diſtenſion:quel
quesfois les vilceres comme ventriculo & inteſtins en ſont rem
n!
piis,commcen timpanites,Ellesdifferec du vray Oedeme, d'au.
tant qu'eſtans preſſees auec le doigt,le veſtige n'y demeure,à cauſe qu'elles ſont rem
plies des vapeurs,& non d'humeurs, leſquels eſtans preſſez reuiennent, comme il ſe
veoit à vne balleou veſie remplie de vent.
Canſes des La caute de celle tumeurvenccuſe ,eſt pour l'imbecilité de la chaleur naturelle , la. C
IhmiCHTS quelle ne peut difiper& conſommer la matiere phlegmatique diſpoſec à exciter fia
repteuſes. cuofitez:ce qui nous eſt facile à cognoiſtre par le Soleil ( qui reſpond à noſtre chaleur
naturelleſſe leuant au matin,n'ayantſi grandeverto commeau mridy,ne peut außlfa
cilement conſommer les humiditez qu'il attire d'icy bas, comeil fait versle milieu du
iour:& pource s'eſcuent ſeulement des brouillards& vapeurs. Ainſi eſt de la chaleur
naturelle,laquelle taſchấtà conſommer la ſuſdite matiere par ſon imbecilité,n'y peut
grandemét agir, & pource,cauſe & cfleue ſeulementvn eſprit vaporeux, quicſtlama.
ricre d'inflation.D'auantage la denſité,profodité,& craſlitude de la partic,cauſe auſſi 200
telles tumeurs.Car iaçoic que la chaleurnaturelle ſoit forte,toutesfois l'humeureſtác
au profõd,oulespores eſtás reſſerrez,cec'humeur ne peucs'éuaporer, & par ainſi s'ac
Les fignes. cumule petità pecit,& engendre ceſte tumeur. Les lignes ſont,lors qu'on preſſe des
doigts ſus la tumeur,on ſene vne renitence eſtás repouſſez:parcillemér quad on frap 1993

pe deſſus,la partie reſonne,cīme ſi on frappoic ſus vn cabourin , & principalement s'il


y a grāde quácicé de vents,cõmc en la capacité du ventre, ou entre les grăds muſcles. D
D'auantage la tumeur n'eſt chaude ne rouge,mais pluſtoſt froide & blaffarde,comme
en l'Oedeme. Icelles occupent ſouuentesfois les jointures, & principalement les ge
noüils,& lont de difficile curation,comme dirons cy-apres . Si la ventofité ſe faict aux
Prognoftic. inteſtins,icelle cauſe voe colique venceuſe, qui fait quelquesfois vnetelic diſtenſion 0
pour ſa grande quantité,qu'ellerompt& deſchire les inteſtins, donc la mort s'enſuit.
Dela curedes Tumeurs venteuſes aqueuſes. CHAP. XVIII.
A curation ſe fera par trois poin &s principaux.Lepremier eſt touchát lama.
Premier niere deviure,quine ſera differente à celle de l'Oedeme.Le malade vſera de
ſcope tou bonnes viandes,facilesà digerer & de bon ſuc , pluſtoſt roſties que bouillies:
chãela ma.ſon boire ſera bien peu,& principalement de bon vin :ileuicera toutes choſes aqueu
Hiere de us
wre .
ſescomme fruiets,herbes & poiſſons. Laſecodeintention eſt de conforcer lesparties
Second Eco ſeruátes à la conco & io,à ſçauoir
l'eſtomach & foye:ce qui s'accóplira parchoſes aro
pe. matiques,cómcclc & uaires,cóſerues,opiates,poudres,come diacuminum ,diacalamen
Troipofme thum ,aromaticum garyophillatum ,aromaticūroſaii ,& autres,quc ie laiſſe au docte & pru
Scope. deat Medecin.Le troiſieſme ſcope ou intention ,eſt ofter la matiere coniointe:cc qui
>

Des Tumeursen general. 267


1

A fe fera per medicamens chauds,ſecs, & attenuatifs, qu'on nõme carminatifs,afin que
la partie ſoit rareficc, &l'humeur dillipé :coutesfois leront diuerſitiez ſelon la partie.
Carautres doiucnc eftre appliquez au ventricule & inteſtins,aucres aux joinctures &
parcies charneutes.Pour la colique on donne clyſteres carminatifs, & on applique Iça
chets reſolucifs,ſemblablement ventouſesſusl'vmbilic.Sila rumeur et à la partic ex
terne,nous vlons defomentations,linimés, & principalemét s'ily a quelque douleur,
auſſidecataplaſmes & emplaftres.Comme.4 .Aor.camomil,melil.roril.iol.rubranaRemedes
pour les 14
P.j.ablinch ,hyſſop.anam.ij.coquant.cum lixi.addend.aceti parum , pro foru cum meurs veri
ipongia.Gal.vſe d'vne fomentation deoxyrhodinum,y adioultant quelque portion senſeso
de lel,& en fomére la partie auec vne elponge,laquelle il laiſſe ſus icelle ,Aurre.4.olei
camom.apet.rutæ & lilior.ana 3j.olci lau.33. ceræ alb.zvi.aquæ vitæ 3j.liquefiát om.
nia limul,& fiat linim.quo liniatur pars præmiſſo focu.Z.far.tab . & orob.ana. ziij.co
quanc.in deco&o pulegij,orig.cala.laluiæ ,add.pul.camom .& melil.ana.33.(ulphu.vi
B uiſubrilicer pulueril.zij.oleianec.& camo.ana.zj.ß.fiat cata.Autre.2.Iterc. capr.benc
critur.3iij. flor.camom ,melilor,ana n./s.furfur.tar.fabar.& orob.ana zij.coquant.cú
Jixiuio comm.addend.cerebene.ziij.olcianet.& rutæ ana zij. fiae emplar.ad vſum di
&um . L'emplaftre de Vigo elt ſingulier pour cel effect, cum mercurio & fine mercu.
1 sio.llfauc noter que celsmedicamensdoivent touſiourseltretenus chauds par le mo.
yen de linges chauffez,ou briques rouges,ou bouteilles miſesautourde la partie ,com .
me auons die en l'Oedeme.
Apres auoit reſolut l'humeur contenu à la partie,il reſte à la fortifier,afin de ne plus
receuoir cel humeur,qui ſe fera par lemoyen d'une telle fomentation & cataplaſmc.
2 nucum cuprel.cortic.granat.Tumac.berber.balauit.ana.zj.caud. equiarnogl.capſi
barbat.abline.ſalu.roril.lauand,anań .B.camomil.melilot, roſar.anth.ana p.j.alum .
& falis cómunisana zi.bul.omnia in æquis partib, aquæ fabror. & vini auſteri, & fiác
ſacculipro focu,aur deco & io pro foru cum ſpongia . % .far.fab.hor. & lup.añ.zi;.careb,
comm zijj.pul.rad.ireos.malt.añ.3B.melliscomm.zij.C.predi&tæ deco & ionis quantú
latis, ve inde fiat cataplaſmaad formam pulcis ſatis liquidæ, applic.partib.affe&t.calid.
præmiſſo foru.Ec continuëtez ce medicament tant qu'il ſera beſoin .Quát à la tumeur 1

aqueuſe,les ſignes ſont ſemblables à ceux de la venteuſe.Ec d'abondár,eft reluiſante, De la tua


C & au catfai& vn bruict comme vne vellie à démy pleine d'eau .Quantà la curation,li meny 4
nous ne pouuons paruenir à la reſolucion ,on viendra à l'apercion ,comme auons trai. quenfe.
&ć au phlegmon,laquelle eſt icy quelquesfois neceſſaire,non ſeulement à raiſon de la
contumace del'humeur quin'obeye touſiours aux reſolucifs : mais auſli à cauſe quo
ſouuent ſe trouve enfermé en vn kyſtou membrane ,qui luy eſt propre, à raiſon de la
denſité de laquelle la force des reſolucifs ne peut penecreriuſques à l'humeur. Come
cesiours paſſez i'ay experimécé en l'hydrocele d'vne fille aagec de fix à ſept ans pour
laquelle reſoudre,ayanten vain experimenté par vn long temps tous les reſolutifs
que l'art m'auoic enſeigné,ie fusen fin concrainet veoir à l'ouuercure pour donner iſ
Sucàl'eau contenuë,enſemble accacher, & trácher la membrane qui concenoic ladite
cau,commepeut celmoigner Monſieur Hautin Docteur en Medecine , qui m'auoit
fai&t appeller pour l'execution.
D D'Atherome,Steatome & Meliceride. CH A P. XIX

Ombien que ces tumeurs ſoientdugenre des apoſtemes,toutesfois elle dif


ferent, parce que leur matiere eſt concenuë en vn kyſt ,c'eſt à dire,dedans vo
nemembrane ou petite bourſe.Auſſi la difference qu'il y a entre ces trois el
peces, eſt que l'humeur contenu dedans le Steatomic ( ainſi que ſon nom le
porte ) eſt vncmariere ſemblable à du fuif, & quelquesfois on y trouue des corps durs
& pierreux,& autresfois comme peciosos,& des ongles de coq. Philoxene dit y auoir
trouué des animaux ſemblables à des mouſches, & autreschoſes eſtranges. Et dans
l'Acheromceft crouué vn humeur ſemblable à bouillie qu'on faict manger aux petits
enfans : & dedans le meliceride , vn humeur ſemblable à du miel commun , en cou .
leur & conſiſtence.Cestumeurs ſe font ſans que nulle inflammation aye precede.On Lesfignes
les cognoiſtra les vnes des autres en ceſte maniere : c'eſt que le Steatome eſt plus dur defraico
queles deux autres,& a'obeic promptement aux doigts quand on preſſc deſtus, & les me.
/

1
268 Le ſeptieſmeliure
ayát oſtez mal-aiſémét auſli retourne,c'eſtà dire;ſc releuc à tard , parce quel'humeur A
eſt gros.Latumeur eſt de couleur sēblable à la peau & ſans douleur , la figure de la cu
Meliceride, meur eſt longue.Le Meliceride obeït & cede comevn corps laxe & mol:quand on le
couche ilſe diſperſe & dilate promptement,puisſubit retourne,& differeen figure &
tubſtance de l'Acherome,parce que la figure eſt plus ronde, & laſubſtáce de l'humeur
plus ſubtile, & d'auantageeſtcranſparence. Auſſi leMeliceride eſt plus large que l'A .
Atherome. chcrome, & fion la fouleauec lesdoigcs,plus loudain elle obeït, & apres les auoir oftez
aulli ſubit retourne,& eſt ſans douleur, & de figure ronde. Or quad à l'operation ma .

nuelle,iln'imporceli ſhumeur contenu eſt séblable àmiel,bouïllie ouſuif,ou de quel


Cure.
les eſſences elles ſoient. Car nous auons vne ſeule inçencion , qui eſt d'ofter l'humeur
contenu en la partie , enſemble la bourſe contenant ledit humeur. Toutesfois il faut
noçer,qu'aucuns deces cumeursſont elleuces ſuperficiellement, & quand on les tou
che, ſontmobiles:les autres au contraire ſontentees & infiltrees, & liees profonde ON

menc aux parties prochaines & fixes, ſans le pouuoir remuer de coſté ned'autre, &
celles requierenc grande diligence & dexterité à l'operation manuelle ,à cauſe du dan B
ger du flux de fang, & inciſion des nerfs.Il y a pluſieurs autres tumeurs contre nau: rador
re,comme Teſtudo,Nata,Glandula,Nodus,Botium ,Lupia ,(c'eſt loupe)& ſemblables:lef
quellesſontde meſmegenre que Atheroma,Steatoma,& Meliceris:car elles ſont toutes
engendrees d'humeurs pituiteux ,gros,& viſqueux.
Et comme en ces trois icy il ſe trouue de l'humeur ſemblable à bouillie,fuif , & miel:
ainſi és autres s'en trouue,non ſeulement de pareil , mais auſſi des corps qui ont bien
Teftude, forme plus eſtrange,comme nous dironscy apres. Or d'autant que les anciens n'ont
qu'eff-ce fait aucune mention de ces tumcurs,aumoinsſous cels noms, nous diros briefucméc
Talparia
Nafa . . ce que les modernes en ſentent commençansà Teſtudo,qu'ils diſent eſtre vne tumeur
contre nature molle & large, de la figure d'vne torruč, dont elle a pris le nom .Quel CE
quesfois ellevient en la teſte,dela figure d'une taupe,& lors fenomme Talparia.Nata,
Glandula. eft vncgrande excroiſſance charneuſe de la forme d'vn melon , ou comechair de fef.
ſes,dites,Rates en Latin, dór luy peut eſtre eſcheu le nom,li ce n'eſt qu'elle viễneaux
feffes,pluſtoſt qu'enautre membre. Glandula, eſt vne tumeur ainſi di&te,parce qu'elle C
reſſemble à vn gland,ou yne glande: ou parce qu'elle eſt plus ſouvent engendrec és
glandes des emunctoires.Quant aux ſcrophules, nousen parlerós au chapitreſuivát,
Nodus.
Nodus,eſt cumeur ronde,dure & immobile,ainſidice par fimilitude qu'il a d'vn næud
de corde.Guidon dit qu'il ſe trouue volontiers és lieux nerueux. Mais nous le prenos
auſſi communément,& improprement,pouryne comeurdurequi vient és os laquel
le eſt aſſez frequente aux verolez.
...‫ܐ‬
Des Loupes & autres ſemblables. CH A P. XX.

Vpia,ou Loupe, cft rumeur quelquesfois molle, aucunesfois dure, cooliours


Lupia. ronde, prenant naiſſance le plus ſouventės lieux durs,ſecs & nerueux. Or
de toutes ces tumeurs cy expliquees,les vncs fonc'grandes,lesautrespetites :
aucunes ſone mobiles & ſeparables d'auec la partic où elles font,parce qu'elles ont vn
Diuifion. Kyſtis ou ſachet : autres ſont immobiles , d'autant qu'elles n'ontpointde ſachet, ains
ſone infilcrees & attacheesen la partie d'où ils naiſſent. Coutumierement les Loupes
ont yn ſachet , & de la curation d'icellesnous entendons crai &ter maintenant , parce D lu

qu'elles ſont les plus difficiles à guarir , principalement eſtans inueterees. Leurs
cauſes primitiues ſontcoups orbes , cheutes de haut , deſtorles, & autres. Les ante.
cedences & conioin &tes,ſont celles que nous auons dites au commencement du cha
pitre precedent. Leurs ſignes doivent eſtre recueillis de leur deſcription . Pour la cu
ration de celles qui commencentencores à venir , & ſont petites , illes faut ſouuenc
frotter à tout la main. Cat par ce moyen on ſubrilie, eſchauffe, & fouuentreſoult -on
l'humeur quiy cſt contenu. Si cela n'y fait rien , faut preſſer deſſus auec la main , ou
auec vne pecite piece de bois , fi fort que le Kyſtis ſoit creué ou rompu. Quand ilſera
rompu , on appliquera vne lame de plomb , frotree de vif argent , & lice deſſusbien
eſtroitcement. Carelle a vnemerueilleuſe vertu de conſommer, reſoudre , & rarir
l'humeur contenu en quelque partie,comme ielay pluſieurs fois experimenté. Mais
li la Loupe eſtoit en lieu où on nepeult faire compreſſion , comme au viſage, au cho.
sax,au ventre àla gorge,on y mettra vn emplaftrereſolutif, tel qui s'enſuit. 2.gum.
Des Tumeursen general. 269
A miammon,bdel.galb.añ.3.iij.liquof.in aceto ,& paſſene per ſecaceum ,addédo ol.lil.
& lauri,ań.Z.j.aq.vitæ parú pulu.ircos, lalis ammo,ſulphur.yiui,vitrioli Romanzß.
incorporenturomnia fimul, & fiat emp.ſecun.arcem . Si par tous ces moyés la tumeur quatrief
ne ſe peut reſoudre,la fautouurir auec lácette, ou cauteres, faiſant aprestõberl'eſca-me manie
re,& cólommer entieremét le kyſtis auecegyptiac,poudre de mercure, & sčblables. re.
Puis l'vlcere ſera múdifié,incarné, & cicatrile. Aucuncsfois elles ſont ligroſſes qu'elles
ne peuuenteſtre guaries par les remedes ſuſdits,& alors elt beſoin de venir à l'ocuure
manuelle, pour en faire entiere extirpació, pourueu qu'elles ne fuſſent par trop gran.
des & enormes, ou fort adherentes & infilerees aux parcies, ou fituees en lieu dange
reux,comme ayant colliganceaucc groſſes veines,arteres , & nerfs.En tels casilvau - Cinquiefste
droitmieuxleslaiſſer:maisfioncognoiſtpar
cer,ily le contraire,qu'ellesſepuiſſentampu.
faut proceder comme s'enſuit. Il faut donc faire une pecite inciſion au milieu, Tadeslompeso
guariſon
penetrante iuſquesau kyſtis,& paricelle faut mecirevne ſonde groſſe de demy doigs,
ronde en ſon excremice,caue au milieu,longue tant qu'il ſera beloin : & la pouſſer en .
B
B cre le cuir & ledit Kyſtis,iuſques à la racine dela loupe,pourcouper le cuir coutlelóg
d'icelle ſonde.Derechef conuientfaire une autre inciſion au trauers de la premiere,li
quecesdeux facentvne croix : Cela fait,ſeparerle cuir de concre le kyſtis, commen
çantaux angles,& finiſſant vers la racine de la loupe, & 'ce auec les doiges enucloppez
d'vn lingebié delié,ou auecle raſoir ,s'il eſt beſoin . Il faut icy noter, qu'il y a touſiours
quelques vaiſſeaux,leſquels en leur commencemenceſtoiêc pecics, mais auec le temps
ils ſe ſont agrandis & dilacez pour la nourriture de la loupe ,delaquelle ils ſont com
meracines.Doncſi d'auenture en ſeparant lecuir ,il ſuruient flux deſang de quelques
veines ou arteres,ilſera arreſté en les liant vers leurs racines :ou ſera faidte vne bonne
& forteligature en la racine dela louppe, auecques menuë ficelle ou filet en pluſieurs
doubles,laiſſant les bouts dehors , & permetcane que le næud tombe de foy.melme.
Orne (era.ce affez d'auoir amputé toute l'excroiſſance de la loupe , mais conuiendra
auſfiinciſer & couperdu cuir quila couuroit & reueſtoit,àfin qu'iln'en demeure non
plus qu'ilen fauc pour couurir la partie.Apres on ferades poin & s d'aiguille pour reü
nirles léures de l'inciſion ,meccanedestentes aux parties infericures iuſques à pleine choſe
ble . notas
mundification,apres laquelle ſera la cure pourſuyuic iuſques à cicatriſation. Le ſem
C blablea eſté pratiquéparmaiſtre LaurétCollo,Chirurgien ordinaire du Roy,moy
& Hißoire
preſentmonſieurdeViolenes Do &teur, Regent en la faculté de Medecine à Paris, d'uneloupe
grandementeſtimé entre lesgens doctes en la perſonne deMarcialColare,Preuoſt de enorme.
Barbonne,demeurantà deuxlieuësde Sedane: lequel en auoit vne derriere le col de
groſſeur de la teſte d'vn homme,pelance hui& liures,luy faiſane telle peine,qu'il eſtoit
contraint la ſupporter ſur les eſpaules auec vneſeruiecte enmaniere de lac , laquelle
amputation fut ſiheureuſemēt par nous deux faice & executee, que le malade guarit.
Sileſdites tumeurs ont leur baſegreſle,& le fommeclarge, il les convient lier ou Cou- Prognoffic
perpar leur pied ou racine : & fi elles ſoncengendrees à la gorge pres les iugulaires,
aiſcelles & aiſnes,& ſous les jarrers:ſont tresdifficiles à extirper,pourles accidens qui
fouuent aduiennent.Aucommencement ſont fort petites,puis peu à peu par vn long
temps croiſſent,àſçauoir,de quatre,cinq,ſıx , & lepr'ans,quelquesfois moins ou plus.
Aucanesd'icelles ſont fort dures , aucunes molles & obeïſſantes à toucher,& toutes
D pour la plus part ſont ſansdouleur. On peut dire par conie&ure ſeulement ce qui eſt
D contenuen icelles,maison ne le peut certainement cognoiſtre, ſice n'eſt alors qu'on
en fait appertion.Toutesfois à cellesqui ont grăde dureté & renitence, le plusſouuét
oftcrobuć des matieres ſemblables à pecites pierres,& autres corps eſtranges. Ic trou Hiffoirea
way en vne mammelle d'une grande Dame,apres eſtre decedee, eſtant appellé pour 1

l'ouurit,vocſubſtancegroſſe commevn cufde poulle , dure & compacte ainſiqu'v.


nepierre,aſpre & malliue decouleur blanche:& pendantqu'elle viuoic, les Medecins
& Chirurgiens eſtimoicnt eſtre vn chancre , à cauſe que ceſte dureté luy cauſoit vne
grande douleur ſeulement quand on la comprimoit tant peu que ce fuſt. Encores de
puis n’agueres i'ayeſté appellé pour vn ſemblable cas aduenu à vnehonorable & ſage Autre bia
Dame,où pluſieurscane Medecinsque Chirurgiens diſoienc eſtre vn chancre, & itins loire.
lecontraire,à cauſe queceſte tumeur n'eſtoit adherente profondemert: ioinct qu'il
n'y avoit point de mauuaiſe couleur à la partie,ny veines tumefiecs, ny autres ſignes
vrais& demonſtratifs de chancre.Carladice Dame eſtoit bien reglee de ſes mois, la
couleur du viſage & tout le corps bien habituez, eſtant ſans douleur , lion ne preſloic

1
270 Le ſeptieſme liure

contre ladite tumeur. Dauantagepour demonſtrer que ce n'eſtoit vn chancre, la tu . a


meur n'eſtiamats augmencec,ny aucun accidentſyruenu:au contraire eſt gaillarde &
bien diſpoſee, tant de ſon corps que de l'eſprit.

Des Scrophules ou eſcrouelles. CHA P. XX I.

Es Eſcroüelles ſont tumeurs cedemateuſes, faictes aux parties glandu


5
Gal.li. des L Iculos, comme aux mammelles, aíſelles, & aux aines, & le plus ſou .
Tumeurs uenc à celles du col. Elles ſont vnc ou pluſieurs , ſelon la quantité de
contre nam matiere dont elles ſont procrećes , & ſont quali touſiours enuclop
INTI , GAN pees en vn kyſtou membranc propre à elles , comme les Atheromes,
13.dela Steatomes & Melicerides. Elles ſont faictes & engendrees de pituite gyplce , groſſe,

Methode. viſqueuſc , & lors qu'il s'y melle del'humeur melancholic , s'eſchauffent & deuien
nenc maligncs , & font viceros corroſifs, & chancreux , qui rongent la ſubſtance des
glandes & des parties voiſines, & adonc ſone incurables. D'abondant ce meſchant
B
humeur court par le corps, & ſouuent où ils'allied , alcere & pourrift les os, & rend
les pauures eſcroüelleux febriles : En fin meurent miſerablement, languiſfans, tabi
des , acides & ſecs , ſans pouuoir crouuer guariſon des Medecins & Chirurgiens .
Aucunes ſont forc douloureuſes , principalement quand l'humeur s'eſchauffe & ſc
pourriſt , & degenere en viceres chancreux , & alors il n'y faut aucunement tou .
cher auec ferremens ny medicamens acres . Philippe Ingrallias, do &te Medecin de
Sicile , en ſon liure qu'il a compoſé , inricué De tumoribus preter naturam , come i . cha.
Hißoire pitre 1.liure 1. recite d'vn certain Moré , lequel fut pendu pourlarcin , duquel fut fai.
d'un Tore &e anatomie en bonne & grande compagnic , où ledit Ingraſſias preſidoit & fuc
fcrophu
Login trouué au Mezentere ſoixante & dix pecices tumeurs & ſcropuleules ayans chacune
d'icelles fon Kyſtis , leſquelles adheroient en la membrane externe des inteſtins, les
vnes pleines d'une maciere endurcie & pareillo à plaître, les autres d'vne matiere
viſqueuſe & gluance , les autres d'vne matiere plus liquide. Et eſt à noter , que le Mo.
reauoit les autres parties du corps fort ſaines & entieres , principalement le foye &
Nacure renuoyant с
ratce , comme recite l'auteur preallegué . Dequoy il collige, que
tous les excremens de ce corps ſur leMezencere & parties voilines , auoit repurgé &
Le Meyes . netcoyé les aucres , & icelles maintenues en ſanté : de ſorte que ledit More fur cand
qu'il a veſcu , peu ou point malade . Qui eſt l'aduis aullide monſieur Fernel , liure 6 .
tere eft com
me un ef chapitre 7. où ilcraicte des maladies, cauſes & ſignes du Mezentere & Pancreas:Sça
Jout du uoir cſt ,que tels abſcés & rumeurs contre nature ſe font parvne deſcharge de nature,
corps. laquelle cftanc preſſee de pluſieurs excremens, les renuoye vers le Mezentere , & Pan.
creas ,commc dedans vn cloaque ou eſgout de tour le corps : Car ceux qui lont im
Cemperams & exceſſifs au boire & manger,amalient grande qualité de toute forte de
pituite & cholerc,laquelle ſi elle ne ſe purge en téps & lieu,croiſſent au vêtricule, foye
& ratelle.Nature forte par apres la renuoye dedans le Mezentere & Pancreas, par les
rameaux , quide la veine Porte s'inſerent & ſe perdent dedans le Pancreas & Mezére
re . Parquoy cen’eſt ſans cauſe ny fans grande raiſon & experience ( veu que ces parties
reçoiuenttant d'excremcns ) que ledit Fernelafferme & aſſeure auoir trouuéſouuent
la cauſe & ſiege des felós,oudyſenteries,melácholiques,hypochodriaques,diarrhees,
atrophies, lágueurs, fiéures léces,& erratiques,en icelles parties.Pour retourner à no. D
ſtre propos, ledit Ingraſſias racórcl'hiſtoire que deſſus,pour cõfirmació de ce qu'il el
crit auoir leu en lulius Pollux , que les eſcroüelles s'engendrét quelquesfois au Mezé
header
tere.Ce qui eſt conforme à la doctrincde Gal.lequel veut les eſcroüelles n'eſtre autre
Attesaa
tion de choſe
queglandules ſcirrheuſes & endurcies . Ec pour la confirmation dececy ,i'acreſte
l'Autheur. auoir trouué aux corps morts ,quiavoienc des eſcroüelles aux parties exterieures ,plu.
fieurs tumeurs glanduleuſes au Mezentere,groſſescomme noix ,noiſettes ,pois,voire
auſli groſſes que le poing, dans leſquelles eſtoit contenuë vne maciere gypſee, & autre
mátiere purulence.Quant à la cure, elle ſe fera en ordonnant le regime, faiſant vne
IH .
treſgrande diette pour rendrenacure famelique , afin qu'elle conſomme & digereles
humeurs ſupor abondans. D'auantageleMedecin ordonnera medecines pour vacuer
les humeursſuperfles. Semblablemér le Chirurgien appliquera les remedes ſeló qu'il
cognoiſtra eſtre neceſſaire aux parties excericures ,cõmc remollicifs, reſolutifs, & fup
pucatifs: ainfi.4.mucag.alth.fænug. & ficuú ping. an.3 . ij. oleililior. & camomill.añ .
3.j.pin.
Des Tumeurs en general. 271
a 5 j.pingued.anſer.& axun.porc. añ.3.3.cerebent.Venet.Z.j.B.armoni.& galba.in
aceto dill.añ.3.j.ceræ nouæ quant.fatis, fiat cerat, ſecundum artem ,ad modum dia
chil. mag : Le liniment de morbo Gallico, & l'emplaſtre de Vigo cum Mercurio, fonc
tres-excellensen tel cas,voire faire frotterle malade dudit liniment,iuſques à la ſali
uation: car parce moyen nature ſe deſchargera de l'humeur cauſant les eſcroüelles:
ce que i'ay fait auec heureuſe iſſuë. On vſera ſemblablementde ces remedes ſuiuans.
4. Empla.diachil.alb.& mag.cerot.ælipidefcriptionis Philag.añ.z.ij.terebent.cla- Emplafiri
rxz.j.olei lilior.parum ,fiatempl.ſatismolle,Eclîleſdiceseſcroüelles ne peuuéceſtre
relóultes& qu'elles tendent à ſuppuration,commeſouuent il aduient, alors on vſera
de remedesſuppuratifs,comme, 2.rad.alth .& lilior.añ.3.iij.coq.in aqua comm. pi- Cataplafme
ftent.paſlent.addend.capit.allior.fub cinerib.coctor.Z iij.oleililior. & pingued.an -'Suppuratif
ſer.& anat.añ.3j.B.far.ſem.lini quát.ſatis,vt inde formetur cataplaſma, vc ars docct.
Oril faut que le Chirurgien ſoit aduerti,qu'auparauát qu'il face ouverture auſdites
eſcroüelles,faut laiſſer à perfection maturer coute la tumeur, & entierement ſuppu
B rer : autrement le reſte demeurera crud, & par conſequent difficile & long à guarir.
Ce qui ſe doit pratiquer non ſeulement éseſcroüelles, mais auſſi en toutes tumeurs
qui doiuent ſupputer , eſquelles il ne faut pas que le Chirurgien ſe haſte de faire ou
uerture,pourvoir vne petite portion de l'humeurvenuë à maturité : ( ſi ce n'eſt en la
peſte,charbons & parocides.) Car cecommencement de Pus, qui eſtja cuit, fait que
le reſtemeurira &ſuppurera pluftoft.Ce que l'on void aux corps inanimez :comme
lors qu'vne pomme commence àſe pourrir, ſi l'on n'oſte la pourriturc, toſt apres le comparata
reſte ſepourrira : & pour la conſeruer de non ſi coſt ſe pourrir, on oſte ce qui eſt ja ſon.
gaſté:ainſi eſt-ildeshumeurscontenus aux tumeurs contrenature.Il y a vne autre
raiſon: c'eſt que la chaleurnaturelleeſt cauſe efficiente de ſuppuration. Icelle donc
par ouuerture precipitée eſtant diſlipée & renduëmoindre,à raiſon qu'à celle ouuer
tureſ'enſuit dillipation d'eſprits,le reſte demeurera crud & infuppurable. Et partant Notas
le Chirurgien aura eſgard à ce precepte , qui ſedoir entendre , i lapartie où eſt la cu
meur, n'eſt ſujette àcorruption, commeau ſiege: ou li la matiere contenuc n'eſtve
neneuſe,ou critique. Ilya vne autre manieredecurer les eſcroüelles, qui eſt par l'o-Autre ma
C perationdela main du Chirurgien , lors qu'elles ſont au col & fuperficielles ,faiſant lesnieredecurer
C eſcroüel
vae inciſion à fin de les ſeparer des parties où elles ſontattachées, puis tirées & cou les, priſe
péeshors.Mais en faiſanttelæuure ſefaut donner garde de toucher la veine iugulai. Gordon,chdeo
re, ou autre,& l’artere carotide & nerfs recurrens :& oùil y auroit danger deflux de desapoftemes
ſang, apres les auoir ſeparées du cuir, les faudroit lier en leurbaſe,en paſſant vne eſ- froids.
guilleenfilée, les liant & ſerrant des deux coſtez, à fin que d'elles meſmes tombent
petità petit ſans danger. Cela faic, on traitera l'vlcere ainſiqu'il appartiendra.
Hiſtoire digne d'eſtre bien conſideréetanıdes MedecinsqueChirurgiens.
Ilabeau Rolant, femme de lean Bony, demeurant ruë Monceaux pres S.Geruais, Hiſtoire.
où pend pourenſeigne la roſe rouge,aagée de ſoixante ans,le xxij . O &tobre 1578.fué
ouuerte (eltant morte) par l'ordonnance, & en la preſence de monſieur Milor , Do- Les eſcroitela
&eurregent,& Lecteuraux eſcholesde Medecine: & fuc crouuele Pancreas & Me- les occupent
zentere d'une großeur merueilleuſe & preſque incroyable,pesāc dix liures & demie, le Mezentes re .
tout ſcirrheuxpardehors , & adheroit ſeulement aux vertebres des Lumbes, & par
deuantau Peritoine, lequeleſtoit pareillemét tout ſcirrheux & lemblable à vn carti.
D D lage:duquel fuc fait le lendemain diffe &tion & demöſtration au logis dudit fieur Mi. Medecins
loc, enpreſence de móſicur de VaradesMedecin, & Cõſeiller du Roy , & Doyen de qui aſsiſterens
la facultédeMedecine : monſieur Broüet , Medecin du Roy , & de monſeigneur le l'ou
Cardinal de Bourbon : meſſieurs Cappel ,Mareſcot,Arragon ,Baillou , Riolant, Do: à vertures
&eurs Regés en la faculté de Medecine: Pineau ,maiſtre Chirurgie : I'y aflıftay aulli,
& pluſieurs autres,& fuc trouué en icelle,vne infinité d'abſcés ,ayans chacun ſon Kya
fius, lesvns pleins d'vne liqueur pareille àhuile d'oliue , les autres à miel , les autres à
fuiffondu,lesautres à boullie lesautres à l'humeur albugineux, les autresà l'humeur
aqueux:brefautāt qu'ily auoit d'abſcés ,autāt ſe trouvail en iceux de diverſe matiere.
Oreſt-il à noter qu'il y auoithui& ans& plus que ladite tumeur auoit comencé,&
feſtoicaccruë de plus en plus,fans douleur toutesfois :de fait,le Mezentere n'a aucun
fentimét: & auoit ladice Rolant ſes a &tions animales,vitales& naturelles libres (peu
f'en falloit)comme en pleine ſanté, horſmis deux mois auant que mourir , qu'elle
fallitapour cauſe d'vne fieurecontinuë,qui ne l'abandonna iuſques à la morc, com
Аа
272
Le ſeptieſme Liure ,

me auſi pour cauſe de la peſanteur de ſon fardeau, lequel elle diſoit auoir ſenticom- À
meſe defraciner. De fait ,il ſe trouua adherant ſculementaux vertebres des Lombes
& Pericoine,comme a eſté dit cy- deſſus,& nullementaux boyaux & autres parties,
Sappreßion eſquelles il eſt naturellement attaché.De façon que tombant ſur la velfie, & pref
d'orine .
fanc icelle, luy cauſoit difficultéd'vriner , comme aulli preſſant les boyaux luy cau .
ſoit difficulté d'aller à la ſelle , de ſorte qu'elle n'y alloit que prenant quelque medi
cament par la bouche . Quant aux clyſteres ,ils ne pouuoient entrer : lcs ſuppoſitoi
res ne luy profitoient de rien .Elle auoit auſſi difficulté de reſpirer , pour la compreſ
ſion du Diaphragme . Aucuns des Medecins qui la penſoient, auoient opinion que
c'eſtoit vnemole : les autres que c'eſtoic hydropiſie: de fait l'hydropiſie lenſuiuit, &
fut tiré vn ſeau d'eau & plus de ſon corps . Ce qui aduint principalement pour le
foye , qui eſtoit tout ſcirrheux & remply d'abſcés, tancen dehors qu'en dedans . La
ratte ſe crouuaauſſi toute pourrie , les boyaux & omentum liuides & tauelez : bref il
ne ſe trouua partie aucune entiere en tout le ventre inferieur.

B
Du Ganglion. CHAP . XXII.

Definition ANGLION , eſt vne petitetumeur ronde, qui vient ſouuentesfois aux
poignets des mains , ou pres les cheuilles des pieds , cõbien qu'elle ſe fa
ceauſſi aux autres parties du corps , & ſ'engendre à la ſuperficie du cuir,
Cautare & non au profond. La cauſeeft, quand le nerfou tendon ,eſtantdebilité
par contorſion ou extenſion , ou par coup , ou grand trauail, ou autre ac
cident , nature ne pouuant faire bonne conco &tion & aſimilation de ſon nourriſſe
ment,engendre vn certain humeur froid & gros de ſemblablequaliré que fun nour
riſſement, lequel peu à peuſaccumule à l'entour des fibres , & meſme en la propre
ſubſtance des tendons,dont ceſte tumeur eſt dure , faite de matiere pituiteuſe
&me
Cure dugan- lancholique. A celles qui ſont pres les tendons, & auxiointures , ne fauttoucher par
glion eftant ferrement, mais y appliquer ammoniac. & galbanum diſſoule en vinaigre & eau de
pres les ioin
suresi vie. Autre . 2.gummiamm . & fagap.in aqua vitæ diſſol.añ.z.j.coq.ſub cineri.calid .
ad formam empl. ſub finem adde ſulphur.viuiſubtiliter pul.Z.B. fiac empl.ad vſum . C
Aufli l'emplaſtre de Vigo cum mercurio duplicato.Et apres l'auoiramolli faut froc
ter & preſſer deſſus, tant & fi fort qu’on rompe ſon kylt : ce quei’ay faic par pluſieurs
fois . Lalamine de plomb, frottée de vif -argent,appliquéc deſſus auec forte ligature,
on a rompu le kyſt. Il y a des pecits ganglions ,
les conſomme, principaleinent quand
quiont leur racine grelle & menuë , leſquels ſerontlicz , les ſerranc de iour en iour,
-sant qu'ils ſoient tombez. Le reſte de la curation ſe fera commcil appartiendra .

Des Verruës ou Porreaux , dities Myrmecies, Acrochordon , Clauus ,


ou clou , Thymus , Sarcoma , 04 Fungus.
CHAP. XXIII .

L ya de cinq fortesde Verruës, à ſçauoir , Myrmecics, deſquelles l'e


minence eſt petite , calleuſe, ronde, & eſpeſſe, large , & leur baſe n’ex
cede gueres la groſſeur d'vn lupin . Elles naiſſent conimunément aux
mains despetits enfans , & aucunesfois viennent ſubitement, aufli l'ef- D
uanouiſſent tout à coup , & peu ſouuert viennentpour vne ſeule, mais
ſont pluſieurs. Elles ſont curées, y appliquant deſſus du pourpied pilé , ou fucilles
de ſoucy aueo vn peu de ſel. Auſſi les guarit l'huile de fourment, de ſoulphre, ius de
chelidoine, le laict decichymal. ***
Des Porreaux .
Il y a d'autres Verruēs appellées Porreaux . Lenom de Porreau leur a eſté donné ,
qui
à cauſe qu'il a la teſte de Porreaux. Il y a des petits filets qui reſſemblent aux racines
trouvéesaufdites verrués porracées . Pour leur cure, illes faut lier ( li faire ſe peut )
&
pour les faire tomber:eftans combées on mettra deſſus de la poudre de Sabina, & de
l'ocre, faite ainſi. 22. foliorum ſabinæ 3.ij.ochræ z.j.puluerilentur fimul: fiat puluis .
Enlieu du ſabinon prendra de la poudre de hermoda &te bruſlée. Si pour celles cho
ſesne ſ'amortiſſoient, on les touchera d'huile de vicriol , ou eau forte , ou vn petit

grain de caucere potentiel, pourueu qu'il n'y ait grande douleur & inflammation .
Des Tumeursen general. 273
A Acrochordon .
.
Acrochordon eſt vne verruë pendante, ayant la baſe fort petite , eſtant calleuſe ,
fans douleur , de figure ronde , n’excedantla groſſeur d'une febue: quelquesfois el
le ſuppure. On la cure parligature ,par ſe & ion, & par vſtion , & par les arracher.
Clauna ,
Clavus,ou clou, nommé desvulgaires cors eſt vn durillon qui vient aux iointures
des orteils, & ſous la place des pieds,ayant ſa racine dure,ancrée & fichée profonde
ment, commefil nailſoit du perioſte des os. Ils cauſent vne douleur piquante , com
c me ſion eſtoit piqué d'vne pointe declou , lors qu'on chemine ou preſſe deſſus. La
cauſe vient pour auoir porcé des ſouliers tropeſtroits,ou auoir cheminé longuement
3
à pied. Leur caleſt dur & eſpés,commelacorne de lanterne:c'eſt pourquoyfontap
pellez cors.Pourles curerilles faut couper iuſquesau fang: & pourfaire mourir leur
facine,on y appliquera de l'huile de vitriolou eau forte. On feraeſſay premierement
eny appliquanc des aulx pilez deſſus, oude la gomme ammoniac diſſoulte en eau de
vic: fiellesretournent apres eſtre guaries, on fera le remcde comme deuant. Nota
qu'au milieu filløy troune vne pecite dureté noire,il faut plõgervnepointe d'aiguil
leaſſezprofondemnent, & la leuer en haur, & la couper , car c'eſt la racine duditcal.
* Thymus.
- Thymus eſt vne petite verruë eminente, moindre beaucoup que l'Acrochordon,
repreſentant en haut la flcur du Thym :partant a eſté nommée Thymus.Elle eſt du
re & raboteuſe , eſtroltte en ſa baſe, & vient communément aux hommes entre le
prepuce & leglan ,& aux femmes au col de leur matrice , engendrée d'humeurme
lancholic demalignequalité , & fouuent de la verolle . Pour la cure, ſi elle peut eltro
To liée , elle le ſera, y appliquant deſſus de l'huile de vitriol, poudre de ſabina & ocre,
re comme auons dit. Si elle vientde la verolle , les patiens ſeront trai &ez comme ilap
6. partientàtelle maladie , ou autrement n'en pourront eſtre curez . Geldites verruës
ar
He
viennent ſouuent au col de la matrice des femmes, aucunes à la ſuperficie ſeule
ment , & fouuentaumilieu ouau profond : quelquesfois il n'y en a qu’vne ſeule , &
d. quelquesfois pluſieurs. Aucunes ſont peu douloureuſes, les autres font tres grande
C douleur. Aucuns guariſſent les liant, & appliquant les remedescy-deſſus mention
- nez auec lapoudre de ſabina ( laquelle opere par vne proprieté occulte ) & par vne
15 decodion faite de ladite ſabina, adiouſtant de l'onguent Egyptiac,y laiſſantdedans
‫ܕ‬ vn peſfaire trépé en ladite decoction. En fin par vneautre iniečtion d'eau bien aſtrin
as, gente & deſiccatiuefans acrimonie. Par ces inoyensi’en ay penſé beaucoup qui ont
elté guaris , les autres non, parce qu'elles eſtoient de mauuaiſe qualité , engendrées
d'humeur melancolic : ioinat aulli qu'elles ſont ſouuent en ſigrande quantité,qu'el
les occupent la capacité ducol de la matrice,qui cauſe de grands accidens , comme
douleurcuiſante:& les pauures patiensdiſenty auoirle feu ,qui fait qu'ils ne peu
uentcheminer,ny ſe tenir debout ny aſſis, & raiſon qu'elles frayent les vnes contre
les autres, & qui fait auſſi qu'ellesiettent beaucoup de fang. Elles degenerent ſou .
uenten chancre ,ietcans vne fanie ſereuſe , fort fæcide, & en grande quantité. Les
patiens ont yne fieure lente , qui ſe courne en he&tique, & meurent miſerablement,
- perdans toute la ſubſtance del'humeur ſubſtantifique du corps.
De Sarcoma ou Fungus.
:D D. Sarcoma autrement dic Fungus , eſtvne excroiſſance de chair, qui vient de l'a
5 liment propredela parcie oùelle naiſt,& non de la deſcharge & Auxion d'humeur
S desautres parcies. Et ſi ceſte chair n'eſt reprimée,elle ſ'augmente beaucoup, & fou
uentproduit en ſoy des tuyaux ayans formede veines & arteres, par leſquelles elle
prend nourriture & accroiſſement comme l'on voidaux louppes. Elle iecte vneſa
nicfort puante:les vulgaires l’apellentFilfain & Fiacre. Il ſe procrée & forme en nos
corps , ainſi qu'on void aux troncs des cheſnes & autres arbres , quand quelque
humeurà demy-pourry,glueux & viſqueuxvient à ſortir par reſudation au trauers
de l'eſcorce,& peu à peu fortanthors prend accroiſſement, & feforme le Fungus .
Aureſte il ciét de la nature des verrues malines: & vient ſouvent à la fracture du cra
ne,autour du ſiege,aucol de la inatrice , & autres parties. Pour la cure, où la chair ſe
roitfortaccruë, commeſouuenceſt groſſe comme un cof,plus ou moins, on la liera
( lil ſe peut faire) avec fil de foye,leplus pres de ſa racine qu'on pourra : eftant tõbée,
on appliquera deſſus de l'huile de vitriol,s autres choſes cy dellus mentionnées.
Aa ij
274 Le ſeptieſme Liure ,

CHAP. XXIV . A
De la fieure qui ſurvient aux tumeurs ædemateuſes.

Quelles fie
bytes les eſpeces & differences des tumeursædemateuſes expliquées,
ures fruien
reſte à parler briefuement de la fieure accidentaire , qui aſſez ſouuene
nent aux x
demes . ſuruienten icelle . Celte fieure retenant du mouuement de l'humeurpi.

tuiteux dont elle eſt excitée , eſt ordinairement de l'eſpece decelles que
Que c'eſt fie les Medecins appellent quotidiennes intermittentes. Les ficures quotidiennes ſone
ure quori celles qui retournent & font tous les jours leur accés , ſouuent de la longueur de
dienne .
dixhuict heures , donnant intermiſſion & relaſche manifeſte le reſte du iour .Les
Caule. cauſes primitiues de ceſte ſorte de fieures, ſontfroidure & humidité de l'air ambient,

long vlage de choſes froides & humides qui aiſément ſe corrompent , comme fruits
nouucaux, & chairs de poiſſons, intermiflion d'exercice accouſtumé. Les cauſes an

tecedentes ſont grande repletion d'humeurs, principalement phlegmatiques. La


cauſe conioincte eſt le phlegme putrefié hors des grands vaiſſeaux en l'habitude &

Signes. eſpace de tout le corps, ou premiere region d'iceluy. Les lignes font prins de trois
choſes, ſçauoir naturelles , non naturelles, & contre nature.Des choſes naturelles:
car le plus ſouvent ceſte fieure prend ceux qui ſont de nacure , & temperament froid
& humide , comme gens vieux, femmes, pecies enfans, homincs & eunuques , pour
l'abondance de phlegme qui eſt en eux . Des choſes non naturelles: car ceſte fieure
prend le plus fouuenten hyuer, au printemps, en region froide & humide : à cauſe
de la maniere de viure oyſeuſe & ſedentaire,vlage de viandes non ſeulement froides
& humides, mais auſſi chaudes & feiches , ſi elles ſont priſes en telle & fi exceſſiue
quátité, qu'elles puiſſent debiliter & ſuffoquer la chaleur naturelle . Des choſes con

tre nature : pource que ceſte fieure ſuit le froid ,entantque tout le corps cft refrigeré,
Accidens. & principalement les extremitez . Les accidens ſont douleurd'eftomach , parce que
le phlegmeſengendre pour la plusparcen iceluy , d'où ſ'enſuit vomiſſement pitui
teux . Couleur palle en la face , la bouchehumide & ſans ſoif, quelquesfois meſmes
durant l'eſtacou vigueur de l'acees: à cauſc que l'eſtomach eſtant remply de pituite, WWG
la bouclic & la langue fen reſſentenc, pour la continuité de la cunique interieure
Frisſon qui leur eſt comniuneauec le ventricule. Doncques la fieure quotidienne faite de C
Pouls .
phlegme doux , commence par froid aux extremitez , par pouls petit & profond ,qui 2 ou
toutesfois en l'eſtat de l'accés ſe monitre plus fort , plus grand , & plus leger : pour
Qualité de raiſon que la chaleur de ceſte fieure ſemble au premier accouchement douce , vapo
chaleur.
reuſe & humide,mais en fin y tenant plus longtemps la main , vous la fentirez acre :
Prognoftic.
tout ainſi que le feu allumé en bois verd ſe monſtre du commencement petic,langui wear
de & fumeux, mais en fin ardant & violent, lors quele bois eſtant eſchauffe & refei
ché l'action & ardeur du feu n'eſt plus empeſchée par la preſence de l'humidité con
traire L'accés ſe termine par petites ſucurs, leſquelles ne ſe monſtréc point ducom
I'vrine .
mencement, mais approchant la criſe ſuruiennent en plus grande abondance. L'vri .
vomiſſemet. ne eſt palle du commencemene & elpelle , aucunes fois cenuë , ſçauoir , lors qu'il ya
obitruction . Mais quand la matiere eſt cuite ( coinme elle eſt en l'eſtat de la ficure )
I'vrine ſe monſtre rouffe.Siau commencement de la ficure ſuruientvomiffementpi.
cu
tuiteux , cela ſignifie qu'icelle fera en peu de temps terminée ,tant pour la tenuité de
ſa matiere, que pource que par telle euacuation eit faite excreció de la cauſe cõiointe
en op
de la fieure. La heure quotidienne le plus ſouvent eſt longue: parce que l'humeur pi- Đ mor
Cauſe de la e
longueur de tuiteux eſtant de ſa nature froid & humide,eſt lourd, peſant, & tardif à ſe mouuoir , &
ceſte fieure. outre non ſans danger de plus grandemaladie, pource que le plus ſouuent ſe change
en fieure ardante ou en quarte: ainſi ſe fait trăſmutation de maladies.Carcómeainſi
ſoit que la faucur ſaléc ſoit propre entre tous les humeurs à la ſeule picuite, & que cel
2007 a
le faueur eſt fort proche de la faueur amere , en laquelle meſme elle ſe clrange aiſé.
mět & degenere par aduftion ; il ne ſe faut eſmerueiller ſi la pituite par celle aduftion moti
on
ſe change en bile rouſſe & noire . Tous ceux qui releuent de ficure quotidiene ont la elen
Accident ce,
que laiſſe la faculté coctricedebile, & partant ne leur conuient bailler abondance d'aliments, &
quoridienne. difficiles à cuire . Toute celtefieure dure le plus ſouuent ſoixante iours.Si dés le com
signesdeter- inencement de l'accés ſuruient vomiſſemēr, & à la fin d'iceluy grande ſueur, ce ſont
minaiſon. ſignes de briefue terminaiſon de la fieure : pourçe que la maciere elt obeïſſance, & la
vertu naturelle forre, qui ietre hors la matiere d'icelle fieure . Au reſte, il ſe faut bien le con

donner garde d'eſtre trompé, prenantyne fieure double tierce pour yne quotidiene.
Des Tumeurs en general. 275
A pourcequ'ellerepete & donnetouſiours unaccés commelaquotidienne.Or il tel'au-
ſe- delafieure
Distinction
cõlideres l'eſpece & forme eſſentielle de l'vne & de
faaiſéde les diſtinguer,ſitu double tierce
tre.Lescauſes ſontcontraires, & pareillement les ſympromes.D'auantage les quoti d'anec la
diennes leplus ſouuentreprennent ſurle ſoir & comencent dés la nuict,lorsque par quotidienne.
l'abſence du Soleill'air eſtant refroidi,toutnoſtre corps pareillemēc ſe refroidit:qui
eft cauſe que les humeurs froids one lors leur mouuement,qui parauanceſtoit aucu
nement recenu par la chaleur. Les doubles tierces aucontraireprennent ordinaire
- ment vers le Midy. La briefuecé& douleur de l'accésenla fieure quotidienne ſont
fignes dela briefueté d'icelle, & de guariſon, ſi cela aduient l'humeur eſtancjacuit. Curation :
La curaçion conſiſte endeux choſes, ſçauoiren regime,& en medicamens. Le viure Dietes
5 doiteſtre tenu & inciſif,c'eſtà dire, ſubtil& penetrác. L'air clair, chaud & ſecmode
rément.Les aliments ſoient pain bien cuit,boüillós faits de pouletces cuites auec ra
2 cines de perſil,ozeille, & petits hous,quelquefois viádes chaudes & ſalées,pourceux
principalementqui ont le foye& eſtomach refroidis, & qui vomiſſentle phlegme ai
$
gre.On peut manger poulets, mouton, perdrix, petits oyſelers,poiſſons d'eau douce
8 B roſtis,cufsmollets.Lebruuage ſoic petitvin blanc trempé auec eau cuite.Les fruits
ſoientraiſins,pruneaux ,amandes,dates cuites. L'exercice moderé cõuicnt, auec fri
T
&tions de tout le corps. Le dormireſt còmode aux heures deuës, & proportionné aux
C
veilles,pourucu que ce ne ſoit durant l'accés : car lors il eſt fort nuiſible,par reuoca
tionde chaleurdu dehorsau dedans.Quantaux affe& ios de l'ame, il faut que lema
ES
lade ſe refioüiſſe eſperant bien de la ſanté. Les medicamens ſont ſyrops digeſtifs & Medica
C
aperitifs,comme ſyrops d'abſinthe,demente, des deux & cinqracines,oxymel, auec mens .
7.
deco&tion de camomile,calamenthe, melilot,anet,& ſemblables, Les medicaments
purgatifs ſoient diaphænicum, diacarcami,hiera picra,pilulesaurées,agaric,curbit :
C
deſquels on fera potions aueceaux de mente,meliſſe,hyſſope,lauge,fenoil, ſcariole.
Aucuns ſeront donnez en forme de bolauec ſucre,ſelon que le docte Medecin con :
liderera eſtre moins molefte au malade. Enuiron l'eſtar de la maladie , il faudra auoir
eſgard auventricule , & principalement à l'orifice d'iceluy: de tant qu'il eſt le ſiege
ca
principal de la pituite,quifait la ficure quotidienne. Parquoy dedeuxiours l'vn ſera
tec с bon l'oindred'huile de camomile& d'abſinthe, auec vn peu de vin blanc. Il ſera bon Vomitoires
ell
auflile deſcharger par vomiſſement, baillant à boireau maladeſuc de raue auec for
I
cc oxymel , ou deco&ion de ſemence & racine decabaret,ou de camomile auec fy
ropaceteux : & ce ſur le commencement de l'accés, lors que nature ſe commencé à
elmouuoir.Pour vne quotidiene inueterée,que l'on n'aura peu guarir auec remedes
communs,il n'y a rien plus propre que demiedrachme , ou drachme entiere de the
to
riaque vieille auec ſucre, en forme de bol,oubien diſſoute auec vn peu d'eau de vie.
} Du Scirrhe. C H 4 P. XXV.
1
i
Ar cy- deuantnous auons trai&té des Tumeurs engendrées defang, Definition de
2
cholere, & pituite : reſte maintenant à declarer celles qui ſont faites de vray
Gal. ſcirr
2. à .
he
melancholie . Or il y a quatre differences de tumeurs faires de melan .
cholie : la preiniere eſt,le Scirrhe vray & legitime , qui eſt vne tumeur Glauco n.
Scirrhe ille
durc ſans douleur , auec petic ſentiment, fait de melancholie narurel gitime.
le: la ſeconde,eſtle ſcirrhe non vray ,qui eſt dur, ſans douleur & ſentiment, lequel Scirche
c
D
D et fait par trop grande reſolution ou refrigeration ,& quaſi lapidifié :la tierce eſt le chancreux.
?
ſcirrhe chancreuxfait par adultion & corruption : la quatriefme eſt faite de la me
Jancholie naturelle meſlée auec les autres humeurs , comme de melancholie & de
ſang,& d'icelle eſt faite le ſcirthe phlegmonodés:& ainſides autres humeurs mellez Scirrhe
auecicelle.Les cauſesdetelles tumeurs,eſtvnhumeurgros, glueux & eſpés, amafle phlegmono
&endurcyenquelquepartic: ce qui prouientou d'vnmauuais regimede viurepro. Caufes de
duiſant te humeur, ou à raiſon des affe & ionsdu foye ou ratelle , comme pour quel- Scirrhe.
queobſtru& ionou ſuppreſſion d'hemorrhoides & menſtruës. Lesſignes,fontdure- signes.
té & retinence ,couleur noiraſtre, & les veines qui apparoiſſent à la partie,ſontfort
tumefiées pour l'humeur gros qui y eſt contenu, & les eſlargit. Le ſcirrhe illegitime
reçoiu aucune curation : &
quin'anydouleur ny ſenciment, & le chancreux, ne reçoiuent
celuyquieſt vray & legitimeſe guarit tres difficilement.Ceux qui viennent à ſup- Prognoflic.
puration, ſe tournent ſouuenten chancres & fiſtules. Les ſcirrhes au commence
.
ment apparoiſſentpetits , mais de jour en autre deuiennent fort grands
Aa ‫زنة‬
275 Le feptieſme Liure,
De la curation du Scirrhe. A
CH A P. XXVI.

Trois inten A curation du Scirrhe ſe fera par trois poinets principaux : le premier
tions à lacu
ration du
lura eſgard à la maniere de viure, laquelle ſera ſobre & moderee , ten
ſcirrhe. dante à humidité ,& aucunement à chaleur temperée , comme il fera
Premiere . monſtré parlant du Chancre, & euitera le courroux,& ſur toutla com
Seconde. pagnie des femmes. Le fecond poinct ſera à l'euacuation de la matiere
antecedente ,commepar phlebotomie ( où il en fera beſoin ) & purgations, prouo
quant les hemorrhoïdes aux hommes , & aux femmes leurs mois .Les purgations fe
ront de catholicum , de hiera , diafene , polypode, epithyme , & autres qui auront
eſgard à l'euacuation de l'humeurmelancholique:& deceon aura recours au dođe
Troiſieſme. Medecin . Le troiſieſme ſ'accomplira par medicamens topiques emolliens au com
mencement, & apres on vſera de reſolutifs, ou pluſtoſt de inedicamens qui ſoient
Gal. 2 , à meſleż de facultez remolliente & reſolutiue, ainſi que Galien enſeigne: car vſant
Glauc. ſeulement de remollitifs, il y auroit danger de faire pourriture, & engendrer vn B
chancre. Auſli ſi les purs reſolucifs eſtoient appliquez , dangerſeroit de reſoudre le
Medicamens plus ſubtil ,& rendre le reſte lapidifié & endurcy. Les remollitifs ſeront tels : 2 rad.
remollitifs alch . Ib .13. radic . lilior z iij.coquant in aqua com . piſt. paffent. per ſetaceum , ad
du fcirrhe. dendo oleicamomill. & lilior.an zy elip.humid.Z B.emplaít. diachil. alb. cum
olco lilior. diſt.3 iij.čeræ alb . quant. ſatis, fiat cerotum. Autre: 2.gummi ammon .
galba. bdellij, tyrac.aliquid, in aceto diſſolut.añ.31. diachil.magn . 3 ).B.oleililior.
& axung anſer, an z ).cerot.clip.deſcrip. Philag Zij.liquef.omnia liinul,addend.
ceræ quant. ſacis, vt inde fiar cerotum ſatismolle. Apresque tu auras quelquetemps
ramolly,tu vſeras de ſuffumigation faicte de vinaigre fort, & eau de vie jetrée ſusvnc
pierre nommée pyrites ,ou bien ſus vne briquerougie, & ferontreceuës de la partie
malade : laquelle inciſe, attenuë , reſoult l'humeur quiauraeſté ramolly . Cela faid
par interualle on recommencera aux remollitifs à fin de preparer d'autre maciere à $

Gal. 2. à
reſolution, qui ſe fera en reiterant la fuſdice fuffumigation: & continueras ces reme.
descant qu'il ſera beſoin . Car par ce moyen Gal . a guary vn fcirrhe au fils de Cerci
elatie.ch. lius. Pareillement l'emplaſtre de Vigo , duplicato Mercurio , cft ſinguliere pour o
quarrieſme. amollir , fondre & reſoudre les tumeurs ſcirrheuſes. Chriſtofle Landré dicauoir ex
perimenté la fientede chéure à diſcuterlestumeurs ſcirrheuſes : & pour confirmay
tion de ſon dire cite le teſinoignage de Galien .
Du Chancre ja faict. CHAP. XXVI .
Definition de Hancre cſt vne tumeur dure, inegale, raboteuſe, de figure ronde, im
chancre. mobile, decouleur cendrécou liuide , enuironnée de pluſieurs veines 4

pleines de ſangmelancholique,apparentes & torcues (en maniere de


pieds d'un poillon appellé chancre) & plus tendues qu'en vn phleg
mon : leſquelles ne ſemonſtrentrouges , mais de couleur noiraſtre ou
1
plombine, comme l'humeur quiy elt contenu . Au commencement il eſt fort diffi
cile à cognoiſtre , entant que la cumeur eſt comme vn pois chiche,ou vne petite
noiſette , laquelle croiſt aſſez loudain , ſi on y applique remedes qui l'irritent , &
commence ſans douleur : mais comme elle aggrandit , tourmente fort le malade
d'vne douleur intolerable & poignante, auec vne chaleur eſtrange , & aucunefois
par interuallenela ſent beaucoup. Ceſte tumeur a pris le nom de Chancre, parce
qu'elle luy reſſemble beaucoup : & premierement elt de figure inegale ronde, & les
veines qui l'enuironnent, ſont en lamaniere des iambes & pieds cortus de cet ani
malnommé Chancre, leſquelles ſont remplics de gros ſang melancholiquequiſel
chauffe , & eſtanceſchauffe tourmente le malade de douleurpicquante & poignan
te, comme ſi on luy donnoit des coups d'aiguille, & en ſort vne ſanie fecide & lereu
.

fc, & ſouuent le ſangtout pur fileſt vlceré. Dauantage cet animal , quand il eſt ac
taché de ſes piedscontre quelque choſe,adhereà elle ſifort, qu'à peine on le peut
arracher, principalement de ſes deux pieds de deuant, qui ſont en maniere de tenail
Nature du les & pincettes :ainſieſt il de ceſt humeur, qui paroiſt en outre de couleur cendrée
Chancre. ouliuide, auec aſperitez, de meſme que cet animal,duquel pour ceſte cauſe ie t’ay
voulu donnericy le portrait .
Des Tumeurs en genera.l 277
A Figure du Chancre.

Who PO
EY

8 (ང་་་་་་
1

Des cauſes ; e peces, ou differences, & prognoſtic de Chancre.


C H 4 P. XXVIII.

Es cauſes ſont deux , antecedente & coniointe. La cauſe antece- Cauſes ana
dente prouient d'une maniere de viure , produiſant vn ſang eſpais, recedentes,
melancholique & limonneux : l'aptitude du foye à engendrer cello
ſuperfluité, auſſi l'impuiſſance de la racelled'expurger le ſang :la ſup
26
couſtuinées
preſſion des menſtruës, & hemorrhoïdes , & autres euacuations ac
, ioint la debilité de la partie : toutes leſquelles choſes engendrent
ceſte maladie . La cauſe coniointe , eſt l'humeur melancholique arreſté à la partie, Cauſes con
apres ſon ebullition. Le ſang qui eſt plusdoux & moins mauuais, & a acquis ſeu- iointes.
FC Clemencvnequalité plus chaude, cauſe le chancre non vlceré . Lors que cet humeur
infuë à lapartie,l'échaufe& deuient plus acre & malin,fait le chancre vlceré, ainſi
quel'humeur qui cauſe les carboncies , quand il y a acquis vne grande inflam
mation, acrimonie & malignité , rompt, corrode, & vicere la partie. Orle chancré
deuient plus chaud & furieux par alimens qui échaufene le ſang, & par courroux':
aullipar les remedesindeuëment appliquez , quiſont trop chauds,acres,oleagineux
& emplaſtiques. Entre les eſpeces & differences de chancres,il y en a deux principa- Ešpeces ou
les,àſçauoir,vn non viceré, vulgairement appellé apoſtemeux,& quaſi detous les differences.
anciens, chancreocculte ou cache: l'autre eſt vlceré & manifeſte. Et outre il y a des chancre
chancres faits aux parties interieures commeaux inteſtins , & mezentere , matrice, occulte.
fiege,& autres parties internes. Dauantage il y a chancre recent, inueteré, petit,
grand, moins malin, & autre plus rebelle & malin . Ceux qui ſont de complexion Aēc, liu.16.
melancholique,& quivſent d'alimens qui engendrent cet humeur, & qui habitent chap. 44.
en telleregion ,ſonrluiersaux chancres. A uſlilesfemmes en ſont plus entachées que Gal.liu.des
D leshommes:pareillement ceux qui ont le foyc trop chaud, & principalement ſi aucc Tumeurs, a
3
cela la racte eſt ſidebile qu'elle nepuiſſe deuëmentattirerde la maſſe ſanguinaire, & 2.à Glauc.
cxpeller cethumeur limonneux, qui eſt comme la lie du ſang. D'abondant quand
leshemorrhoides& menſtruësſont retenuës és perſonnes qui ontaccouſtuméde Prognoſtic.
fuer. Tout chancre eſt quaſi incurable, ou tres-difficile à guarir : car c'eſt vne tres
mauuaiſe maladie en tout ſon genre, ſçauoir eſt ladrerie particuliere. Aëce dic, que Aëce liu.ić.
le chancre ne ceſſe de ronger & de miner au profond de la partic où il eſt, ne le pou .
uant arreſter . Le chancre vienten pluſieurs parties du corps , mais principalement Les parties
auxlaxes& de rare texture ,fungueuſes & glanduleuſes, leſquelles ſont promptes à Juientes à
receuoir ceſte groſſe mariere melácholique,cõme ſont les mammelles, les emunctoi - chancre.
res,& lesparties honteuſes. Quand il eſt à lamammelle ,ſouuentengedre inflamma
tion ſous les aiſſelles , & tumeuraux glandes d'icelles,qui tourmente grandementles
malades, & diſent ſentir la douleur poignante iuſques au cæur . La douleur monte
auffi iuſques au paleron & os furculaires. S'il eſt deucnu grand, ne le peut guarir ſans
l'auure manuelle, comme auſſiſ'ileſt proche des partiesnobles.ToutAaesfoniisj és corps '
278 Le ſeptieſme Liure ,
quiont peu de force & courage, & meſmes li les chancres font vieux,& procréez de A
longues années , à iceux ne faut aucunement toucher par inciſion, ny par cautere
actuel, nypar remedes forcs & acres,comme cauteres potentiels; ains les pallier par
remedes doux & benins , ſedans la douleur. Quoy faiſant, pluſieurs malades de ce
Hipp. apher. mal n'ont laiſſé d'atteindre leurderniere vieilleſſe: ce qui eſt prouué par Hippocra
38. lin. 6 . tes,qui dit,quec'eſt pour le mieux de ne point attcnter aucunemēcla cure du chan
cre occulte,c'eſt à dire , non vlceré,entantque ceux qui ſont medecinez meurent
pluſtoſt, & ceux qui ne le ſont point viuent plus longuement. Parquoy, comme
auons dit,fauc vſerdecure palliatiue par remedes anodyns,doux & lenicifs.
La cure du Chancre qui commence , á n'eſt encore vlceré.
CHAP. XXIX.

E Chancre qui commence , quelquesfois eſt empeſché qu'il ne


croiſſe,deuant qu'il ayeprispied, & ſoit enraciné plusauant en la
partie malade. Car lors qu'ileſt ia accreu, ne ſepeut curer que par B
amputation : ou demeurera incurable,à cauſe que par ſa malice il
A Glauc. repugneà tous remedes. Gal.affirme auoir guary vn chancre non
Fur la fin. vlceré en ſon commencement. Or il ſe guarit ſouuent en ordon
nant medicamens qui purgent l'humeur melancholique , & fai
ſant la ſaignée, ſi l'âge & les forces le peuuentporter : euitant auſſi coutes choſes qui
engendrent cet humeur eſpais & limonneux. Parcillement faut auoirégard à redi
fier l'intemperature du foye & de la ratelle, & prouoquer les menſtruës, ſic'eſt vne
femme,ou kille qui ſoit enâge,& les hemorrhoides,fi le malade yeſtoit ſuier, forti
fiant la partieaffectée. Aufíi vſera de bon regime,euitant toutes choſes qui échauf
fent le lang,& vſera de cellesquirefroidiſſent & humectent. Euitera pareillement
1
toutes choſes aigres,ſalées, & qui engendrent ſucmelancholique, comme gros vin
noir & plein de lic,vinaigre,pain trop bis, choux,fourmage vieux,vieilleschairs ſa
lées,commede bæuf, decerf,de chéure, grands liéures, ails, oignons,efpices,mou
ftardes. S'abſtiendra detrop grande abſtinence, veilles , labeurs excellifs, triſteſſe,
foucy : & vſera ſouuent d'orgemondé,& en fes pocages demaulues ,eſpinacs,lai.
& uës, ozeille,pourpier,chicorée, houbelon, violette de Mars, bourroche, des qua
tre ſemences froides,inouton,veau ,cheureau,chapons,poulets,ieunesleuraux , la
pins de garenne, perdris, & autres ſemblables,quifontde bon ſuc: cous oiſeaux,ex
cepré aquatiques :poiſſons de grauier, æufs mollets , vin blanc & clairer de medio will
crevertu. La partieoù eſt le chancre doit eſtre doucement traitée , & n'eſtre point ede
chargéede beaucoup de choſes dures & peſantes, ny d'emplaſtres trop folides ny
förivs liv. oleagineux. Au contraire ne ſeront appliquez linimens doux & lenicifs, vſant par
16. chap146. interualle desremedes propres aux venins, commecheriaque & mithridat. Le laiet
d'afneſſe pareillementadoucit fort l'acrimonie de cet humeur, pris par dedans : & fi
le chancre eſt vlceré, l'vlcere ſera laué ſouuent dudit laict.
Care du Chancre vlceré. CHA P. XXX.
D
Signes du E Chancre vlceré a aucuns ſignes communs aucc celuy qui ne l'eſt pas,
chancre ola comme tumeur ronde, inégale ou raboteuſe , & douleurs . Il ſemble à la
seré.
veuë que la tumeur ſoit mollaſſe, mais au coucher eſt fort dure. Eſtant vl
ceré eſt fort ſordide ayant les léures fort groſſes, dures, noüeuſes, renuer 20

fees & éleuées , horrible à voir, ietrantvneſanie ichoreuſe , ſereuſe, & tres-puante
& cadauereuſe,tantoſt noire ,tantoſt rouſſe ou ſanguinolente, & fouuent en ſort du
fang en abondance , accompagné de ficure lente & continuë , & le malade combe teto
ſouuenten fyncope, principalement lors qu'il eſt aux mammelles. Onl'appelle vl
ceremalin ,rebelle,intraictable,lequelſe rend fortfurieux & cruel : & fi on applique
quelque remedc acre & corroſif,on l'irrite & empire dauantagede ſorte que ladou
leur, ficure, & autres accidens faugmentent,dontla vertu eſt proſternée & abbacuë,
& lecorps ſe conſomme,dont fenluic la mort. Et partant aucuns ont appellé tels che
Nolime chancres, Noli me tangere, c'eſt à dire, ne me couche de nulle choſe aſpre & forte, in
sangere. à cauſe qu'on me rend plus malin & furieux. ..‫ܕ‬
CA
Des Tumeurs en general. 279
C

r
Cøre du Chancrepar l'æuure manuelle du Chirurgien .
=
CH A P. XXXI.

C
I le Chancre eſt petit ; & en partic qui puiſſe ſouffrir l'amputation, il
faut auparauant qu'y mettre la main , que le malade foic bien purgé&
ſaigné, ſi la vertu & l'âgey conſentent,ainſiqu'auons dic : & apres l'e
uacuation , faut trancher & oſter tout ce qui eſt corrompu , voire en
couper vnpeu dauantage,à fin qu'il n'y demeure aucune portion de ce
qui pourroit auoir eſté épris de la nature du chancre. Auſſi faut laiſſer couler allez de
ſang,à fin dedécharger les veines remplies de ſang melancholique, eſtenduësde
toutes parcs és lieux voiſins,commeracines: parquoy il les faut exprimer, & preſſer
de couscoſtez,puis appliquer vn cautere actuel, lequel roborera la parcie, en con- vtilité då
13 ſommant la qualité du venin imprimé en icelle,& auſſi arreſtera le flux de ſang.Cela cantere
B fait,onappliquera remedes ſedatifs de douleur, faiſant tomber l'eſcare: puis ſera actuels
3 procedé comme à la cure des autres vlceres.Oren la curant, on cognoiſtra le chan
creauoir eſté du tout amputé, & fa malice eſteinte,quand on verra la ſanie louable,
& vne chair croiſtre en forme de petits grains de grenade, & fans nulle douleur,pon
&tion, & autres mauuais accidens. Toutesfois on peut autrement & plus heureuſe
mentprocederen la curation duchancrequiſuruient aux léures,ſansappliquercau
bien
ceres,ny autre choſe ſemblable apres la ſečtioni, fans melme qu'il demeure que
fort peu de deformité en la partie apres la curacion ; lequel moyen a eſté par moy Hiſtoires !
heureuſement pratiqué en la perſonne d'vn homme quinquagenaire , és preſences
de Monſieur Hautin, Do &teur Regent en la faculté de Medecine,hommebien ver
ſé en la Medecine, de lacques Guillemeau, & de Maiſtre Euſtache, Chirurgiens du
Roy,de lean le leune,Chirurgien deMonſeigneurde Guyſe: la façon eſt telle.Fauc
paſſervne aiguille enfiléeau trauers du chancre,à fin que parle moyen du fil tenu
dela main gauche,on puiſſe éleuer & tenir tellement ledit chancre en ſubiection ,
Clans qu'aucune porcion d'iceluy échappe,& on le puiſſe iuſques à la chair viue cou
perauec des ciſeaux de lamain droicte: & couperde telle ſorte, qu'audeſſous il de
meure & reſte quelque portion de ladite chaic viue de laléure,quipuiſſe feruir com
me debaſe & fondement à la regeneration de chair en lieu de la portion ampucée,
fuppoſant que le chancre n'aura gaigné& ietté de fond en comble ſes racines. Quoy
fait,ayantlaiſſé couler le ſang en allez bonne quantité par dedans & dehors,à dextre
1
& à feneſtre de l'amputation ,fautfaire auec le raſoir des inciſions aſſez profondes, à
3 fin que par apres ,lors que par le moyen d'vne aiguille enfilée, & par ſucure propre
auxbecsde lieure,nousvoudrons approcher & vnir les bords de la playe & ſe & ion,
nous ayons la chair plus obeïſſante à luiurel'attraction du fil & de l'aiguille : parfai
fant au ſurplus le reſte de la curation de meſme façon que dirons cy- apres deuoir
eſtre faite aux becs de lieure .

D
Remedes locauxpour la curation du chancre, tant vlceré que non vlceré.
0
CH A P. X X XII.

V coinmencement on vſera de repercuſſifs, quales funt fuccimorel.plantag.


A hyoſc, lactuc.acecoſ, ſemperui,lenticulæ paluſtris, centinodiæ, burſa pa.
ſtoris, granatorum, & fimilium . Item oleum rofarum omphac. Item pul.
lumach.berber.litharg.cerul.plumb.vít . pomphol. hydrarg. & d'autres ſembla
bles, deſquels on pourrafaire embrocat. linimens, onguens, cataplaſ.emplaſt. Le
diachalcit.diffout auec ſuc de morelle,& vn peu d'huile rofat, eſtpropre aux chan
cres non vlcerez : & le pompholyx laué en ſuc de morelle ou plantain profite à ceux
qui ſontvlccrez: ou bien celtuy: 24. licharg.ceru . añ.z.j.terantur in mortario plum
beo cum oleo rofaceo, donec reducantur ad conſiſtentiam liniment. vel vng. On Medicament
peut vſer d'unonguent reſolutif , & repercullif: comme 2. plumb . vſti &loci,pom
phol.thur.añ.z.ij.13.ablint.pont.3.ß. olei roſat.Z.iij. ceræ z.vj. ſucc.ſolani quantum cſo lmifera
repercußifs
fufficit advnguenti craſſicudinem .
280 Le ſeptieſme Liure ,
A
Emplaftre de Theodoric ſedatif dedouleur aux chancres vlcerez.
+

Remede fort 2.Olei roſat. cer. alb.añ. Z.ij. B.ſucc.granat.& ſolaniañ. Z.ij.ceruſzelotæ 3.j.
approuue." plumb.vſti loci & ruth.præparat.añ.3.B.thur.maſt.añ.z.ij.fiatemplaſt.molle. Autre
remede que i’ay ſouuent approuué. 22. theria. veter.3.). ſucc. cancr. Z. B. ſucc. lact.
& olei roſar. añ. Z.j.B.vicel. ouor.cočtor.ſub cinerib.ij.camph.z. B.piſtenc. omnia NA

Remedes
in mortario plumb.& fiatvnguentum .Autre.22.(pumæarg.axung porc.recent.cc
anodyns ap ræ albæ ,añ.ib.B.oleiboni tb.1.& Z. ij.vitell.ouor.aſſac.vj. fiat vnguentum , ſeruetur
pronnez par vſui. Lors que tu en voudras vſer,le faudra meſler auec vn peu d'onguent rofar. Da
Autheur. uantage i'ay appaiſé de grandes douleurs, appliquant des langſuës à l'vlcere,auxen
droitsquele malade ſentoit vne douleur poignante, & par l'euacuation du ſang la
partie eſtoit déchargée de l'humeur malin ,quila moleſtoit. Autre remcde.Prenez
petits chiens ou chatons nouuellement naiz,ou pigeonneaux, poulets,ou autresani
maux ſemblables, & tous viuans,ſoient coupez le long de leurs corps, & ſoudain ap
pliquez ſus l'vlcere, & renouuelezſubit que lemalade ſentira qu'ils ſerontrefroidis. B
La chaleur naturelle de tels animaux fede grădement la douleur,ce quei’ay cogneu
pluſieurs fois. Io.Bap. Theodoſ.epiſt. 21.pour la curation du chancre approuue grã
dement le cacaplaſme fait de l'herbe dite Eryſmum ou Irio , en François Vellar ou
Tortelle , laquelle ſera broyée, & appliquée en forme de cataplaſme ſur la partie.
Aulli i le chancre eft vlceré,il faitbouillir ladice herbe en eau,& miel , pour en faire
desinie &tions & laueinens pour le netçoyer, & appaiſer la douleur. Encore pour ap
paiſer la doulear,celiniment eſt excellent. 22.plumb.víti loci in aq. ſolani,z.B. an
cimonij pariter loti z.ij.pomphol.3.iiij.ceruſæ z.j.B.cineris cancrorum fluuiatilium
z.iij.ſucc.ſolaniz.iij.oleiomphacini quátum ſufficit,ducantur in mortario & piſtillo
plumbeo , donec linimenti acquiſiuerint conſiſtentiam : iceluy remede ſede la dou
leur en deffeichant fans nulle mordication .

in autre remede duquel i'ay veu un grand allegement pour feder la douleur.
4.theriacæ veteris 3.j.lucci cancrorum Z. B. ſucci lactucæ , plantag. ſolani & olei
roſaci añ.3.j.B. fugitiui extincticum tereb.Ž.j. vitellorum ouorum coctorum ſub ci
ner. num.iiij.camph.z.B. piſtentur omnia in mortario plumbeo & fiat vnguentum . Hotel
Huile Auf l'huile d'æufs fort agitée dans vn mortier de plomb tant qu'elle ſoit épelſe &
d’aufs. acquiere vne couleurde plomb,adiouſtantvn peu de camphre & poudre d'écreuice ..n
bruſlée, eſt un ſingulier remede pour appaiſer la douleur des chancres. Autre. Pre
nez huile de pauor,de nenuphar, d'amandes douces, tirée ſans feu, de chacun vne
once, deux iaunes d'æufbattuslõgtemps en vn mortier & pilon de plomb, & vn peu
d'opium ,ſoitfait linimét,duquel en ſera appliqué ſur le mal, auec cotton,& renou
uelé ſouuent. Et ſi pour ces remedes la douleurn'eſt appaiſée, Galien commăde que
)) ) )

pluſtoſt que le chancre gaigne tout le corps, de l'amputer, & cauteriſer par cauccre
a & uelou potentiel,ſi le lieu le permet. Iceluy meſme loüelvſage d'orge mondé,&
laict clair,du laict d'aſneſſe,fuyanttoutes viādes de haut gouft,& de toute repletion .
Il faut,ſ'ileſt poſſible,faire fluer les hemorrhoïdes pour donner iſſuë au ſangmelan. D
cholique : & encore pour ce faire,l'vſage des pilules d'aloé non laué,en prenant tous
les iours vnſcrupule ,y eſt ſingulier. Et pourdécharger le lieu où elt le chancre, on
appliquera aux lieux où lon verra les veines plus cnfées, des ſangſuës : par ainſi on
oſtera la tenſion & inflammation qui cauſe la douleur, & vuiderez la ſanie acre qui
irrite & entretient le mal. La douleur parcillemét ſe peut appaiſer,en appliquát ſur le
maldeslingesen trois ou quatre doubles, trempezen ſuc de plantain & morelle. Le
meſme ſucreduic en forme de liniinent,par forte agitation dás vn mortier de plomb,
eſt fort loué de Paulus Ægineta,liu.4.Onpeut adiouſter auſdics linimens de la pou :
Chancre en dre d'écreuices brullées. Si le chancre eſt en la matrice, la malade ſene douleur en la
la matrice. parcie,auxaines ,au deſſus du penil ,& aux reins, & fouuent a difficulté d'vrine: fileſt
vlceré ,il iette vne ſanie ſereuſe & noiraſtre,aucc vne puanteur cadauereuſe,laquelle
ſort en grande quatité,& ſouuent la malade tombe en fyncope , à cauſe des vapeurs
putrides qui montentau cerueau , cæur, & autres parties: auíquelles on doit ſoigneu
fement prédre garde,& cõforcer le cæur par remedes cardiaques, come conſerue de
Des Tumeurs en general. 281
A roſe, bugloſſe,bourroche,theriaque,mechridath,ele& uaire de diamargaritum frigi.
dum,ſyrops de limons, & autres ſemblables. Pareillementon appliquera epithemes
ſur laregion du caur, faits d'eau roſe,dechardon benit, vinaigre roſat, trochiſques
de camphre : auſſi cataplaſmes faits de inechridat, theriaque & conſerve de role. Il
faur quele regime de viure ſoit ſobre,rafraichiſſant,& de choſes aigres , à fin de con
ti trarier à la putrefaction des humeurs. Le chancre de la matrice rant vlceréque non
3 vlceré cſt incurable, pource que lon nele peut extirper , & y appliquer lesremedes
is propres: partant ilfauty ſer de cure palliatiue,pouradoucir la fureur,& feder la dou
II
leur, à fin d'empeſcher lesaccidens.Orpour ſéder la douleur de celuy qui eſt vlceré, Fomenta
‫ܕܐ‬ on appliquera tels remedes. Prenez demie once de ceruſe lauée par quatre fois en tion.
lo cau roſe,camphre &plomb brullé,vnedrachme,demiedrachmede bolarmene,in - Cataplaſme,
2 corporez le toutenſembleauec leius de ſemperuiue, de morelle , & huile de nenu
Z phar, cire blanchetantqu'il ſuffiſe,& foit faiconguent, duquel on appliquera ſur le
mal,& parties voiſines. On pourra auſſi faire ceſte fomentation. 2 mucaginisſem .
lini,fænug.extract.in aqu.roſa. & plantag . quantum fatis, & ex his tepidis fiatfotus.
iB B Autre.21.rad.alche.fb.B.coquat,in hydr.piſt.paſſentur, & addan.olei roſar.parum ,
fiatcataplal.Pareillement on fera peſſaires, les diverſifiant ſelon la grandeur de la Peſaires.
douleurqui y ſera: auſſi inie &tions de ſuc de plantain ,centinod.lact.pourpied meſlez
enſemble: & feront broyez en vn mortier de plomb,y adiouſtant vn peu d'huile ro
: far:Icquel remedc eſt recommandé de Galien en tout chancre vlceré . Semblable. Gal.g.liv,
menc on pourra vſer de l'eau ſuiuante,& en faire des iniections, de laquelle i'ay fou- des simples,
uentesfois vſe en tous chancres vlcerez,tant internes qu’externes,pource qu'elle re
frene l'in Aammation,& appaiſe la douleur.Onen lauel'vlcere,& puis apreson laiſſe i
2 desplumaccaux trempezen icelle, ſi la partie le peut permercre. 2. ſtercor. bubuli
> tb.iij. herb.rober.plantag.ſemperuiui,hyoſc.portulac.endiuix, lact.añ.ñ. j.can
cros Auuiatiles xij piſt.omnia fimul,& diſtillentur inalambico plumb. & liquor yſui
rcferuetur,dequo fiat inie &tio frequens in partem . Puis on mettra cec inſtrument
dans le coldela matrice,à fin que la fanic ſoic plus facilement euacuće, & pour don
ner tranſpiration aux vapeurs &ć matieres putredineuſes.
c Inſtrument d'orou d'argentpourmettre en la matrice, en forme de Peſſaire, le
queldoit eſtre longdecinq à dix doigts , & de la groſſeur d'vn poulce à l'extremité
ſuperieure,en laquelle y a pluſieurs trous,par où les vapeurs pucreumeuſes & ſanies,
auront encrée dans ladite cannule , pour ſortir par l'excreinité inferieure, qui doić
eſtre largede deux doigts en rondeur,lequel auravn reſſore pour le tenir ouuere,tant
& fipeu qu'on voudra. Enceſte extremité ſe mettront deux attaches, par le moyen
deſquelles l'inſtrument ſera lié deuanc & derriere , à yne bande que la femmeaura :

ceinte, depeur qu'il ne combe,

B
(

A Monſtre l'extremité ſuperieure où ſone cinqou fix trous,


B L'extremice inferieure .
C Vne partie de ladite extremité qui ſ'ouure,& y avn reſſort par dedas,marquéD .
EE Les deux attaches.
Dauantage leschancres non vlcerez ſongrandement aidez par lamines de plomb
282
Le ſeptieſme Liure ,

frorcées de vif-argent :ce qui eſt confirmépar Galien au 9. des Simples , qui dit que A
le plomb eſt vtile auxvlceres malins & aux chancres. Auſſi le bon vieillard Guidon
Vif argenteſ parlano deſdits vlceres , ordonney appliquer lamines de plomb frottées de vif -argét:
antidote con- Carveritablementon peut dire qu'ileſtalexipharmaque & antidote contre les vice
tre les plce- res malins , qui ſont rebelles à tous medicamens , de ſorte qu'il conſomme leur malice
res malins.
& viruléce.Et encecendroit pour confirmation de ce,ie reciteray vne hiſtoire d'vne
Hiſtoire no- Dame d'hõneur de la Royne Mere ,nommée Madamede Montigny , laquelle auoic
table.
va chancre en la mammelleſeneſtre,de groſſeur d'vne noix , quiluy cauſoir des dou
leurs par interuallespiquantcs,& fi ſes habillemés luy preſſoienttant ſoit peu deſſus,
ſentoit vne grande douleur.Vniourſe complaignoit à la Royne deſon mal , & pour
celuy commáda de remettre entre mes mains pour la guarir,où ſubit qu'elle me l'euc
monſtré , & interrogée de la maniere , & du temps que la douleur eſtoit plus grande,
Houllier , je cogneus que c'eſtoit vne tumeur chancreuſe. Ce que ie luy celay, & perfuaday,
homme ça- que i'euſſe aucc moy Monſieur Houllier, Docteur, Regene en la Faculté deMede
uant en Me- cine, perſonnage ſignalé & recogneu de tout homme docte, lequel ayant veu , palpć
decinc ,
& couché ladite Dame,conclud eſtrevne tumeur chancreuſe : & reſoluſmes enſei- B
ble qu'il falloit vſer de cure palliatiue , craignanc d'irriter ceſte hydre , qu'elle ne for
tiſt en ſa fureur horsde la taſniere.Et pour cefait luy ordonna ſon regime, & certai .
nes purgatiós ,deſquelles elle vſoit par certains iours interpoſez: & ſur la tumeur fuc
appliqué vne lamine de plomb , froccée de vif -argent , & quelquesfois des onguens
cy -deſſus mentionnez, leſquels furentcontinuez par l'eſpace de deux mois . A la fin
ladite Dame ſe commença à faſcher ,diſant que ſonmalne guariſſoit ny empiroit : à
cauſe dequoy print nouucau conſeil d'vn Medecin , lequel ayant veu fon mal ( & non
cogneu ,combien qu'il fuít docte ) luy promit la guarir,doncen fut forcioycule , & en
fic recit à la Royne, laquelle voulut ſçauoir dudit Medecin fil trouuoit le mal incu
rable : où promptement luy reſpondit quc non , & qu'il la guariroic en bref. Alors
la Royne luy dit , le tenois pour certain que c'eſtoit vn chancre, duquel iamais ne
guariroit ;neantmoins il perſiſta en la promeſſe , & aſſeura de la bien toſt guarir , ce
qu'il fit. Et pour ce faire contemna & ietta arriere nos remedes , & y appliqua des
medicamens chauds,mollificatifs & attractifs : où tout ſubit la cumcurfenflagran
dement , auec de grandes douleurs & inflammations,de façon que la mammelle ſc
creua ainſi qu'vne pommede grenade , lors qu'elle eſten fá maturité, & luyſuruinc
vn flux de ſang ſigrád & vehement, que ledit Medecin fut contraint pour l'étancher
appliquer poudres cauſtiques, qui augmenterent encores dauantage la douleur , in
flammacion ,defaillance de cæur,dont la mort ſ'enſuiuit. Et ainſi voila comme ledit
Medecin tint ſa promeſſe de bien toſt la guarir , mais ce fur de tous maux . l'ay bien
voulu reciter ceſte hiſtoire, pour inſtruire le ieune Chirurgien , à fin qu'il ne tombe
en del accident.

De lafieure quiſuraient aux tumeurs foirheufes. CHAP . XXXII.

ELLE ficure ordinairemenceſt quarte,ou retirantà la nature de quar


te : à raiſon de l'humeur melancholic d'où elle eſt excitée , lequel en
fermé en cercain licu où il fait cumeur par communication de vapeurs
D
putrides, oſchaufele cæur , & altere les humeurs contenusen iceluy,
dont ſe fait fieure . La ficure quarte donc , eſt celle qui retourne , & a
Cauſes. fon accés le quatrieſme iour , ayant deux jours d'intermiſſion . Les cauſes primi
ciues ſont celles qui multiplient & engendrent vn humeur inelancholic , comme
le long vrage des lcgumes, pain bis & brudé, chairs ſalées , de bæuf, chéure , cerf,
vieux lićures, vieux fromages,choux, gros vins , & autres ſemblables. Les cauſes
antecedentes ſont redondance d'humeur melancholic en toutes les veines. Les I want
tha
coniointes ſont les humeurs melancholiques putrefiez hors les grands vaiſſeaux, t
signes. en l'habitude du corps . Les ſignes de la vraye quarte ſont pris de crois choſes:
ſçauoir eſt naturelles, non naturelles , & contre nature. Des choſes naturelles:
pource que la temperature froide & fciche, l'âge vieil, ceux quiſont froids & grar
Sers , ayans perites veines & occultes , la rate imbecille & enfléc, font ſuiets à telles

fieures.Des choſes non naturelles : pource qu'en cemps d'Automne ceſte eſpece
de ficure eft fort frcquente : non ſeulement pource que l'Automne et froid &
fec,
Des Tumeurs en general. 283
FA A ſec,& par conſequent propre àfaireamasd'humeur melancholic : mais auſſi à cauſe
que par la chaleur & aduſtion de l'Eté paſſé les humeurs eſtant bruſlez , ſont aiſé
ment tournez en acrabile (commequi diroit, bileou colere noire , laquelle couleur
procede d’aduſtion ) d'où ſe font fiéures quartes, beaucoup plus perilleuſes que cel
- les quiſefont ſimplement de l'humeur melancholic. Brefen touttemps froid & ſec,
e regionfroide & ſeiche,les corps froids& ſecs,aiſément ſont induits à auoir telles fić
1 ures: ſi principalementà cela eſt conioincte vne façon & condition de vie triſte, pe
nible &faſcheuſe,pleine de crainte & anxieté. Des choſes cõrre Nature : c'eſt qu'au
commencement de l'accés, quand la matiere felmeut, furuient friſſon laborieux,
comme lion auoit les os froiſſez. Le pouls au commencemenc elt petit, tardif, pro
fond,& comme reciré en dedans,ainſique celuy des vieillesgens. L'vrine eſtblanche
) au commencement, & aqueuſe, declinantà liuidicé . En la declinaiſon, eſtant la ma
tiere cuite, l'vrine paroilt noire: non point par ſuruenuë de quelque mauuais acci
dent,ou excés de la chaleur, (car ainſi ſeroit-elle funeſte & mortelle ) maispar ex
crecion de la maciere conioincte, ſçauoir de l'humeur noir & melancholic. L'accés
B peut durer vingt-quatre heures, & alorsdonne quaráte-huiệt heures d'intermiſſion .
Souuent celle fićure proúient par l'obſtruction,douleur & dureté de la ratelle,reten.
tion des mois & hemorrhoïdes . Eſdites fiéures ſurviennent au commencement des
acccz,rigueurs,horripilation ,baaillement,grande froideur,& tremblement,iuſques
5 à claqueter les dents, qui ſont les precurſeurs ou trompettesquiannoncent la venuë
2 de la fiéure.Telles choſes ſe font,à cauſe de la qualité & matiere fiéureuſe,qui altere
& corromptles humeurs contenus dedans les veines & arteres, de façon queNature
o lesaen horreur, & les veines & arteres les ietcent hors d'une grande ſecouſſe, & les
1 reſpádent parmy la chair, nerfs & membranes iuſques au Pannicule charneux.Ceſte
qualité febrile eſt ſi cuiſante,& ſe mcut ſi rudement, queles parties par où elle paſſe,
ES en ont celle douleur qu'il ſemble qu'on les pique & deſchire.Parquoy ilnefauctrou
C uereſtrange, ficelte matiere fiéureuſe,foit froide ou chaude, caule friſſon : car l'eau
ce boüillante iettéeàl'improueu ſur vn corps nud, le fait trembler auſſibien quela froi
ES
C
de : toutesfois la fiéure,dequelque eſpece que ce ſoit, eſt touſiours fondée en cha
с leur.Ainſiles parties ſenſibles irritéesd'humeurfebrile,ſecoüent toute la perſonne.
Jorsquela vertu expulſiue taſche à iercer ce qui luy nuiſt. Delà vient le tremblemér
qui demonſtre l'accez,lequel dure iuſques à ce que la matiere febrile ſoit conſom
mée & dillipée ſenſiblement & infenſiblement. Senſiblement,comme par ſueurs,
le vomiſlemens, fluxde ventre,flux de ſang,Auxd’vrine,& autres. Inſenſiblement, par
It reſolution, qui ſe fait par inſenſible trāſpiration,par lebenefice des forces, & chaleur
n naturelle de noſtre corps.Les fiéures quartes en Eſté ſont briefues ,en Automne ſont
C longues,& principalement ſur la fin d'iceluy,ſelonHippocrates. Celles qui prouien- Prognoſlic.
nentde tumeur de foye,racelle,ou autre maladie precedente, ſontpires,& fouuentſe lin Aph.25
. 2.
.
terminenten hydropiſie.La quarce qui commence en Automne,louuentſe terinine
au Printemps ſuiuanc.Au reſte,ne dure iamais plus haut d'vn an : pourueu qu'il n'y
ait faute du malade, ny du Medecin : car pour cela, il ſ'en eſt veu quelquesfois durer
douze ans. Celle qui eſt faite par aduſtion du fang ou phlegme ſalé, eſt deplus facile
& bricfue curation,quecelle qui eſtfaite paraduftiond'humeur melancholicoubi.
D
licux. L'on eſt plusfurieux & penetrant,l'autre eſt plus peſant & difficile àdiſcuter.
D Fernel,liure quatrielme des fićures,chapitre neufieſme,dit que les fiéures ſe guariſ
fentplus ſouvene par nature,que par lesremedes,parceque la cauſe en eſt ignorée.
La cure conliſte en diete & medicamens. La diete doit eſtre ordonnée ſur les ſix Curation:
choſes non naturelles,contrariancà la cauſe.Lemalade n'vſera de chair de pourceau Diese.
ny deschoſes Aarueuſes,viſqueuſes,glutes oiſeaux aquatiques,poiſſons ſalez, grof
fe venaiſon,nyd'aucune viande de difficile digeſtion . L'vlage de vin blanc tenu & vlage du
mediocrementchaud,eſtbon pouraccenuer & inciſer l'humeur melancholic , pro- vin.
voquer les vrines & ſueurs. Er meſmes prisau commencement de l'accez, excite vo . vomiſſemēr.
miſſement,lequela tanc de vertu pour la guariſon de la quarte , que par iceluy ſeul
pluſicursonteſté guaris. Les exercices,frictionsdeuantle repas, & autreschoſes ac
couſtumées par mediocrité ,font bonnes.Les affe & ions de l'ame contrairesà la cauſe
d'où ceſte fićureaura eſté excitée,doiuenteſtre permiſes commetousieux ( excepté
le icu d’amour )ſon d'inſtrumens de muſique, & autres choſes refiouiſſantes. Du
commencement,ilfaut doucement traiter le malade ,& ne faut vſer d'aucun fort ou
Bb
284 Le feptieſme Liure ,
Medicaměs. violent medicament.Carau commencement cet humeur opiniaſtre eſt rendu plus A
Saignée. rebelle & reueſche,par la chaleur des violensmedicamens.Si le fangelt abondant il
en faut tirer de la Baſilique oumediane,auec telle caution que l'il ſe mõſtre noiraſtre
& elpais,ille faut laiſſer couler : ſiau contraire il ſe monſtre cenu & bien coloré , le
faudra promptement arreſter. La maciere doit eſtre digerée & diminuée par fyrops
d'epithyme,de ſcolopendre, capilli Veneris , de eupatorio , auec eaux de houblon ;
Experience bourroche,bugloffe,& leurs ſemblables. le proteſte auoir eſté cauſe, par l'ayde de
Tutubeur. Dieu,de la guariſon de pluſieurs qui long temps auoient eſtévexez de ladicefiéure,
donnantà boire au commencement de l'accez, ſur la declinaiſon de lamaladie,trois
doigts d'eau de vie,auecvn peu de theriaque diffouten icelle,ou deux ou troisgrains
de muſc,diſſous enmaluoiſie .Leſquels remedes ie baillois ſelon la force du malade,
& les indications cy-deſſus métionnées:le tout apres auoir vſé de remedes generaux
& particuliers, pour la preparation & excluſion de l'humeur melancholic. Car pour
enparler à la verité,la fiéure quarte inueterée ne peut eltre guarie , ſi le corps n'eſt
grandementeſchauffé paralimens &medicamens.Parquoy en ce cas , ie ne trouue B
hors de raiſon ( ce que pluſieurs diſent auoir heureuſement pratiqué ) donner auma
tin vin blanc à boire,dans lequel par l'eſpace d'vne nui& auront trempé fueilles de
ſauge. C'eſt auſſi choſe veile, vn peu deuant l'accez , oindre toute l'eſpine du dos,
d'huiles propres à eſchauffer les nerfs,comme ſono l'huile de ruë, de poiure , auec vn
peu d'eau devie,ouhuile de caſtorée,qui aura cuir ſur les charbons dans vne pomme
de colocynthe vuidée de ſes grains,auecpoiure,pyrethre ,& euphorbe pulueriſez , &
ce iuſques à la conſomption de la moitié de l'huile,le tout en apres exprimé. Telles
onctions valent non ſeulement à miciger la vehemence de l'horreur & friſſon , mais
auſſi à elmouuoir les ſueurs. Car celsmedicamens par leur chaleur & humidité eſ
meuuent 8c eibranlent cet humeur peſant, & non obeïſſant à la faculté expultrice :
n’eſtant l'humeur melancholic autre choſe , que comme la lie de toute la maſſedu ‫ ܂‬30

ſang. Mais ſi au contraire la fieure quarte eſtoit excitée d'aduftion d'humeur bilieux,
illa faudroit traiter par remedes refrigerans & humectans,vſant de potage d'ozeille,
laictuë,pourpié ,concombres ,citrouilles, melons, & ſemblables . Autremét qui vou
droit vſer de remcdes eſchauffans,il rendroit cel humeur plus rebelle par diſſipation c
Liu. 11. ch.8. de ce peu qui luy reſteroit d'humidité :ainſiTrallian raconte auoir guary pluſieurs
quibuoient telles fieures, pourauoir vſé en temps commode & auparauant l'accez wolle
d'epithemesmediocrementrefrigerans. Quantaux medicamens purgatifs qu'ilfau asd
juni
dra vſurperdeuant que venir à ces particuliers,leſené, l'agaric, rheubarbe, diaphæ
nicum ,font recommandez pardeſſus les autres. Auſſi eſt le diacarcami,duquel Ron
delet ſe dit auoir guary pluſieurs ficures quartes,
De l'Aneuriſme. CH A P. T XXIV .

Neuriſme eſt vne tumeurmolle,qui obeïſt au toucher, engendrée de


Definition ſang & d'eſprit,cſpandus ſous la chair par dilatation ou relaxation d'v
d'aneuriſme. ne artere : combien que l'Autheur des definitions ſemble vouloir l'a
neuriſme aduenir par dilatation de quelque vaiſfeau veineux en gene
Les cauſes. ral. Galien dir,que quand l'artere eſt ouuerte par anaſtomoſe, il le fait C: \
vne maladie dice aneuriſme.Elle ſe fait auſſi quand l'artere eſt bleſſée d'vne playe, D
& la peau qui gilt deſſus, ſe cloft & cicatriſe, & la playe de l'artere demeure ſans MASC

eſtre agglutinée, ny bouchée, ou remplie de chair: femblablementpour auoir ou


uert vne artere en lieu de la veine faiſant la phlebotomie. Donc les aneuriſines ſe
font par anaſtomoſe, & diapedeſe, ruption, eroſion , & playe . Icelles aduiennent en
toutes les parties de noſtre corps,mais le plus ſouuent à la gorgedes femmes qui onc
mauuais accouchemens: carretenantviolentement leurhaleine,cauſe que l'artere
ſe dilate & rompc,puis le ſang & l'eſprit ſortēt petit-à- petit,& f'amaſſene ſous le cuir.
signeso Les ſignes ſone tumeur grande ou petite ,auec pulſation, couleur , comme la peau' ter
eſtant en ſon temperamentnaturel,molle au toucher,quicede & obeïſt quand on la
preſſe auec les doigts,de façon queſi la tumeur eſt petite,elle ſe perd du touc,à cauſe
On oit in
que le ſang & eſpritentrent au dedans du corps de l'artere, puis ayantoſté les doigts 2001
de deſſus,recourne ſubic comme elle eſtoit auparauant. A d'aucuns quand on preſſe
aneurismes: des doigts deſſus,on ſent vn bruit ou liflement:& non ſeulement quãdon preſiedel
Des Tumeurs en general . 285

A ſus,maisauſſi fans compreſſion qui ſe faitpar l'impetuoſité de l'air ſpirituel,qui entre


& fort par la petite ouuerture de l'artere.Mais és aneuriſmes qui ſe font par vne gran . Prognoftica
de ruption de l'artere,on n'entend aucun bruit: cartel fifflement vient pour l'angu
ſtie & pecite ouuerture . Si les Aneuriſines ſont grandes , eſtans aux aiſſelles, aines, &
autres parties où ily a grands vaiſſeaux,ne reçoiuenccuration: parce que les inciſant,
2
en fort ſubic vne grande abondance de fang, & d'eſprit vital , qui cauſe ſouuent la
more du malade. Če que i'ay veu quelquesfois, & de recente memoire à vn Preſtre Hiſtoires
de S. André des Arcs ,nommé maiſtre Iean Maller, demeurant à la maiſon de mon
lieur de Thou , premier Preſident. Ce Preſtreauoit vne aneuriſme de groſſeur d'une
noix ſur la iointure de l'eſpaule, & luy conſeillay qu'il ſe donnaſt garde de la faire
ouurirſurſa vic :mais au contraire qu'ilvfaſt del'vnguent de bolo, & de compreſſes Remedesproa
1 trempées en ius de morelle & ſemperuiue,ineflées auec formage frais & eſcreme, & L'aneuriſme.
pres porten
autres choſes froides & aſtringentes, melme de l'emplaftre contra rupturam , d'vne

lamine de plomb , & que ſes chauſſes fuſſent vn peu courtes , à fin que ſon pourpoint
luy ſeruiſt de ligature pour preſſer deſſus. Auſſiqu'il euitaſt toutes cholesqui ſubti
B liencle ſang : meſmes qu'il ſe gardaſt de chanter à pleine voix audit S. André , com
me il faiſoie volontiers.Ce qu'il fit par l'eſpace d'vn an : toutesfois il ne peut cant fai
ſon
re que la tumeur ne ſ'augmentaſt, & ſe retira vers un barbier , qui penſoit que
aneuriſme fuſt vne autre eſpece d'apoſteme : & pour ce luy fut appliqué au ſoir va
ruptoire pour faire ouuerture. Le lendemain au matin l'ouuerture faite ietta vne
‫ܬܪܚ؛‬
grande quantité de ſang, dont eſpouuenté , cria à madame la premiere Preſidente
que l'on m'appellaſt pour l'eſtancher ,en luy diſant,que ie luy auois bien dit qu'il n'y
falloit faire ouuerture : & deuant que ie fuſſe vers luy, auoit rendu l'eſprit. Parcant concluſion ?
ie conſeille au ieune Chirurgien qu'il ſe garded'ouurir les aneuriſmes, ſi elles ne ſont Le moyen de
fort petites , & en parties non
dangereuſes, coupant le cuir au deſſus, le ſeparant de guarir les
l'artere,puis on paſſera vne aiguille à ſeton , enfilée d'vn fort fil, par ſous l'arrere aux aneuriſmes
deux coſtez de la playe,& fera ladite artere liée,puis coupée ,& la playe traitée com- par operarios
me vne ſimple playc,laiſſanttomber le filer de ſoy-melme: & ce faiſant Nature en
gendre chair, qui ſera cauſe de bouſcher l’artere. Les aneuriſmes qui viennent aux
Ceux qui ont
с parties interieures,font incurables , & aduiennent fouuentà ceux quiont eu la verol eu la verolle
lc,& fué pluſicurs fois ,à cauſe que leur ſang a eſté grandement eſchauffé & ſubtilié,
font ſuiets
qui cft cauſe que celuy qui eſt contenu aux arteres,cherche à ſortirhors ,& fait dila aux aneurif
tation du corps de l'artere,voirequelquesfois à mettre le poing. Ce que j'ay veu au mes internes.
corps mort d'vn nomméBelanger, maiſtre tailleur d'habits ,demeurant ſus le pont Hiſtoire.
S. Michel , pres l'enſeigne du Coq, lequel auoit vnc ancuriſme à l’artere veineuſe,
dontilmourut promptement eniouant à la paulmc, parce que ledit vaiſſeau ſe cre

ua . Ic l'anatomiſay,& trouuay vnegrande quantité de ſang eſpandu dedans le Tho


rax, & le corps de l’artere dilacé , iuſques à y mettre le poing, & ſa cunique interne

toute oſſeuſe. Ce que ie monſtray peu apresaux Eſcoles de Medecine à pluſieurs au


diteurs,faiſant vne diſſection anatomique, dont les ſpectateurs furent grandement
und : eſmerueillez : & pource ie la garde en mon cabinet comme choſe monltreuſe. Pen
dant que leditBelanger viuoit ,auoit yn tres -grand battement de toutes les arteres,
& diſoit ſentir vne extrême chaleur par tout le corps , & fouuent comboit en defail
lance de cæur . Monſieur Syluius Le& teur du Roy en Medecine, luy fiſt oſter le vin, symptomes

D & en licu d'iceluy vſoit d'eau bouillie , & ſouuent toute pure: fon manger eſtoit de d'une cer
formages frais entierement eſcremez : meſmement luy en faiſoit appliquer ſur la taine anena
douleur, en forme de cataplaſme. Au ſoir vſoit d'orge mondé,auquel il y auoit fari- riſme.
ne d'orge,& femencede pauot : par interualle prenoit clyfteres refrigerans, ou caſſe
1 . mundée toute ſeule. Et me dit ledit Belanger, qu'il n'auoit point receu de tous au

tres Medecins ſi grande ayde , que du conſeil dudit Syluius . Or la cauſe pourlaquel
lotelles aneuriſmes deuiennent groſſes , & leur circonſcription oſſeuſe ,c'eſt que le
fang de lattere chaud & boüillant fait que la cunique premierement ſe dilare &
clargiſt : puis en fin ſe dilacere & rompt , empruntant lors desparties voiſines matie
: reſemblable à ſoy pour ſe reünir, & fait lors vne tumeur grande ou pecite, ſelon la ca

‫܂ܐܢܐ‬ pacitéde la partie,puis peu à peu la circonſcription de la cumcur le deſſeiche & en


cauſe mate
durcit,en façon de vailleau ,ſe faiſant cartilagineux, voire oſſeux par
ca
sielle & efficiente: ainſi que les pierres ſont procreées aux reins & à la veſſie . Car la

maticre terreſtre du ſang ſedeſſeiche & eſpaiſliit par la chaleur eſtrange,quifait que
Bb ij

1
286 Le VII. Liu. Des Tumeurs en general.
ſ'adherant contre la cunique de l'artere, & des parties qu'elle occupe , ſ'endurciſt & A
deuicno oſſeuſe : & cepar vnegrande prouidence deNature ( chambriere du grand
Dicu)voulant faire rampart, commevn bouleuert fort, de peur que le ſang chaud
&bouillant,& plein d'eſprit,ne s'eſcoule, & paſſe au trauers de la tunique de l'artere
aneuriſmacizée,ou dilacée: lice n'eſt qu'on vueille dire celle dureté aduenir à raiſon
des medicamens froids& repercutiens, continuellemétappoſez ſus telles tumeurs,
qui ont vertu d'endurcir & eſpaiſſir : comme il eſt aiſé à colliger de ce que dic Galien
chap.dernier du 4. liure de Preſagitione ex pulſibus. Dauantage à cellesquiſontauec 2

grande tumeur,fouuenton n'yſent aucune pulſacion, ny aufli en preſſant deſſus, on


ne peut renuoyerle ſangau dedans de l’artere,parce qu'il y en a trop grande quanti
té , & auſſi qu'il ſe concrée enthrombus,& apres ſe pourrift, à cauſe qu'iln'eſt plus
flabellé & entrecenu dela chaleur naturelle du cæur,dontſ'enſuit extreme douleur,
puis gangrene & mortificacion de la partie,& en fin la mort.

fin d # livre des Tumeurs en general.

SS
287
A
1

n
C

1. Table des Chapitres du huictieſme liure


8
des Tumeurs contre Nature
en particulier.
E l'eau qui vient à la teſte des perits enfans , appellée Hydrocepha
le.
Chapitre j .
Du Polypus. chap.4.
De la tumeur qui eft ſous les oreilles , nommée Parotide. Chap. ij.
Des tumeurs chair fuperfluë des Gencimes, appelées des Grecs Epox
lides .
Chap.iij.
De Ranula , ou Grenouilletre. Chap.v.
Des Glandules & Amygdales, engroßies & sumefiées. Chap.vi.
Delatumeur,inflammation de relaxation deluule,nommée des Latins Columella.chap.vij .
De la Squinance. Chap. vių.
Du Goüeire, ou Bronchocele. Chap.ix.
De la Pleurefic. Chap. x.
De l'Hydropiſie. Chap. xi.
De la curation de l'Hydropiſie. Cbap.xi.
De la rumeur & relaxation du nombril, appellé des Grecs Exomphalos. Chap. xiya
DesHargnes ou greneures ,quifonttumeurs aux aines& aux bourſes des teſticules.Chap.xiv.
De la curation de la Hargne. Chap xv .
Da poinct doré. Chap.xvi.
Autre maniere defaire le poinet doré. Chap. xvi.
Autre maniere defaire le poinct doré. Chap.xvii.
De la relaxation du gros Boyas culier. Chap. xix.
De la tumeur du Fondement. Chap.xx.
Dw Panaris, ou Paronychie. Chap xxi,
De la tumeur des Genouils. Chap.xxij.
Des Dragonneaux . Chap.xxij.

Bb jij
288

LE HVICTIESME LIVRE ,

traitant des Tumeurs contre Nature

en particulier .

PAR AMBROISE PARE , DE LAVAL AV

MAINE, CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy .

PREFACE.

Avtant que la curation doit eſtre diuerſifiée ſelon la varieté A

de la temperature, non ſeulement de cout le corps,mais en ſpecial


de chacune partie , & ſuiuant la vertu , forme, figure, ficuation , &
ſenſibilité d'icelle , il m'a ſemblé eſtre cres - neceſaire de traitter
des tumeurs qui aduiennent à chafque partie , commençant à
celles de la ceſte , puis aux autres. Or il vient tumeur ou à
toute la ceſte , ou à quelque partie d'icelle , comme aux yeux,
oreilles , nez , genciues ,& autres parties . Celles qui contiennent couce la ceſte, fonc
hydrocephale & phyſocephale .

De l'eau qui vient à la teſte des enfans, appellée Hydrocephale.

CHAPITRE PREMIER. 23

Definition. YDROCEPHALOs eſt vne hydropiſie de la teſte,ainſinommée


des anciens Grecs , parce que l'humeur qui en eſt la cauſe , eſt
Etymologie.
aqueux.Cemal vient ſouuent aux enfans à l'heure de leur naciuicé ,
Ceux qui ſont
fubiets à hy quand les matrones leur preſſent la ceſte,ou la tirent par violence ,

'drocephate. ou par contuſion , commecheute ou compreſſion, qui eſt cauſe de


rompre quelque vaiſſeau ,cõme veines ou arceres,leſquelles eſtans
rompuës, le langſort hors & ſe corrompt & ſe change en vne ſub
Les cauſes. ftance d'humeur aqueux , parce que les petits enfans ont encores le sang ſereux. Cee
Cauſes intera te tumeur vient auſſi de caufeinterne, commedequelquc abondance de feroſitez,
des . ou par vne acrimonie & ſubtilité du ſang chaud & boüillant, lequel reſude & coule
au trauers des porofitez des vaiſſeaux, penetrác entre le cuir muſculeux & le pericra
ne, & quelquesfois entre le pericrane & le crane, ou entre le crane & la dure -inere,
Signes pour ou aux ventriculesdu cerueau ,& ſubſtance d'iceluy Les ſignes pour cognoiſtre quád
cognoiſtre où cet humeur eſt ſeulement entre le cuir muſculeux & le pericrane , c'eſt qu'on voit
['humeur eſt vne tumeur molle ſans douleur, qui obeïſt facilement quand on preſſe du doigt
contenu .
deſſus, & retourne & releue ſubitement. Les ſignes quand l'humeur eſt entre le
pericranc & le crane , font preſque ſemblables, fors ſeulement que la tumeur eſt plus
Des Tumeurs en particulier . 289
A dure & fenfoncemoinsſoudainement, parce qu'on la touche auecques plus de di
ſtance & interpoſition de pluſieurs parcies: ioint auffi que la douleur eſt plus gran
de. Or lors que cethumeureſtentre le crane, & la dure mere, ou aux ventricules du
ccrueau, & en touteſa ſubſtance,le malade a les ſens hebetez , comine l'oüye , & la
veuë:& quand on preſſe ſus la tumeur, elle ne ſ'enfonce pas aiſément , ſi on ne pref
fe de force ,alors elle obeïſt, & principalement aux petits enfans, parce qu'ils ont
leurcrane mol , & leurs ſucures laſches & entr'ouuertes naturellement , & par accia
dent encoresplus, à cauſe de l'humeur, quieſt córre nature,qui les relaſche & dilate
dauantage. Cet humeurefleuele crane,& principalementà l'endroitdes ſutures:80
telle choſeſe cognoiſtaiſémēt parcequ'en preſſant deſſus la tumeur,l'humeur ſen
fuic auprofond de la ceſte. Et en ceſte eſpece d'hydrocephale , la douleur eſt plus
grande, & toute la teſte cft fort groſſe, & le front fauance & for-ietre en dehors: &
quád lemalade aduiſe quelque choſejilla regarde d’æil ferme& arreſté, &larmoye, Hiſtoire de
à cauſede la trop grāde quantité d'humeurs contenus en la teſte. Veſale eſcrit auoir vefale.
veu vne fille de deux ans, malade deceſte affe& ion, qui auoit la teſte plus groſſe que Au
B nulhomme,& auoit le crane non oſſeux, mais tout membraneux , ainſique leless en en- tre hi
fans quine ſontencoreà terme: & auoit de l'eau contenue en la ceſte iuſqu'au poids ſtoire.
deneufliures. Albucraſis dir auoirveu vn enfant,duquel la teſteſagrandiſſant tous
lesiours pour l'aquoſité contenuë dedans, en fin deuint figroffe, qu'il ne la pouuoit
ſouſtenirdebout,ny aſſis : & mourut quelque temps apres. I'ay veu quatre enfans Hiſtoire de
malades de ceſteaffection de la teſte , de l'un deſquels ie fis ſection apres ſa mort : & l'Autheur.
proteſte n'auoir trouué de cerucau nonplus gros qu’on eſteuf : & iamais n'en ay veu prognostic.
vn ſeul guarir, lors que l'aquoſitéeſten grande abondance aux parties interieures de
lateſte:mais lors qu'elloeſt aux parties exterieures ,on reçoit guariſon . Doncques ſi Cure.
l'humeur eſtſeulement entre le cuir muſculeux & le pericrane, ou entre le pericrane
& crane,fielle eſt pecite , faut eſſayer la reſoudre : & li l'on ne peur , il faut faire inci
hon , evitantlemuſcle temporal, & faire ſortir l'humeur qu'on trouue , comme vne
laucuredechair ſanglante :autresfois du ſang noir:& fielle eſt cauſée de contuſion ,
on trouue auec ledit humeurdes trombus deſang .Ayāt fait l'ouuercure, & l'humeur
I C eſtantcuacué,on remplira la playe de charpy ſec, & ſera mis pardeſſus yne compreſ
3 ſe,faiſant ligature propre : & le reſte de la cure ſe parfera comme il ſera neceſſaire.
Du Polypus. CHAP . II.

E Pourpre ou Polypus, eft vne tumeur contre nature faite au nez , prenant Definition de
le plus ſouuent ſon origine aux os cribleux. On le nomme ainſi pour la fi- Polypus.
militude qu'il a auec les pieds du Pourpre marin , autrement dit Poulſe- Lepourpre
pica , &auſſi pource qu'il reſſemble de conſiſtance à la chaird'iceluy.Celle maladie marineft vne
ſeiche.
bouſche & empeſche le nez des malades , leurfaiſantennuy & incommodité tant à
parler qu'àreſpirer,& ietter les excremens , ayans les narilles eſcarquillées, & la
face horrible à voir. Cornelius Celſus dit que Pourpre eſt vne petite chair quel- Cornelius
quesfois blanche, & quelquesfoisrougeaftre,adherante à l'os du nez, dic Ethmoi . Celfus .
3 de ou cribleux , pendante quelquesfois ivſques ſus la léure. Elle croiſt auſſi en
derriere , bouchant le trou du palais , par lequel l'air & les excremens deſcen
D dent du nez au deftroic de lagorge , cltant de telle grandeur qu'on le peut veoir
au derriere de l'Yuule : & eft fouuent cauſe d'eſtrangler le malade , par faute d'a
uoir ſon inſpiration & expiration .Il y en a cinq eſpeces: La premiere eſt vnemem- Cinq eſpeces
branemolle,longue , mince, ſemblable à la luette relaxée & abaiſſée, attachée au de Polypus.
milieu du cartilage du nez , pleine d'vn humeur pituiteux & gluant,qui fait ron- demorbis
Hip.lib. 2.
fier lemalade en dormant,qui ſort hors du nezen expirant,& r'entre en inſpirant, & Premiere
parler d'vne voix caſſe. La ſecondeeſpece eſt vnechair dure au toucher , engendrée
d'vn ſang melancholique non aduſte qui bouche la narille, & donne empeſchement seconde.
àlareſpiration,qui ſe fair-par le nez. La troiſieſmeeſt vne chair eminente ſus le carti- Troiſieſme.
lage,rõde,molleautoucher,engendrée d'vn ſang phlegmatique. La quatrieſme,eſt Quatrieme.
vne tumeur dure , ſemblable neantmoins à chair , quifait bruit quand on la touche,
commeſic'eſtoit vne pierre , laquelle eſt engendrée d'vn ſang melancholique, fort
delleiché,& quiſepeurdite ſcirtheconfirmé& inſenſible.La cinquieſme,lont plu- Cinquieſme.
feurs petits chacres engendrez de biaisen la ſuperficie du cartilage.Aucuns d'iceux
fone vicerez , lesautres non : & de ceux quiſont vicercz, forc vne ſaniepuante , in
Bb ij
290 Le huictieſme Liure ,

1
Autres dif- fecte , & de mauuaiſe odeur. Il ne fautmettre la main à ceux qui ſont douloureux , a
ferences. durs auecrenitence,ayans la couleur cirant ſur le liuide ou plombé, parce qu'ils cien

nent de la nature du chancre,& fouuenty degenerent totalement.Toutesfois à cau


Medicamens ſe de la douleur,on pourra vſer des medicamens cy - deuant declarez , où nous auons
arodyns. parlé de la cure du chancre ,leſquels ſont palliatifs & anodyns, comme ceſtuy. 2 .
olei de vitell. ouor . Zij . lichar.auri , & cuch. præpar. an . 3 j. ſucc. plantag . & ſola.
an . 3j.f. lapid. hæmat. & camph . an . z. B. agiten. ſimul longo tempore in morcario
plumbeo , & fiac medicamentum , duquel en ſera appliquédedansle nez . Ceux qui
ſont mols , laxes & fans douleur , ſont curablesquelquesfois, les arrachanc aucc yn
inſtrument propre à ce faire, ce quei'ay fait ſouuentesfois, ou conſommant par cau
teres actuels, appliquez auec cannules, de peur qu'on ne touche aux parois& pare
ties faines : ou bien par cautere potentiel, comme d'Egyptiac fortifié fait de parties
Medicamens cſgales de ſes ingrediensauec vitriol,lequel conſomme ceſte chairſuperfluë. Autano
pour conſons enfait l'eau forte , ou huile de vitriol , conſommant du tout ſa racine: car filen reſte

mer le Poly- cant ſoic peu d'icelle , il retourne facilement


. Et lors qu'on y appliquera le cautere
pus.
actuelou potentiel , ou quelques medicamens acres, il faudra appliquerſur le nez , & B
aux parties d'iceluy , medicamens repercuſſifs, froids, & aſtringens, en les renouuel
lant ſouvent, afin de feder la douleur, & empeſcher l'inflammation , comme vn
guentum de bolo , nutricum , populeum , ouialbumen cum oleo rofaceo agitatum ,
& autres .

De la fameur qui eft fousles oreilles , nommée Parotide. CHAP. III .

AROTIDE eſt vne tumeur contrenature , occupantles glandules &


Definition de
parties d'autour, qui ſont ſous les oreilles ,dictes Emundtoires du cer
parotide.
ucau : leſquelles , parce qu'elles ſont laxes & rares , facilement reçoi
o
ucnt les excremens d'iceluy. Les vnes ſe font par criſe , comme il 'ad
Differences.
uienc fouucnt apres quelque longue maladie : autres lors que le cer
ucauſe fenc opprimé de beaucoup d'humeurs , leſquelles il chaſſe & expelle en ceſte C
Pourquoy la
parcie , comme choſequi luy eſt du tour contraire.Telles apoſtemes ſont ſouuentes
de ele foisaucc grande inflammation, à cauſe que l'humeur qui eſt chaud & mordiquant,
parotides. peche quelquesfois plus en qualité qu'en quantité . Semblablement il y agrande
douleur pour la diſtenſion des parties ,& exquis ſentiment à cauſe du nerf de la cin
quieſme coniugaiſon , lequel eſt diſperſé par toutes les parties voiſines : & pour les
membranes du cerueau qui ſont proches ; qui eſt cauſe que le malade fent vnc dou
leur intolerable à la teſte , & à toutes les parties de la face tumefiées. Aulli tellc ma
ladie vient d'vn humeur gros & gluant, quitombe ſus leſdites glandules . Lesieunes
gens ſont plus courmentez de telle affe & ion que ne ſont les vieils .Souuentesfois

1 auſſi aduient fieure, & inquietude.Telles tumeurs ſont difficiles à guarir, lors qu'el
Prognoſtic.
les ſe font par criſe & d'vn humeur froid, tent & gluant: & lors qu'elles ſe terminent
Cure. par ſuppuration , ſort le plus ſouuene grande quantité de maciere. La curation ſefera
par bon regime de viure, lequel ſi la matiere dontelle eſt engendrée eſt chaude,ten
dra à frigidité: auſſi ſi elle eſt groſſe & craſſe , la maniere de viure ſeca chaude & de
fubtile ſubſtance : & fily arougeurà la partie qui demonſtre grande inflammation D
Gal. 3.de la & abondance de ſang, la phlebotomie y eſt grandement neceffaire. Quant auxme
compofuion dicamenstopiques commenous enſeigne Galien ,nedoiuent eſtre ſemblables com
des medica MO
me aux autres inflammations, à ſçauoir repercuſſifs, & principalement ſitelles cu
mensſelon les
lieux, ch . 2. meurs ſont faites par voye de criſe : d'autant que là où Nature taſche à ſe deſcharger,
Hip.aph . 21. fauc que le Chirurgien cende pareillement, lors principalement que la deſcharge ſe
liure 1. fait par lieux propres & conuenables par nature , & non incommodes par accident.
Le ſemblable ferons, lila matiere donc eſt engendrée la cumeur ,elt veneneuſe , d'au ini
tant que l'on cauſeroit vn plus grand mal, la renuoyanc aux parcies interieures. Para
quoy le Chirurgien doit avoir eſgard d'aider à nature en ce qu'il pourra , en actirano
Gal. 3. de ede
ceſtemauuaiſe humeur par medicamens accractifs.Or fi la fluxion eſt ſi grande , & ac
la compoſi
sion des me compagnée d'extreme douleur , dont len pourroicenſuyuir veilles , inquierudes &
dicamens re- fieures qui pourroientprofterner les vertus, Galien eſt d'aduis de mefler bien peu de

lon les lieux, repercuſifsaucc grande quantité de reſolutifs.Parquoy au commencement ſera ap :


chap 3 , pliqué vn tel cataplaſme.22.farinæ hordei, & femin.linian.3 ij.coquant.cum mulla,
Des Tuineurs en particulier. 291
A autdeco& .camomil. addend. butyri recent. & oleicamomil.añ. Z j. fiat cataplaf
Ho
ma. On vſera auſſi dece liniment. 22.butyri recent. Z ij,olei camom . & lilio.añ.3j.
is
vnguent. de alth. 3B.ceræ parum , fiatlinimentum : duquelſera frotté toute la par
cie, &cappliquant de la laine graſſe. Lors que la douleur eſt aucunement appaiſée,
a.
on vſerademedicamens diſcutiens & reſolutifs plus forts, comme, 24. rad. alch. & medicamens
0
bryo.añ.Zij.folio.rut. puleg.orig, añ.ñ. j. flor.camomil. & melilot,añ.p.j.co- reſolutifs.
quanturin hydromelite, piſt. paſſent.addend: farin. fænug.orob.añ.zj. pul. ireos,
12
camomil.& melilot.añ.3 ij.oleianethi& rur.añ.z j. B. fiat cataplaſm . Et encore
pourdauantage reſoudre, tu pourras vſer de l'emplaftrede oxycroceum & demeli
lor. Sila rumeur vient dure, tu auras recours auxmedicamensordonnez au chapi Medicamens
es
tre de Scirrhe. Pareillement ſi elle tend à ſuppuration , tu appliquerastel remede.suppuratifs.
24.rad.lilior. & ecp.fub cinerib.coctar. an. Ziij.vitell.ouor. ij.axung. ſuillæ & vn
te guentibafilico.ana. žj.far.ſem.lini z j.B. fiaccataplaſm.vcarciseſt.Etřilelt neceſſai.
fc de faire apertion , lera faite, & l'vlcere traicté comme auons dit par cy.deuant.
TC
3 2
1. Des tumeurs & chairs fuperfluësdes Genciues, appeliées des Grecs
lo
Epulides. CH AP. IV.

Pýlis cſtvneexcroiſſance de chair , qui ſe fait aux Genciues entre les Definition
dents , quipeu à peu croiſt, quelquesfois de la groſſeur d'vn æuf ou
plus, de façon qu'ellegarde de parler & maſchet ,icttant ơne humidi
té faliueuſe d'odeur fecide: & louuent le tourne en chancre. Ce que
l'on cognoiſtra par la douleur , chaleur , & autres accidens: & lors n'y Prognoſtic
faut toucherpar l'æuure de main. Mais à celle qui n'eſt douloureuſe, on la pourra Care.
extirper: ce qui ſe fera en la liant & ſerrant auec vn fil double , iuſques à cequ'elle
be : puiseſtantcheute, faut cauteriſer fa racine, ou autrement reviendroit,auec
to
vn cautere cannulé deſſus eſcric:ouauec vn potētiel, comme huile de vitriol, ou cau
1
forte, fiproprement appliqué, qu'il ne face leſion aux parties ſaines. I'en ay ampucé, Hiſtoire
te
C quieſtoientſigroſſes, que partie d'icelles ſortoithors la bouche, quirendoit lema
C ladefor hidcux à voir, & iamais aucun Chirurgien n'en auoit oſe entreprendre la
5 guariſon, à cauſe que ladite excroiſſance eſtoit de couleur liuide : & ie conſiderois
de outreceſte fiuidité, qu'elle n'auoit point ou peu de ſentiment: donc ie pris la har
dieſſede la couper , puiscauterizer , & le malade futentierement guary,non toutes
es
fois àvne ſeulefois ,mais à pluſieurs, à cauſe qu'elle repulluloit, combien que ie
jo l’euſſe cauteriſée. Ec quien eſtoic cauſe, c'eſtoit vnepetite portion de l'os de l'aluco .
. leoùſoneinſerées les dents , qui eſtoic alceré & pourry l'en ay ſouuentesfois trou
BS ué, qui par longue eſpace de temps ſ'eſtoient degenerées en cartilages, voire en os ;
IS & partant le pluſtoſt qu'il ſera poſſible on viendra à la curacion . Car lors qu'elles
1
fone petites & non enracinées , ſontplus faciles à curer , d'autant qu'on trouue ſeu
IC leme nt vn humeurglaireux dedans, quipetit à petit ſendurcic , & lesrend tres dif
ficiles à curer.
2
1
c CH P. .
De Ranuls , ou Grenoüillette .
D D
L ſe fait ſouuentesfois ſous la langue , vne apoſteme qui empeſche de bieri
proferer la parole , appellée des Grecs pour ceſte caufe Barrachium, & en Batrachium .
Latin Ranula: & en noſtre langue Grenouille : pour ce que les patiens dif
ficilement peuuent articuler & interpreterleur langage Gnon en grenouil.
lant. Elleeſtfaite de maciere pituiteufe , froide,humide, grofle & viſqueuſe ,tom- Canje.
1

bant du-cerucau ſous laditelangue, en laquelleeſt trouuée vne ſanic groſſe & vif
queuſe,ainſi que le blanc d'vn ocuf, tant en ſubſtance qu'en couleur,& quelques
foisauſſi eſt de couleurcitrine. Or pour ſeurement parfaire la curation , il faut faire Curation:
ouuerture de ladice apoftemcauccquescautereactuel, pluſtoſt qu'auecques lancec
te :autrement le plus ſouuentreîterée, voire par pluſieurs & diuerſes fois. Parquoy
ouuriras laditcapoſteme ainſi que fenfuir. Il cc conuient auoir vne piece de fer, de Lemoyen de
figurecambrecomme vn chauffe-pied, & feras ouurir labouche du patient , puis la faire l'onmey
poſeras ſous la langue, & au milieu deladite piece de fer y aura vn trou , lequel metę turs.
trasàl'endroic oùil ſera beſoin faire l'ouuerture, & par iceluy appliqueras le caun
292
Lehuictieſme Liure ,
& par cemoyen ne pourras toucher dudit cautere , nulle autre partie de A
tere
la uel,
boua&che . Semblablement ne fautobmettre ,alors qu'appliquerasle cautere , elle
uer de ton poulce la tumeur par deſſous le menton : à celle fin de ne faillir à bien fai
re ton cuure, puis apres l'apertion faiđe, feras vacuation de la matiere. Et le mala.
de lauera ſa bouche d'eau d'orge, en laquelle on aura fait vn peu boüillir ſucre roſat
& miel. Ce faiſant l'vlcere ſera guarie toſt apres , & fans nul accident..'
La figure de la piece de Fer , da du Cantere actuel eft telle.

Mies

Des Glandales & Amygdales, engroſſies ea tumefiées.


CH AP. PL,

Deſcription L'entrée du deſtroit de la gorge vers la racine de la langue, Natus


des Amys reamis deux glandules vis - à- vis l'vne de l'autre , de grandeur &
dales. figure d'vne amande: pour ceſte cauſe ceſdites glandules ſontdi.
Plage des tes Amygdales. Leur office eſt de receuoir l'humeur faliueuſe di
Amygdales. ſtillant ducerueau qui reſpond ſur la langue pour l'enrouſer, hu
meeter, & tenir freſche par deux conduits manifeſtes, à fin qu'en
parlantneſe deſſeiche par trop , & n'interrompe la continuation
de la parole. Qu'il ſoit ainſi, on veoid les febricitans,par la chaleur eſtrange de la fie
ure, qui aura conſommé ceſte humidité ſaliueuſe ,nepouuoir parler , ſi premiere
Cauſes. mentn'ontlaué & humecté labouche.Or ces glādules,parce qu'elles ſonten vn lieu
chaud & humide , fontfortſubjectes à inflammation , & ſouuenț auec le ſang y fuë 1.

vne grande porcion d'humeur picuiteux , cru & viſqueux, dont ſ'enſuit cumeur, qui
vient ſouuentesfois par trop boire de vin pur & fumeux, manger trop gloucement
signes. les viandes, & ſeſtretenu au ſerein. Les malades ont grande peine d'aualler leurs
morceaux, & ſentent grande douleur à les tranſgloutir, & fouuentont fieure. Quel
quesfois ces glandules ſontſi fort tumefiées, enſemble les muſcles du Larynx, & au
tres du col ( cequ'on void aux Squinances ) qu'elles occupent la voye de l'air, dont D
Care. le malade ſuffoque & eſtrangle. Pour obuier à tel accident , faut purger & ſaigner le
malade, & luy appliquer ventouſes derriere le col, & ſur les eſpaules,& faire fri&tion
& ligacures , & vſer de gargariſmes aſtringens: & où elles l'apoſtumeroient, on fera
apertion auec la lancette. Et poſé le cas que l'on euſt fait toutcela,1cantinoins la flu
xion fult augmentée,defaçon que le pauuremalade fuſt en danger de mort, pour ne
L'endroit pouuoir reſpirer,à fin d'euiter tel peril,fautfaire inciſionà la trachée artere,appelléc
pourfaire vulgairemét la canne du poulmon au deſſous du naud de la gorge. Or on peutfaire
l'inciſion à la hardimět l'inciſion en ce lieu, parce queles veines & arteres iugulaires en foncellon
trachée arte- gnées :ioint auſſi qu'il y a peu dechair en ce lieu :& pour bien faire, on cõmandera au
Te .
malade auoir la teſterenuerſée en derriere,afin que ladite trachéeartere ſoit plus ap
paréte:puis on fera l'inciſion tranſuerſalemétauec vne lancette courbée appellée Bi
itorie,prenantiuſtemétentre les deux anneaux,ſe donantgarde de toucher laſubſta
ce cartilagineuſe,maisſeulement lamembrane quiles tienciointes enſemble. Orles
Des Tumeurs en particulier . 293
1

A lignes que l'inciſion eſt bien faite, c'eſt quele vent ſort par la playe , qui ſera tenuë signes debă.
ouuerte iuſqu'à ce que le perillde fuffocation ſoit paſſé: puisſera coufuëfans tou. n:operation.
cher au cartilage : & ſi les leures dela playeeftoient comme calleuſes & endurcies,
faudroit les ſcarifier ou couper , à fin de faire la playe recente , pour mieux apres la
14
conſolider, ainſicomme nous dirons aux léuresfendues qu'on appelle bec delieure .
l'ay penſé quelques- vns , auſquelsgrande portion de la crachée artere eſtoit cou- Atteſtation
péc ,& meinementaucuns de ſes anneaux cartilagineux , quiontefté guaris , com de l'Au
mei’eſcriray en mon liure Des playes de la gorge . theur.

De la rumeur, & inflammation de relaxation de l'v uale ,nommée des


Latins Columella. CH AP. VII .

’Vuule eſtvn petit corps poin &tu & ſpongieux , de figure pref- Deſcription
que ſemblable à vnepomine de pin , ſuſpendue perpendiculai- de l'vuule.
B
rement à la fin du palais , à fin de rompre l'impetuoſité de l'air
exterieur , attiré & inſpiré des poulmons , comme nous auons
dit en l'Anatomie. Aulli eſt comme vne touche ou archer qui vlage.
couche les cordes d'vne viole pour la faire reſonner. Souuentel
ic reçoit abondance de rheume du cerucau , qui faitqu'elle
Clubestiv la magnitude ou grandeur , deuenant groſſe , longue & grelle en la
poincte: qui fait qu'elle cauſe pluſieurs accidens , comme la toux par vne continuel
je irritation , qui fait perdre le dorinir, & garde de bien proferer la parole , & parler
du nez bien ſouuent. Dauantage le malade eſt contraint de dormir la bouche ovuer- Accidens.
te , & luy ſemble touſiours auoir vnmorceau en la gorge , & fouuent en vain ſ'effor
cedel'aualler, & quelquesfois ſuffoque. Il faut purger , ſaigner ,ventouſer, clyfte- Cure.
riſer,ordonner leregime ,vſer de gargariſmes aſtringens, & autres remedes :& fi
par cesremedes ne peut eftreguarie, ſera cauteriſée auec eau fort : ce que j'ay fait
fouuentauecheureux ſuccés. Etſile maladene peuteſtreguary par tels medicamés,
faurvenir à l'operation manuelle pluſtoſt quelaiſſer ſuffoquer le pauure malade , Quelle Vuule
pourucu quela tumeur ne ſoit de figure ronde. Auſli ſi elle eft rouge & pleine de doit eſtre cu
réeparope
fang, & fort douloureuſe , ou de couleur noiraſtre , comme les chancres, à telle ne rat ion ma
faut aucunement toucher par inftrument, ny par cautere actuel, ny potentiel. Au nuelle.
contraire , ſi elle eſt longue & fubtile , ſe terminant en pointe , trainant ſur la lan Le moyen de
guc, &par le bouteſt laxe & molle, n'eſtant trop rouge ny trop pleinede ſang, mais faire l'opera
au contraire tirant ſur la couleur blanche & ſans douleur, le Chirurgien peut be- tion.
ſongner aſſeurément, & ce faiſant oſtera ce qui excede ſa longueur naturelle. Et
1
pour la couper on fera ſeoir le malade à la clairté, luy commandant ouurir fort la
bouche, & ſera baaillonné : puis on prendra auec des pincetces l’excremité de ladi
te Vuule , & auec vn ciſeau ſera couppé ce qui eſt contre nature : ou bien ſera lié
: auecvn telinſtrument, lequela eſté innoué par monſieur Caſtellan , homme tres Monſieur ‫ܙܰ܂‬
doćte & de bon iugement, Medecin ordinaire du Roy , & premier de la Royne Caſtellan
mere: lequel inſtrumentpeutpareillement ſeruir à lier lesPolypus , & verruës du medecin
col de la matrice, tres-docte
D
D

(
1

294 Le huictieſme Liure ,

A
relaxée.
Figure d'un inftrument pour lier de faire tomber luule trop
1.

A Monſtre yn anneau , dont la partie ſupe


A
A rieure eſt vn peu caue , & peut eſtre
d'or ou d'autre matiere .
B Vn filet double & ciré ,lequel finſere
dedans la cauité dudit anneau , & ſe
ſerre par le moyen d'vn næud coulāt.
CVnautre fil defer ,dedás lequel ledit fil
paſſe pour eftre ſerré, lors qu'on aura
pris tant de ladite Vuule qu'il en ſera
beſoin poureſtre couppée ſansaucun
flux de ſang. Et alors qu'on voudra
B teſerrer ledit filet , il ſera repaſſé par
la verge de fer marquée C: & ferré B
tant qu'on voudra : laiſſant ledit filer
iuſques au lendemain , dont fon ex
tremite pendra hors la bouche, puis
de rechef fera ſerré comme deuant.
Orparcelte aſtridion'on fait tomber
vne partie de ladite Vuule , & par ains
ſi le patient recouure ſanté . Ie t’ay
fait figurer trois deſdits inſtrumens,
que tu peux choiſir à ta commodité,
comme tu vois en ceſte figure,

Figure de deux diuers Speculum oris, pour retenir la bouche onuerte du


malade , à l'heure de l'operation.

ENtittiiEnDE
HOUTENFT N

speed
D

Dauantage ſi en ladice Vuule eſtoit vlcere corroſiue , outre qu'elle fuſt relaxée,
accompagnée d'vn flux de ſang , alors la faudroit cauteriſer & conſommer auec ync
telle cannule feneſtrée, & cautere actuel, li dexcrement qu'on ne couchaft aucune wag
autre partie de la bouche .

ales
LA
Des Tumeurs en particulier. 295
A
La Cannule feneftrée auec son cautere actuel.

1
2
2 De la Squinance. CHAP, VIII.
7
2
Quinance eſt vne inflammation de la gorge , ou du Larynx, qui empeſche Definition:
3 B louuent l'air d'entrer & ſortir par la trachée arcere , & la viande d'eſtre aual
lée en l'eſtomach,leſquelleschoſes ſont neceſſaires à la vie des animaux. Les Les eſpeces
1
Grecs l'appellent Synanche. Ilyen a de trois eſpeces & differences. La premiere eſt a differen
5
auecquesgrande douleur ſansapparence de cumeur au dehors , parce que l'humeur ces.
eſt contenu au derrieredes deux amygdales, pres les vertebres du col :& partant ne 1. Eſpece.
peuteltre apperceuë ſlon ne preſſe ſusla langue auec vne ſpatule ,ou ſpeculum oris,
& alorson void vnerougeur& inflammation en ceſte partie. Auſſi le malade a diffi.
culté de reſpirer & d'aualler les viandes,tire la langue hors la bouche(comme faic vn Signes.
chien qui a grandement couru ) & la tient ouuerte pour mieux attirer ſon haleine, &
parle du nez,eſtane ctõrainteſtre couché,ou aſſis pour mieux auoir ſon vent: ſon boi
remonte & fort quelquesfois par les nafeaux ,à cauſe que la voye de l'air, du boire &
manger ſonceſtouppez : il a les yeux flamboyans & fort enflez, ſe forjeccant hors de
leurorbite : & à tels ſouuenraduientvne ſubite ſuffocation auec yne eſcume ſortant
hors labouche.La ſeconde eſpece eſt celle en laquelle on void vne tumeur par de- 2. Effece?
dans lagorge ,& non oupeu apparente au dehors, la langue aucunement eniée , les
C amygdales,& quelquesfois lesmandibules.La troiſieſme eſpece eſt celle en laquelle 3. Eſpece.,
Signes.
on void la tumeur aux parties excericures ,& peu aux interieures ,& celte eſt la moins cauſes de
perilleuſe.Les cauſes ſont externes ou internes, commequelque coup,ou vneareſte , Squinance.
& autre choſe eſtrange demeurée en la gorge, ou trop grād froideur par bruynes , ou Cauſes exter
exceſliuechaleur.Les cauſes internes procedent d'vnemultitude d'humeurs de tout ncs.
lecorpsoudu cerucau,qui cauſe Auxionquelquefois dematiereſanguine,choleri- Cauſes inter
que,ou de pituite,& bien peu ſouuent d'humeur melancholique.Les lignespour co . nes.
gnoſtre chacun humeur particulier,oulors qu'ils ſont meſlezenſemble ,onteſté dics
cy-deſſus parlant des apoſtemes en general. La ſquinanceeſt plus perilleuſe & mor
telle,lorsque la tumeur n'appert ny dehorsny dedans. Celle qui elt au dehors & non
au dedans,eſt la moins perilleuſe,d'autant qu'elle n'empeſche pas les voyes duman
ger& boire , ny.celles de l'inſpiration & expiration . Aucuns meurent de ſquinance
en douze heures, autres en deuxiours ou en quatre les autres en ſept: ce qui eſt prou
ué par Hippocrates .Qui anginam euadunt,iisadpulmonem malum tranfit, & intra feptem
0
D eres moriuntur : fi verò hos dies euaferint ,fuppurantur. Ainſi telle apoſteme ſe termine Hip.3.li. des
quelquesfois par deliceſcence ,c'eſt à direpar renuoy occulten autre partie , comme Pro gno10.
phor. ſtica
en la poi&trine par vn empyéme, ou aux poulmós & autres parties principales , qui eſt liu.s.
cauſede la mort du malade: auſſi par reſolutió ou ſuppuration.La meilleure voye eſt
la reſolution, qui ſe fait quand ily a peu de matiere , & qu'elle eſt ſubcile, & meſme
métapres la ſaignée, & auoir vſé de certains gargariſmes à ce cõuenables . Quelque
foisaufli ſe termine par ſuppuration , & lors qu'elle vient par voye de criſe eit ſouuét
mortelle pour la grande quantité d'humeurs qui tombent ſur ceſte partic , & emper
chent la reſpiracion. Pour lon manger il humera potage d'une poulaille & de veau
cuitsauec laictuës,pourpié ,ozeille,lemences froides.S'il eſt debile,on luy fera pren
dredes aufs mollcts cuits en eau , ou quelques preſſis & orge mondé, oiivne deco
&tiondepruneaux, raiſins boüillis en eau & lucre, & autres alimés ſemblables. Ileui.
tera du tout le vin,& en licu d'iceluy boira hydromel & eau ſucrée , en laquelle ſera
mis ſyrop toſat,ou violat,accteux,delimons :il euitera le long dormir . Cependant le
Сс
296 Lehuictieſme Liure ,

Chirurgien aura l'æil tant aux remedes vniuerſels que particuliers, à cauſe queceſte a
maladie ne doune grand loiſir. Parquoy il faut ſaigner le malade de la baſilique du
coſte de la fluxion , & leiourmeſmedesveines de deſſous la langue, pour vacuer la
matiere conioincte. Auſli ſeront appliquées ventouſes ſur le col & eſpaules , ſans &
auec ſcarification ,auecfrictions & ligatures douloureuſes aux extremitez. Dauanta
geon luy donnera clyſteres, ſuppofitoires, ou noiets acres & cuilans, à fin de diuer
tir & de tourner l'humeur conioinct à la parcic,Et ſubit qu'on void la fluxion ſe fai
re , il faut vſer de gargariſmes repercuſſifs , à fin de l'empeſcher : carelle pourroit
ſuffoquer le malade: ce que i'ay veu aduenir , quelque diligence que l'on y peuſt
faire. Ecparcanton fera gargariſer ſouuent le malade d'oxycrat ,puis de ceſtiny, 2.
pomorum glueſt. ñ . iiij.
ſumach , roſar. rub , añ . m . B. berber . 3 ij . bulliant omnia

cumaq. fufficienti vſque ad conſumptionen mediecacis , addendo vini granat. acid .


3. iiij . diamor . z . ij. & iterum bulliant modicum , & fiat gargariſma, ve artis eſt. On
en pourra faire d'autres d'eau de plantain , morelle , verjus auec ſyrop roſat, & au
ttes Ceinblables. Et ſi la fluxion eſtoit faite de mariere pituiteuſe ou phlegmatique , il
B
faut adioulter auſdits repercuſifs alum , eſcorce de grenade, noix de cyprés , vn peu
de vinaigre , & ne faut vſer aucunement de repercuſſifs aux parties exterieures, de
peur de faire renuoy de l'humeur au dedans de la gorge , mais appliquerlinitifs, afin
derelaſcher & rarefier les parties, pour donner paſſage à quelque portion d'humeur
Signes de la
qui ſe reſoudroit. Et fion void que la tumeur vueille tendre à reſolution , qui eſt lors
reſolution.
que le maladeeſt ſans fieure, & aualle mieux les viandes , auſſi qu'il reſpirc, & parle
plus à ſon aile ,qu'il dort bien , & a peu de douleur , qui ſont ſignes de pronipte gua
riſon , lors on vlera de remedes reſolutifs. Au contraire , fion cognoift la tumeur ſe
terminerà ſuppuration , ſerontappliquez remedesſuppuratifs, tant par dedans que
pardehors , comme gargariſmes faits de tacines de althea, figues, iujubes, railins
dedamas , dacces boüllies en cau , tantqu'elles ſoient parfaitement cuitces , & d'i
celle decoction en ſera gargariſé & tenu en la bouche. Semblablement eſt bon gai
gariſer de laict de vache, ou de chéure,auecques ſuccre & huile d'ainandes douces,
ou violac vn peu tiede . Car tel remede ſuppure & appaiſe la douleur . Aux parcies ex
ternes de la gorge on appliquera cataplaſmes ſuppuratifs: aulli onenuetopperale €
col de laine noire auec le fuif , imbuë en huile de lis. Et lors que l'on cognoiſtra la
tumeur eſtre ſuppurée , la bouche du malade ſera ouuerte auec vn ſpeculum oriscy
deſſus eſcrit, & la tumeur ſera percée auec vne longue biſtorie ou lancerce courbée,
ſemblable à celle - cy . Apres l'ouuercure faite ,on vlera de gargariſmes mondificatifs,
Gargarifme comme, 26.aquæ hord . 15.B.mellis roſar. & fyrup. rofar. ficcar.añ.3.j.fiat garga.
mondificatif. riſma. Ou
bien de vin & mielmellez enſemble', deſquels à toutes heures ſ'en garga .

riſera : & apres la mondification on fera cicatrice à l'vlcere , adjouſtant aux ſuſdıcs
gargariſmes vn peu d'alum de roche.
ket ,a
Figure des deux Biffories courbées , dont l'une eſt ouverte ,l'antre enfermée
dans ſon manche os chaſſe.

edi
a
Des Tumeurs en particulier
. 297

A De Gongrona ( c'eſt à dire Goüetre ) ou Bronchocele. CH A P. IX .

. Ongrona , eſt vn mor duquelvſe Hippocrates en la ſentence 14. de la


lli troilieſme ſection du 6. des Epid . & lignifie ce qu'on dit en François

11 Goüecreou Goüetron , en Grec Bronchocele ,en Lacin Hernia galturis : qui


eſt vne tumeur en la gorge & au col , & vient du mot Grec Gongros, qui
21. ſignific proprement certaine eminence ou appendice ronde , qui croiſt
0 aux troncs desarbres,appellée par Pline liure 17.ch.24. Clauus, fungus,parella.Gon
ch gros ſelon Theophraſte liure i . de l'hiſtoire des plantes , ch.13. elt vn certain vice
d'oliuier , quand ileſt bruſle du Soleil . Telle indiſpoſition vient ſouuent à la gorge
des femmes, comme auons dit des aneuriſmes. Orice mor de Bronchocele eſt com
c. munen general , mais il a pluſieurs eſpeces & differences. Car aucunes ſont Melice . Differencede
rides, autres Steatomes , aucunes atheromes, les autres aneuriſmes. En aucunes eſt Hernia guta
trouuće vnc chair ſtupide,c'eſt à dire auec peu de douleur , & fouuent ſans douleur : curis.
toutes leſquelles ſeront cogneuës par leurs ſignes, & celles qui ſont curables , ou in
B curables. Aucunes ſontpetites,aucunes grandes, quioccupentquaſi toute la gorge:
aucunes ont vn Kiſt, les autres n'en ont point. En celles qui ſe peuuent curer, on fera Care,
ouuerture , ſoicauec le cautere a & uelou potentiel ou lancette: puis ſeroncoſtez les
corps eſtranges toutd'un coup, fileſt pollible : & où on ne le pourra faire , ſeront
oſtezà pluſieurs fois auec remedes propres : puis l’vlcere ſera conſolidé & cicatriſé.
are
De la Pleurefie. CHAP . X.

Leurelie eſt vne inflammation de la membrane appellée Pleura , ou


Definition
bien des muſcles appellez Meſopleurij ou intercoſtaux , cauſée d'vn
ſang ſubtil 8 bilieux, lequel auec impetuoſité monte de la veine caue
aſcendante,à celle qui eſt dite Azygos , & d'icelleaux veines intercoſta
les , auquel lieu eſtant paruenu , quelquesfoisſe ſuppure, & le malade
ſent vne douleur poignante auec ficure & difficulté dereſpirer.Iceluy eſtant ſuppu- signes

ré,quelquesfois ſeuacue par la bouche, les poulmons ſucçans le pus quieſt porté d'i
с
riala ceux à la trachécartere & d'icelle à la bouche : quelquesfois aulli eſt euacuépar les
vrines, & par le ſiege. Et lors que Nature n'eſt forte pour euacuer ceſte matiere, il ſe
fait vngrandamasde ſanie , dont ſe fait empyéme. Et pour l'euacuer le Chirurgien
‫ܣܘܪ‬ eft contraina de faire ouuercure entre la troiſieſme & quatrieſme des vrayes coſtes, Hipp.lib.de
commençant à compter par embas : laquellcouuerture ſe doit faire à la diſtance de morbis intero
nis.
fixou ſepi doigts de l'eſpine par le cautere actuel ou potentiel : ou parleraſoir, lequel
doit auoir double trenchant comme nos Biſtories , & faut couper peu à peu , con

duiſant la pointe vers la partie inferieure de la coſte ,de peur de couper la veine, ar
terc & nerfs, qui accompagnent chacune coſte pour la vie & nourricure, ſentiment
& mouuement des muſcles intercoſtaux .

Figure d'un cautere actuel auec ſa platine.

Ainſi ſera cuacuće la fanic peu à peu , faiſanc clorre le nez & la bouche du malade,
à fin que le diaphragmc & les muſcles qui ſont entre les coſtes , puiſſenc expeller la
Ccij
i eſme
298 Le huict Liure ,

***ation matiere contenue au thorax. D'abondanton pourra faire l'ouuerture auec ce caute. A
du cautere
re actuel, lequela quatre crouspour mettre vne petite chcuille haut ou bas , ſelon
e defa
plasine. qu'on le voudra faire profonder en bas auec vne platine de fer blanc, au milieu de la
quelle ya vn trou pour paſſerau trauers ledit cautere, à fin qu'il ne couche qu'à l'en
droit où on le veut appliquer. Laquelle platine doit eſtre vn peu courbe , à fin de fac
commoder proprement ſus le coſté, & eſtre attachée par ſes quatre coings auec acca
ches . Ecoù le malade ſeroic grand, ayant les coſtes larges'
, on pourroit faire l'ouuer
cure ſus icelles auec vn trepan : laquelle eſtant faite par l'vn des ſuſdics moyens , fau
dra euacuer le pus peu à peu : & puis y ſera fait iniections deterfiues, comme 2.aq.
hord.z vj.mellis roſat.zij. fiatinic &tio : & autres deſquellesnous parlerons cy apres
Hiſtoire. aux playes , enſemble du reſte de la curation . Benedi&t de la Vallée , natif de la ville

de Thurin , aagé de vingt - cinq anstomba malade d'vne pleureſie, laquelle fuppura,
& ſe fit vn empyéme, jettant la bouë parla bouche , la crachant en grande abon
dance fort fecide & puante par l'eſpace de ſix ſepmaines, puis elle farrelta vingriours
apres : au moyen dequoy, lors qu'il ſe baiſſoit & remuoit , on oyoic vn bruit en ſon
B
corps, comme d'une bouteille à demy -pleine. Et pour la guariſon de ce , appelfa plu
fieurs Medecins, à ſçauoir le Grand, le Gros, Durer, Liebaut, Violainc, Malmedy,
leſquels luy ordonnerent pluſieurs remedes : en fin vn iour m'enuoya querir : &
ayant conſideré fon mal , luy conſeillay d'ouurir le cofté pour donner iſſuë à lamatic
re purulente : ce qu'il m'accorda , lors qu'il ſeroit vn peu plus fort.Quelques iours
apres nature fic expulſion de ladite matiere par grands vomiſſemens, en ſorte que
toſt apres fur du tout guary par la grace de Dieu , & de nature , & ſe porte bien pour
culiu. de le preſent eſtant en bon poinet , comme ſ'il n'euſt euiamais mal . Hippocrates dit,
Morbis inter
que quelquesfois il fautcrepaner la coſte quand il faut vuider l'eau qui eſt amaſſéé
au thorax. Les lignes qu'il y a de l'eau contenuë au thorax , c'eſt que le patient a vne
toux ſeiche, aſperité à la gorge , friſſon, fićure, courte haleinc , & principalement
quand on eſt couché, enfleure des pieds & douleur violente : apres vne grande ſoif
& auoir beaucoup beu , il y a de l'eau dedans le coffre. On cognoiſt de quel coſté eſt
l'enfleure au mouuement du flot , & yavn ſon comme d'une bouteille à demy rem
plic. Hippocrates commande de couper la chair ſur la troiſieſme coſte depuis la der
niere , puis auec le foret, ou vne bien petite trepane qu'on ouure la coſte pour vui
der l'eau , ou autre maciere peu à peu , tant qu'elle ſoit du tout vuidée.

De l'Hydropiſie. CH AP. Ý .

Ydropiſie eſt nommée en Grec Hydrops , ou Hyderos, parce que la cauſe


Definitions. materielle eſt eau ou humeur aqueux , que les Grecs appellent Hydor. Pour
Mbien definir ceſte maladie ,nous dirons que c'eſt vne tumeur contre nature,

faicte d'abondance d'eau , de ventofité ou de picuite aſſemblée , quelquesfois en


coure l'habitude du corps, autresfois en quelque partie ,mais le plusſouuent dans
le ventre inferieur, à ſçauoir en la capacité & eſpace qui eſt encre le Pericoine &
les inteſtins. Delà vient, pour raiſon de lamaciere & du lieu ,qu'il y a diuerſes ma
Diuifion.
3. Eſpece. tieres & cfpeces d'hydropiſie. Et premierement celle qui remplit l'eſpace vuide du
vencre, eft ou humide , ou ſeiche. L'humide clinommée aſcites, pourla ſemblan AC
ce d'vn vaiſſeau dit en Grec Aſcos , de la façon de ceux qui ſont faits des peaux
de boucs ou chéures pour y mettre de l'eau , du vin , ou de l'huile, parce que l'eau o
2. Effece eſt contenuë dans le peritoine ,comme dans un tel vaiſſeau. L'hydropiſie ſeiche
eſt appellée par les Grecs Tympanites, ou Tympanias, à raiſon qu'eltant en icelle lc
ventre enflé de ventoſité , ſi on le frappe, ilrendvn ſon approchant de celuy d'un
tabourin . Mais quand toute l'habicude du corps eſt pleine de phlegme blanc, on

3. Effece . l'appelle Anafarca, ou Leucophlegmatia. Elle commence premierement és parties in


ferieures , comme eſtans plus promptes à receuoir la Auxion , & efloignées de la
chaleur naturelle :Con les comprimeauec les doiges, le veſtige d'iceux y demeure ,
& le malade eſt cout bouffi, ayant la couleur du viſage toute blafarde. Elle differe
des deux autres : carenicelle le vérre ſenile le premier, puis les parties inferieures.
Hydropiſie Voila quant aux hydropiſics generales & Vrayes : mais il f'en fait auſſi de parciculic
particuliere.
res , qui prennent leur nom de la partie , en laquelle l'amaſſe l'humeur aqueux ,
comme en la telte Hydrocephalos , à la gorge Bronchocele , en la poictri
ne Plcurocele , és bourſes Hydrocele , & ainſi des autres . Ncantmoins toutes

1
Des Tumeurs en particulier. 299
A onevnemeſine cauſe efficiente, qui eſt l'imbecillité ou einpeſchement des facultez,
principalement alteratrice & conco &trice du foye , prouenante du ſcirrhe & dureté
d'iceluy, ou des petites bubes pleinesd'eau quifengendrent en la membranequi
l'enueloppe, meline de toute forte d'intemperature grande , & principalement de la
froide,qui a premierementcommencé audit foye,ou a ſuccedéà l'intemperie chau
depar diſſipation de la chaleur naturelle, & telle hydropiſie eſt incurable : ou eſt ſur
uenuë par communication du vice d'vne autre partie ſuperieure ou infericurc.
Comme quand vne partie,auec laquelle le foye a connexion, eſt vexée d’intempera
cure grandementfroide, conſequemment le foye en refroidit. Et ſi c'eſt à cauſe des
poulmons, du diaphragme,ou des reins, le mal eſt aiſémencapporcé & receu és par
ties gibbeuſesd'iceluypar les rameaux de la veine caue , qui iſſent & reſpondent à
cetendroit.Mais ſi cela vienede la ratce, eſtomach, meſenteres, ou inteſtins ( entre
autresdu ieiunum & Ilcon ) la communication ſe fait à la partie caue par les veines
inefaraiques, & autresrameaux de la veine porte. Par ce moyen les aſthmatiques,
B phthiſiques, ſpleniques, i&eriques , voire les phrenetiques, tombent en hydropi
B lie: & pourle dire en vnmot ,tous ceux auſquels ou le ſang pur ,menſtruel, ou he
morrhoidal vuidé outre meſure ou ſuppriméeſteint ou amoindrit la chaleurnatu
relle,ainſique le feuſe meurt ou eſteint par trop ou à faute de bois. Autant en faut- il
eſtimer des excrémensdu ventre & de la veſſie ,lors qu'ils ſont immoderément vui
dezou retenus:aufli des viandes prinſes en trop grande ou petite quantité, trop froi.
des,ſans ordre,ſansbeſoin : de peu dormir,de la mauuaiſecondicion & eſtat de vie :
bref de toutesles choſes externes, eſquelles ſe peut comectre erreur en ceſte partie.
Or Aſcités eſt diſtinguée de deux autres eſpeces, tant par la grandeur de la cauſe ef- signes de
ficiente, qui eſt l'intemperacure froide,que vehemence des lymptomes,commede l'hydropiſie
l'appecit perdu , ou corrompu, ſoif inextinguible & tumeur du ventre : dauantage, vrage ditte
queli l'on vient àmouvoir le corps , ou à ſecouer le ventre , l'on entend l'cau fotcer Aſcités.
dedans , comme ſi c'eſtoit vn vaiſſeau demy plein. Et ſelon que lemalade change de
ſituation, ou que l'on preſſe le ventre auec lesdoigts , l'humeur deſcend ou monte,
Symptomes
touſiours empreſſantles conduits:de fait filmonte, il amenędifficulté de reſpira d'Aſcises .
c tion & toux ,& quelquesfois monte & regorge en la capacité du thorax , & cauſe les
melmesaccidensquiſuruiennenten l'empyeme:& ſouuentauſſi les inalades par le
mouuement deſdites aquoſitez, quifuent & refluent, ſemblent eſtreefleuez en l'air
commefil'on ſe plongeoic en l'eau : ce quei'ay ſceu par leur recit, & non par aucun Experience
aucheur. Sileſdites aquoſitez deſcendent, elles empeſchent l'illuë de l'vrine , & des de l Au
excremens du ventre par compreſſion des orifices de l'vn & l'autre cxcrement . Da- cheur. 1

uantage , le malade citant couché à la renuerſe, la cumeur eſtmoinsapparente : par


ce que l'eau ſe reſpand cà & là. Le contraire aduient quand il eſt debout ou en ſon
ſeant,d'autantque l'eau combe cout en vn tas au petit ventre , là où le malade lent
vne peſanteur.Les parties hauces du corps amaigriſſent parfaute de ſang qui ſoit de
qualité & conſiſtence requiſe pour bien nourrir , & les baſſes enflent par defluxion
d'humeur ſereux & pituiteux ſur icelles : le poulx eſt petit,haſtif, dur , auec quelque
tenſion. Ceſte diſpoſition eſt de longue curation, & le plus ſouuentincurable, prin- Prognoftic,
cipalement à ceux qui l'ont apportée du ventre deleurmere ,qui ont l'eſtomach dé
o praué,cache& iques, & de mauuaiſe habitude : és vieilles perſonnes : & generale
0

0
menttous ceux qui ont la vertu debile & languide. Au contraire, lesieunes gensro
buſtes quin'ontpoint de fieure, & deuant que la matiere ou eau ſoit pourrie, & que
le foye & les autres parties ſoient fort alterées, qui peuvent porter le trauail & exer
cice requis à la curation d'un tel mal, peuuent receuoir curation :

Сс із
300 Lehuictieſme Liure,

A
De la curation de l'Hydropiſie. CH AP. XII .

Cure,
A curation ſe doit commencer par les plus aiſez & benins remc
des , qui ſont la diete & medicamens , auant que venir à la para
cencele. Or nous laiſſerons aux do &tes Medecins à corriger l’in
temperie du foye & des autres parties principales , & à ordonner
yne diece deſfeichante aucc les medicamens hydragogues, c'eſt
à dire qui vuident l'eau ,tant par les ſelles que par les vrines.Hip
Pouldre de pocrates commande leur donner ceſte pouldre. 2. cantharid.
ablatis capitibus & alis Z.B.comburant.in furno, & fiat puluis, de laquelle en ſoient
Hip.liu.4.de
vi&t. Acu . donnez deux grains en vin blanc : car on a veu maintesfois nature aidée par tels
li. de inter. moyens , guarir entierement l'hydropiſie. Et pour avancer la cure nous excitons
affe &t. quant-& - quant aucunesfoisla partie enflée à faire quelque reſolution d'une partie
de l'humeur,en y appliquant lesmedicamensfort diſcutiens comme fachers,baings,
Matiere de linimens & emplaſtres .Lesſachers ſeront faits ex macris furfuribus,auena, ſale,ful- B
ſachets.
phure calidis , ou à fauţe de ceux - cy , ex arena,ſabulo ,cineribus ſæpius calefactis.Les
Baings.
bains plus excellens ſont les eaux naturellement ſalées, nitreuſes, & fulphurées, ou
preparées par artifice, en y mercant du ſel nitre & ſoulphire fondus, & fi l'on y veut
faire bouillir de l'aneth , ruë , marjolaine , fenoil, ſtæchas & ſemblables, ils en vau
Linindens.
dront mieux . Les linimens ſe feront d'huile deruë , d'aneth , de laurier & ſcillitic,
auſquels l'on aura fait bouillir vn peu d'euphorbe, pyretre ou poiure . On compoſera
l'emplaſtre ex thure ,myrrha,terebétina ,coſto ,granislauri,cypero,melle, ſtercoribus
bubulo , columbino,caprino,equino ,& fimilibus, quæ vel per fe imponi poterunt.Si
le mal perſeuere, faut paſſer aux ſinapiſmes, aux phænigmes, c'eſtà diremedicamés
rubricatifs , & phyſegines,c'eſt à dire veſiccatoires,ou quiexcitée des veſſies,leſquel
les ſeront coupées & ouuertes pouren laiſſer couler l'eau peu à peu, & fi longuemenc
implaßre, que toute l'humidité ſoit conſommée , & le malade guari de l'hydropiſie. Quelques
pour appli praticiens ayans leu en Galien liure 1. de facultatib ,naturalibus, les laboureurs d'A

quer surle lie, lors que des champs ils portent le bled en la ville , ayans enuic d'en deſrober
Den iro.
quelque portion , ſans que leur larcin ſoitdeſcouuert, auoir de couſtume de cacher
dans les ſacs dudit bled , des bouteilles pleines d'eau : car de là aduenir que le bled
atcirant par le trauers de la terreſtrité du vaſe l'humidité en ſoy, ſegonfle ,
dont il ſe
monſtre plusenflé & plus peſant: ayans , dis- ie, leu tellechoſe dansGalien , ontpen

que le bled a puiſſance d'attirer les caux,& que qui enſeueliroit vn hydropique
dedans, on verroit leſdites caux en bref conſumées & taries .
Sicout cela ne ſert de rien ,on viendra à l'operation manuelle, qui eſt le dernier re
mcde, que les Chirurgiens appellent par vn nom Grec, Paracenteſe. Or deuant que
demonſtrer comme il nousſemble qu'elle ſe doit faire ,il ne ſera hors de propos d'a
mener icy les diuerſes opinions des anciens, touchant icelle operation . Car les vns
Art
l'abhorrent, & les autres l'approuuét : & certes il y a quelques raiſons de part & d'au
tre , leſquelles nous ſoudrons par meſme moyen . Ceux doncques qui reprouuent la
Raiſons.com- dia
tre la Para Paracenteſe ,diſent qu'elle eſt dommageable pour trois incommoditez. La premiere
centeſe. cſt qu'en vuidantl'eau ,ſe faitgrande reſolution & perte d'eſprits, & par conſequent
des forces naturelles, vitales, & animales. La ſecondeque le foye n'eſtácplus ſoufte. D
nu ſur l'eau comme deuant , prend , & parſa pefanteur tire à bas quant & ſoy le dia po
phragme, & les parties thorachiques , dõt l'enſuit coux ſeiche, & difficulté de reſpira
tion .
La troiſieſme
, que le pericoinc qui eſt de ſubſtance nerueuſe ,ne ſe peut bonne
ment poindre,ny inciſer ſans grand danger,ny aiſément agglutiner, pour eſtre partie
Eraſistrate exágue & ſpermatique. Tels ſont les argumens d'Eraſiſtrate & de ſes ſectateurs,pour
improuue la prouuer que la paracenteſeelt dommageable ,maisils en amenent encores d'autres,
Paracenteſe . pour monſtrer qu'à tout le moins elle eſt inutile . C'eſt que l'eau euacuée n'emporte
point quant & ſoy la cauſe qui eſt l'intemperature & dureté du foye , & des autres
parties internes , leſquelles par apres ne laiſſent de l'engendrer l'hydropiſie comme
dcuant.loint que la fieure,loif ,& intemperature chaude & ſeichc, qui eſtoient tem
se poi
perées par l'accouchement de l'eau ,font par l'abſence d'icelle augmentées. Et c'eſt
ie croy , ce qui a eſmeu Auicenne & Gourdon d'eſcrire , que bien peu fonteſchap
pez de la Paracenteſe : mais cour cela eſt fort aiſé à refuter. Car pour commencer
Des Tumeurs en particulier . 301
A
aux incommoditez qu'ils diſent en prouenir: Galien dit que la premiere aduient Refutation
fauce de bien admimſtrer la ponction,àſçauoir quand on laiſſe écouler l'eau coute à
la fois.Erà la verité il y auroit bien plus de raiſon ſuiuant cela , de reieccer la phlebo
comie,parlaquelle on vuide le ſang,qui contientbien plus grande quantité d'eſprits,
&quiſont bienplus purs que ne fait l'eau desHydropiques. Quant à la ſeconde,qui
eſt quele foye n’eſtant plusſupportépar l'eau,attire å bas par ſa peſanteurles viſceres
( thorachiques: cela ſe peutbien euiter en tenant le malade couché à la renuerſe, car
ainſi le foyemeſmene pendpoint. Plus,quelqueconnexion qu'ait le foyeauec leſdi
ees parties,ſin'y eſt-ilpoint tellementattaché qu'illes puiſſe tirer,veu meſme qu'il en
eſtſeparépar le diaphragme, lequel ſouftient leſditsviſceres thorachiques, & eni
(
peſchequ'ils ne puiſſenttomberplus bas. Pour le regard de la troiſiefme incommo
$ dité ,c'eſt ſimpleſfe de craindre l'inciſion du Peritoine, bien que ce ſoit vne parcic
$ nerucuſc & membraneuſe.Car cous les inconucniens qui aduiennent aux parties
nerucuſes bleſſées,c'eſtà raiſon de leur ſentiment,lequel n'eſtant icy que bien petit
ou du cout nul,à cauſe de l'alteration interieure, il n'en faut auoir aucune doute. D'a . Argument
-- ) B bondant,& la raiſon & l'experience ordinaire nous enſeignent que pluſieurs parties du moinsas
nerueuſes,voire les membranesmeſmesſimples,élongnées& dépourucuësde chair,plus.
) ſe peuuent guarir: par plus forte raiſonlePericoine inciſé ſe pourra reprendre, veu
qu'ileſt encore adherantaux muſcles de l'abdomen, & li ſerré auec iceux, que les
anacomiſtes ont bien de la peine à l'en pouuoir ſeparer.Reftel'argument de l'inucili- Reſponſe à
- ré,qui eſt de ſi peu de valeur,que pouryreſpondre, ie ne veux ſeulement qu'vſer des l'inutilité.
2 proprestermesde Celſe.Ic çay bien (dit-il) que laparacenteſea dépleu à Eraſiſtrate
5 &aux ſiens,parce qu'ils ont eſtimé que l'hydropiſie fuſt maladie du foye tant ſeule
1 ment,& qu'en vain lon mercoit peinede vuider l'eau,laquelle n'emportant quant&
: foy l'affe& ion du foye,ne laiſſoit pas de ſer’engendrerencores apres l'euacuation .En
quoy ils ont lourdemétfailly.Car en premier lieu,ce vicene vient ſeulemétdu foye:
: &encore qu'ilen fuſt venu,coutesfois ſi on ne vuide l'eau corrompuë,qui eſt dedans
leventrecontre nature,elle fait grande nuiſance au foye, & à toutes les autres parties
Ic
interieures,augmentant,ou pour le moins entretenantleur durecé & intemperature.
Aucontraire,eſtanevuidée,li elle ne fait autre bien pour le moins elle fait place aux peilité de
C remedes,quipuis apres pourrontguarirlevice deſdites parties:& tantſ'en faut que l'euacuation,
ceſteeau qui eſt ſalée & corrompuë , puiſſe mitiger la fieure, ſoif, & incemperature
- chaude & feiche,quepluſtoſtelle les augmente.Quantà l'intemperature froide,elle
enaccroiſt, en ſorte que cependantla chaleur naturelle eſt en grand danger d'eſtre
- eſteintepar l'abondance del'humidité.Ainſi nous pourrons,fuiuantCelſe,renuoyer Gal. 2. de
Erafiltrate & ſes ſectateurs par deuers Galien, qui les admoneſte d'apprendre l'effen- facul. narur.
ce& la cauſe de cemal, qu'ilsont ignorée,auant que l'entremettre de lecurer ,oude lib.Morbo,
chron.cap.
diſputerdelacuracion.Pareille & dernierereſponſe ferõs- nous àAuicenne & Gour. de hydrop:
don,parla bouche de Celius Aurelianus autheur excellent, combienque methodi
que.Ceux (dit-il) quioſent mettre en auant,quetousceux à quion a fait la paracen
teſc ſont morts,mentent: car nous en auonsveu beaucoup réchaper. Et ſi pluſieurs
.y font demcurez,c'eſt faute que l'ouuerture aeſté faite ou trop tard, ou peu dextre
ment. lenediray plus que ce mot, pour aſſoupir toutes diſputes &contradictions, Nose dili
c'eſtque le malade citant reduit à celle extremité, qu'il ne luy reſte plus qu'un ſeul gemment.
D D remede,ce n'eſtpas trop ſagement fait de diſputer, ſ'il eſt bon de le faire ou non .
Parquoy pour clorre ceſte diſpute auec Celle ,nous ne voulons pas aſſeurer que
tous puiſſentguarirpar ces remedes,Ormaintenant il nous fautdeclarer la methode
defairelaparacentelepour vacuerl'eau contenuë au ventre. Si l'hydropiſic procede
dufoye,ilfaut faire ouuerture à la parcic ſeneſtre: & fi elle vient du vice de la ratie ,
elle ſera faite àla dextre : parce que ſi le malade repoſoit ſur le coſté inciſé,ladouleur
de la playe l'affligeroit,& laquolicé renuerſée ſur l'ouuercure,ſortiroit & diſtilleroit
continuellement,dontl'enſuiuroit trop grande debilitation de la vertu. Ladice inci.
fion doiteſtrefaite trois doigtsau deſſous del'Ombilic, à coté des inuſcles longitu
dinaux (non ſur la ligneblanche)nyen l'extremité nerueuſedes autres muſcles de
l'Epigaſtre,pourobuierà la douleur,& difficulté qu'ilyauroicà conſolider la playe,à
raiſonquecellesparties font exangues.FrançoisRouſſer,Medecin bien eſtimé entre
lesgens do&tes,dicauoirveu à Orleans vn gros Porte -faix,ſurnommé,VaGcupeux,
hydropique de longtemps, deſeſperé de pouuoir iamais reccuoirguariſon:
Сc iii )
auquei
302 Le huictieſme Liure ,

à S. Aignan vn autre ſemblable beliſtre luy perça le ventre d'vn grand coup de cou A
ſteau , d'où auſſi-toſt ſortit grande quantité d'eau pourrie : lequel ſubitement guary ,
reuint à travailler come deuant,ſansretomber en hydropiſie . Ilfueguary par hazard,
La maniere fans que l'inciſion fult faite par la paracenteſe. La maniere de faire la paracenteſc eſt,
de faire la
qu'il faut ſituer le malade ſur le coſté droit, fi on pretend faire l'inciſion au feneſtre:
Paracenteſe.
au contraire, fion la veut faire au dextre, ſera couché ſus le feneftre: puis le Chirur
gien auec vn ſeruiteur pincera le cuir du ventreauecle pannicule charneux, à fin de
l’éleuer en haut : puis le couper en trauers iuſques aux muſcles: cela faic, cirera la
partie ſuperieure de l'inciſion qu'ilaura faite,aſſez haut vers l'eſtomach , afin que lors
que lon voudra conſolider la playe,le coir retourne deſſus pour mieux l'agglutiner :
puis fera vne autre petite inciſion ,coupant les muſcles & Pericoine, ſe donnant bien
2
garde de coucher à l'omentum , ny moins aux inteſtins: & ſera mis en la playe vne
tente d'or ou d'argent cannulée & courbée , de groſſeur d'vn cuyau de plume d'oye,
de longueur de demy doigc ,ou enuiron , ayant la teſte aſſez large , de peur qu'elle ne
tombe en la capacité du ventre : pareillement depeur qu'elle forte de la playe , aura
en ſa ceſte deux pecits trous pour paſſer vn petit ruban, lequelfera attaché au milieu B
du corps ,fi dexcrement qu'elle ne puiſſe ſortir, fi ce n'eſt à la volonté du Chirurgien :
& par icelle l'eau ſera vacuée tant& fi peu qu'on voudra : qui ſe fera par le benefice
d'vne éponge, qu'on meccra dedās ladite tente , laquelle éponge fera lors oftée qu'on
voudra tirer l'eau. L'eau ne doit eſtre tirée tout à coup , pourla reſolution & dillipa
tion deseſprits, qui ſe feroient auec ſi grande quantité d'eau, dont l'enſuiuroit more
Hiſtoire. ſoudaine.Ce que i'ay veu aduenirà vn malade hydropique, qui ſe donna vn coup de

poinçon dedans le ventre, pour faire ſortir les eaux , & fe reſioüiffoir de les voir cou
Jer,& ſon ventre deſenfer : & fut impoſſible d'arreſter leſdites eaux , dont le pauure
malade mourut en peu d'heures,àcauſe que l'inciſion n'eſtoit faite ſelon la methode
que nousauons dit . Dauantage ne faut obmettre à appoſer vne bonne & groſſe com
preſſe par deſſus, & vne ligature;afin de mieux cenir ladice cannule,depeur que l'eau
ne forte hors , contre la volonté du Chirurgien. Et faut icy noter, que ladite cannulc
ne doit eſtre tirée hors la playe, que iuſques à ce qu'on aye faic coute l'euacuation
qu'on pretend , attendu que puis apres ne peut eſtre ſi bien remiſe ,ny ſans grande
violence & douleur, à cauſe que le cuir & pannicule charneux recouurent l'ouuer SD

ture.Or pendant qu'on fera cuacuation de l'eau, faut bien alimenter le malade, &
auoir touſiours l'oeil à ſes forces : & où il ſeroit debile , on ceſſera l'euacuation quel
ques iours ſans nullement tirer l'eau : puis l'ayant ſuffiſamment vacuée , la playe fera
conſolidée,euitant qu'il ne fy face vne fiſtule : laquelle ſelon Hipp.liu . 6. Apho.8 .
eft incurable .
Portraict de la Cannule .

ceso

Autre ma Autres vuident l'eau en ceſte maniere . C'eſt que l'ouuerture faite ils reprennent
que
niere de Dui
der l'eau . les deux léures de l'ouuerture, les percent tranſuerſalementd'vncaiguille , prenant
aſſez grande quantité de chair , afin que ladite aiguille ne rompe ce qui auroit eſté
pris ,commeil ſe fait és becsde lieures, lors qu'on les veut reünirenfemble . Cela fait,
on paſſe vn filec de coſté & d'autre de l'aiguille par pluſieurs fois, afin de mieux tenir
les léures vnies & le trou fermé, de peur quel'eau ne feuacuë ſinon à la volonté du
Chirurgien . Quelquesfois apres auoir eſtéguaris les malades tombent en 1 & tericie,
dice launille, pour la gueriſon de laquelle ilay efprouué tel remede, auec heureuſe Theot 2

iſſuë en vingtou trente iours , & auoient lesmalades long cemps vſé de pluſieurs re doce
l
medes ordonnez par Medecins doctes. 2. ftercor. anſeris z . ij . dill, cum z . iij . vini
albi.colccur, fiat potio , detur duabus horisante paſtum .
Des Tumeurs en particulier. 303
011 A
ar
De la tumeur & relaxation du Nombril, appellée des Grecs È xomphalos.
CHAP. XIII,
ch
re : A tumeur du Nombril ſe fait quelquesfois, à cauſe que le Pericoine eſt re
ur. laſché ou rompu, qui faitque les inteſtins, ou l'omentum ,ou les deux en
de ſemble y tombent,& quelquesfois ſ'y engendre vne carnofité: quelques
ila fois auſlívient par vne effuſion de ſang,commeaux aneuriſmes,ou par vne
OTS feuleventolicé ou aquoſité. Si l'omentum fait la tumeur, la partie ſera de couleur
er: ſemblable à la peau,molle au coucher,& auec fort peu de douleur , & quádon preſſe
men deſfus,r’entrededans le ventre , ou de ſoy-meſme quand le malade eſt couché à la
20 renuerſe,& nefait leditomentum aucun bruit r’entrant dedans. Sice ſontlesince- signes del
tes Ains,outre lesſignes fuſdits,la tumcureſt plus inégale : & quãdon preſſe deſſas pour inteſtins.
CC Jereduire dedans,on ſent vn bruit de gargoüillement, côme aux hernies inteſtinales.
112 Sic'eſtvne carnoſité,la tumeur ſera plusdure & de plus grande reſiſtance, & demeu Signes de
eu 3 Breraenvnmeſme endroit,ſansrentrerau dedans encore que le malade ſe couche à carnofité.
0;
la renuerfc, & qu'onpreffe deffus. Sic'eſt ventofité,la tumeur ſeramollc, fubitre
& - signes de
CC
tourne: & iaçoitquele malade ſe mette à la renuerſe,demeure touſioursen meſme vents.
ON
figure: aufli quand on frappe dellus,fait quelquebruie,commeſi on frappoit contre
2.
vn peric tabourin. Sic'eſt aquoſité,la tumeur eſt ſemblablement molle, mais elle signes d'a
DIE
n'obeït pas quand on la preſſe ſans diminuer ny augmenter. Si c'eſt effuſion de ſang, quofitez.
de elle ſemonftreliuide:& fi le ſang eſt areerial,leslignes ſeront ſemblables à ceux des signesd'effised
1.
aneuriſmes.Parquoy quand la tumeur du nombril eſt faite par le vice des inteſtins,fion de fang.
Te
oude l’omentum ,ou des ventsou aquoſitez ,fouuentla Chirurgie aura lieu , & non prognoſtic.
Le des autres.Or pour la cure des inteſtins & de l'omentum ,le malade ſera couché à la
tenucrfc, & ſeront reduits les inteſtins & omentum . Cela fait ,on tiendra la peau fuf
21 penduëoù eſtoientcontenus leſdits inteſtins& omentum ,puis on en prédra vnepor- Cure
teſtinaldee l'ima
et
to cion,cantqu'il en ſera beſoin,& paffera-on au trauers de la peau ainſi elleuée,vne af- zirbale.
D
fezgroſſcaiguille, enfilée d'une petite ficelle aſſezforte.Puis on fera desinciſionsau.
C tour aſſez profondes , tant qu'il en fera beſoin , à fin que ladite peau ſe reagglutine
Bu
mieux:puis derechefon paſſeraladite aiguille deux ou trois fois,ouplus, ſelon que le
cuiraura eſté eſtendu en groſſeur,longueur& largeur, & fera ſerrée la ficelle aſſez
1.
fort,puis derechefon liera la totalité vers le ventre : & en ce faiſantla peau qui aura
22
cſté diftéduë,tomberaauec leſdites ligatures.Et pour bien faire,lorsque ladite peau
auroit eſtéfort diſtenduë,on la pourra amputer aſſez pres dela ligature exterieure,
puisl'vlcereſeratrai&tée & cicatrizée ainli qu'il appartient. La venteuſe ſera curée Cure deita
par remedescy-deſſuseſcrits aux tumeursvenceuſes. Cellequi eſtfaite d'humeur ventended
aqueux,ſera vuidée,faiſantpetite inciſion ,la cenancouuerte tant qu'il ſera beſoin .
Des Hargnes ou greucures , quifont sumeurs aut aines es aux bourſes des refticales.
CHAP XIV

Emotde Hargnc aeſté donnéàceſte maladie,parce que ceux quien ſont Etymologie
vexez ( pour la douleurqu'ils ſentent ) couftumierement ſonthargneux, .de Hargne.
c'eſt à dire,mal-plaiſans& criars, principalement lespetits enfans.Lesan .
ciésen ont fait pluſieurs eſpeces, toutesfois iln'y en a quetrois propres &
Vrayes, àſçauoir l'inteſtinale, la zirbale , & celle qui eſt compoſée des deux. Les au
tres ne ſontquc ſimilicudinaires, & peuuent venir au Scrotum ou és aines,ſansque
lesinteſtinsou zirbus ſoient hors leur lieu naturel. A icelles les Grecs ontbaillévn Difference
nom propre,cantſelon le lieu où ſe faitcelletumeur,que ſelon la choſe & ſubſtance dehargnesia
quilafait:comme quand latumeurn'eſtqu'aux aines,ils ont nommécelle hargne leurs di
Bubonocele, quenousdiſons Inguinale,ou Hargine incomplette, à cauſe qu'ellene Hers noms,
tombe dedans le ſcrotum ou bourſe des teſticules. Car lors qu'elle y deſcend, eſt
complecte: & fic’eſt l'inteſtin,ſenomme Enterocele,ouinteſtinale: ſi c'eſtlezirbus,
Epiploceleou Zirbale: ſi lesdeux y deſcendentenſemble, Enterocpiplocele.Sic’eſt
Scau, Hydrocele ou aqueuſe: fi duvent,Phyſocele ou venteuſe:& filya du vent &
del'eau enſemble, comme ilſefait ordinairement,prendra ſemblablement lenom
desdeux,& le nommera Hydrophyſocele,c'eſt à dire,aqucuſe& venteuſe. S'il y a
304 Le huictiefme Liure

excroiſſance de chair en la ſubſtance du teſticule ou autour d'iceluy, telle hargne ſe A


nommera Sarcocele ou charneuſe : Pilya veinesgroſſes dilatées & entortillées, Cir
focele ou variqueuſe. Sice ſont humeurs ,la tumeur prendra le nom de l'humeur do
minant, & fera dite phlegmoneuſe , ædemateuſe , & ainſi des autres , comme nous
Cauſes de auons dit au chap . des Apoftemes. Les cauſes ſont pluſieurs, comme excez violens,
hargne. coups , cheute de lieu haut, vomiſſement, coux , beaucoup cheminer, ſauter, dancer,
cheuaucher yn cheual allant dur , crier, ſouffler aux trompes & trompettes ,cors,cor

nets , & autres inſtruments où il faut beaucoup de vent , leuer peſans fardeaux, eſtre
tiré ſur la geſne,auſti l’yfage des viandes viſqueuſes & venceuſes ,8c l'humidité excre .
menteuſe quivient à la partie. Toutes leſquelles choſes peuvent dilater ou rompre
}
la production du Pericoine,lequel eſt membraneux & delié, & partant ſe rompi &
dilace aiſément. Les femmes qui ont porté de gros & peſans enfans, par la grande
diſtenſion du ventre , ou par les violens cris & épreintes des cruels enfantemens,la
pluſpart font affligées d'vnehargne inteſtinale : en laquelle leur tombe l'inteſtinen 4
+
l'aine, à cauſe que le Peritoine eſt relaſché, & quelquesfoisrompu . Pour meſmes
cauſes font pareillement ſuiectes à l'enfleure du nombril, parce que l'inteſtin ou B
omentum y deſcend. Pour la curation il faut vſer des remedes cy- deſſus eſcrits, &
signes. leur faire porter brayers & ligatures propres à celles diſpoſicions. Les ſignes de l'in
guinale ,ſontcogneus par la tumeur ronde trouuée en l'aine, laquelle eſtant preſſée
retourne facilement au dedans. Les ſignes que les inteſtins ſont deſcendus dedans
le ſcrotum ,c'eſt qu'il y a tumeur dure , & lors qu'on les reduit au dedans, ils font vn
bruit gourgoüillant auec douleur . Au contraire ſi c'eſt le zirbus,la tumeur eſtmol
laſſe, & ſemble qu'on couche de la laine :ioint qu'il eſt plus difficilement reduit que
l'inteſtin . A cauſe que les inceſtins eſtans continus en leur ſubſtance, & en quelque
inouuement continuel , non ſeulement l'entreſuiuent, mais auſſi farcirent l'un l'au

tre pour euiter la diſtenſion qui eſt fort douloureuſe en leurs corps membraneux,qui
aduient à raiſon de la mutacion de leur lieu naturel , en vn non naturel . De toutes

leſquelles choſes on ne peut attribuer aucune à l'omentum , eſtant vn corps ſtupide


& preſque inſenſible ,groſſier, peſant, & ſans mouuement aucun : combien qu'au re
с
ſte ilſoit remis auec moins de douleur , & ſans faire aucun bruit . Signes quele Peri
.
coine eſt rompu , quand la hargneinteſtinale croiſt ſubitement,auec douleur cuiſan
te & poignante : car quand il n'eſt qu'élargy & dilaté ſeulement, elle croiſt lente
ment,& auec peu de douleur.Qui toutesfois continuë tant que la tumeur dure & ſc
renouuelle: ce qui n'eſt en la rupture du Pericoine : car le paſſage eſtant vne fois li
bre & ouuert,la tumeur ſe fait & renouuelle ſans diſtenſion , & par conſequent ſans
Prognoſtic. douleur . Les autres ſignes ſeront particulariſez en leur lieu . Quelquesfois iladuienc
que les inteſtins & zirbus adherent contre le proceſſus, de ſorte que nullement on
ne les peut reduire : ce qui ſe fait par vne coherence & glutinoſité de matiere viſ
queuſe,ou de quelque excoriation qui aura eſté faite en reduiſant les inteſtins, ou
par auoir trop longtemps negligé à les reduire , & n'auoir porté vn bon brayer. La
Hargne in- hargne complette inueterée,en laquelle le procez eſt rompu , 8c principalement à
curable.
ceux qui ontia accomply leurs trois dimenſions,ne guaritiamais, ou bien rarement.
Hargne Auſſi quand ledit proceſſus eſt grandement rompu , les inteſtins peuuent tomber
enorme, dedans les bourſes à la groſſeur de la teſte d'un homme,aucc peu de douleur, & ſans
D
danger demort,à raiſon que par la grande amplicude du lieu , la maciere fecale peut
entrer & fortir librementhors les inteſtins.

De la curation des Hargnes. CHA P. XV .

s
Arce que les petits enfans ſont forc ſuiers à auoir des Hargnes,( non tou
tesfois tant la charneuſe ny vaciqueuſe , mais plus fouuent l'aqueuſe & ven
teuſe, & principalement l'inteſtinale, qui leur vient du grand effort qu'ils hotel
font par leur crier & touſſir) pour ceſte cauſe nous parlerons premierement de la
cell
Maniere de curation d'icelles. Le Chirurgien donc eſtant appelle pour reduire l'inteſtin combé
son
reduire l'in- en la bourſe, ſituera l'enfant au liet ,ou ſur vnetable ,la cefte en bas, les feſſes en haut,
teſtin.
& de ſes deux mains peu à peu fera la reduction. Apres il fomentera la partie d'une svon
a
fomentation aftringente,eſgrite en la precipitation de la matrice, puis onapplique
Cataplaſme. race remcde . 2. Præſcriptæ deco & tionis quant. ſuff, far, hord , & fabar.añ.3.j.pul.

t
Des Tumeurs en particulier. 30s

a aloës,maſtic. myrtil. & farcoc. an . z.bol.arm.z fs.ij.incorpor. fimul, & fiat cataplaf.
ſecundum arcem . Ou de l’emplaſtre contra rupc . Deſquels remedes le Chirurgien

?
vſera à ſa volonté ,en bien bandant la partie auec compreſſes & brayers propres à tel
affaire , & fera cenir l'enfantdans ſon berceau l'eſpace de trente ou quarante iours ,
les feſſes vn peu éleuées , & ſur tout on le gardera de crier & toullir .
Aēcc au premier ſermon commande faire tremper du papier en l’eau par l'eſpace 24. chap,
de crois iours,puis en faire une pelotre qu'on appliquera lur l'aine , ayant premiere 96.10,vi
ment reduit l'inteſtin , & ne le faut deflier de trois iours , & de ce verrez grande eff
cace . En lieu d'eau commune, il faut prendre d'vne aſtringente, commecelle qu'on
vſeen la relaxation de la matrice.

Autre remede. ? . fangu.draconis 3 ij.mafticis z j . thuris Z B. nucis cupreſli z ij.


picis nigræzj. pulueriſentur omnia ſubtiliſſimè, albumina quorum numero dno in
corporentur fimul, & applicetur vc dictum eſt. Il faut laiſſer ce remede fur la par
tie cinq ou fixiours, & continuer vn mois, plus ou moins , & fera appliqué fur des
eſtoupes.
B
Autre. 22. thuris ,maſtic .aloës , fangu, draconis , ſarcocol, boli armcnici , terræ
figillatæ ,gumıni ammoniaci torrefa & i, glutinis piſcium , balauſtiorum , nucis cu
preſli,gallarum ,myrcillorum ,hypociſtidos, ladani , añ.3j . miſce , & fiac puluis . De
ceſte poudre en ſera incorporé auec blanc d'euf, & appliqué ſur la partie , & laiſſé
par cinq ou fix jours fans reinuer .
12
Autre , facile à faire.
ol
Prenez blanc d’æuf , farine volatile, incorporez enſemble, & l'appliquez deſſus.
Il faut que l'enfant ait le ventre laſche, qui ſe fera mettant en la boüillie beurre frais,
& vn peu de ſucre. La nourrice fe gardera de boire cau cruë , mais la fera boüillir:
auſſi ne doit manger ſalades, ne fruicts cruds , & pourra boire du vin bien trempé .
Et par ces remcdes proteſte que pluſieurs ont eſté guaris ,& ay gardé les Chaſtreux impoſture
de leur amputer les couillons, deſquels ils ſont fort friands , pour le lucre qu'ils des cha
en reçoiuent, & abuſent ainſi les peres & meres , leur faiſant accroire
leurs enfans ne peuuentguarir ,depuis que le boyau eſt tombé en la bourſe : qui eſt
Per
C vne choſe fauſle & menſongere, principalement lors que le Pericoine n'elt que re
an
laſché & non rompu . Car les ayant ainfi accouſtrez , & tenus le temps que nous Pourquoy fel
COM
auons dit, l'enfant qui n'a encores accomply ſes trois dimenſions, guaric,pourucu guarist la
qu’ongarde cependant la deſcente aux bourſes: & ce d'autantque la voye du Peri- hargne des
US.
par laquelle l'inteſtin cftoit deſcendu , l'appetiffe & reſtrecit , pendantque perits enfans:
toine ,
d'autre
part les inteſtins groſiſſent. Il y a vn Chirurgien , lequel i’eftimc eltre
hommede bien , qui m'a dit auoir guary pluſieurs enfans en donnant de la pou .
dre d'aymantbien ſubtile & mellée auec leur bouillie , & froitoit de mietlaine où ſe
Tel faiſoit la deſcente de la hargne,puis ſinapiſoit par deſſus de limature de fer bien ſub
tilc , & continuoit tel remede l'eſpace de dixou douze iours & bandoit la particauce
1. น brayer propre . Ce qui ſemble eltre fondé ſur ce que l'aymant par dedans , cupide
look
par l'inſtin , qui luy eſt naturel d'arrirer le fer appoſé par dehors,attire auec violen
ce àſoy les corps charneux & adipeux qui ſoncentre -deux, qui bouchans le paſſage
du Pericoine , & auec le temps s'incorporans à iceluy, empeſchenc que l'inteſtin ou
D omentum paſſe & tombe hors de ſon lieu . Ce qui ne doit lembler
plus eſtrange , que
de voirledicaymant par l'entre -deux & trauers d'vne table , pour double & eſpaiſſe
qu’clic ſoit,cirer apres ſoy le fer,ſelon
qu'il eſt promené deça ou delà . Autre remede
par luy experimenté fouuentesfois : Faut prendre des limaçons rouges , & les faire
calciner en vn por de cerre mis au four , & en faire poudre ,de laquelle ildonne com .
me deſſus,aueclabouillie, & aux plus grandelets la fait prendre auec leur porage. La
cure quelquesfois ſe pourra auſſi faire aux plus âgez , voire à ceux qui ont accomply
leurs trois dimenſions,eſtans en l'âge de quarante ans: & pour le prouuer ic reciteray
ceſte hiſtoire. C'eſt qu'vn Preſtre de Sainct André des Arts, nommé M.lean Moret, Hiffoire mes
Epiſtolier,c'eſt à dire , chantant l'Epiſtre au Dimanche, lequel auoic vne hargne in - morable.
teſtinale complette,ſeretira vers moy , ine monſtrant ſon mal , demandant ſecours,
parce qu'il diſoit ſentir vne cres- grande douleur , principalement en chantant fon
Epiſtrc. Voyanc ſa greucure , ie luy dy , que veritablement il deuoit mettre vn
ligo* autre en la place :ce qu'il fic, priant le Curé (pour lors nommé Monſieur le Clerc ,
jafi Doyen de la faculté de Theologie ) 8 les Marguilliers , d'en commettre vn autre ,
1

306 Le huictieſme Liure ,


leur declarant ſon impuiſſance. Ceque luy eſtantaccordé,femitentre mes mains,& A
ie luy ordonnay pluſieurs remedes propres à ſon mal , luy faiſant prendre vn brayer.
qu'il porta par l'eſpacede cinq ou fix ans: & vn jour luy demandant comment ſe
portoit ſon mal,me fit reſponſe qu'il ne ſçauoit plus que c'eſtoit . & qu'il eſtoitguary.
Ce que iamais ie n'euſſe peu croire, fi ie ne l'euſſe veu. Parquoy l'amenay à mon lo
gis ,& vey ſes parties genitales ſans aucun veſtige dehargne :émerueillé grande
Admirable ment commentilauoit peu eſtre guary cognoiſſant ſon âge. Or ſix mois apresque
prouidence. ie l’eu ainſi reuiſicé, aduint qu'il mourut d'vne pleureſie: & ayane ſceu ſa mort, ie
m'en allây enla maiſon dudit Curé, en laquelle ledit Moret ſetenoit, le priant qu'il
me permitt faire ouuerture du corps mort,à fin que i'euſſe cognoiſſance quel baſti
ment Nature auoit fait en la voye où les inteſtinsdeſcendoient:ce que volontiers il
m’accorda. le proteſte à mon Dicu,que trouuay autour du trou de la production du
Pericoine vne ſubſtance adipeuſe de la groſſeur d'un petit eſteuf,infiltrée & atra
chée ſi forc audit endroic,qu'à bien grande difficulté la pouuois deſtacher ſans dila
cerer & rompre les parties adiacentes. Et voila la cauſe pourquoy la guarion ſ'en
eſtoit enſuivie. Semblablement l'ay cogneu quelques-uns qui auoient porté le B
brayer par longues années, ſans autre choſe eſtre entierement guaris : eſtansmaigres
&puis deuenans gras,les inteſtins accueillentgraiſſe qui les groſſit,deſorte qu'ils ne
tomboient nullemencaux bourſes, & ont laiſſe de porter le brayerſans aucune reci
diue. Ces choſes nousmonſtrent,qu'ilne fe faut haſter d'ofter les coüillons aux pau.
ures garçons. Choſe admirable , que Nacure guariſſe des maladies eſtimées incura
bles,fi elle eſt tant ſoit peu aidée. Le principal aideconſiſte à empefcher l'inteſtin de
deſcendre,pendant qu'elle opere , & faire ce que deſſus. Pourceteffe & , auxenfans
vn peu grandelets,aux
& hommes & femmes ,on fera porter des brayers& eſpaulic
res,delafaçon qui eſt portée par ces deux figures.

Figure
des Tumeurs en particulier. 307

A Figure d'un homme qui auroit vne rupture d'un ſeul cofté,avec un brayer, duquel l'efcuffon doit
auoir trois eminences deux enhsui , & l'autre enbas,& au milieu d'icelles une cauité,afin qu'il
ne preſje trop ſur l'ospubis,có qu'il n'y facedouleur.i'ay trouué depuis n'agueres ceſte inuention,
laquelle me ſemble meilleure que toutes les autres parcy-deuantinuentées,à cauſe qu'elle probia
bemerueilleuſement la defiente des inteſtins, & omentum .

To

ode
foc

CO

A
L'eſpauliere, laquelle s'atrache au deuant comme cu vois , & au derriere auli
à l'endroit de D.
B Le brayer .
C La cauité au milieu des trois eminences .

D Dd
ſme liure ,
Le huictie
308

Ausre figured'un homme qui auroit raptare des deux coſtez , & comment il doit eſtre bandé & -lić A
d'unbrayer pour garder que lesinteſtins oul'omentum nedeſcendentauxbourſes: dauantage

la figure dudie brayer , & de fa ligature nommée efpawliere.

A L'eſpauliere fenduë & ouuerto par


le milieu , pour paſſer la teſte. B

BB Le brayer à deux coſtez , entre lef


où la verge
quelsy a vn trou par
BE
doit paſſer. Note quc chaſcun
deſdits coſtez doit eſtre de mel

me façon que celuy de la figure


precedente.

WA
c

Cependant il ne faucomettre le regime du malade,luyenioignant qu'il ſe garde de


toutes choſes qui peuuenc dilater & rompre le procez ou apophyſe du pericoine, &
entrecenir ou augmenter le mal , ſoyenc viandes ou autres choſes, pourleſquellestu
auras recours au chap . 15. parlant des cauſes. Or quelquesfois & ſpecialement aux
plusâgez,lesinteſtins ne le peuuent reduire,à cauſe qu'il y a trop grande quantité de 20
maciere fecale contenuë en iceux. Alors ne ſe faut efforcer le repouſſer par violence,
mais le malade demeurera dedans le lict bien chaudement, la celte baſſe, & les feſſes
Cataplaſme hauces , & on luy appliquera vn cataplaſme tel qu'il s'enſuit.24.rad.altheæ & liliorum
emollient.
an.z.ij.fem.lini& fænugr.añ.z.B.folior.inal.viol.& parietariæ añ.ñ.ß.coquantur in
aqua communi, poſtea piſtentur & paffentur per ſecaceum , addendo bucyri recentis
fine fale & olei liliorum an . q . ſuff. fiac cataplaſma ad formam pultis ſatis liquidæ : &
D
a1
luy ſera appliqué cour chaud ,cant ſur les bourſes que ſur le ventre . Par ceremcde on
trouue fouuent le lendemain les inteſtins reduits de foy.meſmes ,parce quela vento
ficé elt reſoulce : & que la maciere fecale aura fait ſon circuic , & fera rétrée en vn aurre
inceltin pour eſtreeuacuée dehors . Ecliladite matiere n'eſtoicr'entrée , qui ſe fait à
cauſe des venes qui n'auroient eſté reſoults,on donnera vn clyftere carminacif, & ro
mollitif,auquelſera adiouſtée huile de cerebéchine,d'anis,degeneure , ou defenoil,
clyſteres extraicte par quinte eſſence en petite quantité . Auflieſt vnexcellēc remede, clyfterc
d'effect mer• faic demaluoiſie,huile de noix ,& vn peu d'eau de vie ,avec quelque portion deſdices
weilleux .
huiles de quinte eſſence .Aucunesfois par tous ces moyens la reduction des inceſtins
ne peut eftre faite àcauſe quele proceſſus n'eſt aſſez dilaté,d'où vient quela matiere
fecale contenuë auxinteſtins tombez dedans le ſcrotum , accompagnée de ventolice na que

s'endurciſt & z fait qu'on ne les peut plusreduire.Incontinencils'y faic inflamacion &
Des Tumeurs en particulier . 309

A accroiſſement de douleur, & qui pis eſt, vn regorgement de la maciere fecale , que le
malade reiecte par la bouche, puis gangrene & mortificacion : & pour la ftri& ure du
boyau , la chaleur naturelle eſt eſteinte & ſuffoquée , donc roſt apres la mort s'enſuit.
Telle maladie eſt nommée communément Miſerere mei. Pourobuier à cel accident , mal miſerda
fauc venir à l'extremeremede,pluſtoſt que laiſſer mourir le malade ſi vilainement : ce ble.
qui ſe fera par l'æuure de la main en ceſte manierc . Le malade ſera ſitué , comme a
uons dit cy -deuant, ſur une table , ou ſur vn banc , puis luy ſera faite inciſion en la par
tie ſupericure du ſcrotum , ſoy donnant bien garde de toucher les inteſtins. Apres, Pierre Franco
faut auoirvne cannule d'argent groſſe comme vne plume d'oye , ronde d'yn cofté, en ſon liure
des Hernies
cauc del'autre , ainſi qu'il t'eſt demonſtré par ceſte figure .

lcelle ſera miſc dedãs l'inciſion, & pouſſée le long de la productio du pericoine , pour
faire incilion & ouverture ſur la cauité d'icelle cannule, de peur de toucher les inte
R ſtins du raſoüer. L'ouuerture ſuffiſamment faite ,on reduira les inteſtins peu à peu
JUR dedans le ventre , & ſubicon fera vne couture,en cueillant & comprenant dudit pro
cellus cane profondement qu'il en ſoitreſtrelli: ce qui ſera cauſe qu'apres la cicacrice ,
la deſcente ne ſe pourra plus faire au ſcrotum.D'abondant,s'ily a ſi grande quantité Autre remes
de matiere fecale quiy foit endurcie pour ſa trop longue demeure, ou par l'infam- de pour
macion , que la reduction ne ſe puiſſe faire , il faut par neceſſité inciſer la production l'exiremité.
du pericoine iuſques à l'inteſtin ,& mettant la cannule precedente dedansicello pro.
duction la leuer contremont, & faire inciſion deſſus enmontantvers le ventre , & y
faire ſibonneouverture que l'inceltin puiſſe eſtrereduic. Puis ſe fera la couſtürega
Cftroraphie, en faiſant
autant de points d'aiguille qu'il en ſera beſoin,& cueillantie
die proceſſus, commeauons dit , à fin de rendre la voyepluseltroicte. Cela fait, la Auliu. des
playe ſera traitée en la maniere dite cy-deuant.Toucesfois celle operation ne ſe fera playes.
que les vertus du malade ne ſoyencallez forces pour l'endurer , & qu'on aye fait bon
prognoſtic à ſes parens & amis , parauant que d’y meccre la main .

Du poinct doré . CHAPITRE XVI .


PRO

Ipar tous ces moyens la hargne ne peut etre curée, à cauſe de la trop gran
de dilaceration ou rupture de la produ & ion du pericoine , & que neanc- Maniere de

moins le malade ou parens d'iceluy, defiraffent qu'elle fuft entierementfaire lepoint


guarie , ony procedera par le poinat doré. Pour le faire', ſera appellé un doré.
expert Chirurgien , lcquel fera vn inciſion au deſſus de los pubis, & en icelle mettra
vneſondeſemblable à celle qu'auons cy -deſſus figurée, & la pouſſera tout au deſſus
du proceſſus, l’enleuant en haut pour le ſeparer decontre lesparoisoù il adhere par
le moyen de certaines fibres nerueuſes. Apres tirera & ſeparera aufli les vaiſſeaux
ſpermatiques avec le muſcle ſuſpenſoire du teſticule. Cela fait, il enleuera la pro
duđion ſeule , cueillant & amaitant tour ce quieſt de luy trop dılacé, qu'il prendra
D auec des perites tenailles plattes percées au milieu , le tenant affcz fermement,& fera
pasſée au travers une aiguille enfilée de cinq ou fix fils ,pres & iouxte leſdits vaiſſeaux
Spermatiques, & muſcle ſuſpenſoire: Dauantage , faudra encores repaſſer vne au
tre foisl'aiguille au milieu de ce qui reſte de ladice production comprenant auſſi les
leures de la playe : alors on fera vn neud fort ſerré , & ſera le filet coupé aſſez long ,
& laiſſe hors la playe , lequel ſe pourriſſant & coupant peu à peu , tombera de ſoy
meſme: & fe faut bien garder dele tirer deuanc quenacure n'aye engendré chair au
droit de laditeligature: car autrement on auroit labouré en vain . Finablement ſera
la playe mundifiée, incarnée , & menée à cicatrice , de laquelle la dureté & callofice
empeichera que les inteſtins ny l'omentum ne puiſſenc plus comber dedans le
ſcrozum .

Dd ij
310 Le huictieſme Liure ,
Autre maniere defaire le poin &t doré. CHAPITRE XVII. A

L ſe trouue quelques yns qui font le poin& doré par autre moyen qu'auons
deſcrit. Ils font vncincifion au deſſus de l'osdu penil, du coſté qu'eſt la har
gne, laquelle penetre iuſquesau procez du peritoine, lequel eſtanc deſcou
uert , paſſentpar deffous iceluypar deux fois un fil d'or aſſez delié, lequel eſtant
pafféils ſerrent mediocrement, à fin de reſſerrer ledit procez trop relaſché,ſanscou.
tesfois que les vaiſſeaux ſpermatiques ſoient comprimez. Cela fait, ils tortillent leur
filauecques de petites pincectes, deux ou trois cours,puisle coupent aſſez pres,& ca
chent leboutdu fil d'or leremplianc, afin qu'il ne picque la chair qui le couure : puis
( faillans ledit fil d'or)craitcent la playe,comme vne ſimple playe, tenant le malade
au li& les feſſes hautes,& lateſte vn peu baffe, & ce l'eſpace de quinze ou vingriours.
Parcelle operation pluſieurs ontreceu guariſon.Autres foncrecidiuez, à raiſon que
ledit filn'eſtoit bien accommodé, picquant ordinairementles parties voiſines. Et
pour plus ample cognoiſſance de ce, ie i'aybien voulu faire, figurer les inſtrumens ,
par leſquels celle operation eſt accomplie. Quelque temps apres nature chaſſe hors B id

le fil d'or , & là ſe fait vne ſonde & cicatrice calleuſe, qui bouſche la production du
peritoine,par où les inteſtins deſcendoient.Les practiciens l'ont appellé poinct doré
à cauſe du fil d'or.
Figure des inſtrumenspropresàfaire le poinctdoré.
Of
B
B

C
E

‫ܕ‬
D

A Monſtre
d'or .
l’aiguille courbée , laquelle eſt percée presſa poin &te pour paſſer le fil
BB Le fil d'or paſſé par l'aiguille .
C La tenaille qui coupe ledit fil. ::21
D Lerellort de la cenaille .
E La pincetce qui tourne & entortille ledit fil.
311
des Tumeurs en particulier.
A
Autre maniere de faire lepoinct doré. CHAPITRE XVIII.
Vere façon laquelle me ſemble la meilleure & la plus ſeure, à cau .
ſe qu'elle ne laiſſerien eſtrange en la playe; c'elt qu'au lieu du fil
d'or,on y metvn de plomb de la groſſeur d'un fer d'aiguillecte, le
quel n'eſt paſſé à l'entour du procez du peritoine, qu'vne fois, &
I l'ayāt paſſé,on l'eſtreinc cant qu'ileſt beloin ,à ſçauoir don trop.de a
pcur de clorre la voycaux eſprits, pour obuier à la gangrene:non
15 auſſi crap laſche, par-ce qu'elle ne ſeruiroitde rien, à cauſe que la
© deſcére ne laiſſeroit à ſe faire.Lequelfil ſera laiſſéen la playe,iuſqu'à ce qu'elle ſoie
5. du cout reioincte & conſolidée,reſte la place dudic fil.Ecalors ſera deſtors, puis ciré
se hors dexcrement,puis le reſte de la playe ſera conſolidé& cicatriſé. Os que diray-ic
Es plus des hargnes?c'eſt que lors que la production du pericoine,quieſt la voye par où
ВB. la deſcente le faitaux bourſes, eſt grandement dilacée, apres que le Chirugien aura
fuicladire ligature du fildeplomb,ilfaut qu'il en prennevn peu au deſſus, vnebõne
partie, & qu'illa lie,en pallant vneaiguilleenfilée d'un filet en double au dedans
duditproceſſus, le plus pres des vaiſſeaux ,à ſçauoir des vaiſſeaux ſpermatiques,& du
muſcle lulpenloire,qu'il pourra: puis fera vn næud,& coupera le filallezlong,cóme
nous auons ditcy.deſſus, & le laiſſera hors la playe,& nelerecireradeuác qucnature
Jevueilleiecter hors: qui ſera,quand ce qui aura eſté lié, ſera pourry.Ec eſtác hors on
traitera le reſte de la playe,la cicatrizant, & par ainſi la cicatrice faice,la calloſité cm
peſchera que rien plus ne deſcédra au Scrotum . Or combien que celles manieres de
curer leshargnes,neſoiene ſans douleur& peril,fi eſt-ce qu'il cat beaucoupplus ſeur Aduerriffe
d'y proceder ainſi,qued'amputer les ceſticules,commefontles chaltreux, leſquels més notable.
parleurs cruelles & violentesoperations , mettent le malade en grand danger de
mort. Car pourgarder qu’apres la curation il n'y demeure voe relaxation, ils tirent Cruautédes
Cviolemmét,& deltachent le proceſſusdes parties où il adhere,enſemblele nerf de lachaſtreux.
fixielmeconiugaiſon qui vaaux teſticules.Plusarrachent ,& bien ſouventrompent
lesvaiſſeaux ſpermatiques.Deſquelles violences s'enſuic douleurextreme, ſpalme,
hemorrhagie,inflammation , pourricurc,& confequemmét la mort. Cequc i'accefte
auoir veu aux corps de quelques vns que i'ay ouuerts morcs , peu deiours apres cltro
ainſimiſerablementchaſtrez. Ec ſuppoſé qu'ils en reſchapent, ils ſontà iamais pri
vez du bencfice degeneration; pour laquelle nature a donné les ceſticules à l'home,
comme parties principales & neceſſaires pourla conſeruation de l'eſpece: come dic An liure da
Galien au liure de l'Arc medecinal,chapitreg . & commcnous auons eſcrit en noſtre femine.
Sentence .
Anatomie.MeſmesiceluyGalien ne douce pointde les faire &nommer partiesplus
excellentes que le cæur: d'autant que le cæurcſt le principe & autheur de la vielim
plement,mais les teſticules fonc la vie meilleure, Oreſt-il quec'eſt choſe plus digne
de bien viure,que de viure ſeulement. De là vient,queles Eunuques & chaltrez de
generécen nature feminine,en ligne dequoy ils n'ont point de barbe,leur voix chá.
se,lecourage leur defauc,dcuiennent timides & honteux, breffontinhabiles à plu.
dieurs bonnes actions humaines, & n'eſt leur vie que miſerable. La voix apres la ca
ftration eſtplus grelle: d'autant queles teſticulesn'eſchauffentplus, & nefortifient
lesnerfs& muſcles vocaux par le conſentementqu'ils auoient enſemble au moyen
de leurs nerfs: au contraire lavoix ſemuë & grolift fitoſt que le garçon ſe ruë au icu
D o d'amour.Parcantiamais ne ſeray d'aduis qu'on couppe les caüillons aux petits en
fans,ny meſmes aux plus grands, fors à la hargne charncuſe ,ou qu'iceuxfuffensgan Lacques
grencz ou pourris. Iacques de Fouilloux dic, que le cerf quiaura perdu les couil. Fouilloudex 63
lons au rue,ou autremene, ne mue iamais . Et ſi on le chaître avant qu'il porce ſa ra- Jonliure de
meure,iln'en portera iamais . Aufli au cotraire ſi on le chaître ayāt ſa rameure ,iamais la penerit,
neluycombera. Ne plusny moinsfera :il, f'ileſtchaftré ayantſa teſte ou endoüillers
11 mols & en lang , & lidemeurera touſiours ainſi fans ſcicher ny brunir.Telles choſes
demonftrent que les teſticules ont grande vertu ,cantaux hommes qu'aux animaux .
De la Hargne Zirbale .
La Hargne Zirbale , nommée cy-deſſus Epiplocele,eſt vne relaxation du Zirbus
tombanten l'aine ou au ſcrotum . Ses cauſes ſontſemblables que de la hargncince .
Dd iij
1

Le Huictieſme Liure ,
312

Liu . 3.sh.z3. ſtinale. Les lignes onieſte dits par cy.deuant. Elle ne produir tant d'accidens que A
l'inteſtinale . Audemeurant coures deux ontcuracion ſemblable.
Autre maniere de curation plus ſeure de plus aiſée.
Maiſtre Theodoric, & le bon hommcGuidon deCauliac,ontmis en auancvncau .
tre & celle façon . Si l'inteſtin ou omencum ſonttombez dans le ferocum , illes faue
remettre dans le vencre , le malade eſtant tellement licué, qu'il ait les feſſes vn peu
cſleuécs, & la reſte aucunement balle . Lors le Chirurgien tirera vers la hanche vne
bonne portion de la production du peritoine relaſchée ,enſemble les vaiſſeaux ſper
matiques auec le muſcle ſuſpenſoire .Puisappliquera vn caucere potéciel ſur lerefte
de ladite production , droic au deſſus de l'os pubis : le cauçere fera de la groſſeur qu'il
verra eſtre de beſoin , ſçauoir ſelon que la hargne ſera plus ou moins grande,& ſelon .
l'âge du malade. Apres l’eſcarre faite , on fera desſcarificationsiuſques à la chair
viue : puis derechef ſera mis yn autre cautere,à fin de penetrer iuſques à l'os . On fera
aprescomber l'eſcarre ( laquelle ſe fait d'une partie de ladite production du pericoi
ne) lors la playe traitée & conduite à cicatrice par ſa calloſité , bouſchera & empel
chera querien plus ne tombe dans le ſcrotum . в

Ordeuant qu'entreprendre celle operacion , leChirurgien ſera aduercy de ſe döner


garde des meſmes accidens,deſquels nousallons parlé cy-deuant.Scauoir, qu'en cas
que les inteſtins & omentum fuſſene cane adherans contre la production , en forte
qu'on ne les peuſt retirer dedans, il n'applique en façon quelconque le cautere , de
peur de bruſler & percer leſdits inceſtins, donc pourroient aduenir grands inconuc
nicns.En cas auſſi que ladice production fuſt rompuë , ou parrrop dilatéc , de force
que les inteſtins fillent vne grande & enorme tumeur, le Chirurgien n'entreprendra
celte operacion, non plus qu'à ceux auſquels le teſticule pendu & arreſté en laine, ne
ſera encore deſcendu dans le ſcrotum , ny aux enfans qui n'ont encore diſcretion à ſe
tenir ſans ſe remuer , ou n'eſtans encores nets .
4
.
Nicolas Godin en ſa Chirurgie militaire ,ordonne pour la curación des hargnics,
à ceux qui ſont en âge d'adoleſcence & virile , l'application du cautere actuel,apres
auoir dexcrement couppé la chair iuſques à l'os,a fin de faire perdicion de ſubſtace:
& la cicatrice faire , il ne ſe peut plus faire deſcente,ny de l'omentum , ny de l'ince
ſtin.Ce que veritablementi’approuuc , fi les paciens le veulent ſouffrir.
De la Hargne aqueuſe'nonumée Hydrocele ."
Hargne aqucuſe eſt vne tumcur au ſcrotum , faite à raiſon de l'eau , laquelle s'y a
malle peu à peu , le plus ſouuércontenuë cntre les membranes , qui couurécles ceſti.
cules , & fpecialeměcentrele dartos & l’erythroïde . On la peut nommer hydropiſic
particuliere :car elle ſe faitpar meſmes cauſes, & meſme par diminució de la chaleur
şignes dela naturelle.Les ſignes sõcquc la bourſe des teſticules s’ende peu à peu & ſans douleur;
hargne a- lacumeur eſt pondereuſe, luiſante , & tranſparente ce qui ſe cognoiſtra en mettant
queuſe.
vne chádelle allumée d'vo coſté de la tumeur.Car on voit à l'oppoſite laditecumeur
claire & lucide.Dauancage en preſſantle ſcrotum du haut en bas , & du bas en haut,
on fait deſcendre & remonter l'eau ,pourueu qu'elle ne ſoit en trop grāde quantité,
& peu louuét retourneau dedās du vétre, comefont l'inteſtinale & Žirbale,maisde.
meure preſque touſiours au ſcrotú, pource que le plus ſouuent l'eau eſt cócenuë en
En quoy dif- vn Kyſt ou pecite veſſie. Elleeſt diſcernée d'aucсla charneuſe, parce qu'é celle-làeſt
ferentla haro la tumeur life & vnic : & en cete - cy , à ſçauoir la charncuſe ,eft afpre,inegale & rabo isl
a
gre charneue
ceuſe. La curacion ſera premieremétcentée par des remedes reſolutifs ,deficcatifs &
The com aquen diſcutiens eſcritsau chap.desapoſtemes: coutesfoisiet'ay voulu donner ce remede CD
quei’ay ſouuét experimété.2.vng.comitiſt. & delic.rub.añ.z.ij.malaxent . fimul,&
fiacmedicament.ad vſum . Car par iceux eſt l'eau ſouoči reſoulce, ou pour plus pro

premét parler,tarie ,bcuë & cõſommée ,principalemét quád il y en a petite quátiré .


Curation de Et ſi pour la trop grande quantité, ces reincdes ne ſont füffiſans, faut venir à l'æiure ton
la hargne a. manuelle , en appliquát vn ſeron au craucrs du fcrocum , & des membranes où eſt co

queuſe par ceouë l’aquofité,& paſſer vne aiguillcallez groſſe ,qui ait la poincte en triãgle enfilée
Chirurgie. de fil defoyeen 8.ou 9.doubles: la paſſer (dy-je) promptement au crauers destrous cen
t
des tenailles à ſetõ ,ſe gardāc bien de toucher la ſubitáce des teſticules. Cela faiton h" ould be
y laiſſera le fil, lequel ſera remuédeux ou trois fois le iour,afin que l'eau ſoir euacuće
peu à peu, & s'il y ſuruenoirgráde douleur 8z inflammatio, à cauſe dudit feton ,fubit
ſera olté , & la propre cure delaiſſée pour ſubuenir aux accidens . Aucuns practiciens
Des Tumeurs en particulier. 313
A n'oſent point de ſeton,mais auec le raſoir ou lancette , fontouuercure au bas du l'Autheut
ſcrotum, grande de demy-doigrou enuiron , & profonde iuſquesà l'eau ,ſoy don parlefor pris
nantgardedecoucher les teſticules& les vaiſſeaux: puis ciennent la playe ouuerte l'Hydrocele ,
auecques descentes ,iuſques à ce que l'eau ſoicentierement euacuće . Apres l’eva encore ne dite
cuation , ils la conſolidene & cicatriſent.Ecpar ceſeul preſque moyen , ſe peuvent ilpointl'ope
1
guarir les hydroceles,deſquelles l'eau eſt enfermée en vn Kylt, comme nous avons ratio n qu'on
y fuità presée
c
cnſeigné au liure des Tumeurs en general , chap. 16. qu ef auecle
i t
De la Hargne venteuſe.
0 Hargne venceuſe eft vne tumeur au ſcrotum ,faite deventofité, dont la cauſe et tiecamerepoléon
l , puis l'on
il imbecillité de la chaleur naturelle de la parcie. Onla cognoiſt, parce que la tumeur perce dans
3
citronde,legere,retinente,luiſance,& relplédiſante.La cure le fera par bon regime, Tiſcare avec
it & parappliication desi remedes reſolutifs & carminatifs,comme, ſe mina aniſi.carui, la lancette
2 fænugrác ,agnicaſt ,rutæ ,origani, & autres deſcrits par Auicen ne , au trai &té des iuſqu'à l'eau .
lo Hargnes,& par nous cy-deuantau chap.des Apoſtemes venceux . l'ay pour tcl effect Le vray ſigne
B ſouuét appliqué l'emplaftre de Vigo cum mercurio , auſſi l'emplaftre Diachalciteos difquino usr failas
tingue
diſſoucea vin genereux ,comme maluoilie , aucc vn peu d'huile laurin .. tumeur de
De la Hargne charnewſe. queuſe dela
LaHargne nominće Sarcocele ou charncuſe, eſt vne tumeur contre nature , qui venteuſe eft
s'engendre autour des teſticules, faire d'une chair ſcirrheuſe ,procreée d'abondance que l'aqueuſe
do d'humeurs cras & vil jueux ,qui n'ont peu eltre digerez & adimilez à la partie , la- vient peu à
C quelle eſtaccreuè,comme par maniere d'hyperſarcoſc ,ou de verruës.Elle eſt leplus seule a
vientvé
peu,ool
1C fouuent accompagnée desveines variqueuſes, & croiſt avec douleur. Ses ſignes tout a сөир.
18 pluspropres ſont tumeur & duretéaſpre,inegale & raboteuſe. La cure ne ſe peut Experience
DC fairequepar l'amputation : & pourceauantque ce faire,le Chirurgien doic bienad- dettua
le viſer & regarder que la carnoficé ne ſoic trop haure,ayant ja occupé & accaine l'ai theur.
Sarcocele cu
ne. Carſiainſi eſtoit, ne faudroic entreprendre la cure ,d'autant qu'il ne la pourroit
cauper du couc ſans grand danger de mort. Ecoù ilen laiſſeroir quelque petite por rable, we co
meni .

Ccion, ils'engendreroit puis apres vne chair ſuperfluë, comme vn fungus, qui ſeroit Au liu . des
its
2: erreurpire que le premier . Mais ſi la cumour n'eſt que petite ou mediocre , le Chi playes.
Com rurgien prendra la tumeur auec le teſticule &zle proceſſus, & fera incilioniuſques à Cure decire
ladite cumeur, & la ſeparera du ſcrotum . Cela faic, il pallera vne aiguille enfilée focele par
d'vne fiſcelle forte,autravers du proceſſus,au deſſus du teſticule charneux : puis ſera Chirurgie,
Te tournée paſſer par le milieu meſme par où on l'auoit paflcc. Lors le bouc du fii qui
n'apointparë , & l'autre où eſt l'aiguille, ſeront noüez enſemble , en comprenant
l'autre moicié du proceſſus. Letoutainſinoüé, faudra couper & entierement am
puter ledicproceſſus auec le teſticule , & laiſſer les bours de la fiſcelle, dont on aura
UIT fait la ligacure, aſſez longs, ſortans hors la playe. Dedans la playe on mettra vn di
geftis faic de iaunc d'auf, cerebentine, & huile roſar. Apres on y appliquera des re
CUE percuflifs ſurlaplaye & parcies voiſines, auec bandes « compreſſes, & ſera la cure
, paracheućc ſelon la cure cy deuant mentionnée.
cé, De la Hargne variqueuſe.
de La Hargne appellée Cirſocele ou variqueuſe, elt vne cumcur ou apparence de
en vcines dilacées& cncorcilléesautour des celticules& ſcrotum ,le quelles lontpleines
lt deſangmelancholique. Les cauſes ſont celles meſmes des varices. Lesſignes ſont
0 cuidés.Pourla curer fautfaire ouuertureau ſcrotum de la grandeur de deux doigts
$
9
ou environ,àl'endroit de la varice. Puis faut paſſer par deſſous la veine variqueuſe
de D vne aiguilleenfilée d'un double fil le plus haut de la varice qu'on pourra, pourlalier
X en hautvers la racine.Derechefon paſſera l'aiguille comme deffus,en l'autre partie
baſſe, laiſſant un doiged’eſpace,plusoumoins,entre les deux ligatures. Mais pro
é. mier qu'eltreindre le fil de la derniere ligacure , faut ouuric la varice en l'eſpace
TC moyen, comme ſi on vouloit laigner , à fin d'euacuer le ſang contenu au ſcrocum ,
jo ainſique l'auons pradiqué cy -deuanten la cure des varices.Puis ſera la playe trait
C téecommel'arc le commande, laiſſant comber les filecs d'eux-meſmes, & procurant
quals'y facc vnc cicatrice & calloſité, au lieu où on aura lié la veinc variqueuſe : par
ccmoyen le lang ne pourra plus couler au crauers .
De la Hargne humorale .
it Hargnchumorale eſt apoſtemcengédrée d'un oupluſieurs humeurs aſſemblez au Voyleli
des Apo
ssa
5
ſcrotum ,ou entrelescuniquesquienuclopent les teſticules, & fouuent
Ddenla
iuj
propreniemes
)

314 Le Huictieſme Liure ,


ſubſtance d'iceux. Leurs cauſes,ſignes & curacions, ſont comme des aueres apoſte. A
‘mes . Toutesfois pendácla curacion,le malade ſe tiendra en repos , & portera brayers
& ligacures propres pour ſoultenir les teſticules. Encér endroicieveux aduercirls
icuneChirugien , quequelquesfois les ceſticules ne ſont encores deſcendus au ſcro
tum ,eftans retenusen laine,y faiſansvoc tumeur auec douleur : & pource il eſtime
que ce ſoit voe hargne inteſtinale, qui eſt cauſe qu'ily applique emplaftres altcin
gentes avec brayers & ligatures , pour les repouſſer au dedans.Cefaiſant augmence
la douleur, & engarde la deſcentedu teſticule. Ce que n'agueresi’ay veu eſtant ap
Hiſtoire. pellé pour celle cauſe: 82 apres auoir cogneu que dedās le ſcrotum il n'y auoit qu'vn
ſeul teſticule, lemaladen'ayantiamais elté chaſtré, feisofter le brayer & emplaſtre
qu'il portoit, & commanday au pere qu'ille laiflaſt coorir & ſaulter,à fin d'ayder au
teſticule à deſcendre'en ſon lieu nacurel : ce qui aduint pecic à petic ſans nulaccidét.
Difference Car pour parle: à la verité de celle choſe,fautſçauoirque la difference du malle d'a
dumaſleao uec la femelle n'eſtque chaleur,lepropre de laquelleeſt de pouſſer dehors,comme
de. la femele du froid de retenir au dedans : de là vient que les teſticules aux malles pendent de
vec
hors , aux feinelles ſont reſerrez en l'enclos du bas du ventre. Parquoy il aduicnc B
qu'en quelques malles,quiſont de plus froide nature , leſdits teſticules demeurent
cachez iuſques à ce que le feu de icuneſſe vienpe à les pouſſer dehors.
De la relaxation du gros boyan Culier. CHAP. XIX .
1:

Vand lemuſcle,nomméSphincter(quieſtautourdu ſiege)eſtrelaſché,alors .

Relaxatio de ne peutſouſtenir le gros boyau ,cequi ſe fait ſouuent aux petits enfans, &
gros boyan. procede d'une grandehumidité de ventre , tombant audic muſcle, laquelle
le ramolliſt & relaſche, ou lerend plus peſant que de couſtume, de ſorte que les
muſcles leuareurs du ſiege,ne le peuuent plus ſouſtenir ,puisſe renuerle & ſorchors
duſiege,ou pourvn grandAux de vencre dyfencerique,par trop s'eſpraindre d'allerà
la felle,ou pour des hemorrhoïdes,quiſupprimées rendent le boyau culier trop pe
ſant, & fluences le relaſchent:on pour le froid ,à ceux qui en hyuer vont ſans haut do
chauſſes,ou ſe tiennent longtemps aſſis ſur vne pierre froide :ou pour vn coup, ou
1
cheute ſous l'os ſacrum :ou paralyſie des nerfsqui de là s'eſpandent aux muſcles le
uaccurs du ſiege:ou pour vne pierre peſante contenuë en la velic. Pour la cure , il
faut garder lemalade de tropboirc,& manger potages, & frui& s cruds : & pour les
remedes particuliers, on vſera d'vne decorion akringente , comme corticis granat.
gall. myrtill.centinod. burſ.paſtor.Tumach. berber,nucis cupreſ.alu . rochæ , ſal.
com.boüillis en cau de mareſchal,ou gros vin noir & auſtere. Puis apres la fomenta 11

tion,on reduira l'inteſtin , l'ayant premierement copt autour oine d'huile roſaci, ou
de myrtils:puis on le repouſſera au dedans: & lil'enfancratiocinc,luy faut comman
der que lors qu'on le remettra, qu'ilretire ſon haleine , & que le Chirugien le re
merce peu à peu ,auec vne eſponge, ou vn linge blanc & delić: & eſtancreduit, on
doicentieremençeſſuyer toute l'onctuoſité , de peur que paricelle l'inteſtin ne re
tombe derechef: puis apreson doit mettre dedans le fondement,le plus profonde
ment qu'on pourra, de la poudre qu'auons preſcriptpourla precipitation de lama
trice.Puis apres on luymettravnc bande au trauers du corps,au deſſusdeshanches,
au milieu de laquelle ſera attachée vnc autre bande, qui paſſera entre les feſſes , & à
l'endroit du ſiege fera mis vne eſponge & compreſſe , trempéeen la deco&tion ſuf
dite aſtringente, à fin de garder quele boyau ne ſorte : & Ja perſonneeſtant d'âge ,
on luy commandera,lors qu'il ira à ſes affaires,demettre le lege entre deux ais,ſepa D
rezl'vn de l'autre d'vnpoulce,plus ou moins : quoy faiſant,on gardera que l'inteſtin
De forre lors que le malade va à ſesaffaires. Aucáncen fera s'il fait ſes affaires debout:
Hippoliure car parcelle ficuation , l'inteſtin necombe point. Ec fi l'inteſtin par ces moyens no
desfifules. pouuoit eſtre reduit , Hippocrates commande qu'on pende par les pieds le malade,
& le ſecoüer, & faire tant qu'il ſe remetre : & eſtant reduit,le craicter comine auons
dic.D'abondanc veut Hippocrates,que l'on oigne le ſiege de l'eſcume de limaçons
rouges, à raiſon que leur onctuoſité & ficcicé reſoule fort ſans nullemordicacion ,&
partant eſt propre à tel effect.
des Tumeurs en particulier. 315
A
A
De la tumear & apoſteme du Fnödement. CHAP. XX.

A cumeur du fondements'engendre , ou de cauſe externe , com . Cauſes.


E
me pourauoir eſtélong - tempsà cheual , ou pour eſtre tombé à
cheuauchons ſus quelque choſe dure, qui auroic concus & meur
trylefondement & les parties voiſines d'iceluy: Ou le plus ſouuét
de cauſe interne , comme pour la douleur deshemorrhoïdes , & à
raiſon de quelque maciere chaude& corrompuë qui eſt enuoyée
en çeſte partie : & par ainſi telle tumeur eſt pluſtoſt faite par Au
.
xion , que par congeſtion de maciere. Quieft cauſe qu'elle vientle plus ſouuent à Prognoſtic
ſuppuration :ioineauſſique la partie receuanceſt fortluierce à pourriture : tant à rai
fon dece qu'elle eſt chaude & humide , que pour eltre voiſine & receptacle des ex
E
cremens.La curation ſe doit commencerparles choſes vniuerſelles,conſeillāt pluſ- Cure.
B coſt d’vſer de la ſaignée,que purgation , craignant de faire crop grande Auxion à la
partic. Etpour les remedesdes particuliers,au commencement il ne faut vſer dere
medes crop repercuſlifs,ny tropmaturatifs, craignāt d'enfermer la matiere en ladice
partic,ou engendrertrop grande pourriture , & Touuentgangrene : ce que i'ay veu
pluſieurs fois aduenir. Et pource on pourra appliquer linges imbus & trēpez in oleo
fofar.myrt.cydonio cumou.album. aut, cydonio cum aceto & aqua cocta, miſcen
dacum oleo roſar.informam cataplaſ. Er pour l'augment,eſtar, declination, & acci
dens qui pourront ſuruenir ,comme entr'autres,la douleur,onaura recours au chap.
duPhlegmon vray.Si la tumeur vient à maturation ,leChirurgien ſurtoutaura égard obſeruation
c dene la laiſſermeurir,comme les autres Apoſtemes,à ſçauoir,à parfaiđe ſuppuratio: pourlechi,
ES mais ſuiuanele precepte d'Hippocrates,il fautvenir à l'ouuercure,la cumeur eltant surgien.
encore verdelette, c'eſt à dire, n'eſtane du toutſuppurée , ains ſera ouuerte lors que
l'on cognoiſtra qu'il y aura quelque commencement & apparencede boüe: craignac
quelamatiere retenuë au profond , ne vincà pourrir le boyau culier , ou le col de la
le Cvelfie,d'où ſuruiennent les fiſtules du fondement & perineum : car en peu. de temps
C en icellepartie il s'engendre grande pourriture , pour les raiſons ſuſdiccs.
il Du Panaris, ou Paronychie. CHAPITRE XXI.

c. Anaris , eſt vne tumeur qui ſe fait à l'extremité des doigts , cauſée d'vn hu
1
gneur malin & veneneux, aucc grande inflammation ,la quelle ſouuent com
Anence à l'os,ſe communiquant au perioſte,nerfs,& rendonsqui ſonten ceſte
parcie , qui cauſe cruels accidens, commeextremedouleur pulſacile ,ou battement
3:
d'arteres, fieure,& grande inquietude,de force que les malades ne peuuét repoſer, ny
ſe tenir en place,& deuiennēcpreſque inſenſez,perdanspacience, ainſique ceux qui
1 fone vexezdecarboncles. Le bon vieillard Guidon , & lean de Vigo diſent, que tel
malmeine ſouuent le malade à la mort. Pour la cure, le conſeille qu'on appelle
vn docte Medecin pour faire purger & ſaigner le malade , & luy ordonner la ma
niere de viure. Etpour la cureparticuliere,ilfautdonner iſſuë à la matiere virulente !

& veneneuſe,faiſantpromptement vne inciſion en la partie interieure, le long de la


premiere iointure profonde iuſques à l'os . Er dic de Vigo , qu'il n'y a poinc de plus Zi.2.ch.4.
grandremede que d'ouurir le lieu ſelon le long du doigt, & que ce ſoie devant traicté 8 .
1 D la parfaitemacuration : Elle garde (dit -il) ſouuentle doigt de corruption de l'os &
D des nerfs, & appaiſeladouleur. Ce que i'ay fait Touuent au commencement de- Experience
vant que la virulence fuſt grandemenc imprimée, auec vne tres bonne iſſuë. Ec faictepar
3 par l'inciſion faut laiſſer ſortir bonne quantité de ſang, & apresfaire tremper le doigt l' Autheuro
en fort vinaigre aſſez chaud ,auquelon aura diſſout du theriaque : par ce moyenon
cuacuë la maciere virulente en luy donnant iſſuë. Ec pour appaiſer la douleur , on
5 doitappliquerſur la partie , & tout autour de la main , remetes ſemblables à ceux
des carboncles,comme fueilles d'ozeille , hyoſquiame, ciguë,fueilles de mandrago
Tecuitees ſous les cendres chaudés , & pilées auec vnguent populeum recentement
fair,ouhuilerolac, & beurre frais, fansſel. Aulli tels remedespeuvent grandementRemedesfup
ayderà la ſuppuration,d'autant qu'ilsobrondent par leur froidcur la chaleur eſtran- puratifspas
ge introduite à la partie, & auſli fortifient la chaleur naturelle , qui eſt celle qui accidens,
1
e
316 Le huictieſm liure ,
fait la ſuppuracion, & chaſſece qui luy eſt contraire. Ec voila pourquoy les anciens A
oncordonné cels medicamés aux anthrax & carboncles . Or s'iladuiét que le malade
n'euſt voulu (ou par l'imperitiedu Chirurgien) que ladite inciſion fuſt faite ,& qu'il
ſuruinegangrene & mortification à la partie,alors il faudra faire amputacion decouc
ce qui ſera alceré & pourry, par les tenailles inciſiucs , & faire le reſte de la cure com
me on verra eſtre beſoin & neceſſaire.Iladuient quelquesfois qu'iln'eſt beſoin faire
amputation quedel'extremité du doigt, parce qu'unepartie de l'os ſe ſepare, corro .
de & ronge , & fe ſera conſomméen bouë feride, & fort puante , & que lereſtedu
doigt demeure , mais c'eſt ſouvent fansongle & auec difformité, tant pour la perdi
cionde l'os, que des tendons & nerfs,& autres parties.Que diray- ic plus : c'eſt qu'en
ceſtédiſpoſitionil ſe fait eſcarre pour la chaleur & tres grande adultion, & ſe con
cree vne chair ſuperfluë qui avn grand ſenciment aigu, laquelle convient couper
auec les cızcaux , à fin que le ſang coule,qui allege fort la douleur,pource qu'ilder $1
charge & euacuël'humeur contenu en la partie.
.
-
B V

De la rumeur des genoüils. CHAP. 8x11.


G4.commer. Ouuentesfois il vienteumeurs aux genoüils , apres vne longue &
de la fen , i . faſcheule maladie . Auſſiles corps cacochymes & replecs,apresvn
ſec.4. li.6. long exercice, ſont ſujets à telles indiſpoſitions, d'autant que l'hu.
Epidemio. meurdecoule facilement à la partie qui eſt eſchaufée & eſmevė.
Orlicelles tumeursſuiuent les longuesmaladies,fonctres-dange
Ga.comměr.
reuſes & difficiles à curer,& pour ce ne ſont à negliger. Telles tu
før la lect. 2 .
meurs ſouuenc font accompagnées de douleurs incolerables, à
des.progno-
. cauſe de l'humeur, lequel eſtane defué à la partie,faie diſtenſion des membranes
v
qui lesenueloppent & lient. Cartel humeur eſt ou grandement chaud ou extreme
ment froid , & lorsladouleureſtfi grande , ou accompagnée de quelque matiere vi
rulente , comme il aduient ſouuent és gources & piqueures, & ſpecialement des
Cure. beftes veneneuſes. Orpour la curation ,ſila tumeur eſt cauſéede ſang,ſon manger &
boire ſera cenu & refrigerant: & pour la reuulſion de la maciere antecedente , la C
phlebotomie eſt neceſſaire, & les medicamens copiques ſeront repellans au com
mencement,auſquelsſeront adiouſtez des reſoluans, les diverſifiant ſelon les quatre
temps de la cumcur: & s'il y a douleur,ſeront anodyns , deſquels auons aſſez ample
Application ment parlé cn Phlegmon. Et ſi la douleur eſt opiniaſtre & n'aye peu ceder auſdits re
deSangſuës. medes , ie n’ay crouué meilleur moyen pour l'appaiſer, que d'appliquer quinze ou
ſeize langſuës tout à l'encour du genouil. Tellestumeurs ſont auſti ſouuét engédrees
d'vnc picuite froide & gtaireuſe,de vents & aquoſitez.Pour la curation ,faur avoirre.
cours aux medicamens phlegmagogues ( c'eſt à dire) faiſans euacuation de l'humeur
picuiteux. Ec quant aux copiques, ils doiuent eſtre inciſifs, atcenuatifs, rarefa &tifs,
difcutiens, & grandement deſſeichans. Ladeco& ion de Gaiac, cſt propre pourpro
application uoquer la ſucur: & pendantquele malade ſera dedans le liet,on luy appliquera des
de bouteilles,bouteillesdegrez rempliesd'eau bouillante, bien bouchéc & enueloppée d'vne ſera
uietre, polée aux deux coſtezdu genouil.Pareillementluy en ſera appliqué vne à la
plante des pieds , & parce moyen on eſchauffera & lubriliera l'humeur contenu au
Cataplaſme genoüil . Apres ſera appliqué vn cataplaſme faitdelimaçons auecleurs coquilles ,
de limaçons.Proyez& pilez ſubtilement,y adiouſtant quatre oncesde terebenthine,& vnconce D
d'eau de vie,& ſera reitcré devingt-quatreheures en vingt- quatre heures.
Autre.
Prenez croctes de chéure demye liure, il curs de camomille & melilot , de chacun
demy- poignée , ſon de froment vne poignée , & foit fait cataplaſme auec gros vin
noir auecialie.
Autre plus deficcatif.
Prenez farine de féue,d'orge, & orobe,dechacun tant qu'il en ſera beſoin , racines
d'Iris,maſtic,noix de cyprés,galles,eſcorce de grenades, ſubtilement pulueriſées:de
ce en ſera faic cataplaſme avec lexiue de cheſne, & en ſera vſe coinme deſſus. Leſdies
cataplaſmestarillent,feichent,& reſoluent à merueille l'humeur picuiteux & ſereux.
A pres auoir reſoulelacumeur,ilfaudra encores par longtemps roborer & fortifierla
partie,par celte decoction .Prenezeau de forge,en laquelle onferaboüilliralum , ſel
Des Tumeurs en particulier. 317
A commun, noix de cyprés, galles, de chacun vneonce, groſſement pulueriſées,fueil
C lesdeſaulge,roſmarin,lauande,de chacun demy poignéc; le cour boüilly enſemble,
& paſſéau trauersd'vne ſeruiecte : puis ſeront poſées en cele deco &tion, des com
11 preſſes unpeu eſpraintes : & auec vne ligacure ſeraliéledic genoüil aſſez fort, laos Vertu de la
toutesfoiscauſer douleur.Ladice ligacure avercu dereioindre les parcies diſtenduës
CC
parl'humeur quiauradeAué. Souuentesfois cec humeur eſt dedans & aptourde la ligature .
.. ioincure, quineſe peut reſoudre , à cauſe que la parcieelt debile , ayant peu de cha
1 leur:& ydemeurane longuement, iecte ſouuent les os hors de leur propre place ,
1 commei'ay veu aduenir à pluſieurs. l’ay ſouuenance que monſieur Greaulme Do- Hiſtoire:
En &teur Regent en la faculté de Medecine à Paris , auoit vne tumeur au genoüil , faice
7 d'humeur pituiteux & venteux ,quiluy cauſoic telle douleur qn’il ne ſe pouuoir ſouſ
Er tenit, & eltoic contrainet de garder le lix, & vſa de pluſieurs remedes quineluy pro
fitoient comme il euſt bien degré.Il m'appella pour ſçauoir s'il ledeuoir faire ouurir:
l'ayant veu & palpé , & conſideré que ie n'y croquois nulle mariere ſuppurée, le priay
ВB. d'auoir encore patience: & ques'ily faiſoit faire ouuerture , qu'il s'en repentiroit ,
3
que ie leſçauois pour l'auoir veu pluſieurs fois.Neantmoins il y fit appliquer vn cau
tere potentiel, lequel augmenta grandement la douleur, aucc telle defluxion , que
V les osſemirenc horsde leur place,& fur plus de deux ans ſans ſe pouuoit ſouftenir ſur
WA fa iambe , & maudic cent fois l'heure qu'il n'auoit creu mon conſeil. Les douleurs 7
LU: auec le temps s'appaiſerent vn peu , & fic faire vne iambe de fer ſur laquelle ilmar
ė. choic claudiquant & à bien grand peine:en fin il en eſt mort de douleur & deſplaiſir.
ce Souuentesfois on void commele Chirurgien aux ouuertures des genouils eſt gran - Souuent le
U. dement deceu :car il eſtime en celle partie eſtre contenuë matiere lanieuſe ,& quel- Chirurgien
à ques aquofitez,& en preſſant des doigts, ſent ſelon ſon iugement , inondation , qui eſtdeceu aux
es luy cauſe de faircouuercure : & l'apertion eſtant faire , au lieu de quelque matiere Pune rtures
des gènoü ilso
Po qu'il eſtimoic eſtre concenuë en la tumeur , n'en ſort que du vent , dont puis apres
‫ܘ‬ grands accidens aduiennent pour auoir fait ladite ouuerture , comme i'ay monſtré
e parl'hiſtoire cy-deſſus. Parquoy le ieune Chirurgien y prendra garde .
C

oli Des Dragónneaux. CHAPITRE XXIII.


m
tr: Ene puis paſſer outre que ie ne deſcrive encores cercaine cumeur contre
C. nature, nommée par les anciens Dragonneaux. La maciere des Dragon
neaux a eſté en diuers temps par diuers autheurs diuerſement traictée : de
JU façon que iuſques auiourd'huy n'en auons aucune choſe ferme ne af
es ſeurće, àlaquellenous puillions nous arreſter avec fondement & cilere de bonne
C. taiſon. Ecpremierement, quant à l'authorité de Galien , chapicre 3. du livre 6. De L'opinión de
locis affectis : La generation , dic-il , des poils qui ſe vuidenc éuidemment par les Galien.
S, vrines, eſt auſſi eſtrange , comme de ce qu'ils appellent Dragonneaux , leſquels
) naiſſencésiambesdes hommes, en quelque endroit d'Arabie , comme on dict : &
ES ſontdenature nerueux , de couleur & groffeur ſemblables aux vers. Comme ainti
ľ ſoic doncques que i'aye veu pluſieurs gens qui ſe diſenc en auoir veu , n'en ayane
13 quant à moy iamais veu aucun , ie ne puis rien coniecturer à la verité , ny de leur
generation , dy de leur eſſence. Voyla ce qu'en die Galien. Paulus Æginera, liure l'opinion de
‫ܕܪ‬
quatrieſme,chapitredernier, eſcrit les Dragonnea s'engendr en l'Indie ,& és Paulus Ægis
parties hautes d'Ægypte, cominc animaux reſſembluxans à des verserés parties muſcu- neta.
Dlcuſes,ſçauoirbras,cuiffes ,iambes : & outre iceux , aux enfans fe trainer aux coſtez
par deſſous le cuir , auec mouuemene manifeſte. Aurefte, ſoit que ſoient animaux
D
viuans , ſoit que vrayemenc ils ne ſoient cels , mais que ſeulement ils ſemblenttels ,
2 à la guariſon d'iceux eſt vtile vfer de fomentation chaude, à fin qu'cltant le Dra
gonneau aſſez enfé , il ſorte dehors , & puiffe eltre arraché auec les doigts piece a.
pres piece . Eſtauſſivoile l'application des cacaplaſmes ſuppuratifs faits d'eau , mich
5
&farine de froment & d'orge. Voyla ce qu'en dit PaulusÆgineca .Auicenne chap. L'opinioni
; 21. liu. 4. feu. 3. traide 3. neſçachant à quoy ſe reſoudre, vacillant encline ores en d'Auicenne:
i ce party , ores en ceſtuy là , parlant des Dragonnçaux , maintenant comme d'ani
maux viuans , maintenant comme d'vne ſimple mariere & humeur arreſtée en cer
tain lieu ,ayant au reſte bien compris l'eſſence & curation de cemal, comme diron's L'opinion
cy-apres. Aēcc chap. dernier ,dicquc les Dragonncaux fanc femblables aux vers,& d'Alice bited
me
318 Le huictieſ Liure ,

fetreuuent aucunesfois grands,aucunesfois petics ,n’eſtant leur generation differen. A


te à celle des larges vers du ventre:Car,dic-il,ils ſe meuuent ſousle cuir ſans faire au
cun mal : auec ſucceſſion de temps le lieu où eſt le Dragonneau ſuppure,on ouurele
cuir , puis on tire hors la teſte d'iceluy : que ſi l'on vient à l'arracher,il fait grande dou
leur,principalemēc li par cirer crop violemment il vientàrompre : car ce qui demeure
fait de tres griefuesdouleurs. Partão de peur que l'animal ne le retire,fauclier le bras
forteſtroicauec vn lien bien fort, & faire cela touſiours ,à fin que le Dragonneau al
laotpeu à peu, ſoit retenu par la conſtriction, & ne ſe rompe point . Il faut arrouſerla
partie d'eau miellée & d'huile ,où l'ó aura cuir de l'abſinche ,ou quelqu'autre de ceux
qui ſont ordonnez pourles vers du ventre.QueſileDragonneau ſortant de luy.mel
me , ſe peuc tirer aiſémér, il ne fauc rien faire dauācage;mais s'il courne à ſuppuration,
l'on ne doit faillirà y mettre les cacaplaſmes, & à l'arrouſer d'eau miellée & huile. Les
cataplaſmes oſtez , nous auós accoultumé d'appliquer vne emplaſtre de bayes de lau
rier.La ſuppuration parachevée,le cuir ſoit inciſé ſelon lalongitude:& eſtantleDra
gonneau deſcouvert, ſoittiré hors , & la peau ſoit emplie de plumaceaux, & foirfait
B
le ſurplus de la curation ſuppuratiue :de lorce qu'ayant cécanimalſuppuré & ciré de
hors, ſoitl'vlcere incarnée & menéeà fin de cicatrice .Voila ce que nous a laiſſéAëce.
L'opinion de Rhaſis chap.24.du craieté 7.dit : Quand le lieu commence à s'efleuer en vellie , & la
Rhafis. veine ſe halte de ſortir , il eſt bon que le malade boiue au premier iourdemie drach
me d'aloé : au ſecond ,vne drachmc entiere : au troiſieſme, deux drachmes : & que la
partie ſoit auſſi cpithemée d'aloé , car ill'oſtera du tour: & apres ce qui ſera forty,ilfau .
dra enuelopper ce qui apparoilt eſtre dehors , à l'encour d'vne canne de plomb , de la
pelanceur d'une drachme, & lalier auec cela, & la laiſſer pendre : car par la peſanteur
d'icelle,ilviendra à deſcendre à s'allonger, & ſortir dehors : & quád il y aura voe par
tie dehors,ſoit enueloppé & lié à l'encour dudit plomb : & fi ce quieſt deſia ſorty ,eſt
bien lóg , ille faut couper , & enuclopper encores ce qui eſt demeuré , en ſorte que l'on
ne coupe iuſqu'au bouc : car ſi-on le fait ainſi, il ſe retirera dedans la chair , & engen
drera vne apoſteme putride & maligne : parquoy il fauc ſuruenirà ceſte maladic dou
cement , & cicer hors la veine peu à peu , cant qu'elle ſorte route , & qu'il n'en demeure
rien au
corps . Mais ſi de fortune lona inciſé rezà rez de l'vlcere, il faut mettre le ra C
ſoir dedans letrou,fendre en long , & l'ouurir ſi bien que l'on puiſſeoſter tout ce qu'il
y a de reſte : Delà , que l'on
y mette du beurre par quelques iours , iuſqu'à ce qu'il
pourriſſe , & que la ſubſtáce ſoit conſommée, puis fois curée auec les medicamés,qui
engendrent chair . Voyla commentRhaſis en vnemeſinc ſentence,parlát d'vne mel
mechoſe,labaptiſée de diuers noms , & entre armé de fer & de plomben la curation
l'opinion de d'icelle , tout ainſi que s'il vouloie vaincre quelque furieux animal.Soranus,Medecin
Soranus .
du temps deGalien ,a eu opinion toute contraire, ſelon que cite deluy PaulÆginete
au lieu preallegué , d'autant qu'il conteſte & afferme le Dragonneau n'eſtre point in
animal,ains yne condenſacion & engroſſiſſementde quelque petit nerf ſuperficielav
deſous de la peau , qui ſemble aux malades & Medecins auoir mouuement: en quoy
Soranuss’eſt quelque peu approché de la verité , non toutesfois ſi encieremét qu'il ait
l'opinion de comprins l'eſſence de ce mal,comme dirons cy-apres.Manardus epiſt. 2.de ſon.7.liu.
Manardus, dit que cels Dragonneaux ſont engendrez d'vn ſang mauuais , groſſier,chaud ,& me.
L'opinion de
lancholique,ou d'vn flegme bruſle & deuenu à conplexion grandemécſeiche. Gor
Gorreus .
reus tres -docte Medecin ,enfon liure des Definitios,nie aucun Medecin de ces quar
tiers en pouuoir parler,pour eſtre le malliinfrequét qu'aucun n'en pourroit auoir eu
la veuë. L'aucheurdu livre intitulé l'Introduction & des definicios,definiſt ce mal,&
ditles Dragonneaux eſtre vn mal forc ſemblableaux varices,cauſantgráde douleur,
TE
lors que peu à peu s'elleuant vient à ſe mouuoir . Parquoy le moyen de le guarir eſt
( dit- il ) que , comme en la ſection des varices , nous venõsà ellever la peau de deſſus,&
enfin à le crancher.Ce qui a eſmeule bon pere Guidon au liure des Apoftemes ,chap.
L'opinion de
8.de rapporter cemalaux varices , comme engendrées deſemblable humeurgros &
Guidon ,
melancholique: de faic,que pour la guariſon il vſe de melmes remedes qu'és varices .
Ceſte maladie a eſté baptiſée par diuersautheurs de diuers noms, & cous luyont don. siden
né le nom de Vena:car par Auicenne & Guido ila eſté appellé Vena Meden,pource,
dit - il , qu'il eſt fore frequent en la ville de Medine : par Albucraſis, Vena ciuilis : par
Haliabbas,Vena famoſa: par les autres,Vena cruris . Vraymene telle contrarieté d'o ‫ܪܝܵܐ‬
‫ܠ‬
pinionsrepugnantes, non ſeulement entr'elles , mais auſſi à ſoy-meſme,monſtre éui
demment
Des Tumeurs en particulier. 319
A
A demment le peu d'aſſeurance qu'en auoient ceux qui les ont miſes en auant. Et tou
cesfois le malheur a eſté ſigrád,qu'aucun des recents n'en a rien laiſſé par eſcrit. Bien
eſt vray que lacques d'Alechamps , homme bien entendu en toutesles parties de la
Medecine,aeſcrit de ceſtematiere en laChirurgie Françoiſe,que ces années paſſées 1

il nous a misen lumiere : mais par le long diſcours qu'il nous en a fait, ne nousalaiſſé
autre teſmoignage de ſon induſtrie,finon d'vne diligente & curieuſe recherchede la
meilleure part de cequ'en auoient eſcritlesanciens, ſans autrement auoir vouluaſ
ſeoir ſon iugement, & arreſter vne queſtion tant controuerfe & debatuë entre tous
ceux deſquels les eſcrits ſont paruenus entre nosmains.
Orquant à moy, la modeſtie'ne m'a peu tant commander, que icn'aye mieux aimé
me mettre en hazard d'eſtre eſtimé trop entrepreneur,que de permettre entantqu'il
me ſeroit poſſible,que telle queſtion demeuraſtdauantage encontrouerſe & litige: 1

parquoyie me delibere d'en dire preſentement mon aduis, en ſorte qu'ayant refuté
l'opinion qu'en ont eu les anciens , ie viendray à confirmer par viues raiſons, tout ce
5
quei'enaypeucognoiſtre, tant touchantl'eſſenceque touchant la curation . Caren Premiererata
.
B nepremierlieu , que lesDragonneaux neſoiétvers ſemblables aux lumbriques,& qu'ils l'opinion des
ſoient choſe animée,& que leur generatio ne ſoit ſemblable à celle des larges vers anciens.
du ventre,come la eſtimé Acce,il eſt aiſé à conuaincre, tant de luy meſme,que de la
2
raiſon. Cariceluy, trai&té 3. ſerm ...chap.40. dit lever large,qu'ilappelletenia, eſtre
comme vne metamorphoſe & tranſmutation de la tunique interieure des inteſtins
ti
greles,en vn corps vifanimé & mobile. Or perſonne n'a dit, ncluy-meſme necon
12

I
feſſera pasque lesDragonneauxs'engendrent de la cunique de la veine , en laquelle
ils naiſſent, ny des fibres du corpsnerueux ,lequel ſouuent ils abreuuent , ny moins
du cuir ſous lequel ils font leur reſidence. Outre,la generació des vers,& autres quel- seconde
1
conques animaux quiviennentde pourriture , nepeut eſtre que par corruption de raiſon .
quelque maciere, en laquellenature de ce quieſt le plus bening , par le moyen de la
71
chaleur viuifáce,efforme quelque eſpece d'animal,commemõltre Ariſtoteau 4.des
Meteores.Parquoy pour cet effet,faut que la matiere ſoit diſpoſée à pourriture,celle
re
qu'îleſtrequispour former vn tel animal qu'ilsimaginenceſtre le Dragonneau: que
les cauſes adiuuāres concurrent pour ſeruir d'aide , & comepreſter la main à la cauſe
il
principaleagiſſantc:& que lelieu ſoitpropre àlaprodu& io detel effe& .Ornulle de
toutes cescauſes neſe peut remarquer proprepour faire queles Dragonneaux,donc
UI
eſt queſtion, ſoientanimaux & viuans:carla cauſe materielle dont ils ſont engédrez
of
eltpar le commun accord detous ceux qui en ont parlé, vn humeur melancholique,
883
terreſtre,& groſſier,lequel tácde ces deux qualitez premieres,ſçauoir frigidité & fic
In
citë,que de la qualité ſecõde,ſçauoir acidité & aigreur,eftiugenõ ſeulement le plus
inepte detous les humeurs à pourricure, mais dauãtage y reſilte, d'autāt quela pour
'n
riture ſefait de chaleur & humidité ſuperfluë. Ecoutre, fi la caufe materielle de ce Troiſieſme
maleſtoit vn humeur pourry, & parpourriture changé en quelque animal viuant , il raiſon.
Y faudroit que tel mal fuſtaccõpagné depuanteur, qui eſt vnaccidét & fymptome in
it ſeparablede pourriture:cequieltmanifeſte par la puanteur des excremés de ceux,és
1,
corps & inteſtins deſquels fengédre des vers. Parquoy il faudroit par meſme moyen,
que ce quiexhale par inſenſible tranſpiration des corps de ceux qui ſont infectez des
Dragonneaux,fult puant,commeiladuier à ceux quiſontvexez de phthiriaſis , c'eſt
U
D à dire,de maladie de pouls,accidécroutesfois qui en ce mal n’a eſtéremarquéparau
cun de ceux qui ont parlé des Dragonneaux. Quant à la cauſe efficiente, quelle cha Quatriefriss
leur pourroit eſtreſigrande entre le cuir & la chair,c'eſtà dire en la ſuperficie de no - raiſon.
Are corps,quepar l'a &tiuité en vne matiere melancholique , & du toutinepte à rece
voir telle impreſſion,ils'y peut former yn animal figrád & enorme,que nous ontde
peintceux quifeignent noſtrecorps abonder en monſtres, & n'onteu honte d'aſſeu
rer des Dragons eltre couuez, & eſclos d'iceluy ?cõſideré querellieu ,tát par le moyé
des petitesarteres qui ſe ramifient pariceluy, que parle benefice d'inſenâble trālpi
ration,eſtcontinuellemét aſpiré & cuentilé de la fridigité de l'air qui nous enuiron
ne.Orà ces deux premieres cauſes,materielle & efficiéte defaillātes,ou pour le moins Cinquieſme
fortmanques& debilespourproduire cel effce, quelle cauſe coadiuuáte peut döner raifon .
ſecours:cit ce l'humidité des viandes ?vrayment les corps qui ſe nourriſſent de vian
des tiedes & humides ,cómc de laict,formage , & fruies meurs,font ſujets aux vers &
ſemblablc vermine ,comme nous voyons parexperience és petits enfans. Ecau con
Ee
320 Le huictiefme Liure

traire, Auicéne au lieu cité , dic qu'entre les viandes quiengendrent les Dragõneaux, A
ſont celles principalement quiſont chaudes & ſeiches, & que ce mal ne việt pas cant
és corps humides & accouſtumez aux bains & viādes humides, & qui vsét de vin par
Sixieſme meſure.Voire mais la nacure de l'air du pais où eſt frequét ce mal,ne dône- elle point
raiſon . quelque commodité à la generation de cesanimaux ? encores moins : car à tel effect

eſt propre l'air nebuleux ,


couuert & humide , quel nous voyonseſtre au commence.
ment du printemps, lorsque les grenouilles , crapaux, & ſemblables petits animaux
ſ'engendrent à foiſon. Or aucõrraire M.acques d’Alechamps(meſmede l'opinion
de tous ceux quien onteſcrit)dit chap.83.defa Chirurgie , cel mal des Dragonneaux
eftre frequent aux Indes, Arabie, & autres celles regions chaudes & bruſlantes, où la
terre de grade aridicé ne produit que bien peu de verdure. Que ſi encores tel licu de
noſtre corps,ſçauoir celuy qui eft immediacement deſſous le cuir,auoit en foy quel
que cómodice de produire ou nourrir dels animaux , vrayınécon auroit quelque pre
texte de dire & maintenir les Dragõneaux eſtreanimaux viuans : mais ſi tel lieu n'eſt
apre & capable ,comeles inteſtins,eſquels pour la diuerſité de leur capacité ſ'engedre B
diuerſité de vers: ſı tel licu n'eſt aſpiré d'une chaleur étouféc,ny abruué des plus grof
ſes immondices de tout le corps,come ſont les inteſtins, ains ſeulemét des plus fùbti
les & tenuës , qui le plus aiſément ſe digerét par inſenſible tranſpiration , quellecauſe
vallable pourroiét-ils alleguer d'vn effect ſi admirable & monſtrueux?mais nous au
rions peu auancé par nos raiſons, fi enſemble ne confiderions à reſpondre à certaines

Reſponſe à la obie & tions que l'on nous pourroit faire.Caren premier lieu (diront -ils) pourquoy les
premiere ob- anciens euſſenc- ils exprimécemal du nom d'une choſe animée, çauoirdes Dragon A
iection. neaux ? Pource qu'en la Medecine les noms ſouuent ſont impoſez aux maladies, plus
par ſimilitude que par propriecé.Pour tour exemple nous produirons trois maladies,
I'vne appellée Cancer, l'autre Polypus, & la troiſieſme Elephas,leſquelles ſont dites , non
qu'en nous par icelles fengendre vn vray chancre,ou polype,ou elephácanimé & vi
uant,mais pource que l'on de ſon eſtenduë repreſente les branches d'on chácre, l'au

tre de ſa ſubſtance repreſente la corpulence & ſubſtance d'vn polype; & le troiſielme 4
d'autāt que ceux quisõtladres , ſont en quelque endroit du corps d'vne crouſte ſem
blable à la peau d'vn elephant. Ainſi le mal doceſt queſtion ,a merité le nom de Dra. C 2
gon , parce qu'en toute la configuration ,couleur,longueur & rondeur , il nous repre

Responſe àla lente la figure & image d'vn Dragon. Mais , diront- ils, pourquoy le mouuement de
feconde. celle matiere eſt-ilapparent,fielle eſt inanimée ? A cela nous pouuons reſpondre ,que
l'humeur cauſant ce mal eſt ſubtil & bouillant,quieft cauſe de faire cel mouuement:
& qu'il vient & decoule à la partie malade auec impetuoficé, come fluctuant. Or, di
Responſe à la fent- ils ,toutesfois file dragon vient à fuppurer,on le void ſortir hors de ſa cafe. Nous
troiſieſme. reſpondons qu'ils ſont grandemét deceus : d'autác que lors que la fuppuration eſt fai
te, quelquesfois il demeure quelque corps nerueux denué,faiſant de ſon corps mou
Reſponſe àla uement preſque conuulfifen fimilitude d'vn vray Dragonneau. D'abodanc pourrõe
quarrieſme. dire , que la douleur ne peut aduenir fion aux choſes qui ont ſentiment, & parconſe
quent vie:doncquesquand l'on tirece Dragõneau, il faitextréme douleur , & princi
palement ſi à force de le tirer on le rompt . Nous reſpondons que celle conſequence
eſt malfondée: car celle douleur n'aduient ſinon lors que le Chirurgien maladuiſé
tire le nerfimbu de tel humeur en guiſe de vray Dragõneau: dõt faire ne ſe peut qu'il
ne ſe face douleur,briſant la partie quien nous cauſe
& apporte toutſentiment.Pour D
dócen brefarreſter quelque choſede la nature ,eſsēce & generació des Dragóneaux ,
opinion de
Pautheur. i oſe bien dire,ſaufmeilleuriugemét,n'eſtre autrechoſe qu'vne tumeur , & apoſteme
faire parvne ebullition de ſang quife fait en la maſſe fanguinaire , lequel par la vertu
expultrice eſt enuoyé aux parties exterieures par les veines, & principalement aux
bras , cuiſſes, & iambes, faiſantvne tumeur ronde & longuic , ſouventdepuis la iointu .
re de l'eſpaule iuſques au carpe,ou depuis l'aine iuſques à l'une desmallcoles,accom
pagnée d'vne tres -grande douleur tenſiue, pungitiue & bruſlante , enſemble grande
Les Dragon - dureté ,eſtant touſiours accompagnée de ficure. Dauantage,quelquesfois ladite tu
neaux ne ſone meur eſt de figure droite, autrefois anfractueufe comme vne varice : à raiſon dequoy
iamais ſans quelques-vnsatteints de ceſte maladie , ſe disēreſtremalades du Dragõ .Voila en bref
fieure. ce que i'en ay peu comprendre,ſelon ceſte region .Quát à la curacion, elle n'eſt point

diffemblable à la fluxion phleginoneuſe, diuerfifiantles medicamés ſelon les quatre


temps, ordonnát le regime, faignée & purgations commenous auons dicau chapitre
Des Tumeurs en particulier
. 321

du Phlegmon. Il y a vne autre maladie appelléc Cridons, qui prouient aux petits Cridons
A
enfans,qui les vexent & tourmentent, ainſi que fils auoient des eſpines au dos en ſe
tournant ça & là , & ſont petits poils gros & aſſezeſpais de longueur d'une petite clo
pingle . Ils ſe curent auec l'eau pluschaude que cicde,puis frottez de miel incorporé
auec farine de fourment:cela fait, on les void ſortir hors du cuir, puison les circaucc.
ques petites pincettes . Iecroy que ceſte maladie n'a eſté cogneuc aux anciens, au
moins que i'aye peu encore deſcouurir.

Fin du huidtiefme livre des Tumeurs contre Nature en particulier.

Table des Chapitres du neufieſme liure des

Playes recentes & ſanglantes, en general


.

v'eſt-ce que Playe , quelles ſont les differences efpeces d'icelle , & d'où elles
ca font priſe's. Chapitre j.
Des cauſes des playes. Chap.ij.

Les ſignes & ingemens des plages: Chap.ij.


Du prognoſtic des plages. Chap. iij .
De la curation des plages en general. Chap.v.
Tema
Tento Des futures. Chap ui .

Da flux de ſang qui furuient aux playes . chap. vý.


pm Chap. vių .
De la douleur qui furuient aux playes.
O: Du fpafme ou conuulfion. chap. ix .
co De la cure de paſme. Chap. x.

nema Chap. xi.


Cure du fpafmeper conſentement et douleur.
De la paralyſie. Cbap.xj.

Cure de la paralyfie. chat xay .


De ſyncope. Chap.xiij.
Didelire & alienation d'eſprit. Chap. xv.

ic
2014

Ee ij

tot
10 " .

Spa
288

LE : NE VFIESME LIVRE
TRAICTANT DES PLA Y ES
RECENTES ET SANGLANTES

en general.
PAR AMBROISE PARE', DE LAVAL AV
M A INE , CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy.
1

Qu'eſt-ce que Playes, quelles ſontles eſpeces & differencesd'icelles,


& d'où elles ſontpriſes.
CHAPITRE PREMIER

Definition Laye eſt ſolution de continuité recente , ſanguinolente , & A


de playe . ſans putrefaction complete ou purulente ,faicte principalement
és parties molles. Icelle eſt dite des Lacins Vulnus, qui eſt à di
re, ouuerture dilatée d'un corps , faite par quelque coup, cheus
Gal. liu . 32 te, ou morſure. Quelquesfois aufli eft appellée playe ,quelques
Met.chlo . fois vlcere recent , ou ſimplement vlcere. Or ſolution de con DE
tinuité aduient en toutes les parties du corps : auſſi a - elle di
Diuers nomas uers noms & appellations, ſelon les Grecs , comme en la chair helcos : en los cais
donnez des gma : au nerf þa/ma: au ligament ihlaſma : aux vaiſſeaux apoſpaſma: aux muſcles 1

anciensàſo- yhegma. Et l'il ſuruientſolution de continuité par l'apertion des orifices des vaiſ
continuité, ſeaux , elle eſt appellée anaſtomoſis : ſi par tranſcolation , diapedefis ; fi par eroſion ,
anabroſis. Et pour plus facile intelligence, il m'a ſemblé bon de te reduire ces
differences en ceſte preſente Table.

1
Des Playes en general. 323
Table des differences des playes.

Glandules ,
Molles. Chair ,
Graiſſe,
Moäelle ,

Similaires , Sos;
qui font Dures.
7
Cartilages.

Membranes,
rde la na. Nerfs,
Mediocres. Ligamens,'S Vei nes ,
ture des Vaiſſeaux , Arteres .
parties on Fibres .
le mal eft
V leſquelles Cernean ,
s Saucuns adiouftent lamasri.
font on ſ Principales.} cæus , < ce & les tefticules.
- Foye.
Trachée artere,
Organi Poulmons,
| Miniſtran Oeſophague,
ques, qui tes AUX
font principales. Vede,
Eſtomach ,
Boyaux .
Les diffe
Tences des Non mini- Oreilles,
&
plages fonol ſtrantes aux ) Nez ,
priſes principales Pieds,
di L comme Mains .

so

De leur Simple, ŞQuand n'yaaucunecauſe,ſymptome ne maladie,c'eft?


04 2dire, n'ayant aucune diſpoſition compliquée.
ellence , ou En laquelleya complication d'autres dipoſitions,ſans
3 "Composée. la remotion deſquelles ne peut eftre obienuëguariſon,
f qui eft union .
1
S Longue ,
-Grande , Large,
De la Profonde.
Moyenne ,
quantité Courte,
- Petite , Eſtroite,
Superficielle.
Droite,
De la Joblique,
I figure Angulaire,
Ronde.

Ee inj

1
Le neufieſme Liure ,
324

A
Des cauſes des plages. C H 4 P. 11 .

Diuiliun des Es cauſes des playes , entant qu'elles ſont recentes & encores fan
choſes exter glances , ſont eſtimées eſtre toutes celles qui peuuent aduenir extrin
nes.
ſequement , c'eſt à dire , par choſes excernes , leſquelles ſont animées ,
ou non animées . Lesaniinées, ſont comme morſures , ou picqueures
de beſtes, tant veneneuſes , que non veneneuſes. Les non animées,
ſont comme vn coup d'eſpée, de baſton, de piſtole , de pierre, de dague, & autres
choſes ſemblables: & ſelon les choſes dont elles ſont faictes, prennentdiuersnoms :

Picqueures . comine celles qui ſont faites par choſes poinctuës, aiguës , & poignantes, ſont dites
Inciſions. picqucures : & cellesqui ſont cauſées par choſes trenchantes, ſont nommées inci

Contuſions. lions , ou playes inciſées: & celles faites de choſes lourdes , peſantes, obruſes , ou
mouſſes, ſont dices contuſions, ou playes contuſes & meurtrics .

B
CH A P. III .
Les ſignes & iugemens des playes.

Es lignes des playes ſont cogneuspar le ſens de la veuë , en la conſide


ration deſquels le Chirurgien auant toutes choſes, doit cognoiſtre
Sentence. quelles playes ſont curables, & quelles incurables , & guariſſent faci.
lement ou difficilement. Car premierement vn fage Chirurgien ne
promeccra iamais guariſon à celuy qui ne peut cíchapper, ou quieſt
en peril,à fin qu'il ne face ſoupçonner qu'il aye tué le malade , lequel ſera mort par
la grandeur de la playe : & lors qu'ily úgrand danger, ſans toutesfois que le mal ſoit
22
deſeſperé du tout , il doit aduertir les amis& parens du malade , que la playe eſt
ſuſpecte & tres -difficile à guarir, à fin que ſi la maladie eſt plus force que la ſcience
& moyen que l'on y ſçauroit mettre , on n'eſtime qu'il ſoic ignare , ou qu'il les aye
abuſez . Mais comine telle choſe eit l'office d'un bon & prudent Chirurgien : ainſi
c'eft l'acte d'vn charlatan faire grand vn mal quieſt petit , à fin qu'on eſtime de luy
plus qu'il n'a executé : & eft raiſonnable que le Chirurgien en confeſſant la curation c

1 eſtre facile , oblige ſon honneur & fa reputation , à fin queplus curieuſement il re
cherche & regarde tout ce qui concerne la ſanté du patient , & que le mal, qui de
ſoy-meſme eſtpetit , par la negligence de celuy qui le traitce, ne ſe face plus grand .
Galien 4 :
Doncle Chirurgien doit ſçauoir quellesplayes ſont grandes pour les accidens qu'el.
Mer.chap.6. les amenent, ce qu'il cognoiſtra,comme dic Galien , par ces trois poinets. Le premier
Gal. au lieu pour l'excellence de la partie aßigée ,comme cerueau, cur,grands vaiſſeaux,iaçoit
ſus allegué qu'elle ſoit peu offenſée. Le ſecond à cauſe de la grandeur ou quantité de la mala C
die ; commeſont les playes ſpaticules , auec grande inciſion, larges & fort profondes, Way
ſansqu'il y aye quelque partie noble offenfee. Le troiſieſme pour la malignité, com
me ſont celles qui aduiennent és iointures , leſquelles ſont fouuent accompagnées
de cacoëthie ou malignité.

CHAP IIII.
Du prognoſtic des playes.
vala

Es playes ſont fort dangereuſes, quand il y a quelque grand nerf, veine ou D


artere bleſſez,pour la conuulſion & Aux de ſang,tant veinal, qu’arterialqui
l'enſuit,lequell'abbar, & épuiſe la vertu du malade.Seblablemét fonctres
Hipp. aph.
18. liu . 6 . mauuaiſes aux aiſſelles,cuiſſes, iointures, & entre les doigts : dauátage ſi le
telt ou extremité du muſcle eſt accaint: les moins dangereuſes ſontaux parties char
neuſes. Pareillement les playesfaites à la veſſie,cerueau,cæur, foye, poulmons, eſto
celo
mach ,inteſtins grelles,sõt mortelles: & fi quelque os , cartilage , nerf,porti) de laioüe u
Hipp.aph. Oude prepucc eſt coupé , ne peut l'augmenter,reünir, ny agglutiner . Aulli les playes
19. lin . 6. qui ſont contuſes, font plusdifficiles à curer que celles quin'ontqu'vne fimple ſolu
tion de continuité,à cauſe que devant l’vnion faut mener la plave à fuppuration &
deterſion,choſes qui ne ſe peuvent faire qu'en long téps: celles qui ſont rondes ,font Squi
d
pires que toutes les autres en qualité & condicion de figure: à raiſon que l'vnion ne
ſe fait que par le moyen d'un angle, c'eſt à dire , r - ncontre de deux lignes : ce qui n'a
licu és playes rondes,de tant que la figure ronde n'eſt faite que d'une ligne oblique .

1
Des Playes en general. 325
A Dauantage lesplayes ſont eſtimées les plus grandes & dangereuſes, deſquelles les lugement
extremitez ſont plus ellongnées les vnes des autres,ce qui ſe faités playes rondes: au pris pour la
contraire celles deligne droite, & faites ſelon les fibres, reçoiuent plusfacilement figure.
guariſon.Semblablementfivn corps ieune eſt nauré, ſera pluſtoſt guary qu'vn vieil
lard, pource que nature eſt plus forte & vigoureuſe au ieune: & que le ſang eſt plus
gras & gluant pourfaire prompte vnion & regeneration de chair, au contraire plus Hippoliure
fec, & terreſtre, &moinsabondantés hommes aagez : aufli les playes faites au Prin- des viceres.
temps ne ſont ſi faſcheuſes, que celles qui ſont en Hyuer ou Efte: car l'exceſſiue Hip.conuulſ.
ex,szinere
froideur & chaleur eſt contraire à icelles. Si la conuulſion ſuruient à vne playe, c'eſt le: hal.
vnmauuaispreſage: car c'eſt ſigne que les parties nerueuſes ſont offenſées, & que le
cerucau,quien eſt la ſource , endure & fouffre. Siaux grandes playes il furuicnt cu- Hirp.apho.
meur, c'eſtbon ſigne, pource que nature taſche à ſecourir la partie offenſée, &mon Gal.lis.de
frequ'elle n'eſt du toutabbatuë. Les parties organiques eſtans du tout coupées , ia- arteparua.
mais neſe peuuent reünir, d'autant que la partieeſtanc hors , & ſeparée du corps , ne
В peutreceuoir la vie & mouuement d'iceluy , ſans leſquels elle ne peut aucunement
B viure.Les nerfs, veines & arceres , ſe reprennentquelquesfois, enſemble les os , non
toutesfois proprement, c'eſt à dire , ſelon la premiere intention , ains ſelon la fecon.
de. Orlapremiere intention eſt, quand les parties diuiſées ſe reüniſſent enſemble, Premiere in
comme elles eſtoient auparauant ſans moyen de ſubſtance d'autre genre ou eſpece, tention.
ains par l'aide du nourriſſement, ſçauoir eſt par tranſmutation de l'aliment du tour
ſemblable , & meſme que l'autre, comme il aduientaux parties charneuſes. La ſe . Seconde in
tention .
condeintention eſt, quand les choſes diuiſées ſont vnies par le moyen de quelque
autreſubſtance que nature machine ſemblable à icelle , mais non meſme : & par tel
moyen ſont reünies les parties ſpermatiques, comme ce qui vnit les os enſemble , eſt
appellé Callusou Porus : laquelle calloſité ſe fait d'vn humcur vn peu plus gros, que
n'eſtceluyduquell’os a eſté fait: lequel humeur eſtant là paruenu , lefleue & ioint
enſemble les os ,qui ne pourroient iamais autrement ſe reünir enſemble , pource
qu'ils ſont tropdurs. Toutesfois ceux des petits enfans ſe reüniſſenoplus facilement,
Y & auecmoinsd'addition:ce qui aduient pour leur mollefſe & delicateſſe. Orie veux
1 . C bien aduertir le ieune Chirurgien, que fouuent les playes qui ſont pecites & non
mortelles d'elles meſmes , menent quelquesfois le malade à lamort : ce quiaduicnt
C pourlevice des choſes externes,& non pour la faute du Chirurgien.Ce quieft < ſcrit
1. par Hippocrates , diſant qu'iln'eſt ſeulement neceſſaire que le Medecin ou Chirur- apho.r.
Hipp.liu.s.
be
gien faceſon deuoir, mais auſlı y eſt requis l'ayde des choſes externes.
1
De la curation des playes en general. CH AP. V.

E Chirurgien pour la curation des playes ſe doit propoſer vne commune Gal.li.3.
indication , quieſtvnion des parties diuiſées, laquelle eſt notoire , meſmes Met. chap.1.
aux idiots . Car ce qui eſt ſeparé, monſtre facilement qu'il doit eſtre rc
joint, d'autant qu'vnion eſt contraire à diuiſion: mais par quel moyen , & com
ment ladite vnion doit eſtre faite, n'eſt cogneu de chacun. Orceſte premiere & gc
nerale indication eſtparfaice par nature , comme le principal agent , & par le Chia
rurgien, commeminiſtre de nature : & ſî nature n'eſtforte,le Chirurgien ne pour
D ra venir à la fin pretenduë. Or quand il exerce ſon operation , ſe propoſera cinq cinq inten
D poinctsprincipaux.Le premier eſt , ofter les choſes eſtranges, comme bois, fer, os : tions pourla
carautrementlaplaye ne ſe pourroit iamais reprendre , ains recidiueroit. Le ſecond plages.
curation des
eltapprocher les labies enſemble, d'autantque ſi ellesn'eſtoient iointes , nc pour
roient ſe conglutiner & reünir . Le troiſieſme eſt conſeruer les labies reiointes. Le
quarrieſmeeltgarder la temperature de la partie : car tant qu'elle feroitintemperée,
iamaisneſe feroit vnion. Le cinquieſmeeſt la correction des accidens, leſquels per
uertiſſent ſouuentesfois l'ordre de curation. Or par les choſes eſtranges nous n'en- Gal. Meih,
tendons ſeulement cequiſera venu excerieurement , comme Aeches , dards, balles,
bourre & autres , deſquellesnousparlerons cy -apres, mais auſitout ce qui depen
droit du corps , & demanderoiteltre ofté, comme ſang caillé , chairdilacerée, frag
mens ou eſquilles d'os : leſquelles choſes empeſchent l'action de nature. Aduertille
mentau jeune Chiturgien : c'eſtqu'il n'vſe point de tentes, comme aucuns fontor
dinairement , ſicen'eſt qu'il y cult dedans la playe quelques corps eitranges, comme
eſquilles ou autres choſes. Cár vfant de tentes on fait donleur, & font ertranges à
E iii)

i
e
f ieſm e
326 Le neu Liur ,

nature , qui caufe fluxion & apoſteme: & le Chirurgien ignorant ne penſe pas que a
ces tentes en ſoient cauſe , & n'oſe les oſter, eitimant que ceſte boüe qui ſort de la
playe , pourroit eſtre arreſtée , laquelle eſtant arreſtée & retenuë en la playe , ron
geroic & caueroit . Au contraire , c'eſt la tente quientretiene la playe à ierter beau
coup de ſanie & bouë , & lors qu’on ofte les tentes , on void que toit apres la playe
Galien au 4 . de la Mech .
neiette plus , & feconſolide. Cecy eſt bien confirmé par

quidic quetout vlcere ( il prend icy vlcere pour playe) ſimple ou auec cauité,deman
de qu'il n'y ait rien entre les labies , quipuiſſe empeſcher vnion : tellement que l'il
aduient qu'il y ait araignée , poil , huile , & autres choſes eſtranges , elles empeichend
l'agglutination.Dieuſçait l'honneur & le profit quei'ay receu pour n'auoir touſiours
vſe de tentes . Partant icelles doiuent eſtre oftées le pluſtoſt qu'il ſerà poſible , &
principalement ſi elles comprimentou piquent quelque nerfou tendon ,dont fen
ſuit grande douleur ouapoiteme à quelque partic principale , ou ſeruante à icelle.
Sentence do- Toutesfois ne fauteſtreſi curieux ,que lipar l'extraction d'iceux l'en peut enſuiure
rée.
grande douleur , ou flux de ſang, ne ſoit expedient pluſtoſt attendre que nacure le
chaſſe pecit à pecit , comme luy eſtantcontraire, ce qu'elle fait ſouuent auec la bouë : B
& où l'attenteou delay ſeroic dommageable, faut que le Chirurgien opere prom
prement, ſeurement & auec peu de douleur, ſ'il luy eſtoit poſſible. Car és playes
indiſcrectement maniées, ſuruient routesfois flux de ſang , fyncope, conuullion , &
autres mauuais accidens qui meitene le malade en plus grand danger que la propre
playe . Telles choſeseſtranges ſontoſtées auec les doigts ou inſtrumens propres à ce
Gal.3 .Meth. la : quelquesfoisfacilement,autresfois auec difficulté,ſelon que la choſe crifaſcheu
1
ſe à trouuer & tirer : ce qui aduient ou pour la diuerſité & figure d'icelles choſes
eſtranges , ou pour la nature de la partie qui eſt molle ,dure ,& profonde, à laquelle
icelles ſontmoins ou plus fort attachées , & pourla crainte qu’on a de faire ruption

Hipp.liu. de quelque vaiſſeau .Orle moyen d'accomplir ceſte premiere incētion , enſemble les
des viceres. portraits des inſtrumens à ce neceſſaires,te ſerontdeclarez amplement au traictédes
coups d'harquebuſes, feches & dards . La ſecõde & troiſieſineintention ſ'obtiendra
par melmes moyens , qui ſont deux , à ſçauoir, par ligatures & ſutures. Toutesfoisde
C
uant qu’vſer des ligacures & futures , auras cſgard fil y a Aux de ſang , lequel ſ'il eſt
trop grand , ſera arrefté ,& f'il n'a aſſez flué, on le laiſſera couler , ſice n'eſt en la capa
cité des ventres , afin que la partie ſoit deſchargée & moins vexée d'inflammation.
Donconapproche & couure les léures des playes par future ou ligature, ce qui ne
conuientpas à toutes playes , mais ſelon la diuerfité des parties & figures fautvſer de
l'vne ou de l'autre,ou quelquesfois de toutes les deux enſemble. Car la ſimple & pe le
tite ſolution de cõcinuité,abeſoin d'vne ſimple ligature appellée incarnaciuc,princi
palement ſi elle eſt au bras & iambes : celle ſolution de continuité, quieft au trauers
des muſcles, a beſoin de ſuture & deligature, afin d'approcher les labies qui ſont par
trop eſloignées: parce que chacune partie ſe retire vers ſon commencement & fin. 20
Lors qu'il y a quelque portion dechair inciſée, laquelle pour la grande ſolution de
continuité tombeen bas,a beſoin de future,commeauſſi toutes les parties auſquelles
les ligatures ne peuuéreſtre bien accommodées,commeaux oreilles,nez,crane,pau
Trois manie- picre , léures , gorge, & ventre . Tous les anciens ont fait trois manieres de ligatures .
res de ligaru- La premiere elt dite glutinatiue ou incarnatiue, la ſeconde expulſiue, la tierce reten
D
res.
trice. La glutinatiue ou incaruatiue appartient aux playes recentes ſimples , & eft
Premiere dite faite auec deux chefs,en commençant à l'oppoſite de la playe,conduiſant & croiſant
glutinatiue. en ramenát les léures ſeparées l’yne contre l'autre , non trop ſerrée, depeur d'induire

inflammation & douleur , ny troplaſche, craignant qu'elle ne profitant de rien,& tel


Seconde dite le ligacure ſe fait principalement és bras& iambes. La ſeconde nommée expulliue,
mesec
expulſiue. appartient aux vlceres ſanieux& fiftuleux, pour expeller la ſanie : & ſe fait auec vne i
bande à vn ſeul chef, commençant à comprimer au fondsdu ſinus, auquel lieu doit
eſtre plus eſtroittement ſerrée,la continuantmoderément iuſques à l'orifice de l'vl
cere,afin ,commei’ay dit, d'expeller la matiere au dehors. La troiſieſme eft appelléc
La tierceli
the
retentrice , appropriée ſeulement aux parties qui ne peuuenteſtre eſtreintes,comme o
gature dite
retentrice. au col , ventre , & generalement en toutes parties où il y aura douleur , pource que la mun
e
partie douloureuſe ne permet eſtre ferrée. Son vcilité eſt de faire tenir les medica
mens: & relle ligature ou bande fe fait quelquesfois auec vn chef, ou avec pluſieurs.
Toutes leſquelles bādes ſerõr de linge nõ crop neuf , trop vieil,ne trop gros ne delić ,
Des Playes en general. 327
A ſeront grandes & larges ſelon les parties où elles ſeront appliquées,prenant indica
tion de la quantité, figure, & ſituation des membres : ce que nous demonſtrerons
plus amplement aux traictez des fractures & diſlocations. La quatrieline intention, Quarrieſme
quieſtcontregarder la temperature de la partie, ſe fera par bõne maniere de viure,& intention:
remedes vniuerſels & topiques . Quant à la maniere de viure , ſera renuë fiorde &
humide, iuſques à ce qu'il ſoit hors des accidens qui luy pourroient furuenir. Donc
il mangera bien peu , & principalement fil elt plethoric, & fabſtiendra de manger
chair lălée & eſpicée , & n'vlera de vin ,principalementl'ileſt bilieux ou fanguin , &
en lieu d'iceluyvſera d'eau d'orge , ptiſane, bouchet. Il ſe ciendra en repos: car le
repos ( commeditCelle) eſt le meilleur: mcdicament. Il cuitera la compagnie des Cornel.
femmes : aulli fuira contention , courroux. , & lespaſſions de l'ame: & lors qu'il ſera Cell.
hors des accidens ,ilvſera de viure plus copieux , & boira vn peu de vin en retour
nant petit à petit à ſa couſtume & maniere de viure. Les rcmedes vniuerſels ſont la Remedes
phlebotomie & purgation , leſquels ontvertu d’empeſcher la fuxion , dont la tem- vniuer,els:
peracure de la partie feroitchangée. Toutesfois ie ne louë les fortes purgations aux
3 B playes recentes , d'autant qu'elles ſontchaudes & aperitiues, & émcuuentle lang,&
leshumeurs,quiſont cauſe d'enflamber la playe & la faire apoſtumer, & autres acci
dens.Quantàlaphlebotomie, elle n'eſt pas touſiours neceflaire, comme aux petites e quelles
playes , & auxcorps qui ne ſont cacochymnes ny replers , mais aux grandes, & où il y planes la
a danger de fluxion, ou que le corps eſt replet,& aux playes desiointures, tendons, phlebotomie
nerfs, & où l'on craint douleur , reſuerie , & inquietude. Les purgations doiuent eſ neceſſaires
eſtredouces& benignes , d'autant que les forces eſmeuvent & elchauffent, dove le
peut enluiure quelque fuxion & inflammation. Il pourra vier d'vn bol de caſſe, ou
d'vne infuſion de rheubarbe, & de ce auras recours au docte & prudent Medecin.
7 Lesmedicamens topiques ſont dits Collesica, leſquels doiuent eſtre deficcátifs &
s aftringens, à fin de contenir les labies enſemble, & prohiber la fluxion ,ayant cou
tesfois elgard à la nature de la partic,& à la grandeur de la maladie. Les fimples font,
a thus,aloës, ſarcocolla, bolus arme.terra ſigillata,fanguis draco.terebinthina vulga
ris, Veneta ,gummi clemmi , plantago , cauda equina , ſymphycum maius, farina
A Ć volatilismolendini, & pluſieurs autres, leſquels nous dironsen noſtre Antidotaire.
. Lecinquieſmepoinãt,eſtla correction des accidens,leſquelsſouuentesfois donnent Cinquiefime
2, grandes faſcheries & beaucoup d'empeſchemens au Chirurgien , eſtant contraint intention.
10 de lailerla propre cure , pour ſurvenir à iceux : commeAux de fang, douleur, in
la flammation , fieure,conuullion , paralylie, ſyncope, reſuerie , & ſemblables, del
quels dirons le plus ſuccinctement que nous pourrons.
's CH AP . VI.
Des jurnres ou Coutures.
I

Ors que les playes ſont faites au long des bras , cuiſſes & iambes, on ſe
3 peut bien paſſer de les coudre , à cauſe que par ligatures & com
s preſſes ſe peuuent rejoindre : mais quand clles ſont au travers , de
mandent eſtre couſuës, parce que la chair & autres parties eſtanscou
pées , ſeretirentvers les parties faines , & y eſt fait grande diſtance. A Bon documět
D ceſte cauſe pour rejoindre & cenir les léures dela playe , les conuientcoudre. Et pour le icune
ſi la playe elt profonde, faut prendre beaucoup de chair profondement: car ſi on Chirurgien.
ne prend que la ſuperficie, la playe ſe rejoint ſeulementſuperficiellement ,& au
profond non, & la lanie eft retenuë, & ſe fait apoſtemes & viceres caves. Mainte
nant fauerraiếter la maniere de les faire. Or il y a cinq principales ſortes de futures, Cing fories
La premiere eſt faite en laiſſant la diſtance d'vn doigeentre lespoinés: & eſt propre des forures.
auxplayesrecentes,faites auxparties charneuſes qui ne ſe peuuent ioindre auec li- Preiniere fiti
thre .
gatures:& quand iln'y a rien d'eſtrange en la playe , icelle ſe fait en ceſte manie
re. Ilfaut avoirvne aiguilleenfilée , voie , ayant la pointe triangulaire , à fin qu'elle Deſcription 1

entre plusfacilementen la chair: & fautque l'extremité de fa teſte ſoit caue, à fin de l'aiguille:
que le fil ſe cache: ainſi faiſant, ladite aiguille paſſera plus librement. Parcillement
faut auoir vne cannule feneſtrée, ſus laquelle ſera appuyée vne partie de la léure
de la playe ,àfin qu'elle ne tourne ne çà nelà en pallani ladite aiguille, & qu'on
puiſſe voir par la feneſtre quand l'aiguille ſera palice , pour la tireranecqucslcfi..
let, enappuyant la léure , depeur quelorsqu'on tire le fil, elle ne le ſurue. Et ayang
328 Leneufieſme Liure ,
ainſi paſſé les léures de la playe , foit faicvn neud, & ſera coupé le fil aſſez pres d'ic A
celuy , depeur que le reſte du fil s'adherç contre les emplaſtres , qui en les oftant
pourroiencinduire douleur.Etfaucnoter,qu'ilfaut faire le premier poinct au milieu
de la playe , & le ſecond aumoyen eſpace, en faiſant qu'il y aye entre chacun poinct
diſtanced'vn doigt : & ne faucioindre du tout les léures l'vne contre l'autre, afin
que le pusſe puiſlc vuider , & cuicer inflammation & douleur. Car ſi on joinēt les lé
ures enſemble au temps que le pus ſe fait, ſuruient tumeur à la partie; laquelle diftéd
les léures, & eſtans diſtenduës le fil les coupe. Semblablementnefaut prendre la
chair ſuperficiellement,nytrop profondement: car lion la prend ſuperficiellement,
ne tiendra point : & fion la prend trop profondement,induit douleur& inflamma
tion, & rend la cicatrice laide. Vray eſt quand les playes ſont profondès au trauers .

des grosmuſcles,ilfaut faire la couture profonde, c'eſt àdire , prendre beaucoup


de chair, afin queles poinēts ne ſerompent. Or quelquesfois les playes ſe font en
cellieu ,qu'ilfaut auoir canon & aiguille courbe : autrement ce ſeroit impoſſible fai
re ta future comme deſirerois. Et parce ict'ay bien voulu donner le pourtraie de l’y
B
ne & de l'autre , afin de prendre ce qui ce ſera le plus commode.
Cannules & aiguilles propres à faire les futures.

PARANAE Dor mais de WWW . WWWWW

‫أداء‬

Secondefun Laſeconde ſuture eſt faite en maniere que les pelletiers couſent leurs peaux,& eſt
ture.
propre aux playes des inteſtins, craignant que les matieres ne forcent & tombenc 0: 1
Troiſieſme hors par la playe. La troiſieſme cſt faite, en paſſant vne ou pluſieurs aiguilles enfilées
future. au'trauers des léures de la playe , puis remplier & tourner le filautour d'icelles ,ainſi
que font les Eſcoliers , lors qu'ilsveulentgarder leur aiguille dans leurs bonnets : &
celle future eſt appropriée aux léures fenduës,ſoit par nature ou par art,comme nous
Quarrieſme monſtrerons cy-aprest'en donnant le portrai&. La quatriefmeci dice Gaſtroraphic,
future. quieſt appropriée ſeulement aux grandes playes des muſcles de l'Epigaſtre, auecin
Cinquieſnae ciſion du Pericoine,laquelle ſera declarée en ſon propre licu. La cinquięſme eſt la
ſurare. ſucure ſeiche , qui l'accommode ſeulement auxplayes de la face , laquelle nous
deſcrirons en ſon propre licu. D

Duflux desang quiſuruient aux plages. CHAP. VII.

Ouuentpourquelque vaiſſeau, à ſçavoir veine ou artere , qui


aura eſté coupé ou rompu,& dilaceré, ſuruient hemorrhagic
Le ſang efle aux playes , auquel eſt bien neceſſaire donner prompt ſecours, made
atiedu que le ſang eſt le threſor de la vie , ſans lequel on ne peut
threjorde la
pie.

S viure. S'il vient de l'artere , ſe cognoiſt parce qu'il eſt ſubtil,


& forcen ſaucant, à raiſon de l'eſprit vital contenu aux arteres :
fil ſort dela veine, il n'eſt G ſubtil, mais gros , noir , & ne ſore
en fautelant. Or il y a plufieurs moyens d'arreſter ledic Aux de
ſang. Le premier & le plus commun , eſt d'approcher les leures de la playe , &
appliquer ( elle n'eſt profonde) medicamens, leſquels auront vertu de reſtrein
Des Playes en general 329
.

201 A dre,glutiner,refrigerer & deſſeicher.Comme2. terræ ſigill.bol.arm.añ .zB . thur . Medicamës.


LII maſt. myrrh. aloës, añ . zij . far. volatilis molendiniz j . fiat puluis qui albumine oui

the excipiatur. Autre . 4. thur . & aloës añ . partes æquales: excipiantur cum albumine
‫ܕܪܝ‬ oui & pilis leporis : & d'iceux medicamens en ſeront chargez les rentes & pluma
Sle ceaux , quiſeront mis tantau dedans qu'au dehors de la playe : puis par deſſus ſera
18 mis vne compreſſe & ligature propre , & la partie ſera renuë en bonne & deuë ſitua

tel tion , & principalement ſansdouleur , ſ'il eſt poſlīble. Et là où le ſang ne pourroic
AN eſtre eſtanché par ces remedes , alors on oſtera la compreſſe , & preſſera on du doige
IDA ſur l'orifice du vaiſſeau , & y ſera tenu iuſques à ce qu'ilſoit fait yn chrombus , c'eſt à
dire , que le fang dedans & autour l'orifice du vaiſſeau ſoit caillé, & par ainſi cſt en- Autre moya
gardé de ſortir . Orfi le ſang ne laiſſoitde fluer, alors faudroit deſcoudre la playe ( ſi d'eſtancher
on y auoit fait ſuture ) & prendre le vaiſſeau par deſſus auec vncaiguille vers la raci- le fang:
ne , auec bonne porcion de chair , ſelon que la partie le pourra permettre , & le lier.
17 Car par cemoyeni’ay arreſté de grands Aux de ſang , meſme aux amputations des
membres, comme diray en ſon lieu . Quelquesfois faut deſcouurir le cuir par deſſus,
B puis le lier, commeſi la veine ou artere iugulaire auoient eſté coupées : ſi clle ſe reti
re tant en la partie ſuperieure qu’inferieure ,il faut alors, pour la lier, elleuer le cuir
à l'endroicdu vaiſſeau , & le couper ſans coucher audie vaiſſeau : puis eſtant deſcou
uert, il conuient paſſer vne aiguille enfilée par deſſous, puis la lier: ce que i'ay faic
pluſieurs fois. Er deuant que d'oſter le filer duquel on aura lié les veines ou arteres ,
faut que la chair ſoit engendrée deſſus, à fin deboucher leurs orifices, depeur quele
fang deſcoulaſt derechef : parquoy ne ſe faut trop toſt auancer de tirer ledit filet,que
premierement la chair ne ſoit regenerée. Et là où le vaiſſeau en quelque partie que
ce fuſt , ne pourroiteſtre lié , faudroit venir aux medicamenseſclarotiques, faiſant
crouſte , commepoudre de vitriol calciné , poudre de mercure auec autant d'alun
calciné ,ou caucere potentiel, leſquels fonteſchare: laquelle ne faut faire tomber ,
iuſques àce que nature l’aye fait choir d'elle -meſme, & que l'orifice du vaiſſeau qui Autre mad
en eſtoit bouché ,ſoit couuert de chair ou d'vn thrombus . Or quelquesfois pour niere pour
eſtancher le ſang , le Chirurgien eſt contraint de couper du tout le vaiſſeau , pource eſtancher vn
C qu'eftant coupé, chaque portion ſe recire vers ſon colté ,& ſe cache dedans la chair, flux de ſang
cſtantrecouuert des parties circonjacentes qui ſont deſſus, & lors auec peu d'ayde
ledit Aux eſt eſtanché . Mais deuant que le couper, ſi on le peut lier , comme auons
dit cy.deſſus , ſera cncores plus ſeur.

mke De la douleur qui ſuruient aux playes. CHAP. VIII .


enfant
Cauſes d'in
05.09 A doulcur ſuruenant aux playes doit eſtre diligemment appaiſée, par
flammation ,
ce qu'il n'y a choſe qui proſterne & abbacte plus les vertus du malade ;
& jaçoit que le corps ſoitdebonne hábicude & temperature, toutefois
icelle douleur cauſe couſiours fluxion : car à toute partie affligée eſten
uoyé plus d'humeur qu'il n'eſt debeſoin d'autant que Nature taſche
touſiours à la ſecourir : & pour la multitude d'humeurquiyabonde pecháten quan
tité ou qualité , ou tous les deux enfemble, l'excite à icelle inflamacion. Or pour em- medicamens

D peſchertelle douleur & Auxion , on appliqucra autour de la partie desdefenſifs& le- defenſifs.
nitifs,leſquelsauront vertu de repercuter les humeurs qui fueroient à la partie ma
lade, comme , 24. olei myrtini & rofar.añ.3ij. ceræ alb.zj.far .hord. z 3. bol . arme .
& terræ fig.añ.3 vj . liquefacta cera cum oleis,incorporenturomnia fimul, & fiat me
216,46 dicamentum včarciseſt: lequel ſera appliqué au deſſus & autour de la partie. Autre ,
.emplaft.diachalcit.z iiij.olei roſae.& acet.añ.zB.liquefiant fimul, & fiat medica
laika mentum ad eum quem præſcripſimusvſum . Et pour lenir & adoucir la partie , vous
pourrez faire embrocation d'huile roſat, & de myrtiles, adiouſtant vn blanc d’ocuf : &
ll'inHammacion n'eſt grande , mettez l’auf tout entier. Semblablement pourrez
vſer d’ın oxycrat , auqueltremperez vos compreſes & bandes. Or cels remedes de
mandent eſtre renouvellez ſouuent :car eſtans ſecs augmentent la dovieur. Et ſi la
partic eſt ſi enflammée & douloureuſe qu'elle ne cede pour les remedesſuſdits,vous le Chirur
vſerez de medicamens ftupefactifs,cómcoleum papaueris,mandragoræ ,cataplafme sien eſtcon
yadiouſtant mauues& guimauves, deſquels auonsparlé feraux fuper
de hyoſquiame & d'ózeille,
en phlegmon , & du moyen d'en vſer. Bref, le Chirurgien aura égard à la cauſedela factifs,
330 Le neufieſme Liure ,

douleur , & à l'huineur qui fluë à la partie , & où nature tend : car ſelon icoux les me- A
dicamens doiuent cftre diuerſifiez : comme ſi la douleur eſt cauſée par chaleur, ſera
mitigée par froideur, & ainſi des autres : ſi elle tend à ſuppuration , ſera aydéc par
remedes propres à tels accidens .

CHAP . IX.
Du Spajme ou conuulfion.

Paſme ou convulſion , eſt retraction & mouuement inuolontai


Que c'eſt que
ſpaſme. redes nerfs, & par conſequent desmuſcles & parties qui autre
ment ſe meuuent à noſtre voloncé vers leur origine , qui eſt le
cerucau , ou la nucque ,de force qu'il n'eſt en la puiſſance du ma
lade eſtendre ſelon la voloncé ( pendant l'accés) la partie mala
de , ou tout le corps , ſi la conuulſion eſtoit vniuerſelle :toutes
fois l'action n'eſt pas perduë , comme en paralyſie, mais eſt chan
Difference
gée & deprauée , d'autant que les muſcles font meſme action , comme quand la fa
entre paſme culté animale les meut,lors qu'ilsſe portentnaturellement: icelle conuulfion fou- B
Difference de ucntesfois occupe tout le corps , & quelquesfoisvne ſeule partie . Or ilyen a de trois
conuulfion . ſortes & differences : la premiere eft dite en Grec Tetanos , qui ſe fait lors que tout le
corps ſe tiene droit & qu'il ne peut tourner , feſchir, ne hauſſer. La ſeconde Opiſthora
poſterieure. La
nos , quiſe fait lors que tout le corps, tefte & col ſe retient en la partie
troiſieſme Emprofthotonos , qui ſe fait lors que tout le corps , col & tefte ſe retire à la
partie anterieure . Il ſe fait auſſi conuurlion à quelque partie ſeulemét ,comme à l'ail,
à la langue, au bras, ou à la iambe , lors que le nerf qui ſert à telle partie , eſt offenſé.
Conuulſion ſe fait ou par repletion , ou par inanition ,ou par compaſlion, c'eſt à
Cauſes de
dire de quelque douleur . Les cauſes de repletion ſont quantité d'humeurs, dont le
conuulfion
faite parro - corps eſt tout plein, par trop boire & manger, ou par intermiſſion d'exercice, ou ſup
pletion. preſlion de quelque vacuation ordinaire , comme Aux de ſang , hemorrhoides,&
mois aux femmes , leſquels humeurs rempliſſent & fimbibenc és nerfs:ce faiſant
feflargiſſent, & font contraints de l'accourcir : ce qui eſt manifeſte à voir à vne C

aiguillette de cheurotin lors qu'on l’eſlargit, & eſtáceflargiefaccourcit, ou aux cor


des des inſtrumens muſicaux , leſquelles en temps pluuieux , pour l'humidité dont
elles ſont imbuës , ſe rompent pour la trop grande repletion . Les cauſes d'inanition
Cauſes de co- font grands vomiſſemens, Aux de ventre , effuſion de ſang: laquelle maniere de
uulfion faire conuulfion , ſi elle aduient à cauſe d'vnè grande playe , eſt mortelle , pour les eſprits
parinanition .
qui ſe ſeront euacuez . Icelle ſuruient aulli pour vne fieure ardante , laquelle pour la
grandechaleur eſtrange , auroit conſommé & deffeiché l'humidité ſubſtantifique
des nerfs, qui fait que leſdicsnerfs ſe retirent comme on void vn parchemin ſe reci
rer & greſiller,lorsque l'on l'approche pres du feu , ou comme l'on void les cordes de
luth ſe rompreen Eſté, par trop grande ficcité : & icelle conuulſion eſt incurable .
Hip.lin.2. Caril eſt meilleur, commenous enſeigne Hippocrates , que la fieure ſuruienne en
26. aph . conuulfion , que la conuulſionen ficure: ce quiſe doit entendre , ſi la conuulſion eſt
cauſée par repletion: & ſiladite fieure eſt proportionnée& reſpondante en force &
vertu à la cauſe qui fait telle conuulſion , d'autātque la fieure conſomme cet humeur
gros & cras , qui eſt cauſe de telle maladie .Les cauſes de conuulfion par compaſſion D.
Cables de & douleur ſont, comme pointure de nerf,ſoit de corpsanimé ou inanimé : inanimé ,
conuulfion comme d'vne aiguille , d'une eſpinc, ou lancetce , ou ſemblable choſe aiguë : l'animé,
faicte par
commemorſure & piqueure de quelque beſte veneneuſe ou non veneneuſe, com
compaßion..
me nous auons dit : ou pourauoir enduré vnexcreme froid , lequel eſt du tout con
traire aux playes nerueuſes, leſquelles choſes excitent extreines douleurs : adonc les
nerfs ſe recirent vers leurs origines, quieſt le cerucau , comme vn enfant fait à ſon
pere , luy demandantaide & ſecours lors qu'il ſent quelque douleur. D'abondant,
ſpaſme vient pour quelque putrefaction d'vne vapeur putredineuſe,qui ſelleue au CH
cerueau , & eit cauſe quereſentant ceſte pourriture , fe comprime & retire en ſoy,
& par conſequent tous les nerfs & muſcles du corps, comme l'on void arriuer aux
epileptiques , dont il appert que non ſeulement le cerueau , comme ſource
four coin
signes de patit aux nerfs , mais aulli les nerfs au cerueau affecté. Les ſignes de conuullion
conuulfion. Lont difficiles , laborieux, douloureux ,& déprauez mouuemens d'vne partie, ou
de tout le corps , contraction des léures, comme ſi le malade vouloic rire , altri
& tion

l
Des Playes en general. 331
4 A &ion desmandibules, auecques vncſueur vniuerſelle , courmene des yeux, & per
uerfion de toute la face. En paralyſie la léure courne vers la partie malade, & en ſpal
me vers la partie faine.
De la cure defraſme. CH A P. X ,

A cure de ſpaſme ſe doit diuerſifier ſelon la diuerlicé de la cauſe :


Curedefpaf
car celuy quieſt faict par repletion , eſt autrement curéque ce- me fait par
luy qui eſt cauſé d'inanition : auliceluy quieſt fait par compal repletion.
fion ou douleur. La curation de ſpaſme faict par repletion , ſera
faite parinanition ,ordonnant le bon regime de viure , purgeanc
)Oro

& ſaignant, & par application de remedes fort reſolutifs :aulli


pargrand exercice, fri&tions, bains ſulphurez , & autres reme
1: desordonnez ſelon l'aduis du docte Medecin , afin de conſommer les humcurs ſu
perabondans, qui ſont en la ſubſtance des nerfs, & en toute l'habitude du corps. Les
3 B medicamens topiques ſont, huiles , vnguens , linimens , deſquels ſeront frottez le
ES col & eſpine du dos , & principalementlesparties retraictes. Les huiles font, com
C me oleum vulpinum, laurinum, chamæmelinum ,lumbricorum ,deterebenthina, de
a coſto, decaſtoreo .Les vnguents , comme Aragon , Agrippæ ,de Alchæa , Martia- Linimenes ;
La cum :ou d'un tel liniment. 24. olei camomil.& lau.añ.z .ij.olei vulp. Z. j . vnguen.
la dealth .& mart. añ . Z. B.axung, vulpis 3.j . aquæ vitæ 3.j. B.ceræ quantum ſuff. fiat
liniment. ad vſum . Autre.2.oleilumb.de fpica ,& de caſto.añ.Z.iij.axungiæ huma.
Z.j. ſulphuris viui Z. B. ceræ. quantum ſufficit, fiat liniment. Autre . 2.vnguenc.
martiat.& agripp.añ.z. iij. oleide terebint. Z. ij . olei faluiæ Z. B.aquæ vitæ 3.j.ce
Ic iæ Z.j. B. fiat linimentum . Il faut aufli que le patient face vne diete, & ſue en ſon
lia:ſemblablemencqu'il vſe de la decoction de gaiac: car par tels moyens ſe con
De
& ſommera vnegrande quantité d'excremens, gros , eſpais, & viſqueux , qui ſont cau Cure defpaf
ſe detel mal. Le ſpaſımc & conuulfiop faite par inanition ,ſera guarie par ſon contrai me fait par
ne . re,quieftrepletion ,nourriſſancle malade de viandes ſucculentes, tendantes à hu inanition .
er midité, commede bouillons & coulis humectans, faits dechappons,pigeonneaux,
с
OC
veau & mouton gras , adjouſtant fueilles de violiers , & mauues: bref vlera de cou.
res viandes engendrans bonſuc. Il vſera des conſerues, leſquelles ont vertu de con
do forterles vertus,& humecter toute l'habitude du corps , comme conferues de bu
IS gloſſe,violettes,Acursde bourache ,& de nenuphar.Cebouillon luy eſt grandement
la profitable. 22. la& .bugloff. porculac.añ.ñ . j.quatuor ſeminum frigid . major. an.
10
3. B. feminis berberis 3. j . decoquancuromnia fimul cum pullo gallinaceo, capiac
1o ius fingulis matutinis. S'ileftalceré,luy ſera ordonnévntel iulep. 24. aquæ roſar.Z.
le 11).aquæ violat. Ib. B. ſaccar. albiff. 3. vj.fiat iulęp. vtatur in ſiti. S'il eſt conſtipé,il
vſera de clyſteres emolliens, & humectans, faits de bouillons , de teſtes & pieds de
n
mouton, auſquels auront cuit mauues , guimauves, paricoire, violettes de Mars , 86
} autres herbes ſemblables :ou bien vn de laid & d'huile. Pour les choſes externes,
Ć
vſera des linimens & bains , comme d'un tel liniment. 2. olei violar. & amygdal.
1
dulc. añ. ij. olei lilior. & lumbric. an. Z. j. axun. porc. recentis Z. iij . ceræ nonæ
1 quantum ſuff. fiat linim.ex quo vnguatur tota ſpina, & pars affecta. 7

D D Exemple d'un bain remollient, humectant & relaſihant.


22.fol.mal.biſmal.violar.pariet.an.in.vj.ſem.lini, & foenug.añ.lb B.coquát.in aq.
cómuni,addédo olei lilior.fb.viij.fiat balneum ,auquelle malade entrera eſtácticde,
& en ſortant ſera eſſuyé auec linges chauds en ſon liet,& repoſera fileſt poſſible,ſans
prouoquer laſueur.Étlile malade pouuoit porter la deſpenſe, on pourroic vſerd'un
bain de lai& pur , ou du tout d'huile , ou bien egalementproportionnezenſemble.
Cure duſpaſme par conſentement & douleur. C H 4 P. XI ,

E ſpaſme qui vient par conſentement & douleur , eſt curé par remedes con Lespiqueures
trarians à icelle : commeſielle procede d'une picqucure , ou morſure d'une des bemorſures
ſtes ve
beſte veneneuſe, il faut dilacer l'ouuercure& tenir la playe ouuerte, & in neneufes doin
ciſer lapcau, afin que l'humidité & matiere veneneuſe aye plus libre iflue: ſembla uent efire dia
blement on y appliquera des medicamens de ſubtile eſſence , leſquelsFf ſeront de listées.
332 Le neufieſme Liure ,
ſiccatifs & liquides, ayans vertu d'attirer ceſte venenoſité, comme cheriaque , ou a
michridat diffoulc en eau de vie , auecques vn peu de pouldre de mercure ,leſquels
ſont alexipharmaques : auſſi cornecs,ventouſes & fang-ſues. De meſme és autres
cauſes de douleur,ilfaudra vſer de medicamens contrarians à icelle cauſe : comme ſi
le ſpaſme eſt faic par douleur prouenante de punction ,ou d'un nerf ou d'vn tendon,
ſerontappliquezmedicamens propres , comme huile de cerebenthine,d'euphorbe,
mellées auecqueseau de vie , & autres ſemblables , propres à la picqueure desnerfs,
comme nous dirons cy-apres. Or quand le ſpaſme ſuruient par trop grand froid
( d'autant qu'il eſt ennemyducerueau, delamoüelle ſpinale &nerf) le malade ſera
i mis en licu chaud ,comme en eſtuues, ſe donnant de garde de l'expoſer inconti
nent au grand feu , ou en baintiede: 8luy ſeront appliquez les linimens chauds cy
deſſus mentionnez, le long de l'eſpine du dos, & à la partie malade. Et le Chirur
gien doicauoir eſgard, lorsque le malade commence à veniren ſpaſme,qu'illuy face
tenir yn baſton entre ſes dents,afin que les mandibules & dents ne ſe ſerrene dutour: 1

car par cemoyen quelques-vns ſe font coupez la langue , qui n'eſt ſans grand preiu B
dice du patient : & fi les dents eſtoient fortſerrées , la boucheſera ouuerte par vn in
ſtrument qui ſe dilate & ouure par le bencfice d'vne viz , tant & ſi peu qu'on veut,
dont cu as icy le portraict d'un qui eſt ouuere , & d'un autrefermé.
Figure d'un dilatatoire pour owurir la bouche, les denis eftans ferréess.

Definition de
paralyſie.
UG De la Paralyſie. CHAP. XII .

Aralyſie ou reſolution eſt vne relaxation ou mollificatio des nerfs


avec priuation du ſentiment & mouuement,non de tout le corps,
C

mais d'un colté dextre ou ſeneſtre , & telle eſt dire propremét pa
ralyſie: ou de quelque partie ſeulemét, & telle eſt dice inoinspro I
premet paraplegie:car fielle occupoit toutle corps,telleaffcction D
Difference ne ſeroic dite paralyſie, mais apoplexie. Icelle occupe quelques
entre paraly fois les parties infericures,à ſçauoir depuis laceinture iuſques au co
foc com apo- bas, autresfois la moitié du corps . Elle ſuruient auſſià la langue,æſophague,veſlie,
Difference verge,yeux,bref à touteslesparties. Elle eſt differente à convulſion:carenicelle il y
entre conuul- a retraction du membre, & en paralyſie relaxation & reſolution : aufli le ſentiment
fiona para- eſt perdu, ce qui n'eſt en ſpaſme & conuulſion :toutesfois quelques vns ont vne dou
lyſie. leur poignante à la parcie,& leur ſemble qu'ils bruſlent quelquesfois. Les cauſes font
Cauſes inter- internesou externes ; les internes ſont humeurs gros, cras , & viſqueux,qui font ob
nes .

Cauſes exter
ſtruction de l'un des ventricules du cerueau , ou de la moiielle ſpinale : & par conſe
nes . quent des nerfs, dont la faculté animale , qui fait le ſentiment & mouvement , ne
Signes des peur eſtre enuoyée par iceuxaux parties de notre corps . Les cauſes cxternes ſont
parties of cheute , qui cauſe quelque luxation & contorſion aux vertebres , ſolution de conci
fenfees. nuité, compreſſion ,conftri&tion :leſquels accidés empeſchent que l'eſprit animal ne
Des Playes en general. 333
A puiſſe reluire & paffer en la ſubſtance des nerfs. Or ſelon la partie offenſée, fenſuit
paralyſie ou reſolution,ce qui ſe voitfacilementpar l'anatomie.Car lors que la para
lyfie eſt vniuerſelle, c'eſt à dire qu'ellc occupe le coſtédextre ou feneſtre, nous de
vons eſtre aſſeurez que le vice vient du cerueau ,& de la ſpinale medulle: & ſi le chef
n'eſt offenlé & que les partiesinferieures ſouffrent paralyſie, c’eſt ligne que l'eſpine
eltmaldiſpoſée: & fi les bras demeurent paralyciques, c'eſt ligncque la cinquieſme,
fixielme, ſeptieſmevertebre du col ,foncoffenſées. Semblablement quand les par. Prognoftic.
cies inferieures ſouffrent reſolution , les vertebres des Lumbes & os Sacrum fontof
fenſées: ce quele Chirurgien doit ſoigneuſement conſiderer , afin qu'il aye recours
àl'originedu mal. Sila paralyſie vient à cauſe d'une ſolution de continuité du nerf,
ou d'une grande contuſion ,eſt incurable : d'autant que le chemin par lequei eſtoit
porté l'eſpritanimal, eſt coupé. Les vieilles gensneſontiamais guaris, oudifficile
mentdetelle maladie , à caule de leur debilité, eſtans deſtituez de chaleur naturel
le , & par ce qu'ils abondenten excremensſuperflus. N'eſt auſſi curable la paralyſie
inueterée, & quidelonguemain ſ'eſtmiſeen poflellion de la partie, & non plus que
B celle quiſuruientà l'apoplexie .Si la fieure ſurvient à la paralyfic, c'eſt bon ſigne,
1 d'autancqu'elle conſomme & diſlipe par la chaleur celt humeur gros & viſqueux.
Lorsquelapartie affligée de paralyſie demeure atrophiée , & que la partie oppoſée
ſemonſtre mieux refaite en tumeur , chaleur & douleur, c'eſt mauuais ſigne, d'au
tant que lenourriſſement n'y reluit pas : ains au contraire, ſe tranſporte tout vers la
parcie ſaine& oppoſite : & fi la couleur naturelle ſe change , cela demonſtre que
l'eſpricvital n'est ſuffiſamment porté à icelle.
Cure de Paralyſie. CHAP . XIII.

Our la curation ,il faut que les choſesvniuerſelles precedent les particulieres, l'uſage du
qui conſiſtent au regime& purgation :ceque ie laiſſeaudocte & prudent Me- Gaiac, Ibon
decin. La decoction deGaiacelt fort neceſſaire pour leur donner à boire,d'au . aux paralyti
tantqu'elle prouoque la ſucur, ſubtilie l'humeur gros & viſqueux , & deſſeiche par ques.
meſmemoyen les humiditez ſuperfluës qui ſontimbibées aux parties nerueuſes : &
Clorsqu'ilſuera, eſt cres - voile d'appliquer autourde la partie paralyſée des bricques
rougesdefeu , puis cltcintes en vne decoction d'herbes reſolutiues, cuisces en vin
blanc, & vne portion devinaigre :puisenueloppées en des linges, & appliquées au
tourd'icelle:ou on vlera de bouteilles à demyrempliesd'eau chaude,ou deveſlie de
bauf,ou de pourceau, à demy remplies de la ſuſdite decoction , parce que tellccha
leurađuelle robore & viuifie la chaleur naturelle , qui eſt en celle maladie grande
ment languide. Semblablement faut mettre le malade en vne cuue figurée au cha- Decoction
pitredes eſtuues, afin dereceuoir vne telleeuaporation. 24. fol. faluiæ , lawan. laur. pour mettred
la fudifte
maior, abſ, thymi, ang. rutæ, an . ñ. B. flor. cam , melil . anet. anth . an. p . ij . bac marmite .
car.laur.& iunip.conqua.añ.3.j.caryoph.z.ij.aquæ fontanæ & vinialb.ań.fb.iiij po Nota qu'il
nantur omnia in vaſe ſupradi& o ad vſum . Le malade ſe tiendra dans ladite cuue, faut qu'il y
its ayáteſgardaux forces:puis ayant receu ladite eſtuue ſera mis dedans Ic liêt bien cou: au rnpazil
5, uert,& ſueraencores derechef,puis ſera eſſuyé , & repoſera quelque tempsapres ſera lon ſurladite
2 frotté decet vnguent, lequeleſtgrandementapprouué de LeonellusFauentinus. cuue.llissLeonc
De D 4.oleilaurini& decereb.añ. Z.iij.olei nard . & petrolei añ.3.ij.vini maluatici Z.iij. Fauentinus .
22 D aquæ vicæ 3.ij. pyrethri, piper.linapis,gr.iunip.gummi hederæ ,anacard.ladanipuri Mefué.
S. anz j.B.terantur& miſceantur omnia cu oleis & vino,bulliant in duplici vaſe víquc De Vigo.
30 advini conſumptionem : facta forti expreſſione, addc galbani , bdellij , euphorbij, Tagaui.
is myrrhæ , caſtor. adipis vrſi, anatis, añ.z.ij. fiac vnguentum ad formam linimenti,ad
y dendo ceræ parú,ſiopus fuerit. Autre remede loué de pluſieurs autheurs. 24. myrrh.
21 elet.aloës,fpicæ nardi,ságuin.draconis,thur.opop.bdellij,carpoball.ammonij,far
cocol.croci,maſt.gummiArabici,ſtyrac.liquid.ladani, caftor. an 3. ij.moſchi z.j.a.
quæ vitæ.3.j.terebint.Venetæ ad põdus omnium .Leschoſes qui doiuereſtre pulue.
Do riſées le ſeront, & les hommes ſerõt liquefiezauec l'eau de vie, en vn peu de vinaigre:
puis le toutſeramis en vaiſſeaux propres pour les diſtiller in balneo Mariæ : & d'icelo
e le liqueur ſerõt frottez toute la nucque & parcie malade. Autreremedepar moy ſou
Ć uent experimenté.24.rad.angel.ireos Florent.gent.cyper. añ .Z j. calami aromatici,
cinnamo.garyophyl.nuc.moſcac.macisan z.i),laluiæ maior.viæ artrit. lauad.roriſ . Remede bien
ſatureix,puleg.calamenc,mécaſt,añ.ñ.B.for.camomil.onelil.hyperic.anth.ftechad,experimenté,
Ff ij
1
334 Le neufieſme Liure ,

an.p.j.le couc fera conquaſſé & haché,puis infuſé en vne pinte d'eau de vie ,& autant A
de maluoiſie, & ſeroncdiſtillées in balneo Mariæ , comme auons die cy -deflus. Et
de ceſte diſtillation on en froccera toute l'eſpine & les parcies paralytiques : dauanta
geon en pourra bailler au macin vne cueillerée à boire au malade auec vn peu de
luccre , à cauſe qu'elle a vertu d'eſchauffer l'eſtomach &
, conſominer les humidirez
contenuës en iceluy , qui ſont cauſe de cellemaladie.Dauantage ne faut obmettre à
faire exercer la partie malade , auſſi faire frictions longues & afpres auec linges
chauds , afin de reuoquer la chaleur naturelle , conſommer l'humeur contenu aux
parties nerueuſes. On pourra pareillement yſer d'huiles de ſaulge , roſmarin , thym ,
lavande, cloux degirofle, noix , muguettes , & generalement de tous aromates,leſ.
quelles ſeronttirées, comine nous dirons cy-apres, où meſmes donnerons la figure
des vaiſſeaux , & le moyen de les diſtiller. Pareillement celinimenteſt fortpropre
aux paralyſies & nerfs retirez. 2. olei hypericonis tb.j.terebent. tb.B.olei lauriniz.
iiij. olei de ſpica Z.j. B.baccarum iuniperipulueriſati tb. B. pul.euphorbij Z. B. ca
ryophyllorum & zingiberis , & nucismoſcatæ añ.3.j. B. flor. lauandulæ , fáluiæ &
roriſmarini añ . ñ . ij. aquæ vitæ Z. vj . piſtentur & inacerentur in balneo Mariæ , B
poſtea colentur:in colatura adde ceræ quantum ſufficiet, fiat linimentum , duquel
en ſera oinct couce la nucque & partie affectée , & toute l'eſpine. Semblablement la
liqueur quiſ'enſuit eſt cres- finguliere par deſſus tousremedes, à la paralyfie :lequel
i’ay reciré de Meſué, & apres luy de Guidon & Tagaut , qui eſt tel qu'il l'enſuit .2 .
myrrhæ , aloës , ſpicæ nardi , fanguinis draconis , olibani, opopanacis , opobalſami,
bdellij , carpobalſami
, ammoniaci, ſarcocollæ , croci, maſtiches, gummi arabici,ſty
racis liquidæ,añ.z.ij. B. ladani, ſuccicaftoreiañ Z.ij. f). muſchi odoraci z . B. tere
bench.clariſſimæ ž.iiij. quæ debent pulueriſari, pulueriſentur, & vnà cum cerebent.
fiatmiſtio, acin balneo Mariæ , in vale vitreo lento igne ſecundum artem , fiat diſtil
lacio quæ feruetur fic , ne euaneſcarinſenſibiliter. le loüerois fort , fi en ceſte diſtilla.

tion on adjouſtoit de l'huile de cerebenthine & eau de vie bien re & ifiée auec vn peu
Autheurs.
d'huile de faulge extraicte par eſſence. Meſué des maladies du ceur , Guy de Cau
liac au chapitre de la paralyſie, Tagautauchap . de la paralyſie, Andreas à Cruce des
С
playes.des nerfs , ſur la fin , loüent tous à merueille ceſte diſtillation , comme choſe
diuine à la paralyfie , prouenant de cauſe externe & interne .

De Syncope & defaillance du caur. CHAP . XIV.

Definitions. Yncope eſt vne ſoudaine & forte defaillance des facultez & vertus,
& principalement de la vitale , & demeure le malade ſans aucun mou

Cauſes. uement : & pour ceſte cauſe los anciens l'ont appellé pecite mort : la
caufe de ſyncope ſuruenātaux playes,eft cómunément pour la grande
IS
hæmorrhagic ou flux de ſang ,auſquels ſontcõtenus les eſprits,ou que
le malade ſ'effroye par yne crainte de voir ſon sāg,ou pour quelque peur quieſt cauſe
que les eſprits ſe recirent ſubitement, & en grande abondance aucæur, qui eſt cauſe
pohy
de ceſſer ſon mouvement , dont fenſuit ceflacion des autres facultez. Souuent auſli

aduient pour quelque vapeur putredineuſe & veneneuſe , montant par les arteres
winou
iuſques au cæur ,& par les nerfs au cerucau . Dóc nous colligeons toute ſyncope ad
D
uenir pour trois raiſons, premierement par diſſipation d'eſprits, comme en excelliue
hæmorrhagie, par oppreſſion ,obſtruction ou cópreſſion d'iceux ,come en crainte , &
effroy ,à raiſon de la conculcation des eſprits ,qui à la foulle delaiſfans tout le reſte du
corps , rebrouſſant leur chemin & cours ordinaire , fejercent & rendentau cæur par
corruption , comme és corps cacochymes , & playes empoiſonnées. Les ſignes de fyn
copelont quád le malade palliſt, & qu'il luy việc vne petice ſucur ceſſation du mou
uement des arteres,ou coſt apres le malade tombe en terre ,ſansſentir & mouuoir au.

cunement , & deuient pareillemét froid par cour,tellement qu'il reſſemble plus à vn
homemort qu'à vn vif. Pluſieurs qui combet en ſyncope , f'ils ne ſontſecourus,meu

Signes de rent.Orle moyen de les ſecourir deuant qu'ils y tombét , c'eſt qu'il leur faut jercer de
fyncope. l'eau froide au viſage, ſi la ſyncope vient de diſſipation, les mettre à la renuerſe à terre
Prognoffic. ou ſus vn li &, & leur dóner du pain trempé en vin:& où la ſyncope viendroit à raiſon
Cure . de quelque vapeur veneneuſe ou putredineuſe, ſera vcile ieur donner vne cucillerée
d'eau de vie,en laquelle on aura diſſoult vn peu de theriaque & mithridat : ce que i'ay
Des Playes en general . 333

A fairpluſieurs fois à ceax qui eſtoient peſtiferez & affligez de gangrenes & mortifica
cions en quelque partie. Erfils ne peuvent reprendre leurs eſprits, à raiſon de l'op
preſlion & compreſiion deſdits eſprits au cæur , leur ſeront faites & baillées toutes
ca choſes qui eſpanouiſſent & eſpandent les eſprits : parquoy on leur preſentera de bon
vac à boire, on leur mettra au nez fleurs & pommes de ſenteurs, ra les appellera
pres les oreilles hautement par leur nom , & on leur tirera le poil des temples & der
riere le col;on leur fera ſentir eau de vie ,en laquelle auront trempé cloux de girofle,
mugucité & gingembre ,on leur enfrottera les temples , & les creux des mains, &
les poignets à l'endroit des arteres .

De delire , & alienation d'eſprit. CHAP. XV .


1
1
Elire, commenousle prenons en ce lieu - cy pour vn ſymptome Definition
general, qui ſuruient ſouuent aux fiéures, cauſées de playes & Les cauſes.

Z inflammation , & perturbation des ſens & entendement . Iceluy


2001 B donc ſuruienc ſouuentesfois aux playes , par vne vehemente dou .
leur & ficure, lors que les parties nerucuſes , comme les iointu
res , orifices de l'eſtomach , & principalement diaphragme,lequel
les anciensont appellé Phrenes, ſont offenſez : pource qu'eſtant Gal.comm .
bleſſé, induit phreneſie , c'eſt à dire alienation & perturbation de la faculté anima- en l'aph . 9.
te, pour la communication qu'a iceluy , par le benefice des nerfs de la ſixieſme con- du liure 7.
iugaiſon, diſtribucz auſſi à l'orifice de l'eſtomach. Delire doncques aduient pour
trop grande perte de ſang , le cerucau en eſtant affoibly pour la defaillance des
cſprits, dont vient que lesmouuemensde l'ame fontdepraucz , ce qui eſt manifeſte
à ceuxauſquelsonampute quelque membre , doncſenſuit grand Aux de ſang. Pa
reillement, delire ſuruient pour vne picqucure d'vne beſte veneneuſe, ou par la le
mence & menſtruës recenus en la matrice , ou d'vne pourriture d'vn membre gan
grené & fphacclé , à cauſe des vapeurs putredincuſes quiſeſleuentau cerueau, com
menous auons dit cy -deſſus au chapitre du ſpaſme. Aulli il aduient parvne ſubite &

с grande apprehenſion : ce qui eſt manifeſte à ceux qui ont euicé le peril de mort, ou
pour n'auoir ioüy de ce que l'on defiroit : toutes leſquelles choſes rendent la faculté
animale perturbée : & d'en eſcrire toutes les cauſes,
ſeroit choſe trop prolixe . Par
quoy il ſuffira d'entendre en general que toutes choſes de quelque façon que ce ſoir,
par intemperature principalement chaude , par affluence d'humeur, principale
ment choleric , par diffipation, oppreſſion ou corruption d'eſprits, affoibliſſentl'en
tendement , peuuent cauſer vn delire.Or pour la curation, lors qu'il eſt cauſé par
l'inflammation du cerueau & meninges , fileſt beſoin qu'il ſoit purgé & faigné,
on
2017
appellera le docte Medecin . Et pour lesøemedes topiques , on luy coupera le poil ,
auec ciſeaux & non auec le raſoir, de peur de donner vne cuiſeur au cuir qui auroit
elté raſé, le plus pres qu'il ſera poſſible, puison luy appliquera vn oxyrodinum , &
par deſſusvnemplaftre ,de diachalciteos diſſout en huile rofat & vinaigre. Auflion lors qu'on
luy prouoquera le dormir auocorges mondez , auſquels auront trempé noüersde fe- appliquevi
mence de pauot : & vſera de potages, dedans leſquels aurontcuit ſemences froides, naigreſurla
refle ne la
laictucs, pourpier ,ozeille ,& autres. Dauantage il ſentira chofes froides, comme faut rafer :
D vinaigre roſar,cau roſe, auec ſemences de pauot conquaſſées : il aura pres de luy car s'en wie
compagnic qui luy ſera agreable, afin
de le diuertir tant que faire ſepourra, de beau- uroit vne ex
2017
coup d'opinionsqui luy viennent en fantaiſie.Si c'eſt de vice d'eſprits ,on y remedie- treme cuiſon,
raà la façon expliquée au chapitre de Syncope .

be
Fin du neufieſme liure, des playes en general,

Ff iij

;
101.5"

gie
336

OMNIUM

TABLE DES CHAPITRES DV DIXIESME LIVRE ,


DES PLAYES EN PARTICVLIER .

Es efpeces & differences des fracturesdu Crane. Chapitre j.


Descauſes & fignes. Chap. ij.
Des ſignes ſenſuels. Chap.iy. TR.
Defciffure,quieſtlapremiere eſpece de fracture. Chap.iij.
O
M

Dela contuſion ,qui eſt la ſecondeeſpece defracture. Chap.v.


Des embarreures ou enfonceures , qui eſtla troiſieſme eſpece de fracture.
Chap.ui.
Dela quatrieme eſpece de fracture quieſtincifion . Chap.vj.
Dela cinquieſmeeſpece defracturequiſefaitdu cotéoppoſitedu coup. Chap. vij.
Delacommotion ou esbranlement, & concuſſion ducerueau. Chap. ix .
Duprognoſtic. Chap . x .
Pourquoy le ſpaſmevient à l'oppoſitedu coup. Chap, xi.
Sommaire des ſignesmortels cy-deffus mentionnez. Çbap.xj.
Les ſignes&preſages de bonneguariſon . chap. xij.
Duregimevniuerſel qu'ilfaut ordonneraux playes fracturesdu Crane , d aux accidens
d'icelle. Chapxiij.
Dela cure particuliere, da premierement des playesdecuir mufculoux . Chap. xv.
Cure des accidens qui aduiennent au Crane. Chap. xvi.
Des accidens qui aduiennent à la Dure-mere. Chap. xvj.
Pourquoy c'eſt que la Dure -mere noirciſt. Chap.xui .
Pourquoy on trepane aux fracturesdu Crane. Chap. xix .
Deſcription des trepanes. Chap.xx.
Deslieux eſquelson doit appliquerla trepane. Chap. xxi.
De l'alteration de l'os de la teſte. Chap. xxi.
De la curedela concuſſion on commotion & esbranlement ducerueau . Chap.xxij.
Desplagesde la face. Chap.xxiij.
Desplayes desyeux. Chap.xxv.
esplages
De s desjonës. Chap.xxvj.
Desplayes du nez . Chap.xx.
Desplages de la langue. Chap.xxvij.
.)
(
..

Desplayes des oreilles. Chap.xxix.


Desplayes du cole de la gorge. Chap. xxx .
Hiſtoires memorables. Chap.xxxi.
Des playes du thorax & de lapoitrine. Chap.xxx .
Cure des playes du thorax& de la poictrine. Chap. xxxij.
Delafieure hectique, cauſe,fignes, & cure . Chap. xxxiij .
Desplayes du ventre inferieur, dit Epigaſtro. Chap.xxxv.
.)
(
..

Cure des plagesdu venire inferieur. Chap. xxxvj.


Desplayes des aines, verges & tefticules. Chap.xxxvj.
Desplayes des cuiſſes & desiambes, Chap.xxxvij .
Desplayesdes nerfs. Chap.xxxix.
Cure desplagesdes nerfs. Chap.xl.
Hiſtoire duRoy Charles neufieme. Chap.xli.
Desplayes desioinetures. Chap.xlj.
ſituation des partiesbleſſees.
Dela Chap.xlij.
Desplayes des ligamens. Chap.xliij,

!
337

LE DIXIESME LIVRE ,

TRAICTANT DES PLA Y ES

' RECENTES ET SAN GLAN TES

en particulier .

PAR AMBROISE PARE ' , DE LAVAL AV


X MAINE , CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy .

Des efpeces differences des fractures du Crane.

CH A P IT RE PREMIER .

A
PRE s auoir en bref traicté des playes en general,à ſçauoir de leurs
differences, fignes, cauſes, prognoſtic & curation , enſemble des
1
accidens qui y peuuent ſuruenir : reſte maintenant à traiter de
celles qui ſont faictes en chaſque partie , d'autant qu'elles diuerſi
fient grandement la curation : & commencerons à celles de la teſte,
continuant par mcſme inerhode à toutes les autres parties . Donc
pour entrer en matiere, il faut ſçauoir que la teſte eſt aucunesfois
AN
bleſſee auec pecite contuſion ſans playe , & quelquesfois auec inciſion du cuir qui
couure le Crâne ſeulement . Et auſi ſouvent on trouve complication des deux, à
{çauoir, Playe , & Contuſion . Dauantage , l'os eſt aucunesfois fracturé ſuperficiel. Les eſpeces
lement, & quelquesfois iuſques au Diploé , & fouuent en toutes les deux tables,auec differęces
les membranes , comprenant auſſi la ſubſtance du cerucau . Aulli fouucntesfois des fractures
du Crane,
aduient vne commotion , ou elbranlement au cerueau : auec ruption d'aucuns vaiſ
1,1 ſeauxdudedans , & autres accidens. Ce qui ſera declaré cy -apres par ordre , auec la
curacion de chacune diſpoſition , où principalement ie ſuiurav le diuin Hipp .lequel Hipp. aulis .
B en ſon liure des Playes de Teſte , a fait cinq eſpeces , & differences de fracture au de vul.cap
.
Crane. La premiere eſt appellée Fente ou Sciffure. La ſeconde , Contuſion . La fait cinqelbes
ces de fra
troiſieſme, Embarrcure , ou Enfonceure. La quatrieſme , Incilion ou Marque. Etures.
IS
Lacinquieſme,ditte Contre -fence, qui ſe fait quand l'os eſt fra & uré, fendu, ou ef
clarté autre part qu'à l'endroit où a eſté donné le coup . Et de ces cinq eſpeces ſont Autres dif
encores pluſieurs differences :car aucunes ſont grandes , moyennes , petites , & tres- ferences.
petites: aucunes longues, larges , courtes , aucunes ſuperficielles : lesautres iuſques
au Diploé ,& quelquesfois paſſent toutes les deux tables . Les vnes ſont de figure
act droiđe,oblique & ronde: les autres ſimples : les autres compoſées entre elles , com
me Contuſion auec Fiſſure , & ſemblables: les ynes ſont compliquées auec douleur,
chaleur, tumeur , Aux de ſang, & autres accidens : quelques -vnes ſont auec vne ou
pluſieurs eſquilles d'os ſeparez,autres non : toutes leſquelles differences font diuer
fifier la cure . Or pour ſoulager ta memoire , ic t'ay bien voulu bailler ces deux
Tables
pour plus facile intelligence.
e
ſm
x ie ur
e
33
8 Le di Li ,

Table des fractures du Crane .

à la reuë ,
Apparente , au tau , à
la fonde. Du dextre au ſencftrc, ou au contraire ,
comme d'vo coſté du Coronal à l'au
Enmel tre cofté d'iccluy.
mo os,
Gardent leur Non apparente, Dchauten bas,commede la premiere
comelors qu'el -table à la ſeconde,
place, & de
meurent con le et à l'oppoſite
rigos,dontet du coup , c'eſt à
dire,quadla par Da dextre au qui n'ont
faite l'eſpace aucunes
Contufion , defracture en tic frappée de ſenc tre, ou
meurāte cotiere, au contraire, lututes.
c'eſt à dire , forme de li
l'oppoſite eſt fra. comme de
callure , ou gac , diac
froiſſure de fente ou félu- cturés, ce qui ſe l'os parietal
fais à l'autre, Ce qui
choſe côton- rc , qui eſt En di Saduient ) qui les ont
dente , qui fc uersos. Acnocux trop ſerrées .
ra tombée ſur Du deut au
le crane , ou Moyenac, di &te capillaire, derriere , ou
pour eſtre laquelle n'apparoiſt plus au contraire,
tombé ledit largequ'vn poil , & pourtat comme da qui les out
cranc de haut) ne le deſcopure quelques- front à l'oc. mal diſpo .
ſur choſc ob lees.
fois qu'apres l'application ciput .
tule, faiſant de l'huile & cacia
Fradure ou quc lcs par
folution de tics de l'os
-Entierement, de forre Embarrure ou briſure en Apparens.
continuité és fracture qu'ils tombent ſur la pluſieurs eſquilles ou frag- Cachez ſous
os da Crane, membrane,dont ſe fait mens, dont aucups Coat < l'os entier.
ſe fait par
Perdent leur
Enfonlure , Il y a vne autre force d'ena
(place quád la pic- fonfurc qui n'eſt vraye er
cc cft du pece de fracture: laquelle
cour Cepa. le fait és os mollers des cna
réc, tombát fans,sás fracture nydiuigó,
ſur la mem aing que la boſſclore ca
brane , ſans vaificaax d'eftain & de cui
cſquilles, Lure, ſans qu'ils ſoiét répus. .

En partie, commequand vouſture , quand l'os eſt ellené & x.


l'os rompu eft en partie hauffe ,laiſſant ſous fon reply quelque :
ſeparé, & tient aufà par eſpacc vuidc.
quelquc endroit au fain , Eſclature, ou briſure ed eſciacs,non du
dontle fait sout leparez.

Ineile, c'eta Exciſion ou entaillore , en laquelle l'os eſt aucunement clleué & rcaterſé , tenant
dire , fracture ncantmoins encore à l'os lain .
faire par cho Deperdition ou calcucure , en laquelle la piccc eft emportéc , dont ya perdition
ſe trenchan de ſubſtance.
te , qui con . Marque ou fiege, quieft toure inciſion du Crane, retenant la figure du bafton,lequel
( cient ſous ſoy eſtant rond, quarré ou triangulaire, rend l'inciſion ſemblable.

Simple , comme quand elles ſe trouuent à part.


Nature Entre elles, S Inciſion aucc contuſion .
commc Fenrc aucc embarrure, & ainſi des autres.
Compoſée Tumeur,
Avec autres diſpoſitions, ) Douleur.
commc auec Chaleur . Flux de fang.
1 -Conuullion , & autres .

Les differen Longues.


ces commu Grandes. Larges.
acs à toutes Parce Profondes .
7
Quantité , dont elles Moyeoncs. qu'elles Mediocres.
ces eſpeces ſont dicss font Courtes.
de fracture , · Perites.
font prinſes Efroides , Superficielles. 4010
de la Droictes.
Obligues.
Figure , dont elles
Traplucrſes,
Cont nommées
Rondes .
-Triangulaires, & c.
ÇAnterieure, poftericure
Situation , Dertre, feneſtre ,
Haure , balle.
Corogal.
Partie , comme fra Occipital.
Parietal.
cture en l'os
Petreux, & ce

1
Des Playes en particulier
. 339

А CHA P. II .
Des cauſes &fignes.

Es cauſes d'icelles fractures ſont externes , comme cheutes & coups


de baſton , de maſſe , de lance & halebarde,de pierres, de harquebuſe,

d'eſpée, morſure de beſtes, & autresſemblables. Il y a doubles ſignes,


par leſquels on cognoiſt les os du Crane eſtre fracturez , car les vns
ſont rationaux, c'eſt à dire , ſe comprennent, & donnent à entendre
par raiſon la fracture du Crane :les autres font ſenſuels , c'eſt à dire, monftrent au
doigt & à l'cil telle choſe.Les rationaux concluent tel effe & par les accidens, com
medle patient eſt tombé du coup en terre, ou de haut en bas lus yne choſe dure , fil
a demeuré quelque temps ſans parler, ouyr, ne voir : & auſſi par le recit du patient,
quidit ſentir grande douleur , & porte ſouuent la main à l'endroit du mal . Aulli faut
auoir contemplation du baſton , comme ſ'il eltoit peſant & obtus , picquant, tran
chanc,ou autrement: & à la force de celuy qui a frappé, & lileſtoic en grande colere
B lors qu'ildonna le coup : ſi le coup eſt combé perpendiculairement & de droit fil.
Auſlili le patient auoit la ceſte nuë ,ou bien couuerte ,fileft tóbé en fyncope apres le
coup,& l'il a perdu ſa raciocination apres eſtre retourné dudit fyncope ſubitapres le
coup, & qu'il euſtelblouiſſement des yeux ou vertigine, c'eſt à dire, qu'illuy ſemblaſt
que touttournalt deſſus deſſous: & fil a iercé lang
par le nez , bouche , oreilles ,ou
3. yeux, & filavomy. Car Hipp.dir, quequand le cerueau eſt vulneré il eſt neceſſaire
Aph. so ?
que la ficure & le vomiſſement bilieux ſuruiennent. Autant en dit Galien au com lin. 6.
mentaire , & au 3. de locis affe & is, cap . z . où il dir, que cela vient quand les fra & ures
paruiennent aux membranes du cerueau . Semblablement ſi l'os eſtant dénué on
frappe deſſus auec vne ſpatule ou ſonde de fer, & qu'il ſonne caſſé, comme ſi on frap
poit lusyn pot de terre rompu, c'eſt ſigne que los eſt fra & turé : ce que Paul Ægin.a
bien ſceu dire. Or tous ces lignes ſont grandement coniecturatifs,voire certains que
leCrane ſoicfracturé , & le cerueau offenſé: de cant qu'il n'aduient point ſans appor.
ter conſequence de tel accident , comme dic Celſus liu.8.chap.4 . Mais aufli cels ac
etik cidens peuuent aduenir ſans qu'il y ait fracture ,eſtant ſeulement commeu ,elbranlé,
с
& eſtonné. Pareillementon a veu aucunsauoir l'os de la teſte caffé ,à qui tels accidés
n'eſtoient ſuruenus,faiſans leurs affaires accouſtumées, comme ſ'ils n'euſſent point
cfté bleſſez ,durát huic iours , plus ou moins, quidepuis ont eſté abbatus de pluſieurs
accidens iuſques à mourir . Parquoy les playes & fra &tures de la ceſte ne ſe doiuent
3
negliger. le veux icy reciter l'aduertiſſement que donne Guidon , qui dit , qu'alors
que la fracturceſt incertainc ,lion veutcognoiſtre à la verité où l'os eſt rompu, il faut
mettreentre les dents du pacient vne cordelecce , & frapper deſſus: car au meſme in
ſtant, le pacient portera lamain au lieu de la frađure pour la monſtrer au Chirurgien .
Ccque toutesfois ie n'ay ſceu trouuer par experience, iaçoit quei'aye penſé pluſieurs
patiens qui auoient l'os fracturé, comme ie voyois à l'ail. Ec ſuiuant le precepte de
Guidon , ie leur ay fait ferrer auec les dents vne cordelette,ou bien vn mouchoir :
ncantmoins ſans laiſſer à tenir ferme,ilsne faiſoient point ſemblant de ſe plaindre ,
ny dem'enſeigner le lieu où l'os eſtoit rompu : à cauſe dequoy ie ne puis bonnement
alleurer que ceſte raiſon de Guidon ſoit certaine, veu que ie n'en ay rien trouué par
D experience.Non plus que celuy d'Hip . quiaux Coaques, veut lors qu'on eſten dou .
ce de la fra & ure du Crane, que l'on donne au maladevn tronc ou coſte d'aſphodele
ou de ferulcà maſcher,l'aduertiſſant de ſeprendre garde, ſi en preſſant cela entre ſes
dents & ſous la maſchoire, il ne ſent point quelque os craqueter : carſiles os de la
teſte ſont rompus , ils ne faudront point lors à faire bruit & craquetis , dit Hippocra
ces . Maintenant nous faut parler des lignes ſenſuels .

Des ſignes fenfuels. CH A P. 111.

Es ſignes ſenſuels ſont ceux qui ſe voyenc à l'ail,principalementquand l'os


eſt deſcouuert , & au doigepar le bout de l'eſpacule,ou du doige meſme:auſſi
quand les cheueux ſont coupez, & demeurent cous droits , entrans dedans
la playe: alors on peut predire vrayement
, que l'os eſtinciſé, pource qu'il eſt bien dif
facile de couper le poil qui obcüt
, que l'os ne'le ſoit auſſi quant -& - quant
. C'eſt un
340 Le dixieſme Liure

prognoſtic qu'on peut faire deuant que d'habiller le patient. Ceque Hippocrates a A

confirmé. Auſli peuceltre cogneuë la fracture quelquesfois au ſensdu cađ, quand le


cuir n'eſt deſconuert, qui ſe fera en preſſant des doigts ſur la fracture : car alors on
ſent l'oseſtre elleué ou enfoncé outre le naturel : & lors que le cuir eſt diuiſe , l'os
eſtant deſcouuert, li elle n'eſt apparente à la veuë, faut chercher auec la queuë de
Quelle doit l'eſprouuette, qui ne ſoit crop aiguë ny poinctuë, à fin que trouuant quelquc natu
eſtre la fo- relle cauité de l'os,elle ne donne imagination abuſiue que l'os ſoit fracturé. Elle ne
de .
doiteſtre auſſi trop groffe ,à fin qu'elle ne paſſe ſur les petites fepces ſans les fentir : &
Cornelius
lors que l'on touche l'os,fion le trouue liſſé & gliſant, nous eſtimons qu'il eſt encier
Celſus,
Les fissures & non roinpu : mais au contraire ſi on trouue aſpreté , c'eſt ſigne qu'il eſt rompu ,
trompent pourueu que ce ne ſoit à l'endroit des futures: toutesfois fe Chirurgien doit ſoigneu
founent le ſement conſiderer que les fractures ſe font fouuent ſur les ſucures, leſquelles n'ont
Chirurgien. touſiours vne certaine ſicuation . Or quelquesfois l'os eſtant contus, fendu , ou ſcil
ſuré, ne peut eſtre cogncu à l'æil ny par la ſonde : mais quand on aura apperceu par
les ſignes coniecturatifs cy - deſſus eſcrits ,fautpar artifice chercher la fillure ,par mix B
tion d'encre & huile ,ainſi que ſera cy - apres declaré . Et ayant cogneu l'os cítre bleſ
ſé, faut diligemment ſçauoir combien le mal eſt grand, & y remedier promptement.
Et lors que le coup eſt ſurles ſucures, le maleſt difficile à cognoiſtre, ſi l'os n'eſt gran
dement rompu : pource que les ſucures,ainfi qu'auons dit,repreſentent les filures, à
1
cauſe qu'elles ont aſperitez comme les ſutures: auquel cas Hippocrates dir , les Mc
decins eſtre fouuent trompez & deceus,ainſi qu'il telinoigne de luy meſmeau liure
5. des Epidemics , en l'hiſtoire de Autonomus in Omilo. Apres auoir ainſi declaré les
eſpeces, differences, & ſignes en general des fra &tures du Crane : maintenant faut
traicter de chacune eſpece à part, commençant à la Fiſſure ou fente.

De Sciffure , qui eſt la premiere eſpece de Fracture . CHAP. 1111.

Ile Chirurgien cognoiſt par les ſignes predits l'os eſtre fracturé & ſciſſuré,
& qu'il n'y ait playe ſuffiſance: pour la traicter,faut premierement raſer le
IS poil,puiscouper le cuir muſculeux & le pericrane auec yn raſoir, & faire la c
fc&tion triangulaire ou cruciale, de grandeur qu'il ſera beſoin ( car telle
choíe ne ſe peut bien eſcrire ) euitant touſiours tant que poſſible fera , les commif.
fures & les muſcles temporaux : & ne faut que le Chirurgien face difficulté de ce
ne le del
faire : car il eſt plus expedient faire vre inciſion pour deſcouurir l'os que
couurir , & ne cognoiſtre la nature de la fracture : car ayant fait la ſection , & n'ayant
Cornelius rien trouué,facilement la playe ſe conſolide : meſme comme dir Hippocrates , il eſt
Celſus. meilleur guarir les maladies auecques longitude de temps en ſeureté , qu'auecques
Hippocr.
crainte & ſoupçonen bien peu de temps. Doncques ladite ſection íe fera auecques
yn raſoir : & où ily auroit playe du balton qui auroit donné le coup , icelle ſeruira
d'vne derdites inciſions.

Raſoir pour faire inciſion. C


2011

Punction du Aucuns enleuent toute la piece dudit cuir muſculeux & Pericrane,ce que
i’ay fait pluſieurs fois. Puis apres faut bien ſeparer le Pericrane d'auec le Cra- D
pericrane
dangereuſe. ne , de peur qu'on ne le touche de la crepane ( car tel accouchement ſeroit
cauſe d'induire douleur & inflammations) en commençant aux angles de la
playe auecques tel Cizeau .
bore
Cizeau pourſeparer le Pericrane.

capu
ure
Des Playes en particulier. 341 >

А Et apres faur emplir toute la playe de charpy ,à fin de tenir les léures eſlcuées, &
dilatées iuſques aulendemain,&par deſſus appliquer remedes repercuflifs &re- Ligature de
Atraintifs du flux de ſang. Er l'il aduenoit qu'il fuſt impetueux, & fi grand qu'il ne vaijan.
peut eſtre eſtanché par iceux,alors faudroit lier le vaiſſeau, faiſantvn poinet d'ai
guille,commençant à paſſer l'aiguille à la partie exterieure au travers de touc le cuir
muſculeux,puislarepaſſer par la partie interieure , & faire le næud deſſus, y appli
quancvneperice compreſſe ronde faite de linge , de groſſeur d'vn tuyau de plume
d’oye,depeur que le fil ne coupe le cuir, & euiter la douleur le ſerrant ſi fort que le
ſang ne puiſſe paſſeroutre ledit vaiſſeau. Et ainſi faiſant l'on eſtanclie le flux deſang,
que lesremedes aftri&tifsne peuuent faire. Ce que j'ay fait puis n’agueres à vn char- Hiſtoite:
recier, lequel ainſi qu'il eſtoit ſur ſa charrette,tomba la teſte premiere ſur le paué en
ceſte ville,& ſe fit vne bien grande contuſion ſur l'os Parietal, partie poſterieure : au
moyen dequoy le conuint inciſer, tant pour faire vacuation du fang meurtry , que
pourauoirégard au vice de l'os : & par ladite inciſion fut coupée vne artere.Dont
B celuy qui le traictoir neluy ſceuteſtácher le ſang,chiquelledircharretierauoit perdu
B ſi grande quantité,qu'ilne ſe pouuoit pas ſeulement tourner dans ſon liat, & à peine
+

parler,tant eſtoit foible& debile. Icyi'ay bien voulureciter telļe hiſtoire, à fin d'in
Itruire le ieune Chirurgien , qu'il ne laiſſe mourir vn homine par faute d'un petit
poinct d'aiguille: lequelne doit ſeulement eſtre faic enla telte,maisauſſi en toutes
autres partiesdu corps en cas ſemblable, ſ'il eſt poflible faire ledit poinet d'aiguille :
C
puis ayant faitcela,faut ficuer la reſte dumalade en haut. Or pour retournerànoſtre
S
propos,le lendemain ſera regardé quel vice fera en l'os : & aucas qu'il n'apparuft au
ut
cune fracture au ſens de la veuë, ou au cact de l'eſprouuette, neantmoins on conie
&ure par lesſignespredics,y auoir fracture: alors faut mettre ſus l'os qu'on aura del
couuert,del'encreà eſcrire,mellée auec vn peu d'huile roſat , à fin qu'elle penetre
dedanslafente,filyen a, & que l'os en ſoit imbu. Et au premier appareil d'apres , Moyen potý
faut eſſuyer l'os,& voir li l'encre ſera entrée dedans, qui ſe fera en ruginant & raclant cognoſie lt
l'os auec rugines,iuſques à ce que l'on trouue la fin dela noirceur de ladice encre, & Jure non
le qu'on verra l'os eſtre blanc,adonc faut ceſſer. Autres y mettent vn cataplaſme ou apparente :
12 3 C emplaſtre aſtringente , & le lendemain eftant leuée,le lieu qui apparoiſtra eſtre plus
le ſec,quiſe fait à cauſe d'une vapeur chaude, laquelle paſſant au trauers de la diuiſion,
{ deſfeichelemedicament, & par là la ſciſſureelt demonſtrée.Ec apres, encores pour
C eſtre plusaſſeuré,fi la fiſſure penetre les deux tables, fautfaire clorre le nez & la bou
lo che au patient,& le faire reſpirer, & regarder fi par la fente fort quelque humidité
1 fanguinolente,àcauſe que par tel moyen l'air de la reſpiracion fait enfler & éleuer la
fubſtance du cerucau & les membranes,dontl'enſuit l'expulſion de certaine humia
$ dité : fi telle choſe apparoiſt,ſeta vray ſigne manifeſte que lesdeux tables font rom
$ puës encierement: & adonc faut couper l’ospar lesRugines, ou par autresinſtrumens
2 propres à ce faire, iuſques à la Dure-mere,ſoy gardantla toucher aucunement. Et ſi
laſciſſureeſtoitfort longue,il ne la faut pas ſuiure, car Naturereünira le reſte d'icel
le par vne callofité, qui eſt comme cicatrice de l'os : ſemblablement le Chirurgien ,
commedic Celſe,doit oſter de l'os du Crane le moins qu'il ſera poflible, pource que Cornelius
la couverture de l'os eſt meilleure que toute autre maciere qui y pourroit eſtre re- Celjceso
D generće,apresqu'on l'auroit tranché & oſté. Mais ſuffira donner iſſue & tranſpira
0 tion au ſang,& à la maciere ſanieuſe, de peur qu'elle ne corrompe l'os, & ſe face apo
ſteme au cerueau. Et ne faut paſſer à faire ouuerture en l'os le troiſieſmeiour,l'il eſt
poſlīble, & principalement en Eſté; à cauſe qu'il n'y a encores inflammation. Tou
tesfois i'en ayruginé & trepané apres le ſeptielme& dixieſme iour, tant en Hyuer 11 faut tre
qu'en Eſté,qui en font reſchappez,auſli pluſieurs ſont morts. Ie dy ces choſes, å fin paner le plus
queiamaison ne laiſſe les malades ſans aide : veu que ( comme dic Galien en laMe' rol que faire
chode) ileſtmeilleurd'eſſayer quelque remede, voire doureux,que nul:toutesfois ſe peut.
en faiſantauparauantbonprognoſtique,pource qu'ilen meurt plus fans eſtre trepa- Celſe lin.2.
nez,quede ceux qu'on trepane. Or les inſtrumens propres à donner ouuerture aux chap. 18.
fciffuresſont appellezRugines,deſquellesasicy lesportraicts de diucrſesfortes,à fin
quetu en puilles choiſir ſelon qu'il te fera beſoin : & les pourras toutes inferer l'vne
apres l'autre dans la viz d'vn manche que tu vois icy,laquelle viz cu cognois allez par
les extremitez deſdits inſtrumens.
342
Le dixieſme Liure
A
engines, ou Rapatoires.

‫הייחואנחנו‬
‫חעילינוו‬
2011
Awo

deli
TU B
G

‫اين‬
On racle l'os,quand il eſt fendu & ſciſſuré ,à fin de voir iuſques où pencere la fen
ir eſt raboteux,noir,& vermolu :au & x cartilages
& icor
te , &rczauſſ
alte pourom pusplan
r l'ap fautceſilſerde racler l'os quand on en void ſortir vn peu
. Or illorsqu'
de fang: apres on y doitmettre deſſus des poudres cephaliques , comme racines d'i
ris de Florence , farine d'iris,thus, ariſtoloche,eſcorce de racines de panax , leſquels
feichent & detergent ſans acrimonie ny piqueure .
Rugines d'autre façon que lesprecedentes ,pour comper dauantage l’os. C

Et pour le dircen vn mot,quand l'os eſt ſeulement fendu ou fiſſuré,le Chirurgien


ſe contentera dedilater & ouurir l'os, auec les ſuſdites Rugines , & non par trepanes;
encor que la fiſſure penetre les deux tables : & fi elle ne deſcend que iuſques à la
deuxieſme table,nela fautruginer que iuſques là : mais ſi l'os eſt contus & caſſé en
Paul,Agle pluſieurs pieces, faut les ofter auecinſtrumensconuenables : &f'ileſt neceſſairey
.6 . appliquer la trepanc ,on le fera comme nous dirons tantoſt.

De la
Des Playes en particulier . 343
. A
De la Contuſion , qui eſt la fecondeeſpece de Fracture. CHAP . V.

Ar contuſion ſe fait ſouuentesfois vne ecchymoſe,c'eſt à dire,effuſion


de ſang,ſousle cuir muſculeux ,auec coagulation dudit lang fansplaye.
Et fi la contuſion eſt grande , & que le cuir ſoit ſeparé du Crane , alors Les choſes
fauc faire fe &tion & ouuerture, à fin d'euacuer le lang, & n'appliquer humides font
nullement remedes ſuppuratifs ( ce qui ſe pourroit faire en vne autre contraires
partie charneuſe ) de peur que l'osneſ'alteraſt & ouuriſt:car toutes choſes humides aux os.
ſontcontrairesaux os. Ce qui ſera clairement monſtré cy-apres. On void louuenc
venir celles contuſions,principalement aux ieunes enfans,& le cuir fe deprimer , &
pour leurmolleſſe & rarité le ſang decouler entre le cuir & le Crane,&: l'on ſent vne
molleſſe & inondation à l'endroitdeladice contuſion: ce que i'ay pluſieurs fois ou
uertaucc vne lancette, & par l'ouuerturefaiſois ſouuent ſortir vn ſang ſereux auec
chrombus,quieſtſang coagulé & fort noir: puis apres auec compreſion moderée, Paul. Ægi.
B & remedes deſiccatifs, promptement eſtoientguaris. Pareillement par vne grande liure 6 .
contufion le Cranc des petits enfans ſe peut enfoncer au dedans, comme l'on void 1

aux deliez vaiſſeaux d'airain, de plomb, d’eſtain , ou ſem


blables,quand on preſſedudoige deſſus,il ſe fait vne foſſe
ou cauité, & quelquesfois ſe releuent de ſoy -melme: &
celle choſe ſe fait principalement aux ieunes enfans, leſ
quels ont encores leurs os tendres, lanuleux & mols , & à
S
u
ceux qui ſont de temperature mollafie,comme femmes,&
1
pituiteux : & où ils ne ſe releuent d'eux- meſmes par le be
Is
nefice de nature,fautappliquer vne ventouſe auec grande
flamme, à fin de recirer l'osenfoncé en ſon lieu naturel, fil
eſt poſſible , & faire clorre le nez & la bouche au malade
pour recenir ſon haleine. Car par ce moyen le cerueau &
les membranes aydent à la ventouſe de reduire l'os en ſa
C
place. Et ſi par la ventouſe ne peut eſtrereduit, adonc fau
dra faire le&tion au cuir, & appliquer yn Tirefons comme Tirefons.
cetuy : & tirer l'os en haut ,ainſi que font les tonneliers
quand ils veulent retirer vne douue du dedans au dehors.
Et où tel cas aduiendroit à vn os folide
& eſpais, & que par tels moyens ne
peuſt eſtre leué:adonc faut appliquer
vne pecite Trepane, & faire ouuerture
au crane, au milieu de l’os qui ſera en
foncé , & par l'ouuercure l'on efleuera
ledit os auec ceſt Eleuatoire à trois
pieds,lequel le tirera de la ligne droite :
& a puiſſance celle qu'on la peut deliter
pour efleuer les os enfoncez. Sa figure Eleuatoire a
a eſté faite triangle,à fin qu'ilpeuſteſtre trois pieds.
D D aſſis en toutes les parties de la teſte:
pource qu'elle eſt de figure 'ronde : pa
reillement l'on pourra en ſon extremité
inſerer diuerſes poinctes ſelon qu'il en
ſera beſoin , ainſi qu'il c'eſt monſtré par
ce portraict.

Gg
344 Le dixieſme Liure

Autre eleuatoire.
А

B
AA Monſtrent la poincte de l’Eleuatoire, laquelle doit eſtre mouſſe à raiſon que
elle ſe doit couler doucement dedans la fracture du crane ioignant la Du

re -mere. Icelle poincte ſe hauſſe & baiſſe tant & fi peu qu'il elt beſoin.
B Le corps de l’Eleuatoire lequel doit eſtre quarré , à fin que la poincte dudit

Eleuatoire qui s'y inſere , ne varie & tourne : l'extremité d'iceluy corps
doit eſtre appuyée ſus l’os ſain ,à fin de tenir fermement. ·
L'uſage d'iceluy Eleuatoire eſt tel,qu'ilfaut,eſtant bien mis dedans la fracture, four
leuer la main en haut , à fin d'efleuer l'os rompu & embarré .
C Monſtre la premiere branche du ſecond Eleuatoire , l'extremité duquel ſe
coule par deſſous l'os embarré & fracturé.
D La ſeconde branche laquelle doit ſ'appuyer ſur l'os ſain,à fin de tenir
coup
pour efleuer ledit os cinbarré.
maniany

L'yſage d'iceluy eſt tel , qu'il faut, eſtanc bien accommodé,preſſer le manche en bas,
car par celle compreſſion la premiere branche ſouſleue l'os fracturé.
C
Scies propres à couper les os de la teſte .

Ce qu'il faut Et où il aduiendroit quc l'os ſeroit rompu


faire en la
& deprimé d'vn coſté ſeulement, ſans que
fracture &
toute la piece fuſt enfoncée, il faut pour
depreßion
l'elleuer & donner ifluë aux choſes eſtran
d'un ſeul
faire ouuerture auec ſcies ſemblables
cofté de l'os. ges ,
à celles - cy : car par icelles on peut couper
de l'os ( ſans comprimer deſſus ) tant & fi
peu qu'on voudra , ſans eſtre en danger de
comprimer l'os fracturé ſur les membranes,
& par conſequent ſur le cerucau .

Trepane exfoliatine.

Et ſi l'os n'eſtoit contus que D

iuſques à la ſeconde cable ,


ou moins : & qu'il n'y euſt
ſigne que la fracture ne pe
ober

necraft plus outre , il ſuffira


de deſcouurir l'os iuſques à g
la fin de la contuſion , de

peur qu'il n'acquiere infam


mation , ou autre mauuaiſe
diſpoſition : laquelle chofe
ſe fera auec vne Trepane ex
foliatiue, parlaquelle fe fera
amputation de los, tans & G
peu que l'on voudra .
Des Playes en particulier. 345

Des embarreures, on enfonceures , qui eſt pour la troiſieſme eſpece de fracture .


A С ЯАР. VI .

Ar grands coups orbes , comme de baſton pelanc, rond , ou quarré ,en


ruantoufrappant, auſſi par cheutes d'enhaut en bas à plomb ( comme nous
P
auons dit) ſouuent les os du Crane ſonc froiſſez , fendus & enfoncez , plus
ou moins , & en diuerſes manieres , ſelon la vehemence du coup , & la diuerſité des
inſtrumens qui bleſſent, & la partie qui eſt endommagée . Et par ainſiſelon la diuer
fité deſdites fractures, & deſdits accidens quien enſuiuent,fauc changer deremedes
& inftrumens. Or pofons le fait que l'os ſoit enfoncé auec vne ou pluſieurs pieces
d'eſquilles ſeparées,leſquelles ſe peuuent tirer & efleuer ſans l'application de la Tre

pane:laquelle chole ſe pourra faire auecques eleuatoires propres à ce faire , comme


celles qui te ſont icy portraites.

Elevatoires ,
to

Or il faut bien ſe caution en


Die
. donner garde en el eſleuant les
leuant & tirane lef- eſquilles.
dices eſquilles , ou
porcions d'os,qu'on
could ne bleſſe les mem
branes : car aucunes

ont des aſperitez &


pointes qui les peu
uent bleſſer en les
tirant , ſi l'on n'y
prend bien garde.
- Auli quelquesfois on ne les peut extraire ſans accroiſtre l'ouuerture de la fracture :
& en tel cas ,où il y auroit eſpace & lieu à mettre l'extremité de ces tenailles , facile
2.
c ment on pourra couper auccicellescant & li peu de l’os que l'on voudra , pour don
ner iſſuë auſdices eſquilles ſeparées , ſans appliquer la Trepane : ce que i'ay faict
pluſieurs fois aucc bonne iſſue. L'operation deſdites tenailles eſt plus briefue & plus
ſcure queparla Trepane: cc que nous deuons touſiours chercher.

Tenailles capitales inciſiues, dites


Cou
bec de Perroquet.
WWW.I

TAI

marian

Gg ij
eſme e
346 Le dixi Liur ,

A
Autres Tenailles.

Ec d'abondant tu as encores icy figures diuerſes de petits cizeaux , auec le mailler de


B
plomb, pourapplanir les aſperitez des os , enſemble des pincettes , dont les figures
font telles ,

Figures de divers cizeaux & pincettes, avec maillet de plomb.

Or il faut en eet endroit noter qu'on ne doit


Il ne faut apo appliquer Trepane ny Eleuatoire ſur l'osen
pliquer Tri
mine

tiereinent fracturé , de peur qu'en preſſant


page , ny ele .
watoire ſur deſſus, on ne bleſſaſt les membranes ,mais ſe
l'os enriere ront appliquez ſur l'osſain & entier, & le plus
mět fracturé. pres de la fracture qu'on pourra , à fin de n'o
iter de l'os & ne deſcouurir le cerveau que Ic

moins qu'on pourra . Pareillement faut enco


res bien noter , que ſila fracture eſtoit grande ,
c'eſt à dire longue,ne la faut du tout ofter : C
non plus que les longues fiſſures ne doiuent
aulli estre luiuies ( comme nous auons dit )
mais ſuffira donner iffuë à la matiere , & elle

uer l'os filcomprimelesmembranes , comme


nous auons dit cy - dewant . Car nature reünit
& glutinele crane par vn callus , comme elle
fait auſſi és autres parties du corps . Ce qui a
Hiſtoire. eſté faiēt puis n'agueres à l'vn des feruiteurs de monſieur Grolo , lequel eut yn coup

de pied demulet à la teſte, de ſorte que le crampon du fer luy fractura & fic embar
rure à l’os Coronal. Eteſtantmandé pour le penſer ,ayant cogneu l'os eſtre enfoncé
au dedans , ie feisfe &tion triangulaire pour appliquer la trepane . Et le lendemain le
trepanay pour elleuer l'os fracturé, & ayant fait l'ouuercure,voulus extraire l'os fra
& uré , & le voulant tirer hors, cogneus la grandeur d'icelle fracture ( parce que l'os
branloit) laquelle comprenoit depuis le milieu du front, iuſques au petit Canthus ,
ou coin de l'ail . Adoncceſſant de tirer cec os , ie commençay à l'efeuer en haut, de D
façon qu'ilne preſſoit plus la dure -mere , & par l'ouuercure de la Trepancyſoient
lesmatieres,la dure -mere auoit tranſpiration , neantmoins feis prognoſtique audic
Grolo ( lequel eſtoit fortcurieux de faire traiter ſon ſeruiteur) qu'à grand peine veu
la grandeur de ladite fracture, pourroit - il reſchapper : toutesfois,gracesà Dieu,ileſt
Il neconuient guary,reſté l’cil du colté de la fracture qu'il a perdu . Partant ne fautolter les gran
confioursti- despieces d'os,ſi elles ne ſont du tout ſeparées de l'os non fracturé, pource qu'ils ſe
rer l'os du , reüniffent par vn callus ,ainſi que les os des autres parties : ce quieft acteſté & com
toutfracturé.mandé par le diuin Hippocrates au liure des Playes de la teſte , & par Celle , comme sande
nous auons diccy - deſſus. Et à celte fin & intention ,Nacure,entre les deux tables du the
p
Crane, appellé Diploé , a fait prouiſion d'un aliment fanguin pour reparer la ſub
Itance perduë : comme en la cauité des autres os , vn aliment qui tient de la nature
de moölle .
Des Playes en particulier. 347
A
De la quatrieſme eſpece de Fracture ,qui eftInciſion, appellée d'Hippocrates; Marque ou fiege:
autrement figure delaiſée du bafton , duquell'os aura efté frappé.
CHAP VII.

Lyaſemblablementpluſieurs eſpeces d'inciſions faites au Crane : aucunes Diuerſes


ſuperficielles,autresmoyennes, penetrantes iuſques au Diploé , autres pe- efpeces d'ina
netrantes toutes les deux tables:aucunes ſontauec perdition dela ſubſtan- ciſions.
ced'os: aucunes ſont longues , autres courtes : aucunes larges , les autres
eſtroićtes : aucunes ſont faites auec vninſtrument aigu,commela poincte d'vne da
gue,poinçon, ou dehallebarde,ou autres ſemblables. Aucunes ſontcompliquées
auec contuſion , Fiſſures, & Embarrures, & autres accidens : & ſelon la diuerſité de
ces differences,ilfaut pareillement diuerſifier la cure.Ec partanten aucunes d'icelles
ferontappliquez Rugines,Trepane ,& autres inſtrumens,ſelon que la neceſſité lere
querra,comme auonsdit par cy -deuant. Orilfauc icy noter , que l'iladuient qu'il y
B ait grande playe apres auoir coupé du tout l'os , & queportion du cuir muſculeux
fult demeurée ſanseſtre entierement coupée : en tel cas ne faut paracheuer de cou
per ledit cuir,nyſeparer l'os (qui ſera du tout coupé ) d'auec le Pericrane, mais re
duire leſdits os & cuir enſemble en leur lieu. Ce que Celſe commande, & feis au ca- Hiſtoire dx
pitaine Hydron,lequel puis peu detemps fut bleſſé en ceſte ville d'un coup d'eſpée capitaine
aumilieu de l'osCoronal. Ereſtoit ledit os coupé du cour iuſques à la dure-mere,de Hydron.
grandeur & largeur detrois doigts ou enuiron, tellement qu'il ſe renuerſoitſur le vi
De ſage, & ne tenoit plus qu'au Pericrane & cuir muſculeux, enuiron trois doigts : &
promptement voyanticelle playe, fusquaſi d'opinion de paracheuer du cout lecou
LIS per : mais ie conſideray qu'Hippocrates & les autres bons praticiens ont touſiours
O prohibé de ne laiſſerle cerueau deſcouuert,ſ'il eſt poſſible: puis i'eſſuyay le ſang qui
le eſtoic combé ſurla dure -mere,laquelle on voyoit fort mouuoir à l’æil: puis renuer
0. ſay lapiece qui eſtoit ſeparée,la poſant en ſon lieu : & pour la micux tenir, feis trois
pointsd'aiguille aux parties ſuperieures, & mis des petites tentes aux coltez de la
FI : с playe, à fin de donner iſſuëà la lanie. Et le tout fut ſibien adapté, quepar la grace de
ni Dieuilen guarit,iaçoit qu'il euſt encor pluſieurs grandscoups d'eſpée, tant au tra
:) uersd'une cuiſſe, qu'au viſage, & vn autre au coſté droic pres la mammelle, paſſant le
Ten longdescoſtes,penetrantoutre de l'autre parten la partie baſſe de l'Omoplate. Et Ne fautlaiſ
bic pour conclurre, ne faut faire ampucacion de l'os ny cuir muſculeux qui couure le fer terterueans
Dit
Cranc,&moinsencoresdes os d'iceluy,ſinon le moins qu'il ſera poſſible ,de peur que branes à deſ
le lccerveau ne ſoit deſcouuere. conuert .

52
Dela cinquieſmeeſpecede Fracture,quiſefaitdu coſté oppoſitedu coup. CHAP. VIII.
A fracture ſe fait quelquesfois du coſté oppoſite du coup : commegi le coup la contre
le
eſtenla partie dexcre,la fracture ou fiſſure ſe fait au coſté ſeneſtre: qui eſt fente ſepexo
vne chole bien dangereuſe,à cauſe que rarement on peut cognoiſtre le mal, faire.
& n’ ya mo yen ny artifice vray de le cognoiſtre, comme dit Hippocrates ,liure De
D vulneribus capitis: parquoy en tel cas quand la mort ſ'enſuit le Chirurgien eſt excu
5,
ſable. Ce que ie puis vrayementattelter auoir veu aduenir, combien que Paul Ægi
netaſen mocque, diſantque nature a fai &t le Crane de pluſieurs pieces , & commif
C
furesquileſeparent,àfin quefiladuenoit Fractureà vn coſté, qu'elle ne fuſt com
.
muniquée à l'autre.Et ainſi conclud qu'icelle fracture ne peut eftre faite au cofté
oppoſite du coup.Oriedy , que celle choſe eſt vraye en ceux qui ont leurs commif.
ſures parfaictes:maisen ceux qui n'en ont point , ou ſont imparfaictes , il ſe pourra
3
faire qu'vn coſté eſtantfrappé , l'autre oppoſite ſoit bleſſé. Ce quieſt aduenu plu- Hiſtoired'Ix
ſicursfois,& meſmes puis n'agueres à l'vn des ſeruiteurs demonſieur du Mars,Con- feruiseurde
trerolleurdes Poſtes,lequel eut vn coup de pierre ſur l'os Parietal, partie dextre, monſie urdu
auccpetite playe, & grande contufion & tumeur. Et luy fut faite inciſion pour ago M415 .
grandir la playe,& faire vacuation du ſang contenu en ladite tumeur.Et fut traité
par defună maiſtre Thierry de Hery,duquel ſuis aſſeuré qu'il n'oublia rien à faire Thierry do
ſondeuoir,pourcequ'ilauoit Dieu deuantles yeux,& qu'il eſtoit bien exercé à la Hery.
Chirurgic. Etapres l'inciſion faite,cogneur à l'ail queloseſtoit entier: neantmoins
Gg iij
348 Le dixieſme Liure
auoit conie&ture grande que l'os pouuoit eſtre fra& uré, pource qu'incontinent qu'il A
fut frappé,tomba en terre, & vomit : & eut autres accidens, quidenotoient Fradu
re. Tancy a que le pacient mourut levingt& vnieſmeiour, dont ledic Thierrym’en
uoya querir, par la perſuaſion dudit du Mars,pourſçauoir la cauſe de fa mort.Et luy
ayant ſcié le crane , trouuaſmes à la partie oppoſite du coup , l'os ſciſſuré & fendu,
grande quanticé de ſanie & apofteme en la Dure -mere, & meſmes en la ſubſtance
ducerueau: & ne luy fut trouué aucune commiſſure, excepté les deux mendeuſes.
Fracture fe, Et partant conclus auec l'authorité d'Hippocrates, & par raiſon & experience, qu'il
peutfairedes repeut faire Frađure du coſté oppoſite ducoup,principalement à ceux quin'auront
cotéoppoſite
du couh : ce commiſures,ou qu'elles ſoient fortiointes enſemble. D'autre coſté il n'eſt pas auſli
que auctori- impoſſible que la fiſſure ſe face à l'oppoſice du coup aſſisau meſme os, & non en l’au
zé, raiſon ,o tre, en cenx quiont le crane bien conformé& diſtingué par ſucures.Et telle eſt l'in
experience cention d'Hippocrates en ce paſſage, parquoy ne doit eſtre ſuiuie l'opinion de Celle
demonftrent. en ce lieu, eſtimant lecoup aſlis en vn os,& lá Fiffure en vn autre : ny de Paulus Æ
gincta,reiettantla ſentence d'Hippocrates, commechoſe impoſſible. Et faut noter B
que l'oppoſite du coup en meſmeos ſe peut entendre en deux manieres. Premiere
ment, quandla fracture eſt en la meſme ſuperficie de l'os frappé: conimeſi la partie
d'vn desos bregmatis, qui elt vers la future lambdoïde,eſtant frappée ,celle qui eſt
vers la ſuture coronale, ſe monſtre bleſſée. Secondement , quand non la ſuperficie
quia receu le coup eſt bleſſée, mais celle ſeulement qui eſt au deſſous, comme lors
que la premiere cable eſtfrappée ſans eſtre fracturée, & que laſeconde eſt rompuë.
Cequer’ay veu aduenir à vn gentilhomme de la compagnie de monſieur d’Eſtam
pes, lequel fut bleſſé ſur la breche du chaſteau de Hedin, d'un coup d'harquebuſe
qu'il receut ſur l’os Parietal,ayant vn habillement de teſte, lequel la balle enfonça
ſans eſtrerompu ,ny pareillement le cuir, ny le crane exterieurement, & le fixieſme
iour mourutapoplectique. Dont aduint que pour l'enuie que l'auois de cognoiſtre
la cauſe de la mort,ie luy ouuris le crane, auquel trouuay la ſeconde table rompuë,
aucc eſquilles d'os,qui eſtoient inſerez dans la ſubſtance du cerueau , encore que la
premiere table fuftentiere. Ce que pareillement attefteauoir veu & monſtré depuis
à meſſieurs Chapelain,premierMedecin du Roy, &Caftellan premier de la Royne,
en vn gentilhomme qui fut bleſſe à l'aſſaut deRouen .Or Hippocrates ne baille au
cune maniere de traiteer icelle cinquieſme eſpece de fracture, pource qu'on ne peuc
vrayement cognoiſtre lelieubleſſé, pourtant le plus ſouuent ſont mortelles. Tou DIC
tesfois ſe faucefforcer à les cognoiſtre, en appliquant deſſus ( ayant tout raſé le poil)
vne emplaſtre qui ſera faicte de poix liquide,& de poix noire, cire , auec terebenthi
ne, & poudre d'Iris & Maſtich: & lion void quelque endroit eſtre plus humide & 1280

plus mol, & aucunement tumefié & enflé , on pourra dire par conie & ure qu'en tel ind
endroit doiteſtre lafracture ſciſſurée. Ioint auſſi que le patient met ſouuentla main xfo
à l'endroit où eſt la fracture: & voyant telleschoſes auec autres ſignes coniecturatifs
par cy-deuanteferits,pluſtoſt quelaiſſer le patient mourir, ie conſeille de crepaner,
Il quatre
a
eſt plusaiſé
de vſantparauant de bon Prognoſtiqueaux parens & amis du patient. Auſſi appellant
Porter vn bố conſeil, cant de Docteurs,Medecins,que Chirurgiens, de peur qu'il ne ſe trouuc
me en terre empefché,ſid’auenture le pacient vientà mourir: car ce ſera choſe plus aiſée à qua
qu'à vn ſeul. tre de le porter en terre, qu'il neſeroit à vnſeul. Or retournons à noſtre propos,con
il y a quatre cluans qu'entre les eſpeces des fractures du Crane, ſont quatre qui peuvent dece. D
especes de uoir le Chirurgien. La premiere , quand l'os eſt contus, & promptement retourne
Fracturesqui en la place. Laſeconde,quandilyavne petite ſciſſure comme vo poil. La tierce,
poir le chis quand loseſt eſclatré au dedans,& par dehors eſt entier. La quatrieſme, quand l'os
pergić, dór le cſt fracturé à la partic oppoſite du coup .:
patient perit.
De la Commotion ou esbranlement,& concußion ou eſcouſſe du cerueau . CHAP . IX.

Gal. 2. de la Auantage, faut entendre quevre les ſuſdices Fractures , il ſe faict vne Et
compoſition autre diſpoſition , appellée Commotion , ou eſbranlement & concuſſion
des medica du cerueau , qui cauſe ſemblables accidens que les fractures du Crane:
mens, cha. 6 .
laquelle Commotion ſe fait pour auoir tombé de haut en bas ſur choſe
om furl'aph. folide & dure , ou par coups orbes , comme de pierre, ou d'vne maſſe , ou d'vn
58.fect.7:
coup de lance,ou l'air d'un coup d'artillerie, ou du connerre combant pres de la per,
Des Playes en particulier . 349
A ſonne,voirede lamain,ou autresſemblables. Qu'il ſoitvray, Hippocrates au s. liure Hiſtoire de
des Epidemiesen cſcrit ceſte hiſtoire qui ſ'enſuit. Vne fort belle pucelle fille de Ne- Hippo,au su
jus, âgée de vingt ans , eſtant frappée par maniere de ieu, ſur l'os du Bregma , de la liure des
main eitenduëd'vne ſienne amie,fucincontinentſurpriſe de Vertigineſansreſpirer.Epidemies.
Aulli- tolt qu'elle fuc de retour en ſa maiſon , vne fieure aiguë la failic, auec douleur
de teſte & rougeurde la face , & au ſepieſmeiour elle vuida par l'oreille dextre vn
bon verre de boüe puante & rougeaftre, & luy ſembla eſtre allegée. Mais derechefla
fieure ſuruint, & lors fut aſſoupie ne pouuant parler , auec conuulſion de la partie
dextre de la face & difficulcé d'halener. Auſſi la conuulfion & tremblemet de tous le
corpsenſuiuit,la langue liée, l'æilimmobile, & au neufielme iour elle mourut. Da
uantagenoterasque le patient, iaçoit qu'il ait vn armer ou autre habillemêt de teſte, Paul. Æs
lors qu'il ſera frappé, neantmoins par grand effort & ébranlement de la telte, le peu gin .
uent rompre veines & arteres , non ſeulement celles qui paſſent & entrent par les 1

futures,maisauſſi aucunes decelles qui vont parcy & par là entreles deux tables, au
licu dicdiploé, tant pour ſuſpendre & attacher la dure-mere, contre le Crane, à fin Cornelius. 1

quele cerueau ait ſon mouuement plus libre , que pour porter le ſang & alimentau Celſusa
B Crane,aulieu qu'iceluy n’a moëlle , ains eſt nourry du ſang contenu au diploé , aindi
qu'auonsdeclaré en l’Anatomie. Donc l'enſuit flux de ſang , qui découle ou entre l'os
& lesmembranes,ou entre les membranes & le cerueau , & en cec endroic le malade
ſentgrande douleur,& la veuë ſobſcurcit:lequel ſang eſtant horsde ſes propres vaiſ )

ſeaux ſe corrompt & putrefie. Ce qui eſt approuué par Hipp.en l'Aphoriſme, siin
ventrem ſanguis preternaturam .Donc pluſieursaccidens aduiennent,cóme ébloüifle- Apho.20.
Hippos
ment de veuë,vomiſſement,lequelle fait par la colligance & amitié qu'a l'eſtomach liu.G.
auec lecerueau par les nerfs de la ſixieſme coniugaiſon , leſquels deſcendent du cer 1
ueau & ſe vorinſerer à ſon orifice ſuperieur , & de là en coute ſa ſubſtance, au moyen
dequov par la ſocieté qu'ilsont enſemble, ſe comprime , reſerre en ſoy, & comme ſe
5
renuerſe, & alors ietre premierement ce quieſt contenu en la capacité,&: d’abondát,
ce quiy peut affluer des parties qui luy ſone voiſines, & alliées,cõmedu foye, & veſſic
s dufel:entre leſquelles choſes la bile', comme la plus mobile , & par legereté natu
FU relle prompte à ſuiure ce mouuement par lehautſortla premiere , & en plus grande
C abondance, qui eſtla vrayecauſeduvomiſſement bilieux,tantrechăté parlesMc
11
decins,ésſolutionsde côtinuité, quiaduiennét tantau Crane qu'au cerueau. Quel
quetemps apres ſuruient inflammation aux membranes , & au cerueau : à raiſon du
ſangquiſoredes veines & arteres rompuës pour la violence du coup, &épandu par la
ſubſtáce ducerueau ,ſecorrompt & pourrit, incõrinentcelleinflammation eſt com
muniquée à toutes les parties du corps , ſe fait fieure aufli toſt auſſiaduient reſuerie,
1
paralterationdu cerueau & aſſopiffemét,paralienation : leſquels accidens és playcs Hipp.
1 de teſte ſontfort dangereux, ſuiuant l'authorité d'Hippoc.en l’Aphoriſme,Incapitis Aph, 14.
ictu obff.apefcentia &dzſipientia , malum : & ftupeur , quieſtdiminution de mouuoir & lin.7.
ſentir, faite par l'obſtruction des voyes & conduits de l'eſpritanimal : puis apoſteme
& pourricureau cerucau,auectres-grande difficultéde reſpirer,quiprouientdu cer
,1
ucau offenfé,quifait que lethorax,qui eſtpropre inſtrumée de la reſpiration,nepeut
faireſonoffice,pourceque lesmuſcles quiontmouuementdu cerucau & del'eſpine
D
medullaire, par l'eſpritanimal enuoyé par les nerfs, ne peuuent éleuer ledit Thorax,
D parce qu'ils ſont priuez de la faculté demouuoir,& par telsaccidens la mort ſ'enfuit.
.

Tousleſquelsaccidens, on la pluſpart , on a veuaduenir au feu Roy Henry dernier Hiſtoire


decedé, lequel autournoyreceut vn tres-grand coup de lanceau corps,quifurcauſe dufeu Roy
luyéleuer laviſiere; & vn éclatducõrre-coupluy dóna au deſſous du ſourcildextre, Henry 11.
& luy dilacera le cuir muſculeux du front pres l’os tranſuerſalement iuſques au petit
coin de l’æil ſeneſtre ; & anec ce pluſieurs petits fragmensou cfquilles de l'éclat de
meurerent en la ſubſtance dudıræil , ſans faireaucunefracture auxos . Donc à cauſe.
detelle commocion ou ébranlemétdu cerueau il deceda l'onzieſme iour apres qu'il
futfrappé. Ecapresſondecez ,on luy trouuaen la partieoppoſite du coup ,comine
cauiron le milieu de la commiſſure de los Occipital , vne quantité de ſang épandu
entre la Dure- mere, & pie-mere: & alteration en laſubſtance du cerucau ,qui eſtoic
decouleur Alaue ou iaunaſtre,enuiron la grădeur d'un poulce:auquel licu fuccrous
commencement de putrefaction : qui furene cauſes fuffiſantes de la inore aduentë
audit Seigneur,& non le vice de l'ailſeulement.A quoy neantmoins quelques- vns
Gg ilij
.
350 Le dixieſme Liure ,

one voulu referer la cauſe de la mort : car on a veu pluſieurs qui ont receu de plus a
Hiſoire de gráds coups que ceſtuy- là ſur les yeux, qui toutesfois neſont pasmorts.Commeauſfi.
Monſieur de on a veu de freſche memoire , à Monſieur de S. Iean , Eſcuyer du Roy , lequel eſtant
Sainct lean, au tournoy,quifutfaic deuát l'Hoſtelde Guyſe ,cuc vn coup d'éclat delance par de
Eſcuyer du
Roy. dans ſa viſiere ,de longueur & groſſeur d'un doigt, ſous l'ail dedans l'orbite , penetrát
de trois doigts ou enuiron dedans la teſte, & le traittay auec bonne compagnie , tant
de Medecins que de Chirurgiens , par le commádement du Roy Henry defunct: en
tre leſquels eſtoient Meſſieurs Valeran Medecin ordinaire du Roy , Loys Durer, Ro.
dolphe de l'Or,Docteurs Regensen la faculté de Medecine à Paris ,& laques le Roy
Chirurgien ordinaire du Roy : neantmoins la playe faite par vn ſigrand coupaeſté
guarie par l'aide de Dieu . Et d'abondanten cet endroit ne veux laiſſer en arriere la
Hiſtoire de tres-grande playe que Monſeigneur François de Lorraine,Duc de Guyſe,receur de
Monſeigneur uant Boulongne ,d'un coup de lance , qui au deſſous de l'oeil dextre , declinant vers
le Dac de
le nez , entra & paſſaoutre de l'autre parc, entre la nucque & l'oreille , d'vne ſigrande
Guyſe.
violence que le fer de la lance auec vne portion de bois fut compuë , & demeura de
dans , en ſorte qu'il ne peut eſtre tiré hors qu'à grande force,meſmesauec tenailles de B
mareſchal :nonobſtant routesfois ceſte grande violèce , qui ne fut ſans fracture d'os ,
nerfs, veines , arteres , & autres parties rompuës & briſées par ledic coup de lance,
mondit Seigneur , graces à Dieu ,furguary.Donc conclurons qu'aucuns meurent de
1
bien petites playes,les autres réchappent de tres - grandes , voire quiſont entieremeno
deſeſperées, tant aux Medecins qu'aux Chirurgiens : mais celles choſes ſe doivent
quelquesfois referer aux temperatures , & principalement à Dieu , qui tient la vie IA
des hommes en la main . Er ce ſuffiſe de la commotion du cerucau , & des eſpeces de
fracture du Cranc . Maintenanc faut parler du prognoſtique.

Du prognoſtique. С НАР.

Hip.auliu. L ne faut negliger les playes de teſte, & n'y euſt- il que le cuirinciſé ou
de vulner.
contus:mais encoresmoins lors qu'il y a fracture au crane, à raiſon que
capiris.
quelquesfois ſuruiennent grandsaccidens, & le plusſouuent la mort : c
1 principalementaux corpscacochymes, comme ſont verolez , ladres,

hydropiques, phthiſiques, ou he & iques, bouffis, lentigineux , & generalementtous


cacheātiques : carà tels, leurs playes ſont difficiles à curer , & bien ſouuent impoſſi
bles ,à raiſon que les playes nefe guariſſentque par vnion & cõſolidation, leſquelles
choſes ne ſe font que par affluence de bon ſang & loiiable , & par la force de nacure.
Ocl'affluence de lang defautaux he & iques & phthiſiques: le ſang bon & louable de
faut generalement à tous cacochymes & cache &tiques : come la force & vigueur de
la faculté naturelle manqueà tous deux . Les fractures de teſte faites à ceux qui re
Hip.an liu . leuent de maladie , ſont difficiles à curer,& quelquesfois impoſibles. Les playes de
de vul.cap. teſte faices par contuſion ſont plus longues & difficiles à guarir , que celles qui ſont
faites par inciſion . L'os ne ſe rompt point , que la chair de deffusne ſoit bleſſéc,
excepté en la fracture, qui ſe fait à l'oppoſite du coup. Les os des enfans font moins
durs , plus deliez , & plus arrouſez & imbus de ſang , que ceux des vieux : & partane
f'alterent & pourriſſent pluſtoſt. Parquoy telles playes ſont plus dangereuſes & mor D
1
telles qu'elles ne ſont ésvieilles gens, parce que leurs os ſ'alcerent & pourriſſent
pluſtoft, à raiſon qu'ils ſont de temperature pluschaude & humide , & par conſe
quent plus faciles à pourrir :& pour leur tendreté & molleſſe communiquent pluſtoſt
leurs pourritures aux membranes , & au cerucau , dont la mort ſ'enſuit , pluſtoſt qu'à
ceux qui ſont d'âge viril : combien qu'ésvieilles gens les playes , tant celles quiſont
à la chair, que celles qui ſont ésos de la teſte,nefagglutinent, & vniſſent pas ſi tolt
qu’ésenfans, à cauſe que les vieilles gens ont les os plus ſecs & plus durs , & par con
fcquent moins agglutinables , & ont moins de ſang , & meſme ce peu qu'ilsen ont, Race
eſt plusſereux , & par conſequent moins propre à faire l'agglutination. L'homme
vit plus long temps d'vne playe mortelle faite au Crane , en Hyuer qu'en Eſté : à
raiſon qu'en Hyuerta chaleur naturelle eſt plus forte qu'en Eſté : pareillement l'hu tet
meur ſe pourrit pluſtoſt en Eſté qu'en Hyuer,au moyen que la chaleur contre natu pentru
Hippocrat. re ,eſt plus gradeen Eſté qu'en Hyuer. Ce quieft approuué par Hippocrates en l'A
aph.is.liu.l. phoriſme quinzieſmc du premier liure : Ventres hyeme,& c. Et où la chaleur naturelle
Des Playes en particulier. 351
A
A ne peut curer la fracture.Nature eſtant plus forte prolonge la vie. Les playes ducer
ucau & des membranes ſont mortelles le plus ſouuenc,à cauſe que ſouventesfois f'en
enſuit ablation de l'action desmuſcles du Thorax, & des autres ſeruans à la relpira
cion, donc de neceſſité lamort ſ'enfuit. Ce que nous auons par cy-deuant declaré.
Siapres un coup donné à la teſte il ſuruiene tumeur , & fe perd coft, c’eſt mauvais
ligne: ſi ce n'eſt par cauſe raiſonnable,comme apres vne faignée, purgation, oume
dicamens reſolutifs : ce qui cſt prouué par Hippoc. Quand la fieurevientau com Hip. Aph.
mencement , c'eſt à ſçauoir dans le quatrieſmeou ſeptielmeiour ( ce qu'elle faitle os.liu.s.
plus ſouuent) on peutiuger qu'elle vient pour la regeneracion de la ſanie , ainſi qu'il
eſt eſcrit par Hippocr. Dumpus.conficitur, &c. Et celle fieure n'eſt tant à craindre lors, Hip. Aph.
que quand elle vient apres le ſeptielmeiour , auqueliour a de couſtume de laiſſer le 47.118. 2.
patient:mais quádelle vientau dixieſmeou quatorzieſıne, & auecfroid & tremble
ment,elle eſt dangereuſe, pource qu'il y a ſuſpicion qu'elle ſoit cauſée de quelque
putrefa& ion ,quiſe faic au cerueau , ou à la Dure-inere,ou au Crane,principalement
lielle eſt accompagnée d'autres accidens:comme ſi la couleur de la playe n'eft rouge
;B mais blafarde, comme chair lauée : laquelle choſe ſe fait à raiſon que la chaleur na
turelle eſt preſque eſteinte, & le pus deuient viſqueux, pource quela chair eſt lique
")
fiée.Puis toſt apres ladite playedeuient aride & feiche, commed'unechair ſaléc, &
©
quelquesfois de couleur plombée & noiraltre,neiertár qualirien ,à cauſe que la cha
at
leurnaturelleeſt pareillemét languide, & quaſi ſuffoquée,quieft ligne de corruption
u

qui ſe faiten l'os ,qui alors ſe fait afpre & éleué ( comme on le trouue lors qu'il eſt
carieux & pourry ) où auparauant eſtoit liſſé & poly , & en fin deuientde couleur
jaunaſtre,puis liuide,quãdileft corrompu dauantage,& entre lesdeuxtables y a ma
tierepurulente& fanieuſe,ce quei'ay veu pluſieurs fois :& alors lon peut prognoſti
quer le patienteſtre en peril & danger de mort : mais ſi ladite fieure procede d'Eryſi
pelas fait ou à faire,le plus ſouuentn'eſt'mortelle. Et pour diſcerner & ſçauoir ſi ladi.
te fieureeſtcauſée de matiere Eryſipelaceuſe ou bilicuſe: c'eſt qu'elle ſera tierce, &
EC qu'elle commenceraauec grand froid ,puisvient la chaleur auec ſueur , & nelaiſſera
IC lepatiétiuſques à la fuppuration ou reſolution de la maciere bilieuſe. Auli lesléures signes mor
C dela playe,& autres parties à l'enuiron ,ſerõçtumcfiées,enſemble coute la face, auec leures dela
S, grande inflammation aux yeux,ayant les malchoires & colgroides& tenduës,nepou - playe.
uanttourner la teſte , ny ouurir la bouche. Ortelle defluxion Eryſipelateuleclten- Pourquoy
1.
gendrée & faite deſangcholerique,ſubtil, chaud & ſec , lequelóccupe communé. l'Eryſipelas
ment la face pour deuxraiſons : la premiere , pour la ſubtilité de l'humeur: l'autre , occupe
1
pourla tenuité & rarité ducuir. Ainlilesaccidensſontplusgrands qued'vnclluxion face.
phlegmoneuſc ,quiſont chaleur , & douleur poignante & mordante, aucc rougeur
tirant ſur le citrin , ou iaunaſtre : parce que chacun humeur donne la ceinture au
cuir, comme auons dic cy-deſſus. Et ſubit qu'on preſle du doigt deſſus, la couleur Gal. 13. de
2
l'éuanouïſt, & toſtretourne. Et pour la curacion , fauc auoir deux intentions: l'vne à la Merh.ch
l'evacuacion,l'autre à la refrigeration & hume&tation. Et ſi l'humeur eſt simplement law.des ou
cholerique,nefaut faigner,mais le purger par remedes qui purgent la cholere,appe -meurscom
$ lez des anciens, Cholagogues.Toutesfoisſi c'eſtoit vn Eryſipelas phegmoneux,fau-tre Nature,
1 droitfaire ſaignée de la veineCephalique, du coſté auquel lemal ſeroit plus grand.
Eepourcefaire appelleras le Medecin , ſi tu es en lieu où on le puiſſe recovurer. Et
D apres leschoſesvniuerſelles faites, il faut appliquer medicamens refrigeratifs & hu
inectatifs, comme Succum folani, ſemperuiui,portulacæ ,lactucæ ,vmbilici veneris,
lenticulæ paluſtris,cucurbitæ :deſquels vſeras ſelon que les pourras recouurer, pour Remedes
į ceqn'iln'eſt neceſſaire les prendre toutes, mais ie les ay inſerées , afin que lon vle des Eryſipeles.
propres anx
vnes ou des autres.Pareillement pourras vſer de Acetoſa ,coctain aqua communiad
m.ij.poſtea piſtetur & colecurper fetaceum ,addendo vnguentiroſaccivci populeo
nisportionem aliquam , & autresſemblables , leſquels feront renouuelcz rouuent,
iuſques à ce que la chaleurquieſt contre Nature, foiceſteinte. Et faut euiter toutes
choſesonctueuſes& olcagineuſes àraiſon que promptemētfenfammét ,& feroient
lemal plusgrand.Puis apresſ'ilelt beſoin, lon vlera de remedes reſolutifs: & icy no.
teras que c'eſt un bon ſigne de guariſon , lors que l'humeur eftietté du dedansaude. 25.11.
Hip. Aph,
6
hors:& au contraire , quand ilreto urnededehors au dedans, c'eſtmaou ais pretage , Eryspela
ainſique l'experience le monſtre.Ce qu'auſli Hipp.a eſcrit.Quand l'os eſt purulent, ab interids
ilvientdes puſtules à la langue, pource qu'il tombe de la ſanie par les trous du palais ribus,oc,
1

352 Ledixieſme Liure ,


ſur laditelangue: & quand elley eſt arreſtée , par ſon acrimonie faicéleuer leſdites A
puſtules : & quand tel accidentaduient,peu de gensen réchapent. C'eſt vn mauuais
ligne, quand le malade vient commeapople &tique,apres auoir eſté frappé : car tel
Hip.auliu.
accident ne monſtre ſeulement l'oseſtre bleſſé ,mais auſſi le cerucau ,lequelſe peut
des playes pourrir & fphaceler : ce qui eſt prouué par Hippocrates diſant, que quand l'oscit ia
de ceſte. purulenc, il naiſt des puſtules à la langue, & le malademeurt n'ayant les ſens entiers:
1 & aux vns ſuruient conuulſion ou ſpaſme à la partie oppoſite du coup: auſſi lon void
communément par experience , qu’apres ceiſpaſme la mort aduient & vn ſeuln'en
réchape : ce que i'ay couſiours veu , ouurant la teſte de ceux qui de cels accidens
mouroient, où i'aycrouué portion de la ſubſtáce ducerueau & desmembranespour
rie & ſphacelée. le veux en cet endroitaduertirleieune Chirurgien, qu'à aucuns les
poulmons fontatrachez contre les coſtes ( comme ſonuentilſc void par l'ouverture
des corps morts) qui fait qu'à cels , lion fait vne contre- ouuercure au Thorax , rien
n'en peut fortir: en ce cas le Chirurgien eſt fruſtré de ſon incétion : pour cela ne faut
pas qu'ildelaiſſe vne autre fois faire telles ouuertures quand il en ſera beſoin : car
telle adherence ne ſe void pas couſiours, mais rarement.
Pourquoy leſpaſme vient à l'oppoſite du coup :
C H 4 P. XI.
4

R la cauſe pourquoy le ſpaſme vient à l'oppoſite du coup , a eſté iuf


ques icy par pluſieurs recherchée , mais non aſſez clairement expli
quée : pource m'a ſemblé bon , de voüer vn chapitre à part à celle que.
ſtion. l’eſtime celaccident prouenir à raiſon dela doulcur de la playe,
& auſſi queleshumeurs & eſprits naturellement courentvers la partic
bleflée: leſquelles deux choſes épuiſeor, feichent & conſument le coſte de la partie
faine, dont puis aprestombeen conuullion. Ce qui fe peut prouuer par Galienau
quatrieſme liure de vſu partium , qui dit que le ſouuerain conducteura conjointles
trois eſpritsen mutuelle connexion ,& infragile cõfederacion par leurs productions, ‫و‬
qui ſont veines,arteres & nerfs: parquoy ſi vn defaut en vnmembre,lesautres pareil. c QUE
lementlenegligent: & parcant la partie demeure languide,& deuienten atrophic,ou 9000
elle femcurt du cout. Et ſi on m'obiecte que Nacurca fait cout noſtre corps double,
à fin que ſivne partie eſtoic bleſſée,l'autre demeuraſt en ſon entier,ie l'accorde. Mais
ic nie qu'elleait fait tous les vaiſſeaux doubles:car il n'y a qu'vne veine pour le nour cole
riſſement de tout le cerueau , & de ſes membranes , qui eſt le Torcular , par laquelle
la partiefeneſtrebleſſée peut épuiſer l’alimée de la dextre, & par cõſequentcauſer la
Grandean- conuulſion pardefauc d'aliment. Or il eſt vray qu’aux parties où les muſcles conge --
notation.
nerez ſont égaux en grandeur , force & nombre , la reſolution d'une partie cauſe :
conuulſion accidentaireà l'autre, mais au cerueau neſe fait ainſi : car les deux par coulei
ties,c'eſt à ſçauoir,dextre & feneſtre font chacune leur office à part,& ne ſ'attendent
l'vnc à l'autre, comme il appert en paralyſie: aucrementil ſ'enfuiuroit qu'icelle , lors
qu'elle eſt vniuerſelle (c'eſtà ſçauoir de lamoitié du corps) apporteroitquant& -loy
conuulfion à la partie oppoſite. Ce quieſt faux, commeon void iournellement par
experience. Parquoy ic conclus ( ſaufmeilleur iugement ) que le ſpaſme qui eſt à D
Opinion de
l'oppoſite du coup,vientpar inanition, & faute d'aliment, & nourriture.Toutesfois
Dalechamps. Dalechamps en la Chirurgie Françoiſe eſt en ceſte opinion : Pour liquider ce doute
(dit-il)faut preſuppoſer ce lignede conuulſion en la partie cătraire,propoſé d'Hip. 1
aduenir , quand pour la grandeur & vehemence de l'inflammacion faire en la parcie
bleſſée, qui ia eſt tournée en gangrene ducerucau , & delesmembranes, aueccom content
mencemér de ſphacele au teſt,le pacientdoit mourir.En celle diſpoſition & ainfico .
dicionnée,eſt necellaire le ſentiment & mouaeméteſtre perdu ,comme nous voyons
aux autres gangrenes ,par l'extin &tion de la chaleur naturelle : & dauantage , par la
grandeur de l'inflammation eſtre tellement bouchez les conduits de l'eſprit animal,
qu'il ne peut deſcendre ou paſſer aux parties inferieures & prochainesdu cerueau
de ce colté là : & quand bien y pourroit deſcendre & paſſer , fi ſeroit il inhabile à
communiquer & porter la vertu du ſentiment & mouuemenc, eſtantinfect & alceré
de la putrefaction aduenuëen la playe . D'où l'enſuit que la partie bleſſée , priuéc hind
de ſentiment, n'eſt prouoquée à ſe retirer pour ſecourre & cbafler de loy ce quiluy
Des Playes en particulier. 353
raiſon les nerfs proredans
i
А pourroit eſtre moleſte,luy demeurant le ſens:& pour ceſte
d'elle , ne ſont auſſi point retirez & affligez de conuulfion : dauantage que tous les
nerfsayans leur origine deceſte parcie , ſonodeſtituez de la preſence & aſſiſtance de .

l'eſpritanimal,commeaeſte declaré : & de la procede la paralyſie des parties ſituées


au coſté de la bleſſée.Car paralyſie ſe fait,ou eſtantle nerf coupé,comeaux grandes trois cauſes
1
playes:ou eſtant le paſſaged'iceluy bouché, cõme en l'apoplexie: ou cſtāt ſa iubſtáce de paralyfien
abbreuuée & mollifiée de quelque humeur ſubcile,ou par quelque grande intempe
1
Ś
rature tellemétoffenſée, qu'elle ne peut receuoir l'affluence & vertu de l'eſpritani
mal. Quant à la partie contraire, & fa conuulſion ,noustenons pour choſe accordée, 1

le ſpaſmc eftre fait ou par repletion, quieneſtendant la ſubſtance des nerfs l'accour
's
C
cit:ou par inanition,quand eſtant conſommée & diſlipée leur humidité naturelle,la
0
propre ſubſtance d'iceux eſt deſeichée & retirée , comme nous voyons vne corde de
luth approchée du feu: ou par ſentimet de quelque vapeur,ou de quelque humidité
ſanieuſe, acre & mordante, ou d'une douleur excelliue, comme il aduienten l'epile
pſie cauſée d'unc exhalation veneneuſe, quidu pied monte au cerucau :aux piqueu
B.
res des nerfs, quand eſtant fermél'orificedela playe , la matiere ſanieuſe y eſt rete
nuë:& aux playes des nerfs quand quelque nerfeſtāc ſeulement à deny coupé,exci
te douleur vchemente: Or nous trouuons en la partie contraire de la bleſſée, deux
decescauſesinſignes: vne matiere ſanieuſe reſudante de la gangrene,acre & cuiſan
fo
te, que Hippocrates au denombrement des accidens mortels pour ſignifier la mali
i
gnité,appeile Ichora,& au liure des Fractures,Dacryon,& non Pyon;dauantage,vne va signification
peur exhalantede la gangrene , puante & infecte, comme d'une charongne pourrie . du mos
le
Cen’eſt donc merueille ſi la partie contraire , eſtantſon ſentiment bon & entier, eſt Ichor.
C
10
offenſée,cant de la matiere ſanieuſe, que de la vapeur infecte, & pour les dechaſſer ſe
je
retire,ſecour,& branle,àquoy s'enſuit la conuulſion des nerfs, quiprennent leur ori
20
gined'icelle,cõmeen l'epilepſie. Amoniugement,voila comment le doicexpliquer
le dire d'Hippocrates & d'Auicenne.Hors l'occaſion d'une playe ainſ mortelle, les
praticiens adnotentquelquesfoisen la partiebleſſée eſtre paralyſie, en l'oppoſite opinionde
conuulfion :quelquesfoisen la bleſſée conuulfion , en la contraire , paralyſie : qucl- route con
il.
с quesfoisen toutesdeux conuulſion ou paralyſie : quelquesfois en chacune d'icelles traire à celle
ſeparémentconuulfion, ou paralyſie ,ſansque l'autre foitoffenſée: mais icy n'eſt le de l'autheur,
-C, lieu de rechercher les cauſes decela. Voila le diſcours de Dalechamps. Annotation
BIS
au Chirurgien ,qu'aux playes du ventre , où il y a playe aux inteſtins,nefaut donner
le
clyſtere aux bleflez, à raiſon que le clyftere ſortiroit par la playedes inteſtins , & de
meureroit en la capacité du ventre, qui ſe pourrit auec le ſang, & ſ'éleuent grandes
la
ventofitez putredineuſes, qui fontenflure ,& tenſion au ventre : & quand telle cho
fcaduicne ,fay prognoſticque le malade bien -toft mourra , ce que i'ay veu pluſieurs
le
1
fois aduenir. Ec principalement quand le malade eſt febricitant , & dic lentir vie
excreme douleuraux teſticules.
11

Sommaire desſignesmortels cy -deſus mentionnez .


CH AP. XII .
ir

15
D T pour retourner à noſtre propos,& te dire tout en ſommaire: de tous les
D
e
accidens fuſdits, tu peux faire prognoſtic de la morc du patient , lors qu'il
perd ſa ratiocination , & n'ayant plus dememoire,parlelansoccaſion,& a
les yeux tenebreux, n'oyantpoint,& ſe veutietterhorsdu lict, ou ne peut
mouvoir, ayant fieure continúë, auec puſtules à la langue , qui meſme luy devieno
feiche& noire, & fa playe aride,ne iettant aucune choſe, ou bien peu , & de couleur
commechair ſalée:ou l'illuy ſuruientapoplexie , plirenelie , ſpaſme, paralyſie, & le
poulsformicant, retention d’vrine , & autres excremens, & filcombe loquenten
fyncope, alorsfaycon prognoſtique,quebien-toftcon patient mourra.Or les ſuſdits
accidens viennent quelquesfois aux premiers iours, & quelquesfois aſſez longtemps
apreslecoup donné. Ecl'ils viennent au commencement, c'eſt quand le cerucau eſt
blcſlé par inciſion,contufion ,compreſſion ou ponction ,ou par commotion que nous
auons parcy- deuant appelé , Ebranlement. Et quand ils viennent quelque temps
apres, c'eſt lors qu'il ſuruientinflammation, & que le ſang ſe putrefie , & que l'os le
faitpurulent,& par conſequentapoſteme au cerueau.

/
Le dixieſme Liure ,
35+

Playe au D'abondant noterez que fouuentesfois vne playe faire au Crane , cauſe vn apoſte. A
Crane fait meau foye. Ce que Robert Greaume , Regent en la faculeé de Medecine , & Bi
apoſteme
noſque, Chirurgien iuré à Paris , & moy , auons veu puis n’agueresen trois patiens .
Au foye. Etfi cu m'obiectes querelle apoſtemeeſtoic ia concreée auparauant le coup don
Hiſtoire.
né : ie reſpons que les patiens auparauanceſtre bleſſez , auoient vneviue & naturelle
Cauſes des couleur ſans aucun ſigne d'eſtre hepatiques , & eſtoient bien habituez , faiſans toutes
apoſtemes leurs operations: ce que tu pourras voir par experience y prenant garde , commei'ay
qui ſe fone fait. La cauſe de ce peut eſtre que nacure ſe ſentant offenſée par la grande vehemen
au foye. ce du coup, collige & retire à fon ſecours, ſes forces & vercus decoutes les parties du

corps ( qui ſont le ſang & les eſprits ) vers le cæur & le foye: ainſi que voyonsen peur
& crainte , & adoncques faic inflammation au foye : ainſi qu'il ſe fait en quelque
partie , lors que le ſang coule en plus grande quantité qu'iln'eſtbeſoin pour la nour
riture :dont le foye ayanț receu plus de ſang & eſprits, leſquels ne peuuent eſtre
deuëmenc euentilez , pour l'exiguicé & anguftie ( c'eſt à dire, pour la peciteſſe 86
eſtroiſſeur de ſes vaiſſeaux) alors le fait ficure & apoſteme phlegmoneuſe en ſa pro
pre ſubſtance , dont la mort ſ'enſuit. Ou ſi tu aimes mieux dire auec Monſieur de la B

Corde , que nature ſuccombant ſous le faix du mal , vient à renuoyer vne partie de
ceſte matiere purulentc aucc le moins d'incommodité qu'il ſe peut au foye par les
veines : 8c qu'ainſi ſoit , tous ceux auſquels vne apoſteme ſe fait au foye, le cerueau
Corn.Cell. bleſſé, meurent. La chair aiſément ſe regerere en tous les endroits de la teſte, fors
li.8. cha.4 . la partie du front,quieſt vn peu au deſſus du milieu des ſourcils : car en ce lieu-là à
peine y peut - elle croiſtre, de ſorte que toute la vie du malade , l'ulcere y demeure ,
parce qu'en tel endroit , il y a vne incercauicé en l'os , pleine d'air , qui le rend aux
os cribleux du nez , lequel air cmpeſche la conſolidation dudit vlcere , & en outre,
l'os eſt fi épais & denſe, qu'il ne peut ſuinter aſſez d'aliment pour la regeneration de
la chair . Adiouſté que du nez , & des yeux eſt enuoyée en l'vlcere grande quantité
d'excremens , qui empeſchent que l'vlcere ne ſoit menée à cicatrice, dontaduient
que lors qu'on fait ſerrer le nez & la bouche du malade, & qu'il ſ'efforce à ſouffler,
l'air forc du trou de l'vlcere en ſigrande quantité, qu'il peut eſteindre vnc bien grof
Hiſtoire. ſe chandelle . Ce que ie proteſte auoir veuen vn quidam quci'auois trepané, parce C

que l'os Coronal en cet endroit auoit eſté rompu & enfoncé , vn peu au deſſus del
dites cauicez .

Les fignes de preſages de benne guariſon .

CHAP. XIII .

V contraire , les ſignes & preſages de bonneguariſon , ſontlors que le


patient n'a point defieure , raciocine, mange & boit de bon apperit,
dort , aſſelle bien , & que la playe eſt vermeille , non aride & ſeiche,
iettant pus lociable , & l'os gardant ſa couleur naturelle , & que la
Les fractures Dure - mere a ſon mouuement libre. Toutesfoistu noteras que les an

fode
ntlahor
teftene
s de ciens onteſcrit ( ce qu'on void ſouuent par experience ) que les fra &tures duCrane
120
peril de mort ne ſont hors du peril, iuſques à centiours apres la bleſſure faite : partant , fay auec D
iuſques à cene ton patient bon guet, tant en ſon boire , măger, repos , coit, & autres choſes. Écauſi 6.2.01
jours. faut qu'il ſe garde du grand froid , pour le peril& danger de mort , qu'on a veu en ter

telles playesſouuentesfois arriuer pour tels accidens,


apres'la guariſon faite deſdices
fractures. Oucre -plus , i’ay à ce declarer que le callus,foulde, ou vnion des os du Cra
ne , ſe fait ordinairement en quarante ou cinquante iours : toutesfois on n'en peut
donner vraye certitude pour la diuerſité des temperamens & âges , non plus que des
fractures des autres parties,come nous diros cy - apres . Carauxieunes ſe faitpluſtoſt,
aux vieils plus tard. Ette ſuffiſe des preſages. Maintenant fauc parler de la cure ge mui
nerale , puis de la ſpeciale: qui ſe fera le plusſuccinctement, 8c le plus clair qu'ilmc
ſera poſſible. Laquelle choſc ſe fera premierement en ordonnanc le regime ſur les
fix choſes non naturelles. parei.

D# AGU
A
Des Playes en particulier. 355
A
Duregime vniuerſelqu'ilfuutordonner aux playes & fractures du Crane,
aux accidensd'icelles.

CHAPITRE XIIII .

T premierement fauc tenir le patient en vn air cemperé, qui ſe fera par Moyens d'ef
art , s'il n'eſt cel par nature : comme ſi c'eſt en Hyuer , faut faire bon fcu chauffer
en la chambre du malade , les feneſtres& portes bien cloſes, ćuitant la l'air.
fumée,depeur de prouoquer la ſternutation & autres accidens : & aufli
alors que tu craiceras & penſeras le malade , te faut auoir vne baſlinoire
pleine de braiſe, ou vne pelle de fer, laquelle ſera tant eſchauffée qu'elle devienne
souge, & qu’vo ſeruiteur la cienne ſur la ceſte du malade, de celle hauteur que le pas
tienten ſence aucunement la chaleur : à fin que par la reuerberation d'icelle , l'air
B ambient , c'eſt à dire,qui eſt à l'eotour, ſoit corrige.,Carlefroid ( comme dic Hippo Hipp.liure si
crates) et ennemy du cerveau ,des os, & de tous les nerfs, & generalement de toute aph. 18.
Ć noſtre nature , ce que nous auons dit. Auſlieft-il contraire aux vlceres en leichaneles
ES
cxcremens , qui puis apres mineot l'vlcere, empeſchane la ſuppuration : & pour - ce
11
que ceſte paſcie n’a accouſtumé d'eſtre deſcouuerte de la peau :& meſme, comme dit
Galien , il ſe faur donner garde de refroidir le cerueau quand on trepane , & apres Calien 8. de
cſtrecrepané: car c'eſt le plus grand mal qui peut aduenir aumalade quia la teſtelage des
es rompuë.Or Gil'air eſtoit plus chaud que le cerueau,il ne le refroidiroic pas:& encores part,chap.2 .
X
queloyons enEſté ,& que l'air ſuit exceſſivement chaud ,le cerueau delcouuert en eſt
e, refroidy,& demādelubit eſtre elchauffé .Voila ce que Galien nous en a laiſſé par eſa
crit,& ne ſe faut eſmerueiller ſi pluſieurs meurent de playes faites à la ceſte ,parfaute
d'eſtre à couuerc .Pareillemét la trop grande chaleur ſeramoderée en rafraiſchiſſanc
.:
lachambre auec cau froide, ou oxycrat, rameaux de ſaulx, fucilles de vignes , & au
Ctres choſes ſeinblables. Semblablemétne ſera ledic patient expoſé en grande clairté,
to
principalement iuſques à ce que les accidens ſoyent paſſez : à cauſe qu'icelle diſlipe
& reſoulc les eſprits , & augmencela douleur,fićure & autres accidens.Ilfaut auſſi du son boire .
couc ćuiter le vin : ce que Hipp .enſeigne : mais en lieu de vin,pourra boire cau d'or- Hipp. au liv.
gc,ou caucuitre , en laquelle on mettra mie de pain , que nous appellons cau panée , Devul.ca .
oubien hippocras d'eau ,ou eau bouillie , puis mellée auec ſyrop roſat, violac ,ou ace
teux,ouautre breuuage,appellé Porus diuinus, lequel eſt fait d'eau cuice ſucrée ,& ius
delimon ou citron , deſquels tu pourras bailler ſelon le gout du patient , & que ſon
clomach pourra bien vſer. Ec decels breuvages doic vſer le patient , iuſques à ce que Eſroite diese
]le
les grands accidens ſoyent paſſez, qui ſont communément & le plus ſouvent dans le principalle
quatorzieſıne iour. Son manger ſera panade , orge mundé , & non amandé : pource ment iuſques
h quelesamandes cauſent douleur de reſte , à raiſon qu'elles ſont vaporeuſese aufli'il son jour.:
a* 14.manger
pourra vſerde prunes de Damas cuitres , paflules, raiſins de damas confits aucc vn
lo
peu de ſuccre & canelle(laquelle eſt finguliere, pource qu'elle conforte l'eſtomach ,
C
& refioüit leseſprics) & parfois d'un petit poulet, pigeonncau , veau , chéureau , lé
uraux,petitsoyſeaux des champs, comme faiſans,merles, courtres , perdris , griues ,
0 alouettes, & autres bonnes viandes boüillies auec lai&tuës,pourpier, ozeille ,bourro
11
che,bugloſe,cichorée,endiue, & ſemblables,Aullipar fois pourrontleſdices viandes
aucunes eſtreroſties:& peut ledit malade vlerauecicelles,de verjus,drenges,citrós,
Dlimons, grenades aigres, jusd'ozeille ,les diuerſifiant ſelon legouſt & la puiſſance de
labourle du patiét.Età celuyquivoudra máger du poiſſon,truites,loches,brochets,
nourris en cau claire & non limoneuſe , & autres ſemblables: pareillement raifins &
prunes de Damas,ceriſesaigres , pallules: mais qu'ils'abftiennede choux, & de tous
legumages , parce qu'ils cauſenedouleurde reſte. Et apres le paſt , vſera de dragée Doublefa
commune,ou anis,fenoil,coriandeconfits, conſerues de roſes, ou corignat , à fin de cultéducosi
garderquelesvapeurs & fumées quimontent de l'eſtomach à la ceſte, ne bléſent legnar.
cerueau: pareillement le cotignacprisdevant le paſt, aftraint le ventre à cauſequ'il
cftftyptique & aſtringent,& partátlerre l'eſtomach:mais prins apres le paſt, le laſche:
àraiſonauſſiqu'il le reſſerre , aftraint, & contraint les viandes de ſortir hors.Sic'eſt vn Hip.aph.s3.
enfant,luy conuiendra donner petit & ſouventà manger :pource que les ieunes ne 14 lissode
peuvent porter la faim, commelesplus âgez,à raiſon qu'ils ont vne grandechaleur:
Hh
356 Le dixieſme liure ,
parquoy ils ontbeſoin de grande nourriture , autrement leurs corps ſe conſomme. A
rojent : au contraire,levieila ſa chaleur naturelle plusimbecile,àcauſc dequoy il por
te mieux la faim que le ieune. Et par ſemblable raiſon en temps d'Hyuer,faucentou
Hip.aph.rs. tes âges donner plus
d'alimens, qu'en Eſté: pource que la chaleur nacurelle eſt plus
lim. i.vens" grandeen Hyuer qu'cn autres temps , aintiqu'il eſt prounćpar Hipp . Et apres le 14.
tres hyeme, iour (à ſçauoir , s'il n'y a rien qui repugne , comme fiéure & autresaccidens) on peut
C. donner vn peu de vin , & augmenter ſon manger peu à peu , ſelon qu'il ſera beſoin ,
Du dormir. prenant touſiours indicacion de la vertu & couſtume du malade.Il doit éuiter le dor. !

mir de iour,s'il eſt poſſible,ſi ce n'eſt bien peu , pourueu que la Dure-mere, ou lecer
ucau ne loic affligé de phlegmon : car en cellenecellité,il ſeroit meilleur faire duiour
la nuit , & principalementdela premiere partie duiour, à ſçauoir , de fix heures du
maciniuſqu'à dıx : pource qu'en ceſte partie duiour, comme auſſi au printemps , le
ſang domine au corps ,comme dit Hipp.au commencement du 2.des Epidemies.Or
c'elt choſe toute notoire, que par les veilles, le ſang eſt eſpandu au dehors, ſuperficie
& extremité du corps , comme au contraire parle dormir , il ſe retire au dedans vers
les parties nobles: parquoy ſi auec ce que parle benefice du Soleilleuant le ſang fe B
Icue & elpand en l'habitude du corps , il venoir encore à s'y eſpandre dauãtage par les
veilles, l'inflammation & phlegmon ſe redoubleroit en la meninge & cerueau . Par
quoy il elt tres - expedient par le dormir,brider & retirerle cours du ſang en telle par
cic duiour , en cas d'inflammation, ce l'habitude & parties externes du corps.
Du veiller. Leveiller pareillement doit eſtre moderé : car le trop veiller corrompe la bonne
temperature du cerucau , & de route l'habitude du corps : pource qu'auſſi excite 11
cruditez , douleur , pelanteur de ceftc, & rend les playes arides , ſeiches, & malignes.
Mais file pacient ne peurdormir , à cauſe de l'inflammation des membranes du cerem
ucau , Galien commande au creizieſme de la Methode , faire des perfufions, lini
mens,vnctions dans lesnarines & au fronc, ou és oreilles , de choſes refrigeratiues :
à cauſe qu'elles endorment & rendent ſtupides les membranes & lecerueau,quiſont DIA

Decoction exceſſivement eſchauffez. Pour ceſte raiſon ,on appliquera aux temples, vnguentum
dormitiue. populeum, ou rolatum , auec oxyrhodinam , ou oxycrat. Aulli luy fautfaire ſentir
vne cſponge trempée en vnc decoction de pauor blanc ou noir , auec eſcorce de с
mandragore, ſemencede hyoſcyame, laictuë, pourpier, plantin, morelle,ou autres.
Semblablement on luy pourra faire vn potage ou vnorge mundé, auquel l'onmet abit
tra vne emulſion de ſemence papaueris albi:ou bien prendre 3.j.vel 3 j.ß. ſyrupi pa ...‫ܘ‬
pau.auec Zi) . aquæ lactucæ : & faut que ledic pacient vie de telles choſes quatreheu
vtilité du res apres loupper,à fin de luy prouoquer le dormir. Lequel dormir ayde grandement
dormir.
à faire la digeſtion . Il reſtaure la ſubſtance du corps & eſprits qui font dillipez parle ef
trop veiller. Dauantage, appaiſe les douleurs : il fortific ceuxqui ont laffitude: pa
reillement fait oublier lescourroux & criſteſſes, & corrige leiugement depraué:par
quoy eſtb :loin au Chirurgien prouoquer le dormir au malade lors qu'il luy eſt neccl
ſaire.Pareillement ſi le pacienteltreplet,ſoit faite éuacuation par laignée, ou purga
duisles con-tion
chant for & grande diette,ſelon l'aduis & conſeil du docteMedecin.Ecen cécendroit no Jod
tespurgatios. teras,qu'on doit éuicer les medecines fortes auſdices playes, principalement au com irke
mencement, de peurd'enflaimer les humeurs , & faire commotion à toutes les fa
cultez : qui liroir cauſe d'induire inflammacion, douleur, fieure, d'autres accidens :
ce quei'ay veu aduenir fouuentesfois. Et quant auſi à la ſaignée (ſelon Galien , au 4 :
Saignée re- de la Methode)nedoit eſtre ſeulement faite pourl'abondance du ſang,mais aulli D
uulliue.
pour la grandeur de la maladie preſente ou future: à fin de diuertir & faire remulſion
pour tirer la fuxion , laquelle commence aux parties contraires : & celle qui eſt ja
coniointe, doit eſtre vacuéc de la partie meſme, ou la deriuer de la partieproche.
Exemple pour faire la reuullion: Sila partie dextre de la celteelt bleſſée,la ſaignée ſe
fera de la veine Cephalique du bras droic,s'il n'y auoit grande plenitude:& en dcfaut
de la Cephalique, faut ouurirla Mediane : & lion nepeut trouuer la Meliane, ſoit
prio ſela Baſilique : & li la bleſſeure eſt du coſté ſeneſtre,lera fait le ſemblable du bras
ſeneſtre, pluſtoſt qu'à l'oppoſite , à fin que plusayſeinent on arcire & delcharge la
par la rectitude des filamens : & 'en tirant íe fang, faut avoir eſgard ſur tou
Il n'eſt necef partie,
faire au Chi tes choſes à la vercu du patient , qui ſe fera en touchantion pouls ( li ! e Medecin n'eſt
rurgien de preſent) pource,commeditGalien au liure de sanguinis mißione, qu'il monſtre infail
toucher le lıblement la vçrtu & force du pasient. Parquoy faucauoir cſgarden ſa mutation &
Des Playes en particulier. 357
A inégalité: & fi cu le trouues pecic & lent auecques vne petice ſueur qui commence à poulsau ma
venirau front,mal de cæur,comme volonté de vomir,& bien ſouuent d'alfeller,auccladecinde,fileme
n'ef
baaillemens,& mutation de couleur,ayant les léures palles : ſi celles
choſes apparoiſ
fent,fubie te fautclorrc laveine,de peurquetuneciresl'ameaueciesāg:& alorsdon preſent.
neras au malade vnpeu de pain trempé en vin,& luy frotteras les cemples& le nez de
fort vinaigre,& le feras couchertoucplacà la renuerſe.Etquant au ſecod poinct ,qui saignée vas
eſt de la fluxionjafaice& arreſtée enla partie , elle doit eſtre vacuée par la partie suasine.
meſme, ou eſtre deriuée par la proche. La parcie ſera deſchargée de la Auxion con
iointe & arreſtée en la partic,faiſantdesſcarifications aux léures de la playe , ou par
applicacion de ſangſuës bien preparées : la maciere ſera deriuée en ouurant les veines saignéederde
proches de la playe,àſçauoir, dela veinePuppe,ou celle du milieu du frot,ou des vei- uasine.
nes& artereslesplusapparentes des temples,ou cellesdedeffousla langue. Pareille
ment ſeront faices frictions& applicacions deventouſes ſur les eſpaules,ſoitauecſca.
Ĉ
rification ou ſans ſcarification,ſelon la neceſſité. Outre plus, noteras quependantla
B coration, fouuentesfois il conuiendra faire des fri&tionsaſſezlongues& fortes, auec
ES
linges vn peuaſpres,vniuerſellementpar coucle corps,excepté la ceſte:leſquellesſer
1.
uironc,canc pour faire reuulſion des matieres qui pourroient monter en hautſper hali.
tum) c'eſt à dire par exhalation,ou inſenſible tranſpiration de cercaines vapeurs con
tenuës entre cuir & chair,leſquelles s'augmenteni fort en noſtre corps , & principa
lement par faute de faire l'exercice accoutumé.D'abondantie ne veux outre paſſer,
100
queiene recice de la ſaignée ceſte hiſtoire digne au Chirurgien,& à tous d'eſtre bien
notée. C'eſt que cesiours paſſez,fus appellé auxfauxbourgs S. Germain des prez , à Hiſtoire me.
l'image S. Michel,au logis du fire leanMaciau,pour viſicer& medicamenter vn ieu- morable de
ne homme de monſieur Douradour,âgéde vinge-hui & ans ou enuiron,& de tempe la faignée.
rature ſanguine, l'vn des maiſtres d'hoſtel deMadamel'AdmiralleBrió: lequel eſtoit
combé la teſte ſur vne pierre , à l'endroit de l'os parietal partie ſeneſtre, & au moyen
lo
du coup, s'eſtoit fait vocplaye conceuſe, ſanstoutesfois aucunefrađure d'os : par le
moyen delaquellele 7.jour luy ſuruint vne fićure continuë & reſuerie ,auec grande
0
Cinflammation phlegmoncuſe, cauſée par la leſion du Pericranc accompagnée d'une
tumeurmerueilleuſe de toute la teſte & le co ),ayantle viſage grandement defiguré,
ne pouuant voir ny parler , & moins aualler aucunes choſes ſ, i elles n'eſtoientbien
liquides. Subic, voyant cels accidens, combien que le iour de deuant qui eſtoit le 8.
jourdeſableſſeure , il cufteſté ſaigné par Germain Agace , maiſtre Barbier audit S.
Germain,lequelluy auoic tiré quatre paletces de fang : & voyant les accidens li grāds,
la force & vertu du patient bonne, reiteray la ſaignée , & luy tiray quatorze pa
leccespourceſtefois:puis le iour ſuiuant,voyantque la fiéure nyaucuns des accidens
fo nes’cltoientnullemencdiminuez,mais pluſtoſt eſtoiêc augmentez ,reiterclaſaignée,
2.
&luy tire de rechef quatre palettes, quieſtoicnt vingt-deux: & le lendemain voyanc
encores les accidensn'eſtre diminuez , fus encores d'aduis le relaigner , ce quen'o.
no
fay faire ſeul, veu la grande euacuation qu'on auoitja faite. Et alors priay Monſieur
Violene, Docteurregenten la faculté de Medecine, homme do&te & de boniuge
for
ment,devoir le patient. Lequel ſubic luy ayant touché le pouls , le trouuant fortro
buſte,& voyantpareillementà l'æil,la grande tumeur, l'impecuoſité & vehemence
del’inflammation ,fuc d'aduis que promptementfuſt reſaigné: & luy ayant dit que
14 ,
ja on avoittiré vingt-deux palecies, m'vla de ces mots : Efto, qu’on luyen euſt tiré
12:21
dauantage, fi elt ce qu'illuy en fautencores tirer :accendu queles deux indications Cations
Deux indio
de la
D principales qui nous indiquencà faire la ſaignéc, font preſentes : à ſçauoir la gran ſaignée.
'12 deurde lamaladic,& la force & vertu du patient. Adoncfus bien ioyeux ,& foudain les palettes
.;lc
luy cn tirayencoretrois palettes en lapreſence : & luy en voulois cirer dauantage ,ce de Parispen
qu'il remità l'apreſdiſnée, où ic luy en retire encore deux , qui ſont vingt-ſept palec- went tenir
tes,quifurent tirées audit patiencen quatre iours ſuivans. Etlanui& ſuivante le pa- trovoncesco
Dii
ras
ticntrepoſa fort bien : & le lendemain le crouuay ſans fićure, la tumeur grandement plus.
like
diminućc, l'inflammation preſque toute eſteinte, horſmisles paupiercs ſuperieures
des yeux, & lemollec desoreilles ,leſquels endroits s'apoſtumerent , & ietterentaflez
come
grande quantité de bouë . Ec proceſte qu'il fut entieremétguary ,graces àDieu ,par les
ilo
remcdes:qui ſans la benedi&tion d'iceluy ,font du touc inutiles.Ori'ay bien voulure
$
citertelle hiſtoire ,àfin que leicuneChirurgić ne ſoit timide à tirer dufang aux gran .
des inflammations : pourucu que principalement la force & vertu du patient ſoic
Hh ij
e
58
3gra
Le dixieſm liure ,
nde : ie dy grande , parce qu'ily a des perſonnes que ſi on leur auoic ciré croispa- A
Aux playes lettes de fang , on ſeroitquelquesfois cauſe de leur oſter la vie. Et pour retourner à
de pe fantnoſtre propos, il faut que le malade éuite l'acte venerien , non ſeulement pendant
euiter l'acte
que la playe n'eſt encores conſolidée , mais long -temps apres , pource qu'en petite
venerien . quantité de ſemence,eſt contenu grande quantité d'eſprics: & qu'vne grande portion
de ladice ſemence procededucerueau , qui eſt cauſe de debiliter les vercus, & prin
cipalement la faculté animale :dont grands accidens , & ſouuent mort prochaine
aduient par cel acte à ceux qui ont playes àla teſte : ce que'ie puis atteſter auoir veu
ſouuentaduenir en bien petites playes de teſte, cocores que la playe fuſt du tout blay
Des affectiosconſolidée . Semblablement leChirurgien ne doit meſpriſer les affections de l'ame,
de l'ame. pource qu'elles cauſent grands mouuemens & mutations au corps , à cauſe qu'elles
dilatentou comprimenclecæur, & en ce faiſant les eſprits fe reſoluent , ou aftrai
gnent , & ſuffoquent : ces paſſions foncioye, amour , clperance , ire, triſteffe, crainte, fun
& autres : toutes leſquelles doiuent eſtre corrigées par leurs contraires .
Dauantage , faut que le malade ſoit en vn lieu derepos,& hors de grand bruit , s'il B etc
Reposo eſt pollible ,comme loin de cloches ,non pres demareſchal,tonnelier ,malerier ,armu
rier, paſſages de charettes , & leurs ſemblables , pource que le bruic luy augmente la
Hiſtoire dela douleur , la fiévre, & autres mauuais accidens . Ecme ſouvient quand i’eſtois dernie 4

neceßité d'vn rementauchaſteau de Hedin , qu'à l'heure qu'on faiſoit la batterie, le bruit & reten 2013

ciffement de l'artillerie cauſoir aux paciens yne douleur extreme , & principalement 1012!

à ceux qui eſtoient bleſſez à la teſte : car ils diſoient qu'il leur ſembloit, qu'autant de
quoy . coups de canon qu'on tiroir , qu’on icur donnoirautant de coups de baſton ſur leurs
playes : & meſmement leur ſuruenoit flux de ſang par icelies , & faiſoient grands
pleurs & lamencations :de ſorte que la douleur,fiéure , & autres accidens, eſtoient par
telle vehemence grandement augmentez , & la mort accelerée.Ecce ſuffiſe du regi
me vniuerſel : maintenant faut declarer la cure particuliere felon qu'aucuns des an
ciens ont eſerit, & aulli ſelon ce quei'ay experimenté par pluſieurs années .
Delacure particuliere,& premierēmentdes plagesdu cuirmuſculeux. CHA P. XV.
C
T pour la cure particuliere , nous commencerons à vne playe ſim 2013

ple,laquelle pour ſa cure n'a qu'un ſeul & ſimpleſcope, qui eſt vnió : .
Gal. 4.dela
Methode. carſielle ne penetre iuſques au crane , elle eſt penſée & curée com
me celles des autres parties de noſtre corps : mais ſi elle eſt compo
ſée ,autant qu'il y aura de complications,autant faudra -il qu'il y ayc
d'indications . Ec en icelles faut garder l'ordre ,l'vrgent,& la cauſe. པའ
Donc ſi la playe eſt ſimple & ſuperficielle ,faut premieremencraſer
le poil d'alentour elle ,& appliquer vnmedicamét, fait cum albuminc oui, & bolo ar.
menico & aloë : & le lendemain appliquer vne emplaſtre de lanua ou Gracia Dei,&la
continuer iuſqu'à la parfaite vnion de la playe : mais ſi la playe eſt profonde iuſqu'au
Pericrane ,on ne peutfaillir au ſecond appareil , à mettre dans icelle vn digeſtif , faic
cum tcrebenchina Veneta ,vitellis ouorum ,oleo roſaceo, & tantillo croci : & en ſera
continuéiuſqu'à ceque la playe ietcera ſanie: & alors ſera adiouſté audit digeſtif
melroſarum , & farina hordei.Puis apres ſeront appliquez autres medicamens, auſ
quels n'entrera aucune huile ,ny autre choſe vn & ucuſe, comme ceſtuy 2.tereb. Ve
Medi came nt netæ Z. ij.fyrupi roſati Z.).pul.aloës ,myrrhæ & maſtich.añ.3.B.incorporentur fimul, D
epulorique, & fiatvnguentum : duquelfaudra vſer iuſqu'à la procrcation de la chair . Puis pour
oucicatriza-faire cicatrice, ſera appliqué la pouldre qui s'enfuit. 2. aluminis combuſti ,corticis
rif
granatorum combuſtorum an.z:j.miſccátur fimul, & fiat puluis.Ec ſi la playe eſtoitſi
grande qu'il fuſt beſoin faire aucun poin &t d'aiguille , ſeront faits en telnombre qu'il
Hiſoire ſera beſoin.Comme ie fis à vn ſoldat quieſtoit dans le chaſteau de Hedin , vn peu de UVC
d'unſoldat uant le ſiege dernier ,qui beſchoir en terre auec pluſieurs autres ,pourla porter ſur les
quifurbleſſérampars , ſur aucuns deſquelscomba vnegrande quantité de ladite terre, qui en é
auchaſtean couffa la plus grande partie : ledit ſoldat fuc ciré de dellous, & eut tout le cuir muſ
Hedin culeux inciſé,& deprimé iuſques au pericrane ,commençantſa playedeut doiges au
deſſus du ſommet de la teſte , & eſtoit renuerſé ſur le viſage ce quifaifoit grandehor
reuràregarder.Et l'ayant veu, fis appeller Charles Lambert, Chiturgied n e defunct
monſicur le MareſchalDuc deBouillon,pour m'ayderà le penſer:donc l'ordre fut tel.
Des Playes en particulier. 359
A Te lauay ſa playe de vinvn peu tiede,tantpour oſter leſang coaĝulé,que la terre quiy
eſtoit: puisfut icelle biē eſſuyée aueclingemollet & delié.Ecluyappliquay ſur coute
fadire playe terebentinedeVeniſe,mellée auec un peu d'eau de vie,en laquelle auoit
eſté difoult lang de Dragon,aloės,& poudre de maſtic: & apres luy réueríay & remis
Jedit cuiren ſon lieu naturel,& luy fispluſieurspoinêts d'aiguillepeu ferrez,pouréui.Chefe moltes
ter augmentation de douleur, & inflammation, qui ſe fait principalementautemps poinētsd'ai
quelalanie ſe fait, pour tenirioincesles parties quieſtoienediſtances& ſeparées,& guilles.
garder l'alceration de l'air,lequel ouilt grandementà celles playes,commenous auós
dic. Auſſi luy furentmiſes destentes aſſez longues & platres , auxparties inferieures
de la playe,tantd'un coſtéqued'autre,pour donnerilluëà la ſanie.Et par deſſus cou
te lateſte luy fut appliquévn cataplaſme tel que s'éſuit.2.farinæ hordei,& fabar.añ.
3 vj.oleiroſa.Z.iij. aceti quant.ſuff.fiat cataplaſ.ad formá pultis:lequelavertu defic
cative,refrigeratiuc, & repercuſſive :auſli de leder la douleur,eſtácher le flux de ſang,
& éuiter inflammation : & luy eſtoic renouuellé ſouuent, de peurqu'eſtant deſfeiché
B les farines ne vinſentà clorreles pores ſerendás crop emplaſtriques, & par conſequét
ne permiſſent qu'il ſe filtaucune exhalation, & reſolucion des vapeurs contenuesen
2 la partie.Et audic ſoldar ne luy fut faic ſaignée,à raiſon qu'il auoit eu grád Aux de sāg,
principalement par cercaines arceres quiſontaux temples:& eſtant bien aduerty que
l'ennemy nous venoit coſt aſlieger , luy conſeillay de ſe retirer à Abbeville, à fin qu'il
ot fuſtmieuxtraitté, ce qu'il fit.Ecdepuis vous puis bien afleurer, l'auoir veuaudit Ab
beuille,dutout guary, lors que ie retournay de priſon d'entre les mains des ennemis.
ITS
Mais ſi la playe eſtoit faite parmorſure de beſte, il la faudroic traicer par autrema
niere. Ce que ie te veux bien en cérendroit auſſi demõltrer par l'hiſtoire qui s'enſuit.
-21 Voiour eſtās les Lyons du deffun & Roy Henry en ceſte villeaux Tournelles,comme nefille
Hiſtoiremorſe
d'v
pluſieurs les alloient voir, il aduint qu'vn d'iceux ſe deſtacha & ieita ſa griffe ſur vne d'un Lyon .
filleâgée de 12 ans ou enuiron, & l'accerra: ce fait,engoula lateſte, & auec les dents
luy ficpluſieurs playes, ſans toutesfois luy faire aucune fracture aux os. Ec eſt vray
Semblable qu'il l’euſt deuorée n'euſteſté que le mailtre deſdits Lyons luy oſtá celte
C pauurefilled'entrelesdents & les griffes.En céiendroit ſetrouva vn nomméRolád
Claret,mailtre Barbier Chirurgien à Paris,qui penſa & medicamenta ladite fille. Ec
11 quelques iours apres fus mandé pour la viſiter, laquelle crouuay febricitante , auec
LIC grande tumeur&infamation de toute la teſte:enlemble d'vne eſpaule, & du thorax,
principalement aux endroits où les dents & griffes dudic Lyon auoient entré : & e
ftoient lesléures deſdites playes liuides,& d'icelles ſorroicmatiere ſereuſe,virulence,
216 acre,& fort fæcidc,& quali intolerable à ſentir ,ainti que d'vne charogne, de couleur
noire & verdoyante : & diſoit ladite fille ſentir grandes douleurs pongiciues &mor
lat dantes. Voyanc tels accidens, il me vint promptement en memoire que les anciens Toutes wor

Grande auoientlaiſſé
elles pareſcrir,que toutespicqucures
faites d'hommes)eſtoient &morfures
veneneules , les vnes de beſtes(voire
plus,lesautres moins: & fullent- fureser depica
partant queures
a1
ic conclus qu'il falloicauoir égard à l'impreſſion du venin delaiſſé, tant par les dents beſtes, font
que par lesgriffes dudit Lyon, & qu'ilcõucnoit appliquer choſes qui eullenc faculté veneneules. ]
12
& puiſſanced'obeundre cous venins: & partanc on luy fic pluſieurs ſcarifications au
fuf
tourdeſes playes, & y furentappliquées desſangſuës,pour tirer le venin dehors, &
. deſchargerles parties enflammées:& ſubitluy fucfaicablution d'egyptiac,mithridac
& theriaque,auec vn petit d'eau de vie,ainſi qu'il s'enfuit,àſçauoir,23.michridat.zj.
ch
theriacæ veter.3 ij.xgypt.Z.B.diffoluantur omnia cum aquavitæ , & carduibenedi
Dåi : & luyen furentlauces & fomentées coutes ſes playes. Etaux medicamens qu'on
r/
appliquoit tant dedans ſes playes que dehors , eſtoic mis deſdits theriaque & mithri
il
dat:pareillementluyen furdonne parl'eſpace de quelques iours à boire avec conſer
ue deroſes & bugloſe, diſſoule danseau depetite ozeille & chardon beniſt, pour la
C
corroboracion du cæur,afin qu'il ne fuſt infcêté des vapeurs malignes. Pareillement
les
e
luy futappliquéſur laregion ducæur tel epitheme. 22.a quæ rofarum & nenupharis
il
añ.3.iij.aceriſcilliticiz.j.corallorum & fantallorum alborum & rubrorú , rofarum
rubrarum ,pul.ſpodij,añ.3.j.mithridatij,theriacæ ,an.z.ij.forum cordialiuin pulveri.
fatorum p.ij.croci z j.ditſolue omnia fimul.fiat epithema, quod fuperponacur cordi,
11
cum panno coccinco aut ſpongia. Ec eſtoit cedic remederenouuelle louuēt : & vous
puis aſſeurer,que dés la premiere fois que nous euſines fait relsremedes, la douleur
1. & inflammacion,auecalitresmauuais accidens,commenceront à diminuer, & depuis
Hh iij
360 Le dixieſme liure ,
fucguarie: reſté, queplusde deux ans apres, au lieu qu'elle ſouloit eſtre graſſe & en A
bonpoinct,demeura fort maigre &extenuée decousles membres,mais àpreſentelle
ſeporte bien. Ori'ay bien voulu recicer celle hiſtoire au ieunc Chirurgien, à fin qu'il
cienne en memoire , que les playes faites par picqueures & mortures de beltes, de
mandent autre cure que les autres faices par autres cauſes.
Ormaincenāc il nous faut retourner aux autres diſpoſicions,commeſi c'eſt vn coup
orbe qui aic cauſé contuſion ſans playe : alors ayát rázé tout le poil (ce qu'il faut tout
iours faire,à fin de cognoiſtre micuxlemal ,& queles remedes puiſſentpareillement
mieux proficer) pour le premier appareil on doitvſer de repercuſſifs, côme d'oxyrho
dinum ,ou tel quis'enſuit. 2. olei roſati3. iij.albumina ouorum numeroij. pulueris
nucis cupreſſi,balauſt.aluminisrochæ ,roſarum rubrarum ań 3.j.incorporétur ſimul,
fiat medicainentum ad vſum di&um. Quau licu d'iceluy , on peut appliquer le cara
plaſme fait de farine d’orge,deféues & d'oxycrat,& huile roſat,cy.deflusécric,ou au.
tres ſemblables:leſquels remedes ſe doiuét renouveller ſouuent. Etapres quelaflu .
xion & douleurs ſont appaiſées, fauc appliquer desreſolutifs à fin de reſoudreles hu
meurs defluez à la partie. Exemple. 2. emplaſtri de mucilaginibus Z.ij.emplaſtri de B
meliloto &oxycrocei an.3.j.olei camomillæ & anethi an.3.8.malaxécur ſimul, & fiac
emplaftrum ad vſum di&tum :duquel ſera appliquéſur ladice partie. Pareillement en
cel cas on peut yſer de fométació, commede ceſte-cy. 22.vinirubri Ib.iiij.lixiuij com .
munis fb.ij.nuces cupreſi contuſas,numero x.pulueris myrcillorum Z.j.roſarum ru
brarum ,abſinthij, foliorum ſalujæ,maioranæ,ltæchados,forú camomillæ , meliloci
añ.ñ. B.aluminis rochæ ,radicis cyperi,calamiaromatician.z.B. bulliát omnia fimul,
& fiat decoctio pro focu : & d'icelle ſoitfomēcé le lieu bleſſé aueceſpõges ou feutres.
Gal.au G.de Icelle fomentarioa reſout& ſeiche le ſang meurtry, come on peuccognoiſtre par ſes
la meth.dit ingrediens: & la faut faire longuemér, & apres fauteſſuyer & ſeicher cres-bien lateſte
que lafomë- auec linges chauds , & appliquer deſſus encores choſes plus reſoluciues, pour touſ
tatiólongue- iours conſumer & reloudre,comme le Cerat, eſcrit par de Vigo,appellé Cerorum de
mentfaitereo minio,lequela vercu d'amollir reſoudre,&
four plus & eft cel.22.olei camomillä ,liliorum an.z.
qu'elle n'atti x.olei maſtichisz.ij.pinguedinis veruecistb.j.lithargiti aurei 3.viij.minijz.ij.vini bo
Te . nicyathum vnum, bulliant omnia ſimul, baculo agitando, in primis lento igne, & in с
Cerorum de fine, ignis augmentetur , donec acquirat coloremnigrum vel cendentem ad nigre
minio . dinem , addendo in fine co &turæ terebenthinæ ib.B.pul.maſtichis 3.ij. gummi elemi
3.j.ceræ quantum ſufficit, & bulliátrurſus vna ebullitione, & fiat emplaſtrum molle.
Et ſi parcels moyens on ne peut reſoudrc, & qu'on voyey auoirmolleſſe & inonda
Les cauſes de cion,alorsfaut ouurir la tumeur le pluſtoſt qu'ilſera poſſible. Car quand la chaireſt
rendre l'os enflammée & pourrie , elle alcerel'os, & le rendpurulent , cantà cauſe de l'inflam
purulent.
mation qu'à cauſe auſſi de l'acrimonie de la ſanie qui combe deſſus : parquoy fauc
promptement faire apertion, & mundifierla playe auec vn cel mundificatif. 2.Cyru
piroſati, & abfinthij,añ.3.j. cerebinthinæ 3.j.B.pulueris ireos,aloës,maſtichis, myr
rhæ, farinæhordei,añ.z. B.ou egypriac mellé auec apoftolorum , parties cſgales, ou
pur ,s'il eſt beſoin pour mundificrvne grande pourricure: & apres la mundification,
fauc vſer dcremedes incarnatifs , puis cicatrizatifs.

Cure des accidensqui aduiennentauCrane. CHAPITRE XV 1.


R apres auoir parlé des remedes propres au cuirmuſculcux,ſelon la diuerſi
☺ céla des diſpoſicions d'iceluy : maintenant fauc declarer ceux du Crane & de
Dure-mere. Doncques li l'os eltfracturé, & qu'il ſoit beſoin de le trepa
ner,ou i'elleuer,ou ruginer:apres auoir fait ſeâion audit cuir muſculeux,fauc depri
merle Pericrane de contre le Crane , ainſi qu'auons dit. Ce qui ne ſe peut faire fans
grande douleur pour la ſenſibilité d'iceluy , & la connexion qu'il a aux membranes
du cerveau par les ſucures:& partant fauc bien auoir égard à mitiger la douleur, pour
éuiter inflamacion ,& autres accidens.Doncques apres qu'on aura faitle premier apo
Digeſtif. pareil , & elleué les angles de la playe ;au ſecod ſera mis vn digeſtiffaic de iaune d'auf
& d'huile roſac,auec yn peu decerebenthine,& ſur l'os qu'on voudra garder lain,ne
Gal.6.liu.de faut nullemét coucher de choſes humides,enſuiuãtGalien quidit,qu'on ne doic nul
la inech , lement vſer aux os deſnuez, de choſes vnctueuſes,maisau contraire detoutes choſes
quidcſleichéc coute humidité ſuperfluë.Dont fauc meccrcſur ledit os charpy ſec,ou
Des Playes en particulier. 361
. a pouldres cephaliques(leſquelles deſcrironscy-apres )& garder qu'il ne foic alteré,
- Cancdel'air que des medicamens humides. Pareillement apres qu'on aura trepané ,
faut auoirgráde ſolicicude à bien traiter laDure-merc.Carquelquesfois il foregrá
de quácité deſang de quelquevaiſſeau, qui pourroic eſtre attachécontre la ſeconde
cable:ce quei'ayveu ſouucnt aduenir.Eccoutesfois ne le faut ſubit eſtancher, mais le
laiſſerfluer ſelon la plenitude,force,&vercu du malade:car partel moyen la fiéure &
autres accidens ſont moins grands.ce qui eſt prouué parHippocrates,qui dit qu'il eſt Hip.axl. des
1 neceſſaire laiſſer Aluer le lang aux playes recéres, excepte aux vécres :car par cel moyé vlceres,
ellesſerontmoins moleſtées de douleur,inflamacio ,& d'autres accidens.Eclesvieil- Gal. au li, 4.
ES les(ditilon les doit faire ſouuentfaigner,à raiſon que partelmoyenon deſcharge la de la meth.
1 partie des humeurs contenuës en icelles.Ordoncapres en auoirlaiſſé Auer affez,ſera
arreſté auec ceremede eſcric deGalien.4.pul.aloëszij.thur.maſt.añ. zj . B. albumina
be ouorum , numero ij . agitentur fimul cum pilisleporis minutimincilis, fiat medica
7. mentum.Et apres que le Auxſera eſtanché pour ſeder la douleur,ſera appliqué deſſus Mesh
Aug.. de la
1. B ladite Dure-mere, ſang depigeon ,recétemer tiré de deſſous l'aile:puis de ceſte poul
dre quis'enſuit.7.aloës, thuris, myrrhæ , ſanguinis draconis an.zj.miſce, fiac puluis
at fubcilis.Etpourra-l'on auſſifaire vneembrocació d'oxyrhodinu,ou autre repercuſif,
commelecataplaſmefait de farine,devinaigre, & huile roſat, pour addoucir & ap
paiſerla douleur & euiter inflammation iuſques au quatrieſmeiour : puis on pourra Cerar derige
ſeuremétvſer du Cerat deVigo,lequelme sebleeftrefort propre pour les os duCra- propre aux
ti nefrađurez,pourcequ'il attire la matiere du profondà la ſuperficie,reſoult& deſſci-fractures
Crane .
du
ul. chemoderément: & à cauſe de ſon odeur,reſioüift l'eſprit animal,robore le cerueau
28, & lesmembranes. Ce faiſant appaiſela douleur, commcon le pourra cognoiſtre par
les les ingrediens,qui entrent en lacompoſition, qui eſt telle. 24. Oleiroſatiomphacini,
Atc rclinæ,pini,gummi elemi añžij. maſtich.zj.B.pinguedinis arietis žij. B.foliorum be
ul. thonicæ,matriſyluæ,anchos añ.manip.j.ammoniaci zB.granorum cin&orum z x. li.
de quehat pinguedo,&tricuranda cricurentur, & liquefac fimulammoniacum cum acea
toſcillicico :deinde bulliant omnia fimul in tb.ij.vini boni,lenco igne vſquead con.
bom ſumptioné vini,deinde exprimantur:cum expreſſione addantur terebinthinæVenc
D. tæZiij.ceræ albæ quantum fufficic,fiat cerotum molle:deſquels remedes ſera vſé fe
i
TO lonlaneceſſité : ce qui cſtenioinc par Hipp. 8en laMechodede Galicn, qui com. Hips devuda

mandent touſiours indicacions contraires. Pareillement faudra frorter touce la nuc- cap.
que du col , & l'eſpine malade de ce liniment,lequel a grandefaculcéd'addoucir les Liniment cão
nerfs, pourempeſcher le ſpaſme:cõme pourras cognoiſtre auſlī par les ingrediens qui tre lefpafme.
s'enfuyuent.22.rucæ ,marcubij,roriſmarini,ebulorum ,ſaluix ,herbæ paralyſis, añ. ń.
b.radicisireos,cyperi,baccarú lauri, an.zj.forum chamameli,meliloti,hypericonis,
an.m.j.piſtentur& macerentur omnia in vino albo per no & em :deinde coquanturin
vale duplici cum oleo lumbricorum, liliorum,& de cercbinchina axungiæ anſeris86
huma.añ.3ij.vſque ad conſumptionem vini:pofteacolétur, & incolacuræ addetere
01 binthinæ Venetæ z iij.aquæ vitæ ZB.ceræ quancūſufficic,fiat linimencum ſecundum
‫ܕܠܐ‬ arté:maisla douleur eſtácappaiſée fauc defifter de coutes choſes vn & ueuſes, de peur
qu'elles ne rendéc la playe ſordide& maligne,& que les parties proches de ſe pourrifa
lent,& par conſequétla Dure-mere,& l'os:pource que les particsneſeroient gardées
parleursſemblables,ce qui ſe doit faire parremcdes deliccatifs. Parquoy ne fauc aux
playes& fractures delateſte vſer de remedes oleagineux,humides& luppuratifs:fice
n'eſt pourmitigerla douleur,& ſuppurer en cas de neceſſicé:car(comme dit Galien) Gal.au 4. de
Dilfauc laiſſer louuentesfois la propre cure , pour ſubuenir aux accidens. Dauantage, lameth.
Hipp.ne veutqu'aux fractures du Craney ſoitfaicfomentationde vin, ou bien peu: Hip.de vul,
1 & cebien peu encores,comme interprete VidusVidius,licen'eſt quand on craintin - capo
AS Māmatiõ:pource qucla fomération de vin a faculcé de reprimer, refroidir, & feicher
es (ſupplé que leditvin ſoit noir& rude)Eccombié que ledit vin ait faculté & vertu de.
UI siccatiue,toutesfoisactuellemér humecte. Ce qui eſt grandemēc cótraire aux playes
de lateſte,& principalementlil'oseſt deſcouuert:en forte qu'il y auroit danger, par
larefrigeration,qu'ilferoit au cerueau,qu'il ne ſuruint ſpaſme, ou autre mauuaisac
10 cident.Ecparcant ne faut vſer de choſes froides & humides,ſi cen'eſt comme auons
1 dit, pour reprimer l'inflammation ,& appaiſerla douleur, cauſée par laditeinflam
$ mation: mais ſeronc appliquez ſur les os deſnuez pouldres caragmatiques,& cepha. Pouldres caia
liques, ainſi appellées des anciensGrecs , parce qu'elles ſont propres aux fracturestag.& cepha
Hh iiij
362 Le dixieſme Liure ,
des os de la reſte & autres à cauſe que par leur ficcité,conſommér l'humeur ſuperflu, A
& en ce faiſant aident à Nature à ſeparer leſdits os , & engendrer chair deſſus.Ėc ſone
La verrudes leſdites poudres celles.Thus ,radix iroos Florenciæ, farina hordei, & erui,pulu.aloës
poudresc hepaticæ, ſanguis draconis,maſt.myrrha,radix ariſtolochiæ, gentianæ, erucæ, & ge
phaliques. neralement cous ſimples qui ſont deſiccatifs, abfterlifs ſans eroſion : leſquelsſeront
appliquez apres que la douleur, inflammation & apofteme ſeront paſſez: mais alors
qu'onvoudra mundifier les membranes, & faire ſeparer,incarner,& couurir les os,en CE
conuient vſer en les diuerfifiant ſelon la temperature, & habitudedu corps,& des ac 12
cidens qui ſeront trouvez auſdires fractures, ayanten conſideration , que l'os porte
plus forts remedes, & veut auſſi plus eſtre deſféiché que le Pericrane, & Dure-mere, ***

d'autant qu'il eſt plus ſec, & nonſenſible . Et pour celte raiſon, lors qu'on appliquera
leſdites poudres cephaliques aux membranes ,ſeront mellées auecmiel, ou ſyropro
ſat,ou d'abſinthe,ou leurs ſemblables,àfin de les rendre moins deficcatiues & acres.
Die
Des accidensquiaduiennentà la Dure- mere. CHAPITRE XVII.
B

Hip.de
I par forcune la Dure-mere eft inciſée ou eſcorchée , pour l'agglu
vuln.cap . tiner,Hipp.commandey appliquer ſuccum neperæ ,mellé auec fa
Pouldre pro rine d'orge. Enlieu d'iceluyremede,on peutvſer de ceſte pouldre, to

prepour la qui a pareille faculté.2.colophoniæ z iij.myrrh.aloës, maft.lang.


Dure.mere. dra.ań.zj.croci,ſarc.añ.3 B.mil. & fiat pul.lubtilis.Ec pour expur
ger le ſang & la ſanie qui eft,ou peuteſtre,entre le crane & la Durc
mere,faur mettre vne tente de lingedelié en quatre ou cinq dou maka
bles,crempé en ſyrop rofat & d'abſinthe,auec un peu d'eau de vie, entre le Crane &
la Dure- mere , afin d'abbaiſſer la Dure- mere , de peur qu'elle ne touche au Crane ,
pour donner iſſuë au ſang & à la fanie, qui peuuent eſtre tombez entrel'os & ladite
Dure- mere : & auſſi pourdeffendre,que par la pulſacion du cerueau,la Dure.merene
frappe contre les bords du circuit de l'aſperitéde l'os qu’aura coupé latrepane. Erà
chacune fois que le pariēt ſera habillé ,on mettra vne autre tente femblable,iuſqu'à
ce que la mondification ſoit faite. Meſmele Chirurgien ,chacune fois qu'il habillera с
le patient,comprimera la Dure mere auec vn cel inſtrument : & luy faut faire clorre
le nez & labouche,& qu'ilſouffle& expire:à fin que par tel moyen il expurgelaſanie,
qui eſt entre l'os & laDure-mere. Ledit inſtrument duquel ſera comprimée ladite neid
anul
Dure-mere,doit eſtrerond,large,poly,& vnyen ſon extremité,comme ceſtuy-cy.
Inſtrumentproprepourpreffer& baiſſer la Dure-mereen bas,
à fin dedonner isſuea la fanie.
Et par deſſus la ſurdice pouldre, ſoit miſe ſur la Dure-mere vne eſponge
trempée & cſpreince en vnc deco&tion ,laquelle ait faculté deſiccatiue,to
boratiue,faite de choſes aromatiques, propres à la reſte,commeil s'enſuit. lalui
24.foliorum ſaluiæ , maioranæ,beconicæ , rofarum rubrarum , abſinthij &
myrtillorum ,florum chamam.meliloti, tachadosveriuſque aññ.ß.radi
ciscyperi,calami aromatici ,ireos, caryophyllatæ angelicæ an,z.B.bulliant
omnia ſecúdun attem,cum aqua fabrorum , & vino rubro:fiat dcco &tio ad Den
vſum dictum.Eren lieu d'icelle on pourra vſer de vin clairet , auec portion
d'eau de vie : à fin que ladite eſponge attire & ſeiche la ſanie , & autres hu
midicez .Icelleeſponge ſera plus propre qu'vn linge ou autre choſe,pource
que d'elle-meſmeelle attire la ſanic,& auſſiqu'elle obeit par ſa molleſſe,àla
pulſatio ducerueau.Et pardeſſuscouce la playe & parties proches,ſera ap
pliqué yn emplaſtre fait deDialchalciteos liquefié auecvinaigre,ou vin,&
huile roſat, afin qu'iceluy emplaſtre ſoit rendu moins chaud , & plus mol.
Hip.au liure Car ( comme dic Hippocrates) on ne doit meccre aucune choſe dure , &
des playes de -foropeſante ſur les playes de la teſte ,nyfaireligacure fortſerrée, de peur
la reſte. d'induire douleur & infiammacion: ce qui eſt auſſi recicé par Galien,qu’yn
Gal.en onli.
dels manie A pochicaire auoit bandé & lié ſi fort la tefteà quelqu'vn , qui auoit dou
redebander leur cauſée d'ioflammation, qu'il fut cauſe de luy faire ſortir les yeux hors la teſte, à
saiſon que celle ligacure comprimoicles ſucures, en ſorte que les vapeursfuligineux
Des Playes en general 363
.
a quis'exhalent cant parleſdites ſucures, que par les poroſicez du Crane , ne fe poua

uoiencexhaler paricelles : & aufli que par telle compreſſion ,lesarceres ne pouuoient
auoir leur mouuement pulſacif. Pour ces cauſes ,la douleur & inflámation fut ſi gran
dement augmentée, que les yeux luy creuerent , & ſortirenthors la ceſte. Par ainſi, à
bon droic Hipp.defend couurir & lier par trop les playes de la teſte . En quoy ture- Tout cequ'on
tiendras en memoire, que les emplaſtres que tu appliquerasſur la teſte , ſerone de con- applique fue
liſtence molle : & les compreſſespareillementſeront faitesde linge mol & ſubcil , ou lacefle doit
clorelegeres
de corcon,ou de laine,ou d'eſtouppes, & fera la teſte (comme avons dit )pcu ſerrée & mol.
preſſée. Etapres que le malade aura eſté habillé , ſi la playe ietre beaucoup , le faudra
faire ſituer ſur la playe s'il eſt poflible , & qu'ileltouppe par fois le nez & la bouche,&
qu'il expire pour faire elleuer & enfer le cerueausà fin que parcel moyen la lanic con
tenuë au dedās,ſoicexpellée, de peur qu'elle n'acquiere acrimonic, & autremauai
ſe qualité.Autrement il faudra gratifier lemalade,de ſe tenir & ficuer en la façon qui
luy ſera plus aiſée,& qui luy viendra mieux à plaiſir. On pourra mectre auſſi entrele
B crane & la Dure-mere,huile decerebentine,& vn peu d'eau de vie , auec aloës & faf
fran ſubtilemenc pulueriſé, poúr mundifier & deſleicher la ſanie. Autre pour meſme
effe& .2.mell.roſ.z.ij.far.hor.pul.aloë.maſt. & ireosFloren.añ.z.B. aquæ vitæ parú :
incorporencur fimul , fiat mundificatiuum ad vſum dictum . Orquelquesfois ſefaic Mundificatif
inflammation apresla crepanation à la Dure -mere , laquelle ſelcue & fort grande- propre à la
mene par lecrou qu'on aura trepané au deſſus du Crane,doncpluſieurs mauuais acci . Dure-mere.

sp. dens s'enſuiuét:mais pour obuier à la mort,faut faire plus grade ouuercure auCrane ,
ED : auec nos tenailles capicalles inciſives, à fin dedonner plus grandetranſpiration & é
uacuation aux macieres contenuës ſous le Crane : & alors ſera reiceréc la ſaignée ou
purgation :enſemble conuiécordonner vne diete tenuë au parient,& toutpar le con- Pau ,£ gi.listo
feildu dođe Medecin : & appliquer remedes contrarians à l'inflammation : qui ſe fera 6.ch. 9o .
auec fomencation d'vnedecoction faite d'eau ,en laquelle onfera bouillir ſeminisli
pi,althex ,fænugræci ,pſilij, roſarum rubrarum ,añ.3.j.ſolani,plantaginis añ.ñ.j.ou
autres remedes propres à cels accidens : & inſtiller remedes anodyns & repercuſſifs
C dans les oreilles: & fielle eſt grandemencelleuée,pourla baiſſer & reſerrer on y done
appliquer de la farine delentille , ou fueilles de vignes broyées auec graille d’oye,ou
autres ſemblables remedes . Erlion void qu'icelle cumcurne le refolue , & que l'on
cultſoupçon qu'il y euft de la boue au deſſous, alors 'on doit faire inciſion à la Durc
mere auec unelanceite,ou aucc une biſtorie, tournát ſa poin &te vers le Ciel , de peur
de toucher la ſubſtance du cerucau : & partelmoyen on donnera iſſuë à ladite boue .
Ceque i'ay fait, & autres Chirurgiés,dont aucunsſontréchappez ,autresſont morts ,
Mais il vaut mieux renrer vn remede grand & extreme , ayant encores quelque cfpe
rance , que de laiſſer mourir le patient ſans cſſayer aucune choſe.

Pourquoy c’eſi quela Dure-merefe noircist . CHAP . XVIII.


Canut
Laduient auſſi que la Dure-merceſtnoire par la contuſion & vehemêce du

blinds coup , & fangreſpandu & coagulé deſſus,oupar alteration d'air froid,ou par
application de remcdcsnon propres à ſaſubltance,& cemperament, ou par
Whois putrefa& ion. Parquoy il faut bien que le Chirurgien ayt égard à corriger
tels vices. Donc pour olter la noirceur faite par contuſion , il faut appliquer oleum
CC
de vitellisouorum , auec vn peu d'eau devie & ſaffran , & racine d'ircos de Florence
ecept
JUICE olubcilement pulueriſée. Auſſi fauc faire foinentations de choſes reſoluciucs, & aro - Fomentarios
ples: matiques, leſquelles ſeront boüillies en eau & en vin . Pareillement ſera appliqué le reſolutives
Cerac deVigo, que nous auons eſcrit parcy- deuant. Et ſi c'eſt par ſang congelé & & aromalia
eſpandu deffus ia Dure-mere , ſera oſté auec cel remede. 24. aquæ vitæ Z.ij. granæ ques.
1 fuiflimæ fubciliter cricuratæ z ij . B. croci 3 j . mellis roſaci Zj. B. farcocoliæ 3 .
1,01 .
e iij. bulliant omnia fimulparum , & colentur : & foic appliqué deffus , iuſqu'à ce que
ipl
la noirceurſoir oſtée. Et ſic'eſt par l'alceration de l'air, ſera appliquétel remede . 22.
terebenthinæ Venetæ3 iij . mellis roſatiž ii . vitellum vnius oui , farinæ hordei 3 iij.
croci ſcrupulum j.ſarcocollæ zij. aquæ vitæ ziij . incorporentur fimul , & bulliano
RI
VUO paululum : & en ſoit appliqué ſur la Dure-mere , iuſqu'à ce que la noirceur ,
& fa temperature
ſoit re & ifiée. Si c'eſt par application de remedes induëment
appliquez, il y faut mettre d'autres contrarians. Comme li la noirceur vient pas
Le dixieſme Liure ,
364

induë application des choſes trop humides ſeront appliquez remedes deficcatifs, A
commeſontles pouldres caragmaciques, & cephaliques. Si c'eſt par remedes acres ,
foyent appliquez remedes doux & familiers. Or ſi la noirceur vient à putrefaction,
de Vigolouë tel remede.2.aquæ vitæ Z.ij.mellis roſati z B.Ec ſi par telmoyen la pu
trefaction ne peut eftrcoſtée ,ſera appliqué remede plus fort , commeceſtuy. 2.a
quæ vitæ Z.iij. mellisroſati Zj.pulueris mercurij zij . & vnica ebullitione ad inuicem

bulliant, miſce ad vſum dictum . Autre.2.aquæ vitæ Z.j.B. fyrupi abſinthij, & mel
lis roſatian.zij.vnguenti Ægypriaci zij.i.farcocollæ ,myrrhæ ,aloës añ.z.j. vinialbi
boni & odoriferi Zj . bulliantomnia limulparum : deinde colentur ad vium dictum .
Ægyptiac Outre plus ſila putrefa &tion eſtoic ſi grande , qu'elle ne peuft eſtre oftée par les rc
pour offer la medes que nous auonsja dit,ſera appliqué egyptiac pur,faicen eau de plancin en lieu
putrefaction .de vinaigre, ou pouldre de mercure touteſeule ,ou meſlée auec vn peu d'alum .Ec
ne faut craindre appliquer cels remedes ſur la Dure - inere, lors qu'elle eſt putrefiće:
à cauſe qu'aux grandes maladies il faut yfer de forts remedes. loint que comme
monſtre Galien à la fin du 6. de la Methode , la Dure - mere peur de la nature porter

tels medicamens fore deſſeichans pour deux raiſons : la premiere, que les corps ſecs B
& durs , quels ſont les membranes , ne ſont alcerez que par medicamens forts. L'au
tre, que le principal ſoin du Medecin doic couſiours eſtre de garder la temperature de
la partie par medicamens de femblable qualité . Que file conduic de l'ouye, nonob
Itant qu'il penetre & touche iuſques à la Dure -mere, & reçoiue le nerf quiluy vient
du cerueau , porte & requiere medicamens de celle qualité : à plus forte raiſon les
Hip . sph. pourra porter la Dure-mere. Et ſi parcels moyens la putrefaction ne ceſſe, & que la
6. line 1. cumeur fuſt ſi grande que la Dure - mere forciſt hors du Crane , ſans aucunement loy
mouuoir , & qu'elle fuſt noire & aride , & les yeux du pacient rouges & enfiammcz,
fortans comme hors la tefte, ſa veuë non aſſeurée, auccinquietude & phreneſie , a
cels accidens ne ceſſent bien coſt , fay prognoſtique que le patient en bref mourra ,
pource que la Dure-mere eſt gangrenée , & la chaleur naturelle eſteinte. Au con
traire, lila Dure -mere a ſa chaleur naturelle , & qu'elle ayt ſon mouuement aſſezli.
bre , la playe non aride , & la fanie louable , & qucle pacient ſoit peu febricitant,
ayes bon eſpoir qu'il guarira : ce qu'auons dit par cy -deuant. C

Pourquoy on trepane aux fracturesdu Crane. CHAPITRE XIX .

Rà preſent conuient au icune Chirurgien ſçauoir la raiſon pourquoy oa


trepane les fractures des os de la teſte , & non des aucres parties de noſtre
Raiſon pour corps.Ce qui ſe fait pour quatre cauſes .La premiere , pour ellewer les os , &
quoy on ire- ofter leseſclars, fragmens & eſquilles fracturées, qui compriment ou picquent les
pane. membranes , & quelquesfois la ſubſtance du cerucay . Secondement, afin qu'on

puiſſe vacuer, deterger & ſeicher le ſang ou la ſanie, quiſontja combez par la fra& u
re , pour la ruption des vaiſſeaux,ſemcz entre les deuxcables ( dic Diploé ) ou de ceux
qui attachent la Dure-mere auec le Crane , qui pourroit pourrir l'os & les membra
nes, & meſme le cerucau . Tiercement, pour appliquer remedes convenables à la
playe & frađure, ſelon qu'il eſt neceſſaire . Quarcement, pour fuppleer à la ligacu
rcrepercuſſiuc & defenſiue de Auxion & inflammation , laquelle ſi elle pouuoic y
eſtre accommodée , comme és autres membres , expelleroit & prohiberoit les fu
perfluitez du lieu affe & é
. Or pourquoy les ligaturesqui ſont propres aux fractures D
des autres parties de noſtre corps ne ſontveiles & commodes à celles du Crane , c'eſt
à cauſe que la figure de la teſte eft ronde, laquelle ne ſe peut bien commodément ale
ſerrer & lier , canc pour tenir les os frađurez en leur lieu naturel , que pour exprimer

& renuoyer le ſang loing de la partie vulnerée & fra & urée , & aulli pour empeſcher
qu'il ne ſe face nouuelle Auxion : ce qu'il eſt impoſſible de faire à la teſte, cantà cauſo
de la figure , qui ne peut permettre telle ligature, que pource que les vaiſſeaux, à
ſçauoir veines & arteres , qui ſontau deffous du Crane , ne peuuent eſtre ſerrées ,
pour exprimer & renuoyerle ſang , ains ſeulement les excerieures , ce qui cauſeroit
douleur & inflammation : d'autant que celle ligature empeſcheroit par la com
preſſion le mouuement des arceres : pareillement arreſteroit l'euacuation des excre
mens fuligineux , quis’euaporent par les commiſſures du teſt , à cauſe qu'elles ſe
roient trop ſecrées p
: areillement renuoyeroit le ſang du lieubleſſé auxmembranes
Des Playes en general 365
.
,cha
A & au cerueau ( comme nous auons predit) & ſeroit -on cauſe d'induire douleur
leur , ficure ,apoſteme, apoplexie, ſpaſme,paralyfie,& par conſequent la mort . Ec

partant pour évirer tels accidens,nous conuient faire ouuerture au Crane , lors qu'il
eltfracturéou concus , ce qu'il n'eſt beſoin aux autres parties.Et auparavant que l'on La ſituation
applique la crepane , faut bien fituer le patient, & lay mettre ſous la teſte quelque du patient
drap plié en pluſieurs doubles ,& preſſer ſur le cheuet ou trauerſin , à fin que lors qu'on peut

qu'on fera l'operation ,quela ceſte du patient n'enfonce en la plume,mais qu'elle ſoit trepaner.
table , ſans qu'elle courne de coſténe d'autre, ny qu'elle enfonce , fi ce n'eſt par le
commandemenc du Chirurgien qui crepane . Auec cela , luy fauc bien eltoupper les
preilles de corton : à fin d'obtondre le bruit dela Trepane, ou autres inſtrumensca
pitaux . Et auparauant que d'appliquer la Trepane,on doit commencer à percer l'os
auec vn inſtrument, lequel aura fa poincte de figure triangulaire , afin qu'il entre
mieux & plus ſubic, & n'aura ſa poinětenon plus groſſe que le clou de la Trepane , à
fin qu'elle ne vacille decoſté nyd'autre . La figure eſt preſque ſemblable à vn Foret ,

p horſ-mis la poin& c , comme cu vois par ce porcraict.

Foretpourcommencer à oaurir le Crane.

AT
B

1.

A Temonſtre le manche ,
TQUE
BB
decada Les poinctes quis'inſerene dans le manche par vne viz.
lesos
a
quer Deſcription des Trepanes.
CHAP . XX .
afino
Repanes ſont ſcies rondes , qui coupent l'oś circulairement plus ou
Definition de
ou de ce moins ſelon qu'elles peuuenceſtre grandes ou petites : leſquelles doi Trepanes.
rest
inte
uent auoir vn clou aigu ,ou poincte au milieu de leur circuit ,& qui pal- Trepaner ,
ſe vn petic outre les dents de la Trepane : à fin qu'en crepanant loic íta- c'eſt à dire
ble ,& ne vacille de coſté ou d'autre, iuſques à ce qu'elles ayeni fait leur percer,quieft
polcs circuit , & coupé pour le moins la premiere cable , ou environ . Adonc faucoſterledic lors qu'on
clou,depeur qu'il ne touche( l'os eſtant coupé) la Dure-mere.Puis s'il eſt beſoin , ſoit emporte une
ork
piece du mi
continuée la perforation entiere des deux tables. Dauantage faut qu'autour de la lieu de los
206, D trepancy aic vn chaperon , à fin qu'elle ne puiſſe paſſer & couper l'os plusqu'on ne
s
sode voudra ; depcuraulli qo'en trepanant , on ne l'enfonce ſur la Dure - mere . Parcille
D
CIDA ment on doitvn peu huiler ladice trepane , à celle fin qu'elle coule mieux & plus
doucement. Ce qui eſt cogneu par les artiſans, qui frotrent leurs ſcics de choſes
c
ari : / olcagineuſes, à celle fin qu'elles encrent micux. Scmblablement faut ſouvent en
Hip. debuts
ile trepanant leuer la trepane ,& la tremper en eau froide, à celle fin qu'elle n'eſchauffe cap.
elem trop l'os : car toutes choſes ſolides quitournent auec vehemence, s'eſchauffent : &
par ainſi la trepane tournant en l'os s'eſchauffe , & ros femblablenient aulli s'efa

chauffe & deffeiche, & par conſequent s'alcere : dont s'en pourroit ſeparer dauanta
rs
lese gcapres la crepanation . Ecicy ne faucignorer, que touſiours Nature iette vne exfo- Nore .
r ie
ielle
liation d'os,où la crepane aura fait fon circuit & aura touché , & aulli vnepetite eſcail
lede laſuperficie qui aura eſté deſcouuerce, & que l'air aura couché . Et pour ayderà
366 Le dixieſme Liure ,

Nature à faire ladite exfoliacion , on appliquera deſſus pouldre d'eruca , autrement A


dite roquerce, bryonia , concombre ſauuage,ariſtolochia ,& autres qui ſeronc decla
rezcy -apres.Ecalors qu'elles ſeront ſeparées, l'on appliquera ceſte pouldre, laquelle
a faculté d'augmenter la chair ſur l'os & l'endurcir . 2. pulueris ireos Illyricæ , aloës ,
mannæ ,churis,myrrhæ ,ariſtoloch.an zj . Puis apres ia generation de chair , ſoit faire
Grande an . cicatrice, auec poudres d’eſcorce de grenades bruſlées, & alum cuit. Eine doitla
notatio pour Chirurgien tirer leſdites eſcailles & os par violence : mais fauc attendre que Nature
le ienneChi- ayo baſty vne chair deſſous, & qu'elleictce l’os de ſoy.meſme: ou autrement ſe feroic
rurgien . nouvelle alceration , & corruprion dudic os . Ce qui ſera cy - apres plus amplemenc

dcclaré aux Icaries desos. Celuy quitrepane doit conſiderer que la figure de la teſte
eſtronde, pareillement ſa trepane, & par ainſi ne peut couper l'os également comme
ſi c'eſtoit fur vn lieu plat.Aulli que l'os n'eſt pas cour d'vnemeſmeeſpeſeur: & par
tant faut qu'il regarde ſouvents'il coupe l’os plus d'un coſté que d'autre , qui ſe fera
en prenant garde ſouuent au circuit qu'aura fait ſa Trepane , auec vne efpingle ou
choreſemblable. Ec où il ſera trouuéeftre coupé plus d'un coſté que d'autre,faucde
B
cliner & preſſer la Trepane ſur celuy qui ſeramoinscoupé,& plus eſpais. Or quanrà
la Trepane,pluſieursen onrinnoué à leur plaiſir:de ſorte que maintenanton en trou
uc depluſieurs & diverſes façons: mais icte puis bien aſſeurer que celte - cy , qui eſt
par moy inuentée,eſt plus ſeure que nulle autre ( au moins que i'aye cogneu ) pource
qu'elle ne peut aucunement enfoncer dedans le Crane , & par conſequent bleſſer les
membranes & le cerucau , à raiſon d'vne piece de fer appellée Chaperon , lequel ſe
hauſſe & baiſſe du courà ca volonté , & garde que le Trepan ne penetre & paſſe ou
trece que ſeulement tu precens couper del'os , lequel ( comme nous auons dit ) n'eſt
d'vnemeſmegroſſeur, eſpeſſeur & durecé : &c par aing nullc Tiepane ne peut eſtre
faite de certaine hauteur ou peciteſſe ſans iceluy Chaperon , lequel ſe hauſſant &
baiſſant, fait tel arreſt à ladite Trepane qu'il ce plaiſt,voire& fuft de l'eſpeſſeur d'vne
ligne.Et le danger de penetrer ſon Trepan auxmembranes & au cerueau, n'emporte
ſeulement que la vie du patient: ce que i'ay veu aduenir pluſieurs fois, non ſeule
ment par la fauce desieunes Chirurgiens,mais auſſi de ceux qui pluſieurs fois auoiét
crepané . Auiourd'huy i’eſpere que icunes & vieils , voire apprentifs, pourront trc с
parer ſans danger auec ceſdites Trepancs,deſquelles cu as icy le pourtrai&.

Figure de la Trepane deſmontés. Figure de la Trepane montée.


SUNI D

nepat

E
romane pour]
D
neske
JERAWA

F
cu ,&

la
al

A Mon
Des Playes en particulier. 367

A A Monſtre le manche encier de la A Lemanche & la trepane montée .


5 B Lelieu où ſe met la Trepane .
Trepane .
B Le chaperon . CCC L'extremicé de la Trepane qui
с La viroller s'inſere dedansle manche .
DD Les Viz qui tiennent la Trepane D La Trepane auec ſon Capichon .
& Virolle . E La Virolle .
E La Trepane ſans la poincte . F La Viz qui ſerre la Trepane dans
F La Trepane auec ſa poincte. le manche .
G L'aucre Viz qui ſerre la Virolle
contre le Trepan .
H La poin &te criangulaire .

Autre Trepane deſmontée. Autre Trepane montée .

B
o
w
Last umiddelen

с
GES

E
3

A Le manche. B La Trepane. C La viz qui tient la dite Trepaneau manche.


DD Le chaperon qui prohibe & garde que la Trepane ne paſſeoutre la volonté de
D
celuy qui trepane. E La Virolle qui ſe hauſſe de telle hauteur qu'il eſt ne
ceſſaire que le chaperon donne entrée à la Trepane . F Vne autre viz qui
tientfermeladice Virolle . G La poincte triangulaire, laquelle doit vn peu
paſſer outre les dents de la Trepane , à fin qu'elle puiſſe eſtre tenuë ſtable ,ne
vacillant de coſté ne d'autre : & doit eſtre paſſée droitement au milicu de la
trepane: & en fa partie ſuperieure doit eſtre en viz , comme tu vois en ceſte fi
gure , à fin qu’on inſere autour d'icelle ceſte petite Virolle , marquée par H,
pour l'extraire lors qu'on aura crepané iuſques au Diploé .
Or toutes les pieces de ladite Trepane te fonten l’unede ces figures poſées en leur
propre lieu , & par ainſi fontla Trepane complette . Et où l'os eftant coupé
ne ſeroit
cleué auec lapreſente Trepanc , le ſera aueccet inſtrument nommé Tirefons, du
quel pofcras la pointe au trou qu'aura fait le clou de la Trepane : les branches duquel
peuucnc aulli ſeruir d'eleuatoires ,
li
308 Ledixieſme Liure ,
A
Tirefons à trois branches.

Apres auoir ellcué auec la Trepane ceſte


Il faut ap piece ronde de l'os,s'il y a quelques aſperitez
planir les du reſte en la ſeconde table , qui pourroient
bords de la
fcreure s'ils
bleſſer la Dure-mere , lors qu'elle fait fon
font rabo
mouuement , il les faut couper & applanir
feux.
auec vn inſtrument nommé Lenticulaire:de
HOBDIIijiiRDER peur qu'en applaniſſant les aſperitez, on ne
bleſſe la Dure -mere auec cet inſtrument
lenticulaire : ainſi nommé , parce qu'en ſon
extremité il reſſemble à vn pois de lentille
mouſſe & poly . B

Lenticulaire .

Maille de Etoù ledit Lenticulaire ne peut couper l'os qui pourroit eſtretrop eſpais,onvſera
plomb, eso de cizeaux frappantdeſſusauec maillet, lequelſerade plomb , de peur d'eſtonner le
con v/age. cerueau que le moins qu'il ſera poſſible. Et ſeront oitées les eſquilles & petits fra
gmens aucc pecites pincertes. Et quand le lieu où ſera la fracture,nt permet faire le C
&tion pour deſcouurir l'os, à fin d'appliquer la trepane comme lors que la fracture eſt
pres dumuſcle temporal,ou pres des commiſſures : lors au lieu d'vne , en faut appli
quer deux ou trois (s'il eſt beſoin ) bien pecites , & plus pres l'une de l'autre qu'il ſera
polible :de façon que le circuit de la ſeconde ou tierce,prendra ſur le circuit de l’au
Il ne faut tre . Et ſi la fracture eſt ſur vne commiſſure , ne faucappliquer ſur icelle la trepane
trepanerſur ( commenousauons dit ) mais ſera appliquée des deux cortez d'icelle , en laiſſant la
lesfutures. commiſſure entiere,depeurde couper & dilacerer les fibres nerueux, veines & arce
res , par leſquelles la Dure-mere eſt ſuſpendue au Crane. Pareillement ſi l'on ne fai
ſoit apertion que d'un coſte de la commiſſure , le ſang & autres matieres ne pour
roient encierementeſtre euacuées, à raiſon que la Dure- mere eft entre- deux. Orau
lieu de trepaner, on peut vſer aux cas ſuſdits (pourucu que l'os ſoit ſuffiſamment del
couuert)de cet inſtrument qui eſt en maniere decompas,lequel ſe dilate & ferre ain
ſi qu'on veut, par le moyen d'vne viz. Auſſi on pourra changer les poinctes d'iceluy 07
ſelon la neceſſicé, leſquelles ſeront cenuës fermes par vnc viz.
D
Des Playes en particulier. 369
A

Compas pour couper l'os du Crane.

A Le pied du compas qui coupe l'os .


B La petite viz qui tient la poin & e .
C Deux pointes differentes,leſquelles ſe
peuuent inſerer dans le pied du com
pas marqué A , ainſi que l'affairele re
D quiert.
D La grande viz qui tient vne piece de
fer , marquée par E , par laquelle le
Compas ſe dilate & ſerre comme il
eſt beſoin .

Or il eſt neceſſaire qu'vne iambe du


B
Compas ſoit appuyée fermement pour
couper de l'autre iambe. Au moyen de
quoy c'eſt neceſſaire auoir vne piece de fer
trouée de petits trous , dans leſquels ſera le
pied du Compas appuyé , de peur qu'il ne
Cс vacille çà ou là , outre la volonté du Chi
rurgien . Pareillement faut qu'icelle piece
de fer ſoit courbée , afin qu'elle puiſſe eſtre
appliquée en toutes les partiesdela ceſte,
conſiderant la figureronde d'icelle.

Lapiece de fer pourappuyer le Compasſurle Crane , qui


eft de figurecourbe .
O.

CA

dict.
Autre Compas
pour meſme uſage, lequelſedilate & ferreparle moyen d'une viz,
ainſique tupeux voirparceſtefigure.
33

li ij
370 Le dixieſme Liure ,
Ayant leuélapiece de l'os , on mettra ſur la Dure- mere du charpi ratiſſé , lequel a
boira le ſang & autres humidicez: & le lendemain on y mettra vn digeſtif fait d'huile
roſac,iauned'auf,& vn peu de terebenthine de Veniſe. Pluſieurs pra & iciens y appli
quent huile roſatſcule, ceque ie n’appreuue, mais pluſtoſt cesreinedes qui s'enſui
uent.22.mellis rofaciz.ij.olei de vitellis ouorum Z.j.coquantur limulad vſum.
Autre .
mellis roſari 3.j.cerebenthinæ Venetæ Z.B.olei roſati 3.j.incorporentur ſimulad
víum . Lequatrielmeiour paſſé,on deſiſtera d'appliquer auſdits remedes des huiles,
mais bien le miel roſat, & huile de cerebenthine,iniſesen egale porcion ,yadiouſtanć
poudre de maſtic , aloës lauć , iris, & vn peu d'eau de vie . Ce medicament doiceſtre
appliqué chaud: il mondific ,& eſt propreaux membranes du cerueau , & aux fractu
res du Crane,& au cuir muſculeux , qui le couure. Pardeſſus toute la playe , & par
ties voiſines , on meccra vn cataplaſme fait de farine d’orge , & de féues cuities en
oxymel & huile roſat: ou bien on pourra vſer de l'emplaftre diachalciteos, liquefić
en huile roſat & vinaigre : ou l'emplaſtre debetonica , ou du gratia Dei , fondus en B
huile roſat. Dauantage , on frottera le col d'huile roſat & de lumbriques ,& ſuyura .

on la cure comme ie diray cy -apres .


Des lieux eſquels on ne doit appliquer Trepanes. CHAP . XXI. -

R apres auoir deſcrit les Trepanes & autres inſtrumens capitaux,faut main
tenant declarer les lieux ou endroits , eſquels nullement ne faut appliquer
1. Trepanes. Et premierement ſur l'os fra &turé & ſeparé du tout , ou ſur la
plusgrandepart ſeparée d'iceluy qui demeure entier, c'eſt à ſçauoir , quin'eſtfra.
&ture , de peur qu'en preſſant delſus ,on ne l'enfonçaſt ſur lesmembranes. Secon
dement ſur les futures. Tiercement ſur les ſourcils, pour les raiſons ſuſdites , auſ
ส่

3. U

quelles il faut adiouſter vn poin &t bien notable:ſçauoirqu'en cet endroit y avne grã.
de cauité pleine d'vnehumidité blanche & glueuſe, & enſemble de l'air, ordonnée 6

de naturepour preparer l'air qui monte au cerueau :autrement le Chirurgien pour


roit s’abufer, cuidant la ſuſdite cauité eſtre vne enfonceure d'os qui requiſt le tre- C
4. pan. Quartement', aux parties inferieures dela teſte , s'il eſt poſlible, de peurque la
ſubſtance du cerueau ne force dehors par l'ouuerture faite en l’ospour ſa peſanteur .
‫کر‬. Quintement ſur lesos bregmatis ou fontenelles des petits enfans, leſquels ne ſont
6, encores aſſez ſolides pour ſouftenir la trepane. Sextement ſur les temples,à raiſon du
Hip . de muſcle temporal , pour obuier à l'accident que deſcrit Hippocrates, que ſi on faic
vuln. capit. ſection aumuſcle dextre de la temple,il ſuruiendra ſpaſmede l'autrecoſté: & fion la
fait au ſeneſtre, le ſemblable accident aduiendra. La raiſon eft, que le muſcle inciſé
en trauersperd ſon action : qui eſtoit mouuoir & amener larmādibule inferieure vers
la ſuperieure.Et lors ſon compagnon oppoſiteeſtant en ſon entier & perfe & ion (qui
eltcirervers ſon principe)tire à loy ladite mandibule inferieure: & celuy qui ſera in
ciſé,n’a nulle contrarieté à ſon compagno : parcant la partie faine attirera vers elle la
maladie: & par ainſi la bouche & autres parties de la face demeureront tortues, prin
cipalementplusdu coſté non inciſé, que l'autre inciſé, parce que toutes & quances
fois qu'il y a commevn contrepoidsdes nerfs &muſcles eſtans en parties opp. ute.
egaux en nõbre,magnitude & force, la reſolució & paralyſie d'une partie caule & fait a
conuulfion en l'autre partie pareille,cõme vn contrepoids,ainſique lon void en vne
balance le plus peſantemporter le plus leger. Oril n'y aura ſeulement ce dáger,mais
encores vn autre plus grand,pourceque ledicmuſcle ſe meuten maſchant,& en par
lant: & partant difficilementeſt conſolidé,& auſſi que ſous iceluy eſt la commiſſure
petreuſe. Pareillement qu'en ſa ſubſtance font pluſieurs veines , árteres & nerfs , au
moyen dequoy ſouuent beaucoup d'accidens aduiennent, comme douleur, inflam
mation, ficure,ſpaſme,nõ ſeulemét particulier, mais auſſi vniuerſel ,& par cõſequent
la mort.Parquoy nul ne ſera ſi cemeraire de couper leſdits muſcles des temples,pour
faire trepanation pour la fracture qui pourroiteſtre en telendroit: mais plüſtolt ſera
faite apertiõ au deſſus, ou à coſté, & le pluspresde la fracture que l'on pourra.Ce que 203
Hiſtoire de feis à vn gentil home nommé monſieordela Bretelche,lequelà l'entrée du feu Roy
Monſieur de Henry,fut bleſſé d'un coup de pierre ſur le pont noſtre Dame,en celte ville de Paris:
la Breteſche. laquelle luy fractura l'ospetreux, auec grande contuſion du muſcle temporal, fans
Des Playes en particulier. 371
el A playe. Dontiefuslelendomainenuoyé querir pourle penſer en ſon logis,ruë de la
le Harpe à la roſe rouge.Et ayant cogneu la fracture& la nature du lieubleſſé, voulus
appeler conſeil, tant de Medecins que Chirurgiens :entre leſquels aucuns furent
daduis de faire ouverture deſſus ledic muſcle, à fin d'appliquer la trepane pourex
traire les os fra& urez. A quoy ie repugnay bien fort, alleguant l'autorité d'Hippo
crates au liure des playes de la teſte, lequel defendde ne faire inciſion en tel endroit,
pad pour obuier aux accidents predics : & auſſi par l'experiencequ'auions cognuë, que
ceux auſquels on auoit faic le &tion, & coupé leditmuſcle, tõboient en conuulfion &
mouroient:maisfusde ceraduis,qu'il falloitfaire ouuerture à la partie ſuperieure,&
tric le plus pres de la fracture qu'on pourroit, ſans toutesfois toucher audi& muſcle que
le moins qu'il ſeroit poſſible. Or le frere duditſieur de la Breteſche , qui eſtoit l'vn Aduis, its
2‫ܕ‬ des Protonoraires de monſeigneur le reuerendiſſime Cardinal de Chaſtillon , qui gemens.
ca eſtoit pour lors viuant,commeil eſtoit preſent à la conſultation, pour la grandeami
C cić fraternelle qu'illuy portoit , dic que nullement ne permettroit qu'on fiftinciſion
2.1 furledic muſcle, de peur que ne ſuruiot l'accident qu'auons demonſtré. Et ainſi fut
4. B- accordé de tous,que la ſeation ſeroit faite au deſſus dudic muſcle :cequi fut fait par
moy coutàl'heure. Et lelendemain ( qui eſtoit le troiſieſineiour) ie le trepanay, &
par l'ouuerture faite à l'os quelques iours apres tiray quatre eſquilles de la fracture,
luy mettant vne tente de plomb cannulée ,de figureplatte ( comme tu vois parceſte
figure ſuiuante,toutesfois non ſilongue) pour extraire la ſanie qui ſortoit d'entre l'os
(IM & la Dure-mere. Et lors que l'habillois luy faiſois bailler la teſte en bas,& fermer la
der bouche & le nez , à fin d'expulſer la ſanie hors : puis luy faiſois iniection de choſes
‫ܐ‬ dererſiues, auec vnepetite Syringue , dontasicy auſſi le portraic : & auec autres re
medes fue par la grace de Dieu bien guary.
17
Tente de plomb cannulée , defigureplatte,
pour donnerisſuë àlafanie retenue en Syringue.
tre le Cranedla Dure - mere .

Semblable cas preſque aduint au ſiege de Mers , en la perſonne de monſieur de Autre hie
Pienne, nommé alors Bugueno , lequel eſtant ſur la breſchefur bleſſé en la temple foire à ce
auec fra&ture d'os par vn eſclac de pierre de la muraille fait d'un coup de canon ti- propos.
ré parl’ennemy. Etſubit qu'il fut frappé comba en terre , & ietra le ſang par le nez,
parlabouche& par les oreilles, auec grandvomiſſement : & fuc pres de quatorze
joursſans parler ny ratiociner & cognoiſtre perſonne. Et luy ſuruint aufli des trel
ſaillemens, approchansde ſpaſme, & eut tout le viſage enflé & fort liuide. Il fut tre
panéàcoſté dudit muſcle ſürl’os Coronal , par vn nommé Pierre Aubert , Chirur
_3 gien ordinaire du Roy. Etau vingt cinquielmeiour illuyſuruine vnc chair molle &
So fortſenſible,appelée Fungus,quiſortoit de la Dure-mere,à l'endroit où l'onauoic
appliqué la crepanc:laquelle chair croiſſoit de iour eniour , iaçoit qu'on appliquaſt
D deſſuschoſescorroſiues: toutesfois depuis ( neantmoins ceſte grande playe & fra
ce đure,&autres accidents ) fut guary. Les anciens ontappelé icelle chair Fungus, à Fungus.
is raiſon qu'elle eſt molle, ayant yne racine comme vn potiron ou champignon, & eft
large enlapartie ſuperieure, en l'inferieure greſle & menuë, & s’auginente ſelon la cauſe de
ce quantité de lamatiere,ou ſelon qu'il ſera auſſi traicté par remedes contrariants à ſa Funguso
u cauſe,& auſſi le plus ſouuenteſt fecide : les vulgaires l'appellent le Ficſaina Fiacre.
Orla maniere comme ſe font leſdits Fungus , c'eſt qu'ainſi qu'aux troncs des arbres
1 quelque humeurà demy pourry , glueux & viſqueux vientå ſortir, quaſipar reſuda
tionde choſe excrementitielle par l’eſcorce,& peu à peu ſortanthorsprend accroiſ
- fementen formede Fungus: ſemblablement des vaiſſeaux dela Dure-mere & du
e Crane eſtans rompus, en fortquelquesfois vn ſang melancholique , lequel Naru
IC
y chuoye pour la regeneration de la chair , neceffaire à telles parties, dont ſe for
:
mevnFungus,lequel, comme dit Galien , tientde la nature & ſubſtance de la par
s
ticoù il naiſt,aureſte recientengeneral dela naturedes verruës malignes. Or pour
li iij
Ledixieſme Liure ,
372

la curation d'iceux faut appliquer remedes , qui par proprieté occulte ontfaculté de A
confumer telle chair ſuperfluë;ſçauoir fort deficcatifs de leur nature & doux cathe
retiques, comme celuy cy:2. Sabinæz.ij.ochræz.i.pulueriſeiltur fimul , & fiat plu .
uis . Autre . 4. hermodact. combuſtorum Z. B. fiatpul. Ecoù icelle chair fongueuſe
feroit forc accreuë , comme il s'en void quelquesfois groſſe comme vn æuf, plus ou
moins,on la peut lier auec fil de ſoye le plus pres de fa racine qu'on pourra:puiseſtane
tombé , appliquer deſſus des ſuſdits remedes, & infailliblementon le curera inieux
& plus ſeurement que par autres medicamens plus corroſifs.

De l'alteration des os de la tofte. C H 4 P. XXII .

Velquesfois aux playes de la Teſte s'enſuit alteration & corruption de l'os :


Caure d'al
teration du ce qui aduient , ou pource que l'air l'a touché à nu , ou pource que la matiere

teft. a croupi dellus, ou pour l'indeuë application des medicamens ſuppuratifs &
onctueux : ce que nous monſtrerons plus amplement au traicté des Caries , parlans
des Nodus de la verolle . Telle alteration ſe cognoiſtra , tant par la veuël car au lieu
В
d'eſtre blanc, il deuicntiaunaſtre, puis liuide & noir) que par la ſonde, d'autant que
l'on ſentaſperité & inegalicé ,& l'eſprouuerte y entre facilement : toutesfoisi'ay veu
l'os eſtant longuementdeſcouuert & alteré , eſtre fort dur , voire que la trepaney
entroicauec difficulté. Parquoy le ſigne decarie n'eſt aſſeuré: entendu quel’air ſou
uent deſſeiche l'os carieux en telle ſorte qu'il ſe monſtre de ferme conſiſtance, apres
auoir demeurélong tempsdeſcouuert. Ce ſigne eſt bien plus à certain, ſçauoir que
la chair quis'engendre fur l’os carieux , eſt baueuſe , & de peu ou nul ſentiment. Or
icelle alteration ou corruption ſera corrigée par cauteres actuels ou potentiels, com
menous dirons en leur propre lieu , ou par poudres catagmatiques ccphaliques, fai
tes de rad.ireos,maſt.myrr.aloës, gentianæ, ariſtoloch.concau.corti.pini: comme,
24.rad.ire.florent.ariſt.an.z.j.centaurij zij.corcic.piniz.B.miſce & fiat pul.ſubtilifl.
laquelle ſera appliquée ſus l’os,& fi la corruptionelt grande , on vlera de Rugines.
La cheute ſe doit attendre & non procurer par force: car autrement l'os quiſeroit
deſſous n’eſtant couuert de chair , s'altereroit toutesfoispetit à petit , on les eſbranle
ra pour ayder à nature à les ſeparer. Ericy en paſſantcu noteras que l'exfoliation du С
circuit de l'os, quieſt où la trepancaura paſſé, ſe fait communémenten quaranteou
cinquante iours, autresfois pluſtoſt. Enſemble l'exfoliation qui eſt cauſée par l'alte
ració de l'air ambient, quiaura touché l'os nu & deſcouuert ſe fait preſque en meſme
eſpace de temps:ce quiſe fait aulli apres l'application des cauteres, ou par le beneficc
Temps re des pouldres cephaliques. Et la conionction & vnion (appelée Callus) ſe fait cómu
quis pourla nément auſſi en l'osfracturé par autant de iours : toutesfois aux vos pluſtoſt comme
generation aux ieunes:aux autres plus tard , comme aux vieils : de toutes leſquelles choſes on ne
dy Callus.
peut donner regle certaine de temps prefix, pour la diverſité des liabitudes & tempe
raments, & ſelon la dureté & elpefleur de l'os.Orlil'alteration de l'os & cõſolidation
des playes ſont repugnantes aux remedes fuſdits , faut ordonner au pacient potion
vulneraire. Ce quei ay ſouuentesfois fait auec heureuſe iffuë. Or quelquesfois , non
ſeulemét vne portion de l'os eft alterce & tóbée, mais aufli iceluy tout entier, ce qui
Hipp. au eſt prouué par Hippocrates quand il dit : L'os du Crane eſtant bleſsé, ſe ſepared'auec
li
. des playes le fain plus ou moins , ſelon la vehemence du coup : ioint auſſique l'experience le
de la teſte.
monſtre. Et en cet endroit ie feray recir de ce que i'ay faiteſtanten Picd -mont, D
Chirurgien de defunct le Mareſchal de Montejan ( qui lors eſtoit Lieutenant du
Hiſtoire. Roy)ie penſay vn laquay de defunét monſieur de Goulaines: qui futbleſſé d'vocoup
d'eſpée ſur l'os Pariccal, partie ſeneſtre, non penetrant iuſques à la ſeconde table : & 1992
quelques iours apres que la playeeltoit preſque conſolidée & guarie ,arriua à Thurin
351
quelque compagnie de ſoldats de ſon païs de Gaſcongne , auec leſquels vn matin
mangea descripes fricaſſées,auec forceoignos & elpices , & ne fut auſi fans boire vin com
e
Faſcheux fort & en quantité , & fans eau . Dont colt apres tomba en fieure continuë , & perdic
Vique
accidens par la parole & le ſens , & luy ſuruint grande tumeurà coure la teſtc & z au viſage , les yeux
mauuaiſe rouges & enflammez iſſanshors de la ceſte. Ce que voyant i'appelay Medecins &
diete.
Chirurgiens , pour aduiſer qu'on feroit pour luy fauver la vie . Et fulmes tous d'aduis
de le faigner & clyſteriſer, & faire application de pluſieurs remedes ſur la teſte , auec
frictions& ligacures aux extremitez : neantmoins tout le coté de la partie affectée,
quelques iours apres s'apoſtuma. Et ayant faict ouuerture,iecta grāde quantité de fa
Des Playes en particulier . 373
A nie,& trouuay le cuir muſculeux quieſtoit deprimé,aupres de l'os auec le Pericrane,
de largeur enuiron de quatre doigts : & finablement toutes les deux cables de los fu
renc alterées, pourries,noires& fecides. Et pour corriger ceſte corruption y appli
quay par interuales,cauteres actuels : & ce tant pour corriger la pourriture,que pour
faire ſeparation de ce quieſtoit alteré. Ecenuiron ynmois apresle penſant, vis lorcir vers engena
certaine quantité de vers de deſſous leditos pourry ,par aucunstrous de la carie : qui ledrez de jous
Crane.
fuccauſe de me fairehaſterd'extraire & leuer ledit os , qui branloit long temps au
parauant,& deſſus la Dure-mere trouuay,où Nature auoit engendré chair, trois ca
uitez à mettre le poulce,quieſtoient remplies de vers groulans& mouuans, leſquels
eſtoient chacun de groſſeur enuiron d'vn fer d'éguillette , ayant la ti ſte noire . Or
eftoitlaportion d'osqueNature auoit ſeparé, de grandeur de la paulme de la main ,
& plus: tellement qu'à le voir on ne pouuoit comprendre que Nature euſt peu letter
& ſeparer telle quantité de l'os du Crane ſans inort. Et toutesfois il en guarit, outre
l'eſperance de tousceux qui l'auoient veu : mais apres la conſolidacion de la playc, la
cicatrice luy demeura grandement caue ( ce qui eſteſcrit d'Hippocrates ) pour raj. Hipp.aph.
ſc peut rege 43. 14.9
B
ſon de la perdition de l'os, qui eſt de mariere ſpermatique, laquelle ne V’lcera que
nerer ſelon la premiere intention. Et auſli pource que la chair ne peut deuëment cumque, och
croiſtre ſur vn Callus : à cauſe qu'il eſt commechoſe eſtrange& emprunteeà Natu
re, & meſmement parce qu'il elt plus folide & compact quelosnaturci,dontle ſang
nepeut reſuder,& par conſequent la chair ne peut eſtrer'engendrée. Au moyen de
quoy lors qu'il y a perdition d'os en quelque partie de noſtre corps , la cicacrice de
meure couliours caue : & au Crane où il y a perdition de ſubſtance des deux tables,
lon void aux ſens de la veüe , & fent-on à l'accouchement de la main , vne pulſation
faite par le mouuement du cerueau, à l'endroit de la cicatrice,& le lieu demeure par
. longue eſpace de temps plus debile & douloureux. Et pour ceſte cauſe fis faire audit
1

Laquay vn bonner decuirbouilly,pour reſiſter aux iniures externes, qu'il porta iuſ
quesàceque la cicatrice fuft bien ſolidée ,& la partie fortifiée. Or il y a d'aucuns Impofture.
foy diſans Chirurgiens , mais pluſtoſtfone de ces abuſeurs, coureurs& larrons , que
lors qu'ils ſont appellez pour traicter les playes deteſte,où il y aura quelque portion
1
с d'os amputé, font accroire au malade s aux aſſiſtans, qu'au lieu dudit os leur faut
mettre vne piece d or. Et de fair en la preſence du pacient l'ayant receuë,la bactent,
& la rendent dela figure de la playe , & l'appliquent deſſus, & diſent qu'elle y de
meure pour ſeruir au lieu de l'os , & de couuerture au cerueau : mais coſt apres la
mettenten leur bourſe, & le lendemain ſen vont laiſſans le patient en ceſte impreſ
fion. Lesautres diſent que par leur induſtrie & grand ſçauoir ils font coaleſcer vne
i
piece decougourde deſſeichée au lieu de l’os ampucé. Et ainſi abulent les ignorans,
qui ne cognoiffent que tant Pen faut que cela ſe puiſſe faire,que Nature ne peut Nature ima
fouffrirun petit poil enfermé en vie playe,ou autre petit corps eſtrange. Ce qui eſt parente de
1
prouué par Gal . au quatrieſme liure de fa Methode. Parquoy nul homme de bon corps eftrarea
0
0
eſpricne doit croire tels affronteurs. Si aucun veut dire qu'vne balotte de plomb ti ge.
rée parvne harquebuſe , peut demeurer longues années en quelques parties de no
c
ſtre corps,cela je leur concede: parce que le plomb a quelque familiarité auecques
noſtre ſubſtance,commeie declareray aux traictez des playes faites par harquebuſes:
©
partant n'engendrent ſi tot corruption. Toutesfois nonobſtant icelle familiarité,
;D D Nature l'expulſe au dehors, ſi l'épaiſſeur des muſcles, ligamens, pannicules, ou au
tres parties ſolides ne l'empeſche,ou la figure de la partie qui ſeroit caue . Parquoy
I? leur obiection ne fait rien,ou peu à propos . Etconclus que ſilon applique vnepiece
! de plomb au Crane pour feruir de couverture au cerucau : iamais n'y pourroit fer
1 uir,nonplus que l'or ny la cougourde,ou autre maticre eſtrange. Et te fuffile des al- Reſolution
terations,& caries des os du Crane . Maintenant il ne reſte plus qu à declarer la ma. d'une doute
1
niere comme lon doit proceder à la curation de la concuſſion & commotion du cer
ucau. Ce que ie feray, I'ilplaiſt à Dieu, & le plus brefqualme ſera pollible.

li iiij
Le dixieſme Liure ,
374

La cure de la concuſsion of commotion , & ébranlement dis Cerueau . A


CH A P. XXIII .

Ovs auons par cy- deuant declaré les cauſes, ſignes & accidens de la con
cuſſion du Cerueau,fansplaye au cuir muſculeux ,ny fracture à l'os : partano
à preſent nous faut parler de la cure . Donc le patient ayant receu grande
concuflion à la teſte, & le Chirurgien ayant cognoiſſance que l'os n’eſt fracturé, mais
a crainte qu'ily ait quelque vaiſſeau rompu au dedans , promptement luy fauc tirer
du ſang de la veine Cephaliquedu coſté bleſſé. Ecluy en ſera ciré aſſez bonne quan
Gal av liv . cité ,ayant égard à la maladie preſence & future, & principalement à la vertu , & au
de Sanguin . tres choſes qu'ilfaut conſiderer à la ſaignée,ainſi que Galien declare . Et pour ce fai
mißione. re , appelleras vn docte Medecin . Puison luy raſera toutle poil de la tefte, & luy ſera
appliqué le cataplaſme cy - deuant eſcrit compoſé de farines,huile roſat, & oxymel ,
ou autresrepercuſſifs froids & humides ,leſquels ſeront renouuellez ſouuent.Ec fauc
euiter ceux qui ſont ſecs & fortaftringens,comme vnguentum de bolo ,
ou ſembla
bles , pource qu'ils oppilent par trop,& gardēt que les matieresfuligineuſes ne ſe peu
uent exhaler,tant par les futures, que par les poroſitez du Crane & du cuir qui cou- B
ure la teſte. Donc tant ſ'en faut qu'ilsgardaſſent qu'il ne furuinſt inflammation, que
pluſtoſt pariceux elle ſeroit augmentée . Pareillement luy faut donner clyfteresſou
uent, ſ'iln'a bon ventre , à fin de garder que les vapeurs ne montent au cerueau : qui
ſe fera auſſi auec l'aide des frictions & ligatures faites aux bras, cuiſſes & iambes, &
par ventouſes appliquées ſur les eſpaules, & le plus pres du col que lon pourra , lel
quelles ſeront aſſezgrades , & auec grande flábe,pour ſe faire plusgradereuulſion ,&
deltourner leſang qu'il ne monte par trop grāde impetuoſité au cerucau, lequel cau
Ouuerture de ſeroit inflammation , & autres mauuais accidens.Etle lendemain faut ouurir la veine
la veinePup- Puppe, qui eſt ſituée au deſſus de la ſuture Lambdoïde, laquelle a grande comunica
pis .
cion auec celle du cerueau : & eſtant ouuerte, faut commãder au patienc qu'il ferme
ſa bouche , & le nez , & qu'il reſpire le plus fort qu'ilpourra.Caren ce faiſant les mem
branes féleuēt, & par ce moyen le ſang qui ſeroit reſpādu entre leCrane & lesmem
branes,eft euacué,mais non celuy quieſtentre le cerueau & leſdites membranes. Ec
où tel accident aduient la choſe eſt deſeſperée ,ſ'il y en a trop grande quantité , & que o
Nature ne ſoit aſez forte pour le ſuppurer & ietter hors . Lon peut pareillemétouurir
quelques iours apres celle du milicu dyfrót,8c les arteres des cemples,auſſi les veines
de deſſous la lāgue , à fin que par telles ouuertures on puiſſe faire vacuation de la ma
Les accidens tiere conioincte. Pareillement le patientdoit tenir diece tenuë ,ſansboire nullement .
ſont encores vin ,principalemêtiuſques au quatorzielie iour , qui eſt le terme couſtumier où les
en vigueur accidés ſont encore en vigueur.Auſſi les medicamens repercuſſifs doiuét eftre con
iuſques au tinuez iuſques au quatrieſme iour : & puis apres on doit venir aux reſolutifs, com
14. iour .
mençant aux doux & amiables,commeceſte deco& tion . 4.radicis altheæ 3 vj . iteos,
cyperi , calami aromatician.zij.foliorum ſaluiæ ,maioranæ ,beconicæ, forum camo
millæ ,meliloti,rofarum rubrarum , ſtæchados añ.ñ.ß. falis communis Z iij. bullianc
omnia fimul ſecundum artem cum vino rubro & aquafabrorum , fiat deco & io :de la
quelle on fera fomération deux fois le iour auec feutres ou éponges.Et te conviéten
cécendroic noter qu'il ne fauttrop échaufer la teſte,depeurd'induire douleur & in .
Cerar de vin flammation.Puis appliqueras le Cerat eſcrit par de Vigo,lequela faculcéde reſoudre D
go propre moderément,deſſeicher & attirer par les poroſitez l'humidité qui eſt ſous leCrane: &
aux concul par ſa vercu aromatique conforte le cerueau & l'eſprit animal : lequel Cerareſten

frons de la ceſte forme.23.furfuris bene cricuratiziiij.farinæ lentium zij.rofarum ,myrcillorum ,


teſte.
foliorum & granorü eius an.zj.calamiaromatici žj.B.camomillæ , melilotian.m.b.
nuces cuprefli,numero vj.olei roſacei & camomillæ ,an.3 iij.ceræ albæ 3ij . B. churis ,
maſtiches,añ.3 iij.myrrhæ zij.pulueriſatis pulueriſandis ,& liquefa & is oleis cum ce
ra , omnia miſceancur ſimul: & fiat mixtura, quæ erit inter formam emplaftri & ceroti.
neg
Hiſtoire. Ecditen auoir vſé à yn Gentilhomme du Duc d'Vrbin , lequel cheur de cheual ſur le a
pont S. Ange à Rome , la teſte ſur vne pierre de marbre , & demeura en terre comme aga
mort ,& ſaigna par le nez , bouche , & oreilles : & ſubit la teſte luy deuine forcenflée,
enſemble tout le viſage,auec couleur liuide , & demeura vingriours apres eſtre bleſ
ſé, ſans parler : auſlı fut vingt iours ſans boire ny manger, fors de la gelée fondue &
des bouillons de chapon, auec ſucre, & autres ſemblables: neantmoins fut guary : ume
a
vray eſt qu'il perdit famemoire , & luy demeura vne balbutie, c'eſt à dire , fut begue, ced
Des Playes en particulier. 375
A ne ſçachant expliquer ce qu'il deſiroic dire. Ce qui confirme le dire d'Hippocrates, Hipp. aph.
lequelaffirme que ceux qui pour quelque cauſe ontconcuſſion au cerucau , perdent 58.lino 7.
incontinent la parole: voire comme note Gal.au Commentaire , toute action qui Qurtuscere
vient de volonté.Oren tel cas ie n'eſtime de petite efficace non moins que de Vigo , brem aliquas
la faculté d'un tel Cerat,d'auoir prohibé l'apoſteme qui le pouuoit aiſément fait au C.
cerucau.Ce qu'aucuns bigarrez hors deraiſon ,ne veulent conceder , & maintiennét
ne ſe pouuoir faire apoſteme en la ſubſtance du cerueau . Pareillement ne croyent
qu'on en puiſſe échapper,lorsqu'il y a portion de la ſubſtance du cerueau déperduë ,
& donnét des raiſons en l'air, que ne veux icy reciter pour euiter prolixité : mais il me
fuffira le prouuer par l’authorité des Anciens, qui ont laiſſé par eſcrit telles choſes
eltre aduenuës : ioint que par experience on le void ſouuent aduenir. Er premiere
ment Hippocrates dir, que celuy quia grande douleur de teſte, l'iladuient qu'ilietre Aph. 10.
t
du pus,deseauxou duſang par le nez , & par la bouche,ou par les oreilles , cela guarit an'lin. 6.
le malade, Pareillement Galien au liure deInequali temperie ,& Rafis au troiſieline li- Auliu, de
ure de ſon Continent,chap.4 .& Auicenne au chapitre des Exitures en la troiſicfme Iraeuali
B
partie du quatrieſme liure, chap . 20. affirment que Nature icrte la ſanıe faite au cer . tem crie.
c
ueau,par le nez,bouche,& oreilles . Or par experience auſſi on a veu aduenir telle
choſe. Etmeſouuient que Maiſtre Prochais Coulon , Chirurgien de defunct Mon- Fliſtoire.
1
ſieur de Langey,m'a recité & affirmé auoir veu yn ieune garçon en la ville du Mans, Prothuis
lequelaidoit àſonner vne groſſe cloche , & fe pendoit à la corde,parlaquelle futélc- Coulon .
uéen haut , & tomba la telte premiere fur les quarreaux . Et ſubit perdit la parole ,
l'oüie,& la veuë , & toute cognoiſſance & raiſon ,auecretention des excremens : puis
J.
toſtapres luy ſuruint la fieure ,aucc delire , & autres mauuais accidens.Etne fut le pa
C
tient trepané,à cauſe qu'on ne trouuoit aucune fracture au Crane . Ec au ſeptielmo
jour il luy ſuruint vne grande ſueur & ſternutation ,auec laquelle ietta grande quan
2
tité de pus par le nez ,oreilles, & bouche , Et apres ceſte euacuation les accidens celle
rent,& guarit:Dauantage i'ay faitouuerture ſouuentesfois pour faire rapporten iu
ſtice,àcauſe de la mort de pluſieurs qui auoient eſté bleſſez àla teſte : où ie trouuois
Et
grande quantité de pus auec pourriture de la propre ſubſtance du cerueau . Reſte
C ſemblablement prouuer que les playes auec perdition de ſubſtance du cerueau , ne
1
ſontneceſſairement mortelles. Ce que le bon vieillard Guidon recite auoir veu yne Liu. 8.de
playeen la teſte, partie poſterieure,de laquelle eſtoit ſorty de la ſubſtance du cer- lºvſ.des pare,
ucau,& le patient guarit. Ec quant à moy ,ie puis aſſeurer en auoir auſſi veu, dort icy
11
cn raconteray quelques hiſtoires.Désl’an mil cinq cens trente -huict ,commei'eſtois Hiſtoire.
03
à Thurin , Chirurgien de defunct Monſieur le Mareſchal de Montejan , penſay I'vn
1
de ſes Pages ,qui receut vn coup de pierre à la teſte par vn de ſes compagnons , ioüang
%
au palet ,& le coup fut ſur l'os Parietal,partie dextre, auec fracture & embarrure du
so ditos ,& fortoic par ſa playe de la ſubſtance du cerueau ,la groſſeur de demicauclaine
ou enuiron . Et fubic qu’apperceus telle choſe,difois la playeeſtre mortelle. Et ſur ce
faig arriua vn ieune Medecin ,lequelconteſta fort contre moy ,diſant qu'icelle por
tion du cerueau eſtoit graiſſe & non du cerueau . Auquel ie dis qu'il la gardaſt iuſ
D
ques à ce que i’euſſe habillé le patient , & que mon dire ſeroit trouué veritable. Et
apres auoir penſé ledit Page , à fin de prouuer par raiſon & experience qu'icelle por
co tion du cerucau ne pouuoit eſtre graille : ie luy dy premierement qu'au dedans le 11 ne fepeus
D
Crane il ne ſepeut faire graiffe,encores que les partics ſoientfroides àcauſe qu'ily graijje fons
1
agrande quantité d'eſprits animaux qui ſont tres-chauds & ſubtils, ioint lamulticu le Crane
de desvapeurs elleuées de tout le corps à la teſte , leſquelles choſes empeſchent la
1
generacion de la graiſſe: & quant à l'experience parladiſſection des corps morts , ia
mais on n'y void aucune graiſſe. Et neantmoins vouloit gagner fondire par touſiours
conteſter .En fin luy dis que l'experience nous mettroit d'accord Ce que pluſieurs
Gentilshommes & autres aſſiſtans deſirerent bien voir & entendre : carie tenoisque
:
fic'eſtoit graiſſe ,elle nageroit ſur l’eau : au contraire que ſi c'eſtoitde la ſubſtance du
!
cerucau ,qu'elle iroit au fonds. Dauantage ſi c'eſtoit graiſſe ,en la mettant ſur vne signes par
pelle chaude , elle fondroit ; & ſi c'eſtoit du cerueau ,il le deſſeicheroit & demeure - leſquels la
roit aride comme parchemin ,ſansſe fondre ou liquefier, & promptement bruſle - graiſſe est
roit,pource qu'il eſt gluant,humide,& aqucux . Etfurent faites telles éprevues, dont difiunguee
furtrouuédumocerucau
ſubſtance n dire eft
perduë,ilguarit, ienqu'il
revray: & combreſté queledit
demeura e cult telle portion de la substancdoe
Pagſourd. cerne4k .
i eſme e
376 Le dix Liur ,

А
Des playes de la Face. CH A P. XXI111 .

Difference R apresauoirainſi trai & é des playes & fractures de la teſte,main


des playes
tenant faut parler de celles de la Face , leſquelles ſe doiuent ſoi
de la Face .
gneuſementtraicter, à fin queles cicatrices ne demeurent laides
& difformes. Les cauſes peuuent eſtre ſemblables à celles du
Crane, ſçauoir eſt, externes. Mais aux eſpeces & differences on
peutadiouſter amputation totale des parties commed'vne oreil
le , ou d'vnæil creué, ou du tout ſorty hors de la teſte : aufli le nez
du tout coupé,8cauec portion de la léure, ou totalité d'icelle. Pareillement la playa
peuceſtre faice de choſe ſi violente, comme d'un coup d'harquebuſe, & autre choſe
ſemblable , quiaura rompu & emporté portion des os du palais : de façon que le pa
tient iamais puis apres ne pourra parler que Regnaut,c'eſt à dire , parlant du nez ,fil
Des playes n'eſt ſecouru parle benefice de la Chirurgie : ce qui te ſera declaré cy - apres . Nous
des ſourcils. commencerons donc aux playes des Sourcils,en continuant toutes les autres parties B
du corps . Aucunesfois il aduient que la playe ſera faite au trauers des ſourcils,en for
te que les muſcles & pannicules charneux , qui les meuuent & eſcuent ſeront du
tour dilacerez & coupez. Adonc les paupieres nepeuuent eſtre elleuées, & les yeux
demeureront clos,de façon que le patient ( fil veut voir ) ſera contraint ( voire apres
la conſolidation de la playe ) efleuer de ſa main ladite paupiere : ce que i'ay veu plu
ſieurs fois : & cel accident le plus ſouuent vient de l'imperitie ou inaduercance du
Chirurgien , faute d'auoir deuëment couſu la playe, & d'y auoir appliqué compreſ
Faute de fu- ſes, & fait ligature propre. Et où tel accident ſeroit ſuruenu , faudroic couper, & du
sure Goliga- tout amputer autant du cuir & du pannicule charneux qu'il en ſera beſoin : à fin que
sure,preiudi- la paupiere ſe tienne elleuée en haut, fans que le patient ſoic contraint y mettre la
main . Puis faut coudre deuëment la playe, decouſture de peletier : & par deſſusſera
appliqué de mon baume , & aux parties voiſines, tel medicament . 24. olei rofati zB .
albumina ouorum , numero duo ,boliarmenici, fanguinis draconis ,maſtiches añ. zj.
tel.c
agitentur ſimul,fiat medicamentum : & ſoit fait bandage & ligature propre pour
cas. Puis apres en vſera de l'emplaftre Gratia Dei, vel beconicæ , vel diachalciccos,
ou autres ſemblables,iuſques à ce que la playe ſoit conſolidée: & tellesplayes & au
Les playesde tres de la face, fecurent facilement,fi elles ne ſont accompagnées d'autres mauuais
la face fecu- accidens , ou que les patiens fuſſent fort cacochymes. Il aduient vn autre accident
rent facile-
meni. du tour contraire, que la paupiere demeure elleuée en haut,en ſorte que les malades
dorment les yeux ouueres,neles pouuans clorre : les Grecs les nóment Lagophpıhal
mos . La cauſe vient decauſe interne, comme d'un charbon , ou autre aporteme: ou
extericure,commed'un coup d'eſpée, ou d'autre balton . La cure ſe fera en faiſant
vne inciſion au deſſus de la paupiere,defigure de croiſſant, & que les angles ou poin
tes ſoient contre-bas ,à fin de relaſcher & abaiſſer ce qui eſt trop elleué de la paupic 1919
re, & ne faut nullement toucher le cartilage, pource qu'apres ne ſe pourroit plus re
leuer. Lereſte de la cure ſe fera ainſi qu'il appartient.

Des playes des Teux . CHA P. XXI. D

Moyen de Es playes des Yeux ſont faites de choſes poignances , trenchantes,


ietter les contondantes, ou autrement . Et ſelon icelles differences,faut que

corps eſtran le Chirurgien diuerſifie la cure . Or f'il y a aucune choſe eſtrange


ges hors
dans l’æil, fauc ſubit la tirer hors , renuerſant ( fil eſt beloin ) la pal
ľæil.
pebre doucement auec la queuë de l'eſpatule, ou vne piece d'argent. ha
Et où ne la pourras apperceuoir & voir , appliqueras dans l'eil crois ou quatre grains
de ſemence d'Ormium , ou Toute -bonne , laquelle a puiſſance de purger & nec
toyer les ordures , & petits corps eſtranges des Yeux , non toutesfois inſerez, & gran
dement attachez contre lesmembranes:mais où la choſe eſtrange ſeroic adherante,
& inſerée aux membranes, alors vſeras de cet inſtrument , lequel
poſeras ſur l'æil, &
ouuriras les paupieres , & preſſeras doucement l'æil: & par iceluy fera tenu ledic
cil ſtable, & auec petites pincettes ſera tirée la choſe eſtrange hors. La figure du talice
dit inftrument eſt telle .
Des Playes en particulier
.
377

A Figure d'un Speculum Oculi , pour dilater & tenir les paupicres flables : lequel ſe
peut accroiſtre referrer ſelon la grandeur des yeux .

dir

Or apres auoir extrait les choſes eſtranges , ſera appliqué dans l'æil tel medica- Medicamens
mene . Prenez germes d'eufs dixou douze, agitez en vn mortier de plomb , auec vn repercuſsifs.
peu d'eau roſe, & le mettez dans l’æil,& par ſus ledicæil , & parties voiſines, ſera mis

B repercuſſif tel que ceſtuy. 2. albumina ouorum nuin.iiij.pulueris aluminis rochæ


combuſtizij,fanguinis draconis zj.aquæ rofarum & plantag.añ.3ij.agitentur fimul,
16 .
fiat repercufſiuum : duquel on vlera, & ſera reïteré ſouuent. Autre. Prenez formage
frais, bien écreſmé, cau roſe & blanc d'æuf, & ſuc de acacie . Autre plus excellent &
de plus grande force à reprimer la fluxion , & oſter l'inflammation.22 gummiArabici
& tragacanthian.ziij.pfillij ,cydoniorum ,feminis porculacæ ,plácaginis,ſumach.añ.
zij.fiane mucilag. extrahantur cum aqua plantaginis , ſolani & rofarum ,& fiat collya
rium : duquelon en pourra ſeurement vſer,tant au dehors l'æil qu’au dedans.Etno . Poinct notde
ble .
teras que tous les remedes que tu appliqueras à l'æeil, & autour d'iceluy ſe doiuét ap
pliquer tiedes,tantà fin qu'ils penetrentmieux par lemoyen de la chaleur moderée,
qu'auſſi à raiſon que les choſesfroides actuellement ſont ennemies des yeux & de la
veuë , par incraſſation & ſtupefaction des eſprits viſifs: de fair, que i'en ay veu quel- Remedes fora
ques -vns à qui la veuë eſt demeurée trouble à faute de ce faire : comme aulli i'ay veu guliers pour
aucuns ayansplayes aux yeux faites par ponation d'aiguille ,ou de poinçon , ou choſes Sederdouleur
des yeux ,
с ſemblables en la ſubſtance de l'ail,toutesfois en la pupille , ſortir bonnequantité de
l'humcuraqueux, & guarir , en y appliquant les remedes ſuſdits , & tels mucilages. Et
par foisfaut faire inſtiler ou rayer du tecin lai & de femme laictante, parce qu'iln'eſt fi
chaud lequela faculté d'adoucir & appaiſer la douleurmondifier & nettoyer. Sem
blablementon pourra vſer du ſang de tourterelle, pigeon ou de poulets , inciſant la
veine qui eſt ſous leurs ailes . Iceux auſſi reſoluent,mondihent, & appaiſent la dou
leur. Aufli ſera appliqué ſur l'æil & parties voiſines ce cataplaſme, lequel a grande Cataplafme
vertu & anodyne & ledatiue de douleur, & prohibe la fluxion & inflammation. 2. forr anodyn.
carnis pomorum ſub cinere calido deco &torum Zv.vitellos ouorum num.iij.cafliæ fi
ſtulæ recenter extractæ z B.mucilaginis pſillij,aitheæ & cydoni.anzj farinæ hordei
parum : incorporeneur omnia fimul,fiat catap . Auſſi on peut vſer de poulmons de
La
mouton,ou d'autres beſtes,vn peu parboüillis en laict, & tous chauds les appliquer
deflus,& les renouueler promptement que le patient ſentira qu'ils ſeront froids. Et
où cedic remede n’auroit puiſſance de leder la douleur,à cauſe d'vne extreme cha
leur,ſoit fait cel remede . Prenez fueilles de ioſquiame vne poignée, cuittes ſous les
Cataplaſme
D cendres , puis pilées en vn morcier, auec mucilages pſilij & cydoniorum , extraits refriger
ant.
en cau de morelle & plantain : & en ſoit appliqué entre deux linges ſur les yeux &
temples. Autre . Prenez mucilages pailij, & cydoniorum , extraitsen vnedeco &tion
de papauer,& vn peu d'opium aueceau roſe.Ecoù la playe auroit beſoin d'eſtre mõ.
difiée& incarnée ,fera appliqué tel medicament. 2. fyrupi tofati de ficcis zi.aq. fæ Mandificatif
nic.& ruthæ an.3ij.aloëslocæ ,olibanian.38.miſce ad vſum dictum .Semblablement propre aux
les fiels de raye , de lieure,de perdris diſſous en eau d'eufraſe & fenoil , ſont propres à plages des
lamondification d'icelles playes. Pareillement ce Collyre . 2 aquæ hord. Zj.mellis yeux.
deſpunati ziij. aloës ter locæ in aqua plantag. & faccari cand. an.zj. fiat collyrium :
& f'ileſtbeſoin engendrerchair ,on vlera de ceſtuy .24. mucil.gummi olibani , ara
bicj,& cragacanthi,farcocollæ in aqua hordei extra&tæ an ziij.aloës ter lotæ in aqua incarnatif.
rol.31.ceru.vítæ & ablutæ ,thuciæ præparatæ an zB. fiat collyrium .
Tú . Or ilfaut nocer que la conion &tiue,au moyen de la ſolution de continuité, ou au
trement , f'elleue quelquesfois en ſi grande tumeur pour la defuxion d'humeur ou
378 Le dixieſme Liure ,

ventoſitez, qu'elle couure du tout la pupille , & fort bien fort hors des paupieres, & A
ſemble à vne chair ſuperfluë, perdant la couleur naturelle , & deuient rouge: qui ſe
fait au moyen de la douleur & chaleur eſtrange, auec ventolicé & quelque aquoſité,

en ſorte que l'ail ne ſe peut ouurir ny clorre . Et me ſuis trouué en compagnie d'un
icune Chirurgien , qui ſans moy vouloic couper & adapter remedes corroſifs pour ?

amputer l'exuberance de ladice conionctiue: mais ie l'engarday, parce qu'il eult eſté
cauſe de rendre aucugle ſon patient , auquel ordonnay vne fomentation d'une de
coction de camomille ,melilot,roſes,abſinthe, ruë, fenoil & anis , racine d'iris , & de
ſouchec; boüillisen laiết: & auec éponges furent
faites fomētacions, puisapres auec
ceſte -cy plus forte & deſiccatiue. 22.nucis cuprelli,gallarum ,balauſt.añ.zj.plantag.
abſinthij, hippuris, forum camomillæ ,meliloti,rofarum rubrarum añ.ñ. B. bulliant
fimul cum aqua fabrorum , fiar deco &tio pro foru. Semblablementon peut faire са

taplaline de ladite decoction,auec farineshordei ,fabarum ,puluerismaſtiches, myr


Collyre fin- thae, ireos . Puis en la declinaiſon de la reſolution, fuc vſé de ceſte liqueur dans l'oeil :
gulier pour laquelle a grandiſſime vertu d'aſtreindre, conſumer, ſeicher, & roborer ladice con
deſfeicher ionctiue relaxée,qui eſt telle . Faites durcir vn euf frais, & ſubit le dépouillez de la B
l'humeur con
tenu en la cocque , & oſtez lemoyeu : & dedans le reſte du blanc , mettez vn ſcrupule de vitriol
copionctiwe. Romain en poudre : puis l'épreindrez dans vn linge blanc & nec , & d'icelle liqueur
en foit mis quelques jours dans l’æil , auec quelque portion d'eau de forge, en la
quelleonauroit fait bouillir ſumach , & roſes rouges. Et te puis aſſeurer, que tel re
mede eſt de grand effect. Mais où le cas aduiendroit qu'il ſe fiſt chair ſupercroiſſante
en la coniončtiue,elle pourra eſtre conſumée par celte poudre . 22. oſlis ſepiæ & te
ſtarum ouorum calcinatarum añ.zj.fiat puluis ſubtilis.On peut pareillement vſer de
vitriol calciné,ou alum bruſlé,ou autres ſemblables :mais auec grande diſcretion ,en
vſant touſiours de repercuſſifs deſſus l’æil & à l'entour,pour obuieraux accidens.Or
il fautentendre , que la fuxion ſe fait quelquesfois en ſigrandequantité & qualité
d'humeur aigu , que le Cornée ſe rompt & fe creuc , de ſorte quetous les humeurs for
Aduertiſſe- tent hors. Dauantage icy noteras , que pendant que tu cures les playes & autres
ment au ieune diſpoſicions mauuailes des yeux,tu dois ſituer la teſte du patientallez haut , & tenir
Chirurgien. clos l'æil qui eſt ſain : à raiſon que toute partic vulnerée doit eſtre en repos, & parce c
qu'vn æil ne ſe peutmouuoir que l'autre neſe mcuue : pour ceſte cauſe le ſain doic
eſtre tenu bandé& clos ,à fin que l'æil malade demeure en repos , pour la connexion
& colligance qu'ils ont l'un auec l'autre par le benefice des nerfs optiques & motifs,
Dure & Pie -mere, Pericrane, veines,arteres , & autres parties , qui fait que lorsque
l'vn ſouffre, l'autre quelquesfois ſent la douleur de ſon compagnon : de façon que le
Chirurgieny doit prendre grande ſolicitude : pource que le plus ſouuent lon void
vne fluxion ſ'y faire ſi grande, que par les remedes ſuſdits ne peut eſtre arreſtée , de
force qu'il eſt beſoin d'vn autre plus extreme, quieſt le cautere actuelauec Secon ap
pliqué derriere le col , lequel a vne merueilleuſe efficace aux fluxions inueterées .
Qu'il ſoit vray , l'experience quotidianemonſtre que toſt apres que l'vlcere fait par
ledit cautere, iectebouë, la veuë ſe clarifie ,voire à ceux qui ja l'auoient quaſidu touc
perduë, ce qui ſ'eſt veu de freſche memoire à vn honneſte Italien Orféure, nommé
Hiſtoire di- mellire Paule ,demeurát en Nele, pres les Auguſtins de Paris, lequel eut vne fluxion
gne d'eſtre ſur les yeux , où pluſieurs, tant Medecins
que Chirurgiens , & autres,yauoient mis la D
bien notée.
main , deſquels receút peu d'aide: & ne ſe pouuant plus conduire, m'appella, & luy
conſeillay d'aller à l'extremeremede,qui eſtoic le Secon : ce que volontiers accorda,
& l'ayant appliqué , & ſon vlcere eſtant conuerrie en matiere ou fanie , commença
à mieux voir , & à meſure que ſon vlcere couloit , touſiours alloit en amendant , de
façon qu'il recouura du tout ſa veuë , & porta ledic Secon enuiron vn an ou plus : puis
f'en faſcha , penſantqu'il ne luy faiſoit plus aucun profit , dont le voulut oſter, &
faire clorre ſa playe : mais fix mois apres tomba en pareil accident , perdant la veuë
comme deuant. Parquoy me renuoya querir pour luy appliquer derechef ledit Se
ton , donc coſt apres recouura pareillement fa veuë , & le porte encore à preſent. ziy
Hiſtoire. Or ie ne te puis encores aſſez louer l'effe&t dudit Secon : car depuis peu de iours en
ça l’ay appliqué par le conſeil de lacques Houlier , DocteurRegenten la faculté
TE
de Medecine, homme de grande erudition & de ſinguliere do &trine, à vn ieune
homme âgé de vingt ans ou enuiron , lequel comboit ſouuent d'epilepſie : mais
incontinent que ſon ylcere commença à ietter ſanie, n'eft combé audic'accident :
& elt
Des Playes en particulier . 379
A Xeſt vray. ſemblable que le virus & venenofité prend iſſue par l'vlcere fait dudic Sc
ton. Ic diray icy ſommairement que c'eſtqu'Epilepſie. C'elt vn mot Grec,qui ſigni
fie ſurpriſe,ou retention de tous les ſentimens,dontiladuient que le malade chet en
terre bil n'eſt ſouſtenu . Car il perd tour à coup la veuë, l'ouye , & autres ſentimens,
comme par vne fyncope,ou comme par vne apoplexie.Maisily a difference. Car en
l'apoplexie & fyncope,iln'y a nul mouvement ny ſentiment: & en l'Epilepſie, le
corps ſemcut fortroidement,& trauaille de conuulſion ou retirement des nerfs in
uolontairement. On le nomme auſſi le mal fainat lean , pource que la teſte de fainct
lean cheut en terre lors qu'il fut decapité, puis poſée dedās vn plat, à l'appetic d'He 1

rodias. Or maintenantfauc deſcrire au jeune Chirurgien la maniere d'appliquer le seronsreme


de en l'Epic
Seton ,& luy en bailler la figure.Premierement faut que le malade ſoit aſſis ſur vne lepſie.
eſcabelle,luy commandanebaiſſer la teſte vapeu en arriere : à fin que le cuir auec le
pannicule charneux, ſoit plus laxe. Puis faut qu'un ſeruiteur cire & efleue en haut
ledit cuir,ayant raſéle poilſily en a , & alors leChirurgien pincera le plus profond
& pres du poil qu'il pourra ledit cuir, ſans aucupement coucher à aucun muſcle du
B col,pourles accidens quien pourroient aduenir,commeſpaſmes, & autres, & ſerre
rales tenailles ( alors qu'il mettra le cautere ardant ) aſſcz fort, & par ce moyen le
patient nc ſentira l'a &tion du feu. Cardeux douleurs enſemble,faites en meſmes Hipp.aph.
partie & licu,la plus grande fait que la plus petite ne ſe ſent point ou peu. L'ouuer- doloribus,
cure ſe doitfaireen long,& non en trauers:car par ce moyen l'euacuation des ma- & c.duli.2.
tieres ſe fera mieux pour la re &ticude des fibres. Les tenailles feront percées au mi
licu, pourpaſſer le cautere au trauers,lequel ſera en ſon extremité aigu , triangle,ou
quarré,àfin que ſon a &tion ſoit plus prompte. Puis ſoudain pafferas au cravers deſdi
testenailles,& cuir que tu auras cauteriſé,vne aiguille à Secon , enfiléede fil de cor
ton en trois ou quatre doubles , lequel ſera imbu & z trempé dans albumen oui &
olcum rolatum .Puis appliqueras compreſſes trempées audit medicament , & feras
ligature propre à la partie.
83

Les figures des Tenailles, Cautere actuel, & Aiguille à Seton ,ſont tels.
011
с
102

Di
ce
in
os

UNI
é

D
2
Orlelendemain on fera embrocation d'huile roſat autour du col , & fera conti
nué le ſuſdicremede auecleſdites compreſſes: & le Secon ſera imbu de digeſtif, faict Le Seton dois
de iaune d’æuf& huile roſat, iuſques à cequel'vlcere ierce bouë : & alors on vlera eftrefaict de
E d'vn telmedicament,autour deladite corde faire de cotton. 24. cerebenth . Venetæ fildecotton
ziij.fyrupiroſ. & abſinthij, añ. Z.B. pulueris ireos, diacrydij,agaricitrochiſcati, & moiſie.
ou foye cra
rheubarb. an. z. B. incorporentur omnia fimul, fiae medicamentum : duquel on Mundifica .)
vſeratantque l'onvoudra tenir l'vlcercouuert,pourcequ'ila vertu d'attirer les ma- rif
tieres du profond, & les mundifier ſans douleur . l'ay trouué puis n'agueres par ex
perience,quel'ouuerture faite auec vne groſſe aiguille triangulaire bien trenchante,
ſemblable àcelles des emballeurs, eſt moins douloureuſe, qu'auec le cautere actuel
cy-deſſus mentionné. Partantie conſeille au ieune Chirurgien,dene plus vfer defa
ditscauteres a &tuels.Lafigure de ladite aiguille t’eſt icy repreſentéc. Kk
380 Le dixieſme Liure ,
Figure de l'aiguille triangulaire. A

14

Desplayes des zoües. CH A P. XXVI .

Aintenant nous fauteh briefparlerdes playes des ioücs. Si la playe a beſoin


de coulture,la faut faire ſeicher, à fin que les cicatrices ne demeurent lai
des : car ily en a pluſieurs qui craignent tel accident , & principalement les
Medicamens belles Damoiſelles .Et pour ce faire,cu prendras deux pieces de toille neufue,qui ne
agglutina- fera ny trop groſſe ny trop deliée , de grandeur qu'il conuiendra pour la playe , cou
, propres uerces & emplaftrées de telmedicament. 2. pulu, maſt . fang. drac.thur.fár. volat.
sifs
aux furures , gypſi,picis,ſarcocollæ ,anzij.picisnigræ 3).B.alb.ouor. quæ ſuffi- B
i piſtic . Leblanc de l'æuf, auec de la farine fait le ſemblable . Et ſeront
ſeiches. ciant canth
traga : fiatmedi
appliquées à chacun coſté dela playe, & diſtant l'une de l'autre d'vn doige ou cnui
ron . Et ſeront laiſſées ſeicher, puis aprescouſuës en les approchant l'vne către l'au.
tre ,comme tu vois par ceſte figure. Et par ainſi la playe ſera glutinée , tant par ladite
ſuture ,que par les medicamens propres ,compreſſes & bandages: tous leſquels ban.
dages de la faceſe doiuent attacherà vne coëffe ou bonner denuit, que le malade
aura ſur la tefte .

***

wo

w D

Or quand la playe eſt foregrande & profonde, & les léures d'icelle fort diſtantes,
3 Auere forte lors telle futuren'y pourroit en rien ou peu ſeruir. Au moyen dequoy faul vſerd'ai
de future. guillesquarrées ou triangulaires,à fin qu'elles penetrent & paſſent plus aiſéinēt fans
grăde douleur,enfiléesde fil ciré,en trauersāt d'icelles les léures de la playc,&replier
Des Playes en particulier. 381
A le fil autourcinq ou fix fois ( en la maniere que les femmes font, lors qu'elles veulent
garder leursaiguilles ſur leur manche,ou les coulturiers dans leurs bonnets) & laiſ
ferainſi les aiguilles attachées iuſques à la conſolidation de la playe. Telle maniere Remedesauge
decoulture ſe faicaux léures : & ſont auſſi neceſſaires auxbecs delícure, c'eſt à dire, ure
becs, de lié.
aux léures fendues denatiuité,par defaut de la vertu formatrice. Mais telle coulture
n'auroit aucun effect f'il y auoitdu cuir entre les léures. Et partant le faut du tout
couper,ou autrement l’vnion ne pourroit eſtre faite. Autre maniere de ſucures pro
fire peu en telles playes, à raiſon que les parties ſont mobiles , tant par la maſtication
queleparler:partant le fil couperoit la chair:& encores pour celte cauſe, on doit
par leſditesaiguilles prendre beaucoup de ſubſtance charneuſe,comme ilappert par
1 ceſte figure.
je
‫ܐ‬،
Lafigure des futures desléures : & au deſſous t'eſt monftré l'Aiguille , autour de laquelle eft
entorrillé le fil,commedoit eftrefait au deſſus de la léure.
B

lie

En cetendroit ie reciceray vne hiſtoire, à fin que fil aduient entre les mains cel Hiſtoire.
accident,que eu faces le ſemblable. Cominci'eſtois à la Fere en Picardie,deux jours
apres la iournée ſainą Laurent,crouuaygrandnombre de ſoldats bleſſez, entre leſ
quelsyauoitvn Gaſcon, qui eut vn coup d'eſpće au trauers dela mandibule ſupe
ricure, penetrant iuſques à la bouche , auec grande difformité du viſage :& parce
qu'ilauoiteſté troisiours apres ſa bleſſeure ſans eſtre habillé , Binoſque Chirurgien
iuré à Paris &moy,trouualmes grandequantité de vers en ſadite playe, & grande
D fercur. Promptement luy lauaſmesſaplaye auec vne deco &tion d'abſinthe & aloës,
auecyn peu d'egyptiac,tantpour fairetomber les vers,que pour mundifier la pour
riture : & pourreſoudre la tumeurdes léures de ſa playe, filmes fomentacions refo- Remede aga
luciues:pareillementluy furent appliquez cataplaimesreſolutifs.Et ſubit la reſolu- glutinatif.
tion faite,leditBinoſque luy fit pluſieurs poinets d'aiguille en la maniere cy -deſſus
eſcritc:& pardeſſus & dedans ſa playe, ne luy fuemis autre remede que ceſtuy, 2.
terebenthinæ Venetæ 3 vj.gummi elem . 3 ij.pul.boliarmen. fangu.draconis,maſt.
myrrhæ,aloës añ.3.B.incorporentur ſimul,fiatmedic . & en peu de iours fut la playe choſe digne
duditGaſcon conſolidée,en reſtant qu'ın bien petit trou , pres la conionction dela defire notée.
mandibule inferieure à la ſuperieure,non plus grand qu'à mettrela teſte d'vne cſpin
gle:duquelluy ſortoit en parlant ou inaſchantgrandequantité d'eau fore claire, ce
>
qucøay ſouuentesfois veu. Et pour arreſter ladite aquoſité,luyfut appliqué au pro
fond de fon vlcere,de l'eauforte, & quelquesfois de la poudre de vitriol brune.Es
s
par ces remedes fut la playe guaric.
Kk ij

>
e
382 Le dixieſm Liure

A
Des playes du Nez . CHAP . XXVII .

Reduction
E Nezeſt quelquesfois bleſſé par playe, froiſſúre & fracture : & alors
du Net fra
Eturé. fauclereduire en ſon lieu naturel (fil eſt poſible ) auecques la queuë
d'une eſpatule ,ou d'vn baſton de bois propre , enueloppé d'eſtoupes,
cotcon ,ou linge,en elleuant & reduiſantles os en leur figure naturel
le : & apres la reduction faite, ſoient miſes compreſſes aux parties la
terales, pour tenir le nezen fa figure : leſquelles ſeront trempées & imbuës en vn rc
ſtraintif faitex albumine oui,maftiche,boloarmenio ,& ſanguine draconis , alumine
combuſto . Puis ſoit faite ligature propre,en ſorte qu'elle ne preſſe ſur le nez, de peur
de rendre puis apres le patient camus,comme aucuns ont fait par leur imperitic. Et
Vtilité des apres ce fait fautmettre dans les nazeaux centes cannulées aucunement plattes , leſ
tentes can- quelles ſeront attachées par vn fil,à la coëffe ou bonner du bleſſé, de peur qu'elles ne
nulées.
tombent: leſquelles ſeruiront de tenir les os fracturez en leur lieu naturel , & donner B
iffuë à la fanie filenya, & pareillement à l'inſpiration & expiration .

La figure des tentes cannulées eſt telle.

Or ſilencz ou portion d'iceluy n'eſt du tout tranché & abbatu , & qu'il y ait en:
core ſuffiſamment chair pour donner nourriture,alors le faut coudre ce quia lieu en
ſon inferieure partie ,quieſt cartilagineuſe ,qui ſe peut bien caſſer, enfoncer, tordre
& couper , mais non rompre ou fra & urer , comme la ſuperieure qui a nature & ſub
ſtance d'os .

Des plages de la Langue . CHAP. XXVIII .

Vne portion A Langue eſt aucunesfois vulnerée auecques perdition de ſubſtance, &
de la langue quelquesfois inciſee & fenduë au long , & autresfois en trauers . S'il y a per
entierement dicion de ſubſtance , iamais la piece ne peut eſtre repriſe, pource que toute D

sranchée ne le partie ſeparée du corps viuant,auec lequel elle eſtoit conioin &te par vie , perd la vie
peut reünir à
l'autre. en melmeioſtant. Or, comme diſent les Philoſophes,à priuationead habitum non fitre
grellw : mais felle n'eſt qu'inciſéeen long , facilementelt curée,en la reüniſſantauec
coufture: & f'elle n'eſt inciſée en trauers,& qu'il y ait encores quelque portion de ſa
chair pour bailler vie , il ſe faut bien garder la paracheuer decouper, ( pour l'excellen
ce de ſon yſage:)mais la conuiendra recoudre,en faiſant les poincts d'aiguille deſſus
w & deſſous : & lafaut tenir fermement, pendant qu'on la couſt, auec vn linge blanc,
ner & delić , pource qu'elle gliſſeroit d'entre les doigts , à cauſe de la lubricité, ainſi
pois
que fait vncaiguille,& couperas le fil le plus pres du næud
qu'il ce ſera pollible, de
peur qu'iccluy
ne foit mis entre les dents, lors que la lāgue lemeut en la bouche: qui mouc
h
pourroit eſtre cauſe que lespoin & s ſeroiêc dilacerez & rompus.Puis fautcommáder
au malade qu'il māge orge mudé ,lai & d'amádes, gelée ,coulis, prelifs ,æufs mollets, upet
& autres choſes ſemblables : & qu'il cienneſouuenten la bouche ſucre roſat, ſyrop de
sasi
ly
Des Playes en particulier. 383

A coings,de ceriſes,jus de ceriſes confices, ou autresſemblables confitures, pource que


telleschoſes alimencent & nourriſſent, & ſeruent de medicamens agglucinatifs. Or Hiſtoire de la
ietepuis aſſeurer,qu’oncques n'ay veu en aucun liure, ce que ict'eſcris de la langue, lägue preſque
nyouy d'aucun precepteur :mais ie l’ay pratiqué deux fois, comme cu orras à pre- coupée au fils
ſene. Vniour fus appellé en la maiſon de defun & monſieur Coüer, Aduocat en Par- de Comet,
lement,pour penſer vn ſien fils, âgé de crois ans : lequel comba le menton ſur yne Aduocat en
Parlement.
pierre, & ſecoupa de ſes dents bonne portion de l'extremité de la langue , & ne tenoic
qu'à bien peu de chair :& ayane peu d'eſperance qu'elle fepeuít reünir, cuiday para
cheuer la luy couper,mais toutesfois auec un tres- grand regret , veu que puis apres
n’eult peu parler : qui me fit differer, cognoiſſant que quelquesfois nacure fait des
choſes admirables : & que la langue eſt d'vne chair fungueule , laxe , & ſpongieuſe:
aulli qu'elle n'eſt ſubiecte aux iniures exterieures de l'air. Adoncques luy fis deux
poinás d'aiguillc, l'vn deſſus , & l'autre deſſous, & commanday à la mere dudic en
fancqu'elle cultà le nourrir des alimens predits : & vous puis aſſeurer qu'en peu de
joursI'enfantfuc parfaictement guary ,& à preſent parle trelbien. Vn cas ſemblable Autre hiſtoi
B arriua vn peu de temps apres au fils de monſieur de Marigny Preſident aux Enque- re du fils de
ftes, qui fut ſemblablement guary. le puis narrer vn cas pareil aduenu depuis n'a- monfieur le
gueresà vn charpentier,hommede bien en ſon eſtat, nommé maiſtre lean Piet ,de- Preſident de
Marigny.
meurant au fauxbourg Sain &t Germain des Prez, lequel comba d'aſſez haut ſur vne
piece de bois , & ſe coupa auſſi l'extremité de la langue, & ſubic vint vers moy pour la
luy paracheuer de couper, parce qu'elle ne tenoit qu'à peu de choſe : ce que ne luy
voulus accorder, veu l'experience que i'en auois faice auparauant . Doncques la luy
recoulis,& peu de iours apres fut pareillement guary auecques les remedes ſuſdits.
Parquoy ces choſes entenduës au jeune Chirurgien , faut qu'il traite bien ( f'il n'a
meilleur moyen ) les playes de la langue en la façon dite , & honneur & profit luyen
aduiendra.

Des plages des Oreilles. CHAP . XXIX .

Aintenant faut parler des playes des Oreilles , leſquelles ſont aucunesfois en quel cas
C
du tout coupées ,ou vne partie d'icelles,& aucunesfois reſte encores quel- se peut recou .
que portion qui tient . Parquoy faut auoir égard, comme auons dic , fil y a dre l'oreille
encoresſuffiſance nourriture , & lors tu y feras ſuture &
: de ton aiguille ne toucheras coupée.
au Cartilage,de peur que la partie ne tombe en gangrene ( ce que ſouuentesfois eſt
arriué) mais ſeulement prendras le cuir, & ce peu de chair qui eſt autour ledit carti
lage :& auec compreſſes & bandages,& remedespropres à ce faire , prohiberas l'in
flammation ,& autres accidens . Aulli donneras ſi bonordre , qu'ilne fengendre chair
fuperfluë au conduit de l'oreille ,de peur qu'elle ne face obſtruction , qui eſtouperoic
la voye de l'ouye. Pour ceſte cauſe tuy mettras touſiours vn peu d'éponges , à fin de
tenirle trou de l'oreille ouuert. Aufli vſeras de medicamens ſecs,attendu que la par
ciceſt cartilagineuſe, & par conſequent fort ſeiche. Etoù le cas aduiendroit qu'elle
fuſt du couc coupée,apres la guariſon & cicatrization, lemalade pourra porter ( pour
cacher ſon imperfection ) vn bonnetappellé calotte , & à l'endroit de ladite oreille,
ſera embourré de cotton ou drap , pour cacher le vice de ladite oreille qui aura eſté
D amputée.

Des plages du Col & de la Gorge. C H 4 P. XXX.

Es playes du col & de la gorge ſont ſimples, c'eſt à dire,auecques ſolution Diuifion des
de continuitéſçule és muſcles:ou compliquées, à ſçauoir auecques playe playes de la
en la chair & auxos, comme és vertebres. Souuentauſſi les veines iugú gorge er set.
laires, tant internes qu’externes , enſemble les Carotides fonc offenſées.
Quelquesfois la Trachée artere & Ocſophague ſont naurez,voire du cout coupez,
& pour les ſuſdites playes , fouuent ſenſuit la mort. Parquoy le Chirurgien deuant Prognoffic,
que ele coucher à la playe, doit faire ſon prognoſtic, ſelon qu'il verra les accidens
grands ou petits,d'autantque la ſolution de continuité eſt ſouuent cauſe de perdre
quelquemouuement,ou de la mort , comme nous auons dit. Car à celle du Col,lou

ucntesfois il y a quelque grand nerfou tendon atteint, qui eſt cauſe de la priuation
Kk iij
i

384 Le dixieſme Liure ,

du mouuement:& fi elles penetrent iuſques à la ſpinale medulle ,auec leſion d'icel- a


signes des le, le mal elt incurable . Les playesde l'Ocſophague & Trachécarcere ſont tres-diffi
playes de ciles à curer pour leur perpetuel mouuement, & que ladite Trachée arcere eſt carci
Toeſopha lagineuſe & exangue . Celles de l'Oeſophague ſe cognoiſtront , li le patient crache
gue.
Signes de cel du ſang par la bouche,& que ſon manger & boire lortira par la playe : & filelt du
lesde la Tra- tout coupé,nepourra iamais aualler , parce que chacune partie ſe recire , à ſçauoir !
chée artere. I'vneen haut, & l'autre en bas : & fi la Trachée arcere eſt bleſſée, le vent ſortira par la
signes des playe : ſemblablement crachera le fang, & n'aura ceſſe de touſſer. Celles des veines
playes des iugulaires & arteres carotides, eſtans grandes ſont mortelles, pource qu'elles ne peu
Teines iugue. uenteſtre eſtreintes & comprimées par ligatures , à cauſe que le col ne peuceſtre fort
Gal.deyju ſerré,que l'on ne ſuffoqualt le malade: au moyen dequoy ſ'enſuit vn Aux de ſang,
partium . qui eſt cauſe de morc : & fi le nerf recurrens eſt coupé du coſté dextre ou feneſtre ,la
voix demeure rauque : lide tous les deux , le malade ne pourra iamais parler , pource
Cure . que l'inſtrumentqui eſt cauſe de la voix , eſt tranché . Quant à la curation , ſi la playe
n'offenſe aucun grand vaiſſeau,ny la Trachée arrere, ou Oeſophague, & fi elle eſt pe . B
tite,ſera facilement curée: ſ'il eſt neceſſaire y faire poincts d'aiguille, ſeront faicts
comme auons diccy -deſſus: puisſera inſtillé terebenthine de Veniſe aucc vn peu de
Baume arri- bolfin ,ou bien de noſtre baume , qui eſt tel . 2.terebenth . Venet . Ib . B. gummi ele
ficiel de mi,z iiij.olei hyperico.ziij.bol . armen . & fangu.dracon.añ.3j.aquæ vitæ 3ij.lique
Psuthenr. fiant omnia fimul lento igne , & fiat balſam . vt artis eſt: addend.pulu.ireos Floren.
aloës, maſt. myrrhæ añ.zj. Duquel baumei'ay fait choſes admirables pour conſoli
der & agglutiner les playes, auſquelles n'y auoit choſes eſtranges, ou complication
des maladies : & par deſſus ſera appliqué l'emplaſtre diachalciccos, diffoulcen huile
roſat & vinaigre ,laquelle a vertu de reprimer leshumeurs, & euiter l'inflammation,
Playes des ou bien ſera appliqué l'emplaftrede Gratia Dei, ou de ianua. Et ſi la playe eſt auec
peines iugu- inciſion des veines iugulaires, & arteres carotides, l'effuſion de ſang ſera arreſtée, co
laires. me nous auons deſcrit au chapitre du flux de ſang : & lors que la Tracheartere &
Playes de la
Oeſophague ſeront coupez , le Chirurgien y fera future le plus proprement que luy
Trachée arie
ſera poſible, & le malade n’auallera choſe qui ſoit difficile à tranſgloutir, mais vfera
re oeſo
de bouillons, reſtaurans, gelée,orge mundé : & filcft beſoin de gargariſmes, celtuyo
phague.
ſera fort propre . 22. hord. ñ.j.flor. roſar.p. j. paſſul.mund .iuiubar. an.3. B. liqui
ric . 3.j.bulliant omnia fimuladden. mellis roſat.& fyrup. roſat.añ. 3. ij.Har garga
riſın . vt artis eft :duquel tiede en lauera & gargarizera ſa bouche: il leniſt & addou,
ciſt la partie,ſedela douleur , deterge & agglucine , & aide à la reſpiracion.
Oricy reciteray-ie ceſte hiſtoire,digne d'eſtre laiſſée à la ieuneſſe desChirurgiens.
Hiſtoire me
morable d'on L'an mil cinq cens ſeptante - quatre, le premier iour de May , François Brege,pacillier
parißier de demonſeigneurde Guiſc,futbleſſe à leinuille d'vn coup d'eſpécà la gorge,coupant
monſeigneur vne partie de la Trachée artere , & l'vne des veines iugulaires, dont lenluiuit grand
de Guife. Aux defang ,& vn chifflementpar ladite Trachée arcere. La playe fuc couſuë, & ap
pliqué remedes aftringens: & coſt apres le vent qui ſorcoit de la playe, l'introduiren.
tre le pannicule charneux , & l'eſpace des muſcles, non ſeulement de la gorge , mais

aulli de tout le corps ( commevn mouton qu'on a foufflé pour l'eſcorcher )


ne pou
uant aucunement parler . La face eſtoic cellement enfée qu'on ne voyoit apparence
de nez , ny des yeux.Voyant tels accidens tous les aſſiſtans iugerent que ledit Brege
auoit plus beſoin d'un Preſtre que deChirurgien : & partant l’excreme On&ion lùy D
fur adminiſtrée. Le lendemain Monſeigneur de Guiſe comınanda à maiſtre Iean le
Ieune , ſon Chirurgien ordinaire , aller voirledic Brege, accompagné de monſieur
Buho,Medecin celebre de Madame la douairiere de Guiſe , enſemble Iacques Gi
rardin , maiſtre Barbier Chirurgien au lieu de leinuille, leſquels l'ayans veu , ledic
Medecin fur d'aduis le laiſſer, n’eſperant aucune guariſon , & ne trouuoit le pouls
des arteres aucunement battre pour la grande enfieure du cuir. Ledit le leune ne betri
voulant laiſſer le malade ſans luy faire quelque choſe, & comine hardy operateur , confit
pour la bonneexperience qu'il a eu d'vn vif eſprit , fut d'auis d’vſer d'vn extreme re
mede,qui fut luy faire pluſieurs ſcarificationsaſſez profondes, par leſquelles le ſang
& ventofitez furent vacuées. En fin ledic patiſſier recouura la parole , & la veuë , & there
fut quelque temps apres du tout guary , par la grace de Dieu , & eft encore viuant,fai ament
s
ſant leruice à Monſeigneur de Guiſe de ſon eſtat de patiſfier.
Siplus
Des Playes en particulier. 385
А Autre Hiſtoire.
1 Noble homme François Preuoſt, Enſeigne de la Coronalle de monſieur de l'Ar Pourquoyle
10 chan, aagé de vingt- cinq ans fur bleſſé d'un coupd'eſpec au trauers de la gorge , pal- bras tomba
Lu fant presla Trachecartere, quicoupales ramcaux de la veine & artere iugulaire:dõt en la paraly.
ilſuruint un bien grand flux de ſang, quià bien grande difficulté fue eſtanché. Da- fie.
‫ܐܐ‬ uācage vn des nerfs vocales furcoupé.Semblablement les nerfs qui naiſſent des ver. parol
Pourquoy
e eſtoitla
es tebres du col , qui ſe diſperſent aux bras : dont tout ſubit le bras demeura impotenc deprauee.
& paralycique. Dauantage la parole grandement deprauec :ioina que le col demeu Pourquoyle
RI sa vn peu cors, nele pouuant tourner commeauparauant.Neantmoins eſt reſthappé collayde
bi la vie ſauue. Il fut mené en la maiſon de maiſtre Pierre Pelorot , maiſtre Barbier meura tors a
Chirurgien demeurant à la place Maubert , dont ſubicfus enuoyé querir par lema cauſe des
FCC lade , pour le penſer auec ledit Pelotot . Où eſtanc arriué , & l'ayant penſé , i’eus vne nerfs og mua
-Yc grandedesfiance de la gueriſon, pour les accidensquiluy furuindrenc.A ceſte caure quſelesdu col
i furent
ie fis appeller meſſieurs Cointeret , & Pietre , hommes bien entendus en la Chi couper.
rurgie, & filmes rapporten Iuſtice,qu'à grande difficulti en pourroit-ilreſchapper,
B & queſa playe eſtoitmortelle. Ie l'ay penſé iuſque à la fin , & vieu l'a guary. Tou
cesfoiselt demeuré impotent du bras , & fa parole deprauce.
Autres hiſtoires memorables. CHAP. XXXI.
li
08 Rencet endroitieveux bien reciterces trois hiſtoires , à fin qu'elles
ile feruent d'inſtruction ſignalec pour le jeune Chirurgien ,litelles playes
ng luy tombent entre ſesmains. La premiere fut l'anmilcinq censcin Premiere
ECC quante : Vn ſeruiteur de Monſieur de Champagne,Gentil-homme histoire.
co du pays d'Anjou, fut nauré d'vn coup d'eſpee à la gorge,en ſorte qu'il
& auoitivne des veinesiugulaires coupee auec la Trachee artere , au moyen dequoy
auoitvn bien grand Aux defang: ioint qu'il ne pouuoit aucunement parler, iuſques
à ceque la playe fuſt couſuë & medicamentee. Or pendantque les medicamens
с
cſtoient liquides, il les actiroitentre les poin&s d'aiguille , & les rendoit par la bou
che. Dont confiderāc la magnitude de la playe,& la nature des parties bleſſees,prin
cipalement de la Trachee arcere & veine iugulaire , leſquelles ſont ſpermatiques,
froides& ſeiches, par ainſidifficiles à reünir :auec ce auſi que la Trachee artere eſt
fubiekeau mouuement qui ſe fait en la deglution , à raiſon de la cunique interne la
DS quelle eſt cótenuë en celle de l'Oeſophague,obeiſlant l'une à l'autre par vnmouue
ment reciproque , comme corde à double chefdedans une poulie : conſiderant auſſi
l'vlage deſdıces parties, c'eſt que la Trachee artere ſerc à la reſpiration , laquelle eſt
old neceſſaire à la fymmetrie & chaleur vitale du caur , & que la veine ingulaire eſt for
rcquiſeà la nutrition des parcies ſuperieures. Dauantage ayant cſgard à la tres grā
Do de quantité de ſang , qu'il auoit perdu , & perdoit par la playe (quieſt le threſor de
15 Nature, conſeruant la chaleur naturelle & eſprits vitaux ) & autres accidens , faiſois
mó prognoſtic de more prochaine : coucesfois ie ce puis aſſeurer qu'il eſt rechapé . Ce
CC que ic croy eſtrepluſtolt aduenu par la grace de Dieu , que par le moyen & ayde de
l'hõme,ny desmedicamens . La ſecode hiſtoire eſt,quedepuis peu detemps eſtoient Secondo
D deux Anglois logez enſemble , pres laporte S. Marcel,en cette ville deParis ,dont hiftoire.
I'vn auoit quelque fomme d'eſcus, & vne aſſez groſſe chaiſne d'or auec quelques au
jf tres riches bagues qu'il porcoitordinairemét ſur ſoy. Son compagnon voulants’em
parerde telsioyaux fic cant qu'il le mena ioüer vers le bois de Vincenne: & eſtant de
Je dans les vignes , luy coupala Trachee artere & l'Oeſophague , & luydonnacertains
coupsdedague, 8cpenſoit bien l'auoir tué , le laiſſant preſque en la chemiſe. Ayant
0 fait ceſte trahiſon & mefchanceté, incontinenc retourna en ceſte ville . Puislenauré
quiauoit feinceſtre mort,ſe leua,& fic tant qu'il ſe treina à la maiſon d'un paiſant,le
quel par pitié le fic penſer & medicamenter. Ilfur apporcé en ceſte ville ,où coſt apres
vndeles compagnons m'enuoya querirpour le penſer :& trouuay qu'il auoitla 1ra
! chcearcere auecl'oeſophague,ou Mery (qui eſt la voye duboire & du manger) en
tịcrement coupee : & lubicie recouſus ſaplaye,prenant la Trachecartere ,& r'appro
chant plus prez qu'ilme fut poſſible ſesdeuxextremitez l'vne contre l'autre:mais de
l'Oclophague no,par ce qu'il s'eſtoit retiré versl'eſtomach:puis àſaplaye appliquay
Kk iiij

1
i

e ſme
386 Le dixi Liure ,

remedes auec compreſſe & ligature propre : & incontinent qu'il fut ainſi habillé , co - A
mença à parler ,& nommer celuy qui luy auoit faiæ cetexcez.Le meurcriertoſtapres
fut pris aux faux -bourgs S. Marcel : & le trouva- on ſaiſy des hardes dudic patient,
donc il fut conſticué priſonnier, & le faic verifié apres la mort du patient, laquelle fut
le quatrieſme iour de ſa bleſſure. Toſt apres le meurdrier fut rompu ſur la rouë pres
Saincte Catherine du val des Eſcholiers , & lemeurtre verifié , pour auoir recouſu la
playe dudit patient,l'ayancfait parler . La troiſieſme hiſtoire preſqueſemblable d'vn
Troiſieſme
Allemand ,penſionnaire d'un banquier nommé Perot, demeurát à la ruë des Noyers
hiſtoire.
en ceſte ville de Paris ,lequelpar vne phreneſie, & folle opinion , la nui & ſe couppala
gorge d'vn couſteau ,& fe donna pluſieurs autres coups,tant au Thorax qu'au ventre,
dont aucuns penetroient au dedans , & les autres eſtoient ſuperficiels .Lelendemain
matin , aucuns de ſes compagnons le voulans viſiter le trouuerent fortmal , auec
grande quantité de ſangreſpandu autour de luy . Et voyant cel ſpectacle croyoient
& penſoient que c'cuſteſté ſon ſeruiteur qui luy auoit faic telexcez, parce qu'il cou
choit en ſa chambre:lequel fut prins & mené priſonnier au Chaſtelet,en luy mettát
ſus auoir ainſi meurdrylon mailtrę. Or ie fus enuoyé querir pour viſiter & penſer le B
malade : & voyant la Trachee arcere & l'Oeſophaguccouppé, auec pluſieurs autres
playes,n’eus aucune eſperance de ſa vie : parquoy fus d'aduis qu'on appellaſt Eftien
ne de la Riuiere , Chirurgien ordinaire du Roy , & Germain Cheual, Chirurgien
luré à Paris , & fut conclu entre nous, qu'il falloit recoudre la playe de la gorge, come

Confeßion ila eſté recicé cy - deuant . Promptement la playe couſuë & bandee, ledit patient Al
au malade. lemand commença à parler : & confeſſa que luy -meſme s'eſtoit fait tel excez, & def
chargea du tout ſon pauure ſeruiteur en nos preſences, & de pluſieurs autres , & prin
cipalement de deux Notaires ,& d'vn Commiſſaire du Chaſtelet: parce moyen fuc
mis ledic ſeruiteur hors de priſon , & abſous entierement par la confeſſion quefit ſon
maiſtre : vous puis aſſeurer qu'il veſcut quatre iours , iaçoit que iamais depuis fa

bleſſure ne ſçeut aualler aucune choſe,mais fut aucunement alimenté par clyfteres
nutritifs, & choſes odoriferantes nutriciues , comme mie de pain chaud, trempee en
vin , & autres choſes ſemblables que ie te laiſſe à dire , à caulc de bricfuecé. Seule
ment ict'aſſeureray, que par le benefice de la Chirurgic , fut donné moyen audit o
Allemand , de parler par l'eſpace de trois iours : qui futcauſe que ſon feruiccur, &
ſon hofte furent du tout deſchargez, & la verité du faic enticrement cogncuë.

Des plages du Thorax ou Poictrine. CHAP . XXXII .

1.
Es playes du Thorax ou Poitrine , les vnes ſont faites par deuant , les
zd.
autres par derriere : aucunes penccrentau dedans & profondement,
les autres non : aufli aucunes ſont auec leſion des parties contenuës,
Difference cõme mediaſtin , poulmons, cæur, diaphragme, veine caue & grande
desplayes arcere aſcendante , & quelquesfois penetrent de part en part tout au
du thorax. trauers du corps, auecfra & ure d'os pulſez au dedans,par l'entre de la playe ,& àla
ſortie chaſſez au dehors : parquoy aucunes ſont mortelles, les autres non. Les ſignes
qu'elles penetrent au dedans ſont cogneus , quand l'air lors de la playeauec vn fif nie
2075
Signes que la flement. Etpour bien cognoiſtre cela on
, fera boucher le nez & bouche du malade,
playe eštenla à fin que ſon ventſoit retenu. Ce faiſant, ſi la playe penetre , on verra ſortir le vent, D
capacité du approchant vne petite chandelle allumee pres la playe , & lors on voit la flambeſc
Thorax .
mouuoir , & quelquesfois eſteindre la chandelle: joint auſſi que le malade a peine
Lesſignes quide reſpirer & expirer, 8c principalement quand il y aura du ſang tombé ſur le Dia
quelle partiephragme. Les lignes par leſquels on cognoiſt le cæur eſtre bleſſé, c'eſt qu'il ſort
eft offenſée. grande quantité de ſang , auec yn tremblement vniuerſelde cout le corps : le pouls
cſt forc languide & petit, la couleur fort palle & ſueur froide, auec ſyncope, lesex
ele
l
Signes du tremitez demeurans refroidies , & promptement la mort s'enfuit. Toutesfois ie pro
ceurbleſſé. tefte auoir veu à Thurin vn Gentil - homme , lequel ſe combatoit auec vn autre,
ales
qui luy donna vn coup d'eſpec ſous la mammelle ſeneſtre penetranciufques en la h
Hiſtoire. ſubſtance du cæur , & ne laiſſa de cirer encores quelques coups d’eſpee concreſon proi
ennemy qui s'enfuyoit, le pourſuiuant la longueur de deux cens pas , puis com
ba en terre mort : & en feis ouuercure , où ic trouuay vne playe en la ſubſtance du
cæur , de grandeur à mettre le doigt , & grande quantité de ſang combé ſur le 10,
5
Diaphragme. Les ſignes qui aduiennent quand les poulmons ſont vulnerez ,c'eſt
alapl
Des Playes en general
. 387

A qu'il ſore de la playe vn fangſpumeuxauec vne toux,lemalade ſe couche volontiers


ſur la playe, & en telle ſicuation quelquefois parle aiſément, & ſe tournant de l'autre signes des
coſté perd la parole,& a grāde difficulté de reſpirer ,& douleur aux coſtcz qui n'eſtoit poulmons
bleffez.
auparauant.Les ſignes quidemõltrent le Diaphragmceſtre bleſſé, fontpeſanteurau
lieu bleſſe ,delire , c'eſt à dire percurbacion de raiſon , qui ſe fait parla communicatio
des nerfs de la ſixieſme coniugaiſon qui s'inferent au Diaphragme : grande difficulté Diaphragme.
d'halener, touxde douleurs aiguës: les flancs ſe recirent & rellerrentcontremont: &
parceſte grande & vehemente inſpiració ,elt quelquesfois attiré l'eſtomach & les in
teſtins par la playe en la capacité du Thorax ,ce quei’ay remarqué à deux perſonnes:
L’yneſtoit aide à maçon , lequel futbleſſé au milieu du Diaphragme,en la partie ner Hiſtoire mea
ueuſe,doncilmourut le troiſieſmciour:& luy ayant ouuert levêtre inferieur ,ne peus morable.
trouuer ſon eſtomach: ce qui me fitgrádement eſmerueiller,penſant que ce fuſt vne
choſe monſtrueuſe d’eſtre ſans eſtomach . Mais ayant diligementconſideré ,cogneus
en fin qu'il eſtoit monté dans le Thorax , iaçoit que la playedu Diaphragme ne fuſt
plus grande qu'à mettre le poulce:&cayancouuertle Thorax, trouuaylediteſtomach
enfé & plein de vent, auec peu d'aquolicé. D'abondancie neveux omettre ceſte hi- sure hic }

B ftoire aduenuë depuis peu detemps,d'vn Capitaine nõmé François d'Alon natif de Noire.
Xaintonge , lequel eſtant à la ſuite de Monſieur de Biron , Grand maiſtre de l'artille
rie de France, receur deuant la Rochelle vn coup d'harquebuſe , dont l'entree eſtoit
à la fin du Sternum pres le cartilage ſcutiforme,paſſantau trauers du Diaphragmeen
la partie charneuſe , dont la ſortie eſtoit entre la cinq & fixieſme des coſtes vrayes du
coſté gauche , duquel coup ſa playe fut bien conſolidee par dehors, toutesfoisilluy
reſtoit touſioursdepuis vnc debilité d'eſtomach,côme vne eſpece de cholique,à rai
ſon dequoy il n'oſoit ſouper que bien legerement. Huict moisapres luy ſuruint vne
grande douleur au petit ventre, come vne colique, & fut ſecouru bien ſoigneuſemēr
par Monſieur de Malmedy,docteur Regentenla faculté deMedecine,& Lecteur du
Roy , & monſieur du Val pareillement docteur en la faculté de Medecine , hommes
fçauans en la Medecine & Chirurgie:neātmoinsquelques remcdes qu'on y peut ad
miniſtrer,mourut, & fus d'aduis l'anatomiſer,pour ſçauoir la cauſe de la mort, & des
grandes douleurs qu'il ſentoit pendantſa maladie: ce qui fut fait par Iacques Guille
с
mcau , Chirurgien du Roy , & Iuré à Paris , grandement verſé en l'anatomic, & és au
tres partiesde la Chirurgie :& fur trouué en la capacité du Thorax vne grande partie
dell'inteſtin Colon remply de vent, qui eſtoit entré par le trou du Diaphragme fait
par la bleſſeure : toutesfois n'eſtoit icdit trou ſuffiſant qu'à mettre le boutdu petic
doigt. Maintenant nous retournerons à noſtre propos . On peut cognoiſtre le ſang signes pour
eſtretóbé dedans le Thorax par la difficulté de reſpirer , pourucu que le patient ſoit cognoiſtre lo
aſſis ou debout : car eſtantcouché ſur l’eſpine du dos , le fang contenu en la capacité , ſang eſtre
s'eſpanche du long de l'eſpine,ne comprimant nyles Poulmons, ny le Diaphragme , contenu au
Thorax .
qui fait que quelquesfois il y a grāde quantité de ſang córenu audit Thorax,au moyé
dequoy le Chirurgien ne fituant bien ſon patient , peuteſtre trompé en ſon progno
fic.Pareillemétauſſi ſe cognoiſt par là , & parl'accroiſſement de la fiéure ayant l'ha
leine puante , & crachement de ſang, & autres accidens qui prouiennent, lors que le
fang eſt hors de ſes vaiſſeaux , ſe conuertiſſancen vne ſanie fecide alterant les parties

cſquelles elle touche de la ſubſtance ou de la vapeur.Auſſi que le malade ne peut de


o meurer couché que deſſus le dos , &a volonté devomir :deſireeſtre ſouuent leué, qui
eſt cauſe qu'il tõbe en fyncope, à cauſe de la faculté vitale qui ſouſtient le corpseltác
els grandemēc debilitee , tant à raiſon de la playe , qu'à raiſon des gremeaux de ſang , qui
en quelque partie qu'ils tóbent,acqueransqualité veneneuſe par corruption du lang
failly de ſes vaiſſeaux, affoibliſsét & dillipentgrādemét les forces du cæur.Lesſignes spinale
medule.
less que lamujielle de l'eſpine eſt bleſſee, c'eſt qu'il ſe fait paralyſie , & fouuent conuulgo
ou ſpaſme:le ſentimétsz mouuemēc des parties inferieures ſubitſe perd , & les excre.
here
mens cóme macicrc fecale & lvrine,lontieteez inuolontairement,& fouuenc du tout
retenus.Les ſignes que la veinc caue & grāde artere ſont vulnerees,c'eſt que le mala. VeineCare
demeure promptement,à cauſe de la ſubite & grande vacuation qui ſe fait du fang & O grande
eſprits qui répliſſent le Thorax,faiſantceſſer l'a & ion des Poulmons & du caur,dont doute pour
0
100 : le pauure malade eſt promptement ſuffoqué.De Vigo au Traité des playes de la poi- la curation

for trine, ch.1o . dit qu'il ya diſcord entre les Chirurgiens , par-ce que les vns ſont d'auis des plages du
h de clorre la playe penetrante au dedans le plus ſubit que faire le pourra ſanss'amuſer Thorax .
oc
388 Le dixieſme Liure ,
à la tenir ouuerteauec tentes,depeur que l'air froid n'entre au cæur, & que leseſprits A
vitauxſortent & fe diſſipent. Les autres tiennentlecontraire, & commandent de te
nir la playcouuerte:voire ſi elle n'eſt grande,qu'il la faurouurir,afin que leſang con
tenu au dedans puiſſeeſtre vacué,craignant qu'ilne ſe pourriſſe & putrefie, dont fié
ure,fiſtule,&autres pernicieux accidens aduiendroient. Or veritablement ceux qui
tiennent quepromptement faut clorela playe ſans y mectre aucune tente, ont gran
de raiſon, pourucu qu'il n'yait point de fang, ou bien petite quantité combee au de
dans, de peurdes accidensſuſdits. Auſſi ceux qui tiennent qu'il faut tenir la playe
ouuerce ,ontſemblablement raiſon , pour les accidens qui peuuent venir , eſtant le
ſang tõbé en grande quantité au dedans & recenu. Et en cet endroicie veux reciter .

Hiffoire. ceſte hiſtoire. Extant à Thurin au ſeruice dedeffun & Monſeigneur de Montejan, ie
fus appellé pour penſer yn ſoldat nommél'Eueſque , natif de Paris , qui eſtoit lors
fous la charge du CapitaineRenoüart , qui fur bleſſé de trois grands coups d’eſpee,
deſquels en auoitvn au coſté dextre ſous la māmelle,où la playe eſtoit aſſez grande,
penetrant en la capacité du Thorax , & eſtoic decoulé grande quantité de ſang ſur le
Diaphragme, qui empeſchoic la reſpiration, & ne pouuoit qu'à bien grandepeine B
parler, ayant vne fiéure fortvehemente, & auec lacoux ieccoicle ſang par la bouche,
& diſoit ſentir vne douleur extréme au coſté bleſſé. Or le Chirurgien qui premiere
ment l'auoit penſé,auoic couſu du tout ſa playe,de ſorte que rien n'en pouuoit ſortir:
& le lendemainie fus appellé pourviſiter le malade,où eſtant arriué,voyantles acci
dens & la mort proche, fus d'aduis de deſcoudre la playe , à l'orifice de laquelle ie
trouuay du ſangcoagulé,dontſubit feis efleuer le malade par les jābes la teſte en bas,
laiſſantvne partie du corpsdeſſus leliet , s'appuyant vne main ſus vnceſcabelle plus
Moyens de balſcquc lelia :&eſtantainſi ficué,luy feisfermerla bouche & lenez , à finque les
faireſortir poulmonsſe tumefiaſſenc & le Diaphragmes'eſcuaſt,& les muſcles intercoſtaux ſe -2

1
decoulsangaude cóprimaſſent, enſembleceux de l’Epigaſtre, afin que le ſang decoulé au Thorax fuc 1

é iecté hors par la playe: & encores pourmieux faire, mettois le doigt aſſez profonde
Thorax . menten la playepourdesboucher ladite playe du ſang coagulé , & en ſortit prés de
feprà huictoncesjafetide & corrompu: puis le feis ſituer au liat, & luy faiſantdesin
ie &tions en la playe d'eau d'orge , en laquelleauois faictbouillir miel roſar& fuccre
candi, le faiſois tourner de coſté & d'autre : & derecheflefeis efleuer par les iambes
cõme auparavant. Lorson voyoit ſortirauec ladite iniection des petits thrõbus& gre AP

mcaux de ſang. Cela fait,lesaccidens diminuerent, & petit à petit ceſſerent.Lelen .

demain luy fis encoreinie&tion ,en laquelle adiouſtay centaure, abfinthe,aloës,pour


encores mieux mundifier:mais le malade coſt apres me dit qu'il ſentoit vne tres-grā
deamertumcen la bouche , & volonté de vomir. Alors me vint en memoire auoir SON
On ne doit
faire inie veu aduenir vne pareille choſeà l'HoſtelDieu de Paris,à vn quidam qui auoitvne fi 2001
ctions ameres Itule au Thorax :& conſiderant que celles choſesameres s’imbiboient en la ſubſtáce ...ÁCI
au Thorax. des poulmons,& que parleur rarité & ſpongioſité facilement ſe comuniquoient à la 10
Trachee arcere & Deſophague, & parconſequentà la bouche , cela fut cauſe que bell
n'y appliquayplus( & ne feray) celles choſes ameres en telles playes, à cauſe qu'elles
dónenc plus de faſcherie au malade que de bien. Or pour conclure, ladice playe fut ſi dla
bien traittee, qu'outre mon eſperáce lemalade guaric.le reciteray ſurce propos vne vG
autre hiſtoire.Quelque temps y a que fus appellé pourtraiter vn Gentil-home Alle. D
Hiſtoire. mand,au logisdeS.Michel,ruës.Denys,lequel futbleſſéd'uncoupd'eſpcepene Care
trant au Thorax: & pour le premier appareil le penſa vn barbier ſon voiſin , & mic
vne aſſez groſſe tentededansla playe. Le lendemain viſitay ledit Allemand ,& ayant
veu ſa playe, & examinés'il y auoitdu ſang coulé au dedans, cognoiſſant qu'il n'y en
auoit point,pource qu'il n'auoit fiéure, nypeſanteur,& qu'il n'auoit craché du fang:
lors luy oſtay ſa tente , & luy inſtillay de mon baume , & par deſlus vn emplaftre de
Diachalciteos, & coſt apres fut guary: ce que le proteſte auoir faicen cas pareil par plu
fieurs fois. Et puis icy atteſter , que pour tenir crop longuement destentes és playes
du Thorax,icelles degenerenten fiſtules,& fonc renduës incurables le plus ſouuent.
Andreas à Cruce, Medecin tresfameux à Veniſe, en ſon quatrieſmeliure,fe & ion
premiere de fa Chirurgie, parlant des playesdu Thorax , & comment il faut cirer le une
fang ou autre humeur de la capacité d'iceluy, recommande entre cous remedes l'em
plaître quis'enſuic,duquel voicy les paroles expreſſes.Nous trouuons tres- ſeur & ex
pedientvſerde l'emplaſtre qui s'enſuit, aux playes du Thorax & séblables, appliqué
Des Playes en particulier . 389

A exterieurement, ſans mettre aucunement tentes ny cannules , que ie puis aſſeurer,


& prensDieu à teſmoin, qu'ileſt d'vn effe & merueilleux : pour raiſon dequoy il eſt
appellé ſain &t , digerant les playes profondes, anguſtes& cauerneufes, roborant les
parties voiſines , attirant par vne merueilleuſe prouidence les matieres eſtranges du
profond & centre du corps , & fi ilabſterge ,deſſeiche, & conſolide toute playe fai
te d'eſtoc ſans nullement trauailler le malade. C'eſtoit des ſecrets de defunct mon
pere , qui a long temps regné en ces quartiers auec yne honneſte reputation . Ileſt
preparé comme s'enſuit .

2.reſinæ pini recécis claræ & odoratæ z xij.olei laurini puri,terebenthinæ opimæ,
1 an zij.gummielemni tranſparentis, grauis ac boniodoris , z iiij. miſce.
Il faut tout premierement mettre la reſine & la gôme en yn poillon, ou petit ballin
d'eſtain ſur le feu , le remuant iuſques à ce qu'ilsſoient meſlczenſemble l'vn auec
l'autre : puis fauc adiouſter l'huile laurin & la cerebenthine , & derechef les faire re
bouillir , remuant touſiours: & lors que vous verrcz que ledit medicament viendra
eſpés,le faut paſſer au trauers d'vn gros linge , & le mettre dans vn por de terre pióbé,
& bien bouché , & en eſtendre ſur du cuir , & faire vn emplaſtre qui couurira nó feu
B lemét la playe,maisquatre ou cinq doigts ésenuirós , luy donnātiour au milieu , pour
donner paſſageaux matieres eſtranges. Il faut ſeulementpenſer leſdits malades vne
fois leiour en hyuer,& deux en eſté. Il loue auſſi grandement,cõme eſcric Galienau
s.liure de locis affe &tis, & au chap.2 . dus.liure de la Methode , & Diofcoride liu.5.
chap.9 .I'vſagedu melicratum , qui eſt faict de deux parties d'eau de riuiere & vne de
miel. Il incile & attenuë le ſang caillé, qui autrement ne pourroit paſſer, pourraisāde
l'anguftie de la playe , pris en potion , ou bien en y faiſant inie & tion dans icelle playe .
Galien au 7. liure des adminiſtrations Anatomiques , recite ceſte hiſtoire , que le Hiffoire me
ſeruiteur de Marillus Mimographe , receut vn coup ſur le brichet , duquel au com- morable
mencement ilne fit conte : & en apres ne fut bien conduit ny gouuerné. Eftre paſſé d'unecure
quatre mois , il monſtra de lafange en la partie quiauoiteſté frappee: celuy qui le que fitcalien
à une auquel
penſoit, la voulant euacuer , firinciſion : & commeil cuidoit deuoir eftre fait ,incon on voyoit le
31
tinent fir venir l’vlcere à cicatrice. Par apres ladite partie s'enflamma derechef & s'a- caur ánud .
с poſtema, & derecheffurinciſee, & ne fur de là en auant pollible la cicatriſer. A ceſte
raiſon, ſon maiſtre aſſembla pluſieurs Medecins , du nombre deſquels ie fus, & les
pria conſulter de fa guariſon . Orcomme tous cviderent la maladie eſtre vn ſphace
le , & corruption du bricher , ſe voyant & apparoiſſant le mouuement du cæur en la
parcie ſeneſtre , aucun n'oſa entreprendre decouper l'os gaſté & corrompu : lors ie
promis de le couper , au reſte ie n'aiſeurois point leguarir parfaictement. Auoir dóc
coupé l'os corrompu , à l'endroit où luy eſt adherente la poin &te de l'eſtuy ducæur,
femonſtrāt le coeur cour nud , parce que ſon eſtuy ou Pericrane eſtoit pourry : en ceć
inſtantnous conceuſmes mauuaiſe opinion & eſperance dudic ſerviteur : ce neant
moins il fue cotalement guary en peu de temps : ce que ne fuſt aduenu , li on n'euſt
pris la hardieſſe de couper l'os gaſté.Cecy ſont les paroles de Galien dignes de gran
de admiration , comme vn homme a peu viurc ,luy ayant veu le cæur à nud , & hors
de ſon enucloppe ou tunique , nommé Pericarde. Et ſi c'eſtoit vn autre que ce grand
perſonnage Galien , difficilementon le pourroit croire .

D Cure des playesdu Thorax ou poictrine. CHAP . XXXIII .

I la playepenetre au dedans du Thorax, au premier appareil ne


la faut clorre, mais ſera tenuë ouuerte deux ou trois iours : & fi
Belle anno
le
on voit le malade eſtre auec peu de douleur , n'ayant peſanteur tation ,
ſus le Diaphragme, & qu'il reſpire bić , lors on oſtera la cente , &
la playe ſera conſolidee le pluſtoſt qu'il ſera poſible ,en mettant
vn lingedelié beaucoup plusgrád que la playe , couuere de bau
me agglutinatif,ſe gardāty mettre de la charpie, de crainte qu'il
white
ne ſoit attiréau dedans, lors que le malade inſpire. Davantage
Les tentes que l'on applique à telles playes doiuent eſtre attachees ou liees aux com
‫اردو‬ preiſes, & qu'elles ayent ſemblablementla teſte grolle & large , afin qu'elles ne puiſ
ſent tomber au dedans: car eſtanscombees cauſeroientputrefa &tion , & par conſea
390 Le dixieſme Liure ,

quentla mort : parquoy le ieune Chirurgien y prendra garde . On appliquera ſur la A


piaye vnemplaſtre de diachalciceos, ou autre ſemblable. Son regime , & les purga
Pourquoy les tions , faignee , & autres choſes neceſſaires, luyſeront adminiſtrees , ainſi qu'il lera
fiftules du requis. Auſſi ſi l'on cognoiſt qu'il fuſt tombé beaucoup de fang au dedans du Tho.
Thorax fone rax , il faut tenir l'orifice de la playe ouuert auecgroſſes tentes ,iuſques à ce que la
ſonueneincu- ſanie caufee par ledit ſang, ſoic vuidce : & fi le cas aduient ( qui ſe fait le plusſouuent,
rables,
quelque grande diligence que l'on puiſſe faire) que la playe degenere en fiſtulcs, leſ
quelles peu ſouuentleguariſſent, par -ce que les muſcles du Thorax, qui ſont entre
les coſtes, ſont en perpetuel mouuement , & auſſi que par dedansneſont couuerts
que de la membrane pleurerique, quieſt exangue : joint auſſi que la playo n'a point
d'appuy pour eſtre comprimee , couſuë & lice pour ayder à natureà rapprocher les
labies , & y faire regeneration & agglutination: cout celafait que les fiſtulesen cec
endroit ſont le plus ſouuentincurables. Or pour la cure il faut ,apres les choſes vni
verſelles faites, donner au malade de la pocion vulneraire , & luy en faire desinie
¿ tions dedans ladite fiſtule : en laquelle on adiouſtera du ſyrop, des roſes ſeiches, &
iniel roſat , & vn peu d'eau de vie , auec yne Syringue : & où ily auroic grande pour. B
riture , i'ay ſouuentesfois adiouſté del'onguent Egyptiac. Et faut auoir eſgard à la
quantité de l'inje &tion , à fin de la faire ſortir, & qu'il n'y en demeure nulle portion,
s'il eſt poſſible : car y demeurant, nuiſt à la partie , parce qu'elle ſe corrompteſtant là
rerenuë .

Figure d'une Syringue pour


faire iniections en quelques parties que ce ſois,
lors qu'il en faut ietter en grande quantité.

L'iniection ſorcie ,on mettra vne tente cannulee faite d'or , d'argene, ou plomb,la

quelle ſera pertuiſee, afin que la ſanic entre en icelle , & qu'elle ſoitvuidec par de
Vrage des dans ladite cannule . Dauantage ne faut omettre qu'elle ſoit bien lice , craignant
tentes cannu
qu'elle ne tombe au dedans : & à l'orifice d'icelle , on y mettra vnegrande eſponge
lees, o de
l'eſponge. trempee en yin & eau de vie , puis eſprainte , & toute chaude ſera miſe ſur la partic.
Ladite eſponge fere à clorre l'orifice de l'vlcere, de peur que l'air exterieur n'entre au 300
dedans : dauantage eſt propre pour aucunement attirer & contenir la matiereſor
tane d'icelle , qui ſe fera par l'ayde du malade , lequel ſouuent tant le iour que la nuia ,
bouchera le nez & la bouche , & pouſſera ſon vent , & fe panchera du coſté malade,
à fin d'expurger ladite ſanie. Or ladite cannule ſera oſtee , lors que la fiſtule iettera
peu : puis ſera cicatriſee. Et fi la fiſtule ne pouuoit eſtre curee , à cauſe que l'orifico
L’vfage de la
contye-014 d'icelle eſt en la partie ſuperieure,alors faudroit faire vne contr'ouuercure, ainſi que
uerture. nous auons diccy -deſſus de l'Empyeme. D

Figure

o que

3
Des Playes en particulier. 391
A
FiguredesTentes cannulées, avec leursliens eeſponges.
Notez que leſdites cannules ne doivent auoir pluſieurstrous, commetu voisparces figures,
mais ſeulementdeux ou troisen leurs extremilcz , àraiſon quela chair s'imprime des entre de
dansleſditstrous, quieſtcauſequ'onneles peusretirer ſansdouleur , & nuire à la plage. lebo
Isaypourl'anoirexperimenté.

COMO OWO

‫ܬ‬
1

E
B

Vnc playe faite aux poulmons ſe peut guarir, pourucu qu'elle ne ſoit trop grande, Des playes
qu'elle ſoitſans inflammation, & qu'elle ſoitfaite aux extremitcz,& non enla partic des pouls
ſuperieure, & que le malade ſe cienne en repos ſanstouſlirny parler , & ſans grande. mons.
menchalener. Carlile malade couſle,la playeſc dilatera, & y ſuruiendra inflamma
cion,puislavertu expultrices'efforçant ictter ce qui luy nuit parla coux(car les poul
monsneſe peuuent purger que parce moyen ) eſt cauſe que l'vlcere ſe dilate de plus
en plus en couſſant, & ainſi la playe s'agrandit, & l'inflammation accroiſt,& parainſi
demeure incurable , & le malade meurt tabide à cauſe dudit vlcere aride & ſec. Et
pourmondifier,agglutiner,& cicatriſer la playe,on fera vſer au malade d'aliments&
medicaments emplaſtiques auſteres & aſtringens, commeterre ſigillée,bol d'Arme.
nie,hypociſthis,balauſte,plancin,renoüce,berberis,fumachacacia,& leurs ſembla
bles,deſquelson feravſerau malade en potage & lohots,y mettant du miel roſac,qui
leurſera comme vehicule & aydera à decerger & mondifier la playe : & lorsquele
malade vſera de lohors ſera couché à l'enuers, & luy ſera commandé tenir leſdits lo
hots longuement en la bouche,en relaſchant les muſcles du larynx: ce faiſant leme
2
dicamentcoulera peu à peule long des parois de la Trachée artere. Et faut ſe garder
qu'il nedefluë trop à coup,depeurd'exciter la toux ; mais qu'ildeſcende par dedans
la Trachée arcere, ainſique fait l'eau le longd'vo mur: ce faiſant la toux ne ſera exci
tée. Lelaict de vache,ou d'afneſſe,ou de chcure,ſono propres, auſquels ſera adiouſté
D du miel,qui le garde ſe coaguler en l'eſtomach. Celuy de femme eſt excellent par
deſſus tous. Leluccreroſateſtfort ſingulier ence cas , & recommandé grandement
par Auicenne : comme ayantvertu enſemble de modifier & aftraindre , qui ſont les
deux choſes ſouhaitables en yn ylcere. Mais de tant que comme nous auons noté cy.
deuant, la ficure he&tique ſuruientaiſément & aſſez fouuentaux playes & maladies
desparties Thoraciques,& nommémentdu Poulmon , il ſera bon de dire quelque
choſe de lafaçon de penſertelle ſorte de fieure: à fin que le Chirurgien en l'abſence
duMedecinayedequoydonner quelquecontentement & allegeance au malade,en
attendant que lavenue duMedecin deſiré, & en tels cas bien neceſſaire , puiſſe ap
porter quelqueplus grand fecours, & guariſon entiere.
LI

2
392 Le dixieſme Liure ,

6
PROBLEME .
A

ནི
Pourquoy eſt-ce que les playes
faites en lafubftance des Poulmons, cauſentfiftules, deſquelles
forgrande quantité de matierepurulenteé feride:qui
fait que les malades
meurent rabides & hectiques.

ICO
ST - C e point que le Poulmon vlceré , attire beaucoup de fang du cour
par la veinearterieuſe, comme d'une pompe , & l'ayant attiré nele peut
allimiler ,ains ſe corrompt & tourne en fanie feride , à raiſon qu'elle elt re
‫تع‬
cenuë encloſe au Thorax ſans pouuoir eſtrecuencilée , laquelle eſt iectée
par la playe , & quelquesfois par vomiſſement & par les ſelles & vrines ? Or ladite ſa.
nie eſchauffe les partics qu'elle touche , & croupit ,comme le Diaphragme & autres
Listelo
parties du Thorax , & d'elles’eſleuentyapeurs putredineuſes, leſquelles ſont com .
‫ܬ‬
muniquées au cæur ou au cerueau , donts'enfuitpluſieurs accidens , & principale ; ‫ܐ܂‬

ment fieure hectique & choliquatiue, & alteration de l'eſprit de la reſpiration qui eſt
B
la cauſe pourquoy les anciens ont appelé telle maladie Therioma, pour la voracité de
l'vlcere , laquelle s'aggrandic couſiours par le moyen du mouuement du Poulmon .
Qu'il ſoit vray , veritablementi’ay fait plufieurs ouuertures de corps morts par coups
d'harquebuzes , dont le boulec ne pouuoit eſtre plus gros que le bout du doigt,
neantinoins ie trouuois la playe aux poulions, grande à mettre vn éreuf. Or celte
vlcere attire à ſoy le ſang , commevnloup affamé, de la veine arterieuſe du cæur , &
lecæur de la veine caue, dont tout le corpsen eſt conſommé & rendu ſec , aride, 86
hectique: donc la mort s'enſuit.
Et quant aux fiſtules, aucunes,neantmoins que le Poulmon ne ſoit point vulneré ,
ne laiſſent à iettergrande quantité de matiere purulente, parce qu'elles ſont voiſines
du cæur qui fontaine du ſang (ſelon l'vſance cómune denacure,quieſtde ſecourir la
partie affligée, tant qu'elle peur, de ſang & eſprits , venant des rameaux de la veine
azygos)en fournit ſans fin & ſans meſure, auſdites parties offenſées, ſans ce que d'el
les-meſines, par douleur,ou par chaleur du par leurs mouuemens ( comme les Poul
mons & Diaphragme ) en peuuent attirer à loy. Or ce ſang fluant & enuoyé, ne pe- c
chant ny en quantité ny en qualité ,imbu de lamalignité de la partic vulnerće , fe fait
purulent : d'où vient que touſiours nouuelleſanic s'engendre& deſgorge à la playe
ou vlcere , quien fin conduit le malade en vn maraſme, le rendant ſec, aride, & he
&tique: dont le plus ſouuent le malade meurt d'une heure hectique.

De la ficure hectique, de ſes differences , cauſes , fignes ,& cure .

C H 4 P. XXXIV.

A fieure he & tique eſt ainſi appelée , ou pource qu'elle eſt ſtable &
Etymologie difficile à guarit & oſter, comme les choſes qui ont prins leur habitu
defieure de : car le motGrec Hexis, fignifie habitude:ou pource qu'elle occu
hectique.
pe les parties ſolides de noſtre corps , leſquelles les Grecs appellent
hexci : meſme que lemoc Latin habitus, ſe prend en l'vne & l'autre fi
Freure hetti- gnification. L'on faittrois fortes de ficure he & tique , qui pouren parler à la verité , D
quepar les ſont pluſtoſt degrez qu'eſpeces d'icelle . Le premier degré donc eſt,quand la chaleur
degrez. he &tique conſomme l'humidité des parties ſolides. Le ſecond, quád il deuore la ſub
ſtance charncuſe d'icelles . Le troiſieſme & dernier, quieftincurable, quand il s'arca
che & rauage par les os & autres parties ſolides: Toutaina que la flamme d'vne lam
pe conſumepremieremeorl'huile,en apres la propre humidité du lumigno ,en fin le
corps du lumignó meſme , & lors qu'il n'a point de moyen , ny d'eſperance de le pou
uoirr'allumer,bien que luy donnicz l'huile à regorger.Ceſte ficure ne peut quebien

rarement, & à peine,commencer d'elle-meſme, parquoy elle fuit touſiours quelque


Les cauſes . autre fieure.Lescauſes donc de la ficure he & tique ſont fieures aiguës & ardentes mal
penſées , & principalement auſquelles on n'a donnérefrigeration competente par
epithemes ſur le cæur & hypochondres , ny cau froide à boire en téps & failon requi
ſe. Elle peut auſſi cítre cauſée d'vne fieurediaire , quiaura eu ſon commencement de
quelquegrande,forte,& longue faſcherie ou cholere, la cauſe & impreſſion d'icelle :
Des Playes en particulier. 393
A perſeueranelong temps , en nous : oude quelque trauail excellifen lieu & en temps
chaud & ardent,& en corpsAlouet & de peu de fang & d'humidité.Elle ctt aufli'lou
viene cauſéed'vn vlcere & inflammation des poulmons, empyeme de Thorax, d'un
grád & long phiegmon de foye, ventricule,meſentere,amarry,reins,veſlie,inteſtins
ieiunum & colon :voire auſſi des autres , s'ils ſont enflammez d'vne vehemêre & lon
gue diarrhée, lienterie, ou dyſenterie, dont aufl s'enfuitinflammation ,reſiccation,
emaciation de tout le corps, & par conſequent fieure hectique:car l'humidité eſtant signes auec
conſommée la chaleur ſe fait plus acre & ardente.Ceſte fieure de tant elle eſt plus ai- leurs cauſes
léeàcognoiſtre qu'elle eſt difficile à guarir.Le pouls donc en iceliceſt dur à cauſe de foronorables:
+
la ficcitéde l'artere,qui eſt partie ſolide, & debilepour l'infirmité de la faculté vitale,
lec«ureltant en toute ſa ſubſtance aſſailly: au reite pecit & frequent, à cauſede l'in
temperature & ardeurdu cæur , qui ne pouuãt faire grand pouls pour ſe refrigererà
cauſe de ſon imbecillicé,taſcheà ſe reuáger & refraiſchir (maisen vain )par frequéce
d'iceluy. Le propre ſignede telle ficure pour le reſpeêt du pouls eſt, qu'vneheure ou
deuxapres le repaslepouls ſe moſtre grãd & leger, & meſme la chaleur lorsau corps
B dumalade ſe monſtre plusgrande:ce quidure tant que la diſtribution de l'alimentſe
. fait, & que laſiccité du cæureſtaucunement corrigée, & fa ſubſtance humectée par
$ la ſuruenuë de l'aliment: qui eſt cauſe que la chaleur s'augmente , ne plus ne moins Belle compa
que la chaux parauancfroide à l'accouchemét,s'eſchauffciuſquesà fumer & boüillir raiſon.
quand elle eſt arrouſée d'eau. Au reſte, la chaleur & lepouls demeurent touſiours ef
gaux en leur petiteſſe,langueur,obſcurité, dureté,frequence,ſans aucune exacerba
tion,fibié que le malade melmes ne penſe pas auoir la fieure, & ne ſent aucun mal &
douleur,quieft vn autre ſigne propre de la fieure hectique. La raiſon vientde ce que
la chaleur ne ſe monſtre point,n'eſtāt placée en laſuperficie des eſprits ou humeurs,
Es
commc en la diaire & putride, ains eſt commecachée & plongée au plus profond de
2
la ſubſtance des parties ſolides:combien que toutesfois ſi vous tenez longtemps yo
ftre mainſur ſon corps,en fin la chaleur ſemonſtreacre & mordicante , le paſſageluy
eſtant ouuert par le cuir rarefié par l'accouchement doux & benin d'vnemain bien
temperée. Queſile malade en ceſte fieure ſent quelque douleur,& que par l'inegali
с
té &cxacerbations de la chaleur il ſe iuge, & ſente luymeſme auoirla fieure, c'eſt fi
1
gneque telle heatique n'eſt pas ſimple,maiscompliquée auec fieure putride,quiap
Ĉ
porte auecſoy telle inegalité , ſelon que le feu vientàembraſermoins ou pluslama
tiereſujette àpourriture:autrement la fieurehectique,de ſoy eftexempre d'inegali
té:licen'eſt par quelque accident,commeapres le repas,ainſi qu'il a eſté expliquécy. Cauſe de la
deuant. Au reſte ,fi la face Hippocratique a lieu en quelque maladie, certes elle eſtface Hippo
monkrée és he &tiques , à cauſe dela colliquacion de leur ſubſtance. Pour la cure de cratique.
ceſte fieure , il faut curieuſement conſiderer, auecquelles affc &tions elle eſt compli. Aduertiſſe
quće,& dequelle cauſe elle aura eſté excitée . Premierement fauefçauoir ſielle eſt ment ſur la
maladie ou ſymptome : car ſi elle eſtſymptomatique,elle ne pourraeſtreguaric, la cure de l'he
maladic peráſtante : comme ſi elle eſt cauſée d'vne fiſtule au Thorax , à raiſon d'vne étique.
playereceuë en ce lieu , ou d'vne vlcere dyſenterique d'inteſtins, clle ne pourra gua
rir,que premierement la fiſtule ou vlcere ne ſoir guarie,d'autatque la maladie entre. La maladie
!
tientle ſymptome,commela cauſe ſop effect:maisſi elle eſt ſimple de tant que ſon el fymptome.
entretient le
ſence eſt miſe en intemperie chaude & ſeiche, qui eſt placéenon ſeulement auxhu
D meurs,mais és parties ſolidescoure l'intention & conſeil du Medecin ſe doit rappor
teràalterer,& corriger,& nõ à purger :car les ſeuls humeursfont capables de purga
tion, & non les parties ſolides. Reſte doncmaintenant de refraiſchir & humcéterles
parties ſolides, ce qui ſe fait par choſes priſes au dedans & appoſées par dehors.
Les choſes qui ſe peuuenifort heureuſement prendre au dedansdu corps,ſont les choſes à
aliments medicamenteux, quiprofitent ſans coparaiſon plusqueles choſes qui peu- prendre dans
uent ſimplementalcerer, c'eſt à dire refraiſchit & humedter ſans donner nourriture: le corps.
carparlereſpeo de la portion aliméreuſe qui eſt en eux , eſtans attirez & appoſez à la
partic ,& tournez en la ſubſtance d'icelle,ilsviennent à l'humecter & refraiſchir ,non
fuperficiellement, comme les choſes quialterent ſimplement,mais interieurement .
Detelles choſes auons -nous entre les herbes,entre les fruicts entre les racines , entre Reg ime de
viure .
lesſemences,entre les choſes que nous prenonsordinairement pour la nourriture de
noſtre corps.Entre les herbes eſt fort recommandée pour ceteffe & la viole ,pourpić ,
la bugloſic,l'endiue,& la lentille paluſtre ,la maulue aufliquãd principalementilya
Li ij
394 Le dixieſme Liure ,

aſtri &tion de ventre.Lesfruicts ſont de courge , de cócombre , pommes , pruneaux,la А


pafferille ,amandes douces & recentes , les pignons. Des ſemences,les quatre ſemen
ces froides grãdes & pecites , & icelles recentes à cauſe de l'humidité cõioincte, les ſe
méces de pauor,de berberis , decoings , les fleurs de buglofſe, de violcs, denenuphar :
deſquelles choſes l'on fait des condics auec vn poulet pour prendre au matin ,la pre
miere concoction eſtant accomplie , ce qu'on continuera par l'eſpace de neufiours .
Quant aux viandes pour le commencemet , lors que les facultez ne ſont encores fort
debiles,qu'il prenne aliments qui à la verité ſoient difficiles à cuire , mais quinourrif
ſent fort & lög temps , quels ſont les extremitez des animaux , comme pieds de veau ,
Preparation pourceau nõlallez: chair de tortuë , qui premier aura eſte nourrie en quelque iardin , WICH
de la chair pour ſe gourmer & purger de ſes humiditez excrementitielles , la chair de limaçons
de tortuë.
blancs prisés vignes,les grenouilles,eſcreuiſſes deriuiere,anguilles,priſesen eau pu
re & bien aſſaiſonnées, aufs durs,mangezauecius d’ozeille ſanseſpice, le ſtocfich &
merlu bien deſtrépez & deſſallez,des aſnons & poucepieds , la ſemoule ,& autres fem 222
blables . Cartelles choſes ayans vn ſuc viſqueux s'agglutinentaiſémétaux parties de
B
noſtre corps & ne peuuét eſtre diſſipées ſi aiſémét par l'ardeur de la chaleur: mais lors

que la fieure hectique aura ia long temps trainé dans le corps , de ſorte que les facul
tez ſemblent fort affoiblies, il faudra donper viandes aiſées à cuire , & icelles encore
pluſtoſt bouillies que roſties :d'autant que les bouillies hume &tét davācage,& que les
roſties ſe tournent plusaiſément en bile . Les viādes ſeront veau , chéureau ,chappās,
poulets , cuits en herbes ,& femences qui refraiſchiſſent & humectent:les orges mun.
dez , les amandes leur ſont propres : commeaulli la panade faire de mie de pain blanc
arroſée d'eau roſe, puis cuitte en la decoctio des quatre ſemēces froides, auec du ſuc
creroſar en forme de boüillie : telle panade refraiſchit le foye & l'habicude de tout le
corps , & nourrit grādement , comme auſſi les teſticules, les foyes ,aillerons,deieunes
Choix de la coqs, les figues & raiſinsde damas . Que ſi toutesfois lemalade eſt degouſté des vian
vianderoſie. des bouillies,que la chair qu'on luy donnera ne ſoit gueres roſtie, & qu'on ne luy do .
ne de la ſuperficie de la chair qui eſt plus ſeiche & bruſlée,mais de l'interieure qui eſt
plus humide , & ce qu'on luy en donnera encore ſoit temperé d'eau roſe ,de ſuc de ci
Pourquoy les trons d'orenges, de grenades.Qu'ils'abſtienne de poiſſons ſallez &durs les meilleurs c
poiſſonsís- ſont les ſaxatiles, pour l'exercice qu'ils fonteſtans continuellement heurtez entre les
xatiles fons rochers : ceux auſſi qui ontchair glutineuſe comme ceux que nous avons cy - dcuant
tant recom
nommez . Le laict d'alnelle pris chaudement, & corrigé auec vn peu de ſel,deſuccre,
mandez.
ou miel & fenouil,ou anis, de peur qu'il ne ſe corrompe ou aigriſſe en l'eſtomach, ou
bien le laiet de femme ſuccé de la mammelle , ſont fortrecominandez en ceſte mala

Le laiet de die , le tout pris iuſques à demie liure :mais celuy de la femme eſt plus vtile, parce qu'il

femme. eſt plus doux & nourriſſant, & approchant de plus pres de noſtre naturel, moyennát 102
qu'il ſoit prinsd'une nourrice bien temperée & habituée , mefme qu'il eſt ſingulier
aux eroſions de l'eſtomach & vlceres des poulmons , dont s'enſuiremaciation &
phthiſie. Quācau laict d'afneſſe, il le faudra choiſir qu'elle ſoit nourrie d’orge& auoi
anda
ne,fucilles de cheſne,à fin que par le benefice de celle nourriture il ſoit plus profita
ble & moins ſuject à corruption. Ecoù le malade auroit le ventre troplaſche,on fera
vn peu boüillir le laict & yeſteindre des cailloux tout rouges & ardents . Et noteras,
que ſi le laict pris , ledit malade auoit rots aigres , difficulté d'baleine,chaleur non ac
couſtumée,enfleure, & fluctuació de ventre, douleurde teſte ,comme il aduiétà plu- D
ſieurs ,il faudra deſiſter à prédre ledit laict.Qu'il crépe ſon vin auec quelque peu d'eau
Verius de
delaictuë ,pourpier,ou nenuphar ,& beaucoup de celle de bugloſſe,tātpourcequ'elle
l'eau de bu
humecte grandement, qu’auſſi elle a vertu ſpeciale de reſioäir & nourrir le cæur, la
gloffe.
ſubſtance ſolide duquel eſt fortaffligée en ceſte maladie : & telles ſont les choſes qu'il
AL
conuient prendre au dedans.Celles qui ſe doivent appliquer par dehors, ſont les on
kemuel
& tions, les bains , les epithemes , les clyſteres. Leson &tions ſont diuerſe's, ſelon la diuer
Onctions
fité de l'indicació priſe des parties ſur leſquelles illes faut appliquer.Carſur le dos, &
fur l'eſpine
dy dos. ſur toute l'eſpine Gal.y fait des onctions de choſes froides & aſtringeres moderémét,
stice!
c'eſt à dire qui puiſſent roborer les parties, empeſcher la colliquation d'icelles , & non
bouſcher le paſſage à l'inſenſible tranſpiració , quirédroit la chaleur encore plus acre
parla retérion des humeurs fuligineux. Tels ſont les linimés qu'on peut faire d'huile
roſat ,de nenuphar , de coings , mucilages de gomme tragachát & arabic , tirées en cau
de morelle, quelque pecite quācité de căphre incorpore auec vn peu de cire,s'ilviétà
Des Playesen particulier. 395
A à propos. ! Lesparcies pe&torales au contraire doiuent eſtre oin &tes de choſes moyen- on tions
7. nement refraiſchiſſantes& relaſchantes:ie dy,moyénement refraiſchiſſances, parce pourles par
que le froid en tout leur eſt ennemy : ie dy auſlírelaſchantes, pour raiſon que les vies pectora,
aſtringentes apporteroientvne difficulté dereſpirer & de mouuoir librement les les.
muſcles du Thorax. Telles ſont les on &tions qui ſe peuvent faire d'huile violar ,de
73, ſaules,d'huile de ſemence de lai& uë,depauot,denenuphar, y mellant de l'huile d'a
ort
mandes douces , pour temperer l'attriction & frigidiqé qu'ilspourroientauoir. Sur Caution touw
toutque l'on ſe garde que l'Apothicaire,par auarice,en lieu deceshuilesrecentemer rice des A
tirées, ne vous en ſuppoſe devieilles rācides, & fallées: car en lieu de refraiſchir vous pothiquaires,
eſchaufferiez , commeainſiſoitque le vin,le miel & huile acquierent par l'aagevne
chaleur exceſſiue. A defaur de bonnes huiles , nous les oindrons de beurre premie
rement lauediligemmenten eau de violes & de folanum . L'uſage detelles on &tions
eſt de refraiſchir, hume&ter & conforcer les parties , & ſe doiuent faire matin & ſoir,
quand le malade s’ira coucher, principalementapres le bain.
ede Quant aux bains,nousles ordonnons ou pour ſimplement humecter, & lors ſuffira
0.5
B le bain d'eau tiede,dans laquelle on pourra ieteer fleurs de violes,de nenuphar,fueil
les de ſaules, & orge mundé : ou pour non ſeulement humecter , mais aufli relaſcher
CIC lesparties qui fonttenduës de ficcité& aridité hectique,&outre leurapporter quel
ela que meilleure habitude,àcequ'elles ſemblent mieux refaites & nourries , & lorsony
más peutmeſler la decoction d'vne ceſte & tripes demouton,& enſemble quelque quan
UD citédebeurre.Oril faut qu'il ait pris &cuit quelque viande deuant que d'entrerdans
ce bain, à fin que par la chaleurdudit bain ,l'aliment ja cuit ſoit acciré auxparcies&
lic en toute l'habitude du corps: car d'y entrer l'eſtomach vuide& à ieun , il ſe feroit trop
ook grande diſſolution des forces du corps. Le regime donc qu'il conviendra tenir deuấc nirRegime ate
devant
qued'entrer dedans,doiceſtre tel :que leiour dedeuant ſurlematin,on luydonne yn que d'entrer
clyftere remollient ,à fin que les excremens,qui ont de couſtume d'eſtre retenus dans dans le bain
lesinteſtins par l'intemperie ſeiche,ſoienteuacuez: qu'on le face diſner parapresſus
les neuf heures,luydonant viāde de ſolide nourriture: qu'il ſoupe ſur les quatre heu
res,mais moins ,& de viandes aiſées à cuire :vne heure apres minuict qu'il préne la de
225 с cođió d'un pouler ,ou vnorge müdé , ou deux æufs mollets, dans leſquels on mettra
cles vnpeu d'eau roſe & de ſuccre en licu de ſel : quatre ou cinq heures apres ,qu'il entre
danslebain à la façon que dit eſt: en apres auſortir du bain, qu'on lenettoye & frot
CTS tedoucement auec linges mols & deliez : apres qu'il ſoitoina à la mode cy.deuanc
deſcrite:puis qu'il repoſe & dorme dásle lią deux ou trois heures ſi poſſible eſt:à ſon
‫ܬ‬ reſueilqu'il boiue de laptiſane, & qu'il prenne des potages de facile digeſtion :à ſon
ſouper qu'ilboiuedu vin ,&qu'il ſe nourriſſe des viandes plusſolides.Le matin qu'on
luyredonnevnorgemundé,ou autre viandedepareille eſtoffe: en apres qu'il r'entre
dás le bain à la mode ſuſdite.Celuy ſera choſe tres.proficable qu'il vſe ainſi artificiel
& lement dubain de dixiours en dix iours:& cepar l'eſpace de trois iours cótinus. Que
Iclo filemaladeeſt ſujet à quelque crudité d'eſtomach ,de ſorte qu'il ne puiſie endurer le
bain ſans danger,& de ſyncope & autres accidens,illuy couiendra roborer le ventri
223 culcauecliniment d'huile decoings,d'abſinthe,& demaſtic:ou bien luyappoſervne
crouſte de pain aſpergée de poudre deroſes,de ſandal,de girofle , & de vin odoriferác
ſurlaregion du ventricule, & par derriereenuiron la trezieſme vertebredu dos , où
lu D parl'intelligence de l'anatomie ,nousentendons reſpondre la bouche de l'eſtomach .
20
Lesepichemes luy doiuenteſtre appoſez ſur le foye & ſur le cour , à fin de temperer
ic l'ardeuracre d'icelles parties, & corriger leurficcité par vnehumidité raiſonnable:
‫ܐܐ܂‬ parquoy celsepichemes ſe preparent dechoſes froides & hume& antes,mais plus hu- table.
Choſe nos
wil mc&antes que froides,d'autāt que ce quieftfort froid,coupe & ferme paſſageà l'hu Epithemes,
1
midité. A cela ſont propres les eaux de bugloſſe & devioles iuſques à vn quarteron,
auec quelques gouttes de vin blanc.Mais celuy qui ſefait d'orgemundé,de ſemence
13

decourge,de pompons ou de concombre iuſques à trois drachmes de chacun en la


decoction,eny mellant par forte agitation, huile de violes ou d'amandes douces, eſt
" mee

plusexcellé quetous les autres.Lemoyen d'appliquer cesepithemes,eft de plonger


desdrapeauxdedans, & les appliquer ſur le cœur & ſur leshypochondres, les chan
geárd'heure à autre,àmeſure qu'ilss'eſchaufferont ſurlapartie.Quant aux clyſteres
parceque par l'imbecillité delafaculıćconco & rice pluſieurs excremens s'amal- clyfteres,
ſene és
corps des he& iques , il ſera vciled'en vſer ſouuent tout le long de la mala
Ll iij
396 Ledixieſme Liure ,
die:on les preparera dela deco &tion d'herbes, fleurs, & femences refrigerantes & hu A
Rensede con mectantes ſansy diſſoudre autremedicament que la calle auec le ſuccre, huile violat
tre le flux de ou de nenuphar, & autresſemblables. Mais auſſi d'autant qu'à la fieure hectique,
Dentre qui quandelle eſt fortauancée,ſuruiennent des flux de ventre fort pernicieux, denotans
furuieni aux imbecillité de coutes les facultez & colliquation de la ſubſtance du corps , ly faudra
ficures hecti- remedier par choſes refrigerantes & aſtringentes , par aliment de groſſe ſubſtance
ques. comme de rys, de pois chiques, appliquantpardehors choſes qui aſtraignent & ro.
borene, luy donnant en oucre à boire cau , en laquelle l'on aurafait cuire auparauant
auoine ou orge roſty. Quant au reſte il faudra traiter le malade le plus doucemenc
que l'on pourra , le tenant en perpetuel repos , & le faiſant le plus dormir qu'il ſera
poſible. L'on dit que la liqueur deslimaces blanches, priſes & nourries ésvignes,des
torcuës nourries à la façon parauantexpliquée , aureſte pilées & diſtillécsen l’alam
bic de verre,in balneo mariæ , baillée auec ſyrop de pauot,de nenuphar,ou cau de de.
coction de laictuës & de poullet,eft ſingulierement bonne en la ficure hectique.Tel
le fieure peut affaillir les petits enfans, ou pour quelque deſpit, ou longue crainte en B
laquelle ilsauroienc eſté tenus , ou pourauoir vne nourrice cholerique de nature &
de façon de viure, de laquelle parcant le laict eſt trop chaud & ardant: ou pour eftre
nourris de vin ,ou pour eftre cenus continuellement au Soleil: en ce cas il leur faudra
changer de nourrice & façon de viure , en autre coute contraire , les tenant en air
chaud & humide temperément : les oindred'huile violac, & faire à peupres les cho
ſes cy deuanc expliquées pour les refroidir & hume&ter. Que ſi la fieure eſt compli
quée d'hectique, & putride, il faudra pareillement compliquer , & accoupler les
remedes pour l'vne & l'autre intention par bonne methode.
Des playes du Ventre inferieurdit Epigaſtre. CA A P. XXXV.

Pres auoir ſommairementtraitté des playes du Thorax , reſte mainte


Diuifion des nant à parler de celles du ventreinferieur: dont les yncs ſont faites par de
playes du uant , les autres par derriere : aucunesſontſuperficielles , les autres pene
Dentre infe trent au dedans : d'autres paſſent de part en part au travers du corps , &
rieur.
quelquesfois l'inſtrument demeure dedans : aucunes ſont auec leſion des parties с
contenuës, comme du foye, ratelle , eſtomach , inteſtin ,reins : & aucunes d'icelles
fontſigrandes,que partie de l'omentum forcdedehors : autres penetrentiuſques en
la ſubſtance du Pancreas : autres à la veſſie & pores vreteres : autres en la matrice &
corps des grands vaiſſeaux, comme de la grande veincou arcere.Or les lignes que le
signesde foyeeſt bleſſé, c'eſtqu'ilſort grand quantité de ſang par la playe , & le blelle ſent
foye bleffi. vne douleur pongitiue, qui s'eſtend iuſques aucartilage XiphoideouScutiforme,
auquel eſt attaché le foye : quelquesfois le bleſſé vomit pure cholere , & fe trouue
Eſtomach ego mieux d'eſtre couché ſuslcventre qu'en autre maniere. Sil'eſtomachouaucunsdes
inteſtins.
inteſtins grelles ſont offenſez, le manger & boire ſort par la playe , les flancs fetume
fient & deuiennent durs , le malade a le hocquet, & vomit fouuentesfois pure cho
lere, a grande douleur & contorſion au ventre , luy ſuruiennent petites ſueurs & re
Gros inte froidiffement des extremitez : & fi lesgrosinteſtins font vulnerez , lamatiere fecale
frins. ſort par la playe. Si la racelle eſt naurée, le fang fort du coſte feneftregros & noir, &
Rarelle. le malade eſt alteré, & a lesmeſmesſignes que nousavons dit du foye.Si les rognons
Rognons,
veſie , et ſont offenfez, le malade a difficulté d'yriner, & pille du fang : a douleurauxaines , à D
pores bre la verge & teſticules. Sila vellie ou porcs vreteres font naurez , le malade lent dou
teres , leur aux Hancs , les parties du penil ſont tendvës , & au lieu d'urine fait du fang, ou
l’yrine ſanglante, & quelquesfois meſme ſort par la playe.Si la matrice elt vulnerée,
il ſore du ſang par lesparties honteuſes , & telles bleilevres ont preſque ſemblables
Pourquoy les accidens que ceuxde laveſſie. Les playesfaites au foyeſont mortelles,parceque c'eſt
playes du la partie qui ſanguifie, & eſtneceſſaire àla vie : adiouſté que la veine caucouporte
foye ſont ſont inciſées en leurs rameaux,par celles playes , dont s'enſuitgrande hemorrhagie,
mortelles. ou flux de ſang, qui coule non ſeulementaux parties interieures, mais auſſi auxexte
rieures,au moyen dequoy les eſprits s'exhalent, & pour le regard du ſang quieſt cou.
lé aux parties interieures, il s'eſchauffe & pourrit, dont s’enluit douleur, inflarnma
Paul, Ægin. tion ,& par conſequent lamore.Toutesfois PaulusÆgineta dir,qu'vne partie& por
88.chol.6 , tiõdulobe du foye peut eſtreoſtée ſans mort. Auſſi les playesde l'eſtomach,inteſtins
grelles, & principalement du ieimum ( pour la multicude des vaiſſeaux qui ſoncen
Des Playes en particulier
. 397

A iceluy,& pour la ſubtilité de ſa ſubſtance nerueuſe,auſli pource qu'il reçoit la colere


du cyſtis fellis) ſontmortelles : pareillementcelles de la rarelle, roignons, vaiſſeaux Hipp.aph .'
18. lix , 6.
vreteres,veſlie,matrice , cyſtis fellis ſont pernicieuſes , & ſouvent mortelles : pource
que l'uſage de telles parties eſt neceſſaire à la vie, & auſſi qu'aucunes ſont exangues ,
Com & nerueuſes, & que paricelles paſſentles humiditez excrementeuſes , & qu'il eſt dif
ficile d'appliquer les remedes,à cauſe qu'elles ſont en la profondicé du corps, & par
tant font dices mortelles, & principalement ſi elles ſont grandes . Meſmes toutes
playes qui penetrent ſeulement en la profondité des ventres ſans leſion des parties
internes,ſontfort dangereuſes :parce que l'air ambiens ou exterieur entre dedans,
lequel n'eſtantelabouré ,nuit grandement aux parties interieures : ioint que les ef
prits ſ'exhalent,dont les vertusſontrenduës imbeciles: & pource qu'on nepeut bien
mondifier celles playes , qui eſt cauſe qu'elles degenerent en fiſtules, principalement
2.1 au Thorax , commc auons dit : il ſe fait collection de maciere , dont en fin la mort fen
ſuit. Toutesfois i’en ay penſé pluſieurs qui auoient des coups d'eſpée , & de piſtoles
au trauers du corps , qui font guaris. Etpourceſimoignage de ce , i'ay pente en la ville Hiffoire.

B de Melun , l’Argentier de l'Ambaſſadeur du Roy de Portugal , qui auoit vn coup


d'eſpée au trauers du corps , par lequel les inteſtins furent vulnerez, en ſorte que quad

COM on l'habilloit, ſortoit par la playe aſſez grande quantité de matiere fecale,neátmoins
set ledit Argentiera eſte guary. Melmeces derniers iours ie fus appelle pour vn Gentil- Hiſtoire.
homme,narifde Paris, nomméGilles le Maiſtre, Seigneur de Belle -jambe , demeu
m
rant à la ruë S. André des Arts , auec Meſſieurs Botal, Medecin ordinaire du Roy &
de la Royne, Richard Hubert Chirurgien ordinaire dudit Seigneur , & laques Guil .
lemeau , Chirurgien du Roy , & Iuré à Paris , hommes ſçauans & bien experimentez
en la Chirurgie: lequel auoit receu vn coup d'eſpée tout au trauers du corps , donc
par pluſieurs ioursietta le ſang par la bouche & ſiege , en aſſez grande quantité , qui
Cornelius
denocoit les inteſtins eſtre offenſez, toutesfois en quinze ou vinge iours fut guary .
Parcillementlesplayes des grands vaiſſeaux ſont mortelles , pour la grandeeffufion Celfus, lin.si
chap 16 . 3
de ſang & eſprit qui ſ'en enſuit.

Cure des playes du Ventre inferient. CHAP . XXXVI .


с
Vant à la curacion , il faut conſiderer ſi la playe penetre en la capacité ou le moyen de
non : & celles qui ne ſeront que iuſqu'au Pericoine, ſeront traictées comme remettre l'in
0
playes ſimples , qui demandent ſeule vnion : mais celles qui ſont en la capa teſtin eftine
cité , requierent autre curation : car ſouuent les inteſtins ou omentum ,ou tous deux joriy e cons
enſemble, ſortent par la playe . Quelquesfois aufli l'inteſtin eſt bleſé, lequel doit fis.
eſtrecouſu de la future du peletier à petits poincts,commenous auons dit cy-deſſus,
puis ietter deſſus poudre de maſtic, myrrhe, aloës , bol: & la ſucure eſtant faite,doit
C!!
cſtreremis au dedans petit à petit , & non tout à coup,faiſant ſituer le malade au con
traire dela playe : comme ſ'il eſt bleſſé à la partie dextre , il doit repoſer ſus le coſté Notable
gauche, & au contraire: & ſila playeeſt aux parties inferieures, le faudra ſoufleuer, poinet de la
firuation du
ayant les feſſes plus hautes que la ceſte : & fi elle eſt aux parties ſuperieures , faut faire malade.
ſituer le malade au contraire , à fin que les inteſtins tombent& preſtent place à remet .
tre ceux qui ſont ſortis. Or ſouuentesfois les inteſtins ſe cumefient & enflent à
cauſedequelques ventofitez qui y ſont contenuës , & pour l'air ambiens quiles a re
D froidis & fait enfler ,qui eſt cauſe que difficilement le peuuent remertre : & pource
leChirurgien fera fomentations auſdits inteſtins,de decoctions reſoluantes & difcu
tientes,auſquellesaura cuir camomille,melilot,ſemence d'anis,fenoüil : ou bien ap
pliquerez deſlusiceuxinteſtins , vne volaille viue tranchée par le inilieu , ou bien de
petits chienneaux , ou vne veſlie de porc à demypleine de la deco &tion ſuſdite : car
telle chaleur diſcute & reſout merueilleuſementlesventoſitez contenuës auldits in
teſtins, & conforte la partie. Et ſi par tels remcdesles ventofitez neşeuvent eſtre dir
ſupées ,& que l'orifice de la playe foic eſtroit , il ſera expedient de la dilacer , à fin de
donner lieu à les remettre plus facilement. Etſ'ils ſont inciſez ,il doingir eitre recou .
fus,principalementles gros, & non les grelles, f'ils ne ſont du tout alteriz & changez
de leur couleur & chaleur naturelle . Or ils ſe corrompent en peu de temps par l'air
exterieur. La inaniere de faire la coulture eſt, qu'il faut les recoudre cou me font
les peletiers leurs peaux : & apres , de peur que la matiere fecale ne ſorte hors, on
mettra ſur la playevn peu de poudre de maſtic ſubtilement pulueriſe, puis les fauc
I ‫ ا‬ii‫را‬
398 Le dixieſme Liure ,

remercre dedans le ventre : & faut que les bouts dufil ſoient paſſez hors de la playe , à 4
fin que l'inceſtin repris on les puiſſe retirer. Or ſi la playe faite au ventre eſt ſi eſtroite
qu'on ne puiſſe reduire les boyaux au dedans , il faut accroiſtre la playe auecvnebi
ſtorie,ayant vn bouton au bout , & qu'elle ne trenche que d'un coſté, de peur qu'en
faiſant l'inciſion pour agrandir la playe,on ne bleſſe les boyaux.Et Giles inteſtinsſont
ſi enfez de ventofitez, qu'on ne les puiſſe reduire, lors on les fomentera d'eau chau
de,auec huile , puis apres de gros vin noir,tiede & aſtringent, & auçres choſes cy-def

33
fus dices . Etfily auoit ſi grande quantité de ventsqu'ils ne peuſſent eſtre reduits ,il
les faut percer auec vne aiguille pour faire ſortir les vents,ainſiqu'on void vne veſſic
de porc remplie de vents lors qu'on la perce d'vne épingle. Ce quei’ay fait aux inte
ſtins auec heureuſe iſſuë. Cela fait, il les faut reduire au dedans , commençant aux

derniers ſortis,à fin que chacun puiſſe cître remis en la place : & pendantqu'on les
pouſſe dedans le ventre,faut que le bleſſé retire ſon haleine. Eteftans reduits ,il faut
coudre la playe,8c y faire tant de poincts qu'il ſera de beſoin. Et lila playe eſt grande ,
il faudra faire la coulture nommée des Anciens Gaſtroraphic. C'eſt que le premier
B
poinct prenne la léure de la playe avec le Pericoine , & la léure de l'autre colté laiſſe
le Peritoine,neprenant que la chair,& de l'autre coſté le Pericoine,
Et faudra faire cela tant de fois qu'ilſera neceſſaire pour recoudre toute la playe.
Ortelle coulture a eſté inuentée des Anciens à bonne raiſon , parce que ſi on prenoit

le Peritoine tant d'un coſté que d'autre,il banderoit & ſe déchireroit,& demeureroit
vne eſpace vuide à l'endroit de la playe , qui feroit que les inteſtins feroient vne tu
mcur femblable aux hargnes inteſtinales. Apres auoir reduit les boyaux , & recouſu
la playe , le malade doiceltre vn peu ébranlé & ſecoüé,à fin que les boyaux fe remer
tent d'eux-meſmes en leur place. Tout cela fait, on appliquera ſur la playe remedes
L'omentum
propres aux playes recentes. Si l'Omencum eſt ſorty, doiceſtre remis le pluſtoſt qu'il
doit eſtre
ſoudain re fera poſible,carileſt ſuiet à ſoy putrefier,eſtant de ſubſtáce pinguedineuſe ,laquelle
mis . eſtantexpoſée à l'air , ſe congele, & lachaleur naturelle ſ'éteint, & toſt apres tourne à
Hipp.aph. pourriture . Ce qui eſt prouué par Hippocrates , diſant, Si le Zirbus vient à ſortir
s8.liu. 6. hors, il pourrira . Ce que le Chirurgien cognoiſtra lors qu'il ſera liuide, noiraſtre,80

Signes que
Pomentum refroidy au cact, & lors ne le remettra ainſi putrefié :car les parties d'iceluy corrom
puës pourroient endommager les autres : mais le liera auec yn fil recors au deſſus de
eftcorrompu .ia putrefaction ,& extirpera ce quieft corrompu , & fera reduir en ſon propre lieu.
Obſeruation
pour le chic Toutesfois on doit laiſſer prendre le filer,à fin d'attirer ce que par le moyen du filet,
rurgien. qui auroit eſté ſerré,pourroitchoir en la capacité du ventre. Aucunsoncvoulu laiſſer
Noia que les l'Ométum dehors eſtáclié: ce qu'il ſe fautbien garder de faire,à cauſe que ce faiſant,
parties de il eſt cenu ſuſpendu,n’eſtant couché ſur les inteſtins, qui eſt ſon propre lieu:dont ſ'en
noftre corps fuit grande douleur, & trenchées au ventre : & pour euicer tels accidens , le faut re
leur propre mettre commenous auons dic, quipourroitfaire quelque pourriture, comme choſe
lieu appor eſtrange à Nature. Lors que l'inteſtin & Omencum ſontremis,la playecſtant grāde,
tene grandes doiteltre couſuë par le benefice de la ſuture , dite Gaſtroraphie , delaiſſant un petit
douleurs.
orifice en la partie plus decliue , pour donner iſſuë à la ſanie. Grande annotation au
Gal. lin. 6. jeune Chirurgien : c'eſt qu'aux playesfaites aux boyaux, ne faut donner clyfteres ,à
Mer.ch.4. raiſon que le clyftere ſortiroic par la playe des inteſtins,& demeureroicen la capacité
Annota tion.
du ventre, & ſe pourriroic auec le ſang, dont ſ'éleueroient de grandes ventoficcz D
putredineuſes , qui feroient enfleures, & tenſion au ventre . Et quand celles choſes
aduiennent, & que le malade ſe plaint ſentir grande douleur aux teſticules , fay
prognoſtic, que conmaladebien toſt mourra : ce quei'ay veu pluſieurs fois. En licu

de clyfteres on peut vſer de ſuppoſitoires,ou noets. Et quant aux playes penetrantes


en la ſubſtance du foye, ratelle, eſtomach , & autres parties contenuës , ne doiuent

eſtre delaiſſées: mais leChirurgien fera fon deuoir en ce qu'il luy ſera poſſible :iaçoic
que par ce moyen n'aye certaine eſperance de guarir , neantmoins yne eſperance
Sentencede douteuſe eſt meilleure qu'vn deſeſpoir aſſeuré .Sila vellie eſt bleſſée , ou la matrice,
Corn.Cell. & gros inteſtin , ſeront faites inie &tions par leurs propres conduits. le n'ay veu aucun
Des plages Autheur quiayeparlé des playesfaitesen la graiſſe,mais lesonttouſiours referées à tool
de la graiſſe.
celles de la chair & des muſcles : parcant en céc endroit m'a ſemblé bon de dire ce
mor en paſſant: c'eſt que lors qu'ilſera fait vne playe ſimple ſeulement en la ſubſtáce
de la graiffe ,encor qu'elle fuſt bien profonde,iln'y fautmettre nulle tente , mais ſeu
lementyietter de noſtre baume dedans, & vn emplaſtre par deſſus de Gracia Dci,
Des Playes en particulier . 399

OK А ou autre ſemblable:ce faiſant ladite playe ſera coſt apres conſolidée, fermée , & ci
cacriſée ,ce que i'ay fait pluſieurs fois.
ebila
o
. Des playes des Aines , Verges, & Teſticules.
lari
ha CHAP. XXXII .

3 L aduient quelquesfois playes aux Aincs, & parties voiſines, & alors il Playes des
faut auoir égard ſi elles penetrent au dedans , & cognoiſtre quelles par- tines.
cies ſont vulnerées, comme veſie ,matrice, inteſtin droit,parce qu'elles
ont grande conionction enſemble ,de façon que ſouuent ſont bleſſées
toutes enſemble d'un coup : & pour le cognoiſtre, voy les deux ſuſdits
chapitres. Or quant aux playes des teſticules & parties genitales,parce qu'elles ſont playes des
neceſſaires à la generation , & qu'elles mettent la paix en la maiſon, on les conſeruera Teſticules,
le plus ſoigneuſement qu'il ſera poſſible ,y procedant ainſi que lon verra eltre neceſ
faire,ſuiuant la doctrine donnée par cy- deuant,diuerſifiant les remedes ſelon lesac,
cidens qui viendront : car d'eſcrire celle choſe en particulier , ne ſeroit iamais fait.
B
2x
Des playes des Cuiffes, & des lambes.

C H 4 P. XXXVIII .

Esplayes faites au dedans des Cuiſſes,ſont ſouuent cauſe de mort ſu- Playes des
bite, quand elles penetrent en la groſſe veine Saphene,ou groſſe arte- cuiſjes,mora
re,& aux nerfs quiles accompagnent : ce que j'ay veu ſouuent adue. solles.
nir . Or lors qu'elles ſont ſimples,iln'y a rien qui peruertiſſe la cure ,
fors qu'il faut que le malade garde le lią , ſuivant le prouerbe com
la gamba al letto. Mais quand elles pe- Proverbe
muncies Italiens , à ſçauoir, La mano al petto,
netrent profondement, ſouuent aduiennent grāds accidens , commeinflammation , Italien.
apoſteme & pourriture aux membranes qui couurent les muſcles , qui cauſent que
C Tvlcere iette vne tres - grande quantité demariere,de façon que le malade meurt en
atrophie,& tour deſſeiché. Ecpartant faut que le Chirurgien ſoicaduiſé à bien crai
ter telles playes,vlceres& fiſtules, faiſant des inciſions, à fin de pouuoir extirpet 86
mondifier lesmembranes pourries , & les calloſitez . Car vne petite portion peut fai
re grands accidens , & tenir l'vlcere longtempsouuere. Etquand les tendons du iar
ret & autresſone coupez ,aucuns Chirurgiens ont bien oſé les coudre bout à bout,
à fin de les reünir enſemble : ce que iamais n'ay oſe faire, de peur qu'il n'y furuint ex
treme douleur,conuulſion , & autres accidens . l'ay bien veu le gros tendon fait de Hector fue
trois muſcles du molet de la iambe,lequel ſ'inſere au talon ,eſtant coupé d'un coup trailné par
d'eſpće ,la playeeſtre longtemps ſans le pouuoir conſolider :& apres eſtre cicatriſée,
fon lõg des murs
quand le malade commençoit à cheminer, la playefouuroit comme auparauant ; & de Troyes
parrant ie conſeille,le faict aduenant,que lon commande au malade de bien long
temps ne cheminer ſur la iambe bleſſée, iuſques à ce que la cicatrice ſoit endurcie ,&
bien ferme:à celte cauſe il doit cheminer long temps ſur potences .

ils
D
Des plages des Nerfs , & parties nerueuſes.
i

CH A P. X X XIX.
1#kat

L ſe fait ſolution de continuicé és parties nerueuſes, par cauſes externes,

en diuerſes manieres , à ſçauoir, par choſes qui contondent, meurtriſſent &


écachent , comme coups de pierre , de baſton , de marteau , de maſſe, bale
1

dharquebuſe, garrot darbaleſte, d'voe morſure, pinſeure, piqueure , & ſemblables :


par choſes aiguës & piquantes , comme d'vne aiguille ,poinçon , lancette , dard ,
Aeſche, eſpine, eſcharde : ou quelque partie de beſte piquante , commed'une viue !
auſſi par
choſes trenchantes , commed'eſpée & couſteau : ou qui eſtendent ſi fort
qu'ils rompent & dilacerent , comme eſtre rompus ſur la geſne. De là vient que des
playes qui en prouiennent, les vnes ſont plus compoſées que les autres ,aucunes ſont
fuperficielles & petites , autres longues & profondes, & aucunes aulli font faites

1
400 Le dixieſme Liure

A
ſelon la longueur du nerf, tendon , & membrane : les autres ſelon la largeur,auec
inciſion cocale, ou d'vne portion ſeulement. Il y a d'autres differences, leſquelles ie
Lesaocidens delaiſſe pour cauſe de briefuecé. Les accidens qui en aduiennent , ſont douleur ve
qui aduien-, hemence,Auxion, inflammation ,
fieure, delire, fyncope,apofteme
, gangrene , & tota
net aux nerfs
vulnerez . le mortification de la partie , ſpaſme, &ć fouuent la mort , & ce pour la communica
tion & colligance qu'ils ont au cerueau , & autres parties nobles . Entre toutes les
bleſſeures des parties nerucuſes, la piqueure eſt celle qui plus amene de pernicieux
accidens , parce que la playe eſt pecite & eſtroite : au moyen dequoy ny le medica
ment n'y peur entrer,ny la ſanie ſortir ,laquelle parſa demeure acquiert vne virulen
ce , dont elle imbibe la ſubſtance des nerfs,tendons, & membranes, & fait qu'en eſtás
engroſſis, l'accourciſſent, & par telle replecion eft cauſée douleur , inflammation,
ſpaſme, & les autres accidens deſſuſdits.

Dangereuſes Apres celles - cy , les plus dangereuſes ſont les playes , où les nerfs, tendons , & mem
playes des branes ne font coupez qu'à demy, ou ſuperficiellement, parce que la portion qui
nerfs. n'eſt coupée, ſe recire vers ſon principe,qui cauſe grande douleur & ſpaſme par con
B
munication. Cecy eſt manifeſte aux playes de la ceſte,lors que le Pericrane n'eſt qu'à
demy-coupé,& meſmes quand on l'inciſe pour appliquer le crepan.Carn’eſtant que
demy inciſé, la douleur & accidens y demeurentbien plus grands , que ſ'il l'eſt du
tout . Parquoy la plus ſeure playe des nerfs ,eſt celle où ils ſont du tout coupez, d'au
tant qu'ilsnecommuniquent rien aux autres parties ſuperieures, & queren recirano
ils ne trouuent point de contrarieté . Bien eſt vray que la partie demeuredebile, &
priuée de ſon a & ion , & le plus louuent de mouuement .

Cure des playes des Nerfs. C = A P. X L.

Indication Es playes des Nerfs, ſelon la commune pratique des anciens Medecins &
curatiue au Chirurgiens ne doiuent eſtre promptement agglutinées , ſuiuant la genc.
tre qu'és rale indication de ſolution de continuité: mais pluſtoſt ſi elles ſont trop
plages com eſtroites ,comme les piqueures, ils commandent qu'elles ſoient agrandies
munes . C
parinciſion de ce qui eſt deſſus ,&
qu'on les tienne long temps ouuertes , à fin de don
· Hiſtoires. ner iſſuë à la ſanie , & entrée aux medicamens. Quant à moy, i'ay pluſieurs fois traitce
telles playes tout autrement , & de freſche memoire en vn nommé Monſieur le
Cocq , Procureur en Cour d'Egliſe , demeurant en la ruë de Noſtre Dame,lequel

1 en ſerrant certains papiers qui eſtoient ſur fon contoir, trouua entre iceux vn tren
che- plume , qui luy paſſa tout au trauers de la main . Auſſi en vn mien voiſin , qui
voulant embrochervn aloyau de bæuf qui eſtoit gelé , ſe perça auec la broche le
milieu de la main de part en part. Ie leur ay agglutine incontinent leurs playes , y
mettant dés le premier appareilde mon baume aſſez chaud , ſans nulle tente , & au
tour vn defenſif, & furentbien coſt guaris , ſans leur aduenir aucuns accidens. Tou
En quel case, tesfois iene conſeille pasauicune Chirurgien de ſe hazarderà luiure telle façon de
nerfsrecentes pratiquer , que premierement il ne ſoit bien exercé à diſcerner les diverſes com

Je doinene plexions & habitudes des corps : car cela ne pourroit bien ſucceder,file corps eſtoic
incontinent plethorique , cacochyme, ou de ſentiment fort aigu : en tel cas ſeroit plus ſeur d'y
agglutiner. beſongner , comme nous dirons cy - apres . Or non ſeulement les playes des nerfsdif-.D
ferent en curation d'auec les autres playes , mais auſſi ſont differentes entr'elles : car
combien que tous medicamens ſoient propres aux nerfs bleſſez , leſquels attirenc
du profond, & tariſſent les humiditez & fanies , ſi eſt -ce que ceux qu'on applique
aux piqueures, & où les nerfs ne ſont pas dénuez , requierent & endurent bien re
medes plus forts, ſubtils, & deſiccatifs ( toutesfois ſans mordication ) à fin qu'ils puiſ
ſent penetrer au profond, en attirer & ſeicher l'humeur & fanie qui eſt autour, ou

en la ſubſtance d'iceux nerfs. Au contraire, quand ils ſont deſcouuerts ,iln'eſt beſoin
que de medicamens doux , & qui ſeichent ſans aucune mordicacion . Exemple
pour la piqueure de nerf. 24. cerebenthinæ Venetæ , olei veteris añ . zj . aquæ viræ
Remedespour parum . Autre. 4. olei cerebenthinæ 3 j. aquæ vitæ zj . euphorbij zB . Autre . 2 .
la piqueure radices dragoncheæ , brioniæ , valerianæ & gentianæ cxſiccacas , & in puluerem
des nerfs. redactas, miſce cum deco &to centaurei , & oleo aut axungia veteri : tu en mcc
tras chaudement dedans la playe. Autre : Prenez galbanum , poix graſſe , opopa.
nax , liqucficz en eau de vie & fort vinaigre ,puis y meſlez axunge de porc , d'oyc,

1
Des Playes en particulier. 40ole1i
CC
ie
A de poule,de chapon, d'ours,huile vieille,huile de lis,& ſemblables. Autre. 24.
hyper. Lambuci & de euphorbio an .3 j . ſulphuris viui ſubtiliter pulue.z B. gummi
e. ammon. bdellijañ. zij.aceci boni 3 ij.vermium terreftrium præparatorum žı.bul
Jianc omnia fimulad conſumptionem aceti. On inſtilera en la playe de ce medica
a ment,puis ſera appliqué tel cerat, lequel attire la matiere du profond. 24. olei fuprà
les ſcript.zj.cerebenth .Venetæ zß.diachylonis albi cum gummis z x.ammoniaci,bdel
lijin aceto diſſolutorum añ.3 ij.reſinæ pini, gummi.elemi, picis naualis , añ. zv.cc
ma. ræquod fufficit,fiat ceratam ſatismolle. Tu vſeras prudemment aux piqueures des
21 nerfsdecels 8 ſemblables remedes , les diuerſifiant ſelon la qualité & profondeur
tas d'icelles, & aufli ſelon la temperature & habitude des corps , & ayant égard aux au
20, tres choſes conſiderables. Ecoù par tels moyens la douleur ne ſeroit appaiſee , mais
pluſtoſt augmentée,& qu'on veiſt lapartie enflammée,& les léures de la playé cíle
uées, iectantvne ſanie ſereuſe , ſubtile , & virulente , nommée Ichor (Hanc curandi
rationem Ptalefcus de Taranta lib . 1.c. de conuulfione sannotauit , vt es nerni inciſionem )
onydoit appliquer de l'huile toute feruente ,auecvnpeude linge attaché autour Huileferuen
12 d'vne eſpatule , & en toucher le fonds & les parois de la playe-crois ou quatre fois. te pour ſeaer
uc B.Ceſte cauterization fera coſt apres appaiſer la douleur,à cauſe qu'en bruflantle nerf, one extreme
du cendonou membrane,on ofte le ſentiment, & par conſequent la douleur :ainſiqu'il douleur.
appertaux grandes & extremes douleurs des dents pertuiſées, lors qu'on peut tou.
cherauprofond de leurs racines d'vn fer ardant,ou d'huile de vitriol rectifiée, ou eau
& de vie : car cela fait promptement ceſſer la douleur ,en bruſlanc le nerf quifinſere
eſdites racines.Nous voyons auſſi aux vlceres corroſiues & ambulatiues ( couſiours
accompagnées de douleur extreme ) qu'apres y auoir appliquévn medicament eſca
rotique, comme poudre d'alum ,de mercure, egyptiac fortifié , icelle douleur ceſſe
incontinent Or ſuppoſons encores que la douleur perſeuere, & qu'il y ait ja com
& mencement de retraction des nerfs & ſpaſme, & que le malade Toit en danger de
mort,entel cas il eſt expedient de couper du tout lomerfou tendon du trauers. Par .
cemoyenchalquepartie d'iceluy ſe recirant vers ſon coſté ,n'y aura plus de contra
LOS & ion,vrayclt que l'a &tion ſera perduë , mais il vaut mieux la perdre que la vie , ce que
I les Anciens ont commandé .
с

le .
el입 Hiftoire du feu Roy Charles 1x.
CH A P. XLI.
HI

R pour inſtruire leicune Chirurgien ,& lc dreſſer mieux à la pra- Hiſtoire du


I tique deſſuſdite, ie reciteray ceſte hiſtoire, qui n'eſt hors de pro- Roy Charleso

pus , pour la curation des piqueures des nerfs. Le Roy ayant la
Jo
fieure, Monſieur Chapelain ſon premier Medecin, & Monſieur
Caſtellan, auſli Medecin de fa Majeſté, & premier de la Royne ſa
3. mere, luy ordonnerent la ſaignée: & pour la faire on appella vn
1
qui auoit le bruit de bien faigner, lequel cuidant faire ouuerture
::D
à laveine,piquale nerf: qui fit promptement eſcrier le Roy ,diſantauoir ſenty vne
tres-grande douleur. Parquoy aſſez hautement ie dy qu’on deſſerraſtla ligature,au
1 D trementque le bras fenfleroit bien fort : ce qui aduint ſubit auec vne contraction
1 du bras , de maniere qu'ilne le pouuoit fechir ny eſtendre Itbrement,& y eſtoit la
e douleur extreme, tantàl'endroitdela piqueure,que de toutle bras.Pourle premier
&plus prompt remede , i'appliquayvn petit emplaſtre de baſilicon, de peur que la
playe ne fagglutinaſt,& par deſſus tout le brasdescompreſſes imbuës en oxycrat ,
quec vne ligature expulſiue, commençant au carpe, & finiſſant pres l’eſpaule, pour
7
faire renuoyduſang& cſprits aucentredu corps,de peur que les muſcles nere
e ceuflenr trop grande fluxion , inflammation , & autres accidens. Cela fait , nous
nous retraſmes à part , pour aduiſer & conclurre quels medicamens on y devoit Raiſons de
appliquer pour leder la douleur,& obuier aux accidensquiviennent ordinaire- l anibeur
ment aux piqueures des nerfs. lemis ſur le bureau , qu’on dcuoit mettre en l p touchant les
a ie,.. medicamens
queure del'huile de terebenthine aſſez chaude ,auec vn peu d'eau de vie rectifić
& furtoutlebrasvn emplaſtre de diachalciteos,diſſout auecvinaigre & huile rolat, surle bras
ca continuant la ſuſdite ligature expulfiue. Mesraiſons eſtoient que ladite huile du Roy.
402 Le dixieſme Liure ,

& cau de vie ont puiſſance de penetrer iuſques au fonds de la piqueure , & ſeicher A
l'humidité qui forcoicde la ſubitance du nerf, & par leur chaleur, tant actuelle que
potentielle,leder la douleur : & ledit emplaſtre de diachalciteos a pareillement ver
tu de reſoudre l'humeur ja couru au bras, & prohibe la deſcente d'autre humeur.
Quant à la ligature , elle ſert de roborer & altreindre les muſcles, exprimer & ren
uoyer aux parties ſuperieures l'humeur ja deſcendu , & empeſcher nouvelle fluxion .
Ce que leſdits Medecins accorderent, & conclurent celsremedes y eſtre vtiles & ne
ceſaires. Par ainſi la douleur ceſſa. Et pour dauantage reſoudre , & tarir l'humeur
contenu en la parcie , on vſa puis apres des remedes reſolutifs 8c deſiccatifs, comme
de ceſtuy. 2.farinæ hordei & orobi an. Zij.for.camom . & meliloti añ.p.ij. butyri
recent. ſine ſale zj.ß. lixiuij barbitonforis, q . luff. fiat cacapl . ad formam pulcis. Le
Roy demeura trois mois & plus, ſans pouuoir bien feſchir ny eſtendre ſon bras : 1
neantmoins ( graces à Dieu ) il fut parfaictement guary , ſans que l'a &tion fult demeu
récaucunement vitiée . Orauions- nous conclu ,où les ſuſditsmedicamensn'euſſent
ſuffiſans pour obtenir la curation ,d'vſer d'huile feruente , à fin de cauteriſer le
eſté
nerf,ou meſmes de le couper totalement: parce qu'il eſtoit plus expedient qu'il per- B
diſt l'action du bras , que de le laiſſer mourir miſerablement à faute de ce faire. Com
Aurrehiſtoi- me il eſtoic aduenu de recente memoire à Madainoiſelle la Bailliue Courtin , de
re de Me
damoiſelle meurant ruë ſaincte Croix , prés la Bretonnerie à Paris : à laquelle pour auoir eſté
Courtin . ainſi mal - laignée, le bras luy comba en gangrene & totale mortification, dont elle
mourut par faute d'auoir eſté ainſi ſecouruë. Et ce fuffira pour la curation des pi
queures . Mais où les nerfs ſeront deſcouuerts, n'y faudra appliquer medicamens fi
forts : carits induiroient plus grandedouleur,& amencroientplus grands accidens :
partant on en appliquera dedoux , qui ſeichent ſans aucune acrimonie ou mordica

tion . Exemple. 2.tereb .Venet.lotæ in aqua rofar.Zij.boli arm , ſubtil. pulueriſaci,


& ireos Florent.añ . zij ,incorp.ſimul. Pareillement noſtre baume eſt en el cas ex
cellent . Auſlieſt bien ceſtuy fome recommandé de Vigo.24. olei rof.omphacini ZB .
olei de terebenth . z iij . ſucci plantag: 3B.feminis hypericonis aliquantulum contrici
ñ.ß. cuchiæ præparatæ z iij. calcis decies locæ cum aqua plantag . zij . antimonij zj .
ſepi hircini & vitul.añ . zv .vermium terreſtrium locorum cum vino Zj . B.bulliant 0
omnia fimul dempra tuthia, in cyatho decoctionis hordei vſque ad compoſitionem
aquæ & vini,colencur, rurſúſque igni admoueantur, addendo cuchiam , & fiat lini
mentum cum cera alba , & z B.croci. Ce liniment mitige la douleur, & elt incarna . 14
tif, & engendre chair deſſus les nerfs découuerts . Tu accommoderas proportionnel
lement la predite curation aux tendons & membranes , n'oubliant auſſi à conforter
iceux nerfs( en quelle ſorte qu'ils ſoient bleſſez) à l'endroic de leurs origines & paffa
ges plus inſignes ,coinme la teſte, l'eſpine,le col , les aiſſelles, & aines : & ceaucc hui
les chaudes, commehuile laurin , de lis , de vers , de ſauge, & ſemblables. Je ne puis &
ne dois icy obmettre vn accident que i'ay veu aduenir au gros tendon du Talon .
C'eſt qu'iceluy pour bien legere occaſion ,commepour quelque petit ſaut, pour ync
mal-marcheure,pour auoir failly de pied en inontant à cheual, ou pour ye tremon
té cropalaigremenc, & bruſquement,ſe rompt & dilacere , ſans qu'il y ait aucune ap
parence de ſolution de continuité à la veuë , ou autre lefion au cuir. Les ſignes de tel
accident font, que lors que tel excés ſe fait , on oic vn bruit en ceſte partie ,comme D
d'un coup defouet , & celors que la ſolution ſe fait: puis au tact , on ſent vne cauité
au deſſus du talon , à l'endroit que lediccendon eſt roinpu. La douleur eſt grande en
la partie,auecimpuiſſance de marcher droità ſon aiſe . La cure ſe fera en gardant le
liet par vn long temps,appliquantdu commencement des reinedes repercuſifs ſur
la partie , poureuiter la fluxion , & autres mauuais accidens : puis on vſera de l'empla
ftrum nigrum , ou diachalciteos, & autres , ſelon qu'on iugera le cas le requerir . Et
toutesfois pour cela ne faut eſpererreceuoir enciere guariſon du mal,ainsau contrai
re dés lacommencement fauc prognoſtiquer , & predire qu'il reſtera touſiours quel
mouth
que depreſſion en la partie ,auec deprauation de l'action de la iambe : c'eſt à dire , que
le malade clopinera touſiours quelque peu , à raiſon que les extremitez du tendon
rompu ou relaſché,neſe peuuentiamais parfaiđement reioindre .

Humo
a
Des
Des Playes en particulier . 403

A
Desplages des ieintures. CHAP . XLII .

Arce que les playes des ioin &tures ont quelque choſe de particulier ou
cre ce quia eſté dic des nerfs au chap . precedent , pour celte cauſe nous
en traicterons à part en ce chap . Oricelles ſont dangereuſes, & le plus
ſouvent morcelles , à cauſe des aponeuroſes ou tendonsmembraneux
13
qui les liene , auſquels s'inſerent des nerfs , & partantonegrand lenti
ment , qui cauſe les ſuſdits accidens , & encores pluſtoſt ſi la playeeſt en la partie in
terieure desioincures , comme ſous les aiſſelles, au ply du bras , au dedans du Carpe
de la main ,& ſous le iarret, pour les grandes veines ,arteres , & nerfs quiſont ences
parties , eſquelles la ſolution de continuicé faichemorrhagie & grande douleur , &
autres accidens: auſquels fauc obuier ſelon la nature & qualicé de chacun : comme
s'ilya flux de ſang , l'eſtanther: 8 s'il y a douleur , la leder tant qu'il ſera poſſible. Si
B laplaye eſt fort grande, on la recoudra pour reünir les parties ſéparées ,delaiſſant vn
orifice en la partie decliue, pour donner iſſuë à la ſanie : & lors que la playe ſera cou
ſuëony appliquera de ceſte poudre ordonéepar de Vigo,par l'eſpace de deuxiours.
2. churis,lang.drac.boli arm.cer.figill.añ.z.ij.aloës,maft.añ. z.j. fiatpuluis ſubtilis,
laquelle foic aſpergée ſur la couture. Puis on appliquera vn defenGfautourde la
iointure, faic deblancs d'eufs,peu d'huile roſat,bol.maſtic,& farine d'orge : & fion
y met vnc tence,elle ſera courte, & degroſſeur qu'il ſera beloin , à fin qu'elle n'induiſe
douleur : & ſera oin& d'vn digeſtif fait de iauned'æuf,huile roſat , tercbenchine la
uće, & vn peu deſaffran. Erdi ladice playe eſtoit petite & eſtroice, on l'agrandira s'il
eſtbeſoin : à fin que les humeurs , qui par le moyen de la douleur ſeroient fluez à la
partie, puiſſent auoir libre iſſue. Dauantage faut tenir la particen repos , & regarder
dufroid & d'application de medicamens relaxans, emolliens & humedans : mais au
contraire faut qu'ils eſtreignent & ſeichent. Exemple d'un cataplafine. 2. furfuris
macri, far.hord .& fab.añ.3 iiij.flor.camom.melil.añ.ñ.ß.cereb .ziij.mellis commu
C
nis zij.ol.myrt.zj.oxym . timp.vel oxycrati, vellixiuij comm.q.luff. fiat catap . ad
formam pultis. Autre. Prenez lie de vin , ſon de froment, du tan , noix de cyprés, de
galles,cercben.ſoit faiccataplaſme.Onen peut faire pluſieurs autres qui ont ſembla
ble vertu d'altraindre ,ſeicher & roborer les ioincures : & en ce faiſane ſedent la dou
leur , & gardent que les humeursne courent à la parcie . Au dedans de la playe , & au- Les medicša
tour d'icelle, on ſegardera d'appliquer medicamens huileux , ſi n'eſtoit pour ſeder mens huileux
doivent eſtre
vne grande douleur, d'autant qu'ilsrelaſchencla ſubſtáce des muſcles, nerfs &mem
fuis és playes
branes, & lesrendent plus faciles à receuoir fluxion : ioincque par leſdites huiles la des iointures .
playe en elt renduë plus ſordide & humide, & partant plus difficile à conſolider:par
pi quoy vſeras de medicamens deſſeichans & aftringens. Exemple d'vn remede altcin
10
gene & agglutinacif.24.cereb.Venet.z.ij.aquæ vitæ parum , pul.maſt.aloes,myrrhæ,
boliarm.añ. 3 ij . Noftre baume y elt bon aulli , en y adiouſtant de la poudre defic
caciueſansacrimonie, ſelon qu'on verra cître beſoin . Et s'il ſurvient quelques acci
will
dens,on yremediera parremedes contrariās à iceux . Surcouron doit éviter le froid,
parce qu'il eſt totalement contraire aux playes & viceres, & principalement des para
ties nerucuſes. Qu'il ſoit vray , beaucoup d'hommes bleſez meurent en Hyuer , mel
mes de pecites playes , qui ne mourroient de plusgrandes en Eſté. Et cela s'accorde
bien au dire d'Hip. à ſçauoir ,qu'aux parties vlcerées le froid eſt mordicant , ilendur- vaphor. 20.
D cicle cuir, faic douleur, réd les playes inſuppurables ( d'autāt qu'il diminuë ou eſteint ſett. s .
la chaleur nacurelle qui fait la ſuppuratio)engendre liuidité,friſſons,fiéures,conuul
fions & tenſions.Etfáuticy noter, que de celles playes ſorcencdiuers excremens, &
principalement une humidité glaireuſe ,mucilagineufe , & quelquesfois liquide, qui
cfl'humeur dont lesiointures font entretenuës& alimentées,ainſi que chacune par

cicet nourrie de propre humeur. Car chacune partic a ſon baume naturel, propre à chaque para
151
ſa nutrition & entretien , lequel lors que la partie eſt vulneréc , ſe decoule ainli que tie a ſon bass
l'on voit loss qu’on taille lavignc decouler vne humidité , qu'on appelle feue:c'eſt ce me .
dont eſt fait le Callus és fractures. Telle humidité des parcies nerueuſes eſtane glai
reuſe,& comme congelée , monſtre bien qu'elle eſt accompagnée d'une grande froi
deur,quicauſe yne douleur extreme & repugnante à tousremedes potentiellement
chauds. Cela monſtre aufli qu'cn toute douleur desiointures , s'il y a matiere , elle eſt
Mm
404 Le dixieſme liure,

pluſtoſt froide que chaude.Ec pour appaiſerceſte douleur , & corriger l'intempera . A
cure froide, on doit appliquer choſes calefa &tiues, non ſeulement potentiellement ,
mais aufli actuellement commeveſſies de bæufou de porc , demy-pleines d'vne de
codion reſolutiue , ou des briques forceſchauffées, puis eſteintes en vin , & poſées
tout autour de la iointure, les réchauffant ainſi qu'ilſera beſoin. Ceſte chaleur ainſi
actuelle ayde nacure à cuire , digerer , & reſoudre l'humeur contenu en la partie & la
fortifie : ce qui eſt grandement neceſſaire , d'autant que la chaleur des ioinctures eſt
perice, & pource ne peut reduire les medicamens de puiſſance à effe &, ſi elle n'eſt ay
dée par le benefice des remedes a &tuellement chauds.Pour confirmation de ce , ieco
Hiſtoire de
PAutheur . reciteray ce qui m'aduine vnioureſtancen Hyuer enmon eſtude. Vo vent coulisme
donna tellement contre voe hanche , que mevoulant leueril me fue du tout impoſſi
ble,pourle froid quiauoit refroidy les parties nerueuſes, & ſentois vne excremedou .
leur, laquelle ne peut eſtre appaiſée que par application de bricques fort chaudes ,
auſſi devellies de bæuf demy-pleines d'vne deco & ion d'htibes chaudes , parfois dé
bouteilles remplies d'eau bouillante , autresfois de mil & auoine fricallez en vne
B
poille avec un peu de vin blanc. Ceſte chaleur actuelle me fic perdre la douleur : ce
que n'cuſſenciamais fait les remedes potentiellement chauds .

ſituation des partiesbluffées. CH A P. XLIII .


Dela

Ourretourner à noſtre propos, le Chirurgien methodique pour


voira au ſurplus de la curation de telles playes,prenantindication
des choſes naturelles , non naturelles , & contre nature . Sur toutil
regardera à bien ſituer la partie dont la iointure eſt vulncrée : par
ce que par la mauuaiſe ſituation , les accidens mauuais accroident,
& fouuencapres la curation de la playele membre demeureroide ,
retrait, & corcu.Parquoy il noterà ce que nous en dirons preſence
ment pour le bien obſerver en temps & lieu . Sila playe eſt en la partie anterieure de
l'eſpaule, on doit mettre ſous l'aiffelle vne aſſez groſſe compreſſe , & meccre le bras
en eſcharpe, ſupportant le coulde , à fin d'ellenet & tenir la teſte de l'os du haut du
bras contremont , & par ce moyen l'agglutination & conſolidation ſera mieux &

pluſtoſt faite. Sila playe eſt en la partie inferieure , lors que nature commencera à
produire chair, & ioindre les labies de la playe , on feraleuer, hauſfer , & mouvoir di
choſe digne uerſement & par interualles le bras malade. Carli on manque de ce faire, le malade
d'eſtre norée.
ne pourra iamais bien mouuoir le bras , apres quela cicatrice ſera faite , & aulli qu'en
celte iointure il ſe fait le plusſouuent vne indifpofition ,dice des Grecs Ancyloſis. Sila
c'eſt à dire
playeelt en la iointure du coulde , faut ficuer le bras en figuremoyenne ,
non du couc droitny plić . Par ainſi apres la conſolidation , on s'aydera erop mieux du
bras , ques'il demeuroit droit ou trop courbé . Lors qu'il y a playe au carpe ou aux
iointures des doigts excerieures ou interieures , les doigts & la main ſe doiuent tenir
demy - Aechis , en meccant dedans la main vne plotte ou compreffe .Car ſi on les tiene
droicts, & non courbez , ils demeureront quaſi impuiſſans en leur a &tion qui eſt de
prendre.Ec aducnant que la main demeuralt demy-flechie apres la curation, le mala
de s'en pourra encores ayder à prendre diuersinſtrumens ,comme vne effée,picque,
hallebärde, la bride d'un cheval ,& faire autres actions de la main . S'ily a playe en la
jointure de la hanche ,on la doit tellement ſituer, que la reſte de l'os femoris ne forte
D
hors de la place , qui ſe fera par bonnes compreſſes & ligatures . Le malade ſe tiendra
couché ſur le dos. Quand la playe commencera à ſe conſolider ,on fera mouuoir l'os
femoris dedans ſa boëtte , à fin qu'il ne ſe face yne conionction de la reſte dudicos
contre la cauicé de l'os Iſchion , comme nous auons die qu'il falloit faire du bras. Sila
playe eſt faite en la iointure du genoüil ,on fera tenir la iambe do malade coure droi
te : car il ne pourroit bien cheminer apres ,parce qu'il demeureroit boiteux . Lesioin
tures du pied & des orteils vulnerez , ſeront tenuës droictes , & non courbées & Ale
chies :autrement l'on ne marcheroit pas bien . Et pour le dire en vo mor , la licuation
de la jambe & du pied eſt coute difference à celle du bras & de la main .
40S
Des Playes en particulier.

A
Desplayes des ligamens. C H 4 P. AL11 .

Our le ſurplus de la curation des parties nerucuſes, i'ay encores à ad


uertir couchant les ligamens vulnerez , qu'ils n'ontrien de particulier ,
ſinon qu'il les conuiendra agglutiner, deſſeicher , & conſolider plus
ſeurement, & auecmedicamensplus forts : parce qu'ils ſont fort durs
& ſecs,& n'ont point de ſentiment. Leur curacion a eſté compriſe cy
dellus, & fpecialement ſous les playes desiointures . Quant aux accidens que nous
auons dit au commencementſuyure les playes des nerfs , aucuns appartiennent au
Medecin , & ceux qui touchent le Chirurgien, onteſté crai &tez ailleurs,partantnous
nepousy arreſterons dauantage, & ferons en cérendroit finir ce preſent liure , dus
quel Dieu ſoit loué & remercić.

Fin du dixieſme liure , des Playes en particulier.

Mm ij

23

ak

ŚC!
I.
1

s
hosi
406
A

PREFACE .

SVR L'ONZIESME LIVRE


DES PLAYES FAITES PAR B .

HARQ V E B VSES ,

PAR AMBROISE PARE , DE LAVAL ;


CONSEILLER , ET PREMIER CHIRVRGIEN
du Roy.

Intention de EVANT qu'entrer à bon eſcient en la deſcription des


Autheur. playes faites par Harquebuſes & curation d'icelles, il
m'a ſemblé bon pour mettre le Lecteur en gouſt, devant 2001

que le preſenter à vne table , diuerſifiée de tant de


mets , & fricaſſées de poudre à canon , coucher icy en 0
bref, qui fut l'inuenteur d'vne li pernicieuſe machioc
de guerre , en combien d'eſpeces elle a eſté cournée & tok:
variée , ayant chacune ſon nom ſelon ſon vlage, &
combien elle eſt dommageable au genrc humain.Poly
Inuention de
dore Virgile , chapitre ſecond , du liure deuxieſme des
lepoudre.
inuenteurs des choſes, dit l'artillerie auoir eſté inuen
tée par vn Allemana de baſſe condition , & ce par vne telle rencontre & occaſion. 30 %

Cét homme né pour la ruyne & deſtruction de l'humain lignage , gardoit vn iour CS
pour quelque cercaine intencion dans vn morcier , de la poudre, qui depuis pour :
ſon principal vſage, a eſté appellée poudre à canon, & l'auoit couuerte d'une pierre. Coupe
Aduint qu'en battant ſon fufit, vne petite eltincelle tomba dans ce mortier , & lou
dain lapoudre ayant pris feu, fit ſauter ceſte pierre en haut : ce qui l'eſtonna, &
de forte
enſemble luy appris la force de ceſte matiere non cogneuë auparauant,
que faiſant vn petit canon de fer, & compoſantla poudre , il eſſaya ceſte machine :
Les Venitiens & voyant ſon fait reüllir à ſon ſouhait , il enſeigna premierement aux Venitiens I'v
ont premiers lage de ceſte diablerie, en la guerre qu'ils eurent contre les Geneuois, l'an de noſtre D
eu l'arriblerie.ſalut,mil trois censo & ante, en vn lieu iadis nomméFoſſeClodiane,à preſent Chiog
Diuerſes opi- gia. Combien que ſelon leiugement de Pierre Mellie , chapitre huidieſme, en la
niõs touchăr premiere partie deſes diuerſes Leçons, ceſte inucntion doit eſtre plus ancienne : à
le temps au- caule qu'en la Chronique d'Alphonſe vnzieſme, Roy de Caſtille, qui conquir les
quell eſté. lle- Illes Argezires,ilſe trouuc qu'eſtancav ſiege de la ville ,en l'an
rie a 'arti
mil crois cens quaran
te crois,les Mores aſſiegez tiroieni cercainsmorciersde fer,dont les coups rendoient
vnſon'eſclattant & horrible, à l'égal de celuy du tonnerre . Le ſeigneur Dom Petre
Euelquc de Leon , en la Chronique du Roy Alphonſe ,celuy quiconquit Tolede ,
eſcrit qu'en vne bataille nauale , qui fut entre le Roy de Tunes, & le Roy More de
Seuilc (ily a quatre cens ans 8z plus) auquel le Roy Alphonfefauoriſoit, les Tunin
geois auoientcertainstonneaux de fer ou bombardes, & qu'auec ceils tiroient forco
connerres de feu : cc quidcuoiteſtreartillerie , bien qu'elle ne furt à la perfection de
Preface. 407
A maintenant. L'inuenteur de ceſte machine a eu pour recompenſe, queſon nom &
fa profelliononteſté incogneus detoutle mõde, commeindignes d'aucune memoi
re,pourvne fi mal-heureuſe & damnable inuention. Combien qu'André Theuet en
fa Coſmographie, parlantdes Suëuians, peuples d'Allemagne , auance de l’autho
rité d'un cercain vieilliure eſcrit à la main, cel homme Allemand auoir eſté Moine L'autheur de
& Philoſophe, ou Alchymiſte de profeſſion , du pays de Fribourg , nommé Con l'artillerie ,
AtantinAncizen. Quoy qu'ilen ſoit , ceſte mach
ine a eſté premiereme appel
nt lée
Bombarde , à cauſedu bruit qu'elle fait, que les Latins conformément au naturel
du ſon, appellent bombus. Depuis à ceſte premiere inuention de ſoy rude & impar
faite, lecemps ,l'art , & ſur tout la malice des hommesa beaucoup adiouſté. Car
premierement quant à la matiere ,au feront ſuccedéle bronze , &le cuyure, metaux adiosſi
Comme on
éà
plus traitables& fufiles, moins auſi ſubie & s à la rouille. Secondement ceſte
à les l'artillerie,
miere ſimple & lourdemaſſe de canon a eſté diuerſifiée en cent façons , iuſques pre-
E monter ſurdesroues , à fin que non ſeulement de plus haut , mais auſſide plus gran
B de viteſſe,elles peuſſenc courir à la ruine des hommes, les premiers mortiers ne
ſemblansaſſez maniables , ny aſſez cruels par vn ſimple vomiſſement de fer & de
feu. De là ſontvenus ceshorribles monſtres de Canons , doubles Canons , Baltar- Divers noms
des , Mouſquets, Paſſe - volans, & pieces de campagne , ces furieuſes beſtes de de l'artillerie
Couleurines , Serpentines , Baſiliqs , Sacres , Faucons , Fauconneaux , Verſes , d'où ils
‫ر‬
L Fleutes , Orgues , & autres infinies eſpeces, toutes de diuers noms , non ſeulement ſontpris.
tirez & pris de leur figure & qualité ,mais bien dauantage de leurs effe & s & cruauté .
Enquoy certesſe ſoncmonſtrez ſages & bien entendusen la choſe , ceux qui premie
rement leur ont impoſé cels noms, quiſont pris non ſeulement des animaux les plus
rauiffans,commedes Sacres & faucons; mais auſſi des plus pernicieux & ennemis du
genre humain , comme des Serpens, Couleuures, & Baſiliqs pour monſtrer que celles
machines guerrieres n'ont aucre vſage , & n'ont eſté inuentées à autre fin & incen
tion ,que pour rauir promptement & cruellement la vie aux hommes ,& que les oyans
ſeulement nommer , nous les euſſions en horreur & deceſtacion. le laille pluſieurs

w
autres piecesmoindres en corps , mais de force & cruauté plus pernicieuſes,d'autant
C qu'elles attaquent noſtrevie de plus pres ,& qu'elles nous peuuent ſurprendre à l'im
prouiſte & trahiſon , ſans qu'il y ait moyen de s'en donner garde , comme ſont les
piſtoles, piſtolets, perits bidets, & autres ſemblables, petits lezards & ſcorpions,
que l'on peut aiſément cacher dedans les chauſſes. Entre ces deux eſpeces ciennent
41
lemoyen les harquebuſesà croq , que l'on ne peut bien tirer , ſi elles ne ſont liées &
accrochées ſurdu bois , lesmouſquets , poitrinals , que l'on ne couche en ioüe , à
cauſe de leur calibre gros & court, mais qui ſe tirentdela poi&trine, & les harque
bules communes : le tour inuenté pour la commodité des gens de pied , & pour
deſerrer balles & dragées.Le mot general impoſé parles Latins,eſt Sclopus,àl'imica- D'où eft tiré
Oui
tion du ſon, & desItaliens qui difene Sclopecere:par les François harquebuſe: mot lemotd'har
parcillemét tiré des Italiens à cauſe du crou ,par lequel lefeu du ballinet entre auant quebuſe.
danslecanon : car les Italiens nomment yn trou Bużo , & fenomme arc, à cauſe qu'on
‫ܬܵܐ‬ en vſemaintenant, commeiadis on faiſoit des arcs à la guerre , veu que les archers
auoient le temps paſſé la premiere pointe comme à preſentonclesharquebuſiers aux
Bad
combats & bacailles. De ceſtemiſerable boutique & magazin de cruauté ,font fortis Divers artific
li
les mines , contre - mines , les ſapes , les pots à feu ,les traicts, les lances & arbaleſtes à ces defeu.
D feu,les tonneauxmeurtriers,les ſachets,les trainées , les fuzées,les fagots bruſlans, les
cercles,les oranges,lesgrenades , les pelottes , les paux & carreaux à feu, tres miſera
ble inuention, par laquelle nous voyons ſouuent'vne milliaſſe de pauures hommes
1 fricaſſezfous ynemine,ou cazematte: les autres en l'ardeur du combat atteins,voire
los
legerement de quelqu'un de ces engins,bruſler cruellement dansleurs harnois, fans
meſme que les eauxpuiſſent refrener & eſteindre la furie d'un tel feu. Ce n'eſtoit
doncques aſſez d'auoir armé fer, & le feu contre nous , ſi meſme
le pour haſter le
coupon n'euſtquaſi comme empenné telles armes , les faiſant voler aux deſpens de
noftre vic,approprianc desailesà lamort,pouraccabler l'hommeplus ſoudainemér
pourla conſeruation duquel toutesfois telles choſes auoiene eſté premierement,
creées. Vrayementquand i'oy parlerdes machines deſquelles les anciens vſoient, desmachines
fuitpour affaillir leshommes en combat & rencontre,commeſont les arcs , dards,ar. des anciens
balcites, fondes, fultpour forcerles villes, comme font beliers, chcuaux ,vigncs, auxnofires,
Mm inj
408 Preface.
tortuës , baliſtes ; & autres ſemblables , il me ſemble que i’oy parler depetits ioüets A
d'enfans, au regard de celles-cy , qui pour parler proprement & à la verité, ſurpaſſent
La fondre en figure &cruauté les choſes que l'oa ſçauroit penſer lesplus cruelles . Que ſçauroit.
n'eſtfi cruelle on imaginer en ce monde de plus eſpouuancable & furieux que la foudre & le ton
que Partille- nerre?Eccoucesfois le connerre ordinaire & naturel,n'eſt par maniere de direrien ,au
me mel'hom . regard deces machines infernales: ce quiſe pourra aiſémetcomprendre par la com
meeſtprefer-paraiſon deseffects de l'vn & de l'autre. Nature abien voulu honorer & priuilegier 2001
wédela fou. I homme,inferieur en force corporelle aux beſtes,de cecy : c'eſt que le ſeulhõme ne
dre.
meurt touſiours eſtant frappé de foudre , & au contraire pour peu que les autres ani
Plin. liure 2. maux,quiſont ſubiects à la foudre, en ſoient touchez , ilsmeurentloudain . Car tous
chap. 54. animaux frappez du foudre,combenc de l'autre coſté le ſeul hõme n'en meurtpoint,
s'il ne combe ſur la partie frappée du foudre , ou s'il n'eſt tourné par force du coſté 2017
d'où la foudre vient. Mais l'artilleric n’eſpargne nonplus les hommes quelesbeſtes,
& ſans diſcrecion de quelque coſté qu'elle vienne , de quelque coſté qu'elle frappe ,
en quelque façon qu'elle les renuerle , leur emporte la vie. Il y a pluſieurs remedes B
Plin.l.2.c.ss.pour ſe garder contre le tonnerre.Car outre les charmes,par leſquels les anciens Ro
mains croyoient la foudre pouuoir eſtre coniurée & diuertie , ou excitée , on ne veit
Quelles cha iamais la foudre deſcendre plus auant que cinq pieds en terre. De là vient, queceux
ſes font pre- qui la craignent , font caues profondes en terre, pour s'y retirer comme en ſauueté,
fernées de la On dit que le laurier n'eſtiamais frappé de la foudre,c'eſt pourquoy le temps pane &
foudre. eneores auiourd'huy ,il eſt pris pour vn ſignal devi& oire.Parquoy l’Empereur Tibe
Shet. in Tib. re craignant ſur toutes choſes le tonnerre, ſe faiſoit promptement couronner de lau
rier, aumoindre bruit qu'il euſtouy en l’air. On lit quelques vns auoir fait faire des
teores de peaux de veaux marins ,pource que cér animal a cela de particulier , qucia
mais il n'eſt acceint de la foudre. L'Aigle auſſi eſt dit auoir ce priuilege entre les oy
ſcaux de n’eſtre frappée de la foudre :c'eſt pourquoy on l'appelle couſteliere de lupi
ter, dit Pline, liu.2.chap.54 .& 55.Mais contre l'artillerie,rien ne ſeruent les paroles &
incantations, rien le laurier victorieux, rien le veau marin , rien choſe quelconque,
L'artillerie non pasmeſme vnemuraille oppoſée,eſpeſſe de dix pieds.Brefcecymõltre lafureur
chaſſe le con- inuincible de l'artillerie , au regard du connerre: c'eſt que letónerre ſe peut diſliper С
nerre , par ſon decloches , baſſins d’airain , & meſme par le bruit de l'artillerie , les nuées du
heure & combat deſquelles ſe fait le tonnerre , eſtans par celle agication de l'air ou
dillipées, ou 'chaſſées en autre pays bien loing : mais la fureur & orgucil de l'artilleric
Temps ex . nes’appaiſe pour choſe quelconque. Il y a quelques temps & quelques regiõsexem
empisde la pres de foudre : car on ne voitguerestomberla foudre au ceur de l'Hyuer,non plus 19
foudre. qu'au gros de l'Eſté.Ce qui aduieoc de deux raiſonscontraires : car en Hyuerl'air eſt
fort eſpais,auſſi ſont les nuées, de force qu'aiſément eſteignent tout le feu, que pour
soientavoir chargé les exhalations de la cerre , qui ncantmoins ſont lors froides &
glaciales.Delà vientque la Scythic & les regions froides qui ſont à l'enuiron, c'eſtà
dire, la Tartarie, Liuonie, Moſcouie, Ruſſic, & autres pays voiſins, ſont exempts de
foudre,conrme au contraire les grandes chaleurs en preſeruentl’Egypte.Carlesex
halations & vapeurs de la Terre, qui ſont chaudes & ſeiches, ſe conuertiſſent parla meu

11 Liu.2.c.go.chaleur vehemente en petites nuées,qui n'ont point de force,comme ditPline.Mais ‫ا‬


comme l'inuention ,auli la tempeſte & dommage de l'artillerie, s'eſt eſpanduë cómo
vne peſte par toutes les provinces de la Terre,&en tout cemps le Ciel recentit ſous la hide
plaintiue voix de ceux qui en ſententles furieux effects. Letonnerre ordinairement D
Deſſein @ u n'a qu'vn coup , qu'vnefoudre , & ne frappe qu'vn homme à la fois : mais l'arcillerie
but de l'ar- d'un ſeul coup poutaccabler vne centaine d'hommes.Lafoudre le plus ſouuét,com
sillerie. mecſtant choſe naturelle,combeforcuitement,tancoſt ſur vn chelne,tancoſt ſur vne
montagne , cantoſt ſur yne cour, & rarcınent ſur l'homme : mais l'artillerie conduire
par la maligne dexterité de l'hommc ,n’appere que l'homme,n’a aurrebut que l'hom
mc, le mire ſeul& choiſit ſeul,entre vne milliafic de choſes. La foudre par le bruic de
ſon tonnerre auant- coureur quelque bonne eſpace de temps deuant , nous aduercic
de la tempeſte future :Mais l'artillerie, qui eſt le comble detout mal,en grondát fiapu
pe, & en frappant gronde ,enuoyantaulli-coſt la balle morcelle dans l'eſtomach ,que
lc ſon & bruit dedans l’oreille . C'eſt donc à bon droit que nous deceltons l'autheur
d'vne ſi dommageable & pernicieuſe inuention :commeau contraire deuons eſtimer
ceux dignes de grandes louanges , qui ou par paroles caſchent à reuoquer les Princes
/
Des Playes d'harquebuſes. 409
A & Rois de la practique d'une a miſerable & funeſtemachine,ou par effe &ts & eſcrits,
s'eſtudienc à donner quelques remedes à ceux quien auroienc elté atteincs. Ce qui
ma elimeu preſque le premier entre les François, à eſcrire de cele mariere. Mais de Ce qui incite
vanequefaire courir ma plume enceſte carriere, il m'a ſemblé bon pour plus facile PAutheur à
inteligence du Traité principalquc ie pretensmeccreen lumiere , des playes faites eferire des
parharquebuſes, fairemarcherdeuantdeux Diſcours, pourarracher quelques opi- plages d’hat.
nions de la fantaſie
de pluſieurs, quimeſemblent du tout faulſes: la falſité deſquels li quebuſes.
ellen'eſtconvaincuë,il n'eſt pas poſſible de rien entendre en l'eſſence de ce mal, ny
rien faire à profit & hõneur en la cure d'iceluy. Le premier Diſcours addreſſe au Le- sommairedu
& eur, condamne par viues raiſons la façon deVigo, qui brufloit les playes faites par premier Diſ
harquebuſes , & lescauteriſoit,penſantqu'elles participaſſent de quelque venenofi- course
té.Au contraire,celle qui guarit celles playespar les fuppuratifs, eſt autant douce &
ſalubre, comme celle dudic deVigo elt cruelle & pernicieuſe. Le ſecond Diſcours Sommaire du
addreſſé au Roy , monſtre leſdites playes ne participer d'aucune venenoficé, ains laſecond Dif
B cacoëthie & male morigeration d'icelles, dependre encicrement du vice de l'air , & cours :
de la cacochymie des corps offenſez.
ntnntnautnats Antennenadnacknadenokraten neratantnacter noks

Diſcourspremier,ſur le faictdes Harquebuſades,


& autres baſtons à feu.
10 'An mil cinq cens trente fix , le grand Roy François enuoya vne
grande armée en Piedmont,pourenuicailler Thurin ,& reprendre
les villes & chaſteaux, qu'auoitpris le Marquis du Gualt Lieute
1 nant General de l'Empereur , où monſieur le Conneltable, lors
Grand-Maiſtre , eſtoit Lieurenant General de l'armée , & mon
C
ſieur de Moncejan , Capicaine General des gens de pied , duquel
alorsi’eſtois Chirurgien. Vnegrande partie dearmée arriuée au Pas de suze
pasde Suze, trouualınes les ennemis qui cenoientlepaſſage, & auoient fait certains
forts& tranchées, de façon que pourles faire debuſquer& quitter la place , il con
uintcombatre,où il y eucplulieurs cuez & bleſſez,cant d'une part que d'autre : mais
cefurà eux decourquitter, & gaigner le Chaſteau : où bientoit furentſommez de
VA
fe rendre:ce qu'ils feirent, & fortirent ſeulement la vie ſauue, en chemiſe : & leba
fton blanc au poing , dont la plus grand' part s'en allerenc gaigner le Chaſteau de
Villanc , où ily auoit enuiron deux cens Eſpagnols . Monleigneur le Conneſtable
nelevouluc laiſſer en arriere , à fin de rendre le chemin libre. Ce Chaſteau eſt allis
fur vnepecitemontagne, qui donnoit grandeafleuranceà ceux de dedans, qu'on ne
.
pourroicaſſeoir l'actillerie pour le baccre: & furent ſomiñez de ſe rendre, ou qu'on
5 lesmettroit en picces : ce qu'ils refuſerent, reſpondans qu'ils eſtoient autant bons &
fidelcsſeruiteurs de l'Empereur ,que pouuoiceftre monſieur le Conneſtable du Roy
fonmaiſtre.Leurreſponſe entenduë, on fic de nuictmonterdeux gros canons à for Le Challeau
ce debrasauecques cordages, parles Suiſſes& Lanſquenets. Où le malhcurvoulucde Villane
qu'eſtanslesdeux canons aſlis, vn Canonniermic parinaduertence le feu dedans vn aßiegé ego
D facplein de poudre à canon , dont il futbruſlé ,enſemble dixou douze ſoldats . Et pris.
en outre la fiamme de la poudre fur cauſe de deſcouurir l'artillerie, qui fit que toute
lanuict ceux du Chateau cirerent pluſieurs coups d'harquebuſes, à l'endroic où ils
.
2

auoient peu deſcouurir les deux canons,donuils cuerent & bleſſerene quelque nom
ů
bre de nos gens. Le lendemain de grandmarin on commençala batterie , qui en peu
d'heure fic breche.Eſtant faire ceux de dedans demanderent à parlementer , mais ce
À
futcrop tard,carcependant nos gens de pied François , les voyans eſtonncz ,monte
fentàla breche, & entrerenc dedans, & lesmirent tous en pieces , excepté vnefore
bellc& ieune Piedmontoiſe, qu'vngrand Seigneur voulutauoir pour luý tenir com
pagnie lanui& ,depeur du Loup-garou. Le Capicaine & Enſeigne furent pris en vie,
1 mais bien toſt apres pendus & eſtranglez ſur les creneaux de laporte de la ville , à fin
de donner exemple & crainte auſdits ſoldatslmperiaux,n’eſtre ſitemeraires & fi fols
devouloirtenir telles places contre vne ſigrande armée. Or tous les ſuſdits ſoldats
Mm iiij
+

410 I. Diſcours ſur le liure ,

du Chaſteau ,voyans venir nosgens d'vne tres -grande furie, firent tout devoir de ſe A
deffcudre,cuerent & bleſſerene vn grand nombre de nos ſoldats à coups de piques &

L'Autheur d'harquebuſes, où les Chirurgienseurent beaucoup de belongne taillée .


entre en ma l'eſtois en ce temps - là bien doux de ſel,parce que ie n'auois encores veu traiæter les
tiere. playes faites par harquebuſes : il eſt vray que l'auois leu en lean de Vigo , liure 1. des
Playes en general,chap.8.que les playes faites par baitons à feu,participent de vene
noficé, à cauſe de la poudre , & pour leur curation commande les cauterizer, auec
huile de fambuc , en la quelle ſoit mellé vo peu de theria que . Ec pour ne faillir, para
uant qu’vſer de ladite huile feruente , fçachant que celle choſe pourroit apporter au
malade extreme douleur , ie voulu ſçauoirpremierement que d'en appliquer,comme
les autres Chirurgiens faiſoient pour le premier appareil , qui eſtoit d'appliquer ladi
te huile la plus boüillante qui leur eſtoit poſible dedans les playes , aucc tences & ſes
tons , dontie prins hardieſle faire commeeux : en fin mon huileme manqua , & fus
contraint d'appliquer en ſon lieu vn digeſtif fait de iaune d'æuf, huile roſac, & tere
Remede trou benthine. La nuitie ne peu bien dormirà mon aile, penſant que par faute d'auoir
B
ué par acci- cauteriſé, ie trouuaſſe les bleſſez,où i'auois failly à mettre de ladite huile,morts em
dent.
poiſonnez , qui me fit leuer de grand matin pourles viſiter. Où outre mon eſperance
trouuay ceux auſquels i’auois inis lc medicament digeltif , ſentir peu de douleur à
leurs playes ſans inflammation & cumeur , ayans aſſez bien repoſé la nuict : les autres
où l'on auoit appliqué ladite huile , les trouuay febricitans,auec grande douleur , lu
meur & inflammarion aux enuirons de leurs playes : adonc ie me deliberay de neia
mais plus bruller ainſi cruellement les pauures biellez d'harquebuſades .
Lors que nous entraſmes à Thurin ,ilſetrov ua vnChirurgien , qui auoic le bruit par
deſſus tous de bien medicamenter les harquebuſades , en la grace duquel crouuay

moyen m'inſinuer , & luy fis la cour pres de deux ans & demy , auparauant qu'il me
voulſiſt declarer ſon remede , qu'il appelloit ſon baume Cependant monheur le
Mareſchalde Montejan , quieſtoit demeuré Lieutenant General du Roy en Pied
mont , nourut : adoncreinonſtray au Chirurgien que m'en voulois futourner à Pa
ris , & luyſuppliay qu'il me tinſt promeſſe de me donner la recepre de fon baume :
oleum catelo ce que volonrairemencil fic , attendu que ie luy quitcois le pays. Il m'enuoya querir
lorum . с
deux petits chiens , vneliure de vers de terre , deux liures d'huile de lys , fix onces de
terebenthine de Veniſe , & voe once d'eau de vie : & en mia preſence il fit bouillir
les chiens tous viuans en ladite huile , iuſqu'à ce que la chair laiflaſt les os : & apres
mitles vers qu'il auoit auparavant fait mourir en vin blanc , à fin qu'ils iectaſſent la
terre qui eſt couliours contenuë en leurs ventres . Eſtant ainſi vuidée, les fic cuire en
ladicehuile , iuſqu'à ce qu'ils deuindrent cous arides & ſecs : alors fit le tout paſſer
par vee ſerviette, ſansgrandement en faire exprellion : cela fait , y adiouſta la terc
benchinc, & à la fin de l'eau de vie : & appella Dieu pour celmoing que c'eſtoit ſon
baume , duquel il vſoit aux playes faites par harquebuſes , & autres qu’on preten
doit ſuppurer, & me pria dene diuulguer ſon ſecret. De là ic m'en vins à Paris , où
quelque temps apres,mouleur Syluius , Lecteur du Roy en Medecine,hommegran zda
demenceltimé entre les gens doctes, me pria d'aller diſner auccluy : ce queie kisvo
lontiers : où il m'interrogea comme on craictoit les coups d’harquebules & les com 06
La poudre à buſtions faites par la poudre à canon : où tout ſubic ie luy prouvay que la poudre à
Canon n'eſt
canon n’eltoit aucunement veneneuſe , parce que nullimple qui entre en icelle n'eſt
veneneuſe..
trouue veneneux , & moins la compolition, & auſſi que l'experience en faiſoit foy:
parce qu'aucuns ſoldats eſtans bli llez en prenvient auec du vin , dilans qu'icelle D.
prinle par dedans gardoit les accidens d'auenit ( ce que ie n’approuve) ioina aulli
qu'aucuns ayans quelques vlceres ſur leurs corps , pour les deſfeicher , y mettoient
dellus de ladice poudre , ſans qu'illeur en ſuruinftaucun mal. Er quant aux balles , entele
ne pouuoient concevoir ſi grande chaleur, qu'elles euſſen vertu de bruller . Car vne
balle eltart cirée contre une muraille ; on la pouuoit promptement tenir en la main
nuë ,combien que pour la colliſion fairccătre la pierre elle deuroit encores eſtre plus
Les playes échaufféc : & quant aux combuſtionsfaites de la poudre à canon ,icn'auois rien crou
d'harquebu- uéde particulier,pourdiverſifier la cure des autres combuſtios: & Juy racontay ceſte inte
s
fes font ſans hiſtoire, qu'vn garçon de cuiſine de monſieur le Mareſchal de Montejan tomba en
combuſtion. vne chaudiere pleine d'huile quali boüillante , pour lequel penſer eltant envoyé que.

rir,promptement m'en allay demander à yn Apothicaire des medicamés refrigerans, aced


į 1

Des Playes d’harquebuſes


. 411

a qu’on auoic de couſtumed'appliquer aux bruſleures. Là ſe trouua vne bonne vieille Remede
villageoiſe, qui entendant que ie parlois de ceſte brulleure, me conſeilla y appliquer accident.
trouué par
pourlepremier appareil de peur qu'il n'y ſurưinſt des puſtules ou empoulles) des oi Ceremede eft
gnons cruds pilez avec vn peu deſel.le demanday à ladice vieille , li autresfois l'auoic approuué de
eli
experimenté: elle meiura en ſon iargon , Simeſſé,álafé de dé:qui m’incita à en vouloir celseli.s.ch,
t
bien faire l'experience ſur le ſouillon de cuiſine , où veritablemen trouuay le lende . 27 .
F1 main les endr oi ts où auoi en t couc hé les oign on s , n'au oi r aucu ne s vellies ,ou empoul

les : & où ils n'auoiércouché,touteſtreveſié. Quelque temps apres yn Allemād de la Hiſtoirei


garde dudit ſeigneur de Montejan s'eſtoit for - beu: le feu princ en ſon falque qui
CORE liquay
luy feir grád deſaſtre aux mains & au viſage ,& fus appellé pour le penſer.l'app
s e es re me de s un s
des oignon à la moitié du viſage , & de l'autr coſtél comm :au ſecond
appareil crouuay le coſté où i'auois appliquéles oignons, ſans nulles veſſies ny exco
riacion , & l'autre tout empoullé : & lors propolay d'eſcrire l'effect deſdits oignons .
Davantage ie dy audit Sylvius, que pour bien extraire les balles demeurées dedans Comment il
20 . B quelque partie du corps , il falloic ſicuer le bleſſé en celleficuació qu'il eſtoic lors qu'il faut fiewer
fuc frappé , & outre ie luy diſcouru beaucoup d'autres choſes contenuës en celiure . pourextraire
Mon diſcours paracheué, ilme pria de grāde affection de le mettre par écrit,àfin que les balles,
du ceſte faulſe opinion de Vigo fuc enuoyée à val l'eau : ce que volontairemétluy voulus
accorder ,& feis cailler pluſieurs inſtrumens pour extraire les balles , & autres choſes
eſtranges,ce qu'on n'auoit encores fait, & fuc premieremēcimprimé l'an 1545. & bien
receu: quia eſté cauſe demelefaire reuoir , & encore le faire r’imprimer l'an 1552. &

pour la derniere fois l'an 1564.où iel’enrichy debeaucoup d'autres choſes,pour auoic
bio fuiuydepuisles guerres, & auoir eſté aux bacailles, & enfermé és villes , cõme à Mecs
& Hedin . Pareillement pour auoir eſté au ſeruicc decinq Rois , où i'ay touſiours par
tout voulu communiquer auec les Medecins & Chirurgiens ſçauans,lors que i'auois
quelque douce , pour deſcouurir s'il y auoit autre moyen de traiter leſdites playes fai.
tes par harquebuſes,dontla plus grand'part,au moins ceux qui ont ſuiuy les guerres,
-Гt": & yonc peu cognoiſtre quelque choſe par raiſon & experience ,ſontde mon aduis les
medicamenter,en vſancde ſuppuratifs au commencemét , & non d'huile bouillance.
Home C Ec proteſtay en outre audit Syluius,auoir trouué celles playes autant aiſées à traiccer, ce qui rend
‫ای یا‬ cſtans aux parties charneuſes, que les autres faites par grandes contuſions: mais où le les playes
LIB boulet rencontre les os & parties nerucuſes,illes briſe; dilacere ,rompt , & fend par és d'harquebu .
ſes difficiles
clars,non ſeulemét où il couche , mais beaucoup plusloing,ſans aucunemiſericorde,
guarir.
cauſant grands accidens , qui ſuruiennent principalement aux iointures & aux corps
cacochymes : & en temps ſujet à corruption, à ſçauoir quand l'air eſt chaud & humi
ONE de, adonc la cure eſt tres-difficile ,& fouuentimpoſſible, non ſeulemét des playes fai
‫ܠܐ ܐ‬ tes par baſtons à feu , mais auſſi de celles qui ſontfaites par autres inſtrumés, voire en
cores qu'elles fuſſent aux parties charneuſes.Parcant les ſuſdits accidens ne prouien
nent de la venenoficé qui eſt en la poudre à canon , ou par la combuſtion faite par le
Patie boulet .Pour preuue dequoy , ie puis alleguer ce que i'ay n'agueres experimenté en la
Hiſtoire.
perſonne du Comte de Courdon ,ſeigneur d'Achindon Eſcoſſois, que i'ay penſé par
le commandement de la Roynemere du Roy , lequel fut bleſſé d'un coup de piſtole
au trauers des deux cuiſſes,ſans fracture d'os, luy eſtanc donné de ſi pres que le feu
fo Hamboic en ſes chauſſes : & furentierement guaryen 32. iours , ſans qu'il luy ſuruinſt
fićure,ny autre mauuais accident: & le medicamenray àS. Ican de Latran au logis de
D monſieur l'Ambaſſadeur d'Eſcoſſe, Archeuelque deGlaſco, lequel tous les jours af
90. litoit àle voir penſer.Ceque peuuent teſmoigner eſtre vraymonlieur Brigard , Do
BE &eur Regent en la faculté de Medecine , qui l'alliſta auec moy , enſemble lacques
Guillemeau,Chirurgien du Roy & Iuré à Paris, iuſqu'à la parfaite guariſon . Lemeſ
me peut teſmoignermonſieurHaucin , Docteur Regenten la faculté de Medecine ,
CG quile vint voir pariours interpoſez:&-GillesBuzet Elcoſſois ,Chirurgie,tousleſquels
s'eſmerueilloienc comme il auoit eſté litoſt guary , ſans application de medicamens
fores & acres.Or l'intention pourquoy i'ay fait ce pecit Diſcours, eſt pour demöſtrer
qu'il y a plus de 30.ans quei'ay trouué le moyen de traiter les playes faites par har
quebuſades, fans vſer d'huile bouillante,nyd'autresmedicamensforts & cuiſans :fice
n'eſt que l'on y ſoit contraint , pour les accidés qui aduiennétaux corps cacochymes ,
1.01. & pour la mauuaiſe diſpoſition & malignité de l'air,commeie demoſtre plusample
ment en ce ſuivant Diſcours ,que ie fisau Roy defun & ,apres la priſe de Rouen .
412 II. Diſcours ſur le liure ,

AVTRE DISCOVRS , SVR CE QU'IL PLEVT VN

1OVRA V ROY DEFVNCT CHARLES 1X .

me demander touchant le fait des harquebuſades, de antres


baftons à feu,à fon retour du ſiege og priſede la ville
de Roüen .

B
Occaſion de Ource qu'il pleut vniour à voſtre Majeſté ( Sirs ) à celle de la Roync

ce diſcours. voſtre mere , à monſieur le Prince de la Roche- ſur Yon , à pluſieursau


tres Princes & grands Scigneurs , me demāder commeiladuenoit qu'en
ces dernieres guerres ,la plus-paredesGentilshommes & ſoldats bleliez
B
de coups d'harquebuſes, & autres inſtrumens, mouroient ſans y pou
voir aucunement remedier , ouà bien grand peine releuoient de leur maladie , ores
que les playes par eux receuës , fuſſent de bien perite apparence : & que les Chirur
giens appellez pour leur guariſon , y employaſſent tout leur deuoir & ſçauoir : l'ay
bien oſe mettre ce diſcours en auant , ſatisfaiſant en partie au deuoir de mon art, & ne
derogeant à l'honneur premier de ma profeſion ,que voſtre Majeſté m'a pleinement
continué iuſqu'à ce iour , pour vous faire entendre les raiſons qui peuuentauoir cau
ſé la mort à tant de vaillans hommes : la pluſpart deſquels i'ay veu , à mon grandre
gret, finir piteuſement leurs iours , ſans qu'ilme fuſt pollible nyà autre encore plus
inſinuatio en eſprovué quemoy, y donner aucun remede. Ieſçay que le ſuiuanc diſcours eſtonnc
la bõne grace ra quelques-uns, qui ſe repofans ſur leurs opinions particulieres, & ne recherchans a
de ceux qui
les matieres iuſqu'au fond du ſac, trouueront le premier front de ma diſpute aſſez
font d'opinió
contraire. eſtrange: pource que contrariant à ce que de long -temps ils ontimpriméen leur el
prit ,ie neleur accorde la cauſe de la malignité des harquebulades, proceder du ve
ninou empoiſonnement, que leur cerueau ſonge eſtre porté par la poudre à canon ,
ou par les balles trempées & friquaſfees en quelque matiere veneneuſe. Toutesfois
fileur debonnairecé & pacience aufli ſe pcuuenteſtendreiuſques- là , que la premiere
vueille peſer le zele quim'a meu de profiter à la Republique,enuerslaquelle li parle
paſſé me ſuis efforcé faire valoir le calent, que la ſinguliere prouidence de Dieu m'a
voulu departir,encor’maintenant ie m’y employe dauantage: & l'autre auec entier
iugement examiner les raiſons, deſquelles i'vſe en ce preſent Trai&té:ic ſuis ſcur qu'ils
auront mon labeur aggreable , & l'exempceronc de toute calomnie : ou bien qu'ils ſe
ront cant mal-affectezenmon endroit , que fiie m'addreſſois à eux , enrichydetous
les threſors des anciens Philoſophes,encormevoudroiệt -ils mettre au rang des plus
L'Auteur appauuris & ignorans hommes de toucle monde . Pour doncobuier aux argumenrs 2200
propoſe les , que les fauteurs du venin & empoiſonnement cy -deſſus mentionné poutroiét mec
201
deux poinets tre'en ieu , ie feray voir à voſtre Majeſté ( Sir el que l'offenſe des harquebuſades ne D 7
futer, alça- provient du venin quela poudrcou la balle porte quant-& - ſoy, & moins encore de
woir le poiſon la combuſtion ou caucerization ,que ladice balle échauffée par le fcu mis en la pou
tuet
de la poudre, dre, face és parties qu'elle rompe par la violence : ce que toutesfois quelques vns
istie
o le feu dø s'efforcent ſouſtenir , alleguans pour toutes raiſons qu'autresfois on aveu vnctour
bouler, pleine de poudre , ruinée en vn inſtant par vn ſeul coup decanon : Semblablemér vne
med på
maiſon couuerte dechaume s'embrazer au ſeul coup d'vne harquebuſe. Avec ce ,
qu'en la pra &tique des playes que font les inſtrumens à feu , nous voyons ordinaire
GA
ment lesorifices & parties circonvoiſines auſdites playes, ſi noires qu'on diroit yn
cautere actuel y auoir paſſé :ioint aufli que l'on voit ſortir& tomber l’eſcarre,comme
que
ils diſent. Tous leſquels argumens ſont fi malappuyez , que leur fondemétne merite 1976
qu'on s'y arreſte, & moins encor’que la reſolucion de voſtre demāde foit priſc d'eux ,
aing quei’eſpere vous faire encendre parla diſpute qui s'enfuit, laquelle ( apres auois
wriced
Des Playes d'harquebuſes
. 413

A veu grand nombre de telles playes , icelles obſerué diligemment,& medicamenté par
grand' methode ) i'ay recueillie des anciensPhiloſophes, Medecins, & Chirurgiens, la diſpure
pour en faire preſentà voſtre Majeſté, & enſemble la retirer de l'admiration qu'elle preſente en
priſe des Phin
auoit de la mort eſpouuentable de cant de Gencilshommes & bons ſoldats .
loſophes, Me
Or pour entrer en matiere , & reſpondre aux argumés cy-deflusallegucz, ilmeſem . decins , o
ble bon de diſcourir premieremér s'il y a quelque venin enclos en la poudre à canon : Chirurgiens.
& encore qu'il y en cuft,fi elle pourroit infe &ter par ſon pretendu venin . Pour lequel
poinct parfaictemét deduire ,force m'eſt rechercher la compoſition d'icelle poudre ,
cõlidere qu'elle n'eſt de ſubſtáce ſimple ,mais copoſée: puis pourſuyure la nature des
11 fimples qui entrécen la compoſicion ,leurs qualitez,effe &ts, & operations. Quancaux
ſimples,c'eſtchoſe toute afleurée ,qu'il n'y en a quetrois qui facent lacompoſition ,à compofitione
de la poudrs
ſçauoir, ie charbon de ſaule ,ou de cheneuottes,le ſoulphre,& le ſalpeſtre,quelques à canon.
fois aufli l'eau devie : leſquels ingrediés cõſiderez à part,ſont exempts de tovcvenin .
Qu'il ſoit ainſi,le charbon n'a choſe conſiderable en ſoy,linonvncleichereſſe en vne
B ſubſtance ſubtile , moyennātlaquelle reçoit auſſi facilemécle feu , qu'vn linge bruſlé
RO reçoitles eſtincelles d'vn fuzil. Le ſoulphrechaud & fecen degré ,non toutesfoisex
Cursa celif,& de fubftace plus oleeuſe & viſqueuſe, non toutesfois cant aiſée à enflammer
que le charbon :combien qu'il reticnne fortviuemétle feu quand il en eſt faily, & ne
sble
s'eſteint qu'à grand peine. Leſalpeſtre eſt cel , que pluſieurs s'en ſeruenten licu de ſelo salpeſtre est
sypia Ainſi delcouurons - nous n'y auoir aucune venenolicé en la nature de ces ſimples, nó- felde pierre.
mément en celle du ſoulphre ,qui eſt le plus ſuſpect :veu meſme que Dioſcoride liv.j.
ch.73.en donne à boire & humer dans vn æuf,aux aſthmatiques, toufleurs, & à ceux
cirilib quicrachentdu pus , & qui ont la iaulniſſe : & Galien liu.9.des ſimp.chap.36.l'ordon
ne pour remede copique à ceux qui ſontmordsde beſtes venimeules , & aux gratelles
malignes.Orquant à l'eau de vie,c'eſt vne choſe ſi ſubtile,qu'elle s'euapore & conſu
0.16 me ſi on laietre en l'air : outre ce que les Chirurgiens l'ordonnent fouuences fois en
breuuages & fritions, pour vn remedegrandement ſingulier. Qui me faicdire que
CORSI route la compoſition de la poudre eft exempte de venin ,puisque les ingrediens ſont
C
fientiers chacun en ſon endroit . Auſſi les Allemands , Reiſtres, offenſez de quelque Exemple pris
harquebuſade,nefont difficulté de diſſoudre en vin deux charges de poudre à cano , des Reiffres :
Allemands,
a les aualler, eſperans par ce moyen recouurer leur ſanté , & obuier aux accidens qui
e des fol
16 ſuruiennér à leurs naureures :ce que pourtantien’approuue parce que celle choſe ne dats Fraçois ,
leur peut leruir . Dauantage,les viceres faits par ladite poudre ne ſe trouvent d'autre feruantà la
nature,queceux qui ſont faies de feu ou d'eau bouillāce. Mais que me ſert d'alleguer 'meſme pro
JUMS vn exemple eſtrāger, puis que i'ay veu pluſieurs ſoldats François par ie ne ſçay quelle bation .
gayeté de cæur, & levoulas monſtrer bons compagnós , en aualler aſſez bonne quan
tité,ſanstoutesfois en reccuoir deſplaiſir aucun : & quelques autres bleſſez en vncn
Die droit de leur corps , en appliquer ſur leurs vlceres pour lesdeſſeicher , & s'en trouuer
Pret fort bien ? Quant à ceux qui diſent que ce n'eſt la poudre,maisle boulec ,qui ſubtile- Refutatió de
ment pertuiſé en pluſieurs lieux , & remply de venin, ou trempé , fricaſſé,& mixtionné ceux qui di
en quelque poiſon.cauſe cér exccz dangereux:le leur puis reſpondre,ſansbeaucoup fent leboulet
eſtre empois
metrauailler , que le feu mis en la poudre purifieroit le venin de la balle , ſi aucunyen
fonné : ce qui
auoit:ce qui ne le peut faire aux épieux , épées , & fleches,attendu que le feu n'y paſſe. ſe monſtrera
Brefpour.confirmer mon opinion eſtre veritable , ſçauoir eſt que telles playes ſont cy apres plus
exemptes de venenofité , il ne faut ſeulement que ſe reſſouuenir: Qu'il n'y a aucunde amplemene.
tous ceux ,quieſtoiét en voſtre cap de Rouen , quine ſceuſt afſeurémēt les boulecs ci
D rez parluycórre ceux de la ville , auoir eſté ſans aucun poiſon, & toutesfois les allie
gezauoićt opinion que coutes celles balles eſtoiét empoiſonnées: les ſoldats de voltre
Campauoiétmeſıne creance des boulers qui leur eſtojét tirez par ceux de la ville,leſs
60
quels ils diſoiét auoir eſté empoiſonnez par eux : croyās pluſtoſt & iugeans la qualité
‫ہرو‬ des playes par l'iſſuë mal -heureuſe d'icelles , que par les cauſes doncelles eſtoient fai
t
Augus tes.Vrayementcomme en Medecine ſelon la ſentence d'Hipp . aux Epidemies , ainſi
quenoteGalié ſur la lentéce 20. & 21.de la ſect.3.duliu.z.toutes maladies ſont appel
lées peſtilentes& veneneuſes ,lelquelles excitées des cauſes communes & generales,
quelles qu'elles ſoiết , tuée pluſieurs perſonnes ainſi peut-eſtre à parler impropremét,
pourrons - nous appeller les playes des harquebuſades ,venencules, quiſontplus dif
ficiles à penſer que les autres , non qu'elles participée d'aucune venenofité,maispour
::
quelquc cauſe generalle dependácou de la cacochymie des corps,corruptió de l'air ,
ou duvice des viures, dont les vlceres ſontrendus p ! us malins ,cacoëthes, & rebelles
414 II . Diſcours ſur le liure ,

Refutatio de aux medicamens.De dire que ce ſoit la cõbuſtion du boulet auſſi qui face le danger, A
ceux qui di- ie ne le puis entendre , veu que les balles faites ordinaireméo de plomb , ne pourroient
fent la balle endurerliextreme chaleur,fansſe fondre & diſſoudre du tout : leſquelles nonobſtant
faire combs
nous voyos paſſer au trauers d'vn harnois , & penetrer le corps d'outre en outre , & de.
ftion.
meurer encores entieres . Dauantage , nous obſeruons lors qu'on les tire contre ync
pierre , ou quelque autre mariere ſolide, pouuoir au meſme inſtanceſtre maniéesde
nous , & tenuës en la main , ſans qu'elles rendér norable ou ardante chaleur : combien
que l'accouchemét & colliſion d'icelles auec la pierre deuſt accroiſtre leur chaleur, fi
aucuney en auoit . Qui plus eſt, li on tire quelque balle dans un ſac plein de poudreà
canon , le feu n'y prend aucunemét : par ce i’oſe hardimét dire & aſſeurer ,que quád le
feu ſe met envne poudrereſeruée en quelque tour,ou en autre lieu ,cela le peut faire
non par le feu que la balle porte quani-& -loy,mais par l'accritió d'icellc, frapant con
tre la pierre de ladice tour, & en faiſant ſortir quelques eſtincellesde feu qui tombent
en la poudre : ne plus ne moins qu'en la meche du fuzil nous voyons cheoir quelques
eſtincelles par la colliſion du fer & du caillou . Le ſemblable dcuons-nous iugerdes
B
couuertures de chaume, quines'embraſent par la chaleur compagne du boulet,mais
l'exemple pluſtoſt par quelque linge , bourre, ou autre telle matiere attachée à la balle . Ce qui
d'uneballe me rend encórplusferme en l'aſſeurance de mon dire , eſt que ſi nous voulós tirer d've
de cire.
ne balle de cire, ne porcancaucun feu quant-& -ſoy ( car autremecelle ſefondroit) en
core percera-elle vn bois de l'eſpeſſeur dedemy -doigt: argument aſſez valable pour
mõſtrer queles balles ne peuuéceftre eſchauffées en force qu'elles cauteriſent& brul
D'où viene lent ainſi que quelques-vnsonteftimé. Et pour reſpondre à la noirceur qui ſe crouue
que lesplayes ordinairement en l'orifice des playes & despartiesproches , ie dy cér accidenc nc pro
de barque- uenir à raiſon de quelque feu accompagnácla balle,maisà cauſe de la grande contu
buzesſont lion qu'elle fait :& pource aulliqu'elle ne peut entrer au corps, ſinon par vne force 8
noires. violence incroyable , à cauſe de la figure ronde. Surquoy lion vouloic interroger les
meſmes paurcz, ie croy qu'ils ſeroiêc ſuffiſans teſmoins de mon dire,pourcequ'ils ne
ſontfitoft frapez,qu'au meſme inſtantne leur ſoit aduis qu'vne poucre,ou autre ſem
blablefardeau leur ſoit tombé ſur la partie offenſée ,en laquelle aulli ſentée vne dou .
leur aggrauante , vne ſtupeur & endormiſſement, qui diſlipe & quelquesfois eſteint la C
chaleur naturelle auecles eſprits qui y ſont contenus : doncle plus ſouuét s'enſuyuéc
gangrene & mortificació de la partie ,voire quelquesfois du corps vniuerſel. Ec quát
ie

à l'eſcarre qu'ils diſent y eſtre, & en ſortir ,ils s'abuſent: accendu que ce ſont certaines
porciós desmembranes & chair conteuſes ,dilacerées par la balle, quiſe ſont corrom
puës , & ſe ſeparent des partiesſaines:ce quiaduient ſouvent à toutes les parties gran.
Raiſons de demét conceuſes , & autres. Cóbien que cesraiſons monſtrécaſſez éuidemmée n'y a
ceux qui ſont uoir aucun venin en la poudreà canon , ny aucun feu porté par le boulet , fieſt-ce que
de contraire pluſieurs ſe ruās ſur laPhiloſophie naturelle ,louſtiennéc tout le contraire : & pourmo
opinion. preualoir en ceſte opinió , disēcles coups de canó eſtre du cout ſemblables aux coups

de tonnerres& foudres, que les nuées rompuës en la moyenne region de l'air precipi
SY
tent en terre. De laquelle fimilitude inferent & concluét qu'il y a du feu & du venin
au boulet, ſortãt de la bouchedu canon.Ie ſçay,Dieu mercy , que la foudre engédrée
d'une exhalation craſſe & viſqueuſe,au moyen de la vapeur qui luy eſt cõiointe ,n’el
clarte iarnais lanuë pour ſe lancer ça bas, qu'elle ne traine quant-& .loy quelque feu,
tantoſt plus ſubtil,cantoſt plus eſpés, ſelon la diuerſité de la matiere dont l'exhalatió
Seneque. eſt compoſée : car Seneque eſcrit au 2.liu.de ſes Queſtions naturelles , ch.49.qu'il y a D
Trois genres ſeulement trois genres de foudres cous differens I'vn de l'autre , ſelon la quantité &
defoudres . ſorte de leur inflammation : I'vn, qui à cauſe de la mariere plus ſubrile & tenuë,perce
ſeulemér & penetre cóme en pertuiſant,les obiets qu'il atteint: l'autre,quipar la vio ໐ 013
léccrõpt & diſſipe lesmeſmes choſes,pource que la matiere eſt plus cópacte , & tépe. " Tot
vence
ſtaciue,comevn orage : & le ciers, quicopoſé d'vne maciere plus terreſtre ,bruſle avec
copios
indices manifeſtes de ſon ardeur.le ſçay dauantage que la foudre eſt de nature peſti
lente & fecide , à raiſon de la matiere craſſe & viſqueuſe, laquelle bruflée rend vno tulee
cor
deur ſi puante queles animaux accouſtumez de giſter en leurs cauernes & tanieres ,
ligu
ri
ſont contraints les abandoner, fid'aduenture la foudrey eſt tombée , ne pouuāsendu
rer la puceur infecte de ce poiſon .Meſme que OlausMagnus en ſon hiſtoire Sepré
trionale a remarqué qu'en quelques lieux où la foudre eft combée , incöcinenc apres
la cheure , la campagne ſe trouue toute couuerce & ſurſemée de ſoulphre ,inucile cou
Cesfois
Des Playes d'harquebuſes
. 415

A tesfois, & quaſi cominceſteint. Sieſt-ce que pour ces raiſons ne me faudra confeſſer Reſponſes
que lescoupsde canon ſoiétaccompagnez de poiſon & de feu, come ſont les coups aux raiſons
de foudre :carores qu'ils conuiennét les vns auec les autres en quelque fimilitude , ce contraires.
n'eſt pourtant en leur ſubſtance & matiere , mais pluſtoſt en la maniere qu'ils ont de
caſſer,briſer,& diſſiper les obiets qu'ilsrencătrent, à ſçauoir les coups de foudre par
leur feu ,& par la pierre aucunesfois engendrée en iceluy : & les coups de canon , par
l'airimpetueuſemét pouſſé,quicăduiſant vne balle fait vn pareil delaftre. Quefi'e
ſtois conuaincu par argumens plus forts,iuſqu'à auerer les foudres & canonseſtre de
femblable ſubſtance e
, ncor ne ſerois- ie forcé de dire les canonnades & harquebu
ſadesporter feu quant-& -ſoy: conſideré que parmy les foudres ſ'en trouuent quel
ques -vns ( ainſi que dit Plineau ſecond liure de ſon hiſtoire ,chap.cinquáte & vnieſ
me ) qui compoſez de matiere merueilleuſement ſeiche, diſlipent tout ce qu'ils ren
contrét,fanstoutesfois le bruſleraucunement: les autres de nature plus humide, qui

pareillemétne bruſlent,maisnoirciſſent à l'auantage: & quelques- vns d'vne mariere


beaucoup plus claire & diaphane,le naturel deſquelselt cant émerueillable ,qu'on ne
B peut douter (commeabien dit Seneque) qu'il n'y ait en eux quelque vertu diuine en effect mer
C. ce qu'ils fondent ſubtilemét l’or & l'argér fans que les bougettes & bourſes en ſoient ueilleux des
aucunement intereſſées :fondent vne eſpée, le fourreau demeurāt en ſon entier:font foudres.
COM diſtiller le fer d'vne picque, ſans que le bois conçoiue aucune ardeur : eſpādent le vin
des tóneaux fans y faire ouuercure,neles bruſler.Suivāc lequel teſmoignage,ie pour
18 rois aſſeurer, & fans preiudice aucun, les foudres, quiſeulement compent & diſlipent
fansbruſler aucunemét , & qui laiſſent quelques effe& ts pleins de grande adıniration,
n'eltreſemblables en ſubſtance aux canonades;mais ceux- là qui quant-& -foy portēc

& flamme & feu. Pour approuuer mon dire, ie ſeray concer de l'exemple d'un ſoldat,
Exemple,
de la cuille duquel me ſouuient auoir ciré vne balle , laquelle enueloppée du taffetas
105 de ſes chauſſes, luy auoit fait vne profonde playe : toutesfois ie l'en reciray auec le

ga meſme taffetas, ſans qu'ilfuſten faço aucune intereſſé ny bruſlé. Qui pluseſt, i'ay veu
pluſieurs hommes ,leſquels fans eltre frappez; ny aucunement couchez , melmesen
leurs habillemés , ont receu tel eltonnement des canonnades paſſanspres d'eux ,que
leurs membres en font deuenus noirs & liuides au poſlible, puis coſt apres ſe ſontgan
C
grenez & mortifiez ,dont finalement ſont morts . Ces effects ſont ſemblables à ceux
de la foudre, toutesfois il n'y a en eux aucun feu ou venin , qui mefait hardimés con
clure n'y auoir poiſon aucun en l'artifice ordinaire de la poudre . Puis doc que le def
aſtrea eſté commun à tous ceux qui onteſté bleſſez en cesdernieres guerres, & que
cen’eſt par feu ne par venin que tant de vaillans hommes ſont morts , à quelle cauſe
pourrós-nous imputer ce malheur?Ie ſuisà l'endroit, Sire,où i’eſpere preſencemét la
k: faire entendre à voſtreMajeſté,à fin qu'elleen ſoit pleinemétſatisfaite. Ceux qui ont
columéleurâge & eſtude aux ſecrets de la Philoſophie naturelle , nous en ont laiſſé
.feud
vn entre autrespourauthétique,& approuué de tout téps:c'eſtque les elemés ſymbo
En quoy les
liſent telleméclesvns auec les autres ,qu'ils ſe tranſmuentl'vnen l'autre : de forte que elemens Sym
non ſeulementleurs qualitez premieres,quiſont chaleur, froideur, feichereſſe & hu- boliſent les
midité;mais auſſi leurs ſubſtances ſe changét par rarefactio ,ou condenſation de foy- unsauec les
meſme : ainſi le feu fe conuertic ordinaireinent en air , l'air en eau , l'eau en terre : & à autres ,

l'oppoſite, la terre en eau ,l'eau en air , & l'air en feu.Ce que nous pouuons voir à l'æil ,
D & éprouuer és ſoufflers de cuiure que les Allemands nous apportent,copoſezen for
me de boulle :laquelle remplie d'eau , & n'ayāt qu'vn perit trou au milieu de la forme
spherique,reçoit la tráfmutatio de só eau en air,par l'actió du feu , pres lequel la bou
le ſera poſée, & pouſſe auec violéce ledit air dehors le faiſant bruire impetueuſemēr,
juſqu'à ce qu'il ſoit du tout ſorti. Leséblable ſe peut cognoiſtre és chaſtaignes& mar
rõs lorsqu'on les iecte au feu sās les auoir entamées:car adõcl'humidité aqueuſe qui
yeſt cõtenuë,ſechāgeen air par l'action du feu ,& lair voulāt ſortir ,crcuele marron,
pource qu’occupant plusde place, la forme d'air en laquelle il eſt changé par rarefa
đion cauſée par le feu , qu'il ne faiſoit ſous la forme d'aquoſité, & ne trouuant ouuer
ture,eftcontrainten faire vne par violéce :ſelon la verité de la propoſició tenue pour
toute aſſeurée entre les Phyſiciês,ſçauoir ,que d'une partiede terre ilſe faicdix d'eau ,
& d'vne d'eau , dix d'air,comme d'vne d'air, dix de feu.l’en oſe autant dire & affermer
‫هل‬
des matieres cótenuës en la poudre à canon , qui par le moyen du feu, ſe conuerciſſent
en vne tres - grande quátité d'air, lequel ne pouuát eſtre contenu au lieu où la matiere
Na
urs e
416 II . Diſco ſur le Liur

eſtoit auparauant ſa tranſmutation , eſt forcé ſortirhors auec vnc incroyable violéce , A
moyennant laquelle le boulet pouſſé rompt , caffe & briſe tout ce qu'il rencontre,
ſans toutesfois l'accompagner. Qu'il ſoit vray,vnarc,vne fonde,ou arcà iallet , iectēc
Effect du ca- loin vne pierre , fleche ou iallet, ſans aucun air. Mais la balle chaſſe bien deuantſoyvn
non ſembla- vét fi fubcil,& ſiroidemétagité ,que lescorps en font premieremét ſaiſisque du bou
let, ores que la choſe ne ſoit deſcouuerce à la veuë : car bien ſouuét l'action ſe fait par
du foudre.
ce ſeulvér, ſansque la balle dõne ſon coup ,voire iuſques à rompre les os ſansmanife.
ſte diuiſion de la chair: ce que nous auõs deſia diteſtre communau foudre. Le pareil
éprouuons - nous en ladite poudre,lorsqu'eſtant encloſe dans les mines, & conuertie
en vent par le feu qu'on y met , bouleuerſe les monceaux de terre auſſi gros quemon
Exemple de
tagnes. On a veu celte année en voſtre ville de Paris vnecertaine quantité de poudre
| Arſenal de fraiſchement faire en l'Arſenal, cauſer vne ſi grande tempeſte, que toute la ville en
Paris .
trēbla d'vne horrible furie, rua par terre toutes les maiſons prochaines, découurit &
defeneſtra celles qui eſtoient plus à l'écart . Et bref ( come vn foudre éclatcant ) ren
uerſa ça & là pluſieurs hommes demy-morts :aux vnsolta la veuë aux autres l'ouïe , & B
en laiſſa d'autres non moins deſchirez en leurs pauures membres , que ſi quatre che
uaux les cuſſent écartelez .Ec ce par la ſeule agitation de l'air, en la ſubſtáce duquella
poudre eſtoit conuertie : qui ſelon la quantité & qualité de ia maciere , ſelon aufli fon
mouuemēcplus oumoinsfort,a cauſe des euenemens émerueillables en nos Prouin
ces , & du tout ſemblables à ceux que font les vents enclos fous vne terre non perſpi
rable ,leſquels voulans ſortir , fouMentauec vneli forte agitation , qu'ils font trembler
touce la terre aux enuirõs,la hauſſant & baillant,tâtoft cy, tantoſt là ,demoliſſant les
Megare au baſtimés , & les tranſportant d'un lieu en aucre :cõneles villes de Megare & d'Egine ,
Egine, villes anciennemét fort celebres au païs deGrece,peries partreblemens de terre,nous peu
de Grece,pe- uét teſmoigner. Ie laiſſe à diſcourir (comme peu feruant à noſtre propos)quelevent
ries par trem- enclosaux entrailles de la terre , rend vn bruit de diuers ſons, & fort eſtrāges, ſelon la
blement de
terre. diuerſe forme des conduits ,&c l'emboucheure des ſoulpiraux par leſquels il fort ,ne
plus ny moins que des inſtrumens de Muſique,leſquelseltans larges, rendent le ſon
plus gros & bas : ettans eſtroits, le rendent haut & aigu : & fils ſontcourbes & repliez ,
le rendent diuers : ainſi qu'on voiden vn corner de chaſſeur, & aux trompettes , comec
auſli eſtans moittes & mouillez , grondent & iettent vne voix enroüée. Semblable
ment ces bruits ,murmures & bourdõnemens ſelon la formedes lieux d'où ils partēt ,
Diuers bruits ſecrouuent diuers & mellez .Tellement qu'on a quelquesfois oüy des ſifflemens, qui
iſans des fembloient repreſenter afſaules de villes, cris & mugiſſemens de taureaux ,ou hennif
Veines dela ſemens de cheuaux, rugiſſemens de lions, ou de trompettes, & coups d'artillerie, &
terre .
beaucoup d'autres choſes eſpouuſtables,meſmes voix humaines.Ce quifutraconté
d'vn qui auoit oüy vne voix, comme d'une femme quelon battoic,& qui ſe plaignoir,
dont il eut vne ſi grade frayeur , qu'à pene l’haleine luy eſtoic demeurée pour le pou
uoir raconter.Mais on luy die la cauſe de ceſte voix plaintiue: & apres l'auoir enten
duë fue deliuré de ceſte grande peur , qui autiemér eſtoit ſuffiſante pour le faire mou
rir . Mais quelqu'vn dira ces choſes auoir eſté de tout temps , & non moins ordinaires
al temps parle qu'elles ſont à presēc , & que c'eſt folie à moy de les alleguer pour cau
ſesefficientes de la mort de cant d'hommes: ce que libremét ie confefferois ſ'il eſtoit
ainſique ie les preſentaſſe pour celles,mais veu que par icellesie veux ſeulemét parā
gonner l'impecuoſité des canons , auecques celle des foudres & des mouuemens de D
terre,ilſe trouuera que cela ne fait rien către monintention, ce que i’eſpere mõltrer
clairement, & que ſans raiſon ie ſuis calomnié , fi l'on veut preſter l'oreille à la dedu
& tion en laquellei’entre preſentemét pour arreſter la cauſe principale de ceſtemoit .
Poinct prin- Au nombre des choſes neceſſaires à noſtre vie , n'y a rien qui nous puiſſe plusalterer
cipal , og que l’air , lequel continuellement bon -gré & mal -gré nous,inſpirons par les conduits

vraye expli- deleguez à ce faire,commefont la bouche,le nez , & generalement les


cation de la que Nature a
ouuercures du cuir ,& des arteres qui luy ſont adherantes : ce que nous faiſons beu
queſtion.
uans, mangeans , veillans , dormans , & faiſans toute autre action naturelle ,vitale
& animale. De là vient que l'air inſpiré dans les poulmons, le cæur, & le cerucau , quid
& vniuerſellement en toutes les parties du corps pour les rafraiſchir, & aucunes
Hipp. en la fois nourrir , fait que l'homme ne peut viure vne ſeule minute ſans ſon inſpiration .
Preface du Suiuant lequel bencfice le Medecin Hippocrates a veritablement prononcé, que
Progno.e l'air a ie ne ſçay quoy de diuin en ſoy, pource que foufflant par le monde vniueriel ,
Galiau Cómo circuit toutes les choſes contenuës en iceluy , les nourrit miraculeuſement, las
Des Playes d’harquebuſes 417
.
A fouſtient fermement, & les entretienten ainiable vnion , & le tout ſymboliſant auec
les altres ,eſquels la prouidence diuine eft infuſe, qui change l'air à ſon plaiſir , & luy
donne puiſſance, tant ſur la mutation du temps , que des corps naturels . Pource les
Philoſophes & Medecins ont expreſſément commandé d'auoir égard aux aſlietces
des lieux ,& aux conſtitutions de l'air , lors qu'il eſt queſtion de garder la ſanté, ou de
guarir les maladies : à l'endroit deſquelles la fuitte & lamutatio Juditair a fort gran
de puiſſance , ainſi qu'aiſément nous pouuons cognoiſtre par les quatre faiſons de
l'année . Car l'air eſtant chaud & z ſecen Efté, nos corps pareillement f'échauffent & Hipp. ax có.
deſſeichent,cominc en hyuer l'humidité de l'air & froidure nous remplir de meſmes mencement
du liure de
qualitez,en telordre toutesfois , & libonne diſpoſition denature, qu’ores que noſtre
tëre, locis,
temperament ſemble changer ſelon les quatre ſaiſons,fieſt-ce quenousn'encourons o aquis.
aucun mal pourucu que lestempsgardent leurs faiſons & qualitezexemptesde tout
excés . Au contraire, ſi les faiſons ſont peruerties , de façon que l'Eſté ſoit froid, l'Hy L'alienation
der chaud , & les autres en pareille intemperance ,ce diſcord amene grande perturba des ſaiſons
tion ,cant en nos corps qu'en nos eſprits contraints toutesfois d'en receuoir le dager, caule mala
B pource que les cauſes ſont externes , & nous enuirõnent de cous coſtez,iuſquesà nous dies.
contraindre les heberger en nos organes & conduits deleguez par nature, partie à
mettre hors les excreinens ſuperflus de noſtre nourriture , parcie à receuoir leſdites
cauſes venantes de dehors ,quiſontles vents produiſans divers effects en nous , ſelon
les parties du monde dont ils procedent.Orcomme ainſi ſoit que le venc Auſtral lois
chaud & humide , celuy de Septentrion froid & ſec , l’Oriental net & pur , celuy d'a
ual nubileux & tout moitte de pluye , c'eſt choſe toute aſſeurée, que l'air lequel aſſi
duellement nous inſpirons, cient en tout & par cour la qualité du vent, qui par ſon
ſouffler domine ſur les autres : pource nous faut neceſſairement conſiderer en toutes
maladies ,&cés inconueniens qui ſuruiennentenicelles,la qualité des vents ,& la puiſ
fance qu'ils ont ſur nos perſonnes,ainſi que dođement Hippocrates nous a laiſſé par Hipp. auliu?
eſcrit au 3.liure de ſes aphoriſmes,diſant
nos corps receuoir grande alteration par les 3.des aphor.
vicillicudes des temps & faiſons de l'année,comme par le vent auſtral, qui nous affu . ch . s . & 17 .
jetticà coutes maladies, recognoiſſances l'humidité pour leur cauſe premiere , & af

с foiblicnoſtre chaleur naturelle,laquelle en cas oppoſite ſe fortifie & réd plus vigou
reuſe par vn vent froid & fec, qui pareillementrend nos eſprits plus ſubtils & agiles .

La verité de laquelle ſentence experimentent trop à leur dam les habitans du terria
toire deNarbonne , qui autrement aſſis entre les peuples les plus gaillards & diſpos
de toute la France,lonc coutesfois ordinairement mal - ſains, comme leurs corps def
charnez ,leurs viſages triſtes ,leurs faces baſanées , & de couleur d’oliue, le monſtrent
euidemment. Aulli entre autres maux ils ſont preſque fuiets à la lepre blanche , & les
moindres vlceres ,deſquelles on ne feroit cas à Poitiers ou à Paris , y durēt vn an d'or
dinaire : non pourautre raiſon ,commeeux -meſmes confeſſent,& commerecognoil
ſent tous les eſtrăgers,qui ont demeuré en leur païs,ſinon qu'ils ſont ſoufflez & halc
Tec nez ſouuencd'vne forte de ventMeridional,qu'ils appellent Aultan ,quileur faic l'air
groſier & nebuleux , & qui cauſe en leurs corps tous les effects attribuez aux venes de
Midypar Hippoc . Aph.s.liu.3 . ſçauoir quand il regne , les fait oüir dur, leur éblouit la
veuë, leur enfle & aggraue le chef , leur appeſantit & abbat coutes les forces du corps .
ets
D Aufliquád ledic Hippocrates comparc les téperatures les vnes auec lesautres,illaiflc Li. 3. aph.is.
ce poinêt pour reſolu: Que les ſeichereſſesſont ſans comparaiſon plusfaines , queles
humiditez continuées par longue ſucceſſion de temps : pource ( à ſon aduis du tout
conforme à la raiſon )que l'exceſſiue humidité eſt la vraye matiere de pourriture,ainſi
que l'experience nous fait voir és lieux où le vent marin exerce ſatyránie,eſquelsyne
viande,tantſoit - elle fraiſche,ſecorrompt & pourriten moins d'vne bõne heure. Ces
C choſes conſiderées,& qu'ileſt neceſſaire pour conſeruer noscorps en leur encier, que
les faiſons ſe ſuiučt pas à pas en leur temperature naturelle , ſans aucun excez ou con
trarieté , il n'y a doute aucune que les corps ne tombent en affection contre nature,
lors que les ſaiſonsperuertiſſent leurs qualitez par la mauuaiſe diſpoſition de l'air , &
du ventqui domine en iceluy . Comme doncainſi ſoit que depuis trois ans en ça , les
Saiſons de chaſque année n'ayent gardé leurs qualitez ordinaires, & que l'Eté aiteu
pcu de chaleur, l'hyuer peu ou pointdefroidurc :aufli qu'en toutes les faiſons ſe foići
C. delbordées des huiniditez cötinuelles auec vn ventAuſtral,du naturel cy -deſſus de
claré ,& ce par toute la France : ie ne ſçache homme ſi peu verſé en la Philoſophiena.
Nn ij
rs
418 II . Diſcou ſur le Liure

turelle , ny en l’Aſtrologie, qui ne recherche en l'air la cauſe efficiente de tant de A


L'air intem- maux qui depuis l'eſpace deſdits trois ans ſont ſuruenus au Royaume de France.Car
vieux,
peré
dui t ales mu d'où procederoiét tant de peſtes contagieuſes indifferemment aduenuës aux
pro-
1 aux ieunes aux
, pauures & aux riches,& en tāc de diuers lieux,ſinó de l'air qui n'a eſtá
ladies paſ chiche de ſon poiſon,mais nousen ainfe &tcz à ſon plaiſir ? D'où feroient venuës tant
fées.
de coqueluches , de pleureſies, d'apoſtemes,catherres, fluxions, petites verolles & gal
Les:các debeſtes veneneuſes,comine grenouilles,crapaux, ſauterelles,chenilles,arai
gnées,mouſches, hanecons,limaçons,ſerpens, viperes, couleuures, lezards, ſcorpiós,
& aſpics, finon d'vne trop grande pourriture,que l’excedance humidité de l'air, ac
compagnée d'une chaleur languide,a engendrée,tant en nous qu'en la terre vniuer
a eſté affoiblie , com .
ſelle de noſtre Prouince : Voila comme noſtre chaleur naturelle
me noſtre lang & nos humeurs onteſté corrõpus par la malignité de l'air ,quele venc
Auſtral a caule par só humidité chaleureuſe. Qu'il ſoit ainſi,on a tiré ceſte année bić
peu de fang à quelque persone quien ait eu beloin ,ſoit ieune ou vieille, bleſſée ou no
bleſſée, debonnetemperature ou de mauuaiſe, qui n'ait eſté vicié & veu de couleur
blanche & verdoyante: ce que i'ay touſiours obſeruéen cesdernieres guerres , & és B

autres lieux,auſquels on m'appelloit pour guarir les bleſſez , ou phlebotomer ceux


quitant pour precaution , que pour quelque guariſon de maladie,ſe faiſoient tirer du
ſang par l'ordonnance des Medecins en cous leſquelsindifferemment ie trouuois le
ſang putrefié & coriõpu.Ce poinct arreſté,c'eſt choſe plus que veritable que la char
neure de nos corps ne peut auoir eſté que mal diſpoſée, & tous nos corps cacochy
mes,puis que leur nourritute , qui eſt le fang,eſtoit putrefiée,& l'air cout corrompu:
dõt ſenſuit que les corps naurez en leur ſubſtance charneuſe, eſtoier difficiles à gua.
rir , conſideré qu'il y auoit en iceux perdition de ſubſtance, laquelle ayant beſoin de
regeneration de chair, n'en pouuoit venir à bout,fuſt par mcdicamens, ou parartifice
Similitude de Chirurgien ,cant grande eſtoic fa cacochymie . Tourainli qu'en vn hydropique la
priſe des hy- chair ne ſe peutengendrer,pource que le ſang y eſt trop froid & aqueux : & qu'en vn
dropiquese elephantiquela chair & lesautres parties du corps demeurent en leur putrefaction,à
deslepreux. cauſe du ſangcorrompu dont elles ſont nourries : pareillement és playes des corps
cacochyines neſe peut faire acquiſition nouuelle, ny regeneration de bonne ſubſtan C
ce : pource que pour rédre vne chair louable à la partie naurée,ileſt neceſſaire que la
ſang ne pechcen quáticé ne qualité :meſme que la partie offenſée ſoit en la téperatu
renaturelle.Toutes leſquelles choſes defaillances au temps des dernieres guerres, il
ne ſe faut elbahir ſi les naureures,tant fuſſent- elles petites & de peu de conſequence,
meſmes és parties non nobles & principales ,ont amené quant- & -ſoy cantd'accidés
faſcheux, & en fin la mort:conſideré quel’air qui nous enuironne , rend par ſon infpi
ration & tranſpiration les playes pourries & puantes , lors qu'il eſt alceré & pourry : cc
Puanseur in- que font auſſi les humeurs preparez à cet incóuenientpar leurcacochymie. Nous en

ſupportable ſommes deuenus ſages par l'experiencede cantde playes , leſquelles lors que ie m'ef
forran des forçois à les guarir , rendoient vne telle & ſi grande
puanteur, indice & teſmoignage
playes des
tres- certain de pourriture & infection , que les aliſtans ne la pouuoient ſentir qu'à
naurez contre-cœur,& aucc bien grāde difficulté.Il ne faut alleguer que ce fuſt par faute de
Playes Deni
les tenir nettement,de les penſer fouuent,nyde leur adminiſtrer toutes choſes neceſ
meuſes.
faires:car telle pourriture eſtoic commune aux Princes aux grands Seigneurs , & aux
pauures ſoldats : aux playes deſquels ( fi d'auenture on laifoit couler vniour fans les D
penſer, tant eſtoit grande la inultitude des naurez ) on trouuoit le lendemain vne
grande quantité de vers ,auec vne puanteurmerueilleuſe . Quiplus eſt, leur furue
noienc à tous pluſicurs apoſtemes en diuers lieux de leurs corps és parties oppoſite à
leurs naureures : car s'ils eſtoient bleſſez en l'eſpaule dexcre, l'apofteme ſe faiſoicau
genoüil ſeneltre : & fi la playe eſtoic en la iambe dextre, l'apofteme ſe faiſoit au bras
ſeneſtre : comme il aduint au feu Roy de Nauarre , à Monſieurde Neuers ; & àMon
ſieur de Rendan , & preſque à tous les autres.AinliNature ſembloittát chargée d'hu
meurs vicieux , qu'elle n'eſtoit contente ſe purger par leurs ſeules playes, ains en
uoyoit vne porcion de ſon vice en autre lieu apparent ou caché : car li les apoſtumes
ne ſe manifeſtoient par dehors , on les trouuoit és parties internes , comme au
foye , aux poulinons , ou en la ratte . Des meſmes putrefactions s'efleuoient quel.
ques vapeurs , qui par leur communication auec le cæur cauſoient fieures con

cinuės, auec le foye empeſchoient la pure generation du ſang, & auec le cerucau
Des Playes d'harquebuſes. 419

A cauſoient alienation d'eſprit , refuerie, conuulſion, & confequemment la mort. A ce qui pens
cauſe deſquels accidens n’a eſté poſſible à Chirurgien aucun ( tant expert fuft - il) excuſer les
de dompter la malignité deſdites playes : dequoy toucesfois ne doiuent eſtre repris Chirurgiens
qui n'ont ficut
ceux qui ſ'y ſont employez ,pource qu'il n'eſt poſſible de combatire contre Diea , ny guarir un fic
contre l'air,auquel louuétesfois fontcachées les verges de fa diuine iuſtice. Si donc, grád nombre
fuiuant la ſentence de l'ancien Hippocrates , qui dit coute playe contuſe deuoir eſtre de bleſſen:
conduite à ſuppuration pour eltre parfaictementguarie , nous nous ſommes efforcez

de ce faire, & toutesfois n'en ſommes venusà bout, à cauſe des pourritures , gangre
nes , & mortificacions quify ſont miſes par le moyen de l'air vicié : qui eſt -ce qui iu
ftement nous en accuſera :conſideré auſli que la neceſſité nous a contraints changer
noſtre façon de faire , & au lieu de medicamens ſuppuratifs, vſer d'autres remedes,
pour entierement combattre les accidens ſuruenus non ſeulement aux coups d’har
quebuſes,maisauſſi d'eſpées,& autres baſtons à main , leſquels nouucaux remedes ſe
pourrone voir en la lecture de ce preſent traicté. Outre les cauſes humaines , l'hom
meelt mal inſtruit en la cognoiſſance des choſes celeſtes, qui ne tient pour tout cer
B tain l'ire de Dieu ſe deſbander ſur nous pour punir les fautes qu’ordinairement nous
cominettons contre la Majeſté. Ses fleauxonteſté preſts, ſes verges& ſes armes ont
cu leurs miniſtres touſiours appareillez pour executer les commandemens de ſa di
uine iuſtice , aux ſecrets de laquelle ne pouuant entrer plus auant , Payme mieux me
contenir en vne ſimplicité,que paſſer plus outre , & conclure auec les mieux aduiſez
l'occaſion principale des morts proceder de la pure & ſimple volonté de Dieu, qui
parla temperature que ſon bon plaiſir a donnée à l'air, & aux vents , herauts de fa di
vinc iuſtice,nousa rendus aptes à receuoir les inconueniens que nous auons encou
rus par noſtre iniquité.

FI N.

Nn iij
420

1 Table des Chapitres de l'onzieſme liure , des


playes faites par harquebuſes & baſtons 0
à feu , fleſches & dards .
IT

I uiſion des playes ſelon la diverſisé des parties offensées, & des Balles
dont elles ſont faites. Chapitre j .
Des ſignes des playes faites par harquebuſes. Chap.ij.
j.
Le moyen de penſer leſdites playes au premier appareil. Chap.i
Deſcription des inſtrumens propres pour tirer lesballes, & autres choſes
eſtranges. M.
Maniere de traicterles playes au premier appareil , apres que Chap. tt .
les choſes
eſtranges en font horsi Chap.v.
Comment il faut iraicter lesplayes apresle premier appareil.
Moyens de tirer les cho es eſtranges qui ſeroieni demeurées à extraire. Chap. vý.
Chap u.
1

Indica ! ions qu'ilfaut obſeruer aufderesplayes.


Comme les maladies ſont compliquées. Chaporių.
Comme le Chirurgien pourra pourſuiure le traictement deſdites playes. Chap.ix.
Chap.
Des balles qui demeurent en quelques parties longiemps apres lagsariſon des playes. Chap x .
Des grandes contuſions á dilacerations faitespar lesboullets d'artillerie. xi.
Chap.. xj.
Des moyens qu'il fauttenir pour rectifier l'air, &pour corroborer les parties nobles , & forti
fier toui le corps.
Hiilores memorables . Chap.xij.
Apologie iouchant les playes faites parles harquebuſes. Chap.xiij.
Autre di comes for la queſtion de la venenofité des plages d'harquebuſade. Chap.xv.
Chap. xvi..
Les differences des playes faites parflefches, & de celles qui font faites par harquebuſes
Chap xu
De la difference desfleſches & dards.
De la difference des parties bleſsées. Chap xoi
De l'extraction des flefches. Chap. xix.
Comment il fautproceder pour tirer les flefches rompuës . cbip.xx.
Ce qu'ilfaut faire , fi la fleſche eſt inſerée en l'os. Chiv . xxi.
Des blefleures enuenimées , Chip.xxj.
Ch.p.xxij.
421

L'ON ZIES ME LIVRE

DES PLAYES FAITES PAR HARQVE

B V SES , ET A V TRES BASTONS A FEV,

fleches , dards , & des accidensd'icelles .

PAR AMBROISE PARE ', DE LAVAL AV

MAINE , CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy .

$
Diuifion des playes fe'un la dinerfité tant des parties offenfees , que des
bales dont elles font faites.

CHAPITRE PREMIER.

Ovtes les playes que les baſtons à feu cauſent au corps de Diuifion
l'homme , tant ſimples que compliquées , auec contuſion , di
laceration , intemperature , & cumeur , ſe font les vnes és par
ha
ties nobles , les autres és ignobles : quelques- vnes és parties
Differenc
churneuſes , quelques -autres és nerueuſes & oſſeuſes : aucu- des parviees s
nesfois
auec ruption & dilaceration des grands vaiſſeaux, bleßées
.
comme des veines & arteres , & quelquesfois fans la ruption
d'iceux . Telles playes auſli font aucunesfois ſuperficielles , &
forrent profondes, iuſqu'à penetrer outre le corps , & les membres , eſquels on les
reçoit . Vne autre diuerfité ſe cognoiſten elles , ſelon la difference des bales , entre Differences
de la matiere
leſquelles s'en trouve de groſſes , de moyennes , & de petites comme dragée , dont
des balese
la matiere ( qui n'eſt ordinairement que de plomb ) ſe laiſſe aucunesfois conuertir
en acier,enfer, ou co eſtain , rarement en argent, & moins encore en or . Suiuancler

Pok quelles differences , ic Chirurgien doit prendre diuerſesindicationspour operer , &


B ſelon icelles diverſifier les remedes. Or nous ne deuons iuger les grands accidens de
ces playes projevir par adultion de la bale , ny par la venenofité , ou autre mauuaile
qualité de la poudre à canon , pour lesraiſons qu'auons deduires aux Diſcours pre .
cedens : inais à cauſe de la contuſion , dilaceracion , & fraction , que fait la vio
lence de la bale és parties nerueuſes & oſſeuſesCar quand il aduient que la balene
touche que les parties charneules , & en corps de bonne teinperature , i'ay troune d'ou depend
autresfois telles plages autant peu rebelles à curation , & aulli faciles à traitter , lim alizni
despingestéde
que celles qui ſont faites par autres baſtons faiſans vulneres ronds, contus , & de barquebuſes.
telle figure que farcle boulet. Pour ce eſt- il neceſſaire auoir plus d'egard aux ſym
ptomesou accidens de la contuſion , dilaceration , fractured os & violence de l'air
enuironnant, qu'à la combuſtion qu'on eſtimeroit prouenir du boulet , & veneno .
fite de la poudre à canon , pour les raiſons predites . Ce que mettant en lumiere
pour aider aux jeunes 8c nouueaux praticieris en ( hirurgie , i'ay voulu traicter
bricfucmcat , toutesfois ainſi que l'ay peu experimenter à la luitte des guerres ,

Nn iiij
422 L'onzieſme Liure ,

А
que i'ay continué par l'eſpace de quarante ans . En quoy ie proteſte auoir ſuiuy le
Intention de
l'Autheur . conſeil desMedecins , & gens de ma profeſſion plus renommcz , & approuuez, tanc
par leur do &trine, quelongueexperience: leſquels ie m'aſſeure ſçauoir choſes trop
plus grandes que ne pourroient contenir mes eſcrits. Par ainſi ie n’eſcry pas pour
eux , ains pour les nouueaux apprentifs en cet art , & pour ceux qui n'auront meile

leur ayde pour ſuruenir aux cas vrgens , prouenans deſdites bleſſeures, leſquels fur.
prennent quelquesfoisle conſeil du Chirurgien , ſi la raiſon & experience nc con
duiſent ſon æuure .

faitespar harquebufes.
Desfignes desplayes

С НАР. II.

V commencement dela curacion , ilfaut cognoiſtre ſi la playe eſt faite


Lesfignes par par coup de harquebuſe: ce qui ſera aiſé à voir , ſi la figure de la playe
teſquels on
eſt ronde & liuide en couleur, & la couleur naturelle dela partie eſt B
cognoiſt les changée , à ſçauoiriaune,violette, liuideou noire . Semblablementlià
playes faites
l'inſtant que le patiencareceu le coup , il dit auoir fenty vne douleur
parharque
buſes. aggrauante , commes'il euſteſté frapé d'vn grand coup de pierre, ou qu'vne poutre,
ou quelque autre grand fardeau luy fut tombé ſur la partie vulnerée . Pareillement di
le coup n’acraint quelque gros vaiſſeau , s'il en ſort peu de ſang des parties bleſſées,
d'autant qu'elles ſont contuſes & grandement meurtries , qui eſt cauſe qu'elles s'en
flent bien toſt apres le coup , de façon qu'elles bouſchent quelquesfois le paſſage,
tant que lon n'y peutmettre cente ne ſeron : & cela peut aduepir, que le ſang eſt ſup
primé , lequel autrement couleroit par les orifices. Auſſi le malade y ſent grande
chaleur, à cauſe de l'impetuoſité du mouuement violent, & de la vehementeimpul
ſion de l'air , auec la ruption de la chair & des parcies nierueuſes : quelquesfois auli
pour les os fracturez qui piquent & preſſent leſdites parties , dont s'enfuit fluxion &
inflammation : auſſi pour la grande contuſion que fait la bale , qui ne peut entrer en
aucune partie de noſtre corps, que par grande force , pour ſa figure ronde , dontle
0
lieu en eſt rendu noir , & les parties voilines liuides : parquoy s'enſuiuent pluſieurs
grands accidens , comme douleur , fluxion, inflammmation, apoſteme, ſpalme ,alic
nation , paralyſie ,gangrene , mortification , & apres la mort . Elles ietçent ſouuent
vne ľanie virulente & fort fecide, qui prouient de la trop grande abondance des hu
meurs qui fluent à la partie bleſſée, à cauſe de la vehemente meurtriſſeure, contu
fion & dilaceration des parties , & pardefaut de la chaleur naturelle qui nela
peut

regir & gouuerner : pareillement auſſi à cauſe de la cacochymie du corps & despar
tiesnerueuſes, comme les iointures . Auſſi cels coups ſont trouuez touſiours plus
grands que la bleſſure des cornes d'vn cerf , oud'un coup de pierre ietcée d'une fon
de , ou autres contuſions ſemblables , parce que la choſe eſantronde , il faut que
l'effortſoictres- violent & impetueux , pour la faire penetrer au dedans , commcelle
fait à l'égal d'on coup de foudre .

Le moyen de penſer leſdites plages au premier appareil.


D

CH A P. III.

Ove ces cauſes il faut que promptement le Chirurgien amplifie la playe,fi


la partie le permet, tant pour donner iſſuë à la ſanie , que pour donner libre
paſſage aux choſes eſtranges , & les oſter ( fi aucunesya ) comme portion
d'habits , bourre, drapeaui , papier, pieces de harnois , mailles , bales, dragées , eſquil
les d'os, chair dilacerće, & autres choſes qui s'y peuuent trouuer : & dès le premier
Le moyen de appareil , ſi poſſible eft. Car les accidens de douleur & ſenſibilité ne font ſi grandsa
fituer le ma- commencement , comme és autres temps de la maladie . Or pour mieux les extraire,
lade pourti- il faut faire mettre le patiécen la meſme fituatió qu'il eſtoit lors qu'ilaura eſté bleſlé,
rer les choſes
pource que les muſcles & autres parties autremétficuées peuuenteſtouper & empeſ
eſtranges.
cher la voye . Et pour regarder à bien trouuerleſdices bales & autres choſes eſtranges,
il les faut chercher auec le doigt ( s'il eſt poſſible) pluſtoſt qu'auec autre inſtrument,
parce que le ſens du taat eſt plus cercain que nulle ſonde ou autre choſe inſenſible.

Ć
Des Playes d'harquebuſes. 423

А Que ſi la bale a profondé bien auant , lors il la convient chercher auec vne ſonde ,
rondeen ſon extremité , depeur de faire douleur : coutesfois il aduient ſouuent, que
par la ſonde on ne peut trouuer ladite bale , comme il eſcheut au camp de Parpı
As per
other gnan , à Monſeigneur le Mareſchal de Briſſac, offenſé d'un coup d'harquebuſe pres Difinire
i'omoplate droite, où pluſieurs Chirurgiens ne pouuant trouuer ladite bale , di- deMonſieur
cabo
1:20 : ſoientqu'elleeſtoit entrée dedansle corps, attendu qu'il n'y apparoiſſoit iſſuë aucu- de Briljaa
ne . Mais n'ayant c'eſte opinion , ie vins à chercher ladite bale , & n'y voulus aucu
neinentmettre la fonde , mais luy fis faire rel geſte du corps qu'ilfaiſoit lors qu'il
fut bleſſé. Puis comprimay doucement les parties circonuoiſines de la playe: ce
faiſant trouuay vne tumeur & dureté en la chair , auec ſentiment de douleur & liui
dité au lieu où eſtoit la bale , qui eſtoit entre la partie inferieure de l'Omoplate , &
enuiron la ſeptielme & huictieſme vercebre du dos : auquel lieu fut faite inciſion
pour tirer la bale , dont puis apres fuc toſt guary , Parquoy eſt fort bon chercher la
bale, non ſeulement auec la fonde, mais (commei’ay predic )auec les doigts,en ma
niant & traictant le lieu & les enuirons d'iceluy , où lon conic& ure la bale auoir peu
penetrer.
donia B

Deſcription des inſtrumensproprespourtirer les bales , & autres choſes eſtranges.

bien CHAP. IIII.

VANT aux choſes eſtranges , elles peuuent eſtre tirées par les inſtrumens
cy -apres dépeints, quiſont de diuerſe figure & grandeur , ſelon la neceſſicé:
1
les vns ſont dentelez , les autres non : & faut que le Chirurgien en air do
pluſicurs & diuerſes façons ,les vns plus grands , les autres plus petits, en chacune
de les formes, à fin deles accommoder aux corps & aux playes , & non les corps ny
For
les playes à ſes inſtrumens.

Inffrumens requis à tirer les choſes eſtranges,


01

Bec de Corbin dentelé .

Bec de Gruë coudé,

UM
LATIN

D MONTDA
s ordonna
424 L'onzieſme Liure ,
Ceſtuy eſt nommébec de Gruë, pour la ſimilitude: lequel pareillement doiteſtre A
dentelé , & cſt propreà extraire du profond ,dragées, mailles, cſqaillesd'os fractu
rez , & autres choſes .

Bec de Gruë, droir. Bec de Cane.

тq
Ceſtuy qui eſtnomméBec de Cane, ayant nocauité en ſon extremité ,large &
ronde, dentelée, pourmieuxprendre la bale , eſtpropre , principalement lors que
la balceſt aux partiescharneules.

sutrefaçon deTire-bale. utre figurede Tire-bale,nommé BecdeLezard,


B

pourtirerla bale ,lors qo'elle ſeraapplatie:cottée C


de mefmes lettresgael'autre.

D
A

A
Wwwm

COM

B
‫عشقمان‬
‫نشدم‬
tre å
Dees Playes d’harquebuſes. 425
A Monſtre fa cannul .
tus A
B. La verge qui fait ouurir & fermer la charniere .
C La charniere .

Autre inſtrument nommé Bec de Perroquet, pour tirer quelques pieces de har
nois inſerées au profond des membres, meſmes dedans les os.

Bec de Perroquet.

ВB.

:
2

ell
A Monſtre laqueuë de la viz .
B L'eſcroüe.
DD La couliſſe .
C Lecoulant , lequel au moyen d'vne viz ſe hauſſe & baiſſe.
h
Autre inſtrument nommé Bec de Cygne, lequel ſ'ouureàviz ,accompagnéd'vne
pincette, quepar cy- deuant nous auons nommée Bec de Gruë droit : & fertà cirer
с quelque choſe eſtrange, apres auoir dilaté la playe auec ledit Bec de Cygne.

Bec de Cygne.

G SEREN
au
ch
en

D
maca

Siles corps eſtranges, ſpecialementles bales & dragées, ſontpeuprofonds,onles


pourra tirer auec Eleuatoires.
' o n z i e ſ me ure
426 L Li ,
A
Cannule de Tire -ford. 260

piki et
1

mil
Wilt
Tire-fond.

பாபா Huintall

Autre inſtrument, nommé Tire-fond , lequel tourne à viz dedans vnc Cannule,
& eſt fort conuenable à tirer leſdites bales, lors qu'elles ont penetré iuſquesdedans
les os : car ſa pointe entre dedans ladice balotte , pourueu qu'elle ſoit de plomb ou
cſtain :( car elle ne pourroic entrer en vn corps plus dur ) & parcemoyen peuteſtre
aiſément oſtée.

Dilatatoire.

MYPA
GE

Ceſtuy eſt nommé dilatatoire,duquelon peut vſer à ouurir & dilater les playes,à
fin de mieux trouver leſdites choſes eltranges. Car en comprimant enſemble deux
de ſes extremitez , les autres s'ouurent : & peutauſſiſeruir en pluſieurs lieux ,comme
aux narines , au ſiege, & autres parties.
Aiguilles Les inſtrumens qui ſenfuiuent, ſontnommez Aiguilles à Secon , leſquelles ſont
à seton . conuenables , lors qu'on veut paſſer vn Secon pour tenir la playe , & la voye de la
bale ouverte , iuſques à ce que lon air tiréhors les choſes eſtranges quiy peuuent
encores eſtre. Outre ce , peuuent ſeruir à ſonder les playes profondes, pour crou- D.
uer la bale , & ne cauſent point de douleur , pource qu'elles ſont rondes & polies
De quelle en leur extremité. Faucdonc entendre que lesfondes , deſquelles on cherche la
groſſeur cou bale , doiuent eſtre moyennement groſſes , polies & rondes en leur extremité :
lõgueur dot pource que les parois de la playe , & les voyes par où la bale a paſſé, incontinent
uent eſine
lesfondeso
le r'approchent, & retouchent l'une contre l'autre, de ſorte que ladice playe ou
voye apperc au ſens de la veuë beaucoup plus petite qu'elle n'eſt. Et pour ceſte
cauſe les ſondes grelles & aiguës ſont moins commodes : car elles f'arreſtent à la
chairr’approchée & contiguë , & ne peuuent ſi facilement aller au lieu de la bale,
comme celles qui ſontmediocrement groſſes : ioint auſſi qu'elles piquent la chair
de la playe , & ce faiſant moleſtent fort le pacient : quieſt fouuenc cauſe , que
les bales ne peuuent eſtre crouuées . On en doic auſſi auoir de plus grandes pour
paſſer au trauers d'une cuiſſe, lors que le cas le requiert . Par ainſi la longueur d'i
celles ſe doit changer ſelon la groſſeur du membre bleſſé : & ne ſuis d'auis qu'on
fefforce beaucoup à les faire touſiours paſſer au travers des parties bleſſées , de
peur
di
427

peut d'induire douleur , & autres accidens . Car le malade ne laiſſera pasà guarir pour
le ſeton , qui ne ſera paſſé courau trauers,comme l'expérience en fait foy,lors qu'vne
balle paffeaucrauers du corps, on ne palle pointde ſéton , & ncantmoins guariſſent.

Sondes quipeuvent feruir de fetons.

money

B e
C

‫יומולטימישושימושים‬

La maniere de traister les playesau premierappareil , apres que les choſes eftranges forttirees.

CHAPITRE V.

Pres auoir tiré les choſes eſtranges par les moyens ſuſdits, la princi. La principem
paleintention ſera de batailler contre la contuſion & alteration de le insension
l'air, s'il eſt chaud & humide , & diſpoſé à pourriture: ce qui ſe fera da Cherur
cant par remedes pris par dedans, que par autres appliquez par dc - 86e .
hors, & auſli mis dedans les playes. Ceux qui doiuent eſtreadmini
ſtrez par dedans, ſe prendront par le conſeil & ordonnance du pru
dent Medecin à la doctrine duquelie laiſſe tout ce qui peut appar
tenir à la maniere de viure , & à la purgation du malade. Et quant aux medicamens Quelle cau
topiques, le Chirurgien ſuivant les choſes ſuſdites , doit conſiderer la conſtitution tion on doit
du temps & de l'air : car s'il n'y a danger que la partictombe en gangrene , il vſera de quour djane
fuppuratifs.commeaux playes contules, quels ſont l’oleum catellorum , ou d'yn di- des/mpplica
geſtif
, ayant efgard àlanaturedelapartic :attendu que les parties nerucufes deman- ratifs.
denemedicamens plus ſecs que les charneuſes ,cõme nous auons amplement diet au
trai&té des playes desioin & urts. Doncauſdicesiointures & parties nerueuſes,on vie
ra deterebenthine de Veniſe, ou d'huile de cire ,demaſtic, de iaunes d'aufs , & au
tres ſemblables: yadiouſtantvn peu d'eau de vie re & ifice . Telles choſes ont puiſ
ſance de defeicher & conſommer l'humidité ſereuſe ,yſTant des parties nerueuſes, &
feder la douleur. Monſieur loubert Medecin ordinaire du Roy, & Chancelier en sõ
VniuerGcé de Montpellier , qui a tres-doctement eſcrit des Harquebuſades , pour
auoir veu pluſieurs bleſſez à la ſuite des guerres.,au trai&té qu'il en a fait dict, que aux
fimples coups d'harquebuſeslo ne doit vſer de medicaméscſcharotiques,các a &tuels
que potentiels,parce qu'ils induiſent douleur ,inflámation, gágrene, fićure, & autres
pernicieux accidens. Aulli que l'eſchare ou crouſte, garde la ſuppuration qu'on doit
Pourquoy &
faire promptemét,pour ſeparer la chair meurdric d'aucc la fanic ,de peur que tout ne ne faur yfer
ſe pourriffe :comme il ſe fait aiſément,quand l'humeur ſuperflu croupift longuemēt d'escharoija
en yn lieu,n'ayant illuë libre, & meſmes pour ſes vapeurs , qui ne ſe pçuuent exhaler ,à presa
Oo
428 L'onzieſme Liure ,
cauſe qu'elles ſont encloſes & couuerces de l'eſcarre , ſe multipliát couſiours où elles A
ſoncencloſes,requeranevn plus grand lieu qu'il ne leur eſt permis, paſſant & entrant
des pecits'vaiſſeaux aux plus grands,& de là aux parties nobles, dont s'enſuit le plus
ſouuêtla mort. Toutesfois s'il y a ſoupçon de pourriture,lors il faudra paſſer des fup
puratifs aux remedes contrariansà la putrefačtion ,delaiſſantla propre cure pour ſur
venir aux accidenes. Parquoy au premier appareil,dans les playes,en cas de putrefa
&tion ,ſera appliqué telonguent qui s'enſuit. 22.puluer. aluminis rochæ, viridis æris,
vitrioli Romani, mellis roſaciañ zij.aceci boni quantum ſufficit: bulliant omnia fi
mul ſecundum arcem ,& fiat medicamentum ad formā mellis. Les vertus deceton- į
Deſcription guent ſont, que par ſa chaleur& tenuité ilinciſe & attenuë les humeurs, reuoque la
del egyptiac chaleur nacurelle, laquelle a eſtérepouſſee par la vehemente impulſion du coup , &
propre auſdi-violence agitation del'airconduit par laballe. Dauantage il corrige la putrefa& ion
tesplages.
de l'humeur virulent,qui proprement abbreuue la chairconteree &meurdrie,fifort
qu'il faiteſcarre . Celtonguent toutes & quantesfoisqu'il en ſera beſoin , ſe pourra
appliquer auec tentes ou ſetons,eſtanediſfoult auec vin ou eau de vie:leſquelles ceu B
tes ſeront aſſez groſſes & longuespour le premier appareil, afin d'elargir & dilaterla
playe,pourmieux y iecter lesmedicamens:puis apres ne ſeront appliquees li longues
& grolles. Auſſi pour mieux couler au profond des playes , ſe pourra iecter auec vne
fyringue.Quipluseſt,ſa vertu & fa forceſeradiminuéeſelon latéperature des corps ,
& ſenſibilitédesparties bleſſees:cõme ſi la playeeſt és lieux nerueux,ſera mellé auec
huiles de terebenthine & d'hypericon,en telle quantité que leChirurgien expert co.
gnoiſtra eſtre neceſſaire:l'on ſe peut mefme& doit-on paffer de l’Egyptiac & n'en vſer
aucunement,quand l'on n'a point àcombatere vn tempspeſtilenc & pernicieux pour
leſdices bleſſeures, tel qu'on a veu les annees paſſees. A pres I'vſage del’Egyptiacon
fera tomber & feparer l'eſcarregauec choſesremollitiues&lenitiues ,cõmeeſt l'huile
quiſenſuit,lafaiſant chauffer yn peu plus chaude quc tiede.4.olei violati tb iiij. in
Quand il quibus coquantur catelli duo nuper nati, vſque ad diſſolutionem ollium ,addendo
conuiendra vermium terreftrium præparatorum ve decer tb.j.coquaturſimul lento igne,deindo
Der dudie fiat expreſſio, quæ ſeruetur in vſum prædi&um, addendo terebent. Venetæ z iij.
Egypriac. aquæ vicæ zj . Ladite huile eſt de grande & merucilleuſeefficace, tantpour appaiſer o
Oleum ca-
sellorun . la douleur, que pour ſuppurer la playe, & faire tomberl'eſcarre. En defaut d'icelle,
faut appliquer celle quiſ'enſuit qui eſt plus facile à crouuer.
2. olei feminis lini & liliorum ań z iij.vnguéci bafilici žj.liquefiant fimul, & ex eis
vulneri indacur quant. ſuff. l'ay bien cogneu que leſdices huiles appliquées au com.
mencement de la bleſſeure mediocrement chaudes,appaiſent la douleur, lubrifient,
relaſchent & humectent les parois de la playe , la diſpoſans à fupputation , quieſtla
Poin &tfou vraye maniere deguarir telles playes. Ce que Galien recite d'Hippocrates diſant,fi ‫و‬
‫به‬

werain la chair eſt contule, meurdrie, ou bacuë de quelque dard,ou en autremaniere,qu'il


principalen la faut medicamenter en telle ſorte qu'elle ſuppure le pluſtoſt que faire ſe pourra.
Is cure des Car parce moyen elle ſeramoinsmoleſtee de phlegmon : auſſi eſt neceſſaire que la
playes des chair contufe& barcuë ſoit putrefice, liquefiee , & conuertie en pus , puisapres
harquebuſes. nouuelle chair engendree. Monſieur loubert approuue fort tel remede , lequel
coucesfois n'ay encores experimencé ; il eſt tel. Prenez poudre de Mercure deux
fois calcinee 3 j . graiſſe de porc recenteou beurre frais Zviij.camphre diſſoule en
eau de vie z ij. meſlez le couc , adiouſtant vn peu d'huile de lis ou de lin . L'expe- D
rience monſtre que ce remede eft excellenc, & la raiſon le confirme auſfi . Car la
poudrede Mercureaccompagnee de mariere craſſe & hume&tante, fait que la chair
Vereus du meurtrie ſuppure facilement, & en peu de cemps ſans qu'il y aduienne fort grande
camphre. douleur. Ec quantau camphre, ſoit chaud ou froid , il y ſertgrandement, pourl'ex
cellente tcnuité de ſes parties , à raiſon de laquelle tout medicament de quelque j
qualité qu'il ſoit , penetre micux & pouſſe plus auant ſa vertu : dauantage ledic
camphre reſiſte à toute putrefaction . Aucuns inſtillent en la playe cau de vie , en
laquelle on diſſout vitriol calciné. Tel remede n'eſt ſuppuratif,mais reſiſte à lapour
riture,duquelon peut vſer en temps chaud & humide. Autre. 22. olei cereb. Z iij.
Combuſtion aquæ vitæ 3 B. miſce. Or file coup eſt donné de fort pres , veritablement la playa
żoincte és ſera bruſleepar la poudre enflammee , & lors on appliquera remedes propres à la
playes des combuſtion, ſans coutesfois delaiſſer la contuſion. Er quant aux parties dedeſſusla
barquebuſes. playe, l'on n'appliqueramedicamentsrefrigeratifs & altringens,ains remolliens &
1
Des Playes d'harquebuſes. 429
A ſuppuratifs:ſi ce n'eſt peut-eſtre au premier appareil:pource qu'ils refroidiſſent &af
foibliffent la partie,& cmpeſchent la ſuppuració:auſſi conſtipent le cuir,qui eſt cauſe !

de ne donnercranſpiration aux vapeursfuligineuſes,dont s'enſuicgágrene & morci.


fication parl'indeuëapplication de tels remedes.Ecoù la concuſionſeroit grande on
pourra faire des ſcarifications pour deſcharger la partie du fāgmeurtry quiet ſibiet
á ſe pourrir. Mais aux parties circonuoiſines , qui ſontau deſſus de la contuſion , &
elloignees de la playe,faut appliquer remedes refroidillans & corroborans, pourre
poufler& empeſcher la fluxion des humeurs,cõmeeſt ceſtuy.cy.2.pul.boliarmenij,
fanguinisdraconis,pul.myrrh.añ.3j.ſucciſolani,ſemperuiui,portulacæ añ.3j.B.al
bum.iiij.ouor.oxyrrh.quant.ſufficit:fiablinim.vedecet,ou autres séblables, deſquels
il conuient vſeriuſques à ce que l'on ſoicaſſeuré des accidens,Pareillementil ne faut Bandagei
faillirà bien bander le membre,le ſituant en figure propre & ſans douleur, s'il eſt poſ Temps ile
ſible. Au commencement ilnefaut penſer le malade iuſques à ce que la playecom penſer lema
mence à luppurer,quede xxiiij.heures en xxiiij. heures.Et quand la ſuppuration cõ lade.
mence, & par conſequent la douleur,fiéure, & inquietude s'augmentent,il faut pen
B ſer le bleſſe de douze heuresen douze heures. Ec alors qu'il y a grande quantité de
matiere qui moleſte lemalade,on le penſera de huict heures en hui& heures.Etquád
lc pus commence à ſe diminuer naturellement, il ſuffit de douze heures en douze
heures. Finablement quand l'vlcere ſe remplit de chair , & partant ne rend gueres
dematiere,c'eſt aſſez le penſer yne fois le iour, ainſi que du commencement.
Comment il fauttraitter leſdites plages apres le premier appareil.
С НА Р.. VI.

V ſecond appareil & autres ſuiuans , s'il n'y auoit ſoupçon de pourri
43
cure & gangrene, faut ſeulement vſer d'une deſdites huiles , y adiou
tantdes moyeux d’æufs avec un peu de ſaffran :ce que l'on continue
ca iuſques à ce que l'excrement de la playe ſoit digeré & courné à Lepus eft an
С
ſuppuration.En quoy chacun doit biennocer, que lepus eſt pluslong cempsàfaire
temps à l'y faire,qu'és autresplayesfaites par autres inſtrumens, pource que la balle és playe's
&l'airqu'elle pouſſe deuant loy, diſlipelà cauſe de la grande concufion ) la chaleur d'harque
naturelle & les eſpritsde la partie , quieft cauſe que la co &tion n'eſt pas ſi coſt, ne ſi bujos.
bien faite au defaur de la chaleur naturelle ,dont ſuruieni vne tres grande puanteur
en la ſanie,& autres accidens fort dangereux .Toutesfois elle ſe faic le plus louuenc
en trois ou quatre iours , quelquefois auſſi pluſtoſt ou plus tard , ſelon le tempera
ment du corps & de la partie,& l'air ambient chaud ou froid. Ces choſes faites, il ſe.
rabeſoin de commencerà mundifier peu à peu la playe: en adiouſtant au medica- Medicament
12 ment ſuſdit de la cerebenchine lauée en eau deroſes ou d'orge,ou ſemblables, pour müdificarif.
6
luy diminuer ſa chaleur & mordacité . Si la diſpoſition du temps eſtoit fortfroide,on
y pourroit adiouſter del'eau de vie , ſuiuant le conſeil deGalien qui enſeigne qu'en dela areibon
Hyuer il fautappliquermedicamens plus chauds, & en Eſté moins. En apres nous dech.8.
faut vier de ce mundificatif . 4. aquæ decoctio ,hord. quantum fufficit, lucci plan.
03 taginis,apij,agrimoniæ ,centáurijminorisan.zj.bulliantomnia fimul : in fine deco
D &ionisaddeterebenthinæ Venetæ z iij.mellisroſatı 3 ij.farinæ hordeiz iij. croci 3
j. miſceantur fimul omnia benè agicando , fiar mundificat. mediocris conſiſtenciæ.
‫ܐܕ‬ Autre. % .fucc.clymeni,plantaginis , abſinthij, apij,añ. Zij.terebench Venerx z iiij.
ſyrupi abfinth. & inellis roſa.an Zij.bulliantomnia ſecundum arcem , poftea colécur
& in colaturaadde pul.aloës,maſtich.ireosFlor far.hord.ana zj. fiat mundif.ad vſú .
Do
dictum.Ou ceſtuy cy 4.cereb .Vene. lotæ in aq.ror Zv.ol.roſa.zj.mell.roſa.žij.
myrr.aloës,maſtic.ariſtolo.rotundæ ana,zj.B.far.hor.ziij.miſce, fiat mundif lequel
10 feraappliquédedans la playe auec tentesou ſecós, ne trop longs ne trop gros, pource
qu'ilspourroiétempeſcher l'evacuació de la ſanie & des vapeurs elleuéesdesplayes :
clquelles fileſdites vapeurs sõtretenuës,c'eſtchoſe certaine qu'elles felchauffent &
acquierent vne acrimonie, qui puis apres erodelesparois & coſtez de la playe , dont
ſ'enſuitdouleur,Auxion ,infiammation,Aux de ſang,apoſteme,& pourriture,quiſont Ad
cómuniquez aux parties nobles,& cauſentpuis apres plugeurs pernicieuxaccidens. uerille ment au China
Pourceilne fauc que le Chirurgić craigneaucunemēt,queleſdites playOesſe puiſ rurgien.
oij ſent
L'onzieſme Liure ,
430

glutiner & clorre , parce que la chair ſi grandement contuſe & & lacerée ne fe peut A
conſolider ,, que premierement la contuſion & meurdriſſeure ne ſoit fuppurée &
mundifiée : à cauſe de quoy ie luy conſeille de n’vſer de ſerons & tentes , ſi elles ne
ſontgreſles & z menues , afin qu'elles n'empeſchent l'iſſue des matieres, & que le pa
L'uſage des tientneles ſouffre aiſément, afin d'euiter les accidens predits .L'vſage des tentes &
sentes o re- ſerons eſt pour porter les remcdes iuſqu'au profond des playes , & les tenir ouuertes ,
tons , principalementen l'orifice , iuſques à ce que les choſes eſtranges ſoient miſes hors .
Etſila playeeſt ſinueuſe & profonde , en force que les medicamens ne puiſſent at
teindre toutes les parties offenſées, lors il faudra faire inie &tion auec la deco &tion qui
l'epfuit.

Iniections. 2. aquæ hordei tb iiij . folior. agrimoniæ , centaurij minoris , pimpinellæ , abſin
thij, plantag . ana ñ . B. radic . ariſtol. rotundæ z B. fiat decoct.ad 1b.j.in colatura ex
preſſa diſſoluealoës hepaticæ z iij . mellis rofacižij.bulliant modicum . Puis foit faite
inie &tion dedans la playe troisou quatre fois à chacune heure que le pacient fera pen
ſé. Etſice remede n'eſtſuffiſant pour nettoyer la ſanie , & conſommer la chair (pon B
gieuſe, morte ou pourrie , il faut adiouſter en la decoction de l'egyptiac liquefie ,
en celle quantité que la neceſſité commandera : comme pour vne liure de ladite de
coction , enuiron vne once dudicegyptiac plus ou moins, lequel eſt de tres - grande
efficace pour corriger la chair ſpongieuſe & mauuaiſe au profond deſdites playes: ce
Poudre ca- que fait auſſi ledit egypriac appliqué ſeul ſur la croiſſance dela chair mauuaiſe. l'ay
sheretique ſemblablement experimenté la poudre demercure & alum brullé, mellez en egale
porcion , auoir en tel cas vertu toute pareille à celle du ſublimé ou de l'arſenic (com
bien qu'elleneſoit tant douloureuſe) & qu'elle fait tres- grāde eſcarre ,dont fouuen
tesfois me ſuis eſmerueillé. Quelques practiciens laiſſent le plus ſouuent grande
quantité de decoction au profond des playes ſinueuſes, ce que ie n’approuue. Car
outre ce qu'elle acquiert pourriture & ſe corrompt, elle tient les parties tendue ( qui
leur eſt choſe eſtrange) & les humecte, qui fait que nature ne peut faire ſon deuoir à
regenerer la chair : conſideré que pour la curation de tout vlcere , entant qu'il eſt vl
cere, comme dit Hippocrates , le but doit rendre à deſſeicher & non à humeder.

Pluſieurs crrent auſſi en l’vſage trop frequent & afſidu de ſetons, en ce que ne fac Q
commodans à la raiſon, les renouuellent couſiours, & les font ſrayer aux parois des
playes , par lequel frayement cauſent douleur auſdites playes , leur renouuellent au
tres mauuais accidens . Pourtant i’approuue dauantage les tentes cannulées , faictes
d'or , d'argent, ou de plomb , comme celles qui ſont deſcrites aux playes du Thorax,
Compreſſes. i'entends où elles auront lieu , & où y auroit grande quantité de fanie. Aufli faue-ií
appliquer des compreſſes à l'endroit du fonds du ſinus, afin de comprimer les parties
eſloignées de l'orifice, & chaſſer la ſanie : meſme eſt bien conuenable , que la com
preſle ſoit pertuiſée à l'endroit de l'orifice de l'vlcere ſinueux , & ſus les tentes cannu
Ligature. iées , & qu'il y ſoit mis vne eſponge, pour receuoir la ſanie, pource que par tel moyen
l'expulſion ,euacuation , & abſumption d'icelle ſe fera beaucoup mieux ,en commen
çant la ligature au fond du finus, & la comprimant mediocrement: afin que lamatie
re ne ſoitretenue au dedans . Les bandes & compreſſes propres à ceſte operation ſc
ront moüillées en oxycrat , en vin auſtere, ou en quelque autre liqueur aſtringente
pour roborer la partie , & empeſcher la fluxion : mais il ſe faut garder de n'aſtreindre
D
par trop la partie, pource que paricelle aſtriction ſe cauſeroit vne douleur, au moyen
de l'exhalation des excremens fuligineux, qui ſeroit empeſchéc : pareillement ſe
par trop longtempscontinuer leſdites bandes.
pourroit faire atrophic au inembre ,

Des moyens de tirer les choſes eſtranges qui ſeroientdemeurées à extraire.

CH AP. VII.

T là où il y auroit quelques eſquilles d'os , qui du commencement n'au


Remedes roient eſtétirées par les predics inſtrumens , lors il faudroit appliquer ce
pour attirer
remede, ayant grande puiſſance de les attirer , & autres choſes eſtranges. ata
choſes eſtran
2. Radicis ireos Florentiæ , panacis & capparum ana 3 ij. ariſtoloc. ro
ges.
tundæ , mannæ , thuris ana z j . pulueriſentus ſubciliter , & incorporentur fimul
cum mellis roſaci& terebentinæ Venetæ añ .z ij . Autre remede pour ofter leſdictes
eſquilles & corruption des os. 2.reſinæ pini liccæ z iij. punic . combuſti & excindi
THEA
Des Playes d'harquebuſes. 431
A in vino albo,rad ,ireos, ariſtolochiæ an. z.B.thurisz j.ſquammææris zij. polueriſen
& curomnia diligenter , incorporentur cum melle rolaco , fiat medicamentum . Outre
16 ces remedes qui ont en eux & de leur nature,tellepuiſſance d'attirer les choſeseltrā .
2. ges, il en y a d'autres qui l'ontacquiſe par putrefaction , comme eſt coute ficntc d'a
& nimaux , & le leuain, ainſi qu'eſcric Galien.
5,
5. Des indications qu'il faut obferuer aufdites playes. CHAP. VIII.
ti
A mundification & excra&tion deſdites choſes eſtrāges faire, faut
aydernature à regenerer la chair,& cicatrizer,tāt par choſespriſes
par dedans , que par medicainens à ce conuenables , & proceder
par certaines indicacionsqui ſont priſes premieremée de l'eſſence
te de la maladie, & dela cauſe d'icelle ,ſi elle eſt presére:jaçoitque de
la cauſe primitiue (ſelon Galien au troiſieſmede la methode)nefer
doit prendre indication non plus que du temps:ce qu'ilentend de Indication
B la cauſe abſence, & du temps preterit. Pareillement faut prendre indication des teps
vniuerſels de la maladie curable, c'eſt à ſçauoir du commencement, accroiſſement,
eftat ,& declination : ſelon leſquels fauc diuerſifier les remcdes.Autreindication eſt indication
priſe dela temperature du patient, laquelle auſſi change la curation : comme tout priſe de la
Chirurgien rationnel & methodique entend bien qu'il faut d'autres remedes à vn temperature
du corp s.
cholerique qu'à vn phlegmacique, & ainſi des autres temperatures,tant ſimples que
1 compoſées :ſouslaquelle indication de temperament ſera compriſe celle de l'âge,
quine reçoit indifferemmēt tous remedes,maisenveur d'autres pour les ieunes per
ſonnes, & d'autres pour les vieilles. Dauantage ſe doit prendre indicacion de la cou. Couſtumes
1
ſtume deviuredu patient :comme ſ'il auoic accouſtume de manger & boire beau
coup , & à toutesheures, lors ne luy faudra ordonner diete ſi exquiſe, qu'à celuy qui Dietes
eft accouſtumé de peu manger & boire& à certaines heures. Pour ce les dietes de pa
nades ne ſont li propres aux François qu'aux Italiens: pource qu'il faut relaſcher &
remettre quelque choſe à la coultumequieſt vne autre nature. Sous ceſte maniere
:0 C accouftuméede viure,ſepeuuécentédre la condicion devie,&l'exercice du patient:
d'autāt qu'il faut vſer de remedes plus forts à l'édroit des ruſtiques,des gés de trauail,
& quiont la chair dure,qu'il ne faut à l'endroitdes delicats qui peu travaillér, & font
peu d'exercice. Quelques-vns toutefois ont mieux aimé cõprendre celle indication
ſous le temperament :dema part,ie n'en diſputeray,en laiſſant la reſolution plusen
ciereaux Docteurs. L'indication priſe de la vertu du patient ſur toutes autreseſtà re- l'indication
ſpecter,pource qu'icelle defaillant,ou eſtão fort debile,ilfaut neceſſairemét delaiſſer prije de la
vertu du
toutes autres choſes pour luy ſubucnir: comme quand la neceflité nous force de cou patient.
per vn inembre, ou faire quelques grandes inciſions, ou autres choſes ſemblables:
ſi le patiene n’a vertu fuffiſante de tolerer la douleur , il eſt neceſſaire de differer tel
lesoperations( ſ'il eſt poflible ) tant que nature ſoit reſtaurée, & ait recouuré ſes ver
tus par bons alimens & repos. Autre indication ſe peut prendre de l'air qui nous en
uironne, ſous lequel ſontcompris la ſaiſon de l'année , la region , le lieu de noſtre
demeure, & la conſtitucion du temps . Car ſelon la chaleur, froideur, feichereſle &
D
humidité , ſelon avili la continuation de ces qualitez, il faut adapter les remedes.
D Pource diſoit Guidon , les playes dela teſte eſtre plus difficiles à guarir à Paris qu'en Sentence de
Auignon, & les playes des jambes,plus faſcheuſesen Auignon qu'à Paris : pourrai Guidon .
ſon qu'à Parisl'air eit froid & humide, qui eſt choſe contraire, principalement aux
vlceres de la teſte. Au contraire,en Auignon la chaleur de l'air enuironnant,eſt cau Dcmonftra
fe dc liquefier & ſubtilier les huineurs. Ainſi plus facilement & en plus grande abon tion de la
dance les humeurs decoulentaux jābes,dontvient que la guariſon desjābes eſt plus ſentence.
difficileen Auignon qu’à Paris . Que faucuns alleguent l'experience au cõrraire, &
que les playes de la teſte font plus ſouuent lethales ou mortelles és regions chaudes :
ie luyreſpondray ,cela ne prouenirà raiſon de l'air, d'autāt qu'il eſt pluschaud & fec,
mais à raiso de quelque humidité ſuperflue,ou mauuaiſe vapeur comuniquée à l'air,
comme és lieux deProuence & d'Italie, prochains de la mer Mediterranée. L'indi
catió de guarir ſe peut auſſi prendre de latéperature des parties bleſſées:car leschar
neuſes demādēt autre remede que les os,ne queles parties nerueuſes, & ainſi des au · Indication
tres.Ce qu'en pareil cas faic la ſenſibilité defditespartics,laquelle chāge la curation: de la partie,
Ooiij
I

1
432 L'onzieſme Liure , 1

comme ainſi ſoir qu'il ne conuienne appliquer medicamens ſi acres & violens aux А
Pronostic nerfs & rendons, qu'aux ligamens, & autresparties inſenſibles. La dignité & action
desparties des parties n'a moins de priuilegeau fait de la gueriſon : car ſi la playe eſt au cerueau,
bleſſées. ou en aucunes des parties vitales & nacurelles, il faut ſelon leur dignité & action
Aphor.18. changer & appliquer les remedes : veumeſmesque pour lacontemplation d'icelles,
eſt ſouuentesfoisfait certain prognoſtic de l’evenement. Pource que les playes qui
penetrent au ventricule du cerucau, au cæur,aux grands vaiſleaux , du Thorax , en
la partie nerueuſe du Diaphragme , au foye,au ventricule, aux inceſtins grelles, & à CE
la veſlic, ſi elles ſont grandes ,fontneceſſairementmortelles : aulli celles quiſont és
iointures ou pres d'icelles, & és corps cacochymes , ſont plus ſouuent mortelles, ce
qu'auons dit cy -deuant.Pareillemencil ne faut oublier les indications priſes de la
poſition & colligance de la partie affectée, ne meſme de la figure , comme Galien a
affez expliqué au 7. de ſa Mech. & au ſecond à Glaucon .
Comme les maladiesſont compliquées. CHAP. IX .
B
Auantage , en prenant leſditesindications, faut confiderer fil ya
complication de maladic ou non. Carainſi que la maladie ſimple
propoſe indication ſimple, aufli la complication des diſpoſitions
contre nature propoſe indications compliquées. Orlescomplica
cions ſe font en trois manieres , c'eſt à ſçauoir, maladie auec mala.
)
die, commeplaye auec apoftemc ou fracture d'os : maladie auec
cauſe, cõme vlcere auec Auxion: &maladieauec ſymptome,com
me playe auec douleur ou flux de ſang : ou toutes choſes contre nature enſemble,
comme maladie,cauſe & ſymptome.Orpour ſçauoir traiter artificiellement toutes
ces complications, on doit ſuiure la doctrine de Gal.au 7. de la Meth .laquelle nous
exhorte à conſiderer les affections cópliquées, la plus vrgente, la cauſe, & celle fans
laquelle la maladie ne peut eſtre oftée , qui font choſes de grande importance en
toute curation . Er en cecyl’empirique demeure vague , incercain , & ſans conſeil ny
reſolucion, ne ſçachant àquelle des affe & ions il doit premierement l'arreſter pour
la cure : mais le Medecin rationnel au contraire eſt dirigé par ces trois petits mots 1

dorez , deſquels deſpend l'ordre & methode de proceder en celles diſpoſitions & af
fe&tions compliquées. Les ſymptomes, entant qu'ils ſont ſymptomes, ne donnent
aucune indication, & ne changent l'ordre de curation : pource qu'en oftant lamala
die qui eſt cauſe du fymptome, iceluy eſtoſté; car il depend d'icelle , comme l'om
bre du corps: combien queſouuent nous ſoyons contraints de laiſſer la maladie en
cure irreguliere,pour ſubuenir aux accidens de lamaladie,leſquels fils ſont vrgens,
tiennentle lieu de la cauſe , & non proprement desſymptomes.Pour concluſion,
fin des indi- toutes leſdites indicacions ne ſont quepourvenir à deux fins,c'eſt à ſçauoir, rendre
cations. la partie en la cemperature naturelle , & quele fangne pecheny en quantité , nyen
Auz. de la qualité . Cela faic, comme dic Galien , rien n'empeſchera que la regeneration dela
Methode. ' chair, & vnion de l'vlcere ne ſe face. Mais aucunesfois il n'elt poſſible mettre leſdices
indicacions en execution , à cauſe de la granjeur de la playe , ou par exoez & in
obeiſſance du patient, ou à raiſon de quelques autres indiſpoſitions ſuruenuës par
l'ignorance du Chirurgien , ou mauuaile & indeuë application des medicamens:
pource qu'au moyen de ces choſes ,furuiennentgrandesdouleurs , filures , apoſte- D
mes , gangrenes ( vulgairement & abuſiuement dictes Eſtiomenes) mortification, &
ſouuentesfois la mort. Dauantage ceux qui reçoiuent coups d'harquebuſes , fou
uent meurent , ou bien demeurenteltropiezoumutilez à iamais.
Commentle Chirurgien pourra pourſuiure le traitement deſdictesplages. CHA P. X.
V commencement donc fauc bien auoir elgardà mitiger la dou
leur en repercurant les fluxions , en ordonnant regimeſur les fix
choſes non naturelles , & leurs annexes , en cuitant choſes calefa
diues & acres , & en oſtantou diminuantle vin , de peur qu'iln'eſ.
Façon deres
chauffe, ſubtilie , & facefluer les humeurs. Sa maniere de viureau
uulfion par commencement doit eſtre aſſez tenue , afin de faire reuulſion . Car
diete tenai : quand l'eſtomach n'eſt aſſez plein , il accire de tous coſtez à ſoy, au
moyé dequoy les parties externes f'en reſſentans,demeurétvuides. Voila pourquoy
UX
Des Playes d'harquebuſes. 433
00
A A on doit nourrir moins le malade aux premiers iours de ſa bleſſeure. Le coït luy eſt
20 , fort contraire,d'autantqu'ilendáme les humeurs & eſprits, plusquetout autremou
on
mement, & pour ceſte cauſe, rend la playe forc enflammée , & fubierte à defuxion.
CS
Ecne ſera que bon au commencement ſ'il y aflux de ſang, en laiſſer mediocrement
couler à fin dedeſcharger le corps & la partie.Ecoù il n'auroit ſuffiſamment coulé, la phleboto
faudra le jour ſuivant vſer de phlebotomie reuulſiue, & en tirer ſelon la plenitude & mie eft necef
en
faire aux
vertu du patient. Il ne faut auſſi craindre faire auerſion du ſang vers les parties no playes d’hara
es bles. Car( comme nous auons dit) il n'y a aucune qualité veneneuſe. Toutesfois quebuſes.
CC
nous noterons que telles playes à l'inſtant ne iettent gueres de ſang, à raiſon que la
la grande contuſion faite par la balle, & la vehemence de l'air agité , lont cauſe de re
pouſſer les eſprits au dedans, & aux parties voiſines de la playe, comme auons die cy
deuant :cequi eſt ordinairemenr cogneu en ceux à qui yn gros boulet aura emporté
vn membre.Carà l'heure de leur bleſſeure ne ſort que bien peu de fang de la playe, Pourquoy en
relies playes
combien qu'il y ait de grandes veines , & arceres rompus & dilacerez.Mais quelque n'adaient
temps apres,comme au quatrielme, cinquieſme, & fixieſmeiour, & quelquesfois tomfiours hea
ole B plus tard ,le ſang coulera en grande abondance, à cauſe que la chaleur naturelle & morrhagie.
-ns
leseſprits y retournent. Quant aux medecines purgatiues , ie les laiſſe à meſſieurs les
Docteurs : toutesfois en l'abſence d'iceux,ileſt neceſſaire de la cher& mouuoir le
12
ventre du patient,pourle moins vne fois leiour,ſoit par art ou par nature : ce qui ſe
CC
fera pluſtoſt parclyſteres que purgations, principalement és premiers jours, parce
quel'agitation deshumeursentelcaseſt ſuſpecte,pour la crainte qu'il ne ſe face plus
-
grande Auxionà lapartie bleſſée. Toutesfois Galien liure quatrielme de la Metho
OS
de, chapitre 6. parlant des indications de la ſaignée & purgation, dir, que pour la
grandeur du mal, ſont neceſſaires la faignée & purgation ,combien que le malade
Loic ſans repletion ou cacochymie . La douleur ſe doit appaiſer ſelon l'intention 8
7S
remiſion d'icelle: & poury remedier, fi d'aduenture y a inflammacion ,on applique
ra pourmedicament local,vnguentum nutritum , compoſé auec le ius de plantain ,
Y ioubarbe, morelle, & leurs ſemblables. L'onguent diachalciteos deſcrit par Galien Onguens
en ſon premier liure de la Compoſition des medicamens ſelon les genres, chapitre pourleder
с
fixielme& liquefiéauec huile de pauot,de roſes & vinaigre, n'eft demoindreeffica, la douleur, i
r

1
ce,nel'onguent de bolo,ne pluſieurs autres de telle faculté, oresqu'ils ne ſoient pro
prement anodyns ( car tousanodyns ſontchauds au premier degre,ou pour le moins Faculté des
pareils en chaleur à noſtre corps,Galien liure cinquieline , chapitre dix -neufieime medicamens
des Simples) &les ſuſdits medicamēs ſont froids non pastant coutesfois qu'ils ſoient anodyns.
0
narcotiques,leſquels ſont froids au quatrieſme degré. Mais quoy : les fuſdits mentio Les humeurs
h ne z au cas predit,appaiſent la douleur tres commodémét, pource qu'ils contrarient chandes,one
e
auxintemperatures chaudes, & fluxionsd'humeurs ſouuent acres & bilieuſes , lel- pluftoft fin
1
quelles coulentpluſtoſtque les froides,& cauſent plus grande douleur. Apres l’yſa- xion queles
ge desrepercuſſifs, i’approuve merueilleuſement ce cataplaſme. 24. inicæ panis in- froides.
fufæ in la&tevaccin. Ib.j. B. bullianc parum ,addendo olei violacci , & rof.añ. Z. iij .
s vitellos ouorum numero quatuor,pul, rolarum rubrarum ,florum camomill.& me
lil.an.Zij. farın , fåbar. & hord, an zj.iniſce : fiat cataplaſmafecundum artem .Ou
1
1
pour remede plus preparable, cu pourras prendre de la mie de pain , laquelle feras vn
peu bouillir auec oxycrat & huile roſat.
D D Pour la curationdes apoſtemes, il conuient auſſi diuerſifier les médicamens ſelon
les temps d'iceux. Car autres medicamens ſont propres au commencement,autres à
l'accroiſſement, & autres aux autres temps, comme aff«zelt declaré par Galien au
1 liu.troifieſme,chapitreneufieſme,dela Facultédesmedicamens:& parGuidon,en Aph.21.
la curacion des apoſtemes, & parceux qui en onteſcrit. Ec où nature tendroit à fup- liure's.
puration ,illa conuiendroitſuiure, commedic Hippocrates : carle Medecin & Chi- Medecin ,
rurgien ne font que miniſtres, & aides de Nature, pour l'aider en ce où elle tend con- miniſtre de
modement . Naiure.

Oo iiij
L'onzieſme Liure ,
434
A

Des Balles qui demeurent en quelques parties long temps apres la guariſon des plages.

CHAP XI.

Aduerrille Vcunesfois les Balles de plomb demeurent long temps dedans


mene . les membres,commeparl'eſpace de ſeptou huid ans, & plus, ainſi
que i'ay obſerué moy -meſme, ſans neantmoins ſuruenir aucun
mauuais accident , ny empeſchement de conſolider la playe, &
demeurent là iuſques à ce qu'elles ſoient pouſſées hors parlaver
tu expulcrice , deſcendant pour leur grauité & peſanteur és par
ties inferieures,eſquelles elles ſe manifeſtent , puis doiuent eftre
tirées hors par l'operation du Chirurgien. Or ceſte demeure ſilongue aux corpsſans
pourriture aucune , ny mauuais accident ( comme i’eſtime) ne prouient que de la
matiere du plomb , dont ladite balle eſt compoſée,comme ainſi loir que le plomb a B
Faculté du certaine familiarité & accointance auec la nature, principalement des parties char
plomb.
neuſes, ainſi que nous voyons par experience ordinaire , qui nous apprend que le
plomb appliqué par dehors,a vertu de clorre & cicatriſer les vieuxvlceres. Mais ſi la
balle eſtoit de pierre , de fer, ou d'autre metal,c'eſt choſe toute aſſeurée , qu'elle ne
pourroic demeurer longtemps au corps ,pource que le fer ſenroüille, & à cauſe deco
corrode la partie , ce qui amene quant- & -ſoy de pernicieux accidens: mais ſi le bou
lec eſtoit en parties nerueuſes ou nobles,& füſt -il de plomb , il ne pourroit gueres y
demeurer ſans cauſer de bien grands inconueniens. Parquoy f'il aduient qu'il de
meure longtemps,ce ſera és parties charneuſes , & és corps qui ſeronc de bonne tem
perature & habitude: autrement il n'y peutdemeurer ſans induire douleur , & plu.
fieurs autres griefs maux, commeil a eſté dic .

Des grandes contufions & dilacerationsfaietes par les boulets d'Artillerie , & autres
gros Canons. CH A P. XII .

Vere- plus,fi la balle d'une groſſe piece d'Artillerie frappe contre


quelquemembre,ſouuent l'emporte , ou du cow le briſe & eſca
che , de telle façon quc par ſa grande vehemence elle caſſe &
romptles os , non ſeulement ceux qu'elle touche , mais auſſi ceux
quien ſont loing , pource que l'os qui eſt dur,fait reſiſtance , & par
ce moyen la balle le force dauantage . Qu'il ſoit vray , nous voyos
ordinairement ladite artillerie auoir bien plus d'a& ion , & effe
& uer davantage contre vne muraille , qu'elle ne faict contre vn gabion remply de
terre , ou vne balle de laine, & autres choſes molles , comme nous auons ditcy-de
uant. Pourtant ne ſe faut elbahir, ſi eſdites playes faietes par harquebuſes, ſuruien.
nent douleur, inflammation ,fiéure, ſpaſme, apoſteme, gangrene, mortification, & le
Cauſes des plus ſouuenc la mort .Car les grandes contuſions des parties nerueuſes, fractures ou
grăds accidës concuſſions vehementes des os, faictespar les boulets,cauſent griefs accidens,non D
des playes la combuſtion ou venenoſité de la pouldre , ainſi qu'eſtiment pluſieurs,ne conſide
d'harquebu- rans la matiere de ladite pouldre,laquelle ( comme i'ay dit ) n'eſt veneneuſe. Car ſi la
fes.
playe eſt fai & e en vne partie charneuſe ſans toucher les parties nerueuſes, elle re
quiert ſeulement pour la curation remedes ſemblables à ceux que font lesautres
playes contuſes, hors -mis ( comme i'ay dic cy- deſſus ) la pourriture cauſée de l'air
enuironnant, laquelle nous a rendu ces années paſſées les playes alterées , & grande
putrefaction cant à la chair qu'aux os , de laquelle ſont ( commé i’ay die) elleuées
pluſieurs vapeurs au cerucau , au cæur, & au foye, dontſont enſuiuis de tres -mauuais
accidens, & la mortà la plus - paro:
Des Playes d'harquebuſes. 43 .
A
Des moyens qu'il fauttenirpour rectifier l'air , & pour roborer les parties nobles, do
fortifier tout le corps. CHAP. XIII.

Ś
Artant faut que le Chirurgien ait égard à adminiſtrer toutes les Remedes
choſes qui ont puiſſance de rectifier l'air ambiens , & de roborer ayans vereis
les parties nobles,auſſide fortifier tout le corps : qui ſe ferapar les de conforter
choſes qui ſ'enfuiuent,adminiſtrées tantpar dedans que par de tale.
la facultévis
hors. Lepatientprendra par dedans au matin trois heures deuant
le paſt, des tablettes de diarrhodon abbatis , ou de aroma.roſ.de
triaſant. diamoſchi,de læcificans Galeni , & autres ſemblables.
Pardehorsſeront faits epithemes ſur le coeur & foye, vn peu tiedes , appliquez auec
ES
2
vne piece d’eſcarlate ou elponge, feutre ou lingebiendeliez. Ceſtuy-cy pourra ſer
uir de formulaire à cout Chirurgien. 24. aquærofæ Z iiij. aquæ buglo.aceti boni an.
3 ij.coriand. præpar. z iiij . garyophyl.corticum citri an. 3j . ſantali rub. 3 B. coral.
B veriuſque zj.camph. Sj.croc. 3 B. pul. diarrho.abbatis z ij. theria. & mithrida. an.
ZB.pulu. Aorum camomillæ, melilo.añ.zj . miſce, & fiarepithema. Dauantage on Remedes
1 doit donner ſouuent à ſentir au patient choſes odoriferantes & refrigerantes ,pour pour faire
roborer la faculté animale , comme celle qui fenſuit. 2. aquæ roſaceæ , aceti boni ſentir aumas
Ć
an. 3ij.garyophyl.nucis moſca.cinamomi conquaſſatorum ,theriac.Galeni añ.zj. lade.
ſoit en icelle liqueur trempé vn mouchoir ou eſponge, & que le patient le mette ſou
7 uentau nez. Il vſera auſſi de quelque pomme aromatique pour meſme intention,
comme eſt ceſte- cy .24. rofar.rub. violar. an . 3 iij. baccarum myrti,& iuniperi, ſan
tali rubr.an.zij.B.benioin.zj.camph. ij.fiatpuluis. Poſtea. 4.oleiroſ.& nenuph ,
an. 3B. ſtyracis calamitæ z ij. aquærofarum quantum ſatis eſt, liquefiant fimul cum
cera alba quancum ſuffic f.iat Ceratum ad comprehendendos ſuprà di&tos pulueres
cum piſtillo calido,& fiat pomum : Autre. 2.radic.ireos Florent. maiorana,calami
aromatici, ladani , benioin. rad.cyp. garyop.ana. 3 ij . mof. . iiij.fiat pulu. & cum
gummi tragachan. quant. ſufficit , fiat pomum .Autre. 22. ladani puri žij . benioin.
C iz 3. ſtyrac.calam .3 vj.ireos Florentiæ zB.garyophyl.z iij.maiora .rofarum rubra
e rum ,calami aromat.añ.zB.pulueriſentur omnia,& bulliant cum aqua rofarum qua
tum fufficit, & coleacur, & colata liquefianccum cer. alb. quantum fufficit, ſtyracis
liquidæ Zj.fiat ad modum Cerati,comprehendantur per piſtillum , addendo moſch.
3j. fiat pomum . Pareillement on peut appliquer des Fronteaux , pour roborer la fa
cultéanimale,& prouoquer le dormir, & mitiger la douleur de la teſte,comme ce
i ſtuy. 2. aquærofaceæ zij.oleiroſ.& papauer.añ. Zj . B. aceti boni zj . trochiſcotum
de camphora zß. fiat frontale. On doit plier vn linge en cinq ou lix doubles , & le
tremperen ceite mixtion vn peu tiede, &le renouueller quand ilſera ſec. Et ne faut
pasbeaucoupſerrer la teſte,de peur de garder que pulſation desarteres des temples
ne ſoit libre :autrementonaugmenteroit la douleur de la teſte.ll y a pluſieurs autres
remedes excerieurs,parleſquelson peut corriger l'air ambiens, comme faire bon feu
en lachambre du malade auec du bois de geneure,de laurier,de ſärment de vigne,de
roſmarin, de racine d'ircos. Auſſi les choſes eſpanduës par la chambre , comme l'eau
& le vinaigre,& fi le pacient eſt riche , l'eau de damasy eſt bien propre,ou celle qui
D ſ'enſuit. 21. maioranæ, menthx, radicis cyperi , calami aromatici,ſaluiæ ,lauendule,
fæniculi,thymi,ſtachados, florum camom. melil. fatureiæ , baccarum lauri & iu
nipcriań.m.iij.pulu. garyoph . & nucis moſcatæ añ.zj.aquæ rof. & vitæ fb.ij. vini
albiboni & odoriferi Hb.x.bulliant omnia in balneo Mariæ ad vſum di&tuin.Dauan .
tage on peut faire parfums pour parfumer ladite chambre , comme ces oifelets de
Cypre. 4.carbonis ſalicis Zviij, labdani puri z ij . thuris maſculi,lini , & baccarum
iuniperiań.Zj. xylaloës,benioin. ſtyracis calamitæ añ. zß. nucismoſcatæ ,ſantalilu
tei añ. z iij . garyop . ſtyracis liquidæ an.zij.zedoariæ ,calami aromatici,anazj gum
mitragach.aqua roſac. ſoluci, quod ſit facis: fiant auiculæ Cyprinæ,feu ſufficus, qua
formalibebic.Quant aux caries & corruption des os , nous en parlerons cy-apres
amplement .
436 L'onzieſme Liure ,
А

Hiſtoires memorables. CH A P. XIIII.

Tumehr æde
mareuſe és Ouuent celles playes ſontaccompagnées de pluſieursindiſpoſicions,com
me tumeur ædemateuſe , fra &ture aux os . Oren faueur du ieune Chirur
playesd'har
quebules. gien ,pourexemple raconteray ceſte hiſtoire de la bleſſeure de monſieur le
Hiſtoire. Comte de Mansfelc,Gouuerneurde la Duché de Luxébourg , Cheualier
de l'Ordre duRoy d'Eſpagne,lequelfutbleſſé à la bataille de Moncõcour d'un coup
de piſtole à la iointure ducoulde, au bras dextre,qui luy fra &tura les OS , dont il y en
auoit qui eſtoiércomminuez ,come ſi on les eult rompus ſur vne enclame,parceque
le coup luy furdonnédefort prés. Et par violence & force de ce coup,luyſuruindrée
pluſieurs accidens,à ſçauoir,douleurs extremes,inflammation, fieure, cumeur æde
mateuſe,flacueuſede tout le bras,voire iuſques à l'extremité des doigts, & ja grande
preparation de gangrene. Et pour obuier à icelle,& à la totale mortification ,maiſtre
Nicole Lambert, & maiſtre Richard Hubert,Chirurgiens ordinaires duRoy,auoiệt B
faiết pluſieurs & profondes ſcarifications. Orpar le commandement du Roy , ie fus
enuoyé vers luy pour le penſer: & eſtant arriué,voyantces accidens accompagnez
d'une grandefeceur 8 pourriture,fuſmes d'aduis luy faire des lauemens faits d'Egy
priac fortifié, & diſſouli en vinaigre & eau de vie, & autres remedes eſcrits au chapi
tre des Gangrenes . Er outre ces accidens,ledit ſeigneur eut vn flux de ventre , par
lequel il ietroit de la bouë qui venoit des vlceres de ſon bras: ce que pluſieurs ne peu
rent croire, attendu ( diſoient-ils) que pour deſcendre par le ventre, il faudroit par
neceſſité que ladite bouë fuft mellée auec le ſang,& auſſi qu'en paſſant pres le cæur,
8 par dedans le foye, elle feroit pluſieurs accidens, voire cauſeroit la mort.Toutes
fois il me ſemble que i'ay aſſezamplementdemonſtré en mon liure de la Suppreſſion
d'urine,comme telle choſe ſe fait.Partantſi quelqu'vn deſire en ſçauoir la raiſon, on
aura recours audit liure. Meſmes ledic ſeigneur tomboitquelquesfois en ſyncope, à
cauſe des vapeurs putrides,quiſe leuoient desvlceres : leſquelles vapeurs par les ar
teres,veines & nerfs, eſtoientcommuniquéesà l'eſtomach , & aux parties nobles. Et C.
poury remedier,ieluy donnois par fois à aualler vne petitecuillerée d'eaude vie, en
laquelle i'auoisfait diſſoudre vn peu de theriaque.Monſieur Bellanger,Medecinor,
dinaire du Roy,& monſieur le Bon,Medecin de monſieurle Cardinal de Guiſe, ſça
uans & experts en la Medecine &Chirurgie,le ſecoururēt pareillemét de couccequi
leur eſtoit poſſibleà côtrarier contre la fieure & autres accidens, Or quācà la tumeur
ædemateuſe & flatulente,qui occupoit entieremét tout le bras,i'y appliquois des co
preſſes iinbuës en oxycrat,auecduſel & vn peu d'eau de vie, & autres remedesque ie
Prilité des dıraybien coſt: puisauec des linges en double,ie lescouroisle plus fort & dextremêt
compreſſes qu'il m'eſtoit poſſible c'eſt à dire, tant que ledit ſeigneur les pouuoit endurer. Telle
O ligatures.
cõpreſſion ſeruoitdecõrenir les os fracturez en leur lieu , & à expeller la fanic des vl
ceres, & renuoyer les humeurs vers le centre du corps. Et où l'on deliſtoit à ſerrer &
lier le bras,la tumeur l'augmentoit ſi fort,que i'auoispeurque la chaleur naturelle de
ſon bras ne fuſt ſuffoquée & elteinte.Or de faire autre maniere deligature,il eſtoit du
tour impollible pour l'extremedouleur qu'il ſentoit lors qu'on luyremuoitcant ſoit
peu fonbras. Il luy furuint auſſi pluſieurs apoſtemesautour de la iointure du coulde, D.
& en autres endroits de ſon bras. Et pour donner iſſuë à la farie , ie luy feis plu
ſieurs inciſions, leſquelles ledit ſeigneur enduroit volontiers,mediſantſ'il n'y en a
uoit aſſez dedeux , qu'on en feiſt crois, voire quacre, pour le deſir qu'il auoit d'eſtre
hors de ſes douleurs,& guary.Etlorsen ſouſriantie luy dis ,qu'il mericoiceſtre bleſſé,
& non ces delicats,qui pluſtoſt ſe veulentlaiſſer pourrir, voire endurer la mort , que
de ſouffrir quelque inciſion neceſſaire pour leurguariſon.Et pour abregerla cure,il
vſa de la potionvulneraire,& par foison iectoit auec la fyringue dedās tesvlceres,de
l’Egyptiac diſſout en vinou auec ladite potion,ou de mielroſat au lieu de l’Egyptiac,
pour les mundifier,& corriger la pourriture,auec d'autres remedes qui ſeroienttrop
longsà reciter : & entre les autres,la poudre d'alum pour deſſeicher les chairs (pon
gieuſes , laxes & molles. Auſſi apres la mundification deſdics vlceres,i’vſay long
temps de charpie ſeiche , & ne luy en falloit pour chacune fois qu'on l'habilloit
gueres moins gros que le poing. Etvn iour voyant qu'il eſtoit ſans douleur,& que
lachair ſeregeneroit,ie luy dis qu'il ſ'en alloit guarir : alors il me dit en riant,qu'il me
Des Playes d’harquebuſes. 437
A cognoiſſoit bien ,pourcequ'il ne falloit plus de charpie à ſa playe qu'auſſigros qu’vn
æuf. Or pendanr ladice curation, ie te puis atteſter luy auoir ofté plus de ſoixante
pieces d'osentre leſquelsy en auoit de grăndes commevn doigt, rompuës en eſtran
om
ge figure: ce nonobſtant ledit Seigneur( gracesà Dieu ) a eſteguary: reſte qu'il ne
Lite
peut,& ne pourra iamais , plier nyeſtendre le bras. Monſieur de Ballompierre, Co- Hiſtoire de
ionnel de douze cens cheuaux,leiourde ladite bataille fut bleſſé d'vn pareil coup,& monſieur de
05
eurgrande partie des accidens ſuſdits : lequel auſſi i’ay penſé iuſques àguariſon ,gra- Baßõpierre.
ces à Dieu :yray eſt qu'ileſt demeuré imporеnt comme l'autre Seigneur.
Apres auoir penſé leſdits Seigneurs , Comte de Mansfelt, &Baffompierre,i'cus Aurre biſoi
commandement du Roy d'aller trouuer en diligence Charles Philippes de Croy , re de mõfieser
feigneur de Havret, frere de monſeigneur le Duc d'Aſcor, presMonsen Haynaut : de Havrei.
lequely auoic ja ſept mois & plus qu'il eſtoicdetenu au liæ , à cauſe d'un coup d'har
meie
quebuſe qu'il auoit receu trois doigts au deſſus du genoüil,lequel ie trouuayauec les
accidens qui ſ'enſuiuent: Sçauoir eſt ,douleurs extremes ,fiểure continuë , fueurs Merueilleux
fu
froides, grandes inquietudes, le cropion vlceré de la grandeur de la palmede la accidens.
B main (pour auoir eſté trop longuemet couché deſſus) ne pouuant repoſer nyde iour
ny de nuict, ſans appetit de manger,mais de-boire affez. Ii reſſentoit parfois dedans
ſónlią des accez epileptiques,& auoitſouuent volonté de vomir,auec vn continuel
tremblement, ne pouuant porter la main à ſa boucheſans aide d'autruy : tomboic
ſonuent auſſi en ſyncope ou defaillance de cæur, à cauſe des vapeurs putrides qui
eſtoient communiquéesàl'eſtomach,& aux parties nobles par les veines , arteres &
nerfs,qui eſtoient elleuées de ſes vlceres, & de la corruption des os . Car l'os de la
cuiſſe eſtoic fracturé & éclaccé en lög & en trauers,auec eſquilles,dõtles vneseſtoiệc
ja ſeparées, les autres non. Il auoic vn vlcete cauè pres laine, finiſſant au milieu de la
0.1
cuiſſe:dauantage ilen auoit d'autres ſinueux& cuniculeux autour du genoüil.Tous
C
lesmuſcles,cantde la cuiſſe,que de la iambe,eſtoient extrememét tumefiez & imbus
f
d'unhumeur pituiteux, froid,humide,& flatueux ,de façon que la chaleur naturelle
eſtoitpreſqueſuffoquée & elteinte.Voyant donc tous ces accidés, & lesvertus pro
fternées, & grandementabbatuës,i'eu vn tres-grand regret d'auoir eſtéenuoyévers
G ledit Seigneur,pource qu'il y auoit bien peu d'apparence qu'il en peuft échapper, &
craignois qu'ilne mouruſt entre mesmains. Toutesfois conſiderant ſa ieuneſlo, i'eu
W
encorquelque eſperance: car Dieu & Nature font quelquesfoisdes choſes qui ſem- Dien egen van
다.
blentauChirurgien eſtreimpoſibles. Et parcărie demanday auditſeigneur l'il auoit iure fonechos
bon courage,& luy disf'il vouloit bien endurer luy faire quelques inciſiós,leſquelles ſes merueil
pourla guariſoneſtoit plus que neceſaires,que par cemoyen bien toft ſes douleurs leuſes.
& autresaccidens ceſſeroiệt. Alors il me fic reſponſe qu'il endureroit tout,voire à luy
amputer la iambeſilen eſtoit beſoin. Adoncie fus bien ioyeux : & toſt apres luy feis
deux ouuertures pour donneriſſuëà la maciere qui eſtoit autourde l'os,& en la ſub
fance desmuſcles par leſquelles en ſortie grande quácité. Etapres fut fyringué auec
du vin & vn peu d'eau de vie,où il y auoit bonne quantité d'Egyptiac, pourcorriger l’Egyptiac
la pourriture,& deſſeicher la chair ſpongieuſe,laxe & molle, & pour reſoudre & co eft excellent
i
ſommer la tumeur ædemateuſe & flaculėte, & ſederla douleur, refociller & fortificr à corriger v.
ne pourriture
la chaleur naturelle,qui jaeſtoit grandement preparéeàeſtre ſuffoquée , parce que en la chair.
lesparties ne pouuoientcuire nyaſlimiler le nutrimentà elles neceſſairepour la trop
!
D grande quantité de matiere. Son Chirurgien , nommé maiſtre Antoine Maucler,
1
homme de bien,&grandement experimenté et la Chirurgie,demeurant à Mons en
1
Haynaut, & moy,fuſmesd’auis luy faire des fomentacionsd'vnedeco &tion faicte de
faulge,romarin,thym ,lauande,Aeurs decamomile,melilot,roſes rouges cuites envin.
blanc,& en lexiue faice de boisde cheſne,& quelque portion de vinaigre, & vne poi
gnée de ſel.Celte deco &tion ainſi faice auoit vertu & puiſſance de ſubciler, attenuer,
inaiſer,reſoudre, & ſeicher l'humeur gros , froid, & pituiteux , & roborer les parties "

bleſſées.Leſdites fomentarios ſe faiſoićt longuement,àfin quela reſolution fuſt plus


grádc:car eſtant ainſi faite longuemét,reſoluoit plus qu'ellenepouuoit attirer, enli
quefiát l'humeur quieitoit au profond,& rarefioit lecuir, voire la chair desmuſcles .
Et pour ceite intēcion nous luyfaiſions des fri& ions,aueccouure-chefs chauds,en Galata 6.
coutes manieres:à ſçauoir,de hauten bas,& debas enhaut,à dextre, à ſeneſtre, & en de la neihi
rond,x fort longuenent:car les briefues,c'eſtà dire,faictesen peu de temps, font at. Ariefues
traction ſans aucunemétreſoudre.Semblablemét par iours interpoſez luy fut appli- frictions.
eſme
438 L'onzi Liure ,

A
que tout autour de la cuiſfe & de la iambe, & à la plante du pied , des bricques échau
fécs &arrouſées de vinaigre & vin blanc,auecvne portion d'eau devie : & par ceſto
cuaporation on voyoit ſortir des poroſitez du cuir pluſieurs aquoſitez, par ſueur, l'en
fleure ſe diminuer , & la chaleur naturelle eſtre reuoquée. Apres on luy appliquoit
des compreſſes trempées en vne lexiue faiete de cendre de chefne,en laquelle on
Cauoit faic bouillir ſaulge,roſmarin , lauande,ſel,eau de vie ,cloux de girofle :& faifoit
on les ligatures ſi dextrement,que lemalade les pouuoit bien endurer : au reſtcauec
tel profic que où on les laiſſoit vn iour,la cumeur accroiſſoit, Aullion appliquoit des
groſſes compreſſes au fonds des ſinus des vlceres, pour chaſſer & expurger la ſanie:
& encor pour mieux ce faire les orifices des vlceres eſtoient tenus ouuerts par le bc
‫ای‬
nefice des tentes cannulées . Parfois auſſi pour reſoudre la tumeur, on luy appliquoir
vn cataplaſme fai&t ainſi..far.hord.fabar. & orobian.zvj.melliscomm .& tereben
thinæ añ.zij.pulu.florum camomil,meliloti ,& rofarum rubrarum añ.ZB.pul, radi ,
Gal. au 6.de cum ireos Florentiæ ,cyperi,maſt.an . z iij.oxymellis fimplıc. quantum fufficiat ,fiat
la methode. cataplaf.ad formam pulcis facis liquidä. Pareillement il luy fuc appliqué desem
L'emplafire plaſtres de Vigo finemercurio, quiluy donnerent grande aide à ſeder les douleurs,
devigo effe & à reſoudre ladite tumeur ; toutesfois c'eſtoit apres auoir eſchauffe les parties ſur
refolutiue.
leſquelles elle eſtoit appliquée par les fomentations, fri& ions,& euaporations: car
alicrement ladite emplaſtre n'euſt peu eſtre reduite de puiſſance en effect pour la
grande intemperature froide des parties . Or pour la mundification des vlceres, on
appliquoic remedes propres, en les changeant , comme nous voyons qu'ilen eſtoit
beſoin. Auſſi les poudres catagmatiques, pour faire ſeparer les os,& corriger leur
pourriture , ne luy furent eſpargnées. Il vía aulli par l'eſpace de quinze iours de la po .
tion vulneraire . Ie ne veux encore laiſſer en arriere les frictions que ie luy faiſois fairo
au matin vniuerſelles de tout le corps , qui eſtoit grandement extenué & amaigry,
Prilité des pour les douleurs & autres accidens qu'auons dit,& auſſipar faute d'exercice.Leldia 11
frictions vni- tes fri & ions reuoquoient & attiroient le ſang & les eſprits, & tcſoluoient quelques
uerfelles humçurs fuligineuſes, detenuës entre cuir & chair : & partant les parties eſtoient puis
apres mieux nourries, ſucculentes & refaictes :ioint auſſi qu’apres ces douleurs pal
C
ſées, & la fiéure ,il commença à bien dormir , & auoir bon appecit , & partant luy fai.
fois vſer de bonnes viandes , & boire de bon vin & de bonne biere : & deleunions luy
& moy tous les matins de potage de ſoupe-chaudiere, & par ainſi deuintgras,refaid, 1
Tomtes bon , potelé & gaary,reſte qu'il ne peut bien ployer le genoüil . Or i'ay bien voulu reciter

nes choſes ces hiſtoires pour touſiours conduire le icune Chirurgien à la pradique,& non pour
procedent de m'en preualoir & attribuer gloire , mais la rendre à Dicu ,cognoiſſant que toutes
Dieu .
bonnes choſes procedent de luy,comme d'vne fontaine qui neſe peut épuiſer, &
rien de nous comme de nous. Par ainſi luy faut rendre graces de toutes nos bonnes
Quures leſquelles i luyſupplie vouloir continuer, & de plus en plus augmenter en
nous par ſa bonté infinic.

Apologie touchant les plagesfaictes par harquebufes.

CH A P. XV .

D
Iuſte occa L m'eſt tombé ces jours paſſez entre les mains vn certain liure faia par
fió de l'Au vn Medecin , auquel aſſez ouuertement il blaſonne & denigre ce que l'ay
theur ſur l'a. eſcrit
par cy - deuant des playes fai &tes par coups d'harquebuſes, & da
wancement
de ceſte leurs cureș. le proteſte que quand iln'y auroit autre mal , & que ie ne verrois autro
so
intereſt en cecy ,que le meſpris de moy & de mon liure , ie laiſſerois couler les choſes
pologie.
doucement,& les paſſerois fous ſilence,fçachantbien que les reſponſes & repliques,
dont nous nous voulons aider à clorre la bouche des meſdifans, bien ſouvent ſeruent
imbu
pluſtoſt à les faire parler dauantage qu'autrement , & qu'il n'y a meilleur moyen
term
d'affoupir telles noiſes ,quc de ne dire mot : comme nous voyonsque le feu ſ'eſteine,
ceflantſa matiere combuſtible, & luy oltant le bois. Mais quand i'ay bien conſideró
le danger euident ,auquel pluſieurs fe fourreront s'ils viennent à ſuiure les reigles &
enſeignemens que donne ledit Medecin pour la cure deſdites playes : i’ay penſé que
mon deuoir eſtoit d'aller au deuant dece mal, & l’empeſcher autant que ie pourrois,
eu égard à ma profeſſion , laquelle outre l'affe& ion cõinune que tous doiuent au bien
public,m'oblige particulieremér à cecy , tellement que ie ne pourrois en bonne con
ſcience
Des Playes d'harquebuſes. 439
A ſcience fait le fourd & le muet,où le deuoirgeneral & particulierm'obligét, & con
C
cfaignét de parler.C'eſt cela qui me ſollicite à faire ceſteApologie,pluſtoit qu'vn de. Ze baſilicon
fir boüillant &paſſionné d'auoir ma reuāge de celuy quià laveriţe m'a affailly à tort. huliquefié
ile eſten
Oren celiure il pretendcontemner & melpriſer l'application des medicamēs ſuppu
2 ratifs,côme du baſilicon , & d'autres ſemblables:pareillement de ceux qui ſontacres, propre aux
1 comme l’Egyptiac,& autres.Et dit, tels remedes onteſté cauſe de la mort d'vneinfi playes quand
on les veut
nicé de perſonnes,auſquelson les a appliquez,voire encores que leurs playes fuſſentſuppurer.
ſuperficielles, & en parties charncuſes:& qu'en ce lon ne doit ſuiure le conſeild'Hip- Hipp. anlin.
pocrates,quidic, que toutes playes concules doiuét eſtre ſuppurées.Parce (dit-il) que desviceres.
c'eſt vne maladie nouuelle,& incognuë aux anciens,quidelire auſſi nouueaux reme
des. Dauátage,il dit quepourl'intemperature de l'air n'eſtbeſoin changer de reme
des auſdices playes. Auſſi qu'on ne doit comparer le tonnerre & la foudre aux coups
7. d'artillerie. Enquoy le voyant du toutcontrarier à ce quei'en auois eſcric en mon li
ure des playes faites parharquebuſes, feſches & dards , ie ſuis contraint pourmade
fenſe repeteraucunemētce quei'en ay parcy-deuãt & ailleurs expoſé, pour reprou
B ller tous ces poin & s,come i’eſpere faire l'vn apres l'autre. Premieremét que les medi
- camens ſuppuratifs ne ſoiét propres à telles playes,c'eſtcõbattre la raiſon, l'au & orité
& l'experience.Car chacun ſçait que les baleseſtanslongues& maſſives, ne peuuent Defenſe des
bleſſer ſans faire grande contuſion & meurtriſſeure, laquelle ne peut eſtre curée ſans ſuppuratifs.
eſtre ſuppurée,ſuiuantl'authorité non ſeulemēcd'Hippocrates,mais auſſi deGalien,
H & d'autres autheurs , tancanciens que modernes . Et que luy ferc de nommer celles
II playes nouuelles, pour deroger au dire d'Hippocrates, lequel nous tenons comme
3. pere,aucheur,& vray fondement des loix de la ſacrée Medecine,ſur toutes dignes de
50 grande louange,parcequ'elles ne ſont ſujectes à changemēr, commecelles des Rois,
Princes,& grands Seigneurs,ny à la preſcription de temps, & couſtumesdesregions.
Dócli i'ay en cecy ſuiuy la doctrine Hippocratique, qui touſiours ſe trouue vraye &
S ſtable,iecroy auoir bien fait ,& n’ay eſtéſeul.Carmonſieur Botal,Medecin ordinaire
du Roy,& monſieur Ioubert aufliMedecin du Roy,& fon lecteurordinaire en l'Vni
uerſité de Monepellier,hommes bien experimétez,tant en laMedecine qu'en laChi
C rurgie,qui ont eſcritrecentement deceſte matiere, loüent & commádent appliquer
-Y aucomencementen telles playes du baſilico & autresmedicamnésſuppuratifs. Ceux
cy ( pour auoir ſuiuy les guerres) ont plus veu de bleſſez par baſtons à feu en vniour,
3
-
quenoſtre Medecin n'afait en coute la vie. Quant à l'experience, il y a vne infinité
il d'autres bons Chirurgiens,& grandement experimentez, quiont vſé, & vſent de ces
remedes au commencement pour conduire telles playes à luppuration ,fil n'y a indi.
cation contraire. Te diray dauantage, qu'vn Chirurgien Empirique ſon voiſin, nom
mé Doublet,a fait maintesfois descures merueilleuſes, appliquant à celles playes vil Doublet"em
2 medicamétfuppuratif,compoſé de lard fondu,iauned'auf,& terebenthine,auec vn pirique.
peu de ſafrá :& tenoit ceremede pourvn tres.grādſecret.Il y en auoic yn autre à Thu
rin l'an 1538. (moy eltác lors au ſeruice de defunct mõſieur le Mareſchal de Mõtejan,
Licutenāt general duRoy en Piedmõt ) lequel auoit le bruit par ſus cous les Chirur
giés dece païs-là, de bien guarir telles playes auecques oleúCatellorú,la deſcription Oleum can
duqueli’eusdeluy par grandes prieres.Celte huilea puiſſance de lenir& appaiſer la cellorum.
douleur,& faire ſuppurer les playes : & l'appliquoit vn peu plus chaude que tiede,&
D non pas boüillante,come aucuns veulent.Ce qu'vne infinité de Chirurgies ont fait,
apres que ie leur ay deſcritladite huile en mõliure des playes faites par liarquebuſes,
auecbõne & heureule iſſue.Quâtau meſpris qu'il fait de l'onguent Egyptiac,ie croy Reſponſe au
veritableméequ'il demeurera leulen ceſte opinion & hereſie, veu qu'on n'a encores me pris de
ſceu trouuerde plus ſingulier remede pour preuenir& corriger la pourriture, qui ſur. l'Egyptiac.
viết le plus ſouuéren telles playes,leſquelles degenerétrouuét envlceresvirulés,cor
roſifs,ambulatifs,& malins,iettásvneſanie puante,dontla partie tombeen gãgrene,
fionn'yremedie par l'Egypciac, & autresmedicamens acres , qui onteſté pour ceſte
faiſon fort approuuez deſdits Boral &loubert,& de tous bonsChirurgiés .Et cepen
dantnoſtreMedecin ſouſtient qu'ils ſont venimeux :attendu (dit- il) qu'en les appli.
quâcaux playesfaites par baſtonsà feu,onteſté cauſe de la mort de pluſieurs perſon
nes:qui eſt choſe ſi abſurde & contre raiſon, que i'en quitte la reſponſe aux Barbiers
devillage,quiauront trop dequoy luy ſatisfaire ſur cepoinet, & luy prouuer plus ma
nifeſtement qu'ilne leſçauroit nier hardiment,par la conſideracion d'un chacun des
Рp
440 L'onzieſme Liure ,
ingrediens dudit Egyptiaciceluy non ſeulement n'eſtre veneneux, mais meſmes re А
alter & contrarier directement à toutes forces de venins & pourritures qui peuuent
Preuue que ſuruenir aux parties charneufes,à raiſon de quelqueplaye & vlcere. Il dit dauantage,
l'air aliere que la diſpoſicion de l'air ne peut eſtrecauſe d’infe & er & rendre les playes dangereu
e infecte ſes en vn cepsplusqu'en autre.En cela il demeurera encore cont ſeul decelteopiniõ.
kes playes. Mais fileuſtbien leu &encendu Hippocrates,il n'euſt fi legerement cõremnélaco 42

ſtitution desſaiſons, & l'infection prouenāte de l'air,non pas ſimple & elementaire:
( careſtant ſimple,iamais n'acquiere de pourricure) mais par addition & meſlange de
1 vapeurs corrompuës eſparſes en luy,commei'ay eſcricen mon traicté de laPeſte.Car
d'autant que l'air qui nous enuironne & eft contigu ,cſt perpetuellement neceſſaire à
noſtre vie ,il faut que ſelon ſa diſpoſition noſtre corps ſoit auſſi alteré en pluſieurs &
diuerſes manieres,à cauſe que nous l'attironscontinuellemét par le moyendes poul
mos& autres parties dediées à la reſpiration, & meſmes par les pores &petits pertuis
inuiſibles detoutle corps,& par les alleres eſpāduësau cuir:ccqui ſe fait tant pour la
generation de l'eſpritde vie, quepour rafreſchir & fomēcer noſtre chaleur naturelle.
A ceſte cauſefileitimmoderémencchaud,froid,humide ou ſec, ou autremét vicié, B
ilaltere & change la cemperacure des corps en ſemblable conſtitution que la ſienne.
Exemple de Cela ſe void clairemét, lors qu'il eſt infecté pardes vapeurs putredineuſes, & charõ.
la corrupsion gneuſes,produites par vne grande multitude de corpsmorts,non affez toſtenſeuelis
de l'air à en la terre,commed hommes, de chcuaux,& d'autres beſtes:commeiladuientapres
raiſon des quelque bataille ,ou quand pluſieurs hommes peris par naufrageonteſté icttez auri
corps morts. uage par les flors de lamer. Pour exemple ,on a recogneurecentementla corruption
de l'air prouenante descorps morts au chaſteau de Pene ſurla riviere de Lar, auquel
lieu l'an 1562. au mois de Sepcembre, pendant les troubles premiers aduenusà cauſe
de la religion ,fut iecté grand nombre decorps morts dedans vn puits profond de
cent bratſées ou enuiron, duquel deux mois apres f'elleua vne vapeur puante & veni
mcuſe, qui ſ'eſpandit partoutle païs d'Agenois, & licux circonuoiſins, iuſques à dix
lieuës à la ronde,dont pluſieurs furécinfedez de peſte. Dequoy ne ſe faut émerueil
ler : car les vents ſoufflans& pouſſans les exhalations & vapeurs pourries d'un païs en
autre, foncpulluler la peſte. Par ainſi la maligne conſtirution de l'air,ſoitque la cauſe 0
en ſoit manifeſte ou occulte ,peut rendre les playes putrides , alterer les eſprits & les
humeurs ,& cauſer la mort . Ce que l'on ne doit point attribuer aux playes , attendu 10

que ceux qui ſont bleſſez ,& ceux qui ne le ſoncaucunement,en ſont égalementinfo
Etez, & tombent en meſmes inconueniens. Monſieur d'Alechamps en la Chirurgie
Françoiſe,parlant des choſes qui empeicher la curation des vlceres n'a point oublié,
que quad enaucune Prouince regne quelque peſtilence,ou maladie epidemiale,par
le vice de l'air,cela fait les vlceresincurables,ou tres- difficiles à guarir.Lebon vieil
Au traicté lard Guido a pareillemēr eſcrit que les playes de la teſte eſtoiēt plus difficiles à guarir
des vlceres. à Paris qu'en Auigno : & les vlceres desjābes plus faſcheuſes en Auignon qu'à Paris:
d'autant qu'à Paris l'air eſt plus froid & humide,qui eſt choſecótraire, principalemét
aux playes de la teſte:aucontraire,en Auignon lachaleur de l'air ambiés eft cauſe de
liquefier & ſubcılier les humeurs.Ainſi plus facilemét, & en plusgrādeabondāce,les
Auxios decoulēt auxiābes,d'oùviệt que la guariſon des vlceres d'icelles, eſt plus dif
ficile en Auignon qu'à Paris.Que ſi quelqu'vn alleguant l'experience,dic au côtraire
que les playes de teſte ſont le plusſouuentmortelles és regiõschaudes,ieluyreſpon . D
dray cela ne prouenir à raiſon del'air, qui eſt plus chaud & ſec; mais pluſtoſt à cauſe
de quelque humidité ſuperfluè, & mauuaiſe vapeur communiquée à l'air,comme il
ſe faic éslieux de Proučce & d'Italie,prochainsdela merMediterranée.Defait qu'il
n'y a fi pecit Chirurgien qui ne ſçache qu'eftantl'air chaud & humide,facilement les
playes degenerencengangrene &pourriture. Etquantà l'experience ie luy bailleray ...,
bien familiere:c'eſt qu'en tempschaud & humide, & lors que le vent Auſtralſouffle,
les viandes pourriſſent en moins de deuxheures,tantſoient- elles fraiſches, de façon
queles bouchers en ce temps-là ne tuent leurs beſtes qu'à meſure qu'ils les vendent.
Āuſſi n'y a-il doute aucune,queles corps humains ne combécen affection contrena
ture,quád les ſaisos peruertiſſent leurs qualitez par la mauuaiſe diſpoſicióde l'air,dóc
on a veù parcertaines années que les naurez eſtoiêttres- difficiles à guarir, & fouuéc 191

mguroierdefort petites playes,quelquediligence que les Medecins & Chirurgiesy


peuſsée faire.Cequei'ay biéremarqué au fiege qui fut mis deuátRoüe.Carle vice de
441
Des Playes d’harquebuſes
.

A l'air alceroic & corrompoic tellement le ſang & les humeurs , par l’inſpiration & tran
{ piration,que les playes en eſtoient renduës ſipourries & puantes, qu'il en ſortoit vne
feteur cadauereuſe. Et ſi d'auenture on paſſoit yniourfans les penſer,on y treuuoit le Playes ver
lendemain grande quantité de vers , auec vne puanteur merueilleuſe, dont ſe le- mineuſes.
uoienc vapeurs putrides , qui par leur communication auec le cæur, cauſoient fieure
continuë , auec le foye empeſchoient la bonne generation de ſang, & auec le cer
ueau produiſoient alienation d'eſprit,reſuerie,conuulſion ,vomiſſemens, & par con
ſequencla mort . Eclors qu'on les ouuroit ,on trouuoit pluſieurs apoſtemes en diuer
ſes parties de leurs corps pleines d'vn pus verdoyant & fecide. De ſorte que ceux qui
eſtoient dedans la ville voyans telles choſes , & que leurs bleſſez ne ſe pouuoient gua
rir , difoient que ceux de dehors auoient empoiſonné leurs bales , & ceux de dehors
en diſoientautant de ceux de dedans . Et de faict apperceuant que les playes ſe tour
noient pluſtoſt à pourriture , qu'à quelque bonne ſuppuration, ie fus contraint , &
auec moy la plus grande part des Chirurgiens , laiſſer les ſuppuratifs; & en lieu d'i
ceux vſer de l'onguent Egyptiac , & autres remedes ſemblables, pour obuier à ladice
B pourriture & gangrene, & autres accidens ſuſdits. Dauantage , ſi le divers cours du

chini ciel a la puiſſance & la force d'imprimer vne peſtilence en nous par ſes infuences,
pourquoy ne luy ſera-il poſſible de faire le ſemblable en vne playe , & l'infecter en
nie
pluſieurs manieres : L'experience nous en rend bon & ſuffiſant teſmoignage , non
feulement en temps chaud , mais auſſi en hyuer . Car meſmes nous voyons que les Cecy ſe void
(11
malades ,tantvulnerez qu'autrement diſpoſez concre nature, ſont plus tourmentcz bič aux gout
ſans comparaiſon de leurs douleurs , quand il veut pleuuoir que lors qu'il fait beau reux princi
temps à raiſon de l'air vaporeux & tenebreux , & vent Auſtral, qui meut & agite in- palement.
sk
terieurement leshumeurs, quipuis apres ſe deſchargent ſur les parties affiigees ,& y
fon :
augmentent les douleurs .

Noſtre Medecin a auſſi eſcric qu'aux batailles de Dreux & Sain & Denys , qui furenc
données en temps d'hyuer, mourut vn grand nombre d'hommes : ce que ie confeſſe
bien :mais ieluy nie que ce fuſt par l'application desmedicamens ſuppuratifs ,ou des
corroſifs,ainspar la vehemence de leurs bleſſeures, & pour le deſordre que le boulec

C faiſoit en leurs membres : à quoy aidoitgrandement la nature des partiesbleſſées, &


la temperature des malades ,& fur tout le froid .Car le froid rend les playes difficiles

sat à guarir ,voire cauſe ſouuent gangrene & totale mortification : comme teſmoigne
Hippocrates.Etſileuſteſté auec moy au ſiege de Mets , il euſt veu beaucoup de fol- Aphor. 200
dars, ayans les iambes eſtiomenées par le froid, & vne infinité qui moururent par la

violence du froid , encore qu'ils ne fuſſent vulnerez . S'il nele veut croire, ie le ren
temps d'hyuer,où pluſieurs laiſſent la vie, & ſont tranſſis
uoyeray ſus le mõc Senis en
tout en vn moment : teſmoin la Chapelle des Tranſlis, quien a pris le nom . Il m'a pa
522
reillement calomnié ; d'auoir faict ſimilitude du tonnerre à l'artillerie. Veritable
lan
menton peut dire qu'ils ont ſemblables effects. Car la diabolique pouldre à canon
faid des choſes ſi merueilleuſes,qu'il eſt facile à prouuer qu'ils ont grande ſimilitude
CLE
entr'eux. Ecpremierementon peut comparer le feu ſortant par la lumiere du canon
à l'éclair , en ce qu'il eſt veu parauant que leconnerre ſoitoüy.Car le ſemblable ſe fair Premiere
plu.i cn l'autre : ce qui aduiene , parce que l'oreille n'eſt ſi prompte que l'oeil, à receuoir les fimilitude.
obie&ts de ſon ſens. On peut auſſi cõparer l’eſpouuentable bruit quefont les gros ca- seconde
D nons à celuy de la foudre. Tellement que lors qu'il ſe fait quelque grande batterie ſimilitude.
auec des groſſes pieces , on en oit le bruit quelquesfois loing de vingt lieuës ,plus ou
O
moins, ainſique le vent rapportele retentiſſement du ſon. Les premiers coups ne ſont
pas entendus,commeles autres ſuyuans. C'eſt quepar la multiplication des ſensl'en
treſuiuans, & ſuccedās, le plus proche pouſſe ſon voiſin ,quipuisapres pouſſe l'autre ,
& l'autre l'autre , & vient à nos oreilles.Semblablemét les bales ietcées par la pouldre , Troiſieſme
d'vne viſteſſe ineſtimable, rópent & brisée tout ce qu'elles rencórrent, voire ont plus ſimilitude.
de force către les choſes dures que către les molles ,en ce reſſemblantes au tonnerre,
quicomminuë l'eſpée dedans le fourreau qui demeure entier , fond l'argent en vne
bourſe ſans la rompre.Ainſiſcõmei’ay par cy - deuát eſcrit) on a veu pluſieurs que les
bales n'ontaucunement touchez ,auſquels neātmoins l'impetuoſitéde l'air fait par la
pouldre forcant du canon , a rompu & briſé les os ſans aucune apparéce manifeite de
lolution de continuité en la chair ,voire les a meurtris & tuez proinprement
, comme
Quatrieme
lic'cult eſte lafoudre. La poudre àcanõ a auſſi vne odeur puáce , qui ſent le ſoulphre, ſimilituds.
Рp i)

2
442 Lonzieſme Liure ,
imitát l'odeurqui demeure au lieu où ſera combé la pierre de la foudre,laquelle non a
ſeulement les hommes ne peuuent ſentir,maisles animaux auſſi ſont contraints d'a
bandonner leurs cauernes & taſnieres lors qu'elley eſt combée , ne pouuant endurer
Cinquieſme. la puanteurſulphurée delaiſſéepar le tonnerre.Mais encore leur fimilitude eſt plus
ſimilitude. manifeſtée parles effe&tsdeladite poudre,laquelle eſtantencloſe dedãs lesmines,&
conucrtie en vent par le feu qu’onymet,bouleuerſe les monceaux de terreaulli gros 1

queinontagnes,rompt & demolitlesfortes tours , renuerſe les montagnes c'en-del


Horribles
ſus deſſous.Ce quei'ay aſſez donné à cognoiſtre par l'hiſtoire quei'ayailleurseſcrite,
effectsdela
poudre à à ſçauoir qu'on a veu puis nagueres à Parisle feufeftátmis en la poudre de l'Arſenal
canon . cauſer vne ſi grande tempeſte,qu'elle fit trembler preſque toute la ville , & comber
parterre toutes les maisos prochaines,deſcouurit & defeneſtra celles quieſtoiētplus
à l'écart de la furie . Briefcomme la foudre en l'éclatát, renuerſant ça & là quelques
hommes demy-morts auxvns ofta la veuë,aux autres l'ouye,& en laiſſa pluſieurs no
moins deſchirez en leurs pauures mēbres, que ſi quatre cheuaux les euſsét écartelez,,
& tout ce par l'agitation de l'air,en la fubſtáce duquel ladite poudre eſtoic cóuertie. B
Semblable fait arriua en la ville de Malignes l'an 1546. par la cheute du tonnerre de
dans vne grolle & forte cour,où y auoit grande quantité de poudre à canon , qui de
molit preſque la moitié de la ville , & tua vn grand nombre de perſonnes, donc i'ay
Conclufion . veu depuis vn peu de téps les veſtiges encores bien apparēs.Ces exemples ſont à mon
aduis fuffiſanspourcontenter noitre Medecin, & luymóſtrer qu'il y a grande fimili
cude entre les effets de la poudre à canon & du tonnerre. Combien que ie ne veux
pour cela confeſſer que les coups d'harquebuſes ſoiét accompagnez de poiſon & de
En quoylu feu,comme les coups de la foudre.Car encore qu'ils conuiennent les vnsauec les au
foudre er
l'artillerie tres parles ſimilitudes predires, ce n'eſt pourvácen ſubſtance & matiere, mais pluſtoſt
diff:rent. en lamaniere de caller, briſer,& diſliper les obiects qu'ils rencontrent : à ſçauoir, les
coups de foudre par le moyen du feu 8c de la pierre engendrée en iceluy, &les coups
de canon , par l'air impecueuſement pouffé,quiconduiſant la bale, fait vn pareil &
auſſi tempeſtatif deſaſtre que le tonnerre.Ces choſesconſiderées, ne faut- il pas con
feſſer queceux qui ont eſcrit que les coupsdecañon & le tonnerre ont grande limi
litudeenſemble,ne l'ontdit ſans raiſon? Au deigeurātce Medecin n'a pas eu grande
peine à prouuer comme la poudre à canon n'eſtvenimeuſe, & que les bales ne peu
uentbrüller , non plus qu'à inuenter & nominerles inſtrumenspropresà extraire les
choſes eſtranges, parce qu'illes a trouuez tous nafchez enmon liure,auec pluſieurs
autres choſes qu'ila eſcrites, comme chacun le pourra cognoiſtre, par la conference
de fon liure & du mien . Il a aulli enrichy ſon liure de pluſieurs ſentences & raiſons
qu'il'a recueillies d'un autheur Italien ,noinmé Bartholomæus MagiusMedecin de
Boulogne,qui en a eſcric aſſez bien en vn traité intitulé, De vulnerum Sclopecorum
curatione: combien qu'il ne l'a pas recogneu pour guide,ains l'ayant traduit preſque
moc pour moc, en a neantinoins fuit ſon propre,& pour traducteur ſ'eſt nommé au
Nonuelle theur. Venons maintenant à ſa belle pra & ique, & methodc nouuelle de guarir les
forte de sup playes fuites par baſtonsà feu : Premierement , il veut qu'on y applique des medica
puratifs. mens fuppuratifs,leſquels toutesfois il n'esttend eltre chauds & humides,ny de ſub
ſtance emplaſtique:mais tout au côtraire,illes ordonne chauds & ſecs. Parce(dit-il)
que ce n'eſt pas comme aux abſcez,où il ne faut auoir autre cure que de fuppurer:
mais icy ,où les playeslontaueccõruſion, pluſieurs & diuerſes indicaciós en fourdet, D
d'autant que la contufion veuteſtre cuitce & meurie, & la playe deſſeichée. Pour reſ
pondre à cela,ie lerenuoyerayapprendre la nature & qualité desſuppuratifs en Ga
lien au 5.des Simples, & tour d'un chemin au 10. de la Methode , qui luy enſeignera,
qu'aux maladies compliquées ilfaut conſiderer la cauſe,l'ordre & ľvrgét.Puis ie luy
demanderay volontiers filiçaura guarir la playefaite par coup de boulet,que la con
cuſion ne ſoit premieremét bien ſuppurée. Il me ſemble que non,& deceiem'en rap
porteauiugemét de cous bons pradiciens. Par ainſi noſtre baſilicũ , & noſtre oleu ca
tellorum , & autres tels medicamens ſuppuratifs, ſeront propres à lúppurer les playes
faites par harquebuſes. Secondement,il veutqu'on mette dedans la playe de l'oxy
crat , pour eítancher le flux deſang. Ecl'il ne peuteſtre arreſté par ce moyen,qu'on y
Le vinaigre applique vn medicament faic de blanc d'æuf,bolarmene,vinaigre rolat, & du ſel. Ie
irrite le flux laille à penſer ſi telsremedesont puiſſance d'arreſterle flux de fang ,eſtans appliquez
de fang: dedans la playe.Certes ils le feroient pluſtoſt Auer dauantage, à cauſe que te vinaigre

1
Des Playes d'harquebuſes. 443
1

A eſt de qualité tenuë &mordante, cauſantdouleur, fluxion , inflammation , & autres


mauuais accidens , comme ie l’ay cogneu par experience : & nefçay aucun Chirur
gien,qui ayant exercé l'arc,vouluſtſuiure telle façon de pratiquer,qu'il neſ'en trou
uaft trompé. A ce proposmeſouvientauoir penſé vn More, qui eſtoit à monſieur le
Comce de Roiſſy,lequel fut bleſſé deuant Boulongne par vn Anglois,qui luy donna
vn coup de lance au -trauers du bras. Donc pour cuider eſtancher le lang, ie misde
dans laplaye vn reſtraintif,où il y auoit du vinaigre à faute d'autre. Maiscoſt apres il
mereuint trouuer,diſant qu'illuy ſembloit auoir le feu au bras , & fus contraint le
penſer de nouueau, & changer deremede en la playe,appliquant leditreſtraintif par
1 dellus. le croy que ce Medecin n'a cogneu celle choſe : autrement l’eſtimé - ie fi Erreur coue
$ homme de bien , qu'il ne l'cuſt mis dedans ſon liure pour vn bon reſtraintif. Dauan- uert d'ignos
tage il louë ſur tous autres remedes ,ſon baume fait d'huile , decire & myrrhe, bartus rance .
auec vniaune d'æuf,ou bien le baume naturel qu'on apporte du Perou : & dit, qu'ils
- conſomment l'humidité ſuperAuë des playes , & confortent tellement les parties,
qu'iln'y ſuruient aucun accidentperilleux: & neantmoins dit, qu'ils ne conſolident
B ne font reprendre ces playesicy,commeilsferoient celles qui ont eſté faietes detail
le. Veritablement c'eſt choſe bien eſtrange, de vouloir penſer & guarir les playes
1 concufes comme les ſimples qui ne demandent que ſeule vnion.Outre plus ces bau- inutilitédes
12
mes ne peuuent eſtre propres aux playes fai&tes par harquebuſes, d'autant que par baumes és
leur ſiccité ils empeſcheroient la fuppuration,fanslaquelle ne peuvent eſtreguaries. playes d’har
EK Etfils y conuiennent en aucunemaniere,ceſeraſeulement apres quelacontuſion quebuſes.
ſera ſuppurée,& la playe mondifiée. Mais encore ne ſçay -ie où l'on pourroit trouuer Refpõſe plain
tanc d'extracteursde quinte- eſſence, pour preparer & fournir tant de baumes qu'il Jantecom a
.
faudroit pour penſer les ſoldats qui ſeroientbleſſezen vne rencontre, ou bacaille, ou propos,
en quelque aſlauc deville :ne o ils prendroient l'argentpour ſatisfaire aux frais.
Venonsau reſte. Ilordonne que ces baumes ſoiencinſtillez dedans les playes ſans
tentes : & ſe reprenant puis apres dit, qu'il ſeroit bon y en mettre vne petite & cour
1
to
te ſeulementpour empeſcher que les bords de la playe ne ſe reioignent. Comment neceßité des
ſeroit-il poſſible que ces baumes & autres onguents peuſſent eſtre portez au fond de tentes en los
C la playe,fanstentes ou ſerons,deſquels l’yſage eſt principalement de porter les me- tons,
dicamens iuſques au profond des playes,& les tenir ouuertes, pour donner iſſuë aux
choſes eſtranges? Tous les bons practiciens ne luy accorderontiamais ce poina , ne
ceux quiſçauent que c'elt de penſer telles playes. Oril y a encore icy vne choſe di
gne d'eſtre bien notée : c'eſt qu'apres auoir reprouuél'onguent Egyptiac , il ne laiſſe cotradiction
du Medecin.
1 pourtant de commander qu'on l'applique, depuis le commencement iuſques à ce
que la contuſion ſoit du tout ſuppurée: & veut qu'on en vſe ainſi. Prenez ( dic-il) de
10
l’Egyptiac diſſout en yne decodion faite de la ſummité d'aluyne & demille-percuis,
& de petite centaure & plantain , & en fyringuez la playe. Il en deſcric puis apresvn
autre,faitd'eau de plantain & miel roſat,bouillis enſemble à l'eſpeſſeur& conſiſtáce
BS
demiel,en l'eſcumant bien : puis melle autant de cecy que d'Egyptiac enſemble,&
ho
dit quecetonguent ſuppure les harquebuſades. le laiſſe à penſer aux lecteursChi- l’Egypriac
rurgiens experimentez,litels remedes ſont ſuppuratifs. Quant à moy , ie les eſtime n’ejifuppu
plus propres à deterger & mondifier, qu'à ſuppurer. Il a finalement eſcrit qu'il ne rasif.
faut penſer laplaye que de quatre en quatre iours. Et ſ'il ya fracture d'os,qu'on n'y
D touche,ou qu'on ne leue l'appareil iuſques au huictieſme iour. Puis il diten vn autre cötradiction
endroit , qu'il eſt conuenable inſtiller tous les iours dix ou douze gouttes de ſon bau- touchant le
me dedans la playe. Veritablement telle doctrine eſt pour bien eſtonner le ieune teps d'habil
ler les plages
Chirurgien ,pourſçauoir quelle maniere de pratiquer ildeura ſuiure. Et qui ſuiura d'harquebu
" la ſienne,ie le puis aſſeurer qu'il fera ſouuent ouurir le ciel & la terre : le ciel , pour ſes.
receuoir les ames ,8c la terre pour les corps. Mais c'eſt aſſez parlé de ceſte matiere Les mauuais
pour le preſent,puis que nous ſommes aſſeurez que toutes ces petites cauillations ne practiciens
pourront en rien diminuer la reputation de noſtre liure : duquel les eſtrangers ont fon
le tciouv
elorir
tant fait de cas, qu'ils l'ont traduit en leurs langues maternelles pour en auoir com la terre.
munication . Partantnous dirons adieu à noſtre Medecin ,apres l'auoir prié de reuoir
& corriger ſon liure le pluſtoſt qu'il pourra,pour ne retenir plus longuement les icu
nes Chirurgiens en l'erreur dont ils pourroient auoir eſté imbus par la lecture d'ice
luy : car lesplus courtes folies ſont les meilleures. 1

Pp iij
444 L'onzieſme Liure ,

Autre diſcours ſur la queftion de la venenofité des playes des Harquebuſes.

C H 4 P. XVI.

E me ſuis trouué depuis quelques mois en la compagnie de quelques do


& tes Medecins , & bien experts Chirurgiens ,leſquels par maniere de deuis,
remetcans en ieu la queſtion de venenofité des playes d'harquebuſes, l'ef
forçoient principalement par cinq raiſons deprouuer la venenoficé eltre conioince
auec icelles playes , non à raiſon de la pouldre à canon ,laquelle ils confeſſoient aucc
moy eſtre exempte de cour venin , & en ſa compoſition & en ſon eſſence : mais à rai
ſon de la bale , dedans laquelle le venin pouuoit eſtre tranſmis , mixtionné & incor .
Premiere poré . La premiere raiſon eſt, que le plomb eſtant fort rare & ſpongieux, comme
raiſon. la facilité de ſa fuſion & molleffe le monſtrent, eſt par conſequent fort propre à l'im

biber de quelconque liqueur . Mais telle conſequence me ſemble peu aſſeurée :car B
en toutemixtion artificielle, quelle eſt celle dont nous parlons , il y a deux choſes à
conſiderer : la matiere des corps qui entrent en la mixtion , & la forme ſelon la ma
tiere . Tels corps doivent eſtre liquides , ou mols , ou friables, & aiſez à mettre en
petites portions , à fin que facilement de toutes parts elles ſe puiſſent rencontrer,
ioindre, & vnir . Selon la forme, elles doiuent eſtre alliables & compatibles les vnes
auec les autres : ce qui ſe cognoiſt euidemment en l'eau, combien que leurs matieres
ſoient liquides , & aiſées à meſler auec infinies autres choſes, ne pouuans toutesfois
eſtre meſées enſemble ,à raiſon de l'antipathie de leurs formes. Ainſi l'or & l'argent
ſont tant amoureux du plomb , que quand il eſt queſtion de les fondre,on les mer
peſle -melle auec le plomb: mais l'airain fuit autant le plomb , que l'or & argent
fuyent l'eſtain ( ou plomb blanc . ) Sidonc le plomb & l'airain liquefiez ne ſe peu .
uent meſler enſemble, bien qu'ils ſoient contenus fous vn meſme genre & eſpece
neneule,
metallique, comme le pourroit incorporer le plomb auec autre choſe venen
Seconde
d'eſpece & forme toute differente :Venons à la ſeconde raiſon . Le fer ( diſent- ils)
raiſon.
qui eſt plus denſe, ſolide, & moins poreux , peut receuoir quelque qualité veneneu- o
ſe, comme le monftrent les feſchesenuenimées, dont les anciens vſoient: parquoy
Responſe. le plomb pourra à plus forte raiſon receuoir cel venin . Pour reſponſe, ie dy que leve
nin peut bieneſtre receu en la ſuperficie du fer,maisnon pas en la ſubſtance interieu
se par mellange. Or eſt - il icy queſtion d'incorporation , & non de ſimple enduiſe
Troiſieme ment & inoņētion. Voyons la troiſieſmeraiſon . Nonobſtant ( diſent- ils) que le
raiſon . plomb reiecte ſa craſſe & ordure à la fonte, coutesfois il ne lairra de receuoir & fa
bruuer de quelque ſubſtance eſtrangere: ainſi que l'acier , mecal entre tous le plus
Responſe. ſolide, reçoit vne trempe quil'endurcir,de toute contraire ſubſtance. Pour reſponſe,
ie dy que quand la trempe eſt donnée à l'acier, icelle n'eſt receuë dedans la fubitance
interieure d'iceluy: car ſi celle choſe eſtoit neceſſaire pour l'endurciſſement , cela ſe
feroit plus aiſément lors que l'on fond ,& liquefie ledit acier,meſāc la trempe parmy
pour l'incorporer,pluſtoſt que d'atcendre qu'il ſoit pris & conſolidé en barre . Celté

Quatriefme reſpõſe feruira meſmede refutation pour la quatrieſme raiſon, par laquelle ils diſent
raiſon.
que des ius de Napellus& Rhododendron ,d'apium riſus, & autres , qui de toute leur
faire des D
ſubſtance bleſſent & corrompent la noſtre,mellées auec le plomb, on peut
mixtions li veneneuſes ,que les playes en ſeront neceſſairement venencuſes . Ie dy au
Reſponſe.
contraire , que la mixtion eſt ſeulement des choſes qui ſe peuvent non ſeulement ap
pliquer , mais auſſi accacher & adherer,bref incorporer & vnir les vnes auec les autres.
Orcoinme pourra ſeulement adherer l'eau ou autre ius quelconque liquide auec le
plomb , qui eſt dur & ſolide, cant fen faut qu'il ſe puiſſe vnir? La varieté de cela leiu
gera mieux par experience que par raiſon. Faitesfondre le plomb dedans les ius reci
cez cy -deſſus, ou autres que voudriez choiſir. Cela faict, poſez l'vn & l'autre, vous
trouuerez reſter l'égale meſure deſdits ius , & l'égal poids du plomb qui eſtoit par de
uant : ſigne tres-euident,que ny le plombnefelt rien incorporé deſdits ius,ny lesius
Cinquieſme rien perdude leur ſubſtance. La cinquieſme raiſon eſt celle . La bale laſchéc d'vne
faiſon . harquebuſe cătrequelquepierre,ou autre corps de pareille dureté , ne feſchauffe pas
tant, qu'elle ne ſe laiſſe bien manier auec la main , lion la prend incontinent apres
le coup . Parquoy cela eſt faux , que le venin empraint dedans la bale puiſſe eſtre
Des Playes d'harquebuſes 445
.
conſommé par le feu de la poudre enflammée. Pour reſponſe faut noter , que reſponſe.
A
quand nous diſons, qu'encores qu'on peult empoigner la bale , toutesfois le feu
conſommeroit le venin , nous entendons cela non du feu de la poudre enflainınée ,
lors qu'on deſſerre la harquebuſe :mais du feu , par lequel lon incorpore le plomb
fondu auec ledic poiſon :lequel agiſſant immediatement ſur le venin non encores
enucloppé ny embrouillé d'aucun corps eſtrange , & agiſſant auec temps & loiſir,
non en vn inſtant & tour à coup , peuc , ſinon conſommer , à tout le moins rabatre Grande ana
grandement les forces du venin . Ceux quine ſe voudront contenter de ces raiſons, notation .

qu'ils liſentMatheole ſur la Preface du liure ſixieſme de Dioſcoride. Il y a, dit - il ,


Ľ Autheur
des Modernes fi fols & ignorans, qu'ils ont fait iecter dedans l'or ou l'argent fondu ,
deſquelson vouloir faire des vales , de la theriaque , du mithridat , & d'autres anci . Te defend tát
A qu'il peut,co
doces , afin que ces metaux ayant acquis à la fonte les vertus deſdits antidotes puiſ en
ſent reſiſter aux venins . Mais compien ceſte obinion eſt ſocce & ridicule , ceux -mel uieux oen
mes le peuuentiuger qui n'ont que mediocre cognoiſſance des choſes naturelles , & nemis de fon
principalement desmetaux ,tancſen fautqu'elle ait beſoin de plus euidente refu- liure.
cacion. Voila les raiſons, voila l’authorité , qui me reciennent en ma premiere opi
B nion des playes faires par harquebuſes , non coniointesauec venenoſité.

Les differences desplayes faites par


fleches, & de celles qui fontfaites par harquebuſes.

CH AP. XVII .

ES playes qui ſont faites par fleches, trai &ts d'arbaleſte , ou au- Les playes de
6 tres baſtons ſemblables , different en deux choſes de celles qui traitſont fou
ſont faites par harquebuſes, & autres baſtons à feu : car aucunes- uent ſans cõa
foiselles ſont trouuées ſans contuſion , ce que iamais n'aduiene tufon , o
auxplayes faites par baſtons à feu: ſouuent aulli ſont veneneuſes. font ſoument
veneneufes.
Er ſelon ces deux differences faut diuerſifier la curation : puis
conſiderer les differences des fleches & des dards , pource qu'el

les ſeruent beaucoup à la cognoiſſance & curacion deſdites playes .


C

De la difference des fleches & dards.

CHAP . XVIII.

ES Acches & dards different en matiere ,en forme ou figure , en


magnitude , en nombre , en maniere & faculté ou vertu . La dif. Differences
des fleches
ference en matiere eſt que quelques - vnes ſont de bois, & les au odards,
tres de cannes ou roſeaux : les vnes ſont en leur extreinicé gar . auires inftrum
nies de fer , de plomb , d'eſtain , d’airain , de corne, de verre , ou mens .
d'os ; les autres non . La difference de la forme eſt telle , que les
vnes ſont rondes , les autres angulaires , les autres barbelées en

forme d'épy:les ynesont la pointe tirant en arriere les autres en bas : & aucunes ont
pointe vers lesdeux parties,fçauoir en auant & arriere :aucunes decoſté & d'autre :
D aucunes ſont larges deuant & trenchantes en forme de cizeau . Quant à la grandeur,
aucunes ſont longues de trois doigts, & les autres moyennes. Le nombre les fait dif
ferentes en ce , que les vnes ſont ſimples, n'ayans qu'vne ſeule pointe :lesautres ſont
compoſées en ayantdeux , ou pluſieurs. Aulien icelles la maniere eſt diuerſe. Car
les vnes ont le fér iniere dedans le fuft : les autres ont le fuft inſeré dedans le fer : les Diff
erence
vnes ont le fer attaché & cloué : les autres non , & tiennent ſi peu , qu'en les tirant, le des dardsen
fer demeure , qui font les playes beaucoup plusdangereuſes.La faculté les fait diffe- maniere.
ter,en ce qu'aucunes ſont commea eſté dit) enuenimées,les autres non . Telles ſont
les differences ſpeciales & propres des fleches & dards , ſelon leſquelles les diſpo
fitions qu'elles delaiſſene, diuerlifient la curation . Tu peux voir en ceſte figure les
differences ſurdites.

Pp iiij
446 L'onzieſme Liure ,
A

LIMAVARATMARE

int
TITATION

Outfit

WAKUUTA
JAWACUS

UTILITI
RU

in

‫שעועי‬
B

VA 1

3
De la difference des partiesbleßées. CHAP. XIX .

Es differences expoſées, il nous faut conſequemment parler de la di


La difference uerſité des partiesaffectées, qui ſont ou charneuſes, ou oſſeuſes :quel.
des plagesſe ques- vnes pres les iointures, les autres dedans icelles : aucunes auec
lon leurs
lieux. grand flux de ſang & fra &ture d'os , les autres non : aucunesſont ésmem
Prognostic bres principaux,ou ſeruans à iceux : aucunes profondes , les autresſuperficielles.
neceſſaire Et ſi en aucunes de telles playes apparoiſſent ſignesmanifeſtesde mort , il en faudra
poureuiter faire bon prognoſtic deuant qu'y toucher , afin de ne donner occaſion aux igno
l'infamie. rans de médire de noſtre art. Or laiſſer le traict au corps , cauſeroit la mort ineuica-. O
ble , & feroic eſtimer le Chirurgien inhumain & impitoyable, & l'arrachant le ma
lade parauenture en reſchapera:car comme auons dit, il vaut mieux center vn re
mede douteux , que laiſſer le malade fans ſecours.
De l'extraction des fleches. С НАР. X X.

Ovchant l'extraction des fleches , il faut euicer d'inciſer , dilacerer


& rompreles veines , arceres , nerfs, & tendons, fil eſt poſſible: car ce
ſeroit chofeignominieuſe, & contre l'art,lion offenſoic nature plus que
Deuxmoyens la fleche. La manicre de les tirer eſt double. L'vne ſe fait par extra &tion,
d'extraire & l'autre par pouſſer outre . Pourtant dés le commencement & premier appareil,
lesfieshes. il conuient oſter les choſes eſtranges ( ſi aucunes y en a ) comme les fers deſdi
tes fleches , leur fuft , ou bois , & autres choſes ſemblables , ainſi qu'il a eſté dit
des playes faites par harquebuſes, & parlesmeſmes moyens. Et pour mieux les ex-- D,
traire, conviendrafituer le patienten la figure qu'ileſtoit lors qu'il aura eſté bleſſé,
pour les raiſons ſuſdites,filclt poſible, & vſer d'inſtrumens propresàcet effect,prin
cipalement comme eſt ceſtuy, quia vne cannule fenduë ,& denteléepardehors,en
laquelle l'inſere vne verge ſemblable à celle du tire- fonds de l'harquebuſe,quia eſté
Paul. Ægin . figuré cy -deuant, horſmis qu'elle n'eſt faite à viz en ſon extremité. Aufli eſt-
elle
Hippocr. plus groſſe, afin de dilater la cannule pour remplir la cauité du fer, & l'extraire hors,
tantdesparties charneuſes qu'oſſeuſes, pourueu qu'il ne ſoic demeuré du bois de
la feche en la cauité du fer. Cet inſtrument auſſi y eſtpropre , qui ſe dilate en com
primant les deux extremitez de derriere , dentelé aulli par le dehors, ainſi que cu
Les ſignes peuxvoir en ceſte figure. Les ſignespour cognoiſtre où eſt le fer , ſont , que li lon
pour cognoi- touche la partie où il eſt, lon ſentira aſperité, & inegalité : auſſi la chairapparoiſtra
Atreoùeſt contuſe,liuide & noire,& le patient ſencira peſanteur & douleur continuelle en la
le fer. partie vulnerée.
Des Playes d’harquebuſes. 447
A
inſtrumens propres à tirer lesfers de fleches,dont lefuft eft dehors.
Ceſtuyf'ouure par vne viz quiſ'inſere
dans ſa cannule .

Ceſtuy ſe dilate en comprimant la


poignée .
mer
‫חוויתחילו‬

Tenailles à viz auec le bec de Corbin.

..11.11

do

VANTITAT

Oo
4
с

Inſtrument fermant & ouurant à viz , commode à tirer les fers des fleches , auec
vn bec de Corbin propre à tirer lesmailles , & autres petits corps eſtranges.
Autre petit crocher pour tirer les mailles & autres choſes eſtranges, qui ſe pour- Extraction
fontaccrocher:duquel aulli te pourras ſeruir à ce meſme effect aux bleſſeures des des mailles.
harquebuſes.

1.
Queſi parcas fortuit le ferbarbelé, ſoir de feche,pique, dard ,oulance, demeure
D cn quelque partie du corps , comme ( pourexemple )en la cuiſſeou iambe , encores Extraction
. auec portion de bois qui fuſt rompu par éclats : alors faudra que le Chirurgien lé,du fer barber
coupe le bois au deſſus des éclats a, uec tenailles inciſiues : puis qu'il cire ledit fer
aucсtenailles dentelées , comme cu peux cognoiſtre par ceſte figure.
448 L'onzieſme Liure , 2

Hippocrates au cinquieſme des Epidemies , ditauoir ofté le fer d'une fagette ,lix
l'aine.
ans apres , eſtant pres .

Comme il fautprocederpour tirer lesfleches compues. 11

CHAP. XXI.
O
Ars file fer eſt d'auenture rompu de telle ſorce , qu'on ne le puiſſe pren
dreauec les ſuſdites tenailles , ſoit tiré , ſi poſſible eſt, auec le bec de
Dangereufo
Gruë ou de Corbin ou, autresinſtrumens propres qui ont eſtédépeints
playe.
M cy-deuant. Et ſi le fuſt cſt rompu ſi pres du fer, qu'on nepuiſſe auoir
priſe auditfer, ny au fuſt auec le bec de Gruë , alors faudra l'extraire
auec le Tire- fond de l'harquebuſe. Car ſ'il ſ'inſere dedans le plomb , à plusforte
raiſon il entrera bien dedans le bois . Pareillement ſi le fer eſtoit barbelé , ainſi que
fouuent eſt le fer des fleches Angloiſes, lors ſ'il eſt poſſible, le conuient pouſſer outro
la partie auec vninſtrument propre : car parce moyen l'on euitera plus grand dan
ger, pource qu'en le tirant , les barbillons pourroient rompre ,tant les nerfs que les
veines , arteres & autres parties . Ce que foigneuſement on doiteuiter. Pource eſt- il
Quelquesfois
on doit faire meilleur de faire vne contr'ouuercure de l'autre part àl'endroit du fer , & le mettre
onecontr'on- hors en pouſſant outre , ſuppoſé qu'il y euſt pecite épeſſeur à inciſer : car par ce
Herture. moyen & en moindre danger la playe quiaura double iſſuë, l'vne par deuant, & l'au . D
tre par derriere , ſegüarira pluſtoſt ,à raiſon qu'on y peut appliquer remedes d'une
part & d'autre : & auſſi qu'elle ſe mondifiera mieux. Au contraire ſi le fer ayanebar
billons, eſtoit à l'endroit d'vn os , ou inſeré dedans , ce que ſouuentaduient, au pro
fond desmuſcles dela cuiffe, des bras ,des iambes , ou d'autres parcies , eſquelles y
auroit grande diſtance, lors nele conuient pouſſer, mais pluſtoſt dilacer la playe ,en
euitant lesnerfs & grands vaiſſeaux , ainſi que fait le bon & expert Chirurgienana.
tomique. Auli faur deuëment appliquer vn Dilatatoire caue en la partie interne,
& faire de ſorte que lon puiſſe prendre les deuxailles du fer,puis auec le bec de Gruë
le tenir ferme, & tirer les trois enſemble ,comme ceſtuy ce monſtre.
Des Playesd'harquebuſes
. 449

A
Dilatatoire , qui a certaine cauité an dedans anec un bec de Gruë , tenant un ferbarbelé.

Ce qu'il faut
faire quand la fleche eſt inferée en l'os .

CHAP. XXII .

R G le traict ou la feche eſt inſeré dedans l’os , de façon qu'il ne puiſſe


B
eſtre oſté en pouſſant outre , mais bien en le tirant par le lieu où il eſt
entré , il le conuient ébranler & mouuoir fagement , fi d'auenture il
tient fort : ſe donnant bien garde , qu'il ne fe rompe , & que portion
d'iceluy ne demeure dedans l'os, ce que pourras faire par l'inſtrument
nommé Bec de Corbin , ou autres propresa ce , cy - deuant figurez. Quant & -quant
ne faudras à exprimer le ſang , le laiſſant aſſez couler, prenant indication de la vertu, ilfaut laisſer
couler du
à fin que la partie ſoir deſchargéc, & moins moleſtée d'inflammation ,de pourriture,
&d'autres mauuaisaccidens. L'extraction faite,& le premier
appareil
, fa la playe ett lang.
ſimple , cu la traicceras comme ſimple : mais fily a complication, tu la cureras ſeloni
que lesdiſpoſitions ſeront compliquées. Pour appaiſer la douleur , tu pourras appli
quer auec grand profit, olcum catellorum de noſtre deſcription cy - deuant . Et pour
furuenir aux autres accidens, auras recours aux playes en general , & à celles deshar
quebuſades.

с CHAP . XXIII.
Des bleffenres enuenimées.

Este maintenant entendre& conſiderer, que ces playes ſont quel- signesdes
quesfois enuenimées (commenousauons dit ) & que cela provient de plages enues
nimées.
la cauſe primitiue des fleches ainſi preparées par l'ennemy. Ce que l'on
peut cognoiſtre !, cant par le recic du nauré , diſant ſentir grande &
R poignante douleur , commefil euſt eſté mords de mouſches à miel
(principalement ésvenins chauds, deſquels on vſe plus ſouuent en tel cas) que par la
chair du vulneré , qui deuient palle & aucunement liuide , aucc quelque apparence
de mortification . A quoy pluſieurs autres griefs & plus grands accidens ſuruiennent,
qui n'ont couſtume d'aduenir aux autres playes , où n'y apoint de venenoſité. Para
quoy du commencement (apres auoir tiré les choſes eſtranges , fi aucunes y en a )
faut fairedes ſcarifications aſſez profondes autour de la playe , y appliquant ventou
ſes aucc grande flambe , afin de faire attraction & vacuation delamatiere virulente .
D Pareillement ladice attra& ion ſe fera en faiſant ſuccer la playe par quelque homme
quiciendra cependant un peu d'huile en la bouche , & qui n'aye aucunc vlcere en
icelle , depeur que le venin ſuccé & attiré ne ſ'y atrache. Se fera auſſi attraction par
application d'onguens , cataplaſınes,emplaftres,veſicatoires,cauteres, epithemes , &
autres choſes qui ſerontdeclarées cy - apres , parlant des morſures & piqueures de
beſtes veneneuſes ,

Fin de l’onzieſme Liure des Playes des harquebujes f


,leches o dards.
450

Table des Chapitres du douzieſme Liure des

contufions, combuſtions,& gangrenes.

E la difference des Contuſions de meurtriſſeures. Chapitre j .


Delacuration vniuerfelle des grandes enormes Contufions. Chap.j.
De la maniere de iraiter les Contufions auec playe . Chap.ij.
Des Contuſions fams playes. Chap. iiy.
Des moyens d'obuier aux menaces des gangrenes qui peuvent fuiure les
Contuſions.
Chap. v.
Merueilleux accidens qui viennent aux Consufions faites ſur lescoſtes.
Chapitre vi.
Diſcou de l'Auiheur, touchant l'vſage de la Mumie, contenant dix Chapitres.
rs
Des Combuſtions, brulures, & differences d'icelles.
Chap xuỹ.
Des medicamens chauds & attractifs, qui oſtent ladouleur & inflammation . Chap. xvij.
Qu'une profonde combuſtion n'ejt tani douloureuſe qu'une ſuperficielle . Chap.xix.
Des gangrenes & mortifications,
Chap.xx.
Des cauſes generales de gangrene.
Chap. xxi.
Des cauſes particulieres degangrene.
Chap.xxij.
Des cauſes antecedentes de gangrene.
Chap.xxij.
Desfignes de gangrene. (:: :) Chap.xxiit.
Duprognoſtic des
gangrenes.
Chap.xxv.
• Dela cure generale degangrene.
Chap.xxvj.
Dela cure particuliere de gangrene.
chap.xxvi.
Des ſignesdes mortifications parfaites.
Chap.xxong.
Dulieu où il fautcommencer l'amputation du membre.
Chap.xxix.
Du moyen deprocederà la fe tion du membre. Chap.xxx.
Des moyens
pour arreſter le flux deſang quandle membre eſt coupé.
Chap.xxxi.
Comment il fam proceder au traittement du membre ampuié, le flux de sang arrefté
Chap. xxxi .
Ce qu'il
faut faire s'il ſuruenoit flux deſang , à cauſe d'un deſdits vaiſeaux déliczi
Chap. xxxij .
Des medicamens emplaſtiques.
Chap.xxxiij.
Digreſion del' suiheur fort neceſſaire à bien conſiderertouchant les canteres actuels, deſquels
ora vſé iuſques icy apres l'amputation.
Chap.xxxv.
La maniere de pourſuiure la curation du membre ampuré.
Chap. xxxvj.
Hiſtoire memorable d'une mortification aduenuë à un ſoldat 5 auquel le brasfui coupéàla
jointure du cowde.
Chap.xxxvj.

Le
451
А

LE DOVZIESME LIVRE
TRAITTANT DES CONTVSIONS ,
B
COMBVSTIONS ET GANGRENES .

PAR AMBROISE PARE ' , DE LA VAL ;


1
CONSEILLER , ET PREMIER CHIRVRGIEN
du Roy .
Des differences des cortufions de meurrriſſeures.
the
CHAPITRE I.
Y.
Ah

AINTENANT nous traiterons des contuſions & meur


triſſeures, commençans par la definition de contuſion :
C qui eſt ſelon Galien ( liure De conftitutione artis) ſolution de
continuité en chair ,ou os , faite par baſton ou terrement
Oj!
gros & peſant, ou par cheure de haut. Le ſymptome qui
enſuit telle maladie ,eft meurtriſeure,dite d'Hippocrates
en la ſečtion ſeconde du liure des Fractures, Pelioſis, ou
Melaſma, c'eſt à dire, noirceur ou liueur.Ce qui ſe fait en Differences
diuerſes manicres , ſelon leſang qui tantoſt s'eſpand aux des contuſios,
品 parties ſolides , tantoſt aux cauitez profondes du corps ,
& quelquesfois ſeulement aux parties exterieures . Orle
ſang s'eſpand dedans le corps, quand,pour exemple,quel
qu'vn chet du haut en bas d'vne breche: ou quand il a eſte preſſé ſous quelque grand
& peſant fardeau, comme il aduient és mines,auſquellesbien ſouuent grande quan
tité de terre ou de pierres tombent ſur les ſoldats & mineux : ou par vne extreme
tenſion, comme eit celledela geſne: ou par trop deſordonnément crier , au moyen
duquel excés quelque vaiſſeau des poulmons ſe peut rompre. Pareillement pour
vne harquebuladereceuëau trauers du corps , le lang peut ſortir des vaiſſeaux :vne
D partie duquel ſe jette par les ſelles & vrines, ainſi que i'ay veu aduenir à pluſieurs:
meſmemencà défund monſieur de Marrigues , quiau dernier ſiege de Hedin , vou- Hiſtoirede
lancvoirpar deſſus lerempart de la muraille, les ennemis qui la ſapoientau pied , monſieur de
furfrappé d'un coup d'harquebuſe au traversducorps: donttoftapres iettae le ſangMarrigues,
parla bouche, par le fiege, & la verge , quifur cauſedela mort. Dauantag le ſang defedin.
ſepeut eſpandre dans le corps ,pour entre frappé de coups orbes , comme fone ceux
debaſton ,de maſſe de pierre, & pour dire envn mot , de coutes choſes qui peuvent
contundre, meurtrir & faire ſortir le ſang hors des veines & arceres : qui à cauſe de
celonepreſſées, exprimées , rompuës, & dilacerées : meſmes le plus fouuent les
parties exterieures en ſont auſſi grandement contuſes & bleſſées auec playe, & qucl
!
quesfois ſans playe, de façon que le cuir demeure cout entier,mais leſang eltelpan
du parles muſcles,&entre cuir & chair ſeulement: laquelle diſpoſition a eſténom
méc des anciens Ecchymoſis: & particulierement d'Hippocrates, Naufioſis,2. fe &t. du Ecchymoſis.

452 Douzieſme liure des Contuſions,

liu . des Fra & . pour autant que les veines ſemblent vouloir comme vomir . Donc A
contuſion ſe faic, quand quelque groſſe choſe lourde & peſante tombe ſur vne par
tie , qui rompe la chair , & où le ſang prend ſon cours , qui ſe nomme Effuſion, & la
chair demeure enciere : maisil eſt certain que les peciçes veines ſontrompuës,quand
ce mal aduient . La ruprion ſe faic, quand les fibres des muſcles ſontforteſtenduës , &
ſouuentquelques-vacs ſerompent, & de -là s'enſuitinflammation & apofteme . Sui
vant la difference de ces conculions, il nous faudra diuerfifier la curation d'icelles ,
ainſi que preſencement nous declarcrons .

De la curation uniuerfelle desgrandes& enormes contuſions. CH A P. II .

E ſang qui eſt découlé dedans le corps , ſe doit éuacuer ſenſible


mentou inſenſiblement. L'euacuation ſenſible ſe fera, canc par
ſaignéės, ventouſes, corners, aucc ſcarifications, & langſuës, que
parmedecinespropres & dediées à ceile choſe , comme font les
B
ſolutifs, moyennant que le malade n’aye fiéure forte & continuë .
On l'éuacuera inſenſiblement par pocions reſolutiues prouo
quantes la fueur, ou par bains , & par la maniere de diere tenuif
Sur la fen .62.
de la 3. fect. fimede laſaignée. Nous avons cexceexpres dans Galien, où ildit : Si quelqu'vneſt
du liu Dear . tombé de hauc , encores qu'il n'euſt aſſez de ſang lieſt-ce qu'illuy en faut tirer , pour
ricul. obuier qu'il ne ſe coagule & pourriſſe au dedans , eſtanc hors de ſes propres vail

ſeaux. Parquoy ne faut que le Chirurgien obmetre à tirer du ſang, ſelon la grande
Indications vehemence du mal , & la plenicude& force du malade . Ce qu'ayant fait, lay doit
principales
pour tirer du donner à boire telle pocion.2.rad.gent.ziij.bul. in oxycrac.in colat. diſſ.chcielcat.
3 j . fiat potio . Tels remedes reſolucnc, diſſoluent, & ierccnc hors par le cracher
fang .
le ſang caillé, s'il eſt és poulmons . Puis l'enuclopper en vne peau de mouton recen
tement eſcorché , ſur laquelle ſera eſpandu de la poudre de myrte , de naſturce,

& du ſel ſubtilement pulueriſé. On le poſera puis apres en ſon liet , où cftant bica
Liniment. couuert , fuera couc à ſon aiſe. Le lendemain faudra oſter la peau , & l'oindre du li
niment qui s'enſuit , lequel appaiſe la douleur & reſour le ſang mcurrry 2. vnguen a
tide alchæa z vj. oleilumbric. camo anechian . Zij.cereb . Venet.z.iij. farinæ tænu
Potion ſudo- greci.roſar.rubr.pulueriſ.pulu.myrt.añ.zj.fiaclicus ad vſum di&tuin . Pareillement
rifique. on luydonnera à boire de la potion ſublcquente, laquelle provoque la ſueur, &

diffoule le ſang coagulé dedans le corps . 2.ligni gaiaci z viij.rad.cnulæ campanæ ,


conſolidæmaioris,ireos Florentiæ , polypodij qucrciniañ.3 B.lem.corian .aniſian. 3
B.glycyrrhizažij.repetæ ,centaureæ , caryoph.carduibened.verbenæ añń B. aquz
fontanæ tb xij. omnia concaſſata infundantur per fpatium duodecim horarum , quæ
omnia lento igne ſecundum arcem coquátur ad conſumptionem medietatis .Quand
le malade aura pris le matin demy ſeptier de ceſte potion vn peu tiede , ſe laiſſera
fuer vne heure dedans leliet plusou moins par chacune fois , & continuera fix ou
Remedespour feptiours , ſelon qu'ilen ſera beſoin. Si c'eſtoit quelque pauure ſoldat quinepeuſt

les pauvres . auoir telles commodirez, ille conuiendra mettre dans du fien , l'enveloppant pre
micrement en vn drap , & luy meccant va peu de foing , ou de paille blanche , auant
que l'on ſeuelirdans ledit fien iuſqu'à la gorge, & l'y cedir canr qu'on verra qu'il aura
Außiloxy.allez ſué: ce que i'ay fait pluſieurs fois. On donnera parcillement aux malades quel
Crat donné à ques ſyrops à boire , qui ſont propres pour empeſcher la coagulation & pourriture D
boire eſt une du ſang comme
, ſyrops aceteux ,delimons , ou de aceroſitate cicri,la quantité d'une
choſe ſingu- once diffoulcen cau deſcabieuſe , ou dechardon beniſt , pour chacune fois. Aulli
liere , comme
nous dirons doit - on donner promptement ce potus , qui eſt propre pour garder que le ſang neſe
coagule , & qui ſemblablement conforceles parties incernes.2.rheu. ele &ti paluc
Cy -represe
ril.zj.aquæ rubiæ maioris & plant.añ.zj.theriacæ z B.ſyrupi de roſis ficcis z 3.fiae po
cus . Lequel ſera donné toucaullicolt que le malade fera combé , & reiteré par quatre
ou cinqmatins. Ou en ſon lieu on luy fera boire vne drachme de nature de baleino
diſloulie auec eau de bugloſſe, ou des eaux cy - deffus eſcrites , auec vne once oude
mye de ſyrop de capill.Ven .Apres l'uſage de ladite potion , il conviendra faire pren
dre au malade par l'eſpacede neufiours au matin , deux heures ou trois devant le paſt
Poudre.
de la poudre quis'enſuit , s'ileft ncceſſaire.2.rub.torref.rad.rub.maioris , centaurij,
gétianæ ,ariſtoloch.rotunduan.zB. De laquelle en ſera baillé pour chacune fois vnc
Combuſtions & Gangrenes
. 753

А drach me auec ſyrop aceceux, & de l'eau de chardon beniſt.Dauantage l'eau de noix
verres , tirée en l'alambic & bcüe , a grande vertu de diſſoudre le ſang amaffé & coa
gulé . On peut vſer pareillement des bains faicsauec decoction deracinc d’ireos, cnu
Ix campanæ ,oxalidis,fæniculi,althcæ , oſmondæ regalis , conſolidæ maioris , feminis
fænugræci,foliorum ſaluiæ ,maioranæ , florum camomillæ ,melil. & de leurs ſembla
bles . Auli les ſemences trouuées ſous le foing ont grande efficace à cettemeſmefin .
Lebain en chaleur cempecée aceſte vtilité , qu'illalche & rareficlecuir , fond & diſ- Veilité des
bains.
foulc leſang grommelé, inciſe les humeurs viſqueuſes, addouciſtles agres, & les tire
du profond du corpsiuſqu'à la ſuperficie du cuir , de façon qu'vne partie d'eux eſt
vuidée par ſueur vniuerſelle, vne autre par cracher& moucher, ſi d'auenture l'affe
+
dion eli aux parties ſuperieures : par le liege & vrine , ſi elle eſt aux infericures. Les
bains avſli ſone profitables aux inflammatiós des poulmós , & aux pleureciques ſelon
Hippocrates, au 3.De victu acutorum , & 3. liure Demorbis : mais c'eſt lors que la fiéure
eft mitigée &addoucie : car lors ils appaiſent la douleur, & aydent à ſuppurer & ietter
s par les crachats les ſuperfluitez contenuës auſdites parties. Ils peuuentpareillement
ſurvenir à pluſieurs autres diſpoſicions, moyennát qu'ils ſoient faits deücment apres
les choſes vniuerſelles. Cars'ils eſtoient adininiſtrez deuant la ſaignee & purgation ,
ils nuiroient grandemenc,à raiſon qu'ils pourroient cauſer nouuelle Auxion aux par
ties malades. Parquoy ic te conſeille d’vſer couſiours du conſeil du doce & expero
Medecin ,s'il c'eſt poſſible.

De la maniere de traitter les contufions auec playe.

CHAPITRE III.

Ncoute grande conculion fauc premierement ſaigner,ou purger, ou faire Remede fors
cous les deux enſemble, capt pour l'éuacuacion , que pour la reuullion. bon concreles
Ce qui eſt prouvé par Hipp.en la 2.ſection Defracturis ,où en la concuſion contufions.
du talon , il donne purgation vomitoire dés le meſmciour, ou le lende
main pour le plus card .Puis ſi la contuſion eſt auec playe , il faut au com
mencementempeſcher la defluxion aueconguenc de bolo, blancs d'aufs, de l'huile
roſat,de myrte,dela poudre de roſes rouges,d'alum ,& maſtic. Ecau fecond appareil
on vſera d'vn digeſtif de iaune d'auf, & huile violar , auec vn peu de terebeochinc.
On pourra aulli mettre ſur les parties voiſines, pour aydec à ſuppurer, le cataplaſme
quis'enſuit.22.rad.alth .& lilior.añ . z . iiij. folio .malu. viola . ſenecionis añ . ñ.ß.co
quant.coinpletè in aqua communi, & paſſentur per ſetaceum ,addendo butyri recés.
& olei viol.ań z iij . farinæ volatilis quantum fufficit, fiat cataplaf.ad formam pulcis
facis liquidæ : ou autres ſemblables, en l'applicació deſquels auras égard, pource quo
s'ils ſonc indeüement appliquez , rendent les playes phlegmoneuſes, fordides & pu
trides.Donc apres la ſuppuration faite,la playe ſera mundifiée, & la chair regenerée ,
puisconduite à cicatrice . Toutesfois ſi la chair contuſe eſt grandemenc dilacerée, &
deſticuée de la chaleur naturelle, il en conuiendra faire amputation. Mais s'il y a en
cores cſperance qu'elle ſe puiſſe agglutiner ſans couper , elle ſera couſue comme la comment il
choſele requiere: & ne ſeront les poin & s d'aiguille cant
ſerrez, comme ſi c'eſtoit vne faut coudre
playe ſimple ſansconcufion : pource que celles playes s'enflamment & enflent: qui les playes
D ſeroit cauſe de dilacerer tout lecuir auec la chair , & rompre les poin& s . contufes.

Des contuſions ſansplaye. CHAPITRE IIII .

Rs'il n'y a playe qui apparoiſſe , & que lecuir demeure entier, les parties
de deſſous demcurans contuſes, & qu'il y aic effuſion deſang ſous le cuir,
celle diſpoſition ( comme nous auons dit) eſt nommée des anciens Ecchy- Que c'eſt
mofis.Pour la curacion de laquelle fauc tenir bon regime,iuſques à ce que qu'Ecchymo
les accidens ſoient paſſez. Au comencement ſera tiré du ſang de la partie fis,
oppoſite, s'il en eſt beſoin,cant pour l'éuacuation ,que pour la rcuulſion .Pareillemét
1 ſeront faices des ſcarifications égales ſur la contuſion , & puis ſeront appliquées des
ventouſesou corners , tant pour vuider le ſang qui fait cumcur & tenſion à la partie,
guc pour donner inflammation,de peur qu'il ne ſe face gangrenc , & autres mauuais
Qq ij
454 Douzieſme liure des Contuſions ,

accidens.Auſli fauc lafcher le ventre , commeon verra eſtreneceſſaire. Et pour les ro- A
piques & particuliers remedes , au commencement faut vſer de remedes forts & a
ſtringens,principalemenc vo peu au deſſus du lieu ſigillé. Hipp.commande que l'on
commence à bander ſur la partie concuſe , à fin de reſerrer les veines & arteres , pour
roborer la partie, & empeſcher la defluxion ,& chaffer le lang hors de la partie bleſſée;
& appliquer vnmedicament ,comme peut eſtre ceſtuy-cy que i'ay en vlage ordinai
rement. 2.album.ouor.num.tria,oleimyrti,& rof.añ.zj.boliarm.ſang.drac.añ.3B.
nuc.cupreſli,gallarum ,pul.alum.vſtian.zij.incorporentur omnia addendo acetipa.
rum , & fiatmedicam . Puisapres on vſera de fomentations, cataplaſmes & emplaftres
reſolucifs. Ces deux deſcriptions d'emplaſtre ont eſté de long temps ordonnées ,
pour lesRoys , Princes , & autres grands Seigneurs ſuiuans laCour,leſquellesont elté
confirmées par les premiers Medecins de Roy en Roy , en ſorte que quand quelqu'vn

clt contus en noſtre Cour , on a recoursà l’Apochicaire du Roy , à demander lesem


plaſtres de la concuſion, ordonnez pour le Roy .
Ad nouas contufiones.
B
2.boliarm . zij . terræ ſigillatæ 3j. B.roſar.rubr.myrtill.añ.gvj. nucis cupreſli zij .
omnium ſandalorum an.zj.nucismoſcatæ 33.maft.ſtyracis calam.añ.3j . B.ceræ no
U2
a Zvj . picis naualisz iij. tereb . quant , ſuff. fiat emplaſtrum .
Ad contufiones antiquas.
2.ſtyracis calamitæ ,labdani,benioin ,añ.3 vj . maſt. iridis Flor.baccarum lauri , ci
namomi,garyoph.calamiarom.añ.zi.B.ligni aloës, flor.cham.lauendulæ ,nucismola
. ceræ novæ žvj.relinæ 3ij.cereb . & olei rof.quantum fufficit,
carxañ . zB.moſchizj
fiatemplaftrum .

Des moyens d'obuier aux menaces desgangrenes quipeuvent


fuyure des contufians.

CHAP. V.

Es grandes contuſions ſont dangereuſes: căr par icelles ſuruien


Tówes gran
nent aucunesfois gangrenes & mortificacions: ce qu'Hipp.decla .
des contuſios
readuenir quand la partic eſt dure & livide,au ſecond Defracturus.
font perilles
fes. Or quand la partie eſt fort noire & liuide,iuſques à ſembler qu'el
le ſoitmorte, & la chaleur preſque elteinte , pour la grande con
D cretion du ſang defluéen icelle ,quiempeſche que l'eſprit vitalne
puiſſe paruenir à la partie pour l'entretenir en con eſtre, & meſme
eftcine la chaleur naturelle de ladice partie,on doit , pour vuider & delcharger la par
tie , appliquer ventouſes ou corners , ayant premierement ſcarifié la partie auec vn ra
ſoir , lancerres, ou flammetces,ou bien de l'inſtrumentappelléſcarificateur, que cu
voisicy figuré,dedans lequel ſont inſerées dixhuic roües trenchantescomme vnra
ſoir, marquées FFF, qu’on bande auec yn reſſort marqué C , & ſont deſbandées par yn
autre marqué D , duquel lors que voudras faire pluſieurs ſcarifications pour vacuer
le ſang eſpandu ſous le cuir , tu t'en pourras aider plus promptement & à moindre
douleur, à raiſon que dixhuid inciſions ſont auſi coſt faites qu'vne ſeule.

2
Combuſtions & Gangrenes . 455

Inſtrument appellé Scarificateur.

15 .

orde
ci
2007 2
opi.

B
FOCO
( 417

lauri a Monſtre le couuercle .


b La boiſte.

Puis on doit fomenter ladite partie de forc vinaigre,auquelon aura fait bouillir ra Remede pour
dices raphani ou de ſerpencaria maior , Arom ou ſigillum Salomonis, auripigmen- dißiper le săg
tum , & autres ſemblables : car celles choſes acres eſchauffent fort , diſcutent , reſol- caillé cef
uent , & attirent du profond à la ſuperficie le ſang meurtry : deſquels neantmoins tu pádu au pro.
vſeras par diſcretion, de peur d'attirer non ſeulement le ſang, qui eſt hors des veines, fond de la
chair.
mais auſſi celuy qui eſt contenu en icelles . Pareillement n'en vſeras qu'alors que la
fluxion ſera du toutarreſtée.Aux petites meurcriſſeures, que nous cognoiſſons quád
с
la partie liuide eſt molle, ſelon Galien , ſur le 2. De fracturis , on appliquera ſculement
dela cire vierge fonduë auec de la poudre de cumin , & du clou degirofle, & vn peu
de racinc de ſigillum Mariæ , quien tel cas a grande puiſſance de degafter, & de prom .
ptement reſoudre toutes ecchymoſes & meurdriſſeures. Auſſi on peut appliquer de
l'abſinthe yn peu piſtée & chauffée ſur vne pelle de fer chaude , & l'arrouler d'un peu
do vin blanc , ou la faire fricaſſer dedans vne poëlle auec du vin , de l'huile de camo
mille, vn peu de ſon de froment , & de poudre de clou de girofle & muguecte , y ad
2015 jouſtanc ſurla fin vn peu d'eau de vie : puis la mettre entre deux linges deliez ,& l'ap

19 . pliquer aſſez chaude ſurla partie . Pareillement l'emplaſtre quis'enſuit ,eſt fortreſo Emplaſtre
120 lutif du ſang meurtry .2.picis nigræzij.gummi clemi 3 ). ſtyracis liquidæ , & tereb. fori reſolusif.
comm.an.žß.pulueris ſulphuris viui žj.liquefiant ſimul,fiatemplalt.excendatur ſus
per alucam .

Merueilleux accidens qui viennent aux contuſions faitesfurlescoſtes.

CHAPITRE VI . i
D

Velquesfois par vne grande contuſion la chairconcuſe deuient mucqueu- Hipp .au liu
ſe & bourſouflée, comme ſi on l'auoit enflée de vent , la peau demeurant des artic.ſeft .
entiere : ce qui ſe voit principalement ſur les coſtes, & lors qu'on compri- 3.fent.58.com
me deſſus auec la main ,on ſent l'air quiſe depart avec vn petit fiflement, & Gs.
y demeure l'impreſſion desdoigts, comme aux Oedemes.Que ſionn'y donne bonne choſe mera
ordre , à raiſon quela chair n'eſt attachéecontre leſdites coſtes, il s'y amaſſe du pus , ueilleuſe qui
quivientà occuper l'eſpace puide, & le faic alteration des os , comme l'on voicaduc- ſuruiene ,aux
nir le plus ſouuent. contufions,

Pour la curacion deceſte tumeur mucqueuſe, il faut comprimer & lier la partie le
plus fort que lepaciêtpourra endurer:coutesfoisen luy laiſfant la reſpiration libre le
plus qu'il ſera poſible, ſi c'eſt au Thorax . Puis ſera appliqué ſur la partie vn empla
ſtre d'oxycroceum ,ou diachylon ireacum , mellé auec l'emplaître de meliloto , & fo
Qq iij
me s
456 Douzieſ liure des Contuſion ,

Cauſe de mencations reſoluciues. Or la cauſe de celle tumeur eſt vne picuite glaireuſe, qui ſe A
bourſoufie- fait par fauce de bonne conco & ion en la partie , & d'vn alimentà demy-cuit : aioli que
ment en la l'on voit ſouuencesfois la conionctiue de l'ail,par vne concufion s'enfler ſi forc ,qu'el
.
partie conin- le forchors la cauité de l'æil, à cauſe que la vercu concoctrice de la partie eſt debile ,
fe.
pour raiſon de l'intemperature immoderée, ou pour l'humeur quiy affluë, comme
I'on voit aux cumeurs cedematiques. Car de l'humeur aqueux & pituiteux , par le
moyen d'vne chaleur imbecille, s'exciteneaiſémét des flacuoſitez, qui mellées parmy
le reſte de l'humeur, font monſtrer & paroiſtre la tumeur plus grande & ondoyante ,
comme explique Galien , liure 6. de Sympt. cauſis.

Diſcours de la Mumie. CHAP . VII .

L ne ſe fauc donner merueille, ſi en ce trai &té des contuſions ie n'ay


fait aucune mention de la Mumie , pour en donner à boire ou à
manger , comme font la plus part des Medecins & Chirurgiens ,
parce qu'elle ne vaut rien , ce que ie prouueray par ce preſent dir. B
cours.LaMumie a pris ſon nom & origine des anciens Iuifs, Ara
bes,& Chaldées , & principalement des Egyptiens, meſmes long
temps auparauant Moyſe , & depuis eux les Grecs & Larins : tous

leſquels ont eu en ſi grand honneur, reuerence, & recommandation , les corps des
treſpaſſez, pour l'eſperance de la reſurrection , qu'ils ont forcrecherché les moyens,
non ſeulement de les enſeuelir , mais auſſi de les conſeruer à iamais , s'ils l'euflent peu
faire, par cercaines drogues precieuſes, & choſes odoriferantes: leſquels corps ainſi
Mumie eſ un embaumez ſe gardoient longuemententiers ſans ſe pourrir.Ec parleldits Arabes ago
mot Arabe. eſté appellez Mumie, qui vaut autant à dire , qu'vn corps mort , accouſtré de choſes o
Herodote. doriferantes & conſeruatrices de pourriture.Orpour le premier , Herodote tres-an
Diodore. cien Hiſtorien Grec, & apres luy Diodore Sicilien ,parlant de la fepulcure & condui
te des corps des creſpaſſez, & des pleurs & gemiſſemens qui ſe faiſoient ſuriceux par
les anciens Egyptiens , racontent que lors qu'il decedoit quelqu'vn des domeſtiques
d'vnemaiſon qui eſtoic de reſpeâ & apparence,comme vn grand Seigneur ou Dame, C
alors ſe tranſportoiệt cour d'un coſtécoutes les femmes de la famille & parentage au
lieu où le defunct eſtoic decedé,habillées toutes de dueil , pleurantes & lamentantes.
Puisayans laiſſé le corps morc en ſon lieu , s'en alloient par la ville comme vagabon
Les femmes des couransçà - & -là, eſtans ceintes & trouſſées par le milieu du corps , deplorantes
auoient les leurs vies & miſeres, auec leursmamelles& parties plus proches, coutes nuës & del
mammelles
couvertes . De l'autre coſté alloient les hommes ayantpareillement la poitrinetoute
deſcomuertes: deſcouuerte ,& ſe frappoient & battoienten deteſtation du defun &t.Cela eſtant fait,
ſebattoient. ils ſe tranſportoient par deuersceux quieſtoient deputez pour embaumer les corps
Salleurs ou morrs, qu'on appelloit Salleurs ou Embaumeurs , leſquels leur monſtroiét trois figu
embaumeurs. res de corps morts embaumez peintes en vn beau linceul, de diuerſe valeur & cſi
macion : l'vne comme la plusriche, exquiſe , & élabourée,vallantvn Talent,l'autre,
vn demy , & la tierce devil prix , & àbon marché,qui eſtoit pour le communpopulai
rc , qui leur donnoit ſelon leur puiſſance. Ayans marchandé l'une des trois effigies ou
figures pour les embaumer & enſeuelir, ils laiſſoient le corps mort entre leurs mains.
Eelors les embaumeurs ciroient tout auſſi colt, auec vn fer courbé , par les narines ,
toute la ſubſtance du cerueau , puis inciſoiêc aucc vne pierre aiguë & bien trenchan.
tele ventre , & en oſtoient les entrailles, & puis lauoient tout le corps de vin , auquel D
dc
auoient bouilly pluſieurs choſes aromatiques . Cela fait, rempliſoient le corps

myrrhe,aloës ,de cinamome,ſafran ,& autres choſes odoriferantes , & precieuſes :puis
apres le falloient & mercoienten vn ſaloir par l'eſpace de 70. jours.Lequel temps ex
piré , le retiroient pour faire ſeicher, & apres l'enueloppoienten yn beau drap pre
cieux , & de rechefl'oignoient de certaines gommes aflez communes. Apres toutes
Cholecamere ces choſes luy faiſoient faire vneeffigie ſur la tombe & fepulchre ,où ils vouloienc
pulchres e qu'il fult poſé pour la memoire eternelle, & lelaiſſoient- là pour dormir & repoſer,
epitaphes que iuſques ( diſoient- ils) au grand iour de la reſurrection. Les deux autres façons d'em
tö fait encor baumer le faiſoientd'autres drogues non ſi precieuſes, ny ſi cheres , & ſelon l'argene
aviourd'hwy. on eſtoit ſeruy.
Combuſtions & Gangrenes. 457
A
CH A P. VIII.

Trabo dit , que les Iuifs pour la conficure de leurs corps ſouloient Strabor
vſer de bitume , qui eſt vne poix liquide , qui ſe prend en la mer
Rouge , pres Sodome.Orbien à peines'eſt- il trouué nacion , tant
barbare fuſt-elle , qui n'ayent embaumé lescorps morts , non.S
meſmelesScythes , qui ſemblenc en barbarie auoir ſurpaſſé lete
fte des hommes . Cariceux ,comme dit Herodore , liure 4 de fon) ja manierè
Hiſtoire , n'enterrent point le corps deleurRoy , que premiere des Scythes
mentils ne l'ayent mis en cire , apres auoir curéle ventre , & nettoyé , puis remply de d'emóaumer
cypreconcaſſé, d'encens, degraine de perſil, & d'anis, & en apres recouſu. De ceſte les corps.
Her dore .
meſme chole les Ethiopiens ſe ſont monſtrez curieux, faiſansleurs fepulcures de ver Aurri ma
reen celte forte :C'eſt qu'apres qu'ils auoient vuidé & decharné iuſques aux os ,com niere des E
B mevncanatomie ſeiche, les corps deleurs amis defun &ts, ils les accouſtroient & lil: ihiopiens.
ſoient de plaſtre, ſur lequel ils iectoient apres vne peinture qui approchoic du vif, pource qu'il
autant qu'il leur eſtoit poſible. Et ce fait, ils l'enfermoient dansvne colomne de n'y auoit que
verre creux. Le corps ainſi enchaſſé apparoiſſoit au trauers le verre,ſans rendremau les os.
uaiſe odeur , & fans deſagreer aucunement. Les plus proches parens le gardoient
chez eux l'eſpace d'vn an , en luy faiſant offrandes & facrifices, & au bout de l'an le Herodore
I. tranſportoient hors la ville au lieu deſtiné, ainſi que nous faiſons aux cemetieres , liu.z.
comme eſcrit le melme Herodote.

7
CHAP . IX.

Ais le ſoing & curioſité eſt encore entrée plus auant dedans le coeur des La maniere
Egyptiens,que de nulleautre nation ,doncils ont mericé grande louan- d'embaumer
11
gc,s'eſtans monſtrez rancaffectionnezà la memoire de leurs parens,que les corps par
pour la conſeruation d'icelle ils eſtoient couftumiers d'embaumer les les Egypirés.
C
au
corps tous entiers d'iceux en vaiſſeaux de verre diaphane,& tranſparēt ,
& les mettoient en licu plus honorable de leurs maiſons pour en auoir touſiours la
memoiredeuantles yeux,& leurſeruir d'aiguillon pour les ſtimuler de les enſuyure;
& imiter leurs vertus,afin de ne degenerer & forligner de leur naturel & inclination.
Ec dauantage ſeruoient iceux corps ainſi embaumez, de ſouverainsgages , & affeu- Les Egyptifs
ſance deleur foy:ſi bien que s'il cltoit aduenu qu'aucun deſdits Egypties euſt affaire n'auoient
de quelque groſſe fomme d'argent,il ne failloit pointde la trouuer àemprunter chez point de plus
ſes voiſinsfurlegaige d'vn corps de ſes parens, le renans tous aſſcurczles crediteurs,gesprecieux gai.
que les
quemoyennant cel gaige,le debiteur manqueroit pluſtoſt de vie que de foy,tantils corps de leurs
auoiencà ceur de retirer cel gaige . Et lila forcune faiſoit ,& le malheur fult ſi grand , ayeuls.
qu'aucun s'oublialt de tant en les neceſſitez, que de ne vouloir ou ſçauoir trouuer
‫ܙ‬
moyen deretirer ſon gaige, il comboitenteldeshonneur& infamie, qu'il n'euſt pas
eftébonà donner àmanger aux chiens, & ne ſe fuſt oſé monſtrer en public. Caron
$
luyfaiſoitla huée ,comme l'on fait à vn loup,ou un chien enragé , & de liberté,com
‫رو‬
boit en yne ignominieuſe leruitude , comme ayant delauoüe & renoncé la race , &
origine. Cequielt teſmoigné parClaudeParadin ,en la preface du liure qu'il a faic ClaudePara.
D des Princes delaGaule . Pierre Mellie enles
Alliances & Genealogies des Roysles&anciens din .

6
diuerſes leçons,chapitre 8.eſcrit,que Romains auoiene vne couſtume de Pierre Mißi e.
bruſlerlescorps morts , & que le premier des Senateurs qui futbruſlé apres la mort, Les Romains
$
.
futSylla,& apres luy pluſieursautres hommes notables & illuftres: les cendres del bruſleiene les
quels on gardoit dedans des vrnes ou vaiſſeaux de terre , puis on les poſoitdedans les corps morts.
Les Grecs

Ś
fepulchres ou tombeaux ſous terre,faits en voulce.Les Grecs auoient auſſi ceſte ma
de bruſler
nieremorts les corps morts. Stobée eſcrit, quelesColchesn'enterroientpoint leurscorps
mais pendoient arbres.Les Scythes d’Aſie ſeruoientpourboi morts.
6
leurs , les aux ſe
re,de l'os du crane de leursparens & amis,enchallé enor,pouren auoir couſiours ine . Les scyther
bemuoiēt das
moire : & entre tous leurs threſors & choſes precieuſes eſtimoient leſdices caffes. le crane de
leurs peresoo
Qq iiij Autres pares,
ſme ns
zie uſio
458 Dou liure des Cont ,

CHAPITRE X. ' A

Auantage les Egyptiens recognoiſſans ceſte vie eſtre de peu de durée

au regard de celle que nous auons à viure apres la ſeparation du corps


d'auec l'ame, eſtoient fort negligens à baſtırmaiſons pour cux loger ,
mais au reſte ſi magnifiques à édifier Pyramides , deſquelles ils ſe you
loient ſeruir pour leurs ſepulchres, que pour le baſtiment d'vne quifus
entrepriſe par Cheopes l'on de leurs Roys ,cent mil hommesy furent employez,cha
Cheopes Roy cun trois moys , par l'eſpace de vingcans : laquelle eſtant de forme quarrée ,auoie de

d'Egypte. profondeur cinq ftades ,& en chacun fronthuictcens pieds de large, & autantde
haut , chaque pierre ayant le plus ordinairement trente pieds , fort bien ouurée ,
comme raconte Herodote.Ordeuanc qu'enfermer les corps dedans ces ſuperbesſe
Herodote pulchres,ils les porcoiêc auec pompes magnifiques vers les Salleurs ou Embaumeurs
lihre 2.
( office bien ſalarié du peuple) quiles embaumoient de choſes aromatiques & exqui
ſes,ſelon la volonté & puiſſancedes parens & amis,commenous avons die cy-deſſus:
B
leſquels reſouls ils recournoient prendre, & eſtans bien lauez & nettoyez les lioient
de bandes faites d'vn drap de loye collé auec certaines gommes. Et lors les parens &
amis reprenoient le corps , & luy faiſoient faire vn eltoy de bois moullé & effigić
. Voyla comme les Egyptiens enterroiết leurs
d'homme , dedans lequelils le poloient
Roys & Princes.Autres mettoienc dedans les corps ainſi preparez , vneidole faire de
cuyure ,ou marbre , & quelquesfois d'or & d'argent, qu'ilsadoroient : & auoient ceſte
opinion , quele corps eſtoit gardé& conſerué de pucrefa &tion, ayans leurs Dieux re
poſans auec leurs corps dedans leurs monumens , & que telle ſuperſtition donnoit
ſoulagement à l'ame. I'ay veu au cabinet de Theuec , vne perire idole de marbre blan
che , marquetcée d'un certaio verd , qu'il affirme auoir apportée de ce pays - là , &
qu'elle auoit eſté treuuée en vn corpsmumié. Ainſi voit - on comme les Egyptiens
eſtoient fort ceremonieux & grandsidolatres. Louys de Paradis , Chirurgien, nacif
Louys de Pa. de Vitry en Partois ,m'a dit qu'eſtant au grandCaire il veit18.0u 20. Pyramides faites
tad is.
de bricques . Entre autres il en veit vne de merueilleuſe grandeur,de figure quarrée,
ayant en chaque face trois cens pas . Celle - là eſtoit la plus grande , appellée la Pyra
Pyramide de mide de Pharaon, où ſont pluſicurs corps mumicz . En outre, qu'il entra dedans vne
Pharaon . deſdices Pyramides où il veic plus de deux cens corps encores tous enciers, quiauoiée

les ongles rouges: parce que c'eſtoit la couſtume de ce pays - là que pour auoir de bel
les mains,ilfalloit auoir les ongles rouges . Les gens du pays ne veulent ſouffrir qu'on
tranſporte aucun deſdits corps , dilans que les Chreltiensſont indignes de manger

leurs corps morts .Que li on les cire hors du pays,c'eſt par le moyen de quelquesluifs,
qui les defrobent & emballent auec leur marchandiſe , à fin qu'on ne les puiſſçco
gnoiſtre . Le Seigneurdela Popeliniere , en ſon 3. liure Des trois mondes , dit , que
quand les Indiens de Canarie meurent, c'eſt pitié deshurlemens & plaintes que font
les femmes, leſquelles racontenc leurs louanges d'auoir bien tué & mangé les hom
Grande bar- mes eſtans leurs ennemis : Ec qu’apres leur auoir lié les bras & pieds,elles lesenuclop
baria.
pent de leur liet de corcon , & les encerrenten vne foſſe ronde & profonde, & preſque
tout debout, auec quelques colliers & plumaſſerie qu'ils auront plus aimé : comme
les Indiens du Perou font de leurs Roys & Caciques, auec quantité d'or & pierres
precieuſes : & les Celtes anciennement , qui eſtoient enterrez auec le plus beau de
leurs meubles, & la femme qu'ils auoienc la plus aymée .

CHAP XI.

E ceſte meſme curioſité nos François eſmeus & incitez font la plus gran
>
de parc embaumer les corps des Roys & grands Seigneurs , & dreſſene des
figures enleuées en boſſes,ou en places peintures, approchans de la gran
deur & figure au plus pres qu'ils peuuent du rreſpaffe. On en trouue
teſmoignage en l'Egliſe de Saint Denys en France , & en beaucoup d'autres
lieux , là où l'on voic pluſieurs effigies des Roys & Roynes , & autres grands Sei
gneurs : ce que Chreſtiennementils ont évidemment ciré cant du nouuçau Teſta
Solean 20. ment que du vieil , & façon de faire ancienne des Iuifs. Car il eſt diet au nouueau
39 .. Teſtament, queloſeph achepta vn linceul , & queNicodemeapporta vne mixtion de
Combuſtions & Gangrënes. 459

A myrrhe& d’aloës ,iuſqu'au poids d'enuiron cene liures , de laquelle auec autres odeurs
aromatiques ils embaumerent & enſeuelirent le corps de Ieſus-Chriſt, comme la
couſtume des Iuifs eſtoit d'enſeuelir leurs corps embaumez , en ligne de ceſte incor
ruprion qu'ils eſperoient en la reſurrection des morts , comme nous avós dic . Ce que
meſmes depuis eux voulurent faire les Marics : ce qu'ils auoient appris de leurs peres
anciens . Car Ioſeph ,au vieil Teſtament,commanda à ſesMedecins d'embaumer ſon Geneſe 52,
pere . Orquieſt cauſe qu'à preſent nos Roys , Princes , & grands Seigneurs, encore
qu'ils ſoiét vuidez & lauez d'eau de vie & de vinaigre, & fàlpoudrez de choſes gran
demécaromatiques,n'y eſpargnans aucunes choſes pour les embaumer,neantmoins
auec toutcela , en cinqou fixiours, ou moins , fentent li mal , qu'on ne peutendurec
eſtre aux lieux où ils ſont, & eit -ou cócraina les enfermer en leur cercueil de plomb ?
Carnonobſtant cel appareil , parce qu'ils ne ſont ploigezen ſaumeures auec leſdites Pourquoy les
chuſes aromatiques , commeanciennement on faiſoit, & auili pour la grande mulci- Roys embaua
tude de gens qui y entrent pour les voir , & legrand nombre de corches & lumieres y mez à la mo
Beſtans iour & nuia , l'airs'eſchauffc ſi forc , que lecorps n'ayanceſté imbu aſſezlong- de qui court ,
ne ſe peuvent
temps de choſes qui gardent la pourricure , il aduient qu'en peu de iours s'elleue vne garder.
vapeur puante & cadauereuſe , qui offenſe grandemenc ceux qui la ſencent. Icy ic
veux aduertir le Lecteur, ſur ce qu'on m'a voulu donner quelquesfois blaſmeden’a
voir içeu bien embaumer les Roys, atrendu la pourriture quicolt apres s'ellcuoit de
leurs corps.Carma relponſe eſtoit facile à faire ,c'eſt qu'ils n'auoient eſté trempez & Dofterefpöfe
lis. ſalez ſoixante & dixiours , comme les anciens faiſoient,dedans le vinaigre , & choſes de l'Au
aromatiques ,& que la faute ne procedoit que de-là ,commeil ſe peut prouuer,que le cheur.
ORC vinaigre garde de pourriture , d'autant qu'il eſt froid & ſec ,qui font deux choſes re
pugnantes à putrefaction ,ce que l'experience monſtre :attendu qu'en iceluyon gar
deles herbes, fleurs, fruicts, voire fort humides , comme concombre ,pourpié, & au
tres choſes , ſans qu'elles ſe pourriſſent. lepuis dire auoir yn corps en ma maiſon, le Pourquoy
quel me fur donné par le Lieutenant Criminel , nommé Seguier, Seigneur de la Ver . l Autheur
riere,apresauoir eſté executé pariultice ,il y a vingt-ſept anspaſſez,que i'anatomiſay , garde un
que ie mort anateg
& leuay preſque cous les muſcles du corps de la partie dextre ( à fin que lors que ie
C
vcux faire quelques inciſions à quelque malade,voyācles partiesde recencc memoi- mifé
.
re , iefois plus aſſeuré en mesæuures) la partie ſeneſtre laiſſéeen lon entier : pour le
quel mieux conſeruer ie le picquay d'vn poinçon en pluſieurs endroits, à fin que la li
queur penetraſt au profond desmuſcles , & autres parties , & voit-on encore à preſent
les poulmons entiers ,cæur ,diaphragme , mediaftin , eſtomach , ratelle, reins , ſembla
blementle poil de la barbe,& d'autres parties, voire les ongles , lelquels i'ay apperceu
éuidemmentrecroiſtre ,apres les auoir par diuerſes fois coupez .

CHAP . XII .

Arce recueil on peut veoir , que les anciens eſtoient fort curieux Pourquoy les
d'embaumer leurs corps,mais non pas à l'intécion qu'ils ſeruiſſent anciens ſe
à manger & à boire aux viuans , comme on les a faic ſeruir iuſqu'à faiſoient en
baumer..
preſent.Cariamais ne penſerētà delle vanicé & abominacion , mais
bien ,ou pour l'opinion qu'ils auoient de la reſurrection vniucrfel
le , ou pour vne memoire de leurs parens & amis decedez.Cela elt

confirmé par André Thevec , en la Coſmographie, où ildit, avoir s.Theues.


cſté en Egypce en descauernes longues d'un traict d'arc, & de largeur aſſezgiande,
dansleſquelles il y a des tombeaux, où anciennemenceſtoient polez les corps morts
embaumez, où il faut porter du feu à raiſon de l'obſcurité, & desbeltes veneneuſes
quiy habi :ent. Il y a ( dic- il ) des corps paſſé deux mil ansenclosen des tombeaux de
pierre, fermez & cimentez. le laiſſe à penſer quelle bonne viandeon feroit d'en bois
1
reol manger à preſent.On dit que la Mumie , dont on a vſ. iuſques aujourd'huy , eſt
venuë de là: à raiſon d'un maſtin Medecin luif , qui par vne brutalicé auoit eſcrit vn Medecin
que celte chair ainſi confite & embaumée ſeruoit grandement à la curation de plu . Tuifa esté
Caule que l'on
‫دیا‬ fieurs maladies , & principalement aux cheures & coups orbes,& meurtriſſeures,pour
a mangé les
Tai garder que le ſang ne ſe caillebocaſt & congelait dedansle corps : quia eſté cauſe que rps
co des
l'on les tiroic furcivement, ou par argent , hors des tombeaux. Ce qui ſemble choſe Egyptien
sis
fabuleuſe, parce que les nobles riches , & 'anciennesmaiſonsn'euffentiamais enduré
4бо eſme ſions,
Douzi liure des Contu

pour rien du monde , que les ſepulchres de leurs parens & amis , deſquels ils eſtoient A
tant curieux, fuſſencouuercs, & les corps emporcezhorsde leur païs , pour eftre man
gez de Chreſtiens , & diſent qu'ils ne ſont dignes de manger de leurs corps. Et s'il eſt
aduenu que l'on en ait cranſporté, ç'a eſté de la populace, quionteſté embaumez do
Aurrema- la ſeule poix aſphalte,ou piſalphalce,dequoyon poiffe les navires. Autres disét , que
niere de Mu• Mumie n'eſt autre choſe qu'une ſimple chair humaine priſe des corps morts trouuez
mie.
dans les ſables & arenes quiſoncésdeſercs d’Arabie , où l'on dit que leſdites arenes
s'efleucne li haut par la violence des vents , que ſouuent elles couurent & eſtouffent
les paſſans: d'où vient que les corps morts reſleichez ,tant par la chaleur & aridité des
arenes, que par le ſoufflement des vents , ſo donnent & feruent en vſage medecinale
pour Mumie. Macheole ſuivāt la plus commune opinion , dir, que Mumie n'eſt autre

Autre choſe qu'vne liqueur reſſeichée, Corcár des corps humains aromatiſez & embaumez.
Serapion & Auicenne n'ont cogneu autreMumie que piſſaſphaloc ,qui cſt vne forte
d'eſcume qui provient de la mer. Ladice eſcume, pendantqu'elle nage & flotte ſur
l'eau eſt inolle , & comme liuide : mais peu apres eſtant portée par l'impetuoſité des
vagues aux riuages , & arreſtée entre les rochers & cailloux, ſe deſſeiche & affermit B

plus dure que la poix reſleichée,comme il eſt diſcouru par Dioſcorideliu.I.chap.84.


Autre . Autres tiennent que laMumie ſe fait & façonncen noſtre France : & que l'on defro
be de nuiet les corps aux gibecs ,puis on les cure oſtant le cerucau & les entrailles, &
les fait-on ſeicher au four, puis on les crempe en poix noire , apres on les vend pour
vraye & bonneMumie,& dir-on les auoir achetez des Marchands Portugais ,& avoir
eſté apporcez d'Egypte . Mais qui voudra rechercher, comme i'ay fait, chez les Apo
thicaires, on trouuera des membres & porcions des corps morts , voire de tous entiers,
Les corps eſtreembaumez de poix noire,leſquels fentent vne odeur cadauercuſe.Neantmoins
mumica en ie croy qu'ils ſont auſſi bons que ceux qu'on apporte d'Egypte : parce que tout n'en
France ſont
vaut rien .
außi bons
CHAP. XIII.
que ceux
d'Egypte :car
sout n'en Epuis n’agueresdeuiſant auec Guide de la Fontaine , Medecin celebre du
14ht rien .
Roy deNavarre,lçachant qu'il auoit voyage en Egypte & en la Barbaric, ie 0
le priay me faire participantde ce qu'il auoic appris de la Licorne , & de la
Mumie . Il me dit que c'eſtoieot toutes bayes ce qu'on bruyoit par deça de la Licorne ,
& que iamais n'en auoic rien ſceu deſcouurir . Ec quant à la Mumie, qu'eſtant l'an
1564. en la ville d'Alexandrie d'Egypte , il oüic dire qu'il y auoic vn luifquien failoic
grand crafic : en la maiſon duquel allant, le ſupplia de luy vouloir monſtrer les corps
mumiez.Ce qu'il fic volontiers, & luy ouuric vn magaſin , où il y auoit plugeurs corps
encaſſez les vns ſur les autres . Iceluy prianc derechefle Iuif deluy vouloir dire où il
avoic recouuré ces corps , & s'ils ſe trouuoient comme en auoient eſcric les anciens ,
és ſepulchres du pays : ledicluifen ſe mocquant de ceſte impoſture , fe print à rire,
l'aſſeurant, & affermant qu'il n'y auoit point quatre ans que tous leſdits corps qu'il
voyoit là en nombre de crente ou quarante , il les preparoic luy.meſme,que c'eſtoient
corps d'eſclaues , ou autres perſonnes . Ledit de la Fontaine luy demandant encore ,
de quelle nation , & s'ils n'eſtoient point morts de mauuaiſe maladie , comme de le
pre , verole , ou peſte :il luy reſpondit , qu'il ne ſe ſoucioit point d'où ils fuſſent, ny
de quelle morcilseſtoient morts , ou s'ils eſtoient vieils ouicunes, marles, ou femel
les , pourueu qu'il en cuft, & qu'on ne les pouuoic cognoiſtre quaird ils eſtoientem D
Le luif ſe baumez . Encore luy dit- il qu'il s'eſmerueilloit grandement comme les Chreſtiens
mocque des eſtoient cant friaods de manger les corps des morts . Ledic de la Fontaine l'importu
Chreſties qui nant de luy declarer la façon qu'il cenoit à les embaumer , die qu'il voidoit le cer
foot fi frians
de manger de ucau & les entrailles, & faiſoit de grandes inciſions au profond des muſcles, & apres
la chair des les rempliſſoit de poix indée , appellée aſphaltice &
, prenoit des vieux linges trem
corps morts. pez en ladice liqueur, & les poſoit dans leſdites inciſions, apres bandoit chacune

parcie ſeparément: & eftansainſi bandez , enueloppoit tout le corpsd'vn drap erem
pé ſemblablementen ladite liqueur: leſquels ainſi accouſtrez,lesmectoicen certains
Responſe du lieux , où il les laiſſoitpour confire deux ou trois mois. Finalement ledit de la Fon
Tuiſ digne cainc diſant que les Chreſtiens eſtoienc doncques bien trompcz , de croire que les
d'eſtre bien corps mumicz fuſſene tirez des ſepulchres anciens des luifs : le luifluy fit reſponſe,
worés. qu'ileſtoic impoſſible que l'Egypte cult peu fournir de cant de milliers de corps ,
Combuſtions & Gangrenes. 461

A quionteſté enleuez depuis que ceſte ceremonic a eſté. Car de dire aviourd'huy
qu'elle s'obſerue,cela eſt faux :d'autant que ceſte region eſt ſeulement habitée des
Turcs,des luifs , & des Chreſtiens, qui ne ſontcouſtumiers d'vſer de celle ceremonic
d'einbaumement, comme du temps queles Roys d'Egypte y commandoient .
ya

C H 4P . XIII .

R par ce diſcours du luif ,on voit commeon nous fait aualler indiſcrettemēc
« brucalement la charongne puante & infe &te des pendus,ou de la plus vile
canaille de la populace d'Egypte, ou de verolez , ou peſtiferez , ou ladres ,
comme s'il n'y auoit moyen de ſauuer vn homme tombé de haut, contus, & meurtry,
linon en luyinſerant, & commencantvn autre homme dedans le corps , & s'il n'y a
uoit autre moyen derecouurer fancé, ſinon que par vne plus que brutale inhumani
té . Etlien ce remede y auoir quelque efficace,veritablement il y auroit quelque pre
B texte d'excuſe. Mais le fait eſt cel de ceſte meſchance droguc, que non ſeulementelle
ne profite de rien aux malades , comme i'ay pluſieurs fois veu par experieoce à ceux
auſquels on en avoir fait prendre, ainsleur cauſe grande douleur à l'eſtomach , auec
puanceur de bouche,grand vomiſſemēc ,quicſt pluftoft cauſe d'eſmouuoir le ſang,&
le faire dauácage ſorcir hors de ſes vaiſſeaux , que de l'arreſter : les peſcheursvſent d'ap. Nota .
palts puās pour allicher les poiſſons;à ceſte cauſe ils vſenc de Mumie ,parce qu'elle eſt
12
fort puante.Theuet dit l'auoir experiméré en ſoy.meſme, en ayant quelquesfois pris Experience
a
en Egypte à la ſuſcitation d'un nommé Idere,luif.Aceſte cauſe ie protettedeiamais par Theuet.
n'en ordonner ny permettre à aucun en prendre s'il m'elt pollible. Quoy ? dira quel- obiection ,
qu'ın ,que fera-on donc pour garder que le ſang ſe coagulc dedāsle corps de ceux qui
VI
ſeront combez de haut en bas,ou auront receu coups orbes, cómo de pierre,ou de ba
ſton,oude quelque autre choſe lourde & peſance: ou ſe ſeront violentementheurté
contre quelque choſe dure , ou par vne grande extenſion, come ceux leſquels on tiro
ſur lagihenne,ou pour extremcmércrier,donc quelque vaiſſeau du poulmõſe peut
rompre,ou pourvn coup d'harquebuſe, ou d'eſpée, ou autre inſtrument ſemblable,
с
& pour le dire en vn moc,toutes choſesqui peuuent inciſer ,contundre, & meurtrir,
caſſer,eſcacher,& rompre , non ſeulement les parties molles , mais auſſi les os , & faire
ſortir le lang hors des veines & arteres, qui à cauſe de ce sóc preſſées ,exprimées,rom
puës , & dilacerées, dont le ſang combe dedans les parties interieures du corps , & ſou
uenteltieccénon ſeulement par les playes , mais par la verge, ſiege, & par la bouche
Ce quei'ay vcu pluſieursfois: meſmes les parties excerieures eo ſont pareillement
concuſes & blefiées auec playes , & louuent ſans playe , de force que le cuir demeure
K.
tout encier , mais le ſang eſt reſpádu par la chair des muſcles , & entre cuir & chait ſeu
lement : dont la partie eſt renduë liuide & noire, laquelle diſpoſicion eft nonmée des
anciensGrecs,Ecchymoſis. En quoy l'on obſerue entre autres choſes , que ſi quelqu'vn
eſt tõbéde haut,ou frappé de coup orbe , & qu'il faigne par le nez ,bouche & oreilles,
cela veritablemét demonſtre qu'il y a quelque veine ou artere rompuë & ouuerte de
dans la teſte , & fouuentaduiene que le malade moure. Les ſignes de morc ſone vomiſ- signes de
ſemens, defaillance de cæur , perdicion deparolo, delire , ou refuerie , ſueur froide ,
vrine retenuë, & les eiections ( orient hors , ou ſoncretenuësinuolontairement .

D En toutcecyfaut ſuivre la do & rine des anciens, comme Hipp . en la 2.ſe & ion des
Fractures,quidit,qu’en toutes grandes contuſions il faut ſaigner ,ou purger, ou faire Hippocrate,
les deux enſemble,à fin de recirer le ſang,
qu'il ne fluë aux partiesinterieures, & pour saignée.
l'cuacuer quand il y a plenicude.PareillementGalien ſur la ſentence 62.de la 3.ſeat . Galien .
duliure des Articles, que ſi quelqu'vneſt combé de haut, encore qu'il n'euſt aſſez
de ſang, ſi eſt-ce qu'illuyen faut tirer . Pourquoy le Chirurgien ne faudra à tirer du
ſang ſelon la grandeur du mal , & plenicude , & force du malade. Ce qu'ayant fait ,
on luy donnera à boire de l'oxycrat, par le commandementdu meſme Galico , liures .
dela Methode,chap.s.qui a fáculce derefrigerer & reſtraindre, & inciſer les throm
bus , & caillots de ſang, & garde qu'il neſe coagule dedans les parties cane interieu
rcs , qu'exterieures : coutesfois il ne faut donner à boire à ceux quionc vlceres aux
poulmons , & quione l'eſtomach plein de viandes. Au lieu de l'oxycrat,on fera pren
dre au malade de la rheubarbe , qui eſt ainſi ordonnée par Raſis, & Mclué, comme Raſis en
s'enſuit. . rhcubarbari eleài 3 j . aquæ rubiæ maioris & plantaginis an . z j . Meué.
492 Douzieſme liure des contuſions,

theriacæ z 8. ſyrupi de rofis ficcis zB.fiac potus : lequel ſera donné tout auſſi toft que A
le malade ſera tombé, & ſera reiteré par trois matins , s'il eſt neceſſaire. Autres l'or
donnent en celte façon.2.radicum gentianæ z iij.bulliancin oxycrato ,in quo diſſo
L’eau denoix lutio rheubarbari electižj. fiat porio . Dauantage l'eau de noix vertestirées par l'a
fingu, lambiceſt aufli fort louée, donnée à boire la quáticé d'vne ou deux onces , quia gran
pertesdonnée
liere ,
à boire pour diſſime vercu de diſſoudre le ſang caillé,combé dedans le corps , ce que i'ay diccy-del
garder que le fus. Qu'à la mienne volonté, les Apothicaires fuſſentautāt curieux d'en eſtre fournis,
săg ne fécail. comme ils ontefté, & ſont encore d'auoir dela Mumie , & qu'ils la vendiſſent au qua
lebotte aux druple , ce ſerait le mieux pour les malades . Eci'eſpere qu’apres auoir entendu par céc
parties du
dedans . eſcrit la bonne drogue que c'eſt que la Mumie, ils n'en voudroient teoiren leurs bou
ciques , ny la plus vendre qu'aux peſcheurs pour prendre les poiſſons. Mais pourre
tourner à noſtre propos, apres auoir baillé au malade les potions ſuſdires, il le faut en

uelopper dedans la peau d'vn mouton,ou d'vn veau freſchemér eſcorché,ſurlaquel


le ſera aſpergé & eſpandu de la poudre de myrte : puis le poſer dedans vn liet chau
dement,où il ſera bien couuert, & fuera tout à fon aiſe,ſans coutesfois dormir de qua

tre ou cinq heures , à fin que le ſang ne ſe recire au dedans du corps , & le lendemain
on luy oſtera la peau , & ſera oingt de celiniment , lequel a puiſſance de ſeder la dou
leur, & reſoudre le ſang meurtry. 2. vnguenti dealt. 3 vjo
. lei lumbricorum , camo
millæ & anechian zij.terebenthinæ Veneræ z iij. farinæ fænugræci , & rofarum ru
brarum ,myrtillorum pulueriſatorum an.zj.fiat linimentum . Etſic'eſt quelque hom
me quine puiſſe auoir celles commodicez ,il le faut mettre dedans du fien : mais pre
mierement deſſus un peu de foin ,ou paille blanche, puis l’enuelopper en vn drap, &
le couurir dudit fien iuſqu'à la gorge , & luy faire tenir tant qu'il ait bien ſué. Dauan
bon regime de viure , & ne boire vin de ſeptiours,
tage faut que les malades tiennent
ains ſeuleinent de l'hydromel,ou oxymel ,ou hippocras d'eau . Et ſi le mal eſtgrád,de
force que le malade fuſtcanc meurtry, qu'il ne peuſt remuer les membres,on luy don
nera vne potion ſudorifique, & le baignera -on en cau , où on aura fait bouillir herbes

neruales , & principalement les ſemences que l'on trouue ſous le foing, qui ontgran
de vertu de diſſoudre le ſang meurtry , tant des parties incericures, qu'exterieurcs.
Toutesfois s'il y auoit fiéure, ne le faudroit mettre au bain , & ſerois d'aduis qu'on ap
C
pellaſt vn do &te Medecin . Or apres auoir diſcouru ſommairement des remedes pour
garder que le ſang ne fecongele ,caillebote , & pourriſſe dedans les parties interieures
du corps, nous crai & erons à preſent des contuſions & meurtriſſeures, qui ſefontaux
parties exterieures, quelquesfois auccplaye ,autresfois ſans playe , en ſorce que le cuir
demeure tout entier, mais le ſang eſt reſpandu par les muſcles & entre cuir & chair
ſeulement: laquelle indiſpoſition a eſté nommée des anciens Ecchymoſe .

CHAP. XV .

Fawe diuerfi L faut diuerſifier les remedes ſelon les parties bleſſées. Au cõmen
fier les reme cemēron doic vſer de remedes froids & aſtringens,afin que leſang
des ſelon les ne tombe ſur les parties offenſées, & reſſerrer les veines & arteres ,
parties bles pour empeſcher la fluxion , comme ceſtuy.cy. Prenezonguent de
fées.
bolo,blancd’auf,huileroſat,& de myrte , poudre de maſtic, alum
cuic . Autre , que i'ay en vlage ordinairement . 2 .. albumina ouor.
num.cria,oleimyrtill. & rofarum an . zj . pucum cuprelli, & galla
D
rum pulueriſacarum ,aluminis vſtian zij.incorporenturlimul,addendo aceci parum ,
fiac vngucntum . Apres auoir vſé ſuffiſamment de repercuſlifs, on vſera de fomenta
tion, emplaſtres, & cataplaſmes reſolutifs. Exemple. Prenez de la bouë de vache, lie
de vin ,ſon de fourment ,cerebenthine commune beurrefrais, & ſoit fait cataplaſme
,
y adiouſtant de l'eau de vie, & vn peu de vinaigre. Ce cataplaſme eſt propre à reſou
dre quelque grandemeurtriſſeure ſurles bras & iambes des pauures gens..
Auxriches on vſera de ees emplaſtres, qui ont eſté de long temps ordonnez pour
Ces remedes les Roys , Princes & grands Seigneurs allansà la chaſſe. Lors qu'il comboiét decheual ,
fons eſcrits ou ſe heurtoiept,les Chirurgiens appliquoient céremplaſtre au commencement.4 .
pag. 454 . boliarmeni,terræ ſigillatæ añ.zj.B. roſarum rubrarum , myrtillorum an .z. vj . nucis

cuprellizij.omnium ſandalorumañ.zj.nucis moſcatæ zB.maſtichis, ſtyracis,calami


tæ ,an.zj.B.ceræ nouæzvj.picis naualis zij.cerebenthinæVenetæ ,quancúſufficit:fiac

1
!
Combuſtions & Gangrenes. 463
A emplaftrum . Et quandileſtoit beſoin dereſoudre dauantage, on vſoit de ceſtuy -cy.
22.ftyracis calamicæ, labdani,benjoin.añ ziij.maftichis, ireos Florentiæ , baccarum
lauri,cinamomi,caryophyli, calamiaromatici,añ z j.ligni aloës,florum camomillæ,
lauãdulæ,nucismoſcatæ ,an. 3 B.moſchizj.ceræ nouzz vj.refinæ Zij.cerebenthinæ
venecx z iij. olei rofarum quantum fufficit : fiat einplaftrum . S'iladuient qu'on ſoit
bleſſé auviſage, & quel'onait les yeux ( comme l'ondit) pochez au beurre noir,faut
1
fubit prendrevn mouſchoir crempé en eau froide, & vinaigre , & en baſſiner la par
1 tie.Cependanton aura blancs-d'æufs bartus en eau roſe,pourles appliquer dedās &
autourdesyeux,& parties proches. Et ſubit que tel remede ſera ſec,on y en remettra
d'autre: Etapres du ſang de pigeon ou autre volaille, qui ont faculté de ſeder la dou
"
leur , & reſoudre le fang meurtry des yeux .
FO
le
Aullion fera vne fomentation de ſauge,thym ,romarin,marjolaine boüillics en cau
& vin . Dauārage on peut prendre de l'aluyne hachée, & poſée ſur vne pelle chaude,
5.
& l'appliquer deſſusentre deuxlinges.La farine de féues cuite en oxymely eſt auſſi
bien propre.Quantaux emplaftresdediachylonireatum ,demeliloto oxycroceum ,
‫ܕܐ‬
B elles ſont pareillemét refolutiues:mais ſur tous autres remedes (pourueu qu'il n'y aic
ny douleur ny chaleur)la racinc de ſigillum beatæ Mariæ appliquée par roüelles, ou
170.
raciſſée, diſcute & refout le ſang meurtry comme choſe miraculeuſe. Que ſi l'on fe
itoitheurté des doigts contre quelque choſe dure,ou receu quelquecoup, ou preſſé,
ou eſcaché les ongles qui ſonten danger de tomber, ou marqué de noirceur,à raiſon
du ſang quieſtAue dellous: Cela aduenant,tout ſubiton prédravn linge trēpéen vi
naigrefroid,& eſtreindra le doigt bleſſé de l'autre main,le plus fort que lo le pourra
endurer, afin de reprimer la fluxion : & pour ſeder la douleur,on mettra deſſus vn ca
taplaſme fait defueilles d'ozeille , cuites ſous les cédres chaudes,puis pilées auecon.
guentroſat , ou beurre frais.Et pour reſoudre le ſang ja deflué, on y appliquera cata
1
plaſmesfaitsde crotes de chéures,incorporéavec poudre de ſouphre,& vn peu d'eau
00
devie.La cure ſera paracheuée ſelon que l'on verra eſtre debeſoin . Dauantage ſipar
vne grande contuſion & meurtriſſeure furuientquelquefois gavgrene, & mortifica.
tion,quiſe cognoiſt quand la partie deuiét fort liuide & noire,iuſquesà fembler que
ci fachaleur eſt preſqueſuffoquée & efteinte pour la grande concretion de ſang deflué
UE
en la partie,quiempeſche que les eſprits nepeuuent paruenir pourl'entretenir en so
T

eſtre:Alorsil fauc vſer de ſcarifications ſuperficielles,ou profondes ,& appliquer des Scarificatiớs'
301
ventouſes, pour faire attraction & vacuation du ſang eſpandu hors des veines : & l’il ſuperficielles,
y auoittotale mortification , conuiendroit faire amputation de ce qui ſeroit mort.
Siquelqu'vn a ſauté & tombé ſur le calo de haut à plomb,ſurquelque choſe dure, 80
parla córuſion le ſangſort hors deſes veines, dõr il furviết grande douleur, puistu
meur,& apres il ſe noircit & ſe fige,puis le pourrit.La douleur vient pour la cõcuſion
quiſ'eſtfaicte à l'aponeuroſe dugros tendon compoſéde trois muſcles du pommeau
de laiambe , qui fimplante ſousletalon,& ſus toute la folle du pied, & des nerfs qui
fonc en ces parties-là:àquelques-vns leur ſuruient ficure,ſpaſme,& autres cruelsac Remede poki
cidés:ce que ie certifie auoir veu aduenir.Partātil y faut obuier tatque poſible ſera, le talon cong
en faisāc la ſaignée au bras du coſté malade : puis faire vacuaciõdu ſangmeurtry,à ça. tus .
uoiren coupant la peau deſſous le talon,pourluy donner tranſpiration, de peur qu'il
D
ne ſe pourriffe,& qu'il ne face apoſtemeougangrene.Et ſi la peau eſtoic dure , côme
1
elle eſtordinairement,il eſt beſoin auparauant que la couper,faire des fomentations
d'eau chaude, &huile aſſez longuement : puisy appliquer deſſus du cerat , & autres
remedes: la muſcofité des limaçons auec poudre d'encens,aloës, & myrrhe , ſeichent
àmerycille le ſangmeurtry:faiſant le bandage comme lona accouſtumé aux fractu
10 res,commençantſurle talon,à fin de chaſſerle ſang loin de la contuſion , & fituant le
pied plushaut que le reſte ducorps,&les guariſſenten ſoixante iours,ſ'ils ſe tiennent
1 en reposfansnullement marcher. Hippocrate dit que ſi l'os du talon vientcarieux, Hippoc. am
la maladie dure vn ſiecle , c'elt à dire de la vie de l’homine, & que le malade ne liure des
doitboirede vin,ains en lieu d'iceluy , de l'hydromel, & non oxymel: car lors que les Articles,
.
nerfs foncoffenfez,le vinaigre leur eſtdu tour contraire. Pareillement pour quelque
couporbe , oufentorſer, pour quelque meſmarcheure,ou entorſure que les ospeu
i
uent ſortir deleurs places, & ferompre,fendre, & eſclatter,8c enfoncét quelquesfois
iufques à la mouelle:& ſelon les differences,fautdiuerſifier la cure. Et ſommairemét
pour ce faire, faut tenir, pouſſer, efleuer, ficuer, bander, & lier la partie,& la tenir en
RE
464 Douzieſme Liure des Contuſions,

repos :toutes leſquelles choſes trouueras amplement eſcrites en l'onzieſme,quator. A


zieſme , & quinzielme liures de mes cuures .
Hiſtoire.
Ledouzicline iour de Mars 1582.vn gentil - homme de la ſuite de Monſieur le Ma
reſchal de Biron ,nomméBernaut de l'Eſtelle, feigneur dudiclieu,ioüant à l'eſcrime
au logis dudit Marechal, cut vne playe contule dás l’æil feneſtre trauerſant de l'au
tre part pres la quatrieſme vercebre du col , icelle faite d'vne cſpée rabbatuë ,au
bout de laquelle y auoit vn bouton rond & plat , de grofleur d'un bon poulce,quifuc
donné par vn Gentilhomme du pais de Quercy, nomméle Baron du Bouluer. Tou .

-tesfois ledic coup, n'auoit paſſé tout outre de l'autre part , ne rompu entierement le
cuir ,mais y eſtoit demeuré vne petite tumeur liuide & noire de la groſſeur d'uneauc
line. D'abondant toute la celte & le colluy enflerent, ne la pouuant tourner pour le
ſang qui eſtoic reſpandu entre les muſcles du cal . Auſli ledit ſeigneurjetta lelang par
le nez , & par la bouche, & fut fort eſtonné dudic coup . Er ne veux oublier queledic
ſeigneur Baron ,hommeforc& puiſſant,ayant bleſſé ledit Bernaut auſſi tolt qu'il eut
GE
donné le coup voulant retirer l'eſpée , ne le peurqu'à grande difficulté , & l'efforça
par deux diuerſes fois auparauant que de la r'auoir , à cauſe que les os de l'orbite de B
l'ail auoient eſté rompus & enfoncez au dedans par la grande violence du coup .
Mondii ſeigneur le Mareſchal in’enuoya prier d'aller en la maiſon pour penſer ledic
bleſſé : où eſtant arriué , le me recommanda d'autant bonne affection , que fi c'euſt
eſté vn de ſes propres enfans . Adoncie luy feis promeſſe, que ie folliciterois comme
ſi c'eſtoit ſa perſonne . L'ayant veu , ie fus dedans auecParadis,Chirurgien de mondic
ſeigneur le Mareſchal, & Solin Crinel , Chirurgien des bandes Françoiſes (hommes
bien entendus en la Chirurgie , pour leurs grandes & longues experiences, qui le
folliciterent avecmoy iuſques à ce qu'il fuít du tout guary ) qu'il futfaignc de la vei
4
ne Cephalique , du coſté de la bleſſeure. Et en l’æilfutappliqué du ſang de Pigeon
Choſe admi
( qui eft vn vray baume des yeux ) & aux parties voiſines blancs- d'æufs battus en cau 4
rable car fort role & plantain ,& ſur toutela teſtcluy futfaite vne embrocation d'oxyrhodinum :
puis luy fut appliquc vn emplaſtre diachalciteos (apresluy auoir ofté le poil ) diſſout
en huile roſat & vinaigre, pour euiter l'infiammation des partiesinterieures du cer
ueau . Il luy fut ſemblablemét faitouuercure, à l'endroit où le bout de l'eſpée n'auoic C
paſſé outre , de laquelle en tortitbonnequantité de lang noir & caillebotré , & fuc
tenuë ouuerte tant que nous veilmes la teſte & le col tout deſenflez : & les accidens
paſſez , nous luy filmes pluſieurs autres choſes , que ie laiſſe à cauſe de brieueré . Iene

veux paſſer fousſilence , que Meſſieurs Pigray, Cointret, le Fort, Dioniau , Viard ,
& Nicolas Marc, & pluſieurs autres , tantMedecinsque Chirurgiens , vindrent voir
penſée ceſte bleſſeure, ſans perdre la vevë , qui eft veritablementchoſe admirable. Il
fut guary , graces à Dieu , en vingt- quatre jours , & ce ſans que nulle portion d'os en
fuftſortie , quieſt encore plus eſincrueillable. Que ſi quelqu'vn demande comment
cela ſ'eſt peu faire: le luy reſpondray que peut- eſtre les osde l'orbite quiauoienteſté
pouſſez au dedans, peurent auſſieſtrereduits en leur lieu , retirant l'eſpéeau dehors .

CH A P. XVI.

Hiſtoire. E ſeptieſme jour de luin , milcinq cens quatre -vingts& deux,le


fils de Mathurin le Beau , marchant Bonnetier, demeurant ruë S.
Denys, à l'enſeigne de la Couronne d'argent , aagé de vingt-ſix D
mois ,eſtant au milieu de la ruë , vne coche chargée de cinq gétils
hommes , la roüe de deuant paffa au travers du corps dudit en
fant . Le peuple criant au cocher qu'il arreltaſt ſes cheuaux ,les fic
reculer en arriere , & la rouë repaſſa encore vne fois par deflus le

corps de l'enfant . Il fut porté en la maiſon de ſon pere, & penſoit - on qu'ilfuft mort, .com
& tout éventré. Subitie fusenuoyé querir pour penſer ledicenfant : lequel ie reuifi
tay bien exactement, & ne trouuay aucune fracture,ny luxation en aucun endroic de
ſon corps . Tout à l'heure i’enuoye querirà la porte de Paris vo mouton que ie feis eſ
corcher : & apres auoir frotté le corps dudit enfant d huile roſat & de myrtille, ie
l'enueloppay nud en la peau dudit mouto tout chaudemét : puis lay feis boire de l’o
xycrat en lieu de Mumie, pour garder que le ſang ne ſe caillebotaft, & figealt dedans
Bon aduer- le corps . Dauantage ie dyà la mere qu'elle le gardaſt de dormir le plus qu'elle pour- .
eifferent. roit , pour le moins quatre ou cinq heures , afin que le lang ne couruſt pas tant aux

.
Combuſtions & Gangrenes. 465
A parties interieures du corps ( ce qu'elle fit.) En outre ie luy appliquay des fomenta
tions d'herbes reſolutiues & emplaſtres propres aux contuſions, pour reſoudre le
ſang meurtry. Trois ou quatre iours apres, apperceuantque ledit enfant ne ſe pou
ubic cenir debout, & moins cheminer , ie fcis appeller monſieur Pietre, Docteur re
genten la faculté de Medecine, hommed'excellent ſçauoir, qui luy ordonna quel
Au
que pecite medecine , parce qu'il auoit le ventre fort conſtipe: & craignant que la
retention des excremens ne procedaſt pour la leſion de l'eſpine & les nerfs qui lal
chent & altraignent les excremens:comme ainſi ſoit que les malades qui ont fractu
ile re ou luxacion aux vertebres , ſouuent laiſſent aller leurs excremens inuolontaire
ment , autresfois ſont retenus ſans les pouuoir ietcer dehors,ce que i'ay veupluſieurs
fois : ioint auſli que par vnegrande contuſion les coſtes ſe peuuent ſeparer des verce
bres,où elles ſontioinctes. Pareillementle defaut de ſe ſouſtenir & marcher , me
faiſane craindre que ie n'euſſe trouué le vice par laveuë & au toucher , fçachantque
deux yeux voyent plus qu'vn , ie feis ſemblablementappeller lean Cointret , & lac
LICI ques Guillemneau , Chirurgiens du Roy , autant bien entendus en la Chirurgic qu'il
B yenaitàParis:où eſtans arriuez viſiterent ledicenfànt, ſur lequel ne trouuerent'au
cune fracture ne luxation . Ainſipourſuiuant la cure iuſques à la fin , ileſt du tout
guary , graces à Dieu , & cheminecommeil faiſoit auparauant qu'il fuſt bleſſé. Et fi
l'on demande comment la roue de la coche chargée de cinq hommes puiſſe auoir
paſſe au trauers du corps de l'enfanc, ſans auoir rompu les coſtes& vertebres: Ie
2016 reſpondray, que les coſtes, & principalement les fauſſes ſont cartilagineuſes, & mol
lalles, nommément aux ieunes enfans,& parcant ſe peuuent grandement ployer,
ſans eſtre rompuës. Ceſte preſente hiſtoire pourra encore ſeruirau ieụne Chirur
gien, pourfaire le ſemblable, ou mieux ſ'il peur , à l'endroit de telles bleſſeures.
Voyla comme les anciens Medecins commandent de trai&ter ceux qui ſont com
le bez de haue,ouonteſté frappez, concus &meurtris, pourobuier que le ſang ne ſe
LO coagule, ou caillebote ,ou ſepourriſſe, tantauxparties interieures, qu'exterieures,
leſquels n'ont iamais parlé, nyordonné à mangerny à boire de la Mumie , & chair
descorpsmorts. Partant nous la renuoyerons en Egypte , comme nous ferons de la
JOT Licorne aux deſerts inacceſſibles.
с

Des combuſtions, bruleures, & differences d'icelles. CH AP. xvII.

E feu eſt plus chaud ſelon les matieres où ileſt imprimé,cóme ce


Difference
luy quielt au bois de cheſne, eſt plus chaud que celuy qui eſt au de"bruſleurd
ſaule, ou en la paille : celuy qui eſt au fer, eſt plus chaud que ce .
se
luy qui eſt en l'or : celuy qui eſt en l'huile , plus que celuy quigic
en l'eau , & ainſi des autres matieres . Mais le plus chaud & plus
Effects de
ſubtil & mortel , eſt celuy du Ciel,qui vient par les foudres & bruſleu re.
VNI

tonnerres , & eſt le feu des feux. Les bruſleures faites par pou
dre àcanon ,ou metaux ,huile, cau , & generalement toutes autres macieres qui
bruſlent,ne different qu'en la ſeule quantité de la combuſtion . Leſquelles tout
fubitimpriment à la parcie vne douleur & chaleur eſtrange , qui retient la qua
:S
D lité du feu ( que les Grecs appellent Empyreuma ) plus ou moins ſelon la nature
& qualité de la choſe qui bruſle , & le temps qu'elle aura demeuré ſur la partie.
Si la bruſleure eſt ſuperficielle , illefleue des puſtules ou veſſies lion n'y preuoit : &
L'action du
fi labrulleure eſt profonde, il ſ'y fait eſcarre ou crouſte, qui eſt la chair bruſlée. L'a. feu.
ni
đion du feu faiſant combuſtion , laiſſe à la partie incemperature chaude qui con
10
denſe, reſtrecit, & eſpellitle cuir, le rendant dur & reſſerré, cauſant grande dou
T leur, comme auons dit : qui eſt cauſe d'attirer les humeurs des parties prochaines Comment
& lointaines , qui ſe conuertiſſent en aquoſitez ſereuſes,qui cherchans iſſuë,quileur font les der
co elt deniée à raiſon du cuir eſpeſſi par lefeu , efleuentainſi que nous voyons la peau fies parfeu.
excitant veſſies.Et de ces differences ſont priſes indicatiós , dont on tire les remedes ,
entre leſquels les yns oſtent l'empyreume, qui eſt la chaleur eſtrange imprimée en
lapartie bruſlée, & appaiſent la douleur qu'elle excitoit . Les autres empeſchétqu'il
neſefleue vellies. Autres preuoyent à la cure des vlceres , en faiſant premierement
tõber l’eſcarre mondifient,incarnent,& cicatriſent.Lesremedes qui oftēt l'ardeur,
X
douleur,& inflammation ,ſontde deux ſortes. Les vns le font par leur vertu refrige
Rrij
:
466 Douzieſme Liure des Contuſions,

Medicamens rante , par laquelle ils eſteignent & amortiſſent la chaleur eſtrange, & repouſſent le a
‫ܕܕܠܐ‬
refrigeratifs. ſang,& lesautres humeurs qui aflueroient à la partie,àcauſe de la douleur & inflam .
mation. Les autres ſont de naturedu tout contraires , à ſçauoir chauds & attra & ifs,
qui relaſchent le cuir , & ouurent les pores , refoluent & conſomment l'humiditéſe .
reuſe, quicauſe lesveſſies : & par ce moyen appailent la douleur & inflammation .
Exemple des refrigeratifs, l'eau froide , eau de plantain , de inorelle, de ių ſquiame,
de ciguë, & jus d'herbes refrigerantes, commede pourpié , laiduës, plantain , iou
barde, pauot, mandragore , & autres ſemblables. On en pourra ſemblablementfai

re decompoſez: Exemple, blancs -d'æufs batus , auſſi caux ou fucs, la fargede che .
min dilayée en forc vinaigre , l'alum de roche fondu en eau , en laquelle feront bat
tus blancs -d'æufs, l'encre qu'on eſcrit mellée en oxycrataucc vn peu de camphre,
vnguentum nutricum , populeum , recentement fairs, ou autres ſemblables, leſquels Sifa
ſeront renouuellez ſouuencau commencement tant que l’Empyreume& la douleur
ſoient appaiſées. Dauantage ne faut oublier d'appliquer lefdits remedes vn peu
Annotation chauds , parce que f'ils eſtoient froids actuellement, inciteroient douleur, & par
pour le jeune conſequent Auxion : ioint auſſi que leur vertu ne pourroit penetrer fi facilement, & B.
Chirurgien. eltre reduits de puiſſance en effeèt , & eſtans ainſi appliquez ſedent la douleur , pro
hibenc l'inflammation , & les veſſies.

Des medicamens chauds & attractifs, qui oſtent la douleur & inflammation.
CH A P. XVIII.
si

E feu tientle premier lieu aux petites bruſleures. Quand on ap C. 1


Medicamens
attractifs . proche le lieu bruſlé contrevne chandelle ou charbon ardant, &
je tient- on aſſez longuement , on void par experience, que ceſto
chaleur attire à loy ce que le feu auoit delaiſlé de ſa qualité, dont
procedoit la douleur: & eſt parce moyen le vray alexitere & con
crepoiſon du mal qu'il auoit fait. Autre remede , c'eſt d'appliquer
ſubir des oignons cruds , pilez auec vn peu de ſel. Ec eſt à noter,
Les onguens qu'il ne les faut appliquerfil y auoit vlcere , parce qu'ils cauſeroient douleur , & fe
aux combu- roient agmentation d'inflammation : ce quine ſe fait où le cuir elt demeuré entier ,
stions. ſans eſtre eſcorché,mais prohibent qu'il ne ſe procrée bubes ou vellies : & à ceſteoc
caſion Hippocrates ſ'en ſert pour faire tomber les eſcarres. Et quant aux parties cir
conuoiſines , eft vtile y appliquer remedes refrigerans. le ſçay que pluſieurs n'ayans
encores experimenté ce remede des oignons , conſideré leur qualité chaude, con
temnerontl'npplication d'iceux,voulantdiſputer les maladieseltre curéespar leurs
contraires , & quecombuſtion eſt faite par chaleur : parquoy pour ſa cure demande
remedes froids. Toutesfois ſ'il veulentoüir la raiſon , ils comprendront.

L'apparente probationde l'vtilité desoignons au premier appareil des combuſtions.


Raiſons de Les oignons , comme dit Galien , ſont chauds au quatriefme degré : dont tant l'en
I vilité des faut qu'ils contrariétaux combuſtions, que pluſtoſt doiuenteſtre cauſe de l'augmen.
oignons és ter : parquoy n'y peuuent commodément eſtre appliquez . Or nonobſtant que cello
combuſtions. raiſon ait quelque apparence de probabilité , toutefois l'experience , raiſon , & autho
rité nous en demonſtrent le contraire, ce que i'ay veu pluſieurs fois par experience .
Et par raiſon ſe peut prouuer , que les oignonsſontchauds potentiellemét, & actuel. D IM
lement humides : ainſi leur temperature chaude rarifient, & par leur humidité
actuelle relaxent le cuir : par ce moyen attirent , conſomment, cariſſent, & ſeichent
l'humeur ja flué: ce faiſant prohibent les vellies : qui eſt auſli la raiſon pourquoy il
eſt bon promptement qu'on eſt bruſlé, d'approcher la partie du feu . Par auctorité,
Galien ine perſuade au cinquieſmeliure des ſimples, comme les maladies ne ſont
touſiours guaries par contraires qualitez,mais aucunesfois par ſemblables: combien
que toute curation ſoit faice par concrarieté , prenant contrarieté largement.Ceque 0:17
manifeſtement appert aux phlegmons , qui ſont fouuentesfois curez par medicamés
1 reſolutifs, leſquels en euacuant la matiere les curent . Parquoyi'oſe conclure l'appli de 50
cation des oignons eſtre commodeau commencement des brulleures, non toutes 202
Pluſieurs re fois eſcorchées ou vicerées . Autre . Prenez fiente de cheual toute recente, & foit fri ".
medes contre caſſée en huile de noix ou huile roſat, & loic appliquée ſur le lieu bruflé. Il fautre.
les bruſleures,nouueller ces remcdes crois ou quatre fois le iour & la nuict , f'ilya grande douleur .
Combuſtions & Gangrenes 467
.

Autre remede.
А
Prenez huile de noix , fueilles de lureau , ou d'hiebles , cuites en ladite huile , 8c
ſoient pilées, y adiouſtant yn peu de fel,& appliqué comme deſſus.
Autre .
Prenezchaux elteinte,& lauée par ſix fois pulueriſée, & incorporée aueconguent
rolat. Aurre.

Prenez fucilles dejarus , autrement vit de chien , fueilles de ſaulge , pilées auec yn
peu de ſel. Autre .

Prenez colle des Menuiſiers, fonduë en eau chaude, en double vaiſſeau , & en ap
pliquez auec vne plume ſur la partie bruſlée. Et ſi par ces remedes on ne peut tant
faire qu'il ne fy face quelques veſſies , les faudra couper auſſi toft qu'elles ferontelle
uées : pource que l'humeur retenu ſous icelles acquiert vne acrimonie , qui corrode
la chair , quicauſe vlceres caues . Ainſi par multiplication de cauſe , & accroiſſement
de matiere l'augmente l'inflammation , non ſeulement neufiours ( ſelon les vulgai
res ) mais quelquesfois plus longtemps, & aucunesfois moins , felon la diuerfitédes
Redeme cona
corps , & auſſi tant que la douleur ſoit ſedée, & la fluxion arreſtee . Si la bruſieure
B tre l'eſcarre.
eltoitli grande , qu'elle euſt fait eſcarre, on la fera tomber par remedes remolliens, &
humectans, comme axunges , huiles , beurre , avec un peu d'onguentbaſilicu ,ou cec
onguent. 24. mucilag. pſilly & cydoniorum an . Ziiij.gummicragacanthi Z ij.extra
hantur cum aqua parietariæ , olei lilior . Zij.B. ceræ nouæ quancum luff.vnguentum
molle . Et ſur les eſcorcheures ou vlceres feront appliquez remedes propres à telles Remede cond

vlceres, leſquelles n'aurontnulle acrimonie,commevnguenti albi raſis camphorati, tre les eſcora
den:
deſiccatiuuni rubeum ,onguentrolat,auqueln'y entre point de vinaigre,ou nutritủ, cheures.
Onguent bien
fair come ceſtuy 2 lithargyri aureiž iij.olei roſati z iij.olei de papauerez i aquæ
approuué..
ſolani vel ſucci & planta. an .Zij . vnguentipopul . Ziij.camphuræ zj.fiat vnguent .
in morcario plumbeo ſecundum arté Autre. Prenez huile d'oeufs batuë en yn mor
red tier de plomb: auflichaux viue lauée par neuf fois, puis incorporée auec onguent
rolar ou beurre frais ſans ſel,& quelque nombre de moyeufs d'æufs durcis :ou,24.bu
tyri recentis ſine ſale vſtulaci & colatı 3 vj . vicellorū ouorum iiij.cerulæ lotæ in aqua
plantag.vel roſarum Zb.tuthiæ ſimiliter lotæ z iij.plumbi vſti & loti z ij . miſceantur
С
omnia fimul,fiat linimentum ve decer. Ec faudra augm nter ou diminuer la deſicca
tion de l’vlcere ſelon qu'on verra eſtre beſoin . Autre. 2. corticis ſambuci viridis 8
2105 olei rofati an . Ibj
. bulliant fimul lento igne , poltea colentur , & adde olei ouorum
ID : z iiij . pul.cerulæ & cuthiæ præparatæ añ.zj.ceræ albæ quantum fufficit , fiat vn •
dei guencum molle ſecundum artem .
Autre pour le viſage.
Il fautprendre de la pommade žij, mucilage de pſyllion tiré en eau roſe zi.căphre
9.j.Sperme de baleine, zij .& foit faitonguent.S'il y auoit vnegrăde chaleur & dou
, leur,on prendra luc de iuſquiame, iombarde, ciguë , fueille de nenuphar,de chacun
Itan tant qu'il ſera beſoin , beurre frais, ou huile roſat : puis incorporez le tout dans vne
eſcuelle ſur vn reſchaut: & foiç appliqué deſſus la bruſlcure, & renouuellé ſouuent.
ques onguent pour les taches des grains de poudre à canon .
&2014 2.vnguenti citrini recenter diſpenſati z is. olei rofati 3 B. incorporentur, & fiac
linimentum .
permes Autre qui a veriu d'appaiſer la douleur.
D Prenez moyeufs d'æufs cinq ou ſix , & foient incorporez auec inucilages de ſemen
hom ce delin, de pſyllium & de coings , & renouuellez ſouuent. Autre...mucagin.ſem ,
le lij, pſyllij & cydonio.extract. in aqua roſa ,velcomuni,addendo camph . parum. Ecả
fin que ceremede ne ſe deſleiche trop ſubitemét,faucadiouſter vn peu d'huile roſat.
Autre dont les Dames de l'Hoſtel -Dieu de Paris vſentaux bruſleures.
smo 2. lardicoſcilli per fruſta loj. liquefatin aqua rofar.deinde colecur per rarum lin
reum , & frigidum lauetur quater cum aqua iuſquiam . vel alterius generis eiuſdein ,
C: deinde cum co incorporeneur vitelli ouorum recent. num . viij.fiar vnguentum .
Joe Lorsqu'ily a grande douleur ,come aduient touſiours à celles vlceres,on doit met- Bon documët
tre deſſus de la cuile de creſpe,afin que lors qu'on les eſſuye , on ne les touche à nud : an icune Chis
& au traucrs de ladite toile creſpe la ſanie ſort librement, & les remedes y entrent pa - rurgien.
reillement:ce faiſant le malade eit grandement ſoulage de la douleur , à cauſe qu'en
eſſuyant la lanie on ne touche à nudl’vicere . Dauantage faut bien garder , que li les

bruſleures ſont faites aux palpebres, ou aux léures , ou encreles doigts,ou à la gorge ,
R : 113
468 Douzieſme Liure des Contuſions
А
ou ſous les aiſſelles ,ou aux jarrets , ou au ply des bras, qu'icelles parties ne ſe ioignent
les vnes contre les autres : partantony pouruoira en bien ſituant les parties bruſlees,
& mectant touſiours quelques linges entre deux . Ie ne veux icy mettre en arriere ,
que la poudre à canon enflammée penetre en la chair , fans quelquesfois vlcerer le
cuir: ccqui aduient pour ſa tenuité & ſubtilité. Elle demeure detelle façon au pro
fond d'icelle chair , qu'elle n'en peut aucunement eſtre oſtée : en ſorte qu'ayant ef
ſayé à l'en tirer par tous moyens qu'il m'a eſté poſſible ,comme auec veſicatoires,ſca.
rifications & cornets appliquez deſſus,ce neantmoins la ceinture & marque d'icelle
y eſt demeurée , tout ainſi que l'on void les cara & eres ou lettres qu'on a fait aux ef
claues y demeurer à iamais , quelque choſe qu'on y puiſſe faire.

V neprofonde bruleure n'eſt tant douloureuſe qu'une ſuperficielle.

С НА Р. XIX.

B
Auantage vne profonde bruſleure ayant fait eſcarre dure, n'eſt
tant douloureuſe comme vne qui eſt ſuperficielle: ce quel'expe.
rience quotidiane monſtre en ceux qui ſont cauteriſcz : car colt
apres la cauteriſarion ne ſentent que bien petite douleur , à rai
ſon qu'icelle grande combuſtion olte le ſentiment, en bruſant &
mortifiant les partiesſenſibles, comme nous auons dit cy deflus
parlát des playes des parties nerueuſes, & de la douleur des dents.
Età telles eſcarres ſera fait des ſcarifications, tant & fi profondes, qu'on aille à la
1
chair viue , afin de donner tranſpiration aux humeurs , & place aux medicamens re
mollitifs pour pluſtoſt faire tomber l’eſcarre , & apres on appliquera remedes deter
ſifs, & generatifs de chair , adiouſtant aux ſuſdits onguens qu'auonsparlé cy-deſſus,
des poudres minerales. Et quantà la quantité ie ne la puisdeſcrire ſans eſtre taxé a
on ne peut uec ceux que Galien dit , chauſſer toutes perſonnes à vne forme : dont ie laiſſe la
aßigner par quantité d'icelles poudres,à fa prudente conie & ure du Chirurgien , cognoiſſant с
liure la qua- bien que la quantité desmédicamens ne ſe peut rationnellement deſcrire ( non plus
dicamens. qu'vn peintre la meſlange de ſes couleurs ) tant pour la diverſité des diſpoſicions,
qne des corps , & des parties d'iceux , & auſſi ſelon la varieté des accidens , & au
tres choſes qu'auons cy - deuant dit , parlant des indications. Ec apres que nature
aura remply dechair l'vlcere , on vſera de medicamens cicatrizatifs qui ont vertu
de faire le cuir . Or la cicatrice des bruſleures demeure ſouvent laide & raboteuſe :
parquoy ſera applanie ( & principalement aux mains & à la face ) par les reme
des eſcrits au traicté de la Peſte , chapitre trentehuidieſme . La bruſlcure fai
&te par le tonnerre doit eſtre traictée comme celles qui ſont faites par la poudre à
canon .

Des Gangrenes & mortifications. CHAP. xx .


>

N toutes les playes& folutions de continuité ( deſquelles i'ay parlécy


deſſus) furuiennent le plus ſouuent grands & griefs accidens , tant D
pour l'inaduertance du Chirurgien , que par les fautes qui viennene
auſſi bien du patient, que des autres choles exterieures : ou pour la
grādeur de la maladie : & principalement entre autres accidens aduien
nent gangrene & mortification, qui ſont de tres grande importance & perilde
vie , fidiligemmenton n'y remedie . Parcant m'a ſemblé bon elcrire deſdites Gan

11 Faur laiſſer grene & mortification , & ce pour deux raiſons: L’vneeſt,que leſdites gangrene&
la proprecu- mortification donnent plus de mal, canc aux Chirurgiens qu'auxpatiens , que les .com
re cu
re pourſur- maladies auſquelles ſuruiennent : au moyen dequoy faut delaiſſer la prop
uenir auxac- re , pour obuier à leur fureur & malignité. L'autreraiſon eſt, que i'ay deſia decla
cidens.
ré par cy -deuant, vne partie des cauſes deſdices gangrenes & mortificacions : cou

tesfois de toutes i'en ay voulu eſcrire amplement & de leur curation , afin qu'vn cha
cun puiſſe auoir entiere cognoiſſance de les curer ainſi qu'il appartient , le com
menceray donc à la definition , puis te declareray les cauſes , leurs ſignes, progno
ſtic, & conſequemment la curation , que ic donneray à entendre par exemple & de
Combuſtions & Gangrēnes. 469

A monſtration familiere. Gangrene eſt vne diſpoſicion , qui tend à mortification de la Definition
parcie bleſſée, qui n'eſt encores morte ne priuée du tout de ſentiment, mais elle ſe de gangrene.
meurt peu à peu , en ſorte que ſibien toſt on n'y donne ordre , elle ſe morcifiera du
tout,voireiuſques auxos: qui alors eſt appellée des Grecs Sphacelos, ou Necroſis, des
Latins Syderario,& Efthiomenos ſelon les modernes , & des vulgaires le Feu ſainct
Antoine , ou fainct Marcel .

Descaufes generales de Gangrene. CHAP. XXI .

A cauſe premiere & generale de Gangrene, eſt quand par la dif- La cauſe ge
ſolution de l'harmonie ou temperature des quatre qualitez , vne nerale de
partie ne peut receuoir les vertus ou eſprits quila maintiennent gangrene
& conferuent en ſon eſtre, à ſçauoir l'eſpric naturel procedant du mortificació.
foye , porté par les veines pour luy donner nourriture . Sembla
blement l'eſpric vital,enuoyédu cæur par les arceres pour la viui
B fier. Aufli l'eſprit animal enuoyé du cerueau par les nerfs pour
bailler ſentiment & mouuement : leſquels eſprits receus en la partie , conſeruent &
reſtaurent l'eſtre & temperature de ladite partie en ſon entier. Et au contraire, fi par
quelque empeſchement ne ſont communiquez à icelle parcie , faut qu'elle ſoit cor
rompuë & gaſtíc, & ſon mouuement depraué: qui eſt la cauſe principale deſdites
gangrene & mortification : laquelle auſſi prouient d'autres cauſes ſpeciales & parti
culieres cy -apres declarées .

Des cauſes particulieres de Gangrenes. CH A P. XXII.

7 . Es cauſes ſpeciales ſont primitiues , ou antecedentes . Les primi- Combuſtion.


ciues & externes ſont combuſtions (par le moyen deſquelles ſur
uiennent grandesspflammations) faites actuellement, ou poten
ciellement: Actuellement, comme brullures cauſées par feu ,

с huile , cau , poudre à canon,ou ſemblables: Potentiellement, par


application de medicamens acres,commeſublimé, vitriol, caute
1 res potentiels ou autres : Par frigeratios ou grandes morfondures Frigeration.
faites par l'air qui nous enuironne , ou par indeüc application des remedes froids &
ſtupefa & ifs, fractures, luxations , grandes contuſions ou meurtriſſeures, forces liga
tures, morſeures de beſtes veneneuſes, ou autres non veneneuſes, piqueures de nerfs
outendons, playes faites és parties nerueuſes, comme ésiointures ou pres d'icelles :
ou faites és corps plethoriques & cacochymes. Autres playes eſquelles les vaiſſeaux
qui apportent la vie , ſont du tout trenchez ou en partie , donc à aucuns l'enſuit ce
que les Grecs appellent Aneuriſme : & autres cauſes , leſquelles ie laiſſe pour Aneuriſme,
briefueté.

Des cauſes antecedentes de Gangrene. CHAP . XXIII .

Es cauſes antecedentes ou internes ſont grandes fluxions d'humeurs Fluxio cauſe


D
chaudes ou froides , qui tombent ſur une partie en plus grande quan- de gangrene.
cité qu'elle ne peut alterer, digerer & regir par ſes facultez , en ſorte
que celles Auxions ſuffoquent & eſteignent la chaleur naturelle & les
eſprits, par faute de tranſpiration. Car pourla petite & eſtroite eſpace
du lieu , les arceres ne peuuentauoir leurs mouuemens naturels . Outre - plus Galien Gal. au liu .
diçqu'aucunesfois l'inflammation commence aux os : ce qui nous eſt auiourdhuy des Tumeurs
bien manifeſte. Ce que meſme dit Hippocrates en la ſentence 2. du 2. des Epide covenature,
mies. Etnon ſeulement inflammation ſimple , mais carie & corruption deſdits os ,
principalementaux verolez , & elephantiques ou mezeaux : deſquels la chair & cuir
fc monſtre ſainen aucuns endroits & non corrompu , & au deſſous on trouue les os
tous pourris , corrodez , percuiſez & vermoulus , & meſme le plus ſouuent perdi
tion de leur propre ſubſtance , voire en grande quantité. Ce qui ſe fait d'une ma
tiere veneneuſe ,
dont la qualité ne ſe peutexprimer. L'hiſtoire luiuante en fera foy: Hifoire.
hiſtoire , dy - ie , fort remarquable & digne de grande admiration , d'vn Receueur de
Rr inj
1

470 Douzieſme liure des Contuſions,


Madame la Conneſtable, demeurant en la ville de Senlis, nommé du Freſnoy, le A
Tumeur en la quelm'enuoya prier de l'aller voir, à cauſe qu'il'auoit en la ceſte vne tumeurde la
reſte de la groſſeur d'un æuf entre l'os occipital & parietal,pour ſçauoir de moy s'il y falloit
los faire ouuerture , eſtimantqu'ily euft de labouë . I'y
grofeurd'un
aufentre
crouvay deuxMedecins& deux
occipitale Chirurgiens demeurans audit Senlis , gensd'honneur& de bon ſçauoir: nous con
parietal. ſultaſmes ſur le faict de l'ouuercure. Ayant conſideré la tumeur, & entendu comme
elle eſtoic venuë peu à peu, & de longue main, & apres auoir ſenty & remarqué yne
pulſation (qui eſtoic lemouuementdu cerucau)penſant quece fuſt vne artere,parce
que lors quc i'appuyois ma main deſſus,la tumeur s'abailloit & diminuoit veritable
menti’eus opinion que c'eſtoit vn Aneuriſme : & dés lors ie dy , qu'il ſe falloit bien
garder de faire ouuercure de ladite tumeur, de peur d'une hemors hagie, & par con
ſequent de mort ſubice. Or il y auoit vn des Medecins , & vn des Chirurgiens, qui
tenoient qu'il n'y auoit aucun danger de l'ouvrir , eſtimans qu'il n'y euſt que dela
bouë.Leprocezeſtant ainſi party en deux, ie fus d'avis qu’on enuoyalt querirMon
ſieur Fabry, Medecin ordinaire du Roy , & de Madame la Cõneſtable, qui eſtoit lors B
à Chantilly,pour aduiſer s'il y falloit faire ouuerture ou non :lequel donna prompte
ment ſon aduis,eſtimant comme les autres, qu'il y auoit du pus,& qu'on pouuoitſans
-nul danger faire euacuation d'iceluy .Toutesfois lors que ie luy dy que i’auois opi
nion que ce fuſt vn Aneuriſine, par les ſignes qui y apparoiſſoient,il changea de pro
pos ,& conclud qu'on n'y touchaft nullement, & qu'il falloit penſer ladite tumeur
comme vn Aneuriſme , qui auoir touſiours eſté mon aduis. La reſolution faite, ie
m'eo reuins à Paris : mais ledit Receueur crois iours apres enuoya querir vn Barbier
à vn village pres de Senlis, lequelli coſt qu'il fut arriuc, & qu'il eut veu le patient,dit
qu'il y auoit dupus contenu en ladice cumeur, & qu'il n'y auoit point danger de l'ov
urir : ce qu'il fit, & en lieu de bouë,en ſortir de la propre ſubſtáce du cerucau , & deux 4

La fubftance jours apres ledic Receueur mourur. Apres ſon decez, la teſte luy fut ouuerte par A.
du cerueas dam Hannequin,& Hamard Cheron , Maiſtres Barbiers & Chirurgiens demeurans
forsit de la
tumeur en audit
du
Senlis: leſquelsm'ont atteſté que la tumeur eſtoit faite de la proprc fubitance
lieu de bouë cerucau , auec deperdition de deux tables du crane,de la grădeur d'on Noble à la
pretenduć. Roſe. l’ay bien voulu reciter ceſte hiſtoire ,à fin d'aduertir le ieune Chirurgien de ne C
faire ouuercure à la reſte en ſemblables tumeurs. Et pour retourner à noſtre propos,
1
Gal.dicau Commentaire ſur le 54. Aphor.du 7.liure, quemeſme Narvre forte peut
!

ietter la bouë au trauers la ſubſtáce des os . Souventesfois auſi quád la chair de quel
que parcic eft vlcerée, il s'engendre vne mauuaiſe fanie,acre & feride, de laquelle ſi
les os ſuiers ſont imbus, ſe corrompent & carient. Ce qu'on void ſouuent aduenir
aux vlcerescacoëthes&malins,ou autres, quide long teinps ont demeuré ſur aucu
sphor.
lin . 6. 41. ne partie. AuſliHippoc.le ceſmoigne, diſant qu'en fous viceres d'vn an ou de plus
longtemps,ileſt neceſſaire que l'os ſe ſepare & tombc, & qu'il y demeure cicatrices
Qualité des profondes & caues. Semblablement le diçesgangrenes & mortificationsaduiennét
menexle. par qualité veneneuſe, chaude ou froide: Chaude, comme on voit aux charbons
& anthrax peftiferez, qu'en moins de ving - quatre heures ſe fera eſcarre & morti
fication en la partie affectée : Froide, comme on void lubit aducnir en vne partic 1

Reſponſe. ſans douleur precedente, ny tumeur, ny liuidité, ou autres ſignes de gargrene. Ce


que de Vigo certifie auoir veu advenir à vne noble femme dela cité de Gennes. Il
me ſouuient auſſi auoir veu ſemblable faict en ceſte ville de Paris, à vn homme, le- D
quelfaiſoitbonne chere le ſoir, ne le plaignant de nulle douleur : toutesfois la nuict
luy furuint gangrene& morcification aux deux iambes, ſans tumeur nyiofanyna
tion: mais y auoicvne couleur en certains endroits tendance à liuidité , noirceur, &
verdeur : en aucuns autres endroits eſtoic la couleur quaſi naturelle : toutesfois n'y
auoit aucun ſentiment, & lorsqu'on le piquoit auccques la pointe de la lancette, ou
auec vne épingle , n'en ſortoit point de Tang, & de chaleurau ſens du cact n'y'cn
auoit aucune,mais au contraire on ſentoit pluftoft vne froideur.Ce voyant, appilay .

conſei !, par lequel fuc deliberé & ordonné qu'on luy feroit plotieurs x profondes
inciſions pour tenter la cure :ce que ie fis, mais d'icelles inciliens n'en forcoit qu'vn
Gangrene peu de fang fort noir,gros & quali congelé . Pluſieurs avtres reinedes furent toutez:
inckrable. ce neantmoins en bref rendic ſon eſprit à Dieu auecques giandes reſucries , ayant
le viſage & tout le corps liuide, le laiſſe à penſer ſi la cauſe n'estoit point vedencu
ſe. Pareil cas aduint à vn quidam à Thurin , l'an mil cinq cens trente - lix , ainſi que
Combuſtions & Gangrenes. 471
"A i'ay entendu par le recit que me fit François Voſte, Chirurgien tres-docte,citoyen
A
dudit Thurin. En ce lieu ne ſera impertinent declarer & expoſer comme font faites
gangrenes & mortifications par le froid ſans qualité veneneufe: ce quei’ay ſeulemét
touché en vn mot aux cauſes externes. Doncques pour plus grande clarté se te l'ex
20
pliqueray.Lefroid excreme, ſoitpar l'airambiens, ou par application de remcdesre. Comment le
6
percuflifs,froids,& ſtupefactifs, fait vne intemperie froide,ſigrande queles eſprits gan
froidgrenes
cause.
t
ſon ſuf foq uez ein ts enc e
& eſt . Etlors que Nature ou la prouid de tout le corps ren
C.
uoye autres eſprits pour ſubuenir à ladite partie , leſdits eſprits ne trouuans l'harmo
niebien diſpoſée pour eſtre receus,ſe retirent ſubit vers leur origine, comme l'ils
eſtoient repouſſez par le grand froid de ladite parcie , ennemný, & du tout contraire
à Nacure : & pourtant ladite partie ainſi deſticuée deſdits eſprits , promptement ſe
u!
‫ܐܐ‬
mortifie. Cecy ſe cognoiſt.inanifeſtement en ceux qui marchent par les neiges &
De
glaces : car par l'extreme froid perdentaucuns de leurs membres , si bien ſouuent la
DKS
vie,commepreſentementdeclarerons. l’ay bonne memoire auoir medicamenté en Hiſtoire.
Piedmont pluſieurs ſoldats ayans paſſé les montagnes en Hyuer : deſquels les vns
2x
par l’excreme froid auoient perdu les oreilles,lesautres la moitié d'vn bras , les autres
B le inembre viril,autresles orteilsdes pieds,aucuns y perdirent la vie, teſmoin la Cha Chapelle des
10. pelle des Tranſis, ſituée ſur le mont Senis. Auſſimeſouuientqu'en temps d'Hyuer, Tranſis.
vn pauure Breton ,ſeruiteurd'eſtable,demeurantà Paris,fen alla coucher ſus vn liet, Hiſtoire.
apresauoir bien beu, pres lequely auoit vne feneſtreà demy-ouuerte,parlaquelle le
AT
froid entra : & tellement luy altera l'vne de ſesiambes, qu'à ſon réueil penſanç ſe le
uer, neſe peutſoutenir. Etpourtant futpoſé pres le feu ,duquel il approcha ſa iam
be,cuidant qu'elle fuſt ſeulement endormie: mais ſe brufla la plante dupied d'épaiſ
feur d'on doige ſans rien ſentir : parce qu'elle eſtoitjamortifiée parle froid plus qu'à
la moitié.Le lendemain ledit Breton fut apporté à l’Hoſtel-Dieu , où il fut viſité
wu
par le Chirurgien ,& autres,leſquelsconclurent qu'il eſtoic neceſſaire couper & am
puterladiteiambe ainſi mortifiée ; ce qui fut fait :mais ce neantmoins ladite morti
ficacion gaigna les parties ſuperieures,en ſorte que dedans trois ioursapres ledit Bre
tonmourutauec ſucur froide, refaeries, grands roucemens & fyncopes. Dauantage
audit meſme temps d'Hyuer faiſoit ſigrand froid, qu'à aucuns malades couchez au
online C dit Hoſtel- Dieu l'extremisé du nez ſemortifia fansyauoir aucunepourriture à qua
tre d'iceuxie fisamputation de ladite partie, deſquels les deux guarirent, les autres
20
moururent. Cependant faut noter, qu'en ce cas de froidure les parties extremes, &
entre celles-cy les plus eſloignées du cæur , comme les pieds & iambes :ou les plus
Cu
froides de leur temperament,commele nez ou oreilles,&autres cartilagineuſes,iont
touſiours ſaiſies de gangrenes les premieres . Puis que j'ay declaré amplement toutes
(61
les cauſes de gangrene & mortification ,fautproceder à la declaration des lignesdel
na
dites gangrenes & mortification,leſquelles ic diſtingueray ſelon leurs cauſes, à fin de
03
bailler aux icunes Chirurgiens non encores exercez, l'enciere cognoiſſance deſdites
gangrene & mortificacion, & de leurs cauſes.

Des ſignes de Gangrene. H


CH A P. XXIIII.
1
e- ) Es ſignes de Gangrenes faiđes par inflammation , ſont quand la gran- signes de
D de douleur & pulſation quiauoient precedé leſdites inflammations,gangrene og
ſont grandement diminuées,& la couleur rubiconde ou vermeille , mortification
2.
par inon.lam ,
qui eſtoit auparauant en ladite partie , eſt changée en couleur palle, mari
Y
fuſque, & aucunement tendante à liuidité , comme fort amplement
deſcrit Hippocrates , en la ſeconde ſection du liure De fracturis,où il parle de la
12
gangrene du talon. l'entens icy douleur pullatile , non celle qui eſt faicte par le
mouuement des arteres , mais vne pulſation ie&tigatiue, ou poignante, qui ſe fair,
S
quand par le combat d'entre les deux chaleurs ſçauoir eſt nacurelle & non na
12
turelle ) relleuent pluſieurs vapeurs des humeurs & matieres qui tendent à pour
:
riture ésparties enflammées. Sile froid eſt cauſe deſditesgangrene & mortification , signes de
1
ſera aiſéà cognoiſtre: car ( comme un chacun ſçait) le grand froid promptement gangrene par
fait à la partie grande douleur poignante & cuiſante, & rougeur eltincelante , & froidurs.
tolt apres la rend liuide,& fort froide, & quaſi ſans mouuement & fentiment , auec
horreur ou tremblement , comme ſi on auoit vn commencement de ficure quarte.
472 Douzieſme liure des Contuſions,
A
Si le froid continuë plus longtemps que la chaleur de ladite partie ne puiſſe reſiſter,
ſuruiendra gangrene,& par conſequent mortification ( li on n'y donne ordre) & à la
Aphor.
liv . 7 .
18. parfin la mort :car ( comme dit Hippocrates) le froid eſt contraire & ennemy aux
os, dents, nerfs, au cerucau, &à la moëlle du dos, generalement à noſtre vie,laquel
le conſiſte en chaleur & humidité,àcauſe qu'il faitſpaſmes ou conuulſions, & autres
mouuemens contre noſtre vouloir,agitation deſordonnée de tout le corps,quenous
appellons friſſons, & conſequemment par ſa grande violence eſt ſouuentesfois cauſe
Signes de denoſtre mort. Quanteſt desgangrenes & mortifications faites par ligatures fortes
gangrene par és fractures, luxacions, grandes contuſions,cu les cognoiſtras facilement à la dureté,
ligature, qui eſt pour la defluxion ,pareillement des veſſies qui ſeront elleuées au cuir , lef
bruſleures
, quelles viennent à raiſon de la grande inflammation qui eſt en la partie: cequiſe
eto autres
Cauſes. void manifeſtement aux bruſleures:auſſi par la peſanteur & impotence de la partie,
qui ſe fait à raiſon que les eſprits manquent,& lorsqu'onpreſſe deſſus , la foſſe des
meure ſans ſe releuer,coinmeaux Oedemes, & le cuir le plus ſouuent ſe ſepare de la IN

chair.Les ſignes declarez aux gangrenes engendrées par inflammation , ce pourront B


döner cognoiſſance des gangrenesfaites parmorſures,piqueures, aneuriſmes,playes 200

faites és corps plethoriques & cacochymes: car par ces cauſeseſt faite fluxion, & at
tradion d'humeurs en trop grande quantité , qui empeſchent(commei'ay dit) l'air
& euentilation de la partie. Maisie te veux encoreaduertir qu'ayant cogneu par les
ſignes les inortificacions, ne faut differerà faire amputation du membre , iaçoit que
les extremitez ſe remuent : car la teſte des muſcles ſe remuant tire la queuë , ou leurs
tendons. Dauantage encore qu'il y euſt quelque peu de ſentiment, ne fauc differer VIDEO

l'amputation , iuſques à ce qu'il n'y en aye plus,attendu qu'elle pourriroit les parties
voiſines. Quant aux ſignes de gangrene &mortification prouenantes de venins, icy
n'eſt beſoin de reciter lafaçon comme lon peutcognoiſtre & diſtinguer les accidens
quiaduiennent,tantdes venins chauds quefroids: car nous en pourrons parler
amplement cy- apres.
Du Prognoſtic des Gangrenes. CHAP. XXV.
С

Pres donc que lon à cogneu la gangrene & mortification par ſes
ſignes & cauſes,faut auantque center quelque choſe de la cure, re sen
garder quel effect pourra auoir ladite diſpoſition , & le predire & figni
Prognoſtic ñer aux parens ou amis des malades (ce que nous diſonsprognoſtiquer)
de gangrene. commeie te diray. Gangrene & mortificacion ſont de li grande fero
cité & malignité , que ſi on n'y remedie promptement , la parcie facilement, & du
tout mourra , & corrompra les parties proches : ce quieſt cauſe que quelques-vns
ont appelléla Gangrene Chylomenos, pource que telle corruption chemine par toute
la partie comme venin , & la corrode commefait le feu épris au bois ſec, cant que
Auant -cox- finalement fera mourir les patiens. Et auparavant qu'ils meurent , ont tous vne
reursdemort ſueur vniuerſelle froide , auec deliresou reſueries, fyncopes ou éuanouiſſemens,
en gágrenes. roučtemens &hocquets:à cauſe que les vapeurs éleuées de la putrefaction & pour
riture, font communiquées & portées par les veines,arteres,& nerfs aux parties no TOOL
bles. Ton prognoſtic faict,faut mettre la main à l'æuure , ainſi que ie declareray D
maintenant.

De la curegenerale de Gangrene. CH A P. XXV I.

Cure genera N la curation de Gangrene , faut prendre les indicacions d'icelle, Car il
le de gangre. faut diuerſifier la cure ſelon l'eſſence ou grandeur du mal : parce qu'aucunes
ne. gangrenes & mortifications occupent toute vne partie,lesautres ſeulement
vne portion :les vnes ſont profondes, les autres ſuperficielles. Les cauſes auſſi diuer
ſes font diuerſifier la cure. A toutescauſes ne conuient appliquer vn meſme remede.
Du tempera Semblablement faut auoir égard au temperament du corps & de la partie. Car au mic
met du corps. cuns ( commeauonspar cy -deuant dit ) ſont de temperature molle & delicate,com ata
me femmes,jeunes enfans,gens oiſifs & viuans delicatement, chaſtrez,& autres, leſ
quels demandent remedes plusdoux & moins violens , que ceux qui ſont d'habitu
de ou ſubſtance dure & robuſte, comme laboureurs, mariniers, bateliers, chaſſeurs,
Combuſtions & Gangrenes. 473
A. porte-faix , & autres gens de trauail. Non ſeulement faut auoirceſte conſideration
du corps , mais auſſi despartiesbleſſées. Car il y a difference despartiesmuſculeuſes de la nature
& charneuſes,commebras ou iambe: ou parties nerueuſes, dures & folides, comine des parties.
ſpondyles,iointures, & autres:aufli des parties chaudes & humides , comme ſont les
S
parcies nonteuſes, labouche,la matrice,l'anus,eſquelles pluspromptement aduient
corruption & pourriture, par cauſeinterne,& Auxion d'humeurs,qu'aux autres par
cies de noſtre corps.Parquoyſelon l'eſſence,temperature ,& diſpoſicion naturelle de
ces partics & du corps, faut adminiſtrer reinedes, & proceder à la cure. Et entre les Maniere de
autres remedes,faut ordonner bon regime & maniere de viure, fur les fix choſes non viure.
naturelles,pour obuier & contrarier (tant qu'il nous ſera pollible)à la maladie,& à ſa
cauſe ,ſi elle eſt encore preſente. Si l'habitude du corps eſt plethorique ou cacochy
me,fautfaigner ou purger ſelon le conſeil du Medecin . Et pour autát que les vapeurs
quiſelleuent de la partie gangrenée , ſontcommuniquées par les arteres au cour, &
confecutiuemétaux autres parties nobles: faut roborer lecæur, à fin qu'il ne ſoit in
fe &té de ces vapeurs malignes,en donnant à boire cheriaque diffoute en eau de petite
05
B
ozcille,ou chardon benit: mithridat à manger, & cóſerue de roſes ou bugloſes opia
.
tes,& autres choſes cordiales,quiontelté declarées cy -deſſus. On pourra auſſiappli- Remede con
40
quer cet epitheme par dehors,ſurla region du cæur pour touſiours roborer. 22.aq.tre tous ve
he ro
rol.nenuph.añ.3.1 ).aceri ſcyllitici zj.corall.& ſantal.albo. & rubr.rol.rubr.puluer. borer
ninspour
le cæur.
& Ipodijan.z ;mithridatij,ther.an.zij.B.trochiſc.de camph.zij. Aor.cordial.pulu .
p.ij.croci zj. diſſoluantur omnia fimul,fiat epithema,quod ſuperponatur cordicum
1

185
panno coccinco ,aut ſpongia.Voila briefuemērle ſommaire des choſes vniuerſelles :
il nous faue venir maintenant à la curation propre & particulierc deſdites gangrenes.

De la cure particuliere de Gangrene. C H 4 P. X XVII .


This

PG A curcde Gangrene faite par fluxion de fang, & autres humeursqui ſuffo
quent la partie ainli que lon void louuent aduenir aux grandes inflamma
tions, ſe doit faire en euacuant & ſeichant promptement leſang & humeurs
LC
corrompus,qui ſont arreſtez enla parcie dolente,auecquespluſieursſcarifications &
a
incifions grandes,moyennes, pecites , profondes, & luperficielles , ſelon qu'il ſera
beſoin & neceſſaire: à fin que ladite partie ſe puiſſe euenciler & flabeller, & lesva
peurs corrompuës exhaler. Lon fait les inciſions quand le mal eſt grand, profond, & Inciſions.
c) prochain à pourriture, & les ſcarifications quand il commence à putrefier. Car d'au
To. tantque le mal eſt grand, il a beſoin de remedes grands & violens. Parquoy ſi ledit
do Hipp.aph .
mal va iuſques aux os , faut diuiſer le cuir & la chair de pluſieurs & profondes inci Extremis
pos fions, que pourras faire auec raſoir à ce propre & conuenable . Toutesfois ſe faut morbis.
JI donner gardede coucher les nerfs & vaiſſeaux notables , f'ils ne ſont du tout pourris
ILO Sycorrompus. Car en ce cas faut faire inciſion , fans auoir égardauſditsvaiflèaux :
mais fils ſont enciers , les inciſiós ſoient faites entre leſdits vaiſſeaux ſans les coucher,
15, f'ileſt poſſible. Sila gangrene eſtmoindre, n'eſt beſoin que de ſcarifications ſeule
‫ܬܪ‬
ment.Apres les ſcarificacions & inciſions faices,faut laiſſer couler beaucoup de ſang, scarificatios.
à fin de vacuer la matiere coniointe , décharger & ſeicher la partie. Puis appliquer
remedes quiontfaculté d'oſter la pourriture par leurvertu calfa &tiue,deſiccatiue,
D reſolutiue , deterſiue , & aperitiue, & penetrerau profond, à fin de conſumer lama
tierevirulente & corrompuë , laquelle eſt arreſtée & fixe en la partie gangrenée. Ec
à ceſte intention, feras ablution avec lexiue faite de cendres de figuierou dechelne,
il
ca laquelle on aura faitbouillir lupins,tantqu'ils ſoient parfaictemét cuits. Ou pour Ablutions
's
auoirremedcs plus parables , faut prendrede l'eau ſaléc, en laquelle on aura faict on lauemens.
boüillir aloes & Egypriac,yadiouſtantà la fin de l'eau de vie. L'eau de vie & vitriol
calciné eſt fingulier remede.
Autre. 2. aceti oprimi tb.j.mellis roſati z iiij.fyrupiacetoli z iij . falis comm.zv.
bulliant fimul,adde aquæ vitæ tb. 13. D'icelles ablụcions faut lauer par pluſieurs fois
la partic:car ellesſont de grande efficace aux gangrenes. Ceſdites ablucions faites,
appliqueras Egyptiac ſur plumaceaux:car c'eſtle plus excellent &premier en dignité Egyptiac qui
entrelesremedes cõuenables aux pourritures pource qu'il fait ſeparerla chair pour. eftforecon
rie d'auecques la faine faiſanteſcarre: deſquelles en telcas ne faut attēdre la cheute, uenableaux
mais plultort les couper,& oſter ce qui ſera corrompu aucc raſoir ou cizcaux : puis y pourritures :
474 Douzieſme liure des Contuſions,
А
remetcre dudit Egyptiac tantdefois qu'il ſera beſoin. Ce que cognoiſtras à la c011
leur de la chair,à la feceur & ſenſibilité des parties fubiacentes. La deſcription dudit
Egyptiac (duquel i'ay touſiours cogneu grands effects en tel cas )eſt telle. 24.floris
æris,aluminis rochie ,mellis com.añ.ziij. aceti acerrimi zv . falis communis žj.vi.
trioli Romani ZB . ſublimati pulueriſati z ij.bulliant omnia fimul ad ignem , fiat vn
guentum :fileft beſoin ,on le fera moins fort. Avec l'application dudit Egyptiac,
Caraplaſme. Faut mettre ſur toute la partie affectée ceſtuy cataplaſıne, lequel empeſche & prohi
bela putrefaction, reſout, deterge, deſſeiche & ſède la douleur. 2. far. fabar hord .
orobi, lent. lupinor.añ.ib.B. fal.comm . & mel.roſ.añ. zinj.ſucci abſinth. inarrub .
an zij.B.aloës,malk.myrrhæ & aquæ vitæ añ.zij.oxymelitis fimplicis quant.ſufficit,
fiat cataplaſınamolle ſecundum artem . Gal.l.3.de la Compoſicion des medicamens,
ordonne faire cataplaſme pour prohiber la pourriture des gangrenes ,fait de farine
d'orge & !exiuc : auſi le capitel des cauteres eſt fort propre. Lerdies remedes con
ſomment , refoluent & detergent la ſanie virulente & matiere pourrie: & pour leur
grande ſiccité & tenuicé d'ellence penetrāt au profond,empeſchentla putrefaction , B
ſedent la douleur , & roborent la partie : ce quieſt plus neceflaire en elcas. On doit
auſſi appliquer au deſſus du mal vn celou ſemblable defenſif, pour obuier & repri
mer la deſcente des humeurs, & garder que les vapeurs pourries elleuées de la putre.
faction , ne montent au cæur , ou aux parties ſuperieures & nobles. 24.olei roſati,
myrt.añ. Zilij.fucci plantaginis,ſolani,ſemperuiui an . Zij.albumina olor.numero
quinque ,boli armenici , terræ ſigillatæ ſubtiliter pulueriſatæ, an .Zj . oxycrati quan
Les remedes tum ſufficit,iniſce ad vſum dictum . Lon en pourra faire auſſi d'autres ayans pareille
fe doiuent vertu : mais fautnoter que ceſdics remedes ſe doiuent renouveler ſouvent. Car lors
renouueler
fouuent.
qu'ils ſont froids, refroidiſſent la partie ,qui eſt languide,à cauſe que fa chaleur eſt
preſqueſuffoquée :& partant il y faut ſouuent appliquer linges chauds, ou briques,
ou bouteilles remplies d'eau bouillante,à fin de roborer la chaleur naturelle qui eſt
preſque du tout eſteinte. Etne fautprendre indication,ſila gangreneaeſté faite par
inflammation,mais de la diſpoſition qu'elleaura laiſſée en la partie.Or ſi le malelt fi
grand qu'il ne veucceder aux ſufdics remedes,fautvenir à d'autres plus vehemens & с
violens,qui font les cauteres actuels. Apres l'application deſquels Galien au ſecond
à Glauc.commande que ius de porreaux auec lel pilé & diſſout ſoit mis deſſus,à cau
ſe que tel remede penetre & ſeiche fort, & par ce moyen empeſche la pourricure. !

Dauantage,fileſdits cauteres ne profitent,ileſt beſoin venir à l'extreme, qui eſt faire


Aph. 6 .
liare 1 .
amputation dela partie,ſuiuantle dire d'Hippocrates : Aux maladies extremes con
uiennent extremes & derniersremedes. Toutesfoison ne doit ce faire, que premie
renient lon n'ait certaine cognoiſſance ſila partie eſt totalement morte. Car ce n'eſt
pecic cas de couper vn membre, f'il n'eſt plus que neceſſaire. Parquoy ie re donneray
entiere & infaillible cognoiſſance des parfaictes mortifications & fphaceles,par les
ſignes cy-apres declarez. Ouide :
Le membre infect d'une playe incurable
Se doit couper, que le fain il n'accable. MA

Des ſignes des mortifications parfaictes. CHAP. xxviii.


D

Ion cognoiſt en la partie affectée, noirceur & froideur, prouenant de l'ex


tinction de la chaleur naturelle, non de l'air enuironnant : grande molleſle, D
laquelle ſi on comprimene ſe peut releuer,ainsy demeure cauitéou fofles
ſeparation du cuir d'auecques la chair ſubiacente, & ne ſent- on nul batcenienc des
arteres: grande puanteur , comme de charongne (principalement filedit ſphacele
eſt vlceré) dont la ſenteur eſt cant acre & forte, qu'elle eſt intolerable & abomi.
4.12

nable à toutes perſonnes, & en ſort vne liqueur viſqueuſe , de couleur noire 85
verdoyante, totale priuation du ſentiment & mouuement, ſoit qu'on tire , frappe,
preſſe,bruſle,coupe,touche,ou pique : certainement pourras conclure vne morcfi
cation parfaicte,ouſphacele :toutesfois faut auec boniugement explorer ladite pri
poinct nota uation du ſentiment. Car ie ſçay que pluſieurs ont eſte deceus ſe fiansàvn ſenti
ble ſur le ment que les patiens diſentauoir, ſi on pique,preffe,ou autrement accouche, lequel
ſentiment en eſt totalement faux & deceptible. Car il ne vient que d'une grande apprehenlion
gangrene. de la douleur extreme , quiauparauanteſtoit en la partie : & principalement par
la
conti
i

Combuſtions & Gangrenes . 475

continuité & conſentement qu'ont encore lesparties mortes auec les viues . Comme
A
pour exemple familier , nous voyonsque ſi lon tire vne chemiſe ou autre veſtement
adherantà noſtre corps,nousdiſons le ſentir , iaçoit que ledit veltemét eſt inſenſible Accident
& ſeulement contigu à noſtre corps. De ce faux ſentiment auras argumēt manifeſte admirable.
apres l'amputation
des parties mortifiées. Car les patiens long cemps apres l'ampu
tation faite , diſent encor
’ ſentir douleur és parties mortes & amputées ,& de ce ſe
plaignent fort: choſe digne d'admiration, & quaſi incredible à gens qui de ce n'ont
experience. Parquoy ſe fautdonnergarde que cel ſentiment nenousretarde à faire
le deuoir de la parfaicte curation : comme quelquesfois i'ay veu coupper vn membre
à deux ou à trois fois, pour ſ'eſtrearreſté à un ſentimentfaux & incertain . Donc Amputation
apres auoir cogncu que la partie eſt vrayement morte , la faut promptement & ſans de la partie
delay, tant petit ſoit-il, couper & amputer : car la contagion & corruption rauit & morie ſedoit

gaigne ſans ceſſe les parties prochaines faines & viues : & pource Hippocrates en la farre prom
premeni.
feptieſme ſection du fixielmeliure des Epidemies , dit que les ſeĉtions, vſtions& tre
pans, ſe doiuent promptementexecuter . Ceremedeelt miſerable & digne de com
B
paſſion ,cancau patient qu'au Chirurgien : mais c'eſt le ſeul & dernier refuge que l'on
doittouſiours preferer à la mort , laquelle fenſuiura , ſi l'oncherche autres moyens
quc le &tion de la partie mortifiée.
1102

Dulieu où il fautcommencer l'amputation . CH A P. XXIX .

para L ne ſuffic coutesfois de cognoiſtre qu'il eſt neceſſaire d'amputer


Cach
la partie mortifiée , mais faut ſçauoir le lieu où l'on doit faire & Quel iuge
commencer l'amputation : & en cela giſt leiugement & prudéce ment eff re
du Chirurgien. L'art commande que l'on commence à la partie Etion quisend'un
la les
faine, mais ie declareray cecy facilement. Poſons pour exemple ,
membre.
qu'aucun ait vn Eſthiomene au pied iuſqu'aux malleoles ou che
uilles . En tel cas faut bien conſiderer là où tu dois faire l'amputa
tion : car ſelon l'art faut garder le corps humain entier,tāt qu'il ſera poſſible. Parquoy
cu dois oſter le moins que tu pourras de la partie ſaine. Ceneantmoins faut auoir
C conſideration de l'action sornementde la partie , leſquels te donneront conſeil de
couper ladice iambe,à cinq doigts ou enuiron prés le genoüil.Pource que l'amputa
DICHI
tion faicte en ce lieu , la partie pourra apres mieux faire ſon action , qui ſera marcher
mos
auec vne iambe de bois.Car l'il eſtoit ainſi que l'on coupaſt vn peu au deſſus du mal ,

le patient ſeroit en peine de portercrois iambes, là où il n'en portera que deux . Ie


ITA {çay quc le Capitaine François le Clerc , eſtantſur vn nauire eut vn coup de canon ,
donna quiluyemporta le pied vn peu au deſſus de la cheuille , de laquelle playe fut guary :
mais quelque temps apres voyāt que ſa iambe luy nuiſoit, la fic couper iuſques àcinq
doigts prés du genoüil: & maintenant ſe crouuemieux àmarcher qu'il ne faiſoit au
parauant . Au bras faut faire au contraire , qui eſtoſter le moins que l'on pourra de la Autre corſi
partie ſaine, pour la diuerſité des aâions du bras & de la iambe. Et principalement deratio pour
pource que le corps ne ſe repoſe ſur le bras , comme ſur les pieds & iambes . l'ay decla- la ſection
d'on bras
récy -deuant comme l'on pourra cognoiſtre la neceſſité de la ſection , & le lieu d'icel.
le : faut à preſent monſtrer le moyen de proceder & exercer la ſection .
D
Du moyen de proceder à laſection du membre. CHAP . XXX .
OUD
710.. N premier lieu roboreras la force & vertu du patient , ſ'il eſt be
par alimens propres , de facile digeſtion & pleins d'eſprits :
ſoin ,, par
commeæufs mollets , roſtie trempée en bon vin , ou autres ſem
20.5 blables . Puis ſituë le patient ainſi qu'il appartient , & tire les muf
cles en haut vers les parties ſaines, & fais vne ligature extreme vn
peu au deſlus du lieu que l'on voudra amputer , auec vn fort lien
delić , & de figure platte , comme ceux deſquels les femmes lient
curs cheveux . Icelle ligature ſert de trois choſes. La premiere eft,qu'elic tient au
l'aide du ſeruiteur, le cuir & muſcles eſlevez en haut : à fin qu’apres l'æuure ils re
here couurent l'extremicé des os qui auront eſté coupez , & apres la conſolidation de la ci
Catrice faite leſditscuirs & muſcles ſeruent comme d'un couſſinet aufdites excremi.
sr
476 Douzieſme liure des Contuſions,
tez des os . Par ainſila partie pourra demeurer plus forte, & moins douloureuſe ſi l'on A
comprime deffus. Ioint auſſi quela curation eſt plus briefue: car d'autantqu'on laiſ
le plus de chair ſur leſdits os,pluſtoſt ils ſont couuerts.Laſeconde eſt, qu'elle prohi
bel'hemorrhagie ou flux delang ,à cauſe qu'elle preſſe les veines & arteres. La troi
fieſme eſt,qu'elle rend obtus, & oftegrandement le ſentiment de la partie : pource
qu'elle empeſche par ſa grande compreſſion l'eſprit animal,qui donne ſentiment par
les nerfs à la partie. Doncapres la ligacure forte ainſifaite, faut promptement cou
per tous les muſcles & autres parties iuſqu'aux os , auec vn raſoir bien trenchant,ou
coupant courbé,comme ceſtuy ſuiuant:apresauoir deuefti & deſcouuert l'os de ſon
perioſte,à fin que la ſcie paſſe mieux & plus promptement, & à moindre douleur.
Nota que lors qu'on veut faire amputation d'vne iambe,faut qu'elle ſoit vn peu
ployée, &qu’apres la ſection on l'eſtende, à fin que les vaiſſeaux qu'on pretend lier
pourarreſter le ſang , le manifeſtent unieux pour plus facilement les pincer , tirer &
lier.Ceux qui auront mis la main à telæuure,facilemententendrontceſte methode,
& crois que nul patient ne l'a encore dicte ny eſcrite,au moins que ie ſçache. B

Confteau courbé pour couper les membres.

Il te faut noter icy ,qu'il y a entre les os portion d'aucuns muſcles, que ne pourras
bien couper auec leditraſoirou couſteau . Pourtantles couperas auec vn inſtrument
fait en maniere de lancette courbée. le t'aducrtis de ce : car ſi tu laifles autre choſe
que l'os à couper à la ſcie, certainementtu fera's en la ſciant grande douleur au pa o
tient,à cauſe que la ſcie ne peut qu'à grande peine couper les choſes molles , comme
chair, tendons &membranes ainſiqu'elle fait les os durs & ſolides.

Apres auoir enticrement coupé toutes les parties iuſqu'aux os,les faut ſcier promº
prement auectelle ſcie,de grandeurd'vn pied,trois pouices ou enuiron. Dauancage
cu mercras vn linge en doubleau deſſus de l'os qu’on veutſcier,depeur que les dents D
de la ſcie ne touchent à la chair, & ne la deſchirent.
Scie.

:
1

Combuſtions & Gangrenes. 477

Des moyens pour arrefter leflux de ſang quand le membre eft coupé.

CHAP . XXXI.

Ors que l'amputation du membre eſt faite, il eſt neceſſaire que quelque neceßité de
quantité de fang l'eſcoule , à fin que la partie deſchargée y ſuruiennent laiſſer écowa

so moins d'accidens, & ce ſelon la plenitude & force du malade. Le ſang eller le lang.
coulé en quantité ſuffiſante ( prenant couſiours indication des forces du malade )il
fauc promptement lier les groſſes veines & arteres fi ferme, qu'elles ne fluent plus. Ligature des

end Ce qui ſe fera en prenant leſdits vaiſſeaux auec tels inſtrumens, nommez Becs de vaiſſeaux,
Corbin ,
El.
ph

1 Bec de Corbin propre à tirer les vaiſſeaux pour les lier .

B
!
AN
WIDI

Ceſtuy eſt le plus propre,parce que l'on ſ'en peur ſeruir par ſes deux extremitez ,
ſelon que
le vaiſſeau ſera grand & delić. A , monſtre vn petit reſſort , qui le cient
aucunement ouuert , iuſques à ce que l'on le comprime,
0

ber 1
AUD De ces inſtrumens faut pinſer leſdits vaiſſeaux ( qui n'eſt mal- aiſé à faire, parce il n'y a dana
qu'on voit le ſang jaillir par iceux )les tirant & amenant hors de la chair ,dans laquel- ger de lier
le ſe ſont retirez & cachez ſoudain apres l'extirpation du membre, ainſi que font quelque por:
D toutes autres parties coupées, touſiours vers leur origine. Ce faiſant, il ne te fauc iion de chair
eſtre trop curieux de ne pinſer ſeulement que leſdits vaiſſeaux ,pource qu'il n'y a auec leſdits
vaiſſeaux,
danger de prendre auec eux quelque portion dela chair des muſcles , ou autres par
ties ,car dece ne peut aduenir aucun accident: ains auec ce l'vnion des vaiſſeaux fe
fera mieux & plus ſeurement, que l'il n'y auoit ſeulement que le corps deſdits vaiſ
ſcaux comprins en la ligature . Ainſi tirez,on les doit bien lier auec bon fil qui ſoit
en double ,

Srij
478 ' Douzieſme liure des Contuſions,
А
Comment il fautproceder an traictement d'un membre amputé, leflux deſang arreſté.
C H 4 P. X X XII.

Lesvaiſſeaux E fait , tu deſlieras la premiere ligature que tu auois faite au def


liez , il faut ſus du lieu de la coupeure : puis promptement feras quatre poin as
prendre et
approcher la d'aiguille en croix aux léures de la playe, profondant leſdits poin&s yn
playe auec doigt dedans la chair,à fin qu'ils ciennent plus ferme : par ce moyen cu
quatrepoints rameneras les parties des muſcles coupées ſur les os , à fin qu'il ſoic
d'aiguille. mieux & pluſtolt couuert, & moins touché de l'air exterieur, à fin que ladice chair
luy ſerue après la conſolidation, comme d'un couſſin. Or cu dois noter, qu'ilne faut
ſerrer leſdits poin & s ſi pres que tu c'efforces d'approcher enſemble les leures de la
playe,ce qu’auſlicu ne pourrois faire: carpluſtoſtle tout viendroit à ſe rompre, & les
parties à le relaſcher. Ains te ſuffira de les ſerrer mediocrement, pour ramener la
peau & chair fubjacente en l'eſtat & pareille longueur qu'ils eſtoient auant la retra B
&tion , quiſ'eſt faite depuis & durant l'amputacion.

Ce qu'ilfautfaire s'il furuenoit flux defang , à cauſe d'un des fuſdiis vaiſſeaux deſlić.
CH A P. XXXIII .

Es choſes ainſi faites, fil aduenoit puis apres qu'aucun deſdits vaiſſeaux
ſe deſliaſt, il te faut relier lemembre de ta premiere ligature comme a eſté
dit cy-deuant,ou au lieu de ce faire ( ce que ie louë dauantage , & qui eſt
Moyen deres tropplus aiſé & moins douloureux )qu'vn ſeruiteur prenne le membre à
lierles peines deux mains,preſſant fort de ſes doigts ſur l'endroit du chemin deſdits vaiſſeaux :car
e arteres en ce faiſant,ilempeſchera le Aux de ſang. Cependant tu prendrasvne aiguille lon
ſans bec de gue de quatre poulces ou enuiron,quarrée & bien trenchante , enfilée de bon fil en
Corbin . trois ou quatredoubles,delaquelle tu relieras les vaiſſeaux à la façon qui ſ'enſuit:car
с
alors le bec de corbin ne te pourroit ſeruir. Tu paſſeras ladice aiguille par le dehors
de la playe à demy-doigrou plus à coſté dudit vaiſſeau,iuſques au trauersde la playe,
pres l'orificedu vaiſſeau: puis la repaſſeras ſous ledic vaiſſeau, le comprenant de ton
fil, & feras forcir ton aiguille en ladite partie exterieure de l'autre coté dudie vaiſ
ſeaui, laiſſant entre les deux chemins de ladite aiguille,ſeulementl'eſpace d'vn doigt,
puis tu lieras ton fil aſſez ſerré ſur vne petite compreſſe de linge en deux ou trois
doubles de la groſſeur d'vn doigt, qui engardera que le næud n’entre dedās la chair,
& l'arreſteras Teurement. Ladite ligature retirée entierement dedans la bouche &
l'orifice de la veine ou artere, auec leſquelles auſſi cachées & couuertes des parties .
charneuſes adiacentes,fe reprend aiſémét ledit orifice. le te puis aſſeurer que jamais
apres telle operation on ne voit ſorcir vne goutte de fang des vaiſſeaux ainfi liez. Et
L'hemorrha- ne ſe fauc trauailler d’vſer des ſuſdits moyens d'arreſter le ſang aux petits vaiſſeaux:
giedes petits pource qu’aiſément il ſera ſupprimé par les aſtringens que nous t’ordonnerons cy
pailſcanx apres. Tu pourras trouuer cette maniere de practiquer aſſez obſcure & mal -intelli
s'arreſte tu
les gible:mais dois
ment paraife-
conſiderer que c'eſt choſetres-difficile de mettre clairement & D
Seuls aſtrin encierement par eſcrit la Chirurgie manuelle. Çar elle ſe doit pluſtoſt apprendre par
gens. imagination , & en voyant beſongner de bons & experimentez mailtres, ſi tu en as le
moyen : ou bien l'eſſayer ſur descorps morts , comme l’ay pluſieurs fois fait. dol

Des medicamens emplaſtiques. CHAP. XXXIIII.

A INTENANTnous dirons les remedes deſquels il nous conuient vſer


apres l'amputation du membre , qui ſont les emplaſtiques grandement
Poudre em propres aux vulneres recents , comme ſont ceux - cy. 4. boli armenij 3 ‫ܘܰܥܝܬ‬

plaſtique. siij.farinæ volatilis ziij . picis reſinæ z ij . pulueriſentur omnia ſubtiliffimè, 4:0
& mixtis fimul fiat puluis, de laquelle ſera la playetoute poudrée , puis garnie par 2.93
deſſus de charpy ſec: apres on appliquera par deſſus ce repercuſif.2.albumina ovo
Repercußifs. rum num.vj.boliarmenij,fanguinis draconis, gypſi,terræ figillatæ ,aloës,maſtiches,
gallarum combuſtarum, añ zij.pulueriſenturſubtilillimè & beneagitentur,addédo
a
Combuſtions & Gangrenes . 479
A oleiroſaci & myrt.añ Zj.fiat defenſiuum ad formam mellis. Certonguentdoiteſtre
appliqué auec eſtoupes trempées en oxycrat ſur la partie,& plus hautvn pecit:com
meſi cu as coupé la iambe , faut appliquerton onguent quatre doigts ou plus au del Vrilité des
ol ſus du genoüil.Ceremede n'eſt pas feulement repercuſif,mais auíli robore la partie,
ats
empeſche la Auxion,appaiſe le flux de ſang,fede la douleur, & prohibe la chaleur repercuſifs.
eltrange.Il faut cremper en oxycrat les compreſſes & bandes , puis ſituer le membre
en figure moyenne ſusdescouſſins & oreillers,pleitisde paille d'auoine, poil de cerf,
LOR
ou de ſon de froment. L'appareil ſuſdic ne ſe doit renouveller fans neceilicé grande, Tempspour
àſçauoir quatre iours apresen Hyuer,& moins en Eſté, ſelon que tu verras etre be. l'appareil. {
foin .

cles Digreßion de l'Autheur fortneceſſaire à bien conſiderer touchant les Cauteres actuels,
Ila deſquels on a vsé iuſques icy apres l'amputation.
CHAP XXXV.
B
E confeffe librement,& auec grand regret, que i'ay par cy -de
uantpractiquétout autrement que ie n'eſcris à ceite heure,apres
que l'amputacion desbras & iambes eſtoit faite. Mais quoy: l'a- Accidens
uois veu ainſi faire à ceux que l'on appelloit pour telles pratiques, pernicieux
AUX
eſquelles incontinent apres le membre extirpé , vſoient de plusdes cauieres
efte
apres
ſieurs cauteres,tantactuels que potentiels, pour empeſcher leAux put on . .
atil'am
de ſang; choſe tres- horrible & cruelle ſeulement à raconter : car
el
cela cauſoitvneextremedouleur aux patiens,attendu que relles playes recentemét
faires,ſont fort ſenſibles,& au moyen de ceſte ſenſibilité,lion y applique chofes cau
CHI
03
ſtiques deſſus , & contre les parties nerueuſes, ſoudain leur agion & impreſſion eſt
I en
communiquée aux parties internes, dont furuiennent de tres-grands & pernicieux
accidens, & le plus ſouuent la mort. Qu'il ſoic vray, on ne veit oncques de fix ainſi
c cruellement traictez, eſchapper deux, encores eſtoient-ils long temps malades, &
015 с mal-aiſément eſtoient les playesainſi bruſlées,menées à conſolidation ,pource qu'v
netellevſtionfaiſoit des douleurs ſi vehementes,que les malades tomboient en fić
TON
lle
ure,enſpaſme, & autres mortels accidens,auec ce que le plus ſouuent l’eſcarre cheu
teſuruenoit nouueau flux de ſang, qu'il falloit encore eſtancher auec les cauceres Flux de ſang
actuels ou potentiels,leſquels repetez conſommoient vne grande quantité de chair ,Juruenant 4
Tul
& autres partiesnerueuſes.Pourlaquelledeperdition,les os demeuroient puis apres presla chente
21! nuds & deſcouuerts. Ce qui a rendu à pluſieurs la cicatrization impoſſible ,ayansde l'eſcarre.

tout le reſte de leur vie gardévn vlcere au lieu du membre coupé, qui leur oſtoit le
Disi moyen de ſe pouuoir ſeruir d'vne iambe ou bras, faits artificiellement. Parce ie con 1

]1215
El
feille au ieune Chirurgien de laiſſer telle cruaucé & inhumanité,pourpluſtoitſuiure
ceſte mienne façon de practiquer,delaquelle ila pleu à Dieum'aduiſer,ſansque ia
mais l'euſſe veu faire à aucun,oüy dire,ne leu, ſinon en Galien au s.liure de la Ma
thode,où il eſcrit qu'il faut lier les vaiſleaux vers leurs racines , qui ſont le foye & le
cæur,pour eſtancher ce grand Aux de fang. Or ayant pluſieurs fois vſé de celte ma
&
D niere decoudre les veines& arteres aux playes recentes , eſquelles ſe faiſoit vne he
morrhagie, i'ay penſé qu'il ſ'en pouuoitbien autant faire en l'extirpation d'vn mem
de bre.Dequoy ayant conferé auec Eſtienne de la Riuiere , Chirurgien ordinaire du
Roy,& autres Chirurgiens lurez à Paris, & ſur ce leur ayant declaré mon opinion,
furent
bien
d’auis que nousen fillions l'eſpreyueau premier malade quil'offriroit, com
quenouseuſſionslescauteres tous preſts pour en vſer au defaut de la ligature.
Ceque i'ay practiqué à l'endroit de pluſieurs,auec treibonne iſſuë, encore depuis
de
peu de ioursen ça en la perſonne d'vn poſtillon ,feruiteur deBruſquet,nomméPireu
Garbier,auquelfuc coupée la iambe dextre,quatre doigts au deſſus du genoüil, pour
vne Eſthiomene qui luy eſtoit ſuruenuë à cauſe d'vne fracture. Partant ie conieille Grande
4
au ieune Chirurgien de laiſſerceſtemiſerablemaniere de bruſler & carnacer,fiquel- cruauté de
11
que reliqua de gangrene ne le contraignoir de ce faire, l'admonneſtant de neplus bruſler pour
Do
dire,lel'ay leu au liuredes anciens pradiciens, lel’ay veu faire àmes vieux peres & arreſter on
3
maiſtres,ſuiuant la practique deſquels iene puis aucunement faillir.Ce que ie t'ac-flux defang,
veu qu'i l y to
corde , li tu veux entendre ton bon maiſtre Galien au liure cy-deſſusSal legué , & fcs quire moyen .
T 11 )
480 Douzieſme liure des Contuſions,
ſemblables: mais ſi tu te veux arreſter à ton pere & à tes maiſtres, pour auoir preſcri- A
ption de temps, & licence demal-faire,y voulant touſiours perſeuerer, ainfi meſines
que l'on fait quaſi ordinairement en toutes choſes , tu en rendras compte deuant
Dieu, & non deuant ton pere ou tes bons maiſtres praticiens,qui traictent les hom
mes de ſi cruelle façon.

La maniere de pourſuiure la curation du membre amputé. CHAP. XXXV I.


R pour reprendre noſtre premier poin&, & paracheuer la cure
encommencée par le moyen des remedes propres & conuena.
bles à nos viceres, il faut premierement noter ,qu'auparauant que
d'olter les liens deſquels on aura lié les vaiſſeaux , il conuient que
l'agglutination d'iceux ſoit faite , & de peur qu'il ne vienne nou
ucau flux de ſang , qu'ils ſoient couueres de chair, qui ſe fera en
appliquantdeſſus quelques remedes froids,aftringens & empla B
Pordre 4- ſtiques,comme la poudre qui ſ'enfuit.2.pulu.boliarm . farinx hordci ,picis relinæ,
ſtringente gypſian.ziiij.aloës,nucum cupreſli,cortic.granat,an . Zj.incorporenturomnia fi
emplaſtique. mul, fiat pul.fubtilis,de laquelle en ſera afpergėè &faulpoudrée toute l'vlcere par
l'eſpace de trois ou quatre iours : puis apres on n'en vſera qu'à l'endroit des vaiſſeaux
qui auront eſté liez,& en ſera encore continué par l'eſpace de huic ou dix iours, à fin
qu'on ſoit bien aſſeuré que les vaiſſeaux ſoient eſtoupez & comuerts de chair :mais
ſur le reſte de l'vlcere ſera appliqué vn digeſtif, & continué iuſques à ce qu'elle ſoit I

Digestif. tournée à ſuppuration . Carlorson quittera le digeſtif pourprendre les medicamens


Mundifica- mundificatifs,commeſontceux qui ſ'enſuivent.2.cerebenthinæ Venetæ , locæ in
tif aq. vitæ Zv.mellisroſacicolariziij. ſucci plantaginis, apij & centaurij minoris an. ..14

zij. bulliant omnia fimul vſque ad conſumptionem fuccorum , auferantur ab igne ,


addendo farinæ hordei & fabar.añ.zj. theriac. Gal. ZB. aloës,myrrhægariſtolochiæ ,
añ z iij . croci 3 j.fiat mundificatiuum . Orileſt ainſi que long tempsapres l'ampu
tation , les patiens penſent encore auoir en ſon entier le membrequi leur a eſté am
puré,commei'ay dit : ce qui leuraduient,commeil me ſemble, pource que lesnerfs o
ſe recirent vers leur origine. Car , comme eſcrit Galien au liure De motu muſculorum ,
contraction eſt la vraye & propreaction du nerf & muſcle: & quant à l'extenſion, ce
n'eſt cantaction que mouuement. Or les nerfs en ſe retirant font grande douleur &
preſque ſembable aux retractions qui ſe font au ſpaline. Pour à quoy remedier, fauc
Liniment
leur frotter la nueque, & toute la partieaffectée auec le linimentqui ſ'enſuit, & qui
propre pour eſt de grande efficace contre ſpaline , paralyſie, ſtupeur, concorſions,diſtenſions, &
les affections
des nerfs. autres affections,principalement des parties neruevſes prouenantes de cauſes froi
des . 22.ſaluiæ ,chamäpyt.maioranæ ,roriſmarini,menthä,rutæ, lauand. añ.ñ. j.flo
rum camom . melil . ſummitacum anethi & hyperici añ.p.ij. baccarum lauri & iuni
perian . Zij.radic . pyreth . 3 ij. maft. afſx odoratæ añ. z ).B.cerebenthinæ Venecx tb . r
j. olei lumbricorum ,anethi, & catellorum an Zvj.olci cerebenthinæ z iij axungiæ
humanæ žij . crociz j . vini albi odoriferi tb .).ceræ quantum ſufficit: contundenda .. ‫به‬
contundantur, puluerifanda pulueriſentur,deindemacerentur omnia in vino per
noctem , poſteà coquantur cum oleis & axungia prædi&tis in vafe duplici: fiat lini
mentum ſecundum arcem : in fineadde aquæ vitæ ; iij . Dauantageen craidantceſte D
playe, il eſt conuenable de procurer la cheute des extremitez des os que la ſcie & l'air
auront touchez : ce que le Chirurgien fera parl'application des cauteres actuels ſur
leſdits os,en l'application deſquels ſe doit bien garder de toucher aucunement les
Les os ne ſe )
parties ſenſibles,maisen vſer diferettemenc,comme i'ay deſcrit par cy -devant. Sur
doinent tirer quoy tu noteras que les os ne ſe doiuene tirer par violence, ains en les eſbranlant peu
par violence,amoins,apres
peu: deſquelsnonobſtant tunedoiscſperer la cheutedetrente iours, ou plus, ou
l'amputation . Ce fait, cu vſerás des remedes propres pour conſomurer
les chairs ſpongieuſes & ſuper- croiſſantes, comme font vitriolbruſlé , poudre de
Alum cuit .mercure, & autres entreleſquels l'alumn cuit & pulueriſé en ce cas eſt fort commo
propre aux de,fion l'appliqueſeul ou auec autres mundificatifs. Doces remedes tu pourras vler
chairs ſpon- iuſques à l'entiere guariſon de l'vlcere,& les diuerſifier,comme tu verrasqu'il en fera
gieuſes. beſoin .
3
Combuſtions & Gangrenes. 481 1

A
Hiſtoire memorable d'une mortification aduenue à un soldat, auquel le bras fur coupé
à la jointure du coulde. CHAP . XXXVII .

’Eſtime auoir aſſez amplement traicté les moyens de curer la Gá.


grene & fphacele: toutesfoisafin que tu puilles mieux entendre
ce quei’ay dic,ie te feray recit ( comme pour exemple d'vne cu
re que ie feis eſtant à Thurin au ſeruice de Mõſieur le Marechal Hiſtoire.
de Montejan . Vn pauure Soldat receut au bras feneſtre pres la
carpe & iointure de la main ,vn coup d'harquebuſe :au moyen
duquel la balleauoit dilaceré & rompu pluſicursos, tendons, &
autrespartiesnerueuſes, doncſuruintgangrene,puis eſthiomene : iuſques à la join
cure du coulde & iuſques à l'eſpaule y auoic gangrene , & en la moitie du Thorax
grande inflammation, & ja notable preparation de gangrene,dont auoit le patient
grands routemens , fyncopes, inquietudes, & autres inauuais accidens , denon
çans la mort. Parquoy ledit ſoldat futdelaiſſé de pluſieurs Chirurgiens, & alors fus Bref diſcours
ſtimulé d'aucuns de ſes amis de le viſiter,ce que ie feis: & apres auoir cogneu ladite d'une ampu
" le
tation d'un
mortification,prinslahardieſſe , ſuiuanclecommandement de noſtre Aic , luy cou- ciion
per le bras parla iointure du coulde : & en premier lieu luy liay eltroittement le bras
au deſſus du coulde pourles raiſons ſuſdites:ce fait luy coupay le bras ſansicie,pour bras mortifié.
ce que la mortification n'eſtoicoutre la iointure du coulde:& là commençay l'ampu
.
tation,inciſarit lesligamens qui ioignent les os.Ec neſe faut eſbahir de telle amputa
tion de la iointure : car Hippocrates en la quatrieſme ſection de ſon livre des Arti
cles , la recommande ,& dit qu'elle eſt fort facileà guarir , & n'y voit rien à craindre
que la tyncope,à cauſede la douleur en l'inciſion des tendons& ligamenscommuns.
Mon inciſion faite ( nonobltant la ligacure ) ſuruintgrand Aux deſang ,à cauſe des
vaiſſeaux qui ſont enicelle partie , lequel laiſſay ſuffitamment couler pour defchar
-, ger, alleger, & euentiler la partie, & auſſi pour empeſcherla gangrene qui eſtoit au
bras,jatendancà mortification.Puis arreſtay ledit lang auec cauteres actuels,n'ayant
C en cetemps-là autre methode ny façon de faire : ce fait,deſliay doucement la ligatu
1,66
ture, & apres feis ſur la gangrenepluſieurs grandes & profondes inciſions, cuicant la
partie interne du bras , à cauſe des groſſes veines , arteres, & mulcitude de nerfs qui Document
fact
y ſont. Er derechef cauteriſay quelques vnes desinciſions,tant pour arrelter le lang , pour le jeune
C1
que pourdeſſeicher & conſumer aucune maciere virulente imbuë en la partie: puis Chirurgien.
appliquay des remcdes cy - deuant eſcrits, ſuricelle & ſur l'inflammation du Thorax,
5 grandequantité de refrenatifs & repercuſſifs:pareillement epithemeslur lecæur, &
autreschoſes cordialesque ie luy donnay: leſquels remedes ie continuay, iuſques à
tant que les routemens & autres accidés aduenuspar le moyen desvapeurs eſleuées
•16.
de la pourriture , & communiquées au cæurpar les arteres,furentfedez & appaiſez.
Oriene puis omettre à raconter(pour fen donner garde) que quinze iours apres ſur
nda
uintau pauure ſoldat vn ſpaline:lequel i'auois paravant prognoſtiqué, à cauſe du
froid, & qu'il eſtoit mal couché en vn grenier, là où non ſeulement auoit peude cou
per verture,maisaulli eſtoit expoſé à tous vents, fans feu , & autres choſes neceſſaires à la
oft 3
viehumaine Erle voyanten tel ſpaſme& retra&tion demembres , les dents ferrées,
l'air
D les léures& toute la face tortië & retirée, commeſ'il euſtvoulu rire duris Sardonic ,
fur
quifont ſignesmanifeſtesde convulſion:émeudepitié,& deſirát faireledeu demon paſm
signese. dudir
art,ne pouvāt autre choſe luy faire pour lors ,le feismettre en vne eſtable ,en la qucile
citoitgrand nombre de beſtáil, & grande quantité de fumier , puis trouuay meyen
d'auoir du feu en deux rechauds,pres leſquels luy frotay la nucique, bras & jambes, Moyens dela
20
cuitant les parties pectorales, auec linimens cy.deuant eſcrits pour les retractions & cwarion dw
ſpaſmes. A presenucloppay ledit patienten vn drapchaud , lefituant audit fumier, ditpayme.
l'ayantpremierement garny & couuert de paille blanche: puisfuc dudit fumier tres
bien couuerc ,où il demeura trois iours& trois nuicts ſanste leuer :dedans lequel
luy ſuruint vn petit flux de ventre & vne groſſe fueur : ce pendant commença vn
petitàouurir la bouche, dont peu à peu luy aıday auecques tel inftrument, lequel
ic metcois entre les dents.
ST iiij
482 Douzieſme Liure des Contuſions, & c.
A

Dilatatoire à ouurir la bouche , lequel rourne à viz .

Apres auoir ouuert la bouche par cedicinſtrument, luy mercois vn petit baſtonde
ſaux ,afin que la bouche demeuraſtouuerte, ayant retiré ledic inſtrument : & ce pen
dant qu'il ne pouuoit maſcher, ie luy faiſois donner du laict de vache & æufs mol
lecs : par ces moyens fut guary dudit ſpaſme. Conſequemment ie ſuiuy la cure du
bras ,
en reicerant l'application des cauteres actuels ſur l'extremité de l’os adiutoire,
pour couſiours conſumer & feicher les humiditez eſtranges: & te fauc noter que le
pacient auoit grande delectation , lors qu'on luy appliquoit leſdits cauceres, pource
qu'il diſoit ſentir vn prurit tout au long dudicos adiutoire , qui eſtoit pour la chaleur
Prurit plai- communiquée par lemoyen deſdits cauteres le long de l'os. Ce queſouucntesfois
ſantpar le auois veu aduenirà l’Hoſtel-Dieu de Paris en cas ſemblables.Ainli tomberent gran
Cautere .
des ſquammes ou eſcailles de l'extremité dudic os, tant pour l'air exterieur, que pour
l'application deſdits cauteres.Pareillement ie fomencois ſouuent la partie affe &tée, o
pour toujours la deſſeicher & roborer: leſquelles fomentations eſtoient faites auec
vn vin auſtere, gros & aſtringét,auquel faiſois bouillir roſes rouges,abſinthe,ſaulge,
laurier , fleurs de camomille & melilor , aneth , & autres medicamens predics : par
ainſi futguary le pauureſoldar. Parquoy faut que le Chirurgien ait touſiours deuant
Cidwertiſſe
ment. les yeux , que Dicu & Nature luy commandent ne laiſſer les patiens ſans faire touſ
iours ſon deuoir , combien qu'il preuoye tous ſignes mortels. Car nature faic ſou
uentcequ'il ſembleau Chirurgien eſtreimpoſible : comme tres- Sagement nousdc.
monſtreion de nos Do & eurs anciens, diſant, Contingunt in morbus monftra,ficus&
in natura .

Fin du douzieſme liure des Contufions , Combuſtions


& Gangrenes.

D
sos
-
i
483

Table des Chapitres du Treizieſme liure ,Des

Vlceres , Fiſtules, & Hemorrhoides.

Ela definition & cauſes des vlceres. Chap.j.


Leslignes des vlceres. Chap.ij.
Du prognoſtic des vlceres. () Chap.ij.
De la curation des vlceres. Chap.iij.
De l'ulcere intemperée. Chap.v.
tom
De lvlcere douloureuſe. Chap. Di.
De l'ulcere compliquée avec fupercroiſſance de chair. Chap.vj.

De l'ulcere vermineuſe, & putredineuje. chap.vij.


chap.ix.
LINIO De l'ulcere fordide.
Des vlceres virulentes,corrodantes, cacoërhes , & chironiques ,ou phagedeniques. Chap. x.
Aduertiſſement awioune Chirurgien touchant la diſtance du temps qu'il faut penſerles vlceres
Cacoëthes. Chap. xi.
Chap. xj.
Dubandage des vlceres .
Des vlceres en particulier , dupremierement des yeux. Chat xa .
CONNECT
Desvlceres dunez ,enſemble de la punaiſie ou mauvaiſe ſenteur d'iceluy , diété des Grecs do
ou
Latins oZoena. Cac xung .
Des ulceres de la bouche. Chap. xv .
Des vlceres des oreilles, Chap. xvi.
Des vlceresde la Trachée artere , Oefophague , Eſtomach , & Inteſtins. Chap.xvi .
rede
Des ulceres desreins , & de la veſſie. Chap xui .
Des vlceres de la mairice . Chap.xix .
ante
Chap. xx .
itamis Des varices , & moyens de les couper.
Chap.xxi.
Des fiftules.
Cure des fiftules. Chap xx .
( ..) Chap.xxij.
Des fitules du fondement ou fiege.
Des Hemorrhoides. Chap.xxiij.

)
n
484
ho

LE TREIZIESME LIVRE,
TRAITTANT DES VLCERES ,
FISTVLES , ET HEMORRHOIDES . 1

AR AMBROISE PARE', DE LAVAL AV


MAINE , CONSEILLER ET PREMIER
Chirurgien du Roy.
De la definition & caufes des vlceres.
CH A P IT RE PREMIER.

Definition. OVS auons par cy- deuanctraiccé de la Nature, diffe. A


rence, cauſes, ſignes, & curation des playes ſanglantes:
Il faut maintenant parler des vlceres , qui eſt vne ſolu
tion de continuité aux parties molles , non ſanglante,
ainsinuecerée, de laquelle fort pusou ſanie, quelques
fois eltant accompagnée d'vne ou pluſieurs indiſpofi.
tions , quicmpeſchent, & retardent l’vnion & conſoli
dation d'icelle : ou pour dire plus briefueinent ſelon
Galien chapitre 6. dulure Deconſtitutione ariis, ſolution
Canſes.
Cauſes inter de conciliuité faite par erofion . Les cauſes fonc inter
nes. nes , ou externes. Les cauſes internes , ſont humeurs,
pechans plus en qualité, qu'en quantité, & quelquefois
en tous les deux,leſquelspour leur malignité font erolion au cuir & parties molles.
Ce qui prouient parvn mauuais regime de viure , ou pour quelque vice qui eſt en
quelque partie principale , commeau foye, à la ratelle, ou par toute l'habitude du B
Cauſes ex- corps. Les cauſes externes ſont, comme excreme froideur, qui occupera quelque
sernes .
partie, & principalement les extremitez,à ſçauoir, bras & jambes,dont fenſuirdou
leur , quieſt cauſe d'attirer le ſang & eſprits à icelle, qui ſe corrompent par le de
faur de la chaleur naturelle & extreme froideur,donc ſ'enſuit vlceration de la partie.
Semblablementvlcere vient à raiſon d'un coup, ou froiſſement, ou pour applica
tion de medicamens acres , ou pour quelque combuſtion. Auſſi contagion & actou
chement peut eſtre cauſed'vlcere: ce qui eſtmanifeſte à voir en ceux qui ont vlceres
aux parties honteuſes, ou qui auront couché auec quelqu'un qui auroit la maladie
venerienne,

1
Fiſtules & Hemorrhoides. 485
Figure, dont Rond, toriu ,
Propres del eft ditſolce- > Crochu
simple , ſeule troischofes re. Triangle.
fans adionctið á ſçauoir Longueur. 2 long .
Court .
d'autre dipos:- de la
tion , duquel Dimenſionen Largeur. vlcere, Eſtroit
Large..
font priſes les
Mediocre .
differences,
Superficiel.
Profödeur.j Profond.
Moyen .
JE Egalité; 01 ÇEgal: außilong ,large,profond,
inegalité, vlcetanten un endroit qu'à l'autre.
cere Zinegal aucontraire.
Temps, ŞRecent , Inueteré.
vlcere De briefue ou longue durée.
AN vlcere
Seuident
Apparence, caché Du tour.
. En partie.
vlcere
Moinspro
Deſchiré, inciſé.
Maniere de generation, partie deſchiré,&partie
.
eft folu vlcere Liscif .
tion de pres ou acci
continai.
dētaires del Anterieur, pofterieur.
iéenpar. cöpofer fix choſes, Generale, ) Interieur , exterieur. 1

[ comme du. vlcere superieur, inferieur,


tie molle, en plus. Dextre , feneſtre.
d'où forilſieurs Situation
Au commencement ,
mariere manie
o fanie:! res,qui Cacochy Speciale, ) Au milieu .
cot ne ſont I me
Similaire, En lafin d'un muſcle,
double. dife- Canſe,) Reumati. vlcere 45 į ou autre partie.
Tences vlcere, que
ques d' vice Enueni Partie cuir , en la
res , (mé chair , &c.
mais Organique vlcere
addi Lipsanique ,ulcere, aunez,enl'oreillesen
l'æol
tions Autres acci- [ Telephien, rqueTelephus en a eſté
dens , com malade.
d'im 1
Lme vlcere Chironiens ,, que Chiron en a query
que
710 Ceux
parce le premier.
bok ( qu'Preſſemble à telas
cia Çinëpe- 2 simple, Chancreux , Lnimal.
dedi rature . rChaud ,froid ,
Compoſee, vlcere Sec, humide,
Maladie
Chaadowfec,Chand &
ede mide,
en
210 Froid & fec , froid & hu
mide.
trum Incommodera- Jauecluxation, apre ,
Colt
adi tion , vlcere
Scaleux,fiftuleux ,cauer
neux , ſinueux .
Phlegmoneux .
Eryapelatesx.
(Intemp.& incomp.enſemble,vlcere Oedemateux.
Symptome, sphagedenique , douloureux, Scirrheux.
vlcere Sordide , virulent, & c.
Cauſe & maladie, Pour exempleaccommode icy les
Cauſe du Symptome,
Maladie Symptome, appellations deſſwfdiétes ésirois
Ccauſe, maladie ,en Symptome. ( complications particulieres.
486 Treizieſme Liure des Vlceres,
AVTRE TABLE DES CHOSES ESTRANGES QUI SORTENT
des fiftules ,vlceres & apoftemes.
rElpais..
Des partics charneu - i Elgal.
ſes ſort yn cxcrc Lifte.
similaires, ment.
Blanc,
& non fetide,appellédes anciens à cauſe de
comme
ſon eſpellcur, Pus.
Noir , & l'appelle par
Des os & cartilages verdoyāt, lesGrecs Elæo. Celle
Huileux & des , d'autant liu.s.
pourris . qu'il reſſemblc lchap ...
rde la Oature teride.
à huile ,
des parties Mais la par ſon acrimonic
mermes , ler gisel
Desperfs,veincs,ar- r Sanicux , laveinecit erodéc ,il cn lort
quelles ſont cores , tendons & vo lang gros , & de l'arte.
membranes, qui Subtil, re, subril,chaud& boüillāta
couurécles muſcles. Cucc pulſation & ſantellemét.
LGlueux, Et lort en touflant , & cft
Feride. quelques foisictté ,non ſede
Grilaftre, lement par l'vlccre , mais
Du Thorax , Cadaucreur . ( auſſi par la bouche , par le
liege & par les vriacs.
Aucunefois
| Organiques, ( Verdoy ant .
De la bouche vlcc . De diucrſe couleur.
commc réc,& des parties &
pudibundes , de mauuaiſe odeur.
1
Fort onctueux ,
| Des genoüil s & au &
(cres iointures, Glaircux ,
-Blanc ,
Du Cang au Phleg: Elgal ,
mon . Lillc.
Iaunaſtre,
Dela bile cn Eryſipe
lc, subtil.
La difference
de la matierei
eſtrange qui Dela diucrfi . De la bile noire au SNoiraſtre,
fort des vlcc - ré des hu- Chancre. Liuide,
Ies, fiftules, & meurs , com
es
apoftem ,eft mc
rinrc Dela pituite en l'Oe SA queur,
deme. Zvifqueur.

De la teigac , des ef
croielles, des char
boos peftiferez , des
bubons vencucux , Feride.
des contufions par
De la diucrfis baſtons à eu .
sé des tu
mcurs , com Noire ,
mc Feride,
Des gangrenes &
mortifications. Verdoyance ,
Sentant une odeur fi puante & cadauereale, que difficilce
Linent on la peut endurer.
En l'abſcés nommé Miel,
Meliceride , eft ſem
blable en couleur &
conaftaacc à Suif,

Steatome.
De la matiere Bouillie ,
qui repreſen . Atherome, -Pierre ,
te , comme Craye ,
Sablon ,
Charbon ,
En autres abſcés, au-! Coquilles de limaçons,
tres corps qui ont Elpics,
forme plus eſtrange Chair ,
commo Carrilages,
Corne dure & fpongicuſe,
O s,
Pril,
Voirre,
St. Certains animaux , taat Yifs que morts ,
Des
Fiſtules & Hemorrhoides. 487
A
T
Que c'eſt qu'il faut entendre par ces mors , Pus, Ichor, Sanies , Sordes, Ros,
Cambium Gluten .

CHOR & Sanies ne ſonten rien differens, ſinon que Ichor eſt vn mod
Grec, & Sanies eſt Latin . L'vn & l'autre eſt pris maintenant pour toute Sanies

1 humidité ſubtile & aqueuſe ,qui eſt contenuë parmy les humeurs de
dans les veines: maintenant auſli pour tout excrementſanieux,ſubtil,
& humide , lequel ſort des vlceres, ou bien quiexude des corpsmorts.
Galien l'accompare au laict clair, nommé en Latin Serum : lequel eſt ciré du lai&t Liure 2. des
caillé,quádon fait le formage: & eſttelexcremēt (comeeſcrit Čelſe) trouué aux vl. Elemens.
AR
Vues ceres malings, & principalementà ceux desnerfs, quand vne inflámation a precedé. Liu.s. chap.
011 Sordes eft vnmotLacin tiré d'vn mot Grec dic Rypos, lequel vient de Rypao,ou Rypeo, sordes.
qui eſt aucant à dire , qu'eſtre ord , ſale & craſſeux. TellementqueRypos ou Sordes,fi
B gnifie proprement le plus gros excrement,lequelapres la croiſieſmeconcoction,forc
& exude deſſus la peau & epiderme, où eſtancamaſſé ileſt appellé craſſe , & ceux qui
abondencen tel excrement , ſontnommez craſſeux. Il ſe prend auſſi pour l'excre f

ment , ou plus groſſe ordure qui ſ'amaſſe auxvlceres , & qui f'apparoiſtdeſſus lalan
gue des febricitans. Pour ceſte cauſe Galien dit,que Ryposou sordes,n'eſt autre choſe Liu. z.de la
qu'vn excrement gros, quirend I'vlcere ord & ſale,& ichor ou Sanies, vn autre excre
mentaqueux & lubcil qui le rend humide.
Pus ,
Cemot quien François appellé bouë , en Latin Pus,& en Grec Pyon, ſignifie vn
humeur putride , qui reſſemble à peu pres àla ſubſtance des parties ſpermatiques.
Les anciens l'ont ainſi appellé , à cauſe de ſon eſpeſſeur & blancheur, comme cel
moigne l’Auteur du liure appellé Onomaſtus.
Cambium , Ros , & Gluten, ce ſont trois mots qui ont eſté inuentez par les recents, Ziu.7.cha.6.
pourexprimer la nature de l'humeur alimentaire, lequel humeur ſeul Galien eſcrit de la met.
deuoir eſtre dit proprement Alimentum , parce que actuellement il nourrit. Toutes
fois pour ſçauoir la diſtinction de ces inots, il faut entendre que l'humeur qui exude
C & fort dehors par les emboucheures des veinés capillaires,poureſtre diffus & appoſé
aux parties qui doiuenteſtre nourries , clt appellé Ros , pour autant qu'en maniere &
façon deroſée , ileſt eſpandu par les places vuides des parties ſinilaires, pour leur
nourriture. Iceluy feſtantpar l'aſſimilation vn peu eſpelli, & comme congelé, fag
glutine & attache aux fibres ſolides des parcies , dont il eſt appellé Gluten o
, u carni
forme: apres qu'il eſt cranſmué & parfaitementaſlimiléà lapropre ſubſtance deſdi
tes parties ,eſt appellé Cambium , quieft vn mor barbare.
Les ſignes des vlceres. C H 4 P. 11.

Elon la diverſité & difference des viceres , il y a auſſi diuers ſignes.


Carlors qu'il y a pourricure,& que d'icelle ſorevapeur fecide & ca. Diu fignes
ersetas:
Lesvi
dauereuſeaccompagnée de ſordicie ,c'eſtſigne d'vne vlcere putri- vlcere pueria
de. Ainſi vlcere corroſiue ,eſt celle qui par la malignité de la matic- de.
reronge & cõſomme les parcies qui luy ſont voiſines. L'vicere ſor- Corroſiue.
D dide eſt pleine de gros excremés & viſqueux , auec vne chair mol- Sordide .
le ſuperfluë & crouſteuſe.Vicerecauerneuſe, a l'orifice pecit & c- Cauerneuſe.
ftroitauec profondité nó apparere,& pluſieurs anfractuofitez de coſté& d'autre,sās
foutefoisqu'ily aye calloſitény dureté.L'vlcere fiſtuleuſcelt ſemblable à la ſuſdite, Fifulcuſe..
finon qu'ilya calloſité & dureté des labies & parois dela profondeur & cauernoſité.
L’vlcerechácreuſeelthorrible àvoir,ayantles léures dures& renuerſées,de laquelle Chancreuſe.
ſort yn virus puanc & feride , & quelquefois du ſang,& autourd'icelle fontles veines
tumefiées,commenous avons monftré auch.du chancre.Vicere dyſcrafiée,eſt celle Dyſcrafiée.
qui eſt accompagnée de quelque intemperature froide,chaude, humide, ou ſeiche,
ou compliquée d'icelles. Vlcere cacoëche,eſt celle qui ne ſe peut guarir par remedes Cacoërhe..
dcuëment appliquez , à cauſe qu'il y a au corps , ou à la partie vlcerée, quelque cau
fe occulte ,de laquelle n'eſt poſſible donner raiſon , qui empeſche la giariſon .
L’vlccre rhieumatique, eſt lors qu'en la partie fluë quantité d'humeur qui l'entre- Rheumati
tient , comme l'on voiden l’vlcere variqueuſe, lors qu'elle eſt accompagnée de va- que.
plies de Variquense ,
rices,c'eſt à dire, groſſes veines eminentes , tortuës , & anfractueuſes, remTc

!
me
488 Treizieſ Liure des Vlceres ,

gros ſang. L'vlcerc apoftemateux,eſt celuy auquely a tumeur contre nacure, comme A
Chironique. phlegmon, eryſipelas, ædema,ſcirrhe.Vicere Chironique , eft celuy duquel Chiron
Centaure ; hominc bien verſe en la cognoiſſance des ſimples , a guary pluſieurs par
le moyen de l'herbe dite de ſon nom ,Centaurium minus : ainſi que ſemble montrer
Dioſcoride , chap.7.liu.s.ou bien pource que Chiron en a eſté guary . Cerces Galicn
ſur l'Apho.22 . delas.ſect.eſtime tels vlceres malings , & ne faire iamais fuppuration

Telephie. louable : comme l'vicere Telephie , duquel a eſté affligé Telephus.

Du prognoſtic des vlceres. C H 4 P. III .

S vlceres malings , qui durent vn an , ou dauantage , jaçoit qu'ils ſoient pen.


Hip. Aph.
ſez & medicamentez ſelon raiſon , il eſt neceſſaire que l'os qui eſt le fon
45.liu.6 .
dement de la chair vlcerée , ſoic alteré & corrompu , à cauſedela mauuaiſe
diſpoſition de la parcie , qu'elle a acquiſe par vn long temps pour la defluxion des
humeurs malings dont elle a eſté abreuuée , ou pour la mauuaiſe diſpoſition de l’os .
Ec par ainſi il eſt neceſſaire que dudit os alteré le face exfoliation , & en ſortent el B
quilles , comme choſe qui eſt contre nature : & faut que l'vlcere eſtant cicatrizé,de
meure autant caue , que ſera grande la portion de l'osque l'on aura oſtée. Les vice
res qui aduiennent auparauantquelque maladie , ou duranticelle , lors que les vice
Hipp.progn. res viennentpalles ,liuides , noiraſtres, & ſeiches , c'eſt ſigne que le patient eſt pro
lim.I. cha.8. che demort, d'autantque les faculcez qui nourriſſent le corps , font debiles & lan
guides , qui ne peuuent ſecourir de ſuc nourriſſant la partie malade. Et ſelon l'hu
meur quiſera à la partie , l'vlcere en aura la couleur : commefily a quelque portion
debile , fera iaunaſtre de melancholie , liuide ou noiraſtre , & de pituite blancha
ſtre. Ceux quionc vlceres accompagnez de tumeur ne tombent ſouuent en conuul
fion , & ne deuiennent pas fols ne intenſez , d'autantque cels humeurs malings con
tenus en la tumeur , ne ſont communiquez aux parties nerueuſes,ny au cerueau,
dont fenſuiuent les ſuſdits accidens . Mais ſi telle tumeur vient à l'cſuanoüir ſans au.
cune cauſemanifeſte ,comme pour application de quelque medicament reſolutif,
ou par quelque flux de ſang , à ceux qui auront vlceres au dos , aduiendra conuul С
fion , pource que la ſuſdicematiere ſera retournée aux parties nerueuſes, & auxmu
ſcles du Thorax , leſquels imbus de ceſte matiere par repletion , feront ſpaſme&
conuulſion.Er ceux qui auront vlceres à la partie anterieure, deuiendront fols, inſen.
ſez, & phrenetiques , pour la multitude des veines & arteres qui ſont en icelles , par
leſquelles telle humeur eſt portée au cerucau ,donc fenſuit phreneſie & manie.Aulli
fielles occupent le Thorax, ſuruiendra pleureſie, ou empyeme, ſila matiere decou
le en la capacicé du Thorax. Les vlceres qui ſontaccompagnez de tumeur laxe , li
Hippo.liu.
Apho.6s. gnificht concoction deshumeurs quiſont à la partie :& font plus faciles àguarirque
ceux qui ſont accompagnez de tumeur dure , d'aucant que la nature & partie du
membre affe &té n'en a fait encore concoction ,laquelle naturellement en nous fe fait
par elixation , & non par afſacion , commedit Ariſtote au 4. des Meteor. quieft cauſe
qu'aux tumeurs ,la molleffe eſt ſigne de concoction & mitificacion de la matiere.Les

Hip,fect.s. viceres qui ſontaux parties pileules , quand le poil qui eſt autour cher ,oubien quand
ipho.67. lecuir quieſt autour ledefleure, ſont rebelles,malings & difficiles à cicatrifer,pource
D
qu'ils demonſtrent qu'il y a au profond de la partie quelque manuais humeur, qui
ronge &corrode , tant le cuir que la racine des cheueux qui naiſſent & f'entretien
nenten nous de l'exhalation d'un ſuc louable & nourriſſant , d'où vient que par les
Hip, liu.6 . longues fiéures , & par la verole & ladrerie , le poil combe . Es viceres où il y a caric
Apho.4. d'os,lila chair eſt liuide,commeplombée,ou de couleur citrine,c'eſt mauuais ſigne :
car cela denote que la chaleur naturelle eſt eſteinte , & quel’os ſubiecelt grandement
alteré & corrompu.Les vlceres qui ſuruiennent à cauſe de quelque maladie , comme
Hip. Apho. pour hydropiſie, ſonttres-difficiles à guarir : ſemblablement ceux qui ſontaccompa.
Hip. de plc. gnez de varices,de quelqueintemperature, ou quiontles bords durs, & qui ſontde
1
cal.cha. 2. figure ronde.Tout vlcere remply.de chair & cicatriſé,l'il ſerenouuelle,elt en danger

s.244 de tomber en fiſtule: ſemblablemét ſ'iloccupe quelque tendon , elt difficile à guarir,
de la Meth. & tres - douloureux Es viceres quin'onteſtémondifiez commeil appartient, fen
gendre touſiours ſupercroiſſance de chair: li ils occupent quelque bras ou jambe,
Auicenne. excitent fouuent phlegmon ,ou autre tumeur aux aines & parcies glanduleufes,
Fiſtules & Hemorrhoides . 489

A principalement ſi le corps eſt cacochyme. Car telles parties ſont ſubiettes à Auxions
pour leur imbecillité & rarité. Albucraſis dir, que pour neuf cauſes les viceres ſont Pour neuf
difficiles à glutiner , incarner , & cicatriſer. La premiere, quand le corps a faute de cauſes lesvi
ORIO ſang. La ſeconde, quand il peche en qualité. La tierce , par l'indeuë application des cereses ſont dif
GK medicamens qui ne luy ſont conuenables . La quatrieſme, lors que l'vlcere eſt ſordi-,ficiles à curer
de. La cinquieſme,quand lvlcere eſt putride ou pourry. La fixieſme, quand en vne & cicatriſer.
prouince ilregne quelque peſtilence , ou maladie epidemique , qui fait les vlceres
difficiles à guarir. La ſeptieſme,quand il ya calloſité. La huidieſme, quand la nature
du païseſt telle, que les vlceres y ſont de longue durée, comme en Saragoce d’Ar
ragon , ou les apoſtemes durent vn an . Laneuficſme, quand les os ſont carieux &
corrompus. Cornelius Celſus dit qu'il y a aucuns ſignes, par leſquels on peut co- Corn.Cell
.
Hled gnoſtre combien il faut eſperer ou craindre,touchant la curation : car les ſignes qui lin. 2. choz .
า น ... nous denotent quelquechoſe de bon , ſont dormir & repos , librement reſpirer,n’e .
ſtre point alteré,n'auoir en horreur & deſdain les viandes , eſtre exempt de fieure, &
li le malade l'auoit euë , ne l'auoir point: auſſi que l'vicere rende vn pus blanc , poly, &
B égal , & non de mauuaiſe odeur . Nous diſons le pus eſtre poly , quand toutesſes par
[IZE ,U. cies ſont cuites ,& ne ſe trouue aucune aſperité à l'attouchement , qui puiſſe mon
ſtrer qu'il y ait encores quelque portion d'humeur cruë & non meurie. Nous l'ap
pellons eſgal, quand il n'eſt point de parties de nature diſſemblables. Nous le diſons
blanc , quand il eſt non de couleur blanche parfaiđement, mais de couleur de cen
eft fi
dre : d'autant quetelles choſes ſignifient que la chaleur naturelle concurrant en la
lonte generation , ſurmonte celle qui eſt contre nature , & que la matiere obeït à l'opera
cion de la chaleur, dont la mauuaiſe complexion du membre eſt rectifiée, & par con
sports
ſequent, nature pourra mieux faire curation de l'vlcere .

ECO Or les ſigries qui nous denotent quelque choſe de mauuais ſont veille , inquietu- Signes de
de, difficulté d'expirer & reſpirer, grande alteration ,deſgouſtement, & voir les vian- mauuaiſe
ngs
CHINES des à contre-cæur , eftre febricitant, & de l'vlcere ſortir pus noir , limonneux & de guariſon .
mauuaiſe odeur : dauantage , quand la curation eſt bien auancée , & l'il ſuruient

relli Alux de ſang. Car , comme dit Hippocrates , Quand l'hemorragie & ſoudaine efflu- Hippo. li . 7 .
bir с xion de ſang ſuruient aux viceres , qui pour l'inflammation qu'ils ont font grande spho. 21 .
pulſation , c'eſt mauuais ſigne, pource que telle effluxion ſortant de l'artere s’y arre
ſte aſſez difficilement: & auſſi pource que la partie eſt lors moleſtée d'inflammation
& douleur , par laquelle le ſang attenué & bouillonnant , ſe deſbonde tout à coup,
rompant de violenceſes canaux & arteres : à quoy l'enſuit vn autre inconuenient ,
fçauoir mortification de la chaleur naturelle , par la deperdition de ſang; & par cõſe

reda quent faute de ſuppuration , & en fin gāgrene. Il reſte encore du prognoſtic à parler
des excremens qui ſortent des vlceres, à ſçauoir vn nommé en Grecichor, & en La
lanc
tin Sanies, lequel eſt double : l'vn ſubtil & virulent, comme on void ſortir aux pi
queures des nerfs & malins vlceres : l'autre eſt gras & glucineux , qu'on void ordinai
pure
rementſortir des playes des iointures . Ileny a vn autre nommé Sordes, qui eſt enco
gust
re plus gras ( dont lvlcere eſt dice ſordide ) de couleur noiraſtre , autresfois rougea
ichu .
ſtre, cendrée , inegale , comme lie de vin & d'odeur fecide. La tenuité de la ſanie ir
ſant desviceres qui eſt rougeaſtre, ſemblable à laueure de chair , monſtre que la ma
engua
tiereeſt chaude, & fi elleeſt blancheaſtre, monſtre qu'elle eſt froide
. Et celle quieſt signes que le
pus eft bon.
D blanche , polie , c'eſt à dire , douce au toucher, egale, & en petite quantité , auec
vne viſquoſité ſans nulle mauuaiſe odeur , ſignific eftre bonne , & que nacure fait
generation de chair.

De la curation des vlceres. CH AP . IV.

N la curation des vlceres deux choſes nous ſont propoſées : ſçauoir


Deux points
l'vlcere ſimple , lequel n'eſt accompagné d'aucun accident , & l'vl nous sõt pro
; ‫ܐ‬. cere compoſé ou compliqué auec la caule , maladie ou ſymptome. Or posezala
l'vlcere ſimple, encant qu'il eſt vlcere , a vne commune indication de curation des
curation , à ſçauoir exſiccation. Car tout vlcere , entant que vice- vlceres.
Gal.4.05 .
re , a beſoin de deſiccacion , & d'autant qu'il eſt plus humide que la playe , il re Met
ho . Gui
quiert auſſi plus grande deſiccation. Or lors qu'il y a pluſieurs complicacions don traicté

qui accompagnent l'vlcere , pour l'ordre de leur curation , Galien veut que le Chi- des vlceres .
rurgien methodic ſe propoſe crois principaux poinēts , qui ſont l’vrgent, la cauſe , & Gal.7.Mes,
Tc ij
490 Treizieſme Liure des Vlceres,

la choſe ſans laquelle la maladie ne ſçauroit eſtre oftée. Et pour facile intelligence A
dece , ie te donneray cet exemple . Poſons le cas qu'il
y aic vn vlcere à la iambe,licuć
à la partie interieure, vn peu au deſſus du malleole , eſtant forc douloureux,caue,pu
tride , auec carie en l'os ,
de figure ronde , ayant les bords calleux & durs, auec tu
meur & inflammation desparties voiſines , & accompagné d'vne varice. L'ordrede
curation de tel vicere ſe doit commencer aux choſesvniuerſelles,ayantelgard à l'ha
bicude de tout le corps , qui eſt plethoric & cacochyme: leſquelles indiſpoſitions
pourront eſtre amendées par les ſix choſes non naturelles ordonnées par le docte
La cauſe. Medecin : ce qu'eſtant deuëment faitoſtera la cauſe dudic vlcere. Car tel eſt le com .
mandement de Galien , chap ... du 4. liure des Medicamens ſelon les genres.Si ( dit
il ) le corps a beſoin de quelque preparation, il faut qu'elle foit faite deuantque
toucher à l'vlcere . Car ſouuent pour la guariſon de quelques vlceres,la ſeule purga
tion ſuffic, à autres la ſeule ſaignée, à autres tous les deux , ſelon que la cauſe de l'vl
cere cft cacochyme , ou plethore , ou tous les deux . Et quant à la cure particuliere,
L'urgent. nous aurons eſgard à ce qui eſt le plus vrgent,qui ſera premierement de leder la dou
B
leur par remedes contrariants à icelle : commeſi c'eſt à raiſon d'vne intemperature
phlegmoneuſe qui dés long temps a occupé, diſtendu , & endurcy la partic, elle ſe
ra oſtée par euacuation , faiſant premierementfomentation d'eau chaude, afin d'a
mollir & relaſcher le cuir , & que l'euacuation des humeurs contenus ſe face plus ai
ſément: puis on fera des ſcarifications pour euacuer le ſang,ſelon que l'on verra eſtre
neceſſaire. Sile malade eſtoic delicat, ne voulant colerer icelles ſcarifications,on ap

pliquera des ſangſuës: puis ſera mis ſur la partie vn emplaſtre de Cerat refrigerant
de Galien , ou autre ſemblable : & pour paracheuer à vacuer l'humeur arreſté , on
vſera de remcdes conucnables , ſelon la doctrine eſcrice és tumeurs contre nature.

Carie . Cela fait, on aura eſgard à la choſe, ſans laquelle la maladie ne pourra eſtre oftée,
Figure rom qui ſe fera en gardant l'ordre des ſuſdices diſpoſitions compliquées comme la Carie,
de. laquelle ſera oſtée par cauceres actuels , & cn l'application d'iceux on fera de force,
Calloſité. que l'on rendra l'vlcere d'autre figure queronde, à ſçauoir longue ou triangulaire, &
Pourriture .
par ce moyen on conſommera la calloſité ,& la pourriture de l'vlcere ſera corrigée:
puis on procedera à faire choir l'eſcarre :& apres on ſera ſoigneux à l'exfoliation de o
l'os, comme nous auons traicté cy - deſſus, & on procedera au reſte de la curation de
l'vlcere,lequelapres auoir eſtémodifié ,ſera répli de chair: pour la regeneració de la
Gal. 3. Met. quelle deux choſes ſont neceſſaires. La premiereeſt la cauſe efficiéte: la ſecõde eſt la
chap 3 matiere doreſt engendrée la chair . Or la cauſe efficiéte eſt la bonne téperature, non 1
Cauſe efficië- ſeulement de cout le corps,maisauſſi de la partie affligée, par lemoyen delaquelle ſe
sede la chair. faic attraction ,conco &tion ,appoſicion ,& alimilation :& telle temperature doiteſtre
conſeruée & maintenuë par bonne maniere de viure , qui engendre vn bon ſang,
non chaud ,acre ,bruſlé, ny aqueux : car cel lang pourroit rendre non ſeulement tout
le corps mal diſpoſé ,mais principalement la partic vlcerée.Quant à la matiere done
eſt procreée la chair ,c'eſt le ſang pur & fyncere,ne pechant ny en quācité ny qualité ,
Gal . zi mer. Oren telle generation ilfengendre double excremét : vn , qui eſt humide,appellé de
chap 3 nous fanie: l'autre plus eſpés, fordicie .Tous deux , d'aucant qu'ilsſont contre nature ,
empeſchent la ſuſdite regeneration, & pour ce doiuenteftre oftez par leur cõtraire.
Ce quiſefera par medicamens, leſquels ſerontdeſiccatifs au premier degré , & mon .
D
difient mediocremēt: deſquels les vns ſont plus forts,lesautres plus debiles:& pour.

cele diſcret Chirurgien en vſera auec methode,cõſiderác le nacurel de tout le corps


& de la parcie vlcerée, l'aſſiette, formació , & vertu d'icelle partie ,enſemble labódan
ce del'humidité & ſordicie. Car les femmes,d'autantqu'elles ſont plus humides, de
mandent medicamens qui ſeichent moins,& les parties charneuſes requieret medi
camens plus forts queles tendineuſes, pour leur ſentiment exquis : car, dic Galien ,
chap . 7. du liure 4 . de la Methode , coute parcie fort ſenſible ſe doit traicter fans

douleur autant qu'on peut. Ainſi l'vlcere , tant plus qu'il eſt humide, a beſoin deme
dicamens qui ſeichent dauantage : car la partie demande eſtre conſeruée par choſes

ſemblables, & l'vlcere requiert choſes contraires à luy . Lors que l'vlcere ſera rem
ply de chair , par le benefice de nature & aide du Chirurgien , ilfaut induire cicatri
ce(quieſt vne chair calleuſeenduite en lieu de peau ) en appliquárremedes qui deſci
Qu'eſt- ce
que cicatrice . chent ſans acrimonie ny mordication , ſice n’elt en petite quantité. Car l'alum bruſ
lé, & le vitriol cominun bruſlé & laué, mis en pecite quantité, cicatrizenc. On vſera
Fiſtules & Hemorrhoides .
491

A doncquesde radix ariſtoloch. aloës, plumbum vſtum ,cortic.granat.combuſt . li


charg .pomphol. ayant eſgard aux choſes vniuerſelles eſcrittes en la generation de
chair, ou de la lamine de plomb frotcée de vif argent,de laquelle ay veu grand ef
fect, voire plus que d'aucun remede .

De l'ulcere intemperé. С НАР. V.

Pres auoir eſcrit en general la definition , les cauſes, ſignes, dif


ferences, & prognoſtic des vlceres ,reſte en ſpecial enſeigner la
guariſon de ceux qui ſont compliquez auec quelque accident,
commençant à l'vlcere intemperé. Or toute intemperature eſt
chaude , froide, feiche, ou humide :& pource afin que le Chirur
gien ne prenne l'vne pourl'autre , il eſt bon de les diſtinguer. L'insignesde
l'intempera
Dich temperature ſeiche ſe cognoiſtra par la veuë , l’ylcere eſtant com
túre feiche.
me ridé , ne rendant aucune ou peu d'humidité , comme auſſi par le coucher ,la Curation.
B
opere ſencant rude & dure.Telle intemperature ſe guarira par remedes humectans,faiſant
E, C. vne fomentation d'eau tiede , ſuyuant l'opinion de Galien , au liure 4. de la Metho.
ou bien hydrelæo , c'eſt à dire ,d'huile & eau (ayantelgard, comme nous enſeigne
Galien , que ſi le corps eſt plethoric ou cacochyme, il le faudroic premierement
ceplus
errae purger & faigner, craignantd'actirer dauantage à la partie . ) Telle fomentation ſera
75,007 continuée iuſques à ce que la chair vienne rougeaſtre, mollaſſe, & humide , & que
la partie l'enfle vn peu : car ſi on continuoit davantage , on reſoudroit l'humidicé
qu'on auroic actirée . La fomentation faite, ſera miſe ſus l'vlcere tel ou ſemblablere
2 1432 mede. 2. cremor. hordei Zij.fol. mal.in aqua co & .3 j.pingued. porc . 3j. B.mellis
commun ZB.miſce in mortar. & fiat vnguent. admoueatur parti,præmif.fotu.L'in . signes de
l'intempera
lalo temperature humide ſe cognoiſt par la quantité des excremens que iette l’vlcere ,par iure humide.
dein la chair baueuſe & fupercroiſſante: parquoy faudra vſer dc remedes plus ſecs , tels Curation .
que ſontles Sarcotiques, ayant eſgard à la quantité de la matiere , & à la nature de
la partie , & autres indicacions eſcrites cy - deſſus. Entre autres remedes Galien liure

с 1. De fimpl. med. facult. chap . 7. louë fort l'eau alumineuſe : car elle deſſeiche,mon
difie ,& fortific la partie . On peurauli fomenter la partie vlcerée , d'une telle deco
& ion.2.roſar.rub.abſinth. beconicæ , capli barbat. añ.ñ.j. gallar, nucum cupreſſ.
ań.zij.aluminis roch. Zj . fiat decod . in vino auſtero, de quo fiat fotus
. La fomen
tation faite,ſera appliqué ſus l'vlcere de l'emplaſtre de cerula, de minio , & autres. Ie
loüc fort la poudre d'alum calcinée , miſe en petite quantité , pour l'experience que
ques
i'en ay fait. Quant à l'incemperature chaude elle ſera cogneuë par la couleur rouge, signes pour
ou iaunaſtre,par l'accouchement du Chirurgien , & par la douleur que ſentira le ma cognoistre
lade , ainſi que monſtre Galien liure 4. de la Methode. Lors nous aurons recours l'intempera

ered aux remedes refrigerans, comme l'onguent roſat de meſme, refrigerans Galeni cure chaude.
populeum : auſſi les compreſſes & bandages ſeront trempées en eau de plantain , Curatión.
que
morelle , oxycrat, l'ay ſouvent pratiqué les ſcarificationsprofiter plus que tous reme

DET des,ou bien lesfanſúës: car par cel moyen le ſang eſchauffe & preparé à corruption ,

Olta eſtoſté de la partie , & de cel fardeau grandementdeſchargée.L'intemperature froi signes de


de ſe cognoiſtra parla couleur blanche ,par l'accouchement du Chirurgien, 8 ſen- l'intempera
Dtiment du malade , lequel dit ſentir froid àla partie . Pour laquelle guarir, tout au- ture froide.
tour de la partie refroidie ſeront appoſez bouteilles pleines d'eau chaude ou veſſies Curalion,
CA
de porcà demy rempliesd'une telle deco &tion. 2. origa . puleg. camomill. melilo .
añ.ñ. j. abſinth. ſal. maior.roriſ. an . ñ B. fiac decoét. in vino generoſo , addendo
aquæ vitæ q . facis. L’vlcere pourra meſme eſtre fomenté, auec eſponges trempées
en celtedice deco & tion . Pareillement on vſera de l'emplaſtre de meliloto , oxycro
ceum de Vigo , cum & fine mercurio. Or ſi l'vlcere eſt compliqué, auec deux ſortes
d'intemperatures, lesremedespareillement ſeront diuerfiſez ſelon icelles , & tou
che
chant le reſtede la gueriſon , elle ſera paracheuée , comme a eſté dic cy -deſſus , en
mondifiant l'vlcere, puis l'incarnant afinde le rendre à cicatrice.

del
To iij
biz
492 Treizieſme Liure des Viceres ,

А
De l'vlcere douloureux. Ꮯ H A P. Ꮴ.
q 1

Comme l'on
Ouuentà raiſon deſdites temperatures l'vlcere eſt fort doulou
fait aux
reux . Pour à quoy remedier , on aura recours aux remedes ſuſdits,
' charbons par
chancres dla & où la douleur perſeuereroit, & ne voudroit obeir à iceux , on
paſſeroit aux narcotiques. Tels ſont les cataplaſmes faits ex folijs
cerca :
mandragoræ , ſymphy.hyoſcyami, ſolani , cicutæ , & oleiseiuf
dem ,auſquelson adiouſte oleum papaueris,mandragoræ ,opium ,
vnguentum populeum , & autres ſemblables, deſcrits au liure
des Tumeurs , parlantde la douleur. Mais ſi telle douleur ſuruient pour quelquema
lice & virulence d'humeur , lequel ſouuent corrode & 'ronge la chair & bords de l’ul
cere , ne pourra eſtre appaiſee par remedes anodyns ny narcotiques , ains au contrai

re augmentera de plus en plus , eſtane dauantage irritée par remedes doux & gra
Aux fortes cieux , que ſ'ils eſtoientplus forts. Pourquoy pour appaiſer telle douleur, fauc B
maladies, auoir recours aux remedes forts& catheretiques : car aux maladies fortes , faut vſer
forts reme de forts remedes. Parquoy il ſera appliqué ſusl'vlcerevn plumaceau, chargé & cou
des , ou d'un
uerc de noſtre Ægyptiac fortifié tout pur , ou bien vn peu d'huile de vitriol
mondificatif, auquelon aura adjouſté pouldre de mercure , Tels remedes ont vercu
d'obtundre & abbatre la virulence , & malice de l'humeur qui entrecenoit la dou
leur : cependant tout autour d'icelle , ſeront mis remcdes refrigerants, craignant
que la douleur cauſée par le remede acre ne face fluxion à la partie .

De Pulcere compliqué auec ſupercroiſſance de chair.

С НАР. VII .

Nl'vlcere , tant pourla negligence du Chirurgien , que pour la faute


La chair fuo
percroiſſante du malade, ſuruienevne chair ſuperflue plus qu'il n'eſt de beſoin ,eſtant
provient aux quelquesfoisenuironnée de bords ou léures dures & calleuſes. Sitelle o
chair eſt mollaſſe & baueuſe , ſe pourra ofter
viceres con par remedes deſiccatifs,
comme ſontgalla, churis cortex ,aloës,cuchia, antimonium ,pompholyx
chalcitis , plumbum vſtum , bruſlez & lauez ſ'il en eſt beloin , deſquels ſeront faits
pouldres & medicamens , auec vn peu d'huile & cire . Er où cels remedes ne ſeront
fuffiſans, la chair eſtant dure & ferme , faudra d'iceux paſſer aux cauſtiques,ou bien la
couper. Car comme dic Galien liure 3. de la Mech . chap . 6. d'oſter la chair ſurcroiſ
ſante n'eſt quure de nature , commel'vnion & generation d'icelle , mais c'eſt l’æu
ure du medicament fort deſſeichant, ou la main du Chirurgien . Entre autres reme
des , ie louë fort la poudre de mercure , auec porcion d'alum calciné , ou le vicriol
ſeul calciné. Et quant aux léures de l'vlcere dures & calleuſes , ſeront amollies par
remedes emolliens , comme ſont, pinguedines vituli , anſeris, gallinæ , anatis, olea
liliorum , amygdalarum dulcium , lumbricorum , catellorum ,clipus, mucagines
althex , lini, fænugræci,gummi ammoniac. galbani , bdellij : deſquels ſimples ſe
ront faits emplaſtres, onguent & liniment : ou bien on vlera de l'emplaſtre diachy
D
lum , de mucaginibus, ou de Vigo cum mercurio . Apres auoir vſé quelque temps

de ces remedes, ſera appliqué vne lamine de plomb , frotté de vif-argent, laquelle
a grande vertu d'applanir l'vlcere , & abbaiſſer les bords d'iceluy; & où tels remedes

ne ſeroientſuffiſans, faudroit appliquer remedes cauſtiques. Que fi la calloſité eſtoit


ſi dure , que les remedes ne peuſſent faire leur operation, faudroit premierement les
ſcarifier, ou bien les couper du couc , afin de donner priſe au medicament , & ce iuſ
ques au vif, comme dit Galien liure 4.de la Meth . chap. 2. ayant elgard au precepte
d'Hippocrates, liure des Vlceres . Que ſi l'vlcere eſtrond , luy faudra donner autre
figure, à ſçauoir oblongue ou triangulaire.
Fiſtules & Hemorrhoides. 493
A
De l'ulcere vermineux & putredineux.
09.
CHAP. VIII .
die,s
1,02
olis VELQVES FOIS és vlceres il ſ'engendre des vers : dont ils ſont dits
eich. vermineux. La cauſe de ce, eſt la crop grande humidité excrementeuſe
num, preparée à pourriture par la chaleur immoderće ,& contre nature. Ce
liure quiaduient,ou parce que l'vlcere eſt negligé , ou pour l'intemperature
& cacochymie de tout lecorps,ou de la partie,ou parce que celle humi
to dité excrementeuſe ne ſepeut égouter n'ayant libre iſſuë:ce que lon void aduenir
en l’oreille, nez, ſiege, col de la matrice,& és vlceres cuniculeux. Pour guarir cels
vlceres; faut premierement que le medecin aye égard à coute l'habitude du corps,
ordonnant la purgation & ſaignée, ſans omettre labonnemaniere de viure. Secon
vler B dement faudra oſter les vers,puis deſſeicher ceſte trop grande humidité . Parquoy
COB
l’vlcere ſera fomencé d'une telle decoction , laquelle a vertu de les faire mourir : car
dva les voulantoſter viuans, on feroit douleur , à cauſe que ſouuent ils ciennent à la par
Terti
tie vlcerée .2.abſinth . centaur. maior . marrub.añ.ñ.j.fiar deco&tio ad fb.B.in qua
dou diſſol. aloës Ž B.vnguen.ægyptiaci žj.Dece remede ſera laué l'vlcere , & des plu- Remedes
pour tirer
maceaux trempezen icelley ſerontlaiſſez. Or ſi l'vlcere eſt ſinueux & cuniculeux, les vers des
on fera inic&tion d'icelle deco&ion. Archigenes louë fort ce remede. 2. cerufæ , viceres.
polij montanian.zB.picis naualis liquidæ q.1.miſce in mortario pro linimento.Sou
uent la pourriture eſt ſigrande,qu'elle ne ſe peut corriger par cels remedes : & lors
faut paſſer aux plus forts, meſmes aux cauceres actuels,ou bien à la ſe & ion : toutes
fois ſuiuant le precepte d'Hippocrates,nous commencerons aux plus legers, ſi la ma
ladie le permet, comme de ce remede eſcric par Galien , liure 4. De la compoſition
des medicamens. 24.ceræ fb.j.cerulæ Zviij.olei rofati tb.j.falis ammon.Ziiij.ſquam- Ce remede
mæ æris zij. thuris , alum.ærug. malicor.calcis viuæ añ.Zj. fiar emplaſt.ou bien de le peutfaire
ceſtuy. 22.terebinth .lotæ 3 ij.ceræ albæ 3 B. liquef. fimul addendo ſublimati z B. en pluspetite
с ſalis torrefa&t.& vitriolicalcinat.añ.3j. fiat mundif. ou bien nousvferons de noltre quantité.
ting egyptiac pur,auquelil entre du ſublimé. Cependant les enuirons de l’vlcere feront
YX munis de defenſifs ,craignant la trop grande douleur.
De l'ulcere fordide. CHAP. IX.

il
' VLCER e ſordide ( apres les choſes vniuerſelles) ſera guary parmedica
mens decerGfs,en conſiderant que ſouuenty a vn excrement gros & eſpais,
DC
accompagnéde certainehumidité& ſanie ſuperfluë, quiſontcommerem
pars& bouleuars lus les partiesvlcerées , aſſoupiſſantſouuent la force & vertu des
medicamens
I'vlcere
, pour forts qu'ils ſoient. Il faut pour celte cauſe premierement lauer
lea auecques telle deco & ion. 24. lixiuij communis tb.j.abſinth . marrub.apij,
26
leo
cent.vtriufque, hypericonis añ. ñ B.coquant, in colat . quod ſufficit. adde mellis
rofa.3j.vnguent.ægypt.38.fiat deco & io :puis ſeramisvntelmondificatif. 24.fucci
apij& plantag.añ.Žij.mellis comm. 3j.tereb.zj.B. pulu. ireos Florent. & aloës añ .
D ZB. fiat mundificat . Auſſi le vin doux, auquel on aura fait bouillir herbes deterſi
ues, comme panax , ariſtoloche, abſinthe, & autres ſemblables: puis y adiouſter
miel roſat, & cau de vie. Ceſtuy lauement decerge & deſſeiche les vlceres caues &
cuniculeux. Le Chirurgien doit conſiderer diligemment en combien d'appareils
il pourra auoir deſcouuert l'excrement ſordide , & deſſeiché l'humeur ſuperflu: car
quelquesfois on peut oſter tels excremensà vn ſeul appareil: & quelquesfois auſſi

on ne le peutfaire qu'à pluſieurs fois, à raiſon que la partie eſt fort ſenſible, ou que le
corps eſtdelicat. Et lorsqu'on aura decergé l'vlcere, faut euiter les remedes forts &
acres, depeurd'inciter douleur, fluxion , inflammation & eroſion, qui ſeroit cauſe
de rendre l’vlcereencore plus caue,parquoyon appliquera remedes quideſſeichent
ſans acrimonie, à fin d'aider à Nature à engendrer & produire la chair. Tels remedes Poudres in:
font poudre d'aloës , maſtic, myrrhe, ireos,licharge, antimoine ,racine de gentiane, Carnatiues.
farine d’orge , & leurs ſemblables: puis appoſerdeſſus charpyfait de linge vieil &
delié,& par dellusvne laminedeplomb, frottéede vif-argent: & Tt
ſeront leſditsde
iiij
494 Treizieſme liure des Vlceres ,
A
terſifs & deſiccatifs , plus ou moins forts, ſelon qu'on verra eſtre neceſſaire. Leur
quantité ne ſe peut bien deſcrire : mais la faut cognoiſtre parconie &ture artificielle,
qui ſera quand on verra lvlcere cftre crop humide,ſec,ou aride . S'il eſt trop humide,
il ſe cognoiſtra par la quanţité de la ſanie, & par la chair baueuſe , laxe & inollaſſe. S'il
eſt trop deſfeiché,il ſe cognoiſtra à raiſon qu'il ſera ſec, ietcant peu d'excremens, en
ſemble par la mutation de la couleur de la ſanie.
Or quelquesfois par l'indeüe application des medicamens fort deterſifs & de

ſiccatifs, les vlceres le cauent ,& iettent grande quantité de maciere : ce qui trompe
& deçoit ſouuent les Chirurgiens : car voyans les vlceres ieteer tant de fanie, ils y
appliquent derechef encore de plus forts & acres remedes , ce qui nous eſt confirmé

Hiſtoire. par l'Hiſtoire d'vn Empirique recitée par Galien , lequel traitoit vn vlcere ſordide,
y appliquant vn medicament verd qui eſtoit mordant & corrofif. Ce medicament
conſumoit la chair ſubie &te , cauſantdouleur & chaleur à la partie , & par ce moyen

de iouren iour la rendoit plus caue : mais voyant que ledic vlcere iettoit beaucoup
d'excremens, penſant que ſon medicament ne fuſt aſſez decerfif,y adiouſta plus forts B
decerſifs, & ce faiſant l’vlcere ietta encore dauantage: donteſtant forceſtonné, il
yadiouſta derechef des remedes encores plus forts, pour cuider carir l’excrement
d'iceluy: mais de plus en plus l'vlcere ſe cauoit: tellement que par ſon ignorance il
laquelle l'vlcere ieccoit telle quantité de fanie,
Grande an ne le peut guarir. Or la cauſe pour
notatio pour eſtoit que la chair ſe colliquoit & fondoit en pus & fanie par la violence de ſonme

le ieune Chi- dicament trop abſterſif , & la douleur qui cauſoit Auxion. Parquoy il faut bien
Turgien . auoir égard , l’vlcere eſt deuenu ſordide par eroſion , & colliquation de la chair

ſubiecte: comme auſſi prendre garde , ſi le medicament que lon y auraappliqué,


l'aura aſſez nettoyé . Ce quiſe cognoiſtra par la douleur , & par les léures qui ſont 1
plus rouges , & plus chaudes qu'auparauant. Et pour ces raiſons faut diuerſifier les
medicamens, ſelon que lon verra l'vicere eſtre trop humide ou ſec , & que les corps
ſeront plus forts ou robuſtes. Oron appelle les corps forts , ceux qui ſont de tempe
Indication
des tempera rature ſeiche, commeLaboureurs,Crocheteurs , Mariniers , Chaſſeurs, & autres,de
tures . grand crauail , & qui demeurent en region chaude . Tels ont leur corps ferme & ſec,
eſtant de couleur noiraſtre. Les foibles ſont ceux qui ſont de temperature humide ,
comme femmes, enfans, cunuques , gensoiſifs& ſedentaires, & quidemeurenten
pais froid,tels ont leur corps humide & phlegmatique , & par conſequent mol , blanc ,
Les remedes & fort ſenſible. Et pour ce eſt- il impoſſible qu'vn medicament puiſſe feruir à tous
doiuens eſtre corps : à ceſte cauſe ille conuientdiuerſifier ſelon la temperature ,tantdu corps que
chăgez ſelon de la partie vlcerée , de la ſaiſon de l'année , region , âge , ſexe, & autres choſes priſes
les tempera- des choſes naturelles , non naturelles , & contre nature, comme plus amplementi'ay
mens,
deſcric en l'introdu & ion : combien que la quantité , qualité , & mixtion de telsme
La quantité dicamens , ne ſe puiſſe au vray deſcrire , non plus que le melange des couleurs aux
e mixtion peintres . Toutesfois le Chirurgien prudent par vne conie& ure artificielleprendra
desmedica. indication , que les corps robuſtes, endurcis à la peine , de grand labeur , demandent
mens ne se remedes forcs : car des doux & benins n'en peuuent auoir aucun amendement. Au
peuvent bien contraire ceux qui ſont de temperature molle & delicate , requierent remedes doux
defcrire. ſans aucune eroſion : autrement en lieu de vouloir produire chair en leurs vlceres,

les remedes fortslaconſommeroient & .caueroient dauantage : comme les remedes D


doux & fans eroſion appliquez és vlceres des corps robuſtes,les rendroient ſordides
& ſanieuſes , & en fin putrides.

Des ulceres virulens, corrodans , cacoërhes , Chironiques, ou phagedeniques.

CHAP. X.

Es Viccres virulens & corrodans ne ſont differens les vns des autres ,
Plceres fer ſinon
pans, c'eſt à par le plus ou le moins . Car l'vlcere virulent eſt celuy duquel
dire, qui am ſort vn excrement , dit vulgairement virus : lequel lors qu'il eſt rendu
bulent og
plus malin & corrodant, mine & ronge les parcies ſubiacentes & voiſi
corrodens, & nes de l'vlcere , dont il eſt dit pour lors,corroſif : ils viennent d'vn humeur me
carent la
lancholic , erugineux & malin , & fuiuent les chances de bien pres . Tels vlceres
partic.
ſont nommez de Galicn , liure quatrieſme De la compoſition des medicamens,

.
Fiſtules & Hemorrhoides . 495

dyſepuloriques, c'eſt à dire dedifficile cicatrization . l'appelle rels vlceres cacoëthes


A
( dit- il)quand la partie ſouffrante eſt tantcakcétique & intemperée, qu'elle altere &
corromptlc laog qui affluë pourla nourrir , ores que de ſoy fiicbon & ailé à digerer :
dyſepuloriques, quandle ſang eſt li mauuais & fi cacochyme,qu'il ronge la partie
quide ſoy elt temperée: puis ildic vlcere Chironien , c'eſt àdire , vicere, qui eſt bien
forecacoëthe. Pour la guariſon , conſideré qu'entre iceux il y a grande latitude &
difference, entantque les vns ſont plus dyſepuloriques & plus cacoëthes, les autres
moins,ileſt necellaire qu'il y ait autant denombre de medicamens qui les guariront,
que de differencesd’vlceres . Parquoy ce n'eſt de merueille , ſi ceux ſont ſouuent
deceus de leur intention , leſquels n'ontqu'vn medicament pour guarir tous vlceres
cacoëthes . Gal.liu.4 . Dela compoſition desmedicamens, chap.4.recommande ce Remede
medicament d'Aſclepiades. 2.æris ſquammæ ,ærug.ral.añ. Zj.cerx tb B. reſina d'Aſclepias
caricis zj.B.ca quæ liquari poſſunt,aridis affundancur.Telle emplaſtre ſera appliquée des.
ſeulement ſur l'vlcere, & à l'enuiron ,pour engarder l'inflammation , ou autremedi
cament froid. Pareillement Galien au liure ſus-allegué,loüe fort ceremede : Epulo- Carex ,herbe
B
tique (dit -il) de Primionaux deſeſperez, c'eſt à dire, aux vlceres , que maints Mede- appellée glas
cins ſe ſontefforcez de guarir , mais ils n'en ſont venus à bour , & les ont delaiſſez diolus, on
commcincurables: il conuient auoir fiance en ce medicament, tant pour autres glaicu.
choſes, que pource qu'il eſt approuué par experience.
om
b
Aduertiſſement au jeune Chirurgien , touchant la diſtance du temps
qu'il faut penſer les vlceres cacocibes.

Ся4 р . х .

Ove montrer l'vfage de l'emplaſtre cy -deſſus eſcrite d'Aſclepiades,


& pour la faute qui le commet auiouruhuy entre la pluſparc des Chi
rurgiens, de penſer deux ou trois fois le iour lesvlceres malins, cacoë
thes, & de difficileguariſon , eſtimans par ce moyen pluſtoſt les guarir :
l'ay bien voulu icy leur mettre l'authorité de Gal. (qui eſt du tout con Gal.lis . 4.
C
traire àleur pratique ) laquelle eſt pareillement appuyée ſur la raiſon. Aſclepiades de lacompo
(dit - il ) a bien fait d'adiouſter à la fin de la recepte du medicament ſuſdicce qui ſ'en - ſition des me
ſuit. Ofte ta bande & l'emplaftre tous les trois iours , & fomente l'vlcere : & lors que dicamens,fe
tu aurasnettoyé con petit emplaſtre , & malaxé,remets-le deſſus, eſtant certain que ſi lon les gëres.
Spa
vn medicament ne ſciourne longtemps ſur le corps , il ne profice aucunement:choſe notationGrande .an,
qu'aucuns Medecins ont tancignoré , qu'ils penſent crop mieux beſongner, quand
cho
ils abſtergent la fanie de l'vlcere trois fois le iour , que ceux qui ne les nettoyent que
deux fois. Et eſt celte mauuaiſe couſtume cantinuecerée , que les malades meſmes
PICO
accuſent ſouuent les Chirurgiens de negligence , qui ne les habillent qu'vne fois le
och
iour : mais ils ſont bien deceus: car commeauez entendu & leu en pluſieurs lieux de
mes æuures , les qualitez de tous corps qui ſ'entretouchent, agiſſent l'on contre l'au
usca
trc, & tous deux paciſſent quelque choſe ,& fuſt l'une d'icelles beaucoup plus forte
que l'autre : au moyen dequoy leſdites qualitez ſ'yniſſenc & fermentent auec le

temps, combien qu'elles ſoient de beaucoup differentes : de maniere que la qualité


D dumedicament l'unit, & quelquesfois deuient ſemblable à celle du corps, qui eſt
choſe fort vtile . Parquoy deuez louer celuy qui premier a inuenté d'vſer encores , &
de remeccre le premier emplaſtre ,& l'imicer: d'autant qu'aucz plus cogneu par expe
rience ſon inuention eſtre bonne. A iuſte raiſon il a encores commandé , qu'on fo
mente l'vlcere tousles trois iours , c'eſt à dire toutes les fois qu'on l'habillera : car
cſtantle medicamentfort, ce n'eſt de merueilles ſ'il a beſoin de quelque mitigation .
Telle authorité de Galien peut eſtre confermée par raiſon. C'eſt choſe toute notoi
Raiſon fuinas
fc ,quelesmedicamensne peuuent agir ſinon par le benefice de la chaleur naturelle. "authorité.
laquelle doit exciter la faculté du medicament à faire ſon operation . Or eſt-ilainſi,
qu'en tels vlceres malins & rebelles , la chaleur de la partie eſtfoible , languide , &
quaſi commecachée & enfeuclie par la chaleur eſtrange & contre nature , de force
qu'elle ne peut ſitoſt ſe mettre en cuidence & effort , pour exciter & elueiller le re
medeà faire ſon operation, & pour ce a beſoin d'eſpace de temps : de ſorte que lors
Nes
qu'il ſeroit excité à ſon @uure, & comme au milieu de ſon operacion, la chaleur eſtát
496 Treizieſme liure des Vlceres ,

atcirée , & feſtant fortifiée , fi vousdeibandez la partie & oſtez l'emplaſtre, l'vlcere a
ſera expoſé à l'air,qui rendra la chaleur plus foible & pecite , la repouſſant au dedans :
& le remede quiſera ia excité & éguillonné à agir & operer, perdra ceſte premiere
force acquiſe, de ſorte que le remettant en vn autre, ilfaudra touſiours recommen
cer nouuelle beſongne , n'ayant permis qu'il euft fait toute ſon operacion en impri
Autre faute mantſafaculcé à la partie vlcerée: Pareille faute font ceux , quien habillant filou
toschae ceux uent les vlceres, les eſſuyentbien fort: car ils oſtent non ſeulement l'excrement inu
qui effugene tile, qui eſt la boüe & ſanie de l'vlcere, mais auſſi le naturel , qui ſont Ros, Cambium
les vlceres. & Gluten , donc eſt engendrée la chair bonne & louable en l’vlcere. Parquoy pour
les raiſonsſuſdites , il n'eſt beſoin de fi ſouuent penſer les viceres , l'il n'y a accident
qui y ſuruienne, ny de les eſſuyer ſi ſoigneuſement.

Du bandage des vlceres. CH A P. XII .

Hippocrates E ne veux oublier à demonſtrer la maniere de bander & lier les


a eſté premier parties vlcerées : C'eſt que la bande commencera ſus l’vlcere , & B
innenteur de ſoit tantlarge , qu'elle comprendra non ſeulement l'vlcere , mais
ceſte maniere
de bander. auſſi quelque portion des parties ſuperieures & inferieures , &
qu'elle comprime mediocrement ſus l'vlcere , afin qu'elle expur
ge les humeurs hors dudit vlcere .•Ce faiſant, on la rendra plus
ſeiche , qui eſt la voye de guariſon , comme dit Hippocrates au
commencement du liure des vlceres . Et ne faut que la bande ſoit ſerrée trop fortny
troplaſche: car la forte feroit douleur & fluxion , & la foible ne ſeruiroit de rien ; &
partant il faut en toutes choſes mediocrité. On peut cremper les comprefſes & ban
des en oxycrat , ou en gros vin auſtere, & principalement en Eſté. Le bandagefait,la
partie doit eſtre tenuë
en repos :comme ſi l'vlcere eft aux iambes , le malade, ſuiuanc
la do & rine d'Hippocrates , ne ſe tiendra debout, ny aſſis, mais couché au liet, faiſanc
exercice de ſes bras en les maniant, leuant & baiſſant ,ayant de groſſes bales peſantes,
comme de plomb ou d'autre matiere . Au contraire , ſi l'vlcere eſtau bras, il exercera
les iambesen cheminant : Eroù il ne pourroitcheminer , on les luy frottera ,enſem - C
ble les cuiſſes en deualant en bas : à fin de faire reuulfion & deriuation des eſprits &
humeurs, qui fluent à la partie vlcerée , en crop grande abondance .

Des vlceres en particulier , & premierement des Teux .

CHAP XIII .

Ovs auons par cy.deuant expoſé les differences des vlceres cauſes
& ſignes d'iceux ,& combien ily en a , & quelle eſt l'indication d'un
chacun , enſemble leur curation : maintenant reſte à ſpecifier ceux
qui occupent quelques parties: car ſelon Galien ,liure quatrieſme
de la Methode, diuerſe indication doit eſtre priſe de la ſituacion,
forme & figure,del'vtilicé & vlage, & du ſentimét aigu , ou heberé
Cauſes des dela partie. Et pour ce commencerõsaux vlceres des Yeux.Telles D
vlceres des vlceres aduiennent ſouvent, comme dit Celſe liure 6.chap . 6. à raiſon de quelque
yeux . puſtule, ou pour quelque fluxion d'humeurs acres, qui corrodent lesmembranes,ou

pour quelque coup.Paulus Ægineta liure troiſieſme en remarque telles differences .


Differences: Her
Silvlcere eſt ſitué en la membrane cornée , & qu'il ſoit caue (dit-il) eſtroit & net , les
site
Grecslappellent Borryon : que ſi il eſt plus large, moins caue & profond ,eſtnommé
Cæloma : & lors que l'vlcere eſt au cercle de la pupille , elt dit Argemon. S'il eſt crou
teux & ſordide, eſt appellé Epicauma. Iceux en general requierent vne ſemblable
guariſon comme les autres, à ſçauoir eſtremondifiez , incarnez , deſſeichez, & cica
trizez: mais particulierement la partie demande remedes plus doux & moins dou
cont
Care. loureux . En premier lieu , le malade ſera purgé , baigné , ſaigné, tane du brasque des
1:1
veines & arteres temporales , & pour les remedes Topiques, à fin de deſtourner la 6
fluxion , luy ſeront appliquées ventouſes derriere les eſpaules auec ſcarifications,
fil en eſt beſoin : ou bien vn gros pain bis chaud , enroufé d'eau de vie & bon
vin ſus la nucque du col, & fus le front & temples en forme de frontal , & vne
Fiſtules & Hemorrhoides. 497
A emplaftre aſtringente , comme celle contra rupturam , ou l'onguent comitille , &
deficcatiuum rubrum mellez enſemble, & dedās l’æilſera mistelcollyre, deſcrit par
Cellcaulicu ſus-allegué,approuué par Hollier.24.æris vſti,cadmiæ vitæ & lotæ añ. Collyre de
zj.myrrh.opij,an.zij.acac.gum .Arab.añ.ziij.cum aqua fingiturcollyrium,quod li. Celle.
quoré ouidiffoluitur.LeChirurgien doit prendre garde àla douleur, & pource par Aduertiſſe
nu interuale ſera bon d’vſer de quelque collyre anodyn:à fin d'accouſtumer læil aufuſ ment auChis
dic. Auflion pourra faire collyres dedecoction de plantain ,abſinthe,fenugrec ,y dif rurgien .
Our foluant ſuccre candi,tuthie ,gomine diacragacanthi, myrrhe, & vn peu de vitriol.
Flex L'vlcereeltant inondifié ſera incarné d'vn tel remede. 2. ſarcocollæ nutritæ in lact.
mulieb.ziij.pul.diæreos ſimpl.gummi Arabici,tragacanthi,añ.zB . mucag.fænug.
quan. ſuff. vt inde fiar collyrium . Il faut noter qu'aux vlceres qui ſontforthumides,
les poudres ſont plus conuenables que les collyres. L'vlcere remply, la cicatrice ſera
faite par vn rel collyre. 2. cuthiæ ,cadmize præparatæ vc decet,cerulæ ,antim.olibani
‫ܝܕ‬ añ.;B.myrrhæ,farc.fang.draco.aloës,opijan . B.cum aqua plantag.fiat collyrium .
B Ou bien la poudre ſera miſe ſeule.Celle liu.6.chap.6.remarquedeux vices d'icelles vice des cio'
Tos cicatrices: car ou elles ſont groſſes côme enleuées,oubien caues. Sielles ſont caues, vien
catrices qui
nent aux
ellesdemandent d'eſtre remplies par vn tel remede.2.papauer.lacrym.zB.fagapeni, усвх.
CPU opop. an.zi.B.ærug. zi.cuminizinj. piperis zij.cadmiæ lotæ,cerul.añ.3j.B.cum
aquapluuiali,fiat collyrium .Sila cicatrice elt groſſe & eleuée , il recommande cel
collyre.22.cinaino.acaciæ añ.3B.cadmiæ lotæ ,croci, myrrhæ, papaueris lachrymæ,
gumıni Arabici,añ.zj.piperis albi, churis añ.zj.B.æris combuſti z iij.cum aqua plu
uiali fiat collyrium .Or lila cicatrice eſt ſus la cornée,& qu'elle couure la pupille, le cicatrice
bar malade ne pourra voir de cetcil , à raiſon que l'eſprit viſuel ne peut reluire au tra- cauſe de
211,1 uers, n’eſtane tranſparente & lucidecomme auparauant. Et eſt à noter, que les cica- cecité.
crices qui ſont à la cornée ,fontblanches , & celles de la conionctiue ſont rouges ,
d'autant quela conionctiue eſtplus garnie de veines , quela cornée , leſquellesrem . Pourquoy les
plies deſang, qui y eſt coulé & forty dehors,fait queceſtepartie demeure rouge. Or yeux
cicatricesdes
ſont
Jacornée eſtant du tout ſpermatique & exangue , ne peut receuoir ceſte Auxion de de diverſes
ſang: meſme lamaciere qui la doit nourrir , enuoyée à icelle pour l'aſſimiler, eſt de couleurs.
couleur lucide & tranſparente, laquelle matiere endurcie par la chaleur, deuient
C blanchecomeilappertau blanc d’ynæuf, qui deuient blanceſtantdurcy par le feu . .

Des vlceres du Nez , enſemble de la punaiſie ou mauvaiſeſenteurd'iceluy,


dité des Grecs & Latins Ožena.
CH A P. XI111 .

greke
di V NAISIE ou ozæna,n'eſt autre choſe qu'vn vlcereprofond & puane,
qui eſt au dedans du Nez,duquel ſortent pluſieurs crouſtes de mau
ele: uaiſe odeur. Celle les appelle vlceres puantsdemauuaiſe odeur , & de
difficile guariſon. La cauſe deſquels,commeeſcrit Galien liure 3. De Lino 6.ch. 8.
bir la compoſition des medicamens ſelon les lieux, chap. 3. prouient d'hu
ellos. meurs acres & pourris , qui tombent de la celte dedansles nazeaux , vers les apophy
ſesmammillaires.Pour la gueriſon , il eſt neceſſaire d’vſer de bon regiune, puis apres Cure.
D preparer l'humeur pechant,& eſtantpreparé, le purger par medecines conuenables,
0 & meſme par la ſaignée, ſi beſoin eſt. Apres faut deleicher & roborer la teſte, à fin
‫܀‬ qu'elle nereçoiue,& qu'elle'nerenuoye aucun excrementen bas. Puis fautvenirà
‫ܪܐ‬ la partie vlcerée ,& taſcher à refeicher l'vlcere , par medicamens qui ayent vertu de
repouſſer l'humeur, & le reſoudre: comme ſontle vin de grenade, cuit à la moitié en
vn vaiſſeau d'airain ,poudre de coral , ſandaux , poudre decalamite , de naſturtium ,
d'hellebore blanc, ſuc de ranunculus, auquel onadiouſtera de l'alum, & autres que
OU. lon peut lire en Celſe. Galien au lieu allegué, de l’authorité d'Archigenes,conſeille Remede
‫والی‬ qucion tire le ius de calament par le nez , & qu'on ſeiche ledit calament , & eſtant d'Archi,
misen poudre bien ſubtile, qu'on le ſouffle auec vn petit canal, comme par vn cuyau genes.
my deplume dedans le nez . Autres vſent de ceſte poudre. 2..roſarum rubrarum ,myrtil.
calam ,aromat.radic.ang. gent. macis, caryophyl.añ.zB.camph . amb.ĝiii .moſci
ſvj.fiatpul.fubtilis. Manardus en ſes Epiſtres, liure20. Epiſtres. loue ſur tout le
caputpurgium ,faitex vrina aſini. Et là où lemal ſeroit tant enraciné qu'il ne ſe pour.
ſme
498 Treizie liure des Vlceres ,

roit appaiſer par les ſuſdits remedes, il faudroic auoir recours au vitriol, verd de gris , A
ſelammoniac, & alum auec vinaigre.Souuentles os Ethmoïdes falçerent partelles
Il faut laiſſer vlceres . Que ſi cela aduenoit , ne les faudroit tirer par violence , mais les laiſſer ſepa
cheoir les os fer par nacure , faiſant petites inie & tions, auec eau de vie ,en laquelle on auroit infufé
de foy -meſ. les poudres cephaliquespour deſſeicher l'alteracion d'iceux .
me.
12
Des vlceres de la bouche. CH A P. XV .

Es vlceres de la bouche , des Grecs ſont dites Aphthæ , maladie fami


liere aux petits enfans, commeileft nocé au troiſielme liure des Apho
riſmes . Telles vlceres ſouuent commencent par les genciues , & che
minentiuſqu'au palais : & en fin gagnentiuſques à laluette & gauion ,
comme monſtre Celle liure fixieſmechap. 11. Galien Commene. du
Differences. troiſieſme des Epidemies , en faitde deux eſpeces, dont les vnes ſont aſſez traicta
bles , les autres malignes & rebelles. La caule pour les petits enfans vient à raiſon de B
la delicateſſe de leurbouche , eſtant mollaffe ,tendre , & facile à exulcerer,enſemble
Cure .'
auſſi les excremens acres , dontfenſuit vlceres malins. Pour la guariſon , fauteuiter
1
toutes viandes quiéchaufent: & ſi c'eſt vn nourriçon , faut que le laict de la nour
rice ſoit re & ifié par viandes refraichiſſantes, bains, & fomentations à ſes mamıncl .

Fame uſer de les d'eau cicde , comme commande Celſe liure fixielıe chap . 11. Et quant auxre
remedes qui medes Topiques , ayant égard à l'âge, faut vſer de remedes quioperent prompte
operér prona- ment , attendu qu'ils ne peuuent demeurer longuement ſur la partie vicerée: &
plement.
pource ont beſoin de ſubite operation , à fin qu'ils facent en vn inſtant telle a & ion ,
comme fils eſtoient foibles, ils pourroient faire en vingt . quatre heures, demeurans
touſiours ſur la partie . Donc ſilvicereeſt maligne , ſera touchée d'eau forte elteinte
( dite eau de Separation ) ou auec la commune qui n'a ſeruy, à laquelle on adiouſtera
pour vne goutte d'icelle , cinq ou ſix d'cau de fontaine ou de puits , plus ou moins
ſelon la malignité. Auſſion pourra vſer d'huile de vitriol , de ſoulphre, d'antimoine,
Remede d'eau de ſublimé, & autrestemblables. Aëce veut que celles vlceres putrides ſoient
С
ď sice? corrigées auecques huile boüillante , trempant en icelle vn floc de laine , attachée
au bout d'vne eſprouuette , puis l'appliquer ſur la partie vlcerée , iuſques à ce que de
coute parcelle apparoiſſe blanche,& que l'vlcere ſoit applanie . Par ce moyen on
arreſte la corroſion de l'vlcere , & faic on quela chair fainefauance , pour remplir &
Gargariſme. couurir ce qui eſt rongé & conſommé. Apres telle cauteriſation , on vſera d'un tel

gargariſme, leqnel proficera aux vlceres non malignes. 22. hord . inte. p.j. plan.ce
terac. piloſel.agrim.añ.ñ.j. fiat decoct. ad fbj. in qua dill.mel.roſ.zij. diamor.ZB.
fiat garga. Semblables gargariſmes peuuenceſtre faits d'écorce de grenade,balauite,
ſumac ,
berberis , roſes rouges , y diłToluant du diamorum & dianucum auec vn peu
d'alum . Gal . chap.1o . liu.6 .dela Methode , dit que les vlceres de la bouche ſimples,
doiuent cftre gueris par medicamens , qui deſſeichentmediocrement , commedia
moruin & dianucum , & que ſi elles ſont autres , faut vler de plus forts remedcs. Lors
que celles vlceres ſont au palais , faut les traiter plus loigneuſement , craignant que
par la chaleur & humidité de celle partie , l'oseltant rare & ſpongieux, ilne ſ'alcere
& corrompe ; qui feroic, qu'eſtant tombé , le malade parleroit regnaut , comme nous D
monſtrerons au liure, D'adiouſter ce qui defaut.Quz fil’vlcere eft verollique , fauc
auoir recours à ſon alexitere , qui eſt le vif-argent, laillant tous remedęs communs.
Fiſtules des Or ſouvent il y a des vlceres filluleuſes aux genciues , dont l'enfuit carie à la racine
genciues.
de la dent , & en fin l'vlcere penetre par dehors ,cominc ſous le menton : ce qu'aucuns
eſtiment eſtre cſcroüelles, eſtimanseſtre incurables , ne ſe pouuant guarii par aucun
remede luſdit. En telles vlceres faut ſuiure le conſeil d'Aëce , & de Celſo , ljure 6.
chap.13 . qui eſt arracher la dent offenſée: car parce moyen on extirpera la fiftule, la
genciue fabaiſſera , & ce qui reſte de la curation , fera plus facile , pour ce qu'il n'y
plceres de auoit que la pourriture de la dent qui l'entretenoit . Et quant eſt des vlceres de la
la langue langue, ellesne requierentautres remedes que celles de la bouche: vray eſt, comme
dir Celfeliu 6.chap. 12. que celles quilontaux coltez ſont plus difficiles à guarir , &
qu'il faut prendre garde ſiln'y a point quelque dentaiguë qui luy touche,laquelle
f'il eſtoit ainų , la faudroic limer .
Des

5
Fiſtules & Hemorrhoides. 499

Des vlceres des Oreilles. CHAP . XVI.

L aduiết vlcere au conduit de l'oreille, ou par cauſe externc, com


me coup,cheute,ou pour vne apoſteme.Decelles vlceres ſouuenc

ſore grande quácicé de mariere, quiaduien non dela propre vice


re, eſtant petite & en partie ſpermatique, mais de la deſcharge de
toutle cerucau . Pourla guariſon ,faut auoir eſgard à la cauſe ante- Cure.
cedére , qui peut entretenir l'vlcere, laquelle pourra eſtre diuercie
par purgations,maſticatoires & Errhines : comme 2. maſt.zj.Ita- Errhinei
philag . & pyrethrian.Jj.cinamom . & caryophyll.añ.zB.fiant maſticat.quibusmanè
antepaſtum vcatur.Errhine.2.Succibecon.mercur.melill.añ.3B.vini albi žj . miſce ,
lice!
frequenter naribus attrahātur. Quant aux remedes topiques , taut éuiter toutes cho
ſes onētueuſes & huileuſes,comme a notéGal.liu.s.de la Mechode, diſputant contre Hiſtoire de
B. vn Theſſalien ,lequel vſant du cetrapharmacum à vne vlcere d'oreille, de iour en au- Galien.
tre la rendoit plus purulente & fecide , & en fin Galien la guaricauccles trochiſques Trochiſques
d'Andro
ured
d'Andronius , diſſout en vinaigre , deſquels la compoſition eſt celle . 22. balauſt. Zij . nius.
aluminis zj.acramenci ſurorij zij.myrrhæzj.thuris ,ariſtoloch.gall.an.zij.fal.ammo.
zj . excipiantur omnia melicrato , & fiant trochiſci. Galien au ineſıne lieu, dir auoir
Etaux
guary telles vlceres inuecerées de deux ans, auec coria ferri miſe en poudre cres- lub .
From : tile, & en apres cuite avec vinaigre bien fort, iuſques à ce qu'elle ſoitdocenuë eſpeſſe
werés commemiel. Pour corriger la pourricure qui ſort des oreilles, le forc vinaigre , & fiel
de bæufincorporez enſemble , & inſtillez dedans,vn peu cicdes, la merde de fer ſub
cilement pulueriſée en vinaigre cres -fort, puis boüillic, leichée, & appliquée auſdices
vlceres , les deſfeiche à grande merueille:ce qu'on void par experience.Queſi la boue
& ſanicne pouuoit eſtrecuacuée , il faudroitla tirer par vne ſeringue propre , diate
OUC Pyoulcos, comnc tu vois par ceſte figure.

dem Pyoulcos.
с

.2013

ten
adica

imci :
babaw
OCESO

elima Des vlceres de la Trachée attere,oeſophague, Eſtomach & Inteſtins.


TMC
st CHAPITRE XVII .

nant
Telles parties peuuét venir vlceres de cauſe externe , comme pour cauſe de tela
les vlceres.
12 quelque medicament qu'on aura pris , lequel ſera corroſif,ou pour

D quelque poiſon : auſſi de cauſe incerne , commepourquelque hu


meuracre & poignāc, quiaura vlceré celles parties. Les ſignesſont signes.
douicur en la partie , & principalement lors qu'on aualle quelque
5
16.2 choſe aigre , chaleurà l'endroit. Silvlcere eſt à l'orifice de l'eſto
mach , les accidens ſont plus grands, comme defaillance de cæur,
douleur preſque incolerable,& refroidiſſement desextremitez. Si l'vlcere et auxin
teſtins,lemaladeiecte ſouventesfois de la boüc par le ſiege, enſemble du ſang, ayant
de grandes douleurs & eſpreintes, à raiſon que tel humeurcroupiſſant aiguillonne
Naturcà chaſſer li peu d'excremens qu'il y a . Si l'vlcere eſt à la Trachéearcere, le ma
‫و‬، ‫ا‬
lade touſſe fouuencesfois, & la pluſparc du temps a difficulté de reſpirer. Pour la cure Cure .
51
12:
éelles.vlceres doivent eſtre guaries,commeeſcric Galien liure 4.& 5.de la Methode,
par ce qu'on mange 8 boic, ſe donnant de garde d'vſer de toutes choſes acres & cor
roliucs , ny de cuchie , licharge,ceruſe, verdegris ,& ſemblables, ainſi qu'on fait aux vlo
Cercs externes : maisau contraire douces & gracieuſes ayantelgard à la partie.Com
Vu
Joo Treizieſme Liure des Vlceres ,

me ſi elles sõr à l'Oeſophague,& Trachée artere , & poulmõs,ſerõtbaillées à plufieurs A


Caution rou- fois : autremencils ſeruiroient peu , parce qu'ils nefontque paſſer. Pareillementtels
chane les re- remedes ne doivent eſtre fort liquides , mais viſqueux & glutineux : car eſtans les
medes.
voyes du boire & manger & de l'air, ont beſoin de remedes qui puiſſent adherer &
glutiner, & non qui coulent promptement . Ecs'il les conuiene mundifieron vlera de
Mielcru ,
miel cru,lequelſur toutes choſes eſt vtile à celles vlceres: & lors qu'on les voudraag
glutiner, on y mellera de la gomme diatragacanth , diſſoute auec decoction aucune

A telles pl- ment aſtringente.Les remedes propresaux vlceres de l'eſtomach doiuent eſtre medi
ceres les cho
camenteux , & alimenteux,non acres,de peur d'induire douleur , inflammation & vo
les acres ſont
à éuiter . miſſement: auſſi ils engarderoient de digerer les alimens. Parcant on vſera d'orge
mundé bien luccré,de gelée, en laquelle on aura diſfoulc de la gomme diatragacăth,
bolarmene vraye ,decoction de pruneaux ,dattes,figues,raiſinsde damas , miel : le laict
de vache boüilly auec moyeux d'æufs, & vn peu demielewmmun ,eft fingulier. Er fi
on veut agglutiner telles vlceres on vſera de remedes auſteres , aſtringens, & gluti
neux , leſquels n'ayent aucune eroſion ny mauuais gouſt, comme hypociſthis , feurs
B
de grenadier,eſcorce de grenade,terre leellée, fumac, acacia , roſes rouges,& autres
ſemblables , leſquels ne fontnulleerolon aux parties interieures . On vſera au ſlide
decoctions aſtringentes,commede coings , de lentiſque, ou de l'extremite de vigne ,
de rubus, de myrte auec vin auſtere , s'il n'y auoic crainte d'inflammation.Lorsqu'on
vſe de rels ou autres remetes , l'vlcere eſtavrà la trachée artere & poulmons,Gal.yeut
Situation du que le malade ſoit couché à l'enuers , & qu'il cienne le medicament ( dic lohot) en la
malade tom bouche,en relaſchant les muſcles du Larynx : car en ce faiſant le medicament coulc
des medica ra peu à peu le long des parois de la trachécarcere,commel'eau faitlelong d'un mur,
mens. fegardant quelemedicamencn’entre tout à vn coup , de peur d'induire la coux ,la
quelle eſt du tout contraire à telles viceres, à cauſe qu'elle fait dilacer l’vlcere . "Le
Semblable eſt pour les vlceres de l'Oeſophague. Leur breuuage ſera hydrome ) , hy
Vſage de droſaccarum ,ſyropde violes , & de iuiubes . En coucesvlceres interieures lc miel eſt
miel.
forerecaminandé pour eſtre melléauec les medicamens:car vſant ſeulement de cho
ſes aſtringentes ,elles demeureroiét ſouuencen l'eſtomach , ſans cftre digerées ny diſ
tribuées,mais le niel outre qu'il aide à la digeſtion & diſtribution ,ilest auſſifortpro C
pre à telles vlceres . Pareillemécle laiet d’aſnelle eſt fort recommandé , & en licu d'ice
luy , de chéure ou de vache . La portion vulnerée eſt fore vtile , pourueu qu'elle ſoit
compoſée de ſimples, qui ayencégard aux parties vlcerées . La guariſon des vlceres
qui ſontaux inteſtins, differeen ce desſuſdicesparties : commefi elles ſoncaux gros,
on y remedie par inie & tions & clyſteres , vlanc meſme de remedes acres à fin de corri
vſage de l'E- ger lapourriture,commeEgypriac diſſoul en decodion d'orge ou de vin : mais lil'vl.
gyptiac. cere cft aux grelles qui ſont pres l'eſtomach , les remedes ſeront pris par le boire &
manger. Pource,comme dic Galien , liure 5. de la Methode , ce qui eft ietié par le ſic
ge , ne peut parueniriuſques aux inteſtins grelles , & cequ'on prend par la bouche ,
quand il paruient aux inteſtins gros , ne peutauoir la vertu entiere .

Des vlceres des Reins , & de la veſſie. CHA P. XVI11 .

L vient vlcercaux Reins,ou pour quelque humeur acre & mordi


cant qui y coule,ou pour quelque veine qui ſe rõpt , ou pour quel
signes. que apoſteme quidcgenere en vicere. Ellesioni cognenës parla D
douleur & peſanteur qu'on ſent aux lumbes à l'endroic durein, &
parla boue quiſemelle auec l'vrine,laquelle fe cognoilt venir d'i
Pourquoy la ceux & non de la veſſie: d’autāt qu'elle n'eſt ſi fecide que celle qui
boüe eſt feti viene de la veſſie : car eſtant froide & exangue,nela pouuant cuire
de aux vlce. comme les reins qui ſont chauds & charnus, eſtrenduëfetide & de mauvaiſe odeur.
res de la veſ- D'abondant la boue qui ſort des reins, ſe meſle premierement auec lvrine,puisreſide
fie , e non
des reins. au fond du vaiſſeau , & ne ſort qu’auec l’vrine : mais celle qui fort de lavellie fort quel
quesfois ſans l’vrine toute ſeule: d’abondant les reins eltans vlcerez , on apperçoit
ſouvent de petits filamens ſortir auec l'vrine . Hippocrates au 4. liure , Aphoriſme
27.dit , que ceux auſquels auec leur vrine eſpente , ſorrenc furfures ou pecites el
Cure) cailles blanches , leur veffic eſt ſcabieuſe. Pour la guariſon , il eſt tres - expedient

d'auoir le ventre mol , qui ſe fera par clyfteres conuenables , & viandes humides. Le
--
Fiſtules & Hemorrhoides . sor

Al vomiſſement recommandé , à fin de faire reuulfion des humeurs quipourroicatfluer


ſusiceux. Les grandes purgations ſont contraires,craignane de faire commotion des
humeurs en icellepartie . Pour mundifier celles viceres, celte decoction a grand ef
fe &t.24.hordei integri m.ij.glycyrrhizxzß.rad.acecofæ & petroſelini añ.3 vj. fiarde
coat.ad tbj.in colatura diffol. mellis delpum.zij.capiar ſing.matut . ad Ziiij. Le laiet
de cheure ou d'aſneſſe aucc vn peu de ſuccre eſt fort profitable. Gourdon loüe fort Trochiſques
cels trochiſques.2.quatuor fem.frigidor.maior.mund.ſem.papaue.albi,ſemin .mal. deGourdon.
her ſemin.port.lemin.cydonior.baccar.myrti ,tragacanthi,gummiArabici,nucum , pin .
mund .piſtac. penid. glycyrrhiza mund . muc. pſyllij,amygdal.dulc.hord.mund.añ .
01. Si
ろり boli arm . lang. drac. Ipodij, roſ.myrrh.añ.3.B.cxcipianturhydrom .& fingantur
trochir. qui ſint ſinguli ponderis zij . Galien liure quatrieſme de la methoderecom

mande fort le miel, & les diuretiques , pour eſtre mellez auec les remcdes qui ſont
propres à celles vlceres , d'aucant qu'ils provoquent& eſmeuuent les vrines , & ſong
cóme vehicules aux autres remedes . Les vlceres de la vellie contou au fond d'icelle , vlceres de los
B ou au col pres le conduic de l'vrine . Siils ſontau fond , l'on ſenc douleur preſque con- veſie,
cinuelle : & li ils ſont au col , on les apperçoit le plus ſouvent lors qu'on piſſe, & apres signes.
auoir piſſé. Si ils ſont au fond, il ſort quelquesfois de petites peaux cômeeſcailles: &
lors que l'vlcere gaigne iuſques au conduit de l'vrine,la verge ſouuét ſe dreſſe. Ceux
den
quiſonc au profond, pour la plus part ſont incurables , cant pour la compoſition de la
partie, qui eſt exangue & nerueuſe, que ponr lvrine qui demeure perpetuellement :
car encoresqu’on aye piſſé , lieſt- ce qu'il demeure quelque portion d'vrine , laquelle
touche de couces parts la veſlie , attendu qu'elle ſ'affaiſle, & referre ſelon que l'vrine L’orine.
1 fort. Pour la guariſon , les meſmes remedes deſcrics aux vicercs des reins luy ſeront
profitables, tant pris par dedans, que ſeringuez par la verge: & entre autresles tro
IOM
chiſques deGourdon diſſoulos deſcrits cy-deuant. Reſte ſeulemét que celles vlceres
co
cftans plus douloureuſes, le Chirurgien doit auoir eſgard à appaiſer la douleur . I'ay
approvuć , & ſouuent experimencé vne inicction d'huile de iuſquiamc extrai& cpar
expreſion. On pourra vſer de cataplaſmes ,linimés ſus le petit ventre, & encrcfelſon ,
enfemble de clyfteres, deſqnels remedes anodyns nons auons aſſez fait mention . Si
Cles vlceres eſtoient ferides, ie ne ferois difficulcé d'vſer d'vn peu d’Egyptiac diſſouc
vin & cau de plantain ou de roſe : quei’ay fait ſouuent auec bonne iſſuë.

Des vlceres de la Matrice. CH A P. XIX .

Es vlceres de la marrice viennentou à raiſon dequelque humeur Cauſes.


acre & mordicant , qui ronge les parois d'icelle , ou pour quelque
apofteme qui y eſt ſuruenuë, o'u apres les fleurs blanches , ou apres
dos
vn grand prurit,ou apresla contagion de la verolle , par la violente
defloration de la fille pucelle ,tropieune, ou d'vo accouchement
abo AL
difficile, ou pour eſtre tombée ſur quelque choſe aiguë, ou en
auoir eſté frappée. Orcels vlceres ſituez au col dela matrice , ou signes.
cauité d'icelle , ſont fimples ou compoſez. Ils ſe cognoiſſent par la douleur que les
femmes ſentent au deſſus du penil , & par la ſanie & boüe qui ſort par leurs parties
honteuſes .Auicenne liu.z.ſen.21. traicté 11. chap . s . en fait celles differences: Ouils

D ſont puerides,lors que la matiere quien ſort , eſt forcpuante,reſſemblantà la laueure


de chair : ou ils ſont ſordides , lors qu'ilen ſort grande quantité d'humeur virulente
& indigelte. Que ſi ils ſont corrolifs, l'humeur qui en ſortira ſera noiraltre auec
grande douleur & eſlancemens. Ils ſont au col de la macrice , ou au fond d'icelle .
tir Celles qui ſont au col , ſont cogneuës par la veuč, y mercant le ſpeculum , & ceux qui
d
Blon
fontau profond , par les excremens qui en ſorcenc, & le lieu de la douleur . Les reme- Cure.
des ſeront ſemblables à ceux qui ſont deſcrits auxvlceresde la bouche, comme eau
fore, huile de vitriol , d'ancimoine, & autres,eſtans corrigées , deſquelles on touchera
l'endroic vlceré : car il faut que le remede belongnc à l'inſtant, ne pouvant long
:bo. temps non plus qu'à la bouche,y demeurer . Oril ſe fait en la matrice telle corruption
que l'inteſtin droir en eſt congé & corrodé , & de l'inteſtin , le col de la matrice en eſt
erodé , & la ſanie fort cant par l'inteſtin ,que par le col de lamatrice,voire par le ſiege.
Le prognoſtic, c'eſt que les vlceres de la matrice ſont difficiles, & ſouucot impolli- Frognoſtic.
bles à guarir; poucce qu'elle eſt chaude & humide, & qu'elle reçoit coutesles ſuper
Vu ij
502 Treizieſme Liure des Vlceres,
fluitez du corps. Les vlceres qui ſe peuuent voir & toucher en ceſte partie , ſont plus A
faciles à guarir que ceux qui ſont au profond. Ceux qui ietrene vn puslouablc , &
auxieunes femmes, ſont plus aiſez à guarir que ceux qui ieccent vneſanie non loüa
ble, & ſont aux corps des vieilles femmes.
Galien commande les remcdes forc deſiccatifs , à fin d'euiter la pourriture,à la
quelle ceſte partie pour ſa chaleur & humidicé eſt ſubiecte, & cõme ſencine de tous
Imiection les excremens du corps. Sil'vlcereeftau profond , on fera telle iniection. 24.hordci
integri pij,guiaci zj.rad.ircosz B.abſinth.plancag.centaur.vtriuſqueań m.j.fiar de
coct in aqua fabror.añ.fb.ij. in quibus diff. mellis roſaci & ſyrup. de abſinth.añ. Z iij.
fiat iniectio. Silafeteur ne ceſſoir,entre autres remedesi’ay ſouventelprouuécecuy.
2.vini rubriibj.vnguen.ægyptiacizij.bulliant parum.Tel remede corrige la pours
ricure& malice de l'humeur,laquelle louuenc eſt cauſe de la douleur. Puis on pourra
faire des parfums tels qui s'enſuiucot.Prenez eſcorce d'encens,maſtic,grainedege
néure , labdanum , dechacun demie once , orpigment rouge , ou citrin,gij. cinabre
demieonce , & ſerontformez trochiſques auec terebenthine,pouriercer ſur le feu,
& en faire receuoir la fumee. Ec s'il y auoit grande ardeur & inflammation, on feroit B
iniection aueciusde plantain , & de morelle, ou eau de forge, en laquelle on fera
bouillir teſtes de pavor concaſſées, trochiſques de camphre , & autres ſemblables.
Les viceres mundifiées ſeronc cicatriſéespar eaux propres , comme eau alumincuſe,
Les plceres eau de plárain,en laquelleonaura diffoulc un peu de vitriolou alum .Si telles vlceres
de la matrice degenerent en chancre,on aura recours aux remedes anodyns & propresà celle affe
fouuensdege.
merent en
&ion, leſquels ſont amplement deſcrits aux chapitres du Chancre.Touchantles vl
chancre, ceres du fondemnene, nous en parlerons au chap. des Fiſtules, comme de celles de la
Verge au liure de la Verolle .

Des Varices, a le moyende les couper. CHAP . XX .

Que c'eſt que Ariceeltvnedilatation de veine ,quelquesfois d'un ſimple ramcau,


Varico . quelquesfois de pluſieurs. Aucunesfois elles ſont courbées & re
pliées en pluſieurs circonuolutions emmoncellées: & peuvent ve C
nir en pluſicurs parties de noſtre corps, commeaux temples ,au deſ
ſous du nombril , & teſticules, à l'amarry, & fiege, mais le plus fou
uent aux cuiſſes & iambes. Lamaciere pour laplus parcelt un ſang
Les cauſes melancholic. Les varices s'engen jrenc aux perionnes qui font me
des varices. lancholiques, & quiſe nourriſſenede viandesmelácholiques. Lesfemmes groſſes en
1
ſont communément eſpriſes,à cauſe du ſang melancholique, qui retenu pendācleur
groſſeſſe,faicqueles veines ſe dilatēt,& deuiennēt variqueules pour la grande multi
cude du fang: auſſi elles viennentà cauſe d'vn grand & vehement mouuemét,commo
de courir,laulter, & danſer,voyager à pied , & porter grands fardeaux,comber dehaut
Signes. en bas,ou eſtretiré ſusla geſne. Quācaux fignes,ils font manifeſtes pour l'amplitude
Chre. & groſſeurd s veines. Il eſtmeilleurdenetoucheraux inuecerées,parcequ'elles pre
ſeruent de pluſieurs maladies, àcauſe que le ſang regorge auxparties nobles,dór s'en
ſuic vlceres,chancres & fuffocations. Lors qu'elles ſont pluſieurs& ioinces enſemble
aux iambes, quelquesfois dedans icelleson trouue des thrombus de fang deſſeiché &
dur,cauſant grande douleur au malade lors qu'il chemine, ou quádon preſſe deſſus.
A celles on fera ouuercure au corps de la veine , à fin d'euacuer la crop grande abon
dance contenuë en icelles,enſemble les chrõbus, comprimáccant en hautqu'en bas,
à fin de les faire ſortir: ce que i'ay faic auec bonne & heureuſe iſſuë,faiſant cenir quel
Le lieu où l'o que temps le malade en repos,& y appliquant medicamens propres . L'on coupe ſou
coupe
rice.
la va- venresfois la varice au dedas de la cuiſſe,vn peu au deſſous du genoüil,où la plus part 1

Pourquoy lo ſe trouve l'origine & production de la veine variqucuſe.Car communément plusbas


coupe lava . elle ſe diviſe en pluſieurs rameaux,àraiſon dequoyl'operació cſt plusmal-aiſée.Orla
rice . cauſe pourquoy lo inciſe,eſt à celle fin de couper lechemin, & faire rampart au lang
& autres humeurs contenus auec luy ,quiabreuver quelques vlceres eftans auxiam
bes:ou pour defendre les humeurs quifluēcà icelles quiſont cauſe que le malade ne
peut cheminer:ou pour lacrainte qu'on peut auoir,que par quelque accidét, la veine
ainſi grandemenreitenduë & dilatée,nes'y face ouuerture,laquelle ſeroic cauſe d'un
trcs-grād Aux de ſang, & cauſeroit la mort dumalade,s'il n'eſtoic promptemét ſecou,

)
Fiſtules & Hemorrhoides. SO3

A ru.A ceſte cauſe les anciens commandent delescouper : & pour ce faire fautficuerle Paul. Ægin.
malade à la renuerſc, ayant les iambes eſtendvës, von du tout , mais vn peu flechies, ch.8z.lin.6.
Cela fair,on fera vne ligacure à la cuiſſe, vn peu au deſſus de l'ouuerture qu'on y fera ,
& quatre doigts au deſſous yne autre, à fin de tumefier la veine : & deſſus le cuir, à l'é
droit de la veine,on fera vne marque d'encre, pour ne faillir à faire l'inciſion, laquelle
fe fera en ceſte maniere : C'eſt que l'on elleuera le cuir en haut des deux coſtez, & on
fera l'inciſion au cuir ſus le corps de la veine ſanscoucherà icelle , où l'on auoic mar
quéd'encre. L'incilion faite,la veine ſera manifeſte à la veüe , & par deſſous icelle on Le moyen de
paflera vne aiguille à ſeton,enfilée à doublefil,non ayant poin & e aigüe, mais vn peu faire l'opera,
tion .
ronde , de peur d'inciſer la veine , & on ſeparera lesmembranes de la veine cant en
haut qu'en bas , puis on desfait les bandages de la cuiſſe, & apreson liera fermemenc
la veine à la partie ſuperieure , puis le corps de la veine au deſſous de la ligacure ſera
incilé ,ainſique ſi l'on vouloit faire vne ſaignée: & par ceſte ouuerture ſera éuacuélo
fang dela partie inferieure,cantqu'il ſera neceſſaire : & lors op liera la partie inferieu
B re de la veine , comme on a fait la ſuperieure , & apres on occupera entieremenilo
corps de la veineentreles deux ligacures , laquelle eſtane coupée ſes deux extremitez
ferecirent & cachent cantd'un coſté que d'autre. Et faur noter , que la ligature de la
veine doiceſtrelaiſſée, iuſqu'à ce qu'elle tombe de ſoy -meſme. Et pour les remedes
parciculiers , on appliquera vn reſtreintif,tant ſus la playe , comme és parties voiGnes ,
& de trois jours ne ſera couché à la playe. Lereſte de la cure ſe fera comme les autres .
Autre maniere de couper la varice : C'eſt d'appliquer vn cautere potentiel , qui ronge
& coupela veine , puis ſe retire en haut & en bas : & par ce moyen il y demeure vne
is
eſpacevide,où apres s'engendre de la chair: & puis la cicatrice, qui ſera dure & el
peſſe,cmpeſchera la fluxion ,en bouſchant le paſſage de ladite veine . Et par ce moyen
la veine variqueuſe ſera guarie.

Des Fiſtules. CHAP , XXI.

Itulcelt vne linuoſité profonde,eſtroicte, calleuſe, & quelques- Definitió des


с
fois inſenſible , ainſi dite desanciens , pour la fimilitude & figure fiſtules.
qu'elle a à l'inſtrument nommé Fleute , parce que les fiſtules loncD'où el dice
ſemblablement caues & vuides . Elle ſe faic en pluſieurs & differen- fiſtule.
tes parties de noſtre corps , & ſouuent apres quelques apoſtemes Generation
ou vlceres mal-trai &tées & penſées. Quelquesfois auſiellesſontdes fiftules.
critiques de pluſieurs autres maladies , ſelon le texte d'Hipp. ſenc.
28. de la 3.fe &t. du liu. De humoribus, où il dir que les fiftules guariſſent d'autres mala
dies,voire celles quiſontaiguës : commeaduient quand la fiſtule de la iambe eſt in
dicatoire de la peripneumonie, comme eſcric Hip.au Prognoft.64.de la 2. fe &t. & à
interest
telle fiftule ne conuienefitoft coucher.La calloſité eft vncchair blanche , ſolide, ſei Que c'eſt que

che, & fans douleur ,laquelle eſt engendréepar congeſtion d'vn excrement picuiceux calloſité.
deſſeiché,ou melancholiqueaduſte, quienduit la circonference de l'vlcere,& occu
pele lieu ſus lequel ſe deuroit engendrer la bonne chair . La finuoficé quelquesfois
eſt du tout ſeiche, quelques fois humide : & eſtanthumide,pleure & iecte inceſſam
mene,aufliquelquesfois elle ceſſe de couler , & l'orifice d'icelle ſe ferme du tour , de

D ſorte qu'elle deçoit le malade , & le Chirurgien eſtimant la guariſon d'icelle : puis
quelque temps apres s'ouure & fluëcommeauparauant. Les fiſtules quelquesfois Differences,
proviennene du vice des os,quelquesfois des nerfs , ou membranes, ou d'autres par
ties . Les vnes ſone droictes,aurres tortuës : les vnes ont vn ſeul orifice ou finuofité,les
autres pluſieurs : quelques vnes ſont aux iointures,autres penetrêt en quelque capa
ciré du corps,commededans le chorax,ventre, boyaux,matrice, veſlie, & autres :les
vnes ſe guariſſent facilement, autres difficilement , & s'en trouue quelques vnes in
Curables. Aux fiftules ſe trouuét diuers ſignes,ſelon la partie où elles finiſſent. Celles
Signes des fi
quiſe rendent & terminentaux os , ſe cognoiſſent par la reſiſtance, quand on y met julesſelonles
l'eſprouuerte: carlors on rencontre la ſubſtance d'iceluy dure , qui ſonne caffe, & li parties .
l'eſprouuerte eſtant ſus l’os gliſſe ,commeſus quelque choſe brunic & polie, on peut
conie &turer l'oseſtre ſain & entier : & lielle s'arreſte deſſus en quelque lieu que ce

ſoit,c'eft figne quel'os eftaſpre, raboteux, caricux, & corrompu.Quelquesfoisl'os


dous eſt manifeſte à la veuč, & pource n'auons beſoin de ſondeny eſprouuerce, & la
Vu iij
504 Treizieſme Liure des Vlceres ,
matiere qui en ſort eſt huileuſe ou viſqueuſe, rapportantàl'aliment & humeur con- A
tenu en la cauiré de l'os,ſçauoir à la moëlle,commc ainſi ſoic que cour excrementre
tienc la conditiondel'aliment de la parcie dont il vient . En celle qui ſe rend à quel
que nerf, le malade ſentira vne douleur poignante , principalement li la mariere eſt
acre, ou vne ſtupeur, fi elle eſt froide: de ſorte que lemouvementde la partie ſera
vicié:& lors que l'on voudra fonder la fiſtule,on cauſera douleur,& la mațiere quien
ſortira ſera ſanieuſe,ſubtile,aqueuſe,glueuſe, & non builcuſe, comme celle quiſore
des os repreſenteen tout lamatieredonteſt nourry le nerf pourla raiſon ſuſdice.Ces
Signes defie meſmes accidens aduiennent , quand les fiftules penetrentauxmembranes, quien
ſtules en la
shair. veloppent lesmuſcles, & aux tendons d'iceux. Sielles finiſſent en la chair,la matiero
cſt pluseſpeſſe & moins liquide,égale,lifle ,blanche, & en grande quantité. Si la filtu .
le finic aux veines,les accidens ſont ſemblables à ceux qui ſe trouuent en la fiſtule des
nerfs, maismoindres, comme és pointures & douleurs, & n'y a aucunmoyuemenc
Prognoſtic. cmperché.Sielles ſe finiſſenten l'artere,lesmeſmes accidensſé trouvent qu'en celles
de la veine. Mais ſi lamaciere de l'vlcere eſt fiacre , qu'elle corrode les ſuſdits vaiſ
ſeaux, il ſorrira du ſang gros en abondance de la veine, & de l'arcere du ſang ſubcil B
auec vnbruir , commenousdirons cy-apres de l'aneuriſme. Les vieillesfiftules qui
ont par longues années coulé,lors qu'elles ſe refermeño,cauſent ſouuent lamort, &
principalement aux vieilles gens,à raiſon queles humeurs, qui auoient couſtume de
couler,regorgenten la maſle ſanguinaire, & ſe pourriſſent engendrans fiéures & au
tres accidens, & par conſequentla mort.
Cure des fiftules. CHAP. XXII.

Our la curation on commencera par ſonde, qui ſera d'vne chan


delle decire , ou de plomb , d'or ,ou d'argent: & paricelleson co
gnoiſtra la profondeur & anfractuoſitez.Etfi la fiſtule a deux orifi
ces ou pluſieurs ayantdes cauicezcuniculeuſes, de façon que l'on
les puiſſe bien ſonder, & ſuivre leurs cauirez , alors on doit iecter
vne iniection par l'undes orifices, & obſeruerl'iſſuëde ladite inic
&tion par les autres ouuercures : & par cemoyen on cognoiſtra s'ily
avne ſeule ou pluſieurs cavitez profondes ou ſuperficielles.Cela faiton fera desinci.
1 fions pour deſcouurir & amputer les calloſitez, quiſe feront auec le raſoir,ou parme
dicamens cauſtiques,ou par cautere actuel.Car iamais on ne pourroit guarir l’vlce.
refiftuleuſe,quepremierementon n'euſtoſté la calloſité,à raiſon que Nacure nepeue
produire & agglutiner les parties diſtances,lorsqu'il y a chair calleuſe: d'autantque
deux corps durs ne ſe peuuent vnir que par le moyen de quelque humidité gluante,
quelle eſt le bon ſang. Orles calloſitezoccupantes de coures parts la ſuperficie de la
chair vlcerée, empeſchentqu'iceluypuiſſe ſortir desveines capillaires pour l'vnion
signes que deſdices parties. Semblablementon vſera d'inie& ions cauſtiques, & apres on bouſ
l'operation a chera le pertuis,à fin qu'elles facent leur operacion : laquelle ſera cogneučeſtre bon
efté bonne ne lors que la partie demeure enflée, & la matiere quieſtoic en abondance,ſortdige
Corn.Cells Ite & en petite quanticé. Apres fauraccelerer la cheure de l'eſcarre,puis craicer l’vice
recommcauec deperdition de ſubſtance. Souuent la calloſité quieſtautour de la ſi
nuoſité ou cauité de la fiſtule, vaincuë des medicamens acres & eſcarotiques ayans
fait eſcarre,ſeſeparc & fort entiere, & lors au deſſous on trouve la fiſtule nette & ver D
Bifoire. meille.Ce quei'ay veu à vn Gentilhomme, lequel ayant vne fiſtule à vnecuiſſe, pour
vn coup d'harquebuſe, & ayant vſe demedicamensacres,comme Egyptiac fortifié,
quelques iours apresl’eſcarre forcoit d'autourdela circonſcription dela fiſtule ſem
blable à vne membrane. Ce que voyant leditGentilhomme, eftimoit eſtre quelque
linge , que le Chirurgien ,qui premierement l'auoic penſé, n'auoit cogneu , le caxant
de ſon imperitie. Toutesfoisſçachant que c'eſtoit lacrouſte de ladice eſcarre, luy dis
que c'eſtoitla chair calleuſe & dureque i'auois fait ſeparerparlemoyen des remedes
forts & cuiſans qu'il auoit bien ſenty: & quccelle choſe eſtoit figne qu'il ſeroit bien
coſt guary.Ce qu'il fut,parce que i'inſtilay demon baume dedans coute la cauité.Les
fiftules qui ſont pres des grands vaiſſeaux,comme veinesarceres , & nerfs,ou de quel
que partie noble, neſedoiuent coucher, ſi ce n'eſt auecgrande prudence &arcifice.
Paul.Ægin. Or quand la fiſtule vient à cauſe de l'os alteré & pourry o
, n doit confiderer file vice
Fiſtules & Hemorrhoides . SOS

A eft en fa ſuperficie ou profondité,ou s'ileſt du couccorrompu : & s'iln'eſt qu'en ſalu Cure de la fi
perficie , il ſera raclé & ruginé ſeulement : & fi la carie eſt profonde , on la doit oſter ftule prowenát
auec vn crepan exfoliatif : & fi la corruption eſt communiquée iuſques à la mouëlle , à raiſon de
elle ſera oſtée auec vne tenaille inciſiue, pour y faire plus ample ouuerture, y appli- l'os carié.
quant premierement , li beſoin cſt, vn pecic crepan pour donner paſſage à ladite renail
le ,& s'il eſt du cout corrompu ,il ſera pareillement du tout coupé, commeen l'os d'v
neiointure du doigt,du rayon, du coulde,de l'os de la greue, ou tibia . Mais aduenant
ce mal à la boiſte de la hanche , ou en la teſte de l'os de la cuiſſe , ou à vne vercebre, ne
faue entreprendre la cure non plus qu'à autre quelconquefiſtole ,qui de ſoy eltincu
rable,quelles ſont celles qui penetrenciuſques aux membres principaux , ou ſeren
contrentaux parties veineuſes,arcerieuſes,ou nerueuſes:ou qui aduiennent à perſon .
nes delicates , qui choiſiroient pluſtoſt mourir auec leur mal , qu'endurer le tourment
de l'operation : ou bien quand de l'inciſion doit ſuruenir autre plus faſcheuſe diſpo
Gtion ,commeconuulſion en fiſtule de partie nerucuſe : en tel cas le Chirurgien ne
B doic chercher l'enciere cure & parfaicte, ains ſe doit contenter de la palliaciue, quiſe

fera en preuoyant qu'ilne tombe ſur la partie autre nouvelle fluxion , faiſant parbon
regime que trop d'excremés ne s'amaſſent dans le corps . Et en cas qu'ils s'y amaſſent,
THUR les purgeant par interualle, & diuerciſſant ſur vne partie moins noble, fi micux on ne
peur:mundifiant la chair vicieuſe qui croiſten l'vlcere, & la ſanie auec medicamens
qui n'irricent & ne cauſenc putrefaction.Leieune Chirurgien ſera aduerty , que lors
qu'on verra aux fiſtules que la ſonde ou tente demeurera noire , ou qu'il y aura quel
que fecidité , on ne doit pourtant acercener qu'il y ait carie auxos . Car fouuentesfois
cela aduient à cauſe qu'il y eſt demeuré dedans quelque morceau d'eſponge ou de
linge,quiſe pourriſt, commei'ay veu par expericnce .

Des fiftules du fondementon fiege. CHAP. XXIII.


dor
Es fiſtules du fondement ſont faites comme les precedences,à ſçauoir d'vn
7
abſcés ou d'vne playe mal- curée,ou d'une hemorrhoïde apoſtumée. Les Differences.
C
vnes ſont cachées , les autres manifeſtes. Celles qui ſeront cachécs , ſe co- signes des fic
gnoiſtront, d'autant que parle liege ſortira vne humidité ſanicure & puru- Sulescachées.
lente,& que le malade ſentira douleurà la parcie. Celles qui ſont manifeſtes, le co- signes desfor
gnoiltronc en les ſondant: & pour ce faire leChirurgien mettra ſon doige dedansle Rulesappa:
rentes .
ſiege , & par l'orifice de la fiſtule mettra ſa ſonde de plomb: laquelle ſi elle couche le
vietos doigcàovd, ſans aucune interpoſition , c'eſt vn ligne infaillible qu'elle penetrc de
dans la cauicé du boyau : ioint auſſi que non ſeulement par le liege ſorc vne maticre
ſanicule, & louuentesfois des vers,maisen outre par le trou que la matiere par ſon
acrimonie ſe ſera ouvert à coſté. Les fiſtules cuniculeuſes & torcucuſes comme vn Paul. £ gin .
unt labyrinche , leiugencà ce que la ſonde ne penetre gueres auant , & neantmoins il
500 en fluë plus grande quantité de matiere qu'il n'eſt requis pour vnc pecice vlcere : or
ſe voit preſque touſiours quelque calloficé eminente , que les
enl'orifice de couces
Chirurgiens appellent vulgairement Cul de poulle. Aux fiſtules du fondement il Accidēs qui
10
aduienelouuent pluſieursaccidens, commeceneſıne, que nous appellons eſprein- Turuiennenea
tes par acrimonic de la matiere : ſtranguric , quieſt vn découlement d'vrine : proci- telles fitules .
dence ou relaxation du fondemenc : decoulement de matiere ſanieuſe & puance , le
yum ? D
tout par communication de maciere eſtrange, & fympathie par voiſinage des parties,
comme note Hippocrates liure des Fiſtules. Lors que nous voudrons curer la fiſtu- Curation.
le parcuure manuelle , faut faire ſituer le malade àla renuerſe,en ſorte qu'il cienne
les iambeselleuées en haut, de façon qu'ilaye les cuiſſes iointes vers ſon ventre : puis
le Chirurgien mettrale doigt dansle liege, oio &t de quelque medicamentonctueux,
ISAN
ayantrongné ſon ongle : puis par l'orifice de l'vlcere mettra vnc groſſe aiguille do
plombenfilée, partie de fil & de qucuë de cheual , laquelle aiguille cſtant rencon
trée par le doigt à nud , qui eſt au fondement,
ſera courbéc & ramenéc dehors
par le liegepour paſſer leditfil: lequel eſtant paſſe , ſera lié & lerré à næud coulant ,
1 à fin
que de jour en autre on le puiſſe ſerrer dauantage : & auparavant de le reſa
ſerrer, on le tirera vers ſoy, comme ſi on le vouloit ſcier : car par ce moyen ledit fil
4
8275 coupera la fiſtule , ſans avoir aucun flux de ſang. Or quelquesfois celles fiftules ne
pencurentiuſqu'à la cauité du boyau , tellement que le doigt ne couche immedia
V u iiij
506 Treizieſme liure des Vlceres ,
tement la ſonde , à cauſe de quelque calloſicé quiſera interpoſée entre la ſonde & le A
Cure des fi- doigt. Et pour la curation faudra mettre vne londe de fer ou d'argent , laquelle ſera
Stules non pe-creuſe , & pardedans ſa cauicé on iecteravne aiguille picquante & trenchante, à fin
nsirantes.
de rompreladice calloſité :ce que l'on ne pourroit faire par le benefice d'vne de
plom,bou d'unc autre quifuſt ronde,ſansyne grar.d -douleur.
Sonde d'argent creuſe , auecl'aiguille deplomb.

B
.

Macacu
m

A Monſtre l'aiguille .
B Lalonde creuſe .
j C L'aiguille & ſonde. i
D L'aiguille de ploinb enfilée. be

Puis eſtant rompuë,ſera liéecomme la ſuſdice.Celle qui eſt ſuperficielle,n'a beſoin


d'eſtreliće ,ains ſeulement ſera coupée auec vne biſtorie courbe, ou ciſeaux propres
à ce faire, & apres ſera oſtée la calloſité , & traictée comme auons dit cy -deſſus des
autres fiſtules.Cependant il faut noter en ce lieu , qu'apres auoir coupélafiſtule, s'il
demeure quelquecalloſité ,& cuir cicatrizé, qui n'ait eſté emporté & trenchépar le
fer ou medicament , la fiſtule a couſtume de retourner.

Des Hemorrhoides. CHAP. XXIIII.

Que c'eſtque Es Hemorrhoïdes,ſelon que le mor eſt pris vulgairement,ſontcu


Hemorrhoi meurs aux extremitez des veines qui ſont aucour du ſiege, faites
de. par vne fluxion d'humeurs melancholiques pour la plus part , &
ſono ſelon les anciens,eſpeces de varices. Les vnes ſont ouuertes ,
Differences. & par ſucceſſion de temps l'ouverture deuient calleuſe :les autres
Vi fermées, clans ſeulement enfées ſans rien iercer : & autres ſont
grandes , petites , groſſes: & autres apparentes, autres cachées,
ietcans pour la plus-part ſang, auec vne ſeroſité iaunaſtre , qui eſt celle qui de la ce
nuicé a fait courir le ſang en tellieu , & de ſon acrimonie a ouuert leſdites veines.
Hemorrhoi. D'icelles,lorsqu'elles ſont fermées,aucunes ſont ſemblables à vne ampoullefaire de
desveſicales. brulleure àraiſon de quoy les paticns les nomment Veſicales, & font engendrées par
affluxion d'humeur pituiteux & ſereux : autres à vn grain de raiſin , qu'ils nomment
Vuales. Vuales, qui ſoncengendrées par affluxion de fang louableen qualicé , redondanten
Morales. quantité. Aucunes ſontſemblables à vne mure, & ſont dites Morales,cauſées par af
Verrucales. Auxion de ſang melancholique:autres ſontdices Verrucales,pour la ſimilitude d'vne
verruë, & z ſontengendrées de pareille cauſe. Ceſte diſpoſition eſt cauſe de pluſieurs
accidens aux homes,parce qu'elleofte la naturelle beaucé,à raiſon que pour la gran
de euacuation de ſang,la couleur de tout le corps eſt changée & corrópuë, & les con•
Le temps que
duicà yne miſerable vie,& pour la foibleſſede coucle corps,elles mettent fouuencle
les Hemor malade en danger de mort : à cauſe quel'euacuacion immoderée qui s'en enfuit, faic
rhoides fluir.hydropiſie.Ellos fuent volontiers demois en mois,oude trois mois en trois mois : cc
Fiſtules & Hemorrhoides . 507

A qui ne ſe fait ſovuent qu'auec grande douleur , qui excite quelquesfois inflamma
cion , abſcés , & fiſtules,li promptement on n'y remedie . Orfi elies iecrent moderé
ment , & lemalade louſtienne bien l'éuacuation ſans ennuy , on ne les doic arreſter du
touc , parce qu'elles preſeruenc de melancholie,manic ,lepre,ſtrangurie,& autres affe
& ions, comme pleurelie, peripneumonie , & malins vlceres, ſelon la ſent . 37. de la 3.
ſect.du 6. des Epidemies : & ores qu'on les voulult curer,ileſt bon ,ſelon l'Aph.12. du
liu.6.en laiſſer vne:maisfileflux de ſang eſt démeſuré on l'arreſtera: car autremencil
cauſe hydropilie ,pourla refrigeration du foye,auec vne conſomption & excenuation
decout le corps . Pareillement eſtant indeuëmencretenu , il regorge aux poolmos,
rompāc quelque vaiſſeau , quicauſe la mort du malade : ou au foye ,çaulanc la melme
hydropiſie ,refrigerantledit foye par ſuffocation de la chaleur nacurelle. Pour la cu- carei
ration , lors qu'elles fluent trop ,on y appliquera vne cente faire de poil de liéure,cou
uerce d’un telmedicament.4.pul.churis, balauſt. ſang. drac.añ.ZB.incorp.omnia
cum alb.oui, fiar medicam.ad vſum . Autre . Prenez du drappeau bruflé comme fion
B le vouloit mettre en vn fuſil, & le meccez deſſus. Et lors qu'elles ſont fort cumeſiées
ſans eſtrc ouuertes,on doit faire cuire yn oignon ſous la cendre, & piler enſemble vn
fiel de bæuf, & de cout ce en faire medicament , qui ſera appliqué & renouvellé de
cinq en cinq heures . Tel remede eſt propre lors qu'elles ſont internes & cachées , &
lors qu'elles ſontapparences on y appliquera des langſuës , ou bien on fera apertion
auec la lancette . Le ſuc & marc de l'herbe nommée galiopſis, autrement vrtica La
beonis , poſéſurles hemorrhoïdes , les ouure & fait faigner, auli cure les fungus &
thymus qui ſont autour du ſiege. S'ily a grande ardeur , cuiſſon & douleur , on fera
affeoir lemaladeen vn demy.bain : & s'il y a quelquesvlceres,on y appliquera tel me
dicament.4.oleiroſ.Z.iiij.cerul.z.j.litharg :3B.ceræ nouæ z vj.opii.j.fiat vnguent .
ſecund.art. Autre pour ſeder les grandes douleurs & eſpreintes. 2.thur.myrrh.croci Remedepour
añ.zj.opija.j.fiac vnguent.cum oleo roſa.& mucag.ſem.pſyllis, addend.vitel.vnius Pederlesgră
oui.Autre. Prenez fueilles de ſaulge,de conſolida media de millefolium ,& de lierre des douleurs
oefpreintes:
terreſtre ,dechacun demy - poignée , pilée en vn mortier auec iaune d'auf : & decel
remedcen appliquer ſurlemal.Autre. 2.voguenti populconis zij.vitel.ouor. nu
mcro duo : agitent.fimul in mortario plumbco :ou prenez de la močlle de bæufauec
beurre frais,du cour laué en eau roſe ,loit fait vnguent. Lereſte de la cure ſe parache ,
uera ainſi qu'il ſera neceſſaire.

Fin du Treizieſme liure,Des vlceres, Fiſtules & Hemorrhoides.

an Pernirinnerne gen

Table des Chapitres du Quatorzieſmeliure ,

Des Bandages.

ifference des bandes. Chapitrej.


indications & preceptesgenerauxpour les bandes de ligatures, Chap.j.
Trois bandes requiſes aux fractures. Chap.ij.
D Des bandes des fractures auec playes. Chap.iij.
pour les fractures& luxations.
Preceptes e obſeruations communes Chap.v.
Prilité des bandes . Chap.vj.
Vlage des compreffes. Chap.vj.

Vlagedesferules,aftelles, torches, eaqueſes. , Chap.vii .


Des lacqs & liens. Chap.ix.
Des accidens de trop ferrer les parties du corps. Chap.x.
508
А

QVATORZIESME LIVRE
TRAITTANT DES BANDAGES ,
PAR A MBROISE PARE , DE LA VAL , B
CONSEILLER , ET PREMIER CHIRVRGIEN
du Roy.
Difference des bandes. C H 4 P. 1.

Differece des Es bandes, deſquelles on fait ligature, ſont diffe


bandes priſes rences entre elles. En icelles nous conſiderons ,
de la matie
ſelon Galien au liure des bandages, fix choſes, la
SO

maciere , la figure, la longueur, la largeur , la


ftru & ure ou façon, & les parties. La matiereelt
triple , membraneuſe, ou fairede cuir, laquelle
eſt propreaux Cartilages du nez fracturé : celle
de laine , comme aux parties enflammées, où С
ne faut preſſer:delinge, commeoù il faut preſſer.
Esde cefte - cy les vnes ſont de lin , les autresde
chanure fort, commenore Hip.cn la 3. le & t. do
Conditions l'Officine du Chirurgien. Et pour eſtre Bonnes,
requiſes en elles doiuenteſtre de coile qui aura delia ſeruy,
une bonne à fin qu'elles ſoient plus molles & craictables. Aulli faut qu'elles ſoient fortes, de
bande.
peur qu'elles ne ſorompent,& qu'ellespuiſſent fermemēc tenir & expeller l'humeur,
pour prohiber les fluxions. Et fauc qu'elles n'ayentaucun outlet,bord,liziere,nycou.
ſture: parce que l'ourlec,& coulture bleſſent:d'autant que l'ourlet, quieſt dur, com
primelachair,& la liziere,nepermec bien lier,& la bande comprimetrop à l'endroit
de la liziere , & ne ſerre aſſez au milieu, parce qu'elle n'obeiſt, mais cient ferme. Da
uantage,elles doiuenteſtre nettes, afin que fion faitquelque infuſion, elles puiſſene
eſtre imbues de liqueur neceſſaire ,& icelles paſſer au trauers. Auli elles doiuent
eſtre coupées de droi& fil, & non de biais , parce qu'elles tiendront plus ferme, & ſe
ront eſgales, c'eſt à dire,non plus larges,nypluseſtroites en un endroit qu'en l'autre. 11
La figure des Pour la differencede la figure, aucunes fontourlées , auſquelles ne faut rien coudre,
bädeser des lesautrestranchéespar leursextremitez( comme auxmammelles) ou par lemilieu: D.
differences. les autres ont pluſieurs bandes couſuës enſemble , pour faire diuers chefs , repreſen
1
tans vne diverſe figure, comme en la telte.Aucunes ſont longues, les autres courses: 11

aucunes forc larges,lesautres forc eſtroicces, ſelon qu'il eſt requis. Or la longueur&
largeur d'icellesne ſe peut particulierement eſcrire, mais elles ſeront diuerlifiéesſe
Jon la diverſité des corps , & la longueur , largeur, & groſſeur des parties blefſees:
& pour le dire en vn mot , il faut bander la reſte en autre maniere que la gorge.
Ainfi cît-ildesclauicules , des bras , cecins , aines , teſticules, liege, cuiſſes ,iambes,
pieds , & doigts ,ſelon leur ſtructure. Les vnes ſont pour ſuſpendre ou elleuer , com
me aux mammelles, teſticules, hargnes, aufliſeruent à tenir les medicamens ſur les
parties pour curer les inflammations ou faire ſuppuration . Galien commande que le
icone Chirurgien s'exerce & apprenne à faire les bandages ſur yn homme fain , & lies
Des Bandages. 509

A les malades bien dextrement quand il en ſera beſoin . Les parties ſont les corps de la
bande , & les chefs. Le corps eſt celte longueur & largeur : les chefs ſont les extremi
rez , tant ſelon le long que ſelon le trauers ,comme eſcric Galien, ſur la 22. ſen . de la 2 .
fe &t. de l'officine du Chirurgien .

Indications & preceptes generaux pour les bandes d - ligatures.


CH A P. 11.

A bande ou ligature , doicauoir deux indications , l'une à la partie , l'autre


à la maladie,comme dit Hippocrates en la premiere & ſeconde ledion du
RE
liure des Fractures. Quand on bande vneiambe , il la faut bandereltant la iambe ega
droite : car ſi on la bande eſtan ployće , le bandage ſe deferalors qu'elle ſe brasle bădă
raeltenduë à cauſe que les muſcles ſe mecent en autre figure. Au contraire, lors que de faço route
nous voulons bander le bras, il faut qu'il ſoit ployé : car s'il eſt eltendu , & qu'on le contraire .
B ploye apres , la ligature ſe laſchera,à cauſe ( comme nous auons dit ) que les muſcles
ſeront peruertis en autre figure.Surquoy nous obſeruerons, qu'il fauebander & lier Les panies
doinent estre
les parties en la figure qu'on veut qu'elles demeurent. Il faut que les compreſſes & bandées com
altelles embraffent toute la partie fracturée : toutesfoisauxosiugulaires , & auxco me on veut
ftes,& aux vertebres , cela ne ſe peut faire , parce que celles parties ne peuuenceſtre qu'elles de
cnuironnées. meurent.

Quant à l'indication de la maladie ,s'il y a vn vlcere caue , finueux, & cuniculeux , Beau prece
le
ietrane grande quantité de fanie, il faut commencer à lier & comprimer au fond duptepour
Chirurgien .
finus , & finirà l'orifice de l'vlcere : ſoit que le ſinus ſoit en haut , ou en as , ou aux
coſtez: à finquepar cemoyen on expurge la ſanie, & qu'on face approcher les par
ties ſeparées & diſtantes.Car ſila ſanie demeure ſans eſtre euacuée,elleronge & cor
rode les parties , & fait croiſtre l'vlcere , & la rend incurable , & ſouuere fait carie
auxos : parce qu'ils s'alterent & pourriſſent, à cauſe que les humeurs acres s’imbi
bent en leur ſubſtance. Or entre les bandages les vis ſont par eux melines remedes ,
comme ceux quiconioignent les choſes des - ioindtes & ſeparées : les autres feruene
C
aux remedes, comme ceux qui ſeruent pour tenir les medicamens appropriez aux
maladies . Tel bandage , dit Hippocrates au commencement de la ſeconde lection Hip . ſen. 4
de l'Oficine du Medecin , ou ille faic qu'il appelle Deligalio operans, ou il eſtfait qu'il de la 2. fect.
appelle Deligario operata . Quant au premier , pour bien bander, il faut que la bande de l'officine.
ſoit rouléceſtroisement, afio qu'elle ſoit mieux entorrillée autour de la partie qu’on Preceptes
veucbander , & que le Chirurgien la cienne fermement en la main . Dauantage en pour les ban,
16
bandant fautprendre garde que les bouts des bandes , & la couture , ne toient finisdages .
ſur le lieu douloureux , mais au deſſus, ou au deſous , ou à coté . Outre plus il ſe fauc
bien garder de moire quelquenæud ſur ledit lieu , ou bien à l'endroit du dos,ou des
feffes, ou aux cultez , ny à l'endroit des iointures , ou au derriere de la teſte , ouaux
coſtez des temples , ny ſous lesaiſſelles, aines , & plantes des pieds :pour
& dire'envn
mot, à l'endroit où le malade a accouſtuméſe coucher , & s'appuyer . Plus il faut plier
les bandes à l'endroit qu'on veut qu'elles ſoient attachées x couſuës , afin qu'elles
tiennent plus ferme: car quand les bours ſont larges , encores qu'elles ſoient liées
cítroitrements routesfois elles ne tiennent pas fisieleinenc. Parquoy i'ay touſiours
decoutume de les replieren long en leur exrremité, lors que ie les veux couldre &
D
arreſter .Qiiane au fecond ,le Chirurgien quiaura fait les ligatures ,doit prendre gar
de aux intentions pourquoy elles ont eſté faites, & s'ila bandé bien proprement, &
face qu'elles ſoient belles à voir , & qu'elles nerident point, afin de contenter les ma
lades & les alliſtans : car chacun ouurier doit polir & embellir ſon ouurage tant que
poſſibleluy ſera . Les bandages trop laſches aux fractures & luxations font ſouvent
cauſe de rendre les parties cortuës, boſſuës, & contrefaites.
Aux fractures, luxations, & ſeparations des os , auſſiaux playes & concuſions, faut vrilité duebás
commēcerle bandage, & y faire les premieres reuolutions,ou tortillemēs , qui ſerone dage fur la
deux ou trois , & les ferrer ( s'ileſt poſſible ) plus en tels endroits qu'es autres, fin de re partie, o in
nir fermementles os en leur lieu , & exprimer & expulſer le ſang xalitres humeurs quel cas ilſe
qui peuvent eſtreià Auez, & aufli pourgarder qu'il n'enfë plusqu'ilne fera beſoin, fais.
Car par vne fracturellaquelle ne ſe fait jamais ſans contufion) lelang ſort deres vaira
ſcaux,à raiſon qu'ils ſont violentement foulez,preſlez ,& exprimez: quicauſe meurs
SIO Le quatorzieſme Liure,
driſſeureen la chair,de couleur premierementrouge, puis liuide ou noire,parce que 'A
le lang eſtant hors de ſes propres vaiſſeaux,s'eſt eſpandu en la chair & ſous le cuir, &
en la ſubſtance des parcies ſubiacentes.Partát fautconduire la bande le plus loing de
Galien fi:r la la partie fracturée,ou luxée,que l'on pourra.Carqui feroit autrement,il renuoyeroio
fent.25. dela le ſang au lieu bleftë, & pourroit cauſer apoſtemes, & autres mauuais accidens. Or le
1. feét.des fang quifluë, tend en bas ſeulement par vn chemin : & celuy quieft exprimé , va par
fractures. deux à ſçauoir de haut en bas, & de bas en haut. Toutesfoisilfaut auoir eſgard delo
repouſſer pluſtoſt vers le corps, que vers les extremitez , parce qu'ellesnefont aſſez
capables, nyforces pour receuoir ſans accident telle abondance de fang: car il s'y
pourroitfaire vne inflammation ou apoſteme: & lors qu'on le repouſſe vers le corps,
il eſt regy & gouuerné par les vertus & facultez naturelles.
Trois bandes neceſſaires aux fractures. CHAP Ill.

T pour bien & deuëment tenir les os luxez & fra &turez, il eſt neceſſaire au B
Chirurgien s'ayder ſelon Hippocrates, ſentenc. 24. de la ſeconde ſection de
l'Officine du Medecin ,dedeux eſpeces de bandes:les vnes ſont appellées de
luy Hypodermides,c'eſt à dire,ſous-bandes,lesautres Epideſmi, c'eſt à dire, ſus-ban
des. Les fous-bandes fonc deux,quelquesfois crois,dont la premiere commencera ſur
la fracture, y faiſant crois ou quatre reuolutions, & qu'il ait égard à la figure de la fra
& ture, pource que ſelon icelle fautfaire & diuerlifier le bandage. Car il fautmener la
bande vers le coſté contraire à celuy vers lequel la luxation ou fracture oft enclinée ,
à fin que l'oséminent ſoit repouſſé,& rcnu ferme en ſon lieu naturel,auquelon l'aura
reſtitué. Tellechoſe ſe fera bien en ceſte maniere:à ſçauoir,quandla partie dextre eſt
plus éminente,la bande alors commencera à la meſme partie, & ſera menée vers la ſe
neſtre:Au contraire, ſi la ſcncſtreeft excedáte, faut que la bande commence à icelle,
LeChirurgien & ſoit conduite vers la dextre.Partantil faut que le Chirurgien vſe de lamain dextro
doit eſtre am- & feneſtre , pour bien faire icelles ligatures : & conduira la premiereen haut , c'eſt à
bidexere, s'il dire, vers le corps pour les raiſons predites.
eftpoßible. Ceſte maniere de comprimer ſur les fractures n'eſt feulement propre & particuliere C
à icelles,mais auſſiaux luxations.Car quand il ſe faic luxation en vne partic,& qu'elle
eft reduire,il faut comprimer & bander plus doucement le cofté d'où l'os eſt party,&
ſerres plusfort celuy auquel il eſt tõbé. Dont le bandagedoit eſtre amené du lieu ſur
lequel l'os eſt tombé, & que celuy duquel il eſt combé ſoitlaſche & non preſſé de la
bande & compreſſe,à fin qu'on la pouſſe & face cendre & tirer vers la partic cõcraire ,
où s'eſt faite la luxation. Car fion bandoit autrement , le bandage cederoitau mal ,
pource que la partie a eſtérelaſchée & des-jointe de ſon lieu naturel: & partanton ‫تکرفے‬
pourroit eſtre cauſe de la repouſſer, ou renuoyer derechef l'oshors de ſon lieu ,où il
auroit eſtéreduit. Mais tants'en faut qu'il le faille bander vers la parcie où s'eſt faitela
luxation, qu'Hippocrates veut qu'on la rameine vn peu plus que ſon naturel.
secède bäde. Or pour pourſuyure nos ſous-bandes ayantfait la premiere , on en prendra voele
conde , laquelle commencera pareillement ſur la fracture, & n'y fera qu’un tour ou
deux: parce qu'il ne faut cant enuoyer de ſang vers les excremirez,comme aux parties
ſuperieures (ainſique nous auonsdes- ja demonſtré) & fera conduicê vers le basou
extremité de la partie, la ſerrant doucement, à fin aulli d'exprimer le ſang de la partic
bleſſée, & la remenerons en haut : ce que ſi nous ne voulons faire, prendrons vnc D
Troiſieme troiſieſme ſous-bande, qui commencera où la ſeconde aura finy, & ſera conduite en
bande.
haut , qui ſert à reduire les muſcles, quionc eſté deſtors & cournez de leur ſicuation
Quel moyen naturelle par les deux premieres bandes. Or il faut ſerrer les bandes moderément ,
doiteſtregar. meſuranslamediocrité par notre iugement, & le ſentimenc du malade, qui dic eſtre
déen ſerrant aſſez ſerré, & que s'il l'eſtoit plus , ilnele pourroit endurer : conſideransauſſila cu.
les bandes. meur ou enfleure qui doit eſtre ſans inflámation , & l'habicude du corps.Car les corps
mols ne peuuent raneendurereſtre ſerrez & preſſez que les durs . Or pour avoir trop
lié & bandé vne fracture ou luxation,on ierce & expelle les humeurs aux extremitez,
donc rouuentesfois luruiennent de grandes tumeursædemateuſes. Ec poury reme
dier il faut dellier le lieu fracturé ouluxé , puis on commencera à bander & compri
mer les partiesenflées ,& conduire la bande vers les parcies ſupericures, afin de def
charger la partie enfiée: & où on nc dellieroit la partie fra & urée ou luxée, l'humeur
ne
Des Bandages . SII

A ne pourroic eltrerenuoyé és parties ſuperieures. Ceſte methode eſt laiſſer la propre


cure pour ſubuenir aux accidens . Ce que le Chirurgien rationel fera touſiours, Methodeex:
quand ilcognoiſtra eſtre neceſſaire. Et pour ceſte cauſe Hippocrates commande traordinaire.
qu’on defic la ligature de trois en trois iours , & à chacune fois qu'on fomente la par
tie d'eau chaude , à fin que les humeurs contenus en la fra &ture, leſquels y ſont fuez
par le moyen de la doulcur, ſoient reſouls & euacuez, pour prohiber vn prurit , & au
tres accidens: & apres qu'ils ſeront paſſezon defliera la ligature plus à tard,& la fera
on plus laſche,à fin que le ſang & lamatierequi doit faire le callus , ne ſoit empeſché,
mais qu'il y flue plus librement.

Des bandages des fractures auec playe. C H 4 P. 111i .

VcVnes fra& uresſontauec playe : & lors qu'il y a playe , encor Neceßité de
les faut-il bander : autrement elles enflerofent, receuansles hu- bandage en
meurs des autres parties, dont pluſieurs accidensfuruiendroient. fracture a
B
Mais il ne faut pas que le bandage ſoit auec des circonuolutions , Bandages
comme nous auons dit, parce qu'il faut tous les iours traicter la fans circon
playe , pourla mondifier & medicamenter : & ſi il y auoit des cir- uolutions.
SITE
conuolutions, il faudroit tous les iours remuer la partie , qui ſeroit
cauſe de faire douleur au malade , quiengarderoit lvnion de l'os , laquelle demande
le repos.Partanticeluy bandage ſe fera ( en paſſant ſeulement vne fois autour d'icelle

playe) auecques vne bande qui ſera en deux ou trois doubles, en façon d'une com
preſſe, laquelle ſera dextrement couſue : & ſera de celie largeur , qu'elle comprime
entierementtoute la playe , pour les raiſons que dirons cy - apres au liure des fractu
res. Et ſi la playe eſt de figure ſelon la longitude du corps , les compreſſes & altelles Diuerſité de
doiuent eſtre appliquées aux coſtez , à fin de reioindre la playe, & expeller les excre- bandages ſe
lonla diner
mens:mais ſi elle eſt au trauers , ne faut appliquer tellemaniere de compreſſes &
firé de la
aſtelles : caron didateroit la playe & iecteroit -on les excremens dans icelle , comme
playe.
eſcric Galien ſur la douzieſme ſentence de la ſeconde ſection du liurc des fractures .
с

Preceptes & obferuations communes pour les fractures & luxations.

CHAP . V.

AVANTAGE en toute fracture & luxation les parties caues &


extenuées , comme celles qui ſont vers lesiointures,docuenteſtre
remplies de compreſſes, ou bandes appliquées autour, pour faire
la partie égale , à fin que les aſtelles la compriment également,
pour mieux tenir les os en leur lieu naturel: comme quand on
bande le genoüil , il faut emplir la cauité , c'eſt à dire , la partie po
ſterieure , quieſt le iarret , à fin que le bandage ſoitmieux & plus
promptement fait. Il faut faire le ſemblable ſous les aiſſelles, & au deſſous du calon ,
& au bras pres le carpe , & en toutes les autres parties, où il y a cauité & inegalité.

D Apres auoir bandé & lié , faut interroger lemaladef'ilſent la partie eſtre trop ſer
rée ,& filditouy, & qu'il ne la peut endurer, la faut deſſerrer. Car ſi le bandage eſt Incominodi
trop ſerré, il excite douleur, chaleur,Auxion ,gangrene , & par conſequentmorcihi - tez de la bă
cation: & celuy qui n'eſt pas aſſez ſerré, ne profiterien ,principalement auxfractures de trop 04
trop peu fer
& luxations . Or ſi la partie eſt bien bandée, c'eſt à dire ſi elle n'eſtcroplaſche ny trop rée.
ſerrée, on la trouuera le lendemain enflée d'vne tumeur molleædemateuſe, à cauſe Hip.ſen. 37
que la ligature a exprimé le ſang du licu fracturé .Au contraire, fi elle eſt trop ſerrée , o 38.feét...
latumcur ſera dure. Eclion netrouveaucune tumeur le lendemain , c'eſt ſigne que des fract.
la ligature n'eſt aſſez ſerrée , & qu'elle n'a aucunement chaſſé & cxprimé le fang de
la partie fracturécou luxée . Si doncques on cognoiſt que pour la ligature trop ſerrée ,
il doit ſuruenu vne tumeur grande & dure , illa conuient promptement caffer, pour pour corriger
empeſcher les accidens: & faut fomenter la partie d'eau chaude auec huile, puis la la dureté qui
rcbander mediocrement, ne ſerrant fortles bandes, pendant qu'il y aura douleur & eft en la par
inflammation . Durant lequel temps ne faut auſſi mettre choſes peſantes , de peur tie fracturée.
d'augmenter les accidensfurdits. Ec lors que le malade ſe porte bien , faut laitierlo
Xx
512
Le quatorzieſme liure ,

Hippo.ſen . bandage trois ou quatre iours ſans le deſier ; pluſtoſt aux delicats , & plus tard aux A
32:49:41.de robuſtes . Toutesfois il fauticy noter,que le troiſieſmeiour, & de là en auant iuſques
la fect.1. des
au ſeptieſme, on trouue les bandes laſches, & la partie plus grelle , qui eſt bon ligne,
fract.
à cauſe que la tumeur ſ'eſuanoüit & reſout, parce que parlaligacure ona expriméle
ſang quiauoit couru à la partie : ioint que par la compreſſion on a defendu vne por
tion du nourriſſement , qui la fait monſtrer plus grelle & amaigrie . Ec ainſi les os
rompus, en les ſerrant, ſe dreſſeront & toucherontmieux: & lorson doit aſſez ſerrer
ſur la fracture, & ailleurs moins : & à l'endroit où la fracture fait eininence,fautcom
le
primer & ſerrer dauantage avec compreſſes & aftelles. Et pour le dire en vn mot ,
ſeptieſmeiour paſſé, il faut plus eſtroictement bander qu'auparauant, pource qu'en
tel temps l'inflammation , douleur, & autres accidens , ſont communément paſſez.
Orce que nous auons cy- deſſus declaré des trois bandes ne peur eſtre deuëment faic
en toutes parties , comme aux fracturesde lamandibule, à l’os furculaire, à la teſte,
au nez , & aux coſtes: parce qu'à raiſon qu'elles ne ſont longues & rondes,on ne peuc
faire la ligature tout autour d'icelles parties , comme l'on fait aux bras , aux cuiſſes &
B
iainbes: mais elle ſe fait par dehors .

Vrilité des bandages. C H 4 P. * I.

A r les choſes precedentes nous cognoiſſons , que l'vcilité des banda


geseſt , que par iceux les choſes deſiointes & ſeparées, ſont pouſſées en
leur lieu naturel , & les entrouuertes ſont coniointes , comme és fra
Eures , fentes, contuſions, vlceres ſinueux : eſquelles choſes l'unitéeſt
"perdue, & pour la conionction deſquelles les bandes ſone neceſſaires:
e - plus, par icelles les choſes leſquelles ſeroient ſerrées& coniointes , tenuës ſc
parées comme on void , qu'és combuſtions les doigts ſe ioignent enſemble, & les
iarrets , & auſſiles aiſſelles contre la poitrine , & le menton contre le ſternon : & par
Les bandages bien bander , icelles choſes n'aduiennent point. Les bandes & ligatures ſeruentpa
feruens aux reillement à refaire les parties emaciées & amaigries . Exemple. Sila iambe dextre
parties alro- eſt en atrophie , il faut lier la ſeneſtre , commençant au pied , & finiſſant en l'aine. Si
phiées.
c'eſt le bras dextre on liera le ſeneſtre, commençant à la main , & finiſſant ſous l'ail C
felle: car en ce faiſant, on renuoye vne grande portion du fang de ces parties aindi
liées en la veine caue: laquelle eſtant plus pleine , en ſera enuoye à la partie cmaciée,
en laquelle les vaiſſeaux ne ſonc remplis ,mais aucunement vuides. Orilen convient
enuoyer beaucoup , d'autant que la partie eſt vuide , & pareillement pour l'alimen
ter. Dauantage, faut que la partie faine ſoit en repos , & qu'elle ſoit bandée & liée
ſans douleur, à fin que le ſang & eſprits y fuent moins : ce qu'ils feroient dauantage ,
Les ligatures ſielle eſtoic liée auec douleur . Plus les ligatures & compreſſes ſeruentà eſtancher le
ferait à eſtá- Aux de ſang des playes , dequoy l’experience iournelle nous fair foy, en ce qu'apres
cher le ſang vne ſaignée, y mettantvne comprelie & ligature deſſus, le ſang eſt eſtanché . D'a
des playes. bondantles ligatures ſeruent aux femmesnouuellementaccouchées, & lors qu'on
bande leur ventre , on exprime le ſang de leur matrice, quien eſt grandement arrou.
ſée & imbue , & par cemoyen on aide à la vertu expultrice à le iecter hors . Auli
ceſte ligature prohibe que les vents n'entrentenicelle matrice. La ligature ſert aufli
aux femmes groſſes à ſupporter le fardeau de leur groſſeſſe , en celles principale
ment qui porcent leurs enfans li bas qu'ils leur pendent entre les iambes, leur em . D
peſchant la liberté de marcher : car par la ligature appellée des femmes nombrille
re , outre qu'elles ſont ſoulagées de la peſanteur, le faix eſtant retrouſſé, l'enfanteſt
contraint remonter plus haut , dont leur eſt le marcher plus aiſé. Outreces
his choſes , les ligatures ſeruent à faire reuulfion , & deriuation de pluſieurs parties du
corps , & auſſi à tenir les medicamens appropriez aux maladies , commeau col,au
thorax & au ventre . Galien au troiſieſme commentaire de l'officine du Medecin
commande de commencer le bandage ſur les fractures & luxations , & ſur les playes
& contuſions ,à fin de deſcharger la partie du ſang& humeurs qui ont deflué ſuricel
le , & garder qu'ils ne fluent. Toutesfois ſ'il y a ſinus auldies vlceres ,il faut com
mencer ſur iceluy: à fin d'euacuer le pus ou ſanie par l'ouuercure de l'vlcere . Que di
ray - ie plus ? la ligature a trois vcilitezen l'amputation desmembres , comune bras &
Premiere iainbes. La premiere, c'eſt qu'elle ciēc le cuir & les muſcles elleuez en haut , à fin qu'a
vrilité. pres l'auure ils recouurent l’excremnité des os , qui auront eſté coupez . Car apres la
Des Bandages. 513
A
conſolidation & la cicatrice faicte les muſcles feruent comme d'un couſſinet aux
extremitez des os . Et par ainſi la partie pourra demeurer plus forte , & moins
douloureuſe , quandon preſſera deffus, ioinet auſſi que la curation eſtplusbriefue:
car d'autant que la partie eſt plus couuerte de chair, pluſtoſt außi les os fonc

couuerts . La ſeconde eſt , qu'elle prohibe l'hemorrhagie , ou flux de ſang , à cauſe seconde.
bien peu . La
qu'elle preſle les veines & arteres; de ſorte qu'il n'en peut ſortir que
find troiſieſine eſt, qu'elle rend obtus & hebecé , c'eſt à dire , qu'elle oſte grandement le Troiſieſme.
ſentiment de la partie , parce qu'elle empeſche par ſa grande aftri &tion , que l'eſprit
Tot animal , lequel donne ſentiment par les nerfs ,
ne peut reluire à la partie pendant
qu'on la coupe .

CHAP . VII.
Vſage des Compreſſes.

' V sage des Compreſſes eſt double , à ſçauoir , pour emplir les Hip.fen.2.de

B parties caues , & celles qui ne ſont ſigroſſes vers leurs extremitez, la 3. fe t. de
comme vers le milieu. Exemple des parties caues qu'ilfautrem- l'officine, co
plir, comme ſous les aiſſelles, ſousles iarrets , aux clauicuies & aux (en. 32. de los
aines . Quant à celles qui ne ſont ſi groſſes vers leurs extremitez, 1. fe&t.des
comme
vers le milieu ,ce ſont les braspresle carpe, & les iambesfractu.
Hard
Tees pres le pied , & la cuiſſeau deſſus du genoüil : auſquels lieux il
fautmettre des compreſſes & bandes tout autour , tant que l'on verra la partie eſtre
égale . Le ſecond vlage eſt , d'entretenir les premieres deux bandes, appliquées ſur la
partiefracturée: & different en ce qu'au premier vſage on les met de crauers , & au ſe.
cond de long . On peut auſſi vſer de compreſſes,quandon veut eſtendre vn membre
peur que les liensnecompriment & facent douleur . Pource
luxé pour le reduire,de
fautgarnir de compreſſes la partie qui doit eſtreeſtendue , à fin que les liens ne com
priment par trop , & par ce moyen on engardera qu'ils ne bleſſent, tant qu'il eſt poſſi
ble . Lescompreſſes doiuent eſtre eſpelles de trois ou quatre doubles,plus ou moins,
& longues & larges plus ou moins , ſelon qu'on verra eltre beſoin , & doiuent eltre
c trempécsenoxycrat, ou en vin, ou en huile, ou Cerat, ſ'il y auoit douleur , à fin qu'el
les ſoient plus mollettes , & qu'elles tiennent plus ferme.

v fage des ferules , aſtelles , torches , & quelles.

C H 4 P. vrij.

Pres auoir parlé des bandes & compreſes, à preſent nous faut
che
He craicter des ferule's & altelles, & autres choſes qui ſeruent à tenir
les os en leur place ,comme ſont fachets, couſſins, oreillers, tor- Matiere des
:D
ches depaille ,& queſſes. Les ferules , ouaſtelles, ſont faiđes de ferules, 0%
papiers colez enſemble, ou de bois mince & delié , ou de cuir aftelles.
dequoy on fait des ſemelles aux ſouliers,ou d'eſcorce d'arbre , ou
lames de fer blanc , ou de plomb , ou d'autre matiere ſemblable,
D qu'on pourra commodément recouurer : bref, commedit Auicenne , de mariere
quien la dureté ſoit douce, & ſe puiſſe ployer.Vray eſt ,que ie conſeille qu'on prenne

vne matiere la plus legere qu'il ſera poſible de trouuer, de peur que par ſa peſan
teur elle ne bleſſe la partie , comme d'eſcorcede ferule qui eſt fort propre, ou pa
pier collé,enueloppé de laine ou de cotton ,ou de linge mollet ,de peur qu'on ne face
douleur. Pareillement faut qu'elles ſoient de longueur & largeur ,& en nombre tel
qu'il ſera neceſſaire: auſſiqu'elles ſoient courbées, ou droides, ſelon quela partie de
requerra : & qu'elles ne portent ſur les eminences des os , comine ſur les cheuilles
des pieds, des genoüils, des couldes , & autres parties eminenres, de peur qu'elles ne
les bleſſent, & qu'elles ſoientplus minces vers leurs extremitez, & plus clpelles vers Vſage des
la fracture. Leur vrageeſt, de tenir ferme les os fracturez, ou luxcz, à fin qu'ils ne férules.
vacilent d'un coſté ny d'autre. Et pour ce faire , ne faut qu'il y ait beaucoup de com
preſſes, & dereuolucions de bandes ,parce qu'elles ſeroient tenuës trop laſchement,vſage des
ſous le nombre des reuolutions , ou eſpeſſeur des compreſſes. Les torches ou fenons, forches en
ſont faictes debaſtonsdegroſſeur d'vn doigt : leſquels on enucloppe de paille , puis fenons,
Xx ij
S14
Le quatorzieſme liure,

d'vn demy linceul : & font appropriez principalement auxiambes & cuiſſesrom A
Vſage des pues. Les queſſes ſont faictes de fer blanc,ou de bois. Leur viageeſt de tenir les osen
queſſes. bonne figure, & meſmement quand le malade ſe faict lever d'un liet , pour ſe faire

porter en vnautre , ou quand ilva à ſes affaires : & pour le dire en vn mot , quand il
faut appuyer & ſituer les parties fracturées & luxées fermement,de façon qu'elles ne 1
ſe puiſſent mouuoir à dextre ou à ſeneſtre , en haut ny en bas , loiten veillant ou en
dormant : auſſi qu'elles ne pendent en bas, & qu'elles ne ſoient trop liées& ſerrées,
de peur queles humeurs necourent à la partie bleflée , & qu'il n'y ſuruienne dou
leur, inflammation, apoſteme, gangrene , & mortification .Onpeut appeller , ſelon
Hippocrates , les calloles, torches , & tous autres inſtrumens , qu'on accommode aux
Gloſſocomes. fractures, pour tenirle membre en figure droite & indouloureuſe , Gloffocomes,
c'eſt à dire, engins, ou machines , leſquels on applique pour tenir lesmembresen vn
eſtat, ſans que le malade les puiſſe remuer aucunement à dextre ou à feneſtre, haut
ou bas , ſoit en veillantou en dorinant: & pour le dire en vnmot,Gloffocomesſignis
fient tous inſtrumens , quiſervent à rcduire les fractures, ou luxations.Hippocrates
B
appelle les plumaceaux, leslinges dequoy on fait les compreſſes, & ce qu'il appelle
fulcimens, c'eſt à dire , appuis, qui affermillent, comme font les bandes,compreſſes ,
canaux , aſtelles , & autres choſesquiappuyent. Ceux qui ne ſont encoresexercezen
la pratique de Chirurgie , ne peuucntbonnementencendre ces choſes: carilelt tres
difficile de mettre par eſcrit la diverſité des bandes, compreſſes, aſtelles ,ferules, &
autres choſes qu'on fait par la main . Mais il faut imaginer ce quien eſt icy eſcrit, &
auſli auoir veubelongner les bons maiſtres, auparauant que d'y pouuoir bien mettre
la inain . Et m'aſſeure, que ceux quiauront practiqué & veu practiquer, prendront
grand plaiſir en ceſte lecture, parce que ce qu'on void par les ſens,eſt plus croyable
que ce qu'on comprend parraiſon . Toutesfois i'ay mis peine , non ſeulement en cec
endroit , mais par tous mes eſcrits , d'enſeigner & expofer aux ieunes Chirurgiens , le >
plus clairement qu'il m'a eſté poſſible , leur mettant quaſi l'image des choſes deuant
50
les yeux .

Des lags & liens. CHAP. IX.


C

L reſte encores à parler des laqs ou liens , deſquels il y a pluſieurs


differences. Les vns ſont grands & larges, comme ceux qu’on víc
à reduire la hanche , ou les vertebres : autres petits , pour lierles
altelles aux fractures & luxations : autres à tenir ceux que l'on

taille de la pierre , & aux femmes lors qu'on les deliure de leurs
enfans: autres à lier la production du Peritoine , cn l'amputation
des hargnes & teſticules: autres à lier les veines & arteres: autres
à lier les bras & iambes pour faire les ſaignées: autres à lier l’vmbilic de l'enfant nou
uellement nay : autres à lier les bras , cuifles & iambes, pour faire reuullion à ceux
qui ſaignent trop : autres à lier les excroiſſances des parties honteuſes desfemmes:
ou verruës , aux louppes, & autres cxcroiſſances de chair : autres
autres aux polypus,
à lier les fillules du fondement , ou les fungus qui naiſſent entre les dents , & en au
tres parties .
D

Les accidens qui aduiennent par trop lier & ſerrer les parties du corps.

с я A Р. Х.

Ar trop ſerrer la ceſteaux inflammations des yeux , on les faict couuene


ſortir hors leur orbite : ce que i'ay veu , comme i'ay eſcrit cy dellus aux

R playes de teſte, chapitre xvij.Aux playes faides au nez , par le tropferrer


& preſſer on rend les malades camus .
Pareillement aux playes desioües & léures, on rend la bouche tortue .
Par trop ſerrer & comprimer les vertebres du dos , on les iecte hors de leur place :
qui fait que les filles font boſſues & grandemenc emaciées par frute d'aliment,
Hiſtoire. ce qu'on void louuent . Cari’ay ſouuenance auoir ouuert le corps mort d'vne Dame
de noſtre Cour , qui pour vouloir monſtrer auoir le corps beau & grelle, ſe faiſoit
Des Bandages . SIS
A
ferrer de forte, que ie trouuay les fauſſes coſtescheuauchansles vnes par deſſus les
autres : quifaiſoit que ſon eſtomach eſtant preſſé, ne pouuoit ſ'eſtendre pour conte
nir la viande, & apres auoir mangé & beu , eſtoitcontraincte de le reietcer , & le corps
n'eſtant nourry deuint maigre , n'ayant preſque que le cuir ſur ſes os , quifut cauſe
de la mort.

Pour trop lier vne partie , on eſt cauſe de gangrene , 8c de totale mortification.
Par eroplier & ſerrer vn enfancen ſon maillot, on l'eſtouffe, faute de reſpiration .
D'auantage par trop lier & compreſſer vne iointure, on cauſe fouuent vne luxa
cion ou diſtorſion , & deprauacion de l'action .
Par crop ſerrer le ventre aux femmes groſſes ,on fait que les enfans font boſſus &
ucm contrefaicts, & la mereauortant ſouuent meurt auec l'enfant.

Par trop ſerrer l'cſtomach , & les parties dediées à la reſpiration , on eſt cauſe d'vne
tre .
fuffocation & mort ſubite : ce que de recente memoire on a veu aduenir l'an'1581.cn Hiſtoire
l'Egliſe Saina Nicolas des champs,où vne ieune eſpouſée de lean de la Foreſt, mai

B ſtre Barbier Chirurgien à Paris , fille de defunct lacques Ochcde marchand Paſſe
mentier, & de Claude Boufauc; laquelle poureſtre crop ſerrée & preſſée en ſes habics
mo nuptiaux, ſortant de l'Autel, apresauoir pris du pain & du vin à la façon accouftu
mée , penſant recourner en la place , tombaroidemorte , faute de reſpiracion , & le
iour meſme fut enterréeen ladite Egliſe. Etquelques iours apres, ledic de la Foreſt
cſpouſa à Sain &t Germain en Laye ladire Boufautmerede ladice fille defuncte : par
ce que ſon Curé auoit refuſé faire ledic mariage, diſant qu'aucun ne pouuoit eſpou
ſer la fille & la mere .
rende
Par trop comprimer la production du peritoine par vn brayer, on garde la deſcen
CILE te des teſticules au Scrotum .
Pour porter des ſouliers trop courts & eſtroits , on fait que les ongles entrent en la
chair, & les orteils cheuauchent l'un par deſſus l'autre, & fy font des corps , quicau
ſent de grandes douleurs .
Par trop longuement lier & ſerrer les parties , on les atrophie , & en fin on leur
ofte la vie.

C Que diray- ie plus ? c'eſt que par trop ſerrer la gorge à quelque perſonne que со
ſoiton l'eſtrangle, & luy fait-on perdre la vie .

Fin du quatorziefmeliure, des Bandages.

Your

Pie

Tin

Xx iij

1
516

Table des Chapitres du quinzieſme Liure


des fractures des os.
Es fractures des os. Chap.j.
Desſignes des fractures. Chap. j.
Prognoſtic desfractures. Chap.ij.
Cure univerſelle desfractures & diſlocations. Chap.iij.
Intention de corriger les accidens aux fractures. Chap.v.
De la fractu re du nez. Chap. vj.
De la fracture de la mandibule inferieure. Chap.vj.
De la fracture de l'os Clauiculaire. .
De la fracture de l'omoplate.
Chap. vių.
Chap.ix. "

De lafracture ou depreſsion du Sternon . .)


(
.. Chapox.
De la fracture des coſtes. Chap. xj.
Accidens qui viennent des costes compues. Chap. xj.
De la fracture des vertebres. chap.xij.
De lafracture de l'osfacrum ,
De la fracture du cropion . Chap.xiij.
Chap.xv.
De la fracture de l’os de la hanche. Chap. xvj.
.)
(
..

De lafracture de l'os du haut du brao. Chap.xvi.


De la fracture de l'os du coulde. Chap xui.
De lafracture de la main . Chap. xix.
De la fracture de l'os de la cuiſſe. Chap. xx.
De lafracturefaite pres la jointure de la hanche, Chap.xxj.
De la fracture dugenoüil. Chap.xxi.
De la fracture de la iambe. Chap.xxij.
Ce qu'il faut obferuer aux bandages quand il y a playe de fracture. Chap.xxiij.
Hiſtoire de l'Autheur ayant la jambe rompue. Chap.xxv.
De la cauſe des treſaillemens aux membres fracturez. Chap xxvj.
Aduertiffement touchant les parties fur leſquelles le corps eft appuyé eftant couché au lift.
Chap. xxvg .
Par quels ſignes on cognoiſtra le Callus ſefaire. Chap. xxvij.
Des choſes qui empeſchent la fomentationdu Callus. Chap.xxix.
Des fomentations qu'onfait auxfractures des os, Chap.xxx.
De lafracture de l'os du pied. Chap.xxxj.

3
517

d
e
re

LE QVINZIESME LIVRE ,

TRAITTANT DES FRACT VRES DES OS .

Cir

PAR AMBROISE PARE ' , DE LAVAL AV


MAINE , CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy . :

Que c'eſt que fracture, & de ſes differences.

CHAPITRE PREMIE R.

RACTURE , ſelon Galien au fixieſme liure de la Me


chode , eſt ſolution de continuicé faire en l'os , nommée Les eſpeces
А
en Grec Catagma. Or toute offenſe d'os a pluſieurs cl- & differens
peces & differences , à ſçauoir , ſeparation , luxation , cesdes os
vnion ou conion & ion , exciſion ou diviſion , contuſion , offenjer.
apoſteme, carie, pourriture , dénuëment auecques per
dicion de ſa couuercure , fracture ( de laquelle voulons
traiccer maintenant ) complecte, incompletce, quelques
fois faite en long , & autresfois en trauers , ou oblique
ment & de biais ; & les pieces ou eſquilles rompues ,
quelquesfois ont leur bout mouſſe, & autresfois aigu &
4. pointu , qui pique la chair ou les nerfs, & fouuent les vei. Fracture falo
te en raifort
nes & arreres. Quelquefois la frađure eſt faite en raiforc : c'eſt lors que l'os n'eſtpoint Fractur
e fai
éclatré en eſquilles,mais eſt rompu vniment :les Grecs l'ontnomméRhaphanidon. En te en noix.
25
noix : c'eſt en pluſieurs petices pieces ( comme vne noix caſſee ſus vne enclume auec Fracture fai.
ques vn marteau ) ſeparées l'une de l'autre, comme nous voyons ordinairementeſtre te en fenre.
fait aux coups de piſtoles ,& autres baltons à feu , en Greci alphitidon .En fente ap
parente , ou capillaire, c'eſtà dire , pecite come vn poil, de façon qu'on ne la peut ap
perceuoir au ſens de la veüc:partanconeſt contrainc d'y mettre de l'encre qui deſcéd

B en dedans , & la racler pour la cognoiſtre : les Grecs l'appellent Apochema. Enfon
por la
ceure : Voulture , rehauſſant l'osen haut.Briſeure, c'eſt à dire ,diuiſion de l'os en plu
ſieurs éclats . Aucunes de ceſdites fractures ſont faites en large , en long,en trauers:les
vnes auecques pieces égales , les autres deotelées & inégales, & eſquilleuſes.Aucu

nes ſont faites en la ſuperficie ſeulement de l'os , auec perdition de quelque portion Fracture ena
d'iceluy , comme vne eſcaille ſeparée: les autres, fans que les os ſoient ſeparez les vns foncée.
Fracture bria
des autres, mais ſeulement fendus en long : les autres deſcendantes iuſques à la
moëlle de l'os.Aucunesfois les os ſe courbent ſans eſtre rompus , comme l'on void fée.
aux coſtes & aux cartilages , & auſſi aux bras & iambes, principalement aux ieunes
quiont les os encores mols & tendres . Aucunesfois auſſi les os ſe cauent & boſſe ! lent,
comme l'on void aux pots d'eſtain & de cuiure, on void ſouuent aduenir au crane
Parcontuſion de ceux quiont les os tendres . Ie dy dauantage que quelquesfois les
cſquilles des os ne bouger de leur place : alors le mal eſt difficile à eſtrecognev,parce
que rien ne pique ne recroche contre-mont; au coucher coureſt égal & yny, la partie
Xx iing
518 ſme
Le quinzie Liure

garde la forme entiere . Toutefois on peut prendre conie & ure de ce que la partie ſe A
deult quand l'on preſſe deſſus, & qu'elle ne peut faire ſon office, & qu'elle l'enfle &
deuientchaude & enflammée : loint qu'il y a eu cauſe manifeſte qui aura precedé ,
comme cheure ou coup orbe . Aucunes ſont ſimples , c'eſt à dire , ſans eſtre accom
pagnées d'aucune diſpoſition ny accident: comme playe , flux de fang,inflamma
tion , gangrene , & autres complications . Toutes leſquelles differences demanden
indicacions propres à chacun genre d'icelles. Pareillement faut conſiderer la partie
en laquelle la fracture eſt faite , pource que bien ſouuentelleaduient à la teſte , aux
coſtes, aux bras ,auxiambes ,aux iointures , & autres parties du corps . Auſſi aux corps
vieux , ieunes , & bien tempercz , & auſſi aux intemperez & malhabituez ,& ſelon
icelles differences fauc diuerſifier la cure . Or les cauſes des fractures ſont toutes cho
ſes externes , qui peuuent couper , froiſſer , briſer, & caſſer les os : & auſſi pour tom .
ber de haut en bas,voire en tant de façons qu'il ſeroic difficile de tenir le nombre del
dites cauſes .

B
Des ſignes des Fractures. CHAP . IV .

Es ſignes des fractures ſont aſſez euidens & manifeſtes:deſquels le pre


Signe cer
tain defra mier & plus certain eft , quand en maniant la partie fracturée , on trouue
Eture en l'os. les parties des os ſeparées, & ſent- on vne crepicacion & actrition , ou cro

quement : c'eſt à dire vn bruit qui vient du frayement des os qui couchent
· les vns contre les autres . Semblablementon cognoiſt la fracture par l'impuiſſance de
la partie , & principalement ſi ladite fracture elt aux os adiutoires, & au grosos de la
iambe. Carn’eſtant ſeulement qu'à vn des petits fociles du bras ou de la iambe, pour
cela le inalade ne laiſſera de manier aucunement le bras , ou decheminer ſur le pied ,
pource que ce petit focile ne lert qu'à ſouſtenir les muſcles & non le corps , comme
fait le grandos.Dauantage la fracture peut eſtre cogneuë par la figure de la parcie
Le petit focile changée : qui eſt caue au lieu d'où eſt party l'os , & bofluë au lieu où il ſeſt arreſté,
delaiambe accompagnée d'une tres- grande douleur, quivient à cauſe de la bleſſure de la mem
С
ne ſert qu'à brane dite Perioſte, & de celle qui couurela moielle , & des autres parties qui ſont
foustenir les preſſées ou piquées , & les nerfs qui ſont peruertis de leur lieu .
muſcles.

Prognoſtic des Fractures . C H 4 P. 11.

E Chirurgien doit prognoſtiquer , quieft predire les inconueniens & iſſuës


Que c'eſt que
qui peuuent aduenir aux fractures,à ſçauoirlì elles ſont mortelles , ou cura
prognoſti
bles: ou ſi leur curation ſera longue,ou briefue: & quels accidens le peuvent
quer.
accompagner, afin qu'il declare la verité aux parens & amis du malade, pour euiter
la calomnie des hommes , ce qu'il fera ayant la cognoiſſance non ſeulement de l'ana
comie des os , maisauſſide la compoſition & habitude de tout le corps : & en bien
prognoſtiquant peut acquerir honneur & profit: & où il verra la fracture douteuſe,il

ſi le malade réchappe, ce
doit pluſtoſt decliner ad periculum , quàm ad ſecuritatem .Car
luy ſeravn plus grand honneur, que filauoic dic qu'il deuſteſtre guary , & puis il en
mouruſt. Deuãt que paſſer plus outre , ie diray qu'en Hyuer lors qu'il gele,à la moin D
Les osſerom . dre chcute lesos ferompent plus facilement qu'en autre teinps . Cat parlaficcité de
pent plus fa
cilement en l'air les os deviennent plus fragiles & frangibles,où en temps humide ils deviennent
Hymer qu'en plus proyables & obeïſſans.Ce quenous pouuons cognoiſtre aux chádelles de fuif &
Efté. de cire. Pour entrer doncques en maciere touchant le prognoſtic des fractures, il faut

entendre que les os ( à cauſe de leur ſeichereſſe) ne ſe peuvent aiſément glutiner, co


f
me fait la chair ( ſinon aux petits enfans , coinine eſcrit Galien In arte parna , au
quels à cauſe qu'ils ont beaucoup de ſubſtance humide, l'os ſe reprend ſelon la pre
miere intention ) mais à l'entour de leurs fractures fengendre vneſubſtance dure,ap
pellée callus (qui ſe fait de ce qui abonde de l’aliinentde l'os rompullaquelle le tient
& l'agglutine , & auec le temps fendurcit ſi fort, que l'endroit de telle glucination ſe
trouueplus ferme& plusdur que l'autre partie non rompue . Car comme la colle fert
au bois pour le ioindre, ſemblablemétle callus ſert aux os rompus perar les ioindre &
agglutiner enſemble. Ce n'eſt donc ſans grãde raiſon, que les os fracturez, pour eſtre
vnis,demandent le repos . Car ſi on remuë la partie , auant que l'agglucinacion ſoit

1
Des Fractures. 519
A deuëmentparfaite, le callusferompt & diſſout, & l’os neſe pourra iamais reünir. La
mariere d'iceluy ne doit pecher en qualité ny en quantité, non plus que le ſang en la
generation de la chair deperduë: & partant pour le bien faire, il faut que la partie ſoit
1. en ſon temperamét naturel: autremer ne ſe pourra faire, ou pour le moins fera gran
dement retardé.Les fractures aux ieunes ſont trop plus faciles à guarir qu'aux vieux, Raiſon pour
pource queles icunes ſontencores pleins de ſucglaireux & viſqueux,& abondenten des jeunesos
quoyles
tic
humidité naturelle,radicale & ſubſtātifique: combié qu'on puiſſe alleguer les vieux ont plufort
UX auoirplusd'humidité que les ieunes : à quoy ic penſe auoir reſpondu en vlant de ce 'aggiurin :
aps mor, humidité ſubſtantifique & naturelle, å la difference de celle des vieux qui n'eſt que ceux des
09 telle,maisſuperfluë & excrementeuſe, dont ſenſuit qu'elle eſtmoins apte & propre vieux.
à faire la generatio du callus . Ec parcecy l'on void qu'il n'eſt poſſible de döner reigle
certaine du temps de la generation du callus : parce qu'aucuns os lyniſent pluſtoſt, 1

del & les autres plustard : qui ſe fait auſſi pour la conſtitution de l'année dela region,du
temperament du malade , & de ſa maniere de viure , & pour la façon de la ligature.
ВB. Aufli
quand lemaladeeſtdebile, & que l'humeur eſt trop aqueux & ſubtil, lors il
n'eſt propre pour faire le callus. Au contraire quand les forces & vertus ſont entieres , Choſes requi
lors ellesfontleur deuoir à joindre les os enſemble : & principalement ſila matiere ſes pourla
eſt groſſe & épeſſe, elle eſt facilement conuercie en la ſubſtance du callus . Pource il generation
conuientordonner au malade alimens , & medicamens propres pour aider Nature à du callus.
ce faire : ce que nous dirons cy-apres . Lors qu'il ſe faict fracture pres les iointures, le Fractures
mouvementeſtapres difficile, & principalement quand le callüs demeure gros : & faſcheufes.
cca aulli du toutperdı , ſi la iointure eſt attrite & froiſſée : & encor en tel accidenty a
grand danger , quela partie ne tombeen grande inflammation, à cauſe qike les ten
0 donsexcitentdouleur , & que la inore n'enſuiue. Les fractures faites aux deux os du
bras , & des iambes , ſont plus difficiles à guarir, que celles qui ſont ſeulement à l'vn
des fociles des bras & des iambes , parce qu'elles ſont plus mal - aiſées à tenir,que lors
IKE qu'il n'y a qu'un ſeul focile rompu:pourceque celuy qui demeure entier,fouſtient &
appuye celuy qui eſt rompu. Semblablement il faut plusde temps à faire le callus
en vn gros os ,qu'à vn petit. Aufli les os qui font rares & ſpongieux , ſont pluſtoſt Hip. ſen . 18.
Om le ure. Dauantage les osfractu- € 19. de lig
C glutinez par le callus, que ceux qui neſontde tel nat
rezés corps de temperature fanguine,ſontpluſtoſt vnis qu'aux choleriques.En quel- 1.fect des fr.
que corps que ce ſoit, les os rompus ne peuuentiamais ſibien eſtre vnis, qu'il n'y de- aide
Laliga rure
beau
meure quelquein ega lit é & emin en ce nio n te
à raiſon de l'v des os fai par le cal lus.Et
partantle Chirurgien doit deuëment faire la ligature, autrement le callus demeure bien coupleàfaire
callus.
roitplus gros , ou plusmenu qu'il n'eſt beſoin . La fracture la moins faſcheuſe eſt la
fimple :& celle qui eſt en éclats,elt pire : & la plus difficile detoutes , c'eſt celle où il
yades fragmens quipiquent, à cauſe que par pointure de nerf ou perioſte ſe faict
conuulfion. Or quelquesfois les pieces de l'os rompudemeurent en leur placo : aulli
‫م‬ leplusſouuent ſont hors de leur lieu,ou l’yne cheuauche ſur l'autre: filespieces ſont
hors de leurlieu ,il y aura cauité , & au toucher inegalité , & les eſquilles piquent &
prellent. Auſſi li les extremitez de l'os ne ſont iointes bout à bout , le membre eſt
CH plus court que le ſain : & ſes muſcles ſontplustumehez & entlez, d'autant qu'ils ſe
retirent vers leur origine: c'eſt pourquoy fion trouue l'os enfoncé,lubitil fauteſten
dre lemembre :car lesmuſcles & nerfs cendus par l'os , & retirez vers leur chef, ou Extenſion du
D leur fin, ne permettront que les pieces de l’os retournent en leur place, fi on ne les membre frag
OV eſtend de force & violence . Ec ſi cela n'eſt fait dés les premiersiours,ily ſuruientin- Eturé.
FX flammation : durant laquelle ileſt tres dangereux de forcer les nerfs & tendons,
parce qu'il en aduient fouuent apoſteme , ſpalme , gangrene, & mortification : &
pource Hippocrates conſeille en la ſentence trente - ſixieſme de la troiſieſme ſection
des Fractures, que nous nous gardions de faire extenſion le trois& quatrielmeiour,
pour crainted'inflammation. Les fractures ſont perilleuſes, quand les éclats ſont
grands, & forcent hors,&encores principalementaux os quiſont pleins de moüelle.
Lors que les os rompus;ou luxez,ne peuventeltre reduits en leur ſituation naturelle, En quel cas
co lapartie tombe en atrophie, à cauſe que les veines, arteres, & nerfs ſont peruertis de
leur propre lieu , & e que la partie ne ſemeutpoint ou à grande difficulté. Parquoy les luxuriana
eſprits n'y peuvent reluire, & l'alimentn’y vient pas en telle quantité qu'il deuroit meinene atro
pournourrir la partie , dont l'atrophicfenſuit : lequel meſme accident pour venir par phie .
trop longuement & eſtroitement tenir la partie liée :dequoy nous traicterons plus
520 Le quinzieſme Liure ,

En quel cas il amplement cy- apres . Lors que le membre rompu , ou luxé , eſt grandement enfam. A

faus furſcor mé, il y a danger ,en voulantreduire la fracture ,que le malade ne tombe en ſpaſme:
la reduction .
partant faut differer la reduction ( ſ'il eſt pollible ) iuſques à ce que les humeurs
ſoientreſouts ,& la partic deſenAéc , & la grande douleur ceſſée.

Cure vniuerfelle des fractures & luxations. CHAP . IIII.

R r'habiller vne partie rompuë ou luxée & feparée , eſt la reduire en ſon
lieu. Parquoy les vulgaires à bon droit appellent ceux qui reduiſent les os *
Que c'eſt que
' habiller on fracturez ou luxez , R'habilleurs ou renoueurs. Et pour bien redreſſer &
membre. r'habiller les os , il faut auoir parfaite cognoiſſance de l'anatomie d'iceux ,& la pra
tique dece faire , appriſe des bons Maiſtres , & continuée de longue-main. Ecen la
Trois poinets cure de tellesdiſpoſitions, on doit auoir trois intentions. La premiere eſt remettre

principaux l’os en ſon lieu.La ſeconde, l’y faire tenir.Latierce,empeſcherqu'ils n'y ſuruiennent
en la redu- aucuns mauuais accidens : &f'ils y eſtoient ſuruenus, les corriger : qui ſont comme
Etion .
douleur , inflammation , fieure, apoſteme, gangrene , mortification , & autres . Donc
B
Pour lapres
miere inten pour reduireaiſément vne fracture ou luxation , il le faut faire toutchaudement,ou
rion . du premier iour, f'ileſt poſſible : pource qu'alors le malade eſt moins moleſté de dou .

leur & inflammation, & que les muſcles ne ſontencores for refroidis.Ecpour y pro
ceder , faut que le malade , & la partie luxée , & leChirurgien ſoient en bonne veuč,&
ayen ; bons ſeruiteurs,bonnes ligatures, & bonnesmachines, ſi le cas le requiert:aufli
que les alliſtans ſe caiſenc ,& eſcontenc le reducteur, & ne crient , ne diſent, nc facent
aucune choſe , qui empeſche le Chirurgien de faire ſon æuure . En apres faut lier &
tenir la partie pres de la fracture, ou luxacion , cant d'un coſté que d'autre, c'eſt à dire,
Quec'eſt par- cane vers la partie ſuperieure ( par laquelle i’entens celle qui eſt vers le centre du
Tt . Superien- corps) qu’infericure, depeur qu'en faiſant l'extenſion par trop loing d'icelles,l'on ne
sie

bleſſe lesparties ſaines : & auſli que l'extenſion ne ſe peuft deuëment faire pareille
ment , de peurque le malade en tirantneſuiue le Chirurgien, ſ'il n'eſtoit lié qu'en la
partie inferieure, & non vers le corps. Ces choſes eſtans ainfi ordonnées , faut que le

Chirurgien eſtende, & tire bien droic la partie offenſée, d'autant que les os eſtans
C
rompus, ou luxez , les muſcles ſe recirentversleur origine :& par meime moyen touc
Nipp.ſen.go. l'os ſe retire ,comme eſcrit Gal . ſur la 1. ſent. de la 1. lection des Fractures. Pource il
de la 2. fe&t. eſt impoſſible de les reduirc ſans eſtendre lesmuſcles. La particainficirée, feront les
des fract. os plus aiſément reduits en leur lieu , preſſant auec les mains deſſus,l'ils font quelque
eminence. Ecles reduiſant, il ſe faut donner garde que les bouts des os fracturez ne
ſ'entrechoquét, de peur qu'ils felbrechent &ropene. Car les eſquilles ſeroient cauſe
de faire apoſteme, pour puisapreseſtreiectez hors . Sivn os rompu ſurpaſſe la peau ,
& qu'il ſoitnud & découuert, & ne puiſſe eſtre reduir, alors le faut fcier ou couper,
qui eſtl'aduis d'Hippocrates: & du jour meſme, ſ'il eſt poſſible. Puis ſeront bandez,&
liez auecques compreſſes & altelles. Et li c'eſt vne luxacion, apres l'extenſion faire

Quand le faut pouſſer, tourner & virer la partie luxée, ſelõ qu'il ſera neceſſaire . Quelques fois le
Chirurgien eſt cõtraint d’vſer de machines , comme aux luxationis inueterées , & aux
chirurgien
doit ver de fractures & luxations des grands os , & aux corps robuſtes, & aux grandes iointures :
machines. pource que la force qui y eſt requiſe, ne peut eſtre ſouuentesfois faite par la ſeule
Chirurgien. Car d'autant plus que les muſcles ſont fores & robuſtes , d'autát D
main du
ils ont plusde force & vercu , pour feretirer vers leurs origine . Partant à ceux- là nous
ſommes contraints d'vſer demachines , parce que les mains du Chirurgien ne font
pas ſuffiſantes pour tirer & reduire telles fracturesou luxations . Toutesfois il ſe fauc
bien donner garde de tirer trop fort, de peur d'encourir és accidensſuſdits : qui ſont
rompre les muſcles & nerfs, & cauſer douleur, gangrene , conuulſion , paralyfie, &
autres accidens, leſquels viennent pluſtoſt aux robuſtes & vieux qu'aux ieunes gens,
pource qu'ils ſont moins bleſſez que les vieux , lors qu'ils ſont forc tirez,à cauſe qu'ils
ont le corps plus humide & mol . Car tout ainſi qu'on tire fort les cuirs ſans les dé

chirer & rompre, lors qu'ils ſont mouillez & mols, mais quand ils ſont durs & fecs,ils
Les vieux sőt
ſe rompent pluſtoſt,ainſieſt-ildes muſcles,nerfs ,& ligamens.Car quand ils ſont hu
plustoſt bles
fez de trop mides & mols , ils obeïſſent& nerompent facilement: mais quand ils ſont ſecs &
eſtendre que durs , ils ne ſe peuuenteſtendre ſansgrande force, non ſeulemenc fils ſont tirez plus
lesicunes. qu'il ne faut,
mais auſī fils ne ſont que moyennement eſtendus, pource qu'en ce cas
les fibres nequeuſes ,& corps des muſcles, ſe rompent:ce qui n'aduientaux ieunes,qui
Des Fractures. 521
Gur
ime A ſont humides & mols, & generalementà tous ceux qui ont la chair mollaſſe & hu
‫ال‬
mide , comme enfans, femmes, & eunuques. Parquoy ( comme nous auons dic ) signesde la
le Chirurgien y aura eſgard , afin de faire la reduction ainſi qu'ilappartient :laquelle reduction
on cognoiſtra eſtre bien faite ,quandla douleureſt appaiſée, à raiſon que les fibres bien faite.
les os
des muſcles, & autres partiesſont remiſes en leur ſituation naturelle , & que
en for ne preſſent plus: auec ce qu'au coucheron ne ſent aucune eminence,mais vne ega
lesci lité.Ecfiles frađures,ou luxacions ſont aux cuiſſes, ou aux iambes,pour cognoiltre
Terti filesos ſont bien reduits, il faut faire conference de la partie ſaine auec la malade ,
apra approchant les pieds & genoux l'vnpres de l'autre, pour voir ſ'ils ſont bien égaux en
longueur. Laquelle choſeon doit obſeruer toutes les fois qu'on craittera le malade,
pource que l'os reduit peut reſortir hors de ſon lieu , le malade ſe tournant de coſté
& d'autre en ſon 1:&,ou par certains treffaillemens, quiviennent lors qu'il dore : ce Pourquoyil
vient des
qui ſe fait par la force desmuſcles ſe retirans vers leurs origines, & ce faiſant elbran treff illemens
Dea: lent & mouuent l’os fracturé , qui à raiſon de ce ne garde la ſituacion que le Chirur aux osfras
B gien luyabaillée , ains cheuauche I'vn ſurl'autre, dont le malade fent vne extreme Eurez
douleur,iuſques à ceque les os ſoient derechefremis en leurs places : à quoy le Chi
y po rurgien doiceftre fort attentif: car le callusſe faiſant,ſiles os cheuauchent les vnsſur
les autres, l’os demeurera d'autant plus court ,& par conſequent le membre : qui fera
touſiours clocher le malade à ſon grand regret , & def-honneur du Chirurgien . Par
quoy faut que le maladey donne bonordre de ſon coſté ,ſegardant bien de remuer
lapartierompuë ,leplusqu'il luy ſerapoſſible, iuſques àce que lecallus ſoit affermy
& endurcy :maisla luxation eſtantreduite & bien bandée , ne fe defait pas ſi facile
cred.
la ſeconde
mentcomme la fracture.Or ayant fait la redu & ion ainſi qu'il a eſté declaré , faut intention . !
Onn
venir à la ſeconde intention par la curation des fractures & luxacions ; c'eſt que la
partie qui eſtoit rompuè ou luxée , & eft remiſe tienne ferme en ſon lieu : qui ſe fera
perk par bandages , compreſſes , & autres choſes que nous declarerons particulierement
cy-apres, ſelon chacune partie , & aulli parles medicamens propres : à quoy ſert pa
reillement tenir la partie en repos, & en la figure & ficuacion naturelle & accouſtu
TOUR
mée , afin qu'elle ypuiſſe longuementdemeurer,& la penſer quand il ſera beſoin,
sce il euitant la douleur, tant qu'il ſera poſſible.Et partant apres la reduction faite , il eſt Medicamens
cle
C bon d'appliquer toutautour du Cerat, & autres reperculifs, puis des reſolutifs, ſe- propres à la
clar lon qu'ilſera beſoin : & faut que les bandes& compreſſes en ſoient imbuës : autre partie apres
ment ils beuroient ledit Cerat par leur ſeichereſſe, & partant profiteroit peu . Ceſte la reduction.
do& rine eſt priſe d’Hippocrates,du3. liu. de l'Officine du Medecin. Et ſi c'eſt fra
&ture ſimple fautque lesbandes& compreſſes ſoiét trempées & baignées en oxycrat
TH ou oxyrrhodinum ,ou en gros vin auſtere, & autres liqueurs ſemblables, vn peutie
3ft des,fila fracture eſt auec playe , commeeſcritGalien ſur la 21.ſen.de la r :ſection des
Frađures,leſquellesfaudra ſouuentesfois humecter, principalement en Efté : car
par cemoyen on robore la partie , en repouſſant ladefluxion , & par conſequenton
COUT
cmpeſche l'inflammation & la douleur.Etquand les accidens ſeronc paſſez, il faut
deſiſter d'humecter les bandes, de peur de recarder le callus , à la generation duquel
il faut proceder par les choſes qui aident à le faire, comme nous declarerons cy
apres. Or quant à la figure que l'on doit obſeruer,elle ſera conucnable,a les muſcles
out
ſonten leur ſituation naturelle:ce qui ſe fera ſi la partie eſt tenue en figure moyenne,
duine
D en laquelle ſi elle eſt ſans douleur, le malade pourra longuement demeurer . Ces
format
choſes faites, il luy faudra demander ſ'ileſtpoint tropſerré :& l'il dit quenon , ſi ce Temps de

ODE
n'eſt vn peu ſur la fracture ou luxacion , adonc faudra conclurre qu'il eſtbien : & fi difier le bảo
c'eſt une fracture ,il la conuient laiſſer trois ou quatre iours , plus ou moins,fans la dage aux
., . délier, ſ'ilne ſene grandedouleur. Mais aux luxations on la pourra bien laiſſer ſept fractures o
15 luxations .
;‫ܪܐ‬ ou huièt iours,biln'y ſuruient aucun accident. Et faut que le Chirurgien entende,
]dan qu'en traittant les os fra & urez ou luxez,il doit par tous moyensprendre garde d'em
ils peſcher les accidens , qui pourroient ſuruenir: qui eſt la troiſieme intention que
106
craitcerons à preſent.

LS
522 Le quinzieſme Liure
A
La troiſieſme intention eft corriger les accidens. CHAP. V.

La troiſieme Our ce faire faut traitcer la partie le plus doucement , & auecques
intention .
T moins de douleur que faire le pourra ( ainſi qu'il a eſté cy.deuantde
claré ) prenantgarde d'empeſcher la fluxion ſur la partie : & cepar me
dicamens qui ont vertu de corroborer , & repouſſer les humeurs : & par
bonne maniere de viure , aulli par purgation & phlebotomie fil en eſt
il faut tenir beſoin . Que ſi les accidens ſont deſia ſuruenus, ily faucremedier ſelon la diuerſité
regime iuf- d'iceux : car il y en a de pluſieurs & diuerſes ſortes: entre leſquels ſe fait communé
ques au dix- mene vn pruric ou demangeaiſon au commencement. Or le prurit eſt engendré des
żeſme iour. vapeurs de ce qui reſte du fang, & des autres humeurs contenus en la partie,qui
font vne mordication moderee, d'où vient prurit ſimple , ou mordication grande,
d'où vient prurit douloureux . Gal . ſur la 4. ſent. de la 1. ſect. des Fractures. Parquoy
Caufe du lors que celle matiere eſt vuidée , la cauſe du prurit eft ceſſee. Or leſdites vapeurs ne
prurit. ſe peuuent bien exhaler , pource que la partie eſt preſſee & couuerte d'emplaſtres,
B
de compreſſes, & de bandes: joint auſſi qu'elle demeure ſans ſon exercice accou
ſtumé, & pour ce y a moins de chaleur naturelle . Partant conuient dellier les ban

des de trois iours en trois jours , pour donner air & tranſpiration aux excremens fuli
gineux , & matieres ſanieuſes, contenues ſous le cuir, de peur qu'elles ne le rompene
Persedes con & vlcerent : ce qui eſt ſuruenu à pluſieurs par faute de ce faire. Pareillement faut
Pre le prurit . fomenter la partie auec cau chaude , & ce allez longuement : car commeil eſt eſcric
au 3.de l'Officine du Chirurgien , longue fomentation d'eau chaude,attenuë & cua
cuë , la moindre remplit & amollit : auſſi vſer delegeres frictions auec la main ou lin
geschauds ,deſquels on la frottera en toute figure:àſçauoir en haut,en bas à dexcre,
à ſeneſtre ,& en rond. Pareillement on peut vier de fomération faite d'vne deco &tion
de ſauge, camomille ,melilot,roſes, & ſemblables , bouillis en eau & en vio.Ec par ces
moyens petit à petiton oſtera le prurit . Eroù il y auroic deſia veflies, il les conuient
couper, pourdonner prompreiſſuë à l'humeur , lequel retenu pourroit corroder &
faire vlcere : & apres faudra appliquer quelque medicamentrefrigeratif ,commeeſt
0
l'onguent album Rhaſis camphoratumou deſiccatiuum rubrum ,ou vnguentum ro

ſarum , où il n'entre point de vinaigre , auquel on y adiouſtera poudre de bois pourri,


ou de la tuthie preparée, ou autres ſemblables.Mais il aduient auſſi quelquefois des
accidens beaucoup plus grands & dangereux , que nous declarerons cy -apres . Or
Hipofen.46
des . fily auoit quelquespicces ou eſquilles d'os quifuſſent du tout ſeparées, il les fauc
proprement oſter,principalement fils piquệt les muſcles : & auffi l'os eſtoit éclació
fract.
& forti hors de la chair , en ſorte qu'on ne le peuſt reduire,il conuient couper auecte
nailles inciſiues,ou par le Bec de Perroquet : deſquelst'aideras ſelon que verraseſtre
veile.Le Chirurgien doit pareillement prendre garde que la partie bleſſée ait ſou
uent vne flabellation , afin qu'elle n'acquiere inflammation : auſſi garder qu'elle ne
ſoit trop couuerte dy preſſée. La flabellation ſe fera en la changeant de place,' & la
ſoufleuant parfois . Telprecepte n'eſt ſeulement à noter pourles fractures, mais auſſi
pour toutes parties bleſſées & vicerées. Ayant donc ainſi diſcouru des fractures & lu

xations en general,maintenantie traicteray des particulieres , commençantau Nez.


D
De la fracture du Nez . C H 4P . .

L faut entendre que le Nez eſt cartilagineux en la partie inferieure,


Hipp. fene.
46. de la 2 . & oſſeux en la ſuperieure. En la partie cartilagineuſe'il n'aduient point

fe&t. des art . fracture, ſi ce n'eſt marque ou ſiege : ains ſeulement enfonceure 04
entorfeure , contuſion ou meurtrilleure : mais en la partie oſſeuſe ,
fouuent aduient fracture & enfonceure au dedans : & où il ne ſera bien re
duit , le malade demeurera camus , ou aura le nez torcu , & par conſequencdif
ficulté de reſpirer . Or pour reduire ceſte fracture, faut baiſſer l'os qui eſt tropemi
14 maniere nent , & celuy quieſt trop baiſſe , le faut releuer auec vne eſpatule , ou vn petit ba
de reduire le ſon approprié à ce faire , garny & enucloppé de cotton ou de linge , afin de faire
nez en la fi
gure naturela moinsde douleur au malade: & faut tenir ladice eſprouuerre d'unemain , & de l'au
le . cre faire la reduction. Puis l’os eſtant ſuffiſamment efleué & reduit en ſon lieu , on
mercra des tentes longues & groſſes dans les nazeaux faites d'éponges ou d'écoupes :
parce
Des Fractures. 523
А
parce quetelleschoſes ſont molles , & tiennent le nez haut efleué. Pareillement ſe
es
ront appliquées compreſſes des deux coſtez , pour mieux tenir l'os en la figure nacu
relle,iuſquesà ce que l'agglucination ſoit faite. Souuentesfois i’y ay mis des tentes
cannulées, faites d'or ou d'argent,ou de plomb, leſquelles eſtoientattachées par vn l'uſage pro
fileràla coëffe , ou bonnec denuiát du malade, qui ſeruoient à tenir les os, & donner cannulees,
predes tentes
ifluëàla ſanie, & autres excremens fortans du nez: & feruoiencauſiì à l'inſpiration &
expiration. Dauantage, f'il n'eſt neceſſaire, on ſe gardera de preſſer le nezpar le ban
dage,de peur de le rendre large, enfoncé ou tortu: & où il y aura playe, tu y procede
1 rasainſi que i'ay declaré en mon liure des playes de la telte humaine. Apres l'auoir
des
reduir , tu vſeras de ce medicament , & à toutes autres parties ſeiches, lequel a puiſ
ſance derepercuter & reprimer la fluxion , aſtreindre, tarir & deſſeicher l'humeur ja

--
defué ,& aider à tenir les os en leur lieu. 2. thuris, maſtiches, boli armeniæ , fan
guinisdraconisañez B. aluminis rochæ ,relinæ pini ſiccæ an.zij.pulueriſenturſubti
liflimè: icem farinæ volatilis 3 B. albuminum ouorum quantum ſufficit : incorpo
B renturomnia fimul, & fiat medicamentum . Si la partie cartilagineuſe eſt pareille
mene fracturee, on y procedera comme en la ſubſtance oſeuſe. Or il faut entendre
12
que la ſolution decontinuité faite aux cartilages, eſt nommee d'Hippocrates fractu Hip- feet. 2
re,commeen l'os , pource qu'il ne peut trouuer autre vocable plus propre , attendu duliuredes
que c'eſt la partie la plus dureapres l'as. Le callus en la fracture du nezelt communé . art.ſen. 47.
ment fait en douze ou quinzeiours s'il n'y ſuruientaccident. Gal. au
commeni.

De lafracture de la mandibule inferieure. CH AP: VII.


dir

2
A mandibule inferieure ſe terminc en deux manieres de cornes , donc l'v- Deſcription
ne ſe finit en pointe, & reçoit vntendon du muſcle temporel, l'autre en tu- anatomique
de la mandi
bercule rond, qui eſt allié à l'os ſous l'addition nommee mammillaire , & bule infe
illec s'implante en ynepecite cauité . Elle eftioin &te au milieu du menton Tieure.
par coaleſcence, & eft moüelleuſe au dedans . Lors qu'elle eſt fracturee, elle ſera re
ed duideen ſon lieu ,en mettant les doigts en la bouche du malade, preſſant les eminen
10 C cescant pardedans que par dehors, à fin d'vnir & appoſer les os l’vn contre l'autre . Et
iti, ſielle eſt du toutfracturee en trauers, & que les bouts fuſſent l'vn ſur l'autre , il faut
sdi faireextenſion & contr'extenſion , c'eſt à dire , tirant en deux parts contraires, pour
. mieux adioulter les bouts de l'os au droiêt l'un de l'autre. Et ſi les dents ſont diuilees, liguure des
elbranlees,ouſeparees hors deleursalucoles ou petites cauitez,elles doiuenteltrere- lees denesesbrang
duitesen leursplaces: 8c ſeront liées & attachces contre celles qui ſontfermes,auec. .
CI.
ques vn fil d'or, ou d'argent, ou de lin . Er les y faut teniriuſques à ce qu'elles ſoient
bien affermies ,& le callus ſoit refait & rendu ſolide. Et y ſera appliquee vneferule
low faite de cuir,dequoyon fait les femelles aux ſouliers,fendue parle milieu à l'endroit 1

CD dumenton,de longueur & largueur de la mandibule: 8 y fera-on vne ligacure auec


vne bande large de deux doigts, & longue tant qu'ilſera beſoin , coupee par les deux
2.1
bouts, laiſſantd'entier vn pouce: & à l'endroit du mencon ſera pareillement fenduë, Les compreſ
ilo à fin qu'elleſeront
empoigne
inferieurs couſus& ſurle
comprimemieux
ſommet de la leteſte,
menton
à vn :bonnet
& des quatre
de nuictbouts ,les deux
ou callote , & josoligaru
res doivent
D les deux autresbouts ſuperieurs ſeront conduits detrauers , & ſeront couſusau der- en re fendaës
riere dudit bonnet, le tout fi dextrement qu'il ſera poſſible, pour bien tenir la fractu- du menton .
re. Le lignequ'elle eſtbien reduicte , c'eſtquand les dents planteesen icelle ſont en Signe de bona
re pareilleaſliece de leur rang. Le malade ne ſe couchera point ſur la partie fra & urce, de nereduction.
peur que les os ne ſe demetcent, & que la fluxion nes'y face dauantage. S'il n'y ſur
C애 uient inflammation, ou autre accident, le callus ſe fait en vingriours, par ce qu'elle Temps de
eſtfpongieuſe, creuſe,& pleine deſubſtance moëlleuſe , & principalement en ſon generation
milieu, quelques fois plus tard, ſelon la temperature & aage du malade, comine il ſe du callus.
ita faiten tous les autres os. On vſera du medicament agglucinatif & repercuſlifcy-deſ
ſus eſcrit, & d'autres qu'on verra eſtre neceſſaires. Le malade doiteſtre nourry de
choſes qu'ilne faille maſcher,iuſques à ce que le callus ſoitfait & bien affermy,pour
ce qu'ilneles pourroit maſcher, & auſſi que la maſtication luy ſeroic contraire. Par
quoy vſera deboüillie,panade, coulis, preſſis,orges-mundez, gelees, potages, æufs
20 mollets,jusde confitures, reſtaurans,& autres semblables.
Si Yy
524 Le quinzieſme Liure

A
De la fracturede l'os clauiculaire, ou furculaire. CHAP . VIII.

A fracture deceſtosſera reduite , ſelon qu'ilſera hors de la place .


Or ſoit ceſte fracture faite en quelque ſorte que ce ſoit, touſiours
Hipp. fent, le bout qui eſt attaché contre l'eſpaule, eſt plus abaiſſé cõrre - bas
63. fect.1 . que l'autrebout , qui eſt attaché cõcre le ſternú : parce que le bras
des Artic .
le tire cótre - bas . Si la fracture eſt faite en trauers , elle eſt plus fa
cile à eſtre reduite , & aufli plus aiſee à guarir quecelle qui ſe faict
Vne fracture
en lóg . Car toutos ropu de trauers, plus facilemétrecourne enső
farcte de tra- lieu naturel,en ſe ſoufleuant d'un coſté
bud'autreauec les doigts ,& plus facilement
facile eftre fe remet , que celuy qui eſt rõpu en raifort, quieſt plusmal- ailė à eſtre reduit,& aufli
reduits les bouts des os à ſe tenir l'on contre l'autre, & plus difficilement ſecoller enſemble.
que
nulle autre.
Car remuant les bras tant ſoit peu , l'vne partie de l’os l'eſcarte & ſe ſepare de l'autre,
& la piece qui eſt proche de l'eſpaule, deſcend à l'inferieure partie de la poi & rinc : ả
B
raiſon que los clauiculaire n'a de ſoy aucun mouuement , mais ſuit le mouuement
Pluſieurs fa- du bras& de l'eſpaule ,qui tire contre- bas la portion qu luy eſt contigüe . Or pourre
çons deredu- duire ceſte fracture faite en raifort,ou autre façon que les bouts del os ne ſoient l'vn
Erion ,
ſur l'autre , ou eſcartez, faut qu'vn ſerviteur tire le bras en arriere , & vn autre au con
traire tirera l'eſpaule vers ſoy à l'oppofite, & ainſi ſe fera la contr’extenſion : cepen
dant le Chirurgien r’habillera auec ſes doigts la fracture, pouſanr contre- bas ce qui
eft eminent & releué , & recirant contre-monten dehors ce qui eft enfoncé en bas .
Aucuns pour mieux reduire ceſte fracture, mettent vne groſſe compreſſe ronde ſous
l'aiſſelle du malade: puis preſent le coulde contre les coltes: & le Chirurgien reduit
la fracture. Si d’auenture les bouts de l'os eſtoient tant enfoncez contre- bas , & que
. par les inoyés ſuſdits n'euffent peu eſtre releuez , alors il faut faire coucher le malade
à la renuerſe, & luy mettre entre les deux eſpaules vn oreiller, ou vn quarreau aſſez
dur , ou leculd'vne jatte,ou chaudron ,ayant mis premieremenc deſſus quelquecou
uerture . Puis vn ſeruiteur preſſera contre - bas les eſpaules du malade ,afin que les
C
bouts de l'os cachez & defcendus contre bas recournent contre - mont . Et par ce

Accident moyen le Chirurgien reduira facilement la fracture. Et fi d'auenture l'os eſtoit en


mortel. telle façon rompu & eſclaté, qu'il n'euſt peu eſtre reduit en la place , & qu'aucun
de les eſclacs picquaſt & entralt dedans la chair , & qu'il cauſalt difficulté dereſpirer,
alors on ſeroit contraint de faire inciſion , & le releuer auec yn crochet,& couper les
poinctes pour obuier aux accidens de la mort : & puis traicter la playe ainſi qu'il eſt
Medicament beſoin. Etfiledicos eſtoit rompu en pluſieurs pieces , apres les auoirreduitesen leurs
glutinatif. places , il faut appliquer deſſus yn medicament colletic , commefarine de froment,
thus,bol- armene,ſang - dragon reſine de pin , pulueriſez , & incorporezen blancs
d'æufs, & mettre par deſſus des ferules autour de l'os enucloppées de linge vſé ,oin
&tes dudit medicament : & pareillementtroiscompreſſes,àſçauoir deux aux coſtez,
mais la troiſieſme fera plus groſſe , & poſée ſur l'endroit de l'os eminent , qui le re
pouſſera & l'engardera de ſe relcuer , oinctes pareillement du medicament ſuſdit,à
fin qu'eſtāc deſleiché il ne puiſſe bouger de deſſus , & que les extremitez de l'osne de
clinent à dextre nyà ſeneltre, & ne l'eſleuent en haut . Ec faut pareillement que leſ d
Bande pour dices compreſſes ſoient de groſſeur & largeur qu'il ſera beſoin , pour remplir les ca
la clauicule, uitez qui ſont au deſſous & au deſſus dudit os . Puis on bandera commodemencauec
vne bande à doublechef , & la mettra - on en Croix Sainct André , & fera de la lar
geur d'une palme , & longue d'une coiſe & demie , plus ou moins ſelon le corſage du
malade : & fera -on qu'elle tire le bras en derriere . Aufli ne faut oublier à mettre des
compreſſes ſous les aiſſelles , & principalement ſous celle de la fracture, pour remplir
les cauitez d'icelle, afin que le malade comporte & endure mieux la ligacure . Sem
blablement ne faut oublier à commander au malade de tenir les bras en arriere , po
11 demeure fant ſa main ſur la hanche , ainſique les villageois la mersent quand ils danſent, fai
touſiours de- fans la ie renie- goy , à fin que l'os ſoit mieux tenu en fa place. Toutesfois quelque
Toate reduction diligence qu'on
puiſſe faire, il y demeure quaſi touſiours deformité, pource qu'on
de la claui- ne peut bien faire la ligature qui puiſſe enuironner l'os tout autour comme l'on fait
cule. au bras & à la jambe. Le callus en cetos eſt fait le plus ſouuenten vingt iours , à cauſe
qu'il eſt rare & fpongicux.

1
Des Fractures, 525
A
De la fracture de l'omoplate. С НА Р. IX .

Moplate, eſt un motGrec qui ſignifie eſpaulette ou paleronde l'eſpau- Deſcription


le. Elle n'eſt point enioincée , mais plaquée ſeulementau derriere des de anatomique
coſtes de la poi&rine , & attachée auec l'os occipital , & auec les fpon. l'omoplam
dyles du dos par le moyen des muſcles, & au deuant par l'acromium
(quieft vne apophyſe ou vn auancement de l'extremité de fa creſte ou eſpine)où l'os
neer clauiculaire eſt appuyé & ioinct. Aucuns Anatomiſtes appellent ceſte meſme con
ion&ion , acromium . Ellea yne autre production & apophyſe , appellée le col de
l'Omoplate, & au bout il y a une cauicé quireçoit la ceſte de l'os du haur du bras.Da
Como vantageelle a vne autre petiteapophyſe, appellée Coracoïde en Grec,à cauſe qu'el- Gal. au liu.
le repreſente vn bec de Corbeau , pource qu'en ſon extremicé eſt crochuë. Or elle desos.
Print peuteſtrefracturée en toutes ſes parties. Quelquesfois en la creſte, qui eſt au milieu l'omoplate a
ve B d'elle, que nature luy a donnée pour ſa tuition & defenſe, commeoncles vertebres deux produ
Etions, l'une
du dos.Quelquesfois auli quela partie large eſt enfoncéeau dedans, & quelques
CHINA fois en la iointure, où l'os du haut du braselt poſé en ſa cauité . Et ſelon cesdifferen appellee
cromium ,
e
‫باد‬ ces , les accidens ſont plus grands ou moindres. l'autre cora
CETTE Oncognoiſt la fractureeſtre en la creſte,quand en touchane deſſus on trouue vne coide.
Satin incgalité quicauſe douleur . L'enfonceure de la partie large ſe cognoiſt pareillemét Signes de
au coucher ,parce qu'on y trouue vne cauicé , & vne ſtupeur , ou endormiſſement, fractures.
au bras du coſté blame, & le malade ſent vne douleur poignante quand on y touche:
& telle choſe ſe fait cauſe des nerfs , quiſe diſtribuent aux muſcles de l'eſpaule. Si
les picces de l'os ne font du touſteparées, & ne picquent point,il lesfautredreſſeren curation:
leurſituation naturelle,&les y fairetenir auecremedes agglutinatifs,qui engedrent
le callus, & auec compreſſes & bandages propres à ceſte partie. Et ſi les pieces bou Les os qui ne
Jacob gent, ou remuent , & picquent la chair, il ſera fait inciſion pour les ofter, & feront font du tout
Com tiréesavec un inſtrumentnommé Bec de Corbin. Eten cet endroitfavt noter ſiles ſeparez de
fare eſclats, ou quelques portions des os fracturez ne ſont du tout ſeparez , & qu'ils tien- leur perioſte
0107 nentencoresau perioſte & ligamens, f'ils ne piquent la chair, ne les faut oſter: pour- ſe peuuene
Ques cequei'ay veu pluſieurs fois,qu'ilsſeprenoient&vniffoient enſemble,nonſeule-reünir.
mencà l'Omoplate, mais aufli aux autres parties, comme i’ay monſtré par cy- deuang
pa aux playesde la teſte. Mais alors qu'ils ſont du tout ſeparcz, & n'adherans plus au pe
UN rioſte, neceſſairement les faut tirer dehors , ou autrement nature aucc le temps les
nk chaſſera hors, parce qu'ils n'ont plus de vie auec leur tout , & faue, comme dit Hip
pocrates au liure des fractures de teſte, que le vifchaſſe le mort. Ce quieft aduenu à
+
monſieur le Marquis de Villars, lequel receut en ceſte partie vn coup de piſtolet à la
la bataille de Dreux , & dés lors on luy tira quelque eſquille de l'os , & quelque pic
ce de ſon harnois, & dela balle , & ſi la playe quelque cemps apres furconſolidée &
du tout cloſe: toutesfois apres la bataille de Mont- contour,pouravoir longuemenc
portélcharnois ſur ſon dos , il ſe fie vnenouuellefluxion& inflammation ſurla cica
trice , en ſorte qu'elle ſer’ouurit& en ſortit derechefpluſieurseſquilles d'os, & por
tion de la balle . Si la fracture eſt faiteau col du paleron , ou à laioincture de l'eſpau
le, rarement on en eſchappe,quelquegrandediligence qu'on puiſſe faire. Ce qu'on
D a veu n'agueres adueniraux defuncts Roy de Nauarre, & à Monſieur de Guiſe, & au
Comte RingrauePhilebert,& pluſieurs autres,en ces dernieres batailles , à cauſe
qu’autour deceſteiointure il y apluſieurs& gros vaiſſcaux, àſçauoir la veine & arte
reaxillaire,& les nerfs naiſſans des vertebres du col , qui ſe diſtribuent à tous les
muſcles du bras.Dauantage , lors qu'il ſ'y fait inflammation & pourriture, facile
ment ſont communiquez au cæur,& autrespartiesnobles:dontpluſieurs accidens
aduiennent , & ſouuent la mort.

Yy ij

1
e
526 ieſm
Le quinz Liur
e
,
А
De la fracture ou depreſion du Sternum ou Brechet.

CH 4 P. X.

E Sternum quelquesfois eſt fracturé, & quelquesfois iln'y a qu'une de


Signe de fra
Etare au ster preſſion & enfonceure au dedans fans fracture. Le ſigne qu'il eſt fra
num. & uré , c'eſt qu'au lieu de la fracture on trouue vne inegalité : & quand
on touche deſſus , il obeiſt au doigt , & fent- on vne crepitation & bruit.
E
Et lors qu'il eſt enfoncé , on voit vne inegalité & cauicé , & adonc le
Ia coux viết malade fent grande douleur , & a difficulté de refpirer,à cauſe que l'os preſſe les
à caule que membranes, & les poulmons qui ſont au deſſus de ces parties -là : pareillement, a la

les poulmons toux , & fouuent crache du ſang. Or pour reduire cer os , il faut ſituer le malade
Soni preſjez. comme nous auons dit en la reduction de l’os clauiculaire , å ſçauoir le mettant à la
)
renuerſe: & luy meccera - on yn quarreau ſous ſon dos , puis ſera foulé ſur ſeseſpaules
contre - bas , & auec les inains on reduira l'os preſſant les coſtes d'un coſté & d'autre :
& fera -on en ſorte que la reduction ſoit bien faite.Puis apres on appliquera les reme . B
des cy - deſſus mentionnez , pour prohiber l'inflammation , & feder la douleur. Ec
.
y ſerontadaptées promptement des compreſſes : auſſi la ligature ſera croifee par def
ſusles eſpaules ,laquelle ne doit eſtre trop ſerrée , de peur qu'elle n'engarde la reſpi
racion du malade . S'il eſt beſoin on tirera du ſang, & fera - on toutes autres choſes
Hiſtoire. neceſſaires & requiſes à cet effe & . L'an 1563. ie fus enuoyé par le commandement
du defunct Roy de Nauarre , Lieutenant general du Roy, pour penſer Antoine Be
nand, Seigneur de Ville - neufue , Cheualier del'ordre du Roy , & Gentil - homme
de ſa chambre, Capitaine de trois cens hommes, lequelfutbleſſé pres la porte de la
ville de Mehun , d'vn coup de mouſquer, au milieu du Sternum , dont la cuirace en
fonça les os dudit Sternum : qui fut cauſe qu'il comba par terre comme more , iettant
grande quantité de ſang par la bouche , & en cracha par l'eſpace de trois mois apres.
Et pour reduire les os,i’y proceday comme i'ay dit, & receut parfaite guariſon ,eſtant
encore à preſent viuant .
0

De la fracture des Coftes. CHAP . X1 .

Es coſtes vrayes ſont oſſeuſes , & reçoiuent fracture en toute partie :mais
Quelles coſtes les coſtes faulſes ne ſe peuuent fra & urer que presi’crpine du dos , auquel
en quelle endroit ſont offeuſes :car en la partie anterieurcellesſontcartilagineulis,
partie peuuét & partant en cet endroit ſe peuuent plier , & non fracturer . Or elles le
encourir fra- peuuent coutes rompre en dedans & en dehors. Auſliclles ne ſont quelquesfois du
Eture.
tout rompuës , mais leulement eſclatées & fenduës, & quelquesfois par dedans,&
non par dehors: & la ſciflure ou fente penetre aucunesfois iulques au milieu de leur
ſubſtance , qui eſt rare & ſpongieuſe : & quelquesfois auſſi ſont du tout rompuës,&
eſclattées,dont les eſclats prellent & picquét la membrane pleurerique, qui les cou
ure par dedans
. Adonc le danger elt grand : mais lors qu'il n'y a que ſimple fra
¿ ture , ſans que ladicte membrane ſoit rompuë ou grandenient preſſée ,
complication de diſpoſition, le mal eſt petit , & pource Hippocrates conſeille qu'ils D
mangent aſſez liberalement,parce que le ventre moderément plein redreſle la coſte,
ce qui eſt vray.Ceux qui ontfracture aux fauſſes coſtes , ſe trouvent plus malauant
Prognoſtic de
manger qu'apres, à raiſon qu'auant le paſt ils ſentent les coſtes ſuſpenduës, fans
des costes. qu'elles ſoient aucunement ſouſtenuës par les alimens contenus en l'eſtomach. Pa

reillement la fracture , qui cſt au dehors,eſttrop plus aiſée à guarir, que celle du de
dans, à cauſe qu'elle picque la pleure, excite inflammation, & fouuent empyeme.
Car celle de dehors le reduit facilement, à cauſe qu’on la peut toucher, mais cele de
de dedans ne ſe peut toucher. Celle qui eſt faite au dehors fe peut guarir en vingt
Signes,
iours ; f'il n'y ſurvient quelque mauuais accident. Les lignes des coſtes rompvës,
ne ſont pas difficiles à eſtre cognus . Car touchant des doigts à l'endroit de ladou
leur, on trouue la fracture en fentant vne inegalité & crepitation , principalement ſi
elles ſont du tout rompuës . Et ſi la coſterompüceſt cournée vers le dedans, le mala
deſene yne vehemente douleurpun & iue , &encores plus violente & faſcheuſe qu'en
la pleurefie, parce que la membrane quicouure les coſtes, eſt picquée & prellee par
Des Fractures. 527

A les eſclats de la frađure. Au moyen dequoy le malade a vne cres- grandedifficulté de


reſpirer,couſſc , & fouuent crache du ſang,par-ce que les poulmonsle ſuccent & atti
rent : qui à cauſe de la dilaceracion , eſt hors de ſes vaiſſeaux , & d'iceux entre en la
Trachée arcere,& de là eſt jetté parla bouche . On peut bien redreſſer auec les doigts De la fractu
les fractures des coſtes , faites au dehors : mais Gielles ſont cournées au dedans , il eſt re en dehors.

impoſſible , parce qu'on ne peut faire ce qu'ilappartient, qui eſt cirer & contre- tirer,
& prcfſer ſur les eminencesdela fracture. Aucuns pour retirer l'os fracturé en de
hors ,commandécappliquer vne ventouſe,mais ils font mal :car par la contra &tion &
compreſſion des parties circonjacentes, ou voiſines , faite par la ventouſe , feroient Hipan
liare
attraction des humeurs , & augmentation de douleur à la partie malade: & partantne des ari . ſect.
la faut nullement appliquer : ce qu'aulli Hippocrates defend. Mais pour la reduire , 3.fent.si.co
on fera coucher le malade ſur le coſté ſain . Puis on mettra ſur la fracture vne empla- Paulliu . 6 .
ſtre couuerte ſur de la toile ncuue & forte , faicte de terebenthine, reſine, & poix chap: 96.
Auic. en ſon
noire , farine de fourment, maftic , aloës : & l'ayant laiſſé quelque eſpacede temps ,
4.
B ſera clleuće & tirée de force contre-mont, & par ce moyen la coſte ſera tirée en haut: Emplaſtre
r
& fera -on cela non ſeulement vne fois :mais par pluſieurs, tant que le malade ſe pour eflene
UR
ſente allegé , & auoir ſon halcine pluslibre.Pourquoy faire plus aiſément, le malade la coſte rom
peut grandement aider au Chirurgien , en touflant, & retenant ſon haleine , lors puthen hant.
clar.
qu’on tirera l'emplaſtre. Mais auſſi ſi nous ſommescontraints par vne grande neceſ
lité , à cauſe que la membrane quicouvre les coſtes, & les nerfs qui accompagnent
nder
les veines & arteres qui ſont ſous chacune coſte, font grandement preſſez & pic
DOO
quez,en ſorte que le malade ſent yne extreme douleur, & ne peut qu'auec bien gran
Thou
de peine reſpirer , & auſſi qu'il crache du ſang & touſle , & eft febricitanc: alors pour
obuier à la mort, il faut faire inciſion ,& deſcouurir vne portion de la coſte fracturée:
puis auec vn crocher efleuer les eſclats de l'os qui picquent , & les faire ſortir dehors
1, en les coupant , ou autrement . Et ſi la playe eſt grande ,il la faut couldre , & la trait
ter comme il appartient. Et ſera ordonnéregime au malade , & la feignée & purga
‫اور انا‬ tion , ainſi que verra le docte Medecin eftre beſoin : car comme eſcrit Hippocrates,
en la ſimple fra &ture il n'eſt grand beſoin de cel regime , parce qu'il n'y a fićureny au
C cun malin accident : mais en la compoſée, qui eſt ayec conuullion ou playe desmu
ſcles, il eſt de neceſſité pour la fiéure & empieme. Et ſur la partie ſera appliqué vn Bandes Tea
Cerat & autresremedes , ſelon les accidens qui ſuruiendront. Les bandages qu'on
tentimes .
faità ceſte partie , ne peuvent ſeruir qu'à tenir les remedes.Et quand à la ſituation du
malade, il le doitinettre en telle aſſiecte qu'il pourra endurer, & ſe trouuer micux .

Accidens qui viennent des coſtes rompues. CHAP. XII.

L nous reſte à preſent traitter en bref desaccidens qui aduienněc


à cauſe de la contuſion faite ſur les coſtes. C'eſt que la chair con
tule deuient bourſouflée, pituiteuſe, muqueuſe, & glutineuſe, à
raiſon que la partie ne peut cuire & digerer l'alimentqu'il luy eſt
enuoyé: partant il demeure à demy-cuict, à cauſe de l'imbecilli
Com té de la partie , & de la trop grandemultitude de l'humeur qui in
@ Aue : d'où vient que de telle crudité & humeur indigeſte, l'elle
Duent pluſieurs flacuoſitez, pourceque la vertu conco & triceeft debile,à raiſon de l'im
becillité & intemperie de la partie.Hippocrates 3.des Art.dont on trouue la chair en
ceſt endroit tumefiće, comme ſi on l'auoit ſouffiće: & lors qu'on comprime deſſus a
uec la main on ſent l'air qui ſe deſparc, & le lieu qu'on a comprimédemeure caue,că
meon voit aux fluxionscedemateuſes.Et ſi on n'y donne ordre, il ſ'y faitinflámation , 3
fićure, apoſteme, difficulté de reſpirer : & quelquesfois les coſtes fe pourriſſent, å
cauſe que la chair eſtellcuée de contre l'os: lequel demeurant nud ſans ſa couuercure
naturelle,ilſ'introduit, & eft frappé d'vn air qui quelquesfois eſt cauſe d'alterer l'os & La cauſe de
le pourrir. Et lors quecela ſe fait, lesmalades jectentla boäe parla bouche, puis dc . l'alteration
uiennent tabides ,dont la mort ſ'enſuit.Orpour obuierà dels accidens,faucprompte- e pourritu
mentfaire la redu &tion , comme nous auons dit . Et pour reſoudre ceſte tumeur mu- re des coſtes.
queuſe, fautappliquerremedes propres, bander & comprimer auec compreſſes, afin
que la chair touche à l'os, & qu'il ne demeure nud.Et quand à la maniere de la com .
preſſion ,on appliquera le bandage aſſez ſerré , toutesfois non tant que les coſtes ne ſe
Үy iij
me
528 zieſ e
Le quin Liur

puiſſent mouuoir, & que la reſpiration ſoit empeſchée. Puis on vſera des remedes re. A
ſolutifs & calefactifs pour dilli per l'humeur. Et faudra diuerlifier les remedes ſelon

Cure de tel que les accidens ſe preſenteront. S'il ſuruientapoſteme, elle ſera ouuerte ſans trop 31
accident . carder , de peur que l'os ne ſe pourriſſe, & apres l'ouuercure faite, on cuacuera la ma

tiere : & pour ce faire on mettera yne tente cannulée dans l’vlcere , ſi bien attachée
qu'elle ne puiſſe comber en la capacité du chorax . Et ſeronc faites toutes autres cho
les neceſſaires & requiſes à celles diſpoſitions.

De la fracturedes vertebres ou roüelles de l'eſpine & de fes apophyſes, ou faillies.


* H 4 P. XI11 .

A rondeur, ou circonference des vertebres, eſt quelquesfois rompuë , con


Accident
tuſe & enfoncée au dedans, qui fait que les membranes qui couurent la
incurable.
moüelle ſpinale, ou elle -meſmeeſtant ainſi preſſée, cauſent pluſieurs mau
Uais accidens, & peut-on preſager eſtreincurable, ſelon qu'ils ſeront grands : à ſça
B
uoir , quandon voit que les bras & les mains du malade ſont ſtupides & paralyciques,
fans les pouuoir remuer : & auſſiqu'en les picquantou ſerrant, le inalade ne fentrien :
ſemblablement quand les accidens ſuſdits ſe trouvent aux jambes & aux pieds : &

Curation . que le malade laiſſe ſortir ſes excremens ſans lesſentir , & les pouuoir tenir , ou auli
qu'il ne peut vriner : car ſelon Hippocrates ſeat. 2. du Prorrhet. de quelque cauſe,
que la moitié de l'eſpine ſoit bleſſée, ces accidens ſuruiennent , on peut alors preſa
ger la mort prochaine : & apres l'auoir predit
aux parens & amis, & auxalliſtans, il
ſe faut enhardir ( ſ'il eſt poſſible) de faire inciſion pour oſter leseſquilles ou eſclats,
qui ſe ſont enfoncez ,, & compriinenc la moüelle & les nerfs : & l'il n'eſt pollible,
faut appliquer remedes qui ſedent la douleur, & qui prohibent l'inflammation , &
reduire les parties fracturées en leur lieu , les y faiſant tenir par les moyens que dirons
Signes des en la luxacion de l'eſpine .Que ſi ſeulement les apophyſes des vertebres ſontrompues
ſeules apo- ( qui ſe cognoiſtra, parce que les accidens ſuſdics n'y ſuruiennent, & qu'en pouſſant
phyſesrom- du doigt deſſus, on ſenc la pieceou eſclat de l’os ſe remuer,& changer de place, ioint
pues. с
auſſi qu'au lieu de la fracture on trouue vne cavité & enfonceure, auec quelque
bruit d'une petite crepitation ou craquement: d’abondant ſi le malade yeut plier
l'eſchine , il ſent douleur , parce que la peau qui eſt à l'endroit de la fracture, feſtend
& preſſe des eſclats de l'os , principalement ſ'ils ſont pointus & eſpineux, picquants
la chair : & fil ſe dreſſe il ſe trouue mieux à cauſe que ladite peau eſt lafche : partant
les eſquilles de los picquent moins ) alorson les pourra reduire, fils ne ſont du tout
ſeparez de leur perioſte: mais aulli fils en ſont entierementfeparez ,adonc faut fai
reinciſion & les oſter , puis traiter la playe comme il appartient.
Les fractures des apophyſes des vertebres ſe guariſentaiſément, pourueu qu'elles
Prognoſtic.
ne ſoient accompagnées d'autres diſpoſitions, commequelque grande contuſion,
ou autres : parce que tous os rares & fpongieux , en peu de temps ſe conſolident,
comme nous auons dic .

De la fracture de l'os ſacrum .


D
CH AP. XIV .

Oxelle fra. Vfli l'os ſacrum peut eſtre fracturé en certaine partie , où le patient peutre *
Eture de l'os
couurer ſanté : ce que i'ay veu pluſieurs fois feftre fait par coups de boulets
,
Jacrum eft ou autre choſe briſante : mais où la fracture ſera faite à l'endroit de l'eſpi
mortelle . AC
ne , & fi elle eſt bleſſée, à peine le malade peut euiter la mort , pour les raiſons qu'a-.
uons declaré cy - deſſus.

De la fracture des os du croupion , ou de la quenë. CH A P. XV .


C.

E croupion , nommé os Coccyx,eſt compoſé de quatre petits offelets,donc


Deſcription
anatomique le premier a vnc cauité où finlere la fin de l'os ſacrum : les trois autres fonc
de l'os Coc joints enſemble par ſymphyſe,à l'extremitédeſquelsil y a vn petit cartilagę.
cyx .' Or lafracture de ces osſera reduite, en mettant le doigt dedans le fiege du
‫ار‬
Redaction. malade , tant qu'il ſoit appoſé à l'endroit du lieu de la fracture duquel il repoullera
Des Fractures. 529
A
l'os, & l'egalera aucc l'autre main l'expoſant exterieurement ſur la fracture. Et afin

qu'elle ſoit mieux & pluſtoſt glutinée,fautque le malade ſe tienne auli & pendant la
curation : & où ilſe leuera , faut qu'il ſe mette en vne chaire percée , afin qu'il n'y aic
rien qui preſſe ſur la fracture. Et ſeront appliquez les remedes conuenables aux fra
étures, les diuerſifiant ſelon qu'on verra eſtre neceſſaire.
30

De la fracture de l'os de la hanche. C H 4 P. XII .

E!
' Os de chacune hanche eſt compoſé de crois os , le premier eſt ios de la
hanche eſt
nommé os Ilion , le ſecond Iſchion , le ciers os Pubis . Ces trois os

font ſi bien coniointsenſemble (aux hommes quiont accomply compoſ é de,


1Y0ls Autres
20,0.1 leurs trois dimenſions) qu'on ne les peut nulle ment ſepare r , mais

aux petits enfans, ils ſe peuuent aiſément ſeparer l’yn d'auec l'au
tre. Et pour les bien entendre ,ie terenuoyeray à mon anatomie,
B où l’en ay amplement eſcrit : & dırons que cedic os peut eſtre
rompuen toutes ſes parties , pour eſtre tombé de haut en bas ſur quelque choſe dure ,
ou parcoup de quelque certain inſtrument , comme de piſtole , arbaleſtre , ou autre
façon.
CUL Ceſte fracture ſe cognoiſt comme les autres , à ſçauoir,parle ſentiment de douleur signes.
pungiciue & pulſatiue , & ſtupeur en la iaipbe du coſté meſme, quand le milieu eſt
Disper enfoncé: elle ſe cognoiſt auſſi au ſens de la veüe , & du coucher , & veut eſtre habillée
ſelon qu'on verra eltre neceſſaire. Faut tirer les pieces d'os , ſi elles ſont du cout ſepa. Curation :
rées , du premier appareil, f'il eſtpoſſible ,faiſant inciſion , ſ'ilen eſt beſoin , euitant
de couper le chef des muſcles, ou quelque vaiſſeau, principalement le grand & gros
nerf qui ſe diſtribue entre les muſcles de la cuiſſe & de toute la iambe . Ecles eſclats
UCO ou fragmens, quine ſont entierement ſeparez de leur perioſte , ſerontraſſemblez &
reduits auec les doigts . Et conſequemment on procedera à la reſte de la curation ,
commeon verra eſtre neceſſaire,
apos
Tak
C
De la fracture de l'os du bras , ou adiutoire, C H 4 P. XF II.

Os du haut du bras eſt rond , caue , & plein demoüelle,ayantvne Deſcription

pilot affez grande teſte en la partie ſuperieure, aſſiſe ſur un moyen col . anatomique
op lla en la partie inferieure deux apophyſes, ou prominences, l'une de l'os du
bras.
anterieure , l'autre pofterieure : & y a entre les deux comme vne
‫ناکا‬ demie orbite , ou cauité d'vne poulie , les deux extremitez de la
quelle ſe definent , l'vne en l'vne cauité exterieure , & l'autre in
cerieure,pour l'arrelt de la flexion & extenſion, c'eſt à dire , de peur
OLE que l'os du coulde ne tournaſt rout autour de ſa cauité , quieft ſemblable à vnc pou
lie.Etſitelle choſe aduenoit, l'action du bras euſteſté imparfaicte, parce qu'il ſe fuſt
plié autant au dehors comme au dedans. Cecy eſt neceſſaire ſçauoir au Chirurgien ,
pour la reduction des fractures & luxacions de ceſte partie . Ecne faut ſeulement l'ap
prendre par ce livre , mais qu'il aille aux cimetieres l'apprendre ſur les os des morts,
D comme i'ay faict, & autres Anatomiſtes. Si les extremitez de ceſt os fracturé chcuau
chentbeaucouples vnes ſur les autres , & que ce ſoit un homme forcrobuſte : alors
pour le reduire , il faudra faire grande extenſion au bras , ayant premieremenc fait
ſeoir le malade aſſez bas , afin qu'il ne ſe puiſſe leuer lors qu'on reduira la fracture , &

de auſſi que le Chirurgien face ſon operacion plus à ſon aiſe , bien que Hippocrates meu
d'autres conſiderations vueille que le malade ſoit ſitué haut.Semblablement ne faut
faillir en faiſant l'extenſion , de la faire en tirant ledicos en bas vers la terre en ligne

droicte, & que le coulde ſoit ſemblablementplié auſſi lorsqu'on le veut ſituer pour
eſtre tenu en eſcharpe . Car ſi on vouloir faire la reduction , le bras eſtant hauſlé & ce qu'on doit
7
eſtendu, ou en quelque autre figure, il le faudroit touſiours tenir en ceſte melme obféruerenla

coco ſituation en laquelle on lauroit reduit :ou autrement , le voulant mettre en eſchạr- reduction de
pe ,la fracture lepourroitaiſément defaire. Ce quicít tres - necelfare au Chirurgien a fracture de
d'obſeruer , en remettant ledic os rompu , tenant le bras couché, presque contre le du bras,
corps versla ceinture. Enquoy le Chirurgien prendra aulli gardeen'e bandant, & y
appoſant les aftelles , qu'elles ne preſent ſur les iointures : car comme eſcrit Hippo
Y y ulij
530 Le quinzieſme liure ,
crates, ſection 3. de l'officine du Chirurgien,& fe&tion 1.desfra& ures,il ne faut que a
les altelles preſſent les parties deſcharnées, nerueuſes & ſenſibles de peur de douleur
& denudation , cant du nerf que de l'os:& principalement à l'interieure partie , vers
laquelle ſe fait la Alcction, de peur qu'ellene face douleur& infammation : & par
Poſition du tant il faut en cet endroit qu'elles ſoient pluscourtes . Erapres auoir ainſir'habillé le
bras apresla bras, il ſera poſé contre la poitrine, en figure d'angle droi&t, & y ſera lié , afin que le
reduction. malade ſeremuant,il neperuertiſſé la figure de l'os, qu'on aura reduit en ſon licu.
En telles fractures, il faut que le bras demeure à repos , iuſques à ce que le callusſoit
fait, qui ſe fait en quarante iours,& quelquesfois plus card : dont on n'en peut don
ner reigle certaine, non ſeulement de la fracture du bras , mais de toutes les autres,
comme nous auons dic.

De la fracture de l'os du coulde , & durayon,c'eſt àdire, des deuxfocilesdu bras.


CH A P. XVIII.
B

Differentes Vel vessois l'os du coulde & du rayon ſontrompus en


fractures de femble d'vne meſme fracture , & quelquesfois un d'eux ſeule
l'os du coul ment. Auſſi il aduient que la fracture eſt faicte ou au milieu d'i
de.
ceux,ou en l'extremitéprochaine du coulde, ou du poignet. La
pire fracture eſt quand tous les deux os ſontrompus enſemble.
Car le bras demeure du tout impotent : & la curacion en ſera plus
difficile, parce qu'ils ſont plusmal-aiſez à tenir, quelorsqu'il n'y
en aura qu'vn ſeul: pource que celuy qui demeure entier ſouſtient encores les bras,
& garde queles muſcles ne ſe retirent,comme ils font lors qu'ils ſont du toutrom
Reduction. pus enſemble. Et la pire d'apres,c'eſtquand l'os du coulde eſtrompu :& la plusfacile
à guarir, c'eſt quand l'os durayonſeul eſt fracturé, parcequ'ileſt ſupporté& fouſte
nu ſur l'os du coulde : & fices deux os ſont rompus, il faut faire la contr'extenſion
plus forte , parce que les muſcles ſont plus recirez que fil n'y en auoit qu'vn ſeul,&
Situation du l'vn demeurant entier ſerc plus que les bandes & aftelles à ſouſtenir l'autre. Auflifilc
brasnosable. n'y a qu'vn d'iceux rompu:pour reduire,ilfaudra faire moindre excenſion que ficous
les deux l'eſtoient, parce que les muſcles ſont moins retirez , demeurant entier l'vn
deſdits os quiles tientdroics: & eftans reduits , bandez, & altelez ainſi qu'il appar
tient , le bras ſera pendu en eſcharpe; de forte que la main ne ſoit gueresplushaute
que le coulde , afin que le ſang & autres humeurs ne tombent ſur la main : laquelle
pareillement ſera ſituée & tenüe en figure, qui ſoit moyenne entre la prone & fupi.
ne, ſelon laquelle figure ,l'os du rayoneſt droictement ſitué ſur le coulde, comme il
eſt en Hippocrates ſentence 3. ſe& ion 1. du liure des Fractions. La raiſon eſt, qu'il y a
peruerſion tant en l'os qu'aux muſcles parla figure ſupine: car premierement pour
l'os , l'apophyſe ſtyloide & Polecrane du coulde doiuenceftre au niueau , & vis à vis
l'vn del'autre: ce qui ne ſe faiten la figure ſupine, par laquelle l'apophyſe ſtyloïde du
coulde eſt vis à vis del'os de l'apophyſe interne de l'os du coulde. Pour les muſcles,
parce que quelle eſt l'inſercion & la telte du muſcle , telle eſt la ſituation de ſon ven
tre, & l'inſertion de ſa queue. Or par lafigure ſupine des muſcles qui viennent de
l'apophyſe interne de l'os du bras, & fechiſſent le coulde,ont leur queue ſuperieure D
& exterieure.D'abondant tun'oublieras pareillementà flechir & eſtendre par fois le
bras du malade , coucesfois ſans douleur le moins qu'il ſera poſſible pour obuier que
par la fluxion (qui ſe fait à la iointure du coulde & parties voiſines) & la longue de.
meure, les os d'icelleiointurene fagglutinent enſemble, dont ſ'enfuicapresimmo
bilité de la iointure , comme ſ'il y auoit vn callus formé: & de là vient que puisapres
Galien au le bras ne ſe peutplier ny eſtendre: ce que i'ay veu aduenir à pluſieurs; aufliGalien le
comm,furles nous a laiſſé par eſcrit:& tel viceeftnomméAncyle ou Ancyloſis. Or fi lafrađureeſt
d'Hippoart. accompagnée d'une playe , cu prendras garde de ſouſtenir le bras auec lames defer
liur.des
blanc, courbées ,ou gros papier de carte, ou autre choſe propre àce faire ( quiſer
uent de concenir les pieces de l'os en telle ſituation , qu'on les a reduics ) & de licuer
le bras ſur yn pecit oreiller comme cu vois par ceſte figure.
Des Fractures. 531
A '

La figure de la ſituation d'un bras rompu , auec playe.

SKU

De la fracture de la main . CHAP . XIX.


B

Es os du Carpe , Metacarpe, & les doigts de lamain ,font quel


quesfois rompus & caſſez:mais ,comme eſcrit Hippocrates ſect.
2. des Fractures; le plus ſouuent ils ont l'eſpece de fracture , qui
fappelle marque ou liege. Toutesfois ils ſont rompus ou caſſez :
le moyen de les reduire; c'eſt que le malade eſtende ſa main ſur
vne cable égale. Ce faict; vn ſeruiteur cirera les os fracturez, & le
Chirurgien les redreſſera , & poſera en leur ſituation naturelle .
Puis appliquera les remedes propres , & altelles : & les doigts ſeront liez enſemble
auec leurs voiſins qui les coſtoyent: car en ceſte façon ils demeurentmieux . Il faut
que le Chirurgien conſidere,que ces os ſont de ſubſtance rare & fpongieuſe , & par
tant le callus fe fait aiſément. Dauantage il faut appliquer vne compreſſe ronde au Nora.
dedans de la main , pour mieux tenir les os rompusen leurs places, & les doigts en
figure moyenne , à Içauoir n’eſtans du tout ployez ny dreſſez: pource que l'ils de
С meuroient autrement, le callus qui ſe feroit , depraueroit l'action de la main , qui eſt
de prendre , ou bien l'aboliroit du tout . Au contraire , les orteils des pieds frađurez
ſeront tenus droicts, & non ployez , afin que le cheminer ne ſoit empeſché.

Des fractures de la criſe faictes au milieu de l'os.

CH A P. XX.

N trouue communément les extremitez de l'os de la cuiſſe pourquoy les

eſtant roinpu , cheuaucher l'vn ſur l'autre , à cauſe de gros & forts osde la cuille
muſcles quiſontenicelle, leſquels ſe retirent tous vers leur ori- rõpue ſe für
gine , comme nous auons dit cy - deuant . Parquoy lors qu'on re- paffent l'on
l'autre
duira ceſte fracture, faut que le malade ſoit couché ſur le dos , &
ait la iambeeſtendue: & que le Chirurgien cire bien fort la cuiſſe:
D & où il ne le pourra faire ſeul, il aura deux ſeruiteurs forts & puiſ
fans, pour ramener les extremitez des os rompus l'vne contre l'autre . Et à ces fins
les anciensauoient l'inſtrument nommé Gloflocomium , lors que la main n'eſtoit
aſſez forte.
532 Le quinzieſme liure ,
A

Figure d'un inſtrument sommé Gloſocomium .

Figure de Enlieu d'iceluyon peur pareillement faider de noſtre mouffle : car Hippocrates
pos de la permet la tenſion ſigrande, que meſme il bande ſansauoir reioint les os , parce que
cuiffe. où lemuſcle eſtpluspuiſſant quele bandage,aiſémentles os ſeremettent par la con
tra &tion du muſcle. D'abondant le Chirurgien conſiderera , en reduiſane ceſte fraa
cure,que ceſt os eft courbé en la parcie interieure, & gibbeux en l'exterieure: partác
il le faut remettre en ſa figure naturelle, & auoirmemoire,qu'iln'eſt de figure droite:
& où l'on y commettra faute,lemalade demeurera claudicantà iamais . A ceſtecauſe
faut appliquer vne compreſſe au dedans de la cuiſſe , qui rempliſſe le plat & cauité
d'icelle, depeurque l'os ne ſe demette de ſa place : laquelle ſera couuerte d'onguenc
roſat , ou de quelque autre medicament glutineux , de peur qu'elle ne ſe deſplace.
Semblablementonmettra d'autres cõpreſſes ſur la partie qui eſt plus greſle, laquelle
trois
eſt pres du genoüil,afin que les ligatures ſoientégales, leſquelles ſe font pour
intentions dites cy -deſſus. La premiere eſt, pour contenir l'os en la figure où il aura
eſté reduir,iuſques à ce que lespieces ſoient conglutinées par le callusqui les ſoude. D
La deuxiéme , pour empeſcher la Auxion , quiaiſémenty vicnc,cantpour la douleur ,
que pour la debilité de la partie . La troiſiéme,pour contenir les cõpreſſes & aſtelles,
& les remedes qu'on y applique . L'inflammacion cít empeſchée en reprimant, & re
chaſſant leſang & les autres humeurs ,qui autrementyfiueroie , & en exprimant le
ſang contenu en la partie fracturée vers les parties prochaines ,necant ſuperieures que
inferieures.Ec partant leſdites bandes ſe doiuent faire de bonne coile forte , & non
rude . Leurlargeur & longueur giſt en la coniecture artificielle du Chirurgien , qui
les meſure ſelon que la fracture eſt grande ou pecice , & la groſſeur ou longueurde la
partie : & doiucni touſiours couurir toute la partic fra &turée, & grande portion de la
faine. Or parce qu'au liure des Bandages , i'ay expoſé principalement le bandage
d'Hippocrates,ie te veux icy expoſer celuy de noſtre practique ordinaire :quieſt que
nos practiciens veulent auoir trois bandes pour celles fractures.
Lapremiereſe doic commencer ſur la fracture (comme nous auons ditauliure des
Des Fractures.
533

A bandes ) y faiſant deux ou trois trous , & plus ſerrées que les autres , qui ſeront menées
contremont où elle doit eſtre terminée : & ſes reuolucions doiuenteſtre fortiointes
l’vne contre l'autre : ainſi conduite , fait qu'elle ciencles os , & exprime & reprime le
ſang loing de la fracture . Ladeuxieſmefera auſi deux tours ſur la fracture, puis ſera
menée contre- bas auec reuolutions plus eſcarcées l'vne de l'autre que la premiere, &
de bas on la fera retourner contre -mont, où ainſi ſe finira . Son effè &t eſt ſemblable
ment d'exprimer & reprimer : & ſes reuolutions deſcendent corre - bas , & ſont moins
jointes , afin qu'il ſe face moindre expreſſion de fang aux extremitez , qui ne peuuent
ſans inflammation en receuoir beaucoup , à cauſe qu'elles ſont loin de la chaleur na
turelle, qui eſt plus grande au centre qu'elle n'eſt aux extremitez . La troiſieme doit
commencer en bas à l'extremité du membre , & eſtre conduite doucement contre
mont ,& faire ſes reuolutions au contraire des deux premieres afin de reduire lesmu
ſcles quipeuuent auoir eſté deſtors de leur deüe ſituacion naturelle . Apres auoir faict
ces bandages, il faut appliquer trois aftelles faictesde gros papier de carte ou autre
matiere, commenous auons dit.Lapremiere ſera poſée au deſſous de la fracture aſſez
B
large , & longue , tanc qu'il ſera beſoin :& deux autres,vne de chacun colté, diſtantes
l'vne de l'autre d'vn doigt , afin de tenir l'os qu'il ne vacilleçãoulà , enucloppé d'e
ſtoupes ou de cotton , & auec des liens les ſerrer tant qu'il ſera conuenable.Et apres il
fautfaire ſituation de la partie : laquelle doit auoir trois intentions , à ſçauoir mol ,
égal , & haut . Mol , parce que la dure comprimant la partie malade, cauſe douleur &
inflámation. Dauantage le malade ne la pouuant ſouffrir ,eftcontraintpour la chan- sitation de
ger & ſeſoulager remuer la partie fracturée, laquelle doit demeurer en repos fans la partie.
eſtre remuée.Egal,parce que le côtraire fait douleur & diſtorſion de la partie, quand
vne partie d'icelle eſt appuyée, & l'autre ſuſpendue ſans appuy : & pource ſe faut gar
der, dic Hippocrates ſect.2.des Fractures, que le talon & pied ne demeure ſuſpendu
ſans appuy, parce qu'incontinent ſe feroit douleur & Auxion faſcheuſe. Haut, pour
empeſcher la fluxion , qui eſt irritée par la ſituation baſſe & penchantė : & partant la i
cuiſſe & la iambe ſeront cenuës plus haut que le reſte du corps, ſur certains oreillers ,
ou quelques matelats , gardát toutesfois en ceſte hauteur telle mediocrité ,que la par
c tie ne ſoit trop tendue,comme aduertit Hippocrates ſent.56.ſect.1.des Fract. Etlera
auſſi cenuë la cuiſſe en pareille longueur que la faine: & pour ce faire la faut appuyer
de coſté & d'aucre auec des torches de paille, come nous dirõs bien toſt d'vne iambe
1
rompuë.Or quand le bandage eſt ainſiconduit que nous auons dit , la nuict & le len
demain le malade ſe ſent plus ſerré que lors qu'on l'a mis du commencement : & au
genoüil ſe fait vne tumeur molle par l'expulſion de l'humeur quieſtoit en la partie Le malade
fracturée, & le deuxieſme iour la ligature ſe laſche, pour ce qu'vne partie de l'humeur doit eſtreha
ſe refout: & le troiſieſme iour on la trouue encore pluslaſche, pource que la matiere billé le troi
feſt dauantage reſoluë. Adoncques faut débander lá ligature, de peur qu'elle ne fiéme jour:
Hip.anliure
faſche le maladepour la ſicuation où il demeure ſi fonguement contraint ſans aucu des Fractures
nementſeremuer : & aulli eſtant la partie couuerte & enucloppée ſi longtemps ſans ſene .40. &
eſtre débandée , qu'il n'y ſuruienne yn prurit, qui vient parfaute de tranſpiration & 41. fectus.
reſolucion de l'humeur ia arreſtée: & auſſi de celuy qui flue, à raiſon de la chaleur &
douleur , & des excremens & fuperfluitez du nourriſſement de la partic , qui abondet
D pour raiſon de ſon imbecillité . Car par la retention d'iceux non ſeulement aucuns
fentent vne demangeaiſon ,mais auſſi fouuét fe font des vlceres à la peau , à raiſon des
3
humeurs ſanieux & acres qui croupiſſent là . Et quand celaccident aduient, il faut viilité, de
fomenter la partie d'eau tiede auechuile , autant d'eſpace de tempsqu'il ſera beſoin , l'eau tiede.
pource qu'elle appaiſe la douleur, relaſche ce qui eſt trop tédu par la compreſſion du
bandage,eſchauffe la partie refroidie par la repercuſſion & expreflion du ſang, & des
eſprits qu'ontfait les bandes . S'il ya tumeur auec grandemeurdriſſeure , il faut lon
guement faire ladice fomentation pour reſoudre ce qui eſt eſtrange en la partie , & y
appliquer autres remedes plus reſolutifs. Toutesfois
fauc auoir égard de non lestrop
cótinuer,pource qu'ils empeſcheroient la generation du callus: parquoy nous auros
touſiours égard en ce faict à la reigle miſe par Hippocrates, ſentenceis.ſection 3. de
l'officine du Chirurgien , touchant le temps, & durée de lafomentation ; quieſt que
petite fomération attire & ne reſout rien . Dauátage faut conſiderer le temperament
& habitude du malade : car l'ileſtoit plethorique,ilsattireroient les humeurs ſuper- Intentiondes
fus en la partie . Les anciens vculéc iuſques au ſeptiémeiour qu'on remuë le bādage anciens.
534 Le quinzieſme liure ,

de troisioursen troisiours : 8cpaſſé le ſeptieſme, de ſept iours en ſeptiours. Maisà A


celaon n'en peut donner reigle certaine : car ſelon les accidens il faut habiller lema
lade, plus toit ou plus tard , ſelon la douleur & autres accidens.Ileſtvray quefil n'y
10
auoit aucun accident,ie ſerois bien d'auis que ce fuſt le plus tard qu'il ſeroit poflible:
car ſi les bords de l'os fracturé ſontelbranlez & remuez, cela empeſche l'agglutina

tion du callus : car ainſi que l'on ioint les pieces de bois auec de la colle, ou les potiers
d'eſtain leurs pots : ainſinature cimente les osrompus auec le callus;de façon qu'ils
ont grand beſoin ( pendant que le callus ſe fait) de demeurer à repos: ou autrement
la maciere du callus ſe fend , & ne ſ'agglutine point . Pour aider à l'agglucinacion du
callus ( qui commence à ſe faire apres le treizieſme iour , ou bien le quinzieſme,
pluſtoſtou plus tard , ſelon que la partie ſera en ſon temperament ) on y appliquera
vn emplaſtre faic de blanc d'æuf, barcu auec poudre de roſes rouges & farine de
fourment , & autres emplaſtres catagmatiques, qui ſeront cy -apreseſcrites å la fra
& ture d'vne iamberompue . .

B
faite pres la iointure dudit os.
De la fracture

C H 4 P. XXI .

VerQvesfois il ſe faict fracture pres la iointure de la hancheau col


Hiſtoire. de l’os femoris : ce que le proteſte auoir veu en vne honneſte Dame,
ayanteſté appellé pour la penſer. Voyant que ſaiambe eſtoit plus cour
ce que l'autre, auec vneeminence que le Trochanter faiſoit exterieure

ment au deſſus de la iointe de l’Iſchion ; i’eſtimoisde primeface ,que ce


fuſtla teſte de l'os , & yauoir luxation , & non fracture. Alors ie ciray & pouſſay l’os
ce me ſembloit en la boëte ,attendu que les deux iambes eſtoient égalesen longueur
& figure: & la penſay & accouſtray comme d'vne luxation. Deux iours apres ie
la fus reuoir , qui ſe plaignoit ſentir vne extreme douleur , & trouuay faianibe cour
te , & ſon pied tournéau dedans . Alors ie deffeis toutes lesbandes,& trouuayl’emi
Signes de nence comme auparauant . Adoncie m'efforçay derechef à reduire l’os en fá boëte.
fracture. Cependant i’apperceu que l'os crepitoit , & eu eſgard qu'il n'y auoit nulle cauité en
la iointe , lors ie cogneu qu'il y auoit fra &ture, & non luxation . Pareillement l'epi
phyſe de lateſte de cetos quelquesfois ſe ſepare & deſioint , de ſorte que le Chirur
gien eſt deceu , eſtimant qu'il y ait luxation , & non diſion &tion de l'epiphyſe dudic
Curation . os. Adonciereduis l'os, appliquant des aftelles ſur les compreſſes , & feis la ligature
à deux chefs, la croiſant par deſſus la iointure , & autour du corps en croix S. André :
& le reſte de la curation le feit, ainſi qu'auons dit par cy deuant: & poſay vn arc de
cerceau par deſſus le pied , de peur que la couuerture ne preſlaſt ſur les orteils . D'a
bondant feisattacher vne corde au plancher au milieu de fon liêt, commeon doit
touſiours faire aux fra & ures & luxations de la cuiſſe & de la iambe , à laquelle les ma
lades ſe ſouſtiennent des bras , pour ſe ſouſleuer lors qu'ils vont à leurs affaires,& aufli
pour quelquesfois un bien peu ſetourner & efleuer le dos & le croupion,afin de don
ner vne tranſpiration aux parties preſſées , qui par trop longtemps leur eſtant déniće ,
cauſe vne douleur , & chaleur cſtrange: dontſ'enſuic vlcere le plus ſouuentau crou
pion , lequel induit douleur , fiéure, & vne ſigrande inquiecude, que lamorcſenſuit, D
Porrquoy la fi on n'y' donne bon ordre . Aufli que d'autant que la fra &ture eſt faicte pres des

Laiointureet lointures,d'autanteſt plus difficile à traiter , & plusmalaiſémentguarie: pource qu'à


plus faſchen .cauſe des nerfs, tendons & ligamens communs elle apporte de plus grands accidens ,
fe. & que ce lieu eſt exangue. Celle qui eſt faicte au milieu de l'os , eſt plus aiſée à
traitter & pluſtoſt curée.

Que diray.ie plus ? c'eſt qu'il faut que le Chirurgien prenne ſouvent garde, que l'os
L'os de la nele demette comme on l'aura reduit . Ce qu'il fait aiſément , parce qu'il eſt ſeul ,&
cuille fe de
que par la moindre faute du malade,ſe ſoufleuãten allant à ſes affaires, ou autremét,
met aiſément.
los de la cuiſſe ſe déplace,& les extremitez cheuauchét l’yne ſur l'autre :& partác fauc
à toutes les fois qu'on l'habille,auoir égard à la figure de l'os , & cõferer la lõgueur de
la iambe laine à lamalade:& auparauant que le callus ſoit faict, la tirer & reduire , en
Liu.z.ſen.6 . ſorte que le malade ne demeure boiteux, & qu'il ſe remuë aulli le moins qu'il pourra .
traicté 1 . Auicenne dit quepeu ſouventon guarit ſi heureuſement la fracture de la cuiſſe, que
chap 14 le malade ne demeure boiteux . Autres anciens auſſi nous ont laiſſé par eſcrit,quel'os
de
Des Fractures. ; 535

A de la cuiſſe eſt conſolidé en cinquante iours: mais à cela il'n'y a point de regle certai
ne , comme i'ay dic cy- deſſus. Dauantage , ſoit que le callus ſoit fait en cinquante ou
ſoixanţe iours, ſi eſt -ce pourtant que le malade ne ſe pourra pas encores de long
temps ſouſtenir & cheminer deſſus, à cauſe que la partie demeure bien long cemps
debile , & partant les malades cheminent quelque temps ſur des croſſes. Ainli faut-il
entendre en toutes les autres parties fra & urées & luxées, du temps prefix, qu'ils leur
ont baillé pour eſtre le callus fait , & lesiointes affermies. Icy le ieune Chirurgien
notera ,que les epiphyſes des os ſouuencfe deſioignent & ſeparent: qui eſt vne eſpece
de luxation , laquelle Colombusau Chapitre ſecond de ſon anacomie dit, quemal
aiſémétſereünit, à raiſon que celle conionction & alliance d’os ne ſe fait pas par vne
ſeule teſte entranten vne ſeule cauicé , mais par le moyen de pluſieurs tubercules re
ceives dedans pluſieurs ſinuoſitez , laquelle rencontre eſtmal-aiſée à reduire: qui ſe
faic de cauſe interneou externe : excerne quelquesfois par la faute du Chirurgien ,
qui manie troprudement les os tendres des petits enfans, ou parcheures , ou autres
B cauſes qu'auons diccy-deſſus: interne, à cauſe de certains humeurs qui ont coulé &
croupy en quelqueiointure , ainſi que nous voyons ſouuent arriuer en la pecite &
groſſe verolle ,ou d'autre humeur non verollique , ainſi que de recente memoire eſt
aduenu à defun &t Monſieur Marchant Aduocat au Chalteler de Paris , homme Hiſtoire.
d'honneur & de bonne doctrine & experience,lequel eut vne defluxion à la iointure
ED: du genoüil,qui le tourmenta par l'eſpace de huidt mois , & appella pluſieurs gens
dočtes ,tantMedecins que Chirurgiens pour cuider le ſoulager: ce qu'on ne peut
faire par aucun moyen , à cauſe que ſon mal commença à l'os. Vniour ſe tournant
en ſon lict , l’os de la cuiſſe ſe rompic pres legenoüil, dont il mourut bien toſt apres .
La cuiſſe fucouuerte, & luy fut trouué frađure & ſeparation de l'apophyſe dudicos,
lequel pareillement eſtoit tout carieux & pourry , fans toutesfois qu'il euſt iamais eu
la verolle . A bonne cauſe a eſté dit par nos anciens , que les os peuuent ſouffrir les
trois genres de maladies , à ſçauoir ſolution de continuicé , incommoderation , ou

mauuaiſe compoſition, & intemperie .

CHA P. XXII .
0 De la rotule du genoüil.

these
A rotule du genoúil ſouuent eſt contuſe , & moins ſouuent ſe
rompt: toutesfois elle ſe ſepare en deux ou trois pieces, quelques
foisen long , quelquesfois en trauers : & quelquesfois eſt ſeule
menc fendue voire de toute ſon eſpeſſeur , & quelquesfois briſée
en petites pieces . Et telles choſes aduiennent ſans playe , ou auec
is. playe . Les ſignes ſont manifeſtes pour l'impotence de la iambe : Signes.
COM & auſſi qu'en la maniant on trouue cauité & ſeparation des pie
tele ces rompues: & lesmaniant& faiſant toucher l'vne contre l'autre , on ſent yn bruit
faiſantcrepitation ou craquement . On les reduit en eſtendant la iambe , & appro
nd chant les pieces les vnes contre les autres , & appliquant propres remedes,& vne groſ
ſe compreſſe ſous le iarret pour remplir la cauité, afin que le malade ne puiſſe plier la
:20 iambe, pendantque le callus ſe fera: car la pliant , on feroit derechef ſeparer les pie . Operaian,
ces qu'on auroitreduites enſemble. Auſli ſeront pareillement faites lesligatures, &
D appoſées les torches de paille , comme nous auons dit à la fracture de l'os femoris. Et
fauc ſituer & tenirla iambe comme ſi elle eſtoic rompue , iuſques à ce que le callus
ſoit fait & endurcy . Pour le prognoſtic, ie dy que iamais ie n'ay veu que ceux qui ont ceux qui ont
eu ceſte partie rompue , ne loient demeurez claudicans : parce que la conionction la rorule võa
faite par le callus, empeſche le genoüil ſe pouuoir Alechir ,& les malades trauaillent que clochens
le reſte de
..C beaucoup en montant : mais en cheminant en lieu applany, ceſte peine ne ſe mani leur vie .
feſte point . Ceſte fracture demande vne longue demeure dans le liet , pour le moins
quarance iours ou plus.

Zz
)
me
536 zieſ
Le quin liure ,

De la fracture de la iambe .
.
CH A P. X XIII.
4

N r’habille ceſte fracture comme l'os du petit bras , quand les 4


Liu. des fra deux os ſont rompusenfemble. Hippocrates prognoſtique qu , e
Etures feét.2. gréue eſt plus dangereuſe, difficile, & tar
la fracture de l'os de la
Sent. 65 .
diue à guarir , que celle du petit os : parce qu'il eſt plus gros , &
auſſi ſouftienttouclecorps : & le petit n'eſt que pour appuy &
ſouſtien des muſcles qui ſont à la iambe, pourmouuoir le pied .
L'os de la gréve ſeulement rompu ſe trouue au dedans de la iam
be , parce que le petit eſtantentier, ne laiſſe ietter en dehors: & aufli le petit ſeule
Signes pour ment rompu ſe trouue en dehors , parce que l'os de la gréue eſtantentier, ne laiſſe
diſcerner la ietter en dedans: mais aulli l'vn & l'autre eltans rompus ſe peuuent auſli bien tour
fracture de B
los de la gré ner en deuant qu'en derriere , & en derriere qu'en deuant . Auſſi quand il n'y en a
ue,decelledu qu'vn rompu , la fracture eſt beaucoup plus aiſée à guarir , que lors qu'ils le font

1 getiros. tous deux : pource que ( comme nous avons dit en la fracture du pecit bras ) celuy
qui demeure entier , ſert à ſon compagnon , voire plus que les aftelles. Or pour touſ
iours mieux inſtruire le ieune Chirurgien ie veux reciter vne hiſtoire laquelle me
Hiſtoire de fut bien chere . Le malheur me vint en la preſence de defunct Neftor , Docteur re
l'Autheur.
gent en la faculté de Medecine , & de Richard Hubert Chirurgien ordinaire du
Roy (duquel le renom eſt aſſez cogneu) qui eſtoient mandez & moy auec eux , pour
viſicer quelque malade au village des Bons-hommes pres Paris. Or voulant paſſer
l'eau , & taſcher à faire entrermon cheual en vn bacteau , ie luy donnay d'vne houſ
fine ſur la croupe , dont la beſte irritée merua vn tel coup de pied , qu'elle me briſa
entierement les deux os de la iambe ſeneſtre , à quatre doigts au deſſus de la iointure
du pied . Ayant receu le coup & craignant que le cheual ne me ruaft derechef, ie
Fracture demarchay vn pas : mais ſoudain tombant en terre ,les os ia fracturezſorcirent hors ,
enorme de & rompirent la chair , la chauſſe, & la botce , dont ie ſenty telle douleur qu'il eſt o
douloureuſe. poſſible à l'homme d'endurer . Mes os ainſi rompus & le pied contre-mont,ie crai
gnois grandement qu'il me falluſt couper la iambe: pource iettant ma veüe & mon
eſprit au ciel , i'inuoquay mon Dieu , & le priay qu'il luy pleuſt par ſa benigne grace
me vouloir aſſiſter en mon extreme necellicé. Soudain fus porté dans le batteau,
pour paſſer de l'autre part , pour me faire penſer: mais le branlement d'iceluy me
cuida faire mourir , pource que l'extremité des os rompus frayoit contre la chair ,
& ceux qui me portoient n'y pouuoient donner ordre . Èſtant hors , fus porté en vne
maiſon du village , auec plus grandedouleur que je n'auois endure au barreau : car
l'vn me tenoit le corps,l'autre la iambe,l'autrele pied : & en cheminant l'vn hauffoit
à feneſtre , l'autre baiſſoit à dextre . En fin toutesfois on me pola ſur vn li & pourre
prendre vn peu mon haleine, où pendant que mon appareii ſe faiſoit, ie me fis
eſſuyer tout le corps , pource que i'eſtois en ſueur vniuerſelle : & fi on ni’euft ietté
Bon medica, en l'eau , ie n'euſle eſté plus mouillé. Ce fait on me peoſa auec vn medicament,

mens de vil. tel que nous peuſmes practiquer audit lieu , lequel nous compoſaſmes de blancs D
lage prõpse- d'æufs, de farine de froment , de luye de four, avec du beurre frais fondu . Surtout,
‫اندازی‬
‫کا‬

ment appa- ie priay maiſtre Richard Hubert, ne m'eſpargner non plus que li j'euſſe eſtéle plus
reille.
eſtrange du monde en ſon endroit: & qu'en reduiſant la fracture il miſt en oubly
l'amitié qu'il me portoit . Dauantage l'admoneſtay ( ores qu'ilſceuſt bien ſon art)de
tirer forcie pied en figure droite , & que ſila playe n'eſtoit ſuffiſante , qu'il la creuſt
auec vn raſoir ,pourmettre plus aiſément les os en leur poſition naturelle , & qu'ilre
cherchait diligemment la playe auec les doigts, pluſtoſt qu'auec autre inſtrument
Le talt du ( car le ſentiment du tact eſt plus certain que nul autre inſtrument) pour ofter les
doigteſt plus fragmens & pieces desos , qui pouuoienteſtre du tout ſeparées : meſmes qu'il expri
seur que nul malt, & feiſtſortir le ſang , quieſtoiten grande abondance aux enuirons de la playe :
Auire.
& qu'il me bandaſt & ficuaſtla iambe ainſi qu'il ſçauoit ,& ce faiſant qu'il eułt crois
bandes , comme nous auons dit cy-deſſus,& qu'il commençaſt à bander ladicc playe:
puis fuſſent iniſes desaſtelles, les vnes de largeurde crois doigts , les autres de deux,
& longues de demy pied , & cambrées , pour mieux ſe coucher autour de la iam

1
Des Fractures. 537
A be : leſquelles aufli eſtoient inoins larges par lesbouts , & loinglune de l'autre d'vn
doigt.Puisfurent liées auec petits rubans de filet;ſemblables à ceux dont les femmes
entortillent & lieneleurscheueux: & tout ce , afin qu'elles comprimaſſent mieux,&
fuffent vnpeu plus ſerrées à l'endroit de la fracture qu'en autre lieu. Apres la iambe
Le
ainſi bandée, ieluy feis remplir la cauité du iarret , & celle qui eſt entre le pommeau
de la iambe & du talon, de compreſles faites d'eſtoupes, enuelopees delinge. Puisy
furent appoſez deux fenons ou torches de paille, dans leſquelles on mic ynpetit ba
fton à chacune, pour tenir la paille ferme & roide,& enueloppée d'vn demy linceul,
puis appoſée au coſte de la iambe:& comprenoitenlongueur depuis le talon iuſques
pres de l’aine, & furent apresliéesen quatre endroicts : & par cemoyen la iambene
peut eſtre peruertie ny tournée d'vn coſté ou d'autre: & apres fur ficuée en figure
droicte, & non courbée , & elleuécen mediocre hauteur , mollement , & vniement,
afin d'euiter douleur,fluxion , inflammation , & autres accidens.
Or il faucicy noter, quefionfait fauce à bien ſituer la iambe,on rendra le malade il faut tous
en:
B boiteux: pourautaneque ſi elle demeure trop haute, la fracture demeurera concaue jours remplir
les cauitez
en la partie anterieure: au contraire , fi elle demeure trop baſſe , elle ſera conuexe & des parties
for:
celu
gibbeuſe en la partie anterieure . Dauantage tu obſerueras, que ſion faucà bien rem fracturées
plir & vnir le lieucaue,quieft entre le pommeau de la iambe & les cheuilles du pied, pour les venn
lema
letalon ſouffrira beaucoup, à cauſe qu'il demeure longuement preſſé: qui fait vne dreégates.
excréme douleur ( ce qucieſçay pour l'auoir ſenty en moymeſme) à cauſe que les
eſprits n'y peuuentdeüementreluire,& fouuencilly fait vnechaleur eſtrange. Par
sreda
quoy ſçachant la cauſe de celle douleur , ſouuentesfois me faiſois vn peu leuer le ta
PO lon,afin de donner air, & que les eſprits peuſſent reluire , & quelquevapeurtranſpi
rer. Et pour le declarer en vn mot , ma iambe fut poſée ſur vn couſſinet , bandée &
houl:
liée auec torches de paille, comme tu vois par ceſte figure.

met
cher
С
Figure d'une iambe rompuë auecplaye.

Ega

Conne

Duh
QUIM
Cequ'il fautneceſſairement obſeruer aux bandages, quand ilya plaze auecfracture.
‫ܐ‬x CH A P. XXIIII.
metod

Gancs L n'y a doute aucune, ſelon la doctrine des anciens, qu'il ne faille Faur bandey
TOCK D bander ſurla playe : autrement elle fenfleroit, receuant les hu- ſur laplaye,
meurs des autresparties, dont pluſieurs accidens ſuruiendroient:
ainſi quelon peut voir par experience en quelque partie charneu
ſe , & bien laine , ſi elle n'eſt bandée qu'en haut & en bas , ſans y Hipp.ſect.3.
comprendre le milieu , la partie non comprimée deviendra fort desfract.
enflée, & changera ſa couleur, deuenant liuide, à cauſe de la trop
IN grande mulcitude d'humeurs, qui ſont enuoyez des parties circonvoiſines preſſées.
Par plus forte raiſon telle choſe le fera, ſi la partie cít vlcerée , veu que ſans vicere ou
X,pats playe telle tumeur ou liuidité ſe fait. Pourcescauſes l’vlcere demeureinſuppurable Hipp.liure
& lacrymcux, c'eſt à dire , que d'iceluy diſtille vne ſanie crue & claire, comme ſont des fra£t.
leslarmes quidegouttentdesyeux , lors qu'ils ſont offenſez d'inflammation , Orfi
celte humeur crue coule & demeure longtemps ſur la ſubſtance des os, illes altere, signes pour
1, & pourrit encores pluſtoſt ſ'ils ſont rares & mols , que l'ils ſont plus ſolides & durs. l'os
cognoſive
eſtre cor
213. Laquelle corruption & alteration ſe cognojit , parce que l'vlcere ietrZe plus de boue rompu.
zij
r

538 e u i n z i e ſ m e iure
L q l ,
Claire & plus fecidé, qu'il ne feroit en vn ſimple vicere: auſſi pour voir les léures de A
l'vlcere renuerſées, & la chair baueuſe & mollaſſe, & le malade dit ſentir quelques
fois vnedouleur pulſaciueau profond de l'vlcere : pareillement en fondanton trou
ue l'os du cour deſnué de ſon perioſte, & fouuentesfois aſpre & raboteux : ou qu'en
preſſant deſſus auec la fonde,elle entre dedans la ſubſtancedel’os . Mais icy ie laiſſe
ray ce propos, veu quel’ay eſcrit ( ce me ſemble ) affez ſuffiſamment de l'álteracion
des os. Or ceſte alteracion & pourriture n'aduiendra iamais, ſi le malade eſt bien
En quel cas bandé & penlé. Pourcei’aduerty leChirurgien à ne faillir de bander ſur la playe,Pil
ne faut ban- eſt poſible, c'eſtà dire,filn'y a vneſigrande douleur& inflammation, qu'ellepeuſt
der ſur la
playe. engarder de ce faire: car lors on ſeroit contraintde laiſſer la propre cure pour ſurue
nirà l'accident: pour l'égard duquel ſera priſe vne piece de toilenon trop vſée,qu'on
ployera en deux ou trois doubles,& fera decelle largeur qu'elle couurira &compri
mera entieremēcla playe, & les parties proches,& ne fera qu'une ſeule reuolucion,&
fera couſue aucoté dela playe, afin que lors qu'on la voudra penſer, on neface que .

la deſcoudre, ſans aucunement ( filelt poſſible) remuer ny elbranler les os fracturez, B


pourceque la fracture ne demande a eſtreremuée ſouuent,commefait la playe,pour
eſtre traitcée ainſi qu'il eſt requis. Il ſe fauc garder de tropeſtreindre & preſſer ſur la
playe , pour prohiber douleur, inflammacion, & autres mauuais accidens. Et pour le ;

dire en vn mot ,ſi la playeeſt liée , preſſée , & bandée commeil appartiene, elleem.
peſche la deſcente des humeurs : mais aulli li elle n'eſt bien faite,ilſ'y fera apoſteme,
principalement quand elle ſera trop laſche ou crop ſerrée. Or ceſte admonitionelt
pour les apprentifs , qui n'ont encore leur iugement entier en ceſte practique: ioint
que pluſieurs ſuyuent la pratique de Paulus, & font circonuolutions deçà & dela,
ſelon le lieu ſuperieur & inferieur de la playe , puis ramenent la bande & circonuo
lucions en croix faina André. Mais tel bandagefeneſtré ne vaut rien , & faut faire
celuy que ie t’ay declaré luiuant Hippocrates. Ie veux à preſent retourner à declarer
comme iefus traicté de ma fractureapresle premier appareil. :
4

Comme l'autheurfut traictéayanteſtéporté en fon logis apreslepremier appareil.


CH A P. XXV .

Ovr retourner donc à mon malheur : ma jambe traictée de


Saignée. poinct en poinct en la maniere predicte, ie fus apres diſner porté
en mon logis, où iemefeis tirer trois palettes de ſang de la baſili
que ſeneſtre. Erau ſecond appareil , & autres ſuivans, ie fusſolli
cité de mes compagnons& amis, Chirurgiens iurez de Paris. Er
Onguent autour de la playe & de ſes parties voiſines , ie feis appliquer de
rofar.
l'onguent roſat: lequel eſt fort loué des anciens au commence
ment des fractures , parce qu'il ſede la douteur, & prohibe l'inflammation , repouſ
ſant les humeurs loing de la partie bleſſée, à cauſe qu'il eſt froid , aſtringent& re
percuſſif: lequel eſtoit fait d'huile omphacin , cau role , & vn peu devinaigre & de
cire blanche: continué iuſqu'au fixieſme iour . Les compreſſes& bandes eſtoient
trempées en oxycrat , & quelquesfois en vin gros & aſtringent, pour roborer la par- D
tie . Ce quieſt principalementrecommandéd'Hippocrates aux fractures auec playe,
pour aſtreindre & repercuter les humeurs: & quand elles eſtoient ſciches , ie les fai
ſois arrouſer dudit oxycrat , & autresfois d'oxyrhodinum . Car quand elles ſont
trop ſeiches , douleur& inflammation ſurviennent à la partie,à cauſequ'elles la ſer
Erreur de rent d'auantage qu'elles ne faiſoient quand elles eſtoient mouillées. Il y a pluſieurs
Polage des Chirurgiens, quien tel cas depuis le commencement iuſques à la fin n’vſent que de
medicamens medicamens aſtringens & emplaſtiques , contre la methode d'Hippocrates & de
emplaftiques Galien : conſideré que par leur altri & tion & emplaftration ils eſtouppenciespores
aftrin . du cuir
gens . de la partie: ce faiſant augmentenc la chaleur eſtrange auec vn grand prurit
ou demangeaiſon. Au moyen dequoy l'engendre fous le cuir vne certaine humi
dité ſereuſe, acre & mordicante , quifait vicere : qui donne bien à cognoiſtre,
que tels medicamens ne peuuent eſtre continuez que cinq ou fixiours : doncau
lieu d'iceux on vſera des emplaſtres cy- apres declarées . Et pour retourner à mon
propos , ie garday au commencement de ma maladic vne ſi extreme diere , que par
1
Des Fractures .
539

A l'eſpace de neuf iours ne mangeoy par chacun iour que douze pruneaux de damas ,
auec lixmorceaux de pain : & beuuois vne chopine d'Hippocras u’eau , compoſéen
ceſtemaniere.2. facchar.albiffimiz xij.aquæ fontanæ tb xij,cinna. ziij.bulliant fi
mul ſecundum arcem .Autresfois du fyrop capil.Vener . auec eau cuite. Aucresfois
du Porus diuinus fait ainſi. 24. aquæ co &tæ tb vj . ſacchati albiſt. z iiij.fucci limonum Boucher .

31. Le rout foie baccu enſemble dans deux eſguieres de verre , ou autres vaiſſeaux Polus diui
pour boire . Par fois auſii'yſois d'vn bol de calie auec vn peu derheubarbe . Autres . nus .
fois de ſupoſitoires de fauon pour prouoquer mon ventre : choſe que ie craignois
beaucoup, à cauſe qu'il me falloir remuer pourmettre vn drap deffous moy , auec ce
que , quand i'eſtois quelque temps ſans y aller , ie ſentois grande chaleur aux reins. Il
s ཅ ཙདཔས པ n'y eui toutesfois ſi exquis regime,nyautres choſes ,qui peuffent garder que la fiéure
nc mefaiſiſt en l'onzieſine iour auec defluxion , qui caulavne apoſtene, laquelle La fieureſur :
fuppuralongtemps : tout ce que ie croy m'eſtre aduenu , canc à cauſe de quelquehu- uint l'onzie
me iour..
meur recenu en la partie, que
pour n'auoir ſceu endurer que la playe fuſt aſſez ban
B dée,meſmespour quelques eſquilles comminuées & ſeparées des extremitez des os ,
d'icelle : car le bout de l'vne & de l'autre
faites tanc par la fracture, qu'en la reduction
n'eſtoit égal , & lors qu'il y a quelques petits fragmens du cout ſeparez,ils ne pevuent
Ein
plus eſtrevnisny glutinez, & par ainſi l'alterent & pourriſſent: qui eſt ſouuent cauſe
de faire apoſteme& autres grands accidens.Or les lignes qui mefaiſoientcognoiſtre Les ſignes
qu'ily auoit des os ſeparez ,eſtoient que de la playe ſortoit vne lanie claire & crue : pour cognoi .
ſtre qu'il y a
pareillement les léures d'icelles eſtoient fort enfées , & la chair laxe & molle comme
des eſquilles
cſponge.Outre leſquelles cauſes il meſembleque la principale occaſion de la fićure, ſeparées.
& de l'apoſteme, prouine de ce qu'vne nuicten dormant les muſcles ſe retirerent par
vne violenceſi grande , que ie leuay ma iambe en l'air, voire de telle forte , que les os
ſortirent hors de leur ſituation , & prefferent les léures de la playe , tellement qu'il
falur derechef tirer & pouſſer les os pourles reduire . Enquoy faiſanc i'endurayen
cores plus de douleur , quen'auois fait la premiere fois que fus penſé . Celte fiéure
mecontinua ſeptioars, au bout deſquels fut terminée partie par l'apoſteme , & par
tie par tres.grandes ſueurs.

с >
De la cauſe des treſaillemens aux membres fracturez . CH A P. XXVI .

E ne veux oublier de dire en cet endroit , ce qu'il me ſemble de la


contraction & treſſaillemens des muſcles , qui en dormantſur .
uient ordinairement aux fractures. La cauſe eſt ( à mon aduis )
qu'en dormant lachaleur naturelle ſe recirant au centre de noſtre
Corps , fait que les extremitez deuiennent refroidies ; dont ad .
uient que nature voulant par ſon accouſtumée prudence en
uoyer quelques eſprits pour ſecourir la partie bleſſée, & ne la

0.7, trouuant diſpoſée à lesreceuoir, permetque ſubit ils ſe retirent au dedans, dont ils
ſont enuoyez . Les muſcles ſemblablementtirent les os , auſquels ils ſont attachez : 80
faiſansceſte retraction vers leur origine , comme nous auons dit cy.deuant, tirent
les os fracturcz ,qui eſt cauſe de lesdeſioindre & ſeparer de nouueau , auec vne tres
grande douleur .
D

viduertiſſement touchant les parties, ſurleſquelles eſt appuyé le malade eftant couché au liet .

CHA P. XXVII. -

R pource qu'en demeurant long temps au liat à la renuerfe fans


ſe pouuoir aucunement remuer , qu'auec yne extreme douleur ,
on ſent au lieu frađuré , & auſſi pource que les parties , leſquelles
ſont appuyées ( qui ſont le talon, le dos,& l'os Sacrum ) & que les
muſcles de la cuiſſe & de la iambe fracturée demeurenecendus 87,
fans faire aucunement leurs mouuemens accouſtumez , ces par .
ties deuiennent premierement endormies & ſtupides , puis apres
ſ'eſchauffent d'vne chaleur non naturelle : dontaduient fluxion , apoſteme ,& vlcere,
& principalement à l'endroit de l'os Sacrum ,ou croupion , pource qu'en ceſte partie
ily a peu dechair : 8c le calon ſemblablement, qui eſt fort fenfible & ſubiect à pareils
Zz iij
540 Le quinzieſme liure,
Hipp.ſen. 2. inconueniens.Ec les vlceres faits en icelles parties difficilement ſe guariſſent,& fou. A
desfract. uent fy faic carie, corruption , & mortification : donton a veu enſuiuir fićure conci.
nue, delire, ſpaſme & ſanglot: qui vientà cauſe de la ſympathic quiſe fait par fimili
tude de ſubſtance des nerfs dela ſixieſme coniugaiſon , qui ſont diſtribuez à l'eſto nede
mach ,& du gros tendon du calon qui vient destrois muſcles. Tousleſquels accidens
aduenus font mourir le malade en peu de iours , tant pour l'inflammation , que des
vapeurs pourries qui ſont communiquées auxparties nobles parles veines , nerfs, & DA
arceres: & apres l'expiration & inſpiration defaillante ,par conſequent la morifen
Ceux qui ont fuit. Cooliderant toutes ces choſes , qu'autresfois auois veu aduenir, ie me faiſois
fractures aux ſouvencelleuer le talon: auſſi auec vne corde,qui eſtoit au plancher de mon liet, me
uét vferd
iambes on foufleuois par fois vn peu ,pour donner tranſpiration auxparties preſſées. Páreille
, doi
bourrelet
mēt me faiſois mettre vn bourrelet ſousmes feſſesde figure ronde,remply de dauer, wure 2

fors leurs afin que le cropion fult porté en l'air, & qu'il ne touchaft à rien : ſemblablement en
felles. faiſoismettre un autre petic ſous le talon, & faiſois ſouuent appliquer emplaftres
d'onguentrolat, pour remedier à ladouleur & chaleur deſdites parties. Ordepuis B
ma guariſon, eſtant appellé pour ſemblables fractures, ayanc memoire de la doulcur umien
& inflammation que ie ſentois au dos ,& principalement ſous le talon ,& que lesma
Premiere lades ſe plaignoient de ſemblables accidens: i'ay inuenté vne caffole de fer blanc,en
Diilité. laquelle on poſe la iambe fracturée (apres l'auoir penſée ) qui ſert de la tenir en la fi
gure naturelle, ſans qu'elle puiſſe tourner çà & là, ſice n'eſtà la volonté du malade,
plus aiſément que ne font les fenons ou torches de paille. Auſſi empeſche que le ta
Seconde ion ne porte à plomb , ainseſt ſouſtenu en l'air : ce qui ſe fait en poſant vne groſſe
Peilité. comprefle vers le mollet de la iambeſousicelle caſſole, quieſt cauſeque le talon eſt
ſoufleué en l'air, à raiſon qu'icelle caſſoleeſt eſchancrée en ce lieu . Pareillement elle
Troiſieme ſerc de tenir la plante du pied droice & appuyée, & que la couuerture ne touche del
Vilisé .
ſus les doigts dudic pied , par le moyen d'une femelle de fer blancaccommodée à
icelle , laquelle eſt enuironnée d'un archet de ſemblable fer, comme tu peux voir
par cesfigures qui ce ſonticy preſentées, dont l'vne eſtentiere ,& l'autre ouuerte &
deſmontée.
Figure des Caloles.

D E
BI

D
ЕВ

B
F

Dm

AA Le fond de la Caſſole .
BB Les aileronsqui fouurent & ferment comme l'on veut.
C Lafin des ailerons où ſe met la ſemelle. DDD . L'archer de fer blanc.
EE La femelle . FF. L'eſchancreure oùpaſſele talon.
16

Maintenant nous faut retourner à la reſte de la cure.


Des Fractures, 541

л Quels remedes furent appliquez à l'ulcere accompagné d'apofteme.


Quand ie cogneus l'apoſtemeſe faire, ie fis appliquer vn ſuppuratif fait de iaunes
d'æufs, d'huile commune , & terebenthine , auec vn peu de farine de froment, tant
que la ſuppuration fut faite. Quelque temps apres pour mondifier l'vlcere , i'vſay dę
tel medicament. 2.fyrupirofati, cerebenthinæ Venetæ , an . 3 ij . pol . radicis ireos
1
Florentinæ ,aloës,maſtiches, far.hord.añ.3.B.incorporentur omnia fimul fiat mun
dificatiuum . Et à l'endroit où l'auois conieéturé les os deuoir ſorrir, i’y faiſois mettre
tentes d'éponges, d'écoupes de lin , pour tenir l'vlcere ouuert : & dedans le profond Vertu de la
de l’vlcere, des poudres catagmatiques auec vn peu d'alum cuit , pour faire ſortir les poudre d'a
fragmens des os ſeparez, leſquels mis hors, l’vlcere fut guary , & cicatrizé auec alum Cum cuit.
cuic : lequel ayant vertu deficcaciye & aſtringente, que fait la chair ( qui eſt molle &
ſpongicuſe , & arrouſée d'humidité ſuperfluëjeſt renduë ferme & dure : & en fin aide Emplaftre
Nature à faire le cuir & la cicatrice . Or les pieces de l'os , à cauſe deleur ſiccité, ne ſe pour faire le

peuvent reioindre immediatement: mais ont beſoin de calloſité , qui ſe caille & calus ou fouls
cſpeſſità l'entour de leurs bords , qui les attache enſemble , comme vne fouldure ou daredes os.
B
Per ciment , quiſefait de la propre ſubitance de l'os& de fa moüelle , & par l'aide des me
dicamens qui ſont emplaſtiques , & eſchauffent moderément.Au contraire ceux qui
ont puiſſance de reſouldresi de ſubtilier, diminuét le callus. Partanton vſera deces
D emplafties ſuivans, deſquels i’ay cogneu de grands effects pour aider à Nature , à la
generation du callus .4.ol.myrtil .& roſ omphac.añ.lb B.rad.alth.15 ij.radicis fraxi
is
ni & folior.eiuſdem ,rad.confol.maior , & fol.eiuſdem ,fol.ſalicis an ñ.j. fiat deco
m
& io inſufficienti quantitate vini nigri & aquæ fabrorú ad mediam conſumptione .
altri Adde in colatura pul , myrrhæ & chur.añ. ZB.adipis hirci tb B. cerebenth , lotæ Ziiij .
maſtich .z iij.litharg . auri & argenti an . Zij.boli Armeniæ , & terræ ligil. an.zj. B.
che minij z vj. ceræ albæ . quan . ſuff. fiar empl.vcars docet.En lieu d'iceluy on peut vſer Emplaftrum
d'emplaſtrum nigrum , fait en ceſte maniere . 22. litharg . auri tb j . olei & aceti to ij . nigrum .
coquant ſimullento igne , donec nigrum & ſplendens reddatur emplaftrum , & non
c
adhærcar digitis. Autre .4.oleirola.myr . an.3 ij.nuc.cupreſſi,boli Armeniæ ,ſang .
lc eos z iiij. liquefiant fimul, & fiat emplalt.
it
drac . pulueriſ.añ.3 B.emplaſt.diacha
с ſecundum arcem . Eren defauc d'iceux ,faut vſer de Sparadrap ,dont voicy la compo- sparadrup

fition .2.pul.thuris,far. volatilis maſtic.boli Armeniæ , reſinæ pini , nucum cupreſli, ou toile
rubex tinctorum añ.3ij.feui ariecini,ceræ albæ .añ .ib. B. fiatempla . Auquelon doit Saurier.
plonger ( pendant qu'il eſt chaud ) quelque coile aſſez vſée pour ſ'en ſeruir comme
deſlus. L'emplaſtre de diachalciteos eſt fort louée des anciens pour les fra&tures,mais
il la fautaccommoder ſelon le temps : comme en Eſté ſera liquefiée en ſuc de plan
tain & de morelle , de peur qu'elle n'échauffe par crop . Aufli faudra touſiours auoir
égard à la temperature du corps . Carnulne doute , filn'eſt bien dépourucu de rai
fon , qu'il ne faille tant deleicher à vnieune enfant, comme il faut à vn vieil : parce
quelion vſoit de medicamens , autant deſiccatifs à vn enfant, qu'on feroit à vn vieil,
on conſommeroit l'humeur dont ſe fait le callus . Pource il eſt neceſſaire au Chirur
gien debien regarder à celles choſes. Car combien que les remedes ſoient bons &
t
louables, neantmoins pour eſtre indiſcrectemen appliquez , ſouuent aduiennent
de tres - pernicieux accidens, donton peut accuſer le Chirurgien , qui n'a conduic
D fon cuure par methode raiſonnable , comme il appert quand le callus eſt fait trop
mol , trop gros , trop petit , torcu , ou trop retardé à faire.

Par quels ſignes on cognoiſtra le callus fe faire.

/ С НАР . XXVIII .

Rie cogneu que le callus ſe commençoic à faire en ma fracture , lors


il faut pen
que l'vlcere commença à ietter moins de ſanie que de coulume : aulli elfuyer il
que les douleurs ceſſerent , pareillement les tres - Caillemens : qui fut cere quand le
cauſe que ie ne voulus faire penſer ma iambe li fouuent, que ie faiſoy callus ſe fait.
auparauant. Car en eſfuyant la playe quand le callus ſe fait, on deflei .
che les matieres du callus , c'eſt à ſçauoir, ros, cambium , & gluten , qui ſont les pro
pres alimens de la ſubſtance, tant de los que de la chair . Ie le cogneu auſſi, pource

qu'à l'encour de la playcon oyoit ſortir par les pores vne petite ſueur ſanguinolente,
Zz iiij

1
542 Le quinzieſme Liure ,
qui teignoit les bandes & compreſſes, comme les anciensont laiſſé par eſcrit.Ce A
quiaduient, pource que la matiere du callus amaſſéeen celieu , Nacure pouſſe hors
par les poroſitez du cuir quelque roſée ſanguinolente, en maniere de reludation.
Puis aulli ie ſentois vne vapeur , ou exhalation , auec vne chaleur temperée,quipro
Hip.ſect. 1 . cedoit des parties ſuperieures iuſques à la playe , auec vn ſentiment qui m'eſtoitfort
des Fracta. aggreable . Alors ie ne voulus plus tenir la partie tant ſerrée, de peur d'empeſcher la
ſent. 43. , dcicente de la matiere du callus : d'autant quel'os ne ſe reünit point par le callus , fi
ce n’ett par le moyen du ſang qui y vient , ne pechant en quantité ny en qualité. Et
commençay à vſer d'alimens propres pour engendrer vn lang gros & viſqueux , &
Alimens qui facilement ſemuë en la ſubſtance du callus : comme ſont les extremitez tendi
proprespour neuſes & cartilagineuſes , à ſçauoir , tremeaux, gigoteaux, pieds de bæuf,groins&
ladugeneration
callus.
oreilles de porc ,teſte de cheureau , de mouton, d'aigneau : leſquels eſtoicnt cuits
le plus ſouuentauecris,ou orge-mondé, en les diuerlifiantauiourd'huy de I'vne , &
demain de l'autre forme. I'vſoy aulli de fourmentée, ou panade de pain de pur fro
ment , cuit en bouillon de chapon & moyeux d’æufs. Iebeuuois du vin clairet aſſez B
gros& aſtringent,& mediocrementtrempé,& au deſſert chartaignes & nefes. Or
ce n'eſt ſans raiſon que ie t'ay ſpecifié ces alimens: car ily a autant de danger d'vſer 9

de viandes trop durcs , comme de chair de bæuf, comme de trop legeres : car les 1

Gal.lin . 6. dures font vn callus trop ſec, & les trop legeres le font crop dellié. Or doit- il eltro
dela Mech, viſqueux , comme eſcrit Galien au 6.dela Meth. chap.5. Leſquels alimens receus
chap.s. premierement en l'eltomach ( auquel ils ſont preparez ) ſont depuisenuoyez aux in
teſtins, leſquels ſont attirez aux veines meſaraïques, & d'icelles à la veine-porte , &
d'elle au foye , puis à la grande veine caue, & de là és veines qui ſont diſtribuées par
tout le corps : dont aucunes portent meſmement le ſang dans lesos, auſquels eſt fai
te la moüelle , qui eſt la propre nourricure d'iceux : & pour ceſte raiſon elle eſt con
tenue en la cauité des grands os, & aux petites cauitez & porofitez des petits, dans
Dequoy eft leſquels il y a vn humeur qui eſt leur propre nourriture , en lieu de la moäelle.Orla
engendrée la moüelleelt engendrée dela plus eſpeſſe partie du fang: qui eſt portée aux cauitez
mouelle, des grandsos par grandes veines& arteres , & aux petits par petites qui finiſſent aux
porofitez d'iceux. Car aux grands os on trouve cauitez manifeſtes, par où entrent c
leſdices veines & arteres , pour les cauſes que deſſus. Semblablement auſſi y entrent
des nerfs, deſquels eſtfaite vnemembrane,quienveloppe & couure ladite moüelle:
au moyen dequoy ladite membrane a ſentiment exquis , ainſi que l'experience le
monſtre: non queie vueille dire , que ladite moüelle aic de ſoy ſentiment, ains ſeu
Comme ſe '
lement de la membrane . Or d'icelle medulle,& de la propreſubſtance de l'os,ſefait
fait le callus. vne reſudation craffe & terreſtre,dontl'engendre & fait le callus, par la vercu nutri
tiue , tenant lelicu de formatrice: du temps duquelcallus , ne ſe peut donner reigle
En combien ( comme nousauoitsdiccy -deſſus) pource queleschoſes qui empeſchent la genera
de tempss'en tion d'iceluy,fontoltées aux vns pluſtoft, & aux autres plustard. Etpourretourner à
gendre le noſtre propos , les ſimples fractures ſans playe de la iambe,le plus ſouuentſont glu
callusà la tinées en cinquante iours par le cállus: mais à cauſe de la playe & eſquilles ſeparées,
iambe .
& autres accidens qui eſtoient à ma iambe , ie fus trois mois & plus, deuant que le
Le callss en- callus fut fait, pendant leſquels ie demeuray couſiours couché à la renuerſc , qui eſt
gendrepour vne eſpece degeſne à vn pauure malade. Encores fus -ie vn autre mois auant que ie D
quoy la iam.
ben'a son peuſebien appuyer le pied en terre ſans potence : ce que ic commençay auec dou
mouitement leur, à raiſon quele callus tenoir la placedes muſcles. Car auparauant que le mou
libre.
ucment puiſſe eſtre libre , il eſt neceſſaire que peu à peu lestendons& membranes
Conſentemět foient désjointes, ou depriſes contre la cicatrice.Que diray ie plus ? Maiambe laine
O amitiédesaidoit à la malade,comine faitlamain à ſa ſæur, & le bras å ſon compagnon qui ſe
parties.
roit rompu, aidant à le ſoufleuer, tourner & virer d'un colté & d'autre,la couurant &
découurant lors qu'il eſtoic neceſſaire, d'vne providence admirable : Ainſi quenous
voyons que ( Nature voulant defendre la vie ) louuene l'homme recte au deuanc de
ce qui nous peut offencer les mains ſeules,& prend l'eſpée nuë , penſant eſtre mieux
qu'elle ſoient bleſſees,meurtries , voire entieremencamputées, quele cerveau ou le
cæur ſoienteffenſez, pource que ce ſontparties principales & ſource de noſtre vie :
ce qu'on void ordinairement,ſansque premierementony aye penſé: & relles choſes
ſont offices de l'ame à nous incomprehenſibles. Ori'ay bien voulu icy aleguer ceſte
hiſtoire de maiambe, afin qu'elle ferue de methodeà toutes aurres fractures accom :
pagnées de playc .
Des Fractures.
543
A

Des choſes qui empeſchent la formation du Callus : eo de la maniere


de le corriger fil eſt vitié.

CH A P. XXIX .

Pres auoir ainſi declaré les ſignes, dont on cognoiſtra lecommencement Les relatifs
du Callus , la generation, & la maniere par laquelle il ſe fait :maintenant empeſchent
tum la generation
il conuient dire ce qui empeſche la generation d'iceluy , & ce qui aide Na du callus .
ZE
ture à le former & endurcir.Orleschoſes qui empeſchết que le callus ne ſe face , ou
qui le recardét , ſont toutes choſes qui ont grande puiſſance de reſoudre & ſubcilier,
& qui ſont onctueuſes, oleagineuſes, & humides. Car par icelles famolit , relaxe,
C.
ſubtilie, liquefie , & conſomme l'humeur , dont il ſe doit faire : lequel à l'oppoſite
çiri. on doit deſeicher ,engroſſir, & eſpellir, & endurcir auec medicamens emplaſtiques,
leta
moderément chauds & aſtringens. Toutesfois ie ne veux nier , que les medicamens
B humides & relaxans ne doiuenc auoir lieu où le callus ſeroit trop gros & tortu , ou
210 d'autre mauuaiſe figure , afin de le diminuer & rompre de nouueau.Ce qui ſe fait les En quel cas
relixans
lors que la partie eſt grandement difforme, & ſon action deprauée, pourueu qu'il ont lieu en la
ſoit encores recent. Ceque l'on doit faire auec fomentation faite de decoction de generation
15 ML
tripes ou de teſte de mouton , eſquelles on fera cuire des racines de guimauve , cou- du celius
leurée , ſemence de lin , fenugrec, fiente de pigeon , graine de laurier, & autresfem- liniment fori
remolinır.
blables. Auſli faudra vſer de ce liniment & emplaſtre 2.vnguenti de althæa Z 111) .
ol . lilii & axung. anſeris añ. Zj.aquæ vitæ parum : liquefiantfimul,fiat linimentum : Emplafire
duquel faut frotter la partie , puismettre deſlus ceremplaſtre . 24. emplaftri de V1- grandement
eeli. go cum mercurio , ceratiæſypati deſcriptione Philagrij. an.ziij.ol. aneth . & lilio
rum añ . Z j . liquefiant omnia fimul, fiat emplaftrum , extendatur ſuper alutam ad
vſum di& um . Le callos eſtant aſſez amoly , faut le rompre , & redreſſer les os en leur
UICI figure naturelle ,& pratiquer toutes les choſes de nouucau neceſſaires à la fracture

pour parfaire la curation. Sile callus eſtoit erop endurcy & vieil , il vaut mieux ne
c fefforcer à le rompre, ains le laiſſer, de peur de faire pis au malade . Car il peut adue
nir , le voulant rompre, que l'osſerompra pluſtoſten vn autre endroit ,qu'au lieu du
callus. Parquoy le malade ſera plus fage de ſe contenter de viure eſtant boiteux , que
de ſe mettre en hazard de mourir . Si le callus cſtoit trop gros , on le diminuera ( au
moinsfileſt recent)par medicamens mollificatifs & refolutifs, & fort aftringens , qui
ont vertu de liquefier , conſommer , & deſeicher. Pareillement ſera bon le frotter
(
ZITUEN ſouuentesfois longuement auec huile laurin , auquelon diſſoudra du ſalpeſtre , ou
indir , d'autreſel. Ec la tumeur ſera bandée , y appliquant vne lame de plomb aſſez eſtroi Pour amoine
tement ſerrée, qui empeſchera que le nourriſſementne pourra penetrer à la partie, drir le callus.
& par ainſi le callus ſera diminué. Si le callus eſt quelquesfois trop petit & retardé
faire, à cauſe que les bandes onceſté trop ſerrées, & auſſi parce que la partie a eſté Pourquoy la ,
slepi longuement en repos ſans aucun exercice ( qui eſt vne des occaſions principales qui partie en

an la rendentemaciće, conſideré que le mouuement eſchauffe la partie, dont elle eſt emaciée par

the 4. mieux nourrie , & par conſequent plus forte ) ou ſi ladite retardation vient parfaute oifiueré.
ianco D des alimens pechansenqualité ou en quantité , ou en tousles deux enſemble : aufli
pour auoir trop louuent dellié la partic ,ou ſeſtre trop haſté de la mouuoir : on obuie
e been ra à ces vices,adminiſtrant au malade le boire & manger parcy - deuant eſcrit ,parlant
er
Tend de la generation du callus . Si c'eſt pour auoir trop ſerré la partie, illa faudra deferrer,
ambe & oſter du touc la bande de deſſus la fracture: au lieu de laquelle ſera faire vne autre

maniere de ligature , qui commencera à la racine des vaiſſeaux, à ſçauoir pres l’aine ,
014
& au bras pres l’aiſcelle ,la conduiſant iuſques pres la fracture. Car par ce moyenon
exprime le ſang , & le fait-on couler à la partie offenſée, ainſi que par cy - deuant en
auons eſcrit. Au contraire , pourchaſſer le ſang de la partie . Pareillement on peut
views vſer de frictions molles , & fomentations auec eau chaude temperément, qu'il fau

dra delaiſſer, lors qu'on verra quelquechaleur & cumeur en la partie . Car ſi on pour- Contraires
fuiuoit dauantage, on reſoudroit ce qu'on y auroit attiré. Parrart tu noreras que effects des
frictions
lesfrictions & fomentacions ont contraire effect , ſelon qu'elles ſeront longues ou
briefues. Dauantage pour faire attraction de l'aliment,on appliquera emplaſtres de fomentariős.
poix , & fomentations neceſſaires aux accrophies .
544 Le ſeizieſme Liure ,
A
Des fomentations qu'on fait auxfractures des Os. CHAP. X X X.

N fait les fomentations pourpluſieurs & diuerſes intentions , & en di


Wild
Sacultez de uerſe maniere. La fomentation d'eau chaude doit eſtre temperée ,
l'eau chaude ( c'eſt à dire moyenne , entrebouillante & froide) & ceſte temperature
Jelon Hipp ſe cognoiſt, partie au ſentiment de noſtre main , partie au ſensdumala
ſene. 15. feét. de , quiettant interrogé, la dit eſtre trop chaude, ou tropfroide, ou mo
3.ne du
de l'offici-
chirur
derée. Icelle eau ainſimoderément chaude , appliquée par peu de temps par fomen
gier . tacion, eſchauffe& fubtiliel’humeurquieſt à la ſuperficie du cuir,& le prepareà re
ſolution :auſli fait attraction duſang & del'alimēt neceſſaire à vne partie qui en aura
beſoin. Pareillement appaiſe les douleurs : relaſche ce qui eſt trop tendu : cſchauffe
moderément vne partie trop refroidie par l'expulſion & expreſſion du ſang & des ef
prits, quiauroit peu eſtre faite par lesbandes&ligatures: & f'il y a intemperature
chaude , elle la refroidic accidentellement , qui ſe fait en reſoluant l’humeur chaud m2

contenu en la partie : que ſi elle eſt extenuće & amaigrie , la rend charnuë & mieux B
nourrie , & ſucculente, laiſſant vne humidité gracieuſe, comme font les bains d'eau
douce. Nous iugeonsla fomentation auoir eſte appliquéepeu de temps, quand en la
signes dela partie il commence yapparoiſtre un peu de rougeur & tumeur:moderément, quand
fomentarion la rougeur & tumeur ſont apparentes &manifeſtes:longuement,quand la rougeur
deuëment
faite.
qui apparoiſſoit, eſt perduë , & la tumeur abaiſſée. Ilfautauoir auſi vne conſidera
tion de l'habitude du corps qu’on fomente. Car ſ'il eſt plechorique , la mediocre fo
mentation remplira la partie d'humeurs ſuperflus: mais auſli f'il eſt maigre & exte
nué , rendra la partie qu'on fomente charnue , mieux nourrie, ſucculente, & refaite.
Reſte à parler des fractures des os du Pied. .

De lafracture des os du Pied . CHAP. X X X1.

Esos de l'auant-pied & ceux des orteils peuvent eſtre fra&turez , comme
ceux de lamain .Parquoy ils pourront eſtre craitcez comme nous auons С
Operation
naturelle . 10 dic par cy-deuant . Toutesfois ſpecialement les orteils ne ſeront tenus
courbezcomme les doigts dela main , afin que leur action ne ſoit empel
chée , qui eſt de tenir l'homme droit & debout ,comme les iambes pour le fairemar
cher :& auſſi faut que le malade ſe tienneau liet & en repos , ſans cheminer , iuſques
à ce que le callus ſoit bien formé.
Fin du quinzieſme Liure des Fractures.

Tables des Chapitres du ſeizieſme Liure ,


des Luxations .
Eſcription & enumeration des luxations. Chap.j. 46

Difference des luxations. chip. 4. D


Caufes des luxations. Chap.ij.
Signes vniuerſels pourcognoiſtre les deſloüeures. Chap.iij.
Prognoſtic des luxations . Chap.v.
Cure vniuerfelle des luxations. Chap.oj.
Deſcription de quelques inſtrumens feruans aux luxations, Chap.vj.
Dela luxation de la mandibule . Chap. vij.
Maniere de reduire la mandibulelors qu'elle eſt luxée en la partie anterieure des deux coſtez ,
Chap.ix.
Maniere de reduire la mandibule luxéeſeulementd'uncofé. Chapex .
Delaluxation de l'os clauiculaire , on iugulaire. Chap.xj.
De l’eſpine luxée . Chap.xij.
Delaluxation de la teſte, auec la premiere vertebre du col. Chap. xij.
Dela luxation des vertebres du col.
Chap. xiij.
Des Luxations. 545
Delaluxation des vertebres du dos. chap. xv.
La maniere de reduire l'efpone luxée en la partie exterieure . chap. xvj.
De la luxation des vertebres faite de cauſe interne. Chap. xvj.
Prognoſtic de la luxation des vertebres. Chat. Xui .
Delalaxation de l’oscoccyx caude , ou quenë. Chap. xix .
Delaluxation des coſtes . Chap. xx.
Delaluxation de l'eſpaule. Chap xxj.
La maniere de reduire l'eſpaule auec le poing , ou les doigts ioints enſemble. Chap.xxg.
La maniere de reduire l'efpaule auec le talon . Chap.xxij .
1
Autre maniere de reduire l'epaule. Chap.xxiiij.
La maniere de reduire l'epaule auec une eſchelle , & autrement. Chap. xxv .
Autre maniere de reduire l'eſpaule. Chap.xxxj.
La maniere de reduire l'efpaule, quand la luxation eſt faite en la partie anterieure.chap. xxvj.
Delaluxation de l'eſpaule faiteen la partieextericure. Chap. xxvij .
Delaluxation del'epaule faire en la partie ſuperieure. Chap.xxix .
De la defloiieure duCoulde. Chap.xxx .
Lamaniere de reduire la luxation du coulde faite en lapartie exterieure. Chap.xxxj.

Delaluxation faite en la partie interieure. Chat.xxx .


ninc.com
Dela deſloüeure de l'extrémitédel'os du coulde, appellée ſtyloïde,proche du carpe. Chap. xxxij.
De la luxation du poignet. Chap. xxxiiij.
onlik
De la luxation des os do carpe. Chap. xxxv .
Delaluxation des os du metacarpe.
chap.xxvj.
cell Delaluxation des doigts.
chap. xxxvi .
De la luxation de la banche. Chap. xxxvij .
Prognoſtic de la luxation de la banche.
Chap. xxxviij
borsi
Delaløxation de la hanche faite en dehors. Chap. xl.
Les ſignesque la luxation de la hanche eſt faiteen dehors . Chap.xlj.
Delaluxation de la hanche faite en deuant. Chev. xl .
2. de
De la luxation de la hanche faite en derriere. Chap.xlij.
La maniere de reduire la luxation de la cuiſſe , faite en dedans. Chap. xliii .
Autre maniere de reduire ladite luxation par machines, & c. Chap. lxv.
Lamaniere de reduire la luxation de la cuiſe, faiteen dehors . Chap. xj.
La maniere de reduire la luxation de la cuiſſe,faite en deuant. Chap. xlvi.
La maniere de reduire la luxation de la cuiffe,faite en derriere, Chap. xloi .
Delaluxation de la roüelle du genoüil, Chap. xlviii.
De la defloücure du genoüil. Chapel.
De la lúxation du genoüil, faite en deuant. Chap.lj.
Delaluxation & difonction du petit focile du bras. Chap.lij.
Delaluxation du grand focile avec l'aftragle. Chap.lij.
Te , Delaluxation du talon . ! Chap.liij.
Des accidens qui viennent pourla contuſion faiteau talon . Chap.lv.
De la luxation de l’os aſtragale . Chap.lvj.
De la luxation des os du tayle & du pedium . Chap.log.
De la luxation des os de la plante du pied & des orteils. Chap. lviij.
Des complications ou accidens quipeuventaduenir à la partiefracturéeou luxéc. Chap.lity .
Cile
:

Celeid

Pivoa
546
A

LE SEIZIESME LIVRE ,
TRAITTANT DES L V XATION S.

PAR AMBROISE PARE ', DE LAVAL AVB


M A INE , CONSEILLER ET PREMIER
Chirurgien du Roy.
Deſcription & enumeration des luxations, c'eſt à dire, deſlojeures & déboëturesd'os.
CHAPITRE PREMIER.

YXATION eſt ſortie de la teſte de los hors ſa ca.


Deſcription uicé en vn lieu inaccouſtumé , quiempeſche le
de luxation . mouuement volontaire . Il y a vne autre eſpece
de luxation , qui ſe fait par elongation ou eſlar
giſſementdesligamensqui lient lesiointures:la
quelle n'eſt pas vraye diſlocació ,mais eft vnche C
min à ce faire: & telle choſe ſe fait par vne tres
grande diſtenſion & relaxation des ligamens ,
comme de celuy qui eſt au dedans de la ioincure
de la hanche,à ceux qu'on aura tiré ſur la geſne:
ou de ceux qui enuironnent la iointe , comme
l’eſpaule ,pour auoir eu l'altrapade:ou le pied, à
ceux qui font quelque faux pas, & le tordencou
renuerſent.Ily a auſſi vne autre eſpece de luxation,quiſe fait quand les os ſellochét,
fentr’ouurent, & entre-baillent, ſans toutesfois eſtre luxez : & principalementcela
ſe void és ['suits fociles du bras ,& de la iambe : & quand cela ſe fait, les ligamensſont
auſſi dilatez ,& quelquesfoisrompus & dilacerez. Nousauons vne autre ſorte de lu
jeunes fe xation , qui ſe fait ( principalement és os des ieunes) párvne ſeparation des Epiphy
courbent de ſes, comme de la telte de los adiutoire & femoris, & autres ioiotures: & cela ſe co
ployentquel gnoiſt en ce qu'on void ſeparation des os auec crepitation & impotence dela partie.
quesfois fans Dauantage par vne violencelesos des ieunes enfans ſe courbent & cambrent,
eſtre rompus. que i'ay veu pluſieursfois :mais ceux des vieux ſe rompent pluſtoſt que de ſe ployer,
à cauſe de leur dureté .
Differences des Luxations . CH A P. II.

Vcunes luxations ſont ſimples , lesautres compoſées. Nous diſons eſtre


Simples luxe . ſimples , auecleſquelles il n'y a aucune diſpoſition adiointe. Les compo.
rions or
ſées ſont celles , où il y a complicacion de diſpoſition , comme fracture,
compoſées. playe,apoſteme,inflammation, douleur tres grande, & autres : pour leſ,
quelles nous ſommes quelquesfois contrains de laiſſer la luxation ſans eſtre reduite.
Autres differences ſont priſes de ce qu'aucunes ſont complettes,comme lorsque l'os
eſt du cout forty de ſaboète. Les autresincomplectes,quandil n'eſt du tout forty de
ſa cauité, & eft appellé concorſion,ou elongation & entr'ouuercure. Ceſte delloueu
reimparfaite n'a pointde difference, finon en tant que les os nacurellement conti
gus
Des Luxations. 547
A gusſont plus oumoinsſeparez les vns des autres. Auſti ſelon la diuerſité du lieu, la
Difference
luxation eſtdiuerſe, pour-ce qu'aucunes ſont faiđes en la partie anticure, poſterieu princip ale
re,fuperieure & infericure: aucunes en toutesces parties,c'eſt à dire,en toutes lesma du lient.
nieres ſuſdites, & lesautresen aucunes d'icelles ſeulement. Parquoy ſelon icelles
differences, faut diuerſifier l'operation manuelle,comme nous dirons cy -apres. Ou- La differe
tre leſquelles differences il y en ad'autres priſes des iointures, comme grandesou pe cepriſedes
cites:profondes ,ou peu caues. On peut encores adiouſter autres differences priſes du jointures
temps,en ce quelaluxation eſt recente ou vieille . Et toutes ces differences ſuiurons @ dusēps.
.
parordreen chaſque partie du corps humain ,traictans d'icelle particulierement.
Cauſedesluxations. CHAPITRE III.
Es cauſes des luxations ſont trois en general , à ſçauoir internes , &
externes, & la troiſieſme eſt hereditaire. Internes, comme quand il Caſes in
B.
y a certaines humeurs & ventofitez qui tombent aux iointures en li sernes.
grande abondance,qu'elles lubrifient & relaſchent les ligaments qui
lient les os enſemble , & les iettent hors de leur boëtte , ou bien rem
pliſſent leſdits ligamens,decelle ſorte qu'iceux engroffis, & par con
fequent accourcis, venans à ſe retirer enſemble, recirent ou les apophyſes desos,dont
ils ont leur origine , ou bien les os meſmes hors leurs ſinus & cauité : ce qu'on voit
ſouuent aduenir à la hanche par vneſchiatique, & aux vertebres, qui rendent les pa
ciens boſſus & contrefaits, à raiſon qu'elles ſont deſplacees de leur propre lieu. Ex Cauſes ex
ternes, comme tomber de haut en bas, ou receuoir quelquecoup orbe, ou eſtre tiré ternes .

furvnegeſne,ou endurer l'aſtrapade,ous'entorſerviolentement par vne meſmar


cheure. Auſli parvne induë fituation, comme l'on voit ésieunesgarçons qui belu
tent lafarine,& tondeurs, leſquels par vne longue continuation, iettent les genouils
au dedans. Pareillement les enfansqui apprennentà eſcrire, par vneinduë ſituation
ſe tournans de coſté, hauſans l'eſpaule deuiennent boſlus. Auſſi les autres manou
esebi
uriers, par vne couſtume à exercer leur art, (ce que l'on voitaux laboureurs ) ſe pliant
C ledos , deuicnnent courbes & contrefaits, & lesieunesfilles par leur trop ſerrer le 1

mer
corps ſont rendues boſlucs. Toutes leſquelles choſes font que les os ſortent de leur
place & licu naturel: ce qui aduient auſſi ſouuentesfois aux enfantemensdifficiles,
quand les ſages-femmes tirans les bras des enfans, diſloquent les iointures de l'eſpau
geles leou de la cuiſſe. La cauſe hereditaire eſt celle qui vient de pere & mere aux enfans,
La caisſo
comme quand les boſſus engendrent des enfans boſſus & contrcfaits, & les boiteux hereditaire.
engédrent des boiteux:dont l'experience fait foy,non pas touſiours , mais le plus ſou
ent uent. D'abondant Hippocrates liu desart. fedt. z.ſent.88. & 94.& fe&t.4 , ſent.3. &
ach 4. ditque les enfansauventre de la mere ſe peuuent luxer les bras & iambes parcheu
Arc ! tes, coups,ou pour auoir eſte preſſez: ce que nous voyons en ceux qui ont les pieds
is for bots,oui pour avoir les articles trop humides & laxes. Er de ce , ne ſe fautnon plus
des esbahir,quede ce que Gal.eſcritau Commentaire ſur le liurc des articles , à ſçauoir Les enfans
4:03 que l'enfanteſtant au ventre de ſa mere, peut auoir des apoſtumes,qui ſapeuuent ou- au vintre
leco utir & cicatrizer.Iladuient auſſi qu'aucuns ont les cauitez de leursiointures peu pro de leurme
D fondes; & que les léures ou bords deleurs pyxides ou cauitez , ſont fort rabbatues: repeuvens
dont les teſtesdesos n'entrentaſſez profondementen icelles: & queles ligamensqui auoirapo
Oye tiennent les os en leursiointures,neſontfermes,maisforedeliez &menus de leurftemes Souffrir, loc
conformation :ou ſonthumidesd'eux melimes, & fortlubriques ou humectcz par vne xat 1675.
Auxion d'humeurs pituiteux & muqueux,quirelaſchent & amolliſentles ligamens;
quidoiuenttenirferme la liaiſon des os ,comme nous auonsdeclaré: & à ceux-là les
osſe deſioignent facilementdeleursiointures, & auſlifacilementy ſontreduits, de

op façon que les maladesle plusſouuent les remettentd'eux-meſines ſansayde du Chi


tur rurgien :ce quei'ay veu pluſieurs fois. Aufli quand les marges ou bordsdes cauitez
dele fontrompus,& lacauite d'iceux eſtapplanie s'enſuit pareillement facileluxation.

mitr.
A A3
心心 叫叫

DES

LI
548 Le Seizieſme liure
Signes vniuerfels pourcognoiſtreles dejoueures. CHAPITRE IV . A

Esſignes les vns ſont communs à toutes delloüeures,lesautres pro


pres à chacune. Les ſignes communs ſont, tumeurs ou gibboſitez, ou
Signes de l'oseſt forjecté , & cauicé au lieu dont il eſt ſorry. Les particuliers ſe
luxation
complette. rontrecitez en traittant particulierement de chacuns. Les ſignes de
Caule de la luxation completce ſont,quel'action de la parcie eſt perduč,c'eſtà
douleur dire qu'elle ne ſe meut point. Oncognoiſt auſiladiſlocation par le
aux diflo- ſentiment de douleur, laquelle prouicntà cauſe
casions.
quel'osn'eſten ſon lieunaturel,&
qu'il preſſe la chair , & faitdiſtenſion aux nerfs , qui ſont pareillementperuertis
leur ſituation naturelle. A ce ſert auſſi la comparaiſon de la pareille iointure de la
partie ſaine à celle quieſt malade , pourueu que ladite partie ſainene ſoit point vitice
contre nature,comme tortuë ou extenuce, ou trop grofle,ou qu'elle ait quelque'autre
vice qui peut empeſcher de cognoiſtre losdeplacé de fa boëtte. Et partantilfauten
tendre qu'elle ſoit en ſon temperament & figure naturelle. Le lignedela luxationin - B
completce eſt,quele mouuement de la partie n'eſt du tout perdu, inais il eſt grande
ment depraué. Leſigne que les ligamens qui lientles iointures,ſontallongez,eftque
Signes de quand on preſſedes doigts vn colté de l'os,on le chaſſe de l'autre, & fubit il retourne
luxariõin. en ſon licu : d’auantage quand on preſſe du doigt ſur la iointure, il y entre facile
complerte. ment : ioint auſſi que l'action de la partie eſt grandement deprauce ,& fouuentdu
tout perduë.

Prognoſtic des luxations. CHAPITRE V.

Outes iointures ſe peuuent deſloüer,maistoutes ne ſe peuucntpas re


Luxurion mettre,comme la teſte:parce que tout promptement tuëlemalade;
dela teſte pour compreſſion qui ſe fait à lamouëlle de l'eſpine: pareillementles
incurable. vertebres de l'eſpine, & la mafchoire tombee des deuxcoſtez,ſi aupa. c
rauant que les remettre il y a deſia grande tumeur & inflammation.
Aux autresiointes, pource que les osne ſont tous luxez d'vne meſme
forte, ains quelquesfois plus, autresfoismoins:ſelon ceſte diuerſité, la redu& ion ſera
plus ou moinsdifficile.Car d'autant que les os ſeront moins esloignez de leur cauité,
d'autant aufli ſeront-ils plus aiſez à eſtre reduits:& d'autant qu'ils en ſeront plus esloi
gnez,d'autant en ſerontils plus difficiles:auſſi pour la figure, commecelle du coulde.
D'auantage d'autant que la luxation ſe fait plus aiſementen quelquepartie ,d'autant
auſſi la reduction en eſt pareillement plus aiſee , que où l'os ne ſe desboërte qu'à
grande difficulté. Les os de ceux qui ſont bien charnus & gras , ne ſe desboërcent
pas ſi aiſément, quc de ceux qui ſont maigres : & aulli lors qu'ilsſont hors de leur
lieu , plusdifficilementſeremettent : & ceux qui ſont plusmaigres quedecouſtume;
Aux gries leurs os ſeluxent & reduiſent plus
facilcmét. `Or la cauſe pourquoy aux gras les oś
les os font ne tombent facilement, eſt que lcur iointure eſt entierement comprimee detoute D
plis diffi part par les muſcles & greffe. Au contraire ceux qui cſtoient gras, puis ſontde
culement uenus maigres, ?cursiointures en fontplus laſches : parquoy plus facilement ſe des
boettent: iomt quelesiointures aux homes qui deuiennent maigres,, ſe rempliſſent
de muccoſitez par defaut de bonne nourriturc, & de chaleur de la partie ,quirend le
licu plus gliflanc,côme dit Hippocrates la ſent. vingt-neuf de lafeat. premiere du
liure desarticles . Mais en un corps maigre & ſec de la nature les muſcles ſont plus
robuſtes , & les ligamens plusforts & ſecs : & pour ceſtecauſe les os ſe deslocquent à
tard : auſi àplusgrande force ſont-ils reduits lors qu'ils ſont deſlouez. Aucuns os
eltaris ioinetsre,, s'entrouurent &Grecs
feparent l'un de l'autre , comme l'Omoplate de
nomment Acromium : l'os du coulde & du
la clauiculai au lieu que les
Celfus.
rayon : l’os de l'eſperon, oupetite fociledecontre l'os de la greue ou grand focile: l’os
calcaneum de contre l'aſtragale ,ou l'oſſelct. Tous leſquels ne ſe reioignenc iamais,
comme ilscſtoientauparauant qu'ils fuſſent cfcartez & delioints. Audi la partie en
demeure le plus ſouuent difforme, & ne recouure point ſi bien ſon a&ion & vlage, à
raiſon que le plus ſouuent les ligamens qui ſeruentà lier, attacher, renforcir , & rcuc
ftir lespartes denoſtre corps les ynes auec les autres , ſont rompus & trop relaſchez,
Des Luxations . 549

A Ceux qui ont luxation de cauſe interne , icelle eſtant reduite , peut reuenir de rechef, La luxació
& fouucnt:parce que les ligamenseſtansimbus & arrouſez de l'humeur ſuperflu, qui de cauſe

eſt decoulé , ne peuuent faire tenir les os : ce qui aduient auſſi quand les ligamens ſont interne re
rompus : & lors.qu'on eſtimeque le malade ſoit guary , les os ſortent de leur place , & vidue fora
puis les ayant de rechef reduits ,n'y peuuent demeurer.Quelquesfoisles ligamens ne mens.
font du tout rompus , mais portion d'iceux : dont l'action dela partie ſelon la dılpoli I Sage des
cion ſera plus oumoins deprauce ou perduë. Il y a auſſi vne autre luxation incurable, liens coli .
qui aduient à raiſon des mefmes ligamens : ſçauoir lors qu'iceux ſont tellement rem gamens.
plis & abreuuez d'humidité ſuperðuë, que venans à ſe racourcir & recirer, enſemble
auec ſoy retirent& font diſtraction des appendices d'auccleurs os . Car à raiſon de la
multicude des cauitez & tubercules , par l'inſertion deſquels l'appendice eft iointe
auec ſon os, il eſt preſque impoſible que la rencontre s'en face de meſıne qu'aupa
rauant . Pareillement ſi les luxations ſont inueterees , & qu'il y ait quelquc humeur
accreuë aux cauitez des iointures,les os ne pourront tenir . Auſſi lors que les teſtes de Pourquoy
l'os adiucoirc , ou femoris ,ont ja fait par diuturnité de temps un lieu broyé & bateu , les os ne
B auquel elles ſont deſcenduës ou montees, iamais les os ne pourrontdemeurer dans peuuentre
leurs iointures encores qu'on les y ait bien reduits : pource que la cauité de la jointu- nir en losse
res'eſt remplie de ceſt humeur glaireux, lequels'endurcit & augmcnte , qui fait que sointure.
l'os ne peut entrer ny demeurer en la iointure, & que la teſte deſdits os a fai& autre
lieu ou cauicé tenant la place deſdits os,laquelle eſt broyee & calleuſe. Outre plus
ceux qui ont le haut du bras luxé, peuuent faire quelque æuure de leur main , auſſi
bien que de l'autre bras qui n'eſt luxé. Car les mains ne portent pas le corps, comme
fontlesiambes. Et d'autant qu'on fait exercice de la main : d'autantauſli le braselt
mieux nourry. Mais au contraire, quand il y a luxation à l'os femoris,principalement la cauſe de

en la partic interieure , il ſe fait une grande atrophie àlaiambé, pource qu'on n'en l'arrophie.
peucfaire nul mouvement. Car les parties qui ont moins de mouuement , ſont auſſi
moins nourries . Donc dic Hippocrates, L'vlage & exercice des parties les robore &
entretient bien habituees : au contraire la parelle & ceſſation du mouuement, les ex
tenuë & debilice. Finalement lors qu'il y a vnc luxation accompagnecd'vne grande Ziu . 6.Epin
C playe & fra & ure, la voulant redụire , & faiſantextenſion, il y a danger qu'on ne face feft.s. Senr.
trop grande extenſion aux nerfs,& ruption aux ligamens , veincs, & artercs:qui ſont 10.6 feet.
cauſe de conuulſion & ſpaſme, ou inflammation , & autres accidens . Parquoy en tel 3. de art.
cas Hippocrates conſeille nereduire telle luxation, & d'autant qu'il vaut micux laif- Sen. 88 .
fer deuenir le malade impotent , que de luyoſter la vie. Carroute deſloüeure ſedoit
remettre auant que l'inflammation y ſoit vcnuë : & fija elle y eſtoit, il faut laiſſer le
malade en repos ,& oſter l'inflammation , & n'irriter pointle mal , de peur d'y cauſer
vne cxtremedouleur,gangrene, ſpaſme
, & par conſequent la mort : ce que l'ay veu
SIE
aduenir quelquesfois. Et quand l'inflammation , tumeur, & autres accidens ſeront
010
ceſſez il faut eſſayer à reduire l'os aux membres qui le peuuent ſouffrir: & à cela ayde
Com
beaucoup l'habitude du corps : Car ſi le corps eſt delicat & mollace , on fera la redu
072
ction plus promptement & facilement : au contraire non . Et ſuffiſe du prognoſtic:
edem
maintenant il nous faut venir à la cure yniucrfelle.
s tem

D Cure vniuerſelle des Luxations. CHAPITRE VI.

io
jun
VTre ce que nous auons declaré cy.devant de la cure generale des fra
¿ tures & luxations,il ſera bon d’eſcrire encore maintenant ce qui appartient
sho
plus ſpecialement auſditesluxations,t'aduertiſſant premieremene d'obſer
00 uer cinq intentions,ou reſpe& s, leſquels conuicnt faire par ordre & ſucceſſiucment. Cinq inte
La premiere, tenir:la ſeconde tirer: la troiſieſme pouſſer: la quatrieſme , faire deuë ſi- curetionsen ,!

tuation :la cinquicſme , corriger les accidens. La premiere intention ,quieſt tenir,ſe xarions.
doit entendre de cour le corps,ou ſeulement d'une partie. Tout le corps ſe doit tenir ,
La premiere
lors que l'eſpaule eſt hors de la place , ou les vertebres , ou l'os de la cuille. Il ne faut intention .
tenir que la partie , quand la luxation eſt à l'os furculaire, ou au coulde , ou en la main ,
ou au genoüil ,ou au pieds : & la raiſon pourquoy on tient,c'eſtde peur qu'en tirant, le
corps ne ſuiue lapartie que l'on circ :8c où ilne ſeroictenu ferme , on ne pourroit bien
A Aa
550 Le Seizieſme liure
Seconde in reduire la luxation. La ſeconde intention , qui eſt de tirer, c'eſt à fin qu'ilyaitinter- a
rension . ualle libre & ſpacieux entre les osdes ioints:ſurquoy il faut norer,qu'on doitmettre
touſiours la partie,cn laquelle l'os eſt tombé, au deſſus, & celle dontileft combé , au
deſſous,ou àcoſté.Orles façons de tirer,c'eſt àdire,eſtendre,foncdiuerſes,ſelon que
les muſcles & ligamens ſont puiſſans, & les os ſont tranſportez en çàou en là: & pour
ce faire on s'aydc ſeulemêt des mains. Que files mains ne ſont fuffiſantes,on vſe d'in
ſtrumens & machines propres à ce faire,comme cu verras par les figurescy-apres de
peintes. Mais pour cuiter l'inconuenientquipourroit venir de tropeſtendre, l'ex
• Troiſieſme tenſion ſera faite ſeulement tant que l'os ſoit vis à vis de ſa cauité. La troiſieſme in
intention. tention eſt ,qu'apres que la parcie ſera ſuffiſamment citenduë, fautpouſſer ,tourner,
& virer l'os deplacé, ſelon qu'il ſera beſoin. Enquoy faut bien prendre gardedene
pouſſer en autre lieu qu'enſa boëtte , parce qu'on pourroit faire paſſer l'os d’ync
partie en l'autre , comme ſi l'os adiucoire ou femoris ſont luxez en la partie ancericu 1
re,en les trop pouſſant, on les ierce & fait -on paſſer en la partiepoſterieure, ſansles
faire entrer en leur iointc. Pour à quoypouruoir,les os ſeront pouſſez par la meſme B
voye qu'ils ſont ſortis:laquelle chole ſe fait facilement aux luxations recentes,à cau
ſedes muſcles qui ſe retirent vers leur origine , lors qu'ils font a dez par la main du
Chirurgien. On cognoiſt los y eſtre mis,quand entrant dans ſa boëtte,ilfaic vn bruit
ſonnantclocq : & la partie qui eſtoic defloüec,au toucher & à la vcüe eſt ſemblable à
la ſanie de figure,conformation &grandeur,& la douleur eſt appaiſee, & que la par
tie fait ſes mouuemens naturels,à ſçauoir flexion,excenſion,prone& ſupine,la hauſ
Quarrieſ. ſant & baiſſant,& tournant, comme elle faiſoit auparauant eſtreluxee. La quatriel
me
tion. insen- me intencion,quieſt de faire deuë ſituation, c'eſt afin que los qui aura eſtéreduit, fe
puiſſe contenir, & de rechef ne ſorte de ſa boette. En la luxation du bras on le tien
dra en eſcharpe:& en celle de la hanche,du genouil , & du pied , au liet: ainſi des au
tres parties quiſont declarees chacune à par-ſoy. En quoy fautobſeruer, qu’apres la
reduction faite,l'on doit appliquer eſtoupades & compreſſes baignees en oxycrat, &
couuertes de medicamens conuenables: auſſi qu'elles ſoient proprement ſerrees &
lices ſelon lapartie luxee,n'oubliant à tourner lesbandes à l'oppoſite du lieu où l'osC
aura eſté luxe. Semblablement leſdites compreſſes ſeront miſes plus groſſes au lieu
d'où ſera forty l’os,qu'en vne autre part. Car lion fait le contriare,ily aura danger de
le repouſſer & iecter hors de la place. Cela fait,on n'y doit coucher de quatre oucing
Cinquief- iours,s'ils n'y ſuruient douleur,ou quelqueautre accident. La cinquieſme intention
meinsen-
rion . eſt,de remedier aux accidens & affe & ions compliquees,s'il enya :comme douleur,
inflammation, playe,fra&ture,& autres qu'auons ditau liure des Fractures. Que ſila
luxation eſtoit vieille,c'eſtà dire, qu'elle euftdemeuré long- temps ſans eſtrereduite,
& les ligamens fuſſent endurcis & deſſeichez ,avant qu'on eſſayedela remettre , il la
faut adoucir & amollir auecfomentations,cataplaſmes,emplaſtres,linimens, & au
tres choſes neceſſaires:puis mouvoir & broyer, c'eſt à dire, agiter deçà & de là (non
par violence) la ioincure qu'on veut remettre, à fin d'eſchauffer,diſſoudre,attenuer,
lubrifier , & ſubtilier l'humeur deflué ſur icelle , pour mieux eſtendre les fibres des
Autre in muſcles,ligamens, & aponeuroſes qui la lient. Mais fion voit qu'il y ait grande dou
tention leug inflammation & tumeur, il n'y fauttoucher que premierement tels accidensne ID
pour leslu foientpaſſez,comme auonsdit.Lesos quifontentr'-ouueres,entre-baaillez,&a11
xaricns in- cunement ſeparez,ſerontreioints par bien bander , lier, & fituer la partie , commen
weterecs.
çant le bandage ſur l'entr-ouuerture de l'os , puis ſituer la partie comme il eſt requis.
îl aduient de tres-grands accidensàl'entr’ouuerture du calon ,comme inflammation,
douleur,conuullions, & quelquesfois la mort:par quoy ne doiuent eſtre negligez.

1
Des Luxations .
55L

A
Deſcription de quelques inſtrumens feruans aux luxations.
CH A P I T RE VII.

Vparauant que d'entrer en matiere , i'ay voulu te faire peindre ces trois liga
tures : pour tenir & tirer les parties luxees. La premiere marquee A. ſerc à
tenir . La ſecondemarqueepar B. eſt pour tirer,quieſt faicte d'un ſeulnæud .
La troiſieſme marquee par C. eſt auec deux næuds , pour mieux tenir fermement,
comme tu vois par ces figures.

B
B

CHI C

** Plus yn inſtrument pour tirer d'vne vehemente force , lors que la main n'eſt ſuffi
1
ſante,quieſt fait en manicre d'une petite moufle, marquee D. D. dedans laquelle y a
trois petites rouës , dans leſquelles le met vnc corde marquee H. & aux extremitez il
yadeux crochets, dont l'vn ſertpour tenir ladite moufle contre quelquc pillier , &
с
l'aucre qui eſt pour tirer le lien qu'on attacheà icelle . B. B. Les boëtes qui couurene
laditemoufle . A.A. Les couuercles deſdites boëres . C. V n piton fait à vis , qu'on po
II
ſe dansyn pillier de bois pour atracher l'vn des crochets de la moufle . F.Vn foret du
quelon perce le pillier, pour inſerer ledit piton , comme tu vois par ceſte figure.
edone

Figure dela Moufle.


It!і.
ettie, f

three
ndedo

B
czËM D B

om EUR
freon
D

€ H

En licu de la Mouflc, qucuns Practiciens vſene de ceſt inſtrument nommé mani


uelle , dont la poincte eſ faiete en manicrc de foret , ou d'vnc tairicrc qu’on atrache
contre vn pillier ou ſoliue de bois:dans laquelle maniuello y a vne vis , quien ſon ex
tremité à vn crochet , là où on attache vn lien , & par le moyen de la clef, ladite vis
tourne dans yne eſcroce: & paricelle eſt tiré lc licn tant & fi peu qu'il clt rcquis pour
reduire l'osen ſaboëtic .
AAa ij
552 Le Seizieſme liure

A
Figure de la Manjuelle .

LUFTONITE

A preſent nous pourſuiurons les defloücures particulierement, commençans à la


mandibulc infericurc, & finirons à l'extremité des doigts des pieds.

Cure particuliere des Luxations, & premierementde la Mandibule inferieure.

CH A PIT RE VIII.

N la Mandibule infericure ſe fait luxation :ce qui aduiene fouuent


Cauſe a
lies de la en baaillant & ouurantgrandement la bouche . Eticelle ſe fairen la
luxaciă de partie anterieure , & peu ſouuent en la poſterieure, à cauſe des deux
la mand additamens mammillaires, qui l'engardent eſtre reculee en arriere.
bule. Elle ſe fait en deux manieres, à ſçauoir , ſeulement d'un coſté, &
Signe que quelquesfois des deux . Le ſigne qu'elle n'eſt delloücc que d'onco
elle eft lu. Ité, c'eſt qu'elle eſt tournee de crauers , & le coté doncelle eſt luxec , ſe monſtre plus
xee fryle . plat & caue , & celuy de la partie faine, plus elleué & avancé: & la bouche du mala
ment d'un
de demeure ouuerte, ne la pouuant fermer , ny maſcher les viandes, & lesdents ſont
cofte.
plus aduancees en deuant que celles de la mandibule ſuperieure : & auſſi ne font à
l'endroit de leurs pareilles: au contraire les canines ſerencontrent ſous les inciſiues, &
la partie deſloüee, & le menton , ſone tournez & inclinez vers le coſté qu'elle n'eſt
signes que delloüce. Les ſignes qu'elle clt deſloüce des deux coſtcz , font, qu'elle pend ſur la
elle eft lis . poi& rine, & toutle menton s'auance en deuant, & pardeſſus la maſchoire on voitles D
xle des
denx coa muſcles temporels tendus,& la ſaliue coule de la bouche du malade, ne la pouuant
recenir : & ne peut fermer la bouche , ny remuer la langue pour parler, mais balbutie.
steze
Lors qu'elle eſt luxee des deux coſtez , elle eſt plus difficile quequand elle ne l'eſt que
que d'vn coſté : & pareillement les accidens ſont plus grands. " Pourquoy elle doit
Prognoffic. eſtre ſoudainement remiſe, ou autrement le malade tombe en extreme douleur, fil

i ure , & inflammation aucour de la gorge , eſt en danger de mort, & le plus ſouueneen
dixiours , plus ou moins , ſelon l'habitude du corps : à raiſon ( comme dic Mon
ſicur d’Alechamps ) des cinq rameaux de nerfs , qui viennent de la ſeconde & cin
quieſme coniugation du cerueau , qui ſe diſtribucnt aux muſcles qui la font mou
Ce qu'il
uoir : au moyen dequoy lors qu'ils ſont violentement eſtendus , cauſent les acci
faut faire
devant que dens ſuſdits.LesPračicienstiennent, qu'en douze iours ,apres eſtre reduire, elle eſt
semietre la aſſeurec de non plus recomber . Ecoù elle aura eſté quelque temps fans eſtre reduite ,
mandibule fauc vſer de remedes remollitifs, & relaſchans, comme fomentations, linimens, ca
luzee de taplaſmes, & femblables choſes qui ont vertu de ce faire, & apres la reduction faite,
longtemps . ony appliquera vn medicament fait de blanc d'eufs, & huilc rofat,pourleder la dou
Des Luxations. ‫ رک‬3
A leur, & les compreſſesſeronttrempeesen oxycrat : & au ſecond appareilony mettra
vn autre, qui aurapuiſſance d'agglutiner & reſerrer lesligamens,& autresparties qui
auront elle relaſchecs , à finauſſi que la partie remiſe loittenuë immobile, & ſoit
altrainte. Exemple. 2. pul.boli armen. ſang. drac. farinæ volatil. maſtich. picis re
finx an. ZB.albuin.ouor. q.f.fiat medica. Etapreson pourra vſer de l'emplaltre dia
chalciteos fonduë en huyleroſat,& vn peu de vinaigre, & autres qu’on verra eſtre ne
cellaires.

Maniere de reduire la mandibule,lors qu'elle eſtluxee en la partieanterieure dedeuxcoſtez.


CHAPITRE IX.

L faut faire coucher le malade en terre, ou ſur vne petite ſelle baſſe, & luy Premiere
tenir fermementlateſte, & quele Chirurgien mette ſes deux poulces dans methode
la bouche du malade , enueloppez d'une petite bandelette, à fin qu'ilne ſe de reduire
B bleſſe contre les dents , & qu'ils n'eſchappent & gliſſent,preſſant ſur les la mandi
groſſesdents de la mandibule inferieure, & quant-& - quang tenant les doigts par def- bule luxee.
fous le menton en elleuant toute la mandibule. Et ſi par ce moyen on ne peut faire la Autre face
reduction, à cauſe, peut- cſtre que la bouche ſera ſi fermee qu'on nepourra mettre les fos.
poulces dedans , faudra mettre des coings de bois ,qui ne ſoit pas dur ny aſpre , mais
mol,& qui cede, commele bois de coudrier, ou ſapın ( & ſeront de figure quarrec de
groſſeurd'un doigt ou plus ) & les appliquera-on deſlusles dentsmolaires auxdeux
coſtez, qui ſeruiront de conduire la maſchoire en ſon lieu quand on la tirera : & lesy
faut tenir fort: puison mettra vne bande ſous le menton , & vn ſeruiteur mettra ſes
deux genoux ſur les eſpaules dumalade,& tirera en haut les deux bouts dela bande, regilamā me--.
&alors le Chirurgien doitpreſſer versle bas les deux coings de bois,& dreſſer en leur dob
presule
. reo
licu les os de la mandibule. Er apres la reduction faut bander & medicamenter lefiruce.
malade ainſi qu'il eſtneceſſaire , & apresluy commander qu'il n'ouure la bouche, &
qu'il nemangerien difficile à maſcher, iuſques à ce que la douleur ſoit palee : & qu'il
Vedi
с
vſe de choſesliquides,commcorge-mundé,panade,gelec , preſlis, coulis, & autres
ſemblables.
ola
eux
414.
Maniere de reduire le Mandibule luxee ſeulement d'un coſté.
2, & X.
CHAPITRE
ICO.
Split
ark
L faut faire aſſeoir le malade beaucoup plus bas que le Chirurgien , & obferuas
luy fera -on tenir la teſte en derriere par vn feruiteur, à fin qu'en la redui- tion en ton
ſant & cirant , il ne ſuyue le Chirurgien :cequ'il faut touſiours obſeruer ses luza
&
en coutes luxacions, commenousauons dit. Puis mettra le poulce dans tions.
nél
la bouche du malade ſur les dentsmaxillaires, du coſté luxé,& abbaiſſera
Urla la mandibule ,en la tirantà coſté,& la pouſſera en la place. Et pendant qu'il fait cel
icles
quure, faut que le malade s’ayde de ſon coſté , n'ouurant la bouche que le moins
UAD D qu'il pourra, à fin que les muſcles ne tendencpoint :mais plucoſton luy commandera
LIDE
de la laiſſeraller ſans la fermer: car en ce faiſant les muſcles crocaphites ſe rccirenten
leur propre licu , & aydent à la reduction.
‫الا‬ Aucunsaffermentqu'il ſe fait luxation de ladite mandibule en la partic poſtericu- A ſçauogin
he re, & qu'alors la bouchedemeurefermee, & le malade ne la peut ouurir: aulli que les luxation
s'il je fais
1161
dents d'icelle ne ſont point cantauanceesque celles de la mandibule ſuperieure,mais de Laman
On
fontreculees en arriere : & pour la reduction diſenc,qu'il faut tenir la ceſte du malade dibule en
fermement par derriere,& que le Chirurgien metteſes poulces dans la bouche, & les la partie
100
doigts ſous le menton, & qu'il la tire vers ſoy en l'esbranlant, & maniant d'un colte pofterieure.
& d'autre.Quant àmoy,iamaišie n'ay veu telle luxation aduenir,& penſe qu'à gran
de peine ſe peut- elle faire, pour la raiſon predite. Sielle ſe faiſoit, ce ſeroit vneluxa
tion incomplerte; eſtane vnpeu reculee en arriere contre leſdits addicainens mam
millaires, & facilement ſe pourroit reduire en elleuant en haur ladite mandibule,
donnant vn coup de poing par dellous. AA a iiij
554 Le ſeizieſme ljure,
de la luxation de l'os clauiculaire ou iugulaire. А
CH A P I T R E XI.

Os iugulaire le peut ployer , delloüer, & rompre. Il ſe difiointen


deux manieres : I'vne contre le ſternum , & l'autre contre l'Omoplate ,
La forcherte à ſçauoir l’Acromium : qui eſt partie & aboutiſſement de ſon eſpine,
Se peut lite contre lequel eſt appuyee & iointe la furcule. Toutesfois tant d'un
xer par les
deux extre coſte qued'autre la luxation de ceſtos eſt rare & difficile, pour la fer
mirez me adherence & connexion qu'il a auec les parties ſutdices: & à gran
de difficulté l'extremité ,quiadhere au Sternum , ſe peut baiſſer en bas, à cauſe qu'elle
Les diffe eſt ſouſtenuë de la premiere coſte. Ladice luxation peutaduenirau dedans, & aude
rences dela hors , & aux coſtez: & felonicelles differences il faut quele Chirurgien face la redu
luxation &tion ,qui ſe fera en pouſſant & eltendant les bras : Ecs'il eſt beſoin,on fera coucher le
delosfur-
. patientàla renuerfe ayant l'eſpaule ſur le culd'vne iatte, ou autre choſe ſemblable,à
fin que l'eſpaule & le Thorax fc courbenten dehors , pour puis apres reduiremieux la
luxation ou fracture:ce qui fe fera en hauſlanc, ou baillant,ou tirant le Orasdu patient
en auant,ou en arriere, ſelon le coſté auquel ſera faite la diſlocation. Puis en pouſſant В
ſur l'eminence duditos,ſera reduit en fonlieu. Ec conuient lier,& mettre compreſſes,
& lc tenir en repos , ainſi que s'il eſtoit rompu . Galien ſur le liure des deſloucures
d'Hipp . dit que luy eſtant en l'aage de trente cinqans, en s'exerçant dedansl’eſchole
publique , luy auoir eſté diſioine l'os de l'Acromium d'auec l'osfurculaire, li grande
Hiſtoire de
ment,qu'entre l'Acromium & los furculaire eſtoit interualle de trois doigts: & recite
Gal. des ceſte deſloüeure auor eſté guarie par yne ſi violente ligature, qu'il ſentoit au deſſous
art. fe&t.l.
de l'os furculaire le battement des arteres. Laquelle ilporta par l'eſpace de quarante
Comm . ſur jours: & dir, que peu de malades veulent ſouffrir vne ſi grande compreſſion ,& filon
lafent. 62. guement comme il eſt neceſſaire. Or veritablement ceſte luxation eſt difficile à co
gnoiſtre & encore plus à eſtre curee: le ſçay qu'aucuns Chirurgiens s'y ſonttrompez,
point con . cítimans que la teſte de l'auant-bras eſtoic luxee. ( ar lors la ſommité de l'eſpaule,ap
fiderable. pelle des Grecs Epomis, ſe voit plus enfice , & le lieu d'où eſtoit ſorry l'osfurculaire,
caue & enfoncé ,auec douleur vehemence & grande tumeur,& lemalade nepouuant
hauſſer le bras,& ne faire autres mouuemens neceſſaires de l'eſpaule : & où l'os ne ſera
reduit, le malade demeurera impotent , & ne pourra iamais porcer la main ſur la teſte C
ny à la bouche .
De i'eſpine luxee.
CH A P I TRE XII .

Compoſa
porting ESPINE eſt compoſee de pluſieurs os, quiſont comme petites roüelles rap
portees enſemble pareniointures, qui aydent chacun en ſon endroit vn peu à
sion de lief faire ſon mouuemēr,pourfleſchir le dos ſur le deuant, & non en arriere, lelon
pine. leur rondeur & circonference de leur cercles,pour plier & dreſſer.Carfielle euſteſté
faite d'vn ſeulos,l'homecultelte immobile,eltantcome embroché ou empalé. Auſſi
leſdites roüelles ſontcreuſes pour donner vn chemin ſeur à la moüelle de l'eſpine: la
quelle come vn ruiſſeaucoulāt du cerucau,a eſté faite pour la generatio & diſtribució
La moielle des nerfs , qui dcuoiét döner ſentimét & mouuemēt à toutes les parties ſituees au def
une pro fousde la teſte:deſquelsſort par les trous de chaſque roüelle vne cõiugation.
eftcomme Auſfi il
longation
y a des veines & arteres qui y entrent dedans pour lesnourrir & viuifier. D'auantage D
duserucau.faut entendre, que la face poſterieure de l'eſpinc dorſale cft diuiſee en quatre parties,
appellccs apophyſes, & epiphyſes:dont les vnes montér en haut, les autres deſcendent
en bas, & d'autres qui ſont à trauers,& les autres au milieu, comme creſtes & eſpines,
à cauſe dequoy a clté appellee Eſpine, pour ſes forjettures qui ſont aiguis comme cí
L'os facris
pines, à l'extremite deſquelles il ya des cartilages. Et notteras icy q, ue la premiere
oft le fonde.
vertebre n'a pointdecreſte ,pource que les muſcles qui meuuent la teſte, occupenc
ment dis lc lieu où elle deuoit naiſtre. Or l'vtilicé de l'eſpine auec ſes apophyſes ſerc com
sertebre.. me de bouleucrt & fortification à la moüelle ſpinale , la couurant & enueloppant
de toute part contre les iniures externes . Auſſielle eſt comme la carine & fonde
Des Luxations .
( SSS

ment du corps,& principalement l'os ſacrum ,lequeleſt plus grand de toutes les ver
A rebres, & cft au plus bas d'icelles , comme leur fondement: ſemblablement ſouſtiene ch.7.li.13.
l'os dela hanche. Toutes les vertebres vont touſiours en diminuant & eſtoit ( comme de vfupar.
dit Galicn ) raiſonnable, que celles qui ſont ſur les autres,ſoientmoindres que celles
qui ſont deſſous, veu que ce qui eſt porcé & ſouſtenu , doit eſtre moindre que ce qui 7

porte & fouſtient.Voyla pourquoy elles ſont baſties comme vn clocher.Les apophy
les laterales des vertebres du Metaphrenum ont d'abondant vne autre vcilité,
qui eſt
d'appuyer & eniointer les os des coſtes.Entre les vertebresy a des cartilages, & vn hu
meur glaireux ,quilesabbreuue & humecte ( ſemblable à celuy de qui preſque toutes
les ioiptures de noſtre corps ſont lubrifices & rendues gliſſantes) pour lesrendre plus
obeyſlantes à leur mouvement , qui ſe fait en deuant & non en derriere, commenous pourquoy
le mouuea
auons dit, à fin que les actions de l'homme ſe facent micux : & pareillement pource
que la grande veine caue & grande artere , qui ſont couchees fur icelles , eufient eſté ment des
vertebres
trop tendues , & fc fuſſent pcu rompre liclles ſe fuſſene ployees en arriere. A ceſte ſe fait en
cauſe les eniointures des vertebres ſonten la partie poſtericure, & non à l'anterieure , 'deuans.
B
& fonclices enſeinble par certains ligamens bien fores i'vne auec l'autre . Or mainte
nant ie laiſſeray pluſieurs autres diſcours quc fair Galien au liu , treizieſmę Delvſa
fage des parties parlant de l'eſpinc, & diray auec luy qu'en noſtre corps rien n'y cſt
faict cemerairement, mais auec grande induſtrie & artifice , par la ſageſſe admirable
du divin & grand Architecte, le Dieu viuant , ſans qu'aucune choſe y ſoit ſuperflue
du manque.

Delaluxation de la Teſte auec la premiere vertebre du Coi.


DATA
CHAPITRE XIII ,

A teſte eſt affiſe ſur le col , & en la baſe d'icelle il y a deux apophyſes ou emi
Connexion
nences pres le grand trou par lequelpaſſe la moüelle ſpinale,leſquelles ſont
de las
steſte
receuës par deux cauirez qui ſont en la premiere vertebre du col: & icelles auec la pre
aucunesfois ſe deſioignent & ſeparentdeſditescauitez, & font luxation en miere ver
la partie poſtericure: à railon dequoy l'eſpinemedullaire eſt foulee , preſſee & eſten- rebre.
due: & lors le menton du malade touche à la poictrine, & ne peut rien aualler, ny par
meurt ſubitement,non par la faute du Chirurgien ,maispar la grandeur du mal Luxasion
ler,&
incurabler
qui eſt du tout incurable .

Dela luxation des vertebres du col.

CHAPITRE XIV .

ielles
L ſe peut ſemblablementfaire luxation complette ou incoinplette aux au- Luxation
tres vertebres du Col.Sielle eſt complete,ſubitementla morts'enſuit, ſi elle completee
Tiere,
n'eſt promptement reduite, à cauſe que la nucque , & les nerfs ( principale- bres
des verte
leent , incs .
ment ceux qui ſeruent à la reſpiration ) ſont comprimez & ſerrez : dont l'eſprit ani rable,
'Dmal n'y peut reluire,& ſubit y ſuruientinflammation ,ſquinancic, & difficulté de re
CITATA
{pirer. Quelquesfois auſſiladite luxation eſt incomplette : ce qui ne peut aduenir
à toutes vértebres, à ſçauoir, quand elles ſont peruercies en la partie antcricureou
2012
poſtericure. Le ſigne qu'clle eſt incomplette,eſt quelecol demeure tors, & le ma- signe de la
19, lade a le viſage liuide, & difficulté de parler & reſpirer. Le moyen de reduire icelle luxation
luxation , ſoit complette ou incompletce ,c'eſt qu'il faut faire affeoir le malade en vne inoplass.
chaire baſſe, & qu'vn ſeruiteur luy preſſe ſur les eſpaules, & le Chirurgien prendra ſa
teſtcaux coltez des oreilles avec les deux mains, & l'efleuera en haut,en tournant &
virant de coſté & d'autre ,iuſques à ce qu'elle ſoit reduite . Le ſigne qu'elle ſera re
3000
duite ,eſt quele malade ſéncira promptementallegement de douleur,& pourra tour
afelett
ner la teſte de coſté & d'autre. Apresia reduction faiđe, faut faire pancher la teſte Ligature
, liir apres lares
du coſtéoppoſite à la luxation , & lier le colautour de la iointure de l'eſpaule : & en duction
ce faiſant le faucgarder de trop lier & ferrer la gorge , de peur d'empeſcher la reſpira
uch tion & tranſglutition,

1
eliure
556 Le ſeizieſm ;

Delaluxation des vertebres du Dos . CHAPITRE XV. A

Quatre for " Es vertebres du Dos ſe peuuent luxer en quatre manieres:à ſçauoir,anterieu
tes de lu
xations des re , pofterieure à colté dexcre, & feneſtre. Le ſigne qu'elles ſont luxces en la
vertebres partie anterieure , eſt qu'on void qu'elles ſont enfoncees en dedans. Lors
du dos. qu'elles ſont luxees en la parcie poſterieure, elles ſont trouuees gibbeuſes, c'eſt à di
re,plus hautesleuees par dehors qu'elles ne doiuent: quand elles ſont luxces aux co
ſtez,ony void yne eminence contre nature . Les vertebres deuicnnent gibbeuſes de
les
des cames cauſe interne ou externe : ce quieft commun à toutes luxacions.La caufe interne eft
rions des vne fluxion d'humours,enuoyez ſur les rouelles de l'eſpine & ſur leurs ligamens, ou
vertebres . de tout le corps,ou de quelque partie : ou l'imbccilité meſme des rouelles & ligamens
quiamalſent telles ſuperfluitez ou douleur qui lesy artire . La cauſe externe eſt pour
tomber de haut ſur choſes dures , ou par coups orbes, & de ſe pancher & courber ſur
le deuant: ce qu'on void aux vignerons , paueurs , & autres manieres de gens quigai . B
gnent leur vie én fe fort ployant
, comme nous auons dit cy-deuant
. Auſſi à ceux qui
ont vne luxation exterieure del'os femoris , qui n'a peu eftre reduir, pource qu'en
cheminant le malade ſe panche, & appuye ſa main ſur la cuiſſe , il ſe fait que par vne
accouſtumance les vertebres fe courbent. Telle diſpoſicion ſe fait aux vieux qui ſe
pourſe pă , panchentſurle deuant. Or les vertebresne ſont gueres pouſſees de la partie poſte
i
ſe fait que rieure à lancericure , ſi ce n'eſt à grande violence , & encores les ligamens peuuent
les vente- pluſtoſt ſe rompre que de ſe tant eſtendre: & telles luxations ſont mortelles, à cauſe
bres re que la moüelle ſpinale eſt offenfee par la compreſſion , & eſtant ainſi preſſee, les par
courbent. tics ſont renduës ſtupides & intenſibles. Donc ſi les vertebres ſont luxees par dedans
Signes de la reduction ne ſe peutiamais faire, pource qu'on ne peut les repouſſer par leventre
luxation
pour les reduire en leur lieu. Il ſuruient aux malades difficulté d'vriner , & iccter les
interieure
des verte aucres excremens du ventre: auſſi leur aduient aux cuiſſes vn refroidiſſement:& abo.
bres. liſſement de fentir & mouuoir : & à aucuns l'vrine & autres excremens ſortent inuo
lontairement: & auſſi quelquesfois ſontretenus du tout : combien que non ſeule
mentrels accidens aduiennent aux luxations , mais auſſi par playe & fra& ure , Oro
Galien ſur quand l'eſpine eſt luxce en la partie interieure ,elle induitlesaccidens deffuſdics,par
laſe.st.de
ce que les nerfs qui procedent de la moüelle, vont & ſe diſſeminent plus aux parties
la 3.fe &t. du
li.des art . interieures qu’exterieures : parquoy ils ſontpluspreſſez & pareillement la moüello
ta
ſpinale , enſemble toutes les parties qui ont connexion & conſentement auec elle,
s'enflamment: dont la vellie ne peut plusietter l'vrine . La ſtupeur prouient à cauſe
Pourquoy que la faculté animale ( pour la compreſſion des nerfs, enſemble de la Dure & Pie
il aduicne mere ) ne peut reluire par iceux , dont s'enſuit neceflairement difficulté de ſentir. A.
ирсr.. lors la veſlie & les inteſtins ne font plus leur adion naturelle , qui eſt d'ouurit &

altreindre, dont la mort s'enſuit. Quand l'eſpine eſt luxee en la partie exterieure, elle
ne cauſe point ces accidens ſuſdits, pource qu'elle ne fait point compreſſion à la me
dule ſpinaic, ny aux nerfs,

La maniere de reduire l'espine luxee en la partie exterieure.

CHAPITRE D
XVI.

Our reduire les vercebres gibbeuſes, c'eſt à dire luxees en la partie


Pourquoy extcricure , faut fituer le malade ſur vne table , le mettant ſur le
il faut tirer
ventre, & le faut eſtendre au longd'icelle ,& lelier commodément
en haut cu
en bas les par deſſous les aiſſelles, & au delſus des hanches, auec la tierce par ande
cie d'vne nappe . Pareillement luy faudra lier les cuiſſes& les pieds:
fpondylus
luxees. R puis ſera tiré en haut & en bas , & eftendu le plus qu'on pourra,

ſans toutesfois grande violence : car où telle extenſion ne ſe feroit,ilſeroit impoſlible


de reduire & remettre la vertebre luxee , à cauſe des apophyſes, qui ſont reçcuës &
reçoiuent pour s'entretenir les vncs les autres . Apres l'extenlion deuëment faicte, le
Chirurgien pouſſera de ſes mains en dedans la vertebre qui fera eminence. Et fion
ne la peut reduire en ceſte maniere , il faut enuelopper auec du linge deux baſtons
de groſſeur d'un doigt , & delongueur de quatre , plus ou moins , & les appliquer aux
Des Luxations . 557

А Cortez des vertebres luxees, & preſſer ſeulement ſur icelles, pour les iecter dedans
leur apophyſe articulatoire , ainſi qu'il c’eſt demonſtré par ceſte figure.

sii

UM

ees
UNC.

1343
B

cjepis

Et ne faut toucher ny preſſer ſur les apophyſes qui ſontau milieu, de peur qu'on
tief nc les rompe. On cognoiſtra la vertebreeſtre reduite, quand elle feraeſgale aux au - Le figne
quelfine .
7sperson
tres qui luy ſont proches. Apres la reduction fauc lier & preſſer la partie , & y mettreſera bien
es at
desaſtelles ou platines deplomb accómodees à ce faire : leſquelles ſeront fi bien ap .reduise.
ce
propriees qu'elles ne preſſentnullement ſur l'arreſte des ſpondyles , mais ſeulement
ploten
aux coſtez .Auſſi faut faire ſituer le malade ſur le dos, & ytenir longuement lesaftcl
allere
les, de peur qu'il ne ſe face reiteracion de luxation .

De la luxation des vertebres faicte de cauſe interne,


WAL
CH A PÍT RÉ xvii.

ES vertebres ſe luxent pareillement de cauſe antecedence, qui ſe fait par


l'imbecillité naturelle des parties , principalementdu ligament nerueux , par
lequel toutes les vertebres ſont liees enſemble. Or cedit ligament eſt plein
d'vn humeur glaireux & glutineux , quc nature a engendré autourdeſdites vertebres,
12014
ainſi qu'és autres articles , à fin que leur mouuement ſoit plus librc . Ceſtuy ligament
nc vaiuſques à la moüelle de l'eſpine, & hie ſeulement les vertebres par dehors :mais
are
ilya vn autre, dontla moüelle de l'eſpine eſt toute enuironnee,outre la Pie , & dure
:lenni
mere,à fin qu'elle ne ſoit offenſce par les vertebres , quand elles ſe mcuvene, laquelle
d'OL naiſt du Pericrane à l'endroit qu'il eſtconioint auec la premiere vertebre du col . Or
rieur quelquesfois il ſe fait mixtion de grande fluxion d'vn autre humeur contre nature ,
froid ,crud, gros,viſqueux & glutineux, dont s'engendre vne tumeur, qui fait diſten
fion des nerts qui ſortent des vertebres , & principalement des ligamens quiles liene .
le dy principalementdes ligamens : car il ne fautpaseſtimer que les nerfs, quiſor
tent de la moüelle, puiſſenttirer auec eux les vertebres, & les luxer,parce qu'ils ſont ſi Raiſon
D petits &mols,qu'ils nele peuuent faire. Orlesligamenseftans fort diftendus & tirez pourquoy la
vers la tuberoſité & tumeur noücuſe , tirent à ſoy les vertebres , à ſçauoir,au dedans ou luxarıon ſe
named
dehors,à dextre ou ſeneſtre, & par conſequent les luxent. S'il y a des tumeurs ou no- fair an de
dans ou dia
dofitez au dedans & au dehors,i'eſpine ſera tournee des deux coſtez à ſçauoir, au dc
hors, à dex
0106 - dans & au dehors, & aux coſtez : & voit on alors l'eſpine eltre tournee en figure d'arc, pop ou fene.
ou de S. ou d'autre figure qui ſera faite ſelon que les vertebres ſeront deiplacees de ſtre.
leur lieu naturel . Les Grecsontdonné certains noms à celles deſloüeures, à ſçauoir,

10 Cyphoſis, Lordoſis, Scolioſis: qui nous ont eſté interpretez par Monſieur d'Alechamps
100 en ſa Chirurgie Françoiſe. Cyphoſis, eſt la boſſe releuec en dehors: Lordoſis ,eſt enfon
ceure baiſſee en dedans Scolioſis, eſt entorſeure ou bofle non droite : mais tournec & Cauſes qui
entorſee , c'eſtà dire, ietteeà dextre ou à feneftre. Lescauſes qui font aintidifioindre femeilor
Line
les vertebres ſont cheutes, contuſions , l'habitude de tout le corpstrop humide, qui vertebres.
ime cnuoye ſuricelles deshumeurs glaireux & vifqueux, qui les amoliſſent, lubrifient, &
558 Le ſeizieſme liure
rclaſchent. On voit cecy aduenir aux ieunes enfans, à cauſe de leurtrop grande hu A
Pourquoy midice & tendreſſe : comme pour exemple )on voit qu'on plie facilement vne verge
Sounent les humide & verde. Auſſi il aduient par la faute de leursnourrices, quieſtreignent aux
os de la poi- filles la poitrine & les coſtesà l'intention de leur faire à l'aduenir le corps grefle,& les
trine feres hanches efleuces : car par telle faute les os de la poitrine font contraintsdeſe ietter
rent en de
Hant. tropen deuant,ou en arriere,donts'enſuit gibboſité & boſſe : & quelquesfoisyne ef
ſpaule ne croiſt pas,& demeure amaigrie, & l'autre croiſt & s’agrofſicpar crop. D'a
uantage la nourrice peut encores faire faute au coucher de l'enfant, qui le couche
pluſtoſt ſur les coſtes queſur le dos. Aufli au leuer , car ſi venans à leuer leurs enfans
elles les prennent ſeulement par les pieds ſans ſouſtenir le dos de l'autre main,à la
longue viendra luxation aux vertebres, à raiſon de la peſanteur des partiesſupcricu
res au regard des inferieures. Ce qui a principalement lieu auxpetitsenfans, à raiſon
qu'ils croiſſent plus en teſte qu'en tout lereſte du corps..
)
Prognoſtic. CHAPITRE XVIII.
B
CE I en l'aage d'enfanceles vertebres du Mecaphrene ſont voutees , les coſtes
Delaluxa s ne croiſſent point, ou peu, en large,mais ſe forjettent en deuant : & partant
tion des la poitrineou le Sternum perd fa largeurconuenable & s’aiguiſe en poincte.
vertebres Parceauſſi que les coſtes lone peruerties de leur ſituation naturelle , les malades de
qui vient uiennentaſthmatiques, ne pouuans auoir librement leur inſpiration & expiration
dès l'en- naturelle, à cauſe que les poulmons ſont preſſez, & les muſcles quiferuent à l'inſpi.
fance. ration :& partanefont contraincts, pourmieux auoir leur haleine, de tenir le col
Aeſchy en arriere: ce qui leur faict monſtrer la gorge groſſe en deuant : auſſi pour
languſtie & ftri &ture de la Trachée artcre,par laquelle l'air forcés poulmons,ilsre.
fpirent auec bruit , & en dormant ſoufflent. Ilsłontauſſiſujets àdefluxionsſur les
Hip.fe£t.:.poulmons:& dic Hippocrates,qu'ils ne viuent pas longues annecs. Si les vertebres
dulure des des lumbes ſont fortiertees en la partie interieure les malades ſont ſuiets à maladie
art, depuisdes reins, & de la veſſie : aulli leurs iambesleur dcuiennent plus grelles: la barbe & le
lafen. c. poildupenilſort
tilcs à
plustard ,&enmoindre quantité:& fontpareillementmoinsfer С
procreer lignee,que ſi le vice eſtoit à celle du Metaphrene. Les gibtolitezqui
viennent des cauſes exterieures , ſont aucunesfois curables: mais celles quiſont faites
de cauſes intericures ,ſont incurables, fion n'y pouruoit au commencementpar gran
Boljes here- de mechode . Parquoy ceux qui viennent boſſus decauſe hereditaire, c'eſt à dire,de
diraires in
Curables. pere & mere boſſus,nepcuuent eſtre guaris . Aulli quand l'eſpine eſt gibbeuſe en en
fance, & auant que le corps foit parfaitemēc creu ouagrandy ,elle ne croiſt plus, mais
les bras & les iambes ſe parfont. Et ne fauts'elmeruciller de cela : carà cauſe que les
veincs,& arteres & nerfs ſont peruertis de leur propre lieu ,aufli qu’à gráde difficulté
les eſpritsy peuuentreluyre, neceſſairement l'aliment n'y paruientpasen telle quan
tité qu'il deuroit : dont il s'enſuit emaciation , c'eſt à dire,amaigriſlement:mais file
corpsa acquis les trois dimenſions , c'eſt à dire qu'il ne croiſle plus, les parties del'ef
pine deuiennent ſeulement emaciees : mais desparties lointaines, comme le bras, &
Cauſe de icsiambes , fontdu toutſansmal. Carlesvertebresainſivicices ne gaſtent pas toutle
l'atrophie. corps,maisſeulement les parties quiluy ſont prochaines. Il nous reſte à parlermain
mouuementelbranler, D
tenant de la moüelle de l'eſpine,laquelle ſe peut par vn grand
fans que les vertebres ſoient luxees. Ce mal ſe peut appeller commotion ou concuf
de la mori lion : lequel ſe fait quand elle ſe deprime de ſon lieu où elle adhere. Les cauſes ſont
Concuſsion
alleSpinale.
pour tomber de quelque licu haut en bas , ou par quelquc grand coup orbe, ou pour
auoir eu l'altrapade. Peu reſchappent à qui tel accident aduient , pour pluſicurs rai
fons quele Chirurgien dogmatique peut bien excogiter & fçauoir. Pay differé iuf
quesicy vir poinct fore conſiderable pour le prognoſtic de la luxation des vertebres.
)
C'eſt que plus il y a devertebresluxees,moins eltdangereuſe la luxation :laraiſon eſt
qu'en tel cas la mouelle eſpinale n'eſt pas fi preſſee que quand iln'y a luxation que
d'vne vertebre , àraiſon que la luxation de pluſieurs vertebres fait en la moüelle yn
angle obtus, & ceHe qui n'eſt que d'vne , y fait vn angle aigu . C'eſt ceque tant de fois
repete Hippocrates en la ſcet.3. du liure des arc. que la luxacion orbiculaire de l'eſpi
neeſt moins dangereuſe que l'angulaire.
Deli
Des Luxations 559
De la luxation de l'os Coccyx caud.e, ou quenë. CH A P. XIX.
A
’Oscaudæ ſeluxe en dedans pour tomber violencemeorſur le cropion, " Le ligne
ou par quelquecoup orbe. Le ſigne qu'il eſt luxé, cft,quand le malade quelecrossa
pior eft lm
ne peut mettre letalon vers la felle,meſmesployer le genouïlqu'à gra- mé.
de peine & difficulté : & va à ſes affaires auec douleur : & ne ſe peut Cure de la
tenir aſſis,fice n'eſt ſurvne chaire percée . Pour le reduire ,ilfautmet lucationde
tre le doig, dans le ſiege,tant qu'il foit appoſé à l'endroit du lieu affe los de la
été,ainſiqu'auons dir en la fra & ure: puis on efleuera ledir os vers les parties ſupericu- queue.
1
resauec force, & de l'autre main on l'egalera en ſon licu exterieurement : puis ſera
6
traitté par remcdes cy -deſſus mentionnez. Il eſt affermy en vingt iours, durant leſ
quels ſi lemalade ſe leue duli&, faut qu'il ſoic aſſis en vné chaire percée,de peur de
faire reſteracion de la luxation .
De la luxation des coſtes. с на Р. XX ,

B Es coſtes par vne grande contuſion (opeuuent defioindre & luxer aux coſtez
des vertebres où elles ſont ioinces , & eſtre pouſſees au dedans: dequoy les an
ciens n'ont point parlé,toutesfois ilsconfeſſent que tous les os en general ſe
peuvent peruertir de leurs iointures. Le ligne qu'elles ſont luxées aux coſtez , eſt,
qu'auec les doigts on trouue vnc inegalicé ,à ſçauoir, cauité d'un coſté, & exuberan
cedel'autre : & lors qu'elles ſeront pouflees au dedans,on trouue vnc cauité au licu
où ellesadherent aux vertebres.Telles luxations cauſent pluſieurs & diuers accidens, les coſtes
à ſçauoir,difficulté de reſpirer, à cauſe queleur mouuement eſt empeſché; ioint auſſi ontmonue
quele malade ne le peut ployer & dreſſer.Et pour la córuſion faite luricelles, la chair l'o
ment, que
n nepeut
contuſe deuient bourſoufflée, pituiteuſe , muqueuſe, & glutincuſe , pour les saiſons pas mania
qu'auons declarées en la fra & ured'icelles. Doncques pour obuier à cels accidens, feftemēt ap
faut promptement faire la reduction,puison remediera à celte bourſouffleure.Sila perceuoir.
luxation eſt faite au coſté ſuperieur des vertebres, on fera tenir le malade debout, De la lu .
ayantlesbras ſuſpendus à quelque porte ou feneſtre, puis on comprimera ſur l'emi- xation fai
nencede la coſteluxće,tant qu'elle
ſoit reduiteen ſon licu.Aucótraire,ſi la luxation descope
eſtfaite ducoſté infcricur,fautquele maladeſe ployeayantles mains ſur lesgenoux, infericur.
Cpuis leChirurgienpoulſera ſur l'eminécctant qu'elle ſoit reduite.Etſi laluxation eſt
: faiteen la particiniericure,iln'eſt poſſible qu'elle ſoit reduite par la main dn Chirur
gien,non plus que la luxation des vertebres faire en dedās,pour les raiſons ſuſdites.
De la luxation de l'eſpaule. CH A P. XXI .
‫اح‬
L ſe fait facilement luxation en l’cſpaule, parce qu'en celle iointure les li
gamens ſont laſches, & la cauicé de l'Omoplate peu caue,& dc toutes parts
egale & liſce , c'eſt à dire, polie , & pareillement la teſte de l'avant-bras :ce
Na qui ſe fait parlemoyen des carcilages, & de certain humeurglaircux ,qui la lubri
fient & humectent : ioint auſſi qu'il n'y a point de ligament en ceſte iointure d'os en
ich os,commcilya en la hanclic , & au genouil. Er telle choſe a cfté faite par la pro
vidence de naturc, à cauſe qu'icellenefaitſeulement extenſion & flexion ,commelc
PI coude, mais fait dauantage : c'eſt qu'elle contournc lebras circulairementen figu
ul. se lupine & pronc, & en toutes parts. L'os adiucoire, qu'Hippocrates appelle l'a- Gal. Siúrlá
Duant-bras, fc peut luxer en quatre manieres, c'eſt àſçauoir, en la partie ſupcricure,in- Sens.1.ex
ferieure,anterieure,& exterieure:iamais en la poſtericure,à raiſon de la cauité du pal- 2. du liure
ilo leron qui reçoit la teſte de l'auant-bras:jamais auſſien l'interieure parcic de la iointu . des Art.
rc,tant pourlegrand & fort muſcle deltoïde qu'elle a pardeſſus,que la creſte du pal
% leron & de l'acromium qu'elle a tirauit vers le col,&l'apophyſe Ancyroïde qu'elle a
tirant en dedans. Communement & le plus ſouucnt elle ſe faic en la particinfericure:
C partant nous la deſcrisons premierement . Doncques le ſigne que la luxation eſt fai- Le vray
C. te en la partieinfericure, cſt, qu'on trouuevne cauité ſur l'eſpaule : & l'extremité de ſigne que
3 l'omoplate nommée Acromium , ſe trouve eſtre aiguë & auancée en dehors, parce l'os efluxé
quc la teſte du haut du bras eſt deſcenduë ſous l'aiſſelle, qui fait vne eminence. Le enla partie
coulde ſe iette en dehors , & s'eſcarte des coſtes: toutesfois l'approchant de force inferieures
on le fait joindre & coucher à icelles. Auſſi il eſt plus difficile au malade de l’auan
cerendeuant,que le retirer en derriere : davantage le braseſt plus long. Pareilles
Bbb
1

1
560 Le ſeizieſme Liure ,

ment le malade ne peuc leucr le bras ſur l'autre eſpaule, ny porter ſa main à la bou.A
chc, & ſene douleur quand il manic ſon bras en quelque maniere que ce ſoie, pource
que les muſcles tont preſſez & cendus,& aucunes de leurs fibres ſont rompuës
. Et ce
figncn'eſt pas ſeulement particulier pour la partie inferieure,mais pour les luxations
14
faites en toute autre partie de l'eſpaule .Il faut icy entédre ,que le ſigne de ne pouvoir
leuer lebras nyl'eſtendre,n'eſt certain pour conclurrela luxation. Car cela peutaufi
venir d'aure cauſe, comme contuſion , fra & urc, inflammation , playe,apoſtemeou
Belle anno . fcirrhe,ou quelqueAuxion faite ſur les nerfs, qui naiſſent des vertebres du col , pour
sasion . cftre diſtribucz au bras. Or il y a ſix maniercs de reduire la luxation ,quád elle eſt faite
en la partie infericure.La premiercauec le poing ou les doigts. La ſeconde aueclcl
paule miſe ſouslesaiſſelles: leſquelles deux conuienaçncà la deſloucure recente , & ako

six manie- facile à rcduire ,comme aux icunes enfans, & femmes, & ceux qui ſont peu charnus,
res pourre- & generalement qui ont vne habitude mollaſſe & pituiteuſe. La troiſieſme , auec le
duirela lu. polocon de fil pouſſé par le calon. La quatricſmc, auec vne pelote,icttape lebras ſur ors
xation qui
ſe fait des vne barre de bois , ou ſur vne courge ,ou autre choſe ſemblable , louítenuë pardeux
fous vers ,B
ſeruiteurs ,ou entre deux colomnes, ou ſur vne porte. La cinquieſme,auec l'eſchelle
l'elJaille. Laſixieſme,auec l'Ambi. Toutes leſquelles nous deſcrirons maintenant: & en quel
que maniere qu'elles ſoient luxées , faut pour les reduire tirer le bras en basvers la
terre .

La premiere maniere de reduire l’eſpaule auec le poing, on les doigtsioints enſemble.

с Н.Р. XXII .

L faut premierement tenir fermemcar le malade au deſſus de la jointure


de l'eſpaule, par un homme aſſez fort : ſecondement luy fairc tirer le bras
par vn autre au deſſus du coude contre-bas, tellement que la teſte de l'a
uant- bras ſoit poſec vis à vis de ſa boërre. Ayant tiré ſufiſamment, le Chi
rurgien hauffera & poulera deſes mains ou de ſon poing l'osdedans ſa cauité.Et icy
point no noteras,qu'aux luxations recétes, & aux ieunes , & aux peu charnus , & à ceux qui ſont
table. de temperamene mollaſſe , lors qu'on fait ſuffiſante extenſion , lateſte de l'os eſtant
..
deſueloppée d'entre lesmuſcles, & autres parties qui la comprimée, leſdits muſcles
de ceſte partie ſoudain laſchez ,aydētàreduire l'os : ce que i'ay cogncu quelquesfois:
car ne faiſant ſeulement qu'vne preparacion en tirant & hauffant vn peu le bras,lac
redu &tion ſe faifoic ſansy penſer : ce qui ſe faifoic par le moyen des muſcles qui ſere
Quelques tiroient vers leur principe, & ce faiſant ciroient l'os en ſaboërte.Ec ſi par ce moyen la
fou la 1. main n'eft fuffiſante, cu attacheras l’eſpaule du malade par le lien qu'auons cy -delus
fair outre figuré contre yn pilier,ou tenu par derriere par vn fort homme: puis le brasdumala
T'eſpoir de ſera lié au deſſus du coude auec vn eſcheueau defil, lequel ſera attaché auec vne
quafi de corde,& tiré parla moufle, qu'auons pareillement deſcrite cy-deſſus , & vn ſerviteur
joy -meſme
. cirera la cordc cant& fipeu qu'on voudra. Puis le Chirurgien aura vne ſeruiette,ou
autre lien , qui ſera paſſé ſous le bras du malade,aſſez prés de la delloüeure, lequelſera
paſſé ſurle col du Chirurgien , afin qu'il efleue le bras en haut: & de ſes deux mains
reduira l'osen ſon lieu, en tournantle bras vers la poitrinc du malade , commetu vois
par ceffe figure.

D
Des Luxations? 561
Apres la reduction fautappliquerſur toutes les parties voiſines de l'eſpaule yn
medicament faic de folle farine,bole armene,myrtilles,encens,poix,refine,alum ,
A lubcilement pulueriſez, & incorporez auecblancs-d'oufs. Et faut mettre ſous
l'aidellevnpeloton de laine ou de cotton, ou vne compreſſe de drapeau trempee Reſtraintif
ephuile roſac,ou de myrtille,auec vn peu de vinaigre , & vn peu d'onguent roſac
refrigerant de Galien ,depeur qu'ellene tiénc au poil, s'ilyenauoit. A preson fe
ralahigature large de cinq doigtsou plus oumoins, ſelon la groſſeur du malade,
&longue de deux braffees ou pluslaquelleſera à deux chefs, commençantle ba
dageparle milieu d'icelle,iettec ſous l'aiffelle, & mencepardeffus l'eſpaule mala Bandage.
de,puispar deſſousl'autreaiſſelle, de force que ſes reuolutions ſe croiſenten for
mede croix ſain & André,& faire cant de cours qu'il ſera beſoin. Apres on atta
chera le bras contre les coſtes, & ſeraſitué en eſcharpe aſſezhaur en figure d'un
angle droit, tenant la main pres l'eſpaule ſaine,à fin que l'os recentement remisne sicuation
combede rechef hors de latboëtre, & ne faudra remuer l'apparcil de quatre ou de du bras reco
einy iours , s'il n'yſuruien quelque accident. mis,
B
Autre maniere de reduire l'eſpaule auec letalon , lors que le malade ne ſe pourroit
tenir droiệt ny aſis.
CHAPITRE XXIII.

Aut faire coucher le malade contre terre ſur quelque couuerture out
matelas:puis on luy mettra ſous laiſſelle vn peloton defil,ou vne pe
lorte de cuir remplie debourreoude cotton ,degroſſeur proportion
E
neeà la capacitédel'aiſſelle,à fin que du calonon puiſſe mieux pour
fer l'os en la place. Car lorsqu'on tire le bras,il ſe fait plus grandeca
E:( uité en l'aiſſelle,àcauſedes tendons & des muſcles qui ſont desdeux coſtez. Puis
E
le Chirurgien s'aſſiera vis à vis du maladeau deuant du bras deſloüé. Et ſi c'eſt l'ef
paule droitte,ilaccómodera letalon de ſon pied droit ſur la pelotte :& fic'eſt l'ef
paule gauche, il accommodera le calon du pied gauche . Puis apres il empoignera
lebras dumalade, & letirera vers les pieds, & auec le talon il pouſſera fort contre
city l'aiſſelle. Et pendant quecela ſe fait ,ily aura un ſeruiteur par derriere la teſte du
&
malade lequel hauſſera lebras auec quelque feruictte delicc , ou quelque lien ou
courroye propre àce faire, & poſera la plante de ſon pied ſur l'eſpaule du malade,
C se la poufleraen bas.Et d'auantage pourbien faire,ilyauravn autre feruiteur aſſis
de l'autre coſté qui tiendra lecorps& le brasſain du malade, à fin qu'il n'obeyſſe;
&neſoit elltué ny tourné çà & là, lorsqu'on fera la reduction.
105

fr
salute

PUM
mow
ill
i

obb ij
562 Leſeizieſme Liure ,

A
Autre maniere de reduire l'espaule.

Il faut mettre l'aiſſelle du malade ſur le boutaigu de l'eſpaule d'un homme aſſez

fort, & plus grand que le malade, ou qu'il aye quelque choſe ſous les pieds pour le
hauffer, & luy tirera le bras vers ſa poitrine, en ſorte que le corps du malade demeu
rera ſuſpendu. Et Gilc malade eſt fort leger ,il faut que quelqu'vn pelant ſuffiſammét
pour luy donner contrepoids , ſe pende & branletur iceluy: & parce moyen le bras
eſtantainſi tiré contre bas , & eſbranlé en tournane & virant en la partie contraire,
faiſant cela auec l'ayde du Chirurgien ,qui preſſera l'eſpaulc du malade contrcobas
,8
arç duđion ſera'faicte , comme tu vois par ceſte figure.

7 .

Astre maniere de reduire l'eſpaule, CHAP. XXIV .

N prend un baſton allez plat , comme vric courge ( dont les cham
brieres deParis portent deux ſeaux d'eau ſur leurs c {paules) de lar
gucurde deux poulces, & long enuiron d'vnetoiſc : au milieu du
quel ſera attaché va peloton de fil, ou vn eſteuf de groſſcur conuc
dable à l'aiſſelle : & à chacun coſté y aura vne cheuille elleuéc, quí
engardera que l'eſpaule ne vacilc en çà ou en là. Puis y aura deux
hommes plus grands que le malade ( ou pour le moins auront quelque choſe ſous
leurs pieds , qui les hauſfera tant que beſoin ſera ) & tiendront le baſton ſur leurs el
paules , puis lemalade poſera ſon aiſſelle ſur le peloton , & le Chirurgien tirera fort
lcbras contre- bas , de façon que le malade demeurera ſuſpendu ſur le baſton .A donc
Ja reduction ſe fera comme tu vois par ceſte figure ſuivante : en laquelle cu voisp
aulli le baſton , auecque le peloton & les chcuillos. On peut nommer ce baſton,
Courge .
1

Des Luxations. 563

台B

с
La cinquiefme maniere de reduire l'eſpaule auec une eſchelle.
CHAPITRE XXV.

les N la rcduit pareillement aucc lo degré d'vne eſchelle,commeils'en


5) fuit. Il faut attacher ſur l’eſchelon quelque choſe ronde, commeun
nils. peloton de fil, de groſſeur qu'il puiſſe entrer deſſous l'aiſſelle du mala
de, comme auons dit : puis on le fera monter ſur vne petite eſcabelle,
& luy liera-on les deuxjambes enſemble, & le bras ſain derriere le dos,
afin qu'ilneprenne & fe remette ſur l'eſchelle quand on fera la reduction: puis faut
hole poſer l'aiſſelle du malade droittement ſur le peloron , & luy commander d'appro
cher ſon corps tant qu'il luy ſera poſſible contre l'eſchelon : autrement il yauroic

danger de rompre l'os du haut du bras,ſans reduire la luxation. Auſfine faut que
ACT le malade poſc la teſte entre les eſchelons. Puis on liera le bras luxé au deſſus du
coude auec vn eſcheucau defil, ou autre lien propre à ce faire, & vn ſeruitcurle ci
tera fort contre-bas, & tout à l'heure vn autre ſeruiteur luy tireral'eſcabelle de
deſſous ſes pieds , de façon qu'il demeurera toutſuſpenduå l'eſchelle. Ainſi l'os
Icra reduit ou deſoy-melme,ou auec l'ayde du Chirurgien , qui pouſſera l'eſpaule
contre-bas, en branlanc les bras d'un coſté & d'autre. L'os reduit, toucà l'inſtant
on remettravnc autre eſcabelle ſous les piedsdumalade, afin qu'il puiſſe retirer ſon
bras de deſſus l'eſchelle plus aiſémenr : car s'il le relcuoit trop contre-mont,il y au
roit danger que losrecentement remis ſortiſt dorechef de ſa place. Tu peux cognoi
ſtre l'induſtrie de reduire l'eſpaule parcelte figure de l'eſchelle: laquelle doit eſtre
toute droitte ,& non en autre figure.
Bbb iij
564 Leſeizieſme Liure,
lene veux cn ceſt endroit laiſſer en ar
riere l'aſtuce & inuention du Chirurgien
de Monfeigneur le Duc de Lorraine,noma
mé Nicolas Picart, lequel fut appelé en vn
village pres Nancy, pour reduire vneluxa
tion del'eſpaulc d'on païſan :en la maiſon
duquel il n'y auoit que luy& ſa femme. Il
mit & attacha ledit paiſan lurvnceſchelle,
comme deſlus auons dit , & print vn baſton
cntrcſes jambes, & le pofalous l'vn desef
chelons, & attacha vn lien au deſſus du

‫ایمان‬
‫وبوم‬
coulde du bras luxé:puis de toute ſa peran
teur & force preſſa ſur le bafton , & com
manda à la femme de cirer la felic de der
202
fous les pieds : & cout à l'inſtant remic l'os
en fon licu , comme tu vois par ceſte figure. B

Ee par faute d'vne eſchelle,on ſe peur ai


der d'une perche polec en frauers dc deux
colomncs, ou d'vncporte , comme tu vois
par ceſte figure: en laquelleteſt monſtrévn
bois auec liens , qui te ſera doclaré tout
maintenant.

Figure pour reduire l'espaule utre figure pour reduire


fur l'eſchelle. l'espaule ſur une porte.
wippocr.eu
commence
ment dus
liu.des fra
WH
Etures fast
mention de
res deux
moyens de
reduire l'e
ſpaule los
e.

ID

A

Des Luxations: 565
Autre maniere de reduire l'espaule. CHA P. XXVI.
AIPPOCRATES loüeſurtoutes lesmanieresdereduire l'eſpauleluxée,ceſte- Hipp,asr..
cy. Il faut prendre, dit-il,yn bois large de quatre ou cing doigts,& eſpais low.desar
L de deux,oumoins,& de longueur de deux coudées , ou plus court. Il faut pres
que l'un des bouts foitfort efroic,& fort ténuë: &qu'ily ait une petite teſte ronde,les,fensparo
.19.
& yn pelu'caue , & qui ſoitvn peu eminente , non vers les coſtes,ains vers la reſte de
l'os du haut dubras, afin qu'eltant mis ſous ladite teſte de l'os du haut du bras , ıl ſoit Deſcription
approprié à l'aiſſelle pres lescoſtes. L'oncolera quelque piece dedraa p u bout du de l'infra
dit bois , ou quelques compreſſes de cotron , ou de linge , afin qu'il bleſſe moins les mens alma
bio
partics où il touche. A pres ilfautmettre le plus avant qu'on peut la reſte dudic bois
en l'aiſſelle, entre la teſte de l'os du haut du bras & les coſtes. Pareillement cout le
brasſera eſtendu ſur ledit bois, & lié au deſſous de l'aillelle ,& vn peu au dellus du
coude & de la main, afin qu'il ſoic immobile. Or c'eſt choſe qui importe, & qu'il faut
faire que le boutde cebois paſſe la teſte de los du haur du bras,defaçon qu'il entro
fort auant fous l'aiſſelle. Enapres il faut mettre vne grande piece de bois en tra
Buers,de groſſeur du manche d'vne houé, au milieu dedeux colomnes , auſquelles la
dite picce ſoit bien attachee :ſur laquelle auec lebois il faut mettre tellementlebras,
qu'il ſoitd'un coſté, & lereſte du corps ſoit de l'autre.Et doit ladite piece eſtre fous
l'aiſſelle : & apres il faut cirer d'vn coſté le bras autour de la picce de bois , & de l'au
tre coſté il faut tirer lecorps. Or il faut lier la piece de bois ſi haut,que le malade
foit pendu de tout le reſte du corps , de ſorte qu'il ne touche en terre Auſſi qu'on le
balance contre bas. Ce moyen de reduire la luxation de l'eſpaule eſt le meilleur de
tous les aucres. Au lieu de deux colomnes ,on s’aydera d'vne cſchelle,ou d'yne por
prenue de
te , ou de deux pieds de lia. Maiſtre Henry Aruet Chirurgien demeuranta Orleans, l'inftrumét
homme de bien ,& grandement experimenté en la Chirurgie, m'a affermé que ia Ambe pas
mais n'auoicfait fautcà reduire ceſte luxation par ceſte manicre , fi par ſuccellion de experience.
temps ( comme dit Hippocr.) la chairn'eſtoit accreuë en la cauité de la iointure, &
aulli lateſte de l'os n'auoit fait vn licu tout batcu , auquel elle fuſt delcenduë. Car
alors l'os ne pouroit eſtre remis , ny demeurer en ſon licu , mais retomberoit au lieu Dexterire
battu & ja calleux ,qui tient licu d'vnciointure. Dauantage , ne veux encor oublier requiſe à
Cde bien intruire leieune Chirurgicn , que ſi dauanture la teſte & l'os du haut du bras s'ayder, do
faut à entrer tout à l'heure en la cauité,ilfaut que le Chirurgien branle çà & là le bras ambio
diſloqué, & parce moyen la teſtedel'os r'entrera en fa boëctc: & y eſtanır’entrée,on
r'habillera & appliquera-on les compreſſes & les ligatures, comme nous auons dit
parcy.dcuant.Outre & pardeſſus les figurescy - deſſus depeintes , i'en ay voulu encor
donner un autre, pour réduire ladite luxation auec la piece de bois qu'eſcrit Hippo
crates,quiſera attachée d'vne cheuille de fer dans vn treteau , laquelle ſe pourra
hauſſer& bailler tant & li peu qu'on voudra, comme tu vois par ces figures.
A denote le bois. B le treteau .
Gloffocome d'Hip
pocrates , nommé
Ambi.
TRUNWALD

D B

Bbb jiij
566 Le ſeizieſme Liure ,
Or le malade doit eſtre aſſis ſur yne petite A
felle, vn peu plus bas que n'eſt la hauteur du
tretcau , ayant les pieds licz enſemble , de
peur qu'il ne s'elleue lors que le Chirurgien
reduira la luxation :cequ'il fera ayant poſé
& lié le bras luxé ſurlapiece de bois,&icello
appliquée ſous la teſte du haut du bras.com
mea eſté dit cy -deſſus : & apres cefait, bail
fera le bout deladite piece de bois oppoſite à
la teſte cauc & ronde contre -bas. Ce faiſant
l'os ſe reduira en la boëte. Dauantage ict'ay
encores fait depeindre en particulier la pie
ce de bois , nommce Ambi : laquelle en la
teſte a vne cauité marquée par B. & la tora
licé marquée par A. auec trois liens pour
lier le bras ferme , de peur qu'il ne vacille çà B
où là, comme tu vois par ceſte figure.
Depuis la premiere impreſſion de mon
Livre , eſtant à Nancy en Lorraine par le
commandement du Roy, pour la maladie
de Madame la Duchcffc : Maiſtre Nicolas
Picart, Chirurgien de Monſeigneur le Duc,
me monſtra vn Ambi,auquel ilauoit adiou
fé quelques choſes pardeſlus celuy que i'a
vois tiré d'Hippocr.duquelie t’ay bien vou
lu donner le portraix , enſemble l'explica
^식

tion d'iceluy.
Figure dudit Ambi, enſemble la ſituation du malade.
C'eſt une
chole bien C
decēte aux
Chirurgiēs an
t
demeuraus
Aux villes
d'auoir reb
inftrument
pourreduir A
relesluxe-.
sions de
Pipaule.

1
D e s Luxations.
AA Monſtre deux ailerons orei
ou lles qui ſont audit Ambi , afin de retenir le56
hau7t
A dubras, qu'il ne vacille çà ne là.
BB Le pilier lus lequeleſt attaché ledit Ambi.
CC La petite cheuille qui tient ledit Ambi ioin dans le pilier.
DD Les viroles quitiennent ferme la patte du pilier , afin qu'ilne ſe hauſſe , o
RAPPORTO

cille en la redu &tion .


EE Les trous de la patte où eſt inſeré le pilier ioint au plancher, ou va

La maniere de reduire l'espaule: quand la luxation eſt faicte en la partie anterieure,


CHAPITRE XXVII.
ľ
L n’aduient pas ſouuent que l'eſpaule ſe luxe en la partie anterieure.
'
'

Toutesfois iln'y a rien qui par vacſoudaine violence ne ſe faco: telle


ment que les os le luxent , combien que leurs articles ſoient bien munis
B pour empeem
fcher la luxation : commel'enaccet article ill'yexatr
vnemgrand ob
printot ta cle ou peſchement, à ſç auoir romium , & ité de l'os
furculairc,quielt appuyé de contre, & auſſi le grosmuſcle& fort,nommé Epomis , & Hip. feet.io
celuyà deux teites , & autres . Donc lors qu'elle ſe fait, il y a vne grande violence: ce
qu'Hipp.dit n'auoir iamais veu : neantmoins Gal.telmoigne l'auoir veu cinq fois: liAturte des
vne foisen Aſie es la ville de Smyrne,& quatre en la ville de Rome: laquelle, dit -il,
eltoicen ce temps-là ſi peuplec, qu'on pouuoit dire que c'eſtoit l’Epitoinc de toute 2 . . ſent.
la terre habicée: & aux villes où Hippocrates habitoit , n'y pouuoit auoir tant de Gal. coms.
gens qu'en vne ſeule ruede la ville de Rome. Parquoy Galien dit, qu'ilne ſe faut cl- Sur la ſext .
merueiller s'il n'auoit veu telles luxations. Caroù il y'a beaucoup de gens , on void 1.des liures
parciliement pluſicurs & diuers accidens. Demapart, ie proteſte n'en auoir iamais des Art,
veu qu'vne ſeuleen vne Nonnain , qui ſe voulant lauuer de ſon Monaſtere , ſeietta
d'vne feneſtreen terre , & tomba ſur le coude : dont elle ſe fit luxation en la partie an- ſe
sint
gn.es.23 .
terieure del'epaule. On peut cognoiſtre telle luxation par la figure de la partie vi
ciée, & en touchant de la main deſſus l'article , on trouue la teſte de l'auant -bras vers 1

Cla poitrine . Pareillement le malade ne peut flechir le coude . Telle luxation eſt re
duite commeles autres , à ſçauoir en cirant & pouſſant. Et pour ce faire, faut faire
Coucher le malade à la renuerſc, & faire l'extenlion du bras à la partie contraire. Mais
premierement que ce faire,ilfaut mettre un lien propre pour tenir la iointure ferme- Seft.l.fente
ment ( comıneceluy qui eſt appelé deGalien ſurle liure des Articles, Carcheſicn)& 23.
remplir la cauité de l'aillelle d'vn peloton defil, ou autre choſe ſemblable, & tirer le
bras pardeſſusle coude. Ec faut noter, que lors que la teſte dudit os eft aſtreinte des
mutcles, il faut tourner vers la partie poſterieure, quieſt oppoſité à l'anterieure. Aufli
fe donner garde qu'il ne combeen bas ſous laiſſelle: ce qu'on euitera en l'eſtendant
& tirant vers diverſes parties;à quoy aufli ſert de munir & garnir la cauité de l'aillelle
du peloton deffuſdir . Puis faut pouſſer la teſte de los qui eſt ſerrécentre les muſcles:
& apres en laſchant l'extenſion, faut laifler remettre l'osen ſon lieu aliec les meſcles,
qui s'en retournent d'eux- meſmes à leur origine.
De la luxation de l'eſpaule faicte en la partie exterieure.
D
CHAPITRE XXVIII .

L ſe peut faire luxation en l'eſpaule vers la pertie exterieure: mais auſi re


rement. Le ſigne de ceſte luxation eſt, qu'on ne peut eſtendre le bras, & ſe
mcutplus difficilement en l'eſtendant vers la partie exterieure , que vers
l'anterieure : joind aulli qu'on trouue vnecminence de la teſte de l'os vers
la partie exterieure de l'eſpaule, & vne cauité à celle qui eſt contraire. Pour reduire come l'ex
telle luxation, faut fituer le malade ſurle ventre,& luytirer fort le coude vers les doie former
parties contraires à la luxation ,& poufler l’eminence en la cauité: & par ainſi l'osſele malade
remettr a en laplace quelq
.En ue maniere que la luxatió de l'eſpaule foit faire pour la
reduire, il faut eſtendre le bras verslapartic inferieure ,le tenant touſiours droit. Le enrienonlalapaluxoa
rtie
Signe que la reduction eſt faicte en toutes ces manieres de luxations c’eſtqu’on oit vn poßericafosneites
568 Lefeizieſme Liure ,
bruit faiſant clocq, lors que l'os entre en fa boëte. Pareillemene le malade peut
plier, eſtendre, & hauſſer le bras:ioint auſſi quela douleur ceſſe: Outrc- pluson leAs
cognoit en conferant le bras malade aucc l'autrc ſaint, comme auons dit cy.del
fus.Apresla reductið faite,on appliquera medicamenspropres,& mettra on ſous
l'aiſſello vnc pelotte, qui ſera accommodée ſelon lacauité, & pareillement des
comprelles aux coltezoù ſera faire la luxation. Puis feroncliez auec vne bonne
& large bandcà deux chefs,quiſera tournée ſur l'eſpaule en forme de croix ſainą
André,& ſera menée par deilus l'autre aiſſelle, & fera -on tāc de reuolutiós qu'il
ſera beſoin. Puis le bras fera tenu en eſcharpe, faiſant vn angledroit. Laquelle fi
, à la main luxče ou
gure non ſeulement en ceite luxation , mais auſſi au coude &
fracturée eſt propre ,parce qu'elle eſt la moins douloureuſe ,ioint que ladite par
tie pcu longtempsdemeurerimmobilcenceſte figure.
Delaluxation faięte en la partie ſuperieure del'eſpaule,
CHAPITRE XXIX.
B

L ſe fait auſſiquelquesfois luxation à laſuperieure partie de l'eſpau


le.Le ſigne deceſte deſloüeure eſt, que l'on trouue la ceſte de l'os du
haut dubrasioignantle deſſous de la furcule, & cauité ſous l'aiſſelle:
& le coude plusfort eſloigné des coſtes, que lors que la luxation eſt
faictcen la partie inferieure, & ſemblablement impotence dubras.
Pour réduire telle luxation ,faut que le Chirurgien mette ſon eſpaule ſous le coudc
du máladé, & qu'il la hauſſe contre-mont ,& à l'inſtant qu'il preſle ou face preffer
& poufler par vn feruiteur la teſte de l’os dans ſa cauité. Autre maniere. Il faut fai
re coucher le malade à la renuerſe ſur vne table, ou à terre, & qu'vn ſeruitcur tirele
bras,& le Chirurgien de ſes mains pouſſera l'osen la place. Apres la reduction fai
te, on y procedera comme nous auonsdit es autres luxations, ſçauoir qu'on mcr
tra les compreſſesoù l'os eſtoit forietté, conduiſant la ligarure,commcauonscy .
deuant enſeigné.
Dela desloueuredu Conde, CHAPITRE XXX. С

Ce quie
E Coude ſe peut pareillement luxer en quatre manieres,à ſçauoir
ť Autheur en la partie interieure, cxterieure, ſupericure & inferieure. Parla
appelle fun
partie interieure , i'entends celle qui regarde le centre du corps, le
perieure
bras eſtant en la ſituacion naturelle, ſçauoir eſt , en figure entre
inferieure prone & fupine:par l'exterieure,celle qui luy cſt oppoſite: & parla
partie. partie ſupericure, celle qui regarde le ciel: & parl'inferieure,celle
Hipp.ſent.qui regarde la terre.Et d'autant quela iointuredu coude a plus grandes diverſitez
dern.fekt.z. d'eminences & cavitez,que celledel'eſpaule, d'autant auili la luxation d'icellecft
des fractu .plus faſcheuſe.Auflil'osledéplace plus difficilement,& pareillemécſe reduit plus
res l'appelle malaiſément.Orle coudeeſtjointaucc l'os du haut du bras. deentrent mutuelle
anterieure

o poſte. ment l'vn dedans l'autre, cõmevne ficheen vn gondqu'on attache à vne feneſtre
Tielre . pour l'ouurir & fermer. Autre comparaiſon. L'os du coude tourne autour duhaut
Außi fait du bras,comme autour d'ynedemic poulie, pour flechir & eſtendre le bras. Ie dy
Celle chap: demie poulie,pource que ſiNacure l'cuſt faittournerdauantage, l'action du bras
6.liu.8 .
n'euſt peu ſe faire commodément:parce que le bras ſe fuſt pliéau dehors conmed
au dedans:ce que l'on peut cognoiſtre par l'Anatomie.Donc nous dirons , que le
Gal, lin.2. coude ſeluxeà cauſe que ſes deux apophyſes netrauerſent pas toutautour de los
del'uso des del'auant-bras,quile reçoiuent.Parquoy lorsqu'on fait plusgrandeflexion, que
part.
Cauſes. là où ſon apophyſeinterieurerécontre le fondsde ſa cauiié, l'apophyſe poſtericu
a Celione re ſe déplace enderriere:& auſſi quand on fait vneextenſion violente, l'apophyſe
eft attribué anterieuretouche le fonds de ſa cauité , & alors ladite apophyle ſeiette horsde
par Hipp: ſon lieu: & ceſtelaxation eſt plus difficile à reduire que la premiere:iointaufli que
e celle à
la lixarion l'extremicé du coude , nommee Olecrane,eſt fort haute, & ſon interieurc fort ab
faire en la baiſſee. Parquoy il nous eſt plus facile à le flechir qu'à l'eſtendre à cauſe dequoy
partie an telle delloüeure ſe fait par plus violente force, que celle qui ſe fait en la partieinte
serieatre rieure.Lelignedeceſeluxació et quele bras demeure cftendu, & ncle peut plice
Des Luxations .
569

pource que l'apophyſe interne du coude demeuré en la cavité externe , qui eſt en la
parcieinfericure de l'osdu haut
du bras,laquelle eſtoit auparauantoccupéede la par
tie interne de l'Olecrane, qui eſt l'extremité du coude : dont alors la reduction eſt
a Ce ligue
cres-difficile pource que ladite apophyle demeure accrochée dansicelle cauité . Le of atribué
ligne que la luxation eſt faite en la partie interieure,c'eft que le bras ne ſe peut eſten- par Celfe ad
dre ,& demeure plić . " Leſigne qu'elle eſt faite aux parties laterales eſt, que la figure la luxation
de la jointure du coude demeure viciée entre la flexion & l'extenſion . Et en coutes en lapartie
cesluxationsl’action du coude ne ſe peutfaire iuſques à ce quela reduction foitfai - pofterieure,
6'il appelle
cc. Pareillement on trouue vne eminence du coſté où la luxation eſt faite, & vne ca. partis la .
uité à la partic contraire: ce qui eſt commun à toutes luxacions. Outre -plus la luxa- terales
tion du coude ſe fait complette, ou incomplette. Celle quieft incomplette, eſt facile qu'il a die
à ſe faire, & auſſi à ſe reduire. Mais celle qui elt completce, tout ainſi qu'elle eſt diffi- partie ſua
cile à ſe faire auſſi eſt - elle forcdifficile à reduire, ſi on n'y procede promptement, & pereure com
Bauant que l'inflammation y ſoitſurucnuë: car si elle y eſt ja, la curacion et tres-diffi- inferieure.
ce ſigne eft
cile, & fouuent du tout impollible, principalement celle qui eſt faiđe en dehors. attribuépar
Celle à la
La maniere de reduire la luxation du coude, faicte en la partie exterieure. luxation
en la partie
interieure 1
CHAPITRE XXXI.
o extes

T lors qu'on void que le bras du malade demeure preſque en figure rieure.
ordi
droite,ſansle pouuoir aucunement Acchir, faut conclurre la luxation Tel de
le f
eſtre faite en la partic extericure. Parquoy la faut reduire prompte- ložeure re
hacer
ment , à cauſe qu'il s'y faic Auxion & inflammation , pour l'extreme quiereprõps
al
douleur qui interuient. Pour faire donc la reduction , en quelque ſecours,
partie que la luxation ſoit faire,fautqu'vn ſeruiteur tiennc fermemét
lebras du malade au deſſous de la iointure de l'eſpaule, & le Chirurgien cirera le bras
quins Cparlamain ,& pouſſera los delauant-bras en dehors, & l'eminence du coude en de
dans , & tirera le bras pecit à petit en le cournant d'un coſté & d'autre , afin de ieccer
l'os en la cauité.

Ie veux icy aduertir le ieune Chirurgien , que pour reduire ceſte defloücure ne Poin
t no
eicina faut Alechir le bras,pource quciamais parcemoyen l'os ne pourroiteſtrereduit,à cau table de
ſe que l'apophyſe interieure de l'os du coude eſt en la place de l'apophyſe extericuregrande ima .
W. de la cauité de l'os du haut du bras : & partant en pliant le bras on ne faic ſeulementportance.
que hauſſer le coude, & ne le cire-on pas en la cauité. Etoù telle choſe ne ſe pourra
faire par la main ,adoncfaut faire que le bras luxćembraſſe vne colomne, ou le pied
d'vn lią ,& qu'ilſoit un peu plić : puis on empoignera d'vne forte lifiere l'extremité
‫ اما اعلان‬. ‫م‬ du coude, dite Olecrane, la tirant versſa cauité aucc yn baſton entorcillé dans ladice
online
lificrc, comme tu vois par ceſte figure.
fered

Aveces
r
ulce
lebia

hos
dioz
2
1002
des:
570 Le ſeizieſme Liure ,
A
La figure qui monſtre à faire la reduction La figure qui monſtre à faire la reduction FUNT
du coude autour d'un pilier y
du coudepar un lien. proces
auec un baſton. HLAVE

CR calen
PV
C
uelo
: bud

Le ſigne que l'asfera reduir, c'eſt que


malade eſtend & flechic le bras , & la dou EC
leur eſt ceſſec , & la figure viciće remiſe ca
fon eſtat naturel .
Signes de
redu &tion . Autre maniere encore plus facile : c'eſt
que le bras eſtant autour du pilier, onmer
tra vn bien fort lien de la largeur d'vn
poulccſur l'extremiré du coude, puisſera tirétant que l'os tombe en la place : com - c
me tu vois par ceſte figure.
De la luxation du coude,faiteen la partie interieure
CHAPITRE XXXII .

I la luxation eſt faite en la partie intericure , pour la reduire il faut eſtendre


1
fort le bras, & le ficchir ſoudainement & impcrueuſement, de façon que la
& main touche droit ſur l’eſpaulc dubrasluxé. Aucuns nietient quelque choſe
sonde & durc au ply du coude,puis flechiſícne fort le bras,comme nous avons dit.
De la luxation incomplette du coude, faicte en la partie ſuperieure ou inferieure.
Si l'os du coudceſt ſeulement quelque peu ſorry de fa place en la partic ſuperieure
Situation ou inferieure, en le cirant & pouſſantvers ſa cavité, on le reduit facilement en ceſto
banda, façon.Deux ſeruiteurstiendrontle braseltendu (l'vn par l'auant-bras, & l'autre par le
ge due bras braſſal) & letireront chacun vers foy en parties contraires &
, lc Chirurgien avec la
temu . main repouſſera l'os en ſon licu .Apresces seductios faides,faut poſer le bras en figu
re d'angle droit , & le bader , & y appliquer remedes cy -deſſus mentionez,puisle pen
dreaucol auec vne eſcharpe,ainſi qu'auons dicen la luxation de l'cipaule.Hippocra
tes veut qu'apres la redu & ion de ceſte partie , le malade remuë fouuent fon brasen
figure pronc & ſupinc,& auſſi qu'ill'eſtédc& flechiſſe: pareillemēc que quelquesfois
allouſcuedeſa main quelque choſe pelante ,afin d'adoucir & affoupir les ligamens
quilicnt ceftcioincurc,depeur que les os nes’vniſlent & coaleſcent enfemble parvne
maniere
1

Des Luxations . 571


A maniere de callus , nommédes Grecs, Ancyloſis : qui ſeroit cauſe que le malade nc d'Ancyloſis
caufes
pourroit iamais apres fleſchir nyeſtendre le bras. Cequei'ay veu louuentaduenir,
pour auoir eſté trop long-temps ſans auoir remué ladite iointure:parceque l'humeur
viſqueux, quieſt naturellement auxiointures , & autres ſuperfluirez qui interuien
nencà cauſe dela douleur, s'y endurciſſent, & fontcoller les os enſemble. Parquoy
pour obuicr à tcl accident, il faut remuer l'appareil de trois iours en trois iours, &
commander au malade de remuer ſon bras en toutesmanieres , toutesfois ſans nulle
violence. Icelle luxation eſt aſſeurée en vinge , ou vingrcinq iours, ou moins , ſelon
les accidens qui ſeront interuenus. Il faut dauancage que le Chirurgien contemple , Delaluxatið
que lors que le coulde eſthorsde ſon lieu entierement, l'autre os nommé rayon, ſe du rayonpres
delboëtce pareillement. Partanten reduiſant le coulde , il prendra garde de reduire du coulde.
le rayon en ſon lieu : 8 notera qu'en la partie ſuperieure il y a vne apophyſequi eſt
caue & ronde , qui reçoit l’os du haulcdu bras , & yne pecite eminence où s'inſere le
muſcle Biceps .
B

De ladeſlouëure de l'extremité del'osdu Coulde, appelléeftyloide, qui eſt prochedu Carpe.


CH APITRE XXXIII.

Velquesfoisl'extremité ou apophyſe de l'os du coulde , appellée ſtyloide,


eſt ſeparée du rayon, quelquesfois en dedans , & quelques fois en dehors ,
pour eftre tombé de hault ſur les mains.La maniere de le reduire ſera dele
repouſſer en la place, & y faire bonne & ſeure ligature , & y appliquerme
dicamensgrandementaſtringens & deſiccatifs.Maisencoresqu'on face couces cho
ſes neceſaires, leditos ne ſe peutiamaisbien reioindre & tenir à la place dont il eſt
iſſu. Ce qui eſt confirmépar Hipp.au liure des Articles , qui dit : Quand le rayon eſt sen.I.ſect.2.
ſeparé de l'osdu coulde, telle ſeparation eſt incurable, comme coute autre diſtra- ſen. der
đion des osioints par ſymphſye, c'eſt à dire, vnion : pource quel'osne peutbiende- niere,fe&t.3.
meurer en la place, à raiſon desligamens qui ont eſté trop eitendus& relaſchez :: cc
C quei'ay veu ſouuentesfois, quelquc diligence qu'on y peüſt faire.
Dela luxation du Poignet. CHAP. XXXII11 .

E Poignerelt la conion &tion du radiusauec les huiť os du carpe.Eniceluy ily a icy para
il y a double iointure , afin que l'vne ſupplee au defaut de l'autre. Exemple. reille diſcor
Lemouuement circulaire, c'eſt à dire, courner la main , en deffus, en def- danceen la
ſous, ſefait par le benefice du rayon , & la fuxion & extenſion par le moyen de los nomination
du coulde. Il fait eniceluyluxation interieurement, exterieuremenc , & aux coſtez. des eſpecesde
luxat ions; un
Le ligne qu'elle eſt faite incerieurement , c'eſt que la main demeure renuerſée : & raport desſin
lors qu'ellel’eſt excerieurement, laman demeure fileſchie.Et ſi elle eſt aux coſtez , la gnes à chacu.
main eſttournée au concraire , à ſçauoir vers le poulce & le petit doige . Anlli quel- ned'icedes ,
‫عام‬
quesfois il n'y a que l'un des os luxez: qui ſe cognoiſtra facilement par la figure vi- enirel' Au
ciée,& par l'ađion bleſſee.Lemoyen dereduireleſditsos,eſt,qu'il faut tenirl'auant-thewr,grill
,
bras, & tirer aſſez forcla main , la ſituant ſur vne table , ou ſur quelqueaucre choſe le, o Hipp.
ferme,& faiſant quela partie d'où l'os eſt luxé,ſoit au coſtéinfericur d'oùileſtforty, fent. 2.fect.z.
D & cellcoù il eſt luxé , au colté ſuperieur. Puis fauc pouſſer ſur les eminences des os, par ananı ch.
tant que la reduction ſoit bien faite. 30.

Delaluxation des os du Carpe. CHAP. XXXV.


1

V Carpe ily a huict offelees,leſquelspar vne grande force peuuent ſortir de


leur ſituation & conionction naturelle . Les ſignes ſont,qu'on trouue qu'ils signes.
font tumeur & cauité , ainſi que les autres os luxez. Le moyen de les re
duire, eſt,qu'il fauc faire ficuer la main du malade ſur vne table : & s'ils ſont
luxez au dedans , on couchera la main ſur la cable à la renuerſe : & lors le Chirurgien operation.
preſſera de la main ſur lesoseminens , & les reduira en leur lieu : & s'ils ſont luxez en
dehors , le dedans de la main ſera poſé ſur la table , & fera preſſée comme deſſus: 8
û laluxacion clt vers yn des coſtez, on les repouſſera en la partie contraire & oppo
CCS
572 Le Seizieſme liure,
fire: & la reduction faite, on yappliquera les remedes neceſſaires: & fera la main A
liée & bandée , & le bras poſe en efcharpe.
' De la luxation desos du Metacarpe. CHA P. XXXVI .

Comment ſe V Metacarpe il ya quatre os , deſquels les deux du milieu ne ſe peuuent lua


peuuée luxer
les os du Me- A xerà coſté à cauſe de leurs pareils ou compagnons.Auſſiceluy qui ſoufient
l’lodex, & l'autre qui ſouſtient le petit doige , ne ſe peuvent luxer du coſté
à ceux du milieu , mais ſeulement de l'autre coſté: cousſe
14carpe. auquel ils foncoppoſez
pequentluxeren dedans & en dehors . La maniere de les reduire eſt ſemblable à celle
du Carpe .
Delaluxation des Doigts. CHAP . XXXVII. : ‫פתגם‬
‫ده گا۔‬

La reduction Es doigtsſeluxent en quatre manieres,à ſçauoir,en la partie interieure,ex. B


des doigts lu cerieure, & aux coſtez. Pour les reduire, il faut tirer & pouſſer de figure
xe ºff facile. droicte, & par ce moyen on les remettra en leur lieu , lls font reduits facile
ment , parce que leursioincures ſont peu caues, & auſſi qu'elles ſont ſuper
ficielles, & leurs ligamens laſches & foibles. Ceſte luxation eſt communémencaffer
mie en douzeiours , ainſi que celles du Carpe & Metacarpe. to

De la luxation de la Hanche. CHAP. XXXVIII.

Galien ſur la AHanche ſe deſloučen quatre façons,à ſçauoir en dedans,en de


fent.47.de la hors,en deuanc , & en derriere: mais le plus ſouuent en dehors &
4.fe&t.duliu . en dedans , en deuant & en derricre rarement.En ceſte iointure ne
des Articl.
ſe peut faire luxation incompletre, principalement des cauſes ex
terieures,ainſiqu'il ſe fait au coulde, à la main , au genoüil, & àla
cheuille des pieds, à cauſe que laceſte de l'os de la cuiffe eſtronde,
& que la cavite où il ſe logea des bordscout autour : ioint que Ics с
muſcles en ceſte partie font forts : & partant il ne ſe peut faire qu'vne partie ou por
cion de la elteloic dedans ſa cauicé, & l'autre dehors,pource qu'en tournant & moue
uancelle retourneroit dans ſa bočice par la force desmuſcles :maisés luxacions faites
de cauſe incerne ; elle peuteſtre incompletce , parce que les muſcles & ligamens ſont
signes ago
relaſchez, & n'ont la forcede ramener ledir osenſaiointe ou cauité. Le ſigne qu'elle
cauſes dis eſt deſboëctée en dedans,eſt que la iambe malade comparée à la laine fcmonftre plus
сех. longue , & legenuüil plusabbaiſſé& tourné en dehors , & le malade ne peut plier la
iambe : & auſſi qu'à l'endroit de l’aine on trouue manifeſtement la reſte delos femo
ris,qui y eſt arreſtée & retenuë.Elle ſe monſtre pluslongue,pourceque la teſte dudit
os n'eſt plusen la boërce, & eſt deſcenduë plus bas,parcant la iambc s'allonge:auflile
genoüille tourne en dehors, parce que de neceſſité le bout inferieur de l'os femoris
ſe courneau contraire de la boërce , qui eſt vne choſe communeà tous les os luxez ,
que quand il y a luxation d'un coſté, l'autre extremité du meſme os eft touſiours
Gal. au liu. tournée vers la partie oppoſite à celle qui eſt luxée. Parquoy quand la teſte de l’os de
du mouuemět la cuiſſe eſt dellouée en la partie interieure , l'autre extremité qui eſt au genoüil eſt
des muſcles. neceſſairementrournée vers le dehors : 8 ainſi desautres parcies.Pareillement onne
peut plier la cuiſſe vers l'aine,àcauſe que l'os deſplacétient les muſcles, qui font ex D
tenſion , ſi tendus , qu'ils ne peuuent obeïr à ceux qui la doiuent plier : car la flexion
doit preceder l'extenſion , & l'extenſion la flexion .
Des Luxations .
573

А
Prognoſtic de la luxation de la Hanche.

CHAP. XXXIX.

Vx luxations de la cuiſfeil y a danger , ou que l'os ſoie reduit malaiſe


ment,ou qu'eſtan reduicne tombe derechef . Car ſi les muſcles,ten .
dons & ligamens de ceſte partie ſont forts & durs, à peine laiſſent-ils
reduire l'osen la place . Pareillement s'ilsſont trop foibles, laxes &
ORI mols, ils ne le peuuent tenir quand il eſt reduit : ſemblablement
quandleligament court & rond , quiioinc eſtroitement la ceſte du.
dit os au fond de fa cauité , eſt rompu ou relaſché.Orledit ligament pourquoyle
ſe rompt par quelque violente force : & ſe relaſche par vne humidité glaircule & ſu- ligament de
perfluë ,amaſſée és parties voiſines de ceſteiointure ,qui l'abreuvent & mollifient.Ec ia banche se
B li ledit ligament eſt rompu ,encores que l'os ſoit reduit , ne tienciamais, & retombe rompe,ou ſe
touſiours, quelquc diligence qu'on y puiſſe faire : ce que i'ay veu pluſieurs fois . S'ilrelaſches
clt ſeulement humecté & relalché, apres l'auoir reduit ,fion peut conſommer & ſei
anche cher l'humeur par medicamens , & par cauteres potentiels ou actuels,appliquez au
conc tour de la iointure, l'os y demeure ferme & ne retombe plus . Donc pour le dire en vn Voyez Gal
mot, quand ce ligament eſt rompu ou trop relaſché , l'os ne peut tenir ferme en ſa Surlaſen !.42.

boërte lors qu'ilyeſtremis, principaleméten ceux quiſontmaigres,pource qu'icellede la festa


i
ioincuren’eſt liée de ligamens par dehors , commeeſtla iointure du genoüil &
, qu'il
n'y a point d'aponeuroſe, c'eſt à dire , tendons larges , comme nous avons dit . Dauan
tage les parties qui ſont pres d'vne luxation ,quin'a elté reduite , deuiennenten atro
phic, c'eſt à dire , qu'ilsamaigriſſent , en ſorte quela chair desmuſcleseſt extenute
& conſommée,à raiſon que l'os n'eſt en ſon lieu : & parcant ladite partie ne peut faire
ſon action : & aufli que les veines , arteres , & nerfs,
ne ſont pareillement en leur ſitua
tion naturelle ,qui garde que la nourricure & les eſprits n'y peu'uent ſuffiſamment re
luire : & eftantimbecille ne peut accirer & retenir, cuire , n'alimiler le nucriment.
C Exemple . Ceux quione l'osfemoris luxé , & n’a eſté reduit,ledicosne croiſt plus com- Pourquoylos
me les autres os du corps , & auſſidevient plus court que celuy quieſten la boëtte , femorisne
pource qu'il eſt pres du lieu où eſt le mal.Toutesfois les os dela lábe & du pied ne fontcroit quand

100 cmpcíchez à croiſtre , d'autant qu'ils demeurent en leur ficuation naturelle. Ncant- ja cauilé.
moins la iambeleurdeuient plusgrelle,c'eſtà dire,les muſcles atrophiez . Autant s'en
fait- ilà l'os du haur du bras ( ce qui eſt commun à toutes luxations non reduites) le

onde quelavfli devient plus court, & les muſcles plusemacicz & conſonimez que ceux du
bas du bras , & de lamain.Ecpour le dire en vn mot ,les os qui ſont plus pres de la ioin .
-U
ture luxée, deuiennent plus courcs ,& leurs muſcles plus atrophiez, parce que les el
Pok
zeltu. prits & alimens ne peuuenceſtre porcez en icelles parties : quicft cauſe qu'elles tom
bent en atrophic. Orquand Hipp . dic plus courts, il faut entendre en ceux qui n'ont

oster pas'accomply leur croiſſance. Car à ceux qui ſont paruenus à leurs trois dimenſions, Belle annotas
les osne ſe peuuentaccourcir , mais bien diminuer en groſſeur. Il faut auſſi entendre tion.
50!!
que l'exercice de la main ſertgrandement à ce que la chair de tout le bras demeure
Wow
dei plus nourrie,& principalementdepuis le coulde iuſques aux doigts : mais quand l'os

D feinoris eſt luxe & principalement en la partie interieure , & que lesenfans loncenco
res au ventre de leur mere, ou qu'ils ſont en leur enfance , les muſcles ſeront plus ema
cicz qu'au bras, à raiſon qu'ils ne ſe peuucnt aider de la iambe , ny du pied , en la luxa
tion de los femoris, comme ils font de la main , en la luxation de los du haut du bras ,

De la luxation de la Hanche, faite en dehors. CHAP . XL .

Vand la luxation de la cuiffe eſt faite en dehors,& qu'elle demeure ſans eſtre Quelle luxe
remiſe, la douleur auec le temps s’appaiſc , & la chair d'entour devient cal- tion de la
leuſe & dure , comme la main des laboureurs & artiſans, & la teſte de l'os ſe cuiffe eft plus
forme, & fait vne cauité en laquelle elle ſe mer , de façon qu'aucc letemps le malade tolerable.
peorcheminer ſans potence ou balton . Adonc la cuiſſe & Ta iambe ne ſont cant atro
phiées ou amaigries. Maisà la luxation eſt faite au dedans , l'atrophie ſera plus gran
de , d'autant que les vaiſſeaux qui de leur naturelvont & tirent couſiours plus vers le
ССcij
574 Le Seizieſme liure,
1 dedans , comme pote Galien ſur la ſentence 51. de la 3. fe &tion du liure des Articles , A
ſontplus preſſez, & que la partie ne peut ſe mouuoir ny tourner contrel'os pubis, ou
Pourquoy lesdu penil . Dauantage ceſteluxationn'eſtant pointreduite , quelque temps apres les
maladesche
minent come malades cheminenc commeles bæufs, à ſçauoir, en tournoyant la iambe versla par
lesbeufs. tie de dehors.Pareillementle malade eftantlouſtenu ſur la ambe luxée , ne peut de
meurer en figure droicte, mais oblique. Auſſi la iambe laine faitpeu d'eſpace quand
elle ſe meur,à comparaiſon de celle quieſt luxée: parce que celle qui eſtluxée , fait
ſon mouuement en tournoyanc , & l'autre le fait ſans tournoyer. Pour ceſte cauſe les
malades portent vne potenceou vn baſton ,afin qu'ils ſoient appuyez ſur la partie ma.
lade , de peur qu'ils ne combent en terre. Dauantage ceux quiontcée os luxéende
hors,ou en derriere, qui n'a peu eſtrereduir, par ſucceſlion de temps la teſte dudicos
rend la parcie calleuſe, qui permet que le iarret ſe plie ſans grande douleur , maisles
malades ſe ſouſtiennent & marchent ſeulement ſur la racine des orteils . Toutesfois
ils ſonçcontraines de ſecourber en deuant , lors qu'ilscheminent bien fort, pource
que la jambe eſt plus cource, & ciennent à chacun pas la main ſur la cuiſſe malade, à
, B
cauſe que la teſte de l’osn'eſt pas droictement ſousle corps portant à plomb : neant
moins à la longue lesmalades peuventcheminer laos potence ny baſton, lors qu'ils y
ſont accouſtumez . Pareillement la iambe ſaine par vne couſtuine & vlage dcuient
difforme, pource qu'elle aideà la malade en s'appuyant en terre.En quoyfaiſant, il
eft neceſſaire que la cuiſſe & le iarrec ſoient courbez. Au contraire, quand la luxation
eſt faite en deuant,& n’a eſté reduite,& que le malade(comme auons dit)eſt paruenu
à ſes trois dimenlions, l'os ayant accouſtume de tourner au lieu auquel il eſt combé,&
que la partie eſt deuenuë calleuſe & dure , alors il chemine ſans baſton ,potence ,ou
croce,& marche du cour droic:pource quela iambe luxée nr ſe peut facilement plier,
ny en l’aine, ny au iarret , & queles malades s'appuyenc plus volontiers ſur le talon,
qu'ils ne font ſur la racine des doigts des pieds.lene veux encores laiſſer en arriere de
memorer que ſi ceſte luxation , comme toutes les autres , eft inueterée , iamais nele
peutreduire . Orvoila les ſignes & accidens qui viennent quand la luxation eſt faica
en dedans , & que le ligament qui accache l'os en la cauité de la ioince , eft rompu ou
trop relaſché. С
Lesfignes que la luxation eſt faiteen dehors.
CH A P. XLI.

accidens Ors que la luxation eſt faite en dehors , les ſignes ſont contraires à la luxa
qu'ameine la tion faire en dedans.Car la iambe malade eſt plus courte , d'autanc quela
defoüeure teſte de l'os de la cuiſſe eſt au deſſus elleuée de la boëcte,& que les muſcles
externe de là ficuez ſe recirent vers leur origine , & eux ſe recirans , tirent encorespa
l'os femoris. reillement l’os contre-mont : qui fait que la iambe eſt plus courte. Pareillement le
genoüil & le pied ſe tournent en dedans : &fion veut faire marcher lemalade,le talon
ne peut toucher contrecerre , mais ſeulement ſur le mol du pied , qui eſt en la racine
desdoigts.Auſſi peut bien plier la iambe : ce qu'il ne ſçauroit faire, quand laluxation
eſt faite au dedans . Dauantage la iambe malade porce mieux le corps, que quand la
luxation eſt faite au dedans : parce que la teſte de l'oseſt plus de ligne droite ſous le
corps, qu'il n'eſt quand la luxation eſt faite au dedans : & auec le temps,li laluxation
ne peuteſtre reduire, le maladechemine ſans baſtó, pource qu'il ne ſent plusdedou
leur, à raiſon que la teſte de l'os a broyé & rendu calleux & dur le lieu où il fait la de
meure , n'eſtant plus en ſa propre place. Alors auflua iambes'cxtenuë & amaigric
moins que quand la luxation eſt faite au dedans , pource que l'os ne preſſe tantles
vaiſſeaux,&auſſi qu'on la trauaille pluscommodémenc.Bref, quandla cuille eſt lu
xée en la partio pofterieure, la iambe ſe fleſchic & neſepeuteſtendre: & quand clle
eſt luxée en la partie antericure, elle s'eſtend, mais elle neſe peut Aeſchir.
Des Luxations . 575

А
Delaluxation faite en dewans. CHAP. XLII.

A luxation en deuant ſe fait bien rarement. Les ſignes ſont, qu'on sigue dela
trouue la teſte de l'os de la cuiſſe tombée lur l'os du penil : dont on deſloucure de
voit laine tumefiée,& la feſſe apparoiſtridée & deſcharnée,à cauſe de l'os femoris
la contraction des muſcles: auſi que le malade peuteſtendre la iambe en deuani.
ſans douleur, mais il ne la peut ployervers l'aine, à cauſe que le mur.
cle anterieur , qui naiſt de l'os ilion , eſt preſſe de la teſte de l'os qui ne ſe peur eſten
dre : & file malade eft contraint de fleſchir le iarree, il ſenc grand' douleur : & lors
*
‫سلام‬ qu'on fait comparaiſon de la iambemalade auec la faine, on les trouve égales en lon
gucur.Neantmoins le malade ne ſe peut ſouſtenir ſur la racine des orteils: & fion Accidens de
relle defloü
veue l'efforcer de le faire marcher , il ne ſe peut appuyer que deflus le talon . Dauan enre .
tagelobout du pied neſe peut tourner vers la partie anterieure. Souucntesfois en
or
celte luxation l'vrine eſt ſupprimée,à cauſe que la teſte de l'os preſſe les grands nerfs,
B deſquels naiſſent ceux qui vontà la veſſie: laquelle ſe reſſentant de la douleur , tom
been inflammacion, quiaffligele muſcle Sphincter de la vellie : qui fait que pendant
icelle inflammation , I'vrinc ne peat paſſer qu'àgrande difficulcé, parce que les par
ties enflammées & tumefiées ferment le paffage del’vrine .

De la luxation faiteen derriere. CHAP . XLIII.

Areillement la luxation faire en derriere vient rareinent, parce que la par- Pourquoy los
med
tie poſterieure de la boërte de la hánche eſt fort profonde, comme l'ante . femoris rare
rieure l'eſt beaucoup moins : au moyen dequoy la luxation faite au dedans mens ſe def
loüe en ders
eſt plusfrequente que nulle des autres . Les ſignes ſont, que le malade ne
riere.
peut eftendre la iambe , & auſſi il ne la peut plier , à cauſe que les muſcles qui ſont au
signes,
tourde la teſte de l'os ſont grandement preſſez & tendus : & la douleur s'augmente
City
quand il veut ployer le iarrcc,à raiſon qu'on tire les muſcles dauantage.Pareillement
claiambe malade eſt plus courte que la laine : & quand on preſſe ſur la feſſe , on trou .
ue la teſte de l'os prominente entre les muſcles felliers: & trouue- l'on cauicé en l'aine ,
donteſt crouuée laſche& molle quand on la couche : & letalon ne peut toucher en

terre , parce que la ceſte de l’oseſtcachée entre lesmuſcles de la felle ,qui la retirent
contre-mont , & principalement legros muſcle feſſier, qui fait le coulinet de la feſſe,
lequelen ceſte luxation eſt plus preſſé que nul des autres : qui fait que le malade ne
peut Aleſchir legenoüil , à cauſe que le feſchiffanton fait grande extenſion de l'apo
neuroſe, ou tendon large , quicouurele genoüil. Et ſi le malade s'efforce de ſe tenir
ein ſur le pied de la cuiſſe luxée lans quelqueappuy, ilcombe en derriere , parce que le

corps panche en ceſte partie ,à cauſe que la teſte de l'os n'eſt pas droictement auder
ſousdu corps pour l'eſtançonner : & pour ceſte raiſon il faui qu'il s'appuye ſur vne
delos
potence poſée ſous l’aiſcelle du coſté luxé .Apres auoir ſuffiſainmēr deſcric les ſignes,
accidens , prognoſtic, & diuerſité des luxations faitesen la hanche,maintenantilre
Talou
îte à eſcrire & monſtrer la maniere de reduire l'os , ſelon la diverſité des lieux où il
CG
Dtombe, avecques la meilleuremethode,& la plus briefue qu'il me fera poflible.Pre- come il fame
mierementil faut ſituer le malade ſur vn banc, ou ſur vne table (meccant delſjus luy foruer le ma
lalu
quelque matelasou couuerture delict ,de peur qu'il ne ſoitpreſſé) ou à la renuerſe,ou lade ayāt las
usca de la hanche
ſur le ventre,ou ſur le coſté : de façon que la partie où l'os eſt forjeccé , ſoit touſiours luxé en deuāc
la plus haute , & celle d'où ileſtſorty ,la plus baſſe.Exemple.Sila luxacion eſt faice en ok en derrie
.L_2
dehors ou en derriere,faut ſituer le malade ſur le ventre.Si elle eſt faite en dedans , le re .
to end
faut licuer à la renuerſe ſur le dos . Sielle eſt faite eo deuant , il faut le liquer ſur le coſté

ſain. Et l'os fera touſiours ciré & pouſſé vers la iointe, pour le chaſſer dedans . Si la lu
xation eſt recente , ou que ce ſoit voieune enfant,ou femme, ou autres qui ont nacu
tellement les iointureslaxes ,ilne ſera beſoin pour reduire l'os de faire grande exten
ſion
par liens : mais la ſeule main du Chirurgien ſuffira : 0u bien on le contencera
d'une force liziere , ou d'vne portion d'vne nappe ou ſeruiecte : & auecques certaines
compreſſes miſes entre les iambes, à ſçauoir, autour de la iointure de la hanche, ſera obſeruation
tenu fermement. Puis le Chirurgien tirera la cuiſſe de droitee ligne au deſſus du ge- digne d'effre
noüil , vis à vis de la boëcte d'où l'os eſt iſſu : & par ce moyen fera reduit , pourucu bien norée.
ССc iij
576 Le Seizieſmeliure,
qu’on tire un peu plushaut la teſte de l'os , de peur que les bors de ſa cauité n'engar- A
denreſtre remis,ſielle n'eſtoit cirée & elleuée vn peu plushaut que fa cauité. Oùl'os
neſera affez tiré,on doiceſtre afleuré qu'il ne pourra eſtrereduir. Parcant il faut plus
toft pecher à tirer vn peu plus que trop peu : toutesfois il ſe faut bien garder de trop
tirer, de peur de rompre quelque muſcle ou tendon , ou autre partie nerucuſe :& où
on ne pourra reduire l'ospar la ſeule main , alors faudra vſer de machine, commeno
ftremoufleacrachée à deux poteaux,& la corde tirée tant qu'il en ſoit beſoin.Orce
pendant qu'on fera ces reductions violentes par machines, ne faut que les parens &
amis du malade ſoient preſens, s'il eſt poſſible, comme eſtant vn ſpectacleodieuxà
veoir : & ouyr crier le malade: & auſſi que le Chirurgien ſoit aſſeuré, non piteux , be Metapo
craintif,lors qu'il fera la reduction, & ne ſoit nullement eſmeu parla clameur duma
lade , ny moins des alliſtans: & que pour cela il ne ſe halte point plus qu'il ne doit ,
pource que ce luy ſeroit grand deshonneur n'auoir peu reduire l'os, & auſli grand
dommage au malade. Apres avoir ainſi diſcouru desluxationsde la hanche,eil faut
pour l'inſtruction du ieune Chirurgien ( auquelcét eſcrit s'adreſſe) les deduire parci B
culierement,pourplus grande intelligence , commençantà celle qui eſt faire en de
dans de la cuiſſe.

Lamaniere de reduire la luxation dela Caiſſe faiteen dedans.


CH AP. XLIIII.

L faut eſtendre le malade ſur vne table ,ou ſur un banc, comme nous a
uons dit. Au milieu d'iceluy ſera poſée vne cheville droict entre les
cuiſſes, longue d’va pied, & groſſe comme le manche d'vne houë , gar
nie de quelque choſe molle,de peur qu'elle ne bleſſe le malade. Cette
cheuille ſerc, afin que le corps eſtanc arreſté contreicelle , ne fuiue &
n'obeïſſe point quand on tirera , & auſſi que lors qu'on fera l'extention , elle ſe ren
contre entre la ceſte del'os & le Perinæum , que d'Alechamps en la Chirurgie Fran
çoiſe appelle l'entrefeſfon.Cefaiſant, il n'eſt grand beſoin faire autre contr'-exten o
operatiöpour lion aux parciesſuperieures.D'abondant quand on tire le malade,ceſte cheville aide
la reduction, àrcchaffer & pouſſer l'osauccques vn peu d'aidede lamain duChirurgien,quien vi
rane 8 donnaotlecour ça & là aideà remettre l'os en ſon lieu . Orquand il faut cirer
& contre-tirer , il faut auoir des liens qu'auons par cy deuant eſcrits en la redu &tion
de l'eſpaule ,ou vn tiſſu ,ou quelque liziere forte , conduits par deſſusl'eſpaule :I'vn
deſquels ſera poſé au deſſusde la iointure de la hanche, & au defauc de la cheuille,on
mettra vn lien autour de laiointure de la hanche, tenu par vn homme fort: & l'autre
lien ſera poſé au deſſus du genoüil,lequel ſera pareillementtiré contre-bas par vn au
tre homme,tant & li forc qu’on verra eſtrebeſoin . Aufli ſe faut donner garde, quelo
lien qui tient la partie luxée , ſoit ſur la teſte de l'os qu'on veut reduire, parce qu'il
empeſcheroit qu'il ne pourroit r’entrer en la place. Ceſte maniere d'extenſion eft
commune aux quatre eſpeces dela luxation de la cuiſſe , mais en chacune d'icelles
particulierement il faut changer la maniere de repouſſerl'os en la boërce, ſelon les
parties ou elle decline,à ſçauoir le pouſſant & cournanten dehors ,quand la luxation D
eſt au dedans : & au dedans , quand elle eſt au dehors : ce que nous deduirons parci
culierement , & chacune eſpece à par- ſoy. Or aucuns s'habilleurs & renoueurs de
village , lors qu'ils veulent reduire ceſte luxation , font la ligature au pied , & parce
moyen la iointure du pied & du genouil ſont plus eſtendues que cello de la lianche
luxée , pource qu'elles ſont plus presdu lien quieſt acraché au pied : & partant fans
nulle occaſion ils font extenſion à la iointure du pied ,& à celle du genoüil,donc plu
obſeruation fieurs accidens aduiennent . Parquoyicy noteras, qu'on ne doicattacher les liensau
noiieau Chi pied , mais au deſſus de la iointure dugenoüil, & en la luxation de l'eſpaule, nulle
rurgien. ment la faire à la main , mais au deſſus du coulde ſeulement.

}
C
Des Luxations .
5777

A
La maniere de reduire la luxation de la Cuiffe , faite au dedans, par machines, lors que la main du
Chirurgien n'eft affez ſuffiſante . CHAP . XLV .

I laluxation eſt faite au dedans,apres auoir ſitué devëment le corps,& CC- Operation.
nula parcie malade, il fauç metre deſſus laine quelque choſeronde, &
ſoudain par deſſusicelle on tirele genoüil du malade, en pliant fort &
vellanelurla ceſte de l'os vers ſa boëcte, & cirant legenoüil & la ianıbe à
l'endroit de l'aine, & la menant au dedans vers l'autre iambele plus qu'il
ſera poſible : & par ce moyen on reduit l'os en la place , comme cu vois par ceſte fi
gure .

UN

Auſſi noteras en ceſteluxation , & autres, apres auoir tiré l'osfuffiſamment d'entre Choſe digne
les
muſcles, & avoir fair extenſion des ligamens,àfin qu'ils cedent, fauc lalcher la cor d'eflre notte
Cde , & neplus tirer : ou autrement la redu & ionne le pourra faire pour la trop grande
extenſion qu'on feroit auxmuſcles,tendons,& ligamens , qui ne pourroient obeir à
la main du Chirurgien. Les ſignes que la luxation eſt reduice;ſonoque les iambes ſont signes..

radi de pareille longueur : aulli que le malade plie & eltend la iambe ſans douleur ny pei
ne : apres qu'on ſera affeuré l'os eſtrereJuic, on appliquera les remedes qui ont eſté
aci
parcy - deuant eſcrits. Puis on commencera touſiours le bandage ſur le lieu où eſtoic Bandage
l'éminéce de los deplacé , & ſera mcné & conduit vers la parcie oppoſite & lainc,paſ
ſant ſur les reins parderriere, & ſurle ventre par deuanc.Ec ne faut oublier de mettre
palm vne groſſe compreſſe dedans l'aine , quiciendra l'osferineen ſa cauicé : aullidestor
de,
ches de paillelongues iuſques au calon , comme nous avonsmonſtré en la fracture de
la cuiſſe. Dauantage fautlier les deux cuiſſes enſemble ,
afin que la parcie luxéede
meure encores plus Itable ſans le mouuoir. Et ne faut ofter ce premier appareil de
2 di
lak quatre ou cinq iours, s'il eſt poſſible , ſçauoir eft, qu'il n'y cult quelque accident qui
contraigniſt de ce faire. Fauc aufli faire tenir le malade crente iours dansle liet , à fin
Home
D que les muſcles,nerfs ,& ligamens , quione eſte relaſchez ,ſe fortificnc : de peur qu'en
ON*
cheminant trop coft, l'os ne le demiit de rechef.Quant à la ſituation de la iambe , elle Situation de
Die
doit eſtre tenue en figure inoyenne, c'eſt à dire , entre droicte & courbée : autrement la iambe.

alias ne pourroitlonguement demeurer en figure droide fans cauſer doulcur , à caule des
muſcles qui ſeroicoccrop long- temps tenus tendus ,

ccc iiij

<
57% Le Seizieſme liure ,
А

Lamanieredereduirelaluxation à la Cuiflefaiteendebors.
CHAPITRE XLVI .

Vand laluxation eſt faite en dehors , il faut fituer le malade ſur vne table,
ou ſur vn banc , garny comme nous auons dit par cy-deuant : ayant le ven
tre deſſus la cable , & faire les ligacuresà la hanche luxée , & au deſſus du
genoüil.Cela fair, fauctirer contre-bas, & contre -tirer contre -mont: & le
Chirurgien pouſſera du dehors en dedans l’os en la place : & ſila main n'eſt aſſez for
te, on s'aydera de noſtre moufle , comme cu vois par ceſte figure.

THEORY B

IZUMIVUISTA
Facilité de Ceſte luxacion eſt la plus facile à eſtrę reduire de toutes les autres de la cuiſſe : celle
reduction en ment quei’ay veu quelquesfois ayant faitl’extenſion , qu'en laſchant les muleles, ils
la deſloüenre iettoientlateſte del'os en la cavité, ſans aucunement pouſſer: àcauſe que naturelle.
Pis en dehors.mentils ſe retirent vers leur origine: & l'osr’entrant dedans ſa boëtte ne fait quel.
quesfois aucun bruit,& quelquesfois fait bruit,faiſantclocq: qui eſt vn ſigne certain
que l'os eſt r’entré dans ſa cauité.Apres ceſte redu &tion faite,on appliquera les reme
1
des cy -deſſus mentionnez. Ec pareillement ne ſera oublié de mettre vne compreſſe
ſur la ioince,& la ligature, & les torches de paille ,ainſi qu'auons enſeigné par cy-de
uant .
La maniere de reduire la luxation de la Cuiſe faireen deuant.
CHAP . XLVII.

I la luxacion eſt faite en deuant, faut fituer le malade ſur le coſté ſain ,& lo
La force du lier ainſi qu'auons dit . Puis le Chirurgien mettra vne compreſſe dellus la
genoüil peut
grandement
Ayder à ceſte
luxation .
SA teſte de los qui faic éminence, laquelle ſera tenuë fermement par vn fer
viteur . Puis ayantfait l'extenſion ſuffiſante , le Chirurgien auec la main D
pouſſera la t « ſte de l'os en la boëtte : & fi la main n'eſt aſſez force , la pouſſéra avec le
genoüil , tant qu'elle ſoitreduite : & eſtant reduite lera traiccéc & bandée ainſi qu'a
uons enſeigné cy -deſſus,
Des Luxations . 579

A
La maniere de reduire la luxation à la Cuiſefaite en derriere.

CH AP. XLIII.

Emalade ſera pareillement couché ſur le ventre deſſus vn banc , ou operation .


vne table , & ciré ainſi qn'il a eſté dic.des autres luxacions de ceſte par
tie : & le Chirurgien pouſſera de les mains l'eminence de l'os en fa ioin .
cure ,en prenant le genoüil du malade , & le tirant en dehors , le recu
lant, ou ſeparancdela iambeſaine: & bien qu'il ſoit reduic en ſon lieu ,
11fautcou
ſi eſt- ce qu'il n'y peut demeurer, ſi le malade n'eſt couché & bien bandé , à cauſe que cher le mala
de apres PO
la cauité dela boëtre de l'Iſchion va en baiſſant, & que la charge de toute la cuiffe, de
quiy eſt penduë , eft peſante , & parcant comberoic de rechef de ſon lieu , file malade peration.
vouloit cheminer .

'B
Delaluxation de la rouille du genoüil CHAP. XLIX .

A roüelle du genoüil ſe peurdeſloüer en dedans , en dehors , en deſſus ,


en deſſous,& noniamais en derriere, parce que les os qu'elle couure ne
le permettent. Pour la reduire , il faut que lemalade s'appuye ſur le pied Reduction:
de la partic luxée , en terre vnie,ouſur vpe cable : puis le Chirurgien la
pouſſera de ſes mains du coté où elle encline: & l'ayant reduide fauc
remplir la cauité du iarrer de compreſſes de telle groffeur que le malade ne puiſſe
plier la iambe : car la ployant , on la fait de rechefſortir de ſon lieu. Pareillementon
mettra vncaſtelle'yn peu caue & ronde , comme eſt la figure de la rouelle , poſée du
coſté vers lequel eſtoit deplacé : & les remedes propres ſeront appliquez , & auec le
bandage ſera tenuë ſi fermequ'ellenepuiſſe tourner çà ou là . A presauoir cenulege . Ce quälfame
noüil aſſez en repos , faut que le malade commence peu à peu à ficchir le genoüil , iul- faire apres la
reduction .
ques à ce qu'il cognoiſſe que le mouuement de cette partie luy ſoit aiſé.
C

Dela deſlouënre du Genouil. CHAP , L.

E genoüil ſe peut luxer en trois manieres ,à ſçauoir, en dedans , en Pourquoy le


dehors, & en derriere : en deuant rarement,n'eſtoic parvac extre genouilfe, lu
en
meviolence,pource que la roüelle l'empeſche,laquelle cient les os dedans,de
de ceſte partie fermes.Les autres manieresle font aiſément, à rai- hors,e ders
ſon que la coche , ou cauité du bout de l'os de la cuille , eſt caue riere.
comme vne goutiere , & aulli eſt fort life & gliſſante, & pareille
mēt que ſa ſtructure eſt moins ſerrée que la iointure du coulde , &
partam ili luxe & reduit plus aiſément . Les cauſes de ceſte luxation font pour tom
ber de haut,ou fauter, ou courir trop viſte.
Les ſignes ſont , que le malade ne peut plier la iambe contre la cuiſſe , c'eſt à dire , signes.
mettrelecalon contre la felle .

Les luxations qui ſe font au genoüil , en dedans & en dehors , pourles reduire faut La maniere
Dfaire vne mediocre excepcion , & pouſſer l'os du coſté où il ſera forjecté,cantqu'il ſoit de reduire le
genoüil luxé
en ſa place .
en dedans en
Il faut faire aſſeoir le malade ſur vneeſcabelle , ou ſur un banc de moyenne hau dehors .
ceur , le dos tourné contre le viſage du Chirurgien , lequel luy mettra ſa iambe entre de la luxatiö
les deux ſiennes , & de ſes deux mains la pliera contre la feſſe. Etfi par ce moyen de fe du genoüil
peutreduire ,fautauoir yne pelotce faite d'une banderoulée, & l'accacher au milieu faite en dery
d'un baſton : & icelle ſera poſee parvn ſeruiceur au ply du iarret ſur l'os eminent , & riere .
pouſſee en deuant : & vn autre ſeruiteur mettra ſurle genoüil vne bande ou quelque
lifiere large de trois doigts : puis de ſes deux mainsla tirera contre -mont: & tous eo
ſemble coucà coup plierontia iambe & le talon contrela cuiffe ou la feſſe . Toutes ces
choſes ſeruentà reduire celle luxation faite en derriere,
e
580 Le Seizieſmeliur ,
A
Dele luxation dugenouilfaite en deuant. C H 4 P. LI .

Ilaluxation eſt faite en deuant,il faut ſituer le malade ſur vne cable, & faire
deuë ligature au deſſus de la iointure du genouil, & au deſſus du pied. Puis
le Chirurgien pouſſera de les deuxmainsſurl'os cant qu'il ſoit reduit. Etfi
les mains ne ſont aſſez ſuffiſantes pour tirer & contre-tirer,l'on vſera de no.
ſtre machine, comme tu vois par ceſte figure.

El

PIOI '8630

Le ſigne qu'ileſt reduit , eſt que le malade Acchit & eſtend ſa iambe fans douleur.
Apres la reduction ,on appliquera les reniedes & compreſſes , & fera-on les ligatures
ainſi qu'il eſt requis: & deffendra-onau malade de cheminer ſur la iambe, iuſques à
ce qu'on verra cſtre beſoin .
с
De la luxation & diſionction de los Peroné, autrement ditpetitFocile de la iambe.
CHAP. LII.

Delos Peros E petit Focile de la iambe eſt appoſé fans cauité contre le gros Focile , à
né entr'ou ſçauoir en la partieſuperieure preslegenoüil,& en bas preslaftragale:& fe
werto luxé. peut luxer,defioindre, & entr'ouurir deſdites parties en crois manieres, à
Caules. ſçauoir en la partie anterieure, & aux deux coltez. Cela ſe faic communé
menelors qu'en chemivanton ſe melmarche, & que le pied fauc, & ſecourne ende
dans,ou en dehors,& le corps s'appuyantau deflus,fait qu'il s'entr'ouure,deprime,&
luxe. Auflicelle choſe ſe peut faire pourtomberde haut, ou pour quelque grand
coup orbe. Pareillement quelquesfois ſes epiphyſes ſe deſioignent & ſe rompent.
Operation. Or pour les faire tenir & ioindre enſemble , elles ſeront reduites par la main du Chi
rurgien en les pouſſant en leur ſituation naturelle : & les faut puis apres bien bander,
& mettre des compreſſes au coſté auquel le petit Focile a eſte peruercy, commençant
la ligacure deſlus la luxation , pour les raiſons predices : & le malade gardera leligt
quarance iours, & tant qu'on cognoiſtra les ligamens eſtre bien affermis. D

Dela luxationdwgrand FocileaueclAſtragale.


CHAP. LIII .

L ſe fait auſſiluxation du grand Focile d'auec l'Aſtragale, tant au dedans


signes: du pied , qu'au dehors. Onla cognoiſt par l'eminence trouuée au coſté
SI où la luxationeſt faite. S'il n'y a que luxation incompletce , & que l'os
ne ſoit qu'vn peu ſeparé, adonc la reduction ſera facile, en pouſſant ſeule
Operation . menc l'os en ſon lieu : & apres la reduction , faut appliquer des compreſſes & li
gatures , comme il eſt beſoin , à ſçauoir, en appoſant & cournant la bande au coſté
oppoſite à la luxation , comme nous auons declaré cy-deuant , à fin qu'on repouſlo
Des Luxations. 581

tendon
À l'os en ſon lieu d'où ileſt forty :.& fe faut garder de trop comprimer le gros
qui eſt au talon. Ladite luxation eſt affermic en quarante iours communément, s'il
n'y aduient aucun mauuais accident .

Dela luxation du talon. CHAP . LIV.

Vandon faute de bien hautlieu,& qu'on tombe ſur le talon ,adonc l'os du Cauſes
calon ſe luxe , & s'elloigne de los nommé aſtragale. Telle luxation ſe fait pourquoy le
plus communément vers la partieinterieure qu'exterieure, à cauſe que le talon leluxe
pecit focile paſſe & embrafie l'altragale, qui eſt cauſe qu'il le tient plus dans.
plus en de
1
fort que de l'autre coſté, où il n'y a telle apodiation ou eſtanceure . La reduction le fe Operations.

ta en tirant & pouſſant les os en leur lieu naturel : laquelle eſt aſſez facile, pourueu
qu'iln'y aicgrande fuxion & inflammation. Quantau bandage qu'on y fera , il faut
plus preſſer ſur le mal qu'en autre part , afin d'expeller lelang du licu bleffé aux par
B tiesvoiſines , toutesfois ſanscauſes douleur que le moins qu'on pourra , le donnanc
garde detrop preſſer les nerfs, & legros tendon qui eſt au talon ,comme nous auons
dit. Il faut que le malade ſoit à repos parl’eſpacede quaranteiours pour le inoins, en
core qu'il n'y ſuruiennenuls accidens: ce qui ſe fait ſouuent par la contulion faico
en celte partie, parquoy eſt bon en faire chapitre .

Des accidens qui viennent par lacontuſion faite au talon . CHAP. LV.

R pour ceſte grande contuſion les veines & arteres iettent du ſang au tra . Cauſe d'inflă
uers de leurscuniques , & par leurs petits orifices. Au moyen dequoy ſe mation en la
fait vne Ecchymole , c'eſt à dire , meurdriſſeure au lieu de la iointure , & de loueüre du
talon .
au talon : & alors ſuruientgrande douleur & cumeur . Parquoy il eſt ex
pediencd'y remedier : qui ſe fera en ordonnant bon regime , ſaignée, &
purgation s'il en eſt beſoin ,y appliquant auſſi desremedes propres,& principalement
en attenuant le cuir quieſt ſous le calon , s'il eſt trop dur(comme nacurellement il elt)
с
par fomentation d'eau chaude & huile : melmele fautcouper , s'il eſt trop calleux ,
aſſez profondement auec vn raſoir, éuitant la chair viue . Telles choſes le font afin
que le cuir ſoit plus tranſpirable , & que la reſolution de la meurdriſſeure ſe puiſſe
mieux faire . Ecfaucqu'au calon ces choſes ſoient faites deuant que l'inflammationy Pourquoy il
foic ſuruenuë,de peur qu'il n'y furuienne ſpaſme: car le ſang iſla horsde ſes vaiſſeaux famecomperle
le pourriç, pource que la partie pour la denſité ne permet qu'il ſe puiſſe bien exhalercuir qui est
& reſoudre, & auſſi que le groscendon , quieſt attaché ſousle talon, eſt fort ſenſible: Sous le salon.
ioint qu'il y a des nerfs qui paſſent en ſes parties laterales : ce quei’ay monſtré en lA'
nacomic vniuerſelle. L'inflammation vient pareillement en ceſte partie pour trop

longuement demeurer à la renuerſe, & eſtre appuyé & couchédeſſus, & principale
ment ſur vne choſe dure,ainſi qu'auons declaré en la fracture de la iambe , parlans de
la fituation du talon . Parquoy le Chirurgien y procedera commeil eſt die, de peur
qu'il n'y ſuruienne apoſteme , & par conſequent carie . Car paricelleil ſuruientplu- Lacarie des
ſieurs accidens,comme fiéure continuë ,aiguë,& d'icelle s'enſuic tremblement , lan - talon cauſe
t
glot, & delire .Car parla carie de céros lesparciesproches qui l'enuironnencommu- degrands
D niquent leur mal aux parties nobles , pource que le gros tendon , fait de trois muſcles
du pommeau de la iambe , eſtant enflammé, communique l’ioflammation auſdits
muſcles , & aux nerfs qui ſont diſtribuez par iceux . Auli lesarceres qui ſont ſembla
blement preſſées & eſchauffées, communiquent leur chaleurau cæur: doncs'enſuic
fićure, & par les nerfs diſtonſion , ſpaſme & ſanglot, à cauſe des nerfs qui ſont diſtri
buez à l'eſtomach , lequeleſt auſſi nerueux , & pareillement aux nerfs qui ſono diſtri
buez aux muſcles de la reſpiration . Pour le dire en vn mot , lors qu'il y a carie , c'eſtà
dire,pourricure en l'os du talon , ce maleſtincurablc.

BE
582 Le Seizieſmeliure,
chauer
А
de
Delaluxation del'os Aſtragale , c'eſt à dire , de l'offelet.
CHAPITRE LVI .
ele
'OsAſtragale ſe peut luxeren toutes parts : & quand il ſe deſplace Pour la
Signes.
endedans, le dellous du pied le recourne en dehors: & quand ille
deſplace au contraire , leligaeeſt auſli contraire. Ets'iléſtluxéen smo
deuant,le grostendon quis'implante au talon ,cſt dur & tendu. Es
s'il eſt luxe en derricre , l'os du calon cſt preſquc caché au dedans
du pied : & telle luxation eſt faite par vne extreme violence.Onle anunc
reduic auec lesmains en tirant & pouſſant par grande force le pied
Ce qu'il faut aux parties oppoſites d'où il ſera deſplacé. Apres la reductio ,on appliquera remedes reme
s101
faire apres la & ligaturespropres.Il faudra que le malade garde longuement leliet, parce que ceſt
reduction. oſſeler ſoultiene tout le corps : & n'eſtans point encores les ligamens qui le ciennenc
retournezen leur premiere force, & cedans au faix qu'ils portent, il y auroit danger * 2,00
B
que de rechefneſorciſt hors de ſon lieu. sa

Dela luxation des os duTarſe, & de Pedium .


CH AP. LVII .
..PICS
Commentſe
Esos du Tarſe & duPedium ſe peuuentpareillement luxer: & laluxation 251
Luxeni letar
fe e Pediữ.
ſe fait quelquesfois ſous le pied, autresfois deſſus, & aucuns d'iceux aux
Operation . coſtez,Sion les void eſtre eminens & eleuez ſur le pied,faut que le mala maba
de appuye ſon pied ſur quelque ais : puis que le Chirurgien preſſe ſurl'os
eminent cant qu'il ſoit remis en ſonlieu. Au contraire, fi l'eminence eſt crouuée ſous
Toni
le pied, il fautfaire le ſemblable , c'eſt àſçauoir , prellerl’os par deſſous tant qu'ilſoit
reduit. Et s'ils ſont aux coſtez, on les preſſera, deforce qu'on les reduira en leur lieu
naturel.
Delaluxation des osde laplantedupied, & des orteils.
CHAP. LVIII . C

Reduction. Es doigts du pied ſc luxent en quatre manicres, comme les doigts de la


main : & la maniere de les reduire eſt auſli ſemblable,quieſt de lescirer
de ligne droitce , & les pouſſer en leur iointure , & lesbander commo
Prognoſtic. dément.Ec pour le preſage, ils ſont reduits facilemenc, i.cauſe quela
ſortie de leur licu eſt pecice. Toute la curacion eſt pareille à celle des
doigts de la main ,hors-mis qu'il faut garder le liet pourlepied,& pour la main mettre
Ce qu'il faut le bras en eſcharpe. Il faut commanderau malade de ſe repoſer par l'eſpace devinge
faire apres iours, plusou moins, à ſçauoir, iuſques à ſe qu'il ſe puiſſe aiſément ſoultenir delius.
l'operation.
Des complications& accidensqui peuuentfurueniràlapartiefracturéeon luxéc.
CH A P. LIX.

R il y a pluſieurscomplications de maladies & accidens , qui ſouvent ac


compagnent les fractures & luxacions: comme concufion , douleur extre
me,inflammation, fićure,apofteme, gangrene, elthiomene,vlcere,fiſtule,
alteration,& caric aux os atrophic,ou amaigriſſement de la parcie,depra
uacion de l'a &tion des parcies , & autres: leſquelles requierent pour leur curacion
Cauſe de con- grande methode & diligence. Quancà la contuſion , elle eſt faitelors que quelque
тиion. choſe groſſe& peſantetombeſurvne partie, ou par tomber de haut en bas , dont le
fait effuſion de lang: lequel,s'il eſt en grandequancité , fera ſubir evacué par ſcarifi
cacions , afin de deſcharger la partie , de peur qu'elle ne tombe en gangrene & pour
riture: & d'autantqu'on cognoiſtra le ſang eſtre plus gros , & le cuir eſpais, les ſcari
ficacions ſeront faites plus profondes : &cypeut-on ſemblablemencinettredes ſang
Cauſe de la ſuës. Or nous auons parlé cy -deuát de la douleur,fçauoir eſt,qu'elle ſe fait au moyen
douleur. quelesos ne ſont en leur lieu nacurel, faiſans pun &tion & compreſſion aux mul
cles & parties aerucules, donc l'inflammation ſuruient, & par conſequent lafiéurec,
& foguen
Des Luxations.
583
A
& fouuent apoſteme, pour la defluxion & infammation : & de l'inflammation gan
grene, de gangrene eſthiomene, puis vicere & fiſtule: defiſtule, carie & pourriture
aux os. L'atrophie ,ouamaigriſſement viene d'auoir trop longtemps tenu la partie en cauſedes i
repos, & aulli pour l'auoir cenu liée : car telles choſes priuent la partie d'aliment par- trophie.
ce que le ſang & eſprits ſont comprimez & empeſchez de tomber en la partie .
Pour la cure de l'acrophie, fi la parcie eſt trop liée ,on la deſliera : & ſi elle peut eſtre Cure d'atro.
phie.
exercée , on le fera, en l'eſtendant, flechiſſant, hauſſant & baiſſant, & tournanr : car

par ces moyens la chaleur naturelle ſera excitée , & par conſequent les eſprits reluiMethode de
ront plus abondamment en icelle. Er où la partie ne pourra eſtre exercée, faut faire faire deüe
des frictions, & fomentations d'eau chaude. Les fri& ionsſeroncmoderées , ſçauoir ment les fo
cſt, entre dures & molles , auſſi entre celles qui ſe font crop briefueinent , & trop mentations
Jongtemps . Quant à la qualité de l'eau pour les fomentations, il faut pareillement o frictions
qu'elle ſoit moyenne entre la fort chaude , & celle qui eſt ciede. Aufli ne faut faire la poær reparer
une partie
fomentation trop longuement, ny trop peu : pource que ſi on la faiſoit trop longue
ment, on pourroit reſoudre ce qu'on auroit attiré : & lion la fait peu de temps , on trophié e.
B
attire peu ou rien. Apres la fomentation on appliquera medicamens chauds & em
plaſtiques ; faits de poix , de terebenthine , cuphorbe , pyrethre , ſoulphre , & leurs
ſemblables, tel que ceſtuy -cy : leſquels faudra remuer tous les iours , plus ou moins ,
ſelon qu’on verra eftre neceſſaire .

4. picis nigræ , ammoniaci , bdel . gummi elemmi in aqua vitæ diffol. an . 3 ij . olei Dropax.
laurini zj.pul. piperis,zingiberis , granorum paradiſi, baccarum lauri , & iuniperian.
.
zij.fiat emplaft.fecund. artem , extendatur ſuper alutem . Davantage faut bander & Ligature.
lier l'autre partie faine, toutesfois ſans douleur. Exemple : Si le brasdexire eſt atro
El phié,on bandera le ſeneſtre,commençantà la main ,& finiſſantà l'aiſſelle : & fi c'eſt la
iambe dextre , on liera la ſeneſtre , commençant au pied , & finiſſant à l'aine : car en ce
faiſancon renuoye vne portion du ſang & eſprits en la veine caue : & d'elle eſtát plei
ne , il en ſera renuoyé en la partie atrophie, en laquelle les vaiſſeaux ne ſont remplis,
mais aucunement vuides.Pareillement faut que la partie ſaine ſoit en repos,afin que
l'aliment y fue moins . Oril couiet en faire aller beaucoup en la partic emaciée,d'au
C tant qu'elle eſt vuide , & auſſi pour l'alimenter . Dauantage vne partie atrophiée peực
eſtre reſtaurée en la liant & ſerrano mediocrement : car ainli on attirera le lang, com
me quand nous voulons fairevne faignée, nous lions les bras , ou les iambes, pour ac
tirer leſang aux veines.Plus,on peut faire ſouuent tremper la partie atrophiée dās de lBain
iet. partics .
TO l'cau,vn peu plus chaude que tiede, & l’y tenir iuſques à ce qu'elle ſe cumefie & rou
giſſe: & par ce moyenon attire le ſang aux veines : ce qui ſe void quand nous voulons

IM ouurir les veines des mains & des pieds. Or lors que par les remcdes cy - deſſus métió.

DOC de guariſon: Prognoſtic de


nez,les parties atrophiées ſ'eſchauffent,rougiffent, & enflent,c'eſt ſigne

ER au contraire non : & partant les faut laiſſer & n'y perdre tęps ny argent . Dauátage ſ'il l'atrophie
demeure dureté aux iointures apres les fractures & luxations,illes conuientamollir , curable on
non curable
& reſoudre l'humeur contenu en icelles par fomêtations, linimens,cataplaſmes,em
plaſtres, faits de racines deguimauues , bryone, oignons de lis,ſemence de lin , fenu
grec , & autres ſemblables :pareillement de gommes fonduës en fort vinaigre,cóme
ammoniac, bdellium , opopanax , ladanum , lăgapenum ,ſtyrax liquida:auſſidegraiſſe
D
d'oyc ; de geline,humaine,huilede lis , & autres ſemblables:& commander expreſſé
menc au malade qu'il remuë la partie le plus qu'il luy ſera poſſible ſans douleur , afin
qu'il eſchauffe,ſubtilic, & confomme l'humeur contenu en icelle , & par tel moyen
ſera la partie reſticuée en ſon naturel, li poſſible eſt.Iç dis ,fi poſſible eſt: car fi l'impuif
ſance vient à cauſe que la fracture eſtpres de la iointure (commenous auons dit ) lc
mouuement apres eſt difficile , & louuent du toućimpoſible: principalemét ſi le cal 1
lus eſt trop gros ou ſi la iointuremefmesaeſté accrite,froiſſée, & fracturée, comeon
voidordinairement aux coups d'harquebuſes. Que diray- ie plus: C'eſt qu'ilfe fait de ladepra
quelquesfois dilatation des membranes & fibres, tát nerucuſes que muſculenſes, ap- sation de l'a.
pellée desGrecs Apoſpaſma: & dilaceration des meſmes parties,nommée ſemblable { tion de la
mēt Rhegma,quiſe faitpar vne grande & violence extenſion ,comeceux que l'on tire partie.
ſur la geſne,ou par tomber de hauten bas , ou par vne meſmarcheure, ou vouloir tirer apoſpaſmá,
Rhegma,
vn coup deraquette à vn ieu de paulme,ou iccter vne pierre ou barre , ou faire autre
violente extenſion : leſquelles cauſent grande douleur,& deprauation de l'action de
la partic , ſans rien apparoiſtre au dehors,dont ſouuérme luis trouuébien empeſché,
DDD
584

Et pour ſecourir à celaccident, faut au commencement appliquer ſur la partie de A


l'oxyrodinum , qui eſthuile roſat & vinaigre , puis apres l'emplaſtre diachalciteos
fondue auec dudicoxyrodinum : puis deux ou trois iours apres oindre coute la par
cie d'huile deterebenchine , & eau de vie , laquelle confortera les parties bleſées,
cnrcloluant la meurtriſſeure des parties nerueuſes.

Fin du ſeizieſme Liure des Luxations.

NCHI

Table des Chapitres du dıxſeptieſme Liure ,

traictant de pluſieurs operations ap

partenantes au Chirurgien.
}

E l Alopecie.
Chap.j.
De la teigne .
Chap. j.
De ſcotomie ou vertigo.
Chap.ij.
De la migraine.
Chap.isj.
Du moyen de rehauffer la paupiere fuperieure.
Chap. v.
De lagophthalmie ou ail de lilure .
1 Chap. vj.
De lagreſle des paupieres.
Chap. vý.
D'une ſubſtance graſſe qui
ſe couche ſous la paupiere, nommée Hydatis. Chap.vij.
Des pompieres prinſes eu iointes enſemble. Chap.ix.
Du prurit des palpebres.
Chap.x.
De lippitude ou chaſie des yeux .
Chap. xj. MA
De ophthalmia.
Chap.xj.
De l'eil qui chet dehors, diet proptoſis .
Chap.xij.
De ungula.
Chap. xiij.
Desfiftules lacrymales.
Chap.xv,
De ſtaphylome.
Chap.xvj
Delæil plein de matiere purulenie , dit Hypopyon. .
Chap 3 .
De la dilatation de la paupiere , appellée des anciens Mydriaſis.
Des cataractes. Chap xui.

Cure des cataractes. Chap. xix.


(...) Chap.xx.
Signes poor cognoiſtre les catarastes ou non .
Chap. xxj.
Cure des cataractes par l'æuure de main .
Chapo xxj.
Du conduit de l'oreille bouché.
Chap. xxij.
Chap.x
La maniere de tirer les areftes & autres choſes eſtranges en lagorge. xiij..
De la douleur des dents.
Chap.xxv.
De pluſieurs indipoſitions qui aduiennent aux dents. Chap.xxvj.
Les inſtrumens propres pour arracher & rompre les dents.
chap. xxxg.
De la limoſite ou roüillemens des dents,
Chap 8xong.
De l'empeſchement de retraction de la langue.
Chap. xxix .
Des doirs (uperflus, & de ceux qui fontjoints enſemble.
Chap. xxx.
La maniere d'habiller le prepuce.
Chap. xxxi.
Du prepuce ſiferré quel'on nepeus deſcouurirkeglan ,dit Phymoſis,ow Paraphymofis. Ch.xxxj.
585

Deceux qui n'ontpointde trou au bout du glan. Chap. xxxij.


De la cauſe des pierres. Chap. xxxiij.
Desſignes des pierresés reins & en la veßie. Chap. xxxv .
Des prognoſtiques despierres. Chap. xxxvj.
Delacure preferuatiue. Chap. xxxvj.
Des moyens de ſecourir celuy qui auroit une pierre defcendue du rongnon dans l'undes vreie
res. Chap. xxxvij.
Comment il fautproceder à laguariſon de lapierreeſtanı defcendue en laveſie. Chap. xxxix.
Dela pierre eftantau conduit de la verge , ou au col de la veßie. Chap. xl.
faut uſer pourtirer par
Des moyens qu'il pierre arrejtée au conduit de l'urine , que
inciſion une
l'on n'aura peu extraire par les voyes
ſuſdites. Chap. xlj.
Comment ilfautoreitter la playe faite par inciſion. Chap. xli .
Delamaniere de tirerparinciſion les pierres quiſonten la veſie d'un petitenfant. Chap.xlij.
Delamaniere d'extraire lapierre aux hommes , qu'on appelle le hautappareil. Chap. xling.
Comment il faut penſerla plage apres l'extraction de la pierre. Chap. xlv.
De la ſituation que l'on doit donner au malade l'operation fdite . Chap xlej.
Comment il fauttraitter la playe faite par inciſion. Chap.xl.
Des moyensdeguarir les vlceres par leſquels long temps apres l'extraction du calcul l'urine
palle. Chat: xloi .
Dela maniere de tirer les pierres aux femmes. Chap. xlix .
Des cauſes de la retention d'urine . Chap...
Digreſsion de l'Autheurcontenantaucunes notables Hiſtoires. Chap.lj.
Des cauſes exterieures de la retention de l'urine . Chap.li.
Duprognoſtic de la retention de l'urine. ( ...) Chap. lii.
Del'urine fanglante. Chap.liii .
Des ſignes desvlceres aux reins. Chap.lv.

Desvlceres en la veſie , & des ſignesd'icelles. Chap. lvj.


Duprognoſtic des ulceres en la veßie. ChaP. luỹ.
Dela curation de la retention de l'urine.
Chap. Iviz.
De diabete & ftrangurie . Chap. lix .
)
.
( ..

Des cauſes de diabete. ( Chap.lx.


Des cauſes de ftrangurie . Chap.xj.
Desſignes dediabete. Chap. Ixij .
Etus Delacure de diabete. Chap. Ixij .
Dela cure deſtrangurie. Chap. Ixiij .
0. De la colique. Chap.lxv.
(9 Delaſaignée.
Chap 2xvj.
Le moyen de faire la ſaignée. ( ...) Chap 2x.
CS Des ventouſes. Chap. Ixvij.
Desfangſbes. Chap /xui .

ch

be

1
Cha
DDd ij

ber

1
586

LE DIXSEPTIESME LIVRE ,
TRAIT TANT DE PLUSIE VRS
INDISPOSITIONS ET OPERATIONS
B.
particulieres, appartenantes au Chirurgien.
PAR AMBROISE PARE' , DE LAVAL AV
MAINE , CONSEILLER ET PREMIER
Chirurgien du Roy.
De l' Alopecie. CH AP. 1.

'A LOPECIE eſt cheute du poil de la teſte, &


Que c'eſt quelques fois des ſourcils,barbe, & autres par
queAlopia ties , di&tevulgairementla Pelade. Elle eſt aingi
cie . appellée des Medecins , comme maladie des
renards , parce qu'ils ſont ſujets à telle indiſpo
fition, pour certaine galle qui leur ſuruienien
Cauſes d'A leur vieilleſſe, Icelle le faitparle defaut dema
lopecie. tiere dont les poils doiuêteſtre nourris,oupour
la corruption d'icelle maciere , comme apres
fiéures longues: ou par vieilleſſe, faute d'humi
dité radicale : ou par application des onguens
trop chauds , comine ceux qui ſe veulent faire
Le poil ne noircir lescheueux :aufli par l'indeuëapplicatið
croiſt iamais
ſur les cica- des depilatoires, ou parvne bruſleure ou deperdition de ſubſtance du cuir, qui apres
trices . la guariſon faitque la cicatrice demeure dure : & generalement pour tout vice de la
ſubſtáce d'iceluy en trop grăde rarité,qui fait que l'excrement fuligineux n'eſt point
arreſté:ou denſité,quifait qu'iceluyretenu deſſous le cuir n'a point iſſuë pour döner
Prognostic.
ellence aux cheueux. Or pour la corruption des humeurs quialterét la vapeur & ma
tiere dont les cheueux ſont engedrez , vientalopecie : ce qui procede du vice de tout
le corps, comme l'on voiden la maladie Neapolitaine,autrement groſſe verole,ouà
ceux qui ſont preparez à lepre, ou qui en ſont du tout infectez. Celle qui vient par D
vieilleſſe,ou par fiéure hectique,oubruſleure,aux chauues, lepreux,teigneux,citin
Cured clo curable:& parcant le Chirurgien n’y doitmettre lamain . Celle qui ſe peut curer , le
pecie. ſera oſtant la cauſe:cõme ſi c'eſt parcorruptiond'humeurs, le Medecin ſera appellé,
lequel ordónera la maniere de viure,purgation & ſaignée, ainſi qu'il cognoiſtra eſtre
neceſſaire:puis le Chirurgien raſera lepoil,& vſera de fomécacions attractiues, & re
ſolutiues:appliquera des corners & ſang-ſuës,afin d'accirer la malice de l'humeur au
dehors.Cela fait,on lauera la teſte du malade delexiuc,en laquelle on aura fait boüil
Cøre d'Alo- lir miel,racines d'ircos, alocs, afin debienmondifierles lieux affectez.Orfil’Alopc
pecie faite cie vient par faute d'aliment, on frottera la partie auec vne piece de coile neufue,
par faute
d'aliment. ou auec fueilles de figuier, tantquel'on voye vne rougeur, ou d'oignons cruds. Pa
Cared reillementon picquera en pluſieursendroits la partie auec vneaiguille: puis ſeront
clo
pecie faite appliquezonguentsfaiesdeladanum , fientede pigeon ,ſtaphylagria,huile laurin,
par la groſſe terebenth. y meccanttantde cire qu'il eſt beſoin pour enfaire onguent, pour attirer
perole.
leſang & la matiere du poil. Si l'Alopecie vientde la groſſe verole, le malade doit
Operations de Chirurgie. 587
A eſtre bien frotté iuſques à ce qu'il entreau Royaume de Bauiere : & par ce moyen re
couurira ſon poil, & parfaicte ſanté. Sielle eſt cauſée par quelque vice de cuir , il le
corrigera par ſon contraire, le rarefiantou condenſant, ſelon que le cas le requerra.
De la Teigne. CHAP. II.

Eigne eſt vnegalle eſpeſſe, qui ſe produit en la teſte auecques eſcailles Que c'eſtque
& crouſtes de couleur cendrée,& quelquesfois iaulne,hideuſeà voir,auec teigne.
GES vne ſenteur puante & cadauereuſe.Elle eſtainſi appellée du vulgaire, par
ce quele cuir de la ceſte apparoic troiié & rongé, comme le drap mangé
de reignes, quiſontvers quicongent les habillemens.Ilyen a trois differences. La Premiere
premiere cſt appellée Squamola,à cauſe que lors que lemaladeſe gratre, fait ſortir eſpece dicte
grande quantité de petites eſcaillesblancheaſtres, ſemblables à du fon : d'aucuns-Squamosa.
pra& icienseftdite teigne ſeiche , pour la grande aduſtion de l'humeur . La ſecon- La ſeconde
B de eſpece eſtnommée Ficola ,à raiſon que lors qu’on ofte la crouſte, qui eſt iauna- eſpece diete
ſtre, on trouue deſſousdepetits grains de chair rouge , ſemblables aux grains d'vne Eicoſa.
figue, & iette vne mariere ſanguinolente. La troiſielie eſt dice Corroſina, à raiſon La troiſieſme
que l'on y trouue pluſieursvlceres, auſquellesy a pluſieurs petits trous , deſquels ſort diete Corro
vne ſanie liquide , ſemblable à la laueure de chair ſanglante , aucc portion de poil. fiua.
Icelle eſt fort puante & cadauereuſe , de couleur plombine ou iaunaſtrep,ar fois
faite d'humeur picuiteux , nitreux , & aucunesfois de cholere adulte, & demelan
cholie. Toutes lesſuſdites eſpeces ſe font d'humeurs corrompus ſelon la diuerſité
d'icelles , plus ou moins, comme la furfureuſe, moins que la fiqueuſe, & la fiqueu
ſe moins que l'vlcereuſe. Quelquesfois elle vient dés la nativité de l'enfant, & lors Remedes
eſt de tres- difficile curation: ou d'vne nourrice reigneuſe, & alors ne faut atcenter la pour les pe
cureiuſques à ce que l'enfant ſoit parucnu en aage luffiſantpour collerer les remea rits enfans.
des : toutesfoison pourra appliquerdes fueillesdechoux ,ou de porée, ointes d'un
peu de beurre frais, ou autre remede doux , qui aye puiſſance d'amollir & donner
iſſuë à la maciere qui fait lateigne. Ceuxqui ſont en aage ſuffiſant, ſeront ſaignez,
C purgez,& baignez ,ainſi qu'il ſeraneceſſaire.Il y a encore vne aucrc eſpece moins
maligne, familiere auxenfans, qui leurcouure parfois coute la celte, & le viſage,
qui vient de l'impurité du ſang , dontils eſtoient nourrisau ventre de leur mere. Et cure de la
pourles medicamens topicques, on fera vne fomentation remolliente & diſcutien- furfureule.
te , faideauec racine d'althca, de lis , lapath. acuti, leſquelles ſeront bouillies en Remedes so
lexiuc, adjouſtant vnpeu de vinaigre. Apres la foinentation faite , qui ſera conti- picques.
nuée par cinqou fixiours ( deux fois chalque iour ) on fera raire le malade : & feront
12
faides pluſieurs ſcarifications, applicacions de ſangſuës , cornets : puis on frottera
ilm
la tcſte d'huile de ſtaphyſagre, auec vn peu de fauon noir, afin d'attirer & obcondre
l'humeurconioinct å la parcie. Auſſi on pourra vſer de ce medicament, tant que
Spo l'on cognoiſtralaguariſon parfaite, lequel eſt grandement loué de de Vigo , Gour . Onguene fosse
&
don , & Guidon .22. hellebori albi & nigri,atram .auripigmenti, litharg . arri,calc. uerainpour
dem
viu. vitrioli , alum . gallar. fulig.ciner. clauellacarum añ.ZB.arg. viuiextina Z. iij . lateigne, pris
ærug.æris z.ij.fiat pul. qui incorp.cum ſuccoborraginis, ſcabiofæ , fumarıæ ,oxyla de
pathi,aceti añ.quart.j.olei antiqui fb ).bull.vſque ad conſumpe. ſuccorum : tuncin vigo.
D fine deco& .ponantur pulueres, addendo picis liquid.z6.ceræ quant. fuff. fiat vng.
Quant au vif-argent il le fauc deſteindre auec vn peu deterebenthine& axunge, Lesvertusdu
puis l'incorporerauccles autres ingrediens.Les fuldits autheurs afferment ceton- ſuditonguer.
guent guarir de couce eſpece de teigne. Et
quantà moy , veritablementie le prouue
grandement, conſiderant la promeſe des ſuſdirsautheurs, & les ingrediens qui en
trent en la compoſition .
La crouſteuſe,nommée Ficoſa,ſera auſſi fomentée tant que les crouſtes ſoient tom
bécs:& pourpromptement les faire tomber,on yappliquera du creſlon pilé & frical.crou
Cureteuſe
dela,
chur
ſéauecgraiſſe de porc,& le lendemain les crouſtes tóberõclansnulle douce: & mel dicte Ficola.
mement ſon en continue long cēps,ledic creſſon la guaric du cout:ce quei'ay experi
mencé: & ſera appliqué deſſusdu ſuſdiconguēt. I'enay traitté quionc eltéguaris par
applicatió d'huile de vitriol,& parfois de l'egyptiac fortifié.Et lil'o void la racine du
poilcltre pourrie,on les doit arracherauec pincetres: & ficelle corruption coprenoir
tout ou grande partie de la ceſte, pour plus promptementlesarracher, faut prendre
DDd iij
588 Le dixſeptieſme Liure, de pluſieurs
onguent bien des pieces de fuſtaine, & eſpandreſusl'endroitvelu vn telremede.2. picisnigræ 3 A
e prouué. vj . picisreſinæ Z.ij. pul. virid. æris & vitrioli Rom .an.zj.vel3 B. ſulph, viui zi.co.
quan.omnia fimul.in acero acerrimo quan. ſuff. fiat medicam . ad vſum : qui ſera
appliqué ſus la teſte, & laiſſé par l'eſpace de trois iours,puisſeront leſdits empla
(tres cirez à contre poil aſſez violentement, afin d'arracher auec ſes racines iceluy
Cure de la poil : & tel remede ſera continué, tant que l'on verraeſtre neceſaire. Et quant à la
seigne corro- troiſieſmc eſpece, nommée teigne corroſiue, il faut mondifier les vlceres, y appli
fiue. quant un telonguent.2.vng.enulat. cum mercur. duplic. ægyptiac. an. 3 iij. vi
trioli albi pulucr. 31. incorp .omnia fimul, fiat vnguent. ad vlum . Ou bien on vſera
du ſuſdit. Et filaduenoit quelque douleur,ou autre accident, on y remediera com
me le prudent Chirurgien cognoiſtra eſtre neceſſaire. Sur tous autres remedes i'ay
bien approuuéceux - cy. 2. caphur. Z. B. alumin.toch. vitr. virid. æris , fulphur.via
ui , fulig. forna, añ . z vj.olei amygd.dulc.& axung.porci.añ.3 ij. incorporentur(i
mulin morcario , fiatvnguentum . Autres prennent du jusde fumier de brebis , & en
frottent les lieux où eſt la ceigne , & y laiſſent vn linge trempé pardeſlus. Or lile B
malade ne peut eſtre guary par tous les ſuſdies remedes , & qu'il cult pareille
ment en autres endroits deſon corps vlcerescrouſteus, ſemblables à ceux qui ſong
à la teſte , ie conſeille que l'on luy frotte la teſte d'vn liniment fait d'axunge & vif
argent, auec vo peu de ſoulphre: puis qu'il luy ſoitappliqué lus la teſte l'emplaftro
de Vigo cum mercurio , en façon de bonnet : ſemblablement ſur les elpaules, cuiſ.
ſes & iambes ,& que l'on le tienne en vne chambre chaudement , citant traicte
comme ceux quiont la groſſe verole : car par ce moyen pluſieurs en ont eſté guaris.
Prognoſtic. Er celuy qui l'a premierement experimentéde ma cognoiſſance, ce fut mailtre Si
mon le Blanc , Chirurgien ordinaire du Roy, hommegrandementexperimenté en
la Chirurgie,quiappliqua l’emplaſtre de Vigo cum mercurio, ſus vn icune hom
me qui auoit la ceigne , ayanc auparauant eſſayé tous moyens de le guarir : če qu'il
La reigne ne peut obtenir,finon par lesfuldiesemplaſtres, le traitcant commefileulteu la ve
laiſſe ſouuent role, & fut parfaictement guary. La teignceſt horrible à voir , & iecte ſouuent vno
one clopo- ſanie fortpuante , & cadauercuſe : la recente eft difficile à curer , & la vieille encores
cie.
plus faſcheuſe: & lors que l'on eſtimele malade eftre guary, quelque temps apres
reuient & repullule , à cauſe de la mauuaiſe impreſſion de l'humeur quiaura rendue
la partie intemperée. La teigne eſt contagieuſe, & fouuent vient de cauſe heredicai
re : aufli pourvſer de viandes qui corrompent le ſang. Ladite teigne eſt fore difficile
à curer, à raiſon que le cuir de la teſte eſt fort eſpés & ſerré : & partant l'humeur dif
ficile d'eſtre deſraciné de là. Elle delaiſſe ſouuent apreseſtre curée, vne depilacion,
& reproche au Chirurgien , de ſorte que pluſieurs en ont laiſſé la cure aux empiri
ques , & aux femmes.

De Scotomic , ou Vertigo. C H 4 P. III.

Que c'eſt que A maladie nommée Vertigo, eſt vn clblouiſſement & offuſcation de la
Vertigo veuë , cauſée d'vn eſpric vaporeux & chaud , qui monte par les arteres
Caule de carotides à la teſte , & remplit le cerueau , faiſant yn mouuementdes hu
Vertigo. meurs & eſprits contenus en iceluy,lequel eſt inegal, confus, & cur D
bulent, comme quand noſtre corps tournoye, ou quand on abeu trop de vin fort,
D'où viene puiſſant ,& fans eau.Ceceſprit boüillant le plus ſonuent eſt enuoyé du cæur au cer
sel eſprit va- fois
poreux .
ueaueſtengendré
par les arteresdedansle
carotidescerueau
internes, & d'elles à celles du retsadmirable:
, melmeseſtantintemperé en chaleur. quelques
Parcille
signes. ment pourvenir d'autre part , comme de l'eſtomach , foye, ratelle,ou autre viſcere.
Les ſignes ſont ,que les malades ont la veuë perturbée , fi tant peu ils rournent le
corps , ou regardent quelque choſe qui tourne , comme vne rouë , ou l'eau couran
te , & autre choſe ayant unmouuement ſubit. Sila cauſe vient du cerueau , les mala.
Curation.
des ont douleur & grande pelanteur de teſte , bruit aux oreilles , & ne ſentent le
Paulus plus ſouuent rien par le nez. Pour la cure , Paulus Ægineta commande faire l'inci
Ægi
ti.6. ch.4 fiondes arteresderriereles oreilles,combien qu'il ſembleroit meilleur faire l'inci
.
ch, 22 , ſion des arteres qui sont aux temples: mais ſielle vient d'autre partie, peu profite: &
parcant le docte Medecin y pouruoyera .
589
Operations de Chirurgie .
A

De la Migraine. CH A P. IIII.

IGRAINE , eſt proprement quand la douleur ne cient que la Quec'eſt que


moitié de la teſte, dextre , ou feneſtre. Aufli la douleur quelques- Migraine.
fois ne monte point plus haut que les muſcles temporaux ,aufli
quelquesfois monte iuſques au ſommet de la teſte. La cauſe de Cauſe.
ceſte douleur peut venir des veines ou arteres , cant internes
qu'externes , ou des meninges , ou inerme de la ſubſtance du cer ;
ueau , ou ſeulement du Pericrane , ou cuir mufculeux qui couure
le crane . Auſſi peut venir de certaines vapeurs putrides qui montent de l'eſtomach ,
ou de la matrice , ou de quelque viſcere, à la teſte. Lacauſe eſt interne , ou externe .
L’externe, comme chaud , froid , ou trop boire ou manger viandeschaudes & vapo- Cauſe exter
reuſes, ou quelque vapeur & exhalation, coinme celle d'antimoine,vif argent, ou ne .
autre : ce qui eſt cauſe que les Orfeures & Doreurs en font fouuent elpris. L'interne, Cauſe inter
B comme intemperature ſimple ou compoſée , auec inflammation & tenſion. La pe--ne.
ſanteurdeteſte monſtre l'abondance d'humeur : & quand la douleur eſt poignante , Les ſignes.
pulſatile, & tenſiue, les humeurs & vapeurs enſemble en ſont cauſe . Si la douleur
cít faite par l'abondance d'vne vapeur ſubțile auec pulſation , cela vient à cauſe de
l'inflammation des membranes du cerueau . La fiéure y ſuruientà cauſe de la grande
inflammation , principalement quand l'humeur qui cauſe la douleur ſe pucrefie .
Quand la douleur eſt ſuperficielle , la cauſe d'icelle eſt au Pericrane : & quand elle
eſtprofonde, & que le malade ſent la douleur iuſqu'à la racine des yeux , cela mon
ſtrela cauſe eſtreaux membranes du cerueau , & ſouuenteſt fi cruelle, que le malade
ne peut endurer que lon luy couche à la teſte. Orces douleurs font quelquesfois signes que la
continues , quelquesfois ont des paroxyſmes qui viennent ſans ordre, & louuene doulenreſtau
tourmentent cant le malade , qu'il ne peut ſouffrir qu’on face bruit en ſa chambre, Pericranc.
ny parler haut , & ne peut voir la clarté , ny ſentir aucune choſe odorante , ne faire
mouuement de ſon corps , & eſtime quelon luy rompe & briſe la teſte auec vn mail
c let, & ne peut boire vin . Lors que la cauſe eſt d'vn ſang boüillant, ſubtil & vaporeux , La curation :
& que tous les autres remedes n'auront ſeruy, l'inciſion des arteres és temples eſt vn Aéce, ale
tres-grand remede , ſoic que la cauſe vienne des vaiſſeaux interieurs,ou exterieurs : à bucrafis.
Paul. liu.6 .
cauſe qu'il ſe faic couſiours euacuation de ſang & eſprits , leſquels doiueriteltre eua
cucz ſelon la forcedumalade.Chriſtophle Landré dit auoir guary vne infinité de chap.4.
gens de la migraine , appliquant yn cataplalme fait de fiente de palombes ou pi
geons , broyéeauec huile denoyaux de peſche. Or ne ſera icy hors de propos reciter
Hiſtoire mes
ceſte hiſtoire de Monſeigneur le Prince de la Roche -ſur- Yon, lequel eſtoit extre- morable de
mement courmenté d'une douleur de reſte, cant de iour que de nuiet , auec peu d'in- Monſeigneur
termiſſion : & pour le guarirappella Meſieurs Chapelain premierMedecin du Roy, le Prince de
la Roche-ſur
& Caſtellan , aufli Medecin dudit Seigneur, & premier de la Royne - Mere , & Mon- Ton ,
fieur Duret , Lecteur & Medecin ordinaire du Roy , hommes fort ſçauans & beau
coup eſtimez entre les gens do &tes, leſquels luy ordonnerent pluſieurs remedes,
edia cant par dedans que par dehors, ſemblablement ſaignées ,ventouſes, bains , frictions,
D diete; bref , tout ce qui ſe pouuoit excogiter : tous leſquels remedes ne luy peurent
iamais appaiſer la douleur . Adonc m'enuoya querir , pour entendre demoy li i'auois
aucun moyen à luy ſedere la douleur ,où promptement luy conſeillay ſe faire ouurir
l'artere de la temple , du coſté où il ſentoit ſa plus gráde douleur : & luy dis que i'auois
grande coniecture que la cauſe de la douleur eſtoit contenüeaux arteres , & non aux
Pol
veines , & qu'auois fait ſouuent telle ouuercure , donc lesmalades eſtoient guaris , &
que les anciens le conſeilloiene, meſme que ie me l'auois fair ouurir pour femblable
douleur , & que depuis n'auois ſenty aucun mal . Subit enuoya querir les ſuſdits Me . Gal.13. Mer

decins, leſquels furent de mon aduis , & en leur preſence fis ouuerture de l'artere , ch.dernier.
choiſiſſant la plus apparente à la temple , & qui auoit plus grand bactement auecvne
ſimple incifion ,comme pour faire vne phlebotomie , & fut tiré du ſang deux palettes
& plus,lequel ſorcoit par vne grande impetuoſité de ladite artere , ſaucelant loing à
raiſon du diaſtolé & ſyſtolé d'icelle: & proteſte que par le moyen de ceſte ouuerture voglech.des
il perdit incontinenţſa douleur ſans plus luy recourner: dontledit Seigneur me fit varices.
yn honorable preſent. Aucuns ont ſuſpecte ceſte inciſion des arteres , pource qu'il
DDd iiij
590 Le dixſeptieſme liure , & c.
eſt difficile d'arreſter le Aux de ſang : & que ce faiſant, la cicatrice autour de l'artere A
cauſe ancuriſme , maladie faſcheule & dangereuſe, & que l’artere eſtant en perpan
cuel mouuement ne ſe peut aiſément conlolider: & pourceconſeillentde couper
premierement le cuir , puis l’eſcorcher& ſeparer , & la lier de deux coſtez, puis la
couper,comme nous auons dit dela varice. Mais ie te puis aſſeurer l'apertion auec la
lancette , comme on fait la ſaignée, n'eftre dangereuſe, comme i'ay experimenté
ſouuentesfois, & que la conſolidation ſe fait auit bien que de la veine,nonſi toſt
coutesfois, & qu'il ne ſuruient aucun Aux de ſang : pourueu que la ligature fois
bien faite , & qu'elle demeure trois ou quatre iours , en y mettant vne conuenable
compreſſe.
Des maladies ou indipofitionsquiaduiennent aux Teux .
Ces iours paſſez eſtant en conſultation auec Monſieur Cappel,Docteur Regent
en la faculcé de Medecine à Paris, homme tres- docte & de grande recherche , pour B
vn quidan qui auoit vne grande inflammation auxyeux , dont il ne voyoit rien, de
uiſanc auec luy,ie luy dy quei'auois tres- grand deſirde trouuer quelque docte Me
decin en la langue Grecque, pour faire vn Recueil de coutes les maladies des yeux,
& en bailler l'interpretation en langue Françoiſe,afin que les ieunes Chirurgiens les
peuſſent diſcerner& cognoiſtre les vnes des autres, pour pouuoir plus facilement
paruenir à la curation.Alors me dit qu'il le feroit volontiers pourl'amour demoy &
du public : Ce que depuis il a fair, en ayant recueilly la plus grande part , leſquelles
par apres pour plus grande facilité, l'ay redigées en cette Table.
2

591

METHODIQVE DIVISION ET DENOMBREMENT

des maladies qui ſuruiennent aux yeux.

ÇExophthal. 5 Prominentia oculi, en Latin. Oeil de bæwf, Gros æil:qui ſe faisquand l'æil fort
mia
hors l’orbite parnature pluftoftque par accident.

Şimminutio oculi, L.Extenuation : qui eſt un emmaigriſſemět de toutes lespar


Atrophia
1 Zriesde l’æil, apportant une profondité & cauitéd'iceluy. Gal.in definit.Medic.
d duzout hors de ſa
Ecpie[mos ŞExitus, Expreßio,Exertio, C. Cheute de l’æil: Quan il eſt
cauité , o principalement par fluxion ou coup. A'ece livre 7.
Strabiſmus ŞStrabolitas, L. Eſtrelouche, ou bigle.C'eft vne diſtorſion contrainte auec in
Resu Zégalité dela veüe. Paul. liu. 3. chap. 2.
Caroplis & Propinqua viſio, L. Quand naturellemet lon nepeut voir leschoſes que de pres,
Myopiaſis 20 difficilement de loin, em ſemblequelon voye des mouſches, sëceliu.7 ,
Hyperolia ŞRemotavifio, L. Quandlon ne peutvoir & diſtinguer les choſes que de loin,
Pendilatane fórs les yeux :ceſte affection eſt contraireà la precedente.

81 Anopſia { Quand on ne peut


diſcerner les obiects filsneſont un peu iſlemez.
Chord SHallucinatio, ou caligatio L. Abuſement de veüe ou d'æil : Quand on prend
Parorafis
Zune choſepour une autre, & eft lauant- coureur d'aueuglement. Sauonarola ,
( Hebetudo, L.Esbloüiffement continuel & diminution de la više, ſans aucune
apparence exterieure ,mais ſeulement par alserasion mediocre des humeurs,
Ambylepia epritsou tuniques.MonſieurFernell'a ditvenirquand la cornée deuient trop
idure. Paul.liv.3.chap.22. Aëce liuye 7 .

ŞDelacrymatio, Pituire curſus, L.Teux pleurans,moitesou mouſſes: Quandles


Epiphora
Zhumeurs coulent aux yeux , & pleurentperpetuellement.Celfeliure 6.
SRuptura ab ictu, L. Rupture: Quand les membranes,principalement
& l'Vuée
Rexis ou la Cornée
font toutes rompues parquelque comp , de forte que læileft du tout
rræil Ccreué ,tous les humeurs fortans.Aèce liure 7 .
en
ŞConfuſio, L. font meſlez & confus enſemblepar grāde
Quand tous les humeurs
tier Synchiſis
2playe ou inflammation, la prunelleapparoiſt de diverſescouleurs.Gal.in Tſag.
com
S Reſolutio, L.Quand l'æilne ſe peutmounoir eſtantperclus deſes muſcles. Gal.
me Paralyſis
Zenl
'Introduction. Aëce, ibidem .
( Equus , L. C'eſt un branlement perpetuel de l’æil, venant dés la natiuité de

Hippos la perſonne: Aucuns l'attribuent aux paupieres, & le nomm.ni en Latin,


Nictatio Nictatio, clignement d’æil , æil d'hypocrise : d'autant que lon remue touſiours
Lles paupieres, ou l'æil meſme.

Oedema ŞQuand l'æil eſt tout bourſouflé perdanifanaifue couleur, ſe remuant diffici
Clement, Gal. in Medico.

Sepedon ŞPutredo, L. Quand l'eil fe vient du tout à pourrir, & quelquesfois ſe gangren
Gangrena Zne . Gal. en l'introduct.
Les mala
Anthra- ŞCarbunculatio, L. Oeil roffy: c'eſt uneeſpece de charbon à l’æil. Galien enl In
dies ou af
choſis Ztroduction .
feétiös des
yeux , com
Nyctalopia ( Nocturna ou veſpertina cecitas, ou Nuſcioſa affe &tio , L. Quand de nuict
me eſcrit
Hemeralo- on ne void rien , & ce par accident. Le contraire eft , scies nocturna :
Gal.chap .
pia quand on void mieux de nuict que de iour , & fe peut dire Hemeralopia en
is.delin
troductiö Acies ſola- Grec ,Oeil de chas, en François : comme Acies ſolaris, ou Solana viſio,
ris
quand lon ne peut voir qu'aux rayons de soleil : & Tenebroſa affectio, ſe
ſontennoad
bre de cent Tenebrofa | dir de ceux qui voyent malaiſément la lumiere grande. Paul.liure3.chap.
Caffectio 22. Gal. in Iſagog.
treize, deſ
quelles au
CuNCS OCCU

pent

.
592

Emphyſema Sinflatio pruriginoſa, 2. Quand la paupiere devient enfléeeſtant pleine de


piruite , qui fait une demangeaifon auec fluxion . Cela aduienevolontiers
cnefmodes
Aux vieillards & en Eſté. Acceliu. 7. Celf.liu.O.
P, orophthal.S Lippisudo pruriginoſa ,L. Chaſie bauenfe « poignante: Quand unepi
mia cuire ſalée caufe une demangeaiſon , auec fluxion d'unematiere acre, dont
fenfuit quelquesfois inflammation . Aëce,ibidem .
Lippitudo arida, L. Chaßie feiche : Quand il ne decoule rien, ou bien peu
Xeropthal des
9714 paupieres, y ſentant cuiſſon & apreté, principalement en la ſuperieure.
A'ëce lix . 7. Elle ſerapporte à tour l'æil auſi.
Sclerophthal. ŞLippitudo dura , L. C'eſt un difficile monuement des paupieres & yeux
Zaccompagnez de dureté ſans fluxion. Hippocr. Aëce, dé locis áaquis.
Inuerfio ,ou Hiatus, L. Quand l'une e l'autre paupieteeſt relournéepar
Ch mojis vne grande inflammation , & que le blanc de l’æileft plus haut ellenéquele
no1r . Gal. in Medico. Paul. liu . 3 .

Priloſis , ous.Craßeries culloſapalpebrarum , L. Deplumation,e pesſeurdes paupieres dues


pelade. Quand les panpieres ſont dures & groffes auec chaleur rougeur,
Poroſis
& le poil ne s'y peut ficher pour en ſortir. necelsu. 7. chap.77.
Coloboma · ŞMutilatio, L.C'eſt vne deperdition dequelque partie de lapaupiere.Il ſepred
4. Method .
2 iußi pour deperdition de quelque parte que ce ſoil .Gal.liu.4.
Scleroſis f Durities , L. C'eſt une tumeur des paupieres auec chaleur douleur, conti
Scirroſis nwant plusque l'inflammation , Gal.in Med . Er fileſdites paupieres deuien
Scirrophthal nent auec la dureié, enflées o liuides par une chair ſous-croijante,fe fatico
mia
{ furuient Scirroſis ,come parune longue continuité d'imflmmation.Gal.ibid.
Sinuerfatio, L. Oeil eraillé : Quand la paupiere inferreure par cicatrice ,04
Ectropion
duire occaſion , ſe renuerle & ne peut couvrir ſon blanc. Paul. liv.6.
Ancyloble- [ Inuiſcatio, L. Quand les paupieres feirennenıles vnes les autres , ou bien
pharon font adheranies a la Conionétiue on Cornée , pour quelque ulcere malpensé,
Symphyſis (Gal.in Ifag. Aëce lix .7. chap.64 .

Prophylos, Leporina palpebra, L. Ocil de lieure . Quand lon dort les paupieresouueres
Lagophthal- comme les lieures, il vient ( ouuent de nature : außiquand parcomuwilionla
-paupiere ſuperieure ne copure le blarc. Amaud .

Trachoma Aperitudo, L. I segalité de l'une a l'autre paupsire,auec dureté raboteu


les par 2. & ſemble qa’sly aie des grains de milet. Cilie liu.7.chap -43.
dies de ) Lespau
Ficofiias , ou fico apalpebra, L. Quand les paupieres ſont fi inegalese ru
læil,qui) peres Sycoſis des que lon y apperçout comme peries grains de figue. Gal in ijaz Esquand
font cilen foro du fang ,fouuent s'appelle Morum , ou Cel um.
Teloſis , ou sCalloſa palpebra , L. Quand les paupieres viennent dures comme un calon
Eyanaſtema comme un cor. Aucuns le nomment Epanaſema ochihodes .
och hodes SPalpebrarum aquofitas, ou ve/ 10.1 , L. Quand lapaupiere inferieure eſt pleine
Hydaris { i'unegraiſſe molaffe & aqueuſe. Pwul.liu. 6. chap.14.
My defis { putredo, L.Tumeur auecputrefaction dont il en comte matiere. Gal.in 1/ag.

Cruhe , ou JHordeum, præputiolum , L.Orgueil.c'eft vne pesite rumeur fixe,quiviend


poſtia l'extremué dela paupiere, où s'engendrent les cils. Paul. liu . 6 .
Chalazion Grando,2.Greſe,c'est une petiterumeur mobile ronde & lucide commern
grain de greſle , laquelle vientaux paupieres. Gal, en l ' Introduct.

Pabiriaſis Spediculatio, L. Quand le poil des paupieres eſt molefté par le moyen despas
{ tits poulx qui y croiſſeni. Sèce liu . 7.chip.os.
Thrichialis Quand il croitd'autres poils aux paupieres que les naturels leſquelspiquět

Madarojis Steiló le font pleurer:lecontraireeft'n


ada ofis,ú Milpojisen Gree, Gla
Milphoſis ( brities palpebrarumen L. quand le poil des paupieres tombe. Aèc : 16.7.6.78
.
Quand il vient à la paupiere deux ou trois rangsdepoil , ou bien quand ols
Phalangojas
ſe recoquillenten dedans et piqueni læil . Paul.linre 7.0 quand il n'en
Diſtychiaſis vient qu'un rang , el dit Duſtychiaſis. Gal.enl Introduct.
Lapideſcentia, 7. Sont petites tumeurs du es comne pierrottes qui croiſſent
Lithiaſis
* #x paupieres, & le peur dire Grauelle des yeux . Arce liu.7.1629.79.

Pladarotis { Ce ſont perits corps molse decolorez venans au dedans des paupieras.
Imbecilué ſimple des paupieresfans aurre cauſe exteri: e que los voze: mais
slonia
cependanı lon neles peurleuer, eſtans contraires de les tener fermées,comme
Paralyfis paralyriques,fion ne leshauſſe de la main . Auic.
Croiſſance de chair quivient en leur parute interieure, eftans quelquesfois
Sarcoſis Sleux ou trois comme petits pois.Gal. in Medellíuwent auße és paupiera sa
Atheromara Atheromata , Ganglia,Me!icerides & varices. Enſemble il sombe en l'eil
( choſes eftranges. Aese linie 7
1

593
Sanguinis effufio , L. Meurtriſſeure,fonspetites marques rouges , on gros
Hypophagma, Sang noir qui ſuruientaux membranes, &principalemēr à la Coniortti .
we do cornée,parrupture,quieft venu aux veines qui fontanfditesmem
CA 10w- Epanaftema branes,c principalement par un coup.Anicen.liu.z.le nomme Alearfari.
tes & ochrhodes
Ficus, L.qui eſt une tumeur des comme inflation & bourſowflement de
se fait | toutes les mébranes qui fons à lạil: & lors que le mal eſt plus grand ,ilſe
i Hymenon nõme HymeronEpanastaſis, Rebelliones en Latin ,côme fileſdites mēbra
Cepanaſtaſis mesfenorgueilliſſoient ,& vouloient
ſortir hors deleurplace & lieu natu
rel . Cornariusles nõme Membranarum eminentias. Il ſurvientauſi aux
membranes vne molleffe, dite par Arnaud, Mollities membranarum .
Perturbatio, L.Chaleur rougeur de l'æil, auec meiteur,proue
Taraxis
Gant decaufe externe, comme de la fumée , powßiere, huile , ou
Cautre choſe quiaura entré en l'eil.Áece liure 7.chap.3
.
Lippitudo , L.inflammation de l’æil, quand le blanc d'iceluy eft

fort rouge fouuentesfois pleurant. Nonusch.69.en nommeune


ophthalmia ophthalmia Sphacelizoufá :en Latin , Inflammatio ocularis in
ophthalmia , Sphacelum degenerăs: Quad par trop freguěte& indiſcrette ap
/
Adna-iphacelizou- | plication de remedes rafraichiſanslapartie perd ſon téperament
5 .
1a, Con You
fyngula, L.Vngle.c'eſt une excroisſance de chair fibreuſe ,laquel
ioneti .
0101 ne Pterygion Ile petit à petit conurela Conionitiue, é quelques fois la prunelle
venanı d'un angle de læil : & pource eſt ditcomme ongle. Celje
Mem
( liure 6.chap.7 . Aëceliure 7. araud.
branes , )
Albicans cicatrix .L. Sont humeurs blancheaftres en forme de
à fça Aigle
cicatrice ſur le blanc de l'æil. Hippocrates prorrh .
;146
KOIT ,00
STophus, durities Adnata, L. C'eſt une tumeur qui ſe concrée ſur
Poroſis
la membrane Adnata, comme un durillon . Gal. in def. med.

Botrjen Foljula , c'eſt un vlcere perit & profond comme une pointure en
la Cornée. Aëce liure 7. chap. 27.

Cæloma ſemblable aw ſuſdit,mais pluslarge,


Scauitas, L. C'eſt un vliere
& moins profond. Auicenne.

Argema şc'estun ulcere rond occupant l'Iris, de forte qu'elleſ'apparoiſ}


rouge en la Conionctiue , á blanche en la cornée.

Svlceratio, L. C'eſt une ruprion de la Cornée par un coup , on


Elcofis
grande inflammation. Gal. in def. med.

En şvlcus fordidum , L. Sont vlceres ſordides & crouſteux , deſquels


Epicauma
Encawm4 fori delaboüe orde e vilaine. Aéceliure 7 ;
parti. S
culier Phlyctena spuſtule, L.C'eft une petite rumcur auec izflammation ,qui occupe
la Cornée , & fortcomme veſies. Aëce ibid. chup.is.
comme P /jdracia
Corrée Caligo, L. C'eſt un vlcere ſuperficieldecouleur ceruléeou obſcue
Achlys re , ou obſcure cicatrice , qui commence à broisiller l'æil. dece
Goredu .

Nubecula, L. Nuage. C'eſt un vlcere fuperficielcomme le prece


Nepheleon 3 dent, mais plus obſcur o profond , la veiie commençant à eſtre
Lbale. Nonus chap.4s.
sanies, L.Telle maladie aduient lors qu'il coule du ſang meurtry,
Hypopion
Pyofis Sou qu'il fengendre de la boue entre la Cornée é vuée, eſtant

Onyx nomméonyx , ſi ladite boje, comme deſſeichée, repreſente la fort


ime & couleurdel'ongle. Paul.liure 3. chap. 22 .
Carcinoma SCancer Cornea , L. Quand les veines qui font en la Cornée font
pleines de ſang noir,accompagné de douleur poignante.Gal.ilag .
Oule SCicatrix , L. Sont cicatricesblanches & efleuées qui viennenten
Zla Cornée, à cauſed'un vicere profond. Gal. en l'introd .
Paralampſis Cicatrix reſplendens, L. C'eftvnedureté & cicatrice au noir de

Aigis l'æil, plusgroſſe & eſeuée que l'Aigis. Elle ſe peutdire Oeil blanc.
( Galien en fon Lexicon .

Proptoſis Procidenti vuea ,, L. Chente de l’ruée : ce quiaduientquaisdla


a vuek
Prosidentia
Cornée eſtrompue,élvuéecheure. Celfeliure 6 .
Mwſce capui, on formicalis ruptura ,L. Quand l'Vuée ſe repre
Staphyloma 3 ſente par la Cornée en groſſeur & figure d'une sefte de mouſche.
Paul. liure 6. Gal.in def. med .
Vuée
tra
Melon ŞMalum ,L.Pommette. Quand l’Vuéeeſt tellemet groffe & fortie,
{ qu'elle repreſente, ſuspendue,unepommette.

LHelos SClauus, I. Cleu. Ce qui adnient quand la ſuſdite Vuéefe vient de


endurcir, repreſentant la teſte d'un clow. Auicenne,
594

Mydriaſis [ Pupille dilatatio, L.Effargilemërdela prunelle,quiſefaitquand la mēbraneouée


Plasycoria Selargis à l'endroit du trow ,ó repreſente l'obiect plusgrand, imparfais,& confus.
Pupille è loco fece liv.7.ch.sz. Quelquesfois la prunelle ſemblen'eftrepas droitement au milieu,
remotio ( mais changée de la place , & fedit par Arnaud, pupille è loco remotio,pag. 154.

STabespupille,L. Quand laprunele deuientpluspetite& obfcure que le Baturel,á


Phthifis
Prunelle alors les obiers ſemblent plus grands.sëceibid ,
Suffw/10, L. Casaracte os couliſſe.c'eſtune concretion d'humeur entrela cornéedu
l'humeur Cryſtalin,qui eſt le ſigne de la diſtinction des couleurs. Et quand elle cou
Hypochyma vre la prunelle ,ox vieni à fendurcir en l'vuée ,quieſt le fondemeni de la prunelle,
Gutta Zala elle eftappellée Tunica ocularis en Latin , en François , Maille,Taye , Bourgeon.
Paul. lin.c. Elle f appelle parAuicenne Gurrazala, obſcura .
Glaucedo, L. Cequi adnient quand l'humeur Cryſtalin ſe vient
rGlaucoma à deſſeicher & blanchir: on l'appelle æilblafard , ő telle affection

vient aux gens vieux .


la ſuſdite affection n'aduient qu'à vn desyeux , & ſe
Eſt quand C
Heteroglaucisz peutnommeræilveron, ou bigarré , se fontaußi quand ies yeux
Cryſtalin , Sono blafards, ou la prunelle eſt noire. Gal.1o.de vfu part.

font albugo, L. Oeil de chéure :quand l'humeur Cryſtalin eft du tout


Leucoma
blanchy, qui ne vient point par vlcere , ny aux perits exfans par
force de crier. Gal. in def. med .
Ś slbedo in Cryſtalloide, L. Quand ilſe faitune marque blanche
Aggrias
menys sur l'humeur Cryſtalin . Aëce liure ?. chap.26 .
scataftafia Ś Quand l'humeur cryftalin eft fi imbecile, que par une grande
[ cryftalloidons l'umiere eſt tourné bouleverſé,comme filestois diloqué.
ŞRaui oculi, L.Oeil de loup, ou de mauvais garçon: quandleshua
rsithemoma
Zmeurs fe noircijent dos tout l'æildewenanida sout noir ou obſcur.

Oudetowen- ) H emalops Ssuggillatum L.Oeil poché,quand il ya confuſion d'humeurs


iſemble, come Hypochiſis { l’æilestant noir. Il ſ'appelle außiHypochylis.
Leoninus oculus , L. Oeild’airain. Quand l'æilest roux , fier, estincelant comme
Là un Lion : ainſi lesont les Ladres, L. Fernel,chap.de Elephant.
Abfceffus ocularis , L. C'eſt une collection d'humeur ſemblable à du miel, entre
Anchilops le grand coing de l'æil & berez , du effenweloppé d'une sage ſans faire douleur.
.Gal.in Ifag . Paul.liu.6.chap.22 .
ŞFiſtula lacrymalis, L. C'eſt une fiftulequinaiſt au grand coing de l'ail par le
Ægilops
ſuſdit abſcés, faiſant carie founentà l’os. Celle.
Angulorum eroſio, L. C'eſt unvlcere qui eſt au petit coing ,vers la temple, do
Peribroſis quelquesfois en forr du sang , ſe nomme auſi, Prurilus Lacrymalium.
Arcul.
Coings ,
Sc'eſt une tumeur ou addition dela chairà celle qui eſt contenüe aux angles, ou que
Ou An Encanthis
Zla glandelacrymale ſe vient à enfler.
gles
Rhæas, fie- sc'est une diminution de chair à celle quieſt consenäe aux angles , ou fous les
paupieres & coings des yeux , & à icelle ſe rapporte Scemoſis en Grec , en Latin
mojis
imminusio. Gal.in def. Med.
Şc'eft vn vlcere quidecoule perpetuellemeni ducoing des yeux. Pline liure 20 ,
Epinyetis
Echap. 6 .
Agglutinatio, L. Quand les coings on angles reviennent à prendre e aggls
Prophylis finer: il ſe prend ausſi pour l'agglutination des paupieres avec l'ail.Galien en
l'Introduct.

Amaurofis çobfuſcatio, ou Gutta ſurena, L. aueuglement : qui vient quand le nerf optique
est bouſchépar quelque humeur. Gal.r.prorrh. Hipp
Nerf Şabruprio, L. Quand le werf optiqueeſt rompu par quelque coup ; de ſorte que
optique porhexis ;

Paremproſos concidentia , L. Ce qui ſe fait quand le nerf optique eft remply de quelque
1 Zhumeur quiy decoule. Gal.ibid .
1
Symptoſis Coincidentia, L. Ce qui adnient quand le nerf optique ſe reftreßis ou deuient
flacque par imbecillirć osfeicherele.

Expli
Operations de Chirurgie. 595
Ά
Explication de quelques maladies particulieres contenuës en la fuſdire Table.
et premierementdumoyen derehauffer la paupiere Superieure.
CH A P. V.

'Avois propoſé d'eſcrire en particulier toutes les ſuſditesma


ladies : mais comme i'ay eſté deuancé par l'impreſſion de mon
liure qui eſtoit ſus lapreſſe, & fçachant qu'il y auoit quelqu'vn
qui y trauailloit pour les eſcrire toutes en particulier,ie me ſuis
arreſté à mettre ſeulement celles qui ſ'enſuiuent. A quelques
vns la paupierc ſuperieure eſtrelaſchécoutre ſon naturel, & plus
qu'il n'eſtneceſſaireà couurir l’æil , qui eſt cauſe d'amener dou
ble accident : l'oneſt, que le maladene peut bien ouurir l'ail: l'autre, que les poils
du cil entrent dedans l’æeil, & le picquene , donnant au malade grande douleur.
B Ceſte relaxation vient à raiſon d'vne paralyſie particuliere , qui ſe fai& aux vieilles dent
Double acci
pour la
gens, ou d'unefexion rheumatique ſansacrimonie, cuiſon, ne mordication : ce qui
nouseſtmanifeſte, parce que ceux qui ſont vexezdetelle affe& ion , ont quelques- perieure
paupiererefrom
fois vn ou deux rangs de poils aux paupieres outre le naturel , qui croiffent pour la laſchée.
quantité de ceſte matiere: comme voyons qu'en terre humide il croiſt beaucoup Cauſes.
d'herbes. Or ſi c'eſtoit vne humidicé acre & cuiſante, le malade le pourroit facile
mentapperceuoir pour la douleur qu'ilauroitaux yeux : ioino que te humeur cor.
romproit le poil,qui naturellementyeſt produit, & par plus forte raiſon engarderoit
.
qu'ilen ſuruint de ſuperflu. Et pour la curation : deuant que faire l'operation ,faut Cure.
marquer d'encre ce qu'il ſera expedient d'en couper, craignant qu'en oftant trop, la
paupiere ne demeuraſt renuerſée, ce queles anciens nomment Ectropion : puis il faut EEtropion.
pincer & ſouſleuer la paupicre ſuperieure, laiſſant le cartilage quieſt au deſſous : &
apres coupper en trauersla peau cant qu'il ſera beſoin ,fans offenſer ledic cartilage:
puis lon fera deuxou trois petits poincts d'aiguille,pourreünir la playe & la conduire
à cicatrice: laquelle eſtantfaicte,empeſcheque la paupiere ne tombe plus bas qu'el
C le ne doit, à cauſe qu'elle aura eſté accourcie. Il ne faucoſterque ce qu'il en faut, ou
autrementiladuiendroic deux dangers: l’vn , que lion coupe trop, I'æil demeurera
erailléé , parce que la paupiere ne pourra couurir l'æil. Aufliſion en coupe moins
qu'ilne faut,ce ſera temps perdu , & faire endurer le malade ſans profit.Etoù il y Moyen d'ar
auroitpluſieurs cils of poils,les faut tirer & arracher par petites &propres pincerces: racher lescils
puis cauteriſer la racine auec vn petit caucereſansoffenſer l'« il, oùapresſe formeleourempeſcher
genera
vne cicatrice qui defend qu'ils n'y renaiſſent. Le cautere c’eſt icy repreſenté. sione

Cautere .
‫ ܢܳܐ‬1

D DeLagophthalmie ,ou æilde Liéure. CH A P. VI.

R ceux qui ont la paupiere trop elleuée en haut , dorment les


yeux ouuerts , ne les pouuans clorre : les Grecsnomment ceſte
maladie Lagophıhalmos. La cauſe vient interieurement, comme
d'un charbon , ou autre apoſteme, & vicere : exterieurement
13
comme d'un coup d'eſpée ou d'autre baſton , ou bruſieure, par
cheute, ou autremene. Quand ceſte maladie eſt venue par vne Prognoſtic.
cicatrice, on la peut guarir, pourueu que la paupiere ſoit d'eſpel
ſeur ſuffiſante: mais quand ce vicevienedenature, ou qu'il y a vnegrande deperdi
tion de ſubſtance, comme il aduient par vne bruſleure, ou par vn charbon ,le malade
ne peut guarir . Pour la curation , il faut vſer des fomençations relaxantes & remol Curation :
lientes :puis on fera vne inciſion ſus la paupicre en forme de croiſſant, cirée deſſus
ſoit en hauten
toute la cicatrice ;de maniere que toute la circonference d'icelleЕЕe
(
596 Dixſept liure , de pluſieurs
ieſme
forme de voûte , & ſes poin & es en bas pres du cil: apres on ſeparera les léures de A
l'inciſion que lon aura faicte, & ſera mis deſſusde la charpie ſeiche, & par deſſus yne st
petite emplaftre: puis ſera la partie liée comme il appartient, en rabaiſlant la paupie
re, afin qu'elle ne retourne en la figure premiere & non naturelle . Or faiſant l'inci
fion , il ſe faut donner garde de toucher le cartilage : car eſtant inciſé, la paupiere ne
ſe pourroit plus releuer.La paupiere inferieure eſt ſubje &te à pluſieurs indiſpoſitions,
& meſme à ceſte ſuſdite , & lors celle maladie eſt nommée Ectropiox : laquelle ſera
traictée comme la ſuſdite ,

Dela Greſle des paupieres nommée Chalazion en Grec: & d'un autre vice nommé Hordcolum.

CH A P. VII.

HALazion eſt vne petite eminence ronde,tranſparente,quiſo


concrée en la palpebre ſuperieure, & ſe remueçà là : les Latins B
Greſle. l'ont nommée Grando ,Grelle en François , à cauſe qu'elle reſſem
ble à vn grain de grelle. Il ſe fait vn autre cubercule ou eminence
Horgcole. au bord des paupieres qui ſe nomme Hordeolum , à cauſe qu'elle a
Prognoſtic. quelque ſimilicude à vn grain d'orge . Leur matiere eſt contenüc
dedans vne tunique , & tres difficileinenc ſe ſuppure : au commen
cement on la peut reſoudre , & lors qu'elle eſt inueterée , & que l'humeur eſtdur
commeplaſtre ,ou comme vne pierre de cuf, elle eſt cres-difficile à guarir. Quant à
la curation , il les faut oſter par æuure manuelle , y faiſant apertion , afin de faire eua
Cure .
cuation de l'humeur contenu: mais quand ladice tumeur n'eſt non plus groſſe qu'un
grain d'orge,on doit paſſer au trauers vne éguille enfilée , & y laiſſer le fil delongueur
Tuffiſance ,lequel ſera attaché au front ( ſi c'eſt à la paupiere ſuperieure) ou à la joue
( li c'eſt à l'inferieure) auec vne petite emplaſtre de gratia Dei , & ſera remué de deux
en deux iours, com nelon fait à yn Secon : car par ce moyen ladite tumeur ſera ſup
purée , & en fin guarie.

D'une ſubſtance graſſe qui ſe couche ſousla paupiere, nommée Hydaris.

C H 4 P. VIII .

Paul. ch.14 . YDATIS eſt vne ſubſtance graſſe comme vn petit morceau de
liu. 6.Hyde graiſſe, laquelle eſt couchée au deſſous de la peau de la paupiere
tis eft vne tu . ſuperieure, qui ſuruient principalement aux petits enfans qui ſont
ment molle. fort humides : & par ainſi la tumeur eſt molle & laxe , quirend la
paupiere ædemateuſe ,eſtant cauſe qu'elle ne ſe peut releuer.Ceux
quiſontvexez de telle indiſpoſition , ne peuuentregarder la clair
1
té du Soleil , ayans les yeux rouges & pleurans couſtumierement.
Cure. Pour la curacion , il faut inciſer & amputer dexcrement ceſte ſupercroiſſance, fans
toucher à l’æil : apres l'amputation on doit maſcher vn peu de ſel, & l'appliquer deſ
ſus ( ſi la douleur n'eſtoittrop grande ) afin de deſſecher le lieu , qu'elle ne reuienne D
plus : & par deſſus tout l'ail onappliquera vn blanc d'oeuf auec eau roſe , ou autre
medicament repercuſſif.
Lit

Des paupieres priſes et jointes enſemble.

C H 4 P. IX .

dure despau A paupiere ſuperieure ſeioint auec le cil de l'infericure , quelquesfois


pieres priſes auec la tuniqueconion &tiue , & quelquesfois auec la cornée . Telle ag
enſemble. glutination ſe fait quelquesfois par Nature , c'eſt à dire , par le vice dela
vertu formatrice dans le ventre de la mere ( comme quelquesfois lon
voit les doigts l'entrecenir enſemble : les extremitez du liege & l'orif
fice du col de la matrice) combien que les yeux ſont bien formez; ce qu'on
peut voir à la groſſeur de l'æil dans l'orbite, & mouuement d'iceluy : aucune
fois telle choſe aduientpar playe ou par aduſtion , ou parapofteme, meſme parlas
Operations de Chirurgie. 597
esde A petite verollc , & autres cauſes, Poupla cure faut la ſeparer ſoigneuſement,auecvn caredes
lite
inſtrument propre , regardant bien de toucher la cornée: à cauſe qu'elle ſe forjecte- paupieres
roit en dehors: ce qui ſe fera metcant la queue d'vne eſpatule entre les palpebres, la- miſes eno
quelle on leuera en haut (depeur de toucher à la ſubſtancede l'æil) faiſant l'inciſion ſemble.
TITURA
‫ܕܢܐܠܐ‬ aucc vne lancerte courbée: l'inciſion & ſeparation ainſiexecutée, on mettra dedans
l'æil du blanc d’æuf, barcu auec eau roſe, & tiendra- on la paupiere ouuuerte, com
lelor mandant au malade l'ouurir & fermer : & la nuict on mettra vn pecit linge delié,
trempé en eau , en laquelle on aura diſſoule vn bien peu de vitriol: ou bien onvlera
de ladite eau ſimple:car tel remede empeſchera qu'elle ne ſe reagglutine. Le troiſief
‫ܕܐ‬ meiouron y appliquera caux deſiccatiues ſans acrimonie , afin de produire cicatri
ce. Or ſi la paupiere eftadheranteà la cornée, à l'endroit de la pupille, le malade de
meurera borgne decertail , ou bien n'en verra que bien peu , à cauſe de ladite cica-,
crice, par laquelle la vertu viſuelle ne pourra penetrer en dehorsiuſques auxobiects,
ou bien ne pourra donner paſſage à leurs images iuſques à l'humeur cryſtallin. Pour
le prognoſtic, cu apprendras de Celleque cemalrecidiue touſiours, encore qu'on
Ellen B aye mis toute diligence à le guarir.
neac
Du prurit des palpebres des yeux. CHAP . X.

L ſe fait ſouuent un grand prurit ou demangeaiſion aux palpe


bres des yeux , cauſée de pituite ou phlegme falé, qui quelques
fois engendreles vlceres , deſquelles fore vne ſanie, qui fait que
les palpebres ſe glutinent de nuict enſemble , & les rend chal
que
ſieuſes: laquelle choſe donne grande faſcherie au patient. Ec
pour la curation, les choſes vniuerſelles premiſes, ſ'il y a vlceres,
ſeront lauées & corrigées auec ce collyre. Prenez eau de miel Cure duprusa
Gli
diſtilée in balnco Mariæ z ii , ſacch.cand.zj. aloës lotæ ſubtiliter pulueriſaræ z B. rit des Ран
miſce, fiatcollyrium . Et fitelregime ne ſuffic,vſeras de ceſtuy plus fort.4.vnguenti pieres.
ægypriaci 3 j . diſol. in aqua plantaginis quantum fufficit ,& auec un peu delinge
c delić & imbu,ſeront couchéesles palpebres,ſoy donnant bien garde qu'il n'en tom. 'Tenentēsque
Egyptiac
been l'æil : & au ſoir lors que le patient voudra dormir,le fera appliquer de ceſton touche Pæil,
guent,quien tel caseſtde grandeffe&.4.axungiæporci &butyrirecentisañ. ZB .comme quela
tuthiæ præparatæ z B. antimo.præpara .in aqua euphraſ.ſcrupulosij.camphoræğ. ques- ons
iiij . miſce , & in mortario plumbi ducantur per tres horas , lequel ſera gardé en vne l'ont voulu
20C
boëtte de plomb. Autres eaux propres auſſi à decerger , feicher, roborer, aſtreindre, dire.
& entiereinent guarir le prurit, & rougeur deſdites palpebres . 24. aquæ cuphrafiæ , Remede de
upes
mitor
fæniculi, chelidoniæ, ana 38. ſarcocollæ nutritæ fcrupulosij. vitrioli Romani zi. grand effect.
endis miſceantur fimul, & bulliancvnica ebullicione: poftea coletur,& ferueturadvſum
Се: dictum. Autre. 2. aquæ roſatæ & vini albibonian.3 iiij . tuthiæ præparatæ , aloës,
añ.3j . Boris ærisícrupulum ij.camphoræ q . ij.bulliancomnia ſecundum artem , 8c
feruentur in vaſe vitreo : & d'icelle en ſoient lauées les palpebres . Autre. Prenez vin
la blanc demie liure ,deſel communzi. & les mettez en vn baſſin de Barbier bien net
edeli & comerc, & le laiſſez par l'eſpace de cinqou ſix iours , en remuantvne fois le iour
D ledic vin ,& d'iceluy en foient frottées les palpebres iuſques à la parfaicte curacion.
LINTE Autre. Prenez de l'vrine du patient,& la mettez en vn baſſin de Barbier, par l'eſpace
d'vne nuict, & d'icelle le malade lauera fesyeux: & ne faut faire difficulté d'yſerder
diesremedes,aufquels entrentchoſesacres. Car ie proteſteàDieuauoir veu vne Hiſtoire.
femme aagée de cinquante ans,ou enuiron, laquelle pourvn prurit ſe lauoit les yeux
de vinaigrele plus fort qu'elle pouuoit trouuer, done en fus forcémerueillé : & me
diſt iamais n'auoir trouué remede plus fingulier.DeVirgo ordonne vne eau , qu'il Liu.2.chaa?
fois dic eltreprecieuſe & d'admirable operation deſſus toutes autres medecines en ce traicté3,
cas , & dir qu'elle doit eſtre plus eſtimée que l'or & l'argent , laquelle eſt celle. 2.
aquæ roſatæ , vini albi odoriferi, mediocris vinoſitatis añ. ziij.mirabolanicitrini
101 trituratizj.B. thur.zij.bulliantomniafimul,vſquead conſumptionem terciæ part.
deinde inninediatè addantur foris æris ſcrupul. ij.camphoræ q. ij.deinde refer
uecur in vaſe vitreo bene obcurato ad vſum .
EEcij
6
598 Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs A
Dela Lippitude & Chaſsie.' C H 4 P. X.

Cauſe de lip L yen a quelques-vns qui onttoujours les yeux moüillez d'un
pitude. humeur ſubtil , acre , & chaud , qui leur cauſe vne perpetuelle
Prognoſtic.
aſperité, & pour peu de choſe il ſuruient inflammation , & quel
quesfois lippitude, ou chaſſie, & en fin éraillementdes yeux. Or
lippitude n'eſt autre choſe qu'vne ordure blanche qui ſort des
yeux , & quelquesfois tient les paupieres ioinctes enſemble, &
tourmenre le malade toute ſa vie: toutesfois à d'aucuns ce maleſt
Cure . curable , & quelquesfois du tout incurable. Premierement la curation eſt inutile à
Corn.Celfo ceux quiont ce mal d'enfance : car neceſſairement il leur dure iuſques à la mort.
Semblablement ceux qui ont groſſes teſtes pleines d'humeurs, en gueriſſentdiffici
lement : quelquesfois la fluxion ſe faict par les veines exterieures,& autresfois par
les interieures, & quelquesfois par toutes deux.Et li la Auxion ſe faic par les vaiſſeaux B
interieurs , eſt incurable , ou difficile à guarir. Si par les excerieurs, il y a cſperance de
guariſon ,en faiſant les choſes vniuerſelles: puis raſer toute la ceſte, & appliquer me
dicamés aſtringens,afin de reſſerrer les veines, comme l'emplaftre contra rupturam :
ſeront auſſi appliquées ventouſes, en faiſantfrictions par derriere : lon pourra appli
quer vn Seton fileft beſoin. Et pour les remedes copiques , on vſera du collyre d'eau
role & de vitriol en petite quantité : aucuns appliquent vn caucere actuel au ſommet
de la tefte, afin d'arrelter la fluxion : ceque ie loüe grandement.
D'ophthalmic. CH A P. XII .

Que c'est PHTHALMI E eſt vne inflammation de la membraneappellée


qu'ophthat conion &tiue, & par conſequent de tout l'æil, accompagnée ſou
mie.
uenc de douleur rougeur& chaleur.Itelleeſt faicte de cauſe pri
miciuecoinme cheute, coup, pouldre ,ou fable qui peut ialliraux
yeux: ou d'antecedente,comine par vne defluxion d'homeurs ſus С
signes. la membrane . Les lignes ſuyuent l'humeur dont elles ſont com
poſées. Si c'eſt le ſang, il y aura douleur, rougeur, chaleur & de
coulement de larmes , & ſemble au malade qu'il aye du ſable aux yeux :bref tous les
Prognoſtic. lignes qui ſuyuent le fang,& ainſi des autreshumeurs,come nous auons dit cy.deſſas,
Gal. delocis Sielle prouient de toute la ceſte ,on ſent grande peſanteur en icclle :& fily a grande
affectus. douleur & inftammation vers le front,c'eſt ſigne qu'elle prouient de quelque intem
peracure qui vient de la Dure-mere ou Pericrane. Lors que le malade a volonté de
vomir , c'eſt ſigne qu'elle prend fon origine de l'eſtomach . Entre toutes lesinflam
mations, cellesdesyeux font les plus douloureuſes, & pource pluſieurs defirent ſou
uentesfois la morc,pourla grande &excreme douleur qu'ils ſentenc, donc ſouuent les
yeux ſorcent hors de leur propre lieu & ſe creuent, commenous dirons cy-apres.
sre. Pour la curation, le Chirurgien ſe propoſera trois poinets. Le premier eſt lc regi
me de viure. Le ſecond, euacuation de lamatiere antecedente. Le troiſieſme eſt ap
plication de medicamens topiques. Le regime de viure ſera moderé , cuitant couces D
viandes vaporeuſes, & vſera de cellesqui empeſchent les fumées de monter en haut.
Il fabſtiendra de vin , ſi ce n'eſt que la douleur ſoit cauſée d'vn humeur gros &
Comm .ſur viſqueux, comme dic Galien. Le ſecond poinct , qui eſt l’euacuation de la maniere
Paph.st.de antecedente, & de la conioincte , ſe fera par purgations & phlebotomie : ſemblable
la fe &t.6. ment les ventouſes appliquées ſur les eſpaules auec ſcarification , & ſans ſcarificacion
Remede pour font neceffaires , enſembloles frictions. Ec ſi la fluxion augmentoit, il feroit tres
les vieilles
ophthalmics.
expedient d'appliquer vn Seton , afin de faire cuacuation & deriuacion de la matiere
antecedente. Pareillement apres les choſesvniuerſelles , Galien recommande fort
l'apertion des veines & arteres au front & cemples: à cauſe que ſouuentesfois le ſang
chaud & vaporeux remplitles vaiſſeaux , qui caulent telle douleur. Le troiſieſme,
qui eſt application de medicamens topiques , ſeront diuerſifiez ſelon les quatre
temps: car au commencement lors que la matiere eft chaude, les reperculifs
ſeront grandement profitables, & en l'augment les repercuſſifs & aucunement
scſolutifs, comme 24. aqu. rofac. & plantaginis, añ. ZB . alb . vnius oui , mucaginis,
1
2S 599
A
gummi tragacanthi, z B. fiat collyrium ,lequeltiede ſera mis en l’ceil, & par deſſus on
appliquera vne petite compreſſe trempéeen ce collyre . Autre.
24. mucag . ſem.pſyllij & cydon.extract.in aqua plant.añ.zf . aquæ ſolani, & la& . Gal.13 .Met.
mul.an Zb.crochiſc.albiraſis 3 j.fiat collyrium ,duquelvſerczcomme du precedēt, chedernier. -
& on appliquera ſur le front & aux temples vn tel defenſif.2.bol.arm , & fang.drag.
maſtic.añ.zj.B.alb.vnius oui,aquæ roſar. & acetiañ Zj . terebinth.lotæ & oleicydo
nior.añ.31.B. fiat defenſ. Ou bien en lieu d'iceluy on vſera de l'onguent de bolo , ou
l'emplaître de diachalcit . ou contra ruptur. diffoulten huile de myrtils, & vn peu de
vinaigre .Etſila douleur eſt grande,on appliqueracel cataplaſme.2 medull.pomor.
fubcinerib.coctor. Z iij . lađ .
mul.zB.fiat cataplaſ.lequel ſera appliqué ſurl'ơil , ayat

20 mis du collyre, & renouuellé ſouuent


: ou 2.mucag .fem.pſyllij& cydonior.añ.3B.
micæ panis albiin lacte infuf.3ij.aquæ roſar.3B.fiat catapl. Dauantage pourras vler
des cataplaſmes cy -deſſus eſcrits à la douleur de phlegmon. Aufli le ſang de tour
terelle , pigeon ou volaille appaiſent grandement la douleur . Semblablement les

B bains appaiſent la douleur , & arreſtent la fluxion , à cauſe que par ſueur ſe fait eua
cuation de tout le corps . En l'eſtat lors que les douleurs ſerontceſſées, on vſera de
cels remedes .

2. ſarcoc. nutr . in lact. mul.zj. aloës lotæ in aqua rofar. ij. trochiſ.alb.raſ.z8.
am
ſacc. cand.zij.aquæ roſar. ziij. fiatcollyrium , lequel ſera appliqué tiede en l'æil .
nie do
Autre.24.leininis fænic.& fænugræci añ.zij.forum camomil.meliloti añ.ñ.ß.co
quantur in aqua communiad Z. iij.collaturæ adde tuthiæ præparatæ , & ſarcocollæ
nutritæ in lači.mul.añ.zj.ß.facchar. cand. zB , fiaccollyrium vtartiscſt. En la decli
nation on fomentera la partie d'vne decoction carminatiue , puis ſera appliqué ce
collyre. 22.farcocol,nut. zij . aloës lotæ & myrtil . an.zj. aquæ rofar . & euphraſ.añ .
3ij.fiat collyrium vt artis eft :vtacur ve dixi .

De l'Oeilquicher dehors, dit Proptoſis. CHAP . XIII .

L yayneindiſpoſition nommée en Grec , Propioſis, Exitus en La


Les cauſesa
tin, Ingroſſation ou prominence en François, qui eft quand l'æil
С ſort hors de ſa cauité par trop grande repletion dematieretom
bant ſur les yeux , qui ſe fait par vn grand & vehement vomiſſe
ment , & par trop crier , & aux femmes par labeur d'enfanter , ou
fo
par trop grande reſolution des muſcles, ou par vne douleur ex
treme de ceſte. Et quelquesfois par ceſte prominence ou proci
dence , la veüe ſe perd du cour , & l’æil ſe creue , & les humeurs ſortent dehors. Ce
quei'ay veu aduenir à la fæur de Louys de Billy ,marchand Drapier demeurant pres Hiſtoire.
le pont Sain & t Michel à Paris, laquelle cucvne liextreme douleur, inflammation &
unt's
fluxion, que les yeux luy forcirenthors de la teſte en ma preſence . La cure ſera diuer
ſifiée ſelon les cauſes. Etapres les choſes vniuerſelles,on appliquera ventouſes ſur la
nucque du col & ſur les eſpaules: auſſi vn ſecon ou cautere. Et pour les particuliers ,
TCS.
l'cil ſera comprimé auecques compreſſes imbues en decoction aftringente, cum Compreſſes
ſucco acaciæ , rofarum rubrar. fueilles de pauor ; eſcorces de grenades , fueilles de aftringentes.
roſes, de iuſquiame. Etaufli deſdites choſes on pourra faire cataplaſmes auecque
D farine d'orge, & autres remedes femblables .
cole D'atrophie de l'Oeil.
Ilya vneautre inaladie contraire à la prominence de l'Oeil , nommée atrophie ,
qui eſt priuation de nourriſſement; de façon que toute la ſubſtance de l'aileſt aucu
nementficſtrie & conſommée auec grande anguſtie de la pupille . L'atrophie ſera
Cure.
curée par ſon contraire . Et pour le particulier, on fera des fomentations chaudes &
attra&tiues, & frictions aux parties proches , & autres applications de choſes qui re
uoquent le nourriſſement, & les eſprits à la partic .
De Chemofis.
Chemofiseſt vn mot Grec , c'eſt quand l'vne & l'autre palpebre font renuerſées Fuchſies en
od
par grande inflammation , qu’à grande peine peuuent couurir les yeux: iointaullique la Merb .
la conion &tiue eſt beaucoup plus eminente que la cornéc , & eft rouge non blan

che. Les cauſes font antecedentes & primitives : Antecedentes , comme multicude
d'humeurs : Primitiues , comme playe , contuſion , & autres . La cure ſe fera ſclonla
diſpoſition qu'on verra eſtre delaiſſée en la partie .
ЕЕe iij
600 Le dixſeptieſme liure, de pluſieurs A

Del'agglutinationqui ſefait des palpebres l'une contrel'autre.


L'agglucination des palpebres ſe fait quelquesfois par nature,c'eſt à dire,parle de
faut dela vercu formatrice au ventre dela mere ( comme lon voit les doigts ſe tenir
enſemble , ou le ſiege, ou l'orifice du col de la matrice) combien queles yeux ſoient
bien formez : ce qu'on peut voir à la groſſeur de l'æildedans l'orbite , & aumouue
mene de l'ail . Aucunesfois celle choſe aduient par playe , ou paraduftion,oupar
apoſteme, anthrax, & fouuent par la petite verolle, ou autres cauſes .
Cure .

La cure , c'eſt de mertre la queüe d'vne eſpatule entre les palpebres , la leuanten
haut (de peur de toucher la ſubſtance de l'æi!) puis faire inciſion auecques vne lan
cette courbée , & feparera -on les paupieres l'vne d'auecques l'autre. Ec fera la playe B
traittée ainſi qu'ilappartient. Et le faut donner garde que derechef elles ne ſ'agglu
tinent, quiſc fera, y appliquant vn peu de linge delić, & medicainens propresent res
deux, iuſques à ce que la cicatrice ſoit faicte.
De Vngula. CHAP . XIIII.

VIRE indiſpoſition yientaux yeux,appellée Vngula ,quieftvne


excroiſſance de chair membraneuſe, quipeu à peu croiſt ſur la
conion & iue, prenant ſon originc le plus fouuent du grand angle
de l'æil , & quelquesfois du petit : aucunesfois couure entierc
ment la conionitiue, & autresfois portion de la cornée, & aucu- ,
no nesfois la pupille , qui fait que le malade ne voitgoutte. Autres
ne ſont en leurmilieu nullement adherantes contre la conion CHO
& tiue: de façon qu'on peut mettre yne petite fonde entre-deux. Aucunes ſont de
Cauſes. couleur rouge , citrine, brune , les autres blanches. Leurs cauſes font primitiues, с
comme coups , cheuttes, & autres : aulli peuvent venir des antecedentes, comme
Prognofic. fluxions quiſe fontſur les yeux . Les ſignes ſerontcogneus des choſespredites : l'on
gle qui eſt groſſe, large, & fortattachée à la coniondiuc , eſt difficile à guarir : ſielle
couure entieremét la pupille,le Chirurgien n'y doit coucher: carla cicatrice quide 0
meureroit apres , ne permettroit la faculté animale viſuelle reluire au trauers. I celles
ſont ſouuentaccompagnées d'ophthalmie , demangeaiſon ou cuiſon , auec douleur
Cwrarion . larmoyante, & tumeurdespaupieres. Or quant à la curacion , au commencement
faut vier de bon regime de viure , eltre purcé, ſaigné , principalement l'il y agrande
inflammation. Et pour lesmedicamenstopiques,afin de conſommer icelle excroiſ
ſance , & prohiberl'augmentation, onmettra ſouvent dans l’æilde noſtre collyre de
vitriol , delcricau chapitre des Playes des yeux: & fi pour tel remede ne laiſſe à pren
dre croiſſance, ou qu'on n'euft eſte appellé au commencement; deforce qu'elle fult
confirmée, la cure fera faicte par operation manuelle, comme l'enſuit.
Ayant ſitué le patient ſur un bancà la renuerſe ,à demy couché , & tenu fermepar
vnſeruiteur , luy faucouurir les paupieres , & les tenir ſtables par l'inſtrument, dic:D
Speculum oculi, eſcricau chapitre des Playes des yeux. Lors le Chirurgien cfleuera &
Extirpation ſuſpendra en haut l'Vngula par ſon milieu ,auec certains petits crochets :& l'ayant
de l'vnguld. elleué, faut paſſer vneaiguille enfilée de fil yny entre la conion &tiue& l'vngula:
puis ſera oſtéle crochet , & eflcué l'vngula en haut par le fil, puis commencera à la
ſeparer doucement, commençant vers ſon origine,aucc vne pecite Biſtorie iuſques
à ſon extremité , en ſedonnant bien garde de toucher la ſubſtance de la coniondiue
ou cornée .

ļ
Operations de Chirurgie. бої
A
Les figures des Crochets, Aiguille , & Biſtorie fort telles.
Crochets. siguille. Biterie.

pa

nen

fue
ang

auce
ured
11
Puis ſera coupée aucc ciſeaux , & fera appliqué dans l'ail albumen oui cum aqua Pourquoy
roſarum , & ſera ſouuentrenouuellé ceſtuy remede. Aulli faut que le patient ouure fautquela
& remuë louuent ſon æil , de peur que la palpebre ne fe coaleſce contrela partie, malade ou
d'où onaura tiré lVngula. Aucuns practiciens font qu'en lieu de ſeparer l'Vngula are o fermé
auec la Biſtorie, prennent le cuyaud'vneplume d’oye bien accouſtrée, trenchante ſouuene l’ails
& polie : les autres la ſeparent auec yn poilde queue decheval : & quand elle ſera ſe
:)
Ċ parée , la faut couper aucc la pointe de ciſeaux deliez & bien trenchans, en ſe gar
dant expreſſément de toucher à la glandule qui eſt au grand Canthus : pource que
ſielle eſtoit coupée , ſon vlage feroit perdu , & le patient ietceroic larmes toute ſa vie.
012 Or luyayant coupé, faut mafticher fel commun & du cumin , & le mettre dans
polet
l'ail, de peur que la paupiere ne ſe reprenne à l'endroit d'où on aura amputé l'V 11
Men |
gula. On pourra mettre par deſſus l’æil desreperculffs eſcrits aux playes des yeux,
pour euiter l'inflammation, & autres accidens.
Trosh CHAP. Xr.
ired
Des fiftules Lacrymales, appellées des Grecs Aegilops.
pien
V grand coin de l'ailily a vne glande faiete de Nature , pour re- rfage de la
ceuoir & contenirvnehumidité , pour lubrifier & humecter læıl, glande lacryd
afin qu'il ne fuſt par fes mouuemens defleiché : ce que nous male.
lefait avons allez demonſtré cy deſſus en l'Anatomie de celte partie.
6, de 1
728
Or ceſte glande par Auxions phlegmonneuſes , ou parmaciere ca
AJINI
D tharreufe & picuitcuſe tombant du cerueau , l'apoſteme & vl
01‫܂‬
cere , & quelquesfois degenere en fiſtule, & par quelque temps
ſe faict carie en l'os . Aucunes deſdictes fiftules font ouvertes
par dehors , principalement la phlegmonncuſe : les autres par dedans , qui ſe
ques fait de maciere catharreuſe , de force qu'il n'appere aueune ovucreure par de
hors, fors vne tumeur de groffeur d'un pois : & lors qu'on preſſe deſlus , on differencer
fait ſortir vne ſanie ſereuſe & rouſſe, autresfois blanche & viſqueute par le coin'de
Pæil, ou par dedans le nez : aucuns iettent ladite ſanie continuellement : les au :
tres ſont vn mois ou plus fans rien iecter, qui eſt le propre d'aucunes fiſtules. Les
vieilles fiſtules lacrymales ſont cauſes de rendre l'ail atrophié, & puante halei,
ne , & quelquesfois de faire perdre du tout l'action de l'vil : parquoy eſt beſoin
que le patient appelle conſeil , tant du Mcdecin que du Chirurgien , pour ob
uier à tels accidens . Pour la curation , il faut que les choſes vniverſelles prece- Cute,
dent les particulieres . Donc lil'vlcere n'eſt aſſez ample ,faudra appliquer destentes
EEO inj
1

602
Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs
A
d'eſponge: & pour corriger & conſommer la chair ſuperflue de ladite glande, on ap
pliquera dexcrement au profond , medicamens cathereciques , comine pouldre de
vitriol calciné ,ou demercure ,eau forse , huile de vitriol, ou vn petit cautere po
tentiel . Et litelsremcdes ne profitent, & qu'il y cult carie en l'os , & que le patient
. vouluſtendurer , on doit vſer de cautere actuel, lequel ie louë plus que le potenciel ,

pource que ſon operation eſt plus prompte & ſeyre: & puis bien aſſeurer qu'à plu
ficurs l'ay appliqué auec heureuſe iſſue. Entel cas aucuns practiciens veulent que
ledic caucere ſoit d'argent , les autres d'or, pource ( diſent- ils ) que tels metaux ſont
plus excellens que le fer : mais quant à moy , ie n'y trouue aucune raiſon : parce que
c'eſt touſiours le feu qui opere , & non la matiere des cauteres. Que fil elt queſtion
d'eſtre ſi ceremonieux pour le choix deſdics metaux : ie trouue par raiſon le fer plus
propre à celle operation qu'aucun autre , d'autant qu'il eſt plus aſtringent & delic AL
Catif quenyl'or ny l'argent, pource qu'il eſt plus terreſtre , comme l'effe &t le mon
ſtre és caux qui paſſent par les mines de fer. La figure du cautere doit eſtre de figure
triangulaire , & vn peu aigu en ſon excrémité , afin que plus promptement il facefon
3
effect.Et alors qu'on l'appliquera , on doit bander l’æillain ,depeur que le maladene
voye le feu . Et luy ſera tenu la teſte ferme, de peur qu'il ne la tourne de coſté ny
d'autre.Etſur l'ail fiſtulé , ſera appliqué vne piece de -fer, laquelle ſe cambre ſelon
la cauité du grand canthus de l'æil , en laquelle y aura vn trou quiſera poſé à l'en
droit de la fiſtule, par lequel on appliquera le cautere : ce faiſant on ne touchera
nulle autre partie que l'endroit qu'on veut cauceriſer. Et d'abondant , ſert pareille
ment de clorre entierement l'æil , de peur que le patient n’apperçoiue ledic caute
re : la figure duquel eſt telle auec la piece de fer.

La figure du Cautere actuel , & la piece de fer rroüée.

Dauantage le Chirurgien auſſi aura eſgard que lors qu'il appliquera le cautere , ou
Aux gran- fera quelque autre grande cuure de Chirurgie , comme coupper vn bras , ou autre
des operatios partie du corps, ou faire quelque ouuerture, & generalement toute operation cruel
de chirurgie Ic , iamais ne doit ,ſ'il eſt poſible, permettre y aſliſter aucuns des parens & amis du D
les parens du
malade ne malade , fors ſeulement les ſeruiteurs , ou ceux qui puiſſent bien ratiociner & enten
doivent aſsi, dre, que telsactes ſe fontſelon l'art , afin de luy donner aide & ſecours pour la gue
fier. riſon de fa maladie . Car ceux qui portent folle amitié au patient , & qui peu racioci
La ſcience nent , tant ſ'en faut qu'ils donncot louange à ton auure , qu'au contraire la vitupe
n'eſt iamais reront , & c'appelleronenon Chirurgien ,mais bourreau : pource que la ſcience n'eſt
woefpriſee que jamais conteinnée, ſi ce n'eſt par gens ignares , empiriques , & ſans raiſon. Or apres
par gens
auoir deuëment appliqué ledit cautere , metcras dans l'ouuercure & ſur l'æil& par
ignares.
ties voiſines , blancs d’æufsagitez en cau roſe ,plantain , & morelle : & ſera le patient
poſé au liet, ou en vne chaire la teſte vn peu haute, & ſera renouuellé leditremede,
ſubit qu'il commencera à ſe deſleicher. Puis ſera procuré la cheute de l’eſcarre, auec
vn peu de beurrefrais: laquelle eſtant tombée , ſera l'vlcere mondifié , puis incarné ,
& cicatriſé ſelon l'art: & où l'os ſera trouué eltre carié , ſeront appliquez remedes
propresaux caries des os , leſquels declarerons cy - apres.
боз
Operations de Chirurgie
.

A
Des Staphylomes. CHAP . XVI.

Taphylome , eſt vne tumeur de la cornée del'æil auec l'ouée , qui Cauſe de stad
vient à cauſe d'vne defluxion ou vlcere faite en l'æil , la cornée
phalome
eſtant relaſchée ou pouſſée en dehors, par vne puſtule engendrée
au deſſous. Ceſte tumeur reſſemble à vn grain de raiſin , en la fi
gure & rondeur , au reſte quelquesfois eltant de couleur noire,
quelquesfois blanche. Orlila cornée eſt vlcerée & corrodée , de

ſorte que la cunique vuée ſorte par l'vlcere , la couleur du Staphy


lome ſera noire , ſemblable à vn grain de raiſin noir ( pource que la membrane vuée
cft en ſon exterieure partienoire) quif'apparoiſt quand la cornéeeſt rompue. Etlors
que la cornée n'eſt que relaſchée & non rompue,le Staphylome eſt blancheaſtre
comme vn raiſin quin'eſt encore meur. Les anciens en ont fait pluſieurs differences.
Stéce. Paula
B Premierement ſ'il y a petite ouuerture à la cornée , là où l'vuće apparoiſtra, eſt lors
appellé teſte de mouſche : & quand elle eſt plus ouuerte , & enſemble dure & cal
leuſe , ſera appelléceſte de clou : & fi elle eſt dauantage ouuerte , ſera dit grain de
ubre raiſin . Eten quelque ſorte que ce mal aduienne , il apporte deux inconueniens &
dangers : I'vn , de perdre & deſtruire la veuë : l'autre , degalter & défigurer le viſage.
lou La Chirurgie y ſerr, non pour reſtituer la veuë : carellecit ja perdue , mais ſeulement Prognoſtic.
pour embellir l'ail,ce qui ſe fera en coupant ce qui eſt trop eminēt:coutesfois ſe faut
pers
donner garde de faire trop grande ouuercure , que les humeurs ne combent dehors .

De l’æilplein de matiere purulente , dit Hypopyor . CH A P. XVII.

L ſe faitſouuentesfois du pus entre la cornée & l'vuéc : ce qui aduiene Cauſ


e de hoc
ou de cauſe interne , ou externe : de cauſe interne , comme de quelque popyon.
Auxion , & ſouuent apres vne grande inflammation :decauſe externe,
comme de quelque coup ,de façon que quelque vaiſſeau ſe rompt: puis

с le ſang eftańchorsde ſes vaiſſeaux ,le pourrit. Pour la curation on dojc Cure.
(les choſesvniuerlelles premiſes ) appliquer ventouſes, & faire ſcarifications, en
ſemble des frictions de haut en bas, afin que l'autreæil par conſentement ne ſouffre,
& appliquer collyresſedatifs de douleur & reſolutifs. Galien dit auoit fait vacuation Gal.li.14. de
de ceſte mariere purulence en incifant la cornée quelque peu au deſſus de l'Iris : qui la Meth.che
eſt le lieu où toutes les tuniques feioignent enſemble , Ce quei’ay fait en la preſence dernier.
de lacques Guillemcau Chirurgieniuré à Paris , aucc heureuſe iſſue. Et ayant faic
ceſte ouuerture , & vuidé la matiere , on mundifiera l'vlcere auecques cau miellée,
ou autre choſe ſemblable .

Dela dilatation de la pupille, appelléedesanciens Mydriaſis.


5. ใน “ๆ
20:0013 CH AP. XVIII .

Ydriaſis ſelon les anciens , eſt dilatation de la pupille de l'æil , la- Differences

sur quelle ſe fait naturellement, ou par accident . Celle qui eſt naturel- deMydria
fis,
UTA . D le , vient de la nariuicé , & ne ſe peut reparer : celle qui ſe fait par ac
cident, eſt double , à ſçauoir quivientde cauſc antecedente, & l'au
Mence tre de primitiue . Celle de cauſe antecedente vient par vne deflu .
0: 1 xion du cerucau : la cure de laquelle ſe fera par le docte & pru- Cure .
ws dent Medecin . A celle qui vient de cauſe primitive, comme pour un coup . cheu
ce',ou contuſion faicte à l'ail , y conuient ſoudain appliquer deſſus chofes reper
cuſliues , & appaiſer la douleur , & prohiber la fluxion par bon regime de vi
ure , phlebotomie, ventouſes, fri& ions, & autres choſes que l'on verra eſtre voiles :
puis apreson vſera des remedes reſolutifs, comme du ſang de tourterelle, pigeon,

2 ou de quelque volaille , que l'on appliquera touc chaud , cantdedans l’æil que de
hors, & lusiæil & aux parties voiſines tel cataplaſme. 24. far.fab.hord.añ. z iiij.olei
Telle fomens
roſar ,& myrtıl.añ žj.B.pul . ireos Florent zij.cum fapa , fiat catapl. Dauantage on tation a pero
vſera de ceſte fomentation . 24.rol.rub.myrtill.añ. ñ.j. flor.melil. & camom.añ.p.j. in de reduire
nucum cupreſlizj.vini auſteri tb B.aquæ roſar. & plátag.añ.3.ij.fiat omnium deco& . la paupiere.
604
Ledi liure ,de pluſi
xſep eurs
tieſ
me
pro fotu ,cum ſpongia. Ægineta lib . 3. de Remedica , louë pour ceſte affe &tion l'eau A
marine , & en defaut,la fanmure; Aëtius apres luy en diclemelme, Actuarius aulli,
Gourdon , & de Vigo l'approuuent .

CH A P. XIX.
Des Cataractes .

Que c'eſt que R quelquesfois auſſi par coup , ou cheute , & autres cauſes, ſont faites
Hypochyma. cataractes , deſquelles ie traicteray en ce lieu , le plus briefuemenc
qu'il me ſera poſſible. Cataracte, eltautrementappellée des Grecs Hy
pochyma, desLatins Suffufio, & du vulgaire maille . Oril ne faut icy diſ
puter des noms , mais de la choſe afin qu'elle ſoit entendue . Parquoy diſons que
Cataracte n'eſt autre choſe qu'vne taye ou petite peau , qui naiſt ſous la runique
Cornéc , à l'endroit de la pupille ou prunelle de l'ail,nageant ſur l'humeur aqueux :
à la difference des taches , macules , & cicatrices qui ſono deſſus ladite Cornée. Au .
LA
cunesfois la pupille enelt du tout couuerte , & aucunesfois ſeulement à moitić , & B
quelquesfois n'y a que bien petite portion d'icelle . Et ſelon icelles differences , l'a
&tion del'eilelt deprauée & empefchée, ou du tout perdue & abolie : à raiſon que
Canſes. l'eſprit animal viſuel ne peut reluire au trauers d'icelle caye . Les caufes Tontexterieu.

res, ou interieures. Les exterieures, commecoups ou cheutes, ou auoir eu trop gran


de chaleurou froideur à la teſte, quiauroient cauſé quelque douleur & Auxion aux
Les vapeurs yeux. Les interieures ſont groſſes vapeurs& fumées elleuées de l'eſtomach (par fau
qui s'eſleuent te de bonne digeſtion ) au moyen d'auoir vſe indeuëment de groſſes viandes, vins
de l'eſtomach forts, & generalement toutes choſes vaporeuſes, dont ſont faires groſſes vapeurs &
montane dax fumées corrompues, qui montent de l'eſtomach au cerueau : puis deſcendent aux
les catars- yeux par quelque eſpace de temps , leſquelles ſe liquefient & fondent en humeur
Etes, o ſelon viſqueux , puis ſe condenſent & congelent par la froideur des membranes , ainſi que
leurs quali- voyons en la generation de la glace. Les ſignes peuuent eſtre pris de la deſcription
to ſub- predite,parce qu'on void,principalementlors qu'elle eſt confirmée, vne taye,mem
stances ſone brane , ou petite peau ſur la pupille,laquelle eſt quelquesfois blanche , noire, celc 0
diverſement
colorées. ſte ,cendrée ou liuide , citrine , verde , & quelquesfois reſſemblant à argenc-vif, ſe
monſtrant fort mouuante entre toutes les autres . Toutes leſquelles ſont ainli colo
rées ſelon la diuerſité de l'humeur dontelles ſont faites. Du commencement que la
Cataracte ſe forme , il ſembleau patient voir en l'air petites mouſches , poils , rets,&
autres diuerſes choſes qui montent & deſcendent, & qu'vnechofe foic double: aufli
que la lumiere , & characteres ou images , luy ſemblent plus petits qu'ils n'auoient
accoultumé, à cauſe que la faculté animale viſuelle ne peut deuëmentreluire , pour
l'obſcurité que faic la taye : ainſi que font les nuées leſquelles empeſchent la lumiere

Pourquoy on du Soleil & de la Lune reluire ſur la terre . Pareillement lors que la Cataracte eſt en
voit plus ſon accroiſſement , le pacienc voir moins en plein iour, que vers le ſoir, parce que le
clair en lieu iour eſtant en la grande lumiere , reſout& diſſipel'eſprit viſuël. Et pour ceſte cauſe,
obſcur qu'en les fimulacres, images, & characteres , femblent plus petits en plein jour , que vers
plein iour. le ſoir : à raiſon que l'Eſprit animal viſuël ſe fortifie lors que le iour n'eſt en la grande
clarté . Dauantage , li la Cataracte n'occupe qu’vne portion de la pupille ,alors le
patient voic choles obſcures & diuerſes formes , comme de croiſſants ou feneſtres D
que
oblongues , & autres corps fanta & iques. Car ſi la taye occupe le centre de la pupille,
tous obiects qui ſe preſenteront à luy, luy ſembleront eſtre feneſtres, eſtimant ce
qu'il ne veoid point du milieu des obiects , eſtre comme ouuercures en iceux. Au
contraire , ſi elle occupe lamoitié de la pupille , il ne verra & diſcernera que la moi
rié des obiects , n'ayant l'vſage libre quede la moitié de l'humeur cryſtalin :comme
aulli quand elle couure du tout la pupille , & qu'elle eſt confirmée , ne peut plus rien
diſcerner de ſa vevë , fors quelque lueurdu jour & de la Lune , & Eftoilles, ou de la
chandelle : coutesfois ſansrien en pouuoir diſcerner .

:57
Operations de Chirurgie . 605
A

Cure des Cataractes CHAP . XX.

A cure des Cacaractes qui commencent à ſe former, ſe fera en


ordonnant au pacient ſon regime , euicapt vins forts, & viandes
quiengendrent ſuc phlegmatique& groſſes vapeurs, & genera
lement toutes choſes aiguës , comme ſaleüres , elpiceries , ails,
oignons , mouſtarde, poids, féues, nauecs , chaltaignes, & leurs
ſemblables : & principalement le coïc immoderé , quien cel cas
eſt fort contraire. Son pain ſera fait auecfenoüil, pource qu'il a
vertu deciautier la veuë , & prohiber les vapeurs demonter en haut, les diflipant en
l'eſtomach deuant qu'elles puiſſent gaigner le cerueau par ſa vertu carminatiue. Et
pour ceſtecauſe apres le palt, le patient doit vſer de cotignac, conſerue de roſes, ou
dragée, compoſée de choſes carminatiues . Semblablement ſera purgé & faigné ( l'il
B eneſt beſoin .) Pareillement ſeront faices fri & ions diuerfiues, applications de ven
touſes derriere le col . Aufli le matin vſera de maſticatoire , pour faire deriuation des Frictions G
laiffé par el- ventouſes.
matieres picuiteuſes par la bouche . Quelque ancien practicien nous a
crit , que la friction faire desdoigts ſur la palpebre, & regarder ſouuent les Eltoiles
du Ciel ( & quelquesfois la Lune en ſon plein ) conſument & difſipent la taye , tou
tesfois non encores confirmée : auſſi fait le regard du miroir d'acier & des pierres pre
cieuſes , & generalement de toutes choſes vertes & luiſantes , à raiſon , peut- eſtre,
andes
que par la vertu de leurs rayons & fplendeur, elles peuuent diſliper çà & là ,& caric
tel humeur. Pareillement l'effilation ou ſoufflement fait par quelque perſonne (apres
thue la friction faicte ſur la palpebre ) qui aye l'haleine douce ,ayantunaiché fenoüil, anis,
coriande , noix de muguette , clou de girofle , canelle,& leurs ſemblables, fi ainſi elt
les ayant encore en la bouche , luy face efflation dans l'æil , & le plus presque
que
faire le pourra , & faut continuer celle choſe par plufieurs & diuerſes fois: car par ce
Collyre de de
SC moyen on eſchauffe , ſubtilie , reſoult , rompt, & diſlipe la Cacara & e . Outreplus on
0011 doic vſer de ce collyre qu'eſcrit de Vigo, lequel a auſſi grande vertu de clarifierla Pigo:
C veuë , & prohiber que les Catara & es ne ſe confirment : & meſmement les diſlipe, &
To ſouuentesfois les cure.2. hepatis hirciniſani& recentis tb ij.calami aromatici mel
lis añ Z B. ſucci ruthæ z iij .aquæ chelidoniæ , fæniculi, verbenæ & eufraſiæ an Z iij .
piperis longi, nucis muſcacæ , garyophyllorum añ . z ij.croci ſcrupulumj. Aorisró
rilmarinı aliquantulum contriti m . B.ſarcocollæ ,aloës hepaticæ añ.3.iij.fellis raya ,
leporis & perdicisan.zj. Ces choſes ſoient pilées , & puis loic adioulté facchari albi
3 ij.mellis roſati z vj. & le tour enſemble ſoit mis en l'alambic de verre, & diſtillé in
balneo Mariæ , & de celte diſtillation , en ſoit ſouuent mis aux yeux . Eclipar tous

ces remedes ladite taye n'eſt curée , mais au contraire , ſe forme & engroſſit plus
fort : alors la faut laiſſer endurcir & confirmer, afin qu'on la puiſſe guarir par opera

tion manuelle , qui ſe fera en l'abatant auecques l'aiguille ( commenousdirons bien


toſt) car ſi elle elt crop tendre lors qu'on la voudroit abatre,l'aiguille paſſeroit au tra
uers & nela pourroic -on abatre . Au contraire ſi elleeſt trop dure,difficilement eſt a
batuë . Donceſt beſoin au Chirurgien cognoiſtre celles qui ſont confirmées ou non

putere D confirmées : Semblablement celles qui ſontcurables , & celles qui ſont incurables :
leſquelles choſes ſe peuuent cognoiſtre par les ſignes qui ſ'enſuiuent.
elope

Signes pourcognoiſtreles Cataractes carables, ou non. CHAP . XXI.


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Jubi
REMIEREMENT, celle quieſt confirmée, l'æilſain eſtant fer
1
mé , lors que du poulccon vient doucement å frotter celuy où eſt
urper
laCatara &te, & que ſubiton l'ouure , on void que la pupille ſe dila
23, 6
tc , & coſt retourne en ſon lieu , en meſme eſtat & couleur qu'elle
eſtoit auparaúát,ſans demeurer eſparſe & dilatée.Secõdemét ,ſi
le patient ne peut voir & diſcerner aucunechoſe par le ſens de la
veuë, c'eſt ſigne infaillible que la Cataracteelt entieremét cõfir
mée . Au contraire , fi le patienc void encores, & peut diſcerner aucune choſe par la
veuë : & auſſi que la pupille demeure dilatée & eſparſe apres la friction de l'æil , c'eſt

ligne qu'ellen'eft encores confirmée . Oràſçauoir ,pourquoyle Chirurgien oculiſte


606 Le dixſeptieſme liure de pluſieurs
pour cognoiſtre ſi les Cataractes ſont incurables & confirmées, cloft l'ail ſain du pa
cient , & frotcel'autre. Eſt - ce point afin que l'eſprit animal viſuel de l'æil ſain aille A
en plas grande abondance à celuy que l'on frotte , & que l'on fait ouurir prompte
ment, ſans l'autre quifait que la pupille ſe dilace, & la Cataracte ſe manifeſte oculai
Cataractes remene? Or les Cacaractes qui ſont incurables , ſont celles qui l'enſuiuent : c'eſt à
incurables.
ſçauoir celle qui eſt auecques grandedilation de pupille ,& qu'on ne void aucune
ment branfler lors qu'on aura frottéla palpebre de deſſus l'ail, ayant clos premiere
menc l'ail ſain , & que la pupille de l'ail où eſt la Cataracte ne feſlargift :car celle
choſe monſtre qu'ily a obſtruction au nerf optique: au moyen dequoy l'eſprit ani
mal viſuël n'y reluiſt plus. Parquoy encore qu'on l'euſt abbatue , on ne profiteroic
Pierre Fran- rien. Dauantagefil y'a emaciation ou amaigriſſement à l'ail , n'y aura aucune vtilité
coenſonli- à abatre la Cacaracte. Aulli ſielle eſt cauſée parcoupou chcute, & apres grande &
ure
nies .
des Her- extreme douleur de reſte. Pareillement celles qui ſont de couleur gypſeuſe , verte,
noire, plombée, citrine , ou decouleur d'argent vif, le plus ſouventfoncincurables:
au contraire celles qui ſont de couleur celeſte, ou blanche, ou de couleur de chaſtai B
gne , ſont curables: & entre coures , la celeſte, lors qu'elle eſt accompagnée de CO
quelque blancheur : & principalement quand elle branſle en la pupille ſubit qu'on VI

aura frotté l'ail où ſera ladite Cataracte.Il ne faut coucher aux vieilles gens , parce I DE

qu'elles viennentpar faute d'eſprits viſuels , ny auſſià ceux qui ont læil fort petic &
enfoncé.

Cure des Cataractes par læuure de main .


CHAP. XXII.

Accidens Yantainſi cogneu par ces ſignes la Cacara &te eſtre confirmée & cu
qu'ilfaut ap rable , ſera procedé par operation manuelle. Toutesfois, li le pa
paiſer deuant cienta douleur de cette, coux,ou vomiſſement, ne luy fauttoucher,
gae venir iuſques à ce que tels accidens ſoient remis : car en vain tu laboure
læuure . rois. Er lorsquetu voudras ouurer , te faut eſlire un temps propre
pour tellechoſe , c'eſt à ſçauoir, en decours de la Lune , & que no
ſoit au cemps des foudres & tonnerres, & au temps que le Soleil eſt
au ſigne d'Aries qui regarde la teſte. AdoncleChirurgien prendra conſeil du dođe
Medecin, afin que li le patient a beſoin d'eſtre purgé & ſaigné, il le ſoit : de peur
qu'il ne furuienne aucun mauuais accident, qui par faute de ce pourroic aduenir.
En quelle fi- Puis deux iours apresauoir fait les choſes vniuerſelles, fauc ellire vn lieu mediocre
tuation doit mentclair : & à ieun faire aſſeoir le pacient ſur vn bancaſſez eſtroic, le viſage courné
eftrelepasser. non vis à vis de la lumiere , c'eſt à dire, du iourou de la chandelle ,mais à coſté :&
dois de rechef bien noter que lalumiere ne doiteltre grande, ce qui eſt commandé
par Hipp.au liure de l'Officine du Medecin , & luy bander l’æil ſain aucc cotton ,
ou choſe ſemblable , afin qu'il ne ſe meuue pendant l'æuure. Puis le Chirurgien
faſſerra ſur le banc vis à vis de luy (comme deux fourbiſſeurs) coutesfois le Chirur
gien vn peu plus haut que le malade, luy faiſant poſer lesmains à la ceinture , 8c doit
embraffer de ſes jambesles genoux du pacient , & qu'il y aic vn ſeruiceur qui tienne D
la reſte du malade par derriere, afin qu'il nela tourneny çà ny là, ains qu'elle demeu
re ferme & ſtable .Etayant preparé l'aiguille , quiſera l'auoir paſſée pluſicurs fois au
Preparation trauers de ſon bonner ou autre accouſtrement, afin de la rendre plus polie & aucu
de l'aiguille.
nement eſchauffée, pour accomplirl'auure autec moins de douleur. Ladice aiguille
doit eſtre de ferou d'acier, pluſtoſt que d'or ou d'argenc : & la poincte vn peu placce,
afin qu'elle entre plus aiſément & abate ladice Cataracte: & ſera inſerée dedans vn
manche , de peur qu'elle ne vacille , comme tu peux voir par ce pourtraict.

Aiguille
Operations de Chirurgie. 607
A
Aiguille pour abbattre les Casaractes, auec fox manche.

COMMUNISTIDE
Api

Viva

UJEDHODOBE
V
1973

Ayantainliſitué le malade, & preparé l'aiguille , luy commanderas qu'il regardeOperation


vers ſon nez:adonc poſeras ladite aiguille tout droit(iuſques en la cauité del'ail ſans
B aucune crainte ) dedans la conion & iue, entre le petit canthus & la tunique cornée,
droitement au milieu des deux, cuitant les veines qui ſonten ladite conion & iue , &
pers
alors poulſeras la poin &te del'aiguille iuſques à ce qu'elle ſoitau milieu de la pupille.
Puis eſtant là paruenuë , faut abbatre la catara & e, en commençantà la partiefupe- Gals au
ricure , la tournant toutdoucement par lemilieu , & l'abbaiſſer tout au bas de l'æeil, comment.
& touteentiere fil eſt poflible.Eceſtancainſi abbaiſſéc la luy fautlaiſſer, latenane rof.Lume
ſuje &te de l'aiguille par l'eſpace dedire vne patenoſtre ou enuiron ,depeur qu'elle ne decin.
remonte, & pendantfaire mouuoir vers le Ciel l'æil au malade. Puis faucrecirer l'ai
guille en haut, peu à peu en la tournant, & encores ne la tirant du tout hors de l'æil,à
cauſe que ſi la cataracteremontoic , faudroit de rechefla rabbatre vers le petit can
thus,tantde fois qu'elle y demeure. Ecicy noteras qu'en faiſant telle choſe, ſe fauc
bien donner garde de coucher à l'humeur cryſtalin (pource que, comme nous auons
dit,ileſt le principal inſtrument de la veuë ) ny pareillementà la pupille , de peur de
ladilater: puis ſera l'aiguille tiréehorsde l'oeildoucemét,en la tournāt ainſiqu'elle y
auoiceſté miſe,pourcrainte que l'on ne reriraſt la cataracte ſurla pupille. Quelques
C vnsapres l'operation faice preſentent quelque choſe au malade pour cognoiſtre f'il
peut diſcerner & voir diſtingement ou non :ceque toutesfois defend Paulus Ægi
necaliure 6.chap. 21. parce, dit-il, que quand le malade vientà ſ'efforcer pour regar
der attentiuement, la cataracte de rechefremontepromptement :pourquoy le plus
de ſeur ſera d'appliquer ſubit vn reſtreincifſur l'æil & parties voiſines, fait de albumine
duen
ouorum & aqua rofarum , enſemble agitez auecalum de roche crud. Et ne faut re. Ce qu'il oba
dior
muer ce remede que iuſques au lendemain :auſſine faucomettre à bander l’æil ſain, ferue apres
Touc comme nous auos dit:carf'il n'eſtoit bādé, ſe mouueroit , & ce faiſant l'æil malade ſe l'operation.
remueroit auſſi,pour la grande colligance qu'ils ontenſemble come nous auons dit:
& partantla cataracte pourroit remonter.Le malade eſtant ainſi bandé,doit eſtrepo
OILO!
fédans vn liet la teſte aſſez haute . Er ne doit parler que le moins & le plus bas qu'il
pourra,& doit eſtre hors du grand bruit & ne doit maſcher choſes ſolides :car en ma
Chitu ſticant pourroit faire remonterla cataracte: mais vſera de panade , orge-mondé ou
amandé,coulis,preſlis, gelée,æufs inollers, & leurs ſemblables.Etayācainli demeu
tient
ré parl'eſpace de huict iours ,le faut delbander & luy lauer l'æild'eau roſe, & luy co
D mander non regarder promptement grande clairté, luy faiſant porter deuantl'æil
foisa taffetas vercou lunettes,iuſques à ce qu'ilpuiſſe bien tolerer la clairté ſans douleur.
Ecfil aduenoit quelques iours apres que lacataracte remontalt ſur la pupille,alors la
Bosch faut rabbatre de rechef commedeſſus: mais il ne faut paſſer l'aiguille au lieu où elle
blacion aura eſté poſée parauant,àraiſon qu'il eft plus douloureux. Or quelquesfois la cara- Remedes four
racte n'clt abbattuë entiere, mais lerompt par pieces : adonc faut abbattre toutes les les accidens
quifuruien
pieces I'vneapresl'autre : & encores qu'il en demeuraſt quelque petite portion , ne nent en l'opos
faut douter qu'elle ne ſe conſomme parlebenefice de la chaleur naturelle : pareille rutiin .
ment aucunes cacaractes en les voulant abbatore , deuiennent commelaid ou cau
trouble , à raiſon qu'elles ne ſont encores aſſez dures : & combien que telle choſe
jau aduienne, lieſt- ce qu'ily a eſperance de guariſon ,pource que puis apres elle ne ſe
peutr’aſſembler , & apres quelque temps l'æilſe clarifie, principalement auxieunes.
S'il ſuruenoit quelques accidens, on prendra nouucau confcil, diuerfifiant les re
inedes ſelon qu'il en fera beſoin.
FFE
608 Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs
A
4
Du conduit de l'oreille bouché naturellement , 04 par accident, des choſes eſtranges qui
tombent dedans. С НА Р. XXIII.

Velquesfois aux petits enfans nouucllement nais , on trouue les con


Canje. duics des oreilles bouchez , à raiſon de quelque chair , ou membrane
procreée au fond, ou en la ſuperficie des oreilles. Elle eſt bouchée aufli

par accident depuis noſtre natiuité ,à cauſe de quelque apoſteme, playo


ou vlcere : au moyen dequoy y ſuruiene quelque chair luperAuë. Lors
Cure.
que l'obſtruction ſe fait au profond, la cure eſt plus difficile, que quand elle eſt à la
ſuperficie. Et pour la curation la faut inciſer & couper , ou la conſommer & corro bis
senſibilité de der auec medicamens acres & corroſifs. Or il faut traitcer ce mal bien curieuſement,

Autpartico
la res caur de peur de faire tomber le malade en conuullion , & le faire mourir, pour la grande que le
ſenſibiliçé de celte partie , & auſli pource qu'elle eſt proche du cerucau. Quelques Cancel
fes.
fois auſſi le conduit de l'oreille eſt bouche par choſes eſtranges qui ſont tombées de .
dans: comme petites pierres, verre,balotce de plomb,d'or ou d'argent , de fer, & ſem . B " Hegel
blable matiere, perles,noyaux de ceriſes, pois , graines, & autres choſes . Les corps ſo. propie
lides demeurenttouſiours és oreilles en leur propre grandeur: mais les pois & grai
nes , & noyaux de ceriſes , l'imbibent & enfent de l'humidité qui naturellement elt
aux oreilles : & parcant cauſene de tres- grandes douleurs. Parquoy le pluſtoſt que meent

l'on les pourra cirer , c'eſt le meilleur, quile fera auec petites pincettes & inſtrumens
courbezen maniere de cure - oreille : & fices choſes eſtoient li fort enflées que l'on prop
n'y peuſt remedier parce moyen , on les tirera aucc vn pecit tire - fond , dequoy on ti -zime
Le moyen re les baies de plomb. Les pierres & autres corps durs ſeront tirez auec inſtrumens Cab
d'extraire les
propres :& fi on ne le peut faire par ce moyen , on mettra vn peu d'huile d'amende
pierres cu douce dans les oreilles , ou autre ſemblable : puis on fera touſlerle malade,le prono soud
desoreilles. quant à efternuer par fternutatoires, & fermiera la bouche ferrant les narilles auce
les doigts quand il eſternuëra , afin de faire ſortir hors de l'oreille ce qui eſt contro
nature par l'impetuoſité de l'air agité , cherchant iſſuë par vne violente commotion ,
& eſbranlement de tout le corps . Etficels remedes ne profitent , faut faire vne petite O
inciſion au profond de l'oreille , afin de donner lieu aux inftrumens pour extraire les
le moyen choſes eſtranges. D'abondant quelquesfois il entre en l'oreille de petites beſtioles,
d'ofterlespe- comme puces, punaiſes ,fourmis ,mouſcherons,perſe- oreilles , & autres ſemblables :
eises
des beftioles toutes leſquelles pcuuent eſtre cuées , inftillant de l'huile ou vinaigre. Er quant à la
petite beſtiole de perſe- oreille , on la pourra attirer,appliquant la moitié d'vne pom
me douceioignant l’oreille : car ceſte petite beſtiole la voulantgrignotter , fera ſou
dainement tirée, comme nous auons die cy- deuant en l’Introduction .
scuch
teles
La maniere de tirer les areftes, & autres cholês ejlranges qui s'attachent àlagorge.

CHAP . XXI ! 11. Pea


D

Ouuent en mangeane on analle des arcſtes,ou quelques petits os , spres


Remedes ou autre choſe eitrange. Sien ouurant la boucheon les peut voir,
pour ofter
ſerontoltées avec pincettes longues & eſtroictes, courbées com
une areſte
quick
attachée à la me vn bec de gruë: & fionne les peut apperceuoir, il fautque le
gorge. malade aualle vn morceau de pain moller , ou vne figue feiche
bien pcu maſchée , ou autre chole : ou bien le faire vomir : car

par cemoyen la choſe eſtrange elt ſoyuent pouffie dehors : ou

bien on prendra vn porreau courbé ,de groſſeur que l'on cognoiſtra eſtre neceſſaire,
luy ayant coupé le bout de la teſte , laquelle ſera huilée : & ayantfait ouurir la bou be
cho
che du malade , ſera mis dans le gofier aſſez profondément , tantde fois que la

La tour pro- ſe eſtrange ſoit ietrée en bas , ou retirée en haut . Et où le porreau defaudroit, on
fite à ceux , prendra vi plomb approprié à ce faire , de figure du porreau . Or f'il y a quelque
qui ont quel choſe eſtrange qui ſoit entrée en la trachée artere, il faut prouoquer la toux auec
Lachée a la quelques choſes aigres , & ietter dedans le ncz vn fternutatoire : car en faiſant cet
crachée arie- te grandeagitation par l'expiration violente , fouuent ces choſes eſtranges font ict Pre
tées hors.
Operations de Chirurgie. 609
A
De la douleur des dents, CHA P. XXV.

A douleur des dents eſt la plus grande & cruelle qui ſoit entre Hiſtoire sono
toutes les douleurs,ſans mort : & pour la preuue, ie la laiſſeà ceux chant la
quien onceſté vexez. I'ay memoire qu'vn valec de chambre de cruauté du
defun &t Monſeigneur le Conneſtable,eftant à Chantilly,me dit, mal desdéts.
que pour vne extremedouleurde dent qu'il auoit , l'il n'euſt eu
peur d'eſtre damné,ilſefuſtjecté par vne feneſtre dans les foſſez,
& ſe fuſt noyé , pour eſtre exempo de la douleur : dauantage me
dit , qu'en vingt- quatre heures il ſe fic vne apofteme ſur la genciue , qui ſe fuppura à
l'endroit de la douleur, & peu de jours apres ſa dent tomba en pieces, qui monſtre
queles dents peuuentapoſtumer ,& pourrir commeles autres os : ce qu'on void,
parce qu'elles ſe pertuiſent , & corrodent , & par ceſte pourriture les vers ly engen,
B drent. Ce qui eſt prouuépar Hippocrates au liu. 4. des Epidemics , en l'hiſtoire de
Hegeſiſtratius, diſant que les dents peuuent endurer cumeurcontre nature en leurs
propres corps : ce qu'il recire comme par vn grand miracle de Nature , attendu que
les tumeursneviennent ſinon aux lieux où ilſe peut faire extenſion. Dauantage Ga
16
ien liu.g.ch. 8. de la compoſition des medicamens ſelon les lieux , dit avoir elproy
lué en ſoy-meſme,lors qu'il fut trauaillé d'une forte douleur de dent, que non ſeule
ment le nerf & la membranequi lie la dent , eſtoit trauaillée de douleur , mais aufli
ODT
la propre ſubſtance de la dent eſtoit douloureuſe & agitée de phlegmon ;& de la
meſmo pulſation que les partiescharneuſes:& dit qu'il tientcela pour choſe clmer
ucillable, pour la grande dureté dela dent , commela pulſation ſe peut faire pour la
difficulté del'extenſion. La cauſe de la douleur des dents vientdecauſe anteceden cauſededeslos
อ ใจ te ,ou de primitiue : d'antecedente , comme rheume & defluxion chaude ou froide, denis.
tombant luricelles, qui remplit l'alueole ,de façon qu'elle pouſſe la dent hors , qui
fait qu'elles ſont ſouuentauancéesen dehors, tellement que le malade n'oſe, & nc
‫ܕܝܝ‬

--
peut aucunementmaſcher deſſus pour l'extreme douleur qu'il ſent, & la fuxion
G fait qu'elles ſont relaſchées, qui cauſe les faire branler : & ſi elles ſont corrodées ,
creuſes, & pertuiſéesiuſques à la racine, lors que le malade boit, ſurtout quelqueli.
. queurfroide,il luy ſemble qu'on luy donne vn coup de poinçon dedans.
0.6 Les fignes que la cauſe eſt chaude,c'eſt que la douleur eſt aiguë & poignante,com-Les lignes
me fion mettoitdes aiguilles dedans. On ſentauſſi vne grande pulſation en ſa raci- pourcognoid
ne, & aux temples:pareillement fera cogneuë quand on applique remedes froids fire ſila dou .
quiappaiſentla douleur. Les ſignes que la cauſe de la douleur que le leur estfaicte
eſtfroide, c'eſt
maladea grande peſanteurde teſte, & jertebeaucoup de ſaliue & d'humidicez par launcher
la bouche,& la doulcur l'appaiſe par remedes chauds:& en ces douleurs , ne faut froide.
que lesBarbieis & dentateurs ( c'eſt à dire arracheurs de dents ) ſe haſtent crop fubic
lesarracher ſans le conſeil des plus aduiſez qu'ils ne ſont quelquesfois.
Pour la cure il y a trois intencions: La premiere eſt,ordonner le regime: La fucon- Cure..
de,purgerla matiere antecedente: La troiſieſme,application de remedes particuliers
308 propres àleder ceſte extreme douleur. La premiere intention eſt, ordonner le regi
‫دان‬ me ſus les ſix choſes non naturelles . La deuxieſmeeſt,vacuer la maciere antecedente, Rernedes for
D comme fil eſt beſoin qu'il ſoit faigné & purgé :auſli pour diuertir la Auxion, onap dodarulifseude
r , en
pliqucra des ventouſes derriere le col, & ſur leseſpaules : & fi la matiere eſt chaude, maniere
cice on appliquera ſur la genciue à l'endroit de la douleur,des langſuës pour vacuer la chaude.
matiere conioincte, & ouurira- on les veines de deſſous la langue: ce que l'ay fait par Remede fora
pluſieurs fois, & fedé des douleurs extremes : mais auparauant queles appliquer, ie uns approwe
HTC faiſois petites ſcarificationsauec vn déchauſſoir de dents.La tierce intention fera ac- ué.
complicen appliquant pluſieurs remedes contrarians à la cauſe de la douleur :com
in meſi lamatiereeſt chaude , il faut tenir en la bouche vin de grenade, auec eau de
01 plantain , & vn peu de vinaigre bouilliauecroles & ſumach, & fleurs de grenades. Il
faucicy noter, queles remedes ſedatifs de la douleur des dents, doiventeſtre dere
ELS ont touliours
nuëſubſtanc , à cauſe qu'elles ſontfort dures: & partant les anciensAutre
•• voulumettreeduvinaigre, parce qu'ileſtinciſif & penetratif. .
Prenez roſes rouges,ſumach ,orge, de chacun yne demie poignée,ſemencede iuf
quiamo cócallec deux dragmes, detousles ſandauls de chacun vnedragme, laićtuë,
FFF ij.
610
Le dixfèptieſme liure , de pluſieurs

ſommité de rõces,morelle ,plátain , de chacun demie poignée:le tout ſera boiiillyen A A


quatre liures d'eau cõmune, & vn peu de vinaigre, iuſques à ce que l'orge ſe creue , &
Tel remede d'icelle decoction en ſera tenue en la bouche vn peu tiede. Autre. Prenez ſemence

fede coſtla
douleur . de iuſquiame , ſandaracha, coriandre, opium , de chacun demie dragme, le tout pi
}é & incorporé auec vinaigre, & en ſoientformez trochiſques, puis en ſoic appoſé
fur la dent douloureuſe .Autre trochiſque. Prenez ſemence de pourpié , de iuſquia
me,coriandre , lentilles , eſcorce de ſandal cicrin , roſesrouges, pyrethre , camphre,
de chacun demie dragme , & foient bien pilées enſemble auec fort vinaigre , & loient
formez trochiſques : lors qu'on en voudra vfer, on en prendra vn ou deux auec cau
rofe , & en ſera frottée la genciue, & tenu en la bouche , Autre remede . Si les genci do
de
ues font relaxées , faut que lemalade ſe gargarife de choſes froides & aſtringentes
,
les
comme oxycrat, auquelon aura fait bouillir noix de cyprés , myrtilles , & vn peu d'a
luin : & fi la douleur neceſſoic, fauc vſer de narcotiques pourſtupefier le nerf.Exem
ple . 2. ſeminis iurquia . alb.opij , camph.papau.alb.añ . q.1. coquanturcum ſapa,&
ſoit appliqué ſur la dent . Pareillement ſera mis dedans l'oreille ce qui ſ'enfuit. 2 .
B
opij , & caſtor. an.31 .mifceantur cum oleorolat. L'ouuerture de la veine quieft au rad
derriere de l'oreille, lede la douleur ( choſe par moy ſouvent experimentée) autres che:

la font au milieu de l’oreille par dedans, au dellus du trou de l'oüye: aufli vn petit les

emplaftre de poix & de maſtic,poſé ſur l'artere de la temple, du coſté de la douleur. dare
Pour ſeder la Pour ſeder la douleurde cauſe froide, prenez eau de vie melléeavec vne deco &tion que
douleur de
faicte de vin & vinaigre , roſmarin , faulge, pyrethre , & vo peu de theriaque , & toit bare
Caufe froide.
poſé ſur la dent. Autre. Prenez armoniac diſſoult en eau de vie ,& vn peu de ſanda hacCE

racha, de myrrhe, & ſoit appliqué ſur la dent: choſe louée & approuuée de de Vigo. hefur
Autre . Melué dit que pour leder la douleur, faut tenir des ails pilez en la main du que
colté de la douleur. 1,83

Experience Autre . Pour vne excreme douleur de dents que i'auois , vne petite bonne femme
faicte fur me conſeilla y mettre deſſus vne goſſe d'ails vn peu cuitre Tous les cendres,& la met
PAutheur. cre la plus chaudeque ie pourrois endurer : ce que ie feis, & coſt apres ma douleur Lab
fuc ceſſée , tellement que depuis ie l’ay pra & iqué en pluſieurs, où l'on a veu vnefeat
merueilleux : auſſionenmettra dedansl'oreille . Autre . 2. rad . pyret . z . B. ment. & o
rut.añ.p.bulliant in aceto , & d'icelle en ſera tenu chaud en la bouch. Autre . Fai
tes fumigation de graines de coloquintes , & de mouſtarde, & d'ails , receuë par en deli
connoir a la dent , du coſte de la douleur : auflion mettra en l’oreille huile de caftor,
ou de girofle, ou autre tirée parquinte eſſence. Autre . Soit fait parfum ou fuffumi 0400
gacion ainſi quef'enfuit. 2. rad. pyret.gingib.cinaino.alum.roch. ſalis communis, Mice
nuc moſcai,nuc.cuprei. aniſ, ſem . finap . euphorb . De ce choſes en ſera pris & Pone
faicte decoction en oxycrao, & à la fin ſera adiouſté vo peu d'eau de vie , & en ſera rc
ceuë la vapeur , ou fumée par vnentonnoir:aufli en ſera faic gargarilmes: dauanta
ge en lira mis vne goutte ou deux dedans les oreilles avec un peu de cotton . Autre.
Soit applique vo velicatoire au deſlous de l'oreille à çauoir , en la cauité où ſe con ducer
1
joint la mandibule inferieure , la douleur celle : d'autant qu'en ceſte parcie il y a vei
ne , artere ,& nerf, lelquels ſe diftribuent aux racines des dents : & par la velicacion is,fu
on faic vacuation de l'humeur ja Aué , & de celuy qui decoule , & partant la douleur
f'appaiſe: ce que i’ay fait pluſieurs fois , rache

Remiedes' On fera tenir en la bouche du malade du vin , auquel on aura fait boüillir ſemen. D 0 Lc
pour mariere ce de iuſquiame , ou mandragore. Dauantage , prenez racines de tithymal ,boulluës fucke
chaude. en vin & vinaigre , & d'icelles qu'il en ſoit cenu en la bouche : ceremede cît bien ap chole
prouué ſila dentelt pertuiſée, & que le malade ne vueille permettre l'arracherpour perico
appaiſer vne cxtremedouleur : il n'y a rien plus aſſeuré, que d'y appliquer choſes
ſte
cauſtiques, comme huile de vitriol, ou cau fort, ou le cautere actuel:car par ce quest
cauteriſation, on bruſle le nerf , lequel eſtant brulé n'a plus de ſentiment, & n'en Los des
ayant plus , ne peut faire douleur . Lors que les genciues & les iouës fenflent au de
hors ,c'eſtbon ſigne :car la douleur ceſſe, à cauſe que Nature a pouſſe l'humeur du ion .
dedans , au dehors: & fion veut faire tomber la dent par pieces , faut prendre latet defpl
a
de cichymal , & pouldre d'encens incorporez auec vn peu de fleur d'amidon , en
faire parte, & en ſoicenueloppé la dent , ſans toucher aux autres.
dent
s
611
Operations de Chirurgie.
A
De pluſieurs indiſpoſitions qui aduiennent aux dents.
C H 4 P. XXVI.

L y a autres vices & accidens qui aduiennent aux dents , à ſçauoir Cauſes.
quand elles ſont relaxées, & qu'elles branſent,pourriture,corruption,
pertuiſement, & des vers engendrez en icelles , congelation , & au
tres . Les dents branflent pour la relaxation des genciues, qui ſe fait de
cauſe primitiue , commecheute , ou coup : & auſſi par cauſe antece
dente , comme fluxion qui deſcend du cerueau : ou par certaines vapeurs elleuces
de l'eſtomach , & quelquesfois par fauce de nourriſſement, ce qu'on void aux vieil
les gens: pareillement par corroſion de certain humeur acre qui tombe aux genci Branflement
Ex ues.Or le branllement quivient par ſeichereſſe & defaut d'aliment, eſt pernicieux, incurable,
comme teſmoigne Hippocratesen l'aphor.246.aux Coaques , & iamais nefecure: venant par
B mais les autres ſeront aidez par choſes contraires . Et premierementle malade cuite- feichereffen
ra de maſcher choſes dures , & de trop parler. Si le branflement vient par coups ou
cheutes , & ſi elles ſont aucunement hors de leur place , le Chirurgien les reduira, &
les liera aux autres proches qui font fermes & entieres , & neles doic-on acheuer
d'arracher : car elles ſe peuuentr’affermir & tenir fermement en leurs alucoles. Ce Hiſtoire.
quei'ay encores depuis n’agueres fait à vn mien voiſin & amy , nommé Antoine de
‫ܝܺܒܽ܂‬ là Ruë, maiſtre tailleur d'habics , demeurant au bout du pont Sain & Michel, lcquel
receut vncoup de pommeau de dague ſus la mandibuleinferieure, tellemenc qu'el
: le fut entierement fracturée , & crois dents miſes 8 renuerſées en la bouche, &pref
que du tout hors de leursalucoles : toutesfois la frađure de la mandibule fuc redui.
te, & les dents remiſesen leurs places , liées & atrachées auec un fil en double, ciré,
auec lesprochaines, leluy ordonnay viandes qu'il ne falloit maſcher , comme pref
ſis, coulis,orge-mondé , panade, gelée , ius d'éclanche de mouton , & autres lem
blables : auſilauemens & gargariſmes aſtringens, & autres choſes neceſſaires à la
fracture, & ainſi fut guary , defaçon qu'auiourd'huy maſche aurant bien deſſus ler
C
dites dents qu'il fit iamais: parcant le ieune Chirurgien fera le ſemblable lors qu'il ſe Aduertiſſe
trouuera entels accidens. Or pofons le faict qu'il y cuſtvne dent miſe du tout hors ment 44 Chị
de laplace par quelque coup,ou par l'imperitie de l'arracheur de dents, ou du ma. rurgien.
lade qui luy en auroit faict tirer vne bonne pour vnemauuaiſe ,on la doit prompte
mentremettre droitement en la place , & la bien lierauecques les autres proches, &
parce moyen elle peut reprendre.Vn homme digne d'eſtrecreu , m'a affirmé qu'vne Hiffoire.
Princeſſe ayant fait arrachervne dent , fenfit remettre ſubit vne autre d'une lienne
damoiſelle, laquelle ſe reprint : & quelque temps apres maſchoit deſlus comme ſus
celle qu'elle auoitfaicarracherauparauant: cela ay.ie oüy dire , mais ie ne l'ay pas
veu : & fileſt vray , il peutbien eſtre. Si le branflement vient par rheume diſtillant
bai ducerucau , ou par vapeurselleuées de l'eſtomach , on y remediera parleurs contrai
res : & aullipar gargariſmes, & opiates faites de choſesaſtringentes,comme berbe
ris, lumach, nuc.cuprelli, alum.roche , centinod . equiſeti, ſucciacaciæ ,& leurs
louicus femblables. Dauantagé le malade ciendra ſouuent en la bouche vn peu d'alum de
roche, le tournant tantoft d'un coté , tantoſt de l'autre .
D L'eroſion ſe fait par vn humeur aigu & acre , qui les corrode & percuiſe, voire Delapourri
whe ſoulfentiuſques en leurs racines. Pourcorriger ceſte pourriture ( apres auoir fait les ture, eroſion,
1201 choſesvniuerſelles) on appliquera dedans letrou huile de vitriol, ou cau forte,ou vn ment & pertuiſe
des
Iforum petit cautere actuel, ſelon qu'il ſera neceſſaire : & fil eſt beſoin ( de peur qu'on tou dent s, des
chos che à autre partie qu’aulieu qu'on veut cauteriſer ) on mettra leſdits cauteres auec vers trouhet
ques vne cânule , afin de corriger la pourriture & eroſion. Or ſi lepertuis eſtoicentre enlaracine
s les dents , comme ſouuent aduient, deſorte qu'on ne peuſt appliquer nulle des cho d'icelles.
ſesſuſdites ,on limera entre la dent ſaine & celle qui eſt pertuiſée tant qu'il ſera be
loin .Onlımepareillement les dents quand elles pouſſent outre les autres, & fonc
،، deſplaiſir à maſcher, & à la perſonne , comme l'on void aux ſourdents. Orcela eſt
eſmerueillable que les dents ne ſentenc pasquand on les lime ou bruſle , & c pour oc
caſion plus legere ſentent douleur , ainfiqu'on void quelques -vns auoir douleur aux
dents, ſubitqu'ils entendent le ſon & bruit d'vne lime raclant ſur quelque fer allez
rudement . Arecéedic , que Dieu ſeul en ſçait la cauſe.
FFF iij
612
Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs
А
Figures des limes à limer les dents .

Et pour retourner à noſtre propos,fera faite ouuercure telle qu'il ſera neceſſaire B
Pour faire pour appliquer les choſes ſuſdites, & prendra -on plus ſus celle qui eſt erodée , que
mourir les
ſus la ſaine. Etpour faire mourir les vers , faut appliquer choſes cauſtiques, aulli py
vers .
rethre deſtrempé en vinaigre , ou theriaque diſſout en meſme liqueur : ſeront auſli
appliquez ails, ou oignons, ou vn peu d'aloës ..
De la fu
La congelation vient pour crop vſer de viandes aigres , ou par aucunes vapeurs
Petir.comes
larion , ou eno mauuaiſes quimontent de l'eſtomach en haut , ou pour quelque defuxion froide
tombante du cerucau deſſus les dents, ou pour auoir cenu en la bouche choſes trop
dormiſſement
des denis . froides & narcotiques . Pour la cure : les choſes vniuerſelles faictes, il faut tenir call
Cure . de vie ou de bon vin , auquelon aura fait bouillir ſauge , roſinarin , & autres ſembla-,
bles herbes , cloux de girofle , & noix muguettes: de laquelle deco &tion en ſera te
nu en la bouche. Les dents ſ'arrachent pour l'extreme rage , & douleur qu'on y ſent,
ou pource qu'elles ſontcreuſes & pourries , qui fait que l'haleinceſt renduë de mau
uaile odeur, & aulli qu'icelle pourriture gaſte & altere les autres dents qui ſont fai
nes & encieres . Dauantage on les arr«che quand elles ſontforjettées hors de leur
rang , & les appelle -on ſourdents, qui viennent aux enfans deuant que la premiere
foit tombée.Alors il faudra déchauffer celle qui deuoit tomber , puis l'arracher , &
tous les iours pouſſer la ſourdentauec les doigts en la place de celle qui aura elté ar
rachée , iuſques à ce qu'elleſoiten ſon licu naturel. On les rompcaulli à cauſe qu'el
les tiennent par crop , afin d'inſtiller quelque choſe en leurs racines, ou les cauteri
ſer plus aiſément, afin d'oſter le ſentimentau nerf qui ſ'inſere en leurs racines. Les
dents ne doiuenc eſtrearrachées par grande violence , de peur de luxer & démettre
la mandibule inferieura : ioint que par l'extraction violente on fait grande concuf
fion au cerucau , & aux yeux. Auſſiſe faut donner garde de tirer vne bonne pour la
mauuaiſe : car ſouuent melme le malade ne la ſçait diſceruer , à cauſe qu'il ſeno vne
fi extreme douleur en toute la mandibule , qu'il ne peut cognoiſtre celle qui eſt vi
ciée d'entre les autres . On ne les doit arracher tout à coup,depeur de rompre & em

porcer vne partie de la mandibule ( ce que i'ay veu par pluſieurs fois)dont peuvent
furuenir de bien grands accidens, comme fićure, apoſteme, Aux de ſang & par con
fequent la mort: & auſſiquelques - vnsen ont euà iamais la bouche toric , ne la pou D
uans que bien peu ouurir : & parcant on ſe doit garder de les arracher pat violence,
principalement lors qu'elles ne branlent aucunement : & dauantage , ſi elles font
creuſes, on doit remplir le pertuis de liege ou de plomb bien accommodé , de peur
les racines demeurent
qu'en les ſerrant elles ne ſoient froiſſées & rompuës , & que
dedans la mandibule ; qui cauſeroit de grands & mauuais accidens,parce que la dent
ou racine d'icelle , eftantcncore conioin & e & attachée au nerf ſubiec à laAuxion,la
douleur feroit pluſtoſt irritée & augmentée que fedée: à laquelle il ſeroit bien plus
mal- aiſé de remedier, tant par l'arrachement & extirpation de ce qui reſte de la
deno , que par le caucere & autres renedes, eſtant cedit reſte enfoncé & couuert de
lagenciue , ainſi que i'ay veu arriuer quelquesfois.
1 Ά
Operations de Chirurgie. 613
Les instrumenspropres pour arracher& rompre les dents.
CH A P. XXV II.

REMIEREMENT deuant qu'arracher les dents, il faut quele situation dú


malade ſoit aſſis bas , ayant la teſte entre les iambes du dencateur: malade:
puis qu'illes déchauſſeprofondement d'alentour de leurs alueo
les,auecdéchauſſoirs que tuas icy figurez par A : &apres les auoir
déchauſſées , ſi on void qu'elles tiennent peu , ſeront pouſſées
& iectées hors auec vn pouſſoir,duquel cu asicy la figure marquee
par B. Aufli lion cognoiſt que la dent ne puiſſe eſtrearrachée par
le pouſſoir, on prendra vn dauier quit'eſtmarqué par D, lequel eſt propre à rompre
la dent qu'on veut caſſer: ou bien on faidera des policans marquez par CC ,& ccſtụy
par E, ſelon que ledentarcurſe feraexercé à tirer desdents : carveritablementil l'ylage de
B
fautetrebieninduſtrieux à l'uſage despolicans,à cauſe que li on ne ſ'en ſçaitbien policanre
qui no on
aider , on ne peut faillir à ietter trois dents hors la bouche, & laiſſer la mauuaiſe & homm e
gaſtée dedans. exercué.

2011
Figured'on pouſſoir & déchauſſoir. Figured'undanier el.policans.
PEC
roic

Tech

Los
A B
А
ma c :D

Cure
rka
Pirm
yn

TAR !
Tip

cus D Figure d'autrepolican.


OCH

US
1
:

FFf iiij
614 Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs

Hiſtoire, Qu'il ſoit vray , ie veux icy reciter vne hiſtoire d'vn Maiſtre Barbier demeurant à A
Orleans , nommé Maiſtre François Louys, lequel auoit par deſſus tousl'honneurde
bien arracher vne dent ; de façon que tous les Samedispluſieurspayſansayansmal
aux dents venoient vers luy pour les faire arracher : ce qu'il faiſoit fort dexcrement
auec vn polican , & lors qu'il en auoit faic , le iecroit ſur vn ais en la boutique . Or
auoit- il va ſeruiteur nouueau , Picard , grand & fort , qui deliroit tirer les dents à la
mode de ſon maiſtre. Arriua cependant que ledit François Louys diſnoit,vn villa
geois requerant qu'on luy arrachaft vne dent , ce Picard print l'inſtrument deſon

maiſtre & feffaya faire commeluy : mais en lieu d'oſter la mauuaiſe dent au pauure
villagcois , luy en pouſſa & arracha trois bonnes . Et ſentant vne douleur extreme, &
voyant trois dents hors de la bouche , commença à crier contre le Picard : lequel
pour le faire taire luy dit qu'il ne dift mor ', & qu'il ne criaft ſi haue , attendu quelile
maiſtre venoit , il luy feroit payer crois dents pour vne . Donc le maiſtre oyant tel
bruit , ſortic hors de table pour ſçauoir la cauſe & raiſon de leur noiſe & conteſta 41
cion : mais le pauure payſan redoutant les menaces du Picard , & encor apres auoir B
enduré celle douleur , qu'on ne luy fiſt payer triplement la peine dudic Picard , fc
: ceut , n'oſant declarer auditmaiſtre ce beau chef-d'æuure : & ainſi le pauure badauc
de villageſen alla quitte ; &z pour vnedentqu'il penſoic faire arrachèr, en remporca
trois en la bourſe , & celle qui luy cauſoit le mal , en la bouche. Partant ie conſeille
à ceux qui voudrontfaire arracher les dents , qu'ils aillent aux vieux dentateurs, &
Ce qu'il faut non aux ieúnes , qui n'auront encore recogneu leurs fautes. Or apres qu'on aura
faire apres a, arraché les dents , il faut aſſez laiſſer faigner le malade , afin que par ce moyen la par
uoir arraché
La dent . tie en ſoir deſchargée : puis le dentateur de ſes doigts comprimera à l'endroic de la
genciue , le lieu duquel lon aura arraché la dent,
tant d'un coſté que d'autre, afin
de reduire & r'aſſembler l'alucole qui aura eſté elargy , & quelquesfois rompuen
tirant la dent: & apres on fera lauer la bouche au malade auec oxycrae,& fic'eſten
temps froid , gardera de l'expoſer au vent , de peur qu'il ne ſe face vne nouuelle
fluxion ſur les autres dents.

с
De la limoſité ou roüilleure des dents, & la maniere de les conſeruer.

CH A P. XXVII.

L faut apres le repas lauer la bouche d'eau & vin , ou eau auec vn
peu de vinaigre: ſemblablement les nettoyer , afin qu'il ne de
meure quelque pecitreſte de viande , laquelle le corromprendre
les dents, qui fait qu'apreselles falterent & pourriſſenc , & fonc

Cauſes. que l'haleine eſt de mauuaiſe odeur. Auſſi il ſe concrée vnema


tiereterreſtre , comme une roüille ſur icelles ,de couleur iauna
ftre , qui les corrode comme la rouille le fer: ce qui aduientpar
faute de les neccoyer & de ne maſcher deſſus : il faut oſter & racler telle maciere
auec petits inſtrumens propres à ce faire,puis apres ſeront les dents frottées d'on peu
d'eau forte , & eau de vie meſlées enſemble , afin d'oſter le reſte que les inſtrumens
n'auroient peu faire. Pour les conſeruer ne fauc maſcher choſes par trop dures,ny D
rompre noyaux , ny os , & autres femblables: aufli qu'on ne les cure ordinairement
auec choſe quiles déchauſſe , & qu'on les frotte auec dentifrices faits de racines de
guimauues bouillies en vin blanc & alum de roche , & en ſoient ſouuent frottées les
Poudre pro- dencs : auſſi la poudre faitè d'os de ſeiche,pourcelaine, pierre ponce , alum cuir, cor
pre pour net- ne de cerf, & vn peu de canelle, yet fouuerainement bonne : aucuns ne prennent * E
toyer les
dents. que de la crouſte de pain brulée miſe en poudre. Eau pour blanchir les dents fort
excellente. 22. ſal,amm - si gemm . an .zi.alum , roch.ŽB. addendo aquæ roſarum
quod ſufficic; & fiat diſtillatio, de laquellc vferez, & enfrotterez vos dents. iner

)
12.0
0
6is
Operations de Chirurgie.

De l’empeſchement & retraction de la langue.

CHAP . XXIX .

’ EMPĖSCHEMENT & retraction de la langue aucunesfois eſt Cauſe.


naturelle , eſtant la langue retenuë par les muſcles & membranes,
quidés le premier iour deleur naciuicé , font ou trop durs , ou trop
courts. Quelquesfoisauſli vient par accident, à cauſe de quelque
cicatrice dure,apresva vlcere fait ſous icelle . On cognoift ce vice Signes .
eſtre naturel , quand le malade du commencement eſt fort tardif
à parler , & quand la parole luy eſt venuë, il parle haſtiuement en
bredoüillant : ſemblablement le ligament qui eſt ſous la langue , eſt raccourcy plus
qu'il ne doit , tellement que lemalade ne peut bien pouſſer la langue hors la bouche.
B Quand ce vicc vient par accident,faut trencher & couper au trauers , l'attache ver- Cure .
ueuſe ( dite vulgairement le filet) qui larecient , & en ce faiſant,fe faut donner garde ,
d'inciſer les veines & arteres qui ſont ſous icelle, de peur du flux de ſang , qui apres
ſeroic difficile à eſtancher. L'operation faite, faut faire lauer la bouchedu maiade Pour empero
cher l'iggly
d'oxycrat,puismettre vn drapeau en double , trempé en ſyrop de roſes ſeiches , ou tination.
de miel roſar , dedans la playe, & principalement de nuict, de peur qu'elle ne ſe re
prenne : pource qu'en dormant le malade ne parle point , & ne remue point la lan
gue. Auſſi paſſera Touuentesfois ſon doigt au deilous , & tirera la langue par interual
le hors la bouche . Or quand il y a danger de flux de fang ,à cauſe de l'inciſion , on Moyen de 1
coupera ce ligament, en paſſant vne aiguille enfilée au deflous, la ſerrant li fort de faire inciſion
iour en autre qu’ille coupe. Quelquesfoisce ligament eſt ſi large & court , tenant la fans bemor,
li rhagie
langue fi ſubiecte, que la Chirurgie n'y a lieu ſans grand flux de ſang, & peril du
malade .

Des doiges fuperflus , & de ceux qui ſontioints enſemble.

C
CHA P. XXX .

E nombre naturel des doigts de la main eſt de cinq, & l'ilyen a Diuiſion des
plus ou moins, c'eſt choſe ſuperfluë, & contre nature . Ce qui de- doigts ſuper
W.
faut ne peut eſtre reſtitué par Chirurgie :au contraire , cequieſt flise
0 ſuperflu ſe peut ofter quelquesfois, & quelquesfois non . Ceux
em3r! qui ſont ſuperflus naiſſent pres le poulce, ou pres le petit doigt , &
rarement les void - on naiſtre aux autres doigts. Iceux fonc'ou du
tout charneux , ou bien ont des os en leur compoſicion , & ſou
ademais
uentesfois des ongles . Ceux qui ont des os , naiſſent ou de la iointure, ayant l'aſſem
S. blage d'icelle commele doige nacurel:ou naiſſent de l'eſcadron des os des doigts , &
ceux n'ont aucun mouuement. Les autres qui naiſſent des iointures , quelquesfois
fe remuent & ont mouuement, & le plus communément ſont plus courts , & quel
please
quesfois d'égale grandeur au naturel . Quelquesfois auſli les doigts ſont vnis eniem- Des doiges
vnis enfem
D ble, & autrefois bien peu ſeparez l'un de l'autre :ce qui aduient naturellement, ou ble .
par accident : naturellement,dés le ventre de la mere , par le vice de la vertu forma
trice: par accident, comme à cauſe d'une playe,& le plus ſouuent d'vne bruſleure,
IN par l'ignorance du Chirurgien ,qui n'a eu égard pendant la cure , mettre du linge & Cure des
autre choſe entre iceux : car le cuireſtant vlceré tant d'vn que d'autre coté des doigts ioines
doigts,eſtcauſe qu'ils ſeioignent enſemble. En ces deux accidens
, fi le Chirurgien & vnis en ,
cognoiſt qu'il y aye peu d'eſpaiſſeur,n'ayantque le cuir & bien peu de chair qui les ſemble .
tiennent liez & attachez l'vn contre l'autre , aiſément ſeront ſeparez auec vn raſoir
1
bien trenchant. Au contraire ſ'ils eſtoient grandementioints, & les tendons & z nerfs Cure des
ynis enſemble,en tel cas le Chirurgien n'y touchera. Onampute aiſément ceux qui auigos ſupers
fius.
fonecharneux , coupant auec le raſoir ce qui eſt ſuperflu : & fily a des cs , ſeront tren
chez auec tenailles inciſiues ,comme cu vois par ces figures. Et le reſte de la cure le
paracheuera ainſi qu'il appartiene :
616
Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs A
Figure des tenailles inciſiues. Autre tenaillepour comper les doigtsſuperflu .

20

le diray encore qu'ily a pluſieurs auſquels lesonglesentrent en la chair des or


ceilsqui leur donnene douleurs extremes ,& fouuentesfois on n'auance rien à cou
per l'ongle : car recroiſſant, il fait le ſemblable mal. Et partantpourla curcil con
uicnt couper entierement la chair,où la portion de l'ongle ſe cache , ce que j'ay faic
ſouuent auec bonne iſſuë. Pareillement aucuns ont des cors aux ortcils , qui fone
grandes douleurs.On lesguarit , coupant toute la calloſité,oucorne, puis on appli
quedeſſus aulx pilez :mais pourle plus expedient, les faut cauceriſer aucc cau fore,
ou huile de vitriol.
с

La maniere d'habiller le Prepuce trop court, & des Resaillez.


CH A P. XXXI .

Caufes. L ſe void à aucuns le Prepuce e tre trop court, & ne couurir le


glanou extremité de la verge.Orcela aduient,ou naturellement,
ou par tailleure dés l'enfance,& ce par commandement de Reli
gion, à ſçauoir,Circonciſion,commeaux luifs,Turcs ,& autres.
CHT ? Pour la curation, faut renuerſer le Prepuce , puis couper la peau
interieure en toute ſa circonſcription , euitant la veincou artere
qui ſont droitement ſur la verge, entre les deux peaux dudic Pre
puce : puis ſera tiré contre bas tant que le glan ſoit couuert & caché ,meccant pre
mieremér entre le glan & le Prepuce, vne petite emplaftre deliccatiue,depeur qu'ils
ne ſe ioignent enſemble : cela fait,ilfaudra lier le Prepuce ( que lon aura ciré ) à ſon D
extremité , iuſques à ce que la cicatrice ſoit faicte, & ne faut obmettre laiſſer vne pa
tite Cannule au conduitdela verge, à fin que le malade puiſſe vriner à ſa volonté.
Il eſt icy à noter, que ceux qui onteltécaillez & circoncis par commandement de la
Loy en leurenfance ,puis quitcenticelle auec toutesſes ceremonies ( à fin de n'eſtre
recogneus pour luifs circoncis ) ſont guaris en ceſte ſorte. On coupe la peau de la
verge contre ſa racine tout autour,& quand elle aura ainſi perdu ſa continuité, on la
tire peuà peu en bas,iuſques à ce que le glanſoitcouuert,puison procedera à la cure
pour y faire cicatrice. Tels ſont appellez des Latins Recutita, & des François, Re
Retaillez taillez .
Operations de Chirurgie. 617
A
Da Prepace ſerrégu'on nepeutdefconuvirk Glan, diePhymois, Paraphymes.
CH A P. XXXII.
si ? 2

A conſtruction du Prepuce a deux eſpeces : la premiere , quand le


glan eſt couuert d'iceluy, & qu'on ne le peut retirer contre -mond &
deſcouurir. La ſeconde, quand le prepuce eſt reciré contre -mont, qui
fait le glan deſcouuert , & on ne le peut renuerfer , & reduire ſus le
glan. La premiereeſpece eſt nommée Phymoſis, la ſeconde Paraphymoſis. Phymoſis:
La cauſe de la premiere eſpece, qui eſt quand le glan nepeut eſtre deſcouuert, vient Paraphy,
naturellement,oupour quplquecicatrice& excroiſſance du prepuce: comme ilad- moſis.
uient ſouuent pour des verrues. La ſeconde eſpece vient pour quelque inflamma- Cauſe.
tion de la verge , comme pourauoirarcouchéfemmes ordes , dont l'eſt faitdes vice
res entre le prepuce & balanus, auec tumeur & inflammation; de ſorte que lon ne le
B peut renuerſer :au moyen dequoy on ne ſçauroic traitter leſdits vlceres,dont fen
ſuit le plusſouuentgangrene & mortification de toute la verge, à cauſe dequoy eſt
neceſſaire faire amputation d'icelle, pour euiter la mort. Pour la cure du prepuce Cure diuerſe
ſerré, ayant mis le malade en bonne ſituation ,on tire leprepuce en deuant, l'elten- ſelon ladi
dant & ouurantautant qu'il ſera poſſible : & fi la conftri &tion eſt faite à raiſon d'vne uerſité des
cicatrice , on le couperaen trois ou quatre endroits en ſon interieure partie, ce quiſe cauſes,
fera commodément auec yne Biſtorie courbe : & ne faut que leſdites inciſions pene
desc trent iuſques à l'extericure partie d'iceluy, leſquelles ſeront diſtantes l'une de l'autre
également. Si l'aſtriction vient pour quelquechair ſuperflueou verruës,conuiendra
la conſommer ,comme les verruës du colde la matrice, & de la verge. Et là où il ſe
roit tout en la circonference adherant contre le glan , ne reçoic curation.
ui font
De ceux qui n'ont poiut de trou au bout du glan , ou qui l'ont au deſſous, e qui -
ont le ligament de la Verge trop court.
C H 4 P. XXXIII.

Lysievr's de leurnaiſſancen'ontpoint le bourdu glan percé,maisbien symptomes
au deſſous presle filet, à cauſe dequoy ils ne peuuent vriner droit , f'ils ne duglannon
renuerſent la verge contre le ventre: ilsnepeuuentauſliengendrer , parce percé.
quc celte imperfection les empeſche de ietter droit la femence dans la ma
une trice. En telle diſpoſition on vſe de la Chirurgie. C'eſt que lon tire le prepuce de la
main ſeneſtre, & de la dextreon coupe le bout du prepuce, & l'extiemité du glan,
Rul joignant le trou quieſt au deſſous. Aucunsontle ligament de laverge fortcourt;de Curedu liga
façon qu'en l'erection d'icelle elle n'eſt droite , ainstortue; en ſorte que cela em- ment trop
peſche la generation , la ſemence ne pouuant eſtre iectée en la matrice de ligne couri.
droite: & pource faut couper le filet le plus dextrement qu'ilſera poſſible,& traitter
CD la playe comme les autres, ayantégard à la partie . Il y a desenfans qui paillentayans
le fiege clos d'vne membrane qui garde les excremens de ſortir: auſquels pour le de
ਹੈ03 D uoirdenoſtre art , il conuient faire ouuerture , & l'ayant faite , on void fortir quel
a la ques excremens: mais nonobſtant ceſte ouuerture , i'ay remarqué que tels enfans ne
Tepe viuentpaslongs iours , ains meurent en peu de temps.
De la cauſe des pierres. ĆH A P. XXXI111.
des
elle Es pierres qui ſe font en la veſlie, prennent le plusſouuent leur origine Canſe des
dei Jes reins , & deſcendent en la veſlie par les vaiſſeaux vrinaires. La cauſe pierres.
d'icelles eſt double ,à ſçauoir materielle, & efficiente. La cauſematerielle,
CUK pour la pluſparcſontgros humeurs gluans, elpés & viſqueux, faits de cru.
RS ditez cauſéesparintemperature, & exercicesimmoderez , principalementſoudain
apres le paft: & pour ceſte cauſe les enfans ſont plus ſujets à ceſte maladie que les Les enfans
plusaagez,ainſiquelon void par experience, à raiſon de leur inſatiable voracité. La Jone plus fwa
cauſe efficiente,citlachaleurexceliue,qui conſume la ſeroſité ſubtile, & la plúster- reiersàla
que pier
les
reſtre demeure & le feiche,ainſique voyons eſtre faic és tuiles & briques, deſquelles plus aagez
le feu conſumant l'humidité, lereſte ſe tourne en pierre . Ce quıyaide beaucoup, ce cauſe and
ſohtles conduits & voyesvrinaires tropeſtroits, en ſorte que les excremens gros & inuante.
618
Le dixſeptieſme liure, de pluſieurs

viſqueux ne peuſſent paſſer, & eſtre iectez hors par iceux , ains demeurentdans la A
ſubitance des reinsou de la veſlie , puis l'amaſſent les vns ſur lesautres : ainſi par ad
dicion eſt faice vne pierre , commepar eſcaille , crouſte ou eſcorce. Ec tour ainſi que
1 le Chandelier crempant fa meſche par pluſieurs fois dans le ſuif, en fait vncgroſſe
chandelle : ſemblablement la partie de l'vrine plus craffe & gluante en paffant ſur
vne petite arenc ou pierre , adherant contre , & l'incruſtant, & apres par eſpace de
temps ſe grofliflant, fait en fin vne groſſe pierre. L'vrine contenue en la vellic ,dc.
puis qu'elle eſt cſchauffée, rend grande chaleurau corps : partant il eſt bon de piſſer
ſouuent.

Des lignes des pierres és reins, en la veßie.

CHA P. X X XV .

Hippoc. asx Es ſignes de la pierre engendrée és reins ſont, que le patient ictce auec
B
Epidemies. l'vrine des arenes rouges ou iaunaſtres, & ſent vn prurit obtus aux reins,
auec grauicé & peſanteur des lumbes : & quand il ſe meur , il ſouffre vno
les
douleur poignante , & ftupeur ou formiement aux lumbes , hanches &
cuiſſes, à cauſe que la pierre eſtantencloſe dedans le rein , ou dans le pore vretere,
signes des preſſe les nerfs procedans des vertebres des lumbes. On cognoiſtra la pierre eſtreen
pierres en la la veſſie par ces lignes : c'eſt que le malade ſent vne peſanceur (ſçauoir eſt ſi elle eſt
vefie.
groſſe) au ſiege & perineum , auec douleur ie& tigaciue & poignante , qui ſ'eſtend
iuſques à l'extremité de la verge, tellement qu'il la cire & frotte touſiours,dont elle
vientalongée & relaxée outre meſure :& le plus ſouuene l'a roide , pour la douleur
qu'il ſouffre, auec grande enuie de piſſer, mais ne peut bien libremenc, & quelques
fois ne piſſe quegoute à gourc : & en vrinant ſent vncexcremc douleur , croiſant les
iambes, & ſeant contre cerre auec cris & gemiſſemens, auec tres grandes eſpreintes,
à cauſe que la pierre eſt choſe eſtrágeà Nature. Parquoy la vertu cxpulcrice l'efforce
Cauſes des à la ieteer hors, quicauſe les eſpreintes: & paricelles ſouuent le muſcledu ficgenom
etpreintes, , c
mé Sphincter ,eſt relaſché: lors portion de l'inteſtin droit ſort dehors, & à d'aucuns
parles eſpreintes leur viennent les hemorrhoides auec extreme douleur. En outre,
au fond de leur vrine eſt trouué vn humeur gros , viſqueux & gluant , quelquesfois
auſſi gros comme de petites huiſtres, ou comme du blanc d'auf: & telle choſe de.

montre que la pierre eſt faice par diminution de chaleur naturelle . Dauancagele
malade a úne couleur palic , iaunaſtre, ou liuide , & les yeux battus , ne pouuantre
poſer ny dormir qu'à grande peine , à cauſe qu'il eſt preſque en continuelle douleur.
Situation de D'abondant, on recognoiſtra par la fonde, en ſituant le patientdebout vn peu cour
celuy qu'on bé deuant, les iambes diſtancesl'une de l'autre d'vn pied ou enuiron, & faut qu'il ſoic
veurfonder. appuyé par derriere : alors on appliquera vne de ces ſondes ( celle qu'il ſera beſoin)
premierementoincte d'huile ou beurre ,la paſſant dextrementiuſquesdedans la ca
pacité de la vellicfileſt poſſible. Et où par telle ſituation on ne pourroit mettre la
Autrefitua
tion . ſonde en la veſſie , il conuiendra lituer le malade ſur le bord de fon liệt vn peu à la
renuerſe, les genoux pliez , & les talons pres des feſſes, comme tu pourras voir en la
figure depeinte cy -apres de ceux à qui on tire la pierre par inciſion. Ce faiſancon
D
mettra la ſonde plus facilement dedans la veſſie , & par icelle on ſentira la pierrepar
vne reſiſtance & durecé . d'vn corps dur , aucc vn ſon ſourd au bout de la ſonde, qui
La pierre ſe fera iuger veritablementy auoir vne pierre. Ec noteras icy pour vn precepte , qu'en.
20
cognoiſt par- tre cous les ſignes ſuſdits, celuy de la ſonde eſt le pluscertain pour cognoiſtre ſ'ilya
faictemét par pierre ou non . Il aduient neantmoins quelquesfois qu'on ne la peut trouuer au ſens
la fonde.
du cact , à cauſe qu'elle ſera peut-eſtre contenue en vne apoſteme, ou enucloppée
d'vn humeur gluant ou viſqueux,ou couuerte d'vne membrane. Quelquesfoisauſſi
que la pierre eſt pecite & errante en la veſſie , qui fait qu'on ne la peutpascouſiours
trouuer , & quelques iours apres on la trouue . Or les ſondes doiuenteſtre propor
tionnées ſelon leſexe & les aages.Partantil en faut auoir de pecites,longues,moyen
nes,groſſes ,menues, courbées, & droites. Dauantage, lors qu'on les met en la veſlic
pour les faire vriner, il y fautmettre dedans vn filet d'argent, pour empeſcher que
quelque humeur ou ſang ne ſ'engorge au bout , qui ſeroitcauſe que l'vrine nc pour
roit paſſer au trauers : & quand elle ſera dans la veſlic , on doit recirer le fil d'argent,
afin que l'vrine paſſe librement au trauers d'icelle.
LA
619
Operations de Chirurgie.

La
figure des Sondes,& du fild'argent eft telle.

May will www

0
B

Duprognoſtic des pierres. CHAT. XXXVI .

A pierre eſtant ſortie hors de l'vn des reins , & arreſtée dans ſon vrere. En quel cas
re ,en ſorte qu'ellele bouche du touc ,le patient neantmoins ne laiſſera ſuppreßior
Java d'vriner : parce que nature ayāc faic noſtre corps double l’yrine regur . d'urine piens
girera & ſera vacuée par l'autre vretere , Ecli celaccident aduient aux au calcul des
reins.
deux , l'vrine ſera du tout ſupprimée , qui ſera cauſe de la mort du pa
tient ; & en mourant fera ſemblables aſpirations que ceux qui ſc noyent en une gran
P de eau ,à raiſon que l'vrine regorge dedans la grande veine caue, & par conſequent és

autres , & meurent : pource quela chaleur naturelle eſt ſuffoquée & eſteinte par la
trop grandemultitude d'urine: & auſi aucuns la vomiſſent, ce quei'acteſte auoir vcu
G ſoquentesfois.
Quelquesfois natureierte quelque perice pierre des reias,& s’arreſte aux vaiſſeaux signes de
VI vreteres, dont aucunes fonc vne extreme douleur , iuſques à ce qu'elles ſoiét deſcen- pierre deſcens
duës dans la vellic, & cauſent pluſieurs accidens , comine eſpreintes, & volonté d'al- danse des
lerà la ſelle & vriner,& neancmoins les malades ne peuvent, pource qu'ils ſont le plus reins,

dos ſouuent conſtipez de ventofitez : qu'il ſoit vray, ils routeniquafi continuellement .
CHE Et ſi le patient eſternuë, ou qu'il couſſe, ou qu'il face quelque grandecommotion de
corps , il ſent une douleur poignante (principalement lielle eſt cornuë,& fi elle eſt a
bal uccafperitez )à l'endroit où eſt la pierre arreſtec.Semblablementla douleur eſt com
muniquée à la hanche & à la cuiſſe , & à d'aucuns leur ſemble qu'on leur cire en hauc
les teſticules par vne grande violence . Dauantage ſont vexez de la colique , auec vo
miſſemēs bilieux , & fueurs vniuerſelles. La pierre s'engendre plus ſouuétaux vieilles Lapierre release
pedig
OTE gens és reins , qu'elle ne fait aux ieunes , à raiſon que leur faculté expulcrice eſt plus l'âgeeft plus
debile . Au contraire , elle s'engendre en la veſſie des ieunes plus ſouverqu'aux vieux , soft aux veins
d'autant que leur chaleur naturelle eſt plus forte , & parconſequent leur faculcé ex onàla reßie .

D pultrice eſt plus vigoureuſe , & auſſi pource qu'ils ſont plus excellifs à la crapule ,
comme auons dit cy- deuanc. Et quand elle eſt en la veſlie , & que le patient iecte du
fang auec lvrine , c'eſt ſigne que la pierre n'eſt groſſeny vnie ,mais au contraire eſt pe
tite & cornuë , ou eſpineuſe, c'eſt à dire auec alperirez :car d'autant plus qu'elle eſt
petite , plus facilement entre dedans le col & orifice de la veſſic , & par ce moyen a
plus de peine à en eſtrereculée , & à r'entrer dedans ſa violence, pource qu'elle eſgra
cigne & vlcereles parties où telles aſpericez touchent , qui eſt cauſe de ietter le lang
par la verge. Aulli quand l'vrine eſt blanche & laicteuſe, c'eſt ſigne que la pierre eſt signes de
vnic : pareillementle pacient nc ſent celle douleur que lors qu'elle a des aſpericez. Ec pierre vnie,
filapierre eltant aux reins et eſpineuſe, il ſentira douleur picquante , comme d'ai
guillons,ne ſe pouuant plier ny remuer qu'auec peine : s'il travaille iliecte vne yrine
fanguinolente, voire quelquesfois le ſangtout pur, àcauſe de la violence qu'elle faic
contre les parois des colatoires où elle a eſté procrcée.
Or les pierres qui naiſſent auxrcins ſerontgroſſes ou petites , & de diverſes formes
GGg

/
620 Le dix-ſeptieſmeliure, de pluſieurs
Les pierres & figures,à raiſon des interceptions ou petits ventricules qui fonc au profond des ca. A
fone dediuer uitez des colacoires.Vericablementi'en ay crouué en aucuns eſtansducedez ,de gran
ſesfigures. descômeledoigt, 8edefigure d'vn léurier, autresfois d'un porc , aucresfois rondes &
vnies,autresfois quarrées,& auec pluſieurs aſpericez,comme pomme de pin : autres
fois vne ſeule ,autresfois pluſieurs & de diuerſes couleurs,commenoires , iaunaltres,
blancheaſtres,cougcaſtres, cendrées, & autres de diuerſes formes & couleurs ſelon la
temperacure des patiens.Descholeriques &maigres,les pierres ſont communément
faites par chaleur & ficcité eſtrāge: & des phlegmatiques & gras; par froideur & con. Gio
gelation,& par obſtruction desconduits. La pierre qui eſt en la velliceft quelquesfois
errante , autresfois attachée en haut , ou en bas , ou au fond . Sielle eſt accachée au VA

fond, le patient pourpiſſer à ſon aiſe le coucheſurles reins : 8z ſi elle eſt en haut , il ſe
courbe pour vrider: ſi elle eſt en bas,ilſe cient debout : & fi elle eſt errante,quieſt lors
qu'elle eſt petite,ilſe mec en diuerſes figures.Quelquesfoisla pierre rõbe du fond de
la velſie au conduic de l'vrine,& du tout le bouche, dontaduient entiere ſuppreſſion
Moyen dere- d'urine. Alors il faut ficuer le patient ſur le dos, & clleuer lesiambes en l'air, l'agicane B
culer les pier- & fecoüant, comme lion vouloit enſacher quelque choſe dans vo ſac, à fin de la re.
Tededuconduit
l'urine,
pouſſer hors du conduit del'vrine:&zſemblablement ſe peuc repouſſer auec vne ſon
de. Ceux qui onc la pierre és reins ou en la veſlie ſono preſque en cõrinuelle douleur,
toutesfois à d'aucuns leur douleur vient par paroxyſmes, & ſeront quelquesfois vn
mois ou deux,plusoumoins,voire vn an entier,ſansſentir douleur:qui eſt lors que les
pierres ſont liſſées & polies: mais ſi elles ſont raboteules auec aſperite,cauſentde tress
grandes douleurs,principalementapres auoir piſe:à cauſe que lecorps de la vellieſe
comprime & reſerre contre la pierre pour iecter l'vrine, & la pierre qui luy eſt contre
nature , la vertu expulſiue s'efforce autant qu'elle peut la vouloir ietter hors. Orces
pauures lapidaires, pour l'extreme douleurqu'ils endurent,deſirent plus mourir que
viure,quifait qu'ils s'exposēc entre lesmains du cailleur,mais le plus ſouuét c'eſt trop
tard. Car iamais ils nes'y mectent , lice n'eſt lors queleurs vertus ſont prolternées &
abbaccuës, & la vellie cſcorchée & vlcerée,quieſt cauſequ'ils meurent. Partant n'en
faur donner aucun blaſme au Chirurgien . Ceux qui ont pierres auxreins,le plusſou 19
A

uene fonc les vrines claires, & quelquesfois laicteures & lanieuſes avec du poil. Les C
Les femmes femmes ne ſono fi ſubiectes d'engendrer pierres comme les hommes, à cauſe qu'elles
nefont ſiſubo ontlc colde la veſlie plus court & plus large,laxc& ample:paiquoy lors qu'il y a com
jectes au cal
cul que les mencement de pierre,elle ſort devant qu'elle ſoic forcgroſſe: neantmoins à aucunes
hommes. ſe forment & groliſſent autant qu'aux hommes, donc les conuiencinciſer, & leur ay.
der par ſemblables remedes qu'on fait aux hõmes. Lors que la pierre excede lagroſ
feur d'vneuf és hommes,le plus ſouuent en la ciranton dilacere le corps de la veſlie.
La veßie di- Et ſi celle choſe eſt faice,l'vrinefluera inuolontairement à iamais, à cauſe que lavelic
lacerée, on eſt nerueuſe &exanguc:parquoy neſe peut conſolider ayreünir,& dauantagele plus
rend inuo- fouucnty ſuruien inflammation & gangrene,& par conſequencla inort . Les pierres
lontairement
P' prine. mediocrementgroſſes ſe tirent plus fcurement,& le malade en eſchappe pluſtoſtque
ſi elles eſtoiét petites,à raiſon que le malade eſt accouſtumé de longue main à pacien.
ce,en colerancordinairement inflammation,douleur, sx autres accidens: ce qui n'eſt
demeſmeaux autres. Sila pierre adhere fort contre la vellie , & eſt couuerte d'vne
membrane,la voulant tirer on dilacere ladice veſlie, & par cel moyen s'enſuit conuul.
Pierres enue- ſion ,gangrene, & par conſequentla mort. Tadoisicy noter que la pierre eſtant aina
loppéesd'une couuerte d'vne membrane, mal-aiſément le peut trouuer parlaſonde. En outre, lila
membrane. pierre eſt defigure longue , & que l'on la prenne en trauers , on dilacerera & rompra
on la vellic ,dont s'enſuiuront les accidens predirs . Sile Chirurgien , par casfortuit,
pincele corps de la veſſie auec ſes inſtrumens , & qu'illa dilacere & ſepare desparties
où elle eſt iointe, s'enſuiura conuulſion, & autresaccidenspredics. Or parce qu'elle
ſera ſeparée des parties où elle adhere ; ſe fera grande inflammation , à cauſe du ſang
qui coulera entreicelles parties,laquelle ſe putrefiera, ſuiuát l’aphoriſmed'Hip.qui
dit , si in ventrem ſanguispreter naturam effunditur, neceffariòputreſcit. Parquoy s'enſui
uraaulli gangrene,mortification,& conſequemmentla more. A pres auoir ainſi eſcrit
les cauſes des pierres qui ſont trouuées au corps, la maniere comme elles ſontpro
creées,lesſignes des lieux où ellesſont lesſymptomes & accidens,8c le prognoſtic:à
preſencfauceſcrire la curation,à ſçauoir, preſeruatiue, & curaciuc, & comme il faut
diuerſifier les remedes & inftrumens ſelon les corps &parties où elles ſont trouuées.
5 62
Operations de Chirurgie.

A Dela cure preferuatiue. CHAP. XXXVII.

A cure preſeruatiue ſera faire en ordonnantle regime ſur les ſix choſes Regime.
non naturelles,en évitant les cauſes qui engendrenchumeursgros & vif
queux . Donc pour c'en inſtruire ſommairement, faut éuiter la demeure
L'S
en vn air gros& vaporeux.Quantaux alimens,faut s'abſtenir de poiſſon, Quels alimës
chair de beuf,de porc,oiſeaux deriuiere , legumes , formages, laidages , peuuent cas
@ufs frits & durs,ris,patiſſeries, pain fans leuain , & generalemét tous autres alimens fer la pierre.
qui font obftru & ion . Auni ſe garder demanger ails, oignons, poireaux , mouſtarde,
eſpiceries, & generalement toutes choſes quieſchauffenrle lang, & principalemenc
ceux eſquels on aura coniecturé que la caulc de la pierre vient par exceſſiue chaleur .
Ecquãt àleur boire ,faut s'abſtenir demauuaiſes caux,
mareſcageuſes & bourbcuſes,Quelsdoit breua
& de gros vins troubles,bieres,& autres breuuages ſemblables.En outre ne faut trop uages

manger, ne gloutement, de crainte qu'il ne s'engendre descruditez , & par confe - fuirceluyqui
quencobftru & tions.Le dormir coſt apres le repas eſt fort nuiſible ,à cauſe qu'il engen- anoir tapiers
B dre crudicez.Letrop veiller , trauailler, & ieuſner, ſont auſſi incommodes , pource ye.
qu'ils enflamment leſang , & ſi ſono cauſe auſſi d'indigeſtion , & de chaleur eſtrange.
edoc S'il y a repletion , fauc vacuer cant par medicamens & phlebotomie,que par vomifle.
ment,lequel eſt un ſingulier remede pour precaution de la pierre . Il ne faur aufli mel
26
2015 priſer les paſſions de l'eſprit. Ec pour l'éuacuation des humeurs cras & viſqueux , tu
pourras auoir le conſeil du docte Medecin : toutesfois conſiderár qu'on ne peut touſ.
iours le recouurer , ie c'ay bien icy voulu deſerire aucuns remedes bons & approuueż,
deſquels pourras vſer ſelon qne verras eſtre beſoin : & icy noteras pour vn precepte
25 . de Galien , qui a commandé qu'ilfaucéuiter les choſes diuretiques ,& fortes purga- # 13 ,dela
Methode.
tions , au commencement de l'inflammation des rcias ou de la vellie , parce qu'elles
mon
Croce l'augmenteroient , y faiſantfluer les humeurs en plus grande abondance, qui ſeroit
cauſc d'augmenter la douleur & autres accidens. Parquoy faudra vſer en cel cas de
choſes refrigerantes & lenicntes ,cant par dedans que par dehors, comme de ce ſyrop .
2.ſunmitatum maluæ , biſmal.& violariæ ,añ.ñ.ß.radic.althexZj.glycyrrhizæ rafa
cziij.B.4.leminum frigid.maiorum an.zj.fiac deco &tio .Accipeprædi&tæ deco &tionis Syrop?
tb.B.& io colacura diiſolue facch.albift.Zij.mellis albizj.l.fiat fyrupus ſecundum ar
tem : duquelle pacient pourra vſer fouuent. Auli vſera parfoisd'vne demie oncede
caffe fraiſchement mundée ,auec vne dragme,ou dragme & demie ,ou deux dragmes
de rheubarbeen poudre , ſelon qu'il en ſera beſoin , deux heures deuant le paſt. Tu
pourras auſſi vſer decécapozeme auec grand effe & . 2. rad. aſparagi, graminis poly
podij quercini , paſſularum mundatarum an.z B.betonicæ , herniolæ ,agrimoniæ , om
nium capill.& bipinellæañ.ñ.B.quatuor ſemin.frigid.maiorum ,feminis feniculian .
gj.folior. ſenæzvj. fiac decoctio ad b B. in colatura diſſoluatur fyrupi de alth. & do
herniola an.z.j.B.fiat apozema clarif. & aromatif, cum tancillo cinnamomi pro dua
bus doſibus: capiatprimam doſin manè duabus horis ante cibum , & alceram quarta
pomeridiana. L'uſage des choſes diuretiques ſonc bonnes à ceux qui ſont fubicats à
icrrer de la grauelle, d'autant qu'elles prouoquent à vriner, & ne demeurent gueres à
cy
paſſer par les reins & pores vreceres . Les maricres qui cauſent la pierre ,n'ont pas loiſir
de s'aſſembler pour s'endurcir & lapidifier.Parquoy on vſera par fois du bouillon qui
Ds'enfuit ,lequel eſt demerueilleux effe& ,& bien experimenté. Prenez vn coq, & vn Boüillon.
sarrer de veau, qu'on fera cuire en eau auec poignée d'orge,racines deperfil , ozeille,
fenoüil,chicorée,bruſci ,dechacun vne once d : es quatre ſemences froides concaſ
ſées,dechacune demic once : à la fin on adiouſtera fueilles d'ozeille, pourpié,laiduë ,
ſommicez de maulue , violettes de Mars , de chacune demic poignée : puis ſera gardé
le bouillon ,duquel le patient en prendra par quatre macins,deux heuresdeuantman
ger, la quantité de demy- ſeptier, auec un doigcdeius de citron , le faiſane boüillityn

bouillon auant chalque priſe : en bref on verra vne operation merueilleuſe. Carpar
l’vrine on verra arenes , & grande quantité de matierecraffe & viſqueuſe. Parquoy
demonſtre par ſon effect qu'il neccoye & expelle les matieres des parties dediées à l'v
rine, & ne fait aucune nuiſance à l'eſtomach ,ny aux autres parties par où il paſſe : ic
puis dire que c'eſt vn aliment medicamenteux.Tu pourras auſſi vſer de la poudre lui. Poudre fin
uantc auec grand profit.2 . nucleorum meſpil.zj.pul.ele &t. diatrag . frigidizij . qua- guliere conite
tuor ſeminum frigidor.maiorum mundacorum ,glycyrrhizz raſæ añ.zj.lem Taxi.zij.la pierre .
GGg ij
622 Le dix-ſeptieſme liure, de pluſieurs
ſeminum milij Colis,geniltæ ,pimpinellæ ,bruſci,& aſparagiañ.3.j.ſemin.althex zj.B. A he

facc. albiſlimiz vj . fiat puluis. Il fautvſer de ceſte poudre le premieriour de la Lunc


core
nouuclle , du premier quartier de la pleine Lune, & du dernier quartier, & tous les
0001
mois enſuiuans, & en prendre la quanticé d'une cuillerée au matin , à crois heures de.
vantmanger.Auſſi lexiue faire des cendres de troncs de febues,eft ſinguliere pour tel
Clyftere. effect. Outre-plus pourra le patientvſer d'un clyftere tel que ceſtuy.cy. 2. La&ucæ,
ſcariolæ ,fol.ſali.porculacæ ,an.m.j.for.viol.& nenuph. a n.p.B.fiat decoct.ad ibj.In PV

colaturadiſſoluccaſſiæ fiſtulæžj.mell.viol.& facc.rub.añ.ſi olei viol.ziiij. fiatcly


Autre cly. fter.Autre pour ſeder pareillement la douleur.2. Aor.camom ,melil. Summic.anech.
ſterepourap- berul.añ.p.ij.facdecoct.in lacte vaccino , & in colatura diffolue call.fift. & facc. albi
paiſer la dom zj.vitell.ouor.num.iij.olei aneth . & cam.añ. Zij. fiacclyſt. Par dehors ſur les reins &
leur.
au long on appliquera de l'onguentroſar,nutrit.ou popul.feuls ou meſlezenſemble:
puis par deſſus vneſeruietce trempée en oxycrac. Orfila generation de la pierre pro
uient par frigidité,ily fautſubuenir par choſes contraires, dont faudra vlerſouuent
Breuuagefort du remedcluiuant.2.tereb.veter.zj.cortic.citri.zij.aquæ coctæ zj . B.miſce,fiat po
conuenable
cõrrela pier tus.Autre potion.4.call.recent.extra & .3 vj.benedic.ziiij.aquæ tænic. Žij.aquæ al-B
re.
par.zj.B.fiacpot.capiac tribus hor.ante prandium . Pourra ſemblablemcac vſer d'vn
Apozeme. telapozeme.2.rad.cyper.barda.gramin. an. ziij.biſmal.cum toto ,beton.añ.ñ .B.
fem.mil.folis,bard.vrei.anzij.ſem.melo.glycyrrhizæ ralæ añ.zij.l.fic.iiij.num . fiac
deco &t.ad quar, iij . colaco & expreflo , diſſolue fyr. deraph. & oxymelitisſquillitici
an.zı.B. facc. albiſ.Ziij.fiar apozcmapro tribusdoſibus clarific .& aromatiſ.cum zj.
cinnam .& 3 B.ſanc.citrini: capiatziiij.crib.hor.ante prandium . Dauantage on peut
vſer de celte poudre qui agrande efficacepourdiſliper la maciere du calcul. 2. ſem .
pecroſelini & radicis eiuſdem mundatæ añ.3.iiij.ſem.card.quem calcitra.vocant,zj.

..
deliccentur in furno lento igni,poſtea piſtencur ſeparacim ,quibus fiatpul.de quoca
piat æger 3j . B.vel ij. cum vino albo , vel cum iure gallinacei pulli, de quabibat
æger tribus diebus ieiuno ſtomacho. Autre remede.22.rad.petrol.fænıc. an. Zj. ſaxi
frag.pimpinel.granor.alkekengi &bardanæ,añ ñ B 4.lem ,frigid.maior,mund.ſem .
milijlolisan.zij.miſce, fiacdeco& .capede cola. Ib. B.in qua dill,facchar.rub. & {y
rup.capill . Veneris añ.31.3.capiatin cribus doſibus duabus horis ante cibum. Autre C
propre à dis.po d. pr æp .2 4.anifi,marathri,granor.alkekengi,milijſolisan.3 ij.zin
udrc.24.corianij.curbis.ele&.
la
ſiper ma zib.cinuam.añ.3 zj. carui Hij.galang. nucis inofcat. & lapid. Iudaici
diere du cal.añ.3j.folio.ſenæ mund.ad duplum omnium, diagredij zij.B.miſce, & fiat pulu.doſis
cul.
erit ad zj.cum vino albo: capiacæger tribus horis ante prandium .
clyftere fort Pareiliement pourra le patientvler de tels clyſteres contre les ventoſicez.24.malux,
carminatif. biſmaluæ , parietariæ , origani, calamenthi , forum camomillæ , fummitatum anethi,
añ ñ.j.aniſi,carui, cumini , feniculi añ. ZB.baccarum lauriziij . ſeminisrutæ zij. fiac
decoctio : in colatura diffolue benedictæ veldiaphænici Z 8. confectionis bac. laur.
ziij.ſaccharirubei zj.oleorum ancihi , camom.rutæ añ.zj.fiatclyſter.
Clyffort. Autre facile à faire pour mefme intention . 2. oleinucum , vini maluat, añ. fb.B. 1

aquæ vitæ z.B. On lesdoit tenir le plus longueinent que l'on pourra , parce qu'ilsfe
sont meilleure operation, & appaileront mieux les douleurs: & par lesmoyensſuſdits
on peut empeſcher la generation des pierres, & ſubuenir aufli à la douleur de la coli
que, tanc venceuſe que nephritique. D

Des moyens deſecourirceluy qui auroie unepierredans l'un des vreteres deſcendüe durein.
CH A P. X X XVIII.

Yant aſſez parlé de la cure preſeruatiue de la pierre , il nous reſte de


pourſuiure les moyens pour ſoulager ceux qui en ſont affligez , tant
Signes dela aux reins , vreteres, qu'en la vellie : & en premier lieu nous parlerons
pierredemeu. d'un patient qui auroit vne pierre ſortie de l'vn des reins, eſtant de
rée dans les
preteres .
meurée dedans l'un des vreceres , & que l'urine eſt ſupprimée en par
tie : lors le patient ſent grande douleur à l'endroicoù elle eſt demeurée , & par con
ſentement & voiſinage à la hanche, veſie , teſticules , & à la verge , avec vne
volonté d'vriner , & aller à la ſelle. Pour la faire deſcendre , faut ( s'il eſt por
ſible au patient ) qu'il monte for vn trottier courraut , & qu'il le cheuanchevne
lieuë , plus ou moins : car par ceſte équitation & mouuement , la pierre ſouuentde
623
Operations de Chirurgie.

ſcend en la vellie : & où il n'aura le moyen d'aller à cheual,faut qu'il monte & defcen-.
de vn eſcalier pluſieurs fois, iuſques à ce qu'il ſoit las & en ſueur. Ec luy faut alors Brenuage.
donner à boire choſes qui leniſſent,adouciſſent,& relaxent, commehuile d'amendes
douces , recentementtirée auec eau de paritoire, & vin blanc : auſli on doit faire des Frictions.
frictions auec linges chauds en deualant en bas , & appliquer des ventouſes auec
grandes flammes : & doiuent eſtre appliquées rancoft fur les lumbes , tanroſt ſur le
ventre,tirant vers les aines , vn peu au dellous de la douleur , pour touſiours attirer la
pierre en la veſſie.Sile pacienc ne vomiſt ille faut prouoquer à ce faire, en luy donnát vomiſſemēs,
à boire eau & huile tiede , en quantité ſuffiſance : car le vomiſſementaide beaucoup à
chaffer la pierre contre - bas , à cauſe de la compreſſion des parties qui ſe fait en celle
ađion . Ei li par tels remedes le patiétn'eſt allegé , le faut mettre en vn demy- bain faic Bain.
de la deco &tion qui s'enfuit.22.malux ,biſm.cum coro añ.ñ.ij.bethon.naltur. & be
rulæ ,faxıfr.parietariæ ,violarıæ añ.ñ. iij . ſem . melonis , milij ſolis, alkekengian.zvj .
cicerum rubr.ib.rad.apij, gram.fænic.& ering.añ. z iij.coquant.omnia in ſuff. quan .
aq.pro inceſſu. Toutes ces choſes ſeront miſes dans un ſac, ſur lequel ſera allisle pa
B tient , & qu'il te trempe iuſques au nombril. Et ne faut qu'il y demeure iuſques à ex - combien ilse
creme foibleſſe : car par les bains eſt faite grande reſolution des eſprits & defaillance faut tenir 44
des vertus.Telsbainsſedentla douleur, relaxét couces les parties,ouurent& dilacent bain .
les voyes de l'urine.En quoy faiſant ſouuencesfois la pierre deſcend en la veſlie.Et où
la pierre par tel moyenne deplaçaſt, & qu'il y cuftentiere ſuppreſſion d'urine, & auſſi
qu'auparauant le bain on n'euft içeu faire paſſer la ſonde en la vellie ,le fauc derechef
ſonder à la ſortie du bain : pource que lors la fonde y entrera plus facilement qu'au
parauant,& pareillementleringuer auechuile d'amendes douces . Dauantage il faue

que le malade ſe garde bien du froid. Tu pourras par ceſte figure cognoiſtre la façon
d'vne chaire pour faire le demy - bain .

Figure de la chaire à demy-bain .

Deſcription de la chairea
с demy -bain .

La chaire .
puri b Le trou d'icelle , là où le pacient
eft affis.
free с Lacuuerte où on met l'eau ,
d La fontaine pour vacuer l'eau
Cizi, quand elle eſt crop froide.
e L'entonnoir par lcquelon met de
l'eau chaude.
ca

р
MALAMUT

5 *

GGg iij
624
Le dix -ſeptieſm liure , de pluſieur
e s
Autre decom
Autre deco &tion pour faire vndemy-bain..rad.raph.alth.añ.tb.ij.rad.bruſci, pe : A
Etiõpour fai. trofel . & aſparagian tbj.cumini fænic.dulcis,ameosañ.3 iiij.ſem.lini,& fænug.añ.3
all
re un demy . vj.flor.camom ,melil.aneth.folior.marrub .pariet. an . ñ.ij. bul.omnia fimul ſecun
bain.
dum arcem , cum aqua fufficienti, & parum vini albi odoriferi, vſquead conſumptio
La decoction nem tertiæ partis , & fiatſemicupium . Dauantage eſt vtile de ceſte decoction en
ļuſdiceeff forefaire clyftere auec huile de lys quatre onces , & deux iaunes d'æufs : & lors qu'on
bonne à faire lc voudra 'donner au pacient , eſtant en la chauſſe ou canon à clyftere on y ad
clyftere a cette joultera vne dragine d'huile de genéure : vous aſſeurant qu'elle ſede promptemenc
meſme fin .
la douleur cauſée par vencoſitez. Ericy faut noter qu'aux grandes douleurs nephri
tiques ne faut bailler trop grande quantité de decoction , de peur que les inteſtins
trop remplis ne compriment les reins & pores vreteres , qui ſont ja commencez à
cnfiammer: pource que par cela la douleur faugmenceroit, & feroient provoquez
autres accidens . Outre plus on peut appliquer vn tel cataplaſme ſur l'endroit de la
douleur , & au petic venire, & ſur les parties genitales , lequela grande puiſſance d'ap
paiſer la douleur , & ayder à faire deſcendre la pierre desvreceres en la veſlie. 2.rad.
alth.raph . an . ziiij.pariec.fænicu.ſenecionis, nafturtij, berulæ añ ñ.j.herniariæ ñ . B
B.omnibus in aqua ſufficienter deco & tis ,deinde piſtatis, adde oleianethi,camomil.
pinguedinis cupiculian .Zij. farinæ cicerum quancum ſufficic: fiat cataplaſma ad
vfum dictum .

Comment il faut procederà laguariſor de la pierreeftantdefcendüe en la vesie.

CHAP. XXXIX .

Poudre prou Teſtant la pierre tombée en la veſſie , l'il n'y en a qu'vne ( car ſou

pre pour co uentesfois il y en a pluſicurs qui deſcendent auec multitude d'a


minuer le fa : rene ou ſable ) lors la douleur cefle , & ſentira le patient prurit,
ble. auec vn pecit aiguillonnement à l'extremité de la verge ,& au lic
ge . Ec alors ſ'iln'clt debile, faut qu'il crauaille à pied ou àcheual,
& c qu'il vſe d'vne telle poudre .2.pal.electuarijlithontribon 3 4.
W ſumatur zj. tribus horis cam ante prandium quam ante cænam
cum vino aibo , vel cum iurecicerum rubrorum . E ¢ faut aufli qu'il boiue de bon vin
blancen aſſez bonne quanticé , & qu'ilrecienne longuement ſon vrine fil peur, à fin
quele grand amas d'icelle chaſſe & pouffe plus aiſement la pierre hors la veſlie . Pa
reillemencluy faut faire celle iniection. 22.fyrupicapill . Veneris 3j . aquæ alkekengi
3 iij. olei de ſcorpionibus 3 B. & d'icellcluyen ſera ietcé en la vellie auec vne ſyrin
gue . La pierre en la veſie fait vicere par ſon aſperité & aftriction , & la ſanie qui en
lortmordique& ronge les parties où elle demeure , quifait touſiours augmentation
de douleur, & autres accidens.

Delapierre eftant as conduir de la verge ou au col de la veſsie.

CHAPITRE XL.

Moyens de A pierre eſtant ſortie hors du corps de la veſlie , & demeurée au


tirer la pierre col d'icelle , ou à la verge , il faut alors que le Chirurgien le gar
hors du col
de bien de la repouſſer au dedans : mais la menera tant que faire
de la veßis.
ſe pourra , auec les doigts à l'extremité de la verge , en y iccrant
huile d'amendes douces, ou autres choſes lubrifiances. Et fi elle
deſcendiuſques à l'extremité de la verge , & qu'elle y demeurs ,la
faut cirer auec pecics crochets . Et ſi on ne peur par cels crochets
l'extraire , on mettra cérinſtrument nommé Tire - fond auccia cannule, en la verge
Operations de Chirurgie. 625

A iuſques aupres de la pierre : puis on le tournera doucement , à fin qu'il comminuè la


pierre & la merce en pericesporcions, qui ſe fera aiſément, parce que ledit Tire - fond
a ron extremité en maniere de Forec: ce quei'ay fait plufieurs fois.

5 Figure d'un Tire -fond propre à comminuer la pierreeftant dans la verge.

Denk

9go

Valmis

Autreplus perit.

elci LAKE

GET

Onze

de
Per
TC Ec faut noter qu'iloc doiceſtrègros non plus qu'une grofic fonde, à fin qu'ilne fa
akt cc violence à le mettre dedans la verge .

NIEL
1

GGg iiij
D

1626

0 +
-
626
Ledix -ſeptieſme liure , de pluſieurs

A
Des moyens qu'ilfaut uſerpour tirer parinciſion vne pierre arreſtée au conduis de lorine,
que l'on n'aura peu extraire par les voye sſuſdites.

JAKET
CH A PITRE XLI .

' Abondant , poſant le cas qu'elle fut ligroſſe & dure ,ou ayant des
aſperitez , & loingde l'extremité de la verge , de façon qu'elle ne
En quel lies peuteſtre tirée , & l'vrine fut ſupprimée : adonc faut fairc inciſion

faue inciſer la ( ce que i'ay pluſieurs fois fait )à coſté de la verge, & non au deſſus,
verge, CDC
ny au deſſous. Au deſſus , à raiſon d'vne groſſe veine & arterc , quí
bad
pourroic eſtrecauſe du flux de ſang. Audeſſous n'eft conucnable,
parce que la partie eſt exangue , & pource difficile à eſtre conſoli
2:01.
dée , & aulli que l'vrine ne permettroit l'union eſtre faire , parce qu'elle paſſeroit par
l'vlcere & comberoit entre les léures de la playe.Ec pour ces cauſes l'inciſion ſera fai
3
Aduertiffe- te ſur la pierre à coſté, qui eſt vne partie plus charneuſe. Mais tu dois icy noter, qu'a
nếu k chịu
uant que faire l'inciſion ,ilte fautlier la verge au deſſus , & bien pres de la pierre,pour
rurgien.
la tenir contraincte & ſubiecce, & ployer la verge en cercle , pour mieux faire ſortir la
ide
pierre , puis cirer aſſez fort vers toy le prepuce à
, fin qu'apres l'inciſion , le cuir eſtant
relaſché , recourne & couure ladice inciſion , dont plusaiſément & briefucmentl'y
IN
nion & conſolidation de la playe ſe fera puis apres . Lors cu circras la pierrc aucctel
inſtrument.

Inſtrumenspropres à extraire lapierre , apres l'inciſion de la verge,

GICO

Comment il faut traicter laplaye l'inciſionfaite.

CHAP. XLII .

on pene ver Viss'il eſt beſoin , faudra faire vn poin & d'aiguille pour reünir laplaye,
de future en & ſuricelle on appliqucra vn cel glutinatif. 2. cerebenthinæ Venetæ }
l'inciſion ful jij.gummi elemi žj . lang. drac.& maſtichesan.z.ß .fiat medicamentum
dite .
ad vfum di& um . Et autour de toute la verge faudra mettre vn cel reper
cuſſif.4.albumina ouorum cum puluer.boliarmeni, aloës, farinæ vola- )
cilis , oleiroſat. Puis faut ſuiure le reſte de la cure commedes autres playes faites és
Chandelle de parties charneuſes. Auffion mettra dedans la verge vne chandelle de cire, ou une
sire . verge de plomb, oin & c de cerebenthine de Veniſe, pour ayderNatureà glutinerla
playe, & tenir le canalvny & également dilacé en cett endroit , de peur qu'il ne ſe fit
quelque chair ſuperfluë, dont puisapres ſc pourroit engendrer vne carnoficé. mane

que

(
Operations 627
de Chirurgie .

A
Dela maniere de tirer
par incifion lespierres qui fonten la veſie d'unperit enfant male.

CHAP. XLIII .

Pres auoir ainſi eſcrit les moyens comme les petites pierres ſontextraires :
maintenant faut monſtrer par methode comme les groſſes fe peuuent &
doiuent tirer hors le corpsde la veſſie , & par quels inſtrumens. Eccommen
cerons aux petits enfans,puis aux hommes,& confequemmér aux femines.
Ayant donc ſuppoſe que nous ayons yn ieune enfantà inciſer, il faut premieremene situation de
l'enfant.
que le Chirurgien leface ſauter cinq ou fix fois à fin de faire deſcendre la pietre au
fond de la veſſie . Puis le pouſſera ſur les genoüils d'vn homme aſſis ſur vne eſcabelle ,
ſurleſquels y aura vn drapen pluſieurs doubles, l'enfant ayant les feſſes ellcuées en
hauc:auſſi ſera vn peu renuerlé,à fin qu'il ait ſon inſpiration & expiration libre, & aulli
que lesparties nerucuſesne tendent, mais qu'elles ſoyenc laxes pour mieux donner
B paſſage à la pierre lors qu'on la tirera hors. Il faut dauantagecenirlesmains dudicen
fant par deſſus ſa cuiſſe, au deſſus du genoüil , eſlargiſſant ſeſdites cuiſſes , à fin que
l'auure ſoit plusſcurement& mieux fait.Eceltantainli ficué, le Chirurgien mettra
ſes deux doigts de la main ſeneſtre dedans le fondemenc,le plus auant qu'il pourra , &
preſſera de l'autre main ſur le petit ventre , y ayant premierementinis vu lioge , à fin
de moins offenſer & meurerir les parties ainſi preſſées,de peur que puis apres il ne vind
inflammation & autres accidens pluſtoſt que parl'inciſion . Ceſte compreſſion ſe fait pour quelle
à fin de faire deſcendre la pierre du fond de la vellie par ſous l'os Pubis,vers le col d’i- vai!on an fait
celle , & l'ayant conduire la faut tenir ſujetre,depeur qu'elle ne recourne en ſa capa - compreſsion
, le Chirurgien fera vne inciſion au Perineum , à deux doigts pres le lic- fur lepenil.
cité.Cela fait
ge,acolté de la ſucure,auec vn raſoir treochantdes deux coſtez.Et d'iceluy ſera cou
pée doucement toute la chair , iuſques à ce que l'on ſait paruenu à la pierre : & en fai
ſant telle inciſion ,faut donner libon ordre que l'on ne coupel'inteſtin cullier : pour Bon aduersif
ce que quelques fois ſi on n'y prend bien garde, en attirant la pierre au colde la veſſie, femët au ching
rurgien .
l'inteſtin ſe replie & redouble: & lors qu'il eſt coopé, la matiere fecale ſorevne partie
с
par la playe, & lyrine par le ſiege, quipuis apres empeſche la conſolidation d'icelle,
ce quieſt aduenu à d'aucuns:mais auſſi pluſſieurs n'ont laillé d'eſtre bien guaris,pour.
ce que la ieuneſſe fait choſes qui ſemblent eſtre impoſſibles. Ayant fait ladice inci,
fion , fauc tirer & mecere hors la pierre par celinſtrument.

Crochets proprespour extraire la pierre aux petits enfans.

Unirii

.z/
Hicar
2 POLIS
D

cire,

Ayant ciréla pierre , faut appliquer vne petite cannule dans la playe , & l'y tenir
quelque temps pour les raiſons quenous dirons cy - apres : & la traitoer ſelon qu'il ſera
beſoin ,obuiant aux accidens , ayanceſgard à l'habitude & tendreſſe du corps.Pareil
lement ne faut oublier à lier les genoüils enſemble, à fin que la conſolidacion ſoie
micux & plus ſubtilement faire : & le reſte de la cure ſe fera comme il appartient:
Toutesfois diuerfifiant les remedes ſelon la temperature du corps tendre & icunc , &
plus ſenſible que les vieils .

1
628
Ledix -ſeptieſme liure , de pluſieurs

A
De la maniere d'extraire les pierresaux hommes, qu'on appelle legrand & haut appareil.

CHAP. x L11.

faic
Il ne faut Vparauant l'extra &tion de la pierre , le patientdoit eſtre bien purgé &
re l'operation ſaigné, s'il en eſt beſoin , & ne faire l'operation le lendemain qu'il aura
le lendemain
prismedecine: pource que tout le corps en eft encore eſmeu .Dauanta
de la medeci
ge on pourra fomenter les parties pudibundes de ehoſes qui humc& ent
ne priſe .
Situation . & relaxent,à fin que la pierre fois mieux tirée.Il faut ſicuer le patient ſur
Comment il vne cable ferme
,lesreias ſur vn couſſin ,& ſous les feſſes vn drap en pluſieurs doubles,
faut lier le & qu'il ſoit à demy renuciſé, les cuiſſes plićes,
& les talons vers les feſſes : & luy faut
patient. lier lespieds pres les cheuilles aucc vne bande forte & large de trois doigts,la paſſant
>
par derriere lecol deux ou trois fois, & d'icelle ſeront liées les mains contre ſesge
noüils , ainſi que cu vois par ceſte figure. B

La figure d'un hommefisuécommeil fawiquand on lwy vent extraire la pierre de la veſie.

Ilfautque le
malade fois
foruéles feljes
plus pres du
bout ego ex
tremité de la
cable .

Eſtant le patient ainfilié,faut auoir quatre hommes forts ,non craintifs,ny cimides,
à ſçauoir deux pour luytenir le bras, & les deux autres qui luy tiendront d'vne main
vn genoüil ,& de l'autre le pied, libien & dextrement qu'ilne pourra remuer les iam
bes ny hauffer les feſſes : mais demeurera ſtable & immobile , à fin que l'auure ſoic
micux faire. Eſtanc le patient ainſi ſitué, faut avoir vne ſonde d'argentou de fer, ou
uerte au dehors & affez large,à fin que le trenchant du raſoir puille entrer librement
dans ſa cauité pour guider la main de l'inciſeur. La figure eſt celle.

Sondes ouvertes en leurpartieexterieure.


D
DOV
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‫ارد‬
240
Operations de Chirurgie. 6299

A Le Chirurgien la paſſera oin & c d'huile en la vergeiuſques à la vellie , puis la tour- '
nera vn peu vers le coſté ſeneſtre , & le ſeruireur ſitué à la main dextre , alors eſleuera
dela main ſeneſtre les teſticules en haut vers le coſté dextre : cela fait, le Chirurgien
fera l'inciſion ſur la ſonde,à coſté ſeneſtre,éuicantla coulture duPerineum , & pareil
lemcncne la fera trop pres du ſiege. Ocl'incommodice quipourroic vehit pour la fai
scſur la coulture, ce ſeroic que la playe ne pourroicelticapres ſi bien reünie ny.con
ſolidée pourla calloficé d'icelle couture , & qu'elle eſt exangue ,& que l’vrine palle
par deſſus, quipuis apres fueroic perpetuellement par la playe. L'autreincommodité Pourquo sé
qui pourroic auſſi venir faiſancl'incilion crop pres du ſiege,leroit que l'on pourroiten fant incifer
tirant la pierre rompre quelque rameau des veines hemorroïdes, qui caufcroit vn Sur la ligne
du perineund .
flux de ſang ,quimal-aiſémenten ceſte partie eſt eſtanché: dont aucuns par celle fau.
tcont perdu la vie . Pareillementy auroit encore danger en tirane la pierre , qu'on di.
En quel lies
laceraſt grandement le muſcle Sphincter , & le corps de la veſſie. Parquoy l'inciſion ſe
il faut faire
fera deux doigts pres le liege, & ſelon le long
des filamens, à fin que puis apres elle ſe l'inciſion.
reprenne mieux & pluſtoft. Ladice inciſion faire du raſoir doit eſtre ſeulement de la

B grandeur d'un poulce: pource qu'on l'augmente puis apres par vn bec de Corbin , &
parle Dilatacoire, & meſmement par la pierre lors qu'on la cire . La raiſon pourquoy ce qui eſt di
on fait la playe au commencementli petice, c'eſt pource que cequi eſt coupé ne le laceré ſe reü
temps que ce quieſtdilaceré & deſchiré.
rcüniſt ſi bien , ny en brief Car la dilacera- nift mieux
tion ſe fait ſelon la re &ticude & longitude desfibres nerucux. Doncques apres avoir quecequi ef
fait l'inciſion ſur la fonde auec leraloir crenchant des deux cortez , cu inertras dans la coupé.

playel'vne de ces vorges d'argent, appelléesconducteurs ( pource qu'ils feruent de


guide aux autres inſtrumens que l'on veucintroduire en la veſlie ) laquelle en ſon ex
tremité a vne pecite eminence & rondeur , qui s'inſere & entre dans la cauicé de la
ſondedeſcrice cy - deuanc . Ladice verge eſt marquée AA . Puis en faut couler vne au
tre par deſſus icelle , qui aura en ſon extremité vne cauité & petite oche commeva
fourchon quiembraſſera & coulera iuſques à l'extremité de la premiere . Ledit ſe :
cond conducteur eſt marqué BB .

Les figuresdes Conducteurs fonttelles, & yen a de deux


façons,

ed
muerte DATUM
ROUTENI
lopen
‫دریا دلی‬

‫افتادسالان‬

யாப்பாய
D ா.

Puis on tirera hors la fonde, & feront lefdits conducteurs pouſſez dedans le corps de
la veſſie, les cournant c'en deffus deſſous : & alors on doitmettre lescheuilles aux per
cuis d'icelles.Les autres où ne ſonticelles cheuilles ſont plus aiſées, & ſont nommées

clpées par ceux quifont telles operatios.Puisſerõtfort ferréesentre les doigts deľo
perateur lequelpuis apres doit entre les deux conducteurs pouſſer auec violence de.
dans la cauité de la veſlievo autre inſtrumérnõmé Bec de cane :puis l'ouurir des deux
mains, le tournant à dexcre & à feneſtre, ça & là ,auec force, pour dilacerer & aggrádir
Ja playe tant qu'il ſera beſoin ,pour faire paſſage & entrée aux autres inſtrumens qu'il
faur encory mettre . Toutesfois s'il eſt poſſible de dilater affez la playe , & extraire la
pierre par ce mcſmc inſtrument pendant qu'il eſt dedans la vellie, ce ſeroit bien fait.
630 Ledix -ſeptieſme liure , de pluſieurs

A
La figuredu bec de Cane, cane en fapartie exterieure, eſt telle .

Etaufliſion ne peut, & qu'il faille dilacer la playe dauantage, la pierre eſtant trop
groſſe, adonc faut vſer de cérinſtrument nomméDilatatoire, lequel ayant mis de
dans la veſſic , ſera pris par les deux bouts les preffant enſemble: par cela on dilatera
la playe tant qu'on voudra .

La figure d'un Dilatatoire clos.

1
co
‫ גמתרכיוננכשנפענגושגננוזנוימאוואבחוטמפננועתים‬.

La figured'un Dilatasoire ouweri.

Apres

1
63i
Operations de Chirurgie .

A Apres la dilaceracion & dilatation cu te ſeruiras du bec de cane cy -deſſus eſcrit;


ou de ceſtuy quieft courbé .

Tenailles en forme de bec de cane courbé.

UDDIN

n ‫ملك النافلة‬
Minttin

bom

Paricelles tenailles ſera cherchée la pierre ,dilacant la playe pour l'empoigner, &
ook
lors quel'operateur cognoiſtra la pierre eſtre entre ces tenailles, promptementfaut
lier les branches d'icelles , & la tenir fermement,puis la cirer non tout à coup ; mais la Moyen de
faut tourner d'un cofté & d'autre, l'amenant dehors peu à peu auccques la plus gran- sirer dex

de dexterité que l'on pourra. Et ce faiſant le faut garder de trop comprimer & trement la
eſtreindre la pierre par leſdits inftrumens, de peur de la comminuer & rompre en pierre,
pieces. Aucuns , à fin qu'elle n'eſchappe d'entreles inſtrumens, mettent deux doigts
C dedans leſiege, & gaignent le deſſus de la pierre : choſe qui aide grandement à la ti
rer, & quc i’approuue. Les autres ſe feruentde ces deux pieces appellées aillerons,
& les mettent à coté des tenailles : l'vne deſſus, & l'autre deſſous: puis les ioignent
enſemble,deforce que la pierre ne peut aucunement eſchapper, comme tu vois par
ceſte figure.

Figure des aiflcrons , & de la pierre priſe en iceux auec ic bec de cane .

HHI
632
Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs
A

W
KING Mineral
lela

La figureoù à l'extremitédes aiflerons g a vae vixpourles mieux tenir, auec une piece de fer
B :
pliée ,pour lesſerver encor davantage. Ladite piece eft marquée , 4 a.

En lieu des aiſlerons,on peut vſer d'un bec de cane , & l'excra & tion en ſera plus,ſu.
bite , & auec moins de douleur.

La pierre tirée par les moyens cy- deſſus,illa faut diligemment regarder pour voir
signes qu'au fi elle eſt en quelque endroit vſíc & polie : ce qui ſe fait par lacolliſion,confri&tion ,
refte en la & attrition d'une ou de pluſicurs autres pierres. Toutesfois le ſigne le plus certain
reßie apres (comme par cy-deuant nous auons dit) c'eſt la ſonde, qui ſe peut faire à preſentauec
l'extraction. vn des bouts de l'inſtrument deſcrit cy -deſſous: duquel cu ce ſeruiras, cane de ſonde
que de curette .

Figure d'un inſtrumentd'argeri,nomméCureste,propre pour l'extraction d'une pierre,


fonder D
s'ilyen ad'autres d'außiponr recueilliramaffer le fable,fang coagulé,& autres
chofes eſtranges qui feroient en luvelie,la pierre sirée .

1
Operations de Chirurgie. 633
A Sipar iceluy on cognoiſt en la velliey auoir autres pierres, il les faut tirer comme Moyen de
deuant : & lesayant ainſi tirées, faut mettre en la velfie l'autre bouc qui eftcaue en tirer les au
façon de cuillier , & le tourner d'un coſté & d'autre pour prendre & attirer les cho. tres pierres
fes eſtrangesqui peuuent reſter en la vellic, commelang coagulé & arenes,qui puis traction
apres l'ex
de
apres ſeroient cauſe degeneration d'autres pierres. Rembert de Douay,Medecin de la premiere:
l'Empereur Cefar ,en ſesobſeruationsmedicinales au liure i.chapitre quarante - qua
tre,dit ſeſtre trouué douze pierres en la veſlie d'vn homme,dont laplus groſſe eſtoit
d'vne noix. Pour retourner à noſtre propos,où la pierre ſeroic trouvée trop groſſe , &
qu'ily euſt danger derompre & dilacerer le corps de la velic, la voulant tirer,il la
faut rompre auec becs de corbin tels que ceux -cy . 4

Lafigure d'un bec de corbin dentelé, pour rompre les pierres en la


veſie, lequelferme à viz.
B

1
1

Autre bec de Corbins.

plass

1
MHh ij
634 Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs

Comment il fautpenſer la playe , la pierre efiant tirée. CHAP. XLV .

PREs auoir ainſi tiré la pierre & autres choſes eſtranges, ſi on


1
void qu'il ſoit neceſſaire faire vn poinet ou deux d'aiguille à la
playe ( laiſſant ſeulement l'eſpace à mettre une cannule) illes fauc
faire, & faut que le filloic de foye cramoiſie aſſez groſſe & forte, &
vn peu cirée ,de peur que ſi elle eſtoic trop deliće , ne trenchaft la
chair, & auſſi qu'elle ne ſe pourriſt pour l'humidité de l'urine, &
Moyen de
pour les excremens de la playe . Faiſant icelle couſturo , ſera pris
faire poinet , aſſez bonne portion de chair , qu'elle ne ſe rompe & dilacere : à fin que la douleur
d'aiguille ſur
l'inciſion . faite au patient par ladite coulture, n'ait
eſté faite en vain , & fans aucun profit. Tout
cela fait, faut mettre dcdans la playe iuſques à la veſſie , vne tente d'argent cannulée,
de laquelle tu as icy pluſcurs figures.
B
Cannules d'argent pour feruir en la playe , l'extraction de la pierre faite,dont tu en as C
icy de pluſieurs fortes , a fin de les accommoder aux playes, & non pas 1
les plages aux cannules ,

Ces trois ter


ses ne doinës
eftre troüées
qu'en leurs
extremitez
pour les rai
fons dietes
cy - devant.
с
un

res

Il faut tenir Par le moyen d'icelles le ſang iſſu de la playe & coagulé en la veſſic , ſe pourra iet
la cannule ter & purger , & auſſi tout autre excrement retenu en icelle : & ne l'y faut tenir lon
en la playe, gue eſpace de temps , de peur que nature ne facheninaſt à ierter perpetuellement
La
iuſquesà ce I'vrine par la playe, & qu'il ne ſe fiſt vne fiſtule.Et aux parties d'autour, faut mettre
qu'on voye touche
voye vn repercuflif tel que celuy quiſ'enſuit ,pour reprimer le ſang & la fluxion qui pour
que l'urine
roit eſtre faite en icelle , à cauſe de la douleur. 22.alb . ouor.zum.jij.pulu. boli ar
ſeule iffe di
celle. men . ſanguinis draconis, añ . 3 ij.olei roſati z j . pil . lepor . quantum fufficit, fiatme
dicamentuin ad formam mellis. D

De la ſituation que l'on doit donner au patient l'operation faire . CHAP. XLVI.

Moyen d'a E patient ſera poſé en ſon lic ,meccanedeſſous luy vn ſac plein de
lon ,ou paille d'auoine , à fin que l'vrine & autres excremesſ'y im .
viſer au ſang
1

qui,deſcend bibent : & en faut auoir pluſieurspour les changer , lors qu'il en
dans les ſera beſoin. Quelquesfois apres l'extraction, il deſcend du ſang
bourſes. engráde quantité dedans le ſcrotum , que fion n'y donne bonor .
dre & propt , auec reniedes diſcutiens,conſumans & deffeichans,
la partie ſe tourne en gangrene : ce qui ſe cognoiſtra en traitcane
la playe. Et adiit quelquesiours apres faut faire inic &tion par la playe en la vellie, faite
des liqueurs qui ſ'enſuiuent. Prenez eau de plantain , morelle, & eau roſe,auec vn peu
une
de ſyrop roſat. Telleiniection ſeruira pourmoderer l'intemperature , qui peut eſtre
en la veſſie , cant pour la playe que pour la contuſion des inftrumens. L'inie & tion
635
Operations de Chirurgie.

A fy doit ietter vn peu ticde , & non actuellement froide. Éc dauantage aduient apres Retention
l'inciſion, que le ſang coagulé, ou autresexcremés, font telleobſtruction au conduir d'vrine apres
de la verge, que l’vrine n'y peut paſſer, ou bien à grande difficulté. Parquoy illeur l'operation:
conuicntmettre & laiſſer dedans la verge aufli vne ſonde pour quelque temps, à fin
que l’vrinc & autres excremenspuiſſent auoir iſſuë paricelle .

Comment il faut traicter la pláye faicte par inciſion.

CHAP. XLVII.

Vant à la playe, elle ſe doje traitter comme les autres playes recentes,
à ſçauoir en la digerant, mondifiant & glutinant , & la conduire à cica
crice. Auſſi que le patient tienne les iambes croiſées I'vnc ſur l'autre , à En quelle fa
fin que l’vnion ſoit pluſtoſt faite. Qu'il ciennc diecce iuſqu'au ſeptieſme con il faut
ou neufieſme iour. Sur tout qu'il cuite le vin , fil n'eſt fort debile : en que le patient
D demeure com
lieu d'iceluy vſera d'eau d'orge,ptiſanc,hippocrasd'eau , boucher , cau bouillie auec ché.
ſyrop de roſes ſeiches , ou de capill.Vencr . & leurs ſemblables. Pour ſon manger v
Regime apres
ſera de panade,raiſins,pruneaux ,poulets cuits auec ſemences froides, lai& uë, pour- l'extraction .
pić ,ozeille,bourroche,eſpinars ,& autres ſemblables. Ecfil n'a bon ventre , vſera de
caſſe recentement mondée, clyfteres, & autres choſes qui luy feront neceſſaires ,
couſiours ſelonľaduis du dočte Medecin, ſ'il eſt poſſible le recouurer.

Des moyens de guarir les vlceres, par leſquels long temps apres l'extraction de la pierre.
l'urine palle encore. CHAP. XLVIII .

T d'abondant il te faut icy noter , qu'à d'aụcuns hommes, apres leur


auoir tiré la pierre , l'vlcere par où la pierre a paſſé, ne ſe peut conſolider,
& par icelle continuellement l’yrine ſort inuolontairement, dont de Faſcheux 4

meurent toutle reſte de leur vie en grande douleur & faſcherie ,ſi ceSimpsome
.
C n'eft par l’ayde du Chirurgien expert,lequeldoit couper la calloſité des
lćures de la playc, & faire comme ſi c'eſtoit vne playe toute nouuelle : puis ioindra
les léures de l'vlcere, leſquelles ſeront pincées & ſerrées auec cétinſtrument nommé
tenon , auquel ſont trois trous , par leſquels on mettra des aiguilles au trauers , en
comprenant aſſez bonne portion de chair : puis tu lieras les aiguilles autourdudic
inſtrument, & appliqueras vn medicament glutinatif, comme terebenthinæ Vene- Cicatriſatiot
tæ, gummi elemni,ſanguinis draconis, boliarmenici :& au bout de cinq ou de ſix de l’vicere.
iours faut ofter les aiguilles, & ledic inſtrument, & trouueras l’vlcere preſque gluti

ille né,puisparacheueras de la cicatriſer.

La figure des Tenons eſt telle. A. Monſtre le grand Tenon . B. Le petit, leſquels
tu choifiras à ta commodité .

u.be

FIL

idea
Leh..

Etſi tu n'auois tel'inſtrument,tu pourras en leurlieu vſer d'autre maniere , que i’ap- Amir :
prouue beaucoup , & qui eftauſſi plus aiſée, commerenſuit: il faut prendre deux pe- moyori.
tits tuyaux de plume de la lógueur & vn peu plus que ne ſera l'vlccre , & les mettre au
Li HHh in
636 Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs
coſté d'iceluy , & paſſer les poinēts au travers d'iceux avec la chair , & faire le næud du A
filfur iceux, faiſant tant de poinetsd'aiguille qu'il ſera beſoin .Par ces moyens l’vlce
: refereioindra ſans que la chair ſe rompe,qui ſe feroit à cauſe des poinéts d'aiguille.
La maniere de tirer les pierres auxfemmes. · CH A P. XLIX .

R apres auoir ainſi eſcrit tour par le menu de la curation de la


pierre aux hommes par l'operation manuelle , maintenant iede
clareray aulli la maniere comme il faue ſecourir les femmes. Ec
Les ſignes premierement les ſignes pour cognoiſtre les pierres és femmes
des pierres és ſont tels qu'aux hommes, mais plus aiſez à eſtre cogncus par la
femmes font
sels qu'aux ſonde; à raiſon (comme nous auons dit cy -deuant ) qu'ellesont
hommes. le col de la veſſie" plus court & plus large , & plus droit que les
hommes. Et parcanton peut facilement cognoiſtre fil ya pierre mettant la ſonde en
leur velſie,ou les doigts dedans le colde la macrice, les efleuant vers l'interieure par B
tie de l'os pubis ou le penil:& ce faiſant on trouuera facilement ſ'il y a pierre ou non,
& doruent eſtre en meſme ſituation que les hommes. Il faut icy noter, que les filles
ne peuuenteſtre ſondées par le col de leur matrice, li ce n'eſt qu'elles ſoient âgéesde
Comme il fix à feptans, ſans grande violence. Partantpour leur tirer la pierre,ily faue proceder
faut rirer la comme aux enfansmalles,en mettant les doigts dedans le ſiege: & ayant trouué la
pierre aux pierre,on la doiramener en preſſant ſur le pecic ventre auec les doigts :& l'amener
filles de bas vers le col de la veſlic,puis l'extrairecommenous auons diçaux malles. Etoù la fille
4age .
ſeroit aſſez aagée pourpermettre ( ſans violence) mettre les doigts dedans le colde
ſa matrice,comme on fait aux femmes,l'æuurele feroit plus commodément que de
les mettrededans le ſiege,à raiſon que la veſſie eſt bien plus pres de l'amarry ,que du
boyau cullier,comme ainſi ſoit que ledic amarry ſoit fitué au milieu entre l'vn & l'au .
tre. Erapres on mettra vneſonde dedans le colde la veſlic, laquelle doit eſtre ſem
blablement caue en la partie exterieure, comme celles qui ont eſté parcy-deuancfi
gurées : mais ne ſeronccourbées,ainstoutes droictescomme tu vois par ceſtefigurc. с .

Sonde pour faire inciſion au col de la veßic, pour extraire Lspierres aux femmes.
!

Inicio M4A

Et ſur icelle ſera faite inciſion, &procedé à extraire la pierre , commenousauons


dit par cy -deuant aux malles.Puis faut dilater la playe auec le dilatacoire , plus ou
ve faurtant moins, ſelon qu'il en ſera beſoin ,ayant eſgard que le col de leur veſſie eſt court : par- .
dilater la tant ne faut tant dilater , de peur de lacerer le corpsde la veſfie, car apres ne pour
playe aux roient tenir leur vrine. Et ayant dilacé auec dilaceration ,le Chirurgienmettra vnou
Femmes.
deux doigts par dedans le col de la matrice ,& preſfera le fond de la veſſie ,puisy met D
tra parla playe des crochets ou tenailles ,& d'icelles prendra la pierre : & de ſes deux
doigts qui ſeront dans le col de la matrice ,ciendra fermement la pierre contrainte 8
arreltée parderriere,de peur qu'elle ne recule . Et ainſi fera plus facilement tirée &
miſe hors,
Surre façon Autres practiciens operenten autre façon à l'extractiondes pierres aux femelles,
à extraire comme i'ay veu pluſieurs fois faire à mailtre Laurent Collo,Chirurgien ordinaire
la pierre. du Roy, & melinementà ſes deux enfans, les plus excellencs & parfaits ovuriers en
leur vocation ,qu'il eſt poſſible de trouuer de noſtre temps, & croy queparcy.deuant
y en a eu peu de tels:c'elt que nullement ne mettent les doigts dedans le liege ny de
dans le col delamatrice :mais le contententde mettre les conducteurs defTus men
tionnez dans le conduit de l'urine : puis apres font vne pecite inciſion cour au deſſus,
& en ligne droicte, de l'orifice du col de la veſſie, & non à coté,comme on fait aux
hommes, à fin que puis apresl'vnion ſe face mieux . Puis fontcouler les tenaillesca
ues en leur partic exterieure , figurées au chapitre 44.cntre les deux condu&curs,
Operations de Chirurgie. б37 .
i dilatans & dilacerans cant qu'il eſt neceſſaire ,pour donner paſſage à la pierre , la.
quelle parmeſmesmoyenseft cirée hors la veſlie. Le reſte de la cure ſe fera comme
nous auonscy deſſus monſtré à celle des hommes.Et fil ſurucnoic quelque vlcere
au col de la matrice , par la dilaceracion faite en l'extraction de la pierre , on pourra
vſer du Speculum matricis , pour dilacer le col d'icelle matrice , afin de mieux appli
quer les remcdes quiſont neceſſaires.

De la suppreſſion ou retention d'urine par cauſes interieures.


CHAP. L.

1
Vere les cauſes declarées cy-deuant de la difficulté d'vriner , il y en a
encores beaucoup d'autres qui ſont bien neceſſaires eſtre cogneuës au
Chirurgien : & parcant il me ſeinble bon en eſcrire de ce que i'en ay
B veu & cogneu par experience & raiſon. Parce quela pluſpart desChi. Erreur des
rurgiens & autres, lors qu'ils voyencvne difficulté d'vriner, ils penſent Chirurgiensi
promptement la cauſe venir despierres, à quoy le plus ſouuent ils ſe trompent: &
parcant vont incontinent & fans diſcretion ordonner choſes diuretiques , leſquelles
fontcauſe de grands accidens , & le plus ſouuent de lamort des pauures malades,
comme nous monſtreronspreſentement. Les cauſes de la retention d'urine, font Cauſes.
26.
pluſieurs , à ſçauoir, interieure , & exterieure : interieure , comme quelque ſang
coagulé, verruës,petiteseminences de chair procreées és voyes de l'vrine , ou (com
colz me nous auons dit) pierres & arenes , ou pour quelque ventolité ou inflammation ,
& apoſteme faite aux parties dediées à l'vrinc, ou aux parties proches & voiſines,
comme àl'inteſtin re&tum ,auquel ſepeutfairevneinflammation,à cauſe de laquelle ri2'infiamma.
ledit inteſtin tumefié & douloureux fera vne retention d'vrine , au moyen que la on des ra
pa
ties voiſines
veſſiceſt preſſée de l'inflammation & tumeur, auſſipour la connexion &voiſina- dela veßie
ge que la vellic &c l'inteſtinont en ſemble :ſemblablement pour le vicedu foye , ce faie suppres
qu'on voidaux hydropiques qui ne peuuent vriner : ou vice de faculté ſegregatrice (ion.
С du ſerum abolie , par quelque intemperie des reins : auſſi par le vice dela faculté
animale , commel'on voidaux maniaques, lechargiques , apople & iques, paralyci
ques , & aux ſpaſmes. Semblablement la pituite & autres humeurs froids, gros, vira
queux , fe peuuent purger de tout le corps par la veſſie : & iceluy humeur paſland
par les voyesde l’vrine,fait quelquesfois telle obſtruction , qu'il empeſche que l'v
rine ne peut paſſer: auſſi pourauoir retenu troplonguement I'vrine, au moyen de
quoy la veſliceftanr extremement pleine, l’orine ne peut ſortir, à cauſe que le con Quels huo
duit eſt eſtrecy, & rendu plus anguſte : ioin &t que la vertu expultrice ne peut com- meurs ſe pean
primer la veſſie pourietter ce qui eſt contenu à raiſon de la grāde dilatation d'icelle, mens expur
2010 ! & de la douleur qui debilite & abbat incontinenc coutes les vertus de la partic aſſie- ger par la
less gée : & parcantil ſe fait entiere ſuppreſſion d'vrine. Ce qu'on a veu aduenir à plu- veßie.
Hiſtoire me
Tof
fieurs : & encores n’agueres à yn ieune ſeruiteur qui reuenoit des champs , menant morabl e.
pola
en croupe vne honneſte Damoiſelle ſa maiſtreſſe bien accompagnée , & eltant à
cheual luy print vouloir de piſſer : toutesfois n'oſoit deſcendre , & moins encores
** )
? faire ſon vrine à cheual. Eſtantarriuéen ceſte ville , il voulut piſſer, mais il ne peur
sdeur D nullement : & auoit de tres-grandes douleurs & eſpreintes, auecvne ſueur vniuer
felle, & tomba preſque en fyncope. Etalorsl'on m'enuoya querir:& diſoit -on que
c'eſtoit vne pierre qui l'engardoit de piſſer:& eſtant arriuéluy mis vnc ſonde dedans
la veſſie,& preſſay leventre:& par ce moyen piſſa enuiron vne pince d'eau : & n'y
relk trouuay aucune pierre , & depuisnef'en eſt ſenty. Dauantage les vieils ont grande
difficulté de jeter leurs vrines,parce que les partiesdediées àl’orine , font feltries,
deſſeichées, &retirées, & ontla vertuexpulcrice foible, & debile , & quelquesfois
auſlinė la peuuent retenir, parce qu'elle eft acre & mordante.

CE
HHh iiij
361
638
Le dixſeptieſme liure, de pluſieurs
A

Diſcours de l'Autheur du ſang & pus qui pouuent eftre euacuez par les vrines.

CHAP . LI . la

Ela eſt accordé entre les Medecins & Chirurgiens tant anciens que
modernes, qu'il peut ſortir par la verge du ſang & du pus ſeparément, pl
& aufli mellezenſemble: lequel vient ou de la verge , de la veſſie ,des
vreteres, des reins , du foye ,ratelle , méżencere , pancreas , inteſtins,&
dela matrice : ou des parties plus hautes qui ſont ſur le diaphragmc,

#6
ou de quelque antre partie,
comme du poulmon & poi& trine,du cæur, ou des bras,
Signespour voire de toute l'habitude du corps . Pour cognoiſtre de quelle partie il vient, il faut do
rognoiſtre le conſiderer le lieu de la douleur , la couleur & odeur de ce qui fort, & des accidens ker
lieu d'ou fort
qui ont precedé, ou ſont encore preſens,commedouleur & fiéure & autres , & du
lepus , ou le
sang eſtane temps que ceſte deſcharge feſt faite :auſſi le fera la quantité & qualité du pus. Tel Ro
B
pärgé par les choſes demonſtreront le lieu d'où l'écoule le pus . Carfil vient des poulmons, on OCT
Porine
d'vne empyéme , ou du foye, ou de la ratelle , & en grande abondance, ſera cogneu (
ne proceder des reins : parce que celle quantité ne peut etre contenuë en iccux. des
1
foinct que lors qu'il vient du foye, ou d'autres parties ſituées ſur le diaphragmc, le 200
puseſt bien plus exactementmellé auec lvrine, qu'alors qu'ilvient des reins ou de
la veſſie. S'il vientſeulement de la verge , le pus ſera jetté pur ſans l'vrine.Oril vient
de la verge pour quelque apoſteme quiy ſera faite, ou de quelque carnoſité, ou d'v.
ne chaude piſſe. S'il vientde la veſſie vlcerée , il ſera mellé & jetcé auec lvrine: mais
à la fin apresauoir piſſé, ileſtjetcé fans I'vrine , & li ſera feride: d'autant qu'il ſott
A
d'vne partie membraneuſe : & fion y trouue de petites eſcailles furfureuſes,la veſlic
ſera rongneuſe. Pareillement quand on void yn ſedimentou lie eſpeſſe & viſqueuſe,
commemucilage & blanc d'æufmelléauec l’yrine , & que promptement il aille au
fond , cela monſtre qu'il a fa generation en la veſſie : & telle choſe ſe fait ordinaire
Aphror. 81. ment pour vne pierre quiſera en la veſſie . Hippocrates dir, que ſi quelqu'vn pille
pus ou ſang, ou eſcailles auec mauuaiſe odeur , cela montre la veſlie e tre vlcerće. O
Au 4. ch.du Siles vreteres ou reins ſont vicerez, le pus ou ſang ſort par la verge.Galieneſcritquc
6.liure de le pus de l'apoſteme du poulmon receu par l'artere veineuſe au feneſtre ventriculo
loco affect. du cæur, delà en la grande artere, & d'icelle en l’emulgence du rein , peut paſſer par MI
les vrines . Monſieur
Houlier ſur le Commentaire de l'Aphor . 75. Jiure 4. dic , qu'v A
Hiſtoire de
Monſieur ne notable femme par l'eſpace de quatre mois entiers piffoic de la boué, & quel
Houlier . quesfois du ſang auec, à cauſe de l'acrimonie quicorrodoic quelque veine
. Les Me
w
decins la traicterent comme ſi les reins euſſentefté vlcerez: parce que par interualle
Pierres trowelle y ſencois grandes douleurs: & mourut le quatrieſme mois . Eltant ouuerte , on DIOR
uéesaucæur. trouua les reins & la veſſie en leur entier : mais il fur trouué deux pierres enſon cæur,
& pluſieursapoſtemes, leſquelles fe purgeoient par les vrines , & en paſſant par les
reins cauſoienc douleur. Galien dit , que les monſtrues recenuës ſontietrées par l'vri
ne , laquelle ſe trouue ſanguinolence , & quelquesfois eſpeſſe & noire comme en
cre: ce quei'ayveu . Lapituite & autres humeurs froids & viſqueux ſe peuvent ſem
blablement purger par les vrines , & par les hemorrhoïdes .. omad
Or maintenant il nous faut parler du ſang quieft jeccé en la veſſie, & de là en la ver- D.
ge .Telle choſe ſe fait pource que les hemorrhoïdes ou méſtruës foncfupprimées,ou
pour quelquegrande plenitude de ſang contenu aux veines , pechant en quantité ou
qualité , ou lesdeux enſemble, leſquelles ſerepurgent parles veinesemulgentes aux Aqua
reins, & de là par les pores vreteres à la vellie : ou à caufe d'vne imbecilité du foye,ou
des veines mezaraïques ,ou d'autres parties : ou pour vne imbecilité des reins,lefquels
ca
ne peuuént aſſimiler le ſang enuoyé pour leur nourriture : ou par actricion & fray
d'vne pierre contenuë auſdits reins.Ce que ie ſçay vericablement pour l'auoir veu à
Aurelianus, pluſieurs. Aurelianus docteMedecin dit que l'on piſſe le ſang touc pur , pour auoir yſé
intempeſtiuemēc de Venus. Et tout ainſi que par certain temps lesmois aduiennent
promptement aux femmes , & aux hommes les hemorrhoïdes,ainhiil ſe fait yn amas
de lang au corps , lequel ſe repurge quelquefois par les reins,& d'iceux à la vellie,fans
qu'il y aicrupture d'aucun vaiſſeau :au moyen dequoy les vrines ſont cruences & fan
glantcs.Pour auoir pris auſſi du poiſon , comme cácharides , ou autres choſes ſembla
639
Operations de Chirurgie.

A bles. Ilyen a quipourauoir eſté trop longtemps à cheual,ontpiſſé le fang: ie le ſçay


par moy -meſine, allanten poſtcau camp de Parpignan,eftant prés de Lyon ie piſſois
le fang cout pur.Toutesfois à la verité on ne doit dire piſſer le lang , quand il lor de
la verge pur, mais ſe doit dire emiſſion de ſang. Le lang ſort pareillement auec les
vrines par diapedeſe ou anaſtomoſe des vaiſſeaux , & alors il ne ſortira pur , mais les

vrines ſeront ſeulement teintes.Dauantagele ſang ſort parinciſion des veines prom
prement & en abondance en vrinant: commei'ay eſcrit cy - deuantde defun &t Mon
lieur de Martigues , qui fut bleſſé d'un coup de harquebuſe à la priſe du Chaſteau
de Hedin , au milieu du chorax ,dont tout lubit jecca leſang par la playe ,par la bou
che , & par ſes vrines & lelles , & mourut bien -coſt apres . Monſieur Selecgue Ale . Hiſtoire.
man, Colonnel des Reiſtres, eut en ceſte ville vn coup d'eſpée au traucrs le ventre ,
dontincontinent jetta le ſang pur par la verge, le ſiege , & par ſes playes, & non ſeu
lement le ſang, mais auſſi la matiere fecale. Il fut penſé par Monſieur de la Corde
Medecin celebre ; & Docteur à Paris, & Monſieur Pigray Chirurgien ordinaire du
B Roy , & moy ,& Dieu leguarit . l'ay veu pluſieurs quionteu ſemblables playes qui
oncreſchappé, & d'autres de bien petites quien ſont morts .
Or quant au pus qui eſt jeeté des bras par les vrines , cela ſera demonftré par ces Premiere bla
deux hiſtoires.l'ay veu Monſieur Sarrer Secretaire du Roy,auoir vn coup de piſtole ſtoire
sarretode M.
au bras dextre : à ſa playe ſuruindrent pluſieurs accidens & apoftemes,deſquelles
forcoit bien grande quantité de boue, & par quelques iours n'en ſortit que bien peu :
& alors la jetroic par le ſiege & par ſes vrines ; & quand les vlceres jeccoient beau.
S.COM
coup , on ne voyoit ny par les ſellesny parles vrines aucune apparence de bouë , &
guary graces à Dieu , & eft encore à preſent viuant .
fut
Monſieur Houlier ,Docteur Regenten la faculté de Medecine à Paris;Germain seconde hi
Cheual , & Maiſtre Raffe , Chirurgiensiurez ,hommes excellens en la Medecine,& ftoiredeM.
moy ,auons penſé vn Gētil- homme nommé Mõſieur de la Croix, qui fut bleſſé d'vn de la Croix
coup d'eſpécau bras feneſtre, auquel aduint pareille choſe :toutesfoisil mourur. Or
Maiſtre Raſſe diſoit, qu'il eſtoit impoſſible que la boue peult prendre un li long che
min pour eftre vacuée: ioina qu'elle ne pouuoit paſſer par les vrines, fans qu'elle fuft
G mellée avec le ſang,& parcát qu'elle pouuoit pluſtoſt venir du mezentere , ou desin
teſtins, & non du bras ou de quelque autre part. Ic difois au contraire, qu'elle venoic
du bras, à raiſon que lors que les vlceres jeccoient grāde quantité de fanie, il n'en ſor
toit nullemét par en bas . Mõſieur Houlier eſtoit de mon party,diſant que les Anciés
auoient laiſſé par eſcrit celle choſe ſe pouuoirfaire : & ce qui nous mettroic d'accord,
3,4
corps filý
ſeroit que lors que ledit de la Croix ſeroitmort , qu’on regardalt en ſon corps
auoit quelque apoſtemcou vlcere . Il mourut, & fis ouuerture de ſon corps en la pre
ſence des ſuſdits : & ayāt regardé & examiné coutes les parties internes ,ne fut trouué
aucun lieu ,d'où la boüc peult ſortir :doc fuccõclu de tous , que ladice boüe procedoit
olar
du bras,eſtantyacuée par les ſelles & vrines :adjouſtāt que telle choſe n'eſtoit pas im
poflible,parce que noſtre corps eſt cõfluxible & traſpirable. Dauantage nous voyons Belle compa
par experience de deux vaiſſeaux deverre appellez Monte -vins,que l'on ſoit remply raiſon.
d'eau , & l'autre de vin clairet , & ſoient poſez l'vn ſur l'autre , à ſçauoir celuy qui ſera
remply d'eau ſur l'autre réply de vin ,on void à l'æille vin mõterau haut du vaiſicau
au trauers de l'eau , & l'eau deſcédre dedās le vin , fansmeſāge des deux : ce que nous
license
D auons dit par cy - deuanc. Et ficelle choſe ſe fait ainſi exterieuremêt & apertement au
ſens de noſtre veuëpar choſes inanimées : il faut croire en noſtre entendement, que
Nature peut faire paſſer la boue par les veines, ſans qu'elle ſoit meſée auec le ſang.
Parquoy faut conclure auec Galien,que la boue faite aux parties interieures , & loing Galau a
De loc . aff
des reins & de la veſſie, peut etre vacuée par les vrines : ce qui ſe peut encore prou
uer .Caraux excremés de noſtre corps qui f'expurgent par les reins , inteſtins, rarelle ,
11
kyſtis fellis , Nature par ſa vertu ſequeſtrice y reſerue quelque portion du ſang & fuc
benin , & propre pour leur nourriture ,que chacune d'icelle partie attire & ſepare d'a
uec les excreinens.Dauantage le ſang pur & le meilleur qui ſoit au corps enuoyé de
Le
toutes les parcies , pour eſtrejeccé par la verge,afin de generation, paſſe par dedás les
vaiſſeaux ſpermaciques ,qui touſiours ſont réplis de ſang : neācmoins la femēce coule
au trauers fans femeller aucunemét.D'abõdantne void - on pas que les femmes nou
uellemétaccouchées ,jetcée le laićt pur cótenu aux mámelles par leur marrice : lequel

auſli faut qu'il paſſe au trauers des veines & arteres mammillaires: Toucle ſemblable
640 Ledixſeptieſmeliure ,de pluſieurs
ſe faic aux veines mezaraïques , par leſquelles le chyle ſe porte au foye,pour eſtrefait A
lang ,& fait fang aux boyaux,pourleur nourricure, lans mellange de l'vn auec l'autre.
Le pus peut Le pus peut auſſi paſſer au trauers des os,cequi eſt prouué par Galien au Commen.
paſſer au tra taire ſurle $4.Aphoriſme du 7.liure, & pareillement par autres parties, par conduits
Hers des imperſpirables. Exemple , comme nous voyonsſortir le laict d'vne Nourrice par le
os .

Exemple de bout de ſon cecin , & la ſueur par les pores de noſtre cuir à groſſes goutes comme per
la tranſpira- les,neantmoins on ne peut trouver aucun cõduic, pour y mettre aucune choſe tant
rion .
deliée ſoit- elle.Dauátage ne void. on pas aux pauures verolez ,quijerteront parcha
cuniour & nui& , cinq & fix grandes baffinées debaue : Semblablement aux flux de
ventre,vn malade jercera par le ſiege des matieres de diverſes ſubſtáces & couleurs,la
quantité qu'on ne peut cltimer pouuoir eſtrecócenuë aux inteſtins. Parcillemét par
le vomiſſementon jetre grande quantité d'humeurs qui y abordene decoutes lespar
tics du corps, cõme torrens, par coduits imperſpirables & incogneus . Il faut aufire
marquer qu'il apparoilt aux vrines quatre ſubſtáces, à ſçauoir la ſemēce, le pus,la pi
tuite,& lelang:laſemence nage deſlus,parce qu'elle est plus legere & fubtile: le pus B
& la picuite vont au fond, lapituite eſt vnie,an cõrraire le pus ſe diſſoult lors que l'v
rine eft agitée : & quantau fang, il apparoiſt aucunesfois leul,& quelquesfoismellé
auec l'urine,comenous auons diccy -deſſus. Il faut de neceſſicé conclure, que toutes
ceſdites matieres ne viennent ſeulement des lieux où ils ſortēt, parce qu'il eſt impoſ
lible qu'ils puiſſent contenir vne ſigrandeabondance de matieres quien ſortent.
Masieres qui Apres auoir diſcouru des matieres qui feuacuent par les parties inferieures, faut
s'euacuent eſcrire de celles qui ſeuacuent par les ſuperieures. Exemple.Lesmenſtruës ſe peu
par lespar- uent purger par vomiſſemēs,parle nez, & par les mammelles, voire en grande quan
sies
ris.
ſuperieu- tité tous les mois ( comme i'ay eſcritcy-deuant) on par vne apofteme faite au tho
fax : comme d'vne pleurelie lepus ſortpartie parlaboucheen crachant, ou par vo
miſſement : & partie par les vrines, comme i'ay deſia dit.Semblablement l'urine eft
jectée parvomiſſement ( ce que i'ay veu pluſicurs fois) quand lespores vreteres ſont
bouſchez, ou la vellie & vergegangrenez. Veritablement i'ay veu à vn corps mort
vn des pores vreteres de groffeur d'vn doigs, plein d'vne matiere gypſeuſe,& en l'au 0
trey auoir vne pierre quieſtoic defcenduedansles reins, en ſorte que l'vrinene pou
uoitcouler en la veſſie, & regorgeoir en haut. Le pacienc deux iours deuát quemous
rir,vomiſſoit& jetcoit ſon vrine parla bouche. Pareillement quand les inteſtinsſont
eſtoupez, comme lorsque nous les voyonseſtre deſcendus aux bourſes, & aux fem
mes entre les muſcles de l’Epigaſtre , ou pour eſtre entortillez par les vers,& qu'ils
n'ont pcueſtre reduics , lors lamacicre fecale remonte en l'eſtomach , & eſt vomic
par la bouche : tel accidenteſt appellé Miſerere.
Comme le Il reſte encor vne difficulté àlaquelle ilfaut reſpondre,ſçauoir eſtcommelepusſe
puis le peut peut purger par la veſie, fans femeller parmy le ſang.A celafaut reſpondre,queno
purger Sans Atre corpseltgouuerné de faculté ſecretrice,qui peut tirer & faire choisdesmatieres
Je mefler para entierementconfuſes & mellées de bon & de mauuais. Exemple. La veſie du ficl
my le sang. attire à ſoy la cholere d'auec leſang, & la ratte lamelancholic, quin'apparoiſſent au
ſens de la veuë eſtre dedans le ſang. Aufli les rognons cirent la ſeroſitéduſang, & la
mettentà part,laquelle eſt jcrcéepar l'vrine. Ďauantage, pluſieurs bien toſt apres
auoir pris leur refe&tion, vomiront grande quantité de pituite & cholere, ſans jetter
vn ſeul morceau de leur viande,ceque ie ſçay pour l'auoir experimenté en moy.incl D
me. Et icy notera le icune Chirurgien , que lors que nous diſons qu'il y a certaines
vertus & faculcez naturelles : comme ,
Animale. Senſitiuc. Animoſiciuc.
Vitale, Motiue. Riſifique.
Naturelle . Generatrice . Imaginatrice.
Actra &trice . Regeneratrice. Memoratrice.
Recentrice. Agglutinatrice. Concupiſcible.
Concoctrice . Visible . Chylifique.
Aſimilatrice . Auditiue.
Sanguifique.
Formatrice . Odoratiue . Colorifique,
Augmentatrice. Guſtatiue. Lactificatrice.
Expulcrice, Tactile.
Sequeſtrice, & autres :
Ratiocinatrice.
Operations de Chirurgie. 641
À Il ne faut pourtant imaginer que telles facultez ayent entendement& raiſon pour
noſtre
faire leurs effe & s: car ellesne ſont qu'inſtrumens de laquelle a eſté crcée
ame,
par l'ecernelle prouidence de Dieu , eſpanduë en toutes les partiesdu corps , & en
tiereen foy,quin'occupepoint delicu par extenſion corporelle, laquellceltincom
prehenſible à l'eſprit humain.
Des cauſes exterieures de la retension de l'Vrine. 1

CHAP. LII.

Es cauſes exterieures ſont pareillement pluſieurs , comme ſ'eſtre


baigné en eau froide, ou auoir eſté longuemenr au froid ,ou auoir
par tropappliqué des choſes narcotiques ſur la region des reins , &
vſé de viandes trop froides, & autres choſes ſemblables. Pareille
B ment pour vne luxation interieure faite aux vertebres des lumbes,
SMA
à cauſe de la compreſſion des nerfs, quiſortentd'entre leſdices vertebres , y eſt faite
ſtupeur , dont la faculcé expulcrice eſt affoiblic , & partant le muſcle qui tient la veſ
ſie ferrée , ne permer que l'vrine ſorte.

Du prognoſtic de la retention de l'Vrine.


CHAP. LIII.

para
I l'Vrine n'eſt euacuée ſelon que Nacure le deſire , & qu'on ſoic Prognoftis.
quelques jours ſans vriner , le patientmourra ſ'il ne luy vient fié
ure ou flux de ventre‫و‬,oules deux enſemble : par leſquels l’vrine
ped
puiſſeeſtre cõſumée & euacuée par autres voyes que par la veſſie.
ke Car retenuë en la veſſie par pluſieurs iours plus qu'elle ne doit,
acquiert vne qualité acre & veneneuſe, dont aduient que par la
C repletion dela veſlie , venant à regorger en haut, ſemelle parmy
toutela maſſedu ſang: meſme ſe tranſporte aiſémentau cerueau,à raiſon de la lym
pathic qu’ont les meninges auec la veſſie, par ſimilitude de maciere membraneuſe.
ele
Oren tel cas Nature ſi elle eſt forte, ſouuent ſe deſcharge manifeſtement par le ven
tre, autresfois parle moyen d'vne ficure:ſenſiblement,li à icelle ſuruieni vne grande
ſueur, ou par vomiſſemenc, comme ainſi ſoit quela matiere de la ſueur & de l’vrine
et meſme: inſenſiblement, l'urine eſtantreſoluë en cénuës & fubiilesexhalations
par l'ardeur de la chaleur ficureuſe. Par vne refrigeration du Sphincter de la vellic,
,que
ou d'un humeur froid qui y ſera decoulé, il ſe fait paralyſie, donc l'vrine ne peut eſtre
‫ا م‬
‫ی‬
iertée , auſſi par la leſion de l'eſpine, commed'une playe ou contuſion: parmeſme
moyen auſſi coule inuolontairement auec les autres excremens , pour la leſion de
15,1
ladice eſpine.
alta De l'p'rineſanglante de purulente.
101. CHA P. LIII1.
D

piſſent leſangcourpur, autresfois mellé auec l'vrine , com . Cauſes du


me vneeau en laquelle on aura laué quelque piece de chair fanglan- flux de lang
te , & quelquesfois avec de la boüe mellée auccques l'vrine. Les cau- par la verge:
les ſont pluſieurs, comme de crop grande replecion deſang , lequel
periode & paroxyſme, ainſi que fait le flux menſtrual
reuacuë par
ou hemorrhoidal , & f'en trouuent pluſieurs, à qui tels Hux ſont cellez, feua
cuant par les reins. Auſſi par vne cauſe de maladie faite de repletion , ou par
exeſion de veine , ou par quelque humeur acre & inordant : ou pour auoir leué
trop peſant fardeau , ou faucé, ou tombé du haur en bas , ou auoireſté frappé de
quelque coup orbe, ou qu'il fuſt tombé quelque choſe peſante ſur les reins , ou
couru la poſte, & fait autres exercices grands & violens , & ( comme nous auons
dit cy-deſſus) pour vne pierre aux reins, ayant aſperitez & pointesou corners, ou
pour l'imbecillité de la faculté rccentrice d'iceux, ou pour avoir vſé immoderémong
642 Le dixfeptieſme liure,de pluſieurs
de l'acte venerique , & autres ſemblables,ou pour auoir receu quelque playe aux par- A
cies ſeruantes à l’vrine. Pareillement pour auoir vſé de quelques pocions, alimens&
medicamens trop chauds , acres & diuretiques, & contraires de toute leur ſubſtance
aux parties dediées à l'vrine, comme cantharides , & autres que ie ne veux icy nom
mer. Et pour ces cauſes , il ſe fait aux reins & à la velſie vne ſi grande inflammation,
qu'elle ſe termine le plus ſouuent en apoſteme & ſuppuration , & par conſequenten
vlcere : duquella ſanie eft ietcée par les voyes des vrines . En telle & ſigrande varieté
de cauſes d'urine ſangláte,nous diſcernerons d'où procede telſymptome par l'action
de celle ou telle partie offenſée, par la qualité du ſang qui ſort, ou pur ou mellé: auec
Exemple. I'vrine ſeule , ou auec du pus . Exemple : Si la ſanie vientdes poulmons , du foye, des
reins , ou des vertebres luxez , ou du vice de l'inteſtin droic , ou d'autre partie, fera
cogncu par la ſituation des parties affe &tées, & par les accidens quiſont, fićure,dou
leur, & autres quiont precedé , ou ſont encorcs preſens, & demonſtreront infailli
blement le lieu d'où procede & coule la ſanie ,aufli fera la quantité & qualité du pus .
Car ſi c'eſt d'vn vlcere ſitué au bras , comme nous auons dit , lors que de l'vlcere for
tira quantité de lanie , ne ſ'en fera emiſſion par les vrines . Au contraire , lors quelv !- B
cere demeure ſec , on la void ſortir par les vrines ou ſelles, voire en grande quantité .
Semblablement ſi elle vient des poulmons , comme d'vn empyeme, ou du foye,&
en abondance , ſera cogneu , pource que celle quantité de fanie ne peut eſtre conte
nuë aux reins : joint que comme ſortant du conduir de l'vrine, tellang eſt pur : aulli
venant du foye ou autre partie de deſſus le diaphragme, eſt bien plus exactement
mellé auec l’vrine, que lors qu'il vientdes reins , ou de la vellie. Quant à la curacion ,
nous ſorrirons des bornes de noſtre profeſſion ,finous la voulons pourſuiure ſpeciale
ment: Il ſuffira de dire en vn mot, qu'ilnefauteſperer guarir yn tel ſymprome,que la
cauſe, c'eſt à dire le vice de celle ou telle parcie , ne ſoit guary premierement. Aurelte,
fitel Aux d'vrine fanglante vient par ſimple ouuerture devaiſſeaux, il ſera guary par
: ide rupture , par agglutinantes: fi d'eroſion , par farcotiques.
choſes aſtringentes l

Des ſignes des vlceres aux Reins .

CHAP LV .

FC
Ombien que ie n'euffe deliberé de pourſuivre ſpecialement les cau
CE
ſes d'urineſanglante : toutesfoisparce que celle qui depend des vlceres
des reins & de la vellie, combe fortrouvencen pratique, il m'a ſemblé
DA19
bon d'en dire vn mot en paſſant. Les ſignes des vlceres des reins, font
douleur aux iambes . Dauantage la ſanie, qui ſort de leur ſubſtance,eſt
Mei
mellée auec l'vrine , & trouue - on les ſedimens ſanieux & rouges : & iamais ne ſort
tetap
qu'aucc ladite vrine , & touſiours reſide au fond d'icelle. Davantage, des vlceres des fem
reins ſortent quelquesfois de petites pellicules , & portions de chair, & filamens rou
geaſtres. Outrc- plus n'eſt de ſi mauuaiſe odour, comme celle qui vient de l'olcere de
la veſlie , d'autant qu'elle eſt de ſubſtance nerueuſe , à cauſe dequoy la matierenc Quoi
peuteſtre ſi bien ſuppurée , comme ésreinsqui ſontcharneux.
lieu
lesi
D
Des vlceres en la Veßie , & des ſignes d'iceuxo O proi
radi
CH A P. LVI .

qua
' Vlcere de la Vellie peut eſtre fait au profond & capacité d'icelle, pareille tibu
Les ſignes des ment en ſon col . Les ſignes que l'vlcereeſt en la veſlie, c'eſt que le patient
plceres de la ſenc perpetuelle douleur au profond du penil . Ec Gl’vicere eſt au col, le pa
pepie tient ne ſent que peu de douleur , ſi ce n'eſt alors qu'ilpiſe , & vn peu apres cum
auoir piſſé , comme nous dirons éschaude piſſes. La ſanie qui ſort de l'vlcere de la
pour
veſie eſtfort fecide, & aulli qu'en la iectant, la verge le plus fouuene feroidit, à cauſe
009
de la douleur qu'elle fait paſſant par la voye de l'vrine. Outre -plus on void dedans COX
l'vrine de petites peaux blanches ,& deliécs ,& non rouges ou peu ſouvent, Ec void .
on icelle lanieeſtre à la fin iettée apresl'urine, & non tanımeflée auec l'vrine , coni ftou
)

me lors qu'elle vient des parties ſuperieures.


D#
Operations de Chirurgie. 643
El
Duprognoſtic des vlceres des reins, et de la veſie. CH AP. LVII.

Es vlceres des reins ſont pluſtoſt guaries que celles de la veſſie, yvlcere des
d'autant qu'ils ſont charnus, & la veſlic exangue, membraneuſe, reins eſt plus
nerucuſe & plus ſenſible.L'vicerc quieftaufondde la veſſie eft qutote ceguarit
lle de
incurable ou fortdifficile à curer, à cauſe qu'elle eſt nerueuſe , & la veſico
que l'vrine quideſcend & y demeure, poingr & mordique , donc
augmente touſiours l’vlcere, tellementqu'elle ne peut eſtre glu
tinée qu'à grande peine : car iamais l'vrine ne peut eſtre du tout
cuacuće : & le reſte qui eſt laiſſé, eſt eſchauffé par l'intemperature de la veſſie, &
parce auſſi qu'elle ſe dilate & ſereſerre ſelon l'vrine qu'elle contient. Qu'il ſoityray,
nous voyons aux ſuppreſſions d'icelle jetter vne pinted'vrine à vn coup. Quand les Sinotez.
gnes de
Ito vlceres ſont en la veſſie& que les cuiſſes du malade maigriſſent & combent en atro mort.
B phie, c'eſtſigne de more prochaine.Siles vlceres ne ſont toſt guaries tant d'une par
cie que d'autre , demeurent incurables. Si la ſanie vient des parties fuperieures,com
me des bras, ainſi qu'auons dit, ou des poulmons , du foyeou racelle,fera cogneu , à
cauſe que celles parties onteſté premierement bleſſées.
De la curation de la retention d'urine. CHAP. LVIII.
tai
TO
Our la curation des choſes qui prohibent vriner , il faut prendre Indication.
indication de la maladie & de la cauſe , ſi elle eſt encore preſen
E
W te. Pareillement ſelon les parties bleſſées faut diuerſifier les re
medes, appellant le Medecin fil c'eſt poflible : lequel ordonne
ra les choſesvniuerſelles au malade , & ce qu'il appartiendra à la
Chirurgie, auecſon conſeil, les mettras en execucion. Et ſubit Aduertiffes
voyant vne difficulté d'vriner,nc courras au remede des pierres meninosable:
ou ſables ,comme ſouuent font ceux qui ne ſont conduits par methode , qui ordon
с nent choſes diuretiques,leſquelles ſont cauſe de pernicieux accidens. Si c'eſtoit vn
humeur acre , ou quelque ſang cauſé d'une contuſion, ou par trop auoir exercé l'acte
venerique , ou autre grand & violent exercice, ou auoir vſé de quelques potions
chaudes, auſquelles y eultcantharides , ou apoftemes & viceres qui fullent és par
ties dediées àI'vrine , ou pourauoirtenu trop longuement ſon vrine , & autres fem Quand
Die
blables. Car ſi en telles choſes on donnoicles diuretiques, on accroiſtroitla douleur faue verildes
ace, & inflammation ,gangrene ,& par conſequencon ſeroiccauſcdelamort dupatient.diuretiques:
Mais telles choſes diuretiques pourroient auoir lieu,lors qu'il y auroit quelque peri
SIESTA te pierre ou ſable , ou vn humcurgros & viſqueux, demeuré aux voyesdel'vrine. Er
ſemblablement pour ſeſtre baigné en eau froide , ou par le froid interieur , ou induë
application des choſes narcotiques ſur les reins ou à la veſſie ,ou d'vn empyeme , ou
de pituite , & humeurs froids ,eſpés & viſqueux , qui fuſſent cauſe de faire obſtru
đion aux voyes de l’vrine,& autres ſemblables,les diuretiques pourroient alors auoir
lieu, pourueu encor que les choſes vniuerſelles fuſſent faites,& non autrement. Or
les diuretiques peuuent eſtreadminiſtrez en diuerſes façons comme fenſuit. Pour
D prouoquer l’yrine.24. Agrim.vrticæ , & pariecariæ , ſurcul. rubros habentis añ.í.j.
radicum aſparagimundatar. žiiij. . alkekenginum .xx. ſem . málux ZB. radic.aco
ri Zj . bulliant omnia fimul in ſexlibris aquæ dulcis ad tertias ,deinde colecur , de
qua capiacæger. Z iiij . cum 3 j . ſacchari cand. & calidum bibat ieiuno ſtomacho
tribus horis ante cibum . Pourmeſmeeffe &t .Prenez trente ou quarante, voire plus,
bayes de lierre , & broyezen vin blanc,& en baillez à boire au pacient deux heures
le deuant manger.Autre pourmeſmecauſe. 24. ſem .vrt. pulueriſaræ 3j. diffoluatur
‫دان‬
cum deco & ione pulli. Et faut que le patient l'aualle le plus ſubic qu'il pourra , de
peur qu'il n'adhere contre la gorge: pource qu'il y cauſeroit ardeur. Autre. 2.de
co&tionis milij folis , bipinellæ , pariecariæ, faxifrag. rad. petroſelini, aſparagi,
acori , bruſci, & ireos, & en ſoit donné à boire au pacient la quantité de trois ou qua
treonces tiedes. Etentre tous ceſte eau eſt excellente pourprouoquer l'vrine , & de
,‫تنها‬
ſtoupper les voyes d'icelle , de quelque cauſe que ce ſoit.
2. Rad.oſmõda regalis,cyperi,biſmal.graminis petroſelini,fæniculian.žij.sapha
ili
644 Ledixſeptieſmeliure,de pluſieurs
Eau diſtil- ni craſſioris in calcolas fe &ti z iiij.macerentur per no &tem in aceto albo acerrimo,bul. A
lée propre liant poftea in aquæ fluuialis tb.x.ſaxifra.criſtæ marinæ ,rubiæ tinctorum ,millijſolis, TE
pour prouo- ſummitacum maluæ ,biſmal.añ.p.ij.folio.viol.p.iij.berulæ , ciccrum rub. an.p.j.ſe. 0.

quer l'brine. minismelonum ,citruli,ań.Zij.B.alkekengigrana xx.glycyrrhizxzj. bulliant omnia 4

ſimulad tertias : in colatura infunde per noctem foliculorum fenæ oriental.ib .R. fiat
iteram parua ebullitio ,in expreſſ.colata infunde cinnamomi electiz vj.colencurice PAP

rum : colacura inijciaturin alembicum vitreum , poſtea adde terebenthinæ venerx OC

Jucidæ Ib. ij. aquæ vitæ 3 vj. agitentur omnia fimul diligentiſlimè, lutecur alem
bicum luto fapientiæ , fiat diſtillatio lento igne in balneo Mariæ , deſquels tu as
les figures cy- apres. 4. Aquæ ſtillaticiæ præſcriptæ 3 ij . aut iij . ſecundum ope lim
racionem quam præftabit, quatuor horis ante paſtum . A ulliau lieu d'icelle,on peut 02
donner eau de raues, diſtillée pareillement in balneo Mariæ : & donnée à boirela
quantité de trois ou quatre onces auec ſuccre, deux heures deuantmanger,eſt cres V

propre pour deſtoupper les voyes de l'vrine , ſoir de cauſepituiteuſe, ſable, ou autre NO

Vtilisé des obſtruction . Les bains & demy-bains faitscommodément , relaxent , dilacent & ou B d's
bains. urent, & amolliſſent tout le corps : & à la ſortie d'iceux ,lorsqu'on veut fort deltoup
per, on donnera des choſes diuretiques, comme encores pour exemple , demie dra
gme de theriaque diſſout en eau deraues, ou autres choſes ſemblables. Maintenant
nous deſcrirons quelques remedes pour la mondification des vkceres des reins, & de
la veſlie. Et premierement les fyrops de capill. Veneris , de roſes, beuz auec hydro
mel,ou eau d'orge, la quantitépour chacune fois d'vne once, ſont bons pour leſdits
vlceres: aulli lelaiat d'aſneſſe ou de chéure y eſt propre , à cauſe que dela fubſtance
ſereuſe les deterge, & les glutine pour ſa ſubſtance formageuſe, il nourrift pour la
ſubſtance butireuſe : & doir cître pris , ſ'il eſt poſſible ,tout recentement tiré de
Veilité de la beſte . Le malade en prendra pour chacunefoisvn poſſon , aucc vn peu de miel
laict d'aſneſ- roſat, & vn peu de ſel,de peurqu'il ne ſe corrompe & tourne cn l'eſtomach. Dauan
se , ole
moyen d'en
tage, apres l'auoir pris,on ne doit boire nemáger queiuſques à ce qu'il foit digere, &
ſer.
parlé hors l'eſtomach .Lestrochiſques quiſ'enſuivēt,font pareillementpropres pour
Trochiſques. mondi fier les vlceres des reins & de la veſſic.2.quatuor ſemin , frigid.maior.femin.
papaueris albi,porculacæ ,plátaginis,cydoniorú ,myrtillorum ,gummitragacanthi & G
arabici ,pineart ,glycyrrhizæ mundatæ, & hordei mundati , mucilag. pſillij,amygdal.
dulciú ,anazj.boli armen .ſang.draco.ſpodij,roſ.maftich.terræ ſigillatæ ,myrrhæan.
zij.ſecundum artem conficiantur cum oxymel. (impli. & fiant crochiſci. Et le patiér
en doitprendre demie drachme, diſſoulte enlaiết clair, ou ptiſane,oucau d'orge, &
autresſemblables. Pareillement tu en peux diſſoudre en eau de plantain, & en jetter
Inieftion . auſſi auec la ſyringue dedans la veſſie. Le malade en lieu de vin, boira cau d'orge, ou
Prilane arti
hydromel , ou ptiſane faite auec vne once deraiſins de damas , auſquels on aura ofté
ficielles les pepins du dedans, & ſeront faits bouillir en cinq chopines d'eau deriuiere , en yn
por verniſſé, ou en vne fiolle de verre , iuſqu'à la conſomption d'vne quarte : puis y
ſoit adjouſté ſur la fin vne once de regliſſe mondée, & deux dragmes de ſemences
froides concaſſées , & les faire derechefvn peu boüillir, puis les paſſer par la chauſſe
d'hippocras, auec vn quarteron de ſuccre fin , & deux treleaux de cannelle triće , &
d'icelle en ſera vſé en lieu de vin . Le reſte de la cure laccomplira ſelon l'art.
D
De Diabete & Strangurie. CHAP . LIX .
Pres auoir deſcrit les cauſes de la retention d'vrine ,& des vlceres
des reins,& dela veſſie :ie nepuis encores paſſer , que ie ne declare
aucunemét les cauſes dejercer l'urine inuolontairement gource à
goutte,outout à l'inſtant que le malade aura beu :qui vient parle
defaut de la vercu retétrice ,& d'vne deprauació de la vertu expul
crice .Sil'vrinecltjectée en grande quátité , les anciens l'appellét
Diabetes : & fi elle eſtjercée ſeulemér goutre à gource,celle diſpo
ſition eſt nommée ſtranguric : qui eſt vne inuolontaire emiſſion d'vrine frequéte en
petite quantité :aucunesfois auec douleur,& autresfois ſans douleur.l’ay ſouuenace
Histoire. auoir traicté auec Monficur Houlier , Medecin tres- docte, defunct Monſieur Goyer,
Aduocatdu Royau Chaſtelerde Paris , lequel auoit vne difficulté de retenir ſon
vrine , di&te ftrangurie , & piſſotoit ordinairement tant le jour que la nui&t, auec
Operations de Chirurgie. 645
A tresgrandes douleurs,ſe plaignant ſentir grande chaleur & cuiſon à la veſſie, & à
l'extremité de la verge , & jettant ſes vrineslai& ueuſes, & à la fin de l’vrine , du pus.
On luy fit beaucoup de remedes:& pour luy appaiſer la douleur , ie luy faiſois par 1
l'aduis dudit Houlier, des iniections auec eau de plantain, centinodium , auſquelles
eſtoit diffoule dela craye & terre ſigillée. Autresfois ie luy faiſois des iniections fai
ces de mucilages de coins , & de plyllium auec eau de plantain , & de roſe, leſquels
remedes tendoientafin de rafreſchir l'intemperie de laveſie ,& delleicherles vice
res. Deuiſant auec ledit Houlier, pourſçauoir la cauſe des ſuſdits accidens , il me
dit que Goyecauoit la vellie rongneuſe&teigneuſe, auec petits vlceres, & lors que
lyrine comboit à la veſlie , elle mordiquoit les vlceres : qui faiſoitque la faculté ex
pultricela vouloit promptement jetter, & que le pus qu'il jettoit apres I'vrine, ve
noit de la rongne qui eſtoicà la vellie,pour la compreſſion qu'elle faiſoit à jetrer icel
le vrine.Ledit Goycteſtant decedé, ie fis ouuerture de ſon corps à la preſence du
dit Houlier : & trouualınes la veſſie toute calleuſe & pleine de puſtules, de groſſeur
B d'un petit pois , & lors queielescomprimois , enſortoit du pus toutblanc,tel que
celuy qui eſtoicjeccé auec les yrines pendant ſa vic.

Des cauſes de Diabetes,


с н 4Р . LX.

Es cauſes de Diabere ſont doubles,à ſçauoir internes & externes. Les


externes c'eſt d'auoir vſe intempeſtiuement de choſes trop chaudes &
diuretiques , ou trop grand trauail immoderé , & autres ſemblables. Les
cauſes internes ſontpluſieurs comme inflammation de foye, poulmons,
ratelle, reins, veſſie , ou du vice de tout le corps , comme par vne criſe
de quelque maladie , laquelle ſe termine parfux d'vrines.
Les cauſes de Strangurie.
C
CH AP. LXI.

f Es cauſes de Serangurie ſont auſli primitiues, & antecedentes. Les primi


per ciues , d'auoir beu crop grande quantité d'eau froide,ouauoir enduré trop
gjente grand froid. Les antecedentes, ſonthumeurs froids defluez ſur les parties
366. dediées à l'vrine , qui lesrend paralytiques : au moyen dequoy le muſclo
qui terre la veſlie, eſt aucunement relaxé & amolly : parquoy ne peut tenir la veſlie
ſerrée, ou bien bouſchenten partie le conduit de l'urine: doncſenſuit cours d'urine
pusy goutte à goutte , contre noſtre volonté,
1000%
hauer
Des ſignes de prognoſtic desDiabetes.
CH A P. LXII.

D N
pourra cognoiſtre la cauſed'intemperature chaude par ces ſignes: à
ſçauoir que le patient ſent vne doulcur poignante & mordante, auec
Icere vne grandealceration & ſoif excreme : ioinēt auſſi qu'il ſe crouue bien
d'oſerdes choſes refrigerantes, & non diuretiques: au contraire il ſe
froide , trouue mal de choſes chaudes. Etfila cauſe prouient d’intemperature
au contraire la douleur ſera petite & quaſi inſenſible : & ſe trouuera lc ma
lade mal , à l'uſage des choſes froides. Or neantmoins que la cauſe de diabete ſoit pourquog
lelli chaude , ſi eſt-ceque lvrine n'eſt trouuée teinte ou rouge, ny trouble rty eſpeſſe: l'vrine n'eſt
рол mais cruë & blanche, claire & ſubtile, à raiſon qu'elle demeurepeu au foye ,& en rouge,
12 20 la grandeveine caue,mais eſt attirée par la chaleur intemperée des reins de la veſlie,
ſans aucune ou peu de concoction. Er quantau prognoſtic, fi tels flux d’orines du
ya rent longuement,donneront grande faſcheric au malade , & tombera en atrophie
& emaciation, ou amaigriſſementde tout le corps , & par conſequenc mourra.

Ili ij
646 Le dixſeptieſme liure, de pluſieurs A AP

De la cure du diabete . CHAP. LXIII .


&
m
A cure ſe fera ſelon la diverſité de la cauſe. Exemple . Sic'eſt par fie
Les 4. femen vne intemperature chaude ,le patient ſera purgé & ſaigné.Ec
ces froides fauticy noter , quelesquatre ſemences froides,neantmoins qu'cl el
font diureti. les ſoient froides , ſontdiuretiques , prouoquans l’vrine:partant
ques. en telleindiſpoſition ne conuiențen donnerau pacient. Et vlera 61

d'alimens froids & altringens , qui engendrent grosſuc, comme


riz, orge- mondé , & leurs ſemblables:boira eau froide, ou gros
vin aſtringent, auec bonne quantité d'eau. Et ſur les reins & parties dediées à l'vri
Il fautper ne , ſerontappliquées choſes forçfroides & narcotiques, prenantindication de la fi
qui
dechoſesex- tuation desreins,qui ſont ſous les muſcles lumbaires. Parquoy tu dois appliquer les 20
eremement remedes plus froids ,quef'ils eſtoient ſuperficiels. Donc tu vſeras d'huile papaueris du
dehors parpour albi, iuſquiami, opij , feminis portulacæ , la &tucæ , aceti , corticis mandragoræ , & B
froides VI
leurs ſemblables, toit en linimens, cataplaſmes, & onguents, pour eſteindre la cha fo
les reins. leur eſtrange , & roborer les parties affe &tées. Au contraire,fi la cauſe vient du froid, fet
faut changer du tout les remedes froids,cantpar dedans, que par dehors: & vſera de
viandes pluſtoſt roftics que hoüillies. Ceremede eſt ſingulier: faut faire boire de la
ceruelle de liéure , cuite & deſlayée en vin clairet , & en donner à boire , quand le
maladeira coucher. Ceremedcalouuent eſté approuué eſtre excellent pour ceux
qui jettent lyrine inuolontairement.
De la cure deſtrangurie. CH AP. LXIIII.
Areille indication doit e ſtreſuiuie pour les remedes de la ſtran
guric :à ſçauoir tiranticeux de la varieté des cauſes dont elle eſt
faite. Car comme ainſi ſoit que toute intemperie peut cauſer A

ſtrangurie, comme eſcric Galien ſur l'Aphor. is. de la fe& ion 3.


certes ſelon que ſera le vice d'intemperature,ſelon cela nous vſe
rons de fomentations contraires: comme ſi elle eſt froide, nous
eſtuuerons lesparties honteuſes de decoction de mauues , roſes,
origan , calament , & ſemblables :puis les oindrons d'huile laurin , de caſtoreum , &
d'autres de pareil effe & t. Commanderons au malade de boire de bon vin , & iceluy
pur : comme aulliquand la ſtrangurie ſera excitée par obſtruction de quelque hu
meur , & fans froid ,ſans plethore :maisſi elle vient de quelque infamation auec
plethore , nous la guarirons par la ſaignée , comme noteGalien ſur l’Aphoriſme 48.
de la ſect. 7. Au reſte , ſitelmal vientd'obſtruction de quelque choſe ,nousy reme
dierons par diuretiques chauds, ou froidsſelon la qualité ducorps , qui fera telle ob
ſtruction . Quant à la dyſurie , c'eſt à dire , difficulté d'urine , nous n'en parlerons
point dauantage, pour autant que les cauſes & remedes d'icelle ſont melmes aucc
l'iſcurie, c'eſt à dire ſuppreſſion d’yrine ,dont nous auons parlé cy- deuant , differano
ſeulement ſelon le plus ou moins .
De la Colique. CHAP . LXV.
D
'Il aduient quelque obſtruction ou autre accident, que les matieres con
tenuësaux boyaux ne puiſſent eſtre vacuées par la deſchargeordinaire,
qui ſe fait parle liege: fileviceeſt aux grelles, il fappelle voluulus, ou ileos
( vulgairement Miſerere mei) mais ſ'il eſt aux gros, c'eſt ce que nous nom
mons proprement colique ,quia pris ſon nom de la partie malade qui eſt colon, c'eſt
à dire la continuité des gros boyaux : mais principalement en celuy que nousnom
Auicen.li.z. mons colon. Pour ceſte cauſe la colique eſt diffinie par Auicenne douleur inte
e
Paul. Ægin . ſtinalct,aen laque
lle mal- aiſément on rend ſes excremens par le ſiege. Paulusn
Viu. 3. ch.43. Ægin reduit la cauſe en quatre eſpeces : à ſçauoir craflitude d'humeurs , co
tenus entre les tuniques des boyaux , & eſprits flatueux , qui ne peuuent ſortir,
inflammation des inteſtins, & humeurs acres & mordans: Mais pour mieux in
ftruire le icune Chirurgien , nous en parlerons plus particulierement", & 'dırons
les cauſes & differences eſtre pluſieurs. Et premierement pout auoir trop va
ſé de viandes pituiteuſes , venteuſes , & gluantes . La colique venteuſe eſt
647
Operations de Chirurgie .

A procreée,
ou pour auoir mágé de pluſieurs& diuerſes ſortes de viādes,en trop gran . Cauſe de la
de quācité ( ncantmoins qu'elles fuſſent de bon ſuc )ſe ſeroient engendrées cruditeż colique venia
tene.
& obſtruction, puis ventoſicez,cauſantvne douleur tenſiue :ou pour avoir beaucoup
mangé de fruids cruds,& beu parcrop froid apres ſ'eſtre forceſchauffe:car par ceſte
froideur l'eſtomach & les boyaux ſont refroidis, & les humeurs aucunemércógelez .

Il y a vne colique appellée nephritique quielt aux reins , ainſi appellée, parce que Colique në
en Grec le rognon eſt ditNephros . Ceſte colique procede communémentde quel phrinquepar
que pierre ou grauier engendrée aux reins , ou eſtant deſcendue aux pores vrinaires :
Impathie.
E, alors le malade ſent douleur à la hâche & aux lūbes, à cauſe qu'elles preſſent les nerfs
qui naiſſent des vertebres des lumbes leſquels ſeramifient autourde la iointure de la
252
hanche , & aux muſcles deslumbes & de la cuiſſe. Semblablement les pores vreteres 1
ond
(qui ſont nerfs caues ) & les muſcles ſuſpenſoires patiſſent: & eft aduis aux malades
qu'on leur circ en haut les teſticules d'vne grande violence, auec douleurs extremes
for accópagnées de grands vomiſſemens pituiteux & bilieux , & fueurs vniuerſelles qui
B durčuiuſquesà ce que la pierre ou ſable ſoiét deſcédus en la vellie. Or le vomiſſeniêt Pourquoi
Direkt viencà cauſe que l'eſtomach ,pourla continuité & voiſinage qu'ila auec les inteſtins, viene le või
del fouffre pareille peine & douleur, quefont les boyaux :melmes que l'eſtomach eſt de miſſement.
ſemblable ſubſtáce que les boyaux ,n'eſtās leſdits boyaux qu’vneprodució de l'eſto
Dolki mach : parquoy quand nature veutjercer ce qui eſt contenu contre nature aux reins,
que ou aux pores vrinaires, ou entre les tuniques des inteſtins, ou au mezentere , ou au
pour se pancreas & hypochondres, cauſe la douleur coliqueuſe , auec grandes douleurs &
vomiſſemens. Dauantage la colique ſe fait par intemperature chaude & feiche, qui Colique de
fait douleur poignáce & mordante ,deſſeichantelesexcremenscõrenus aux boyaux, cause chau
enſembleles humidirez qui doiuent rendre les boyaux gliſans & coulans : auſſi ſe de.
faitpar vne pituite groſſe & viſqucuſe,acre,& glutineuſe.Pareillement la colique le Colique de

faitpar vne concorſion ,c'eſt à dire que les boyaux fentortillent , & tournoyene, de repleure
eniorfeure.
ſorte que la matiere fecale ne peut paſſer pour eſtrejettéc hors, comine nous voyons
cuidemment en la deſcente des boyaux en la bourſe des teſticules, qu'on appelle
hargne inteſtinale. Semblablement par les vers qui f'entortillenc dedans le boyau Colique par
с colon , qu'ils occupent enſemble , retortillent& replient le boyau . Hippocrates li- les vers.
ure troiſieſme desmaladies,traictant du væluulus, dic vulgairement Miſereremei,con
ſeille ( apres auoir vſe de pluſieurs remedes ) d'introduire du véc dedás le ventre auec
vn ſoufflet quiſera mis au ſiege, afin de faire diſtendre ledic vencre , & de tourner le
7,
boyau entortillé . Aufli par trop longue demeure des matieres fecales contenuës aux Pay trop lona
inteſtins, qui ſe fait par l'intemperature du malade , chaude & ſeiche, ou pour auoir gue demeuré
crila voyagé en temps de grandes chaleurs , ou pour auoir longtemps vſé de viandes trop des matieres
ſeiches. Veritablementiecognois des perſonnes, qui ſeront huict ou dix jours fans fecales.

TALE pouuoir aller à leurs affaires, & quand ils y vont leurs excremeus ſont ſecs & durs ,có
me crottes de chéure : & tels ſont fort ſujets à la colique, & mal de teſte, pour les va
peurs qui ſ'eſleuétau cerueau , voire quetelle choſe eſt cauſe de la mort des malades .
l'ay ſouuenāce auoir ouuere le corps mort d'vn ieune garçon aagé de douze ans , qui Histoire.
auoit entierement tous les inteſtinsremplis de matiere tecale ,fort dure & feiche, &
auparauant ſa mort la jettoitpar la bouche, qui fut cauſe le faire mourir faute de l'a

uoir ſecouru en temps conuenable. Or voila les cauſes & differences de la colique,
D ccquei’ay peu apprendre des anciens & modernes Medecins . A preſent il nous faut
parler des lignes dechacune cſpeccon particulier.Les lignes de la colique nephriti . signes de la
SI
que,ou pierreuſe :c'eſt que la douleur eſt fixe,c'eft à dire arreſtée en vn lieu ,à l'édroit colique ine
des reins , ioint que ſouuent auparavant , le malade aura jetcé quelque pecite pierre ou phritique:
ſable parſes vrines, & ſent vne douleur à la hanche & aux teſticules , pour les raiſons
cy-deſſus alleguées:iointavfſi que le malade avne excremcenuic d'alleller & vriner ,
à cauſe que nature fefforce meccre & jeccer hors ce qui luy nuft . Les ſignes de la vē- signes de la
teuſe ,c'eſt que le malade ſent vnegrande douleur tenfiue, comme qui luy tireroit & venteuſe:
deſchireroit les boyaux , auec bruit
dedans le ventre, qu'Hippocrates a couſtume de
15,6
nõmer Borborygmes . Partelle vécofité quelquefois les boyaux ſe rõpēc ainſi qu'on
voidà yne veſlie de porc , lors qu'on la répliſt trop de vét , on voit les fibres de les tuni- Pourquoy le
ques ſerópre : & quand cela aduiécle malademeurt,auec grāds vomiſfemēs,ne pou- vomilement
vant tenir aucune choſe du boire ou manger: qui ſe fait à cauſe que les boyaux eſtans vient à la com
lique denteno
réplis de véts, preſſent l'eſtomach ,de façon que les alimés n'y peuuét demeurer pour
Je.
eſtre cuits & digerez. La colique qui ſe fait par les excremens retenus,le patienileno
Ili ii)
648 Ledixſeptieſme liure, de pluſieurs
Signes desvne excremedouleur & peſanteurau ventre , & tenſion aux boyaux , & lors qu'on A
excremens preſſe ſur le ventre, on fent vne grande dureté , & auſſi que le malade n'a delong
Tetenus ,
temps eſté à ſes affaires. La colique qui eſt faite par inflammation bilieuſe, le malade
signes que ſentvnegrande chaleur & pulſation au milieuduventre,à cauſedesveines & arte
par inflam- res qui ſont au pancreas & mezentere , & de celles qui ſont diſſeminées entre les tu
mation . niques des inteſtins, & autresſignes des inflammations qu'on trouueaux apoſtemes
cauſées par inflammation. Aufli l'inflammation ſe faità cauſe d'vne pituite falée,
acre, groſſe, & glutineuſe,qui ne peuteſtre ieuée horscombien que nacure fefforce
de cefaire, cantparles vomiſſemens, que par grādes eſpreintes, auec difficulté d’yri
ner, parce que la veſie eſt preſſée pourl'inflainmationde l'inceſtin droit, pour l'affi
signesdecel-nité& conionction qu'ils ontenſemblo.La coliquæ ſe fait,parce quelesboyaux fonc
lequieſtfaite entors & repliez ,quele malade ſenc vne extreme douleur, à cauſe que l'inteſtin n'eſt
parreplieure. en ſon lieu,& ſituation naturelle, & auſſi que la matierc pour ſa croplõguedemeure,
acquiert vne chaleur eſtrange. Et faut icy nocer en paſſant, que coutes les fois qu'une
parcie n'eſt en ſon lieu naturel, ooſenciracouſiours douleur iuſques à ce qu'elley ſoit B
reduite. Et voila que plufieurs meurér les inteſtins eſtans tombez ployezaufcrorum
par vne hargne;lamatiere fecale y eſtátendurcie,accăpagnée de vērofitez & inflam .
mació,ne pouaát eſtre remis dedans le vétre,lamatiere regorgepar la bouche,& faic
la maladie nõmée Miſereremei.Ec quát aux lignesdes hargnes,iln'eſt point icy beſoin
leseſcrire, parce qu'il en a eſté ſuffiſammentparlécy-deuant,eſcriuant des hargnes.
Les prognoſtics de la colique.
Prognoſtics. LesLes prognoſtic s de la colique ſont de deux ſortes, les vns bons,lesautres mauuais.
mauuais ſe diuiſenten deux ,à ſçauoir en ceux qui ſont dangereux,&en ceux qui
Lin. 3. ſont mortels : les bons ſone, ſelon Auicenne , quand la douleurn'eſt pas fixe:c'eſt à
dire, arreſtée en vn lieu, & auſſi que les matieres ne ſonc du couc retenuës. Les ſignes
mauuais auec danger de mort ſont extremes douleurs., vomiſſemens continuels,
ſucur froide , & les extremitez :qui ſe font, parce que le fang & les eſprits ſe retirent
au dedans du corps : hocquet continuel , qui ſe fait par la ſympathie ,& continuité
des inteſtinsà l'eſtomach: alienation d'eſprit par communication de l'eſtomach au с
Apho.du 4. cerucau, & par conſequent conuullion par tranſport aux nerfs. Hippocrates dit que
liu. les trenchées & douleur du nombril, qui ne ſappaiſentny par ſaignée,ny purgation,
ſe cerminenten hydropiſie ſeiche, c'eſt à dire, en tympanite.
Cure .
Cure. Lacure ſera diuerſifiée ſelon les eſpeces & differences: car celle qui provient de
la pierre ou ſable, ſe doit curer par lesremedes propres aux nephritiques : auſſi celle
qui eſt faite par la hargne, par la repoſition de l'inteſtin : & celle qui eſt faicte parle
vice des vers, par medicamens propres à iceux, à ſçauoirpar potions ameres pour les
faire mourir, & principalement ſ'ils ſont au deſſus du nombril, faites de rheubarbe
infuſcen eau d'abſinthe,& autres choſes propres à tuer les vers:& f'ilsſontau deſſous
du nombril , par clyſteres faitsde choſes douces , afin de les faire deſcendre & forrir
par le ſiege. Si elle eſt cauſée par debilitation & refrigeracion des inteſtins & de
l'eſtomach , ils ſerontroborez, tantpar bons alimens , que par application des cho
ſes chaudesſur l'eſtomach & ſur le ventre, & par inie&tions de clyſteres. La colique
qui eſt faite de picuice viſqueuſe & de ventoſitez,ſe commencera premierement à D
ſeder la douleur, parce qu'il n'y a choſe quiproſterne & abbate plus les vertus que
fait la douleur, Ecles trenchées ſontcauſées de grosphlegmes viſqueux, & de ven
tolitez, leſquelles enflent & fonttenſion aux inteſtins. Auſſi que tels phlegmes ne
peuuententrer des orifices des veines mezaraïques dedans les boyaux ſans donner
des trenchées & extorſions. Exemple : Nous voyons des phlegmes forceſpez iectez
par les ſelles des coliqueux, qui ne peuuent venir de l'eltomach , ny du dedansdes
boyaux, attendu que pluſieursvomiſſemens & aſſellations ont precedé , & n'euſſent
peu tant ſeiourner là. Ilfautdonc conclure qu'ils viennent d'ailleurs, leſquels faut
qu'ils paſſent parlesorifices des veines mezaraïques, non ſans faire grande douleur:
neantmoins qu'ils n'y paſſent auſſi gros quenous lesvoyons par les ſelles : car ils fi
lent delié au ſortir, & depuis le ramaſlenc & eſpefliſſent commeglaire d’æufs. Et
Matiere des partant il faut faire des bains & demy-bains, fomentations, où il yentre mauues,
bains or fo- guimauues , violiers,pouliot , fenoil, origan, ſemencesde lin , fænugrec, fleurs de
mentations.
camomille , melilot , & autres ſemblables, qui ayenc faculté d'eſchauffer, ſeicher;
ns 649
A atrenuer & rarefier le cuir , à fin que les venes ſoient diſlipez:& doiuent couſiours
eſtre actuellement tenus chauds fur leventre.Et pour les reinedes copiques & parti
culiers,on froccera tout le ventre d'huile de camomille, d'aner, beurre frais, de cha
cun vne once,ſemence d'apion,& petroſelinum ,galanga,de chacun demie dragme,
& vn peu d'eau de vie, & huile de lauge, &de thym , extraictes par quinte eſſence:
t
ces ceinedes fondent ces groſſes humeurs, & lesfonc couler plus facilement. Autre
de Houlier,quiafferme ce linimenteſtre forcexcellent & bien approuué. 4.olei ru- Poulier.
tæ & nardiañ.3 vj. galbani cum aqua vitæ diſſolutizij, liquefiant fimul:adde zibet.
qiij.crociğvj. fiatlinimentum .Semblablement leront appliquez fachers , où il y
aura dumil,ou de l'auoinc,du ſel, fricaſſez en yne poifle, auec yn peu de vin blang,
puis appliquez tous chaudsſur le ventre,& fur leshanches, & renouuellez lors qu'ils
ſe refroidiront:en lieude ſachets,on pourra mettre desvellies de bæuf,demiesplei
nes d'vne decoction d'herbes reſolutiues, comme ſaulge, romarin , thym , lauande,
bayes de laurier,& autres ſemblables. Cela fai& ,on baillera clyftere tel qui ſ'enſuit.
B 2. quatuor remolliciuorum an. ñ.j.origani,pulegij,calami,añ.ñ.ß.anili,carui,ań.
zj.florum anethi p. j.fiat deco &tio in hydromel.ad Ibj. in qua diſſolue benedi&t.la
xat. mellis anthol.ſacchari rubrian.zj.oleianethi& camomill.añ.3.B .De ce ſoient Nosa.
.
faicts clyfteres pourdeux iniections,à raiſon que les boyaux eltans remplis,ne peu
uentreceuoir grande quantité de deco &tion.Autre excellenc , & bien approuvé. 24. excellens.
Clyfteres
vinimaluatici,& oleinucis,añ.ziij. aquæ vitæ Zj.olei iuniperi, vel ölei ruchæ 3ii).
fiat clyfter, & fera baillé le plus chaud qu'il ſera poſſible, toutesfois fans brufler le
0
malade,& faut que l'huile de genćure,ou de ruë , ſoientextraictes par quinte-eſſen
ce. Ie proceſte en auoir ſouueot vſe moy -meſme auec heureuſe iſſue, qualicomme
choſe miraculeuſe à ſeder promptement vne vehemente douleur cauſée de ventoſ
tez , & de matieres cruës & viſqucuſes.
X
Auicenne ordonne clyftere carminacif,compoſé d'hyſope,origan ,achor:ſemence suicenne.
d'anis, cyperi , calam. aromat. & aucres ſemblables choſes chaudes. Le malade doit Alimens.
vſer de bonnes viandes,& faciles à digerer; & bouillons,auſquelsſeront mis moyeux
dæufs,ſaffran,fines herbes,& bõnes eſpices de muguette, & cloux de girofle,& boi
O
re de bon vin genereux,ou maluoiſie,ou hippocras faietde bon vin,à fin d'eſchauffer
l'eſtomac, & les inteſtins:parce que toute flatuoſité prouient de chaleur debile,com
meeſcrit Galien ,partantil faut vſerde toutes choſes chaudes. Dauantage a dou-De ſympre.
leur perdiſte,ilfaut appliquer vne aſſez grande ventouſeſur le nombril : car elle diffi- caufis.
pe les vents.Galien dit que la ventouſe eſtſi admirable către les facueuſes douleurs, Andernier
lice qu'ilſemblecître vn enchantement,parce qu'elle les appaiſe promptement,àcauſe chap,dels
qu'elle diſlipe & conſomme les vents. Auſſi il ne faut oublierà bien forc ſerrer le
ventre,auecforces & larges bandes,à fin de pouſſer les ventofitez hors,& roborer les
book boyaux.ce que les maladesmeſmesnousmonſtrent, parce qu'ilsſe preſſent le ventre
ch auec leurs mains,& mettent la teſte entre les genoux : & fi la douleur perlifte, nous
lozi vſerons de remedes qui operent par proprieté occulce, comme inceſtinum lupi reſic
catum,duquel pulueriſé,on donnera à boire vne dragme,auec du vin blanc,
De la colique bilicuſe.
‫اد‬ D La colique bilieuſe eſt celle quiprouient d'inflammation ,laquelledemande re
medes contraires à celle qui eſt faicte de ventofitez & de crudicez. Le premier eſt la
ſaignée,regime de viure refrigerant: potions decatholicum ,caſſe, diſfoults eneau
9 d'orge:
En la
clyfteresrefrigerans,auſquelsſeront caſſe catholicum ,diſfoulcsen eau d'or
ge . grande douleur, Auicenne ordonne des narcotiques, pource qu'ils ſont
froids : ils contrarientà la cauſe de la maladie qui eſt chaude& feiche, comme ſono
lent les pilules de Philonium,ou de hiere picre, la quantité de 9 iiij.opij& crocian.ſi .
fiant pilulæ cum vipo. Auſſi les bains faicts d'eau douce, auſquelsſeront miſes mau
Sur ues,guimauucs,violiers,fleurs de nenuphar, laiduës, pourpié, & autres ſemblables
5. refrigerans, à fin de corriger l'acrimonie des humeurschaudes, cauſansla maladie.
E: Celle qui eſt faite d'vne picuite ſalée,acre, groſſe, &glutineuſe,ilfautpremierement
attenucr l'humeur,puis le fondre & l'attirer, quiſe fera par remedes chauds,pris cano
parla bouche,quepar clyfteres, & applications exterieures qui ſeront ordonnées par
ic do &re Medecin .
Ili ilij
oso Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs
Curedela Colique faicte par retention des excremens, & des replis des Boyaux.
· En icelle Auicenne recommande les alimens qui one vertu d'amollir le ventre,
comme toutes eſpeces de bouillons humides,& entre autres celuy qui eſt fai & d'un
vieilcoq,qu'on aura fait courir longtemps, puis batcu , & le faire cuire auec anet &
polypode, & quelque peu de ſel,iuſques à ce que celle ſubſtance ſe reſoude en eau.
Faudra pareillementvſer de clyſteres deterſifs,à quoy le meſme autheur ſe ſere dece.
Ituy-cy.4.becæ ñ.j.furfurisp.j.ficuum numero x.althex ñ ..fiar decoct.ad fb.j.in
qua diſſolue nitri & muriæ añ :zij.facchari rub.zj.olei ſeſam : Zij . Etſil'obſtruction
eſt trop concumace, il en faucvſerde plus forts, auſquels on mectra du cyclamen &
Hiſtoire, de la centaure,& de la hiere,diacolocin.ad zij. Et ſi encore pour toutes ces choſes le
Marianus
Sanctus.
malade n'eſt allegé,& qu'il ietce ſa maciere fecale par la bouche, Marianus San & us,
homme fort experimenté en la Medecine & Chirurgie , die auoii veu pluſieurs qui
lib.de caſu eſtoient échappez de l’iliaque paſſion (maladie mortelle)en prenant trois liures d'ar B
offenfion genc vifauec del'eau ſimplement:ccqui aduient,d'autantque par ſa ponderofítédé.
78 .

tourne l'inteſtin,quieſtoic encors & replié, & pouſſela mariere fecaleen bas ,& faict
mourir les vers qui pourroient auoir cauſé ladite concorſion. Maiſtre Iean de Sainct
Germain , Apothicaire à Paris, homme bien accomply en ſon att, m'a affermé auoir
penſé vn gentil-homme ayant la colique accompagnée d'extremos douleurs, & pour
fen deffaire,auoit pris pluſieurs clyfteres, & autres choſes ordonnées par do &tes Me
Hiſtoire. decins:neantmoins tout cela,la douleur ne ceſſoit point. Il ſuruint yn Allemand,ſon
amy, qui luy conſeilla boire troisonces d'huile d'amendes douces,tiréeſans feu,mix
tionnée auec du vin blanc, & eau de paricoire, ce qu'il fit,puis coſt apresluy ficaualler
vneballe de harquebuze faicte de plomb , frottée & blanchie de vif-argent ( à fin
&
qu'elle coulaſt mieux) oùbien toſt apres les ietta par le fege,quant & quant ſa
douleur fur du tout ceſſee.Tellechoſe peutaider grandemét àla Colique venteuſe.
En la Colique l'eſtomach ſouffte, & parçant aucuns diſent auoir la Colique d'eſto
mach.
Qu'eft- ce que saignée. CHA P. LXVI.

Hlebotomie ,eſt inciſion deveineeuacuant le ſang auec les autreshumeurs,


Premier fco comme l'inciſion de l'artere eft di&te Arteriotomie. Le premier ſcope dela
pe de la phlebotomie ,cîteuacuer le ſang pechant en quantité : combien aufliquc
phlebotomie. ſouuenton ſe propoſe de tirer le ſang quipeche en qualité, ou tous les deux enſem
Deuxfortes ble. La quantité ou repletion fentend en deux manicres :I'vn quant à lavertu,iaçoic
derepletion. que les veines ne ſe monſtrent trop pleines,qui rendſoudainles hommes foibles &
La premiere debiles,nature ne pouuant porter vn tel faix ou peſanteur; l'autre maniere de re
ad vires. plecion ſe prend quant aux vaiſſeaux qui conciennent le ſang, & ſe rapporte à l'a
La ſeconde
ad vafa.
bondance
plecion les d'iceluy , encoreſequela
veines ſouuent vertu lelecomporte
rompent,& fans aucun
malade crache le fang,ennuy.En
ou bien ilceſtere
ſort par
Accidens de la
la repletion quelque autre partie du corps, comme par le nez, par la bouche en vomiſſant, par
ad vaja. matrice aux femmes, par les rognons, de façon quelon piſſe le ſang cout pur,ou par
les hemorrhoïdes,ou quelquesveines variqueuſes , ou ſans eſtre variqueuſes. La re
pletion quiſe fait quant à la vertu,ſe cognoiſt par la peſanteur & laflitude de tout le D
corps. La replecion quant aux vaiſſeaux, ſecognoiſt par l'extenſion d'iceux, & qu'ils
apparoiſſentfortpleins : & l'vne & l'autre repletion a beſoin d'evacuation. Dauan
La phleboto- tage,pourcinq intentions on fait la Phlebotomic. La premiere eſt pour euacuer l'a
mieſefait bondance du fang des humeurs,comme és plethoriques, & à ceux qui ſont vexez de
pour cing me pour quelqueinflammation .La ſeconde eft,
quelque paſſion ſansplethore,com
intentions.
pour deſtourner & diuertir,ce quelon appelle reuulſion, comme lors qu'il ſuruient
vn flux deſang par la narille feneftre, on doit faire la ſaignée au coſté dexcre , & aina
au contraire. La troiſieſme eſt pour attirer, comme lors que nous voulons prouo
quer les mois des femmes, nous ouurons les veines ſaphenes aux malleoles. La qua
trieſmeeſt,pouralcerer, comme nous faignons és fieures aiguës , à fin d'éuacuer le
ſang boüillant,& refroidir ce qui reſte. Lacinquieſıne eſt, pour preferuer, comme
nous phlebotomons au printemps , & automne, ceux qui ſont diipoſez à cracher le
ſang,ou ſuiets à Iquinance,pleurélic,epilepſie,apoplexie, gouttes, & à d'autres indif.
Operationis de Chirurgie. 651
A poſicions, auſli és playes nous ſaignons pour euiter lephlegmon .Auant que ſaigner, ce qu'il faut
on doit conſiderer fries excremensdu ventre ont eſtéretenus long temps dans les confiderer a
boyaux : & fi ainſi eſt, les faucpremierement vuider auec clyfteres gracieux, ou ſup- uant queſai
cau
poſtoires,ou noüers , à fin que les veines meſaraïques ne tirent desboyaux quelque gnero
ſubſtance purride.On ne doit faigner les vieils ( ſi ce n'eſt en vne neceſſité ) pour jeun
Lesesvieils
ne ng
crainte de la diminution de leur chaleur naturelle,& deſiccation de leur ſubſtance, doiuent eflire
pareillement ny les ieunes enfans, pour crainte de crop grande reſolution de leur ha ſaignez.
bitude, faicte par l'abondance de leur chaleur naturelle: à raiſon de la rarité de l'ha
bicude de leurs corps, auſſi de lamoleſſe & delicateſſe de leur ſubſtance. La quanti
té du ſang que l'on tire , ſe meſure à la force de la vertu & à la grandeur de la mala
die.Si le maladeelt debile,& que la maladie demande grande euacuation,on fera la
faignée à deux ou à trois fois, & quelques iours interpoſez. Pour vne grande douleur
itus deteſte qui eſt en la partie poſterieure,nous inciſons les veines du front, & premiere
ment nous fomentons la partie auec eau chaude pour amollir le cuir, & attirer da.
B uantage de ſang dans les vaiſſeaux. Auxſquinances, on ouurira les veinesau trauers,
qui ſont ſous la langue, ſans aucunement lier le col, de peur de ſuffoquer le malade.
A toutes affectionsou maladies, qui oſtent l'haleine, & nous eſtranglenc, & à celles
qui ſoudain font perdre la parole,la phlebotomie eſt neceſſaire : aufli à toutes grādes
contuſions des parties internes,ou externes,commeeſt tomber de haut, ou auoir re:
ceu quelque coup orbe,encores que la vertu fuſt debile, & que le ſang ne pechart ny
en quantité ny qualité, il faut faire la ſaignée: pareillemét en apoplexie, ſquinance,
pleureſie, ficures ardantes . Auſſi ſi le malade, apres l'eſtre precipicé, vomiſt le ſang, l'os ne dois
5,01 ſoudain luy faut ouurir la veine: autremenc le langſe pourroit cailler, fion le laiſſe ſaigner endelos
repoſer & refroidir. Il ne faut ſaigner lemaladeenla vigueur de la fiéure. Or ſi la fié- lafiture.
vigueur
ure ne croiſt plus , & auili ne decroiſt point , & n'eſperons aucune declination
d'icelle, en tel cas il ne faut perdre ceſte ſeule occaſion de la ſaignée, encore qu'elle
ſoit pire qu'en la declination de l'accez. Quelques -vns debattent que le ſang doic
B
eſtretiré au plus loing qu'ileſt poſſible du lieu où il fait le mal , & y cauſe inflamma
tion, & que par ce moyen le cours des humeurs eſt deſtourné : le faiſant autrement,
с que l'on attire à la partie malade ce qui la charge & offenſe. Ceſte opinion eft fauſſe:
car la ſaignée vuide & euacuë premierement le lieu le plus prochain . Car i'ay lou
1
uencesfois ouuert les veines & arteres du meſmelieu,commeà la chiragre, & poda
4
gre,lesveines du pied ou de la main,& à la migraine les arteres & veines des temples:
& par ceſte euacuation de ſang qui eſtoit Aué auec le virus arthritique , & les eſprits
bouillants qui eſtoient euacuez, la douleur ſoudain f'appaiſoit : ce que i'ay fait plu- Gal.13.
1201211 ſicurs fois auec bonne & heureuſe iſſuë. AinſiGalien commande inciſer les arteres dir. mer.chap?
planten des temples pour la fluxion des yeux,& pourvnedouleur de teſte inueterée,ou pour
vne migraine: ce que i'ay faiet par pluſieursfois auec bon ſuccez.
all
Her Le moyen de bienfaire laſaignée. CH A P. LXVII.

pard Aintenane ic te veux donner lemoyen de bien faire la faignée. Premiere- Situation des
ment fautbien ſituer le malade,à ſçauoir, ſ'il eſt foible, ſera ſaigné dedans malade.
-0 , leli&t : & files vertus ſont fortes , ſera aſſisdans vnechaire,ſituéde maniere
D que le iour donne droid au lieu ou l'on voudrainciſer le vaiſſeau.Cela fait, ce qu'ilfaut
ZU US le Chirurgien frottera la partie auec ſa main ou linge chaud , à find'attirer le fang au faire deuane
vaiſſeau : puis fera vne ligature vn peu au deſſus dudit vaiſſeau qu'il voudra ouurir, & qu’ouurir los
sta
zde
renuoyera le ſang des parties inferieures vers la ligature,& empoignera le bras du weine.
malade auec ſa main feneſtre, ſi c'eſt le bras droict : & fi c'eſt du bras feneſtre , le
eni
prendra de la dextre , mettant le poulce vn peu plus bas que le vaiſſeau, àfin qu'il
ini
le cienne , & nevacille ça & là , le faire eſleuer à cauſe du ſang qui aura eſté en
uoyé. Cela faict, de ſon ongle marquera le cuir qui ſera ſus la veine, à l'endroic Pour ramo!
où il la voudra inciſer : puis ſubic prendra vne pecite goutte d'huile ou de beur -lir le cuir..
le
te frais, & frottera le lieu marqué par l'ongle,à fin derendre le cuir plus lice,& l'a
mollir, & par ce moyen ſera plus facile à couper, & fera moindre douleur au malade,
à raiſon que la lancecce entrera plus doucement. Or le Chirurgien tiendra ſa lan Façon de teo
cette du poulce & de l'index,nontrop loing nycrop pres de la poincte, & de les trois nir la lacesse,
autres doigts ſ'appuyera contre la partie : & d'abondant mettra les deux doigts ſuf
652 . Le dixſeptieſme liure , de pluſieurs
dies deſquels il cient la lancette , ſus le poulce , pour auoir dauantage ſa main ferme A
& non cremblante : alors fera inciſion vn peu obliquement au corps du vaiſſeau , qui HA
ſoit moyenne, non trop grande ny trop petite , ſelon le corps du vaiſſeau , & le ſang
Danger de gros & ſubtil que l'on aura conicăturé y cſtre contenu . Et ſe faut garder de coucher
toucher le l'artere qui eſt fouuentcouchée ſous la baſilique, & ſous la mediane vn nerf , ou le
nerf on l'ar- tendon du biceps : & quant à la veine cephalique, il n'y a aucun danger . Il ſera cirédu
tere en inci- ſang ſelon qu'il ſera de beſoin :puis défera la ligature , & en fera vneautre ſus le corps
fant la veine .
de la vcine,pourarreſter le ſang auec vne petite compreſſe: & laligature neſeratrop
laſche, ny trop ſerrée,defaçon que le malade pourra plier le bras à ſon aiſc : & pour
la faire comme il appartient,
faudra à l'heure que l'on la voudra faire,commander au
malade de plier le bras : car ſion le bandoit eſtanc droit , il ne le pourroit apres plier ,
ainſi qu'il a eſtédıæt cy -deſſus: ce qui ſe fera auec vne telle lancette .

Lancette pour faire les faignées.

lim

Des Ventouſes. C H 4 P, L XL11.

vlage des Entouſes eſt vn vaiſſeau ventru qu'on applique ſur le corps pour attirer
Dentonfes. violentement. Il y en a de cuiure , de corne, de verre , de bois,de terre,

d'or & d'argent : les vnes ſont grandes , autres petites ( appellées petits
corners ) les autres moyennes. Erf'iladuient qu'on ne trouualt des ven
touſes,on ſe peut aider d'vn verre ou gobelet , ou d'un petit pot de terre.
Elles ſont grandes ou petites, ſelon la diuerſité des parties où elles ſeront appliquées.
Orcelles qui ont l'emboucheure eſtroite, & qui ſont longuettes tirentdeplus loin .
On met dedans des eſtouppes ou chandelles de cire allumées au cul d'icelles. Les
petits corners ſont appliquez les ayant trempez en cau chaude, & apres qu’on les a O
vn peu eſchauffez à la fammed'une chandelle, ou de lampe ayane grande famme ,
ou par ſuccer auec la bouche. On applique les ventouſes lors que l'on veut faire va
cuation de quelque matiere coniointe en vne partie,principalementquád elles ſont
auec ſcarification , & font auſſi appliquées pour faire reuullion & deriuation en quel:
La ventouſe que partie,commepour la defuxion qui ſe faitaux yeux . On les applique ſurles ef
Drile princi- paules aucc grandesflammes: car par ce moyen font plus grande attra &tion. Parcil
palement à lement aufli ſousles mammelles des femmes pour faire reuulſion de leurs mois quád
zirer les ven- ils fluent crop , & font pareillement appliquées aux plats des cuiſſes, quãd ils ne cou
tofitez
lentaflcz : aufli aux morſures de bektes venençufes , & bubons, & charbons peftife
tez , pour attirer le venin du dedans au dehors. Cornel . Celſus veut que l'on appli
que la ventouſe ſus la partie dolente que nous pretendons guarir , en faiſant euacua
tion du ſang & eſprit Aacueux imprimez en
quelque partie. Les ventouſes f'appli
quent ſus lenombrilpour reſoudrevne groſſe ventofité enfermée en nos boyaux,ou
en quelque autre ſpacioſité,commeentre quelque membrane des muſcles de l'epi
galtre , qui cauſent colique . Auſſi ſont appliquées ſus le flanc dextre ou ſeneſtre, D.

quand au foye ,ou en la ratelle il y a tenſion douloureuſe faite des ventofitez,ou qu'il
ya hemorrhagie par le nez . On les applique auſſi ſus les reins & ſus le ventre , à l'en
droit où ſont lituez les vreteres,pour faire deſcendre la pierre à la veſlie , & font ap
Plage des pliquées plus grandes ou plus petites, ſelon la neceſſité. Dauantage, cu vſeras des
cornets.
cornets comme des ſuſdites ventouſes, és lieux eſquels les ventouſes nepeuvent
eſtre,pourleur grandeur,appliquées: deſquelles tay voulu donner le pourtrait,
i

is
Operations de Chirurgie . 653

A
Ventoufes dediverſe grandeur , ayans de petits Cornets de pluſieursfortes, auec les
by flammestes , de lanceite propre pour
trous leſquels ſeront bouchez de cire lors qu'elles
ſeront appliquées : & quand on les vondra ofter faire les ſcarifications.
nei
on leur donnera tent par iceux .

Trebama

apers

B a

OP

en And

Cornets qui attirent ſans feu , mais par le benefice de la bouche,


en retirant fon baleine.

004

sta

D
WCS

homes
654 Le dixſeptieſme liure ,depluſieurs
A
Des Sang ſaes,& le moyen d'eo uſer. CHAP. L xix.
A Sangſuë eſt vn ver aquatique,de figure d'vn ver de terre. Au
bout où eſtla teſte, elle a un trou rond, comme celuy d'un lam
proyon,& trois petites dents ou aiguillons auec leſquels elle per
cela peau , non ſeulement de l'homme , mais auſſi d'vn cheualou
Sangſnes ve d'unbæuf, & ſ'y attache & ſucce, & ſe rempliſt de ſang. Il y en a
nimenfes. qui ſont venimeuſes, & ſont celles qui ontgroſſe teſte,decouleur
verdoyante, & reluiſentcommeversardans,& font rayées de bleu
ſur le dos,ou toutes noires. Auſſi ſont venimeoſes celles qui viennent és mareſts,86
aux eaux bourbeuſes, & engendrent inflammation,apofteme, fieure, & malings vl.
Bornesſang- ceres,voire
fues.
fouuencincurables.Les bonnes ſont celles qui font de couleurde foye,
menuës, rondes,ayans petite teſte,le ventre rougeaſtre,& le dos verd,& rayé de cou
leur d'or par deſſus, & qui habitent és caux claires & coulantes. Apres les auoir pri
ſes, illesfaut garder enuiron vn mois & plus, à fin qu'elles ſedégorgenedeleur baue
& ordure,& leur changer d'eau ſouuent: parce qu'aucunesfois elles ſe feront jettées
ſur quelque beſtemorte& chàrongneuſe , & qui les appliqueroitfans eſtre dégor
gées,elles pourroient imprimer quelque venin à la partie. Partant il les coñuientfai
Le lieu où re dégorger & vomir leurordure auparauant que les appliquer. Or on les applique
appliqueaux endroits du corps,où les ventouſes & cornets ne peuucnt tenir, comme au fon
l'onſangfees
les .
dement,pour romprela cunique des veines hemorrhoïdales , à l'entrée de la vulue,
aux genciues,léures, nez, & ſur les doigts.Sion veut faire grande euacuation de ſang
apres que la langſuë eſt tombéc,fi le lieu le permet, on appliquera des ventouſes où
Lors que l'on cornets,ou bien on enremettra d'autres. Il fautnoter,que Gi la ſângſuë eſt maniée à
veut appli- main nuë, elle ſe rend deſdaigneuſe & deſpiteuſc , & ne veut pas mordre: parquoy
querleslangoquand
fues ne les on la veut appliquer,on la prendra auec vn linge blanc,& net, faiſant aupar
faut tenir À auant ſur la partie petites ſcarifications,ou mouchecures, ou bien ſera mis ſusquel
nud. que peu de lang tiré de quelque belte : car par ce moyen elle prendra plus facile
ment. Ec pour la faire tomber,on iecte ſus ſa teſte de la poudre daloës, du ſel, ou de o
Le moyen de la cendre: & eſtant tombée,lil'onveut ſçauoir combien de ſang elle aura tiré,on la
cognoiſtre mettra dans vn vaiſſeau , & fera couuerte deſel broyé bien menu, & foudain elle vo
combien la miſt tout ce qu'elle a ſuccé: & qui la voudra faire tirer dauancage ,auantqu'ellelal
Langfue aura che priſe,& delmorde,il la faut couper d'vn cizeau par en bas vers la troiſielmc par
siré delang. tiedeſoncorps:enceſtefaçon elle cirecouſiours,& le ſangqu'elle attiredécoule par
fon corps. Orla ſangſuë par ſon ſuccementattireprofond,& parties voiſines: & non
ſeulement de celle qui eftmalade ſurlaquelle elle eſt appliquée.Ce quieſt manifc
ſte à voir, à raiſon qu'eſtant combée , il fort bonne quantité de fang , & par longue
eſpace de temps, par lamorſure,encorequ'elle ſoit petite,iointque difficilementon
l'eſtanche: ce qui ne ſe faic par les ſcarifications, & applications de corners & ven
Le mogen touſes. Sion ne pouuoiteſtancher le ſang apres la morſure, il faut appliquer lamor
d'eſtancher
le fang.
tié d'vne féue : la tenant & preſſant deſſus , iuſques à ce qu'elle y demeure attachée
& adherance,infailliblemétcela recient le ſang :ou bien yappliquerdu linge brulle
aucc compreſſe & ligature propre. le ne veuxlaiſſer en arriere vne autre operation,
qui ſefaidiparpoin&ture ou piqueure auec vnc eſpingle,ouaiguille , ou par la pointe D.
de la lancette o
, u par la piqucure des ſangſuës. On pique les petites apoſtemes és
membranes de l'ail,pour abbaccreles cataractes,ou pour euacuer le pus,appellé hy
popyon ,contenu entre les membranes de l'ail, ou appliquer vn ſecon, ou faire luru
re à couldre les playes, & autres.
Fin du dix-ſepsieſme liure, de pluſieurs operations de Chirurgie.
TABLE
1

655

elegt
hou.
Dve

Table des Chapitres du liure dixhuictieſme


3ale
de la maladie articulaire , vulgairement
CA
2001 ,

leuh .
appellée Goute.
Eſcriptionde la maladie articulaire, dicte vulgairement Goute. Chap.j.
Des cauſes occultes des goutes. Chap. ij.
Quien
Hiſtoires memorables. Chap. ij .
Sapi Des cauſes manifeſtes des goutes. Chap.sig.
De l'origine de la defluxion des goutes. Chap. v.
elai
Signes que la fluxion vient du cerveau . Chap. vj.
1az
tock
Signes que lafluxion vient dufoye, Cbay..
Signes pour cognoiſtre que l'humeur accompagse le virus arthritique. Cha p. vij.
Signes de lafluxion cholerique.
Signes de la fluxion pituitewſe. Chap.ix.
Chap.x.
Signes de l'humeur melancholique.
Prognoftic de la goute. Chap. xj.
Cure preferuatiue& curatiue desgoutes. Chap.xij.
Blok Du vomiſement. Chap. xij.
11,00 32 Digers remedes pour les goutes. Chap. xiij.
2014 De la maniere de viure des goutchx. Chap.xv.
Du boire des gouteux . Chap. xvj.
lone Pour roborer les jointures.
Chap. xvj.
.com De la cure palliative des goutes. Chap xui .
este Chap. xix.
Des remedes topiques pour la goute de matierefraide. Chap. xx.
ficare Remedes locaux pour la goutede matiere chaude principalement faire deſang. Chap. xxj.
atlow Remedes ropiques pour la goute de l'humeur cholerique.
Chap. xxi.
Remedes de la douleur arthritique ,faied'intemperature ſans matiere . chap. xxiy.
Ce qu'ilfautfaire la douleur des goutes ceßée. Chap. xxiij.
er las Des tophes ou næuds des gouteux .
Chap.xxv.
Desventofitem , & leurs remedes. Chap. xxj.
De la ſciatique . Cbap.xxvj.
elet Cure de la ſciatique.
lapa Chap. xxvii.
De la goste grampe . Chap. xxix .
temy
T
WICH
1

KKK
1

655

LE DIXHVICTIESME LIVRE,
TRAITTANT DE LA MALADIE
ARTHRITIQVE , V VLG AIREMENT
appellée Goute .
PAR AMBROISE PARE', DE LAVAL AV
MAINE , CONSEILLER ET PREMIER
Chirurgien du Roy.
Deſcription de la maladie articulaire , difte vulgairement Goute.
CHAPITRE PREMIER.

Que c'est RTHRITIS,ou Goute,eſt vne maladie qui afflige & A

que goute . gaſte principalement la ſubſtance des articles d'vne


matiere virulente,accompagnée de quatre humcurs: &
pour celte cauſe eſt nommée des Grecs Arthritis, & des
Latins, Morbus articularis. Et ce nom eſt general pour
toutes les iointuss: mais le vocable de Goute, qui eſt
François, luy peut auoir eſté accribué , parce queles hu-.
meurs diſtillene goute à goute ſur les ioincures:ou pour
ce que quelquesfois vneſeulegoute de céc humeur fait
douleur tres- grande,& peut venir à toutes les iointures
du corps . & ſelon les lieux où la fluxion ſe fait ,prend di
uers noms. Parquoy nous dirons qu'ellea autant d'eſpe
Dinersenoms ces & differences qu'il y a de iointures. Comme li la Auxion ſe faitſur la jointure des
fortes de mandibules, elle pourra eſtre nommée Siagonagra: parce que les Grecs appellentla les
goutes , ſelon mandibule Siagon. Si elle vient au col , ſe peut appeller Trachelagra :pourceque
La diuerſité Grecs nomment lecol Trachelos. Sielle vient ſur l'eſpine du dos,on la pourra nom- B
desiointures. mer Rhachiſagra: parce quelesGrecs nommentl'eſpine Rhachis. Aux eſpaules, oma
gra: à cauſe que la iointure de l'eſpaule & du bras eſt dicte des Grecs omos. Auxioin
curesdes clauicules,Cleifagra: parce que la clauicule eſt appellée en Grec Cleis. Au
coulde,ſe peut nommer Pechyagra,du nom GrecPechys, quiſignifie le coulde. Sielle
vient aux mains,elle eſt communément appellée Chiragra : à cauſe du nom Grec
Cheir , qui ſignifie la main. Et à la hanche Iſchias, pource qu'elle eſt appellée en
Grec Iſchion.Au genoüil, Gonagra, du nom Grec Gony, qui ſignifie le genoüil . Aux
caufes de pieds, Podagra, du Grec Pows, c'eſt à dire, le pied. Lorsqu'ily atrop grande quantité
gonte vni
d'humeur,& que le malade vicen oiſiuccé, quelquesfois le mal occupe toutes les
werſelle. iointures yniuerſellement. Aucuns l'appellent deſcente,theume,ou catharre,parce
que le nom de goute eſt odieux , principalement aux ieunes gens. Aucres le nom
mentgoute naturelle àla difference des goutes de la groffc verole.
Des Coutes. 657
A
Des cauſes occultes des Goutes. CA A P. II.

'Humeur qui cauſe les Goutes,ne ſe peutbien expliquer,non plus que ce


& ft to
luy qui faitla peſte,ou qui eſt cauſe de la verole,ou de l'epileplie: e
calement d'autre nature que celuy qui fait un phlegmon, ou vn vedeme,
ou eryſipele,ou ſcirrhe: & iamais ne ſe ſuppure,comme dit Aëce chap.12.
du 12. liure,comme fontles autres humeurs: ioint auſſi que les iointures qui en ſont
affligées, font dénuées de chair,& de temperature froide & ſeiche: & lorsque leſdits
humeurs defluent en quelque partie iuſques à l'apoſtumer, ne cauſent telles dou
leurs que celuy qui fait la goute,ny meſme vn chancre apoſtemeux. Outre-plus,leſ- 2'humeur
dits humeurs ne font des næuds auxioincures comme faic celuy qui cauſe la goute, quicauſe les
lequellaiſſe vnematicre gyplécincurable,ainſiquenous declareronscy-apres.Sur uers
goutesetdi
des
ce fauc noter, que cet humeur Auant ne faic pasnuiſance par la voye où il paſſe ( non tres.
B plus que celuy qui cauſe l'epileplie , montant des parties inferieures iuſqu'au cer- l'humeur
ueau;fansleur fairc aucune nuiſance ) mais ſubit qu'il eſt combé aux iointures ,cauſe qui caujela
extremes douleurs, & autres diuers accidens ,en eſchauffantou refroidiſſant. Caron goute n'afli.
la
void aucuns malades qui ſe diſent bruſler, & nc leur peut-on appliquer remedes joiniur
ge quee .
aſſez froids : autres diſent ſentir vne froidure glacée ,leiquels on ne peut aſſez auſſi
cſchauffer : & melinement en vn meſme corps ſevoid que la partie dextre eſt intem
perée de chaleur,& la ſeneſtre de froidure. Auſſion void des gouteux , leſquels ond
la goute chaude au genoüil , & au meline pied , froide : ou aux pieds chaude, & au
genoüil froide. Ic diray plus : on void ſouuent vne tres grande chaleureſtre vniour
en vne partie, & l'autre vnefroideur: & partant en vn meſme membre fauc vſer de
remedes contraires . Et quelquesfois ceſte matiere virulente eſt ſi peruerſe & mali- Diuers acci
gne,qu'elle repugne ,& ne cede à nuls remedes : & diſent les malades ſentir plus de dens & fym
mal y appliquant quelque choſe,quelors qu'ils n'y font rien. Et bon -gré mal-gré,de plomes dear
touces choſes faites par raiſon &methode,ceſte matiereaſon periode &paroxyſme: shritique.
qui demonſtre apertement la meſcognoiſſance & malice de la cauſe. Pareillement
250 G on void que les goutes ne ſe peuuent iamais parfaictement guarir( principalement Gontes herea
celles qui font hereditaires ) quelque diligence qu'on y puiſſe faire :dont cela eſt ve- ditaires in
nu en prouerbe ,meſmes aux Poëtes Lacins,entre leſquels Horace dit , curables.
Qui cupit, aut metuit , iuuat illum fic domus, aut res,
Vi lippum picte tabule, fomenta podagram .
Voulant dire, que les medicamens & fomentations donnent autant d'allegemens
aux podagres, quefoncles richeſſes à celuy qui eſt vexé d'auarice inſatiable, deſirano
JMKL touſiours d'amaſſer :ou comme les peintures & tableaux donnent recreation à vn
AN
homme quia mal aux yeux. Surquoy auſſi Ouide diş ,
del Soluere nodoſam neſcit medicina podagram .
Quiſignifie que la medecine ne peut guarir la goute des pieds eſtant noueuſe.
ller . Doncence on ne doic accuſer les Medecins & Chirurgies,ny auſſi les Apothicaires
quell & leurs drogues.Cari’oſe affermer qu'aux goutes,il y a un certain virus incogneu &
NUE indicible : ce qu'Auicenne ſemble confeſſer,liure troiſicſme, fen. 22. traicté z.chap.
5,64 5. & 7. quand il dict, qu'il y a vne eſpece de goute, quieſt d'vne matiere ſi aiguë &
D maligne,quc fielle vientà ſ'émouuoir par quelque courroux d'eſprit, elle cauſe vne
MA mortſubite.Aufli Galien au liure de Theriacaad Piſonem ,chap.is. dir , quele the
riaque profite aux podagres , & à toutes maladies articulaires,parce qu'il obtund ,
Gin conſomme, & feiche la matiere virulence des goutes. Dauantage, Gourdon au cha
pitre des goutes , ſemble auſſi auoir entendu qu'en icelles y a quelque venenofité,
des quand il dit,qu'en telle maladie l'vlageducheriaque eſt fort à loücr: & principale
mentapres que le corps eſt mondifié & purgé. Orpourle dire en vn mot, les goutes Les goures
participent de certaine mariere virulente, tres-ſubtile & veneneuíc , non toutesfois participene
Pirkt
contagieuſe, laquelle peche plus en qualité qu'en quantité: qui caufe vne douleur de quelqne
extreme en la partie où elle combc, & eft cauſed'y faire fluer les humeurs , principa- mariere ind
vii
lement ceux qui ſont aptes & preparez à deſcendre: & non ſeulement les humeurs, cible,
mais auſſi les eſprits fatueux : ainſiqu'on void és morſures & piqucures de beſtes ve
nimeuſes,comine des inouſches àmiel,freſlons, & autres , quipar leur venin cauſent
douleur aiguë,auec chaleur,enfleure & vellies, qui ſe fait pour l'ebullition des hub
K Kk is
658 Dixhuictieſme Liure ,

Conditions meurs cauſée par le venin . Levirus arthritique fait pareils accidens , leſquels neceſ- A

de Chumeur ſent iuſques à ce qu'il ſoit reſout & conſommé, ſoitpar nature ou par medicamens,
Cantes des ou par les deux enſemble. Or il faut icy entendre, que les accidens des morſures&
accidens des piqueuresdes beſtes venimeuſes ne viennent pas ſeulement pour la ſolution de con
morſures et tinuité : car on void ſouuent les coulturiers, & autres artiſans,le piquerprofonde
piqueures mene de leurs aiguilles aux extremicez des doigts , meſmes entre l'ongle & la chair :
penencuſes. neantmoins ne fentent pareille douleur, & n'y void - on ſuruenir le plus ſouuent au
cun mauuais accident . Parquoy ie conclus, que les accidens prouenans à cauſe de la f

morſure d'vne vipere,ou piqueure d'vn ſcorpion , icctant vne bien petite quantité de
il
venin , & qui eft cauſc en peu de temps de faire vne intemperature à la partie ,& gran
II
demutacion au corps,ſe doiuent attribuer, non à la playe, mais à la qualité du venin
principalement. Auſſi la cauſe de la douleur, & des autres accidens qui aduiennent
aux goutes ,eſt vne virulence & venenoſité, laquelle ( comme nous auons dit ) peche
de
plus en qualité qu'en quantité : ce qu'on cognoiſt en ce qu'aucuns ont des douleurs
auxiointures ſans aucune apparence de defluxion d'humeurs , mais par vne ſeule in B
ce
temperature indicible : laquelle choſe peut eſtre encorcs illuſtrée & entenduë par
ceſte hiſtoire . 20

Hiſtoires memorables. CH A P. III.

416
Hiſtoire d'o . E Roy eſtant à Bordeaux , ie fus appellé auec meſſieurs Chapelain
ne demoiſelle 21
Conſeiller & premier Medecin du Roy , Caſtellan Conſeiller &
quifui guarie Medecin du Roy , & premier de la Royne , auec Monſieur de la
d'une extre
me douleur Tafte, Medecin demeurant à Bordeaux , & maiſtre Nicole Lam

par vn caute bert, Chirurgien ordinaire du Roy , pour viſicer & donner conſeil
re potentiel. à vne damoiſelle, aagée de quarante ansou enuiron , malade d'v
ne tumeur de la groſſeur d'un petit pois , ſituée au deſſous de la
iointure de la hanche ſeneſtre ,partie externe: & ſur ladite tumeur & parties voiſines,
ſentoit par interualle de temps vne extremedouleur,comme ie declareray cy -apres :
& pour l'appaiſer,on auoit cherché cous moyens,appellant pour ce faire pluſieurs
Medecins & Chirurgiens , voire meſıne des ſorciers & ſorcieres :cous leſquels ne luy c
ſceurent donner aucun allegement de la douleur . Or ayans tous entendu ceſte hi
ſtoire , ic deſiray fort ſçauoir quels accidens ſuiuoient en l'accez de fa douleur : donc

ie m'en allay au logis de ladice damoiſelle, accompagné dudit de la Taſte :où bien
toſt apres eſtansarriuez,ſa douleur luy print, & alors elle cominença à crier , ſe iet
tant ça & là , faiſant des mouvemens incroyables. Carelle metroit la teſte entre les ‫ܐܪܐ‬

iambes, & les pieds ſur les eſpaules, auec pluſieurs autres mouuemens merueilleux.
Cet accez luy dura pres d'un quart d'heure: pendant lequel ie m'efforçay à prendre
gardef'il ſuruenoit tumeur,ouquelque inflammation au lieu de la douleur:maisic
puis acertener qu'il n'y en auoit aucune, ny au ſens du tact, ny de la veuë . Vray eſt
que lors que i’y touchois elle crioie dauantage. L'accez paſſé,elle demeuroit en vne 4 .

grande chaleur & ſucur vniuerſelle & laſſitude de tous les membres , ne ſe pouuanc
aucunement remuer. Or apres auoir veu telle choſe, ie demeuray grandement el
merueillé ,comme auffi fit ledit de la Taſte ; auquel ie demanday ce qui luy en ſem

bloic : il me fic reſponſe, qu'il eſtimoit que c'eſtoit vn Demon qui tourmentoit ceſte peric
pauure creature. En quoy ie ne luy voulus contredire pour l'heure , attendu que ia. D
mais n'auois veu ny ouyparler de tel accident . Car ſi c'euſt eſté vne maladie epile
ptique, il ſe fuſt enſuiuy perdition de tous les ſens , auec conuulſion : mais ceſte da les fal
moiſelle ratiocinoit bien , & parloit encore mieux . Apres qu’euſmes fait rapport de
1101
ce ſpectacleà meſſieurs Chapelain & Caſtellan , ils furent grandementeſtonnez : &
fue conclu de nous tous ( attendu qu'on auoit procedé auparauant par pluſieurs
moyens, leſquels ne luy auoient aucunement ofté la douleur ) qu'on luy applique
roit ſur la tumeur vn cautere potentiel, lequel i'appliquay : & l'eſcarre cheure, tom .
bavne ſanie virulente de couleur fort noire : & fut veuë depuis n'auoir aucunedou
leur. Parquoy ie veux conclure par ceſte hiſtoire, que la cauſe de la douleur eſtoicvn
virus venimeux , lequel pechoit plus en qualité qu'en quantité : qui eut iſſuë par le
moyen de l'ouuerture faicte par le cancere.
Surre his Vnſemblable fai & eft aducnu à la femme du Cocher de la Royne , demeurant à
Joire. Amboiſe , au milieu du bras droit , ayāt par certains iours ſemblables douleurs que la
Des Goutes . 659

A ſuſdite damoiſelle : laquelle nous vint trouuer,meſſieurs Chapelain , Caſtellan , &


moy à Orleans,nous ſuppliant que nous euſſions à luy vouloir donner ſecours à la

douleur ,qui eſtoit ſi vehemente qu'elle ſe vouloit iecter par les feneſtres, ayane pour
cette occaſion gardes auec elle . Nous conclumes qu'on luyappliqueroit vn cautere
je
potentiel ſur la partie meſme, ainſi qu'auions faict à la ſuſdite damoiſelle , ce que
fis : & l'ouverture faite , fa douleur ceſla , & l'a depuis du tout perduë . Or pour re
ſeulement cauſe des goutes,
tourner à noſtre propos , le vice des humeurs n'eſt pas
parce que le mal ne ſeroit pas ſeulement aux ioinđures , mais auſi aux parties mul
culeuſes: & ne cauſeroit telles douleurs comme i’ay dit. Auſſi on peut dire à la ve- Pall. Ægio

cort rité,que le mal ne vient pas de l'imbecillité des ioin &tures ( comme pluſieurs efti- neta.
ment) laquelle ſeule auſſi ne peut cauſer celles douleurs . Carlileſtoit ainſi , les dou . Cauſes de les
douleur Aro
leurs ne ceſſeroienc iamais pendant que l'homme vit , d'autant que l'imbecillic eſt
é shritique.
touſiours aux articles : ains les deux enſemble,c'eſt à ſçauoir, la redondance vicieuſe selon Hippo
50
de l'humeur , & l'imbecillité des articles. Que diray- ie plus pour demonſtrer l'incer- Aphor . 55:
nelei
B titude de la cauſe des goutes ? C'eſt qu'elles ſont comme vnerente conſtituée , pour- lin.6.
ce qu'elles reuiennent tous les ans à certains termes, principalement en Automne &
au Printemps, quelque diligence que l'on y ſçache faire : dequoy l’experience faict
foy. Etquiplus eſt,celles meſmement qui viennent de naiſſance, c'eſt à dire par he- La goure qui
ricage du pere & de la mere , ne peuuent iamais guarir vrayement , comme i'ay dit: viene depere
Ch23
en fils eſt in
ainsſeulementreçoiuent cure palliatiue. Ec pour y proceder , les Medecins & Chi- Curable.
rurgiens doiuent auoir bon pied ,bon vil, & qu'ils ſoiencmunis de bon iugement , &
nieur
de pluſieurs & diuers remedes : à fin qu'on en puiſſe choiſir ſelon qu'on verra les ac
Fick
cidens aduenir, pour ſeder les douleurscant chaudes que froides, ou miſtionnées en
NOK ſemble , tant qu'il ſera poſſible.

Des cauſes acquiſes de manifeftes des Goutes. CH A P M111 .

OMBIEN que nous ayons demonſtré la cauſe des goutes eſtrein


cogneuë,toutesfois communémencon luy aſſigne des cauſes, dont
le Medecin pour donner quelques raiſons. Or tout ainſi qu'il y a Cauſe des
trois cauſes aux autres maladies, à ſçauoir,primitiue,antecedente, goutes here:
& conioin &te, auſſi y a- il aux goutes. Quant à la primitiue , elle est disaires.
double : l'vne vient dela premiere generation, comme celuy qui
aura eſté procreé de pere & mere goureux : principalement quand
la mariere virulente eſt en reuc,c'eſt à dire en mouuement , & que l'homme ſe ioinct
Tere . auec ſa compagne , & qu'il engendre ,il eſt bien difficile que les enfans ne ſoient gou
teux, à cauſe que ceſtematiere virulente ſe melle auec la ſemence : d'autant que la
CID . maciere de la femence vient de tout le corps , comme monitre Ariſtote au liure De
jë la generatione animalium : pareillement Hippocrates au liure de l'air des regions , & des yw r. lini
uroker caux. L'autre prouient parintemperature, tant dela maniere de viure , que de chap 17 :
trop
fep. frequent exercice de l'acte venerien , & autres choſes que declarerons cy -apres.Cel
le qui prouient des parens gouteux , peur eſtre appellée maladie hereditaire , pource
qu'elle vient de pere en fils : ce que toutesfois n'aduient pas touſiours, comme l'ex
oy
perience le monitre. Car on void pluſieurseſtre vexez des goutes , deſquels les pere Pourqu les
D & mere iamais n'en auoienteſté malades : & d'autres n'en eſtreaucunement affigez, maladies des
fack & toutesfois leur pere & mere en eſtoient grandement tourmentez : laquelle choſe peres or mes
res ne paſjent
ISCOM ſefait par la bonté de la feinence de la femme, & par la bonne cemperature de la ma soufiones aux
tricc d'icelle ,corrigeant l'intemperature de la ſemence virile : couc ainſi que celle de enfans.
l'homme peut corriger celle de la femme : comme on void ſouuent par experience
des enfans n'eſtre point goureux, lepreux , teigneux, epileptiques, encore que leur
pere ou mere fuſſent ſubiects à telles maladies. Laquelle correštion ſi elle défaut au .
pere ou à la mere ,les enfans,ne peuuent échapper qu'ils ne ſoient ſubiects auſdites
10 . maladies : leſquelles ne ſe peuuent parfaictement curer , quelque diligence qu'on y
puiſſe faire , Parquoyon ne doit ( commenous auons dia ) calonnier la Medecine
ny la Chirurgie ,ny moins les drogues de l'Apothicaire : pource que la ſemence ſuit Ia
ſemence
la complexion & temperament de celuy quiengendre en ſorte qu'vn homme & vne ſuis letempe
femme bien cemperez,produirontvnclemence bien complexionnée. Au contraire , celuyquien
f'ils ſont intemperez, produiront vne ſemence mal-complexionnée , & non propre gendre.
кKk iij
660 Dixhuictiefme Liure ,
Auicenne pour engendrer vn enfanc bien complexionné, comme deduit Auicenne. Parquoy A
lir. 3.fen. celuy qui ſera gouteux,ſ'ilfait vn enfant, à grande peine pourra-il euader qu'il ne
32.traicté ſoit goureux,lice n'eſt par lareâification dela ſemence de la mere ou du pere,ainſi
2.chap.s. qu'auons declaré.Laſeconde cauſe vientdes ſuperAuicez de noſtre corps, qui fal
terent & fe conuerciſſent en cér humeur virulent. Or ces fuperfluitez produites par
vne grande plenitude, ou obſtructions des vaiſſeaux ( qui ſe face principalement par
la mauuaiſemaniere de viure,& pour auoir crapulé & beu desvins fores) font elle
uer au cerucau pluſieursvapeurs,qui rempliſſent la ceſte : puisles membranes, nerfs,
& tendons,en ſont rendus laxes & imbecilles, & par conſequent les iointures. Aufli
cela aduient pour auoir mangé pluſieurs & diuerſes viandes à chacun repas , en trop
3
grande quantité : leſquelles engendrentvne cacochymic. Aulli dormir tot apres
le repas,&z longuement,& prendre peu d'exercice,telles choſes corrompent la fa
Credicé,mere culté digeſtiue. Carlors qu'elle defaur, fenſuiuentcruditez, obſtructions & ferofi
desgoules. tez, quitombent ſur les iointures : leſquelles ſur toutes autres parties, ſontdebiles
naturellement,ou par accident: naturellement,commeen ceux qui les ont dés leur B
premiere generation laxes& foibles: par accident , comme en ceux qui ont beau
coup cheminé à pied , ou ſe ſont tenus debout,ou ont enduré le froid :pource que
Cauſes de par la longueintemperature ,les iointures ſont renduës imbecilles. Auſſi cela peur
l'imbecillité aduenir par cheute,ou coups,ou pour auoir eſté eſtendu fu : la geſne, ou auoir endu
desiointures. ré l'altrapade: pareillementàceux qui ſontexceſſifs au coït , & principalement to
Gal. an i: apres le repas,d'autantque tout le corps eftrefrigeré: parce que la chaleur naturelle
liure
mins.de fe-
l'amoindrit,pourlagrandequantité d'eſprits quiſontiettez au coïc, & quela faculcó
digeſtiue en eſt affoiblie: & þarcant l'enſuiuent cruditez ſereuſes, qui defluent fer
les ioincures,à cauſe deſquelles, & auſſi de ladirerefrigeration,leſdites iointures ſone
debilitées,quieſt cauſe des goutes , Or veu que ladite faculté digeſtiue defaut aux
vieilles gens,il ne ſe faut émerueiller ſ'ils ſontgouteux. Outre- plus, les cuacuations
accouſtumées recenuës,comme le vomiſſement, fluxmenſtruel,hemorrhoidal,Aux
de ventre,& autres,fouuentſont cauſe de la goute : partant les femmes ne ſont fu
iccces aux goutes , pendant qu'elles ont leurflux,mais bien apres l'auoir perdu. Ce
Aph. 29. que dit Hippocrates: parce que les ſuperfluitez ſont retenuës, leſquelles auoient
liure 6. accouſtume de ſe purger. Dauantage,ceux à qui quelques vieux vlceres ou fiſtules
auront coulé par longues années,8c puis ſont cloſes & conſolidées, f'ils ne tiennent
apres bon regime , & nefe purgent par fois,ſont en danger d'eſtre gouteux :comme A
au contraire, lesvarices des cuiſſes & iábes, & les hemorrhoïdes, Aux dyſenterique,
& vieux vlceres , empeſchent la generation des goutes. Plus, ceux qui releuentde
quelque grande maladie,leſquels n'ontpointefté bien purgez parmedecine, ou par
nature,fouuentdeuiennent goureux :ceuxqui ont lecerueau fort froid & humide ,
Cauſes pri- font pareillement ſubiets aux goutes . Or pourconclureen peu de paroles,les cauſes
misiues des manifeſtes de ceſte maladie font,mauuaiſe maniere de viure, qui engendre crudirez
goules. & ſeroſitez, le coït ſuperflu , cheminer trop haſtiuement, ou plus longuement que
nature ne le peut porter,demeurer crop longuemór debout,cquitations de crop lon
gue durée , euacuations accouſtumées retenuës,le vice des parens, lequel les enfans
Cauſes inter- font contraints de ſentir, quaſi par droit heredicaire. Quant aux cauſes internes, en
nes,
Voy Guidon tre les principales ſont redondance des humeurs crus,& l'amplitude des vaiſſeaux, D
au chap.des la force des principales parties mandantes,& l'imbecillitédes receuances ,auec laxe
gontes.
capacité des conduits & inanitez d'icelles,&c la ſicuacion inferieure de la partie afili
gée. Or le icune Chirurgien doit ſçauoir, qu'il y a quatre facultez naturelles,par
leſquelles les plantes & animaux ſegouuernent.La premiere, eſt celle qui attire l'a
liment: la ſeconde,qui le retient : la rierce, qui le change & digere : la quarte , qui
reiecce le ſuperflu, parce qu'il peche en quantité ou en qualité,ou en tous les deux
enſemble : auſſi le virus & les humeurs ſont ieccez par la vertu expultrice aux iointu
Pourquoy res. Quant à ce que ledithumeur ſ'arreſte pluſtoſt aux iointures qu'aux parties muf
l'humeur culeuſes,cela ſefait, pource que les iointures ſont exangues & froides, c'eſt àdire,
s'arreſteplus auec vnpeu de ſang,& de ſubſtancedenſe & ferrée, & queles parties qui fone entre
roſt aux ioin
tures qu'aux icelles ſontcharneuſes,laxes & molles, & la grande aftri&tion du cuir i qui eſt ordi
autres par nairement aux vieux pour la ficcité )fait que la tranſpiration eſt empeichée, & les
ries. ſuperfluitez retenuës:dontſouuent s'enfuit la goute, ou quelque grand prurit par
cout le corps , ou gracelles, ou rongnes,& leurs vrincs acres . Or la douleur qui ſe faic
--
!
Des Goutes. 661

А en ceſte maladie , vient pour l'acrimonie de la qualité virulente , quelquesfois toute


ſeule ſans nullc autre humeur : & auſſi le plus ſouuentla douleur faicte du virus , eſt
cauſe d'actirer des eſprits flatueux , & humeurs ja preparez à fluer, comme le ſang :
& alorsla fluxion ſera phlegmoneuſe : ſi c'eſt la cholere , eryſipelateuſe : ſi c'eſt le
phlegme , ædemaceuſe: ſi c'eſtl'humeurmelancholic , ſcirrheule.Etfily a deux hu
meurs meflez enſemble , la denominacion ſe prendra de celuy qui ſera en plus gran

nesia de quantité , comme file ſang domine la cholere , on pourra dire phlegmoneryfipe
latcux: au contraire,ſi c'eſt la cholere, fera nommé eryſipelas phlegmoneux :& ainſi

11,00 des autres humeurs. Etceſte matiere virulence accompagnée des humeurs & eſprits
Alacucux, eſtans aux iointures , les remplic & faic diſtenſion aux parties,commemem,
branes , aponeuroſes, tendons , & autres parties , qui lient lesiointures.

De l'origine de la defluxion des goutes.


Traces
С Н 4Р. V.
Osta B

'Origine de la defluxion & matiere des goutes vient du cerucau , source de


ou du foye. Lors qu'elle vient du cerucau , on peut dire que c'eſt l'humeur
la pituite ſereuſe c
,laire & fubtile , telle qu'on void le plus lou- Athriti
uent diftiler & couler par le nez & parla bouche , accompagnéc Fernel.
du virus indicible , laquelle diffluë par les tuniques des nerfs & Diſtinction
tendons par deſſous le cuirmuſculeux, qui couure le crane , & de laſource
par dedans le grandtrou , par lequella nuque paffe : & celle Au- des humeurs
par les veines Arthriti
xion eſt couſiours froide. Lors qu'elle vient du foye , elle court & Huë par
& arteres chargées d'abondance d'humeurs , qu'elles ne peuvent concenir pour la ques.
quantité , ou pour la qualicévicieuſe. Ec peut- on lors dire que ce ſont les quatre hu
meurs contenus en la maſſe ſanguinaire, ſimples ou compoſez, accompagnez pareil
lement du virus arthritique : & ſont pluſtoſt chauds que froids, au contraire de ce
quiaduient lorsque la fluxion ſe fait du cerueau. Orceſte matiere , de laquelle ſonc
faites les goutes ,
que nous auons maintenant declarées, eſt la fluxion qui ſe fait des
0
autres parties : outre laquelle il y avne autre cauſe appellée congeſtion : à ſçauoir,
quand quelque partie ne peut faire concoction de ce quiluy eſt baillé par Nature
pour la nourriture. Et quant à moy il me ſemble ( ſaufmeilleur iugement que le
mien) que la matiere virulente des goutes eſt en la maſſe ſanguinaire v
, oire en toute
l'habitude du corps : & que ceſte ſerolité virulente ſe meur par certainescauſes ,qu'a.
0122,0 uons cy-deſſus mentionnées . Encore outre ces raiſons naturelles, il y a quelque cho
he ſe qu'on ne peut expliquer , ainſi qu'à l'epilepſie, fićure quarre , & àvne infinité d'au
es,leo tres maladies: ce qu'Hippocrates a dit au liure premier des Prognoſtiques, qu'aux
lectus maladies il y a quelque choſe de diuin .
Jent

Lesſignes que lafluxion vient du cerueau . C H AP , P 1.

Es malades , lors que la fuxion ſe veut faire , ſe ſentent appeſantis, Auant-00:32


endormis , & hebetez , auec grand ſentiment de douleur aux parties reurs de fluo
1, 2015 D externes de la reſte , & principalement quand on leur renuerſe leurs xion Ar
cheucux : & ſouuentesfois on leur trouue vne tumeurædemaceufe thritique du
CETHEAN .
au cuir qui couure le crane : & leur ſemble qu'ils ayent changé leur
nature à vne autre preſque toute eſtrange, de ſortequ'il leur eſt aduis qu'ils ne ſont
2025 ". plus eux -meſmes , pource que la virulence de la matiere a renuerſé & changé les
fonctions, & toute l'æconomie du corps . Auſli ils ſentent grandes cruditez en l'e
ILITIES ſtomach , & routemens aigres . Er meſme l'humeur qui caule la migraine ,a ſimilitu- Diſtinction
de la tempe
JE de pour ſa malice & virulence , à celuy qui cauſe les goutes : laquelle pource qu'a
rie de l'his
lors elle communique fa douleur à toute la moitié de la teſte , a eſté appellée des an . meyr Are
ciens Hemicrania . A aucunsla fluxion deſcend du cerucau entre cuir & chair aux shritique.
Job iointures , voire iuſques à celle des doigts des pieds, & telle defluxion procede len
beri tement, au contraire de l'humeur qui eſt chaud , duquel la Auxion ſe fait prompte
ment , & auec ſentiment de douleur.
KKK zij
662 Ledixhuictieſme Liure ,
A
Les ſignes que la fluxion vient du Foye, & de la malle fanguinaisè.
CH A P. VII .

Esmalades ſencent chaleur au foye, & aux parties interieures de leurs


corps, & ſont communément de temperature ſanguine & cholerique,
ayans les veineslarges & groſſes: ioin que la fluxion ſe fait prompte
Comme le mient : dont ſe fait Auxion de fang ,& de la cholere auec les autres hu
fang dege meurs.Maisquelquesfois le ſang peut degenerer de la qualité chaude,
nere en 4
& deuenir picuiceux & ſereux par multiplication des cruditez, & autres choſes qui
quoficez. cauſent & engendrent la pituite: & alors peut aduenir , que la maſſe fanguinaire,
comme du cerucau , tombe & découle ſur les iointures, vn humeur picuiceux auec
ques le virus : tout ainſi que ſi l'humeur melancholique eſt en grandeabondance ,il
ypeut auſſi découler : ce quetoutesfois eſt rare , comme nousdemonſtrerons en fon
licu : parcantpourmieux diſtinguer la difference deſdits humeurs , nous les deſcri
rons particulierement . LE

Les ſignespour cognoiſtre quel humeur accompagne le virus Arthritique. 48

CH A P. VIII.

Remierement pour cognoiſtre ſile ſang domine , faut confiderer t'a


ge , comme la ieuneſſe du malade , ſa temperature ſanguine, le temps
de l'année, qui eſt le Printemps , la region temperée :aufli fil a vſé de
Signes du maniere de viure, chaude & humide, multipliant le ſang : & qu'au
lang abon
dant. matinla douleur eſt plus grande & plus pulſatile & tenſiue , auec yne
peranceur ,& la couleur de la partie rouge & vermeille : joint qu'il y a grande cu
meur,non ſeulement des veines, mais de toute la partie malade : & y a grande diſten o Ved

ſion en la partie , tellement qu'il ſemble qu'elle ſe rompe. Les vrines ſont rouges & PAN

eſpeſſes: dauantage , ils ne peuucnt endurer l'application des remedes chauds ,ains
Le ſang a ſes par l'application d'iceux, la douleurſ'aigrit dauantage. Plus , les exacerbacions , ou
paroxyſmes accés, le font & repetent tous les iours, & principalement au matin . De toutes ces
le matin .
choſes tu peux conclure que le ſang domine.
Lesſignes de la Chelere.
CHAP. IX .

Couleur d'E.
Vlli lesſignes de la Cholere font, que la couleur de la partie ſera crou
iée blaffarde, auec grande chaleurignée, & peu de cumcur, douleur
ryſipelas. poignante, & excremement aiguë : & le malade ſent pluſtoſt chaleur,
que diſtenſion & peſanteur: & combien qué la partie apparoiſſe rou
ge, toutesfois elle tend plusà citrinité , c'eſt à dire couleur iaunaſtre, hos
qu'à la couleur ſanguine :& fi elle eſt preſſéc du doige , le ſang cholerique ( à cau
le qu'il eſt fort ſubtil)fuit facilement , puisſubic retourne, & reuient plus rougea. D.
ître qu'auparavant. Car deuant qu'on comprimaſt la partie , l'humeur plusvicieux
& flaue occupoit la ſuperficie du cuir , & par la compreſſion du doigt, le ſang
qui eſtoit caché ſous le cuir , fait monſtre & parade de ſoy, iuſques à ce que l'ef
feet de la compreſſion ceſſe , l'humeur bilieux retourne en ſon premier lieu , dont
iceluy apparoiſt plus blafard , qu'en vn phlegmon faiet de ſangpur, comme nous
auons dit : ioint que la partie eſtplus aidée parmedicamens refrigerans & hume& a
Le mouue- tifs, que par ceux quieſchauffent & feichent. Le patient a le pouls fort viſte & fre
ment de quent,& eft de temperament choleriquc. Auſli la douleur ſera trouuée plus grande
l'humeur
ſur le midy , iuſques à quatre heures du iour, qu'à autres heures, parce que la cho
cholerique. lere ſe meut en el temps. Dauantage les patiensont des cxacerbations , c'eſt à di
re , renouvellemens de douleur de crois iours en crois jours , comme on void aux
fiéures tierces . Auſſi la chaleurdu temps donneindice ,commel’Eſté. Outre plus
la qualité des viandes cſt à conſiderer ,commeſi le malade a vſé de viandes , qui
Des Goutes .
663

A multiplient & engendrent la cholere , ſes vrines ſeront trouuées fort fubtiles, &
de couleur citrine , & quelquesfois tellement acres , qu'elles offenſent le conduic
yrinal .

Signes de l'humeur pituiteux.


Chola
CH AP. X.
Alipoto
ng

' Humeur pituiteux , qui cauſe les goutes , eſt ſereux , & quaſi Quelle espece
couſiours feinblable à celuy qu'on void diſtiller du cerucau en depituite fait
temps froid , par le nez , comme auons dit . Lors qu'il defluë ſur la goute pia
quelque iointure , il faut qu'elle apparoiſſe enflée , & de la cou- enitenſe .
LICE
leur du cuir : & ne differe grandement en couleur de la partie 1

faine, c'eſt à dire ,qu'elle n'eſt ny rouge ny chaude, mais on ſeno


B froideur au ſens du tact: & l'application des choſes froides nuit
grandementau patient, mais les chaudes luy ſont profitables. Or pour engendrer
tel humeur , la vieilleſſe y fait beaucoup , & aufli le temperament froid & humide,
& l'air ambiens de meſme, pareillement le temps d'Hyuer , loyſiueré , les viandes
RE froides & humides , fruicts, legumes, & generalement toutes choſes qui engendrenc
la pituite : & la douleur eſt en temps d'Hyuer, plus grande la nuict que le iour, pour- La piinite a
fon principal
ce que la picuite a ſes exacerbations, ou mouuemens , tousles jours, & principale mouvement
ment la nuict. La tumeur ſera trouuée molle , en laquelle apres auoir preſſé du la nuict.
1
doigt deſſus, la foſſe y demeure quelque temps apres , comme on void aux ædemes.
E, Lesvrines ſeront trouuées cruës & eſpelfes, & de couleur blancheaſtre, comme
touteslesautres ſuperfuitez phlegmatiques, mucqueuſes, & glaireuſes.Sila pitui
signe de pie
cc eſt ſalée ,le patient ſencira vn grand prurit &
, mordacité à la partie. Le pouls au
laire falée.
toucher ſera trouué mol , lent , & diuers. Auſſion prend garde que le malade n'a fait
‫ܛܬܐ‬ exercice . Eccer humeur cauſe le plus ſouuent les goutes, principalement quand il
TAL cft cru : 8 pour abreger , d'autant queles ſuſdics humeurs ſeront eſloignez de leurs
temperamens , & aurontacquis vne qualité acrc & virulente , d'aucant aulli en fc
ch roncles douleurs & accidens plus grands.

Teleorman
Signes de l'humeur melancholique.

С на Р. XI .

1 N la particy aura peu de cumeur & douleur , & fera commeendormie


Cauſes quiao
en ſentiment de peſanteur.La couleur ſera aucunement liuide & plom-maſlen :
l'hu
Wielem bine , & le plus couuent on ſent la partie froide , quand on la touche. mehr melan
ĐI,C. Auſli peut eftre que le malade eſt de temperature in.clancholique, & cholique.
obfcbeth accenuć: pareillement qu'il aura vſé de viandes qui multiplient l'hu
tapi meurmelancholique. Lacauſe auſſi de tel humeur eſt la region froide & ſeiche, 8
les alimens qui engendrent ſuc melancholique : auſſi la triſteſſe, le temps d'Au
ern
Guv tomne , ou l'Hyuer , & l'âgequi eſt vers la vieilleſſe . Le pouls ſera trouué dur , cen
fus con D lif, & peric. Le patient aura peu d'apperit de boire & manger. Les vrines le plus ſou
2541 uent au commencement ſont cenuës & aqueuſes, à cauſe des obſtructions, & apres
plus noires qu'elles ne doiuent eſtre ſelon Nature ,& moyennement craſſes. La reli Le temps dy
e
cigl dence eſtquelquesfois mellée de matiere cruente, & fuſque. Les exacerbacions ſe monuement
ront de quatre iours en quatre iours, & la douleur ſera trouuée plus grande apres de l'humeur
midy vers le ſoir , qu'à autre heure du jour , à cauſe que le mouuement de l'humeur melancholi,
melancholique eſt tel,ce qu'on voidaux fiéures quartes, qui ſont faites de cel hu- que.
meur . Or pluſieurs eſtiment que les goutes ne fengendrent d'humeur melancholi
que , à cauſe de la ſubſtance groſſe & terreſtre , quià peine peut Auer aux iointures :
ceque ie concede, fil eſtoitfeul: mais eſtancaccompagné du virus predir , peut Auer
aux iointures .

and
664 Dixhuictieſme Liure ,
A
Prognoſtic. CHAP. XII.

La goure eft Es anciens Medecins nous ont laiſſépar eſcrit, que les maladies des
accompagnée jointures ſont trouuées entre les plus griefsmaux, & tourmens prel
de douleur
inſupporta que inſupportables,tellementque quelquesfois les malades perdent
ble . le ſens &entendement, & defirentplusla mort que la vie. Les gou
ces tiennent leur periode & paroxyſme du virus , & des humeursdonc
Hipp.li.6. elles ſont faites : elles viennent volonciers au Printemps, & en Automne, comme
Aphor.ss. nous avons par cy- deuanc declaré. Et ceux qui ſont vexez de goutes naturelles, c'eſt
Goutes
rables. incu- à dire , qui les ont heredicaires , ne guariflenciamais parfaitement , ou bien rare
ment. Lors auſſi que les næuds , ou nodofitez ſontaux jointures , ils ne ſe peuuent
parfaictement curer, principalement ſi la maciere cft gypſée, parce qu'elle ne ſe peut
reſoudre, & encores moins ſuppurer.Les goutes faites de matiere picuiteuſe & froi
de , ne ſont pas cant douloureuſes, que celles qui ſont faictes de maciere chaude, B
comme de ſang ou de cholere : auſielles ne ſont li colt curées, parce que leschaudes
Gal . an
ſont pluſtoſt digerées & reſoluës,àcauſe de leur chaleur & ſubcilité. Carles froides
Comm. du durent le plus ſouuent quarance iours ou plus, à cauſe que la matiere eft groffe & el
49;Apho
. de peſſe: quelquesfoispluſtoft,&quelquesfois plus tard, ſelon que le malade tiendra
bon regime , & qu'ilſera bien penſé de Medecin & Chirurgien. Auſli d'autant plus
que la parcie , où ſ'eſtfaite la fluxion eſt eſpeſſe, comme la iointure du genoüil , ou
ſous le talon,ou en lieu profond, comme à la hanche, & qu'elle a lavertu expultrice
imbecile, le mal eſt pluslongà guarir, que quand le contraire le fait. Celles quiſont
chaudes, durent quatorze iours, & bien ſouventvingt,ou plus , quelquc diligence
qu'on y ſçache faire.Les goutes qui ſont cauſées d'humeursgros & viſqueux,nefont
pareillementgrande douleur, & neſont auſſi coſtguaries. Celles qui ſontfaites d'hu
ieurs chauds & choleriques , ſont tres- douloureuſes, & meccent quelquesfois le
pacient en deſeſpoir , & cauſent à aucuns paralyſie, & difficulté de reſpirer, percurs
bacion d'eſprit, gangrene& mortification en la partie , & par conſequent la mort.
Entre toutes lesdouleurs arthritiques , la ſciatique emporte le prix , pour eſtre plus
douloureuſe, & cauſer plus grands accidens, comme fiéure,inquietude,luxacion ,&
claudication perpetuelle , emaciation, ou amaigriſſement de toute la cuiſſe & de la
Cauſe de la jambe , & quelques fois de tout le corps . La caule de la claudication & de l’emacia
claudication tion et quel'humeur aura jeccél'os Femoris hors de la boërte & lieu naturel : lequel A

aux goutes eltane hors,preſſe les muſcles,veines,arteres,& le gros nerf quideſcend le longde la
Jciatiques. cuiſſe,iuſqu'à l'extremité des orteils , pour ſe diſtribuer aux muſcles : au moyen de
quoy les elprits ne peuvent reluireaux parties inferieures; & par conſequentle tabc.
fient , & deviennentconſommées & ainaigries: donc le pauure gouteux demeure
Autre cauſe apres claudicant tout le long de ſa vie.Orpluſieurs demeurent claudicans , combien
de claudica- qu'ils n'ayent luxation :quiſe fait à cauſeque l'humeur glaireux,propre çant pourla
sion .
nourriture desiointures, quepour les lubrifier & les rendre plus faciles à mouuoit,
f'endurcit par la chaleureſtrāge:& pareillemét parce qu'il n'eſt ſubtilié par le mou
vement quiauoit accouſtumed'eſtre fait: & lesautreshumeurs ,qui ſont defluezen
plus grande quantité , que la partie n'a peu digerer , & affimiler en ſa ſubſtance,
par congeſtion ſont demeurez impactes& endurcis, qui fait quele mouuement ne D
peut eftie faict & accomply. Dauantage, la goute cauſée de matiere groſſe & viſ
queuſe, defluant ſur vne partie , ſouuent rend les membres courbez & tortus ,
juſques à jetrer les os hors de leurs propres iointures : ce que l'on void , non ſeule
ment és grandes iointures,mais és doigts des mains& des pieds , leſquels par vne
goute nouće font quelquesfois jettez deleurs jointures, au moyen dequoy ils de
viennent tout crochus :& principalement, quand l'humeurtombe en grande abon
dance , rend la partic languide & atrophiée,c'eſt à dire , conſumée ,aride & ſei
che , & ſon action deprauće, & louuent du tout perdue. Car toute intempera
ture qui demeure longuement ſur vne partie , diminuè la force & vertu dicel.
le , & par conſequent ſon action , comme nous auons dit cy -deſſus. Lors que le
virus cauſant les goutes, n'eſt ſelon ſon cours ordinaire & paroxyſme accouſtu
mé , jetré aux iointures ( par l'imbecilité de la vertu expulfiue ' il cauſe mala
dies cruelles , grandes & mortelles. Car quand il arriue en la ſubſtance du foye
Des Goutes. 665
A ilexciteinflammation d'iceluy : fil demeure aux grandes veines , il engendre une mortel
Accident
du
fiéure continuë: & fil tombe ſur la membrane quicouure les coſtes, il cauſera vne Cours d'h4
diet pleureſic : fildemeure & faccacheauxinteſtins, ſera cauſe de faire vne colique,ou meir arthrin
mis on
iliaque paſſion, auec cres-grande douleur : & ainſiſurles autres parties faic accidens tique ſuppris
perten
diuers. Ce qu'on void , en cequ'aucuns goureux deuiennent paralytiques, à cauſe mé.
que la matiere des goutes bouche les poroſicez des nerfs, de ſorte que l'eſprit animal
n'y peucreluire:parquoy la partie demeure immobile , & reſoluë. Les vieillards ne Les vieillards
Cute peuuent iamais eſtre deliurez de leurs goutes,parce que leur ſang, & toute leurmaf- ne peruens
les.cc fe fanguinaireeſt alterée ,& ne peut etre rectifiée, non plus qu'vn vin bas, & deue- des
eftreguaris
goutes.
nu aigre. Les goutes qui viennent promptement ,procedent d'intemperature chau
de , & ſouuentſansmaciere: qui ſe cognoiſt , parce qu'il n'y a aucune tumeur appa
rence à la partie, ny au dehors , ny au dedans des iointures : & ſent-on apercemenc
par le coucher la partieforc chaude, & le pacientſe ſent allegé par remedes froids,
ainſi que nous auons dit . Au contrairela fluxion faite de matiere froide decoule len
chaud B tement, & la partie ſera froide, & allegée par remedes chauds . Les goutes viennent
- fro...
quelquesfois au fort de l'Hyuer, pourla grande froidure, qui bleſſe les parties ner
ueuſes, & comprime les humeurs, les chaffant aux iointures. Pareillement aucuns
en ſontvexezau fort del’Eſté, pour la grandechaleur, qui liquefie & fond les hu
meurs , dilace les conduirs, & parties nerueuſes & membraneuſes. Or elles peuuent
OUI,
veniren tout temps de l'année, pource que les gouteux ſe delbauchent, & ne tien
nent reigle en leur maniere de viure : toutesfois elles reviennent pluſtoſt au Prin.
temps , & en Automne , comme nous demonſtrerons cy-apres.
Dauantage, les gouteux prognoſtiquent ordinairement le changement de temps, les gouteuse tiquět
commeplaye,neige,ou quelque autre temps nubileux : tellemêt qu'ils portent auec leprognoſchangemes
eux vn Almanach quileur ſert touce leur vie , à cauſe de l'air gros & vaporeux que le de temps.
vent Auſtral, ou deMidy ameine & conduir , qui remplic lescorps d'humiditez , &
cſmeut interieurement les humeurs, & les agice : & lors qu'ils ſont ainſi eſmeus , ſe
fait nouuelle fluxion ſur les parties imbeciles, & principalement ſur les iointures,qui
ſontpeu charneuſes, & exangues, ou priuées de ſang ,& par conſequent de chaleur
C naturelle: & parce auſſiqu'elles onteltémalades,affligées & debilitéesde long teps,
non ſeulement en leur harmonie ,maisaulli en leur propre ſubſtance: & parcant les
pauures gouteux au changement du temps,& lors qu'il veut pleuuoir,leurs douleurs
leur viennent, & les courmentent plus aigrement. Il'y a aucuns gouteux quideſirent Les gourense
grandement lecoïc pendant leurs douleurs, parcequ'ils ſentent vne grande chaleur deſirens le
cſtrāgeau dedās du corps,laquellene ſe reſout & dillipe point en exhalations, come coit.
l'ardeur febrile: mais fait fondre l'humidicé ſeminale , qui courantaual vers les par
ties genitales ,les faicenfler 8z en-orgueillir.Ce que nous voyos meſme tous les jours
mbre
aduenir aux mulets deſchargez , & aux cheuaux de poſte rendus en l'eſtable , apres
auoir couru vn long chemin . Toutesfois cel acte aux gouceux eſt bien contraire, à
POL cauſe que par le coïc ( comme nous auons dit ) les eſprits, & chaleur naturelle ſere
ſoluent,dont la chaleur eſtrangeſauginente, & quant- & -quant leursdouleurs. Par
quoyie leurconſeille qu'ils ſengardent filslepeuuét faire, & fils ſonc ſages, & prin-.
cipalement ceux qui ne ſont pas mariez . Les anciens Medecins , & ceux de noſtre
temps, ont tenu que ceſte maladie eſtoic incurable : toutesfois on en a veu guarir,
D principalement celle qui n'eſt pas heredicaire, ou inuecerée , li le malade veut tenir
citos
bon regime,& n'eſtre ſujecà ſes plaiſirs. Les riches ſont plus fouuent tourmentez de Lagouré vlēt
goute,queles pauure s ,parce qu'ils ne trauaillent pas, & qu'ils mangent hcaumecontup, & pluſtoltaux
s
dediuerſes viande en tous leurs repas ,& boi uenc utant
d'a , & immoderé , &'richesqu'aux
trop ſouuentioüent aux Dames rabacuës. Auflion a veu des riches (leurs biens con .pauures.
bor
fiſquez) retourner à la cable des pauvres , & faiſans exercice,auoir eſté guaris d'icel
les, quiauparauant les vexoient beaucoup.Et de fait,on void rareinent les pauures
Laboureurs & Artiſans auoir les gouces . Parquoy ceux qui ſe veulent deliurer des
goutes, faut qu'ilsmangentpeu , & vſent de viandesqui engendrent bon fuc: qu'ils
Pexercent moderément , & laiſſent l'vſagedu vin & des femmes , ou pour le moins
qu'ilsen vſent moderémnent , & auſſi qu'ils vomiſſent & fe purgent par l'ordonnance
du docte Medecin. Hippocrates dit que les enfans ne ſontgouteux auant qu'ils Flippo Apha
Taide vſent du coïc: coucefoison voidaucunschaltrezeſtre gouteux,principalement ceux 3. lin. 6.
qui viuenten oyliueté, & ne trauaillent point,commeles ſedentaires & crapuleux :
666 Dixhuictieſme Liure ,

quieft cauſe qu'ils amaſſent crudicez en leurs corps , & humeurs malins & fuperfus, a
qui cauſent les gouces . Semblablement les femmes ne font point gouteuſes pendant
Aphor.29.
qu'elles ont leurs mois : car par iceux tout leur corps ſe purge:au contraire lors qu'ils
rect.G.
ſont trop coſt recenus , beaucoup de mariere & humeurs l'amaſſent en leurs Corps

qui le plus ſouuent leur cauſent les goutes .

Cure preferuatiue & curatiue des Goutes. С НАР. XIII.

Euant toutes choſes, il faut derechef diſtinguer toutes les cauſes, & ladi
uerſité de leur origine , afin de diuerſifier les medicamens ſelon la nature
de l'humeur pechancen quantité ou en qualité , afin de les guarir par leur
Trois cauſes
generales des contraire . Or il y a trois cauſes en general , conimenous auons dit,quifont
les goutes . La premiere qui vient par heritage, de pere en fils. La feconde , parle vice
goutes.
& alteration des humeurs. La tierce , de la foibleſſe & imbecilité des iointures. Et
pour contrarier à telles choſes, il faut auoic double indicacion , à ſçauoir euacuation
B
& alteration des humeurs ſuperabondás,& la fortification & roboration des iointu
res debiles . Or telles choſes le feront par bon regime , purgation , ſaignée, & en pro
uoquant les hemorrhoides,vomiſſemēs,ſucurs & vrines, & autres, ſelon qu'on verra
Pluſieurs one cítre neceſſaire, & par application des remedes locaux . Les remedes qui ſeruent à la
eſte guaris preſeruation des goutes, ſeruentauſſi à la curation ,tant curatiue , que palliatiue. Il
pour auoir eſt donc neceſſaire de contrarier aux cauſes qui font les goutes, commeà l'vlageim V
laiſé le vin moderé du vin , & de l'acte venerien , & l'oiſiveté, au dormir coſt apres le repas, & au
Ve
o lesfem- tres choſes qu'auons eſcrit aux cauſés. Lors que le malade cognoiſtra le tempsappro.
mes.
cher,auquel les goutesle doiuentprendre, il tiendra bon regimc,& fe purgera:& fi
la douleur prouient du ſang ,il ſe fera ſaigner ( ſ'il n'y a choſe qui l'empeſche) de la
partie contraire, pour faire vacuation & rcuulſion . Exemple : Si les parties ſuperieu
res ſont enflammées, on tirera du ſang des partiesinferieures : au contraire,ſiles par
Rectitude ties inferieures ſont enflammées, on taignera les fupericures, en gardant la re &ticude

des filamens.des filamens: comme ſi c'eſt le bras droit , on ouurira la veine de la jambe droite : &
0
ſi c'eſt le bras ſeneſtre,on ſaignera la jambe ſeneſtre :& ſera tiré du ſang en celle qua
tité qu'il ſera beſoin . Et apres auoir ainſi fait la ſaignée vniuerſelle, & que pour cela
la douleur & inflammation continuaſſent, alors on fera apertion de la veine la plus
prochedela douleur : ce que i'ay par pluſieurs fois fait, auec bonne & heureuſeiſſuë.
4
Ce que commande Hippocrates en la ſentences. de la 6. ſection , ſur le 6. fiure des
saignée paro
ticuliere. Epidemies, qui dit, qu'aux douleurs il faut euacuer& tirer de la partie prochaine &
malade par ſection & vltion , qui eſt vn fouuerain remede . Or ie ſeray couſiours

d'aduis , que pour ſaigner & purger, on prenne le conſeil du dođe Medecin , parce
qu'il ne faut pas touſiours tirer du ſang tous les ans aux goureux, fil n'eſt bien neceſ
Pourquoy il faire. Car auecques le fang , l'eſprit vital ſe perd ,les forces f'affoibliſſent, & le corps
ne faut fai- ſe refroidit : par ainſion abregeroit la vie du pauuregouteux . Dauantage , la ſaignée
gner ſouwene ne profice àceux qui ſont continuellement affligez de goutes , & qui ont le corps im
e temerai
rement . becile & froid , & à qui la pituite ſeule domine . Auſiles purgatiõs ſont quelquesfois
neceſſaires : mais où ellesſeroient frequêtes, ſont dágcreuſes. Parquoyilvaut mieux
corriger le vice des humeurs par bon regimede viure que d'vſer tant ſouvent de fai
gnée & de purgations . Dauantage, ceux qui ſont exceſſifs au manger , & boire, & D 100
à l'exercice venerien, & qui ont beaucoup de cruditez , trouuent peu d'aide dela 1912
ſaignée & purgation , pource que les humeurs crus n’obeïſſent aux medecines. Er

pour ceſte cauſele plus ſouuent pluſieurs gouteux ne peuuent guarir, ny eſtre aidez
par aucun remede , pour la grande intemperature, & crudité qu'ils ont en toute l'ha
bitude de leur corps , & de l'alteration de la ſubſtance des parties affligées.
Aphor.ss. Or pour retourner à noſtre propos , le malade vſera de choſes refrigerătes,& euicera
liure 6. le vin, principalement ſilales goutes chaudes , ou pour le moins ymettrabeaucoup
Pourquoy les d'eau ſelon que ſon eſtomach le pourra fouffrir.Lecemps principalauquel on ſedoit
goutes ont
purger ,eſt le comencementdu Printemps, & d'Automne, parce que les gouces ſont li
e
leur paroxyl- cómunément eſmeuësen ce temps - là , ſeló l’authorité d'Hippocrates, & l'experiéce.
me en Ann
tomone , Caren Automne elles ſont excitées , parce qu'en Eſté la faculté cõcoctricea eſté fort
debilitée,àcauſe de l'air ambiens qui attire hors noſtre chaleur nacurelle :ioint qu'en
temps d'Eſté, nous vſons volontiers de fruits crus , qui engendrent grande quantité
de
Des Goutes . 667

A de cruditez & corruption en la maſſe ſanguinaire, leſquels en Automne(à cauſe de la


.
froidure exterieure ) l'aſſemblent au dedans,puis montent à la teſte , & apres par leur
grauité & peſanteur retombent aux iointures, leſquellesalorsreçoivent plus facile
mene la fluxion , pource que par la chaleur de l'Eſté, ſ'eſt fait dilatation des conduits ,
& par l'intemperature inégale d'Automne, les arcicles ſont forc debilitez . Au Prin Pourquoy 498

temps les humeurs ſ'eſmeuués, pource que par la froidure d'Hyuer ils onteſté ſerrez Printemps.,
& comprimez au dedans du corps : & eftans ſubtiliez & eſchauffez , au Printempsils
forcenthorsdu centre , & courent auxiointures . Parquoy ileſt beloin en ce temps.là,
purger & ſaigner les gouteux ,fion void qu'il ſoit neceſſaire, comme auons dit , à fin
de vacuer les humeurs qui cauſent les goutes. Caren ce temps les humeurs ſ'eſpan
dent, & foncelmeus & preparez à éuacuation , par laquelle lion ne cure & gardede
venir les douleurs arthritiques , pour le moins elles en ſeront beaucoup moindres.

Du Vomiſſement. CHAP. XII11.

B Ous les anciens ont fort approuvéle vomiſſement ſur toutes au


Le vomiſe
tres purgations, lorsque principalement la cauſe des goutes pro- ment ell'ape
vient du cerueau & de l'eſtomach.Car pariceluy il ſe fait euacua- prouné des
rion '& diuertion des humeurs pituiteux , ſereux , & choleriques , anciensaux
qui defluent plus communément que les autres humeurs aux goureux .
iointures . Pareillement le vomiſſemenc atcenuële phlegme gros
& viſqueux contenu en l'eſtomach , & partant il eſt loué, tant au
commencement qu'à l'accroiſſement, eſtar & declinaiſon , & auſſi cant à la preſerua
rion qu'à la curation des goutes ,& deliure de pluſieurs autres maladies,& purge l'hu .
meur virulent,commenousmonſtrerõsau trai &té de la Peſte.Tu prendras toutesfois
garde, que le patiene n'ait le chorax & cerucau debiles : car en ce cas le vomiſſement
ſcroir ſuſpe &. Et pour le regard de l'ordre & temps qu'il conuientvomir , ceux - là doi
uencvomir auant le paſt, auſquels pour quelque exercice que ce ſoir ,ou autre mou
ucment,les excremens fluenten l'eſtomach :au contraire doiuent vomir apres le paſt,
с ceux qui oncamallé grande quanticé d'humeurs picuiteuſes. le loue plus le vomiſſe
Grande an
mencapres la priſe des viandes, qu'à ieun, parce qu'il faut plus grand effortà ierter la nosasion ,
pituite qui eſt contre les parois de l'eſtomach eſtant vuide , que lorsqu'il eſt plein de
viande :& par le vomiſſement qui eſt fait par force,y a danger qu'il ne ſe rompe quel
que veineou artere de la poictrine , ou des poulmons . Davantage, à ceux qui ont la
poi&trine eſtroicce & le collong , en temps d'Hyuer le vomiſſement eſt concraire, fils
nel'ont accouſtumé , & que Nacure ne tendiſt à ſe deſcharger par telle voye , & faus
que le patient vomiſſe de quinze iours en quinzeiours,plusou moins, ſelon la repe
hagueren
tition & vexation de la goute . Or il me ſouuient auoir penſé en ceſte ville vn gentil Hiſtoire d'vn
bicara
homme Genevois , lequel auoit vne extremedouleurà la iointuredel'eſpaule ſene Geneuois qui
by Siki
Atre ,auec impotence de toutle bras, & quoit ja cfté traiêté par pluſieurs Medecins & perdie vne
Chirurgiens,tanc de Lyon , que de ceftesille: & mcrecica que pourluy oſter ſa dov- douleur de
leur, il auoit eſté purgé, faigné,& avoit fairdicco,cantpar le gayac , que par l'eſquinc, goule parle
wehus vomiſſement:
& qu'on luy auoit fait pluſieurs applications ſur le lieu de la douleur, neantmoinsne
luy auoienttoutes ces choſesrien ou peu profité. Surquoy ieluy demanday fil n'a
Ano . D
eſtoic plus grăde la nuict que
voic point eu la groſſe verolle ,à cauſe de la douleurqui
leiour : parce que la cauſe eſtoit vnepituite & maricre froide : ilm'afferma que non :
& ayant entendu tous les remedes qui luy auoienteſté faits, & ce pargensdoctes, ne
luyſçauois qu'ordonner ,forsque le vomiſſement. Et m'ayant dis qu'il eſtoit difficile Moyen de fa
à vomir,ieluy conſeillay qu'il crapulaft, & mangeaſt pluſieurs & diuerſes viandes au ciliter le bo
ſouper,auecoignons,porreaux, & femblables, & puis qu'ilbeurt d'autāt , & de diuers miſſement.
3 vios à ſçauoir doux & aigre:pource que la grande quaocité & diuerſité de viandes &
debreuuage, eſt cauſe du vomiſſemenc, à raiſon qu'aucunes ſont cuices & pourries
les vnesdeuant les autres , & la grande quantité ne permec icelles eſtre digerées en
l'eſtomach,dont ſ'enfuit qu'on vomicplus aiſémenc.Aufli luy ordonnay qu’apresce
la il ſe couchaſt aſſez toft,& qu'àſon premier reſueilil ſe provoquaſtàvomir ,meccano
yne plume ou le doigt en la gorge, à fin que plus aiſément ilietialt auec la viande le
phlegmegros , viſqueux , & fereux , & qu'il fiſtcér excés par deux ou trois iours ſui- Hip.auti. de 1
uans:pource qu'en ce faiſanc/comme dit Hippocrates ) le ſecond & le ciers iour peu- ratione vict.
LLI

1
668 Dixhuictieſmeliure,
uent pouſſer ce quireſte du premier. Ecluy dis qu'il concinuaft ce vomiſſementvne A
fois ou deux le mois , & qu'il princ en la bouche & maſchaſt par fois du maſticà icun ,
à fin qu'il fiſt parce moyen éuacuation 8c diuerſion de l'humeur qu'ilſentoit, diſoit
il ,couler de la ceſte ſur ſon eſpaule. Semblablement qu'il frotalt (anucque & ſon el
paule d'eau de vie,en laquelle on auroit infuſé roſmarin, lavande , cloux de girofic,
vn peu concaffez: pareillement qu'il fiſt exercice mediocre de ſon bras. Quelque
temps apres iele trouuay , & me dic qu'il auoit fait ce que ie luy auois conſeillé, &
n'auoitiamais trouué meilleur moyen pour appaiſer la douleur & la perdre : & par
ainſi fur du tout guary, faydant autant bien de lon bras que iamais auoit fait. Ceux
Vomitoire. quinc veulent crapuler pour leur prouoquer le vomir,boiront bonne quantité d'eau
en laquelle aura boüilly des raues, auecques demye once d'oxymel: toutesfois ne
faut en faire couſtume:mais ſuffira deux ou trois fois le mois , & quand le malade
ſencira ſon eſtomach chargé , & que Nature le ſtimule à ce faire. Ormaintenantil
nous faut pourſuiure noſtre propos de la curation preſeruatiue.
B
Diuersremedespourles Gouteux. CHAP. XV.

Emalade goureux , pourgarder que les humeurs ſereux & picuiteux no


courent auxioincures, vſera quelquesfois de choſes diuretiques pour les
faire vuider par les vrines , commeſontracines d'ozeille,perfil,fenoil,bru
chus, alperges , gramen ( autrement dir dentdechien) & lcursſemblables:
leſquels fera bouilliraux pocages, & ſeront donnez au malade.Surquoy fauc ſçauoir
que quand le patient a grand Aux d'vrines, & qu'elles ſont eſpelles , lesdouleurs cel
choſe digne lenc.Aulliaucuns desanciens commandent ( ce quei'ay fait pluſieursfois) faire des
d'eſtre norée. vlceres auec cauceres parentiels , & les tenir ouuertes à fin dedonner iſſuë àéuacuor
le virus qui faicles gouces: pource que par celles ouuercures le virus s'eſconle, Ainſi
que voyons aux verollez, lors qu'ils ont vlceresquicoulent, ils ne ſentent,ſanscom
paraiſon, tant de douleur que lors qu'ils n'en ont point : ou auronteſté conſolidez
fans auoir oſté ledic virus par ſon alexicere , qui eſt le vif -argent, parce que par icelles
ouuertures decoule & s’euacuë portion du virus verolique. Toucainſi aduicnt aux 0
goures lors qu'on leuraura fait des ouuercures: leſquelles ſeront diucrfifiées ſelon
En quel licu la diuerlité des lieux par où ſe fait la fluxion.Exemple.Sila Auxion ſe fait ducerueau
il faut faire tombant ſur les os clauiculaires, l'ouuercure ſe fera par derriere le col : & fiellctom
овиеrture be ſur les iointures des eſpaules , & aux couldes ,ou ſur les mains , on appliquera les
pour les gox- cauteres au deſſous des muſcles Epomis : & fi elle tombe à la hanche, ou aux ge
noüils , & aux pieds , ils feronc appliquez trois doigtsau deſſous des genoüils , par
tie interieure, pourueu que le pacientn'aitpas à faire grand exercice : pource qu'c
ftant faite l'ouverture en ce lieu , il ſe fera plus grande euacuation , à cauſe de la vei
ne ſaphene qui eſt en celle partie. Au contraire li c'eſt voicunc hommeauquel il ſoit
neceſſaire de beaucoup trauailler & aller à cheual , l'ouuercure ſe fera en la partie
exterieure entre les deux fociles , à fin que l'eſtriuicre & la (elle du chcual ne luy ſoit
trop moleſte & douloureuſe. Or tellesouuertures ſe feront par cauteres aêtuels ou
potentiels, ſelon qu'on verra eſtre neceſſaire, & la volonté du malade. Si on veut
vſer de l'actuel, il ſera de figure triangle , trenchant& aigu , à fin que plus prompte D
mentil facefon operacion ,& àmoinsde douleur. Dauantage,ilſe peutmetre
vnepiece de fer crouée ſur l'endroit où l'on veut appliquer le cautere, laquelle ſer
uira qu'il ne touche finon qu'au lieu où l'on veut qu'il ſoic appliqué , comme nous
auons diet au chapitre del'Ægilops . Et ſera cenuë l’vlcere ouuerce, y mecrane de
dans voe petite ballose faite d'orou d'argent , ou de racine d'iris , ou d'hermoda
& cs , ou de liege , ou de gentiane, ou de cire ,auec laquelle on incorporera pou
dre de vitriol, mercure , ou alum , de peur que l'vlcere ne ſe conſolide iuſques à la
volonté du malade , & conſeil du Medecin & Chirurgien . Dauantage , it faut
Pilules prou purger le cerueau ( qui eſt le plus ſouuent la fontaine de ce mal ) vne fois le mois ,
pres. auec pilulescochées ,& d'aſſajerecen Hyuer : & en Eſté, de pilules ſine quibus , ou
imperiales , deſquelles la doſe ſera vne drachme devant la pleine Lune, & le lende
main on prendra vn bouillon de pois chiches, auecracines aperitiues & diureciques.
I'vſagedes L'vſage des diuretiques eſt bon, pource qu'ilspurgentles ſuperduitez ſereuſes de la
dixrerigues: feconde & cierce digeſtion. On peutſemblablemene vſer d'autres pilules, qui ont
Des Goutes. 669
A vertu de purger l'humeur pituiteux & ſerelix,comme celle-cy.2.pilularum færida
rum & de hermodact,an.zB.miſce ,& cum fucco vel fyrupo rotarum foluriuo for
mencuin pilulæ .Autres.2..aloësziij.agaricitrochiſc.rhabarb.añ.zi.maffa pilularum
arthriticarum , & de hermo.añ.3.diagredijoj.cum mellero 210 , fiat maila. Del
quelles en ſera donné au malade vne dragme, plusou moins , felon la force & verfu .
Les remedes des purgatifsſeront changez ſelon que le docte Medecia verra cítre be
ſoin à purger les humeurs ſuperflus qui cauſencles goutes : comme li la cholere en cft
caule, on vſera deremedes cholagogues: & entre tousle cacholicum elt loué, & les
pilules communes. Etapres pour roborer les parties interieures, on donnera demie
some
pourquoy les
dragme de theriaque, trois heures deuantle paft. Or il fauticy entendre, que pour ordonnées
purger le cerueau , les pilules ont eſté plus louées des anciens, que les autresmedeci. pilulespour le
nes liquides ;à cauſe qu'elles demeurent pluslonguement en l'eſtomach à faire leur cerutan .
operation : & par ce moyen elles atrirent mieux du cerueau ,& des parties loincaines ,
l'humeur qui doiceftre deriué & éuacué par le fiege . I'ay cogneu aucuns qui ont vſe
des pilules auſquelles y entroit bonne quáticé deſcammonée,à ſçauoir, lepi ou huict
B grains pour vne priſe, leſquels apresietroientgrandequantitéd'eau , & feroficez : &
pareillement auſdices pilules y entroit du gingembre,de peur qu'elles ne fiſſent malà
l'eſtomach. Or en rel cas,apres la priſe & operation ,on baillera à manger au malade
Post vn peu d'orge mundé, pource qu'il adouciſt & leniſt les parois de l'eitomach , qui
would pourroit auoir eſté bleſſé deſdicespilules. Er le lendemain on pourra pareillement
bailler du theriaque la groſſeur d'vne féue : lequ - l neconforce pas ſeulemenclade
Job biliré de l'eſtomach , procedante des purgations , mais auſſi corrigele virus arthrici
Louise que.Ilne faut pareillement omecere, qu'apres le paſt fauc vier de dragée, de fenoüil,
anis , & coriandre,ou cotignac,ou conſeruc de roſes , à fin de rabbatre les fumées qui
montent de l'eſtomach au cerueau. Semblablement on vlera de parfums en temps parfums
humide,leſquels ſerõt ainſi faits.2.churis ,vernicis & maſt.añ.zi.granor.iunip.bacc.
laurian.z B.ligni aloëszij.affæ odoratæ zj.B.conquaſſeneurgroſſo modo : & en ſojét
parfumces eltouppes de chanure,ou cocion cardė , &z foientpoſéeschaudement fur
la teſte.Dauantage,on pourra frotter la tefte du patient de ceſte pouldrepar l'eſpace
C de quinze iours, plus ou moins,à fin de couſiours deſleicher les humidicez luperfiuës.
a 2.roſarum rubr.folior.ſenæ,ſtæchadosvtriuſque añ.ñ.ß.milij 3 iiij. furfuris loci in
vinoalboz iij.for.camom.melil.añ.ş.j.ſem . aniſi zj . lalis comm . Zij. Soit faire poul
dre qu’on mettraen petits ſachets de coile, & les fera -on eſchauffer dedans voepoël
jotta le,& d'iceux on frottera la ceſte au matin . On peut auſſi vſer des pilules quienſuiuēt.
24.pulu.hieræ timplicis zj.agarici recenter trochiſcari & rhabarbari eleđian zij.my- Apophie:
rabalanorum , chebularum zß. tamarindorum ij.cum infuſione fenæ fiatmarfa , & gmatique
ex ea formcntur pilulæ vj . pro dragma , capiat duas antecænam octauo quoque dic.
delas Onpeut dauantage prendre au macin , au temps dela fluxion , vne pilule de la com
jelila poſition ſuivante , la tenantvn quart d'heure en la bouche, la marchant, & crachant
continuellement ce qui aura eſte artiré & deriué en la bouche. 2. cubebarum , nucis
lo moſcatæ ,glycyrrhizæ ,aniſi an.zi.pyrethrizij.maftiches,radicis ſtaphiſagriæ ,eryngij
añ. zij. Toutes ces choſes ſoient pulueriſees & mellécs enſemble , & en ſoit fait des Lºvſage du
OOK , petitsnoüecsentre deux linges ou tafferas,& foient formées petites pilules de la groſ- sheriaque
prile contreet
000121 ſeurd'uneauelaine.Etpour obeundre la virulence de l'humeur qui cauſelesgoutes,
D
on doit prendre quelque peu de theriaque par incerualle , auec de la conſerue dero le virus des
ſes,oude Acurs de roſmarin, parce qu'il conſommeune partie deshumeurs ſuperflus, goutes .
121 & re& ific & obtund l'intemperature du virus arthritique, comme nous avons dit cy-
dellus.

382
162 LLI ij

US,
len
(
670 Dixhuictieſmeliure,
A
Dela maniere de viure des Gouteux . CHAP . XVI.

Axiome en L ne faut manger viandes ſur viandes,c'elt à dire, que la digeſtion


Medecine , ne ſoit faitc en l'eſtomach ,depeur que le foye n’attire les crudicez
par les veinesmeſaraïques,dont le nourriſſement du corps demeu
recru & inſalubre. Et faucicy nocer , que la ſeconde digeſtion ne
corrige point la premiere,ny la tierce,la ſeconde. Les viandes doi.
uenceſtre de bon ſuc & de facile digeſtion, & doivent eſtre roſtics
pour les pituiteux : mais pourles ſanguins,choleriques,& melan
Les gouteux choliques,pluſtoſ boüillies quc roſties.Ilfauc éuiter la varietédes viandes en yn re
Ladiuerficiés" pas :auſſi touslegumes,le lai&t& le fromage,& touteschoſesacides, commeverjus,
vin aigre, orenges,citrons, & leurs ſemblables,li ce n'eſt en petite quantité.Lemala
desviandes à
un repas. de ne doit manger s'il n'a appetit : auſſi il ne mangera iuſques à ſaciecé, maisſeleuera 1

de cableauecappetit. Il évitera de manger grands oiſeaux, comme cygnes , grües ,


paons, & leurs ſemblables:car ils ſonc de difficile digeſtion, & engendrene mauvais B
fuc: Les anciens defendene l'uſage ordinaire de chapons, & autrespoulailles , parce
' Les goulenx qu'elles ſontſouuene vcxées de podagre, dequoy l'experience faic foy. Les poiſſons
doiuene vſer ne leur ſont bons , parce qu'ils engendrene beaucoupdeſuperfluitez, & auſi ſe cor
реи de pois
ſons. rompent facilement,8c engendrent phlegmes, & amolliffenc & relaxent l'eſtomach,
Les moins nuiſibles,ſontceux que declarerons au chapitre du regime de la Peſte.Or
entre les beltes à quatre pieds, le veau eſtrecommandé, parce qu'il engendre bon luc
& vn ſang bien temperé, ioinct qu'il eſt de facile digeſtion . Lemouton pareillemenc
eſt bon.Orilfauticy noter, queles goureux doivēt tenir grand regime, cantau man
ger qu'au boire : coutesfois il faut auoir elgardau temperament d'vn chacun , diuer
lifiant les alimens, tant en quantité qu'en qualité . Car les choleriques & fanguins
Le ieuſner en (pource qu'ils ontla chaleur forte,& qu'ils confommentbeaucoup ) ont beſoin de
contraireaux manger dauantage,parceque le ieuſner rendla cholere plus acre , & par conſequent
choleriques, augmente les douleurs. D'autre part,ilnefaut pas qu'ils vient de viandes trop humi
des : car leur humidité agrandiſt la fluxion , & pourriſtles humeurs , & les faircouler
aux noincures. On doit eſpellir la cholere, tant par medicamens pris par dedans, que
0
par dehors, de peur que par la tenuité, elle ne coule plus facilement aux ioincures.
C
Lesquesphlegma.Les
ti endu phlegmatiques, qui ontla chaleur debile, portent preſque leur aliment avec
rent mieux la cux, & endurent mieux le ieuſne: aulli le regime humide leurnuiſt beaucoup, d'au
faim . tant qu'ilaugmente les defluxions.Ncancmoins aux vns& aux autres on aura cſgard ,
qu'on neleur baille rien qui ſoit de difficile concoction, & de facile corruption. Car
à raiſon de la douleur , ils ontle plus ſouuentvnefićurelente , laquelle diminuë leur
chaleur naturelle ,& eft cauſe de conuertic leurs alimens à pourricure .D'abondant,il 1.

ſe faut bien garder de leur donner crop d'alimens, où la chaleur naturelle eſtant oc
cupécà la digeſtion d'iceux , faic moindre concoction des humeurs qui cauſentles
goutes , & ne les peutſurmonter. Parquoy les choleriques & ſanguins vleront des
viandes de bon ſuc, & de facile digeſtion ,leſquelles ſeront froides d'elles-meſmes,
c'eſt à dire, de leur faculié, ou ſeront alterées par herbes froides & humides, comme
laiđuë, pourpier ,ozeille , & leursſemblables:auſſi les ſemences froides concafiées,
Ceux qui sot
ſeront miſes en leurs potages . Ils pourront vſer d'orge mundé, dans lequel on D.
mutilez de mettra pareillementlemences froides. Ceux qui ont perdu vne parcie de leurcorps,
quelque més commeun bras ou vneiambe,ou ſi elle eſtatrophiće,ne doiuét cancmanger nyboira
bre doinene qu'ils faiſoienelors que leur corps eſtoit entier : carla nourriture, qui auoit couſtume
Tetrácher leur d'aller à telle partie,coule fouuent ſur les iointures , & cauſe la goute : & pour abre
ordinaire. ger, ceux quiſontde bonne habitude, & qui viuent ſobrement, tenane bon regime,
lont peu vcxez degouce : mais ceux qui ſont fort replets, & bien nourris fans exerci
ce,& cxcellifsen bonnes & diuerſes viandes,ou qui ſe nourriſſenc de mauvaiſes,lone
volontiers gouteux .
/

Des Goutes. 671


A
Du boire des Gontexx . CH AP. Xết.

lige Eux qui ſont ſubicâs aux goutes, ſe doivent bien garder de boire incomodite ?
crudo trop,nonſeulement de vin,mais aullidetout brevuage catcela detropboira.
fait nager la viande en l'eſtomach', & cmpeſche & elteiót la chaleur
naturelle, à cauſe dequoy la concoction eſt plus difficie: & de là
s'enfuiuene grandes crudicez,dontſont engendrezbeaucoup d'hu
rero meurs ſereux & lubrils, leſquels facilement coulentaux ioincures.
Aucuns Medecins ordonnent boire du vin blanc,pource qu'il exci.
celes vrines,ce qui n'eſt à rejercer,moyennantque le corps ſoit pur & net: mais s'ily a 1

pluſieurs excremés & cruditez(& queceſoit en vn corps decemperature chaude)pas


tel vinſeront porcéesauxioincures , & exciteront les goures. Parquoy en el cas il le il fautoffer le
faue du tout éuiter,s'il n'eſtoit clairct,petir,debilc, & altringent,afin qu'ilbouſcheles pin aux gou
orificesdesveines & arteres, de peur que les humeurs coleriques & ſereux ne diffuét tes chandes.
B facilementaux iointures.Et ſi le pacient veur du coutfen abitenir ce fera lemeilleur;
& en lieu d'iceluy,il vſera d'hydromel fait ain G.24.aquæ ib iij.mellis optimiq.f.bul
pom. liancad conſumptionem libræ voius, bene deſpumando ,adde ſaluiæ p.B.Eroù le pa .
cient ſeroit de temperaturephlegmatique,on y adioultera de la canelle,& vn peu de
muguette , & cloudegirofle. Et pourlescholeriques , on fera hippocras d'eau en
ceſtemanicre.4.aqux fontis tb iiij.ſacchari ib B.colencur per manicam Hippocratis
: ‫به دانما‬ fine ebullicione,addendoin fine cinnamomizij .& luy ſeruira aulli grandement à so
borer l'eſtomach.On peutleur fairevſerde prilane,en laquelleenla fin delacuiſſon,prizane.
Eſpecede
on mettca vn peu de roſes ſeiches, ou de ſyrop degrenades, depeur qu'ellene ſoit
renduë bilieuſe au ventricule , & ſubir qu'elle ſera tirée hors du feu , la faut laiſſer re
poſer, & puis la couler par vne manche de drap,ou feruierte blanche.Les phlegmati
ques doiuent pareilleinent vſer de viandes de bon fuc, & de bonne digeſtion :mais
faut qu'elles ſoient chaudes de leur nature , ou alterces de choſes chaudes,pourueu
qu'ils n'ayentfićure ou grande chaleur, à raiſon de la grande douleur : car alors il fo
C fautgarderd'alimens chauds.Ec pour ces cauſes, la maniere de viure ſera diuerſifica
fclonladuis du do& -Medecin ,& laiſſera-on la proprecuracion,pour ſubuenir à l'ac
cidenc. Et aulliilfaudra par conic &ture artificielle, changer tous les remedes, tant
ceux qui ſootprins par dedans, qu'appliquez par dehors,lelon que la diſpoſition, lo
temperamene , & lesaccidenslerequerront: & à la fin de table , vſeront dechair'de
coings , parce qu'elle a puiſſance dedefendre que les vapeurs ne montent de l'eſto .
TO mach au ccrucau .Eccombien que de la nature elle eſtreigne,routesfois eſtãı priſea
pres le paſt,ellelaſchele ventre, pource qu'en reſerrantl'eſtomach par haut,ellcaide
à faire bonne digeſtion, & fait aller à la ſelle.L'exerciccelt fort profitable contreles l'exercice eff
010 gouces, & l'oiſiueté eſt mere d'icelles.Car comme le fer qui eſt laiſſé ſans eſtremanié, fort bon aux
bien coſt ſeroüille : auſſi noſtre corps eſtantſanss'exercer, ferempliſt d'humeurs ſu - gouteux.
perfus,quieſt ſouvet cauſe des gouces.Ce qu'on void par experience ,qu'entre mille
laboureurs, & autres hommes de grand crauail de corps,s'en trouue peu de gouteux.
Et parcantil faut faire exercice aumatin ,apres qu'on aurarendu ſes excremens. Ec
D ceux quiſontſubiets à auoir la gouteaux pieds,exercerontles bras. Car par ce moy
cnncle fait ſeulement reſolution & conſomption des cxcrcmcns qui ſont aux par
ties du corps, mais auſſi ſe fait reuulſion d'iceux. Il faut auſſi euicer les paſſions de l'a
me, comme cholerc,triſteſſc,& autres. L'acte venerien doit eſtre dutourdelaiſſé, rfage de ter
pour les cauſes qu’auons expoſées par cy-deuant: mais ceux qui à cauſe du mariagenu .
nes'en peúuentexempter , en vſeronc apres que la digeſtion ſera faite en l'eſtomach,
&s'y gouueraeront G bien, qu'il ne leurferaqu'vn peu de mal.
LLI jij
1
672 Dixhuictieſme liure ,
A
Pourroborerles sointures. CHAP . XVI11.

L reſtepour la cure preferuatriceparler de la roborationdesiointures,


Friction .
à fin qu'ellespuiſſentrefifteraux humcurs qui combent fur icelles. Es

1: pourcefaire , il cft bon les frotter ſoir & macin d'huile d'oliucs , non
mcures, appellée oleum omphacipum ,ou d'huile roſat, auſquelles
incorporeraſel commun broye ſubtilement: on le pourra
on
auſſ mcller
auec huile commune , & y adiouſter de la limature de corne de cerf, parce qu'elle
i

Fomentatio . defleiche & aftreinc. Auflieſt bon de lauer les iointures de lexiue , faite en ceſtema
nicre. 2. Corticum granatorum , nuçum cupreſſi , gallarum ,ſumach , corticis quer
cini, an. Zij. falis communis , aluminis rochæ, an Zj . laluiæ , roriſmarini, lauandulæ,
lauri, ivæ arthriticæañ.ñ.j .rofarum rubrarum m .B.Toutes ces choſes ſoientboüil
lies enſemble , en lix liures degros vin aſtringent, & lexiue faite d'eau ferrée, auec
cendres de chelne: & deceſte decoction ,on fera fomentation avecfeutres ou eſpon
ges. Et icelle faire , fauc bien eſſuyer les parties auec linges chauds , & fe garder du B
froid .Leſuc deſenelles vertes delayé en oxycrat, eſt vn remodelingulier.Aulipour
Pour mariere roborer vne parcie de bilicée de cauſe froide, on prendra de l'eau de vie , & vin ver
froide. meil fort aſtringent, auſquels on fera infuſer & tremper , ou faire bouillir in balneo
Mariæ ,lauge,roſmarin ,chym ,lavande,laurier,abſinthe,an.m.j.cloux de girofle,gia
gembre,poýure,coutconcaſſe añ.31. & feroc les iointures fométées deceltemiſture
chaude,loir &matin,à fin d'eichauffer & re & ifier l'intéperacure delaiſſée par le froid.
On trouue auſſi par experience , que fouler la vendange conforce forc lesiointures:
& quinc le peutfaire , on fomen cerales piedsdevin recent pris en lacuue. On peut
ſemblablement faire des pecits ſachets , dansleſquels on mercra ce qui s'enfuit. 4.
Salis communis , aluminis rochæ, corricum granatorum , ſumach, berb.nucum cup.
an.z iiij.fol.laluiæ ,roriſm.roſar.rubrarañ.ñ B.bulliant omnia fimul cum lixiuio,fiac
deco& io , pro foru. Er d'icelle on fomentera lcs sointures aueceſponges, ou feutre
aſſezlonguement. Voila ce qu'il me ſemble pour la roboration des iointures, àfin
qu'elles ſoient fortifiées contre les fluxions. 0

Delacuration palliativedes Goutes. CHAP. XIX .


2
Our bien proceder à la curation de ceſte waladie,il faut confideret
Cotreles em
la diuerſité des cauſes d'icelle,& les temperamens du corps, & au 23
tres choſes, leſquelles ne ſont touſiours ſemblables , & parcant ne
piriques. peuventeſtre curées par un ſeulreinede, commeeftiment lesvul
gaires & empiriques , qui veulent d'un ſeul remede guarir couces
clpeces de goutes: ne conſiderans pas, que celles quifoncfaites de
matiere froide, accompagnantle virus, demandent autre maniere
de curer , quecelles quiviennentde matiere chaude : auſſi celles qui ſont faites d'un
ſeulhumeurſimple, que celles qui ſont faites de cópoſé. Car celles quiſontfaites de
cholere pure,cauſentdouleursgrandes & extremes:mais lors qu'elle eſt mixtionnée
Zes remedes auec phlegme, elle n'eſt cancdouloureuſe. Plus il faut autreremede au commence D
des goutes ment, qu'à l'accroiſſement,& ainſi desautres cemps. Semblablement ſelon les parties
diuerſifiez où ſont les goutes. Car en la ſciatique n'eſt beſoin d'vler de medicamens repercuſſifs.
Jelon letemps s'il n'y auoitgran de inflammation:cequ'on peut bien faire aux autres parties. Finale
Glesparties.ment ſi la gouce vient ducerueau,il faut vſer d'autres remedes,que lors qu'elle viene
du foye,&dela maſſe du ſang.Ceschoſes ainſi premiſus, nous commencerás la cure,
non proprement curaciue ,mais pluſtoſt palliative (principalement de celle qui vieno
Quatre inté- par heritage) laquelle conſiſte en quatrechoſes:lapremiere,àordonner le regimelur
tionsrequiſesles ſix chol's non naturelles,ſelon la diuerſité des eauſes:la ſeconde, à éuacuer& di
à la cure
repal- uertir la matiere antecedente, cant parmedecines laxatiues,queparſaignées ,s'il eſt
goutes. beſoin:la tierce,pardeuëment appliquer les remedes locaux& particuliers,les diuer
fifiãtſelon l'humeur qui cauſe les goutes,àſçauoir,par remedes chaudsaux humeurs
froids, & par froids remedes auxhumeurschauds, en les changeant aufli ſelon les
quatre temps :à ſçauoir,commencement,accroiſſemét,eſtat, v declinaiſon,comme
a eltédit.Ets'ilyávacintemperature ſimple ſansmatiere,on appliquera remedes al
Des Goutes. 673
a teratifs, ſansqu'ils ſoient vacuatifs.La quarte ,eſt corriger les accidens,& principale
mentla douleur, quien celle affection courmente extrememécles pauures gouteux,
voire leur cauſe quelquefois vne mort ſubite,file virus eft grand, commenous avons
dic cy -deſſus.
Oril faucicy nocer,quefouuent le Chirurgien eſt deceu à cognoiſtre la cauſe de la En quoy
dice pris des
douleur :car en appliquantremcdes froids & narcotiques aux goutes froides , ſi la dice
douleur s'appaiſe , on eſtimeque cel humeur ſoit chaud , ce quiaduienetoucesfois à choſes quiain
cauſe que cels remcdes ſtupefient,endorment, & oftent le ſentiment de la partie, en- derou nuiſene
cores que la cauſe de la goute ſoit froide. Au contraire, quelquesfois nous eſtimons eſtfallacieux.
quela matiere ſoic chaude, combien qu'elle ſoitfroide: pource que quand nous ap
pliquons medicamens chauds,ils appaiſent la douleur,en rarefiant, arcenuant,reſol
uanc, & dilipancportion de la maciere, parinſenſible tranſpiration : & partancà cau
ſc de l'aydcqui s'enſuic de ces remedeschauds, on pourroit penſer quela matiere ſe
roicfroide, à cauſe de ce qu'on dic communément , contraria contraris curantur:& au
contraire, Similiafimilibusconferuantur. Donc pour le dire en vn mor, l'indice pris des Autre occao
B choſes quiaydencou nuiſent , eſt ſouucnc fallacieux: d’abondanc il decoule quel- fon d'eftre
quesfois vne grande quantité de maciere froide, laquelle cauſe grande douleur,mais decen.
c'eſt à cauſe du virus & de quelque humeur cholerique, qui ſubrilie & conduic l'hu
mcur froid & z viſqueux auxiointures:lequelhumeur virulent & cholerique induicla
douleur,& non la pituite :à cauſe de la douleur, la partie eſt chaude & enflammée, &
bien ſouuent cauſe fiéure & grande alteration : & alors nous croyons que la cauſe
principale ſoir chaude ,& toutesfois elle eſt froide : partant nous ſommes ſouvences.
fois deceus: 8 ce quien eſt caule, eſt que la fusion deſcend parles nerfs & tendons,
ce qui nenousappere par dehors. Dauantage quand les humeurs ſont meslezenfem- Troiſiéme oca
ble, quelquesfois la couleur de la partie nousdeçoit:car combien qu'elle nous ap- cafion
decen , d’eftre
paroille citrine,ou blaffarde (ce qui veritablement aduient de l'humeurcholerique:
lequel aiſément, à cauſe qu'il eſt de ſubcile & tenuë ſubſtance, eſt ieccé du profond
du corpsà la ſuperficie du cuir ) toutesfois il ſe peut faire que le phlegme ſereux de
coule auxioincures, & ſoit la principale cauſe dela gouce , à raiſon qu'il induit vne
grande & extreme douleur , principalement la nuiæ, & communément lors qu'il eſt
accompagné d'vne portion de l'humeur cholerique : donc le ſang & les eſpries s'ef
mouueront, & ſe monſtrerõt à la ſuperficie du cuir de la partie affectée, qui la feronc
apparoiſtrerouge & chaude . Dauantage , au moyen de la douleur il ſuruiendra au
malade, par le defauc du repos, & pour la grande inquietude,vne fićure, laquelle li
quefie & ſubcilie l'humeur,& l'eſchauffe , & le fait Auer dauantage aux ioincures :
ioincaullique l'urine ſera teinete, & le pouls forceſmeu : & toutesfois la cauſe du mal
fera froide. Etparcant en tous casce ſeroit grand erreur de vouloir procederà la cure
comme ſi la cauſe de la goute eſtoic chaude. Vray eſt qu'il faut ſouuenc laiſſer la pro- Souvent le
precure pour ſubuenir auxaccidens : au contraire il ſe peut faire que la cholere foic chirurgien
cauſe dumal , fans toutesfois que la couleur de la parcie affe & ée demonſtre apert:- laipſe la proa
menticelle : mais pluſtoſt la couleur ſera blanche ou plombine , & la partie froide ,à precure pour
cauſe dù froid de l'air ambiens , ou de quelque application deremedefroid,qui aura accidens.
fait qu'elle represente pluſtoſt la qualicé du phlegme , que dela cholere. Dont nous
D
concluós,qu'ilne ſe fauc arreſter couſiours àla couleur & froidure de la parcie, pour
2017 .
ce que leshumeurs,qui ſont profonds au dedans d'icelle, ne changent pas touſiours
en couleurle dehors.lice n'eſtoit qu'ils perſeueraſſene long -temps. Outre-plus il ad
vient ſouuentesfois que le corpselt rantremply d'humeurs gros,eſpés, viſqueux ,que
Nacure en ietee yne partie auxiointures, & en laiſſe vne portion au profond du corps
àcauſede l'imbecilite dela vercu expultrice:laquelleportion eſtane arreſtée en quel
que partie interieure,fait obſtruction & pourriture,donteſtengendrée vne fiéure in Fiéure intera
termittente, c'elt à dire , qui a relaſche quelque eſpacede temps entreles accez , ſça- mittête qu'eſte
186 uoir eſt , ſi elle ſe faicaux petites veines :mais elle ſera continuë , li cela aduient aux ce.
grandes veines. Eccelle choſe aduenant , le Medecin & Chirurgien ne doiuent pas
ſeulement confiderer la maladie arciculaire,mais beaucoup plus la fiéure : laquelle fi
elle eſt continue.apporte touſiours danger au malade ,& des-honneur au Medecin : ſi
2 ‫دی‬ elle eſt intermittente, elle paſſe facilement en continuë,ſion nydonne medicamens come il faut
propres.Car il faut alors doucemenepurger le ventre,& ouurirlaveine,lileMedecin purger les
cognoiſt qu'il en ſoit beſoin :puis apres avoirpreparé &cuit les humeurs,ondonnera gonicus,
LLI iiij
674 Dixhuictieſme liure,
au pacient vne bonne & fortepurgation, lion void qu'ilenſoit beſoin. le dis bonne, a
de peur quelamaladicarticulaire ne s'augmente : ce qui aduient ſouuent quand on
ne fait qu'elmouuoir les humeurs ſans les purger:careſtans eſmeus,ilsſeieccent roula
signes pour iours ſur la partic affligée. Partant tout cecy giſt en la contemplation du Medecin &
cognoitre la Chirurgien ,leſquelspar coniecture artificielle cognoiſtront la maciere des goutes :à
matieredes ſçauoir,par la couleur , par le toucher , par l'aydc ou nuiſance des remedes p, ar lere.
gowtes. gime que le patient aura auparauant cenu, parſon temperament, age, region, par la
conſideration du temps de l'année,la maniere de la douleur,& auquel temps du jour
elle s'eſmcut,& eſt plus grande,& quel cſt ſon periode & paroxyſme,auſſi par le iugc
menc des vrines , & autres ſuperfluitez qui ſortent du corps du malade : ce que nous
Qu'on peut avons par cy-deuant declaré plusparticulierement. Or aucuns diſent, qu'ilnefaut
Saigneror purger nyláigner les gouteux pendant curs grandes douleurs, toutesfoisileſt aiſéde
purger en
l'accés ar prouver le contraire. Car veu que la loy de Medecine giſt en addition & detraction,
thritique. & que la goute vient d'addition & d'augmentation d'humeurs ſuperflus, qui accom
pagné le virusarthritique; ioint queles douleurs ne ſe peuuétappaiſer, ſinon quand B
la cauſeeſt hors : il s'enſuit neceſſairement, quela ſaignée & purgation fontgrande
: menc vciles.Metrius en ſon crai &té de la Goute,dit,qu'il faut touſiours vſer de purga
cions,pour vuider & cuacuer l'humeur fuperflu, & non ſeulement en la declination,
mais auſſien la force & vigueur de lamaladie:ce que nous auós trouuépar experien.
ce eſtre grandement proficable, & pris d'Hippoc.diſanc,Quandil y adouleur, il faut
donnet medecine par bas. Aufli cela ſe peutprouuer par authorité d'Hipp. au liuro
De affe tionibus , parlano de Arthritide. Et ſemblablement par Galien , au Comment.fur
le 23. Aphoriſ.de la lect.i.qui commande qu'on ſaigneaux grandes inflammations &
fiéures ardantes,& grandiſſimes douleurs,diſant qu'il n'y a point de ineilleurremede:
& s'ils ne peuuent eſtreaydez par la ſaignée & purgation devëment faice,cela aduiét
Quelsgensne ( comme dit Galien au liure, De curationeper fanguinismißionem ) que les intempcrans,
foneſecoursgourmands,& yurongnes,neſont guarisparpurgations,ny parlaignées,pource que
parſaignée, l'intemperance aſſembleabondance d'humeurs crus, leſquels ne cedentaux reme
purgarios.
des. Parcant les gouteuxgoulus & intemperans, ne peuuent eſtre aydez paraucuns
remedes, combien qu'ils ſoient adminiſtrez par vraye & bonnc methode.
102
Desremedes topiques, ou particuliers,pourmariere froide. DO!
CHAPITRE XX.

Aintenácil nous faut deſcrire les remcdes locaux ou particuliers,


Les remedes
pour contrarier à chacun humcur. Et premierement noteras , que
topiques les remedes topiques apportét peu de profit,lile corpsdu gouteux
n'aydent fi n'eſt pur & necdes'excremens: ioinet qu'il y a danger de renuoyer
les generaux la fluxio & le virus aux parties nobles par les forcsrepercuſſifs,dóc
n’ör precedé. s'enſuitmortſubite, commeon l'a veu aduenir pluſieurs fois.Par
quoy il faut que leschoſesvniuerſellesprecedent les particulieres.
Or nous traicterons premierement de la douleur cauſée de pituite , ou phlegme :
parce qu'elle aduient plus ſouuent que de maciere chaude. Au commencement fauc D
vſer de remedesrepercuſifs domeſtiques, ayans faculté d'aſtreindre & ſeicher, non
coutesfois en la ſciatique.
Cataplaſme 24.Foliorum ſabinæ ñ.B.nuciscupreſli ziij.aluminis rochæži.gummi tragacanthi
repercußif. ziiij.mucilaginis pfyllij,& cydoniorum quantum ſufficit, fiaccataplal.
Autre.2.Stercorisbubulírecentis tbj.mellis roſatiZiiij.oleirolati& aceci añ zij.
bulliant ſimulparum ,fiatcataplaf.4.Oleiroſati& myrtinian.3ij.puluerismyrrha,
aloësan . 31.acaciæzij . B. incorporéncur cum aqua gallarum coctarum & fiac vn
guencum. Autreremede.2. Aceci quantum fufficit, in quo coquesſaluiam, flores
camomillæ ,meliloti,abſinthij& ebuliañ ñ . j.fauttremper la partieenicelle deco
&tion chaude, & l’y laiſſeraſſez longuement: ce quei'ayexperimenté pluſieursfois
auecbonne iſſuë. Ćeremcde repouſſe l'humeur, & le conſomme, & fifortific la par
tie :& le fautfaire pluſicurs fois encor'qu'il y euſtchaleur.Le marc des oliues recent
appliqué deffus, fede ladouleur:aufli fontlesorenges feiches, & bouillies en vin
aigre, & puis broyées. Autrc.4 .Medijcorticis vlmi ft.B.caudæ cquinz ,ſtoech.con
1
Des Goutes. 67
A folidæ maioris añ ñ.B.aluminis rochæ ,thu.añ.3 iij.far.hord.zv.lixiuij comm.quan
cum ſufficit, fiatcataplaſ.ad formam pulcis (acis liquidæ ſecunduin arcem. Lors que la 1a doulcät
parcie eſt enfée,la douleur ceſſe le plus ſouuent,à cauſe que la vercu expulſiue a ieccé interieure
l'humeur ducentre à la circonference, c'eſt à dire,dudedansau dehors:ce qui nous celle quand
appercea ceux qui ont une extreme douleur auxdents : lors que le viſage s'enfe, on s'enfl
le dehors
e.
void lubit la douleur ceſſer,Apresauoir ainſi vlé de repercuflifs, il faut venir aux re
ſolutifs & éuacuatifs : car toute fluxion arreſtée ſurvnepartie , demande vacuation .
Etne ſe faut címerueiller ſi on ne reſoult toſt la inaciere contenuë auxligamens, Refolutio dif
membranes , & parties nerucuſes ,parce qu'elles ſont ſolides ,&non aiſées áreſolu- aux
ficilepart
à faire
ies
tion , comme ſont les parties charneuſes. nerueuſes.
24. Radicis bryoniæ ,ligilli beatæMariæ an.z iiij.bull.in lixivio, poftea terantur& Refolutife
coiencur per ſecaceum , addendo far. hord. & fabarum an.zj.olei camomill.Z iij . fiac
cataplaſ. Autre . 4. Farinæ hord . & lupinorum an. ziiij.fulphu.viui & ſaliscommu.
añ.zj. mellis communis Zv.pulu.aloës & myrrhæ añ ZB.aquæ vicæ 31. & cum lixiuio
fiac cataplaſ. Autre. 2. Succi caulium rubrorum, aceri boniañ. zinj. far. hor. 31. ß.
B pulueris hermodactylorum zB.vitellos ouorum numero iij.olei camomill.Zij.croci
Bij . Autre. 42.Radices & caules braſlicá ,vre, & miſce cinerem cum axungia ſuilla &
puluere ireos,& fiat medicamentum . Aucre. 2.Lactis vaccini tb. ij. inicæ panisalbi
quantum fufficit, bulliant ſimuladdendo pulueris ſubcilis flor. camomill. meliloti
añ.ñ B.crociDj.vicellosouorum oumero ilij.oleirolarum Z11).butyri recentis žj.te
21 rebenthinæ žij. fiat cataplaſ. ad formam puleisſacisliquidæ . Or il faut norer que ce
cataplaſme eſt propre à couces douleurs de goutes,ſoicau commencemér,à l'accroiſ
ſementeſtat,ou en la fin , & en toutes temperatures: & doit eſtre renouvelle deux ou
trois fois le iour. Lecheriaque diſſoulc en vin ,& appliqué, ſede grandement la dou
leur.On peut auſſi vſer d'emplaſtres, onguents, cerors, & linimens.
ugot 24. Gummiammoniaci,bdellij,ſtyracisañ.3ij. cum aceto & aqua vicæ diſſoluc,& Emplaffres ;
adde far.fænug zB.olei camomill .& anechiañ.zij.ceræ quancum ſuffi. fiar emplaft.
molle. Autre . 2. Radicis bryoniæ & ſigilli beatæ Mariæ añ. zv. bulliant in lixiuio
completè, & colentur per ſetaceum , addendo olei camomillæ žiij.ſeui hircinizuiij.
C ceræ nouæ quautum ſufficie, fiar emplaftrum molle. Autre. 2.Gummiammoniaci,
opopanacis , galbanian zij.diſſoluantur in aceto, poſteacolentur :& adde olei lilio
rum , cerebent. Venec.añ.zj. picis naualis & ceræ nouæ quantum fuffi, fiar emplaſt.
molle .
2.Succorum radicum enulæ campanæ & ebulian.z iij.radicis alchex tb B.coquan . Autre poate
tur & colentur per feraceum ,addendo flor.camomil.melilo.Jambuci,roriſmarini,& app
refoudre ei
aiſer les
miento hypericiañ.p.ij.nuces cupreſſi numero iiij.oleichamemeli,aneri, layperici, liliorum , douleurs ,
2623.4 & deſpica añ .Zij.pinguedinis anatis,gallinæ ,& anferis an ZBranas virides viuas nu- yoborer les
mero vj.catellos duos nuper natos : bulliác omnia fimulin tb ij.B.vini odoriferi & vna join Etxres.
MOON aquæ vitæ ad conſumptionem ſuccorum &vini,ac offium catellorum diffolutionem ,
& forcicorexprimaotur :expreſſioni adde cerebenth.ziij.ceræ quant ſuffi.fiatempla
Arum molle . On peut vſer pour meſme effect à Jeſoudre, des emplaſtres de de Vigo,
oxycroceum ,demucilaginibus,demeliloto , & autres ſemblables,lesmcllant enſem :
shka ble , & les liquefiant auec huiles & axunges reſolutiues , diminuantou augmentano
D leurs forces , commeon verra eltre neceſſaire, & que le malle requerra .
her 4. Anſerem pinguem , & imple catellis ij.de quibus demecutem , viſcera,caput & onguent
pedes. Item acciperanas numero x.colubros detracta cute in fruftula diſſectos nu
mero iiij.mithridatij& theriacæ añ . z 13.foliorum ſaluiæ , roriſmarini , thymi, ruthæ,
an. m . 1. baccarum lauri, & iunipericoncaſſatarum an .zi. pulueris nucis moſcatæ ,
zinziberis, caryophyllorum , piperis anzi. Ec du degouſtloit fait onguentoulini
ment, auec'cire ,ou terebenthinede Veniſe, y adiouitant vn peu d'eau de vie. Tel
onguent appalle àmerueilles la douleur faire de cauſe froide. Autre. 2. Gummipini
5,con & ladani,añ.ziiij.gummi elemi & picis naualis an.zj. B rerebenthinæ Venetæ clarz
3vj.olcichamameli & delilio an.ziiij.vini rubri Ib j.ſem.aquæ vitæ & faluix ań. Z vj .
076 omnia fimulditfoluantur lento igne,baculo ſemper agicando. Deinde adde pulueris
gelist ircos Florentiæ, baccarum lauri & hermodactylorum an .Zij.fem.maſtiches, myrrhæ
& olibanian. zij.farinæ fabarum z iiij.omnia fimulincorporencur , & fiat vnguen
tum molle . Autre .
2. Muccaginis ſeminis fænugreci in acero extract æ quantum yolueris , cui miſce
Dixhuictieſme liure ,
676

mellis quantum fufficit : coquantur fimul,donec ſpiſicudinem vnguenti acquirant. A


Ces choſes ſoient appliquées à la partie malade , & remuées filouuent qu'on verra e
ſtre beſoin. Et pour meſme offe & à ſçauoir, à appaiſer la douleur & reloudre, on fera
des fomentations. Exemple...fol.rutæ , ſaluix, roriſmarini , añ.m.j. flor.camomil.
melilot.añ.ñ.ß.vini albi & lixiuij larment.añ.lib.iij.bul.omnia fimul: fiatdecoétio
pro fotu . Autre .

2.origani,fatureix ,calaminchæ , faluiæ ,roriſmar.flor.camomi.melilot.lauand.hy .


perici,rofar.rub.abſinth.añ ñ.j.bulliant cum acero & vino: fiac decoct.pro foru.Ce
ſte decoction eſt propre non ſeulement à la goure froide, mais auſſi à celle qui eſt
chaude , pource qu'ellereſout,aftreinc, & robore la partie , & garde la de Auxion,

Chāgemět de Il faut bien prendre garde que lesmedicamens desgoutes ſoient ſouuent changez:
medicamens. car l'vn profite à vne heure , & nuiſt à l'autre . Que li la douleur & l'humeur eſtoient
Hipp. Aph . fi opiniaſtres,que parlesremedesſuſdits ilsne voulu ſene debuſquer, alors faudra vc.
lim.I.
nir aux plusforts , ſuiuant la doctrine d'Hippocrates, quidit , qu'aux extremes &
rebellesmaladies , il fauc vſer de forts & violens remcdes , comme ceux qui s'enſui
uent. B

2.axung.gallinæ, olei laurini , & euphorbij,añ.zj.oleimaftiches Zj.pulu.cuphorb ,


& pyrethrian.zj.ou plus ou moins, ſelon l'intemperature qu'on cognoiſtra eſtreen
la partie.Ceschoſes ſoient mellées enſemble & foit fait medicament,duquelon fror
tera la partie tous lesiours . Ceremede eſt bon : car l'euphorbe & pyrethreelchauf.
fene & ſubtilient,diffoluent & font reſolution: l'huile & axunge amoliſſent ,& l'hui.
le de maſtic parfon aftriction empeſche la fluxion nouvelle . Autre. Prenez huilede
Huile de re- regnard, en laquelle on aura fait bouillir des vers de terre , & de la racine d'enule &
gnard.
bryonia , & auec vn peu de cerebenthine & cire ſoit faiconguent, lequelamollift,ac
cenuë , & refoule l'humeur froid qui eſt auxioinđures .
Apodyn .
22. ſem . ſinapi pulveriſaci & acerrimo aceto diffoluciziij. mellis anacardini 3 ij,a
quæ vitæ z j.falis com.zij . Le tout ſoit mellé, & en ſoit appliqué ſur la douleur.
Autre.7.picis nigræ z iij.terebenthinæ Venetæ 3ij. ſulphu.viui ſubriliter pulueri
ſacizj.euphorbij & pyrethrian ZB.empla.oxycrocci Z iij.olei quant.fof.liquchant li.
mul, & fiat emplaftrum , excerdacur ſuper alucam : & ſoit laiſſée l'eſpace de deux ou 0
trois iours , ſi le malade lent allegement de la douleur :linon ſoir ofte,commedeſſus
eſt dit .

Pour ceſtemeſmeintention , on peur appliquer ſur la douleur des orties grieſches,


0
puislauer le lieu d'eau ſalée: pareillementla fiente de pigeons boullië affez longue
ment en vinaigre ,duquel en ſoic fomentée la partie .Auflileveſicacoire fait de lcuain
bien aigre,cantharides, ſtaphiſagre, & vn peu d'eau de vie ,elt ſovuerain remede pour
vacuer la maticreconioindte: car par celveſicacoire ſort vne cerraine ceroficé & viru.
Remede ſin. lence, laquelle eſtant hors s'enſuit allegeáce des douleurs . Or il ne ſe faut eſmerucil.
21
gulier aux Jer ſi ces remedes acres , corroſifs, & velicatifs, donnent allegeance , & appaiſent les
douleurs des douleurs cauſées de mariere froide & picuiceuſe , non plus que les bains froids & hu
goules . mides à bonne & iuſte raiſon profitent aux douleurs compoſées d'humeurs chauds & solu

acres , pource qu'ils hume&téc & refroidiſſeve. Car il y a des douleurs arthritiques qui
1 ne peuuentiamais eſtre appaiſées queparremedes plus grands que n'eſt l'incempera
ture : partant leſdics veficatoires ne doiuenteſtre deiettez , veu que les anciens ont D
commandé le fer chaud & ardant , comme nous dironscy-apres.Chriſtoflel’André,

en ſon Oecoïacrie , recommande la fiente de bæufou de vache,enveloppéede fueil


les de choux, ou de vigne, poſée ſur les cendres, & puis chaude appliquéeſurla dou
leur .
OS
Remedes locaux pourmatiere chaude, principalement
faite de fang.

CHAPITRE XXI .

Remedes teo L fauc v ſer dereperculſifs aui commencement , qui ſont froids , ſecs , &
RA
percußifs. aſtringens , à fin de contrarier auxqualitez du ſang quieſt chaud & hu
mide,& ce apres leschoſes vniucrſelles.24.albumina ouor.numero ilij .
fucci lactucæ & ſolanian.zj.aquærofarum zij, incorporeneur fimul,fiat
linimentum : lequel ſera renouvelle fouuenr.
Autre . Prenez de la farine d'orge, de lentilles , acacia ,huile rofar & demyrtilles,en
Des Goutes: 677
A peu de vinaigre, & de ce ſoit faic cataplaſme: Autre .
Prenez lumach,myrtilles,bolarmeniac,de chacun demye dragme,acacia, eſcorce Auire de
de grenades,balauſtes, de chacunvne drachme : eau de plantain & de roſes , de cha- ſemblable
cun croisonces , huile roſac once & demye , vinaigre vne once, farine d'orge & de vers .
lentilles, de chacun canc qu'il en faudra , & loic faic cataplaſme,lequel eſt fort excel
lent pour arreſter les Auxions phlegmoneuſes & eryſipelaceuſes. Aucre. Prenez mu
cilage de coings extraicten cau roſe, caſſemundée,huileroſat, & vinaigre, & de ce
foit fait cataplaſme. Prenez deux ou trois poignées de fueilles devignes pilées ver
des , leſquelles ſeronc faites bouillir eu oxycrac d'eau deinareſchal,puis on y adiou
1; ſteravne once de ſumach concaſſé, huilerofacdeuxonces , farine d'orge , tant qu'il
en fáudra : & foitfaic cataplaſme, & ſoit appliqué ſur la partie.Autre.2.Succi ſem
peruiui, hyoſcyami & porculacæ an. Ziiij.corticum inaligranaci zj. B.farinæ hordei
Žv.viniauſteri quantum ſufficic, fiat cataplaſma. Telcataplaſme eſt fort à louer ,
pource que le vin & l’eſcorce de grenade aſtreignent, & les ius refroidiſſent, & la
his
farine auſli davantage eſpelliſt & formele cataplaſme. Autre.2.Foliorum hyoſcia
B mi, acecolæ añ. ñ. j.leſquellesſeront enueloppées dans du papier , & cuictes entre
deux cendres , & puispiſtéesauecdeux onces d'vnguentum populeum ,ou roſat, 8
ſoient appliquées cicdes ſur la partie. Autre... Florum iuſquialmi tb ij.ponantur in
phiala vitreata , & reconde in fimo cquino donec putruerint: accipe ex putredine
Zij.in aquadiſſolucolei de iunipero zB. fiaclinimentum & ad vſum . Autre. Prenez
descicroüilles piſtées, & ſoientappliquéesdeſſus. Aucre. 2. Mucaginis pſyllij, cy
zl doniorum extra &tæ in aqua rofarum & ſolani an.ziiij . olei roſati omphacini zij.vini
granatorum Zj.vitellos ouorum cum albumine numero iij. camphoræ iij. incorpo
rencurfimul,fiaclinimentum .
Autre.2.Oleiroſariomphacini ziiij.albuminaouorum cum vicellis numero vj.
fúeci plantaginis,lactucæ,& ſolanian.zj.farinæ hordei ziij.incorporentur fimul,fiac
cataplaſma.Autre.2.Farinæ hordei & fabarum añ.3 iij.oleirofati žij.oxycratiquan
cum ſufficit,coquancurſimul, fiat cataplaſma. Autre. 2. Mucagiois ſeminis plyHi, z
jiij.oleiroſati3 ij.acecizj.vicellos ouorum numero iij.croci ſcrupulum vnum ,miſce:
C fiac medicamentum .
Pline au vingtdeuxieſme liure eſcric, qu'vn Iuriſconſulte eſtant à veoir vanner ſon Telles goutes
bled ayant les goutes aux pieds , il ſe mit dans ſon bled par deſſus les genoux , & s'y des
eſtoieni chane
orele tine quelque temps , & par cemoyen ſa douleur ceffa.
Or il fauricy noter,que quelquesfois la douleur ne ſe peut ſeder,à cauſe de la mul- Experiëcefat
titude du ſang quieft deflué ſur lapartie,& partant le fauc vacuer : ce que veritable- tetheparl'Aus
ur auec
Acnri'ay practiqué,faiſant ouverture dela veine plus apparente & proche de la dou . bonne iſſuë
]: leur,& fubitelle eſtoit ceſſée.Il faut auſli noter, qu'ilne faut vſer trop de remcdes re- souchanila
percuſſifs, de peur d'endurcir lamaciere , quipuis apres à grande difficulté pourroic faignée faite
cſtrerefoluë ,& y auroit danger qu'elle ne fuſt conuerticen nouds& pierres gypſées: de la part. ie
& partancon y prendra garde. Etapres l'uſage des repercuſifs, il faut appliquer des malad
checa reſolutifs ,quiſerontcy- apres declarez ,à fin de reſoudre l'humeur qui pourroic eſtre
demeuré en la iointure .
que
Remedes topiques pourl'humeurcholerique. CHAP. XXII.
D
Es remedes locaux doiuent eſtre froids & humides , à fin de contrarier aux Remedere
deux qualitez de la cholere , quieſtchaude & ſeiche. Comme fueilles de percußifposs
Colanum , portulaca, ſemperuiuum ,hyoſcyamus,papauer,acetola,plan -Lacholere:
cago, aquafrigida,& autres ſemblables, deſquels on fait pluſieurs compo
fitions.Exemple. 2.Succihyoſcyami,ſemperuiui ,la & ucæ añ . zij.farinæ hordeiZj:
oleiroſaci z ij.agitando ſimul fiat medicamentum : & ſoit renouuellé ſouuenc: tel
remede fede grandementl'inflammation. Autre. Le cerucau de porc , broyé aueca
mydon ,ou farine d'orge,& huile roſat,eftvn remede ſingulier:pareillement lesmau
ues cuites en eau ,broyées & pilées, & appliquées deſſus, ſedentgrandement la dou
leur.Autre.22.Mucaginis pfyllij excractæ in aquaſolanivelrofarum 3 ij.farinæ hord.
1000 3j.aceciquanrum fufficit: fiat linimentum .Aucrc.2.vnguencitoſacıMeſuæ & populo
an. ziij . Tucci melonumZij. albumina ouorum numero iij.miſceantur fimul: & roic
fait commedeſlus.Pareillementvne eſponge imbuë en oxycrat,& vn peu eſpreinte,
faitlefeinblable. Autre. Prencz fueilles de choux rouges deux poignées , cuictes

1
678 Dixhuictieſme liure ,

en eau & vinaigre , puis broyées , y adiouſtant trois moyeufs d'æufs ,huile roſat, crois
;
onces,farined'orge,cant qu'il ſuffira: & ſoir fait cataplaſme . On peut auſſi prendre te
fuccru des choux & des hiebles , roſes piſtees, huile rolac , & farine d'orge , cane qu'il
fuffift : & ſoit fait cataplaſme. En Hyuer qu'on ne peut trouver des herbes recentes,
en lieu d'icelles on prendra del'onguent de Galien refrigerant , auec du populeum.

Onguent re 2. ceræ albæ žj.crocioj.opij 3 iij.oleiroſaciquant ſufficic : macerencuropiun


percußif fort & crocus in acero ,deinde cerantur & incorporentur cum cera & olco , fiat ceracum :
excellent. lequel ſera eſtendu ſur du linge , & appliqué deſſus le lieu dolent , & aux parties voiſi
nes , & renouvelle ſouuent.Orveritablementceremede eſt à louer àcauſe qu'ilyen
tre du vinaigre ,lequelreſoult & ſeiche grandemenc , & ouure les poroſitez de la par
tie , & fait penetrer la vertu des autresingrediens , qui diſſipent l'acrimonie du virus
arthritique, & parcant ſede les douleurs :
ce qu'on a veu à pluſieurs. Autres prennent
grenouilles touces viucs , & les fendent par le ventre,& les appliquent ſur le lieu dou.
L'eau de li- loureux. Autres ont crouué que l'eau muſqueuſe des limaçons rouges , ſede grande
maçons effe- ment la douleur & inflammation. Il faut prendre cinquantc ou ſoixantelimaçons
datiwe de
douleur cau rouges, & lesmettre dans un pot de cuyure , & les ſaupoudrer de ſel commun , & les B
ſée de marierelaiſſer par l'eſpace d'vn iour entier : puis on les coulera par vne eſtamine, & d'icelle
chande. coulature on en trempera des linges , leſquels ſeront appliquez ſur le mal , & renou
uclez ſouuent.Et fauc icy nocer quefily auoit grande inflammation,on fera boüillis
les limaçons en vinaigre & cau roſe. Cedit remcdc eſt fort excellent , ainſi que i'ay
pluſieurs fois experimenté.Ec meſme m'a confirmé monſieur le Longemcau,Gencil
homme d'honneur, & digne de foy , lequel ayant eſté malade & courmenté d'vno
ſciacique l'eſpace de ſix mois : pour la guariſon de laquelle il auoit faie pluſieurs re
medes, tanc vniucrſels que particuliers , ſans luy rien profiter :enfin reccuc par cedit
moyen guariſon , en vſant par l'eſpace de feprou hui : iours . Pareillementlespom
mes de citrons ou orenges cuirtes en vinaigre , puis piſtées auec vn peu de farined'or
geou de féues, & appliquées deſſus.
Aucre.2.pomorum co & torum in lacte tbj. butyri zj . vitellos ij. ouorum , aceti Zi .
fiat cataplaſma.Aucunsprennent vnfromage frais eícremé,battu auec huile rolat &
farine d'orge. Il reprime l'inflammation & lede la douleur . Autres prennent de la
caſſe recentement mundée, & la mellent auecius de cougourde ou melon. Autres
prennent des fucilles de choux & d'hiebles, ou d'achc,ou les trois enſemble, broyées
deb
auec un peu de vinaigre,& les appliquent ſur le lieu dolent. Les autres prennenedela
ſemence de lin vne once , & en tirent mucilage auec biere : puis y adiouſtent huile
roſat , & farine d'orge , & en font cataplaſme. Autres prennent huile de pauot auec de
la chair de citroüillc pilez enſemble , & l'appliquent ſurla partic dolente .

Autre remedepar lequel a eſtéguary un homme en Gaſcogne, en la ville de Baſas, quiauoit esté
affligéde la goute for
long- temps, avec lesplus eſtranges douleurs qu'on
fçauroit
turper
excogiter , & n'afenry depuis aucune douleur.

paliek
Prens vne cuile feftiere , grande, forte , & eſpeſſe , & la fay chauffer iuſques àcequ'el
le ſoit deucnuë ronge, laquelle tu meccras dans une autre tuile pareille en grandeur,
Thune
couce froide,decrainte que le linge du lidt où ſera le malade ne le brulle. Puis cu rem
sphes
plicas la ſuſdite tuile chaudede fucilles d'hiebles , en telle quantité que la partie ma
iade y puiſſe eſtre poſéc , & demeurer dedans ſans ſe bruſler.Lemalade en endurera la is.Le
Teal
chaleur & fucur l'eſpace d'vne heure ou plus fil peut, r’adiouſtant de rechef des hic
flans
bles apres que les premieres ſeront deſſeichées,changeant auſſi de tuile rechauffée,&
200CVO da, let
la premiere ne te ſemble aſſez chaude.Ces choſes faites,la partie ſera elluyćealle
palema
linge : & concinueras leſdites eſtuues douze ou quinze jours le matin , l'eſtomach
eſtancà ieun : & apres la partie ſera oin & te du linimentfuiuant,eftant vn peu chauffé.
i cieles
Verts de 24. ſucciebuli ibj. B. olci communis Ibj. miſceantur fimul & ponantur in vafe fi obai
l'huile d'hie.Qili, cuius orificium fit ftri & um admodum , & cum luco bene obcurarum : poftea bul. n
bles. liane in duplici vaſe cum vino ad medias diluco,perfpatium decemvelduodecim ho: Que las
men ve
rarum : refrigerentur & feruentur vſui, addendo vnctionis tempore gutras aliquot
pieds c
aquæ vitæ.Inungi poteric bis aut ter in die longè à paſtu . Pareillement les racines &
fueilles d'hieblescuittesen eau , piſtées & appliquées ſur la douleur, la ſedent.Sem Aant
il
blablemcacl'huile d'hiebles extraicte en quincc- ellence, clt fingulicrcpourſederles
douleurs
Des Goutes .
629

A douleurs . Or fila douleur eſtoit ſirebelle qu'elle ne peuſteſtre ſedée par les remedes
fùſdits , & qu'elle fuftintolerable auec vnetres- grande chaleur & ferueur en la par
de
tie , tellement que les eſprits fullent reſours, & les forces abbatuës, & que le mala
combaſt en ſyncope : il faut alors vſer de remedesnarcotiques & ſtupefactifs, com
bien que par iceux la temperature de la partie ſoit diſſoluë , & la chaleur naturelle

for at diininuée , voire elteince , fion en vloit trop longuement: neantmoins ils doiuent
pluftolt eſtre appliquez , que de permettre que cout le corps perille de douleur into - Le temps atte 1
para
İcrable. Leur vertu eſt de grandement refrigerer, & feicher, & d'hebeter le ſenci- quel il faut
ulice
ment de la partie : & qui plus eſt, ils eſpefliſſent & incraſſent les humeursłubcils , fer de nar
acres & mordicans, comme eſt l'humeur cholerique. Si la matiere eſtoit crafle & Deri u es
cotiqu :
des
impacte en la partie , alors les fauteuiter, ou pour le moins en vſer auec grande dil. medicamens
cretion, de peur d'induire ſtupeur. narcotiques.
ure -2 .Micæ panis ſecalini parum cocti in lacte zij.vitellos ouor . num.ij.opij 3 j . fuc- Medicament
corum ſolani, hyoſcyami,mandragorx , portulacæ ,ſemperuiui , ana 31. Letont foie narcotique.
B mellé enſemble , & en ſoit appliqué deſſus, & renouuellé ſouuent. Autre. Prenez
fueilles de iuſquiame , ciguë ,ozeille, de chacune vne poignée , leſquelles feronc
7eAd boüillies en oxycrat , puis pilées & broyées auec moyeufs d'oeufs cruds , huile roſat,
2.1 deuxonces,farined’orge cant qu'il ſuffira : & ſoit fait cataplaſme , lequel ſera appli
n fen qué ſur la douleur , & ſera continué iuſques à ce que l'inflammation loit ceſſée. Ce
remede eſt forcapprouué, & duquel i'ay vſé louuentauec bonne iſſue. Autre.2.opij .
moon 3 iij. camphoræ z B. olei nenupharis z j . lactis 3 ij. vnguenci rofati deſcriptionc Ga
leni z iiij. incorporentur ſimulin morcario . Etde ce en ſoir appliqué ſur la partie .

Outre- plus,l'eau froide appliquée & jectée goute à goute ſur la partie , eli narcoti- Verta de
que & ſtupefa &tiuc, comme dit Hippocrates, Aphoril.25.de la fect.s.adiouſtanticel.l'eau froide ,
le pour vne autre raiſon , cître fort propreen toute eſpece de goute , içauoir, campeſ
chant par la vertu repercuſſme que les humeurs n'aMuent davantage ſur la partie ,
Autre. Prenez põmes de mandragore cuicces en lait,puispilées & appliquées deſſus.
Autre.Prenez fueilles de iuſquiame,ciguë ,pourpić, laictuescuirtes e n laict ,& foient Annotation
eckling pilées & appliquées deſſus. Ec qui voudra queces remedes ſoient plus froids, ilne les aux iennes
pres 0 faudra cuire,maislesappliquer tous cruds. Or ſubiţque la douleur & ferueur ſera Chirurgiens
eſteinte & ceſſée , il faut deliſter de tels remedes , & roborer & fortifier la partie auec di ne d'efire
Sanh remedes chauds & reſolutifs. Car autrementy auroit danger qu'elle ne fuſt renduë obſeruée.
debile , & intemperée : ou que puis apres elle fuſt ſujette à toutes fluxions. Parquoy
pour la fortifier, il fauc vſer de decoctions faites d'herbes reſolutiues, & autres choſes
promet deſcrites cy: devant,ou aurresqui ſ'enfuiuent. 24. gummiammoniaci,bdellijanaži
.
Ic diſfoluantur in aceto , & paſſentur per feraceum , addendo ſtyracis liquidæ , farinæ
fce ugracianaz B.pulueris ireoszij
, olei camomilla z ij.puluerispyrethri zij.cum
cera, fiatemplaítrum molle. Autre.2.radicum cnulæ ,ebuli,althex analb . B.feminis
soft
lini,fænugræciana zij ficuum pinguium num.xxij.coquantur completè , & paſſen
tur per ſetaceum , addendo pulueris euphorbij 3 ij. olei camomill . anet ,rutæ , ana
3 iij. medullæ cerui z iiij. fiat cataplaſma. Nous auonspar cy -deuant fait mention de Le trop vſex
pluſieurs autres reſolucifs,deſquelsle Chirurgien ſe pourra aider, ſelon qu'ilcognoi- dereſolusifs
Itra eſtre beſoin : & ſe gardera de trop reſouldre, & feicher , de peur de conſumer faie fcirrhe.

c.Pos l'humeur ſubtil, delaiſtant le gros endurcy & putrefié, dont ſe pourroient faire des
D tophes & næuds , ainſi qu'il ſe peut faire auſſi par l'indevë application des repercuſ
plap le
ſifs. Ie ne veux encores laiſſer en arriere , que les anciens ontfort loué les bains fairs Bain apres
2007 ! pour les
cchet d'eau douce , en laquelle on fera bouillir herbes refrigerantes , & font profitables bilieux.
h
Tec eſtans adminiſtrezprincipalement trois heures apres vn leger paſt: car apres la vian

05 de, le bain a plus grand pouuoir de corriger les intemperatures bilieuſes, & princi
palementà ceux qui ſont grelles & de rare texture , parce qu'ils humcêtent l'habiti
7,
d de du corps, & euacuentl’humeur cholerique par inſenſible trantpiration : d'autant
spee
que les conduits fontouuerts & dilateż par le bain & les humeurs liquefiez. Apres
le bain , il fautoindre tout le corps d'eau & d'huile d'oliue,afin d'humecter & garder
que la chaleur naturelle nefexhale: & les faut continuer iuſques à ce que le chirur
e leson
Poprquoy
gien verra eſtrenecellaire.Auſli faut noter que les viandes de gros fuc,comme beuf, ordonn
pieds de mouton , ciz , & leurs ſemblables , leur ſont meilleures que les delicates viandes de r
les
( pourueu que le malade les digere bien ) pource qu'ils incraſſent le fang bilieux, gros luc aux
dont iln'eft fi facile à defluer auxiointures. choleriques.
MMm
6 Di Li ,
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De
s aydes de la doule fai d'iſm ſan mat .
te nte e s ier
ur mpe e
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CHAP. XXIII. re

ne Lyades douleurs aux iointures qui ſe fonc d'intemperature ſansmatic


re ce qui n'aduient pas fouuenc: toutesfois ie l’ay experimenté ſur moy
meſme il y a enuiron de dix à douze ans . Eſtancen hyuer en moneſtude
Hipp. Aph. vn vent coulis me donna ſur la hanche ſeneſtre, lequelie ne ſentoisa
18.lix.s.
lors , à cauſe que la vertu imaginatiue eſtoit occupée à l'eſtude :puis ma
voulant leuer, il mefut impoſſible de me pouuoir ſoultenirdebour :& auois vn fen
cimenc de douleur ſi extreme & incolerable , qu'il me ſeroit impoſſible la deſcrire,
ſans aucune apparence d'intemperature, ny de cumeur au ſens de la veuë . Lors force
me fut me faire mettrededans lelict : & conſiderant que le froid ( quieft du tout en
nemy des parties nerucuſes) eſtoic cauſe demadouleur , me feis appliquer pluſieurs
B
linges chaudsdeſſus : & ncantmoins qu'ils fuſſent fort chauds, ie ne ſentois qu'à pei
nela chaleur ſur l'endroit de ma douleur, tanc eſtoit l'intemperature grande: & és
autres parties voiſines , ie la ſentoisſi bien qu'ellemebrulloit, iuſquesà me faire le
uer desveſſies. Dauantage ie feis appliquer des ſachecs réplis d'auoine & dcmil fri
Moyens caſſez enſemble , & imbus de vin vermeil: pareillement autresfois y faiſois appliquer
Ine douleur veſſies de bæuf, dans leſquelles y auoit de la deco &tion d'herbes reſolutiues, & n'c
.
de cauſe froi- ſtoienc qu'à demy pleines , afin qu'elles adheraſſent mieux ſur le lieu de la douleur
da. Autresfois y faiſois appliquer vne eſcuelle de bois creuſe , preſque remplic de cen

dres chaudes, & par deſſusdela ſaulge, roſmarin & ruë vn peu piſtez : puis ladite el 1
cuelle eſtoit couuerte & enuelopée d'vn linge , ſur lequel on jectoit eau devie, de la.
12
quelle ſortoit vne vapeur humide quidonnoit grand allegement à ma douleur. Au LA
tresfois y faiſois appliquer la mie d'un gros pain tout recentement tiré du four, ar
1
rouſée d'eau de vie, &enuelopée dans vne ſerviette : ſemblablement me faiſois ap
pliquer aux piedsdes bouteilles de terre remplies d'eau bouillante, afin que l'intem
0
perature fuſt plus amplement corrigée , d'autant que la chaleur de ceremede peut
ſe communiquer au cerueau , pour la re &titude des nerfs .Ceſte extreme douleur me
dura enuiron vingt- quatre heures , & fuc ceſſée par les remedes ſuſdits. Il yaencore
vne autre eſpece d'humeur excrementicieux , lequel pour eſtre de ſubſtance forc
CA
deliée & ſubtile , ne ſe peut voir à l'ail, qui f'appelle fuligineux, à cauſe qu'il eſt
ſemblableau noir qui ſengendre de la fumée d'vne lampe ,lequel eſtant accompa
18
gné de ſeróficé virulente , paſſe par tout , faiſant des extremes douleurs, tancoltà
vne partie , tantoſt à l'autre , ne demandant qu'à ſortir: partant luy fauc ouurir la
porte en quelque ſorte que ce ſoit, ou par application des ventouſes & corners , &
ſcarifications,
ou par veſicatoires & cauteres.

Ce qu'il faut faire, la douleur ceſsée des Goutes . CH A P. XXIV.

A douleur eſtantappaiſée ,il faut roborer, & fortifier les iointures . Orce
Moyens de
roborer unee os mot de roborer, ſe doitnon ſeulement entendre à vſer des aſtringens , & Want
me : & fil y a que
fi y a quel hu
m
ſup ,il fau reſ
erfà l'indiſpoſicion
t ouddelaiſſée à lqu
ſei
deſiccatifs,
l maisauſſi
qu eu
contrarier lu la partie.Com
e
partie. e r re D

cherelle, il faut humecter &z relaſcher : & au contraire , fi les iointures eſtoient trop
1.0.1
lubriques & relaxées ( comme ſouuent aduientaux podagres , deſquels la goutea eſté
faite de mariere picuiteuſe ) alors faut vſer de remedes deſiccatifs, & fortattringens:
& ainſi des autres intemperatures, commenous avons diccy- deſſus.Outre-plus fauc
entendre que les podagres apres auoir perdu leur douleur ( laquelle commence
Les podagres cantort ſous le talon , & quelquesfois ſousla cauité du pied ) neantinoins demeurent
cheminer , la long teps ſans pouvoir marcher qu'à grand peine à cauſe que les nerfs& tédons qui 6
douleur cef ſont en grand nombre aux pieds, ſont imbus & arrouſez d'vn humeur picuireux, &
par ce moyen onteſté relaxez , de force qu'ils ſont demeurez amollis comme vn par
pic.
chemin moüille, quifait que le pauure podagre ne peuccheminer ,& luy ſemble qu'il
marche ſur des eſpines.Et pour le faire cheminer,ilfaut neceſſairement conſommer
l'humeur conioinct,& delaiſſé aux parties nerueuſes: qui ſe fera auecfomentations,
Cataplaſmes, & emplaftres aſtringens & deſiccatifs, comme ceux qui ſ'enſuiucnt.
Des Goutes. 681
2 Pour la fomentation, on vſera de celle qui eſt eſcritte cy -deſſus, au chapitre de la
roboration des iointures: pour la preſeruation ,augmentant la quantité de l'alum &
du ſel, adiou tantdu ſoulphre vifen pareille quantité : puis on vſera de ceſte em
plaſtre.
24. Mallx emplaſtri contra rupturam 3 iiij. terebenth. 3 ij.pulu.rofarum rubr. Emplaftrei
nucum cupreſli, gallarum, granorum myrti, & foliorum eiuſdem , thu.maſtic.ca
ryophyl.añ.zj. malaxenturomnia fimulmanibus inun &tis oleo myrtino & maſti
chino, & fiar emplaſtrum extenſum ſupra alutam debitæ magnitudinis & latitudi
nis : &foit appoſé ſur les pieds cant dellus que deſſous:puis fautauoirvnechauffe cuir
Chaufe de
de chien
de cuir de chien conroyé , laquelle ſoit laſſée bien proprementſurtoute la jambe.
Or ceſte emplaſtre eſt fort veile , d'autant qu'elle fortificles nerfs, & confume l'hu
meur imbueniceux , & cmpeſchela fuxion : & la chauſſe de cuirdechien conſerue
***
la chaleurnaturelle: & parce qu'elle comprime & ferre , elle empeſche auſſi la Au
xion de ſe faire ſur les pieds.
B
Des sophes ou niends qui viennent aux iointures des gouteux.
CHAP. XXV.

N aucuns goureux ſengendrent des næuds aux iointures , appellez des an- Generation
ciens tophi,ou nodi,ou tuberoſitez : leſquels ſont faits par congeſtion d'une des næuds
pituite craſſe,viſqueuſe,cruë , & indigeſte, accompagnée d'vn humeurbi- Glophes.
licux, acre& chaud : leſquels conioints & delaillez en la parcie ( pour l'imbecilité
d'icelle ) ne peuuent eſtre reſoults:& aulli pour la douleur du virus arthritique, il le
faitvneautre augmentation de chaleureſtrange & adulte , qui conſomme & reſoulo
lapartie la plus ſubtile de l'humeur, & legros& terreſtre demeure & l'endurcit, &
ſeconuerticen matiere gypſeuſe & pierreuſe, comme craye : & par conſequent ſont
engendrez des næuds & pierres,ainſi qu'on void ſe faire en la vellie. Pareillement comme l'in
lesnæudsſe font quelqnesfois pour indeuë application des medicamens repercuſ- deuë'applica
fifs & reſolutifs, d'autant que par les repercuflifs les humeurs ſ'eſpellillent & con- tion desre.
o gelent, & par les reſolutifs le plus ſubtilſe reſoult, & lcreſte ſe tourne en pierre.Par: percußifs c
quoy leChirurgien , qui ſera appellé pourcurerles defluxions, ſe doit bien garder næuds.
de troplonguement vſerderemedes repercuſſifs, reſolucifs & deſiccatifs.
cause les
Les medicamens qui doiuent amollir , ont une chaleurmoderée , & doivent me- Remedes qui
diocrementhume&ter,pourliquefier l'humeurconioint & attaché en la partie, com. amolliffens
COOL me l'eau tiede. Aulli on pourra faire bouillir des herbes e :nollientes, ou en lieu d'i- & rompens
le cuir
celles la decoction de crippes , pieds, & teſtes de veau ,ou de mouton , & autres ſem
30 blables. Et apres auoir devëment fomenté, on vſera de ce medicament. 2. axun
Deb giæ humanæ, anſeris & gallinæ ,medullæ ceruinæ añ. Z ij.terebenthinæ Venetæ 3 j .
aquæ vitæ parum , ceræ quantum ſufficic, fiat vnguentum molle,
Apres auoir quelque temps vſédece medicament , on vſera de ceftuy-cy.
2.rad.althex ,lilio.bryoniæ ,lapathiacutian.zilij.coquant.complecè & paſleneur
10.CF
perſetaccú :addegum.ammon.bdellij,galba.opopana.in aceto dil.anzi.medullæ
ceruinæ an.zj.B.incorporétur fimul, & applicentur partiaffectæ. Autre. 3.olei lilio .
: COS
& amygda.dulcium ,medul.crurisceruian . Zij . B. mucaginis, ſeminis lini, altheæ, &
D fænugr.añ.3j.ceræ quant. luff. fiatceracum .Autre. 22.emplaft.de Vigo cum merc.
& ceratideæzipo humida deſcriptione philagrij.anazij.malaxétur fimulcum oleo
lilio.fiatmaſſa.Autre.2.gum.ammon.opopa.galb.bdellij,diſſolutoru in acetoan.
Zij.pannolineo collacis adde pulueris ſulphu.nitri,finapi pyrethriañ.3B.ſtyracisli
14:00
quidæ,axúgiæ hum.añ.3j.reſinæ pini,tereb . Vene ana ZB.ceræ quantú ſuff. fiatce
ratum molle. Er entre tous autres ceſtuy-cyelt fort approuué des anciens pour rom- Exceller mer
prelecuir,& faire fondre les nodoſicez putrefiées,& nommément de Gal.liu.io.des dicamentſur
2500 |
ſimples 7.& d'Auicenne fen.22.liu.3. traicté z. ch.21. 24. pedes porcello. benefalſos tous pour les
num .iij.& veterem pernam cum illis coque , addendo ſub finem rad. alth.bryoniæ, nodofitez,
17:22
lapath.acutiañ.3 iij.axung,taur.& medullæ ceruinæ anaz ) . & cũcafeo putrefacto, auquel entre
Vieil jambon
fiatempla.ſatis mollead vlum .Autre bien excellent.4.calei acris & putrefacti žinij .
eu vieil from
pul.ſulph.viui,euphorbij& pyrethri ana ziij.cómunis veteris pernæ & pedú porcel mage.
lo. ſalicorú quod luff. ad incorporandum ducanturin mortario, fiat empla.ad vſum .
Autre. 2. ſpumæ nitri z vj . tereb. z. ij . olei veteris Z viij . lixiuij quolanx pileorum
.3

MMinij
682 Dixhuictieſme Liure ,
)

lauantur, & ceræ quantum fufficit, fiat ceratum fatis molle . Et apres l'vlage des re- A
mollitifs, on fera vne euaporation , auec la pierre pyrite , ou de moulin ,
ou d'une
bricque bien chaude , & ſuricelle ſera jercé de bon vinaigre & eau de vie : car celle
vapeur diſſoule, ſubtilie, inciſe, & romptla matiere grumeuſe, gypſeuſe, & endur
cie , & fait ſouuentouuerture au cuir . Ec neſe faut elmerueiller litelsremedes rom
pent le cuir ,attendu que le plus ſouuent en tel cas la peau f'ouvre d'elle -melmelans
nulle inciſion : & pour le dire en vn mot , les remedes qui ſont propres à curer les
Les næuds ſcirrhes , ſont bons pouramollir les nodus :mais il faut entendre, que lors qu'il y a
quelquesfois matiere coniointe & ja conuertie en pierre par vne autre fluxion , quelquesfois fic
suppuront.
ſuppure , & eft neceſſaire de faire ouuerture pour vacuer l'humeur fuperflu contenu
en la partie :lequel humeur eſt laicteux , puis la ſubſtance gypſeuſe qui fait les nodo
ſitez , fort dure commeplaſtre: & apreseſtre fortie, il faut curer l'vicere, & mettre
l'emplaſtre de gratia Dei , & autres que le Chirurgien verra e tre neceſſaires.

Des ventofitez qui le plus fouuent font srcauées avec les goutes , é de leurs remedes, B

CH A P. XXV I.

Army les humeurs accompagnez du virus qui fait la goute , ſouuentes


fois eſt crouuée grande quantité de vencoſitez, principalemét és gran
signes de des coincures, comme à la hanche & aux genouils , qui font quelques
sencofitez
fois ſortir les os de lcur propre lieu :& font cogneuseſtre en la partie,en
aux joinike UP
res. ce que le malade ſent grâde douleur tēſue,ſanspeſanteur : & lorsqu'on
preſſe deſſus du doigt, il n'y demeure point de cauité,commeaux ædemes:mais l’eſ
pritflatueux repouſſe & fe releucen haut , comme qui preſſeroit vne ballerempliede
vent: ioint auſſi que la partie ne peut faire ſon action ,à cauſe que les vēts rempliſſene
les eſpaces vuides , & empeſchentle mouuement de ſe pouuoir faire.Or aucunsieu
Document
pour le jeune nes Chirurgiens mercans leurs doigts deſſus en elleuane l'vn & preſſant l'autre , ſen
Chirurgien. tent la ventofité fellever entre lcurs doigts , comme vne inondation de pus ja fait en
vne apoſteme , & y ayant fait ouucrture , icelle faite n'ont apperceu ſortir aucune
matiere : & partantonceſté deceus , & cauſes de grands accidens,commeaugmenta.
tion de douleur, & fuxion d'humeurs , qui ont faiu delboërter les os hors de leurs
iointures , & lesmaladesſont denieurez à iamais claudicans . Ec pour ces cauſes ic
conſeille aux gouteux , en tel cas , d'appeller pour leur aide des Chirurgiensexperi 0

mentez . On void peu ſouuenc telles vétofitez ſans qu'elles foient accompagnées de

Prognoftico quelque humeur pituiteux , lequel n'eſt trop cruny viſqueux.Davantage , ces vento
fitez demeurentlonguemeut ſans pouuoir eſtrereſolues, à cauſe de l'intemperature
froide que faic la matiere venteuſe , & des membranes & ligamens quilientlesioin
cures ,leſquelles ſont denſes & dures , & par conſequent leurs porcs fent ferrez,de fa
CATC çon qu'à grande difficulté les matieres ne fe peuuent euaporer ny ſortir hors . Or DO
pour la curation il conuient pour conſumer les ventofitez , vſer de fomentations re Te,
folutiues,carminatiues,diſcuſſiues,& deficcariues:autquellesauront bouillifenoüil, fois

anis , ruë , camomille, mielilor , ſaulge, roſmarin , origan, calamenthe , marrubium , &
hor
leurs ſeinblables ,cuittes auec vin & lexiue , & vn peu de vinaigre roſat, & du felcom
D
mun.Erapres la fomentation on appliquera celiniment quiſ'enfuit.2. Olei camo
millæ , anethi,rutæ , laurini , anzij. & cum cera alba fiat linimentum , addendo aquæ
vitæ parum . Davant.ge, apres celinimenton appliquera ce cataplaſme. 2. Florum
camomillæ , meliloti anethi, roſarum rubrarum pulueriſ .an . ñ.j. foliorum malua
rum & abfinthujan.ñ (. furfuris ñ.j.bulliantomniafimul cum lixiuio & vino ru
bro : deinde piltertur cum medulla panis & farina fabarum quantum fufficit: fiat ca
taplaſm ., add : ndo oleiiofati & myrtiniań. z ij . Aucuns ont loué pour telle diſpoſi
Remede bien tion, ce remedepourtarir la ventoſité. 2. Axung . ſuillæ Zilij. calcis viuzzi B.Ces
Cayminarif. choſes ſoientfort battiës en vn mortier, & appliquées deſlus
. Autre . Stercoris
caprinico &ticum vino & aceto an . 8. B. terebenthinæ Venetæ , & melus commu
nis an . 3 ' ) . aquæ vitæ Ž 13. pulueris rad . ireos Florentiæ , fubinæ ań. 5 iij . olei rulæ &
Astre , bon aneth ñ zi . farinæ tabarum quantum fufficit: fiat cataplaſma ad formam pultis
.
Il faucappliquer descompreſſes trempécs ( & ctpreintes) en oxycrat ,auquelon Fin
o bien ap
prosué. aura fait bouillir abfinthe,origan,camomille ,melilot,ruë, felcommun ,yadicultant

Il
Des Goutes. 683
A eau de vie : & fera la partieliée& ſerréc le plusqu'il ſera poſible, & que le malade le
pourra endurer.Ecſur la fin pour roborer la partie, on appliquera deſſus de lá lexiue
faite de cendre de cheſne & de ſarment, en laquelle on aura faic bouillir ſel , ſoul
phre, alum de roche , en ſerrant & liant la partie, comme deſſus, aucc compreſſes
trempées en icelle lexiue. Orfily auoit grande douleur , alors faudroit laiſſer la pro
pre cure pour ſuruenir aux accidens, en frottantla partie de quelquc huile carmina
ciue , aucc laine à tout le ſuif ,& autres remedes qu'on verra eitre neceſſaires.
De la Sciatique.. CHAP . XXVII.

AINTENANT il nous reſte à craicter de la goure Sciatique, laquel- Goute sciatia


le ſurtoutes / commei’ay dicau prognoſtic ) emporte le prix pour eſtre que , plus

B
M la plus douloureuſe , & 'cauſe grands & excremes accidens, à raiſon de douloureuſe
la ioincure qui eſt plus profonde que les autres , & que le plus ſouuent que les au
l'humour eſtant en grande abondance & pituiteux , froid , gros & vif- tres.
queux , difficilement le peut-on faire debuſquer de la partie : & vient le plus
ſouuent apres vne longue maladie d'vn humeurmalin , lequel deliurant les parties
d'où il eſt venu , cauſe vne extremedouleur , non ſeulement à laiointure de la han.
che , mais encore plus profondementdedans les muſcles de la feffe , aux aines , ge
Iufques laou
noüils, & iuſques àl'extremité des orteils , & quelquesfois aux vertebres des lum - s'eſtend
bes , qui donne grand tourment au malade : lequel penſe/ & auſſi les Medecins & douleur scidi
Chirurgiens) eſtre yne colique venceuſe ou pierreuſe, ce qui n'eſt pas. Mais la cau tique.
ſe pourquoy on ſenc ſi extremes douleurs, eſt à raiſon des nerfs qui viennent des ver
tebres des lumbes,& de ceux de l'os ſacrum , qui deſcendent & ſe diſſeminent aux
muſcles de la cuiſſe & de la jambe, iuſques à l'extremité des orteils : ce que i'ay am
plement montré en l’Anatomie .Leplus ſouuent on n'y apperçoicaucune tumeur ny La Sciatique
rougeur, ny autre intemperature à la veuë : parce qu'au cuir de ceſte partie y a peu eſt ſansens
de veines ſuperficielles, & que l'humeur eſt fichéfort profondemenc, & ne fémon -meur ego
trcà la ſuperficie .Aulli au contraire , nous voyons quelquesfois, qu'à raiſon de l'ex - rougeur.
treme douleur,ilſe fait ſi grandamasd'humeurs & ventofitez,qui empliſſent la ca
uité de la boërte , & relaxent ſi fort le ligament interieur & les exterieurs , qu'ils
chaſſent l'os du tout hors de ſa cauité : & f'il y demeure longtemps, il ne faut eſperer
qu'il puiſſe eſtre iamais reduit , & qu'il ſe tienne en ſa place , à cauſe quel'humeur a
occupé le lieu & cauité de la teſte de l’os femoris , & aufli que les bords de la boëtte
( quiſontcartilagineux ) ſe ſont eſtrecis , & les ligamens relaxez & allongez: done
ſ'enſuiventpluſieursaccidens pernicieux , comme claudication perpetuelle , amai. La partie a
griſſement detoute la cuiſſe & dela jambe : parce que l'os n’eſt en ſon lieu naturel, maigrit
los n'eſtquad
en
preſſe lesmuſcles, veines, arteres , & nerfs, & y manque le mouuement : au moyen place natu.
:.‫دنیا ان‬ dequoy les eſprits eſtansainſi comprimez & arreſtez , nepeuuent reluire aux parties relle.
inférieures,& par conſequent ſe tabefient & deuiennenten emaciation , c’elt à di
0033 re, amaigriſſement, non ſeulementdetoute la cuille & de la jambe,mais quelques
tem foisauſſi detout le corps , aucc vne fićure heđique, qui meine le malade à la mort.
Parquoy faut que les Medecins & Chirurgiens, qui ſeront appellez en telle diſpofi
tion, ayentgrandeſgard à ne laiſſer aduenir cels accidens,& qu'ils vſentde remedes
D forts & vigoureux, lors qu'il en ſera beſoin ,commenous dirons cy-apres.
Cure de la Sciatique. C H 4 P. XXVIII.

10 . N la goute Sciatique, combien que communément elle ſoit faite Quand il


de pituite craffe, toutesfois ſi le corps du malade abonde en ſang, faut faigner
& qu'il ſoit fort & de téperature ſanguine, il faut faire la ſaignée: en la sciatia
bloi car paricelle il ſe fait égale vacuation des humeurs : & partant la que.
fluxion nc ſeca ſi própte à courir ſur la partie.le vous puis aſſeurer
d quen’ay iamais trouué pluspresét remede à leder la douleur cau
minde feed'inflammation phlegmoneuſe, quela ſaignée, premierement
chose
faite de la veine bafiliqueau bras qui eſt du coſté malade,commei'ay diccy deuát (à
k11 fin de faire reuulſion :) & apres ( pour deſcharger & vacuerlamatiere coniointe ) de
ſaigner la vcine ſciatique, qui elt ſur le malleole exterieur du pied , ſçauoir eſt, îîla
MMm iij
684 Dixh Liur ,
uict e
ieſm
e
Choix de la douleur occupe plus ceſte partie :& fi elle eſt plus grande au dedans , faut ouurir la A
veine ſciati- veine ſaphene, qui eſt ſur le malleole interne : & fauc cirer du ſang ſelon qu'on verra
que, on fan eltre neceflaire.Et à ce faire ie conſeilleauicune Chirurgien qu'il appelle le Mede
phene.
cin , afin qu'il ſoit preſent lors qu'on tirera lefang : & où le cas aduiendroit qu'il nely
peuſt trouuer, & qu'il ordonnaſt tirer trois palletces, plus ou moins, de fang desvci
nes ſciatique & ſaphene, il pourroicfaillir à la quantité dufang : à cauſe que pourlai
ġner telles veines aux pieds, il les fautmettre en eau chaude, & le ſang ſe mellant en
l'eau , on ne peut bien obſeruerla quantité , li ce n'eſt qu'en faiſant mettre lepieddu
patient dedans le vaiſſeau auquel ſeral'cau , il fera vne marque à la hauteur de l'eau ,
subtile oba puis il adiouſtera deux ou trois palletres d'autre eau , plus ou moins, ſelon qu'aura
feruation de ordonné le Medecin , & fera de rechef vneautre marque audic vaiſſeau : puis retire
l'Amheur. rala quantité de l'eau proportionnée du ſang qu'il faudra tirer , & ainſi il ne pourra
faillirà tirer plus ou moins la quantité du ſang qu’aura ordonné le Medecin . Pareil
lement les clyfteres forts & aigus ſont vtiles, pourueu qu'il n'y ait rien qui lesempel
chaſt, comme ſeroient vlceres aux inteſtins & hemorrhoides.
B
2. Rad. acotizij.centaurij,rutæ , faluiæ , roriſmarini, calamenchi, origani,pu
legij , añ . ñ . B.ſtæechados Arabicæ, florum chamameli, melilori, anechi añ. p.jile
minisanili,funiculian. 3 B.fiat deco & io ad tb.j. in colacura diſſolue hieræ ,diapha .
nici an 3 B. mellisanthoſati, & ſaccari rubrian . 3 j.olei liliorum 3 iij . fiatclyſter.
Lequel il faudra accommoder au temperament, aage & au temps, lelon la pruden
E
ce du Medecin . Auſli les purgations vigoureuſes, comme les pilules d'hermoda
etes, ferides , arthritiques, aflajeret pour lespicuiteux , & autres cy -deſusmencion
nées . L'ele&tuaire de diacartami purge l'humeur cholerique & pituiteux . Les vo
miſſemens frequens ( ſi le malade le peut faire commodément) font cuacuation non
ſeulement des humeurs , mais auflircuulſion d'iceux , comme nous auons dit parcy

Les beings deuant. Les baings & fueurs ſont ſemblablement bons . Auſſi la deco &tion de gaſac
hypocauſtes ou de falſeparille : & en vſer cant & fi peu qu'on verra eltre neceſſaire. Et ſi onco
chaleur , on frottera la partie d'oxyrrhodinum , qui eft mixtion
choleri gnoiſt qu'il y ait
aux propres
Jons

queso d'huile roſat & de vinaigre , principalement quand la douleur cft profonde. Car
0
le vinaigre , à cauſe de la tenuité penetrantiuſques au profond , fait voye à l'huile,
WN
laquelle de ſon naturel appaiſe les douleurs . Auſſi on pourra vſer d'autres reper
cuſtifs, ſi on cognoiſt cftre beſoin : & apres on appliquera remedes qui attirent &
reſoluent, leſquels ne ſeront nullement appliquez ,que premierement on n'aic
faict vacuation vniuerſelle, de peur qu'on n'attiraſt trop d'humeur à la partie , &
le.
qu'il ne fuſt rendu viſqueux & eſpais . Dont apres les choſes vniuerſelles,pour af
tirer l'humeur du profond à la ſuperficie , on vſera de l'emplaftre faic de poix &
d'euphorbe & deloulphre, fai&te aing . 2. picis naualis ft.j. fulphuris viui ſub
tiliter pulueriſati 3 ij. euphorbij puluerifari 3 ij . lardi Z B. fiac emplaftrum ſecun
dum artem , & extendatur fuper alucam ( dont il faut vſer auec prudence, de peur
alla
qu'il n'y ſuruienne inflammation ) ou vn emplaſtre d'ammoniac, euphorbe, tere
chai
rerin des benthine , propolis , galb.bdel.opop. & ſemblablement d'huile de laulge,roſma
isde
huiles de rin , de pyrethre, & autres ſemblables,extraictes par quinte - eſſence: leſquelles ſont
lesy
quinte-ellen- bien plus à louer que les autres , d'autant que d'icelles les vertus ſont plus pures ,&
leur action plus prompte fans comparaiſon ,
que celles qui ne ſont tirées par quin
2001
te - eſſence , parce qu'elles ſont de tenuë & ſubtile ſubſtance, & penetrent fore pro- D
fondement, & reſoluent & roborent les parties nerueuſes. Semblablement on fera oud
des fomentations d'herbes diſcutientes & reſolutiues , comme racines & fucilles 0

d'hiebles , ireos , graine de laurier , genéure , & ſemence de fænugrec, anis, fe


noüil , ſaulge, roſmarin , camomille ,melilot , fueilles de ſurcau , & leurs fembla
Auicenne bles : & les fautfaire cuire en vin & en huile , & de ce ſoit faite fomentation. Aufli quc
loüe ceſte em- ceſteemplaftre eſt fort loüée des anciens pour reſouldre & feder la douleur,auec
plaftre. ce qu'elle attire les eſpines & os pourris .22. Seminis vrcicæmundarx , { pumæ bora
cis , ſalis ammoniaci,radicis ariſtolochiæ rotundz , colocynthidos , terebent. Ve
bila
netæ an 3 x . fænugr. piperis longi, xylobalſami, churis,myrrhæ , adipis caprilli,
gummi;'ini añ 3 v.ceræ 15. B. lactis ficus lilueſtris z iij . ß . Il fauc liquefierles cho
les ſeiches auec quantité ſuffiſante d'huile de lis & bon vin , & le tout incorporé en
ſemble ſoit faitemplaftre, & en ſoit appliqué deſſus l’os Iſchion. Aucre. 24. Sinapi
accco acerrimodiſſoluci žij.fermentiacrisźB.pulucris hermodactylorum zij.mellis
Des Goutes. 685
PLAN
031
A communis z iij . cerebenthinæz iiij. olei laur. 8c de ſpicaañ . Zij.farinæ fænugræc.zj.
B. terræ formicarum cum ouis tb . foliorum lauri,faluiæ , cuix, roriſmarini,añ.m . B.
vermium terreſtrium præparatorum tb B. La terre de fourmis, & leurs æufs, & les
vers cuiront à part , auec les herbes hachées auec vin blanc, puis coulées, & en icelle
despois coulacure on adiouſtera les autreschoſes ſelon l'arc : & de ce ſoit appliqué ſous l'os
pour Iſchion, comme deſſus. Autre. 22. Radicis enulæ campanæ, ſigilli Salomonis,bryo
Doua
nix, biſmaluvan. Zij.coquantur completè& piltentur , & pallentur per ſetaceum ,
addend . farinæ fænugræci & hordeian.zj.olei liliorum & camomillæ añ .Ziij. tere
dela bench . ziiij . ceræ quantum fufficit, fiat cataplaſma. Il reſout & appaile la douleur,
i quen & attire la matiere du profond à la ſuperficie. Autre. 24. Radicis ligilli beatæ Mariæ
Zvj. emplaſtri diachylonis albi z iiij.croci diffolutiin aqua vicæ z ij.cerebenthinae
žj.olei de ſpica nardi quantum fufficit:fiac emplaſtrum , applicecur ſuper,alucam
calidè. L'ay appliqué pluſieursfois de la ſeule racine de ſigillum beatæ Mariæ en Experience
roüelles ſur coute la hanche,qui a ſedé roſt la douleur cauſée demaciere froide. Au- faicte par
B tre. 2. Ceræ citrinæ & terebenthinæ abieris añ. Zij . fundantur fimul in vaſe dupli- ; usheur.
ci : & vbirefrixerint,adde pulueris hermodactylorum zB.Aorum camomillæ , iridis
Florentiæ añ .ziij . ſpicæ nardi, florum thymi añ. zij. interioris cinnamomi ele&ti 30
ſeminis nafturtij añ.zij.crocia iiij.malaxentur limul manibus axungia porcivece
ich re non ſalica vn & is,fiat
& maſſa emplaftri. Ec ſipar ces femnedes on ne peut ſeder la
douleur, alors fautvenir aux plus forts, commeappliquer deſſus grandes ventouſes
crmon auec grande flamme, pour attirer l'humeur du profond à la ſuperficie: puis appli
lients quer veſicatoires, à fin que lon face vacuation manifeſte de l'humeur contenu à la
Loss partie.
DIOED 2. Cantharidum,quibus detra&tæ ſuntalæ z ij. aftaphidis agriæ z iij. ſinapi z j. veſicatoire,
JEPO B. fermenti acerrimi zB. Ces choſes ſoienc incorporées enſemble, &ſoit faic veſi
catoire .
Autre. Prenez l'interieur de l'eſcorce de viorne, le poids de deux eſcus, & appli
quez au deſſous de la douleur. Les vlceres faits par les veſſies ſeront tenus longue
li ment ouuerts , à fin de vacuer & tirer l'humeur coniointen la partie Si la cuiſſe tom
C been atrophie,on y procedera en la maniere qu'auons declaré,traitcantdes accidens
des fractures & luxations. Etſi pour tous ces remedesle pauure gouteux ne trouue
allegement de ſon mal , il fauc venir à l'extreme remede par le commandement
CA DE d'Hippocrates,qui dit, que ceux qui ſont affligez de douleur diuturne en l'Iſchion , Aphor. 60.
4 la cuiſſeſe luxe,& deuiennent cabides,& clochent à perpetuité , lion ne les caureri- liu. 6.
power ſe. Auſli Celle commandequ'on vlcere la peau aux vieilles douleurs ſchiatiques en Celfe liu. 4 .
posle trois ou quatre lieux,aueccauceres: car toutes telles douleurs , quand elles ſont en
BI uieillies,à grande peine peuuenceſtre guaries ſans brulleures: & a-on veu pluſieurs
quiontrecouuert lancé apres l'application descauteres. Parquoy pour ſeder l’excre
option me douleur,& prohiber les accidents predits,on appliquera troisou quatre cauteres
-, Per actuels ou potentiels, autour de la iointure de l'Iſchion , les faiſant profonder en la
OKE chair l’eſpeſſeur d'vn doigt( plus ou moins, ſelonque le malade ſeragras ou maigre)
6. ſe donnant garde de toucher lesnerfs. Etpour bien faire,le Chirurgien doit tenir
TIC , lesvlceres longuementouueres, à fin dedonner iſſue à la matiere coniointe, qui a
elté delongtemps recenuë en la partie affe&tée: qui ſe fera par le moyen de pecites
D boulettes faites d'or ou d'argent,gentiane,ou decire fonduë auec poudre de viariol
ou demercure ,ou d'autre matiere catheretique .
Or les cauceres profitent pareillement, à cauſe qu'eſchauffans la partie, auſſi ils Autre veili
eſchauffent, & diffoluent les humeursfroids, & ſubtilient les gros &viſqueux, & les rédes caute
ma attirentdehorspour eſtre cuacuez par les excremens que ieccent lesvlceres : & auſſi res.
que les ligamens ſe referrent par les cicatrices, & la partie affectée demeure puis a
pres fortifiée. Annotation au ieuneChirurgien : c'eſt qu'il fautfaire fechir & eſten
WIT drela cuiſſe malade de celuy quiaura vne ſchiatique, de quelque cauſeque ce ſoit,
de peur que le ligament cartilagineux, qui lie lesos enſemble, ne ſ'enfile au dedans
de laioincure,& queles os ne ſe conioignentenſemble, & ſe face vne Enchyloſis.
CLV

MMm iiij
686 Le dixhuictieſme Liure , des Coutes.
A
De la Goute grampe . CH A P. XXIX.

Deſcription. A Goute grampe eſt vne eſpece de conuulſion, faite d'vnema


cicre flatulente,par le moyen de laquelle fouuentesfois le col, les
bras, & iambes ,lont par vne grande force retirées, ou eſtenduës,
cauſantvneextreme douleur, non coutesfois de longue durée.
Cauſe. La cauſe d'un tel maleſt vne vapeur craſle & lente,qui eſt entre 1
les membranes des muſcles. Qui vient pluſtoſt de nuict que de
Pourquoy
elle vient iour, à raiſon que la chaleurnaturelle & eſprits ſe recirent au cen
pluftoft de tre du corps, quifait que la matiere Aatulente ſelleue, & fait tenſion aux parties, où
nuict. fintroduit la goute grampe. Auſſi quelquesfois vient à ceux qui nagent en cau froi
de,qui les fait noyer,pour l'impotence qu'ils ont,ne pouuansnager,demeurans im
mobiles, parce que par la frigidité de l'eau , le cuir eſt eſpelli & retrait,& les pores
font clos,de ſorte qu'ilne ſe peut faire euaporation de ladite maciere flatulence,mais B
Prognoſtic. au contrairc elle faugmentepar l'eau froide. Ceux qui ſont addonnez à yurongnc Signe
Cure .
rie, oiſiuecé,&c pareſte, pour les crudicez qu'ils amaſſent, ſont le plus fouuent épris D8 9
deceſte maladie. Pourla cure,faut tenir bon regime, & trauailler moderément, &
roborer les parties où tel mal aduient, qui ſe fera parfrictions longues , aucc linges
chauds, cau devie, en laquelle on aura infuſé fueilles de ſauge, romarin , thym , ſa
riette, lauande,cloux de girofles,gingembre, ou autres ſemblables diſcutiens & rc
ſolutifs. Et pour ſeder la douleur,lors que la goute grampeoccupe quelque partie, Co
promptement elle ſera appaiſée par fri& ion ,ou par extenſion , ou flexion, ou par
cheminer.

Fin du dix -huiftieſme Linre , des Goutes.

Car
SS

Ey
24

1
682

Table des Chapitres du dixneufieſme liure,

de la groſſe Verole .

Eſcription de la Verole. Chap.j. Des carnofitez qui s'engendrent au conduisde


Des cauſes de la verole. Chap.ij. Porine . Chap.xxij .
En quel humeur le virus veroli Des lignes des carnofitez . Chap. xxiij.
D
que eſt enraciné. Chap. ij. Duprognoſtic des carnofitez ,e de la cure d':
Signes de la verole. chap.itý . celles. Chap. xxv.
D # prognoftic. Chap. v . Cure particulieredes carnoſitez . Chap. xxvj.
Quelles choſes il fautſçauoirentendrepour De quels remedes il faut vjer ,
ſi leſdites car.
entrer en la cure de la verele . Chap.vj. nofitez tiennent de la verole ,enſemble de
Les moyens de curer la verole. Chap.vi. lexy curation . Chap.xxt .
La maniere de preparer le bois de gaiac. Des remedes conuenables pour cicatriſer les
FT
cbap . viy. vlceres apres l'ablation des carnofrez .
2,
La ſeconde maniere de curer la verole pari Chap. xxviij.
frictions. Chap.ix. Desbubons,ou poulainsveneriens. Ch.xxix .
De l'election, preparation & mixtion de l'ar- ' Des tophes os nodus venans du virus veroli
geni-vif. Chap.x. que. Chap. xxx .

Laforme d'executer ladite friction .Chap.xj. Des cauſes pourquoy l’os s'altere & pourrit,&
Le temps de la friction . Chap. xij. des ſignes pour le cognoiſtre. Chap. xxxi.
De la troiſieſme curation par ceroines ou ém Des moyens de proceder à la ſeparation des os
plaftres vicaires de la friction. Chap. xij. carieux . Chap. xxxij .
La quarrieſme maniere de curer la verole. Des cauteres actuels & potentiels. Ch.xxxiij.
Chat. x 19 . Du mal qui aduient des cauteres actuels in
Cure des ulceres de la verge. Chap.xv. deuëment appliquez ; & quels remedes
En quoy differe la gonorrhée de la chaude . il faui appliquer apres l'uſage d'iceux .
pilſe. Chap. xvj. Chap. xxxiiy .
De l'erection & tenſion continuë du membre De la porion vulneraire. Chap.xxxv.
genital. Chap. xvij. Des darires ou fciffures ferpiginenfes.
Des chaudes -pilles , & differences d'icelles. Chap. xxxvj.
Chap xui . De la maladie venerienne, ou große verole qui

Du prognoſtic des chaudes -piffes. Chap. xix . furuient aux petits enfans. Chap.xxxvij.
Sommaire de la cure de la gonorrhée. Ch. xx. Deſcription de l'eau theriacale.Ch. xxxvij.
Curation generaledela chaude - piſſe. Ch.xxj. De la puanteur d'haleine, desaiſſelles ,& des
Curation particuliere de la chaude- piffe. pieds, & delafueurvniuerſelle.ch.xxxix.
Chap. xxi. De la furdité des oreilles. chap.xl.

Au Lecteur

E n'ay voulu laiſſer en arriere à parler de la groſſe Verole . Et poui ce faire,


l’ay pris la plus grande part de ce qu'en auoit eſcrit deffunct Thierry de
Hery,Chirurgien demeurant à Paris : lequel en a autant bien craicté qu'au
cun de ceux que i'ay pculire, quien auoient parlé deuant luy . Et pource n'ay voulu
changer ſa mechode & maniere de pratiquer , à raiſon que n'euſſe ſceu mieux faire :
& l'ay inſeré en ce preſent Liure pour deux raiſons: La premiere , à fin que le jeune
Chirurgien ne deſiraſt lamethode de guarir ceſte maladie en ce preſentæuure : La
ſeconde, pour le faire renaiſtre, ſi pollible m'eſtoit, pour la preud'hommie du per
ſonnage, & bonne amitié que nous auions enſemble des nos ieunes ans .

1
688

LE DIXNEV FIESME LIVRE ,

TRAITTANT DE LA GROSSE VEROLE ,

DITE MALADIE VENERIENNE , ET DES

accidens qui aduiennent à icelle .

PAR AMBROISE PARE ' , DE LAVAL AV

M A INE , CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy .

Deſcription de la Verole.

CHAPITRE PREMIER.

Dilers noms
Es FRANÇOIS nomment ceſte maladie, la A
de la mala maladie de Naples , & les Neapolicains , lo mal
die vene
di Franceſe : les Geneuois , lo mal di Broluſc :
rienne .
les Eſpagnols, la bouez :les Alemans,Françou
ſe : les Latins , Pudendagra . Tous lefquels noms
1
onceſté ainſi impoſez ſelon le plaiſir desnations :
bu
mais pour ne faillir, ie ſuis d'aduis quefile Fran
di
çois en eſt vexé , que l'on l'appelle la maladie du
François : & fic'eſt le Neapolitain , la maladie du
Neapolitain : & ainſi des autres nations . Ecne
fauc ' eſtre curieux des noms , pourueu que
lon
entende la choſe par eux ſignifiée. Verole eſt
Verole of
one conth . vne maladie cauſee par attouchement, & prin
cipalement de compagnie charnelle , auec qualité occulte , commençant le plus ta
fion de di
wers accidens ſouuent par v !ceres des parties honteuſes , puſtules en la telte , & en autres par
conioints ens cies extcrieures , infectant auſli les parties internes , auec douleurs nocturnes ex
Jemble. tremes à la reſte , eſpaules, iointures , & autres parties . Et par ſucceſſion de temps B
fait des nodoſitez , alteration , & caries aux os , les liquefiant , comme ſi c'eſtoic
meral fondu , laiſſant les parties charneuſes d'autour , louuent en leur entier : en
ſemble cauſe pluſieurs autres & diuers accidens , comme corruption totaledespar
ties , ſelon l'intemperature & cachexic des corps , & la diuturnité du
le
Accidens malade en ſera épris . Car aucuns perdent yn wil, & fouuent les deux ,temps que
ou vne bon
de la verole. ne portion des paupicres , & les malades demeurent apres eſtre curez , hideux à re
garder , ayans les yeux éraillez: autres perdent l'ouïc : autres le nez : autres ont le
palais troué,auec deperdition d'os , qui eſt cauſe de les faire parler Renaud : autres
ont la bouche torſe , comme renieurs de Dieu : autres perdent le culciueur du champ
de nature humaine , de façon qu'ils demeurent apres ſteriles : & les femmesy lail
dinc
ſent la moitié, & quelquesfois dauantage , de leurs parties genitales ; qui faitqu'el
les ſont laiſſées , comme inhabiles d'auoir la compagnie des hommes :8 à d'aucuns
par vn reliqua d'vnc chaude-piſſe , ſe procrée des carnofitez en la verge, qui fait
HRC
que iamais ne peuuent piſſer que par le benefice d'vne ſonde ,& ſouvent meurent
enfan
689
De la groſſe Verole .
A par vne ſuppreſſion d'vrine , ou d'vne gangrene à la verge. Autres demeurent impo
nces. Autres de .
tens des bras ou iambes , cheminans tout le cours de leur vie à pote
meurent cn vne contraction de tous leurs membres, de maniere qu'il ne leur reſte
que la parole , qui eſt le plus ſouuenten criant & lamentant,maudillans l'heure qu'ils
ont eſté engendrez . Autres demeurent aſthmatiques & hectiques , auec vne fiéure
lente, & ineurent cabides & deſleichez : aucuns deuiennent lepreux: autres ont des
vlceres putrides,chancreuſes & corroſiues à la gorge , & autres parties du corps : au
cuns ont vne cheuce de poil,dite alopecie,ou pelade: autres des dartres ſquammeu
ſes aux pieds & mains : il ſe concrée à d'aucunsdes boutons & puſtules dans le con
duit de I'vrine,qui fexulcerenc & enflamment , & ſecumefient de façon que les ma
lades nepeuuent vriner , puis la gangrene & mortification ſuruiennent: qui fait, que
pour leur ſauuer la vie , leur conuient entierement couper la vergeſion n'y remedie .
DI Aucuns ſont vexcz d'epilepſie, autres de flux de ventre , iettans les matieres ſangui
nolentes & corrompuës. Et pour le dire en vn mot , on peut voir la verole compli
ES
quée de toutes eſpeces & differences de maladies , leſquelles ne ſe peuuent guarir
B
fans ablation du virus verolique , auec ſon alexipharmaque, quieſt le vif- argent, que Vif-argento
anidele
lon peut comparer à vn furet, faiſantſortir le connin hors de ſon terrier . d'humeur

AL Veroligne.
Des cauſes de la Verole. CHAP. II .
ER

Lya deux cauſes de la Verole . La premiere vient par vne faculcé ſpecifi- Deux cauſes
que & occulte,laquelle n'eſt ſuierce à aucune demonſtration :on la peur de la verole.
toutesfois attribuer à l'ire de Dieu ,lequel a permis que ceſte maladie com- La verole ese
le fleau mi.
balt ſusle genre humain ,pourrefrener leur laſciueté, & deſbordée concu ſerable des
piſcence. La ſeconde, eſt pour auoir eu compagnie d'homme ou de femme ayant la- paillards.
dice maladie , laquelle ſe prend à cauſe que l'homme aura à la verge quelques vlceres Comment la
de verole ou chaude-piſſe, ou la femme à ſa matrice : ou qu'elle aura vne chaude- verole ſe
piſſe ( qu'elles appellent fleurs blanches ) ou de la ſemence recentement receuë de prend par
quelque verolé : & par le contact de la verge, la mucoſité & ſanie virulente retenuë le coit.
alta
с aux rugoſitez du col de fa matrice,ſ'imprime aux poroſitez de la verge , cauſant vice
res malins,ou chaude-piſſe. Puis le virus pullulera & cheminera par les veines,arte
lela
res & nerfs aux parties nobles ;ainſi que lon void le feu épris à vne corde d'harques
buze : & le foye ſereſſentant de tel vice,fouuencpar ſa faculté expultrice , chaſſe le
squ dic virus aux aines, & faitapoſtemes,appellées bubons ( vulgairement poulains ) leſ Si
le poulain
quels ſ'ils ne iectent leur gourme , & retournent au dedans par deliteſcence , ce venin
ne ierie fa
infede la maſſe du ſang ,dontfenſuit la verole.Toutefois elle peut aduenir par autre gourme, eſt
zation ? cauſe, comme par la reception de l'haleine infe & ée d'vn verolé , ou verolée , baiſant cauſede ve
pluſieurs fois vn enfant: ce qui n'eſt hors de raiſon. Car par la reception desvapeurs role.
corrompuës, le virus ſe peut imprimer au corps de l'enfant, attendu ſa delicateſſe & Autre cauſe
de verale.
rarité puerile . Pareillement pour auoir excrait & receu vn enfant d'une femme vero
Com lée ,les matronesen peuuenceſtre entachées,d'autantque par les poroſitez de leurs
1
mains,le virus ſe cominunique aux veines & arteres, & d'icelles par tout le corps ,
comme monſieur le Coq , Docteur Medecin à Paris , teſmoigne auoir veu au traicté
frondom qu'il a faict ,Deligno fancto non permiſcendo. Aulli par experience on void , que gens Eſpece de
mel D de toutes complexions , ſexes, ſoient enfansadolefcens, hommes en âges , conſiſtans, cauſe de ve
role admira
ſolides,& robuſtes, couchansaucсautresinfectez de ceſte maladie, fans aucune com
ble .
ouko
pagnie charnelle fen trouuencatceines & épris . Il ne faut pas en attendre moins de
comps celuy quicouchera au li& d'vn verolé ,fi la fueur ou ſanie fortant de quelque vlcere ,
QUE infeáte lesdraps & couuercure , eſtans imbus de ce venin : à cauſe que nos veines &
hide arteres attirent l'air ,mettant en nos corps la qualité maligne desexcremens impri
mez aux linceuls . Aucant en ſera - il de manger & boire aux vaiſſeaux où ils auront
beu & mangé : car de leur bouche ils y laiſſent vne ſaliue fanieuſe , contenuë entre
urde leurs dents ,laquclleeſt veneneuſe en ſon eſpece ,ainſi qu'aux lepreux , ou que la baue
d'un chien enragé en la ſienne. Semblablement les enfans alaidans nourrices ve
uit rolées en font infc & ez :attendu que le laiet n'eſt que ſang blanchy , lequel eſtant
infe & té du virus , & l'enfant en eſtant nourry , en prend les meſmes qualitez . D'au .
L'enfant pewe
tant que nous retenons de la nature dequoy nous ſommes nourris. Souuent auſſi donner lave
32,2
l'enfant ayant la verole , la donne à la mere nourrice :car par la grande chaleur 86 roleàfameres
690 Le dixneufieſme Liure ,

vlcere qu'il aen ſa bouche , & par les vapeurs qui l'eſleuene de ſon corps , ilimprime a
au mammelon ,qui eft poreux , laxe , &č rare, le virus qui ſubit ſe communique par
tout le corps, qui premierement & le plus ſouvent le monſtre au mammelon .
Hiſtoire me En céc endroit ie veux bien reciter ceſte hiſtoire. Vne honnelte & riche femme
morable. pria ſon mary qu'il luy permiſ d'eſtre nourrice d'vn ſien enfant: ce qu'il luy accorda ,

pourueu qu'elle prinſt vneautre nourrice pour la ſoulager à nourrir l'enfant. Icelle
nourrice auoit la verole , & la bailla à l'enfant, & l'enfant à la mere, & la mere au
mary , & le mary à deux autres petits enfans , qu'il failoitordinairement boire & man
ger, & fouvent coucher auecques luy, non ayant cognoiſſance qu'il fuſt entaché de
Ceux quifone ceſte maladie.Or la mere conliderant que le petit enfant ne profitoit aucunement,
ents
per hez
ole ne de & qu'il eſtoic en cry perpetuel , m’enuoya querir pour cognoiſtre la maladie , qui ne
fut difficile à iuger: d'autant qu'il eſtoit tout couuert deboutons& puſtules, & que
peuuent pro. Jestecins de la nourriceeltoient tous vlcerez : pareillement ceux de la mere,ayant
firer.
ſus ſon corpsplugeurs boutons : & ſemblablement le pere,& les deux petits enfans,
dont l'vneltoit âgé de trois , & l'aucre de quatre ans . Lors declaray'au pere & mere
qu'ils eſtoient tous entachez de la verole, ce qui eſtoit proucnu par la nourrice : lef-B
quelsi’ay traicté , & furent cous guaris reſte le petit enfant qui mourut , & la nourrice
eur le foüet ſous la cuſtode , & l'euſten par les carrefours, n'euſt cité de craintede
deshonorer la maiſon ,

En quel humeur le virus veroligue eſt enraciné. CHAP . III.

Le fondemēt OMBIEN que ſelon aucuns , la cauſe antecedente de ceſte maladie ſe


de cele ma faic indifferemment des quatre humeurs : toutesfois il me ſembleque le
ladie eſt à la fondement & la cauſe materielle, premiere & principale d'icelle , eſt vne
pituite vil matiere picuiteuſe, groſſe & viſqueuſe, alterée & viciée par ce virus: 1c
queule como quel conlequemment altere & corrompt les autres humeurs, ſelon la preparation
froide.
qu ils auront à le recevoir. Et pour probation que ce virus eſt fondé en l'humeur pi
cuiteux ,c'eſt que par l'euacuation qui ſe fait de cet humeur , ſoit par flux de bouche
ou de ventre , ou par I'vrine , ſucurs, & en toutes temperaçures , ſoit choleriqucs, fan. с
guines , oumelancholiques, ladite verole elt guarie : ce que lon void par experience .
Premiere Aulli que les paroxyſmes & mouvemensdes douleurs ſe fontla nuict plus que le iour, 4
raiſon. parce que lors la matiere eſt en ſon rutou mouuement,faiſant diſtenſion au perioſte, 9
membranes, & autres parties nerueuſes , & retourne tous les jours en meſmemaniere 91
Seconde.
que fait une fićure quotidienne , cauſée d'humeurs pituiteux . Auſſi lon void que les
choleriques,fanguins, & melancholiques,nepeuvent eſtre guaris que par l'euacua
tion de l'humeurpituiteux ,& ſont tous,ou la pluſpart, des accidens ſuiuans celte ma
Troiſieſme. ladie , cauſez d'humeurs froids. Pareillement les malades ſe ſentent bleſſezaueccho
ON
ſes froides, & aidez & guaris par choſes chaudes, fort par decoctions, onguens,em
Quatrieme plaſtres, parfums, & autres remedes, pris cant par dedans que par dehors.D'abon

& cinquief- dant en toutespuſtules ou vlceres , on trouue vnc dureté en la racine , encores qu'el adu
me.
les apparoiſſent exterieurement bilieuſes ou fanguines: car les ayant ouuertes ,on Que
les trouuera farcies d'vne maticre gypſeuſe & blanche, ou vne pituite craſſe,ou vn alo

pus viſqueux: auſſi les parties froides & ſpermatiques en font plus affe &tées que les les
chaudes. Les exoſtoſes ou nodus, ne ſont procrcées que d'une picuite craſſe & viſ. D.
queuſe . Auſſi les vlceres ne pcuuenteſtre curez ,que le corps ne foit vacué,& princi: let:
palement par ſueur: parquoy ſi la matiere eſtoit chaude & feiche ,feroit pluſtoſten
tretenuë par tels remedes, que guarie. Pareillement on void que ladite verole el
guarie par remedes chauds & fecs,comme par la decoction de gaiac, d'eſquine, fallc,
parille , & vif- argent, & autres choſes prouoquans la ſueur.

De la Pelade.

La pelades La Pelade ſe fait d'humeur ſereuſe introduite ſousle cuir ,quicorrodela racine des
cheueux. On cognoiſt ladice pelade quand on void deperdition de poilà la ceſte,
barbe & ſourcils. Elle eſt pluſtolt curée par l'onction , que par la diecte . Rondelee
eſcrit que pour faire renailtre le poil , faut prendre vne taupe, & la faire bouillic , & en tom
Sixieſme, frotter la partie . Dauantage , ceitemaladie ſecache au corps yn an , lans demonltrer
091
De la groſſe Verole.

A quelquesfois ſignes apparens : ce que ne font les maladies cauſées d'intemperature


chaude . Parquoy ces choſes conſiderées, on peut conclure , que la baſe & fonde
ment du virus verolique eſt l'humeur picuiteux : toutesfois elle peut eſtre compli
quée auec autres humeurs,commeil appert aux tumeurs contre nature , leſquelles
ſe treuuent peu ou poine , qui purement & z ſimplement ſoient faices d'vn ſeul hu
meur,maisceluy qui domine en la tumeur , prend la denomination , comme nous
auons dit au traicté des Tumeurs contre nature .

Signes de la Verole. CHAP, Tini .


+

Ors que la verole eſt recente, il f'apparoiſt vlceres à la verge,ou source des
à la vulue, tumeurs aux aines, chaude- piffe , iertant quelquesfois chaudes
fanie puance & fort feride, laquelle provient des paraſtatesou des piles.
vlceres qui ſont au conduit de la verge : ils ont auli douleurs aux
B iointures , ceſte, eſpaulės, & autres parties, auec vne lallitude des
bras & iambes, de façon que les malades diſent qu'il leur ſemble
auoir eſté battus de baſtons,nepouuans cheminer ,ny porcer leurs
mains ſur la ceſte, finon auec grande difficulté. Il leur ſuruient inflamination à la
bouche , & tumeur aux amygdales,qui les garde de bien parler , & aualler leurs vian
des , & melmes leur faliue : aufli ils ont puſtules & boutons à la teſte , & par tout le

corps, & ſouvent vn chappelerautourdu front, cheute de poil ( dite alopecie , ou pe- Chappelet
lade ) à la teſte, ſourcils, & à la barbe , auec amaigriſſementde tout le corps , & gran- deboutonsi
CA des inquietudes .
Il faut icy noter ,que tous ces ſignes ne ſuruiennent pas à chacun malade , mais à signes cer
aucuns d'iceux . Les plus certains fonc,quand le malade a quelque vlcere malin aux tains de la
perole.
LIK
parties honteuſes,calleux,dur & difficile: & encores que les vlceres ſoient conſoli
dées, & qu'il y reſte certaine dureté, principalement à la verge , cela denonce la ve
role à curer , & apparoiſſent tumeurs aux aines, qui l'en retournent dedans le corps
und
ſans le ſuppurer. Et lors qu'il ſurulent aucun des ſignesſuſdits, il faut iuger qu'ils ont
ok la verole: toutesfois il faut bien noter, que pluſieurs ont ſignes euidens de la verole,
C
21 : ſans qu'ils ayenc vlceres à la verge , ny bubonsaux aines , nc chaude- piſſe, neantmoins
fursa qu'en telles parties le plus ſouuent l'apparoiſſent les premiers ſignes: mais ont quel
052 ques vlceres ou puſtales en autres parties , leſquellesne peuuent eſtre curées , quel
quediligence qu'on y puiſſe faire , ſi ce n'eſt par le benefice du vif-argent. Lors qu'el- signes de pes
3070 leeſt inueterée, les douleurs ſont fixes & arreſtées, aueć tophes ou nodus, carie & role inuete
pourricure quxosde la telte,ou aux bras , & au deuant des iambes : auſſi ils ont des tu- rée.
UBE mcurs noüeuſes, remplies de matiere dure , en maniere de chartaignes,ou commevn
nerf ou tendon pourry,quiſont fortenracinées : & apres eítre ouuertes, degenerent
org en diuerſes eſpeces d'vlceres, à ſçauoir, putrides & corroſiues, & autres, ſelon la di
hosilci uerſité des corps . Les douleurs vexent plus les malades la nuit que le jour : ce Pourquoy les
CHUS aduient,pourcequ'eltans tenus chaudement , icelle chaleur clineur l'humeur : ioint verolez ſono
02 que le virus verolique l'accache le plus ſouvent à l'humeur pituiccux , lequel la nuict plus courme
a fon mouuerent:partant il feſleue & diſtend le perioſte , & autres parties nerueu - teze la nuice
qu le
ſes,quieſt cauſe auecl'acrimonie du virus faire de grandes douleurs. Qu'il ſoit vray ,
D les pauures verolez au matin , apres auoir crié toute
la nuict , commencent à le repo
ſer: parce que ledic humeur pituiteux commence à l'abbaiſſer, & quitter place au

Define ſang, qui a la dominacion au matin . On peut icyadiouiter autre raiſon , c'eſt que le
malade ne trouuancoccaſion de parler la nuict à aucuns , & voir choſes diuerles, ſon
eſpriceſt attentif du tout à la douleur.

Du Prognoſtic. CH A P. V.

Icelte maladie eſt recente aucc peu d'accidens, comme puſtiles ,& quel
Signes de ve
helai ques petices douleurs mobiles , & que le corps ſoit ieune & de honne habi,rolecurables.
tude, & que le temps foit commode , comme le Print:mps, la cure ſe fera
facilement. Maisål oppoſite ,celle qui iſt inueterée auec grand noinbre d'accidens , signes incu
comme douleurs de tcite, nodus, & carie aux os , pareillemene vlceres cacgëthes én rables.
Det corps forc cxtenuez , debiles, & qui auront eſté par diucrſes fois penſez par empiri
NN 12
692 Le dixneufieſme Liure ,
ques,ou bien par perſonnes methodiques,qui n'auront rien oublié ſelon l'art à exe A 19
d
cuter : à quoytoutesfois la maladie n'aura voulu ceder par fa grande malice , de fa
çon que le virus ſera plus fort que les remedes , & auſſi lors que le malade elt forç IC

emacie,ſec & hectique ( pour la conſommation de l'humidité radicale ) lors ſera du PE


di
toutincurable . Parquoy à tels faurordonner cure palliatiue , toutesfois faut vſerde D
grande prudence en prognoſtiquant,pour n'encourir mauuaiſe reputation: parce
que lon en aveu pluſieurs que loneftimoit ne deuoir iamais recouurer ſanté , auoir de
C
Les ieunes eſté guaris : car Dieu & Nature font ſouuene choſes admirables. Les ieunes, qui
fone fort ſus- ſont de texture mollaſſe,rare, & delicate,ſontplus diſpoſez à receuoir cels virus, que
iers à receo
voir la ve ceux qui ſont de contraires temperatures, & non preparez à receuoir cel venin.Com
role. me nous voyons en temps de peſte, que tous ceux d'une maiſon en ſeront morts, &
qu'aucunsconuciſ
Hazard ſurhan dront erontaueceuxiour & nuict,voire à ieunou ſaouls; quine pren
aucun mal : ce qui appert ſouuent en aucuns qui habiteront auec femmes in
ceux qui
bitentauec fectées, & ne prendront la verole, là où les autres qui n'en auront tiré qu'une ſeule
femmes
rolées.
ve- pauure dragmela prendront . Etquantaux douleurs dites goutes , elles differentde B
celles qui ſont vulgaires: car les vulgaires ont certains periodes & paroxyſmes, &
Difference
des gontes celles delaverole font preſquecontinuelles.En outre, les goutes vulgairesdemeu
ME
Deroliques rent quelquesfois, non ſeulementcinq ou ſix ans ou plus cachées en vn corps : mais
Goulgaires, auſſi toute lavie d'vn homme,viuant de bon regime, ſans qu'il f'en reſſente, & tou dis
Nota. tesfois les enfans yſfans de luyen ſeront affligez: ce qui n'elt pas ainſi de celles de la Que
POT

verole. Caron les void ordinairement,ou ſouvent,guarirauec toutes leurs racines, 7

fans iamais recidiuer de pere au fils. Dauantage,lesgoutes qu'on appelle naturelles, Wil

tal
occupent les iointures,& y cauſent des nodus,dedansleſquelson trouue vnematic
re pierrcuſe & gypſeule, & celles de la verole occupent pluſtoft le milieu desos,les
rendans carieux & pourris: ſ'il ya vlceres à la verge , ſontdifficilesà guarir, & apres
les auoir cicatriſez , fildemeure dureté au lieu , celle choſe infailliblement monſtre
le malade auoir la verole . Quant au reſte du prognoſtic, la verole du temps preſent
eſt beaucoup moins cruelle & plus aiſée à guarir , qu'elle n'eſtoit le temps paſſé de
ſon premier commencement:carelle l'addoucit de iour en iour euidemment. Les
Aſtrologues eſtiment la cauſe de cecy prouenir dece que les influences du Ciel,qui G
ſemblentauoir premierement cauſé celle maladie, ſemblent auſſi par laps de temps ,
& contraires reuolutions eſtre affoiblies :tellement qu'il y a apparence , qu'auec le
temps elle ſe perdra,comme fit la Mentagre, qui luy reſſemble en pluſieurs accidens,
& qui affligea beaucoup lesRomains ſous le regne de l'Empereur Tibere : & la Li
chene,qui ſousClaudeſon ſucceſſeurmoleſta,non ſeulement l'Italie,maisauſſi tou
te l'Europe. Mais les Medecins aiment mieux attribuer la cauſe de tel addouciſſe
ment, à l'inuention d'vne infinité d'excellens remedes, que pluſieurs gens de bon
eſprit ontrecherché diligemment pour oppoſer à vn malli cruel . Que puis-ic dire
dauantage du prognoſtic? C'eſt que pluſieurs ayans gaigné la verole, fubic l'appetit
Venerien eſt quaſi comme eſteint, & la verge ſe rend mollaſſe ,& tombent en vne
triſtelle: puis peu à peu lemalaccroiſt,accompagné de pluſieurs & diuers accidens ,
comme nous auons dit. A ceux qui ont les humeurs ſubtils,ſuruient la pelade,à au
tres,vlceres malins & cacoëthes. A quelques- vns ſuruiennent des dertres & fentes
auxmains& aux pieds,qui procedent d'une pituite ſalée. Lors que la verole eſt in
ucterée , les douleurs ſont fixes, & ont des nodofitez, & le plus lovuent derţres aux D
inains ou aux pieds,& ontvne couleur plombine , & peſanteur de tout le corps, &
ſont chagrins & melancholiques.
Quelles choſes il fautſçauoir de entendrepour entrer en la cure de la Verole.
CH A P. VI.

Trois manie ALIE N afferme que toute curation de maladie ſe faiet parl'unede ces
res pour 44 crois parties de medecine curatoire, à ſçauoir , par diece, Chirurgie, ou
rir toutes
mladies .
pharmacie,ou la pluſpart d'icelles enſemble.Orenceſte peruerle & ma.
igne maladie,toutes les trois ſont néceſſaires : car comme la pharmacie
a beſoin de diere & de Chirurgie , auſſi la Chirurgie a beſoin de diece
& de pharmacie. Et partant il faut que le Chirurgien raciopelayę lą cognoillanco
1
De la groſſe Verole. 693

A de crois choſes, en l'ignorance deſquelles giſt le defautde curation de toutes mala


dies,c'eſtà ſçauoir, l'eſſence , cauſe & accidens de la maladie. Aufli la diuerſité des
temperatures; tant generales que particulieres , auec les remedes & medicamens
propres pour la curation d'icelleeft neceſſaire. Car fans la cognoiſſance & metho
dique adminiſtracion d'iceux,nc ſe peut faire curacion lice n'eſt par cas d'aventure.
Donc pour bien curer ceſtemaladie, il faut cognoiſtre les choſes naturelles , & les
dependances d'icelles, pour la varieté des corps & parties bleſſées: car il faut que le
Chirurgien methodique ſçache que les hommes d'habitude dure & robufte , com
me laboureurs, nautonniers ,forgerons, chaſſeurs, crocheteurs, poftillons, & autres
telles gensde grand trauail, endureront medicamens violens, & euacuations plus
fortes, que les autresqui ſont d'habitude & complexion molle & delicate , comme
femmes ,cunuques ou chaſtrez, & ieunesenfans & ſedentaires.Aufli ſelon la tempe- Faut diuerſi
rature de chacun malade,faut diuerſifier les remedes, comme les perſonnes qui ſont fier les reme
des pour la
de complexion cholerique , ſanguine, demandét autre forme de curer que les pitui
diuerfité des
B teux & melancholiques. Car encores que le fondement de la verole ( comme nous complexions.
auons dit ) foit en l'alteration de l'humeur pituiteux , li eſt- ce qu'il s'enſuit vice &
corruption des autres, pour la temperature des corps , & abondance des humeurs .

Mais il y a vn tas de coquins, impoſteurs, & maquerelles , qui traictent tous malades
d'un ſeulonguent ,ou d'une decoction de gaiac auec vin ,ou ſans iceluy , adiouſtant
quelquesfois medicamens purgatifs,font & vne infinité de fautes , dont les pauures
verolez demeurent eſtropiez & languiſſanstoute leur vie . A ſçauoir, ſi au commen
cement de la verole,comme il aduientque quelqu'un aura vlcere à la verge , ou à la
vulue,pourauoir eu compagnie d'vn verolé ou verolée, f'il faut promptement pur .
ger & ſaigner . Monſieur Rondeler defend de non purger & faigner, de peur de re
carder le venin verolique à ſortir hors , & ofter la cognoiſſance pour quelque temps :
BE mais il faut attirer le venin au dehors,parfomentations & lauemens, bains , eſtuues,
cmplaſtres de de Vigo cum mercurio ,onguents vif - argentez appliquez aux aines &
entre-feſſon ,decoction de gaiac donnée en pocion ,à fin de chaſſer le venin verolique
mh hors , & luyobrundre ſa malice : celles choſes le plus ſouuentgardenc la verole de ve
nir. Aulli qu'il nous eſt commandé des anciens, de non purger ny faigner au com
psis mencement des piqueures & morſures des chiens enragez,&
autres beſtes venimeu

2 ,4 ſes,depeur d'accirer le venin du dehors au dedans. Parquoy c'eſt mal faict de purger
& ſaigner au commencement de la verole.

*Te f1

Le moyen de curer la Verole, enſemble du bois de guiac.

CHAP . VII.
GUES

theater Luſieurs ont cherché & experimenté diuersremedes pour la cura- Quatre mai
Teacher tion de ceſtemaladie ,mais auiourd'huyde tous elle ſe pratique en nieres pour
clues quatremanieres.Lapremiere,par decoction de gaiac . La ſeconde, guarir la veu
role ,
paronctions. La troiſieſme, paremplaftres,auſquelsentre le furer,
erokai que i'appelle l'argent-vif. La quatrieſme, par parfums
. La premie
D
deur re qui ſe faitpar la decoction du gaiac, n'eſt pas ſeure,ce qui eſt ma- '

le com nifeſte par experience : car il n'eſt ſuffiſant poureſteindre ce virus,


mais ſeulement pour pallier : parce qu'il eſchauffe ,attenuë , prouoque les ſueurs & Effects du

vrines ,deſſeiche& conſomme les humiditez ſuperfluës ; & ſemble qu'il guariſſe ,veu gaiac.
que pour quelque temps appaiſc les douleurs , & autres accidens . Mais tous ſes ef

fe&ts ſont imbecilles, & ne fai&t vacuation que du plus ſubtil parles ſucurs : mais l'ar
gent-vif a toutes les actions du gaiae, & ſans comparaiſon plus grande puiſſance &
vertu : car outre ce que lon voit par experience qu'il eſchauffe , attenuë, inciſe, diſ
ſoult, reſoult, & delleiche,il prouoque ſueurs, vrines, flux de bouche , & ventre ,
par leſquels non ſeulement les humeurs fubtils, mais auſſi les gros ( ſiege prins :
historia
e
Tub cipal de ceſte maladie ) ſont euoquez & tirez dehors. Or apres lvlage de la deco
&tion du gaiac,on voit quelquesfois retourner les nodus , & pluſieurs douleurs, leſ
22
quelles ſont cauſées par les reliquesdes humeurs plus lents, eſpais,& vifqueux , de
Vio
laiſſez au profond des partics , leſquelles le vif-argent challc & caric entierement
.
NNn i)
694 Dixneuf
iefme Liure ,
Blection du Quant à l'ele &tion du bois de gaiac ,celuy eſt le meilleur quia le troncaſſez gros, a- A
saisc. uec vne couleur cannée , tendance à noirceur , & qui eſt recent & gommeux, & de

Faculté du bonne odeur, fort peſant,auec ſaueur acre, & quelque mordication , ayant l'eſcorce
gaiac.
Trois fubftão fort adherance au bois : fá faculté eſt d'eſchauffer, rarefier , accenuer ,accirer , prouo .
Ces ſonttrom- quer ſueurs& vrines , & oucrc a quelque choſe de propre contre le virus verolic. Es
nées au bow faucicy nocer,qu'en iceluy bois y a trois facultez : la premiere eſt en l’eſcorce: la ſem
de gaiac.
conde eſten la partie d'apres, qui eſt exterieure & blancheaſtre: la troiſieſmc eſt le
La premiere dedans,ce que lon appelle le cæur , qui eſt le noir ,toutesleſquelles docuenteſtrecon
Subſtance du liderées.Carla premiere ſubitáce,qui eſt l’eſcorce,eſt plusſeiche , au moyen dequoy,
gaiac.
Seconde. quand il eſt beſoin de fort deſleicher ,on vſèra d'icelle: la ſeconde elt moins feiche,
Troiſieme
. parce qu'elle eſt aucunement plusgommeuſe, non coutesfois comme la troiſieſme,
qui eſt lededans: pource qu'elle a plus d'humidité gommeuſe , au moyen dequoy
peut moins deſſeicher. Et pour ce és corps delicats,humides,& de rare texture , où il
cſt beſoin , pour la conferuation des choſes qui leur ſont naturelles,moinsdeſſeicher;
I'vſage de la deuxieſme ou troiſieſme ſera plus propre : & à ceux qui de leur nature B
ſont robuſtes, il faudra d'autác plus deſſeicher, & partant l'vfage de l'eſcorce leur ſe
E
fa propre auec les autres ſuſdits,meſlez ſelon qu'il ſera beſoin . Orquand ie parle icy
de l'eſcorce dudit bois ,ilfaut entendre qu'elle ne ſoit trop vieille , noire , vermouluë
Cauſes de la
yermouleure ou pourrie : qui ſe fait ,à cauſe que ſouuent le bois eſt demeuré en chancier au bord
du de lamer, dontl’eſcorce ſe ſera alterće & pourrie : auſſi que les mariniers mettent le
gaiac.. A
bois au fond de leur nauire , où ſouuent reſide vne eau puante & infe& e: ioine que
d'autres eaux ſales & ordes tombent d'enhau deſſus, & ce le plus ſouueno parlonguo 1
eſpace de cemps . Oreſtans les nauires arriuez au port,le diftribuenc, & le vendentà
la liure. Les Apothicaires voulant conſeruer leur poids,le mectent en leurcaue,où il
1
demeure bien fort long temps : qui fait que ladite eſcorce ,encore qu'elle fuſt coure
recente , ſe chanGft & pourriſt, voire ſous icelle deux ou trois doigts dudit bois . Er
parcant ie conſeillen'ordóner l'eſcorce,ny du bois, qui eſt trois doigts proched'elle.

La maniere de preparer la decoction de gaiac. .


C
C H 4 P. VIII.

Comme lon T premierement il le fautraper,& pour liure d'iceluy, adiouſter


cel
doit faire la hui &, dix ou douze liures d'eau de riuiere, plus oư moins, ſelon
fuer
decoction du quc lon verra eſtre neceſſaire, ſuiuant les indications predi&tes:
gaisc. & le faut laiſſer infuſer par l'eſpace de vingt - quatre heures, &

l'eau ſera quelquepeu chaude, & fpecialement l'hyuer,à fin qu'il dette
l'amolliffe mieux , & penetre en la ſubſtance ſolide. Cela fait, la
decoction doit eſtre faicte popr le mieux in balneo Mariæ , à fin
brion
d'euiter vn empyreume, c'eſt à dire, impreſſion ignée , qui ſ'acquiere par bouillirſim . leara
plement deuant le feu. Autres le font en vn pocde terre plombé deuant le feu : &
faut garder querien ne ſ'enfuye par deſſus, pour l'euaporation & la deperdition qui
fe feroit de la vertu . Cela faiót , ſoit conſommé à la moitié , tierce , ou quarte partic,
les fal
ſelon qu'il ſera rcquis . Aucuns y mellent en le cuiſant certains ſimples pour cuider
D
rendre ſon a &tion meilleure ; comme lors que lon douce qu'il y aye quelque partie
affectée, y meſlent ſimples, qui fpecialement ont égard à icelle , leſquels operent
esco
comme en propre ſubiect , & feruent comme de vehicule , pour y conduire la faculté
cion,
Il ne faut de ladite decoction . Autres mettent medicamens purgatifs : mais quant à moy , ie
rien meſler ſimple, parce qu'il n'eſt bon
ſerois d'auis (ſaufmeilleuringement ) n'y meſler aucun
auec legaiac. faire deux vacuacions enſemble, comme prouoquer la ſueur, & purger le ventre : car
upla
file malade ſuc beaucoup, le ventre ne peut fluer: auſſi ſ'il.a flux de ventre ,ne peut
dhed
ſuer,parce que ces deuxmouuemensſont contraires : parquoy ne doiuenc eſtre faics
enſemble, d'autant que le medicament purgatifcire de la circonference vers le cen
tre , & la ſueur tout au contraire. Et tel eſt l'aduis de pluſicurs grands perſon
La ſeconde
nages , & doctes Medecins . La premiere deco & ion faicte, coulée & paſſée, lon cc tunes
decoction
mettra auec le marc du bois ja cuit autant d'eau ſans le laiſſer plus tremper , parce
alwgaiac.
qu'il eſt aſſez maceré, puis on le fera boüillir comme la premiere ,en laquelle on
peut adioufter à la fin vn peu de canelle pour l'aromatiſer, & roborer l'eſtomach ,
695
De la groſſe Verole.
A car en ce faiſant,on ne luy peut oſter ſa vertu : & d'icelle deco & tioni le malade en viſera

à ſes repas , & encre iceux fila ſoif.le laiſſe icy à deſcrire qu'auparauant que le malade
préne de ladite decoction, doiceltre purgé éfaigné,ſelon l'aduis du docteMcdecin ,
& filen eſt beſoin : pareillement qu'il ſoit en vne chambre bien chaude en hyuer , &
qu'il ne ſorte nullement dehors : & fi c'eſt en Eſté,nelaiſſera d'aller quelquefois à ſes
affaires. La doſe ou quáticé de ladite decoction eſt de cinq à fixonces, plus ou moins, Doſe de la
fa decoction,
bien peu ciede , à fin qu'elle ſoit pluſtoſt reduire de puiſſance à effeâ, & que par
froideur a &tuellel'eſtomach n'en fuſt bleſſé : & apres le malade ſera couuertmedio
crement ,à fin qu'il ſue: & où à grande difficulté ſueroit, la ſueur luy ſera prouoquee Moyens de
par le moyen de bouteilles de terre rempliesd'eau chaude,miſesà la plance des pieds: la provoquer
fueur.
& autour des parties douloureuſes , on luy appliquera veſſies à demy remplies de la
dice decoction chaude : d'abondanc deuant que le mercre au liet ,on luy frottera tout
le corps auec linges chauds , à fin d'ouurir les pores ,actirer & ſubtilier les humeurs .
Quandilaura ſué par deux heures ou enuiron , ſelon que les forces le permettron ,
t
B on luy eſſuyera premierement les parties oppoſites des douleurs , ſi aucunes y en a :
puis doucement les dolentes , pour crainte d'attirer dauantage d'humeurs. Cela fait, Le moyen
fe rafreſchira en ſon liæ , cuitant le froid , & deux heures apres il pourra diſner de d’e//uyer le
malade.
bonnes viandes, & en petite quantité , ſelon ſa nacure & coultume, & la puiſſance de
ſa bourſe . Puis enuiron cinq ou ſix heures apres diſner, prendra de la decoction , &
SUS ſeramis au liet comme deſſus. Etoù le malade auroit à deſdain ſe inetcre deux fois le

jour dedans le liet ,ou qu'il fuſt aucuneinét foible, il ſe pourra tenir chaudement ſans
fe coucher . Car encores qu'il ne ſuë (les pores eſtans ouuerts ) ne laiſle pourtant à ſe
faire grande exhalacion des vapeurs & eſprits venimeux & corrompus, comme il eſt
bien à croire : veu que ceux qui couchent auec gens infectez de telle maladie ,gai
gnent bien la verole par la reception des vapeurs venimeuſes. Il faudra qu'il conti
linked nue les choſes ſuſdices, tant quelon verra eſtre vtile pour la curation de ceſte maudi
te & deteſtable maladie . Parinterualle il ſera tres -expedient qu'il vſe de quelques
purgations , pendant qu'il prend ladice decoction ou des clyfteres doquatre, cinqou
fixiours ,pournettoyer les inteſtins & premieres veines des excremens recuits & del

Ć ſeichez par la chaleur . La diecce de gaiac eſt fort propre, principalement pour la cu
re des nodus,d'autant qu'elle conſomme l'humidité ſuperfluë, & matiere viſqueuſe
imbuë aux os . Or il faut icy noter qu'aucuns empiriques donnent la decoction la
xatiue, & font ſuer tout enſemble : ce qui eſt contre le precepte des anciens . Car à
celuy qui ſue beaucoup , le ventre ne peut fluer : & fi a le flux de vencre , ne pourra i
ſuer . Parquoyon ne doit enſemble purger, & faire ſuer , d'autanc que ce ſont deux
mouvemens contraires , comme i'ay dit cy- deſſus. Car la purgation attire de la cir

erib conference vers le centre, & la ſueur courau contraire . L'vlage de ladice decoction Combien il

Chi durera ſix ſepmaines, plus ou moins , ſelon la grandeur de lamaladie , & temperament faus vferde
du malade, & le temps de l'année . Il faut bien auoir égard à bailler de ladite deco . La decoction

OPERA &tion diſcrecement, & à quelques- vns moins , comme à ceux qui ont grande cha- de galac.

De Bee leur au corps , & qui ſontemaciez , & quiont des ſquammes & defedations de cuir,
eſtantſec & aride, quidemonſtre vne grande aduftion , & quaſi incineration de tou
te l'habitude du corps, de peur qu'ils ne ſoient rendus ladres. Mais au contraire, il
e les faut pluſtoſt humecter & rafreſchir, tant par dedans que par dehors , auec bains,
poul D onguens ſans
, que le furet y entre , & autres choſes pour temporer la trop grande
El que
chaleur & ficcité. Apres l'auoir ainſi temperéc , faut venir à la friction , & non à la
decoction : toutesfois on luy en peur donner vn peu qui ſoic aqueuſe deuant la fri
Teht
& ion , pour touſiours dauantage l'humecter. Lors que le malade prend de la deco
dion ,vſera de viandes de bon ſuc en quantité mediocre : conſiderant que la trop,
grande diereauxmaladieslongueseſt perilleuſe. Orileſt ainſique ceſte maladie eſt Regime de
des plus longues , & leur faiſant vſer d'vne trop eſtroite diete, ils deuiennencemaciez ceux qui vo
IIC
& heđiques : & fils ont vlceres , ſe rendentquelquesfois rebelles & incurables . Par lent de la
SSO quoy le Chirurgien ne doit chauſſer tous malades à vne forme, comme leur donner decoction de
PROCE
ſeulement troisou quatre onces de pain (encores biſcuit) dix ou douze pruneaux : gaiac.
La chair peyi
mais v ſeront pluſtolt de chair roſtie, ou boüillie ,ſelon qu'il ſera neceſſaire , comme miſe ceu
à x
icunes moutons, veaux , cheureaux , connins de garenne , poulettes faiſandées, qui font la
allouettes graſſes , merles , & leurs ſemblables : parce que le ſuc de telles - vian- diesse.
des eſt meilleur, pour la fimilitude qu'il a auec nous , que ceſtuy de pruncaux .
‫ܝܐ‬
-
696 Dixneufieſme Liure ,
Leur pain doit eſtre fromene bien leué & bien cuir, ny trop tendre , ny trop dur. A
Leur boire ſera de la ſeconde decoction de gaiac : & li le malade eſtoit trop debile,
on luy donnera du vin non trop fort ny fumeux,mais petit & delicat,principalement
apres le premier trai &t de ladite decoction . Ec quant au dormir, il l’euitera prompte
mentapres le diſner , & ſouper, parce que cel dormir rempliſt le cerueau de vapeurs,
augmentantlesdouleurs . Fauteuiter toutes paſſions d'eſprit, à cauſe qu'elles en
Alambent les eſprits: à quoy luy ſeruira beaucoup paſſer le temps à quelque choſe
joyeuſe,comme deuiſer,ioüerdes inſtrumens muſicaux, auſſi lire choſes facecieuſes.
Il faut extremement fuir Venus, pour la debilitation des parties ncrueuſes.
Pluſieurs au lieu de gaiac vſent de l'eſquine, qui eſt vne racine d'un certain jonc,
20
croiſſantaux Indes, fort noüeuſe, rare, peſante,lors qu'elle eſt recente, & fort legere
quand elle eſt vieille, laquelle legereté demonftre n'eſtrebonne : ayantperdu laver
tu, elle eſt ſans odeur, dont quelques-vns tiennent qu'elle eſt fans qualité.
Preparation de l'eſquine.
fu
Il faut la diuiſer en petites pieces rondes,& la faire cuire en cau de fontaine, ou de B AL
riuiere : & d'icelle en boiuent les malades , matin & ſoir. Elle doit eſtre cuicce trois
fois. La ſeconde & troiſiéme deco &tion ſe doic faire auec moindre quantité d'eau lo
ch
que la premiere, ou doit bouillirplus long temps que la premiere , l'ayantfaictplus &
toſt tremper l'eſpace de douze heures.
L'ordonnance eſt telle. 11

2.radic.chinæ in caleos diuiſæ , žij.aquæ fontis tb xij.infundantur per xij . horas, 14

AL
& decoquantur ad conſumptionem tertiæ partis: & deçeſte deco &tion en fautpren
dre le matin , la quantité de ſix onces àchaque prinſe vr peu ciede , & luer dedans le vu

li &t. La ſeconde decoction ſoit faire de la meſmeracine, qui aura eſté boüillic: le pa
tient en peut boire en ſes repas, & entre ſesrepas. Aucuns la fontencore rebouillir, RA

pour en faire yne tierce decoction qui ne peutauoir grande verru . De la ſalſe-parille VI

ſe fait meſınedeco&tionque de l'eſquine.Legaiac,leſquine,& la ſalle-parille, & au


tres prouoquansla ſueur,ne le fontſeulementpar leurchaleur,mais par leur qualité
& tenuité deſubftancefondantc, pouſſée par vn peu d’aftri & ion . 0

La ſeconde maniere de curer la Verole par friction . A

CH A P. IX.

La friction , A ſeconde maniere , qui eſt l'onction ou friction , eſt la plus cer
certain re taine & neceſſaire à la cure de ceſte maladie , non coutesfois en il

mede. toutes les eſpeces & diſpoſitions d'icelle , ny en tout temps. Car .

1S où la maladie ſeroit inueterée, faite d'vn humeur lent , gros , vil


queux , & adherant aux parties ſolides commenodofitez aux os,
lors tant ſ'en faut que la fri&tion immediatement en cel cas foic
commode, quemeſmes on pourroit tuer lemalade,liauparauano
Quelle pre- on n'auoitamolly,digeré & preparé l'humeur,auec les emplaftres de de Vigo: mais
paration doit quand elle eſt recente auec douleurs mobiles, & pluſieurs puſtules & vlceres àla gor.
preceder la
friction. ge,& partieshonteuſes, on ſe paſſera detelleschoſes, principalement lion cognoiſt
la maciere eſtre preparée. Etle faut garder demettre le malade plethorique àlafri- D
&tion ,deuant quele corps ſoit bien purgé des excremens, à fin qu'il ne ſoit faic plus
grande attraction,que ne peut eſtre euacuée par la ſueur. Qu'il ſoit vray, on a veu
pluſieurs, qui apres les onctions ont eu grandes douleurs , & leurſont ſuruenus des
nodus,n'en ayantiamais ſenty auparauant: parce que la matiere la plus ſubtile auoit
eſté reſoluë, & la craſſe eſtoitdemeuréc, & auoit elté attirée aux parties excericures,
& non éuacuée. Dont apres les choſes vniuerſelles, faut venir à la friction , laquelle
ſera continuée tant qu'il ſuruienneflux de ventre,& auec ce l'haleine du malade ſera
feride, & les genciues enflées,& lalangue. Telle choſe montre que la picuite eften
flammée. Parquoy faut ceſſer la friction , & changer de linceuls & dechemiſe,de
pour que le malade n'ait trop grand Aux de bouche .
697
De la groſſe Verole .

A
De l'eflection ,preparation , & mixtion de l'argene -vif.

C HAP. X.

E meilleureſt clair, ſubtil,blanc & Auide: & celuy qui eſt terne, non fluidu
Helt mellé auecdu plomb, fallihe. Orpourle bien nettoyer,on le fera bon signes de
vif-ayo
paſſer au ccauers d'vne peau de mouton , & en preſſant penetrera au trauers genis.
de ladite peau par ſa fubtilité, & y laiſſera fa ſubſtance groſſe & plombine:
puis on le fera boüilliren vinaigre auec ſaulge,roſmarin ,thym , camomille, melilot,
apres ſera de rechef coulé : & cítane ainſi preparé, on le pourra mellerauec les on
guens & emplaſtres.Ec pour le bien eſtendre,le fautlongtemps agiter & bactre en vn Le moyen
mortier, afin de le ſeparer en parties tenuiſſimes, pour luy ofter le moyen de ſe reünir pour bien
en ſon premier corps : & pour mieux ce faire , on adiouſtera yn peu de ſoulphre & effendre le
s
B ſublimé, comme dirons cy-apres. Le plus ſouuenton le mclle auccaxunge de porc , vif-argenta
auſquelles on peut adiouſtero leum terebenthi næ , nucis moſcatæ , caryophyllorum ,
faluiæ.Siauec icelle maladie il y auoit leucophlegmatie , il faut adioulter remedes
chauds , attenuans , inciſifs, & deſiccacifs, au medicainent, donc la friction ſera faite,
& lors qu'il faudra penetrec iuſques en la ſubſtance des os . Au contraire ſi c'eſt à vne
temperature bilieule , & que l'on veoit les humeurs chauds & tenus prelts à l'en
Aamber , nous y adiouſterons mcdicamens moins chauds , attra &tifs & reſolucifs,
Auſli quádlon verra des nodofitez, ſcirrhes ou reſiccacion generale de tout le corps,
onymellera des remollitifs & hunc& tarifs. Or pour dóner confiltáce à celslinimens, )
i'ay accouſtuméy adiouiter pour liure, quatre , cinq , ou fix moyeufs d’æufs durcis, &
partel moyen lemedicament acquiert vne bonne conſiſtance. Exemple dumedica
cament de deVigo. 2. axungiæ porci tb . olei camom . anet . maſt. & lauri an . Z j. Le medicää
Atyracis liquidæāx.radicumenulæ campanæ parum contritæ , radicum ebuli an. Z mene de de
iij.pul. euphorbij z B.viniodoriferi tb.j.bulliant omnia fimul vſque ad conſumpt. Vigo.
vini, deinde colentur, cui colaturæ adde litharg.auriz vj. thuris, maftiches añ . 3 vj.
C relinæ pinizj . B. cerebenthinæ Venetæ Zj.argenti viuiž iiij. ceræ albæ 3j . B. lique
fa & is oleis cum cera incorporentur omnia fimul, fiar linimentum ad vium . Autre.
2.argentiviui præparati ž vj. ſublimat.z. B. ſulphur. viuiz 8. axungiæ porci ſal.ex.
pertis tb.j . vicellos ouorum ſub cinerib.coctor , iij. olei cerebenth . & lautinian . 3 ij .
fiat linimentum ve arcis eſt. Le moyen de le faire ſera en ceſte maniere : Premieremét
vous pulueriſerez ſubtilementle ſublimé & le ſoulphre: puis mettrez vne portion de
vif-argent, enſemble vn peu d'axunge , puis vn morceau de moyeu d'æuf , en remuão
le toutforc diligemment, & le couceſtane bien incorporé , adiouſterez encores au
tant de vif argent, d'axunge & d'veuf, iuſques à ce que tout ſoit bien incorporé , &
ohicza ſus la fin adioulterez vos huiles en agitant le tour enſemble l'eſpace d'vn iour : par

en el ainſi aurez vnonguent de bonne conſiſtance,duqueli’ay pluſieurs fois vlé,auec bon


ne & heureuſe iffuë. Ladice axunge doit cuire auparauant auec les herbes neruales,
comme ſaulge, roſmarin , thym , marjolaine, lauande , & autres aromatiques, ſelon
que l'on pourra recouurer : l'axunge par telle cuiſſon , eſt rendue plus ſubtile & con
Celta
forcatiue des parties que la verole offenſe .Les onguens fe font pour attirer la maciere
icra
D virulence du dedās au dehors par les pores du cuir ,par ſueur & par inſenſible tranſpi
nigers
ration : parquoy ils doiuét cftre relaſchans,rarefactifs,& attractifs. L'axunge de porc
fot.
yeſt fort propre , parce qu'elle relaſche, amollit , & reſout facilement le vif -argent.

furuese L'huile laurin, d'alpic, ruë, y font pareillement bonnes, à cauſe qu'elles rarefient &
m
Solhei digerent , & fedent les douleurs . La terebenthine y eſt auſſi fore commode , à raiſon
qu'elle ſuffoque & efteint le vif-argent, eſchauffe moderément , digere & euacuë , 86
robore les parties nerueuſes. Levif- argent eſt le vray antidote deceſte maladie , par
ce qu'il la cure en quelque ſorte qu'il loic appliqué: ilcímeut les ſucurs , delleiche à
cauſe de la tenuité deſes parties. C'eſt le furet, & le vray alexicere de ceſte maladie Les ongues
& accidens , pourueu que leChirurgien en (cache vſer methodiqueme .S'enfuit vn chauds fons
nt
onguent pris de la praétique de Rondelet , au traicté de la verole , propre pour ſeder Martiarum
les douleurs de tefte & des iointures . Orilſedeles douleurs en elchauffancla maciere
ragon ,
veroliquè, en la fondant & cuacuant par ſucurs , par flux.de bouche , & flux de ven- Arippa.
trc. 2. quatuor vngucntorum calid . aä.q. I.axungiæ porci , olci laurini , anechi , irini Dialshes.
NNn iiij
698 Dixneufieſme Liure ,

anažij.olei de fpica zj . argenti viui 3 vj . cerebenthinæ locæ in aqua vitæ 3 iij. fiat A
vnguentum , S'il y a des nodus, on appliquera deſſus ceſte emplaſtre. 2. emplaftri
de Vigo cum mercurio duplicato Z iiij.pul.euphorbij, & iris ana 3j. le tout mala
xé auec terebenthine lauée en eau devie , & ſoitappliqué ſur les nodus.

La forme d'executer ladite friction. CHAP. XI.

Stant donc le corps & les humeurs preparez auec medicamens doux &
benings , tantſyrops conco & ifs, que medecines purgatiues & fe&tion
de veine , fily auoit plenitude, inflammacion gencrale ou particuliere
ou autres indicacions, pour leſquelles auras recours au Medecin ; lepa
Les lieux tient ſera mis en vn lieu chaud naturellement, ou par artifice, exempo

propres pour de coucvent froid ,lequel( penetrant parlesportes , feneſtres ou ſemblables ouuer
/ La friction. cures ) eſt en ce cas fort pernicieux & nuiſible, pource qu'il peut penetrer , & faire le
fion aux parties nerucuſes, & auſſi diminuer & deprauer l'ađion des medicamens. B
Ec en cecy pluſieurs faillent grandement , lelquels auçant l'Hyuer commel'Eſté ,
frortent les patiens en vne grande chambre commune où tous vents peuuent tranſ
Ze lies plus pirer, Et pource quand ladite friction ſe fera , ſerabon auoir linceux & couvertures
feur pour
eſtendues à l'enuiron du feu en forme de demy- pauillon , pour en toutes ſortes ſe
frotter les garder de l'ait froid . Mais ie n’ay trouué choſe meilleure ny plus propre à cecý , quc
verollez. de faire en la chambrevne petite chambrette, où deuxperſonnes puiſſenedemeurer,
& au deſſous faire quelque pecit poille, ou enfermervne partic d'vne grande cham .
bre , & icellecſchauffée mediocrement,y frotter le patient , ſans qu'il puiſſe ſentir
aucun vent : & là demeurera aſlis ( fi bon luy ſemble ) trop plus long temps, & auec
moindre faſcherie qu'il n'eaſt fait deuancle feu :& fiaura la chaleurvniuerſellement
& eſgalement par tout le corps : où l'il cuſt elté deuant le feu , il ſe fuſt brullé d'vn
coſtě & morfondu de l'autre , qui ſont mouuemens & choſes contraires à ceux que
Jurre lieu demandons . Auſſi où le patient ſeroit debile , ne pouuantendurer la chaleur du feu,
pour faire la
ou eſtre debour,ou ne voudroit f'expoſer nud deuantceux qui le traitceroient (com
friction. 0
me entre autres fontles femmes honneſtes & honteuſesen ce cas ) eſtant couchéde
dans le liet, on pourra luy frotter les parties les vnes apres les autres. Comnc ayand
preſenté vn bras hors le lidt & luy auoir frotté les articles d'iceluy auec l'onguenc
preparé,au deſſus ou aupres d'un petit feu de charbon ,mis dansvn reſchaut ou pačlo fa
rougie, pour re & tifier l'air, & pour donner entrée aux medicamens, on luy envelop les
pera d'eſtouppes ,ou de cotton cardé , de compreſſes de linges , d'vne fucille de pa 201
pier noir , ou autre ſemblable : puis on le bandera & remettra dedans le liet, en fai
fant autantà l'autre bras : pareillement des articles des iambes & des autres parties.

Le temps de la friction . CHAP. XII. Com

A fri &tion ſe fera le matin , lors que la concoction & digeſtion ſera
parfaide, & l'eſtomach & inteſtins deſchargez, afin qu'il ne ſe fa stan

ce ſubuerſion d'icelle , & diſtraction des operations de nature.Mais


où nature ſeroit debile , le patient pourroit vne heure deuantlafri D
dion , prendre quelque geléc , moyeu d'vn æuf , ou fix raiſins de
damas , les pepins eſtans oſtez , ou quelque conſommé, & autre choſe ſemblable
de facile digeltion , & en pecite quantité ,pour n'empeſcher nature à la conco &tion
d'iceux . Puis faudra commencer ladite friction aux articlesſeulement, comme des
Lesparties
mains, couldes,eſpaules, pieds , & genoux. Mais où le patient ſera fort, & où ſera
doit faire la beſoin plus fort eſinouuoir, on en pourra appliquer aux emonctoires des parties
friction . nobles,& le long de l’eſpine dorſale, aucc prouidence & diſcrecion , euitant ſur cou
ces choſes les parties nobles ( comme nousauonspredict en nos indications ) afin de
ne faire comme ces malheureux, leſquels froccent indifferemment tout le corps,de
puis la plante des pieds iuſques à la ſommité de la telte. Etences frictions fautconſi
derer la licuation des ſymptomes: comme pour exemple ; Si les parties ſuperieures

ſont plus affe &tées, la friðið ſera plus copicule en icelles, & ainſi des infericures : mais
il faudra premierement frotter les parcies moins dolences , pour ne remplır dauanta,
geles parties plus affectées. Pareillemét fauc noter, que coutainficôme les tropdou,
699
De la groſſe Verole.
1
A ces fri &tionsnefont ſuffiſante ouuerture des pores : auſi les trop fortes ſont cauſe de Les frictions
deiwent eſtre
les ſerrer, faiſantdouleur, commotion , & attraction en la partie : parquoy ſera meil mediocres.
leur les faire mediocres , & nous arreſter principalement ſur la vercu & force du pa
tient,eſtant ceſte indication la premiere &principale entre les autres.Ily a encorvne
autre choſe, à laquelle ilfautſur toutes autres auoir eſgard , qui eſt cauſe de tous les
maux & recidiues , qui ſuruiennent aux affligez de ceſte maladie : c'eſt la quantité
des remedes , & nombre des friations : laquelle ( auec la parfaicte cognoiſſance , &
gradation des tempsde la maladie , & de la téperature des corps,& parties, fait lame
decine conie & urale & deuinereſſe, & y font tous methodiques & rationels bien em
peſchez . le vous laiſſe donc à preſuppoſer, comme vn tas de vieilles , & autres empi
riques pourront limiter la quantité d'iceux ? Ecne m'eſmerueille plus ſi l'on void , par
experience, vn nombre infinide gens perdus à iamais.Suivanc doncques nos indica
tions tant de fois repecées , il faut auec methode & raiſon en approcher le plus que

1 nous pourrons,& ſçauoir quand nous ceſſerons leſdites fri & ions. loin &t qu'il n'eſt
La quantité
B pollible exactement deſcrire le nombre d'icelles , ou quantité des medicamens. Il ne des remedés
faut doncques , comme nos Empiriques, en donner (ſelon leur recepte ) aux vns ne le peut
quatre, aux aurres cinq,aux autres ſix ,ny plusoy moins,à l'vn comme à l'autre ,pour is.rire.
ce qu'ils n'ontqu'vne forme pour chauffer vn chacun : mais faut pour la grandeur &
qualité de la maladie , & la nature des corps , les appliquer , en continuant iuſques à
ce que l'on cognoiſſe ſuffiſante cduction des humeurs veneneux, ſoit par flux de bou
demy
che, de ventre , ſucurs,vrines,ou reſolutions inſenfibles : qui ſe cognoiftra par la de
ficcation des puſtules ,& vlceres , ſedation des douleurs , & autres accidens commun signes pour
s
à celle maladie . Et où nous verrions qu'és corps ſolides & robuſtes nature ne vou- cognoiſe love
droit par la maniere des frictions ſuſdites felmouuoir , i'ay practiquéen aucuns,qu'il suffiſance des
eltoit bonles frotter ſurla fin deux foisleiour ,vneau matin ,& l'autre au ſoir,enuirő frictions ,

cinq ou fix heures apres le diſner ( parce que lors la digeſtion ſera acheuée ) & ay crou
ht
ué qu'elles faiſoient trop plus d'action , que ne feroient crois par trois diuers iours :
bal commeau contraire és corps delicats , & de temperatur
es rares, i'ay laiſſé maincefois
CIO ( par meſme prouidence ) vniour entre deux fri& ions,voire deux ou trois,de crain

0 te que par les frequences ne ſe fiſt trop grande reſolution des eſprits, & fuſt par con
ſequent nature renduë ſi imbecille ( laquelle eſt principale agente en cecy ) qu'elle
ne peuſ nous ayder à expugner & chaſſer hors ce qui luy eſteſtrange & inuiſible. Ec
faut noter qu'és dernieres fri& ions, ſpecialement quand ils commencent à cracher,
les corps ſont tellement preparez à cauſe des precedentes , qu'vne fera plus que deux
au commencement.Pour ceſte cauſe ayant touſiours les indications deuāc les yeux,
faut conſiderer la nature & la force des corps , & ( ſ'il eſt poſſible) ne point donner

Jacja plus d'vne friction ,lors qu'on verra nature címeuë ,ſoit parflux de bouche , deven
tre ou autres des fuſdits, & feroit trop plus ſeur les faire à diuerſes fois,ſuiuanc Gal.en Intermißion
ſon livre De vena fe& tione , où il dir , que ſi lamaladie eſt grande, & la vertu foible, il des frictions,
faut tirer du ſang ,non à vne fois, maisà pluſieurs. Auſli Maſſa raconte vne hiſtoire
Hiſtoire.
d'un quieſtoic tout maraſmé, & deſfeiché,auec extremes douleurs , lequel it penſa,
digela
julio eſtant quaſideploré d'un chacun : & dic , qu'apres l'auoir fait frotter par quelques
fois, il le laiſſoit refociller & reprendre ſes forces par aucuns iours : & ainſi continua

deweza par ſilongtemps, qu'il fut frotté crente fepefois, & fut guary. I'en ay veu craiccer à
harus D aucuns de mes compagnons, & fait frotter pluſieurs,
quinze, ſeize ou dixſeprfois
( laiſſant quelques interualles) & par apres eftre guaris.Aucantſ'en doit faire éscorps
‫معنیفر‬
aco.cz reſoules & debiles: prenant toutesfois gardeque lesfri & ionsne ſoient par trop im
becilles,&cen ſi petit nombre, que la cauſe ne fuſt ſuffiſamment couchée : car par art
& ayde des medicamens, ſe procure vne criſe,parle moyen de laquelle nature aydée,

esde & dominatrice , expelle & chaſſe levenin par lescuacuacions ſuſdices, de force qu'e
ſtant la criſe parfaicte, il l'enſuit vraye & entiere curation. Les ſignes de ladite criſe signes de lo
2
10111 ſont inquietudes telles, que deboutny couché, les patiens ne ſe peuuent contenir, criſe.
boire ny manger : & ſont auec perpetuelles lalitudes,quaſi iuſques à ſyncope:toutes
fois le pouls bon , fort & eſgal: il leur ſuruientdes eſpreintes, ieccans par leurs ſelles
quelque maciere ſanguinolence & viſqueuſe: puis au bout d'vn iour ou deux , que
shpesh
Nature commencera à expeller , & ſe deſchargeant cuacuer la cauſe du mal , autant
ſe diminuent dels accidens , & fentent allegement de toutes douleurs. Mais par n'e- Criſe imparo
h {tre les remcdes ſuffiſans, la criſe demcurcimparfaicte , & laiſſe touſiours quelque re . failte.
des
Dixneufieſme Liure ,
700

îte defermerc,qui pourra corrompre toute la maſſe , & engendrerrecidiues de lama. A


ladie , dont l'enſuivroncaccidens pires que les premiers : & eft cauſe qu'aucunesfuis
demcure caché celeuain en vn corps , fix mois , vnan ,deux ans , & dix ans, & plus .
Auſſi pareillement il faut bien ſe donner de garde que les medicamens ne ſoientcrop
violencs, ou indiſcretcement appliquez,pour les grands accidens quiont decouſtu
me d'en aduenir : comme i'ay veu en pluſieurs, qui par telles fautes eſtoične four
mencez & affligez en pluſieurs & diuerſes ſortes: les vns ( pour la trop grande violen
ce des medicamens qui auoient colliqué , & conſumél'humeurradical ) eſtoienede.
uenus cabides : Aux autres furuenoient vlceres fordides , & putridesen la bouche ,
qui mangeoient & rongeoient vne bonne partie d'icelle, & de la langue : quelques
fois ſe degeneroicntiuſques engangrene & mortification, dont aucuns font morts
miſerablement: A aucuns la langue feſt tellement enfée , qu'elle rempliſſoit toute CE
j1
la bouche , ne pouuantmanger,qui eſtoit cauſe de leur mort. Es autres la colliqua
cion eſtoit celle, qu'vnmoisapres leur fluoit la bouche , & jercoient continuellement
humidité paricelie . S'enſuit auſſi aucunesfois vne deperdition ou deprauation gran
B
de de l'action des muſcles, qui font le mouuement de la mandibule inferieure , en
forte qu'aucuns ſont demeurez ſans iamais ouurir la bouche que bien peu . Autres or
ontperdu les dents auec deperdition de la maſchoire : quieſt choſe admirable , que
par l'ignorance & aſnerie de tels coquins , cant de perſonnes ſans occaſion languif
ſent, ou miſerablement periſſent: attendu meſme quepour la cognoiſſance qu'ont
auiourd'huy gens rationels ( plus que iamais ) tant de lamaladie , que des remedes,il
eſt poſſible delescurer plus ſcurement, & auec moindre violence.Lors qu'on craint
le flux de bouche trop grand apres deux ou trois frictions, faut purger le malade,ſc
lon l'aduis de Rondelct. Semblablement il ne faut touſiours continuer les fri & ions,
Il ne faut iuſques à ce qu'il ſe face flux de bouche ou de ventre, parce qu'il y en a plufieurs, à
souſiours al- qui iamaisil n'aduicnc ,encores qu'on le frottalt infiniement là quoy ayde bcaucoup
sendre flux la preparation precedente des humeurs :) & à beaucoup d'iceux ( traictez methodi
de bouche ou
de Dentre 4 quement) ayde nature par les reſolutions inſenſibles, ou Aux d'urine , auec quelque
petit flux de ventre incité de nature, ou par art : & me ſuis fort bien trouué en tel cas
pres la frio o
ction . Icur faire vſer apres par quelques iours d'vne decoction de gaiac le matin , aucune
ment laxatiue pour la nature de l'humeur. Et ſi le corps eft plein ou abondanten hu
meur cras , lent & yiſqueux, i’yadiouſte du vin blanc parmy.Meſmes ie l’ay veu auſle leht

preparé auec vin ſeul,profiter à des gens, voire bilieux maraſmcz . S'il furuiene dyſen dete

cerie apres les frictions, il faut bailler clyfteres, auſquels y entre bonne quantité d'a OUT

xunge de porc,afin de lenic&adoucir l'acrimonie du medicament quia cauſé la dyſ.


cnterie. Aufli le laict en el cas eſt ſouverain , delayé auec theriaque recentc.

De la troiſieme curation parceroines , ow emplaftres, vicaires de la friction. CHAP. XIII.

Ourec que pluſieurs abhorrent le nom , & l'vſage de la friction faiđe ada
Vicaires des auec leſdits onguens,on a pratiqué l'admotion des ceroines , ou em
frictions, plaſtres, leſquelles ſont vicaires , & ciennent les lieux des frictions: ex under

cepté ſeulement qu'elles ſont plus tardives : & non ſeulement doiuent
de
eſtre pratiquées & vficées en ce faict , celles qui ſont deſcrites par
Vigo , mais auſli ( comme auons di& des frictions) celles qui ſont compoſées de
choſes plus ou moins anodynes , emollientes , inciſiues, reſoluciucs, ou deſiccatiues, D asche
pour la nature des ſymptomes ou accidens , aufli des humeurs , quidoiuenteſtre va
came
cuez , & autres indications ſufdictes , ſans oublier l'argent-vif pouralexipharmac
par ſucurs & 3100
contre le venin , cauſe de la maladie , par vne tranſpiration inſenſible & e
l'vtilité des Aux de bouche : elles mitigent les douleurs & refoluent les nodus & autres duretez. utro
emplaſtres. Au lieu de l'emplaſtre de de Vigo on peut vſer de ceſte cy . 24. Mallx emplaſtri de
Lioned
meliloto & oxycrocei an . Ib . B.argentiviui extin & i z vj . oleo laurino & de ſpica,
reducantur ad formam empl . Leſdites emplaſtres ſont de grand effe&t, pource que
demeurans continuellement ſur les parties , leur action eſt auſſi continuelle : &
doivent eſtre appliquées,fpecialement aux recidiues, & où les humeurs ſont gros,
viſqueux, & adherans aux parties profondes, & difficiles à cradiquer , parce qu'el
les beſongnent & font leuraction plus lentement, & auec moindre violence, que
ne font les fri& ions : de ſorte que nous ſommes maintesfois contraints ſur la fin elou
nony
de l'vlage deſdites emplaftres donner quelques fri &tions ,pourinciter nature à plus
De la groſſeVerole. 701
A prompte euacuation. Nous les auons auſſi quelquesfois appliqué à des nacures, & où
les humeurs eſtoient tellemét preparez qu'au bout de deux ou troisiours elles auoiệt
faitaction ſuffiſante, pour la conſomption de la cauſe de la maladie : & falloit les o
fter,autrementeuſſent faic colliquation, & lesmeſmesaccidens que nous auons dic
dela fri &tion violéte,& trop copieuſe: pourcefaucauoirmeline iugement à les ofter
cõiñenous auons dicen la friction.Lesemplaſtres ſe doiuét eſtendre fur du cuir vni
mét,& lesappliquer à l'environ des articles, & meſmes lieux des frictions. Les autres Voy le chap.
çouurét toutle bras depuis la main iuſqu'à l'eſpaule & lesjambes depuis le deſſus de28. deesla
genoüil iuſqu'à l'extremicé des doigts : mais à l'édroit des arčicles ie voudroiseſtedre comp.d mer
dicamens.
l’emplaſtre vn petit plus eſpés.Et faudra lesy laiſſer iuſques à ceque nature aydée par
le moyen de lacriſe ſuſdite, face eduction ou euacuation deshumeurs corrompus de
ce venin,commenous auons deduit parlans des fri& ions. Et faut auſſi les augmenter
ou diminuer ſuivant les intentions ſuſdites. Et où en l'vlage d'icelles ſuruiendra pru- Quand il
rit ou demangeaiſon , lors faudra leuer les emplaſtres, & fomenter les lieux auec vin faudra leuer
les empla
B chaud,y adiouſtant flores chamæm .meliloti,roſarū , & ſemblables pour reſoudre ce
quieft cauſedudit pruric:lequelceſſé,faudralesy remettre.AudipoureuiterledicPres.
pruritpourrez couurir les emplaſtres de quelque caffetas,ou linge delié,appellé creſ
pe :afin de garder qu'ils ne l'accachent, ou adherent au cuir pour empeſcher la tran
lang ſpiration. Les effects d'iceux emplaftresſontcels quedes frictions, & fone criſe quel
€ quesfois parreſolution inſenſible, Aux d'urine , flux de ventre : mais le plus ſouueno
par flux de bouche, qui eſt bien plus cercain. Doncques au moyen de l'operation fai
te par l'application des emplaftres, & auſſi de la friction ( incitant le flux de bouche
ſuſdit) ſont procreez vlceres virulens& ſordides par l'acrimonic des humeurs malins
ite & corrompus de ce venin adherans aux parois de la bouche :qui fait eroſion , & f'aug.
mente autantcomme l'humeur acre continuellement paſſant les abbreuue. Et pour
empeſcher leuragmencation ,& legrand Aux de bouche , faudroit vſer ſouuent de
clyſteres remollitifs ſeulemét,poucempeſcher les humeurs des parties inferieures de
ne monter aux ſuperieures: qui ſeroit cauſe d'augmenter leflux ſans vtilité,ſpeciale.
ment au commencement d'iceluy,& lors que leshumeurs ſe commencent àelmou
uoir & fefondre. Aucuns pour lameſıneintention donnentau malade medicament cure des Dia
purgatif àl'heure du mouueméc des humeurs,afin de les euacuer par lesſelles, & cui: ceres debox,
ter leſdits vlceres de la bouche,qui n'eſt coutesfois la voye plus certaine.La curation che.
de tels vlceres eſt differente des autres , parce que nullement doiuent eſtre reprimez,
RIKH
ou repercutez, encores que ſoientenflammez :mais peuuéteſtre temperez auec gar- Diuersgara
garilmesanodyns, pour leur diminuer l'ardeur & defendre par ce frequent lauemét, gariſmes
que les humeurs gros & viſqueux{adherás aux partiesinternesde la bouche ) n’aug- res
pourdela
lesplce
box
mentent lesvlceres: à quoy eſt bon l'vſage de la deco &tion d'orge ,laietde vache tie che .
detenu dedans la bouche: auſſi mucilages ſem.maluæ ,alth. pſyllij, lactucæ,lini,ex
12: tra &tæ in aqua hordei,malux velpariecariæ :leſquels tenus en la bouche, adouciſſent
, OuCCP les viceres & empeſchenc les humeurs d'y adherer. Pour le cornmencement il ſe fauc
garder d'y appliquer choſes forc deterſiues,parce que la pluſpart des medicamens de
dores terſifs ont quelque acrimonie qui pourroit cauſer douleur :& files vlcereseſtoient
ifall nets & detergez , pourroient par ceſte acrimonie de cels remedes eltre irritez dauan
tage.Etpource faudra au commencement, & pendant le flux ſe contenter de l'vſage
D des choſes ſuſdites,empeſchant que la ſordicie & corruption n'augmente : pourucu !

Ihreris toutesfois que leſdits viceres ne fuſſent trop violés : car où par la vehemence desmc
dicaments,oudeprauation de nature,le flux ſeroițextreme, & rendroit la bouche &
les iouës ſi tumefiées,quepar crop granderepletion leseſprits ne peuſſent reluire,il ſe
pourroit enſuiure vne gangrene,commeaucunesfoisaduiét.En cecas nous ſommes
contraines de laiſſer la propre cure pour ſuruenir aux accidens: & pource faire nous
víons de medicamens refrenans,comme eſt deco &tum hordei, plantag. lolani, poly
‫ان من‬ goni, burſæ paſt.& c.cum fyr.roſ.violar. nymphææ, cydoniorum ,berberis,granato
rum, &c. Auſli commeſont mucilag. & decocta ſem . lactucæ , pſyllij, cydoniorum ,
plantag.cucumer, melonum , papaueris albi, hyoſcyami albi, & c.in aquis hor. roſ.
quid plantag.fglani,nymphæx,caprifolij, &c. Faui pareillement faire eſtuues ſeiches,a
uec choſes chaudes,deficcaciues,& roborantes,afin qu'eſtans les ſueurs prouoquées
par l'ouuercure des pores,letropgrand mouuement de natureſoit retiré. Lors donc
qu'on verra lefux diminuer,l'on pourra adioulterauecles gargariſınes fuldics quel
702 Dixneufieſme Liure ,
que peu de fyr.ex rof.ficcis,mel.roſ.diamoron ,dianucum ,& ſemblables pour douce- A Alto
Forts defic. meni deterger. Ec où on voudroit deſſeicher les viceres, on pourra les coucher auec
casifs ésvlce- eau alumineuſe,ou eau des alkemiſtes corrigée & addoucie,comme celle qui aura ja
res de boue
she. operé ( qui eſt bleuë ) cau de ſublimé, ou autre faiteauec choſes deſiccatiues: lef pys
Mapo
quelles en peu de temps les deſſeicheront: ioint que lors on pourra vſer de gargarif baris
mes deſiccatifs auec quelque aftriction: adiouſtez auecleseaux predites,exrol.plan
tagine, ſolano, polygono,burſa & virga paſt.cynogloſſo, les ſimplesqui ſ'enſuiuent,
balauſt.roſæ rub.myrtilli ſumach ,alumé,acacia,berberis,gallæ ,malicorium,& fem inghe
blables. Il faut noter que le flux de bouche neceſſera iamais iuſquesà ce que les vlce
res des genciues & dela langue ſoient conſolidées & cicatriſées. Parcancelles ſeront
touchées del'eau de ſublimé,ou de celle qui aura feruiaux orféures, qui ontpuiſſan pour
0411
Alimēs pro ce d'arreſter la putrefa &tion & corroſion . Pendant le flux, il faut reſtaurer & nourrit
pres pour les patiens auec viandes propres: leſquelles ſerontliquides, de bon fuc , & de facile 82.1.1
ceux qui ont concoction : accédu lors qu'il ne leur eſt poſſible demaſcher: & quenature eſtdebile, Cas, o
57222
flux
che, de bou- & diuertie ailleurs à l'expulſionde cequieſt eſtrange: ioint auſſi lagrande reſolution B
quiſeſt faite des vercus, tãtpar les grádes douleurs precedentes,inquietudesno&tur
nes,commependaot le flux debouche, entre autres ils pourrontvſerdæufs mollets,
potages faitsauec moyeufs d'æufs,orges mondez,cõlommez (faitsauec extremicez
de veau , & quelque volaille ſans ſel) geléc,eſpreintes,coulis, & ſemblables: deſquels
ils vſerontpeu,& ſouuét,ayans à chacune fois laué & nettoyé la bouche.Pareillemét
vſeror de decoction de gaiac, aromatiſéc cum cinamomo, ou de vin vieil bien meur,
clairet & ſubtil,auec eau d'orge:ſi on veut leur döner vn boire plus nourriſſant,pour
aucant qu'ils ne mangét rien de ſolide, on pourra leur faire tremper de la mic de pain
blanc bien leué auec du vin predic,puis l'exprimer pour meſler de la ſubſtáce du pain
auec le vin quilerendra plus nourriſſant, & luy diminuëra ſon acrimonie: autremét
Brenuage de faire tremperdupain chaud auec du vin par l'eſpace d'vnennią , puis les faire diſtil
vin difiille. ler in balnco Mariæ :lecomencemét de la liqueur qui ſortira ſera quelque peu forte:
mais l'autre ſera douce,& d'icelle pourra meſler parmi ſon vin , qui le refocillera, &
nourrira. Auſſioù pour les grandes euacuationsle patienr ſeroit fort debile,ou ſynco
piſeroit, on luy pourroic dõner à ſentir bõvin baſtard ,maluoiſie, hippocras,cau roſe, 0
vinaigre roſac, & autres telles choſes pour reſtaurer les eſprits : toutesfois fautobſer 11

uer lanaturedu patient,& fenquerir diligemmeneſien ſanté il les aappetez ou non,


pource qu'autrement telles choſes lay pourroient pluſtoſt nuire qu'ayder , les ayanc for
en horreur. Sur toutes choſes ne fauc negliger ſon vétre,&où il fédurciroit,doitvſer
de clyfteres,leſquels ſerõr doux & lenitifs: parquoyelt bő auoir l'aduis du Medecin.
La quatriefme maniere decurerla Veroleparparfums. CHAP. XIV .

L fautà preſent parler de l’vſage des parfums, qu'aucuns ontdit eſtre


Reprobation la croiſieſme ou quatrieſme voye generale de curer ladite maladie ve
des parfums.
STIK nerienne , laquelle ie n'approuue beaucoup pour les accidens quien
aduiennent, parce qu'ils bleſſent le cerueau, poulmons, & demeurent
les malades parfumez auec vne haleine puante toute leur vie : aulliquc
plufieurs en les traictant ſont tombez en ſpaſme , tremblement de teſte & iambes,
1

en apoplexie, ſurdité , & ſontmorts pour la mauuaiſe vapeur & qualité du ſoulphre D
& vif argent, donc ledic cinabre eſt compoſé ,quibleſſe le cerucau & autres par
En quel cas ties nobles. Parquoy ie conſeille n'en vſer vniuerſellementny par le neż ,nypar la
eſt licite l'v- bouche : mais bien particulierement pour deſſeicher quelque vlcere cacoëthe , ou
fage
fums.
despar- car
quelque nodus & douleur
veritablement fixe, qui ont
leſdics parfunis n'auroient peupar
puiſſance eſtrelecurez
moyenparlesautres moyens:
du vif -argent d'at
tenuer , inciſer & reſoudre ce qui pourroit auoir reſté particulierement en quel
que partie. Ceux qui en vſent vniuerſellement, font poſer les pauures malades
fousvn pavillon couuert & clos de toutes parcs,auquelya vn vaiſſeau plein de brai
ſe, ſus laquelle jettent leur cinabre , & les fricaſſunt & parfument comme font les
mareſchaux quelque cheual morueux : & concinuene par cant de jours leſdits par
fums, qu'ils voyent venir le flux de bouche. Or la matiere principale & fondemenc
des parfums, eſt le cinabre, qui eſtcompoſé de foulphre & argent-vif: onadiouſte
auec luy rad. ireos Flor.chus, olib . myrrh. iunc. odorar. aſlam odoratam , maſt.
cercbenthin. & theriac. leſquels ont puiſſance d'empelcher la trop grande dillo
lution
De la groſſe Verole. 703
A lution denature,& de corriger lafeteur, & mauuaiſequalité du vif-argent.On peut
quiſe feraainſi. Il faut faire fondre
faire autres parfums apres auoirvfé le vif-argent,
du plomb , puis lors qu'il ſera preſque refroidy il faucmeſler l'argent-vif enſemble,
puis ſeraredigéen pouldre , adiouſtancantimonium ,aloës,maſtic, vitriol, auripig.
benjoin en poudre & auec terebenchine, on en forme trochiſques.Autre. 2. Cinna.
baris 3 j . ſtyracis rubri & calamitæ , nuc.muſcaræ añ. z iij. benjoin 3 B. excipe te
rebenthina, fiant trochiſci pondere 3 ij. ad vſum dičtum . La cerebenthine y eſt
miſe pour lierles autres choſesqui ſont ſeiches: & pour aufli faire fumée: on y ad
iouſte ſemblablementdesgommes. On parfumc les vlceres cacoëthes cauſées de la
verole , apres qu'elles ſontmondifiées,& non auparauant. Exemple d'un parfum
pour les vlceres.2.Cinnabaris 3 j. benjoin , myrrhæ, ſtyracis , olibani , opopona
cis ań. Z B. maftich. macis , thuris an. 3 ij.excipiatur cerebenthina , & fiac fumi
gium .Autre pour deſfeicher les vlcereshumides. 2. Cinnabaris 3 j . benjoin, ſtyra
CIS , olibani, opoponacis añ. Z B. maſtic , thuris añ. z ij . nucis cupreſli & corticis
B granatorum an. 3 B.terebenthinæ communis quancum fufficiat : fianttrochiſci pro
fumigio. Et ſeront leſdits parfums concinuez tant qu'il ſera beſoin.
Curation des ſympromes ,ou accidens de la maladie venerienne , ou verole :
e premierement des vlceres de la verge.
CH A P. XV . 1

L ſe fait à la verge vlceres calleuſes & malignes: & celles qui naiſſent
ſurleglan , le fontmoins quecelles quinaiſtentſuriteles prepuce,& font leeredu
rebelles aux medicamens communsaux vlceres faites par autre cauſe, prepuce plus
dangereux
& ſouuent ſe terminent en gangrene, en ſorte que pluſieurs y perdent que de la
pour la teſte de la verge,voiretout le corps,cóme auonsdiccy-deſſus, faute verge.
de recourir à l'alexipharmaque, qui eſt le vif-argent. Toutesfois ie ſuis d'aduis que
l'on commence premierement aux remedes communs & propres à la curation des
c vlceres : cartoutesvlceres qui viennencà la verge par le coſt , ne ſont pas veroliques.
Mais apres auoir vſe de pluſieurs remedes , & que l'on voye l’ylcere cheminer, & ne
voulant cederà nulmedicament , alors on doicvenir à ceux auſquels entre le furet,
pour obuier que le venin n'occupe toute l'habitude du corps. Les remedes que l'on
doitappliquer, faut qu'ils ayentfaculté d'obtundre l'acrimonie de ce virus, comme
When ce collyrede Lanfianc. 2. Vini albitbj. aquæ rofar. & plant.añ.p.j . auripig. 3 ij.vi- Collyre de
7.
rid. æris zi.aloës myrrh.n.3.ij.teraliturfubtiliſ. & fiaccollyrium. Auli on les pour- Lanfrancfina
ra toucher d'eau de ſublimé, ou d'eau fort qui aura feruy aux orféures, dicte eau gulier pour
odie bleuë : ou bien on y appliquera vn peu de pouldre de mercure , ou de noſtre ægy relles vlceres.
priac: & pour prouoquer la chcutede l'eſcarre ,on vſera de baſilicon ou beurre frais.
ins Tels medicamens acres ſeront appliquez auec diſcretion , de peur de gangrene &
ace mortificacion , quiſouvent vient à celte partie.Erow la pertinacité & rebellion de la
aut dite vlcere viendroientde la vehemence du virus verolique, en ſorte qu'ils ne vouſif
fentceder aux remedes ſuſdics ,alors faut faire friction aux aines, perineum,& auſdi
D
tes viceres,auec les onguens preſcrits pourla friction ,Auſſionpourra faire parfums
tres comme nous auons diccy -deſſus: ce faiſant, on verra la malice & acrimonic de l’hu. Le moyen
meureſtre abatuë,les duretez amollies,& les viceresquaſi ſe delleicher & mondifier d'appliquer
& conſolider Or quelquesfois apres la curation & cicatriſation deſdites vlceres . en sels medica
aucuns l'enſuuent ſignes apparens de la verole comme douleurs nocturnes , puſtu- mens.
med
les,leſquelles ne ſont apparuës auparauant la curacion deſdites vlceros,parce que
le virus avoir iſſuë par icelles, & eltans cloſeş, le virus ſe manifelte par les autres
ma voyes : à telles fautvſerde la friction vniuerfelle. Icy ie veux aduertir le jeune Chie choſe digne
furgien , que ſ'iladuiene qu’apres auoirrenuerſé & deſconuert le gland pour penſer d'eftre norée.
les vlceres quinaiſſencencre le prepuce & le balanus,le prepuce ne peut plus recour
ferment
ner en ſon lieu. Ce qui aduientauſſi ſouuent à quelque folaltre ieune marié , trou
uant la partie genitale de la feinme anguſte & fort eltroicte , voulant entrer a'u
champ de bataille ,comme par force,deſcouurele gland, & renuerſe en haut le pre
puce,defaçon que ſouuent ne ſe peutrabattre pour couurir legland.Il ſe face vnein
Hammation & gangrene. Donc pour fauuer lavie dudit combattanc,ilconuient en
00
704 Dixneufieſme Liure ,
cierement couper le cultiucur du champ de nature humaine. Libremene ie confeſſe A All
l'
y auoir eſté autresfois bien empeſché, mettant fomentations, cataplaſmes , & em
plaſtres reſolucifs & relaxatifs, pour toutcela ie n’auançois rien au contraire la tu се с

meur & douleurfaugmentoient.Eſtant à Milan deuiſant avec vn vieil Chirurgien, det


il me dit qu'il falloit baffinerle petit ventre & parties genitales d'eau fort froide, & fiori
uta
eſpreindre toute la verge auec la main aſſez fort: par ces choſes les parties ſe retirent
au dedans, & ferriſſent,puisfaut retirer le prepuce en ſon lieu, ce que i'ay faią F
pluſieurs fois auec heureuſe illuë. Et fi la cumeur du prepuce eſt ſi grande que ces jom
remedes n'y euſſent point de lieu , alors faudroit faire desſcarificationstout autour.
Car par icellesles vents ſe reſoluent, & le prepuce ſe relaſche, qui fait qu'apres on
le peut plus facilement reduire. Misc

En quoy differe la Gonorrhée de la chaude-piſſe. CHAP . XVI.

Vcuns ont iuſques icy penſé, que la chaude- piſſe euſt quelque B.
choſe de commun avec la gonorrhée des anciens: mais elles ſont
fort differentes l'une de l'autre , comme tu pourrasvoir par ce trai.
Dont eſt fai & té. Car la gonorrhée eſt vn Aux de ſemence inuolontaire, decou
te la femence . lant de toutes les parties de noſtre corps aux parties genitales , cau
ſée par la reſolution & paralyſie de faculté retenciue d'icelles par
Gal. au liure cies, comme dit Gal. à la fin du livre 6. De locis affectis,ou bien de diure
de locoeffect.trop grande abondancedeſang & matiereſeminale dedans le corps , qui ne ſetour con C

nantpointen graiſſe & habitude du corps,prend ſon cours vers les parties genitales.
Au contraire,la chaude-piſſe ou ardeurd’yrinc,eft vnc ſanie qui ſort par la verge,de 2000

couleur iaunaſtre,quelquesfois verdoyante,autrefoisſanguinolente,approchantde


la qualicé d'vn pus non bien cuit & de mauuaiſe odeur, auec vne acrimonie qui le
plus ſouuentronge & vlcere le canal de l'vrine,faiſanterection de la verge & des par
ties genitales auec douleur:pource qu'en ladite erection ſe fait vne contra &tion com
me par vn ſpaſme particulier,teſmoins les patiens,qui diſent ſentir comme vnc cor wel

de qui leur tire la verge contre-bas : & telle choſe ſe fait au moyen d'vn eſprit fla G
tueux quiremplicle canal ou le nerf cauerneux , & toute la ſubſtance dumembre
viril.A cauſe de laquelle repletionſe fait vne diſtenfion de la verge.Outre leſquels
accidens , lors que le conduit eſt vlceré, le patient vrinant ſent vne griefue dou ***
La chaude
leur : pource que l'vrine paſſant par les viceres, les mordique & poingt. Or
piſle conti le Aux de ladite ſanie continuë quelquesfois deux ou trois ans & plus : qui nous
nue long fait croire que la chaude-pille n'a rien de communauec la gonorrhée , comme nous
temps. monſtreronscy-apres,deſcriuant les parties qui principalement ſontaffectées. Aucc
ce qu'il eſt impoſible que la ſemence peuft ſortir hors du corps parvn ſi longtemps,
qu'elle ne fuſt cauſe quele corps deuinſt languide, debile , & affoibly ( attendu que
la femence eſt faite d'vn ſang bening, prouenantde toutes les parcies du corps) dont 19
la mort ſ'enſuiuroit, commeditl'autheur des definitions. Ce qui eſt auſſi aiſé à co
gnoiſtre en ceux qui ont eu cinqou fix fois la compagnie d'unefemme,voire moins, 1
fora
le corps deſquels ſe trouue fort debile & abbacu , & à quelques vnstout alloupy.
Parquoy fautconclurre que la fanie que l'on jette aux chaude piſſes, ne procede du
ſuc bon & dedié à la generacion de la ſemence humaine ; mais pluſtoſt que c'eſt un D
humeur virulent , acre , viſqueux , alteré & corrompu .

De l'erection & tenſion continue du membre genital.


C H 4 P. XF 11 .

Es accidens fappellent en Latin Priapiſmus, & Satyriaſis: & ſont deux


noms ſignifians deux choſes de diuerſes eſpeces. Car le premier aduient
ſeulement aux hommes ,& eft vne tenſion du membre viril ſans aucun ap
petit charnel ; le ſecond aduientaux hommes & femmes, accompagné
d'vn deſir furieux. Outre cela,le premier eſt ſans effuſion de ſemence, le ſecond avec
effuſion , d'où vient que ſi coſt que l'habicacion a eſté auec la femme, incontinene il
ceffe. Mais au premier rien moins, qui eſt cauſe qu'il ſ'augmente de celle façon, que
De la groſſe Verole . goś

A lil'on n'y preuoit bien toſt, ſuruient vne mort cruelle,ou conuulfion inſupportable.
L'vne & l'autre procede d'vne excelliue chaleur, & dilatation des arteres, d'abondá
ce des vents qui rempliſſent le ncrfcauc du membre genital , pour auoir mangé trop
de viandes venteuſes, & autres cauſes. Sicela aduient à vne femme, au lieu dela ten
fion ſent en ſes parties genitales yn prurit ,ardeur, & douleur , accompagné d'vn deſir
intolerable de Venus , & eft contrainte de porter ſouuent la main pour ſe frotter.

Pour curer l'erection , ſoit appliqué ſur les reins yn cataplaſme fait de morelle,
jombarde , pourpié , laidues, iuſquiame,nenuphar , ciguë , pilez enſemble , & ap
pliquez ſur leſdits reins , & ſur l'entrefeſlon . Faut boire de l'eau froide , & vſer de
viandes ſemblables. Maintenant nous retournerons à parler des cauſes & differen
ces de la chaude-piſſe.

Des cauſes de la Chande -piſe , & differences d'icelle.

CHA P. XVIII .
B

A Chaude-pille vient de trois cauſes :à ſçauoir , de trop grande repletion , chaude-piſſe


de trop grande inanition , & de contagion .Cellequi le fait par repletion, de repletion.
eſt cauſée d'vne trop grande abondance de ſang , ou pour auoir eſté à
cheual ayantle Soleil à dos ,ou pour auoir vſé de viandes chaudes , acres,
diureciques ; & fatueuſes, qui cauſent tenſion & chaleur , dont fenfuic inflamma
tion des parties genitales: quieftcauſe de faire fuer non ſeulement la ſemence, mais
auſſi les humeurs ſur leſdites parties, principalementſur les glandes proftates ſituées situation des
late
au commencement du col de la veſlic, là où finiſſent & delinent les vaiſſeaux ſper- glandes pró,
matiques : ou pour l'eſtrc trop long temps abſtenu de la compagnie des femmesen lates,
ceux qui ont de couſtume d'en vſer ': & deſquels l'excrecrice de telles parties eſt
debile , nel'en pouuant desfaire de ſoy -meſme: de tant que celle matiere ſuppri
mée fe corrompt , & venant à ſortir fáit ardeur & douleur par acrimonie de cha
leur eſtrange. Or ces proſtates puis apres l'apoftement, & leur fanic quidccoule
6 auec vncincercaine corroſion , le long du canal de la verge , y fait quelques vlceres,
au moyen deſquels lyrine qui eft acre, paſſant par deſſus , les mordique & corrode
dauantage :choſe qui cauſe aux patiens vne grande douleur, quimeſmecontinuë
quelque temps apres auoir vriné:auſi en l'ercation de la verge ſe fait vne contra
oferta & tion comme deſſus a cité dit) qui prouient de l'inflammation & de l'eſprit facueux,
qui remplit le nerf cauerneux , par laquelle replecion la verge ſe grollit & allongit.
Celle qui ſe fait par inanition , aduicnt pour auoir trop & intempeſtiuement vſe de chaude-pillë
l'accolade amoureuſe : car tel excés & autres ſemblables tariffent l'humidité hui- faite par ina
lcufc & naturelle de ceſte glandule , laquelle conſomméc , l'urine de ſon acrimonie nition.
bleſſe & offenſe la verge , cauſant vne cuiſon & chaleur contre nature en ceſte par
tie, qui ſe ſent principalemcuten vrinant , donteſt appellée piſſe-chaude. Celle qui chaude-piſe
sli. viene de contagion , le fait pour auoir eu la compagnie de ceux quien ſont infe & ez, faite par con
ſoit homime ou femme, pour auoir habiré auec celle qui peu auparauant auroit re- tagion.
10012 ceu la ſemence de l'homme contaminé dudicmal,ou qui auroit les purgations blan
se poco ches , quelque vlcere dans les parties honteuſes, quelque maciere procedante de la
Dverolc, ou quelque eſprit vcneneux & virulent , quifinſinuancés parties genitales,
les infecte, & quelquesfoiscour le corps. Car( comme Galien monſtre au troiſicf Ch
ap. s .
nie liurc , De locis affectis) qui eſt- ce, qui ſansle voir , croiroitque par la picqucure
d'vn ſcorpion le corps peult eſtre ſi fort bleſſé , attendu la petite quantité de venin
qu'il introduit dedans le corps, & qui neantmoins a ſi grande puiſſance, qu'il faict
mourir celuy quien eſt picqué? Dauantage, void on pas que par vne petite picqueu
rc de mouſcheà miel , ou d'vne gueſpe ou d'vn freſlon , aduiennent douleurs , ru
meurs , & inflammationstres- grandes ? Et combien que celles picqueures neſoient
&
DIECTE que ſuperficielles, leur venin toucesfois pour communiquer ſa malice iuſques aux
parties nobles. En cas ſemblables ſe peut faire que la vapeur du virus de la ſemēccou
d'autres humeurs corrompus , ſoicntcómuniquez aux parties genitales , principale
ment aux proſtates, leſquelsreçoiuent non ſeulement la ſemčce,mais les autres hu
ilor
meurs, qui ſe putrcfians cauſencapoſtemes & vlceres,deſquelles ſorevn pus feride &
virulent
, queleshommes jeccentpar la verge; & les femmes par le.col de la matrice.
e Ooo ij
me
706 Dixneufieſ Liure ,

La chaude. Quelquesfois auſſi vne partie de ladite fluxion tombe ſur les teſticules & fur le peri A
piffe fouuene neum, meſme ſur la verge,qui cauſe en icelles parties le plus ſouuent des gangrenes,
ameine la be- & des vlceres caues & fiſtuleux. D'abondant ſe peuuenteleuer d'iceluy virus, quel
role ,con le ques vapeurs corrompues & veneneuſes, qui ſont portées aux parties nobles par les
peut dire de- veines , arteres , & nerfs, dont bien ſouvent procede la verole .
role particu
liere .
Du Prognoſtic des Chande -piſſes. CHAP . XIX.

A Chaude-piſſe ne ſe doit negliger , pource que pluſieurs perni


La chaude
cieux accidens en aduiennent ( comme nous avons dit ) & en
piſe eſt incu
Table à 4 # quelques - vns eſt incurable , qui jette perpetuellement une ſanic
CUNS. virulence , laquelle fait quelquesfois vne entiere ſuppreſſion d'v
rine , à cauſe que les proſtates & cour lecol de la veſſie ſ'enflent
& enflamment tant par le coït , que par l'vſage des viandes chau
des & vaporeuſes, ou parcrop grand exercice, comme eſt celuy B
de la poſte : auſſi par le changement des Lunes : de laquelle ſuppreſſion la mort l'en
ſuit aucunesfois : ainſique n’agueres i'ay veu aduenirà vn quidam , qui ayant porté
vne chaude -piſſe dix ans & plus, la garda iuſques à la mort. Cet homme, apresauoir
Bel cxemple fait quelques excés violents ,ne failloic incontinent d'eſtre pris d'vne ſuppreſſion
tion d'urine d'vrine , au moyen de laquelle ne pouuoic vriner ſans le benefice d'vne ſonde qu'il
venäe d'une portoit touſiours avec luy. Or ne pouuanc vn iour la mettre iuſques dans la veſlic,
chaude -piſſe. m'enuoya querir pour le faire piſfer: ce qucie ne peux faire , ores que i’employalle
tous les remedes å moy poſibles , qui fut cauſe de la mort : laquelle aducnuë, iepriay
La ſanie vi- ſa femme me permettre l'ouurir : ce que volontiers elle m'accorda. Ie trouuay ſa
rulente des veſlie toute pleine d'urine , & forreſtenduë, les proſtates groſſes , enfices,vlcerćes,
chaude-piffes
vient des & toutes pleines de pus ſemblable à celuy qu'il jectoit pendant la maladie.
Parquoy
proſtates, non i’oſe conclure , que ce pus qui vient des chaude-piſſes, eſt fait dedansla ſubſtance
des reins. des glandes proſtaces , & non des reins , ce qu'aucuns ont eſtimé, & voulu affirmer.
le ne veux neantmoins icy nier que les reins ne l'apoſtement & ſe conſument en
cierement , jeccans ſemblablement grande quantité de pus , toutesfois les accidens
G
L'authener ne ſont pareils à ceux des chaude - piſſes. Les vieilles chaude- piſſes eſt vne verole
particuliere : partant pour ſacure faut le furec, Or l'vlcere qui est au col de la vellic Ne
appelle le
& à la verge, eſt facile à diſcerner d'auec celuy qui eſt au corps d'icelle, parce quefil VIN
fürer,parce eſt en la veſlie , la ſanie ſera mellée auec l’vrinc , & y aura de petites membranes ou
qu'il eſtrange filamens, l'odeur en ſera fetide & acre , & n'aura le patientſi grande douleur : & no
fais forrir cez , que ic dy ſi grande , pource que lors qu'il y aura vn vlcere aux proſtates ou con
la verole hors duit vrinal , touſiours on ſentdouleur à l'extremité de la verge , pource qu'en toutes
de fa saſnie
Te . extremitez le ſentiment eſt touſiours plus aigu & exquis , & principalementà la ver
ge , & fi auecce , le pus fort dcuantl'vrineſelon Galien liu . 6.chap.6 . Delocis affectis. cool
Or ayantamplement diſcouru des ſignes & differences, tant de la gonorrhée, que de
la chaude -piſe, il conuient maintenant craicter des remedes concernans la guariſon
E: .
de l'vn & l'autre mal , & commencer à la gonorrhée. LU

Sommaire de la cure de la Gonorrbée.


D
C H 4 P. XX .

Cure de Go L fautappeller vn docte Medecin qui purge & faigne le malade, filen
norrhée. eft beſoin , & qui luy ordonne ſon regime,luy defendant( ſi telle gonor gel
rhée vient d'abondance exceffiue de ſang & matiere ſeminale ) toutes
choſes quiengendrentgrande quantité de fang, augmentent la ſemen
ce , & prouoquent
à coït : ſemblablement l'yſagedu vin , filn'eſt pe 220
cit & auſtere , l'aduertiſſant de fuir la frequentation des femmes, meſmemenede
les voir en peinture, ou autrementrepreſentées, nommément celles à qui le mala chor
froi.
Autre cure . de porte quelque affection .L'exercice mediocre leur eſt bon , baigner en eau la de
de , dormir peu , & appliquer ſur les lumbes, & autour des parties genitales , vn,
guentum rolatum refrigerans & nutritum : puis par deſſus vn grand linge trempé ailon
cn oxycrat , & fouuent le renouueller , comme il elt dit cy- apres. Carſi elle eſtcauſée
par debilitation de la faculté retentrice des parties genitales, ſingulierement pour
De la groſſe Verole. 0707
A auoir trop vſé de l'acte venerien, il faut vſer de choſes roboratiues & aſtringentes :les&
ſur touc euicer les femmes, voire lesmettant du tout enoubly , iuſques à ce que
malades ſoient reſtaurez & entierement guaris . Il re ſuffira de cesremedes generaux
pour la curacion de la gonorrhée,attendu qu'amplement la guariſon d'icelle eſt trai ,
&ée dans les doctes commentaires des Medecins & Chirurgiens, tant anciens que
modernes: & auſli que ma principale incention eſt , de te donner ſeulement les re
medes de chaude- pillc: la curation delaquelle,tant generale que particuliere , ſe
ra cy- apres deduite.

Curation generale de la Chaude-piſe. CHAP XXI.

A cure ſera changée felon la diuerſité des cauſes & accidens. Pour les Cure de
choſesvniuerſelles, faut que le patient cienne bonne maniere de vi- chaude-pille
1
ure , & qu'il euite toutes choſes qui eſchauffent le ſang , principale- de répletion.
B mentious alimens facueux,diureciques, & violens exercices: qu'il ſoit
purgé & ſaigné, principalement file mal procede de repletion. Ildoic
fuir l'habitation des femmes, fi ladice chaude piffe n'eltoit venuë de defautde coïc:
il ne ſe doit coucher ſur vn liat de plume ,mais ſur vn matelas , ou vne molle paillaſ
fe, ſur leſquels on mettra vn drap en pluſieurs doubles à l'endroit de la region des
reins, & f'illuy eſt poſſible ,nedoit dormir ne coucher aucunement ſur le dos . Il
mangera ſes viandes pluſtoſt bouillies que roſties , cuittes auec ozeille , laictue ,
pourpić, & quelque quantité d'orge mondé , & des quatre feirences concaſſées.
Pour ſaulle,le doit contenter de jus de citron , d'oranges,grenades ou deverjus. Il
fabſtiendra de vin , en lieu duquel vſera d'cau d'orge , de priſane, de boucher, potus
diuinus, ou bien de l'hippocras d'eau auec vn bien peu de canelle . Au matin prendra
quatre heures auant que manger, vn orge mondé, auec lequel aura cuit vn petit
noüet plein des quatre ſemécesfroides concallées, vn peu de graine de pauot blanc,
pource qu'il rafreſchic, addoucit,& decerge. Pareillement vſera quelquesfois du
fyrop de guimauues , ou de capill . veneris : parfois d'vne demie once de caſſe ſcule,
î C à laquelle auſſi de fois à autre on pourra adiouſter vne dragmede rheubarbe , ou de
miedragmeen poudre, ſelon l'exigence du cas, ou bien de cespilules . 2. Maflæ pi
lul. ſine quib .Əj . rhei electi z B. camph.ğ iiij. cum cerebench. formenturpilulæ le La terebenta
ptem deuorandæ poſt primum fomnum . Semblablement la terebenchine de Veniſe thine de ver
ſeule, ou avec rheubarbe en pouldre, ou auec huile d'amendes douces recentement nile excellent
tirée & fans feu , ou auec dudit ſyrop de capill . veneris ; eſt vn remede louucrain & rimede à la
fingulier: parcequ'elle a vne tres- grandevertu d'addoucir & mondifier , & qu'elle chaude-p://e;
STOCK
ayde grandement la vertu expulcrice à pouſſer hors la matiere virulente & infectée Icelle par
hare
contenue aux proſtates .conſideré auſſi, qu'à cauſe de ſon amertume, elle eſt fort proprieté ocs
contraire à pourriture :outre leſquelles vertus elle a elgard aulli par vne proprieté culte ayde de
la chaudes
geous occulte furlesreins, & les autres parties dediéesà l’yrine : ce qui ſe cognoiſt cant par pifje.
ſon effect,que par l'odeur qu'elle delaiſſe en l'orine apres que l'on enavſé.
Etſily auoit quelque patient,commeil ſ'en trouue,qui ne peuſt aucunemét pren : Le moyen de
dre en bolus ladice terebenthine ( en la façon que l'on la baille ordinairement ) ilelt rendre la tea
aiſé de la rendre potable en la deſtrempant dans un morcier auec yn peu de iaulne rebenshine
D d'euf, & de vin blanc ,l'ayant premieremenclauée auec ptiſane: ce quei'ay ſceud'vn posable.
Apothicaire quicáchoiccemoyen de la rendre porablecomme un grandſecretque
ien'ay voulu oublier à eſcrire : parce que ieſçay que peu de perſonnes peoſent que
l'on la puiſſe faire aiſée à boire,attendu ſa glutinoſité & eſpelleuriSemblablement la
lexiue faite de paille de feue , eſt excellente pour modifier les reins & vaiſſeaux ſpera
matiques & vreteres. La quantité ſera de deux ou trois onces; auec vne dragme de
microſat , ou autre ſemblable pris deux heures aumatin deuant manger. La lexiue
de farinent fait le ſemblable donnée auec ſuccre roſat. Celle qui vient d'inanition ,ſe
guarira parinie &tionsgraſſes,huileuſes& remollientes: par bruuages & applications
de choſes de meſme effect, ſuiuant les cauſes qui ont engendré le mal.De celle qui
viene de contagion, nous en allons traicter amplement: te pouuant aſſeurer que l'on
a veupar les remedes ſuſdits , grand nombre de malades de chaude - piſle recouurer
Fuh
guariſon: neantmoins, afin que nous n'oublions rien de ce que nous auons deliberé
de traicter, ayans fait les choſesvniuerſelles , nousviendrons aux particulieres.
000 ilj
708 Dixneufieſme Liure ,
A
Curation particuliere de la Chaude-puſſe.
CHAP . XXII.

sedatif de T premierement nous fautcommencer à ſeder la douleur, & di


douleur minuer l'inflammation tant que nous pourrons , en faiſant vne
ardeur iniection dansla verge , de la decoction qui l'enſuit. 2. ſemp.
pfyllij, lactucæ , papaueris albi , plant. cydoniorum , lini, hyo
ſcyami albi añ. z ij. detrahantur mucores in aquis ſolan .plant.
& rofarum quantum ſufficit, trochiſcorum , albi Ralis, cam lag
w phoratorum pulueriſacorum z j.miſce ſimul, feruetur pro inic leu
&tione. Celte ordonnance cy-deſſus eſcrite, te feruira pour vn formulaire que tu pre
pourras diuerſifier, l'augmentantou diminuant ſelon la neceſlité, & tc conduiſant re,
touſiours auec raiſon . Ladice inicêtion a puiſſance d'appaiſer la douleur , pource B for
B
qu'elle eſt refrigerante, & par ſa viſcoſité lenit & addoucic le canal de l’yrine, le de
fendant de l'acrimonie & mordacité des humeurs , & des macieres virulences. On
doit vſerde ladite iniection tiede : en lieu de laquelle on pourra auſſi vſer de laia ve
nant de la vache,ou bien vn peu tiedy:meſmeinentde laiet- clair, ou pecic laic. Le
laiết eſt fort propre à faire iniection, ou à boire aux chaude-piſſes & ardeurs d'vrine,
pour la vercu qu'il a de rafreſchir & decerger : & auſſi pource qu'il paſſe aiſément
eſtant fort ſubtil & d'effence tenuë . Par dehors ſera fort bon de faire yne onction de
Remedes pro.
pres pour ceratum Galeni refrigerans, addita camphora, ou de ceratum ſantalinum ,ou comi
mettre par tiſſ.ou de nutritum ,ſusla region des reins, des lumbes,& du perineum , meſmes
dehors
chaudes
aux en frocter le ſcrotum , & toute la verge. Mais auant que d’vſer deſdits onguens ou
ſemblables, les faut faire fondre ſur le feu , & prendre garde de ne les faire beau
pifos. coup chauffer, afin qu'ils ne perdent leur faculté de refrigerer , qui eſtnoſtre princi
pale intention. Ladice onction faicte , conuient appliquer par deſſus quelques lin
ges trempez en oxycrat,compoſé ex'aquis plantaginis, ſolani, ſemperuiui, roſa 2011

rum , & ſemblables. En ce , filaduenoit que le pacient euſt vne grande douleur en
vrinant : & apres auoir vriné ( ce quieſt preſque ordinaire ) il ſera bon que le malade
piſſe en vn vaiſſeau plein de laict cicde, y trempant ſa verge pendant le temps qu'il f
rendra ſon vrine : & au defautde laiat , faudra prendre del'eau ticde : par ce remede
tu appaiſeras vne grandepartie de la cuiſeur. La douleur mitigée par ces moyens,
tu commenceras à mondifier les vlceres de la verge par vne iniection relle. 2. Hy
dromelit . fimpl. Z iiij. fyrupi roſati de ficcis, & de abînch. añ . 3 B.fiat inie& io,
ſeruetur ad vſum . Et où il ſera beſoin de plus grande deterſion , cu adiouſteras à l'in
Decoction
iection vn peu d'Egyptiacum , ce quci’ay fait pluſieurs fois : done , graces à Dieu,
l'iſſuö a eſté bonne. l'ay veu auſſi grandement profiter en ceſte intention, la deco
mondificati- &ion quifenſuit. 22. Vinialbi odoriferi tb B.aquarum plantag. & rofarum an. z is.
HC.
auripigmenti 3 j. B.viridis æris 7 j . aloës ſuccotrini 3 B. pulueriſentur pulueri
ſanda ,& bulliant fimul, ſeruetur deco &tum pro iniectione . Il te faudra diminuer
& augmenter la force des ingrediens , ſelon que verras eſtre neceſſaire. Les vlceres
mondifiez, il convient vſerdedeficcation pour les mener à cicatrice , deſſeichant lac
l'humeur , & corroborant les parties qui ont eſté imbuës & relaxées par la longue & D
grande fluxion : pour à quoy remedier , la decoction ſujuante eſt bien conuenable.
2. aquæ fabrorum tbj.pſidiarum & balauſtiarum , nucum cupreſliconquaſſac. an. led
žj.B. ſumac. & berberisañ.jij.ſyrupi roſati, & de abſint, an.zj. fiae deco&tio, fer
Inic tion de- uetur pro inie &tione. De ceſte decoction en fautjeccer ſouuentdedanslaverge auec
ficsatine. vne ſyringue , & continuer iuſques à ce qu'ilne forte plus de ſanie , lors tu pourras
eſperer le pacienceſtre guary. Reſte maintenant à parler des accidens qui prouien
nent d'aucunes chaude -piſſes, qui ſont descarnoſitez procreées au canalde l’vri.
ne , dont pluſieurs ſont tourmentez : & à cauſe de ce , tombent ſouvent en vne re.
tencion d’vrine , & meurent.
1
De la groſſe Verole. 709
A
Des carnofitez qui s'engendrent au conduit de l'urine apres aucunes chande-piffes.
1 )
CHA P. XXIII.

'HVM EVR virulent qui ſort des glandes proſtates, & paffe conti- Done procea
nuellementpar le canal de la verge,erodepar ſon acrimonie & vlcere dent les cars
en quelquesendroits le conduitde la verge des hommes,& aux fem- nofitez
mes le colde la matrice . Quelquesfois.en ces vlceres fengendre une
la prima chair ſuperfluë,ainſi que nous voyons aduenir aux vlceres exterieurs,
laquelle empeſche quelquesfois que la ſemence & l'vrine ne paſſent aiſément par
leur voye ordinaire, dont aduiennent grands accidens . Parquoy faut diligemment
prendre garde auſdits vlceres, ſe mettant en tout deuoir de lesguarir.Et pour ce fai- Carnofitez
re,conuient ſçauoir en premier lieu f'ils ſont regents ou inueterez; à raiſon qu'ils calleuſes.
B font de tant plus faſcheux à guarir,que plus ils ſont vieils & anciens : car lors ils ſont
***
plusdurs & calleux,meſme que la pluſparc deſdites carnoſitez a japris cicatrice.

‫ܐܐ‬
Deslignes des carnefitez. CH A P. XXIIII.
dri
for
Es carnoſitez ſont cogneuës par la ſonde, qui nepeutpaſſer librement
par le conduit de l’vrine, ains trouue autant de fois reſiſtance qu'il y a de
carnoſitez: pareillement par la difficulté que lepatient a en vrinant. L'v- Prination
rine fort grandement deliće, fourchuë ,ou de trauers : quelquesfois ne fourchuë.
vient que goure à goute,auec grandes eſpreintes: de façon que le plus ſouvent le pa
cient voulanc uriner,eſt contraint d'allerà la ſelle,comme ceux quiont vne pierre en
la veſſie: dauantage,apres auoirpiffé, demeure vne petite portion de l'vrine derriere
#
les carnoſitez : aulli faitla ſemence apres le coït, en ſorte que le patienten tel cas eſt
contraint decomprimerle haut de la verge pour faire ſortir leſdites matieres. Aucu- 1ſchurie caw
nesfois eſt aduenu à quelques-vns vne cntiere ſuppreſſion d'urine, qui leura cauſéSie de carnos
c vnetelleextenſion delavellie,qu'ilenenſuiuoitvnegrandeinflammation,& quel- foid.
ques apoftemes en diuers lieux,dontl'vrine regorgeant en haut , puis apres ſortoit
parpluſieurs endroits,ſçauoir,à l'environ du ſiege,par le perineum, les bourſes,le pe
nil,& les aines,ainſi que i'ay veu à pluſieurs qui eſt en mal du tout incurable.
Du prognoſtic des catrofitez , & de la cure d'icelles. CHAP XXV .
.

Ors qu'il y aura commencement de carnoſité, le pluſtoſt qu'il ſera poſſi- Ce qutrend
ble la conuiendra curer : car elle croiſtroir de iour en iour , & ne feroit au . la cure de la
cuncment guariſſable par nature. La ſuppreſſion entiere de l'urine , & les carnoſitédif,
accidenscy-deſſuseſcrits,monftrent affez la difficulté de fa guariſon :iointficile.
auſli que les remedes ſont mal-aiſez à y appliquer : neantmoins te gouuernant tant
en general qu'en particulier,ainſique nous c’enſeignerons,tu pourras paruenir à la
fin parcoy pretenduë . Hippocrates dit, que ceux qui ont tubercule ou carnoſité en lisph. 82.
ure 4.
la cauité de la verge,ſontguaris par la ſuppuration & eruption du pus.
D Or le temps plus propre pour les curer,elt le Printemps, & puis l'Hyuer : toutes- obſeruation
fois ſi la maladie preſie,on n'aura égard au temps. En faiſant la curacion ,le patient touchant la
cure des CATC
ſedoitgarderdel'acte venerien : car pariceluy lesreins, les vaiſſeaux ſpermatiques, nofisca:
glandes proſtates,& toute la verge ſ'enfent , cſchaufent, & par conſequent accirent
de toutes les parties ſuperieures: dont aduient que ſont enuoyées pluſieurs ſuper
fluidez aux parties bletlées,qui empeſchent la guariſon. Pourſuiuant la curation def
dices carnoſitez il ſe conuient garder de trop vſer en la voye de l'urine de remedes
acres & corroſifs : pource que la ſenſibilité de ce conduit eltant par iceux offenſée ,
pourroit eſtre cauſe de grands accidens . Il ne faut auoir peur ſi de fois à autre vient il eſt bon de
quelque flux de ſang deſdites carnoſitez: carc'eſtvne choſe fort conuenable ( ſeua- faire ſouuent
cuant vne portion de la maciere coniointe) qui meſine ſoulage la partie, & empeſche Jaigner les
le mal degrandir,actendu que le ſang eſt cauſe de la carnolité. Pource n'aduenantcarnofuez,
de ſoy-melme ledit Aux de lang,ceſera fort bien fait de le prouoquer diſcrectement
par la ſonde.
000 ilij
<
710 Dixneufieſme Liure ,

A
Cure particuliere des carnofitez. CH A P. XXVI.

I les carnoficez ſont vieilles & calleuſes, il les faut amollir par fomenta.
cions , cataplaſmes, linimens, emplaſtres, & fuffumigation. Celte fomen
Mortifica
sion des cara cation te feruira de forme . 2. Rad. altheæ , & lilior. albor. an. Z iiij.rad.
noſitez cal; biyoniæ , & fæniculian.zj.B.fol.mal.viol.par . & mercur.añ.ñ Š.ſem.lin.
leufes . fæng.añ.3 B.caricasping. num.xij.for.camom.melil.añ.p.j.contundanturcon
tundenda,incidenda incidantur, bulliác omnia in aqua com .& fiat focus cum ſpon
gijs femellis & mollibus . Du marc de la fomentation , tu pourras faire vn cataplal
me ainſi qu'il ſ'enfuit. Prædicta materialia colentur, piſtencur, & paſſentur, adde
axung. porci , vng. baſilic, añ . Zij.fiat cataplaſ. Tu vſeras de ce cataplaſmeapres la
fomentation. Entre ladice fomentation & application du cataplaſme, tu pourras te

ſeruir du liniment ſubſequent,ou d'autre, à pareille fin. 22.vng. dialchcæ Agrip . an .


31. 3. æſypi humidi,& axung ohnmanæ añ . žj.butyri recentis,olei lil. & camom.añ. B
zvj . liquefant fimul
, addendo aquæ viræzj far linimen .duqueltu frotteras parde
hors l'endroit où tu penſes eſtre les carnoficez. Tuy pourras aulli appliquer empla
ſtres tendans à ce meſme but quetu ordonneras ainſi que verras eſtre bon de faire:
I'emplaſtre mais ſi tu te veux contenter de l'emplaſtre de de Vigo cum mercurio , cu le pourras
de de
cum Vigo faire: caric t'aſſeure qu'il emporte l'honneur ſur tous autres , pour remollir & dć
merce
rio , propre gaſter telles dureccz , pourucu qu'il ſoit fidellementdiſpenſé.
pour amollis. A ceſte meſme intention , tu pourras vſer de la fuffumigacion , & euaporation qui
suffumigariö l'entuir. Ilte faut prédre vn morceau d'vne meule de moulin (car nous vlons deceſte
pourremollir pierre au lieu de celle que les anciens ont nommée Pyricés ) ou groſſes briques,& les
e refondre. ayant bien eſchauffées dans le feu , les metcras dans vn baſſin de cuiure , ou vn petit

chauderon ſous vnechaire percée : puis le malade eftant aſſis ſus icelle, comme fil
vouloir aller à les affaires, tu verſeras ſus leſdites pierres de bon vinaigre , & de l'eau

de vie mellée enſemblément par parties égales , & garniras ladite chaire fibien à l'en
tour , que la vapeur ne fe perde, ains qu'elle ſoit portée droit contre le mal . Pour en
cores mieux faire, tu pourras vſer dece tonneau ,dedans lequel le patient ſera nud,&
aſſis au milieu fur vn ais pertuiſé à l'endroit des parties genitales . Puis y aura vn
chauderon entre les iambes , où lon poſera les pierres eſchauffées :& par la pecite fc 101
neſtre marquée B ,tu arrouſeras leſdites pierres de la liqueur ſuſdite , la fumée de la
quelle le patientreceura commodément ſur la partie affectée: mais il faut que Jedit

patient ſoic bien clos, & couuert dedans le conneau , marqué A , de peur que la va kes
peur ne ſe perde, & que la petite feneſtre ſoit pareillement bien cloſe.

Tonneau propre pour recevoir vre fumigation.


(

Ap

Www
De la groſſe Verole. 711
A Telle cuaporation penetre, inciſe,diſcute ,liquefie ,mollit & reſout grandement Au 2.liu .
à Glauc.trai
toutes durerez ſcirrheuſes, teſmoin Galien 2. à Glaucon.
sant de la cy
ration des
for Dequels temedes ilfautvferfileſditescarnofitez tiennent de laverole,enſemble deleurcart. fcirrhesch.s
ferme CHAP. XXVII.

Ars l'il y a ſoupçon que leſdites duretez & carnoſitez ſoient cauſées de
quelque humeurcenant dela verole , il faut que le malade face diere, & vſe
de decoction de gaiac,luy frottant les aines, tout le perineum , &la verge, 2

d'vn onguent propre à la verole :car autrement on perdroit la peine& lon


temps. Pendant qu'il ſera en ſucur, on luy fera tenir entre ſes iambes vne bouteille
remplie d'eau bouillante, ou vne brique chaude , & bien enueloppée de linges,ar
rouſezen vinaigre,& cau de vie : pource qu'au moyen de ces pierres feſleuera vne
B vapeur & chaleur, qui auec l'onguent de verole ,amollira & fondra l'humeur cau
Sport
temi
fanc leſdites carnoſitez : ce que i'ay pratiqué en pluſieurs, auec trelbonne iſſuë. A
pres auoir par ces moyens ainſiamolly leſdites carnoſitez ,il les faut conſumer , auec
remedes qui ont puiſſance de ce faire. Et lion cognoiſt qu'elles ſoient calleuſes, & signes de
ayent pris cicatrice ( qui ſera aiſe àvoir, parce que d'elles neſortira aucune humidité carnoſité
ſúperfuë ) alors les conuiét eſcorcher,& rompreauec vne ſonde ou verge de plomb, calleule.
Le mogen
ayant vn doigt pres de ſon extremité, pluſieurs aſperitez,comme vne lime ronde , & d'vlcerer les
l'ayant paſſée dansla verge outre les carnoſitez, le patient ou le Chirurgien la tirera, Carnoſitez
repouſſera & retournera decoſté & d'autre tant de fois qu'il verra à ſon aduis eſtre qui ont pri
100
neceſſaire pourcomminuer leſdites carnofitez,laiſſant fluer apres aſſez bonne quan- naiſſance.
tiré de ſang, à fin de deſcharger la partie. On pourra auſſi vſer de quelques ſondes
propres pourcel effe & ,dedans leſquelles y aura un fil d'argent, & à l'excremité d'i
celuy vne petite rondeur qui ſera trenchante & caue vers le bout de la fonde, à fin
qu'elle ſeioigne contre pour la mettre ſans violence dedans laverge, à l'endroit des
carnoſitez : & lors on pouſſera ladite verge de contre la ſonde, tant & li peu que lon
C voudra : car l'ayant ainſi pouſſée,on la retire tant de fois qu'on veut. Ce faiſant on
pince & comminuë de ladite carnoficé,tant qu'il ſembleeſtre bon pour vne fois. Ie
te puis aſſeurer que i'en ay fait de belles cures. La cannule marquée a ,eſt ſemblable
ment vtile pour celeffect. Son vlage eſt cel : Il la faut mettre en la verge , & les ou
ile
uercures marquées b,b, ſeruent pour couper & comminuer les carnoſitcz ,lors qu'el
lesſont poſées dedans , parce qu'elles ſont trenchantes :& alors on doit tourner la
cannule, &comprimer des doigts l'endroit de la verge où ſont les carnoſitez.
Sondes de Canxslespropres à couper & commisuer les carnofitez.

D
o이
O

Apres faudravſer dela poudre ſuiuante, laquelle eſt prompte à conſumer leſdi- Poudre firma
tes carnoſitez & excroiſſances de chair és parties honteules,cant à l'homme qu'à la quliere pomer
femme,ſansnotabledouleur. 24. herbæ ſabinæ in vmbra exſiccatæ zij.ochræ, anti- lescarnosis
monij, tuchiæpiæparatæ an.z6.fiacpuluis ſubtilis,vtalchol. Il fautappliquerladice teR.
712 Dixneufieſme Liure ,

poudre auec la ſuſdite cannule , & auec vne petite verge d'argent ( qui ſera de la pro- A
portion de la cauité de ladice cannule ) au bout de laquelle cu auras lié vne perico

Plage de la picce de linge delié de ladite cannule , eſtant mis la feneſtre contre-mont,àfin quo
Cannule fe- ladice poudre nc combe au conduit de l'vrine . Tu addreſleras ladice feneſtre ſur la
neftrée. carnoſité: car en pouſſant auec ladite verge , tu pouſſeras hors de ladite cannule la
poudre: puis apres tu retireras ladite cannule , ayant retourné la feneſtre de l'autre
part de la carnolité,à fin de ne rapporter en ladite feneſtre la poudre,ainsqu'elle de
meure ſur la carnoficé le plus long temps qu'il ſera poſſible: & f'il ſuruient grande
douleur,il conuientvſer de l'iniečtion ſuiuante, pouradoucir la douleur , & fuir l’in
flammation. 2 .. fuccor. porcul . plantag , ſolani & femperuiuian.zß.albumina ouor.
num.vj.agitentur diu in mortario plumbeo :& tiede ſera ietcé en la verge par vnc
ſeringue. Tu pourras au lieu de ceſte -cy vſer de l'inie &tion que nous auons cy-de
uant eſcrite au chapitre Dela cure particuliere de la chaude-pifle. Il ſera beſoin auſſi
mettre par dehors au long des parties genitales, quelques remedes repercuſlifs pour
cmpeſcher la douleur & inflammation. On peut pareillement vſer des remedes qui
B
ont faculté de diminuer & conſumer les carnoſitez, entre leſquels les ſuiuans ſont
Fortexcellens. 24. Viridis æris , auripigmenti, vitrioli Romani,aluminis rochæ, an.
zij . Toutes ces choſes ſoient infuſes en tres - fort vinaigre , & entre deux pierres de
marbre ſoient diligemment menées, & reduites en poudre tres-ſubcile, & puis ſoient
miſes au Soleil d'Eſté. Derechef ces choſes ainſi leichées , ſoient encore infuſesde
vinaigre, & menées commc dcuant , iuſques à ce qu'il n'y ait aucune aſpericé, & de
rechef les mettereau Soleil , iuſques à ce qu'elles viennent en ſubtile poudre ,& que
toute l'acrimonie de ces medicamens ſoit eſteinte : ce qui ſe pourra faire en huic
jours. Cela fait, 2. Olei rofacei ziiij.licharg . zij. ſoient cuittes au feu,iuſquesà ce
que l'emplaſtre acquiere conſiſtance de corps ferme: puis ofté du feu , adiouſtez de
la poudre predicezij . & ſoit mellécaueclclpatule, & mis ſur le feu, iuſques à ce que
le medicament acquiere dureté , tant qu'une chandelle de cire , ou vergede plomb
y tienne , & fy puiſſe bien adherer, & que meſme ne tombe eſtant maniée des doigts:
& de ce remedevſent les Chirurgiens de Montpellier . Apres la ſuppuration de la
carnoſice,on yſera de l'onguent ſuiuant, qui a puiſſance de les mondifitr,& confu
mer la chair excroiſſante .

Onguent pour les carnofitez .

Onguent fort
Prenez ceruſe de Veniſe Žiij.camphre žj . cuthic preparée auec eau toſc z 8.li

carnpour
propre charge d'or lauécz vj. antimoine crud ſubtilement pulueriſé , & paſſé parlecicotrin
les ofi
Zj . trochiſques blancs de Rhafis zij . maſtic, oliban, aloës hepatic, fubtilement pula
ueriſez an . 3 ij . huile rofac tant qu'il ſuffiſe pour faire onguert. Il faut broyer tout
en vn mortier de plomb, auec vn pilonauſlideplomb , & qu'il ſoit longtemps broyé:
fe donnantgarde dele faire on vnmortier de bronze, ou autre mecail, de peur qu'il
n'acquiere vne acrimonie , & ne cauſe inflammation , ou autres accidens qui pour
roient arriucr, commcon a veu . Dccetonguent en oindrez la candelette environ le fait

deux trauers de doigts, & le reſte ſera oingide longuent fuivant. Prenez onguen
roſar de Galien , laué en cau roſe , onguent blanc de Rhafis, camphre, & pomade
fimple añ . zB . incorporez enſemble dans le ſuſdit mortier de plomb,& en vſcz par
interualle pour ofter la cuiſeur:pareillement on fera inicction de laid . Faut nocer
qu'en l'application dudit onguent,ilnefauc vſer de bougies ordinairenient, comme
aucuns leſquels apres auoir piſlé, promptement en remettent daucres , penſans bien
faire : parce que le plus ſouuenc il fen enſuic cumeur en la verge , & inflammation,
qui contrainc le Chirurgien de differer l'uſage: & partant ie me contenite d'en vſer
vne fois en vingt-quatre heures, fpecialement la nuit. Et pour mieux faire,& abre
ger la cure , il eſt beſoin de faire fortirdu fang de la carnoſité auec vne fonde, à fin Pou
de deſcharger la partic, & auſſi que le medicament puifle plus librement faire ſon
operation . On peutauſſi vſer d'autres chandelles de cire, dont la meiche fera faite
exprés de fil bien fort & delié , de peur qu'elles ne fe rompent: mais ilfaut qu'à
l'endroit qu'elles coucheront leſdites carnoſitez , elles ſoient formées & embou.
ties de la compoſition qui ſ'enfuit. 2. Emplaſtri nigrivel diachylonis ireati3ij
.
pul . lab.ochræ , vitrioli Romani calcina , pul, mercur. an. 3 B. omnia liqueſcane
fimul ad vſum di & um . Ledic romeda ſera augmenté de ſes forces,ou diminué,
7

De la groſſe Verole. 713


A ſelon queleChirurgien cognoiſtra eſtre neceſſaire. Pendant que lon vſera desſuſdits
remedes,faucſoigner que le malade ſecoue bien la verge , & qu'il s'efforce qu'il ne
ire
demeure pas vne goute d'vrine au conduit apres qu'il aura pillé: car il n'en ſçau
roit demeurer li peu , qu'il n'empeſchaltlađion des ſuſdits remedes.
-delu
Des remedes conuenables pour cicatriſer les ulceres apres l'ablation des carnofitez :
CH A P. XXVIII.

T.
Pres que par ces remedes la carnoſité ſera conſommée,ce qu'on peut signes de
cognoiſtre quand le patient piſſera librement& à l'aiſe,& auſligros qu'il carnofué
auoir accouſtumé auant qu'il fult malade: ſemblablement fors qu'en comfommée,
mettant la ſonde dans le conduit , on ne ſent aucun empeſchement,il
fautadonc deſſeicher & cicatriſer l'vlcere : ce que lon pourra faire auec
B telle & ſemblable iniection, qui a grande vertu de deſſeicher & cicatriſer ſans gran
de mordication. 2. A quæ fabror. tb .B. nucis cupreſli, gallarum , cort.granat.an.
Focta
zj.aluminis rochæ z B. bulliant omnia fimul ſecundum artem , fiac decoctio pro in
pour ie& ione.Delaqueile on vſeraiuſques à ce que lon n’apperçoiue aucune humidité
ſanieuſe ſortir hors de la verge. Pareillementpour deſſeicher dauantage ,& auancer
la cicatriſation ,ſera bon d'vler de ceſte poudre,laquelle deſſeiche fans nulle douleur
& mordication . Prenez pierre.calaminaire lauée , coquilles d'æufs brullez,corail
rouge,eſcorce de grenade , le tout mis en poudre ſubtilement: puis ſoit appliquée
CO2 ſur les vlceres auec chandellesde cire, ointes d'onguent deſiccarif, rouge,ou autre
ſemblable. Pour meſme effect , on vſera de verges ou ſondes de plomb, les plus singulier rew
groſſes que le patient pourra endurer,& icelles mettre dedans la verge iuſques ſus mede des
de
leſdits vlceres,les ayant premierement frottées devif -argent, & les y tenir iour & verges
nuid , le plus longtemps quele patient pourra. Ellesontvertu de deſſeicher, cica,plomb.
criſer, & dilacer le conduit de l'vrine,ſansaucune douleur : & gardenr que les parois
des vlceres ne ſe touchent. Iete pourrois encore eſcrire vn grand libelle de remedes Bon docum
tendans à pareil but que ceux cy deſſus eſcrits : mais ſçachant bien que le Chirurgien cument,
expertles peut changer & varierpar raiſon,comme lemal lerequiert,ceux - cy te fer
uiront d'exemple.
Des buboxs oupoulains veneriens. CH A P. XXIX .

VELQUESFOIS le virus verolique ſe communique au foye, & fi la Generation


vercu expultrice eſt la plus forte,lereiecte aux aines,quiſontlesemon- o mariere
&oires, d'où l'enſuiuent apoſtemes, appelléespoulains: la pluſpart deſ des bubans
eur
quels ſont engendrez d'humeurs froids, lents & viſqueux, comme il ouou poulains.
gan appert par la tumeur dure ,blanche , & de petite douleur, eſtant tres
00
difficile à curer : qui eſt vne autre raiſon, outre celles que nous auons alleguées au
ODKI chapitre troiſiéme, qui monſtre que le virus de la verole eſt principalement fondé
en l'humeur pituiteux . Quelquesfois auſſi il y en a d'autres faits d'humeur chaud ,
bilieux,& acre, auec grande inflammation & douleur ,qui fouuent degenerent en
D vlceres virulens& corroſifs: & aucuns d'eux ſont accidens precedans la verole:com
me ceux qui ſe tournent & ſe cachent par deliteſcenceaux parties internes. Il y en a
3761 d'autres quine ſontaccidensde la verole, mais ſontmaladies à part, qui ſe peuuent
curer ſans les remedes propres à la curation de la verole ,comme iournellement ap
pert: & pource eſtans comparez aux autres bubons veneriques,ils ſe peuuent ap
for the
peller ſimples, & non compliquez.
Pour la curacion, il ne faut vſer de reſolutifs,craignant qu'vne partie ſeulement ſe curation
iela reſolue , & l'autre demeure au dedans : aufſi ne faur iainais vſer en tel cas de re, des bubons
percuſſifs : doncon appliquera medicamens attra &tifs & ſuppuratifs, propres à la na- veneriquesa
cure de l'humeur, à ſçauoir, plus chauds aux tumeurs cedemateuſes & ſcirrheuſes,
qu'aux ſanguines & bilieuſes. Auſſi ſeront diuerſifiez ſelon les corps rares & deli
cats. L'application des ventouſes a grande efficace: car elles ont puiſſance d'attirer
l'humeurdu dedans au dehors : auſli faut ſubit y appliquer vn medicament empla
fique : ſomme, il faut conduire la cure par fuppuratifs : & apres la ſuppuration
714 Dixneufieſme Liure ,
Quelspou- faite, l'apoſtemeſera ouuerte parcautere potentiel,ſi elle eſt cauſée d'humeurfroid: a 4
lent
20

lains ilfaut car par leur chaleur & douleur, ils aideront à cuire le reſte de l'humeur : iointque
ouuriranec
le cautere par l'ouuerture la maciere ſera mieux euacuée ,& nefaudra y mettre aucune tente, jada
actuel. mais ſeulement des plumaceaux. On traittera l’apofteme par remedes emolliens & licou
OSTU
fuppuratifs,en mondifiant l'vlcere : & apres le malade ſera faigné & purgé , l'il eſt met
beſoin , & non auparauant que la ſuppuration ſoit faite. Sion fait l'ouuercure auec
ques la lancerce,on la fera en trauers,ſelon le ply de l’aine, parce qu'en pliant la cuiſ coice
ſe contre le ventre,lesléures de l'vlcere ſe couchent l'vneTur l'autre, & l'agglutina
tion eſt mieux faitc, & n'y demeure tant de difformité quand la cicatrice cîtfaite. Vent
der a
Des exoſtoſes, rophes ou nodus venans du virus verolique. fail
D
l'una
12
CH A P. XXX .
cel le
Matiere des Es cumeurs dures , & exoſtoſes ou nodus ſont engendrées de B 120C
nodus. pituite & melancholie craſſe,froide,& viſqueuſe, laquelle ne ſe
e 1034
peut diſſoudr que par remedes chauds , qui ont faculté d'amol
lir & fondre ledit humeur : & outre les indicacions communes
HOULD
des ſcirrhes, fauty appliquer le vif- argentauec les remedes pro bar

pres. Exemple. 24. emplaftri filij Zachariæ , & ceronei an. ž iij.
euphorbij Z B.emplaftri deVigo 3ij . ceroti hyſopi deſcriptione
Philagrij zj. argenti viui extindi z iiij.vt dictum eſt,& fiat emplaftrum :extenda.
tur ſuper alutam ad vſum . Cependant le malade doit tenir bon regime , par tels
moyens ſera guary, pourucu que les os ne ſoient point intereſez : car fils eſtoient
carieux & pourris,les ſuſditsremedes n'auroient plus de lieu. Et faudra faire ne
ceſſairement apertion en deſcouurant l'os, ſoit auec raſoir , caucere potentiel ou
actuel,lequeleſt en ce casmeilleur& plus certain , à cauſe qu'il conſomme vne cer
taine virulence imbuë en l'os,& aide à la cheute de los corrompu. Il ſera de figure
Choſe digne du tophe que lon veut cauteriſer, ſoit rond , quarré, ou long. I'ay de couſtume 0
d'estre notéc.auparauant l'applicationdeſdits cauteres a&uels, couper la chair de deſſus auec vn
raſoir , à fin de faire moindre douleur par le cautere : parce qu'auparauant que la
chair fult bruſlée ,la douleur ſeroit trop grande , pour la longitude du temps que
lon ſeroit à la bruſler deuant que deſcouurir l'os . Orne ſera icy hors de propos trai.
ter de la carie des os . de

La cauſe pourquoy l'os s'altere & pourrit, des ſignespour le cognoiſtre.


CH A P. xxx 1,

Catagma eſ A ſolution de continuité faite aux os , eſt nommée au ſixieſme de laMe


ſolution de chode parGalić Catagma. La carie ſe fait en eux,pourcequ'ils ſont froiſſez,
continuité
en l'os. LE fendus,percez, fracturez,luxez, apoſtemez ,& deſcouuertsde leur chair.
Quand doncily a deperdition deſubſtance dela chair qui les couuroit,ils
s'alterent alors, & le ſang & leur propre nourriture ſe deſfeiche par l'airexterieur qui D
les touche, queles os nuds ne peuuent longuement endurer ſans qu'ils s'alterent.
Aufli quandvne playe eſt de longue durée , la ſanie croupiſſant deſſus s'imbibe en
leur ſubſtance, & les pourrit. Pareillement par l'application des choſes on & ueuſes C
& oleagineuſes, & autres medicamens humides & ſuppuratifsà cauſe qu'ilsrendent
la playe ſordide & maligne: puis la chair des parties voiſines s'eſchauffe & ſuppure,&
la boue defluante ſus l’os l'enflamme auec ſon perioſte:à cauſe dequoy il tombe ſou
Hipp.auliu.uent en fićure. Pour dire en bref,les os peuvent ſouffrir tous les inconueniens dont
des vlceres la chair eſt vexée:partant ſe peuuent carier & pourrir. Dauantage , Galien nous a
GFractures,
O auliu.des
laiſſé par eſcrit, que ſouuentesfois l'inflammation commence auxos. Sur ce quel
Tumeurs co
ques- vns pourront obic&ter, que les os ne peuuent auoir pulſacion, accendu qu'ils .

tre nainte . n'ont ſentiment aucun. Carles anciensont eſcrit,que le pouls ſignifie mouuement
des arteres auec douleur. Ce que ie confeſſe: mais ie reſpons auſſi,que la membrane
qui les couure,& les arteres & nerfsquientrent en leurs cauitez,ont vn exquis ſenti
ment:& que quád leſdites arteres ſe meuuent,cftans eſchauffées de l'os malade,elles
caulent

3
De la groſſe Verole. 715

A cauſent douleur en la membranequi l'enueloppe : tellement que les patiens diſent


fentir vne douleur pulſaciucau profond des os, ce que l'on cognoilt manifeſtementà
la douleur des dents . L'alteration & pourriture des os eſt aucunesfois cognuë à l'æil : Moyen de .
ſçauoir eſt quand loseſt deſcouuert:car lorson void qu'il ya mutation en la couleur cognofire
naturelle , quád aulieu d'eſtre blanc , il ſe trouue liuide, iaunaſtre, ou noir: pareille- l'os alteré.
mencon la cognoiſt au coucher dela fonde, quandon y trouue aſperité & inegalité,
& en la pouflanton entre en la ſubſtance , comme en vn bois pourry : car l'os lain L'os ſain doil
doiceftre ſolide, & non mol.Neantmoinsde ce ſigne n'en faut faire vne regle cer- efie fólide.
caine , pource que quelquesfois i'ay veu l'os ayant eſté longuement deſcouuerc, de
uenir alceré, & rellemeni dur, que la crepane, ou autre inftrument, ne pouuoit en
crer dedans qu'auec peine . Auſì ladite alteration & pourriture ſe peut cognoiſtre
par la fanie, qui ſort de l'vlcere, laquelle eſtplus ſubtile & claire, que celle qui coule
d'un autre vlcere eſtanten la chair. Meſme eſtmoins viſqucuſe, & plus puante , que
celle qui ſort de la chair , des nerfs, des tendons , & des membranes. Dauantage , en
B l’vlcere ſe trouuera touſiours quelque chair molle , baueuſe , & fpongieuſe : pareille
ment l'vlcere ſera mal craitcable , & rebelle à clorre & cicatriſer : combien toutes
fois que par la longue continuation des medicamens deficcatifs, aſtringens, on y
induiſe quelquesfois cicatrice : mais coſt apres l'vlcerc s'ouure & renouuelle, a rai
ſon que nacure ne peut faire bon fondement, ny engendrer vne chair louable ſur
l'alteration & carie de l'os, car c'eſt choſe contre nature , & parcant elle doit eſtre
oſtée le pluloft qu'il ſera poſſible.

Des moyens de proceder à la ſeparation des os caricux .

CHAP. XXXII .
A

R il ne ſuffic au Chirurgien cognoiſtre que l'os ſoicalceré & cor


rompu ,mais ilconuientauſſiqu'il fçache ſi l'alteration eſt ſuper
ficielle ou profonde, afin de diuerſiſer les medicamens & les in
de ſtrumens pour donner iſſue à la ſanie, qui peut eſtre en la ſubſtan
ce de l'os: & pour ce faire, faut ſeparer l'os alteré & pourry , Le Moyens de
ed : moyen de ce faire, eſt de corriger leur corruption en mundifianč corriger lo
l'vlcete ,afin que la fanie ne combe ſur l'os,& qu'elle lerende hu- corruption
soy
mide . Pareillement le detſeichant bien fort ,tantpar medicamens , que par cauteres
potentiels: ou actuels , car parcemoyenon le rend exangue , ſansnourriture & vie .
Celſe liurc 8. chap.2 . veut qu'on perfore les os vermoulus & alterez, en quelque
endroit que ce ſoit, iuſques à la partie ſaine & entiere , quielt quand il eu ſorc vn peu
puis appliquez dedans les trous,cauteres actuels faicts en maniere de poin
de ſang:
çons, afin que losdeuiennc tout fec :coutesfois il ſe faut garder de crop profonder
les poinçons de peur qu'ils ne touchés ſur l'os vif, & par cette maniere on fait ſeparer
elmed
l'os alteré, pourry & vermoulu , & par ce moyen on le rend exangue & ſans nourri
ture . Ce qui ſe peut monſtrei par l'exemple des arbres , eſquels les fueilles tombent,
sidebar à cauſe que le ſuc ,par lequel elles ſontadherantes aux branches , etdeſfeiché, donc
les con
fermed aduient que les fueilles n'ayans plus d'humidité & vie , fe feparent de l'arbre verd &
D vif, qui eſt la cauſe pourquoy elles tombent: ainſi conſumant l'humidite desos , on
08
leur ofte la vie , qui eſt cauſe de les faire feparer. A caufe dequoy les poudres appel
Passa
lees Catagmatiques ſont propres pour aider à ſeparer l'os qui ſera alteré ſuperficiel. Poadres pro
prespourfajn
lement . 2. pul.aloës, creræ combuſt. pompholygos añ :zij ireos Florentiæ ,ariſtol. re ſeparer les
2003
rotund.myrrh.ceruſ. an 31. pul.oftreorum combuſtorum z B.terantur ſubtiliſſimè, os,appellées
ter
fiat puluis. Icelle peut etre appliquée ſeule, ou auecmiel roſat, & vn peu d'eau de par Hippocr .
vie : auſſi on peut appliquer de celt emplaftre, qui a faculté d'aider nagure à cxtraire Catagmati,
lesosfrađurez, & denettoyer la ſanie groffe & vilqueuſe des vlceres .2. ceræ nouæ , ques .
Galerie
reſinæ pini , gummi ammoniaci & elemiañ.3 vj . cerebenchinx z tij. pulu . malt .
15. Set
myrrhæ añ .zB ariſtolochiæ rotundæ ,ireos Florentiæ ,aloës ,opopanacis, cuphorbij,

U añ.3j . oleirofati quantum fufficit , fiat emplaftrum ſecundum artem . L'euphoibe


IPD
fait tomber les eſquilles des os , comme dit Dioſcoride liurcz . chapitre 8. Aulli l'em
plaftre de beconica a pareille vertu. Autre. 2. olei caryophyll . zB.camph. zij.mi
PPP
716 Dixneufieſme Liure ,
ſccantur fimulin morcario , & veere. Et lil'alteration ne peut etre oſtee par les re- A
medes ſuſdics , on peutvſer de trepanesexfoliatiues, & autres rugines deſcrites aux
playes de ceſte, lors que la carie eſt en vn grand os, & fort ſolide. Meſmes tu tepour
ras ſeruir de la trepaneperforatiue, dont tu as le pourtraict cy-deſſous, en percuiſant
l'os carieux en pluſieurs endroits de la carie , & en profondant iuſques à ce qu'ilen
ſorte comme vnc humidité ſanglante: & ce pourdonnerair & tranſpiration : afin
auſſi que la vertu des remedes puiſſe mieux conſumer l'humidité ſuperfuč. Les os ſe
troüent, raclent, limenc, ſcient, coupent , & bruſlent.
Trepane perforatiue auec deux poinctesen triangle, de la petite chenille
pour luy ſeruir à l'emmarcher.

Autre trepane à ceſte intention : mais faiſant plus grande ouuerture ,propre pour
les gros os grandement carieux : de laquelle les poin & es ſont quadrangulaires ou
ſexangulaires, comme tu peux voir par ceſte figure ſubſequentc. HA

Trepane dont les poinctesfont quadrangulaires deſexangulaires.


namna
0001W)

Dauantage, ſilacarie eſt fortprofonde,& l'os eſt ſolide ( comme ſe fait ſouuenc
par alteration de l'air exterieur)alors il faut couperles os corrompusauecques les in.
ftrumens deſcrits aux playes de ceſte,deſquels cu oſterasla corruption, frappant d'un
mailler deſſus, lequel doiceſtre de plomb , afin demoinseſtonner la partie: puis tu
Comment on oſteras les fragmens & eſquilles auec petites pincettes. Leſigne pourcognoiſtreque
cognoiſtra la lon aura ofte la carie , clt quand au deſſus d'icelle l'os ſera crouué plus ſolide, & D
carie oftée. quandaulli on verraſortir du ſang.
De la groſſe Verole. 717

A
Des canteres actuels & potentiels. CH A P. XXXII .

T ſi ces inſtruinens predits n'auoient lieu ,à cauſe de la crop gran- Pourquoy les
de corruption ,ilconuiendroit vſer de cauçeres actuels ou poten- caureres as
ciels: entre leſquels iepriſe plus les actuels: parce que leuraction étuels ſont
eſt plusſoudaine, & plus ſeure , & ne bruſlent qu'où ils touchent, prepoſer aux
ſans offenſer les parties proches . loint qu'ils ſont ennemis de potensielt.
coute pourriture,parce qu'ils conſomment, & deſleichent l'hu
midité eſtrange, imbuë en la ſubſtance des os, & corrigent l'in
temperature tioide& humide , ce que ne peuuent faire les potentiels . Toutesfois
nous ſommes ſouuent contraints d'vſer d'iceux , pource que les malades abhorrent
le fer ardent, pour leur delicateſſe effeminée, & auſſi pour la coüardiſe & timidité
ſeulement
des Chirurgiens. Or l'a &tion des potentiels eſt tardiue, & ne bruſlepas
l'endroit où ils ſont appliquez : mais auſſi pendant qu'ils ſont eſchauffez par la cha
leur naturelle de la partie, ils agiſſent & impriment leur qualité ignée couc douce
ment , & plus loin : & aux corps cacochymes ,quelquesfois cauſent inflammation ,
gangrene , & mortification . Ce que i'ay veu , à mon grand regret : toutesfois nous
ſommes ſouvent contraints d'en vſer, pource que les patiens abhorrent ſouuentes
fois le fer ardent. Les potentiels ſont commc eau force, eau de vitriol , huile feruen- Canceres
će , ſoulphre fondu & boüillant , & autres ſemblables. En l'application deſquels eſt posentiels
requiſe au Chirurgien grande diſcretion & habilité . Car il y a danger que par fauce
d'induſtrie & dexterité,iltouche d'iceux quelque partie de la chair ſaine : qui ſeroit
cauſe d'exciter grandes douleurs & infiammacion , choſe grandement à craindre.
Quant aux a & uels, ils ſont faits en cant deſortes, que le reciten ſeroit trop long pour
la diuerſité des formes, qui ne peut eſtre limitée, & encores moins eſcrite, à cauſe
qu'il les fauc diuerlifier ſelon la grandeur du mal , & figure desos carieux : toutesfois
ie propoſeray icy quelques portraits de ceux qui font maintenant plus vſitez pour
leſdites carics :deſquelsaucunsſont cultellaires, les autres punctuels, les autres oli.
uaires, & d'autre figüre.

Dinerſitez des canteres affuels ; defquels pourroos vfer à sa commodité.

om

mwww www

Ppp ij
718 Dixneufieſme Liure ,
A
Autres cauteres . 10L

1
POP

ub

TRW

Autres cauteres,

DICI

Celtuy ſuyuant eſt propre aux nodus de la verole, quiſont au crane, lors qu'on
veut emporter la chair qui couure l’os : pour ceſte cauſe elt fait cauc & trenchant, de
figure triangulaire& quadrangulaire,& feparé en trois,pour en vſer à la commodité.

D
De la groſſe Verole . 719

А Ceux qui s'enſuiuent,auront lieu ſi l'os carieux eſt profond ,en ſorte qu’ony puiſſe
coucher ſans bruſler les bords & léures de l’vlcere,qui ne ſe fait ſans grande douleur :
pource eſt- il plus ſeur & doux vſer de cannule de fer, par laquelle Ion fera paſſer le
cautere actueliuſques ſus la carie ,en la façon qui s'enſuit, ſansque la chair fence no
table action de feu .

Casteres actuels auec cannules.

Du mal qui aduient des caureres actuels indeuëment appliquez , e quels


remedes il faut mettre apres l'vfage d'iceux .

CH A P. XXXIIII .

L te faut icy noter, que ſi leſdits cauteres ſont inal appliquez,c'eſt le danger
2
à dire trop ſouvent, ou qu'ils ſoient laiſſez trop long temps ſur des caureres
l'os , ill'enenſuitgrand inconuenient: car par lear excelliue cha- actuels in
deüement
leur & ſeichereffe , non ſeulement eſt conſumée l'humidité ſu
appliquer .
perfluë de l'os carieux : mais auſſi l'humeur ſubſtantifique , qui
doit faire ſeparation de la carie , & induire chair, & couuerture
entre l'os carié & le ſain , qui demeure deſſus. Parquoy l'applica
tion deſdits cauteres ſe fera tant que leChirurgien verra eſtre neceſſaire , & ſelon que
la carie ſera grande & profonde, les tenant deſſus , iuſques à ce que lon verra ſortir
quelque ſanie aucunement ſpumeuſe ,par les poroſitez de los carieux. Ce faiſant, on
aidera à nature à exfolier , ſeparer, & iecțer hors l'os corrompu . le te veux bien icy choſe digne
aduertir de ce qué cu dois obſeruer ſoigneuſement en cauteriſant les caries des os , d’eſtre notées
nommément ſi elles ſont profondes, comme en la cuiſfe , & autres parties fort char
nuës . C'eſt qu'auant l'appoſition d'iceux, il te faut bien couurir les parties d'entour
de la playe ou vlcere : pource que le ſang ou humeur contenu en la playe , auquel on
donne chemin ,eſtant eſchauffé par le feu ſortant hors , fait autant d'impreſſion de
bruſleure ſur la chair,queferoit de l'huile bouillante . Apres la cauteriſation ,on doit
pour ſeparer les os , & faire choir les ſquammes , y appliquer deux ou trois fois de no
ſtre huile,cy- deuantnoinméeoleum catellorum ,feruente.Et combien qu'elle y ſoit
D fort propre, ie n'approuue qu'on en applique ſouuent: pource que de la ſubſtance
oleagineuſe, ſubtile , & humide,elle pourrois derechefoffenſer l'os ſain , qui eſt ſous
l’os carieux . Orl'os eſt plus ſec que nulle autre partie de noſtre corps : parquoy les Les medica
medicamens cras,onctueux & humides, lay ſont contraires . Dauantage, par meſme més onctueux
raiſon la chair quieltprochaine des os , d'autant qu'elle eſt de nacure plus ſeiche, & contraires
approchante de la temperature deſdics os,requiert auſſi medicamens plus ſecs : au aux os.
contraire, d'autant qu'elle en eſt loin , deſire medicamens moins deſiccatifs. Parce
il conuient vſer de ladite huile auec diſcretion : mais quelquesfois aufli faudra ef
branler doucement les os pour aider nature à les ſeparer, fans les tirer & arracher par
violence , ſi on ne les voilenleucz en haut , & ne tenir quafi point. Et fi le Chirurgien
eſt indiſcret iuſques à tirer los carié,deuant que nacure aic fait couuerture ſur celuy
quieſt ſain , il ſera cauſe qu'il ſe fera nouuelle alteracion . Pource le Chirurgien doic obſervation
bien noter ce paſſage, lequel n'eſt de pecite conſequence. Outre - plus, quand natu- neceſſaire un
reauraiecté & exfolié l'os carieux, il ſe faut bien garder d'appliquer deſſus quelques Chirurgien.

PPp iij
720 Dixneufieſme Liure ,

la chair medicameris corroſifs,depeur de conſumer la chair que naturcaura produite dellus: A

nouuellement laquelle eſtant nouuellementengendrée, eft molle comme formage nouuellemens


engendrée coagulé , à cauſe qu'il n'y a gueres que le ſang y eſt concret & pris :pourtant ſe fauc
efi molleco- donner garde de la conſumer par medicamens acres. Carauec le tempselle ſ'endur
me formage. cit ,& fe forme enmaniere de petits grainsde grenade, en laquelle on voit lafanie
rougeaſtre, polie , cgale , glutineuſe, non feride, & puis blanche. Ce fait, ſeront deſ
ſus appliquées des poudres capitales de faculté deſiccatiue , fans aucune mordica.
tion ,commecelles de racine d’ireos de Florence, d'aloës laué , & maſtic, myrrhe,
farine d'orge , & ſemblables : & conduire la playeà cicatrice , diuerfifiant les reme
des , comme le mal le requiert . Les eſquilles des os vallent mieux qu'elles tombenc
par nature, quepar medicamens, ou par inſtrumens qui les ſeparent: car les choſes
qui ſont tirées par vne force ſubite ,laiſſentdes ſinuoſitez ſemblables aux fiſtules.
Orles os ſe ſeparent par le moyen d'une carnofité qui croiſt deſſous, puis on doic
mettre vn medicament deſiccatif, & aſtringent ſans eroſion, de peur de conſommer
la chair nouuellementengendrée , laquelle eſt molle : à cauſe qu'il n'y a gueres que
B
le ſang eſt concreé , pource qu'il eſt fait comme le formage nouuellement figé,&
coagulé. Pareillement les membranes fuppurées & pourries, ne doiuent eſtre cirées
par force, d'autant qu'elles ſont attachées aux parties ſaines , & les tirant & arrachant
par force , ou qu'on y appliquedesmedicamens acres & corroſifs ,on induit douleur
& inflammation , & quelquesfois conuulfion , & autres pernicieux accidens: par
quoy faut laiſſer faire à nature, qui les ietcera & les ſeparera auec le temps . Car le vif
chaſſe le mort .

De la potion vulneraire. CH A P. XXXV.

R ſi l'alteration de l'os & conſolidation des playes ſont repu


En quel cas
la potion gnans aux remedes ſuſdits, faut ordonner au patient potion vul
vulperaire neraire . Ce quei’ay ſouuentesfois fait auec heureuſe iſſuë, pour.
a lieu .
ce que nature fait choſesadmirables,aidée par celle potion. Car
nous voyons ſouuent aduenir que les playes, & vlceres, qui de
leurs premiers commencemens ſembloienteſtre des plustegeres,
deuiennent auec le temps ſi rebelles , qu'il n'eſt poſſible, quelque
diligence & induſtrie qu'on y employe, les amener à raiſon & conſolidation par les 1
remedes ordinaires : ſoir à cauſe de leur malignité & cacoëthie ,ſoità raiſon qu'iceux
remedes communs & ordinaires ſont repugnans à l'alteracion , & conſolidation deſ dh

dites playes , vlceres , & fiftules. Parquoy les Anciens en tel cas ont inuenté & or
donné certaines potions, quià celte occaſion ont eſté appellées Vulneraires,à raiſon
de leurs merueilleux effects, pour la guariſon des playes, vlceres , & fiſtules deſeſpe
MIN
rées . Cartelles potions, bien qu'ellesnevuident les humeurs par le bas , ſi ſont-elles !
conuenables à nettoyer les playes & viceres de toutes les humeurs ſuperflues, à pu
rifier le ſang de toutes les impuritez , à recoler les os briſez , & guarir les nerfs : bref, à
den
aider nature en telle façon , qu'en peu de temps les playes ſont incarnées & cicatri
cire
ſées, meſme quelquesfois ſans appliquerautre remede. Ceconſideré, il m'a ſemblé
los
bon d'en dire quelquechoſe , d'autant principalement que leur vlage ayanc eſté ap
prouué.anciennement,eſt pour le iourd'huypreſque du tout aneancy & negligé par D
jes Medecins & Chirurgiens,choſe grandement dommageable au public. Car lila
guariſon de celles playes & viceres inueterées , eſt la deterſion & regeneration de la
ſubſtance perduë, quelles choſes les pourroient mieux faire que celles , par la versu
miraculeuſe deſquelles le ſang humain eſt tellement mundifié , que d'iceluy, comme
de matiere competente & bien diſpoſée, la chair & ſubſtance perdoë eſt prompte
ment reparée , & la partie renduë en la premiere vnion ? Que ſi les vlceres fiſtuleux,
les chancres vicerez, les paſſions arthritiques, & autres ſemblables maladies,par vſa
ge de viandes ſalées, eſpicées, acres ,& ſubtiles, comme d'aulx, d'oignons, mouſtar
de, bref, par quelconques excés en boire & manger, s’aigrica & enflamment,pour

quoy par viandes & mcdicamens contraires ne fe pourrongils amener à quelque
ſe puiſſent aider de telremede , ie mede
raiſon : Orà fin que les icunes Chirurgiens
libere preſentement d'en deſcouurir & deſployer le chreſor : donc les Simples & in
grediens de celles compoſitions ſont,
De la groſſe Verole. 721

A La ſcabienſe . La veronique.
Le fenicle . L'aigremoine.
Le bugle. Les capillaires,
La pilozelle . L'herbe Robert.

La pimpineken Le pied du coulon .


La garence. Le plantain .
La tenaific. L'herbe dite langue de chien.
' Les fommitez de chanure.
Le caryophyllare.
Les fommitez des ronces . La carpentaire.
Le cyclamen . L'oſmonde Royale.
Les conſoldesgrande de petite. La toute - bonne.
La verneine. La gentiane.
La ferpentaire. L'herbe au Turc.

L'armoyſe. Le chou rouge.

B La peruenche. Le fcordion .
13 La centaurée. L'herbe à char.
L'herbe diete langue de ſerpent. Le pentaphyllon.
La betoine.
Le mille pertuis.
Le peium ou Nicoriane, Le chardon benift.
vImaria ,
Les trois fleurs cordiales .
CA
Taßilago. Le foucy .
Dens Leonis. Fenouil.
L'ariſtolochie. Le macis .

De tous ces ſimples, le Chirurgien choiſira ceux que bon luy ſemblera eſtre pro
so pres aux parcies vlcerées , commeauons dit au trai&té des Vlceres particulieres , &
ſelon la ſaiſon & le temps , ſelon le temperament du patient, & ſelon l'eſpece & pro
priecé de la maladie . Iepuis aſſeurer les potionsqui ſeront faites de jus ou de deco
info & tions d'icelles , ſoit en vin blanc ſimple ou vin miellé , eſtre par l'experience que

C i'en ay par pluſieurs fois faite, tres-vciles à purifier & mondifier le ſang, & nettoyer
les vlceres ſanieux & virulens, & dyfenteriques, à prohiber la pourricure, 8c diſliper
ch les humeursſuperflus, à exfolier les os, à diſſoudrele ſang des meurtriſeures & con
ders tuſions, chaſſer tous corps eſtranges, & faire autres merveilleux effe & s au corps hu
main . Parquoy de crainte que le ieune Chirurgien ne ſe perde en ſi grand jardin
d'herbes deſſuſdites, i'en preſenteray deux exemples , à l'imitacion deſquels il pour
ra dreſſer toutes ſes autres potionsvulneraires. Prenez bugle, pecum , ou Nicotiane,
2015 cuſlago , vlmaria, diête Royne des prez, ſenicle,aigremoine,de trois ſorces de plan
cain , des conſoldes,prunella , verueine , armoyſe ,dent de Lyon , caryophyllaca , ra
cines ou ſommitez deronces dechacun demy poignée: herbe Robert, aluine blan
ntis che ou Romaine , fenouil verd , choux rouge, de chacunvnepoignée: Le tout ſe
ta mundé & laué , puis mis en vn pot neuf & plombé , en huiet liures de vin blanc , &
demie liure de miel crud , puis le cour bouillira in balneo Mariæ : & ne doiuent lef
dices herbes y eſtre plus d'une heure & demie , de peur que leur vertu ne ſe diſlipe, &
foit renduë de mauvais gouſt. Puis ſera paſſée , coulée, & miſe en petite bouteille
o bien bouſchéc : de laquelle potion le malade prendra troisonces pour chaſque priſe
A
SC au macin , trois heures auant le repas . Les ſuſdices decoctions peuuent eſtre aroma
tiſées decannelle, pour donner meilleur goult au malade . Autre . 2. Saniculæ , bu

folos glæ , ſcabiofæ , beconicæ , ſcordij & nepitæ añ.ñ.B.yuarum mundatar.ſcm , hyperi
ci, & carduibenedictian. 3j . crium forum cordialium an . p . ij. coquantur com
plecè in fb viij . aquæ communis ,poftea in fine adde vinialbi tb ij. inellis Narbonen
lis to j . fiac deco &tio lento igne , velin balnco Mariæ : paſſecur permanicam Hippo

dia cratis , addendo cinamomi z B.decur manè tribus horisante prandium ad Ziij.Mef
me de celle liqueuron peut vler és iniections , fiſtules , & en lauer les viceres, & met
18, D.
tre des ſuſdites herbes dans les potages des malades , dc tant que le ſuc d'icelles peut
cltre dit medicament alimenteux. Et puis aſſeurer auoir faict choſes merueilleuſes
par long vlage deſdites potions , és fiftules de la poi& trine & ventre inferieur, & au
tres parties,où les autres remedes ordinaires n'auoient ſçeu obţenir la parfaicte gua
obfers
riſon :ayant touſiours eu eſgard , fuiuant le bon vieillard Guidon , de n'en vlerau
PPp iiij
722 Dixneufieſme Liure ,
À
commencement és playes recentes,à cauſe que celles herbes ſont chaudes & aperi- A
tiues , & parcanteſchauffent & ſubcilienclelang ,le faiſant fuer en la partie bleſſée.
Parquoyapresque la ſuppuration ſera faite , & qu'il ne reſte plus qu'à deterger &
incarner, & l'inflammation paſſée, ſera tres- vcile & expedient d'en vſer.
Des dartres ou fciſſuresferpigineuſes. CH A P. XXXVI .

Quel lieu
Eſte maintenant à traicter des ſciſſures ou creuaſſes, leſquelles D

occupent le ſuruiennent le plus ſouuent apres la curacion de la verole. Le lieu C


plus ſouvent qu'elles occupent le plus ſontles palmes des mains, & plantes des 1

a.
les dartres. pieds. Elles ſont cauſées d'humeur picuiteux ſalé ,ou de cholere CH
renduë aduſte par l'intemperie chaude de la maſle ſanguinaire, CL
ou de quelquereliquat& portion du ferment de ce virus, lequel C
Prognoſtic. eſtenuoyé auſdites parties.Or quant à leur curacion, elle eſtdiffi d
) cile , principalementquand elles ſont inuecerées , à cauſe que les parties ſe ſont ha ni
Cure des bicuées àreceuoir tel humeur :ſi elles ſont recentes , elles ſerontmoins difficiles à B
dartres. guarir.Lesrecentesſontcogneuëspar vne rougeur accompagnée d'vn grand prurit,
& le cuir eſt plus gros, eſpais, & aride que de couſtume: celles qui ſontinueterées,
outre les ſignes predits, il y a des duretez ſquameuſes, & furfureuſes, de ſorte qu'en
les froccantrudemenc,on en voit ſortir des eſcailles en maniero de farine de ſon
Quant à la curation , pour les choſes vniuerſelles il faut auoir eſgard au vice du foye,
ordonnant le regime,purgacions,bains, ventouſes, corners . Ecquantaux copiques,
ſi elles ſont recentes , on vſera d'eau deſiccatiue , & de tenuë ſubſtance, commecec
Remede pour te- cy: 4. Aquæ roſar. pariet.añ. z j.aquæ alum . 3 ij . chalcic. 3 ij . alum . 3 iij. pul.
icelles. ſublim . iiij.fiat lenta & minimaebullicio in balneo Mariæ. Onaugmentera la for Les

ce de celte eau par le ſublimé,ou ſera diminuée ſelon qu'il ſera neceſſaire. 2. Olci
de cartar. 3 ij . ſapo.communis z iiij.miſce,& fiat vnguentum ad vſum . Autre de
merueilleux effe &t. 2. Sublimati pulueriſati 3 ij . aluminis rochæ 3 j . albumina
ouorum fortiter agitatorum quantum fufficiat,applicetur ſuper partem affettam :.
interim vtaturdecocto gaiaci. Sielles ſoncinueterées, il les faut ramollir pardeco O PE

Etions emollientes,attenuatiues & inciſiues, & par linimens , onguens, emplaſtres


demeſme faculté: puis y proceder auec parfums, comme de ceſtuy qui ſ'enſuit. 2 .
Pul.cinab.z ij.labdani, aſſæ odorar. ſtyrac.calamicæ añ . Z B. olibani , maft. an: 3 al

iij.olci tarc. & theriacæ quant. ſuff. fiant crochiſci: deſquels on pourra vſer, la do
ſe de demieonce par chacune fois ou enuiron : & faut que l'on face receuoir le par .
fum ſeulement à lapartie , ſans que la fumée ſoit communiquée à la bouche , nez,
yeux , ou oreilles. Pareillement ce remcde eſt fort propre pour frorcer les mains.
Prenez cendre degrauelée, & en faites capitel dans vne chauſſe d'hippocras, & en
iceluy faut diſſoudre de la preſure , & battre aſſez longuementen vn mortier , & de
ce en faut frotter les mains. Autre. 2. vnguenti cnulati 3 iij. fugitiui 3 ij. re
ſinæ pini Zj . ceruſſä Z B. argenti viui ž'iiij. Tucci citri & lapathi acuti añ.zß.in.
corporentur fimul : fiac linimentuin quo illiniatur pars. Si on y adioulte demic
dragme de ſublimé, laué & preparé comme celuy des fars, il ſera de grande efficace.
Autre. Prenez alumbruſlé, & ſubtilementpulueriſé, & incorporé auec blanc d'æuf
& de ſuc de citron , & vn peu d'aloës de trempéen oxymel ſcillicic. D
4

De la maladie Venerienne , ou groffe verole quifuruient aux petits enfans.


CHAP . XXXVI 1.

Ouuent on veoit ſortir les petits enfans hors le ventre de leur


Les petits en mere , ayans ceſte maladie , toſt apres auoir pluſieurs puſtu
fans nain a les ſur leurs corps : leſquels eſtans ainſi infectez, baillenc lave
wecla berole, role à autant de nourrices qui les alaictent : aucuns prennent
difficilement la verole de leur nourrice : parce qu'icelle maladie , comme
reçoiuent auons dit , eſt contagieuſe. Or on veoit peu loquent les en
guariſon. fans naiz aueccelte maladie,receuoir guariſon; mais ceux qui l'ac
quierent par cetter ou autrementeſtans ja grandelets , font quelquesfois guaris. Le
moyen de paruenir à la curation eſt de faire vſer à la nourrice de l'eau cheriacale.
De la groſſe Verole. 723
A que deſcrirons cy-apres, l'eſpace de vingeiours, ou plus,tant pour ſexempterdecet
te inaladie , que de rendre ſon laict alimenteux & medicamenteux : & lors qu'elle
donnera à cetter à l'enfant, n'oubliera lauer & eſſuyer le bout de ſon cecin , afin que
le virus ſortant parla vapeur de la bouchedu petit enfant, nef'imprime en ſon mam..
melon par les trous où paſſe le laict. Etquand aux petitsenfans, on leur frottera ſeu- ce qu'il faut
Jementles puſtules d'vn onguentbien peu vif argentin,commevnguentumenula- faireenfans.
comment
tum cum mercurio , ou autres ſemblables : & ferapuis apresenueloppé en vne cou
che ou linge , lequel ſera premierement parfumédes parfums cy -deſſus mention
nez , & fera tenu fortchaudement. Or telles choſes ſe doiuent faire par eſpaulerées,
c'eſt à dire, petit à petit , & non parcontinuation ,de peur qu'il ne leur vienne mal
à la bouche . Auſſi l'il auoit quelques vlceres en la bouche, on les touchera des eaux
cy-deſſusmentionnées , lescorrigeant , ayant eſgard à la delicateſſe de l'enfanc.Au
cuns ont eſté guaris par des moyens: autres aulli lont morts non par le vice du medi
cament , maispour la grandeur de la maladie. Dauantage ſi l'enfant a pris la verole
B de la nourrice , la fautchanger,& luy en bailler vne autre qui ſoit ſaine, aucrement
ne pourroit iamais eſtreguary ,pource qu'il ſeroit couſiours nourry du ſang infecté
du virus verolique .
Deſcription de l'eau theriacale. CHAP. XXXVIII .

Eciperaſuræ interioris ligni ſan &tigummoſ. tb j . polypodii quercini 3 iiij . Eausheria


vinialbidulcedinis expertis tb. aquæ fontanæ puriffimæ fb viiij. aquarum cale.
R cichorij & fumariæ añ.z iiij. ſeminis iuniperi , hederæ & baccar. laur. an.
ij . caryophyl . & macis añ . B. corticis citri ſaccharo cond. conſeruæ rofarum , an
thos, cichor. bugloſ, borrag. an. z B.conſeruæ enulæ campanx , theriacæ veteris &
michrid. añ. z ij. fiatomnium diſtillatio in balneo Mariæ , modo fequenti.
Le moyen defaire la diſtillation,
Vous infuſerez legaiac en lamoitiédevoſtre vin & eaux , l'eſpace de douze heu
res : & le reſte de vosingrediensen l'autre moitié dudit vin & eaux,en conquaſſano
ceux qui peuuenreſtre conquaſſez, ſeront mis à part en infufion l'eſpace de lix heu
С res : puismettez tout enſemble,afin qu'ils ſe puiſſent fermenter: laquelle fermen
tation ſe fera en yne ou deux groſſes bouteilles de verre , les laiſſant bouillir ( eftans
bien eſtouppées ) en vn grand chauderon plein d'eau chaude , l'eſpace de cinq ou fix
heures. Le touteſtant bien fermenté & conficenſemble, ſera mis en vn alambic de
verre , & en ſera faic diſtillation , de laquelle eau en donnerez 3 iij. pour chaſque
priſe, laquelle ſera aromatiſée d'vne z . de canelle , & d'vn 3. de diamargariton, ad
jouſtane z B. de ſuccre pour la rendre plusagreable. La nourrice en pourra vſer fans
ſemettreauliat : car elle a vertu par vne proprieté d'obtundre ce virus ,& fortifier les
partiesnobles.Aufli la nourrice en lauera ſon mammelon apres que l'enfant l'aura
allaicté.
‫گی و‬
Autre eau theriacale.
Eau theriacale compoſée par Rondelet , qui prouoque les ſueurs en la verolein
;0 uecerée , & cure les douleurs, baillée auec les autres ſuiuantes, & dit en auoir fait
vſerauec heureux ſuccés.2 .theriacæ veteris ib ij . acetoſæ ñ.iij. radicum graininis
cdr 3 iij. pulegij , cardui benedicti añ. . ij . flor. chamämeli, p. ij temperenturomnia
D in vino albo , & diſtillentur in vaſe vitreo , & aqua ſeruetur vſui,de laquelle on bail.
le deux onces auec trois onces d'eau de vinerte & bugloſe, & cecy ſe doit faire lors
que le malade ſen va au lict. Ceſte eau cure les douleurs, baillée ſeule ou auec de
co& ion d'eſquine ou de bardane : ſi c'eſt vn pituiteux, en lieu de l'eſquine on pren
dra la decoction de gaiac : car à cauſe de la ſubſtance ſubtile penetre bien toit, &
de expelle les matieres cauſantles douleurs.

Delapuanteurd'haleine,des aiſcelles, despieds,& de la fueurvniuerſelle. CHAP. XXXIX .


A puanteur d'haleine vient de pluſieurs cauſes comme à ceux qui ont eſté
BSP
froctez, emplaſtrez, & principalementparfumez de vif -argent: ou pour
a pourrituredes dents & genciues , ou vlcere des poulmons, ou par vne
'lindigeſtion d'eſtomach, ou pour l'obſtruction & corruption des os colla
toires, ou pourauoirmangé ails , ongnons, choux , vieil fromage, & autre choſe de
724 Dixneufieſme Liure ,
mauuaiſe odeur. Lesboſſusont volontiers l'haleine puante , à raiſon que l'air qu'ils A A

inſpirent, eſt crop longtemps retenu dedans leur thorax courbé , qui fait que leur
haleine elt puante.
La puanteur des aiſcelles vientparce que le lieu eft concaue , non perſpirable, qui
fait que les ſueurs neſexhalent & neperſpirent :& parcant acquierent pourriture &
mauuaiſe odeur,comme la ſenteur d'vn bouc : c'eſt pourquoy l'on dic qu'ils ſentent
le bouquin , ou l'eſpaule de mouton .
Ordinairement la plante des pieds eſt de mauuaiſe odeur , parce qu'il en ſorc vne
fueur ,laquelle n'eſt tranſpirée, à cauſe de la grande eſpaiſſeur de cuir qui eft cal
leux & dur,
La puanteur de la ſucur forcant de tout le corps , vient de la corruption d'hu
meurs, & principalement aux rouſſeaux cauelez. Il y en a pluſieurs qui ſe ſont abu .

DIO
ſez, voulans perdre ceſte mauuaiſc ſenteur, leſquels ſe frowans les aiſcelles & plance
des piedsdechoſes odoriferantes, ſe ſont rendus plus puants. Car d'autant que les le!
choſes odoriferantes ſontchaudes , d'autant plus elles fondent les vapeurs , eſqacl B l's
les la feceur conſiſte, qui eſt cauſe qu'elle apparoiſt d'auantage : ce qu'on vcoit par
experience. l'ay ſouuenance que ie penſoisvn Prince de quelque maladie , & le fer leu
Hiſtoire d'on uiceur de l'Apothicaire auoit les pieds puants, de façon qu'on le ſentoit lors qu'il en
quiſefrottoit troiten la chambre. Il fapperceut qu'on le fuyoit pour ceſte puanteur , & pour y re
la plante des
pieds de medier,ilſofrortale deſſous des piedsde quantité de muſc : dont au lieu de cacher & .

mufc. eſteindre ceſte feteur, il l'augmenta derelle façon, qu'il parfumoir toute une cham
bre où il entroit ,d'vne odeur ſiforte & li puante , qu'on ne la pouuoit endurer : qui
fuc cauſe qu'il fut chaſſé & banny entierement de la maiſon dudit Seigneur.Or
pour la cure, elle ſera diuerſifiée ſelon la diuerfité des cauſes.La cure palliatiue ſe fc
ra en ſe frotcant les aiſcelles & lespieds d'eau alumineuſe, ou autre decoction aftrin,
gente , quiaura vertu decondenſer & reprimer ceſte exhalation puante.
CH AP. 1
De lafurdité des oreilles. LX.

Queſtion problematique .
A ſçauoirqui eſt la cauſe defurdité.
Si ce point que la membrane qui eſt au căcum foramen , faite
du nerf de la cinquieſme coniugaiſon , eſt rompuë , ou empeſo
chée de quelque humeur combé deſſus;Ou diſlocation des pe
cits offelets, appellez Incus,Malleolus & Scapes: & que les cali
ſes peuuenceitre internes , ou externes ? Internes comme quel
que fluxion tombée aux oreilles , qui fait apoſteme, dont l'en
gendre vlcere hyperſarcoſe , ou cair ſupercroiſſance : Ou de
l'excrement ou fordirie, qui continuellement ſe fait en nos oreilles , faute d'eſtre
nettoyées , & faccumule & deſſeiche en forme de petites pierres , quieftouppentle
conduit auditif: Ou d'vn grain provenant de la petite verole , ainſi qu'on vcoit fou
uent les verolez vexez de la groſſe verole,perdre l'oüye pour vne grande douleur
도’으로

de ceſte. Ou auſſi vient de la premiere conformation , & hereditairement, ainſi qu'a


Hiſtoire. remarqué Fernel au liures. chap. 6. lequel fait mention d'vn Senateur , qui ayant D.
yne femme bien ſaine,engendra tous ſes enfansſourds & muets : de laquelle choſe
on ne peut donner raiſon .Decauſe externe: Eſt-cepoint d'un grand bruit de con
nerre,degroſſes cloches, ou d'artilleries,ainfiqu'on veoit ſouuent les canoniers per
dre l'oüye tiransles groſſes picces , pour la grande agitation de l'air qui rompt ladice
membrane, & déplace & renuerſe leſdits offelers dulicu naturel : de façon que l'air
implancé aux reſſores,anfra & uofitez,ou petics labyrinthes contenus en la cauitéma
ftoide ( nõmée d'aucuns Tabourin) le malade oic vn bruit & rintamarre aux oreilles,
duquel bruit il y a pluſieurs & diuerſes differences: A ſçauoir,Sibilus,ou liflement,qui
cſt fait d'vne vapeur fubtile : Tinnitus , ou tintement , fait d'un cours & abondan
ce d'humcur picuiceux : Sonitus, Bombus, ou bourdonnement,cauſé d'vn humeurplus
cras, & viſqueux : &filyia vn bruit comme d'une cau coulance d'vn moulin en bas,
monſtre vne agitation d'humeur mellé parmy la vapeur : Strepitus , ou eſtonnement,
fait d'une grande cominotion , eſbranlement, ou eſcouſſe du cerucau: ou pour eſtro
De la groſſe Verole . 725

A combé & auoir receu quelquecoup ſur la teſte : ou d'vn air froid , qui auroit entré
aux oreilles & refroidyle cerveau : ou quelques noyaux de ceriſes, ou autres corps
eſtranges. Or la ſurdicé cauſe de grandes faſcheries aux malades pour la diuerſité des
fons qui perpetuellement les tourmente: qui ſe fait à cauſe que l'air naturel implan
té aux anfractuoſitez du cabourin eſt empeſché.

Seconde queſtion problematique.

A ſçauoir, pourquoy les ſourdsparlent d'une autre façon qu'auparauanı


qu'ils fuffent fourds.

Eſt - ce point parce que les nerfs de la cinquielmeconiugaiſon onc communica


tion avec ceux de la ſixieſme, qui ſont les nerfs recurrents ( appellez nerfs de la voix )
leſquelsdeſcendansen baillent de peciteş ramifications au poulmon , magazin de
les
l'air , qui eſt mariere de la voix , qui fait deprauation de la parole, & ſemble que
B
malades parlent ayant la teſte dans vn pot ? Tous leſquels accidens ſeront guaris par
leur contraire , tant que poſſible ſera : toutesfois , celle qui vient hereditairement eſt
incurable , comme celle qui eſt faite par la diſlocacion des trois petits offelets , ou
par la ruption de la membrane , quieſt tenduë ſur l'entrée de la cauité di te Tabou
rin: ſemblablement, celle qui ſuruient par vne ſupercroiſſance de chair , l elle eſt
fort profonde, ne ſe peut guarir.

Fin du dixneufiefme liare , de la groſſe Verole de de ſes accidents.

Miten nuenerates interne NAN ER NEHRANE.

TABLE DES CHAPITRES DV VINGTIESME

LIVRE TRAITTANT DE LA PETITE

с Verole , & de la Lepre .

Es cauſes de la petite verole & coxgeolle. Chap.j.


De la cure de la petite verole do rougeolle. Chap.j.
Quelle partie faut preferuer de la verole. Chap.ij.
Des vers . Chap. iij .
Cure des vers Chap.v.

Des poulx , morpions, du cirons, Chap.vj.


Briefue deſcription de la lepre ou ladrerie. Chap.vj.
Des cauſes de lepre. ( ... ) Chap. vij.
Des ſignes qui montrent la preparation delepre. Chap. ix .

2017 Signes qui monſtrent la lepre eftre confirmée . Chap.x.


Du prognoſtic de la lepre. Chap. xj.
De faire ſeparer les ladres d'anec lesſains. Chap.xj.

JK D De la cure de ceux qui font preparez à lepre . Chap.xij .


De la lepre des Grecs, dicte du vulgaire ,Mal S. Main , qui eſt une rongne. Chap. xiiij.

2001
1 .

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S

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0.ު‫ަކ‬
726
A

d
d
LE VINGTIESME LIVRE IC
21
TRAITTANT DE LA PETITE VEROLE ,

Ö
el
ROVGEOLLE ET VERS DES PETITS ENFANS,
le
& de la Lepre le

TO
PAR AMBROISE PARE, DE LAVAL AV ce
1

PREMIER
MAIN E., CONSEILLER ET CI
CU
Chirurgien du Roy.

c-
4

Des cauſes de la petite Verole , & Rougeelle. 3

CHAPITRE I. >

Ource que la petite Verolc & Rougeolle ſont comme A Ć


Occaſion de les portes, Herauts , & Meſſagers de la peſte, prouc
ce traicté. nans auſſi du vice de l'air , & de la corruption des hu
meurs: outre plus qu'en la peſte l'engendrent des vers
à pluſieurs, il m'a ſemblé bon d'en eſcrire icy quelque
choſe, afin que par ce traicté le jeune Chirurgien ſoit
plus amplement& parfaictemencinftruit en ceſte ina
ladie peſtilente.
, Donc pour commencer à la deſcription de la pecite
verole , & rougcolle: Ce ſont pecites puſtules & taches
quiapparoiſſent à la luperficie du cuir, faites de ſang B
impur & autres humeurs vicieux , iertez par la force
Deferiprion de la vertu expulfine. Les anciens tiennent qu'elles ſont engendrées de quelque
de la perite reſte du fang menſtruel, duquel l'enfant ayant eſté nourry au ventre de la mere,
Verole ou
rougeolle.
en retient encore apres, quelque portion & malignité, laquelle en grand chaud ou
faiſon Auſtrale venant à l'exciter & bouillonner auec tout le reſte de la maſſe
fanguinaire , l’eſpand, & ſe monſtre par l'habitude de tout le corps. Qu'il ſoic
vray , on veoit peu de perſonnes qui ne l'ayent yne fois en leur vie : & meſmes
elles peuuent venir aux grands ainſi qu'aux petits enfans, d'une grande ferueur
& cbullition de lang , & autres humeurs vicicux, & auſi par contagion de l'air С
Differences peftiferé : dequoy l’experience iournelle nous faiá foy.Or la verole differe de la
dela perole rougeolle , ainſi que la boſſe du charbon : d'autant que la verole eſt faicte dema
O rongcolle.tiere plus củaſſe & viſqueuſe,fçauoir ſanguine & pituiteuſe, que la rougeolle , quila
ſe faict d vne matiere plus chaude & plus ſubtile , ſçauoir bilieuſe : parquoy
rougeolle ne laille pour marque de ſoy , ſinon taches comme de pulces , par couc
le corps , autresfois rouges , autresfoisverdes ou noires : mais la verole feſleue en
puſtule poinctuë & blanchiſſante , argument de mellange de pituite auce fang. Da
uantage,la verole eſt plus eſleuće en poince:au contraire,la rougeolle ne ſort gueres
hors du cuir , mais eſt plus large :coutesfois au commencement quel'vne & l'autre
fortent, comme du premier,ſecond,& ciers iour, il eſt difficilede les diſtinguer l'vne
de l'autre,parce qu'elles ſont en leur commencement preſque ſemblables :& depuis
le ſecond
De la petite verole , & Lepre 727
A le ſecond ou tiers,ou quartiour,laverole croiſt & fe blanchit auantqu'elle vienne en
crouſte: au contraire,la rougcole demeure rouge à la ſuperficieducuir , & ne croiſt
pointen tumeur. Dauancagela verole pique & fait demangeaifon, & la rougcole
be pique & ne demange point: parce que l'humeur n'eſt pas fi acre nymordicant,ou
parce qu'eſtaneplus ſubcilil ſ'exhale plus aiſément.Les malades ont vne grande ſter- signes queis
nucation lors qu'elles veulent ſortir, à cauſe que les vapeurs putridesmontentdes verole
parties inferieures au cerueau. Outre plus ils ont fiéure continuë,auec douleur cres- rougeole doi
grandeau dos, prurit & demágeaiſon au nez auſſidouleur & peſanteur de ceſte avec ueni forsir.
vertigine, comine ſi tout tournoit, defaillance de cour,nauſée & vomiſſemens, mal
de gorge,la voix enroüée,douleur de poitrine, courte haleine,aucc grand bartement
decæur. Dauancage, ils ontles yeux Alamboyans, laflicude de tout le corps ,vrines
rouges & troubles,reſveries:coutes leſquelles choſes,ou la plus grande part d'icelles,
aduiennent au commencementdela verole& rougeole. Quant au preſage que l'on
peut fairedeces deux maladies ſi ſemblables d'origine, on peucaſſeurémēt dire,que
B en icelles il y a vne qualité tellement venen'cuſe & contagieuſe, que meſmes auec
les humcurs & parties charneuſes, elles rongenc & gaſtentles os,commefait la grof.
ſe verole: ce que ie n'ay pas veu ſeulement en l'année 1568. mais pluſieurs autresfois
par le diſcours de l'aage , qu'ila pleu à Dieu ine donner iuſques à preſent. Et pour
vous en donner vn notableexemple , i'ay bien voulu deſcrire ceſtuy.cy ( qui eſt l'un
des plus eſmerueillables que l'on ſçauroitvoit) d'vne petite fille aagée de quatre à
cinq ans, fille de Claude Pique, Relicur de Livres du Roy , demeurant ruë S. Iac
ques àParis, laquelle ayant eſtémaladede petiteverole enuiron vn mois, & nature peHiſtoiredela
tite derole,
n'ayant peu ſurinoncer la poiſon, luy furuindrene apoſtemes ſur le ſternon , & aux
iointures des eſpaules, dont la maciere virulence rongea & ſepara entierement tous
les os dų ſternon , & les epiphyſes des os adiucoiresauec bonne portion de la teſte de
l'omoplate: ce quen'ay veu feul, ainsauecmoy Monſieur Myron , à preſent Con
feiller, & premierMedecin du Roy, Docteur,Regent en la faculté de Medecine à
Paris, & lean Dorcau Chirurgien de Monſieur le Comte de Bryanc : en la preſence
deſquels i'ay veu & anatomiſé laditefille,en laquelle ay trouué ce que i'ay diccy-def
fus.RolinMariemarchand Lunctierdemeurant presle Palais,me fic apporter la fille ſtoir
mure e,
hi
aagée de quatre ans deux mois , qui auoit eu tout lecorps couvertde puſtulesde la
1
petite verole ,ayantlesos des bras & jambes apoſtumez ,pourris , & fracturez,accom
pagnée de fiéure ardente . Ie ne luy vouluaucunemércoucher ,le lendemain deceda .
On voitauſſi à pluſieurs grăde portion de genciues caricuſes & pourries, auec gran
de feteur: telte corruption ſe fait de vapeurs putredineuſes qui l'eſleuent des parties
interieures à la bouche , &meurent preſque tous ,quelque diligence qu'on leur ſça
che faire. On voit dauantage parla diffection des corps quien font morts, que leſdi- Grands acci
de sus tes maladies laiſſent le plusſouventvnemerueilleuſe intemperature aux parties du déns de la
dedans,commeau foye,àla rate,& aux inteſtins ,dontfenfuità pluſieurhs ydropi, pasiteverole.
fie,phtiſie,enroüeure de voix, courte haleine,Auxde ventre, auec vlceres aux inte
ftins,& par conſequent lamort,ſelon que ces puſtules ont ravagé par ces parties inte
22001
rieures,de meſme furie que l'on les voic aſſeoir ſur la peau. Et quant aux parties ex
‫ ܐ‬:‫ܝܐ‬
tertes, elles laiſſent non ſeulement deformité,principalement au viſage, à cauſe des
uhlist puſtules & vlceres,qui paſſans la ſuperficie du cuirontprofondé en la chair,deſquel
melci
Dies ſont demeurées des laides.cicatrices : mais auſſi quelquesfois ellesgaltent & fond
formes perdrele mouuement des iointures, & principalemét des couldes,poigners,genoux,
dels & du pied. Aucunsen ont du tout perdu la veuë , ainfi qu'a fait le ſeigneurdeGuy
ecs menay , & vne infinité d'autres :auſſi quelques-vns ont perdu l'oüie,autres le fleurer,
deco par excroiſſance de chair ſuruenuë aux conduits , tant des oreilles que du nez , apres
Jespuſtules ſorties, commeellesfont auſſien tous les endroits du corps , tancparde
hors quepar dedans (ainſi que nous auons demonſtré par cy-deuant) leſquellesem
peſchentlesconduits des oreilles & du nez. Bref, ie puis dire que toutes les apoftc
mes qui aduiennent aux petits enfans ayans eu la verole ou rougeole,deſquelles ils
Die n'auront pas eſté purgezà ſuffiſance pour la deſchargede nature, tiennentde lama
lignité & venenoſité de l'humeur qui fait leſditesmaladies, & parcantſont fort mal
ailées à guarir. Et pour le dire en vn mot , la petite verole & rougcole n'eſtans pas
bieen purgées, cauſenc d'aufli diuers & faſcheux accidens , que fait la groſſe vc
rol .
QQQ
728 Levingtieſme Liure ,
De la cure de la petite verole & rougeole. CHAP. II. A

A cure d'icelles ſera diuerſifiée ſelon que l'humeur participera de la peſte,


ou n'aura aucune communication auecicelle . Car ſi elles ſont peſtilences,
& aux enfans qui encores teccent, on fera vſer à la nourrice de choſes qui
Cure de la contrarient au venin , commenous dirons en la cure de l'enfant peftiferé, afin d'em
perole peſti- peſcher que le venin n’aille ſaiſir lecæur. Et faut tenir l'enfant en chambre chaude,
lense. où le ventn’entre point , & l'enuclopper de drap d'eſcarlatce , ou d'autre drap rou
ge , c'eſt à dire , en faire les cuſtodes & couuercure de ſon liet, auquel on le fera tc
nir , le couurant mediocrement iuſques à ce que la verole ou rougeole ſoit ſorcicdu
Dierepourla
nourrice .
touc. Auli faut que la nourrice mange en ſes potages, pourpié, lai& uë, vinette,chi
corée , bourrache , & qu'on y mette in noüec d'orge-mondé. Elle euicera du cout
les viandes chaudes ,commelaleures , paſtiſſeries , eſpiceries, &c le vin , ſ'il n'eſtoit n

bien trempé d'eau, de peurde rendre ſon ſang tropchaud, quicſchaufferoic dauan
tage celuydel'enfant:parquoy en lieu d'iceluy, elle boiraptiſanecuitte auec raiſins m2
10
& racinede vinccte. Et fauc qu'elle prenne les medicamensen lieude l'enfant, com
meſielle meſme auoir celte maladie : & parcanton luyordonnera ſon regime & ma ME

niere de viure, & medecines quiſoienten quantité conuenables & proportionnéesà


elle , & en qualité propres à l'enfant, afin de rendre le laict medicamenteux: car il
prend neceſſairementlavercu & nacure de ce que la nourrice a pris, ainſi quenous
auons prouué par cy-deuant : & partant le laiat d'icelle ſupplée au defaur des reme
des qu'il deuroit prendre luy meſme par dedans:& pourle dire en vn mot, elle eien
dra le regimequ'on a accouſtumé de teniraux fiéures peftilentes. Il ne faut donner
Dumanger boüillie à l'enfant, ou on luy en donnera en bien pctice quantité.Etfileſt ſcvré & ja
del enfant
fevre. grandelet , il n'yſera pareillement de chair , iuſques à ce que la fiéure ſoit paſſéc &
grandement diminuée, & que la verole ſoit du cout ſortie: mais il mangera orge
mondé fort liquide, ou laid d'amandes, ou porage de poulets cuits auec les herbes
Du boire. fuſdites,panade,gelée,coulis,pruncaux & raiſinsde Damas.Pour ſonboire,vſerade
priſane faite auecorge-monde,racines de dent dechien,& de vinerte , vn noüec des
quatreſemences froides,pruncaux & raiſins de Damas, aucc pouldre d’yuoire & dc
corne de cerf: & auec icelle entre les repas on pourra meller du ſyrop violat,& non
roſat, ny autre aſtringent, de peur d'arreſter l'humeur , & l'empeſcher de ſortir hors.
Dw dormir. Ledormir de l'enfant doit eſtre moderé , & non trop profond ,de peur de retirer les
Delapurga- matieres au centre du corps,&augmenter la chaleur de la fiéure. Il ne faut purger ny 1

tion aujain ſaigner(fil-n'y


gnée.
auoitgrande plenitude,ouquelque complicacion de maladie,comme
vne pleureſic ,ophthalmie, ſquinancie,& autresſemblables)lice n'eſt en la declinai
ſon,ou bien le premier ou ſecond iour au plus tard de lamaladie,de peur d'interrom
pre le cours denature :maison ſecorentera de donner quelque clyftere,ou bouillon
de mauues, violectesde Mars,bourrache,oujus de pruneaux, & raiſins au matin. Ec
aux enfans plusgrandelets, quelque bolus de caſſe,pouramollir le ventre , & aider
nature à jetter hors les humeurs pourris & corrompus, qui cauſent la verole ou rou
geole:ce qui ſe fait volontiers au troiſieſmc ou quatricſmeiour,plus ou moins, ſelon
la diſpoſitio du corps & l’humcur preparé à ſortir hors,ou ſelon l'air ambiés. Etalors GE

faut provoquer la fueur par remedes quiovurent les porcs, & fubtilient les humeurs,
& les facét ſortir parſueur, depeur que la matiere viruléte ne demeure au dedans du
Hiſtoire. corps ,& ſoit cauſe de la mort des malades. Ce quei’ay veu depuis peu de tempsençà D
auec maiſtre Richard Hubert , Chirurgien iureà Paris ,en deux filles,l'vne aagée de
quatre ans,l'autre de dixſept:auſquelles apres leur mort auós trouué les parties inte
rieures toutes couuertes de boutons crouteux,& tousséblablesà ceux qui ſont au de
Du flux de hors.Orfiladuenoitque le ſang ſorciſt par le nez,ne faut penſer que lamacierede la
lang par le petite verole ſe puiſſe touſiours parfaitemet cuacuer par iceluy: cari'ay veu louuen
nez cesfois qu'au quatrieline ou cinquieſme iour furuenoit grand Aux de ſang par le nez
auxmalades, & toutesfois pour ceſte vacuation la verole nelaiſſoit à ſortiren grande
abondance,tellemétquc leur corps en eſtoic tout couuert. Et pource ne fauc arreſter
ledit flux ,bil n'eſtoit tropimpetueux , & qu'on cogneuft les forces abbatuës , à quay
alors on procedera,commerious dirons. Et pour recourner à la ſueur: pour la prouo
quer ſera voile la poció faite de decoctio de figues ſeiches lentilleseſcorcées, femen
cc decitron , de fenoüil, d'ache, perſil, & les racinesde regliſe, & leurs ſemblables,
)

De la petite Verole, & Lepre . 729

A auec raiſins de Damas, 8c dactes:Orque telles choſes ſoient bien propres à faire ſor- Potion for
tir la verole & rougeole , il appert parce que la decoction ſeule de figues prouoque dorifique,
grandement la ſueur, auſſi elle adoucit & abſterge doucement . Les ſemences de fe
noüil & autres mentionnées , ouurent les pores pour donner iſſuë aux humeurs : les
lentilles empeſchent que la gorge & autres parties internes ne ſoient eſpriſes de bou

1 tons de la verole, pource qu'elles ont vne aftri&tion benigne, & feruentauſſi pour en
e deri garder le flux de ventre : on les y mer eſcorcées , parce que l'eſcorce eſt trop aſtrin

lete gente : les da&tes y ſont miſes pour roborer l'eſtomach : la ſemence de citron , pour
defendre le cæur : & la regliſſe pour adoucir la gorge , & empeſcher l'enroü ure,
ioinct auſſi qu'elle aide à prouoquer la ſueur. Er de ces ſimples on fait des doſes
grandes ou pecites , ſelon la qualité & force des malades, & la vehemence de lama Temps de
ladie, & ſes accidens. La ſueur ſera prouoquée loing du repas , tant par choſes inre Juer.
rieures qu'exterieures. Et faut enuelopper l'enfanten vn linceul moüillé en la luſdi
oinde
te deco & tion chaudement, & exprimé bien fort : ce qui ſe peur bien faire, non feule
B mentaux enfans, mais auſſi aux grands . Dauantage la decoction de millec , figues &
raiſins auec ſuccre , prouoque la ſueur.Outreplus on peut
appliquer aux parties ex
*
terieures veſſies, ou eſponges ,ou cailloux chauds. Auſſieſt boneſuenciller le viſage,
COM
pendant que la maladie ſuë,auec vn cluentoir ,afin de corroborer la chaleur naturel
le , & engarder que le malade ne cõbe en defaillance de cæur par la chaleur & lueur :
ce faiſant la vercu eſt mieux conferuée , & par conſequent les ſuperfluitez ſortent
AM
mieux par les pores du cuir , 82 par le cracher & moucher . Pareillement on fera fen
tir au malade vinaigre & eau roſe ,auec vn peu de camphre , & autres ſenteurs qui ont
vertu de rafraiſchir : ce qui ſert encor pour defendre le dedans du nez de la verole.
Level
Quelles partiesfaut preſerwer de la verole. CH AP III.

Nore les parties du corps qui ſont fort ſubjectes à eſtregaſtées & perduës do
ladite verole , les yeux,le nez,la gorge , les poulmons & inteſtins y font fort
enclins,dont quelquesfois la mort l'enſuit: parquoy il y faut remedier tant
que poſſible ſera.Ecpremierement, pour ſuruenir aux yeux qu'ils ne ſoient Yeux .
gafez , au commencement on doit mettre autour des paupieres eau roſe , verjus ,
auec vn peu de camphre, ou faire vne decoction de ſumach, berberis,eſcorce de gre
nade,aloé auec vn peu de ſafran . Lejus de grenades aigres eſt bon à ceſte intencion .
Aulli on peut mettre ſouuent dedans les yeux, des blancs d'æufs & eau roſe bactus
enſemble: pareillement du laict de femme & çau roſeautant d'vn que d'autre, & les
lec renouueller ſouvent. Et pour le dire en vn mot , les choſes froides & qui repouſſent,
ſont bonnes : neantmoins ſi on voit les yeux forc cumefiez & rouges , il ne fauc vſer
de ſimples repercuſſifs, mais ils ſeront meſlez auec choſes abſterfiues, & qui ayent
2004 faculté de corroborer la veuë , comme l'eau d'euphraſe, fenoüil , & autres ſembla
bles. Et lors qu'il y a inflammation & rougeur, il ne faut que le malade voye grande
JUNE clairté , ny choſes rouges , de peur d'augmenter la douleur & inflammation. Et

,5 quand la verole eſt en ſon eſtar, qui eſt ſon plus grand mal , & qu'il y a grande cha
tale leur & rougeur aux yeux , adonc on doit vſer de remedes deſiccatifs & reſolutifs,
doux & benings, & ayansvertu de roborer la veuë , comme ſont aloé , tuthie , anci
D moine lauez , cau de fenoüil , d'euphraſe , & de roſes. Pour defendre le nez , on
Le men
doit faire lentir au malade vinaigre , & eau roſe auec vn peu decamphre , ou verjus
& vinaigre ,& en moüiller fouuent le nez auec vn mouchoir : & aux parties ſupe
rieures on doit appliquer des reinedes repercuſifs cy- deſſus mentionncz.Pour de. La gorge ?"
fendre la gorge , & que la reſpiration ne ſoit empeſchée, on fera des gargariſmes d'o .
xycrat , ou de vin de grenades aigres , & en conuient maſcher , & tenir des grains
fouuenc en la bouche :ou des noiets faits de pſyllium , de coings & autres choſes
froides & aſtringentes. Quant eſt des poulmons , pour les defendre & empeſcher la Poulmon's
courte haleine ,lemalade vſera ſouuent de ſyrop deiuiubes, ou violac , ou roſat, ou
de pauor blanc , ou de grenades ,ou de nenuphar , & autres ſemblables. Et quand la
verole & rougeole ſont du tout ſorties dehors . il ne faut tant tenir la chambre cloſe,
nyfichaude comme on faiſoic :ains alors quant à la verole ,la faut ſupputer,puis l'ou
urir ,la deſleicher , & faire tomber les crouſtes. Mais la rougeole ne ſe luppure point ,
on la fai & reſoudre & ſeicher ſeulement. On ſuppure la verole auec beure frais,
Qq ij
730 Le vingtieſme Liure ,
On doit com- ou auec vne fomentation faite de figues , racines de guimauues , oignons de lys , ſc
per les bon
A
fons de la peo mence de
lin , & leurs ſemblables. Et quand les grains de verole font meurs, on les
tite verole doit couper aucc ciſeaux , ou autrementouurir aucc vne aiguille d'or ou d'argent,de
oftans fuppu- pour que la bovë & ſanie nc face eroſion à la chair de deſſous, & que puis apres n'y
Tel . demeurentdes pecites foſſecres & cicatrices cauez , qui eſt choſe laide, principale
ment en la face . Orapresqu'elles ſont ouuertes , illes convient delleicher , puis les
faire tomber , qui ſe fera auec ouguent roſat, auquel on adiouſtera ceruſc,litharge,
aloës ſubtilement pulueriſé auecun peu de ſafran : ce qui non ſeulement deſleiche,
mais auſſi aide nature à engendrer chair. Ec pourccon peut diffoudre de la farine
d'orge , & de lupins dellayez auec cau rofe , & auec vn linge bien delié on en oingt AD

les parties malades. Aucuns les greffent de coine de lard vn peu boüillie auec cau &
vin , puis reſpandent deſſus de la farine d'orge , ou de lupins, ou coutes les deux en
ſemble: les autres prennent du miel venant de la ruche , auec farine d'orge, & oi TOI

gnent les boutons pour les ſeicher & faire tomber: & quand ils ſont du tout ſeichez, Gal
pour les auancer de ſe ſeparer , ils mettent de l'huile roſac, ou violar , ou d'amandes sec
ten
douces ciede , ou de la creſme. Apres que la verole eſt ſortie , il ſuruicnt vn grand B
Pour corriger prurit & demangcaiſon, & par ſe crop gratter quelquesfois aduiennēt grandeseſcor
les accidens. chcures & vlceres,parceque le grattereft cauſe de faire attraction à la partie , & y 0.1

cauſer vlceres,dontles cicatricesſont puisapreslaides,& la face difforme: parquoy,


ſi c'eſt vn enfant qui ſoit malade , il luy faudra lier les mains , & fomenterles lieux
du prurit, de la deco &tion de guimauues , orge, lupins, & fel. Et quand le cuir eſt
eſcorché, il y faut appliquer de l'onguent dit album raſis camphré , y adiouſtant vn
Des yeux
peu d'aloës en pouldre & de cinabrc , ou de deſiccatif rouge,ou autres ſemblables
Verolez,
remedes.Queli laverole f'eſt jettéeaux yeux ,nonobſtantquelque defenſe qu'on ait
peu faire , premieremencil faut defendre la grande clarté , & la veuëdes choſes rou
ges , & y appliquer collyres , les diuerſifiant ſelon la diucrfité des accidens. Et faut
bien auoireſgard à la grande tumeur & infammation qui y furuicnt quelquesfois :
comme l'on voit à pluſieurs enfansele mal eftre ſi grand , qu'ils perdent la veuë, &
meſmes à aucuns les yeux ſe creuent & forcent du couc hors de la celte, à quoy le
Chirurgien pouruoira, & y remediera tant qu'illuy ſera poſſible. Pareillement ſ'il g
ſuruient des grainsde verole dedans le nez, qui deuiennenten crouſtes & vlceres,on
y appliquera remedespropres , les y adaptantavec des tentes delinge ou de cotton.
Auſſi le plus ſouuent en la bouche & au goſier y viennent cſcorcheures, auec en
roüeure de voix , & grande difficulté d'aualler les viandes :& pour y remedier,illa
conuient gargariſer auec cau d'orge & de plantain ,ou de cerfueil, auſquelles on
diſſoudra du ſyrop roſac & diamorum :auſſi le malade tiendra ſouuent en la bouche
ſucre roſat, ou diatragacanth froid , ou pilules blanches , ſucre candy , alphenic,&
diaireos. Et quant aux cicatrices ou marques qui demeurent au cuir , pour les oſter
il faut auoir eſgarden quelle partie elles ſont: car ſi c'eſt au viſage, & qu'il y aitgran.
de tuberoſité,il les conuient couper auec ciſcaux,ce que i'ay ſouuentesfois fait:auſi
on y appliquera de l'onguent citrin recentement faic, ou de la pommade, ou ce
Des cicatrin liniment.22. amylicriticei& amygdalarum excorticataruman.z j. B.gummi traga
ces ou mare canchi z B. ſeminis melonuin, fabarum ficcarum excorticatarum , far, hord.añ.3
quesquide- iij. pulucriſentur omnia fubtiliter, deinde incorporentur cum aquarofacea,& fiat
meurent au . linimentum : duquel en faut oindre la face auec vne plume , & le laiſſer couce la
cuir. nuict, & le lendemain la lauerauec eau deſon de fourment. Le laiæ virginal y eſt D. chat
pareillement propre. La graiſſe d’oye, ou de canard , ou de poulaille, eſt propre pour
Pour effacer lenir & addoucir l'aſperité du cuir , comme de l'huile delys.Le ſang de liéure tout
lescicarrices.chaud, appliqué ſouuent, ef ſouuerain pour remplir les cauitez & faire le cuir éga!,
& corrige la noirceur qui demeure és cicatrices : pour cet effe&t auſſi vne coine de
lard chaude eſt propre, frotcant d'icelle la partie . Pareillement l'eau diſtillée de
fleurs de féucs & de racinesde lys , eſt ſingulierc pour effacer & polir les cicatrices:
aufli l'eau diſtillée de racinesde canne & decoques d'aufs, & meſme l'huile d'auf,
& pluſieurs autres remodes ſemblables.
De la petite verole , & Lepre 731

A
De certains animaux monſtrueux qui naiſſent contre nature aux corps des hommes,
femmes, o perits enfans.

Oucainſi qu'au grand monde il y a deux grandes lumieres , à ſçavoir lc


Soleil & la Lune,vuſiau corps humain il y a deux yeux qui l'illuminent,
lequel eſt appellé Microcoſme, ou petit pourtrait du grand monde ac
SE courci, quieſt compoſé des quatre Elemens comme le grand monde,
auquel ſe fontdes vents , tonnerres , tremblemens de terre, pluye , ro
ſée , vapeurs , exhalations, greſies, eclipſes, inondations d'eaux , ſterilité , fertilité,
pierres,montagnes, fruicts ,& pluſieurs & diuerſes eſpeces d'animaux. Aufli ſe fait
il le ſemblable au petit monde , qui eſt le corps humain . Exemple des venrs : Ils ſe vents
voyent eſtre enclos és apoſtemes venteuſes ,& aux boyaux de ceux qui ont la coli
que venteuſe , & pareillementen aucunes femmes , auſquelleson oicle ventre brui
TO
te decelle ſorte, qu'il ſemble y auoir vne grenouillere ,leſquels ſortans par le fiege
rendent bruits comme coups de canonnades. Et encore que la piece ſoit braquce
vers' la terre , neantmoins touſiours la fumée du canon donne contre le nez du ca
nonnier , & de ceux qui ſont proches de luy. Exemple des pluyes & inondations pluves.
d'eaux : cela ſe voit aux apoſtemes aqueuſes , & au ventre des hydropiques. Exem- Inmblement
ple du tremblement de terre: telle choſe ſe voit au commencemeor des aciez des de terre .
fieures, où les pauures febricitans ont vn tremblement vniuerſel de cour le corps.
Exıinple de l'eclipſe: cela ſe voit aux ſyncopes ou defaillances de cæur , & aux tuf. Ecc'ipſe.
focations de la matrice. Exemple des pierres : on les voit à ceux auſquels on en ex- Pieries:
Fruicts.
trait de la veſlie , & autres parties du corps . Exemple des fruicts : combien en voit
on quiau viſage ou autres parties exterieures du corps,ont la figure d'vne ceriſe, d’v
ne prune ,d'une corme, d'vne figue , d'vne meure ? La cauſe dequoy a eſté touſiours
referee à la forte imagination de la femme conceuante ou enceinte , elineuë de l'ap
petit vehement, ou de l'aſpect, ou d'un attouchementd'iceluy à l'improuilte : com
ER me meſme de ce qu'on en voit naiſtre d'aucuns ayans en quelque endroict du corps
TE
с la figure & ſubſtance d'une coine de lard , d'autres d'une ſouris , d'autres d'vne e ſere
See uille, d'autres d'vne folle , & d'autres ſemblables. Ce qui n'eſt pointhors de raiſon ,
OUW entendu la force de l'imagination ſe ioignant auec la vertu conformatrice, la mol
leſſe de l'embryon prompte, & comme vne cire molle à reccuoir toute forme , &
que quand on voudra eſplucher to is ceux qui ſont ainſi marquez , ilie crouuera que
2Digo leurs meres auronteſté clineuës durant leur groſſetſe de quelque cel appetitou acci
dent. Où nous remarquerons en paſſant, combien eſt dangereux d'ottenſervne fim
me groſſe, de luy monſtrer & ramenteuoir quelque viande, de laquelle elle ne puiſ
port ſeauoit la iouiſſance promptement , voire & de leur faire voir des animaux ou pour
traits d'iceux difformes & monſtrueux. En quoy i'attens que quelqu'vn m'objecte
fost que ie ne deuois donc rien inferer de ſemblablcen mon liure de la generation. Mais
mado ieluy reſpons en vn mot , que ie n’eſcris point pour les femmes. Retournons à noſtre

UDIO propos.Exemple des montagnes : op les voit aux boſſus , & à ceux qui ont des lou .
Montaignes .
head pes groſſes & enormes. Exemple de ſterilité & feicherelle: on le voit aux hcétiques , Sterilizé.
quiont la chair de leur corps preſque toute conſominée. Exemple de fertilité :on la Fertilité.
ilerin D cognoit à ceux qui ſont fort gras, felfus, & ventrus, tant qu'ils creuent en leur peau ,
force leur eſt de demeurer toutiours couchezou aſli.,pour ne pouvoir porter la groſ
13:00
ſe maſſe de leur corps . Exemple des animaux qui ſe procréent en nos corps , à lça- Animaux.
prom
uoir , pouls, punaiſes, & morpions, & autres que deſcrirons à preſent . Monſieur Hiſtoire
Houlier eſcric en fa Practique , qu'il traitcoit vn Italien tourmenté d'vne extreme
douleur de teſte , dontilinourut. Et l'ayant fait ouurir , luy fut croqué en la ſubſtan
ce du
cerveau yn animal ſemblable à vn Scorpion , comme'tu vois par ceſte figure.

eea iij
732 Levingtieſme Liure,
Lcquel , comme penſe ledit Houlier ,feſtoit engendré pour auoir continuelle A
ment fentydu bafilic.Ce qui eſt fort vray-femblable: Veu que Chryfippus, Diopha
nes , & Plinconteſcrit, quc file baſilic eſt broyé entre deux pierres , & expoſé au
Hiſtoire no- Soleil, d'iceluynaiſtra vn ſcorpion.Monſieur Fernel eſcrit d'vn ſoldat, lequel eſtoic
fort camus , tellement qu'il ne ſe pouuoit moucher aucunement , ſi bien que de
l'excrement retenu & pourry , fengendrerent deux vers velus & cornus de la groſ.
feur d'un demy doigt, leſquels le rendirent furieux par l'eſpace de vingtiours , & fu
rent cauſe de la mort. Tuen vois la figure.

Hiſtoire. Depuis n’agueres vn ieune homme auoit yne apoſteme au milieu de la cuiſſe par
tie externe, de laquelle ſorrit cet animal ,lequelmc fur apporté par lacques Guille.
meau Chirurgien ordinairedu Roy , qui diſoit l'auoir tiré : & l'ay mis en vne phiolo
de verre, & a demeurévif plus d'un mois ſans aucun aliment. La figure c'eſt icy rc
preſentée.

Hiſtoire
Monſieur Duret m'a affirmé auoir ierté par la verge apres yne longue maladie, 9
vnebeſte viuante ſemblable à vn clouporte queles Italiens appellentPorcelleti,qui
cftoit de couleur rouge : comme cu vois par ce pourtraict. CO:
co

Hiſtoire. Monſieur le Comte Charles de Mansfeld , n'agueres eſtant malade d'une grande
fiéurc continuë à l'hoſtel de Guiſe , a jeccépar la verge vne certainc matiere ſembla
ble à vn animal , dontlafigure c'eſt icy repreſentée.

Il ſe fait pareillement en la matrice des femmes, beaucoup de formes d'animaux Si


( qui ſouuent ſe treuuentauecles moles & enfansbien formez) comme grenouilles,
Nicole Flo- crapaux,ſerpens,lezars, harpyes. Nicole Florentin les compare à chat-huans,& dić
Tentin . devoir eſtre appellées beſtes fauuages.Les harpyes onceſté appelléesdes anciés,fre
res Lõbars,parce quecelles choſesaduęnoiét aux femmes de Lombardie,& qu'elles
Gourdon naiſſoienten vne meſıne matrice comme les enfansbien formez, qui a donné occa
>”

in. 7. ch.18. fion de les nõmer freres vterins, par vne meſdiſance d'une perſonne que l'on hait.Or
les femmes du Royaume de Naples y sót fort fujectes, à cauſe de la mauuaiſe nourri
cure qu'elles prennēt,leſquellesdecous temps ont mieux aimé auoir le ventre de bu
De la petite Verole , & Lepre.
733
A reau que de velours : c'eſt à dire, manger fruiets, herbages, & autres choſes de mau
uais ſuc , qui engendrent tels animaux parputrefaction , que manger viandes de bon
ne nourriture pour eſpargner eſtre braues & bien accouſtrées . Monſieur loubert Auliure des
cſcric de deux Italiénes, l'vne femme d'vo Frippier , & l'autre Damoiſelle, quidás vn erreurspopus
meſme mois accoucherét chacune d'vn part monſtrueux: celuy de la Frippiere eſtoit laires.
peric ,reſſemblant à vn rat ſans queuë ,l'autre de la Damoiſelle eſtoit gros comme vn
chat : ils eſtoient de couleur noire : & au partir de leurs matrices , tels monſtres grim 1

perenten hauc contre la paroy de la ruelle du li & , & fy attacherent fermement.


Lycoſthenes eſcrit ,que l'an 1494. vne femme de Cracouie ,en vne place nommée Lycofthenes
Sainct Eſprit, enfanta vn enfant mort, qui auoit vn ſerpent vif attaché à fon dos, qui en les prodi,
rongeoir ceſte petite creature morte : comme tu vois par ceſte figure.
ges.

E
N

Levinius en raconcevne merueilleuſe hiſtoire en ceſte façon . Ces années paſſées ift.lib. 1.

vne femme vint vers moy pour me demander conſeil: laquelle ayant conceu d'vn de occult.no
marinier,le ventre luy commença à enfler de telle ſorte , qu'on penſoit qu'elle ne tur .chap.8.,
deuſt jamais
porter à terme . Le neufielme mois paſſé , elle enuoye querir la Sage
C femme : & auecgrands efforts, premierement accoucha d'vne maſſe de chair fans
forme,ayancà chacun coſté deux anſes longues d'un bras , qui remuoic & auoic vie
comme les eſponges. Apres luy ſortit de la matrice vn monſtre ayant le nez crochu ,
le col long, les yeux eſtincelans,vne queuë aiguë, les pieds fort agiles . let'en repre
ſente la figure.

Si toft que ledit monſtre fut forty , il commença de bruire , & remplir toute la
chambre de Gffiemens, courant ça & là pourſe cacher. Sur lequel les femmes ſe iet
terent, & le ſuffoquerent auec des oreillers. A la fin la pauure femme toute laſſe &
rompuë ,accoucha d'un enfant maſle , tant bourrelé & tourmenté par ce monſtre ,
qu'il mourut fitoſt qu'il cut receu Bapcelme.
Cornelius Gemma , Medecin de Louuain , en vn liure qu'il a fait depuis peu de Hiſtoire,
temps ,intitulé De nature diuinis characteriſmis,raconte vne hiſtoire admirable d'vne
ieune fille de ladite ville âgée de quinze ans du corps de laquelle apres douleurs in
finics, ſortirent pluſieurs choſes eſtranges par haut & par bas . Entre leſquelles elle

QQq iiij
734 Le vingtieſme Liure ,

rendit par le ſiege auec les excremens, vn animal vif,long d'vn pied & demy, plus A
gros quele poulce,repreſentant ſi bien vne vraye & naturelle anguille ,qu'iln'y auoic
rien à redire,forsqu'il auoit la queuë fort peluë: comme tu peux voir par le portraict
cy -deſſous, ſemblable à celuy que ledit Gemma a mis en ſon Liure .

B
B

Hiſtoire. Maiſtre Pierre Barque, Chirurgien des bandes Françoiſes , & Claude le Grand,
Chirurgien, demeurans à Verdun , n’agueres m'ont affirmé auoir penſé la femme
d'vn nommé Gras-bonnet,demeurantaudit Verdun , laquelle auoit vne apoſteme
au ventre : de laquelle ouuerte ſortir auec le plus grand nombre de vers, gros comme it
les doigts , ayans la teſte aiguë ,leſquels luy auoient rongéles intestins,en ſortequ'elle
fut long temps qu'elle ietcoic ſes excremens fecaux par lvlcere, & à preſent eſtdu
tout guarie . G
Hifoita. Antonius Benenius , Medecin de Florence, efcrit qu'un quidam ,nomméIcan
Menuſier, âgé de quarante ans , auoit preſque vne aſſiduelle douleur de cæur , pour th
laquelle auoit eſtéen danger de mort. Ec pour y obuier , eut l'opinion de pluſieurs
Medecins de ſon temps , ſans toutesfois en auoir receu aucun allegement.Quelque a
que
temps apres fadreſſa vèrsluy : ayant conſideré la douleur , luy donnavn vomitoire, &
par lequel iecta grande quantité de matiere pourrie & corrompuë , lans toutesfois
fel
appaiſer la douleur. Derechef luy ordonna vn autre vomitoire , au moyen duquel
CE:
il vomit grande quantité de maciere : enſemble vn ver de grandeur de quatredoigts,
la teſte rouge , ronde , & de groſſeur d'vn gros pois ayant le corps plein de poil follet,
la queuë fourchuê en forme de croiſſant,enſemble quatre pieds, deux au deuant,& dil
deux au derriere : comme cu vois par ceſte figure.
las
rede
Figure d'un ver ietté par vomiſſement. 2001

le dis encore qu'aux apoſtemes il ſe trouve des corps fort eſtranges , conime
pierre , croye , ſablon ,charbon ,coquilles de limaçon ,elpics, foin , cornes, poil, & au
tres choſes enſemble pluſieurs & diuers animaux, tant morts que viuans.Deſquelles
choſes la generation (faite par corruption & diuerſe alteration) ' ne nous doit eſton
ner beaucoup,fi nous conſideronsque comme Nature feconde'a mis proportionné
menten l'excellent Microcoſme toute forte de maciere , pour le faire reſſembler,&
eſtre commeimage viuedece grand monde :auſſielle ſebac à y repreſenter toutes
ſes ađions & mouuemens, n'eſtant iamais oifiue quand la matiere ne luy defaut
point .
De la petite Verole, & Lepre . 735

A
Des vers qui s'engendrens és boyasx. C H 4 P. 1111.

Es vers ſe font d'une matiere groſſe ,viſqueuſe& cruë , laquelle ſe cor- Generation
rompren l'eſtomach , puis deſcend és inteſtins : & veu qu'elle n'eſt pas des vers.
bien chylifiée,c'eſt à dire, façonnée par la premiere concoction qui ſe
fait en l'eſtomach , elle ſe pourrit du tour : & pour ſa viſcoſité , qui la fait
adherer à iceux, ne la peuuent iecter hors le ventre , dont y eſtant rete
nuë, ſe putrefie dauantage : dequoy ſont produits& engendrez des vers par l'action
Canfe effic
de la chaleur, qui puis apres viuenc d'icelle : laquelle eſtant conſumée , ſi on ne leur ciense.
baille promptement vne autre matiere pour les nourrir & ſaouler , ils ſe promenent

par les inteſtins , cauſans grandesdouleurs aux malades , & montent quelquesfois
iuſques en l'eſtomach , & les ierce- lon par la bouche, & aucunesfois paſſent par les
trous du palais , & ſortent par le nez . Ce que j'ay veu pluſieurs fois.
Il y a trois eſpeces & differences de vers, à ſçauoir , de ronds & longs: larges & !! y a troje
differences
B longs : & depetits & grelles. Les premiers ſontnommez des anciens Teretes ,c'eſt à de vers .
dire ,ronds en longueur . Les ſeconds ſont dits Tæniæ ,parcequ'ils ſont longs & larges
en forme d'vne bande. Les tiers ſont appellez Aſcarides, pource que cels communć
1
ment font lautelans. Il y a d'autres differences des vers ,priſes des couleurs , commc Difference
rouges,blancs, noirs,gris,citrins, & quelques - vns ſont trouuez cornus & velus, ayans desvers,fo
co
la teſte d'vochabor.En aucuns malades ſ'en procréegrád nombre , qu'ils idctent tous lon les u .
leurs.
lesiours par le ſiege , & font menus comme filets ou poils, & tels ſont volontiers de
couleur blanche : ce ſont ceux que nous avons appellez Alcarides. La diuerficé des
couleurs le fuit ſelon la cauſe des humeurs pourris: non pas que des vers les vns ſoiệt
. engendrez de cholere , autres de melácholic , autres de picuice , commeles Medecins
Grecs onceltimé : car la melancholie & cholere ſont humeurs pour le regard de leurs
10
qualitez du cour ineptes à la generation des vers . Mais parce que parmy la ſubſtance
de ce
chyleuſe ou picuiteuſe , doncils ſontengédrez ,ily a quelque meſlange des humeurs ,
de là vient la diuerſité des couleurs és vers . Orles longs , & larges , ou plats , tiennent Grande long
des
quelquesfois tout le long des inteſtins, & tels ſont comme vnc ſubſtance mucqueuſe gueur
vers.
C & glaireuſe : & veritablement i'en ay veu vn qui ſortit hors d'une femme, & 'eſtoit
ans Hiſtoire.
ſemblable à vn ſerpent , de longueur de plusd'vne toiſe. Dequoy ne ſe faucémer
mon
uciller ,veu que les Anciens eſcriuencen auoir veu de toute la longueur des inteſtins,
qui eſt lept fois la longuenr de noſtre corps , parce que les boyaux de chacun homme
pose ont tellc longueur : & leſçay pour l'auoir veu, & monſtré quelquesfois aux Eſcholes
de Medecine de ceſte villé , faiſant diffe & ions anatomiques publiques. Dauantage, Hiſtoire .
lean Vuier , Medecin tres -docte du Duc de Cleues,eſcrit en fon Jiure De l'importu
re des Diables , qu'vn villageois ierta vn verde huièt pieds & vn doigt de long , lequel
auoit la gueule preſque ſemblable à vn bec de Cane , comme tu vois par ceſte figure .

Figure d'un ver ayant la teſte comme une Cane.

5.12

sen
736 ſme
Le vingtie Liure ,

Monſieur Valeriola , Medecin d'Arles,au liure de ſes Obſeruations, diſcourant A


doctement ſur les cauſes de la generation des vers,dit en auoir veu en la ville d'Arles
ayant neufpieds& plus de long. Et cout ainſi que les vers ſont differens les vns des

autres,auſliilya diuerſité de lieux où ilsſe procreent : car les ronds & longsſengen
drent volontiers és inceſtins grelles, les autres aux gros , & principalement les petits
Nul animal vers capillaires , & iamais en l'eſtomach: car nul animal ne le faic en la conco&tion de
ne le fait en la viande : mais ſeulementen la diſtribution és boyaux , apres qu'elle a commencé à
l'eſtomach.
eſtre corrompuë en l'eſtomach ,eſquels boyaux elle ſe corrompt & pourrit dauanta
ge , & de la naiſſent des vers . Quelquesfois ils ſ'engendrent dés que l'enfant eſt au
yentre de la mere, à cauſe de la mauvaiſe nourriture qu'ilprend d'elle ,& aufli à cauſe
qu'ils ne vuident lors rien par le fondement :dont aduient que de la retention de tels
excremens fengendrent vers, comme quelques -vns ont noté de la ſentence d'Hip
pocrates,au liure quatrieſme De morbis ſurla fin . Et pour le dire en vn mot , ils ſ'en
gendrent en tous âges, & principalement aux crapuleux,goulus, & à ceux qui viuene
de mauuaiſe nourriture, comme de frui& scruds, formage& laiétage.
B
Signes des Or pour cognoiſtre en quels endroits du corps ſont les vers , ilfaut entendreque
Ders aux
lors qu'ils ſont auxinteſtins ſuperieurs,les malades ont vne douleur d'eſtomach auec
inteſtins
appetit canin & depraué , c'elt à dire , qu'ils deſirenc à manger diuerſes viandes, &
grejles.
grande quantité : parce queleur nourriture eſt conſumée& mangée par les vers , &
tombent ſouuenten defaillance de cæur ,à raiſon du conſentement & ſympathie de
l'orifice du ventricule & eſtomach , qui a ſentiment tres -exquis auec lecæur.Dauan
tage, ils ſentent yn prurit & demangeaiſon au nez, & ont l'haleine force & puante , à
cauſe de la corruption des viandes en l'eſtomach, dont les exhalations montent en
haut,qui faitpareillement qu'ils ſont fort afſommeillez, & treſfaillent en dormant.
Outre- plus, ils ont quaſi touſiours vne petite fićure lente , auec toux ſeiche,les yeux
signes des connillans, & ſouuent changement de couleur au viſage. On cognoiſt les longs &
longs
larges , quand on voit aux ſelles, des excremens ſemblables à ſemences de melonsou
larges.
Signes de A- cougourdes: les autres, ſçauoir les aſcarides, fe cognoiſſent par le prurit & deman >
!1
ſcarides. geaiion qu'ils font au ſiege: ainſi que morſure de fourmis ,par vn tenefme, & defcen
0
Raiſon des te du gros boyau . La raiſon de tous ces ſymptomes eſt telle: le ſommeildeceux qui
Symptomes. ſont inquietez des vers eſt curbulent , iuſquesà crier en dormant , quand les vapeurs
excitées par le remuement des vers, & enuoyées au cerueau , ſont chaudes, fubtiles, IN
& acres : comme au contraire le ſommeil eſt profond lors que celles vapeurs fone
froides & groſſieres : ilsſongenten dormant manger & aualer, ou bien grincent les
dents , à caule que les vers lors deuorans le chylus,enuoyé du ventreaux inteſtins,ex
citent ſemblable ſentiment & imagination en eux lors qu'ils dorment : ils ont vne C
toux leiche par le conſentement des parties qui font dediées à la reſpiration , aucc

1 celles qu'on appelle naturelles , deſquelles vapeurs putrides ſont elleuées,quivenans


à heurter contre le diaphragme , l'irritent à excretion , comme pour ietrer quelque
choſe nuiſible: leſquelles venansà monter à l'orificede l'eſtomach, partie fort ſen
ſible de noſtre corps , excitent vn ſanglot,ou ſyncope, ſelon qu'elles ſont fubtiles, 0
groſſieres, ou acres: & venansà lefleuer vers la teſte,excitent vne demangeaiſon des
narines , & efbloüillement à la veuë . Ceux qui ſont grands ſont pires que les petics,
les rouges plus mauuais que les blancs , les vifs que les morts , & les bigarrez plus que D
ceux qui font d'vne ſeule couleur, detant qu'ils demonſtrent plus grande pourritu
re. Et lorsqu'il y en a grand nombre, ils demonſtrent d'autant grande quantité de
pourriture. Ceux qui ſortent auec le ſang, ſignifient mal , parce qu'ils demonſtrene
que les inteſtins ſont offenſez d'eroſion : car quelquesfois ils les rongene , de façon
qu'ils ſortent hors des inteſtins, & ſe diſperſent en pluſieurs endroits du ventre,&
font cauſe de lamortdes pauures malades . Ainfi eſcric lacques Houlier, & Manard
en ſes Epiſtres, liure troiſieſme, chapitre cinquante-quatre , des maladies internes,
qu'on a veu quelquesfois des vers ſortir par les aines,feltanseux -meſmes fait le che
nin par eroſion. Quand les enfansont des vers , & ne peuuent auoir leur haleine qu'à

peine , & font moites, c'eſt ligne que la mort eſt à la porte. Dauantage,au commen
cement des fiéures aiguës, li les vers ronds & longs corrent en vie , c'eſt ſigne que la bic
fiéure eſt peftilenre , demonſtrant qu'ils ne peuuent endurer tel venin : & encores
fils ſont morts , ils donnent à cognoiſtre davantage qu'il y a plus grande corruption
& venenofité.
!
1

De la petite Verole , & Lepre . 737

A
De la cure des verse CHAP. V.

Ovre l'intention de la curceſt,faire ſortir les vers vifs ou mores hors


du corps , de cant qu'ils ſont de ce genre des choſes qu'on dit eſtre du
tout contre Nature. Il faut euiter touces viandes quiengendrent cor- viandes qu'il
ruption , commefruicts cruds , fromages, laictages, & le poiſſon , & ge- fane enirer.
neralement toutes choſes de difficile digeſtion ,& de facile corruption.
La bouillie eſt bonne aux enfans,à cauſe qu'ils ont beſoin d'vne nourriture humide, Dela božila
de groſſeur conforme au laict ,non de trop difficile digeſtion : leſquelles condicions lie.
ſonc trouuées en la bouillie ,pourueu que la farine de froment ne ſoir cruë, mais cuit
te auparauant au four,à fin qu'elle ne doit cant viſqueuſe & groſſiere , & aufli à fin que
le laiå ne cuiſe pas li longuement, parce qu'il fautque pour donner cuiſſon à la fari
ne , le laict cuiſe ſemblablemenc long temps , en quoy il perd ſa bonté,
parce que le

B cuiſane beaucoup , fa ſubſtance aqueuſe ſe conſume par le feu , & engendre gros ſang ,
comme ilſe fait par la bouillie , lors que la farine n'eſt cuitte auparauant : car il perd
en ceſte façon ſa ſubſtance de maiguë & de beurre , y reſtant ſeulement la formageu
ſe ,groſſe ,viſqueuſe, & de difficile digeſtion, & par conſequent peſante, & faiſano
obſtruction aux premieres veines & au foye : qui louuentesfois cauſe qu'il ſ'engen
dre des vers à l'enfant, & des pierres, & autres mauuais accidens, pour n'eſtre ladite
farine cuitre , & delaid trop cuit: parquoy ceux quiont des enfans , y prendront gar
de, li bon leur ſemble. Et ne ſere de rien alleguer, que par experience quotidienne, Belle anndo

on voit pluſieurs enfans quimangent boüillic fans que la farine fois cuitte, fe porter cation .
bien : car ic dy que cela ſe fait pluſtoſt d'auenture,ou de bonne nature, que de la bon
té de ceſte nourriture .

On doit donner ſouuent à manger aux malades de bonnes viandes,de peur que
6
les vers ne piquenc & rongent les inteſtins: & veu que cels animaux fonc rouuens
r medes
cngendrez de pourricure,il faut purger le malade , & corriger icelles pa re
eſcrics cy -apres en la peſte. Ec pour les faire mourir & ſortir promptement, le ſyrop
C de chicorée , ou de limons, auec rheubarbe ; & vn peu de ſucre , & cheriaque ou
mithridat , eſt vn ſingulier remede, pourueu qu'il n'euſt fiéure coniointe , ou en lieu
de ce ,
on pourra vſer dela medecine qui ſ'enfuir. 2.cornu cerui . puluer.raſ.ebor. Remede con
añ.zj. B. ſeminis tanac . contra vermes añ.zj.fiat decoctio pro parua doli: in colacu- eve les verse
ra infúnde rhabar.oprimi3 j.cinnam . 3 ). diſſolue ſyrupi de abſinch . Z B.fiat dor.
deturmanètrib.hor. ante paftum .

Outre - plus , l'huile d'oliue priſe par la bouche fait mourir les vers , comme auſſi Corrigiole ; !
l'eau de corrigiole donnée à boire avec du laiů : toutes choſes ameres les cuent.Mais c'eſt la res
noüle.
deuant que d'vſer d'icelles,il faut donner vn clyftere de laiet auec miel & ſucre, au
quel on ne doit mettre huile ou graiſſe, ny choſes ameres , de peur de les renuoyer
contre-mont,parce que les choſes douces les attirent , & les ameres les repouſſent.
Dauantage, tu noteras qu'il faut touſiours donner & meſler choſes douces auec les
ameres , à fin que par la douceur , les vers atcirent ce qui les pourra faire mourir. Et
partant faut donner l'eſpace de deux ou trois iours du laict ſucré au malade,puis a
pres ymeſlerchoſes ameres, comme femencesde centaure , aloës , ruë , abſynthe, &
op D leurs ſemblables.Auſſi la corne de Cerfa grande vercu contre les vers, & en doit -on La cornede
que bailler tant à boire qu'à manger à ſçauoir ,lameccant en poudre , & la faiſant boüillir cerf efi prom
en eau , laquelle on donnera à boire au malade : auſſi on en meccra cuire vn petit pre contre
‫ویتری مرد‬ noüet auec la viande . Pareillement le theriaque donné à boire en boüillon , cuë les les vers,
‫ن‬
vers. Le pourpié eſt ſemblablemenc bon en potage, ou en deco & ion & breuuage, &
i
dil le faut faire bouillir en eau , & en faire boire aux petits enfans, & aux grands , on le
pourra donner auec du vin . Le ſemblable eſt de la chicorée & de la menthe. Aufli
aizoon minus, & les ſebeſtes ſont propres , en faiſant vne deco & tion d'iceux , & en
ik donnant à boire deuant le repas auec vn peu de ſucre.On donnera aux enfans à man
ger de la poudre de la ſemence contre les vers dedans leur bouillie,ou auec vnepom
me bien cuicte . Dauancage,on pourra faire ſuppoſitoires, comme ceſtuy. Prenez du suppofitoire,
coral qui cire ſur le blanc, des racleures d'yuoire, de la corne de cerf bruſiée, & d'iris,
de chacun deux ſcrupules, du miel blanc deux onces & demie , & de l'eau de coțri
giole, aucant qu'il en faut pour incorporer le tout enſemble ,& faices ſuppolitoires :
738 Le vingtieſme Liure ,
donton en appliquera tousles iours vn qui ſoit du poids de deux dragmes aux en- A A
fans, & plus peſant aux grands . De cels ſuppoſitoires faut principalement vfer,lors
que ceux dcfquels le malade eſt courmenté,ſontdu genre de ceux que lon appelle
Aſcarides,parce qu'eſtans attachez & logez dans le boyau appellé Droir,ils peuuent
Caraplaſme par cel remede eſtre promptement tirez .Quant aux petitsenfans qui ne peuuent
contre les rien prendre par la bouche ,illeur faut appliquer ſur le nombril cataplaſmes faitsde
Ders . poudre de cumin ,incorporée auec fiel de bæuf, & farine de lupins, abſynthe, auroſ
ne , & tenaſic, fueilles d'artichaut ,ruë,poudre de colocynthe, ſemence de citron, Q

aloës, perſicaria; mentaftrum ,fueilles de perſiguier,coſtamer, zedoaire,fauonmol.


Onapplique telles choſes non ſeulemenčſur le nombril, mais ſur tout le ventre , &
ſur l'eſtomach : toutesfois on y doit meſler des aſtringens, de peur de le trop relaſ
cher,comme ſont huile demyrtilles,decoings, maſtic, & autres ſemblables. Outre
plus ,on leur peut appliquer ſur le nombril vn grosoignon ,lequel on creuſera ,&fera
remply d'aloës & theriaque,puis on le fera cuire ſousla braiſe: & le tout chaud, piſté
auec amendes ameres, & fiel de bæuf. Dauantage, on leur pourra faire emplaſtres B tre
Emplaſtre de choſes ameres , comme ceſtuy. Prenez du luc d'abfynthe & du fiel de bæuf, de "po.
pour applile- chacun deux onces :adiouſtant de la colocynthe huict dragmes: le tout ſoit broyé
quer ſur
nombril . & nené enſemble, & incorporé auec farine de lupins,& dece ſoit fait emplaſtre,qui 100

ſera appliqué ſur le nombril de l'enfant. Quon pourra faire onguens & linimensde
ſemblables matieres pour leur frocter le ventre. Les pilules communes ſont pareille
inent fort bonnes à en faire emplaſtres pour appliquer deſſus le nombril. Et pourles 1
faire encore pluſtoſt debuſquer & fortir hors, faut oindre le ſiege dumalade de miel
& de ſucre,parcequ'ils fuyent l'amertume, & courent à la douceur: & partant for
Les vers tent pluſtoſt du ventre. Pareillementfauc prendre des meſmes vers , & les faire ſci 1

morts pris en cher ſur vne pelle de fer fort chaude, puis les pulucriſer, & en donner à boireauec
brennage
challeni les
vin,ou autre breuuage, & promptement mourront. Aufli le ius de citron en petite
wifs. -quantité donné à boire dans vne cuillier auec huile d'amendes ameres,ou huile d'o
liue. D'abondant,on pourra faire bains contre les vers ,comme le ſuiuant. Prenez de
l'abſynthe & noix de gallc autant qu'il en faudra, faites bouillir le tout en cau,&
mettez l'enfant dans icelle, & le lauez chaudement. Finalement on peut baigner O
l'enfant dans de l'eau , en laquelle on aura fait bouillir des fueilles de peſcher & FA

d'abſynthe : ce qui eſt principalement propre contre les vers qui ſont appellez Aſca
rides . Or en touteceſte curation , faut auoir égard que le mal des vers eſt ſouuene
compliqué auec maladie plusgrande & principale, comme auec fiéure aiguë & ar
dente,auec flux de ventre, & ſemblablesaccidens,eſquels cas ſi;pour exemple, vous
donniez incontinent ſemen contra , ou cheriaque vieille, myrrhe , ou aloës, vous
Los choſes augmenteriez l'ardeur de la fiéurc, & flux de ventre, d'autant que les choſes ameres
ameres au- font contraires à la guariſon de ces deux accidens : comme au cas pareil , li ayant
gmentent la égard au flux de ventre,parlequel les vers ſont reiettez, vous ordonnez du corail,
fénre. pourpić, farines de lentilles,vousrendez la fiéure plus difficile à guarir , de tant que
toutes choſes aſtringentes & ſeiches rendent la matiere de la fićure plus contumace.
Parquoy il fauteſtrediligent à conſiderer ſi la fiéure eſt dependante desvers,ou bien
fi elle eſt cauſe propre,commeeſtant fiéure premiere,propre,eſſentielle,& nonſym
promatique : & touſiours ordonner medicamens qui combattent la maladie princi D
cipale : autrement on peut choiſir medicamens qui combatent l’vn & l'autre: com
me laxatifs, & quelque peuamers en la fiéure & vers : amers, & quelque peu aſtrin
gens en versiointsauec Aux de ventre.
Des.Poux , Morpions, & .Cirons. C H 4 P. I.

E s trois fortes d'animaux ſont engendrez de grande multitude d'hu


meurs & humiditez corrompuës,faite d'vne portion craffe & vifqueuſe
de la ſueur, laquelle famaſſe & f'arreſte aux meats des pores du vray
cuir.Les poux sõt appellez en Latin Pediculi,pourla multitude de leurs
Des poux. pieds,& excitentvnemaladie,que lesLatinsappellētMorbus pedicularis.
Ils naiſſent par toutle corps, principalement éslieux chauds & humides, come font
les aiſſelles,aux aines ,à la teſte,pour la multitude du poil: & voic-oncommunément
qu'ils ſ'engendrenc alentour du col , parce qu'il ya vne einunctoire accompagnée de
pluſieurs
De la petite Verole, & Lepre . 739
a pluſieurs grands vaiſſeaux,parleſquels ſortent pluſieurs humiditez ſuperfluës, pour 1
l'abondance des ſueurs. Les petits enfansy ſont fort ſubiets,à raiſon qu'ils crapulent Prognoſtica
&engendrent beaucoup d'excremens.Il ne faut negliger ceſte maladie: car pluſieurs
perſonnes en onteſté trauaillées, & en ont perdu la vie ,comme Herode Roy de lu
dée, Sylla Di&tateur de Rome, le Poëte Alcman , Acaſtus fils de Pelias, Pherecydes
Theologien , Calliſthenes Olynthien ,Mutius Iuriſconſulce, Eunus, qui fut le pre
mier quiſuſcita la guerre des ſerfs en la Sicile, & Antiochus. Ils ſe peuuent engen. 1

drer par toutes les parties de noſtre corps,meſme dans la maſſe du ſang, commetel Pline.
moigne Pline en pluſieurs lieux,au liu. 7.chap. 51. liu. 11. chap. 33.
La curation de ce mal conſiſte en trois points. Le premier eſt, d'ordonner le re- curation:
gime de viure deſiccatıf,& euiter les viandes qui engendrent mauuais ſuc, & princi
palement les figues & chaſtaignes, & faut vſer de viandesameres. Le ſecond, de pur
ger l'humeur quele Medecin verra eſtre de beſoin . Le troiſieſmeeſt,rarefierle corps
par bains,auſquels entrera de la ſtaphifagre,gentiane,aluine, ruë, marrubium , & au
B
tres herbes ameres. Apres le bain,on frottera le corps d'un onguent fai& d'axunge de
porc,en laquelle lon fera boüillir les herbes ſuſdites : puis y ſera mellé ſoulphre vif
ſubtilement pulueriſé, ſtaphiſagre, orpiment, aloës,& vif-argent,lequel eſt propre vif-argene,
contre lespoux,morpions,& cirons: puis on reiterera le bain & leſdits remedes,cant ennemymor
rel des poux,
qu'il ſera beſoin . morpions,
Des Morpions. cirons.
Les Morpions ſont fortadheransà la peau , ſi bien qu'on ne les peut qu'à peine ar
racher. Par leurs morſures ils penetrent le cuir iuſques dedans la chair, & melines
aux paupieres des yeux,qui cauſe vn extreme prurit & demangeaiſon , & (comme
eſcrit Celle, liu . 6.chap. 6. ) parla grande fri&tion l'y fait defluxion , qui vient à ga
fter & corrompre la veuë : tant eſt inſupporcable ledic prurit, comme l'ay veu dyne
oe
Uli
femme qui ſe lauoit les yeux de bien forc vinaigre . Or ils ſont engendrez d'vnema
tiere plus ſeiche que les Poux,qui fait qu'ils ſont auſſi plus plats,& moinsnourris. La
cure ſera ſemblable à celle des Poux.
Des Cirons,

С Les Cirons ſont pecies animaux , touſiours cachez ſous le cuir,ſous lequel ils ſe
traiſnent,rampenc, & le rongent petit àpetic, excitans vne faſcheufe demangeaiſon
& gracelle. Ils ſontfaits d'vne maciere ſeiche, laquelle par defaut de viſcoſite,eft di
uilec & ſeparée, comme petits atomes viuans.
Cure .
Les Cirons ſe doiuent tirerauec eſpingles ou aiguilles : toutesfois il vautmieux les
tuer aueconguens & decoctions faites de choſes ameres & ſalées.Leremede prompe
eſt le vinaigre,danslequel on aura fait Lurr
bouillir
e.
du ſtaphilagre,& fel commun.
Gdue
demons
Prenez axunge & vif-argent auecvn peu de ſublimé & aloës, & fois faiconguent,
OOM
lequel eſt excellent entre tous les remedes pour tuer les poux, cirons,& morpions.
Autre liniment.

1901
4.ſtaphifagriæ tritæ ZB.aloës zij.acetiſcillitici,& olei amygdalarum amararum Petrus de
ań. Z ij, olei fraxini, & fucci genitiæ añ. Z B.cum ſucco athanaliæ , fiac inſtar mellis Argilata
prolitu partium affe &tarum . L'eau marincauec le ſoulphre , & du fiel de bæufmeſlez liv.s.
D enſemble,yſont auſſi fort ſinguliers. Le bon homme de Guidon ,traiđé6. do&. 1. traiété 2.
eum chap: 3.promet,qu’vne ceinture de laine portée ſur la chair , frortée d'onguene vif- shap. 2 .
argentin,cuëentierement & fait mourir les poux,de quelque eſpece qu'ils ſoienc,&
en quelque partie que lon l'applique.
Briefue deſcription de la Lepre ou Ladrerie. CHA P. VII.
Eſte maladie eſt appellée des Grecs Elephantiaſis, parce que les malades
ont leur peau aſpre, ſcabre, ridée & inegale,ainſique les Elephans : ce
qui eſt dit à cauſe de la grandeur de la maladie. Quelqnes Chirurgien's
ca riyuans l'opinion des Arabes, luy ont atcribué ce nom de Lepre (mais
improprement,d'autantqu'il ſignifie vne eſpece de ſcabie, ou galle,&
vice du cuir, appellé du commun peuple,Lemal S.Main) duquel nous vierons aulli,
s pourlepreſent, commeeſtantfore
le retiendronement,que
&dironspremier commun& vſité.Donc nous Paul.Agin.
Lepreou Ladrerie ( ſelon Paulus Ægineta ) cſt vn chan- liure 4,65
RRS
740 Le vingtięſme Liure ,
Auicenne. crevniuerſel de tout le corps. Auicenne l'appelle Maladie vniuerſelle,laquellecor- A
Galien ,
rompt la complexion ,forme ou figure des membres. Galien dit que c'eſt vnemala
die tres- grande,prouenant de l'erreur de la vertu digeſtiue & fanguificatiuedufoye,
par lequel erreur & defaut,lavertu aſlimilatiue de lachair eſt grandement deprauée
Chap.ur. & changée. Lemeſmc Galien, liure deuxieſme, à Glaucon , definiſt çeſte maladie,
cffuſion deſang trouble & groſſier,contenuésveines par tout le corps, & habitude
d'iceluy . Outre, Lepre eſt di&te maladie tres-grande, à cauſe qu'elle participe d'un
virus veneneux ,corrompant les membres & la beauté du corps: car qu'elle partici
pede venin,ileſt aiſé à cognoiſtre, c'eſt qu'il n'eſt pas neceſſaire que tous ceux qui
Zá Lepre cő en tout leur corps ſont melancholiques, ſoient ladres. Elle contient les trois genres
sie tro
nt u
genres de
demaladies : & premieremencelle eſt de mauuaiſe complexion ,àſçauoir, chaude &
maladies. ſeicheau commencement, & en fin l'ebullicion & ardeur paſſée & eſuanoüie,froide,
& ſeiche: qui eſt la cauſe immediate de lepre confirmée. Elle eſtde mauuaiſe com
poſicion ,pourcequ'elle corromptla forme & figure des membres : auſſi elle fait ſo
lucion de continuicé, quieſt maladie commune.
Des cauſes de Lepre. CHAP. VIII.

Cauſe primi Es cauſes de Lepre ſont trois, à ſçauoir,primitiue, antecedente, & con.
siwedeLepre. iointe. La cauſe primitive eſtdouble,à ſçauoir , celle qui eſt introduite
au ventre delamere,commelors que quelqu'un eſt engendré au temps
des menſtrues , ou qu'il a eſté faičt de la ſemenced'vn pereou mere le
preux,& partant on la peut aſſeurément dire eſtrevne maladie hereditaire : car yn
ladre engendre vn ladre,veu que la ſemenceou genicure prouient de toutes lespar
ties du corps : parcant lesparties principales eſtans viciées, & la maſſe du ſang alte
rée, corrompuë & infe&tée,pourceil eſt neceſſaire que la ſemence le ſoit auſti, dont
celuy quieſt engendré,eſt infecté. Pareillement ceſte maladie peut venir d'autres
cauſes, à ſçauoir, pourfaireſa demeure en lieuxmaritimes,où l'air eſtantcouſtumie
rement eſpais&nebuleux , rend par ſucceſſion de temps telle couce l'habitudede
Hippocrates. noſtre corps,ſelon le dirc d'Hippocrates : Que quel eſt l'air, tels ſoncles eſprits, cels g
ſont nos humeurs : ou pour l'habitude des lieux & pays trop chauds,dont noſtre ſang
deuient aduſte & bruſle :ou lieux trop froids, dont il'deuient eſpais,cardif& congc
lé : ainſi voyons -nous en quelque partie d'Allemagne beaucoup de ladres, & en A
frique & Eſpagne,plus qu'au reſte dumonde ,& en noſtre Languedoc, Prouence, & 21

Guyenne,plusqu'au reſte de la France : ou pour communiquer & frequenter auec


les ladres,& coucher auec eux, pource que leur ſueur & exhalacion des vapeurs qui
ſortent hors de leurs corps,ſontveneneuſes. Ainſi eſt de leur haleine ,& de boire aux
verres , & autres vaiſſeaux auſquels ils auront beu:car de leur bouche ils y laiſſent vnc
ſaliue ſanieuſe contenuë entre leurs genciues , & contre les dents,laquelle eſt venc
neuſe en ſon eſpece, ainſi que la baue du chien enragé eſt en la ſienne. Pourceſto
cauſe les Magiſtrats leur enioignent ne boire qu'en leurbaril: & à la mienne volonté
que tous les ladres le fiffent, à celle finqu'ils n'euſſent occaſion d'infecter perſonne
e ſçauoir ſe par ce moyen. Or icy ſe peut eſmouuoir vne queſtion ,à ſçauoir , fi vne femme peut
par le coit auoir compagnie d'homme lepreux, ſans qu'elle ſoit infe&tée : ce qui eſt poſible, si
la lepre se bien toſt apres ſes mois coulent,d'autantque Nacure ſe purge & nettoyepartel flux: D
pemecommu- mais au contraire, l'homme à tard & difficilement le peut fauuer qu'il neſoitlepreux,
niquer. fila compagnie d'vne femme lepreuſe, ou qui recentement ait habité auec un le
preux, & qu'elle ait encor quelque portion de la matiere fpermatique,demeurécaux
rugoſitez du col de la matrice,pource que l'homme eſt apce & prompt à receuoir le
virus ou venin lepreux,à cauſe que la verge virile eſt fortſpõgicuſe & rare,au moyen
dequoy reçoit facilement le virus,elleué desvapeurs de la matiere ſpermatique, qui
eſt communiquée aux eſprits par les veines & arceres, & aux membres principaux,
& delà en toute l'habitude du corps,ainſiqu'on voic communément que la groſſe
verole ſe prend par telacte. Or les lepreux delirent grandement le coït,principale
ment lors que leur maladie eſt en ſon commencemenc& eneſtar,à cauſe qu'ils ſen
tent grandechaleureſtrange aux parties internes de leurscorps , & parcanc bruſlenc
du deſir de dame Venus:mais cel deduit leur eſt fortcótraire, d'autant que par iceluy
les eſprits & chaleur naturelle ſe reſoluent,doncla chaleur eſtrangeeft fortaugmen
De la petite Verole ,& Lepre 771
.

A téé , & les bruſle dauantage . Auſſi ceſte maladie peut aduenir pour auoir vlé de vian- Par va main
des trop ſalées ,eſpicées & acres, groſſes & craſſes ,cõme chair de porc , d’aſne, d'ours : nau regime
aulli de pois , febues,& autres legumes, laictages,poiſſons & ſemblables
, tant alimens l'hommepeut
quc medicamens,qui generalement engendrent langcacochyme & melancholique, estrelepreux:
aduſte & bruſlé:auſſi par crop crapuler, & boire de vins trop forts : pareillement grád
trauail afſiduel, ſoing & follicitude,vie miſerable, & en perpetuelle crainte: leſqucl
les choſes fonc vne intemperature chaude & ſeiche, qui engendre vn lang melan
cholique , feculent ,aduſte, & bruſlé par vne chaleur immoderée, lequel de la maſſe
ſanguinaire venant à l'eſpandre aux parties exterieures , change toute l'habitude du
corps , & depraue la forme ou figure.Autre cauſe de lepre peuteſtre aſſignée ſur la re- Ia meläche
tention des ſuperfluitez & excremens melancholiques, comme des hemorrhoïdes, lie ſupprimée
flux menſtruel,groſſe & pecite verole ,rougeole,vieillesvlceres , fieures quartes, op- engendre la
pilation de ratelle,excelliue chaleur du foye. Or il faut icy entendre , que la cauſe de lepre.
lepre par la retention des ſuperfluitez, ſe fait à cauſe que le ſang corrompu n'eſt natu
B rellemét euacué , dont il regorge par tout le corps , & corronipi le ſang qui doit nour
rir tous les membres: parquoy la vertu aſimilatiue ne peut bien affimiler, pour la cor
ruption & vice du ſuc, doncla lepre eſt cauſée. Les cauſes antecedentes ſont les hu- Cauſe anica
meurs preparez à le bruſler & corrompre , & conuertir en melancholie, par vne cha- cedente.
leur adulte & du tout eſtrange à Nature : car és corps poſſedez de telle chaleur , les
humeurs par aduſtion ſont aiſément tournez en arra bilis: laquelle parlong temps ve
nant à l'enuenimer & corrompre, donne commencement & eſſence à la ladrerie.Les Cauſ co
e n
coniointes, ſontles humeurs ja pourris & venencux , ja eſpandus par l'habitude, qui finetes
alcerent & corrompent tout le corps par vne intemperature froide & feiche,contrai
reau principe de vie, dont la mort l'enſuit: car noſtre vie conſiſte en chaleur & humi
dité naturelle .

IX .
Des ſignes qui monftrent la preparation de Lepre. Ć HA P.

Eſte inaladie eſt cogneuë par les ſignes & accidens quiſ'enfuiuent:pource
PS que chacune maladie a ſes propres accidensqui la fuiuét, comme l'ombre
fait le corps . Ec entre les fignes,aucunsſignifient la preparation , les autres
l'effc & ,lequel a quatre temps , à ſçauoir, commencement,accroiſſement,
eſtat, & declinaiſon. Le commencement eſt, quand le virus couche les membres inte . Comencemët
Post rieurs,dontleurs actions ſont diminuées & affoiblics. L'accroiſſement,lors que le vi . de lepre.
rus apparoiſtau dehors , & les ſignes & accidens ſe multiplient & accroiſſent. L'eſtat Accroiſſe.
gen ment.
eft,quand les membres commencentà f vicerer. La declinaiſon eſt, que la face eſt hi
28 Ellai .
beton deuſe à regarder , & que les extremitez des doigts tombenc,& alors les fignes ſont po- Declinaiſon.
pulaires, & cogneus à vn chacun . Or les lignes qui demonſtrent la preparation ou
Signes de
diſpoſition à la lepre,font,mutation de couleur naturelle en la face, comme goutte- preparation
roſe, faphyrs, cheute de poil , grande alteration ,tantde iour que de nuict ,l'haleine à lepre.
forte & puante,& vlceration à labouche , muracion de voix , & vn grad deſir de l'acte
Venerien ,

Signes quimonftrentla Lepre eſtreja confirmée. CHAP. X.

D VIVANT la do &trinedes anciens, il faut examiner toute la teſte , & princi.


palement la face du malade, en laquelle apparoiſſent les propres ſignes &
les plus vericables,pource que la facceft molle & rare , & en icelle le cuir
de cénuë ſubſtance : au moyen dequoy l'humeur melancholique & aduſte
y eſt facilement cogneu , faiſant leſion à icelle pluſtoſt qu'aux autres parties exte
rieures. Premierement donc faut regarder la teſte, & ſçauoir ſi les malades ont vne
Share
alopecie , c'eſt à dire , cheute de poil ,aſſez ſemblable à celle à laquelle ſovic ſubiects Premier ligne
de la lepre
naturellement les renards , & regeneration de cheueux greſles, courts & ſubtils: qui
p
fefait, pource que l'action de Nature en l'habitudedes poils , eft corrompuë par le prefense.
LE
defaut d'alimens propres , & parcant il eſt neceffaire qu'ils toribent. Adjouſte que
les humeurs & vapeurs enuoyees & ſuſcitees des parties naturelles & inferieures
d'un ladre , en haut , fontſiaduſtes, que de leur acrimonie ils rongent la racine des
poils , & aliment qui pourroit eſtre enuiron icelle , de ſorte qu'iceux ne peuvent au
cunement ſubGfter. Et à cauſe de l'imbecillité de la partie ,ilsreuiennent plus delicz
RRr ij

1
.
742 Le vingtieſme Liure ,

& greſles: pareillementon leur arrachera des cheueux , & de la barbe , & des ſourcils, A
& verra on ſi auecques leur racine on arrachera quelque portion de chair : cartelle
2 choſe ne ſe fait, que par pourriture & corruption du ſuc alimentaire . Pour le ſecond
, ſçauoir s'ils ont destu
der. ſigne , faut taſter du doigtles ſourcils, & derriereles oreilles
fourcils
Des du
riere des bercules granuleux ,c'eſt à dire , grains ronds & durs , à cauſe qu'en la lepre la vertu
areilles. allumilatiue defaillant, fait que le nourriſſement venant aux parties , ne ſe peut aſli
miler entierement & parfaictement: parquoy arreſté & comme conglobé en lieu
eſtroit, cõime derriere les oreilles,dela propre craſlitie & terreſtrité , il demeuregra
nuleux: laquelle choſe appert , & ſe monſtre principalement au viſage, & aux parties
3 deſnuces de chair : & tel ligne eſt fort certain. Dauantage, ils ont lesoreillesrondes,
Des oreilles, pour la conſomption de leurs lobes & parties charneuſes par defaut d'aliment ſuffi
fant,groſſes, eſpeſſes, & tuberculeuſes,à cauſe de la craſſité & terreſtrité de l'alimēt ,
4
qui affluë à la partic ,ce que nous mettrons pour le troiſieſme ligne. Pour le quatriela
Dufront.
me , ils ont le froneridé comme vn Lion ,dontaucunsontappellé ceſte maladie ,Mor.
bus leoninus. Ec telle ſiccité vient de toute l'habitude du corps:auſſi voyons - nousl’eſ 3
B
corce d'vn vieux cheſne, & la face de nos vieilles gens,eſtre toute pleine derides.Lc
S
cinquieſme , ils ont le regard fixe & immobile,à cauſe que les muſcles faiſans le
Däregard.
mouuemenç de l’æil , reſeichez par faute d'humidité , qui lesrend gliflans & lubri
ques , ſont moins prompts à ſemouuoir . Et les yeux ronds: car les yeux deſoy ,& de
leur propre ſubſtance, font preſque ronds . Or ce qui fait qu'ils apparoiſſent en nous
plats par deuanc , & tendans en poincte par derriere, vient de la concurrence & figu
redes muſcles, & graiſſe qui les enuironne. Parquoy iceux conſommez par faute de
nourriture, ou parl’acrimonie de l'humeur qui leur eſt enuoyé,ce n'eſt de merueille,
ficomme deſnuez de leur veſtement, ils ſe monftrent ronds . Pareillement ils ontles
yeux rouges ,enflammez, & luiſans comme ceux des chats à cauſe de l'ardeur desel
prits , & humeurs acres & aduftes : & vrayement le temperament des ladres eſtfort
ſemblable à celuy du chat , fçauoir ſec & melancholique, commeaulli les mæurs, én
ce qu'ils ſont malicieux commeeux . Le ſixieſme,ils ont les narines larges par dehors,
Des narines, & eſtroites par dedans, à cauſe de l'aliment terreſtre, groſſier & melancholique, le
quel pouffé du dedans en l'extremité des narines , les efleue en tumeur par dehors: 0
dont s'enſuit que pour l'eſpeſſeur dudict humeur , leur cauité interieureſe
monſtre
moindre , & comme bouchee. Icelles narines ſont pareillement corrodees, crouſteu
ſes & vlcerees , dont ſouvent en ſort duſang, & le lepcum cartilagiuoſum corrodé & C

conſumé , & ſont veus eſtre camus , d'autant que toute la face elt tumefice, imbuë &
enflee de mauuais ſuc :ce qui auſſi peut proceder de l'acrimonie de l'humeur quicor 1
2
rode les os qui font l’eminence du nez , ou font contraction d'iceux au dedans, dont
7 pour la cauicé apparente ils deuiennentcamus . Le ſeptieſme, ils ont les léures fort
Des léures
gencives, groſſes, elleuces, & les genciues ordes, puāces & corrodees,à cauſe des vapeurs acres,
8 dont les dents ſont deſcharnees. Le huiētieſme,ils ont la langue entlee & noire,
BE
Dela langue. pour meſme cauſe que leurs narines : car commel'air extremement chaud del'Afri
que; par reſolution dela portion plus ſubtile, eſpeſſic les humeurs accirez en l’excrc
inité des léures des hommes de ce pays : ainſi la chaleur interieure des ladres fait le
ſemblable des humeurs pouſſez au dehors vers ceſte partie , laquelle outre le mõſtre
réuerſee à faute d'appuy , pour ſouftenir vn tel faix d'humeurs. One deflus & deſſous 95
0
des tubercules ,ou pecites glandulertes,ou grains, comme on voitaux pourceaux la D
02
dres , & les veines de deſſousapparoiſſent groſſes & variqueuſes. La cauſe eſt, que la
201
langue eſt vn corps ſpongieux : parquoy il eſt aiſément imbu des humeurs qui re
gnécpar tout le corps . Et pour le dire en vn mot,ils ont toute la face tumefiee & cou

perolee de couleur rouge,obſcure, lucide , & les yeux filamboyans, hideux, & eſpoư.
uentables à regarder , comme Satyres: laquelle chole procedede la cachexie &mau
uaiſe habitude de tout le corps . Or la couleur du cuir eſt un ſigne tres - certain des hu
meurs quiabondent & dominent aux corps:partantveu que l'humeurmelancholi
que quicauſe la lepre , eſt gros& aduſte , il s'enſuit quela couleur du cuir , & princi
palement de la face , foit liuide & plombine. Ce qu'il faut entendre de ce qui appa
foiſt le plus ſouvent : car autrement la couleurà quelques ladres tend ſur le iaune, à
autres ſur le blanc,ſelon qu'eſt l'humeur quieniceuxregne. Car ainſi la pluſparc des
be
Eſpeces de Medecins font trois eſpeces de ladrerie :rouge ou noiraître,faicte de ſang,oumelan
ladrerie. cholic naturelle : iaunaltre faicte de cholere :blächealtre faicte de pituite, le coutbru
1 De la petite Verole, & Lepre . 743

A lé & recuit par la chaleur non naturelle . Leg.leurhaleine eſt fort puante , & genera 9
leméc cous les excremens qui ſortér de leurs corps , ſentans la fauuagine qui comence De l'haleine
Το
ja à ſe pourrir,pourle venin conceu en leurs humeurs. Lero.ils ont la voix enroüée ,
& oucre qu'ils parlent du nez : ce qui aduienc à cauſe queleurs poulmons , nerfs recur. De la voix .
rens , & muſcles du larynx , ſont offenſez & imbus de la matiere virulente , & qu'ils
ont la cauité du nez bouchée : la trachée arcere , come toutes les parties du corps, forc
reſleichée, trop aſpre & inegale , ainſi quelon voit aduenir à ceux qui ont largement
beu des vins trop chauds, forts & puiſſans: pour laquelle meſme cauſe ils ont grande
2013 it
difficulté de reſpirer, ſur la ſeichereſſe des muſcles ſeruas à la reſpiration . L'onziéme
De la defe
eſt, qu'ils ont morphea , & defedation vniuerſelle de leur peau , & l'ont pareillement darion du
creſpie comme vneoye maigre déplumée, à ſçauoir, aſpre, aride, & inegale : icelle ſe euir,dartress
ridác & grillant par l'aduſtion & ficcité interieure des humeurs , de meſme façó qu'vn & glädules.
cuir au feu ou au Soleil . Auſſionc pluſicurs darcres & vilaines galles , deſquelles fou
uentesfois ſortent des crouſtes, comme eſcailles de carpe , ou autres poiſſons, & onc
01
auſſi pluſieursglandules:leſquelles choſes procedent à cauſe des humeurs alterez &
corrõpus , & principalemét de la malice du gros ſang melancholique & adufte, pour
n'eſtre bien claboré par l'ceuure de nature ,& regy par la faculté nutritiue :& parcant
il ſe procréeyne chair craſſe ,ſcryrheuſe,dure,aſpre, & inégale.Donc veu qu'en ceſte
maladie il y a grād erreur en la faculté nutritiue, & par conſequent en l'aſſimilatiue :
de là l'enſuit que l'aliment n'eſtant bien elabouré,ne peut etre chágény aſſimilé . Er
par tel defauc,ileſt neceſſaire que ces tubercules ſe facenten la chair , & qu'elle ſoit
dure, & toute la peau aride, inegale , & de mauuaiſe couleur, & vlcerée en plufieurs
1 4.09
แ endroits, tancà cauſe de la craſlitie & terreſtrité,que pour l'acrimonic d'iceux:& ce 12
ituy- cy doit eſtre bien noté entre tous les ſignes. Le douzieſme, ils fentent parfois de l'ardeur
Godoy
grāde ardeur & pun &tions par tout le corps,cõme ſi on les piquoit d'aiguilles: qui ſe du corps, g
Hadire fait à cauſe d'vne vapeur maligne qui l'eſleue des parties interieures,
& eft retenuë des punétiõs.
ſous la peau , & ne peut libremēt ſorcir, pource que le cuir eft fait gros , denſe , & eſpés,
par l'aduſtion des humeurs pourris : parcát la vercu expulque eſt continuellement ſti 13
mulée à ieteer hors les vapeurs acres & mordicantes. Le treizieſme eſt, qu'ils ont vne Des muſcles
cmaciation ou amaigriſſemēc ,& conſomption des muſcles qui ſont entre le poulce & conſumer.
le doigt index : non point ſeulement, pource que la faculté nutritiue a defauc d'ali .
2014 menspournourrir leſdits muſcles ( cartel defauc eſt general par tous les muſcles du
corps) mais pource qu'iceux, commele Tenar , ayans ync eminence manifeſte, la de
preſſion & emaciation ,comme choſe eſtrange & inaccoultumée,eſt pluſtoſt remar

nen. quée en iceux: & pourceſte raiſon ils ont leseſpaules protuberantes en forme d'ailes , 14
à cauſe de la conſomption & emaciatio de la partic interieure dumuſcle trapeze. Le Dela limpexử
slac quatorziéme , ils ont vne ſtupeur ou diminutio de la faculté ſenſitiue, à cauſe que les ou diminutio
nerfs ſont remplis d'humeurs melancholiques , gros & terreſtres : qui fait que l'eſprit de la faculté
animal ne peut reluire & eſtre porté par iceux aux parties qui en ont beſoin, dont fenfitiue.
f'enſuic ſtupeur. Veritablementie meluis ſouuent trouué à l'efpreuue des ladres, &

coola entre cous les ſignes dignes d'eſtre bien notez ,ceſtuy.cy m'eſtoit comun, c'eſt que les
ayant picquez d'vne affez groſſe & lógue eſpingle au gros tendon qui ſ'attache au ta
reler lon ,quieli fort ſenſible par deſfus les autres, & voyant qu'ils n'en ſentoient rien , bien
quei'euſſe pouſſé l’aiguille fort auant , ie conclus que veritablement ils ſont ladres.
‫ گیرن‬،
D Or pourquoy ils perdent ainſile ſentiment, le mouuementleur demeurant entier, la
cauſe eſt que les nerfs qui ſont diſſeminez au cuir ,ſont plus affectez, & ceux qui ſont
el
auxmuſcles,ne le ſont tant : & pource quand on les pique profondement; ils ſentent
Isyn IS
la picqueure , ce qu'ils ne font à la ſuperficie du cuir. Le quinzieſme, auec ce qu'ils Du ſentiment

‫وبانگی کر‬ n'ont point oupeu de ſentiment en leursextremitez, & icelles tombent principale des extremi
menten la declinaiſon,à cauſe que la faculté expultrice iette les humeurspourris qui seze
la moleſtent, le plus loing qu'elle pour des parties nobles,dont vient que l'humeur
MTK
melancholique eſtant de ſubſtance groſſe,accompagnée du virus lepreux,oppile les
nerfs,de faço quel’eſprit ſenſitif ne peut penetrer& reluire iuſqu'aux extremitez , leſ
quelles ſont loing de la chaleur naturelle: ioint que depuis que l'une des principales 1
16
facultez māqueen vne partic ,lesautres la deſdaignent,& n'y reluiſent aſſez ſuffiſam
Des fonges
mét pour la fympathie qu'elles ont lesvnes auec les autres, & par ainſi la partie com
o imagina
been totale mortification .Leſeiziéme,ils ont fonges & idées en dormant fort épou tions espon .
uentables : car quelquesfois il leur eſt aduis qu'ils voyent des diables ,ſerpens, & ma- waniables :
RRr iij
744 Le vingtieſme Liure ,
noirs obſcurs,ſepulchres,corpsmorts,& autreschoſes ſemblables leſquellesimpref- A
fions ſont faictes au ſens comun,à cauſe des vapeurs fuligineuſes de l'humeur melan
17
cholique,qui mõrent au cerueau,ainſique nous voyās auſſi aduenir àceux qui eſtans
De la caute mordsdechiensenragez,combent en hydrophobie.Pour le dixſeprieſme,nousmet
le furie trons, qu'ils ſont quaſitous caureleux,trompeurs,& furieux ſur le commencement,
deſir du coit.& increment de leur maladie,à raiſon de l'aduſtion des humeursà laquelledauanta
ge la ſiccité ſere d'aiguillon : mais en l'eſtac & declinaiſon de la maladie,ils deuiennět
cauteleux & trompeurs, & ſoupçonneux, à cauſe qu'ils ſont deffians d'eux -meſmes,
à raiſon de la melácholic,qui froide & feiche,les rend ineptes à executer toutes cho
ſes,ſoit du corps ou d'eſpric: d’où vient que craignans toutes choſes, voire les plus
aſſeurées, ils caſchent touſiours à paruenir & ſuppléer par malice , ce qu'ilsſçauenc
leur defaillir d'eſprit & d'addreſſe : qui eſt la meſmecauſe pourquoy les vieilles gens,
Du deſir les malades,& femmes ſont ſur tousſubjets à cels vices. Ils defirentauſſi grandemenc
du coit.
la compagnie des femmes, & principalement au temps de l'accroiſſement & eſtat de
leurmaladie,à raiſon de la chaleur eſtrange qui les brule au dedans: mais en la de
clinaiſon ils abhorrent cel deduit,parce que leur chaleur naturelle eſt preſque exha B
lée & elteinte. Cela peutauſſiprouenir de lacraſſicie de leurs humeurs, leſquels ou.
18
tre qu'ils ſont terreſtres, ſont dauantage embroüillez d'un eſprit flatulent excité &
proumenédedansla maſſe ſanguinaire par la chaleur non naturelle. Lc dixhui& iel
Delprise. me,leur vrine eſt eſpaiſſe comme celle desiumens,& quelquesfois ſubtile,pour l'an
guſtie des vaiſſeaux paroù paſſe l'vrinc, par leſquels leplusſubtil s’euacuë : icelle eſt
auſſi quelquesfoisblafarde,& de couleur cendrée, & fecide,comme tous leurs autres
19 excremens. Le dixneufieſme, ils ontle fang foregros, aduſte,& decouleur noiraſtre
De la qualité
du lango
& plombine : & fion le laue,on le trouuera arenuleuxen fa profondité pour la gran
20 deaduſtion.Levingrieſmeeſt,qu'ils ontle pouls fortdebile & languide àraiſon que
Du pouls. le cæur & facultépulſatile reſidente en iceluy , eſt tellement opprimée des vapeurs
fuligineuſes qui s'efleuent de leurs humeurs grolliers & melancholiques, qu'elleno
peut librement battre. Or nous auonspluſieursautres ſignes de ladrerie, commedu
recé de ventre,à raiſon de l'ardeur du foye : rots frequencs, à cauſe de la frigidité de
l'eſtomach , cauſée de l'humeur melancholique qui regorge en iceluy :frequence
La peau des ſternutation,pour la plenitude du cerucau : mais entre tous,ceftuy leureſt fort fre
ladres appa quent,c'eſt que leur viſage & tout leur cuir apparoiſtcouſioursonétueux, à raiſon de bil
Toilfonctueu: l'ardeur & chaleur non naturelle,qui diſſout & liquefie toute la graiſſe qui eſtſousla 1

fe. peau,doncelle ſemble toute arroulée. Ce qui ſe cognoiſtra, ſi on leur iecte de l'eau
netre ſus la peau : car lon verraicelle ne s'arreſter en aucun lieu par fautedepriſe. Or
des ſignes ſurdics,les vns ſont vniuoques,c'eſt à dire,quidemonſtrent veritablement
la lepre:les autres ſont equiuoques ou communs , & ſuruenansà d'autres maladies
qu'à icelle lepre, toutesfoisſeruent grandement àla cognoiſtre.Etpour concluſion ,
ficoutes ces choſes-là,ou la pluſparc,fonttrouuées, elles demonſtreneveritablement
la ladrerie parfaicte.
Dis prognoſtic de Lepre. C H 4P. XI.

Lepre here A Lepre eſt vne maladie heredicaire & contagieuſe,quaſi comme la peſte,
dituire. & du tout incurable,comme auſli ſouuent eſtla peſte.Ceſte contagion eſt
ſi grande qu'elle vient aux enfansdes enfans,& encore plus loing,dequoy D
l'experience faitfoy. Orelle eſt incurable,parceque (comme nousauons
dit ) c'eſt vn chancre vniuerſel detout le corps : car fi vn chancre qui eſt en vne ſeule
partie d'iceluy,ne reçoicaucune curacion ,comment ſe pourra guarir celuy qui occu
pe vniuerſellement tout le corps. Auſſielle ne ſe peut guarir, parce que le mal eſt plus
La lepre eſt grand,que remede aucun qu’on ait iuſques à preſent peu trouuer & inuenter. Oucre
premieremêt
au dedans plus,ilfaut eſtimer que lorsquelesſignes apparoiſſentau dehors, le commencement
t
qu'audehors. eſt long temps auparauan au dedans,à
raiſon qu'elle ſe fait touſiours pluſtoſt aux
partiesinterieuresqu’exterieures: toutesfois aucuns ont la face belle, &le cuirpoly
& liſſé,ne donnant aucunindice de Lepre par dehors, comme ſont les ladres blancs,
appellez Cacots, Cagots, & Capots, que lon trouue en baſſe Bretagne,& en Guyen
ne versBordeaux, où ils les appellentGabets:és viſages deſquels,bien que peu ou
point des lignes ſus alleguez apparoiſſent,fieſt -ce que celleardeur & chaleur eſtrage
leur ſort du corps,ceque par experićce i'ay veu : quelquesfois l'un d'iceux tenát en la
Dela petite Verole , & Lepre. 745

A maiſon l'eſpace d'une heure vne pomme freſche, icelle apres apparoiſſoit auſi aride
& ridée , que ſi elle euſt eſté l'eſpace de huict iours au Soleil. Or cels ladres font Desladres
blancs 8 beaux , quaſi comme le reſtedeshommes , à cauſe que leur ladrerie confi- blancs.
ſte en matiere picuiteuſe, laquelle reſſeichée par aduftion, eſt faiteatrabilaire , fi que
recenanc touſiours fa couleur blanchealtre , apporte toutesfois cels inconueniens,
aux actions de ceux quelle poſſede , quels nous auons cy - deſſus mentionnez des
vrais ladres & deſcouuerts . Davantage, on voit qu'en celte maladie les trois vertus Les trois fa
& faculcez du corps ſont corrompuës & viciées : car premierement l'animale proce . cultez ſont
deprauées
dence du cerueau , eft alterée & changée: ce qui eſt cogneu par les imaginations &
Aux ladres.
fonges terribles & eſpouuantables, & par la difficulté du ſentiment & mouuement
. qu'ont les malades : la corruption de la vitale eſt auſſi cogneuë par la voix & difficul
té , d'haleine & puanteur d'icelle , & par le pouls tardif & depraué :le vice de la na
curelle ſe cognoilt , parce que le foye ne fait ſanguification , & par les excremens
de tout le corps procedans du foye , parquoy nous pouuons conclure que les trois
membres principaux patiſſent en la Lepro.

De faire ſeparer les Ladres de la conuerſion de compagnie des ſains.

CH A P. XII .

R ayant cognçu par les ſignes fuſdics, que quelqu'vn ſera eſpris de
Lepre ja confirmée , & confiderant le danger qu'il y a de conuerſer
auec telles gens , les Magiſtrats les doiuent faire ſeparer & enuoyer
hors de la compagnie des ſains , d'autant que ce mal elt contagieux
quaſi comme la peſte, & que l'air ambient ou enuironnant, lequel Pourquog
nous inſpirons & attirons en nos corps , peuteſtre infe &té de leur haleine , & de l'ex- i'aleine des
halation des excremens qui ſortent de leurs vlceres : & l'homme fain conuerſant ladres eft
aucieux , l'attire , ce qu'ayant fait, il luy altere & infecte les eſprits , & par conſe- dangereuſe.
quent les humeurs , dont apres les parties noblesſont ſaiſies , qui cauſent la lepre . Et Nomb . s .
Ext:
pourceſte occaſion , il eſt bon & neceſſaire de les faire ſeparer , comme i'ay dic : ce
qui ne repugne point aux ſainctes eſcritures. Car il eſt eſcrit que le Seigneur fir ſepa Leuit. 13 :
с
rer les lepreux hors de l'oſt des enfans d'Iſraël. Auſſi au Leuic eſt commandé le ſem
blable , & elt ordonné pour les cognoiſtre ; qu'ils ayent les veſtemens deſchirez , &
la teſte nuë , & ſoient couueres d'vne barbure , & appellez ſales& ords : mais auiour
d'huy on leur baille des cliquettes & vn baril , afin qu'ils ſoient cogneus du peuple .
10 Neantmoinsic confeile que lors qu'on les voudra ſeparer , on le face le plus douce
ment & amiablement qu'il ſera poſſible , ayant memoire qu'ils ſont ſemblables à
nous : où il plairoit à Dieu, nous ſerionstouchez de ſemblable maladie , voire encor
plus griefue. Ecles faut admoncſter que combien qu'ils ſoient ſeparez du monde,
toutesfois ils ſont aimez de Dieu en portans patiemment leur Croix. Qu'ilſoit vray , Matth.6 .
Ieſus -Chriſten ce monde a bien voulu communiquer & verſer avec les lepreux leur LUC . S.
donnant iancé corporell . & fpiricuelle : car ileſt eſcrit qu'vn lepreux ſ'enclina deuất Marc. I.
Ieſus- Chriſt diſant, Seigneur ,fitu veux tu me peux nettoyer , & Ieſus eſtendant Luc 17.
ſa main le toucha , & luy dit. Ie le veux , ſois net : & incontinant ſa lepre fut nec
CI toyée . Outre -pluseſt eſcrit que Icſus vne autrefois guaric dix ladres .
D
De la cure pour ceux qui ſont preparez à la lepre. CH AP. XIII.

GO L nous faut maintenant parler de la cure, toutesfois ſeulement pour Lepre en for
mak ceux qui ſont preparez à tomber en tel deſaltre & diſpoſition :c'eſt qu'il commence .
leur conuient euiter toutes choſes quieſchauffent & bruſlent le ſang , ment eſt cu
& generalement contrarier à toutes celles que nous auons di &tes cy- rable.
STRE
deſſus pouuoir procreer la lepre ,& qu'ils vſenc de viandes qui engen
drene bon fuc & aliinent , leſquelles deſcrirons cy- apres au regime de la peſte: &
ho ſeront purgez , ſaignez, baignez, & cornerez ſelon laduis d'vn do & te Medecin , afin
ODGE de refrener l'intemperaturedu foye , & par conſequent de tout le corps.Valeſien d'oſter les
PLEASE de Tarente,conſeillequ'on leuroſte les tefticules,dequoy ie ſuis auſſi d'aduis :car par teſicules aux
l’inciſion & amputation d'iceux , l'homme eſt mućen temperance feminine , & lepreux,
par ainſi en complexion froide & humide , laquelle eſt contraire à la chaleur & ſei
RRS iiij

3
1
746 Levingtieſme. Liure ,
chereſſe dela lepre : parcant le foye eſt refroidy, & par conſequent ne bruſle les hu A
meurs qui ſont cauſepremiere d'icellemaladie. Orquant à la cure de la lepre con
Deli lepre firmée, iln'yen a point, comme nous auons dit,encor qu’on donne desferpensà
confirmée. boire & à manger,& qu'on faigne, ventouſe ,cornette & baigne les malades, ou
qu'on vſe de pluſieurs &diuers autres remedes. Il eſt vray que par ce moyen onpeut
pallier 8c repouſſer l'humeur au dedans , afin qu'ils ne ſoient cogneus : ce que ie ne
voudrois conſeiller de faire, de peur qu'ils n'abuſaſſent les femmes : & euſſent con
uerfation auec les ſains : mais pour les faire viure plus longuement , ie leur conſeille
ray touſiours qu'ils ſe facentchaîtrer pour les raiſons ſuſdites, & auſſi afin qu'on en
puiſſe perdre plus facilement la progeniture. Maintenant nous parlerons lommai
rement de la lepre des Grecs.

De la lepre des Grecs, dicte du vulgaire Mal Sainet Main , qui eſt une rongne.
CHAP . XIIII.

Ongneeft vncaſperité du cuir,ou ynė plceration legere conioin.


te auec vnprurit, cauſée d'vne picuice nitreuſe & ſalée , & de
melancholie qui ſe pourrit ſous le cuir ,& eft tres- difficile à gua
rir. Pour la curacion il faut eſtre purgé & faigné, éuiter toutes
viandes de haut gouſt qui enflamment le ſang. On baignera le
malade par diyerles fois & l'on mettra dedans le bain choſes rc
mollientes: & au partir du bain touc le corps dumalade ſera frot
té de beurre frais, afin de faire tomber les crouſtes & amollir l'aſpericé du cuir. En
apreson retournera au bain , & dans iceluy ſeront appliquez pluſicurs cornets aucc
ſcarifications, pour cuacuerle ſang contenu entre cuir & chair. Et quelques iours
apres ſerafrotté le corps de l'onguent qui ſ'enſuir. 2. olei iuniperi 3 ij. olei nucum
Zj . olei tartari albi 3 j. vitrioli Romani, falis communis , ſulphuris viuian. 3 iij.
terebenthinæ locæ in ſucco limonum 3 ij. lithargyri 3 B. ceræ modicum : fiat vn
guentum . Or ce medicament ſera de plus grande efficace, ſi on y adiouſte deux
onces de vif-argent, & deux dragmesde ſublimć: & aura grande vercu ,appliqué
apres le bain. Car le bain amollit &ouure les pores , & par conſequent le fait pcac
D
trer plus fort.
Autre.
Prenezracines d'enulacampanaz iij.cuites en forevinaigre,puispilées &paf 其
fées par l’eſtamine, adiouſtez ſoulphre vif 3 B. ius de limon Žij.beurre frais 3 inje
& de ce ſoit faiconguent.
Si larongneeſtrebelle à guarir , les parties malades ſeront frottées de l'vnguent
Enulatum cum Mercurio .
Autre .
Prenez axunge de porc z iiij. fouphre vif 3 1. ſel ſubcilement pulueriſé , terca
benchine lauée vnc once & demie , & de ce ſoit fait onguent .
Des Datires .
Les dartres ſont aſperitez du cuir, commepetites enleueures auec grande de D
mangeaiſon , qui jetrent vne matiere ſereuſe. Pour les remedes topiques, Hippo
crates, a 1 'iure De morbis mulierum , recommande le vinaigreoù l'on aura fait trem
per de la pierre ponce , ou ſoulphre vif. Pareillement l'huile de fourment extraite
fur vne enclumeauec vne paëlle toute rouge ,& en frotter la dartre tant de fois que
l'on cognoiſtra e treguarie : l’eau de ſublimé aura pareille vertu , ou l'eau fortc qui
aura ſeruy aux orfóures.

Fin du vingtiefme liare, de la petite Verole, Rougeole, & Lepre.


-
747
A

TABLE DES CHAPITRES DV VINGT

VNIE SME LIVRE DES VENINS .

2002 Ourquoy l' Autheur a eſcrit des venins .


Chap. j.
Queſtion.
Chap.y.
Auire queſtion.
Chap. ij .
Aſçauoir ſiles animaux viuans de beſtes venimeuſes fontvenimeux,
ea fi on en peut manger fans danger. Chap. iiy .
Des ſignes des venins en general. Chap . v.
PL
opinion d'aucuns reprounée. Chap. vj.
Pour ſe donner garde d'eſtre empoiſonné.
Chap. vij.
B Remedes prompts contre les poiſons.
Chap. vij.
Des Diuerſions.
1 :: :) Chap. ix .
Des venins en particulier .
Chap.x.
De la corruption de l'air.
Chap. xj.
Prognoſtic des venins en general.
Chap x •
Prognoſtic du venin des beſtes.
Chat.xy.
Des beftes venimeuſes.
Chap. xiij .
De la cure vniuerfelle.
Chap.xv.
La cauſe pourquoy les chiens deuiennent piuftoſt enragez que les autres beſtes. Chap.xvj.
Signes pour cognoiſtre le chien enragé. Chap. xvi .
Signes pour cognoiſtre un homme avoir eſtémorda d'un chien enragé. Chap.xvip.
Des accidens qui viennent à ceux auſquels le venin du chien enragé a commencé d'eſtre
TEA imprimé aux parties nobles.
Chap. xix.
Prognoſtic.
cbap. xx .
Cure de la morſure du chien enragé.
Chap. xxj.
C De la cure de ceux qui font tombez en hydrophobie.
Chap. xxi .
De la morſure du piqueure de la vipere.
Chap.xxi .
Duſerpent appellé
coule -fang . '
Chap: x1 .
Du ſerpent nommé pourriſſeur.
Chap.xxv .
Du bafilic.
Chap xxxj.
De certains ferpens eftranges .
( ... ) Chat xop .
De la falemandre.
Chap.xxong.
De la torpille.
ܵ‫ܪ‬ Chap.xxix .
De la morſure d'afpics.
Chap. xxx .
De la morſure de couleunre . Chap.xxxj.
De la morſure du crapaut.
Chap. xxxi.
De la piqueure du ſcorpion.
Chap. xxxij.
De la morſure & piqueure des mouſches & chenilles.
Chap. xxxiij .
De la morſure des araignées.
Chap . xxxv .
D Des mouſches cantharides.
( .. ) Chap. xxxvj.
De la mouſche'nommée buprefte .
Chap. xxxvi .
De laſang -fue que fucce -fang.
Chap.xxxvij .
De la murene .
Chap. xxxix .
hat the end De la pigueure d'une viue.
Chap. xl.
De la piqueare de la sateronde ou paſtenaque.
Chap. xli.
De la venenofité du liéure marin ,
Chap . xlij ..
Du venin du chat .
( . :) Chap. xlij.
De la venenofité de certaines plantes,
Du Bezahar. Chap xlig.
Chap . xlv .
Des metaux d mineraux venimeux .
Chap.xj.
De la proprieté de l'argent vif.
Chap.xls .
Diſcours de la Licorne, contenant les chapitres
xlviy , iuſques à lxv.
-
748

LE VINGTVNIESME LIVRE
traictant des Venins & Morſure de chiens
enragez , & autresmorſures& piqueu
res de beſtes veneneufes.
PAR AMBROISE PARE, DE LA VAL AV
MAINE , CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy
Pourquoy l' Autheur a eſcrit des vexirs.
CHAPITRE 1.

Inq choſes m'ont incité de colliger des anciens ce pecit traiteé A 1

desvenins: dontla premiere eſt,afin d'inſtruire le ieune Chirur


gien des remedes qu'il doit vſer pour promptement ſurucnir aux
affligez,attendant le ſecours du docte Medecin . La ſeconde,afior
qu'il puiſſe auoir vraye & exacte cognoiſſance de ceux qui pour
roient eſtre empoiſonnez, pour fidellement faire rapporcà iulti
ce,lors qu'il en ſera requis. La troiſieſme, auſfi afin que ceux qui
font reſidens aux champs , comme les nobles & peres de familles, ayans mes æuures
puiſſent ſecourir leurs pauures ſubjets , où ils feroient picquez ou mordus des beſtes
venimeuſes ou des chiens enragez, & autres beſtes. La quatrieſme, afin que chacun B
Bonne affe- fe puiſſe preſeruer d'eſtre empoiſonné, & ſuruenir aux accidens. La cinquieſme, et
stion de le deſir que i'ay touſiours eu & auray toute ma vie, de feruir à Dieu &au public aucc
l'Autheut. proteſtatio n deuantDieu de nevouloir enſeigner à mal-faire, comme aucuns mal
vueillansmepourroienttaxer : ains ie deſirerois que les inuenteurs des poiſons fuf
ſentauortezau ventre de leurs meres . Pour doncentrer enmatiere ,nous commen
cerós par la diviſion de venins en general, puis nous pourſuiurons vne chacune eſpe
ce en particulier. Er dirons premieremét ,que veninou poiſon eft vnechoſt laquelle
eftant entrée ou appliquée au corps humain ,a la vertu de lecõbattre & vaincre; cout
ainſi que le corps eſt victorieux de la nourriture qu'il prendiournellemét, qui ſe fait
Que c'eſtque par qualitez manifeſtes, ou par proprierez occulces & ſecrectes. Le Conciliateur au C
yenin , liv. qu'il a fait des Venins dit, que tout venin pris dedanslecorps, de toutes ſes pro
prietez eſt du tour contraire à la viande,delaquelle nous ſommes nourris. Car cõme
la viande ſeconuertiſt en fang , & rend toutes les parties ſemblables aux membres,
leſquels principalement elle nourriſt, ſemettantau lieu dece qui continuellement
Pelcoule de noſtre corps,ſereſout & cõſomme: Aufli le venin tour au cõcraire tranſ
muë le corps & les membres qu'il touche , ettvne nature particuliere & venimeuſe.
Donc ne plus ny moins que tous animaux, & cous fruits que la terre produit,ſe pou
uant couertir en aliment,ſinous les mangeons, ſe tournéten pourricurce : aufli à l'op
polite les choſes venimcuſes priſes dedans le corps,rendent tous lesmēbres de noſtre
Des Venins. 749
A corps venimcux. Car comme tout agent eſt plus fort que le patient ; auſſi le venin
parla plus grande force ſurmonte noſtre ſubſtance, & la conuertiſt en la nature ve
nimeuſe : par meſme raiſon quele feu par ſa tres grandechaleur conuerciſt ſoudai
nement la paille à ſoy & la conſomme. Et pource lesanciens grands inquiſiteurs des
choſes naturelles , ont dit que le venin tue les hommes , d'autant qu'il corrompe la
cemperaturc & complexion de leurs corps.
Ortous venins & poiſons procedent de l'aircorrompu , ou des foudres & conher D'où proce
artifi
res , & leurs cſclairs: Ou du naturel des beſtes, plantes, & mineraux : Ou par dent les der
ce , & ſublimations des meſchans , traiſtres , empoiſonneurs, & parfumeurs : deſ- nins.
quelles choſes ſe prennent les differences. Car tous venins ne font par leurs effects
RE d'vne meſme ſorte , & ne procedent leſdics effets d'vne meſme cauſe :car aucuns
operent par l'excés des qualitez elementaires,deſquelles ils ſont compoſez: autres
operent par leur proprieté ſpecifique ou ſecrette : dont aucuns tuent pluſtoſt , les
autres plus tard . Auſſi tous venins ne cherchent premierement le cæur pour luy nui
B
re , mais nuiſent à certains membres : comme l'on voit les cantharides qui offenſent
la veſſie, la ciguë le cerueau , lelićure marin les poulmons, la torpille quiengourdiſt
& ſtupefielesmains de ceux qui touchent ſeulement le rets où elle eſt priſe . Autres
bleſſent autres parties , puis apres le cæur. Comme l'on veoit lesmedecines qui con
forcent lecæur , comme le ſafran , autres lecerucau , comme le ſtecas ,autres l'eſto
mach , commela canelle, autres autres parties. Il y a auſſi des venins qui operenc
par qualitez manifeſtes , & par qualitez ſpecifiques tout enſemble, comme l'euphor
be , lequeljaçoit que par la force venimeuſe qu'ila de l'excés de fa chaleur,ilinfecte
toutesfois auſli par ſon autre force , qui procede de fa vertu ſpecifique: ce qui ſe co
gnoiſt parle cheriaque , la propre vertu duquel eſt de ſurmonter toutes poiſons qui
operent deleur vertu occulce ,lequel eſt detres-grande efficace contre l'euphorbe.
Que li ledit euphorbenuiſoic de la ſeule exceſſiue qualité , tant ſ'en faut que le the- Belle consemsa
riaque qui eſt de ſoy fort chaud , luyfuſt contraire , que pluſtoſt il encreciendroit fa plation au
force & nuiſance,ce qu'il ne fait. Les veninsqui operent parleur vertu ſpecifique, Chirurgien .
ne le font pas parce qu'ils ſont chauds , froids, ſecs ,ou d'humidité exceſliue: mais
с c'eſt parce qu'ilsont ce naturel particulier des influences celeſtes, contraires à la na
ture humaine.Pource tels venins pris en bien petite quantité , ſont neantmoins d'v
ne force ſi maligne & tant cruelle , que quelquesfois en yne heure ou moins ils
tuent . Les venins ne cuent pas ſeulement pris par la bouche , mais auſſi appliquezex
tericurement. Semblablement les beſtes ne ruent pas ſeulement par leurs morſures,
ou piqueures , ou eſgratigneures : mais aulli par leurbaue ,regard , ou par le ſeul ac
touchement,ou par leurhaleine ,ou par manger & boire de leurſang , ou par leur
cry & liflement , ou par leurs excremens .
Queſtion . CHAP. II.

Omme ſe peut faire que le poiſon baillé en pecite quantité , ou la piqueure


d'vne beſte venimeuſe, monſtre ſes effects en ſi peu d'heure par toutes les
actions du corps , tant animales , que vitales & naturelles, fait enfler tout le
corps, comme vne beſte que l'on veut eſcorcher qu'on aura ſoufflée ? Et comment
auſſi ſe peut faire que la contre -poiſon puiſſe rabbattre vne celle vertu ? attendu
D qu'il eſtimpoſſible qu’vne pecite portion de liqueur ſe tranſporte à tant de parties .
Galien dit, quela ſubſtance du poiſon & contre-poiſon n'eſt point diſtribuée par le
corps, mais ſeulement la qualité d'iceluy. Toutesfois les Philoſophes tiennent que
nullequalité ne peut eſtre ſanscorps. Nous dirons que ces qualitez ſont tellement
diſtribuées par tout le corps, qu'iln'eſt pas neceſſaire que la petice portion dupoiſon
ſoit partie en tant & tant de parts ( car ilſeroit impoſſible) mais il faut entendre que
quant-& - quant que ce peu de poiſon eſt entré dedansle corps , le veningaigne &
conuerciſt en ſa propre ſubſtance, ce qui de prime face luy vient au deuant, ſoitle
ſang qui eſt és veines & arteres , ſoit du phlegme dedans l'eſtomach, & autres hu
meurs,ou és boyaux,doncpuis apres faydeàgaignerlereſtedu corps: ainſi qu'vn Exemple,
Capicaine voulanc liurer vne villeentre les mains d'vn ennemy, taſche d'attirer le
plus d'hommes qu'il peur , pour ſe feruir au iour donné. Le poiſon doncques parce
moyen que i'ay dit , commence à ſeſpandre par les veines, arteres, & nerfs, & ainſi
ſe communique au foye,au caur, & au cerucau , meſme conuersiſten ſa nature tous
!
750 Le vingt-vnieſme Liure ,
le reſte du corps . Et quant eſt du contrepoiſon, pourautant qu'il eſtpris en allez A
grande quantité, eſtant entré dedans l'eſtomach , où il l'eſchauffe , il efleue des va
peurs , leſquelles eſparſes par tout le corps , combattent parleurs vertus la force du
venin. C'eſt pourquoy le contre- poiſon pris en trop petite quantiténe peut vaincre
Il faut quele le poiſon, à cauſe queles vapeurs ne ſont ſuffiſantes poureltre enuoyées en tanc d'en
contrepoicone droits , & partant il faut que le contre poiſon ſoit plus fort que le poiſon , afin de
ſoit plusfort ſurmonter & vaincre le venin du poiſon.
que le poiſon .
Autre queſtion. CHAP . III .

Sçauoir fileſt poflible de donner des poiſons qui facent mourir les hommes
à certain temps prefix , comme d'vn mois , plus ou moins ? Theophraſte dit
que neantmoins qu'ily a des venins qui cuent pluſtoſt, autres plus tard,
toutesfois qu'ileſt impoſible de pouuoir donner vn terme prefix, comme aucuns
penſent. Carce qneles veninstuent , ou pluſtoſt ou plus tard, il ne procede , ſelon
les Medecins , de leur propre naturel & force, mais de ce que la nature de celuy qui
l'aura pris reſiſte plus ou moins auſdits venins : ce que l'experiencemonſtre,car il 9
eſt certain qu'vn meſme venin , d'un meſme poids & meſmequantité,baillé à diuer
ſes perſonnes de diverſes natures, tuera les vns dedans vne heure, les autres dedans
quatre , autres dedans yn iour , & à d'aucunsne portera grande nuiſance : ce qu'on 2

experimente cous les iours aux medecines laxaciuęs: car fidiuerſes perſonnes pren
nent vne meſme medecine de meſme poids,quátité, & qualité,en aucuns elle mon
ſtrera ſubit ſon effe& , en aucuns tard ,en aucuns fera bien petite operation, en d'au
le
tres grande , és autres point du tout, en aucuns purgera ſans faſcherie, en autres auec
Pourquoy grand trauail & douleur : Ce quineproceded'autre cauſe que de la diuerſe & dif-.
Denin tue
pluſtoſt 04 lemblable temperature des malades, laquelle ne ſe peut ſi parfaictement cognoiſtre,
plustard. qu'on puiſſe ſçauoir iuſques à quand la chaleur naturelle ait puiſſance derefilterau
venin. Il procede auſſi de ce qu'aucuns ont les arceres larges ou fortſerrées. Carlo
venin ayant trouué les chemins& conduits larges , non ſeulemencil penetrclegere
ment , mais auſſi aiſément il paſſe auec l'air , qui continuellement entre ennoſtre
corps, pour flabeller & refrigerer le cæur. G
IN

A ſçauoir ſiles animaux viuans de beſtes venimeuſes, ſont venimeux , &


fron en peut manger ſans danger. CH AP. IIII.

Queſtion. Es Cariars, les Cicoignes , lesHerons,les Pans , les Cocqs d'Inde, & au
tres poulaillesmangent& viuencdecrapaux , viperes , afpics, couleuures,
ſcorpions, araignes, cheoilles , & autres beſtes venimeuſes. Sçauoir , fi
cels animaux ayans mangé celles beſtes, puis mangez deshommes ,les peuuent in
Matthiole. fecter & empoiſonner ? Macchiole dir , que tous les modernes qui ont eſcrit des ve
nins , ciennent aſſeurément que cels animaux mangez ne peuuent aucunement
nuire : au contraire ,nourriſſentle corps ne plusne moins que les autres qui n'au
ront mangé celles viandes venimeuſes , parce que les animaux conuertiſſent en
Credence de leur nature leurs viandes venimeufes. Laquelle raiſon & opinion , encore qu'el
l'Autheuro le aye grande apparence que ce venin fe digere & ſe convertiſſe en la ſubſtance
de ces animaux qui en viuent ordinairement , toutesfois ie croy qu'il ne ſ'enſuic D
pas que la chair faicte de tel aliment venimeux , mangée des hommes, ne porte
quelque nuiſance , & croy que fion enmangeoit ſouvent,elle pourroit cauſerplu
Galien. ſieurs maladies , & en fin la mort . l’ay pour teſmoins Dioſcoride & Galien , qui
aſſeurent le laict, qui n'eſt autre choſe que le ſang deux fois cuit , tiré des beſtes
qui paiſſent la ſcamonée, l’ellebore , ou le cichymal, eſtremerueilleuſementlaxa
tif, lion en boit . Pareillement onvoit quand les Medecins veulent purger vn en
fanteſtant encore à la mammelle , donner des medecines laxatives aux nourrices,
Friſoire me- pour rendre leur laict medicamenteux, & purgatif. Ce que i'ay veu de recente me
morable. moire,qu'vne nourrice malade, les Medecins luy ayant ordonné vne medecine laxa
tiue, & l'enfant l'ayant apres tectée auoir le coursde ventre , & eſtoic- on bienempel
ché de l'arreſter,& fuc on contraincluy bailler vne autre nourrice,attendant le temps
que la medecine cult du tout fait ſon operation. Dauantage on veoiclesgrives ayans
mangé de la graine de genéure, que leur chair l'en reſſent. Aulli les poulailles ayans
mangó
1
Des Venins . 751

A mangé de l'aluyne, leur chair eſt amere, & f'ils ont mangé des ails , le ſencent ſem
blablement . Les moluës & autres poiſſons, ayans eſté prinsauec les ails, ils ſentent
ſi fort que pluſieurs n'en peuuent manger : neantmoins qu'on les ſalle , fricaſſe, ou
qu'on les face boüillir , retiennent touſiours l'odeur & ſaueur des ails . Auſſi les con
nins ayans elté nourris depouliot & de genéure, leur chair f'en reſſent,retenantl'o
deur & gouſt plaiſant. Au contraire , l'ils ſont nourris de choux , & de ſang de bæuf
( commeon fait à Paris ) difficilementonen peut manger , à cauſe qu'ils retiennent
le gouſt de choux. le diray encore dauantage , que les Medecins commandent de
nourrir les chéures, vaches & afneſſes d'herbes propres, quand ils veulent faire boi
: ce queGal.dit qu'il n'ignore point
rc leur laict aux he& tiques, ou à d'autres malades , Lim. 2. des
que les chairs des animaux ſont alterées & fumées par la viande & nourriture qu'ils ſimples,
prennent. Or pour le dire en vn mot, ie ſuis d'aduis qu'on ne mange de cels animaux
qui auronc deuoré les beſtes venimcuſes, ſi n'eſtoit longtemps apres, & que premic
rement le venin n'euſt eſté clabouré & digeré , & tranſmué en autre qualité par le
benefice de la chaleur naturelle des animaux quiles auroient mangées : car on voit
B
des morts ſubites aduenir , dont la cauſeeft incogncuë aux hommes, qui peut eſtre
pour auoir mangé de telles beſtes,dont l'vn peuteſchapper , & l'autremourir.Cela ſe
fait pour la preparation & diſpoſicion des corps qui reçoiuent & repugnent au venin .

Les ſignes des venins en general. CHAP . V.

Ous dirons les ſignes des Venins en general , puis nous pourſuya
urons vne chacune eſpece en particulier. Nous cognoiſſons yn
homme eſtre empoiſonné par quelque façon que ce ſoit , quand
il ſe plaint d'unegrande peſanteur de tout le corps , qui fait qu'il
ſe deſplaiſten ſoy.meſme:quand de l'eſtomach illuymonte qucl.
que gouſt horrible à la bouche , tout autre que les viandes com
munes ne font quelques mauuaiſes qu'elles ſoient : quand la cou
leur de la face ſe change , maintenant liuide , cancolt citrine, & de toute autre cou
leur eſtrange & difforme: quand il ſent nauſée & volonté de vomir : quand il a in
quietude de tout le corps , & qu'il luy ſemble que tout tourne c'en - deſſus- deſſous.
Noys cognoiſſons ledie venin prins agir de toute ſa ſubſtance & propriecé occulte, Penin par
quand fans apparence de grande & inligne chaleur, ou froideur ,le malade tombe proprieté oce
culie.
ſouvent en defaillance de cæur, auec yne ſueur froide, à raiſon que tel venin n'a
point pour obje & aucune certaine partie , contre laquelle de cercaine affe & ion, &
quaſi comme par choiselle agiſſe, comme font les cantharides contre la veſlie, & lo
liéure marin contre les poulmons . Mais comme ce venin agir de toute ſa ſubſtance 86

espacio forme ſecrette: ainſi à guerre ouuerte il oppugne la forme & eſſence de la vie , qui giſt
en la faculté vitale , qui eſt aucæur . A preſentnous faut declarer particulierement
les fignesdes venins , qui operent par leurs qualitez premieres & manifeſtes.
1786 Les venins ou poiſons qui operent par leurs qualitez manifeſtes,cauſentleurs pro- Venins qui
pres accidens , deſquels ils monſtrent leurs lignes apparens. Car ceux quiont vne operent par
chaleur exceſſiue, ſubit ilsenflamment la langue & legofier, l'eſtomach,les inteſtins, qualisez mas
& generalement toutes lesparties interieures, auecgrande alteration & inquietude , nifeftes

oila & lueur continuelle . Et ſi auec leur chaleur exceſſiue ils ont vne force corroſiue , &
D
putrefa &tiue, comme l'arſenic, le ſublimé, reagal , verd de gris , l'orpiment, & autres
ſemblables, ils cauſenten l'eftomach , & aux boyaux, des ponctions intolerables , &

G grandes ventoſitez ,leſquelles on oyt fouuent bruire dedans le ventre ,& one vnc
JERNE foifintolerable. Apres ces accidens ſuruiennentſouuenc vomiſſemens auec ſueurs,
tantoſt chaudes , tancoſt froides, 8 defaillance de vercus , puis la mort .

Signes des Veninsfroids.

ed Les venins qui ſont d'vncexcelliue froideur,cauſentauxmalades vn ſommeil pro- Venins

Policia fond,quefouuenton ne les peut elueiller qu'à bien grande peine:aucunesfois ils ef- froids,
lourdiſſent le cerucau ,que les malades ſont contraints faire pluſieurs mouvemens
deſordonnez , tant de la bouche que des yeux,& des bras & iambes , comme fils fuſ- ,
ſent yures ,ou inſenſez:d'abondancilleur ſuruicnt vne grande ſucur froide ,& ont la
SSC
°752 Levingt-vnieſmeLiuc
couleur du viſageliuide, & iaunaſtre,& forchideuſe à voir,& ont toutlecorps ſtupi. A
de & endormy,& f'ils ne ſont bien coſt ſecourus, ils meurent : leſquels venins fone
comme ciguë , pauor , morelle , iuſquiame, mandragore , & autres ſemblables.
Signes des Venins ſecs.
Les venins ſecs ont preſque touſiours la chaleurpour compagne, auec vne certai
ne humidité : car neantmoins que l'on die que le ſoulphre ſoit chaud & fec, toutes
fois il a vne humidité pour congreger la forme, comme toutes autres choſes compo
ſées requierent: mais on donne aux choſes la qualité qui domine en elles. Les ve
nins ſecs rendent la languearide, & la gorge ſeiche, auec vne ſoif non extinguiblc,
c'eſt à dire , qui ne ſe peut appaiſer. Leventre ſe reſerre, & lesautres parties interieu
res , ainſi que le parchemin fait deuanc le feu. A ceſte cauſe l'urine ne ſort qu'à gran
de difficulté: cous les membres deuiennent ſecs & recirez,& les malades nepeuuent
dormir : leſquels venins ſont comme licharge, ceruſe,plaſtre, eſcaille d'airain ,limeu
re de plomb , antimoine preparé , & autres ſemblables.
Signes des Venins humides,
Les venins humides cauſentyn perpetuel ſommeil, flux de ventre , auec relaſche- B
mentde tous les nerfs & ioin &tures : cellement que quelquesfois les yeux ſortent
hors de la teſto. Il ſ'enſuit auſliſouuentvnepourriture des mains, pieds , nez , oreil
les , & vne ſoifextreme, pour la chaleur quiprouient de la grande pourricure, puis
la mort ſ'enſuit. Aucuns tiennent qu'il ne ſe trouue point de poiſon humide , parce
qu'il eſt impoſſible detrouuer d'humiditeziuſques au quatrieſme degré.Toutesfois
le contraire ſe verifie par l'exemple de celuy qui dormāt de nuiet furmordu d'un ſer
Gilb. Ang. pent, ainſi queGilbertus Anglicus recite : & mourant,ſon valec au matin le cirant
Histoire. par le bras le penſant reſueiller, coute la chair dudit bras pourrie comba, les os del
nuez de chair: ce qui ne peut eltre aduenu que par l’exceſſiue humiditéduvenin qui
eſtoit aux dents & baue du ſerpent. Auſli Hippocrates abien dict, que la diſpoſition
Premier liu . de l'année eſtant pluuieuſe & humide,ſujecte au vent de midy, il clt aduenu parcet
des tempera
mens . cc humidité veneneuſe & corrompuë,qu'en aucuns la chair des bras & desjambes
pourrietomboiten pieces , & les os demouroienc nuds & deſnucz d'icelle : non ſcu.
Iement à d'aucuns la chair ſe trouuoit pourrie , mais auſi la propre ſubſtance des os :
d'où on peut conclurequ'il y ades venins d'vnehumidité li exceſſiue, qu'ils peuuent 1

faire mourir les perſonnesparl'enticre putrefaction des membres : ce qu'on voitad &
uenirà la verole, cant groſſe que pecite , & aux charbons & anthrax peftiferez.
Er quand cels & pareils fignesapparoiſſent ,il ſera facile les combattre par leurs OL
contraires : encore que l'on ne cognoiſſe le venin particulierement. Il n'y a point de
fignes certains des venins qui operent par proprieté ſpecifique ou occulte,parce
qu'ils ont ceſte nature de l'influence du Ciel,quineſelineut iamais àfaire la propre
a & ion ,ſans que l'objetde ſon contraire ſe preſente: & partanton ne les cognoiſt que
parexperience, fansen pouuoir donner aucune raiſon ,commela Torpille quiſtupe.
fie le bras deceluy qui la touche, le Liéure marin qui gaſte les poulmons,les Can
tharides qui bleſſent la veſſic, la piqueure de la Viue qui cauſe gangrene & autres
accluens.Ceque nous dirons cy-apres.
L'opinion d'aucuns reprouuée. C H AP. 7 1.
D

Euxerrent grandement, qui diſent que le venin des beltes venimeuſes


cſt froid, parce que ceux qui en ſontmordus,ou piquez, fubit deuien
nent froids, & que lesſerpens (comme craignans le froid quand l'hyuer
4
fapproche) ſe cachent és cauernes ſous terre, ou ſous les pierres,qui eſt
le naturel des Viperes , où quelquesfois on les trouue fi furpriſes de 13
froid , qu'elles demeurent toutes amorties & immobiles , comme ſi elles eſtoientge W
lées.Orveritablement la froidure de ceux quien ſont mordus ou piquez,ne procede
pas de la froidure du venin : mais de ce queleurchaleur naturelle ſe retire des par
ties exterieures aux interieures, pour ſecourir le cæur, & aufli qu'elle eſt ſurmontée
& efteinte par le venin : & ne faut conclure que tous ſerpens ſoient froids, parce
qu'on les trouve en hyuer en leurs trous , cous comme immobiles , & commemorts.
Cela ne procede ſinon que leur chaleur naturelle eſt retirécen leur centre, pourre
After à l'air ambiens qui eſt froid.
Des Venins.
753
loom

Pour fe donner garde d'eſtre empoiſonné.

CHAP. VII .

A maniere de ſe donner garde d'eſtre empoiſonné eſt fort difficile: car les
meſchans empoiſonneurs & parfumeurs , quiſecretcemenc baillent les poi
ſons, conduiſent leur trahiſon & leur meſchanceté li finement, qu'ils trom
pentlesgens les plus experts , & de meilleur iugement qu'on ſçauroit trouuer. Car
ils oſtent l'amertume des venins , & les mellent auec choſes douces: ainſi ils leur
KA
font perdre leur mauuaiſe odeur par la mixcion des choſes odorantes & parfums.
Auli la poiſon donnée auec faulſesappeciſſanteseſt fort dangereuſe, d'autant qu'el
le eſtauallée auidement , & plus difficilement vomie. Ec partant ceux qui craignent
r
d'eſtre empoiſonnez, comme ſouuent aduientaux Prelats & beneficiers pour auoi
B leur de ſpoüille , ſe doiuencgarder de couces viandes appareillées í par gens ſuſpeats)
auec ſaulſes, qui ſont fort douces, ou fort ſalées, ou aigres ,& generalement tou
tes celles qui ſont de haut gouſt. Pareillement eſtans bien alterez nedoivent boire à
grands traicts, ne manger goulument : mais bien conſiderer le gouſt de ce qu'ils

NEA mangent & boiuent . Dauantage ils doiuentmanger des choſes qui rompent toute
la force du venindeuant toutes viandes : & principalement vn bouillon gras faict de
bonnes viandes.Semblablement doiuent prendre au macin vn peu de methridat ,
mark ou theriaque , auec vn peu de conſerue de roſes,puisboire un peu de bon vin ou mal
uoiſic, ou des fueilles de ruë, auecques vnenoix & figues ſeiches, qui eſt vn ſingulier
! remede . Ec où quelqu'vn auroit ſoupçon d'auoir pris quelque poiſon par la bouche,
103
ne faut dormir en telcas: car la force du venin eſt quelquesfois ſi grande & fi forte
ennemie de nature , qu'elle execute ſon pouuoir, que ſouuentellemonſtreteleffe &
en nos corps , que fai&t le feu alluméen la paille ſeiche.Car ſouuent aduient , que
adi
ceux qui ſontempoiſonnez, deuant que pouuoir auoir ſecours des Medecins & Chi
rurgiens, meurent . Dont ſubic il ſe doit faire vomir en prenant de l'huile & cau Remedes
ice
chaude: en lieu del'huilcon fera fondre du beurre , & le prendre auec eau chaude , prompis cona
bila
ou decodion de graine de lin , ou fenugrec ,ou quelque bouillon gras . Car celles tre les pois
5,99 choſes font jetter le venin hors par le vomiſſement :ioint qu'ils laſchent le ventre , fons.
& par telles euacuations le venin eſt vuidé hors , & ſon acrimonie amortie . Ce qu'on
voit parexperience , que lors que nous voulons appliquer des cauteres potentiels ,
ou veſicacoires , fi la particeftoinete de choſes huileuſes,tels remedes acres ne pour
lloc ront vicerer la partic . Dauantage , le vomiſſement profite , non ſeulement parce
qu'il euacuë le venin : mais auſſi,
que fouuent il manifeſte , ou par l'odeur , ou par la
couleur, ce qui aura eſté prins . Eraulli parcel moyen on pourra auoir recours aux re
medes contrarians au venin .

oplokid Apresauoir vomy, ſi on a conie& ure que la poiſon ſoit deſcendue aux boyaux , on
pourra vſer de clyfteres acres , pour euacuer ce qui pourroit eſtre demeuré & attaché
contre les inteſtins. Ecoù le malade ne pourroit vomir, il luy faut faire prendre des
purgations propres, quireſiſtent aux venins : comme eſt l'agaric, l'aloës, la petite
centaure, la rheubarbe , & autres choſes ordonnées par le dočte Medecin . L'on doic
D vſer puis apres de clyfteres compoſez de caſſe, de bouillon gras, auec ſuif de mou
ton , ou beurre , ou laict de vache, &mucilages de lin , & płylij, ou de coings, afin
que la poiſon n'adhere contre les boyaux ,
comme on a accouſtumé donner aux
dyſenteries. Par leur onctuoſité & viſcoſité , ils amortiſſent l'acrimonie du venin
qui peut adherer contre lesboyaux , & defendent les parties ſaines , qu'elles ne ſen
QUE
s tent la force du venin . Ils ſont bons pareillement quand le venin a viceré les parcics
per
6 lat interieures . Pour ceſte cauſe le lai& beu en grande quantité , apres le vomiſſement,
& baillé par clyfteres , eſt vn remede tres- lingulier, parce qu'il compt la force du ve
nin , & ſouvent leguarit. Il faucicy noter, qu'on doic couſiours commencer à cirer
12,0 "
le venin par la voye où il aura entré. Comme fil a eſté baillé par odeur , par faire

ent cſternuer: ſi par le boire ou manger ,par vomiſſement: fi par le liege ,par clyfteres: chofe digne

Bir ſipar le colde la matrice, parfyringuer: fi par morſures, ou piqueures, ou eſgracia d'eſtre nosee,
gncures , par remedes quil'actirent audebors ,comme nous dirons cy -apres,
4

SSS ij
754 Levingt -vnieſme Liure,
Des diuerſions. CA A P. VIII.

Es diuerſions ſont bonnes & neceſſaires , à cauſe que non ſeulement em


peſchent que le venin n’aille au cæur, mais au contraire, elles l'attirent
du dedansau dehors , parcant les ligacures forces , faites aux bras, cuil
ſes & jambes, ſont bonnes. Aufli les grandes ventouſes auec grande
flambe , appliquées ſur pluſieurs parties du corps . Pareillement le bain d'eau chau
de , auec des herbes contraires aux venins , comme l'auroſne, lecalament , ruë , be
thoine , moulaine blanche , marrubin , poulliot , laurier , le ſcordium , l'ache, ſca
bieuſe, menthe, valerienne , & autres ſemblables. Ainſi les eſtuues leiches, & y
faireſuer longuement le malade ; prenant couſiours indication de ſa force & vertu .
Orli acient eſt grand ſeigneur, en lieu de bains & eſtuues , il ſera mis dedans le
ventre d'vn bæuf,ou d'une vache, ou d'un cheual, ou mulet , afin de le faire ſuer,
& attirer parce moyen le venin au dehors : & quand ils ſeront refroidis, il ſera mis
dedans vn autre , & fera- on touces choſesneceſſaires & requiſes en tel cas , & tout B
par le conſeil du docteMedecin , ſ'il ſe peut trouuer.
Des Venins en particulier. CHAP. IX.

Pres auoir diſcouru ſommairement des choſes vniuerſelles des


venins , maintenant il nous faut venir aux particulieres, com
mençans à l'air, puis aux morſures & piqueures, & eſgracigneu
res des beſtes venimeuſes, puis aux plantes & mineraux. Les
beſtes yepimeuſes ſont aſpics, crapaux, viperes, dragons, ſcor
pions , liéures marins, paftenaques, viues, torpedes,araignées,
cantharides , bupreſtes, chenilles de pin , langſues, & infinité
d'autres.
Or leſdites beſtes ne tuent pas ſeulement par leurs piqueures & morſures, ou el
gratigneures ,mais auſſipar leur baue , haleine, eſcume, regard , cry , & fflement, +

vcuë, & par leurs autres excremens . Auſſi celles qui ſont mortesd'elles-meſmes, ou o
Maschiole. pour peſte , ou fouldre, ou rage. Il y a auſli des venins artificiels, & fi cruels , que a 1

on en met fur vne ſelle de cheual , font mourir celuy qui aura eſté quelque temps
deſſus : & autres , que ſi on en frotre les cítriers, percent les bottes de ceux qui ont
les pieds dedans : deſquels venins les Turcs & autres Barbares vſenc ſouuent en leurs
fleches & dards , pour faire mourir leurs ennemis , & les cerfs, & autres beſtes ſau
uages, quien ſontfrappées : qui eſt unechoſe difficile à croire , vea que le venin ap .

pliqué à la ſelle & aux eſtriers , n'a touché à la chair nuë : coutesfois cela ſe peut fai
re : car pour toucher les rets où ſera prins le poiſſon nommé Torpede ,les mains de
meurent ſtupides, & fait mourir l'homme, comme auons dit cy-deſſus. Ainſi le
Bafilic par ſon ſeulregard , & par ſon cry fait mourir les hommes,& cuë toutes au
tres beltes venimcules, qui ſont pres où il fait la demeure. Ie diray dauantage, que le
meilleur vin eſt poiſon ,parcequ'il ofte le ſens & entendemét ,& ſuffoque, & fembla
blement toutes autres bonnes viandes,lorsqu'on en prend en trop grande quantité.
De la corruprion de l'air. CH AP. X.

'Air eſt venimeux & corrompu par certaines vapeurs mellées o


auec luy , comme par vne grande multitude de corps morcs ,
non aſſez toſt enſeuelis en la terre , comme d'hommes & che
uaux , & autres faiſans vne vapeur putredineuſe. Ce qui ad
vient ſouvent apres yne grande bataille , ou apres vn grand
tremblement de terre, lequel ſort dehors, qui auoit eſté retenu
par long temps aux entraillesdela terre , & par faute d'auoir eſté
eſuenté, il a acquis vne pourriture, laquelle eſt diſperſée en l'air, & la cirane en
nos corps , il nous empoiſonne : comme par vne ſeule inſpiration d'un peſti
feré, on prend la peſte. Il y a encores d'autres cauſes de la corruption de l'air,
que nous dirons cy-apres au liure de la peſte. Il y a pareillement du venin en
l'air , qui accompagnelestonnerres , fouldres, & eſclairs, lequel tuë ceux qui en
ſont frappez, ou à grand peine en peuucnt- ils teſchapper, qui ſe fait par vne certaine
! Des Venins. 755
A venenofité ſulphurée, ce qu'on cognoiſtaux corps quien ſont couchez. Etſi les be
an
ftes mangent celles qu'il aura tuées, ellesmeurent& enragent. Et quant au feu du
1 fouldre i,l eſt plus chaud que nul autre feu : parquoy à bon droict il eſt appellé le
feu des feux : à cauſe qu'il a vne chaleur tres-vehemence, & plus ſubtile que l'air : ce
qui ſe void,qu'ilfond le ferd'une pique ſansbruſler le bois,ainſifond l'or & l'argent
dedans vne bourſe ſans l'endommager. Ec parcantil ne ſe faut eſmerueiller l'il fra
caſſe, briſe, & comminuë les osà ceux qu'il couche. Auſſi l'eſclair eſteint & ſuffo
que la veuë à ceux qui leregardent. Le connerrepar ſon grand bruit & tintamarre
tuë les enfans au ventre de leurs meres. Ce qui ſe prouue par Herodian en la vie des
hes Empereurs .
Sur Martia noble Dame Romaine
Tomba du Ciel de lafoudrefondaine:
Sans queſon corpsfür bleßé atteint,
Son enfant fut dedans ſon corps eftaint.
B Pareillement rend les hommes ſourds, & fait pluſieurs autres choſes grandes &
admirables , qu'il eſt impoſſible aux hommes d'en donner raiſon :& parcant nous
pouuons dire, qu'aux fouldres & connerres il y a quelque diuinité. Ce qui ſe peus
prouuerpar Dauid , Pſeaume cent quatrielme,quidit :
Etfouldre & feufort prompts à con ſervice ,
Sont les Sergents de la baute Iuftice.
L'air pareillement eſtenuenimé par parfums & odeurs , & par l'artifice des trai
ſtres empoiſonncurs & parfumeurs lequelnous conuient attirer, pour la conſerua
tion de noſtre vie : car ſans luy ne pouuons viure. Or nous l'accirons par l'accrađion
105, qui ſe fait des poulmons & des partiespectorales dediées à la reſpiracion , & par le
nez és ventricules du cerucau. Pareillement par la tranſpiration qui ſe fait és petits
pores,ou pertuis inſenſibles de tout le corps,& auſſi des arteres eſpanduës au cuir.
Ce qui ſe faic cant pour la generacion de l'eſprit de vie , que pour refreſchir & fer
, menternoftre chaleur naturelle. A celte cauſe fileſtenuenimé , il alcere nos eſprics,
& corromptauſſiles humeurs, & les conuercic en la qualité venimeuſe , & infecte
1,600
0 toutes lesparciesnobles , & principalement le cour: & alors il ſe faic vn combaten
tre levenin & Nature , laquelle ſi elle eſt plus forte, par ſa vertu expulſiue, les chaſſe
dehors par ſternutations & vomiſſemens, ſucurs, & flux de ventre , ou par autres
Gallery manieres, comme par Aux de ſang, ou par les vrines. Au contraire , fi le venin eſt
plus fort ,Nature demeure vaincuë, & par conſequent la mort l'enſuit, auec griefs
& diuers accidens , ſelon la nature & qualité du venin . Or le venin prins par l'odeur
eſtmerueilleuſementſubit, parce qu'il n'a que faire d'aucun humeur qui luy ſerue
de conduite pour entrer en noſtre corps , & agir en iceluy . Car la va peur eſtant ſub
vapeur
tile eſt facilement portée auec l'air , que nous attirons & expirons . Et ſi quelqu'vn
Air me vouloit obje &ter, que par vne torche ou caſſoleon ne peut empoiſonner , atren
110) du que le feu purifie & conſomme le venin , ſi aucun y en auoir : Reſponſe ,neant
5,4 % moins que le feu ſoit eſprisen vne allumette fulphurée , la flamme eſt tres - puante ,
ſentantleſoulphre. Semblablement le feu eſtant eſpris au boisd'aloës , ou genéure ,
ou en autre bonne ſenteur, ne laiſſe à ſentir vne odeur plaiſante & bonne. Orſi on Hiſtoire de
veut voir l'experience,ie mettray ſus le bureau le PapeClement, Oncle de la Royne deux Chara
D mere du Roy, qui fut empoiſonnéde la vapeur d'vnetorcheenuenimée. Matthiole larans.
elles ſur ce propos parlant des venins , dit , qu'en la place de Senes , il y auoit deux Char
Tv
latans Theriacleurs :l'vn des deux auoit empoiſonnévn æiller , lequel il bailla à Alai
rerà ſon compagnon , & l'ayant ſenty, ſubit tomba en terre roide mort.Dauantage,
yn quidam derecente memoire , ayant odoré vne pomme de ſenteurs enuenimée,
ſubitle viſage luy enfla, & eutvne grandevertigine, de façon qu'il luy ſembloid que
tout rournalt c'en -deſſus-deſſous,& perdit pour quelque temps la parole & toute
cognoiſſance, & n'euſt eſté qu'il fut promptement ſecouru par ſternutatoires, &
autreschoſes, il fuft allé auec le Pape Clement. Le vray alexitere de ces parfums
enuenimez , c'eſt de non iamais les odorer,& fuir tels parfumeurs commelapeſte,
& leschaſſes hors du Royaume de France , & les enuoyer auec les Turcs & Infide
. les .

SSS iij
756 me
Le vingt -vnieſ Liure ,

A
CH AP. x 1.
Prognoftic des Venins en general.

L ya pluſieurs forces de venins , auſſi ils ont diuerſité d'accidens: car il elt
impoffible que tous accidens qui ſuruiennent aux poiſons, ſuiuent à vn
certain poiſon. Car autrement c'euſteſté choſe ſuperAuë aux Autheurs de
traitrer chacun poiſon à part , & des remedes particuliers de chacun . Donc
on ne trouuera point qu'un ſeul & melme venin cauſe vne exceflive chaleur d'efto .
mach , de ventrc, de foye , veſlie , reins , qu'il face venir le hocquet, qu'il face trem
1 bler & friſſonnertout le corps, qu'ilofte la parole , qu'il faceconuullion, qui rende
le pouls languide , qui empeſche la reſpiration , qui rende la perſonne couce endor
mie & aſſoupic, quicauſe vertigine ou tournement de teſte , quieſbloüiſſc la veuë ,
qui eſtrangle, qui alcere , qui face Aux de ſang , qui cauſe la fiéure, qui recienne l'v:
rine ,qui prouoque continuel vomiſſement , qui face rougir le malade, qui le rende
liuide , palle , inlenſé , qui le face ronfler & peter , perdre toute force, & plusieurs
autres accidens, que les venins particulierement font. Et quand ces accidens ſure !
uiennent aux empoiſonnez, il elt difficile de bien cognoiſtre queleſt le venin qu'on
aura pris . Il eſt vray que les venins chauds tuentpluſtoſt que les froids, parce que la
chaleur naturelleles reduit plus promptement de puiſſance à leur effe &, qu'elle no
Liu.des lieux fait les froids. Galien dic qu'il ſe peut engendrer en nos corps vne ſubſtance appro
affectez chis . chante du venin.le dis que celvenin eſt bien difficile d'eſtrecogneu.

Prognoſtic du Venin des beſtes, CHAP. XII.

Des morſures Ornelius Celſus , & tous les anciens Medecins, tiennentque tou.
opiqueures tes morſures & eſgratigneures , piqueures & baue des animaux
qui font fore participent de quelquemauuaiſe qualité,toutesfois lesynes plus,
venimeuſes.
& les autres moins. Les plus ſont celles qui ſont faiếtes de beſtes
venimeuſes, comme d'aſpics, viperes , couleuures, & autres fer
pens, baſilic, dragon, crapaux, chien enragé, ſcorpion, araignes,
mouſches à miel, guelpes, & vne infinité d'autres . Lesmoinsvenimeuſes ſone cel

les qui ſont faictes d'autresanimaux non venimcux , comme le cheual, le linge,lo
chat , le chien non enragé, & pluſieurs autres: leſquels, encores qu'ilsne ſoient ve
nimeux , leurs morſures ſont toutesfois plus douloureuſes & difficiles à guarir , que
1
les playes ordinaires faictes d'autres cauſes: ce qui aduient, parce qu'ils onten leur
faliucubaue ,quelque choſe contraire à noſtre nature , laquelle induit vne mau
uaiſe qualité en l'vlcere , la rendant plus douloureuſe, & rebelle aux remedes :cc
que non ſeulement nous apperceuons en celles morſures , mais auſſi aux eſgrati
gncures des beſtes qui ont des ongles , comme les lions , les chacs , & autres . Au
cuns ne veulent excepter de ceſte condition de morſure , celle des hommes , affer
DF
mans icelle participer de quelque venenoſité , & principalement des rouſſeaux pi
VE
quotez de marques cannées , noires, & autre couleur , qu'ils ont par tout leur corps
,
& encores plus ſ'ils ſont cholerez .,
Quant à ceux qui ne ſont de cel temperament,
on peut tenir leur morſure n'eſtre participante d'aucune venenolité, à raiſon de leur D
Saliue, laquelle on voit par experience eſtant appliquée és petics vlceres, les gua
rir . Parquoy la difficulté qui vient de guarir la morſure qu'aura fait vn homme non pou
roux , vient à raiſon de la meurtriſſeure qui ſe fait au moyen des dents , qui ſont
mouces & non tranchantes , leſquelles ne peuucnt entrer dedans la chair , ſinon en
eſcachant & contufant , comme ſe fontlescoups orbes , & les playes faides auec des
pierres ou baſtons, ou autres ſemblables , leſquelles on voit eſtre plus difficilesà
guarir , que celles qui ſontfaictes auecques glaiues tranchans . Et pour retourner à
noſtre propos , nous dirons qu'entre les beſtes que nousauons dit eſtre les plus ve
Pourquoy le
senin dela nimeuſes , il ſ'en trouue peu quiſoient de cardiue operation : mais elles font com

nimal vif est munément mourir ſoudainement ceux quien ſont mords ou piquez. Surquoy faut
Tv
plus dange- obſeruer, que les venins jettez par les animaux vifs, ſont plus forts & violens que
reux que lors de ceux qui ſont morts , d'autant qu'ils ont vne chaleur naturelle , qui leur ſert de
qu'il eſt mort, vehicule pour les conduircau corps . Auſſioutre ce , la tenuité dela ſubſtance fais
que le venin en eſt plus haſtif.
Des Venins.
757

A Dauantage , ily a des beſtes qui ont le venin fi dangereux, qu'ilfaic mourir vne
perſonne en moins d'une heure , commeſont les aſpics, balilics , & crapaux . Les au
tres n'ont leur venin ſi furieux ,donnans induces deux ou trois jours , & quelquesfois
plus,deuant que faire mourir la perſonne,commela couleuure , & autres. Outre lef
quelles il y en a qui donnent encores plus long eſpace de vie , comme le fcorpion &
araignes. Bref , il y a certains venins, leſquels eſtans entrez au corps de l'homme , A aucuns
voite en petite quantité , y operent d'vne li grande violence & prompticude , que faic Senins
le feuen la paille ſeiche,tellement que lon n'y peut remedier par aucunemaniere, à d'yimpoſible
remedier.
cauſe que la vertu du venin eſt plus grande que le remede n'eſt fort: & partant alors
il renuerſe ,conuercic & tranſmuë promptement les eſprits & humeurs en ſon natu
sel . Car coucainſi que les viandes que nous mangeons,ſe conuertiſſent en noſtre na
ture :auſſi au contraire,tels venins eſtans dedans noſtre corps , rendent tous les mem
bres infectez ,non moins que l'air peftilent eltantreceu par vne ſeule inſpiration d'un
homme peſtiferé. De ceſte malignité aduient qu'aucuns ont vne grande inquietu
B de,8e meurent furieux & enragez.Au contraire, on en voic d'autres qui ſont fort
afſoupis & endormis , & deuiennent enfez comme hydropiques . Outre ces choſes, selon le lies
faut entendre , que le lieu & le temps auquel les beltcs venimeuſes ſont nourries , auquel les
donnent plus ou moins de vigueur à leur poiſon. Carcelles qui ſont nourries aux beftes venia
montagnes & lieux ſecs, ſont plus dangereuſes que celles qui ſont nourries és lieux meuſes nais
froids & mareſcageux. Auſſi toutes morſures de beſtesvenimeuſes ,apportent plus penin eſt plus
de danger en Eſté qu'en Hyuer, Dauantage celles quiſont affamées,ou ont eſté iro oumoins fort
ritées ,ſontplus dangereuſes que les autres , & leur venin eſt plus pernicieux à ieun, violent.
qu’apres qu'ils ont mangé. Pareillement les ieunes , & qui ſont amoureuſes, c'eſt à
dire, en rut , font plusmalignes que les vieilles,& que celles qui ne ſont en rut . Aufli
on cient que le venin des femelles eſt plus dangereux que celuy des malles. Plus , les
piqueures & morſures des beltes venimeuſes quimangent les autres beſtes vene
neuſes ( comme les couleuures qui mangent les crapaux, & les viperes qui mangent
les ſcorpions& araignes , & les cantharides & bupreſtes) ſont beaucoup plus perni
cieuſes que les autres qui n'en mangent point . Or l'impreſſion ſubite,ou la reſiſtance Pourquoy
au venin ,aduient le plus ſouvent ſelon que le venin eſt de ſubtile , ou de groſſe fub- ceux quifont
mord's
on pi
ftance,ou que la complexion & temperature de ceux qui ſont mords ou piquez, eſt
chaude ou froide, forte ou debile. Car ceux qui ſont de temperature
chaude, ont quan,memrën
sos leurs veines & arteres plus groſſes & dilatées, comme nous auons dit par cy -deuant, plustard les
Sa & par conſequent tous les conduits du corps plus ouueres, qui fait que le venin paſſe ons queles
& entre promptement iuſques au ceur : ce qui ne ſe fait li ſubitement à ceux qui autres.
ſont de temperature froide,& qui ont les veines & arteres plus ferrées, & par conſe
quencle venin ne penetre ſi coſt, quifait qu'ils meurent plus tard : non plus ne moins
que nous voyons aduenir ſouuentesfois par lesmedecines laxatiues, qu'on donne
aux malades, que deux dragmes de rheubarbe feront plus à vn , que quatre à vn aus
cre,pour la diverſité des complexions de ceux qui la prennent. Dauantage, les vc
nins ne peuuent tant nuire à ceux quiont mangé & beu , qu'à ceux qui ſont à ieun ,à
cauſe que par les alimens,les veines & arteres, & les conduits du corps eſtans remplis,
& les eſprits fortifiez,cela garde que le venin n'agit li fort & promptement , qu'il fe
roit fi le malade n'auoit mange ny beu . Et voila les raiſons pourquoy ceux qui ſono
o mords ou piquez , meurent pluſtoſt ou plus tard les vns que les autres , ayans eſté em
poiſonnez de beſtes venimeuſes. Or lile venin opere par qualité occulte, le progno
ſtic & lacure en font fort difficiles : & alors faut auoir recours aux alexiteres, qui ont

auſli vne propriccé incogneuë , & principalement au cheriaque , pource qu'en fa


compoſition il y entre des veninschauds , froids, ſecs, & humides, & pourtant il reſi
îte àcousvenins , & principalement aux naturels , comme de beſtes, plantes & mine
raux , & non aux artificiels, deſquels à la mienne volonté que iamais homme n'euſt
mis la main à la plume pour en eſcrire, & n'euſſent iamais eſté inuentez, à fin que
nous n'euſſions à combattre que les naturels des beſtes , pource qu'on len peut
mieux garder , que de ceux qui ſont faits par la malice des craiſtres, meſchans bour
reaux , empoiſonneurs & parfumeurs.

SSS iiij
758 Le vingt-vnieſme Liure ,
A
Cure de la morfure & picqueure des beftes venimenfes,
CH A P. XIII,

L faut promptement & fans delay remedier à la morſure & piqueure des
beſtes enragées & venimeuſes par cous moyens , qui conſument le venin,
à fin qu'il n'entre dedans le corps, & ne corrompeles parties nobles; deſ
quelles cour venin de ſon naturel ne demande que la mort & deftru & ion .
Et ſi par nonchalance, ou ignorance, les remedes propres ſont delaiſſez & intermis
au commencement, certainement en vain ſerontappliquez en autre temps , princi
Deux indi- palement ſi la matiere venimeuſe a deſia ſaiſi les parties nobles. Donc pour comn . 1

cations pour mencer celte cure,lesanciens nous propoſent deux indications, à ſçauoir,vacuation
curer lamor. de l'humeur virulent & venimeux , & alteration d'iceluy. Or comine ainſi ſoit qu'il
fure corpion y aitdeuxmanieres de vacuation à ſçauoir,parvoyevniuerſelle ouinterieure,& par B
beftes venie particuliere ou exterieure , nous commencerons à la particuliere , declarans les rc
meuſes. medes topiques , propres pourattirer& abbatre le venin ,combien que la commune !
Premiere
opinion d'aucunseft,qu'il faut commencer aux choſes vniuerſelles : cequime ſem !

indication. bie ne deuoireftre aucunement obſerué és maladies externes,commeplayes,fra&tu


res, luxacions, & aux morſures & piqueuresdes beftes venimeuſes, eſquelles la pre
miere choſe que lon doit faire, eſt de proceder incontinent aux topiques , puis auoir
égardaux choſes vnmerſelles,commeregime, purgation , breuuages,faignée, 8c au
Remedes tres telles choſes, ſelon qu'il en ſera beſoin . Parquoy en ceſte maladie, la premiere
pour lecom-choſe que lon fera, ſera l'appliquer promptement medicamens conuenables ſur la
mencement morſure ou piqucure : & fur couc eft fort conuenable de lauer incontinentlaplayo
opiqueures. &d'vrine,ou d'eau ſalée,ou d'eau de vie,ou en lieu d'icelles , de bon vin, ouvinaigre,
y diſſoudre du cheriaque le plus vieil qu'on pourra trouuer , frottant aſſez rude
ment la partie :& fautquele lauemer t ſoit le plus chaud que le malade pourra en.
durer : puis le laiſſer deſſus , & alentour de la playe du charpytrempé en icellemix
0
tion . Or aucuns tiennent , qu'il ne faut appliquer ledic cheriaque ſur la morſure,
pource (diſent-ils) qu'il repouſſe le venin au dedans : mais ( ſauf leur reuerence)
leur opinion eſt renuerſée par authorité, raiſon, & experience , comme ie diray en 23
Authorisé
mon liure de la Pelte. Par authoricé: Gal . au liure des Commoditez du theriaque,
pour l'appli- Ad Pefonem , commande en donner par dedans & par dehors, pour les morſures &
sherraque. piqueuresvenimeuſes,leſquelles(dic- il ) il guarit,ſion en vſe deuant que le venin
ait ſaiſi les parties nobles. Par raiſon , pource qu'en ſa compoſition il y entre de la
chair de Vipere, qui eſt un ſerpent venimeux,quipar ſa fimilitude attire le venin,
ainſi que le inagnésaccire le fer, & l'ambre le feſtu : & l'ayantattiré,lesautresmedica
mens quicntrent en la compoſicion ,reſoluent & conſument la virulence & veneno
ſité : & eſtantpris par dedans,il defend le cæur , & autres parties nobles , & fortific
Experience. les eſprits.Quant à l'experience , ie puis aſſeurer auoic penſé pluſieurs ayanseſté
mords & piqucz de beſtes venimcufes, quipar le benefice du cheriaque ont tous re
ceu guariſon ,pourueu que ( comme i'ay aduerty cy -deſſus) on les ait traictez aupar
avant que le venin cuſt ſaili les parties nobles . Partanton pourra aſſeurementvſer D 139
de cheriaque , ou en lieu d'iceluy on prendra du mithridat, lequel a pareillement
grande vertu pour cet effect.
Dauantage,pourfaire la vacuation deſſuſdite, les remedes doiuent eſtre de ténuë
ſubſtáce,cant ceux qu'on applique dehors queceux qu'on prend par dedans, à cauſe
qu'ils penetrentle corps promptement,pour dompter & abbatre la malice du venin .
Remedes Et partant les ails, oignons,porreaux, fonc voiles, pource qu'ils ſont vaporeux, fu
pokeles ve meux & de cénuë ſubſtáce :pareillement la ruë, le ſcordion , le didamnus,centaurea
nins.
minor,praſſium ,roquette, laiet de figues non meures, & autres ſemblables: aufli la
bugloſſe fauuage entre toutes les herbes, a vertu contre les morſures de tous ſer
pens , & aclténommée Viperie, & ce pour deux railons : l'vne , pource qu'elle porte
la graine ſemblable à la celte d'vne vipere : & l'autre,à cauſe qu'elle guaritla morſure
d'icelle,pilée & appliquée par dehors, & par dedans priſe auec du vin: le ſerpolecala
meſme vertu.Ecneantmoins que le venin ſoit chaud,ſieſt-ce que les remedes ſuſdits
ſont conuenables, parce qu'ils reſoluent la ſubſtance du penin, & le conſument &
Des Venins. 759
A cuaporent. Toutesfois on aura égard à la qualicé de l'humeur, pour l'alterer fileſt
beſoin, comme nous l'aduertirons cy- apres. Outre-plus,l'application des ventouſes
& cornets, auec grande flambe ,& profondes ſcarifications eſt profitable, ſi le lieu
permet de ce faire. Aufli eſt bon defomenter& laucr promptement la partie de fort
vinaigre , le plus chaud que lon pourra endurer : ou on prendra de l'eau & du ſel, &
de ce on en froccera la playe aſſez rudement,ou meſme de l’vrine du pacient , comme
nous auons dit. Pareillement la mouſtarde delayée en vrine oú vinaigre efeſtt.propre .
Dauantage , ſera bon faire ſuccer le lieu par quelque perſonne de balle condition , on peut fusca
mo yennant qu'il ait laué la bouche de vin , auquel on aura diſſouc du theriaque ou cer vneplaye
mithridat, & apres auec huile commune. Auſli fautprendre garde qu'il n'aitvlcere ſans
venidang
meneer,
en la bouche, depeur que le venin nefyimprime facilement. Les fangſuës font pa
reillement propres pour ceceffe &. On pourra auſſi mettre ſur la playe le cul des pou- pouru
qu'oneta
face ce
lailles,& entre autres,despoules qui ponnent, parce qu'elles ont le culplus grand &z qu'ilfaut
plus ouuert : ou en lieu d'icelles , prendre des coqs ou poules d'Inde ,parce qu'ellesfaire.
oncplusde vigueur d'atcirer que les communes , & leur faut mettre vn grain de ſel
B dedans lecul,& leur clorre lebec,& l'ouurir par interuales,& ſi elles meurent, en re
meccre d'autres. Sion veut,on pourra fendre leſdites volailles coutes viues , leſquel
les d'vn diſcord naturelreſiſtentau venin ,parce que les poulailles ſont de nature ford
chaude. Qu'il ſoit vray , elles mangenc & digerentles beſtes veniineuſes, comme
crapaux, viperes, aſpics, ſcorpions, & autres : & conſomment pareillement les plus
ſeiches graines qui ſoient , meſmes des petites pierres & fablon. Parquoy appliquez
deſſus, ont grand force d'attirer le venin: ou en lieu d'icelles , on prendra des petits
chicns ou chatons,leſquels eſtans fendus, ſeront appliquez tous chauds ſur la playe
& ſur les ſcarifications,lesy laiſſant iuſques à cequ'ils ſoient refroidis, puis on enre
mettra d'autres,tant qu'il en ſera de beſoin. Outre coutes ces choſes,l'application de
cauteres eſt grandement à louer pour abbatre & conſommer la malignite du venin :
mais en ce cas,l'actuel eſt plus excellent que le potentiel,d'autantque l'action du feu
conſommele venin plus promptemét,& fait que la playe demeure pluslonguement
. ouuerte. Mais ils doiuenteltreappliquez deuant que le venin ait ſaiſi les parties no
0 bles : car autrement ils ne pourroienten rien profiter,ains donneroient faſcherie en
vain au pauure malade : & ſ'il craint le feu,on vſera de potentiel. Et apres l'applica- Faut faire
tion d'iceux,fautpromptement faire cheoir l'eſcarre,àfin de donner plusſubite iſſuë promptemen
au venin.Partant l’eſcarre eſtantfaite,on ferades ſcarificationsdeſlus,penetrantes tomber les
iuſques à la chair viue : puis on y appliquera des choſes onctueuſes,comme beurre & carre.
axunge. Et deſſus la playe & parties voiſines, on vſera d’emplaſtres attractiues faites
de
gommes , comme galbanum , de terebenthine, poix noire, poix graſſe melléc
auccius de porreaux & oignons, & autres ſemblables. Et lors que l'eſcarre ſera tom
bée , on appliquera de longuenebaſilicum ,auquel on adiouſtera poudre de mercu
re, quien ce cas a grande efficace, d'autantqu'elle attire la ſanie & virulence du pro
fond de la playe,& ne la permet reclorre: ce qui eſt bien neceſſaire, car on la doit te
nir long temps ouverte, à fin d'euacuer la matiere venimeuſe. Et pour ce faire, on on doit tenir
fcw . appliquera de l’eſponge,ou racines de gentiane,ou d'hermodades,ou quelques me. Pr/ cere lon
dicamens acres commeegypriac, ou poudre demercure mellée auec alum cuit , ou grement 0:49
vn peu de poudre faice de cautere potentiel. Et ne faut oublier à meller touſiours Keri.
D auec lesonguens vn peu detheriaqueou mithridat, ou ius d'hypericon , ou de nepe
ta,& autres ſemblables,quiont vertu d'attirer & reſoudre le venin, & d'abſterger &
nettoyer l'vlcere . Toutesfois ſi on voyoit qu'il y euſt trop grande chaleur , douleur,
‫ری‬ & acuité, laquelle contraine l'humidité de faire ebullition, qui ſe tourne quelques
fois en virulence & pourriture, gangrene,mortification, alorsfaut laiſſerlapropre
cure pour ſuruenir aux accidens. Et voila quant à l'euacuacion particuliere, qui ſo
doitfaire és morſures & piqueures venimeuſes .
02

2 ore

1
760 Le vingtvnieſme Liure ,
A
De la cure vniuerſelle. CHAP. XIIII.

Temps pour
donner les
Vant à l'euacuation vniuerſelle,ilfaut obſeruer que lon ne fd
remedes ge ce ſaignée, & quelon ne donne medecinelaxatiue, nyclyſtere,
SCT ANX .
ny vomicoire , nybains,ou autres ſudacoires, qu'il n'y ait pour le
moins troisiours paſſez apresla morſure faite: aufli que le patient
euite le coït, de peur de faire commotion & perturbation aux hu
meurs & eſprits, & que le venın fuſt par ces moyens plus prom
ptement porté au cæur : mais quand la matiere venimeule ſera
eſparſe, & l'acuité diminuée,alorstelles euacuations pourronteſtre faites, & non au
trement. Mais pour tous medicamens interieurs, ſuffira vſerde contre - poiſons au
commencement, commede toutes ſortes de cheriaque,mithridat, & autres ſembla
bles choſes : leſquelles eſtans contraires aux venins, changent & alterent tout le
corps: non pas qu'il faille entendre que leur ſubſtance penetre & paſſe tout lecorps, B
(car il eſt impoſible qu'en ſi peu de tempsvne li petite quantité de mariere , qu'on
donne pour contre-poiſon,puiſſepaſſer vne ſi groilemafie denoſtre corps ) maiselle
feſpand, & enuoye les vercus & qualitez : coinme iournellement nous voyons, que
quand nous auons pris des pilules, neantmoins que ļeur ſubſtance , ou maciere de
meure en l'eſtomach ,leur vertu eſt eſpandue iuſques au cerucau,& par toutle corps.
Comme les Onen peut autant dire d'un clyftere,quieſtane dans lesinteſtins,a puiſſance d'acciter
remedes ſe leshumeursdu cerveau . On voit auſlicet effed és medecines, qui attirent par leur
partoutle vertu iuſques au dedans desiointures,& de touresles parciesducorps.Et pour ledi
corps. reen vn moc, les contre- poiſons operencen nos corps, pour combattre le venin,& lc
chaffer, & vaincre fa virulence,ainſique le venin fait pour exercer ſa cyrannic,& fai
fir le cæur : coutesfois il faut bien noter , que la contre-poiſon doiceſtre plus forte
que la poiſon à fin qu'elle domine : & partant en faut vſer en plus grandequantité
que n'eſt le venin ,àce qu'elle ſoit plus forte à le vaincre & challer. Er en fautdonner MA

deux fois le iour,continuant tant que lon verra le venin eſtre amorty, & les accidens 0
ceſſez. Et cecy eſtnon ſeulement profitable pour l'euacuation de la poiſon, mais
Alteration auſſi pour forcifier les parties nobles. Or outre les choſes ſuſdites,fautauoir égard à
de l'humeur alterer l'humeur:ce que nous auons dit eſtre la ſeconde indication qu'on le doit
veneneux. propoſer en la cure preſente. Ce qui ſe fera en changeant yne qualité contraire par
vne autrecontraire . Exemple,ſi le patient ſent vne vehemente chaleur au lieu où elt
la morſure, ou en tout le corps,alors il faudra appliquer remcdes refrigerans:au
contraire , l'il ſent froidure, remedes calefa & ifs, & ainſides autresqualitcz .Cecyte
ſuffiſe pour le regard des Venins, & de leur cure en general:il en fauc traider main
tenant en
en particulier. Et premierement nous commencerons aux morſures des
chiens ragez .

La cauſe pourquoy les chiens deviennent pluſtoſt enragez que les autres beſtes.
CH A P. XY .

Les cauſes EL A aduient,parceque de leurnature ils ſont preparez & enclins D


pourquoy à celle diſpoſition : & pource aufli qu'ilsmāgent quelquesfoiscorps
les chiens
demiennent morcs,charongneux , & autres choſes pourries & pleinesde vers,&
enragez boiuent des eaux de ſemblable nature : auſſi par vnetrop grande
melancholic d'auoir perdu leur maiſtre, dont courent ça & là pour
le trouuer, delaiſſans le manger & boire , dequoy f'enſuit ebulli
tion de leur ſang,qui puis apres ſe courne en melancholic, & puis en rage. Dauall.
tage, pour deux autres cauſes contraires : la premiere , par la crop grande chaleur ::
Gal.ch.20. la ſeconde,par l'extreme froidure. Comme lon voit que le plus louvent ils enra
li,2.fimpl. gent és jours caniculaires , & en Hyuer durant les grandes gelées. Ce qui aduient,
simpi.Semble parcequeleschiens
efire d'opiniócoup ſontdeleurnature froids&
d'humeurs melancholiques,leſquels fecs,&
en telles ſaiſonsparconſequentils
chaleureuſes, ſe ontbeau
tournene
contraire, aiſément en humeurs atrabilaires par aduftion , comme en Hyuer par conſtipation
souchant le de cuir,& ſuppreſſion d'excremensfuligineux,qui leur cauſent yne féurecontinuë

>
.
Des Venins.
761

A grandement ardente,& vne phreneſie & rage.Le grand froid de l'air augmente ſem-temperament
blablement leur chaleur du dedans,laquelle eſtant repouſſée ſ'augmente, & allume des chiens ,
id eſt, il dit
les humeurs preparez à cellerage & pourriture :leſquels ſont d'autant plusdágereux,
qu'il eft
que ne pouuans ſortir & euaporer par les pores & pertuis.du cuir ( qui pour lors ſont chaud es
fait la feco
du tout fermez ) ils demeurent dedans , & font alors les meſmes accidens que

grande chaleurde l'Eſté. Auſſi deuiennent enragez pour vſer de viandes trop chau
des, qui leur eſchaufent le ſang, & leur cauſent fiéure, puis la rage :ſemblablement
)
auſli pour avoir eſté mords d'autres chiens , ou loups,ou autres animaux enragez.

Signes pour cognoitre le chien e;tre enragé. CH A P. XVI.

Ors qu'il voit de l'eau , il tremble , & la craint,& avne horripila


cion , c'eſt à dire , que le poil luy dreſſe . Ila les yeux rouges & foro
Aamboyans , & renuerſez,auec vn regard vehement , fixe & horri
B ble ,regardant de trauers . Il porte la teſte forc bas , & la tourne de
coſté. Ilouure fa gucule , & tire la langue qu'on voit liuide & noi
re,haletce, & iette grande quantité de baue eſcumeuſe , & plu
fieurs autres humiditez decoulent de ſon nez . Il chemine en
crainte, tancoſtà dextre , tancoſt à ſeneſtre, commeſileſtoit yure , & tombe ſouuent
en terre . Lors qu'il voitquelque forme,il court à l'encontre pour l'aſſaillir, ſoit que
ce ſoit vne muraille , ou vn arbre, ou quelque animal qu'il rencontre . Les autres Les chiens
TA
chiens le fuyent, &zle ſentent de loing : & fillen trouue quelqu'vn pres de luy , il le enragez ſont
flatte, & luy obeit,8c taſche à ſe deſrober & fuyr de luy , encore qu'il ſoit plus grand fuis de ceux
& plus fort. Ilneboitny mange : ileſt du toutmuet,c'eſtà dire,qu'il n'abboye point , quine le
ſont poins.
free a les oreilles fort pendantes , & la queuë recirée entre les cuiſſes: il regarde de tra
uers,& plus triſtement que de couſtume : ilmord également beſtes & gens, tant do
la
meſtiques & familiers qu'eſtrangers , & ne cognoiſt aucunement ſon maiſtre, ny
maiſon où il a eſte nourry : parce que l'humeur melancholique luy trouble tous les
ſens. Ce qui aduient pareillement aux hommes qui ſone vexez de cel humeur me

0 lancholique: car ils cuentquelquesfois leurs peres ,ineres , femmes,ou enfans, & fou
ucntesfois eux -meſmes.

Les ſignespour cognoiſtre un homme avoir eſté mordø d'un chien enragé.

CH A P. XVII .

041
L eſt fort difficile de cognoiſtre du commencement quand quel

qu'un a eſté mords d'un chien enragé ou non : parce que la playa
faite par la morſure, n'afflige au commencement le malade, non
plus qu'une autre playe,au contraire de celles qui ſont faiđes par
morſures ou piqueures des autres beltes venimeuſes : car ſubite
menton y ſent vne extreme douleur, & la partic fenflamme &
enfle, & ſuruiennent grands & diuers accidens, ſelon la diuerſité

dela malignité du venin ,comme nous dironscy -apres. Donc nous conclurons, que Le venin fair
D levenin fait par la rage ne ſemonſtre pas au commencement, & qu'il n'ait premiere- par la rage
je ment ſaiſi di alceré les parties nobles . Parquoy fion doute au commencement que ne fe monfire
la morſure ne fuſt faire d'un chien enragé,onle pourra veritablement cognoiſtre en pas au com
moüillant du pain au ſang ou en la ſanie de la playe , quelon donnera à vn chien affa- mencement.
mé : & fille refuſe à manger, meſme qu'il deſdaigne le fairer , cela demonſtre que
la playe eſt faite d'un chien enragé :au contraire, l'ille mange , il n'eſtoit point enra
gé. Dauantage,pluſieurs ont eſcrit, que fion donne le pain ainſi trempéà vne pou
laille, & qu'elle le mange , ellemourra dans vniour ou enuiron, ſi le chien eſtoit en
le
ragé . Mais pour certain , i'ay fait telle experience, & ſçauois veritablement que Experiente
chien eſtoic enragé par les ſignes predits, coutesfois les poulailles ne mouroient faicte par
point apres auoir mangé dudit pain . Parquoy l’eſpreuue du pain donné aux chiens Authent.
eſt plus certain ,pource qu'ils ont un ſentiment exquis de fairer naturellement , qui
fait qu'ils ſentent l'odeur du ſang ,ou fanic de la playe faire d'un chien enragé , & pour
ce aucunement n'y touchent.
762 Le vingt -vnieſme Liure ,
Des accidens qui viennene à ceux auſquels le venin du chien enragé eft
commencé d'eſtre imprimé auxparties nobles,
CHA P. XVIII.

commencement le malade dcuient fort penſif , & murmure entre ſes


dents : il reſpond ſans propos, & deuient cholere plus que de couſtume: il
penſe voir en dormant vne infinité de choſes fantaſtiques, & finalement
tombe en vne maladie nommée des Grecs, Hydrophobia, c'eſt à dire crainte d'eau.
· Lesſignes quela rage eft du tour confirmée aux parties nobles.
Puisapres que le veninf'eſt dauantageaugmenté, & aja du tout changél'econo
mie ou harmonie des partiesnobles,alors la vertu imaginaciue,& toute raiſon &me
moire,& autres ſens ſe perdent : & par conſequencle malade devient fol & infenfé,
& ne cognoiſt aucunement ſes familiers amis, & domeſtiques, & ſe deſchire, & cl
gratigne, & mord ſoy-meſme, & les premiers venus qu'il peuc attraper:quiſe fait à B
cauſe des vapeurs &fumées melancholiques qui montent au cerucau, & alterent &
corrompenc le temperament d'iceluy: parquoy la raiſon eſt perduë , enſemble tous
les autres ſens,donclepauure malade et incité à courroux, & à mordre. Semblable
mentilaſouuent des mouuemens & treſſaillemens inuolontaires,& contra &tions de
nerfs :qui ſe fait à cauſe de la ſiccité vehemente,prouenant du venin chaud & ſec,qui
bleſſe letemperamentdes nerfs quiſont diſſeminez és muſcles, & auſſi qui leur con
In homme ſomme l'humidité ſubſtantifique. Pareillement le patient a vne grande ſeichereſſe
enragé.a puneenlabouche,& lalanguearide & feiche,auec vne foifintolerable,coutesfoisſans ap
ble, neant petit deboire,pourtantque deſia ſon corps a pris vne affe &tion contraire à ſes actions
moins n'a paturelles,dont il aduient qu'il ne deſire leschoſes qui naturellement appaiſent la
aucun appetirſoif. Plus, il a la face & les yeux rouges,& grandementenflambez, & pareillement
de boire .
tout le corps,à cauſe de l'extreme chaleur & ficcité prouenant du virusveneneux&
malin.Il ſ'imagine qu'il voit & oit des chiens,& veut pareillementiapper & mordre:
quiſe fait parce que le venin du chien enragé change & alcere toute la temperature
de l'hommeen toute ſa complexion & fimilitude: en ſorte que tous ſes ſens,penſées, C
paroles , & viſions,& generalement toutes ſes actions ſont deprauéespar l'humeur
melancholique & veneneux ,eſpandu és ventricules du cerueau,lequel leur change
l'eſprit,tellementque le malade penſe voir & ouir des chiens,voire croitluy-meſme
cltre chicn, duquel auſſi il enſuit la voix enroüée, parce qu'il jappe,abboye, crie, &
hurle comme chiens,ſanshonte & reſpect de ſon hõneur,au grand eſpouuancement
Pourquoy il de ceuxqui ſont preſens, & qui l’oyent. L'enroüeure vient parlagrande feichereſſe,
choſes lui quia deſſeiché la Trachée artere, & les inſtrumens de la voix. Il fuit grandement la
Jantes. lumierc,à cauſe que l'humeur melancholique, qui eſt obſcur & tenebreux ,eſt con
traire à icelle : qui fait que le malade deſire les tenebres, qui luy ſont ſemblables. Il
craint auſſi à voir l'eau (encore que ce ſoit vn remede fort veile pour rafreſchir ſon
excreme chaleur & ſiccité Jou quand il regarde en vn miroir,il luy eſt aduis & f'ima
gine qu'il voit des chiens, & que ce ſouuenir luy fait auoir celte crainte. Pour ceſte
cauſe ilcrainc l'eau, & touteschoſes tranſparentes & luiſantes,ayansquelque reuer 1
beration:& quand il les voit,il crie & tremble, depeur d'eſtre encoremords:done
vient qu'il combe,& ſe veautre en terre,pourſecuider couurir d'icelle.Ec celle choſe D
fait, à cauſe que les vapeurs alterées & corrompuës penetrent par les yeux , & eſtans
parucnuës à l'eau ou miroir,ou autres corps ſemblables, par leur reuerberation luy
repreſentent des choſes. Or ils diſent queceluy qui eſt mords d'un chien enragé,fi *

magine touſiours voir le chien duquel il a eſté mordu,la craince duquel luy fait ainſi
fuir & craindre l'eau . Autres diſent cela aduenir , à cauſe que par la rage , le corps
tombcen yneexcreme ſiccité,quile fait fuir l'humidité,cõme ſon contraire. Rufus
dit que la rageeſt vne eſpece de maladie melácholique. Or nous ſçauons eſtre choſe
propre à tous melancholiques , d'auoir quelque choſe particulierementen crainte:
par l'Aphoriſme vingt-cinquieſme de la Section ſixieſme. Mais principalemenc ils
craignent toutes choſes luiſantes,commel'eau,lesmiroirs,à cauſe qu'ils cherchét les
tenebres , pource qu'à icelles lesinuite leur humeur noir , obſcur & tenebreux. Il a 13

vne ſucur froide,& ſort del'vlcere vn virus eſcumeux,fecide,virulent,& erugineux,


c'eſt à dire , de couleur de roüilleure d'airain : qui aduientpar l'excreme chaleur &
acuicé,
Des Venins . 763

A acuité de l'acrimonie du virus adhere en la partie , laquelle faict ebullition & pourri
cure . Aulli on trouue l'vlcere quelquesfois aride & fec. L'vrine eſt le plus fouuent
claire & ſubtile , à cauſe que les colatoires des reins ſont fort reſſerrez & eltreflis, pour
la chaleur & ficcité du venin : auſſi quelquesfois eſt fort eſpelle & noire , qui ſe faict,
à cauſe que la vertu expultrice chaſſe tant qu'elle peut par les vrines l'humeur melan
cholique, quia eſté corrompu par le venin . Pareillement elle eſt aucunesfais tora
lement ſupprimée & retenuë par la ſiccité du virus , & des macieres craſſes, viſqueu
ſes & gluantes , dont ſe faict totale obſtruction des parties dediées à lvrine. Bref, le
pauuremalade eſt tellement tourmenté par ces accidens , qu'en la fin vaincu de dou
leur & de trauail , à faute de manger & boire,il meurtfurieux & enragé . Mais lors que
du commencement ( & deuant que le venin ait encré au corps, & gaigné les parties

nobles) on
adminiſtre lesremedespropres, les malades ne faillent à guarir, & peu de
Jolie perſonnes ſont morts, auſquels on ait diligemment pourueu .

Prognoſtic. CH A P. XIX .
B

N nefe peut bien garder de la morſure des chiens enragez,accédu


forme
qu'ils ſont touſiours parmy les hommes, au moyen dequoy on eſt
en plus grand danger d'eux, quede toutes autres beſtesvenimeu
ſes en leurs morſures. Er d'autant que le chien eſt domeſtique &
cuk familier à l'homme pendantqu'ileſt fain ,d'autantluy eſt - il enne
my depuis qu'il eſt forty de la nature accouſtumée,quiſe faict par
vne rage. Or le virus qui eſt en ſabaue,eſt chaud & lec , malin , ve- Le venin du
neneux & contagieux,tellementqu'il communique la meſme affection à celuy qu'il chien enragé
mord ( ſion n'y pouruoit debonneheure )ſoit vn homme,ou vne autre beſte : & fon (f chaud
venin eſt cant ſubtil,quefacilement penetre par les pores du cuir : & eſtant attiré par ſeco
les arteres , par le continuel mouuement d'icelles , il eſt conduit au demeurant du

corps. Parquoy on peut conclure, que le venin de la rage a la vertu , non ſeulement La baue fais
de faire enrager ceux qu'il mord , mais auſſi ceux auſquels il aura ietté ſon cfiume, enrager.
ou baue contre leur peau ,ſielle y fait long ſejour; mais ſi elle eſt eſſuyée , & le licu
promptement laué d'eau ſalée ou d’vrine,elle n'y fera aucun mal . Erfaue icy entene
Spa
zelka dre, que toute morſure de chien enragé ne nuiſt paségalement, & ne tuë pas en mef
me temps,ainſiqu'auons cy -deſſus demonſtré du venin des beſtes venimeuſes. Car
COK
ibles ſelon la diſpoſition de l'air chaud ou froid , & c la vehemence du venin , & le lieu &
profondeur de la morſure, & la diverſité des forces de ceux qui ſont mordus, & la ca
port
de cochymie & mauuaiſe habitude,c'eſtà dire,ſelon que leurs humeurs ſont ja prepa
rez à eſtre pourris,ou qu'ils ont leurs conduics eſtroits,ou plus larges, de là vient que
les accidens apparoiſſent pluſtoſt ou plus tard . Car aucuns viennent quarante
iours apres lamorſure,autresfois ſix mois , voirevnan , & aux autres plus tard ou pluſ
toſt , comme nousauons ditcy deuant . Pluſieurs apres auoir eſté mords deuiennent

adus epileptiques , puis demoniaques & enragez .Ceux qui font tombez en hydropho
bie, iamais ne guariſſent: toutesfois Auicenne dic , qu’encores y a eſperance , pour
ueu qu'ils ſe cognoiſſent en vn miroir : car on voit par cela , que le venin n'a encores
Ceny
du tout occupé les facultez animales : & ceux- là ont beſoin d'eſtre violentement
D purgez,come nous dirons cy - apres . Aëce raconte d'vn Philoſophe mordu d'un chien Hiſtoires
Era
enragé,lequel voulant d'un grand courage reſiſter à ce mal d'hydrophobie, vint au
bain ,où l'apparence d'un chien ſe preſentant deuant luy (car il auoit ceſte viſion ,
comme les autres frappez de ſemblable maladie ) & ayant longuement penſé en foy.
meſme: Qu'ya-il, dit - il , entre vn chien & vn bain ? Apres ces paroles il entrà dedās
le bain , & en beut ſans auoir peur ,dont ilſurmonta le inal , & guarit . Quand le mala- Sigues de
mort pro
de ſe veautre contre la terre, commeles chiens, c'eſt ſigne de mort prochaine, parce
chaine .
que telle choſe demonſtre que l'humeur melancholique, virulent & veneneux,eft Les hommes
23,4cm
en grande abondance , & eft communiqué par tous les membres. Aufli quand le pa. peuvent eſtre
tient a la voix enroüée,c'eſt vn tres-mauvais ſigne , pource que telle choſe demonltre furpris de la
qu'en la Trachée arcere il y a quelque aſperité par ficcité de virus venimeux . En rageſans a
mordseſte
ſomme , quand les parties nobles font ſaiſies du venin , il n'y a plus eſperance de soir d'ana
guariſon . Les hommes peuuent eſtre ſurpris de la rage ſans eſtre mords de chiens cune belle
enragez : cartout ainſi que les humeurs ſe bruſlent, cauſans yn chancre ou ladrerie, enragée,
le TTC
764 Le vingt-vnieſme Liure ,
pareillement la rage peut aduenir, & principalement aux melancholiques. Dauan A
tage, lesmorſures desbeſtes, comme Viperes ,& autres animaux venimeux , ne cau
ſent cels accidens comme celles des chiens enragez , parce qu'elles fonemourir ,de
uant que les accidens ſuſdies puiſſent venir : ioint auſſi quela qualité d'iceux venins
eſt diuerſe . Plus, les grandes playes faictes par morſures dechiens enragez , neſontfi
dangereuſes que les pecites , pource que par vne grande playe ,fort beaucoup defang
& de fanie quieuacuë le venin.
Cure de la morføre d'un Chien enragé. CHAP. XX.

Ovs auons dit par cy -deuant, qu'aux picqueures & morſures des
beſtes venimeuſes, il falloit vſer de prompts & ſubtils remedes ,
à fin que le venin n’entre dedansle corps, & ne corrompe les par
cies nobles . Etf'ils ſont obrisau commencement , en vain ſeront
Hiſtoire de appliquez en autre temps. Ainſi qu'arriua à Balde,grand luriſcon B
Balde iuriſ ſulte, ſe jouant auec vn ſien petit chien, qui eſtoic enragé, duquel
confulte. eſtant tant ſoit peu mordu en la léure,ne ſçachant qu'il fuſt enra
gé,negligea ſa morſure, & quatremoisapres mourut furieux & enragé,& n'y eut nul
remede qui le peuſtſauuer,pourne l'auoirpris d'heure. Donc pour preuoirà tel ac
cident toutcequenous auons declarécy -deſſus en la cure generale desbeſtes veni
meuſes, tant pour l’euacuation de l'humeur virulent, que pour l'alteration d'iceluy,
doiceftre pareillement obſeruéen la morſure des chiensenragez.Er partant, fiquel
qu'vn cognoiſt qu'il eſt mords d'un chien enragé, il s'efforcera d'attirer le venin par
tousmoyens,commepar ventouſes, corners,ſcarifications, langſuës,applications de
volailles, & autres animaux , & par medicamens propres à ce faire , qui preſencement
Four renir ſeront declarez. Et ſi la playe citgrande,il la faut laiſſer faignerle plus qu'il ſera pof
selles playes ſible,à fin que le venin forte auec le ſang. Et là où elle ne ſera aſſez grande,on y pour
long-temps
Omuertes .
ra faire des ſcarifications,ou y appliquer cauteres a&uels : & ſera tenuë ouuertepour
le moins iuſques à ce que quarante iours ſoient paſſez. L'ozeille pilée & appliquée
ſur la morſure, & le bouillon d'icelle pris par la bouche , eſt de grande vercu . Ce 0
qu'Aëce nous a lainé par eſcrit,difancauoir cogneu yn vieillard Chirurgien , lequel
n'vfoit d'autre remede pour curer celles morſures. De ma part, ie conſeille de pren
dre prompteinent de l'vrine, & en frotteraſſezrudement la playe, & y laiſſer vn linge
trempé deſſus. Auſſi la mouſtarde bien delayée en vrine , ou vinaigre, eſt propre à
Les remedes ceſt effect. Pareillement cous remedes acres,poignans, & forcatrirans.Autre.Prenez
poignans & roquette bouluë & pilée auec beurre & ſel,& l'appliquez ſur la morſure. Autre.Pre
attractifs než farine d'orobe,iniel,ſel, & vinaigre, & ce ſoit toutchaud appliqué deſſus. Autre.
font fort La fience de chéure bouluë en fort vinaigre, & appliquée.Autre. Prenez foulphro
loüez pour
attirer le ſubtilement pulueriſé, & incorporé auec ſaliued'homme, & l'appliquez deſſus. Au
Venis. tre. Prenez poix noire fonduë auec ſel, & vn peu d'euphorbe , & l'appliquez deſſus.
Autre.par
venin Le quelque
poil du chienenragé,
fimilitude: ceappliqué deſſus la playe
qu'on a pluſieurs toutſeul,a verru
fois experimenté , ainſid'attirer
que faictle
le Scorpion, eſtant eſcaché & mis ſur la picqueure d'iceluy. Aucuns Autheurs ont
laiſſé par eſcrit, que ledit poil de chien, bruſle & pulueriſé, & donné à boire auec du
vin,preſeruede la rage. Autre.Prenez froment maſché cru,& l'appliquez ſur la morD
fure. Autre. Prenez desfebucs, & les meccez vn peu ſous les cendres chaudes, puis
les pelez,& fendez, & les appliquez deſſus.
Sutre reme Il faut faire bouillir du lapachum acutum, & de la decoction en lauer & fomenter 1
de approuvé la playe, puis y laiſſerl'herbe pilée deſſus: auſli en faut donner à boire dela decoction
ď serius. au patient.Ilafferme auoir faiet de grandes cures auec ce ſeul remede: & dit que ceſte
decoction fait beaucoup piſſer :qui cſt vne choſe excellente à celte maladie. Autre.
Remede ex- Prenez beroine,fueillesd'ortic,& ſelcomun ,broyez -les, & appliquez deſſus.Autre.
cellens. Prenez vn oignon commun,fueillesde ruë,& fel,broyez -lesenſemble,& appliquez
deſſus. Orentre tous les remedes,le theriaquc eſt ſingulier,comme il a eſtédic,lc fai ‫ܬܐ ܙ‬

ſant diſſoudreen eau de vie,ou en vin,&en froccantaſſez rudement la playe,tantque


elle faigne. Puis y faut laiſſer dedans du charpy imbu en icelle mixcion : & par deſſus
la playe,y appliquer des ails ou oignons,pilez auec miel commun & terebenthine:&
telremedeeltexcellét par ſus cousceux quei'ay veu par experiéce. Et pour la proba
Des Venins. 765
A tion de mon dire,i’allegueray icy vne hiſtoire de l'vne des filles de Madamoiſelle de Hiſtoire ?
Gron ,naciue de ceſte ville de Paris,laquelle fut morduë d'un chien enragé , au mi
lieu de la jambe dextre , où le chien imprima ſes dents bien profondement en la
chair : laquelle fut guarie par le moyen du theriaque, ſans que jamais luy ſuruint au
cun mauuais accident:lequeltheriaque ie mellois dans lesmedicamensdecerlifs, &
autres, iuſques à la fin de la guariſon .Orde vouloir icy declarer tous les autres que
i’ay penſé de tellesmorſures,ce ſeroit vne choſe trop prolixe : & partant ceſte hiſtoi
reſuffira pour le preſent , pour inſtruire chacun à remedier à relaccident.
Il faut promptementmanger vn ail,auec vn peu de pain, puis boire vn peu de vin : Autres rez
& c'eſt un ſouuerain remede,à cauſe que l'odeur, & la grande chaleur ſpiritueuſe qui medes qu’on
eſtaux ails, prohibe que le venin de la morſure n'offenſe les parties nobles. Autres peut prendre.
commandent de manger du foyeroſty du chien quiamordu,ou du foye de bouc : ce par dedans,
que ie n’ay eſprouué. Autre remede. Prenezvne dragmede ſemence d'agnus caftus,
auec vin & beurre, & en ſoit donnés à boire. Autre. Prenez pouldre d'eſcreuiſſes
B bruflées , & la delayez en vin, & en donnez àboire. Autre . Prenez racine de gentiane
deux dragmes, eſcreuiſſes de riviere bruſlées au four, & pulueriſées trois dragmes,
terre ſigillée quatre dragmes. La doſe ſera vne dragme,aueceau ,en laquelle on aura
faict bouillir quantité d'eſcreuiſſes, & en ſoit donné à boire comme deſſus. Aucuns Se plonger :
ſe ſont plongez en la mer apres eſtre mords de chiens enragez , qui n'ont laiſſé d'eſtre en la mer
ſurpris de la rage, ainſi que teſmoigne Ferrand Pouzer , Cardinal, en ſon liure des n'eſt remede
Venins : partant ne ſ'y faut fier, mais pluſtoſt aux remedes approuuez des anciens & certain
la
con
modernes Medecins & Chirurgiens . Il eſt vray que la confidence que peut auoir le tre rage.
R malade aux remedes, & au Chirurgien , ſert beaucoup en ceſte cuire: au contraire,
l'effroy & la crainte nuit beaucoup,& accelere la rage.Parcancil faut touſiours bien
aſſeurer le pacient de la parfaicte guariſon. Or il faut entendre que le venin du chien
enragé,ou la ſaliue d'vne Viperc ,ou la baue d'vn Crapaur , & d'autres beltes veni
meuſes,n'enueniment pas en touchant ſeulement, mais faut que le venin entre de
dans,cellementque ſi à l'heurcon l'eſſuye,ne pourra faire aucun mal.
Vo
C De la cure de cenx quifont ja tombez en Hydrophobie, &neantmoins ſe
recognoiſent encores en un miroit.
CH A P. XXI.

Evx auſquels le venin n'a encores occupé les facultez animales, il les vſage de
conuientgrandementpurger par medecines bien fortes. Eren cela il me l'anrimoine.
ſemble que l'ancimoineſeroit profitable,d'autāt qu'il prouoque la ſueur,
flux de ventre, & vomiſſement.Car ce ſeroit grande folie bailler en tels
cas medicamens legers, quand le venin eſt fortmalin ,& ja impriméaux parties inte
pen rieures. Semblablement lesbains leur ſont bons , pour leur prouoquer la ſueur : la
faignée ne doit eſtre faicte, de peur d'attirer le venin du dehors au dedans. Aufli il Moyen de
faut qu'ils vſent ſouuert de theriaque ou mithridat. En ce temps-là pareillement faire
Peas boire
44 m
!
leur faut faire boire de l'eau,& la bailler auxmalades dedans quelque vaiſſeau cou lade.
uert,de peur qu'ils ne la voyent, pour les raiſons ſuſdites.
D

Du regime de ceux qui ont eſté empoiſonnez & mords des chiens enragez , & de
picqueures & morſures des beſtes venimeuſes.
while
Lcmalade doit demeurer en lieu chaud , & en air bien clair, de peur que le venin
ne ſoit chaſſé au dedans par le froid, & auſſi à fin que les eſprits ſoient recreez,&
eſmeus du centre à la circonference par le moyen de la clarté. Auſſion doit parfu
mer la chambre de choſes odoriferances. Semblablement il doit manger au com
mencement viandes acres & ſalées,commeails, oignons, porreaux, eſpiceries, iam
bons de Majence,& leurs ſemblables, & boire bon vin , & fanseau, àraiſon que celles
choſes ſontfort vaporeuſes & pleines d'eſprits, qui reſiſtent au venin , & ne permet
home tent que la vertu ſoit eſpanduë au corps,& ne ſe failifle des parties nobles . Pareille
ment on doit vſer de viandes craſſes & viſqueuſes, parce qu'ils font obſtruction , &
cſtoupent les conduits,& parties vuides : auſſi en faut pluſtoſt manger plus que trop
IT ij
766 Le vingt-vnieſme Liure ,
I’inanition peu à cauſe que l’inanition accroiſt la malignité des humeurs, quieſt choſe contraire A
accroiſ la aux playes veniineuſes: toutesfois il y faut tenir mediocrité. Et cinq ou (ix jours a
malignité
du venin . pres, on laiſſeraleſdites viandes, & en lieu dicelles, on vſera de temperées : & plufa
toſt humides que ſeiches : leſquelles ſeront elleuës ſelon qu'on les ordonne aux me
lancholiques : & mertra-on cn leurs potages racines aperitiues , leſquelles ontvertu
Il ne faut de faire vriner. On leur viendra le ventre aſſez laſche: & fil y a repletion de fang,
ſaigner au leur en ſera ciré ,non aucommencement,inais cinq ou fix iours apres la morfure fai
con mence- te , pour les raiſons qu'auons deuanc dietes. Pour le boire au repas,on vſerade vin
ment .
mediocrement trempé, à ſçauoir, cinq ou fixiours apres lamorſure,ou d'oxymel,ou
de ſyrop de aceroſiate citri, aucc eau bouillie : & entre les repas, de iulep faic enceſte
maniere. Prenez demie once de jus delimons, & autantde citrons , vin de grenades
aigres deux onccs,cau de petite ozeille,& cau roſe,dechacune vne once,eaude fon
taine boüillie tant qu'ilſera beſoin , & foit faict iulęp. Il faut que le malade euite le
dormir, iuſques à ce que la force du venin ſoit amortie & conſommée : car par le
dormir , le ſang & les cſprits ſe retirent au centreducorps,& parcemoyen levening
Choſes qui eſt porté aux parties nobles. Auſſi on luy doit faire vſer de choſes qui reſiſtent aux
reſiſtentaux venins,comme limons,oranges,citrons,racines de gentiane,angelique,tormeneille ,
penins .
pimpernelle, verbene,chardon beniſt,bourrache,bugloſe,& autres ſemblables:&
generalement toutes viandes qui engendrent bon ſục,commeveau,chéureau,mou
ton , perdrix, poulailles, & autres ſemblables.
CHAP. XXII.
De la morſure &picqueure de la Vipere, & defesaccidens.
Remedes Ovs les remedes qui ont eſté cy -deuant eſcrits des morſures des
generaux. chiens enragez, peuuent pareillement aider à toutesmorſures& pic
queures des autresanimaux venimeux . Toutesfois on trouve des par
ciculiers remedes pour chacune morſure & picqueure. Ceque dirons D
le plus ſuccinctemenr qu'il ſera poflibie.
Accidens Les Viperes ont entre leurs genciues,certaines petites veſlies pleines de venin,qui ‫ܐܐ܂‬
qui viennent s'imprime incontinent au lieu où elles font ouuercure. Les patiens ſentent douleur o
à ceux qui grandement poignante en lapartie , laquelle promptement s'enfle bien forc, voire
mordsdes tout le corps,li on n'y donne ſubir remede. Il loro de la playe vne fanie craſſe & fan
Viperes. guinolente: & autour d'icelle,ilſe faict des vellies, comme celles des brulleures: &
l'vlcere corrode & mange la chair. Auſſi lesmaladesſentent inflammation au foye,
& aux genciues : & tout le corps deuient fort aride & fec , de couleur palle & bla
farde, & ontvne ſoif inextinguible.Ils fentent par fois grandes crenchées au ven
tre, & vomiſſent pluſieurs humeurs choleriques, & tombent ſouuent en ſyncope, &
onchocquets,comme vne conuullion d'eſtomach,auec yne ſueur froide, & lamort {

Hiſtoire. s'enſuit, s'ilsne ſont ſecourus deuāt que le venin ait ſaiſi les parties nobles. Matthio
le dicauoir veu vn paiſan , qui fauchant vn pré,auoit par fortune coupévne Vipere
par le milieu : & iceluy princle tronçon de la teſte , l'eſtimant morte. A duineque la
teſte ſecourbant contre la main, le mordic aſprement au doigt : & ſucçant la playe,
pour cuider attirer le ſang ( qui ja auoit eſté enuenimé ) il mourut ſur le champ.Or
ie veux icy reciter vne autre hiſtoire,à fin de touſiours inſtruire le ieune Chirurgien.
Autre hi- Le Roy Charles eſtant à Montpellier, ie fus mords d'vne Vipere au bout du doigt D
ſtoire de Index , entre l'ongle & la chair,en la maiſon d'vn A pochicaire,nomméde Farges,le
I Autheur. quel diſpenſoit alors leTheriaquc,auquel ie demanday à voir les Viperes qu'ildeuoit
mettre en la compoſition. Il m'en fit monſtrer aſſez bon nombre, qu'il gardoicen vn
vaiſſeau de verre , où i'en prins vne, & fusinords d'icelle voulant voir les denes , qai
ſont en la mandibule ſuperieure de ſa gucule, couuerte d'une petite membrane, en
laquelleelle gardeſon venin ,lequel simprime( commci'ay dit) en la partie,incon
tinent qu'elle y a faict ouuerture. Et ayant receu ceſte morſure , ie fentis fubit vne
extreme douleur,tant pourla ſenſibilitéde la partie,qu'àcauſe du venin:alors ie me
Ligature on ſerray bien fort le doigtau deſſus de la playe,àfin de faire ſortir le ſang , & vacuer le
peu au diſJus venin , & garder qu'il negaignaſt au deſſus. Puis demanday du vieiltheriaque,lequel
de
re .
la mor/h- delayay auec cau devie, en la main de l'vn des ſeruireurs dudit de Farges, & crempay
du corcon en lamiſture ,& l'appliquay ſur la morſure : & apres peu de iours ie fus
guary ſans aucun accident , auec ce remede fcul. En licu de theriaque , on peut
Des Venins. 767
A aſſeurément vſer de mithridat. On peut pareillement vſer de tous remedies poi
gnans, & fort atcirans, pour obtundre la malice du venin. Comme la ſquille ,cuitre
ſous la cendre ,ou des ails & porreaux pilez, & appliquez deſſus. Autre . Prenez fari
ne d'orge delayée auec vinaigre,miel,crottes de chéurc, & appliquez deſlus en for
me de cataplaſme. Autre. Tout promptement on doit lauer & fomenter la playe
auec vinaigre, & ſel, & vn peu demiel. Galien dic au liure de la Theriaque à Piſon ,
quel'on attire le venin d'vnemorſurede Vipere,y appliquant vne teſte de Vipere ſur
la playe : autres y mettent la Vipere enciere bien pilée.
Du Serpent appellé Coule-fang. C H 4 P. XXIII.

E Coule -fanga eſté ainſi appellé , pour autant que le ſang coule par
tous les conduits du corps,quien a eſté mordu .C'eſt un petit Serpent
comme vne Viperc,ayant les yeux fort ardans,& ſa peau fort luiſance.
B Auicenne dit qu'il a le dos marquecé de caches noires & blanches , & Juicenne?
le col fort eſtroit, & la queuë fort menuë . Les accidens qui ſuiuent
la morſure , c'eſt que la partie deuicnt noire , à cauſe que la chaleur naturelle eſt
eſteinte par la malice du venin ,lequelluy eſt ennemy mortel, puis vn mal de l'eſto
mach,& du cæur , qui facilement ſe reſſentent du venin , ennemy capital deſdites
parties, & principalement en maladie veneneuſe, ainſi que nous voyons aduenir en
la Peſte , laquelle eſt ſuiuie incontinent par les vomiſſemens,qui ne ſe font pourau
IM
tre cauſe, quepourla mauuaiſe diſpoſition qu'ils ſentent. Il f'enſuit auſſi grand flux
de ventre, qui ſe faict, tanc à cauſe del'eſtomach debile,qui ne peut faire ſon dcuoir,
que pourautant que les veines eſparſes par les inteſtins laiſſent couler le fang, lequel
neste
mellé par les viandes non digerées, eſt cauſede ce Aux de ventre. Et dauantage , le
ſang ſore par le nez , par la bouche , oreilles , ficge, par la verge , vulue , & par les
coings des yeux, & des genciues, leſquelles ſe pourriſſent, & les dents tombent.
D'abondant, vne difficulté d'vriner & reſpirer, conuulſion vniuerſelle , puis la
mort. Les remcdes ſont de ſcarifier promptement, & bruſler la partic, ou du tout
с la coupper, ſ'il eſt poſſible, puis vſer de remedes attractifs propres aux venins.

Figure du Serpent nommé Coule -fang.

Cc
HACCP
Buy

Hab

CICLO

2012
D Du Serpent nommé Pourriſſeur. CH A P. XXIIII.
duri

E pourriſſeur a eſté ainſi nommé, pour autant que la partie de


ceux qu'il a mordus , eſt ſubitement pourrie par la malignité
de ſonvenin. Il eſt ſemblable au Coule-ſang , reſte qu'ileſle. Nicandre.
ue ſa queuë en haut , & l'entorcille comme vn pourceau faict
la ſienne.
• Pauſanias eſcrit que le Roy d'Arcadie fuc bleſſé par vn Pour
riſſeur, & dic que ce Serpent eſt de couleur cendrée, ayant la
teſte large, le col eltroit, le ventre gros, & la qucuë courbée , & chemine oblique
ment en la maniere des Cancres , ayant des taches ſeparées les vnes des autres,
riolées
dens
piolées , c'eſt à dire , de diuerſes couleurs , comme un tapis velu. Les acci
que cauſe ſamorſure ,ſont grande douleur, qui eſt faiđe à cauſe de ſon venin
brullant,& pourrifantentre tous autres venins, puis vne cheute vniuerſelle du poil.
TT . iij
768 Le vingt -vnieſme Liure ,
Aëce. Aëce adioulte dauantage encore pluſieurs autres : comme flux de ſang par la A
playe,& peu apres vne fanie puante, & grande enfleure en la partie. Voila comme
parlamalignité de ce venin pourriſſant,non ſeulement les eſprits font vaincus , mais
auſſi tout le corps, commeſi le feu y auoit paſſé. Ainſi que nous voyons aduenir en
tempsde peſte,chaud & humide, où il appertapoſteme peſtifere, charbons,& autres
pourritures. Ecquant aux remedes , ils doiuenteſtre ſemblables, comme ceux que
nous auons eſcrit de la Vipere .
Figure du Serpent nommé Pourriſſeur.

Du Bafilic. CHA P. XXV .

Nere tous les Serpens, le Baſilic eſt le plus venimeux ,commeeſtane


Nicandre, meſme le venin des autres . Nicandre dir,que lors qu'il ſe traiſne, tous
Gal.liøre de
les autres le fuyent,& luy quittent la place : eftans comme aduertis par
ſon ſiffler,tant del'heure de ſon arriuće,que deſon depart. Galiendit,
la theriaque que le Baſiliceſtvn ſerpentiaunaltre,ayanc la ceſte munie de trois pe
à Pifon.
cices eminences,ou enleueures,marquetée de caches blancheaftres,en forme de cou.
ronne , & pour ceſte cauſea eſté nommé Roy des Serpens. Par ſa morſure & ſon fif.
Aler, & toucher,fait mourir tous autres animaux. Dauantage,ſon venin cftfi cruel,
Solin . que fion le regardetropententiuement,tuë ceux qui le regardent. Solin eſcric,que o
le corps mortdu Baſilica encores de grandes vercus: pource ceux de Pergame l'ont
achepté à grand prix , pour empeſcher les Araignes de faire leurs coiles dedansle
temple d'Apollon , & lesoiſeaux d'y faire leurs nids , eſtant pendu audit temple.
Elantmort,nulles beſtes ſentans l'odeur de ſa charongne, n'oſent le toucher pour
le manger : & fi par fortuneils en mangent, ilsmeurent ſubitement,non ſeulement
pour auoir mangé de ſon corps,inais pour auoir mangé des beſtes mortes par la mor 1
Lucain . ſure. Pour ces raiſons Lucain eſcrit:
Le Bafilic tout ſeuleft regnant par leſable,
où ſoffiant il ſe rend à tout autre effroyable:
Plus qu'un autre venin le fien eſt dangereux ,
Qui chacun va challant du regard de ſesyeux.
· Il fait mourir les herbes & arbriſſeauxpar où il paſſe,non ſeulement par ſon tou
Plineliu. 8. cher,maisauſſi par ſon haleine. Pline dit qu'en Egypce ya vne fontaine nomméeNi
ch.21 . gris, pres de laquelle y a vnanimal petic, & mal-ailé de ſes membres , qui eſt la mort
du genre humain. Ileſt de longueurdedouze doigts,& eſt orné par la teſte, comme D
vn diademe , d'vne tache blanche : ſon corps eſt iaunaſtre. Lors qu'il rampe, il leue
la partie de deuant de ſon corps,&la porte droite,ne ſ'aidant à cheminer que de celle
La emi
Belette
e
de derriere. La region Cyrenaïque le produit. Pline dit que la Belecte eſt ſonenne
enn mie morcelle, & qu'elle le fait mourir de la ſeule haleine: quieſt que la bonne Nacu
mortelle du re n'a jamais voulu laiſſer vne telle peſte,ſansyn contraire,quieſtla Belecce, laquelle
Bafilic. a autant de force contre le Baſilic ,que luy-meſme a contre les hommes. Aullique le 2
Lion, coinbien qu'il ſoit hardy & furieux entretous les animaux, craint toutesfois le
Eraſiſtraie. Coq, qui eſt vne beſte fans force & reſiſtáce à comparaiſon.Erafiltrate dir,que le lieu
Les accidens de la morſure du Baſilictout ſubicdeuientiauine commeor, & le corps coucendé, &
qui prowien- que la chair des muſcles tombe par morceaux couce pourrie :& baille contre ſon ve
meni de fa 'nin
nin vne
vnedragimede caſtorée à boire,auec du vin ou du ſuc de pauot. Ačce dic eſtre v
morſure. ne choſe ſuperfluë, que d'eſcrire aucun remede contre la morſure, d'autant que la ſua
bite diſſolution des eſprits eſtant faite,il eſt impolible de donner remodeà cemps.
.

i
Des Venins.
20
769
Lafigure du Bafilic eft selle.
during

CHIC

lice ,
Fuerte
22
De certainsferpens eſtranges. CHAP. XXVI .

Ean Leon Afriquain eſcrit en ſon liured'Afrique,qu'à Calicut


on trouue des ſerpens d'eſtrange façon , cítans de la hauteur d'vn
gros pourceau, ayans la teſte plus groſſe & plus hideuſe, & qua
tre pieds, eſtans fort dommageables aux habicans. Il y en a qui
ſont livenimeux, que parleur morſure la perſonne tombe ſubi
tement morte . Et fi quelqu'vn auoit tué vne de ces beſtes , le
0 Roy le feroitmourir, commefilauoit tuévn homme. Le Roy &
les habitans du païs ontvne folle opinion de ces beſtes,eſtimans qu'ils ſont les eſprits
de Dieu , diſant que ſi ainfi n'eſtoit,ilsn'auroient la puiſſance de mettre vn homme à Opinion
mort parleur ſimplemorſure: deſorteque cesanimaux ontce creditde ſe promener fanſje.
ver
parmi la ville,cognoiſſant bienceux qui ne les craignent pas auſquels ne font aucun
mal.Combien ( dit- il) que deſon temps il ſoit aduenu que par une nui& l'vn de ces Hiſtoire.
animaux entra dedans vne maiſon , où ilmordit neuf perſonnes , que l'on trouua au
matin roides morces, & fort enflées. Et nonobſtant cela , ils ne laiſſent les auoir en
' grande admiration ,tellementque ſi en allant en quelque voyagcils rencontrent vne
dcces beſtes,ils lereputent debon -heur ,eſperans de cela que leurs affaires & en
trepriſes ne peuuent venir qu'à bon port. Il dic plus,qu'au Royaume de Senegua ,y a
des ſerpens longs de deux pas & plus, & n'ont ailesne pieds : mais ils ſontli gros,
1071
qu'ils engloutiſſent ynechéure entiere ſans la deſmembrer: croyez-le ſi vous voulez.
De la Salemandre. CHAP. XXVII .
D

di A Salemandre ne fait ſeulement mourir les perſonnes par le venin de fa


morſure, comme les autres ſerpens venimeux : mais auſli infecte de la baue
les fruicts & les herbes par où elle paſſe, & d'vnecertaine humeur eſpeſſe,
qui luy ſorc de tout le corps , comme vne ſueur , au grand danger de ceux
qui mangent deſdices herbes , comme on a veu par experience en pluſieurs, qui en
font morts. Parquoy ne fauttrouuer eſtrange,fiaucuns modernes ont dit , qu'aucu
0254
nes maiſons eſtoient entierement peries pour auoir beu de l'eau despuits, dedans
leſquels yne Salemandre eſtoit par fortunecombée ſans y penſer: car ſi elle grimpe
ſur vn arbre , elle infecte cout le fruict ,& fait mourir tous ceux qui en mangent , de
CUR
ſa qualité froide & humide de ſon venin,n’eſtant en rien differente del'aconit. Aëce sëceliu.is
be
dir, que ceux qui auront auallé du venin de la Salemandre, il ſort de leurs corps ta
ches blanches,puisnoires , leſquelles ſe pourriſſans, font tomber le poil de tout le
corps . On remedie à leur venin par vomiſſemens & clyfteres, en donnant auſſi du
TTC inj
7
770 Le vingt-vnieſme Liure ,
theriaque & mithridat. Auicenne ordonne meſmes remedes qu’on donne contre A A
l'opion , parce qu'ils ſont tousdeux de nature froide, & pour l'alexitaire propre à
tel venin ,c'eſt la tercbenthine , le ſtorax , la grained'ortie, & les fueilles de cypres .
Iix . IO . Diofcoride dit la Salemandre cítre vne eſpece de lczart de diuerſes couleurs : &
chap 67: eft folic de dire qu'elle ne ſe brulle point au feu. Pline dit qu'elle eſt ſifroide ,qu'elle
clteint le feu au coucher ſeulement commela glace : ce qu'elle fait miſe ſur les char
bons , comme on feroit vne carbonnade qu'on y voudroit roſtir. Toutesfois Mar
thiole dit qu'eſtane jettée au milieu d'une grande famme, ſubit eſt conſomméc:
c'eſt, dit-il, grande folie vouloir croire quele feu ne la peut conſommer, & qu'elle
en vit commele cameleon de l'air . La Salemandre eft noire , ſemée de grandes ca
ches jaunes , en figures d'eſtoiles.

Lafigure de la Salmandre.

67
11100110 Wali

( 0

Elle a vnc vertu chaude , corroſiue & vlceratiue : on en víc aux medicaments,
comme des cantharides , à faire veſſies,pour nettoyer & conſommer les matieres
coniointes en quelque partic extericure du corps aux lepreux.

De la Torpille. CHAP. XXVIII .

A Torpille eſtainſi nommée , à cauſe qu'elle rend les membres


endormis.Elle vit,auxriuages fangeux, de chair des autres poil
fons qu'elle prend par fineſſe: car eſtantcachée dans le limon,
elle rend les poiſſons qui ſ'approchent d'elle , tellement endor
mis , eſtourdis& immobiles,qu'elle les prend , & en ioiiit à ſon
plaiſir : non ſeulement a ceſte vertu contre les poiſſons , mais D.
auſicontre les hommes. Car ſi vn homme luy touche auec vno
verge,elle luy endormira le bras: aulli fait-elle aux peſcheurs,qui l'ontpriſeen leurs
sets. Ce que teſmoigne Pline liure xxxij. chap. j . Ce qui eſt confirmépar le dođe
Seigneurdu Barcas au cinquieſmcliure de la Sepmainc, par ces vers ,
La Torpille, qui ſçait qu'elle porteenfonflanc
Vå hyuer inſenſible , un peftifere ſang ,
un incognou panot, une haleine cruelle ,
Qui roidit tons les corps qui s'owoiſinent d'elle:
Verſe traiſtreuſement ſur les prochespoiſſons,
le neſçay quels venins, ie neffay quels glaçons.
Dontl'efrange vertu s’eſpondantpar les ondes
N'arrejte ſeulementleurs troupes vagabondes:
Des Venins. 771
A Ains mefme endort leurs fens ,puis ſe paiſt de leurs corps,
Dont les membres gelezfont & morts non morts .

La figure de la Torpille t'eſt icy repreſentée.


Figure de la Torpille.

JO
De la morfure d'Apics. CHAP. XXIX .
A

A playe de l’Aſpiceſt petite comme la picqueure d'une aiguille , & ne fait Accidene.
aucuneenfleure. Les accidens quiaduiennentapres la morſure , font, que
les malades ſe ſentent coſt apres la veuëcroublée, & pluſieurs douleurs
par le corps aſſez legeres, & ſentent douleur à l'eſtomach: & la peau du
D front ſe ride, & le malade clinotte touſiours les yeux ,conimefilaucit vouloir de dor
mir : & toſt apres,& le plus ſouuét dedanstrois iours,autresen huid heures, meurent
en conuulfion,fion n'y donne ordre. Le malle fait deux piqueures, & la femelle qua
tre , comme font les viperes. Or le venin de l’Aſpic fait congelerle ſang és veines & Le venin de
arteres: & partant faut donner, pour contrarier àiceluy,cholescalefa &tiues & dete- l'Alpic eſ
nuëfubftance ,comme eau de vie, en laquelle on aura diſfout theriaque ou mithri- froid.
dat,& autresſemblables: auſion en appliquera dedans la playe, & fera-l'on eſchauf
ferle patientpar bains , frictions, & ambulations , & autres ſemblables. Lors que la
parcie morſe deuient purpurée, noire ou verdoyante , telle choſe demonſtre que la
chaleur naturelle eft fuffoquée & elteinte par la malignité du venin: alors la fantam
puter ſ'ileſt poſſible, & que les forces le permettent. De Vigo en ſa practique de Chi- Hiſtoire,
rurgie , die auoir vou à Florence vn Charlattan Triacleur, lequel pour mieux vendre
ſon cheriaque, ſe feit mordre à vn aſpic, de laquelle morſure ilmouruten quatre
heures. Matthiole ſemblablement le recite, & dit, qu'ilsehoienc deux Charlatcans,
772 Vingt- vnieſme Liure,

dont l'vn habloit & harāguoit mieux que l'autre, pour mieux faire valoir ſes denrées, a
lequel conceutvne enuie mortelle contre ſon compagnon : parquoy trouua moyen
de luy changer ſon aſpic, qui auoitja perdu ſa virulence par la longue nourriture ,&
l'ayantofté de ſa caſſole ,yen mit vn autre recentement pris & tour affamé. Done
aduint que ce habladour penſantque ce fuſt le ſien , ſe fit mordre au tetin, ainli qu'il
auoit de couſtume, & print apres de ſon theriaque, lequel ne luy ſeruoit qu'à donner
couleur , pour abuſer & tromper le peuple,quivoyantceſte beſte le mordre fans en
reſſentir aucune offenſe , couroic apresluy , eſtimant ſon theriaque fouucrain. Mais
le pauure Charlatran trompé par ſon compagnon , qui luy auoit changé ſa belte pri
uée & alcerée de ſon venin , en moins de quatre heures laiſſa la vie : & les accidens
qui luy ſuruindrent, furent qu'il perditla veuë , & tous les autres ſens : la facc deuing
liuide, & la langue fort noire , & cuc grand tremblement de tous ſes membres , aucc
Tueur froide, & defaillancede cæur , puis la mort, & ce en la preſence des aſſiſtans, 8c
ſubit le meurtrier gaigna au pied . Macchiolus dit , que cesCharlatcanstriacleurs,
pour tromper le peuple à mieux vendre leur theriaque, prennent aſpics & vipcres,
B
long temps apres le printemps , lors qu'ils ont jeccé le plus dangereux de leur venin:
puis lesappriuoiſent par viandes non accouſtumées,& leur font changer en partie la
nature venimeuſe : & apresce les font mordre dedans de gros morceaux de chair,afin
de cirer leur venin enclosen yne petite membrane qui eſt entre leurs dents & genci.
ues : puis ils leur font remordre ſur l'heure quelque compoſition , qui leur cltoupe
les conduits, par lequel le venin a de couſtume de ſortir: tellementqu'apres qu'cl
les mordent , leur morſure n'apporte aucun danger . Et par ce moyen ces lartons &
pipeurs de Charlattans ſe font admirer au ſimple peuple , auquel ils vendent leur
cheriaque fallifié,bien & cherement. Chriſtofel’André en ſon liure intitulé Occoïa.

trie , dit qu'aux illes d'Eſpagne y a grande multitude de ſerpens, afpics & autres be
ſtiaux veneneux , contre la morſure deſquels iamais le theriaque ne peut ſeruir: &
par experience on a trouué ce remede tres - excellent . Prenez des fueilles de thapſus
barbacus, caryophyllata , giroflier rouge , autant d'un que d'autre : faites-les bouillir
en fore vinaigre , & vrine d'hommebien fain , & en fomentez la partie . Et ſi le venin
a eſté ja long temps gardé , faut que le malade boiue quatre doigts de ladiđe deco- O
& tion à ieun , deux heures deuant manger. Ledit autheur iure Dieu , que celaemede
eſt bien experimenté , & qu'il foſeroit bien faire mordre au plus dangereux alpic,
ſans en receuoir aucun mal .

De la morſure de Coulewure . CH A P. XXX.

Hiſtoire re Vant eſt de la morſure de la Couleuure , ie produiray icy vne hiſtoire. Le


cente o me Roy eſtanc à Moulins , Monſieur le Feure Medecin ordinaire du Roy ,
morable d'or
Maiſtre lacques le Roy , Chirurgien ordinaire dudit Seigneur , & moy,
ne morſurede fuſmes appellez pourmedicamenter lecuifinier de madarne de Caſtel t
Couleuure.
pers , lequel en cueillanten vnc haye du houblon , pour faire vne falade , fut mords
d'vne Couleuvre ſur la main , & ſucça le ſang de la playe , dont coſt apres la langue m

fenfla ſi fort, qu'il ne pouuoit qu'à bien grande peine parler, ny eſtre entendu . Da
uantage tout le bras iuſquesà l'eſpaule, l'enfla & bourſouffa grandement , de façon
qu’on cuſtdit qu'on l'auoit foufflé: & diſoit le patient y ſentirvneextreme douleur, 01
& tomba en nos preſences deux fois en defaillance de cæur : commeaftant mort , & D
auoit la couleur du viſage & de tout le corps iaunaſtre & plombine. Nousvoyans 07
tels accidens diſions la morteſtre prochaine: neantmoinsilne fut laiſſé ſans ſecours: IC
qui fut, luy lauer la bouche de cheriaque deſtrempé en vin blanc,puis luy en fucdon fo
Cure d'icelle
né à boire auec cau de vie . Et ſur ſon bras bourſoufflé , ie luy feis pluſieurs ſcarifica de
morſure.
tions aſſez profondes, & meſmement ſur la morſure, & laiſſay fuffiſamment fluer le fa
fang ( qui n'eſtoit qu'vne ſeroſité ) puisapres furent lauez d'eau de vie ,en laquelle DO
i'auois fait diſſoudre du theriaque & michridat. Et apres le patient fur poſe dans vn ga
liet bien chaudement , & le feic - on ſuer , le gardant de dormir , de peur que levenin
ne ſereriraſt auec la chaleur naturelle au cæur . Ec veritablement le lendemain cous
ME
les accidens furent ceſſez ,& fue coſtapresguary deſdites ſcarifications. Toutesfois
l'vlcere de lamorſurefuc tenuë longuementouuerte,y appliquant touſiours du che lo
riaque auec les autres medicamens. Ainſi ledit cuiſinier receut entiere & paifaida 20
guariſon. Ette ſuffiſc de ceſte hiſtoire pour preuoir à la morſure de la Couleuure . A
Des Venins. 773
A
De la morſure du Crapaui. CHAP. XXII.
Ncores que les Crapaux n'ayent des dents, neantmoins ne laiſſent CrComment les
apaux im
d'empoiſonner la partie qu'ils mordent de leurs babines , & gen priment leur
ciues, qui ſontaſpres & rudes,faiſans paſſer leur venin par les con venin .
duits de la parcie qu'ils mordent. Auſſijottent leur venin par leur
vrine, baue, & vomiſſement ſur les herbes , & principalement ſur
les fraiſes, dont ils ſont fort frians. Et ne ſe faut eſmerueiller , ſi
apres auoir pris tel venin , les perſonnes meurent de mort ſubice.
Donten cer endroit ne veux laiſſer en derriere vne hiſtoire, que depuis peu de iours
vn homme d'honneur m'a recité : Deux marchands eſtans à vne diſnée pres de Hiſtoire.
Toulouſe, fen allerentau iardin deleur hoſte cueillirdes fueillesde ſauge, leſquel. voilento
les mirene'cn leur vin lanseſtre lauées : & deuant qu'ils euſſent acheué de diſner,
perdirent la vcuë , ayans premieremene vnevertigine,tellement qu'il leur ſembloid
B que la maiſon tournalt c'en deſſus deſſous, & tomberencen {paſte & defaillance de
cæur , ayans les léures & la langue noire , & balburioient, & auoient le regard hi
deux & de trauers , ayans vne lueur froide auec grands vomiſſemens, & enficrent
bien forc,& peu apresmoururenc, dont l'hoſte & generalementtous ceux de la mai
ſon furenc bien forceltonnez.Eccoſtapres la iuſtice les ſaiſir , & lesmit en priſon,leur
Terme mettant ſusauoir empoiſonné les deux marchands . Et les ayans tous interrogez ſur
le crime qu'on leur impofoic de les auoir empoiſonnez , dirent qu'ils auoient mangé
& beu demeſmes viandes , reſté qu'ils n'auoient mis de la ſaulge en leur vin. Adong
le iuge feit appeller vn Medecin , pour ſçauoir ſi on pouuoit empoiſonner la faulge:
0 & dir que oüy, 8c qu'il falloit aller au iardin , pour ſçauoir ſi on pourroit appercevoir
quelque beſte venimeuſe, qui peuſtauoir jetré ſon venin deſlus. Ce que veritable
ment on trouua, qui eſtoit grand nombre de crapaux gros & pecits, leſquels eſtoient
logez en vn trou ſous le faugé , aſſez profondement en terre, & les feic-on fortir en
foüillant & jettant de l'eau chaudeautour de leur demeure . Et là fue conclu que la Moyen de
fauge eſtoit empoiſonnée ,cant par la baue que de l'vrine des crapaux , & par leur va- faire ſortirles
0 peur venimeuſe, & l'hoſte avec ſa famille abſour. Et partant nous recueillirons par crapaux hors
ceſte hiſtoire, qu'onne doicinanger aucunes herbes,ny des fraiſes,que premieremêt de serre.
elles n'ayételté bien lauées : & auſſi que l'exhalation ,morſure,baue& vrine des cra.
paux ſontfort venimeuſes. Pareillement il ſe faut bie garder de dormir aux champs,
ayāt la bouche prés de quelque trou, où les crapaux,& autresbeſtes venimeuſes font
leur demeure, de peur d'accirer leur venin en reſpirant, qui pourroit eítre cauſe de la
more du dormant.Auſſifauteuicer de mager desgrenouillesau mois deMay,à cauſe
que les crapaux frayent auec elles.Ce qu'on veoit àl'æilau mois de Mayaux mareſts
1, & autres lieux où elles habicent. Il y en a de petits, qui ſont quelquesfois auallez des
:( bæufs & vaches auec les herbes qu'ils paiſſent: & toſt apres illeur ſuruient vne telle
enfleure de tout le corps, qu'ils en creuent le plus ſouvent. Or ce venin n'eſt ſeule
ment dangereux pris par dedans,mais auſſi eſtanc attaché au cuir par dehors , ainſi
nde qu'il aduient lors qu'ils jettent leur venin quand on les tuë ou autrement.Parquoy il
fautpromptement eſſuyer& lauer le lieudvrine, ou d'eau ſalée,ou autres choſes qui
onteſtécy-deſſus declarées aux morſuresdeschiens enragez. Les accidens qui ad- Les accidens
D viennentdeleur venin , ſont que le malade devient iaune, & toutle corps luy enfie, outre lespre
cedens
en ſorte qu'il ne peut auoir ſon haleine , & halette comme vn chien quia grande aduiennent
qui
ment couru :parceque le diaphragme ( principal inſtrument de la reſpiration ) ne du denin des
pouuantauoir ſon mouuement naturel,redouble incontinent, & faichafter le cours crap44х.
dela reſpiration & expiration . Puis luy viennent d'abondant vertigines, ſpaſine,de
faillance de cæur, & apres, la mort, fil n'eſt promptement ſecouru. Cequiaduiént Le venin dy
non à raiſon de la qualité de leur venin , lequel eſt froid & humide , mais de ſa mali crapaut ejf
gnité particuliere , laquelle pourriſt leshumeurs.Or d'autant que ce venin eſtenne - froid e hisa
my mortel de toute ſa ſubſtance, il le faut cõbattre cant parqualitez manifeſtes, que mide , pour"
parantidotes ou contrepoiſons: quiſe fera par vomiſſemens (principalement li le yiſſant les
venin eſtdonné par boire ou manger) par clyfteres , & toutes choſes chaudes & dehumeurs .
‫مندی ہے‬ ſubtiles parties , comme bon vin , auquelon aura diſſout theriaque ou mithridat , &
autres choſes qu'auons par cy -deuant declarées auxmorſuresdes chiens enragez.
Auſliles bains ,eſtuues,& grand exercice ſont à louer,afin de diſſoudre,ſubcilier, &
774 Le vingt-vnieſme Liure ,

vacuer l'humeur venimeux . Rondelet en l'hiſtoire des poiſons dit , que le crapaut A
eſt veſtu d'une groſſe peau dure & mal -aiſée à percer & rompre,parce qu'il ſe coufic
& enfle , ſe rempliſſant d'air , au moyen dequoy il reſiſte aux coups: peu ſouuenc
mord , mais il jecte vne vrine & haleine venimeuſe à ceux qui le ſentent, denieurans
Hiſtoire de
enfez par tout le corps, & bien coſtmeurent.Ildicauoir veu vne femme, qui mou
Rondelet.
rut pour auoir mangé des herbes ſur leſquels vn crapaut auoit halené & jetté fon
venin. Les meſchans bourreaux empoiſonneurs en font pluſieurs venins , leſquels il
faut pluſtoſt caire que dire . Iceluy a la veſſie fort grande, où il garde quantité d’yri
qu'il jette contre ceux qui l'affaillent. Les Alexitaires & contrepoiſons font,
boire du jus de Beroine , de Plantain ; & d'Armoiſe : pareillement leſangde Tortuë,

Pline dit que avec farine , & reduiten pilules , puis deſtrempé auec du vin . Pline dir ,que leur rat
leur ratte te & cæurreſiſtét contre leurvenin . L'opinion du vulgaire eſt fauſſe, penſant qu'on
cæur reſiſtent trouue dedans leur teſtevne pierre nommée crapaudine, bonne contre le venin.
conire leur
bonin . De la picqueure du Scorpion terreſtre. CHAP . XXXII .
B

E Scorpion eſt vne petite beſte, ayant le corps en oualle,& a


Deſcription pluſieurs pieds , & la queuë longue , faite en maniere de pateno
du scorpion .
ſtres, attachées bour à bout l'une contre l'autre, la derniere plus
groſſe que les autres , & vn peu plus longue , à l'extremité de
laquelle ily a vn aiguillon , & aucunsen ont deux , leſquels ſont
creux remplis de venin froid , par leſquels ils jectent leur venin
En la queue dedans ia playe qu'ils picquent. Ila de chaquecoſté cinq jambes
giſt le venin. fourchuës en maniere de tenailles: les deux de deuant ſon beaucoup plus grandes
que les autres , faictes en maniere de celles d'vne eſcreuiſſe. Il eſt de couleur noira
ſtre , comme de couleur de ſuye : il cheminc de biais : il ſ'attache ſi forc auec le bec
Scorpions
ailez . & pieds contre les perſonnes , que bien difficilement on le peut arracher. Aucuns
ont des ailes ſemblables à celles des ſauterelles qui mangent les bleds , qui ne ſont
trouuez en France : & iceux volent de region en autre, ainſi qu'on void desfourmis 0
AU
volans. Ce qui eſt vray - femblable , parce que les payſans de Caſtille ( ainſi qu'eſcric

言合会
Matthiolus ) en labourant la terre , trouuent ſouuent en lieu de fourmilieres ,vne
Pline liv.8 . bien grande quantité de ſcorpions, qui ſ'y retirent l'hyuer. Pline eſcrit qu'en Ethio CC:

chap.29. pie y a vn grand pays deſert pour raiſon des ſcorpions, qui n'y ont laiſſé ny gens

。宫会言三

会 员
宣言
Difference ny beſtes. Les anciens font pluſieurs eſpeces & differences de ſcarpions,leſquels
desfcorpions. ſont diſtinguez ſelon les diuerſitez de couleurs, comme iau nes , roux, cendrez ,
!
verds , blancs , noirs : les vns ayans des ailes : les autres point . Ils ſont plus ou moins
mortels , ſelon les regions où ils habitene , comme en la Toſcane & en Scythic
font fort venimeux : en autres regions commeen l'Iſle de Pharo & à Trente , leur
picqueure n'eſt venimeuſe , & n'en aduient aucun mauuais accident . Il ſuruient dei
inflammation en la partie offenſée , auec grande rougeur , dureté , tumeur ,& dou
Les accidens leur, laquelle ſe change , à ſçauoir, tantoit chaude , & tartolt froide: aufli accroiſt

qui aduien- intempeſtivement , & par intervale ceſſe, puis toſt apres accroiſt : pareillement le
nent à ceux malade a vne lueur & friſſonnement, comme ceux qui ont la fieure, & a vne hor
quiſont pic- ripilation , c'eſt à dire , que les cheveux luy dreſſent. Il ſent auſſi des pun &tions
quez des le corps , comme ſi on le picquoit auec aiguilles , & grande quantité de D. Lai
pariny
ſcorpions. la
vents par le ſiege: il a volonté de vomir & aller à les affaires,& n'y peut toutes
fois aller , & tombe en defaillance de cæur , fiéure continuë , & deuient enflé ,&
ſi on ne luy donne ſecours, la mort lenſuit . Antonius Beniuenius au livre 1. chap.
56. dit auoir eu vn ſeruiteur, lequel fut picqué d'vn ſcorpion ,& tout ſubic luy fur
105C
uint vneſueur froidecomme glace : fut preſeruéde la mort en beuuant du cheria
tell
que diſſout en vin . Dioſcoride liure 2. chapitre 10. dit que le ſcorpion terreſtre
crudeſcaché ou broyé ,& mis ſurla picqueure,ou l'huile d'iceluy , eft ſon vray alexi
Cure.
taire . On le mange auſſi roſty & bruſlé pour ce meſme effect, dequoy l’experience
lees
fait foy. Autre remede . Prenez laict de figuier, & inftillez en la playe,tel remède
Antidose , lieu
guaritpromptement. Autre . Prenez calament broyé , & appliquez deſſus:auſſila
farine d'orge incorporée en decoction de ruë , & appliquée deffus. Er pour reme
de excellent , il ſe fautjecter dedans vn bain , & fe faire tres - bienſuer . Pour ſeder la çou
lore
douleur promptement , il faut piler des eſcargots auec leur coquille , 8c les appliquer
dellus
Des Venins. 775
A deſſus la picqueute.Aufile ſoulphre vif pulueriſé, & incorporé avec terebenthine,
eſt ſouuerain remede. La ruë pilée , & appliquée deſlus, eſt bonne.Aulli pour vn
ſingulier remedeony applique l'herbenommée fcorpioïdes, dont on a prisle nom .
Autre remede. Racinede couleurée boulué, & piléeauec vn peu de ſoulphre. Au
tre. Les aulx pilez, ſoulphre & huile vieille mellez enſemble , & appliquez deſſus.
Autre. L'agaric pulueriſé ou en decoction , cure leur picqueure.
Pour leschaſler il faut faire ſuffumigation de ſoulphre,& galbanum . L'huile aulli Remedesqui
faire d'iceux,appliquée aux trous où ils habitent , garde qu'ils n'en peuvent ſortir. chaſſent les
Autant en fait le jusderaifort. Et pour les garder qu'ils n'approchent & picquent ( corpions,
perſonne, il ſe faut frotter de jus de raifort,ou d'aulx : car par ce moyen iamais n'ap
prochét de celuy qui ſ'en ſera frotté. Pluſieurs autres remedes ont eſcrit les anciens,
mais ien'aypris que ceux qu'on peut aiſément recouurer , & font grandemenc loüez
par deſſus tous autres.

B De la morfure & picqueure des mouſches & chenilles.


CH AP. XXXIII.

Es abeillesou autres , les gueſpes, les frellons, les bourdons , les La picquenti
taons, apres auoir fait ouuercure au cuir, les vnes par leur mor- de mouſche
ſure , les autrespar leur picqueure,cauſent vne grande douleur n'eſttouſiouts
pour la malignitédu venin qu'elles jettent en la playe , laquelle mortelle.
coutesfois n'eſt pas touſioursmortelle:vray eft que ſe jettansiccl
les beſtes en grand nombre ſur vn homme , elles le peuuent tuer :
caron en a meſme veu mourir les cheuaux.Ceux qui en ſoncino
pinément offenſez, pour la grande douleur qu'ils ſencent, eſtiment que ce ſoit quel
qucautre beſtevenimeuſe .Etpour celte cauſe il eſt bon de ſçauoir les ſignes & acci
dens de leur pointure. C'eſt qu'ils cauſent grande douleur, laquelle demeure iuſ
ques à ce que leurs dents ou picquerons ſoiencoſtez , & le lieu devientpromptement
с rouge, & enflé à l'entour, & fy formevne veſlic, pour cauſe de la virulence qu'el
les jettene ayans fait ouuerture du cuir. Pour la curacion, il faut promptement ſuc Cure.
cerle lieu le plus fort que l'on pourra , pouroſter leurs dents & aiguillons: & fi par
ce moyen ne peuucnceſtreextraites , faut inciſer le lieu ( ſi la partie le permet ) ou
prendre cendres , & leuain , & huile , incorporez enſemble , & l'appliquer deffus.
Autre remede . Il fautmettre la partie en eau chaude , & la baſliner par l'eſpace de
demie heure ou plus , & apres lauer la playe d'eau fallée . Autre . Le creſſon pilé , &
appliqué deſſus ſede la douleur , & reſouc l'humeur contenu en la cumeur . Autano
en fait la fiente de bæuf decrempée en huile & vinaigre , & appliquée aſſez chaude
deſſus.Autre.Féues maſchées & appliquées deſſus, ſedent pareillement la douleur.
Auſlifait la perle pilée auec oxycrat. Aucuns commandent prendre deſdites mouſ Les mouſches
ches , & les eſcacher & en frotter le lieu , & les laiſſer deſſus,ainſiqu'on fait aux pic- remediene a
queures de ſcorpions. Autre. Faut prendre vinaigre , miel , & ſel, & le plus chaud leurdenin.
qu'on pourra en frotter le lieu , & y laiſſervn linge en double deſſus. Autre. Prenez
foulphre vif pulueriſé , & incorporé en ſaliue d'homme,& appliquez deſſus. Autre.
D Laict de figues non meures , incorporé auec du miel, eft aulli vn louuerain remede.
On peut eltre aſſeuré ſur tous remedes , du theriaque ( que Galien approuue au li
ure De sheriaca ad Pifonem ) le diſant eſtre le plus ſalubre remede donton puiſſe vſer
we aux picqueures & morſures des beltes venimeuſes, comme i'ay ditcy-deſſus. Pour
‫درزیر‬ garder que leſdites mouſches ne mordent & picquent,il ſe faut oindre le corps de pour chaffer
bien toftles
jus de mauue incorporé auec huile , & pour les challer bien coſt, il faut faire parfum
de ſoulphre & d'aulx. Galien dit que la guefpeaceſte malice , que voyant une vipe- mouchese
Accidens.
remorte, elle ſ'en va tremper ſon aiguillon au venin d'icelle , & de là ( dit-il) les
hommes ont apprisà empoiſonner les feches. Les chenilles rouſſes & veluës , appel
lées en Latin Multipedes, engendrent grande demangeaiſon , rougeur & tumeur au
lieu qu'elles mordent , où ſeront attachées , ou eſcachées : & cellesquiſeront nour
rics és pins encores plus. Les oignons pilez auec vinaigre eſt un ſingulier remede care,
pourappliquer au lieu , & pareillement les autres remedes qu’auonseſcrit aux mor
fures & picqueures des mouſches.
.
үүх
776
Le vingt -vnieſme Liure ,

A
De la morfure des Araignes. CHAP . XXXIV.

Es Araignes ourdiſſent leur toile de diuerſes façons, & y font vn peric


Differences.
trou , dans lequel ſont touſioursen embuſcade , pour attraper & prendre
les mouſches & mouſcherons, deſquels elles ſe nourriſſent
. Ilyen ado
pluſieurs eſpeces. L'vne eſt appellée Rhagion , laquelle eſt ronde, & de
couleur noire , comme vn grain de raiſin , dont elle porte le nom : elle a la bouche
au milieu du ventre , & les jambes courtes, & faiæ meſme douleur , que le ſcorpion.
Il y en a vne autre eſpece nommée Loup , pource qu'elle ne chaſſe leulementaux
mouſches communes , mais auſſi aux abeilles & aux taons , & generalementàtou

tes petites beſtioles qu'elle peut atcraperen ſa toile . La troilieſme eſpece eſt appellée
Formillon , pource qu'elle reſſemble à vnegrande formis, & eft noire , & ale corps
marqueré de certaines petites eſtoiles luiſantes, & principalement vers le dos.La
quacrieſme eſpece cſt appellée de Matthiolus Dyſderis, & eft ſemblableauxmouſ
B
ches guelpes, reſte qu'elle n'a nulles ailes , & eſt de couleur aucunement rouge, la
Arians. · quelle ne vit que d'herbes. Or les anciens tiennent que leur morſure eſt fort veni
0
meuſe , & que levenin eſt froid,parceque les accidens quien prouiennentfont gran
des ventoſitez au ventre , & froideur des extremitez , & au lieu de leurmorfure,le
malade ſent vne ſtupeur, & grande refrigeration , & a vne grande horripilation .Il A
Cure .
faut lauer la playe promptement de vinaigrele plus chaud qu'on le pourra endurer.
Pareillement faut piler des aulx & oignons, & les appliquer deſſus, ou bien de la
fiente de chéure fricaſſée en vinaigre . Semblablement eſt bon qu'on prouoque la
ſueur ſoit par bains , eſtuues, ou autrement. Et ſur tout le theriaque eſt excellent,
tant donné par dedans , qu'appliqué par dehors .

Des mouſches cantharides. CHAP. XXXV .

Le benin des Es mouſches cantharides ſont reſplendiſſantes comme or,& font fort
Cantharides helles à voir , à raiſon de leur couleur azurée parmy le iaulne,toutesfois 0
eft chaude de tres -mauuaiſe odeur. Elles ſont chaudes & ſeiches iuſques au quatrief
Jec me degré , & partantcorroſiues, bruſlantes & venimeuſes,non ſeulement
à cauſe de leur chaleur & ſeichereſſe excelſiue, mais auſſi à cauſe d'une particuliera
inimitié que nature leura donnée , principalement contre les parties dediées àlyri
fat
ne , non ſeulement priſes par la bouche,mais auſſi appliquées par dehors, quand il eſt CO
beſoin de veſſier ou vicerer quelque partie .
Les ſignes ou accidens d'auoir pris des cantharides par dedans.
lic
Le premier eſt que le malade ſent au gouft comme poix noire fonduë,qui procede fa
des humeurs vaporeuſes bruflécs en l'eltomach & au foye par la vehemente chaleur
putredineuſe de leur poiſon : & toftapres qu'elles ſont entrées dedans l'eſtomack,Ic
rongent & corrodent, & y cauſent grande douleur, & excitent vne in Aammacion au Ne
foye & aux boyaux , dont il fenſuit Aux de vétre , par lequel le malade jetre par ſes ſel.
les, des excremens ſemblables à l'eau, dás laquelle on alaué chair ſanglante,ou come
le flux des dyſenteries & caqueſangues. Et à cauſe de l'aduſtion qu'elles font aux
humeurs , ſuruient fiéure ardante , de façon que les malades deuiennent vertigineux D
& inſenſez, ne fe pouuans tenir en place pourles fumées & exhalationsvenimeuſes,
qui montent des parties baſſes au cerueau , lequel reſſentant telle vapeur , peruertie
le iugement & la raiſon : tous leſquels Ggnes apparoiſſans, on peut iuger la maladie
pa
eſtre incurable . Et quant aux parties dediées à lvrine, cauſent inflammation , ex
coriacion , & vlcere ,auec vneextreme douleur , erection de la verge , & cumcuraux
hommes & aux femmes, de toutes leurs parties genitales , qui fait queľorine ſorten
moindre quantité , & encores le peu qui en fort, eſt ſanguinolent: voire fouuen
ois 1
tesf les pati ens piſſ ent le ſang tout pur , & quelquesfois auſſi les conduits de l'v«
rine ſont du tout eltoupez , dont fenſuit gangrene & mortification , & par conſe
Cure de ceux quent la mort . La cure du venin des cantharides priſes par dedans ou par dehors,
ne differe que ſelon plus ou moins . Lors que quelqu'vn aura pris des cantharides
qui auront
pris des can- faut promptement le faire vomir , & luy donner du laiet de vache à boire, lequela ver
tharides. tu d'eſteindre l'ardeur de la poiſon , & reſtreindre le flux de ventre, ſeder la douleur,
Des Venins. 777
A parce qu'il lenit & addoucit la chaleur & ſeichereſſe. Pour ceſte cauſe on en vſera các
au boire qu'en clyſteres & inieciós: & qui n'aura du laict ,on vſera d'huile d'olive ou
d'amandes douces , pour addoucir lacrimonie de leur venin , quipourroic eſtre acca
ché contre les parois de l'eſtomach & inteſtins.Etleur fera-on autres choſes, qui ſe
ront recitées par ceſte hiſtoire, laquelle ilm'a ſemblé bon de reciter,non pourenſei.
gner le moyé d'en vſer,mais au côtraire afin de fen preſeruer,& endo &triner le Chi
rurgien ,où telle choſe aduiendroit,d'y remedier.Vn Abbé de moyen aage,eſtanten Hiſtoire d'on
b celte ville pour ſoliciter vn procés,ſolicita pareillemene vne femme honneſte de ſon ieune abbé
meſtier,pour deuiſer vne nuic auecelle,ſibie que marché fait, il arriua en la maiſon . qui printdes
Elle recueillieMonſieurl'Abbé amiablement,& le voulantgratifier,luy donna pour cantharides
facollationquelque confiture,enlaquelleyentroir des cantharides,pourmieux l'in-par dedans.
citer au deduit venerique. Or quelquetemps apres ,à ſçauoir le lendemain , les acci 3
dens que i’ay parcy-deuant declarezaduindrent à Monſieur l'Abbé, & encores plus
grands, parce qu'ilpiſſoit & jeccoit le ſang tout pur par le ſiege , & par la verge.Les
B
Medecins eſtansappellez, voyans l'Abbéauoir tels accidens,auec erection deverge,
cogneurent qu'il auoit pris des cantharides. Ils luy ordonnerent des vomitoires &
clyſteres,faits d'orge-mondé,de riz, & decoction de mauues, ſemence de lin , de fe
nugrec,d'huile de lis, ſuifdebouc,ou de cerf, & puis apres vn peu de theriaquemix Pluſieurs redo
tionnéauec conſerue de roſes pourfaire ſortir la poiſon dehors. Pareillement on luy medes contre
donna à boire du laict,& on luy en feit auſſi des iniections en la verge, & aux inteſtins l'ardeur des
end auec autres choſes refrigerantes, glaireuſes & gluantes , pour cuider obeundre & cantharides,
10 amortir la virulence & malignité du venin. Or celles choſes à bon droit ont eſté or
données des anciens Medecins, parce qu'elles demeurent longtemps attachées aux
parties interieures offenſées & vlcerées: ioinct auſſi qu'ellesgardent que le virus n'y
peut penetrer : & partant le laict y eſt fort bon. Auſſi le beurre frais beu & jerté en la
veſlie,& l'huile d'amandes douces recentementtirée : ſemblablement les mucilages
de pſyllium ,de mauues,de coings: & le ſyrop de nenuphar ,de pauor,de violes, dejus
de laiđuës, pourpié ,concombres, de courges, & de melons . Or ſon boire eſtoit eau
d'orge & ptiſane:ſon manger eſtoit poulailles, veau ,cheureau, cochons gras boullus
C auec lai& ües,pourpić, mauues, violiers de Mars ,orge, leſquels alimens luy eſtoient
aulli medicamens,tāt pour la cherle ventre, que pour addoucir & leder les douleurs
de l'acrimonie du venin : & ſur la region des reins, lumbes , & ſur le perineum meit
pluſieurs choſes refrigerantes & humectantes. Dauantage il fut baigné pour cuider
donner iſſuë au venin par les pores du cuir : mais pour tous ces remedes faicts ſelon
l’art , Monſieur l'Abbé ne delaiſſa à mourir auec gangrene de la verge . Ec partant ie
conſeille à celles Dames ne prendre de telles confitures, & moins encores en donner
àhomme viuant,pourles accidens qui en aduiennent.le raconteray encore ceftehi
pon
ſtoire. Depuis quelquesans ençà, vne Damoiſelle vint à Paris fort couperoſéeau vi Auire hia
ſage,y ayant de gros ſaphirs,ou boutons auec grande rougeur,en ſorte que plufieurs foire d'une
qui la voyoientl'eſtimoienteſtre lepreuſe,iuſques à luy interdire de non plus entrer Damoiſelle
en l'Egliſe de la paroiſſe , de peur qu'elle ne gaſtaſt les ſains. Icelle appella auec moy couperoſée .
Meſſicurs Iacques Hollier ,& Robert Greaume ,Docteurs Regés en la faculté deMe
pucha decine,auec Eſtienne de la Riviere , & Germain Cheual , Chirurgiens iurez à Paris ,
pour donneraideà ſon mal . Et apres qu'elle nous eut monſtré pluſieurs receptes des
D remcdes qu'elle auoit pris pour cuider eſtre guarie : apres auſli l'auoir exactement
viſitée & examinée, fut conclu & accordé,qu'elle n'eſtoit aucunement lepreuſe:par
quoy pour guarir ſa couperoſe, on luy appliqueroit vn veſicacoire fait de cantharide Merueilleux)
ſur toute la face, afin d'attirer la matieredesboutons & l'humeur ſuperflu qui eſtoit effects des
pareillementimbu en tout ſon viſage.Ceque iefeis. Er trois ou quatreheuresapres cantharides
que le veſicațoire fut reduit de puiſſance en effect , elle eut vne chaleur merueilleuſe appliquées
àla veſſie , & grandetumeur au col de la matrice,auec grandes eſpreintes : & vomiſ- par dehors,
ſoir, piſſoit & aſſelloit inceſſamment, ſe jettant çà & là commeſi elle euſt eſté dans
vn feu, & eſtoit comme toute inſenſée & febricitante: doncie fus alors eſmerueillé
de relle choſe. Partantier’appellay la compagnie , tant les Medecins que Chirur
giens. Et voyant que tels accidens venoient à raiſon des cantharides qu’on luy
auoic appliquées pour faire le veſicatoire, fut aduiſé qu'on luy donneroic du laiát
àboire en grande quantité , auſſi qu'on luy en bailleroic en clyfteres & inie&tions,
tant au colde la velle que de la matrice. Semblablemenc elle' fut baignée en eau
V Vu ij
778 Levingt-vnieſme Liure,
moderément chaude , en laquelle auoit boüilly ſemence de lin , racines & fueillesde A
mauues, & guimauues,violiers deMars,iufquiaine,pourpié,lai&tuës: & fytint aſſez
longtemps,à cauſe qu'en iceluy elle perdoit la douleur. Puis eſtantpoſée dedans le
liæ ,& eſſuyée, on luy appliqua ſurla region des lumbes, & autour des parties genita
lesonguent roſat & populeum , incorporez en oxycrat,afin de refrener l'intempera
ture de cesparties.Ecpar cesmoyens les autres accidens furentceſſez.Et quantàſon
viſage,ilfutentierementveflié: & jecca grande quantité de ſanie purulente. Et parce
moyen perdie ceſte grande deformité de la face qu'elleauoitauparauant. Et apres
eſtre guarie , nous luy donnaſmes atceſtacion qu'elle n'eſtoit aucunement entachée
Preusedure-de lepre. Eccoſt apres eſtant recournécen la maiſon, fut mariće , & a eu depuis de
mede des
choſes on beaux enfans, & vicencore ſans qu'on l'apperçoiue auoir eu la face eſcorchée. Ces
Etweules con . deux hiſtoires inſtruirontleieune Chirurgien à remedier à ceux qui auront pris des
sreles venins cantharides,cant par dedans que par dehors, f'ils ſont appellez pour y preuoir.Orde
corroſifs. uant que les ſuſdits accidens ſoient ſuruenus & grandement accreus,on fera boirede
l'huile, au malade ou quelque deco &tion relaxante : pareillementon en baillera par
clyfteres & iniections, afin de prouoquer le vomir, & laſcher le ventre : & principa B
lement pour garder que le venin n'adhere contre les parties par où il paſſe: comme
lors quenousvoulonsappliquer vn cautere potentiel, ou vn veſicatoire ſur vne par
tie , ſi elle eſt huileule ou engraiſſée, ils ne pourrontfaireleur operation, que pre
mierement on n'ait oſté l'on &tuoficé. Et pour le dire en vn mot,lı vn venin a eſtéprins C
par la bouche , & eft encore en l'eſtomach ,il faut prouoquer le vomir : & f'il eſt ja
deſcendu aux boyaux gros, il faut donner clyſteres :& fi on a opinion que la vertu
ſoit eſpanduë par toutlecorps, il faut donner choſes qui ont puiſſance de chaſſerle
venin du centre à la circonference , comme bains , eſtuues : ou mettre le malade de
K
dans le corps de beltes recentement tuées , comme bæufs, vaches , mules & mulers,
& faire autres choſes qui prouoquent la ſucur comme auons dit cy-deuant.
De la monfche nommée Bupreſte. CHAP. XXXV I.

Pourquong A Bupreſte eſt vnemouſche ſemblable à la cantharide, laquelle g


l'enfleure viet citant mangée aucc l'herbe par les animaux paiſſans, comme bæufs,
à ceux qui
ont mangé
des bupreſtes. 那 moutons, & autres ,les faitmourirenflez comme tabourins. Et pour
ceſte cauſe eſt appellée des paſteurs, enfle-bæuf.Ec fi vn homme
en mange ,il aura ſemblables accidens que ſ'ilauoit pris des cancha
rides, & le fait pareillement enfer, ainſique ſi le malade eſtoic affligée de l'hydropi
fie nommée Tympanités.Cela aduient par les vapeurs, leſquelles l'efleuentdes liu
meurs liquefiez difondus par la vertu de leur venin. Les reniedes ſont ſemblables à
ceux des cantharides, hu

De laſang-fue, ou fuce-fang.
Es

CHAP . XXXVII.
akars

Preparation ES ſang -ſues ſont venimeuſes , & principalement cellesqui


des fango ſont nourries és eaux bourbeuſes , & celles qui ſont és eaux clai
fues. res moins. Ec pour ceſte cauſe , lors qu’on ſen veuc feruir , il
les faut premierement faire deſgorger en eau claire , trois ou
quatre jours pour le moins : autrement elles laiſſent le plus D.
ſouvent des viceres où elles ſeront attachées , leſquelles puis
apres ſeront difficiles à curer : ce qui ſe fait encore dauantage
Cart. ſi on les arracre par force , pource qu'elles laiſſent leurs dents en la chair. Or li to
quelqu'vn en a aualé vne par inadvertence, il le faut interroger , pour ſçauoir
l'endroit, où il la ſent tirer. Ec ſi elle eſt demeurée au gofier , ou au milieu d'iceluy, 20

pour la faire deſmordre, faut que le malade ſe gargarize pluſieurs foisde vinaigre,
auquel on aura diffoult vn peu de mouſtarde : & li elle eſtoit pres de l'orifice de
l'eſtomach , il faut qu'il avalle de l'huile peu à peu auec vn peu de vinaigre : & où
Prenue des elle ſeroitdeſcenduëau fond de l'eſtomach , le malade la ſencira tirer & lucer , &
edes .
rem
quelquesfois crachera le ſang , & tombera en vne peur , comme ayant perdu leſens:
& pour la faire deſtacher,boira bonne quantité d'eau tiedeauec huile : & où elle ſe
roitopiniaſtre, pour la faire encore plus promptement debuſquer , on y mellera yn
Des Venins. 779
A peu d'aloës , ou quelqueautre choſe amere , & par ce moyen elle ſera deſtachée &
vomie : ce qui ſe cognoiſten celles qui ſont attachées exterieurement: car on les fait
démordre & quitterla place en mettant celles choſes ſur leurs teſtes. Puis on donne
ra quelque choſe aſtringente pour eſtancher le ſang de ſamorſure ,comme conſerue
de roſes, auec vn peu deterre ſigillée,& bol armenic, & autres choſes plus aftrin
gentes f'ilen eft beſoin. Car ſi elles ſ'attachent contre un gros rameau de veine, ou
artere , leſang coulera en plus grande abondance , & par conſequent ſera plus diffi
cile à eſtre eſtanché qu'en vn petit rameau .
Oril ne ſe trouue pas ſeulement des animaux venimeux ſur la terre,& és cavernes
d'icelle, mais auſſi ils ſe trouuent en la mer des poiſſons venimeux , comme la Mure
.
ne , la Paſtenaque , la Viue, la Torpille , le Liéure marin , deſquels nous fauc à pres
ſent parler , commençant à laMurene.
De la Murene. CHAP. XXXVIII.
!

A Murenc eſt vn poiſſon de Mer , reſſemblant à la lamproye , routesfois


elle eſt plus large, & a la gueule plus grande : elle a les dents fort lon
gues , aiguës & courbées au dedans. Elle eſt de couleur brune , fa peal
couuerte de petites taches blancheaſtres, le corps long de deux cou
dées. Les ancienslespriſoient beaucoup en viandes , tant à raiſon qu'elles ſont de
bongouſt , que pourautantqu'on les peut longuement garder dedans les viuiers &
boutiques pour l'en feruir en temps : elles ſont faciles à l'apprivoiſer, telmoin celle À

de Craſſus,delaquelle auons parlécy-deuant. Leurs morſures ameinent ſemblables


accidens quecellesdes viperes: & parcant ſont guariespar lesmelmes remedes .
Ælian dir , que la Murene ſe jette ſur terre , & qu'elle va chercher la vipere iuf
quesdedansla cauerne pourfrayerauec elle.Cequieſtprouué parlesvers de Ni- dePremierliure
candre .
sanimaux,

Il court de la Murene un bruit tout affeuré,


C'eſt qu'un ſerpent l'espouſe , & quedefonplein gré
G Elle fort de la mer, puis toute deſireuſe
Elle va s'écouler à la beſte amoureuſe.
La Viuea eu ce nom à raiſon dela grande viuacité , car eſtant cirée de la mer , de- La ville,
meure long temps en vie : ſes aiguillons ſont veneneux, principalement ceux qui
font au bout de ſes oüyes. Pour ceſte cauſe les cuiſiniers leur coupent la ceſte deuang
que les ſeruir à table. A Rouen comme à preſent à Paris les poiſſonniers ne les oient
vendre, que premierement ne leur ayent coupé la teſte. Ceux qui en ſont picquez,
ſentent
de
grande douleur à la partie , aucc inflammation d'icelle fiéure, defaillance
cæur, gangrene & mortification , & par conſequent la mort , fi promptement
on n'y remedie.

cele De la picqueure d'une Viue. CHAP. XXXIX .

Vis n’agueres , la femme de Monſieur Fromager Greffier aux Reque- Hiffoire d'or
D
ſtes du Palaisfur picquée d'vne Viue au doigtmedicus:& peude temps ne femme
apres il l'enfla bien fortauec grande rougeur, & peu de douleur. Elle picquée d'oa
ol voyant que la tumeur ſaugmentoit iuſqu'à la main , craignoit qu'il ne ne Viue.
luy ſuruint vn tel accident , qui de n’agueres pour vn cas ſemblable
eſtoit aduenu àvne ſienne voiſine , vefue deMonſieur Bragelonne, Lieutenant par
ticulier au Chaſtelec de Paris , pour auoir eſté ainſipicquée: donc luy eſtoic ſuruenu
( pour ſa negligence )vne gangrene & mortification totale du bras, & en fin mouruc
miſerablement. Oreſtant arriué vers madame Fromager , & ayant entendu la cauſe
de ſon mal , promptement ie luy appliquay ſur le doigt, & ſemblablement ſur la
main ,vn cataplaſme faic d'vn gros oignon cuit ſous la braiſe, & du leuain , auec vn
peu de theriaque.Et le lendemain matin ie luy fis cremper toute ſa main en de l'eau
lems aſſez chaude, afin d'attirer le venin au dehors, & apies ie luy fis pluſieurs ſcarifica
tions ſuperficielles autourdu doigt : puis luy appliquay des ſang-ſuës ſur leſdites ſca
rifications, leſquelles tirerent ſuffiſamment du ſang : & apresi’appliquay du theria
que diſſoucen eau de vie , & le lendemain trouuay lon doigt & la main preſque tou
V Vu inj
780 Levingt-vnieſme Liure,
te defenfiée, & ſansnulle douleur : & quelques iours apres fut enticrementguarie. A
Autant en auois-je fait n'agueres au cuiſinier de Monſieur de Souffy, Treſorier de
l'Efpargne, lequel ſe picquaſemblablementd'vne Viue, dontroucle bras eſtoiten
filé & enflammé iuſqu'à l'eſpaule, & en brefs iours fut pareillement guary. Ces hi
ſtoires ſeruirontauxieunes Chirurgiens, quand ils ſe trouueront à l'endroicde pa
Remede de reilles picqueures. Dioſcoride eſcrit quepourremedier à la picqueure , faut appli
Dioſcoride. quer la Vive fendue par la moitié, ou del'aluyne , ou de la ſauge, ou du ſouphre in
corporé auec du vinaigre. L'on a trouué depuis quelque temps, quele foye de la Vi
ue appliqué promptement ſur la playe eſt vn tres -prompt & infailliblc remede con
treſon venin . Il faut, ſitoſt qu'on ſe ſentpicqué , ouurirla playe par vnepecite inci
fion , pour donner iſſuë au ſang, & apres la frotter aflez fort auec ledit foye & l'ap
pliquer deſſus: ceremedeeſtſi certain contre celte picqueure qu'il n'en arriueaucun
accident , non plus qu'à vne autre ſimple picqueure d'eſpingle, d'aiguille ou d'eſpi
ne,& felprouueiournellement par ceux quimanientce poiſſon.
B
Picqueure de la Tareronde ou Paſtenaque.
CHAP. XL .

Liure 3 . Ece eſcrit, qu'apres la picqueure de la Tareronde , ſ'enſuit une


douleur continuelle , & vn endormiſſement de tout le corps , &
aucuns en meurent promptement auec conuulfion . Pline dit
qu'il n'y a rien plus execrable, que l'aiguillon enleué ſur la queuë
Liu.9.ch.48. de la Paſtenaque, lequel eſt de grandeur de cinq poulces. Il faiæ
mourir les arbres quien ſont picquez par la racine. Il dit dauanca
ge, que l’aiguillon eſt bon pour la douleur des dents, quandl'on
en ſcarifie les genciues: & reduit en pouldre auec hellebore blanc , les faic tomber
ſans douleur.Cepoiſſonelt bon à manger, hors-mis la ceſte & la qucuë. Aucuns de
ces poiſſons ont deux aiguillons , autres vn ſeul, leſquels ſont pointus,garnis de 0
oppian. dents des deux coſtez , comme dents de ſcieſc tournant vers la teſte. Oppian eſcrit,
que l'aiguillon eſt plus venimeux que les fleches des Perſes enuenimées, lequelgar
de ſon venin , encore que le poiſſon ſoit mort , & n'eſt, dit -il, ſeulement venimeux
aux animaux, mais auſſi aux arbres& plantes. Les dents des aiguillons de ce poiſſon,
ontcltérenuerſées par nature vers la teſte, afin qu'ellesentrent& percent plus aiſé
ment, & plus mal aiſément ſorcent, pource qu'en les tiranton les cire à contre-poil.
Erfilen picquequelquepoiſſon , ille tientenferrécomme d'vn hameçon. Ronde
let dic , que les aiguillons ſontau milieu de la queuë. Il fautqu'il en y ait de pluſieurs
Rondelet au ſortes: cari'ay ev & gardé en mon cabinet vne queuëd'une Paſtenaque,qu'vn Gen lie
poiſſons. til-homme de Bretagne m'a donnée , longue de cinqpieds & plus , au commence
ment de laquelle raiſſent & ſontattachezdeuxaiguillons , & eſtcouteſemée de pe
tites boucles ſemblables à eſtoiles fort aiguës. Les peſcheurs ſubit qu'ils ont pris
ce poiſſon , luy oſtent lesaiguillons,de peur qu'il ne les bleſſe de ſon venin : & lors
qu'ils en ſont picquez, ils l'ouurent & prennent le foye, & l'appliquent ſurlaplaye : au
auſlicſtant brúllé & mis en cendre , & poſé ſur la playe , est la vraye contre-poiſon D III
de fon venin .Elle viten lieu fangeux pres des riuages delamer, & vid des poiſſons
qu'elle prend de ſon aiguillon. La figureeſt comme vne raye , ainſi que tu vois par
ceſte figure. ih
‫ایا‬
Des Venins . 281
Figure du poiſſon nommé Paſtenaque.

De la venenoſité de Lieure Marin . CHAP XLI .

O E Lieure Marin eſt appellé de Pline, maſſe, ou piece de chair fans for
me: Ælian le @ompare àvn Limaçon hors fa coquille. Il eſt fore veni- Ælian,
meux par le teſmoignage de tous les Anciens, & partantil eſt bon de le
cognoiſtre , pourſe garder n'en vſeren viandes, & aulli le ſentir , ou le
regarder par crop, & pouren vſer contre ſon venin mcfme. Il naiſten la
val .
mer , & auxeſtangs de la mer , principalement fangeux. Il eſt de couleur de poilde
Lieure de terre. A la teſte il a vntrou par lequel il iette hors vne chair mucqueuſe,
.
laquelle il retirequandil veut.Il vit dans l'eau limonneuſe d'ordure & vilenie. Pau- Paul.Agin
lus Ægineta, A ëce, Pline,Galien,Nicandre,diſent qu'il eſt ſi venimeux , que fi yne Aece .
femme groſſe le regarde,ellevomira, puis auortera. Les hommes qui ont beu de ſon Pline.
poiſon , commedie Dioſcoride,ont douleur de ventre , & retention d'vrine , & f'il NicGalien,
andre ,
s
aduient qu'ilsvrinent leurvrine ſera rouge & ſanguinoléte.Il ont vne fueur puante,
f D fentant le poiſſon. Ils vomiſſent de la cholere mellée auec du ſang . Aëce dit qu'ils
deuiennent iaunes par toutle corps. La face ſ'enfle,& les pieds , & principalement le
membre genital,quieſt cauſe que l'urine ne peut couler. Galien dit que le lieurema- Liure de la
tin bleſe & vlcere le poulmon.Son alexitere & contre -poiſon eſt le laict d'afneſſe , & theriaque à
du vin cuit ,ou de la decoction de fueilles de mauues . Celieure marinelt bon à faire Piſon .
tomber lepoil . La figure t’eſticy repreſentée ,prinſe au liure des poiſſons de Ronde
let. Auſone cn les Epigrammes luy faitprendre vn chien, mais il falloit que ce chien
fuſt bien pres ou qu'il ne couruſt gueres viſte :car ce laid animal ne feremuë gueres
plus promptement qu'vn limaçon . Ce que le docte Scaliger,en ſon Hypercritique,
diſcourt aſſez amplement,au iugement qu'il fait d'Auſone,à quoyie renuoye le Lc.
&eur curieux. Oriene me veux pas conſtituer luge entre l'vn & l'autre , leur diffe
rend n’eſtant pas de ma profeſſion : mais ie puis dire qu'vn ſerpent,vnecouleuure, &
pluſieurs autres animaux mal- faiſans ont les mouuemens preſque auſſi cardifs , &
toutesfois ils ne laiſſent de mordre ,picquer & tuer les homincs,leschiens, & les che
uaux en les ſurprenant: & lors on peut dire , ce me ſemble, & principalement en
v Vu iiij
782 Le vingt- vnieſme Liure ,
Poëte , à qui il eſt permis d'abuſer des ſens & des paroles, que le ſerpent ſansfere. A
muer a pris un homme,vn cheual ,ou vn chien,encore qu'ils couruſſent bien fort,&c
en ces figures,antithetes,& contrarietez bien accordantes , conſiſte vne desgrandes
graces de la Poëſie.
Figure du Lieure Marin.

Du venin du chat. CHAP. XLII .

Es Chats n'infectent ſeulement par leur ceruelle , mais auſli par leur poil,
Jhaleine,& regard: car iaçoit que coutpoilaualé ſansy penſer, puiſſe ſuffo
B quer la perſonne, en eſtoupant les conduitsdela reſpiration , toutesfois le
poil du Chac eſt dangereux par ſus tous autres : leur haleinc eſt infecte
Matthiole d'vne poiſon tabifique . Et dit Matthiole auoir cogneu aucuns , prenans plaiſir aux
Chacs, qu'ils n'euſſent iamais dormy ſans en auoir quelques- yns couchez aupres
d'eux , de l'haleine deſquels longuement attirée auec l'air, ilsdeuindrent phthiſi
ques,& en fin miſerablement moururent. Les chats auſſi offenſent de leur regard,
tellement qu'aucunsvoyansou oyans vn chat, tremblent , & ont vne peur grande,
Hiſtoire. qui ſe fait par vne antipathie venant de l'influence du Ciel.Marchiole eſcrit qu'e
ftant en Alemagne,foupant enbonne compagnie en vn poille ,en temps d'Hyuer, G
l'hoſteſſe cognoiſſant le naturelde l'un desconuicz , enferma vn pecit chat ( qu'elle
nourriſſoit) dedans vn coffre audit poiſle,de peur que ce perſonnage le voyant ne ſe
courrouçaſt: mais encore qu'ilnevilt ny oüiſt le chat,peude temps apres auoir acci
ré l'air infect de l'haleine du chat, ſa temperature ennemie des chacs en eſtant irritée,
commença à ſuer & pallir , & en tremblant crier (non fans grande admiration de
tous ) qu'il y auoit vn chaten quelque coing dudit poille , alors on mic le chac hors
de la maiſon . Or le chat infecte auſi ceux qui mangent de ſa ceruelle , & font tour
mentez de grandes douleurs de ceſte, & quelquesfois en deuiennent inſenſez. Pour
les guarir , il les faut faire vomir,& le vray alexitere eſt le muſc donné à boire demy al

ſcrupule auec de bon vin , & réiterer ce remede tant qu'on verra eſtre beſoin . le
diray dauantage , que le chat eſt vne belte pernicieuſe aux enfans du berceau ,
parce qu'il ſe couche ſur leurs viſages , & les eſtouffe , parquoy il s'en faut bien
donner garde . Si
La

De la venenofité de certainesplantes. CHAP. XLIII.


D T
Pres auoir diſcouru de la venenoſité des animaux,à preſent ilnous conuient
cſcrire de celle d'aucunes plantes, & les accidens qui aduiennent à ceux qui
Apium en auront pris , & commenceronsà l’Apium riſus. L'Apium riſus, autre.
riſus. ment appellé Sardonia , eſpece de ranunculus,rend les hommes inſenſez,induiſant
vne conuulſion & diſtenſion des nerfs, telle que les léures ſe retirent, en ſorte qu'il
ſemble que le malade rie , dont eſt venu en prouerbe , Ris Sardonien, pour vn ris
malheureux & mortel : ſon bezahar, ou contre-poiſon eſt le ſucde melille. Le fuc,
Napellusauest
chaud frui & ou ſubſtance de Napellus cuë ſon homme en vniour, ou en trois au plus tard,
meſmes ſi par antidotes & contre -poiſons exhibez en temps & lieu on en reſchap
4. degré. pe , le malade tombe en fiéure heatique, ou en charcre , ou en mal caduc, comme
filoschins
font premie- dit Auicenne: c'eſtdequoy lesBarbares empoiſonnentleurs fleches. Les accidens
remer deſcrits qu'il induit font tels : Incontinent les léures l'enflamment , & la langue l'enfle:
Des Venins. 783
A en ſorte qu'elle ne peut demeurer en la bouche,ains ſort dehors auec grande hideur, par Marchio
les yeux auſli l'enflamment& ſorcent hors la teſte: les malades tombenten vertigi- liu.de
le,ſurle 6.
Dios
noſítez & defaillance de cæur , ils ne peuuent mouuoir ny bouger les iambes, tant
ontlescuiſſesfoibles & debilitées:d'ailleursilsontle corpsenÅé& terny,tant eft pafcorideserine
r Leninius
grande la malignité de ce poiſon. Son Bezahar eſt vn petit animal comme vne ſou au liure des
ris, qui ſ'engendre pres laracine dudit Napellus, ſeiché & pris en breuuage du poids venins .
dedeux dragmes :ou à faute de ce,lagraine de raue ou de naueaux miſe en breuua
ge,oignant le corps d'huile de Scorpions .
Matthiole liure quatrieſme de Dioſcoride, dit , que toute la plantedu Napellus
eſt tres-pernicieuſe & veneneuſe : mais la racine eſt plus cruelle que toutes ſes autres
parties : tellementque tenuë quelque eſpace de temps dedans la main ,iuſques à ce
qu'elle ſ'y eſchauffe, fait mourir celuy qui la cient. Ie ſçay, dit-il , des Bergers eſtre
morts pour auoir prisimprudemment vne tige de Napellus, pour leur ſeruir de bro
che à roſtir des petits oiſeaux.
B Le Dorycnium & ſolanum manicum ,ou mortale,ont accidens aſſez ſemblables. solanum
Le Dorycnium baillé en breuuage,donne vn gouſt comme de laict à celuy qui en a manicum
beu, induit ſanglots continuels,chargela langue d'humiditez,faiciecter le lang par froid au 4.
labouche,& paren -bas vne certainematiereBaueuſe,toutainſiqu'onvoidésdyr. degré.
enteries & caqueſangues. Son Bezahar, ſont toutes ſortes de poiſſons à coquille ,
ſoient cruds ou roſtis: les langouſtes auſſi & eſcreuiſſesde mer y ſont bonnes, & le
bouillon où elles ont cuit. Quantà la racine de ſolanum manicum priſe en breuvage
auec vin au poids d'vne dragme,il cauſe des viſions aſſez plaiſantes : mais lion redou.
ble le poids,ou qu'on en prenne trois dragmes,elle rendla perſonne inſentée: & qui
en prendroit quatre,elle la feroit mourir, commeeſcrit Dioſcoride. Le bezahar cſt Dioſcoride.
ſemblable à celuy du dorycnium . La iuſquiame induit vne alienation d'eſprit relle luſquiume
que fion eſtoit yure , vn tournement de corps tel que les malades ſe diſtordent les froide au 4.
membres, auec tremblement, Sur tout ce ſymptome en cevenin eſt inligne : c'eſt degré.
que lesmaladesſortent tellement hors du ſens, que l'imagination en eux troublée,
ils penſent qu'on les fouette partoutle corps,begayans devoix , & bramans comme
© aſnes,puishenniſſans ainſi que cheuaux,commeeſcrit Auicenne. Son bezahar ſont
les Piſtaches mangées en bonne quantité. Auicenne loue le theriaque& le mithri- Auicenne.
dat,& boire du vin pur,auſli de l'aluyne & de la ruë, & du laict.
mm Des champignons, les vns ſontvenencuxde leurnature,ſçauoirceux quirompus Chäpignons.
changentincontinent de couleur, & fe corrompent ſubic ( à ceſte cauſe Auicenne
diſoit queles champignonspers & verdseſtoienevenimeux :) les autres,bien que de
leur nature ne fonctels,ſi eſt-ce que prisen trop grāde quantité, engendrenten nous
accidens morcels. Vrayement ienepuis qu'eſmeu de compaſſion de la pluſpare des
hommes, qui pouſſez d'vne trop grande friandiſe, ne le peuuent ſaouler de celte ſc
NSCH mence mortelle, ie ne puis, dy-ie, que ie n'enſeigne le inoyen comment on pourra Moyen de
appreſter les champignons ſans qu'ils facent mal, ſçauoir,lesfaiſantcuirc auccpoires manger en
berce fauuages : au defaut deſquelleson pourra vſer de poires domeſtiques,pourueu qu’on Jeureté les
prenne de celles qui ſont plus aſpres,ſansregarder ſi elles ſont freſches ou feichées au champignős.
Soleil : & non ſeulement les poires,mais auſſi les fueilles & clcorces du poirier , tant
ſauuage que domeſtique, y ſontbonnes:ainſiaccouſtrez les faut ietrer aux priuez , &
D partant ne feront nulmal.Car la vraye contrepoiſon du champignon , c'eſt le poirier.
Tous les champignons en general eſtrāglent & eltoufent ceux quien māgent: mais
ceux qui ſont veneneux en outre rongent les boyaux,gonflent & enfientl'eſtomach,
donnent pointures,ſanglots tremblemens,oppreſſion d'arteres,defaillancedecreur,
fueurs froides, & finalemét la mort. La raiſon detous ces accidéseit,que tous cham
pignons ſont naturellemét fort froids & humides,& mefines fore viſqueux & gluans:
car pour parler à la verité de leur eſſence,ils ne ſont autre choſe ſinon vne picuite ex
crementicielle de la terre,ou des arbres ſur leſquels ils naiſſent: de là vient que ſi on
prend en quantité,ilsſurmontent & ſuffoquent la chaleur du corps,& citoufent la
perſonne. Leur bezahar eſt l'ail mangé tout crud, comme dit le Conciliator de Aba
no :ou bien auſſi le vinaigre, d'autát que par la tenuité de la ſubſtance,il'a vertu d'ac
ténuer & inciſer les humeurs gluans & viſqueux, qui engendrez en nous par lvfage
deschampignons,cauſentſuffocation ,commeditGal.furla fect. 5.des Epidemies.
Ceux quiontpris de l’Ephemerum , que quelques- vns nomment Cholchicon,ou Ephemeram.
है..

n el
784 Le vingt -vnieſme Liure ,
bulbe ſavuage,ſententvne demangeaiſon generalementpar tout le corps, toutainſi A
que qui ſe ſeroitfrotté d'ortieou d’eſquille:fentent vnrongementd'inteſtins,auec
grande peſanteur & ardeur d'eſtomach : mais quand lemals'augmente,on vuide par
le bas des raclures de boyaux mellées auec du ſang. Le bezahar eſt le laiet de femme,
mädragore. d'afneſſe ,ou de vache,pristiede.Lamandragore priſe en quantité exceſſiue cſtveni
meuſe, & de la racine,& de ſon fruict : elle aſſoupit les ſens,elle rend les hommes lal
ches,triſtes & ellácez ,mornaiz, & ſans aucune force, & fait que les patiés apres auoic
biencrié,& feltre bien courmentez, ſendorment en toute telle ſorte & habitude de
corps que la force du venin les aura rencontrez & ſurpris: de façon que les Mede
cins envſoient anciennement lors qu'on vouloit bruſler ou couper vn membre,pour
oſter le ſentiment de douleur. Quant aux pommes d'icelles, clles peuuenteſtreman
gées eſtans meures,& dénuées de leurs pepins de dedans ſansdanger:mais les man
geant verdes,& auec leurs grains,elles ſont mortelles, & cauſenc des accidens mor
tels. Car en premier lieu, elles engendrentvn feu , & vneardeur qui bruſle toute la
partie ſuperficielle du corps :le malade a la bouche ſiſeiche,qu'ileſt contraint de de
meurer touſiours à gueule-bée pour attirer l'air froid , & quin’y donne promptreme B
de mourra en ſpaſme. Sonbezahareſt,manger trois iours durant du refort auecdu
pain & du ſel, comme eſcrit le Conciliator. Il faut faire eſternuer le malade : ce mal
le cure en baillantà boiredela graine de coriande,ou de pouliot auec eau chaude.
Payot noir. L'odeur faſcheuſe du ſuc de Panot noir,qu'on appelle Opium , fait qu'il eſtmal.
aiſé à meller parmy le boire fans qu'on ſ'en apperçoiue, tout ainſi qu'on fait de la
Mandragore: entendu principalement qu'il ne faicmourirla perſonne, ſi lon n'en
prend grande quantité : mais de tantqu'ily a danger pour l'ignorance des Medecins
ou Apothicaires quien peuventordonner plusqu'il ne faut,lon le cognoiſtra,pour
ce que par la frigidité inſigne,il induitvn lommeiltres-profond , auec vn prurit &
demangeaiſon & friſſon ſigrands, que fouuětle malade en cltexcité de ſon profond
ſommeil: au reſte, ils tiennent touſiours les yeux fermez ſans mouvoir. Ce travail
cauſe vne ſueur puante qui diſtile goutte à goutte : tout leur corps eſt palle & tranſy,
& ont les léures enflammées, & leur void on relaſcher la mandibule d'en bas : ils
iettent vn ſouffle froid & lent , & lors qu'on leur verra les onglesternis,le nez tors, & 0 A

que les yeux leur enfonceront, c'eſt ſigne qu'ils ſont prochains de more. Le bezahar
et le Caſtoreum donné à boire en poudre iuſques à deux dragmes auec du vin.
De la ciguë.
La ciguë priſe en breuuage cauſe vertigines, troublant l'entendement tellement
qu’on diroit lesmaladeseſtre enragez:offuſque la veuë,elle prouoquc hoquets,rend
les extremitez toutes gelées , cauſe conuulſion : la Trachée arcere ferrée & eſtoupéc,
ils meurent comme ſi on les eſtrangloir . Parquoy il faut faire vomir promptement le
malade , & luy bailler clyſteres. Cela fait,illuy fauc faire boire de bon vin tout pur,ou
maluoiſie , ou hippocras, à fin d'eſchauffer les parties intericures,& meſmes trois ou
Hiſoire de quatre doigts d'eau de vie. Matthiole ſur le liure fixieſme de Dioſcoride,dit auoir
la ciquë reci- cogneu leldits accidens par experience à vn Vigneron : cultiuant ſes vignesauec ſa
rée de Mat- houe,
shiole.
par fortune
paltenades, arracha
leſquelles des racines
il fit cuire de ciguëlesmangea
en lamaiſon,& , cuidant que ce fuſſent
àſouper auec ſaracines
femme,de
apres ſouper l'en allerent coucher.A la minuict eſtans réueillez,couroiét ça & là par D
la maiſon,nevoyans goute,come fols & enragez,ſeheurtans la ceſte côtre lesparois,
tellementqu'au inatin ils eſtoient tous meurtris, & les paupieres des yeux groſſes,
monſtrans vne hideuſe face. Les voiſins m'appelleret pour lesguarir,& m'eſtant en
quis des domeſtiquesde ce qu'ils auoient māgé à leurſouper,ie trouuayqu'ils auoiét
mangé des racines deciguëen lieu departenades. Carie ine tranſportay en la vigne,
où on memonſtra le lieu d'où le vigneron auoit tiré leſdites racines : on en trouue
d'autres,quicommençoient à produire des fueilles.Ce qu'ayant conſideré, ie reuins
ſubit verslesmalades,auſquelsmoyennantl'aide de Dieu, ie fis retourner en peu de
Petrus Apo- temps leur premiere ſanté, & entendement . Petrus Aponenſis eſtime fort en ce cas
nenſis. yn brevuage fait de deux dragines de theriaque avec decoction de di&tam , ou de ra
cine de gentiane auec du vin : & affirme que c'eſt le vray antidote contre la ciguë.
De l'Aconit.
L'Aconiteſt vne herbe, qu'aucuns appellent Luparia, parce qu'elle cuë les Loups.
Elle croiſten Acones,dont elle a pris le nom , qui eſt yn village des Peryandins.
Des Venins. 785
A Marchiole dit, qu’on en trouue en abondance aux montagnes de Trente : les païlans
d'alencour,l'appellent Vulparia, parce qu'outre qu'elle tue les Loups,elle cuë außi les
Renards. Semblablement les chiens, chats,& tous autres animaux quien mangent:
elle cuë les rats & ſouris de la ſeule odeur. Auicenne l'appelle Strangulator Leoparoli, Auicenne.
parce qu'elle eſtrangle les Leopars. Dioſcoride dit, que les Scorpions touchez de ſa Dioſcoride.
racine,demeurent tous eſtourdis, & meurent : & meſlée pariny la chair, que les San
gliers, Loups, & Pantheres ,& generalementtoutes autres beſtes ſauuages. Les fic
ches trempées dedans ſon ius , leurs bleſſeures ſont mortelles. Les perſonnes qui
auront pris de l'Aconit , en beuuant ou mangeant , ſentent vn gouſt aſtringenc,&
aucunement doux,mais apres ceſte aſprecé & douceur,ils ſententvne certaine amer
cume : ce qu’eſcrit Aëtius. Il cauſe vertigine, & perturbation de l'eſprit. Il fait venir
p
les larmes aux yeux : il cauſe grande peſanteur d'eſtomac, & au ventre, & faic eter
fouuent. Ilinduittremblementde cour le corps, auec grande enfcure, commelion
eſtoit hydropique. Pline eſcrit au liu.27. chap. 2.que ſon venin eſt vne poiſon ſi
B fubite,que ſi on toucheles parties honteuſes des animauxfemelles, il les fait mourir
2012
le meſme iour. Son principal antidote eſt de promptement vomir. Le Conciliateur,
& Petrus de Abano ,ordonnentde la Saraſine,ou de l'Ariſtoloche longue. Matthio- Marthiole.
le dit,queſ'ily a du venin dedans le corps,ilſe combat contre luy, ayant fait rencon
tre depareil: & donnc ſeulement ce combat quand il trouuele venin dedans les para
cies nobles. C'eſt miracle que deux venins mortels eſtans dedans un corps,l'vn amor
tit l'autre, tellement que la perſonne demeure ſauue. Or celte herbe eſt figurée en
Matthiole,lequel ditauoir ſes fueilles ſemblables au concombre , & n'en a que qua
tre pour le plus, & aucunemenc veluës& heriſſées, & pleines d'aiguillons , ſembla
blement les queuës. Sa racine eſt reluiſante comine albaſtre quand elle eſt recente,
& de groſſeur d'un doigt, large au commencement,puis peu àpeu finiſſant en pointe
courbée noüeuſe, reſſemblant à la queuëd'vn Scorpion. Sa tige eſt longue d'vn
cmpan . Au ſommet a vn heaume ſemblable à celuy d'un homme d'armes ( pour
monſtrer qu'il eſt armé enuers cous & contre tous animaux ) où eſt encloſe ſa ſemen
ce , contenantvn cruel venin , morcel , & diabolique , par vne occulte & indicible
G cauſe .

Lafigure duquel eft relle.

$21

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r
a
m

Voeten

Lor
786 Le vingt-vnieſme Liure ,
De lyf. A
Il ya ſemblablement des arbres venimeux,commel’Yf, & le Noyer : lescheuaux,
bæufs & vaches qui mangent des fueilles de l’Yf, & les hommes quidormentdeſſous
le plus ſouvent meurent. Lesaccidens qu'il cauſe, font Aux de ventre , vn froid par
tout le corps,& vneſtouffement à l'endroit de la gorge. Ce qui aduientnon ſeule.
menc à cauſe de la froideur, mais auſſi par vne particuliere nature, & malignité , ca.
chéeen luy : laquelle aulli particulierement pourrit les humeurs , & eſcorche lede
dans des boyaux . Sa contre -poiſon eſt ſemblable à celle de la ciguë . Nicandre or
donne à boire de bon vin pur.
Du Noyer.
En fon liure
des Venins. Le Noyer eſt ſemblablement venimeux comme l’YF.Ce que Greuin ditauoirex
perimencé ſans y penſer.Car ayant dormy long temps ſous vn Noyer en plein Efté,
il ſentit cout le corps refroidy,aucc vn grand malde teſte , qui luy dura cinq ou fix
iours . On peut vſer contre ſon poiſon de choſe ſemblable que contre l'Yf.
Du Bezahar. C H 4P, XLIII .

Qxe c'eſt ' A VTANT qu'en parlant des ſignesde chacun venin å part,nous .

queBezahar. auons nommé ſonantidote Bezahar,il faut ſçauoir queveut dire


ce mot. Vrayement venin n'eſt autre choſe que ce qui deſtruir la
vie : parquoy les antidotes & contre- poiſonsonceſtéappellez par
les Arabes en leur langue Bezahar,c'eſt à dire en leur barragoüin ,
Conſeruateur de vie. De là eſt venu que tous antidotes & con
tre-poiſons,par excellenceonteſté appellez Bezardica,d'vn nom
emprunté des Arabes : parce que celle contre -poiſon eſtant venuë d'Arabie, & de
Perſe,a eſté cogneuë si celebréepar leurs eſcrits,ſansque les Grecs en ayent faicau
cunemention .Mais entre tous ceux de noſtre temps , en a fort diſtinctement parló
Garcia de
Horto .
vn Medecin du Vice- Roy des Indes pour le Roy de Portugal , nommé Garcia du
Iardin ,en l'hiſtoire qu'il a compoſée des Aromates & Simples naiſſans és Indes. Au 0 31

où ſe trouve païs de Perſe ( dit- il) & en quelqueregion des Indes,ſe void vne eſpece de Bouc,ap
le Bezahar. pellé en langue Perſique, Pazain ,(dont la pierre , à proprementparler , doiceftre ap
pellée Pazar,dumot Pazain, qui ſignifie Bouc: mais nous d'vn mot corrompu l'ap
pellons Bezar ) pour la pluſpart en couleur,de hauteur moyenne, au ventricule du
quel ſe concrée ceſte pierre appellée Bezar, en forme de preſure, couſiours augmen
tant & groſſiſſant entour vnepaille,en forme de tuniques d'oignon couchées l'vne
ſur l'autre,deſorteque la premiere lame leuée,celles dedeſſous le mõftrenttoujours
claires & reſplendiſlantes de plus en plus,qui eſtvn ſigne entre autres de bõne & legi 1

Deſcription. time pierre Bezahar.Ceſte pierre ſe void de plufieurs formes & figures, mais ordinai
rementelle ſerencõrre de figure de gland,ou de noyau de date,decouleur de ſang, calid
tantoſt de miel , tantoſt de iaune-paille, mais pour la pluſpart de verd- brun , comme
nous voyons és pommes qu'on appelle Mala inſana, ou les chats qui font la ciuette.
Ceſte pierre n'a point de cæur, ou noyau au milieu , mais elt caue en iceluy, pleine
d'vne poudre, qui a meſme vertu & ſubſtance que la pierre : Au reſte elle eſt lice&
douce,& telle qu'on la peutaiſémentrapper come l'albaſtre, meſme qu'elle ſe fond
eſtant longtemps en l'eau.Ducommécementelle eſtoit aſſezcõmune & devilprix, D. :C G
parce que lesmarchands de ces païs de deça trafiquans en Perſe, & és Indes, en pou
uoientrecouurer aiſément:mais depuisla forceeltát cogneuë,elle a eſté plus rare &
chere,de tant que par Ediêt des Rois du païs, il a eſté defendu de vendre aucun Bouc za
aux marchands dedehors,que premier il n'euſt eſté tué, & fa pierre portée au Roy. 1
Lemogen de L'un des moyens d'eſprouuer ceſte pierreſi elle eſtlegitimeounon (caron en appor
be cognoiſte. te par deça pluſieurs adulterées & fauſſes, quifait que lon n’adiouſte foy à la vertu du
Coast
Bezahar cant finguliere) a eſté ditcy -deſius. L'autre eſt qu’on la comprime auec les
doigts , apres on la fait boufer de vent comine le cuir de buffle: car fi on ſ'apperçoit
/AgF. que l'air & vét paſſeoutre,elleeſt cenuë pour fauſſe & adulterée.Ilsen vſentà noſtre
exemple ,non ſeulemét contre les poiſons & venins , mais auſſi cõtre les morſures des
beſtes veneneuſes.Les plus riches du pais le purgent deux fois l’an ,ſçauoir enMars&
en Scptembre : cinqiours continus apres,ils prennentpour chaſque jour dix grains
des
Des Venins. 787
A de ceſte pierre macerez en eau de roſe: & par tel remede ils diſent la ieuneſſe & force
aita des membresleureſtreconſeruée : quelques-vns en prennét iuſques à trente grains,
from mais les plus ſages n'approuuent point ſi grande dore.Ledicautheur Garcia,ditauoir
couſtume d'en vſerheureuſement aux maladies melancholiques inueterées comme
en la galle, lepre,demangeaiſon ,iinpetigine:& par meſme raiſon penſe qu'elle ſeroit
fort propre contre la fiéure quarte , & die ſçauoir pour vray que la poudre de ceſte
cantora pierre,eſtant miſe ſus les morſuresdes beltes venimeuſes , deliure promptement de
danger,& auoirmeſme force ſur les charbons de la peſte , iceux eſtans ouuerts, ſça
uoir qu'elle chaſſe encierement le venin peſtilent. Et d'autant (dit-il) qu'és Indes la
verole & rougeole , & herpes ſont fort frequens, & tres-dangereux & mortels , nous
en donnonsfort heureuſement par chacun iourvn ou deuxgrains dans l'eau roſe.
100 Voila ceque Garcia du lardin eſcrit de lageneration & effects de la pierre Bezahar,
non point pour l'auoir leu ou ouy dire,mais( commeil aſſeure) pour l'auoir veu & ex
perimenté. Macchiole chap.73.du commétaire ſur le 5. liure de Dioſcoride, dicauoir
fouuéntesfois éprouué,queceſte pierre eſt plus exquiſe contre tous venins, que tous
autres ſimples medicamens, voire quele theriaque meſme, & tousautres contrepoi
AR
fons.Abdalanarach en eſcrit ainfi: I'ay veu la pierre appelleeBezahar,entre les mains
des fils d'Almizama,gardien de la loy deDieu pour laquelle ilbailla en échange vne
magnifique maiſon , & preſque vn Palais qu'il auoit à Cordube. Soutes leſquelles
choſes ainſi expliquées,il ſera aiſéau Chirurg:é iuger de tel & tel venin ,parles ſignes
d'unchacun d'iceux mentionnez, & en faire rapporten luſtice lors qu'il ſera appellé.
143 Le Roy dernierement decedé , eſtant en la ville de Clermont en Auuergne, vn Hiſtoire.
Seigneur luy apporta d'Eſpagne vne pierre de Bezahar, qu'il luy affermoit eſtre bon- Experience
ne contre cous venins,& l'eſtimoit grandement.Or eſtant lors en la chambre dudit du Bezahar
Seigneur Roy,il m'appella, & me demanda l'il ſe pouuoit trouuer quelque certaine comma
faireparle
ndes
& ſimple drogue,quifuſt bonnecontre toute poiſon, où tout ſubic luyreſpons, que
non ,diſant qu'il y auoit pluſieurs ſortes & manieres de venins,dont lesvnspouuoiêc Charles IX .
eſtre prinspar dedans,les autres par dehors . Icluy remonſtre que les venins ne font Matthiole
leurs effectsd'vne meſme ſorte, & ne procedent leſdits effe & s d'vne meſme cauſe : narre vne
G car aucun s operent par l'excez des qualitez elementaires ,deſquelles ils ſont compo Semblable hia
ſez. Autres operentpar leur propre qualité ſpecifique, occulte & ſecrecte ,non lub.Stoire dupape
Clement vil.
jette à aucune raiſon , & ſelon la diuerſice d'iceux falloit contrarier : comine ſ'ils lequel voulue
eſtoientchauds,eſtoient guaris parremedes froids, & les froids par remcdes chauds , faire eſpreu
& ainſides autres qualitez. Ledit Seigneur qui apporta la pierre, voulut outre mes ue' pour le
IOCO raiſons ſouſtenir qu'elleeſtoic propre contre tousvenins. A doncicdy au Roy,qu’on bien public
auoit bien moyen d'en faire certaine experience ſur quelque coquin quiauroit gai- d'un antido.
gné lependre : lors promptement enuoya querirmonſieurdela Trouſle, Preuoti de lie. te , chap.9.
4. wt
Son
rcelo
ſon hoſtel, & luy demanda t'il auoit quelqu'vn qui euſt merité la corde . Il luy diſt Diofcoride.
qu'ilauoiten ſespriſonsvn Cuiſinier,lequelauoit defrobé deux plats d'argent en la
maiſon de ſonmaiſtre,où il eſtoic domeſtique, & que le lendemain dcuoit eſtrepen
UCIE
du & eſtranglé. Le Roy luy diſt qu'il vouloir faire experience d'vne pierre qu'on di
ſoit eſtrebonne contre tousvenins, & qu'il ſceuſt dudit cuiſinier , apres ſa condem
nation,s'ilvouloit prendre quelque certaine poiſon , & qu'à l'inſtanton luy bailleroic
che vne contre-poiſon ,& que où il eſchapperoit, il ſ'en iroit la vie ſauue : ce que ledic
reation
cuiſinier tres-volontiers accorda,diſant qu'il aimeroit trop mieux encore mourir de
2017 ladite poiſon en la priſon, que d'eftre eſtranglé à la veuë du peuple. Ec toſt apres vn
2
05.201
Apothicaire ſeruant, luy donna certaine poiſon en potion ,& ſubit de ladite pierre de
Bezahar. Ayant ces deux bonnes drogues en l'eſtomach, il ſe princ à vomir, & bien
toft aller à la felle,auecquesgrandes épreinces, diſantqu'il auoit le feu au corps , de
mandant de l'eau à boire, ce quine luy fut refuſé. V ne heure apres , eſtant aduercy
que ledit cuiſinier auoit prins ceſte bóne drogue, ie priay ledit Seigneur de la Trouſſe
me vouloir permettre l'aller voir ce qu'il m'accorda, accompagne de trois de ſes ar
chers : & trouuay le pauure cuiſinier à quatre pieds, cheminant comme vne beſte , la
langue hors la bouche,lesyeux & coute la face famboyante, delirant touſiours vo
mir,auec grandesſueurs froides : & iettoit le lang par les oreilles,nez,bouche, par le
fiege, & par la verge.leluyfeis boire environ demy-ſextier d'huile,penſantluyander
& lauuer la vie,mais elle ne luy feruic de rien , parce qu'elle fut baillée trop tard, &
mourut miſerablement, criant qu'il luy eult micux vallu citie mort à la potence,
XXX
288 Le vingt-vnieſme Liure ,
Il veſcut ſept heures ou enuiron . Ereſtane decedé, iefeisouuerture de ſon corps en A
la preſence dudit Seigneurdela Trouſſe, & quatre deſes archers , où ie trouuayle
fonds de ſon eſtomach noir , aride, & z ſec, comme ſivn cautere y euſt paſſé, quime
donna cognoiſſance qu'il auoicauallé du ſublimé, & par les accidens qu'ilauoitpen
dant ſa vie. Et ainſi lapierre d'Eſpagne,comme l’experience le monſtra, n’eut aucu
ne vercu. A ceſte cauſe,le Roy commanda qu’on la ieccaſt au feu : ce qui fut fait.
Des metaux de mineraux venimeux . CHAP. XLV.

De l'arſenic Es metaux & mineraux viennent de la terre, & des fournaiſes:


Oſublimé. aucuns ſont veneneux,comme arſenic, ſublimé, plaſtre, ceruze,
litharge, verd de gris, orpigment, limeure de fer & d'airain , ay
mant,reagal,chaux, & autres. Ceux qui ont pris du ſublimé, ſu
bit la langue& le gofier leur deuiennent ſi aſpres,que ſ'ils auoient
pris du ius de cormes vertes, laquelle aſpreté ne ſe peurofer par
nuls gargariſmes lenitifs, ſinon qu’auec grande difficulté & lon
gueur de temps. Car ſubit qu'il eſt deſcendu en l'eſtomach ,ilſ'attachecontre,pour
ceſte cauſe,illeronge & vlcere peu de temps apres . Il cauſe vne ſoif inſaciable,& des
angoiſſes indicibles.Ilſuruientenfleure à la langue,defaillance de cæur,fuppreſion IN

d'vrine,difficulté de reſpirer,trenchéesau ventre & en l'eſtomach intolerables, auec


vne contorſion des membresligrande,que ſion n'y remedie promptement,les pau
ures empoiſonnezmeurent lesinteſtins & eſtomach rongez & percez, & de couleur
noire, comme ſi vn fer ardant y euſt paſſé. Les patiensiettent le ſang par les oreilles,
nez,bouche,par la verge, &le ſiege : & i'atteſteauoir veu au pauure larron cuiſinier,
cy -deſſus mentionné, tousles accidens ſuſdits. On guarit ceux qui en ont aualé,&
tous autres venins corroſifs, par meſmes remedes, quiont eſté cy-deſſus baillez à
ceux qui ont pris des cantharides .
verd de gris. Leverd de griseſtoupe ſi fort les conduits de la reſpiration,qu'il eſtouffe ceux qui
en auront aualé.Onles guariſt comme ceux qui auront pris de l'arſenic: le bain pa 0
reillement leur eſt profitable.
La lisharge. Lalitharge beuë ,cauſe vne peſanteur d'eſtomach &du ventre,empeſche d'vriner,
& rend le corps enflé & liuide: on y remedie faiſant vomir le malade , puis ſubit luy
Petrus po donnant de la fiente ſeiche de pigeon , delayée en bon vin. Petrus Aponenfis com

e三
nenſis. mande boire de l'huile d'amandes douces, & manger des figues ſeiches. Il eſt pareil 名三三三三?会
lement bon leur bailler clyſteres relaſchans & humectans, & leur frotter le ventrede
只 L

beurre frais, ou huile de lys.



后是言自会宣一 言

L'eſcaille L'eſcaille d'airain eſtanebeuë,cauſeAux de ventre , & grand vomiſſement,quipro


d'airain.
uient des pointures & douleurs de l'eſtomach : ſon contre-poiſon eſtde faire vomir
promptement le malade , puis apres le faire baigner dansun bain où lon aura mis
grande quantité d'eſcargots, & luy frotter le chorax & le ventre de beurre & huile
de lys, & luy donner clyſteres relaxans& humectans.
L'aymant. L'aymantrend folsceux qui en ontpris : ſon contre-poiſon eſt l'or ſubtilement
pulueriſé, & la pierre d'eſmeraude beuz auec bon vin, & clyſteres de laiat & huile
d'amandes douces .
Limeure de Lalimeure de plomb & merde de fer font grands tourmens pareillement àceux D.
plomb ç quien auront pris par dedans: leur contre-poiſon eſtboire grande quantité dclaid,
merde defer.& beurre frais fondu,ou huile d'amandes douces tirée ſans feu ,& leur donner clyſte
res relaſchans& hume&ans, & continuer ces remedes iuſques à ce que les douleurs
& tranchées ſoient paſſées.
Reagal. Lereagal pour eſtre de nature fort chaude & ſeiche, induit ſoif & eſchauffaiſon , &
ardeur par tout le corps auec telle conſommation de toutes les humiditez, qu'cnco
res que lon ſauue la vie aux patiens par prompts & fouuerains remedes,ſi demeurent
ils toutesfois perclus de leursmembresparvehemente reſiccation, & contraction de
toutes les iointures : ſon alexitere eſt l'huile de pignolac,donné promptement iuſ
ques à demic liure,& puis vomir : apres donner àboire du laict, & 'en faire clyſteres,
& nourrir le malade de bouillons gras .
Chaux viue , Lachaux viue& orpigment,queles Grecs appellent Arfenicum ,prisen breuuage
Gorpigmět. rongét l'eſtomach, & lesinteſtins ,auec grādes douleurs: ils cauſent vne ſoifincolera
1
Des Venins. 789
A ble,avec vne aſperité de gorge, difficulté dereſpirer, ſuppreſſion d'vrine & dyfente
rie,il faut remedier avec toutes choſes, qui ont vercu d’eſteindre leur acrimonie, &
Ti qui ſoient relaxans & humectans: comme le ſuc de guimauue , mauue, violiers de
Mars, decoction de graine de lin, bouillons gras, & generalement toutes choſes cy
deſſusmentionnéesaux remedes des cantharides.
Ilcltfortdifficile pouuoirremedier à l'eau forte,de laquelleles orféures ſeparent L'eau- forte:
l'or de l'argent , parce quetout ſubic elle bruſle la gorge & l'eſtomach. Il y faut re
medier comme à la chaux & orpigment.
La ceruze cauſe hocquets & la toux,& rend la langue ſeiche, & les extremitez du La ceruze:
corps froides & ſtupides, & leurs yeux clinotcent touſiours: & fouuent en plein iour
CICH il ſemble au malade qu'il voit quelque fancoſme: leur vrine eft noire, & louuenc
ſanglante, l'ils ne font promptement ſecourus, ils ſuffoquent & meurent. Les reme
des, ſelon Aëce & Auicenne,eſt de leur faire boire de la ſcammonée,auec cau miel
lée, & autres choſes quiont vertu de les faire beaucoup vriner. Il ne faut oublier à
B
les faire ſouuent vomir, & leur donner clyſteres humectans & relaſchans,
Le plaſtreſendurcit comme pierre en l'eſtomach , & ceux qui en ont aualé eſtran . Plaſtre:
glent,parcequ'il reſſerre les conduits de la reſpiration . On les guariſt comme ceux
qui ont mangé des champignons. Auicenne dit qu'il faut remedier comme à ceux
qui ont pris delaceruze.Etſile ventre eſt conſtipé,on leur baillera clyſteres compo
iez d'huile,& de graiſſe de canard, & leur oindre le ventre d'huile de lys &de beurre.
der De la proprieté de l'Argent - vif. CHAP. XLVI.

'Argent-vifa efté ainſi nommé parce qu'il repreſente l'argent en


couleur, & auſſi pource qu'il eſt quaſi en vn perpetuel mouue
like ment , & ſemble qu'il ſoit vif.Il y a grande contrarieté entre les
Anciens qui ont eſcrit du vif-argent. Les vns tiennent qu'il eſt ceux qui
chaud,commeGalien ,liure quatrieſime des Simples. Haliabas en tiennentle
vif argent
-
ſa ſeconde practique,chap.cent quarante-huict. Rhaſes au 3 . ad chaud.
Almenfor. Ariftofte 4. Meteor. Conſtantin , Iſaac , Platearius ,
с
Nicolas Maſſa. Or veritablement ils ont tous raiſon ſur ce qui eſt dir, que lon prend
indication des remnedes qui aydent & qui nuiſent. Dauantage, il eſt d'vne ſubſtance
fiténuë , qu'il penerre les corps metalliques fort durs, & les diffoult,& fait autres
da actions de chaleur,comme d'attenuer,inciſer, penetrer, ſubtilier, reſoudre, ſeicher,
provoquer ſueurs, flux de vencre,vrines,fluxdebouche : & non ſeulement vacuë les
humeurs ſubtils mais auſſi les gros,cras & viſqueux,cequ'on voicà l'eil aux verolez,
quien vſent par les frictions,ou paremplaſtres.Leſquelles choſes ne ſe peuuene fai.
re que par medicamens chauds,& deſubtileſubſtance, ce que fait l'argent-vif. Au- Aucuns
ZALET
tres diſent qu'ileſt extremement froid, & humide , d'autant qu'il ſtupefie & appaiſe tiennent
toutes douleurs eſtant appliqué aux onguens & emplaftres, refrenant les ardentes qu'il eſ
Tai
puſtules , phlegmoneuſes, & choleriques.Dauantage , pour ſa grandehumidité il froid ei
humide.
amollit les tumeurs dures, & diſſout celles qui ſont faites par concretion : ce qu'on
DE
voicaux tophes & nodus des os. Auſſi ceux quien ont eſté frottez, ou prispar par.
fums,ont leur haleine puante,qui eſt vn ſigne qu'ilpourrit par ſon exceſſive humidi
D té,les humeurs qu'il trouue en l'eſtomach , & parties voiſines,
D'abondant, Auicenneameine un exemple d'vn ſinge, lequel ayant beu de l'ar- Juicenne.
gent- vifmourut,& l'ayant ouuert,on trouua du ſang coaguléautourdu côur. Sem
blablementMatthiolé ſur le cominentaire de Diofcoride, chapitre vingt-huictief- Matthiole,
medit que le vif argent faitmourir les perſonnesquien prendroient en trop grande
quantité, par ſon exceſſive froideur& humidité, parce,dit-il,qu'il congele le lang,
& les eſprits vitaux de toute la ſubſtance du cæur. Ce qui a eſté cogncude Petrus Hiſtoire de
Aponenſis par ceſte hiſtoire , qu'vn Apothicaire ſurpris d'vne fiéure tres-ardenre, Petrus spoo
courmenté d'une ſoifintolerable,& troublé de ſon entendement,allantça & là,vint nenfis.
en la boutique cherchant quelque breuuage pour ſe deſalterer: par fortune il pric
la boitte du vif-argent,& en beuten grande quantité,en lieu d'eau : cela fait, il fen
retourna coucher, où peu d'heures apres il mourut. Ses ſeruiteurs ayans trouué
grande quantité de vif-argent ſorty par le fondement , appellerent les Medecins,
pour ſçauoir la cauſe de la mort, qu'ils eſtimoient vn grand miracle. Leſquels com
XXX ij

1
790 Le vingt-vnieſme Liure , 10
manderentd'apporterla boicte du vif-argent,laquellecrouuant vuide , ils cogneu- a
rent la cauſe de la mort aduenuë à l'Apothicaire.
Dauantage, le corps mort & ouuert, trouuerent encore dedans l'eſtomach & in
teſtins,enuiron vneliure d'argent-vif,& du ſang congelé autour du cœur. Quieſt
cauſe pourprouuer le vif- argent eſtre extremementfroid,pour raiſon de laditecoa
gulation. Autres le diſent froid,pource qu'il eſt faic de plomb, & autre mariere froi fo
de ce qui ne ſ'enſuit pas : car la chaux viue eſt faite de cailloux , & pierres froides,
neantmoins eſt chaude & cauſtique.
Parseelſe. Paracelſe, liure quatrieſme de la nature des choſes, dic le vif -argent eſtre chaud
au dedans,& froid au dehors : c'eſt à ſçauoir qu'eſtant tel comme il vientdela mine, al
qu'il eſt froid ,mais quand il eſt preparé par art, que la frigidité eſt oftée, & que fa per
chaleur , quieſtau dedans, ſe manifeſte, en ſorte qu'ilſert de ceinture à la tranſmu. pro
tation des metaux.C'eſt vne regle generale des Alkemiſtes, que tous mecaux ſone
froids en leur dehors,à cauſe de la partie aqueuſe,laquelley predomine:mais au de q3
dans ilsontvne grande chaleur, laquelle apparoiſt lorsque la froideur ſeſepare auec 272
l'humidité, parle moyen du meſme ſujetqu'elles ont, à ſçauoirl'humidité, deuien. B A
nenc cauſtiques par la calcination . 1s

Autres tien Aucuns ont opinion qu'il eſtveneneux,neantmoins l’experience monſtre le con NA

nentqu'il eſt traire : ce queplufieursdođes perſonnages teſmoignene. MarianusSantus Baralica


Marianus nus,homme forcexperimenté en la Chirurgie,traictant De cafu & offenfione,dit auoir
Santus. veupluſieurs qui en ont auallé ſansaucuneincommodité ouleſion .Et pour confir
Hiſtoire. marion de ſon direraconte vne hiſtoire d'une femme,à laquelle il afferme auoir veu
prendre pour quelque intention, à pluſieurs & diuerſes fois, vne liure & demie de
l' Autheur vif-argent,qu'elle reiettoit par le ſiège ſans aucun dommage. Meſmes il dir , qu'en
n'apprenue l'Iliaque pallion ( diče Miſerere mei,maladie mortelle ) pluſieurs eſtoient eſchap
ceſte quantité pez en prenant trois onces d'argent-vif auec de l'eau ſimplement. Cequi aduient,
d'argent-vif. d'autant,dit-il,que parſa ponderoſitéil deſtourne l'inteſtin, & pouſſe la matiere fe
cale endurcieen bas: ainſi qu'auonseſcrit cy-deuát parlans de la colique.Dauátage,
il afferme autres auoir eſté guaris de la colique, en prenanttrois onces de vif-argent.
Antonius Antonius Muſa dit,qu'ila de couſtume en donner à boire aux petits enfans eſtans g
Muſa, au demy-morts, à l'occaſion des vers. Ce qui eſt encore approuué par Auicenne,où il
traic té des dit que pluſieurs en boiuent ſans en eſtre aucunement endommagez. Auli ledic A
metaax .
uicenne l'ordonne pour la teigne des petits enfans : & meſme en ſesonguentspour
atschap.de la rongne. Semblablementonvoitordinairement les bonnes femmes de village en
argëto viuo. beurre, graille de
frotcer la teſte de leurs petits enfans, eſtant mixtionné auec ou
Marchiole. porc, pour faire mourir leurs poux. Macchiole dit , qu'aucuns en donnent pour le 3

dernier remede aux femmes qui ne peuuent accoucher : ie proteſte que i'en ay fait
aualler vne liure à vn petit & icune chien, qui le reiecta par le ſiege, ſans reſſentir au
cun mal . Toutes leſquelles choſes me fontiuger iceluyn'eſtre venimcux.
Voila ce que i'ay peu recueillir des Autheurs ,tant anciens que modernes. Et ne
nous faut arreſter aux diſputes, mais à l'a& ion & faculté d'iceluy , choſe plus neceſ.
Paculiez du faire que toutes diſputes qu’on en peut faire. Et quant à ſes actions & facultez, nous
vif-argent. le voyons eſtre le vray alexitere, & cõcre-poiſon de la groſſe verole, & propre aux vl
ceresmalingsde quelques genresqu'ils puiſſent eſtre,de façon qu'ilcõſomme la vi
rulence &malignitéqui eſt en eux,plus que nuls autres remedes operans par leurs
qualitez premieres. Specialement lionenfrotte vne laminc de plomb,comme l'en- D.
Guidon. ſeigne le bon vieillard Guidon ,& qu'on l'applique ſur l'vlcere en le bandane propre
ment,ramollic les bords deſdits vlceres, eſtant continuée ameine l'vlcere à cicatrice,
ce que i'ay cogneu par diuerſes fois. Ce quieſt auſſi confirmé par Galien,lequel l'ap
preuue pour les vlceres malings,& pourles chancres.Meſmesnous voyons parexpe
rience, quele plomb ( lequel aucuns diſent venencux, parce que l'argent.vif eſt faic
de luy)peut demeurer long temps en noſtre corps ſans faire aucune corruption.com
melon peut cognoiſtre en ceux quiont eu des coups d'harquebuſes, la balle demeu
rer aux parties charneuſes par l'eſpace de trois, quatre, voire dix ans,& deſcendre du
hauten basſans faire aucune putrefa& ion ou nuiſance à nature , qui demonſtre n'a
uoir nulle venenoſité, mais pluſtoſt quelque choſe de familier auec noſtre nature.
Gal.7.cala- Galien ne dit pas que le plomb ſoit veneneux,mais dic que l'eau cócenuë longtemps
Jop: és canaux de plomb,pourle limon quiſ'y attache,cauſe dyſenteries& Aux deventre, H
1
.
.

Des Venins. 791


A ce que feroit bien l’airain ou le cuyure.
Thierry de Heryreciteceſte hiſtoire. Ces iours paſſez ie fusenuoyé querir pour Hiſtoire de
viſiter vn enfant en la maiſon d'vn Docteur en Medecine,lequelauoit vne parotide, Hery, en fort
( qui eſt vne apoſteme aux enuironsdes oreilles ) auec grande tumeur & inflamma- traiété de la
Verole, bien
cion,douleur, pulſation, & tels ſignes ſignifientgeneration dematiere. Au moyen experimenté
restroi: dequoy ngus aduiſaſmes qu'il ſeroitbon yappliquer un medicament anodyn, ce qui enla chirurs
furfait: & au premier remuement de l'emplaſtre,ſe trouua grande diminution de la gie.
tumeur, & de tous les autres accidens, dont nous fulines elbahis,parce que nous
auions deliberé ce iour ,ou le lendemain ,y faire ouuerture. A la ſeconde fois ſe trou
ua ſans inflammation,pulſacion ,ny douleur,& apparente diminution de la tumeur,
&elem & ſentoit l'enfant la partie quaſieſtre toute deſchargée. Au troiſieſme appareil,i’ap
perceu dedans le cataplafine du vif-argent, parquoy nous enquerans d’où pouuoit
proceder cela ,trouuaſmesqu’yn ſeruiteur,auquelon auoic commandé faire ce me
11:15 dicament ( faute de curioſité ) l'auoit mellé auec vn onguent eſtant au mortier , au
B quely auoit de l'argent -vif. Toutesfois cet enfant fuc guary quatre ou cinq iours
apres , fans ſuppuration ,ny aucun accident .
Autre hiſtoire dudit deHery. Quelque temps apres yne Damoiſelle fut affligée Autre hi
d'vne ſemblable maladie, laquelle non ſeulement luy comprenoit le derriere des ſtoire dudi!
orcilles, mais auſli vne partie de la gorge,& quaſi toute la ioue.Nonobſtantquelque de Hery.
diligence, nous ne ſceuſmes tant faire que nature vouluſt tendre à aucune euacủa
tion,& auoit vne relle douleur,que iour ny nui& ne pouuoit repoſer :quoy voyant,
200. ie raconte aux Medecins l'hiſtoire precedente, leſquels furent d'aduis qu’on adiou
ſteroit du vif-argent aux emplaſtres, ce quifutfait, & la Damoiſelle ſentit ameliora
tion de la douleur , & peu de iours
e
apres la cumeur fut entierement reſoluë. Voila
deux hiſtoires que ie croy eſtr vrayes. L'onguent où entre le vif-argent guariſt la
rongne,appellée du vulgaire, mal ſain & Main (ſupplé apres auoir faitleschoſes vni
uerlelles ,comme purgations,ſaignées,bains ) ce que lesaucresmedicamensne peu
uent faire. Ietiens que l'argent-vif eſtl'antidore de la verole ( auſli fait Rondelet) &
de ſes accidens, & la guarit en quelque ſorte qu'elle ſoit: parce qu'il eſmeur les
C
ſueurs, & deſſeiche la cauſe de la ſubſtance: ce que ne font point les autresmedica
mens,au moins quei’ayepeu cognoiſtre.
Or quelques-vns tiennent qu'il reſout & dillipe la vertu des nerfs, comme lon
voit quelques-vnsquien onteſtéfrottez pour la verole , auoir vn cremblement des
membres:il eſt vray quand lonen vſe indiſcrettement & fans raiſon, qu'il en pourra
eſtre cauſe. Autant en aduiendra -ilaux doreurs& fondeurs de plomb, & àceux qui
FI
fontauxminieres : car par l'indeuë & aſliduelle reception des vapeurs, il ſe fera non
en alt
ſeulement vacuation des humeurs malings & corrompus,mais auſli reſolution &
conſomption des eſprits & humiditez radicales , leſquelles reſoluës, ſpecialement
desparties nerueuſes, il ſ'enfuic vn tremblement quelquesfois perpetuel, non par la
malice du vif-argent,maispar l'indeuë application & mauuais vlage. Eſtant eſteint Ievif-argent,
auec axunge de porc, qu’onen oigne vne liſierede drap, puis qu'on l'appliqueà nud tué lespoux,
en ceintureau milieu du corps , il chaſſe les poux , puces, punaiſes, & morpions: & proces,punai
2011
tuë les vers contenus au ventre, & principalement lion en frotte le creux du nom morpions, et
mbi
bril . Sionen frotte le lieu où habitent lespunaiſes & morpions , il les fait mourir, & autres ver
urbaine D empeſche que plus n'y retournent. Or il y a deux eſpeces d'argent- vif, naturelle & mines.
Disk
artificielle : de la naturelleil ſ'en treuue coulant par les veines & cauirez de la terre, Deux especes
comme on voit en diuers lieux : & auſſi il ſe treuue entre les mecaux , & aux voultes d'argent-vif.
des fodines d'argent. De l'artificielle ilſen fait deminion,auflide ratifleures de mar
bre ,comme eſcrit Vitruue. Ileſt vray -ſemblable qu'il ſ'en pourroit cirer de tous me- vitruve aus
el
caux par artifice, & principalement du plomb, & du Cynabre. Telles eſpeces & diffe- j.lin.de
rencesſepeuuent cognoiſtre par leur couleur fuſque & noiraltre, par leur ſubſtance architecture.
lente & eſpeſſe, quien coulant laiſſe veſtige gras, comme excrement de plomb . Le
/

meilleur de cous eſt celuy qui eſt pur,clair, fubtil, & blanc. Et pour le purifier de ſon
plomb , & autres excremens, & le rendrebon & tres-ſubtil, il le faut faire bouillir en
vinaigre,auec faulge,romarin,thym, lauende,oule faire aualler à vn chien vne liure
bouillir vif-argent
àlafois:puisl'ayantreietté parle fiege,lecueillir, &derechefle fairevnpeugrandes,
2017 audit vinaigre. Cela fait, on peutdire eſtre vn maiſtre Ican, qui faic choſes l'Aucheur,
& quafi miraculcuſes, pourucu qu'on le ſçache bien manier à luy faire ſauter le maillrelean,
xXx iij

1
792 Le vingt -vnieſme Liure ,

baſton. Car à peine ſe trouue -il homme , qui ſe puiſſe vanter d'entendre ſa nature &
vertu en tout & par tout. Les Alchemiſtes ont ſi grande opinion de ce maiſtre lean,
que la pluſpart d'iceux l'ontcouru à force d'or & d'argent, pour cuider l'arreſter, &
toutesfois n'en ont encore ſceu venir à bout. Les riches en ſont deuenus pauures,
pour l'auoir ſouffé, & les pauures, idiots ,inſenſez,& tous deſchirez. Il n'a plusgrand
enneny que le feu, lequel le faitmonteren haut encore qu'il ſoit fort peſant, & auli
luy fait quitter l'orſon plus grand amy qu'il ait point.

Diſcours de la Licorne . CHA P. XLVII .

Intention de ARCE que pluſieurs f'eſtiment bien aſſeurez , & munis contre la
l'Autheur.
peſte , & toutes ſortes de poiſons & venins, par le moyen de la corne
de Licorne ou Monoceros, priſe en pouldre, ou en infuſion : l’ay
Deſcription penſé faire choſe agreable & profitable au public ' , fipar ce diſ
de la Licor
cours i’examine ceſte opinion tantinuecerée ,& toutesfois fort in.
certaine . Premierement on entend par ce mot de Licorne , vne 3
beſte naiſſante en fort lointain pays , ayant vne ſeule corne au
front , qui eſt priſe comme choſe miraculeuſe contre tous venins , & fort eſtimée des
Roys , Princes, & grands Seigneurs , & meſme du vulgaire. Les Grecs l'appellent
Monoceros, & les Latins V nicornis. Et de pouuoir dire & aſſeurer à la verité quelle
eſt ceſte beſte , il eſt fort difficile ,meſme qu'aucuns doutent que ce ſoit vne choſe
fauſſe & controuuée par le vulgaire,laquelle auec le temps ſoitvenuëen opinion , &
que quelqu'vn en peut auoir eſcrit, ſoit par fimplicité ou delectation,voulantemplir
ſes liures de choſes merueilleuſes & extrauagantes , ſe ſouciant bien peu ſi elles
Varieté d'o eſtoient vrayes , ou fauſſes. De fait la deſcription de ladite Licorne porte auec ſoy
pinions con- vne doute manifeſte , veu que les vns diſent que c'eſt vne beſte incognuë & eltran
chanela de- ge , & qu'elle naiſt aux Indes , les autres en Æthiopie, d'autres és terres Neufues, les
ſcription de aụtres és deſerts : dont on peuc conie&turer ( comme dic André Marin , Medecin
la Licorne . tres - docte de Veniſe, au liure qu'il a fait de la fauſſe opinion de la Licorne ) que ce

peu de cognoiſſance que lon en a eu iuſques à preſenten noſtre Europe, commed'v


g
ne choſe eſtrange,a eſté donnée par gens Barbares, leſquels, comme il appert, n’ane
peu dire autre choſe, finon qu'elle naiſt és deſerts ,& qu'elle eſt ſolitaire ,& hante les
lieux inacceſſibles,& partantque c'eſt vne choſe qui ſe voit fort rarement. Qui de
monſtre aſſez, que ces gens-là n'en ſçauent rien au vray , & qu'ils n'en parlent que
par opinion , & parouy dire.
1
be
CH A P. XLVII1 . '
!

Les premiers AVANTAGE, les Autheurs qui en ont eſcric du commence 2


Autheurs ment,eſtoient fort peu renommez, & n'en faiſoit-on pas grand fe
qui ont eſcrit d
cas. Car le premier quien a eſcric ( commcon peut voir en Pline,
de la Licor
au liure 8. chap . 21. ) fuc Cteſias, duquel Ariſtote en ſon livre 8. le
ne , peu ree
somme: de ſon hiſtoire des Animaux ,chap.28.parle comme d'vn Autheur
peu croyable. Or touchant Ælian , il ſemble qu'il en doit auoir
Engă

Ctefias. pa
Ælian parle parlé à la verité , comme ne faiſant profeſſion que de parler des
D
935Oā:

doutcuſemét animaux : & toutesfois lon voit qu'ileſt en doute,en parlant touſiours en cestermes :
de la Licorne.
on dit, ils diſent, on entend . Et parce que tous les Autheurs qui en ont eſcrit iuſques
à preſent, en ont tous parlé diuerſement. Et de fait ,comme ils ſont differens en la de.
Difference
de la figure. ſcription des lieux ,où naiſt ladite Licorne, ainſ ſont- ilsen la forme d'icelle.Les vos
diſent qu'elle reſſemble à vn Cheual , les autres à vn Alne ,les autres à vn Cerf,les au ex
tresà vn Elepliant,autres à vn Rhinoceros, autres à vn L'éurier d'attache. Bref, cha
cun en dit ce qu'il en a oüy dire ,ou ce qu'illuy plaiſt de controuuet. Les vns en font
Varieté des deux eſpeces , d'autres trois . Il y en a qui diſent qu'elle a la corne du pied enciere 7.
autheurs en comme celle d'vn Cheual,autres fendue comme celle d'vne Chéure,autres comme lo
la deſcription d'vn Elephant, comme Pline , & Ælian. Or leſdits Autheurs ne diſcordentpas ſeu
de la corne
de Licorne. lement pour le regard des lieux de la naiſſance,ny de la forme de ladiceLicorne,mais
auſſi en la deſcription de la corne d'icelle. Car les vns la figurent noire , les autres de
le
bay obſcur , & qu'elle eſt blanche en bas , & noire en haut. Yn aucre dit que vers
Des Venins .
793

A haut elle tire ſur le pourpre , vn autre qu'elle eſt polie , & d'autres que depuis le
hauriuſques en bas elle eſt rayée tout à l'encour comme vne coquille de limaçon ,
par vn artifice tres-beau.Plus les vns la deſcriuent moins large, les autres plus lon
gue . Concluſion , cous different , tant les anciens que les modernes: Ineſmes ils ſe
fone trouuez confus en l'experience de pluſicurs cornespretenduës de Licornes , qui Confuſion en
ſe trouuent és threſors des Rois & Princes Chreſtiens , en ce que leſdices cornes ne l'experience,
ſe font crouuées toutes propres à vn meſme vlage: mais en certaines choſes ils ont
trouué vray cequ'en ont dit les anciens, & en beaucoup d'autres , non . Et ce qui en ce qui fait
faic douter dauantage,ce ſont les promeſſes exceſſiues, & incroyables , que quel- douter des
ques - vns mettent en auant des vertus de ceſte corne contre la pelte , le ſpaſme, mal versus de la
caduc, contre la fiéure quarte , la morſure des chiens enragez , viperes , & picqueu Corse.
res de ſcorpions, & contre tous venins . Et pour le faire croire aux Princes , ilsdiſent
qu'il n'eſt beſoin en prendre par la bouche, comme l'on fait de la theriaque , & au Ch
oſe difficia
tres alexiteres preſeruatifs, mais qu'il ſufficque ceſte corne ſoit tenuë ſeulement à le à croire .
B l'oppoſite du lieu où ſera le venin , & que ſubir le venin ſe deſcouure. Ec pour fai.
re croire ces miracles,ils ſe veulent preualoir de quelques teſmoignages des anciens,
que les Rois d'Indie faiſoient faire des taſſes de certaines cornes,où perſonne qu'eux philoſtrate
ne beuuoit , & que par ce moyen ils ſ'aſſeuroienc d'eſtre exempts de toutes maladies ch.i.liu.za
incurables , & que le iour qu'ilsauoient beu dans ces caſſes , ils ne deuoient craindre
aucun venin , nyautres aduerſitez. Bref, vne infinité d'autres promeſſesimpoffibles, Promeſſes
leſquelles d'autant qu'elles excedent toute creance humaine , d'aucant donnent- el- impoſóbles!
les occaſion à ceux quiont quelquepeu d'eſpric, de tenir pour faux, cout le reſte qui
ena eſté dit & eſcrit.

CHAP. XLIX .

Velques -vns pourroient penſer , veu la conformité de ces deux noms,


Rhinoceros, & Monoceros, c'eſt à dire Licorne , que ce fuſtcout vn . Mais
Licem ſi cela eſtoit vray , il n'y auroit delia plus de doute qu'il ne fuſt des Licor
ope, G nes , d'aucant qu'il eſt cout certain , que le Rhinoceros a eſté veu pluſieurs
nella fois aux ſpectacles publiques des Romains . Que ſi c'eſt un autre animal different co
aire meil eſt à preſuppoſer ,ilſourd vne autre difficulté plus grande. Car parmy tant d'a
Ce que l'on
nimaux que l'on menoic de toutes les parties du monde és merueilleux ſpectacles de
faiſois en la
Rome, il ne ſe trouue point que l'on n'y ait iamais veu vne ſeule Licorne . Et quand dedicace de

l'Amphitheatre de Dioclecian fuc dedić, l'on ymena pareillement de cous coſtcz vn l Amphi
bien grand nombre d'animaux forçeſtranges , & nelit- on point qu'il ſe ſoit fait ia- sheaire de
mais vne plusgrande recherche, qu'au temps de Gordian.Car voulāc triompher des Diocletian
Perſes, & celebrer la feſte ſeculiere pour ceſte année glorieuſe , qui eſtoit mil ans
apres l'edification de Rome, que Philippe premier Empereur Chreſtien ſon fuccef
bil-cepand ſeur a depuis encore celebré , il y fit conduire des Ours, des Lions , des grands Cerfs,
des Rhinocerots , Taureaux ſauuages, Sangliers, Chameaux , Elephans , Tigres, El

o lens , Porcs - épics , Ciuettes , Crocodiles , Chevaux ſauvages & marins, appellez
gedes Hippopotames , & autresinnumerables animaux cruels & farouches, donc la plus
part ſe trouue ésdeſerts d'Egypte , & és Illes loingraines : entre leſquels fur grand
D merueille que la Licorne ne fut pointamenée auec lesautres animaux. Quand Gor
11560 dian voulut criompher des Perſes, la Licorne n'y eſtoit , & ne precedoit tous les au
tres animaux à cauſe de ſa rarité, ſi elle ſe trouue, comme l'on dit , en ces coſtez - là .
Qui me fait croire que la Licorne ſe trouue bien rarement. Et ſemble , à voir ceſte

dick . variecé d'opinion entre les Autheurs qui en ont eſcrit, attendu auſſi les promeſſes
FOCUS exceſſiues & incroyables ( comme a eſté dit) d'Ælian , & autres , que ce ſoit vne

ocket choſe fabuleuſe. Cet argument auſſi pris des triomphes des Empereurs ſeroit par
lor moy mal conduit, & ne conclurroit pas ſ'il n'eſtoic approvué , comme ie fais apres au
7. chap.de ce traidé par l’authorité de Pauſanias, que Monoceros & Rhinoceros
doping
ſonc diuers animaux. Parquoy ce ſeroitalleguer faux contremoy qu'ily euſt des Li
‫ که روی‬asing
Orch cornes en ces triõphes, pource qu'on y veit des Rhinocerots, qui font autres animaux
que la Licorne: veu que le Rhinoceros a deux cornes , l'vneau nez , & l'autre ſur le
bybe a dos,au dire de Pauſanias: & la Licorne n'en a qu'vne , commemonſtre le nom Mo.
noceros .
ediyi
XXX iiij
-
794 Le vingt-vnieſme Liure ,

A
CHAP . L.

Dent de Ro Vcuns ſont d'opinion , que la corne que l'on monſtre pour corne de Li
hart prile corne , eſt vne denc de Rohart, quieft vn poiſſon de mer . Autresdiſent
pour corne de que l'on ne peut iamais prendre viue la Licorne . D'autres diſent en
Licorne. auoir vei vne troupe comme l'on veoid icy les moutons . Partant ces
La Licorne ne choſes conſiderées , le Lecteur en croira ce qu'il voudra . Ec quand a
peutetrepri- moy , ie croy que la Licorne n'a encoreseſte deſcouuerre, ou pour le moins bien fa
fe viue.
rement, & que ce n'eſt qu'vneimpoſture de vendre tant de cornes de Licorne,que
Impoſture de
Dendre tant l'on fait à croire' , comme l'on en peut tirer de grandes conie &tures de ce que je diray
de corne de cy apres .Æncas Siluius Picolomini , quia eſté depuis Pape Pie ſecond , en ſon liure
Licorne. de l'Alie chapitre dixieſme, eſcrit de l'authorité d'vn Nicolas Venetien , que vers la
Æneas
fin d'Aſie , en yne prouince nommée Marcino entre les montagnes de l'Indic , &
Silurus.
de Cathay , il ſe trouue vn animal, quia la teſte comme vn porc, la queuë comme
yn bæuf , de couleur & grandeur d'un Elephant , avec lequel ilavne perpetuelle B
inimitié, portant vne ſeule corne au front, d'vne couldée de long , laquelle eltfort
víarc Paul priſée en cesregions - là , pour eftre ( comme ils diſent) bonne contre tous venins.
Venetien . Marc PaulVenetien en teſmoigne de meline, lequel a demeuré long temps au ſer
vice du grand Cham de Tartarie , où il a faict pluſieurs voyages loingtains en Indie :
Licorne agät & entre lesautres choſes dignes de memoire , il a eſcrit,qu'auRoyaumede Baline,où
la teſte lem- les gens ſont du tout barbares, & brutaux , la Licorne ſe trouue , qui eſt vne beſte

blable à on ſans proportion , peumoindre qu'vn Elephant, ayant la teſte ſemblable à vn pour
pourceau . ceau , & ſi peſante, que touſiours la cientbaffe , & courbée.Elle aime à demeurer à
la fange ,ayant vne ſeule corne au milieu du front, de couleur noirc , & longue de
deux couldées. Aloyfius Cadamuſtusen ſa nauigation chap.s. dic qu'en vne certai
Licornes pri- ne region des terresneufues l'on trouuedes Licornes , que l'on prend viues. Louys T
fes viues.
de Berthame, Eſpagnol, en ſon voyage d’Æthiopie , & merrouge, eſcrit auoir veu bi
Deux Licor- en la Mecque , cité principale de l'Arabie, dedans le Serrail du Roy,deux Licornes, l'e
O
nes venes en l'vne ſemblable à vn cheual de trente mois , & l'autre à vn poulain d'vn an, ayant
091
La Mecqu
dans le ser de trois braſſées de long, & l'autre de deux,ayant la
e de chacune vne corne au front,l'vne cd
rail du Roy . couleur d'oncheualbay ,la teſte de cerf, le col court,peu decrins, les jambes menuës , F
Opinion de l'ongle fendu comme vne chéure,Pline dic , que la corne de Licorne eſt noire , foli di
Pline. de , & non creuſe par le dedans.Solinus & certains autres Autheurs la deſcriuent de
92
Louys Para- couleur de pourpre , & non noire.Or pour le deſir quei’ay couſiourseu deſçauoir la CC
dis Chirur- verité touchant ce que l'on pourroit louhaitter de la Licorne , fçachant que Louys
gicn. 2
Paradis,Chirurgien narif deVitry en Parcois , à preſent demeurant en ceſte ville de
Paris, auoic long temps voyagé , ie le priay me dire ſ'il n'auoit point veu de Licor
&
nes . Il me dit qu'il en auoit veu vneen Alexandrie d'Egypte ,vn Elephant aulo
gis du Gouuerneur de la ville , que le Preſte-lean enuoyoit au grand Seigneur, de
grandeur d'un grand leurier d'attache, non ſi grelle par le corps . Son poil eſtoit de
couleurde Caftor, fort liſſe, le col greſle, petites oreilles , vne corneentre les deux
oreilles fort liſſée, de couleur obſcure,bazanée,delongueur d'vn pied de Roy ſcule
ment, la ceſte courte & feiche, le mume rond, quaſi ſemblable à celuy d'vn vcau, les
yeux aſſez grands , ayant vn regard forc farouche, les jambes ſeiches, les pieds fendus D
comme vnebiche , la queuë ronde & courte commecelle d'vn cerf. Elleeſtoicroute
d'vne meſme couleur,forsva pied de deuant , qui eſtoit de couleur jaune. Son man
gereſtoit de lentilles,pois ,féues, mais principalement de cannes de ſuccre. Ce fut
au mois d'Aurilıril cinq cens ſoixante & treize. Il fenquit par vn truchemene de
ceux qui auoient amené ladite Licorne, lily auoit beaucoup de pareils animaux en
celte prouince. On luy ficreſponſe qu'oüy , & que c'eſtoit vn animal fort furieux, &
tres-difficile à prendre , principalement lors qu'il eſt en rut, & que leshabitansdu pais
le craignent plus que nul autre animal feroce, Ledit Paradis affirme , qu'ils luy
monſtrerent vn fragment de corne de Licorne , qui eſtoit comme de couleur du de
Corne de Li- dans d'vne piece de Rheubarbe freſchemērrompuë. Albert eſcrit auoir veu vne cor
corne veiie ne de Licorne, & meſme maniée de lamain propre , large en la baſe d'vne palme &
par Albert. demie, & en diametre large de dix pieds fans aucuneraye, & au demeurát séblable à

1
1

Des Venins. 795


A vne corne de cerf.Ec par laproportion de ceſte longueur & grofſeur,finous conſide
rons la grandeur de la teſte quidoit produire & ſouſtenir vne lidelmelurée corne, &
venanspar là à coniecturer quel doit eſtre tout le corps , nous ſerons contraints de
confeſſer, queceranimaldoiceſtreauſligrand qu'vn grand Navire, & non comme
vn Elephant. Quant à moy , ie croy que ceſte corne doit eſtre quelque corne, os,ou opinion de
areſte de quelque monſtre marin merueilleuſement grand. Munſter, lequel ( com . l' Autheur.
‫ܐܬܝ ܃‬ me dic Matthiole) n'a iamais veu de Licornes qu'en peinture, dit, icelles eſtre ſem-opinion de
blables non àvn cheual,maisà vnpoulain detrois mois,ayantles pieds non fem- munſter.
blables à ceux d'vn Elephant ,mais fenduscomme ceux d'vne chéure : au reſte por
tant vne corne elleućeau front, noire & longue de deux ou trois couldées. Quant à
la beſte, elle eſt de couleur d'vne Belecte , ayant la teſte comme vn Cerf, le col non
pas fort long,& garny de peu de crins , pendans ſeulement d'un cofté, les jambes
grelles & minces,les cuiſſesheronnieres, fort couuertes de poil. Toutesfois Cardan, opinion
Cardan
de
contrcdiſant à tous deux , dit, ceſte beſte porter au milieu du frontvnc cornc longae ondré,
non de deux ou trois couldées , mais de deux ou trois doigts ſeulement.André The- Thewes.
uer en la Coſmographic, de l'authorité & recit d'vn Sangiach , Seigneur Turc , fait
mention d'vne Licorne veuë par ledit Seigneur, grande comme un Taureau de cinq
ou fix mois, portant vne ſeule corne droit au ſommet de la teſte , & non au front,
pitudto
ainſi que l'on dit des autres , ayant les pieds & jambes peu differentes des afnes de
Brice noſtre Europe , maislepoil long , & les oreilles ſemblables à celles d'vn Rangifere.
Garcias ab Horto , Medecin fortcelebre du Viceroy d'Indie , dit qu'au promontoi- Garcias ab
redu Cap de bonne Eſperance , l'on a veu vn animal cerreſtre, lequel auſſi le plaiſoit Horto.
d'eſtre dedans la mer , ayant la ceſte & la perruque d'vn Cheual, & vne cornclongue
dedeux palmes ,qui eſtmobile , laquelleil cournc à ſon plaiſir , cancoſt à dextro , can
ng
coſtà ſeneſtre , en haut & en bas . Cet animal , dit- il , combat contre les Elephans
tres-cruellement. La corne d'iceluy eſt fort recommandée contre les venins.André
Theueten ſa Coſmographie ,dit qu'ilſ'en trouue vn autreenÆchiopie ,preſque ſem :
lcd blable, nommé Camphur ,en l'iſle Mouluque, quieft amphibie ,c'eſt à dire viuant en Camphor.
l'eau & en la terrc , comme leCrocodile. Ceſte beſteeſt de grandeur d'vne Biche, Crocodile.'
‫دیوانگی و‬
ayant vne corne au front, mobile , de longueur de trois pieds & demy, de groſſeur Deſcription
commelebras d'unhommc,plein depoilautour du col , tirant à la couleurgriſaftrc. du Camphur.
Elle a deux pattes comme celles d'vnc Oye , qui luyſeruent à nager,& lesautres
deux pieds de deuant comme ceux d'vn Cerfou Biche:& vit de poiſſon . Il y en a
quelques-vns qui ſe ſont perſuadez que c'eſtoit vne cſpece de Licorne , & quefa
corneeſt fortriche , & excellente contre les venins , la figure de laquelle ce ſera icy
repreſentée.

chanh

ivres
‫من ه‬
bili
lean
De 7

1
e Liure ,
796 Le vingt-vnieſm

A
Figure du Camphur , animal amphibie.

Filla

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B 3

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0
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MC
fo
The

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IEEE 0 de

Orily a pluſieurs autres animaux marins quin'ontqu'vne ſeule corne , & beau
coup d'autres animaux terreſtres : caron a veu des chevaux, chéures , & daimis ,pa
reillement des taureaux , vaches , & aſnes , auoir vne ſeule cornc. Parquoy Mono
ceros ou Vnicorne , clt vo nom quiconuientà couçanimal qui n'a qu'une ſeule cor
ne . Or confiderant la varieté des eſcriuains , & des cornes qui ſont toutes differen
tes les vnes desautres , l'on peut croire veritablement qu'elles ſont de diuerſes be
ftes engendrées en la mer , & en diuerſes contrées de la terre. Et pour la renommée
des vertus qu'on attribuë à la Licorne , chacune nation ſe plaiſt à luydonner le nom
de Licorne .

CHAP . LI.

Datz Aga,Orateur de Soliman,atteſte auoir veu en l'Arabic de- D.


de
Idath ga ſerte, des Licornes courantes çà & là à grands troupeaux. Quant
Orateur de
à moy ie croy que c'eſtoient pluſtoft des Daims:ou Chéures de
Solimam .
ce pays - là , & non des Licornes.Philoſtrace en la vie d'Apollo
nius Tyaneus, chap... liu.3.dit , qu'aux mareltsvoiſins du flequc
Philoſtrare
Phaſis ſe trouuent desAſnes ſauvages,portansvne corneau frór,
lim.z.chap.s. be
auec laquelle ils combattentfurieuſementcomme taureaux : de
laquelle corneles Indiens fonc des taſſes qui garantiſſent l'homme de coute forte de
maladie le iour qu'il y a beu , & fil eſt bleſſé ce jour là , il ne ſent aucune douleur.Da
uancage,ilpeut paſſer par le trauers d'un feu ſans ſe bruſler nullement. Meſme il n'ya
veninny poiſon beu , ou autrement pris, quiluy puiſſenuire :& que pour ceſte cauſe
il n'y a que les Rois qui boiuent dans leſdites taffes: de fait que lachaſſe deſditsalues
n'eſt permiſe qu'aux Roisdu païs: de ſorte que l'on dic qu’Appoll , Philoſophegra
Apollonius
Tyaneus. uc,regarda curieuſemétcelte beſte fauuage, & auec grāde admiration cõlidera la na
Des Venins. 797
A cure.Quoy voyant Damis,luy demanda f'il croyoir ce qu'on diſoit de la vercu deſdi
tes calles : le le croiray ,dit-il,quandi'entendray que le Roy de ce païs ſera immor- Reſponſe fort
cel . Reſponſe que ie delibere d'oreſnauant faire àtous ceux qui medemanderont, ſi ſubtile.
ie croy ce que l'on dit des vertus de la corne de Licorne.
CHAP . L 11.

Oindre n'eſt la contrarieté des Autheurs touchant le naturel de Diſcord des


ladite Licorne. Car Pline au lieu cy-deſſus allegué, la diceftre la Aushcurso

M plus furieuſe de toutes les beltes : meſmes qu'elle hurle fort hi- :
deuſement , & que iamais on ne la prend viue. Cardan la dit pa
reillement eſtre fortcruelle, comme naiſſanc és lieux deſerts d’E
thiopie en terre orde , & entre les crapaux & beſtes venimeules.
Geſnerus dic,que le Roy d'Ethiopieen l'Epiſtre Hebraïque qu'il
B
a eſcrite au Pontife deRome , dit que le Lion craint infinimentla Licorne, & que
quand illa void , il ſe retire vers quelquegros arbre , & ſe cache derriere ledit arbre.
Lors la Licornele voulant frapper, fiche la corne bien auant dans l'arbre & demeu
re là priſe , & lorsle Lion la tuë : toutesfois il aduient aucunefois autrement. Autres
au contraire la diſent fort douce, benigne , & d'vne mignotiſe la plus grande du Lougs de
monde, pourueu que l'on ne l'offenfe point. Louys de Barthame en les nauigations Barıhannes
cy-deſſus alleguées,eſt de ceſte opinion, niantles Licornes eſtre cruelles , comme
en ayantveu deux enuoyées d'Echiopie au Soudan , qui les faiſoit nourrir en laMec
que , ville de l'Arabie heureuſe ( où eſt le Sepulchre de Mahomet) enfermées en
certains treillis, qui n'eſtoient nullement farouches, Theuer ditauoir voyage en ces
regions. là ,& feltre enquis diligemment des habitans , n'auoir toutesfois iamais
ſceu rencontrer homme quien euft veu , ou quicult peu rapporter quelque certitu
de de la figure & nature de ceſte beſte.
Ocho dit auoir veu & manié à Rome , au magaſin du threſor des Papes,vnecorne Orha.
de Licorne, qui eſtoic luiſante & polie commeyuoire ,& qu'il fut fort elinerueillé
delaveoirſi pecite : ſe prenant à rire , d'autant qu'elle n'auoit à grand peine que deux
palmes de longueur, on luy dit que par le crop grand,& frequent vſage de l'auoir
maniée, elle eſtoit deuenuë ainſi pecite. Il y en a auſli qui eſt gardée par grande fin Licorne
gularité dansle cæur du grand temple de Stralbourg ,laquelle eſt de longueur de La cornede gara
à Straf
lept pieds & demy , encore l'on a coupé furtiuement le bout de la poincte , laquelle dée bourg.
ſans cela , ſeroit encore plus longue . Elle eſt par lebas de la groſſeur d'un bras,& va
en tortillant comme vn cierge qui eſt tords, & feltend vers la poincte en forme de
Pyramide , eſtane de couleur noiraſtre par dehors , comme vn blanc ſally pour auoir
cſté manié , & par dedans elle eſt blanche comme yuoire , ayant vn trou au milieu
comme pour mettre le petit doigt qui va toutau long. Les cornes qui ſe montrent Les cornes de
aux Feſtes folennelles publiquement à Veniſe au Temple de Sainet Marc ,different Licorne que
de ceſte -là en grandeur,couleur,& figure,tellementqu'il n'y a nulle conformité en on trel' monf
tre-elles. Pareillement en l'Egliſe deSain &t Denys en France il y a , à ce qu'on dit, à Veniſe.
vnc corne de Licorne qui en groſſeur, longueur & figure ,ſe rapporte aucunement
à celle de Strasbourg . Or fileſdites cornesne ſont de vrayes Licornes , de quelles be. Demande.
D ftes ſont-elles : dira quelqu'vn . Theuet a opinion ,que telles cornes ne ſontque Response.
dents d'Elephans, ainſi cernelées & miſes en æuure : Car ainſi, dit-il,lesdeſniaiſeurs
qui ſe trouuenten Leuant , vendent les roüelles dedentsde Rohure pour cornes de pene de Ros
Licornes, lescreuſent & alongent à leur aiſe. Ec à la verité ceſte corne de Licorne Les dents des
eſtant brufléc, rend & reſpirelemblable odeurque l’yuoire. Et afin que ceſte façon Elephans le
de contrefairene ſemble impoſſible, Cardan dit que les dents des Elephans ſe peu peuuent amo.
uent amollir & eſtendre comme les cornes de beuf. lir o eſten .
dre.
798 Le vingt -vnieſme Liure ,
A
A
Figure d'un Elephant.

eft
IOS
Jos
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20)

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VA

Louys Paradis, Chirurgien natif de Vitry en Parrois , duquel i'ay fai& mencion
cy-deuant , dic auoir veu en Alexandrie d’Egypte deux aiguilles , appellées les ai
guilles de Ceſar ,hautes & grandes à merueilles, neantmoins chacune toute d'vna
piece: & cient- on pour vray qu'elles ſont de pierres fonduës. Hors ladice ville enui
Colomne de ron huic cens pas, il y a vne Colomne , qui f'appelle la Colomine de Pompée , de
Ponapée. merueilleuſe groſſeur- & hauteur ,tellement que c'eſt tout ce quepeut faire le plus
fort homme,deietter vne pierre ſur le ſommet d'icelle. La groſſeur eſt telle , que
cinq hommes ayans les bras eſtendus nelapourroient entourer: neantmoins on dic
Les pierres ſe qu'elle eſttouted'vne piece, & de diuerſes couleurs de pierres, comme noire,griſe,
peuvent for- blanche , incarnate, & dit- on qu'elle eſt auſſi de pierres fondues : que ſi ainſieft, que
dre.
de telle matiere on ait peu conſtruire leſdites aiguilles & colomne, qui empeſchera
que l'on ne puiſſe contrefaire les cornes de Licornes?

CHAP
-
Des Venins. 799
CHAP . LIII.

AUSANIAS eſcrit , que le Rhinoceros a deux cornes , & non vne Deſcription
ſeule : l'vne ſur le nez ,aſſez grande , de couleur noire , & de groſſeur du Rhinoces
& longueur de celle d'un buffe, non toutesfois creuſe dedans,ny tor- ros.
cue , maistoute ſolide, & fort peſante: l'autre luy ſort en haut de l'ef
paule , aſſez petite , mais fort aiguë. Par cela apparoiſt que ce ne peut
eltre la Licorne, laquellen'en doit auoir qu'vne, comme teſtifie ſon nom Monoce
ros. On dit qu'il reſſemble à l’Elephant , & quaſi de la meſme ſtature , ſinon qu'il a
les jambes plus courtes , & les ongles des pieds fendus, la teſtecomme vn pourccau,
le corpsarméd'vn cuir eſcaillé & tres-dur,comme celuy du crocodile, reſſemblant
aux bardes d'un cheual guerrier. Feſtus dir , que quelques- vns penſent que ce ſoit Feftus.
vn bæuf ſauuage d'Egypte.
B
Figure du Rhinoceros armé de toutes pieces.
00
0

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00000

CHAP . LII11.

NDR e' Baccy , dit qu'il y a desMedecins Portugais, qui ontde


meuré long temps és terres Neufues pour rechercher les choſes
rares & precieuſes, leſquelsaffermentqu'ils n'onc iamais peu del
couurirde la Licorne , ſinon que les gens du pays dient c'eſt
quc
ſeulement vnc corne de Rhinoceros , & qu'elle eſt tenuë au lieu
de Licorne , & comme preſeruatif contretousvenins . Toutesfois
Pline eſcric particulierement en ſon liure 8. chapitre 20. que le
Rhinoceros eſt vne eſpece d'animal cruel, different de la Licorne, & dit , que du
D temps de Pompée le grand il fut veuvn Rhinoceros ,quiauoit vne corne ſur le nez.
Orle Rhinoceros eſtane merueilleuſement ennemy de l’Elephant , il aiguiſe ſa cor
necontre vn rocher, & ſe met en bataille contre luy valeureuſement , comme va
taureau ,& demeure vainqueur& ruë l'Elephant : duquel combat Saluſte du Bar
tas en ſon 6. liure de la ſepmaine fait mencion par ces vers .

YYY
800
Le vingt-vnieſme Liure ,

Mais cet eſprit fabril , ny cet enorme corps A A


Ne le peut garantir des cauteleux efforis
D # Bartas on Du fin Rhinoceros , qui n'entre önc on bataille ,
los sepmaine . Conduit d'aneugle rage , ains pluftoſt qu'il allaille
L'aduerſaire Elephant , affile contre un roc
De ſon armé muſeau le dangereux eſtoc:
Puis venant au combat, ne rire à l'auenture
La roideur de ſes coups furja cuiraſſe dure :
Ains choiſit , prouident, ſous le ventre une peau ,
Qui ſeule craint le fil de l'aiguisé couſteau .

Figure du combat du Rhinoceros contre l'Elephant. C


id
lo

1
Des Venins, 801

A
CHAP . LV.

L ſe trouue és Indes pluſieurs ſortes d'animaux , ayáns vne ſeule corne , il y a plu.
comme vaches & taureaux , chevaux , aſnes , chéures, daims, Monoce- ſieursbeſtes
ros : autres ayans deux cornes,& plus.Ec pour la renommée des vertus és Indes , qui
n'ont qu'vne
que l'on attribuë à la Licorne , il elt vray ſemblable ,que chacune nation
Je plaiſt àluydonner le nom de Licorne, comme auons die cy -deflus. Seulecorne.
Theuct come 2.liu.23.chap.2.dir,qu'en la Floride ſe trouue de grands Taureaux , que
Butrol.
les Sauuages appellent Butrol, quiontles cornes longues ſeulement d'un pied ,ayang
ſur le dos vne tumeur, ou bofſe comme d'vn Chamcau , le poil long par deſſus le dos ,
de couleur fauue , la queue comme celle d'vn Lyon . Cét
animal eſt des plus farou
ches qu'on ſçache trouuer,à cauſe dequoy iamais ne ſe laiſſe appriuoiſer,s'il n'eſt del.
robé & rauy petit à ſa mere . Les Sauuages ſe ſerúent de leur peau contre le froid : &
ſonc ſes cornes fort eſtimées , pour la proprieté qu'elles ont contre le venin : & par- Cornes d'ice

B tanc les Barbares en gardenta fin d'obuier aux poiſons & vermines qu'ils rencontrent luy contre les
allans par pays . poiſons.

Figure du Taureau de la Floride.

7
O

D
YYy ij
802 Le Vinge-vnieſme Liure ,

A
CH 4P, Ly .

Nl'Arabie pres la mer Rouge, il ſe trouue vne autre beſte ,que les Savuża
Deſcription
ges appelenc Piraffoipi,grande comme vn Mulet, & fa teſte qualiſem
du Piraſſoipi .
blable ,tout ſon corps velu en forme d'vn Ours,vn peu plus coloré , tirane
ſur le fauucau ,ayant les pieds fendus comme vn Cerf.Cét animal a deux
Les cornes dy
cornes à la teſtefortlongues, ſansrameures, hautelleuées, qui appro.
Piraſſoipifero
uene conire chent des Licornes , deſquelles ſe feruent les Sauuages , lors qu'ils font blefiez ou
les venins. mords des beſtes portans venin , les mettans dedans l'eau par l'eſpace de ſix ou ſept
1
heures , puis apres font boire ladite eau au patient. Ecvoicy le porcraict ciré du cin
LE
quicſmeliurede la Coſmographie d'André Theuer . Les Sauuages l'affomment,
quand ils la peuuentatcraper , puis l’eſcorchent & la mangent .
l'a

9
Figure du Piraſoipi , eſpece de Licorne. B lo
ne

Z
a

D 0
?
Des Venins, 803
A
CHAP. LVII.

Ector Boëtius au livre qu'il aeſcrit de la deſcripcion d’Eſcoſſe,


dic, que l'animal,duquel cy-apres ſuit l'effigie,ſe nomme Elephant
demer, & eſt plus gros qu’vn Elephant,lequel habire en l'eau & en
la terre,ayantdeux dents ſemblables à celle d'vn Elephant, par lef- rel
Infinetnarsa
merkeil
quelles lorsqu'il veut prendre ſon ſommeil,ils’actache & pendaux lexx.
rochers , & dort li profondement que les mariniers l'apperceuans Induſtrie des
ont le loiſir de prendre cerre, & le lier auec de groſſes cordes en plu- mariniers,
ret fieursendroits.Puis meinent vn grand bruit, & luyieccenc des pierres pour le reſueil
ler : & lorsicaſche à leiecter comıne de coutume auec grandeimpetuoficé en la mer.
Mais le voyant pris, ſerend cellement paigble, que l'on en peu facilemenciouyr : ils
l'aſſommcnt & en cirent la graiſſe,puis l’eſcorchent pour en faire des courroyes : leſ
quelles parce qu'elles ſont forres, & ne pourriſſent,fone forceſtimées, & encores plus Dents dele:
B les dents quepar artifice ils dreſſent & creuſenc , &c les vendent pour corne de Licor.lephant
mer.
de
ne, comme on fait celles du Rohart & de l’Elephant.

Figure d'un Elephant de mer .

Y Yy iij
804
Le Vingt- vnieſme Liure,

A
CHAP. LVIII.

Deſcription L ſe void au goulfre d’Arabic vn poiſſon nommé Caſpilly , arméd'aiguil


du Caspilly . lons , dontilenavn au milieu du front comme vne corne , long de quatre
Rufe d'icelary. pieds, forcaigu. Iceluy voyant venir la Baleine , ſe cache ſous les ondes ,&

choiſiſt l'endroit plus aiſé á bleſſer , qui eſt le nombril , & la frappant, il la
meren celle ncceſſité, que le plus ſouuencellemeure de relle bleſſeure: & feſentano
touchée au vif, commence à faire vn grand bruit , ſe tourmentant, & batcant les on
des,eſcumantcomme vn verrat, & va d'vne ficres.grande fureur & roideur,ſe ſentant
pres des abbois de la mort , qu'elle culbute & renuerſe les nauires qu'elle rencontre,
& faic tel naufrage, qu'elle les enfeuclic au profond de la mer.Ledic poiſſon etmer
Il eſt pris de ucilleulement grand & forc, & lors que les Arabesle veulent prendre, ils font comme
tel artifice
auCrocodile,ſçauoir eſt auec vne longue & forte corde,au bout de laquelle ils atta
que le Croco .
dile . chent vne piece de chair deChameau ,ou autre beſte : & lors que ce poiſſon apperçoit
B
la proye , il ne faut à ſe ietter deſſus& l'englourir.Eceftant l'hameçon auallé,& felens
tant picqué, il y a plaiſir à luy voir faire des faults en l'air , & dedans l'eau : puis eltant
las , les Arabes le cirent à coups de fleches , & luy donnent cane de coups de levier,
qu'ils l'aſſomment: puis le mangent, & gardeot ſa plus grande corne , pour en vier
contre les venins, ainſi que les autres font des cornes de Licornes .

Figure du poiſon nomméCafpilly.


V
2
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(
(
Des Venins. 805

A 1
CHAP . LIX .

NDRE'Theue en la Coſmographic ,dit , que courant fortuneen Deſcription


l'Ocean és coſtes d'Afrique,viſicant la Guinée & l'Anopie , il a veu du poifion
appelé v letif.
le poiſſon cy.apres repreſenté, ayant vne corne ſur le front en ma
niere d'vne ſcie, longue de trois pieds & demy, & large de quatre
doigts,ayantſespointes des deux coſtez fort aiguës.Il le combarru .
rieuſement de ceſte corne. Ceux de la Guinée l'appellent en leur
iargon Vlecif. Defun & Monſieur le Coq , Audiceur en la Chambre
des Comptes à Paris, me donna vnc corne dudic poiſſon, qu'il gardoit en ſon cabinet Curioſité de
bien cherement :lcquelſçachant quei'cſtois curieux de rechercher les choſes rares l'Autheur.
& monſtrucuſes, delira qu'elle fuftmiſeen mon cabinet,auec mes autres raritez . I.a
dice corne eſt longue detroispieds & demy,peſant cinq liuresou enuiron ,ayant cin- la Defcriptiode
corne
quance & vne dent, aiguës & trenchantes ,longues du trauers , d'vn poulce & demy ,
dit vlerif.
B eſtans icelle dents vinge-cinqd'un colté, & vingt- ſix de l'autre . Ceite corne en ſon
s
commencement eſt large d'vn demy - pied , ou enuiron ,allanc couſiours en diminuant
juſqu'à ſon extremité , où elle eſt obcuſe, ou mouſſeuſe , eſtanc platre , & non ronde ,
comme les autres cornes . Le deſſus eſt de couleur comme d'une Sole , & le deſſous
aucunement blanc & forcporeux.lls'en trouue d'autres moindres & plus petites,le
lon l'âge du poiſſon.Pluſieurs eſtiment ledit animaleſtre vne Licorne marine , & s'en v letif eflimé
ſeruent contre les morſures & piqueures de beſtes venimeuſes,commel'on fait de la d'ancuns une
corne de Licornc . Le populaire l'eſtime eſtre vne langue de Serpent , qui eſt choſe Licorne troise
rine.
faulſe. Erreur of
laire.
Figure du poiſon nommévletif,espece de Licorne de mer.

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I
806 Le Vingt -vnieſme Liure, А
CHAP . XL.

ESNER vs dit , qu'en la mer Oceanenaiſt vn poiſſon , ayant la ceſte d'vn


Poiſſon re- Porc ſanglier, lequel eſt de merueilleuſe grandeur, couuerc d'eſcailles,mi.
ſes par grand ordre de Nature , ayant les dents canines fort longues , tren
la teſte au
ſemblant par cha nte s & aiguës, ſemblables à celles d'vn grand Porc ſanglier, leſquelles on eſtime IND

CUT
Porefanglier .eltre bonnescontre les venins , comme la Licorne. per
ded
Figure dupoiſſon ayant la tefte d'un porſac nglier. 20
1:11
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240
B
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8000

Lou

Ainſi void- on comme chacune nation penſe auoir la Licorne , luy donnant plu
ſieurs vercus , & proprietcz rares & excellentes : mais ie croy qu'il y a plus demen $10.
pea ſonge
ù vieponil
D'oeur
Err que de verité . Orquia eſté cauſe de la reputacion de la Licorne , ç’a eſté ceſte 0
rep
lai uta
re. tio n de pr eté occulte , que l'on luy a attribué de preſerver de peſte, & de toutes ſortes de
op ri 11

venins.Tellement que quelques - uns voyans que l'on en faiſoit ſi grand cas , pouſſez
Au aricnee,. d'auarice , ont mis enauant certains fragmensde quelquescornes, diſans, & affeu
la Licor
que c'eſtoit de la vraye Licorne : & toutesfois le plus ſouuent ce n'eſt autre
cauſe del'im cho
e
que quelques pieces d’yuoire, corne , ou dent de quelque beſte marine ,ou
ransſeque
podeſtur s
Licorne. pierrefondue. Parlez aviourd'huy à tous les Apothicaires de la France,iln'ya celuy
de
marchands
qui ne vous die & aſſeure auoir de la Licorne , & de la vraye , & quelquesfois eoaſſez
Difficulté bonne quantité.Orcomment ſe pourroic-ilfaire, veu que la pluſpart deseſcriuains
grande de diſent,que le naturel de la Licorne eſt de demeurer auxdeſerts ,& és lieuxinaccelli CE
Comurer dela bles , & s’elloigner ſi fort des lieux frequentez, que c'eſt quafi vne choſe miraculeuſo ch

r es fo is e
quipeut auoir eſté apportée par les inonda
d'e n tr ou ue qu el qu
tions des eaux', iuſqu'au riuages de la meirpe, ut
x vn e co rn , qu & ce quand l'animal eſt mort ? qui cft
Licorne.
Doute , toutesfois une choſe encore douceuſe: car la peſanteur de la corne la feroit pluſtoſt
aller au fond. Mais c'eſt tout vn,poſonsqu'il s'en croque quelquesfois vne,comment D
ſeroit - il poſſible que ces trompeurs en fürrent tous ſi bien fournis? A cela cognoilt
Faut adiou- on qu'ily a bien de l'impoſture. Et certes n'eſtoit l'authorité de l'Eſcriture Sain &te ,à
fier foy à laquelle'nous ſommes tenus d'adiouſter foy ,ie ne croirois pas qu'il furt des Licornes. ‫بنایا‬

ony ,Da tDe liur e-moy,Seigneur, de la


e Eſcriture . gue Ly’o
andi
Maisulequdu deldiur
& ui n me
Pſal
aue mo téſet
iliver
hum22. uidides
.qnes
des22cor , Lic ornes : lors ie ſuis con
. traint de le croire . Pareillement Elaie chap . 34. parlant de l'ire de Dieu contre les L
ennemis, & perſecuteurs de ſon peuple,dit,Et les Licornes deſcendronc aueceux , & Ca
les Taureaux auec les puiſſans . L'allegueroisà ce propos vneinfinité de paſſages de
l'Eſcriture Saincte ,comme le chapitre vingt-huidielme du Deuteronome,letrente
neufieſme chapitre verſ. 13. & 13. de lob , les Pfalmes de Dauid , 28. 77.80. &
e nc croire qu'il eſt
pluſieurs autres , fiie ne craignoisd'attédier le Lecteur . Il favdo
des Licornes , mais elles n'ont pasles vertus qu'on leur ascribuë .

1
Des Venins. 807
А CH AP. LXI.

Ela doncſuppoſé, fçauoir eſt,qu'ilſe trouue quantité de cornes de Licor. Queftio fois
nes,& que chacun en ayt , à lçauoir , ſi elles ont telles verrus & efficaces chantles vero
aik
contre les veoins& poiſons qu'on leurattribuë:le dy quenon . Ce que ie sus
de lapretēdues
Licorne
VH
prouueray par experiēce,authorité, & raiſon .Et pour cómencer à l'expe Refponfe..
rience,ie puisaſſeurer,apres l'auoir elprouué pluſieurs fois n'auoir iamais cogneu au
cun effect en la corneprerenduë de Licorne .Pluſieurstiennent,quelion lataccrem
per en l'eau , & quede ceſte eau on face vn cercle ſur vne table , puis que l'on mette
dedansledit cercle vo Scorpion ,ou Araignée ,ou vnCrapaut , que ces beftes meurent ,
& qu'elles ne paſſent aucunement par deſſus le cercle ,voire quele Crapaui ſecreue .
le l’ay experimenté ,& trouuay cela eſtre faux & menſonger :car leſdits animaux paſ- Experience
ſoient & repalloient hors du circuit du cercle , & nemouroiencpoinc.Meſmement ne trousee fauſ,
mccontentant pas d'auoir mis vn Crapaut dedans le circuit de l'eau , où la Licorne fe.
auoit trempé, par deſſus lequel il paſſoic & repaſſoic: iele mis cremper en vo vaiſſeau
B plein d'eau ,où la corne de Licorne auoit trempé, & le laiſſay en ladice cau par l'eſpace
de troisiours ,au bout deſquels le Crapauteſtoit auſſi gaillard que lors que ie l'ymis.
Quelqu'vn me dira , que poſſible la corne n'eſtoit de vraye Licorne. A quoy ie reſ- obiection.
ponsquecelle de S. Denys en France, celle du Roy, que l'on tient en grande eſtime, Responſe. j

& celles des Marchands de Paris , qu'ils vendent à grand prix, ne font doncques pas
vrayes cornes de Licornes: carç'a eſté de celles-là que i'ay fait elpreuve. Et ſi onne
me veut croire,quel'on vienne à l'eſſay commemoy, & on cognoiſtra la verité contre
le menſonge. Autres ciennent que la vraye Licorneeſtantiniſe en l'eau ſe prend à Autre expea
bouillonner, faiſant eflcuer petites bulles d'eau comme perles.le dy que cela ſe fait rience.
auſli bien auec cornes debæuf,dechéures,demouro, ou aftres animaux ,auec dents
d'Elephant,reſtesde pors,tuilles , bois, bol armene, & terre ſigillée : & pour le dire en
ynmot , auec tous autres corps poreux. Car l'air qui eſt enclos en iceux , ſort par les
poroſitez ,pour donner place à l'eau, qui cauſe le bouillonnement & les perites bubes
qu'on void elleuer en l'eau .Autres diſent, que ſi on en faiſoit aualer à vn pigean ou autres
o poulet,quieuſt pris de l'arſenic, ſublimé, ou autre venin, qu'il n'en ſentiroit aucun Autre,
mal.Cela eſt pareillement faux, comme l'experienceen fera foy.Autres diſent , que
l'eau , en laquelle aura trempé ladice corne, elteint le feu volage, appelé Herpesmilia
ris. le dy que ce n'eſt pas la vertu delacorne,mais la ſeule vertu de l'eau, qui eſt froi
de & humide, contraire au mal , quieft chaud & ſec.Ce qui ſe crouuerà par effea, en
y appliquant de la ſeule eau froide, ſans autre choſe. Et pour prouuer mon dire, il y a
O young vne hoonelte Dame, marchande de cornes de Licornesen ceſte ville, demeurantfur sille Hiſtoire ges
gou bien
le pont au Change, quien abonne quantité de groſſes & de menuës,deieunes & de à propos .
vieilles.Elle en tienc touſiours vn affez gros morceau, attaché à vne chaine d'argent ,
qui trempe ordinairement en yne aiguiere pleine d'eau , de laquelle elle donne aſſez
volontiers à cous ceux qui luyen demandent. Orn’agueres vne pauure femme luy
demanda de ſon eau de Licorne : aduint qu'elle l'auoit toute diſtribuée , & ne vou
nie lant renuoyer ceſte pauvre femme, laquelle à iointes mains la prioit de luy en don
ner pour efteindre le feu volage qu'auoit vn lien pecit enfant, qui occupoit tout ſon
viſage : en lieu del'eau de Licorne , elleluy donna del'eau deriviere en laquelle nul- Eau deriuie:
D lement n'auoit trempé la corne de Licorne. Ec neantmoins ladicc eau de riviere ne redőnée pour
laiffa pas de guarir lemalde l'enfant. Quoy voyant , ceſte pauvre femme , dix ou neeau. de Licor
douze ioursapresvint remercier Madamela marchande de lon eau de Licorne , luy
dilant que ſon enfanceſtoit du cour guary. Ainſi voila comme l'eau de riuiere fut
auſſibonneque l'eau de la Licorne: toutesfois elle vend ladite corne pretenduë
de Licorne , beaucouppluscher que l’or, comme on peut voir parla ſuppoestion.
Car à vendre le grain d'or fin onze denierspite , la liure ne vaut que leptvinges huic laDeLiccombien
orne re
cſçus ſol : & la liure decornedeLicorne contenant leize onces , contient peufmil
deux cens ſeizegrains : & la liure à dix ſols le grain ,la ſomme ſe monce à quatre vingts qvěd plus cher
ue l'or.
douze mil centfoixante ſols , qui ſont quatre millix ceushuia liures , & en eſcus,
milcinq cens trente fixeſcusſol.Er me ſemble, qu'à ce prix la bonne femme ne vend Hiſtoired'un
pas moins fa Licorne , que ficva certain Marchand Tudeſque, lequel en vendit Tudelquequi
vne piece au Pape lules croiſieſme, douze mil eſcus, comme recite André Baccy, Licornecaut
Medecin de Florence, coſonliure de la nature de la Licornc. Mais laiſſons ces bons paperales;
808
Le Vingt -vnieſme Liure,

Autre expe. Marchands , reuenons à l'experience.On dic dauantage que la corne de Licorne fuë A
rience.
en preſence du venin . Mais cela eſt impoflible ,parce que c'eſt un cffe& procedane de
la vertu expultrice.Orladite corne eſt priuée de telle vertu.Et ſi on l'a veuë fuer,cela
a eſté par accident, veu que toutes choſes polies , comme le verre , les miroirs,lemar
bre , pour quelque peu d'humidité qu'ils reçoiuent , meſmes de l'air exceſſivement
froid & humide, ou chaud & humide , apparoiſſent ſuer :mais ce n'eſt vraye fueur.
Car la ſueur eſt vn effe & d'vne choſe viuante. Or la corne de Licorne n'eſt point vne
choſe viuante, mais pour eſtre polie & freſche, elle reçoit yn ternillement de l'air
Autreexpe- froid & humide, qui la fait ſuer. Autres diſent, que la mettant pres le feu,ellerend
rience .
vne odeur de muſc: aufli que l'eau où elle aura trempé deuiendra laiđeuſe & blan
chcaſtre . Telles choſes ne le voyent point , comme l’experience le monſtre.

C H 4 P. LX1 .

Presse faire Vant à l'authorité,il ſe trouuera la pluſpart des doctes ,gens de bien,& expe

parauthorité. rimentez Medecins , qui aſſeureront celte corne n'auoir aucune des verius

Hippocrates. que l'on luy ateribuë . S'il faut comméçer aux Anciens , il eſt certain qu'Hip .B
Galien , pocrates , ny Galien , qui toutesfois ſe fontſeruis de la corne de Cerf, & del'Yuoire ,
Ariſtote. n'ont iamais parlé de cette corne de Licorne , ny meſme Ariſtote , lequel neantmoins
au chap.2.duliu.3.des parties des Animaux , parlant de ceux quin'ont qu'vnecorne,
Oryxa fait bien mention de l'alne Indien , & d'un autre nommé Oryx , ſans faire aucunc
mencion de la Licorne : combien qu'il parle en ce lieu des choſes de moindre conſc
Chriſtofle quence.Or s'ilfaut venir aux Modernes,Chriſtofle l’André , Docteur en Medecine,
P André en en ſon opuſcule de l'Oecoïacrie , eſcric ce qui s'enſuit. Aucuns Medecins font yn
fonliure de grand cas de la corne'd'vne belte,nommée Monoceros,quenous appelons vulgaire
l'Oecoiatrie ,
mencla Licorne , & difen & qu'elle guarantit de venin ,tant priſe par dedans,qu'applia F
quée par dehors . Ils l'ordonnent contre le poiſon ,contre la peſte, voire delia creéeau
corps de l'homme , & pour le dire en vn mot , ils en font vn alexicere contre tous ve TE
1
d
nins . Toutesfois eſtant curieux de ſi grandes proprietez qu'ils attribuée à ladite cor
ne , je l'ay bien voulu experimenter en plus de dix ,au temps de peſtilence :mais ien’en
trouuay aucun effe & t louable , & me repoſerois auſſi toit ſurla corne de Cerfou de 0 9
Chéure, queſur celle de la Licorne.Carelles ont vne vertu d'abſterger & mondifier: CI

partant elles ſone bonnes à reſerrer genciues fleſtries & molles . Dauantage , leſdites
cornes eſtans bruſlées & données en breuuage , apportent merucilleux confort à P
Corne de ceux qui ſont tourmentez de Alux dyſenteriques. Les Anciens ont laiſſé par eſcrit,
Cerf. quela cornede Cerf redigée en cendre , eſt vne plus que credible medecine à ceux M

qui crachent leſang , & à ceux qui ont coliques ,iliaques paſſions, nommées Miſerere
mei, & comme choſe de grande vertu , la mellant aux collyres pour faire ſeicher les
larmes des yeux . Voila ce que ledit l'André a eſcrit de la corne de Licorne .
Rondeler. Rondeler dit , que toutes cornes en general n'ont ny faueur, ny odeur , ſi onneles
bruſte. Parquoynepeuuentauoir aucunc efficace en medecine , ſi ce n'elt pour de
ſeicher. Ecne ſuis point ignorant , dic - il , que ceux qui viennent telles cornes pour
leur profit, ne donnent à entendre au peuple, qu'elles ont grandes & ineſtimables
vertus , par antipathie de chaſſer les ſerpens & les vers, & de regiſter aux venins . Mais

14 corne de ie croy , dit - il , touchant cela , que la corne de Licorne n'a point plus grande efficace, D
Licornena nyforce plus aſſeurée, que la corne de Cerf, ou que l'Yuoire : qui eſt cauſe , que fort
plus de veriut volontiers en meſmes maladies,i'ordonnela dent d'Elephant aux pauures , & auxri.
e
gue la corne ches celle de Licorne , parce qu'ils la deſirent, s'en propoſans heureux ſuccez.Voila
deCerf,ou de l'aduis de Rondeler , lequel indifferemment en pratiquant pourmeſınes effects,en
l'Tuoire . 10
lieu de la Licorne ordonnoit non ſeulement la corne de Cerf, ou dent d'Elephant,
Dent d'ele
mais auſſi d'autres os . qu
phant pour i'auois de
le me ſuis enquis de monſieur Duret , pour la grande afſeurance que
les pauures.
Responſe de ſon haut & tantcelebreſçauoir,quelle opinion il auoit de la corne de Licorne : 11 ch
M.. Duret mereſpondit ,qu'il ne penſoiticelle auoir aucune vercu contre lesvenins : ce qu'ilme
souchant la confirma par bonne , ample , & valable raiſon , & meſme me dit, qu'il ne doucoie dele &
Licorne.
publier en ſon auditoire , qui eſt vn theatre d'vne infinité de gensdođes, quis'y alı PO
femblent ordinairement pour l'ouyr. 01
lle
leveux bien encore aduertir le Lecteur, quelle opinion auoit de ceſte corne de Li
cornc feu monſieur Chapelain , premier Medecin du RoyCharles IX . lequel en ſon €
Des Venins. 809
A viuant eſtoit grandement eſtiméentre les gens doctes. Vniour Iný parlant du grand opinion de
abus qui ſe commettoit en vſant de la corne de Licorne , le priay.(veu l'authorité Monſieur
qu'il auoit à l'endroit dela perſonneduRoy noſtre Maiſtre, pour ſon grand ſçauoir toucha
Chapelain
nt la
& experience ) d'envouloir ofter l'vſage, & principalemeut d'abolir cette couſtume Licorne.
qu’on auoit de laiſſer trempervn morceau de Licorne dedans la Coupe où le Roy Couftumierea
beuuoit, craignant la poiſon. Il me fit reſponſe, que quant à luy , veritablement il mene on laiſ
ne cognoiſſoit aucune vertu en la corne de Licorne : mais qu'il voyoit l'opinion ſoit tremper.
qu’onauoit d'icelle eſtre tant inuecerée & enracinée au cerueau des Princes, & du pn morceau
peuple, qu’ores qu'il l'euftvolonciers oſtée,il croyoitbien que parraiſon n'en pour dans la com
roit eſtre maiſtre. Ioint, diſoit-il, que ſi ceſte ſuperſticion ne profite, pourle moins pe du Roy.
elle ne nuit point,ſinon à la bourſe de ceux qui l'achecent beaucoup plus qu'au poids
de l'or, comme a eſtémonſtrécy -deuant. Lorsie luy repliquay
il en vouluſt doncques eſcrire , à fin d'effacer la fauſſe on , que pour le moins
opini de la vertu que lon
croyoit eſtreen icelle. A quoy il reſpondit, que touthomme quientreprend d'eſcri . Reſpoſe d'on
‫یا‬ B re de choſed'importance, & notamment de refuter quelque opinion reccuë de long homme bien
4duisé.
temps, reſſemble au Hibou , ou Chac-huant: lequel ſe monſtrant en quelque lieu
eminent, ſe met en butte à tous les autres oyſeaux qui le viennent becqueter,& luy
‫وانوار او‬
courentſus à toute reſte : mais quand ledit Hiboueſt mort,ilsne ſ'en ſoucient aucu
Belle fimili
nement. Ainſi rapportant ceſte fimilitudeà luy, il me dit que de ſon viuant il ne ſe onde.
mettroit iamaisen buite,pour ſe faire becqueter des enuieux & meſdiſans, qui entre
LCROCE tenoient le monde en opinions ſi fauſſes & menſongeres,mais ileſperoit qu'apres la
mort on trouueroit ce qu'il en auroit laiſſé par eſcric.Conſiderant doncccite reſpon
ſe qu'il me fit lors,iointauſiqu'on n'a rien apperceu de les eſcrits depuis ſamort, qui
furily a enuiron onze ans, ou plus, ic m'expoſe maintenant à la bütce qu'il refuſa
pour lors. Que l'il y a quelqu'un qui puiſſe m'aſſaillir de quelquebon traict de raiſon Hardieſſe de
ou d'experience,tant ſ'en faut que iem'en tienne offenſé, qu'au contraire ie luy ſçau -Pauheur,
ray fort bongre,de m’auoir monſtré ce qu’oncques ie n’ay peu apprendre des plus de bonne ro
doctes & ſignalez perſonnages ,qui furent, & ſont encore en eſtime, ponr leurdo. lonié.
årine ſinguliere ,nymefme d'aucun effect de noſtre Licorne . Vous me direz; Puis
0 que lesMedecinsſçauentbien, & publient eux-meſmes,que ce n'eſt qu'vn abus de
Pourquoy les
ceſte poudre de Licorne , pourquoy en ordonnent -ils? C'eſt que le monde včitt Medecins
eſtre trom , & ſont contr leſdits Medecins bien fouuent d'en ordonner, ou
pour mieuxpédire, permettreaincs ordonnent de
aux patiensd'en vſer, parce qu'ils en veulent. Que l'il 14 Licorne
aduenoit que les patiens , quien demandent,mouruſſent ſans en auoir pris , les pa
rens donneroient tous la chaſſeauſdics Medecins , & les deſcrieroient comme vieille
Monnoye.

CHAP. LXIII .
16.

Enons maintenant à la raiſon. Tout ce quireſiſte aux venins, Preuuefaite


eſt cardiaque , & propre à corroborer le cæur. Rien n'eſt propre par raiſon .
à corroborer le cæur, ſinon le bon air & le bon ſang: pour autant
que ces deux choſes ſeulement ſont familieres au cour, comme
eſtant l'officine du ſang arteriel,& des eſprits vitaux. Oreſt- il que La Licorne
D la corne de Licorne n'a aucun air en foy, ny aucune odeur, ou bien n'a point
peu,eſtanttoute terreſtre, & toute ſeiche. Dauantage,elle ne peut d'odeurny
su
eitre tournée en ſang, parce qu'elle n'a ny chair,ny ſuc en ſoy: qui eſt cauſe qu'elle de c.
n'eſt chylifiée,nypar conſequent ſanguifiée .Ill'enfuit doncques qu'elle n'a aucune
vertu pour forcifier & defendre le cæur contre les venins . Voirc,mais, dira quel- obiection
qu’vn, en tant d'opiates , electuaires, & epithemes que lon fait pour le cæur,qu’y
a-il detel qui contienne en ſoyvn bon air? Sia,ſçauoir eſt, les conſerues de boura- Responſe.
che, bugloſſe, violiers de Mars, de roſes, de fleurs de roſmarin , la confection d'al
kermés,le mithridat, le theriaque, l'ambre, le muſc, la ciuette, le ſafran,Le camphre,
& ſemblables, leſquels meſmelon delaye en bon vin & fort vinaigre , en eau de vie,
pour appliquer ſur le cæus, ou pour donner en breuuage . Toutes leſquelles choſes
önten ſoy,& rendent de ſoy vne odeur, c'eſt à dire, vn air ou exhalation fort ſoüef
ue, benigne, & familiere à la nacure & ſubſtance du cæur , en tant qu'ellespeuuene
engendrer, multiplier, eſclaircir , & ſubtilier les eſprics vitaux , par ſimilitude de leur
810 Le vingt-vnieſme Liure,
Deinande. ſubſtance aërée , ſpirituelle& odorante. Ouy , mais au bol d'Armenie, en la terre A
Reſponſe. ſigillée,en lacornedeCerf,en la raclure d'yuoire & decorail,n'y a-il rié de ſpiritueux
Queſtion . & aëré ? Non certes. Pourquoy donc ſonc-ils mis entre les remedes cardiaques ?
Reſponſe. Pource que de leur faculté & vercu.aſtringente fondée en la terreſtrité de leur ſub
ſtance,ilsferment les conduits des veines & arteres , par leſquelles le venin & air pe
Ttilent pourroit eſtre porté au cæur. Car ainſi ſont -ils ordonnez profitablement au
A quoyfer. Aux de ſang, & vuidanges immoderées. Ils ſont donc appellez Cardiaques , non pas
wentlebol quede foy & par ſoy ils fortifientla ſubſtance du cæur par aucune familiarité oufi
d' Armenie militude, mais par accident,parce qu'ils bouchent le paſſage à l'ennemy, l'arreltanc
og terre fi
gillée. en chemin, à ce qu'ilne ſe ietce dedans la citadelle de la vie.
CHA P. LXIIII.

Des perles VANT aux Perles & autres pierres precieuſes,ie ſuis de l'aduis de
u pierres Monſieur loubert, Medecin ordinaire du Roy, lequelau chap.
precieuſes,
ſuiuant l'opi 18. d'un craidé qu'il a eſcrit de la Peſte, dit ainſi. le ne ſçay que B
nion de low ie doy dire couchant les pierres precieuſes , que la plus grand'
bere. part des hommes eſtimentcant,veu que cela ſemble ſuperſticieux
& menſonger,d'aſſeurer qu'il y a ynevercu incroyable & ſecrette
enelles,ſoitqu'on les porte entieres ſur ſoy,ou que lon vſc de la
L'or potable,poudre d'icelles. Oricy neveux-ie encore oublierà mectre en meſmerangl’or pota
o l'or mis ble, & les chaiſnes d'or, & doubles ducats,qu'aucuns ordonnent mettre aux reſtau
dedans les rans pour les pauures malades : attendu qu'il y a auſſi peu d'aſſeurance qu'en la Li
reſtaurans,
abus. corne,voire moins.Car ce qui n'eſt pointnourry,nepeutbailler nourriture à autruy.
Orileſt ainſi que l'or n'eſt point nourry : Parquoy il ſembleque ce ſoit vnc piperic
de luy attribuer la vertu nutritiue, ſoit qu'il ſoic reduicenforme porable,qu'ilsappel
lent,ouqu'il ſoit boüilly auec desreſtaurans.Oron me dira qu'apres auoir fait bouil
lir des eſcus, ou autres picces d'or,aux reſtaurans, ils ne ſerontdemeſmepoidsqu'ils C
L'orne ſe di- eſtoient auparauant :lele confeſſe,mais ce ne ſeraquelor ſoit en rien diminué par
minuë par l'ebullition; ains que l'excrement qu'auront accueilly les pieces d'or, pcurauoireſté g
ebullition. long temps maniées ou portées du peuple,voiredesverolez, ladres,& vieilles haran
geres,pourra cître demeuré dans les reſtaurans. D'abondant , ilya encore vne gran
de piperie , que les bons Maiſtres quinteſſencieux font pour faire leur or potable,
qu'ils diſent metere aux reſtaurans, c'eſt que d'vne chaiſne de trois ou quatre cens tu!

eſcus paſſéepar l'eau forte, en defroberont quinze ou vingt eſcus , qui feradiminu.
tion d'autant de poids,& font accroire aux niais,que ledit or eltdiminuépar l'ebul n

lition. Qui pourra ſe garder de ces bailleurs de baliuernes , affronteurs & larrons,
ce ſera bien fait.
to:
CH A P. LXV.

Du pied Ecy me fait ſouuenir du pied d'Hellend,duquel pluſieursfont li grand


d'Hellend. cas,fpecialement luy attribuans la vertu de guarir de l’Epilepſie. Et
m'eſtonne d'où ils prennent ceſte afſeurance,veu que tous ceux quien
ont eſcrit, ne font quedire,Ondic,On dic : ie m’en rapporte à Gelne D
Pourquoy cer rus,& à ApolloniusMenabcnus.Ec quand ce ne ſeroitque la miſere de co
animal en l'animal,quitombe ſi ſouuenten Epilepſie ( dont les Allemans l'appellent Hellend, GU
appellé Hel- qui ſignifie, Miſere :) & neantmoins ne ſ'en peurgarantir, encorequ'ilait touſiours
lend.
ſon ongle quant-&- quant ſoy :il me ſemble quecela eſtſuffiſant pour reuoquer en
Doute
ve de la doute lesvertus qu'on luy attribuë.Voila cequ'ilme ſembledelacornede Licorne:
rtu du lu
pied d'Hel & fi quelqu'vn en peut deſcouurir dauantage , ie le pric en faire part au public, &
lend . prendre mon eſcrit en bonne intention . 16
IG

REPLI. 9
A
811

SU

1. 2".
Se

Escorte
21.0.

REPLIQVE D'AMBROISE
M.
PARE ', PREMIER CHIRVRGIEN DV ROY,
A LA RESPONSE TAICTE CONTRE
ſon diſcours de la Licorne.
'Auois ſouhaitcé diſcourant de la Licorne , que fil y auoit qucl- souhaie de
A qu'vn quien euſtautre'opinion que moy, illuyplenſt mettre les l'Autheur.
raiſons en avant,penſant queparledebat a des raisonscontraires Belle compte
comme par le heure de deux pierres, les viucs eltincelles de la raiſon.
verité viendroient à paroiſtre,quipourroientexciter vne lumie
utan refi grande de tout ce fait en nos eſprits , qu'on n'auroit plus oc
. aſion d'en douter. Cemien ſouhait m'eſt en partie aduenu.Car
illeſt trouué quelqu'vn ,quicontrollantmes eſcrits,m'a voulu deſdirc en ce poinet :
duquel toutesfois les raiſonsne me ſemblentlifortes, que pour cela ic doiuequitter
mon party pour prendre le ſien, ainſi que i’eſpere montrer, repliquant ſur vnecha
cuned'icelles:laiſſant à partſesanimolitez,leſquellesi’eſtimc luy eſtre eſchappées,
plus pour zele qu'il porte à ce qu'il penſe eſtre laverité,que pour opinion qu'il puillé
auoir de moy , autre que d'homme de bien, & ſtudieux du profit public.
!
Sa premiere raiſon eft, Qu'ilfautbien quela Licorne aye de grandesvertus, veu que tous Premiererai
Blesſages demeurent entr'eux d'accord,des admirablesproprietez d'acolle. Et que partant il faut fondu
dant audrelfö
if
.
pl acquiefier à leur authorité : attendu qu'il vaut mieux faillir avec lesfazes,que bien opinercon cours de la
tre leur opinion. Ie nie la premiere partie de ceſte raiſon , attendu que comme i'ay Licores
‫لی‬ monſtré en mon precedent diſcours, Mellicurs Rondelet, Chappelain , & le docte Opinion de
Duret , ne font point plus grand cas de la corne de Licorne, qued'autre corne qucl- Kondeler,
conque : & toutesfois ces trois- là ſontſages & clair-voyansen medecine. Chapelaing
Durei
Quant à la ſeconde partie,ie dy tout au contraire, que i’aimerois mieux faire bien chan ich
t la li
toutſeul,que de faillir non ſeulementauec les lages, mais meſme auec tout le reſte corne .

du monde. Carl'excellence de la verité eſt ſi grande , qu'elle ſurpafſc toute la fa- Excellence
pience humaine, que bien ſouuent n'eſt armée que de brauade , n'eſt enflée que de de la verité.
vent, n'eſt parée que d'apparence & vanité : parquoy la ſeule verité doit eſtre cher
chée, fuiuie & cherie.
с
La ſeconde raiſon eſt, Que le long tensps qu'il ya que la Licorne eſt en vage, monſtre Ceſte raiſon
‫امام خمینی‬ pour pro
bien icelle eſtre bonne, le replique que le long tempsn'eſt pas ſuffiſant pour uver la n’eſt approis
prouver
corne de Licorne auoir des vertus qu'on luy attribuë. Car telle vogue n'eſt fondée mée par
qu'en opinion , & la verité ( commeildit luy-meſme) depend de la choſc, & non des l'Autheur.
COLE opinions. Parquoy rien ne ſerc de m’alleguer les Papes, Empereurs, Rois,& Poten
cars, qui ont mis la cornede Licorne en leurs threſors: car ils ne ſont d'eux -melmes
Iuges competansde la proprietédes choſes naturelles: & ceux par lesyeux deſquels
ils ont veu ,ont eſté ou louches ou conniuens , de leur auoir monftré ou laiſé voir le
noir pour le blanc. Parquoy à bon droict André Marin , Medecin excellent de Flo
André Mao
rence,au diſcours qu'il a fait de la fauſſe opinion de la Licorne,l'elmerueille coment rin tre- docte
iuſques icy il ne feit trouué encoreMedecin , ou autre tant amateur de ſon Prince, Medecin.
AUTO
qui l'ait retiié de cet erreur , la banniſſant de les cabinets, comme un abus & trom
perie manifeſte : concluant que ſiprecieux ioyau n'eſtoitpropre qu'aux baſteleurs &
impoſteurs , & malleant aux Medecins , quiontdes remcdes plus aſſeurez , & ap
prouuez pourcombatre les maladiesmalignes,veneneuſes,& peftilentes.
Z Z z
812 Le vingt-vnieſme Liure ,
Quantà ce qu'il dit, Qu'ilya desLicornes , & que laſaincte Eſcriturele teſmoigne.Ic A A
reſpons que quiconquepenſealleguer cela contremoy, monſtre qu'il a grande en
vie de quereller.Car quieſt-ce qui croit cela mieux que moy ?Quieſt-ce quilemon
ſtre mieux: l'en cite cinq paſſages de la lainete Eſcriture dans mon diſcours dela Li
corne. le croy donc qu'il y a touſiours eu, & qu'il y a encores des Licores, non feu
lement en la terre , mais auſien la mer : mais que leurs cornes ayent les vertusqu'on
leur attribue contre lesvenins& peſtilences, c'eſt le poinct qae i'attendois : lequel
toutesfois n'a elté couché que parvne ſimple aſſertion , ſans aucune demonſtration,
raiſon ou authorité ancienne. Car de dire qu'elle profite contre la peſte, pource
qu'elle refroidic, cela eſt fuir & quitter le combat dela propriecé occulte, de laquel
le coutesfois eſt noſtre principale queſtion .Or quand ainſi ſeroit qu'elle agiroit par
qualité manifeſte, il la faudroic ordonner en quantité raiſonnable, & principale
ment à la vehemence de l'ardeurfurieuſe& peſtilence, c'eſt à dire paronces ou quar
terons. Car trois ou quatre grains qu'on ordonne communément, n'ont non plus de
Bonne com. vertu ( ce que dic Monſieur Durer,debonne grace parlant de la Licorne)que quiiet B
paraiſon. teroit quatre grains demildans la gueule d'vn aſne bien affamé. C'eſt pourquoy ic
voudrois bien empeſcher lesApothicaires de la vedre ſicher, afin que les Medecins TE

euſſent cõmodité de l'ordóneren plusgrande doſe, & que les malades euſſent moyé ľ
de la porter auec plus de profit en leurs corps, & moins de dommage de leur bourſe.
Cela, n'eſt-ce merompre l'eſpric de ce que ie n'ayque faire, comme l'on me repro
che? CarDieu a recomandé à vn chacun le ſalut & profit de ſon prochain : & certes
les Apothicairesmeſmes,i’entens lesplus anciens & experimentez , interrogez par ad

moy,m'ontconfeſſe auoir honte delavendre li chere , veu qu'ils n'onciamaisapper fo


ceu plus grand effecten elle , qu'es autres cornes communesdes vulgaires animaux.
Toutesfoisqu'ils ſont contraints la vendre ainſi chere , parce qu'ils l'achetencche
rement. Or l'achetenc-ils cheremenc , à raiſon du bruit qu'on luy a donné à tort 8
fans cauſe.

Propofition
Venons maintenant aux raiſons par leſquelles il penſe deſtruire ma principale de
de Ish mõſtration,laquelle par moquerie il appellemon Achilles. Mon Achilles dóceſtoit
thepor. tel : rien n'eſtbon à corroborerle cæur,ſinon le bonair& lebonfang: Lacorre de Licornen'aair 6
ny odeuren ſoy,eſtanttoute terreſtre toute feiche.Dauantageelle ne peuteftre tournée enſang,
d'autantqu'elle n'a en foy,nychair nyſuc.Parquoy ellen'a vertu àcorroborerle cæur. La pre pat
miere propoſition , dit il, eſt fauſſe & ridicule : la raiſon eſt , Carrelsremedes alteratifs
fortifient lecæur parqualitémanifefte & elementaire ,ou occalie & formelle, & toutesfois n'one
ny bon air , my habilité à eftre tournezenfang. Iereplique & disau contraire,prenantle
Replique ſur meſme exemple qu'il apris,pour le battre de les armes meſmes, que la faculté des la
Ca
de la premie herbes & fimples qui entrent ésapozemes , n'eſt pointcommuniquée à l'eau par
tor

repropoſitio. quelle eſt faite la decoction , finon par diſtraction du ſuc, ou humeur & vapeur deſ fo

dits ſimples: autrement ſ'il n'y auoit que la qualité muée quiſe communique à l'eau !

ſans ſubſtance, c'eſt à dire ſans humeur ou vapeur , comment cognoiſtrions nous
la decoction de pourpié à fa noirceur , la decoction de pſyllium à ſa viſcoſité, la
decoction de cichorée à ſa faueur & amertume , l'infuſion de rheubarbe à ſon o dei
deur ? la ſaueur y eſt;, & fy remarque manifeſtement : l'odeur donc auſſiy eſt. Car Of

couc ce qua faueur & odeur , la faueury eſt, le ſuc donc ou humeur y eſt: l'odeur y
hay
Qu'est-ce
qu 'odeur. eſt , la vapeur donc y eſt. Car qu'eſt-ce autre choſe odeur , qu'vne vapeur , ou D
pluſtoft fumée ?
Quant au corail, corne de cerf, & ſemblables, ie confeſſe qu'ils n'ont non plus
d'air & de ſuc, que la corne de Licorne , mais auſſi ie ne les tiens pas pour vrais car
diaques : d'autant qu'ils ne fortifient point le cæur en combattant contre les venins,
ainsſeulementou en reſſerrant lesconduics , qui vont au cæur par leur vertu aſtrin
gente : ou en beuuant & tariſſantla ſeroſitéveneneuſe, qui affädit le cæur & l'efto
mach par leur ſeicheterreſtricé ,faiſant l'vn & l'autre , non par fimple infuſion en
Replique lur quelque cau ,, mais par aſſumption de leur propre corps en pouldre.
la refurarion Mais c'eſt aſſez repliqué ſur la refutation pretendue de la premiere propoſition
de la seconde de mon Achilles : venonsà la ſeconde. le difois que la corne de Licorne n'a air
propoſition. ny odcur en ſoy. Cela , dit-il, eft contraire wax principes de Phyſique. Car chaſque
corpselementaire eſt mixie , c'eſt à dire , meſlé des quatre Elemens : parquoy à la corne ih
y a de l'air,

1
Des Venins. 813
A Pour replique ic dis , que les choſes en Medecine ne ſe meſurent & conſiderent
que par les ſens& effects. Bieri donc que par diſcours de raiſon nous comprenions Comment les
que lepoyure,gingembre, & graine de paradis ſont compoſez des quatre Elemens furent choſes enleme.
Me
( c'eſt à dire ) de chaud,froid,lec, & humide : toutesfois les Medecins n'y recognoiſ decine,
fent que du chaud & du ſec,pourcequ'ils ne font en nous principalement que des ef
fects de chaleur & ſeichereſle: ainſi nous nions la corne de Licorne eſtre aërée,parce
qu'elle ne produit les effe & sdescorps aërez ( c'eſt à dire) de vapeur, fumée, & odeur.
Quiconque trouuera de l'air en la corne de Licorne , il tirera de l'huile d'un mur.
Ces deux poinctsde mon Achilles vuidez,le reſte desraiſons contraires n'eſt pas dif
ficile à refuter. Car pour prouuer que la corne de Licorne fe peut tourner en ſang, il 1

allegue, Queleschiens vinentd'os.ledis au contraire que les chiens ne viuent pas d'os, Ceſte compaio
mais bien de la moüelle ou ſubſtance medulçule, qui eſt cachée dedans les cauítez raiſon eft bie
infigncs,ou poroſitez de l'os. Orauxcornes de Licornes, que nousvoyÕsrapper tous foible.
lesiours,y a-ilrien de moilleux ?Non plus,& encore moins qu'en la pierreponce .
B N'eſt pas auſſi plus pertinét ce qu'il adiouſte: Que comme les chiens viuenı d'os,auſsiles Autre com
Auftruches de fer.L'on ſçait aviourd'huy aſſez par experience & inſpection iournalie- paraiſon
re,que ceſte opinion de la vieille hiſtoire naturelle eſtchoſe fabuleuſe.Car bien que moins vallas
ble.
l'Autruche deuore le fer,ſi ne le digere - elle pas :le lendemain,on le trouuera parmy
fes excremenstel quel l'a pris.le puis dire en verité,auoir donné des clefs & cloux de
fer à des Auſtruches à aualler , que le lendemain on trouuoitauec leurs excremens,
fans ere en rien diminuez. Pour voir donc touſiours les petits enfans aualler les
noyaux de ceriſes, & pepins de raiſin , dirons- nous qu'ils les digerent& f'en nourriſ
fent ?
Il dit, Quele Roy a refufécentmilleeſcus de la corne de Licorne qui eſt à S. Denys. Il eſt
bien poffible que pour la grandeur & magnificence ilen ait autant refuſé, mais fi
croy.ie que ſi le Roy l'auoit en celle eſtime, qu'elle ſeroic miſe en plus ſeure garde
que d'un ſimple Clerc ,qui la fait voir indifferemment à vn chacun pour vn grand
blanc , Que ſi elle auoit celle vertu qu'on luy attribue,elle ne fuſt pas enciere, & croy
qu'elle cuft eſté limée & rappée, pour furuenir àla neceſſité des maladies de tant de
C Rois qui ont tenu le ſceptre de France. Ces raiſons oncinduit André Marin au lieu Comment on
ful-allegué,à penſer que telle corne ne fult pas naturelle , ains artificielle fabriquée peutfalfifier
Licorne,
par la main de quelque ingenieux maiſtre , qui par certaine mixtion l'a contre - faicte la
aupres du naturel. Ce quielt prouué par Dioſcoride, liu.4.chap.71 . fucillet 52.qui
dit quefaiſant cuire la racine de Mandragore auec yuoire l'eſpace de ſix heures , elle
PRE le moliifie tellement qu'on en peut aiſément faire ce qu'on voudra. Pareillement
Cardan dit , que les dents des Elephans ſe peuuentamollir & eſtendre, comme les
aufost cornes de bænf : & de telles piperies ſe trouuent à Mets & à Straſbourg , & en plu
pour ſieurs autres lieux. Parquoy ie trouue bon ce que dit l'aduerſaire; Que les Medecins de
1 wroientadmoneſter le Magiſtrat de l'abus quiſeroiten la Licorne, & non pasmoy.l'euſſe deſi
0.32
ré qu'ils m'euſſent deliuré de ceſte peine, & m'eſmerueille comment ils ont tantat
tendu.le ſçay toutesfoisque Monſieur Cappel, Docteur regenten la faculté de Me- Cappelmes
aica decine,cres-ſçauant& home de bien , auoit ja commencé en faire un diſcours, pour decin,homme
C oſter l'abus qui y eſtoit :mais voyantle mien ja imprimé, il ſe deliſta du ſien.I'ay auſti Overtueuxa
tre-afçauane
entendu ſouuent, que Monſieur l’Affilé Docteur en Medecinc ( aſſez cogneu pour Opinion de
D fa vertu & doctrine) autresfois auoit maintenu en pleines eſcholes , que la Licorne Monſieur
n'auoit rien des proprietez cachées qu'on luy attribue, ſeulement qu'elle auoic ver- | Affilé me
100
tu de deſſeicher au premier degré,comme toute autre eſpece de corne. Pluſieurs au- decintouchat
tres Medecins , voire la plus part d'entr'eux, onemeſmeopinion, & ce quei'cn (çay, la Licorne,
ie ne l'ay appris que d'eux principalement, & premierement du docte Duret.
Parquoy ceſtemienneopinion accordante auec celle de tant de gens de bien & de
ſçauoir,nedoit eſtre tenuë pour monſtrueuſe, puis qu'elle n'eſt ny nouvelle ,nyex
‫ܪܢܐ‬- traordinaire,nyerronée : ny pour cela ne dois point eſtre reputé & peint comme
monſtre, ainſi quegabbe l'adverſaire, voulant cirer en riſée la deſcription des mon .
ſtres que i’ay inſerez en mes æuures.MonſieurRondelet premier Medecin de noſtre Rondelet á
the temps,n'a-il pas fait portraire pluſieurs monſtres ? & toutesfois perſonne n'a dit qu'il fait peindre
l'eut fait pour amuſer les petits enfans,maisbien pourrepreſenterà l'ail ce que l'on des monſtres.
nepourroit ſi bien eſcrire, & comprendre ſans le portraict. Geſnerus & Belon ontfait Geſnervis og
le ſemblable,& toutesfois perſonne neleur amiscela à blaſme, le croy que l'aducr- Pelona
zZ z ij
814 Levingt -vnieſme Liure, des Venins. A
Liberalité de faire n'a pas voulu ſeulement taxer les figures des monſtres , mais auſſi toutes les au- a
l' Autheur, tres, qui ſonten mes æuures , en nombre de plus de trois cens ſoixante & quinze:
pour leſquelleseffigier& cailler en planche , i’ay delbourſé liberalement du mien
plus de milleeſcus, & penſe que ceux quifen mocquent , ne voudroient avoir fou
lagé le public d'un ſeul eſcu de leur bourſe . Comment que ce ſoit,ces figures-là
ſontcelles,qu'elles proficent beaucoup à pluûcurs Chirurgiens, pour lemaniement
& vfage de pluſieurs inſtrumens neceflaires à la gueriſon des maladies. Qui me fait
croire quetelle moquerie eſtpartie de meſme animofité quecelle quieſtà la fin du
liure de l'aduerſaire, par laquelle il dit que ie me ſuis faic traduire leliurefaitpar lor
Modeſtie de danus, de peſte. l'appelle Dieu à teſmoin ſi iamais i’y penſay, & ne l'ay veu en Latin
Pantheny, ny en François. Et quand ie l'aurois fait, ie n'euſſe oublié à le nommer honorable
ment,commei'ay fait tous les Autheurs deſquelsi'ay peu apprendre & tirerquelque
profie, ainſrque i'ay demonſtré euidemment par la cable que j'ay dreſſée deleurs
nomsau commencement de mes æuures.
Intention de Voyla ce que i'ay voulu repliquer ſur les raiſons contraires. Ce que ie prie mon B
i sushes . aduerfaire prendre en bonnepart, & eſtimer que ce quei'en fais, eſt plus pourmain
tenir la verité , que pourle deſdire. Car ie penſe que de la part ce qu'il en a fait, n'a
cſté que pour m'inſtruire & le public : & demaparcie me repute tres- heureux d'ap
prendre de tout le monde ,& de vicillir touſiours en apprenant. Seulementic le pric,
ſ'il a enuie d'oppoſer quelques contredits à mareplique , qu'il quitte les animoſitez, De
&qu'il traicte plus doucement le bon vieillard . Il eſt bien ſcantaux icunes gens,
pour faire de leur eſprit ,eloquence ,& do &trine , de diſcourir des poin &s
preuu
problematiqu os lib
c rement : & aux gens de mon âge , defárrcſter tellement à lave
rité , que l'on ne ſen departe aucunement, pourucu que l'on & l'autre ſeface ſans
pique, riotte, blaſme, & offenſe deſon prochain.

Fin du vings-unieſme liure des venins.


g.

2222 44

4

C!

‫اد‬
815
A

TABLE DES CHAPITRES D V VINGT


deuxieſme Liure de la Peſte.
Eſcriptiode la peſte.ch.j. Duboire du malade. Chap.xxij.
Cauſes diuines de la pe- Medicamens Alexiteres. Chap.xxiii.
fte. Chap.ij. Epithemes ou fomentations pourcorroborer les
B parties nobles ,
Cauſes humaines,osi na Chap. xxv.
turelles, & femences silafaignée & purgation ſont neceſſaires au
generales de la peſte commencement de la maladie peſtilente.
priſes de la corruption Chat. xxj.
de l'air. Chap.ij. Medicamenspurgatifs. Chạp. xxcg.
De l'alteration des humeurs, qui ſe fait princi- Des accidens & complications des maladies
palementpar la maniere de viure. Ch.itý. qui aduiennent aux pefiiferez,& premiere
Signes ou preſages de la peſte à aduenir, pris ment de la douleur de teſte. Chap. xxviij.
de la corruption de l'air. Chap.v. Dela chaleurdesreins. chap. xxix .
Signes de lapeſte pris dela corruption qui eft Accidens de peſte. Chap. xxx .
en la terre . Chap.vj. Des eruprions cã puſtules appellées pourpre.
La cure preferuatiue , & premierement de Chap. xxxj .
l'air, du viure , & de la maiſon. Chap.vij. De la cure des eruptions. Chap.xxxj.
Deſcription d'eaux cordiales , electuaires, De l'apoſtemepeftiferée , appellée bubon , 036
C
opiates, pilules ,& autres remedes à pren boſſe, chap. xxxiy..
dre par la bouche, preferuatifs & curarifs Delacure de l'apoſtemepeftiferée.Ch.xxxiv.
de la peſte. Chap.vij. Deſcription du charbon peftiferé,& deſes cau
Remedesparticuliers, ou choſes qu'on applique Jes, fignes & marques . Chap. xxxv.
r
pa le de ho rs .. Chap. ix. Prognoſticdes apoſtemes & charbons peftife
Choſe que l'on doit obferuer outre les prece rez .
Chap. xxxvj.
dentespour la preſervation . chap. x. Dela cure du charbon peftiferé. ch.xxxvi.
L'office des Magiſtrats & officiers publics , Dupravit & demangeaiſon qui vient autour
qui ont la chargedela police. Chap.xj. de l'ulcere, & dela matiere de produire la
Comment on doit proceder a l'election des Me- cicatrice . Ch. xxxvij.
decins, Chirurgiens, og Apothicaires,pour De pluſieurs euacuations qui ſefont outre les
Ce
medicamenter les peſtsferez. chap. xi. precedentes, & premierement de la fueur.
que doivent faireceux qui ſeronteſleuz à Chap. xxxix.
pinſereomedicamēter lespeftiferez.ch.xij . Du vomiſſement. Chap.xl.
Signes de la peſte preſente. Chap. xiij. Du cracher & bauer. Chap. xli.
D Signes mortels de la peſte. Chap. xv. De l'eſternuer& moucher. Chap. xli .
Signesparleſquels on peutcognoiſtre quelema- De l’eructation ou routrement, & duſanglot.
lade eftinfectéde lapeſtevenant du vice de Chap. xlij.
l'air, e non des humeurs. Chap. xvj , De l'urine. Chap. xliii.
Signesque le malide eſtinfectédela peſte pro- Duflux menſtruel. Chap.xlv.
uenās de la corrisptið deshumeurs.Ch.xvj. Deshemorrhoides. Chap.xlj.
Duprognoſtic o augure . Chap.xviij. Pourprouoquerle flux de ventre.Chap. xlvij.
Commentſefaisla fićure peſtilētielle. Ch.xix. Pourarreſter leflux de venire. Chap.xlviij.
Conment lemalade ſe doit retirerdu lieu in- Del’euacuation faite parinſenſible tranpira
fect,ſubit qu'il ſe ſentfrappé de peſte.Ch.xx. tion , Chap. xlix .
De la fitnation & habitation de la maiſon du Dela curatio des enfans épris de la peſte.ch.l .
malade depeſte,& moyen d'y rectifier l’air. Diſcours des incommodiiez de la peſte,& du
Chap. xxj. ſouverain remede. Chap.li.
Du manger de malade. Chap.xxj. Epilogue ou concluſion decediſcours. ch.lý.
zZz inj
816

LE VINGT-D EV XIE SME


Liure, traictant de la Peſte.
PAR AMBROISE PARE', DE LAVAL AV
MAINE , CONSEILLER ET PREMIER
Chirurgien du Roy.
Deſcription de la Peſte. CHAP. I.

Eſte eſt vne maladie venant de l'ire de Dieu , furieuſe, tempeſta A


tiue,haſtiue,monſtrueuſe ,& elpouuantable, contagieuſe, ter
rible, appellée de Galien beſte ſauvage, farouche & fort cruelle,
ennemie mortelle de la vie des hommes, & de pluſieurs beſtes,
plances,& arbres. Les anciens l'ont appellée Epidemie , quand la
corruption venoic del'air, qui promptement faic mourir pluſieurs
en vn inſtant, & enmeſmeregion :auſſi ont- ils appellé Endemic
vne maladie qui eſt propre & familiere en certain pays , comme les eſcroüellesen
>
Cacois
blancs.
ladres Eſpagne , legouetron en Sauoye, la lepre en Guyenne vers Bordeaux,les malades
Accidens.
de laquelleon appelle Gabets , & en la baſſe Bretaigne Cacots , & font nommezla
dres blancs , & ainſi d'autres maladies qui regnent és autres prouinces. Or la peſte
eſt ſouucnt accompagnée de tres- cruels & pernicieux accidens qui ſourdonc iour- B
nellement auec elle:comme fićures ,bubons ,charbons , pourpre ,flux de ventre,
delire , freneſie, & douleur mordicatiue d'eſtomach , palpicacion de cæur, peſan C

teur , & laſſitude de tous les membres, ſommeil profond, & les ſens cous hebetez. d
Aucuns ont vne chaleur interne bruſlante, & ſont froids au dehors auec inquietu. &
de , difficulté de reſpirer, vomiſſemensfrequens, flux de ventre , Aux de ſang par le 0
V
nez , & par autres parties du corps ,appecit perdu , grande alceration , la langue ſci
che, noire & aride , regard haue & hideux, la face palle & plombinc, & quelques
&
fois rouge & enfiambéc, tremblement vniuerſel, crachement de ſang, puanteur des
o
excremens , & pluſieurs autres accidens qui ſe font ſelon la pourriture & altera
tion de l'air peftiferé, & de la cacochymie de ceux qui en ſont frappez.Neant
moins cous ces accidens ne ſe trouuent pas touſiours à vne fois , ny en toutes
perſonnes , mais en aucunes fen apperçoiuent pluſieurs , aux autres peu : voi. C
re à grande peine voit- on deux malades infectez de celte peſte les auoir ſembla
bles ,maisdiuers les vns des autres , ſelon les effe & s qu'elle produict. Ce qui
provient de la diuerGté du venin , de la cacochymie , si complexion des mala P
La peſte n’eſ des , des années & faiſons, & des parcies qu'elle aura failies. Aulli qu'elle n'eſt
d'une meſme pas touſiours d'vne meſme ſorte , mais diuerſe l'une de l'autre : qui aeſté cau
forte. ſe que l'on luy a donné diuers noms , à ſçauoir fiéure peſtilente , caquelangue ,
coqueluche , ſuette , trouſſe-galant , boſſe , charbon , pourpre , & autres , que
deduirons cy-apres. Or l'eſſence de ce venin peltiferé eſt incogneu & inexpli
quable , dont nous pouuons dire la peſte eſtre vn quatrieſme genre de maladie.
Car ſi elle eſtoit vne intemperature ſimple , elle feroit chaude ou froide, ou humi
de , ou ſeiche , ou compoſée d'icelles : 8 lors auec inedicamens contrarians, par leur
1
De la Peſte. 817
A ſeule qualité chaude, froide, ſeiche, humide,oumixcionnées enſemble, ſeroit gua
ric. Si c'eſtoit incommoderation, c'eſt à dire de mauuaiſe compoſiçion , elle feroicen
indeuë conformation, ou figure,ouen nombre, ou en magnitude,ou en ſituation. Si Differences
c'eſtoit auſſi ſolution de continuité, ce ſeroic eroſion, contuſion,inciſion , perfora- deſolution
tion,morſure, picqueure, & ruprion,toutes leſquelleschoſesſeroient guaries par les de cốtivuité.
remedeseſcrits desanciens:mais elle vient non ſeulement d'une ſimple corruption,
mais auſſi d'vne contagion d'air peftiferé indicible & incogneuë,qui imprime ſur vn
corps ja preparé le caractere de ſon venin. Or , me dira quelqu'vn: Cominent ſera
il poſſible à vn Chirurgien pouuoirguarir celte contagion par yrayemethode,atcen
du que la cauſe ne peut eſtre cogneuë? A quoy faut reſpondre ,qu'il faut ſuiurele
mouuement de nature , lequel ayanc en horreur la qualité venimeuſe, qui premic
rement ſailiſt le cæur,taſche & fefforce de chaſſer & pouſſer dehors les matieres que
le venina corrompu, leſquelles entretiennent le mal, & dont ſ'engendrent fićures
peftilentielles, carboncles, bubons,pourpre, & autres accidens, au grand ſoulage
B ment des parties nobles : tellement que ſi le tout (ou la plus grande partie) peut eltre
ainſi pouſſée dehors ſans rentrer au dedans,le patient peuteſchapper du danger.Par
1
quoy le Medecin & Chirurgien , qui ſont miniſtres & coadiuteurs de nature, n'onc
autre choſe à faire que pourſuiure tels mouuemens : comme en prouoquant les
ſueurs & vomiſſemens dés le commencement , & parchoſes qui fortifient le cæur,
vſantdetous remedes eſprouuez contre la putrefa &tion & venenoſité. En ſomme,
il faut munir le cæur par antidotes , & attirer au dehors la maciere conioincte, &
pourueoir aux accidens , diuerfifiant les remedes ſelon la nature d'iceux. Voila ce
qu'il me ſemble de la deſcription de la Peſte, laquelle n'eſt iamais vniuerſelle,ny
d'vne meſme ſorte,commenous auons dit cy -deflus.
A.

Des cauſes diuines de la Peſte. CHAP . II.

' Est vnechoſereſolué entre les vrais Chreſtiens,auſquels l'Eternel a


reuelé les ſecrets de la Sapience,que la Peſte & autres maladies, quiad
SVEL
uiennent ordinairement aux hommes, procedent de la main de Dieu ,
ainſi que le Prophece nous enſeigne: Quelle aduerfité ſera en la cité, Amos 3 :
que le Seigneur n'aye faire ?Ce que nous deuons en tout temps ſoi- Attes 17.
TO gneuſement mediter pour deux raiſons : La premiere cſt,pour recognoiſtre que ce
que nous auons de vie, ſanté,mouuement & eſtre ,procede directement de la pure
elayu bonté de Dieu,qui eſt le pere des lumieres,à fin que par ce moyen nous luy rendions
‫رہ‬ graces de ſes benefices. L'autre eſt, que la cognoiſſance des affli& ions, quinousſont
enuoyées de Dieu,nousachemine àvnedroicte intelligence de la iuſticeſurnos pe- voyez à ce
.
chez,à fin qu'à l'exemple de Dauid nous nous humilions ſous ſa inain puiſſante,pour propos le
garder quenoſtre ame ne peche par impatience : auſſi qu'eſtans releuez de deſeſpoir, Pſeau. 39.
nous inuoquions ſa Majeſté pour nous deliurer de tous maux par ſa miſericorde.
Voila comme nous apprendrons de chercher & en Dieu & en nous, au Ciel & en la
4.1.14
terre, la droicte cognoiſſance des cauſes de la peſte,delaquelle nous ſommes viſitez,
& comment par la Philoſophie diuine nous ſommes inſtruicts, que Dieu eſtle prin
cipe & cauſe des cauſes moyennes,ſanslaquelle les ſecondes cauſes & inferieures ne
2,1 peuuent produire aucun effect, ains ſontconduites& addreſſées par la volonté fe
crette & conſeil priué d'iceluy , qui ſ'en ſert comme d'inſtrumens, pour accomplir
pou
ſon æuure,ſelon ſon decret & ordonnance immuable. Pourtant ilne faut attribuer
we {implement la cauſe de la peſte aux choſes prochaines, à l'exemple des Lucianiſtes ,
Il Naturaliſtes , & autres infidelles:mais il nous faut conſiderer,que tout ainſi queDieu
par ſa toute-puiſſance a creétoutes choſes,hautes,moyennes & baſſes,auſſi que par
la ſageſſe il les conſerue,modere,enclineoùbon luy ſemble,meſme ſouuent change
le cours naturel d'icelles,ſelon ſon bon plaiſir. Voila pourquoy le Prophete nous ex- Ieremie 10.
horte: N'apprenez pointles voyes desGentils, & ne craignez point lesſignes du ciel,
10 ,
comme les Gentilsles craignent. Et ne faut que nul foieſi hardy & plein derage , de inferie
les cauſes
ures
youloir attacher Dieu ,quieſtla ſouueraine cauſe de toutes choſes,aux cauſes lecon ne peuvent
des & inferieures, & à les creatures , ou à la premiere diſpoſition que luy-meſme a agir dans la
baillée, & feroit rauir à Dieu ce cilcredeTout-puiſſant, & luy ofterla liberté de plus premiere, qui
rien changer & diſpoſer autrement qu'il n'a fait du commencement, comme ſi eft Dieu,
ZZz iiij
818
Le vingt-deuxieſme Liure ,

l'ordre qu'il a eſtably le tenoit ſubiect & lié , ſans qu'il peut rien innouer: Car A
Geneſ. 1. quelque ordre ou diſpoſition que Dieu aye mis en Nature , en la reuolution des
faiſons, au mouuement des altres & Planettes, il eſt plus que tres -certain ,qu'il
n'eſt-point lié ny ſujet à creature quelconque : ains beſongne & faic ſes æuures en
toute liberté , & n'eſt aucunement ſuject de ſuiure l'ordre qu'ila eſtably en nature :
mais ſ'il veut punir les hommes à cauſe de leurs pechez , à fin de leur montrer ſa iu .
ſtice , ou les combler de biens , pour leur faire ſentir fa bonté paternelle , il change
ſans difficulté cet ordre ; quand bon luy ſemble , & le fait ſeruir à la volonté , ſelon
qu'il voit eſtre bon & iuſte. Car tout ainſi qu'au commencement de la creation du
monde , par le commandement de Dieu , la terreproduit verdure , arbres fruiciers ,
la mer les poiſſons, la lumiere aufli eſclairoit auant que ces deux grands luminai
res , le Soleil & la Lune , fuſſent creez , pour nous apprendre que c'eſt le Tout- puiſ

fant, qui par ſoy -meſme a fait toutes choſes: aulli depuis que le gouuernement des
creatures a eſté afligné au Soleil , & aux Planettes ,deſquels la terre ,& ce qu'elle con
tient,reçoit aliment & nourriture , nous ſçauons comme ce grand Dieu a changé le
Exode 13 :
cours naturel d'iceux , pour le bien & profit de ſon Egliſe. C'eſt ce que nous liſons, B
que le Seigneur alloit deuant les Iſraëlites par jour en colomne de nuée , pour les
1ofué 10. conduire par la voye , & de nuict en colomne de feu pour les eſclairer . En ceſte meſ .

mefaçon le Soleil & la Lune furent arreſtez , & changerent leur cours à la priere de
1. Rois. 17. Ioſué. Auſſipar la priere d'Helie , il ne pleut point l'elpace de trois ans & ſix mois.Par
Epiſtre ſainet ces exemples doncilappert clairement, que Dieu diſpoſe de ſes creatures ſelon ſon 11
laques, ch.s. bon plaiſir,tant pour ſa gloire , que pour le ſalut de ceux qui l'inuoquent en eſprit
& verité. Or comme le Seigneur ſelere de ceschoſes inferieures,pour eſtreminiltres C
de ſa volonté , & teſmoignages de la grace à ceux qui le craignent, auſſi elles luy ſer
uent de herauts & executeurs de ſa iuſtice, pour punir les iniquitez & offenſes des
Dieu
enuoye pecheurs , & contempteurs de la Majeſté. Et partant , pour le dire en vn mot , c'eſt la
la peſte. main de Dieu , qui par ſon iuſteiugement,darde du ciel ceſte peſte & contagion ,pour
nous chaſtier de nos offenſes &iniquitez , ſelon la menace quieſt contenuë en l’Eſcri
Leuit. 26 . ture . Le Seigneur dit ainſi : le feray venir ſur vous le glaiue executeur , pour la ven
geance de mon alliance , & quand vous ſerez raſſemblezen vos villes, ie vous enuoye a

ray la peſtilence au milieu de vous , & z ſerez liurez en la main de l'ennemy . Qu’on liſe CE
Ieremie 29. auſſi ce qui eſt eſcrit en Habacuc, chapitre 3. Le Seigneur des armées dit: Voicy, el
Exode 9. i'enuoye ſur eux l'eſpéc , la famine, & la peſte. Semblablement Dieu commanda à
Moyfe ietter en l'air certaine poudre en la preſence de Pharaon , à fin qu'en toute la
terre d'Egypte, leshommes & autres animaux fuſſent affligez d'apoſtemes peſtilen
Pleau.78. cielles,vlceres, & pluſieurs autres maladies. Ce que Dauid a confirmé , dilant,que
Dieu enuoya en Egypte des Mouſches , qui deuorerent le pais , & des Grenouilles bi
quiles deſtruirent, & donna leurs fruicts aux Chenilles , & leur labeuraux Sauterel
les : & gaſta leurs vignes par grelle , & leurs figuiers ſauvages par la tempeſte:& liura E
leurs iumensà la grelle , & leurs troupeaux à la foudre. Puis adiouſte ,qu'il dreſſa voye
à ſonire , & n’eſpargna de les mettre à mort, & liura leur vie à la pelte. Pareillement
Deut . 28 .
au Deuteronoine, Moyſe menace les tranſgreſſeurs de la Loy de Dieu de pluſieurs
maledictions, & entre autres de peſte , apoltemes, enfleures , & maladies ardentes.
Or le ſeul exemple de Dauid nous monſtre l'execution de ces menaces terribles,
soixante e quand Dieu pour ſon peché, fit mourir de peſte ſeptante mille hommes, ainſi que D.
dix mil hom- l'Eſcriture teſmoigneau 2. liure des Rois,chapitre 24. Le PropheteGad fut enuoyé
mes morts
à Dauid,auec commandement de Dieu : Iet’offre trois choſes,efly l’vne d'icelles,&
de peſte.
ie le feray,lequel veux - tu ? Ou que ſeptans de famine viennent ſur la terre : Ou que
par l'eſpace de trois mois cu fuyes deuant tes ennemis , & qu'ils te pourſuiuent:Ou
2. Sam . 24. que par troisiours la peſte foit ſur la terre. Là deſſus Dauid prie de cheoir pluſtoft re
entre les mains de Dieu , qu'entre celles des hommes : d'autant, dit-il ,qu'ileſt miſc
ricordieux. Ecquelqu'vn pourra dire que ce peuple n'auoic pas merité la mort pour
l'offenſe de ſon Roy.On peut reſpondre qu'il eſtoit encore plus meſchant que luy. ta
Car il le referua pour la gloire de ſon ſaināt Nom . Nous liſons pareillement, que le de
Seigneur punit l'idolatrie & profanation de ſon ſeruice par le Beau de la peſte. Car ta
voicy comme il parle : Pource que tu as violé mon fainet lieu en tes infametez & fo
abominacions, iele briſeray auſli,mon eil ne l’eſpargnera point, & n'en auray point
de pitié : car la troiſieſme partie mourra de peſte. Concluons donc que la peſte,& a4
De la Peſte. 819
A tres maladies dangereuſes,fontteſmoignages de la fureur diuine ſur les pechez, ido
larries & ſuperſtitions quiregnent en la terre, comme meſmes vn Autheur profane Hipp.chap:
eſt contraint de confeſſer qu'il y aquelque choſe de diuin aux maladies. Et pourtant 2.dur.lin.
lors qu'il plaiſt au Seigneur des Seigneurs,& Createur de toutes choſes, vſer de ſes des progno
juſtes iugemens,nulle deles creaturesnepeut euiter ſa fureur eſpouuentable , voire fics.
melime ciel& terre en tremblent , ainſi que Dauid nous enſeigne:
. Les cieuxfondirent ex fueur: Pflav. 68.
La terre trembla de lapeur
De taface terrible.
Que ſera -ce donc de nous pauures humains,qui nous eſcoulons comme la neige ?
Cominent pourrons-nous ſubliſter deuant le feu de l'ire de Dieu , veu que nous
ſommes foin & paille,& que nos iours féuanoüiſſent comme vapeurde fumée? Ap
prenons,apprenons de nous conuertir de nos voyes mauuaiſes à la pureté du ſeruice
de Dieu,&ne ſuyuonspointl'exemple des fols malades , qui ſe plaignent de la cha
leur & alteration de la fiéure, & cependant reiercent la medecine, qui leur eſt repre
ſentée pour les guarirde la cauſe de la maladie. Scachons que c'eſt icy le principal Principalana,
antidote contre la peſte,que la conuerſion & amendement de nos vies.Ec cour ainſi tidore contre
que les Apothicaires fontdu theriaque de la chair du Serpent, pour la morſure veni- la pelle.
meuſe : auſſi de la cauſe de nos maladies,c'eſt à ſçauoir de nos pechez,tirons lereme
de & guariſon ,en regardant vers le Fils deDicu Ieſus-Chriſt noſtre Seigneur:lequel
neguarit pas ſeulement le corps de ſes infirmitez & maladies, mais netcoye l'amede
tout peché & ordure, & à l'exemple de Dauid , gemiſſons & recognoiſſons nos pe
chez: prians ce bon Dieu de cæur & de bouche,commeil s'enſuit :
Ne vueille pas , ô Sire , Pleau.c.
Me reprendre en ton ire
Moy qui t'ay irrité, &c.
Voila la premiere & principaleconſideration que tous Chreſtiens doiuent co
gnoiſtreen recherchant lescauſes diuines de la peſte, & le preparatif qu'il faut pren
dre pour la guariſon de telle maladie . Ecoutrece , ie conſeille au Chirurgien denc
C vouloir auſſi negliger les remedes approuuez par les Medecins anciens & modernes :
car combien que par la volonté de Dieu telle maladie ſoit enuoyée aux hommes,ſi Dine veus
eſt -ce que par ſa faincte volonté les moyens & ſecours nous ſont donnez pareille- que negligiós
les remedes
ment de luy,pour en vſer comme d'inſtrumensà ſa gloire,cherchans remedes en nos naturels.
maux meſmes en ſes creatures, auſquelles il a donné certaines proprietez & vertus
pour le ſoulagement des pauures malades . Et veut que nous vfions des cauſes ſecon .
des & naturelles, comme d'inſtrumens de fa benedi & ion ; autrement nous ſerions
bien ingrats ,&melpriſerionsfabeneficence. Car il eſt eſcrit, quele Seigneura don- Ecclef.38.
né aux hommes la ſcience de l'art de Medecine,poureſtre glorifié en ſes merueilles.
Et partant ne faut negliger tous autres moyens, que deſcrirons cy-apres . Il reſte
maintenant rechercher les cauſes & raiſons naturelles de cette peſte.

Des cauſes humaines ou naturelles, & ſemence generale de la Peſte, priſes


de la corruption de l'air.
CH A P. III .
D
. Es cauſes generales & naturelles de la peſte ſont deux , à ſçauoir l'air in- Cauſes,
fecté & corrompu , & l'alteration des humeurs viciezen noſtre Corps : &
ci
preparez à prendre la peſte 8 air peſtilent.Cequi eſt prouué par Galien ,
qui dit que les humeurs de noſtre corps ſe peuvent pourrir& , acquerir
venenoficé. Orl'air ſe corrompe lors qu'il y a excez és faiſons de l'année, leſquelles
netiennent leur conſtitution naturelle, qui ſe faict parce que preſque toute l'année
Topics aura eſté humide , à cauſe des pluyes & groſſes nuées. L'hyuer pour la plus grande
partie n'aura eſté froid: ny pareillementle princemps tiede ou temperé, comme il a
decoultume: aufli qu'en automne on veoiden l'air Aambes ardantes ,eſtoiles cou
‫ما می‬ rantes,& comeces de diverſes figures,leſquelleschoſes ſont produites des cxhalacios
ſeiches. De meſme lil'eſté eſt chaud,& que les vents n'ayent ſoufflé ſinon du Midy,
fil & encore ſi doucement,qu'à peine on lesaura peu ſentir : & quelquesfois auſſi ona
veu que les nuées eſtoient pouſſées du Midy au Septentrion . Telles conſtitutions
820 Le vingt-deuxieſme Liure ,
L’aircorrópu de ſaiſoris ſont cfcrites par Hippocrates , au liure des Epidemies, liure premier, & au a
prepare nos troiſiéme liure des Aphor. leſquels fans doute rendent l'air du tout peſtiferé:car
corps à. cor-
ruption alors par ſon intemperature il diſpoſe à pourriture les humeurs ſereux de noſtre
corps,& par la chaleur non uaturelle les bruſle & enflamme:foutesfois toutes con
ftitutions non naturelles n'engendrent pas touſiours la peſte, mais pluſtoſt autres
maladies epidemiales . Quelquesfois l'air peſtilent,qui eſtattiré au corps par vne ſeu
le inſpiration d'un peſtiferé,rend tous les membres infe &tez. Dauantage, l'air ſe cor
rompt par certaines vapeurs mellées auec luy , comme nous auons dit cy-deuant,
comme par grandmultitudede corpsmorts,non aſſez toſt enſeuelis en la terre,com
med'hommes,cheuaux, & autres choſes faiſans vne vapeur putride & charongneuſe,
quiinfccte l'air : ce qui ſouuent aduient apres vne bataille, ou de pluſieurs hommes
peris parnaufrage,puis iettez par les flors delamer au riuage : ou quand la mer a iet
té pluſieurs poiſlons & beſtes,lors que lesriuieres font grandes inondations ſur la ter
le
re,& les rauiflent en lamer,dont ils meurent, n'eſtans pas accouſtumez de viure en
10
l'eau ſalée.Orlamerlaiſſequelquesfois grande quantité de poiſſonsà ſec, quand les
gouffres ou ouvertures de la terre , faictes par le inquuementd'icelles, l'empliſſent 3 C

lo
d'eau,ou quand le for de la mer laiſſe les grands poiſſons eſtans ſortis du profond d'i
celle:ainſi quede noſtre temps vneBaleine fut putrefiée en la coſte de la Tuſcane,qui
Lespoiſſons amena la peſtepar tout le pais .Or les poiſſons,bien que rarement commedit Ariſto. qu
peuvent efire te au 8. de l'hiſtoire des Animaux , peuuenteltre infectez par lesmauuaiſesexhala
infectiz de tionselleuées delaterre,quieſt au deſſous de l'eau,& paſſans par dedans icelle: auſſi
pefie.
peruentſentir la contagion de l'air ambiens, lors qu'ils ſe mettent ſur l'eau. Et pour 00
MI1

ces deux cauſes,ilſe fait quela peſte eſtant en quelquepaïs, les poiſſons ſont trouuez
morts en grand nombre,principalementés eſtangs,lacs, & riuieres, qui ſont peu agi
tées,que lon appelle caux dormantes : ce quine ſe faict en la mer ; car par ſon grand rup
lam
mouuement impetueux,& par ſa'lallıcude, n'eſt ſujette à pourriture : & partant les
poiſſons qui ſonten icelle,ne reçoiuent l'infection peſtilente,comme ceux des eaux
dormantes. Outre plus , l'air eſt infe &té des meſchantesvapeurs de quelques lacs,
eſtangs bourbeux & mareſcageux , çaux croupies és maiſons où il y ades égouts &
conduits ſous la terre, qui ne l'eſcoulent point, & ſe corrompent en Eſté , elleuans 200

Hiſtoire de certaines vapeurs par vne excefliue chaleurdu Soleil. Comme lon trouve par eſcrit, Cuca
Padoue,
qu'à Padoüe il y auoit vn puits quelon auoit longuement tenu couuert : puis ayant pelle
eſté deſcouuert,qui furen Efté,ilen ſortic vne grande exhalation putride,tellement
que l'air conuoiſin fut du tout corrompu,dont procedavne peſte inerueilleuſe, qui
dura fort longtemps , & delaquelle bien grand nombre de peuplemourur.Pareil
lement l'air exterieur eſt corrompu par certaines exhalations, fumées ,& fouſpirs
des vapeurs pourries & infe & ées,enferınéesés entrailles de la terre , ayans efté long queo
temps retenuës, croupies , & eltouffées és lieux tenebreux & profonds d'icelle, qui Terd
viennent puis apres à ſortir par vn cremblement de terre . Par le cremblement de la
terre , les eaux ſentent le ſoulphre, ou autre matiere mecallique,& ſont chaudes &
troublées : cela ſe faic des exhalations de la terre par le ſecouëment ou elbranlement D'a
d'icelle. Es temps deſquels lon oit ſonuent diuerſes voix, comme gemiſſemens de kang
ceux quimeurent aux bacailles, & aufli diuers cris d'avimaux. Semblablement on
voit ſortir de terre pluſieurs animaux ,comme crapaux,couleuures, afpics,viperes,&
La peſte des autres vermines. Et par leſdites exhalations ainſi ſorties ,l'air eſtant infecté, infe& e D.
plantes eſt pareillement non ſeulement les hommes & autres animaux , mais aulli les plantes,
appellée si fruicis, & grains , & generalement touteleur nourriture : d'autant que comme l'eau 1952
derasion. troublée & puante ne laiſſe viure le poiſſon quieſt dedans,auſſi l'airmalın & peſtifc
ré ne laille viureles hommes : mais altere les eſprits,& corrompt les humcurs , & fi
nalement les faict mourir,& meſmement les beſtes & plantes ,comme nous auons
dict. Dauantage,on a veu quelques-voscreuſans la terre pour faire des puits , ſentir
Hiſtoire. vne vapeur fi puante & infecte, qu'ilsmouroient promptement. Et encores n'aguc
1
res és faux-bourgs Saina Honoré de ceſte ville deParis,moururent cinq hommes,
jeunes & forts ,en curantunefoſſe,où l'eſgout du fiens des pourceaux eſtoit de long
temps croupy ,& retenu ſans aucune exhalacion,& fut -on concraint emplir de terre
Autre hi- ladite foſſe,pourl'eſtouper promptement,& obuierà plusgrands accidens. Sembla
Poire d'Em- ble choſe aeité des longtemps obſeruée par Empedocles Philoſophe:lcquel voyant
pedocles qu'il y auoit vne ouuerture du cerre entre lesmõtagnes,laquellecauſoit la peſtepout
De la Peſte. 821
A les mauuaiſes vapeurs quien forcoient, la fir bouſcher,& par ainſi chaſſa la peſte du
pais de Sicile. On a cognu combien cecy eſtoic vray par la corruption aduemë des
corps morts au chaſteau de Pene,ſur la riuiere de Lot :auquel lieu l'an 1562. au inois Hiſoire,
de Septembre, pendant les troubles premiers aduenusà cauſe de la religion, fuc ietcé
grand nombre de corps mores dedans vn puits profond de cent braſſéesou enuiron,
duquel deux mois apres ſelleua vne vapeur puante & cadauereuſe, quiſ'eſpandic par
tout le pais d'Agenois, & lieux circonuoiſins, iuſques à dix lieuës à la ronde , dont
pluſieurs furencinfectez de la peſte.Dequoy neſe fauc cfmerueiller, veu melines que
les vents ſoufflans, pouſſent les exhalations & fumées pourries d'vo pais en autre:
dont auſſion y voit prouenir la peſte,comme auons ditcy-deuanten la 1.Apologie.
Or ſi quelqu'vn vouloit obiecter: diſant que ſi la putrefaction de l'air eſt cauſe de la obieétion .
peſte,ill'enſuiuroit par neceſſité qu'en tous lieux où il y a charõgnes,eſtangs,marel
T
cages,ou autres lieux putrides,la peſte y ſeroit couſiours,à cauſequel'air reçoit faci
lement putrefa& ion : auſli quetouteputrefaction ,quand elle eſt entrée au corps par
B inſpiration ,engendreroit la peſte : laquelle choſe neantmoins eft cótre l'experience,
comme lon voit en ceux quihabitent & frequentent és lieux putrides,cóme és poil
ſonneries,eſcorcheries,cimetieres,hoſpitaux,cloaques,& canneries : aulli és labou
reurs qui manient & mcuuéc les fiens pourris & corrompus par putrefaction,& ceux
quicurent les lacrines ,& pluſieurs autres choſes ſemblables. A cela faut reſpondre, Responſe.
ho
que la putrefaction dela peſte eſt bien differéte de toutes autres putrefactions, pour
ce qu'il ya vnemalignitécachée & indicible,de laquelle on ne peuc donner raiſon, 1

non plus que de l'aymant qui tire le fer, & pluſieurs autresmedicamens, quiattirer &
purgent certaineshumeurs de noſtre corps. Pareillement la malignité occulte, qui
eſt en ceſte putrefaction peſtiferée,n'eſt point aux autreschoſes corrompuës de cor
rupcion ordinaire,leſquelles toutesfois en temps de peſte ſe tournent facilement en
ſemblable malignité, tellemét que toutes les apoftemes,& fiéures putrides, & autres
maladies procedentes de putrefaction , en temps de peſte ſe tournent facilement en
telle corruption extraordinaire, & du cour eſtrange. Et partant en telle conſtitution
de temps,ilfait bon éuiter les lieux infects,& la frequentation des peſtiferez,de peur
o que par la vapeur & exhalacion de l'air corrompu nous ne ſoyons infectez, combien
qu’auſſi il n'eſt pas neceſſaire que tous ceux qui attirent l'air peſtiferé prennent la
peſte,car on ne la peut prendre qu'il n'y ait quelque preparation & diſpoſicion :ce que
l'experience iournaliere demonſtre. Auli Galien le declare au liuredesdifferences calien:
des fiéures, diſantque nulle cauſe nepeut produire ſon effect, ſansque le corpsy ſoic
apre & preparé,autrement tous ſeroient infectez de melme cauſe; neantmoins par
continuë frequentation des lieux & perſonnes enuenimées de tel venin,on peut ac
querir vne diſpoſition & preparation à receuoiricelle peſte: car combien que le bois
verd ne ſoit diſpoſé à bruller,ſielt - ce que pour eſtre long temps au feu,ilbrulle. Par
tantie conſeille de ſe preſeruer touſiours, & euirer les lieux & perſonnes peftiferées :
car le venin pris par l'odeur des vapeurs venimneuſes eſt merueilleuſement ſoudain,
analer & n'a affaire d'aucun humeur qui luy ſerue de conduite pour entrer en noſtre corps,
1
& agir en iceluy, comme nousauonsdit par cy- deuant. Car leſdices vapeurs eſtans
ſubtiles, ſontfacilemencattirées auec l'air dedans les poulmons, & d'iceux dedans le
AK cæur ( donicile de la vie) puis paſſent par lesarteres, & d'elles ſe communiquentpar
D tout le corps : gaſtans premierement les eſprits, puis les humeurs, & en la fin la ſub
ſtance meſme des parties . Or quand nous parlons de l'air peſtilent , nous ne voulons l'airſimple
pas qu'il ſoiceſtimé ſimple & elementaire :car eſtant ſimple , iamais il n'acquierede iamas n’ac
* pourriture,mais par addition & mellange des vapeurs pourries eſparſes en luy. Par- quiert pour
quoy veu que l'air qui nous enuironne,& eft contigu ,elt perpetuellement neceſſaire riture,
à noſtrevie, & que fans luy nous ne pouuons viure,il faut que ſelon la diſpoſition, traction de
Sit noſtre corps ſoit en pluſieurs & diuerſes manieres alteré,àcauſe que continuellemét lair.
De nous l'attirons par l'actraction qui ſe faiet des poulmons ésparties pe&orales dediées
à la tranſpiration , & pareillement par la tranſpiration qui ſe faic par les pores & petits
pertuis infenſibles de tout le corps,& des arteres eſpanduës aucuir : ce qui ſe fait tanc
pour la generation de l'efprit de vie ,que pour rafraiſchir noſtre chaleur naturelle.
A ceſte cauſe,l'il eſt immoderément chaud,froid ,humide,ou ſec ,ilaltere & change
la cemperature du corps en ſemblableconſtitution que la ſienne . Mais entre toutes chaleur en
les conſtitucions de l'air,celle quieſt chaude & humide eſt fort dangereuſe :car telles humidité.
822 Le vingt-deuxieſme Liure ,
qualitez ſont cauſe deputrefaction ,ainſique l'experience nous fait voir és lieux où A
le vent marinen Eſté exerce ſa cyrannie, eſquels vne viande,tant ſoic - clle fraiſche,ſe
corrompe & pourrit en moins de demie heure . Semblablement nous voyons que
l'abondance des pluyes engendre beaucoup de vapeurs , leſquelles lors que le Soleil
ne les peutreſoudre & conſumer,alterent& corrompentl'air,& le rendent idoine à
Id,peſte ſe lapeſte. Mais il faut icy noter que la pourriture qui vientdes corps mortsdes hon
communique mes,eſt plus pernicieuſe aux hommes, que celle des autres animaux : auſſi celle des
plus aiſément bæufs aux bæufs, des chevaux aux chęuaux,des pourceaux aux pourceaux,ainſides
à animaux
de meſme moutons & autres animaux : ce qui prouient pour la ſympathie & concordáce qu'ils
espece o ont les vns aux autres,comeon veoit qu'en vne famille & perſonnes qui ſont de ſem .
xion. blable temperament, ſi l'on eſt épris de peſte,elle ſe communique ordinairement à
tous. Toutesfois on a veu auſlipout eſcorcher des bæufs,& autres beſtes mortes de
peſte, l'eſcorcheur mourir ſubitement , & le corps d'iceluy deuenir tout enfé. Le
tonnerre & efclairs par ſon grand bruit & tintamarreelmeut li vehementement l'air,
qu'il fait renforcer la peſte. Orpour conclure des effects divers de l'air, nous dirons, B
que ſelon qu'il eſt diuers & dillemblable, aufli il rend diſfimilituded'affections&
differens effects, meſmes és eſprits, leſquels il rend gros & hebetez,ou ſubtils & ai
gus : & pour le dire en vn mot, l'air aempire ſur tous les hommes, & autres animaux,
plantes, arbres , & arbriſſeaux .

De l'alteration des humeurs, qui ſe fait principalement par la maniere de viure.


CH A P. II11 .

PRE s auoir ſuffiſaminent declaré les cauſes de l'alteracion de l'air quinous


enuironne, & que nous inſpirons par neceſſité,pueillonsou non: maintenát
il nous faur declai ar la cauſe de la corruption des humeurs de noſtre corps.
Cauſes de la Or nos humeurs ſe corrompent & tournent en pourriture par vne trop grande pleni
corruprionde cudeouobſtru& ion ,ou intemperature,ou n-alignité de matiere,qui ſe faic principa
nos humeurs.
lement par la mauvaiſe maniere de viure : & de la procedent les cauſes principales de 0
corruption, par leſquelles tels corps ſont foudainement frappez de peſte: car apres
auoir beu des vins pouſſez & corrompus, & des eaux mauuaiſes & putrides , comme
celles qui ſont bourbeuſes & mareſcageuſes,dansleſquelles ſe dégorgent les égouts
puants & corrompus,fans qu'iceux ayent aucun cours :eſquelles aulli on aura ierté
quelque ordure,& laué le linge, & ictté les'excremensdespeftifercz, comme eſt vn
坦言
5
égout de l’Hoſtel - Dieu de Paris: ou apres auoir mangé meſchantes viandes,comme
grains pourris, herbes, fruits ſauuages , & autres alimens alterez , & non accouſtu E.

mez, comme on faict parvne grande famine,& aux villes & places aſſiegées( ce que
ie ſçay pour y auoir eſté) tellement que par neceſlité les hommes ſont contraintsde
manger la viande des pourceaux,comme on a veu en l'an 1566.àcauſe de la cherté,
faire dupain d'auoine,fcues,pois,lentilles,velſe, glan ,racine de feugere, & dent de
chien : auſſi manger troncs dechoux,& autres choſes ſemblables: apres, dy-je, telle
Zes mauuai- maniere de viure, ſuruientordinairement vne peſte. Car celle nourriture engendre
jes viandes obſtructions & pourricure d humeurs ,dont fenſuiuent galles, apoſtemes, vlceres &
caxleni ma
tadies. fiéures putrides,qui ſont preparatifs à la peſte : à quoy auſſi aide grandement la per
curbacion des eſprits & humeurs commede crainte,frayeur,faſcherie, ou autre cau D
fe : car celles choſes changent l'æconomie detoute l'habitude du corps. Er comme
ésiours caniculaires on veoit,que par la grande chaleur& ebullition ,la lie eftefleuéc
Rondelet en
en haut, & mellée pariny le vin : ainſi la melancholie, & autres humeurs, eſtás meſez
& partroublez, infectent le ſang , & le diſpoſent à pourriture & venenoſité ,dontla
Ja practique. pelteeltfouuentprocreće ,& autres pourritures : ce que n’agueres nous a eſte mani
ga

feſté en pluſieurs de ceux qui furent bleſez à la bataille pres S.Denys, lesplayesdel
8

8
&
8
888

quels degeneroient en grandes pourritures,accompagnées de fiéures putrides,& au


tres grands accidens:&preſque tous mouroient tant d'une part que d'autre,voireen
cores que leurs playes fuſſentpetites, & en lieux du corps non dāgereux :& auſi qu'ils
fuffent traictez de toutes choſes necellaires, tant à leur maniere de viure, qu'autres
choſes. Dont pluſieurs affirmoient,& philofophoient, quec'eſtoit à raiſon de la pou
dre à canon,& des boulets empoiſonnez.Ce quime ſemble n'eftre vray,ainſique i'ay
amplement diſcouru au traicté des playes faides par harquebuzcs, & autresbaſtons
à feu,
De la Peſte 823
à feu,tant par au&orité, saiſon, qu'experience. Dauantage, les pourritures & autres
accidens no venoient ſeulement auxplayes faictes par baltons à feu,mais auſſi à celles
qui’eſtoient faitesparautres armes, comme d'eſpees, de piques, de lances , & autres..
Parcant il me ſemble ( ſous corre& ion ) quelesaccidensne venoienc par la malignité Cauſe de la
de la pouldre à canon, & moins de boulecs qu'on diſoit eſtre enuenimez , maisplu malignisé
ſtort cauſe de l'ebullition du fang & des autres humeursfe broüillans & mellansen. ä pourris
ſemble, cát pour l'extreme cholere & effroy de l'apprehenſion de la mort,qu'on void care des
fi proche, & principalement auſſi pour la conſtitution & pourriture de l'air. Et qu'il plages.
ſoic vray , vn iour ou deux qu'ontiroic du ſang aux maladespourſuruenir aux acci
dens , ilſetrouuoic de couleur non rouge,mais du tout changéde la nature,à lçauoir
blanc , ou verdoyanc comme ſanic desapoſtemes, quidemonſtroit eſtre du rout cor.
rompu. loinct auſſi que lors qu'on faiſoit ouucriure des corpsmorts,on trouuoit
preſque à tousdes apoſtemes aux parties interieures, comme au foye & aux poul
mons, qui ſe faiſoit pour la pourriture acquiſe par le broüillementdulang , & princi
B palement de l'air ambiensalceré & corrompu , & non par la pouldre àcanon, ny les
boulers,que aucunscenoienteſtre empoiſonnez. Maintenant nous deſcrirons les fi.
gacs & prelages de la peſte à aduenit, pris de la corruption de l'air.
Lesfignes oupreſages de la Peſte à aduenir, pris de la corruption de l'air.
C | 4 P. V

Vand les ſaiſons de l'annee ne gardent leurs qualitez & temperatu.


res naturelles,& ſont fort immoderces , à fçauoir quand on voidlo
teps fort pluvieux & Auſtral, & l’Eſté fort chaud,& que leventAu-"meri
Außerwens
dional
ſtral durelong temps ſans pluye, & que l'on void au cielcometes & gere de passe
cftoiles ardentes, qui voltigent & partent de leurs places, tant qu'il trefacties.
lemble qu'elles tombér aucc aboodācedetőnerrcs ,& autres choſes
que nous avons par cy dcuát dit.Auſſi,fion void grande quátité de
chenilles, & autre vermine qui broucent & rongent les fucilles & gectos des arbres,&
C les fruiets eftre venimeux, & lesoiſeauxlaiſſer leurs nids ,voire leursaufs & leurs pe
tirs , & plufieurs femmes enceintes auorter (qui ſe faiết pour la vapeur venimcuſe de
l'air peſtilenc,lequeleſtant inſpiré par la mere,eſtouffe l'enfantpar la malignicé enne.
mic de naturc :) Sices choſes, dy ie , ſont vcuës,on peut veritablement preſagir &
dire que les cauſes & ſignesde corruption ſont preſens, & qu'ilnous menacentdela 1
peſte. Toutesfoisil fauticy encendre que celles choſesapparéresen l'air ne ſont poin'
propres cauſes de la peſte,mais querelles impreſſions aëriennes ſontengendrees des
cxhalations & vapeurs de la terre,leſquelles en fin infe & ét l’air,dont la peſte procede:
car l'air ſe corrompt par les vapeurs purrides eſcuees des entrailles de la terre ; pour
les corruptions qui ſont en icelle,come de corps morcs, eſgouts, eaux croupies, & au.
‫ان کی‬ tres cauſes qu'auonsdeclarees cy deuane , leſquelles le Soleil par ſa vertuatcire en la
moyenne region del'airen temps de grandes chaleurs. Et pourceil ne ſe peut faire,
qu'à cauſe de l'air eſtant ainſi corrompu ,ne s'enſuiuent diuers effects ſelon la diuerfi
té de la corruption. Etdelà s'engendrent pluſieurs maladies Epidemiales,c'eſtà dire,
populaires, ou vulgaires, ainſi que l'an isio . ſuruine vne maladie par tout le Royau
D me de France, tant és villes qu'és villages , nommee par le comujun Coqueluche : La Coques
Eis parce que quand aucuns eſtoient clpris de ceſte maladie, ils ſentojene grande dou luche
leur en lateſte,enſemble en l'eſtomach ,és reins , & és iambes , & auoient fiéure conci .
nuë , auec delire & frencfie: & lors qu'on les purgeoit ou ſaignoit, on abbregeoir
leurs iours . Et d'icelle mourut va bien grand nombre d'hommes , tanc riches que
pavures. Auſſi l'an 1528. furuint vnc aurre maladicen Anglecerre ,& aux baffes Al Le Jarite.
lemagnes , qui futnommee du peuple la Suette , pource que les patiens auoient vne
bien grandeſueurpar tout le corps, auccgrand friſſon, tremblement, & palpitation
decæur accompagnec defićure continuë, & mouroient en peu deiours , & ceſtema
ladie tuaaufli vn bien grandoombre de perſonnes. Pareillementl'an 1546. regna en Autre dia
la ville du Puy en A uuergne,vne autre maladie nommee du peuple Trouſſe - galand, Se Tronfa,
pource que peu de ceux quien eſtoient eſpris ,eſchappoiene, aiasmouroienten deur galand.
ou trois jours ou moins , & pluſtoſt lesrobuſtes que les debiles, & 'les riches que les
pauures. Au commencement lespatiens auoient grandepelanceur de tout le corps,
AAAA
824 Vingt-deuxieſme liure
auec vne excremedouleur de ceſte, & ficuro continuë , & perdoiencroute cognoir. A
fance, & faiſoient tous leursexcremens inuolontairement ſous eux,& auoientgrand
delire, de ſorte qu'il les falloic liçr & attacher, Que ſiaucunsefchappoient leurs chea
veux comboient, & ladige maladie eſtoit foro contagicule . L'anneelujuantevino en
ladite ville vne autre plus grande pefte accompagnce de bubons & charbons, qui fic
auſſi mourir grand nombre de peuple : ce quei'ay bien voulu icy annoter,afin que le
Chirurgien prenne garde à la grandediuerſité& malignité de ceſte maladie peſti
lence pour y obuier,l'adverciffant dauantage , qu'en certains temps aduiennent plu
ſieurs autresmaladies populaires , commefiéurespucrides , Aux de ventre, rheumes,
toux, freneſies, ſquinancies, pleureſics, peripneunionics, ophtalmics, apoplexies,lc
chargies,pourpre, rougeole,pecite verolle,galles,anthrax,ou charbons,&rautrespu
ſtules malignes,leſquellesprennent en meſme temps. Parcantla peſte n'eſt pas couſ.
iours,ny en tout ceps d'vne meſme forte,maisdiuerſe l'vne de l'autre : qui aeſté cau .
ſequeonluy a donné diuers noms ſelon les effects & accidens qu'elle produi& :ce qui B
prouicnt principalement pour la diuerfité du venin qui eſt en l'air. Car ainſi qu'il ek
cauſe de la vie aux animaux,auſi eſt-il cauſe des maladies, & de la mort d'iceux,pour
ce que ſans iceluy l'animant ne peut eſtrene durer , melmes vnbien peu de temps : B

L'air et d'aucant qu'ileſt du toue neceſſaire qu'il ſoit attiré par la reſpiration despoulmons,
cauſe prin lequel eſtant pourry & attiré en la ſubſtance du caur,abat toutes les forces du corps,
cipale de & faitmourir pluſieursanimaux pour la neceſſité qu'ils ont de reſpirer. Parquoy lors
santéouma
budie .
que l'air pourry & peftiferé exerce ſa tyrannic,il cuënon ſeulement le genrehumain,
mais aulli les beltes dela terre, & les oiſeaux du ciel . Et pour le dire en vn mot , cel air
t
peſtilent eſt ſi furieux ,qu'il renuerſe,dillipe,altere, briſe, & corromptl'harmoniends
'turelle & temperature de tous animaux, ainfi qu'vn certain foudre & tonncrreli
quefie & conſume l'argent d'une bourſe ſans la gäſter: Pareillement faic forcir le vin
des conneaux, ſans qu'on puiſſe apperceuoir aucuncouucrcure: aufli font le ferd'vne
pique fans toucher au bois:comminuë & briſe les os du corps ſans aucune apparence
en la chair : qui ſe fait par vne vertu indicible, de laquelle on ne peut donnerraiſon.
Combien qu'Ariſtoteliure3.des Metcores, chap.1. ayant pour reſolution de ces que
Raifon de ſtions fait diviſion des foudres en ceux quiſontplus participansde terreſtrité, & cnc
l'action des ceux qui retičnent plus de la nature & ſubſtancede la flamme,& qui font plus ſubtils:
fondres. dic cela aduenir,parce que cels foudres de leurſubtilité penetrent aisément au crauers
des corpsrares & poreux,commeſont le bois,le cuir,la chair, & peau,ſansles offenſer:
mais qu'au travers des denfes & folides, ils ne peuuent paſſer ſans effort & violence,
dont vient que pour la reſiſtance qui leur eft faiete au paſſage, il les rompent & fracaſ.
ſent , ' ,Ce quemeſme apres Ariſtote a confirmé Pline , liure 2. chap. si & Seneque
liure 2. de les Queſtionsnaturelles : ainſi eſt- il de la peſte, qui deftruit & corrompt CC
toute l'economic denacure,
af
CC
Les ſignes de lapeſte à venir, pris de la corruption qui est enla terre.
C H 4 P. Ꮴ Ꭵ. CC
A.

ES ſignes de la peſte à aduenir, pris de la corruption de la cerre, font, que


l'on void ſortir d'icelle abondance de champignons ou potirons, & le fro: D
wat ment produire yuraye , & autre choſe contre leur naturel. Auſli qucfur Ga
icelle apparoiſfene grandes crouppes de petits animanx, comme araignes,chenilles, di
papillons, cigales, hanncrons, mouſches, & mouſcherons, ſcorpions, eſcargots,lirna
çons,ſauterelics,grenouillecces,vers,& autres ſemblables,qui ſe procreenc de pourri
ture: pareillement les beſtes ſauvages laiſſent leurs cauernes & cachors:aulli en ſortée
pluſieurs autres,commetaulpes,crapaux, viperes,couleuures,lezards, aſpics, crocodi
les, & autresde pluſieurs & diverſes eſpeces : toutes leſquelles beſtes ſortent pourla &
Les belles falcheriedela vapeur putride & veneneuſe qui eſt contenuë és entrailles d'icelle, de
ſentent laquelle meſme la pluſpart de relle vermine ſe fait: ioin &t auſſi qu'on les trouue quel be
changemas
desc
quesfoismortesen grand nombre,ce quenetrouucra faſcheux à croire celuyquicó
fiderera que Dieu a diſtribué aux animaux quelque choſe particuliere , pour de 1

emps.
monſtrer & predire non ſeulement la peſteà aduenir, mais auſi le changementdu
temps , comme pluye, vent,grelle, tempeſte,le Printemps, l'Eſté, Auromne, & Hy
fi
uer, & autreschoſes ſemblables: & ce cant par geſtes,chanſons,cris, que par trouppes
de la Peſte. 825
А
& arrivees , ſortiesdela terre, laiſſans leurs petits, & fuyans en autre region, comme
7
nous auons dic : leſquelles choſes viennent deleurs ſens excerieurs & occulte conue .
pance de leurs corps aucc l'air. Ec ſi quelqu'vn demandeautrecauſe, ie le renuoieray
au grand Architecteur,duquelles threſors de ſcience & ſageſſe ſont cachez, & nous
les manifeſtera quand bon luy ſemblera. Or ces vapeurs pourries , leſquelles nous
auons dic chaſſer les beſtes de leurs caucrnes , s'ellevent en l'air , & cauſenc groſſes
nuces , & tombenc quelquesfois ſur les fruias, & les corrompent, dont ceux quien
mangent ſont cſpris de la peſte. Elles n'infectent ſeulement lesfruicts, mais auſſi fond
mourir les arbres, & les beſtes, comme beufs, vaches, chcuaux,pourceaux,moutons,
poulailles,& autres volatilles,comme nous auons dit. Sur quoy tu dois obſeruer, que
les beſtes à quatre piedsſontpluſtoſt ſaiſies & frappees de ceſte peſte, que les hom
4
mes , parce qu'elles paiſſent les herbes imbuës des exhalations putrides de la terre, &
partant on nelesdoit faire paiſtre que le Soleil n'ait premierement conſommé la ro.
B ſee,s'ileſt poſlible. Qu'il ſoit vray, on a veu vn payſan de la Beauſſe auoir eſté accusé
en luftice d'eftreforcier, parce que lesbrebisne mouroientpoint,&toutescellesde Hipoire
fes voiſins periſſoient. Sur quoy eſtanc interrogé deuant les luges,ilfit reſponſe, que accusé d'e
iamais il ne permetroit que lon beſtailſorciſt hors, que premierement le Soleil n'euſt Are forcier,
conſommé la roſce, & que pluſieurs petites beſtioles qui eſtoient ſur les herbes ne
fuſſentretirees dedans la terre:& dit , que quelquesfoisill'auoit declaré à aucuns de
wy
ſes voiſins: ce qui fut trouué vray, & futabloutpourlesdailons ſuſdites. Or pource
qu'il eſt fait icymention des beſtioles qui nuiſent aux trouppeauxqui paiffent, nous
declarerons icy en paſſant, qu'il y a vne pecice beftiole ſemblable à la cancharide, Plin. li.zo:
trouuec auxherbages,quienfic ſifore vn bæufquand ill'a mágec,qu'il crcuc: & pour chap.4.
ceſte cauſe eſt nommee dePline, Bupreſtis.

Dumoyendeſepreſerueren tempsdepeſte,&premierementdel'air,
du viure , & de la maiſon .
С CH A P. VII.

Presauoir deſcrit la peſte, & doclaré les cauſes,ſignes & preſages


par leſquels on peut cõiecturer qu'elle doic aduenir: maintenác
nous faut dire cóment on s'en doic preſeruer,d'aucár quela pre.
caució doit preceder la curatió d'icelle. Or veritablemér le plus
ſouuuerainremede que ie puiſſe enſeigner avec tous les anciés,
eſt s'enfuircoſt & loing du licu infcet,& le retireren air lain , & Ciro"
, longes
tarde.
formant recourner bien tard,fi on le peut faire. Et où ilne ſera poſſible,
faut obſeruer deux choſes en general: la premiere, eſt rendre le
corps fort pour reſiſter à l’infe & ió de l'air:la ſeconde,moyễnerque l'air infce ne ſoit
aſſez fort pour imprimeren nous lon venin : qui ſe fera en le corrigeant par qualice
contraire,comes'il eſt trop chaud,parchoſes froides, & ainſi des autres qualitez. Le
corps refiftera au venin,s'il eſt net & fortifié,par remedes propres,commepar bon re
gime,purgatio , & ſaignee s'il en eſt beſoin . Aulli faut euiter la grande variété des viá. Mániere de
des,&celles qui ſontfort chaudes & humides, & principalemér celles quiſe corrom viore.
D pent aisément:& ne faut manger patiſſeries,n’yurongner, ou ſecrop ſavuler, mais on
ſc leuera derableauec appetit. Pareillement faut que les viandes ſoient de bon ſuc, &
City
faciles àdigerer : car les bonsalimens pris auec vnemediocrité en temps & lieu engé.
drent bonnes hunieurs,qui ſont cauſe deſanté, & par conſequent preſeruatifs de pes De l'exercis
‫تااز‬ ſte. Aulli il faut prendremoyen exercice au marin ,& au veſpre auantle repas , & en (l.
‫مه‬
lieu non ſuſpect d'air peſtiferé: pareillementavoirbon ventre,ſoit par arc,ou par na
ture : auſli faut fortifier lecæur & autres parties nobles par choſes cordiales , comme
cpithemes, linimens, emplaftres,caux, pilules, pouldres,tablettes, opiates,parfums,
& autresque dirons cy-apres. Dauantage faut ellire vn bon air, & loing des lieuxfe . De l'air:
tides:car le bon air ayde beaucoup à la conſeruation dela ſanté d'vn chacun, & recree
les eſprits & toutes les vertus : au contraire l'air obſcur & de mauuaiſe odeur nuit
merueilleuſement, parce qu'il engendre pluſieurs maladies , fait perdre l'appetit , Vens de sé.
rend le corps languide & malcoloré, & eſtouffele cæur, & pour le dire en vn mot , il peentrion
‫ܕ‬
abrege la vie. Le venc de Bize , qui vient du Septentrion eſt bon , pource qu'il eſt contraire
froid & ſec: au contraire le vent Auftral, qui vient du Midy eſtores-dangereux,par la pestro
AA ij
826
Le Vingt-deuxieſme liure

ce qu'il eſt chaud & humide, qui debilite le corps , & ouure les conduits ; quifaitque A
le venin penetre plus facilement au cæur . Ec celuy d'Occident eſt lemblablement
inſalubre, à cauſe qu'il tient beaucoup du meridional.Et pourcerecauſe, on ferme
ra les feneſtres de la maiſon du cofté qu'ils frappent, & on ouvrira au matin celles qui
ont regard vers le Septentrion & Orient, li d'auențure la peſte n'eſtoit de ce coſtóla:
ilfautfaire & le faut donner garde que nulle mauuaiſe vapeur n'entre dedans. Puis apres on fe.
du feu , es ra du feu par touces les chambres , & on les parfumera de choſes aromatiques, com .
parfumer la me d'encens, myrrhe, benioin , ladanum , ſtyrax, roſes, fueilles de myrte,lauan .
masjon. de , roſmarin , faulge, ballic, ſarrietre, ſerpolec , mariolaine , genets, pommes de
pin , pecites picces de bois de pin , de genéure, & ſa graine, cloux de girofle, oyſclers
de Cypre, & autres ſemblables choſes odoriferantes. Er de ceſte meſme fumec fauc
parfumer les habillemens . On dict auſſi,qu'il eſt bon en temps de peſte de nourrir va
bouc en la maiſon où on habite , & letient-on pour vn fingulier remede contre la
contagion du mauuais air : pource que la vapeur du bouc ayant emplyle lieu où il
u ienn on habite , empeſche que l'air peſtiferé n'y trouue place: laquelle raiſon peut aufli ſeruir B
prend plu- au conſeil de parfumer les habits de bonnes fuffumigations
. Et me ſemble ( fauf B
Book la peſte. meilleur iugement )qu'elle peut aufli eſtre employee à ce qu'on dic , qu'vn homme
à ieun'eſt plus apte à eſtre pris de la peſte,qu'un quiaura mágé , non pasà fatieté, mais
mediocrement.Car auec ce que par le manger Nature fortifice, chaſſe plus aisément
d'elle le poiſon & venenoſité : aum du manger & boire ſe peuvent porter partoutes
les poroſitez du corpsdes vapeurs , qui les cmpliſſansoccuperont les vacuitez que l'air
peſtilenc prendroic . Toutesfois quand eſt du bouc , le vulgaire di &t vne autre rai

Histoire d ſon ,c'eſt qu'vne mauuaiſcodeur châſſe l'autre. Ceſte raiſon eſt ſemblable à celle que
Alexandre Alexandre Benedi&tus recice,a'ſçauoir qu'vn Medecin de Scythic fit ceffer la peſte,
Benedictus laquelle prouenoit de l'air, faiſanctuer tous les chiens & chats , qui eſtans eſpars par
en ſon loure les ruësemplirent l'air de leur vapeur putride : & par ce moyen promptement la peſte
de la peſte. ceſſa. Pource ( dic il ) que celle pourricure changea la nature de l'air, lequel aupara
ſe fait pour la diſlimilitude des choſes, &
forri pour uant eſtoic pernicieux aux hommes : qui
Heare
t
qu'vn venin chaſſe l'autre. On ne doit ſortir de la chambre en temps de peſte,queo
deux heures apres le Soleil leué , afin qu'il ait purifié l'air par ſa clairtė & chaleur , &
C
principalement quand l'air eſt trouble & nebulcux,& en païsde fondrieres, & enui.
ronné
de montagnes.Et faut auſſi ſe garder des grades aſſemblees de peuplc , & prin.
cipalement des dances, d'autant que le corps eſtant eſchauffé & lafić , & que les con
duits ſont ouueres , alors faut qu'on cire grande quantité d'air pour la refrigeration du
caur, & partant s'il eſt infe &ténous donne la peſte par l'haleine & ſueur. Que li quel.
qu'vn voyage audit cemps de peſte cauſec du vice de l'air , & que la ſaiſon de l'anncc
foit fort chaude, ildoit pluſtoit cheminer le nui & que levour, parce que la peſte affauc
& prēd plus facilementdurant la chaleur & ſplēdeur du Soleil,qui ſubrilie, eſchauffe,
c
& rarefie l'air , & qui outre ouurant le cuir rend noſtre corps plus acceſſible à receuoir
C
l'air peftiferć. Partant la nuict eſt plus ſalubre, à cauſe que l'air eſt plus froid & eſpés,
b
Il se fawr toutesfois il ſe faut garder de la pleine Lune , pource qu'en ce temps - là , la nuic eſt
garderdela plus tiede & dangereuſe , ainſi que l'experience le monſtre : conſideré meſme que les
b
pleine Lune bois coupez en icelle ſont plus ſubiccs à pourricure,come experimentent à leur dam
entemps de h
ceux qui en fontbaſtir:la raiſon dece eft , quela Lunc eſtant humide,remplit ( lors D
pilte. P
principalement qu'elle eſt pleine ) les corps d'humidité ſuperflué,donc ſuruičc pourri
ture.Or pour retourner à noſtre propos: le plus ſeur remede de preſeruatiö ,pourceux D
0
qui ne bougent du lieu peſtilenc,eſt qu'auant que ſortir de la chambre, & apresquel
ch
ques promenades, ils ne ſortent ſansauoirdelicuné: pour aucāt que les parties nobles la
du corps (auſquelles le venin s'attache principalemét )n'eſtans encores ſouſtenuës par
les viandes,ne peuuent pas ſe defendre comme ſi elles eſtoient fortifices : ioina aulli

que les veines & arceresnon cncores remplies de nouueau alimēc , attirent & laiſſent
plus facilement entrer le venin , lequeltrouuant place yuide , ſeremparedes parties
D# defien - nobles, & principalement du cœur. Parquoy ceux qui auront accouſtumé dedel
d ner .
ieuner au matin,mangeroncdu pain ' , & beurre frais ſalé, & quelque carbonnade , &
autres bons alimens : & boiront du meilleur vin qu'il leur ſera poſible recouurer.
a
& quiles Les ruſtiques & gens de trauail pourront manger quelque gauſſe d'aulx , ou eſchal 1
qulo fone lottes,auec du pain & du beurre,& bon vin , s'ils en peuuént fournir , afin de charmer
bons.
la brouée,puis s'en irõt à leur cuure, en laquelle Dieu les aura appelez . Les aulx ſont
De la Peſte. 827
ſouuerains aux ruſtiques & villageois, & à ceux qui ont accouſtumě d'en vſer : aufli å
ceux auſquels ils n'engendrent point de douleur de teſte, & ne les eſchauffent par
А
trop, à raiſon que le temperament de ceux là eſt plus robuſte, & leur ſang moins aiſé
à fenflammer:au contraire ils nuiſent aux delicats, comme femnes, enfans, & chole
riques,& à ceux qui viuenten oiſiueré, & qui ont le ſang ailé à s'enflammer: parrant à
iceux les aulxſcroient poiſon,au lieu qu'ils font medecinc aux ruſtiques, auquels tels
remedes ainſi forcs font propres y & ont eſté inuencez par bonne railon , pource qu'ils
contrariene du tout au venin ,à cauſe qu'ils ſont remplis d'vne tres grande vapeur
ſpiritucule, laquelle luffoque , alcere ,corromp, & chaſſe le venin hors du corps. De l'eau
Quant à l'eau,delaquelle on doit vſer en temps peftilent,il faue auoir elgard ſi la pe. qu'on duit
fte prouient du vicedel'air : car alors ne faut vſer d'eau de pluye ,pource que l'air uſer ontērps
dont elle prouient eſt infecté, parcant alors lera meilleur de boire de l'eau des puits de pefic.
fort profonds: au contraire , fi le vice vient de la terre ,on vlera de l'eau de ciſterne, &
de fontaine : & faut attendre à en boire iuſques à ce que le Soleil l'ait purifiee par ſes
rayons : & fion craint qu'elle ſoit vitice,on la corrigera,la faiſant vn peu bouillir,ou la
B ferrer avec acier,ou or,ou argent chaud,ou par mie de pain roſtie ou non roſtie, Or à
fin que tu la puiſſes mieux ellire, cu la pourras elprouuer en trois manieres, à ſçauoir,
par la veuële gouſt, & l'odeur: quant à la vevë, elle te doic montrer claire & verte, si Preuuede la
à la bouchedenulle ſaueur,ny qualité aucune: aufli ne doitpoint auoir d'odeur.Ou . bonne como
tre plus , celle qui ſera toſtefchauffee & coft refroidie , eſt plus legere , & par conſe
peuu bouillir : ic
yn po
quent meilleure:& pour la faire encore plus excellence,la faut faire yn
dy vn peu, car l'eſtant trop elle devient amere & ſalee.

Deſcriptiond'eaux cordialer,electuaires, opiates,pilules, & autres remedes à prendre


par la bouche , preferuatifs & curatifs de la Peſte.
СНА Р. VIII.
Vertus do
l'eam the
E V X qui n'ont accouſtumé & abhorrent à manger au matin , pren risca le .
dront quelque medicament contrariant au venin , & entre tous l'eau The
C riacale eſt tres.excellente , de laquelle, apres s'eſtre habillé , & ayant rendu
„ſes excremens, & fait quelque exercice,il conuientboirevndoig,la mellant auecbon
vin , & d'icelle auſſi on s'en lauera les mains & la face, & pareillemenc la bouche &
les oreilles , & on en tirera auſſi vn peu par le nez. Car elle conforte le cæ : r, chaſſe
le venin loin d'iceluy , & n'eſt ſeulement voile pourprecaution , mais aulli eft propre
pour lacuration , à prendre promptement qu'on le lene frappé, parce qu'elle prouo
Pre che que grandement la ſueur , & partant chaſſe le venin des parties internes aux excer. Deſcription
nes ; & la doit- on faire au mois de luin , attendu que les herbes en iceluy temps font d'icelle
en leur grande vigueur& force. La compoſition en eſt celle. 24. Radicum gentianæ,
cyperi, tormentillæ ,di& amni,enulæ campanx an. Zi.foliorum capſi barbati, cardui
benedi&ti, morſus diaboli , pimpinellæ , ſcabiofæ , oxalidis agreſtis minoris an.m.ß.
fummitacum rutæ p.i.baccarum myrcizi. roſarum purpurearum , forum buglofi,
SUR
boraginis & hypericonis an. zi. mundencur omnia , piſtentur & macerentur xxiiii.
horarum ſpatioin vini albi aut maluatici,aquæ rofarum & oxalidis an.lib.i deinde re.
ponantur in vaſe vitreo , & addatur theriacæ & mithridatij an. zß. fiat diſtillatio in
D
balneo Mariæ. Et l'eau eſtane diſtillee on la mettra cn vne phiole de verre,& dere
chefon y adiouſtera croci zi. terræ ſigillatæ , boli Armenix , ſantali citrini, raſuræ
cboris,limaturæ cornu cerui iunioris prope caput aſſumpri an. zß. Puis on eſtoupera
la phiole,& la laiſſera on fermenter au Soleil par l'eſpace de huict ou dix jours,& ſera
gardec : & lors qu'on en voudra vſer,on en prendra deuxdoigts en vn verre , plus ou
moins, ſelon la force & vigueur des perſonnes. On en peut bailler aux petits enfans
qui encores tercent,& à ceux qui ſont ia ſevrez , & aux femmes groſſes : & afin qu'elle
ſoit plus gracieuſe & facile à boire, on la peut faire paſſer par la chauſſe d'hippocras,
lors qu'on la voudra prendre,y adiouſtant vn peu de ſuccre, & canelle concaſſee. Au
‫ܐܕܐ‬
tres prennent au matin pour precaution,de laracine d'enule campane , ouzedoar,ou R scinespre:
angelique , en lesmaſchano & tenant en la bouche. Les autres prennent de la racine jernariues.
degentianepilee , le poidsd'vn eſcu, & trempeelanuict en vin blanc , & en boiuent
deux doigts au matin à icun : les auprès prennent du vin d'aluyne : autres vſent de
A A iij
828
Le Vingt-deuxieſme liure

conſerue de roſes, de bugloſe, de chicorec , violettes de Mars , fenoüildoux : autres A


prennent de la terre figillee, ou de la corne de cerfratıſfee le poids d'vn eſcu , dedans
vn aufmollet auec vn peu de ſafran, puis boiuent deux doigtsde vin : aucuns pren
nent de l'eau devie ,& y mellenc debon vin blanc,du bol d'Armenie, racine de gen .
tiane, tormencille , dičte ſemence de geneure , cloux degirofle, macis, canelle, fa
Esu cordia, fran,& autres ſemblables,lesfaiſant diſtiller in balnco Mariæ . On pourra aufli vier de
le de grande
efficace. ceſte cau cordiale , qui a tres - grande vercu.24. Radicis ariſtolochiæ longr & rotun .

da, tormentilla, dictamnian .z iii . zedoariæ z ii. lignialoës,ſantali citrini añ . z i. fo.


liorum ſcordii,hypericonis, acetolæ , rutæ , faluiæ, an.Z l. ſeminis iuniperi , baccarum
laurian . z iii . ſeminis citriz i . caryophyllorum , macis,nucis moſcatæ añ . z ii , mafti.
ches, olıbani,boli Armeniæ ,terræ ligillatæ ,raſuræ eboris , cornu cerui an.zi.crocigi.
conſeruæ rolarum , forum bugloſli & nenupharis , theriacæ veteris an . zi caphuræ
zf.aquæ vitæ lib.ſ. vini albi lib.ii.l.fiat diſtillatio in balneo Marię.Ceſte eau ſera reſer
uee en vie phiole de verre bien bouſchee , pour en vſer au matin , comme de l'eau cy
Electuaire deſſus nommee Theriacale , la quantité de deux doigts en vn verre : elle eſt auſi de
B
fore profira merueilleux effect. Pareillement cer electuaire eſt profitable pour preſeruer.
table
pour 24. Theriacę optimę z iii , sadicis tormentillæ , ſeminisiuniperi & cardui benediâi
preferuer.añ.3.1.1 . boli Armenicæ præparatæ z 1. pulueris ele & tuarii de gemmis & diamarg.tri
gidi, raíuræ cornu cerui, coralli rubrian.z.i,cum ſyrupo de corticibus & aceroficato
Opiate ex . citri: miſce , & fiat clectuarium liqiudum in forma opiatæ . De ceſte compofitionen
cellêre con
faut prendre tous les matins la groſſeur d'vne aucline , auec vn peu d'eau de roſes, ou
tre la peſte.
d'endive, chardon benit , ou ſcabicuſe, ou de ceriſes, ou autre caucordiaic : ou en licu
d'icelle vn peu debon vin . Auſſi l'opiate ſuivante eſt bonne & excellente, de laquel
le on peut faire tablettes . 24. Radicis gentianæ & angelicæ , zedoariæ , enulæ cámpa.
næ an . zii : ſeminis citri & accrolę an. zſ. corticis citri ſicci , cinnamomi, bacca
rum lauri& iuniperi , crocian.3 i.conſeruæ rofarum & bugloflian . zi . ſacchariopti
mi quantum ſufficit: formentur tabellæ ponderis 3 13. vel fiat opiata cum æquis par.
tibus conferuæ buglolii & mellis antholati, illa omnia arida escipiendo. Sivousles
'Bonneopia- laiſſez en tablettes, on en prendra vneau matin, & les petics enfans & femmesgroſ- C С
ſes demie : & convient demeurer deux heures apres ſans manger ny boire , fi on ne
vouloit aualler vn peu de vin incontinent apres les auoir priſes. Si vous en faictes
opiate , ladoſe ſera comme des ſuiuantes. 22. Radicum valerianæ , cormencillæ , di,
Cuircopia. &tamni, foliorum rutæ an . zſ. croci , macis, nucis moſcatæ an . 3 B. boli Armenicæ
præparatæ z iiii.cooferuæ rofarum & ſyrupi de limonib . an . quantum fufficit, fiat
opiata ſacis liquida . Autre . 2. Radicumariſtolochiæ vtriuſque, gència . tormentil
læ , di&tamnian.zi
. I. zinziberis z iii , folior, rutæ, faluiæ , mentæ ,pulcgii,an.z ii.bac.
carum lauri & iuniperi, lem . citri an . jili . macis , nucis moſcatx, caryophyllorum,
cinnamomian . 3 ii.xyloales, & ſantalicirrinian. zi . churis moaſculi , maſtiches,ia.
ſuræ eboris , cornu ceruian . fcr. ii. croci z f. boli Armenię, terræ figillatæ , coralli
Conferwai. rubri , margaritarum electarum an . zi . conſeruę rofarum , buglo Mi & nymphæx,
ferà fw.c. theriacæ optimæ & veteris an.z i . ſacchari albiſlimi lib.i. adde fub finem confe &tio
nis alkermes z ii . caphure in aqua rofarum diſfolurę ſcr. i . fiat opiata ſecundumar
tem . La dolc ( era demie dragmeou vn ſcrupule, ou dix grains ſelon les perſonnes.
D
Et
apres l'auoir priſc, on peut boire vn doigrou deux de bon vin , ou quelque eau D
cordiale . Lecheriaque & niechridat fidelement compoſez ſont les principaux de
tous les remedes , & les plus approuuez , en y adiouſtant pour vne demie once de
f
chacun ou enuiron , vneonce & demic de bonne conferue de roſes, ou de bugloſe,

Choix du ou viole, & la pelanceurdetrois eſcus de bon bol Armene preparé , puis le tout bien
2
batcu & incorporé, en faire conſerue ,de laquelle on vſera au matin deux heures de
sheriaque
ſelon le vant le repas , la groſſeur d'vne aueline. Et fauc entendre que le bon theriaquene
ta
temps. doit eſtre recentque de quatre ans, ne plus vieil que de douze ans , & qu'il lail'e ſa la
d
ueur longuement en la bouche:eſtant nouueau ileſt propreaux choleriques: & eftant
If
vieil il conuient aux vieux , & à ceux qui ſont de temperature froide, comme les pitui.
teux & melancholiques : à cauſe de la vertu refrigeratiue de l'opium , qui entrant en
ti
la compoſition du theriaque,recient ſa pleine force pour quelques premieres annees:
en fin par la fermentation eſtant rabatuë , faict que toute la compoſicion demeure
bo
plus chaude. La confection d'alkermes eſt ſemblablement bonne , tant pour prefer.
d
uer , que donner à ceux qui ſont ia frappez de venin . Aufli la rheubarbe tenuë cola
dela Peſte. 829
A bouche, & maſchec au marin, la groſſeur d'vneauelaine, auec vn clou de girofle, eſt
preſeruatiue. Pareillement cete compoſicion eſt proficable pour preleruer quand on compoſs
va cn vn lieu luſpect. 2..corticum cicri & mali aureiſaccharo condicorum añ.3 j. son pré
conſeruæ rofarum & radicis bugloſli an. 3 iij. fem. citriz iij. l. fem. ánili & fæniculi formatine.
añ. 3 I. radicis angelicæ 9 iiij. facchari rotati quant. ſufficit: fiac conditum cooper
tum foliis aureis, quo ycaturex cochleari, ve dixi, in exitu domus : ou 2. granorum Antre
pinimundatorum & piſtacorú, infuſorum in aqua rolarum & ſcabiofæ per ſex horas compofs
añ.3 ij. amygdalarum excorticatarum in aquis prædictis # B.corricum citri & malitiºn.
aureiſaccharo condicorú añ.zj.ß. radicis angelicæ 3 iiij. miſce lecundùm artem ad
formam panis marlicivel confectionis alterius, & teneat fruftulum frequenter in ore.
Pareillement en ce cas ces tabletres ſont profitables. 24. radicisdi&tamni, tormétillę, Tablettes
valerianæ,enulæ campanæ, eryngij añ. 3 B. boli arménicæ, terræ ſigillatæ an.z i.ca- preferus )

phuræ , cinnamomi , ſeminis oxalidis agreſtis, zedoariæ añ.9 j. pulueris ele & uarii tines.
diamargarit.frigidiş ii.cõleruæ rofarum ,bugloſli,corticiscitri conditi,mithridatii,
B theriacæ añ.3 i, ſaccharioprimidiſſoluti in aqua ſcabiofæ & cardui benedi&i quan .
cum fufficit: fiant tabellæ ponderis z i vel 3 8.On prendra de ces tabletres tousles 1

jours à icun,deux heures devant le repas,commedeffus eft dia.Outre plus,lespilu. RuPilules


fus re
de
lesdela compoſition de Rufus ſont fort approvuees des do &tes Medecins, pource commadées
qu'on les a crouuecsde grand effect :& dit ledit Rufus, que iamais ne veid perſonne des doctes
en auoir vſè ,qui n'air elté preferué de peſte, pourueu que les parties nobles n'euſſent Medecins.
cſté ia giandement infectees. La compoſicion deſdites pilules eſt telle . 2. aloes he
paticæ 3 B. ammoniaci ele &tiz iii. inyrrhæ z ii. B. maſtiches 3 ii crocigr.vii, concū .
dantur omnia ,& incorporencurcum lucco malicierii ave lyrupo delimonibus , & fiat
maſſa Laquelle ongardeta bien enueloppee dedans vn cuir : & lors qu'on en voudra
vſer ,on en formera vne pilule ou deux ,qu'on prendra au matin deux heures ou trois
deuanc le repas , ou bien lepoids de demy eſcu ou d'un eſcu , ſelon la volonté d'vn L'ens d'on
chacun. Et apres les auoir priſes , on peut prendre deux doigts de bon vin ou d'eau zeille red
lle le
d'ozei , laquel a pareil lement
grande vertu cõcre le venin peſtiferé ,à cauſe qu'el fiste à la
clceftdeten ueſubtance , &gar
trouué par experience , qu'
deydeputr
à celu aurotion
qui en efac it man é :meſ
pargéſondeuacetantolitqu' mcspiononale peste
vn ſcor
morde,iln'aduiendroit aucun mal.Ec quanrà la faculté des choſes qui entrent en la
ca cópoſicion deſdites pilules,l'aloës nettoye &purge , la myrrhe reſiſte à pourriture , le
DI
maſtic robore & fortifie,& le ſafran relioüit lesfacultez: pattant nous conclurons
qu'elles ſont de merueilleux effect,commela raiſon & experience le demonſtre. On
les peut donner en pocion,comme le meſmc Autheur faiſoit.
Autres pilules pourmeſme effect, bien experimentées.
2.aloës zi.myrrhæ ZB crociorientalis (cr. j.agaricicrochiſcati 3 j. rhabarbariele
&ti puluerilătizj.cinnamomielectiſcr. ij.maſtiches z j.l.ſeminiscierigr.xii.pulueri.
ſentur omnia vedecet,& cum ſyrupo capillorum veneris fiac maſſa.Laquelle on gar
dera bien cnueloppee dedans du cuir, & en prendras comme delus, plus ou moins,
t22 ༢
ſelon qu'il ſera neceſſaire. Et fi leldites pilules eſtojét trop dures , on les amolira auec
112
D
du ſyrop de limons,ou autres ſemblablesà cet effect.Ces pilules qui l'enſuiuent ſont
2013
pareillementdegrande operation . 2. aloëslocęžij.croci zj. myrrhæz f. ammon.
diff.in vino albo žj.mell. rol.zedoariæ ,fantal.rubr.añ.zi.boliarmen . præp. 3 ii.co.
rallirubrizſ.caphuræ fcr.B. fiane pilulç ſecundùm artem. La doſe pour le preferuer Le marin
et en prendre tous les matins vne, & fionſe veut purger, on en prendra vne dragme propre aux
au matin, qui eſt le temps le plus propre à faire les euacuations , à raiſon que lc lang enacuatiosa
14
domine,& eſten fa force & vigueur, auſſique les vertus ſont reparées par le reposde
la nuia,& que la digeſtion eſt faice.Ceux qui ont le flux des hemorhoides exceſſif,ne
doiuent vſer d'aucunes pilules où il entre de l'aloës, depeur d'augmenter le flux, &
le faire trop grand & impetueux. D'abondant,les Anciens eſcriuent , qu’apres la Remede
mort du Roy Mithridates on trouua par eſcrit de la propre main ,en ſon cabinet en-fingulier du
tre les choſes plus precieuſes, que ſi quelqu'vn prend deux noix de noyer (ciches non Roy Mi
moiſies,deux figues, vingt fueilles de ruë , & deux ou trois grains de ſel, pilez & tondares.
broyez enſemble, & en mange la groſſeurd'une aucline , puis ſoudain auale vn peu
devin,& ce deux heures auant que prendre le repas , ceſtuy iour celuy quien aura
AAiiij
830 Le Vingt-deuxieſme liure
La rue en- pris,ne peut eſtre en danger de prendre aucun venin . Outre plus ce remede eft fim. A
nemie aux gulier àceux qui ont eſtémordsou picquez de quelque beſte venencule ,àcaule dela
femmes
grofjes. ruë principalement : toutesfois les femmes groſſes n'en doiuent vſer aucunement,
de peur denuire à leur fruikt, principalement pour le reſpect de la ruë, qui eſtand
chaude & feicheau croiſieſme degré, purge violemment l'amary , & faic couler les
mois promptement :donteſtant ſubftraite la nourriture à l'enfanc, il eſt neceſſaire
qu'il meure. Oneflira les remedes cy-deſſus mentionnez au gouſt de chacun, &les
changera on parfois,de peur que nature n'en face habitude ,& aulli pour la diverſité
des temperamens, & fion n'en trouuede l’vn,on prendra de l'autre.
Desremedesparticuliers, ou choſes qu’on appliqueparledehors.
СНАР . IX .

Vire les choſes cy.deuant eſcrites à prendre par le dedans ne faut en


Remedes cor negliger decenir en la main quelques choſes aromatiques, aſtrin
mannels. gentes,& pleinesde vapeurs, leſquelles ayent proprieté dechaſſercet
air peftiferé & empeſcher qu'il ne trouue place en aucune partie de B
noltre corps : auſſi qu'elles ayent vertu de roborer le cerueau , & autres membres
principaux , leſquels eſtans fortifiez , conforcone pareillement toute l'habitude du
corps : comme ſont la rue,la meliſſe , roſmarin , ſcordium , ſauge, abſinthe , cloux de
girotle, muguette, ſafran, racine d'angelique: racine de liueſche , qui a pareille ver
tu, & autres ſemblables,leſquelles on fera tremper vne nuict en fort vinaigre & cau
de vie, & en prendra - on de toutes enſemble la groſſeur d'vn auf , enveloppecen yn
mouchoir, ou en vne eſponge trempee & imbuc en ladicte eau :Cariln'y a rien qui
L'esföge eft contienne plus les vertus & eſprits des choſes aromatiques & odorantes que fait
propre pour l’eſponge, & partant on en doibt pluſtoſt vſer que d'autre matiere , ſoit pour fairet
contenir les aunez,ou pour appliquer ſur le cæur, pour faire epithemes & fomentacions. Or
choſes 410- telles choſes odoriferantes ſeront diuerſifiees ſelon que l'air ſera chaud ou froid:
matiques.
comme pour exemple, en Eté vous prendrez vne eſponge trempee en bon vinaigre С
roſat & eau roſe autant d'vn que d'autre, canelle & cloux de girofle concaſſez,y ad
iouſtant vn peu de ſafran , & la tenez enucloppec en la main dedans vn mouchoir, &
ſentez ſouvent , ou faites ainſi. 24 abſinthii ñ ß . caryophill , numero x. radicis gen
tianæ & angelicæ an 3.ij.aceri & aquæ roſar, an.3 . ij.theriacæ & mithridatij añ.3 i,
Le tout loje pilé enſemble , puis enucloppé en vn mouchoir auec vne petite eſponge:
laquelle gardera que la liqueur ne tombe . On peut auſli enfermer celles choſes en
des bouertes de bois odoriferant, commedegeneure, cedre,cyprés ,lelquelles ſeront
trouées en pluſieurs en droits , & tenues pres laboucheen les flairant loquent.Aufli
en pareil cas tera bon de faire des pommes de fenteurs, commeceſtery. 94. Santali
Pommes de cicrini, macis,corticum cicri,roſarum ,foliorum myrtian. 3 ij . benioin,ladani,ſtyra
finteints cis añ. z.f.cinnamomi,croci an . 3 ij. caphuræ & ambræ añ, 3 j.algaliæ , molci añ .
pour l’Esté.
gr. iij.cum aqua roſarum infufioniseragacanthi,formeturpomum . Autre.2. roſaú
rubrarum ,fiorum nymphææ,violar,añ.3. j. Tantalorum omnium, coriandri,corticis 0

citrian . z . ſ.caphura 3.j.pulueriſenturomnia,& cum aqua rofarum & tragacantho


fiat pomum. En Hyner vous pourrez vſer d'une telle pomme. 24. ftyracis calamita,D. C

bcnioin añ. z j . molci, algaliæ añ . 3.j.caryophyllorum,lauanduiæ,cyperi añ.3. 2j. ra &


Pommes de
fent #15 dicisireos Florentiæ & calami aromatician.z.ij.f.ambræ griſex Z.iij. gummitraga 0
C
pour l’bywer Canthi diſſoluti in aqua vitæ & rofarum quantum fufficic: fiat pomum.On.peut pa
reillement porter ſur ſoy des poudres aromatiques, comme d'ambre , ſtyrax, irisde
Poarlo'sar- Florence,noixmuguette,canelle,macis,cloux de girofle, ſafran, benioin , muſc,cam.
uzatiques. phre,roſes,violettesde Mars,ſquinant, mariolainc, & autres ſemblables , & les ſentir
au nez.Et de ces ſimples, on en pourra faire de compoſees, comme ceſte cy. 2. radi f
cisircos Florentiæz i . cyperi, calami aromatici, roſarum rubrarum an.z l. caryo.
phyllorum z 1.ſtyracis calamitæ z j . muſci gr.viij . miſce, & fiat puluis in lacculo. 1
Autre pos 2.radicisireos Florentiæ z ij.rolarum rubrar, ſantali albi, ſtyracis calamiræań.zj. 1

dre aroma- cyperi z j. calamiaromaticizj. maioranæ Z . caryophyllorú z iij. lavandula zi.co.


tique. riádrizij.moſci boni-3 1.ladani, benioin añ.zj. nucis moſcatæ, cinnamomi an. 3 ij.
de la Peſte. 831
A fiat puluis ſubtilis,concludatur ſacculo.Dauantage,on portera ſur la region'du ceur
ſantal citrin ,macis,cloux de girofle,canelle,ſafran , & cheriaque: le tout concaſſé,in ,
corporé,& arrouſéde vinaigre bon & fort, & eau roſe en Elté , en Hyuerdebon vin
ou maluoiſie. Tous ces remcdes ainG forcs, & quiont vne grande vertu aromatique
& vaporcuſe, pleins d'eſprits ſubtils, fonc au corps de merueilleux etfects, forcifieno,
les parties principales, ſtimulans la vertu expulſiue à chaſſer le venin hors , & prohi
ber qu'il n'entre dedans: au contraire l'odeur puante caule vne naulec ou volonte
de vomir, & defaillance de cæur. Parquoy ceux qui conſeillent en temps de peſte ?

deprendre l'odeur des retraicts & autres lieux infects, font mal; & contre l'opinion
d'Hipocrates,comme nous demonſtrerons cy apres. Or il ne ſuffit pas ſeulementpor. Ablution id
ter preſeruatifs ſur ſoy,maison ſe pourra lauer tout le corps de vinaigre , auquelonade soat
aura fait bouillir graine degenéure ,laurier,racinc de gentiane, ſouchec, hypericon , corps.
& autres ſemblables, & ydelremper du therjaque ou mithridat. Or le vinaigre eſt
Vertu da
B contraire aux venins tant chauds que froids, & garde de pourricure, d'autant qu'ileſtvin
froid 8 lec,qui ſont deux choſes contraires & repugnantes à la putrefa &tion : ceque aigre.
l'experience monſtre : car en iceluy on garde corps morts,chairs,herbes,fruits,& au
tres choſes,ſansqu'elles ſe pourriffent.Et ſi quelqu'vn veutobiecter que le vinaigre ,
n'eſt voile à ſe lauer le corps à cauſe qu'il feroit obſtruction des pores, & empeſcheroic
la perſpiration (ce qui eſt fort conuenable àpourriture ) ildoit auſſi conſiderer qu'on
nelemet ſeul, &que les qualicez froides & ſeiches ſone corrigees par les autres choſes
mellées auec luy. Et partant eſt bon d'en vſer, comme nous auons dit,& qui ne ſe Ablution
voudra lauer tout le corps,pour le moins on ſe frottera les aiſſelles & la region du particuliere.
cæur, les temples,les aines,&parcies genitales , parce qu'elles ont grandcontentement
aucæur , & à toutes les parties nobles : parquoy feront frottées & lauées de ce lauc.
ment,ou d'autre fait debonnes ſenteurs,ou de cer onguent . 2. Olei roſati ziij.olei
defpica Zij.pulueris cinamomi,caryophyllorum an.zj.ſ. afla odorat Žb.moicigr. vj. Onguělpour
с theriacæ zB.cerebenthinæ Venetæzil . ceræ quantum ſufficit,fiat vnguentum mol. frotter les
parties for
le. On peut pareillement mettre és oreilles vn peu d'huile de maſtic, ou de Cau- nitales.
ge , ou de cloux de girofle, ou aucres semblables , y delayant yn peu demuſc ou
de ciuette.

D'aucunes choſes que l'on doit obferuer outre les precedentes ,pour la preferuation.
CH A P. X.

N cet endroitt ie veux bien encore declarer aucunes choſes, leſquel.


les pourroient nuire à vn chacun , & le rendre plus idoine à prendre la
eſt bon pour la preſervation de les obſeruer. Et ſur
peſte: partant auſſi eft
toutes autres choſes faut cuiter la frequencacion des femmes , d'autant
que par icelles les forces & vercus ſont diminuees , & les eſprits fe reſoluent & af.
foibliſſent, principalement coft apres le repas , pource qu'on debilite l'eſtomach,
& par ce moyen ſe fait crudité , de laquelle procede corruption , & autres infi
goba
rohi D nis accidens: parquoy on peut conclurre que Dame Venus eſt la vraye peſte , ſion
n'en vſe auec diſcretion. Aufli ſe faut garder de viure en oiſiueté, & manger & boire
ſans diſcretion : car celles choſes engendrent auſſi obſtructions & deshumeursvi
cieux,dont ceux qui font tels excez,ſont plus luiers à prendre la peſte. Și les femmes Purgation
fontreglees de leurs Acurs , cela les preſerue beaucoup, aufli ſi elles ſont recenuës, des femmes.
cela leur peut grandement nuire , parce qu'en temps de peſte elles ſe corrompent fa:
cilement: parquoy elles doiucnt prendre gardeà les provoquer, comme nous decla,
ferons cy - apres. Pareillement ceux qui auront vieils vlceres, fiſtules & galles, ne les Desvlceres,
La feronc cicatriſer en temps de peſte,maispluſtoſt en feront de nouuelles,afin que par fiftules, com
icelles, comme par vn elgour detout lecorps , le venin , fi aucun y en auoic en nous, galbes.
ſe puiſſe cuacuer ſans s'y accroupir aucunement. Auſſiceux qui ont flux de ſang par
lenez,ou par hemorhoïdes,le laiſſeront fluer, & ne l'eſtacheroncs'il n'eſtoit excellif.
FB

Bref en temps de peſte ne faut retenir aucun humeur vicieux dedans le corps, ny pa
reillement faire trop gráde euacuation. Oucre plus on ſe doit gaider audic temps
d'achepter choſes eſquellesl'air peſtilent ſe peut couuer aisémet & garder , comme
:

enchanyre,lin ,lietsoù auront couché les peltiferez, fourrures, habillemens dedraps Hàbitatiūs
de laine,capiſſeries,& autres ſemblables, Dauantage , il ne faut faire la deincure pres ad fuit
832 Le Vingt.deuxieſme liure

les cimetieres ( & principalement pres de ceux eſquels les corps morts ne ſont en А
terrez profondement,commcordinairement on faictàlain & Innocent,defaçonquc
quelquefois les chiens les deterrent & mangent ) . ny pres des voiries , eſcorcheries,
poiſſonneries , tanneries,teinturiers, chandeliers , frippiers ,revendeurs, peauflicts,
conroycurs, & tous lieux où on fond les meraux ; ny louffrir fiens pres la maiſon, &
principalement celuy des pourceaux,ny cloaques ,caux croupies & charongneuſes,
& ſemblables choſes infe &tés & puantes. Dauantage, ne faut aller aucunement à la
Il faut cui. ſelle és retraits où on ietreles excremens des peftiferez. Auſſi faut euiter la frequen
ter ceux qui tation de ceux qui hantent lesmalades de peſte, comme les Medecins, Chirurgiens,
banteniles A pochicaires,Barbiers ,Preſtres ,gardes,fecuiteurs,& foſfoyeurs qui enterrét les corps
malades.. mores de peſte car iaçoit qu'vn homme n'ait la peſte ,ncantmoins venant de l'air
peſtiferé, la peut porter auec foy en ſes habillemens. Ce qui eſt cogneu par experien
ce : que ſi on demeure quelquecempsen la boutique d'un parfumeur, lortant de là
on ſenc le parfum , bon ou mauvais à raiſon que l'exhalation & vapeur du parfum
s'eſtend parmy l’air qui eſt alentour,lequel entre en nos habillemés,& par cemoyen B
baille l'odeur qu'il a receu des drogues du parfumeur :aufli l’air peftiferé fait le ſem
blable, partant faut cuiter telles choſes. Finalement il faut auoir égard aux choſes
appellées non nacurelles, deſquelles nous auons ia paravant touché aucunes , & ad . B
iouſterons encores , qu'il faut cuiter dele couroucer grandement; car par la cholerc
il ſe fait grande ebullicion du ſang & des eſprits , & dilatation des ouuertures & con
duits , & par ce moyen l'air peftilent en tel cas engendre promptement la fieure peſti.
lence,cequ'on a veu aduenir ſouuent. Au contraire , il ſe faut tenir ioyeux en bonne
& petite compagnie, & par fois oüir Chantres & inſtrumens de Muſique, & aucunes
fois lire,ou oüir lire quelque le & ture plaiſante, & principalement de la lain &te Eſcritu.
re. Dauantage, il faut euiter le trop veiller la nui& ,les gráds & exceſſifs mouvemens,
l'ardeur du Soleil , la faim & ſoif, parce que telles choſes eſchauffenc les eſprits, &
cauſent la ficure ephemerc ,de laquelle prouient ſouvent la peſtilētielle. Que diray
ic plus ? ceſt que ſi quelqu'vn eft contraint de faire fa reſidence en vne maiſon ou
chambre d'vn peſtiferé,illa fauc auparauant parfumer & tout reblanchir auecdela
CI
chaux. Car le venin peftiferé & contagieux s'attache longuement aux parois.
C C

De l'office des Magiſtrats & officiers publiques ,qui ont la charge de la police.

CHAP XI. P
C
De tenir
Sontes clou ES Magiſtrats doivent faire tenir les maiſons & ruës nerces,

fes actres. & n'y ſouffrir fiés, ny autres ordures, & faire porter les beſtes
CE
mortes, & autres immondices loing de la vilic,& les encerrer
b
profondement:aufli faire tenir les rivieres,puits & fontaines
&
nettes de toute impurité : pareillement defendre expres de 1
ne vendre bleds corrõpus, & chair in feite aux boucheries ,
1
CC
ay poiſſons alterez & corrõpus.Ils doiuent defendre leseſtu
CI
ues & bains,àraiſon qu'apres qu'ó en eſt ſorry ,la chair& cou
ce l'habitude du corps en cft ramollie , & les pores ouverts: D OP

Fane fugl & partant la vapeur peſtiferce peut entrer proprement dedans le corps,& faire mou.
les elmues. rir ſubitemēt:ce qu'on a veu aduenir pluſieurs fois.Ils doiuērchaffer & cuer les chičs

& chats,depeur qu'ils n'apportēt la peſte des maiſons aux autres , pourcequ'ils peuuét
manger le reſte des malades peſtiferez, ou leurs excremes , & par ce moié peuuétpré
dre la peſte ,& la porter ailleurs: coutefois rarement en ſont malades, pource que leur
Des chiens
Gchats. temperament n'y eſt point diſpoſé. Ils feront viſiter les malades parMedecins,Chi
rurgiens & Apoticaires gens de bien , experimentez , & ſçauront ceux qui ſerot peſti.
ferez , & les ferõtſequeſtrer:les enuoyans aux lieux eſtablis pour les faire traiter,ou
bien les ferót enfermer en leurs maiſons(ce que toutefoisien'approuve pas,maisplu

De niache ftoft leur defendre la'conuerſation des ſains ) & les enuoyeront penſer & aliméterà
ter des meu leurs delpens, s'ils ont dequoy ; & s'ils ſont pauures, aux deſpens des deniers commús
bles des per de la ville. Auſli ne doiuenç permettre que les citoyens meccenc en vente aucuns

1 Biferez.' meubles de ceux qui ſont morts de peſte. Ils doiucne fermer les portesde leur vil.
de la l'elteni 833
A les non encorentachées du venin, pour obuier que les voyageurs venans de quel.
que licu infe &t ne leur apportent la peſte: car ainfi qu'vne brebis galtcute peuc Infe:
éter cout vn croupeau, aufli vn peftiferé peut infecter coute vne ville. D'auantage,
ils doivent faire pendre vne nappejou autre ſignal aux feneſtres des maiſons où aua
cuns ſeront morts de peſte. Il faucaufliqueles Chirurgiens, & ceux qui conuerſent
auec les peftifercz ,portent vne verge blanche en la main lors qu'ils iront paria
ville, à fin qu'ils faſſent retirer le peuple arriere d'eux. Pareillement ils feront en
terrer promptement les corps morts , parce qu'ils ſe corrompere & pourriſſent plus.
en vocheure, quene feronten trois iours ceux qui ne ſontmorts depeſte, & d'iceux? Y
s'eſleuent certaines vapeurs putrides par exhalation fort feride, voire plus ſans com
paraiſon,quelors qu'ils viuent, pour l'abſence de la chaleur naturelle quitendit en
bride,& temperoit la pourriture : & de faict, on void que les corps mores de peſte ne
ſontmangez d'aucun animal,meſmes les corbeaux n'y couchent point; & s'ils en
mangcoyent, ils mourroyenc ſubitement. Car combien que vrayement les eſprits
B des corps morts ne ſocommuniquent pas ſi aiſement comme des vjūans, à cauſe de
l'exſpiration & tranſpiration perdue, & fonc ils plus pernicieux . Davantage pour "Signes de
cognoiſtre qu'vn homme eſtmort de peſte, c'eſt que toute la charnure de ſon corps corps mort
de peße.
eſt foremolaltre, ce qui eſt cauſe de la putrefaction : cac bien que cete molleſſe fuſt
aulli le malade eſtanevif, coutesfois à cauſe de la pourriture augmentée, elle eſtauſſi
augmentee , principalement apres quela vie & chaleur naturelle eſt elteinte. Dont
cognoiſſant tant par les ſignesdeſſusdics,que par ceux qui auront precedé en lama
ladie , qu'vn homme ſera mort de peſte, on le doit encerrer en vn lieu à ce deſtiné le
pluſtolt que faire le pourca , commenous auonsdit . Or pource qu'entre toutes les Lefeu pura
choſes qui peuuent re&tifier l'air ,le feu eſt le plus requis & ſingulier, on imitera en fie lain
cecy Hippocrates ,lequel (ainſi que les Anciens nous ont laiſle par eſcrit) fieceſſer
Ynegrande & merueilleuſe peſte en la ville d'Athenes, en faiſant faire grands feux
la nuict par les maiſons , & parmy les cuës de la ville, & aucour d'icelle, & ietter für la
braiſe choſes odoriferantes ,comme genéure , terebentine', geneft, & ſemblables
choſes rendant grande fumée aromatique , & par ce moyen la peſte ceſſa : parquoy
C les citoyens luy firenceriger vneſtatuë d'or au milieu de la place,& par cuxfut adoré
I comme un Dieu & conferuateur du pays : ce quciamais n'auoit eſté fait'à aucun .
Outre plus Leuinus Lemnius au liure 2. De occultis nature miraculis, chap. 10 dit, Hiffoire de
que la peſte eſtantà Tournay ,les ſoldacspour y preuoir , mercoient de la poudre àlamaniere
canon ſansboulet dedans les pieces d'artillerie,qu'ils delaſchoient la nui&, & ſurle de purifer
poin & dujour :ainſi par ce ſon violent & odeur fumeuſe , la contagion de l'air fur l'air par
corrigée & chaſſée, & la ville deliurée de peſte. Parcant les Magiſtrats pour bien coups d'aro
l'acquiter de leur charge enuers la Republique feront auſſi touces choſes peceflai- tillarie.
res pour preſeruer leur ville. Que diray.ie plus ? C'eſt qu'ils doivent auoir l'ailfur
certains larrós , mcurtriers & empoiſonneurs,plus qu'in humains, quigreſſent & bara
boüillent les parois & portes des bonnes maiſons de la ſanie des charbons & bolles,
& aurres excremens des peſtiferez: à fin delesinfe& er, pour puis apres auoirmoych
d'entrer dedans, piller & deſrober,voire eſtrangler les pauures malades en leurliet :
‫مشابه‬ cequia eſté fait àLyon l'an 1865. Dieu,que elshalands meritent grande punition
exemplaire. Ce quc ic laille àla diſcretion deſdics Magiſtrats, quion chargedela
D Police.
ICMS
‫ت‬ !
1 . ‫نه ده‬
olin , C.

6.
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20 . 1 : " 7:10
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22. . ina 9 ..
834 Le Vingt-deuxieſme liure
A
Comment l'on doit proceder à l'election des Medecins, Chirurgiens & Apoticaites,
pour medicamenter les peftiferez.
C H 4 P. XII.

Digreßion Vant aux Medecins , Chirurgiens, & Apoticaires , leſdits Magiftrats elli.
Sur la faute sont gens de bien & experimentez pour lecourir le pauurepeuple,non par
commune
des Magia le fonde trompette,faiſansproclamer(pour auoir bonmarchéd'vnemau
Arats. uaiſe marchandiſe )que s'il y aaucuns Compagnons Barbiers & Apoticaj.
res, qui veulentpenſer les peſtifcrcz, qu'ils ſeront pour cela receus Maiſtres.O Dicu!
quels bons Maiſtres: en lieu de guarir , ils font le plusſouvent par leur imperitic
ouurir le Ciel & laTerre,parce (peut -eſtre) qu'ils n'auront iamais veu ny cogneuu yn
ſeulmaladede ceſte maladie : parquoy ils ſeront cent fois plus à craindre quc les bric
gans & meurtriers guetcans par les bois & chemins, parce qu'on les pour euiter,&
chercher yn autre chemin : mais le Chirurgien eſt cherchédu pauore peſtiferé, qui B
tend la gorge; eſperantauoir ſecours de celuy qui luy ofte la vie. Que s'ils prennent
quelques Medecins & Chirurgiens experimentez , ſe ſera par fauſſes promeſſesou
par violence, menaçant de les chaſſer à iamais de leurs villes. Ie vous laiſſe à penſer,
Meſſieurs, comme les pauures malades peuuenreſtre bien traiccez , fi ceux quiſont
ordonnez pour les medicamenter , y ſonc employez par ceſte force & violence :puis
l'accidenc paſſé, ſont caſſezde leurs gages : & voila les pauures Medecins, Chirur
Onfaisceax giens,Apothicaires& Barbiersàblanc
qui oneaßio tucz àpenſer les peſtiferez, ſont
leſquels ayanscefte marqued'auoireſtécõlti
fuis apresdecouc le monde comme la peſte meſme,
Vé auxpe- & ne ſont plus appelez à l'exercice de leur are : puis leurs compagnons les voyans
Riferezo apres quaſi mendier leur vie, doucans detomber puis apres en cel deſaſtre de padure
té, qu'ils craignentcent mille fois plus que la peite , n'y veulent aller : car c'eſt vno
Mojës d'a grande peſte à l'homme den'auoir pointd'argent pourſecourir fa pauure vie. Par
2
voirgens de tantie ſuppliemeſſieurslesMagiſtrats qu'ils eſliſent(commei'ay ditògens bien cxpc
Sfanair rimentez pourſecourirlesmalades peſtiferez , & leurdonnentunepenſion honncc c
pourpenſer Ite, non ſeulement pendant laneceſité,mais toute leur vie. Adonc ne faudra nulle
les peftife- trompette:mais au contraire les plus experimentez ſe preſenteront volontairemene
reza au feruice d'eux, & de leurs citoyens. (

Ce quedoiuent faireceux quiſerontefeuz à penſer medicamenterlespeftiferez. C

CHAP XIII.

Remierement il faut qu'ils conſiderče qu'ils ſont appellez de Dieu ſ


1
à cece vocation pourexercer la Chirurgic: partant y doiuencallee . f
d'vn grandcourage ſans aucune crainte, ayās ferme foy que Dieu 1
nous conſerue& ote la vie ainſi & quand il luy plaiſt:toutesfois Ć
( comme i'ay dic cy deuant) ne faut ncgliger ni melpriſer les reme.
Quelles des preſervatifs, ou autremêt nous ſerions accuſez d'ingratitude,
Cuacuations veu que Dieu nous les adonnez ; ayant tout faict pour le bien de D
ſont requi.l'homme. Doncques les Chirurgiens qui ſeront appelez pour medicamenter les ma- D f
foscow lades de peſte, ſe feronc purger & ſaigner s'ils en ont beſoin, afin de rédre leurs corps
qui basensnets,& non diſpoſez à prendre ce venin : puis apres ſe feront deux ouuercures (s'ils
'Los peflife n'auoyent quelquc vlcere quicoulaſt)aucccauceres potentiels :l'vne au bras droit yn (

(
peu au deſſous du muſcle Epomis, l'autre trois doigts au deſſous du genouil ſeneſtre
partic externe:cat veritablement on a cogneu par experience,que ceux qui avoyent
telles ouuercurcs,n'onceſté ſujets à prendre la peſte,& n'ont receu aucunmal.com
bien qu'ilsfuſſent iournellemét auec les peftiferez.Pareillemét ils ſe lauerör bien lou.
uent tout le corps auec ceteeau, laquelle a grande vertu aromatique , & eſt fort plei
"Esuprefer- ne d'eſprits vaporcux & ſubtils,& du tout contraires à tel venin . 2 aquæ rofarum ,
warisc aceti roſati aur lambucini,vinialbi aut maluatician.tvj.cad.cnulæ campanæ,ange
licæ ,gentianæ ,biſtortæ, zedoariæ añ .z iij.baccharum iuniperi & hederæ añ.3 ij. lal
uiæ ,roriſmarini,ablyochij, utxan.m.j.corticis citriz f.cheriacæ,mithridacijañ.zj.
conquaſſanda conquallentur, &bulliant lencoigni, & feruentur ad vſum.
Oaſe
de la Peſte. 835

А On ſe lavera tout le corps de ceſte eau avec une eſponge, la faiſant vn peu tiedir. Ec
meſmes conuiét en lauer la bouche , & en tirer vn peu par le nez , aufli en meccre quel
que pecite quantité dedansles oreilles . Ils doiuent pareillement porter & poſer sur la >
deſcrit cy Des fackers
region du caur yn ſacher ou epitheme, ſemblable à ceux que nous avons
deuant. A ce propos lean Baptiſte Theodoſe en la ſeconde de ſes Epiſtres medicina-pour gron dla
os res
les , clcrices à Athanaſe Medecin Florencin , dic eſtre vtile qu'on porte de l'arſenic où CONI
autre poiſon ſur la region du cæur , afin qu'il accouſtume le cæur au venin , & que par
ainſi il en ſoit moins offensé, d'autantque tous veninscherchent lec @ ur . Toutesfois
tu noteras ſur ce propos ce que nous en auonsdic auparavant. Leurs habillemens (e
ront de camelot,large d'Arras, latin ,caffecas, ou ſemblables. E « s'ils n'ont la puiſſaocc,
ils auront du marroquin ,ou creilly d'Allemagne,ou aucre beilc coile noire, & nonde
drap, ny de friſc, ou de fourrure,de peur que le venin n'y ſoit reſerué , & qu'ils puiſſent
4 porter la mort aux lains. Ils changeront louuent d'habits , chemiſes, & de linceux, li
leur commodicé le porte , & les parfumeront en fumee de choſes aromatiques: & lors Castion en
qu'ils approcheront des malades,ſe garderont de prendre leur haleine , & l'odeurde abordat un
peftifeil.
leurs excremens , & pareillement de ſecouutir de leurshabillemensou couuerture, ny
B
manger & boire auecques cux , ou le reſte qu'ils auront touché de la bouche. Plus, il
Ficus leur conuient deſieuner de bon matin : & s'ils abhorrent le mairger ,comme font au
L. cuns,en lieu d'alimens ils pourront prendre quelques mcdicamcns preſeruatifs, delo
quels nous avons cy deuant fai & mencion : & lors qu'ils approcheront du malade , ils
tiendront en leur bouche vn clou de girofle ,ou vn peu de canelle , ou de racine d'an
gelique , ou graine de genéure,ou autres choſes alexiteres,pour occuper & emplir les
Ipatioficez vuides ,& ainſi la vapeur peftiferec ne pourratrouuer place pour s'y loger.
Hiſtoire ado
l'allegueray icy pour exemple, du danger qu'ily a de hancer les infectez,ce qui m'ad .nenuealan
OBS uine vne fois allant penſer vn peftiferé qui auoit vn bubon peſtiferé cn l'aine dexcre , theurvifirmo

& deux grandscharbons au ventre : pres duquel eſtant arriué , ie leuay de deſſus luy lo vx pefifert.
drap & la couverture ,dont apresmevint ſaiſir vne odeurtres -feride,prouenant cant
de la ſueur de ſon corps, que de l'exhalarion pucride du coulement de la bouë de ſon
apoſteme & de les charbons : & lors ayant eſtéenglouty de ceſte vapeur, ic combay
ement à terre commemort , ainſi que fonc ceux qui fyncopiſent, c'eſt à dire , à
penlu с ſubit
ne fin quile cæur defaur ,mais ſans aucune douleur , ny maldecæur, fignc manifeſte que la

voon : ſeule faculté animale eſtoit offenſec : puis coſt apres m'eſtant releué, il me ſembloit
que la maiſon tournalts'en deſſus deſſous, & fus contrainc d'embraſſer vn des pilliers
dulict où eſtoit couché le malade ,autrement is fuſſe tombé de rechef. Et ayant quel
que peu de temps repris mes eſprits, i'eſternuay dix ou douze fois aucc telle violence,
que le ſang me ſortit par le ncz:qui fur cauſe, à mon opinion ( ſauf meilleur iugemét )
que la vapeurpeſtiferee nc me fit aucune impreſſion. Or ic laiſſe au Lecteur à philofo.
pher ſi la mort ne s'en fuſt pas enſuiuie , n'euſt eſté la force de la vercu expulcrice de
monccrucau , veu que tous mes ſens, & principalement la faculté animale , me de Conſeil de
o
poc Ausbeuta
faillirenc en vn moment ; qui ſont les inſtrumens de l'ame. Pour ces choſes ic con
COFC
feille tantaux Medecins qu'aux Chirurgiens, meſmes à tous ceux qui frequentent
ceux qui ſontinfe&tez de ceſte pernicieuſe maladie , qu'ils ſe gardent, tant qu'il leur
Mi lena
ſera poſſible,de receuoir leur haleine & vapeur de leurs excremens , tane gros que li
quides & vaporeux :auſſi qu'ils deſieunent les marins , ou prennent quelque contre
D
POT poiſon,auparavantque de les aller voir , afin de mieux ſe munir contre le venin po
WWW . Itiferé. Et pour concluſion, obſeruera toutes choſes que l'on cognoiſtra eſtre profi.
tables oo nuiſibles en ceſte maladie peftilente , afin de les ſujurc ou euiter ſelon qu'il
en ſera beſoin , recognoiſſant couresfoisque la preſeruation gift plus en la prouidence
.ήκει
diuinc,qu'au conſeil du Medecin ou Chirurgien.

LIQUOTES B B B B
VOLA
n
arte

za
836 Le Vingt-deuxieſmeliure

Des lignes de la peste preſente. CHAP. XIV . A

Luſieurs deſirét ſçauoir les ſignes de la peſte preſente,afin d'y pour.


uoir de bóncheure,pourcequ'ordinairemét on y eft deceu,& lccố.
mun peuplene la cognoiſt iamais, iuſques à ce qu'ilſente quelquc
douleur & apoftemes aux emunatoires, ou quelques caches ſur le
corps ou charbos: quieſt trop tard ,parce que pluſieurs meurent de
yátque celles choſes apparoillent: parquoy ne faut touſiours atten.

dre tels accidens , mais faut prendreindicatio, qu'en la pelte le cæur, auquel giſt la vie,
eſt principalement affailly , & endure plus que touslesautres mēbres , dont lessignes
1. Signe de pris de luy sót plus cercains que denulle autre partie principale. Parquoy les malades
peſte pre- frappez de peſte ont ſouuentdefaillance de cæur, & cõbent comeeſuanouys.Le pouls
Jenre.
eſt quelques fuis remis , & parfois trop frequent, & principalement la nuia. Ils ſentene
2.Signe des punctions & demangeaiſon par coutle corps,& principalement aux natincs,com
3. Signe.
4. Signe. me piqueures d'eſpingles, qui procedent de la vapeurmaligne, montant desparties
inferieures à la luperficie du corps, & à la reſte. Ils ont temblablement la poi&trinc B
chaude & ardente, auec grande palpitation & battement de caur, dilans ſencir gráde
douleur ſous le mámelon du tecin ieneſtre auec courte haleine, & grá dedifficulté de
s . Signe. reſpirer : & halercent comme vn chien qui a grandement couru ,à cauſeque le Dia
phragme , principal inſtrument de la reſpiration ne pouuant auoir ſon mouvement
naturel, redouble incontinenc , & auance le cours de la reſpiration & expiration. Pa
6. Signe.
reillement ils ont toux & douleur d'eſtomach , cnfcure de flancs ou coſtez : pource
qu'à cauſe de la debilité de la chaleur naturelle , le multiplient beaucoup de vétoſicez,
qui ſont cauſe de ladice extenſion :voire que le ventre en eſt quelquesfois ſi fort enfié,
qu'on diroit eſtrevneeſpece d'hydropilic, nommee Tympanites. Dauantage , ils ont

nauſee, ou appetic de vomir, c'eſt à dire que l'eſtomach leur bondilt, qui vient à rai
ſon qu'il a connexion auecques les parties nobles , & ſe reſſentent du venin mortel dec
tout le corps.autreson grands vomiſſemens & frequens, ieccans vne cholereiaune,&
7. Signe. aucunefois verde ou noire,correſpondáte aux ſelles en varieté de matiere & couleur:
& à aucuns ſort le ſang tout pur en grande abondance, non ſeulement par le vomiſ. C
ſement,mais auſli quelquesfois par le nez , par le liege, & par la verge , & aux fémes par
Pourquoy és
fréures pilti leur matrice : & ceux - là ne paffent gueres le croiſieme iour, tanc eſt grande lacrimo.
Lentielles te nie du venin . Aucunsont grande froidure aux parcies exterieures , mais neantmoins
d dansbru . ſentent yneextreme chaleur & ardeur merueilleuſe au dedans . Or la cauſe pourla
single quelle nous voyons qu'és fiéures peftilentielles le dedans bruſle, & le dehors eſt froid,
bors est c'eſt pource qu'ily a infiammatió en quelque partie profonde du corps,en ſorte que
frit.
tollte la chaleur avec leſang & les eſprits elt attiree côme d'vne ventouſe,par les par
ties interieures en Alámmees,dont les parties cxterieures apparoiſſenc froides, & alors (
la face ſe monſtre hideu ! e , & eft veuč de couleur plombine & liuide , les yeux ardens,
8. Signe.
cítince!ans,rouges , & cóme pleins de ſang,ou d'aucre couleur , & larmoyans.Lecour
des paupieres et liuide & noir, come ſi elles auoient eſté batcues & meurdrics,& ontla 1
face hideule à voir , & tout le corpsiaunaſtre , tellement qu'ils ne reſſemblent point ào
9. Sigre . eux.melmes ,defaçon qu'on les decognoiſt, & relle choſe ſignifie la mort proche Au
cuns ont la fieure fi cres-ardére, qu'eile cauſe viceres au profond de la gorge ,& autres
parties,dela bouche , auec vne ſeichereſſe quitend la langue aride & ſeiche , liuide &
D
noire ,accõpagnecd'vne alteration & chaleur ſigrande, qu'ils ſé diſene bruſler cómo
s'ils eſtoient dedans yn feu , auec vn extreme douleur deteſte, quile plus ſouuentles
fait reſuer ;de forte qu'ils ne peuuent iamais repoſer ny dormir : & tombent en vne fu
reur cruelle , cómo frenetiques ,s'enfuyans tous rauds,fe iettárs és puits,riuieres,& par si
les feneſtres ſe precipitans de haut en bas . Au contraire , ils ſont quelquesfois en yneſi A
grande reſolution de tous les mébres, qu'ils ne leſçauroient ſoulterir, & auſſi ſont au te
Pourquoy cõmenceir.onetant endormis,qu'on ne les peutelueiller , pource quela chaleur de la
lespel ferez fieure fait elleuer à la teſte des vapeurs groſſes,cruës, & froides,lelquelles abondée au tu
fone quel corps : ce quiaduient communément lors que la mariere dela boſſe ou le charbon ſe te
quesfois en fait,ou petites taches & eruptiõs elpát les au cuir , qui ſouuét s'appato ſlent à leur reſ.
dormis.
ueil,accompagneesd'vne ſueur fore puante. Orleltires exhalatiós & fumices acquic de
rent ſouvent acrimonies , & ſont quelquesfois ſi mordantes ,cu'elles oordene lesmala
des de dormir , & leur incitene grande douleur de teite, quiles fait tõber en reſucric, QC

1
De la Peſte, 837
A
puis freneſic,manie & rage. Parquoy la varieté de ces derniers lignes & accidens ne
procede que de la diuerſité du venin peſtiferé, & des cemperatures des malades.
Qu'il ſoit vray, nous voyons en certaines faiſons ce venin exercer diuerſement la ry
rannie , voire en couces temperatures , & excraordinairement & également à plu
ſicurs & de tous aages & temperamons, comme nous auons cy -deuant monſtre de
la luette, troufſc-galland,coqueluche, & autres maladies epidemiales. Quant eſt
de la diuerſité des temperatures, ceux qui ſont de complexion chaude , comme 10. Signed
les ſanguins & choleriques , font vexez bien ſouvent de heures bico ardantes , &
combeot ſouucnc en furie: au contraire , les melancholiques & pituiteux ſont tane
aſſoupis & endormis , qu'à peine on les peut reſueiller. Les vrines ne ſont pas cou
ſiours, ny en tous, trouuces d'vne meſme couleur & conſiſtence : car quelquesfois L'urine des
elle ſont trouues ſemblables à celles des ſains, à ſçauoirbelles en couleur , & bonnes peftiferiez
en leur ſubſtance , à caiſon que la fićure faict plus lon effort dedans les arteres , qu'és Semble
veines contenantes le ſang , duquel procede l’yrine , veu que le foye le plus louuent lomable .
B ne ſouffre li fort en vne fieure peitilente , que les autres parties , & ſurtoutes le cæur ,
meſmement quand il n'y a point de cumeur apparente auxaines,où cela le tait: pour
ce que les humcurs contenus aux vaiſſeaux , iaçoit qu'ils ſoient en chemin, & comme
in fieri d'altre viciez & encachez de ce venin , ce neantmoios ils ne ſont point pourris
ne corrompus :celte corruption eſtane vrayement ia parfaicte en la ſubſtance des cl.
pries(ſupposé que telle peſte eſt de celles qui ont leur cauſe & origine de la malignité
de l'air)& d'iceux n'ayant encores paffé & coulé dans les humeurs: car ſi la pourricu.
se eſtoit ia imbuë en iceux , ils en donncroienc cercain celmoignage par les vrincs,
qui ſont cercains & propres ſignes des affections des humeurs contenus auxveines.Et
partant ne deuons point eſtimer que cela aduicnne(commc aucuns ont pensé à rai Ir. Signes
fon que Naturecome eſpouuantee, & fuyant la malignité de ce venin , n'ole aſſaillir
12. Signes
la maladie.Aucunsont lesvrines forc diſſemblables des ſains,deſquels nous parlerons
cy-apres. Pareillemét aucuns iettent par le ſiege vne matiere fori fecide, liquide,ſub
tile, gluante,& de diuerles couleurs:ceque declarerons auſſi. Il y en a d'autres qui ont
l'appetic depraué,ou du touc perdu , celleinent qu'on en a veu quiont demeuré crois
C ou quatre ioursſansmanger cequi procede d'vne douleur mordante & poignante, En la peſte
quieften l'eſtomach,laquelleprovienedesvapeurs venencules enuoyces a iceluy.Ecun moit glä:
pour le direen yn mot,onvoic en cette pernicicule peſte vnegrande bande & multi- ded'accidés
tude de pluſieurs eſpeces de lympromes & accidensconfus , lourdre iournellement,
qui ſe fontſelon la pourricure & alceration de l'air, & la cacochymie & mauuaiſc ić
perature deceux qui en ſont frappez. Parquoy fautbien icy nocer , que tous ces li.
once gnes & accidens ne ſe trouvent pas touGours en vne fois , ny en couces perſonnes,
mais à aucuns s'en apperçoiuent pluſieurs, à autres peu ,voire a grande peine voit on
deux hommes infe & ez deceſte contagion, auoir femblables accidens : & qui pluseſt,
‫ܙܐ‬. il y a aucuns à qui ils apparoiſſent ſubit, & dés le commencement, & les autres plus
Leica tard. Et de tous ces ſignes, il y en aqui ſont totalement morteis , autres moins
mauuais , & d'autres ambigus .
Des ſignes mortels de la Peſte. CH A P. XV.
ES ſignes mortels , & quidcmonitrene lecæureltre ſaili forefieures Difficulté
tres-ardentes & concinuës, la langue aride & ſeiche, de couleur noi. d'insp:sstill
‫ܐ‬. ‫܀‬ D rc , & quand les malades one grande difficulce d'inſpirer , rellement
qu'ils ont plus de peine à attirer l'air qu'à le rendre : quile fait pour
la veherence chaleur qu'ils ont au corps , & one vneloifli grande,
qu'on ne la peut efteindre. Autres ont veilles continuelles , donc
s'enſuitreſuerie & alienation d'eſprit , & louuent meurée comme furieux & enragez.
Aucunsont vne contra &tion & conuulſion de tous les membres,defaillar.cesfrequé
tes de cour,accompagnes de hocquers, & combent ſouvent en ſyncope.Autres one
vne palpitation ou tremblement de cæur, quieft vn mouuement manifeſte de la ver
V
A

tucxpulcrice,quis'efforce de repouſſer le venin qui luy eft du tour contraire & mor
29 tel. Le pouls parcillement ſe meuchaſtiuementge exceſſiuement ſansmeſure, quimõ.
ftre que la faculté vicale eſt grandement enfiammec, & alors les malades ſone en gra
de agitation & inquietude,c'eſt à dire, le rempène çà & là, ſans qu'ils le puiſſent cenit Coule de
àrequoy& en repos, & ontapperit continuel de vomir, qui provient de la venc- nauſee di
noſieć de la matiere, laquelle ſe communiqucau cæur, & à l'orificedel'eftornach : & poffiferez.
BB B B ij
838 Vingt-deuxieſme liure

levomiſſement eſt puant, & de maticre verde , comme ius de porreaus,& quelques-
fois de couleur noire ou rouge: aufli aucunesfois eſt de ſangtoutpur , comme nous
auons dit, & one ſucur froide,la faceliuide, hideuſe & noire , & leregard elgaré . Ils
ont ſemblablement grand treſſaillement, fremiſſement, & aiguillonnemententre
cuir & chair,baaillemét & eſtenduë des mébres, cournans les yeux en la teſtc, parlent
entoüé & begayent, voire quelquesfois dés les premiers iours, & ne raciocinentpas,&
quand on parle à eux , ils ne relpondent à propos.Ils ont la langue forcaride & leiche,
liuide ou noire, qui ſe fait des exhalaciós pucrides qui l'eſchauffent & deſſechenc, icuc
caulanc des eſcorcheures en la bouche. Outre plus , aucuns ont les vrines liuides ou
Vrines mor noires & croublces,commegroſſe lexiue , & y voir- on des nuees liuides, & de diverſes
couleurs, comme verdoyante , plombec ou noire, quieſt vn vray lignc mortel.Aufli
elepoti
. quand on voit vn cercle par deffus,comme greffe ou toilesd'araignesietrees lesvoes
furies autres . Si les malades one charbons , & la chair d'iceux eft noire & Iciche , com
me vne chaleur brullee , & les parties prochaines liuides, lesboſſes ,charbons & taches
retournans au dedans,& n'apparoillans plus au dehors fluxdevencre cholerique, qui
ne donne aucun allegement au malade,fore fecide, liquide, fubcil,gluant, & de diuer.
B
ſe couleur, comme noire ,verdoyante,reſſemblante à verd de gris, & de tres mauuai.
ſcodeur ; auecgrande quantité de vers , quidenore grande corruption & pourriture
aux humeurs : s'ils ont vn elblouyſſement qui vient par l'imbecillicé & defaut desel
prits, & de route l'æconomie de nature quisa commence à chanceler : G la chaleur na.
turelle ſereirant au dehors , fuyāt ce venin emeut vne ſucur fort puante , & lesyeux
du malade s'enfoncent pour l'abſence de ladite chaleur , accompagnee du lang, & cl

Cauſe du pries: ſi le bout du nez eſt retorsaucc vn ris lardonic, c'eſt à dire,vo ris forcé,quiſe fait
sisfardonic.pour la retra & ion des fibres diffeminez aux muſcles de la face , deſſeichez par l'abſen
ce du ſang & de l'eſprit animal:li aulli les ongles noirciſſent, comme approchás d'vne
mortification: puis ſuruiennent ſanglots & conuulfion vniuerſelle pourla reſolution
des nerfs, fi qu'en fin la pauure chaleur naturelle demeurant luffoquec & efteinte,in C
dubirablement la mort s'enſuit .En tous ces ſignes ne faut faigner,mais bailler choſes
cordiales aux malades , & les recommander à Dieu . Neantmoinsic prie les Chirur.
Ne fant a- gieos de ne laiſſer & abandonner les pauures malades encore qu'ils euifene tous ces fi C
bandonner gnes mortels , mais toujours s'efforcer à faire ce que l'art commande :car Naturefait

les peftife quelques fois choſes merueilleuſes contre l'opinion des Medecins & Chirurgiens,ain 1
Tex mem li quei'ay demonſtré cy deſſus en mon liure des playes de hacquebures . Or pour con. (
en lignes Cluſion , ja diuerſité de cesaccidens vient pour la diverſité duvenin ,& des tempera
mortels. t
mens, & de l'air ambiens: & tant plus on trouuera desfignes & accidens ſuſdi& s,rane 1
plus les pauures peſtiferez ſont proches de la mort ; mais fi vn ou deux apparoiſſene t
ſculemenc,il n'eſt pas neceſſaire qu'ils meurent : ioinct aulli que pluſieurs de ces lignes t
ſont communs à d'autres maladies .

ſi
Des fignes par leſquels on peutcognoiſtre que le malade eft infecté dela Peſte venant du vice de U
l'air , non des humeurs. CHAP . XVI . Di

0
Ncores que nous ayonsamplement declaré les ſignes de la peſte preſente,
fieſt ce que conſiderans qu'il y a deux ſortes de peſte, pour la diuerſité des D 2
Donx fories cauſes: I'vne prouenāte du vice de l'air ,l'autre dela corrupció deshumeurs, 0
de pefte. nous auons bien voulu ſpecificr les ſignes qui ſont propres à l'vne & à l'au. À
tre,cómençans par celle qui vient du vice del'air . Donc les lignes par leſquels on la 0
pourra cognoiſtre, ſont cels , à ſçauoir, qu'elleeſt plus malignc & contagicuſe: & les
hommes meurent en plusgrand nombre & plus ſubitement : car pluſieurs faiſans

En la pelle leurs actions accouſtumces , ſc pourmenans par les Temples & rvës ſans aucune
faire de l'air contagion apparente meurent en peu d'heures, voire promptement ſans ſentir aupa. 0
les hommes rauane aucune douleur : parce que l'air corrompu par ſa virulence gaſte prompte
meurent(1. ment les eſpries , & ſuffoque le cæur d'vn feu caché. Dauantage , les malades de font CT
bie . n litourmencez d'inquietude , & ne ſe içttēc point çà & là ,pource que la force naturelle be
grand nom .
brc. eſt du cout profternee & abbatuë : & partant ils ont continuelle defaillancede caur,
& à pluſieurs neſuruiennene bubons,ou autrespuſtulles,nyaucun flux de vérre,à cau.
ſe quele venin peftiferé abbat tellementles forces & lecæur, qu'ils ne peuventchale CO
Ser d'eux aucune choſe nuiſible , quieft cauſe de lamort ainſi ſubite. Lcur vrinc eft
de la Peſte. 839
ſemblableà la naturelle, parce qu'il n'y a point de vice aux humeurs, d'autantque signes pris
A les vrines demonſtrent cercainement le vicequi eſt aux humeurs , comme il a eſté de- des viness
claré cy.deuant.

Signes que lemaladeest infectédela Peste prouenantde la corruptiondes humeurs.


CH A P. XVII

Ous auons par cy.deuât declaré les cauſes de la corruptió deshu Cauſe de la
meurs de noftre corps,laquelleſe fait comed'vne crop grāde ple corruption
nitude ,ou par obftru &io des vaiſſeaux des viſceres ou encrailles, des hum
cauſee par humeurs eſpés & viſqueux ,ou par incēperature,ouma. meurs.
lignité de matiere, toutes leſquelles choles le font par la mauuaiſe
maniere de viure : Il faut maintenanc declarer les lignes, parleſ
quels on peut cognoiſtre vn chacũhumeur domināreſtreinfecté
B
& corrõputin de cõrraries à iceluy. Quand doc on verra la couleur de tout le corps
eltre plus Laune quede couſtume,ccla demõſtre que le corps abonde en cholere:ſi elle
eſt pl' liuide & noire,en melácholic:fi elle eſt plus blâche,en pituite,ou phlegmc: & fi 1

elle eſt plus rouge,& que les veines ſoiét fort enflees,il abõde en fang: aufli lesapoſte
mes & puſtules tiennent ſemblablement la couleur de l'humeur quicaule icelles : pa
reillemēc les excremens,cõmevomiſlemés ,les ſelles & vrines:auili file malade eſt fort
afſoupy & endormy,cela demonftre la pituite:au contraire,s'il a veilles,demonſtrela
cholere.Semblablement la nature dela fiéuredemonſtre l'humeur qui abonde:car la
fiéuretierce demonftre la cholere,la quarte la melácholic,la quotidiane,lapituite, la
continue,leſang. Le reps le demonſtre pareillement: car au Printemps le corps accu
mule plus de ſang ,en Elté plus de cholere,enAutonne de melancholie, en Hyuer de
pituite qui domine en ceſte lailon.Apres s'enſuit le païs,lequel s'il eſt temperė,le lang
abonde:s'il eſt chaud & ſec,la cholere : s'il eſt froid & humide, la pituice. Dauantage,
C l'aage le demonſtre:car les icunes abondent plus en ſang,& les vieux en phlegme. Fi
nalement l'art & maniere de viure:carceux qui cuiſentlesmetaux, & fabriquentou
urages metalliques,come Mareſchaux, Serruriers, Orféures, Affineurs, Fondeurs de En quels
Direito lettres,abondēt plus en cholere: les ſedentaires,cſtudiás & peſcheurs en pituite. Voi- meltiers on
2013 la les obſeruacions qu'on doit auoir pour cognoiſtre vn chacun humeur dominant en acquiert
gesund noſtre corps,afin de le purger quand il en ſera beſoin .Or pour deſboucher les orifices plus d'hwa
201310 des vaiſſeaux ,tác du foye,que de la rare & des reins les medicamēs doiuét avoir facul -meur
Lewx .
bie
té & puillance d'inciſer, penerrer, attenuer , & deterger : ce que ie laiſſe à faire à meſ.
ſieurs lesMedecins . Ec fauc icy noter ,que cómunément les humeurs ſepourriſſent en
tęps de peſte,dont ſe font non ſeulemér des fieurescontinuës,mais auſlides intermit
tēces,c'eſt à dire,qui laiſſent le malade vniour ou deux,plusou moins ſans fiéure, puis
l'aſſaillene derechef,come font les fiéurescierces & quarces:ce qui ſe fait ſcló la diuer
ſité de la pourriture de l'humeur dont elles ſont faites,come nous auós dit par cy -de
uant.Pareillement on les peut cognoiſtre par les accidens:cõme ſi la peſte eſt en l'hu Signes de
D meur cholerique,ellcoccit la plus grand part des homes, &meurentpromptemét:& huncut
ont vomiffemés afliduels de couleur iaunaſtre, & fux de ventre,aucc extremes dou. choleriques
leurs & deſir perpecueld'aller à la ſelle,parce que la cholere pique & vlcere les boyaux:
rité des
auſſi ont vneinappetčce,& tout ce qu'ils boiuent &mangent leur ſemble amer.S'ils
ont quelques eruprionsou tumeurs contre nature,elles ſont trouuees auec peu d'en .
care fleure,& decouleur citrine.Quandelle et aux groſſes humcurs,& au ſangaduſte,elle
elové occit plus tard, & les malades ont grādes ſucurs, flux de vērre de diverſescouleurs,&
ci's principalement ſanguinolentes,& iettent fouuēr le ſang pur :ils ont cómunément bu.
bons & charbons, ou erupcions partoue le corps, auec grades tumeurs enfámees,fié
ures continuës, delires, & l'haleine puante. Lors qu'elleeſt à l'humeur picuitcux , ils
ontlallicudesde tous les mébres , & tout le corps bien fort appelanti , & ſont grands
ment endormis & aſſoupis, & à leur reſueil one yn tremblement yniuerſel de tout le
corps , qui ſe fait pour l'obſtruction des conduits clos aux eſprits: & s'ily a quelques
bubons,charbons,ou eruprions,elles ſont laxes & de couleur bláchaſtre, & difficiles
à fuppurer.Et quand l'humeur melácholique en eſt vitié , les malades ſont fort attri . bumeurs.
Hip.liu.des
ſtez,ayans grande peſanteur & douleur de ceſte,& onc le poulx pecit & profond , & la
couleur de leur apoſteme, voire de tout le corps,plombee & noire:car chacũ humeur
B B B B inj
840 Le Vingt-deuxieſmeliure

donne la couleur au cuir.Or qui demonſtre encor les humeurs eſtrecorrompus, c'eſt
A
que les vrines des malades ſont troublees , & fcmblables à celles des iumes : aufli quel
quesfois fone veues noires avec un cercle verdoyant , qui ſignifie grande pourriture
eltre aux humeurs : car il eſt impoſſible que les humeurs puiflenccftre corrompus , que
les vrines ne le foient. Aucuns ont grande foif,les autres nulle, parce que la pituite
putride abonde å l'orifice de l'eſtomach, & luy change ſon temperament , & lerend
languide auec inappetence.Semblablement aucunsont filure grandement ardente,
& lc diſent bruſlerau dedans : ce neantmoins les parcies exterieures ſont trouuces
quelquesfois forefroides. Que fi la peſte prouient du vice de l'air, & des humeurs cõ.
pliquez, comme ils ſont le plus ſouvent, on ne les peut bien diſtinguer, & les lignes
ſont fort confondus enſemble.

D # Prognoſtic. C H 4 P. XVIII.

Moyens de
bienprogno Rognoſtiquer eſt predire ies choſes à aduenir , qui ſe fait par la co . B
gnoillance de la maladie, & de les accidés , & principalemes de la té.
ftiquer.
perature & dignit de la partie malade , & action d icelle : parquoy
pour ce faire, iesa biz neceſſaire que le Chirurgiē.yecognoifiance B
de l'Anatomie , & aye veu plufcurs malades:car ainſi taisāt p ognior
itic , & deduilant bien aux parēs & amis du maladeles accidens qui
Iln'yapoint peuucne aduenn en la maladie , acquerra höneur & profit. Toutesfois quant à la peſte
ingimo: nous diſons qu'il n'y a point de ingenient certain de la vie,oude la mort: car ceſtede
certan en la cítable abominable & traiſtrelle maladie a ſes mouuemens par interualles inegaux &
pelle. incercains, & eſt quelquesfois tant haſtie & fallace,qu'elle iuël'hõme , ſans qu'ony

puiſſe prendre garde , ce qui aduient à aucunsen dix, quinze, ou 24 heures,ou beau
coup moins. Ec tel venin eſt quelquesfois ſi violent , qu'incontinent qu'on reçoitle
foufflement ou haleine du peftiferé, on voit ſubit s'efleuer puſtules & ampoulles au
cuir , auec douleur acre , comme ſi on eſtoit mords d'vne mouliheà miel. Et par la

violence de ce venin li prompre & ſubite , ceux qui ſont frappez , ſont pluftoft morts
qu'ils n'ont penséà mourir,& meſmes en beuuant,mangeant , & vacquant à leursaf.C
faires, tombent morts en cheminant par les rues & temples, ce qu'auons v cu n'ague C.
Hiſtoire. res le Roy eltant à Lyon . Quelquesfois aulli les accidenste relalchent , & ſemble quc
lemaladele doiue bien porter, faiſant bonnechere :ce quiaduint vne des Damoi
ſelles de la Royne, nommee la Mare, le Roy cftanc au chaſteau de Roufillon, laquel
le fut frappee de ceſte pelte, ayant vn bubon en l'aine , qui s'en recourna au dedanis,&
le troiſiclme iour difoit nelentir aucunmal,fort qu'vnc difficulté d'vriner (àcauſe de
l'inflammation qui occupoit les parties dedicesà l’vrine )ſe pourmenant par la cham
bre, avec bonne ratiocination : toutesfois ce iour meſmcrcndic l'esprit à Dien : qui
fut cauſe de nous faire promptement debuíquer dudit lieu . Et partant les Medecins le

& Chirurgiens ſont le plus ſouuene deceus en celle maladie : car aucuns meurent f

Personne pluſtoſt , les autres plus tard , ſelon que le venin eſt violent & fort : & pour le dire C
n'eft cēpt
en vn mot, en ceſte maladic il n'y a poipe d'heure, de iour, ny de temps prcfix.Oucrc.
cele peste. plus on voit par experience
que gens detoutenature, ſexc, & diuerles complexions,
fo
ſoient enfans,adoleſcens,ouhommes en aage confiftant , foibles ou robuſtes, ieunes
ou vieux , yurongnes , crapuleux , & ceux qui font abſtinence en leur viure,tantoi .
D D
Le Tappo Teux que ceux quitrauaillent, richesou pauures,Roys, Roynes,Princes, Princeſſes, d
ni
TH? de pelle. Papes & Cardinaux , ſont tous ſureats à eſtre pris de la peſte: neantmoinson voit que
les ieunes choleriques & fanguins , qui font de temperament chaud & humide,y
ſont plus ſujets que les vieux , qui ſont de temperature froide & leiche , pource que 01.

leur ſang ne s'enflamme pas fitoft : auſli que l'humidité d'iceux , dont s'engendre la
De quelle corruption , eſt exhalec , & aucunement conſumee . Mais les humeurs des ieunesſe P
temperature corrompent pour legere occaſion , & par conſequent reçoiuent la vapeur veneneule, &
to
o aage lis laquelle facilement eſt aceiree & penetre au centre du corps, qui eſt de celle tempe
malades de
rature chaude & humide , & partant diſpoſee à receuoir inflammation & pourriture,
font
q
en plusgrandà cauſe qu'ils ont les veines & arteres
plus larges, & par contequent tous lesconduies
danger . du corps : dont il aduient que l'air peftilenc trouuant les potes ouueres , entre de 9
dans plus facilement auecques l'air attiré par le continuel mouvement des arteres ,.
Dauantage la peſte venant de l'air prend pluſtoſt les icunes que les vicux,parce qu'ils 9
de la Peſte.
841

ont les pores plus ouueres que n'ont les vieux , Parcillement ceux qui ſont hors des
А
maiſons,ſont alors pluítoſt eſpris que ceux quidemeurent dedans . Et quand la peſte
vient dela corruption des humeurs , elle n'eſt pastant concagieuſe que celle qui vient
du vice de l'air . Mais les pituiteux, melancholiques, & gensaagez lonc en plus grand
danger de mort, lors qu'ils ſont frappez d'iceluy venin venāı decauſe corporelle,par.
ce qu'il ne ſe peut bien exhaller & ſortir hors à cauſe de la cloſure , ou condenſation
de leurs conduics & pores du cuir . Aulli ceux qui ſont cacochymes & semplis d'hu
meurs vicieux , ſontplus prompts & diſpoſez à en eftie infectez , & en plusgranddan
* ger que ceux qui ſont de bonnetemperature: tout ainſi qu'vn fagoc fec eſt piuftoft al
Jumé du feu, & bruſlé qu'vn verd ,ainſi ſont ils preparez , de melnie façon que le ſoul
Pourquoy
phreeſt prepare à prendre le feu.Et par ainſi voit on communément, qu'en cemps de
( teinps de
peſte, nullesou peu d'autres maladies apparoiſſent, d'aucant qu'ellesſe tournent faci, peſte necou
lement en icelle, & lors qu'elles commencent à regner ,la peſte auſſi commence à cel rent gueres
ſer. Donc comnevn homme cacochyme eſt plus diſpoſé á eftre frappé de peſte : auſlianires mia
au contraire vn bóme bien cempere difficilement en peur eſtre frappé. Car combien ladies.
que le feu foit violent, neantmoins il demeare amorty & vaincu , quand il ne trouuc

contre quoy agir. Semblablement vnhommebien fain & nettoyé de mauvaiſes hu


meurs, bien card & à grand peine eſt malade de ceſte pelte: & où il en ſeroit eſpris,
2 B
cllc ne pourroic luy faire celle nuilance, comme aux autres quilont remplis de mau . Ceux qui
vaiſes humcurs: toutesfoison obſerue que ceux quiont ficure quarte, & chancres vl. me font
eres fub .
cerez,avſli les punais ,ladres ,verollez,elcrovëlleux,crigneux ,& ceux qui ont fiítules,gu
& vlceres carieuſes coulantes,neſont fort ſubiets à prendre la peſte : parce qu'ils ne iets à avoir
ſont ſeulement cacochymes , mais demi pourris , & leur cacochimie ne permet ſou- la pifte.
uent entrer la perte en leurs corps, quaſi comme ſi elle leur eltoit vn alexicere cócre le
yenin peftiferć. Les femmes enceintes lont fort ſubiectes à eſtre priſes de la peſte, à
que cauſe de la grande abondance d'humeurs (uperAus & corruptibles qui abondent en
20 clles pour le defaur de leurs purgations, ioin & auſſi qu'elles one tous leurs conduits
fort ouueres : & quand clles Tonefrappees de ceſte maladie & font leurs enfans, elles
meurent preſque toutes:dequoy l'experience fait foy. Aulliles filles auſquelles le flux
Des filleseem
menſtruel commence à fluer , ſont fort fubiectes à prendre ce venin , comme auſſi les
perits ens,
ſont lanuleux , c'eſt à dire,mols & cendres , & de rare texcu fans.
С petits enfans,parce qu'ils
re, ioin et qu'ils viuent deſrciglémét. Le menu peuple ſouffreteux, & ceux qui habités
ésmaiſons ordes , & quien tout temps viuenrordemenr , & qui ne changentpoint
d'habits,d'autant qu'ils approchene plus prés de la putrefaction , s'acquierent vne dil.
‫سال ن‬ polition & conformité grande à la peſte , & partantſont pluftoft afailis que ceux qui
viuent au contraire. Outre plus ceux qui en ceſte maladie ont lommeil profond,
meurene quaſi tous , à cauſe de la craſſicude des vapeurs qui montent au cerueau , lef.
quelles nacurene peut vaincre . Aufliceux qui ont la reſpiration fort puante outre
leur couſtume meurent tous :pource que la pourritureelt du cour cõfirmce en la ſub
ſtance du cæur , & aux poulmons . Orpluſieurs meurent lubicement de la pelte, à

de prensa caule que le venin ſaiſit le cæur , & inſtruments qui ſervent à l'inſpiration & expira
ice tion , leſquelseſtans ſerrez & comprimez à cauſe de l'inflammation qui eſt aux poul.
pract
mons,au diaphragme,& aux muſcles du larinx , laquelle fait que le pauvre malade eſt
10:2,13
fubic eſtranglé & Tuffoquépar fauce de reſpiration , Auſli li les boſſes, charbons,pu. Couleur des,
ſtules & eruptions, qu'on appelle pourpre , qui viennent à la ſuperficie du cuir , lonc Ikineurs
D decouleur noire ,ou verre,ou violette , ou liuide, peu en reſchappent, parce qu'ils de- 11 elt bon
le bu
D ICE " montrent mortification de la chaleur naturelle . Quand le bubon apparoiſt premier que
que la fiéure,c'eſt bon ſigne, car il demonſtre que le venin eſt moins furieux, & que bonugpa
nature a eſté maiſtreſſe , & qu'elle a eu victoire, l'ayaneietié & chaſſé hors:au contrai yo iſe denão
, re,s'il aparoilt apres la fićure,cela vient de l'impetuoſité du venin , lequel domine: la fiévre.
partanreſt vn ligne pernicieux, & le plus louuent mortel, qui demonſtre nature eſtre
gaignee & abbacuë. D'abondant au decours de la Lune, les malades meurenc plus .

teks toſt, ou pour le moins leur mal & accidens s'augmentent , parce que les vertus ſont
plusdebiles ,ioin et auſſi que les humiditez de noſtre corps abondent dauantage . Or Pourque
nous ſome
que les vercus de noſtre corps ſoient plus debiles au decours de la Lune , la cauſe eít,
29995 plus
que la vigueur des faculcez conſiſte en chaleur . Oreſt- il qu'at: decours de la Lune les forbles a mi
corps ſont plus froids & humides pour la defectuoſité de la Lune, qui eſt la cauſe pour decours de
quoy ſur la fin du mois les femmes one reglement leurtlux : car lors le ſang eſtant plus la Lune,
2 BBBB iiij
/

842 Vingt-deuxieſme liure

humide,eſtplus prompt à couler , & noſtre chaleur eſtantmoindre ne peut retenir un a


tel cours commeelle couloir,eſtant fortifiee & guidec de la vertu de la Lunc,quiaplus
de lumiere , & par conſequent de chaleur,eſtant pleine, qu’en decours:cómetres bien
dit Ariſtote au liurc 7. De hiſtoria animal.chap. 2. Aufli faut norer que lil'air pelliferé
eſt ſubtil come bize,il eſt plus dangereux & cócagieux , & cuë pluftolt que lorsqu'ilek
gros & nebuleux.Qu'ilſoit vray ,lors que la peſtecft en cette ville de Paris,elle n'eſtfi
dangereule que lors qu'elle eſt en Prouence & en Gaſcogne:qui ſe fai & à cauſe que
l'air decere ville eſt plus gros & nebuleux :& eit cel ,tant à raslon de la ſituation,quede
la grande multitude du peuple , & excremiens des beſtes,boucheries,cuifioes, latiines,
& autres cauſes, quifoni elleuer pluſieurs groſſes vapeurs , leſquelles eſtás attirecs des
poulmons oc permettent que l'air peftiferé entre ſilegeremene au profond de noſtre
corps.Outre les caules de mort cy.delfus alleguees ,nousvoyons pluſieurs perſonnes
mourir par faute d'eſtre promptement ſecourus,parce qu'ily en a bien peu quiyueil. B

lene prendreconſeil de bonne heure , & parauant quele venin ait faililecæur,& que
Pourquoy pluſicursaccidensne leur ſoient deſia ſuruenus. Or le cæur eſtant ainſi il y a peu d'el. B
pluſeørs perance de lancé , ce que toutesfois on attend ordinairement : d'autant qu'ileſtcres
meurent de difficile de cognoiſtre la peſtedés le commencement, parce que les accidens ne ſone
peſte,
pas touſiours iemblables,comme nous auons deſia dit : parquoy pluſieurs Medecins
& Chirurgiens y ſont abuſez ,tant experts puiſſent-ils eſtre : dont ne le faut eſmerueil
ler ſi le prognoſtic de ceſte maladie ne peut etrecertain . Qui plus eſt, elle eſt fide.
teſtable & eſpouuentable, qu'aucunsde la ſeule apprehenſion meurent , parce que la
vertu imaginatiucou fantaſie a ſi grande ſeigncutie en nous ( ainſi que i'ay eſcrit en
mon liure del'Anatomie du corps humain ) que le corps naturellementluy obeiten
pluſieurs & diuerſes fortes,lors qu'elle eſt fermemét arreſtee en quelque imaginació.
La crainte Doncen crainete & peur beaucoup de langfercrire au cour qui eſtouffe & fuffoque
peut donner
du tout la chaleur naturelle , & les eſprits ,la rendantplus foible pour reſiſter auvenin,
ntent
la pefte. dont lamort s'enſuit:au contraire, iladuien quelquesfois que ceux quifrequente
ordinairement les peſtiferez,n'en reçoiuent aucun mal , parce qu'ils n'apprehendent
rien Pour concluſion :on voit communément que tous ceux qui en ſont frappez,
C
meurenç pas , combien qu'ils n'ayent receu grand ſecours , & ceux qui vſene debons
antidotes , ou choſes contrariances à cel venin ,nc laiſſent ſouuent à eftrepris & mou . C
rir.Bref quand on en reſchappe,on peut bien dire que c'eſt vne choſe plus diuine que
humaine, veu qu'on eſt louuenc incercain de la cauſe. Partant nous devons eſtimer

que telle choſe le faiet par la volonté de Dieu ,auquel, quand il luy plaiſt faire ſonnet
ſa trompette pour nous appeller ,on ne peut refifter,ny euiter le partement par aucun
artifice humain .

Comment ſe faict la fiéure peſtilentielle.


CH AP IX .
1
Euant que venir à la curation de ceſte maladie peſtilencielle, il nous
conuient premierement declarer comment le faict la fiéure en icelle:
C'eſt que quand la perſonne a attiré cet air peſtilent par inſpiration
font les
faite par le nez & la bouche : au moyen de l'arcra & ion que
poulmons , & autres parties dediees à ce faire, & aufli vniuerſelle
ment par les pores & petits trousdu cuir , & canitez des arteres & DC
D
veines , qui 1
lonc diſſeminees par iceluy , lequel air eſtant attiré & conduic en route
ſi
la maſle languinaire & aux humeurs , quitont plus apres à receuoir tel venin , les
Ce venin conuertit en la qualité venencule , & comme ſi c'eſtoic chaux vive , ſur laquel
peftilene le on iettait de l'eau , s'eſleue vne vapeur pucride , qui eſt communiquer aux par
C
conuertie ties nobles , & principalement au cæur, fang & eſprits, lequel bouillonne dedans ſes
les humeurs vencricules, dont ſe fait vne ebullition appellee fiéure, quieſt communiquee par tout
en la quali- le corps par le moyen des arteres,voire iuſques en la ſubſtáce des parties les plus ſoli. C

té vencnen des,quiſont les os les eſchauffantſi fort comme s'ilsbruſloient,faiſans diuerſes alte
rations ſelon la diuerſe temperature des corps ,& nature de l'humeur où ladice fićure
eſt fondee : & lors ſe fait vn combar entre le venin , & nature , laquelle ſi elle eſt plus
Signes de
Nature forte,par fa vertu expultrice le chaſſe loing des parties nobles , & cauſepardehors
waiffreſſe. ſueurs, vomiſſemens, flux de ſang , apoſtemes aux émun & oires ,charbons,ou autres
puſtules & {eruptions par cour le corps : auffi flux de vencre, fluxd'vrinc, cuacuations
par inſenſiblecranſpiration ,& aucres que declarerons cy.apres . Au contraire , file
-
de la Peſte. 843
A venin eſt plus fort que la vercu expultrice,nacure demeure vaincuë, & par cóſequent signes post
la mort s'enfuir. Or pourcognoiſtre que la fieure eſt peſtilencielle, c'eſt que dés le cognoskie
premier jour qu'elle commence, les forces ſontprofternees & abbatues ſans aucune la fićure
cauſe qui aic precedé auparauant: car ſans grande euacuation fai&te,lespauures mala- peſtilente.
des ſont tác debiles & affoiblis,qu'on eſtimeroit qu'ils auroićteſté vexezde quelque Roridelesen
grande maladie, & pluſicurs ſentent mordicationà l'orifice de l'eſtomach,& grande la pratiques
palpitation de cæur,& ont ſommeil profond , & les ſens de l'entēdement hebetez. Ils
ſentent auſſi grande chaleurau dedans de leurs corps , & les parties exterieures ſont
'trouuccs froides,de façon que ceux qui ne ſont experimentez en telle maladie ſont
facilement deceus,eſtimans qu'il n'y ait nulle fieure,pource que le pouls & vrine des
malades ne ſont gueres changez, & toutesfois ils ont grandeinquietude & difficulté
de reſpirer, & ont leurs excremens forc fecides, & autres griefs accidens,& le plus ſou
B uent le croiſielme iour one reſuerie & grand Aux de venire & vomiſſemens,auec vne
cxtreme ſoif, & n'ont point d'appetit.Parcácil faut prendregarde qu'aucus de ces li
gnes ſonccouſiourspreſens,& les autres viennét lors qu'ily a quelque parrie offélee:
comme s'il y a difficulté de reſpirer,cela demonſtre que lesparcies pe&orales ſont of.
live
fenſees,& quand le delire vient cela ſignifie qu'il y a viceaudiaphragme , & au cer.
ueau ,qui ſe faitquand la matiere du charbon ſeputrefie prés d'icelles parties , ou en
icellesmeſmes.Or en toutes ces choſes l'imbecillité des forces eſt commune , & les La faculić
affe&tionsdu caur pareillement,veu que ce venin peftiferé eft contraire à noſtrecena- vitale.Le
ſte mo ntre foi
ture,& qu'ilinfc& e principalementle cæur,fontaine de vie. Et combien que ble en toute
fiéure ſupafſc en malignitéles autres qui ne participent point du venin peſtiferé, ſi eſt peft .
cequ'elle eſt aulli diuerſe comme icelles:carquelquesfoiselle a ſes exhallations com fienres pe.
melatierce,autresfois quarte, autresfois quotidiane, ſelon la diuerſité de l'humeur polentes;
quieſt principalement affc & é:ce qu'on cognoiſt parlesinteruales,c'eſt àdire,l’eſpace rieres,
interpoſé entre les acccz.Pareillemételle eſt dite ſimple, quandla qualité veneneuſe quartes
confifte ſeulement en l'eſpritvital,& que leshumeurs
neſontencorescorrompus.El queridio
le eſt dire compoſee oucompliquee,quand ladi&te qualité eſt fource és eſprits & aux
humeurs en toute la ſubſtance du corpsauec charbons, boſſes & pourpre. Aulli ily a
d'autres differences & diuerſitezd'icelles quiſe cognoiſſent par les vrines, excremēs,
1
C habitude vniuerſelle du corps,temperature d'iceluy:aufli par les acccz , la chaleur, le
pouls,& autres.Doncſelon que la fićuretiendra la nature detierce,quarte, quotidia
ne,ou continuë,faudra diverſificr les remedes pour la curation d'icelle :ce que ie laiſſe
à mcffieurs les Medecins .

Comment lemalade ſedoitretirerdulieuinfect,fibit qu'ilfefent frappédepefte.


C H 2 P.

ko
Yant amplement deſcrit la peſte, & tous ſes ſignes & accidens,& la manie.
.
re de s'en preſeruer, il faut maintenant traicter de la curation , en laquelle
il faut auoir eſgard ſurroures choſes, de prendre incontinenc quelque ale: ilfaut faire
xitaire pour contrarier au venin : mais pour l'ordre de demonftration & tout
dre pren
quel.
Denſeignement,nousdeclarerons premierement la cure vniuerſelle,commençant par que alexi.
le lieuauquel celuy qui ſe ſent frappé,doit babicer.Ec partant il eſt bon,que lemalade 1ere poar
28 ſe recirclubit en quelque licu prochain ,où l'air ſoit bien fain ,& fauc auoir cela en ſin- difendre
guliere recommandation :car en cegiſt vne grande partie de la cure ,parce que l'air eſt que
vne des choſes premieres & plus neceſſaires pour la conſeruation de noſtre vie : veu nın ne ſasa
que vueillons ou non,& en quelque licu que ce ſoit, il nous conuient l'attirer av de.Bjeleraur.
dans du corps , & le ietter au dehors par le moyen des poulmons , & imperceptibles
ouuertures des petites arteres ,quiſontdiſſeminees en noſtre cuir, & de là ſe comuni .
quent aux grandes arteres, leſquelles l’enuoyent au cæur fontaine vie de, & derechef
iceluy le diſtribuë par cout le corps, quaſi de meſme façon que ceſte portion d'airqui
entre par les narilles , laquelle eſt promptement elaboree en la ſubſtance du cerucau.
Ec pour ceſte cauſe il eſt tres.neceſſaireellire un bon air au malade , contrariant à la
caule de la peſte, afin quc pluſtoft & plus (curement il ſoir garanty.

.: แ : 1 .
844 Vingt-deuxieſme liure
Delaſituation &habitation de la maiſon du malade de peſte, & moyen d'y rectifierl'air. А

CH4 P. XXI.
,& .
Vand la peſte vient de l'intéperature de l'air, on ne ſe doit tenir en lieu haut
efleuć :mais en bas lieu enuironné d'air froid ,eſpés & mareſcageux , & fc tenir
caché dans les maiſons: & parcát ceux qui ſont prilonniers, & les Moynes &
Nonnains enfermez en leurs cachors & conuents,ſont plus ſeuremét,& hors
de la porcec du canon peſtiféré,que ceux qui habitent en autre lieu:coutesfois il neſc
faut tenirtác enfermé qu'on n'ouure quelquesfois lesportes & feneſtresauvent con.
traire à celuy d'où vient l'air peſtilenç, afin que l'air frais & bon y entre le matin & le
ſoir,pourpurifier la maiſon des exhalations & vapeurs quiy ſont retenuës , & le cor.
Moyen de ropent dauantage, s'il n'eſt cluencé & flabellé :& ſurle midy leront cloſes & fermees.
refraiſcher
l'air .
Outre plus lors qu'il ne faict vent,commcon void aux grádes chaleurs,il faut elmou.
uoir l'air autour du malade auec vn eluentoir,ou avec vn grád ſac de coile,dáslequel
on porte la farine au moulin.Ec faut qu'il ſoit trempé en eau & vinaigre & poſé ſur yn
gros & long baſton,puis l'agiter fort :car par ceſte agitation on rend vnecres grande B
refrigeration par toute la chambre,ainſique l'experience le mõſtre.Orfi la peſteviene B
du vice des vapeurs de la terre,on ſe logera és lieux mediocremčr hauts & bien aërez:
& pour ledire en vn mot,on fera toutes choſes qui peuuent contrarier à l intempera.
ture de l'air peſtilent,de quelque cauſe que la perte loit procreće. Auſſi convientfaire
changer tous les iours de chambre & linceux aux malades, s'ils le peuuent commodć.
&
ment faire principalement quand ils ont ſué,de peur que les ordures quenaturea ict C

tees,nc ſoient attirces par lesporcs & arteres,qui ſont diſſeminees au cuir,qui fuccent
& attirent l'air indifferemment,ſoitbon ,ou mauuais: leniblablement faire du feu en
la chambre , principalement la nuiat , afin de rendre l'air plus purifić des vapeurs no la
Il faut fai. &urnes,& de l'exhalation & expiration du malade , & deles excremens, Parquoy il C 1
ne du fen
en la chamcouchera vncnuict en vacchambre , & l'autrcnuict en vn autre. En quoy on doit
bre duman auoir eſgard à la diſpoſition du temps : car aux grandes & exrremes chaleurs, il n'y 0
lade. fautfaire grand feu ,de peur d'augmenter la chaleur de l'air , ny pareillement vſer de С
Entemps parfums forts & odoriferans, parce que celleschoſes augmentent la fiéure & ladou
chand foue leur de ceſte, d'autant qu'en tel temps noſtre chaleur naturelle eſt languide, & les ef
fuir les
choſes qui prics & humeurs bouillenc & bruſlent: parquoy il faut pluſtoſt vſer de choſes quira.
fraichiſſent,que decelles qui eſchauffent. Partani en eſté il faut arrouler la chambre
efchauffens. d'eau froide mellcc t
en vinaigre, & cſpandre fucilles de vigne , qui auront trempé ca
cau froide,cáncs ou roſeaux,aubeſpine,ioncs,fucilles & fleurs de nenuphar,peuplier,
ramcaux de chelne, & lcurs ſemblables:leſquels ſeront renouuellez louuent, comme
aulli l'agitation de l'air auec le lac cy.deuanc diete doit eſtre reïcerec quand il en ſcra
Orygemine beſoin .Par .i'lement on accachera autour du lict du malade des linceux gros & neufs
dulia . & non fore blancs(pource que la blancheur dillipe la vcuë, & augmente la douleur de
teſte)leſquels ſeruironc de cuſtodes, & les fauc arrouſer ſouvencesfois d'eau & de vi.
naigre,ou cau toſc,ſi ic malade eſt riche. On pourra tendre en la chambre pluſieurs D
linceux de coile neuue tiempezen oxycrat,qui luy ſeruiront de capiſſerie : Et faut que
le iour il ſoit en peu de clarcé, & au contraire la nui& auec grande lumiere, pource D
que par grande clarié du iour leseſprits ſe diſſipent & affoibliffent, & par conſequenc
Perfum tout le corps:& par la lumiere de la nuiet ils ſonc rcuoquez au dehors. Auſſi qn fera
cmire le
Tenin ,
bruſler par foisbois de genelt,de genćure,freſnc, & tamarix,mis en petites pieces , eſ 1

corces d'orenges,citrons,limons,pelures de pommes de couropendu , cloux de giro 4

Ae,benioin ,gomme Arabique, racine d'iris , myrrhe,prenát de chacun cát qu'on vou 1
dra.Ec ſeront concaſſez groſſement, & mixtionncz enſemble, & icccez ſur vn reſchaut
plein de braize,& ce ſoit reïteré cát qu'il ſera beſoin :mais entre tous, le bois & grainc
de genéure onc grande vertu contrele venin ,ainſique les anciens ont laiſſe pareſcris,
ce qu'on cognoit auſſi pareffe &t:car alors qu'onen bruſle,ils chaſſent tous lerpens vc.
neneux qui ſontautour. Le frelnea ſemblablement grande vercu : car nulle beſte ve.
Ventes du neneuſe n'oleapprocher feulemenc de lon ombre,rellement qu'vn animalvenencux
bois de ſcmettra pluſtoſt dedans le feu, qued'approcher ou paſſer par deffus le bois de freſne,
frefus. le
comme monſtre Pline, & dit le ſçauoir par experience,liu.16.cha. 13 . Parcillomenc
parfü ſuyuát eſt doux & amiable . Il faut faire fortchauffer des pierres de graiz, &les
de la Peſte. 845
mercre dedás des chauderons,puis on verſera deſſus du vinaigre, auquelon aura faid
A bouillir de la rue, lauge,rofınarin ,graine de laurier, genćure noix,deciprés , & leurs
ſemblables:cefaiſant ils'eſleuera vnegroſſe vapeur & fumee qui re& ifiera l'air,& do
nera bonne odeur par coute la chambre.On pourra avfli vſer d'autres en autre façon, Parfums
donc la maciere pourra eſtre plus craſſe & viqueuſe, afin qu'en bruſāc elle puiſſeren.de mariere
dre plusgrăde fumee,comme ſont ladanum ,mirrhe,maſtic,relinc,terebenthinc,ſty.calle
viſquenler
rax calamite,oliban ,benioin,ſemencesde laurier,geneure,pommes de pain, cloux de
giroflc : & peut on piler aueciceux de la ſauge,roſmarin ,mariolaine , & leurs ſembla
bles :à fin qu'aucc les gommes la fumee & vapeur dure plus long çemps. On pourra Chandelles
pareillement faire aux riches ,chádelles ,corches & Hambeaux ,mellant auec la cire des odorantes
pouldres de lenteurs compoſees des choſes deffuſdi&tes.Onfera auſſi ſentir aux mala:
des choſes douces aromatiques ,afin de corroborer l'eſprit animal :car la bonne odeur
recrée & cõforre les parties nobles :au córaire la mauuaiſe prouoque le vomir, & faic
venir defaillance de caur: tellement qu'ils pourrontcenir en leurs mains vncelponge
crempee en eau roſe,vinaigre roſar,cloux de girofle , & vn bien peu de căphrecīcaſſez
& l'odorer ſouvent:ou fauc vſer de l'eau ſuyuáte,laquelleeſt bien odoriferáte & fort E au fingu
ſingulierepourceleffe& .4.Ircosflor zinj.zedoarix ,ſpicæ nardiań zvj.ſtyraciscala . ijrvepour
B micæ ,benioin , cinnamomi,nucismoſcatæ ,cariophyllorum an.31.13.cheriacæ veteris odorer.
zl.Ces choles ſerontgroflementpuluerilees & crempees en quatre liures de bon vin
blanc par l'eſpace de douze heures,deſſusdes cédres chaudes,puis les ferez diſtiller en
alambic de verre. En ceſte cau faudra tremper ſouuent vne eſponge, laquelle lera ANIVECAM
miſe en vn mouchoir,ou en vne boëre , & flairer louuent . Autre 2. aquæ roſar. &
aceti roſatiana Ziiij . cáph. gr.vj.che.z/s. Faites diſſoudre le tour enſemble,& le mettez
en vne phiole de verre,& le faictes ſencirlouuent al malade,ouyne eſponge ou miou. Nomët.
choir imbus en ceſte mixtion . Aullion pourra à ceſte intention vſer de cenouët ,le.
quel eſt debonne odeur & bien experimenté. 24.roſar. p.ij.ireos Florentiæ 3.ca
lâmi aromacici,cinnamomi,cariophy.añ.zij.ſtycacis calamitæ ,benioin,ana.zjß. cype
riz.ß.reducantur in puluerem craffiorem , & fiae nodulus interduas lyndones. Ledic
noüer doit eſtre de la groſſeur d'un eſteuf,& le faut laiſſer touſiours tremper en huiet
onces de bonne eau roſe, & deux onces de vinagre roſat, & le baillerez ſouuent à odo
C
rer au malade. Nous deuonsbien obſeruer, que ſelon la diuerſicé des temps il faut Faut di

c,bez
diuerſifier les parfums: car en eſté ne faut vſer de muſc, ciuerce,ſtyrax calamite,ben - werffier les
join , iris, ny pareillesodeurs fortes , pour les cauſes que nous auons di& es cy-deſſus:parfums.
mais en Hyuer l'air eſtant froid & humide,gros & nebuleux,on en peut vſer. D'auan
tage il faut noter queles femmes ſujettes à ſuffocation de la matrice, & les febricitás,
& ceux qui ont grande douleur derelte , ne doiuenc vſer de parfums & odeurs fortes,
pita mais de doux & benings,afin qu'ils ne leur puiſſent aucunement nuire : partant ils
pourront vſer d'eau role & vinaigre , & bien peu de camphre, & cloux de girofile
concaficz.
s&M Duregime, maniere de viure dumalade, é premierementdumanger.
pulancia С НА Р. XXII.

Ncelte maladie peſtilente la maniere deviure doit eſtre refrigerante &


Site deſſeichantc, & ne faut tenir vne diette fort tenuë,mais au contraire eſt ne.
ceſſaire que les malades ſe nourriſſent aſſez copieuſement de bons ali. La dieteté.
D
mens:cc quepluſieurs do &tes Medecins approuvent, & ciennent que la nuëor ſub
tile efper
maniere de viure tenue eſt dommageable aux pelifcrez, à cauſe de la grande reſo wiciente
lution d'eſprits & debilitation des forces naturelles,quieſt faictc par icelle maladie,
& fait communement troubler le cerueau , rendant les malades frenetiques ; ioinet aux peftife
det auſſi qu'ils ſyncopiſent ſouvent: pour à quoy obuier , fauc vſer de grande & ſubice
JADE reparation par alimens de bonne ſubſtance : ce que l'experience nous a enſeigné:
carceux quien ceſte maladie onc vſé d'vne maniere de viure aſſez ample , ſont plu
$ Itoſt eſchappez queles autres auſquels ona faic tenir diere tenuë : & partant on y emelles
prendra garde.D'avantagefaut eviter lesviandes douces,humides,crales & viſqueu- „ andes
ſes,& celles qui ſont fort cénuës:parce que les douces s'enflamment promptement , faut cuirer.
les humides le pourriſſent, les craſſes & viſqueuſes font obſtructio, & prouoquent les
humeurs à pourriture:celles qui ſont de tenuë ſubſtance lubeilient trop les humeurs
& les eſchauffene & enflamment , & font elleuer vapeurs chaudes & acres au cerueau,
dont la fiéurc & autres accidens s'accroiſſent. Parquoy les viandes ſalees & eſpicces,
840 Vingt-deuxieſme liure

mouſtarde,ails,oignons& ſemblables, & generalement toutes choſes qui engendrent A


mauuais nourriſſement,ne ſont propres.D'auancage les legumesſeront pareillement
euitez,parce qu'ils ſont venteux , & cauſent obſtruction :coutesfois leur bouillon n'eſt

Du pain à reietter,parcequ'il eſt aperitif & diurecique. On vſera dócques de la maniere de vi.
que doie urc quis'enſuit. Et premierement le pain ſera bien leué & bien cuit, & vn peu falé , &
manger le de bon fourment , ou de meceil, & qu'il ne ſoit trop rallis ne trop rendre,inais moyen
malade de entre deux .On vſera de chair qui engendre bon aliment & facile à digerer , & laiffc
pelle.
peu d'excremens: comme ſoncieunesmoutons,veaux,chéureaux, lapreaux , poulets,
heroudeaux , perdreaux, pigeonncaux , griues , alouettes,cailles ,merles,tourterelles,
francolins, phaiſans, & generalement tous oiſcaux fauuages qu'on a accouſtume de
manger ,excepté ceux qui viucnc és caux :tousleſquels ſerör diuerlifiez ſelon le gouſt,
& la puiſſance dela bourſe du malade.Er faut que le malade maſche fort ſes viandes:
pource que lors qu'elles ſont bien maſchces, elles ſont à demy cuites & preparecs , &
par ainſi lesvapeurs montent moins au cerueau . La ſaulce d'icelle ſera verjus, vinai.


B
Yriliédes gre, iusde limons,orenges,citrons, grenadesaigre, elpincuinette, groſeilles rouges, B
choſes ace. & verdes , ius d'ozeille champeſtre & domeſtique. Or toutes choſes aceteuſes lone
tenſes en fortlovices, parce qu'elles irritent l'appecit , & reſiſtenc à la chaleur & ebullition dela
peste.
fićureputride,& gardent que la viande ne ſe corrompe en l'eſtomach :aufli contra
rient à la putrefačtion du venin & pourriture des humeurs:mais ceux qui ont mauais
cſtomach ,ou vice aux poulmons,en vſeront moinsque les autres,ou feront corrigees
auec ſuccre & canello . Ec quelquesfois auſſi le malade pourra bien manger quelques

viandes bouillies auec bonnes herbes , comme laiđuë , pourpić , ſcariole ,bourroche,
oſcile, houbelon ,bugloffe ,creffon ,pimprenelle,loucie ,cerfucil cormenulle , quintc .
fucille ,ſcabieuſe,ſemences froides,orge & auoine muodez , & leurs ſemblables, auec
vn peu de ſaffran ,qui pareillemér en tel cas eſt ſouuerain , d'autant qu'il corrige le vc.
nin.Les pocages nclonc à louer,li ce n'eſt en petite quantité,à caule de leur grádehu
Les potages midité(auſquels on fera cuire racines & temences aperitiues, leſquellesoncøversu de
C.
ne ſont pro provoquer l'vrine & del -opiller ) ny pareillemēr les choſes graſſes & oleagineuſes,par. F
pres « NX
ce qu'elles s'enfláment promptement.Les capres ſon bónes, à cauſe qu'elles aiguiſene
malades
l'appetic, & del-opilene, & doiuent eſtre bien deſſalees & mangees au commencemét
dopoße..
durepas,auec vn bien peu d'huile d'olive & vinaigre : on en peut pareillemene vleren
pocages . Les oliues priles en pecite quantité ne ſont auſſi à reiecer.Auxiours maigres,
lile malade eſt ſcrupuleux, & friant de poiſſon (ce que ie n’approuue , pource qu'il eſt
facile à ſe corrompre & engendrer mauuais luc )il en pourra vſer:mais on luy eſlirales
moins nuiſibles, comme ſont les ſaxatiles,c'eſt à dire,viuans en cau claire,où il y a for
ce grauirc ,pierres & rochers : auſſi ceux qui ſont friables,c'eſt à dirc , aiſez à le commi.
nuer & froiſſer, come cruites,brochets,gardons,perches,dars, loches,eſcreuiſſes prin

Vlage du cipalemér eſtouffees en faict , courqués & autres ſemblables. Quiát aux poiſſons de mer,
porfon. il pourra vſer de dorades rouges,gounauds,merlus,celerins, ſardinesfraiſches & no
ſalces,muloes,merlangs,eſperlants aigrefins,turbots , & leurs ſemblables , leſquels ſe
ront cuits en eau & vinaigre,& bonnes herbes.Auſiles æufs pochez en cau mágez a.
ucc jusd'oſeille , & autres cy.deſſus mentionnez leur ſeront propres. L'orge munde
Orge mon
dé . auquel on mettra grainc degrenades aigres, eft pareillement fori excellent en el cas,

pource qu'il eſt de


facile digeſtion & de bonne nourriture: aufli qu'il rafraiſchit, hu D D
me &te, deterge & laſche vn
peu le vétre. Ony pourra adiouſter de la graine de pauoc
& ſemences de melons, ſi la fićure eſt grande:coutesfois aucuns nc le peuuent digerer,
A quilor- & leur cauſe vne nauſcc & douleur de ceſte : & à cels ne leur en ſera baillé aucunc
se m onde
mondé
ment,mais en lieu d'iceluy,on leur donnera panades, ou pain gratré auec bouillon de
n'eſt bon .
chapon ,auquel on fera bouillir les herbes cy - deſſus mentionnces auec des femences
froides.

Quár aux fruits , le malade pourravſer des raiſins deſſeichez & cófics entre deux plats
aucc eau roſe & ſucre,pruneaux de damacs aigrets, figues ,ceriſes aigrettcs , pómes de
on
pondre cor- court pendu,poires de bon chreſtien , & autres tels bons fruits.Et apres le repas ,
diale. luy donnera coings cuits ſur la braiſe ou corignac , ou conferue de roſes, de bugloſe,

La geler ell violetces , boureche, & leurs ſemblables , ou ceſte poudre cordiale . 24. coriandri
commepro- præparat.zii.margaritarum ele &tarum ,rofarum ,raſuræ eboris , cornu cerviań zl.ca.
pre pourles sabes gii.cinnamomi 2j. & oflis de corde cerui əſ. ſacchari roſati ziiij . fiae pul

Nebilet uis :vcatur poſt paftum . Silc malade eſt fort debile , on luy donnera de la gelee faire
de

1
de la Peſte.
847
A
dechappon & veau , y faiſant bouillir cau d'ozeille, de chardon benit , bourrache ,'&
vn peu devinaigre roſat,canelle,ſucre,& autres choles qu'on vcrra eſtrenecciaires.
La nuictne faut eftredegarny de quelques bons preliis & boüillonsa y adioufiancun
peu deius de citron ou de grenades aigres) leſquelsen cerce maladie fontplus à louer
que le coulis,à cauſe qu'ilsſonttrop elpés,font obſtruction aux veinesmetaraïques &
capillaires du foye, & cauſenc loifpourla tardiueté de leur diſtribution , & donnent
peine à l'eſtomach de les cuire , lequel ( comme aulli le crur & autres membres no .
bles ) a aſſez d'autres empefchemens à vaincrelon ennemy. Il n'eſt auſſi impertinenc
tenir & faire preparer le reſtaurent qui s'enſuic , afin de n'ennuyer le malade d'une
force de viandes,maisle recreer aucunement en diuers vfages d'alimens ,non que par
ce moyen on luy vueille rechercher & conciter vn apperit, inais le fortifier , & cepen
danc le contencer en quelque façon , & luy donner couragedcreſiſter à la maladie:
partanc on pourra vſerdececuy-cy.Prenez conſeruede bugloſe,bourrache,violettes Reſtaurert.
de Mars , nenuphar & cichorce , de chacun deux onces , pouldred clcctuaire dedia.
B margaritum froid & diacragacant froid , crochiſques de camphe, de chacun trois
drachmes ſemence de citron, chardon beniſt, & accreuſe , racinede dictamne, & tor
meneille, de chacun deux dragmes , eau de decoction d'un icuncchappon fix liures,
mellee auec fueilles de laictuë aceteule, pourpić, bugloſe,& bourrache,dechacun de
mie poignec. Lerout ſoit mis en vn alambic de verre auec la chair de deux poulers &
deux perdrix:ſoit faicte diſtillation à petit feu . Puis fera pris demie liure de la diſtilla
tion predicte, auec deux onces de luccre blanc & demie dragme de canelie: ces choſes
ſoient paſīves parla manche d'yppocras; & que le malade en boiue quand il aura foif, Anere he
ou qu'il vſe de ceſtuy {uiuant. Prenez vn vieilchappon & vn jarret de veau , deux faurent.
perdrix hachees, canelle enciere deux drachmes : le toutmis en vo vailleau de verre
bien eſtouppé ſans aucune autre liqueur,& ſoient faits bouillir au bain Marie , iuſques
à ce qu'ils loient parfaictement cuits, ou en vn vaiſſeau d'eſtain ,quit'eſt icy repreien
té,lequel le cloſt i vis, de façon ,quenulle vapeur ne peur ſortir dehors , & eſt propre
С pour faire reſtaurens, & potions vulneraires, & decoctions de gaiac,lalleparille, & ef
quinc, & generalementtoutes choles quile doivent cuire au bain Marie.

on
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‫درمان‬

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depuis
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1

1
843 Vingt-deuxieſme liure

Car par ce moyen la chair fecuit en ſon propreius , ſans que le feu y porte dom
mage : puis le ius ſoit exprimé dedans des preſles propres à celic chofe, duquel en terz
doonévne once ou plus pour chacune fois auec va peu d'eaux cordiales , comme
cau de bourrache, de violettes , de bugloſe , de ſcabicufe,de roſes,ou de conſcruc d'i
celles , & du crialancal , dimargaritum frigidum , deſquelles on en diſſoudra ,& en
ſera donné ſouvent au malade , à ſçauoir, de trois heures en trois heures , plus ou Ć
moins , ſelon que le malade le pourra digerer , & que la fićure & autres accidens le
Les choſes
don'ces fons permettront: car ſelon que la ficure ſera grande ou diminuce, il faudradiverſifier
conitaires les alimens , tant en quantité qu'en qualité . Oron ordocnc les rcftautens, coulis &
aux fie- preſlis, & cau de chair à ceux qui ont l'eſtomach debile , & ne peuuent cuire les
WY4X.
viandes . Outre plus, il eſtbon manger ſouuencen petite quantuéconficures aigret.
tes , comme prunes , ceriſes , & autres dont nous auons fait mention cy dellus. Ex
fauc du touteuiter les confitures doulces : car ( comme nous auons dit cy dellus)
Quantité de toutes choſes duulces prompiement s'enflamment en noſtre corps , ſe rournans en
manger re- cholere , & louuent cngendrent obftru & ion au foye & à la rarelle. Et faut icy noter,
glec .
qu'il n'y a point de maladie quidebilite tant nature que fait la peſte. Parquoy ilfauc
donner à manger au maladepou & ſouvent, ſelon qu'on verra eftreneceſſaire, ayant
cſgard à la couſtume,à l'aage, au temps, à la religion , & íur toutes choſes à la vertu du
malade, afin que le venin quia eſté chaſſé & cxpulsé aux parties.ça res jeures, ne loit
D
de rechefattiré au dedans par inanition. Confideré auſi que la putrefa &tion venc. D
neuſe corrompt , altere , & dillipeles eſprits vicaux & nacurels, leſquels doiuent eſtre
:
ſouuent reſtaurez par manger & boire , comme nous t’auons defia aduerty cy deuát :
toutesfois il faut prendre garde que partrop manger on ne charge lc malade de ma;
tiere ſuperfluë ,partant en ccontiendra mediocrité . Ee quand l'appetit ſera vena , il
ne faut differee de donner à manger & boire ,tant pour les cauſes lufdites,que auſſi de
peur que l'eſtomach ne ſe rempliſfcd'humeurs acres ,bilieuſes,& ameres,donts'enfuia
uent pluſieurs extorſions & mordications en icolufy, inquietude ,& priuation de ſom
meil,retention des excremens,leſquels aulli font faiets plus acres & mordicans . Da
uantage,faut auoir cſgard de donner en Hyuer plus à manger qu'en Eſté, à cauſeque
la chaleur naturelle eſt plus grande. Plus , ceux qui ſont de complexion froide,& qui
ont debilité d'eſtomach , vſerontmoins de choſes refrigerantes, ou ſeront corrigees
auccques autres choſes chaudes , commccanelle , cloux degirofle ,muguette , macis,
Beaucrcs.Outreplus,ceux qui ontgrád Aux de vétre,doiuenc yſer de ius de grenades,
de la Pelte. 849
cant au manger qu'au boire.Ecl'ordrede prendre les viandes, c'eſt que les liquides &
A de facile digeſtion,ſerontpriſes deuantles ſolides , & plus difficiles à digerer. Eccete
ſuffiſe du manger du malade: à preſent il nous faut traicter du boire.
Du boiredu pestiferémalade. CHA P. XXIII .

I le malade a grande fieure & ardente, il s'abſtiendra entierement de vin Maniere de


s'il ne luy ſurviene defaillance de ceur : mais en lieu d'iceluy il pourra boi faire oxy;
! c de l'oxymel faict comme s'enluit. Vous prendrez la quantité que vou.mel.
drez de lameilleure cau que pourrez recouurer , & pour fx liures d'eau y
mettrez quatreonces de miel, & le ferez bouillir en l'elcumant iuſques à la conſom
pcion de la troiſieſme parcie: puis ſera coulé , & mis en quelque vailleau de verre:puis
on adiouſtera trojsou quatre onces de vinaigre: & ſeraaromatiſé decanelle fine.Pa
reillemēc pourra yſer de l'hippocras d'eau fait en cete lorte. Prenez vnc quarte d'eau Hippocras
d'eau
de fontaine, ſix onces de ſuccre, deux dragmes de canelle, & le tout enfemble coule.
sez par vne manche d'hipocras, lans aucunement le faire bouillir : & s'il n'eſt aſſez
doux au gouft du malade, vousy pourrez adiouſter dauantage de luccre , enſemble
B vn peu de ius decirron,& lors melmement qu'ildemande àboire.Leſyrop de aceto- Syrop de
ſitate citriemporre le prix entre tous les autres contre la peſte. Il pourra aulli vſer du acetofitaté
julep qui s'enluir entre les repas avec eau bouillie , ou eau d'ozeille, de laiétues , fca.ciri,
bieuſe, & bugloſe,de chacune égale portion : comme, Prenez ius d'ozeille bien puri
fićdemie liure, ius de laittues aulli bien purifié quatre onces, ſuccre fin vne liure: cla
rifiez le tout enſemble , & le faices bouillir à perfection , & le coulez, y adiouſtant ſur la
fin vn peu de vinaigre, & en vſera comme deſſus eſt dit : & s'il n'eſt aggreable auma Autre iulepe
Jade en cete ſorce,vous lepourrez faire en la maniere luiuante. Prencz quatre onces
dudit julep clarifié & coulé, & le meſlez auec vneliure defdices eaux cordiales, & les
ferez bouillir enſemble crois ou quatrebouillons,& eftant hors du feu y ietteezync
dragme de ſantalcitrin ,& demie dragme de canelle concaſſee: ce faiết le coulerez
par vne manche d'hipocras, & eltant froid, le baillerez à boire au malade auec jus de
citron, comme deſlus. Ceux qui ont accouſtunic de boire du peré, ou du pommé ,ou
с de la ceruoiſe,ou biere, le pourront faire, pourueu que la biere foit bonne, claire, & Du peré ,
. delice, & le peré & pommé faiat de pommes & poires aigres , qui ſoyent bien puri
fiees: car s'ils eſtoyent gros & troubles,non ſeulementengendreroyent mauvaiſes. pommes et
humeurs mais auſli grandes cruditez & inflations à l'eſtomach , & pluſieurs obſtru
‫یکی با م‬
& tions, dont la fiéure ſe pourroit augmenter , & par conſequent faire mauuais ac
cidens : parquoy le conſeille n'en vſer aucunement,ſi le malade ne le defiroic , & fuſt
accouſtumé à boire cels bruuages . Pour eſtancher la grande loif, & contrarier à la
matiere putride & veneneule , on donnera à boire au malade de l'eau & vinaigre coOxycrae
mpose
faictscommes'enſuit. Prenez deux liures d'eau de fontaine, crois onces de vinaigre
blancou rouge, quatre onces de ſuccre fin , deux onces de ſyrop de roſes : le tout
17.30
ſoit faict bouillir vn petit bouillon , & en ſoit donné à boire au malade. Ce iulep
ſuiuanr eſt pareillement propre pour donner à ceux qui ſont fort febricitans, lequel
a vercu de rafraiſchir le cour , & recient en bride la fureur du venin , & gardeles hu
mcurs depourriture. Prenez demie once deius de limons , & autantdecitrons,vin Amereiulep.
D
degrenades aigres deux onces ,eau de petite ozeille , & cau roſe, de chacune vne on
ce e, au de fontaine boüillie, tant qu'il ſera beſoin , & ſoit fai & iulep, duquel en ſera
vsé entre les repas. Autre. Prenez lyrop de citrons & de grofeilles rouges , appel.
lees ribes , de chacun yneonce,eau de nenuphar quatre onces, cau de fontaine, huiet
onces , & de ce ſoit faict iulep à boire comme deſſus. Autre. Prenez ſyrop de nenu
phar , & ſyrop acereux ſimple, de chacun demie once: ſoient diſſouts en cinqonces
JW d'eau de petice ozeille , & vneliure d'eau de fontaine, & de ce ſoit faiæ iulep. Et ſi le POHY Rant
malade eſtoit ieune , & de temperature chaude , & l'eſtomach bon ,ilpourra boire de cher une ex
care bonne eau froide venant d'uneclaire & viue fontaine àgrands traicts, afin d'eſtein- creme fosfo
dre ſon extreme ſoif, & la vchemente fureur & ardeurdela fićure. le dy à grands
traicts, pource que s'ilbeuuoit peu & ſouuét,iamais la ſoifne pourroit eſtre eſtáchec,
ny la chaleur diminuec, mais pluſtoſt ſeroient augmentees. Ce que nous cognoiſſons
par l'exemple dumareſchal, quivoulant eſchauffer le fer, arrouſe ſon feu auec yne el
couuerte, & parcela vertu du feu en eſt renduë plus chaude& ardente: & lors qu'il le
CC ij
)
850 Le Vingt-deuxieſme liure
veut eſteindre,il ietre bonnequantité d'eau deſſus,qui fait que le feu en eſt fuffoqué А
& du tour eſteine : auſſi le pauure febricicant alceréd'vne extréme ſoif, lors qu'on luy
donne vn grand craict d'eau freſche,onluy ſuffoque par ce moyen (a vehemente cha
leur , & defir de boire . Et en relle extreme ſoifnefauctenir meſure du boire : & ou
le malade vomira apres,il n'y aura pas grand danger : & cecy eſt meſme approuvé de
Colfelia
cbap ,7. 3. Celle, quidic,qu'apresquel'caufroideaurarefrigerélesparties interieures,il la con
uient vomir : ce quetoutesfoisaucuns ne font pas, mais en vlent comme de medica
ment. Dauantage, le maladeciendra en ſa bouche ces crochıſques. 2. feminis pfyllij
3 ij. Teminis cichoniorum žj. & B. ſaccaricandi in aqua rofarum diſſolut, žj. miſce,
fiant crochiſci lupinis fimiles,teneatſemper in ore.Ces trochiſques hume& ent gran.
dement la bouche du malade. Auſſi pour appaiſer la ſoif, on pourra faire tenir en la
bouche vn morceau de melon,ou concombre,ou courge , ou quelquesfucilles de laia
&uës , ou d'ozeille , ou pourpié trempé en eau froide, & le renouueller ſouuent. Il
pourra pareillemenc y tenir des leſches de citron vn peu ſuccrees & aſpergees d'eau
Oxycut roſe :ſemblablement auſſides grains de grenades aigres. Outre plus, le vinaigre mix.B
commun . tionné auec eau,ainſi qu'on le preparededans les galeres pour boire, refroidit & gar
de de pourriture, fait paſſer & delcendre l'eau par les parties,diſlipe les obſtructions,
& eftanche merueilleuſement la foif, par la vertu de la froideur & acidité:aulliilrcli
ſte & amortic beaucoup l'ebullition des humeurs , qui cauſent la fiéure putride. Pa.
reillementlesſyrops ſujuans ſontpropres, comme aceteux,de nenuphar, violar, de
papauere,de limons,citrons,deribes,berberis,& degrenades. L vnd'iceux ſera baciu
& mixtionné auec eau bouillie, & en lera donné à boire aux malades, comme i'ay cy.
deſlus dic, moyennant qu'ils n'ayent toux,ny crachats de fang,ou le ſanglot,ou lefto
mach debile: car alors on doit ducout fuïr celles choſes aceteuſes . Or encor que j'aye
En quel cascy-deuant defendu le vin ,i'encendois que le malade fuſt jeune & robuſte, & cuftfié.
ileft requis ure ardente : mais s'il eſtoic vieil & debile,& de temperature picuiteule , & cuft accou.
au febrei- ftumé de boire touſiours vin , auſſi qu'ileuſt paſſe l'eftat de la maladie, & v'cuſt fiéure lo
boi trop grande ne ardente , il peut boireà les repas vin blanc ou
canedepesti-
feré
clairet fort trempé, ic- C
YG UIN. lon la force du vin , & ladiuerſitédes chaleurs dutemps.Et ce n'eſt à reietter:car il n'y ld
a rien qui conforte pluſtoft les vertus,& quiaugmente & reuiuifie les eſprits que faic CA
le bon vin, & pattant en tel cas en faudra donner:& à la fin de la table on luy donnera ra
quelque pecitvin vermeil , verdeler & aſtringene, afin qu'il ferme & ſerre l'orificede
l'eſtomach , & repouſſe les viandes au profond, auſſi qu'ilabbace les fumees quimon
tent à la ceſte.Etpource faict,on donnera pareillement vn peu de corignac,conferue f
deroſes,oa quelque poudre cordiale.Ec noteras que le malade ne doitendurer la foif,
Le malade & partanegargariſera ſouvent la bouche d'eau & vinaigre, ou vin & cau, & en lauera
de pilie ne pareillement ſa face, & ſes mains : cartelle lorion reſiouyt & fortifie les verrus. Si le 1
doir en lører malade a flux de ventre, il boira de l'eau ferree, auec quelques ſyrops aftringens: aufli &
la jouf. le lai& boülily,auquelon aura citeint des cailloux par plufieursfois,luy ſera forcvtile. 2

Bronage
Quantà ceux qui ont la langue feiche & raboreuſe, & coucesles parties de la bouche
deſTeichees , pour la leur rafreſchir & addoucir, on leur fera lauec ſouvene la bouche f
pour le flux
Le venire . d'eau muci'a zincule faicte de ſemences de coings & de pſyllium , avec eau de plan V
tain & de roles, & vn peu decamphre: puis apres l'auoir lauec & hume& ee, il la faut C
nettoyer auec vne ravilloire , puis l'oindre d'vn peu d'huile d'amandes douces tiree D DO
ſans feu, meſlee aucc du Syrop violat.Et s'ilſutuenoit quelques vlceres en la bouche, 8
on les couchera d'eau de ſublimé,ou eau forte ,qui aura ſeruy auxorféures :aulli on fe.
ra des gargariſmes, & autres choſes neceſſaires. V

1
Election de la bonne eau .
2

Il y a pluſieurs malades , & auſſi des ſains, qui iamais pourleur bruuagene veulet & C
ne peuuét boire autre bruuage que la ſeulecau . A ceſte caule vouloirm'a pris en cec t
endroit mõltrer par eſcritla bõne eau remarquee par les anciés : & eft bien neceſſaire
la cognoiſtre,veu que noſtre vie cõſiſte la plus grand part en l'vlage d'icelle. Car c'eſt P
le priociralbruuage,ioin& que le pain quenousmangeons,en eſtpeftri,& la pluſparc
l'cum de des viādes appreſtees & cuittes. Orla meilleure eſt celle de pluyequi tombe en Eté, 1

pluye ft lx & gardee en vne bonne ciſterne. Apres eſt celle des fontaines, quideſcend des mon F
milleure. tagnes , & decoule par dedans les pierres & rochers. Puis l'eau des puits , ou celle
de la Peſte. 851

A qui ſourd au bagd'úne montagne . Celle de la riviere eſt pareillement bonne priſe au
filcourant d'icelle entre deux caux . Celle des eſtangs ou marais eft mauvaile, & prin
cipalement celle qui ne court point cſt tres pernicieuſe & peftilente, à cauſe qu'en
icelle paiſſent plulieurs animaux venimeux, commecouleuuies, crapaux,vers , & au
tres . Celle de neige & de glace eſt auſſi mal lainc, à cauſe de la grande froideur & ter
reſtrité. Et quant à l'eau despuits & des fontaines, laquelle eſt touſiours ou le plus
fouuene trouvee bonne , la bonté ſera cognuë , si elle n'a aucune ſaueur, odeur, ny
couleur,neantmoinsbien claire comme l'air ſerain . Elle doic eltretiede en Hyner, &
froide en eſté,facile à eſchauffer, & ſubite à refroidir , en laquelle les pois & les féucs,
naues , & autres ſemblables choles cuiſent facilement. Et ceux quien v ſenc , ont la
voix claire, & la poitrine laine , & le teint du viſage beau & clair , & la plus legere trou.
uce au poids eſt la meilleure.

Des medicamens alexiteres , c'eſt à dire contrepoiſons , qui ont vertu de chaſſer
le venin peftiferé.

B CHAPITRE X XIV . C

Aintenant il eſt temps que nous traictions de la propre curation de la pelle est
ceſte maladie peſtilente, laquelle eſt fort difficile , à cauſe de la diverſi.difporte à
M té & fallace de pluſieurs accidens qui la luiuent : tellement que le Mede- cognofredo
cin & Chirurgien à grande difficulté peuuent-ils iuger & cognoiſtre ſi commence;
mens.
lemalade eſt frappé de peſte, veu meſmement que quelquesfois il n'aura qu'vne
petite ficure , à raiſon que ce venin ne ſera imprimé en humeurchaud , & partant il
ne ſe diſperſé, & ne ſe fait apparoiitre certainenient, dont aduicnt que le peftiferé
meurt promptement ſans aucune cauſe manifeſte ou ſigne quelconque. Parquoy en
temps de peſte il ne faut prolonger le temps cherchant les vrais ſignes de ceſte ma
ladie : car bien louuent on ſeroit deceu , & lc venin tuera bien coft le malade , ſi on
DI
ne hafte luy donner promptement ſon alexitere ou contrepoiſon . A ceſte cauſe
P
lors qu'on verra la fiévre à quelqu'vn en temps de peſte, il faut preſuppoſer qu'elle eſt
C peitilentielle , attendu melmement que tant que l'influence venimeuſe de l'air dure
ra , cour l'humeur ſuperflu eſt facilementenuenimé. Or pour commencer la curacion , ilfsmicom
aucuns ſont d'aduis de faire la ſaignce , les autres de donner purgation , & les autres mencer le
( HTC par le
de donner incontinent quelque contrepoiſon : mais conſiderare la vehenicnce de ce . medicament
ſte maladie , la diverſité & fallace des accidens qui la ſuivent, auſquels faut fubuenir alexitete
SI
en contemplant la principale partie, qui eſt la matiere veneneule & du rout ennemie
du cæur, nous ſommes d'aduis , que le plus expedient eſt de donner premierement &
ſubitement au maladequelque medicament alexitere & cardiaque , pour contrarier.
& refifter au venin , non entant qu'il lojt chaud ou froid ,lcc ou humide , mais comme
ayane yne proprieté occulte : car ſi c'eſtoit vne intemperature ſeule ou compliquee ,
scot elle pourroit eſtre curee auec medicamens concrarians par vne ſeule qualité , ou mi
ſtionnez ſuivant les remedes eſcrits & approuvez des anciens & modernes :mais nous
cek voyons que par tels remedes communs & mechodiques , tel venin ne peut eſtre vain
cu : parquoy nous ſommes contrain & s pour la curation venii aux medicamens qui
Doperent par vne proprieté occulec, qui ne peyuenteſtre expliquez par raiſon :maisco
gncus par ſeule experience, comme ſont les alexiteres ou antidotes, c'eſt à dire reme .
des dediez contre les venins . Orily en a de deux ſortes : l'vne, qui arreſte & rompe la Deux fortes
d'alexitores
vertu du venin par la proprieté cachce ou particuliere, de laquelle on ne peur donner
raiſon ;l'autre le iette hors du corps , à ſcauoir par vomiſſement , fiux de ventre, ſucur,
autres vacuacions que dironscy apres :leſquels eſtans contraires aux venins , changent
& alcerent tout le corps, non pas (comme dit lacques Greuin cn lon livre des Venins )
qu'il faille entendre que leur ſubſtáce penetre & paſſe tout le corps. Car il eſt impoſſi.
3
11. . ble qu'en ſipeu de teinps, & ſi peu de matiere qu'on donne pour contrepoiſon , puiſſe
paſſer yne ſi groſſe maffe denoſtre corps . Maiseſtant en l'eſtomach, là ils'eſchauffe: Comment
puis s'eſteuent certaines vapeurs, leſquelles ſe comuniquent par cour le corps , de celle l'alexitere
lorre, fouſtenu d'icelles il combat par ſa vertu la force du venin en quelque pare qu'il agiepar ione
le rencontre , le maiſtriſant & le chaſſanthors non ſeulement par la ſubitance, mais le corps.
che non parrenuoy de ſes vertus & qualitez.comme journellement nous voyons que quand
CC iij
29, .'
852 Vingt-deuxieſme liure

nous avons pris des pilules , ou quelque medecine laxatiue , combien que leur fub.
A
ſtance ou matiere demeure en l'eſtomach , leur vertu eſt elpanduë en toutes les par
cies du corps . On en peut autant dire d'un clyſtere , qui eſtanc dedans les inteſtins a
puiſſance de faire reuulfion des humcurs du cerueau . Autre exemple. Comme nousi
voyós de l'einplaſtre deVigo cum mercurio , qui liquefie & chaſſe levirus verolique

Gal.li.2.detant par ſueurs , flux de ventre, que flux de bouche, ſans que la ſubſtance du mercure
com.med.ſe entre aucunement dedans les partiesinterieures du corps : pareillementles alexiteres
cundü locos. operent en noscorps en combattant& challant la virulence du venin .
Mais ainſi que
par la nsorlured'vne vipere ,ou picqueure d'vn ſcorpion , ou d'autre beſte veneneuſe,
vne bien petite quantité de leur venin fait en peu de temps grande mutatio au corps,
à caule que leur qualité s'eſpand par toutes les parties, & les altere & conuertit en fá
nacure,dont la mort s'enfuit, fion n'y met remede: & pareillemét vnc petite quãtité
de contrepoiſon donné en temps & heure abbat la malice du venin , ſoit appliquépar B
Quantité dehors , ou dõné par dedans: Toutefois il faut icy nocer, quel'alexitere doit eſtre plus
des alexise- fore que le venin ,afin qu'il domine & le chaſſe hors, & en leradonc deux foisle jour :
& parcaneil en faudra vſer en plus gráde quantité que n'eſt preſuppoſé eftre le venin,
afin qu'il le domine. Auſſi n'eſt il pas bon en vſer trop grande quantité, de peur qu'il
noblefie la nature du corps , encores qu'il fuſt maiſtre du venin : partant on y tien
B
dra mediocrité , & en fera continué iulqu'à ce qu'on verra les accidens diminuez , ou
du tout ceſſez .Or les alexiteres ou contrepoiſons ſont ſouuentefois faites d'unepar
tie de venins mellez auec autres ſimples en quantité bien accommodee ( comme on
void en la compoſició du theriaque, qu'il y entre de la chair de vipere) afin qu'ils fer
uent de vehiculeou cõduite pour lesmener la part où eſt le venin dans le corps, pour
ce qu'vn venin cherche fon ſemblable , comme aufli foot toutes choſes naturelles.

D'auantage il ſe trouue des venins qui ſont contrepoiſons les vns des autres, voire va
venin contre fon ſemblable, commcon void le ſcorpion propre contre la piqueure.
Lecheriaque
ca metbri. Mais entre tous les alexitcres du venin peſtiferé, ſont principalement letheriaque & с
&
dat fone mechridat , leſquels on a cogncu reſiſter à la malice du venin ,en fortifiant le cæur ,
bons
par generalement tous les eſprits, non ſeulement pris par dedans,mais auſi applıcquez
dedans en
par dehors, comme ſur la region du cour , & ſur les bubons& charbons , & vniuerſel
par debors.
lement par tout le corps, parce qu'ils atcirent le venin vers eux par vne proprieréoc. с
culcc ( ainſi que le magnes attire le fer , & lambre le feſtu, & les arbres & herbes tirent
de la cerre ce qui leur
eſt familier ) & l'ayant atciré l'alcerent , corrompent & morti
Val. Max. fient ſa virulence & venenoſité : ce qui eſt bien prouvé par Galien au liurc des com
ling. ( be 2. modicez du Theriaque: oint quetousles anciens ont tenu pourreſolu qu'en la com
pofition d'iceux y a vnc chole merueilleuſe & conuenable à la forme de l'eſpritvical.
Dequoy nous a faict foy le Roy Mithridates , inuenteur du Methridat , lequel en
ayant pris par long vſagene ſe peut faire mourir par poiſon ,pournerombet entre les
mains des Romains ſes ennemis morcels . Et quanc au theriaque , Galié afferme qu'il
peuc guarir de la morfure d'un chien enragé , eſtant pris au parauant que le venin aic
Obicelion . Taiſi les parties nobles . Et fi quelquesvns me vouloyent mettre en auant , que leche
D
riaque & mecridath , & plufieurs autres medicamens alexiteres de la peſte, ſont
chauds , & qu'elle commence le plus ſouuent par fićure ardente & continue , & que
parrane tels remedes la pourroyent augmenter, & qu’eſtant augmentee , nuiroyenc
Responſe. pluftoft aux malades, qu'ils ne leur profiteroyent.A cela ic reſpons & confeſſe qu'ils
ſont chauds : mais d'autant qu'ils refſtent au venin eſtans baillez & admis par pro
portion conuenable, peuuent plus aider que nuire à la fićure, à laquelle ne faut auoir
rant d'efgard qu'à la cauſe.Vray eſt que quád la fićure eſt fort grāde, il les faut meſler
Deriu du auec choſes refrigerantes, come trochiſques de camphre ( lequel meſme preſerve le
campre. corps de pourriture , & pource eſt commodement mellé ez antidotes contre la peſte)
ſyrop de limons,citrons, nenuphar , eau d'ozcille , & autres ſemblables, & au reſtene
choiſir vo mecridath ou cheriaque trop vieille : ains du moyen aage, comme de quatro
ans : ou recét,commededeux:car ainſi elle n'eſchaufferapas cant. Or la quátiré dudic
theriaque & methridat ſe doit diuerfifier ſelon les perſonnes: car les forcs & robuſtes
en pourront prendre la quátité d'vne dragme ou plus : les moyés , demie : & quátaux
enfans qui tettent encore,nousen parlerons cy apres . Quád le malade aura pris ledic
theriaque ou autre alexitere, faut qu'ilſe pourmenc quelque eſpace dccemps, no pas
toutefois comme aucuns font, leſquels incontinent qu'ils ſe ſentent frappez de peſte,

i
De la Peſte. 853 1

ne ceſſenc de cheminer rant qu'ils ne ſe peuuent ſouſtenir : ce que le n'approvue, veu


A
qu’us debilitent par crop nacure, laqueilc eſtant ainſi, debilitée, ne peut vaincre ſon
ennemy peltiferé: parcanton nedoit point faire ainli, mais y proceder par medio
cricé . Et apres quele malade ſe ſera pourmené, il le faut mecere dedans vn liat chau .
dement , & le faire bien couurir, & luy appliquer des pierres chaudes aux pieds , ou
bouteilles remplies d'eau chaude, ou des vellies, & le faire trelbien ſuer : car la ſucur pour faire
en cel cas eſt vne des vrayes purgationsdes humeurs qui cauſenc la peſte , & les fieures ſuer.
putrides,ſoientchaudes ou froides. Toutesfois toute lueur n'eſt pas proficable,
commeil appert par ce que George Agricola , excellent Medecin au pays d'Alc- Hiffoire.
magne , a eſcric en ſon liure de la Peſtc, oùil afleure auoir veu yne femme de Milne,
ayant la peſte : fuer le lang par la ceſte & la poitrine l'eſpace de trois iours , & ce
nonobſtant elle deceda . Aulli Antonius Beniuenius Medecin Florencin ,au liure 1. Hißoire

B chap.4 . dic auoir cogneu vn homme aſſez robuſte,age de trente- ſix ans , lequel cous
les mois ſuoit le ſang par les pores du cuir : lequelfut guary par'ſcation de veine . Or, Decoction
. pour retourner à noſtre propos, ce quil'eſuic eſtanc pris interieurement , ſera bon
pour pro
pour provoquer la ſucur. 2. Rad.chinæ in calleolas diffe&tæ žj . B. gaiaci žij. corticis woquer la
camariſcizi.rad.angelicæ zij.raluræ cornu cerui zi . baccarum iuniperi z iij. Le couc fuehr.
ſoit mis dans vne phiole de verre , tenanc decinq à ſix pintes , & ſoient miſes dans
ladice phiole quatre pinces d'eau de riviere , ou d'une claire fontaine , & loic
cſtoupéc, & laiſſée en infuſion touce la nuic ſur les cendres chaudes , & le lendemain
ſoic boijilly in balneo Mariæ : & au cul du chauderon ſera mis du foin ou feurre ,
depeur queladice bouteille ne touche au fonds , & que par ce moyen elle ne ſerom .
pe. L'ebullition ſe fera iuſqu'à la conſomption de la moitié,quiſe pourra faire en ſix
heures : puis ſoit paſſé pardedans la chauſſe d'hipocras, & apres repaſlé auec ſix on
ces de luccreroſar, & yo peu de cheriaque , & d'icelle eau eftant vn peu chaude , en
Tel : ſera donné plein vo verre, ou moins , à boire au malade pour le faire lucr. Dauấtage,
С on pourra affeorémét prédre de la poudre ſuiváte, laquelle cſt fort finguliere. 2.Fo.
liorum di & amni, rucæ ,radicis cormcntillæ, beconicæ ,an.38.boli armenicæ præpara

ULI tazj.cerræ ſigillatæ ziiii.aloës, myrrhæ an . ZB.croci orientalis 3j.maſtiches zij. Le

zar tout loit pulueriſé ſelon l'arc, & ſoit faire poudre,de laquelle oa baillera au malade
vnedragmediſſoute en eau roſe, ou de vinette ſauuage: & apres avoir pris ladite
poudre, il ſe pourmenera , puis s'en ira coucher , & le fera ſuer, anſi qu'auons dir. EX excel
Pareillement ceſte eau cres - excellente. 2. Radicum gentianæ & cyperi an . z iij .
upend lente consti
lioreia an. p.i3.la peße.
cardui benedi&ti, pimpinellæ añ.m.j.f. oxalidis agreſtis& morſus diaboli
baccharum hederæ & iuniperian.zl.Aorum buglofli, violarum , & rofarum rubra
aque .
rum añ.p. ij Le tout ſoit mis en poudce groſſement, puis le ferez tremper en vin
dela
blanc , & cau roſe , par l'eſpace d'vnenuict ſeulement, & apres on y adioulera boli
Armenicæ Zj . theriacæ zí.Cela fait, on diſtilera le coue au bain Marie', & on legari
en forma dera en vne phiolede verre bien bouſchée:& lors qu'on en voudra prédre, on ymec
tra vn bien peu de canelle & lafran : & fi le malade eſt delicar , come lone les femmes
& enfans, on y mettra du ſuccre. La doſe ſera de ſix onces aux robuſtes, aux moyens
D trios , & aux delicats deux, plus ou moins,ſelon qu'on verra eſtre neceſſaire. Et apres
l'auoir priſe, on ſe pourmenera & ſuera comme deſſus. Les caux theriacale & cor.
dialecy -deſſus mentionnées , ſont aulli de merueilleux effect pour ceſte intention,
& en faut prendre quatre ,cing ,ou ſix doigts en vn verre . Semblablement celle qui
cortez
s'enſuit, eſt bien approuvéc. 2. Oxalidis agreſtis minoris m.vj.ruræ p.j.piſtencur CANAutre
.
& macerentur in aceto xxiiii.horarum ſpatio , addendo theriacæ zilii , fiac didilacio
in balneo Mariæ . Et incontinent que le malade ſe ſentira frappé, il en boira quatre
#
onces , plus ou moins , ſelon la vertu , puis ſe pourmenera & fuera, comme il a eſté
dit
cy.deſſus. Le tempsde faire ceſſer la ſucureſt, ou qu'elle ſe refroidiſſe, ou qu'on
ne la peuſtplus endurer par foibleſſe, ou autremét : alors faur eſſuyer lo -maladeauec
linges vn peu chauds . Er note , qu'il ne le faut iamais provoquer àla ſueur,l'eſtomach
cſtant plein : car parainſi la chaleur eſt diſſipée, ou pour le moins revoquée du ven
tricule en l'habicude du corps,doncſ'enſuit crudité,Dauantage , faue gaçder lema : Quand le
ladede dormir pendant qu'il fuera , & principalement au commencement qu'il ſe dormie nie
ſent frappé & atcaine dece mal: parce que noftre chaleur, narurelle & eſprits en ce de pefte.
faiſant ſe recicenc au profond du corps, & parçant le venin que Nature taſche,à
chaſſer hors , cit porté au caur , & autres parties nobles auec iceux , & pour ceſto
CC ilij
854
Le Ving - deux liure
t ieſm
e
cauſe faut que le malade fuye grandement le dormir : ce quiſe fera en l'entretenang
Pour garder de paroles ioy euſes,luy faiiant des comptes pour le faire rire , s'il peur . Et pour ce A
by malade faire, luy dire & afleurer que ſon maln'eſt rien , & qu'il ſera bien -toftguary :parcille.
de dormir. ment on fera bruit en la chambre , ouurant les portes & feneſtres. Et li pourtout cela
ilvouloic dormir, on luy fera des fri& tions aſpres, & luy liera les bras & iambes aſſez
cſtroitement:auſſion luy tirera les cheueux par derriere le col & le nez , & les orcil.
les . Dauantage,on diffoudra ducaſtoreuin en fort vinaigre & cau de vie ,& onluyen
appliquera dedans le nez & les oreilles . Ainſi on procedera par toutes manieres ſc
loo la grandeur du mal & qualité des perſonnes ,afin que lc malade ne dorme,&prin .
cipalement le premier iour, iuſques à ce que Nature aidec par les iemedes, ait ietro
le venin du dedans au dehors par ſueur, vomiſement,ou autrement . Donc ne ſuffit
defendre ſeulement le premier iour, mais auſſi iuſques à ce qu'ils ayent paſſé le qua
trieſme, pendant leſquels ne leur ſera permis de dormir que deus ou trois heures
Incommodi
pour iour, plus ou moins , ſelon la veriu : car en ce faut tenir mediocrité ( commeon
te4 de trop
veiller. doibe faire en toutes choſes) & conſiderer que par crop veiller les eſprits ( e difipent, B
dont ſouvent ſ'enfuyt grande debilication : & Nature eſtant proſternec & abbacue,
ne peut vaincre ſon aduerſaire: partant le Chirurgien y aura cſgard :cat ſi les ſains
ſont attenuez & affoiblis par veilles,combien plus ſe trouveront mal ceux qui ſont
malades , leurs forces eſtans ja abbatcues & diminuecs ? Or pour conclure noſtre
propos, apres que le malade aura bien ſué,il le fauc eſſuier, & changer de draps, & ne
mangera de deux ou trois heures apres : mais pour conforter les verrus , on luy
pourra donner vn morceau d'eſcorce de citron confit , ou de la conſerue de roſes,
ou vne petite roſtie trempee en bon vin , ou vn mirabolan çonfit, a le malade
cſt riche.

Des Epithemes ou fomentations pour corroborerles parties nobles.

CH A P. XXV .
C

Ntre les alexiteres peuuent eſtre referez aucuns remedes locaux, c'el C
9
à dire , qu'on applique par dehors , comme epithemes cordiaux & he. ld
patiques , deſquels faut vier dez le commencement ( toutesfois apres
Faculté des auoir fai &t quelques euacuations vniuerſelles, fil eſt beſoin ) pour mu. a
epithemes. nir les parties nobles , en roborant leurs vertus, afin qu'ils repouſſent les
vapeurs malignes & veneneuſes loing d'icelles . Les epithemes doiuens avoir dou TO
ble faculté, à ſçauoir d'eſchauffer, & refroidir. Leur froidure ſert pour refrigerer lo
la grande chaleur eſtrange, & leur chaleur eſt cordiale , parce que les medicaments PE
cordiaux plus communement ſont chauds : & parcant ils ſeront changez & diueifi RE
fiez ielon l'ardeur de la fićure , & doiuent eſtre appliquez tiedes auec vne piece d'ef.
carlate ou vn drapeau en pluſieurs doubles , bien delié, ou vne elponge , deſquels fe
ront faictes fomenracions, & laiſſez mouillez ſur la region du cæur & du foye, pour• V
veu que le charbon ne fuſt en ce licu là : pource qu'il ne faut appliquer ſur iceux au. V
Exéple des cuns medicaments repercuſſifs. Tu pourras faire leſdics cpichemes ſelon les formu
Da
epibemes. laires qui s'enfuyuent. 24. aquarum rofarum ,plantaginis & folanian. Z iij.aquæ ace.
tolæ , vinigranatorum & accrian.3 iij .ſantali rubri & coralli rubri puluerilati añ . le
iij
. theriacæ veteris Z B. capburæ 3 ij.croci 9 j.cariophyllorum z B. miſce & fiae epi. 8C
thema . Aurre epitheme fort aiſé à faire.2.Aquarum rofarum & plantaginis añ.5 x. 92
aceci rofatiz iiij . cariophyllorum, ſantali rubri& coralli rubri pulveriſaci, & pulueris la
diamargariti frigidian.zi
. B. caphuræ & moſchiań.gj. fiat epithema. Autreepithe.
me . 2.Aquarum rofarum & meliſſæ an Zij.aceti roſaci žiij.ſaorali rubri zi. ca fu
riophyllorum zB . croci Hii . caphuræ şi boli Armeniæ , terræ ſigillatæ, zedoariæ ap .
zj . fiac epithema. Autrc. 24.Acecirolati & aquæ rofarum an.IBB. caphuræ zßiche ELE
riacæ & michridatij añ.zj. fiar epithema. Autre.2.Aquarum rofarum , nenupharis,
AMITE 9
moins com buglofi,acetofæ ,aceti rolati añ.tbl.ſantalirubri,rofarum rubrárum an.ziij.forum len

posé. nenupharis, violariz, caphuræ añ.3B. mithridatij & theriacæ an.zij


. Toutesces 9
choſes ſeront pilées & incorporées enſemble: puis quand il faudra co vſer , on en
mettra dans quelque vaiſſcau pour eftre vn peu eſchaufée , & on'en fomentcra le la
ecur & le foye, comme deſſus.
i
dela Pelte , 855
A
A fçauoir fila ſaignee & purgationſont neceſſaires au commencement de la
maladie peſtilente.
CH A PITRE XX V 1.

YANT muny le coeur de medicamens alexiteres, on procedera à la ſai. Opinions


gnce& purgation ,s'ileſt beſoing : en quoy ily a grand differend entre contrairesde
les Medecins, deſquels aucuns commandent la ſaignce, les autres la de la laience
fendent. Ceux qui la commandent , ditent que la fiéure peſtilente eſt en purga
communementengendrec au ſang pour la malignité du venin : lequel rion.
fang ainſi alteré & corrompu pourrit lesautres humeurs, & parcant concluent qu'il
conuient ſaigner. Ceux qui la defendent, dilenc que le plus ſouuent le ſang n'eſt Reſolution
point corrompu ,mais queceſont les autres huineurs, & parcane concluent qu'illes touchant la
B conuient ſeulement purger. Quant à moy,conſiderant les differences de peſte que ſaignee che
j'ay declarées parcy deu anc,à Içauoir,quel'vne provientduvice del'air ,& l'autrapurgation.
de la corruption des humeurs,& que le venin peitiferés’eſpand dedans les conduits
du corps, &delà aux parties principales,come on void par les apoſtemes , quiappa
roiffent tantoſt derriere les oreilles, cantoſt aux aiſſelles, ou aux aines , ſelon que le
cerueau ,le cæur,& le foyeſont infectez: duquel venın procedent auſli les charbons
& eruptions aux autres parties du corps , qui le fonc à cauſe que Nacure le deſcharge
& ietre hors ledic venin aux cmonétoires ,cõíticuées pour receuoir les excremens des
membres principaux. En tel cas il me ſemble qu'il faut que le Chirurgien aide Na
ture à faire la deſchargeoùelle pretend , ſuivant la doctrine d'Hipocrates, & qu'ilHipp. apb:
21. lin . I.
fuiue le mouvemencdicelle, qui ſe fait des parties interieures aux exterieures : pár
quoy ne faut en telle choſe purger ny faigner ,s'il n'y agrande plenitude ,depeur d'in.
terrompre lemouuemēc de Nacure , & de retirer la maciere veneneule au dedans : ce
quieltordinairement cogneu en ceux qui ont commēcement de bubons venericns :
i
car lors qu'on les purge ou ſaigne ,on eſt ſouventesfoiscauſe qu'ils ne viennentàlup
Cpuration ,& quela maciere virulence ſe recire au dedans,dontlaverole s'enſuit.Pat .
quoy au commencement des bubons,charbons,& erupcionspeftiferées,cauſées ſeu
M
lement du vice de l'air , ne faut purger ny ſaigner, mais ſuffira de munir le cæur & Ne fani
coutes les parties nobles de Medecines alexiceres,qui ont vertu & proprieté occulec purger ny
d'abattre la malignité du venin cant par dedans que par dehors, par où elle precend faigner en
faire la deſcharge. Etnoce cecuei'ay dit du vice de l'air,parceque l'on void ordinai- peße qui
rement,que ceux que l'on ſaigne & purge en cel cas,font en grand peril de leurs per- vient de
L'sir .
ſonnes : pource qu'ayant vacué le ſang & les eſprits contenus auec luy,la contagion
prouenante de l'air peſtiferé ,elt plus promptement porcée aux poulmons & aucæur ,
iz & eſt renduë plus förre , & parcantelle exerce pluſtoit la tyrannie.Semblablementle obferuation
corps eſtant elmeu par grandes purgations , il le fait promptemene reſolution des de l'Ass,
Theur.
eſprits, à cauſe que la chaic de coute l'habitudedu corps ſe liquefie & conſume par
vncgrande vacuation. Surquoy ie te veux bien aduertir de ce que i'ay obſervé au
voyage de Bayonne, que i'ay fait auecmonRoy en l'an 1565.c'elt que ie me ſuis en
Hivile
D quis des Medecins, Chirurgiens, & Barbiers de toutes les villes où nous auons paſſé,
elquelles la peſte auoit eſté,commeil leur eſtoit aduenu d'auoir ſaigné les peftiferez:
leſquels m'ont atteſté que preſque tous ceux qu'on auoit ſaignez & grandement pur
berec gez, eſtoient morts,& ceux quin'auoient eſtéſaignez ny purgez, eſchappoient preſ
que tous : qui fait efire vray -lemblable que la peſte venoit du vice de l'air, & non de
la corruption des humeurs. Semblable choſe auoit deſia eſté auparavant obſerude obferuation
en la maladie nommée Coqueluche , comme i'ay eſcrit cy.deuant : car alors qu'on dela ſaignes
purgeoit & ſaignoit ceux quien eſtoient eſpris,tanc s'en faut qu'on les fiſteſchapper,en la Co.
que meſme on leur abregeoit leur vie , & en mouroient pluſtoſt. Or telle choſe a queluche.
IT eſtécogncuë par experience: à ſçauoir apresla mort de pluſieurs: toucesfois il ya
quelque raiſon en ce qu'aucuns onc obſerué, lors que la peſte venoic du vice de l'air,
les bubons & charbons le plus ſouuent apparoiſtre auparauant la fićure. Donc veu
que l'experience eſt iointe auec la raiſon ,ilne faut indifferemment, comme l'on faic
communément , auſſi -coſt qu'on void le malade frappé de peſte, luy ordonner la
ſaignee, ou quelque grande purgation : ce qui a eſté par cy.deuanc bien ſouuene
cauſe de la morc d'vne infinité deperſonnes. Toutesfois s'ily auoit grande repletion
856 LeVingt-deuxieſmeliure
En quelsil ou corruption d'humeurs,au commencement de la douleur & cumeur du bubon & A
fawrpurger. charbon peftiferé,fuppoſéauſſiqu'il n'y cuſt que bien peu de matiere coniointe,Na.
rure cítanc encoren rut,c'eſt à dire, en ſon mouuementd'expeller ce qui la moleſte,
alors on doit donner medicament grandement purgeant, pour ictter hors l'abon.
dance & plenicude de la matiere veneneuſe concenueaux humeurs, & en toute l'ha.
Hipp: apb.bicude du corps: & ce ſuyuant l'Aphoriſme d'Hippocrates, qui dit ,que toutes mala
22, lin. 2.dies qui ſont faictes de plenicude,ſont curees par cuacuation .Plusen vn autre licu,il
sphor. 10.
low. 4• nous enſeignequ'il faut donner medecine aux maladies violéres & tresaigues, voire
le meſmeiour, fi la macicrceſt curgente ; car en celle choſe il eſt dangereux de recar
der, Orſi lamatiere eſtcurgenteen quantitè,qualité & mouuement, fauctirer vne
reſolution ,qu'en la peſte cauſec du vice de l'air auecplenicude de lang & d'humeurs,
la ſaignee & purgation y ſont neceſſaires.Parquoy les medicamēs hypercathariques,
c'eſt à dire, qui font operation effrenée par propriecé occulte ,commealexiteres re.
fiftans au venin , Cont propres pour eſtrebaillez au commencement de ce mal, pour
ucu que Nacure ſoit aflez forte:car à ceux qui ſont cóftituez au hazard de leur vie,& B BE
au danger de mourir , vaut mieux tenter de donnervn fort iemede, que de laiſſer le
maladedeſpourucu detout ayde,eſtár àla miſericordedel'ennemy,qui eſtl'humeur
Celſe liv. 3. peſtilent: ce quieſtaulli approuuédeCelle,qui dic,que d'autant que la peſte eftvne
ebap. 7. maladie haciue & tempeítatiue,faut promptement vfer de remedes, meſmesaúco
temerité. Parquoy faut cõſiderer ſi le malade peftiferè a vne fieure ardante,& grade E
repletion aux conduits, & que la vertu ſoit forie: qui lc peut cognoiſtre, lors que les de
veines ſont fort pleines& eftcnduës,les yeux & lafacegrandement enflammez :auli
que quelquesfois a crachement de ſang, auec grande pullacion des acteres des tem
ples,douleur au golier,difficulté de reſpirer, elpoinçonnemēt par tout le corps, auec
tres-grande peſanteur & laſſitude,les vtines eltans rougeares,troubles, & elpeſies.
Entel cas faut ſaigner promptemēr,pour aiderNature à ſe deſcharger, depeur qu'il
ne ſe face ſuffocation de la chaleur naturelle.pour la trop grande abondáce de ſang,
De, quel.co- comme la meſche s'eſteint en vne lampe,lors qu'il y a trop d'huile:adonc tu ouuriras
Méla ſaigneepluſtoftlaveine baſilique du coſté leneſtre quedu dextre ,à cauſe que le caur & la c
ſang en abondance,ſelon que
doit etre rațelle en ceſte maladie font fort affe&tez : & tireras du
faicte,

‫د‬
Verras eſtre neceſſaire, prenant indication ſur coutes choſes de la force & vercu du
malade. Et garderas que tu ne faces la ſaignée pendant qu'il y aura frifonde fieurė,
parce que la chaleur naturelle & les eſprits ſont retirez au dedans,& alors les parties l'h
externes ſont vuides de ſang, & fion en tiroit lors,on dabiliteroit grádemenc les ver l'a
cus, Aulli pendant quetu ſaigneras le malade , cu luy feras tenir vn grain de ſelen fa ch
bouche, ou de l'eau froide, & luy feras ſentir du vinaigre , duquel auſſi luy frotteras
le nez, la bouche,&les temples,depeurqu'il ne tombe en lyncope. Dauantage, il ne 01

Le dormirdoit dormir coſt apres la ſaignée: car par le dormir, le venin & chaleurnaturelle ſe
nuir apres retirent au centre du corps, & augmententla chaleur eſtrange, dont la fiéure & au ca

la faignce. tres accidens accroiſſent. Oril fauticy noter qu'en telle repletion la faignee ſe doibt
faire aucrement en fiéure peſtilente ſimple,qu'en celle qui eft accompagnee d'vn bu ſc
bon ou charbon ;car s'il y auoir l'vn ou tous les deux conioinets auec latiéure grande 1
& furieuſe, alors ilfaudroit ouvrir la veine plusprochede l'apoſteme ou charbon,& D
ſelon la recticude des fibres, à fin que par icelle le ſang ſoit tiré& euacué plus dire&te. CI

ment: pour autant que toute retraction & reuuiſion de ſang infect vers les parties D
de
nobles eſt defendue de tous bons Autheurs Medecins & Chirurgiens..Polonsdonc of

pour exemple , que le malade ait vne granderepletion , laquelle furpaſſe la capacité 21

des veines i lesforcesnaturelles, ce que les Medecins nommene ad vaſa, & ad vires, d
& qu'ilait vn apofteme peſtiferé , ou vn charbon cz parties de la teſte & ducol, il 9
faut que la ſaignce ſoit faicte de la veine cephalique ou mediane , ou de l'un des ra b
Pourquoy , meaux d'icelle,au bras qui eſt du coſté malade. Ec où telles veines ne pourront appa A
on ſaione le
pied on roiſtre pour eftre ouuertes à cauſe de la grandequantité degreſſe,ou autrement,fauc V

mainenean . ouvrir colle qui eſt entre le poulce & le ſecond doigt, ou vne autre prochaine & plus q
apparenre, mettát la main du malade en eau chaude: car la chaleur de l'eau fait enfiler E
la veine,& attirele ſang du profond aux partiesexterieuresdu corps. Etlil'apoſtemo 0

eſt louz les aiſſelles ou aux enuirons, faut auſſitirer du ſang de la veine Baſilique, ou t

Mediane au deſſus de la main. Etli la tumeur s'apparoitaux aines, on ouurirala vei. d


nc Poplitique, qui eſt au milieudu jarret,ou la veine Saphene, quieltau deſſus de la

1
De la Pefte. 857
A cheuille dupied dededans,ou vn autre rameau le plus apparent qui ſoit ſur le pied;
& touſiours du coſté meſme de l'apoſteme, mettant aulli le pied en eau chaude pour
la caule deſſusdite. Er ſera tiré du ſang ſelon que le malade ſera ieune & robuſte, ayát :
lesveines forcenfices, & autres ſignes cy deſſus métionnez, leſquels fils apparoiſſent
tous,ou la plusparc d'iceux,nefauc pourcant craindre d'ouurir la veine ce qui ſe doit
faire deuaricle croiſieme iour,à cauſe que cete maladie peſtilente vient promptemēc
en ſon eſtat,voire quelquesfois en vingrquatre heures . Er en tirant leſang, tu conti
dereraslesforces du malade, luy couchant le pouls , liie Medecin n'eſt preſent : car
Galien dit quele pouls monſtre infailliblement la verta & force du malade. Doncil Gal.s lix .
le faut coucher & avoirégard à lamucation & inegalité :& s'ileſt trouvélenc&petit, DeSanguin
alors on doit ſoudainemer ceſſer & clorre la veine,ou faire la ſaignée à deux ou trois nis mišis.
fois, fi la force máque . Il faut bien icy obſeruer, qu'aucuns par vnetimidité combent nes

en fyncope deuant qu'on leur aic ciré une palette de fang: parquoy ilfaut cognoiſtre
les ſignesdeſyncope: qui ſe fera par vne pecice lucur quicommence à venir au front,
B & malde cæur, comme volontédevomir, & bien fouuent d'aller à la ſelle , baaille Signes pre.
ment & changement de couleur,les léures deuenans palles : & le ſigne infaillible carſeurs de
(commei'ay dic ) & le pouls qui ſera trouué lent & pecit . Eclors que cels ſignes appa- fyncope en
roiſtront, faut mettre le doigt ſur le pertuis de la veine tant quele malade ſoit plusla ſaigners
aſſeuré, & luy dõncr vne roſtie de pain crempée en vin ,ou quelque chole ſemblable,
Ec apres la laignée ainſi faire ,on ne laiſſeca de donner promptemenjà boire au mala
de quelque alexicere ayanc verti ? & puiſſance de vaincre la malignité du venin & le
challer hors, comme pour exemple , du cheriaque ou mechridat diſſout auec cau
256357 d'ozeille ſauuage , ou de l'eau cheriacale , ou autres ſemblbales que nous avons cy
deuant deſcrits.Orc'eſt aſſez parlé de la ſaignée, venons maintenancà la purgation .
Des medicamerspurgatifs. C H AP . XXV II.

icond I op void que la purgation ſoit neceſſaire par les intentions fuldi. Indications
qu'il faut
tes , on y procedera commela choſe le requiert, c'eſt à ſçauoir , enſuiure , ton .
C conſiderant que c'eſt icy vne maladie violence , laquelle a beſoin de chant les
remedes prompes pour combatere & vacuer la pourriture des hu- purgations
meurs hors du corps, & les faut diuerfifier ſelon qu'on cognoiſtra en la peſtes
l'humeur pechant: auſſi en prenant indication du temperament du malade de
l'aage, couſume, pays , ſaiſon de l'annee , ſexe, air ambiens, & pluſieurs autres .
choſes ſemblables,qu'on verra eſtre neceſſaires, & principalement de la vercu. Par.
tantſion void qu'il ſoit neceſſaire que le malade loic purgé, & qu'il ſoit fort robuite,
on luy donnera vnedragme detheriaque, auec ſix grains, voire dix grains de ſcam
monce en poudre. On peutſemblablement bailler des pilules faites ainſi.24.cheria- Pilules.
cæ & mithridatiian . zi. ſulphuris viui lubciliter pulueriſaciz l. diagredii gr. 111.fiant
CARA pilulæ. Autres pilules. 24. Aloësz iii: myrrhæ, crocian.z i. hellebori albi , azari an .
Icr.iii.cum cheriaca veceri fiacmalia,capiatſcriiii.prodođi, tribus horis ante paſtum. Aniréso
Les pilules de Rufus, dont nous auons parlécy -deuant,ſont propres pour dóner aux
other moins forts & robuftes pour vn remede gracieux,deſquelles fautprédrevne dragme
dia en pilules ou potion. Les Anciens ont fort loué l'agaric, parce qu'il attire les humeurs
D de tousles membres , & a vercu approchante du theriaque , parce qu'il renforce le De la vertu
cæur, & le purge de coue venin : on en peut donnerdeux dragmes aux robuftes, vne de l'agaric.
auxmediocres,& demie aux delicats. Et par ainſi ſelon la force du malade , en ſera
donné en trochiſque & bien preparé. Ec vaut mieux qu'il ſoit baillé en decoction
qu'en ſubſtance, parce que quelquesfois il n'eſt pas bien elleu & preparé : que s'il eſt
hay bien elleu & preparé, on le peut dire eſtre vne medecine diuine corre la peſte cauſec
par le vice des humeurs,de laquelle pluſieurs experiences ont eſté faictes. Quelques
vns approuuent & recommandent fort l'ancimoine , alleguans pluſieurs experiences
:- $ qu'ilsontveu. Toutesfois parce que l'vſage d'iceluy eſt reprouué par Mellieurs de la
faculté de Medecine , ie me deporteray d'en rien eſcrire en ce lieu. Maintenant ve. »
nons aux autres remedes,deſquelson vſe principalement lors que le vice gilt en l'in
temperature de l'air,& nõ des humcurs leſquels ontla vertu d'eſmouvoirlesſucurs ,
& quelremcde en tel cas eſt le premier & plus excellent entre tous autres : or entre
cous les remedes celuy qui s'enſuic eſt de merueilleuſe vercu : & l'ay.cnţendu de
858 Le Vingt - deuxieſme liure
Maurhiss Mellire Matthias Rhodler , Chancelier de Monſeigneur le Duc George, Comie
Rodler , Palatin , homme de bien & d'honneur, demeurant à Schimereu ,lequel ni'a puisn'a A
Chancelier gueres eſcrit qu'on a cſté fort vexé de peſte en Allemagne, & le plusgrand & fingu.
du Duc
lier remede qu'ils ayent peu trouuer ( par le moyen d'vn docte Medecin ) eltoir
Georg's .
Palai prendre une braſſée d'herbe nommée Armoiſe , & de la cendre d'icelíc on faiſoirde
Trochif la lexiue auec vne quarre d'eau pure , puis on la failoit bouillir & conſumer ſur le feu
ques de dedans vn vaiflcau de terre plombé, iuſqu'à ce qu'elle delaiſſaft voc maciere cipelic
Lexine de comme ſel, & dece on faiſoit crochiſques chacun de la peſanteur d'vn forin d'or: &
condres
lors qu'on ſe tentoit frappé de peſte, on faiſoit diſſoudre l'vn defdics trochilques, ou
d'Armoi deux, ou plus ou moins, lelon la force & âge des malades, auec quatre ou cing doigts
les falans de bon vin ou maluoiſie : puis ſe pourmenoyent apres l'eſpace de demie heure , & fc
jemblables
Vecwdurons mettoyene dans le liet, & luoyent deux ou trois heures plus ou moins, ſelon quela
quei'den force & vercu des malades eſtoit grande ; aulli vomiſſoient & alloienc à la ſelle come
limoine. s'ils cuffent pris de l'antimoinc : & parceremede, ceux qui en ont vić au parauát queB
le venin eult ſaiſi le cæur ,ſont preſquerous elchapez :ce quei’ay experimenté depuis

en cette ville de Paris, auec bonne iſſue. Les anciens ont fort loué l'Armoiſe prile B

par dedans & dehors , corre la morſure des ſerpens : & partant eſt à loüer donnée à la
Gilbere peſte. Aufli il m'a eſté aſſeuré par Maiſtıc Gilbert Eroüard , Do &teur en Medecinca
Erouard, Montpelier,queluy eſtant en Sicile , Medecin du Vice- Roy d'icelle Prouince , entra
Docteur en en familiarité & amitié auec vn Nauarrois ,qui auroit ſeruy auec grande reputatió la
Medecine à Religion de Malte l'eſpace de quarantcans:lequel eſtan : a Rhodes, en l'hoſpitalde
Monepelier ladite Religion,pourpenſer les peſtifetez , à la grande inſtance & priere d'vo Pa.

Verty ad tron de Nauire Ragulois, malade de peſte , auroit eſté contraine luy permettre de
mirable de boire un grand plein verre de laumure d'anchois, pource que ledit malade diloie
Jaumurl. cela eſtre vn fingulier remode contre la peſte: auquel breuvage ayant fuccedé vne
grande chaleur, le malade ſe trouua ſans fieure, & entieremene guary : & afſcuroicle.
dit Nauarrois auoir dóné depuisceremede à pluſieurs qui ont eſté guaris.Dauācage, C
ledit Eroijard m'a affirmé, qu'ayant ouy ce recit , il en a fait l'experičce à pluſieurs & C
mcſmcen a donné à deux enfans de Monſieur de la Terraſſe , Mailtıe des Requeſtes
du Roy , qui eſtoient malades de peſte , & one eſté guaris . De l'effe& duquelremede 1

luy ayantdemandéquelle raiſon il en pourroit donner,ilm'allegua que la peſte n'eſt


autre choſe qu’vne eſpece de putrefa &ion & corruption inſigne , à laquelle les media
camensgrandemét deſleicbans ſont propres & vtiles : & partant le ſel(commectanc
fort excellér à garder toutes choſes ſubiectes à corruption ) a force & vigueur de có . i

lumer l'indicible putrefaction où le venin peſtilentiel eſt attaché. Or il faut icy noter
au jeune Chirurgien , qu'ilne faut attribuer ceremcdc aux anchois , mais du tout àla

Semence tallitude. Aucuns prennent le poids d'vne dragmedelemence d'hiebles miſes en in

dbicbles fuliou en vin blanc, qui fait preſque ſemblable cffe & que l'antimoine: ce que iefçay
par experience : Autres prennent vne dragme de ſemence de rue pilec , y mcllans le
propre pour
Chacustion, gros d'vne fubuede cheriaque, & donnent cela à boire au malade auec quatre doigts
de malvoiſie. Il y en a aulli aucuns qui preonent vne poignéc dc fueilles & ſommitez
degenelt, & les pilent aucc demy- feprier de vin blanc ,& le donnent à boire : & coſt
D
; apres les malades vomiffent , affcllent, & luent: ce quc i’approuue , d'autane qu’on D
void par experience , que ceux qui ſont mords de beſtes veneneules, lians du geneſt

deſſus la morſure, ont gardé que le venin ne paſſe plus auant : pareillement on ca
donne à boire , pour garder quele venin ne ſaiſiſſeleçour. Autres víent deracines
de Edula campana',gentiane,tormentille, grainc d'eſcarlate & de genéure, limure
d'iuoite & de corne de cerf, prenans dechacun d'iceux à la volonté àſçauoir demic
dragme pour l'ordinaire , & lc tout cócaffe & mis en infuſion en vin blác & en eau do
vie parl'eſpace de vingequatre heures ſur les cédres chaudes , coulét lerout , & d'i:
celle collature en donnent trois ou quatre doigts , plus ou moins , au malade de peſte,
ſelon qu'il eſt beloin : puis on le mer dedans le li & , & on le couure bien,Icelle mellan .
ge prouoque beaucoup la ſueur,& chaſſe le venin , d'autant qu'elle eſt cordiale , & a
Antre breu
vne grande euaporation ſpiritueule, join et qu'elle eſt alexitere , comme on peut voir

principale par ſes ingrediens. aeſté experimentée aucc heureux ſuccez,


Auſſi la potion ſuiuante
mene aux & eſt principalement propre pour les ruſtiques.
infiques. Prenez mouſtarde acre (& non faite de mouſt )demic once ,delayez - la en vin blanc
& vnpcu d'eau de vie , & y meſlez le gros d'vne febuc de thcriaque ou methridat:
Puis

,
De la Peſte, 859

A puis l'ayantbeuë , ſe faut promener & luer, comme dellus eft dit . Pareillement lere .
mcde ſuiuant leur ſera conuenable. Il faut prendre un gros oignon , & le creuſer, & y
meure du cheriaque ou mithridat demic dragnie auec vinaigre , & faire cuir le couc
enſemble,puis l'exprimer : & de ce on en baillera à boire au malade auec cau d'ozeille
ou de chardon beniſt ,ou autre eau cordiale, ou de bon vin :puis on le fera pourmener

cant & fi peu qu'il ſera beloin, & apreson le mettra dás vn liêt pour luer, comme del
ſus:ou on en fera come s'enſuit. Prenez teſte d'ailla quantité d'vne noix affez groſſe,
vingi fucilles de ruë , & autant d'eſclaire , qu'on appelle en Latin Chelidonium maius: Aure ne
pilez cour auec vin blanc , & vn peu d'eau de vie,puisexprimez & en beuuez cinq ou mede bone
fix doigts . Aucuns prennent du ius d'eſclaire , & de mavues tirez , auec quatre doigts approuaré.
de vinaigre, qu'ils boiuent auec deux doigts d'huile de noix ,puis ſe pourmenent aſſez
longuement , & coſt apres vomiſſent, & lcur ventre s'ouure , & vont à la lelle : & par ce
moyen ſont guarancis . Aucres y ſent de fueilles de laurcolle deſfeichèes, le poids Autre.
‫܀‬
d'vn eſcu , plus ou moins ſelon la veriu du malade , leſquelles ils crempene deux iours
dedans du vinaigre, & en donnent à boire:cela les fait luer, vomir & aſſeller , & par ce
B moyen chaſſe le venin: quielt vn remede plus commode lors que le vice eft aux hu

meurs comme auſſi ſontles ſuiuans. Mathiolc au liure de la verolle,dit que la poudre Des fucilles
de mercure donnee auec vn peu de luc de chardon beniſt, ou ele &tuaire de gemmis, de laureole.
chaſſe la peſte devant qu elle ſoie confirmce,en faiſant vomir, ſucr, & afſeller. Outre
plus ledit Matthiole conſeille de donnerde la couperole diffoulce en eau roſe ,le poids
d'vn eſcu aux peftiferez , parce qu'elle fait vomir & luer, & alfeller : & par ce moyen
Là poudre
chaſſe le venin. Autres donnenc de l'huile de ſcorpions en petite quantité ou ,auec
de merchat
vin blanc , laquelle prouoque grandement le vomir,& peut attirer & vacuer auec ſoy contre la
It le venin peftiferé: & meſmoment en frottent la region du cæur , & les arteres des cé . pefte.
ples & du poignet. Er d'autant que ce venin peſtilenc eſt ennemy mortel de nacure ,
d'autant le faut- il combattre tant par qualiteżmanifeſtes, que par antidotes . Orcel
will
c lesgrandes cuacuations neſontlouces pour curereguliere,mais irreguliere ,& ne ſont
aulli à reietter,pource qu'ils diuertiſſent & vacuent l'humeurvenencux, tant par le
read ventre,vomiſſement, que par ſucurs. Er ne faut vſer de medecines trop debiles en
maladie ſicruelle & force, pource qu'elles ne font gueres d'a & ion , ains ſeulement
QUES eſmeuuent les humeurs ſans les euacuer , dont ſouuent les fićures s'augmentent. Et
partant ſi on cognoiſt que tels remedes purgacifs n'ayent fait ſuffiſamment leur de.
noir, cu les dois reïterer & augmenter:car (come nous auonsdit )aux fortes maladies
il faut vſer de forts & loudains remedes :toutesfois ſe faut donner de garde que la mc
decine ne ſoit trop forte,parce qu'elle ſterncroic & abbattroit les vertus,leſquellesne
pourroient batailler en vn meline temps contre deux ,à ſçauoir, contre lamedecine Hip. Aph.
6. lim. 1 .
& le venin : & par ainſi on pourroit empeſcher le mouuement de nature à iecter le
venin hors : parcant ſur toutes choſes la vertu & force du malade doic eſtrc recom.
mandee.Ec pour ceſte cauſe ie conſeille que les remcdes ainſi fores & violentsnc ſoiếc
lie,les
donnez qu'aux forts & robuſtes,come laboureurs, mariniers, crocheteurs,chaſſeurs,
ti
& autres de forte complexion , lice n'eſt en pecite quantité.Et apres auoir vsé de me
abeti D dicamens laxatifs, il faut donner des choſes quiroborent l'eſtomach , & repouſſent le
venin du cæur , & appaiſent l'agitation des humeurs , comme la compoſition d'alxcr
mes,ou autres cholescy-deſſusmentionnecs au chapitre des Alexiccrcs.
r
Clea

DD

ce
s
Pho e
n

ie
barb
860
Vingt -deuxieſme liure

А
Des accidens és complications des maladies qui aduiennent aux pestiferez:&
premierement de la douleur de reſte.

CHAP . XXVIII.

L nousconuient à preſent traiter des accidens, quile plus ſouuene


treidens
de la reste. aduiennent en ceſte deteſtable maladie, & de la correction d'iceux,
cõmelone douleur de cette & de reins, cruptions & puſtules faictes
au cuir,apoftemes,charbons, flux de vécre, & vncinfinité d'autres:
& commencerons par la douleur de ceſte, laquelle eſt fort commu
ne en cefte maladie .Cat file venin eſt rauy au cerueau,& que natu.
re ne l'ait peu expeller , adonc aduient en iceluy , & en les mébranes

inflammation,laquelle venant principalement àlaiſir & occuperla parcie ancericure,B


le ſens cõmun & imagination letroublent: ſi c'eſt au milieu, il ne ratiocinc point : & 4
c'eſt en la partie poſterieure, ilperd la memoire, donc le plus touuent, par faure d’yrc.
Cauſe de la medier,le malade rombeen delire,frencſic ,manie, & rage : laquelle ne vient ſeulemét
douleur de à cauſe de la qualité chaude , mais par vne particuliere malignité du venin . Or ceſte
tefte.
Cure de la douleur ſi grande & extreme prouient d'vnctrop grande & abondante quantité de
douleur de lang , & de certaines vapeurs putrides,qui montent des parties inferieures à lateſte.

seffe. Qu'il ſoit vray , on leur voit la face & les yeux fort enflammcz , rouges , & larmoyans ,
auec grande peſanteur & chaleur de coute la teſte: partant il faut loigneuſement iub
venir à tel accident . Donc pour la curation , ilfaut premierement ovurir le ventre par
clyſteres, & apres ſaigner de la veine cephalique , du cofté auquel ferala plus grande
douleur. Et li pour cela la douleur ne cefle alorson incilera les arteres des temples,&
Wilité de on tirera du ſang ſelon la vehemence du mal , & ia vertu du malade.Êt ne faut differer
Parterioso à ouurirrelles arceres des temples , & tirer du ſang, pour crainte qu’apres on ne peuſt
thie с
eſtancher le ſang , à cauſe de leur mouuement ( quieſtſyſtole & diaſtolé ,c'eſt àdire,
contra &tion & dilatation ) car veritablement ie l'ay faict pluſieursfois, & n'y crouué
non plus de difficulté à l'eſtácher que des veines:ioint auſſi,qu'au lendemain on trou.
voit l'ouuerture auſſi-coſt conſolidee qu'és veines, parquoy ne faut craindre à inciler
leſdites arteres : & vous puis aſſeurer qu'on void grand effect du ſang qui eſt vacué par
icelles,voire cent fois plus que des veines , qoidemonſtre bien que lamatierepueride
& vaporeuſe eſt plus contenuë en icelles qu'és veines.On pourra ſemblablement pro.
uoquer la ſaignee par le nez, ſi on voit que nature y tende: car elle profite grandemét
aux obſtructions& inflammations du cerueau , & de les membranes , & peut paricel.
Hipp. aph.le eſtre vacué beaucoup de lang pourry & corrompu ; car partelle vacuation ,on voit
10. lin. 6. delires,& fićures ardentesallegecs & du tour guaries : ce qui eſt auſſi prouué par Hip
pocrates,dilant qu'à celuy quia grande douleur de teſte, la bouë,cau, ou fang decou
lant par la bouche, & par le nez , ou par les oreilles , guarit la maladie.Parquoy fautque
le Chirurgien aydeà nacure à ierter horsce quiluy nuift:à quoy elle paruiédra,enfai
ſant que le malade s'efforce à moucher, & gracrerauec l'onglele dedas de lon nez, ou D
qu'il ſe picque auec foye de porc , & qu'il tienne la teſte en bas,afin d'ouurit quelque
veine , de laquelle la matiere conioin &te ſe peut euacuer. Quelquesfois à aucuns.lc
ſang s’eſcoule de ſoy- meſme, parce qu'il eſt chaud , ſubtil,& bilicux,auſſique naturo D

Hiſtoire. veu fairela criſe: ce que j'ay veu aduenir à monſieur de Foncaine , Cheualier de l'or
dre du Roy ( la Maielté eſtant à Bayonne) lequel auoit vne fićure continuë , & peſti
léte, accompagnce de pluſieurs charbos en diuerſesparties du côrps, & fur deux jours
1
ſans ceſſerde ſaigner par le nez : & par iceluy Aux ſa fiéure ceſſa auec vne tres- grande
ſucur: & toſt apres ſes charbonsluppurerent, & fuc par moy pensé , & par la grace de
Dieu guary . En tel cas faut laiſſer couler ledit flux : mais lion voyoit que nature fuſt
deſreiglee & iertaſt trop de ſang, par la vuidange duquel les forces s'affoibliſſent crop,
Moyē d'ar- adoncildoit eſtre arreſté cant par ligatures forces, faidesaux bras & iábes,applicatió
refter l'he
de ventouſes ſous les mamelles , & ſur les parties hôteuſes , ou ſous les aiſſelles, eſtoup.
morrhagie.
pes ou eſponges imbcuës en oxycrat , ou quelque autre liqueur froide , & appliquees
froides & rcïterces ſouuét.Pareillemécon lui fera tenir en la bouche cau froide,& de
dans le nez du cotton , du faulx, ou quelque reſtrain & if faitde poil d'entre les cuiſes,
ou ſous la gorge du lilure,bolarmene,terre ligillce incorporee aucc ius de plantain &
1

de la Peſte. 861
А centinode,ou autreſemblable , & le ſituer en licu frais,& qu'ilpuiffc attirer l'air à ſon
aile. Et pour recourner à noſtre propos,apres la ſaignec, li la douleur perſeueroit, &
qu'on vilt les veilles eſtre grandes,de façon que le pauure malade ne peuſt dormir ny
nuict ne iour , à cauſe des vapeurspucrides qui ont elchauffé & delleiché le cerueau,
alorsil fauç vſer de remedes qui prouoquencle dormir,& ayent faculté de refroidir &
huniecter, leſquels ſeront adminiſtrez tant par dedans que par dehors. Et pour
exemple,
On pourra donner àmanger au maladcorge mundé , fait auec eau de nenuphar & Pourpost
d'ozeille, de chacun deux onces,opium ſix ou huidt grains, des quatre icinences froi quer leder
des & du pauoc blanc ,de chacun demie once . En les potages on merira laiētues ,pour mir.
pied,ſemence de pauor, & des ſemences froides concaflees . On luy pourra auſſi don .
ner vne pilule decynogloſſa ,dans laquelle y entre del'opium . Semblablemét on luy pilule de
pourra faire prendre un peu dediacodion linefpeciebus. Et pour ton boire , caux de Cynogloljan
Jaictues & denenuphar , auſquelles on aura fait bouillit ſemence depauot, à fçauoir
demiconce d'iceluy auec trois onces deldites eaux ,ou vne once & demie de ſyrop de
nenupharou de pauot , auec trois onces de la deco &tion de lai&tuës, ou la potion ſui
B
uante .2.La& ucarum recentium m.i. Alorum nenuphar. & viol,an.p.i.caput vnum
papaueris albicóruſum cum feminib . pondere zii. liquiritiæ ,pafful.an.zi.B.fiac deco
&tio : in colatura diſſolue diacodij ſineipecieb .Ži. fiat porio larga danda hora ſomni.
Ouere.plus,on doit v ſer de cliſteres dormitifs pour refroidirla vehemérechaleur quiClyftcredor.
cſt au centre du corps , faits en la maniere qui s'enfuit.24.Deco & ionishordei mondaci muito
quartaria.ii1 . olei violaci & nenupharis an.zii,aquæ plantaginis & porculacæ velluc
corum zii.caphuræ gr.vii. album.ouor.is.fiat clyſter. Et quant aux choſes qu'il con ..
uient fairepardehors , ilfaut raſerlepoil, & appliquer ſurtoutela teſte del'oxyrrho.
dinum ,quieft huile & vinaigre miſtionnez enſemble , & luy laiſſer deſlus vo linge en
double crempé , lequel ſera renouuelle & remouillé ſouucnt. Pareillemenc on appli.
quera poulmons de veau , ou demouton recencementtirez de la beſte,ou vn coqvif
fendu en deux, & le renouuelera on ainſi qu'on verra eſtre beloin. Semblablement
on appliquera des ventouſesderrierele col,& ſur les eſpaules ſans (carificatio, & auec
С ſcarification. Aufli on fera des fri&tions & ligatures aux bras & iambes, afin de diuer.
: cir & cuacuer vne partie de la matiere. Outre- plus, luy ſera fait vn frontal en ceſte Frontal
maniere. 4.olei roſari & nenupharisan. Zii, olei papaueris Zb. opii zi acetiroſati zi.
caphuræ zB. Ces choſes ſoient incorporees enſemble , & foit fait vn frontal, lequel
doit eſtre reïteré par fois : & feront continuees ces choſes ſeulemenc iuſqu'à ce que la
vehemente inflammation ſoit paſſee,de peur de crop refrigerer le cerveau . Aullion Odeurs pont
luy feja ſentirau nez fleurs de pauot,iufquiame,nenuphar,mandragore,broyez auec
1,000 vinaigre & cau roſe,& vn peu de camphreenucloppez enſemble en vn moulchoir: & dormit
provoquerle
.
ſoient tenus aſſez longuement concre le nez afin que l'odeurſe puiffe communiquer
au cerucau, & par ce moyen ſoit prouoqué le dormir.On luy peut pareillement appli
quer cataplaſmes ſur le front à ces melmes fins,commepouceſtre le ſuivant.24. muci- Casaplaſme
laginis feminis pfyll i& cydonoriú in aqua rolarum extra & x Zivi.farinæ hordei ziiii.
2016? pulueris rolarum rubrarum ,florum nenupharis,violarum an Zb.ſeminis papaueris & Autres
good porculacæ an. Zii. aquæ roſarum & aceci rolatian. zivi.fiat cataplaſma: & l'appliquez
D tiedeſurle front, & meſme ſur toute la teſte.Aurre.4. Succorü la &tucæ, nenupharis,
hyoſcyami, porculacæ, an. lib.3.coſarum rubrarú pulueriſatarum ,feminispapaueris,
ana.3 . olei roſatıziii.aceci zii. farinæ hord. quantum fufficit: fiat cataplaſmaad for
mam pultis ſatis liquidæ.
Apres l'inflammation appaiſec,on fera des fomentations reſoluciucs, afin de reſou
for more dre quelque humeur contenu au cerucau & en les membranes. Ec en cet endroit no.
teras que pluſieurs ſont deceus aux grandes douleurs de ceſte cauſees par inflamma
tion qui commandent de ſerrer & lier cresfort la teſte pour appaiſer la douleur : car
tants'en faut que cela y profite , qu'au contraire l'augmente, parce qu'aumoyen de
ceſte aftri& ion,lemouuementdes arceres eſt empeſché:deſquelles l'vlage, quieſt d'c. Cõbiennwill
ventiller & rafreſchir le corps, tant par attraction de l'air qui nous avoiſine,que par letropfrontferrer
on
C exprellion d'excremens chauds & fuligineux, eſt de beaucoup empeſché& aboly:ou douleur de
tre-plus ferrent & comprimér ies ſutures ou jointures des os du crane, & en ce faiſant refte.
gardent que les vapeurs & fumees ne ſe peuuét cuaporer : Ec parcant font cauſe d'ac
croiſtre voeexcréme douleur & chaleur ,fiéure,celuerie,& autres gráds accidés , voire
DD ij
862
Le Vingt -deuxieſmeliure

quelquesfois iuſqu'à faire ſortir & crever les yeux hors de la teſte , & eftre cauſe de la A
mort des pauures malades:ce quei'atteſte auoir veu , ainſi quei'ay eſcrit en mon livre
des playes de la teſte humaine. Dauantage , aucuns ſont Tiendormis & aſſommez,
qu'ilsneſe peuuencayder:parcancilleur faut meccre dedans le nez choſes odorantes,
& quiayene vertu de lesfaire eſternucr , afin que la faculté animale ſoit aiguillonnce
& excitee à ſe défendre : & s'ils ne ſe peuvent ayder,illeur faut ouurir la bouche par
force, pour leur faire aualler quelque aliment ou medicament .

De la chaleur des reins. CHAP. XXXI.

Refrigerant
de Galien . Areillement pour dauantage diminuer la chaleur des reins , on
appliquera deflus de longuent refrigerant de Galien recentement
faict, y adiouſtant blanc d'aufstres bien baccus , afin que ſon bu
midité ſoit plus longuement gardee : & le faut renouueller à chal
que quart d'hcure, & l'eſſuyer quand on en mettra d'autre: ce que
ion fera iuſqu'à quatre fois : car autrement eſtant eſchauffé en la

partie, il ne refrigereroit pas mais pluſtoſt augmenteroit la chaleur . Auſſi on pourra


vſer du remede lujuane. 22. Aquarum roſarum lib . 3.Succiplantaginis ziin albumina
ouorum ini.olei rofacei & nenupharis an . zii aceti rolati žini, rniſce ad vſum . Les
reins eſtans frottez del yn deidiets onguens, on appliquera deffus fucilles de nenu
phar recentes , ou autres ſemblables herbes refrigerantes, puis apres vne ſeruierte
trempee en oxycrat , & eſpreinte & renouvellee louuent. Aufli le malade ne cou

chera lur liets de plume : ains luy ſera mis par deſlus vn matelas , ou vne paillaſſe do
auoine,ou vn groslinceul de roile ncufue ployé en pluſieurs doubles , ou du camelor,
de peur que la plume n'augmente dauantage la chaleur des reins, & vniuerſellement

detouc le corps. On pourra auſſi appliquer ſur la region du cæur vn medicament re


frigerant & contrariant au venin ,
comme ceſtuy luiuant.
Ongmës pour 2.Vnguentirofati žii. olei nenupharis Zii . aceti roſaci & aquæ roſa.an.Zi.cheria. C
frouterlare.
cæzi. croci zß. Leſdites choles ſoient incorporees & fonduësenſemble, & foit fait С
giõduceur.
onguent mol,lequel ſera eſtendu ſur vne piece d'eſcarlate , ou ſur du cuir,& appliqué
ſur la region du cæur. Autre 2.cheriacæ oprimæ zi . B.lucci acidicitri & limonisan.

Plnyc anti Zſ.coralli rubri,ſeminis rolarum rub.an.3ß.caphuræ ,crocian .gr . iii,incorporen,


fíciille. tur omnia fimul: fiat vnguentum vellinimentū.Dabondant on fera pleuuoir par ar
tifice , en faiſant de couler de l'eau de quelque hauc licu dansvn ballin, & qu'elle face
tel bruit qu'elle puiſſe eſtre entendue du malade.Et auſſi luy faudra frotter doucemēc
· les mains & pieds , euitant tout bruit en la chambre,de laquelle on tiendra les portes
& feneſtres cloſes , afin qu'elle ſoit renduë plus obſcure : aulli ſera rafreſchie auec les 1
choſes predi&tes,euitantcouſiours les odeurs chaudes, pource qu'elles nuiſent beau.
coup à la douleur de reſte cauſee de maciere chaude.
1

Accidens de peſte. CH A P. XXX .


(
D
Accidensde o Lyavn accident de peſte appellé Caqueſangue,quieft vn Aux de
ventre qui vlcere & corrode les inteſtins, tellemet que par les ſel D
peste appel
le Caque les on voit ſortir cómo vne raclure de boyaux , & du ság tout pur,
fangne. autresfois du pus ou bouë , ou aucres matieres purulentes , auec
vnc extremedouleur, qui irrite le malade d'aller ſouuét à la ſelle,
(
& n'y peut rien faire, ou bien peu , encore eſt-ce auec bien grades
17
cfpreintes, & ce qu'iliette eſt fort puant , & de diuerſe couleur,có.
Histoire. merouſſe ,iaunaſtre, verte,cendree, noire,voire le ſang tout pur . Ce quei'ay veu plu
ſieurs fois aduenir ,meſmeau camp d'Amiens, où pluſieurs moururent decelAux, le 1
quel eſtoit fort contagieux , & principalement à ceux qui alloient aux priuez apres i
Curiofité de cux, ou pour y auoir ietté telsexcremens. Si que voulant ſçauoir le lieu d’où ceſte
L'Ansbeur. grande quantité de ſang pouuoit fortir , ie fis ouverture de quelques - vns apres leur
mort , & trouuay la bouche des veines & arteres mezaraïques ouuertes, & cumefiecsla
part où elles aboutiſſent dedans les inteſtins, en forme de petits coryledons de grof. i
leurd'vn petit pois,deſquels lors que ie les preſfois ,le ság fortoit à veuë d’æil : & par là

(
De là Peſte. 863
A ic cognus les voyes,parleſquellesle ſang eſtoit ictté par les ſelles. Monſieur le Grand Curioſité de
Medecin ordinairedu Roy, qui eſtoic avec moy au camp par le commandementdu monfieur le
Roy Henry defun & ,en lauua pluſicurs: & entre autresicmedes leurfaiſoit boire du Grand.
laiá de vache, ferre, & auſſi en faiſoit ſouuent iecter par le liege, pour corriger & ad.
doucir l'acrimonio del humeur .
De la Coqueluche.
Ily a un autre accident de peſte, appelle Coqueluche,ainli dit, parce queceux qui Antreacci
encltojene clprins,ſencoiencvnc extrémc douleur de cefte,& à l'eſtomach ,aux reins, dēc de peffe
appellecon
& aux iambes,auecficure continue , & ſouuent auec delyre & frenclic , & lors qu'on queluche.
les purgeoit ou faignoit, on a cogncu leur auoir abbregé leurs jours.
La Suette .
Il y a vn autre accidentappellé la Suerte,qui a eſté en Angleterre, & aux baſſes Al. Autro accia
Jemagnes ,aina nommec ,parce que les patiens auoienr vne bien grande ſueur vniucr. dent depefte
ſelle auec grand friſſon,tremblement, & palpitation de cæur , accompagné de fićure Suctie.
appelle lo
re
B continue; & mouroient en peu de iours:& tuavn bien grand nomb de peupl e.
Trouſſe-galand.
Ily a vn autre accident , appellé Troulle galand, quia eſté au Puy en Augergne, Amireacci
ainſi nommé, parce que ceux quien eſtoient eſprins, mouroient en deux ou trois appellé
dentdepeste
jours, & pluſtostlesrobuſtes que les foibles & debiles, & les riches que les pauures, Trouffe- gh
by auec fiéure continue , delire & freneſic, & mouroient comme enragez,en ſorte qu'il land.
les falloit lier & attacher. Siquelqu'vn reichappoit, tout le poil luy tomboit : & ceſte
maladie eſtoit fort contagicule.

‫ܗܘ ܙܘܝ‬
Des eruptions du pustulles appelleespourpre.
CH A P. XXXI.

AVcuns aduiennenteruptionsaucuir, ſemblables à morſures de pulcos Deſcription


deseruptios.
ou de punailes: auſli font quelquesfois elleuces, comme petits grains
de mil, ou de petite verolle qu'on voit aux enfans. Et lors qu'ciles
C ſont crouvees en grande quantité, c'eſt bon ſignc: au contraire non.
Auſli ſelon la vehemence du venin , & la maricre dont elles ſontpro
crećes , ſont veuësdediuerſes couleurs, à ſçauoir rouges, citrines, tannees, vio
lectes, azurées, liuides, ou noires. Les vulgaires les appellent le tac , les autres le Dimers mis
pourpre , pource qu'elles ſont ſouuentesfois trouuces à la limilitude de graine de desernpriõsa
pourpre : autres les appellentLencicules , parce qu'elles ſont veuës quelquesfois
comme pecites lentilles. Auſſi aucuns les nomment papillots , à cauſe qu'elles ſe
manifeſtent tantoſt au viſage, tantoſt aux bras & iambes, voltigeans deplaceen
place comme petits papillots volans : & quelquesfois occupent tout le corps non
ſeulement la ſuperficie du cuir , mais penetrentplus profondement dedans lachair,
principalement lors qu'elles ſont faictes de groſſe matiere adulte . Aucunes ſont
trouuees grandes & larges , occupans preſque tout vn bras , ou vne iambe , ou la
face , comme vn eryſipele, & parrant diuerfifient ſelon que l'humeur pethe en
quantité ou en qualité. Et ſi elles ſont de couleur pourpree,noire,ou violette , aucc
defaillance de cæur , & s'en retournent ſans caule manifeſte, c'eſt vn ſigne infailli
D ble de mort . La cauſe deſdi& es erupcions eſt la fureur de l'ebullition du lang,faicteLa cauſe des
par l'humeur malin & veneneux . Elles viennent communement auec la fićure peſti- comptions.
lentielle, & quelquesfois deuant que la boſſe ou charbon ſoientapparus, quelques- Differences
fois auſſi apres:quialorsdemonftrent vne grande corruption d'humeurs aucorps:car depourpre.
outre l'expuiſion de la matiere de la bofle,ou du charbon,ladite corrupció eft fiaboo . merre
Prognat
l.
ie
dante,qu'elle ſe demonſtre aux autres lieux du corps , dont le plus ſouvent le pauure
peſtiferé meurt. Quelquesfois auſli ſont trouucesſeules, à ſçauoir fans boſſe ny char.
bons & alors qu'elles ſont rouges ſans eſtreaccompagnecs d'autres mauuais accidés ,
ne fone mortelles . Elles n'apparoiſſent communement au troiſieſme ou quatrielme sonuent le
jour,& quelquesfoi' plus tard: auſſi louuéresfois ne lont apperceuës qu'apres la mort pourpre ne
du malade,àcauſe quel'ebullicion des humeurs faicte par la pourriture n'eſt du tout amparohbe
cſteinte :& partant la chaleur qui reſte, excitee de pourricurc ,iette des excremens au que apres
mort.
cuir,quifaict ſortir les erupcions . Ou plaſtoſt parce que nature ſur le dernier combat ,
ayantmonftréquclquc cffore plus grád (commc eſtlacouſtumede toutes choſes qui
D D aj
864 Vingt-deuxieſm
e liure

tirent à leur fin que d'ordinaires'eſt deſpetrée ſur l'inſtant de lamort de quelque por A
tion del'humeur peſtilene vers le cuir : cellement toutefois qu'affoiblic de tel effore
cllc fuccombe ſous le faix & malignité du reſte de la matiere.

C H 4 P. XXXII.
De la cure des eruptions.

O V R la curatiou des erupciós il faut ſe garder ſur tout de repouf.


Hipp.Aph. ſer l'humeur au dedans : & partant fauteuiter le froid, pareillemét
21. lin. I.
les medecineslaxatives, la ſaignée, & le dormir profond, parce
que telles choſes recirenç les humeurs au dedans, & partant pour.
roienc interrompre lemouucmenç de nature , laquelle s'efforce
de ietter hors ce malin humeur ; mais au contraire faut fuiure na.
ture la part où elle rend,c'eſt à dire , donner yflvë aux humeurs od
elle veut faire ſa deſcharge, par remcdes qui attirent le venin au dehors & principa
lemérpar lueurs. Et pour encoreayder nacure à repouffer le pourpre hors, faudradó .
ner au malade vne once de ſyrop de limósou de grenades , auec deux onces d'eau cor
B
diale,commede meliſſe ou ſcabieuſe, y adioutant vne demie dragme de theriaque
ou mithridat . Autli pour accirer le venin au dehors , on mettra autour du col, ſous les
aiſſeles,&zaux aines , eſpongestrempees & exprimees en vne decoction d'herbes re.
ſolutiues ,comme lauande,laurier, laulge,roſmarin , & ſemblables :cat ſi les eruption's
ne ſortent , il y a danger que le venin neluffoque le cæur , ou qu'il neface un dux de
venere mortel . Etpour obuier à cels accidens,ie meteray icy ſur le bureau vn remede
ſingulier que i'ay trouué de grand & excellenc effect ( principalement quád la vercu
expulcrice eſt foible, & le cuir trop dur & reſerré ,de ſorte que le pourpre nepeut eſtro
ictté hors,mais demeure ſous le cuir , y faiſant pecices cubero tez )quieſt vo onguent,

duquel i'ay guary ( par la grace de Dieu ) pluſieurs verollez . Cognoiſſant qu'en lave. I
rolley auoit vn certain venin quinc ſe peuc dire ny eſcrire , non plus que celuy qui
cauſe la peite,non que ie vucille dire qu'elle ſoit maladic epidemiale , dependant des
altres, ny del inſpiration de l'air , mais de Dieu , qui par ce moyen punic les offences
des hommes & femmes , & par ſpecial du peché de luxure , ce qu'on void en ce qu'el с
Diners acci- le prend le plus louuent ſon commencement par contagion des parties genicales,
dens de la principalement pour habiter auec hommes ou femmes infe & ts ou louillez de venin
ucrolle.
verollique , lequel traine auec ſoy va bien grand nombre d'accidens , ainli que faið
celuy de la peſte, comme ſont puſtules malignes & corroſiues, qui commencent aux
parties hóteuſes, puis coſt apresſe manifeltérà la teſte & au front,
& par toutes les par.
cies du corps puis viceres en la bouche & aux parties honceuſes, & autres quiles man.
gent & rongent iuſques aux os : en apres leur ſuruiennent apoſtemes dures aux os, ap
pellces nodus ou gouttes noiees, auec extremes douleurs , & principalement la nuiá,
qui paſſionnenc & font quaſi deſeſperer les pauures verollez: & quelque tempsapres
leur aduientpourriture aux os , & le plus ſouvent ſans enfleure ou cumeurexterieure
apparente , dont les vns perdent les yeux, autres le nez les autresle palais,quieft cau
ſe qu'ils parlent regnaut : à aucuns la bouche deuient corſe , comme à vn renieurde C
Dieu , & bien ſouuent deuiennent ladres , & ont autres infinis accidés . Et pour le dire
Le vif-a", en vn mot , ce virus Venerien rend le plusſouuent le pauure verollé impotent de cous
gent le D
r a j ex i ſes memb res , & finalemét produi & vn efićure hectique, qui apres l'auoir rendu tout
v al
miſerablementà la mort. Tous
tere de la ſec,n'ayant plus ſur le corps que la peau , le confine
velalle. leſquels accidens ne peuuenteſtre appaiſez ny curez par aucun remede , fors que par
les onctions & emplaſtres vif -argencees, ou parfumscinnabariſez,qui ſont les vrais
alexiteres de ceſte deteſtable vcrolle,ainſi que le cheriaque & mechridat ſone du cout
contraires au venin peſtiferé. Parquoy cognoiſſant que par le moyen du vif argent,
ceſte verolle ſe curoit,i'ay voulu ſemblablement experimenter la friction vniuerſelle
pour attirer le venin deſdites eruptions au dehors par ſueurs, auec l'onguent proprcà
curer la verolle,conſiderát que le vifargenteſt la vrayecontre poiſon à la verolle,&
qu'il eſt de tres ſubtile ſubſtáce :aulli qu'il liquefie les humeurs gros & vifqucux , & les
rend mobiles auec le therjaque & les autres medicamens qui entrenten la compo
ſitions de ceftonguent, & ſtimule la vertu cxpulſive à ierter hors du corps , & abba.
tre par ſa faculté occulce le venin peſtiferé, comme il fai&t au virus verollique , à ſça
uoir caps par lucurs , que par inſenſible tranſpiration , vomiſſemiens, flux de ventre,
de la Peſte. 865
A Aux d'vrine, & par puſtules cuoquees au cuir par flux de bouche(ſpecialementà ceux
qui ſont diſpolez à cracher ) & autres euacuations.Parquoy voyant que nature ren
doit à ſe de charger du venin par leſdites eruptions & poſtules purpurees, i'en ay faict
frotter quelquesvns commes'ileuſſent eu la verolle toutesfois auparavant leurfai
lois donner un clyftere,puis l'ayant rendu , leur donnois à boire quatre doigts d'eau
theriacalc,l'eſtomach eltane vurde,àfin deprouoquer la ſueur, pour faire mieux for Vſage dela
drcoction
tir les humeurs,& cependanc corroborer le cour . Ec au lieu de l'eau theriacale , on du garac
pourra vſer de la decoction de gaiac,d'autantqu'il eſchauffe, & feiche , prouoque la
ſueur,& reliſte à la pourriture.Ecpour le faire plustigoureux , on mecera en ladire de
coction vn peu de vinaigre, à fin de le rendre de plus Tubeile ſubſtance: ce faiſanc rc
ſiſtera dauantage à la putrefa & ion, & m'eſmement a le corps elt pituiteux . Or quant
à l'ongucnt il ſe fera aina .
B
2. axungiæ ſuillæ tbj.coquatur aliquantulum cum foliorum ſaluiæ , chymi , roriſ.
marini añ.ñ.ß. poſtea colecur , & in ea extinguatur argenti vivi , quod prius in aceto Onguět vif
ebullierit cum prædi&is herbis,žv.lalis nitsiziij.cheriacæ & micbridaci).an Zs.tete argenté.
bentuinæ Ventræ ,olei de ſcorpionibus & laurinian.žlij.vitellosouorum ad duritiem
cocos numero vj. quæ vitæ ziij.
Letouc ſoit incorporé en vn inorcier, & ſoit faict onguent ,duquel on frotcera lę QneBespara
corps du malade, & principalement les aiſſelles & les aines, euitant lateite, les parties cieswedois
pectorales & l'eſpine du dos : puis ſoit enueloppé en vn drapchaud , & mis dedans le sens ette ·
lict & couuert ,& qu'il luc deux heures ou plus :& doiron mectre autour de ton et des frontres de
draps rouges ,& qu'il les regarde alliduellement & attentivement. Car par ce regard i'ongwent
la inaciere veneneuſe cſt atcirce du dedans au dehors , puis il ſera eſſuyé legerement,à ré"if- argento
fin que le medicament produiſe dauantage ſon cffet,& ſera mis en vn autre lią,s'il y
a commodité : puis on luy donnera quelque bouillon de chappon ;on des cufs modo
D lecs , ou autres bons alimens : & fauc derechetreïterer la friction iuſques à ce qu'on
voye que leſdictes eruptions ſoient forcies & rſteintes, qui ſe faict en deux ou crois Remedes
jours.Que s'iladuient Aus de bouche,nele fraudra empeſcher. Et quand on void que attra£tifs
le pourprceſ du tout lorty , & les ſueurs paſſees, encor eſt il bon de donner choles & refolurif
diureciques ,c'eſt à dire,prouocatives d'vrine, parce quçſouuenton void leſdites eru- du VCHINE
prions eſtre cuacuces par celle deſcharge.Outreplus ſeroit bon pour les riches,en licu
decelt onguent,fendre le ventre d'vn cheual oumulet , & ofter les entrailles , & mec
tre le malade nud ayant la reſte dehors, & qu'il y demeure iuſques à ce qu'il commen
ce à ſe refroidir: puis qu'il ſe remerce lubic dans vn autre,& reïcere cant de fois qu'on
verra eſtre neceſſaire : & telle choſe eſt fort loiiee des anciens , à cauſe que la chaleur
.
naturelle de ces beſtes accire merueilleuſement le venin , cant par ſueur que par inſen
807 fible crálpiration : ce qu'on a cogneu par experience,commedie Macchiolus au Proë.
me ſur le ſixiclmeliure de Dioſcoride,où il declare que le Seigneur Valentin ,nepucu Hilaire
du Pape Alexandre ſixieſme,eſchappa par ce moyen de la mort , encor qu'il fuft em
poilonné :car voulantempoiſonner certains Cardinaux en vn feſtin, ils'empoiſonna
loy.meſme, & pareillement monſieur ſon oncle le Pape ſans y penſer.
De l'apoftemepeftiferé, appellébubon ou bolle.
dela
CH A P. XXXIII.

R poſons le cas que nacure ne s'eſt peu deſcharger par aucuns mo- Gal.anli .
yens & remedes luſdics, mais pluſtoſt par vne apoſteme faite aux + $. de Thea
emunctoires , laquelle d'aucuns eſt appellec bubon peſtiferé, d'au riaca
tres la boſſe , d'autres la peſte , ou fuſee , & de Galien beſte fauuage Pifonem .
& farouchc ; & aux autres parcies du corps , charbon , anthrax , &
carboncle. Nous dirons que la boſſe eſt vne tumeur qui eſt en ſon
commencement de forme longuette &mobile, & en ſon eſtar ronde ou poin &tuc,
& immobile , fixe & accachec forc profondement aux emonttoires, comme du cer
ucau à la gorge,du cæur aux aiſſelles, du foye aux aines ,& eft faicte de mariere plus
craſle & viſqueuſe quele charbon , lequel eſt faie d'une matiere plus acre , boüillan
te & furieuſe faiſanceſcarreoùil s'arreſte. Au commencement quela fuxion de la signes
boſſe ſefait, les malades diſent ſentir à l'emunctoire comme yne corde tenduë,ou va
D D iiij
866 Vingt-deuxieſmeliure
nerf durauec doulear poignante : puisla matiere s'aſſemble comme vne glande, & à
peu , & en brief cemps s'engroſſiſt & s'enflamme, & eft accompagoced'autres acci A A

Prognoftic. dens deſſus mentionncz. Sila tumeur eſt rouge& legroſſiſt peu à peu,c'eſtbon ſigne.
Celle qui eſt liuide & noire,& tardiucà venir, eſtdangereuſe. Auſli il y en a qui vien.
nent promptement & d'vne grande furic, & netiennent la forme commune , c'eſt à
dire que ſubitement deuiennent enflammces auec grande tumcur & douleur incolle.
rable, & celles ſont communement mortelles. On en a veu auſſi qui tenoienc de la
couleurdu cuir naturel, &z ſembloient eſtre vnecumcur ædemaceuſe , qui coutesfois
faiſoient mourir le malade,auſſi toſt que celles qui eſtoienc de couleurnoire ou plom
bec: parquoy il ne s'y faut fier.
De la cure de l'aposteme pestiferé.
CHAP XXXII11.

N appliquera deſlus promptement vne ventouſe auec grande famme, 2

Dentonſe ſi elle n'eſtoit celle , comme celle qu'auons diet cy -deffus, à ſçauoir , aucc
furt'aporte grande inflammation , & douleur intollerable , & auec grande tumeur. B
me peftife- So Auli on doit premierement oindre le cuir d'huile de lis , à l'endroict où
ré. on appliqucra ladiccvencoule, afin de le rendre plus laxe : & que par ce moyen elle D.

face plus grandeattraction , & fera reiteree de crois en trois heures: & y demeurera
à chacunefoisvo quart d'heure plus ou moins ſelon la vertu du malade, & la vche. 1

mence de la maticre , afin d'attirer le venin des parties nobles au dehors , & auſſi ai.
dernature à faireſuppuration plus ſubite, ou reſolution : quiſe fera en appliquant
deſſus yn tel liniment. IC

2. Vnguenti dialthcæ Ziß.olei de ſcorpionibus Z. mithridatij diffoluci cum aqua br


Linimene.
Fomenik .
vitæ 3.1. Celinimenc a vertu de relaxer le cuir,& ovurir les pores, & faire exhalation
sioms. de quelque portion de la maticre peftiferce, quia eſté atrireepar la ventouſe.On peut C dir
re
Voficatei auſſi en licu d'iceluy faire des fomentations remolliciues, diſcutientes & refolutiues,
on
& autres remcdes attra& ifs & ſuppuratifs, que deſcrironscy apres. D'auantage,on do
doit faire un velicatoire au deſſous de la boſſe , non au deſſus , ce que i'ay fai&t plu C1
ficurs fois auec heureuſe iſſuë. Comme pour exemple, ſi l'apoſtemeeſtoit à la gorge, ре

ſera appliqué ſur l'eſpaule , & du coſté melme: & fi elle eſt fous l'aillelle, au milieudu
bras parcie internc : & fi elle eſt aux aines,au milieu du plat de la cuiſſe ; à fin de don.
ner prompte iſſuë à vnc partie du venin,& le departir en deux : donc par ce moyen la
partic,oùpremierement s'aſſembloit le venin en l'apoſteme,ſera plus deſchargee.Or
Exēple des pour faire ampoulles ou vellies,leschoſes ſuiuancesſontpropres àſçauoir,cichymal,
veficgcoires bathrachium ,autrementnommé ranunculus, ou apiumriſus:aufli le ranunculas bul
fimples. bolus,perſicaria,pesleonis,autrementnommé pommelce,vitis albavelbryonia,& an
principalement par deſſus cous la moyenne eſcorce de viburnum appellé viornc,
auſſi l'eſcorce de tapſusbarbacus,ou tambe ( laquelle eſt ainſi nommee des anciens, de
parce qu'elleeſt cauſtique, & faict veſics, & coflamme la partie) & auties ſemblables D
Simples . Ecoù ne pourras trouuer deſdits remcdes , comme on faict difficilemen en
EE

hyuer,cu vſerasdeceftuy compoſé,lequel on peutfaire en tous cemps.22.Cantharidu


pul.piperis,cuphorbij,pyrethrijan ,zß.fermeriacris ziij. (inapi 3.1.acetiparum.I'y ad
Eiro8&

ioult peu de vinaigre,d'autant qu'il abbaſt la vertu des cancarides. Er en vne excre.
mité, qn'on ne peut recouurer dels remedes,fautprendre huile feruéte, ou eau bouil
lante,ou vne chádelle flambantc ,voire vn charbon ardant,qui fera vne veſicació rel
le qu'ó deſircra.Et apres que les veſſies ou ampoulles ſerõr faites,ils les faut fubic cou
per, & laiſſer les vlceres longtemps ouuerts , en mettant deſſus fueilles de choux rou.
ges,berte,oupoirce,ou de lierre , amorties en eau chaude , & les oindre auec huile &
beurre frais. Aucuns appliquent des caureres pour faire leſdi&tes ouvertures, mais If

les veſies ſont beaucoup plusà louer, parce que parauant que les eſcharres fuffens ch
la
cheures,le malade pourroitmourir.Erfaut entendre, quc les ouuercures fai &tes par
les veſicatoires ſeruentbeaucoup pour euacuer promptement le venin ( ce quia eſté ti

experiméré par pluſieurs fois)parce que le venin peftiferé peche plus en qualité qu'en
quantité.Erlurl'apoſteme ſeront appliquces des fomentacions, commenous auons CA

di & cy -deſſus: puis on vlerade ceremede,quia vcrcu datcirer la matiero au dehors V


dela Peſte. 867
WE
24.Cæpam magnam, excaua& imple theriaca cum folijs ruræ:deinde coque ſub cine
A ribus calidis,poftea contunde cum pauco fermento & axungia ſuilla ad quantitatem Cataplaf
fufficientem :& ce ſoit appliqué chaud ſurlaboſſe, & le faudra renouvellerde ſix en (ix meantra
tif.
heures.Autre attractif.2.Radiçû biſmalıæ & lilionū añ.lib.fs.jeminis lini,fænugræ .
ci & ſinapian.zz.cheriacæ zj.ficus pingues numerox.axungia fuillæ quantum (ufficit: Antre
fiae cataplaſma lccundum artem . Autec cataplaſmc.
10
2.Cæparum & alliorum ſub cineribusco&torum an.Zi1.contunde cum fermentia ANITE
cris 31.addendo vnguenti baſiliconis 3 j.cheriacæzj.mithridatijzf. axungiæ ſuillæ ve : plus forts
teris žj.cancharidum pulueriſatarum gj. ſtercoris columbinizii. Le coutſont piſté &
melle enſemble, & ſoit faict cataplaſme.Autre.Lavieille prelureeſt forc acre & chau .
dc,& par conlequent attractiuc,mcllcc auec vieilleuain ,& vn peu de baſilicum . On
en peut faire d'aucres ſemblables,deſquelson vlera juſqu'à ce qu'il y aura ſuffisáce ac
tra &tion , & que la boſſe ſoit fort elleuce en tumeur:maisſi on void quedés lecommé.
cement il y euſt crel grande inflammation & douleur excreme, comeil le faitbič ſou .
uent,& principalement aux charbons,en tel cas ſe fauc garder dvſer de cels remedes
ainſi chauds & attractifs, & de ceux aulli qui ſont fort emplaſtiques & vifqueux , lef
quelsconden ſent & opilent les pores du cuir, ou reſoluenc,cólument & Teichenc l'hu:
B meur ſubcil,quipourroit eſtre cauſe d'aider àla fuppuration :pareillement augmentée",
la douleur & la fiéure, & attirenc trop grande quantité d'humeurs chaudes,dõtleves
nin s'en fait plus grand & dangereux,rendant la matiere plus rebeile,la cournant plu
ſtolt à corruption qu'à maturacion:parquoy louuét s'enluicdouleur excreme cauſane
ſpaſme,gangrene, & par conſequencla mort ſubite.Doncen tel cas tu euiceras tels re.
medes,& cn appliqueras des froids & temperez,afin de diminuer la gráde ferueur, &
.
ebulicion de lang: Ce faiſant nature ſera aidee,dontla ſuppuration ſe fera mieux.Et de
celle ſorte ſont les cataplaſmes faicts de fueilles de iuſquiame & ozeille cuitte ſous la
braiſe,aulli la pulce de Galien , & autres que declarerons cy- apres.
Ona veu des malades de peſte,leſquels onteu ſigrandeapprehenſió de la mort,que
C.OF d'vn grăd courage & conſtanceeux meſmes ſc ſont tirez laboſſe auec tenailles de ma.
reſchal.Autresl'ont couppee en pluſieurs endroics ,la cernans tout autour:les autres
onc eſté ſi affcurez,qu'eux-melmesſe ſont appliquez fers ardás, & ſe ſont bruſlezpour
с donner iſſuë à l'humeurpeftiferé : ce que ie n'approuve. Carla malignité peſtilente
Slag n'eſt pas comme la morlure & picqucure des beſtes venimeuſes , parce que le venin
viençdudedás,& non du dehors,commeen lamorſure& picqueure des beſtes veni
meuſes. Et celles cruautez ſi violences accroiſſent pluſtoſt la douleur & chaleur de la
fićure,empirent& augmentent la venenofité, & poạt ceſte cauſe abbregent leur vie.
Parquoy cute contenteras en tel cas de remedes relaxans & ouurásles pores du cuir,
& euacuans par reſolution & inſenſible tranſpiration vne porcion du venin.Erdetels
ober t'en donneray pluſieurs bien approuuez & promptementparables,commeſonçceux
0.7.1.1 quis'enſuiuenc.2. radicum bilmaluæ & liliorum an. zvi. Alorum camomillæ & melil . Foments:
añ.ñ.ß.ſeminislini zß.foliorum rucæ ñ ./s.Lerout ſoitbouilly , puis coulé , & en ceſte lion refolu
· decoction ſoit trempé vn feutre,ou vnecſpõge,& ſoit faite fomération aſſez longue. fiue corres
laxatin e.
ment. Autre remede . 2. micam paniscalidi, & afperge aquatheriac. vel aqua vitæ
cum lacte vaccino ,velcaprillo ,& tribus vitellis ouorum . Letout ſoit incorporé & ap
pliqué deſſus chaudement avec des eſtouppes . Autre.2.fermenciacris ex ſecali ziiij.
D baſiliconis zii . vitellos ouorum numero iij.oleililiorum zii. cheriacæ zi . Le tout ſoit
mellé & appliqué comme deſſus. Autre. 2. diachilonis communis & bafiliconis an .
Zii. oleililiorum ziſ ſoient liquefiez & fondus enlemble : & en ſoit appliqué com
me deſſus. Et lors que l'on verra que la boſſe ſera ſuppuree(ce qui ſe peutcognoiſtre à
la veuë & au ta & )d'autantque la tumeur eſt elleuce aucunement en poincteou pyra
mide , & le cuir blanchy & deliė , & au ſentiment du toucher on crouuel'enfleure -
beyſlante aux doigts auec vne inondation molette,& la bouë va de lieu en aurre : pa
reillement les accidens ſont grandement diminuez , comme douleur pulſatile & les Signes de la
elancemens inflammation
& ouuercure
:alors qu'on void telles choſes, il faut faire par bonëfaite.
991 lancette , ou cauteres potentiels ou actuels: mais les potentiels ſont plus à louër en
tel cas s'iln'y auoic grande inflammatio,parce qu'ils attirent le venin du profond à la
"
ſuperficie, & donnée plusample'iſſuë à la matiere. Et ne faut attendre que Nature fa .
cçcouuercure d'elle meſme,depeur que la bovë eſtát faite,nes'eſleue quelquevapeur
Veneneuſe , quiſe communiqueroit par les arceres, veines & nerfs au caur & autres
868 Vingt-deuxieſme liure A
parcies nobles.Parquoy l'ouuercureſedoit faire par lamain duChirurgien,& ron par A
Nefuntal
nature.Aucunscommandent faire l'ouverture deuant que la luppuration (onc faite,&
tendre que apparéte,diſant qu'il la faur ouurir entre verd& le ſec. Toutesfois ie vous puis aficu
Ponuercuterer,quc a l'apoſtemen’eſt aſſez maturee ,on eft cauſe d'induire grāde douleur,inflam
fe face parmation,& accroiſſement de fiéure:qui eſtſouucntcauſe d'vnegangrene, ouderedre
Mature . l'vlcere malin ;ce quei’ay veu aduenir ſouuentos-fois. La ſuppuration ſe faict volon
tiers en dixou douzeiours,plusou moins,ſeló la malignitédel'humeur,& qu'elle le
fa traictee:aulli ſelon la partie affectee.Or apres l'ouuerture faiąc,on doit encor vier
de medicamens ſuppuratifs & remollitifs tant qu'ilſera beſoin , pour toujours ayder
Nature à ſuppurer& amolir ,mundifiant neātmoinsl'vlcere & cauité d'iceluy par on
guens decerſifs, quedeclarerons cy-apres trai&ansdes charbós.Maisſi on voyoitque
laboſſe ou tumeur retournalt au dedans alorson doic appliquer ventouſes auec (cari B
fications,&autres remedes plus forts & attra & ifs bien acres,voireiuſquesaux caute.
Vsage de res actuels oupotentiels.D'auantage,commei'ay.dit en tel cas,il eſt beloinde faireou.
ventouſes verture ſous la boſſe,auec velicatoires,afin d'euacuer quelque partie duvenin pendác B
Jur la bolje.
quc l'eſcharre faicte par les cauteres , combera . Pareillement autour des boſſes &
charbons on fera desſcarifications, & y ſera appliqué pluſieurs ſangſuës, & reiterees
par pluſieurs fois,afin d'attirer,& vacuer l'humeur conioina à la partie.Or que telles
ouvertures ſeruent,melmes ſoient neceſſaires à deſcharger la partie du venin qui la
molefte, & par conſequent tout le corps,on le veoidiournellement par experience en
ceux qui ont la verolle: car cependant qu'ils ont quelques vlceres ouueres , & qu'ils
fluenc, les pauures verollez n'ont point de douleur, ou en ont bien peu,& fubit qu'ils
fontclos,leurdouleur vient & s'augmente,à cauſe que le virus vencrien n'a plusd'il C
ſuë.Sion voyoit que la peſte ou le charbon fuſſent malins & enflammez & de couleur
verdoyance ou noire (comme l'on veoit principalement en ceux qui ſont faiếts d’hu. tc
meur melancholique bruſé,quieft le pire humeur de tous , parce qu'ileſt froid & ſec, fi
& paraduftion eſt faiết gros & rebelleaux remedes,& parcant eſt difficilementvaincu la
Temps d '». par Nature)& qu'auſſi on viſt qu'il y cult grand danger de gangrene & mortification fo
fer dire en la partie, alors il faudroit vier de medicamens repercuſifs autour & non deſlus, С
percußifs. afin de prohiber que la Auxionne s'augmentaſt par trop , & que la partie ne re CIL
ceuſttant d'humeurs, quela chaleur naturelle fuſt ſuffoquee & eſteinde& que la ma
tiere venenculene remontaſt au cæur , alors on appliquera autour medicamens re 1
lo
1
percuſſifs,leſquels ſeront renouuellez ſouuent: & en ce faiſanton laiſſe la propre curc P
7
pour ſuruenir aux accidens.
Exemple de repercuſsifs. e
2. pomum granatum acidum:coque in acero: poſtea contunde cum vnguento rol.
vel populcone recenter facto: & celoic appliqué autour du charbī ou bofle,& renou. d
uelle couuenr. Autre.4.fucciſemperuiui,porculacæ ,acetolæ, ſolanı an.zi).aceriži.al
bumina oyorum numero iij.olei rol.& nenuphar.añ.3ij.ß.ces choſes ſoient agitees,& d
appliquees comme deſſus.Et ſi on veoit que la boſſe ou charbo fuſſent fore veneneux b
& de mauuaiſe couleur ,auec trop grandemultitudede matiere,& qu'ily euſt danger 8
degangrene ,& mortification ,ilfaut faire deſſus & aux enuironspluſieurs & profon 1
!
desſcarificatios(ſi la partie le permet ) afin d'attirer,ladeſcharger, & cuacuer le venin, 02
& la trop grande multitude deshumcursquiſuffoquent& eſteindene la chaleurnacu. D
relle de la parcie,afin que plus facilemét puiſſent auoir air, euitane couliours les gráds
Le langeß vaiſſeaux,comme nerfs,veines& arteres,de peurdeſpaſme & Hux de ſang, lequelen 1
difficile tel cas eſt difficile à eſtancher ,à cauſe que le lieu eſt grandement enflammė, & que les
elancher le deſir que
1

4Nx inflam . parties voiſines ſont tát eſchauffees de la malice de l'humeur, & auſſi pour 1
mations Nature auec ſa vercu expultrice a deloy deſcharger:ce qui faict queſovuentesfois on a
peftilenses. nc peuteſtácher le lang,deſorte que le malade meurt entre les mains du Chirurgien: 1

ce quei'atteſte auoir veu aduenir pluſieurs fois:parquoy tuy prendrasgarde. Or tu


dois ſçauoir que relleeuacuation faicte du lieu affecté profite à merueilles: car par co 1
moyen Nature ſe deſcharge par le meſme licu où elle afaict amas du venin,poureſtre
cuacué:parcant tu laiſſeras couler la quancité du ſang que tu cognoiſtraseftre beſoin, 1
prenant touſioursindications de la vertu du malade,quipourra principalementeſtre (
cogneuëpar la force du pouls,& autres indices, qu'auonsparcy-deuant eſcrits. Auſli "
on fera des fomentacions relaxances & remolliciues & rcſoluciucs, pour touſiours (
cuaporer & donner iſſuć au yenin.
)
de la Peſte. 869
A
Exemple d'une fomentation remollitiue reſolutine.
7.radicis althæ,liliorum & enulæ campanæ an. tb ).ſeminis lini& fænugr. an. z.ſe.
minis fæniculi,anili añ.32. foliorum rutæ ,faluiæ ,roriſm.añ.ñ.j.flor.camom .meliloti
añ ñ.iii. bulliant omnia fimul : fiar deco&io pro fotu fecund. ariem . Deceſtedeco .
&tion on en fomentera la partie allez longuementauec feutres,ou elponges,ou linges
defaut d’eſponges. On pourra aulli prendre vne poulaille, & principalement vne volailles
poulle communc qui ponde , afin qu'elle ait le cul plusouuert, ou vne groſle poulle Gautres
d'Inde,& leur faudra plumer le cul,mertrededás deuxou trois grainsde felprofon. belles pro
dement,afin que l'acrimonie du ſelirritác le boyau cuillier,le leurtienecouſiours ou pres pour
uert,&Icurtenir leculdellus laboſſeou charbon (apres auoir faict premierementdes forappliquer
les bol
ſcarifications ſuperficielles)iuſquesà ce qu'elles meurent : puis eſtansmortes on yengeses
remettra d'autre en nombre decinqou fix ,ou dauantage, par l'eſpace de denie heu . Cons. 1

God Bre ,ſi le malade le peut ſouffrir, leur ferrant par fois le bec,afin qu'elles artirēt plus viuc.
ment le venin . Cette attraction faicte par le cul de poullailles accire plusledit venin ,
que ne faict la ventouſe parce qu'on tient qu'elles ont vne cõrrarieté naturelle corre
le venin, come ille peucprouuer,parce quel'les mangent & digerent les beſtes vene
neuſes,comme crapaux,viperes,couleuures,aſpics & autresferpens, ſans qu'elles en rité
contra.
des
reçoiuent aucun mal.On peut pareillement prendre leſdires volailies, ou pigeons ou
petits chiễs & chatsnouuellemétnezfendustousvifs,& les y'appliquertouschauds, con la dies
& lors qu'on cognoiſtra qu'ils refroidirót,on y en remettra d'autres:femblablement min .
poulmons de mouton oudeveau,appliquez tout ſubic eftát tirez hors de la beſte Car
par celte chaleur moderee & parurelle de ces beſtes,ſe fait attraction familiere du ve
nin,& la partie malade eſt par ce moyen deſchargee & fortifice: & faut meitre ſubic
ces beſtes mortes profondemec en terre, ou les bruſler,de peur que les chiens & chats
ne les mágent & apportét le venin aux maiſons.Et fionvoyoit que la boſcou charbó Quetzal
tendiſſent àvnegangrenc, qui eſt preparatio de mortificacion ,alors on doit faire plu. quegangres
OORDEN

Brother
ſieurs ſcarifications profondes,toutesfois cuicant les grands vaiſſeaux (comci'ay di&t) ne.
laiſſant fluer du ſang,ainſique verras eſtre neceſſaire,afin d'alleger la partie : & apres
feras ablution d'eau ſalce,vinaigre ,& eau de vie, auec leſquelles diſſoudras egyptiac,
methridat,ou cheriaque :car telle ablution a tres.grande vertu de corriger la pourri
C cure gágreneuſe ,& garder que leság ne ſe coagule, & decerger la virulēce del'humeur
imbu au lieu infectiedant à pourriture.Ec où on cognoiſtra que la gangrenene vou
luſt obeïrà dels remedes,alorsfaut venir aux plus fortsqui ſont les cauteres actuels ou
potentiels,parce qu'aux fortes maladies i) faut vſer de grands & forts remcdes. Er en Lecauline
tels cas lescauceres actuels ſont plus excelles que les potentiels,à raiſon que leur actið aftuel est
WANT
eſt plus ſubtile & plus contraireau venin, & laiſſencmeilleure diſpoſition à la partie. prepojé au
Apres la cauterization,promptemér on ſcarifiera l'eſchare iuſques à la chair viue,a fin pocenciclo
de faire exhaller quelque vapeur,& donner iſſuë à quelque humeur cõtenu en la par
tie.Et ne faut attendre que l'eſchare tombe de ſoy.meſme,mais on appliquera reme.
des pour la fairetomber, comme ceſtuy . 22. Mucilaginis alcheæ , ſeminis linian. Zij. Liniment
butyri recentis vel axungiæ porcizi.vicellos ouorum numero iij.incorporenturſimul pour faire
& fiaclinimentum.Aullion peut vſer debeurre frais,ou ſein de porc,huileroſat, auec toll tomber
moyeux d'aufs :puis apres la cheure de l'eſchare , ru vſera de niondificatifs : commcccl are,fica
niunde
D 2. Succi plantaginis , clymeni & apij añ. Z iij.mellis rolatiziij.terebentinæ Venetä uif so
Žv. far, hord . ziij. pulueris aloës zij. oleiroſatiziiij. theriacæ zß . fiatmundificatiuum
ſecundùm artem .Autre2. Vnguenti Ægyptiaci & baſiliconis Zij.pul. mercurij . 33.
incorporentur fimul,fiac vnguentum.Autre.2.terebenthinæ Venetæ Ziiij.fyrupi de
roſis ficcis & de abſinchio anzi.pulucris aloës,maſtiches,myrrhæ ,far. hord.añ.zj.mi.
thridatijzß.incorporentur fimul:fiat medicamentum . Quon vſera d'vn tel, qui eſt
appropié aux vlceres deſpaſcents,putrides , virulens, & gangreneux. 22. Auripig Deterlif
mentirubriži.calcis viuz , aluminis vſti,corcicum granacorum an.zvj.churis, galla: forr.
ruman.ziij . ceræ & olciquantum fufficit:fiac vnguentú. Ceſtuy onguenteft fort de
terlif,& conſommela chair pourrie , & deſſeiche l'humidité virulente , qui eſt mere
nourrice de pourricure gangreneuſe.Pareillement en lieu de ceftuy on tera de l'egy
priac fortifié,lequel auſlicorrige la chair pourrie, & cóſomme celle quicroiſt parcrop, Onguent
d'auấtage obrúd & eſteine l'humeur virulēt qui eſt en la partie, qui caule fouuétesfois Egypriac.
tres grãde douleur, & eft excellét par deſs' cous autres remedes pour cel effect:d'autão
qu'en la compoſition n'entrér huile ny cire,leſquelles choles rompét la force & acri
870 Vingt-deuxieſme liure

monie des medicaments acres, quiſont propres à tels vlceres . La force de ces medica
A
mens deterſifs ſera diminuce ou augmencee ſelon qu'on verra l'vlcere eſtre fordide ,
& putride, & ſelon la nature du cemperameor de tout le corps & de la partie. Et faut
tenir l'vlcere ouuert le plus longuement qu'on pourra :caron a veu aucuns, deſquels
la boſſc & les charbons ayans iecté beaucoup de matiere,ſembloičceftredu tour gua
Il fautte- ris , & toutesfois bien coſt apres ils mouroient: & parcanton tiendra l'vlcere long téps
nir long
temps on oauert, & confortera- l'on continuellement le cæur : auſſion donnera au malade par
.
sert lol. fois quelque petite medecinc , afin de purger & rectifier les humeurs mauuaiſcs,pour
cere de la rics & vencneuſes.

bolje.
Deſcription du charbon pestiferé ,& defes cauſes,fignes &marques.

C H A P. X X XV .

Harbon peſtiferé eſt une petite tumeur ou puſtule malignc , ferucnte & fu.
ricuſe,faite d'vn ſang gros & noir ,corrõpu en ſa ſubſtance ,par tráfmutation
de ſang louable, de façon que le plus ſouuene ne peuteſtreregy negovuerné
par Nature, parce qu'il peche en vne qualité maligne qui luy eſt inuincible.B
Cante du
charbon Ileſt de figure ronde & aiguë , & en ſon commencement n'eſt point plusgros qu'vn
peftifera petit grain demiel,ou vn pois adherant fore contre lapartie immobile,tellement que
le cuir de deſſus ne ſe peut enlever de la chair de deffous: & croiſt promptement ainſi
quc fait la boſſe, & quelquesfois pluſtoſt, aucunesfois plus tard,ſelon quela matiereelt
plus ou moins furiculc,auec grande chaleur,ardeur, & douleur lancināte & poignan
te, comme poin & es d'eguilles, laquelle eſt tres-cuiſante & intolerable,principalement
vers le ſoir & la nuiet plus que le iour , & plus lors que la concoction ic fai&t en l'eſto.
Signes.
mach , que quád elle eſt faište: & au milieu apparoiſt vne petite vellie,en laquelle ſem .
1
ble eſtic contenuë quelque ſanie : & fi on l'ouure , & qu’on deſcouure le cuir,ou trouue C
C
au deſſous la chair bruſlee & noire,comme ſi vn charbon ardanty auoit eſté appliqué,
& pour ceſte cauſe les anciens l'ont appellé Charbon. Et la chair d'entour eſt trouuce
Pourquoi dediverſe couleur,comme l'on veoic en l'arc en ciel,à ſçauoir rouge,brunc,perſe,vio.
le charbon lecce,plombce & noiraſtrc,auec iplendeur ou lueur eſtincelante, comme poix noire ,
eft ainfi apº embralec & enfiamce,ayant pareillement ſimilicude à une pierre nommceEſcarbou.
pellé.
cle , dont auſſi aucuns luy ont attribué ce nom . Les vulgaires les appellent clouds,
parce que la matiere d'iceux cauſo douleur ſemblable, comme ſi vn cloud eſtoit fiché
t
à la partic. Il y a aucuns charbons qui prennent leur commencemét d'vn vlcere crou.
ſteux, ſanspuſtule, & de couleur noire ,comme ſi on y auoit appliqué vn cautete po
0
tentiel , ou vn fer ardant qui croiſt auſſi ſubitement, & quelquesfois plus tard, felon
que la matiere eſt plus ou moins maligne , comme nous avons dit .Tousleſquels char
bons peftiferez ſont touſiours accompagnez de fiéure continuë , & aucres accidens
fort cruels : & ſemble au malade qu'il a vnegrande charge de plomb ſur la partie char
bonniere, & qu'elle ſoit eſtroictementlicci & veritablement je leſçay pour l'auoir
ſenty en mon corps ) qui ſe faiđ à cauſe de la corrupcion & ſuffocacion des eſprits, & D
de la chaleur naturelle de la partie,en laquelle eſt le charbon ,dontſouuentesfois s'en
ſuit def; illance , cæur de inquietude , alienation d'eſprits, & furie & gangrenne &
Diff'rence
dels bene mortification , & par conſequent la mort , non ſeulement de la partie , mais aullide
charben. tout le corps , ainſi qu'on void auſlı ſouuent aduenirà l'apoſtemepeftiferé.Età la ve
rité on peut dire , que le charbon & la boſſe ſont comme couſinsgermains,leſquels ne
vont gueres I'vn ſans l'autre, & la matiere d'iceux ne differe ſeulement,ſinon que celle
de la boffe eſt plus craſle & viſqueuſc , & celle du charbon plus acre,bouillante,furicu
ſe & ſubtile ,faiſantelcharre au lieu où il ſe lied ,ainli qu'auons declaró cy-deſſus.
Prognoftis

1
de la Peſte. 870
А
Prognoſtic des apoſtemes e charbons peftiferez.
С НА Р. XXXVI.

Vcuns n'ont qu'vn charbā,lesautres pluſieurs,& fe iettent par 11 of meil


toutes les partiesdu corps. Il aduient à aucuns qu'ils auront le que les
charbon & la bofle devāc la ficure, & n'ont aucres mauuais acci charbon s
dens, qui eſt un bon ligne, carcela demonſtre que nature a eſté boſſes appe.
forte (commenous avós dit cy.dellus)& qu'elle a ierté le venin 10 ſen de
au dehors deuant que le cæur en fuit laify:mais quand ils appa.mam la fié
roiſsēr apres la fieure,c'eſtmauuais ſigne:car cela lignific queles ure quiapres
humeurs ſont altercz & corrõpus , & que le cæui me! meen eſt
ſaiſi d'aucát que la fiéure ayāt ſon propre ſiege au cæur,ſereſpád d'iceluy, cómed'vn
B cére à couce la circonference du corps.Si le malade n'elt point croublé d'entendemēc
ducómencement iuſques au ſeptielme iour,c'eſt bó ligne.Lors que la boſſe & le char- signes mor.
bõs'en recournent,c'eſt vne chole le plus ſouuentmortelle,ſpecialement quand mau. res.

uais accidens furuienent apres, Pareillemnéc quand ils font ſuppurez, & ſe deſleichend
Sans caule railonnable,c’eit ſigne de mort. Les charbons quifontfai&ts de ſang, font
plus grande eſcharre , que ceux qui ſont faicts d'humeur cholerique, d'autant que le
lang eſt de plus groſſe ſubitance : partant occupent & prennent plus grande quantité
de chair que ne fait l'humeur cholerique, qui eſt plus ſuperficiel, ainſi que voyós aux Des grands
cryſipeles. l'ay veu des charbons quide leur eſchare occupoicotpreſque la moidie charbons.
du dos , les autres les deux clauicules cirant vers la gorge , & auoientrongéſifort les
parties ſubiacentes , que l'on pouvoir voir la trachee artere deſcouuerte;autres occu
poient la moitié des muſcles de l'Epigaſtre, & l’eſchare cheute on voyoit à l'aille Pe. L'authear a
ritoine delcouuert : ce qui eſt aduenu à moy meſme d'un charbó que i'ay eu au ven.enlecharbo
CUMA C
tre,duquel la cic.erice m'eſt demeureedela grandeur de la palmede la main . Et lors la peste.
qu'ils ſont ainſi grands & enormes,le plus louuent ſont mortels. Il y a des charbons & Charbós ca
boſſes qui commencent ſous le menton,puis la rumeur s'augmente peu à peu iuſques bollis dan
aux clauicules,& eſtranglent le malade. Semblablement il y en a aux aines,qui occu, gereuſes.
pent grande partie des muſcles du ventre: mais la plus dangercule apofteme, eſt celle
‫نا‬:
qui ſe fait lous les aiſſelles:d'autant qu'elle elt plus prochedu cæur. Ily en a auſſiqui
font enormes,grands & hideux à regarder,& de tels le plus louuent le malade meurt,
ou la partie demeure meheignce, y reſtant apres la conſolidatio vne tumeur elephá.
tique,& quelquesfois ſon action eſt du roue perduë:ce quei'ay fait pluſieurs fois. Da.
uantage aucunesfois pour la grande pourriture de la matiere , la chair laiſſe les os
itd.
deſnuez, & les iointures & ligamensle trouvent tous relolus , tanc eſt la pourriture
chaude & humide. Les charbonsiettene vnelanievirulente,tres puante,d'eſtrange Charbons
ature, qui faitlvlcerecorroſif & ambulacıf,pourry & corrompu ,& le plusſouueneſe ambularifs
op bode procréent pluſieurs veſſies aux parties voiſines, leſquelles apres s'aſſemblent coures aueceroſion.
en vne.& iettent lanie en petite quantité,principalement ceux qui ſont faicts de cho.
lere, à cauſe de la ſiccité dela mariere bruſec,qui fair elchare , & tard ſe conuertiſſent
en bonne bovë ou ſanie louable, parce que la matiere eſt bruſlee, & non pourrie, par
l'activité exceſſiue de l'inflammation & corroſion . Outre- plus , la tumeur de la bof.
TOOTED
Smart ſe & du charbonelt quafi touſiours rebelle , & tres-difficile à eſtre reſoluë ou ſuppu
ree , pour la malignicé de leur nature. Et quand ils ne luppurent par aucunsmedi- Prognostic
GUES D camens, & que la tumeur demeure de couleur noire , & ſi on veut accenter à les ou mionic .
uris , qu'il n'en ſorte qu'vne ſeroſité noiraſtre, & le plus louuent nulle humidité : de
mille malades ainſi affectez à peine en reſchappe vn ſeul. Ce que i'ay pluſieurs fois re.
marqué , penſant les peftiferez à l'Hoſtel Dieu de Paris . Il y a des charbons , aula
quels quand ils ſont ouuerts, on trouue vne chair molle & ſpongieuſe, qui ne fe
peut corriger : car quand on en conſume quelque portion , il en reuient davantage :
& tels ſontmortels,parcequ'ils ne cedent aux remedes , ce que j'ay veu ſouventesfois
à mon grand regrer. Dauantage aucuns ſont faicts d'vne ſi grandecorruption d'hu Charbons
meurs , & ſi malings, que les membres combent en mortification , tellement qu'on gangreneux
void le vied ſe ſeparer de la iambe, & le bras de l'eſpaule. Auſſi avtour d'aucunschar
bons & boſſes, le fone petites vellies, comme s'ils auoient eſté piquez d'ortics , ou
comme cciles qu'on void aux herpes milliaires,leſquelles sont procreees de vapeurs
E E
872 Le Vingt-deuxieſme liure

exhalantes de matieres conioin & tes & arreſtees en la partie que nature iette hors.
A
Telles veſſies ne preſagiſſent pas néceſſairement la mort: mais ſi la partie charbon
niere deuient bourſoufflee & de couleur purpuree ou verdoyante, plombine & noi
te , & qu'aucourlon trcuue des ampoulles ſemblables à celles des bruflutes , & quele
malade die n'y ſentir plus de douleur, ſoit que l'on le pique,coupe,ou bruſle, c'eft fi.
gncnon ſeulement de gangrene , mais de mortification totale, & que la chaleur na.
turelle eſt ſuffoquee & elteinte par la malignité du venin . Oucre-plus, i'ay eſté cu
rieux eſtant à l'Hoſtel Dieu de Paris , ayant veu des malades de peſte, aulquels s'e.

ſtoient apparuis quelques tumeurs aux emunctoires,leſquelles le lendemain n'appa.


roiſſoient aucunement, dont les malades mouroient, de chercher à la partie la cauſe

Les bones de la more : & veritablement, i'ay trouué à aucuns , ayant fait inciſion aſſez profonde,
charbös la chair y eſtre bruflce, comme ſivn caucere a & uel y auoit paſſé. Les boſſes & char.
Garemene
bons ne ſont jamais gucres ſans ficuse, laquelle eſt plus grande, lors qu'ils ſe font aux
Jone ſans emunctoires, & aux parties nerueuſes , qua’ux charneules:toutesfois ceux qui ſontde
pénre. bonnetemperacure , ayans les vertus & facultez fories, ont la fiéure moindre , & pa. B

1 reillement tous les autres accidens . Les charbons n'occupent pas ſeulement les par

ties externes ,mais aulli quelquesfois les internes , & quelquesfois les deux enſen ble.
Si interieurement le cæureticſt faiſ ſans aucune apparence exterieure , la vie eſtde
ploree & briefue, & les malades meurent louuent en mangeant, beuuane,& en che.
minant. Si le poulmon ou le diaphragme & autres parties dediccs à l'inſpiration &
Charbons
mortels. expiration en ſont occupees, le malade meurt en yingtquatre heures ou moins , parce
qu'il eſt ſuffoqué par faute de reſpiration. Si le cerueau en cft affailly,s'enſuit trenefic
&
rage , puis la mort. Si le venin ſe ietteſur les parties dedices à l'urine , le malade
mcurt par faute d'vriner. Ce qui aduint au chaſteau de Rouſſillon à vpedamoiſelle,
de la Royne , de laquelle auonsparlécy -deſſus. Aufli ſi le charbon ſe ierte en l'elto.
mach , cela cſt mortel : ce qui ſuruint au gouuerneur des Dames de l'Hoſtel Dicu de
Hißoire . Paris , lors que i’eſtois audić lieu penſant les malades.Oriceluy eſtoit vo mojneicune,
hault, droit,fort & puiſſant,del'ordre ſain & Victor, auquel ſuruint yne fićure conti C
nuë , & auoit la langue aride,ſeiche& raboteuſe, de couleur noire, à cauſe de l'excré
me chaleur de la ficure & de la vapeur pueride , qui moncoit des parcies interieures à
la bouche( car ſelon le dire vulgairc, quand vn four eſt bien chaud , la gueule s'en reſ.
ſent) & ciroit la langue hors la bouche comme un chien quia longuement couru , &
auoit vne extréme alteration ,deſirant perpetuellement boire auec grande defaillan
ce de cæur, & appetit continuelde vomir, & mourut au croiſieſme iour en conuul .
fion voiuerſelle de tous les membres . Les Dames voyans le pauure moyne deſpel

Comp.eßion ché en fibrief temps,& conſiderans les accidens qui furent ſi cruels, affirmoient qu'il
des Dames . auoit eſté empoiſonné:dont meſſieursles gouverneurs dudit Hoſtel Dicu , ayans efté
aduertis,commanderēt que le corps du moyne fuſt ouuert , pour en ſçavoir la verité.
Et pour ce faire furent appelez vnMedecin & vn Chirurgie auec moy , & l'ayans ou
uert,nous trouuaſmes autód de ſon eſtomach vn veſtige ſemblableà celuy que laiſſe

vn cautere porétiel,auec vnceſcharreou crouſte de largeur d'vneongle ,& le reſte de


l'eſtomach fort retiré & bičdur . Alors tous d'vn conſentement pröptement concluf
mes , qu'il auoit eſté empoiſonné de ſublimé ou arſenic , veu l'eſcharrelaquelle penc D
troit bie profondemét. Et ainſi que ie recouſois le corps d'iceluy, i’apperceus pluſieurs
petites taches noires,ſemees ſur ſon corps: & lors ie rappelay la compagnic pour con D
iēpler leſdites taches , leur diſant & affirmat que c'eſtoit du pourpre : mais le Medecin
& Chirurgien me dirent que c'eſtoientmorſures de pulces,ou de punaiſes:ce que ne
voulus aucunemét accorder,parce qu'il y en auoit en gráde quantité.Et pour verifier
mon dire, ie prins yne eſpingle, la pouſſant allez profondement dans le cuir en plu.
fieurs endroics , & le leuay en hauc,puis le coupay auec ciſeaux , & fucrrouvee la chair
210yen de de deſſous bič fort noire.Pareillemétnousconfideraſmes la couleurliuide du néz,des

cognoilreles oreilles , & des ongles ,meſmes de tout le corps ,plus noire qu'elle n'a couſtume d'eſtro
erupe:ouson aux morts d'autres maladies , & principalement le viſage change,tellemétqu'ileſtoit
pourpre , le
maladeeftas quaſi impoſſible de le pouuoir recognoiſtre.Adoncchangerent d'opinion,& fcilmes
mort. rapport que le moynecftoit mort d'un charbon peftiferé, & non d'autre poiſon.
De la Peſte , 873
А
De la cureducharbon peftiferé. char. Xxxvii..
OVS auons die parcy deuant qu'au charbon y auoit grande iti. Le charbons
flámatiò & extremedouleur,quientretient & augmételafieure, cauſedlou
lear,fiéure,
& autres griefs accidens,lelquels affoibliflent & abbaccēt les ver. inoita

tus,ce que ſouuétesfois eſt cauſe de la mort des pauures malades :


& cela provient de la putrefaction & corruption qui ſe faitde la
ſubſtáce du ſang corrompu , & de la venenofité d'iceluy. Parquoy
il faut que le Chirurgien ait elgard à contrarier à la cauſe d'icelle
douleur, & n'appliquedeflus le charbon renedes fort chauds & attractifs,ny fortem
Hali plaſtiques & viſqueux,comme nous auons dit du bubon,parce qu'ils empeſchét quel.
que exhalation du venin ,eſchauffent & opilenttrop ,dont les rumeurs ſont renduës
plus rebelles à fuppuration. Et parcant il vlera de relaxatifs , qui ouvrent les pores &
contrarient à la vehemente chaleur du venin , & ſuppurent: ce qui ſe fait ratement,å
B cauſe que la partie charbonniere eſtant roftie de chaleur eſtrange, iette vn morceau
dechair nommé eſchare, & apres eſtrecheuce, demeure vn vlcere caue,ſordide,& dc
difficile curation. Donc pour le commenceinent on fomentera le lieu d'eau chaude &
d'huile, en laquelle on meccra vo peu de theriaquc,y laiſſant deſſus eltoupes ou laine
graſſe, ou du cotton : ou en lieu de celles choles , on vſera d'vnedecoction faiete de
guimauues, oignons de lys , ſemence de lın, figues graſſes, huile d'hypericon , afin de
rarefier le cuir , & attirer la maciere au dehors: puis le lendemain on y appliquera ce
cataplaſme.
2.foliorum acerolæ & hyoſcyami an , m.ii.coquantur fub cineribuscalidis,poftea Cataplaſme
piſtentur cum vitellis ouorum numero iiii. theriacæ z ii. olci liliorum z iii.farinæ hor- anodyn
dei quancum fufficit : fiat cataplaſma ad formam pultis latis liquidæ. Tel cataplaſme (uppuravif ,
fede la douleur, reprime l'inflammation , & fuppure, & ce faiſant fortifie les forces du pour une
с
malade. Autre. 2. radicum althex & liliorum an.z i.feminis lini z8 .coquantur charboniere
completè, & colentur per ſecaceum ,addendo butyrirecentis ž i. B. mithridatiiz i.fa- influxion.
rinæ hordei quancum ſufficit : fiat cataplaſma vedecer. Les cataplaſmes ſuiuans ſont
propres pour actirer la matiere veneneule, & ayder nature à faire ſuppuration , lors
quelafluxion n'eſt grandc.4.radicis liliorum alborum , cæparum ,fermentian.Zb.le
minis ſinapi,fimicolumbini,laponis mollis an .zi limaces vi.cum ceſtis, ſacchariopri
mi,theriacæ & mithridatii.an.33.piſtentur omnia, & incorporencur ſimulcum vitel.
lis ouorum,& fiat cataplalma, lequel ſera appliqué vn peu chaud ſur le charbon. Ette
Dec. puis afleurer que d'iceluy verras vn effect merueilleux pour ſuppurer & attirer la ma.
tiere virulente du dedans au dehors. Aucre.2.vitellosouorum numero vi.falis com
munis pulueriſati zi.oleililiorum & theriacæ an.3 % .farinæ hordei quantum fufficit:
fiat cataplaſma. Eren lieu d'iceux , on vfera du medicament ſuiuant. 24. diachylonis
paruiz iiii. vnguenci baſiliconis 3 ii. oleiviolarum zß.fiat medicamentum. Pluſieurs De la fisa
aucheurs ont loüé à grand' merueille la ſcabieuſe broyec entre deux pierres , & mix. bicuſ,
tionnee auec vieiloing, iaulnes d'cuf,& vn peu de ſel, pour faire ſuppurer le char. De l'enf
bon. Auſſi l'æufentier mellé avecques huile violat & farine de fourment, appaiſe la Racine de
D douleur & ſuppure. Dauartage la racine de raifort coupec en petites pieces , & ap- rasforr.
pliquee ſur les charbons & apoftemes peftiferees, & renouuelee louucnt,ature gran
dement le venin. Et pour eſteindre la grande inflammation, on pourra pareillement
appliquer ſur les boſſes & charbons , cataplaſmes faicts d'eſcargots ou limaçons auec
leur coquille ſubtilement pilez & broyez ,y adiouſtant du theriaque ou mechridat, &
renouvelé fouucnc.
Autre .
Prenez vers de terre tant qu'il ſera beſoin , comme une bonne poignee , & les
y appliquez deſlus, eſtant mis dedans un petit linge bien delié , fair en maniere de
ſachet.
Autre .
ca
Prenez grenouilles hachecs & pilees , & les appliquez deſſus.
Autre .
Prenez eſcreuices broyees & pilees ſubtilement auec leur coquille.
EE ij
874
Vingt-deuxi liure
eſme
Autre.
A
Prenez huiſtres auec leur coquille & leur eau, & les pilez & appliquez deſſus, Tels
animaux ainſi appliquez ſedenc la douleur , & efteignent la grandeferueur & infam
mation, & attirent à merueille le venin peſtiferé. Sion abhorreceſdits animaux,en
lieu d'iceux'on vſera ſur toute la partie charbonniere enflammee & embrafee, ders.
medesfroids & humides , comme fueilles d'ozeille, iuſquiame, mandragore, ciguë,

morelle , plantain , & autres ſemblables dechacun vne poignce : & ſeront appliquez
auec leur ius, & renouvellez ſouucnt , & continuez ſeulement tant quela grande dou
leur , ferueur & ebullition de l'inflammation ſera efteinte . Que ſi quelqu'vn dirque

tels remcdes excremement froids pourroient repercuter le venin du dehors au de .


Obiection. dans,& fuffoquer la chaleur naturelle de la partie par leur extreme froideur: à cela il
Responſe. eſt aisé de reſpondre,quel'intention pourquoy on les applique, eſt pourſeder la dou
leur, & eſteindre l'impecuoſité & ferueur de la grande inflammació, qui fait augmen
tacion de la fiéure, auſſi pour euicer la gangrene & mortification de la partie , comme
Zas de Twf- nous auonsdit.Auſſile ius de l'herbenommee Tuſſilago, ou Paſd'ainé, efieint pareil
filago: lement l'inflammation des charbons : comme auſli fait l'herbenommee Morſusdia
Morſus
boli , piſtee & appliqucc deffus. l'ay touuent vsé du remede luiuant pour rebouſcher B
diaboli.
& abbattre la grande ferueur & douleur, & ayder nature à faire fuppuration. Prenez
quatreonces de ſuye , qui eſt adherante contre les parois de la chemince, deux onces
de gros ſel , & les pulueriſez ſubtilement,yadiouftant des moyeufs d'æufs,tantqueic
tout ſoit en forme de bouillie , & ce ſoit appliqué vn peu tiede ſur le charbon . Da.
Cauteriza- uantage ne faut obmettre à l'augmentation du charbo decauceriſer la poin & te , fi elle
sion de la apparoit noire, auechuile feruente ou eau forte :car par ladite cauteriſation on abbat
poincte dm & foudroye le venin ,& appaiſe.on la grande douleur , & autres accidens: & cepuisal
charbon. ſeurer que le lay fait pluſieurs fois auec bonne & heureuſe iſſue , & puis bien aſſeurer
qu'elle ne fait grandedouleur,à cauſe qu'on ne couche que la poinde du charbon,
quiel le commencement d'eſchare quali inſenſible. Et apres l'auoir cauceriſee on
C
continuera les remedes ſuſdiâs iuſques à ce que l'on verra que l'eſcharcſc ſeparera
d'autour, comme vn cercle , qui eſt lors vn boo prelage,ſignifiant que nature eſt for
te, & qu'elle domine ſur le venin . Et apres que l'eſchare ſera du touthors,on yſeradėс
remedes deterſifs ,doux & benings , comme ceux qu'auonsdeſcritscy deſſus au cha
pitre de l'apoſteme peſtiferé, les diverſifiant ſelon la nature de l'vlcere & de la parcie
& temperature des malades:car aux delicats ,comme femmes, enfans, & ceux qui ont
le cuir mollet & fore rare , faut v ſer de remcdes plus doux & moins forts,qu'à ceux qui
ſont robuſtes, leſquels ont la chair & le cuir plus dur, & les pores plus ſerrez. Auſfice
pendant qu'il y aura dureté & tumeur en la partie charbonniere , on doit coufours
continuer les medicamens ſuppuratifs,remollitifs & decerſifs, afin de touſiours ayder
Tuſques à Dature à ierter l'humeur ſuperflu entierement dehors , à cauſequ'il y a double indica.
quand on tion ,c'eſt à ſçauoir d'amollir & ſuppurer l'humeur ſuperflu quieſt autour delapartie,
dnit vjer de & finalement mondifier & carir celuy de l’ylcere.
Supparratifs.

Du prurit & demangeaiſon qui vient autour de l'ulcere, & de la maniere de


produire la cicatrice.
CH A P. X X XV III. D D

ES parties d'autour de l'vlcere le plus ſouuent s’eſcorchenc fuperfi.


ciellement par le moyen de petites puſtules vlcereuſes ſituecs fans

ordre , auec ponction , ardeur , & pruritaigu & poignant . Or la cau


Cauſe du le peur venir du dedans , & aufli du dehors: du dedans par vne la.
prurit. nie aiguë & mordicante reſudante de l'vlcere , qui arrouſe les par.
ties voiſines , proucnant du virus veneneux , qui eſt commu
nément en l'humeur cholerique , ou phlegrne lalé : de la cauſe exterieure, par
opilation des remedes deſquels on a longuement vsé , qui ferment & boul
chent les pores , & eſchauffent la partie. Et pour la cure d'iceluy , on doit
Care.
fomencer la partie de choſes diſcutientes & remollitiues , & par ablution d'eau
bleuë ( qui eſt eau forte eſteinte , & ayant ia ſeruy aux Orféures ) ou alumineuſe,
ou eau de chaux , ou faulmure , & ſemblables choſes. Or veritablemenr les vlce
la lanic
res faicts par les charbons ſont fort difficiles à eſtre conſolidez , parce que
de la Peſte. 875

eſt aiguë & corroſiuc, tanroſt craſſe , cancoſt ſubtile,ioin & que la figure de l'vlcere eſt
А
quali couſiours ronde. La cauſe d'icelle ſanie eſt le ſaog alienė & changé du cour de la
nacure,par l'exceſſiue chaleur & corruption : & aufli à caute que la partie a receu vne Postquoy
bien grande intemperature par le vice de l'humeur. Quant à ce que la figure ronde l’ulcere
de l'vlcere eft difficile à conſolider, cela le fait à cauſe que la ſanie ne le peut bien eua- de difficile
cuer , laquelle par ſacrop longue demeure acquiert vne chaleur & nitrofité ou acri.confilidació.

monie , qui par l'accouchenienc des parois de l'vlcere augmére la cauité , à cauſe qu'el.
lerongela chair d'aucour , & puis l'encour ſe borde & deuient calleux & dur, donc
apres ne peut eſtre conſolidee que premierement on ne l'ait ofté: car les poroſicez de
la chair ainſi calleuſe & dure , font lerrees & eſtreintes, & ne permettent que le lang
puiſſe penetter pour faire generation de chair . Semblablement les bords efleuez pac
excroiſſance de chair repugnent à la conſolidation , comme eſtant chofe fuperfluë:
parquoy les faut couper & conſumer,ſoit par fer ,ou par medicamens. Et apres avoic
17: rendu l'vlcere applany & ſans tumeur,& remply dechair , on vſera de medicamés ci
B
catriſatifs, leſquels ont puiſſance decondenſer & endurcir la chair , & produire peau
lembiable au cuir : deſquels en y a de deux manieres : l'vne de ceux quin'ont aucune
CIC eroſion , mais ont grande vertu aſtringente & deſiccative, comme lont eſcorces de
grenades,eſcorce decheſne,chutie,licharge, osbruſlez,ſquamme d'airain ,noix degal
le, noix de cyprés, miniú , pompholyx lauce,antimoine,bole armene,coquille d'hui
ſtres bruſlees & lauces,& la chaux lauce par neuffois, & pluſieurs mecaux . Les autres
ſont preſque ſemblables à ceux quirongent & conſument la chair : mais il faut qu'ils
ſoient appliquez en bič petice quanticé,commeſont vitriol laué , alum cuit , & autres
2010 ſemblables. Or l'alum cuit ſur tous les cicatriſatifs eft fingulier pour la vertu deſicca
tiue & aftringente,rendantla chair ferme & dure,laquelle eſt molle & ſpongieuſe , & L'alam euis
arrouſec d'humidice ſuperfluë. & partant il ayde à faire le cuir lolide & dur. Touces . A fingulier
fois les remedes ſerone diuerſifiez ſelon les temperamens : car aux enfans & femmes, ſur tous les
& generalement à ceux quionc la chair molle & delicate , on en vſera de moins forts cicatriſatifs,

2:݂‫ܐܳܬ‬- C qu'aux temperatures robuſtes & ſeiches, de peur qu'au lieu de faire le cuir, on ne cor
rodaſtla chair. Er apres auoir fait la cicatrice, pource qu'elle demeure en telle mala
dic touſiours laide & hideuſe à voir,à cauſe dela grande aduftion qui a bruſlé la par
LOSS,OB
tie, comme ſi le feu d'un charbon ardant y avoit paſſé, ie ne puis encor pafler, qucic
ne deſcriue quelque moyen pour l'embellir : car le plus ſouuent elle demeure rouge,

liuide,ou noire ,eſleuce & raboteuſe: ce qu'on fera principalement en la partic , où le


fren
malade deſire ladice cicatrice eſtre moins apparence .
QUE
Exemple pour unir le cuir qui demeure inegal.
Elter
Prenez vae lame de plomb frottee de vif argent, & la liez deſſusla parric eſtroitco .
ment . Et pour rendre le cuir blanc , il faut prendre de la chaux viue lauce par neuffois,
toulou
afin qu'elle ait perdu ſon acrimonie , puis ſera incorporec auec huilerolat, & foit fait
dows
onguent Autre . Prenez deux liures dçcartare ,c'eſt à dire, lye de bon vin ,quiadhere Huile de
vurdering
contre les tonneaux , & ſoit bruſlee & miſe en poudre , puis on la mettra dans un cou . Cartare .
ure -chef de coilc mediocrement delice, laquelle ſera penduë en vne caue humide , &
on mettra vn vaiſſeau deſſous pour receuoir la liqueur, laquelle diſtillera goure à
goute , & d'icelle la cicatrice en ſoit frottee aſſez longtemps . Semblablement la ſueur Sueur
des æufs appliquee ſouuét deſſus la cicatrice ,oſte grandement la rougeur qui demeu . d'aufsfiaik.
Dre
re en icelle.L'ongucnecitrin receritement fait a pareille vertu ,comme auſſi l'empla . Onguent
ſtre de ceruſe,lequel ſera pareillement fait de nquueau.Outre- plus , les trois compofi. cerin;
Emplaſtre .
tions ſuivantes ſoit bien approuuces. 22. axungiæ ſuillæ nouies lotæ in aceto acerri de cerufe:
‫و منایا گ‬
moz ijii, cinabrii,luccicitrii, & aluminis vſtian.3.1.fulphuris viuiignem non exper. Linimene
212
tizii caphuræ 3 ii : pulueriſentur,deinde incorporétur omnia fimul,& fiat vnguentú . excellene
blant .
Il ſubtilie le cuir ,& efface grandement les taches . Autre. 2. olei hyoſcyami & oleiſe pour
minis cucurbitæ an . zi . olei tattari 3 B. ceræ albæ z iii. liquefiant iſta fimul lento chir lecuir.
igne,deinde adde ſpermatis ceriz vi.remoueantur prædiéta ab igne,donec infrigide
tur, poſtea addestrochiſcorum alborum Rhaſis pulueriſacorum z iii.caphur. zi.can
dem cum mali citrij ſucco omnia diligenter miſce : & fiat linimentum . Autre 24.radia
, cis ſerpentariæ z i.builiat in aquæ communis lib . i . ad dimidias , deinde adde ſulphu
ris viuiignem non experti , & aluminiscrudi pulueriſatian. 3 i . poftea colenturpræ
dicta , & addatur caphuræ z i ſuccihyoſcyamizi
. 1. Ongardera cela en vn vaiſſeau de
plombou de verre : & quand on en voudra vſer, faut tremper des piecesde linge , les
7
201 EE iij
876 LeVingt-deuxieſme liure
appliquant ſur la partie. On peutvſerdeſdits medicamens pour ofter la rougeur, & A
principalemenc du viſage, les appliquantdeſſus au ſoir,& lesy laiſſant toute la nuiet,
puis au macin on ſe lauera d'eau de lon vn peu tiede.

De pluſieurs euacuations qui ſe font, outre lesprecedentes, & premierementdela fueur.


CHAPITRE X X XIX.

Yant parlé des cuacuations qui ſe font parl'apoſtemepeſtiferés


par les charbons & autres eruptionsdu cuir,il nous reſte de pre
ſent à parler de celles qui ſefont par ſueur,vomiſſemens,fux de
lang par le nez,ou hemorrhoides& par lesmoisaux fémes,auſ
ſi parle flux de ventre & autres , afinque par telles euacuations
on ayde encores nature à expeller le venin du dedās au dehors ,
& principalement que celuy qui n'eſt encores paruenu iuſques
Faut confi au cæur,n'y puiſſe aller aucunemēt. Er en relles euacuations le
dererleche Chirurgien aura eſgard oùnature eſtcouſtumiere à faire la deſcharge, 8 : aulli où elle
min où tend tend à faire facrile:coutesfois icelles cuacuations ne ſont pas touſiours critiques,mais
Mature.
fymptomatiques ou accidentaires, come nature n'ayant touſiours puiſlance de faire
bonneconcoction comme elle deſireroit,à cauſe de la malignité de la mapiere, qui eſt
alteree & corrompuë, & du tout contraire aux principes donc nous ſommescopoſez.
Moyen de Er pour commencer à la ſueur , ſi nature rend à ledelcharger par icelle, elle ferapro.
pronoguer uoqueeen faiſant coucher lemalade en vn lią bien chaud & bien couuert:& luy met,
la fueur. tant cailloux chauds,boureilles ou velſies de porc ou de bæufremplies d'eau chaude,
ou eſpongestrempecs en quelque decoction chaude,& puis eſpreintes, & faiſane ce
qu'auons dic cy-deuantpourprouoquer la ſueur. Les anciens nous ont laiſlé par eſ
crit, que toutes ſueurs ſont bonnes aux maladies aiguës , pourueu qu'elles ſoienc fai.
tes auxiours critiques, & ſoient vnjuerſelles & chaudes,& paravant ſignifiees en iour C
demonſtratif: mais en celle maladie de peſte ne faut attendre la criſe, comme nous
auons dit , mais ayder nature à chaffer lubitement le venin hors par cous moyens où G
on verra que nature s'enclinera le plus. Le malade donc ſuera yne heure ou deux,
plus ou moins,ſelon qu'on verra eſtreneceſſaire.

Du vomiſſement. CH A P. XL .

Ojoyens de VSSI le vomiſſement purge les humeurs , ce que les medecines fortes
prouoquer
le vomiiy. ne peuuent bien faire, & par le moyen de ceſte evacuation l'humeur vene
neux eſt ietcé le plus ſouuent hors. Parquoy li nacure tend à ſe deſcharger
par iceluy , on luy ay dera en donnaut à boire au malade demie liure d'eau
tiede, quatre onces d'huile d'olive,vneonce de vinaigre, & vn peu de ius deraifort:
puistolt apres luy faiſant mettre en la gorge vne plume d'oyc imbuë en huile,ou vno
petite branche de roſmarin : on metſra lesdoigtsau profond dela gorge,pourſe pro
uoquer à vomiç. Autre vomitoire. Prenez eau deíemence de lin , laquelle ſoit muci. D
lagineuſe, & en faut boire vn verre d'icelle eſtant vn peu tiede. Autre. Prenez dela D
Autre you deco &tion de raifort ou de la ſemēce , & ſemence d'arroche,dechacun trois dragmes,
mitoire. demie once d'oxymel,& autant defyropaceceux, & en faut donner à boire au mala
Autre. de en bonne quantité vn peu tiede. Autre.Prenez ſix onces d'oxymelde Galien , &
deux ontesd'huile comune, & ſoit donnétiede. Or ſi nature n'eſt facile à ſedeſchar
ger par levomiſſement,ne la faut contraindre:car eſtant fait par vehemence, iſ cauſe
diſtenſion aux fibres nerueuſes de l'eſtomach ,& abbatles vertus,& quelquesfois tópt
quelque vaiſſeau aux poulmons,donc s'enſuit flux de ſang,quiabbrege la vie du ma
Ze vomiſſe lade. Patquoy en tel casne faut prouoquer le vomir , mais pluſtoft l'eſtomach ſera
ment webce corroborépardehorsdeſachus faicts de roſes, abfynthe, ſantaulx (ce que deſcrirons
ment et plus amplement cy-apres) & par dedans de ius de coings, ou berberis, & bons boüil.
dangereux. lons,& autres choſes qui corroborent l'eſtomach.
-
dela Peſte. 877

De cracher bauer. СНА Р. X Il

A R cracher & bauer ſe fait auſſi grăde euacuation : ce qu'on void


par experience à pluſieurs qui ont eu apoíteme aux coſtes,nommée
Pleureſie,alors que la ſuppuration est faite , la ſanie eft iettée par la
ſubſtance rare & ipongieuſe des poulmons , & de la conduite par la
trachée arcercen la bouche. Et quant au bauer , il eſt bien mani Pour pro
feſte que les pauures verolez ſe purgent par iceluy , comme auſii par noquer le

le cracher. Oron pourra provoquer lecracher & bauer auec maſticatoires faits de cracker
racines d'iris , & de pyrethre , maſtic, & autres ſemblables : auſſi en tenant dedans la baner.
bouche & gargarilant, mucilage de ſemence de lin .

3
Del'esternuer & moucher . CH 4P. XLII.

VA par eſternuer & moucher ,Nature euacuë ſovuent ce qui luy eſt ſul

perflu ou nuiſible, quand le cerueau de ſon propre naturel , ou par artifice


fedeſcharge par le nez , ce qu'on void manifeſtement en ceux qui ont le
cerueau fort humide , comme petits enfans, & vicilles gens,leſquels le pur
EL gēc fort par cet endroit.La cauſe diceux eſt interieure ou exterieure:inte
rieure ,comme vne maciere pituiteuſe ou vaporeuſe qui molelte le cerueau , pluſtoſt
toutesfois àl'eſternuer qu'au moucher:excerieure ,come lorsque le Soleil dóne droit
Sremaik
dedāsienez,ou alors qu'on y mer vne plume , ou autre choſe ſemblable ,ou quelque
poudre mordicatiue , come hellebore , euphorbe , poiure,mouſtarde , ou autreiei - toires.
biable ſternutatoire: car alors par le benefice de la faculté naturelle expulerice , le
cerueau l'aſtreint & ferre pour ierter ce qui luy nuit : & cela procede principalement
C
de la partie anterieure d'iceluy . Or ladite ſternutation ſe faic auec ſon & bruit , àraia
1020 ſon que les matierespaſſent par lieux anguſtes & eſtroits qui ſont les colatoires ou les
os cribleux ,qui ſont au nez. Er neſe doit procurer en grande repletion , ſi les choſes
vniuerſelles n'ont pregedé , depeur de faire crop grande attraction au cerueau , qui
pourroit cauſer apoplexie , vertigine , & autres mauuais accidens .

Del'eructation ou roučtement, & du ſanglot.

nedes C H 4 P. XLIII .
1
libero
Jalk Erusasion .
Avantage il ſe fait quelque vacuation par l'eructation ou rouctement,
& par le ſanglot. Quant à l'eructation elle provient des ventofitez conte
Reise
nuës en l'eſtomach ,iettées par la faculté expulcrice d'iceluy , leſquelles ſont
eo , procreées par indigeſtion , c'eſtà dire , faute de concoction , comme pour
D auoir pris trop de viandes ou brevuages , ou pour auoir vſe de choſes vaporeuſes,
fab comme pois , féues, chaſtaignes, nauets, raues , paſtenades, carores ,vin nouueau ,
& leurs ſemblables : ou par faute de dormir , & generalement par toutes choſes qui
One corrompent ou empeſchent la vertu concoctrice , ſelon la diuerficé deſquelles l'o
deur de l'eructation ſera diuerſe , à ſçauoir douce ou feride,amere, acide, poignante,
ou d'autre qualité . Sule roucement eſtdoux, & ſe fait ſeulement deux ou trois fois, Prognoſtic.
cela eſt bon : au contraire, s'il eſt puant & reiteré par pluſieursfois , cela eſt mauuais;
car c'eſt ſigne que la vertu digeſtive eſt corrompuë. Et pour y ſubuenir, l'il viens en
trop grande abondance , il faut faire vomit le malade: que ſi c'eſt par intemperacure
de l'eſtomach , ilſera corrigé par le conſeil d'vn doéte Medecin . Quant au langloe Sanglot os
ou hoquec , c'eſt vne contraction & extenſion des fibres nerveuſes de l'eſtomach, bocques.
qui ſe fait pour expeller & iecter hors certaines vapeurs qui luy nuiſone . Les
cauſes d'iceluy ſonc inanition ou replecion , ou certaines vapeurs prouenantes de
quelqucputrefa & tion quieſt en la capacité de l'eſtomach ,ou commele plus ſouuenc
atráchée obſtinémentaux tuniques, ou portées en iceluy de quelques boſſes, char
bons , ou autresapoſtemes & vlceres pucrides, qui ſonc és autres parties , ou pour
E E iiij
878 Le Vingt-deuxieſme liure

auoir mangé choſes fort aigres & aiguës,comme vinaigre , fortes efpiceries,& autres
A
Prognoſtic ſemblables, qui mordent & piquent l'eſtomach. S'il vient apres vne grandevacua
dulanglos. tion , ſoit naturelle, ou artificielle, ou ſuruienc en la playe, ſpecialement ſi elle eſt en
la tcfte ,dont la ſanie tombant en l'eſtomach , procrée ledit langlot, & qu'il continuë,
c'eſt choſe perilleuſe. Aufliſ'il vient apres le vomir , c'eſt mauuais ſigne: que ſiapres
Remede iccluy le ſpaſme ſuruient, cela eſt mortel . Or pour yremedier , il fautconſidererla
pour le fan- cauſe : car ſ'il vient par repletion , on y remediera par euacuation : au contraire,li
glor. par vacuation ou inanition , on y procedera par replecion: l'il provient par vapeurs

elleućes de putrefa &tion, il faut donner du theriaque, & autres choſes alexiteres qui
contrarient à la pourriture,qu'auons declarées cy .deuant : & fi c'eſt de choſcs aigies
& aiguës, il faudra vſer des cemedes qui contrarient à icelles , & ainſi des autres.

De l'urine. CHA P. XLIV .

Vere cuacuation ſe fait par l'vrine , & grandes maladies ſe terminent


par icelle , comme voyons quelquesfois aduenir aux verolez , aulquels
LA l'on dionvif. argentée , n'ayant pou procurer aucun flux de bouche,ſur
uient Aux d'vrine , & guariſſent : comme aufli ſouuencaduient en B
29
aucunes fieures, & pluſieurs autresmaladies.Orlvrine ſera prouoquée
par les remedes diureciques eſcrits en mon Liure des Pierres : toutesfois il ſe faut
bien donnergarde d'en vler de trop forts ſ'il y auoit inflammation à la veſſie, à caule
que l'on feroit Auer dauantage les huncurs, choſe quila pourroit gangrener,& acce
lerer la mort du pauure malade. Donc en ce cas il leta plus expedient de diuertir
par ſucurs ou autre maniere.

flux menſtruel
Du CHA P. XLV .

Arcillement ſi on void aux femmes que Nature ſe vueille deſcharger par


Remedes le flux menſtruel , on leur aidera par remcdesqui le prouoquent , tantpris
С
prie d'Hip par dedans , qu'appliquez par dehors. Ceux que l'on doit prendre par la
liv. Denat. bouche , iont eſcorce de canne decafe raciſſée, eſcorce deracine de meurier, ſafran, C
mulier.
agaric , noix muguette , Lauinier, racine de bouillon blanc , paſtel diagrede , & plu
Da. Diofco
. ficursautres. Et l'ileſtqueſtion d'vſer de plus forts, on prendra racines decithymal,

71a1h . Sy2- antimoine , & cantharides (toutesfois en pecite quantité ) leſquels prouoquent gran
2143 liure dement tel Aux . Auflion fera frictions & ligatures aux cuiſſes & iambes , application
des mois. de ventouſes ſur le plat des cuiſſes, apercion dela veine Saphene,langſuës appliquées
Remedes à l'orifice du col de la matrice , peſſaires,noüers,clyfteres, bains , fomentations faites
qui ne ſont de choſes odoriferantes , qui eſchauffenc, lubrilicne, & inciſene la groſſeur des hu
pris par la
bouche. meurs , & ouurent lesorifices des veines qui ſont cſtoupées, par obſtruction.com
meſont racines de bouillon blanc , guimauve , iris , perſil, fenoil, bruſcus , fucilles
fa
& fleurs de mille pertuis , aſperges , roquette , baſilic, meliſſe , cerfeuil,armoiſe ,
c
menthe , pouliot, ſarriette, roſmarin , ruë , thym ,hyſſope ,lauge, bayes delavrier
ti
& degenéure, gingembre , cloux de girofle , poiure , muguette , & autres ſembla.
th
bles, qu'on fera boüillir , & en receuoir la vapeur-au col de la matrice , par vn enton
fa D
noir dedansvnc chaire percée , ou faudra faire bains vniuerſels: on en pourra ire D
de
des particuliers, auſquels la femme ſe mettra ſeulement les iambes iuſques au deſſus
du genoüil, & s'y tiendra le plus longuement qu'il luy fera poſlible. Oubien vſera de
de
Pefaire. pelfaires commeceux qui s'enfuiuent. 22. Theriacæ & mithridatijan.z ) , caſtore, &
Antre
gummiammoniaci an.zj. miſce cum bombace in ſucco mercurialis tincta , & fiat pel.
peſſaire. ye
farium .
CO
Autre . 2. Radices petroſelini & fæniculi ſub cineribus coctas, deinde conruſas
cum pul , ſtaphyſ. pirethri , croco & oleo lilior . & de ce ſoit faic yn pelaire en forma
at
de ſuppoſitoires ou noüers,quiſeront enucloppez en linge tiſſu , en maniere d'vn ſac
Camere pef- de longueur de quatre ou cinq doigts, ou plus. Autre.2 . Pul,myrrhæ & aloës an.3 ). PI

faire plus fol.ſabinæ ,nigellæ ,artemiſ.an.z ij. rad . helleb.nigrizi.croci z i.cum lucco mercur.
fors que les & mellecomm . fiat peffarium cumbombace. Autre plus fort . 2. Succi rucæ & ab.
finch.an.zij.myrrhæ ,cuphorb. caſtorci, ſabinæ,diagredij,cerebenth.galbani,cheria. 3qE
precedens.
de la Peſte. 879
A añ.zj. fiatpeffarium ſecundum artem.Ces peffaires ſeront liez & attachez avec du fil,
lequel pendra aſſez long,à fin dele retirer du col de la matrice quand on voudra.
Aulli le Chirurgien doit conſiderer quel le flux eſt par trop excellit,le fauceſtan. Remedesche
cher, quiſe fera en pluſieurs manieres : premierement par aliinens quiclpeftiffent le flux men
lang , a uſli par la ſaignée faite au bras , par application des ventoules ſous les mam- towel trop
melles,parfrictions& ligatures faitesau bras,appoſition depeſſaires,emplaſtres,& exceßif.
autres medicamens froids & aftringens poſez ſurla region des limibes. Er faut que la
femme loit ſituée en lieu propre, non couchée ſur la plume, de peur que par icelle le
ſang netuft eſchauffé davantage.Eclera bon aulli vlerde ceſte iniectionpourarreſter
telAux. 24. Aquæ plantag.& tabr.añ. Hbj. nuc.cup.gallar, non matur. an. zij. berb.
83. ſumach ,balauít. vitrioli Rom .alumirochæ añ. zij. bul. omnia fimul, & fiat decoctio:
de laquelle en ſera faite inie &tion en la matrice.Ec faut que le Chirurgien ſe gou .
uerne ſagement , cant à la provocation que reſtriction , depeur qu'il n'y commetre
erreur: parquoy en ce cas doitprendre léconſeild'vn docte Medecin, s'illuy elt por: Avi Pourquoy
beke
luy
Blible, ie dys'il eſt poſſ ible, parc e qu'i l s'en tro uue peu quiv ueil lene viſi ter les pau a icy traica
ures peſtiferez : choſe quim'a incité d'amplifier crc eicrit , pour inſtruire les ieunes drs exacka
Chirurgiens à mieux penſer ceux qui ſeront malades de peste. sions.

Des Hemorrhoides. CHAP. X LV I.


Ion cognoic que Nature ſe vouluſt deſcharger par les Hemor Pont pro
rhoïdes,elles pourront eſtre prouoquées par frictions & ligatures a que les
aflez forces faites aux cuilles & auxiambes, application de grades weincriboia
ventouſes, auec grande flambe lur le plat du dedans des cuiſſes: des .
auſſion mettra des choſes chaudes& attra & iues ſur le ſiege, com
me fomentations, & oignons cuits Tous les cendres, pilez auec vn
peu de theriaque. Dauancage, on frotcera les veines hemorrhoï
dales de linges rudes,ou auec fucilles de figuier :ou aignon crud,
ou fiel de bæufincorpóré avec un peu de poudre de colocynthe. Pareillemene y ſe.
odreu
C ron appliquées ſangſuës preparées, & bien choiſies, & pour le dernier la lancerte , ſi
les veines ſontaſſez ſortieshors du ſiege, & enfées & pleines de ſang: toutesfois file
fluxn'eſt rciglé,mais excellif,il lera eſtanché par les remedes qu'auons declarez pour
arreſter le flux menſtruel.

ierige Pourprouoquer leflux de venire. CHÁ P. XLVII.


PO
Lſe fait ſemblablement vacuation de l'humeur peſtilent par le fluxdeven.
Vw
tre ,à ſçauoirquand Nature de ſon propremouuement,ou par l'aide de deDifferences
flux de
medicamens laxatifs , purge & ictie hors lesexcremens & humeurs conte . uenire.

09,00
nus au vencre,& en toute l'habitude du corps , à ſçauoir par flux diarrhei- 1.0 :47hée.
que,licntherique & dyſenterique. Et pour bien difcerner vn Aux d'auec l'autre , il 2. Lientera .
faut voic les ſelles du malade : & s'ilierte humeurs liquides finceres , c'eſtà dire d'vne
ſorte,ou eſpece,commede pituite ſeule , cholere ou melancholic ,& en grande quan
tité ſans vlceration aucunedesincetins & douleurgrande : cel flux eſt appelé diat
Tom
rheique, c'eſt à dire,humoral.
D Flux liencherique eſt lors que les inteſtins ne reciennent point deuëment les vian
Wies des, mais deuant qu'elles ſoient bien cuirtes en l'eſtomach , elles decoulent cruës,
bilet
& telles qu'elles ont eſté mangées. Tel Rux vient de la debilité de la vertu recentiue
‫ܨ ܠܐܝܕ‬
de l'eſtomach , pour vne trop grande abondance d'humeurs, ou de la debilité de la
conco&riced'iceluy pour vnetrop grande frigidice. Flux dyſenterique eſt ,lorsqu'il 3. Dyjínben
ya vlceration aux inteſtins, auec grandes douleurs & tranchées , qui ſe fait d'vne ric.
1

A.
corruption d'humeurs,principalement d'une cholere brallée , laquelle corrode la
mo
tunique des inteſtins, dont s'enſuir que le ſang ſort cour pur par le ſiege. Or en celle
maj
abominable maladie peſtilente ſuruient à aucuns grand & exceflifAux de venire,
par lequel quelques vns iectent une maciere liquide, ſubcile, glutineuſe, & eſcu
meule, reſſemblant quelquesfois à greſſe fonduë, à cauſe de la chaleur pucride , qui
liquefie & corrompe les excremens , & empeſche la concoction , dont les ſelles ſong
quelquesfois veuës dediucrſescouleurs,comme rouſſes,violecces, jaunaſtres,verdes,
noires, cendrées, ou d'autre couleur , dont ſort yne fereur intolerable, comme auſfi
830
Le Vingt-deuxieſme liure

Pourquoy de leur ſucur & haleine , qui prouient d'une chaleur putredineuſe engendrée d'hu
les excte meursténuës,cholcriques , & acres par pourriture , dont eſt grandement irritée la A
mens des vercu expulliueà excretion ,Ec quelquesfois auſſis'y trouue quantité devers , quide.
poſtsferez monftrent pareillement grande pourricuredes humeurs . Ec quand l'humeur eltar.
fone ferides .dant & bruflant, il irrice Narure à iettec non ſeulement les excremens & humeurs,
Hijore.. mais aulli le lang toutpur , dont la mort s'enſuit. Ce que i'ay veu aduenir aucamp
d'Amiens à pluſieurs foldats forts & puiſſans. Ec vericablemēt ie fiş diffe & io, dequel.
ques- vos apres leur mort , pour cognoiſtre d'où ceſte quantité de ſang ainſi pur pou.
voic ſortir : & trouuay la bouche des veines & arteres Meſaraïques ouuertes & ello.
uées,ou cumefiées la part où elles aboutiſſent dans les inteſtins en forme de petits co
tyledons,deſquels lors que les comprimois , le fang fortoit couc pur. Or quelquesfois
Signes pour
cognoiffre ce vice n'eſt qu'aux gros inteſtins, quelquesfois ſeulement aux greſles, & aucunesfois
gaels in aux gros& aux grelles:parcant le Chirurgien prendra indication du lieu où le malade
ieſlins font dit ſentir contorſions& douleurs . Carlice n'eſt qu'és grellesou menus , la douleur

affectez. ſera vers l'eſtomach : au contraire, ſic'eſt aux gros, la douleur ſera vers le petit ventre
au deſſous du nombril . Donc ſi le maleft aux inteſtins grelles, on baillera remedes
par la bouche: au contraire ſi c'eſt aux gros, faut proceder parclyfteres: & fil'affe & ion

eft en tous,faut y remedier par haut & par bas. Et pour ces cauſes ,le Chirurgien rap B
tionel prendra indication de la dtuerlité du flux de ventre, & des accidens qui le pre
ſenceront: comme lion void que le malade ait teneſmes & grandes eſpreintes( qui eſt
vn ſigne que Nature (cveur deſcharger par le ventre ) on luy aidera par medicamens
pris par la bouche,commedemie once de hiere ſimple auec deux onces d'eau d'abſin
the, en y adiouſtant vne dragme de diaphænicum ,ou autres ſemblables : auſli à ceſte
intention les clyfteres apportent grand profit , pource qu'ils purgenc les ſuperfluitez
des inteſtins,diſlipent les ventofitez ,appaiſent les douleurs, & en tirant les ordures
contenuës aux boyaux , par conſcqucnt ilsactirent auſi par ſucceſſion des parties fu
pericures , & meſmement des veines & diuertiſſentdes parties nobles .
C

Exemple d'un clyftere,pour irriter la vertu expultrice à ietter dehors les ſuperfluitez.

2. Foliorum maluæ ,violariæ ,mercurialis añ.ń. j . ſeminis lini zß. fiat decoctio ad C
Cbgese.
lib.j. in qua diffolue
confe & ionis hamech , diaprunis ſoluciuiań. z.theriacæ ziij.olei
violati & liliorumañ.3j.ß.mellis violati z ij. fiat clyfter , lequel ſera reiteré, s'ilet
beſoin : coutesfois s'il y a vlcere aux boyaux, ou veines ouuertes , ou liencerie , ou
Autre diarrhée , ce clyftere ſeroit mauuais , comme aufli les ſuppoſitoires aigus. Autre.
dyſtere. 2. Decoctionis communis clyfteris lib.i. in colacura diſſolue catholici & callizanza.
mellis anthoſatizi.ſaccharirubrizi.ß.olei violarum z iii.fiat clyſter.Aucreplus fort.
2 . Deco & tionis clyſteris communis lib . i . in colatura diſſolue hieræ zß.catholici & b
Aurre. ប
diaphæniciañ. zii,mellis antholatizi.ſ.olei anethini & chamæmeliniañ.3j.ß .far
clyfter. Si le Chirurgien eſtoit en quelque lieu , où il ne peut trouuer vn Apoticaire, d
1

ny ſyringue ,ny chauſſe à clyſtere, ou que le malade ne peuſt, ou ne vouluft prendre


clyftere comme aucuns font ) alors il pourra faire ſuppoſitoires,ou noüccs , fores ou a)
D
22.
3O§

debiles, ſelon qu'il verra eſtre beſoin pour accomplir ſon intention .
ſc

Exemple d'un fuppofitoire,pourirriter la vertu expulſine des boyaux. le


D

Anerefup-. 2. Mellis co & izj . hieræ picræ & ſalis communisañ.36 .& de ce ſoit faicvn ſuppoli
poſtoire. coire. On en peut auſſi faire de ſauon de longucur d'vn doigt, & de groſſeur nioyen.
ne : & auparauant qu'on les applique , on les doic huiler ou engreſſer , afin qu'ilsen
trent au liege plus aiſément, & à moindre douleur ,

Exemple d'un plus fort fuppofitoire.


CC
22. Mellis Ziij. fellis bubuli Zj . ſcammonij pulueriſati, euphorbij , colocyotidis an.
3. & de ce ſoient faits ſuppoſitoires. Les nouets ont meſme vlage que les ſuppoſi
toires, & ſeront pareillement faits forts ou debiles ſelon qu'il en ſera beſoin .Exem
Des noiess. ple . 2. Vitellos ouorum numeroſii . fellis bubuli & mellis an.38. falis communisz ?.
Lecout ſoit battu & incorporé enſemble , & de ce ſoient faits noücts , mettantdes 91
1
dela Peſte. 881
A choſes predites dedans un linge, en quantité d'vne groſſe aueline, le fauit lier & met
tre dans le fondemene. Sion veutqu'ils loient plus forts ,on y adiouftera vn peu de
poudre d'euphorbe ou colocynthe.
Pourarresterleflux de ventre. CHAP XLVII .

Ion cognoic le flux de ventre eſtre trop grand , & la vercu affoiblie, &
quecelmal vinſt de l'affection de tous les inteſtins, alors le fauc arre
ſter : à quoy on procedera par remedes baillez tant par la bouche que
par clyſteres,depeurque la vie du malade ne ſorte par le ſiege:parquoy
E on dnonera à mãger aux malades de la boüillie faite de farine de four Bowillie.
ment auec vne deco &tion d'eau en laquelle on aura faic bouillir vne grenade aigre,
berberis,bol d'Armenie,terre ſelléc,& ſemence de pauor, de chacun vne dragme.
Prenez amandes doucescuittesen cau d'orge , en laquelle on aura fait elteindre
des carreaux d'acierou de fer ardans , puis pilez-les en vn morcier de marbre , & les bouill
Autreor.
faites en formede laiet d'amandes ,& y adiouſtez vne dragmede poudre de diarrho
don abbatis , à fin que l'acrimonie de l'humeur cholerique ſoic adoucie , & l'eſto
B mach corroboré . Aurreremede de merucilleux effect ,lequelieciens de feuMonſieur
Chapelain , premier Medecin du Roy , qui l'au oir comme grand ſecret de defunct
& proteſte luy en auoir veu ordonner auec yn treibon ſuccez . 24. Boli Ac. Poudre de
fon pere ,
grad effi
men terræ ſigill. lapis hæmac.añ 3.j. picis naualis 31./s.corallirub. marelectar.cor
nuccrui víti & loci in aqua plantag . añ aj faccharitolat . Zii, fiat pul.de laquelle le
malade en prendra plein vnecuiller deuant le repas , ou bien avec le jaune d'vn æuf.
Chriſtophle l’André en ſon Oecoiatrie loüe grandement la fiente de chien quiait
rongé par trois iours des os. On vſera deceremede en prenant plus ou moins ſelon
que le flux ſera grand ou petic . Pareillementon peut faire manger deuant le repas de
la chair de coings ou meſmes des coings cuits ſous la cédre , ou en compoſte ,ou con
ſerue du fruiat de cornalier ,& berberis confit , & quelquesfois auſſi vn myrabolan ,ou
vne poix muguerre roſtie pour corroborer l'eſtomach . Il faur ſemblablement que le
malade máge debones viandes & de facile digeſtion, & pluſtoſt roſties que boüillies.
decor c Davantage,ilconuient concaſſer vne grenade aigre auec ſon eſcorce, & la faire cuire
annya en eau ferrée, & d'icelle en bailler à boire, ou de l'eau en laquelle on aura fait boüillie
vne ponime decoings, neffles,cormes ,ou meures de conces & aucres ſemblables : car
celles choſes aſtreignent & conſomment beaucoup d'humidirez ſuperAuès du corps.
On peut pareillement'vſer des ſyropscy deſſus eſcrits,comme de citrons, ribes,iulep
rolat, & aucres donnez auec cau ferrée. L'eſtomach ſera pareillement frocé exte. Remedes
rieurement d'huile de maſtic, de noix muguetce,decoings,demyrrhe,& autres ſem . exterieure
COM blables. Auſſi on peuc mettre ſur icc'uy la crouſte d'vn gros pain ciré un peu aupara. mens applic
uant du four , trempée en vinaigre & cau roſe , ou vn cataplaſme fait de deco &tion lejto
miklarmach .
d'eau ferréc, roſes rouges ,ſumach , berberis , myrthilles , chair de coings ,maftic, fa
forum rine de féues &mielroſar .Orſion void que le malade iece des vers,on y procedera
ainſi qu'il ſera declaté cy- apres ,à fin de les faire mourit,& ietter hors du ventre.Auſli
on pourra vſer declyfteresanodins ,abſterlifs , conſolidarifs , reſtrictifs & nutritifs,
ſelon qu'on verra eſtre beſoin , & premierement,lors que le malade ſene grande dou
D leur de tranchées & contorſions au ventre , à fin derafraiſchir l'acrimonie des hu
meurs ,on poarra donner vntelclyſtere.24.La&. hyrof.foliorum acetofæ , portulacæ Clyflere
añ ñ.j. Horum violarum & nenuph . an.p j. fiat decoct. ad lib.j. in colacura diffolue
DO calliæ fiſtulæ Zvi.olei roſaci & nenupharisan.zi.ß.fiat clyſter.
d
Gol
pourunedouleur aiguë 6 poignanteés intestirs.
Autre anodin propre
2. Rofarum rubrarum , hordei mundati & feminis plantaginis, añ. p.i. fiat de
co &tio :in colacura adde olei roſari zii, vitellos ouorum numero ii. fiat clyfter.
Autre clyftere refrigerant.
2. Deco &tionis caponis , cruris vituli & capitis veruecis vnà cum pelle lib . ii . in
quibus coquantur foliorum violarum , malux , mercurialis & plantaginis an,ñ .i.

1
882 Le Vingt- deuxieſme liure

hordei mundatižj. quatuor ſeminum frigidorum maiorum an .38.in colaturæ . A


diffolue cafliæ recenter extra &tæ ži.olei violaciziiij. vitell . ouorum ij. faccharitubri
3j . fiac clyſter.
Autre clyſtere anodin .

2. Florum camom , meliloti & anethian. p . j . radicis biſmaluæ Zj.fiat deco & tio in
Remedes laéte, & in colatura adde mucilaginis ſeminis lin . & fænugræci extra &tæ in aqua
pour les
vlceres des maluæ Zij . ſacchari rubrižj . olei camæmeli & anethian.zı.ß. vitellosouorumi.hac
clyſter. Il faut garder long cempstels clyfteres, afin qu'ils puiſſent mieux appaiſer la
intestines.
douleur, Lors qu'on verra aux excremens comme des raclures de boyaux ( quieſt
vn fignc infaillible qu'ily a des vlceres és inceſtins ) alors il faut bailler desclyſteres
dererſifs & conſolidatifs, comme ceux- cy.

Exemple d'un clyftere deterfif.

2. Hordei integrip.ij. rofarum rubrarum & florum camomilla plantaginis, apij.


1 B
. 8.
añ.p.j. fiat deco & io : in colaturadiffolue mellis rolati & fyrupi de abſinthio an 3)
vitellos ouorum numero ij . fiat clyfter . B

) Exemple d'un clyſtere pourconſolider les vlceres aux inteſtins.

2. Succi plantaginis, centinodiæ & portulacæ añ.3. ij. boli Armenicæ , fanguinis
draconis, amiliañ . zi . ſeui hircini difloluti ziij . fiat clyſter. Pareillement le laid de
vache vn peu boüilly auec plantain & ſyroprolac, eſt fouuerain remedeaux vlceres
des inteſtins. Et fion void (commei'ay dic ) que le flux fult cropimpetueux , & quele
malade fuſt debile,alors on luy donnera clyfteres aftringens .

Exemple d'un clyftere astringent.

2. Caudæ cquinæ , plantaginis,polygoniañ .ñ. i . fiac decoctio in la &te vſtulato,


ad quartaria iij . & in colacura adde boli Armenicæ , cerræ ligillatæ , fanguinis draco .
nis an.zij.albuminaduorum ouorum , fiac clyſter. Autre . 22. Succorum plantaginis, c
nire arnoglolli,centinodiæ ,portulacæ ,depuratorum reſidentia facta quätum fufficitpro
С
clyftere. clyftere,addendo pulueris boli Armenicæ , terræ ligillatæ , fanguinis draconis an. 31.
olei myrthini & rolacian.z ij .Si le ſang ſort tout pur par les inteſtins il fauc vſer de
plus fort aftringens : & pource ie loue beaucoup les decoctions faites d'elcorce de
grenades , noix decyprés , roſes rouges , lumach , & quelque portion d'alum & de
coupe roſe boüillies en eau de mareſchal, & de ce ſoient fairs clyfteres ſans huile ,ou
autres ſemblables. On doit auſi fomenter le ſiege d'vne deco &tion aftringente. Mais
il faut noter que cels remedes fort aſtringens ne doiuenteſtre baillez , que premiere
mene on n'ait purgé le malade , parce qu'ils arıcſteroient les humeurs corrompus,
qui ſont la principale cauſe de cette maladie ,& les empeſcheroient d'eſtre vacuez ,&
lecoit- on cauſe de la mort du malade , mais ſeront baillez apres qu'ils aura eſté ſufi.
ſammenc purgé , auſſi qu'on cognoiſtra les forces affoiblies & abbatuës , & le ventre r
fort lubrique. Sile malade elt fort debile , & ne peut prendre alımens par la bouche, 0
on luy pourra bailler clyfteres nutritifs, comme 24. Decoctionis caponis pinguis &

clyfteres cruris viculi coctorum cum acetoſa , bugloſſo , borragine,pimpinella,& la &ucazx D


D
Buenisifs. vel xij , in qua diſſolue vitellos ouorum numero iij. faechari roſaci& aquæ vitæ añ:31.
butyri recentis non ſalici Zij . fiat clyſter. C
}
De l'euacuation faite par inſenſible tranſpiration.

CHA P. XLIX . Z

E venin peſtiferè le peut quelquesfois exhaler & evacuer par in

Cauſes (enſible tranſpiration , qui ſe faic par le moyen de la chaleur na

d'inſenſible turelle , laquelle agit perpetuellement en noltre corps , ſoit en dor .


tranſpira mant ou en veillant , & fait inſenſiblement exhaler les excreniens C
rion . du corps auec les eſpris par les porofitez du cuir : ce qui ſe peut
bien cognoiſtre aux cumeurs & apoſtemes contre Nature , melmes
Effects de
y ayant ia de la boüe faite , leſquelles bien ſouuent nous voyons ſe reſoudre parle
narkte for e ture
ſculbenefice de Nature , ſans aide d'aucuns medicamens, Parquoy lors qu Na
ch

i
De la peſte. 883
A eſt forte,elle peut auſliietter quelquesfois le venin peftiferé au dehors par inſenſible
tranſpiration , voire encores qu'ily cult ia quelque cumeur , & humeur amaffé &
cueilly en quelquepartie denoſtre corps : car rien n'eſt impoſſible à nacure forte, ay
dce de la liberté des conduits de cour le corps.
De la curation des enfans eſpris de la Peſte.
CHAPITRE L.

Ource que les petits enfans malades demandent diuerre & au


tre curacion que celle des grands, nous avons reſerué d'en craider
à part,tant de ceux quitetcent,que de ceux qui ſont levrez.Partant
pourcommécer au regime de l'enfant quitetce,ilfaut que la nour

B
P ricel'obſerue pour luy, tour ainſi que li elle-meſme auoit la peſte.
Ec le regime conſiſte és fix choſesnon naturelles, t'eſtà dire , qui Regime des
ſont horsde nature & eſſence de la perſonne, comme font l'air,le enfans, qui
scuět, eſpris
mouuement & repos , dormir 8. veiller, manger & boire, repletion & vacuation de la de pefte.
fuperfluité des excremens , & lesmouuemens & accidens de l'ame. Leſquelles choſes
(quand on en yſe auec moderation, c'eſt à dire , en qualité & quantité, & ſelon que la
maladie de l'enfant le requiert) rendent le laiet de la nourrice profitable à la ſanté de
l'enfant:car comme l'enfanc ne prend que du laict,auſſiquand il ſera rectifié & mode.
ré ſelon que la maladie le requiert, il nourriſt non ſeulement l'enfanc, mais aufli il co
bat contre la maladie, comme ayant en ſoy deux qualitez, vne qui nourriſt, & l'autre
medicamenteuſe:parquoy le laict ſuccé par l'enfant ſupplce le lieu de ſon regime. Pa
reillement on fera quel'enfantobſeruera le regime en ce qu'il pourra , comme de ne
trop dormir ou veiller , & de la voidange des cxcremens , & des choſes qu'on verra
eſtre beſoin d'appliquer par dehors, commelinimens,emplaftres, fomentarios, & au
tres. Or que le lac de la nourrice ſoit medicamenteux, on le voit ordinaireméc en ce, Le lait de
que le iour qu'elle aura pris quelque medecine laxatiue ,le ventre de l'enfant ſe laſche la nourrice
ſubirement , voirequelquefois ſifort ,qu'on eſt contraint changer de nourrice pour est medica
С
allaicer i'enfant (de peur qu'il n'euſterop grand flux de vére, qui luy pourroit nuire mentengo
& le faire mourir ) iulqu'à ce que ſon laict ſoit recourné à ſon naturel.mais ſi l'enfát eſt
opiniaſtre, & ne veuc prendre vne autre nourrice,alorsfauc ſupporter quelque choſe
de l'alteration du laict, pluſtoſt quele laiſſer mourir de deſpit & de faim , par faute de
toccer. Et pourretourner à noſtre propos, il faut que la nourrice vſe de remedes pro
pres contre la fićure, commepotages & viandes qui refrenent la chaleur & fureur de
l'humeur feruent, afin que ſon Tang,qui eſt matiere de ſon laict , loit rendu medica
menteux. Et pour ceſte cauſe , elle ne buita aucunementde vin pour quelque temps:
& doit lauer ſouuentle bouc de la mammelle d'eau d'ozeille ou de luc d'icelle dellayé
auec ſuccre roſar, & vſera desremedesqui ſeront declarez cy - apres.
Ou tre-plus, l'enfant prendra vn ſcrupule decheriaque dellayee au laiet de la nour Alexitere
rice,ou en bouillon d'un poulec , ou quelque eau cordiale:auſſion luy en frottera par desenfans
dehors la region du cour , & les emunctoires & les poignets: pareillement on luy en qui tetiens.
fera ſencir au nez & à la bouche , le deſayant en vinaigre roſat,& eau roſe, & vn peu
d'eau de vie ,afin de touſiours ayder Nature à challer & abbatere la malice du venin .
D Les enfansſevrez & ia grandelets peuvent prendre medicamens par la bouche : car Des enfans
comme ainſi ſoit que leur eſtomach digere bien plus groſſes viádes quc laict,& que le ſeurez.
le foye en fait du ſang, ils pourront pareillemét reduire une petite medecine depuiſ
ſance en ſon effc &t. Parquoy on leurbaillera à aualler du theriaquela quãtité de dou
zegrains deſayez en quelque eau cordiale , auec vn peu de ſirop dechicoree, ou mix
tionnez en conſerue de roles,ou en quelque bouillon de chappon ,ou en autre manie.
re qu'ils pourront prendre. Et faut bien auoir eſgard en quelle qualité on donnera le
dit theriaque : cars’iln'eſt donné en pecite quantité aux enfans,illeur excite la fićure,
& efteint leur chaleur nacurelle. On leurpourra ſemblablement dóner vn bouillo de Autre alco
chappon,aueclequelon aura faict cuire peritcozeille,lai& uë,pourpić, ſemences froi,xitere.
M
1
des,auec vnc once de bolarmene,& autantde cerre ſigilleeenueloppee dedās vn lin.
ge,puis les eſpreindre, & leur en donner ſouuenc auec vne cuillier. Sur ce il faut norer,
que le bol d'Armenie,& la terre ſigillee ontgrande vertu de conforcer lecæur,& em
peſcher que le venin ne l'infecte: & cepar vne propriere occulte que l'o a cognu par la
FF ff

1
884 Le Vingt -deuxieſme liure
feule experience.Aulli Galien affirme, quelebold'Armenie a ceſte proprieté cötre la A
peſte,qu'en vn inſtant ceux quien vſent,fontpreſeruez & guaris,pourucuque les par
ties nobles ne ſoientja grandement infectees. Dauantage , il ſera bon de leur provo
Gsl. ár 7. quer la ſueur:car paricelics la matiere putride eſt louuent cuacuce , ioina qu'il y a en
chap.du g.cux grande abondance de fumces & vapeurs. Parrans onla prouoquera en leur don
des fimples.nantà boire vnc decoction de ſemences de perfil,raiſinsde Damas,figues,racined'o
zeille,aucc vn bien peu de ſaffran , & corne de cerfou d'yuoire rappé. A ces melmes
fins aucuns baillent dela Licorne, mais on ne ſçait encores que c'eſt: ioinct que la cor
Moyens de ne de cerf& l'yuoire peuuent faire plus grand effcet. Pareillement pour provoquer la
pronoguer ſueur,on pourra vſer d'eſpongescrempeesen deco &tion ou de ſaulge, roſmarin, lauã,
lo jwcar. de,laurier,camomille,melilot,& mauucs,puisles clpreindre & les mettre aux coſtez,
aux aines & ſousles aiſſelles chaudement : ou en lieu d'icelles on prendra veſſies de
porc à demy pleines de ladicedeco&tion , leſquelles faut changer incontinent qu'elles
ne ſeront aſſez chaudes,& les continuer iuſques à ce que la ſueur ſorte en abondance.
Er le faut bien garder de faire tropſuet les enfans, parce qu'ils ſont de facilereſolució, B
& ſe delleichent en peu de temps,& tombent promptement en defaillance de la ver.
tu,à laquelle il faut couſiours auoir l'æil. Er pendant qu'ils (uent,il leur conuient ef
Mediocrité ventiller la face auec vu cluencoir,afin qu'ils puiſſent aſpirer l'air froid doux & ſuave,
de fueraux pour fortifier la vertu ,laquelle eſtancfortifice,pourra mieux ieteer la lucur hors.Auli
enfans.
leur faut faire ſentir vinaigre miltionné auec eau roſe, en laquelle on aura diffoue va
peu de theriaque. Ec apres qu'ils auront iuffiſamment lué, ils feront eſſuyez, & apres
on leur donnera à manger vn peu de conſerue de roſes, auec poudre de corne de cerf
& yuoire,& boiront de l'eau de buglofe aucc vn peu d'ozeille, tant pourrafrailchir,
que pour touſiours preferuer le cæur. Eroù l'enfant apres auoir pris les alexiteres ne
fueroit,nefaut pourtant avoir deſeſpois de la cute , parce que Nature ne laifle à faire
ſon profit des antidotes & contre-poiſons qu'on luy aura donné.Et s'il leur luruenoit
De la belle quelque cumeur aux emunctoires,ou charbós en quelque partie,on leur y fera prom C
charbos premenc vnc fomentation de cholesquiamolliffent & řelaichent le cuir,& qui attirer
foruenans moderement: puis on vſera de ſuppuratifs propres commelimaces piſtees tubtilemér o
auxenfans.auec leurs coquilles , moyeux d'oeufs, auec vn peu de chetiaque : ou bien on leur fera
vne pulte de farine,d’huile,d'eau, & jaunes d'oufs, & autres choſes propres , & on con
duira lereſte de la cure le plus doucement qu'il ſera poſſible , ayant elgard à leuricu .
Dolapurgt. ncffe & delicateſſe. Ecs'il eſt beſoin de les purger, on leur pourra donner vne dragmc
tion des en de rheubarbe en infuſion ,ou trois dragmes de caffe ,ouvne once de ſyrop rolat laxa.
fans. tif, ou demie once de ſyrop de chicorec composé auec rheubarbe : ou cette medecine
qui s'enſuit. 21.thab.electi pul. zj. infunde in aqua cardui bencdi&ti cum cinnamomi
3!. in colatura diſſolue catholicizij. Tyrupi rofati laxatiui ziij. fiat parua potio. Or
toutes ces choſes ſe doiuent fairepar le conſeild'vn docte Medecin, s'il eſt poſſible de
le recouurer. Et quant au reſte de la cure,elle ſe parfera ainſi qu'auons declaré parcy.
deuant, ayant cſgard à leur nature tendre & delicate.

Diſcours desincommoditezque la peſte apporte entre les hommes, & du fouuerainremede.


CHAPITRE LI.
D
D
'A Y cy deffus remóftré ſur les cauſes de la peſte, qu'eſtác vn des
ficaux de l'ire de Dieu ,nousnepouuos ſinó tõber en coute excre
La peste eft mité de maux, quád l'enormitéde nos pechez a prouoqué ſa bóté
l'un des
fleanx de à retirer lamain fauorable de nous & no' enuoyer vne telle playe;
Dies . ilmeſuffira donc pour la fin ,de rememorer quelques incómoditez
ou pluſtoft à vray dire,horribles calamitez quiaduiếnent en la ſo
cieté humaine pour ceſte dangereule maladie , afin que ſelon les
moyés humains que Dieu a ordonez poury pourucoir,nousſoyos parla grádeurdu
mal plus enclins à chercher & vfer des rcmedesqui nous en peuuét preſeruer Cõlide
ronsdonc,qu'auſi-coſt que la Peſte eſt en quelque Prouince, toutcõmerce de mar
chádiſc,dontleshõmesont beſoin des'étretenir par aidereciproque des vas & des
autres ,vient à cftreincerrópu & delaiſfé:car nul neſeveut hazarder de venir rien ap
porterau lieu où eſt la Peſte,depeurde perdre ſa vic.De là s'enſuit queles yiures vić
nent bien toſt en grande cherté, & en fin à defaillir du cout , mclmement aux villes
De la Peſte . 885

où il y agrăd peuple, qui a accouſtumé de viure au iour la iournce, ſans faire prouiſio ,
A
car les marchands allans ça & là pour en apporter, ne pouuane non ſeulement eneſer
aux villes ny villages, mais ſouuéc en ſont dechallez pararmes , & à coups d'hacquebu
tes,arbaleſtes, & de pierres,pour ne les laiſſer approcher ,tát que quelquesfois ils ſont
quez & maſſacrez inhumainement,au licu du ſecours qu'on leur dcuroit donner en
leurs neceſſicez. De là vientque les autres n'y veulenc aller , & eux qui ſouloient ſub .
uonir à ce que leur ville ne cobalt en defaut de viures, & autres choles ſont cócraints
d'endurer la famine auec leurs concitoyēs.Souuent les enfans font contraines d'en .
tercer leurs peres & meres,lespeces & meres leurs enfans, les maris leurs fémes , & les
femmes leurs maris ( qui leur eſt vn grand creue cæur ) pour ne trouuer perſonne qui
les veuille encerrec.Souuentauſſi on laiſſe les corps ſans les enterrer , deſquels s'elle.
uene vapeursputredincules,qui renforcét la pelte.ucre pius,lesplus opulēts,mel- Ara Lesls Magis
absors
ſt ra ts tr es io nc el qu c th or it é au go uu er ne me nt de la ch oſ e de lent in
s
me les Ma gi , & au qu qu au
publique , s'abſentenc ordinairement despremiers , & ſe recirent ailleurs ,de ſorte que risdiction; lt
B
la luſtice n'eſt plus adminiſtree,n'y eſtantperſonneà quion la puiſſe requerir : & lors iuftice oeffen
tout s'en va à confuſion , qui eſt vn mal des plus grands qui ſçauroit aduenir à vne
Republique, & adonc lesmeſchans ameinent bien vne autre peſte : car ils entrent eż
domain maiſons,& y pillent & delrobent à leur aiſe impunément, & coupent le plus ſouvéc la
gorge aux malades,voire aux ſains melmes , afin de n'eſtrecogneus & accuſez apres .
Qui en voudra des exéples bien recents , il en pourra ſçauoir des habitans de Lyon , au
voyage que le Roy y a fai& .Auſlien ceſte ville de Paris ſe ſont trouuez des gens, qui
auec l’ayde detets maiſtresayans fait entédre qu'vn quidam leur ennemy auoit la pc
ſte, ſans neancmoins qu'il cuft
mal quelconque, le iour qu'il deuoit parler de ſon pro
cez, ou faire quelque a &tc où la preſence eſtoit requiſe, le firent rauir & emporter à sósa
l'Hoſtel -Dieu parla force de ces galands,quelque reſiſtence qu'il peut faire , eltans Hilosra
pluſieurs contre vn :& fi de fortuneilimploroit l'aide & miſericorde du peuple quilo

leur voyoit, les larrons & meurtriers l’empelchoient, & crioient encores plus fortque luy
С
afin qu'il ne fuſtentendu : ou bien ils donnoient à entendre que le mal l'auoit rendu
furieux & demoniaque,pourfaire fuir chacun d'aupres, & cependanteurent moyen
de le pouſſer audia Hoſtel - Dieu , & le faire liet & coucher auec les peſtiferez.où quel
ques iours apres il mourut tant de deſplaiſir ,que de l'air infecté,ayant eſté la mort au
Topra
parauant vendue & acheptee à beaux deniers contās.len’ay que faire de deduire icy
au long ce que l'on ne ſçait que trop ,c'eſt à ſçauoir que les villes delaiſſees deuienner
chápeſtres ,iuſques à y voir l'herbe croiſtre par les rues,leslaboureurs delaiſſans leurs
mailós & les fruits ſur la terre,laquelle demcure en friche,les croupeaux ſont eſgarez
& eſperdus par les champs : les hommes s'entrerencontransfuyenc arriere les vns des Vn ligne de
(VCOM
autres, ligne de grande punition de Dieu . le me contenteray d'adiouſter icy que cete grande para
maladie rendpar tout l'hõme ſi miſerable, que ſitoſt qu'ileſt ſoupçonné, lamaiſon nition de
Diena
(qui luy eſtoit lieu le plus ſeur & le plus libre ) luy ſert d'vne cruelle priſon :caron l'en .
ferme dedans ſans qu'il puille ſortir, ny que persõncy ſoit admiſe pour le ſecourir. Si
cependát quelqu'un de ceux qui ſont ainſi refferrez & enfermez ſe meurt, ilfaut que
les autres qui ſonc là dedans,voyecquelquesfois durát long temps ceſt horrible ſpe
&acle d'un corps remply de vermine & pourriture avec ynegráde puanteur charon
o gneuſe , qui fait renforcerl'infe &tion & venenoſité de l'air,qui puis apres fait redou
bler la peſte , & eſt ſouuét cauſe de la mort de tous ceux qui ſont en la maiſon .Et ſi on
ſe retire aux champs ,la melme crainte & horreury eſt , & le trouue en touc chacun qui
les voit, & plus encores,d'autāt qu'on a moins d'amitié ou cognoiffance.Tout eft clos
& fermé aux villes,villages,& bourgades, voire les maiſons propres ſone cloſes à leurs
maiſtres, tellement que ſouuent on eſt cõtraint de faire quelque logette aux champs,
arriere de toute conuerſation & cognoiſſance :comme on faiſoit à Lyon ſur le Roſne,
là où les malades s'eſtans rerirez , le chaud du iour les eſtouffoir, & le froid de la nuict incommodi .

les morfondoic, & leur amenoit d'autres mortelles maladies. Et qui plus eſt, n’a on ecz des low
pas veu cſdites loges,que le pere & mere eftans griefuemét malades ,ne pouuans ai : geces faites
der à leur enfant,le virent ſuffoquer & manger aux mouſches Guelpes, & la mere pres Lyon.
cuidát le ſecourir,ſe leucr ,puis tomber morte entre l'enfant & le mary : Plus, on n'eſt
recogneu des vaſſaux, ſubjets,ou ſeruiteurs qu'on ait: chacun tourne le dos , & per
ſonnen'y oſeroit aller:melmes le pere abandonne l'enfant , & l'enfant le perc: le mary
la femme, la femmelemary :le frere la ſcur, & la ſour le frere : voire ceux que nous
FFFF ij
886 LeVingt-deuxieſmeliure
penſons les plusintimes & feables amis,en ce téps nous abandonent , pour l'horreur A
& danger de ceſte maladie.Ets'il y a quelqu'vn quimeu de pitié & charité chreſtien.
ne,ou pour la ſanguinité vueille s’auancer pour ſecourir & viſiter vn malade , il
n'aura apresparét ny amy qui le vueille frequenter nyapprocher. Qu’ainſi ſoit,ona
veu à Lyon , lorsqu'on appercenoit ſeulement és ruës les Medecins, Chirurgiens &
Barbiers elleus pour penſer les malades , chacun courir apres eux à coupsdepierres
pour les tuer commechicnsenragez,diſans qu'il falloit qu'ils n'allafſēt que denuit,
de peur d'infecter les ſains. Combien de pauures femmes groſſes,ſanseſtre aucune
Hilloire ob. mentmaladesde peſte( pour ce qu'en tel tepscoutes autres maladies ſont ſuſpectes)
feruée par ont eſté pour le ſeul ſoupçon delaiſlees & abandonnecs à leur enfantement, doncert
? Autheur.prouenue la mort des meres & des enfans:le puis veritableméc dire auoir trouué aux
mammelles d'une femme morte de peſte,ſon enfant tetác encores le venin mortel,
qui le deuoir cuer bien toſt apres.Si la nourrice d'vn enfant vientà deceder , encores
que ce ne füſt de la peſte,il ne s'en trouuera point d'autre,pourle ſoupçõ qu'on a que
elle ſoic morte de peſte,tant eſt ceſte maladie effroyable & cfpouuentable: que li toft B
Au liure, que quelqu'vn en eſtſurpris,il ne trouue ſecours de perſonne,ains attend ſeulement
des Hilloi- la more miſerable.Qu'ilſoit ainſi,entre vne infinité d'autres exéplesque l'on en voit
res prodi.
gieuſes. ordinairement, nous liſonsqu'vne icune féme, ſon mary eftantmort & deux de ſes
enfans, le voyant frappee,commença à s'enfcuclir elle meſme, & fur trouuec à demy
enſeuelie, ayant encotes le fil & l’aiguille entre les mains. Outre- plus, vn homme forc
& robuſte ayant la peſte,eſt allé au cemetiere, & en la preſence a faict faire la foffe,&
Altes hora auant qu'elle fuit paracheuee,il mourut ſur lebord. A u contraire,il en y a qui ont eu
ribles des telle apprehenſion de la mort,eſtans frappez de ceſte maladie peftilente , que pour ſe
malades deſecourir eux inelmes ſe font appliquez desfers ardans ſur la bofle,fe bruflanscous
pale. vif.Aucres auec tenailles l'ont arrachee ſe penſans guarentir. Aulli aucuns par la
ferucur & rage de ceſte maladie ſe ſontjeccez dedans le feu ,autres dans les puits, au .
cuns és riuieres,autres ſesõt precipitez par les feneſtres,autres ſe ſont heurtez la ceſte
cõcre la muraille iuſqu'à en faire lortir la ceruelle,ce que i'ay veu: autres auſſi ſe ſont
tuez eux.melmes à coups dedagucoude couſteau.Lucrece Poëte Latin aremarqué c
la peſte auoir eſté autresfois ſi furieuſe au pays d'Athenes,quepluſieurs furmõtez de
C
la vehemence de la maladie fe precipitoienc dedans l'eau. On raconte que la peſte,il
y a enuiron quatre vinges ans,auoit de celle rage couru par la Gaule Lyonnoilc, que
Hiſtoire. les femmes principalement ſans apparence d'aucun mal en leur corps,ſe jercoienc de
dans leurs puics,ſurmontees de la fureur de telle maladie. Er à ce propos m'a eſté al
ſeuré ,quedepuis n’agueres vn preſtre de la paroiſſe S. Euſtache en ceſte ville de Pa
ris,eſtát malade de la peſte en l'Hoſtel. Dieu;de furie ſe leua duli&,& pric vne dague,
delaquelleil en frappa pluſieurs des pauures malades couchez dedás leuclict,& en cua
trois:& n'cuſt efté qu'il fut apperceu & empoigné du Chirurgien dudic Hoſtel quire.
ceur de luy vn coupde dague dedás le vérrele voulat ſaiſir,dont ilcuida mourir)ilen
cuſtoccis autant qu'il en eufttrouué : mais ſi toſt qu'ilfutretenu,& que ceſte furiedi
Autre bi minua ,il rendit l'eſprit.Vn autre cas nonmoinshorrible eft aduenu à Lyon ruë Mer
stoire. ciere,où la fémc d'vn Chirurgičnómé Amy Baſton ( qui eſtoit mort de peſte)fixiours
apres eſtant eſpriſe de la meſme contagion ,tomba en reſuerie,puis en frenefic,& ſc
mit à la feneſtre de la chambre,tenant & tourmentant ſon petitenfant entrelesbras: D
ce que voyans ſes voiſins l'admoneſtoient de ne luy faire mal: mais au lieu d'auoir çf D
gard à leur aduertiſſement, le jetra incontinent en terre , puistoſt apres elle s'y preci
pita:ainſilamere & l'enfant moururēt.Ily a vncinfinité d'autres ſemblables exéples,
leſquels ſi ie voulois raconter iamais la matiere ne me defaudroit:mais tant y a quele
tout aduient le plus ſouuét aux malades,parfaute qu'on n'oſe conuerfer,ny eſtreale.
tour d'eux pour les ſecourir :ce qui ne ſe fait aux autres maladies, meſineen lepre: car
On doitfuir en icelle lesmaladessõt ſecourus,mais en ceſte cy on eſt dechallé de ſes pares & amis,
pluftoft les voire de la propre maiſon ,comenous auósdit:dequoy ſe faut d'aucát moins eſmer.
ladres que ueiller,que l'ó ſçait la charité des hõmes eſtre aviourd'huy cellemér refroidie, que
les malades
de peſe.. ceuxmeſmesquionttoute liberté encores qu'ils ayentor & argéc pour ſatisfaire, ne
Hiſtoire de peuvent en téps de peſte auoir ſecours d'averuy.En cetendroit,icneveux paſſerffous
Guidon . ſilence, ce que recite le bon vieillard Guidon, qu'en lan mil trois cens quaráte &
huiết,vinevne peſte& mortalicé,dont ceux qui en eſtoiêc eſpris, mouroient en trois
jours ou en cinq au plus,& cftoit ſicórągicuſe, quenon ſeulemét en cõuerlácenſēble,
?

De la peſte. 887
A mais auſſi en regardant l’yn l'autre ſe prenoit,& les perſonnes mouroient ſans ferui. 1
teurs,& eſtoient enterrez ſans preſtres,& mouroic de iouren iour vn ſi grand nobre
de peſtiferez, que nepouuár(uffice à les enterrer ,on eſtoit contraint de faire de grá
des foffesaux cemerieres& les iecter dedans à măceaux, les vns morts, les autres eítás
encore en agonie.Le pere ne vilicoic l'enfant, ny l'enfanc le pere,ny la fême le mary,
ay iç mary la femme,comme auons dit cy deflus:coute charité eſtoit morte,& elpc
rance abbatue. Ceſte maudi& e peſtilence fuc quaſı par tout le monde,& n'en lailla
preſque la quarce pargie. Elle fut fore honteufe , & non profitable aux Medecins &
Chirurgiens, leſquels n'ofoient viſiter les malades de peur d'eſtre infectez :ioint aufli
quecous les remedesne proficoient en rien:can cous ceux qui eſtoient frappez dece
ſte peſtemouroient.En aucunes contrees depaïsoseſtimoit que les luifs euſſent en
uenimé le monde, & à ceſte cauſe on leur couroic ſus, & les aſſomnioic. Les autres cui
doient que ce fuſſent les pauures Manchets,pour laquelle occaſion eſtoicnt challez.
Les autres en ſoupçonnoienc les Nobles ,& pour ce n'oſoient aller par le monde. Et
finalement les portes des villesfurent gardees, & ne laiſſoit-on entrer perſonnede
l'on le
dans s'il n'eſtoit bien cogneu . Et ſi quelques -vns auoient pouldre ou onguents, croj que
B c'eftoientles
penſoit que ce fuſſent poiſons, qui eſtoit cauſe qu'on leur faiioit aualler. Ladite pe SHCHx .
îte dura lepemois ſans ceſſe. Voila ce que le bon homme Guidon en elcrie , choſe à
la verité de grande remarque, couchantl'ire de Dieu .
Epilogue ou concluſion de ce diſcours de la Pofte.
CHAPITRE LII.

Rie maſſeure que le Lecteur qui aura appris en ce petit craieté le moyen
f. le s'en preſerucr,& mclme ſans danger viſiter & ſecourir ſon prochain,
e meſpriſera point mon labeurº, combien que (fi faire le pouuoit) i'ay
merois beaucoup mieux qu'il ne fuſt beſoin à perſonne s'en aider , & que
la 1erenité de l'air par la bonté de noſtre Dieu fuſt couſiours telle , que la peſte
perdiſt ſon nom & ſes effects. Mais puis que cela prouient par l'iniquité des hum
C mes,laquelle ſe perpecuë auec eux cour le cours de leur vie ,en recevant patiemment
ce qu'il plaiſt à Dieu nous enuoyer, nous ſujuons aullilavolonté,quád nous appren
drons & vſerons des remedes, (ſelon qu'en toutes choſes il en a mis la propriecé &
vertu,pourſeruir à l'vſage de l'hommc,)tant à la nourriture du corps, qu'à la con
ſeruation & recouurement de la ſanté d'iceluy. Ec d'autant plus que ce mal eſt Le vraje
grand, d'autant faut -il recourir promptement au remede , qui eit ſeul & general : fouuerain
c'eſt que grands & pecits de bonne heure implorions la miler.corde de Dieu par con- remede co
fefſion & deſplaiſance de nos forfaiếts , auec certaine deliberacion & propos denousore la peſte
amender , & donner gloire au nom de Dieu , cherchans en cout & partout de luy
strony
obeyr & complaire , ſuivant ſa lainete parole , ſans eſtriuer à l'encontre de luy par nos
deſordonnees paſſions , commenous auons faict & faiſons lournellement . Et s'il
luy plaiſt encores apres cela nous battre de ces verges - là , ou de quelques autresſe
lon ſon conſeil eternel,fautl'endurer paciemment ,lçachant que c'elt tout pour no.
care ſtre profit & amendement : & cependant s’entre aider des remedes qu'on pourra
D trouuer, ſans s'abandonner ainſi les vos les autres,parvneexcreme barbarie & inhu
manité.Croyonsque lemal ſeroit beaucoup moindre,ayans ayde & conſolations les
vns des autres.Le Turcle faict,& nous Chreſtiens de nom,n'en renons compte , Il se faut
abandonnos nos freres affligez:comme ſi nous penſions en ceſte force eſchapper desſecourir
mains de Dieu Helas ;où nous pourrons nous cacher que ne ſoyonstrouuez ?Reco . l'un l'autre
gnoiſsõs pluſtoſt auec le Pſalmiſte :Siie pred les aiſles de l'aubedu iour, & quei'habi. Pſal. 139,
te aux dernieres parties de la mer, là auſſi ca main mecăduira,&ta dexire m'époigne.
ra. Croyons que quand nouspourrions cuiter la morc de ce coſté -là ( ce quinepeut
15,6 eſtre )il a centmillemorcs plus hõreuſes & miſerables pour nous aterapper ailleurs &
confõdre de corps & d'ame poureſtrecourmentez à couc iamais.Parquoy ayans nos
das cæurs remplis de charité,ilnous faut retourner à 'luy,d'autant qu'il eſt plein de cle
mence & benignité,preſt à nous ſoulager en nos tribulations, & eſt tout bon , & nous
aime comme les enfans: & quand il luy plaira, il retournera toutes nos afli&tions en
noſtre ſalue,voire mieux que nous ne ſçaurions ſouhaicer ou imaginer.Delà prenos
FFffuj
888 Vingt-deuxieſme Liure ,
cece reſolution fermedenous aſſujettir & renger paiſiblement à la bonté & fain & e A
volonté:qui eſt la reigle de toute lageſſe, à laquellenousdeuõsconfórmer toutes nos
Bon slexi cogitations & actions.Voila vn trelbon onguent alexitere pouradoucirnoſtre peſte,
rere
ba peſtcontre&
co vnrcmede ſalutaire pour appailer nosmurmures,& nous impofer filēce,& vó arreſt
certain pour faire ceffer le procez que nous intentons couſtumieremée contre lapu.
ſtice diuine,quád il nous chaſtic plus rudemét qu'il ne nous ſemble bon & profitable
au iugement de la chair & nó de l'eſprit. Parquoy apprenósà nous captiuer,& brider
noſtre apperic ,cftimans que Dieu faic toutes choſespar poids & meſurc: & quoy qu'il
nous enuoye peſte,famine,ouguerre , & autres infinies calamitez,il nefaitrienquinc
ſoit bon &droia. Ec quand illuy.plaira nous retirer de cemonde,delà nailtra noltre
heur & felicité,veu que cerc vie crrinc auec ſoy vne infinité de crauaux & miletes où
nous ſommes preſque abyſmez dechoſes caduques & tranfitoires.Et par cete mort
nous ſommes appellez à la pleine fruition du royaumeceleite,comme par vn heraue
& ambaſſade enuoić du Ciel.Sivn Roy par vn meſſager appelloit vn pauure & mile.
rable à ſoy pour le faire participant de ſon royaume,quel plaifir & foulas receuroit il?B
Aplus forte raiſon deuons-nous eſtre joyeux, quád Dieu par la mort nous enuoye ce
meſager qui nous guide à luy , pour heriter ſon Royaume eternel & bien heureux .
Veu donc que l'eſchange eſt cel,nous auons maciere de conſolatio ,la mort nous ellát
celt heureux meflager ,lequel nous faict paſſer de ce mõde au ciel, de cette vi nulera .
ble à la vie erernelle ,de mal-heur en felicité, d'ennuyen liefſe ,de miſere en profperi
té, qui nous doit grandement conſoler ,& tollir toute occaſion de lamenter,quand il
plaiſt à Dieu nous appeller & envoyer la mort , laquelle ila ſouffert pour noſtre rede
prion Espartel argument de reiouiffance Ezechias define la mort ,non qu'il fuitdel
picé contre Dieu : mais eſtant ennuyé des faſcheries & courmens du monde ildeſiroic
d'en ſortir ,pourueu toutesfois que Dieu s'y accordaft.Car noflre vie eſtcommevne
garniſon en laquelle Dieu nous amis,nous enioignant y demeurer juſques à ce qu'il
Il ne fame nous appelle, & nouslicēcie pour en ſortir auec certaine foy & affeuráce qu'il n'eſt pas,
rompre la venu en ce monde ſouffrir , & eftre mis en croix que pour la Redéption des pecheurs,
profon oil
noftre amo & noidesiuites,comme il a dic (d'autant qu'vn hõme ſain n'a que fairedeMedecin.) СC
eft enfer Donc ille faut humilier,& auoit ferme fiance qu'ilnous pardõnera toutesnosfauces,
mee. pourucu que nous luyaddreſliós nas prieres duprofond denoſtre cæur,& de droite
& ardere affection ,croyans que luy meſme a dit qu'ilne vouloir la mort du pecheur,
na'sia redēption.Elaïedic qu'ilmettra nos pechez derriere le dos ,voire au profód
de la mer , & n'en aura iamais de recordation . Ces choſes conſiderees nous ne devons
craindrelu mort,n'eſtans en ce monde que comme en maiſon empruntce,de laquello
ilnous faut deſloger quand il plaira au Seigneur, auquel elle appartient. Que filo
partemenc de ce monde eſt vne entrec à vie, qu'eſt ce dece módi finon yn ſepulchre
ou tombeau: Eccome les mariniers deſirent vn bon port,auſi deuonsnous deſirer de
ſortir de ceſte grande mer de miſere & calamité, pour aller au port du ſalue où touc
Job 14 malceſſera , & n'y aura oragenerourmente,mais touteioye& repos.Iob dit quel'ho
me nay de femme eſt depeu de iours, & remply de miſeres, qui lore hors comme la
fcur, & eft coupé,& s'enfuit comme l'ombre,& n'arreſte point. Autres comparent
cere vie à vne fumee ou vapeur d'unebouteille d'eau quis'eileue en temps de pluye. D
Sounct
Autre s à vne nacelleeſtant au milieu de la mer agiree çà & là des vents & des ondes, D
meurt a
on heurt ant contre les rochers ,qui louuét le perd aux goufires & abyſmes profondes.Et
nant que par ajusſiil faut mettre en la protection de Dieu la grace de noſtre ame , qu'il nousa
fortir de la donnee pour etre reünie à ce corps:lequel ſera glorifié en la reſurrection vniuerſelle
matrice. des moris. Et pour concluſion,ſinous rapportons le tout au conſeil de Dieu ,nousau
rons dequoy nous conſoler au milieu des plus grades angoiſſes & deſtreſſes quinous
pourroient aduenir:lequel nous prions de bon cæur, & de ferme & viuefoy, qu'il
nous pardonne nos pechez,leſquels ſont cauſe de ceſte maladie peſtiferee & autres,
crovat que c'eſt le vray antidotecórre lapeſte.Car Ieſus- Chriſt voulát guarir le Pa
raly usque luy dit Tes pechez tc font pardonnez:monſtrant & declarantparcela,quo
la caule & racine de la maladie procedoir de ſon peché,& que pour en auoir la fin,il
falloit que l'ire deDieu foſt appaiſce, & qu'il luy fult propice & favorable par la ro
miſſion de les pechez. Aioli donc nous implorerons ſa grace d'vn ræur ardant avant
fiance qu'ilnous gardera & defendra,nous donnant ce quinous pil neceſſzire,tant au
corps qu'à l'ame.Ques'illuy plaiſt nous appeller,il ſera noſtre Redempceur, & nous
De la Peſte. 889

A ayant retiré de ce labyrinthe & gouffre de tous maux & miſeres, il nous introduira
en l'hericage de la gloire , pour l'amour de ſon cher fils noſtre Sauveur leſus- Chriſt,
-auquel loa gloire eternelle. Ainſi ſoic. il .

Fin du ving- deuxie/me liure , traictantde la Peſte .

ADVERTISSEME ACT DE L'AVI HEV R.

'Autheug a faict ceſte petire admonition pour le icune Chirurgien,


.
ſe trouuant quelquesfois aux licux où iln'y a Preſtres, ny autres gensBonne affe*
d'Egliſe à la mortdes pauures peſtiferez. Comme i'ay veu le Rby Etur de l'i
B Charlesęſtant à Lyon ,pendantla grande mortalité , où l'on enfermpit subeur.

aux bonnes mailons vn Chirurgien pour medicamenter ceux qui


eſtoienc peftiterez , ſans pouuoir eſtre ſecourus d'aucunes perſonnes
1.
pour lesconſoler à l'extremité de la mort : & ledit Chirurgien ayanceſté inftru & de
cette petite admonition , pourra feruir à la neceſſité d'vn plus grand clercquelüy .
Ecne veux ic pafler les bornes de ma vocation : mais ſeulement ayder aux pauures
peltiferez en leur extremité de la mort.

oma

109

Jordan
lie del

murs:
mord:
laici La mort eſt la peur des riches.
PSIONS Le deſir des panures .
Cater La ioye des ſages.
La crainte des meſchans.
00017 Fin de toutes miſeres ,
richtig Et commencement de la vie eternelle.
doba Bien - heureuſe aux esleus ,
hoben Et malheureuſe aux reprouseks.
CS

delet

E
I DETT

FFff iij

om
890

16

TABLE DES CHAPITRES D V VINGT TROISIESME

liure , traictant des moyens & artifices d'ad


iouſter ce qui defaut.

É moyen d'auoit vn æil artificiel. Chapitre j.


Le moyen de contrefaire un nez par artifice. chapon
La maniere d'accommoder les dents artificielles. chap.iy B

Le moyen d'adapter un inſtrument au Palais pour rendre la paro


le mieux formee. chap. iii
Le moyen de ſecourir à ceux qui auroient la langue coupee, les
faire parler. chap. v
Le moyen de reparer le vice de la face desfiguree. chap.
De l'oreille perduë. chap.vii
De ceux qai font voutez ayans l'eſpine courbee. chap. viii
De ceux qui iettens leur vrine inuolontairement, & le moyen de ſecourir à ceux qui ont laver
se perduë. chap. ix
L'artifice de mettre un poulcier ou doigtier. chap. *

Du vice dont le malade eſt appellé v arus , & Valgus , & des iambes trop gresles. chap. xi
Les moyens d'accommoder des mains, bras & iambes artificielles, au lieu des membres ex .
tirpez. chap. xii c
Le moyen de faire aller droict une perſonne qui ſeroit boiteux à raiſon de l'accourciſement
de la jambe. shap. xiii

D
837
A

LE VINGT.TROISIESME
LIVRE , TRAICTANT DES MOYENS ET
ARTIFICES D’ADIOVSTER CE QUI DEFA V T
naturellement ou par accidenr.
B
PAR AMBROISE PARE DE LA V AL ,
CONSEILLER ET PREMIER
Chirurgien du Roy.
' P R E F A C E.

Le moyen d'auoir un æil artificiel. C H 4 P. 1.

AR су. deuant nous auons amplement deſcrit aux liures des Tu


meurs, playes , Viceres, Frađures , & diſlocations, les trois points
iuſquels s'exercent les operations de Chirurgie , qui ſont, ioindre
e ſeparé,ofter le ſuperflu, & ſeparer le continu. Reſte maintenant
C
en bref le quatrieſme, qui eſt adiouſter ce qui deffaut naturelle Quatrieme
mentou par accident. Or pour entrer en matiere, ſans dauantage Chirurgie.
s'amuler à aucuurir & prefacer, nous voyons ſouuent les yeux ſe creuer , ſortir dela
teſte,ou bien deuenir emaciez, à raiſon de quelque coupou inflammation. Partant
où cel accident aduiendroit apres la curation de l'vlcere, on pourra adapter dans l'or
bite vn oil fai&tpar artifice comme ceux- cy figurez , qui ſont ſeulement pour l'orne
ment du malade.

Teux artificiels , deſquels t'eſtdemonftré le deſſus & le deſſousquiſeront


d'or e/maillé , & de couleurſemblable aux naturels.

1
838 Vingt-troiſieſme Liure ,
Ets’iladuenoit qu'on ne peuſt loger celt æil arcificiel dedans l'orbite, on pourracn.
coreen faire un autre cel quetu vois par cette figure,faitd'un fil de fer applaty,plič& A
couuert de velours ou caffetas,ayantſon extremice platic, afin qu'il nc bleffe,& l'au.
rreextremité ſera couuerte de cuir façonné, & lc peintre luy donnera par ſon artifice
figure d'oeil.Cela faict on le poſera ſur l'orbite:Orledit fil ſe peut eſtendre & referrer
commc fai & celuy que lesfêmes ont à leur tenir leurs cheueux. Il ſera paſlépardef
fus l'oreille, autour de lamoitié deteſte.

Autre figured'æilartificiel.

‫رسام‬

Iladuient ſouvent aux petits enfans vne maladie di&te Strabiſmus,quieftvnedißor.C


fion cõrrain & c auec inegalite delaveuë,nous les appellons en François, Louches ou
bigles. Le plus ſouuét telie maladic aduicnt(comme nousdirons plus amplementau C
liure de la Generation ) pour auoir mal ſicué le berceau de l'enfant,ſoitde nui& ou de
jour,le mettant à coté de la lucur: qui fai & que pourvoir ladite lucurileft contraint
de retourner les yeux à coté d'icelle,cſtanı touſiours deſireux de la regarder:ou bien
pource que la nourrice eft louche,quifaict que l'enfát la contrefait. Oi poſons le cas,
que quelque petit enfant fuſt louche,ayant la vcuë torſe ,ou par le vice de la nourrice,
ou autrement.Paul Ægincce liu. 3. chap.22. nous a laiſſé un moyen propre pouryre.
medier,& redreſſer la veuč,lequel n'a eftépra &tiqué d'aucun de noſtre réps,quc i'ayo
peu ſçauoir: C'eſt qu'il veut que l'on face vn faux viſage en forme de maſque, lequel
doit eſtre ſi bien proportionné & accómodé ſur le viſage de l'enfant,qu'il ne le bleſſe
aucunement: & toutesfois ilfautqu'il ſoit fi juſte, que le jour n'y puiſſe entrer par les
cntrcdeux, craignant que ledit enfant ne tournaſtía ycuë vers le iour. Telfaux viſa
geou maſquc aura feulement deux petitstrous droið au milicu de l'ail , afin que le D
iour y puiffe rcluire : ce qui ſera cauſe que l'enfant n'apperccuát autre lumiere & clar.
té que par lestrous ,tiendra fa veuë touſiours fichec en cet endroit , de forte que l'cil D
s'accouſtumera à demeurer droiæ & arrefté , reprenant vne nouuelle habitude , &
laiſſant celle qu'il auoit acquiſe regardant de coſté.Lcdit faux viſage fera faict de ma.
tiere la plus legere que l'on pourra , & ne doit couurir le viſage plus bas quc lenez
laiſſant la bouche à deſcouuere,afin que l'enfant puiffe à toute heure tetter ou man .
ger: attendu qu'il doit demebrer continuellement ſur ſon viſage : pour lequel tenir
plus commodement ,ilſera attaché par le derriere de la teſte auec quatre pecites atra
ches, deux de chaque coſté , comme on peut voir par ce portraict.
d'adiouſter ce qui defaut.
. Pourtraict d'ux maſque , par lequel la veue eft redreſſee. 895
CHE

+
par lequell'enfant pourravoir,& addreſſer ſa vcuë, Les beſicles ſont marquees par
3
Aulieu de ce maſqucon pourra pareillement vſer de belicles faiếtes de corne, que
l'on adaptera ſur du cuir,& ſeront poſeesſur lesyeux :au milieu y auravn pecit trou,
BB .& ia picce du cuir par A. Les courroyes par leſquelles ſonc attachces , par Cc .
С Figure des beſicles.
a
Here
100 %

MOTU
942
BВ B
Α.

eality
D
lub

Le moyen de contrefaire un nez par artifice. CHAP. 11.

A'R E I'L I E MENT le nez peut eſtre du tout couppé , ou portion


d'iceluy , & ne peut iamais eſtre reioint , parce que vnion ne peuteſtre
R faide aux membres organiques : ce qui eſt prouué par Hippocra- vnPOioNTnqHneoy so
tes. La raiſon eſt , qu'vne partie de noſtre corps pour cftre re- ffauvoirfai
join &te & conſolidee , a beſoin de receuoir nutrition , vic & ſentiment des reaux para
membres principaux, au contraire des greffes qui ſe reprennent aux troncs des tsesorganis
arbres. Parquoy il faut que celuy qui aura perdu ſon nez ,en face faire vn autre par ques ,
artifice, ſoic d'or, ou d'argent, ou de papier & linges colez , de celle figure & couleur
894 Le Vingt quatrieſme liure
qui eſtoit le fien :lequel ſera lić & attaché par certains filets derriere l'occiput , ou à yn a
bonnet. Et d'abondant s’iladuenoit (comme ſouvent ſe faict) qu'auccquesle nez on
emportaft portion , ou toute la léurc ſuperieure,ict'ay bien voulu donnerles figures
afin d'ayderà l'ornementdu patient,lequels'il porcoic barbe,enpourra faire adapter,
ainſi qu'il en ſera neceſſaire.
Portraicts de nez .
I

Con
B

M
Il s'eſt trouué en Italic vn Chirurgien,qui par ſon artifice refaiſoic des nez de chair
en celte maniere. C'eſt qu il coupoit entierement les bords calleux ou cicatriſcz do
Façon non C
wille de re ncz perdu,comme l'on faict aux becs de licure,puis faiſoit vnc inciſion cane grande &
faire les protonde qu'il eſtoit neceffaire, au milieu du muſcle ditBiceps , qui eſt l'undeceux C
nez quifechit le bras : puis ſubit faiſoit poter le nez en ladite inciſion , & bandoit ſi bien la
teſte auec le bras,qu'ilne pouuoit vaciller çà nc là:& certains iours apres,qui cſtordi
nairement ſur le quarancierme iour , cognoiſſant l'agglutination du nez auec la chair
dudit muſcle, en coupoic tant qu'il en falloit pour la portion du nez qui manquoit: en
apres le façonnoit de ſorte, qu'il rendoit le nezen figure, grandeur & groſſeur qu'il
eſtoit requis, & traitcoit cependant la playe du bras, commeles autres,lorsqu'ilya
deperdition de ſubſtance: & durant leſdits quarantciours faiſoit vſer à ſon malade
de panades,prelis , & autres viandes faciles à tranſgloutir , & quant aux remedes
deiquels il vſoit, cſtoientde quelques baumes agglutinatifs. Nous auons de cetele
moignage d'vn Gentilhomme nommé le Cadec deiain& Thoan,lequel ayantperdu
lenez, & porté longtemps vn d'argent,ſefaſcha pourlaremarque, quin'eſtoit ſans
vne riſee,lors qu'il eſtoic en compagnie. Ec ayantouydire, qu'ily auoit en Italie yn
maiſtre refaiſeurde nez perdus , s’en alla le trouuer , qui le luyrefaçonna en la manic
Histoire. re que deſſus, comme vne infinité de gens l'ont veu depuis,non ſansgrandeadmi.
ration de ceux qui l'auoient cogou auparauant auec vn nez d'argenc. Telle choſe D
n'eſt impoſſible , toutesfois me ſemble fort difficile & onereuſe au malade , tant
pour la peine de tenir lateſte lice long tempsaueclebras, que pour la douleur
des inciſions fai &tes aux parties faines, coupant & cfleuant portion de la chair
du bras pour former le nez : ioinot aulii qu'icelle chair n'eſt de telle temperature
Telle choſe ny ſemblable à celle du nez , & pareillement eſtant agglutince & repriſe, nepeut
jefiul awli jamais ellre de celle figure & couleur que celle qui eſtoit auparauant à la portiondu
qu'onfauente
les na- nez ement.: aulli les creux des narines ne peuuenc eſtre cels, comme ils eſtoient pre
mierperdu
geaux . !
La ma
D'adiouſter ce qui defaut. 395
А
La maniere d'accommoder les dents artificielles.
C H 4 P. III.
1

Velquesfois par vn coup orbc ou autrement, les dents de devant ſont roma
puës: ce qui fait que puisapres le patienc demeure cdenté, & defiguré auec iéIncomm
qu'appodiaor
deprauation de la pareic. Parquoy apres la cure faicte, & que les genciues sent lesděts
ſeront endurcies, luy en fautadaprer d'autres os ou yuoire , ou de dents de perdrës.
Rohart qui font excellences pour cet effe &t, faictes par arrifice , leſquelles ſeront
lices aux autres dentsproches, auec fil commun d'or ou d'argent , comme nous ap
prend Hippocratès au liure de articulis, lect. 2. ſent. 25. De ces choſes cu en as icy
les figures.
B
Figure des dents artificielles.

M.
MATIE
Le moyen d'adapter un inſtrument aupalaispour rendre laparole mieuxformee.
CHAPITRE IV.
edia
Velquesfois vnc portion de l'os du palaiseſt briſee & emportee par deInconueniet
los da pa
C
‫ܢܪܪܢ ܬ‬
coup de hacquebote ou autrement, ou bien par vlcere de verole, lais perduo
dont aduient que pour ceſte cauſe les patiens ne peuuent bien pro
nonceray faire entendre ce qu'ils veulent dire : pour à quoy ſubue.
TUBE nir,nous leur auons trouvé vn expedient par l'ayde & miniſtere de
berada noſtre arc. Ce qui ſe fera en appliquant vn inſtrument vn peu plus
non grăd que le trou où l'osdefaudra. Etleditinſtrumene ſerafait d'or
ou d'argét,de figure voutec,& delié,d’eſpeſſeur côme d'vo eſcu, auquel ſera attachée
yac eſponge,par laquellecſtant mis ledit inſtrumentau trou où manquera l'os ,ladice
cfponge aſſez toſt s'imbibera & s'enficra,par certainehumidité ,& puis apres tiendra
fermc:Etpar ce moyen la parole ſe formera mieux. l'ay veu aduenir aux guerrestels
deco inocnucnicns, quelquesfois par coups de hacquebuse & autres fortes d'armes :nais
principalement (comme i'ay dit ) par vlceres prouenus de la verole , leſquels i'ay ſe
courus par ce moyen. Or tu asicy le portrai& desinſtrumens donc il eſt queſtion.
D
Figure des inſtrumens diets obturateurs du palais.

GGgg
Le Vingt- troiſieſme liure
896

Autre inftrument fanseſponge , lequela vne eminence parderriere, qui ſetourne auec un perisA.
bec de corbin ( quetu vois en ceſte figure) lors qu'on le metdans le trou.

1
!

Le moyen de ſecourir ceux qui auroient la langue coupee , & les faire parler. B

C H 4 P. V.

Aintenant fave declarer l'ayde que peur donner le Chirurgien àceluy qui
Hifoire .
auroit perdu portion de la langue , au moyen dequoy il auroit du touc
perdu la parole : artifice qui n'a eſté trouvéque par accident ainſicomme
ie deduiray preſentement. Vn quidam demeurant à un village nommé
Yuoy le Chaſteau ,quieſt à dix ou douze lieuës de Bourges , eut portion de la langue
coupee , & demeura presde trois ans fans pouuoit par la parole eſtrecntendu, Aduinc
que luy eltant aux champs auec des faucheurs, beuuant cn vne eſcuelle de bois aſſez
delice : I'vn deux le chatouilla , ainſi qu'il auoit l'eſcuelle entre les dents , & profera с
quelque parole,en ſorte qu'il fut entendu. Puis derechefcognoiſſantauoir ainſi par
lé , reprinc ſon eſcuelle , & s'efforça à la mettre en meſme ſituation qu'elle eſtoit au C
parauanı : & derechef parloit , de ſorte qu'on le pouuoit bien entendre avecques
Neceßoré ladite eſcuelle. Et fut long temps qu'il la portoit en ſon ſein , pour interpreter ce
maiftreſle qu'il vouloit dire, la mettant touſiours entre les dents. Puis quelques temps apres
des arts.
s'aduiſa ( par la neceſſité qui eſt maiſtreſſe des arts ) de faire vn inſtrumentdebois,de
telle figure que ceſtuy: lequel il porcoit pendu à ſon col . Et par le moyen d'iceluy faz
ſoit encendre par la parole tout ce qu'il vouloit dire .

Inſtrument pour ayder à parler à vn patient, lequel auroitportion de lalangue coupee.


is

A D

D
с

1 BВ B

L’vſageeſt tel ( A ) eſt la partie ſuperieure, quidoit eſtre d'eſpeſſeur enuiron d'vn
teſton & demy, laquelle il cenoir entre les dents de pcuant,nommeesinciſiues, non
qu'elle ſortiſt hors, inaisſembloit qu'il n'euſt rié en la boache. ( B ) la partie infericure
D'adiouſter cequi defaut. 897
A plus ſubtile: eſpaiſſe d'vnteſton, ſeulementlatenoit juſtement contre l'extremité du
,
reſte de la langue eſtant au droit du filecou liga:nent de la langue:& ce qui cſt vn peu Defcriptiori
concaue incericurement(qui eſt la troiſieſme portion dudit inftrumétjmarquée par dudit in
(Ç ) la tenoic deffous en la ſicuation toute platte.Ec quant au filet que tu vois c'eſtoit Strument.
pour prendre ledic inſtrument au col. ( D ) eſt la partie excerieure dudic inſtrument.
Oriere puis alleurer qu'apres auoir recouuré ledic inſtrument, & la manicre d'en
vſer quifut par le moyen demonſieur le Tellier, Medecin tres.docte, demeurant à
Bourges)i'en ay veu l'experiéce à vnicuncgarçon ,auquelon auoit coupé la langue,
lequelneantmoins parle beneficedudic inſtrument, proferoit ſi bien les mots, qu'on
le pouuoit entendre entjerement ou tout ce qu'il vouloit dire & expliquer.Etde ce
chacun en face l'eſprevuc,lors qu'on ſe trouuera à l'endroitpour ce faire.
Lemoyendereparerle vice dela facedefigurée. CHAP. V I.

B L aduient quelquesfois par vne bruſleure de poudre à canon , charbon pe


{tiferé ou autre occaſion , que la face demeure excrememenc hideuſe à
voir , de façon que le maladeeſt grandement eſpouuentable. A ceux-là
T. donc, il fautbaillervn malque fait li proprement qu'ils puiſſent converſer
auec les hommes. Auſſi peut- on reparer levice des léures qui auront eſté amputées
par yn coup d'eſpécou d'vn charbon peſtilent, ou par vo chancre qui aura occupé
telle partie :lesdents demeurans deſcouuertes apres l'auoirextirpé,ce qui eſt diffor
me à voir. A cels on doit reparer ce qui defaut au plus pres du naturel par le moyen
d'vne léure d'or elmaillé,de couleurdu viſage, laquelle ſera attachée à vnepetite ca
lotte, ou pluſtoft à la face quenous auons hcurcuſement pratiquée & enſeignée cy .
deuant au chapicre du chancrc .
tolik
Deľoreille perduë CH A P. VII.

Eux qui auront faute d'oreilles,ſoit par le defaut de nature ,ou par accident,
. с comme par playe,ou parvn charbon peftiferé, ou par morſure de beſte , ou
par autre maniere,fil'oreille n'a eſté du cout emportée , & qu'il en ſoit reſté
bonne portion ,on doit troüer le cartilage avecvncpetiteporte- piece , & y
faire des trous tant qu'il ſeráneceſſaire.Apres la cicatriſation deſdits trous, on atta
4
chera v ne oreille artificielle : & où l'oreille auroit eſté du tout amputée,on y en appli
quera vne artificielle de papier collé ou cuirbouilly ,façonnée debonne grace,com
me tu vois par ceije figure.Er ſera cenuë auec petits liens autour de la teſte:ou le ma
lade laiſſera croiſtre ſes chcucux longs,ou portera vne calorte. Auſſi lors qu'ily a cu
grande quantité du crane perdu, faudra porter vn bones de cuir bouilly pour reſiſtics
aux iniurcs excernes,ainſiquei’ay par cy-deuant eſcricaux playes de teſte.
.

Figure d'uneoreilleartificielle.

‫ܗܽܕ‬

GGgg ij
--
Le Vingt troiſieſme liure
898

CH A P. VIII .
De ceux qui ſontvoutez , ayant l'eſpine courbee.

Camfe de Velques vns & principalement les filles, parce qu'elles ſont plus
won !une (9 mollaffes,deuienent boſſuës, pource que leur eſpine n'eſt pas droi.
l'espine.
& te, mais en arc, ou en figurede S. & tel accidentleur aduientquel
quesfois par cheute ou coups, ou quelque vice de ſe ficuer,comme
nous auonsamplement monftré au liure des Luxations.Oupareil.
lement parce que les folles meres , ſubic qu'elles voyent leurs filles
ſe pouuoir tant ſoit peu tenir debout , leur apprennent à faire lare.
uerence ,les faiſant baiſſer l'eſpine du dos delaquelle eſtanc encore les ligamens iaxes ,
mols & glaireux , en ſe relevant pour la pelanceur decout le corps,dontl'eſpine eſt le
fondemēc comme la carine d'vne nauire ;ſe contourne de coſté & d'autre , & fe ployé
en figure de la lettre S.qui fait qu'elles demeurent tortuës & boſſuës, & quelquesfois B
boiteuſes. Auſſi pluſieurs filles ſont boſſnës & contrefaictes pourleur auoir en leur
ieuneſſe par trop ſerré le corps . Qu'il ſoit vray , on void que de mille filles villageoi.
ſes,on n'en trouue pas vne boſfoë: à raiſon qu'ils n'onc eu le corps aſtraint & crop fer
ré . Parquoy les mares & nourrices y doiuent prendreexemple. Pour reparer & ca
cher cel vice , on leur fera porter lescorcelets de fer delić , leſquels ſeront trouez afin
qu'ils ne poiſent pas cant , & ſeront ſi bien appropriez & embourrez qu'ils ne
bleſſeront aucuvement : 2 ſeront leſdits corcelets changez ſouuentesfois ſile maſa.
de n'a accomply ſes trois dimenſions : & à ceux qui croiſſent, les faudra changer de
trois mois en trois mois, plusou moins,ainſi que l'on verra eſtre neceſſaire:car autre
ment en lieu de faire un bien ,on feroit vn mal . La figure du corcelet eſt telle.

Corcelet pour dreffer vn corps tortu .


?

C C
O
a
o

De ceux qui icttent leur vrine inuolontairement , le moyen de furuenir à ceux D


CHAP IX .
qui ont la vergaperdue.

Trangurie , eſt lors que l'vrine diſille inuolontairement goute D


à goute : ce qui aduicnt par le defaut de la vereu retentrice& de
prauation de l'expulliue, comme auons dicen ſon lieu. Ceux qui
ont telle indiſpoſition ,ſonten grande peine. Et pour les foulager,
i'ay inuencé cet inſtrumét ,lequeleſt de fer blanc de la figure d'vne
brayecre , & contient en la cauité environ vn poflon. Il ledoit
mettre en la brayette du malade , à laquelle il ſera atrachéaucc
vne aiguu icite parla nneau qui t'elt aſſez apparent. Et le malade poſera l'extremi
té de la verge dans la cavité marquee C. en Jaquello y a vnc piece auflide fer blanc,
enfoncee aficz profondement,tantpour ſouſtenir le bout de la verge , que pourgar F
der & empeſchet lvrine de fortir hors , melmes en cheminant. B. monſtre ladi& c

piece . A & D , monftrentle corps dudit inſtrument,à ſçauoir A. la partie antericure,

& D. la poſtericurc.
.89
d'adioulter ce qui defaut.

А Figure d'un inſtrument quipeut eftre dit reſervoir de l'urine.

B
A
1

.
e
B
B

Ceux quione entierement perdu la verge virile iuſques au ventre , ſont en poine
lors qu'ils veulenc vriner ,& font contraints s'accroupir commeles femmes.le leur ay
inuenté ceſte Capule , laquelle on peut faire de bois ,ou de fer blanc, ou d'autre ma
tiere , de longueur & groſſeur d'un doigt , & cauc. A. C. monftrent le corps & lon
gueur de ladite Canule. B. l'extremite ſuperieure qui eſt platte & plus large que le
IM
corps. D. la partie externe d'icelle excremité. Il s'appliquera par la partie lopericure
placce contre le conduic de l’yrine , laquelle paſſera au crauers , & ainſi pourra vriner
debout ſans s'accroupir .

С Figure dudit inftrument ou Canule pour ceux qui ont perdu la Verge,
qu'on peut nommır Vretere,
00

001
a -)

27
C

CH A PITRE X.
L'artifice de mettre un poulcier ou doigrier.

Ors qu'vn nerf ou randon ſono entierement coupez ; l'action qu'ils fai.
ſoient ſeperd , & partant la partie demeure manque à flechir ou cltendre, Hifuire.
* & quelques foispeut eſtre aydec par l'artifice du Chirurgien . Ce que i'ay
fait à vn Gentilhomme qui eſtoit à Monſeigneur le Conneltable, lequel receut vn
coup decoutelas le iour de la bataille de Dreux , pres la iointure de la main dextre
partie externe , de ſorte que les cendons qui eſlevent le poulce , furent du tout cou
pez , dont ledit poulce apres la conſolidation de la playe demcura fechy au dedans de
la main ſans ſe pouuoir leuer , ſi ce n'eſtoit par le benefice de l'autre main : mais ſubic
ſeretournoit à reficchir ,commeauparauant,qui eſtoic cauſe que le Gentilhomme ne
pouuoitprendre ny cenir eſpec , dague , lance , pique, ny autres armes. Or voyant la
GGgg jij
୨୦୦ Le Vingt-troiſieſme liure
Vfage du main eſtre quaſi inutile & priuce du maniement des armes, ilmc pria lay couperle А
dergrier. poulce,ce que ie ne luy voulus accorder: mais au contraire luy fis faire un inftrument
de fer blanc, dans lequel il mettoit ſon poulce. Ledic inſtrument eſtoit attachépar
deux lanieres àdeux petits anneletsſurla iointure de la main, li dextrement , quele
poulce demeuroic elleuć: & par ainſi legentilhomme pouuoit tenir eſpee,pique, lan
ce, & autres armes. La figurer’eſt icy repreſentee.
Figure d'unpoulcier defer blanc pourtenir le poulce esleué.

B
B

D# vice des iambes dont les malades font appelez Vari & Valgi, & des
iambes trop gresles. C H 4 P. XI.
Cauſe du
wce domelo
maladec L m'a ſemblé bon d'eſcrire vn vice dont le patient ſelon la diſpoſition eft
nommee en Latin Varius, Içauoir eſt quand le pied eſt tourné versledc.
appelié van
Kus on Val
gus.
THE dans: & ce vice vient quelquesfois désle ventre de la mere : laquelle pen
danc fa groſſeſſe s'eſt cenuë trop longuementaflıſe lesiambes croiſees: ou
pource que la mere a tel vice : ou pour la mauuaile figure qu'aura teruë la nourrice
enuers l'enfant,pourne l'auoir tenu bien droit,ou pour auoir preſſé & tourné le pied
contre la figure naturelle . Car les os des petits enfans nouvellenient nez font fort
mols. Au contraire,quand le pied eft courné vers la partie exterieure , on comme le
Obferuation patient quiatel vice V algus,qui ſe fait auſſide meſme cauſe: & l'vn & l'autre vice eft
bonete a nommé du vulgaire pied bot : & n'aduient pas ſeulement aux pieds, mais aux ge
neceTorre noüils pareillemer.t. Pour remedier à tels vices, & reduire les osen leur lieu , il les
pourreduirefaut pouſſer en leur ficuation naturelle. Etfaoticy noter,que ſi le malade eſtVarus,il
les os .
faut pouſſer le pied , & letenir commelion le vouloit rendre Valgus. Au contraire,
s'il eſtoit Valgus , le faut pouſſer comme ſi on le vouloit rendre Varus: & lesy fauttc.
nir aſſez longtemps afin que les os puiſſent demeurer en leur deuë ftuation. Car où
l'on ſe contenteroit deremettre ſeulement les os en leur place , ils retourneroienten
leur premier vice. Parquoy ilfaut d'auantage les pouſſer, & les y faut tenir, tant par
bandages & compreſſes appliquces au lieu verslequel tend le vice,& auſſi par petites
botines propres à ce faire, leſquelles ſerontde l'eſpeſſeur d'un teſton, faites de cuir
boüilly , & fenduës par le deuant & ſous le pied, afin qu'elles s'ouurent mieux poury
merire le pied,& feront liees & attachees commodément: & y ſera appliqué ce reme.
de , qui en telcas eſt excellent.
24. Thuris, maſtiches, aloës, boli armeniæ an. Zi.aluminis rochæ, refinæ pini ficca D
Quand on ſubiiliſſimè pulueriſatorum añ z iij. far.volatilis Ži.B.albumina ouorum q.1,fiatme.
d it faire dicam . On y peut adiouſter de la terebentine , depeurqu'il ne ſe deſleiche trop. Il
cheminerles
Vores
faut icynoter qu'on ne doit aucunement faire cheminer les enfans Vares & Valges,
Valjes. que premierement les iointures ne foientbien affermies, de peur qu'ils ne ſe deſboi.
tent de rechef. Er lorsqu'on voudra les faire marcher, on leur baillera des ſouliers al
ſez hauts comme des demies botines , & lacez par ledeuant,ou attachez à un petit
crocher, & qu'ils ſoient de cuir aflez ſolide, à fin de tenir couſiours les osfermesſur
leur jointure,& qu'ils ſoient contraints d'y demeurer : & faut faire que la ſemelle ſoit
plus haute du coſté où le vice eſt enclin à ſe tourner, à fin de le faire renuerſer du coſté
qu'ilſera neceſſaire, comme tu vois par ceſte figure.
D'adiouſter ce qui defaut.
901
A

Pourtraictdedeux petites Botines , l'une onuerte , & l'autre cloſe.

an

KIT

MIN

Les moyens d'accommoder des mains , bras do iambes artificielles,


ode
au lieu de ceux qui auront eſté coupez.
en
‫ܘܳܐ‬ CHAPITRE X'11.

A neceſſité nous a contraints à chercher les moyens d'imiter Na .


CREATED ture , & ſuppléer au defaut des membres deperdus , comme cu ver
ras aux membres artificiels.Les figures & pourtraits des mains,bras

dan & iambes qui s'enſuiuenc, repreſentent les mouuemensyolontaires


d'auſſi pres qu'ileſt poſſible à l'art d'enſuiure Nature. Car flexion
on, et
& extenſion ſe pcuuent faire par bras & iambes artificiellement
D
faites ſur ces pourtraicts : leſquels i'ay par grande priere recouuerc
d'vn nommé le petit Lorrain , Serrurier demeurant à Paris , homme de bon eſprit, Leperit Zos
s

auec les noins & explication de chacune partie deſdi &ts pourtraiếts, faiếte en protein , ingen
he

pres termes , & mots de l'artiſan: afin que chacun Serrurier ou Horlogeur les puiſſe nieux Serg
012
bien entendre , & faire bras ou iambes artificielles ſemblables : qui ſeruent non ſeu - rurier.
del
lement à l'action des parties coupees, mais auſſi à la beauté & ornement d'icelles , có .
Da
meon peut cognoiſtre & voir par les figures ſuiuantes.

nada

GGgg iiij .
902 Le Vingt- troiſieſme liure

А
Portraict de la main artificielle.

Deſcription de la main de fer.


9

i Pignons ſeruans à vn chacun

doigt qui ſont de la ріссе


meſme des doigts , adiouſtez
& aſſemblez dcdans le dos de
la main.
2 Broche de fer qui paſſe par le
milieu deſdiēts pignons, en
laquelle ils tournent.
3 Gaſchettes pour tenir ferme
vn chacun doigt.
4 Eſtoqucaux ou arreſts deſdi. B
tes gaſchettes , au milieu
4 . deſquelles ſont cheuilles pour
arreſter leſdites gaſchettes.
5 La grande gaſchette pour
ouurir les quatre petites
gaſchettes qui tiennent les
doigts fermez.
6 Le bouton de la queuë de la
e grande gaſchette, lequel &
on poufſc la main s'ouurira.
1972)
7 Lc reſſort qui eſt deſſous
la grande gaſcherte ſeruant à
la faire retourner en ſon lieu,
с
& tenant la main fermec.
is Les reſſorts de chacun doigt, qui ramcnent & font ouurir les doigts d'eux.mel. G
mclmes , quand ils ſont fermcz.
Les lames des doigts.

figure fuiuante te monftre ledehorsde lamain ,& le moyen de l'attacheranbras


La
e à la manche du pourpoint,

o
o
***
D'adioulter ce qui defaut. ୨୦ 3

Deſcription du bras de fet.

1 Le bracelet de fer pour la forme du bras . 2. L'arbre mis au dedans du grand


reſſort pour le cendre. 3 Le grand reſſort quieft au coude , lequel doit eſtre d'a

cier trempé, & de trois pieds delongueur ou plus. 4 Le roquet. s La çatchette.


6 Le reſſort qui poiſe ſur la gaſchetce , & arreſte les dents du roquet. 7 Le clou à
viz pour fermer ce reſſort. 8 Le tournant de la hauſſe de l'avant-bras : qui eſt au
deffus du coudc. 9 La trompe du ganceler fait à tournant auec le canon de l'avant
bras quicft à la main : leſquels ſeruentà faire la main prone & ſupine : c'eſt à Içauoir
pronc vers la terre , & ſupine vers le Ciel .
С
ZANI
Autre pourtrait.
es dans

D'vne main fai &te de bouilly , ou papier colé , les doigestenans'vne plumepour
eſcrire , propre à celuy qui auroit eu la main du cout coupee & amputee ( le malade
metcanc ſon moignon dedans le plus auant qu'il pourra ) laquelle s'attache à la man .
multi che du pourpoinētpar certains trous que tu vois en la figure.

D
904 Vingt-troiſieſme Liure ,
Semblablement quand à quelqu'vo par vnc playe les tendons & nerfs de deſſus la A
mainſeront coupez,quifait que le malade ne peut leuer la main , demeurant quaſi
inutile : elle ſera tenuëelleuce par cet inſtrument fait de fer blanc , couuert de caffc
cas,ou autre choſe, & ſera posé ſousla main,ioignant la premierciointure desdoiges:
puis attachépar deſſus le Carpe. Cela fait, que la main demeure droiđe , de façon
que le malade s'en ayde par le moyen dudit inſtrument, qu'on peut nõmer Dreſſe
main.Le bour de cet inſtrumêt quicft rond,ſedoit mettrecorrela premiere iointure
des doigts,& l'autre bour contrele Carpe, & ſera ſerré par les liensfort ou peu ſerrez,
ainſi qu'il ſera neceſſaire.
Figure du dreſſe-main.

wil
len

C
Portraict de iarbesartificielles.
Deſcription delajambe debois.
TA
MB
E

I o Le lien par lequelon tire l'an


neau de la gaſchette , pourplier
RE

la iambe. 1. Le cuiſſot auec les


VE
TVE
S

IAMBE YVE
clous à viz , & les trous deſdiás
clous pour ellargir ou aftreindre
10.5 iur la cuiſſe qui ſera dedans. 2 La
pomme pour poler & appuyer la
10 S main deſſus & le tourner. 3 Le
perit anneau qui eſt au deuant D
de la cuifle , pour dreſſer& con.
B
II duire la jambe où l'on veut, I

L13 4 Les deux boucles de dcuár , &


celle de derriere , pour cenit &
12 O ) )
atracher au corps du pourpoinc,
s Le petit fond au bas, dedans
lequel le mer la cuiſſe iuſques à
H3 deux doigts pres du bout , fer
van , aufli à faire la beauté &
forme da la iambe. 6. Leretfort.
pour faire mouuoir la gatchette
qui ferme la iambe. 7 La gaſ
chette qui cienc le baſton de la
iambe droit & fermc , de pour
d'adiouſter ce qui defaut. gos
A qu'il ne renuerſe. 8 L'anneau auqueleſt attachee vnecorde pour tirer la gaſchettes
afin que le bafton ſe puiſſe plier , lors que l'on le lied , & que l'on eſt à cheual. 9 La
charniere pour faire ioüer & mnouuoir la iambe , miſe au deuant du genouil. 10 Vn
peciç eſtoqueau ou arreſt pour garder que la galchette ne paſſe outre le cuiſſor: car ſi
eile patroit outre , le reſſort le romproit, & l'homme coinberoit. 11 La virolle de fer,
dedans laquelle le baſtonelt inlerč. 12 L'autre virolle au boutdubaſton, qui porcela
charniere à faire mouuoir le pied. 13 Vn reſſort pour faire remettre & reiecter le pied
en ſa place. 14 L'arrel qui ſera au reſſort pour reiercer le pied en bas,
I ambe reneſtue.
A Lames pour la beauté du genouil . B Lagreue pour la beauté & formedela iambe.
C Legras pour acheuer la forme de la iambe . D Lames pour former le coup de pied .
Figure d'une iambe de bois pour les pauures.

Deſcription de lafigure de la iambe de boispour


les pauures.
B a a Repreſente l'arbre de la iambe.
bb Les deux fourchons pour inſerer la cuiſſe ,
donc le plus court le doit mettre dedans
iambe.
Te monſtre le couſſinet , lequel ſe met pour
ſupporter mollement le genouil ſur la ron
deur de l'arbre.
dd Sont les courroyes auec boucles tranſuerſan
tes en deux endroicts les fourchons de la
cuiſſe pour la ſerrer & tenir entre iceux .
Pare , c'eſt marquee la cuiſſe, afin de c'enſeigner
! la vraye poſicion d'icelle ſur la iambe de
bois.

C
Figure d'une bande pour ayder à leuer le pied.
แม่
D'abandane il aduient ſouuent, que pour auoic
receu quelque coup d'eſpće, ou autre inſtrument
trenchant aux tendons & nerfs de la iambe, la
malade apres la conſolidation ne peut qu'à bien
grande peine marcher & leuer le pied , le trai
nanc en arriere , comme eſtant à demy paralyti.
ede que . Pour remedier à cet accident , le malade
aura vn chauſſon au pied auquel ſera attachee
vne bande marquee par A A, icelle faiete de toile
large de trois doigts, laquelle ſera fenduë au mi.
lieu dela iambe , afin qu'elle paſſe aux coſtez du
D genoüil, attachée fermemét aux cillets du pour
point , à fin de tenir le pied elleué lors que lema.
lade chemine.
La figure eſt celle.
40

3
1906 Le Vingt-troiſieſme liure
Le moyen de faire aller droit vne perſonne qui ſeroit boiteux , à raifonde
l'accourciſſement de la iambe.
CHAPITRE XI11.

I par quelque accident la iambe demeuroit courte , dont le malade


ſeroit boiteux : A tel ſymptome faudra vſer de cet inſtrument, die po
cence à ſiege, laquelle eſt faicte decel artifice, que l'on pourra facilement al
ler droiæt & bienà l'aiſe,eu égard à la grandeur de l'inconuenient:dc laquel
le potence ie t'ay voulu donner le portrai &t accommodé à la perſonne,tant par de
uant que par derriere .
Figure d'une homme boiteux ſitué ſur unepotence de grandartifice, laquelle i'ayrecouuert de
Maiſtre Nicolas Picart Chirurgien de Monſeigneur le Duc de Lorraine. B
A B

A
‫الدو‬

IC C

A Monſtre l'arbre de la potence , lequel eſt de bois. D


B Lefiege qui eſt de fer,lequelembraſſe la cuiſſe le long du ply de la feffc. D
C L'arc -boutant qui ſouſtient ledit ſiege.
ſur lequel eſt poſee la plante du pied , lequel eft crochu , afinde
D L'eſtrierr de fer, r
teni le pied ſuie .
E L'arc - boutant dudit eſtrier.
F Vn fer à pluſicurs pointes pour tenir la potence qu'elle ne gliſſs.
G La croix dela potence , laquelle ſe met ſous laiſſelle.
d'adiouſter ce qui defaur . ୨୦ 7
A Ceux quiaurõt perdu leurscheueux, pour avoir eu la tigne, pelade,oli d'autre cau
ſe,auronc vne fauſſe perruque. Auſſi les femmes qui auront leurs cheueux argen
tez, de peur d'eltreeltimees vieilles porteront de ratepenades, delquelles à prelent
elles ſe içauent bien accouſtrer & farder, pour ſouuenc decevoir les bonimes. Ec
auſli pour le monft: er plus grandes qu'elles ne ſont,portentdes patines à la façon des
feinmes Italiennes, & d'Eſpagne. Elles font aulli pluſieurs autres choles pour trom
per les hommes, queiene yeux icy deſcrire, de peur d'encourir leur mauuaile grace.

Fin du vingt-troiſieſmeLiure , traittant d'adiouſter ce qui defaue


naturellement ou par accident.

TABLE DES CHAPITRES D V VINGT -QVATRIESME


LIVRE DE LA GENERATION.

С Ourquoy les parties generatiuesſontaccompagneesde grand plaiſir.ch.i


De quelle qualite est la femence dort eft engendré le mafle a la femelle. >

chapitre ij.
Pourquoy les femellesdes beſtes brutes, apres eftre empreintes ,ne deſirent
plusde s'accoupler aux maſſes. chap.iij
Lámaniere d'habiter defaire generation. chap.iiij
Les jignesquela femme,sura conceu, & estgroſſe d'enfant. chap. v
Comment la matrice ſe reſſerre fitostque la ſemence yeſt iettee & retenué. chap.vj 1

De lageneration du nombril. chap. vý.


Des vaiſſeaux qui font au nombril de l'enfant. chap. vij
Del'ebullition desſemencesà la matrice, & des trois ampoulles quifontles lieux des trois nem
bres principaux,à ſcanoir lefoye,le cæur, & le cerueau. chap.ix
Dela troiſieſme ampoulle où la tefte ſe forme. chap. x
De l'Ame. chap. xj
Des excremens naturels , & de ceux que iette l'enfant en la matricede la mere. chap. xij
D Comine l'enfanteſtant à terme,s'efforcedeſortir hors duventre defamere, & defanatiuité.
chap. xiỹ .
De la ſituation de l'enfant au ventre de la mere. chap.xiij
Dutemps commode on incommode de la natiuité de l'enfant. chap.xy
Les ſignes à lefiinme de bien tost enfanter. chap. xvj
Ce qu'il faut faire à l'enfant fubit qu'il estnay. chap. xot
Delamaniere d'extraire l'arriere faix apres l'enfantement. chap xuij
Cequ'on doit bailler à l'enfantpar la bouche deuantque luy donner àtetter. chap.xix
De !'clcction d'vne bonne nourrice. chap.xx
De quellequalité doiteſtrechoiſie la nourrice. chap.xx]
De l'aagede la nourrice. cleap.xxi
De l'habitude du corpsde lanourrice. chap.xxij
Desmæurs de la nourrice. chap. xxiii
HHHH
908 Table.
Desmammelles,& dela poictrinedela nourrice. chap. XXV A
De la nature du laict de la nourrice . chap.xxvi
De la diſtance duremps que la nourrice a enfanté, & du ſexedeſon enfant. chap. xxvii
Dx regime de la nourrice. chap.xxviii
Comme l'on doit accouffrerla bouillie dupetitenfant. chap. xxix.
En queltemps il fautſeurer l'enfant. chap. XXX
l.es ſignespourcognoiſtre fil'enfanteſtmortou viuant auventre de la mere. chap. xxxi
De lamaniere debienfituerla femmepourluy extraire l'enfant. chap.xxxii
Dela maniere de tirerles enfans hors leventrede la mere,tant mortsque viuans, chap.xxxii
Ce qu'il faut faireà lafemme Jubit qu'elle eſtaccouchee. chap. xxxiiti
Ce qu'il faut faire aux tetinsde la nouuelle accouchee. chap. XXXV
Des cauſes deladifficulté d'enfanter. chap. xxxvi
Des cauſes de l'auortement des femmes. chap. xxxvii
Des moyens de furuenirà l'enfant la mere morte . chap.xxxvi
Dela fuperfetation,c'eſtà dire,conception reiterce, ou ſurengendree . chap.xxxix
De lamoleengendreeen la matrice,appellee desfemmes mauuais germe! chap. x!B
Des ſignes pourcognoiſtre une molle d'auec un enfant. chap.xli
Cure de la mole , chap. xlii
Delaſterilité, qui eſtdefautd'engendrer auxhommes. chap.xliii.
De laſterilité &fecondité des femmes. chap. xliv
Les lignes de la matrice intemperee. chap. xlv
De la precipitation ou peruerfion dela matrice. chap. xlvi
Cure de la precipitation de lamatrice . chap.xlvii
Comme ilfautfituer la femmelors quela matrice eſttombee. shap.xlviii
De la membrane appellee Hymen . chap. xlix
Hiſtoire memorable de lean Vuier dela membrane appellee Hymen . chap.la
De Phimon . chap.li
Dela ſuffocation de lamatrice ,appellee des femmesle maldela mere , & de ſescauſes. chap.lii
Les ſignesque toſt lafemme aura fuffocation de matrice . chap. li
on
Les ſignespour cognoiſtre founefemme eſtmorte ounonparunefuffocati de matrice. C
chap. liv,
Les differences deſuffocation de matrice . chap.lv
Les ſignespour cognoiſtre ſila ſuffocation vient parla femence retenue de corrompue,&non
du fang menſtruel. chap. Ivi
Cure de laſuffocation de la matrice. chap. lvii
Duflux menſtruel desfemmes. chap. Ivić
Pourquoy Nature a faictquela femme a un flux menſtruel. chap. lix
La cauſe des menstrues auxfemmes. chap.lx
Les cauſes pourquoy le flux menſtruel eſt retenu aux femmes. chap.lxi.
Les ſignes do prognoſtic que les menftrues font retenues,delesmaladies& accidens qui enado
viennent. chap. Oxi
Desmoyenspour prouoquer leflux menſtruel aux femmes. chap. Ixiij
Les ſignesque les mois veulentcouler aux femmes et filles. chap. Oxiu
Les accidensquiviennentauflux du fang menſtruelimmoderé. chap.lxv
Lemoyend'arreſterleflux menſtruel exceßif. chap.lxvi D
Les remedesparticuliers qu'on doitappliquerenlamatrice poureſtancherlefluxdeſangimme
deré. chap. Ixvii.
Du flux muliebre ou fleurs blanches. chap.xui
Canſes des fleursblanches. chap. Rix
:
:()

Cure du flux muliebre ou fieurs blanches. chap. lxx


Des palles couleurs. chap. 2xxi
Dubattement de cæur . chap. exi
Bourſoufleure. chap. Ixxiii
(
.
)

Appetit corrompu &depraué. chap.xxx


.

Nauſee & vomiſſement. chap 1xx


Friſſons de rigueurs. chap. Ixxi
res

Desfoupirs ,gemiſſemens & ris. chap. xxvii


Table.
909

A Refueries. chap.lxxviii
De l'efuanoniſſement. chap./xxx
De la fieure erratique. chap. lxxx
& alterations
Soif chap.xxx
Du veiller chap. * xxii
Cure . chap.lxxxiii
Deshemorrhoides qui naiſſent au coldela matrice. cap. 2xxxiu
Des verrues qai viennent au colde la matrice. chap. xxx
De thym eſpece de verrue . chap.xxx :
Des Rhagadies & condilomes . chap.lxxxvii

:
(
.-)
Du prurit de la matrice . chap. lxxxviit
De l'hydropiſie de la matrice . chat. Zxxxix
De l'inflammation de la matrice. chap. xe
Des pierres & fables contenus en la matrice. chap. sci
B
Du col de la matrice trop large , trop ouuert & trop lubrique. chap. xcij
De la relation du gros inteſtin qui ſe fait aux femmes. chap. xcју
De la relaxation d enfleure du nombril quiſefaict aux enfans. chap. xciiij
De la douleur des dents des petits enfans. chap. xec

HHhh ij

Com

pers

j
910

LE VING TO VÀ TR IE S ME

LIVRE TRAICTANT DE LA GENERATION


DES B
DE L'HOMME , RECVEILLY
Anciens & Modernes.

PAR A MBROISE PARE DE LA V AL ,


CONSEILLER ET PREMIER

Chirurgien du Roy .

? REF AC E.
)

Gal. a1 14 . IE V le Createur de toutes choſes : ay commencementda


lix.de l'uſa Monde , par vn conſeil indicible & prudence ineſtimable, 2
ge des par crée non ſeulement en l'eſpece humaine , mais auſſi en tou.C
ties . Coo
tes eſpeces d'animaux , deux ſexes : l'vn malle , l'autre fc.
melle : leſquels par certains allechemens dc volupté ſe
conioindroyent enſemble pour la generacion de leur ſem .
blable , à cauſe de la condition incuitable de mort à tous

individus animaux , que la volonté diuine leur auoit or


donnee . En ceſte conionction voluptueuſe l'homme & la

femme , principalement au ſacré Mariage , iettent leurs ſemences , leſquel


les iointes I'voe avec l'autre , ſont receuës & conſcruces en la matrice de la fem .
me . Or la lemence eſt un humeur eſcumeux , plein d'eſprit viuifiant, qui la fai&
Quel.ce bouillonner & accroiſtre en la matrice: & fonc leldietes ſemences ,la matiere& la for
que la fe- menacurelle de l'enfant , faict du ſang ic plus pur de la maſſe ſanguinaire . La virile
menie bis eſtane iectee en la matrice , ſe fait principe & cauſc effective de la generation de l'ani
mame ?
mal . Icelle ſemence doic eſtre blanche, ſplendide & clairc, glucineuſe,globulente, &
d'odeur deſureau, ou de paline, & appetee des mouches,
deſcendante au fond de o
l'eau : car ſi elle nagedeſſus, elle ſera infeconde.
Or la plus grande partie d'icelle vient du cerueau , mais le cotal procede de tout le D
corps vniuerſe!, & de chacune partie,tantſolide que molle. Car c'eſt choſe manifeſte

L « jemence que ſi elle ne venoit de tout le corps, les parties de l'enfant n'en pourroienc eſtre fai.
vient de ctes,parce qu'il faut que toutes les parties ſoient faictes de leur ſemblable. Et cecyeſt
sculle corps prouué par la ſimilitude ou ſemblance des enfans aux pere & mere, & par l'imbecillité
de certains membres : car ſi le pere ou mere ont lecerueau ou foye, poulmon , eſto
mach , ou autre partie debilc , l'enfant le plus ſouuent tient de cette debilité, & meſmo

eſt ſubie & à certaines maladies heredicaires ,tanedu corpsque de l'eſprit.Orilfaut icy
entendre , que lors que les anciens ont dit la ſemence venir de toutes les parties du
corps, il ne le faut entédre de la matiere : car elle eſt tiree de la maſſe ſanguinaire,mais
acecicellel'eſprit animal , viral , & naturel , & les idees de la vertu formatriccd'vne
de la Generation. 911
A d'une chacune des partics ſont tirees de couc le corps en general,& parties d'iceluy.St
qu'il ne ſoit ainſi, nous voyons ceux auſquels on a coupé un bras ou vneiambe,ou au
tre partie, auoir toutesfois des enfans bien formez. Oi la ſemence aurize & allume le Gal. de vfuit
defird'habiter,& cauſe vn plaiſir dele&table,& principalt ementàl'emillion d'icellel'ac chap 1 .
dePartolin.14
crainte que l'homme,de ſoy braue & fier, ne deſdaignaſ yn ade tel que ſemble
couplement charnel,& par ce moyen ne ſe ſoucialt de perpetuer ſon nom à la poſteri
té par lignee procree de ſon corps , & de peur que la ſemence ne fuft iettee en autre
lieu qu'en la matrice.Ecafin que la generation fuſt faicte, les malles ayás compagnie
de la temelle, les parties genitales del'vn & de l'autres'eſtendent de routes parts:aux Gal. ibid.
malles la verge, pour iester droia la ſemence en la capacité de la matrice: & aux femel- chape 10.
les, lecoldela matrice, qui pour la receuoir s'ouure & eſlargie, & ſeriene droit pour
aulli vaider la femence, qui eſt enuoyee par les vaiſſeaux ſpermatiques aux teſticules,
tant de l'homme que de la femme: leſquels vaiſſeaux fontpluſieurs recours , reuolu
tions & replis come capreoles de vignes,afin que dans ces entorcilleures & anfractuo. Gal.chap.3.
ſitez le ſang & eſpric enuoyez aux ceſticules loient cuits & digerez par ſilong chemin, de vro pare 1

& parrantelabourez& blanchisen ſubſtanceſeminale : & feterminent cesdernieres


entorcilleures aux teſticules, qui ſont de ſubſtance rare, laxe & ſpongieuſe, receuans
B celt humeur quiia a commencé d'eſtre cuit aux vaiſſeaux , & l'acheuent de cuire en
plus grande perfection, luy donnant les qualicez,forme& eſſence requiſe pour la ge
neration de l'animal. Or la ſemēce eſt renduë blanche par la faculté des teſticulesqui
ſont blancs. Le maſle iette la ſemence hors de ſon corps , & la femeile dedans le ſien ,
par les vaiſſeaux ſpermatiques qui ſont implantez dans la capacité interne de la ma
trice.
Pourquoy les parties generatiues ſont accompagnees d'un grand plaiſir.
CH A PITRE I

Vſage des parties generatives eſt accompagné d'un tres. 14.


Gal.deauvfliu.
grád plaiſir, & aux animaux qui ſont en la feur de leur aage,
certaine rage & cupidité furieuſe procede dudit vlage: cepare.ch. 9.
gian que nature a ordonné , afin que l'eſpece demeure à jamais
TO C incorruptible & eternelle , par la mulciplication de ſes indi.
uidus : & partant Nature a voulu que les animaux fuſſent
COT: aiguillonnez d'vne ardeur & enuie excreme de ſe coupler en
ſemble, & qu'à ce deſir fuſt conioinete vnegráde & charoüil
leuſe volupté, afin d'aucát qu'ils n'ont point de raiſon ,ils fuf
ſentneátmoinspar l'aiguillon duplaiſir,incitez à ſe mettre en deuoir pour cóſeruer & Lim.7.ch.5.
maintenir leur gére & eſpece.Pline dit que tous les animaux ont certains tēps limitez
de charger & porter leurs petits,toutefois l'home ſeuln'a aucun tempsnycerme pre
fixou definy,mais vient au mode en tout céps. Outre que Nature a dòné aux parties
genitales vn grand ſentiment,plusaigu & vif qu'à nulle autre partie, par le moyé des
nerfs quiſont diſperſez: partant nulneſe doit eſmerueiller pourquoy à leur a&ion
elles ſentent plusgrandedele tation & plaiſir. Ord'abondant il y a vne certaine hu
meur ſeceuſeſemblable à la ſemence, mais plus liquide & ſubtile,concenue dedans les
proſtates, qui ſont deux glandules ficuees au commencement du col de la veſlie, &
D aux femmes au fond de la matrice par les vaiſſeaux ſpermatiques. Icelle humeur a
vne pecite acrimonie picquance, & aiguillönante, auec vn pecit prurit & demangeai
ſon,qui irrite les parties à faireleuraction, en dónant volupté & plaiſir ,parce qu'elle
eſt accÕpagneedegrande quácité d'eſprits qui s'eſchauffent & deſirençà ſortirhors.
Et pour exemple,comelors qu'il y a en vne partie de noſtre corps quelques humeurs
aigres ou acres,accumulees ſous le cuir, quichatouillent & demangene, elles invicenç
à ſe gratter, & en ſe grattár on en a vn grand plaiſir. Ainſilesparties genitales quiont Hipp.li.de
vn plus grand ſentiment que celles de la peau,eſtans aiguillonnees de ceſt eſprit,ſen- la genera
tent un plus grand plaiſir, principalement à l'heure du coïc.Pareillement lors que la- tion,
Gal. ibid .
dite humeurſortauec la ſemence, on ſene vn extreme & incomparable plaiſir & vo che il
lupré: & telle choſe a eſté faite par dameNature , de peur que la ſemence ne fuft iet
tec hors la matrice pour le deſirqu'elle a à faire generation .Dauantage ceſte humeur
outre qu'elle donne enuie de s'aſſembler, & s'aſſemblanc donne yn grand plaiſir, elle
arrouſe & moüille le canal de l'vrine contre l'acrimonie d'icelle: Autrement quicon
HHhh iij
912 Le Vingt-quatrieſme liure
fidereroit le conduit duchamp de nature humaine, & les immondices qui paſſent par A
iceluy ,& ſes deux voiſins le boyau cullier & la veſſie , jamais l'home ne voudroit s'ac
coupler auec la femme: de l'autre coſté, ſi la femme auoit elgard au mal qu'elle doic
auoir de porter l'enfant neufmoisen ſon ventre,& l'extréme douleur d'enfanter,ia
mais ne deſireroit d'auoir compagnie d'honime.Nonobſtanttout cela,il y a des hom
mes quivient intempeſtiuement du coït,pour l'appetence excitee par la memoire du
plaiſir & de la volupté, & n'eftant detenuedela raciocination ,enflamme & allumele
Lang & les eſprits , leſquels eſchauffez excitent ce plaiſir lubrique, tellement que plu.
fieurs en vſent ſans reigle & immoderémenc:bien Touuentau lieu deſemence iettent
vn humeur demy- cuit & fanguinolent,voire le lang tout pur , dont la mort s'enluit:
carlaconcupiſcence & l'appetit deſordonné lont ſi grands, quebien ſouventils con
Choſe digne traignent Nature de ſortir horsde ſesbornes & limites. Ot il aduient quelquesfois
À nolas . difficulté d'vriner pour auoir trop vsé du coïc,pour la conſomption de cette humeur
glaireuſe,donc les parties dedices àl'vrine onceſté trop deſſeichees:à dels pour les fai
se vriner, fauc ietter del'huile auec la fyringue dedanslaverge. Ec pour retournerà B
Gal.li.15.de propos, pour bien habiter aucc les femmes,ilfaut que la verge de l'homme ſoit
noſtre
ou part. bien fermement tenduë , afio que la ſemence par ſon canal ſoit ietee au loing dedans
eb.1.caz. la matrice: & eſtoit neceſſaire qu'à l'emillion d'icelle,ledit canaidemeuralt fort drojê
& fort large , afin que promptement & fans intermiflion , elle tuftsettec au profund
dela mattice: car fi elletardoit en chemin , elle le refroidtroit , & par evaporation de
les eſprits ſeroit renduë infeconde.Or la vergele dreſſe par le moyé du lang & eſprits
Alatulens, & pourceſte cauſe eſt compoſee d'vne partie ncrueule, Ipongieule & cauc:
la matrice a vne faculté proprc d'attirer la ſemence du mafle à elle par lon conduitoa
emboucheure: & par deux autres conduits qui ſont les cornes ( où ſont les vaiſſeaux
ſpermatiques) eſt iettee la ſemence dela femme en la cauité de fa matrice:leſquelles
cornes ont eſté faites pour tirer la ſemence de ſes propres teſticules, leſquels(onefort
perits, & beaucoup moindres que ceux des hommes: à ceſte cauſe ne ſont ſi chauds nc
vigoureux, & ainſi leurſemēceeſt plus froide & humide que celle de l'homme,& par
tanı meſlee avec celle de l'homc,fe tempere : aulli l'orifice de la matrice s'ouure à l'e
miſſion de la ſemence,pareillement afin que celle de l'hommeentreen ſa cauité: & ia
Lamais la mais la conception ne le fait , que les deux ſemences ne concurrent enſemble en yn
conception melme inſtant, & que la maciere ne ſoit bien diſpoſee , & que les deux ſemences
n'ef " faicte de l'vn & de l'autrene ſoient bien elabourees par bonneconco & ion. Et s'il y a plus
que lesdeux
femences ne
grande quãtité & qualité plus vigourcuſe de ſemence de l'homme, il ſe fera vn malle:
concurrent au contraire, fi la ſemence de la femme ſurmonte celle de l'homme cant en quantité
enſemble. qu'en vertu , il ſe fera vne femelle :car comme vne grande lumiere obſcurciſt la peti
te, pareillement la vercu eftant plus forte & plus grande des ſemences, lamoindrece
de:toutesfois & en l'homme & en la femme il y a geniture,tantpour engendrer malto
que femelle. Qu'il ſoit vray,il y a pluſieurs femmes quin'ont eu de leurs premiersma
ris que des filles ſeulement:leſquelles depuis eſtans remariees à d'autresmaris, n'ont
Il y a en faict que des fils. Et auſſi meſmes les maris , deſquels les femmes ne faiſoientque des
l'homme @ filles, & eftans remariez à d'autres femmes ontengendré des malles : & autres qui ne
en la femme faiſoient que des maſles,ont engendré desfilleseſtans remariez à d'autres femmes.Et D
culine on pour le dire en vn mot,tant en la femme qu'en l'hommc,eſt contenuë ſemence maf.
feminine. culine & feminine. Toutesfois il faut encendre, qu'il ne ſe produit pascouſiours en D
vn mefme homme,vne ſemence pour engendrervn fils, nyauſſi pour faire vnefille:
mais cela varie ſelon la varieté del'aage & façon de viure: ce qu'on void preſque or
dinairement:ainlicſt -il de la femme.Parquoy nulne ſe doit eſmerueiller,de ce qu'vn
meſme homme auec vne meſme femme, engendrent tantoſt vn enfant malle,& can
toft vnc femelle.
De la Peſte . 913
Dequelle qualitéeſt la femence donteft engendré le masle a la femelle.
CHAPITRE 11 .

Left certain que la ſemence plus chaude & plus ſeiche engendre le Hippor, as
mašic, & la plus froide & humide la femelle: carily a beaucoup nat
1.m.urede delas
moins devertu au froid qu'au chaud :ainſi l'humidité eſt de moin l'enfant.
dre efficace que la ſiccité :& c'eſt pourquoy la femelle eſt plus tard
formee que le malle. En la ſemence gift la vertu creatiue & forma
crice: Exemple , en vnegraine de melon, potentiellemét eſt le croc,
les branches, les feuilles, les curs, le fruict, la forme la couleur,l'o
deur , la ſaueur, & femence:ainſi eſt-il de toutes autres ſemences. Ce qu'on cognoiſt
auſſi aux greffes entecs ſur ſauvageons,recenans la nature du fruict de l'arbre, d'où ils
fone cirez.Semblablement quand la ſemence du pere, ſurmonte celle de la mere, lors
B l'enfant rellemble au pere : & quand celle de la femme, ſurmonte celle de l'homme
l'enfant reſſemble à la mere. Toutesfois on void le plus communément les enfans
sellembler plus au pere qu'à la mere,pourla grādcimagination & ardeur qu'a la me- l'imagi
re en lacopulation charnelle : cellement que l'enfant attire la forme & couleur de nacion,cute
ce que li fortelle cognoiſt & imagine en ion encendement : comme il aduint de la mil
le de la fa
orade
Royne d'Ethiopie, laquelle en la copulation de ſon mary , imaginaor vne couleur
fore blanche,enfanra vn fils blanc. Telle chole ſe peut encores prouuer par l'artifice de figures
cel de lacob, qui meit des verges de diuerſes couleursdansl'eau , au temps de la conjon .
Wood & tion de ſes brebis:ce qui ſeracy -apres declaré plus au long parlaue des monſtres . Il
aduient aulli quelquesfois, mais rarement, que l'enfantne reſſemble à pere ny mere:
cres mais à quelques vns de leurs parens,cómeàleur pere & mere grands& ayeulx:par ce
que nacurellemét la vertu des ayeulset fichee & enracinec aux cæurs de ceux quien.
gedréc. En quoy Nature reſſemble à vn peintre,qui portraiêt vne choſe au naturel,
s'efforçant de faire reſſebler lesenfans aux parēs leplus qu'illuy eſt poſſible, Les enfãs
0127 C ne reſſemblent ſeuleinent à leurs pere & mere de corlage(comme en ce qu'ils ſont
grands ou perits ,gros ou deliez,camus ou boſſus, boiteux ou corcus) de parler , & de
more maniere de cheminer : mais auſſi reviennent les maladies , auſquelles leſdits pere &
I love mere ſont ſubiets, qu'on appelle hereditaires, commeille void aux lepreux,gouteux, Arift.aw.
sales epileptiques,lapidaires,ſpleneciques, aſtmatiques, & autres ſemblables : parce que la li. dela ge
ſemence ſuitla complexion & temperament de celuy qui engendre , en ſorte qu'vn neration des
O CUBE
homme & vne femme bien temperez produirone vne femence bien complexionnec. Hi animaux,
pp.aulio
Au contraire s'ils ſont intemperez ,produirontvneſemence mal complexionnec ,& de l'air des
non propre pour engendrer vn enfant ſain & de bonne habitude,ſuivantla ſentence regions et
de Caculle.Vn chacun touſiours ſuit l'origine & ſemence de la nature propre. Par des
o eaux.
quoy celuy quiſera gouteux ,lepreux, ou en autre diſpoſition ſuſdice: s'il s'engendre
vn enfant, à grand peine pourra il cuader qu'il ne ſoit ſujet aux maladies du pere &
de la mere:ce que coutesfois n'aduient pas couſiours ,comme l'experience le monſtre,
ainſi que i'ay eſcrit aux liures des gouttes.Car on void pluſieurs eſtre vexez de Gouc
D tes & d'autres maladies,deſquelles les peres & meres n'auoienc eſté malades: & d'au
tres n'en eſtre iamais affligez, deſquelstoutesfois les pere & mere en eſtoiene grande
ment tourmentez. Laquelle choſe ſe fait par la bonié de la ſemence de la femme, 86
temperature de la matrice,corrigeant l'intemperature de la ſemece virile , cout ainſi
que celle de l'homme peut corriger celle de la fenime. De là vient qu'on void ſouuét D'on vient
par experience des enfãs n'eſtre point goureux,ou lujetsà autres maladies heredicai. que tou-.
ty res,encores que leurs pere ou mere fuſſent ſubjeâts à celles diſpoſitions:laquelle cor- fiours les
re& tion ſi elle defaut à laſemence du pere ou dela mere;à grand peine les enfans peu- maladies
uenc ils eſchapperqu'ils neſoienc ſujects auſdites maladies qui ne ſe peuuent parfai- aux
ne purene
enfans,
&tement guarir,quelquegrande diligence qu'on puiſſe faire: parce qu'elles ont pris
leur habicude auec les principes de la generation de l'enfant.
Plucarque au liurc intitulé,pourquoy la juſtice Diuine differe quelquesfois la pu
nition des malefices, dit que Heſiode conſeille de n'engendrer point enfans quand
l'on a eſté aux obſeques& funerailles des trépaſſez,mais bien apres auoir eſtéen quel
que magnifique banquet,& comedies ioyeuſes : car combien que la ſemence & geni
turereçoiue non ſeulemēc la boncé ou malice de la matrice,maisaulli elle crasfere la
1

914 Vi ng t -qu at ri eſ me Li ur e ,
1
ioye,latriſteſſe, & ſemblables affe &tions en la procreation des enfans, les faiſansgais
joyeux & gaillards,ou melancholiques,ſelon la compoſition de la ſemence , & de la A
Vertu imaginatiue .
Pourquoy les femellesdes beſtes brutes,apres eftreempreintes ,ne defirent plusde
s'accoupler aux mafles. CH A P. III.

' eſt qu elles s'addreſſent ſeulemét à ce qui s'offre , &qui eſt preſent
en leur chaleur & ruc,n'ayantaucune recordation du plaiſir apres
eſtreempreintes:meſmes abhorrent lecoit apres la cõception :par.
ce que leur imagination ne leur eſt donnee de nature que pourleur
Arift.proble eſpece , & non pour la volőté & delectation. Or les malles des vone
7.ſect. de la chercher lors qu'elles font en rut,à cauſe qu'il s'efleue de leur
conjonction
matrice vne cercaine exalation vaporeule, qui s'eſpanden l'air ,&
Sharnelle.
les malles tēcane ceſte odeur entrét en amour,qui fait qu'ils defrent s'accoupler enſē. B
ble Leconrraire eſt aux femmes :car elles deſitent pourla delectation , & non ſeule.
ment pour l'eſpece, & auſſi qu'elles abondent en lang qui les eſchauffe, quand elles
Pourquoy la s'en recordene, & que la vercu imaginatiue procedante du cerueau, & la cócupifci
femme en ble ,ou deſireuſe,du foye qui eſt l'une des plus principales cauſes d'habiter)s'en reſtë.
10ut temps
á defor de tent,ayans recordation dece plaiſir delicieux qu'elles ont receu au coit:& faut enten.
s accompler. dre , que la vertu concupiſcible ou deſireuſe, commande à la vertu expulfiue du caur
lequel lors enuoye la chaleur aux parties genitales par les arteres,& le Foye par les vei.
La concupi- nes,& icelle chaleur accompagnee d'eſprits vaporeuxfont enter & tendreles parties
ſcence confi- genitales,tant aux hommes qu'aux femmes, puis par le coit la semence cſt expuitec.
fleau foye. Les beſtes lauvages ſont grandement furieuſes quand elles demand nc les femelles:
ainſi nous voyons le cerfeitant en rut,bramer & crier apres les biches :aufli les alnes
Ariff, enfes en deuiếnent à seu prés enragez,parce que leur mēbre fort alors forr elchaufféd'ya С
Broblemes delir des fimelles: & cel defirdes'accoupler les diſpoſe à celle ire & fureur , mais aufli
apres l'accointance des femelles ſont rendus doux & paiſibles. Or commci’ay dit cy .
deſſus, il y a vne tres grande dele &tation en la copulatio du malle & dela femelle,par C.
ce quec'eſt un a&c fi abiect & immonde,que s'il n'eſtoit accompagné d'vn tel plaiſir
delicieux ,cous animaux naturellement le fuyroyent & l'auroient en horreur ; ce qui
cauſeroit en bref la conſommation des eſpeces: mais nature s'exerçant volontiers en
telle voluptueuſe ticillation fait, quechacune eſpececft conferuce, & de plus en plus
eſt augmentee .
Les choſes neceſſaires à la generation .
Trois choſes ſont neccffaires à la generation :la premiere, l'excrement humide & bc.
pPour
ar l'accom
acte nin ,qui viene la plus grande parc du cerucau: la ſeconde, ventoficcz pleines d'eſprits
venersen , il vitaux, qui procedentdu cæur,quicauſe diſtenſion &
ereâion des parties genitales:
est requis la tro fielmeeſt vne concupiſcence & appctit naturel ,lequelprend ſaſourcedu foye:D.
troisclosis: de là s’eſpand par les parties genitales. D'abondant faut que l'obiect plaiſe, & foit dc
chaleur, vëfité tantde la part de l'homequede la femme:lil'vne de ces choſes mãquenc,les per D
sofi:é, G bu jonges ſont impuiſſantes.
midué.
La maniere d'habiter & fairegeneration .
Ce chap.est
prideGowy 'HOMME eſtant couché auec facăpagne & eſpouſe,la doicmi.
don, liv.7 . unarder, chatouiller careſſer & elmouuoir,s’iltrouvoit qu'elle tuft
ch.14.le. urcà l'eſperon : & le cultiueur n'entrera dedāsle champ deNature
gueli ayez humaine à l'eſtourdy, ſans que premierement n'aye fait ſesappro
privré lepl Aches qui ſe feront en la baiſanc, & luy parlant du ieu des Dames rab
honnellemni
qu'il m'aeft.
batuës,autfi en maniant fes parties genicales, & pecies mamelons,à
poſible fin qu'elle ſoit aiguillonneu & titillee tant qu'elle ſoit eſpriſe des
deſirs du malle ( qui eſt lors que la matriceluy fretille)afin qu'elle prenne volonté &
appecic d'habiter & faire vne pecite creature de Dicu , & que les deux ſemencesſo
De la Generation, 915
A puiſſent rencontrer enſemble :car aucunes femmes neſont pasſipromptesà ce jeu,
.

que les hommes. Et pour encor quancer la belongne, la femme fera vnefomentació
d'herbes chaudes ,cuices en bon vin ou maluoiſie ,à ſes parties genicales ,& mertra'pa
reillement dedans le colde la macrice vn peu de mulc & ciuerre : & lors qu'elle ſentira
eltre aiguillonnee& eſmeuë, ledira à ſon mary:adoncſeioindront enſemble , & acco
plironeleur jeu doucement,accendāc l'on l'autre,faiſantplaiſirà ſon côpagnon .Quád
les deux ſemences ſerot iettees, l'homene doit promptemēc ſe desjoindre, afin que
l'air n'entre en la matrice ,& n'altere les ſemences , & qu'elles ſe mixtionnene mieux
I'vne auec l'autre ,& ſubir que l'homme ſera deſcendu ,la femme ſe doit tenir coy , &
croiſer & joindre les cuiſſes & iambes ,les tenant doucement rehauſſecs , de peur que
par le mouvement & ſituation decline de l'amarry ,la ſemence pe s'eſcoule hors,pour
leſquelles melmes railós il faut qu'elle ne parle, ne couſſe,ny elteinuë, & qu'elle doc
me promptement apres s'illuy eſt poſſible. Ainli Dieu donna à l'homme la femme
pour ſon ayde & compagne, & mit à l'vn & à l'autre vne vertu d'amour ,& vn delir
IV .
B d'engedrer lignce,ayantpreparé en cux vn humeur& eſprit inAacil,avec inſtrumens
conuenables à telvlage. Ec à celle fin que l'vn ne dedaignaſt l'arcouchemenc de l'au
cre, il adiouſta en cux certainsallechemens & façons de faire attractives, auec vnap
perit & mutuel embraſſement,afin que quand ils conuiendroient il leur aduint de
receuoir vn ſovëf & delicieux plaiſir. Carde vray ſi cela n'eſtoic infus de nature en
coutes eſpeces d'animaux ,de pouruojr à la poſterité,& attendre à generation :verica
biemēc tout le genre humain periroit & viendroit à neanc,& ne pourroit löguement
ſubliſter . Puis donc que celle affe &tion eſt ſi forte & difficile à dompter, Dieu a permis
àceux quine peuuent moderer leurs cõuoitiſes, & quiſonedelpourueus du don de
cõrmence ,le liet de mariage afin qu'il puiſſent ſe concenir dedans les bornes d'iceluy,
& neſe point contaminer parvne paillardile ça & là vagabonde .
Teine
Lesſignes que la femmeaura conceu, &eftgroſſe d'enfant. . ,
CH A P.

с
ES fignes par leſquels la femme ſera aſſeuree d'auoir conceu , ſont Signes de
eam premierement ſi elle a eu autrefois enfans, elle prendra garde quád
la ſemence neluyſera pointſortiedelamatrice apres lacopulació: conception.
car fi elle eſt retenuë elle ſera aſſeurce d'auoir conçeu: pareillemét
elle ſent lors que les ſemences ſont ioin &tes , vn petit friſſon , &
horipilacion , ou heciſonnement en tout le corps : & telle choſe ſe faict à cauſe
que la matrice le comprime , & ſon orifice ſe close pour retenir les ſemences : ainſi
quepar fois nous ſentons à la fin qu'auons piſſé, qui ſe fait par la contra &tion de la
vellic,à cauſe de l'air qui ſubic s'introduict pour remplir aucunement ce qui eſt vuide
auſſi s'elle a ſency quelque perite doulcur autour du nombril & petit ventre , fi
elle eſt fort endormie , & fi la compagnie de l'homme ne luy plaiſt comme aupa
rauant :fi la face eſt deſcoulource , entre blanche & paile ,c’elt ligne de conceptið.
Aucunes quelques temps apres la conception ont des caueleures en la face, les yeux
enfoncez , & le blanc d'iceux liuide : autres ont douleur de ceſte auec yn vertigo ,
D leur ſemblant que tout tourne deffus deſſous , pour la conturbation des eſprits ani
maux cauſee de vapeurs qui s'eſleuent au chefduſang menſtruel retenu , & leterme
de ſes fleurs revenu , au lieu de les auoir , ſescetins s'endurcilent& luy cuiſent: á
raiſon du ſang qui les diſtend & amplific. Adonc peur eſtre aſſeuree d'eſtre groſſe
d'enfant: ioint que ſur les trois ou quatre mois lemouvementde l'enfant les rend
certaines & aſſeurces : & lors que l'enfant eſt ja parfaict, & commence à ſe mouuoir,
sfemmes
lelaia ſore des mammelles . Autres ſont rechignees ,melancholiques , & deſplai- großles forse
ſances à elles melines , tant pource que les eſprits ſontobſcurcis des vapeurs ſuſcicccscholeres.
de bas en haut , que pour le fardeau non accouſtumé dont tout le corps eſt ар
pelanty , aucunes ont mal de dents , defaillance de cæur , appetit depraué ,
auec nauſee , dicte des anciens Pica faiſant qu'elles deſdaignent les bon.
nes viandes , & quelquesfois appetent choſes contre nature , comme char
bons , terre , cendres , vieux harens pourris , fruits verts & afpres, poiure, & au
tres eſpiceries , boire vinaigre , & autres ſemblables , le tout ſelon la qualicé &
ſaueur des humeurs qui regorgent de l'amarry au ventricule . Or quelquesfois tel
919 Le Vinge quatrieſme liure

apperit deprauédure iuſques à ceque la fême ait enfancé ;& auſſi ſouuét ceffelorsque
l'enfanc eſt plus grand,qui conſómccout le ſuperflu cant bon que mauuais . Les fem. A
mes veufues & autres filles, quine ſont groſſes,ſont remediees en leur prouoquant
leurs mois ( car ceſſant la cause ceſſe l'effe&t) leſquels en vain on combat& calche àgua:
sir pendant que leur cauſe eſt entretenuë:mais aux femmes groſſeson ne le doit faire,
de peur de les faire auorter, a &te inhumain & dánable . Autres ont cel malleplus lou
uent trois mois aores , & fe rengrege lors que les cheueux viennent à l'enfát,& princi
palement quand c'eſt vne fille .D'auantage,communément au ſecond mois illuruēc
retention des fleurs: parce que d'autant que l'enfant agrandit , auſſi plus attire- il de
fág pour la nourriture que de couſtume,lequeleſtemployé en trois parties, de la pre
miere deſquelles pluspure,l'enfant ſenourriſt. La ſeconde,quieft moins pure, eften.
uoyee aux mammelles de la féme à faire le laiêt pour la nourriture de l'enfant quand

Ze fang des il ſera né.La troiſicſmc,quieſt la moins pure que les deux autres,demeure en la ma
mois eid ane trice,faiſant cequ'o appelle le gifte ou arriere- faix ſeruãt deli&
t & couſſin,attédu que
retenu aux dedans iceluy l'enfant nage, & y eſt ſupporté,puis iecté deuant & apres l'enfancemét .
femesgrofjes Aucres ſentent leur vrine plus chaude & ardente que de coutume, & en outre rou .
of employé gcaſtre:car à cauſe de la recention des mois,la bouche de la matrice eſt eſchauffee, &
es trois
parties. par conſequer la vellie qui luy eſt au deſſus, conioincte par certains petits filamés,par
leſquels la plus ſubtile & fanieuſe porció duſang reſude dans icelle, qui pour cere cau.
ſe fait l'vrine teinte de rougeur, comme monſtre Hipp.au liu.i.Demorbis mulierî.Au.
tres ont grande douleur aux reins & aux aines,& parjaceruallesſentent trenchces au
De Ivrine ventre . Item ſi les yeines de la poitrine & celles qui ſont ſus les mamelles, ſontplus
des femmes enflees que de couſtume:meſme les mammelles s'enflene & durciſſenc dés leſecond
grofjes.
mois , & leur cuiſent vn peu à raiſon du ſang qui monte :aulli leurs papilles & máme.
lons deuiénét rougeaſtres ou noiraſtres,auec petites tubercules séblables à porreaux,
tout le corps s'appeſantiſt,le ventre s'enfle ,parce que l'enfát prend croiſſance. partát
les coſtes & lumbes ſe dilacent, & par ſucceſſion de temps les mammelles rendent duС
laiệt quicft quandl'enfant eſt ja parfaid ,acheue, & commence à ſe mouuoir : & lors
qu'ils ſont ſus les derniers mois,lentent grande pelanceur aux háches,la facemaigriſt,
les yeux , lenez ,la bouche agrandiſſent, & ſes parties genitales ſe cumefiết.Item toutes
les veines de ſon corps ſont fort pleines de lang, principalement celles des cuiſſes &
des iábes , & autour de leur nature , & ſont trouuecs fouuét variqueuſes, dilatees, & en
tortillees ,& quelquesfoisde pluſieurs reuolutions circulaires iointes enſemble pour la
ſuppreſſion du fang:donts'enſuit grauité & peſanteur de tout le corps , qui faic qu'el.
les ne peuuent cheminer qu'à bien grande peine,principalemét quand elles ſont pro.
ches d'accoucher.Hipp,Aphor.41.li.s.dict , quepour prouuer livne femme eſt groflc,
illuy faut faire boire de l'hydromel fait auec eau de pluye,quád elle s'en va coucher:fi
elle eſt groſſe,sétira destrâchees, pourucu qu'ellene ſoit accouſtumee à tel breuuage.

Comment la matrice ſe referre fitoft que la ſemence yeſtietree retenuë.

CH A P. VI.

D
ors que les deux ſemences ſeront ainſi receuës en la matrice , l'orifice
D
interieur d'icelle ſe reſſerre fermement & eſtroictement, afin qu'el
Ls ſemence les ne retombent : & quand la matrice a pris & retenu les deux
dumile eft ſemences menees enſemble( dont celle du maſle eſt nourrie de celle
nourrie de
de la femelle , qui luy eſt plus familiere que le ſang , parce que
celle de la chaique choſe plus facilemēc eſt nourrie & augmencee de ce qui luy eft ſemblable)
forama.
fe coagulent & adherenc contre lesparois de la matrice, & par la chaleur naturelle
fonc eſchauffees ſabit & fi fort, qu’àlentour ſe concrée vne petite peau ſubtile fera 1

blable à celle qui le fai &t ſur du laiệt non eſcremé, ou d'vne toile d'araignce ,de
façon que le cour eſtfait comme vn cufaborcif, c'eſt à dire qui n'a encore ſa coquille
ferme & dure . Orà l'entour ſont veus des filamens entrelacez enſemble ,auecvno
1
Premiere ſubſtance glutineuſe & glaireuſe ,de couleur rouge ,& aucunement meſleedegros

peau, om ſang noir , & au milieu ſe marifeſte vn peu le nombril, duquel eſt produide ladite
membrane.
taye : & à la verité l'on peut auoir cognoiſſance de beaucoup de choſes des enfans
au ventre de la mere, en faiſant couuer vingt aufs
dela Generation. 917 3
A à vne ou pluſieurs poulles,les caſſant tous les iours l'vn après l'autre en vingtiours:
car en ce temps - là le poulec eſt parfaict , & a vn nombril. Ladite pellicule eſt nommee
ſecondincou chorion ,& des vulgaires arriere.faix ,ou leliet de l'enfant; & icelle eſt Liure de la
faire dés les ſix premiers iours, ſelon Hippocrates, & ne ſert point ſeulement a con. narure do
țenir lesdeux ſemences enſemble enfermees,maisaulliàattirer leuraliment parles enfant.
orifices des vcines & arteres,quiſe terminét enla matrice par où alt expurgé le lang
menſtruel,pour la purgation vniuerſelle de la femme en temps opporcun : & iceux
orifices onteſtéappellez des grecsCotyledons & des Latins Acetables, & reſſemblent
aux petites eminences ou appendices quiſont aux excremitez des Seches : aux fémes
font peu apparens,par lelquels eſt ladite ſecondine attachec & lice de toutes parcs à la
matrice ,pour la conſeruation & augmentation deſdites ſemences.Les anciens ontlail.
ſé par eſcrit,que la bouche de la matrice des fêmes enceintes eſt cant reſerree ;quede
puis la conception iuſques àl'accouchement ,la poin & e d'un poinçon n'y ſçauroit en
trer:toutesfois on peut monſtrer que le contraire eſtveritable: teſmoin la ſuperfeta
tion,à ſçauoir,engendrer derechefſurvn engendrement, laquelle choſe ne ie feroit,
B fila matrice ne s'ouuroit. D'auantage on veoitietter ſouuentaux fémes groſſes grā.
de quãtité d'aquoſitez, & autres excremens hors la matrice,qu'on ne peut dire venir
ſeulemée du col,qui n'a pas aſſez de capacité pour cõrenir tant de matiere. Plusla fem
megrofle ayant affaire à ſon inary,iette ſa geniture hors:& fielle ne s'ouutoit, ellene
pourroic en decouler.Item ilya des femmes qui ontleursfleurs eſtác enceinctes,qui
ne peuuent venir que du dedans de la matrice par l'ouverture de certaines veines
acetabulaires ou cotyledós,auſquellesl'enfát n'eſt pas attaché par la ſecodine ou arrie
re-faix. Car s'il venoit par icelles mclmes,ils'enſuiuroit auorcemét. Ce qui ne ſe fait,
ht & ce ſang paſſager n'empeſche & n'offence non plus l'enfant enuclopé en ſes mem
branes,que font leurs fleurs blaches, & autres matieres putrides,qui ſont produites&
faites deſdites membranes. Il peut bien eſtre toutesfois (ce quin'eſt pas pourtant ne
ceffaire que lors nature ſedeſcharge immediatementpar quelques veines du col de
lamatrice,commeelle faiđt auſſi par les hemorrhoïdes,& par le nez, lieux plas malà Rouſes an lio
c propos,que le col de la matrice,voire meſme l'on a veu telles deſcharges aduenit par dementl'enfanie
cefas
vomiſſemens de ſang , & par les terins au temps prefix , que les fleurs doiuent couler, rien.
choſes admirables en cellesdiuerſions & vacuations, qui ſe font par nature , & non
imicables par artifice du Medecin.D'avantage,ils'eſt veu que la féme eſtant groſſe
de deux enfans,la matrice s'ouure quelquesfois pour en iecter yn more,commeà elle
cſtrange,ſans que le vif ſortequ'à ſon ternic prefix.
De li generation du nombril. C H 4 P. VII.

R en chacun de ces orifices de veines & arteres , dits cotyledons ,


la femme ayant conceu , il s'engendre vn autre vaiſſeau nouueau ,
qui eſt vne veinc , au droic de la veine, & vncarcereau droit de l'ar- 3
tere : ces vaiſſeaux nouueaux ſont attachez par vne membrane
1
ſubtile & deliee , qui par dehors eſteitendoë à l'enuiron decous leſ
dies vaiſſeaux , & cohere ou adhereà iceux . Ceſte membrane ſert
D auſdiēts vaiſſeaux de rempart, de ligature , & couuerturc , qui les attache enſemble,
& ſc redouble auec les deux autres , pour couurir le boyau ou vmbilic faict de
la veine & arteres vmbilicales , iuſques au pertuis de l'vmbilic de l'enfant. Orcha
fore cun de ſes vaiſſeaux nouueaux commence vis à vis des emboucheures de ceux de la
matrice, appellez cy -deſſus Cotyledons , & ſont bien petits & deliez , comme ſono
les dernieres racines d'un arbre plancé en terre : mais eſtans auancez vn peu , ils
s'accouplent deux à deux , tellement qu'il s'en fait de deux vn , puis derechef ilss’al
ſemblent, à fçauoir veine auec veine,arcere auccartere :& cela va touſiours en conti
JA nuant & augmentant enſemble,iuſquesà ce que finablement tous les petits vaiſſeaux
ſe rapportent & finiſſent en deux grands vaiſſeaux vmbilicaux , qui entrent au corps
1

!
de l'enfant par le pertuis du nombril . Et icy Galien admire la grandeur de Dieu & de Diuine conto
Nature ,qu'en ſi grand nombre de vaiſſeaux, conduits & menez par ſi grande eſpace complation:
de chemin ,iamais l'artere nes’adiouſte à la veine ,ny la veine à l'artere,maischacune
d'icelles cognoiſt le vaiſſeau de la propre eſpece, & à celuy-là s'addreſſe & feioint:ſu
bit que les veines ſont paſſees outre le nombril,elles ſe ioignent enſemble, & d'icelles
918 ſme
Le Vingt-quatrie liure

ca eft veu vne ſeule , qui encre en la partie caue du foye de l'enfant , & l'alterclubic
А
qu'elley eſt encree,le fourche en deux, qui defcédent aux coſtez de la veſſie,& s'inſe.
rent aux deux arteres iliaques,& font couuertes ,eſtansdedas le corps de l'enfane, du
peritoine ,qui les lie aux parties où elles paſſét. Les veines & arteres nouvelleméten
gendree,faices de cotyledons ſontcomme les racines d'vn arbre , & la veine& attere
Seconde 19.vmbilicale ſont comme legros tronc , pour attirer le nouriſſement, & viuifier laſe
ngeur
meinbrane mence ,dont l'enfant eſt faiat :car nous vivons comme les plantes , & apres commeles
beftes brutes au ventre de la mere.La ſecode cunique eſt appellec Ampios ou Agne
Hip.appelle
setes les lette, qui cnueloppe de toutes parts la ſemence. Orces membranes ſont fort dclices,
trois les yes reſſemblans au commencementà perites toilettes d'araignees ,& ſont les vnes ſus les
freondines, autres, & en pluſieurs lieux & endroits ſont vnies & attachees enlemble par certains
Gil. lin.de filets ſubtils quivont eſpars les vns entre les autres , & aingi ſe fortifient: comme vne
bopar.
corde ou tiſſu depoil , de laine,ou de fil qui acquiere grande force par complicatió des
choles aſſemblees, combien que chacune d'icelles ſeparément ſoient fori foibles. Et
tellcchoſe eſtà reſpondreà ceux qui voudroienc demander comme il eſt poſſible, quc B
leſdites membranes ne ſerompent, quand la femme groſſe dance & faulte,& auſſique
l'enfant ſe remuë quelquesfois violentement au ventre de la mere : car eſtans leſdites
membranes liees& entrelacees elles ſe fortifient eſtans enſemble comme par l'exem.
pled'vn tiſſu ,côme nous auons dit , & ne ſont ſeparees les vnes des autres ,& netrou
ue on riep entr'elles,à ſçauoir ,ſueur ne vrine.Nature toutesfois ne lesa voulu faire fi
forces qu elles ne ſe rompétà l'heure que l'enfant veut ſortir & naiſtre. Or le contrai.
re de cela eſtcant enraciné en l'opinion de pluſieurs, qu'il eſt impoſſible leur pouvoir
ofter, mais pour ce faire, icles renuoyeray au livre de Nature,c'eſt qu'ilsouurēt vnc
femme morte ,groſſe d'enfant, & alors ils pourront voir & cognoiſtre la verité , s'ils
veulent ouurir les yeux : ce quci'ay voulu faire ſans croire ay credit d'autruy .

Des vaiſſeaux qui font au nombril de l'enfant. CHA P. VIII.


C

Vcuns de nos deuanciers ont eſcrit, qu'au nombril il y auoit cinq vail.
ſeaux , à ſçauoïr, deux veines & deux arteres, & le condui & appella
C
А vrachus : mais quant à moy , iamais ie n'en ay fçeu trouver que trois
à ſçauoir la veine vmbilicale, qui eſt fort ample , de façon qu’ony
mercroic aiſément le fer d'vne aiguillerie : & deux attcres , leſquelles
Trois vaiſ- ne ſont ligroſſes à beaucoup prés . Et telle choſe a eſté ainſi fai&te , parce qu'il fal.
ſeaux um
bilıcaux. loit plus de ſang à l'enfant pour la nourriture & augmentation que d'eſprit vital.Or
ces veines & arteres ( dont eſt conſtirue le nombril,qui eſt fait le 9. jour eſtans co

Le nombyil ſemble ſe redoublent & entortillent, & fonc cercains næuds , comme la ceinture
de l'enfant d'vn Cordelier : & cerdits næuds ainſi anfra & ueux n'ont eſté faits ſans grande vri.
eft formé lité , quieſt afin que le langconduit au corps de l'enfant fur arreſté, & cellalt vn
ke 9. tour . perit ſon cours , afin qu'il fuít plus parfaictement elaboré , cuit, & digeré,ainſiqu'il ſe
faict aux vaiſſcau ſpermatique:, dits Eiaculatoires , c’elt à dire , ſeruans à darder
& ieteer la ſemence, aufli ledics vaiſſeaux vmbilicaux ont eſté faits de longueurde
L'enfine' plus de demie braffee pour la raiſon predice : tellement qu'à d'aucuns enfans on
prend fork trouue leditnombril entortillé une ou deux fois autour du col, & aucres fois autour
D
deleursiambes. L'enfant, commeauonsdic , reçoit ſon aliment & vie au ventre de D
nourrine
mět postcon la mere , par lvmbilic, & neprend aucun aliinent par la bouche : auſſi n'a il aucun
que fait le vlage des yeux,nez,oreilles,ny du ſiege pendant qu'ileſt au vétre de la mere. Dauá.
fraic? parle tage il n'abeſoin de l'office du cæur : car le ſang ſpirituel luy eſe enuoyé par les arteres
arceres, par leſquelles
guenė pers vmbilicales aux arteres iliaques, & d'icelles à toutes les autres
dante à l'enfant reſpire. & parcanc l'air n'eſt pas porté des poulmons au cæur,mais du coeur
7.1xbir, aux poulmóns , tellement qu'il ne crauaille point en la generation du fang,nydescl
.
M , Nicole
pries vitaux,parle benefice des poulmons. Carces choſes eſtans ja elaborees,cuites
d # Hawr
pas an lin . & digerees par la mere,ſontporcees à toutes les parties de l'enfant:lequel ne doitcn .
de la gene coresseſtre appellé enfant, tant que touces les parties ſoient bien formees & figurees,
Tatiou . que l'amey ſoit incroduite ,mais ſeulement lera appellé Genitura , ou Embryon,ou
pullulapt, ou naiſſant,ou meuriſfant, ou fæcus.

DC
De la Generation 919
А
De l'ebullition des ſemencesen la matrice, & des trois Ampoulles, qui fontles lieuxdes trois
membresprincipaux, àſçauoir, lefoye , lecæur, á le cerueau .
CHAPITRE IX

V X ſix premiers iours ſe font les vaiſſeaux nouveaux,qui naiſſenc des


orifices des veines & arceres , appelez cy.deffus cotyledons, commefor Temps
mationde
SA certaines fibres par toute la ſemence , laquelle bour touſiours de des vai
l fuſdi memb
dans es
lic. Or il faut ces
, le neufi
& iour eſtformé l'ombi. ſcaux com
eſme produits des cotile- nombril.
ranes, que ces vaiſſeaux
icy entendre
dons , font pareille ouuertureà laſecondine , qu’à lamatrice : par leſquelles ouuer
tures paſſe grande quantité de ſang & d'elprits dedans les petites ceines qui ſont
tiſſuës & entre lacées autour de ladice ſecondine, & dedans la ſemence , tant pour Comment
la nourricure & augmentation de l'embryon, comme pour la conformation des mé-ſe font les
bres principaux. Les eſprits donc & le ſang meſlez auecla ſemence , qui deſia aupa - trois am .
B rauaneboüilioit, &bouctouſioursde plusen plus,fontelleuercrois petites ampoul.poules.
les ſemblables à trois petites bulles ou veſſies ,reſſemblantesà celles qui s'elevent en
l'eau agitée par la pluye: & icelles ampoulles ſont les lieux où ſeront formez le foye,
lec « ur, & le cerueau : auparauant qu'icelles ſoient elleuées, la ſemence eſt toujours
appelée ſemence, & non encoresfocus ou pullulant.
Le quatrieſme iour apres que la veine vmbilicaleelt faicte, elle ſucce par les coty- La premie
ledons le ſang plus gros, & deplusgrand nourriſſement,lequelà cauſe de la grofleſſe reoù lefoyé
ſe coagule aiſémentau lieu où le doit engendrer le foye: eſtant acheué & parfaiet , ille fige.
eſt admirablc en la grandeur,pourlaquelle dés le commencement à comparaiſon des
TET aucres membres, il ſe peut ailément remarquer. Oren outre il peut auſſi eſtre dit ad
mirable en ce que, ce dont il a perfe &tion & croiſſance, n'eſtqu'vne effuſion de ſang.
1. doncil eſt appelé Parenchyma.Ils'engendre enla partieboſſuë vn gros troncde veinc,
; qui eſt la veine caue,laquelle inſerće,eſtend ſesrameaux par toute la ſubſtance du
foye , puis apres dreſle deux rameaux ,dont l'vn va aux parties ſuperieures, & l'autre
‫ܐܶܢ‬ aux inferieures, qui ſe ramefient & diſtribuent en couces leurs particules pour leur
C formation & nourriture : & cela faict,lavercu formacrice ayant la matiere,dreſſe ſes
CICI delincamens pour faire le meſentere, les inteſtins, eſtomach, racelle , & tous autres
membres nutritifs, & les rend parfaiâs ainſi qu'il appartient.
L'arterevmbilicale fuce pareillementleſangarterial des arteres cotyledoines, quiza feconde
eſttres-chaud, & fort ſpiricuel: duquel en ceſte ſeconde ampoulle ſe forınc le cæur,
qui eſt de ſubſtance charneuſe, ſolide & eſpeſſe ,ainſi qu'il appartient au membre le prendſa fora
plus chaud de tous les autres : en la ſubſtance duquel Nature formatrice faict deux me.
ventricules, l'vn à dextre, l'autre à ſeneſtre. Audroit ventricule ſe viene inſerer le
tronc de la veine cave , & . icelle apportela pourriture au cæur. Au ventricule ſene
folie ſtre ſe fait vn tronc d'arcere , qui pareillement ſe diviſe en deux : l'vn moindre monte
aux parties ſupericures , & l'autre plus grand aux inferieures, leſques ſe ramefiens &
ſediſtribuent par toutes les partiespour les viuifier.
Dela troiſieſmeampoulleoù la teſte ſe forme. CHAP. X.
D
PRES la produ &tion des parties deuant diêtes ,la plusgrande partie de conforma
‫ ܀‬.2 la ſemence eſt pouſſee en la troiſieſme ampoulle,de laquelle le cerueau eſt lion
fait , & n'eſt fait de ſang comme les autres bubes & autres parties : mais Cerneak
matiere . de
eſt faict de la ſeule femence,comme ſont auſſi les os, cartilages, veines, &
cos arteres,nerfs,ligamens, pannicules,la peau exterieure.Toutes icelles par
ties ſont faitesde la ſeule ſemence,& partant ſontappellees membres ſpermatiques:
leſquels toutefois ſont nourris de ſemēce:car depuis qu'ils ſont formez, prennentali
during menc meſme auec les charneuſes, cómc le foye,le cæur, les poulmós , les muſcles,qui
.
ſont nourris de lang.Etapres le cerueau formé, ſont adiouſtees & formees touteslesconformas
I
autres parties de la ceſte:autourde laquelle eſt faite vn couuercle,lequel par ſucceſſiõsion de
de temps ſe deſfeche & eſt fait offeux.Or du cerucau & de la mouëlle de l'eſchine pro- ftane.
Ilii
}
920 Le Vingt quatrieſme liure
prcedēc les nerfs,qui ſont diſtribuez parcoutesles parties du corps,qui ont beſoin de
mouuemét & ſentiment. La teſte( come ſiege des lens,répart derailon & de lapięce, A
de laquelle comme d'vne foncaine forcent diverſes operations) eſt ficuée ſus tout le
corps, à fin que l'eſprit animal regiſſe,gouuerne, & diſpoſe de tout ce que Nature a
ordonné ſous icelle:& pour le dire en vn mot,en icelle ſontcontenuës les facultez de
l'ame, qui ſont choles lublimes & obſcures, ſi bien que leur excellence ſurmonte la
capacité de noſtreentendement. Puis ainſi que les architectes, maçons , & charpen
Vilié des tiers ayans ietréle premier födement d'une maiſon , ou dreſſé la carine d'vne nauire,
os-el dejou edifient & baſtiſlenc le reſte du baſtiment :auſſi Nacure par bonne raiſon ,apres avoir
ftenirlecorp. baſtyces trois principes , fait les os, qui ſont comme fondement des autres parties:&
ainſi ſont-ilsmis au deſſus & au deſſous, comme muraille & rempart . Les premiers
formez ſont les os des Ifles : & entre iceux les vercebres : puis apres toutes les autres
partics, Nature fabrique auec vn indicible,admirable , & incomparable artifice, les
bras & les iambes, & au dedans du corps les creux & canaux : & en la teſte faictſept
trous,à fçauoir,deux aux oreilles,deux aux yeux,deux au nez,&vn pour la bouche,& B
aux partiesinferieures, vn pour le liege, vn autre pour le canal de la veſlie, & aux fe
melles yn pour leur matrice,ſanslcquel ne pourroienteſtre appellées meres: puis Na
ture couure tout le corps de cuir lequel elle polit , comme font les ouuriers leurs der.
Soituen La niers ouvrages . Or dccognoiſtre comme Nature faict parfaictement coutes ces cho.
Šāce de l'o- les , cela excede l'intelligence humaine. Apres ce noble ouurage, appelé des anciens
piface
Dieu .
de Mycrocoſme, ainſi partaictement baſty , Dieu luy infonde & tranſmet l'ame , de la.
quelle nous parlerons cy. apres le plus ſuccinctement qu'il ſera pollble.
Or au foixanlielme iour l'enfant commence à fe mouvoir & avoir vie : mais la me.
rene le pcuc apperceuoir pour eftre encore trop debile. En iceluy temps l'amerai
ſonnable eſt eſtimée entrer au corps de l'enfant. Ce que S. Auguſtin proyue par le
Quelf.Eo. teſmoignage de Moïſe.Siquelqu'vn, dit-il,frappe vnefemme enceinte,& qu'elle en
L'ameſe, auorte,lil'enfanteſtja forme, qu'il en perde la vie : mais s'il n'eſt encore formé, qu'ilС
cie Gofoit l'ame
la formati
condamnéà amendepecuniaire. Parlaquelle ordonnanceil denoteclairement
onque n'eſt point à l'enfanc, qu'il ne ſoit entierement formé de tous fes membres.
de l'enfant.Et pour ceſte cauſe il ne faut point croire que l'ame ſoit deriuée d'Adan , ou desperc
& mere,maisqu'à chacun moment elle eſt creée & infuſe divinement. Aufli les mo
les & faux germes, & autres choſes monſtrueuſes, encore qu'ils ſe meuuent , & qu'il
ſemble qu'ils ayent quelque vie,fi'eſt ce coutesfois qu'ils ne tiennent rien de l'ame
raiſonnable, mais ſeulement de la faculté de la matrice , & del'eſprit generatif ,qui
ſont en la ſemence & au ſang menſtruel, & par iceux meſme ils reçoiuent accroiſſe
ment & vie au ventre de la mere , & non del'ameraiſonnable.
Del'Ame. Ꮯ H A P, XI .

'Ame eſt vn cſprit diuin ,inuiſible , & immorcel , reſpandu en toutes les par
S. Auga. ties du corps, infule par la puiſſance de Dieu le Createur ſans aucune ver
en la defini- 50 2ta tu de laſemence genitale , quand les membres ſont deſia formez & figu. D
zió de lafoy.rez au ventre de la mare , qui eſt le 40. iour au malle ( d'autant que la chaleur eſt
plus grande , & famaciere plus vigoureuſe) & le so. à la femelle, quelquesfois o
plustoſt, quelquesfois'plus tard: toutesfois à l'inſtant qu'elle eſt infuſe , elle nepeut
encore faire ſes fonctionsou operations , à cauſe qu'en l'enfance les organas ou in
ſtrumens ne ſont encores capables pour luy ſeruir: mais auec le temps , & à meſure
que leſdits organes ſe parfont, & que le corps croic,alors elle commence à agir en ſes
operationsleſquelles, à la verité, inanquent quand iceux organes ne ſont en bonne
diſpoſition. Or ils peuuent eſtre vitiez dés la premiereconformation, comme à ceux
qui ont le ſommerdela teſteeſleué en poincte , comme l'auoiét Therficés Grec,Tri
boulet & Tonin : tels n'onciamais bonne ratiocination , & partant ſont naturelle
Pourquoy ment fols, à raiſon que les ventricules du cerucau,& autres organes ſont anguſtes &
mol'Amefe. preſſez, partant l'amene peut faire ſes æuures. Pareillement iceux
nflre vi. eſtre organes peuuene
tiée en les vitiezpar mauuais regime,come par crop boire & s’enyurer , ou par vnefieure
Fonétions. chaude qui aura cauſé vne phreneſie,ou autre accident:paraucre intéperature, com
me à ceux quiparcrop grande humidité du cerueau tombent en lechargie : ou auoir
De la Generacion . 921
A receu quelques coups ſus la teſte,ou par autres choſes ſemblables fortuites aduenuës,
ou par la fauce de la Tage-femmeen tirant de force l'enfant, qui naturellemét preſen
te la teſte; ou de la nourrice en donnant mauuaiſeconformation ou ficuation aux os 1. Cor. 12 .
tendres & delicats , dót ſeroit venu empeſchement és organes & inſtrumés de l'ame. 2. Cor. 2.
Or Dieu a diſtribué, apres la creation & infuſion d'icelle, certains dons particuliers à
vn chacun à meſure & proportion à l'vn de prophecie,à l'autre l'expoſitio des Eſcri
tures ſainetes,aux autres d'eſtre conſtitucz Roys, Princes, & grāds ſeigneurs:aux vns
de ſuiure la Medecine, aux autres d'embraſſer les loix : à quelques- vns denauiger ſur
la mer,aux autres delabourer la terre,aux autres de feruir d'aydes aux maçons, & aux
autres autres choſes :de ſorte que les vns sóc ſubcils, les aucresgroſſiers : &s'addonenc
à choſes diuerſes :ainſi ont les aucres animaux leurs dinerles proprierez & nature,ſelo
que la ſapience infinie ordonne, & qu'illuy plaiſt: & ne faut que nul conteſte contre
sē Createur.Et ne fauc eſtimer qu'elle ſoit vne partie de la divinité, & que Dieu l'aye
B creéede ſon eſſence, commele perel'enfantſelonlecorps, ce ſeroit grád blafphenie.
Car ils'enluiurdit , que la nature de Dieu ſeroit quietre àmutation & pallion : ce qui :
n'eſt pas. Mais d'aucāt que l'ame eſt immortelle, & qu'apres ceſte vie, elleeſt neceflai.
remće ſujecte au bien ou mal:nous pouuos dire en cet endroict qu'iln'eſt pas licite ny
pollible à lhõme de ſçauoir'le ſecret des choſes que Dieu faict par la predeſtination:
& partát l'ignorance en eft do&e, & l'appetit de les ſçauoir vne eſpece derage : pour
ce que ſi nous artencions de penetrer & entrer en ſon conſeilſacré & éternel, ce nous
ſeroic vn abyime pour nousengloutir. Gardons nous donc ſurcouces choſes de ce
rocher auquelon nepeut heurter ſans malencontre. Car la choſe formec dıra elle à
celuy qui l'a formee, Pourquoy m'as tu fait ainſ ? Le potier de cerre n'a-il point de S. mPaulaux
8
puiſſance d'vne meſme maffede cerrefaire vo vaiſſeau à hõneur, & vn à deshõneur? Ro . cb. .
Orcen'eſt icy de ma vacation rendre la cauſe de tels hauts fecrets de Dieu , lequel a
500 voulu que fuſſions curieux, non de les ſçauoir & comprendre , mais ſeulement de les
admirer en coure humilité :& partant ie neveux nyde puis entrer plus auant au cabi
с net du conſeil priué & ſacré de Dicu : mais ie diray que la bonne ame contemne les
choſes elementaires , c'eſt à dire , corporelles & fenfibles, & priſe les choſes hautes &
CCS celeſtes pourcontemplerla beatitude eternelle , laquelle ſortie du corps, ſe peut dire
‫" ما‬
heureuſe , eſtant hors derouteignorance & de cous maux , & en eſtar de demeurer à
iamais en repos: i'entends l'ame de ceux qui par la grace ſpeciale de Dieu ſont faits di Definition
i gnes & capables de celle condition & felicité. Ceſteameeſt l’entelechie, ou perfe- de l'ame.
Chat &tion interieure, donnant mouvement & cauſantl'action nacurelle & volētaire, qui Gabriel da
cſt la vraye forme de l'homme appelée l'eſprit celeſte,d'eſſence ſuperieure, incorpo- Preau,suli.
rée, inuiſible,intellectuelle & immorcelle ,extraicte comme de l'idée de la divinité, di. de la cognoiſ
vinement comuniquée & tranſmiſe en l'homme exterieur:laquelle tout ainſi qu'elle meſm
lance edeſor.
, die
eft viue, auſſi donne- elle au corps vie & mouuement, quand elle eſt cõioincte & vnie telle de
à iceluy : c'eſt le receptacle d'illumination duine,attendu que par lapreſence d'icelle, feriptionest
le corpsne meurt point,cree parla puiſſance de Dieu ,quin’eſt point corporelle , ny appriſe par
compoſee d'aucune maciere , faicte pour viuifier le corps humain , & le conduire à oraclescele
A7
touræuure de vertu & pieté,à l'honneur de ſon Createur, & à l'aide de ſon prochain. Pies,& non
D Dauantage, outrece qu'elle eſt un eſprit inuifible , eſpanduë par toutes lespartiesdu pardisputes
corps, elleeſt coutesfois toute entiere en vne chacune parcie d'iceluy , & yne en ſoy,phes.
desPhilofos
ayāc pluſieurs facultez,puiſſances,vertus, & operatiös en diuerſes parties du corps,có. Philippesde
meimaginer, entendre, iuger, rememorer, & regir lesmouuemensvolontaires :elle Mornayliu.
ve
void,oit,odore.goulle, & ratiocine: de force quenousvoyons qu'elle contient le ciel delaReli
& la terre, ſans qu'ils s'y entr'empeſchče : le paſſé & le preſent,ſans qu'ilss'encre- nui- gion Chren
ſent:infinis lieux,perſonnes,villes,ſans qu'il yait preſeen noſtre entendement. Que tienne, ch.
les choſesgrădesy ſont ſelonleur grádeur,les petites ſelő leur petiteſſe, les vnes & les de14,parlane
l'iramors,
aurres couces cotieres,en elle toute entiere,& nó partie d'elles,ou en vne partie d'elle talité de
ſcalement . Dauantage , plus elleferemplit,& plus elle cítcapable , plus elle logede l'ame.
choſes & plus en appete -elle, & plus grandes elles ſont , & plus propreeſt elle à rece
voir les tres grādes. S'enſuit donc que ceſte ame , qui eſt en quelque façon infinic, ne
peur citre vn corps : & d'autant moins le peut - elle eſtre, que logeant tant de choſes &
fi grandes en elle , elle loge ſoy-meſme en vn fi perit corps . Derechef, comme mille
lieux divers le trouuent en elle ſans tenir place , auſtilans changer de place ſe trouue
elleen mille lieux ,& non par ſucceſſion decemps , ny parinterualles , mais bien ſou,
Ilii ij
3
-quatri
vingt

liure
922

Le
1

uenttout en yn moment: Exemple:commande à con eſprit d'aller en Conſtantino. A


ple : à l'heure mclme de reuenir à Rome,& derechefà Paris ou à Lyon : commande
luy de paſſer le travers de l'Amerique ou de circuir l’Afrique : il faic tout ce chemin
Dinersnoms en vn inſtanc, & enrant quecu commandes, il y eſt, & premier que l'ayes r’appele,en
de l'ame. eſt revenu. Selon leſquelles operacions elle obcient pluſieurs noms. Elle eſt appelco
ame,pource qu'elle anime,& viuifie le corps. Elle eſt dicte eſprit, pource qu'elle aſpi.
re au corps. Elle eſt appelee raiſon, pource qu'elle iuge & ſepare le vray d'auec le
faux. Elle eſt dicté penſee, parce qu'elle recolleles choſes paſſecs.Elleeſt ditc coura
ge pourl'operation de la volonté. Elle eſt dite Sens,parce qu'elle fenc les choſes ſen
fibles: & dauantage elle eſt inuiſible, inta&ible,& de nature incelleduelle. Et pource
aulli qu'elle eſt incorporce; n'occupe point de licu par extenſion corporelle , & eſtanc
de ſimple nature , necroitny diminue : carelle n'eſt point plus grande en vo grand
corps qu'en.vn petit,ny plus petite en vn petit qu'en vn grand:& eft aufli grandeenfa
nature désle commencement de la vie d'vn pecic enfant, qu'elle tera iamais , ſelon la
Autre de- diſtinction qui ſera cy apres couchee. L'ame eſt vne partie principale,& plus excel
finition. lente de l'homme, creće de Dieu , vn esprit par lequel non ſeulement nous ſencons, B
mouuons , & viuons , mais auſſi voulons & cnrendons , habitant au corps commc ca
: vo domicile pour auoir primauré , regir & gouuerner la vie de l'homme, donner vi
gueur aux membres , rendre les organes ou inſtrumensextericurs propres & vciles à
leurs a&ions , non fculement és choles qui concernent la yic corporelle , mais auſſi la
vie ſpirituelle & ccernelle.
Autre definition.
L'ame eſt vo eſpricorné de raiſon & d'incelle &t ( comme eſcrit Moyſe en ſon liure
Il ya trois de la creation du monde) laquelle eſt celeſte & divine , & n'a rien de conucnance
manieres de auecnoſtre corps terreſtre : mais il luy fert leulement d'habitation ,auquelilfaut
corps,qui qu'elle demeureiuſquesau temps qu'il plairra à Dieu la rappeler. Oril y atroisma
ont ame.
nieres de corps qui ontame, par laquelle ils viuent:le premier & le plus imparfaiat el
celuy des plantes:le ſecond,des beltes: & le ciers , des hommes. Les plantes viuentpar
l'ame vegetatiue, quieft cauſe de trois choſes, à Içauoir , mourir , croiſtre & engen
drer : lesbeites parlame ſenſitive : & les hommes outrecesdeux , par l'ame raiſonna.
ble &intellectuelle. Les beſtes quiont l'ame ſenſitiue, ont pareillementlesa &tions C
delame vegetatiue, qui eſt és plantes:mais l'ame humaine qui eſt intellectuelle, em
porte toutes les perfections & vertus des autres: & partant tout ainſi que l'ame vege
tatiue donne vie aux plantes , & les fait croiſtre , aulli fait l'ame intellcătuelle au corps
humain : & comme les beltes ont mouuement & ſentiment parl'ame ſenſitive, qui
eſten elles auſſil'ame intellectuelle (au moyen de la portion ( enfitiue, par laquelleel
le participe auec les beltes ) donne ſentiment & mouuement au corps humain : mais
par deſſus ces deux portions , elle a la ratiocination , quieſt la vrayc cognoiſſance des
choſes,laquelle procede d'vne lumiere diuinc , & par ſpecial privilege a eſté faite àl'i.
mage & ſemblance de Dieu. Ecy a difference entre l'ame& l'eſprit. Car l'amc eſt
commune à coure choſe ayant vie , comme nous avons dit cy.delfus: mais l'eſpriteſt
immortel & ſuſceptible de raiſon & ſcience, & eſt ſeul propre & particulierà l'hom
me. Ec pour conclure, l’ame humaine a toutes les trois puiſſances ſuſdites non ſepa. 1
rėment, mais vnies en vne ſeule. Or pource que nous avons dit cy.deſſus que l'ame
a pluſieurs facultez , puiſſances , vertus, & operations en diuerſes parties ducorps,il D
{ croit beſoin de dire de chacune en particulier : mais laiſſans cela à ceux qui vou
drontphiloſopher plus amplement, nous nous contenterons, pour acheuer ce&dil
cours, de parler ſeulement du Sens commun :de la fancaſie,de la ratiocination , de
la memoire.
Du sens commun .
LeSens commun ,eſt ce qui reçoit les images & formes à luy offertes ,& apportees
par les cinq cens exterieurs , & diſcerne les obie&ts d'iceux,c'elt à dire,qu'il comprend
& reçoit les operations,efpeces,ou ſemblances des choſes materielles, quiont eſtére
ceuës par les cinq ſensexterieurs, leſquels ſont ſeulement comme mellagers au ſens
commun , pource qu'il n'y #rien en l'entendement on ſens commun , qui premiere
ment n'aic eſté aux lens exterieurs: & partát le ſens commun nous eſt donné pour re
ceuoir les a &tions des ſens extericurs. Car l'æilne cognoit point le blanc,ounoir,par
tant ne peat diſcerner lescouleurs, ny lalangue cequ'elle gouſte, ny le nez ce qu'il
De la Generation. 923
A odore, ny l'oreille ce qu'elle encend, ny la main ce qu'elle couche & palpe,ſoit chaud Les action's
ou froid:parce que celles actions apparciennent au ſens commun , qui iuge l'ail auoir des ſens
veu blanc,rouge ou noir,ou auoir veu vn homme ou vn cheualou aucre choſe mare- exterieurs
rielle , commevnchaftcau ounauire, ou autres choſes ſemblables : & nonobſtant appartion
qu'on ne les voye plus, on aura neantmoins cognoiſſance que la choſe eſtoit blanche neni anſens
coinmun .
ou noire,grande ou petice,ou auoir ſeney vne odeur fi elle eſt bonne ou mauuaiſc, ou Actions
apres auoir gouſté vne chole douce oa amere, ou auoirouy vn ſon eftre grauc ou des ſens
aigu , ou ayanc palpé ou touché vne choſe ſi elle eſt chaude ou froide: cartoutes les exterieur's
actions des ſens exierieurs finiflent au ſens commun comme à leur centre , ainſi que su ſens
d'un cercle toutes les lignes viennent de la circonference finir au centre,qui eſt le comituk.
poinêt commun ,comme il te peut eſtre demonſtré par cete pecite figure.

Et pour cete cauſe eſt appellé iceluy, Sens commun , & prince detous les ſens ex
terieurs,pource qu'il en vſe commedeſes ſeruiteurs en diuers negoces & manieres, Sens' com
iugeant & diſcernantles choſes qui luy ont eſté offertes & portecs. Et pour conclu- mur
de prince
fion, l'intention de Nacure a eſté ſeulementque les ſens exterieurs ne receuſſent ſi ſens exie
non que ſuperficiellement les obiects,comme vn miroir fait, non pour autre fin ;fi rieurs.
non que pour lespreſenter au ſens commun , come à leur centre , prince & ſeigneur:.
afin de les diſcerner & communiquer à l'ame , le ſiege duquel, ſelon Auicenne &
Auerroes, eſt en la partie anterieure du cerueau. Parcant le ſens commun eft comme
yn receptacle vniuerſel des ſens exterieurs.

De la Phantaſie ou Imagination .

С ApresicSens commun viene l'Imagination , appellee des Grecs Phantaſia, à cauſe


qued'icelle viennentlesidees& vilionsqu'on appelle Fantafies, laquelle n'apoint quQuestions
e fantaſie
Care d'arrelt, ſi ce n'eſt en dormant: encore le plus ſouucnc eſtoccupeeen (ongeant& rel
tiesiog uant pluſieurs choſesqui n'ont eſté & iamais ne ſeront. Iceluy ſens a grandeſeigneu
ric en nous,tellement que le corps naturellement luy obcïc en pluſieurs & diuerſes
choſes,lors qu'il eſt fort arreſté en quelque imagination. Qu'il ſoit vray, les hiſtoires
font mention qu'Alexandre le Macedon eſtantà diſner, ſon harpeurTimothéiouát Hißoire.
ſur ſa harpevn afſautde guerre,luy fit abandonner la table,& demander ſes armes,&
alorsqu'il changeoit & addouciſſoitſonicu, ſe r'aſſeoir: & par telle admiration d’har.
monie de ſes ſons forts& concicez,ſeseſprits demeurans vaincus,eſtoient contraints
y obeïr, le rendant audacieux, tranquille & joyeux , ſelon la mutation du ſon de la
harpe. D'auantage,cete imaginatio donne effroy & peur lors qu'on void quelqu'vn
. en quelqueperileminent.Exemple,lors qu'vn certain Turc dáçoit ſur yne cordeen Turcdäcant
ceſte ville de Paris les piedsdansun baſſin,pluſieursle voyans en perilde ſe rompre leſur lacorde:
col , bras & iambes, trembloient de peur,ne l'olansbonnementregarder. Pareille
D ment quelquesfois ceſto vertu imaginatiue fait cheoir la perſonne de deſſus qucl.
que planche, ou quelque lieu haut,pour la grande apprehenſion & timidité qu'elle a
decomber: & parcantauec les choſes deuant dictes,nous avons encores beloin d'une
plus haute faculcé,pourſçauoir diſcerner ſi les choſes imaginées,veuës,oüyes,& ſen
ties par dehors,ſontbõnes ou m

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